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Full text of "Histoire littéraire de la France"

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3  9007    0318 


fliil 

7900    0 


HISTOIRE 


LITtHJlHh: 


DE   LA  FRANCE 


TOME  I.   PARTIR  I. 


HISTOIRE 

LITERAIRE 

DE   LA  FRANCE 

OU    L'ON    ThÀlTE 

UV.   I.OHK.INK   KT   IH    PHOCiKES,  DE  LA  DFXADKNCK. 

et  du  rélablbsement  des  Sciences  parmi  les  Gaulois  et  parmi  les  François; 
Du  goût  et  <lu  génie  des  uns  et  des  autres  i>our  les  Letres  en  chaque  siècle  : 
De  leurs  anciennes  Ecoles  ;  De  rétablissement  des  Universités  en  France  ; 
Des  principaux  Collèges:  Des  Académies  des  Sciences  et  des  Relies  Letres  ; 
Des  meilleures  Biblio(lié<|ues  anciennes  et  modernes;  Des  plus  célèbres 
Imprimeries  :  et  de  tout  ce  qui  a  un  rapport  particulier  à  la  Literature. 

LtM  HioQu  hiitortqiuu  dm  OmuMi  «1  dti  François  qui  t'y  sont  fait  qwlque  réputation , 
L»  CaUUogui  tt  ta  Ckronoloffiê  es  leurs  Eerits;  Dm  Remarques  hisloriqius  «t 
erWyiiM  smr  Im  ftrineipaux  Omnçm  ;  Le  dinombnmmi  du  différentes  Editions  : 
Lt  tomijtuMIU  par  les  citations  dm  Autmtrs  originaua. 

Par  des  Religieux  Be.iedict!?is  de  la  Co!<grbgation  de  S.  Mair. 

TttMl^    I.    l'AKTIK   I. 

Qui   comprend  les  tenu  qui  ont  précédé  U  N«iManoe  de  JBOs-CnutT ,  et  les  trois 

pnarian  Siéde»  de  l'Eglise. 

Par    M.    PAULIN    PARIS.     Membre    de    llnsUtut. 

A      PAHIS 
Librairie  de  VICTOR  PALMÉ,   22,  rue  Saint  -  Sulpice. 

M    !•<:•;«:.  i.x\ 

KRAUS  REPRINT 

Nendeln/Liechtenstein 

1973 


loi 

Pi  2^ 
A/ 


Réimpression  avec  L'accord  de 
L'Académie  des  Inscriptions  et  Belles -Lettres,  Paris 

KRAUS   REPRINT 

A  Division  of 

KRAUS-THOMSON  ORGANIZATION  LIMITED 

Nendeln/Liechtenstein 

1973 

Prlnted  in  Germany 
Lessingdruckerei  Wiesbaden 


PRÉFACE 


ANNONCER  au  Public  une  Histoire  Lite- 
i*aire  de  la  France,  c'est  lui  faire  espérer 
In  partie  la  plur»  noble,  la  plus  utile,  la 
plus  curieuse,  et  en  môme  lems  la  plus 
ample  et  la  plus  (lifficile  à  traiter  de  toute  I  liis- 
loii-e  de  notiv  Nation.  C'est  là  le  double  |M>inf 
de  vûë  que  présente  ce  dessein,  à  quicon({ue  en- 
treprend de  l'envisager. 

Les  Anciens  ont  posé  pour  principe,  que  la  con-  o*m.  mm.  i.  i. 
noissance  des  letres  est  le  foiiclement  de  toutes  les  ««*'  ' 

vertus.  C'est  dans  les  écoles  en  eficl,  ajoute  un  Mo-  ioH.«»i. 
derne,  (|ue  Ton  puise  la  pureté  de  la  foi  à  l'égard  de 
la  Religion,  la  régularité  des  moeurs  par  raportà  la 
Morale,  la  tranquillité  et  la  fidélité  publique  en  ce  qui 
concerne  le  bien  de  l'Etat,  l'honnêteté  et  la  politesse 
pour  ce  qui  regarde  la  vie  civile.  Esl^il  donc  rien 
de  plus  intéressant  et  de  plus  digne  de  piquer  la 
curiosité,  (|ue  de  savoir  ce  qui  s'est  passé  au  sujet 
des  letres  et  des  écoles ,  et  ae  connoitre  les  grands 
Hommes  qui  ont  travaillé  à  soutenir  les  unes  et 
les  autres  Y 


1  * 


ij  PRÉFACE. 

Poiyb.  n.  I.  n. ..  '  L'histoirc  en  général,  au  sentiment  de  Polybe,  est 
lemoïen  le  plus  propre  et  le  plus  efficace  pour  former 
les  hommes  aux  grandes  choses.  L'Histoire  literaire 
en  particulier  ne  mérite-t-elle  pas  à  plus  juste  titre 
le  même  éloge,  puisque  c'est  par  les  letresque  l'on  se 
dispose  à  figurer  dans  quelque  état  que  ce  puisse 
être?  Elle  ne  se  borne  pas,  cette  partie  de  l'histoire, 
à  faire  connoîtrc  l'extérieur  des  personnes  :  elle 
va  encore  plus  loin;  et  pénétrant  jusqu'à  leurs  pen- 
sées et  leurs  sentimens,  elle  expose  leur  esprit  au 
grand  jour,  et  en  fait,  pour  ainsi  dire,  un  bien 
public  :  ingénia  hominum  rem  publicam  facit. 

A  considérer  sous  cette  jiremierc  face  le  dessein 
que  nous  annonçons,  il  ])aroît  étrange  que  de  tant  de 
beaux  esprits,  la  plupart  célèbres  Ecrivains,  qui  ont 
fait  l'ornement  de  la  France  au  dernier  siècle,  et  qui 
y  ont  brillé  et  brillent  en(;orc  aujourd'hui,  aucun  (^) 
n'ait  fait  usage  de  ses  talens  pour  traiter  un  sujet  si 
digne  de  ses  veilles  et  de  ses  travaux .  En  vain  jusqu'ici 
deux  de  nos  Auteurs  de  la  fin  du  XVI  siècle  ont  fraïé 
la  voie  à  une  si  généreuse  entreprise.  En  vain  plu- 
sieurs autres,  dans  les  deux  siècles  qui  ont  suivi, 
ont  lâché  de  défricher  quelques  parties  de  ce  vaste 
champ.  En  vain  l'on  a  vu  plusieurs  nations  étran- 
gères, beaucoup  moins  studieuses  que  la  nôtre,  se 
faire  une  gloire  de  recueillir  en  un  corps  de  Bi- 
bliothèque tous  les  Auteurs  qu'elles  ont  donnés  à 
la  République  des  Letres.  Tous  ces  exemples  étran- 
gers et  domestiques  n'ont  point  encore  piqué  ef- 
ficacement l'émulation  de  nos  François  pour  les 
porter  à  la  même  chose  en  faveur  de  leur  Nation, 
la  plus  savante  de  TEurope. 
On  ne  peut  leur  disputer  l'honneur  de  Tinven- 

(i)  A  la  vérité  le  P.  Labbc  Jcsnile  et  le  P.  Louis-Jacob  Carme,  deux  Ecrivains  in- 
fatigables, firent  en  leur  tcms  quelques  tentatives  pour  exécuter  ce  dessein.  Mais  leur 
projet  est  demeuré  en  idée,  et  n'a  point  pu  Uc  succOs.  Il  en  a  été  de  même  de  celui  d'un 
autre  écrivain  plus  moderne  (II). 


PRÉFACE.  iir 

tion  des  journaux  literaires  qui  ont  servi  de  modèle  à  ce 

{;rand  nonibie  de  copies  que  l'on  a  vu  éelore  dans 
asuitccliez  les  étrangers,  nos  voisins.  On  éloil  en  droit 
d'attendre  également  de  leur  habileté  et  de  leur 
amour  pour  la  patrie,  qu'ils  donnassent  une  His- 
toire Literaire  de  leur  nation ,  qui  eut  répondu  à 
la  gloire  qu'elle  s'est  acquise  dans  les  letres,  et  qui 
eut  pu  servir  de  modèle  à  ceux  des  étrangers  qui 
auroient  voulu  écrire  |K)ur  leur  païs  sur  la  même 
matière.  Il  est  aisé  de  préjuger  ce  (pi'ils  eusst*nt 
fait  sur  un  sujet  aussi  nche,  |Kir  l'heureux  succès 
qu'ont  eu  ceux  qui  ont  traite  nôtre  histoire  en 
général. 

S'il  est  permis  de  rechercher  les  raisons  qui  ont 
retenu  nos  plumes  Francoises,  et  les  ont  empêché 
de  se  prêter  au  dessein  d'une  Histoire  Literaire,  il  ne 
s'en  présente  point  de  plus  natun'lle,  que  le  travail 
immense  qu'il  impose  nécessiiiirment  à  ceux  (|ui 
voudraient  le  tenter.  Les  épines  (lu'on  y  a  décou- 
vertes en  le  considérant  de  ce  cùté-la,  ont  fait  dispa- 
roitre  les  attraits  c|u  il  cachoit  de  l'autre  côté.  La 
vaste  étendue  de  la  matière  tpi'il  ofTre  à  traiter, 
les  soins,  les  peines,  les  fatigues  pow*  la  préparei*, 
la  difficulté  de  réussir  à  épuiser  un  sujet  si  técond 
et  à  en  lier  ensemble  toutes  les  diiîereii les  parties 
avec  une  justesse  convenable:  tout  cela  sans  doute 
a  rebuté  les  esprits  les  plus  laborieux  et  les  plus 
entreprenans,  (|uoique  passionnés  d'ailleurs  |)Our 
la  gloire  de  leur  patrie. 

Quel  travail  en  effet  |)Our  parcourir  tous  les  âges, 
V  déterrer  et  recueillir  tous  les  Lcrivains  que  notre 
France  a  produits!  Le  XVII  siècle  seul  avec  les  com- 
mencemens  du  XVIll,  est  un  Océan  où  l'on  se  perd. 
Quelles  recherches,  et  par  conséquent  quelles  peines, 
quelles  fatigues  pour  entrer  dans  le  détail  de  ce  prodi- 

Aij 


iv  P  R  E  F  A  C  E. 

gieu\  nombre  d'écrits  (ju'iis  ont  laissés  à  la  postérité, 
en  faire  la  critique,  en  marquer  les  principaux  carac- 
tères, en  indiquer  les  diflérentes  éditions  !  Quel  est 
l'esprit,  quelque  courageux  (ju'il  puisse  être ,  qui  ne 
se  sente  pas  effraie  à  l'entrée  d'une  si  vaste  carrière? 
Ce  n'est  pourtant  pas  encore  tout. 

Jl  faut  déplus  remonter  jusqu'aux  premiers  ha- 
bitans  du  païs  dont  on  écrit  riiisloire,  et  se  trans- 
porter dans  ces  tems  d'obscurité,  où  à  j)eine  trouve- 
t'on  quelque  lumière  qui  puisse  éclairer  les  pas, 
pour  y  découvrir  ce  qui  s'y  est  passé  par  raport 
au  sujet  que  l'on  traite.  11  faut  s'instruire  quelles 
y  ont  été  leurs  dispositions  pour  les  letrcs,  (juels  soins 
ils  ont  pris  pour  les  cultiver,  quels  moïens  ils  ont 
emploies  pour  les  relever  de  leur  chute,  lorsqu'el- 
les sont  tombées  dans  une  triste  décadence.  11 
faut  encore  rechercher  en  chaque  tems  les  Inven- 
teurs des  beaux  Arts  ,  et  ne  pas  négliger  de 
faire  connoître  le  succès  (|u'ont  eu  leurs  ingé- 
nieuses inventions.  Ces  parlicularités  entrent  comme 
les  précédentes  dans  le  dessein  d'une  Histoire 
Literaire. 

Un  autre  travail,  qui  n'est  peut-être  pas  moins 
pénible  que  celui  dont  nous  venons  de  donner 
une  légère  idée,  est  l'aplication  et  les  soins  qu'il 
faut  aporter,  pour  lier  tellement  ensemble  tous 
ces  faits  détachés,  et  établir  entre  eux  une  telle 
harmonie ,  qu'ils  ne  fassent  qu'un  tout  uniforme 
PI»,  hist.  1.  I.  et  comme  naturel.  «  Ce  n'est  pas  un  petit  tra- 
vail, »  dit  Pline  l'Historien  en  une  ocasion  presque 
semblable,  «  que  d'entreprendre  de  redonner  la 
nouveauté  à  ce  qui  est  déjà  vieilli,  d'autoriser  ce 
qui  est  nouveau,  de  rendre  son  lustre  à  ce  qui 
.  n'est  plus  d'usage,  d'éclaircir  ce  qui  est  obscur, 
d'accréditer  ce  qui  est  ou  décrié  ou  douteux,  de  don- 
ner à  chaque  chose  un  air  naturel,  et  de  ne  rien 


Voif.  liai.  art.  1.  2. 
U.  {  8-10. 


i»hefai:e.  V 

ir|n-ésenl(Tiiuc  coiiforiiiéiiienl  à  sa  i»ro|)i*c  iialuir.  » 
Ce  sunl  là  ucs  loi\  iiulis|>cnsul)lrs  {K)ur  un  ilislo 
ricii  ((ui  se  |)i'0))osc  de  plaire  et  d'instruire  tout  à 
lu  (ois  ;  et  quicon({uc  entreprend  d'écrii*e  l'His- 
toire Lileraire ,  n'en  est  pas  |)lus  dispensé  qu'un 
autre. 

Mais  ,  à  (|Uoi  tend  tout  ce  détail  7  Sans  doute  à 
autoriser  eeu\  (|ui  pouiront  nous  acuser  de  témé- 
rité de  nous  porter  à  enti^prendii;  un  dessein, 
au({uel  tant  d'Iiahiles  gens  n'ont  pas  osé  toucher. 
Mous  avouons  sans  |)eine  (|u'une  telle  entreprise  est 
delieaucoup  au-dessus  «le  nos  talens;  et  c'est  en- 
core plus  par  justice  que  par  liuniililé,  que  nous 
n'osons  nous  flaler  d'une  heureuse  exécution. 

Une  nohic  ardeur,  qui  nous  a  saisis,  et  inspiré 
le  désir  de  faire  quelque  chose  pour  l'utilité  de 
l'Eglise  et  de  l'Etat,  ce  «pii  est  du  devoir  d'un 
Qii-étien  et  d'un  Imiu  Citoïen,  nous  a  élevé  au- 
dessus  de  nous-mêmes  ,  en  nous  faisant  ouhlier 
nôtre  foihiesse.  L'amour  |M)ur  la  gloire  de  la  nation 
nous  a  |K>rsuadé  comme  possihie,  ce  que  nous  ten- 
terions pour  contribuer  à  la  faire  {Kiroitre  dans  un 
nouveau  jour,  et  l'a  euqiortt;  sur  la  |)ersuasion  de 
nôtre  propre  incapacité .  De  si  louables  motifs  rious 
ont  fait  surmonter,  ou  si  l'on  veut,  ont  dérol)é  à 
nos  yeux  toutes  les  difficultés  qu'un  si  vaste  dessein 
{HTsente  de  lui-même.  Entièrement  livrés  à  leui* 
attr.iit,  nous  n'avons  |)ensé  qu'à  les  suivre,  et  moins 
songé  à  plaii*e  par  nôtre  entreprise,  (|u'à  nous  rendre 
utiles.  '  En  pareil  cas  un  Ancien  nous  garantit,  que  oamt.  iud. 
c'est  déjà  un  juste  sujet  d'éloge  que  de  tenter  un 
grand  dessein,  quand  même  on  demeureroit  au-des« 
sous  de  l'enti'eprise.  Itaquc  ctiam  non  assequutis, 
voluisse,  abunde  nulcrum  atque  magnificum  est. 
Heureux,  je  ne  dis  ikis,  si  nôtre  zélé  nous  attire 
les  louanges  du  public,  mais  s'il  suflit  seulement 


vî  PRÉFACE. 

pour  justifier  nos  tentatives  !  Encore  plus  heureux, 
si  Dieu  versant  sur  nôtre  travail  une  abondante  bé- 
nédiction, il  a  l'avantage  de  plaire,  autant  qu'il  nous 
paroît  devoir  être  utile  ! 

Déjà  sur  ce  que  nous  venons  de  dire ,  on  a  pu 
apercevoir  presque  tout  le  plan  de  notre  dessein. 
Il  y  a  cinq  ans  que  nous  en  donnâmes  quelque 
idée  au  public,  dans  un  projet  qui  fut  imprimé  avec  le 
titre  et  un  petit  essai  de  l'ouvrage.  Les  bornes  que 
nous  nous  étions  prescrites  alors,  ne  nous  permirent 
pas  d'entrer  dans  un  grand  détail.  Mais  voici  le  lieu 
de  nous  étendre  davantage. 

Nous  nous  proposons  de  ménager  aux  Fran- 
çois l'agrément  d'avoir  un  recueil  complet  des  Ecri- 
vains, qu'eux  et  les  Gaulois  leurs  prédécesseurs,  avec 
qui  ils  n'ont  fait  dans  la  suite  qu'un  même  peuple, 
ont  donnés  à  la  Republique  des  Letres.  Tous  ceux  de 
la  nation  dont  on  a  connoissance,  et  qui  ont  laissé 
quelque  monument  de  litcrature,  y  trouveront  place, 
tant  ceux  dont  les  écrits  sont  perdus,  que  ceux  dont 
les  ouvrages  nous  restent,  en  (juclque  langue  et 
sur  quelque  sujet  qu'ils  aient  écrit.  Il  nous  a  même 
paru  que  nôtre  dessein  demandoit  d'y  comprendre 
aussi  les  gens  de  letres,  qui  à  cela  près  qu'ds  n'ont 
point  fait,  que  l'on  sache,  usage  de  leur  plume,  n'ont 
pas  laissé  ou  d'exceller  dans  les  sciences,  ou  de 
briller  dans  le  monde  savant.  C'est  un  honneur  dont 
nous  ne  créions  pas  pouvoir  les  priver  sans  une  es- 

t)ece  d'injustice,  particulièrement  pour  les  tems  • 
es  plus  reculés,  on  tout  nous  paroît  précieux  sur 
cette  matière.  On  ne  doit  pas  toutefois  s'attendre  que 
nous  en  usions  de  même  dans  les  siècles  suivans,  à 
compter  depuis  le  VI,  à  moins  que  d'autres  rai- 
sons ne  nous  y  déterminent. 

Aux  Ecrivains  Gaulois  ou  François  de  nation  l'on 
doit,  selon  l'avis  de  gens  habiles,  joindre  ceux  qui 


PREFACE.  vij 


it  passé  un  tems  considérable  dans  dos  Gaules, 
rtoul  lorstiu'iis  \    onl  fini  leuis  jours.  M'importe 


ont 

surtout  lorst|u'ils  \  onl  fini  leuis  jours.  IN'impori 
(lu'ils  y  aient  été  atachés  à  quel(|ues  Eglises,  comme 
i).  Irenée  de  Lyon,  Pontei-e  Abbé  à  Aiies,  Fortunatdc 
Poitiers,  Prudeiue  de  Troïes,  et  tant  d'autres.  En  ce 
cas  ils  nous  u|tarlienenl  par  le  droit  de  leurs  sièges, 
conmie  ils  apai  ticnent  à  leur  propre  patrie  nar  le 
droit  de  leur  naissance.  H  suilit  qu  ils  aient  illustré 
(|uelqu'une  ou  de  nos  >illes  ou  de  nos  provinces, 
soit  |>our  >  avoir  enseigné  les  Utiles  Icti'es  ou  l'é- 
loquence ,  soit  |H)ur  >  avoir  publié  quelques- 
uns  i\v  leui's  ouvragc*s.  Sur  ce  prin('i|M'  on  verra 
paroitre  enti-c  nos  Ecrivains  l'Orateur  Lactancc 
au  IV  siècle  ,  et  quel(|ues  autivs  dans  let»  ùges 
suivans.  Liberté  néaiunoins  dont  nous  n'use- 
rons ({u'avec  un  sage  ménagement ,  et  en  l'cndant 
justice  aux  divc^rs  |>aïs  qui  ont  donné  naissance  à 
ces  grands  liommes. 

A  regard  de  ceux  qui  n'ont  fait  que  se  montrer 
un  certain  tems  dans  les  Gaules,  sans  s'y  être  lia- 
bilués,  conime  S.  Atlianase,  S.  Jérôme,  le  Mé- 
decin Oribase  au  IV  siècle,  et  une  infinité  d'autres 
aux  siècles  suivans,  nous  nous  contenterons  d'in- 
diquer en  son  lieu  le  |>ersonage  qu'ils  y  ont  fait, 
et  n'en  dirons  lien  au-delà.  Peut-être  viendra- 
t-il  à  {juehju'un  en  penséi>,  que  conmie  la  Croix 
du  Marne  a  joint  aux  Ecrivains  de  nôtre  Nation 
les  étrangers  qui  ont  éci'it  en  nôtre  langue ,  nous 
devrions  suivre  le  même  plan.  Mais  outre  que  la 
langue  Françoise  est  aujourd'hui  trop  répandue  dans 
les  autres  Etats,  et  (|u'il  seroit  Irop  diHicilc  de 
connoitre  et  encore  plus  de  recueillir  tout  ce  qu'on 
y  a  publié  en  cette  langue^  on  pourroit  croire  qu'en 
mêlant  ainsi  les  étrangers  avec  nos  François,  nous 
voudrions   nous  enrichir  des   dépouilles  d'autrui. 


viij  PREFACE. 

Ici  se  présente  une  difïiculté  importante,  qu'il  est 
nécessaire  d'cclaircir  avant  ([uc  de  passer  outre.  Quel- 
le étendue  doit-on  donner  à  nôtre  France,  et  doit-on 
lui  donner  la  même  en  tous  les  tems  ?  Il  est  certain 
que  ses  limites  n'ont  pas  toujours  été  les  mêmes.  Tan- 
tôt elles  ont  été  plus  resserrées,  ({u'elles  ne  le  sont  au- 
jourd'hui; et  tantôt  elles  ont  été  poussées  j)lus  loin, 
suivant  les  con([uétes  de  nos  Uois.  Sous  Clovis  1  elles 
n'étoient  pas  les  mêmes  ([uesousCharlemagne;  et 
sous  celui-ci  elles  étoient  tout  autres  (|ue  sous  Louis 
Vil  ou  François  I.  Il  en  a  été  de  même  à  proportion 
sous  divers  autres  régnes. 

D'abord  on  s'aperçoit  sans  peine  que  cette  difficul- 
té ne  regarde  point  les  lems  les  plus  reculés,  lorsque 
nos  Gaules  isolées  Ibrmoient  un  Etat  séparé  de  tous 
les  autres,  et  n'étoient  pas  encore  passées  sous  une  do- 
mination étrangère.  Elle  ne  tombe  point  non  plus  sur 
les  tems  auxquels,  après  avoir  été  subjuguées  par  les 
Romains,  elles  tirent  une  province  de  leur  vaste  Em- 
pire. En  ces  premiers  âges  on  doit  sans  nulle  difliculU'; 
leur  laisser  toute  l'étendue  qu'elles  avoienl  alors: 
c'est-à-dire  depuis  les  Pyrénées  et  les  Alpes  d'une  part, 
le  Rhin  et  l'Océan  de  l'autre.  Le  point  de  la  difficulté 
roule  uniquement  sur  les  siècles  postérieurs,  lorscpie 
les  Gaules  ont  été  érigées  en  Monarchie  par  les  Fran- 
çois, qui  s'en  rendirent  les  maîtres  dès  le  V  siècle. 

Sur  cette  difficulté,  comme  sur  toutes  les  autres, 
nous  avons  eu  une  attention  particulière  de  consulter 
les  Savans,  afin  de  nous  régler  sur  leurs  lumières* 
Presque  tous  ont  été  d'avis,  qu'il  faut  conserver  à  nô- 
tre Monarchie,  jusqu'au  IX  siècle,  la  même  étendue 
de  pais  qu'avoient  anciennement  les  Gaules.  Leurrai- 
son  est  que  les  parties,  qui  en  furent  démembrées 
sous  nos  Rois  de  la  première  race,  y  furent  réunies 
sous  Charlemagne,  qui  étendit  encore  beaucoup  plus 

loin 


PREFACE.  ix 

les  limites  de  l'Empire  François.  Comme  les  choses 
se  maintinrent  à  peu  près  dans  la  même  situation 
sous  L»uis  le  Débonnaire  et  (Iharles  le  (Chauve,  nous 
continuerons  de  consideirr  la  France  dans  toute  cette 
vaste  étendue  de  païs.  Quelquefois  nous  passerons 
même  le  Rhin,  pour  aller  chercher  les  Eenvains  qui 
sont  nés  au-delà  sujets  de  nos  Hois .  Mais  depuis  la  lin 
du  iX  siiV'le,  nous  al)andonnons  aux  Allenians  le  Dio- 
cèse entier  de  Trêves  avec  les  Méli>o|>oles  de  Cologne, 
tie  iMaïence  et  leui*s  l!ivèclu''s  suffragans.  Par  la  même 
raison  nous  laissons  depuis  la  même  é|MM|ue  les  Dio- 
cèses de  Kasle,  d'Iverdun,  d'Avenches  ou  del^u- 
sane.  (lepcndanl  comme  StraslM)urj;  est  revenu  à  la 
France  à  dilïcrenles  fois, et  qu'il  lui  apartient  cncoi-e 
aujourd'hui,  l'on  juge  que  nous  ne  devons  point  l'en 
dcmend)rer. 

De  celte  difliculté  ainsi  éclaircie  nous  retombons 
dans  une  autre,  tpii  n'est  pas  moins  considérable.  Quel 
égard  aurons-nous  pour  tous  ces  |kiïs,  qui  ont  été  au- 
trefois de  la  déitendanee  de  nos  Hois ,  et  qui  forment 
aujourd'hui  les  Archevêchés  d'Utrecht  et  de  Maline? 
IK'puis  répu(|ue  inanpiée  les  compr(uuli*ons-nous 
sous  la  Monarchie  Fi-ançoise  et  jusqu'à  ({uel  tems  ? 
Après  une  meuir  delilnM'ation  il  nous  a  semblé  que  le 
parti  le  plus  conforme  à  la  justice  exige  qu'on  les  v 
comprene,  au  moins  jusqu'au  tems  que  les  François 
les  perdirent  après  le  commencement  du  XIV  siècle, 
il  nous  a  paru  aussi  que  nous  devions  observer  la  mê- 
me chose  à  l'égard  de  Liège,  qui  y  est  enclavé,  quoi- 
que suffragaiit  de  Cologne . 

Dans  la  suite  nous  borneronsla  France  de  ces  côtés- 
là  j)ar  les  païs  compris  aujourd'hui  sous  les  Métro- 
poles de  Reims,  de  Cambrai  et  les  trois  Evêchés  de 
Metz,  Toul  et  Verdun.  De  sorte  que  nous  considére- 
rons dans  cet  ouvrage  la  Lorrame  comme  faisant 

h 


X  PRÉFACE. 

partie  de  la  France,  dont  elle  l'est  effectivement  pour 
l'Ecclésiastique.  On  nous  a  conseillé  d'en  user  de  mê- 
me, quoique  pour  d'autres  raisons,  par  rapport  à  la 
Savoie.  On  est  même  d'avis  que  nous  y  comprenions 
aussi  la  ville  de  Genève,  quoique  depuis  assez  long- 
temps elle  fasse  une  République  à  part.  On  nous 
donne  pour  raison  qu'outre  qu'elle  a  fait  autrefois 
partie  de  la  France,  elle  n'est  presque  peuplée  que  de 
François  réfugiés. 

Du  reste  nous  envisagerons  toujours  la  Monarchie 
sous  toute  l'étendue  que  lui  donnent  aujourd'hui  les 
païs  de  sa  dépendance.  Il  pourra  toutefois  nous  arriver 
d'imiter  en  certaines  ocasions  les  Géographes ,  qui 
dans  la  description  qu'ils  font  des  païs,  représentent 
ordinairement  quelque  partie  des  frontières  qui  les 
limitent.  En  ce  cas  qui  arrivera  rarement ,  on  aura 
d'autant  moins  de  peine  à  nous  pardonner,  que  leur 
exemple  nous  autorise  davantage. 

Quelques-uns  en  très-petit  nombre  auroient  voulu , 
que  sans  entrer  dans  l'embaras  de  toutes  ces  distin- 
ctions ,  nous  nous  fussions  réglés  sur  la  Gaule  Chré- 
tienne, et  que  nous  eussions  envelopé  dans  nôtre 
dessein  tous  les  païs  qu'elle  embrasse.  Mais  à  quoi 
bon  charger  nôtre  ouvrage ,  qui  est  consacré  à  l'his- 
toire de  la  Literaturc  Françoise,  de  tant  d'Auteurs 
qui  ne  sont  François ,  ni  de  mœurs,  ni  de  langue ,  ni 
de  naissance  ?  Nos  propres  richesses  nous  suffisent, 
sans  que  nous  aïons  besoin  de  nous  parer  de  celles 
des  autres. 

Cette  sage  et  juste  disposition  sera  la  règle  criti- 
que et  invariable  que  nous  suivrons,  pour  donner 
place  aux  Ecrivains  dans  l'histoire  de  nos  Savans 
Gaulois  ou  François.  Il  n'y  en  paroîtra  point  qui 
ne  soit  ou  natif  ou  originaire  du  païs  dont  nous  ve- 


PRÉFACE.  xi 

nons  de  inarquer  les  limites ,  ou  au  moiDS  qui  n'y 
ait  été  habitué. 

Quelques  soins  au  reste  que  nous  aïons  aportés,  et 
nuelques  recherches  que  nous  aïons  faites,  pour  lâ- 
cner  ae  déterrer  ces  grands  Hommes ,  on  ne  doit  pas 
8*atendre  à  les  trouver  généralement  tous  dans  ce  re- 
cueil. Ceux  qu'il  contient,  sur-tout  pour  les  premiers 
tems,  ne  sont  sans  doute  que  la  moindre  partie  de 
tous  ceux  qui  ont  illustré  nos  provinces.  Une  anti- 
quité aussi  reculée,  où  presque  rien  ne  nous  éclaire, 
en  cache  le  plus  grana  nombre.  Pour  en  avoir  une 
connoissance  entière,  il  faudrait  qu'en  chaque  siècle 
et  en  chaque  principale  ville  de  nos  Gaules  il  se  fût 
successivement  trouvé  des  |RTSonnes  studieuseset  in- 
telligentes, qui  eussent  fait  pour  chaque  classe  d'hom- 
mes de  letres  ce  que  fil  Ausone  en  son  tems  à  l'égard 
des  Professeurs  di*s  belles  letres  à  Bourdeaux. 

Il  n'y  a  point  eu  à  hésiter  sur  l'ordre  que  Ton  doit 
suivre  dans  un  ouvrage  de  cette  nature.  I^  chronolo- 
gique est  incontestablement  préférable  à  tout  autre. 

Nôtre  Histoire  sera  donc  divisée  par  siècle,  et  com- 
mencera en  reprenant  les  choses  des  la  source,  par  les 
tems  nui  ont  précédé  la  naissance  de  J.-C.  Le^  Ecri- 
vains de  diaque  siècle  tiendront  leur  rang  selon  la  da- 
te de  leur  mort,  ou  lorsqu'on  Tignorera,  suivant  l'é- 
poque de  leurs  dernières  actions^  ou  du  tems  auquel 
ils  ont  fleuri. 

Deux  choses  principales  font  l'objet  des  Lecteure 
dans  une  Histoire  Lileraire,  et  doivent  par  conséquent 
faire  le  sujet  iiarticulier  de  l'atention  de  celui  qui  en- 
treprend de  récrire  :  la  connoissance  des  Ecrivains  et 
la  notion  de  leurs  ouvrages.  Aussi  ce  sont  les  points 
capitaux  que  nous  nous  proposons  de  discuter.  Pour 
y  procéder  avec  plus  de  méthode  et  moins  de  confu- 
sion, lorsque  la  matière  est  de  longue  haleine,  nous 

bij 


xij  PREFACE. 

avons  soin  de  la  diviser  en  deux  ou  plusieurs  articles 
ou  paragraphes,  à  proportion  de  son  étendue. 

Le  premier  est  toujours  emploie  à  raporter  l'his- 
toii'e  de  la  vie  de  l'Ecrivain  ;  le  second  à  traiter  de  ses 
écrits  véritables  et  existans,  dont  on  marque  Tordre, 
la  chronologie,  le  sujet,,  l'ocasion.  Le  troisième  ai'li- 
clc  est  destiné  à  faire  connoître  ses  écrits  perdus  ;  le 
(juatriéme  à  discuter  ses  écrits  douteux  ;  le  cinquième 
à  parler  de  ceux  qu'on  lui  a  suposés.  Sa  doctrine ,  sa 
manière  d'écrire  et  le  jugement  ({u'on  en  a  j)orté,  l'ont 
le  sujet  du  sixième  article.  Enfin  dans  le  septième;  on 
fait  le  dénombrement  des  différentes  éditions  de  ses 
ouvrages,  en  marquant  avec  soin  celles  qui  méritent 
la  préférence. 

Dans  la  vie  de  nos  Savans  nous  prenons  à  tâche  de 
faire  entrer  tout  ce  qui  nous  a  paru  nécessaire ,  poui* 
faire  connoître  l'homme  extérieur  et  l'homme  inté- 
rieur ;  évitant  également  de  donner  ou  dans  une  pro- 
lixité ennuieuse,  ou  dans  une  trop  sèche  et  trop  aride 
précision.  D'abord  nous  avions  })rojclé  d'imiter  en 
cela  la  brièveté  de  quelques  Bibliothécaires.  Mais  sur 
une  réflexion  plus  sérieuse^  que  nos  Lecteurs ,  j)our 
avoir  une  entière  connoissance  des  Ecrivains  dont  ils 
liroientrhistoirCjSeroientobligésde  recourir  ailleurs, 
nous  avons  cru,  pourlcuj*  épargner  cette  peine, devoir 
nous  étendre  un  peu  davantage.  C'est  ce  que  nous 
faisons  sur-tout,  lorsqu'il  s'agit  de  faits  qui  ontraport 
à  la  literature.  Quelquefois  môme  à  l'égard  de  ceux 
qui  concernent  la  piété,  nôtre  cœur  qui  guidoit  nôtre 
plume,  a  trahi  nos  premières  vues .  Nous  n'é(;rivons 
pas,  ilest  vrai,  des  vies  de  Saints.  Mais  grand  nombre 
des  Savans  dont  nous  donnons  l'histoire ,  ont  uni  la 
sainteté  à  la  science.  Or  ne  les  représenter  que  sous 
ce  dernier  regard,  ce  ne  seroit  les  faire  connoître 
qu'à  demi,  et  cacher  le  plus  bel  endroit  de  leur 
histoire. 


PREFACE.  xiij 

Peul-elpc  en  prendra-t-on  ocasion  de  juger  que  les 
nortraitsdenosllominesde  Leli*es  sont  trop  chargés. 
Si  cela  arrive,  nous  prions  nos  I^cteui*s  de  se  souve- 
nir que  nous  faisons  ici  non  le  |H'rs()nna;j;e  d'Orateur, 
mais  celui  d'Historien.  En  cette  (uialilé  nous  nous 
sommes  impose*  la  loi  de  peindre  les  hommes  dont 
nous  sommes  ohligés  de  parler,  tels  qu'ils  ont  été 
recollement,  et  non  tels  qu'on  vuudroit  qu'ils  fussent. 
Leur  propre  conduite  nous  fournit  elle-même  les 
couleurs  de  leui*s  jwrtraits  ;  et  ce  qu'elle  nous  pré- 
sente ,  est  la  règle  et  la  mesure  de  ce  que  nous  eu 
disons. 

Sur  ce  princi|)c,  ennemis  de  toute  partialité  et  dé- 
gagésde  toute  prévention,  nous  aurons  une  atention 
prliculiere  à  rendre  justice  au  mérite  de  chaque 
Ecrivain,  et  de  ne  rien  avancer  sur  son  compte  (pii  ne 
nous  paroisse  ou  exactement  vrai,  ou  au  moins  apuïé 
sur  des  autorités  dignes  de  créance.  Ln  faisant  cou- 
noitrescs  bonnes  quahtés  sans  nous  établir  ses  Pa- 
négyristes, nous  aurons  soin  de  maniuer  aussi  ses 
défauts ,  sans  nous  ériger  en  Censeurs.  Il  y  a  en  efl'ct 
pi-esifue  autant  d'instruction  à  tirer  des  uns  que 
des  autrrs.  ,,  '  Un  portrait  flaté  n'est  |)oint  ressem-  ki«i.  duc.  «. 
blant.  Tels  sont  (l'ordinaire  les  iKinegyriques,  où  "' 
l'on  fait  i)aroître  un  homme  louable  en  ne  l'élevant 
que  ses  bonnes  qualités.  Artilice  grossier  qui  ré- 
volte les  gens  sensés,  et  leur  fait  faire  plus  aaten- 
tion  sur  les  défauts  qu'on  leur  cache  avec  tant  de 
soin.  Cest  une  es|>ece  de  mensonge  que  de  ne  dire 
ainsi  la  vérité  ({u'à  demi.  Personne  n'est  oblige 
d'écrii-e  l'histoire;  mais  <|uiconque  Tentreprend, 
s'engage  à  dire  la  vérité  tout  entière.  Que  si 
quelquefois  il  paroît  censurer  les  personnes  dont 
il  parle,  c'est  la  faute  des  coupables ,  et  non  de 


If 
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,,  l'Historien. 
„  Lorsqu'on  écrit  sur  quelque  matière,  pourexpli 


xiv  PRÉFACE. 

Dac.  poët.  d  Arist.  „  qucr  06  qu'clIc  a  de  bon  ou  de  mauvais,  '  répondoit 
^'  , ,  Denys  d'Halicarnasse  à  Pompée^  qui  se  plaignoit  de 

,, ce  qu'il  avoit  reproché  quelques  fautes  à  Platon, 
,,  il  faut  démêler  et  marquer  exactement  ses  vices  et  ses 
,,  vertus.  Car  c'est  le  moïen  le  plus  sûr  de  trouver  la 
,,  vérité,  qui  est  ce  qu'il  y  adeplusprécieux.Sij'avois 
,,  écrit  contre  Platon  dans  la  vùë  de  décrier  sesouvra- 
,,ges,jeserois  aussi  impie  que  Zoïle'.  Mais  au  contrai- 
„rej'aivoulu  lelouer;  etsienlelouantj'airelevéquel- 
,,  qucs-uns  de  ses  défauts,  je  n'ai  rien  fait  dont  il  put 
, ,  se  plaindre,  et  qui  ne  fût  nécessaire  pour  mon  des- 
,,  sein.  " 

Il  est  vrai  et  il  faut  l'avouer,  que  le  parti  de  dire 
ainsi  le  bien  et  le  mal  est  une  entreprise  fort  délicate, 
où  l'on  ne  doit  pas  s'atendre  à  un  aplaudissement  gé- 

piin.i.  ».  ep.  8.  néral.  '  Si  vous  vous  répandez  en  louanges,  disoit 
dès  le  tems  de  Trajan  Pline  le  jeune,  vous  passerez 
toujours  pour  ne  pas  assez  dire,  quand  même  vous 
vous  épuiseriez  sur  ce  sujet.  Si  au  contraire  vous  vous 
jettez  sur  la  censure,  on  vous  acusera  toujours  d'en 
dire  trop,  ne  le  fissiez-vous  que  le  plus  succinctement, 
Tum  si  laudaveris,  parcus;  si  cidpaveris,  ntmius 
fuisse  dicaris,  quamvis  illudplenissime,  hoc  res- 
trictissime  feceris.  Mais  cet  écueilne  nous  empêche- 
ra point  de  tendre  toujours  à  nôtre  but,  en  suivant  les 
règles  que  nous  nous  sommes  prescrites,  et  dont  la 

TiiL^H.  E.  1. 15.  première  est  de  ne  chercher  que  la  vérité.  '  Ceux  qui 
la  cherchent  uniquement,  dit  un  grand  Homme  du 
dernier  siècle,  attendent  en  paix  tout  ce  qui  plaira  à  la 
vérité  ou  d'ordonner  ou  de  permettre.  Heureux  pour- 
vu qu'ils  puissent  la  suivre  partout,  et  l'avoir  pour 
eux  et  dans  sa  gloire  et  dans  son  ignominie! 
Pour  mieux  donner  le  caractère  de  nos  Ecrivains, 

(1)  Ce  Zoïle  écrivit  autrefois  contre  Homère  à  dessein  de  ternir  la  réputation  de  ce 
grand  Homme. 


PRÉFACE.  XV 

nous  joignons  assez  souvent  à  leurs  éloges  historiques 
les  épitaphes  consacrées  à  leur  mémoire.  Ces  pièces 
sont  précieuses,  étant  oi>dinairenient  nuoiqu'en  abré- 
gé les  actes  originaux  des  grands  lionnues.  Aussi 
avons-nous  gran(l  soin  de  recueillir  toutes  celles  (|u'on 
a  pu  déterrer,  (/est  par-là  (lue  nous  finissons  presipie 
toujours  l'hisUûre  de  leur  vie.  Outre  lu  cunnoissiuicc 
originale  qu'elles  en  donnent ,  elles  servent  encore 
à  faire  voir  (|uel  éloit  le  goût  des  siècles  où  elles 
ont  été  faites,  soit  pour  la  prose  ou  pour  la  versili- 
cation. 

De-là  nous  passons  à  la  discussion  des  écrits  de  nos 
Auteurs,  suivant  la  méthode  qu'on  a  déjà  marqm'>e. 
C'est-là  la  partie  de  l'ouvrage  où  les  i*eclierches  cu- 
rieuses, les  découvertes  intéressantes,  les  remanpies 
et  critiques:  et  historiques  doivent  avoir  leur  place. 
On  veira  dès  ce  prenjier  volume,  «pie  nous  n'avons 
rien  négligé  |>our  satisfaire  à  ct^  conditions;  et  l'on 
|)ourra  juger  par  le  mérite  de  quelques  découvertes  as- 
sez heureuses  que  nous  n'avons  pas  travaillé  sur  un 
fonds  tout  à  fait  mgrat.  Souvent  la  moisson  est  si  abon- 
dante \mr  raport  aux  remarques  en  particulier,  qu'il 
a  fallu  user  de  beaucoup  de  discernement  i)our  faire 
choix.  Kn  ces  rencontres  on  a  pris  celles  qui  ont  paru 
les  plus  nécessaires  et  les  plus  propres  à  éclaireir  le 
sujet  qui  les  fait  naître  ;  et  on  a  laissé  les  autres.  Quoi- 
que le  titre  de  l'ouvrage  ne  promette  que  de  sembla- 
bles remarques  sur  les  écrits  des  Auteurs,  on  ne  laisse 
pas  de  donner  presque  toujours  des  extraits,  et  sou- 
vent des  sommaires,  ou  même  des  analyses  entières 
de  ceux  qui  sont  les  plus  considérables.  On  en  use  de 
la  sorte  particulièrement  à  l'égard  des  ouvrages  des 
Pères  de  l'Eglise. 

Mais  nous  sommes  bien  éloignés  de  faire  le  même 
honneur  aux  écrits  de  presque  une  infinité  d'autres 


xvi  PRÉFACE. 

Auteurs  qui  méritent  à  peine  qu'on  en  fasse  même 
mention.  Le  Lecteur  nous  prévient  sans  doute ,  et 
comprend  que  nous  voulons  parler  de  cette  foule  de 
Casuistes,  de  Sermonaires  et  de  Mystiques,  qui  sont 
venus  avec  quelque  apareil  au  XVI  siècle  et  au  com- 
mencement du  suivant,  et  qui  sont  aujourd'hui  le  re- 
but de  nos  bibliothèques  et  à  charge  aux  gens  de  le- 
tres.  Après  tout,  ce  sont  des  Auteurs;  et  l'on  ne  sau- 
roit  les  oublier,  sans  faire  une  brèche  à  l'exactitude 
d'une  histoire ,  (jui  doit  coniprendrc  tout  ce  (jui  re- 
garde la  literature.  Ils  y  auront  donc  leur  place  : 
mais  nous  avertissons  par  avance  que  nous  passe- 
rons légèrement  sur  ce  qui  les  concerne. 

Entre  les  écrits  dont  la  discution  fait  la  principale 
partie  de  nôtre  dessein ,  on  s'atend  sans  doute  de 
voir  paroître  les  actes  des  Martyrs  et  les  autres  vies 
des  Saints,  qui  ont  été  écrites  en  France ,  ou  par  des 
François.  Ce  sont  en  effet  des  monumens  trop  im- 
portans,  pour  être  omis  dans  une  Histoire  Literaire. 
Il  s'en  faut  néanmoins  de  beaucoup  qu'ils  aient  tous 
le  même  mérite.  Il  n'y  en  a  que  trop,  il  faut  l'avouer, 
(|ui  n'ont  reçu  l'être  qu'en  des  tems  où  la  vérité  de 
l'histoire  étoit  déjà  altérée  [)ar  diverses  traditions 
populaires,  et  souvent  par  des  fictions  inventées  à 
dessein  de  nourrir  la  pieté  des  Fidèles.  Dans  la  discu- 
tion qu'on  en  fait  avec  tout  le  travail  qu'on  peut  s'ima- 
giner, mais  avec  autant  de  discernement  qu'il  est 
possible,  nous  ne  parlons  de  cette  sorte  de  monumens 
que  pour  montrer  qu'on  ne  les  a  pas  oubliés,  et  pour 
avertir  qu'ils  ne  valent  pas  pour  la  plupart  la  peine 
qu'on  s'y  arrête.  Le  peu  que  nous  disons  au  reste, 
bien  loin  de  tendre  a  diminuer  l'autorité  des  actes 
sincères  et  des  vies  authentiques  des  Saints,  ne  servira 
au  contraire  qu'à  les  rendre  encore  beaucoup  plus 
certaines. 

Les 


PRÉFACE.  xvij 

Les  actes  et  les  Canons  de  Conciles  sont  d'autres 
monumens  encore  itlus  précieux,  que  ceux  dont  on 
vient  de  parler.  A  plus  forte  raison  meritent-iis  d'en- 
trer pour  quelque  chose  dans'  une  Histoire  literairc. 
(^  n  est  point  effectivement  l'ouvrage  de  quel(]ue 
particulier,  le  plus  souvent  ou  obscur  ou  mènie  in- 
connu. Ce  sont  des  résultats  d'assemblées  presque 
toujours  nombi'euses  et  éclairées,  où  de  sages  et 
quelquefois  de  saints  £vê(iues  attestent  la  foi  de  leurs 
K^lises,  s'il  s'agit  du  dogme;  ou  bien  prescrivent  des 
règles  «le  conduite,  soit  iM)ur  i-emédier  aux  scandales 
ou  corriger  les  abus,  s'il  s'agit  ou  de  morale  ou  de 
discipline.  Il  n'est  |)oint  de  pièces  plus  authentiques 
et  dont  les  dates  soient  plus  certames  et  les  Auteurs 

S  lus  connus.  Ce  n'est  donc  qu'ajuste  titre  qu'on  leur 
onne  rang  dans  cette  Histoire.  Files  y  sont  placées 
suivant  le  siècle  et  TanniV  où  les  Conciles  ont  été  cé- 
lébrés. I)'alM>rd  nous  donnons  une  relation  abrégée 
de  ces  ass4'nd>lé(>s,  où  nous  faisons  conmMtre  le  lieu, 
le  tems  où  elles  se  sont  tenues,  le  sujet,  t'ocasion 
qui  les  ont  fait  convoquer,  les  Prélats  qui  les  ont  com- 
posées. Après  quoi  nous  faisons  quelquefois  l'énume- 
ration  des  reglemens  qui  ont  été  «tressés.  Mais  le  plus 
souvent  nous  nous  contentons  d'en  marquer  sim|>le- 
ment  le  nombre,  et  d'en  cclaircir  les  endroits  les  plus 
difiiciles. 

Quiconque  se  borneroit  à  connoitrc  seulement  les 
Auteurs  et  leurs  ouvrages,  ne  uossederoit  qu'impar- 
faitement l'Histoire  lileraire.  Il  y  a  encore  ({uuntité 
d'autres  traits  de  literature,  qui  en  font  partie  et  qu'il 
est  important  de  ne  pas  ignorer.  Qu'y  a-t-il  en  effet 
de  plus  capable  d'intéresser  une  noble  curiosité,  que 
de  savoir  quel  a  été  le  sort  des  letres  en  chaque  siècle 
parmi  la  Wation  Françoise  :  leur  progrès,  leur  déca- 
dence, leur  rétablissement?  De  cunnoître  l'origine  et 
'•  c 


xviij  PRÉFACE.' 

la  constitution  de  tant  de  célèbres  Académies  ancien- 
nes et  modernes,  (jui  y  ont  perpétué  l'amour  pour 
les  letres,  et  fait  briller  les  sciences  et  les  beaux  arts? 
De  voir  comment  se  sont  établis  et  formés  ce  grand 
nombre  de  Collèges  et  d'Universités,  qui  ont  été  au- 
tant de  pépinières  de  Savans  pour  la  France?  D'apren- 
dre  quel  a  été  dans  le  Roïaume  le  succès  du  secret  im- 
mortel de  l'Imprimerie,  et  jusqu'où  l'on  a  porté  dans 
les  divers  âges  le  goût  et  l'ardeur  à  former  des  biblio- 
thèques? 

Tous  ces  traits  de  literature  et  beaucoup  d'autres, 
nous  avons  soin  de  les  recueillir  en  un  corps  d'his- 
toire, ou  discours  historique  à  la  tête  de  chaque  siècle. 
Là  réunissant  ce  qui  a  raport  à  ce  dessein,  nous  en- 
trons dans  le  détail  de  tout  ce  que  l'on  a  mis  en  usage 
et  qui  a  contribué  à  soutenir  les  letres,  ou  à  les  faire 
fleurir  avec  plus  d'éclat.  Là  nous  découvrons  les  voies 
par  lesquelles  elles  sont  arrivées  quelquefois  au  point 
d'une  entière  décadence,  et  les  moïens  qu'on  a  pris 
pour  les  relever  de  leur  chute,  et  leur  donner  un  nou- 
veau lustre.  Par  cette  suite  et  cet  enchaînement  de 
traits  ou  literaircs  ou  qui  ont  raport  à  la  literature,  on 
voit  d'un  coup  d'œil  l'étal  des  letres  parmi  nôtre  Na- 
tion, et  quel  a  été  le  goût  et  le  génie  des  Gaulois  et 
des  François  pour  les  sciences  dans  tous  les  âges. 

Déjà  l'on  préjuge  aisément  combien  des  choses  cu- 
rieuses nous  fournissent  sur  les  premiers  tems,  ces  an- 
ciennes et  célèbres  Académies  des  Druides  nos  pre- 
miers Philosophes,  et  des  Marseillois,  ces  hommes  si 
i'enommés  pour  leur  gravité,  leur  politesse,  leur  sa- 
voir :  et  sur  les  siècles  postérieurs,  les  heureux  succès 
de  nos  écoles  épiscopales  et  monastiques,  de  nos  Col- 
lèges, de  nos  universités  ;  ce  qu'ont  fait  en  faveur  des 
letres  les  Charlemagnes,  les  François  1,  les  Louis  XIV, 


PRÉFACE.  xix 

ces  grands  Monarques,  qui  semblent  n'avoir  régné, 
que  pour  faire  régner  avec  eux  les  sciences  et  les 
Iteaux  arts. 

On  voit  par  là  que  nAlre  ouvrage  n'est  point  un 
simule  catalogue  des  Aut^'urs  François  et  des  écrits 
qu'us  ont  laissés  en  leur  langue,  comme  la  bibliothè- 
que de  la  Croix  du  Maine,  ou  celle  de  Du  Verdier, 
({ui  y  a  joint  quelques  écrits  latins,  avec  divers  ex- 
traits assez  mal  choisis  et  encore  plus  mal  digérés. 
Nous  avons  tâché  de  réunir  les  avantages  de  ceux-là, 
d'éviter  leurs  défauts,  de  remplir  leui*  vuide  et  de  su- 
pléer  à  leur  insuflisance.  Ce  sont  les  monumcns  con- 
nus de  la  literature  Gauloise  et  Françoise  recherchés 
avec  soin,  réunis  avec  mélhmle,  rangés  dans  leur  or- 
dre naturel,  éclaircis  avec  une  juste  étendue,  accom- 
pagnés des  liaisons  convenables,  dont  nous  formons 
l'Histoire  literniir  de  la  France.  On  y  aura  un  tableau 
vivant  et  animé,  non  des  faits  d'une  nation  policée, 

fuissante,  bellitpieusi* ,  qui  se  borne  à  former  des 
'oliti(|ues,  des  Héros,  des  Conquerans,  mais  des 
actions  d'un  |)euplc  s;ivant,  nui  tendent  à  former  des 
Sages,  des  Docti's,  de  bons  Citoïens,  delidélcs  sujets. 

Le  plan  de  nôtre  ouvrage  sur  l'idée  qu'on  en  vient 
de  donner,  peut  passer  pour  nouveau  ;  quoi(|u'il  n'en 
soit  pas  de  même  du  sujet  que  nous  y  traitons.  Plu- 
sieurs personnes  de  letres  en  effet  ont  entrepris  avant 
nous  de  le  traiter  et  l'ont  exéaité  ou  en  tout  ou  en 
partie  :  en  tout  comme  les  deux  Bibliothécaires  qu'on 
vient  de  nommer.  Encore  un  plus  grand  nonjbre  l'a 
fait  en  partie.  Tels  sont  entre  ceux-ci  Colomiés  dans 
son  Gallia  Orientalis^  et  tous  ceux  qui  nous  ont  don- 
né l'histoire  de  quelque  Université,  Collège,  Aca- 
démie de  la  France,  comme  Mrs.  du  Boulay,  deLau- 
noy,  Pelisson,  de  Fontenelle  et  autres.  Tels  sont  en- 

c  ij 


«  PRÉFACE. 

core  tous  ceux  qui  ont  écrit  sur  les  Auteurs  de  quel- 
que province  au  Roïaume,  ou  sur  quelque  classe 
dioisie  des  Savans  qu'elle  a  produits,  comme  les 
Historiens,  les  Poètes,  les  Orateurs,  les  Juriscon- 
sultes. 

Toutefois  sans  prétendre  rien  diminuer  du  prix  de 
ces  ouvrages,  qui  tous  à  la  vérité  n'ont  pas  le  même 
mérite,  mais  dont  il  y  en  a  d'inestimables,  ce  ne  sont 
que  des  morceaux  détachés.  On  n'y  trouve  ni  l'ordre 
ni  la  suite,  encore  moins  la  totalité  d'une  Histoire 
complète  :  non  pas  même  dans  ceux  qui  ont  eu  des- 
sein de  tout  embrasser.  Ils  ne  montrent  les  richesses 
de  nôtre  Nation  en  genre  <lc  literature,  que  par  quel- 
ques endroits.  Ce  sont  pour  la  plupart  d'excellentes 
parties,  qui  doivent  faire  désirer  le  corps  entier,  et 
qui  réunies  ensemble,  rédigées  par  ordre  et  emploïées 
avec  une  sage  œconomie  concourront  à  former  un 
tout  qui  sera  peut-être  aussi  agréable  qu'il  paroît 
utile.  C'est  où  tend  nôtre  dessein  ;  et  sur  le  plan  (jue 
nurot.i.i.  v.9â*.  uous  eu  vcuons  de  tracer,  nous  pouiTÎons  dire  '  avec 
un  ancien  Poëte  : 

A  via  Pieridum  peragro  loca,  nullius  ante 
Trita  solo 

Quelque  relief  au  reste  que  nous  tâchions  de  don- 
ner ici  à  nôtre  ouvrage,  en  relevant  le  plan  sur  lequel 
il  est  exécuté,  nous  sommes  bien  éloignés  de  préten- 
dre qu'il  doive  passer  pour  une  Histoire  régulière, 
complète  et  achevée.  Un  tel  chef-d'œuvre  est  trop 
au-dessus  de  nos  forces,  pour  nous  flatter  d'y  attein- 
dre. Mais  quoique  nôtre  travail  n'ait  pas  cet  avanta- 
ge, qu'il  nous  soit  permis  de  dire  qu'il  ne  laissera  pas 
d'être  de  quelque  utilité  pour  l'Eglise,  pour  l'Etat, 
et  plus  particulièrement  pour  la  République  des  Ic- 
tres. 


PRÉFACE.  Mj 

L'Eglise  Gallicane  y  verra  non  seulement  réunis 
tous  les  Ecrivains  ([u'elle  a  formes  dans  tous  les  siè- 
cles; mais  elle  y  en  trtmven»  même  plusieurs  qui  jus- 
qu'ici ont  été  i)eu  connus.  Ce  au'on  y  raporte  de  la 
science  et  du  zélé  de  ces  grands  Hommes  pour  éditier, 
défendre  ou  consoler  l'I^glise,  |M)uiTa  mspirer  une 
pieustuU génère» ise  émulation  à  Uml  d'Ecclésiastiques 
qui  ont  de  l'élude  et  du  lalenl,  sinon  à  mairher  sur 
les  traces  de  leui*s  illustres  Ancêtres,  au  moins  à  s'in- 
struire av(H;  plus  de  soin  de  ce  qu'ils  ont  écrit  pour 
leur  édification. 

Le  Roïaume  entier  aura  l'agrcwent  d'y  voir  d'uni* 
irnrt,  counnt^  sur  un  tht>âtre,  le  grand  nombi-e  de 
iH'aux  esprits  et  de  gens  de  letres  (|U*il  a  produits,  et 
de  l'autre  le  succès  merveilleux  avec  leipielon  après- 
que  toùjoui"»  cultivé  les  st'iences  et  les  lieaux  arli»  dans 
Tenceinte  de  son  étendue  :  succès  (lu'il  peut  légiti- 
mement disputer  à  tous  les  autres  ktats  du  monde 
Chrétien.  Peut-il  y  avoir  rien  de  plus  propre  et  de 
plus eflic;ice pour  entretenir  et  même  augmenter  cette 
noble  ai*deur  qu'ont  nos  François,  |M)ur  ne  pas  dé- 
générer de  ce  qu'ont  été  leurs  iKîi-es?  D'ailleurs  les 
Auteurs  et  les  écrits  se  multiplient  si  prodigieuse- 
ment tous  les  jours,  que  ce  n'est  |>as  une  science  mé- 
diocre que  de  les  connoitre.  Aussi  les  gens  de  letres 
s'y  a|)liqiient-ils  plus  nue  jamais.  Or  il  en  doit  être 
de  celle  coiinoissance  (les  Auteurs  et  de  leurs  écrits, 
comme  il  en  est  de  l'Histoire  prise  en  général.  Avant 

Sue  de  passer  à  celle  des  nations  étrangères,  il  est 
e  l'ordre  de  commencer  par  jiosseder  celle  de  sa 
jH'opre  nation.  Nous  laissons  aux  François  l'aplica- 
tion  de  ce  principe;.  Elle  est  toute  naturelle;  et  ils  ne 
sauroient  s'y  tromper. 

La  Republique  des  letres  en  particulier  y  aura  un 
recueil  d  Ecrivains  en  tout  genre  de  literature,  si  non 


xxij  PREFACE. 

le  plus  parfait,  au  moins  le  plus  ample,  et  peut-être 
même  le  plus  méthodique,  dont  elle  se  soit  vue  en- 
richie jusqu'ici.  L'on  ne  dit  rien  des  recherches  que 
contient  l'ouvrage.  Elles  s'y  montrent  d'elles- 
mêmes  par  le  nombre  prescjue  infini  de  citations 
dont  il  est  orné.  Pour  les  découvertes,  on  a  déjà 
averti  qu'il  s'y  en  trouve  quelques-unes  aussi  heu- 
reuses qu'intéressantes. 

En  lui  donnant  le  titre  d'Histoire,  parce  qu'il  est 
plus  commun,  et  qu'à  la  rigueur  toute  narration  peut 
porter  ce  titre,  il  sembleroit  peut-être  qu'on  y  dût 
donner  une  histoire  suivie  et  continue,  telles  que 
sont  les  autres  histoires  ordinaires,  où  l'on  repré- 
sente les  évenemens,  en  liant  ensemble  ceux  qui  se 
sont  passés  en  même  tems.  Mais  il  n'est  pas  de  l'His- 
toire literaire  comme  de  l'Histoire  de  l'Eglise ,  pai' 
exemple,  ou  de  celle  de  quelque  Empire  ou  Roïau- 
me.  Dans  celle  de  ces  deux  derniers  genres  les  faits 
ont  une  liaison  si  essentielle  entre  eux,  qu'on  ne 
peut  les  raporter  séparément  sans  diminuer  de  leur 

f)rix  et  leur  ôter  une  partie  considérable  de  leur  re- 
ief,  ou  ne  les  faire  connoître  qu'à  demi.  Au  con- 
traire dans  l'Histoire  Literaire,  où  les  faits  sont  in- 
dépendanslesunsdes  autres,  comme  ils  le  sont  dans 
l'Histoire  de  la  vie  des  Saints ,  on  ne  peut  guéres  la 
bien  traiter  qu'en  la  divisant  par  titres  ou  articles, 
dans  lesquels  on  raporte  de  suite  ce  qui  regarde  un 
Auteur,  avant  que  de  passer  à  un  autre.  Le  dénom- 
brement et  la  discution  de  ses  écrits  ne  peuvent' 
permettre  qu'on  en  use  autrement. 

Ceux  au  reste  qui  aiment  les  histoires  suivies  par 
l'enchaînement  des  faits  chronologiques,  trouveront 
de  quoi  se  satisfaire  dans  les  discours  que  nous  avons 
placés  à  la  tête  de  chaque  siècle ,  et  dans  les  tables 
chronologiques  que  nous  mettons  à  la  fmde  chaque 


PRÉFACE.  xxiij 

volume.  Comme  dans  les  unes  nous  faisons  entrer 
en  abrégé  tout  ce  qui  s'est  passé  en  chaque  siècle, 
et  dans  les  autres  tout  ce  qui  est  raporté  dans  chaque 
volume,  on  y  verra  d'un  coup  d'œil  les  évenemens 
de  suite  selon  le  tems  auquel  ils  sont  arrivés.  D'ail- 
leurs nous  n'avons  |kis  laissé  de  garder  en  queUpie 
sorte  un  ordre  chronol(>gi<|ue,  non  seulementen  di- 
visantnôtre  ouvrage  pur  siècles,  niaisen  y  disposant 
encore  les  titres  ou  les  articles  selon  la  suite  des 
tems. 
Aïant  choisi  le  titre  d'Histoire  pour  les  raisons 

3u'on  a  marquées,  nous  avons  enq)loVé  à  l'exécution 
e  l'ouvi-age  le  style  le  plus  convenable  à  ce  dessein. 
De  sorte  (|ue  nous  ne  nous  sonnnes  pas  beaucoup 
arrêtés  à  l'élocution,  encore  moins  à  l'élévation  et 
aux  ornemens  du  discours.  Vn  style  simple ,  ordi- 
naire, maisaussi,  puretclair,  nous  a  paru  préférable 
à  un  (lis<*ours  élevé  et  chargé  d'ornemens,  (pie  nous 
avouons  d'ailleui's  n'être  |)as  capables  de  soutenir. 
Après  toutde quelque  manière (|ue  soit  écrite  Tllis-  nm  i-  y  •■>.  •■ 
loirc,  dit  un  Ancien,  elle  a  toujours  ses  agrémens  : 
llistoria  quoffuo  mmlo  scriptu  do.lectat. 

Pour  ce  (pu  est  de  la  venté,  qui  fait  la  partie  la 
plus  essentielle  de  l'Histoire,  et  qui  consiste  dans  la 
certitude  des  faits,  nous  l'avons  puisée  dans  les  Au- 
teurs originaux;  et  au  défaut  de  ceux-ci,  dans  les 
Ecrivains  les  plus  proches  des  tems  où  se  sont  pas- 
sés les  faits  que  nous  ra|M)rtons.  Ce  devoir  que  nous 
nous  sommes  imposé,  ne  nous  a  pas  néanmoins  fait 
négliger  les  plus  modernes.  Nous  y  avons  eu  re- 
cours comme  aux  autres;  et  souvent  ils  nous  ont 
étéfortutilcs  pour  éclaircirlesdiflicultés.  Mais  sou- 
vent aussi  ils  n'ont  servi  qu'à  nous  en  faire  naître 
de  nouvelles,  ^ui  nous  ont  coûté  de  la  peine  et  du 
travail  à  exammer  et  à  résoudre.  Quels  que  soient 
ces  Modernes,  nous  avons  soin  de  les  citer,  comme 


xxiv  PRÉFACE. 

nous  citons  les  Anciens,  presque  toujours  sans  élo- 
ge, quoique  nous  profitions  de  leurs  lumières;  mais 
jamais  avec  aigreur,  lorsque  nous  sommes  obligés 
de  les  réfuter. 

Attentifs  jusqu'au  scrupule  à  ne  la  pas  altérer 
celte  vérité,  que  nous  cherchons  sur  toutes  choses, 
nous  l'exprimons  avec  lidelité  de  lu  manière  la  plus 
simple,  la  plus  claire  et  la  plus  nette  qu'il  nous  est 
possible.  A  une  autorité  qui  1  atteste,  nous  enjoignons 
souvent  une  seconde  ou  plusieurs  autres,  (pii  bien 
qu'elles  semblent  dire  la  même  chose,  ne;  laissent  pas 
d'y  ajouter  quelques  nouvelles  circonstances.  On  en 
use  ainsi  alin  de  mieux  constater  ce  que  l'on  raporte. 
Autant  (jue  la  suite  du  discours  l'a  pu  permettre,  on 
s'est  attaché  aux  propres  termes  des  Auteurs  (jue 
Ton  cite.  Quelquefois  même  on  en  a  traduit  ou  ra- 
porte de  mot  à  mot  certains  endroits  tout  de  suite, 
lorsqu'on  l'a  jugé  nécessaire.  Hors  ces  cas  on  n'a  fait 
qu'en  prendre  le  sens ,  et  quelquefois  seulement  les 
conséquences  certaines  et  naturelles  qui  en  résul- 
tent. Les  lecteurs  judicieux  ne  sauroient  blâmer  cette 
conduite,  s'ils  se  souviennent  que  Ton  cite  des  Au- 
teurs, non  pour  les  copier,  mais  pour  servir  de  preu- 
ves et  de  garans. 

On  les  nomme  rarement  ces  Auteurs  dans  le  corps 
de  l'ouvrage  ;  mais  on  a  grand  soin  de  les  citer  à  la 
marge.  Par  là  on  suplée  à  la  méthode  introduite  de- 
puis certain  tems,  de  charger  les  ouvrages  histori- 
ques de  preuves  iustilicatives  en  entier,  qui  souvent 
tiennent  autant  de  place  que  les  histoires  mêmes,  et 
qui  grossissent  extrêmement  les  volumes.  Les  An- 
ciens, même  dans  le  Paganisme,  n'en  usoient  pas 
ainsi.  C'est  qu'en  ces  premiers  tems  on  suposoit  assez 
de  bonne  foi  dans  un  Historien,  pour  l'en  croire  sur 
sa  parole.  On  auroit  cru  lui  faire  une  injure  atroce 

que 


PRÉFACE.  XXV 

que  de  le  soupçonner  de  fraude,  et  de  lui  impu- 
ter ce  qu'on  auroit  rougi  de  faii-c  soi-même.  Ce 
n'est  pas,  à  Dieu  ne  plaise,  que  nous  prétendions 
blâmer  la  nouvelle  manière  de  justifier  les  faits  his- 
toriques. Quelque  homme  de  bien  que  l'on  suppose, 
et  que  soit  effectivement  celui  qui  écrit  en  ce  genre, 
son  ouvrage  est  beaucoup  plus  digne  de  créance , 
et  par  conséquent  plus  capable  de  faire  du  fruit , 
lorsqu'on  voit  qu'il  ne  dit  rien  nue  sur  de  bons  ga- 
rans.  Mais  puisqu'il  est  convenable  et  même  néces- 
saire d'en  donner,  il  ne  l'est  pas  moins  de  le  faire 
d'une  manière  qui  satisfasse  le  public^  sans  lui  do 
venir  onéreuse. 

Or  nous  n'en  connoissons  point  de  plus  propre  à 
cet  effet,  que  celle  que  nous  avons  choisie  en  citant, 
comme  nous  faisons,  nos  garans  à  la  marge,  avec  une 
petite  marque  aux  endroits  dans  le  corps  de  l'ou- 
vrage où  se  raiM)rtcnt  ces  citations.  Nous  avons  mê- 
me cru  devoir  les  étendre  jusqu'aux  différentes  édi- 
tions des  ouvrages  dont  nous  avons  ocasion  de  parler. 
De  sorte  que  nous  n*cn  nommerons  presque  aucune, 
que  nous  n'inditpiions,  ou  la  bibliot()é({ue  où  elle  se 
trouve,  ou  le  catalogue  qui  l'annonce,  afin  de  mon- 
trer que  nous  n'avançons  rien  sans  preuve.  Frivole 
assujettissement,  dira  peut-être  quelqu'un  !  Mais  rien 
ne  mente  de  passer  pour  frivole,  lorsqu'il  s'agit  de 
faire  connoître  son  exactitude.  D'ailleurs  nous  som- 
mes bien  aises  de  faire  honneur  aux  biblioUiéques 
que  nous  avons  visitées  ou  par  nos  amis ,  ou  par 
nous-mêmes ,  et  où  nous  avons  trouvé  la  plupart 
de  ces  éditions. 

Tout  cela  nous  a  engagés  à  multiplier  les  citations 
aux  marges  de  l'ouvrage,  et  cette  multiplicité  à  les 
abréger  le  plus  qu'il  a  été  possible.  Mais  pour  remé- 
dier à  cet  inconvénient  qui  les  rend  un  peu  obscures, 

d 


xxvj  PRÉFACE. 

nous  avons  soin  de  mettre  à  la  tète  de  chaque  vo- 
lume une  table  alphabétique  de  ces  mêmes  citations, 
où  elles  sont  expliquées  en  tout  leur  entier.  On  y 
marque  même  les  difl'érentcs  éditions  des  Auteurs 
dont  nous  nous  sommes  servis,  afin  que  ceux  qui 
voudront  se  donner  la  peine  de  conférer  les  origi- 
naux avec  ce  que  nous  en  avons  tiré,  puissent  le  faire 
plus  aisément.  C'est  ainsi  qu'en  a  usé  M',  de  Tille- 
mont,  cet  Historien  si  universellement  et  si  juste- 
ment estimé.  Et  pouvions-nous  prendre  un  meilleur 
modèle  ? 

Pour  une  plus  grande  exactitude ,  nous  aurions 
fort  souhaité  de  pouvoir  l'imiter  en  tout  le  reste,  et 
nous  servir  conime  lui  de  crochets,  pour  distinguer 
du  texte  des  autorités  que  nous  aportons,  ce  (}ue 
nous  sommes  obligés  d'y  ajouter,  ou  pour  éclaircir 
ou  pour  lier  le  discours.  11  faut  avouer  que  cette 
manière  d'écrire,  qui  est  un  peu  embarrassante  pour 
beaucoup  de  Lecteurs,  et  extrêmement  gênante  pour 
les  Ecrivains  qui  la  suivent,  ne  laisse  pas  d'être  d'une 
grande  utilité.  Tous  les  Historiens  qui  ne  tirent  d'ail- 
leurs que  de  leur  propre  fonds  ce  qu'ils  raportent, 
devroient  même  l'emploïer.  Sans  cela  ils  sont  sujets 
à  induire  en  erreur  la  plupart  de  ceux  qui  liront 
leurs  ouvrages ,  sans  avoir  une  connoissance  plus 
que  médiocre  des  Auteurs  où  ils  ont  puisé.  En  ce  cas 
on  croit  effectivement  que  les  choses  qu'on  raporte 
sur  leur  autorité,  se  trouvent  dans  ces  Auteurs  aussi 
éclaircies  et  aussi  liées  qu'on  les  lit  dans  le  nouvel 
Historien.  Au  contraire  en  se  servant  de  ciochets, 
on  fait  voir  ce  qui  est  des  Auteurs  originaux,  et  ce 

3ui  est  de  celui  qui  les  emploie  pour  son  dessein.  On 
onne  ainsi  à  discerner  ce  qui  remonte  jusqu'à  la 
source,  et  ce  qui  n'en  est  qu'une  suite  éloignée. 

Cette  considération  jointe  à  l'exemple  de  ce  Grand 
Homme  qui  s'est  servi  de  cette  méthode,  nous  avoit 


PRÉFACE.  xxvij 

déterminés  à  la  suivre  après  lui.  Mais  ne  voulant  rien 
faire  sans  l'avis  des  personnes  savantes  et  du  meilleur 
goût,  la  plùj>arl  n'ont  pas  aprouvc  ce  dessein;  et 
nous  avons  cru  devoir  acorder  à  la  multitude  ce  que 
nôti-e  inclination  nous  {)ortoit  à  donner  au  petit 
nombre. 

l^i'sipi'il  s<»  rencontre  des  difficultés,  qui  deman- 
dent «pieltpie  éclaiirissenient.  qui  auroit  ou  trop  in- 
terronipu  le  til  du  discours,  ou  cause  quelque  con- 
fusion, nous  en  renvoïons  la  discution  dans  des  no- 
tes au  Uis  des  |»ages,  où  Ton  tâche  de  les  éclaircir. 
On  en  us*'  «le  même  à  l'égard  de  certains  points  de  , 

criti<pie,  qui  ne  nicritcnt  pas  d'entrer  dans  le  corps 
de  l'ouvrage,  et  de  quel<pies  h^çons  corrompues  (lu 
texte  des  Auteui-s. 

Comptant  au  reste  sur  l'équité  de  nos  l>ecteurs, 
nous  en  atendons  qu'ils  voudront  bien  se  souvenir 
que  nous  «'•crivons  une  Histoiir,  et  non  un  ouvrage 
lie  théologie  ou  de  controvers<\  Ils  n'oublieront  donc 
pas  (pie  nous  nous  Inirnons  à  ra|N>rler  des  faits,  sans 
nous  engager  à  répondre  des  const'iquences  qu'on  en 
|K)urroit  tirer.  De  même  lorsque  rocasion  se  pré- 
sente de  |)arler  <les  hérésies  ou  (ies  dogmes  des  héré- 
tiques, nous  les  touchons,  sans  nous  an-êter  n  les 
rauter.  Que  si  quelcpielois  nous  y  o|>osons  la  doc- 
trine de  ceux  qui  les  ont  combattus,  c'est  toujours 
d'une  manière  historique,  et  sans  déposer  le  person* 
nage  d'Historien.  Nous  le  soutenons  ce  (lersonnage 
dans  les  OmciU^s  comme  ailleurs. 

Malgré  toute  l'exactitude  dont  nous  nous  piquons, 
et  tous  les  soins  que  nous  avons  a|>ortés  i)our  la  sou- 
tenir, nous  ne  faisons  aucun  doute  qu'd  ne  se  soit 
glissé  beaucoup  de  fautes  dans  un  si  vaste  ouvrage. 
Nous  ne  sommes  point  differens  des  autres  hommes; 
et  nous  avons  nos  ocni>ations  comme  eux  les  leurs. 
'  Nec  dubitamus  mut  ta  esse  qttœ  et  nos  preeterie^  piin.uut.  i.i.p.7. 


xxviij  PRÉFACE. 

rint.  Homines  enim  sumus  et  occupati  offlciis. 
C'est  ce  qui  nous  engage  à  siiplier  les  Savans,  par 
l'amour  de  la  vérité  qui  est  respectable  dans  les  plus 
petites  choses  comme  dans  les  plus  grandes,  de  nous 
faire  la  grâce  de  nous  en  donner  connoissance.  Ils 
verront  par  l'usage  que  nous  ferons  de  leurs  remar- 
ques, que  nous  ne  cherchons  qu'à  nous  instruire  de 
cette  même  vérité,  qui  fait  le  sujet  de  leurs  veil- 
les et  de  leurs  recherches,  et  que  nous  ne  leur  en 
aurons  pas  moins  d'obligation ,  qu'ils  croiront  nous 
faire  de  plaisir  en  nous  les  communiquant.  Nous 
poussons  encore  plus  loin  la  confiance. 

Lorsqu'il  s'agit  d'écrire  pour  la  postérité,  l'on 
ne  sauroit  prendre  ni  trop  de  mesures,  ni  trop 
de  précautions.  L'on  ne  sauroit  par  conséquent 
trop  implorer  le  secours  des  gens  de  letres  et  des 
personnes  éclairées.  Plus  le  dessein  qu'on  embrasse 
est  grand,  plus  on  a  besoin  de  cette  sorte  de  secours. 

veii.  paierc.  MuQua  ïiegoUa  magnis  adjutortbus  egent.  Ceux 

que  l'on  connoît  dans  l'anliquité  avoir   travaillé 

pun.  1. 6.  ep.  16.  avcc  le  plus  de  soin  sur  l'Histoire,  '  ont  eu  recours 
au  même  moien  pour  1  exécution  de  leurs  projets. 
Non  contens  des  manuscrits  publics  qu'avoient 
laissés  ceux  qui  avoient  écrit  avant  eux,  ils  s'adres- 
soient  encore  aux  Savans  leurs  contemporains 
pour  en  tirer  des  mémoires  instructifs.  C'est  ce 

S  n'entre  plusieurs  autres  S.  Severe  Sulpice,  cet 
[istorien  si  agréable,  et  le  célèbre  Tacite  long-tems 
avant  lui,  ont  mis  en  usage  avec  un  heureux 
succès. 

A  leur  exemple  nous  osons  suplier  les  Savans 
de  nos  jours  et  les  autres  personnes  studieuses, 
qui  tous  sans  doute  s'intéressent  à  la  gloire  de  la 
patrie,  de  vouloir  bien  nous  aider  de  leurs  lumiè- 
res et  de  leurs  richesses.  Il  est  moralement  im- 
possible  d'écrire  avec   exactitude    l'histoire  des 


ïM  I  1. 7.  ep.  33. 


PRÉFACE.  xxvix 

Grands  Hommes  de  lelres  du  XVI l  siècle  et  du 
suivant,  sans  le  sceoui*s  que  nous  atendons  de 
leur  zcle  et  de  leur  politesse. 

Nous  avons,  il  est  vrai,  de  grandes  ressources  dans 
les  Journaux  des  Savans ,  et  les  autres  ouvi-ages  He 
cette  nature.  Mais  il  s'en  faut  de  beaucoup  qu'ils  nous 
fournissent  tout  ce  qui  est  nécessaire  pour  remplir 
nôtre  dessein.  Outre  qu'ils  ne  remontent  pas  même 
jusqu'au  milieu  du  XVII  siècle,  et  que  le  plus  sou- 
vent on  n'y  trouve  rien  sur  l'histoire  de  la  vie  des 
Auteurs,  dont  ils  annoncent  les  écrits,  combien  en 
laissent-ils  dont  ils  ne  jugent  pas  à  propos  de  parler? 
Combien  de  faits  lileraires  passt»nl-ils  sous  silence, 
parce  qu'ils  ne  sont  pas  de  leur  dessein,  et  qui  trou- 
veroient  une  heureuse  place  dans  le  nôtre?  Combien 
par  conséquent  pourroit-on  nous  aprendre  d'anec- 
dotes sur  une  si  riche  matière?  Combien  de  parti- 
cularités louchant  la  personne  des  Auteurs,  et  le 
sort  de  leurs  ouvrages,  dont  les  Journaux  ne  rendent 
ordinairement  compte  que  lorsqu'ils  commencent 
à  paroitre  dans  le  public?  Touchant  la  personne  des 
Auteurs,  conmie  leurs  noms  au'on  ne  fait  pas  tou- 
jours connoilre,  leur  patrie  ,  leur  famille,  le  jour, 
l'an  de  leur  naissance  et  de  leur  mort,  leurs  emplois, 
leurs  liaisons  avec  les  autres  Savans,  en  un  mot,  leurs 
actions  les  plus  mémorables. 

La  grâce  que  nous  demandons  en  général  à  toutes 
les  pei*sonnes  studieuses,  nous  l'atendons  en  particu- 
lier des  divers  Ordres  Religieux  du  Roïaume.  Pres- 
que tous  ont  déjà  des  bibliothèques  de  leurs  Auteurs, 
où  il  y  a  beaucoup  de  richesses  à  puiser.  Il  ne  s'agi- 
roit  que  de  nous  faire  connoître  les  autres  Ecri- 
vains qu'ils  ont  donnés  à  la  République  des  Letres, 
depuis  l'époque  de  la  publication  de  ces  mêmes  bi- 
bliothèques. Le  service  qu'ils  voudront  bien  nous 
rendre  en  cette  ocasion,  tournera  autant  à  leur  pro- 


Hx  PRÉFACE. 

pre  honneur,  qu'il  contribuera  à  la  perfection  de 
nôtre  Histoire.  On  pourra  s'adresser  à  un  des  Li- 
braires dont  on  lit  les  noms  au  frontispice  de  cet  ou- 
vrage. 

Quant  à  la  reconnoissance  que  nous  tâcherons  de 
leur  marquer  pour  le  plaisir  que  nous  espérons  de 
leur  zélé  et  de  leur  générosité,  ils  peuvent  s'en  assu- 
rer d'avance .  Le  témoignage  que  nous  en  donnons 
ici  à  ceux  qui  ont  déjà  eu  la  bonté  de  nous  fournir 
quelques  mémoires,  leur  sera  un  gage  de  celle  que 
nous  nous  ferons  un  devoir  de  leur  témoigner.  A 
Dieu  ne  plaise  que  nous  aïons  le  malheur  de  tomber 
piin.iiist.  1.1.1)8.  '  dans  le  crime  qu'un  Auteur  Païen  reprend  dans 
ces  Ecrivains,  qui  aiment  mieux  s'exposer  à  la 
honte  de  se  voir  surpris  à  se  parei*  des  découvertes 
des  autres,  que  de  leur  rendre  la  justice  qui  leur  est 
due,  en  avouant  les  tenir  d'eux.  Rien  n'aproche  da- 
vantage du  charactcre  d'un  cœur  ingi'at  et  d'un  mau- 
vais génie  :  obnoxii profecto  animi  etinfelicis  in- 
genii  est. 

Nous  nous  faisons  au  contraire  un  vrai  mérite  de 
découvrir  les  sources  où  nous  avons  puisé,  et  de  faire 
connoître  tous  ceux  dont  nous  avons  tiré  quelques 
secours.  C'est  ce  qu'il  est  aisé  d'observer  par  le  nom- 
bre presque  infini  de  (citations  dont  les  marges  de 
nôtre  ouvrage  sont  chargées,  par  raport  aux  monu- 
mens  imprimés  dont  nous  nous  sommes  servis.  Les 
mémoires  manuscrits  mêmes,  qu'on  a  eu  la  chai'ita- 
ble  complaisance  de  nous  communiquer,  n'y  sont 
pas  non  plus  oubliés.  Ce  sont  ceux-là  que  nous  ci- 
tons sous  le  titre  de  Mss. 

Déjà  plusieurs  personnes  distinguées  par  leurs  lu- 
mières et  leur  mérite,  aïant  apris  le  dessein  qui  nous 
ocupe,  ont  eu  la  bonté  de  nous  fournir  de  cette  sorte 
de  mémoires.  Que  ne  pouvons-nous  pour  leur  mar- 
quer nôtre  juste  reconnoissance,  faire  quelque  chose 


PRÉFACE.  xxxi 

plus  digne  d'eux,  ({uc  d'annoncer  au  public  ce  que 
nous  tenons  de  leur  politesse  et  de  leur  travaill 

C'est  dans  cette  \  uë  que  nous  nommons  ici  sans 
d'autres  élog(*s,  l)om  Matthieu  Petitdidier,  Abbé  de 
Senones,  mort  Evè(|ue  de  Macra  le  i  4'  de  Juin  1 728  ; 
M'.  l'Abbé  Gill>on,  Doïen  de  la  Faculté  de  théologie 
de  i*oitiers;  .M'.  l'AblM*  Galliot,  Docteur  en  théolo- 
gie ,  (Jianoinc  Théologal  de  TEglise  Cathédrale 
d'Angoûlème  ;  M'.  l'Abbé  de  Vawnne,  Chanoine 
Archidiacre  de  l'Eglise  Cathédrale  de  Saintes  ;  M'. 
l'Abbé  Racine,  Chanoine  de  l'Eglise'  Cathédrale  de  la 
Rochelle;  M'.  rAbl)é  Ronianet,  Chanoine  Theolo- 
asA  de  l'I'^^lise  collégiale  de  S.  Martial  à  Limoges  ;  M'. 
PAbl)é  Tronchay,  Chanoine  de  l'Kglise  collégiale  de 
S.  Michel  à  Laval  ;  M' .  (lirard  d'Orléans,  (^onfi-ei-e 
de  I  Oratoire;  Le  R.  P.  Dom Guillaume  DurantI,  Re- 
ligieux reformé  de  l'Oi'di'e  de  Cluni  ;  le  R.  P.  Simon 
de  la  Vierge,  Religieux  de  l'Onlre  des  Carnu^  en  la 
maison  des  liilletcs  à  Paris,  mort  depuis  quel(|U(^ 
années;  M'.  Ma}aud,  Docteur  et  Pi-ofesseur  de  Drait 
à  Poitiers. 

Après  avoir  rendu  compte  des  secours  (iuejus<iu'ici 
nous  avons  tirés  des  étrangers,  il  est  del  ordre  et  de 
lajusUcede  fain*  connoitre  ceux  que  nous  ont  prêté 
nos  propii»s  Confrères. 

Le  pi*emier  et  principal,  nous  le  devons  aux  veilles 
de  Dom  Guillaume  Rouss<^>l,  cet  Ecrivain  si  poli,  dont 
le  public  a  reçu  avec  aplaudissement  la,  traduction 
Françoise  des  letres  de  S.  Jérôme ,  qu'il  lui  donna 
en  1704  et  1707,  Il  avoit  entrepris  le  même  dessein 
(|ue  nous  tâchons  d'exécuter,  et  que  nous  avions  con- 
çu presciue  en  même  tems  (|ue  lui,  sans  savoir  qu'il  y 
pensât  réellement.  Déjà  il  avoit  disposé  des  matériaux 
considérables  |>our  mettre  la  main  à  l'œuvre,  lorsque 
nos  Supérieurs  le  chargèrent  de  travailler  à  l'histoire 
de  nôtre  Congrégation.  Mais  à  peine  en  avoit-il  tracé 


xxxij  PREFACE. 

le  plan,  qu'une  mort  prématurée,  qui  l'ôta  du  monde 
le  5  d'Octobre  1717,  fit  échouer  ce  projet  dès  sa 
naissance  ,  et  trancha  le  cours  de  l'autre.  Il  laissa 
plusieurs  portefeuilles  de  mémoires  sur  l'Histoire 
Literaire  de  la  France,  que  nous  tenons  de  la  poli- 
tesse et  générosité  de  Dom  Salomon  Patailler  son 
proche  parent,  qui  en  étoit  dépositaire.  Dom  Roussel 
n'avoit  encore  travaillé  que  sur  les  derniers  siècles 
aïant  aparemment  commencé  par  ceux-là,  parce 
qu'ils  présentent  une  moisson  plus  abondante.  11  avoit 
toutefois  dessein  de  reprendre  les  choses  de  source, 
et  de  remonter  au  moins  jusqu'à  S.  Irenée,  dont 
nous  avons  trouvé  l'histoire  ébauchée  parmi  ses  pa- 
piers. 

Nous  avons  eu  d'autres  mémoires  considérables, 
que  Dom  François  Mery,  Bibliothécaire  de  N.-D.  de 
Bonne-Nouvelle  à  Orléans,  avoit  préparés  pour  for- 
mer une  bibliothèque  des  Ecrivains  du  Berri  sa  pa- 
trie. 11  avoit  déjà  presque  épuisé  ce  que  les  derniers 
siècles  fournissent  sur  ce  sujets  sans  être  néanmoins 
remonté  plus  haut  que  le  XV  siècle,  lorsque  les  mou- 
vemens  qu'il  se  donna  et  le  travail  qu'il  prit  trop 
ardemment  pour  pousser  l'exécution  de  son  des- 
sein, abrégèrent  ses  jours  et  lui  ôterent  la  vie 
au  mois  d'Octobre  1723.  Nous  sommes  redeva- 
bles de  ces  mémoires  à  la  libéralité  prévenante 
du  R.  P.  Dom  François  Bridon,  alors  Prieur  de 
Bonne  -  Nouvelle  et  aujourd'hui  de  Molême  en 
Bourgogne. 

Dom  François  Chazal,  mort  le  13  de  Décem- 
bre 1729,  nous  a  donné  plusieurs  connoissances, 
et  communiqué  diverses  découvertes  sur  les  Sa- 
vans  que  l'Abbaïe  de  Fleuri,  ou  S.  Benoit  sur 
Loire,  dont  il  a  été  Prieur  et  écrit  l'histoire  qui 
meriteroit  de  voir  le  jour,  a  formés  en  tous  les 
siècles. 


PRÉFACE.  xixiij 

LeR.  P.  Dom  Charles  Conrade,  ci-devant  Prieur 
de  S.  Germain  des  Prés  à  Paris,  aujourd'hui  Abbé 
de  S.  Suipice  de  Bourges,  nous  a  fait  aussi  le  plaisir 
de  nous  envoïerde  Rome,  où  il  rcniplissoil  alors  l'of- 
fice de  Procureur  Généi-al  de  la  Congrégation  en  cette 
Cour,  divers  mémoires  sur  quel(|ues  Ecrivains  Fran- 
çois. Il  a  fait  davantage.  Il  engagea  encore  le  R.  P. 
Dom  Pierre  Maloet  alors  son  compagnon,  depuis  son 
successeur,  et  aujourd'hui  Prieur  de  S.  Rémi  de 
Reims,  à  nous  recueillir  dans  les  premières  bibliothè- 
ques de  Rome  les  éditions  les  plus  rares  des  Auteurs, 
dont  nous  parlons  dans  les  deux  nremiers  volumes  de 
nôtre  Histoire.  C'est  ce  que  celui-ci  a  pris  la  peine 
d'exécuter  avec  autant  de  bonté  que  d  exactitude. 
Divers  autres  de  nos  Confrères  ont  eu  aussi  la  com- 
plaisance de  nous  dresser  quelques  mémoires. 

Dom  Maurice  Poucet  en  particulier,  aïant  bien  vou- 
lu dès  1723  s'associer  avec  nous  |>our  l'exécution  de 
nôtre  dessein,  en  a  partagé  le  travail ,  autant  que  les 
différentes  situations  où  la  provipence  l'a  mis  ont  pu 
le  lui  permettre,  jus<urau  commencement  de  cette 
année  1732.  11  est  fâcheux  que  sa  santé  l'ait  aban- 
donné au  l)esoin,  et  l'ait  obligé  d'interrompre  ses  uti- 
les recherches. 

Dom  Jean  Colomb,  qui  dès  1727  est  entré  dans  la 
même  carrière ,  y  marche  d'un  pas  ferme,  sans  que 
rien  soit  capable  de  rallentir  son  zélé  et  son  aplica- 
tion. 

FIN  de  la  Préface. 


3  * 


xxxiv 


TABLE 


DE  CE  QUI  EST  CONTENU  DANS  CETTE  PREMIERE  PARTIE 
DU    TOME    PREMIER. 

PREFACE  générale.  page  ; 

Table  des  cilalions,  et  des  éditions  dont  on  s'est  servi.  xxxviii 

Siècles  qui  ont  précédé  la  Naissance  de  J.-C. 

Etat  des  letres  dans  les  Gaules  durant  ces  tems-là.  \ 

Pytheas,  Philosophe,  Astronome  et  Géographe.  71 

Euthymenes,  Géographe  et  Historien.  78 

Eratosthenes ,  Philosophe  et  Historien.  80 

Lucius  Plotius,  Rhéteur.  83 

Marcus  Ântonius  Gniphon,  Grammairien  et  Rhéteur.  85 

Valcrius  Cato ,   Poète  et  Grammairien.  88 

0.  Roscius,  Comédien.  92 

Divitiac,  Philosophe.  95 

G.  Valerius  Procillus,  Favori  et  Ambassadeur  de  César.  97 

Telon  et  Gyarée ,  Astronomes  et  Mathématiciens.  99 

Cornélius  Gallus,  Poëtc.  101 

Publius  Tcrentius  Varro ,  Poète  et  Historien.  iQg 

Trogus  Pompeïus,  Historien.  II4 
Premier  siècle  de  l'Eglise.  Etat  des  lelres  dans  les  Gaules  en  ce  siècle.    125 

Vibius  Gailus ,  Orateur.  I45 

Oscus,  Orateur.  I47 

Agrotas,  Orateur;  et  Pacatus,   Rhéteur.  149 

Castor,   Rhéteur.  150 

Germanicus  César.  152 

Votienus  Montanus,  Orateur.  158 

Julius  Montanus ,  Poète.  IgO 

Julius  Grxcinus ,  Philosophe.  163 

Claude,  Empereur.  166 

Julius  Florus,  Orateur.  I75 

Clodius  Quirinalis,  Rhéteur.  178 

Ursulus  ou  Surculus ,  Rhéteur.  I79 

Domitius  Afer,  Orateur.  18t 

Pétrone,  Poète.  186 

Dcmosthcne ,  Médecin.  208 

Crinas ,  Médecin.  210 

Charmis ,  Médecin.  211 

.i^bucius  Libcralis,  Philosophe.  213 

(iabinien ,  Rhéteur.  2\\ 

Julius  Secundus,  Orateur.  2IU 

Marcus  Aper,  Orateur.  218 


XXXV 

Antonius  l*rimuft ,  Poète.  ->.>3 

Sairius  Rafus,  Orateur,  et  Artaniu ,  JuriM.-oiMolte.  217* 

Agricole ,  Gouverneur  de  la  gnade  Bretagne.  219  * 
Second  siôrle  de  l'Eglise.  Etat  des  letrw  dana  ka  Gaules  eu  ce  itiéclc.       223  * 

Paulin ,  Sénateur.  Hâ 

tieininius ,  Homme  de  ielre*.  247 

Ruflo ,  Orateur.  249 

A  Lançante,  Médecin.  230 

Saivioti  Liberalis,   Orateur.  251 

Scnlius  AuRurinus  ,  fw-ir.  252 

Luciuit  Annxus  Julius  FlorUiS ,   Historien  cl  IHxHv.  255 

Karorin  ,  Historien .  Philosophe  et  Oratoor.  3(i5 

MenecFite,  Jurisconsulte.  276 

Tile  Antonin  ,  Empereur.  277 

rraoioo,  OralMir.  282 

CbanMlma  et  Zenothemis,  Jwiaooaaallta.  287 

Les  prcmieM  Martyrs  de  Lyon.  388 

Lea  Bcliaaa  de  Lyoo  al  de  Vienne.  290 
rUMie,  AatMrdeaadeadaa  88.  Andocfae  et  ses  liompafpMNW,  Martyrs.       294 

I  GmcU*  de  Lyon.  29S 
TMiaUaa  aiéde  de  l'BRlise.  But  des  ktrvs  dans  1rs  Uaoles  en  t»  sk-de.     2i» 

S.  IrcD^lveaqne  de  Lyon,  Docteur  de  l'Eglise  et  Martyr.  321 

Antonin  OarMalla,  Bmpcreor.  353 

Gains,  Bvesqae  des  nations,  et  Oocteor  de  l'Eglise.  356 

S.  Hipolytr.  Bvéqne,  Doctow  da  llgUae  et  Martyr.  361 

Titien,  (ieograpbe,  Oniav  al  Hkttmr.  401 

PMaUa,  IviafM  de  Lfo*.  405 

9.  Martial,  ptcider  iTca^w  de  UaMfii.  406 

Satomin,  Tyran  sons  Probe.  408 

Gams,  Bmperw.  411 

Nnmerien,  Eopermr.  413 

S.  Eugène,  Martyr.  41S 

Glande  Mancrtio,  Oratcnr.  417 

S.  Grnôs,  Martyr  k  Arles.  423 


C  IJ 


XXXVJ 


AVERTISSEMENT 

SUR     LA    TABLE    SUIVANTE    ET    SUR    LES    CITATIONS 


DU   LIVRE. 


DANS  l'obligation  que  nous  nous  sommes  imposée  de  marquer  avec  le  plus 
d'exnctitude  qu'il  scroit  possible,  d'où  est  tiré  ce  que  nous  reportons  dans 
nôtre  ouvrage,  nous  nous  sommes  trouvés  engagés  à  charger  les  marges  d'un 
grand  nombre  de  citations.  Ainsi  il  a  fallu  les  faire  fort  abrégées,  et  par  con- 
séquent un  peu  obscures.  Afin  donc  qu'on  lespuisse  entendre  sans  difficulté,  nous 
mettons  au  commencement  de  chaque  tome  une  table  de  toutes  les  citations  qui  y 
sont  emplo'iées.  Nous  y  spécifions  même  les  éditions,  dont  nous  novs  sommes  ser- 
vis, afin  que  ceux  qui  les  auront,  puissent  aisément  trouver  ce  qu'ils  cherchent 
par  les  pages  ajoutées  aux  citations.  On  ne  met  point  dans  cette  table  les  cita- 
tions de  l'Ecriture  Sainte,  parce  que,  lorsqu'on  la  cite,  on  le  fait  de  la  manière 
ordinaire  et  connue  de  tout  le  monde. 

Quand,  après  avoir  cité  un  Auteur  à  la  marge  du  Livre,  on  a  besoin  d'en 
citer  quelque  autre  endroit,  on  se  contente  de  marquer  dans  la  seconde  citation 
ce  qu'elle  a  de  différent  de  la  première  sans  répéter  le  nom  de  l'Auteur,  à  moins 
qu'il  n'y  ait  un  autre  Auteur  cité  entre  les  deux.  Dans  ce  cas  on  répète  la  cita- 
tion tout  entière.  Par  exemple,  après  avoir  mis  à  une  citation  Tac.  an.  1.  8. 
n.  3.  Si  l'on  a  besoin  de  citer  ensuite  le  livre  troisième  et  le  nombre  quatre,  on 
mettra  seulement  1.  3.  n.  4.  Si  c'est  quelque  autre  ouvrage  du  même  Auteur, 
comme  ou  son  histoire,  ou  la  vie  d'Agricola,  on  mettra,  hist.  1.  1,  n.  1.  ou, 
vit.  Agr.  n.  l.  et  ainsi  des  autres.  Mais  si  entre  ces  citations  du  même  Auteur, 
on  est  obligé  d^en  citer  un  autre,  alors  on  répète.  Tac.  hist.  1.  1.  ou.  Tac.  vit. 
Agr.  Quand  nous  citons  plusieurs  bibliothèques  de  suite,  ce  qui  arrive  lorsque 
nous  faisons  le  dénombrement  des  éditions  d'un  Auteur,  nous  marquons  dans  la 
première  citation  Bib.  et  aux  suivantes  nous  substituoris  quelques  points  à  ce  mot 
pour  éviter  la  répétition.  Par  exemple  après  avoir  cité  la  bibliothèque  du  Car- 
dinal Barberin  en  cette  sorte,  Bib.   Barb.  l.  1.  p.   25.  et  que  l'on  cite  celles  de 

M',  le  Tellier,  de  M'.  Baluse,  etc.  on  le  fait  ainsi Tel.  p.  20 Ba). 

t.  1.  p.  30.  etc. 

Quand  nous  citons  plusieurs  Auteurs,  ou  plusieurs  endroits  d'un  même  Au- 
teur sur  un  même  lieu,  nous  le  distinguons  par  une  barre  |  . 

Chaque  citation  tommence  à  l'endroit  oit  l'on  trouve  marqué  ou  un  petit  trait, 
ou  une  letre  de  l'alphabet. 
Nous  citons  en  latin  les  ouvrages  latins,  et  en  français  les  ouvrages  français. 
Le  p.  marque  indifféremment  les  pages,  les  feuillets,  ou  les  colonnes  qui  ont 
leur  chiffre  particulier. 


AVERTISSEMENT.  XXXYlj 

1 .  MM  mprtê  U  ekiffr*  de  la  f§t,  t$t  fO*r  l«  pnmiirt  eatoMM  M*  i«  reeto  àm 
ftvilUu  ;  et  t.  tm  pour  1$  reno,  <w  pour  la  MraiM(<  eoUm$u  4ê  Im  fcg*. 
app.  Ml  emploie  pour  ippeDdix,  lortqu'U  *$t  précédé  tu»  nom  d^ Auteur. 
c.  devait  Ut  page  marqu»  e«  le  Aapîtrt  ou  FartieU. 
1.  lignifie  le  Hvre,  hormis  dan$  le$  eitoHonê  de»  Cadet,  où  il  marque  la  loi. 
m.  «f  pour  atarqmtr  Ut  divtrt  nomkret  om  nwmtrot  de»  livrt*  ou  du  pagtt. 

pr.  tigni/U  préface,  pnU§omémn,  o»  aoartittewtent  qui  «onI  A  la  tite  det 


L  — rfm  If  IMM  0»  U  partit  dt  Couvrage  cité,  kormit  dont  Ut  Codtt,  oi  il 
tàgaàflt  Ût  Htrm  fid  part»$mt  Ut  Horet.  Ib.  ou  ibid.  yowr  ibidem  tignifU,  qumd 
il  ut  ttml,  fM  la  HtiMam  prdeddtmte  ut  encore  pour  ut  endroit. 

ÊSH^mtn  Iw  akàffrUt  mit  dm  ckapilru,  mit  du  pagu,  eu.,  U  u  rencontre 
«MyaMf  Ugm,  par  MWiyli  t.  i-S.  p.  3-10.  er<«  ei§aifU  que  et  que  l'on  rs- 
porté  ut  trait»  dont  tam  lu  ihapitru  f«i  tomt  dtpmit  U  prtmiir  jutgu'ma  c«»- 
f«*<M«,  et  daeit  tamtu  lu  y^fM  dtfmi»  i»  tnitiëmt  /<Mf«'A  la  iixiémt. 


I 


XXXVllJ 


TABLE 


DES  CITATIONS  CONTENUES  EN  CE  PREMIER  TOME 

AVKC  F-ES  ÉDITIONS  DONT  ON   s'eST  SERVI. 
A 

Aci.  lari.  »  OTA  primoruni  Mapivruin  sincera  et  sclecta ,  à  1).  Theodorico  Rui- 

A.    nart.  Parisiis,  im.  4-. 
A(io,chr.an.4ti.     Adonis  Viennensis  Archiepiscopi  breviarium  chronicorum  adannum  Hi 
et  sic  de  caileris,  in  bii)liotheca  Patrum,  tom.  16.  Lugduni,  1677.  loi. 
.*gi.  I.  4.  c.  II.      Pauli  iEgineta;  de  re  niedica  lib.  -i.  cap.  H.  et  sic  de  cieleris,  inler  raedi- 

cœ  artis  principes,  etc.  t.  i.  parle  i.  Paris,  1567.  fol. 
A8i.  I.  7.  Aijlii  Medici  gneci  coniracU»-  ex   vctcribus  medicinœ  lib.  7.   Lugduni , 

loti),  fol. 
Agob.  app.  Appendix  ad  opéra  S.  Agolwrdi  Archiepiscopi  Lugduneiisis.  Paris.  1666. 

8°. 
\nib.  S.  Ainl)rosii  Mediolancnsis  Episcopi  Opéra  in.  ±  tom.  distincta.  Parisiis, 

1680  et  1690.  fol.  Sic  autcm  ciUintur  : 
deAbr.  de  Abraham,  tom.  i. 

act.  Aq.  acta  concilii  Aquilcïœ,  tom.  2. 

«dm.  admonilionos  variai  in  fronte  uniuscujusquc  Iractatûs. 

apo.  Dav,  apologia  David,  t.  i. 

app.  appendix  ad  caiccm  Uim.  2. 

in  Au<c.  in  Auxenlium,  t.  2. 

,io  iwn.  de  bcnediclionibus  Pàtriarcharura,  t.  i. 

de  bon.  moi.  dc  bono  mortis,  t.  I. 

Je  cain.  dc  Gain  et  Aboi,  t.  i. 

(le  Elia.  dC  Ëlia,   t.   U 

op.  I.  cpistola  I,  et  sic  dc  ca'tcris,  I.  2. 

cxli.  Virjt.  cxhortjjlio  virgiiiitalis,  t.  2. 

«le  nu.  1. 1.  de  fide  lil).  i.  cl  sic  dc  cet.  t.  2. 

defug.  de  fuga  Sxculi,  t.  i. 

hcx.  1. 1.  hexacmerum,  lib.  i.  et  sic  dc  c>ct.  t.  2. 

hymn.  hynini,  t.  2. 

(loJac.  dc  Jacob  et  vita  bcata,  t.  i. 

du  Inc.  de  incarnatione,  t.  2. 

inst.  Virg.  instituUo  Virginis,  t.  2. 

de  Job.  de  intcrpellatione  Job  et  David,  t.  i. 

doJos.  de  Jose|)h  Patriarcha,  t.  i. 

(le  Isa.  de  Isaac  et  anima,  t.  i. 

Up.  Virg.  de  lapsu  Virginis  consccratic,  t.  2. 

in  Luc.  cxpositio  Evangelii  secundum  Luami,  t.  i. 

demyst.  dc  mysteriis,  t.  2. 


tkKab. 

•I«  ob.  Th. 

•le  ob.  Val. 

J«  oir.  1. 1. 

4>PM. 

4*piN. 

F- 

1.P..I. 

d*r.-s. 

4*8^ 

Sir.  1. 

•b  Sp.  >•  *• 

4*Tob. 

éê\ii. 

et  Vir*.  1. 

Vil. 

A«.  cril.  1.  1. 

TABLE   DES   CITATIONS.  xxxix 

deNabuiho,  t.  (. 

de  obilu  Tlieodosii,  1.  i. 

do  obitu  Yalentiniani,  I.  3. 

de  offidis  lib.  I .  cl  sic  de  («t.  1. 2. 

de  paradiso,  t.  1. 

de  iKenitenlia,  t.  i. 

pnrfalioiie^tomi  t.  et  2. 

in  pulmuin  i,  et  sic  de  cMcris.  1. 1. 

de  rcsumxliooe.  l.  i. 

de  exceua  fintris  wi  Saiyh,  i.  i. 

Sem»  1.  ia  pnliDuiu  i  18,  et  sic  de  cal.  1. 1. 

de  Spiritn  SÛtdo  lib.  f .  ri  sic  de  nrt.  loni.  i. 

deTobia,  tom.  1. 

de  Viduis,  (.  t. 

de  VIrginibas  lib.  1.  e(  sic  de  art.  obi  vero  I.  non  addiior,  est  de  Virgi- 

niiate,  t.  i. 
Viu  per  I^aalmoni  ad  calcen  I.  S. 
Les  Aménités  de  la  chliqne,  ou  dissertalioas  et  ranarquos  nouvelles  sur 
divers  points  di-  ranli«|uilé,  tom.  I.  ii*.  A  Paris,  i717. 
*  '■  '^-  Aromiani  Marcellini  rcrum  gestanim  lib.  15.  et  sic  de  ca-l.  Parisiis,  1081. 

fol. 
M.  BOl«  ab  Adriaoo  Vaketio  in  etundem  colleclc. 

■  ft.  Ad  Locium  Am|idinm  pri'blio  Salroasii ,  e\  edilione  Amstelod.  1G74.  4*. 

\a>h.  lop.  Bri.        Vah  ni  Andréa-  lopoin^pliia  iklgua  m  froiilc   btbliotheca-   Delgicc  ejnsd. 

Aoci.  Lovanii.  l(iU.  4*. 
AM»i.  fur.  Josephi  Antelmi  de  iniliis  eccksia:  Forajuliciuis  diaserlatio ,  etc.  Aquis 

Scktiis,  1680.  4*. 
*»»f.lm.  de  veris  operibas  SS.  Patram,  Leoai»  Magii  et  Prosperi  Aquil.  disser- 

tatione5  crilicx,  etc.  Parisiis,  1(M9.  4'. 
)b  Sya.  de  Sjrmbok)  Alhanasuiio  nova  disquimlio.  i>ansiiK,  Hi'.Ki. 

AMi-Bail.  1. 1.        Aoti-fiâilU'l,  OU  critique  du  livre  de  M'.  Bailiel  intitulé  Jugemcns  des  Sa* 

TIM.  PirM.  Ménage,  I.  i.  A  h  Haye,  1600.  if. 
AaiMi.  .Vntidolon  contra  dirersas  omnium  fprr  svcalomm  harcses.  Basile.1-,  1528. 

fol. 
Apoi.  arf.  e.  4.       Scholia  vetu-sta   in  A|iollonii   Hhodii  argonauticon  lib.  4.  I*arisiis,    1574. 

Scb.  fol. 

Apo.  iIm  PP.  I.  I.  Apologie  poar  les  S6.  Percs  de  FEgiise  Déienseors  de  la  grâce  de  J.  G.  11- 
r.  I.  vre  1,  ou  partie  praniere,  eh.  on  article  1  ;  ainsi  des  auircs.  \  Paris, 

4651.  4*. 
Apfi.  bib.  PP.  1. 1.  Appantu  ad  bibliothecam  maximnm   TCtemm  Patram ,  Aurlore  D.  Ni- 

colM  le  Noarrv,  t.  I.  et  sic  de  i.  l>arisiis,  1TU3.  et  1715.  fol. 
App.  bal.  Cal.        Appiani  Alexandrin!  de  bellis  GalUcis  cpitome,  inter  ejusdem  opéra.  .\m- 

sielod.  1670.  K-. 
Arrb.  pit.  fa(.  t.  L'abbé  Archimbaud ,  recueil  de  pièces  fugitives  d'histoire  et  de  literatu- 

4-  re,  tome  i.  A  Paris,  1717.  H" 

An.  ia  pa.  ST.        Amobii  Junioris  commentarius  in  Psalmum  37,  et  sic  de  raieris,  in  bi- 
bliotheca  Pairum,  I.  8.  Lugduni,  Ifn7.  fol. 
■^••1.  condictus  de  Dro  trino,  etc.  ibid. 


xl  TABLE 

not.  note  Feuardentii  in  eumdem,  ibid. 

pr.  prafatio,  seu  prologus  in  fronte  ejusdem  operis. 

Ath.  S.  Athanasii  Archiepiscopi  Alexandrini  opéra.  Parisiis,  1698.  3.  vol.  fol. 

Sic  autem  citantur  : 

apo.  in.  Ar.  apologia  contra  Arianos . 

apo.  adConst.       apologia  ad  Constantium  Imperatorem. 

apo.  fug.  apologia  de  fuga  sua. 

ep.  ad.  Ep.  /Eg.      epistola  ad  Episcopos  ^Egypti  et  Liby». 

ep.  ad.  mon.         epistola  ad  Monachos  de  historia  Arianorum. 

deSyn.  de  Synodis. 

Aih.  (ieip.  I.  2.       Athensei  deipnosophistarum  lib.  2.  Lngduni,  1657.  fol. 
Auct.  ant.  lat.         Auctores  antiqui  iinguae  latins,  ut  Nonius,  Marcelius,  etc.  l.o95.  fol. 
Aug.  s.  Aurelii   Augustini  Hipponensis  Episcopi  opéra.  Parisiis,  1679-1700. 

fol.  Sic  autem  citantur  : 

app.  varise  appendices. 

de  ciT.  de  Civitate  Dei,  tom.  7. 

conf.  1. 1.  Confessionum  lib.  i.  et  sic  de  csteris,  t.  i. 

coDj. ad.  de  conjugiis  adulterinis,  tom.  6. 

Cons.  Er.  de  Consensu  Evangel.  tom.  3. 

inCres.  contra  Cresconium,  tom.  9. 

de  cnr.  mor.  de  cura  gcrenda  pro  mortuis,  tom.  6. 

doct.  cbr.  de  doctrina  Christiana,  tom.  3. 

encb.  enchiridion  de  fide,  t.  6. 

ep.  n.  epistola  â5 ,  et  sic  de  cxteris,  t.  2. 

gest.  Pei.  de  gestis  Pelagii,  t.  10. 

de  gr.  Cbr.  de  gratia  Christi,  t.  10. 

hier.  41.  de  tiseresibus,  hxresi  il.  t.  8. 

in  Jai.  in  Julianum,  t.  10. 

denat.  etgr.         de  natura  et  gratia  contra  Pelagium,  t.  10. 

op.  im.  opus  imperfectnm  contra  Jalianam,  t.  10. 

in  Par.  contDi  Parmeniannm,  t.  9. 

in  3.  ep.  Pel.         coHtra  duas  epistolas  Pelagianorum,  1. 10. 

retr.  retractationum  lib.  t.  1. 

ser.  Sermones,  t.  5. 

«npp.  Supplementum,  ibid. 

de  Trin.  de  Trinitate,  t.  8. 

Vil.  Vita  per  Possidium,  t.  10.  in  fine  appendicis. 

Avit.  ep.  4.  S.  Alcimi  Avili  Viennensis  Episcopi  epistola  4.  et  sic  de  cjeteris,  inter 

opéra  varia  Jacobi  Sirraondi  S.  J.  t.  2.  Parisiis,  169$.  fd. 

rog.  bomilia  de  rogationibus,  ibid. 

Anm.  Tradition  de  l'Eglise  sur  l'aumône  Chrétienne  et  ecclésiastique.  A*  Paris, 

1631. 
Anr.  Vie.  c«i.       Scx.  Aurelii  Victoris  de  Cssaribus  inter  ejusdem  opéra.  Paris.  1681.  4*. 

epit.  epitome,  ibid. 

Am.  D.  Magni  Ausonii  Burdigalensis  opéra.  Amstelodami,  1671.  8». 

Ubi  vero  F.  additur,  agitur  de  editione  ultima  a  D.  Juliano  Floride,  et 
D.  Johanne  Bapt.  Souchay  adornaU,  Parisiis,  1730.  4.  Sic  autem  ci- 
tator  : 

dissertatio 


DES   CITATIONS.  xlj 


I 


diss«rtatio  Editons. 

Cm.  de  Cxsanbus. 

MM.  gratiarum  aclio  pro  Consulata. 

•deg.  eclofrjrium . 

•dyt.  I.  edylliuin  i ,  et  sic  de  caeleru». 

•Pl  I.  episiuU  I,  et  sic  de  caeteris. 

«fh*.  ephemem. 

•pi.  I.  epigraoiina  i ,  et  sic  de  oMm. 

■fie.  epiccdiuiu  10  patrem. 

hM*.  heroum  epilapbia. 

•M.  mosella ,  seu  edylliuiB  10. 

fu.  c.  I.  parentalia,  carœeii,  seu  cap.  t.  et  sic  de  cxieris. 

pr.  pnebtiooes  varie. 

rro(.  c  I.  Comineinoralk)  Professorum  Bordigalensium,  c.  i.  et  se  de  ccteris. 

prou.  pratrefMkoo  ad  ocpolcn. 

Uf.  ladns  se^tm  Sapientam. 

«k.  ordo  DOlitliuiu  urhiam. 


B 

»M.m-f^  iM-  Adnen   Baillet.  Jogeimnt   des  Savu»,  Poètes  latins,  tome  6.  A  Paris, 
4BMtt.  ^f'. 

P(4i.  deapr^iagémaaioinel.  A  iMiis,  168S.  1«>. 

sa.  AoéL  SB*  }ov  d'Aoèl,  et  au»!  de»  autres,  dan»  les  nés  des  Saints.  A  Paris, 

17(M.M. 

ta.  i«a.  1.f  joar  de  Janvier,  ainsi  àa  antres. 

•a.  Jaii.  iS*  jour  de  Juillet,  ainsi  des  autres. 

u.  Jaia  H'  jour  de  Juin,  ain.si  des  antrea. 

sa.  Mai.  j9*  jour  de  )(ai,  ainM  des  autrea. 

n.  Hmn.  f^*  jo«r  de  Mars,  ain.si  des  autres. 

16.  Nov.  18*  jour  de  Novembre,  ainsi  des  antres. 

tÈ.  Uf.  •if  jour  de  Septembre,  ainsi  des  aMna. 

Mb.ott.  Table  critique  à  U  tète  de  cbaqne  mois. 

Bal.  coM.  Stephani  Raluzii  nova  cullcctio  Conciliorum.  Parisiis,  1683.  M. 

■Uc.  1. 1.  miscelbneoruii)  loin.  1.  t-l  sic  de  t5Pleri.s.  Paris.  167H-1"13.  8*. 

•w.  M-  las.  a.      Eniin.  Cardinali.s  Baronii  annales,  ad  annum  36i.  nom.  245,  et  sic  de  «- 

«4S.  teri.s.  Antnerpic,  161i.  fol. 

Anb.  TiL  s.  Ambrosii  vita,  in  fronte  ejnsdem  opemm.  Paris.  1643. 

Ha*,  ep.  \5.  S.  Bosilii  .Mafrni  Cxsariensis  Episcopi  epislola  S8,  inter  ejuiidem  opéra.  Pa- 

ris. 1«37.  fol. 
Bay.  A.  Bayle,  dictionnaire  historique  et  critique  k  la  letre  A,  el  ainsi  des  autres. 

A  Roterdam,  i7i5.  fol. 
B«i.  bût.  1.  I.  t.  Veaerabtlis  Beda;  Anglo-Saxonis  Presbyteri  hisloriz  ecclesiaslicae  genlis 

*o-  Angiorum  lib.  1.  cap.  10,  tom.  3.  eju^ideffi  openun.   Colonia:   Agrip- 

pinae,  1613.  fol. 

da  oMir.  de  arte  œetrica,  tom.  1.  Ibid. 

à»  iMp.c.  4t.       de  temponim  ratione  cap.  49.  tom.  i.  Ibid. 

f 


xlij  TABLE 

lien.  rog.  c.  13.        S.  Bcncdicli  régula,  cap.  13,  et  sic  de  caîleris.  Parisiis,  1663.  8". 

^•^r^-  Abralianii  Berkclii  coniinentarius  in  Stephanum  Bvsantinum  do  urbibus. 

Lngd.  Batav.  169t.  fol. 
"•'••  Bibliothèque.  Celles  dont  nous  citons  les  pages,  sont  celles  dont  les  dia- 

logues ont  été  imprimés.  Lorscpie  nous  no  marquons  pas  la  page,  il  s'a^ 
git  des  vai.sscaux  mêmes  des  bibliothèques  que  nous  avons  visitées  nous- 
mêmes,  ou  par  le  moicn  de  nos  amis.  Voici  comme  on  les  cite. 
s.  Aib.  Aiiii.  ablwtia  S.  Albini  Andegavensis,  ordinis  S.   Bcnedicti  c  congregaiionc 

S.  Jlauri. 
ao.ctmoJ.  1. 3.      ancienne  et  modcnie  par  Jean  le  Clerc,  lom.  3",  et  ainsi  du  S',  et  du 

12*.  A  Amsterdam,  17lo-i7li).  1:2". 
^'f-  Angelica,  sic  dicta  ab  Angelo  Roca   fundatore,  nunc  magni  conven- 

tfis  Romani  RR.  PP.  Eremitarum  ordinis  S.  Augiistini. 
L'ai.  r.  I.  Baluziana,  seu  catalogus  librornm  V.  C.  I).  Stephani  Baluzii  Tutclensis. 

tom.  1.  et  sic  de  c;cteris.  Paris,  171!).  if. 
l'="''-  '•  '•  Barberina,  sciliccl  D.  Francisci  Barbcrini  S.  R.  E.  Cardinalis,  Vicecan- 

cellarii,  etc.  tom.  i.  et  .sic  de  â.  Roma-,  IGol.  loi. 
"«""•  Bodlejana,  seu  catalogus  impressonim  lib.  bildiothccie  Bodlejaiia-  in  aca- 

demia  Oxoniensi.  Oxonii,  107 i.  fol. 
Cas.  Ucn.  abbali:e  Casalis  Bcnedicti,  vulgo  ChezaI  Benoit,  ord.  S.  Rencd.  e  con- 

greg.  S.  Mann. 
t'a«"'-  Casanatcnsis  Roma-,   sic   dicta   ait  Em.  (lardinali  Casanate  fundatore, 

nunc  RR.  PP.  Doininicanorum  coiiventùs  Minerva'. 
(:;ii.  Vieil.  Crlcstinorun)  Vichicnsium,  vulgo  de  Vichy. 

*''^'*'-  GoJsliniana,  olim  Segticriana,  sivc  manuscriploruui  omnium  qua^  in  a 

occurrunt  accurata  dcscriplio,  etc.  Studio  D.   Bernardi  de  Menlfau- 
con.  Paris,  1715.  fol. 
«;««».  i.l.  Colbertina,  seu  catalogus  librorum  bibliothecar  qua;    fuit  primum  illust. 

V.  D.  Joan  Baptiste  Colbert,  etc.  Parisiis,  1728.  3.  vol.  12". 
Conl.  Cord«siana,  Paris,  l(i43.  i". 

>xt\.  eccicsiasiica,   in  (pia  continentur  de  .'x;riptoril»us  («clesiasticis  S.  Hiero- 

nymus,  Gennadius  Massilicn.sis,  etc.  Hamburgi,  1718.  fol. 
D.  Ftuil.  !>•  Joachimi  Faultricr  Abbatis  B.  V.  Arduenncnsis  et  S.  Lupi,  etc.  Paris, 

1700.  8". 

b.  Kio.  I).  Florens,  4".  |sinc  clironicis  notis.J 

s.  Fio.Sal.  abbati:e  S.  Fiorontii  Salmuriensis,  ord.  S.  Benedicti  e  congregatione  S. 

Mauri. 
S. Ct'i III  l'ai.         S.  Germani  Pai'isiensis,  vulgo  S.  Germain  des  Prés, 
llinp.  Hispanica  vêtus,  auctore    Nicolao    Antonio    His|)a!ensi,    t.   1.   Roina<, 

IGOG.  fol. 
Imp.  D.  Josephi  Renati  Imperialis  S.  R.  E.  Diaçoni  Cardinalis.  Roma-,  1711. 

fol. 
s.  Jul.  Tui.  abbatia>  S.  Juliani  Turonensis,  ord.  S.  Bcnedicti  c  congrcg.  S.  Mauri. 

Koii.  biblioïKilium  Konigianum,  sivc  catalogus  lib.  etc.  Hamburçi,  1722.  8". 

D.  Loreli  D.  de  I^rchcre,  Lieutenant  Général  du  Mans,  qui  l'enrichit  de  jour  en 

jour  de  livres  curieux  et  choisis. 
Liigj.  Bat.  Lugduno-BîWava,  seu  catalogus  librorum  tam  impressorum  quam  ma- 


DES  CITATIONS.  xliij 

nnscriptoniiu     bibliothecr    publie»'    Uairersilnth     l.upduriO-n.it.-)v:i> 
Lugduiii  aiiud  Batavos,   ITIti.  fui. 
Mai.  MM.  abbatia-    Majoris  tnona.slcni,   vulpo    Marniouticr.  proi>c  Turoncs,  orj. 

S.  Ik'nttlicti  f  coHgn'jç.  S.  Mauri. 
ablolBP  U.  MailT  de  Ebroaio ,  vulgo  d'Evron,  ord.  S.  B<'ncdicli  e  con- 

gr^.  S.  Maori, 
abbatic  S.  Maori  super  Ligerini ,  ord.  S.  Beiied.  è  con(;r.  S.  Mauri. 
iratniin  Minonim  CaoaMMMiuni. 

SfiMMoarioruiii   OaooMHMHiBn) ,  cuju»    suppellcx  et  omalus  ad  slu- 
°  diuni  t1  curjiu  l>  de  la  VilU>  Su|ienohs  referenda  siinl . 
Oralorii  Claroiiioiitaui. 
U.  Cardinali.1  Ulloboni  Roina'. 

vrtcniiu  I*alruiu  et  Aiiliquoruui  .-^  ri|>luruiii    Ecdcsia.'itiroruin,  ilr.   t.  i. 
et  SIC    d.'   (M'ieH*.    I.iigduni,  Iif77.   *7  vol.  fol.  Ll»i  vero  I'  nddilur, 
tlaignat  biltiioUKrain  l'airiitii  l^irisunseni  niini  lUti. 
A.  PM.  Bar;.         abbali»  S.  l>e(n  Ourcoben-Ms.  vul|;u  Uourgucil .  ord.  S.  Ikuied.  e  congr. 

S.  Maori. 
s.  Pm.  j.-  Cul.    ,  ahliali».  S.  I'  r  ^    Coharj  .  voljin  b  Coatn^• .  Gcnonnni .  ord.  S.  Re- 

ncdicU  t  S.  <  Muiri. 

S.  Pm. Mm.  S.    Tetri    Muii.M< imumn  .   vulp)  S.   PiemvMoulier.  oril.  (•iuniaeenKi<( 

H.  Pnnl.O«.         fralrum  Prrtiiralonini  *'.i-ii(NnaiH-iisiuiii. 
ff.  Piwl.  Laval.       fralruiu  Predicatonitn  Uivallensium,  volgodc  l^ival. 
i.im%.hm\.         ablalix*  S.  Ser^ii  .Vndo^avcnsis  ,  uni.  S.  Uem-dicli  e  coiigr.  S.  Mauri . 
■M*.  SilT.  UHHMirterii  SilviDiac«.'nsiN,  vul^u  Souvi|;iiy,  onliiiis  ('.liiuiacen^is. 

H.  Siofli.  Niv.         S.  Slc|>hani  ^'lVt■^li^tlM^.  onlinis  ('.limiaci  n^is 
S.M^M.  altbalix  S.  Sul|Nlii  llitiiri<i»Ms  .  unbiiis  S.  |l4iii-li<ii  c  roain^,;aliitnc  S. 


B.  M.iUCI.r 

S.  Iba. 

rr.  Mia.  C^Q. 

U.»*  Cil. 

«rjl.  n-r. 

IMiob. 

PP.  1.  1 

T«4».  Tclh>riana ,  sivc  ralalo^us  lilMwam  hilJiolhen*  I).  Maurtrii  le  TelUer 

.Vn-hit-p.  hcincnsix.  pari-i.  itSKi.  fui. 
Tlia«.  Tliiinru.  I»anv  UHit.  K-. 

Valltr*!.  Vulbivlluiia,  MC  di<  li  ali  ctriesta  bujusce   loci,  qua*  MC  ab  aniiquo  a|>- 

pelLilur.  nnnc  l'I*.  Oratoni  S.  hiilippi  Nerii  Ilmar. 
VaiK.  Vaticana  Roocr. 

s.  Via.  t>a.  abbalia.'  S.  Vincenlii  IkmoinaiiensiA,  ord.  S.  Bcocdieli  e  renier.  S.  Mauri 

liioail.  S;h.  I.  i.     [tavid  nioildcl.  des  Sibvlles  el  des  livre»  qui  portent  Itur  nom.  A  CJiarcn- 

tuii.  Kii'.M*. 
Bioa.  C«o».  auri.     Toiiiaî  l»o(>|»e  Blouii  Ceiisuni  relcbriurum  aucloruiii,  etc.  Geiicva-,  HVM.  {•. 
B<>ia.  bib.  iit..i.       Pauli  BolUuani  Ubhollieca  hLstorica,  Mve  elcocbu^»  ijcriploruin  historicn- 

rom,  etc.  Lipaia>,  lOiO.  i'. 
DoU.  AcU  Sonctoruin  etc.  cura  lohannis  Rollandi  ac  sociorum  cjus,  S.  J.  An- 

laorpic.  <ti{;)-l7:2U.  fol.  Sic  autem  cilmlur. 
*>  Ap-  dieio  .Kphli.s,  et  sic  de  ca;teri.s. 

a  Feb.  die  i8  Pcbruarii,  et  .sic  de  exleri.<. 

t3  Jin  die  13  Jannarii,  et  sic  de  cxieris. 

■iluB.  die  3  Junii.  et  sic  de  cx-tcris. 

!»  ■•'■  die  29  Maii,  et  sic  de  cateris. 

•■»  ■•'  die  3  Blarlii  •H  sic  de  caHcris. 

f  ii 


xliv  TABLE 

Bon.not.  auct.       Johannis  BonaS.'R.  E.  Cardinalis  notitia  auctorum  et  librorum,  in  fronte 

ejusd.  libride  divina  psalmodia,  etc.  Paris.  1663.  4°. 
Bor.  rech.  Gani.      Pierre  Borel  dans  sa  préface  sur  lethrésordes  recherclics  et  antiquités  Gau- 

pr.  loises  et  Françoises,  etc.  A  Paris,  1635.  4". 

Bosq.  1. 1.  Francisci  Bosqueti  Ecclesiae  Gallicanae  historiarum  lib.  i.  et  sic  de  ca'teris. 

Paris.  1636. 4°.  . 

Boaeh.an.i.i.c.io.  Jean   Bouchet,  annales  d'Aquitaine  liv.  i.  ch.  10.  A  Poitiers ,  1524  fol. 
Bout.  mon.  Charles  Bouteroue  Conseiller  en  la  Cour  des  monnoïes ,  Recherches  eu  - 

rieuses  des  Monnoïes  de  France.  A  Paris,  1666.  fol. 
Bach.  iEgidii  Bucherii  Atrebatis  S.  J.  de  doctrina  temportim  Commentarius  in 

Victorium,  etc.  Antuerpis,  1644.  fol. 
Bnit.  hisi.  Occ.  t.  Louis  Bulteau  de  la  Congrégation  de  S.  Maur,  histoire  monastique  d'Oc- 
s.  cident.ou  abrégé  de  l'histoire  de  l'Ordre  de  S.   Benoit,  etc.  A  Paris, 

1684.  4°. 


Cais.  bei.civ.  1. 1.   Caii  Julii  Caesaris  de  bello  civili  lib.  i.et  .sic  de  cateris.  Amstelodami, 
1661  et  1670,  8". 
bel.  Gai.  1.  i.         de  bello  Gallico  lib.  i.  et  sic  de  ca'teris.  ibid. 
CsEs.  hom.  ■£-,.        s.  Caesarii  Episcopi  Arelatensis  homilia  25  inter  CTteras  ojusdcni ,  tom.  8. 
bibliolhecœ  Patrum.  Lugd.  1677.  fol. 
vit.  t.  I.  vita  inter  acta  Sanctorum  ordinis  S.  Benedicti ,  tom.  i.  seu  .saîculo  i. 

Parisiis,  1668  fol. 
not.  notx  in  eamdem. 

Canis.  1. 1.  Canisil  antiquae  lectiones  tom.  i.  et  sic  de  caeteris.  Ingolsladii,  1601 .  4». 

Ubi  vero  B.  additur.  désignât  idem  opus  a  Jacobo  Basnage  recusum, 
Antuerpis,  1725.  fol. 
Ctssd.  cbr.  Magni  Aurehi  Cassiodori  Senatoris  Chronicon,  inter  ejusdem    opéra,   i. 

Rotomagi,  1679,  fol. 
ep.  I.  epistola  prima  lib.  2.  variarum,  et  sic  de  CTteris,  loin.  t. 

inst.  de  institutione  divinarum  litcrarum^  tom. 2. 

not.  nota  ibidem  affixœ. 

pr.  pnefatio. 

il.  pg.  Il  in  psalmum  ii,  et  sic  de  cxteris,  tom.  2. 

Cass.  col.  i  Johannis  Cassiani  collatio  i,  et  sic  de  caeteris,  inter  ejusdem  opéra,  Atre- 

bati,  1628.  fol. 
de  inr .  de  Incamatione  contra  Nestorium. 

jMi.  institutiones  seu  de  institutis  canobiorum. 

pr.  variae  praefationes,  seu  prologi. 

vil.  vita  per  Josiam  Simlerum  inter  scripta  veterum  latina  adversus-Nesto- 

rium,  etc.  Tiguri,  1571.  fol. 
c,y,  Guillelmi  Cave  Scriptorum  Ecclesiasticorum  historia  literaria,  etc.  Gene- 

vae.  1705.  fol. 
cimri».  insi.  gram.  FI.  Sosipatri  Charisii  inst.  gram.  I.  i.  Basileae  1551.  12" .- 
ciiar  hist  univ       Histoirc  universelle  par  Jaques  de  Charron  sieur  de  Monceaulx.  A  Paris, 

1621.  fol. 
ciior.  1. 4.  ?.  u.     Nicolas  Chorier,  livre  4,  §  14  de  l'histoire  générale  du   Dauphiné.    A 
Grenoble,  1661.  fol. 


DES  CITATIONS.  xlv 

Ckor.  po«.  Chonis  PoMniin  chssicornm  duplex ,  sacroram   et  probnorum.  Lugdu- 

ni.  1616.  4-. 
Ck.  pro  Arcb.        M.  TullQ  Ciceroois  oratio  pro  Archia  Poêla,  inter  ejasdem  oraliones.  Am- 
slelod.  1696.  8*. 

•dAu.l.«.fp.«.       ad  Pumpunium  AUicuin  lih.  i.  ep.  6.  Ibid.  168i.  8*. 

d*  dtr.  (le  divinatiooe,  ei  editionc  Dionysii  Lambini.  ParisiLs,  1566.  fol. 

f.  ^^.  I.  <t.         epistola  1S.  Ub.  9.  ad  bmilians.  Amslelodami,  1684.  8*. 

pra  rtae.  MoLacio  Flacco.  ibid.  1696.  8*. 

fa(.  vafinenta,  ad  calcem  tonni  4  editioni.<«  Lambiniaiue. 

et  0.  de  Oratore  lib.  i.  et  sic  de  caHehs,  ex  editione  Oionysii  Lambini. 

d»  d.  Ormi.  de  rians  Oratoribus.  qui  est  Brutu».  Ibid. 

•.  pbu.  in  Aotonium  Philippica  8*.  et  àc  de  13.  Amstelodami,  1608.  8*. 

pr«  Qiiài.  pro  Publie Uuinlio.  Amstel.  16B9.  8*. 

pra  Q.  Kos.  pro  Q.  Rosdo  CooMBdo.  Ibid. 

a.  ■.  •!••■.  I.  I.   Mainerti  Cbudi.ini  de  nalora  anima*  lib.  i.  el  Aie  de  crteris.  t.  6.  biblio- 
Ihecx  I>alnim.  Lugdun.  1677.  fol. 

•dSap.  epistola  ad  Sapaudum,  lom.  6.  naLvellaoeorain  Stephani  Balaai.  Paris. 

1713.  8-. 
a.  pu.  4.  Chudii  Qaudiani  panegyric»  4.  wu  de  quarto  Goosulatu  Honorii  Augn- 

lUi,  mler  estera  eimàmtopen.  Amsteiod.  166S.  8*. 
ra^rrMJ.t.pr.      de  ra[)(u  Prowrpiiu'  lib.  i.  pra-fatio.  inler  ^u-sdem  opéra.  Paris,  1677.  4*. 
te  Kaf.  in  Rufinum. 

cim.  ai.  s».  1. 1.  aementis  Aleundrini  Stromaturo  lib.  i.  inter  ejand.  opéra  gneca  et  lati- 

na.  Parisiv  16tl   fol. 
cim.  ••■«•. i.i.  Oeoiaedis  de  mumlo,  sive  circalahii  inspectioois  ■Mteoromm  lib.  i.  cum 

Prado  de  Spbjera,  etc.  Baailec.  1547.  8*. 
CM.  ih.  p.  I.  la.  Codex  Thcodosianns  lib.  9.  tit.  16.  lege  i.  et  sic  de  oeteris.  Lugd.  1663. 

••  »•  foi.  TOI.  8. 

f"-  protopocraphia,  tom.  6. 

•ff  ■  appeodix  codids  Tbeodosiani  a  Jaoobo  Sirmnndo  édita ,  lom.  i.  cjusd. 

Sirmnndi  variomm  openiro.  Paris.  1686.  fol. 
CM.  Nf .  Codex  regulamm ,  etc.  collectus  olim  a  S.  Benedicto  Anianensi  Abbate, 

et  a  Lan  Holstenio  m  lacem  edilus.  Parisiis,  1663.  4*. 
"*»•  appendix ,  in  qiu  SS.  Patrum  exhortationes  ad  MoMdwa  et  Virgines , 

etc.  Ibid. 
f-  pnebtio  in  fronte  operis. 

Cal.  ad  c«i.         g.  Criestini  Papae  epistola  ad  Gallos  inter  Prosperi  opéra.  Paris,  1711.  fol. 
Col».  1. 1. 1. 1.       Lncji  Jnnii  Moderati  (/ilumeibe  de  re  mstica,  lib.  i.  cap.  i.  cum  M.  Ter. 

Varroue  et  Palladio  RoUlio.  Paris,  1329.  fol. 
Ctmt.  1. 1.  GoodUi  ad  regiam  editionem  exacta.  studio  Philippi  Labbaei  et  Gabrieiis 

Gomrtii  S.  i.  ton.  i.  et  sic  de  cxteris.  Parisiis,  1671.  fol.  (  Il  est  im- 
portant de  remarqner,  que  dans  le  4*  tome  les  pages  1029  et  suivantes 
ju.squ'à  la  1080  inclusivemenl  ,  sont  répète.  Ainsi  comme  nous  les 
citons  souvent,  si  on  ne  les  trouve  pas  en  un  endroit,  il  faudra  les  cher- 
cher en  l'autre.  Lorsque  nous  citons  d'autres  éditions  que  celle  du  P. 
Labbe,  nous  avons  soin  d'ajouter  une  letre  majnscnle ,  qui  indique  celle 
dont  U  s'agit,  comme  nous  en  donnons  ici  des  exemples,  j 


xlvj  TABLE 

0.  i.  I.  Concilia  antiqua  Gallia^,  curA  Jacobi  Sirinuijdi,  toni.  i.  Paris,  1629.  fol. 

R.  i.  I.  Colleclio  rcgia,  tom.  i.  et  sic  de  ca'teris.  Parisiis,  16ii.  fol. 

supp.  Conciliorum  antiquorum  Gallisc  a  Jacobo  Sirmundo  S.  J.  editorum  sup- 

plcmenta ,  operâ  et  studio  Pctri  Dclalande  Ricomagensis,  etc.  Pari- 
siis, 1606.  fol.  *    . 
Conc.  II.  ep.          Conciliorum  Itali»  anno  Christi  381  cpjstola',  a  Jacobo  Sirmundo  édita», 

tom.  I.  ejusd.  Sirmundi  operum.  Parisiis,  161)0.  fol. 
Crin.  p»)o.  lai.  1. 2.  Pétri  Criniti  de  Poëlis  latinis  lib.  2.  et  sic  de  o-l.  cuni  ejusdem  libris  de  ho- 

nesla  disciplina.  Lugd.  1043.  8". 
Oyp.  cp.  fi-.  S.  C-ECilii  Cypriani  Episcopi  Cartliaginensis  o(   Martyris  epistola  07,  intcr 

ejusdem  opéra.  Parisiis,  1720.  fol. 
noi.  notai  ad  calcem  ejusdem  operum. 

I) 

Dam.  car.  9.  S.  Damasi  Papaj  carinen  9.  inter  ejusdem  opéra,  tom.  27.  bibliolhcca'  Pa- 
irum.  Lugduni.  1677.  fol. 

Dama^.  p,irai.  S.  Johannis  Damasceni  Monaclii  et  Prcsbylcri  sacra  parallcla,  tom.  2.  ejus- 
dem operum.  Parisiis,  1712.  fol. 

Dof.  (le  La.i.  Dtff(!nse  des  sentimens  de  Lactance  sur  le  sujet  de  l'usure.  A  Paris,  1071, 
12°. 

Diai.  (leOr.  Dialogus  dc  Oratoribus,  sivc   de  causis  corrupla'  eloquenliaî,  ad  calccm 

operum  C.  Tacili.  Amstelodami  ,  1C8S.  8". 

Dio  I.  (io.  Dionis  Cassii  Romanarum  hisloriarum  lib.  00,  et  sic  de  cœleris,  ex  Guil- 

lelmi  Xylandri  intcrpretationc  et  editionc  Henrici  Stephani,  1391.  fol. 

Dio.  ciiry.  or.  40.  Dionis  Chrysostomi  oralio  19.  inter  ejusdem  oraliones  80.  Parisiis,  1004. 

fol. 

Dio.l.  1. 1.  I.  r,.       Diodori  Siculi  bibliotliec»  historica;  lib.  5.  tom  i.  Hanovria-,  1604,  fol. 

Diog.  Nil.  pli.        nioj!,enis  Laërlii   de  vilis  ,  dogmatibus ,  etc.  Piiilosoi)horum.  Amsteloda- 
mi. 1092.  4".  ',■■: 
iioi.                    iEgidii  Menagii  noUe,  seu  observationes.  Ibid.  tom.  2. 

Diib.  liisi.  écries.     Gerardi  Dubois  Aurelianensis  congregationis  Oi-aloi'ii ,  etc.  liistoria  Ec- 
l'ar.  clesia^  Parisiensis.  Parisiis,  lo90.  fol. 

Du-Chosn.  I.  I.      Andréa!  l)u-Chesne  liistoria;  Fraiicoi'um  Scriptores,  etc.  tom.  i.  Parisiis 
1030.  fol. 

Dupin.  l>ii).  1. 1.  Nouvelle  bibliotliéque  des  Auteurs  Ecclésiastiques  ,  etc.  par  Mcssii-e  Elic. 
I)u-Pin,  tom.  i.  et  ainsi  des  auti-es.  A  Paris,  1087-  1702.  8". 

Efu.  BhI.  i.  I.  Cajsaris  Egassi  Buhei  historia  Universitatis  Parisiensis, tom.  i.  Parisiis,  1663. 
fol. 

Emis.s.  liom.  i.  Eusebii  Emisscni  humilia  i,  et  sic  de  ca-leris,  ad  calcem  aliarum  sub  ejus- 
dem nomine  cditarum.  Parisiis,  1573.  8°. 

Enn.  I.  2.  ep.  fi.      Magni  Fclicis  Ennodii  Episcopi  Ticinensis  lib.  2,  epist.  6.  et  sic  de  GHeris, 
iiitcr  ejusdem  cpei-a ,  ex  editionc  Sirnnmdi.  Parisiis,  1011.  8". 
car.  I.  I.  c<irminum  lib.  i.  Ibid. 


DKS  CITATIONS.  xlvij 

e|4.  epignininat.  Ibid. 

■oi.  noIcJacobi  Sirmundi.  Ibid. 

\n.  A»t.  vila  \nlonii  Monachi  I^rinensis.  Ibid. 

tU.  Epi.  viU  Epiphanii  KpiMopi  Ticiiimsix.  Ibid. 

Enu.  «ir  iM  .v«i.  Enlreiiens  sur  les  anciens  .\u(eurs  par   .M.  A.  D.  M.   .V.  Paris,  1007.  li*. 

KiH.  «1  foi.  rei.  EpignauiuU  a  poeuutia  votera  ,  lib.  i.  sco  pars  i.  et  sic  de  â.  Parisiis. 

I.  I.  \S9ih  li-. 

Etac-  >•  <  Kvaf^rii  Stholasiiri  bisiori:^  eedesïMtkx  lib.  i.  cl  sic  de  carteris,  una  cuiu 

Theodorelo  et  aliis.  Paris,  1678.  M. 

Ewb.  fera.  S.  Kucherii  KptM-opi   I.undunensis  liber  forinularum  s|>iritalis  inlelligenli;i', 
iDier  quaderu  opcra.  Basiler,  1531.  fol. 

ia  6m.  in  Geflicsia.  Ibid. 

ai  MU.  ad  Hilarinm  de  landibos  Eremi ,  rani  nralionc  fanebri  de  S.  Honoralo, 
I»ansiis.  1379.  «•. 

rr-  |)ni'Ialionesseu  prok>|{i. 

fMr*i.  de  qua-stionibos  rcleris  et  nori  TeMMKnii.  Basile»,  ut  supra. 

<■  Km  in  iibros  Regm.  Ibid. 

ad  Mt.  ad  SilTinm,  lom.  0.  bihiiothrar  Patnim  editionis  Lugdancnsis,  lUTT. 

wl  Val.  ad  Valeriauum  cofcnatam  suuni  epistola  |Kin>iirlica.  Basilca-,  at  supra. 

EiiMf.  Rnna|)ias  Sardiaiius  de  vKis  PbiloM>|tburuai  ri  Sophislaruin ,  etc.   KiOli. 

Em*.  eW.  Eosebii   I>ainphili  Osarer  PaLriMiiu*  Kpiscopi  chroniion.  Ainsiclodaini , 

ItUit.  M. 
1. 1.  Mstohx  ccdwJartJCT  lib.  i.  et  sic  do  orteris.  l>anHiis,  1U5!).  fol. 

pr)r.«v.l.9.r.  I.      de  pnep.irj(ione  evanpelica  gneoo-latina,  lib.  9.  c.   i.  Paris.  102K.   fol. 
«il  Cam-i.  vila  Constjnlini  Mai;ni. 

Cair.  I-  I.  Kutro|Hi  hisloria*  MoniaDa'  brc\iAriuiu.  lib.  i.  cl  sic  de  caHcris.  l^risiis, 

l«U.   i-. 
I»-  I.  pnrCMio  priiiu  et  sic  de  crteris,  qua*  in  froiile  uperis  suni  ap|iosila*. 


fit,.  Uh.  |r.  1. 1.  M\.  .\llierli  Fabricii  liibliolliMSi  gneca  ,  loui.  (.  et  sic  de  5.  7.  et  II.  Ham- 

barpi,  ITIl-lTli».  i». 
b*fc.  lai.  bililiothcca  laiina ,  stve  notitia  velerum  Auctorum  Intinonim,  quoruin- 

cumque  scripta  ad  nos  perrenerunl.  lt>ideni,  HXHi.  12*. 
rac.  1. 1.  t.  I.       Factudi  Ûermiancnsis  pro  dcfensionc  irinm  capitalorum  lil).  i.  c.  -i.  et  sic 

de  cdeiis,  ex  editionc  Sirmundi.  I^ihsiis,  Uii).  K*. 

in  Hodanom  scbobslicum  lilicr.  Ibid. 
Fausli  Regiensis  Episcopi  cpistoLi  16,  in  bibliothecx  Patrum  (omo  8.  Lu^i;- 

dnni.  1677.  fui. 

ad  Felicem  Palrtciuin  Ibidem. 

de  gralia  et  libcro  arbitrio  lib.  i.  et  sic  de  i.  Ibid. 

ad  Gratam  epistola.  It)id. 

ad  Ixontium  .Vreiatunscin  Episcopum.  Ibid. 

ad  Lucidum  Pn-sbytcrum.  Ibid. 

ad  Bcncdiclum  Paulinuin.  Ibid. 


i*  Hot. 

Fawt.  «|i.  16. 

miVH. 

ite  ft.  1.  1. 

ad  tirai. 

ad  Lrun. 

ad  La<. 

•  1  PaaI. 

ad  Rur. 

Fesl. 

1.  2. 

Flecb 

.  hist.dal 

1. 

4. 

Fleu. 

dise.  2. 

H 

.  E.t.  3. 

miB.  chr. 

Flor. 

1.  I. 

Pr 

• 

Flor. 

bit.  l.  i. 

Fort. 

1.  2. 

vit.  M. 

Frag. 

poê. 

Fris. 

bib.  ph. 

xlviij  TABLE 

ad  Raricium  Lemovicensem  Episcopura.  Ibid. 
Sex.  Pompeij  Festi  lib.  2.  de  verborum  significatione,  et  sic  de  cseteris 
Amstelod.  1700.  4». 
Flecb.  hist.de  Th.   M^  Flcchicr  au  livre  4'  de  l'histoire  de  Theodose  le  grand.  A  Paris,  1679. 
4». 
M'.  l'Abbé  Fleuri  au  second  discours  sur  l'histoire  de  l'Eglise,  et  ainsi  des 
autres.  A  Paris,  1720.  12°. 
histoire  ecclésiastique,  tonae  3%  et  ainsi  des  autres  jusqu'au  6«.  A  Paris, 

1693-1699.4». 
les  mœurs  des  Chrétiens.  A  Paris,  1682. 12». 
L.  Annaji  Flori  rerum  Romanarum  epitome,  lib.  i.  et  sic  de  cœteris.  Paris, 
1674.  4°. 

proœmium  ;  ubi  vero  additur  S,  sic  pr.  S  agitur  de  Salmasii  prsfa- 
tione. 
Floriacensis  veteris  bibliothecae  tomus  2.  Lugduni ,  1605.  8°. 
Venantii  Fortunati  Pictaviensis  Episcopi  lib.  2.  caput,  seu  carmen  16  ; 
et  sic  de  cseteris.  Moguntiae,  1603. 4". 
vita  S.  Martini  lib.2.  Ibid. 
Fragmenta   Poëtarum  veterum  latinorum  ,  quorum  opéra  non   exstant. 

Apud  Henricum  Stephanum  ,  1564.  8°. 
Johannis  Jacobi  Frisii   bibliotheca  Philosophorum  classicorum  Auctorum 
chronologica,  etc.  Tiguri,  1592.  4°. 
Front,  deaq.  1.  2.   Scx.  Julii  Frontini  de  aquaeductibus  Roms  lib.  2.  Amstelod.   1661.  8°. 
Fuig  degr  1.2  n.  S.  Fulgentii  Ruspensis  Episcopi  de  gi-atia  lib.  2.  inter  ejusdem  opéra.  Paris, 
42.  1684.  4». 

ad  Mon.  ^d  Monimum.  Ibid. 

ad  Pet.  ad  Petrum.  Ibid. 

Fuig.  e\p.  ser.  aiii.  Fabii  Planciadis  Fulgentii  expositio  sermonum  antiquorum,  inter  ejusdem 
opéra.  Amstelodami,  1681.  8°. 
n,yt.  1.  I.  mythologiarum  lib.  i.  Ibid. 

Virg.  coût.  de  expositione  Virgilianae  continentiae.  Ibid. 


Gai.  deaiii.  Claudii  Galcni  de  antidotis,  inter  ejusdem  opéra.  Basilex,  1561.  fol. 

diff.  pui.  dedifferentiispulsuum.Ibid. 

per  gen.  de  compositioue  remediorura  per  gênera.  Ibid. 

do  lib.  prop.         de  libris  propriis.  Ibid. 
deopi.doc.gen.      de  optimo  docendi  génère.  Ibid. 
de  praîc.  de  prsecognitione.  Ibid. 

rem.  sec.  loc.         decompositionc  remediorum  secundum  loca.  Ibid. 
Gail.chr.  nov.t.i.   Gallia  Christiana ,  seu  séries  et  historia  Archiepiscopoium ,  Episcoporuni 
et  Abbatum  Francise ,    etc.  novae  editionis  ,  a  Dionysio  Sammarthano 
et  sociis,  tom.  i.  et  sic  de  2.  3.  et  4.  Parisiis,  1715-1728.  fol. 
vBi.  1. 1.  veteris  editionis,  a  Fratribus  Sammarthanis ,  tom.  i.  et  sic  de  caet.  Pa- 

risiis, 1656.  fol. 
Gass.  t.  4.  Pétri  Gassendi  Diniensis  Ecclesise   Praepositi  tomus  4.  astronomica  conti  - 

nens.  Lugduni,  1658.  fol. 


DES  CITATIONS. 


xlix 


I 


Ml.  nue.  .11. 1.  I.  .Vuli  Gellii  Doctes  allicse,  lib.  i.  «ap.  :{.  et  sic  de  crt.  LuK«>--Bii(uvoruiii, 

«.  9.  1666. 8*. 

C*m.tl.  •»!.         Gemim  elemcnta  astronoim» ,  inter  varios  de  Sphera  \uctores,  a  Diony- 

sia  Petûvio  editos.  Pahsii.'i,  1630.  fol. 
Ccuii.  dof.  Gennadii  Massilicnsis  de dOgaMlibus  ecciesiaslicis,  in  appomlice  loini  ucla- 

vi  S.  .\ugus(ini.  Pari>8s,  f688.  M. 
«ir.  a.  e.  a.        de  viris  illosthbus ,  seu  de  Scriptoribus  ecciesiaslicis  cap.  io.  et  sic  de 
cxteris,  in  bibiiotheca  ecclosiastira.  Hamburgi,  4718.  fol. 
<;««.  iiib.Mki.1.  Coondi  Gesoeri  Tifnirioi  bibiiotheca  Dniversalis,  tom.  i.  Tiguri .  iliVi. 

fol. 
ihmI.  m.  Ml.        Antoine  (îodeau  Evèque  de  Venee  dans  son  histoire  eccIcMastique  k  l'au 

til  ;  ainsi  des  autres.  A  Pariit.  4663  et  suivans.  loi. 
lit.  M.  Oiti.  1.3.    S.  C^rccohi  Magai  Pape  dialogonun  Ub.  3.  cap.  i.  et  sic  deœteris,  inter 
Cl.  4fMdeaie|Mn,i.i.Parisus,170S.fol. 

I.  n.  «p.  M.         Ub.  II.  epbtola  Sii.  Ibid. 
bra|.  Kmi.  Cf.  ie.  8.  Gregorii  Nazianzcni  e|Nstola  76 ,  inter  ejuMlem  upera.  I>ari8iis ,  1600. 
loi. 
«r-  ».  oralio  33,  el  sic  de  c»t«hs.  Ibid. 

tr.  T.  tyH.  m.  1.    8.  GeoTgii  Floreiilii  Gregohi  Torooensis  Episcopi  hisloris  KniKtoruin  epi- 
lOMMa  per  FrakKirium  Schobsiiconi,  iolcr  ejavicin  S.  Grcgohi  opéra. 

I  aiUlUy  IvMr*  HN. 

(1.  Co«i.  de  gionaCoafBMoruin.  Ibid. 

fi.  Mait.  de  glona  MertynuB.  Ibid. 

téu.  tt.  I.  I.        hiamria  Fraoconim  lib.  i.  Ibid. 

■ir.H.Li.«.e.      denih«:alieS.liartiiiiUb.i.e.6.  Ibid. 

M(.  noix  m  CMldea.  Ibid. 

Cm».  ■•«.  Johannis  Bapti^tJB  Gmsmv  8.  J.  proTioda  Maieilieasis  annales ,  etc.  Log- 

dani,  i6S7.  fol. 
bay.  iMM.  d'uri.     Symphorien  Goyon  en  son  histoire  de  l'Église  et  diocèse,  etc.,  d'Urieuis, 

I.  I.  toin,  1.  A  Orléans,  1650.  fol. 

fi>r.  foé.  huLdu.  Lilii  (jfegorii  Gtnldi  FerrarieBiis  de  biatoiia  PoèUrum  dialogi.  lib.  4  et 

4.  sic  de  oeteris ,  inter  ejnsdem  opéra,  Logdani  Balav.  1606.  fol. 


u 


IhH    m. 

Aaei. 

rtin. 

not.  la 

PllD. 

■•r.  coae. 

1.    1. 

Nwod.  1. 

S. 

■mt.  apol 

.  1. 1. 

•»• 

chr.  1. 

1 

•OLP. 

«* 


Josi-phi  llarduini  S.  J.  index  Aucluruin  qui  a  PItnio  ap|)cllaiilur,  luiu.  i. 

operumCaji  Plinii  Secundi.  Parisiis,  1685.  4*. 

nol«  in  Plinii  natoralembistoriam.  Ibid. 
.M'.  Hermant,  histoire  des  Conciles,  tome  i.  A  Roaen,  1701.  li*. 
Herodoti  llalicarnassei  historiarutn  lib.  5.  Londini,  1U70.  fol. 
S.  Easebii  Hieronymi  apologia  adrersos  Rnflnam ,  lib.  i.  et  sic  de  t.  inter 

ejusdem  opéra,  t.  i.  Parisiis,  1706.  fol. 

appendix  tooù  quinti  conlinens  opéra  sapposititia. 

chroflicorum  canonumlib.  i.  et  sic  de  3.  Amstelodami,  1058.  fol. 

nota:  Amaldi  Pontaci  Episcopi  Vasatensis  in   eosdein  chronicos  caiiuties 
edilionis  Bordigalensis,  1604.  fol. 

8 


in  Uaii. 

in  Ecvl.  c.  10. 

in  Kpli.  c.  i. 

cp.  cril. 

ad  Alg. 

aJ  Ara. 

adFlo. 

ad  Hod. 

adMiii. 

ep.  4. 

in  El. 

iu  Gai.  IH.  -i. 

lu  Gen. 

in  Jov.  1. 1. 

in  Is.  c.  (jO. 

in  Lucir. 

in  Miilauli. 

in  MhUIi. 

in  Midi. 

l>r. 

inllut.  1.  J. 

iu  Vi}.'. 

vir.  ill. 

in  Zacli. 

Ilil.  ad  Kucli. 

(le  lluii. 

Ilil.  apu. 

adin. 

ai>l>- 

in  Aux. 

ad  Cuiisl.  1.  1. 

in  Const. 

.liss. 

.^1. 

rnij;.  1. 

in  Malth. 

l)r. 

m  IN. 

do  Syiiod.  n.  i. 

de  il  in.  1.  1. 

TABLE 

m  Danielem  Prophelam,  lona.  3.  ejusdeinoperum.  l'arisiis  170i.  fol. 

in  caput  10  Ecclcsiaslcs.  Ibid. 

in  caput  4  cpistoLv  ad  Ëphesios»  loui.  i. 

epislola;  crilica,  tom.  i.  ejusdem  operum,  109!). 

epislola  ad  Algasiam,  tom.  4. 1706. 

ad  Amandum.  Ibid. 

ad  Florentium.  Ibid. 

ad  Hedibiuro.  Ibid. 

ad  Minervium.  Ibid. 

epistola  i.  et  sic  de  cseleris  aliquo  numéro  pr«notatis ,  lomi  4.  parte 

sccunda. 
in  Prophelam  Ezccbiëlem.  tom.  à. 

prxfatio    secunda   in  sccundum  libruni  cominunlariorum  in  epislolani 
ad  Galatas,  t.  4. 
in  Genesim,  tom.  i.  HjQ'S. 
advcrsus  Jovinianum,  tom  3. 

tommentarius  in  caput  60.  Isate  l'ropiietic  ;  ul  sic  de  caîleris,  tom.  3. 
adversus  Luciferianos ,  tom.  4. 
inMalachiam  Propiietam,  t.  3. 
in  Mattliaium,  tom.  4. 
in  Michaam  Prophelam  t.  3. 
variai  pnefationes,  seu  prologi. 
apologia  adversus  Rufinum  lib.  '2.  et  sic  de  3.  t.  4. 
adversus  ViKilantium,  tom.  4. 
de  viris  illustribus  liber ,  in  bibliotheca  ecclesiastica.  Hamburgi ,  1718. 

fol. 
in  Zachariam  Prophelam,  lom.3. 
S.  Uilarii  Arelatensis  Episcopi  epistola  ad  Eucherium,  una  cum  oralione 
fuiiebri  de  S.  Honorato.  Parislis,  1378.  8", 
de  S.  Honorato  oratio  funebris.  Ibid. 
S.  Hilarii  Piclavorum  Episcopi  ai)oloj!;etica  ad  reprehensores  iibri  de  Syno- 
dis  responsa,  intcr  ejusdem  opéra,  l'arisiis,  1693.  fol. 
varia;  Ediloris  admonitioncs  in  fronte  cujusque  operis. 
ap|)endix  operum. 
contra  Auxenlium  Mediolaticnscm. 
ad  (ionstanlium  Augnstnm  lib.  i.  el  sic  de  ^. 
l'oiitra  Cunslantium  linperalorciu  liber  unus 
dissorlatio  Ediloris. 
epistola  ad  Abram  tiliain  suani. 
fragmenlum  i.  cl  sic  de  ca^l. 
exposilio  in  Mallli:uum. 
varia;  pra'faliones  ;   ubi  vcro   numerus  addilur,   pr;ufalionem  Ediloris 

dénotai, 
commentarius  in  Psalmos. 
de  Synodis  imm.  i.  et  sic  de  c;ot. 
de  Trinitale  lib.  i.  nom.  3.  et  sic  de  coeteris. 


DES  CITATIONS.  |j 

tit.  vita  in  fronte  ejnsdem  op^rrnn. 

iiipp.  rail.  s.  Hippolvti  Epist-opi  Canon  pasealis  cnni  Joseph!  Sraligeri  commcnlario, 

Ugd-Bauv,  «5fW.  4* 
1. 1.  openim  m  ununi  rorpax  coUeetomo  toaras  1.  Hambnrgi,  47tH.  fol. 

I.  *■  tomus  i.  Ibid.  1718.  fol. 

aff.  appendix. 

pr.  preblio.  seu  prolegomena. 

Hipp.  Tk.  Hir.        HippolvU  Thebani  rhroniron,  in  lomo  3.   Henrici  Cani^ii  lootionnm  anti- 

quanim.  a  Janilio  Rasnafce  renrarum.  Antuerpia*,  1725.  fol. 
Ho(.  P.  Joh.  Jacobi  Hofiiuiini  lexicon  uniTcmlo,  ad  litcram  P  ;  et  sic  de  raeteris. 

I>ugd.-Bauv.  \mH.  fol. 
Hoisi.  ia  sieph.       Lncx  Holstcnii  nol.r  et  castiKitioaes  in  Strphannm  Rvzanliiiuni,  cir.  Ul- 

Irajwii,  16!)l.  fol. 
rum.  Seri.  rtti       Honorii  .Vngnstodunensit  de  Ijiminaribos  Ecf lesi» ,  sive  de  Scriploribus 

Ecclesiaslicis  in  blMiothera  eedesiutiai.  Hambarfi,  1718.  fol. 
Hot.I.  i.  «p.  is.     Q.  Horatii  Ftacri  lib.  1.  cpistola  15.  ialer  «|Mdnia  open.  Paris.  1091.  4*. 
L  I.  od.  13.  lib.  1.  ode  £1.  et  sic  de  cart.  Ibid. 

LLlMy.  10.        Kb.  I.SatxT»  10.  etsicdonei.  IM. 


Jae.  Mb.  poM.  I  «.  LodoTici  Jacob  bibliotbeca  pontiloa,  lib.  i.  Lofçdnni,  MiA.  4*. 

■•te.  rbr  Idalii  E|>is4-opi  rhronicoii,  mler  varia  Jarobi  Sinniimli  opéra,  toni.  3.  Pa- 

ri»,  leeu.  fol. 

tmL  fMti  consoUres.  Ibid. 

M.lik.all.si«pti.  Index  lilirorum  m  ofBcina  Rofaeni  Stqikani  impressonim.  Lulcii.T,  15S2. 

8". 
hMcr.  ul.  Inscriptions  antiques,  etc.  i  la  In  des  ménoires  de  l'histoire  de  I.yon  par 

Gnillaumi'  Ihiriidin.  A  Lyon,  1873.  fol. 
My.  Mol.  pMt.  I.  Glande  Joly  CJianlre  et  Chanoine  de  l'Eglise  mctropoliuine  de  Paris,  trai- 
c.  a.  té  historiqno  drs  écn\e%  ««piiBOfihii  et  ea■l(^ia<aiqllM,  etc.  partie  1 .  cha- 

pitn>  3.  et  ainsi  des  antres.  AfMa,  -1678.  IS*. 
JoM.Kri.pli  I  1.  Johannis  Jonsii  HoLsati  de  SeriptoriliM  Ustori»  philosophica;  lib.  I.  Fran- 

1. 14.  cofurti,  1659. 4*. 

Joni-  Jomandes,  wn  Jordanns  Episropns  Rarennas  de  Getamm  sive  Gothonim 

pe^tis  ad  caleentomi  I.  .M.  A.  C—lodori.  Rotomagi.  Mû'.t.  fol. 
Jm.  ia  Api.  i.t.     Flavii  Joseph!  fernaolymiLini  Saeertotia  contra   Apionem,  lib.    i.  inUr 
ejnsde«  opéra.  Gêner»,  1634.  M. 
«kbeii.jod.  i.s.      de  belto  jodaîco  lib.  5  et  sic  de  caterfs.  Ibid. 

S.  Irena?i  Episcopi  Lujtdunensis  Hber  1 .  contra  h«reses  ;  et  sic  de  crleris. 
ParisiLs,  1710.  fol. 

dinertaiio  i.  Editons  et  sic  de  3.  in  fronte  opemm. 
fragmenta  ad  calceni  opemm. 
not«  in  eansdem. 

prefalio  Editons;  obi  vero  I.  cam  aliqno  nmnero  prsmittilur,  sic  1.  1. 
pr.  agitnr  de  variis  Anloris  pneâtionibas. 


lr*a.  1.  I. 


lij  TABLE 

isid.  off.  1. 1.         S.  Isidori  Hispalensis  de  officiis  lib.  i.  inter  ejusdem  opéra.  Parisiis,  1380. 
fol. 
orig.  I.  7.  originum  lib.  7.  et  sic  de  csptcris.  Ibid. 

scri.  ecci.  de  Scriptoribus  ecclesiasticis  liber  in  bibliotheca  ecclesiastica.  Hambur- 

gi,  1718.  fol. 
isic-B.  1. 1.  Les  masures  de  l'Abbaïe  roïale  de  l'Isle  Barbe-lez-Lyon,  etc.  par  M',  le 

I^iboureur.  tome  1.  A  Paris,  1696.  4*. 
Jiii.  ail  Aiii.  Jaliani  Imperatoris  ad  Atheaienses  epislola,  inter  ejusdem  opéra.  Lipsix, 

1696.  fol. 
cp.  42.  epislola  12. 

iniso)).  misopogon.  Ibid. 

"ot.  Dionysii  Petavii  not»  in  eumdem. 

"i-.  •»•  oratio  quarta  ;  et  sic  de  cieteris. 

jiii.Cai».  Vil.  M.      Julii  Gapitolini  vita  Marci  Antonii  Imperatoris,   inter  Scriptoros  historiée 
Am.  augustse,  lom.  1.  Lugduni-Batavorum,  1671.  8». 

\ic.  Max.  juri.         yita  Maximini  junioris.  Ibid. 
>ii  Ver.  vita  Vcri  Imperatoris.  Ibid. 

Jiisi.  iiisi.  I.  o.  c.  Justini  historiaj  Philippiae  lib.  43.  et  sic  de  caeteris.  Lugduni-Batavorum, 
*■  1683.  8». 

i».  prsefatio. 

pnrf.  Fr.  préface  à  la  tête  de  la  traduction  Françoise  du  môme,  par  D.  L.  M.  A  Pa- 

ris, 1692. 12«. 
I).  Junii  Juvenalis  salyra  1.  vers.  42.  et  sic  de  c«teris.  Parisiis,  1684.  4". 

K 

Knn.  i.iii.  \c\.  H      Georgii  M<ithise  Konigii  bibliotheca  vêtus  et  nova.  Altadorfi,  1678.  fol. 
nov. 

L 

l„i!..  i'.mc.  lyn.      Philippi  l.abbei  Biturici  S.  J.  conciliorura  synopsis.  Parisiis,  1661.  4». 
ciir.  chronologie  historicœ  pars  secunda,  seu  tom.  2.  Parisiis,  1670.  fol. 

iiov.  i.ii'.  I.  I         nova  bibliotheca  manuscriptorum  librorum,  tom.  1.  Parisiis,  1657. 

fol. 
Scri.  t.  I.  de  Scriptoribus  ecclesiasticis  quos  attigit  Cardinalis  Bellarminus  philo- 

logica  et  historica  dissertatio,  tom.  1.  et  sic  de  2.  Parisiis,  1660.  8». 
i,.iri.  insi.  I.  I.       Lucii  Cxlii  Lactantii  Firmiani  institutionum  divinarum  lib.  1.   et  sic  de 
caîteris  inter  ejusdem  opéra.  Cantabrigise,  1685.  8°. 
epii.  institutionum  cpitome.  Ibid. 

lie  ir.  de  ira  Dei.  Ibid. 

luor.  |xir.  de  mortibus  persequutorum.  Ibid. 

opir.  de  opiticio  Dei.  Ibid. 

i.amp.  vil  Al.         /Elii  Limpridll  vita  Alexandri  Severi,  inter  cœteros  historisR  augusta;  Scrip- 
tores.  Lugd-Batav.  1671.  8». 
vil.  Aur.  vita  Aurelii  Imperatoris.  Ibid. 

Lan.  il.'  3.  Din  I.      Johanuis  liaunoil  Conslanliensis  respoiisionis  ad  disserlationem  de  duobus 
s. 


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*.  1. 

,  t. 

I 


DES  CITATIONS.  U$ 

Dionysiis  duscussio.  Parisiis,  16C0.  8*. 

appendix  ii«  qninqik!  Virtonnis  ad  dissertalionem  <U>  Vicloriiio  Kpisco- 
po  et  Mart.  l>ahs.  \&A.  \*. 
S.  LaiMis  Magni  Pape  priini  opéra,  etc.  a  l^aschasio  Quesnel  edila.  Paris. 
«675.  4*.  1.  vol. 

Codex  CaiMoum  et  ConsUtulorum  Ecclesùe  Roaaur,  lom.  i. 
disaortatio  i  et  sic  de  cctehs,  tom.  i. 
tfitM»,  lom.  1. 

aotc  et  observatioiies  Ediiorn,  lotn.  f . 
Leporii  Preabyteri  libellas  eaaMdttionw,  intcr  open  Taria  Jarohi  Sirmiin- 
di,  tom.  1.  Parisi»,  lUO».  M. 

DOliP  Jaeobi  Sirmundi,  nec  non  Johaiinis  Gamerii  in  ennMii>iii. 
praltfio.  aea  veteruin  Schptonim  Ivslunonia.  Ibid. 
GkrOMlOgia  Sanctonim   et   alioruni  virorum  iUustriuiu,  ac  Abbatum  8.V 
cne    insuLi*    Lerinonais,    Luf^duni,    16i3.    4*.   |uIh  t.  non  apponiliir, 
agilur  de  1 .  parte  :  ubi  vero  addilnr  t.  "i.  agitar  de  â  parte.] 
JohMois  Lichtfoti  «cna  tlmlinii  Pwfcaaorii  mi.vrtllanea,  sive  Embhiin, 

iater  cjasden  opcn  loa.  1.  Roicrodaari,  iaw.  fol. 
Mirliiu  Lipenii    bibliolliea  rtalis  philomphica,    etc.  Praocofiirti,  KJMi. 
M. 

tkeotafiea.  Uwi.  i.  Ibidem,  1685,  M. 
U^.  «u.  ta  Ta*.  JmU  Lipaii  ad  Comelii  Ta«iti  .innal«^  exi*nr^<.  ad  calcem  ejoAdein  Tarili 
Oficnni.  .VmstekHlaiiii,  UWA.  K* 
ttm.  1. 1.        etectiown  lib.  i.  Ibtd. 
L*  U^.Mk.  wc.  Jaeobi  le  Loof  l>aruini  GongreRatioiiiK  Oraiorii  bibiiothera  «lera.  etr.  Pa* 
risiis,  17i3.  M. 
Mm.  iHbliotb^qae  ki«ork|M  de  Pnaoe,  etc.  ii  Paris,  1719.  (61. 

oimi.  itr     rjiniUoplioh  liOacoii  oralio  de  laidibus  Francoruoi  habti.i  PirUviis.  Pa- 
rt, risiis,  loi».  1». 
Un.iÉT.M.1. 1    Marais  Ajdocqs  Laema  de  beilo  livili.  lib.  I.  vers.  447,  et  ak  de  caKo- 
*.  44V.               ris.  Ainsteiod.  1689.  8*. 

LiM-iani  Samosatensis  IVroonax,  Ira  viu  DeaoMOis,  jnicr  eja«l<>m  opr- 
ra,  lom.  !.  Ainslelo<t.  1*W7.  8*. 
Iw.  Eanuchns.  Ibid. 

■mc.  fil.  Uercnles  Gallicns.  ibid. 

T*«.  Touris,  aive  amicilia.  lom.  fl. 


M 


Johanois  Mabillon  analectorum  vetemm  lom.  i.  Parisiis,  i676.  R*. 
lom.  3.  Ibtd.  1684. 

annaiium  ordinis  S.  Benedicli  lomus  1.  Paris,  4703.  fol. 
lom.  4.  Ibid.  1707.  foi. 
appendix  ad  buoc  tom. 

itcr  lulicum  lilcrariiim,  etc.  Parisiis,  l(i87.  4*. 
de  lilurgia  Gailicana.  Ibid.  1GK5.  (*. 


Mak.  UM. 

1.  3. 

•a.  1.  1 

1.  4. 

•»• 

iUf  II. 

U. 

liv  TABLE 

miH,  il.  inusseum  Italicum,  scn  colleotio  veterum  Sopiptonim  e  bibliothccis  Ita- 
licis,  etc.  Ibid.  1689.  i". 

M.icr.  Sai.l.2c.  Aurelii  Macrobii  Anibrosii  Theodosii  Salumalioruin  lib.  2.  et  sic  tle  c«- 

14.  teris.  Lugd-Batav.  1670.  8». 

soir..  Scip.  i.i.  Gommentarius    ex    Cicérone    in    somnium    Scipionis,    lib.   1.  cap.  2. 

c.  2.  Ibid. 

.Mail.  asir.  I.  i.  y.  M.  Matiilii  aslronomicon,  lib.  4.  vers.  197.  Paris.  1679.  4°. 

197. 

M.  .\iit.  I.  I.  Marci  Antonini  Imperatoris  vita,  .seu  de  rébus  suis,  etc.  Ub.  1.  Trajecti 

ad  Rhenum,  1697.  fol. 
iioi.  notai,  sivc  annotalioucs  in  euiudcni. 

Mar.  i!n\\.  Martvrologium  Gallicanum,  Auclore  Andréa   du  Saussav.   Parisiis.  1637. 

fol". 
.Mal.  (le  meii.         Marcelii  de  medicamentis  liber,  inter  medice  artis  principes,  etc.  toni.  2. 
parte  3.  Paris.  1S67.  fol. 
«p.  Ucii .  epistola  dedicatoria  Jani  Cornari  i . 

pr.  prœfatio  Auctoris. 

Maib.  Marbodi  Redonensis    Episcopi  opuscula,  ad  calcem  operuin   venerabilis 

Hildeberti.  E'arisiis,  1708.  fol. 
P.  ubi  vero  P.  additur,  encliiridion  Marbodi  Galli  de  lapidibus  preliosis 

indicat.  Parisiis,  1S31.  8'. 
pr.  pni'fatio  cuni  ci)istola  dedicatoria. 

Marcel,  iii<i.  i.  i,     Guillaume  Marcel,  histoire  de  l'origine  et  des  progrès  de  la  Monarchie 

Françoise,  etc.  t.  1.  A  Paris,  1680.  12». 
.Marcel,  riir.  Marcelliiii  V.  C.  comilis  Illyriciani  rlironicon,   inter  openi   varia  Jacobi 

Sirmunditom.  2.  Parisiis,  1696.  fol. 
Marr.  am.  coll.  i.   Edniundi  Martene  veterum   Scriptorum   et  raonumentorum   et    aniplissi- 
r,.  ma  collectio,  tom.  .^.  Paris,  1729.  fol. 

Ui.  anec.  I.  i.       thcsaurus  anecdotorum,  tom.  1.  et  sic  de  3.  Parisiis,  1717.  fol. 
vol.  scri.  veterum  Scriptorum  etc.  collectio  nova.  Rotomagi,  1700.  i". 

pr.  prsfatio. 

Mari.  i.  I.  cp.  u.     M.  Valeril  Marlialis  lib.  1.  epigram.  6.  et  .sic  de  ca'teris.  Lugduni-Batav. 

1670.  8°. 
Mast.  hisi.  .le  Nor.  Le  sieur  de  Masseville,  histoire  sommaire  de  Normandie,  t.  1.  A  Rouen, 

I.,.  1691.120 

Maiiff.  I.  2.  Gilberti  Mauguin  veterum  Auctorum,  qui  nono  sœculo  de  pnedestinatio- 

ne  et  gratia  scripscrunt,  opéra  et  fragmenta,  cum  ejusdera  chronica  et 
historica  synopsi,  etc.  tom.  2.  Parisiis,  1630.  4°. 
M«i.  ar.prin.  1.2.   Medica.'  artis  principes  post  Hipocratem  et  Galenum,  etc.  tom.  2/  par- 
te 3.  Parisiis,  1367.  fol. 
.Mêla,  1.  2.  Ponipouii  Melœ  de  orbis  situ,  lib.  2.  et  sic  de  3.  Basile»,  1822.  fol. 

Meii.  scri.  Anonymi  Mellicensis  sœculo  XII.  clari  de  Scriptoribus  ecclesiasticis  liber, 

in  bibliotheca  ecclesiastica.  Hamburgi,  1718.  fol.  (Aliquando  sic  cita- 
lur  hic  Auclor  :  An.  Mell.  ] 
Mcnag.  1. 1.  Menagiana,  ou  les  bons  mots  et  remarques  critiques,  etc.  de  M.  Ména- 

ge, tom.  1.  A  Paris,  1715. 12». 


DES  CITATIONS. 


Iv 


mrc.  low.  c.  J. 


Min.  Oci. 

noi. 
JUr.  WKi. 


■ol.  ta.  I 

Noach.  lia 


Noood. 
Nw.  A. 


M». 

H»t.  anr 

I.  i. 


S. 


Maru  Meiialoris  couimoailuriuiu,   cap.  3.  cl  sic  de  cL>(cris,  ex   editione 

Johannis  Gamerii  S.  J  rujus  tomus  itrimiis  ea  que  id  ha'resini  IVIagia- 

oain  pertinent,  t-untinet,  et  toiuus  secundus  ea  qa  ■  ad   lia>rcsiin  Ne- 

storianain  s|>et-tant  cuinplectitur.  ihirisiis,  linj.  fol. 
M.  Minulii  Fiiicis  Octavius.  I.utrdutii-lkitavoruin.  iitli.  H*. 

ooUi,  seu  coiuiuenlaru  in  vumduui. 
Vuberti  Mira-i  aucluanuin  de  Sc*ri|>torilHis  eedeuasUcis,  m  t>il)lio(heca  oc- 

rlesiaatica.  Uainb.  1718.  fbl. 
Johannis  Molani  natales  Sandurnin  Belgii.  Lovanii,  1805.  8*. 
Antoaii  Momhiareni  iK-iiHMlians  KfMoni'i   de  dirino  Miss»  sacrificio,  in 

opère  eut  tiiulus  :  C.liristuiu-  iii^lilulionis  etc.  catboUca  et  historica  pro- 

pu^natio.  Parts.  IStM.  fol. 
Monodia,  scu    oratio    iu   ConsUotini   jnnioriit    oMNloin.    I>arisiis,    Itfitf. 

if. 
Looi»  Moreri,  ou  le  firand  dirtioniiiii'  histuriquo,   etc.    |coin|M)s4!  d'alwnl 

pir  cet  .Valeur,  puis  n-vù  i-I  augiiionlù  |Kir  divers  autres  l:k;rivains.|  à 

la  Ictre  A.  et  ainsi  des  autres  leires  de  l'alphaliet.  A  l'aris,  17!B.  6  ?o- 

lam.  foi. 
Mémoires  manuscrits. 
.VnerdoLi  qua-  ex  hmbmm*'  IhIiIioiIium-  indicihus  iiunr  pniiium  efuil 

Luilovinis  VnluniM  ItanlMtes,  loin.  i.  MidioUiii,  l«lin.  i*. 

louiusi.  lUd.  I(»H.  4*. 


N 


K»r  hui.  !>•<.  I.     Heorict   de  Noris   Angnsliniani   historia    PHagiMl,    etr.  PaUvii,    lOTi. 
1. 1.  is.  fol. 

mtt.  »a.  .Noikems  Ball)ulu>  de  Interpretihas  dirinarum  snipluraniin ,  m  tomo  f. 
Iliesaori  aoeedotorum  D.  Benurdi  Pcx.  Anguslx-Viiideliconim,  iH\. 
fol. 


U 


Ulia|4i. 
U|it.  I. 


M.  CM 

Ofi)>.M 

S)  a. 

Orig.  in 
pliU. 


1.  I.  I. 

id.oot.pt. 

I.  4. 
Cd».  I.  I 


Unupliri  l>ajivini  couuueiiUni   m  lastos   lonsolares.  HeidelbcrKx*,   <.VW, 

roi. 
S.  OpUli  Afri  .Milevilaui  Eptscopi  de  schismate  Donatislamm  lib.   1.  et 

sic  de  cdchs.  I>arisiis,  170U.  fol. 

iMrtWit  Dooatistaniin,  in  fronle  operuni  ejusdem. 

noue,  seu  annoiaiioncs  vahomm.  ibid. 

pncMo. 
S.Orientii  conimonitorium,  lib.   1.  et  sic  de  i.  in  colleclione  nova  velc- 

mm  Scriploruin  a  I).  Edm.  Martene  odila.  Rolamagi,  170<).  f. 

Oriba.sii  inediciiialiuni  collecloruu)  lib.  1.   prrtatio,  inlcr  inedica;  artis 

principes,  etc.  tom.  1  parto  ±  Parisiis,  1367.  fol. 

synopseos  lib.  4.  Ibid. 
Origenis  contra  Ceisuin  liber  I.  .Vu},'Usta;-Vindeliconim,  I6<).i.  *•. 

philocalia.  I^arisiis,  t6tM.  i*. 


Ivj  TABLE 

Oro».  I.  2.  c.  1!).      Pauli  Orosii  hisloria,  lib.  2.  cap.  19.  in  lomo  6,  bibliolheca;  Patrum.  Lug- 

duni,  1()77.  fol. 
Orthod.  I.  I.  orthoxographa  iheologia  sacro-sanrla!  ac  sincerioris  tidei  Doclores  nu- 

méro 76.  etc.  Basileœ,  1535.  fol. 
t.  2.  tom.  2,  feu  editio  secunda.  Ibid.  1569. 

Oud.  Scri.  1. 1.       Casirairi  Oudini  Commentarius  de  Scriptxn'ibus  Ecciesi»  anliquis,  etc.  lo- 

musl.  Lipsiœ,  1722.  fol. 
Ovid.  am.  1. 1.  il.  Publii  Ovidii  Nasonis  araorum  liber  1.  elegia  15,  et  sic  de  ca;t.  iriter  ejus- 
i.i.  dem  opéra.  Amstelodarai,  1683.  8». 

art.  am.  1. 3.         deafleamandi  liber  3.  Ibid. 
fast.  I.  3.  fastoruiiiliber3.  Ibid. 

pont.  cl.  m.         deponto  elegia  seu  Epistola  16.  Ibid. 
trist.  I.  i.  tristiuni  liber  2.  Ibid. 


l'aiic.  l'alaîographia  graîca,  sive  de  orlu  et  progressu  literarum  graicarura,  elc, 

operâ  et  studio  D.  Bernardi  de  Montfaucon.  Paris.  1708.  fol. 
l'ail,  diai.  Palladii  dialogus  de  vita  S.  Johannis  Chrysostomi.  Parisiis,  1680. 

l'ail,  derorusi.      Palladius  RutiUus  Taurus  iËmilianus  de  re  ruslica,  cum  Catone,   Vano- 
ne  et  Coluinella.  Paris.  1529.  fol. 
deins.  de  insitione.  Ibid. 

pr.  pnefationes. 

Pau  ij.  Panegyrici  veteres  operà  et  studio  Jacobi  de  la  Baune  S.  J.  cditi.  Parisiis,. 

1676.  4»  [Ubi  vero  B  non  additur,  agitur  de  editione  Beati   Rhenani. 
Basilea;,  1520.  4°.] 
l'ai-x.  vol.  Paraenelicorum  veterum  pars  prima.  Insulae,  (seu  Genev»,)  1604.   4°. 

nul.  Melchioris  Goldasti  notai.  Ibid. 

l'a»q.  rech.  1.  i.c.   Etienne  Pasquier,  les  recherches  de  la  France,  livre  1.  chap.  1.  A.  Paris, 

«•  1633.  8». 

Paicrc.  I.  I.  (',.  Velleius  Paterculus   de   liistoria  romana,   lib.  1.  Lugduni-Batavorum. 

1659.  8». 
l'aui.  app.  .Vd  S.  Paulini  Noiensis  Episcopi  opéra  appeiidix,  tom.  4.  ejusdem  ope- 

mm.  Paris.  1785.  4°. 
car.  10.  Carmen  10.  ejusdem,  tom.  1.  Ibid. 

dis.  3.  dissertatio  3.  Editons,  et  sic  de  cseteris,  toui.  2, 

ci>.  I .  epistola  1 .  et  sic  de  caeteris,  tom.  1 . 

not.  I.  nota,  seu  observatio  1 ,  et  sic  de  caetcris,  tom.  2. 

vil.  c.  i.  vita  ex  ipsius  sancti  Paulini  et  veterum  Scriplorum  operibus  concinnala 

a  Domino  le  Brun  Editore,  tom.  2. 
>iiGen.  vita,  seu  passio  S.  Genesii  xU-elatensis,   ad  calcem  episiolaj'um,  to- 

musl. 
Paul.  iii.  Pétri  Francisci  Chiffletii  Paulinus  illustratus.  Divionc,  1662.  4». 

Paul,  eutii.  Paulini  (pœnitentis  dicti)  eucharisticon  Deo,    ad  calcem    Paulini  Petroco- 

lii  poëmatum.  Lipsiœ,  1686. 8". 
Paul.  vil.  li-M.       Paulini  Petrocorii  vita  S.  Martini   ïuionensis,   versibus  exarala.  Lipsia; 
1686. 8». 

de 


DES  CITATIONS.  Ifîj 

d«  B«p.  (le  visiuiione  nepolali  sai  ad  calcem  operis  pneced. 

ao«.  noue  Francisci  Jureti.  Ibid. 

p,.  pnebliooes,  seu  proiegomeiu. 

PM.  Cbry.  »«.       S.  Pelri  Cht7solojji   Archiepisfoi'i  Ravennatis  sermo  <36.  in  lomo  7.  bi- 

«M.  blioth.  Ihilnim.  Lugd.  16T7.  foi. 

Pm.  Bia.  Tir.  Ui.     Pétri  Diaconi  Monachi  et  Bibliothecarii  CasMnensis  de  vins  illustribus,  in 

bibUolheca  ecdesiasiica.  Uanburgi.  1718.  fol. 
Pmt.  Sw.  Tili  Pflronii  .\rbilri  Equilis  Ronwdi  Salyricon.  Arostelod.  lOtiit.  8», 

I,.  iraducuoii  Françoise  de  Peironc  suivant  le  nouveau  nui)u.scrit  irouvé  ii 

Belgrade  en  1688.  A  Cologne,  ou  plulât  en  France,  1694.  2.  vol. 

ci^.  clef,  oa  interprétation  des  noms  propres. 

Hot.  noue  la  idem  opa.s.  Am.Melod.  ubi  sapn. 


fr. 

pr.  fr.  préhca  k  la  lAle  de  la  traduction  Françoise. 

pmIm.  protegoama  «pen   Peironii   pnt-flxa  a   Théodore   dr  Juge*,  nener», 

1019.  4*. 
*te.  Tie  de  Peuwa  k  la  tête  de  k  induction  Francoiw. 

Ht,  MMc.  1 1.       Domni  Bernard!  Pei  pisMo  in  pnmum  lomum  Thesaori  anecdotoruro. 

pr.  Augusix-Vindel.  17i1.fol. 

Pm.  ML  te  Cul.   Dom  l>aul  Pezron,  antiqaitf^  de  la  nation  et  de  la  langue  des  Celtes  oa 

Gaolois.  A  i>aru.  1704.  1i*. 
Phti.  «il.  Ap.        Philostraii  Leiunii  riia  Apoilonii ,  ioler  ejuïtdcro  opéra  gra-co-latina.  Pa- 
nsiis,  1GU8.  fol. 
ni.  Soph.  Tita:  Sophistanim.  Ibid.  -rt» 

PhUo*!.  I.  II.         Philostorgii  historia   ecderiaatiea,  lib.  H.   un*  com  Theodoreto  cl  aliis. 

Pahaiia,  1673.  fol. 
Pbaifc.  S.  Phœbadii  Aginnensis  Eptscopi  liber  contra  Ananos  in  tomo  4.  Itibliolli*-- 

ae  l^truni.  Lugd.  1677.  fol. 
PIM.  c  m.  Photii  myhobiblon,  ^eu  bibliutbeca,  codioe  48,  et  aie  de  caHeris.  Roto- 

magi,  1653.  fol. 
Pic.  prit.  Mil.       Johanait  Pieardi  Tonlrehani  de  priaca  celtopcdia.  Parisiis,  18S6.  4*. 
ffmti.  hnf.  Tbomc   de    Pinedo    breviarimn,  ses   eomMDlariolus   Auctonim   eorum 

quo5  ad  testimonium  Tocat  Stephanns  Byzantinus,  ad  calcem 
Stephani.  Amstelod.  1678.  toi. 
PUh.ad.ialN.l.i.  Pétri  hthcpi  etc.  adversariorum  subsecivomm  lib.  1.  el  sic  de  2,  inter  va- 
ria ejusdem  oposcala.  l'aria.  1609.  4*. 
Plia.  hisi.  1. 1.       C.  Plinii  Secoodi  naturabs  historia,  lib.  1.  et  aie  de  cderis.  Paris.  1688. 

5.  vol.  4«. 
Plia.  1.  I.  «p.         C.  Plinii  Csediii  Secundi  e|iistolarum  liber  1.  el  sic  de  cxteris.  Lugduni, 

Bauv.  et  Roterodami,  1669.  8'. 
Pt«i.  piM.  pb.       Plalarchi  de  placitis  philosophorum,  inter  ejusdem  moralia,  tom.  i.  ope- 

ruro.  Parisiis,  16i4.  fol. 
Po«.  laL  cor.         Corpus  onuiiom  vetemm  PocUrum  latinorum,  etc.  Genev»,  1647,  4°. 
Pnli.  I.  1.  c.  ».     Julii  Pollucis  ooanusticum  gnecc  et  latine,  lib.  7.  cap.  96.  Amslclodami. 
1706.  fol. 


Iviij  TABLE        ' 

Poiy.  I.  I.  n.  I.     Polvbii  Lycortoft  F.  Mcgalopolitani  liistorianitn  liber,  i.  etsicdecset.  Am- 
stelod.  1680.  8». 
syn .  chr.  synopsis  chronologica  Isaaci  Casauboni  in  historiam  Polybii  ad  calcem 

ejusdem  tom.  9.  Ibid. 
iievir.  de  virtutibus  et  vitiis.  Ibid. 

Pom.yit.  eon.i.  I.  Juliani  Pomeri  de  viui  contemplativa  liber  1.  et  sic  de  caeteris,  in  appen- 
dice operum  S.  Prosperi  AquiUini.  Paris.  1711.  fol. 
pr.  prxfationes,  seu  prologi. 

Poss.  app.  t.  a.      Antonii  Possevini  Manluani  S.  J.  Apparatus  sacer,  tom.  2.  Venetiis,  1606. 

fol. 
Prîpd.  I.  I.  Praedestinatus,  sive   Prjcdestinatorum   h-tresis,  in  tooio   27.  bibliotheca; 

Patrum,  Lugduni,  1677.  fol.    Ubi   vero    additur   S.    indigitat   editio- 
nem    Sirmundi,   inter  ejusdem  opéra    varia,  toiflo  i.    Parisiis,    1696. 
fol. 
hjpr.  45.  hœresis  iîi. 

P"".  Sirmundi  pnrfalio. 

Pfiop-  Priapeia,  sjve  diversoruni  Poëtanim  in  Priapum  lusns,  %â  calcem  Titi  Pe- 

Iropii  Arbilri.  Amstelodaini,  1669.  8». 

not.  nota;  in  hwcce  poëmatia  ctsequenlia. 

Prop.  I.  2.  oi.  3i.  yex,  Aurelii  Propertii  liber  2.  elegia34.  Parisiis,  1685.  4°. 
Pios.  S.  Prosperi  Aquitani  opéra.  Paris.  1711,  fol.  Sic  autem  citantur. 

aiim.  admoniiio  in  fronte  ppi)eqdicis  ad  ejusdem  opcra. 

app.  appendix  ad  calcem. 

appr.  approbation  de  M'.  Godeau  à  la  tèlc  de  la  traduction  Françoise  du  poë- 

n)c  contre  les  Jngrals.  \  Paris,  1647.  4". 

avaiii-p.  avant-propos,  ou  préface  de  M.  de  Saci  sur  sa  traduction  Françoise  du 

mêinp  i»pënie. 

chr.  chronicon  inter  ejusdem  opéra,  ut  supra. 

iD  Coll.  contra  CoUatorem.  Ibid. 

ronf.  confessio  qu.T  dicilur  Prosperi.  Ibid. 

a<i  Gaii.  responsioncs  ad  capitula  objectionum  Gallorum.  Ibid. 

n<i  Gnn.  ad  exccrpta  Genuensium.lbid. 

cpi.  cpi^animatii. 

de  faig.  carmen  de  ingratis. 

obj.  Vin.  responsiones  ad  objectiones  Vincentianas. 

pr.  pnefationes,  seu  prologi. 

lie  prov.  de  iM'ovidentia  divina. 

in  Pu.  Oommentarius  in  Psalmos. 

.t<i  Rur.  epistola  ad  Ruiînum. 

.  »ii.  vita  in  fironte  ejusdem  operum. 

deToc.i.i.c.i.  de  vocatione  gcntium  liber  1.  cap.  1.  et  sic   de  oeteris,  in  appen- 
dice, 

adnx.  poëma  conjugis  ad  uxorem.  Ibid. 

Pros.  T.  chr.  Prospçri  Tironis  chronicon,  in  appendice  operum  S.   Prosperi  Aquitani. 
Parisiis,  1711.  fol. 


DES  CITATIONS. 


lis 


U«cti>l. 

U«iai.  (Mcl.  1».  I>. 
iiMl.or.l.«.c.4. 
M.  B.  «I. 


Kmi.  4*aer.  tel. 
iUy.  I.  S. 
»al.  Catf. 
IUT.cni.l.i.(.7. 
aaa.UM.  MTi.  I. 


Rom*,  vil.  rp. 

P- 
Roi.  I.  I.  e.  31. 
■■r.  I.  i.ifi,  S. 

Rai.  il.  «.  «. 


u 

Johannis  André»'  Qaensledt    dial(^s   de   palriis  iUastriuni  doctrina  et 

scriptis  vironirn.  Witteltepgjp,  1B91.4* 
Pétri  l'ithn-i  pn-fatio  in  doclamationes  M.  Fabii  Ouinliliani,  int«r  i-jusdoin 
Ihdia'i opus4ula.  Ihiris.  ItfOl».  i« 
Quintiliani  de  oratoria  institulioiie  lib.  i.  cap.  i.  et  sic  de  ca.'teris.  l>ari- 

siis,  17iS.  fol, 
annales  Qoinctilianri,  numéro  31.  cl  sic  de  carteris,  ad  cala-m  ejusdem 
Qninctiliani. 

R 

rclri    Kami  de    iuoribu«   vetemm  Gallorua    liber.    Krancorurti,  1584. 

If. 
Theophili  Raynaudi   Theologi    S.     J.    tomus    ocUvils.    I.ugduDi.   itf65. 

fBl. 

La  religioa  des  Gtdois,  Urée  àtf  plus  pores  sonrees  de  l'antiqnilé  etc.  A 

Pan».  1717.  4». 
Andréa*  Rivcti  Critiee  aaert  ipeciiDen  lib.  1.  c.  7.  et  sic  de  cajtcris.  Sine 

diroBicis  nous,  fi*. 
RooHU»  histori»  Scriptores,  lom.  3.  qui  Scriplores  Grrcos  minores  con- 

Uoet.  Prancof.  1500.  fol. 
Roma  snbterranea  Dovissima.  etc.  l*aali  Àringhi.  Rome,  1651.  fol. 
Heriberti  Rosweidi  vitxPalnun.  Aniaerpfae,  i6n.  fol. 

prolefomena. 
Rofini  AqDileicnsis  hisioria  ecclesiaMica.  Aniaerpia?,  <<'>4M.  Toi. 
S.  Ruricii  LcmoYiceni  Epiv-opi  liber  1.  cpist.  8.  et  sic  de  carteris,  in  bibl. 

I*alrura,  tooi.  8.  Locduiii,  1077.  fol. 
Glaadii  Rutilii  Numatiani  Galli  iiinerariam,  ver.<i.  !iO.  et  sic  de  cseteris. 

ABB^leludaiiii.  liM7.  lU*. 

■oUf  variorun  in  cniiklcm. 


S 

tekdi.  pviic-         Jobanni.s  Salcsboriensis  Pulicniicns  de  nogis  Curialiuin.  etc.  Paris.  1513. 

4*. 
SaiiMi.  iirii.  Cal.   C.  MUutii  Oispi  belluni  Catilinariam.  Lo^duni-Ralav.  IGG.'i.  8*. 
Mv.  ia  ava.         Salmiù  Maailiensi.s  adversus  avariiiam,  corn  cx-leris  einsdem  opcril>as. 
Paris.  1684.8* 
•p.  I.  epi.'Uola  prima  ;  et  sic  de  ca-lcris.  Ibid. 

i«b.  I.  1.  de  gibematione  Dei  lib.  i.  et  sic  de  ca'teris.  Ibid. 

Ml.  pr.  note  Stephaoi  Baiiuii  ad  caJceui  operi^. 

I».  pnrbtio  Baluzii. 

pr.  P.  pncfatio  in  fronle  editionis  Pilhœan.T.  Paris.  1580.  8*. 

Sand.  Tel.  icri.  M-  Cliristophori   Sandii  trnctalus  de  veteribus  Scriptoribu<  eccicsixslicis,  in 
elM.  froBte  nuclei  histori.T   ecclesiastica;  ab  eodem   Auclore,  etc.  Colunia*, 

1676. 4*.  U  ij 


h 


TABLK 


Sav.  iii  Sid. 

Seal.  in.  Ans.  1. 

c.  li. 
Scri.  vct.  lai. 


Scril).  corn.    nicj. 

pr. 
Scbot.  cl.  RIi. 


Son.  conlr.  1.  i. 


pr. 
Scii.  de  bcu.  I.  'i. 

ep. 

rr. 

ad  IIcl. 

de  m.  Cl. 

liât.  ({.  1.  i. 
Scrv.  in  Virg. 
Sid.  car.  i. 


I.  I.  cp.  1. 
not. 
pr. 

vit.  a  Sav. 

vit.  a  Sir. 

Sigcb.  scri.  ceci. 

Siin.  Ici.  cliui,  let. 

Sir.  t.  I. 

in  .Vvil. 

in  Sid. 
Six.  bil).  I.  i. 
Socr.  1.  2. 

Solin.  c.  34. 
com. 

Sosip.  Charis. 


Commentarius  Johannis  Savaronis  in  Sidoniuin,  una  cuin  cjusdem  Sido- 

iiii  textu.  Pai'isiis,  1609.  4». 
Joscphi  Scaligeri  lectionum  in  Au.soniuin  liber  i.  c..l4.  et  sic  de  cielem, 

in  fronte  Ausonii.  Burdigalic,  1590.  •*•. 
Scripla  vetcrum  latina  de  una  persona  et  duabus  naturis  Douiini  et  Salva- 

toris  nostri  J.  C.  adversHs  Nestorium,  Eulychera,   etc.  Tiguri,  1571. 

fol. 
Scribonii  Lai'gi  de  coinpositione  medicamentorum  praifalio,  iiitci"  niedicsc 

artis principes,  etc.  tomo  2,  parte 3.  Parisiis,  15G7.  fol. 
Andréas  Schotus  de  Claris  apud  Senecam  Rhetoribus,  ad  calcem  operuiii 

M.  Ann-TRl  SenecscRhetorls.  Parisiis,  1619.  fol. 
M.  Annasi  Senccie  Rheloris  controvcrsiarum  liber  I .  et  sic  de  ca^eris,  in- 

ler  ejusdem  opéra.  Amslelodami,  1672.  8°. 

variic  Auctoris  prœfationes. 
L.  Annœi  Senecae  de  beneficiis  liber  2.  inter  ejusdem  opéra,  toiii.  1.  .Vinsle- 

lodami,  1672.  8". 

epistolx,  in  tom.  2.  Ibid. 

fragmenta  in  fronte  ejusdem  operum. 

ad  Helviam  matrem  de  consolatione,  in  tomo  1. 

de  morte  Claudii  Cœsaris  ludus,  in  tomo  2. 

naturalium  qusestionum  liber  i.  Ibid. 
Scrvii  Mauri  Honorali  commentaria  in  Virgilium.  Basili»,  1544.  fol. 
Caji  SoUii  Apollinaris  Sidonii  Arvernorum  Episcopi  carmen  1.  et  sic  de 

cœteris,  inter  ejusdem  opéra.  Parisiis,   1609.  4°.  Ubi  vero  S.  additur 

hoc  modo  :  Sid.  Sirmundi  désignât  editioncm,  quai  habetur  inter  ejus-. 

dem  opéra  varia,  tora.  1.  Parisiis,  1696.  fol. 

liber  1.  epistola  1.  et  sic  de  cœteris.  Ibid. 

nota;  nul  Savaronis  aut  Sirmundi. 

pr:efatio,  seu  velerum  elogia. 

vita  a  JohanneSavarone  concinnata. 

vita  a  Jacobo  Sirmundo. 
Sigebcrti  Monachi  Gemblacensis  de  Scriptoribus  Ecclesiasticis  liber,  in  bi- 

bliotheca  ecclesiaslica.  Hamburgi,  1718.  fol. 
Letres  choisies  de  M'.  Simon,  ietre  25.  tom.  2.  A  Roterdam,   |  ou  plutôt 

en  France  |   1704. 12°. 
Jacobi  Sirmundi  S.  J.  Presbyteri  opéra  varia,  etc.  tom.  1.  Parisiis,  1696. 

fol. 

notset  in  Avitum,  tom.  2. 

nota;  in  epistola  et  carmina  Apollinaris  Sidonii,  tom.  1. 
Sixti  Sencnsis  bibliothecac  sacne  liber  4.  Lugduni,  1575,  fol. 
Socratis  Scholastici  historia;  ecclesiaslicje  liber  2.  et  sic  de  caeteris,  una  cuin 

Sozomeno.  Parisiis,  1668.  fol. 
C.  Julii  Solini  Polyhistoris  caput  34.  Viennie  Austrix*,  1520,  fol. 

Johannis    Gamertis    enarrationes ,     seu    commentarius     in     eumdem. 
Ibid. 

Voy.  Charis. 


DES   CITATIONS. 


UV 


Sm.  I.  i. 


SfWt.  «II.  .V<lr. 

vil.  t.mfe. 

\il.  Siv. 

ÎH*-.  1.  3. 

1.  t. 

1.  5. 

I»- 

1.  7. 

1.  10. 

1.  If. 

1.  U. 

»tifk.By«- 

Stnk.  Li. 

Swi.  I.  i.  ■■  •■ 


ri.   Rh. 
lit.  Cf. 

SmU.  a. 

Sol.  •>!  Aar. 

•dCUa. 

4UI.  1. 
«y.  M. 
•JEm. 
bbl.  1.  1. 

«ii.N. 

•r.  «I.  ar- 


«A<|. 
SI  Jal. 
fliJw. 

«   Sipl. 
5 


Henuue  So/uiueni  hUluru:  eatoailira^  liber  &.  cl  sic  rie  cxleriK,  uiu  cutii 

Socnte.  Parisiis,  1668.  fui. 
vKlii    Spartiani  viu  Adriaai  Imperatohs ,  iu  hislorkc  augusla;  loiiio  I .  Lug- 

duni-Batavoruin  ,  1671.  8*. 

vila  Anlonini  Cancallx  Iinperaloris.  Ibid. 

vili  Scveri  Impt'ralori.s.  Ibid. 
S|Nrilegiam  veieram  aliqoot  Scriptoram,  etc.  a  Dorano  Likm    iMchmo, 

tom.  3.  Pansus,  1639.  &•. 

tom.  4.  Ibid.  1661.  4*. 

lom.  5.  Ibid.  1661.  &*. 

l>nHiilio  ad  hune  tomuiu. 

lom.  7.  Ihid.  1666.  4*. 

tom.  lu.  Ibid.  1671.  4*. 

UNO.  12.  Ibid.  1678.  f. 

tom.  13.  Ibid.  1677.  4*. 
Stephani    Byiantini    de    Urbibus    lib«r.    Lagduni-Batavoiiim,   16)1.  Tul. 
S(raboni!«  renim  f;eognphicarum  lib.  I,  et  ne  deealam.  Kiistalh.  Vignon, 

1587.  fol. 

Isaad  Cawriwi  eoaaalariwal  CHtifMiooes  ad  eandem.  Ibid. 
{'..  Stielonii  Tnnquilli  de  dnodcdin  Oaaribw  lib.  5.  n.  1,  et  sir  de  calc- 

m.  Lugd-Bat.  IMH.  8». 

de  Claris  Rhetonbns  liber,  ad  cakem  fperis  praced. 

de  illustribas  GramniUds  liber.  Ibid. 
Solde  lexicon  ygco-hUil  ad  literam  a,  et  sic  de  ecteris.  Oanlabrigu', 

1708.  3.  vol.  M. 
Snlpitii  Sereri    Preabyteri    epistoia  ad    .Voreliom,  inler  cjosdcm  oper.i 

cum    lectissimis    awmeatarii»    Georgii    Homii.    Am.stelodami,  1665. 

8*. 

ad  BaasBlam  socmin  suam  epistoia.  Ibid. 

ad  Claiidiaro  sororem  soani  epistoia,  in  toroo  i.  mtsc^llamvruiu  Balu/ii. 
Parisiis,  1678.  8*. 

dialogns  1 .  et  sic  de  i.  et  3.  int«r  ijndcn  open,  obi  supni. 

epistoia  dedicatoria  Editons.  Ibid. 

ad  Eusebiom  Presbytemm  cptstob.  Ibid. 

historix  sacne  liber  1.  et  tic  de  i.  Ibid 

prpfatio,  sai  prolefomena.  Ibid. 

vita  S.  Martini  Tarooensis  Episcopt. 
Lanrentii  Sorti  Caribosiani  de  iirobatis  Sanctomm  historiis.  cti-.  :id  dieiii 

i3  Aprilis,  ft   sic  de  cstens  diebos.  Colonix-Agrippiiix,   Io7l-lo7t). 

fol. 

die  M  A.ngu$ti,  et  sic  de  csteris. 

die  31  Jolii,  et  sic  de  ccteris. 

die  fi  Jonii,  et  aie  de  csteris. 

die  i9  Maii,  et  sic  de  estais. 

die  li  Novembris,  et  sic  de  rarteris. 

die  i  SqMembris,  et  sic  de  rarteris. 


Ixij 


TABLE 


8)11.  iMjc.  ciii.       Syllabus  Poëtaïuin  Chrislianorum  velerum  el  coruin  edilionuin,  priefixus 
operibus    l'uulini    Pelrocorii    a  Gliristiano     Dauinio.   l.ipsia;  ,   108(5. 
12". 
Sym.  1.  I.  q..  8.  Q.  Aurelii  Symmachi  U.  G.  liber  1.  cpislola  8.  el  sic  de  cieleris.  l'arisiis. 
1004.  4°. 
aiici.  ep.  I.  auctuarii  Syraniachiani  cpislola  1 .  Ibid. 

luiiicei.  raiscellanea  et  nol&>  ad  epislolas  ejusdem  Syamiaclii.  Ibid. 


lac.  ail.  1.  i.  C.  Cornelii  Taciti  ad  excessu  D.  Augusli  annalium  liber/i.  el  sicde  ca;- 
tcris ,  inter  caetera  ejusdem  opéra.  Anislelodami,  168S.  2.  volum. 
8». 

ab  excessu  Neronis  historiarum  lib.  1.  et  sic  de  ca;t.  Ibid. 
de  moribus  Germanorum.  Ibid. 
vita  Agricola!.  Ibid. 
Q.  Septinii  Florenlis  Tertulliani  adversus  Hermogenem  liber,  inler  ejus.- 
dera  opéra  Paris.  1845.  fol. 
de  teslimonio  animaj.  Ibid. 
adversus  Valentinianos.  Ibid. 
Themislii  oralio  9.  ex  editione  Harduini.  Paris.  1084.  fol. 
Theodoreli  Gyrcnsis  Episcopi  dialogus  1.  et  sic  de  ca;teris.  Parisiis,  104:2. 
fol. 

lnL-reticarum  fabularuin  liber  1. 

liisloria;  ecclcsiastica;  liber  2.  el  sic  de  caiteris,  una  cum  Evagrio  el  aliis. 
Paristis,  1073.  fol. 
M',  de  Tillemont,  histoire  des  empereurs  et  des  autres  Princes  qui  ont  re- 
gné  les  six  premiers  siècles  de  l'Église,  etc.  tome  1.  cl  ainsi  des  autres. 
A  Paris,  1690-1701.4». 

Mémoires  pour  servir  à  l'histoire  eccldsiaslique  des  six  premiei-s  siè- 
cles,   etc.  tome    1.    et  ainsi  de   tous  les  autres.    A  Paris,   1690- 
17i2. 
Triili.  iMfi.  ceci.     Johannis  Trilhemii  Abbatis  Spanhemcnsis  liber  de  ecclesiaslicis  Scriptori- 

bus,  in  biblioUieca  ecclcsiastica.  Hamburgi,  1718.  fol. 
iiisi.  coni.  I.  1.     Commentaires  historiques    contenant  l'histoire  générale  des   Empereurs, 
etc.  par  Jean  Tristan  Ecuier  sieur  de  St.  Amant,  etc.  tom.  1.  A  Paris, 
.  1044.  fol. 


II.  I.  I. 

mur.  (iuriii. 
vil.  Agr. 
Turl.  in.  Hcrin. 

liKil.  au. 

in  Val . 
l'Iioin.  or.  !l. 
Tlidret.  ilial.  i. 

lucr.  1.  1. 
I.  2. 

Till.  Ëiiiii.  I.  I. 
H.  E.  I.  I. 


Val.  Max.  1.  a.      Valerius  Maximus   cum  selectis  variorum  observationibus  et  nova  recusio- 

ne  A  Thisii  J.  Gons.  Lugd-Batav.  1070.  8". 
Val.  nul.  Gai.        Hadriani  Valesii  nolilia  Galliarum,  etc.  Paris.  167o.  fol. 
Vakr.  ci>.  s.  Valeriani  Episcopi  Gemeliensis  epistola,  cum  horailiis  ejusdem.  Parisiis, 

\(H±  12». 
iioiii.  homili».  Ibid. 


DES  CITATIONS.  Ixiij 

^1.  Meichioris  Golda5sli  cotlectanca  in  stnnonera  de  bono  disriplin;»».  ICOi. 

if. 

p,  Siranodi  preùlio  in   fronte  homiliarum    sancU    Valeriani ,    ubi    su- 

pra* 

pr.f.  pjosdem  Sinnandi  prrf.ilio  atlera  ,  in  lomo  4.  varionim  ejusdom ope- 

rum.  Parislis,  ttîW.  fol. 
T»r.  iM.  I.  I.        Varia     sacra  ,    sen    syUofre    Tariorara    opuscuiorum  gnY-onini  .  olc.    a 
Siephano    le   Movne    ediu  ,    ioam   1.    Lugdani-Balavorum ,    1085. 
V. 
I.  1  lum.  i.  qai  notas  cl  ohtervalionet  MHflecUtnr. 

U|ti.  raa.  pMch.     Fcrdinandi  l ichelli  FlorenCim  luHi  nera,   sive  de  Epi840|>is  Ilali.v.  elc. 

tom.  6.  Romx,  lOSO.  loi. 
Vki.  eu.  puOt.     Victorii    Aquiuni    Canoa    paschalis  coin  Bochehi  conunenl:iho.  An(oer- 
fr.  pijp,  t&«4.  fol. 

pnpfalin,  s«>u  proIflfaMM. 
Vi«-Mar.  I.  fl.        Vigneol  Manilli-,   taÊÊÊt»  d'histoire  et  de  literalore,  U>.  t.  A  Roaen, 

noo.  «i*. 
viN.ia  Aw.|.40.     Eiia;  Yineti  comraenurias  ta  AusoDioro  |.  40.  et  sic  de  oeteris,  una  cam 

lextD  Ansonii.  Bardipir,  1580.  V. 
Tia.Ml.l.  10. (.   VuKentii  Bfllovacensis  specalom  doctrinale,  Ub.  19.  cap.  ii7.  «(  sic  de 

<4T.  eatens  ra|Mtibus.  Venetus,  liU4.  fol. 

Tint.  Ur.  VincenUi  Lrincnsis  coramonilonum,  ad  caktta  Salriani  Massilicnsis  opc- 

nim.  Paris.  16H4.  8*. 
MM.  Siephani  Ralazii  no(7  in  enoideai.ad  cairrm  o|>eris. 

Viff .  f«i.  «.  p.  Viiplii  Moroms  edop  6.  ne  de  cxlehs,  uiu>r  ejuadem  opéra.  Pari». 

16tt.  4*. 
•»*■  OfAx.  Ibid. 

Yo».  vil.  Km.       Fiavii  Vopisci  S)Tanuii  riu  Aoreliani  Imperaloris,  in  hi.stori.T  augusLi' 
loiBO  S.  Lagd-BaUT.  1671.  8*. 
rit  Cv.  vite  Cari  Imperaloris.  Ibid. 

tu.  Itai.  ritj  Xaineruni  Imperaloris.  Ibid. 

»te.  Smw.  ,-iia  Salumini.  IM. 

YMi.  art.  (T.         Gt'rardi  Johannis  Vossii   de  arte   graoïmalica  liber.  Amstelodaiiii,  16QS. 
fol. 
art.  Ml.  lie  arliom  et  sdenliarain  natora.  Ibtd.  10B6.  M. 

Uti.  gr.  de  Historins  Gnecis.  Ibid.  16»».  fol. 

Mm.  lu.  de  Hi-sioriris  l.atinis.  Ibid.  1607.  fol. 

hi4c.  M.  historia>  de  conlroversiis  quas  l>elagiiis,  ejnsque  reliqui.i>  movenint.  li- 

bri  7.  Ibid.  1»35.  i'. 
Uu.  u.  «|iii.       hi.storif  oniversalis  epitoroe.  Ibid.  1686.  fol. 
>••.  de  vetemm  Poêtamm  lemporihas.  Ibid.  1696.  fol. 

Vnm.  Cranii  Presbyteri  epistola  ad  Pacatum  de  obitu  S.  Paulini  Episcopi  Noiani . 

in  lomo  i.  operum  ejasdern.  Paris.  16H6.  4*. 


Ixiv  TABLE  DES  CITATIONS. 


Zo*.  i.c.  Zosimi  Comitis  historiaram  liber  6.  el  sic  de  caeteris,  in  historia  augusia 

Francofurti,  1890.  fol. 


FIN  de  la  Table  des  Cf/atwm. 


HISTOIRE 


LITERAIRE 


DE  LA  FRANCE 


SIECLES  QUI  ONT  PRECEDE  LA  NAISSANCE 

DE  JESUS-CHRIST 


ETAT  DES  LE  TRES  DANS  LES  GAULES 
durant  ces  temps-là. 


ENTREPRENDRE  de  découvrif ,  et  de  fixer  la  pre- 
mière origine  des  Sciences  parmi  les  Gaulois,  ce 
seroil  vouloir  deviner  ce  qui  est  inconnu ,  et  déter- 
miner ce  qui  sera  toujours  incertain.  Selon  l'ordre 
naturel  des  choses,  c'est  d'eux-mêmes  que  nous  devrions 
apprendre  ce   bel    endroit  de  leur  Histoire;  mais,  par  un 

Tome  I.  Prcm.  Part.  A 

s* 


2  ETAT    DES    LETRES 

capricft  assez  bizarre,  ils  ont  pris  le  parti  de  ne  laisser  rien 
du -tout  par  écrit.  Etrange  entêtement  qui  nous  a  jettes 
dans  une  ignorance  presque  entière  de  leurs  actions,  même 
les  plus  mémorables  !  Qu'en  savons-nous  en  effet  ?  quel- 
ques traits  répandus  par  hazard  dans  les  écrits  des  Grecs 
et  des  Romains,  et  par  conséquent  échappés  à  des  plu- 
mes le  plus  souvent  partiales,  pour  ne  pas  dire  toujours 
ennemies,  ou  tout  au  moins  jalouses  de  la  gloire  de  no- 
tre Nation.  Encore  parmi  le  peu  de  particularités  qu'ils 
nous  en  ont  conservé,  ne  trouvons-nous  aucun  éclaircis- 
sement sur  le  point  que  nous  touchons  ici.  Et  de  quels 
autres  Ecrivains  en  pourrions-nous  attendre?  De  nos  His- 
toriens modernes?  Plusieurs,  à  la  vérité,  se  sont  mêlés  d'en 
traiter.  Mais  tout  ce  qu'ils  en  ont  écrit  avec  une  certaine 
complaisance,  ne  passe  plus  aujourd'hui  que  pour  d'agréa- 
bles fictions.  Ecoutez  ce  qu'ils  en  disent,  et  vous  n'en 
jugerez  pas  autrement. 
Kgas.  Bui.  1. 1.  p.  II.  Appuïez  sur  je  ne  sai  quelle  autorité,  '  ils  préten- 
*•  dent  que  les  Gaulois  commencèrent  à  cultiver  les  Scien- 

ces sous  Samothès  leur  premier  Roi,  frère  ou  fils  de  Go- 
mer,    et  petit-fils   de  .Taphet,    environ   cent  quarante   ans 
Pic.  pris.  cei.  1. 2.  ap^és   Ic   déluge.  '   Que   Magus,   second   Roi    des   Gaules  , 
p  47  iiiam  mor.  Prince   sage  et  excellent   Philosophe,    qui   succéda    à   Sa- 

Oal.    p.   71    Char.  ,i  x  1'  j  j       *f\"^        giaaa 

iiisi.univ.  c.  15. p.  mollies   son   père   vers    1  an   du    monde  19o7,    2000   ans 
'^'  avant  Jesus-Christ,    institua  dans   les   (iaules  les  premiè- 

res éludes  des  Letres,  que  l'on  nomme  à  présent  Uni- 
versitez.  Qu'après  lui  Sarron,  son  fils  et  son  successeur  au 
Sceptre  Gaulois ,  Prince  très-savant ,  ajouta  aux  éludes 
des  Relles-Lelres  celle  de  la  Théologie ,  du  nom  duquel 
Kh'm.  Bui  ibia.  p.  ceux  qui  la  profes.soient  furent  nommez  Sarronides.'  Que 
*•  Dryus,  fi!s  et  successeur  de  Sarron,    établit  les   Druides, 

p.:).  'et  Rnrdus,  les  Rardcs,  environ  le  temps  de  la  naissance 

nam.  ibiii.  p.  n.  de  Jacob  et  d'E«au,  plus  de  1800  ans  avant  J.  C.  '  Que 
•ii-MbiJ.  p.  3.-.  non-seulement  lous  ces  corps  de  Savans  (leurissoient  dans 
les  (iaules  plusieurs  siècles  avant  Cadmus  en  Grèce; 
iiaii.  jug.  proj.  c.  '  mais  encore  que  ce  sonl  les  (îaulois  qui  ont  appris  aux 
7. 5  !).  p. -'!i!t.  (Ji-ecs  et  aux  Asiatiques  les  Belles-Letres,  les  Arts  hbe- 
raux,  les  Sciences  les  plus  noble»^.  Qu'Aristole  l'a  recon- 
it.m.  p.  91.  nu  lui-même,  '  et  que  lu  gloire  qu'ont  acquise  à  la  Gré- 

ce  ses  Mathématiciens  et  ses  Philosophes,   appartient  ori- 
ginairement à  nos  Gaules. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.  3 

lU.  Telles  sont  en  racourci  les  idées  magnifiques  (^ue 
quelques-uns  de  nos  ICcrivains  se  sont  formées  du  premier 
goût  de  nos  Ancêtres  pour  les  Sciences.  11  ne  serf)it  qu'à 
souhailur  qu'elles  eussent  autant  de  fondement  qu'elles 
paruisscnt  avantageuses.  Mais  il  s'en  faut  de  beaucoup. 
La  tendresse  pour  la  patrie,  si  naturelle  à  chaque  peuple, 
y  a  eu  plus  de  part  que  la  vérité  de  l'Histoire.  Après  tout, 
si  '  un  Italien,  qui  ne  pouvait  avoir  aucun  intérêt  de  men-  b«i.  iuj. 
tir  en  faveur  de  notre  Nation,  .a  été  le  premier  qui  ait 
avancé  des  opinions  aussi  glorieuses  pour  elle ,  quoiqu'aussi 
gratuites,  doit-il  paroltre  .«lurprenant  qu'il  se  soit  trouvé 
des  l'rançois  qui  les  aient  épousées  après  lui?  Mais  pour- 

3uui  ilalter  ainsi  notre  Nation  1  Bornons-nous  à  lui  ren- 
re  justice.  Mlle  n'a  pas  besoin  que  l'on  relere  sa  gloire 
par  des  fables  et  par  le  mensonge.  Klle  possède  assez  d'avan- 
tages réels,  pour  se  passer  des  rhimenques  qu'on  lui  vou- 
droit  attribuer.  Démêlons  le  \Tai  d'avec  le  faux ,  le  cer- 
tain d'avec  le  douteux,  l'eiïectif  d'avec  le  supposé;  et 
nous  trouverons  encore  suflisamment  de  quoi  faire  voir 
l'inclination  et  le  zèle  qu'elle  a  toujours  eu  pour  les  Le- 
Ires. 

IV.  Quoique  nous  ne  donnions  pas  dans  les  senlimens 
trop  llatteurs  que  nous  venons  de  marquer ,  il  faut  pour- 
tant avouer ,  '  que  Diodore  de  Sicile    donne  le   nom    de  oiod.  sk.  i.  s.  p. 
Sarronides  aux  Philasophes  et  aux  Theolegiens  des  anciens  *"• 
(iaulois.'  De  même  S.  Clément    Alexandrin   dit   bien   di-  cim.  ai.  suo.  i. 
sertement  que  les  (iaulois  ont    précédé  les  (irecs   dans  la  '  p'*^* 
connoissance  et  la  profession  publique  de  la  Pliilo^ophie. 
Mais  il  faut  convenir  aussi  que  ni  Diodore  n'assure  point 
que  le  nom  de  Sarronides  qu'ont  porté  ces  Sayans,  leur  soit 
venu  de  Sarron  troisième  Koi  des  (iaules  ;  ni  S.  Clément, 
que  les  (îrecs    aient  pris  des  (iaulois  le  premier  goût,  ou 
pour  la  Philos4)pliie  ou  pour  les  autres  Sciences.  '  Bien  loin  Bail.  iud. 
que  la  (iréce  doive  ses  premières  connoissances  à  nos  Gau- 
les, c'est  au  contraire  nos  Gaules  qui  sont  redevables  à  la 
(iréce,  au  moins  pour  une  grande  partie,    de  la  politesse 
et  de  la  science  qu'on  a  admirées  aans  quelques-unes  de 
ses  Provinces.  C'est  ce  que  l'on  verra  dans  la  suite  de  ce 
discours.  '  S.  Jérôme  n'en  a  point  porté  d'autre  jugement.  Hier,  in  cp.  cai. 
Il  prétend  même  que  si  les  Galates  étoient  des  esprits  pe-  p'-'p*"- 
sans,  difliciles  à  gouverner  et  qui,  au  sentiment  de  S.  Paul, 

Aij      . 


4  ETAT  DES  LETRES 

avoient  peine  à  comprendre  les  choses,  c'est  qu'ils  étoient 
sortis  des  quartiers  des  Gaules  ,  qui  n'avoient  pas  encore 
été  cultivés  par  les  Belles -Letres.  De-là  on  peut  conclure 

Bail. ibid.  avcc  un  de  nos  savans  Critiques',   que  ce  quil  y  a  eu  de 

rudesse  et   de    grossièreté  parmi    certains   Grecs,  soit  de 

p.  300.  l'Hellade,    soit   de    l'Asie  Mineure,  '  leur  sera    apparem- 

ment venu  des  plus  rustiques  d'entre  les  Gaulois  ,  qui 
portèrent  leurs  armes  et  leur  barbarie  dans  la  Macédoi- 
ne et  dans  l'Asie,  où  ils  s'habituèrent  par  le  droit  de  leurs 
conquêtes. 

V.  Quand  nous  parlons  de  la  barbarie  des  Gaulois  , 
il  ne  faut  pas  s'imaginer  qu'ils  fussent  des  barbares  ,  ou 
errants  et  vagabonds,  comme  l'étoient  les  anciens  Scythes  , 
ou  aussi  grossiers  que  le  sont  à  présent  les  Sauvages  de  l'A- 
mérique. Si  haut  que  puissent  remonter  les  autorités  qui 
leur  rendent  témoignage,  elles  ne  nous  les  représentent 
que  comme  des  peuples  civilisés  en  quelque  sorte,  vivant 
en  société,  se  conduisant  par  les  loix  du  bon  esprit,  oc- 
cupés de  l'agriculture ,  des  arts  ,  du  trafic,  aïant  même 
l'usage  des  Letres  ,  et  de  grandes  dispositions  pour  les  plus 
hautes  Sciences.  C'est  là  l'idée  que  nous  en  ont  laissée  les 
Grecs  et  les  Romains,  et  César  en  particulier  gui  con- 
noissoit  mieux  notre  Nation  que  tous  les  autres  Historiens. 
Que  si  quelquefois  ils  la  qualifient  du  nom  de  Barbare, 
ce  n'est  qu'une  manière  de  s'exprimer,  ordinaire  à  ces  Au- 
teurs, pour  designer  les  Nations  qui  leur  étoient  étrangè- 
res. Peut-être  aussi  ne  lui  donnent-ils  cette  qualification , 
qu'à  cause  de  son  inclination  naturelle  pour  les  armes  ,  et 

Poiyb.  I.  ±  |Sai.    Qc  SCS  fréqucutes  guerres.  Car  qui  ignore  '  que   les  Gau- 
sîrab!'i'.'4.'i).  135.'  ^^^^  0"*  ^*^  "'^^  ^^^  Natious  Ics  plus  bclliqueuses  de  l'ai»- 

tiquité  ,   et  dont  les  exploits  militaires  sont   devenus   plus 

célèbres  dans  l'Histoire? 

VI.  Mais  ne  nous  écartons  pas  de  ce  qui  est  de  notre 
sujet.  Il  ne  manquoit  à  nos  Gaulois  aucune  des  disposi- 
tions naturelles  pour  aimer  et  cultiver  les  Letres.  A  re- 
prendre les  choses  même  dès  les  temps  les  plus  reculés,  ils 
passoient  pour  une  Nation  ingénieuse ,  raîç  8i  Siavoiat;  ôÇeîç, 

Dioa.  Sic.  ibid.      dit  Dlodorc  de  Sicile',  et,  pour  des  peuples  d'une  industrie 

CiE|^bei.  Gai.  1. 7.  incomparable,  genus  summœsolertiœ,  ajoute  César.  '  C'étoient 

sirab. i. 4.p.  135.  des  csprits  simples,  '  sans  fraude,  exempts  de  toute  malice, 

àic>.c.Ov  xai  où  )ca)côr,6e«.  La  créduhté,    ils  la  portoient  jusqu'à 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.  5 

un  point  qu'un  Poète  fameux  '  a  cru  devoir  la  faire  passer  en  lun.  i.  5.  «p.  1 
proverbe,  '•  **• 

Et  tumidus  Galla  creduliute  fniar. 

'  Us  joignoient  à  cela  une  grande  curiosité  d'apprendre  Di^  sic  ibid.  •. 
ce  qui  se  passoit  dans  les  Pais  éloignés.  Us  arrêtoient  les  *J  jic**-  ^• 
Voïageurs ,    quelquefois  malgré  eux,  les  logeoient  en  leurs  m.\  *  * 

maisons,  les  regaloient  généreusement,  et  après  le  repas 
leur  faisoient  diverses  questions  :  qui  ils  étoient,  quel  pou- 
yoit  être  le  sujet  de  leur  Toïage,  ce  qu'ils  avoient  appris 
sur  leur  route.  On  sait  assez  combien  ces  qualités  con- 
tribuent à  acquérir  les  Sciences.  Elles  sont  comme  autant 
de  préliminaires,  qui  y  disposent  et  préparent  les  esprits. 
En  effet  la  curiosité  est  comme  la  mère  de  la  science  ;  puis- 
qu'elle n'est  proprement  que  le  désir  de  savoir.  La  simpli- 
cité y  est  encore  nécessaire.  C'est  elle  qui  écarte  les  préju- 
gés, en  banissant  toute  sorte  de  tromperie,  ou  soupçon 
même  de  tromperie.  Enlin  la  crédulité  attire  toujours  a- 
prèselle  la  docdité.  '  Lors  donc  que  S.  Jérùme  dit  d'à-  HMr.iUd. 
près  S.  Hilaire  qu'il  cite,  que  les  Gaulois  étoient  des  es- 
prits indociles,  cela  ne  doit  pas  s'entendre  de  la  nation 
entière,  mais  ou  de  quelques  particuliers  seulement,  ou 
des  choses  qui  regardoienl  leur  salut. 

Vil.    De  ces    heureuses  dispositions,  que  les  anciens  a- 
voient  reconnues  en  nos  Gaulois,  '  ils  ont  conclu  que  c'é-  Dioj.  sic.  ibid. 
toient  des  peuples  nés  pour  les  beaux  Arts,  '  et  qui  avoient  ca*  b«i.  cai.  1. 7. 
une  aptitude  merveilleuse  pour  imiter,  et  porter  à  sa  per-  ''■''*• 
fectiou  tout  ce  qu  Us  voioitut  être  en  usage  chez  les  autres 
Nations.  '  Aussi  se  laisserent-ib  persuader  sans  peine  de  su«b.ibid. 
faire  passer  à  leur  propre  usage  tout  ce  qu'il  y  a  de  plus 
utile  dans  le  commeR'e  de  la  vie.   Et  bien-t6t  ils  ne  cédè- 
rent à  aucunt.'  nation,  pour  le  soin  au'ils  prirent  de  cul- 
tiver les  Sciences  et  les  beaux  Arts,   il    seroit  assurément 
digne  de  notre  curiosité  de  savoir  en  quel  temps  nos  An- 
cêtres ont  commencé  à  s'adonner  à  de  si   nobles  exerci- 
ces.   Mais,  comme  nous  l'avons  déjà  remarqué,  l'on  n'en 
trouve  nulle  époque  assurée.  Si    néanmoins    il   étoit    bien 
certain,  '  que    Mercure   fils   de  Jupiter  eût  régné  dans  les  p«  »»•  «^  c»iij. 
Gaules,   comme   l'ont   avancé,   dit-on,    la  Chronique  d'A-  '' 
lexandrie  et  Suidas,  il  n'y  auroit,  ce  semble,    aucun  lieu 
de  douter  que  les  Gaulois  ne  commençassent  au  moins  alors 


6  ETAT   DES   UlTHES 

à  prendre  du  goût   pour   la  politcssf,   et  les  nobles   occu- 
p  ,23  pations  de  l'esprit.'  Or  ce  Prince  régnoit  dans  l'Occident, 

au  même  temps  que  Joseph  gouvernoit  l'Egypte  sous  le  Roi 
Pharaon,   vers  l'an    du  monde  2300,    environ   1700    ans 
avant  la  naissance  de  J.  C. 
p.  120.  VIII.'  Mercure   tel   qu'on    nous  le  représente,  éloil    un 

Prince  adroit  et  éclairé,  qui,  par  son  esprit  et  son  éloquen- 
ce, sut  polir  un  peu  la  rudesse  et  adoucir  la  férocité  des 
mœurs  de  son  Empire.  Dans  cette  vùë  il  leur  donna  des 
loix,  qui  tendoient  à  l'union  et  à  la  paix,  et  inventa  des 
Arts  pour  l'uîilité  publique.  11  travailla  surtout  à  lier  les 
hommes  par  la  société  du  commerce.  Jusques-là,  dit-on , 
les  peuples  Occidentaux  ,  sur  lesquels  il  regnoit ,  n'avoient 
su  que  la  guerre,  et  respiré  que  le  brigandage.  11  est  donc 
fort  croïable  que  nos  Gaulois  ,  naturellement  portés  à  em- 
brasser ce  qu'ils  connoissoient  le  plus  utih;  pour  les  usages 
de  la  vie  ,  surent  profiter  de  l'avanlaj^e  de  tant  de  nou- 
veaux secrets,  dont  ce  règne  enricliil  l'Occident.  C'est 
C;cs.  i,.-i.  Gai.  1.  apparemment  pour  cette  raison  '  qu'ils  pnrtoient  à  Mer- 
*»•  p-  232.  cui-e  une  vénération   toute  singulière.  Ils  lui  avoient  érigé 

un  grand  nombre  de  Statues.  Ils  lui  attribuoient  la  gloire  d'a- 
voir inventé    les  Arts.    Ils    le  regardoient  comme  le   plus 
.      ,   •     ,  ,    puissant   Patron    des  Voïageurs,  et   des  Trafiquants.  '  Les 
c.  14.  autres  Nations  Païennes  n  en  ont  point  eu    d  autre   ide; . 

Elles  l'ont  toujours  considéré  comme  le  Dieu   qui    prési- 
doit  au  lucre  et  au  commerce. 

IX.  Entre  les  divers  monumens  que  les  Gaulois  avoient 
érigez  à  l'honneur  de  leurs  Dieux,   il  y  en  avoit  un  tout- 
à-fait    remarquable,   et    qui    vient    tout   naturellement    à 
notre  sujet.  C'étoit  un    tableau   où   ils   avoient  dessein  de 
représenter     l'éloquence     avec     ses    principaux    attributs. 
'  Ils  y  avoient  peint  un  Hercule,  qu'ils  nommoient  Og- 
Lnn.Herc.Gai.p.  jjjj^g    Lucicn,  qui  avoit  vu  lui-même   ce  monument,  dit 
qu'ils  le  dépeignoient  d'une  manière  si  extraordinaire  ,    et 
si    différente   des  autres  Nations,  qu'on  ne   l'auroit  jamais 
pris  pour  un  Hercule ,  quoiqu'il  en  eût  toutes  les  marques  , 
et  qu'il  en  portât  les  symboles  ordinaires.    11   avoit  plutôt 
Luci.  ibid.  ^6  caractère  de  Mercure.  '  Il  étoit  représenté  sous  la  figure 

d'un    Vieillard    décrépit   et   chauve,   le    visage  tout  ridé , 
revêtu  d'une  peau  de  Lion  ,  un  carquois  sur  l'épaule,  une 
p.  3C(5.  massue  en  la  main  droite,  et  un  arc  en  l'autre  main.  '  Il 


\ 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.   C.  7 

atliroit  à  lui  une  multitude  de  peuple  par  des  chaînes  fort 
déliées,  d'or  et  d'argent.  Ces  cliaînes  sortoient  de  sa  langue, 
et  alloienl  aboutir  aux  oreilles  de  ces  peuples.  Hercule  les 
regardoit  avec  des  yeux  riants;  et  eux  le  suivoient  avec  joïe, 
et  sans  nulle  contrainte.  Ce  tableau  mystérieux,  selon  l'ex- 
plication du  Philosophe  Gaulois,  '  étoit  le  symbole  de  la  p.  367. 
parfaite  ('loquence.  Elle  n'a,  disoit-il,  toute  sa  force  que 
dans  les  Vieillards  :  ce  qui  étoit  figuré  par  les  marques 
de  la  vieillesse  d'Hercule.  Les  chaînes  d'or  fort  déliées 
marquoient  l'affinité  qu'il  y  a  entre  celui  qui  parle  et  celui 

3ui  écoute.  Enfin  les  traits  et  les  flèches  du  carquois 
'Hercule  figuroient  la  vitesse,  la  subtilité,  l'énergie  du 
raisonnement,  qui  allant  jusqu'à  l'ame,  la  percent  et  la 
blessent. 

X.  '  Comme    ce   Philosophe   étoit    persuadé    que  le  ta-  p.  sec. 
bleau  représenloil  Hercule,    il  tâcha  de  rendre   raison   du 
l'apport  qu'il  croioit  être   entre  réloquence  et  cette  fausse 
divinité.  Il  dit  donc  à  Lucien,  que  les  Gaulois   pensoient 
différemment  des  Grecs  sur  cette  convenance.  Vous  autres 
Grecs,    dit-il,    vous   attribuez    l'éloquence  à  Mercure;  '  et  p. 367. 
nous  à  Hercule,  parce  que  celui-ci  est  supérieur  h  l'autre 
pour  la  force.  Eumenc,  (irateur  t^iaulois  de  la  fin  du  troisième 
siècle,  et  du  commencement  du  quatrième  raisonnoit  un  peu  au- 
trement sur  un  emblème  à  peu  près  semblable  :   '  l'union  Pan.  p.  29.0. 
d'Hercule  avec  les  Muses.  Il  prélendoit  que  c'est  pour  nous 
enseigner  qu'Hercule  et  les  Muses  se  doivent  prêter  des  se- 
cours mutuels,  et  concourir  à  la  gloire  des  uns  et  des  au- 
tres.  Hercule,  dit-il,   doit  procurer  et  maintenir  le  repos 
nécessaire  aux  Muses;  et  les  Muses  de  leur  côté  célébrer  ,- 

par  leur  art  la  valeur  et  les  grands  exploits  d'Hercule. 
Quoi  qu'il  en  soit  de  l'explication  de  notre  Philosophe, 
s'il  étoit  permis  d'entrer  dans  le  mystère,  on  pourroit  en 
donner  une  aulie  plus  convenable.  En  effet,  ne  seroit-il 
pas  plus  naturel  de  dire  que  l'intention  des  premiers  Au- 
teurs de  cette  image  énigmatique,  étoit  de  représenter 
par-là  les  deux  Arts  principaux,  par  lesquels  les  Gaulois 
se  distinguoienl  avec  éclat  de  toutes  les  autres  Nations, 
c'est-à-dire  l'art  militaire,  et  l'éloquence?  La  plus  grande 
partie  des  Gaules,  dit  Calon  dans  Charisius,  '  possède  deux  sosip.  chans.  in- 
avantages  par  excellence,  l'art  militaire,  et  le  talent  de  p.'^.^''*'""  '•  ^ 
parler  avec  grâce  et  avec  esprit:  pleraqxie  Gallia  duos  res 


8  ETAT  DES   LETRES 

industriosissime  consequitur,  rem  militarem  et  argutc  loqw. 
Cette  explication  comprendroit  toutes  les  parties  de  l'em- 
blème: au  lieu  que  ni  la  peau  du  lion,  ni  la  massue,  ni 
l'arc,  qui  sont  les  symboles  de  la  guerre  et  de  la  valeur,  n'en- 
trent pour  rien  dans  l'explication  du  Philosophe  de  Lucien. 

XI.  L'amour  qu'avoient  nos  Gaulois  pour   les  Sciences 

et  les  beaux  Arts,  leur  avoit  inspiré  de  la  vénération  pour 

toutes    les    autres    Divinités,    qu'ils    croioient   y   présider. 

Ces.  bel.  Gai.  1.6.  '  Après  Mcrcurc  ils  honoroient   particulièrement   Apollon, 

•  Ls^^rof.  c.  1.  "   qu'ils    avoient  nommé  Belenus  :    nom   latin   formé  d'un 

p.  154. 155.  ancien  mot  Celtique  qui  signifie  blond. '' Ils  le  regardoient 

k  cœs.  ibid.  p.235.  comme  le  Dieu  qui  présidoit  à  la  Médecine,   et  qui  avoit 

une  vertu  singulière   pour  guérir  les  maladies.   On  voioit 

dans  les  Gaules,  encore  au  quatrième  siècle  de  l'Eglise,  plusieurs 

Pan,  p.  26'..  Templcs  consacrés    au    culte   de   ce  faux  Dieu.  '  Eumene 

f>arle  avec  éloge  d'un  de  ces  édifices,  qu'il  assure  avoir  été 
e  plus  beau  de  tout  l'Univers.  11  ne  dit  point  en  quel  lieu 
il  étoit  situé;  mais  il  paroît  par  sa  narration  que  c'étoit  ou 

p.  287.  dans  la  Viennoise,  ou  dans  un  autre  pais  peu  éloigné.  '  Il 

y  en  avoit  un  autre  à  Autun  auprès  des  Ecoles  publiques 

Ans.  ibid.  de  ccttc  Ville,  '   et  peut-être  un  troisième  à  Baïeux,  dont 

le  Rhéteur  Patere  semble  avoir  été  le  Gardien  et  le  Thré- 

CtBs.ibid.  sorier.  '  Les  Gaulois  rendoient  aussi  un  culte  public  à  Mi- 

nerve, dans  la  pensée  qu'elle  avoit   enseigné  aux  hommes 
les  premiers  éléments  des  Arts  et  des  Sciences. 

jyj  XII.   '  Us  étendoient  ce  culte  à  plusieurs  autres  sembla- 

p  229  bles  Divinités.   '  Aussi  César  remarque-t-il,   que   toute  la 

nation  entière    des    Gaulois    étoit   extrêmement  adonnée  à 

p.  233.  toutes  sortes  de  superstitions.  '  Ils  revéroient  encore  Mars, 

p.  23i.  Jupiter,  Pluton,   et  quantité  d'autres,   '  au   sujet  desquels 

ils  étoient  dans  presque  la  même  croïance  que  le  reste 
des  autres  peuples  païens.  Nous  n'entrerons  point  dans  ce 
détail.  Il  n'est  pas  de  notre  sujet.  Tout  ce  que  nous  en  pré- 
tendons tirer  pour  notre  dessein,  c'est  que  si  les  Gaulois 
ne  cedoient  à  aucune  autre  Nation  en  matière  de  super- 
stitions, ils  ne  lui  cedoient  point  non  plus  dans  la  Science 
de  la  Mythologie.  Leur  Théologie  avoit  même  cet  avan- 
tage, sur  celle  de  tous  les  autres  peuples  du  Paganisme, 
qu'elle  [étoit  plus  ancienne,  plus  raisonnable,  et  plus  subli- 
me. C'est  ce  qu'on  peyt  voir  dans  les  Auteurs  qui  ont  écrit 
de  leur  Religion  et  de  leurs  Divinités. 

XIII. 


DAiNS  LES  GAULES  AVANT  J.   C.  9 

XllL  '  Les  Gaulois  tenoient  l'immortalité  de  l'a-  oœs.  bci.cai.  i.  c, 
me.  Ce  sentiment  seul,  qui  les  distinguoit  des  autres  ''"  "'^' 
Gentils,  peut  suffire  pour  prouver  non-seulement  l'an- 
cienneté de  leur  Théologie,  mais  encore  celle  des  au- 
tres Sciences  qu'ils  ont  cultivées.  En  effet,  ils  n'ont  pu 
puiser  leur  opinion  sur  la  nature  de  l'anie,  que  dans  la  (ni.) 
doctrine  des  premiers  Patriarches,  à  qui  Dieu  avoit  ré- 
vélé cette  venté,  et  de  qui  elle  passa  par  tradition  aux 
Eils  de  Noé,  et  à  leurs  premiers  descendans.  Si  donc  les 
Gaulois  ont  pu  conserver  ce  point  de  doctrine,  au  travers 
de  tant  de  tables  du  Paganisme,  et  malgré  une  idolâtrie 
continuelle  et  les  autres  suites  funestes  du  péché  originel, 
qui  ont  effacé  cette  heureuse  impression  de  l'esprit  et  du 
coeur  des  autres  Gentils;  pourquoi  n'auront-ils  pas  conseï"^ 
vé  également  les  notions  des  autres  Sciences,  de  l'Astro- 
nomie, de  la  Géométrie,  de  la  Géogi'aphie,  de  la  Physi- 
que? N'étoient-elles  pas  connues  de  Japhet,  et  de  ses  pre- 
miers descendans,  dont  les  Gaulois  ont  tiré  leur  première 
origine?  Et  n'étoit-il  pas  plus  facile  de  les  conserver  ces 
Sciences,  qui  sont  du  ressort  des  sens  comme  de  la  raison, 
que  la  doctrine  de  l'immortalité  de  l'ame,  qui  n'est  qu'une 
Science  spéculative?  Concluez  donc  de  ceci,  qu'il  faut  que 
les  Gaulois  aient  connu,  et  cultivé  de  tems  immémorial, 
et  la  Philosophie  et  les  autres  Sciences  qui  en  font  partie, 
ou  qui  y  ont  rapport. 

XIV.  Aussi  l'on  aura  sans  doute  remarqué,  qu'en  disant 
qu'ils  commencèrent  à  prendre  du  goût  pour  les  Arts  et 
les  Sciences  sous  le  règne  de  Mercure,  nous  ne  l'avons  dit 
qu'avec  une  restriction,  qui  supose  qu'ils  pouvoient  en 
avoir  été  instruits  auparavant.  Le  Lecteur  est  en  état  de 
juger  par  lui-même  s'ils  l'ont  été  en  effet.  Ce  règne,  su- 

f)osé  qu'il  ait  été  tel  et  aussi  réel  qu'on  le  prétend,  aura  pu 
eur  aporter  de  nouvelles  lumières,  et  les  enrichir  de  nou- 
veaux secrets.  Mais  pour  les  hautes  Sciences,  il  paroît  hors 
de  doute  qu'ils  les  aporterent  avec  eux,  lorsque  dans  la 
dispersion  des  peuples,  ils  se  répandirent  dans  les  pais  in- 
habités, et  vinrent  enfin  peupler  les  terres  qui  ont  porté 
dans  la  suite  le  nom  de  Gaules.  Et  de  quels  autres  peuples 
les  Gaulois  auroient-ils  pu  prendre  les  Sciences,  dont  il  est 
ici  question?  Des  Egyptiens?  Des  Chaldéens  d'Assyrie? 
Des  Indiens?  Des  Perses?  Mais  il  est  certain  que  les  Gau- 

Tome  I.  Prem.  Part.  lî 


10  ETAT   UKS   LETKKS 

lois  n'ont  jamais  eu  de  communication  avec  ces  Peuples 
éloignés  d'eux  par  des  distances  presque  infinies.  Après 
s'être  habitués  dans  les  (Jaules,  ils  s'y  sont  trouvés  isolés. 
Le  Rhein  et  les  Alpes  à  l'Orient,  la  Méditeranée  et  les 
Pyrénées  au  Midi,  l'Océan  à  l'Occident  et  au  Nord,  les 
separoient  de  toutes  les  autres  Nations,  et  leur  fermoient 
tout  commerce  avec  elles.  Les  Etrangers  ne  se  sont  bazar- 
dés que  fort  tard  de  francbir  ces  barrières,  que  la  nature 
avoit  elle-même  formées.  Les  premiers  que  l'on  sache  l'a- 
voir tenté,  sont  les  Grecs  et  les  Romains.  Mais,  si  les  Gau- 
lois, dans  la  suite  des  temps,  ont  pris  quelque  chose  de  ces 
deux  Nations,  il  est  incontestable  d'ailleurs  qu'ils  les  ont 
devancées  l'une  et  l'autre  dans  la  connoissance  et  l'exercice 
de  la  Philosophie,  et  des  autres  Sciences  qui  y  ont  rapport. 
XV.  Personne  n'ignore  que  la  Philosophie  des  (irecs 
n'ait  eu  l'avantage  de  l'ancienneté  sur  celle  des  Romains. 
Or  il  en  est  de  même  de  la  Pliilosophie  des  Gaulois,  à  l'é- 
cioin.  \i.  stro.  1.  gard  de  celle  des  Grecs.  '  C'est  une  vérité  que  S.  Clément 

I.  p.3or..  Alexandrin  a  pris  à  tâche  lui-même  d'établir.  Après  avoir 

lu,  ce  semble  dans  ce  dessein,  les  plus  anciens  Auteurs, 
il  prouve  par  leur  autorité,  que  les  Nations  qu'il  a  plû  aux 
Grecs  de  traiter  de  barbares,  et  les  (Jaulois  en  particulier, 
ont  fait  usage  de  la  Philosophie,  avant  que   la  Grèce  la 

II.  3W.  connût.  '  En  effet,  continue  ce  Père,  les  plus  anciens  Phi- 

losophes que  l'on  sache  avoir  paru  chez  les  Grecs,  sont 
Mnesiphile,  Selon,  Themistoole,  Xenophane,  Thaïes, 
Pythagore,  qui  n'ont  commencé  à  lleurir  que  vers   la  16. 

i,.303.  Olympiade,  un  peu  moins  de  700  ans  avant  J.  C.    '   Et 

il  y  avoit  déjà  long-tems  alors  que  les  Druides,  qui  étoient 
les  Philosophes  des  Gaulois,  philosophoient  dans  les  Gau- 
les, comme  les  Devins,  ou  Prophètes'  des  Egyptiens  dans 
l'Egypte,  les  Chaldéens  dans  l'Assyrie,  les  Semanées  dans 
la  Bactriane,  les  Mages  dans  la  Perse,   les  Gymnosophis- 

p.  304.  tes  dans  les  Indes.  '  S.   Clément  va   encore  plus  loin,  et 

montre  par  Alexandre  l'Historien,  dans  son  traité  des 
Symboles  Pythagoriciens,  que  Pythagore  avoit  même  été 
instruit  par  les  Gaulois.  Ce  fut  d'eux  par  conséquent 
qu'il  prit  l'opinion  de  l'immortalité  de  l'ame,  qu'il  acom- 
moda  depuis  à  son  fameux  système  de  la  métempsycose. 
Ainsi  les  Grecs  sont  redevables  aux  Gaulois  d'un  des  plu 
nobles  principes  de  leur  Philosophie,  et  du  sentiment  le 


DANS   LRS  r.AlJLES  AVANT  J.    C.  11 

plus  (ligne  qu'ils  aïenl  enseigné  sur  la  nature  de  l'homme. 
Si  nos  Historiens  modernes,  en  relevant  le  savoir  de  nos  an- 
cêtres, s'en  fussent  simplement  tenus  à  faire  valoir  l'avan- 
tage que  nous  venons  de  marquer,  nous  n'aurions  pas  eu 
lieu  de  traiter  d'agréables  fictions  les  opinions  pompeuses 
qu'ils  ont  avancées  à  ce  sujet. 

XV J.   Oui,  dira-t-on  peut-être,   vous  avez  prouvé  assés 
bien,  que  les  Gaulois  n'ont  point  pris  leur  Philosophie  des 
Nations  que  vous  venez  de  nommer.  Mais  pourriez -vous 
justifier  qu'ils  ne  l'aient  pas  prise  des  premiers  peuples  de 
la  Grande  Bretagne?  Au  moins   '  César  semble-t-il  l'as-  Ca;s. bel.  Gai.  i. « 
sûrer  positivement;  '  Et  il  est  certain,  selon  Tacite,  que  tm.^.' i.  u.n. 
cette  Isie  avoit  encore  des  Druides  vers  la  fm  du  premier     ^''• 
siècle  de  l'Eglise.  '  11  est  vrai  que  César,  parlant  des  fonctions  Cics.  ibid. 
des  Druides  Gaulois,  dit  qu'on  croïoit  que  leur  secte  avoit 
pris  nais.sance  dans  la  Grande  Bretagne,  et  que  de  là  elle 
étoit  passée  dans  les  Gaules.  11  ajoute  même  que,  de  son 
tems,  ceux  des  Gaulois,  qui  vouioient  en  avoir  une  con- 
nois.sance  plus  parfaite,  et  s'y  rendre  plus  habiles ,  faisoient 
voïage  en    ce  païs-là  pour  l'y  puiser  à  la  source.  Mais  cet 
endroit  de  César  doit  s'entendre  de  ce  qu'il  y  avoit  et  de 
plus  sanglant  et  de  plus  superstitieux  dans  les  sacrifices  et 
les  divinations  des  Druides.  On  sait,  et  nous  le  dirons  bien- 
tôt,  qu'ils  étoient  assez  inhumains  pour  immoler  des  hom- 
mes à  leurs  fausses  Divinités,  et  en  égorger  d'autres,  afin 
de  chercher  dans   leurs  entrailles   les  secrets  de  l'avenir. 
'  Voila  les  maximes  qui  seront  venues  des  Druides  Bretons  p»"'-  adv.  suts.  i. 
aux  Druides  (Jaulois  ;   et  c'est  tout  ce  que  César  a  voulu     ''  '' 
dire.  Car  on  peut  assurer  qu'il  n'a  jamais  prétendu ,  que 
ceux-ci    eussent   pris   des   autres   cette   belle  police   qu  ils 
avoient  établie  dans  les  Gaules,  non  plus  que  la  Théologie 
et  les  autres  Sciences  les  plus  nobles  qu'ils  y  enseignoient. 
On   ne   trouvera  point   dans   aucun  Historien   de  quelque 
mérite,  que  la  Grande  Bretagne  ait  eu  rien  de  semblable 
dans  les  premiers  temps  ;  '  quoique  les  Bretons  et  les  Gau-  Tac.  vu.  Agr.  n. 
lois  n'aient  fait  originairement  qu'une  même  Nation. 

XVII.  Après  avoir  parlé  de  l'origine  des  Sciences  chez 
nos  plus  anciens  Gaulois,  il  est  de  l'ordre  et  de  notre  su- 
jet de  dire  quelque  chose  de  leur  première  manière  d'écrire. 
Nous  avons  déjà  remarqué,  en  passant,  qu'ils  avoient  eu  la 
bizarrerie  de  ne  rien  laisser  par  écrit  sur  leur  histoire.  Ils 

Bij 


12  ETAT   DES   LETRES 

poussèrent  encore  ce  caprice  jusqu'à  ne  rien  écrire  non  plus 
des  productions  de  leur  esprit.  Ce  n'est  pas  toutefois  qu'ils 
n'eussent  connoissance  du  secret  de  l'écriture  :  Pline,  Stra- 
cœs.  bel.  Gai.  1. 6.  Jjqjj  gj  César,  '  plus  ancien  que  les   deux  autres,    assurent 
L.  \.  p.  28.  qu'ils  se  servoient  des  '  caractères  grecs  dans  les  usages  tant 

publics  que  particuliers  de  la  vie  civile.  C'est  en  cette  sor- 
te de  caractères  qu'étoient  écrites  les  tables  que  César 
trouva  dans  le  camp  des  Helvetiens,  après  qu  il  les  eut 
vaincus,  et  sur  lesquelles  ces  peuples,  qui  faisoient  alors 
partie  des  Gaulois,  avoient  marqué  l'état  de  leurs  forces, 
et  fait  le  dénombrement  de  leurs  familles.  De  même,  entre 
le  peu  de  monumens  qui  nous  restent  de  l'antiquité  Gau- 
loise, il  s'en  trouve  qui  établissent  encore  l'usage  des  letres 
gréques  dans  nos  Gaules.  Il  est  même  des  écrivains  qui 
soutiennent  que  les  Gaulois  ont  continué  de  s'en  servir, 
néanmoins  sans  uniformité,  jusqu'au  sixième  siècle  et  au 
suivant  ;  quoiqu'ils  fussent  passés  depuis  long-temps  sous 
la  domination  des  Romains.  II  n'en  faut  pas  être  stirpris. 
CiBs.  ib.  1.  5.  p.  '  En  ces  temps  reculés  les  caractères  grecs  servoient  à  écri- 
«00  not.  re  différentes  sortes  de  langues  :  comme  l'on  se  sert  depuis 

f)lusieurs  siècles  des  caractères  romains,  pour  écrire  les  dif- 
èrentes  langues  qu'on  parle  dans  l'Europe. 

XVIII.  Il  n'y  a  peut-être  que  François  Hotman  seul, 
qui,  dans  ses  notes  sur  les  commentaires  de  César,  page  74, 
ait  pensé  à  contredire  la  vérité  que  nous  venons  d'établir. 
Mais  il  ne  l'entreprend  que  sur  une  conjecture  qu'il  suffit 
de  rapporter  pour  en  faire  voir  .tout  le  foible.  11  prétend 
que  César,  dans  les  endroits  cités,  veut  seulement  dire  que 
les  Gaulois  se  servoient  de  l'écriture  dans  les  affaires  civi- 
les, quoiqu'ils  ne  l'emploïassenl  pas  à  d'aiitres  usages,  et 
que  le  mot  grœcis  a  été  ajouté  au  texte  de  cet  Historien. 
C'est  ce  qu'il  ne  s'est  mis  en  peine  de  justifier  par  au- 
cun manuscrit.  Ainsi  vous  voiez  suffisamment  de  quel  poids 
f)eut  être  sa  conjecture.  Et  quand  on  la  pourroit  soutenir , 
es  autres  preuves  en  auroient-elles  moins  de  force?  De  ces 
preuves  il  y  en  a  qui  sont  prises  des  anciens  monumens, 

Îrue  l'on  nous  a  conservés;  et  ces  anciens  monumens  con- 
irmenl  ce  que  nous  en  aprenent  les  Historiens  de  l'anti- 
quité. En  faut-il  davantage  pour  se  convaincre  d'un  fait  ?  et 
quelle  est  la  conjecture  qui  puisse  soutenir  les  regards  de 
cette  conviction  ? 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    13 

Mais,  direz-vous,  si  les  caractères  grecs  étoient  en  usa- 
ge dans  les  Gaules,  pourquoi  '  César  dit-il  lui-même  qu'é-  Cies.  iwd.  i.  s.  p. 
tant  obligé  d'écrire  à  Ciceron,  l'un  de  ses  Lieutenans,  qui  *®^"**^- 
ëtoit  alors  retranché  dans  la  Belgique,  il  le  fit  en  caractères 
grecs;  de  peur,  ajoîlte-t-il,  que  les  Gaulois  venant  à  in- 
tercepter ses  letres,  ils  n'eussent  connoissance  de  ses  des- 
seins ?  Rien  n'est  plus  facile  que  de  concilier  cet  endroit  de 
César  avec  les  précedens.  Il  nous  en  fournit  lui-même  le 
moïen,  '  lorsqu'en  faisant  la  division  des  Gaules,  il  nous  ^^  ^  ^ 
aprend  que  les  Belges,  les  Aquitains  et  les  Gaulois  propre- 
ment dits  avoient  une  langue,  des  loix  et  des  coutumes  dif- 
férentes les  uns  des  autres.  Ainsi  les  Belges  pouvoient  fort 
bien  ne  pas  avoir  l'usage  des  caractères  grecs,  quoique  les 
autres  Gaulois  s'en  servissent.  César  ne  risquoit  donc  rien 
en  écrivant  ses  letres  en  ces  caractères.  Que  si  l'on  pouvoit 
prouver  le  contraire,  il  faudroit  dire  que  César  ne  se  servit 

f)as  seulement  des  caractères  grecs,  mais  qu'il  emploïa  aussi 
a  langue  gréque.  Or,  quoique  cette  langue  fût  alors  fort 
connue  dans  la  Province  des  Romains,  et  peut-être  dans 
quelques  autres  endroits  des  Gaules,  elle  n'étoit  point  en- 
tendue des  Belges.  Au  reste  n'allez  pas  conclure  de  ceci, 
aue  les  Belges  n'eussent  encore  alors  aucune  connoissance 
u  secret  de  l'Ecriture,  non  plus'  que  n'en  avoient  les  Ger-  t.ic.  mor.  Gcr. 
mains,  qui  étoient  dans  leur  voisinage.  La  précaution  dont 
usa  César  dementiroit  elle  seule  votre  conséquence.  En 
effet,  elle  supose  bien  clairement  qu'ils  avoient  au  moins 
l'usage  des  caractères  romains.  Sans  cela  la  précaution  d'é- 
crire en  grec  auroit  été  inutile.  U  est  néanmoins  vrai,  que  cas.  bel. Ca».  i. 2. 
les  Belges,  '  et  particulièrement  les  Nerviens  qui  haoi-  p  '* 
toient  ce  que  l'on  a  nommé  depuis  la  seconde  Belgique, 
étoient  des  peuples  féroces,  qui  ne  faisoient  aucun  commer- 
ce, et  qui  n'usoient  pas  même  de  vin. 

XX.  Vous  pourriez  encore  vous  former  une  difficulté 
plus  forte,  ou  au  moins  plus  spécieuse  que  la  précédente. 
'  M.  Bouterouë,  dans  son  Traité  des  anciennes  Monnoïes,  bow,  mon.  de  Fr. 
nous  en  a  donné  plusieurs,  qu'il  ci-oit  être  des  Gaulois,  p- **-^- 
avant  qu'ils  subissent  le  joug  des  Romains.  Or  toutes  les 
légendes  de  ces  anciennes  pièces ,  si  l'on  en  excepte  une 
seule,  et  certaines  letres  de  quelques  autres,  sont  en  cara- 
ctères romains,  et  non  en  caractères  grecs.  Rien  donc  ne 
paroît  plus  opo.sè  h  l'autorité  de  'César  qui  assure,  que  les  Cse|^^])oi. Gai.  1. e. 

6 


14  ETAT  DES  LETHES 

Gaulois  usoient  des  caractères  grecs  dans  leurs  affaires, 
soit  publiques,  soit  particulières.  S'il  y  avoit  lieu  d'em- 
ploïer  ces  caractères,  assurément  ce  devoit  être  sur  la 
Monnoïe,  qui  avoit  cours  dans  le  public.  Nous  ne  nous 
piquons  pas  d'être  assez  habiles  dans  la  eonnoissance  des 
Antiques,  pour  prononcer  définitivement  sur  ces  pièces 
de  Monnoïe  ou  Médailles.  Seulement  nous  dirons,  en 
gênerai,  que  ces  sortes  de  monumens  pour  l'ordinaire  sont 
fort  équivoques;  à  moins  que  l'on  n'y  trouve  des  indices 
bien  marqués  pour  justifier  le  jugement  qu'on  en  porte. 
Sans  cela  on  leur  fait  signifier  tout  ce  que  1  on  veut.  Celui 
qui  aura  l'imagination  plus  heureuse,  y  réussira  le  mieux. 

XXI.  Après  tout  nous  ne  risquons  rien  d'accorder  à  l'é- 
gard des  pièces  dont  il  est  ici  question ,  que  celles  où  on 
lit  les  noms  de  quelques  peuples  des  Gaules,  sont  effecti- 
vement de  ces  peuples.  Mais  quelle  preuve  a-t-on  pour  [les 
faire  aussi  anciennes  qu'on  le  prétend?  On  n'en  donne 
point;  et  nous  n'y  en  voïons  aucune.  On  peut  donc  croi- 
re que  ces  monnoïes  ou  médailles  n'ont  été  frappées  qu'a- 
près que  les  Romains  eurent  réduit  les  Gaules  sous  leur 
obéissance  ;  et  par  conséquent  lorsque  les  caractères  romains 
eurent  pris  la  place  des  caractères  grecs,  au  moins  pour  les 
affaires  publiques.  Car  il  en  fut  sans  doute  de  l'écriture  com- 

Aug.  civ.  1.  19,  me  de  la  langue.  'Or,  S.  Augustin  assure  que  les  Romains 
victorieux  non-seulement  imposoient  le  joug  de  leur  auto- 
rité aux  Peuples  qu'ils  avoient  vaincus,  mais  qu'ils  les  obli- 
geoient  encore  à  parler  la  langue  du  vainqueur,  pour  établir 
une  plus  grande  tranquillité ,  et  une  union  plus  parfaite  en- 
tre les  Membres  de  l'Empire.  Quelle  difficulté  donc  y  auroit- 
il  de  regarder  ces  Médailles ,  ou  comme  '  des  marques  de 
quelques  révoltes  de  certains  cantons  des  Gaules  contre 
les  Romains,  ou  comme  une  concession  de  quelque  apa- 
rence  de  liberté,  que  les  Empereurs  purent  mire  à  quel- 
ques-uns de  ces  Peuples,  en  reconnoissance  des  services 
qu'ils  auroient  rendus  à  l'Etat?  on  n'en  trouve  rien  dans 
1  histoire ,  direz-vous  ;  mais  l'histoire  n'a  pas  tout  marqué. 
Aucun  ancien  Historien  ne  fait  mention  de  la  monnoïe  des 
Gaulois  ;  direz  -  vous  pour  cela  qu'ils  n'en  avoient  point  à 
leur  usage? 

XXII.  Ainsi,  bieji  loin  que  ces  médailles  contredisent 
l'usage  des  caractères  grecs  dans  les  Gaules,  elles  ne  font 


c.  7. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    15 

que  le  confirmer.  Il  n'y  faut  faire  que  la  moindre  atention 
pour  en  convenir.  Premièrement  '  la  légende  de  la  medail-  Bout.  iwa.  .i>.  52. 
le  que  l'on  croit  être  des  peuples  ou  de  Galais  ou  de  Gaux, 
est  en  caractères  grecs.  'En  second  lieu  l'alphabet  Gaulois,  p.  137.         ""' 
que  M'.  Boulerouë  a  tiré  des   légendes  des  autres  pièces, 
nous  représente  plusieurs  lelres  greques  insérées  parmi  les 
romaines.  Tels  sont  le  délia,  le  gamma,  Véta,  le  lambda, 
le  pi,  le  rhô,  le  sigma,  et  le  cht.  '  La  plupart  de  ces  mêmes  p.  376. 
letres  furent  encore  en  usage  dans  les  Gaules,  sous  la  pre- 
mière  race  de   nos  Rois.    On  n'en  peut  douter,  en  jetant 
les  yeux  sur  un  autre  alphabet,  (jue  nous  en  a  donné  le  mê- 
me Antiquaire,    après  l'avoir  tiré    des    monumens  de   ces 
temps-là.  '  G'est  ce  qui  a  fait  dire  à  l'Auteur  du  Traité  de  la  roi.  Gaui.  1. 1.  c. 
Religion  des  Gaulois,  que  les  François  avoient  emploie  les  *  •••  **• 
caractères    grecs,   même   jusqu'au   sixième  siècle,    en    les 
insérant  en  partie  parmi  les  caractères  romains.  Or  je  vous 
demande  d'où  est  venu  à  nos  Gaulois  ce  mélange  de  deux 
caractères      difîerens  ?     Pourroit  -  on     dire    avec    quelque 
aparence   de  vérité  qu'il   leur  soit  venu  de  ce  qu'ils  au- 
roient  reçu  d'abord  ces  deux  caractères,  ou  tous  deux  à  la 
fois,   ou  ainsi  mélangés?  Non  sans  doute.  Il  est  bien  plus 
naturel   de  croire  que  ce  mélange  est  arivé  de  ce  que  les 
Gaulois  ont  usé  des  deux  caractères,  successivement  les  uns 
après  les  autres.  Et  comme  ils  se  sont  enfin  fixés  aux  cara- 
ctères romains,  en  y  insérant  durant  plusieurs  siècles  sept  à 
huit  letres  gréques ,  il  est  évident  que  les  caractères  grecs 
sont  les  premiers  qui  aient  été  en  usage  dans  les  Gaules. 

XXIII.    Non  -  seulement   les   Gaulois,   après  s'être    soû-  (iv.) 
rais  aux  Romains,  se  servoient  encore  des  caractères  grecs 
ainsi  mélangés;  mais  ils  les  emploïoient  même  quelquefois 
sans  aucun  mélange,  au  moins  dans  leurs  usages  particuliers. 
'  Nous  en  avons  une  preuve  aussi  précieuse  que  remarquable:  Rom.  subt.i.  s.e. 
l'inscription   sépulcrale   du  Martyr  Gordien,    Messager    ou  **'  •"'  '^^^ 
Courier  des  Gaules  à  Rome  où  il  souffrit  le  martyre  pour 
la  foi  sous  les  Empereurs  Païens.  Cette  inscription  fut  trou- 
vée dans  le  cimetière  de  S'*.  Agnès  sur  le  chemin  de  No- 
mento,  et  fait  partie  des  anciens  monumens  ,  qui  forment 
ce  qu'on  nomme  Rome  souterraine.   Quoique  les  mots  en 
soient  latins,   elle  est  néanmoins  en  letres  gréques  fort  ru- 
des et  fort  grossières.  Il  y  est  marqué  que  toute  la  famille  de 
Gordien  souffrit  le  martyre ,  et  fut  aussi  inhumée  au  même 


l(i  ETAT  DES  LETHES 

endroit.  11  faut  par  conséquent  qu'elle  fût  allée  s'établir  à 
Rome.  Il  y  est  encore  marqué,    qu'Ythphile,    qui    y    est 

aualifiée  servante,  fit  dresser  cette  inscription.  Tout  le  mon- 
e  supose  qu'Ythphile  la  fit  mettre  en  caractères  usités 
dans  le  pais  de  Gordien  ;  car  cette  sorte  die  caractères  n'é- 
toit  point  en  usage  à  Rome.  Comme  ce  monument  est  le 
seul  qui  nous  reste  en  ce  genre  d'écriture,  nous  croïons  fai- 
re plaisir  au  lecteur  de  le, lui  mettre  ici  sous  les  yeux. 


0HÇ  vc:)pfHAi)VçvI^myypçHyçHvp\/ 


iv.)  Voici  de  quelle  manière  il  faut  lire  cette  inscription.  Le 

6  est  la  letre  que  les  Grecs  avoient  accoutumé  de  mètre  à 
la  tète  des  Epitaphes,  et  ne  signifie  rien  autre  chose  ici.  Le 
reste  se  doit  lire  de  la  sorte  :  JsOordianus  Galliœ  nunsiusju- 
gulatus  pro  fide  cum  familia  tota ,  qu  iescun  t  in  pace .  Ythphila 
ancilla  fecit.  Les  réllexions  qu'il  y  auroit  à  faire  sur  cette 
ancienne  écriture  se  présentent  d'elle-mèmes  ;  et  nous  les 
abandonnons  au  lecteur.  Il  y  remarquera  sans  peine  que 
Véta  est  mis  par-tout  pour  Yiota. 

XXIV.  On  ne  sauroit  dire  au  juste,  en  quel  temps  les 
Gaulois  commencèrent  à  avoir  connoissance,  et  à  faire  usage 
du  secret  de  l'écriture.  Il  n'y  a  gueres  que  deux  opinions  à 
prendre  sur  cela.  Ou  ils  le  reçurent  par  le  canal  des  Pho- 
céens, établis  à  Marseille  près  de  600  ans  avant  Jesus- 
Christ,  ou  ils  l'aporterent  avec  eux  d'Asie  en  Europe.  La 
première  de  ces  deux  opinions  paroît  fort  naturelle;  et  le 
préjugé  est  en  sa  faveur.  Car  les  caractères  dont  usoient  les 
Gaulois  étoierit  grecs;  vous  le  venez  de  voir.  D'ailleurs  les 
just.hisi. I.43.C,  Phocéens  étoient  sortis  de  Grèce;  '  et  leur  établissement 
4.  p.  610.  (jj^jjg  jgg  Gaules  y  renouvella   tellement   la   face   du   pais, 

qu'on  l'auroit  pris  pour  la  Grèce  même,  au  jugement  d'un 
ancien  Historien.  Il  est  vrai  que  les  caractères  dont  se  ser- 
voient  les  Gaulois,  et  tels  que  nous  les  venons  de  représen- 
ter. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C. 


17 


ter  pour  la  plupart,  sont  beaucoup  plus  rudes  et  grossiers, 
que  ceux  qui  étoient  à  l'usage  des  Marseillois.  Cela  paroit 
par  ce  qui  nous  reste  de  leurs  anciennes  inscriptions.  Ainsi 
ceux  des  Gaulois  doivent  passer  pour  plus  anciens  que 
les  autres.  La  rudesse  et  la  grossièreté  en  ce  genre  est  une  mar- 
que de  plus  grande  antiquité.  Mais  on  peut  répondre  à  cette 
difficulté,  en  disant  que  cette  diflerence  n'est  venue  que  par 
succession  de  tems,  et  de  ce  que  les  Marseillois  faisant  un  plus 
fréquent  usage  de  l'art  d'écrire  que  les  Gaulois,  ils  ont  plus 
poli  leurs  caractères  à  force  de  s'en  servir.  En  effet  nous 
avons  d(jh  remarquiî  que  les  Gaulois  n'écrivoient  rien.  Au 
contraire  les  Marseillois  écrivoient  beaucoup;  et  plus  de 
deux  siècles  avant  Jesus-Christ,  ils  nous  ont  donné  plu- 
sieurs Auteurs  célèbres.  De  sorte  qu'ils  auront  fait  en  quel- 
que sorte  dans  les  Gaules  à  l'égard  de  leurs  caractères , 
ce  que  l'on  suppose  que  fit  Ilomere  à  l'égard  de  ceux  que  Cad- 
mus  porta  de  Pnénicie  en  Grèce. 

XXV.  L'autre  opinion  qui  supposeroit  que  les  Gaulois 
apportèrent  avec  eux  d'Asie  en  Europe  le  secret  de  l'écriture, 
ne  laisse  pas  d'avoir  aussi  sa  vrai-semblance.  '  Elle  est 
même  préférable  à  la  première,  selon  l'Auteur  du  Traité  de 
la  Religion  des  Gaulois.  C'est  ce  qu'il  tâche  de  montrer  par 
divers  raisonnemens.  11  se  fonde  principalement  sur  la  ru- 
desse et  grossièreté  des  caractères  dont  se  servoient  les 
Gaulois.  '  Ce  que  l'on  y  trouve  d'affamé*  dans  l'espèce  par- 
ticulière, pour  parler  en  termes  de  l'art,  lui  fait  croire  que 
ces  caractères  sont  les  mêmes  que  Cadmus  porta  en  Grèce. 
On  pourroit  encore  fortifier  cette  opinion  par  la  réflexion 
que  nous  avons  faite  au  sujet  des  premières  Sciences  que  les 
Gaulois  cultivèrent,  et  dont  ils  avoient  apporté  les  pre- 
mières semences  dans  les  Gaules.  Car  si  les  Gaulois  appor- 
tèrent avec  eux  et  la  doctrine  de  l'immortalité  de  l'ame,  et 
la  notion  des  autres  Sciences,  comme  de  l'Astronomie,  de 
la  Géométrie,  etc. ,  pourquoi  ne  voudroit-on  pas  qu'ils  aient 
apporté  également  1  art  de  l'écriture?  De  plus,  '  il  est  mo- 
ralement impossible  ,  remarquent  des  critiques ,  de  cul- 
tiver les  Sciences,  et  surtout  l'Astronomie,  sans  le  secours 
de  quelque  manière  d'écrire.  En  effet,  sans  ce  secours  com- 
ment compter  avec  exactitude  les  années  déjà  passées  ;  com- 
ment marquer  que  telles  et  telles  étoiles  auront  été  tant  de 
tems  à  faire  leur  cours  ;  et  ainsi  du  reste  ? 
«*  C 


Rel.  Ganl.  I. 
i.  i>.  42-43. 


p.  43.     'Cad. 
maigre. 


Gesner  in  Gen.  5. 
q.6.p.  138ILJ)(lit. 
mise.  c.  29.  p.  213 
2) 


18  ETAT  DES    LETRES 

XXVI.  Après  tout ,  quelque  plausibles  que  paroissent 
ces  raisons,  il  est  facile  d'en  montrer  la  foiblesse.  Par  exem- 
ple, celle  qui  est  fondée  sur  la  rudesse  et  la  grossièreté  des 
caractères  de  l'inscription  que  vous  avez  vûë  ci-dessus, 
n'est  pas  d'un  si  grand  poids  qu'on  pourroit  d'abord  se  l'i- 
maginer. Toute  sa  force  consiste  à  supposer  que  la  figure 
grossière  de  ces  caractères  les  approche  plus  de  la  forme 
des  premières  letres  gréques,  qui  étoient  phéniciennes, 
que  de  la  forme  de  celles  qui  ont  été  depuis  emploïées  dans 
la  Grèce.  Mais  il  ne  faut  que  faire  usage  de  ses  yeux  pour 
se  convaincre  du  contraire.  Que  l'on  se  donne  la  peine  de 
comparer  les  caractères  de  l'inscription   dont  il   s  agit  ici, 

Paiicgr.iib.4. 0.   'avec  Ics  divcrs   alphabets   grecs  que  Dom  de  Montfaucon 
■'■      ■  nous  a  donnés;  et  l'on  trouvera  beaucoup  plus  de  confor- 

mité entre  ces  caractères  et  les  letres  gréques  du  moïen 
âge,  qu'entre  ces  mômes  caractères  et  les  letres  phéni- 
ciennes. D'ailleurs  il  semble,  que  l'on  ne  fait  pas  assez 
piin.hi3t.iib.7.c.  d'attention  '  à  ce  que  Pline  l'ancien  et  Tacite  nous  appren- 
n*!'i4?'  *""■  '■  "■  fent  de  la  forme  des  plus  anciennes  letres  gréques.  Ces  Au- 
teurs, parlant  des  tems  les  plus  reculés,  assurent  sans  dé- 
tour qu'elles  étoient  presque  entièrement  semblables  aux 
letres  latines  ou  romaines  de  leur  tems.  Veteres  grœcas, 
dit  Pline,  f\nsse  easdempene  quœrmnc  suntlatinœ.  Et  forma, 
ajoute  Tacite,  litcris  latinis,  quœ  veterrimis  Grœcorum.  C'est 
ce  que  Pline  prouve  par  la  confrontation  qu'il  en  avoit  faite 
lui-même  sur  une  ancienne  table  d'airain  nommée  Del- 
phique,  que  l'on  conservoit  h  Rome  dans  la  Bibliothèque 
du  Palais.  On  y  lisoit  une  inscription  qui  montroit  qu'elle 
avoit  été  dédiée  à  Minerve  par  quelque  Prince  Grec.  Or 
qu'elle  difTérence  entre  les  caractères  usités  chez  nos  an- 
ciens Gaulois,  et  les  lettres  romaines  du  tems  de  Pline  et 
de  Tacite  ! 

XXVII.  Ce  n'est  pas  encore  tout.  Pourroit-on  dire  avec 
quelque  fondement,  que  les  caractères  dont  se  servoient  les 
Gaulois  ont  eu  un  privilège,  qui  n'a  été  accordé  à  aucun 
des  autres,  et  soutenir  qu'ils  n'ont  jamais  souffert  ni  altéra- 
tion ni  changement?  On  sait  que  les  caractères  grecs  dans 
leur  origine  étoient  les  mêmes  que  les  phéniciens,  et  que 
les  latins  ou  romains  aussi  dans  leur  origine  étoient  les  mê- 
mes que  les  grecs.  Cependant  quelle  différence  s'est  glissée 

Hcrod.i.5.p.3oo.  depuis  Ics  premiers  tems  entre  les  uns  et  les  autres.  'Long- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    19 

tenis  avant  le  sit'cle  d'Hérodote,  les  Grecs  en  avoient 
iluuigé  et  le  son  et  la  manière  de  les  peindre.  Pourquoi  la 
même  chose  ne  sera-t-elle  pas  arrivée  aux  caractères  qui 
étoient  à  l'usage  des  Gaulois?  Il  est  d'autant  plus  aisé  de  se 
le  persuader,  que  la  langue  gauloise  étoit  plus  différente  de 
la  gréque.  Seulement,  à  s'en  tenir  à  l'inscription  que  nous 
avons  rapportée,  on  y  trouve  des  preuves  suffisantes  d'un 
changement  visible.  En  effet,  voit-on  nulle  part  dans  toute 
l'antiquité  gréque  Véta  employé  au  lieu  de  Vïôta,  comme  il 
est  dans  l'inscription  ?  La  forme  qu'ont  le  gamma,  le  nu, 
et  le  sigma  de  la  même  inscription ,  est-elle  la  même  que 
chez  les  plus  anciens  Grecs?  11  est  vrai  qu'un  de  leur 
gamma  est  à  peu  près  fait  de  même  que  celui  de  l'inscrip- 
tion ;  mais  avec  cette  différence  considérable,  que  l'un  est 
tourné  comme  Yalpha,  et  l'autre  comme  Yupsïlon.  Ces  ca- 
ractères gaulois  étoient  pourtant  grecs  dans  leur  origine. 
Que  s'ils  ont  souffert  du  changement,  comme  l'on  en  doit 
convenir,  on  ne  peut  donc  pas  s'en  servir  pour  juger  de  la 
forme  des  caractères  originaux,  ni  conclure  de  la  forme 
qu'on  leur  voit,  en  faveur  de  leur  antiquité. 

XXVIII.  De  même  la  seconde  raison,  qui  parott  for- 
tifier l'ancienneté  de  l'usage  de  l'écriture  chez  les  Gau- 
lois, n'est  pas  plus  irréfragable  que  la  précédente.  Com- 
bien de  difficultés  fait-elle  naître  !  Si  les  Gaulois  apportè- 
rent cet  art  en  Europe ,  pourquoi  les  autres  peuples  ne  le 
retinrent-ils  pas  aussi  dans  leur  dispersion?  11  est  bien  cer- 
tain que  ni  les  Egyptiens,  ni  les  Chinois  ne  le  firent  pas. 
'  Ce  fut  pour  suppléer  à  ce  défaut  que  les  premiers  invente-  Tac.  iWJ, 
rent  leurs  hiéroglyphes,  et  que  les  autres  donnèrent  l'ê- 
tre aux  caractères  dont  ils  se  servent  encore,  et  qui  ap- 
prochent en  quelque  manière  des  hiéroglyphes  d'Egypte; 
chaque  caractère  signifiant  un  ou  plusieurs  mots.  11  est  en- 
core certain  que  ni  les  Grecs ,  ni  les  peuples  d'Italie  n'appor- 
tèrent point  non  plus  avec  eux  dans  leur  dispersion  le  secret 
de  l'écriture.  'Les  plus  anciens  Auteurs  nous  assurent  que  Koscb.praepar.cv. 
les  Grecs  le  reçurent  des  Phéniciens,  et  les  Italiens  des  c'ap.'i.'yrlt.^'im] 
Corinthiens  et  des  Arcadiens  :  ceux-ci  par  le  canal  de  De-  ^''""  ^"'" 
marate  et  d'Evandre,  ceux-là  par  le  ministère  de  Cadmus. 
Combien  d'autres  nations  ont  été  long-tems,  et  sont  en- 
core aujourd'hui  sans  l'usage  de  cet  art  merveilleux!  Vous 
direz  sans  doute ,  que  les  Gaulois  furent  en  cela  plus  avi- 

C  ij 


20  ETAT  DES  LETUES 

SCS  et  plus  attentifs  que  les  autres  Nations,  comme  nous 
avons  montré  qu'ils  l'avoient  été  réellement ,  en  ce  qui  re- 
garde l'opinion  de  l'immortalité  de  l'ame.  Mais  il  j^  a  beau- 
coup de  différence  entre  ce  point  de  doctrine ,  qui  peut  pa- 
roître  intéressant  aux  uns,  sans  le  paroîtrè  aux  autres,  et 
l'art  de  l'écriture ,  qui  porte  avec  lui  toutes  les  marques  vi- 
sibles de  son  utilité  pour  les  usages  de  la  vie.  Autre  difficul- 
té. Si  les  Gaulois  ont  eu  de  tout  tems  l'art  de  l'écriture, 
comment  a-t-il  pu  se  faire  que  les  Germains,  qui  étoient 
leurs  voisins,  et  comme  leurs  frères,  soient  demeurés  tant 
de  siècles  dans  l'ignorance  d'un  art  qui  a  tant  d'utilités? 
Tac.  mor.  Cer.  n.  '  Ni  Ics  liommcs  ni  Ics  fcmnics  n'en  avoient  encore  nulle 
*'•  coimoissance ,  (  *  )  au  tems  que  Tacite  faisoit  la  description 

des  mœurs  de  cette  Nation. 

XXIX.  Enfin  la  troisième  raison  prise  de  la  nécessité  du 
secours  de  l'écriture ,  pour  cultiver  les  Sciences,  n'est  pas 
plus  sans  réplique  que  les  deux  autres.  Un  seul  fait ,  qui  s'est 
passé  chez  les  Gaulois  mêmes  suffit  pour  l'infirmer.  Nous 
ne  ferons  que  le  toucher  ici.  Vous  l'aurez  plus  en  détail 
Os.  bel.  (iai.  1.  daus  la  suite.  '  César  as.sûre  que  les  Druides  Gaulois  ensei- 
6p.  227.2iM.  giloient  la  Théologie,  l'Astronomie,  la  Géographie  et  la 
Physique ,  sans  rien  écrire  eux-mêmes,  ni  faire  écrire  à  leurs 
disciples.  Il  n'est  donc  pas  impossible  de  se  passer  de  l'art 
de  l'écriture  pour  cultiver  les  sciences.  De  tout  ceci  con- 
cluez ,  qu'on  ne  peut  rien  établir  de  certain  sur  le  tems 
auquel  nos  Gaulois  ont  commencé  à  faire  usage  du  secret 
de  l'écriture.  C'est  une  époque  trop  éloignée  de  nous,  et 
sur  laquelle  nous  avons  trop  peu  de  lumières ,  pour  la  pou- 
voir fixer.  Concluez  encore  que  les  deux  opinions,  qu'on 
peut  se  former  sur  cela,  ne  sont  pas  sans  difficultés,  quoi- 
que la  première  en  souflre  moins  que  l'autre.  Concluez  en- 
fin ,  que  long-tems  avant  que  les  Romains  pénétrassent  dans 
les  Gaules,  les  Gaulois  possedoient  l'art  d'écrire,  et  que 
leurs  caracléi-es  étoient  grecs  dans  leur  origine;  quoique 
dans  la  suite  ils  aient  été  sujets  à  quelque  changement, 
comme  tous  les  autres  qui  ont  été  à  l'usage  des  diïferentes 
nations.  C'est-là  tout  ce  que  l'on  peut  dire  d'assuré  sur  ce 

Tac.  ibid.  n.  3.  (')' Tache  ilil  ailleurs  qu'on  avoit  iroavé  gcrs  ;  fl  eux-mêmes    les    rapportoicut  i 

sur  les  conliiis  de  laOormanic  et  de  la  Rlié-  lÛlisse.  Us   pouvoient  èirc  ou  des  Hclvo- 

lie  ,   des  (oiubeaux  el  d'autres    moiiuniens  liens,  ou  des  colonies  que  les  Gaulois,  se- 

r   ^    jjgii    gji    I     avec    des   iuscriplious  eu  Icircs  (;rcques.  ion  '  César,  cnvoïuicnt  eu  Germauie. 

6    D    'ui  '    ^^^   ''^^   luoQunicus   leur   étoient   étrao- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    21 

sujet.  Le  reste  n'est  fondé  que  sur  des  conjectures.  Peut-être 
même  nous  y  sommes-nous  trop  étendus,  au  gré  de  ceux 
qui  n'aiment  pas  à  approfondir  les  choses  médiocres.  Pas- 
sons maintenant  aux  autres  particularités ,  qui  regardent 
l'usage  de  l'écriture  dans  les  Gaules. 

XXX.  On  remarque  ordinairement  trois  manières  d'é- 
crire ou  de  peindre  les  caractères  alphabétiques.  La  pre- 
mière et  la  plus  ancienne  est  d'écrire  de  la  droite  à  la  gau- 
che .  Celle-ci  a  été  propre  aux  Phéniciens,  aux  Hébreux , 
aux  Chaldéens,  aux  Arabes;  et  on  la  retient  encore  à  pré- 
sent, lorsqu'on  écrit  les  langues  orientales.  '  Il  n'y  a  pas  Paia;.  gr.i.a.c.i. 
lieu  de  douter  que  ce  ne  fût  aussi  la  première  manière  d'é-  ^'  *'^" 
crire  chez  les  Grecs;  puisqu'ils  avoient  été  instruits  de  l'art 
de  l'écriture  par  les  Phéniciens.  Que  les  Gaulois  l'aient 
suivi  aussi ,  c'est  ce  que  l'on  ne  peut  pas  assurer ,  parce  que 
l'on  n'a  point  de  preuves  certaines,  ou  qu'ils  aient  apporté 
d'Asie  le  secret  de  l'écriture,  ou  qu'ils  l'aient  pris  des  Orien- 
taux. La  seconde  manière,  (jui  depuis  fort  long-tems  est 
la  plus  commune  en  Europe,  comme  étant  la  plus  naturel- 
le, est  d'écrire  de  la  gauche  à  la  droite.  Enfin  la  troisième 
manière ,  est  d'écrire  tout  ensemble  de  la  droite  à  la  gau- 
che et  de  la  gauclic  à  la  droite  :  à  peu  près  comme  un  la- 
boureur forme  ses  sillons  en  fendant  la  terre  avec  sa  char- 
rue ,  et  en  allant  tantôt  à  droit,  tantôt  à  gauche.  De  sorte  • 
que  si  l'on  commence  la  première  ligne  de  la  gauche  à  la 
oroite ,  on  tire  la  seconde  de  la  droite  à  la  gauche ,  et  ainsi 
des  suivantes,  sans  retourner  chercher  le  commencement 
de  chaque  ligne ,  comme  nous  faisons ,  pour  les  tirer  toutes 
de  la  gauche  à  la  droite. 

XXXL  Les  anciens  Grecs  ont  emploie  cette  dernière 
manière  d'écrire.  Ils  l'exprimoient  en  leur  langue  par  ce 
mot  grec  fio-jcTfoçr.^ùv,  qui  signifie  proprement  suivre  le  même 
mouvement  que  les  bœufs  qui  labourent.  Des  voyageurs 
exacts  ont  rapporté  de  Grèce  plusieurs  inscriptions  de  cet- 
te nature.  'Un  Ecrivain  moderne  prétend  que  les  Gaulois  Rd.  Caui.  i.i.p. 
ont  aussi  fait  passer  quelquefois  à  leurs  usages  cette  manière  sl-oô'.f  "  '^'  *'  '"' 
d'écrire,  et  que  l'on  en  trouve  des  preuves  dans  les  légen- 
des de  leurs  monnoïes,  et  dans  leurs  autres  inscriptions.  Il 
a  pu  aisément  se  faire  que  les  Gaulois  dans  les  tems  les  plus 
reculés,  aient  écrit  comme  les  Grecs  de  la  droite  à  la  gau- 
che et  de  la  gauche  à  la  droite  alternativement;  quoiqu'on 


22  ETAT   DES  LETKES 

n'en  ait  aucune  marque  assurée.  Mais  qu'ils  aient  conti- 
nué de  le  faire  jusqu'au  sixième  siècle,  auquel  appartiennent 
les  monumens  que  l'on  apporte  en  preuves,  c'est  ce  qu'il 
est  difficile  de  se  persuader.  En  efTet,  est-il  croïable  qu'en 
ce  tems-là  ,  où  la  même  manière  d'écrire  que  nous  sui- 
vons à  présent,  et  qui  est  tout  ensemble  la  plus  commode 
et  la  plus  naturelle,  étoit  toute  commune  en  Europe  de- 
puis plusieurs  siècles,  les  Gaulois  aient  voulu  faire  usage 
de  la  manière  opposée?  Ne  sent-on  pas  combien  il  est  gê- 
nant d'écrire  de  la  droite  à  la  gauche,  pour  ceux  qui  sont 
habitués  d'écrire  de  la  gauche  à  la  droite.  Il  est  vrai  que 
les  légendes  des  six  médailles  que  l'on  produit,  sont  écri- 
tes en  partie  de  la  droite  à  la  gauche.  Mais  cela  ne  doit 
pas  arrêter.  Ce  ne  peut  être  qu'une  faute  du  Graveur, 
qui  au  lieu  de  graver  de  la  droite  à  la  gauche  les  coins, 
aiec  lesquels  ces  médailles  ont  été  frappées  ,  les  aura 
gravés  à  rebours.  Or  l'on  sait  qu'il  en  est  des  gravures 
qui  doivent  servir  à  dos  empreintes,  comme  des  caractè- 
res à  imprimer.  11  les  faut  ranger  de  la  droite  à  la 
gauche  en  formant  la  planche ,  afin  que  les  appliquant 
sur  le  papier,  l'imprimé  se  trouve  tourne  de  la  gauche  à  la 
droite. 

XXXII.  Avant  que  de  finir  ces  sortes  de  minuties,  il 
nous  reste  encore  à  dire  quelque  chose  sur  les  autres  ma- 
nières d'écrire  qui  ont  été  en  usage  chez  les  Gaulois.  L'his- 
toire ne  nous  apprend  rien  en  particulier  touchant  la  ma- 
tière dont  ils  se  servoient  pour  peindre ,  ou  graver  le  peu 
qu'ils  écrivoient  anciennement.  Mais  il  est  à  croire  qu'ils 
n'avoient  point  en  cela  d'autres  usages  que  les  autres  peu- 
ples qui  savoient  l'art  de  l'écriture.  Il  est  encore  à  présu- 
mer ,  qu'ils  surent  s'approprier  les  nouvelles  inventions , 
dont  l'expérience  et  le  tems  enrichirent  cet  art,  à  mesu- 
re qu'elles  furent   découvertes  et  connues  dans  les  Gaules. 

iior.  rech.  Gani.  '  Les  plus  ancicnncs  manières  d'écrire ,  remarque  un  de  nos* 
Auteurs ,  furent  sur  les  cendres ,  puis  sur  des  briques  et  des 
tables  de  pierre ,  ensuite  sur  des  plaques  de  divers  métaux , 

ioh.  18. 24.  sur  l'ivoire ,    et  sur   autres   choses  semblables.  '  Le  Livre 

de  Job  fait  mention  de  l'usage  d'écrire  sur  la  pierre  et  sur 

Dent.  10. 1-i.         des  lamcs  de  plomb.  '  Ce  fut  sur  des  tables  de  pierre ,  que 

cics^i.ci.Cai.  1. 1.  Moyse  reçut   la   loi   écrite   du  doigt  de   Dieu  même.  '  Les 
Gaulois  au  tems  de  César  écrivoient  aussi  sur  des  tables. 


DANS  LES  GAULES  AYANT  J.  C.    23 

On  ne  dit  pas  de  quelle  matière.  Vous  en  avez  vu  un  exem- 
ple chez  les  Helveliens,  qui  avoient  écrit  de  la  sorte  le 
dénombrement  de  leurs  famille?.  Nous  retenons  encore 
aujourd'hui  cette  manière  d'écrire,  par  rapport  aux  In- 
scriptions, aux  ^Epitaphcs,  et  autres  pirces  semblables,  que 
l'on  veut  faire  passer  jusqu'à  la  dernière  postérité. 

XXXIIL    Ces    premières    inventions   firent   découvrir   le 
secret  des  tabletes  de  bois.  '  Et  comme  le  cèdre  est  incor-  Bor.  iwa. 
ruptible  à  cause  de  son  amertume,   on   choisissoit   ce  bois 
pour  les  écrits   les  plus  importants.  De  là   cette  expression 
célèbre  dans  les  anciens,   pour  faire  l'éloge   des   plus   ex- 
cellens  ouvrages  :  et  cedro  cligna  loquuti.  Cette  sorte  de  ta- 
liletes  étant  faites  des  troncs  d'arbres,  que  les  Latins  nom- 
ment candex  ou  codex,  cette  dénomination  passa  aux  table- 
les  mêmes;   et  de-là  est  venu  le  terme   françois  de  cahier,  (vi.) 
L'usage  des  tabletes  .subsiste   encore  à  présent  ;  mais  elles 
sont  pour  l'ordinaire  do  toute    autre   matière  que  de  bois. 
La  même  raison  qui  faisoit  préférer  le  cèdre  aux  autres  ar- 
bres, porta  à  écrire  aussi  .sur  la  cire,  qui  est  incorruptible 
de  sa  nature.  On  y  ècrivoit  ordinairement  les  testamens, 
afin  de  les  mieux  conserver.  C'est  ce  qui  a  fait  dire  à  Ju- 
venal  :  ceras  implere  capaces.  '  S.  Isidore  de  Seville  témoigne  isid.  orig.  i.7p.3c. 
que  les  Grecs  et  les  Toscans  furent  les  premiers  qui   em-  '     ^' 
ploïerent    la    cire    pour    écrire.    Ils    y   écrivoient  avec  ufi 
poinçon  de   fer,    comme   on   fnisoit   sur   les   autres   choses 
que  nous  venons  de  nommer.  Mais  les   Romains  aïant  dè- 
ffndu  l'usage  de  cette  sorte  de  poinçons,    l'on   y  substitua 
un  style  fait  de  quelque  os  d'oiseau,  ou  d'autre  animal.  '  On  Bor.  iimi. 
se  servoit  au.'^si  de  roseaux  taillés  en  forme  de  plumes.  Ainsi 
l'on  ècrivoit  en  gravant. 

XXXIV.  Dans  la  suite  des  tems  on  s'avisa  de  le  faire 
aussi  en  peignant  '  avec  diflerentes  espèces  d'encre.  Cette  ibiJ- 
nouvelle  manière  d'écrire  fit  inventer  d'autres  matières  pro- 
pres à  recevoir  l'écriture.  On  choisit  les  ècorces  les  plus 
déliées  de  certains  arbres,  de  certaines  plantes,  et  les  peaux 
mêmes  des  animaux,  que  l'on  prèparoit  pour  cet  60*61.  Le 
premier  endroit  où  l'on  commença  à  préparer  ainsi  ces 
peaux,  fut  la  ville  de  Pergame  en  Asie.  C'est  ce  qui  leur 
fit  donner  par  quelques  Latins  un  nom,  dont  nous  avons 
fait  celui  de  parchemin.  '  Elles  sont  néanmoins  plus  con-  isid.  iwd.  5  3. 
nues   dans  les  Auteurs  de   la  meilleure   latinité,  sous  le 


2i  ETAT   DES  LETRES 

nom  de  membrana.  On  les  nommoit  ainsi  à  cause  des  mem- 
bres des  animaux,  que  l'on  en  dépouilloit.  Les  anciens 
avoient  du  parchemin  de  trois  différentes  couleurs;  de 
blanc,  de  jaune  et  de  couleur  de  pourpre.  A  Rome  l'on  ne 
goûtoit  pas  le  parchemin  blanc,  parce  qu'il  est  trop  sujet 
à  se  salir,  et  qu'il  éblouit  la  vûë  aux  J^ecteurs.  On  écri- 
voit  ordinairement  en  leires  d'or  ou  d'argent  sur  le  par- 
chemin couleur  de  pourpre.  Cet  usage  passa  assés  avant 
dans  les  siècles  de  l'Eglise;  et  il  se  voit  encore  aujour- 
d'hui quelques  exemplaires  des  Evangiles  écrits  de  cette 
sorte. 

XXXV.  Les  Egyptiens,  de  leur  côté,   se   servirent   pour 

Bor.  ibid.  écHrc  dc  l'écorcc,  ou  de  la  mouelle  d'un  arbrisseau  '  nom- 

mé papyrus.  Il  en  croissoit  autrefois  une  grande  quantité 
le  long  du  Nil.  C'est  de  cet  arbrisseau  que  notre  papier  a 
tiré  son  nom;  quoiqu'il  soit  fait  avec  du  vieux  drapeau, 
ou  vieux  linge  pilé  fort  menu.  Les  Chinois  font  le  leur 
avec  de  la  soie.  Aussi  est-il  plus  fin  et  plus  délié  que  le  nô- 
tre. L'usage  du  papier  tel  que  nous  l'avons,  est  d'une  assés 
grande  antiquité.  C'est  ce  que  les  anciens  Auteurs   latins 

isiii.  iiiid.  \  i.       nomment  charta,  ou  chartœ.  '  L'on  raporte  la  gloire  de  son 
invention  à  la  ville  de  Memphis  en  Egypte.  (*)  Avant   que 
l'usage  du  parchemin  et  du  papier  passât  aux  Romains,  ils 
.    s'avisèrent  de  se  servir  de  peaux  fort  déliées,  qui  se  trou- 
vent en  certains  arbres,  entre  le  bois  de  ces  arbres  mômes 

B.  r.  ibid.  et  Icur  écorcc.   '  On  nommoit  liber  cette  seconde  peau  ;  et 

de  là  se  sont  formés  les  noms  francois  de  livre,  libraire  et 
librairie.  Anciennement  au  lieu  de  plier  ces  écorces,  ce 
parchemin,  ce  papier,  comme  nous  le  plions  aujourd'hui, 
on  les  rouloit,  à  mesure  que  l'on  écrivoit  dessus  ;  et  le  nom 
latin  que  l'on  donnoit  à  ces  rouleaux,  est  passé  dans  notre 
langue  comme  les  autres.  Nous  disons,  un  volume,  des  vo- 
lumes ;  quoique  nos  livres  soient  composés  de  feuilles  cou- 
pées, reliées  ensemble.  Les  anciens  étoient  plus  curieux 
que  nous  ne  le  sommes,  d'avoir  des  livres  richement  condi- 

Hier.  cp.  18.  p.  43.  tionés.  '  Outrc  la  couleur  de  pourpre  que  l'on  donnoit  au 
velin,  et  l'or  qu'on  y  cmploïoit  au  lieu  d'encre,  on  avoil  en- 
core le  soin  d'enrichir  de  pierres  précieuses  la  couverture 

des 

(')  On  peut  voir  laDisserta'ion  anssi-avan-       donnée  snr  celle  matière  dans  le  Iroisiéme 
tu  que  curieuse,  que  Dom  de  Monlfaneon  a       volume  du  Supplément  d<!  ses  Antiquités. 


M. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    25 

des  livres.  Et  dans  les  mêmes  siècles  de  l'Eglise  on  y  pei- 
gnoit  en  dehors  pour  l'ordinaire  un  Christ  mourant.  Voilà 
ce  que  l'on  peut  dire  de  plus  vraisemblable  sur  l'origine  des 
Sciences  dans  les  Gaules.  Voïons  maintenant  quel  en  a  été 
le  progrès. 

XXXVL  Chaque  Nation  civilisée  a  eu  ses  Savans  et  ses 
Docteurs,  qui  ont  pris  soin  d'y  étendre  l'Empire  des  Le- 
tres,  et  d'y  faire  lleurir  les  Sciences  et  les  beaux  Arts.  Cet 
avantage  n'a  point  manqué  à  nos  Gaulois.  Que  l'on  re- 
monte jusqu'aux  premieis  siéclçs,  où  ils  ont  commencé  à 
être  connus,  et  l'on  verra  qu'ils  ont  toujours  eu  leurs  Sa- 
vans presqu'en  tout  genre  de  Literature.  '  Ceux  entre  les  sirab.  ub.  i.  p.s. 
anciens  qui  ont  parlé  de  la  Poésie  avec  plus  de  justesse,  dit  î.'i.^KO.^.""^' 
Slrabon,  l'ont  comptée  pour  la  première  Science  que  les 
hommes  aient  cultivée.  Elle  a  eu  cours  dans  le  monde 
avant  l'Histoire,  la  Philosophie,  et  même  avant  toute  autre 
sorte  de  Prose.  '  En  clTet,  nous  voïons  par  les  Livres  sacrés,  Bor.  rech.  Caui. 
que  les  plus  anciennes  Nations  ont  eu  leurs  premières  His-  ^"^' 
loires  en  vers  non  écrits.  Avant  que  l'on  s'avisât  de  ré- 
diger l'Histoire  en  écrit,  on  la  comprenoit  en  une  certai- 
ne Poésie,  dont  on  instruisoit  le  Peuple,  qui  la  retenoit 
sans  peine  à  cause  de  la  cadence,  et  (jui  la  chantoit  mê- 
me pour  l'ordinaire.  Celte  pratique  a  été  en  usage  chez 
les  Grecs,  comme  chez  les  autres  Nations.  Et  c'est  de  cette 
unique  manière  que  les  Gaulois,  qui  n'écrivoient  rien,  sa- 
voient  leur  propre  Histoire.  '  De-là  est  venue  la  coutume, 
qui  vit  encore  en  France  et  ailleurs,  de  faire  des  chansons 
sur  les  événemens  les  plus  mémorables.  Aussi  est-ce  la 
Poésie  qui  a  produit  dans  les  Gaules  les  premiers  Savans 
que  l'on  sache  y  avoir  cultivé  publiquement  les  Letres.  '  Ti-  Amm.  1. 15.  p.  ss. 
mogenes,  qui  écrivoit  sous  Auguste,  met  cette  sorte  de 
Savans  à  la  tête  de  ceux  qu'il  dit  avoir  travaillé  à  chas- 
ser des  Gaules  l'ignorance  et  la  barbarie,  et  à  y  faire  ré- 
gner en  leur  place  les  belles  connoissances. 

XXXVU.  '  On  nommoit  Bardes  ceux  qui  faisoient  ain.si  suab.  i.*.  p.iso. 
profession  de  la  Poésie.  '  Ce  nom  leur   éloit   venu,   selon  Fcsi.  1. 2.  p.  «. 
Fcstus,  d'un  mot  Celtique,    qui   signifioit   un   Chantre    ou 
Chanteur.    '   Les   Bardes    en    efTet    étoient    tout    ensemble  sirab.  ibid. 
les  Musiciens  et  les  Poètes  des  Gaulois.  '  Ils  faisoient  leur  Luca.  bei.  dv.  1. 
occupation  ordinaire  de   composer  des   Poëmes  sur  les  ac-  ''  ^'  *"'**'' 
tions  éclatantes  des  Héros  de  leur  Nation,  et  de  transmet- 
Tome  I.  P/ern.  Part.  1) 


20  ETAT    DES    LETKES 

tre  par-là  à  la  postérité  la  mémoire  de  leur  valeur.  C'est 
ce  que  Lucaiii  a  assez  bien  exprimé  en  ces  li'ois  vers  : 

Vos  quoiiuu  qui  fortes  animas,  lx;lloquu  pcruiiiplas, 
Laudibus  in  longum  vatcs  dimittitis  aivum, 
Plurlma  sccuri  fudislis  carniina  Uardi. 

biod  I.  s.  p.  308.  '  11^  ne  s'appliquoient  pas  néanmoins  si  unilormémenl  à 
faire  le  métier  de  Panégyristes,  qu'ils  ne  lissent  aussi  très- 
souvent  le  personnage  de  Salyriques.  S'ils  celebroient  les 
louanges  des  uns,  ils  sa  voient  au.ssi  i-elever  les  vices  des  au- 
tres. Après  qu'ils  avoient  composé  leurs  pièces  de  l^oësie, 
ils  les  chantoient  eux-mêmes  avec  une  douce  harmonie, 
sur  des  instrumens  à  peu  près  semblables  à  une  Lyre.  Il 
est  fâcheux  que  l'Antiquité  ne  nous  ait  pas  conservé  quel- 
que chose  de  ces  Poésies,  afin  de  nous  mettre  au  moins  en 

Amm.  ibid.  éial  d'en  juger  par  nous-mêmes.  '  Ammien  Marcellin  leur 

donne  le  litre  de  Poëmes  Héroïques.  Mais  il  ne  faut  pas 
aparemment  croire  qu'elles  fussent  composées  de  vers 
hexamètres,  tels  que  sont  ceux  des  Grecs  et  des  Latins; 
peut-être  n'étoit-ce  qu'une  Prose  mise  en  cadence.  Et  si 
elle  meritoit  le  nom  d'héroïque,  c'est  qu'elle  conlenoit  les 
éloges  des  Héros  de  la  Nation. 

Diod.  ij)id.  XXXVIIL  '  Ce  n'étoit  pas  seulement  durant  la  paix,  et 

dans  les  occasions  ordinaires  de  la  vie,  que  les  Bardes  exer- 
çoient  les  fonctions  de  leur  ministère.  Ils  le  faisoient  en- 
core, et  avec  plus  de  fruit,  durant  la  guerre.  Alors  les 
ennemis  ne  montroient  pas  moins  de  vénération  pour  ces 
Poètes,  que  les  Gaulois  en  avoient  eux-mêmes.  Souvent 
on  a  vu,  dit  Diodore  de  Sicile,  deux  armées  en  présence, 
et  prêtes  à  en  venir  aux  mains,  l'épée  déjà  tirée,  et  la  lance 
tendue,  terminer  leurs  querelles  sans  coup  ferir,  à  la  vue 
des  Bardes.  Si-tôt  qu'ils  paroissoient  au  miheu  des  deux 
partis,  toute  animosité  cessoit,  comme  s'ils  se  fussent  ser-* 
vis  de  charmes  et  d'enchantemens  pour  les  désarmer.  C'est 
ainsi,  ajoute  Diodore  à  cette  occasion,  que  chez  les  Peu- 
ples même  les  plus  féroces  et  les  plus  barbares,  la  fureur 
sait  céder  à  la  sagesse,  et  Mars  respecter  les  Muses.  11  n'en 
falloit  pas  davantage  pour  atlirer  aux  Bardes  l'estime  et  la 
confiance  de  ceux  de  leur  Nation,  et  les  faire  regarder 
comme  gens  utiles  à  l'Etat.  Cette  idée  d'utilité  publique. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    27 

jointe  h  l'amour  propre ,  qui  aime  toujours  la  flatterie , 
'  les  faisoit  extrêmement  rechercher.  Chacun  en  vouloit  ahic.  dcip.  i.  e. 
avoir  à  sa  suite ,  soit  pour  les  mener  à  la  guerre ,  soit  pour  ''"  '^**'' 
avoir  la  complaisance  de  s'entendre  louer  par  leurs  Poé- 
sies et  leurs  concerts ,  tant  en  public  qu'en  particulier . 
Ceux  qui  les  avoient  ainsi  auprès  d'eux  leur  donnoient  or- 
dinairement leur  table  :  ce  qui  a  fait  passer  ces  Poètes  pour 
des  Parasites   dans  l'esprit  de  quelques   anciens  Ecrivains. 

XXXIX.  '  Il  est   même  des  modernes  qui   croient    que  Amm.  i.  is.  p, 
tous  ces  Bardes  n'étoient  efl"ectivement  que  des  Parasites  et 
des  Boufons,  qui  par  un  esprit  ou  de  plaisanterie  ou  d'a- 
dulation ,  et  le  plus  souvent  de  toutes  les  deux  ensemble , 
chantoient   dans  les  Festins   les  bonnes   qualités  ,  et  quel- 
quefois aussi  les  vices  de  ceux  qui  les  soufTroient  à  leur  sui- 
te. '  Tel  étoit   ce   Poëte  Musicien    qui   suivoit   la  Cour   de  a^hc.  iuj.i.p.  *. 
Luerne ,  Boi  des  Auvergnats.  Un  jour  que  ce  Prince  don- 
noit  un  festin  public  en  pleine  campagne ,  selon  la  coûtn- 
me ,  le  Poëte  s  y  rendit  un  peu  tard ,  en  chantant  la  splen- 
deur de  la  naissance  de  Luerne.  Mais  voiant  que  le  Festin 
('toit  bien  avancé ,  il  ne  put  s'empêcher  de  mêler  dans  ses 
chants  de   louanges   quelques  airs  de  condoléance ,  sur   le 
malheur  qu'il   avoit  d'être  arrivé  si  tard.  Il  ne  laissa  pas 
toutefois   de   demander   le   salaire   de   ses   chansons  ;  et  le 
Prince  fut  assez  libéral  pour  lui  jetter  quelques  pièces  d'or. 
Celte   gratification   ranima   la  veine   du  Poëte,  qui   se  mit 
à  chanter  avec  un  nouvel  enthousiasme ,  disant  à  la  louan- 
ge de  Luerne ,  qu'il  n'y  avoit  pas  jusqu'aux  traces  de  son 
char  qui  ne  fussent  avantageuses  aux  hommes  ;  puisqu'el- 
les leur  produisoient   de   l'or  et  toutes  sortes  de   bienfaits. 
Au  reste ,  tout  ce  que  l'on  peut  tirer  de-là ,  c'est  qu'il  y 
avoit   quelques  Bardes   qui   se  laissoient  mener  par  l'inté- 
rêt ,  et  qui  aimoient  les  bons  repas.  En  tous  les  siècles  on 
a  vu   de  môme   des   Poètes  qui   ont  fait  le  métier   d'adu- 
lateurs à  gages.  Mais  il  ne  seroit   pas  juste  d'en   conclure 
que  tous  aient  été  de  ce  caractère.    Bendons   la  même  ju- 
stice aux  anciens  Bardes. 

XL.    C'est   aparemment    d'eux  en  particulier   qu'il   faut 
entendre  '  ce  que   Diodore   de   Sicile  semble   atribuer  aux  Diod.i.s  p.  306. 
Gaulois  en  gênerai.  Lorsque ,  dit-il ,  l'ennemi   paroît  pour 
combattre ,    ils   se    répandent    en    injures    contre    lui ,    et 
au    contraire    ils    relèvent    les    grandes    actions    de    leurs 

D  ii 


28  ETAT   DES   LETRES 

Diod.  1. 5.  p.  308.  ancêtres ,  et  leur  propre   valeur.  '  En  ces  occasions   ils  di- 
sent avec   hyperbole  beaucoup   de  choses  à  leur  louange , 
et   beaucoup  d'autres  au  mépris  de  leurs  adversaires.    Ils 
joignent    les  menaces    i\    l'arrogance  ,    et    les    clameurs   à 
p.  306.  l'exaggération.  '  Et  par-là  ils  réussissent  h  abaltre  le  courage, 

et  à  déconcerter  leurs  ennemis.  On  ne  doit  pas  douter  que 
le  nombre  des  Bardes  ne  fût  fort  considérable  chez  les  an- 
ciens Gaulois  ;  puisque  leur  principal  emploi  consistoit  à 
chanter  les  grands  exploits  des  Héros  de  leur  Nation ,  et 
que  cette  Nation  étoit  une  des  plus  belliqueuses  de  l'uni- 
vers. C'est  sur  ce  fondement  que  M.  Huet  prétend  que  les 
Belges  avoient  plus  de  Bardes  qu'aucun  autre  Peuple  des 
Gaules ,  parce  qu'étant  les  plus  vaillans  de  tous  les  Cel- 
tes ,  ils  avoient  plus  à  chanter  que  les  autres.  Dans  la  suite 
des  tems  les  Bardes  se  trouvèrent  confondus  avec  les  Drui- 
des, dont  nous  allons  parler.  11  semble  qu'ils  l'étoient  déjà 
avant  que  Cé.sar  écrivît  ;  puisqu'il  n'en  dit  mot  dans  tout 
ce  qu'il  nous  aprend  des  mœurs  et  des  coutumes  des  Gau- 
lois, 
p.  308.  XLI.  'Il  y  avoit  dans  les  Gaules   une  autre  sorte  de  Sa- 

vans ,  qui  comme  les  Bardes ,  paroissent  avoir  été  confon- 
dus avec  les  Druides.  On  les  nommoit  Vates,  nom  que 
les  Latins  semblent  avoir  emprunté  des  Gaulois  pour  signi- 
fier un  Devin.  Aussi  les  Yates  étoient-ils  les  Devins  des 
Gaules.  Leur  ocupation  principale  consistoit  à  prendre 
les  au.spices ,  tirer  les  augures ,  et  faire  les  autres  divina- 
jiisi.  1. 24.0.1. p.  tions.  '  Ils  excelloient  même  en  cette  Science,  selon  le  té- 
*^'  moignage  d'un  ancien  Historien ,  au-dessus  de  tous  les  au- 

Diod.  ibi.1.  tres   Pcuplcs  de  l'univers.  '  Comme   toute   la  Nation  avoit 

une  estime  particulière  pour  eux ,  elle  s'en  tenoit  scrupu- 
leusement à  ce  qu'ils  décidoient.  Mais ,  cruauté  horrible , 
et  peut-être  inouïe  chez  les  autres  Nations  !  lorsqu'il  s'a- 
gissoit  de  quelque  affaire  importante  ,  il  falloit  qu'il  en  coû- 
tât la  vie  à  un  homme ,  pour  savoir  ce  qui  en  devoit  arri-; 
ver.  En  ces  ocasions  on  saisissoit  un  homme ,  et  on  lui  plon- 
geoit  un  poignard  dans  le  sein  au-dessus  du  diaphragme.  A 
ce  coup  mortel  ce  misérable  tombant  à  la  renverse ,  on  au- 
guroit  de  l'événement  5  venir  en  observant  les  circonstan- 
ces de  sa  chute ,  les  convulsions  des  différentes  parties  de 
son  corps ,  et  le  rejaillissement  de  son  sang.  Les  Gaulois 
étoieht    acoûtumés  depuis   si   long-temps  à   cette    ccremo- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    29 

nie  cruelle  et  barbare ,  que  l'habitude  leur  faisoit  ajouter 
foi  à  une  superstition  aussi  extravagante  qu'elle  étoit  inhu- 
maine. '  Strabon  témoigne  que  ces  Vates  s'occupoient  aussi  strab.  1. 1.  p.  i3g. 
à  ofTrir  des  Sacrifices ,  et  à  l'étude  de  la  Physique.  Ne  se- 
roit-ce  point  d'eux  en  particulier  qu'il  faudroit  entendre 
'ce  que  dit  César  de  quelques  Gaulois,  qui  portoient  la  su-  p'^^'^'aa^*""' 
perstition  jusqu'à  ce  point ,  que  dans  les  maladies  dange- 
reuses ,  et  les  autres  périls  de  la  vie ,  ils  immoloient  des 
hommes ,  et  se  voûoient  souvent  eux-mêmes  pour  être  im- 
molés à  leur  tour  ? 

XL.IL  '  A  prendre  les  choses  à  la  lettre,  le  texte  d'Am-  Amin.1.45. p. 98. 
mien    Marceliin    nous    obligeroit  de   reconnoître    dans    les 
Gaules  une  troisième  sorte  de  Savans ,  différente  des  deux 
premières.  Ces  Savans  y  sont  nommés  Euhages.  '  Mais  ce  ■""•  p-  ^• 
terme  est  devenu  fort  suspect  aux  personnes  habiles.  Et  ce 
n'est  pas  sans  raison ,  puisqu'il  ne  se  trouve  nulle  part  dans 
aucun    Auteur    plus    ancien   qu'Ammien   Marceliin.    Aussi 
soupçonne-t-on ,  ou  qu'il  aura  lii  dans  Timogenes ,  ou  que 
ses   copistes  auront  écrit  oùaystç,  pour  oJaTsîç.  Cela  est  d'au- 
tant plus  croïable  qu'il  est  plus  facile  en  grec  de  prendre  le 
tau  pour  le  gamma.  Ainsi  d'oOaTeîî  on  aura  fait  oùoYtîî,  puis 
Euhages ,  et  ensuite  Eubages ,  comme   quelques   modernes 
ont  cru   devoir  lire.  Ce  qui  vérifie  cette   conjecture ,  c'est 
que   ces  Euhages ,  ou    Eubages    d'Ammien    Marceliin ,  ne 
sont  autres  dans  le  fond ,  que  les  Vates  de  Diodore  de  Si- 
cile et  de  Strabon.  'Car  il  est  certain  que  ces  trois  Ilisto-  Dioj. ibw,  1  sirab. 
riens  leur  attribuent  les  mêmes  fonctions ,  qui   étoient  de  ''''''■  '  *""?*•  p-^- 
sonder  les  secrets  de  la  nature ,  et  de  les  faire  connoître  aux 
autres  :  ce  qui  regarde  la  Physique ,  les  Divinations ,  l'As- 
trologie judiciaire  et   la  Magie.  '  Ciceron  ,  qui  relevé  extré-  cjc.  dediv.  1.  i.n. 
mement  la  profession  de  ces  Augures  et  devins ,  jusqu'à  dire  ^'*'  ^'  *'"' 
qu'elle  étoit  compatible  avec  la  dignité  roïale ,  nous  auto- 
rise à  les  confondre  avec  les  Druides ,  au  nombre  desquels 
il  les  met  lui-même. 

XLIIL  Les  Druides  formoient  donc  un  corps  de 
Savans  ,  qui  comprenoit  tous  les  gens  de  letres  qu'on 
voïoit  dans  les  Gaules.  Nous  ne  nous  étendrons  pas 
beaucoup  sur  cette  République  de  Savans.  Un  long  dé- 
tail pouroit  ennuïer  le  Lecteur.  D'ailleurs ,  des  Ecri- 
vains modernes  ont  amplement  traité  cette  matière  ; 
ainsi  nous  nous  bornerons  à  n'en  dire  ici  précisément 
7 


b 


30  ETAT   DES   LETRES 

que  ce  qui  regarde   notre   sujet.  On  débile    bien  des  cho- 
ses ,   ou   peu   assurées ,  ou   peu   importantes   sur   l'étymo- 
logie   du    nom     qu'ont    porté    ces    Philosophes    Gaulois, 
gi'"'  'aï'-»'  '■  '''■'^'  '  ^^^^^'   l'ancien   prétend  qu'ils   se   nommoient  Druides  du 
"'"'""  "  mot  grec  ^pOç,  qui  signifie  un  chêne  ;  parce  qu'ils  avoient 

pour  lui  une  vénération  particulière ,  et  qu'ils  se  plai- 
Diod.  iiii.i.  I  Roi.  soient  extrêmement  parmi  cette  sorte  d'arbres.  '  C'est  pour 
p'."^"!?,-;.' '■  "■  "'■  la  même  raison,  dit  un  moderne,  que  Diodore  de  Si- 
cile les  nomme  Saronides ,  d'un  autre  mot  grec  qui  signifie 
un  chêne  entr'ouvert.  Mais  ne  seroil-il  pas  plus  naturel  de 
dire  que  le  nom  de  Druides  leur  est  venu  du  mot  celtique 
drud ,  qui  a  la  même  signification  que  le  strenuiifi  et  le  fidelis 
des  Latins ,  un  homme  diligent  et  fidèle  dans  les  fonctions 
de  son  ministère  ?  On  dit  encore  pi-overbialement  en  quel- 
ques Provinces  de  France ,  en  parlant  d'une  personne  qui 
sait  se  faire  valoir,  c'est  un  Drud.  Ou'impoi-te  au  reste  de 
rechercher  si  scrupuleusement  l'étymologie  du  nom  de  ces 
Savans ,  pourvu  que  nous  sachions  qui  ils  éloient  ?  c'est  1j\ 
le  principal ,  et  ce  qui  nous  doit  suffire. 

XLIV .  Tous   ceux   entre  les  anciens   qui  ont   parlé   des 
Druides,  ne  l'ont  fait  qu'avec  éloge.  TIs  nous  les  représen- 
tent comme  les  plus  grands  Philosophes  de  l'antiquité ,  l'e- 
xemple  et  le  modèle  de  tous  ceux  que  la  Grèce  et  Rome 
ont   le   plus   admirés.    Vous   avez   déjà   vu    quelle  pouvoit 
ciem.  AI.  Sun.  1.  r|ro   l'ancienneté   de  ces  Philo.sophes.  '  S.    Clément   d'Ale- 
y\i?'v\t  pr.  n.'"i  ;  xaudric  sur  la  foi  des  plus  anciens  Historiens ,  et  Diogene 
de  Laërce  sur  l'autorité  d'Arislole   et  de  Solion  ,  font  tleu- 
rir  les    Druides  au    même-tcms   que  les  Prophètes  ou    De 
vins  d'Egypte  ,  les  Choldéens  de  Rabylone  et  d'Assyrie  ,  les 
Semanées  de  liactriane  ,  les  Mages  de  Perse ,  et  les  Gymno- 
oii,'.  in  col.  I.  I.  sophistes  des  Tndes.  '  De  même   Celse   enlreprenanl  de  dé- 
''  crier  la  Religion  Chrétienne  ,  par  ce  qu'il  y  avoil  eu  de  plus 

sage  et  de  plus  savant  dans  l'antiquité,  lui  opposoit  les 
Druides  des  Gaulois  et  les  Galactophages  d'Homère.  De 
sorle  que  selon  ces  Auteurs  les  Druides  étoient  contempo- 
rains des  plus  anciens  Philo.sophes ,  que  l'on  sache  avoir 
paru  dans  le  monde.  Il  est  des  modernes  qui  vont  encore 
plus  loin.  Comme  il  se  trouve  quelque  conformité  entre 
la  Philosophie  de  nos  Druides  ,  et  celle  des  Gymno?ophis- 
tes  des  Indes ,  et  des  Mages  de  Perse  ,  l'on  prétend  que  ces 
derniers  ont  pris  la  leur  des  Druides  Gaulois,  et  que  par 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J  C.    31 

conséquent  ceux-ci  ont  l'ancienneté  sur  les  autres.  Mais  c'est 
là  une  de  ces  opinions  bazardées.  Cette  ressemblance  de  doc- 
trine ne  peut  avoir  d'autre  origine,  que  ces  premiers  tcms,  où 
toutes  les  Nations  de  la  Terre  avant  leur  dispersion  ne  faiscient 
que  comme  un  seul  et  même  peuple. 

XLV.  La  réputation   que  les  Druides  ont   acquise    îbez 
les  Etrangers,  répond  parfaitement  '  à  l'estime  et  à  la  véné-  Si.'.L'îiiu'.^i'. 
ration,  où  ils  étoient  dans  leur  propre  pais.  On  les  y  esti-  f]'p-']u'|'^^ÎJ; 
moit  et  bonoroit  comme  les  plus  {spirituels  et  les  plus  sa-  k  i5.  p.  ou. 
vans  de  la  Nation.  On  les  y  ri'gardoit  comme   les  favoris 
des  Dieux ,  comme  les  médiateurs  entre  le  Ciel  et  la  Terre, 
comme  des  gens  qui  entroient  dans  les  secrets  de  la  Divi- 
nité.   C'est   pourquoi   l'on   ne   croioit   pas  qu'il  fut  permis 
d'offrir  aucun   sacrifice,  sans  le   ministère  de  ces  Pbiloso- 

t)bes ,   ni  demander  aucune  grâce  à  la  Divinité ,  que  par 
sur  entremise.  Souvent  on  les  a  vu  reconcilier  deux  Ar- 
mées, qui  étoient  sur  le  point  d'en  venir  aux  mains,  com- 
me  nous  l'avons   rajtporté  des  Bardes.  Une  s'ils  ne  pou- 
voient  réussir  à  procurer  la  paix,  '  on  les  voïoit  se  tenir  au-  Tac.  an.  i.  u.  n. 
tour  des  combaltaiis ,   les  mains  élevées   vers  le  ciel ,   et  ^"■ 
prier  des  Dieux ,  qui  ne  pouvoient  les  entendre ,  de  favo-  Ca;s.  ibia.  p.  «ai. 
riser  les  armes  de  ceux  de  leur  Nation.  '  U  n'y  avoit  qu'eux  **'''**'• 
seuls  qui  cultivassent  les   Sciences  parmi   les  Gaulois.  La 
Noblesse,  (jui  formoit  le    second  Ordre  qui   fut  en   consi- 
dération dans  les  Gaules,  n'avoit  point  d'autre  occupation 
que  l'exercice  des  armes.  Pour  le  Peuple,  oui  faisoit  le  tiers 
état  de  la  Republique,  il  éloit  comme  esclave,  sans  aucun 
rang,  sans  aucune  autorité.  C'étoient  les  Druides  qui  tenoient 
partout  le  premier  rang,  qui  décidoient  de  tout,  qui  gou- 
vernoienl   tout,  comme  il  leur  plaisoit  :  ou  s'ils  suivoient 
des  loix,  ils  en  étoient  eux-mêmes  et  les  auteurs  et  les  in- 
terprètes. 

XLVL  Leur  pouvoir  étoit  presque  immense.  '  En  quel-  i-  t-  p-  3113. 
ques  endroits,  comme  à  Autun,  les  Ipix  de  l'Etat  leur  don- 
noient  l'autorité   d'établir  les  Chefs  de  la  Republique.  On 
ne  doit  pas  douter  qu'ils  ne  fissent  ailleurs  la  même  chose; 
et  il  est  à  croire  qu'en  ces  occasions  ils  ne  sortoient  pas  de 
leur  corps  pour  remplir  des  places  de  cette   conséquence. 
Au   moins  '  nous  voïons  que  Divitiac,  qui  étoit  du  nom-  1. 1.  p.  km  cic  de 
bre  des  Druides,  avoit  le  crédit  d'un  Souverain  dans  la  ville  'i™.  ''  ''  "'  ^"■^' 
d' Autun,  au  tems  de  César.  '  U  n'étoit  pas  même  permis  uio.  cinys.  or.  «. 

p.  538. 


32  ETAT   DES   LETRES 

aux  Rois  de  la  Nation,  ni  de  faire  aucune  entreprise,  ni  de 
prendre  aucune  délibération  sans  les  Druides.  C'est  ce  qui 
a  fait  dire  à  un  ancien  Orateur  Grec,  que  les  Rois  Gau- 
lois, quoiqu'assis  sur  des  tlirônes  d'or,  logés  dans  dos  pa- 
lais superbes,  et  habitués  à  avoir  des  tables  somptueusement 
servies,  n'étoient  néanmoins  que  les  ministres  et  les  exé- 
cuteurs des  volontés  de  ces  Philosophes,  et  que  ceux-ci  ré- 
gnoient  plus  véritablement  que  les  Rois  mêmes.  Il  seroit 
difficile  de  trouver  dans  l'antiquité  la  plus  reculée  quelque 
exemple  de  Savans,  qui  aient  joui  d'une  autorité  plus 
complète.  Ce  n'est  pas  encore  tout. 

XLVII.  A  cette  autorité  étoient  joints  les   plus  grands 
privilèges,  qui  ne  pouvoient  qu'inspirer  à  un  chacun  le  de- 
cas.  iijid.  I.  e.p.  sir  d'augmenter  le  nombre  des  Druides.  '  On  les  exemtoit 
**■  de  toute  sorte  d'impôts,  du  service  de  la  guerre,  et  de  tou- 

tes les  autres  charges  onéreuses  de  la  République.  Aussi  les 
Gaulois  touchés  de  ces  avantages,  tâchoient  de  se  faire  ini- 
tier eux,  leurs  enfans  et  leurs  proches  aux  mystères  du 
Druidisme.  Il  est  aisé  de  juger  par-là  combien  grand  étoit 
le  nombre  de  ces  Philosophes.  On  a  des  preuves  qu'ils 
étoient  répandus  dans  tous  les  lieux  des  Gaules,  à  peu  près 
joiy.ecoi.  cp.  1.1.  commc  le  sont  aujourd'hui  nos  Ecclésiastiques.  '  On  voit 
c.  3.p.  la.  encore  quelques  endroits  qui  ont  retenu  leur  nom,  pour 

avoir  servi  à  tenir  leurs  assemblées,  comme  auprès  d'Au- 
tun  le  Montdrud,  c'est-à-dire  Mons  Driùdarum^  la  Mon- 
Cics.  jbid.  tagne  des  Druides.  '  Tous  ces  Druides  en  avoient  un  au- 

dessus   d'eux   qui   exerçoit   une   autorité   comme   souverai- 
ne.   Lorsqu'il   venoit   à   mourir,    le   plus  digne   entre    les 
autres  lui  succedoit.  Que  s'il  s'en   trouvoit  plusieurs  d'un 
égal  mérite,  alors  l'élection  du  successeur  se  faisoit  par  la 
voie   des  suffrages,  et  quelquefois  par  celle  des  armes.  La 
sagesse   dont   ces   Philosophes    faisoient    profession,    n'étoit 
pas  assez  humble  pour  céder  aux  autres  ces  places  d'hon- 
neur. 
Diud.ib.  ic;rs.ib.       XLVIII.  '  Lcs  Druides   étoient   tout   ensemble   les  Prê- 
[a  iTc^IV'ikÎT  ^^®^'   ^^^   Philosophes,  les   Théologiens,   les  Jurisconsultes, 
pi'in.  iiisf.  \.  16.1.  les   Médecins,  les   Rhéteurs,   les  Orateurs,   les  Mathemati- 
■  ^'  ciens,   les   Géomètres,   les  Astrologues,  et  peut-être  même 

c«s.  ibid.  P.223.  les  Magicicns  des  Gaulois.  '  En  qualité  de  prêtres  de 
la  Nation,  ils  offroient  les  sacrifices  publics  et  particu- 
liers;   et    en    qualité   de   Théologiens,    ils   expliquoient   la 

Religion 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.        33 
Religion,  et  tout  ce  qui  regardoit  le  culte  de  leurs  faux  Dieux. 

'  Solis  nossc  Deos,  et  Cœli  numina  vobis,  Lnca.  bel.  civ.l.i. 

Aul  solis  nescire  datum.  v.  «2.  453. 

'  C'est  pour  ces  fonctions  que  quelques  Anciens  ont  donné  Dbg.ib.  isnid.s. 
aux  Druides  le  nom  de  Semnothées,  qui,  selon  la  force  du  '^■^^^• 
Grec,  signifie  des  personnes   qui   font  une  profession  par- 
ticulière  d'honorer   les   Dieux,  et  de   se  consacrer  à  leur 
service.  '  Une  des  principales  et  plus  fameuses  parties  de  c.ts.  ibid.  p.  ms. 
la   Religion   des   Druides,    étoit   de  sacrifier  des   hommes,  l'mp.  t.  i'.  p.  as! 
Faux  Sages,  qui  prenoient  en  un  sens  erroné  ce  principe 
d'ailleurs  véritable,  que  l'homme  ne  peut  bien  reconnoi- 
tre  la  vie  que  Dieu  lui  a  donnée,  qu'en  lui  offrant  la  vie 
d'un   homme  !    Ils  continuèrent   cette   pratique    inhumaine 
et  sanglante,  '  au  moins  jusqu'au  tems  de  Ciceron ,  qui  en  cic  proFom.  n. 

[)rend  ocasion  d'insulter  h  un  culte  aussi  barbare.  Ils  souil-  '  ^' 
ent,  dit-il,  et  profanent  leur  Temple  et  leurs  Autels,  en 
y  offrant  des  victimes  humaines.  Cho.se  étrange,  continue 
cet  Orateur!  Pour  satisfaire  à  ce  qu'ils  doivent  à  leur  Re- 
ligion, il  faut  qu'auparavant  ils  la  deshonorent  par  quel- 
que meurtre.  Ils  ne  peuvent  être  religieux,  sans  être  ho- 
micides. 

XLIX.  '   L'infamie  de  cette  horrible   maxime   rejaillis-  soiïn.  c.  ai  p.  3o. 
soit  sur  tous  les  Gaulois,  et  les  décrioit  beaucoup  chez  les 
Etrangers.  '  Il  paroît  néanmoins  que  les  armes  et  les  con-  Luca  ibid.y.  45o. 
quêtes  des  Romains  dans  les  Gaules,  la  firent  cesser  pour  *"'• 
un  temps.  Mais  presque  aussi-tôt  après  la  mort  de  César, 
les  Druides  y  revinrent  de  nouveau.   C'est  ce  que  Lucain 
leur  reproche  en  ces  termes  : 

Et  T08  barbaricos  ritus,  moremque  siaistrum 
Sacrorum  Druida  positis  rcpetistis  ab  armiB. 

'  Il  pouvoit  y  avoir  de  la  politique  dans  ce  culte  sanglant  Pasq.  rech.  i.i.c. 
et  inhumain,  mais  une  politique  meurtrière,  puisqu'elle  ne  ''  •'"  ^' 
se  pouvoit  aprendre  qu'aux  dépens  de  la  vie  d'un  Citoïen. 
Les  jeunes  gens  qui  assistoient  à  cette  sorte  de  Sacrifices, 
s'acoûtumoient  par-là  à  se  familiariser  avec  le  sang  répan- 
du; ilg  s'habituoient  à  le  voir  répandre  et  à  le  répandre 
eux-mêmes,  et  par  conséquent  à  devenir  plus  braves  et  plus 
hardis  dans  la  guerre.  C'étoit,  ce  semble,  la  même  vue 
qu'avoient  les  Romains,  lorsqu'ils  donnoient  au  public  les 
Tome  I.  Prem.  Part;  Ë 


34  ETAT    DES    LETRES 

jeux   des   Gladiateurs ,  et  qu'ils  exposoient  en  sa   présence 
leurs  criminels  aux  bêtes. 

L.  Quelque  sanguinaires  que  fussent  les  Druides,  ils  ne 
Cœs.  ii.id.  p. 223 1    laissoieut  pas  toutefois  '  de  passer  pour  les  plus  intègres  de 
trab.i.  4.0.136.   1^  Nation.  Sur  cette  opinion   c'étoit  à  leur  Tribunal  que 
l'on  portoit  tous  les  ditlérens  ,  soit  civils  ou  criminels,  soit 
communs  ou  particuliers.  Ils  ordonnoient  les  peines  ou  hs 
récompenses    convenables ,    décidoicnt    du    gain   ou   de   la 
c<B».  p.  22C.         perte,    et   prononcoient   définitivement.  '  Chaque   année   à 
un  certain  tems  fixé,  ils  s'assembloient  en  un  lieu  destiné 
à  cet  efl'ftt  dans  le  pais  des  Chartrains,  parce  qu'il  étoit  le 
centre  et  le  milieu  des  Gaules.  Là  se  rendoient  de  toutes 
parts  tous  ceux  qui  avoient  quelque  différend.  On  leur  fai- 
soit  justice,  et  ils  s'en  tenoient  au  jugement  que  l'on  pro- 
p.  283.  nonçoit.  '  Que  s'ils  refusoient  de  s'y  soumetre,  on  leur  in- 

p.  320.  terdisoit  la  participation  aux  Mystères  :  '  ce-qui  étoit  pour 

eux  la  plus  severe  punition.  Car  alors  ils  passoient  pour  im- 
pies et  scélérats.  Chacun  les  évitoit,  et  n  avoit  aucun  com- 
merce avec  eux.  Ils  demeuroient  sans  honneur  et  sans  au- 
Ram.  mor.  Gai.  p.  cunc  considcration.  '  En  ces  A.ssemblées  des  Druides,  on 
114.  us.  voïoit  une  image  de  ce  qui  se  passoit  anciennement  à  Del- 

{)hes,   lorsqu'au   tems   de   l'ancienne   liberté   de   la  Grèce, 
es  Amphictyons   y  tenoient,    comme   au   centre  du   pais, 
leurs  assises  générales  et  solemnelles.  En  voilà  suffisamment 
pour  juger  et  du  caractère,  et  des  fonctions  des  Druides. 
Considérons   maintenant   leur    doctrine   et   pour   le   fonds, 
et  pour  la  manière  de  l'enseigner. 
Mohi,  1. 3.  r.  2.  p.       ^ï-    ^-"^^^  doctrine  dans  le  fonds  étoit  plus  raisonnable, 
içji'Luca.  kf.  ri-  que  celle  d'aucune  autre  Nation  du  Paganisme.  '  Ils  ensei- 
462.""  ''''  '"  gnoient   l'immortalité   de  l'ame,   de  manière   à   persuader 
qu'après  la  séparation  du  corps,  elle  trouveroit  une  autre 
vie.    Us   établissoient   un   autre   monde  ;    did'erens   de    ces 
Luca.  ibiij.  Hutres    Doctcurs    de    la  Gentilité ,    qui    ou     n'admeltoient 

qu'un  anéantissement  affreux  après  la  mort,  ou  qui  ne 
reconnoissoient  d'autres  demeures  pour  les  âmes  séparées 
de  leurs  corps ,  que  les  enfers,  ce  royaume  ténébreux  de 
Pluton,  selon  le  langage  des  Poëtes.  La  mort,  .suivant  leur 
doctrine ,  n'étoit  qu'un  passage  pour  y  arriver  ;  et  l'on  y 
jouissoit  d'une  vie  qui  ne  devoit  point  avoir  de  fin.  Qui  ne 
croiroit  que  la  connoissance  d'une  telle  vérité,  qui  fait  un 
des  premiers  fondemens  de  la  véritable  Religion,  n'eût  dû 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    35 

porter    naturellement   ces   Philosophes   à  rechercher,   et   à 

reconnoitre   celui  qui   avoit  donné  l'être  à  une   substance 

aussi  noble,  et   qu'ils    avoùoient  être    immortelle?  Mais   il 

leur  est  arrivé  '  ce  que  S.  Paul  dit  de  tous  les  faux  Sages  en-  Rom.  i.  is.  21. 

tre  les  Gentils  :  Ils  ont  retenu  cette  première  vérité  dans 

l'injustice.  Us  se  sont  égarés  dans  leurs  vains  raisonnemens  ; 

et  leur  cœur  insensé  a  été  rempli  de  ténèbres.  '  Comme  ils  ^■ 

n'ont  pas  voulu  reconnoitre  Dieu,  Dieu  aussi  les  a  livrés  à 

un  sens  dépravé. 

LIL  '  Les  Gaulois  imbus  de  la  doctrine  de  l'immortalité  Luca.  itid. 
de  l'ame,  en  devenoient  et  plus  courageux  et  plus  intrépi- 
des. '  Aussi  avoit-on  grand  soin  de  la  répandre  dans  le  pu-  Meia,  wd. 
blic,  afin  de  rendre  par-là  les  hommes   plus  propres  à  la 
guerre,  en  leur  inspirant  le  mépris  de  la  mort.  '  Le  succès  Luca.  ibid. 
répondoit  au  dessein.   Car  les  Gaulois   dans  la  persuasion 
qu'ils  revivroient  après  leur  mort,  affrontoient   toutes   sor- 
tes de   dangers,  et  regardoient   comme   une   lâcheté   indi- 
gne de  leur  croïance,  d'épargner  une  vie  qu'ils  esperoient 
de  retrouver.  C'est  ainsi  que  Dieu  se  plaisoit  à  disj)oser  les 
hommes  par  des  voies  secrètes  et  éloignées,  à  faire  un  jour 
pour  le  Christianisme,  ce  qu'ils  faisoient  dans  les  ténèbres 
du  Paganisme  pour  une  Religion,  dont  ils  n'avoient  qu'une 
certitude  Philosophique.  En  effet  ne  pouvons-nous  pas  dire 
de  cette  Théologie  des  Gaulois ,  '  ce  que  S.  Clément  Aie-  fiem.  Alex.  siro. 
xandrin  dit  de   la   Philosophie   des   Grecs ,  qu'elle   leur  a     ''  **' 
servi  de  pédagogue,  comme  la  Loi  aux  Juifs ,  pour  ariver 
à  la  connoissance   de   J.  C?  '  Heureux,   s'écrie    Lucain,  Luca.  ibid. 
quoiqu'il   regardât   cette   créance  des   Druides   comme  une 
chimère,  heureux  ces  Peuples  qui  se  mettent  ainsi  au-des- 
sus de  la  crainte  de  la  mort,  crainte  la  plus  frapante  que 
l'homme  puisse  jamais  avoir!  Les  paroles  de  ce  Poëte  va- 
lent bien  la  peine  qu'on  les  raporte  ici. 

.-..--    Volns  auctoribus,  umbrœ 
Mon  tucitas  Ërebi  sedes,  Ditisque  profundi 
Pallida  regaa  petunt  :  régit  idem  spiritus  artua 
Orbe  alio  :  longœ  (caaitis  si  cognita)  vite 
Mors  média  est.  Gerte  Populi  quos  despicit  Arclos, 
Feliceserroresuo,  quos  ille,  timorum 
Maximus,  haud  urget  leti  metus.    Inde  ruendi 
In  ferrum  mens  prona  viris.  animaeque  capaces 
Mortis,  et  ignavum  redituiyj  parcere  vitœ. 

E  ij. 


30  ETAT    DES   LETUES 

Val.  Max.  I.  2.  c.       LUI.  '  Celle   doctrine   faisoil  tant  d'impression  sur  l'es- 

^"  "  *"  prit  des  anciens   Gaulois  ,  que   souvent  ils  se  prêtoient   de 

l'argent  en  ce  monde ,  sans  d'autre  condition  que  de  se  le 
rendre  en  l'autre.  Que  de  débiteui's   semblables   suivroient 

HeU,  ii)id.  aujourd'hui  cette  maxime ,  si  on  la  faisoil  revivre  !  '  De  mê- 

me ,  lorsqu'après  avoir  brûlé  les  corps  morts ,  on  en  inhu- 
moit  les  cenares ,  on  enfermoit  souvent  dans  le  même  tom- 
beau les  comptes  arrêtés  et  les  obligations,  que  l'on  trou- 
voit  entre  les  papiers  des  créanciers,  qui  de  leur  vivant, 
aiant  prêté  quelque  somme ,  n'en  avoient  pas  été  payés , 
dans  la  persuasion  qu'en  l'autre  monde  ils  auroient  le  mê- 

Diod.  1. 5.  p.  300.  me  droit  sur  leurs  débiteurs  !  '  D'autres  durant  les  funé- 
railles des  morts,  jeltoient  dans  leur  bûcher  des  letres 
adressées  à  leurs  parens,  dans  la  croiance  qu'elles  leur 
seroient  rendues ,  et  qu'ils  les  liroient ,  quoique  morts  sou- 

Meia,  ibi.1.  yeut   depuis  long-tems.  '  Quelques  autres   alloient  encore 

plus  loin,  et  se  jettoient  eux-mêmes  dans  les  bûchers,  où 
l'on  brûloit  les  corps  de  leurs  proches,  afin  de  pouvoir  vi- 
vre avec  eux. 

Val.  Max.  il),  n.  7.  LIV.  Dc-là  saus  doute  '  cette  joie  que  faisoient  paroître 
les  Marseillois ,  à  qui  la  même  doctrine  étoit  passée , 
lorsqu'ils  inhumoient  leurs  parens  ou  leurs  amis.  Bien 
loin  d'accompagner  leurs  funérailles  de  pleurs ,  pu  de 
quelqu'autre  marque  de  deuil ,  ils  les  faisoient  suivre  d'un 
festin  de  réjouissance  qu'ils  donnoient  aux  principaux  oui 

CiBs  ibid.  1. 3.  p.  y   assisloient.    De-là   encore  '  ce    dévouement  aveugle   des 

112-113.  Soldures,  dont  parle  César,  pour  leurs  patrons.  Ces  Sol- 

dures  étoienl  comme  des  Vassaux  ou  des  Cliens,  qui  s'at- 
tachoient  si  étroitement  à  leur  Seigneur,  qu'ils  se  faisoient 
un  devoir  de  subir  le  même  sort  que  lui.  De  sorte  que  s'il 
vcnoit  à  être  tué,  tous  sans  exception  se  donnoient  la  mort. 
El  l'on  ne  se  souvenoil  point,  dit  César,  qu'aucun  eût  ja- 

L.  e.  p.  228.  mais  manqué  de  le  faire.  '  Outre  le  dessein  d'inspirer  du 
courage  et  du  mépris  pour  la  mort,  en  enseignant  l'immor- 
talité de  l'âme ,  les  Druides  se  proposoient  aussi  de  por- 
ter par  ce  moïen  à  l'amour  et  à  la  pratique  de  la  vertu.  D'où 
ils  liroient  sans  doute,  ou  laissoient  tirer  aux  autres  cet- 
te conséquence  naturelle  :  gue  puisqu'il  y  avoit  une  au- 
tre vie,  on  y  seroit  ou  puni  ou  recompensé  selon  ses  œu- 
vres. 

ibid.  |i)iod.ii.iii.|       LV.  '  Il  se  trouve  des  anciens  Ecrivains,  qui  pour  n'a- 

Yal.  Max.  ib.  n.  10.  '    1        r 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    37 

voir  pas  assez  aprolbndi  ce  point  de  doctrine  de  nos  Drui- 
des, l'ont  entendu  selon  le  système  de  la  métempsycose. 
C'est  ce  qui  a  fait  dire  à  Diodore  de  Sicile  ,  et  à  Valero 
Maxime ,  quf  les  Gaulois  étoient  sur  cette  matière  dans 
les  mêmes  sf^nlimens  que  Pythagore.  Qu'ils  croioient  les 
araes  immortelles,  en  ce  qu'après  un  certain  tems  elle» 
quittoient  un  corps,  pour  entrer  en  un  autre  et  l'animer, 
et  que  c'étoit  ainsi  qu'elles  continuoient  de  vivre.  Mais , 
outre  que  Lucain,  qui  a  expliqué  le  plus  disertement  ce 
point  de  doctrine ,  dit  précisément  le  contraire  ;  tout  ce  que 
nous  venons  de  raporter  des  anciennes  maximes  de  nos 
Gaulois,  détruit  entièrement  le  système  de  la  métempsy- 
cose. 11  paroît  même  que  jamais  ils  ne  l'ont  connu ,  tant 
s'en  faut  qu'ils  l'aient  épousé.  D'ailleurs  on  a  déjà 
vu  '  sur  l'autorité  de  S.  Clément  Alexandrin  ,  et  sur  celle  ciom.  ai.  siro.  i. 
d'autres  Auteurs  plus  anciens  que  lui  ,  d'après  lesquels  il  'p***- 
parle ,  que  Pythagore  lui-même  avoit  été  instruit  par  les 
Gaulois,  bien  loin  que  les  Gaulois  eussent  pris  de  lui  la  do- 
ctrine qu'ils  suivoient.  L'erreur  de  ces  anciens  Ecrivains  ne 
sera  venue ,  que  de  ce  qu'ils  ne  connoissoient  l'immortalité 
de  l'ame  que  dans  le  fameux  système  de  ce  Philosophe 
Grec,  comme  étant  plus  répandu  que  celui  des  Druides. 

LVL  '  Le  reste  de  leur   Théologie   rouloit  sur  les  pro-  c»s.  ibid.  p.  *i8- 
prietés ,  la  force ,  la  puissance  des  faux  Dieux ,  la  manière  *^' 
de  les  honorer.  En  tout  cela   ils   n'avoient   presque    point 
d'autres  sentimens   que   les   autres   peuples  au  paganisme. 
'  Seulement  ils   étoient  dans  une  opinion    particulière  sur  p.  235.  sse. 
Pluton.  Ils    enseignoient   que   tous   les   Gaulois  en  tiroient 
leur  origine.    C'est   pourquoi   toute  la  Nation   commençoit 
la  nuit  ses  mois  et  ses  années;  et  comptoit  ses  saisons, 
non  par  le  nombre  des  jours  ,  mais  par  le  nombre  des  nuits. 
De  sorte  que  chez  elle  la  nuit  prècedoit ,  et  avoit  le  pas  sur 
le  jour.  De-là  cette  ancienne   manière  de  parler   qui  n'est 
plus  en  usage,  et  suivant  laquelle  on  disoit  en-nuit,  pour  di- 
re  aujourd'hui.  '  Sur  la  morale,  les  Druides   enseignoient  Djog.  yn.  ph.  p,. 
qu'il  falloit  éviter  de  faire  aucun  mal ,  et  donner  au  con-  "•  ®- 
traire  en  toute  ocasion  des  marques  de  courage  et  de  gran- 
deur d'ame.  Boxhornius  fait  encore  entrer  dans  la  doctri- 
ne des  Druides  cette  fameuse  maxime  de  Politique  :  Il  faut 
toujours  envisager  et  rechercher  son  avantage  ;  maxime  qui  a 
ouvert  à  cet  Ecrivain  une  matière  assez  ample  pour  un  long 


38  ETAT    DES    LETRES 

Poëme  latin  ,  que  l'on  trouve  à  la  fin  de  ses  origines  des 
(iaules  sous  ce  titre  :  Le  caractère  de  la  Fortune. 

cies.  ii)i<i.p.2i8|       LVII.  '  Aux    leçons    de    Théologie    et    de    Morale,    les 

Mêla,  ibid.  Druides   en   ajoûtoient  de   Physique,  de  Géographie  ,  d'A- 

stronomie :  ce  qui  supose  les  autres  parties  des  Mathoma- 

piin.  hisi.  1. 18.  c.  tiques.'  Pline  l'ancien  se  plaint  toutefois,  de  ce  que  per- 

r.7.  p.  505.  sonne  ,  soit  en  Afrique ,  soit  dans  les  Gaules ,  ou  en  Espagne , 

ne  s'étoit  apliqué  à  l'Astronomie.  Mais  il  ne  faut  pas 
en  conclure  que  cet  Historien  .soit  contraire  h.  ce  qu'ato- 
slent  César  et  Pomponius  Mêla  en  faveur  du  soin  que  pre- 
noient  les  Gaulois  de  cultiver  cette  Science.  Pline  vent 
seulement  dire ,  que  personne  de  ces  vastes  pais  n'avoit  en- 
core écrit  de  son  tems  sur  cette  matière.  Il  auroit  pu  néan- 

strab.  I.  i.  p.  i3;>.  moius  cu  cxceptcr  '  P\  iheas  de  Marseille  ,  qui  ae  l'aveu 
de  Strabon  même  ,  l'un  de  ses  plus  sévères  censeurs  ,  en 

Bail.  jug.  |iiy.  c.  avoit  écrit  avec  plus  de  succès  que  de  la  Géographie.  '  Ceux 

■  ''■  ^'''       qui  distinguent  les  Saronides  des  Druides ,  quoiqu'ils  soient 

les   mêmes   sous   differens  noms  ,    prétendent   que   ceux-là 

laisoient  leur   principale    étudi;  de  la  Philosophie  en  genc- 

.iicia,  ibiii.  i-al^  et  de  la  Physique  en  particulier.  '  Ils  se  flatoicnt  de  con- 

iioître  la  forme  et  la  grandeur   de  la   terre  ,  et   même   dt' 

sirai).  ii.id.  p.  i3«.  tout  l'Univers.  '  Ils  enseignoienl  que  le  monde  étoit  éter- 
nel, que  néanmoins  il  éprouveroit  un  jour  et  l'eau  et  le 
feu. 

LVIII.  Les  Druides  se  mêloient  aussi  de  Médecine. 
Mais  ce  qu'ils  en  savoieiit  étoit  trcs-peu  de  chose  ,  et  se 
réduisoit  proprement  à  quelques  remèdes ,  qu'on  a  depuis 
nommés  empiriques.  On  peut  même  dire  ,  que  ce  n'étoit 
qu'un  tissu  de  superstitions  ,  et  que  toute  leur  Médecine 
eloit   dégénérée  en  Magie.  On  n'en   doit   pas  être  surpris. 

piin.  iiisi.  1. 50  c.  '  Car ,  comme  Pline  le  i-emarque ,  la  Magie  tire  son  origi- 

*■  '"'  "'■  ne  de  la  Médecine.  Elle  s'est  ensuite  répandue  sous  un  pré- 

texte salutaire ,  en  montrant  quelque  chose  de  plus  relevé , 
et  de  plus  sacré  que  l'autre.  Ce  que  nous  allons  raporter 
de  la  Médecine  des  Druides ,  n'est  que  pour  justifier  l'idée 
que  nous  en  venons  de  donner.  On  pourra  juger  par-là 
jusqu'où  un  Peuple   qui   ne  connoît  pas  le  vrai  Dieu ,  est 

L.  m.  c.  97.  p.  31-2.  capable  de  porter  la  superstition.  'Entre  les  remèdes  qu'em- 
ploïoient  les  Druides  ,  la  glu  tenoit  le  premier  rang.  Ils 
la  vantoient  comme  un  spécifique  contre  toutes  sortes  de 
poisons  ,  et  propre  à  rendre  féconds  les  animaux  stériles. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    39 

Aussi  rien  n'étoit  plus  sacré  parmi  eux  que  cette  glu.  Ils  la 
faisoient  de  grains  de  gui  de  chêne  avec  une  superstition 
ridicule.  Au  tems  de  la  moisson,  le  sixième  jour  de  la  Lu- 
ne, qui  commençoit  chez  eux  les  mois,  les  années,  et  les 
siècles,  après  le  circuit  de  trente  ans  seulement,  ils  s'assem- 
bloient  sous  des  chênes,  où  l'on  conduisoit  deux  taureaux 
blancs  pour  être  immolés  ,  et  où  l'on  préparoit  d'autres 
Sacrifices  avec  des  Festins  solemnels.  Ensuite  un  de  leurs 
Prêtres  revêtu  d'une  robe  blanche .  et  une  serpette  d'or  à 
la  main .  cueilloit  les  grains  de  gui .  que  l'on  recevoit  dans 
un  sac  fort  blanc.  Après  quoi  ils  immoloient  leurs  victi- 
mes, et  faisoient  des  prières  à  des  Dieux  chimériques,  afin 
que  le  don  qu'ils  recevoient  de  leur  libéralité,  leur  devînt 
salutaire. 

LIX.  '  Ils  avoient  bien  d'autres  pratiques  superstitieuses  i.  24.  c.  c»  p.  3«.- 
dans  l'usage  qu'ils  faisoient  de  divers  Simples.  Par  exem-  ^*'' 
pie,  ils  prétendoient  que   le  Salayo,   herbe  semblable  au 
thamarin,  éloit  propre  à  préserver,  ou  à  guérir  toutes  sor- 
tes de  maux,  et  que  la  fumée  en   étoit  souveraine  contre 
les  maladies  des  yeux.  Mais  il  la  falloit  cueillir  nuds  pieds, 
sans   aucun    instrument   qui   coupât,    après   avoir   fait   une 
oblation  de  pain  et  de  vin,  et  observé  quelques  autres  su- 
perstitions. '  De  même,  le  Samolum  ou  Pulsatilla,  étoit  se-  <••  es.  p.  3*1. 
ion  eux,  un  remède  excellent  pour  guérir  les  maladies  des 
bœufs  et  des  pourceaux.  Mais  on  le  devoit  cueillir  h  jeun, 
ne  point  regarder  celui  qui  le  cueilloit,  ne  le  mettre  et  ne 
le  broïer  que  dans  un  canal.   '  Ils  atribuoient  encore  une  1.  «s.  c.  59.  p. 412. 
plus  grande  vertu  ci  la  Verveine,  ou  Hierabotane.  Ils  s'en  *'^' 
servoient   pour   leurs   sortilèges  et  leurs  divinations.  Lors- 
qu'ils  s'en   étoient   frotés,    ils  prétendoient  s'atirer  l'ami- 
tié des    personnes  ,  obtenir  tout  ce  qu'ils  desiroient ,  chas-  ''^' 
.ser  les  fièvres,  en  un  mot  guérir  toutes  sortes  de  maladies. 
Cette   herbe   broïée   avec   du   vin,  étoit   médicinale   contre 
les  morsures   des   serpens.    On   lui  atribuoit   bien  ■  d'autres 
vertus  imaginées.  Mais   autant  qu'elle  avoit  de  propriétés,    ■ 
autant  il  falloit  aporter  de  superstitions  ou  pour  la  cueil- 
lir, ou  pour  la  préparer.  Nous  ne  nous  amuserons  pas  à  les 
détailler.   G'étoit,   remarque  Pline,  autant  de  folies  de  ces 
Philosophes  Gaulois.  Quelque  ridicules  que  fussent  ces-  su- 
perstitions,  elles  ne   laissèrent   pas  de  jetter  de  profondes 
racines   dans   les   Gaules.    Elles   trouvèrent  même   créance 


40  ETAT   DES   LETRES 

dans  l'esprit  des  Gaulois,  depuis  qu'ils  eurent  embrassé  le 
Christianisme.  On  en  voit  des  vestiges  dans   le  Traité  des 
remèdes  empiriques  que  nous  avons  de  Marcel,  qui  écri- 
voit  au  commencement  du  cinquième  siècle.  Voilà  le  fonds  de 
la  doctrine  des  Druides.  Disons  maintenant  quelque  chose  de 
la  manière  de  l'aprendre  et  de  l'enseigner. 
«T'p!!^''  re'^li  \       ^^-  '  ^^^  Druides  se  formoient  aux  Sciences,  sans  rien 
I.  c.  i.^^'s.™" ''  '  écrire.  Lycurgue,   Pythagore  et  Socrate  ont  aussi  suivi  la 
même  maxime,  et  n'ont  rien  laissé  par  écrit,  non  plus  que 
Ram.  ibij.  p.  91.    uos  Druidcs.  '  Mais  que  cette  maxime,  s'écrie  un  de  nos 
Ecrivains  modernes,  a  été  fatale  à  notre  Nation  !  Sans  cet 
étrange  caprice,  nos  Gaules  nous  auroient  donné  des   Eu- 
clides,  des  Ptolemées,  des  Platons,  des  Aristotes,  et  peut- 
être  même  des  Auteurs  encore  plus  excellens.  On  peut  di- 
Pa«q.  ibia.  re  au  moins  qu'il  est  bien  fâcheux,  '  de  nous  voir  réduits 

par-là  à  ignorer  l'histoire  de  notre  propre  Nation.  Le  peu 
qui  s'en  est  conservé,  il  le  faut  aller  chercher  dans  des  Au- 
teurs étrangers ,  à  qui  il  n'en  est  échapé  que  quelques 
traits  fort  superficiels,  que  la  vérité  leur  a  arachés  com- 
me malgré  eux.  On  ne  sauroit  dire  si  c'étoit,  ou  le  propre 
du  génie  de  nos  Philosophes,  ou  le  genre  de  leurs  études, 
Diog.  ibid.  qui  les  portoit,  '  à  ne  parler  que  par  sentences,  .souvent  par 

Diog.  1. 5.  p.  08.  énigme,  et  d'une  manière  a.ssez  ob.scure.  '  Cette  manière  de 
s'énoncer  passa  à  la  Nation  entière,  qui  selon  Diodore  de 
Sicile,  ne  parloit  qu'à  mots  couverts,  le  plus  souvent  en  peu 
de  paroles  et  par  Synecdoche,  en  faisant  entendre  un   tout 

f)ar  une  de  ses  parties,  ou  une  partie  par  son  tout,  ou  bien 
a  chose  par  la  matière. 
c«s.  ibid.  p.  225.       LXl.  '  L'instructioH  de  la  jeunesse  faisoit  une  des  princi- 

f**^  )ales  occupations  des  Druides.  Ils  avoient  toujours  à  leurs 

eçons  un   très^rand  .nombre  de  disciples.  '  Ils  y  admet- 
Amm.  lib.  15.  p.  toieut  sur-tout  les  enfans  des  Premiers  de  la  Nation.  '  Pour 
s'aquiter  de  cette  fonction   de  leur  ministère,  ils  tenoient 
des  Académies,  ou  Ecoles  reliées.  C'est  ce  que  Pythagorç 
pratiquoit  aussi  chez   les  Grecs,   aïant  aparemment  apris 
cette  maxime  des  Gaulois  ses  Maîtres.  Mais  il  y  avoit  cet- 
te différence  entre  les  uns  et  les  autres,  que  les  Ecoles  des 
Mêla,  ibid  |  Lnca.  Grccs  étoieut   daus  les  plus  grandes   villes  '  et  que  celles 
ib.  Y.  453. 454.      jgg  Druides  ne  s'ouvroient  que  dans  le  fond  des  bois ,  et 
des  antres   écartés.  Nemora  alla  remotis  incolitis  lucis,  dit 
d'eux  le  Poêle  Lucain.  A  cette  bizarrerie  les  Druides  en 

• 

joignoient 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    41 

joignoient   une  autre  encore  plus  extraordinaire.  '  Quoiqu'-  Cxs.  iwd.  p.  227. 
ils  possédassent  le  secret  de  l'écriture,  ils  ne  faisoient  rien 
écrire  à  leurs  disciples.  'Il  est  vrai  que  les  philosophes  Ein-  Egas.  BuI.  1. 1.  p. 
pedocles ,    Parmenides ,    Mélisse  ,   Xenophanes ,   parmi    les  '• 
Grecs ,  suivoient  la  même  pratique.  Mais  les  Grecs  poste- 
rieurs  s'étant  relevés  de  ce  scrupule  mal  entendu  ,  nos  Doc- 
teurs Gaulois  n'auroient-ils   pas  dû   imiter  leur  exemple? 
Un  peu  d'expérience  les  auroit  convaincus  de  l'utilité  de  ce 
changement  de  conduite. 

LXIL  '  Toutes  leurs   leçons  se  faisoient  donc  de  vive  <^«*-  ^'^• 
voix,  et  étoient  comprises  en  une  grande  quantité  de  vers 
qu'ils  faisoient   aprendre   par   cœur  à    ceux    qui  frequen- 
toient  leurs   écoles.    Cette   méthode    d'enseigner  en  vers, 
plutôt    qu'en    prose    avoit    quelque    avantage;    puisqu'elle 
tendoit  à  soulager  le  travail  des  disciples.  On  sait  par  ex- 
périence '  que  ce  que  les  enfans  étudient  ou  en  vers  ou  en  ^^^^        ^^ 
nombres  mesurés ,  ils  ont  plus  de  facilité  à  l'aprendre ,  et  iss.  '    ' 
le  retiennent  plus   long-tems.  Mais   si  les  Druides   favori- 
soient  par-là  les  études  de  la  jeunesse,  ils  les  embarassoient 
et  prolongeoient  étrangement  par  leur   caprice  à  ne   faire 
rien  écrire ,  et  par  leur  manière  énigmatique  et  envelopée 
avec  laquelle  ils  s'énonçoient.  Aussi',  leurs  disciples  étoient  P."?»-  ">»**•  I  *«•»• 
vingt  ans  entiers  à  suivre  le  collège,  pour  devenir  habiles. 
Il  étoit    défendu  d'écrire   les    leçons    que  l'on  y    donnoit.  c»s.  ibid. 
César  en  aporte   de  lui-même  deux  raisons  :  la  première, 
pour  ne  pas  profaner  les  mystères  et  les  sciences  en  les  com- 
muniquant à  la  populace;  la  seconde,  de  peur  que  les  jeu- 
nes gens  qu'instruisoient  les  Druides ,  se  confiant  en  leurs 
écrits,  ne  négligeassent  de  cultiver  leur  mémoire,  et  ne  la 
perdissent,  comme  il  arive  ordinairement  en  ces  ocasions. 
11  ne  faut  pas  croire  au  reste  que  les  Druides,  quelqu'éle- 
vés  qu'ils  fussent  au-dessus  des  autres  Gaulois,  enseignas- 
sent gratuitement  la  jeunesse.  '  Un  ancien  Auteur  nous  fait  vai.  Max.  1. 
juger  qu'ils  tiroient  de  leur  profession   un  lucre  considéra-  ''•"•"• 
ble,    puisqu'il    qualifie    leur    Philosophie    une    Philosophie 
mercenaire,  et  sujette  à  l'avarice  :  avara  et  fœneratoria  Gal- 
lorum  philosophia. 

LXIU.  Les  femmes    parmi  les    Druides  se  mêloient    de  Egas.  BuI.  1. 1.  p. 
science ,  comme  les  hommes .   Elles   s'adonnoient   particu-  '• 
lierement  aux  Augures  et  à  la   Magie  ,   comme   étant    des 
sciences  plus  à  leur  portée  et  plus  propres  à  nourrir  leur 
Tome  I.  Prem.  Pari.  F. 


4S  ETAT   DES   LETRES 

joiy,  ecoi.  I.  I.  curiosité  naturelle.  'On  ne  doute  point  qu'elles  ne  donnas- 

c.  4.  p.  31.         sent  des  leçons  à  celles  de  leur  sexe,  à  l'imitation  de  ce  que 

faisoient  les  hommes  envers  les  jeunes  gens  .  Car  quelque 

d(^reglés  que  fussent  d'ailleurs  les  Païens  ,  ils  avoient  soin 

do  foire  instruire  leurs  filles  dans  des  écoles  séparées  de  cel- 

l'iih.  aav.  subs.i.  les dos  garcons.  'La  secte  des  Druides  se  conserva  dans  les 

Ici  »         • 

Gaules  jusque  sous  le  règne  des  Empereurs  Chrétiens  ,  vers 
piin.his^.i.  30.  i.  les  commencenicns    du    quatrième    sircie.  '  Pline    l'ancien 
.semble  toutefuis  dire  que    l'Empereur  Tibère  l'avoit  entiè- 
rement éteinte ,  avec  les  Devins  et  les  Médecins  qui  en  fai- 
suet.  Cas.  1.5.  n.  soicut  partie.  '  De   mi^nic  Suétone  témoigne    que  l'Empe- 
^''  reur  Claude  avoit  achevé   d'abolir  la  religion  des  Druides, 

l'iih.  ibiu.  '  Mais  ces  témoignages  ne  se  doivent  pas  prendre  à  la  le- 

tre.  Ces  deux  Auteurs    veulent  seulement  dire  que  Tibère 
et  Claude  avoient  défendu  le  culte  inhumain  et  abomina- 
ble que  les  Druides  rendoient  à  leurs  faux  Dieux,  eh   leur 
suet.  ibid.  Sacrifiant  des   hommes.  '  Suétone  l'explique   lui-mêrtlé   de 

cette  manière,  et  dit  que  ces  sortes  de  sacrifices  barbares 
avoient  été  défendus  dès  l'empire  d'Auguste ,  mais  seule- 
pun.  hist.  1. 3on.  mcut  aux  habitans  de  Rome.  '  Il  y  avoit  même  un  Décret 
du  Sénat  qui  les  défendoit  dès  le  Consulat  de  Cn.  Cor. 
Lentulus,  et  de  P.  Licinius  l'an  de  Rome  657. 

LXIV.    Telle  étoit  la  consistance  qu'avoit  prise  dans  les 

Gaules  la  Republique  des  letres,  lorsqu'on  y  vit  passer  les 

maximes   de  la  Grèce,    avec  toutes  les   sciences  dont    les 

Grecs  faisoient  profession.  Il  commença  dèslors  à  s'y  for- 

.Aiass.hist.deNorin.  mcr  '  uuc  autrc    sortc  de  Savans  plus    raisonnables   que 

t.i.  p.  19.  j,gy^  (j^j^^   jjQ^g  venons  de    parler  :  les   Académiciens  de 

Marseille.  Ceux-ci  ne  faisoient  point  de  mystère  de  leurs 
connoissances  ,  et  avoient  pour  maxime  ,  que  toutes  les 
bonnes  choses  se  doivent  communiquer .  Cet  événement 
est  trop  mémorable  ,  et  aporta  dans  les  Gaules  un  trop 
heureux  changement ,  pour  le  passer  avec  rapidité  ,  et  ne 
lui  pas  donner  quelque  étendue.  Le  détail  n'en  peut  être* 
Just.  hisi.  1. 43. c.  qu'agréable.  Reprenons  les  choses  d'origine.  '  Une  peu- 
siraK'.  i.4.'p*!''?24.  plade  de  jeunes  Phocéens  sortis  d'Ionie  dans  l'Asie  Mineu- 
re ,  pour  chercher  de  nouvelles  habitations ,  aborda  par 
mer  (*)  dans  les  Gaules  près  de  l'embouchure   du    Rhône. 

Jusl.  ibiJ.  (')' Joslin  dit  quo  ce  fut  par  TOcean;       piimcnl    soavent    la    Mer   par    le   terme 

quoiqu'il  soit  hors  do  doute    quo  ce  fat       d'Océan, 
par  la  Méditerranée.  Mais  les  Anciens  ex- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    43 

Eprise  des  beautés  du  lieu  et  de  sa  situation,  elle  forma  le 
dessein  de  s'y  établir,  et  y  bâtit  la  Ville  de  Marseille  ('). 
On  place  cette  fondation  sous  le  r^gne  de  Tarquin  l'An- 
cien, '  vers  la  seconde  année  de  la  quarantek;inquiéme  Amm.  p.  os.  noi. 
Olympiade,  la  cent  cinquante-cinquième  année  de  la  fon- 
dation de  Rome,  environ  600  ans  avant  la  Naissance  de  J.  C. 

LXV.  Rien  de  plus  admirable,  rien  aussi  de  mieux  or- 
donné que  la  Police  de  cette    nouvelle   République.    'Son  Vai.  Max.  i.  s.n. 
Gouvernement    éloit    aristocratique,   manière     de    gouver-  ^' 
ner   que  les  Anciens    préferoient   à  toute   autre.  'Six  cent  n.  7. 
Sénateurs  en  avoient  1  administration,  et  formoient  le  con- 
seil de  la  ville.  '  Ils  exerçoient  leur   charge  pendant  toute  strab.  iua. 
leur    vie.    On  les    nommoit  Ti;i.oJ-/o'j;  d'un  mot  grec  ,    qui 
signifie    honorables.    Ils  avoient    à   leur  tête    quinze    per- 
sonnes de  leur  corps,  auxquelles  on  renvoioit  les  affaires 
de  moindre  conséquence.  Trois  entre  ces  quinze  comman- 
doient  à  tous  les  autres  ,  et  exei-çoient   un   pouvoir  souve- 
rain. '  Ge  furent  ces  quinze  premiers  Sénateurs,  que  Gésar,  Caes.uei.civii.i.i. 
après  s'être  brouillé  avec  Pompée,  fit  venir  à  lui  pour  les 
engager  à  déterminer  leur  ville  à  se  déclarer  en  sa  faveur. 
La  réponse  qu'ils  firent  en  cette  rencontre ,  est  une  preuve 
solide  et  de  leur  sagesse  et  de  leur  profonde  politique.  Aussi 
tous  les  membres  de  ce  Sénat  étoient  autant  d'hommes  sa- 
vans.  '  G'est   au  moins  la   qualification ,  que  le    Gontinua-  1.  2.  p.  537. 
leur  de  Gésar  donne  à  ceux  qui  furent  députés  vers  ce  grand 
Gapitaine  Romain. 

LXVI.  '  On  suivoll  à  Marseille  les  loix  Ioniques  ,  que  sirab.  ibia  1  vai. 
l'on  tenoil  exposées  en  un  lieu  public,  afin  que  tout  le  monde 
les  aïanl  continuellement  devant  les  yeux,  y  pût  confor- 
mer sa  conduite.  Vous  pouvez  juger  de  l'excellence  de  ces 
loix  par  l'intégrité  des  mœurs  des  Marseillois.  Le  peu  que 
nous  en  savons,  vous  en  donnera  une  idée  bien  avantageu- 
se.*'Le  Droit  d'Hospitalité  étoit  chez  eux  en  une  singulière  vai.  Max.  ibid. 
recommandation  ,  et  s'y  exerçoit  avec  toute  sorte  d'huma- 
nité. Les  étrangers  pouvoient  compter  d'être  dans  un  asyle 
assuré,  lorsqu'ils  étoient  à  Marseille.  Pour  maintenir  la  sû- 
reté de  cet  asyle,  on  ne  souffroit  point  que  personne  entrât 

(')'  Seneque  dit    qu'aux   Pbocéens  éta-  à  relie  des  Grecs  et  des  Liguriens.  Cet  en-    Senec.   ad  bel.  c. 

blis  à  Marseille   se  joignirent   at  les  Espa-  droit  siftnifie  seuleme  it  qu'il  étoit  passe  en    8.  p.  170. 

g:iols  et  tes  Liguriens,  comme  il   parois-  Espagne  et  en  Ligurie  plusieurs  usages  des 

soit  par  la    ressemblance   des   mœurs   de  Grecs. 
ceux-ci  ;  mais  que  la   langue  du  pais  céda 

Fij 


44  ETAT   DES   LETRES 

armé  dans  la  ville.  Il  y  avoit  à  la  porte  des  gens  prépo- 
sés pour  garder  les  armes  de  ceux  qui  y  entroient,  et  les  leur 

Val.  Max.  n.  7.  rendre  à  leur  sortie.  '  On  n'y  voïoit  point  de  ces  infâmes 
représentations  de  théâtre.  On  craignoit  avec  raison  que 
de  tels  spectacles  n'inspirassent  le  désir  et  la  licence  d'imi- 
ter ce  que  l'on  y  auroit  vu  représenter.  On  y  fermoit  la 
porte  à  tous  ceux  qui,  sous  prétexte  de  religion,  y  auroient 
voulu  introduire  ou  la  paresse,  ou  une  vie  délicate  et  vo- 
luptueuse; et  l'on  avoit  un  soin  particulier  d'y  détruire  la 

strab.  p.  123.  dupHcité  et  le  mensonge.  La  frugalité  et  la  modestie  '  on  les 
y  portoit  l'une  et  l'autre  jusqu'à  ce  point,  que  la  plus  riche 
dot  n'excedoit  jamais  cent  écus  d'or,  et  qu'il  n'étoit  permis 
à  personne  d'en  dépenser  plus  de  cinq  pour  sa  nourriture, 
et  cinq  autres  pour  ses  plus  somptueux  habits. 

LXVlI.  Il  seroit  difficile  de  renchérir  sur  les  éloges 
magnifiques  que  cette  belle  Police  a  attirés  à  Marseille, 
de  la  part  de  plusieurs  célèbres    Ecrivains  de   l'antiquité. 

cic- pro-  !-•  F'*".  '  Ciceron  en  étoit  si  charmé  qu'il  doutoit  sérieusement  si 
cette  ville  n'étoit  pas  préférable  non  seulement  à  la  Grèce, 
mais  aussi  à  toutes  les  nations  de  l'univers.  Il  avoùoit  sans 
façon  qu'il  étoit  plus  aisé  à  un  chacun  de  faire  l'éloge  de 
ses  excellentes  maximes,  que  de  les  imiter  :  ut  omnes  ejus  in- 
stituta  laudare  fcbcihus possint ,  quam  œmulari.  Combien  en  de- 

Pan.  B.  p.  221.  voit-ou  être  persuadé  dès  le   tems  '  de  Plaute,  puisque  ce 

"*"■  Poète  a  fait  passer  en  proverbe  les  mœurs  des  Marseillois 

pour    exprimer   des  mœurs    irréprochables  et  très-réglées! 

just.  hist.  1.43.C.  '  Une  inclination  comme  naturelle  qui  portoit  cette  Répu- 
'^'     '  bliqueau  bien,  l'avoit  accoutumée  à  cette  régularité  de  con- 

duite, plutôt  que  la  conjoncture  des  tems  ne  l'y  avoit  con- 

Yai.  Max.  ibid.  traiute.  '  luviolablemcnt  attachée  à  la  sévérité  de  ses  loix, 
elle  conserva  pendant  plusieurs  siècles  l'intégrité  de  sa  disci- 
pline, et  la  pratique  exacte  de  ses  anciennes  maximes.  C'est 
ce  que  loùoit  encore  en  elle  un  Ecrivain  du  règne  de  Tibère. 

Tac.Tit.Agr.  n.  4.  LXVIII.  '  D'uuc  si  excellente  Police  jointe  à  la  tempcr 
rance  Gauloise  il  se  fit  un  mélange  merveilleux,  qui  rendit 

P'"ii''<5P£* •'=•''•  Marseille  une  école   de    politesse.  '   On  y  aprenoit  ce    que 

J.  9.  p.  296.  ,,  •  111       '     1         T»  1  1  •    -i-    f      ^1 

1  on  nomme  aujourd  hui  le  Beau-monde,  Ja  civilité  des 
mœurs,  l'art  de  vivre  en  galant-homme,  l'honnêteté  dans 
les  discours  comme  dans  les  actions,  cet  air  gracieux  et  ces 
manières  prévenantes  qui  savent  gagner  et  lier  les  cœurs; 
en  un  mot  tout  ce  qu'il  y  a  jamais  eu  et  de  plus  délicat  et 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    45 

de  plus  poli  chez  les  Grecs.  Outre  ces  avantages,  '  il  n'est  Bail.  jug.  pré.c.7. 
point  d'art  et  de  science,  que  l'on  n'y  cultivât  avec  autant  ^'  ^'  ^'  ^'' 
de   succès  que   de  pompe  et  d'éclat.  '  On  y  professoit  pu-  strab.ibid.  p. 124. 
bliq-uement  l'Eloquence,    la  Philosophie,   la   Médecine,   les  ***• 
Matnématiques,    la   Jurisprudence,    la    Théologie    fabuleu- 
se, et  toute  sorte  de  Literature.  Elle  a  même  eu  l'honneur 
cette  Ville,  de  donner  aux  Gaules  d'illustres  Ecrivains  en  la 
personne    de    Pytheas    et    celle    d'Euthymenes,    long-tems 
avant  que  Rome  s'avisât  de  faire  à   l'Italie   de   semblables 
présens.    En   falloit-il    davantage   pour   faire   de    Marseille 
une  Académie  célèbre,  qui  n'a  pomt  eu  de  supérieure  dans  ! 

le  monde,  et  qui  a  mérité  le  rang  de  préséance  sur  celle 
d'Athènes  même?  En  falloit-il  davantage   pour   lui    acqué- 
rir '  le  titre  glorieux  de  Siège  et  de  Maîtresse  des  Etudes  et  Tac.  ibid. 
des  Sciences,  que  lui  donne  Tacite? 

LXIX.  Qui  sera  surpris,  après  ce  que  nous  venons  de 
dire  de  Marseille,  qu'elle  parût  aux  Romains  un  lieu  pro- 
pre à  cultiver  les  sciences?  Cette  Ville  sembloit  être  de- 
stinée par  la  nature  à  ce  dessein.  Elle  étoit  agréablement 
située,  grande,  bien  bâtie,  '  ornée  d'excellents  ouvrages  strab.  ibui. 
publics,  '  et  avoit  la  commodité  d'un  port  admirable. 
'  Aussi  les  premiers  de  Rome,  qui  désiroient  de  se  perfe-  p.  125. 
ctionner  dans  les  Belles  Letres,  choisissoient  Marseille  pour 
le  lieu  de  leurs  études,  préferablement  à  Athènes.  Elle 
avoit  si  universellement  la  réputation  d'être  l'école  des 
Romains,  '  qu'Auguste  voulant  couvrir  l'exil  de  Lucius  Tac.  ann.  1. 4.11. 
Antonius,  son  neveu  par  sa  sœur,  lequel  il  avoit  résolu  d'é- 
loigner de  la  Cour,  ne  crut  pas  y  pouvoir  mieux  réussir, 
que  de  le  reléguer  à  Marseille  sous  prétexte  d'y  étudier. 
'  On  y  voïoit  aborder  dans  le  même  dessein  les  meilleurs  Egas.  boI.  ».  i.  p. 
sujets  de  l'Europe.  Les  Grecs  même  et  ceux  de  l'Asie  mi- 
neure,  malgré  la  distance  des  lieux  et  la  haute  réputation 
de  leurs  Académies,  ne  laissoient  pas  de  lui  préférer  quel- 
quefois celle  de  Marseille.  C'est  donc  avec  beaucoup  de 
sujet  que  Ciceron  la  qualifie  la  nouvelle  Athènes  des  Gau- 
les, l'abord  universel,  et  le  confluent  de  la  Politesse  et  des 
Belles  Letres. 

LXX.   '  Quelque  fertile  que  fût  le  païs  qu'habitoient  les  strab.  i.4.p.  124. 

Marseillois,   ils    s'apliquoient   néanmoins   beaucoup   plus  à 

la   navigation   qu'à   l'agriculture.    Par-là    ils   se   trouvoient 

engagés  à  cultiver  avec  un  nouveau  soin  et  l'Astronomie  et 
8 


40  ETAT    DES   LEÏHES 

Caes.  beii.  civ.  i.i.  les  autres  parties  des  Mathématiques.  '  Ils  excelloient  dans 
8.'  I?"*-.!  la  Marine;  '  et  cette  Science  les  rendit  extrêmement  puis- 

S(ral).  iwJ.  »»  Ti  r»  •     1  1         T-i  • 

sans  sur  Mer.  lis  se  tirent  cramdre  des  Etrangers,  et  esti- 
cic.  13.  piiii.  n.  lïier  des  Romains.  '  Us  furent  toujours  très-étroitement 
15.  p.  89*.  yjjig  gygç  ccux-ci ,  '  ct  Icur    prêtcreut   divers  secours  dans 

432  l'j'usi.  h'ist'.  r  leurs  besoins  en  armes  et  en  argent  :  ce  qui  leur  mérita  le 
43.  c.  .s  p  613 1    nlorieux  titre    d'Amis  très-fideles,   et  d'Allié.s   très-puissans 

Amm.  lib.  15.  p.    «^      ,  ,       ,  ,.  ,  i  t>  •  i      i  »    » 

<04.  (Je  la  République  Romaine.    Les  Romains  de  leur  coté  en 

reconnoissance  de  tant  de  généreux  services,  accordèrent 
à  Marseille  les  Privilèges  d'immunité,  et  le  Droit  de  Séan- 
ce aux  spectacles  entre  les  Sénateurs  de  Rome.  Depuis  cet- 
te illustre  alliance  il  y  eut  un  commerce  mutuel  entre  Ro- 
me et  Marseille.  Bien-tot  le  Pais  Marseillois  devint  la  Grèce 
des  lîomains  pour  les  Sciences,  et  leur  Province  pour  les  Ar- 
mes. Et  c'est  de-là  que  lui  est  venu  le  nom  de  Provence 

Pan.  B.  p.  2n.n.  qu'il  poi'te  cucorc  aujourd'hui.    '    Par   ce   moïen  ces  deux 


i9|Tm.  an^.Lu.  R^pu^iiaucs     sc     communiqucrcnt     réciproquement     leur 


n.  2«. 


langue,  leurs  usages,  et  les  arts   dont   elles   faisoient   pro- 
fession, 
sirab.  p.  124.127  1       LXXI.  '  Marscillc  devenue  puissante  et  formidable,  tant 
E^as.  uiii.t.  I.  p.  par  les  victoires  remportées  sur  ses  ennemis,  que  par  son 
union  avec  la   Ville   de   Rome,   envoïa   des   colonies   bâtir 
Agdo,    Nice,    Antibe,    Olbie,    Taurence,    et    Arles    même, 
selon  un  Ecrivain  moderne.  Si  elle  ne  bâtit  pas  aussi  Frejus, 
elle  en  étoit  au  moins  Maîtresse   encore   sous   l'empire   de 
Tibère.    Tant    de    nouveaux    établissemens    contribuèrent 
jusi.  iiisi.  1. 43.C.  '  à  répandre  davantage  les  Grecs  dans  les  Gaules,  et  à  les 
*■  p-  eio.  rnrlcr  de  plus  on  plus  avec  les   Gaulois.    Ce   mélange   fut 

avantageux  pour  ceux-ci.  Us  .se  défirent  insensiblement  de 
ce  qui  leur  rcstoit  enconî  de  leur  ancienne  rusticité,  et 
commencèrent  à  se  civilis<'r,  et  à  mener  une  vie  et  })lus  hon- 
nête et  j)lus  reglé(!.  Eux  qui  pour  la  plupart  ne  respiroient 
auparavant  que  les  armes,  s'acoûtumerent  à  suivre  les 
siiab.  ibi.i.  loix  d'une  sage  Politique.  '  Peu  à  peu  l'exemple  des  Mar- 

seillois les  aprivoisa,  et  les  porta  à  préférer  à  l'art  de  la 
Guerre,  l'Agriculture  et  les  Belles-Etudes.  Et  lorsqu'ils  fu- 
rent passés  sous  l;i  domination  des  Romains,  ils  les  culti- 
vèrent avec  autant  de  zélc  que  les  Marseillois  mêmes. 
Mais  n'anticipons  rien.  Raportons  les  choses  selon  l'or- 
dre des  tems. 

LXXII.    Ce  concours    presque    universel    d'étrangers   à 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    47 

Marseille,  cette  noble  émulation  que  l'on  y  montroit  pour 
les  letres,  firent  sur  les  Gaulois  une  si  heureuse  impres- 
sion, qu'ils  entrèrent  dans  le  mrme  goût,  et  s'apliquerent 
aux  nirtnes  exercices,  l/étude  des  sciences  fil  les  délices, 
non  de  quelques  particuliers  seulement,  mais  de  toute  la 
Nation  en  gênerai.  11  n'étoit  plus  question  de  ces  écoles 
des  Druides,  cachées  dans  les  bois  et  les  antres  écartés. 
Les  Villes  gageoient  des  Rhéteurs,  des  Philosophes,  des 
Médecins,  pour  tenir  des  écoles  publiques  dans  l'encein- 
te de  leurs  murs.  Marseille,  ce  lieu  d'exercice  ouvert  aux 
étrangers  pour  la  litcrature,  inspira  à  nos  Gaulois  tant 
d'amour  pour  la  langue  Gréque  en  particulier,  qu'ils  l'em- 
ploïoient  même  dans  leurs  Actes  publics.  '  En  gênerai  ils  strab.ibiu.p.m. 
s'attachèrent  si  étroitement  h  toutes  les  maximes  des  Grecs, 
qu'Ephorus  dans  Strabon  a  crû  leur  devoir  donner  le  sur- 
nom de  (fikùlryxi  c'est-à-dire  des  gens  fort  affection- 
nés aux  Grecs,  et  à  leurs  usages.  '  Ce  fut  par  ces  degrés  just.  iwa.  c.s.p. 
que  nos  Provinces,  et  les  Peuples  qui  les  habitaient,  pri-  '''^' 
rent  un  si  grand  lustre,  qu'il  sembloit  que  les  Gaules 
eussent  été  transférées  dans  la  Grèce,  plutôt  que  la  Gré- 
ce  ne  fût  passée  dans  les  Gaules.  Jdeoqtiê,  dit  un  très- 
ancien  Historien,  qui  étoit  d'un  Païs  voisin  de  Marseille, 
maqnusethominibus  et  rehusimposittiscstnitor,  utnonGrœda 
in  Galliam  emigrmse,  sed  (lallta  hi  Grœciam  translata  videre- 
tur.  Quelque  changement  qu'aient  aporté  dans  les  Gaules 
tant  de  siècles  passés,  nous  ne  laissons  pas  de  trouver  en- 
core parmi  nous  de  précieux  restes  de  ce  que  nos  ancêtres 
avoient  reçu  des  Grecs  par  le  canal  des  Phocéens. 

LXXllL  '  Strabon  ne  nomme  point  les  villes  des  Gau-  strab.  iWd.  p.  123. 
les,  qu'il  dit  avoir  gagé  des  Professeurs  pour  y  enseigner 
publiquement  toutes  sortes  de  sciences,  à  l'exemple  de 
Marseille.  Mais  il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  qu'il  n  y  eût 
dès-lors  autant  d'écoles  publiques,  qu'il  y  avoit  de  princi- 
pales \il!es  dans  la  Gaule  Narbonoise,  et  dans  les  Provinces 
voisines.  Telles  étoient  Narbone,  Corbilon,  Arles,  Vien- 
ne ,  Toulouse  ,  Autun  ,  Nismes,  Lyon,  Bourdeaux  .  Joi- 
gnez-y les  colonies  des  Marseillois  dont  nous  avons  parlé. 
'  Il  est  au  moins  certain  que  la  Gaule  Narbonnoise,  où  Mar-  p.  i3i. 
seille  se  trouvoit  située,  fut  la  première  des  Provinces  qui 
ressentit  les  effets  de  cet  heureux  renouvellement.  C'est 
ce  qui  contribua  beaucoup  à  lui  acquérir  l'éclatante  repu- 


48  ETAT    DES   LETRES 

tation,  où  elle  fut  dans  la  suite.  Car  ses  Habitans  passoient 

pour  les  peuples  les  plus  célèbres  et  les  mieux  civilisés  de 

Tac.  an.  1.  ii.  n.  toutes  Ics  Gaulcs.  '  Dès  avant  le  règne  de  l'Empereur  Clau- 

^*'  de,  elle  avoit  donné  de  très-grands  hommes  à  la  Républi- 

aue  Romaine,  insignes  viros  è  G  allia  Narbonensi  transnnsse. 
lans  la  suite,  c'est-à-dire  lorsque  les  Romains  se  furent 
rendus  les  Maîtres  des  Gaules,  ces  écoles  s'v  multiplièrent 
extrêmement,  et  égalèrent  au  moins  le  nombre  des  Villes 
capitales  des  Provinces.  Ici  ce  seroit  le  lieu  de  vous  faire 
une  description  de  ces  écoles  et  de  la  manière  d'y  enseigner, 
comme  nous  en  avons  usé  à  l'égard  des  Académies  des 
Druides  et  des  Marseillois;  mais  l'antiquité  ne  nous  en 
aprend  rien  en  détail.  Vous  en  aurez  dans  la  suite  quelques 
particularités,  qui  pourront  vous  faire  juger  de  leur  pre- 
mier état.  En  attendant  vous  en  pouvez  prendre  quelque 
idée,  par  l'état  où  étoient  en  ces  premiers  tems  nos  princi- 
pales villes, 
sirab.ibid.  p.  125.  LXXIV.  Commcnçous  '  par  Narbone,  comme  la  plusan- 
"•*•  cienne  ville  des  Gaules,  selon  Strabon.  Elle  étoit  d'un  plus 

grand  abord  qu'aucune  autre,  et  à  proprement  parler,  le  con- 
cic.  pro  Font.  n.  flucut  de  toutcs  Ics  Provinccs  des  Gaules.  '  On  la  trouve 
2.  p.* 3* !"'''*' '■  nommée  Martius  dans  les  anciens  Auteurs;  '  et  l'on  croit 
•  Vin.  in  Aus.  §.  Que  cc  uom  lui  est  venu  d'une  colonie  de  soldats  vétérans 
^^-  de  la  Légion  martiale  de  Mars,  "'  quoiqu'elle  fût  d'abord  une 

c  Aul'''nrti"'c  13  colonie  de  Decumanes  et  d'Atacins.  "  Les  Anciens  parlent 
p.  151. 233.  '  '  avec  éloge  de  ses  Ports,  de  ses  Lacs,  de  son  Commerce 
par  Mer  avec  l'Espagne,  l'Italie,  l'Afrique  et  la  Sicile. 
On  y  voïoit  des  Peuples  de  divers  Pais,  qui  y  parloient 
différentes  langues.  Tout  y  marquoit  une  granae  ville;  et 
ne  cedoit  en  rien  à  Rome  pour  la  magnificence  des  édifi- 
cic.  ibid.  ces  publics.   '  Les  Romains  y  envoierent  dans  la  suite  une 

nouvelle  colonie,  et  en  firent  comme  le  dongeon  de  leur 
Vin.  iwa.  République,  et  une  Place  forte  contre  les  Gaulois.  '  Par  suc- 

cession de  tems  ils  se  rendirent  les  Maîtres  de  tout  son  ter- 
ritoire, qui  étoit  fort  étendu,  comprenant  tout  ce  que  l'on 
a  depuis  nommé  les  deux  Narbonnoises,  et  lui  donnèrent  le 
Ans.  ibid [Sid.  car.  uom  de  Provlucc  par  excellence.  '  Encore  aux  quatrième  et 
"  ""  cinquième  siècles  on  comptoit  Narbone  entre  les  plus  il- 
lustres villes  de  l'Univers.  Ausone  et  Sidoine,  depuis  Evê- 
que  de  Clermont  en  Auvergne,  nous  en  ont  laissé  des  élo- 
ges magnifiques.  Celui-ci  en  relevé  principalement  la  gloire, 

en 


23.  V.  37-90. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    49 

en  ce  qu'elle  a  donné  plusieurs  grands-hommes,  tant  à  l'E- 
tat qu'à  la  République  des  Letres.  '  On  juge  que  les  études  Eps.  nui.  t.  i.p. 
y  étoient  florissantes  dès  les  premiers  tems,  pour  avoir  pro-  ^''" 
duit  dès  l'empire  de  Tibère,  Votienus  Montanus  l'un  des 
plus  grands  Orateurs  de  son  siècle  ;  Julius  Montanus  assez 
bon  Poète  selon  Seneque  ;  et  sous  Domitien  le  célèbre  Juris- 
consulte Artanus,  dont  Martial  a  fait  l'éloge. 

LXXV.    '   Corbilon  alloit  de    pair   avec  Narbone.    G'é-  sirab.ibid.p.isi. 
toit  une  ville  d'un  très-grand  abord,  située  sur  la  rivière 
de  Loire.  Mais  ,  quelque  illustre  qu'elle  fût  avant  les  Sci- 
pions,  il  en  reste  aujourd'hui  si  peu  de  vestiges,  que  l'on 
ne  convient  pas  même  du  lieu  précis  de  sa  situation.  '  Ar-  p-  *-'• 
les  bâtie  sur  le  Rhône,  passoit  aussi  pour  une  ville  fort  fré- 
quentée des  étrangers.  '  Ausone  en  son  tems  la  mettoit  au  ^^^-  "''b.  c.  s.  p. 
nombre  des  plus  célèbres  du  monde,  et  la  nommoit  la  pe- 
tite Rome  des  Gauks.  Elle  mérite  à  juste  titre  l'une  et  l'au- 
tre qualification ,  tant  pour  son  ancien  commerce  avec  les 
étrangers,  que  pour  avoir  été  le  Siège  des  Empereurs  dans 
la  suite  des   tems.  '  Constantin  le  grand  lui  donna  tant  de  Léo,  epist.  «.  p. 
marques  de  son  estime  et  de  sa  considération,  qu'elle  prit  à  f^^' 
cause  de  lui  le  nom  de  Constantine.  'Au  siècle  suivant,  qui  sir.inSid.p.iasT. 
étoit  le  cinquième  de  l'Eglise,   Arles  étoit  la  Capitale  de     "^  ' 
sept  grandes  Provinces ,  la  Viennoise ,  les  deux  Narbonoi- 
ses ,  les  deux  Aquitaines ,  la   Novempopulane   et  les  Alpes 
maritimes.  Les   Empereurs   Honoré   et   Tlieodose   le  jeune 
assignèrent  cette  ville  pour  le  lieu  où  se  dévoient  tenir  tous 
les  ans  les  Etats  de  ces  Provinces.  Ils  donnent  pour  motifs 
de  leur  choix  la  dignité   de   cette  ville,   sa   fidélité  envers 
leurs  Prédécesseurs,  et  les  commodités  que   lui    procuroit 
son  grand  commerce.  En  elTet,  on  y  trouvoit  tout  ce  que 
l'Orient,   l'Arabie,    l'Assyrie,    l'Afrique,    l'Espagne    et    les 
Gaules  produisoient  de  plus  rare  et  ae  plus  précieux,  com- 
me si  la   Province  l'eût   produit   elle-même.    Vous   verrez 
dans  le  cours  de  cette  Histoire  qu'il  est  sorti  d'Arles  plu- 
sieurs gens   sa  vans  en  toute  sorte  de  literature,  et  que  ce 
fut  un  des  endroits  des  Gaules  où  se  conserva  plus  long- 
tems  l'usage  de  la  langue  Grèque. 

LXXVL  '  Vienne  passoit  chez  les  Anciens  pour  la  Me-  vin.  iwd. 
tropole   des   Allobroges.  '  Une   preuve   indubitable   qu'elle  conc.  to.  2.  p. 
étoit   l'ancienne   Métropole  de  sa  Province,  c'est   que  cette 
Province  en  avoit  pris  le  nom  de  Viennoise  qu'elle  portoit. 

Tome  I.  Prem.  Part.  G 

s  * 


50  ETAT   DES   LETRES 

Ens.  I.  5.  c.  i.p.  '  Eusebe  en  parlant  des  célèbres  Martyrs  qui  souffrirent  sous 
***■  Marc   Aurele,  la  qualifié   même   la  plus  illustre   Metropo- 

vin.  ibid.  i.  104 1  le  des  Gaules.  '  Pour  Toulouse,  le  nom  seul  de  Palladia  que 
Egas.  ibid.  p.  30.  lui  ont  douué  Ics  Ancicns,  montre  assez  que  celle  A'ille  fai- 
soit  une  profession  particulière  des  Sciences.  C'est  le  même 
nom  qu'Athènes  portoit  chez  les  Grecs  pour  la  même  rai- 
Ans,  nrb.  c.  12p.  SOU.  '  Encorc  au  quatrième  .si(''cl()  Touloui^e  avoit  la  reputa- 
**••  tion  d'être  une  des  villes  les  plus  grandes  et  les  plus  peu- 

plées de  toutes  les  Gaules.  Ses  citoiens  étoient  en  si  grand 
nombre  qu'ils  auroient  suffi  pour  peupler  quatre  autres 
villes.  Nous  aurons  ocasion  de  parler  dans  la  suite  de  quel- 
ques grands  Hommes  de  Letres  qui  ont  pris  naissance  à  Tou- 
louse, et  des  écoles  qui  y  furent  célèbres  dans  les  siècles 
postérieurs. 

LXXVIl.  Mais  de  toutes  les  villes  des  Gaules  il  n'en  est 
point,  si  l'on  en  excepte  Marseille,  qui  se  soit  acquis  plus 
de   gloire  à  cultiver   les   Sciences   en   ces   premiers   tems, 
Egas.  ibid.  p.  23.  qu'Autiiu  lu  Capitale  des  Eduens.  '  Elle  est  sans  contradi- 
ction  une   des   plus  anciennes  des  Gaules,  et  peut  même 
disputer  à  Marseille  l'honneur  de   l'ancienneté.    C'étoit  là 
que  les  Druides  s'assembloient  souvent;  et  l'on  voit  encore 
dans  le  voisinngo  quelques  vestiges  d'un  lieu  où  Ton  croit 
Pin.  M.  p.  230.  n.  qu'ils  tcuoieut  leurs  écoles.  '  Autun  a  porté  oifferens  noms. 
**•  D'abord  il  se  nommoit  Rihracte^  selon  quelques  Auteurs  ; 

ensuite  il  prit  le  nom  de  Julia  de  Jule  César ,  puis  celui 
à! Augustodunnm  à  cause  de  l'Empereur  Auguste;  enfin  il  se 
p.  519.  n.  I.        nomma  Flacia.  '  Il  prit  ce  dernier  nom  en  reconnoissance 
des  fa-,('urs  qu'il  avoit  reçues  et  de  Constance  Chlore  et  du 
Grand  Constantin  son  fils,  qui  portoicnt  l'un  et  l'autre  le 
o"^.!;.î'"'';,î?.^' ■•!;3"  pvénom  de   Flavius.  '  Cette  ville  étoit  autrefois  très-éten- 
383.  due,  et  d  une  grande  autorité.  Elle  avoit  son  Sénat  et  ses 

loix  particulières.  Les  Romains  se  firent  toujours  un  méri- 
te de  la  soutenir,  et  même  de  lui  procurer  un  nouvel  em- 
sirab.  p.  131.       bellispcment.  '  Aussi   fut-elle  la  première  ville  des  Gaules 
Par.  u.  p.  *i2  I   qui  rechercha  l'alliance  et  l'amitié  des  Romains ,  '  et  qui 
dans  la  suite  travailla  avec  plus  de  succès  à  rendre  Romai- 
p.  220.  n.  s  I  p.  nés  les  autres  villes  des  Gauler..  '  En  reconnoissance  de  ces 
bons  offices  le  Sénat  de  Rome  établit  par  plusieurs  Décrets 
uno  fraternité  entre  les  Eduens  et  les  Romains.  Dès  l'em- 
pire de    Tibère    an   moins    les    écoles    publiques  d'Autun 
étoient  très-célebres.  Nous  aurons  beaucoup  d'autres  choses 
à  en  dire  dans  la  suite. 


Sii.  II.  3. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    51 

LXXVin.  La  ville  de  Lyon  mérite  aussi  d'être  mise  au 
nombre  de  celles  qui  cultivèrent  les  Sciences  dès  les  pre- 
miers tems.  Vous  en  aurez  d'illustres  preuves  sur  le  preinier 
siècle  de  l'Eglise,  et  le  suivant.  Elle  est  beaucoup  plus  an- 
cienne que  ne  la  font  plusieurs  Ecrivains  modernes.  Il  est 
vrai  '  qu'à  s'en  tenir  à  la  letrc  du  texte  de  S.  Jerom.e  sur  la  nier.  cur.  p.  ai. 
Ghionique  d'Eusebe,  il  faudroit  dire  qu'elle  ne  fut  fon-  ^' 
dée  qu'en  la  quritri'me  année  de  la  cent  quatre-vingt-hui- 
tième Olympiade  vers  l'an  de  Kome  sept  cent  \ingt-neuf, 
environ  25  ans  avant  nôtre  Ere  vulgaire.  On  altribue 
cette  fondation  à  Munalius  Plancius  ou  Plancus,  Gouver- 
neur de  la  Gaule  Narbonoise  pour  les  Romains,  et  disciple 
de  Giceron.  Mais  il  est  plus  croïable  qu'il  ne  fit  que  la  ré- 
tablir et  l'embellir.  '  Peu  de  tems  après  ce  rétablissement  sirab.  p.  132.133. 
elle  se  Irouvoit  une  des  villes  les  plus  peuplées  des  Gaules 
après  Narbone.  Dè:-'lors  ille  étoit  la  Capitale  des  Segu- 
siens,  et  le  iieu  de  la  résldf^nce  ordinaire  des  Préfets  que 
les  Komains  avoient  dan-  îcs  Gaules.  On  y  battoit  mon- 
noie;  et  l'on  y  avoil  élevé  un  Temnle  célèbre  à  Auguste, 
avec  un  autel,  où  l'on  voïoit  les  figures  et  les  inscriptions 
de  soixante  Peuples  Gaulois.  Là  se  livrèrent  dans  la  suite 
ces  fameux  combats  de  Literaiure  en  grec  et  en  la'in,  com- 
me nous  dirons  en  son  lieu.  '  Lyon  étoit  au  mili  'u  des  Gau-  p.  us. 
les  comme  une  forte  ciladc-lle.  tant  pour  sa  situation  au 
confluent  de  deux  rivières,  le  iihône  et  la  Saône,  que  pour 
le  secours  qu'il  pouvoit  tirer  des  autres  villes  et  places  du 
pais  qui  étoiont  à  sa  pioxini'lé.  Agripp.i  y  fit  pialiquer 
trois  grands  chemins  roïaux;  l'un  qui  alloit  par  les  monta- 
gnts  des  Cevenes  jiipques  dans  le  fond  de  l'Aquitaine;  un 
autre  qui  conduisoit  au  Rhein;  et  un  troisième  à  la  Mer  par 
les  pais  du  Beauvoisis  et  de  l'Amienois  :  commodités  néces- 
saires pour  le  commerce,  et  qui  contribuèrent  à  rendre  Lyon 
une  ville  d'un  très-grand  abord. 

LXXIX.  '  Nismes  avoit  anciennement  le  titre  de  Capi-  p.  120. 
.taie  des  Arecomiciens.  C'est  ce  que  nous  nommons  uijour- 
d'hui  le  bas  Languedoc.  Si  vous  avez  égard  à  l'abord  du 
monde  et  des  négocians,  Nismes  étoit  beaucou;)  infejieu- 
re  à  Narbone.  Mais  si  vous  considérez  l'état  de  la  Répu- 
blique, elle  étoit  beaucoup  plus  considérable.  Car  elle 
avoit  sous  sa  domination  vmgt-quatre  Bourgs  fort  peuplés, 
qui  jouirent  des  premiers  du  droit  de  Bourgeoisie  Romai- 

GiJ, 


52  ETAT   DES   LETRES 

ne.  A  l'opposite  des  Arecomiciens  étoient  les  Cavares  qui 
jouirent  aussi  des  premiers  du  même  droit,  et  qui  dès  l'em- 
pire de  Tibère  parloient  la  langue,  et  sui voient  les  coutu- 
mes des  Romains.  Il  paroît  par  tout  ce  que  nous  avons 
d'Hommes  de  Letres  sortis  de  Bourdeaux,  que  cette  ville 
cultivoit  les  Sciences  dès  les  premiers  tems  avec  une  affe- 
Ans.  urb.  c.  lô.p.  ctiou  merveilleusc.  '  Sa  situation,  ses  belles  eaux,  ses  bons 
^'  ^''^'  vins,  la  temperie  de  l'air  où  elle  se  trouve  bâtie  :  tout  ce- 

la pouvoit  contribuer  à  rendre  ses  citoïens  plus  propres 
pour  les  Letres.  Aussi  dans  l'éloge  de  cette  ville  qu'Ausone 
nous  a  laissé,  il  a  soin  de  dire  qu'elle  etoit  aussi  célèbre 
par  l'esprit  et  le  génie  de  ses  habitans,  que  par  sa  bonne 
police.  Elle  avoit  son  Sénat,  comme  Rome;  et  il  semble 
qu'on  y  élisoit  des  Consuls  chaque  année,  comme  dans 
cette  Capitale  de  l'Empire. 

LXXX.    Toutes    ou    presque    toutes    ces    villes    allèrent 
toujours  croissant  en  amour  et  en  z.éle  jour  les  Sciences; 
et  leur  exemple  porta  les  autres  à  les  imiter,  jusqu'à  l'inon- 
dation des  Barbares  dans  les  Gaules  au  cinquième  siècle. 
La  domination  des  Romains  sous  laquelle  elles  passèrent, 
comme  nous  dirons  bien-tôt,  ne  fit  que  les  affermir  dans 
sirab.  1. 4.  p.  125.  CCS  uobles  cxercices  de  l'esprit.  Il  n'y  eut  que  '  Marseille, 
qui  après  la  guerre  civile  entre  César  et  Pompée,  aïant  eu 
le  malheur  de  s'unir  aux  vaincus,  perdit  quelque  chose  de 
Cic.  8.  pbii.  n.  G.  sa  première  splendeur.  '  Elle  encourut  par-là  la  disgrâce  et 
av.™  a^^T.' :!a).'  l'inimitié  de  César,  qui  ne  laissa  pas  néanmoins  sur  diver- 
ses considérations  de  revenir  peu  à  peu,  et  de  lui  rendre 
ses  bonnes  grâces.  Il  la  traita  même  favorablement  à  cau- 
se de  son  ancienneté,  de  la  réputation   qu'elle  s'étoit  ac- 
quise,  de  l'ancienne  fidélité  de  ses  citoïens,  et  de  la  rare 
strab.  ibid.  gravité  dont  ils   faisoient  profession.  '  Malgré  cette  infor- 

tune on  voïoit  encore  chez  les  Marseillois  du  règne  de  Ti- 
bère, plusieurs  vestiges  de  leur  première  ardeur  pour  les 
Sciences  et  les  Arts,  particulièrement  pour  la  Mechanique 
et  la  Marine.  Et  ceux  qui  avoient  plus  ae  disposition  pour  y 
réussir,  s'apliquoient  encore  à  la  Rhétorique  et  à  la  Philo- 
sophie. Dans  la  suite  les  mœurs  graves  et  polies  des  Marseil- 
lois dégénérèrent  peu  à  peu  en  luxe  et  en  molesse  ;  et  l'amour 
des  Letres  périt  chez  eux,  à  mesure  qu'il  s'y  introduisit  une 
recherche  étudiée  de  toutes  les  commodités  de  la  vie. 
LXXXI.  De  la  Gaule  Narbonoise  les  Sciences  se  répan- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    53 

dirent  non  seulement  dans  le  reste  des  Gaules,  mais  aussi 
dans  les  Pais  étrangers  du  voisinage.  Vous  aurez  observé 
qu'il  étoit  déjà  passé  à  Rome  par  le  canal  de  Marseille  quel- 
ques-unes des  maximes  de  la  Grèce.  '  L'Espagne  avoit  re-  §,^5^,,  j,,;,, 
çû  par  le   même  canal  le  culte  de  Diane,  avec  les  autres 
rits  de  la  Religion  des  Grecs.  Mais  ce  ne  fut-là  qu'un  léger 
commencement,  qui  fraia  seulement  les  voies  à  ce  qui  se 
fit   dans   la   suite.   '  Rome ,  celte  Capitale   du  monde,  qui  suei.  m.  gram.  c. 
avec  la  Grèce  mérita  depuis  le  titre  de  Mère  des  Sciences  *• 
et  des  beaux  Arts,  ne  faisoit  nul  cas  des  Belles-Letres,  et 
en  ignoroit  même  l'usage ,  lorsqu'on  les  professoit  publi- 
quement dans  plusieurs  villes  des  Gaules.  '  Elle  ne  con-  ovi.i.  fast.  1. 3.  v. 
noissoit   d'autre   éloquence,   de  l'aveu  même   d'un   de   ses  ***3-  *"*• 
Poètes,  que  la  force  et  la  dextérité  du  bras.  '  Elle  vit  h  la  suot.  ibid.  c.  a. 
vérité  paroitre  dans  l'enceinte  de  ses  murs  Cratès  de  Mal- 
les en  Cilicie,  qui  y  donna  quelaues  leçons  de  Literature; 
'  mais  il  n'y  eut  encore  que  quelques  aiïranchis  qui  profî-  s^nec.  1.  2.  contr. 
tassent  de  ses  leçons.  C'est  aux  Gaulois  en  particulier  qu'el-  '"^'  ^' 
le  est  redevable  du  premier  goût  qu'elle  prit  pour  les  belles 
études.  '  Lucius  Plotius,  Gaulois  de  Naissance,  fut  le  pre-  p.  ht. 
mier  qui  y  enseigna  la  Rhétorique  ;  '  quelque  tems  après  snct.  iwa.  c.  7. 
lui   Marc  Antoine   Gnyphon   autre  Gaulois,   y   professa  la 
Grammaire ,  '  c'est-à-dire ,  selon   l'explication  de  Suétone ,  c.  4. 
ce  que  les  Grecs  et  les  Latins  entendoient  par  les  Belles- 
Letres.  '  Presqu'en  même-tems  Valerius  Cato,  Gaulois  com-  c.  11. 
me  les  deux  autres,  y  donna  aussi  des  leçons  de  Grammaire 
et  de  Poétique.  '  Bientôt  les  Letres  furent  en  un  tel  honneur  c.  3. 
à  Rome,  que  l'on  y  vit  plus  de  vingt  écoles  célèbres,  et  que 
les  personnes  les  plus  illustres  en  firent  profession  ouverte. 
On  peut  juger  des  autres  '  par  Ciceron  et  Jules  César,  l'un  c.  7. 
et  l'autre  disciples  de  Gnyphon. 

LXXXIL  '  A  l'exemple  de  Rome  les  Provinces  prirent  c.  3. 
aussi  du  goût  pour  les  Belles-Letres.  La  Gaule  que  les  Ro- 
mains nommoient  Cisalpine,  se  signala  sur  toutes  les  autres 
par  son  zèle  à  les  cultiver,  et  reçut  un  lustre  merveilleux 
par  l'habileté  des  Docteurs  qui  les  y  enseignèrent.  Suéto- 
ne met  de  ce  nombre  un  Petavius  Teucer,  un  Siscennius 
Jacchus,  un  Oppius  Carès.  Ce  dernier  y  continua  ses  le- 
çons jusqu'à  un  âge  décrépit,  sans  que  la  privation  de  l'u- 
sage et  de  ses  jambes  et  de  ses  yeux  les  lui  fit  interrompre. 
Les  Sciences  eurent  un  si  heureux  succès  dans  cette  Provin- 


Jus).  Iiisi 
i.  p.  iW 


54  ETAT   DES   LETRES 

Casd. 1. 8. cp.  12.  ce,  qu'elle  ne  tarda  pas  '  à  liiire  voir,  que  Rome  n'étoil 
p.  130.  ?.i.         pjjg  [g  ggyj  endroit,  où  l'oa  pouvoil  apreudre  la  belle  La- 
tinité. Elle  eut  ses  Cicerons,  comme  Rome  le  sien  ;  et  ce 
pais  où  l'on  n'entcndoit  aupnravont  que  la  langue  Gauloi- 
se, eut  l'avantage  de  devenir  ui'c  école  célèbre  d  éloquen- 
ce. Qu'il   est  glorieux   pour  nolvc  Nation,   de  savoir  que 
cette  partie  considérable  de  l'ancienne  lialie ,  qui  compre- 
noit  la  Ligurie,  l'Histiie,  et  les  Provinces  voismes  en  de- 
çà et  au-delà  du  Pô,  d  puis  les  A'pes  jusqu'à  la  ri  ierc  de 
.i.si.c.  Rubicon;  ce  vaste  pais,  '  où  nos  an<  êlres,  après  avoir  pris 
et  brûlij   Rome,    s'étoient   bcbiîués   par  le  droit   de  leurs 
conquêtes,  environ  quatre  cens  ans  avant  la  nais-ance  de  J. 
C.  ait  fait  paroître  tant  d'ardeur  pour  les  belles  éludes,  et 
Luci.  bci.civ.i.i.  s'y  soit  acquis  une  gloire  si  éclatoîite!  Car  enfin  '  les  peu- 
V.  ^35.  m.  |gg  jjg  ggg  Provinces  étoient   réellement  Gaulois,  et  pour 

j.isi.  i.isi.  1.  j,o.p.  leur  origine  et  pour  leurs  mœurs.  '  Ce  furent  eux  qui  bàli- 
*''■  rent   Milan,   Come,   Presse,   Vérone,    Bergame,   Trente   et 

Quint,  deci.  pr.  p.  Viceuce,  scpt  dcs  priucipalcs  villes  du  pais.  '  Nous  serions 
donc  en  droit  de  compter  parmi  nos  hommes  de  Letres  ce 
nombre  prodigieux  de  Savans  qu'a  produits  la  Gau-e  Cisal- 
pine. Les  céder  aux  Italiens,  dit  un  de  nos  Ecrivains  mo- 
dernes, c'est  faire  à  nos  ancêtres  une  injure  inexcusable. 

LXXXRL  Ici  quelle  riche  et  abondante  matière  se  pré- 
senteroit  pour  grossir  notr  >  ouvrage  !  Sans  descendre  plus 
bas  que  le  premier  siècle  de  l'Eglise,  que  de  savans  hom- 
mes nous  fourniroit  cette  nouvelle  Gaule  î  S  agit-il  de 
Poètes,  d'Orateurs,  de  Philosophes,  d'Hisloriens,  d'Hom- 
mes versés  en  toute  sorte  de  Liteiature?  Vous  y  en  trouve- 
rez et  en  grand  nombre,  et  d'un  me:itc  tout  singulier.  Ne 
vous  attendez  pas  néanmoins  que  nous  vous  en  fassions  ici 
un  dénombrement  exact.  Il  suffit  pour  la  gloire  de  notre 
Nation,  de  nommer  Virgile  le  Prince  des  Poètes  I^atins; 
Plotius  Tucca,  ami  de  Virgile;  Catulle;  Valerius  Flaccus; 
Tite-Live  ;  Cornélius  Nepos  ;  Valere  Maxime  ;  les  deux 
Plines;  Suétone,  qui,  selon  Vossius,' étoit  du  même  pais; 
Asconius  Pedianus  ;  le  Philosophe  Thrasea  Pœlus;  et  avant 
tous  ceuX'Ci,  Cœcilius  Statius ,  contemporain  d'Ennius  et 
de  Terence,  Ce  Statius  a  trop  contribué  à  enrichir  la  lan- 
gue Latine  pour  le  passer  si  légèrement.  Il  étoit  d'une  con- 
dition aervile,  né  à  Milan,  ou  dans  le  Milanès.  Mais  il  s'é- 
leva par  la  beauté  de  son  génie  au-dessus  de  la  bassesse  de 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    55 

sa  naissance ,  et  s'acquit  par  ses  ouviages  beaucoup  de  ré- 
putation. Il  laissa  de  sa  f-çon  plus  de  trente  Comédies.  '  S'il  iior.  1.2  e,i.  iv. 
y  a,  selon  Horace,  plus  d'art  dans  ïerer.ce,  il  y  a  aussi  plur.  ^^" 
de    '.ra.'ité  dans  Statius.  '  Un  autre  Ecrivain  avoue  que  la  Paterc.  1. 1.  n.  n. 
langue  Latine  est  redevable  à  ces  deux  Poëtes  d'une  partie 
de  ses  beautés  et  de  ses  agromcns. 

LXXXIV.  Voulez-vous  encore  d'autres  Savans  Gau- 
lois nés  au-delà  des  Alpes?  Joignez  aux  précedens  Lucius 
Pornponius  (i)  habile Poëte  de  Boulogne;  Titus  Cassius  Se- 
verus  ,  habile  Orateur  de  Parme  ;  et  un  autre  Severus  de 
Corne  ;  Marcus  Furius  Bibaculus  de  Crémone  ;  Quintilius 
son  compatriote  ,  grand  ami  d'Horace  et  de  Virgile  ;  Caius 
Albutius  Silus  ,  illustre  Rhéteur  de  Novare  dans  le  Mila- 
nès  ;  Crispus  V  ibius  ,  fameux  Orateur  de  Verceil  ;  Pedo  . 
Poêle  et  Orateur  d'Albinga  ;  Aruntius  Stella  de  Padouë , 
intime  ami  de  Martial  ;  vlimilius  Macer  ,  Poëte  célèbre  de 
Vérone  ,  qui  a  écrit  sur  les  oiseaux  et  sur  les  herbes  ;  Tinca 
de  Plaisance,  Orateur  célèbre  dans  Ciceron  ;  Caninius  Ru- 
fus  ,  compatriote  de  Pline  le  jeune  ,  qui  avoit  entrepris 
d'écrire  en  vers  la  guerre  do  Trajan  contre  les  Daces.  Joi- 
gnez encore  à  ceux-là  Atrius  Clemens  de  Padouë  ,  célèbre 
dans  Pline  le  jeune  ,  et  dans  Martial  ,  et  peut-,  tre  aussi 
Arettina  sa  femme ,  qui  passoit  pour  une  Savante  de  son 
siècle  ;    Caius   Calvilius,   fameux  Avocat   de  Milan  ;    Pale-  1 

mon  d(!  Vicenci;  ,  illustre  Gi-ammairien  sous  Claude  ; 
Munitius  Mi'crinus  ,  à  qui  Perse  adresse  quelques-uns  de 
ses  écrits  ,  et  Munitius  Acilinnus  son  fds,  l'un  et  l'autre  de 
Bresse  ,  ce  dernier  disciple  de  Pline  le  jeune  ;  Romanus 
Firmus  ,  et  Cornélius  Munitianus  ,  célèbres  Avocats  de  Co- 
rne ;  Pompeius  Saturnius  ,  Poëte  ,  Orateur  ,  Historien  , 
qui  paroU  avoir  été  de  la  même  Ville,  à  laquelle  il  légua 
la  plupart  de  ses  biens. 

LXXXV.  Ce  que  nous  diso  s  des  Savans  de  la  Gaule 
Cisalpine  ,    il   le   faut  dire  et  de  ceux  de  la  Galatie  et  de 
ceux  de  la   Celtibérie.   Les  raisons  en  sont  les  mêmes.  'On  Just.  hui.  i.ai.c. 
sait  que  celte  partie  de  la  Grèce  et   de  la  Macédoine  n'a  p.  àTôl'fiiL-.  îlaL 
porté  dans  la  suite  les  noms  de  Gallogrece ,  puis  de  Gala-  i"''  ^'  "*■  '^^^ 

(1)    Qnelqnes   modernes   trompés    '  par  ont  cru  que  Pomponios  étoit  né  dans  nos    Macr.  Sal.l.  C.  c. 

jes  Jparoles  de  Macrobe  qui  cite  ce  Pool*  Gaules.  Mais  il  est  certain  par  S.  Jeionie    9.  p.  5Gy. 

in  Galtis  Tronja/jo/ii?,   c'est-à-dire  dans  et  plusieurs  autres,  qu'il  étoit  de  iioulo- 

une  de  ses   Pièces  qui  traitoit  des  Gaulois  gne  en  Italie. 
aa-de-U   des  Alpes   par  raport  à  Komc, 


56  ETAT   DES    LETRES 

tie,  que  pour  avoir  été  conquise  par  les  Gaulois,  qui  s'y 
habituèrent  presque  en  même  tems  que  leurs  compatriotes 
strab.i.  3.  p.io*.  dans  la  Ligurie  et  les  autres  Provinces  du  voisinage.  '  De 
beKnVÎ K il'ï^o!  même  la  Celtibérie  ne  s'est  ainsi  nommée  que  des  Celtes, 
c^l.V's^"'''''  ^^^  s'étant  avancés  jusqu'à  la  rivière  d'Ebre  dans  l'Espagne 
Tarraconoise ,  et  même  jusqu'à  Caditz ,  selon  Ephorus  ra- 
porté  par  Strabon ,  y  fixèrent  leur  demeure ,  et  y  bâtirent 
Mart.  1. 4.  ep.  53.  nlusicurs  villcs.  '  C'cst  cc  qui  fait  dire  à  Martial  ,  en  par- 
lant de  lui-même,  et  de  ceux  de  son  pais,  nos  Celtis  genitos 
Ainsi  nous  serions  encore  en  droit  de  compter  parmi  nos 
Savans  Gaulois,  ceux  qu'ont  produit,  au  moms  en  ces  pre- 
miers tems,  les  divers  pais  dont  nous  venons  de  parler. 
Vous  verriez  donc  paroître  ici  les  éloges  de  Castor  natif 
de  Galatie,  si  célèbre  par  le  grand  nombre  de  ses  écrits; 
du  Roi  Déjotare  son  beau-pere  ,  qui  nous  est  aussi  repré- 
senté comme  un  homme  savant  ;  d'un  Acylas  autre  Galate, 
fameux  Rhéteur,  et  disciple  du  Sophiste  Chrestus.  La  Cel- 
tibérie nous  fourniroit  encore  une  assez  ample  moisson. 
Nous  y  trouvons  un  Martial,  que  tout  le  monde  connoit 
par  ses  Epigrammes  ;  un  Voconius  Romanus  illustre  Avo- 
cat, compatriote  de  Martial  ,  et  compagnon  inséparable 
de  Pline  le  jeune  ,  un  Valerius  Licinianus  du  même  pais 
que  le  précèdent,  l'un  des  plus  éloquens  hommes  du  Bar- 
reau, et  qui  fut  honoré  de  la  dignité  de  Préteur  ;  un  Lu- 
cius,  Poëte  célèbre;  enfin,  pour  abréger,  un  Materne,  l'un 
des  plus  habiles  Jurisconsultes  qui  fussent  à  Rome  du  tems 
de  Martial  son  compatriote.  Mais-,  quelque  droit  que  nous 
aïons  sur  ces  richesses,  nous  voulons  bien  les  céder  à  ceux 
qui  en  sont  en  possession  ,  pour  nous  renfermer  dans  les  bor- 
nes que  nous  nous  sommes  prescrites  dès  la  Préface  de  cet 
ouvrage. 

LXXXVI .  Revenons  donc  à  nos  Gaules  proprement 
prises.  Nous  vous  les  avons  représentées  en  partie,  com- 
me aïant  épousé  et  vivant  selon  les  loix  et  les  usages  de  1* 
Grèce .  Vous  allez  maintenant  les  voir  toutes  devenir  Ro- 
maines ,  en  joignant  aux  maximes  des  Grecs  les  coutumes 
des  Romains,  qui  prévalurent  sur  les  autres,  et  qui  se  ré- 
pandirent dans  toute  l'étendue  des  Gaules.  Ce  change- 
ment ne  se  fit  que  par  degrés .  L'alliance  entre  Rome  et 
Marseille  y  prépara  les  voies.  Ces  deux  fameuses  Villes 
commencèrent  à   s'entre-communiquer  mutuellement  leurs 

habitudes 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    57 

habitudes  et  leurs  usages.  Les  Romains  aïant  par-là  une 
entrée  ouverte  dans  ce  que  l'on  nomma  depuis  la  Gaule 
Narbonnoise,  y  firent  d'abord  un  grand  commerce.  En- 
suite ils  formèrent  le  dessein  de  la  subjuguer,  '  et  commen-  Amm.  i.  15.  p. 
cerent  à  l'exécuter  l'an  six  cens  vingt-neuf  de  la  fondation  "*^- 
de  Rome,  par  les  armes  de  M.  Fulvius  Flaccus,  Consul 
avec  M.  Plautius  Hypsœus  ;  puis  par  celles  de  C.  Sextus 
Calvinus.  Enfin,  Q.  Fab.  Max.  Allobrogicus  acheva  ce 
que  les  deux  autres  avoient  fort  avancé.  Bientôt  on  vit  des 
colonies  de  Romains  à  Arles,  à  Narbonne,  à  Vienne,  à 
Aix,  à  Valence,  à  Orange,  à  Avignon,  à  Beziers,  et  ail- 
leurs. De  sorte  que  tout]  le  pais  qui  étoit  entre  le  Rhône, 
les  Alpes,  et  la  mer  de  Ligurie,  aujourd'hui  de  Marseille, 
'devint  une  province  de  la  République  Romaine.  Cies.  bei.cai.i.i. 

LXXXVIL    II   y   avoit  déjà  du  tems  que  cette  Républi-  •'•  ^-  «• 
que  y  avoit  établi   sa   police,    '  et  que  le  pais  se   trôuvoit  cic.  pro  Font.  n. 
rempli    de    negocians    et   de    citoïens    Romains,  *  lorsque  ','(|!^/^jj     ^ 
les   Educns   s'avisèrent    d'apeller   les  Romains  à    leur   se- 33|i.'c.V-^223| 
cours  contre  les   incursions  des   Germains   ligués  avec  les  l'^n-  p-  237. 
Sequanois  et  les  Auvergnats.  César  profitant  de  cette   con- 
joncture pour  signaler  son  humeur  martiale,  passa  dans  la 
Celtique  et  le  reste  des  Gaules ,  à  la  tête  de  dix  Légions  ; 
'et  en  moins  de  neuf  ans  il  subjugua  tout  ce  vaste  pais  qui  Suet.  c«s.i.  i.n. 
est  depuis  les  Pyrénées   et  le  Rhône,  jusqu'au  Rhein  et  à  ^' 
l'Océan.    Par  cette   conquête    toutes    les    Gaules   eurent  le 
même  sort  que  la  Gaule  Narbonoise,  et  ne  firent  plus  avec 
elle   qu'une  Province  assujettie  aux  Romains.'  Dès-lors  on  cic. i.g.ep.is.p. 
accorda  le  droit  de  bourgeoisie  Romaine  à  plusieurs  de  ces  |*  l  S""'-  ■'^'''-  "• 
Gaulois   nouvellement  conquis,   de   quoi  paroit  se  plaindre 
Ciceron  dans  une  de  ses  letres  à  Paetus.  '  On  fit  même  da-  suct.  n.  so. 
vantage.  On  donna  à  plusieurs  entrée  dans  le  Sénat  :  ce  qui 
fit  murmurer   bien  du  monde ,  et  dire  publiquement  dans 
des  chansons  satyriques,  qu'au  même  tems  que  César  me- 
noit  les  Gaulois  en  triomphe,  on   les  voïoit  entrer  dans  le 
Sénat,  et  y  changer  leur  habit  à  la  Gauloise  contre  la  robe 
de  Sénateur. 

LXXXVIIL  Peu  de  tems  après,'  l'Empereur  Auguste  tju  Emp.t.  i.  p. 
successeur  de  César  passa  dans  les  Gaules  dés  la  cinquiè- 
me année  de  son  empire,  et  y  établit  l'ordre  du  gouver- 
nement suivant  les  loix  Romaines.  Il  y  créa  des  Préteurs, 
des  Présidens  ou  Proconsuls,  et  des  Questeurs  ,  qui  ren- 
Tome  J.  Prem.  Part.  H 


58  ETAT   DES    LETRES 

(loicnt  la  justice  en  Latin.  Cette  nouvelle  forme  de  gou- 
vernement obligea  les  Gaulois  à  apprendre  et  parler  la  lan- 
gue latine,  qui  n'étoit  jias  entierenv^nt  ineoimuë  dans  nos 
Gaules,  à  cause  du  graiid  commerce  qu'y  faisoienl  les  Ro- 
mains depuis  long-tems.  Mais  alors  elle  y  devint  toute 
commune  ;  et  l'on  y  vit  tout  h.  fois  l'usage  de  trois  lan- 
gues diffi^rentes,  la  gréque,  la  latine,  et  la  gauloise  ou 
Hier.  Cil.  pr.  2.  cciliquc,  qui  étoit  la  langue  naturelle  du  pais.  '  Cest  ce 
p- 2si.  qui  a  porté  Varron   qui,  selon  S.  Jérôme,  a  poussé  plus 

loin  que  personne  les  reclie, ches  de  l'anliquilé,  et  qui  a 
écrit  beaucoup  de  clioses  mémorables  sur  les  Gaulois,  à 
nommer  Triliiiynofi,  Tiigloltes,  les  habifans  de  Marseille  ; 
parce  qu'ils  parloient  grec,  latin,  et  gaulois.  Marseille 
au  reste  n'étoit  pas  le  seul  lieu  dans  les  Gaules,  où  l'on 
parlât  ces  trois  langues.  Leur  usage  s'étoit  répandu  en 
beaucoup  d'autres  endroits.  Donnons  à  ceci  plus  de  jour  ; 
et  pui.sque  l'ocasion  se  présente  de  parler  de  l'u.sage  de  ces 
langues  dans  les  Gaules,  ne  différons  pas  davantage  d'en 
dire  ce  qui  peut  convenir  à  nôtre  sujet. 

LXXXIX.  Dabord  on  ne  peut  pas  douter,  que  la  lan- 
gue Gréque  ne  fût  ijondant  long-tems  la  langue  vulgaire 
des  Marseillois.  Il  suffit  de  savoir  que  ces  Peuples  étoient 
originairement  Grecs.  Ce  fut  dans  cette  même  langue 
que  Pytbeas  et  Euthymenes,  J'un  et  l'autre  natifs  de  Mar- 
seille, publièrent  leurs  Ecrits  plusieurs  siècles  après  la  fon- 
dation de  cette  ville.  Il  n'y  a  pas  non  plus  lieu  de  douter 
que  cette  langue  ne  fût  fort  répandue,  au  moins  dans  la 
Gaule  Narbonoise  ,  et  que  l'on  ne  l'y  entendît  tout  com- 
munément. En  faut-il  des  preuves?  11  n'y  a  qu'à  se  sou- 
sira!>.  1. 4.p.i2i.  venir  de  ce  que  nous  avons  déjà  dit  '  des  colonies,  que  les 
iis.  Manseillois  établirent  en  divers  endroits  de    cette  Province, 

et  de  la  maxime  qui  y  regnoit,  selon  Slrabon  ,  de  dresser 
les  Actes  publies  en  langue  gréque.  Les  noms  que  portèrent 
les    nouvelles   villes    établies    par   les    Marseillois,    comme- 
Nice,      Antibes,      Agde,    dont  le  nom  primitif  étoit    Aga- 
iiicr.  ibM.  thopoHs,  prouvcul  encorc  la    même  chose.  '  Nonne  Grœci 

sennonis  indicia  demonsfranl?  disoïl  autrefois  S.  Jérôme,  en  se 
servant  du  même  raisonnement  pour  montrer  que  les  (irecs 
s'étoient  répandus  en  Espagne.  Ajoutez  à  cela  que  le  goût 
qu'avoit  pris  Rome  pour  la  langue  gréque  ,  qu'elle  culti- 
voit  avec  zèle  dès-avant  les  tems  de  Ciceron,  et  de  la  bel- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    59 

le  éloquence  latine  ,  ne  lui  étoit  venu  que  de  ses  habitu- 
des avec  Marseille  et  la  Province  ,  que  les  Romains  avoient 
conquise  dans  les  Gaules. 

XG.  11  est  si  certain  que  le  grec  a  été  une  langue  fort 
commune;  dans  toute  l'ancienne  Narbonoise,  qu'à  Arles  en 
particulier ,  on  l'y  entcndoit  encore  aux  quatrième ,  cin- 
quième et  sixième  siècles  de  l'Eglise.  '  Et  ce  n'éloient  pas  seu-  Cics.  vit.  i. 
lement  les  lùrlésiastiqucs  et  les  Gens  de  Lefres  qui  l'y  en- 
tendoient  ;  c'étoient  aussi  et  les  simples  laïques  et  le  petit 
peuple,  ïdiconnn  populantas.  S.  Gésaire,  Evêque  de  la  ville  au 
commenc(;ment  du  sixième  siècle ,  voulant  empêcher  que 
le  conmiun  du  peuple ,  qui  s'assembloit  dans  l'Eglise  pour 
entendre  ses  Sermons ,  ne  s'y  entretint  de  choses  indifféren- 
tes ,  en  attendant  l'heure  de  la  Prédication  ,  l'engagea 
à  chauler,  comme  faisoient  les  Clercs ,  des  Proses  et  des  An- 
tiennes en  grec  et  en  latin.  La  langue  grèque  ètoit  donc 
alors  encore  en  usage  parmi  le  peuple.  '  On  l'y  emploïoit  noi.  p.  ee^. 
même  ,  remarque  un  Savant ,  dans  les  Offices  divins.  De 
même  au  quatrième  siècle,  aprcs  la  mort  de  l'Empereur 
Constantin  le  jeune,  qui  fut  tuè  en  3i0 ,  un  Anonyme  aïant 
entrepris  de  faire  son  (Jraisun  funcbre  ,  l'exécuta  en  langue 
gi  è(jue  devant  le  peuple  d'Arles ,  lieu  de  la  naissance  de  ce 
Prince.  Nous  avons  encore  cette  pièce  qui  est  une  preuve 
bien  rèdle  de  ce  que  nous  avançons  (1).  Que  si  vous  voulez 
remonter  plus  haut,  vous  trouverez  au  deuxième  siècle  un 
Favorin  natif  d'Arles ,  qui  écrivit  toujours  en  grec  le  grand 
nombre  d'ouvrages  qu'il  laissa  à  la  Posl(';rité. 

XGI.  Non  seulement  l'usage  commun  de  la  langue  grè- 
que se  maintint  long-tems  dans  la  Narbonoise  ;  mais  il  pas- 
sa aussi  dans  la  Celtique  au-de-là  du  Rhône.  Il  est  au  moins 
vrai  que  cette  langue  ètoit  fort  connue  à  Lyon.  Cela  ne 
doit  pas  paroître  surprenant  ;  puisque  cette  ville  se  trou- 
voit  a  la  proximité  de  la  Gaule  Narbonoise ,  et  qu'elle  ètoit 


(1)   Peul-êiro    viendra-t'il    en  pcnsco   à  on  doit  savoir  qu'il  yabien  dola  diffcrciiM 

quelqu'un  d'opposer  à  ;ce  que  nous  venons  enire  la  pratique   des   premiers  siècles  do 

de  dire,  la  pratique  qui  est  aujourd'hui  eu  l'Eglise   et    celle  do  ces    derniers    siècles, 

vigueur.    Le   iieuple  chante  à  l'Eglise    en  Alors  on  ne  se  servoit  point  dans  l'Oflicc 

latin,    et    il     ne    l'entend    pas.     Quelques  divin  d'une  lan;,'ue  qui  iiu  fût  pas  entendue. 

Kglises  conseiv<'nt  l'usage  de  dire  la  Messe  D'ailleurs  nous  avons  montré  par  d'autres 

eu  grec  en   certaines  Kêtes.  11   se  fait  niê-  raisonna  mens  qu'en   ces  siècles  reculés   le 

mo  quelquefois  des   Prédications  en  grec.  prec  ètoit  une  langue  vivante  dans  toute  la 

Le  peuple  qui  y  assiste,   et  peut-être  ceux  Narbonoise  :  au  lieu  que  depuis  long-tems 

qui    oflicient,  no   l'entendent  point.    Mais  il  est  parmi  nous  une  lauigue  morte. 


Hij 


60  ETAT   DES   LETRES 

d'un  grand  abord  pour  les  peuples  de  cette  Province.  Mais 
afin  d'éviter  les  redites ,  nous  reservons  les  preuves  que 
nous  avons  de  cette  vérité ,  pour  les  raporter  en  leur  lieu. 
Vous  verrez  sur  le  premier  siècle  de  l'Eglise ,  que  dès  l'em- 
pire de  Caligula  il  se  livroit  à  Lyon  des  combats  literaires 
en  grec  comme  en  latin.  Ces  exercices  se  faisoient  en  pu- 
blic :  ce  qui  supose  que  le  peuple  entendoit  l'une  et  l'autre 
langue.  Sur  le  siècle  suivant  vous  verrez  que  le  grec  étoit 
fort  familier  aux  Fidèles  de  la  même  ville  ;  que  les  Evê- 
ques  qu'ils  avoient  à  leur  tête  ,  ne  parloient  point  d'autre 
langue  ;  que  ce  fut  en  cette  même  langue  que  S.  Irenée , 
l'un  d'entre  eux,  publia  ses  écrits,  qui  étoient  principale- 
ment pour  l'instruction  de  son  troupeau  ;  et  que  ce  fut  aussi 
en  grec  que  les  Eglises  de  Lyon  et  de  Vienne  écrivirent  les 
Actes  de  leurs  Martyrs. 

XCU.  Poussons   plus   loin  ;    et   nous   découvrirons   des 
marques    qu'on    a    parlé    autrefois    la    langue    gréque    en 
Luci.  lier.  Cal.  p.  bien    d'autrcs   endroits    des    Gaules.    '    Lucien  ,    y   aïant 
3G0.  367.  |Vjj^    ^j^    voïage ,   y   rencontra    un   Philosophe    Gaulois , 

avec  lequel  il  eut  une  assez  longue  conférence  en  grec. 
A  cette  occasion  Lucien  remarque  que  ce  Gaulois  lui 
cita  non  seulement  des  vers  grecs ,  mais  qu'il  parloit 
même  aussi  parfaitement  cette  langue ,  que  si  elle  lui 
avoit  été  naturelle,  àxpiêw?  EXXa^a  (pcm.v  à^iei?,  Les  noms 
propres  d'hommes ,  qui  sont  originairement  grecs ,  et 
qui  ont  été  si  communs  dans  nos  Gaules  ,  sur-tout  en  Aqui- 
taine ,  comme  Hilaire  ,  Phebade  ^  Phoebitius  ,  Alethe  ,  Mu- 
sée ,  Anastase  ,  Eucher  ,  Delphide  ,  Dyname  ,  et  tant  d'au- 
tres ,  ne  sont-ils  pas  encore  des  preuves  ,  que  la  langue  gré- 
que étoit  en  usage  en  ces  pais-là?  Encore  aujourd'hui  l'on 
aperçoit  dans  le  jargon  de  quelques  peuples  d'Aquitaine  , 
des  mots  qui  ne  peuvent  leur  être  venus  que  du  grec  imme- 
(VII.)  diatement.  Tels  sont  entr 'autres  Kalaaux  pour  des  noix  lors- 

qu'elles commencent  à  tomber  de  l'arbre,  A-plo  pour  oui. 
assurément ,  Enphounil  pour  un  entonnoir ,  BàiarcfpoviT  une 
civière.  D'ailleurs  le  soin  que  l'on  prenoit  d'enseigner  la 
langue  gréque  ,  particulièrement  à  Bourdeaux ,  comme 
nous  dirons  sur  le  quatrième  siècle,  et  les  Savans  en  cette 
langue  que  l'on  trouve  dans  les  Gaules  en  divers  siècles  , 
tout  cela  ne  fait-il  pas  voir  que  cette  langue  étoit  commu- 
ne dans  nos  Provinces?  Enfin  la  conformité  qui  se  rencon- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    61 

tre  entre  le  génie  de  la  langue  gn'que  et  le  génie  de  la  fran- 
çoise  ,  et  le  grand  nombre  de  mots  que  celle-ci  a  emprun- 
tés de  l'autre  ,  ne  sont-ils  pas  des  indices  subsistans  ,  que 
nos  Ancêtres  ont  autrefois  parlé  la  langue  des  Grecs  ?  Joiy,  ccoi.  1. 1.  c. 
'  Erasme  a  même  remarqué  dans  la  Picardie  des  vestiges  ^'  ^'  ^'" 
qui  prouvent  qu'on  y  avoit  parlé  anciennement  la  même 
langue. 

XCIIL  A  l'égard  de  la  langue  latine  ,  il  est  si  constant 
qu'elle  a  été  pendant  plusieurs  siècles  la  langue  vulgaire 
des  Gaulois  ,  qu'il  ne  paroît  pas  que  personne  l'ait  jamais 
révoqué  en  doute.  Vous  en  trouverez  plusieurs  preuves 
dans  le  cours  de  cette  Histoire  ,  lesquelles  nous  ne  rapor- 
lerons  pas  ici  ,  pour  éviter  la  répétition.  Les  Gaulois  com- 
mencèrent à  entendre  le  latin  par  le  moïen  du  grand  com- 
merce que  faisoient  les  Romams  dans  les  Gaules.  Ceux-ci 
dans  la  suite  s'étant  rendus  les  Maîtres  de  toutes  nos  Pro- 
vinces ,  les  Gaulois  se  trouvèrent  obligés  à  aprendre  et  à 
parler  la  langue  du  victorieux.  '  Car  c'étoit  la  coutume  de  Aug.  civ.  i.  id. 
ces  superbes  vainqueurs  ,  remarque  S.  Augustin  ,  d'imposer. '• 
ce  joug  à  toutes  les  Nations  qui  subissoient  celui  de  leur 
empire.  On  peut  même  dire  que  la  langue  latine  fit  de 
très-grands  progrès  dans  les  Gaules.  Vous  n'en  douterez 
nullement ,  lorsque  vous  verrez  le  grand  nombre  de  Pro- 
fesseurs d'éloquence  ,  que  les  Gaules  ont  fournis  à  la  ville 
même  de  Rome  ,  sans  parler  de  ceux  qui  ont  enseigné  dans 
leur  propre  pais  ,  avec  autant  de  succès  que  d'éclat.  Le 
peu  d'ouvrages  qui  nous  restent  de  nos  anciens  Ecrivains 
en  celte  langue  ,  en  sont  une  autre  preuve  que  l'on  ne  sau- 
roit  contredire.  Nous  voulons  parler  des  écrits  des  deux 
Saints  Hilaires  de  Poitiers  et  d'Arles  ,  d'Ausone  ,  de  S.  Sé- 
vère Sulpice  ,  de  S.  Paulin  ,  de  S.  Eucher  ,  de  S.  Prosper  , 
de  Salvien  ;  et  avant  tous  ceux-là  ,  de  Pétrone  ,  et  de  Tro- 
gue  Pompée  ,  quoique  l'on  ne  nous  ait  conservé  qu'un 
abrégé  assez  imparfait  de  l'Histoire  de  celui-ci. 

XCIV.  Disons  plus  ;  disons  qu'à  bien  prendre  les  cho- 
ses ,  Rome  n'a  gueres  d'avantage  sur  les  Gaules  ,  pour  avoir 
mieux  parlé  qu'elles  sa  langue  naturelle.  En  effet  '  si  les  ^ier.  en  95 
Romains  la  parloient  avec  plus  de  gravité  que  les  Gau-  ^tk' 
lois  ,  les  Gaulois  de  leur  côté  le  faisoient  et  avec  plus  de 
fécondité  ,  et  avec  plus  d'élegance  que  les  Romains.  C'é- 
toit à  dessein  de  faire  de  l'une  et  l'autre  manière  de  par- 
s 


62  ETAT    DES    LETRES 

1er  cette  langue  ,  un  certain  assaisonnement  de  bon  goût ,  que 
les  Gaulois  passoienl  quelquefois  de  leur  pais  à  Rome  :  ut  uber- 
tatem  rjaUici  nitoremque  sermoim  gravitas  Romana  condiret. 
Ils  avoieut  tant  d'ardeur  pour  posséder  celte  langue  dans 
sa  perfection,  qu'ils  ne  negligeoient  rien  pour  y  réussir, 
cp.  5.  p.  568.  '  La  réputation  que  Tite  Live  s'éloit  faite  de  son  vivant 
par  la  douceur  et  la  fécondité  de  son  éloquence  ,  suffit  pour 
altirer  à  Rome  ceux  d'entre  les  nobles  Gaulois  que  les  cu- 
riosités de  cette  Capitale  du  monde  n'y  avoient  pu  attirer. 
Après  la  décadence  de  l'Empire  d'Occident ,  et  l'inonda- 
tion des  Barbares  dans  les  Gaules  ,  la  langue  latine  com- 
mença à  y  perdre  sa  beauté  ,  et  à  y  tomber  peu  à  peu.  Mais 
l'usage  s'en  est  toujours  conservé  jusqu'à  nous  dans  les  Of- 
fices de  l'Eglise  ,  et  m!*me  dans  les  Actes  publics  ,  au  moins 
jusqu'au  règne  de  François  I.  De  même  on  l'a  presque  tou- 
jours emploïée  dans  ce  que  l'on  a  écrit  pour  la  postérité  , 
jusqu'à  la  fin  de  ce  même  règne.  Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de 
parler  des  divers  degrés  de  corruption  ,  par  lesquels  elle  a 
passé.  Nous  reservons  à  traiter  ce  sujet  à  mesure  que  les 
tems  nous  en  feront  naître  l'ocasion. 

XGV.  Pour  ce  qui  est  de  la  langue  gauloise  ou  celtique 
nous  en  dirons  peu  de  choses  ,  parce  qu'il  y  en  a  peu  de 
satisfaisantes  et  de  certaines.  En  effet ,  cette  langue 
n'étant  plus  en  usage ,  qu'(m  pouvons-nous  tirer  pour 
instruire  nos  Lecteurs  ?  De  plus  ,  les  Anciens  nous  four- 
nissent si  peu  de  lumière  sur  ce  sujet ,  que  les  Modernes 
ne  sav(>nt  presque  à  quoi  s'en  tenir.  (Jue  faire  dans  cette 
incertitude  ?  l'icn  de  mieux  que  de  vous  donner  une  no- 
Bor.  rcch.  c.aui.  tioji  dc  leuis  divcrs  sentimeus.  '  Mrs  Borel  et  Marcel  pn'ten- 
Fr.  'i.'*'i'.'''p.''n.'''°  dent  que  la  langue  celtique  n'est  qu'une  dialecte  de  la  lan- 
gue hébraïque.  C'est  ce  qu'ils  ont  suposé  sans  se  mètre  en 
peine  de  le  prouver.  Samuel  Rocharl  dans  son  Phaleg  sou- 
tient que  l'ancien  gaulois  tiroit  son  origine  de  la  langue 
phéniciejine.  Et  il  tâche  de  prouver  cette  opinion  par  di- 
vers raisonnemcns  ,  pris  de  la  conformité  qu'ont  ces  deux 
langues  dans  les  termes  qui  servent  à  exprimer  les  noms 
des  Dieux  ,  des  dignités  ,  des  habits  ,  des  animaux  ,  des  her- 
bes ,  el  de  ce  qui  concerne  la  Guerre  et  la  Géographie. 
D'autres  Ecrivams  vont  encore  plus  loin  ,  et  prétendent 
que  leur  langue  étoit  la  même  que  celle  qu'aporta 
Cadmus    de    Phénicie    en    Grèce.     Boxhorniu.,    au    con- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    G3 

Iraire  dans  son  Livre  des  Origines  gauloises ,  impri- 
mé après  sa  mort ,  veut  que  la  langue  celtique  n'ait 
point  d'autre  origine  que  la  langue  des  Scythes ,  et  su- 
pose  que  celle-ci  a  été  dès  le  commencement  commune 
et  même  l'unique  en  usage  dans  tout  l'Occident.  Mais  si 
l'on  avoit  demandé  à  cet  Ecrivain  d'où  la  langue  des  Scy- 
thes tiroit  elle-même  son  origine ,  sans  doute  il  auroit  re- 
monté plus  haut ,  et  se  seroit  peut-être  trouvé  contraint 
de  rétrograder  jusqu'à  la  langue  phénicienne  ou  hébraï- 
que. 

XCVL  Ainsi  à  dire  ce  qui  nous  paroît  le  plus  vraisem- 
blable sur  ce  sujet ,  la  langue  des  Celtes  ou  Gaulois ,  com- 
me celles  de  tous  les  autres  anciens  Peuples ,  vient  de  la 
première  langue  du  monde ,  qui  jusqu'à  la  confusion  arri- 
vée à  lîabel ,  étoit  l'unique  en  usage.  Depuis ,  il  se  forma 
autant  de  dialectes  de  cette  langue  primitive ,  qu'il  y  eut 
de  Nations  différentes  les  unes  des  autres.  L'ancien  Celti- 
que en  est  donc,  à  proprement  parler,  une  dialecte 
laquelle  par  succession  de  tems,  aiant  reçu  divers 
secours  des  autres  dialectes,  comme  elle  leur  en  a  prêté 
elle-même ,  prit  enfin  la  consistence  qu'elle  avoit  dans  nos 
Gaules ,  lorsqu'elle  céda  la  place  à  la  dialecte  des  Homains. 
'Ce  que  dit  M.  Marcel  de  la  grande  uniformité  de  lan-  Marcci.insLjoFp. 
gage,  qui  se  trouve  entre  la  plupart  des  Peuples  de  l'Oc- 
cident ,  confirme  admirablement  ce  que  nous  avançons 
ici.  Tous  ces  Peuples ,  dit-il ,  se  sont  expliqués ,  et  s'expli- 
quent encore  aujourd'hui  par  des  dialectes,  qui  ne  sont 
pas  si  différentes  que  l'on  n'y  reconnoisse  la  langue  primi- 
tive. Et  quand  on  remonte  insensiblement  vers  h  s  pre- 
miers siècles  ,  on  trouve  toujours  un  plus  grand  raport  ;  et 
l'on  parvient  enfin  à  des  tems  où  les  noms  des  peuples ,  et 
des  villes,  et  les  noms  propres  d'hommes  se  rencontrent 
les  mêmes  dans  toute  la  vaste  étendue  de  l'ancienne  Cel- 
tique ,  c'est-à-dire  de  l'Espagne ,  des  Gaules ,  de  la  Ger- 
manie, de  la  Grande  Bretagne.  De  même  si  l'on  pouvoit 
parcourir  les  diverses  dialectes  des  autres  anciens  Peuples , 
en  remontant  jusqu'à  la  source ,  cette  rétrogradation , 
nous  conduisant  jusqu'à  la  première  langue  du  monde , 
nous  decouvriroit  la  même  uniformité  de  langage  entre 
ces  anciens  Peuples ,  qu'entre  ceux  de  l'ancienne  Celtique. 

XCVIL  Nous   n'avons  gueres   plus  de  certitude  sur  la 


t.  I.  p.  11. 


11. 


t 


64  ETAT   DES   LETUES 

nature  de  l'ancienne  langue  des  Gaulois  ,  que  sur  son  ori- 
AnJr.  top.  Bcig.  ginc.  '  Il  est  des  Auteurs  qui  ont  prétendu  qu'elle  n'étoit 
*'  *•  autre  que  celle  qui  est  aujourd'hui  à  l'usage  des  Flamands. 

Us  ont  même  regardé  cette  opinion  comme  si  certaine, 
Hier.  Gai.  pr.  2.  qu'ils  Ont  cru  qu'il  n'étoit  pas  permis  d'en  douter.  '  Il  est 
P-*52.  yj-ai   qu'encore  au  quatrième  siècle  les  Peuples  de  la  Bel- 

gique   parloient,    à   quelque   changement  près,  le   même 
langage   que   les   Galates ,   qui   étoient   sortis   des   Gaules. 
Ram.  mor.  Gai.   '  Mais  Ics  Flamans  du  quatrième  siècle  ,  remarque  fort  bien 
P-  ''*■  la   Ramée ,   étoient  bien   difTerens  des  Flamans   d'aujour- 

d'hui. Cette  partie  de  la  Belgique  parloit  alors  la  langue 
gauloise ,  au  lieu  que  depuis  plusieurs  siècles  elle  se  sert , 
selon  l'opinion  la  plus  commune ,  du  Teuton  ou  Allemand , 
avec  certains  changemens  qui  s'y  sont  introduits.  Une  au- 
tre opinion ,  qui  est  celle  de  plusieurs  Savans ,  dont  quel- 
ques-uns ont  écrit  près  de  cent  cinquante  ans  avant  Uom 
Paul  Pezron ,  établit  comme  certain  que  la  langue  des 
Bas-Bretons  est  la  même  que  l'ancienne  Gauloise  ou  Gelti- 
ue.  On  apuïe  ce  sentiment  sur  ce  que  les  gens  du  pais 
e  Galles  en  Angleterre ,  où  l'on  supose  que  celte  langue 
s'est  conservée,  conviennent  dans  le  langage  avec  les  Peu- 
Tac,  vil.  Agr.  n.  nlcs  dc  k  Basse-Brctague.  '  Ce  qu'il  y  a  de  certain  ,  c'est  que 
les  anciens  Peuples  de  la  grande  Bretagne  parloient  une 
langue  qui  n'étoit  pas  beaucoup  différente  de  celle  des 
Gaulois  :  Sermo  haud  multum  diversiis ,  dit  Tacite. 

XCYIII.  Dom  Pezron  a  pris  si  fort  à  cœur  cette  uni- 
formité de  langage  entre  nos  Bas-Bretons  et  les  anciens 
Gaulois ,  qu'il  a  cru  devoir  composer  un  Livre  pour  la  per- 
suader aux  autres.  C'est  ce  qu'il  s'est  efforcé  de  faire  dans 
son  Traité  de  V Antiquité  de  la  Nation  et  de  fa  langue  des  Celtes 
ou  Gaulois.  Mais  il  y  a  deux  puissantes  objections  à  faire 
contre  son  système  :  La  première  que  Tacite  ne  dit  point, 
comme  vous  le  venez  de  voir ,  que  la  langue  des  Gaulois 
et  celle  des  anciens  Bretons  fussent  entièrement  les  mê- 
mes; mais  seulement  qu'elles  n'étoient  pas  beaucoup  dif- 
férentes entre  elles.  II  y  avoit  donc  dès-lors  assez  de  dif- 
férence entre  l'une  et  l'autre  pour  les  distinguer ,  et  ne  les 
pas  confondre.  Et  quelle  étrange  différence  n'y  aura  pas 
mtroduit  depuis  Tacite  l'espace  de  seize  siècles  ?  L'autre 
objection  se  prend  des  anciens  mots  celtiques  ou  gaulois  , 
que  nous  ont  conservé  les  anciens  Auteurs ,  et  que  nos  Bas- 
Bretons 


DANS  LES  GAULES  AVANT  .T.  C.    65 

Bretons  n'entendent  point.  Nous  ne  l'avançons ,  qu'après 
en  avoir  fait  nous-mêmes  l'épreuve.  Que  conclure  de-là, 
sinon  qu'il  seroit  plus  conforme  à  la  vérité  de  dire  seulement 
que  le  jargon  des  Bas-Bretons  n'est  tout-au-plus  qu'une  dia- 
lecte de  notre  ancien  celtique? 

XCIX.    Dom    Pezron    n'est    pas    mieux    fondé  '  à  nous  Pezron,  am.  des 
donner  la  langue  celtique  pour  une  langue  matrice ,  en  ce  *^*"''  ''■  ^^"^ 
qu'elle  a  fourni  une  infinité  de   mots  aux  langues  gréque , 
latine  et  teutone.  A  la  vérité  l'on  ne  peut  pas  nier ,  '  que  Q„int.  inst.  or.  i. 
le  latin  n'ait  emprunté  quelques  termes  du  celtique  ou  gau-  l^' f  1™"370^V 
lois.  Divers  anciens  Ecrivains  nous  assurent  que  Ciceron ,  Mac'r.  sai.  i.  e.  c. 
Horace ,  Virgile ,    Cor.    tiallus  y  ont   puisé   quelques-unes  *'  '*'  ^''" 
de  leurs  expressions ,  et  que  k  nom  latin  que  porte  la  riviè- 
re de  Pô   lui  est  venu  d'un  mot  celtique.  Peut-être  le  grec 
en  aura-t-il  tiré  le  même  secours ,  et  encore  plus  le  teuton  , 
qui  étoit  la  langue  des  Germains.  Mais  tous  les  mots  que 
ces  langues  auront  empruntés  du  gaulois ,  n'iront  pas  à  une 
infinité ,  et  n'égaleront   peut-être   pas  le   nombre   de   ceux 
que  le  gaulois  aura   pris  lui-même  des  autres  langues  pour 
s'enrichir.    Au   reste ,  si  pour   mériter   la   qualification  de 
langue  matrice,  il  suffit  qu'une  langue  fournisse  quelques 
mots  à  une  autre  langue ,  il  n'y  en  aura  presque  point  qui 
ne  mérite  ce  glorieux  titre.  Car  il  est  certain  que  c'est  là 
un   secours   que  presque    toutes  les    langues  du  monde  se 
sont  prêté   mutuellement   les  unes  aux  autres ,  depuis  que 
l'orgueil  humain  les  a  fait  multiplier. 

C.  Quelle  qu'ait  été  la  langue  celtique,  elle  se  répan- 
dit fort  au  loin  par  la  dispersion  des  Gaulois ,  à  qui  elle 
étoit  naturelle.  Elle  pénétra  bien  avant  dans  la  Germanie , 
par  le  moïen  des  différentes  colonies ,  qu'ils  y  envoierent 
selon  César  el  Tite  Live.  De  même  leurs  expéditions  au- 
de-là  des  Alpes  et  des  deux  Pannonies ,  la  firent  connoître 
et  dans  le  pais  que  l'on  a  depuis  nommé  la  Gaule  Cisalpi- 
ne ,  et  dans  ces  parties  de  la  Grèce  et  de  la  Macédoine , 
qu'ils  conquirent  par  leurs  armes.  '  Encore  au  quatrième  sié-  Hier.  iWd. 
cle,  les  Galates  parloient  avec  le  grec  la  langue  celtique, 
telle  qu'on  la  parloit  à  Trêves ,  à  quelques  changemens 
près.  C'est  ce  que  nous  assiire  S.  Jérôme ,  qui  en  étoit  té- 
moin pour  avoir  été  en  l'un  et  l'autre  endroit.  De  cette 
langue  celtique  ou  gauloise ,  jointe  d'abord  à  la  gréque ,  à 
la  latine  ;  et  à  celle  des  Francs ,  s'est  formée  nôtre  langue 

Tome  I.  Prem.  Part.  1 

9  « 


66  ETAT   DES    LETRES 

françoise ,  qui  avec  quelques  autres  acroissemens  qu'elle  a 
reçus  des  langues  de  nos  voisins  ,  a  pris  enfin  la  consistance 
qu'elle  a  aujourd'hui.  C'est  à  quoi  nous  donnerons  dans 
la  suite  et  plus  d'étendue  et  plus  de  jour,  orsque  nous 
traiterons  des  propriétés  de  cette  langue. 

CI.  Non  seulement  la  domination  des  Romains  dans 
les  Gaules  habitua  nos  Gaulois  à  parler  la  langue  latine  ; 
mais  elle  leur  fut  aussi  une  ocasion  de  cultiver  toutes  les 
sciences  avec  une  nouvelle  ardeur.  On  en  devine  aisément 
sym.  1. 1.  cp.  i",.  et  le  motif  et  la  raison.  '  C'est  que  les  letres  étoient  alors 
la  voie  ordinaire  pour  parvenir  aux  charges  et  dignités  de  la 
République.  On  n'y  élevoit  personne  en  ces  bons  siècles, 
qu  il  ne  fût  versé  dans  la  literature,  parce  que  ces  places 
demandoient  du  savoir,  pour  qu'on  en  pût  dignement  rem- 
plir les  fonctions.  Il  falloit  savoir  les  loix  et  la  jurispruden- 
ce, pour  soutenir  avec  honneur  les  charges  de  Préfet  du 
Prétoire,  d'Assesseur,  de  Vicaire  des  Préfets.  Il  falloit 
avoir  de  l'éloquence  pour  être  Questeur,  Secrétaire  d'E- 
tat, et  dresser  en  ces  qualités  les  letres,  les  rescrits,  les 
loix  des  Empereurs.  On  ne  pouvoit  être  bon  Politique,  et 
par  conséquent  ni  bon  Magistrat,  ni  bon  Officier  d'armée 
ou  de  finance,  sans  connoître  l'antiquité,  et  posséder  l'his- 
toire. Les  Gaulois  devenus  membres  de  la  République 
Romaine,  et  propres  en  cette  qualité  à  y  exercer  les  pre- 
miers emplois,  se  trouvèrent  donc  obligés  à  aporter  une 
nouvelle  application,  pour  acquérir  les  sciences  qui  y  con- 
duisoient. 

Cil.  Ce  premier  motif  se  trouvoit  soutenu  par  un  autre 
qui    n'étoit  pas  moins   favorable   au  progrès  des  sciences. 
Ficu.  (lis.  i.n.io.  '  Suivant  les  loix  Romaines  qui  étoient  celles  de  la  bonne 
''■  '"*'■  antiquité,  la  puissance  publique  résidoit  dans  le  Souverain. 

Elle  n'étoit  communiquée  aux  particuliers  que  par  les  ma- 
gistratures et  les  charges,  sans  leur  être  jamais  abandonnée 
en  propriété.  Ainsi  les  Magistrats  et  les  Officiers  de  la  Ré- 
publique étant  amovibles,  ils  faisoient  place  à  d'autres  : 
ce  qui  procuroit  un  très-grand  avantage  pour  les  letres. 
Car  plus  il  falloit  de  personnes  pour  remplir  ces  magistra- 
tures et  ces  charges,  plus  il  y  avoit  d'émulation  à  se  rendre 
digne  d'y  parvenir.  On  voïoit  alors  une  chose  aussi  utile 
qu'agréable,  et  que  l'on  verroit  encore  aujourd'hui  avec 
autant  d'avantage  que  de  plaisir:  le  secours  mutuel  que  se 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    67 

prêtoient  les  sciences  cl  les  honneurs.  '  Comme  les  scien-  Sym.  1. 1.  ep.isi 
ces  éloient  la  voie  la  plus  ordinaire  pour  ariver  aux  hon-  **"■  ^^' 
neurs  de  la  République  :  de  même  ces  honneurs  étoient  le 
plus  puissant  motif  pour  soutenir  l'émulation  et  l'ardeur 
pour  les  sciences.  De-là  cet  ancien  proverbe  si  célèbre  dans 
Symmaque  :  artes  honore  nutriri,  les  sciences  et  les  arts  ne 
se  soutiennent  que  par  l'honneur  qui  les  suit,  ou  qui  les 
accompagne. 

ClIL  L'ordre  que  l'on  tenoit  dans  les  études,  dans  ces 
premiers  tems ,  n'étoit  pas  tout-à-fait  le  même  que  celui 
que  l'on  y  suit  aujourd'hui.  '  L'on  commençoit  dabord  par  Rut.  not.  p.  218. 
1  étude  de  la  Grammaire.  Sous  ce  nom  l'on  entendoit  non- 
seulement  l'étude  de  sa  langue  maternelle,  pour  la  parler 
et  l'écrire  correctement,  mais  aussi  tout  ce  qui  pouvoit  con- 
tribuer à  donner  l'intelligence  des  bons  Auteurs.  '  On  fai-  p.  217.  218 1  Petr. 
soit  précéder  l'étude  du  grec  à  celle  de  la  belle  latinité,  en  **'" ^'  *"""■ 
se  servant  d'Homère  et  de  Demosthene  pour  l'une,  de  Cice- 
ron  et  de  Virgile  pour  l'autre.  De  la  Grammaire  on  passoit 
à  la  Poésie,  puis  à  la  Philosophie.  Après  quoi  l'on  s'apli- 
quoit  à  la  Rhétorique.  Pendant  que  l'on  faisoit  cette  étu- 
de, on  avoit  soin  de  donner  quelque  tems  à  la  connoissance 
de  l'Histoire  ;  et  l'on  finissoit  par  une  étude  sérieuse  des 
écrits  de  Ciceron.  C'est  presque  le  même  ordre  que  Pé- 
trone prescrivoit  encore  sous  l'empire  de  Néron  aux  jeunes 
gens,  qui  vouloient  se  rendre  habiles  dans  les  sciences.  Et 
comme  il  est  impossible  d'y  faire  du  progrès,  sans  mener 
une  vie  réglée,  cet  Auteur,  quoiqu'il  n'eut  pas  toujours 
vécu  de  la  sorte,  a  la  précaution  d  y  joindre  des  règles  de 
conduite,  qui  ne  seroient  pas  indignes  d'un  Chrétien.  '  Il  p.  i6-i8. 
veut  donc  que  ceux  qui  s  apliquent  ainsi  à  l'étude ,  com- 
mencent par  suivre  une  exacte  frugalité.  Qu'ils  évitent 
et  la  table  des  grands ,  et  la  compagnie  des  débauchés. 
Qu'ils  ne  s'abandonnent  point  au  vin  qui  abrutit  l'esprit,  et 
qu'ils  ne  se  trouvent  jamais  aux  spectacles  du  théâtre ,  qui 
ne  peuvent  avoir  que  des  suites  funestes. 

CIV.  Cet  endroit  de  Pétrone  est  sans  contredit  un 
des  plus  beaux  de  tous  ses  écrits,  comme  il  en  est  un  des  plus 
chastes;  et  nous  croirons  faire  plaisir  au  Lecteur  de  lui  en 
donner  ici  le  texte  original. 


lij 


68  ETAT    DES    LETRES 


Peir.  sai.  p.    IC-  '  Artis  severac  si  quis  amat  effuctus 

'■'*'■  Menlemque  magnis  applicat,  prius  more 

l'rugalitatis  loge  palleat  cxacta  : 
Nec  curet  alto  regiam  tnicom  vultu, 
Gliensque  cœnas  impotentium  captet  : 
Nec  perditis  adJictus  obruat  vino 
Mentis  caiorera,  nevc  plausor  in  sceua 
Sedeat  redimitus  histrionitc  addictus. 
Scd  sive  aimiguraj  rident  Tritonidis  arces. 
Seu  Lacedicmonio  tcUus  Iiabitata  colotio, 
Sirenumque  doraus,  dot  prrraos  vcrsibus  anno;?, 
Mœoniunique  bibat  felici  pectore  fonteni; 
Mox  et  Socratico  plenus  grege,  mutet  liabenus 
Liber,  et  ingentis  quatiat  Demosthenis  arma. 
Hinc  Roraana  manus  circumfluat,  et  modo  firaio 
Exonerata  sono  mutet  suffusa  saporeni  : 
Interdum  subducta  foro  det  pagina  cui-suni, 
Et  forluna  sonet  céleri  distincta  meatu. 
Dent  epulas,  et  bella  truci  memorata  canote  : 
(Irandiaquc  indomiti  Ciceronis  vcrba  minentur. 
His  animum  succinge  bonis,  sic  llumine  largo 
Plenus,  Pierio  diffundes  pc(  tore  verba. 


CV.  Comme  le  Barreau  étoit  le  séminaire,  d'où  l'on  ti- 
roil  les  Préfets  du  Prétoire,  leurs  Assesseurs,  leurs  Vicai- 
res ,  les  Gouverneurs ,  ou  Présidens  des  Provinces ,  les 
Questeurs,  les  Intendans,  etc.  il  falloit  l'avoir  hanté  quel- 
que tems  pour  pouvoir  prétendre  à  ces  emplois  et  dignités. 
C'est  ce  qui  porta  nos  Gaulois  à  cultiver  j)rincipaiement 
l'éloquence  latine,  et  à  la  préférer  en  quelque  sorte  à  tout 
autre  genre  de  lilerature.  Ils  savoient  d'ailleurs,  que  si  elle 
ne  procuroit  rien  de  plus  réel,  elle  avoit  toujours  la  répu- 
tation pour  recompense,  et  qu'elle  servoil  et  à  soutenir  la 
discipline  publique,  et  à  défendre  l'innocence  oprimée. 
Peir.  vie .  p.  2.  On  avoit  donc  un  soin  extrême  '  d'exercer  de  bonne  heure 
à  la  déclamation  les  jeunes  gens  de  qualité,  afin  de  les  for- 
mer à  parler  en  public.  Il  y  avoit  des  écoles  destinées  pour 
cet  exercice,  où  enseignoient  les  plus  habiles  Rhéteurs. 
Après  s'y  être  exercé  à  déclamer,  on  passoit  dans  le  Bar- 


DAN    S   LES   GAULES  AVANT  .1.  C.        69 

reau;   et   l'on   conlinuoit  à  s'y   former  à  l'éloquence.    La 
déclamation   étoit   alors   un   exercice  si  commun  aux  gens 
de  letres,  '  que  depuis  le  tems  de  Ciceron,  jusqu'à  l'empire  cyi.  po;;. las.  au. 
de  Trajan ,  on  ne  vil  presque  point  de  l'oëtes  même ,  qui  *'  ''"  *'^' 
ne  s'exerçassent  ou  à  plaider  des  causes  réelles  dans  le  Bar- 
reau, ou  à  parler  sur  des  sujets  feints  dans  le  public. 

CVL  11  est  aisij  de  juger  du  progrès  que  firent  les  Gau- 
lois dans  l'éloquence ,    par  le  grand  nombre  et  d'Orateurs 
et  d'Officiers  qu'ils  fournirent  à  l'empire  dans  le  temps  d'Au- 
guste, non  seulement  pour  leur  propre  pais,  mais  encore 
pour  les  Provinces  les  plus  éloignées.  '  C'est  ce  qui  a  en-  casa.  i.  a.  op.  3. 
gagé  un  ancien  Romain  à  dire,  que  Rome  se  faisoit  un  me-  ''•  --'  '• 
rite  de  tirer  souvent  du  fond  des  Gaules,  des  personnes  pour 
remplir  les  Magistratures  et  les  autres  charges  de  la  Répu- 
blique. l^\  raison  qu'il   en  donne  est   bien  glorieuse  pour 
nôtre    Nation.    Rome,    ajoûte-t-il,    en    usoit    de    la    sorte, 
pour  ne  pas  mépriser  à  sa  propre  perte  ce  qu'il  y  avoit  de 
plus  excellent,  ou  pour  ne  pas  laisser  sans  honneur  et  sans 
récompense   une   vertu  éprouvée  et  reconnue.   11  faut  bien 
que  nos  Gaules  en  ces  premiers  tems,  eussent  une  réputa- 
tion particulière  d'exceller  dans  l'éloquence;  '  puisque  Ju-  jhv.  sai.7.\.n7- 
venal  se  plaignant  de  ce  qu'elle  étoit  presque  entièrement  '*^' 
ou  tombée  ou  négligée  à  Rome ,  renvoie  dans  les  Gaules, 
ou  en  Afrique,  ceux  qui  vouloient  se  perfectionner  dans  cet 
art. 

Accipiat  te 


Gallia,   vcl  potius  nutricula  Causidicorum 
Africa 


'  De  même  ce  furent  les  Gaules,  ce  Pais  qui  excelloit  dans  Sai.  r;, 
l'art  de  bien  parler,  selon  le  même  Poète,  qui  formèrent  les 
premiers  Avocats  ou  Jurisconsultes  qu'on  vit  dans  la  gran- 


de Bretagne. 


Gallia  causidicos  docait  facunda  Britaanos. 


GVIL  Concluons  de  ce  que  vient  de  dire  '  Juvenal,  que  Bail.  jug.  préj.  c. 
la    Jurisprudence    s'enseignoit    universellement    dans    nos  '■  ^'  '''■  ''■  ^'"' 
Gaules,  et  que  tout  y  étoit  plein  de  gens  et  savans  dans  le 
droit,  et  versés  dans  l'éloquence.  '  S.  Jérôme  nous  en  donne  j^'^r-  'i  vi^•.  p. 
la  même  idée,  lorsqu'il  dit,  que  les  Gaules  jusqu'à  son  tems 


70  ETAT   DES   LETRES 

n'avoient  jamais  enfanté  de  monstres,  et  qu'au  contraire 
elles  avoient  toujours  été  fécondes  en  hommes  d'une 
bravoure  peu  commune,  et  d'une  éloquence  consommée. 
Sola  Gallia  monstra  tion  habuit,  sed  vins  semper  fortihus  et 
Cl.  pan.  t.  y. 682.  eloquentissimis  ahundavil.  '  Le  Poète  Claudien  estimoit  la 
583 1  ■  .  1  .  p.  ly^ji^jjj  Gauloise  si  constamment  et  si  universellement  savante, 
qu'il  semble  avoir  voulu  persuader  à  la  postérité  qu'il  y 
avoit  dans  nos  Gaules  autant  de  savans  que  de  citoïens. 
Et  il  a  cru  ne  pouvoir  faire  plus  d'honneur  à  l'Empereur 
Honorius,  que  de  lui  donner  pour  compagnie  les  doctes 
Gaulois  avec  le  Sénat  Romain. 

To  Gallia  doctis 


Civibus  ut  toto  slipuvit  Roma  senatu. 

Uaii.  p.  311.  G VIII.   '  Mais  presque  tous  ces  savans  ont  mieux  aimé 

servir  leur  patrie  et  le  public  de  vive  voix  que  par  écrit. 
Uue  si  quelques-uns  d'entre  eux  ont  laissé  des  ouvrages  de 
leur  façon,  la  longueur  et  les  malheurs  des   tems   en   ont 

f)rivé  la  postérité.  Ils  nous  ont  même  envié  non  seulement 
a  connoissance  de  presque  tous  ces  grands  hommes,  mais 
aussi  jusqu'à  leurs  noms,  et  au  moindre  trait  de  leur  histoi- 
re. Ne  vous  imaginez  donc  pas  que  le  peu  de  Philosophes, 
de  Mathématiciens,  de  Géographes,  de  Rheteui*s,  de 
Grammairiens,  de  Poêles,  d'Historiens,  dont  vous  trou- 
veiez  ici  les  éloges,  soient  les  seuls  savans  qu'aient  pro- 
duits nos  Gaules  en  ces  premiers  siècles.  Jugez  au  con- 
traire qu'il  faut  que  le  nombre  en  ait  été  bien  grand  pour 
que  la  connoissance  de  ceux-ci  ait  échapé  à  l'envie  et  aux 
malheurs  de  tant  de  siècles,  et  nous  ait  été  conservée. 
Combien  en  effet  croïez-vous  qu'il  doit  être  sorti  de  sa- 
vans en  tout  genre  de  literature  des  écoles  des  Druides,  de 
celles  de  Marseille  et  des  autres  villes  des  Gaules,  ces  Aca- 
démies si  célèbres,  dont  nous  vous  avons  montré  et  l'an- 
cienneté et  la  réputation?  Et  néanmoins  à  quinze  ou  seize 
près,  nous  ne  savons  rien  de  tous  les  autres.  Combien  d'O- 
rateurs, combien  de  Jurisconsultes  ces  premiers  tems  ont- 
ils  vu  briller  dans  nos  Provinces,  qui  faisoient  une  pro- 
fession particulière  et  de  l'art  de  bien  parler  et  de  la  scien- 
ce du  droit?  Et  cependant  à  peine  le  nom  de  quelqu'un 
d'entre  eux  est-il  venu  jusqu'à  nous. 


PYTHEAS. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  .T.  C.    71 

PYTHEAS, 

Philosophe,   Astronome  et  Géographe, 

HISTOIRE    DE    SA   VIE. 

Parmi  cette  multitude  de  grands  Hommes  qu'ont  donnés 
nos  Gaules  à  la  republique  des  letres ,  Pytheas  a 
l'avantage  de  tenir  le  premier  rang.  Il  est  au  moins  le  pre- 
mier Gaulois  que  nous  sachions  s'être  fait  connoître  par 
son  savoir  et  par  ses  écrits.  '  On  le  compte  même  pour  le  cass.  t.  i.  pw*. 
plus  ancien  Ecrivain,  qui  ait  paru  dans  toute  la  vaste  éten-  *' 
due  de  l'Occident. 

'  11  naquit  à  Marseille,  qui  étoit  une    colonie    de  Pho-  cieo.  uomun.i.i. 
céens  établie  depuis  long-tems  dans  les    Gaules;  mais  l'on  p  *o^,'m-'"*'V'"!' 
ne  convient  pas  du  tems  précis  auquel   il  a  ileuri.  "  Qxiei-  i-  c.  77. 
ques  Auteurs  le  placent  sous  l'empire  d'Alexandre  le  Grand  7^f'V)^°f,'''2^7''|' 
avant  la  cent  quatorzième  Olympiade.  ''  D'autres  ne  le  font  Bayi.  i'.p.âsi.s. 
vivre  que  près  de    quatre-vints  ans    après,  sous  Ptolemée  c.  nfGàl^s.'fhi'd.p! 
Philadelphe,  ou  même  un   siècle   entier  plus  tard  du  tems  ^ofi\'.l%n.T. 
d'Annibal.  Ces  derniers  apuïent  leur  sentiment  sur  ce  que 
Pytheas    rapoiloit    lui-même ,    qu'aucun    des    habitans    de 
Marseille,  de  Narbone  et    de  Corbilon  n'avoit  eu    rien    de 
mémorable  à  répondre  à  Scipion,  qui  leur  avoit  demandé 
des    nouvelles  de  la    grande  Bretagne.  D'où    l'on    conclud 
que  Pytheas  n'a  écrit  au  plutôt  que  du  tems  de  la  seconde 
guerre  Punique.  Mais  quel  qu'ait  été  ce  Scipion,  l'on  doit 
suposer  qu'il  n'étoit    ni  le    père  ni  l'oncle    de  l'Africain  , 
comme  on  le  prétend.  '  La  véritable  époque  du  tems  au-  sirab.  1. 2.  p.  721 
quel  Pytheas  a  vécu,  se  doit  prendre  de  ce  que  Polybe  ci-  ""J '•"''''• 
té  par    Strabon    témoignoit,   que    Dicéarque    disciple    d'A- 
ristote  avoit  lu  les  ouvrages  de  Pytheas.  Ainsi  il  faut  dire 
que  cet  illustre  Marseillois  avoit  écrit  au  moins  dès  le  tems 
d'Aristote  et  d'Alexandre  le  Grand,  qui  mourut  en  la  cent 
treizième    Olympiade,  ou  la   première    année    de  la    cent 
quatorzième  ,  environ  trois  cent    vingt-cinq  ans  avant    nô- 
tre Ere  vulgaire. 


■1  .l/i;o 


72  ETAT   DES    LETRES 

PYTHEAS     "  Pytheas  cultiva  les  plus  hautes   sciences.   Il    étoit  Philo- 

'■ — -  sophe  ,    Mathématicien  ,    Astronome  ,    Géographe  .    ''    En 

K'4l%'.''i39fBan!  qualité  de  Philosophe  il  s'apliquoit  à  la  rechercne  de  la  ve- 

ibid.  p.  308.         rite,  telle  que  les  païens  esperoient  de   la  connoître.  '^  Aris- 

^Gass.  ibid.p.530.  toxcucs  le  met  au   nombre    des   sectateurs    de    Pylhagore. 

«  jons.  scripi.  h.  C'cst  saus  doute  ce  qu'il  faut  entendre  de  l'opinion  où  étoit 

ph.  1. 1.  c.  14.      Pytheas  ,  comme  ceux  de    son  pais ,  sur  l'immortalité  de 

l'ame  :  opinion  que  les  Anciens  ont  confondue  avec  le  Py- 

thagorisme  ,  ou  le  système  de  la  Métempsycose  ,  qui  leur 

étoit  plus  connu. 

Mais  la  principale  ocupation  de  Pytheas  fut  la  Géogra- 
phie. Cette  science  étoit  alors  un  champ  inculte  ,  où  peu 
de  peisonnes  avoient  travaillé .  Ceux  qui  vouloient  y  faire 
sirni).  1.  9.  p.  71.  qucIquc  progrès  ,  '  étoient  contraints  d'aller  eux-mêmes 
reconnoître  les  divers  pais.  C'est  ce  qui  porta  Pytheas  a 
entreprendre  de  longs  et  périlleux  voiages  ,  presque  jusau'à 
l'extrémité  de  la  terre.  Il  parcourut  toutes  les  côtes  de  l'O- 
céan ,  depuis  Caditz  jusqu'à  l'embouchure  du  Tanaïs  ,  et 
conserva  à  la  postérité  ce  qu'il  avoitvû  de  plus  remarqua- 
ble dans  ses  courses, 
iiiid.  '  Polybe  avoit    néanmoins  de    la   peine  à    se   persuader 

qu'un  simple  particulier  sans  biens  ,  tel  qu'étoit  Pytheas  , 
eut  pu  trouver  les  moïens  de  fournir  aux  frais  de  si  grands 
voiages  par  mer  et  par  terre.  C'est ,  ajoûtoit  Polybe ,  fra- 
pé  de  tant  de  courses,  ce  que  l'on  ne  croiroit  que  difficile- 
ment de  Mercure  même,  s'il  se  vantoit  d'avoir  fait  de  pa- 
reils voiages. 

Mais  Polybe  pouvoit  suposer  deux  choses  ,  qui  auroient 
Gass. ii)id. p. .132.  levé   sa  difficulté.    Il    pouvoit   suposer'  que    Pytheas   étant 
habile  Mathématicien  ,  et  membre  d'une  République  déjà 
puissante  sur  mer,  et  fort  appliquée  au  commerce,  en  auroit 
été  choisi  pour  faire    ces    nouvelles    découvertes  ,  afin    de 
voir  si  elle  en   tireroit  quelque  avantage  pour  son  négoce. 
Baji.p.  p.286.1.  '  I'  pouvoit  encore  suposer  qu'il   ne  falloit   qu'une  société 
de  marchands ,  ou  même  quelque  riche  citoien  pour  enga- 
ger Pytheas  à  entreprendre  la  découverte  ,  et  l'équiper  de 
toutes  les  choses  nécessaires.  Quoi  qu'il  en  soit,  Polybe  de- 
voit  donner   de   meilleures  raisons  ,    s'il   vouloit  empêcher 
qu'on  ajoutât  foi  à  ce  qu'il  refusoit  de  croire  lui-même.  Sa 
Gass.ibid.p.  530.  conjccture  ne  doit  rien  diminuer  '  de  l'estime  que  mérite  un 
homme,  qui  passe  pour  le  premier  des  mortels  qui  ait  poussé 
si  loin  la  découverte  des  pais  inconnus.  Tout 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    73 

Tout  le  monde  cependant  ne  lui  a  pas  témoigné  la  mê-     pytheas. 


me  reconnoissance   pour  tant  de  travaux.  On   peut   même 
dire   qu'il  n'est  presque  point  d'Auteur    dans  l'antiquité , 
qui  ait  essuie  plus  de  mauvais  traitemens  que  notre  Geo- 
graphe.  Les  Ecrivains  qui  l'ont  suivi  de  près,  n'ont  eu  la 
plupart  aucun  ménagement   pour  lui.  '  Polybe  et  Strabon  strab.  1. 1.  p.  «  i 
entr 'autres  l'ont  extrêmement  décrié  à  cause  de  ses  men-  'li.'isî.m* '**' 
songes,  ne    faisant    point    difficulté  de  le    traduire  comme 
un   menteur  de  profession,  ivia  ^vjàé<r:ai-:oi  'Plusieurs    mo-  Bayi.  p.  p.  283. 
dernes  ne  lui  font  pas  plus  de  grâce  ,  et  l'acusent  d'avoir 
étrangement  abusé  de  la  maxime,  ^4  beau  mentir  gui  vient 
de  loin;  n'y  aïant,  comme  ils  prétendent,  sortes  de  fables 
qu'il  ne    racontât  des  pais   septentrionaux  qu'il  '  se  vantoit 
d'avoir  vus. 

Gela  n'a  pas  empêché  néanmoins  que  Pytheas  n'ait  trou- 
vé parmi  les  anciens  et  les  modernes,  divers  partisans,  mê- 
me assez  célèbres  dans  la  république  des  letres.  '  Hippar-  strab.  1. 1.  p.  49 1 
que  et  Eratoslhenes  de  Cyrene  se  sont  distingués  parmi  les  '■  *•  ^-  ^'" 
premiers.  Ils  se  faisoient  une  loi  de  suivre  ses  sentimens, 
'  et  regardoient  comme  très-certain  tout  ce  qu'il  avoit  écrit,  j^^,     3.  j 
'  Entre  les  modernes,  Gassendi,  Nicolas  Sanson,  et  M.  Rud-  ^^^  ,  ^     53g. 
becks  dans  son  grand  J  liant ica,  ont  pris  fortement  la  défen-  533. 
se  de  cet  illustre  Géographe. 

Nous  n'avons  garde  d'entreprendre  de  décider,  qui  sont 
ceux  qui  ont  raison ,  ou  de  ses  critiques ,  ou  de  ses  parti- 
sans. 11  suffit  de  remarquer  '  après  un  Savant ,  que  Pytheas  sirab.  com.  p.  as. 
étant  né  dans  les  Gaules,  et  aïant  pu  écrire  des  contrées  *'■ 
voisines  avec  plus  de  fidélité  qu'aucun  des  Grecs,  qui  l'a- 
voient  précédé,  il  a  été  suivi  par  la  plupart  des  Géogra- 
phes postérieurs.  Mais  Polybe  et  quelques  autres  lisant  no- 
tre Cosmographe  avec  plus  d'attention ,  et  moins  d'estime , 
que  ne  faisoient  ni  Eratoslhenes  ni  Hipparque ,  y  ont  dé- 
couvert grand  nombre  de  fautes. 

'  Il  est  arrivé  de-là  qu'on  a  commencé  d'abord  à  avoir  iwd. 
son  autorité  pour  suspecte  ,  et  qu'insensiblement  dans  la 
suite  on  a  regardé  ses  écrits  comme  des  contes  de  Poètes. 
On  est  allé  même  jusqu'à  lui  refuser  créance  en  ce  qu'il 
disoit  de  vrai.  On  devoit  cependant  se  souvenir  qu'il  n'est 
point  d'Historien ,  quelque  fabuleux  qu'il  soit ,  qui  ne  dise  , 

quelquefois   la  vérité;    et    cette   réflexion   auroit   empêché 
qu'on  ne  décriât  si  étrangement  Pytheas. 

Tome  I.  Prem.  Part.  K 


74  ETAT   DES   LETKËS 

PYTHEAS.  Au  reste  il  ne  le  faut  pas  confondre  "  comme  ont  fait  quel- 
•  piin  i  I  p  iM  ^"^^  modernes ,  avec  un  Orateur  grec  de  même  nom ,  dont 
Allie,  iieip.  1. 4.  p.  parlcut  Plularquc  '  et  Athénée  au  sujet  de  Demosthenes 
'*■  .  et  de  Demas.  •  Cet  Orateur  étoil  d'Athènes  selon   Suidas, 

"'  ■  ^' ''■  ■  et  se  retira  en  Macédoine,  après  s'être  sauvé  de  la  prison, 
Poiy.  Je  virt.  p.  OÙ  scs  Créanciers  l'avoient  fait  enfermer.  '  Polybe  fait  men- 
tion d'un  autre  Pytheas  Orateur  de  Thebes,  qui  se  retira 
dans  le  Peloponese  avec  toute  sa  famille.  Quelques-unes 
de  ces  circonstances  fcroient  croire  que  ces  deux  Orateurs 
n'étoient  qu'une  même  personne. 

S  II. 
SES  ECRITS. 

PYTiiEAS  laissa  des  Ouvrages  de  Géographie  écrits  en 
grec,  qui  étoit  la  langue  vulgaire  des  Marseillois,  com- 
Apoiion  arg.  1, 4.  mc  Hous  l'avons  dit  ailleurs.  '  J^'ancien  Scholiaste  d'Apol- 
"''  ''  ''"  '  lonius  de  Rhodes  fait  mention  d'un  livre  de  notre  Géogra- 

phe intitulé  Ynç  irepioSoç  ,  le  tour  de  la  Terre.  C'est  apa- 
voss.  11.  gr.  1. 1.  c.  remment  le  même ,  '  qui  est  nommé  Peripius  orbis ,  le  cir- 
IVi^p'  sM  ^^^'  ^^  Monde,  dans  l'abrégé  d'Artemidore  d'Ephese.  "  On 
^^  '  '^'  ■  croit  que  ce  n'étoit  que  la  relation  des  voïages  qu'avoit 
fait  Pytheas  par  tous  les  pais  de  l'Europe,. qui  sont  sur  la 
r.cm.  cl.  asir.  p.  mer  Oceane  ,  depuis  Caditz  jusqu'au  Tanaïs.  '  Geminus 
***  l'Astronome  cite  aussi  de  Pytheas  un  écrit  sous  le  titre  de 

l'Océan.  Mais  il  y  a  bien  de  l'aparence  que  cet  écrit  n'é- 
toit qu'une  partie  de  l'ouvrage  du  tour  de  la  Terre. 

Il  ne  nous  reste  plus  rien  aujourd'hui  de  ce  grand  ou- 
vrage de  Pytheas,  que  ce  qu'on  en  trouve  dans  les  anciens 
Ecrivains  qui  sont  venus  après  lui.  Hipparque  et  Eratosthe- 
nes  en  tirèrent  beaucoup  de  choses  pour  enrichir  leur  Geo- 
graphie.  Pline  l'ancien  assiîre  qu'il  s'en  est  servi  pour  com- 
poser son  histoire  naturelle ,  et  met  Pytheas  au  nombre  des  • 
Auteurs  dont  il  fait  l'énumcration  dans  les  Livres  deuxié- 
Poii.  1. 7.  c.  88.  me,  quatrième,  et  trente-septième  de  son  ouvrage.  '  Julius 
Pollux  le  cite  aussi  touchant  certains  ouvrages  des  anciens 
ouvriers  en  bois.  On  voit  par  là  que  les  écrits  de  Pytheas 
steph.  B)z.p.77i.  subsistoicut  encorc.  alors.  '  On  les  trouvoit  même  au  tems 
d'Etienne  de  Byzance  ou  le  Géographe ,  qui  les  cite ,  et 
qui  n'écrivoit  qu'après  le  quatrième  siècle  de  l'Eglise 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    75 

Divers    autres    Auteurs,    avant    ces   trois    derniers,     en     pytheas. 
avoient  eu  aussi  connoissance;  mais  ils  les  avoient  lus  avec  " 
des  yeux  bien  difîerens.   Polybe  entr'autres  semble  ne  l'a- 
voir fait  que  pour  les  critiquer.  'Il  ataqua  particulièrement  strau.  i.  2.  p.  71, 
ce  que  Pytheas  disoit  de  l'isle  de  Thul(^,   aujourd'hui  l'Is- 
lande, et  traita  de  fables  ce  qu'il  en  raportoit.   Il  ne  pou- 
voit  souffrir   que    Pytheas  dît,  que  vers   cette   isle   on   ne 
voïoit  ni  air,  ni  eau,  ni  terre,  mais  seulement  un  composé 
de  ces  trois  élemens,  semblable   au   poulmon   marin;  que 
la  mer  et  la  terre  étoient  suspendues  sur  cette  substance; 

Qu'elle  servoit  de  lien  à  toutes  les  parties  de  l'univers;  qu'il 
toit  impossible  d'aborder  en  ce  lieu-là  ni  à  pied  ni  sur  des 
vaisseaux;  qu'il  avoit  vu  lui-même  cette  substance  sembla- 
ble au  poulmon  marin,  quoique  pour  le  reste  il  avouât 
qu'il  n'en  parloit  que  sur  ce  qu  il  en  avoit  oui  dire.  Il  trou- 
voit  encore  à  redire  à  ce  que  Pytheas  donnoit  à  l'isle  de  la 
grande  Bretagne  plus  de  quarante  mille  (*)  de  circuit.  Il 
critiquoit  même  Eratosthenes ,  d'avoir  été  un  des  plus 
grands  partisans  de  Pytheas. 

'  Strabon  marchant  sur  les  traces  de  Polybe,  et  ne  me-  ibij.  i.  9.  p.  78.79 
nageant  pas  plus  que  lui  la  réputation  de  notre  Gosmogra- 
phe,  s'est  fait  une  espèce  de  gloire  de  censurer  le  plus  de  ses 
sentimens  qu'il  a  pu.  Pytheas  avoit  avancé  que  l'isle  de 
Thulé  étoit  la  plus  septentrionale  des  isles  Britanniques, 
et  comme  l'extrémité  du  monde  de  ce  côté-là;  que  le  tro- 
pique d'Eté  y  servoit  de  Pôle  arctique.  Strabon  prétend 
au  contraire,  que  l'extrémiti;  du  Septentrion  se  doit  pren- 
dre moins  loin  vers  le  midi.  La  raison  qu'il  en  donne  est  des 
plus  singulières.  C'est  selon  lui  que  ceux  qui  de  son  tems 
parcouroient  les  divers  païs,  ne  raportoient  rien  de  ce  qui 
est  au-de-là  de  l'Hibernie.  Il  (  st  aisé  de  juger  par  ce  rai- 
sonnement que  la  justesse  n'a  pas  toujours  accompagné  la 
critique  que  Von  a  faite  des  écrits  de  Pytheas. 

On  est  en  droit  de  porter  le  même  jugement,  '  de  ce  que  '•  '•  i'-  ■*^- 
Strabon  reprend  ailleurs  du  reste  de  la  relation  de  l'isle  de 
Thulé  par  notre  Géographe.  Il  ne  peut  lui  passer  que  cet- 
te isle  soit  située  vers  le  Septentrion,  près  de  la  mer  glaciale, 

(•)  On  ne  sanroit  dire  qui  a  élé  le  plus  theas  et  Isulore  lui  en   donnoient  plusieurs 

fidèle,   ou   de  Poljrbc  on  de  Pline,  &  ra-  millions,  tricies,    ocliet,  centena  vtgtntt- 

porler  le  sentiment  do  Pytheas  sur  le  cir-  quinque  M.  n,-      ,    .    .   ,n 

cuit  de  cette  isle.  '  Le  dernier  dit  que  Py-  '  ""■  '•  *'  '^-  •*"• 

Kij 


76  ETAT    DES   LETRES 

PYTHEAS.     6t  ^  six  journées  de  la  grande  Bretagne:  "  ce  que  Pytheas 
n'avoit    peut-être    déterminé,    qu'en    marquant    par-là    le 


•  Gass.    t.   4.    p. 


531.  I. 


tems  qu'il  avoit  mis  à  passer  d'un  de  ces  lieux  à  l'autre.  ''  Mais 
rstrab.  ibii.        tout  ce  qu'y  opose  Strabon  se  réduit  à  dire  que  ceux  qui 
avoient  reconnu  l'Hibernie,  ne   disoient   rien   de   l'isle   de 
Thulé,  et  qu'ils  ne  parloient  que  de  quelques  autres  peti- 
tes isles  aux  environs  de  la  grande  Bretagne, 
pun.  hist.  1. 4.  c.       '  Ceux  qui  ont   écrit   depuis   Strabon ,    rendent   plus  de 
30-  ustice  à  Pytheas.  Pline  l'Historien  ne  fait  pas  difficulté  de 

regarder  comme  certain  que  de   l'isle  de   Thulé  à  la  mer 
glaciale  il  n'y  a  qu'une  journée   de   trajet;    que  cette  isle 
est  la  dernière  de  ce  côté-là;  et  que   de-là   à   l'isle    de  la 
grande  Bretagne  il  y  a  réellement  six  journées  de  naviga- 
Pinea.  brev. p. 772.  tion.  '  Dc  même  Thomas  de  Pinedo  soutient,  que  Pytheas 
sur  le  reste  ne  s'est  pas  si  fort  éloigné  de  la  vérité,  qu'il 
doive  passer  pour  un  homme  qui  ne  débite  que  des  contes. 
Strabon  n'est  peut-être  pas  plus  croïable  en  ce  qu'il  dit 
strab.  1. 2.  p.  61.  ailleurs  contre  l'exactitude  et  la  fidélité  de  Pytheas.  '  11  pré- 
tend que  ni  Timosthenej,  ni  Eratosthenes,  ni  aucun  de  ceux 
qui  avoient  écrit  avant  eux  sur  la  Géographie,  et  entre  les- 
quels il  comprend  Pytheas,  n'avoient  eu   nulle  connoissan- 
ce  certaine  de  l'état  des   Gaules,   de   l'Espagne,   et  encore 
moins  de  la  Germanie,  de  la  grande  Bretagne,  de  l'Italie  etc. 
Il  soutient  même  que  Pytheas    en  particulier  avoit  erré  en 
établissant  la  distance  qui  se  trouve  entre  la  grande  Breta- 
gne et  Marseille  sa  patrie.  Il   veut  que  ce  Géographe,  qui 
selon  lui  a  trompé  ses  lecteurs  en  plusieurs  autres  points,  les 
„  ait  encore  trompés  en  celui-ci,  '  aussi  bien  qu'à  prendre  à 

1  4.  p.  139.         Marseille  même  l'élévation  solstitiale  du  soleil.  '  Enfin  il  ne 
veut  rien  croire  de  tout  ce  que  Pytheas  avoit  écrit  sur  l'isle 
de  Thulé  et  sur  les  païs  circonvoisins. 
eom.  p.  35.  2.  '  Mais  Strabon  a  beau  dire  tout  ce  qu'il  voudra,  l'on  ne 

peut  disconvenir  que  Pytheas  n'ait  apris  aux  Grecs  bien 
des  choses  qu'ils  ignoroient  avant  lui  touchant  cette  isle;. 
aïant  été  le  premier  Géographe  qui  l'ait  découverte.  D'ail- 
strab.  1. 2.  p.  78 1  leurs  ouelque  passionné  que  paroisse  '  Strabon  contre  Py- 
Gass.  ibia.  p.  530.  jjjgg^g^  ^  j^g  laisse  pas  de  nous  iburnir  des  preuves  de  la  re- 
tenue de  celui-ci.  Car  de  son  propre  aveu  Pytheas  n'assu- 
roit  point  ni  que  Thulé  fût  une  isle,  ni  qu'il  y  eût  des 
habitations  jusques  là.  Or  si  notre  Géographe  avoit  voulu 
imposer  à  ses  Lecteurs,  pouvoit-il  avoir  un  plus  beau  champ 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    77 

pour  le  faire?  Ce  n'est  donc  pas  sans  sujet '^  qu'un  savant     pytheas. 
moderne  en  examinant  les  points  de  la  critique   de   Stra-  .  siraii  com    T 
bon  contre  Pytheas,  dit  que  ce  censeur  y  fait  trop  paroî-  *  '  ' 
tre  de  chicane  et  de  fausse  subtilité. 

Il  est  pourtant  vrai  que  ce  que  nous  venons  de  dire  en 
faveur  de  Pytheas,  ne  le  justifie  pas  également  à  l'égard 
de  ce  qu'il  débitoit  du  poulmon  marin.  Cela  ne  le  justilie 
pas  non  plus  d'avoir  avancé  quelques  autres  contes  de  mê- 
me nature.  '  Ce  qu'il  disoit,  au  raport  de  Pline,  d'une  isle  PUn.  last.  i.  37.  c. 
à  une  journée  du  pais  des  Guttons,  peuples  de  Germanie,  "' 
où  il  assûroit  qu'on  se  servoit  d'ambre  au  lieu  de  bois  pour 
faire  du  feu,  ne  peut  passer  que  pour  une  pure  fable;  quoi- 
que Timée  n'ait  pas  iait  difficulté  de  le  croire  sur  la  foi  de 
Pytheas. 

On  ne  peut  pas  regarder  autrement  '  ce  qu'il  raportoit  Apoiion.  arg.  1. 4. 
encore  des  isles  de  Liparis  et  de  Strongyle,  ou  Strongoli  "'^  " 
entre  l'Italie  et  la  Sicile.  Il  racontoit  fort  sérieusement, 
qu'en  cet  endroit  l'eau  de  la  mer  y  étoit  bouillante;  que 
ceux  qui  anciennement  vouloient  faire  faire  quelque  ou- 
vrage en  fer,  comme  une  épée,  ou  autre  chose  sembla- 
ble, n'avoient  qu'à  y  porter  la  matière;  que  le  lendemain 
ils  trouvoient  l'ouvrage  prêt,  qu'ils  prenoient  en  laissant 
le  prix  de  la  façon. 

Il   faut   encore   mètre   au   nombre  des    méprises  de  Py- 
theas '  ce  qu'il  disoit  du  flux  et  réflux  de  la  mer  dans  la  ^'"-  '''^'  '•  2-  «• 
grande  Bretagne,   où   il    prétendoit   qu'il   étoit    de   quatre- 
vints    coudées.  '  Car  depuis  on  a  observé  que  celui  qui  se  not.  iwa. 
fait  dans  la  Tamise,  et  qui  est  le  plus  grand  que  l'on  voie 
en  ce  pais-là,  ne  va  qu'à  quatorze  coudées  de  hauteur. 

Mais  ce  seroit  une  injustice  de  ne  le  pas  croire  '  en  ce  que  Gem.  ci.  asi.p.sa. 
Geminus  raporte  de  lui,  touchant  les  lieux  les  plus  pro- 
ches du  Nord.  ,,  Les  Barbares,  disoit  Pytheas  dans  .sa 
,,  relation,  nous  montroient  l'endroit  où  se  couche  le  so- 
,,  leil.  On  remarquoit  que  la  nuit  en  certains  pais  de  ce 
,,  côté-là  étoit  extrêmement  courte,  ne  durant  que  deux 
,,  heures  en  quelques  lieux,  et  trois  en  quelques  autres.  De 
,,  sorte  que  peu  de  tems  après  que  le  soleil  s'étoit  couché, 
,,  on  le  voïoit  presque  aussi-tôt  reparoître  ,,  .  '  Cratès  le  i'-23. 
Grammairien  témoigne  qu'Homère  avoit  eu  connoissance 
de  ces  mêmes  contrées  :  ce  qui  lui  fait  dire  qu'un  ouvrier  en 
se  passant  de  dormir,  pouvoit  gagner  deux  salaires  en  un 
1  0 


78  ETAT   DES   LETRES 

PYTHEAs.     même  jour;  puisqu'il  pouvoit  faire  le  travail  de  deux  jour- 
nées ordinaires. 


piin.  hist.  1.  2.  c.       '  Pytheas  ne  paroît  pas  non  plus  avoir  imposé  à  ses  Le- 
"■  cteurs,   lorsqu'il   assûroit   que    dans    l'isle   de  Thulé,    il  y 

avoit  six  mois  de  jour  continuel,  et  autant  de  nuit  pendant 
le  cours  de  l'année. 
strai).  1. 4.  p.  139.  '  Après  que  les  sévères  censeurs  de  Pytheas  ont  bien  cri- 
tiqué ses  sentimens  sur  la  Géographie,  ils  conviennent  en- 
fin de  lui  rendre  justice  pour  sa  science  dans  l'Astronomie 
et  dans  les  Mathématiques.  Ils  avouent  qu'il  a  assez  bien 
connu  les  propreités  des  pais  septentrionaux,  par  raport 
à  leur  propre  nature,  et  aux  aspects  du  soleil.  Par  exem- 
ple, lorsqu'il  disoit  qu'il  n'y  croît  point  de  fruits  à  cou- 
teau; qu'on  n'y  élevé  point  d'animaux  domestiques; 
qu'on  y  vit  de  millet,  de  légumes,  de  racines;  que  là  où  on 
cueille  du  miel  et  du  bled,  on  en  fait  une  boisson;  que  l'on 
ne  s'y  sert  point  d'aires  pour  batre  les  grains,  à  cause  des 
pluies  fréquentes,  et  du  peu  de  chaleur  du  soleil,  mais 
qu'on  les  bat  dans  des  granges  faites  exprès.  (VIII.) 


EUTHYMENES, 

Géographe  et  Historien. 

EUTHYMENES.    T  Es  dîvcrs  monumcus,  qui  font  mention  de  cet  Ecrivain, 

■  Ajexpriment    diversement   son   nom.    Dans  les   uns   il  est 

nommé  Euthymanes,  dans   d'autres  Eumenides,   ou  Eudi- 

menes,  et  par  une  corruption  encore  plus  grande,  Euride- 

Fab.  i.ib.  «r.  t.  4.  mcs.  '  Mais  les  plus  anciens  entre  les  Grecs  et  les  Latins, 

}m.*^2.%"''7.wT   *î"^  °"^  ®"   ocasion  de  parler  de  lui,  s'acordent  tous  à  le 

i"!'  327  f  Plu!'  nonfini^r  Euthymenes.  C'est  le  nom  que  lui  donnent  Aristi- 

via.pii.  I.4.C.  1.  p!  de,  Seneque  le  Philosophe,  S.    Clément   Alexandrin,    Plu- 

tarque,  ou  un  autre  Auteur  qui  nous  a  laissé  le  Traité  De 

placitis  Pkilosophorum. 

scnec.  ibid.  I  Plut.       '  Euthvmenes    étoit    de    Marseille,  comme    Pytheas   dont 

nous  venons  de  laire  1  éloge,  et   ileunssoit  en  meme-tems, 

vers     la    cent     et     douzième     Olympiade,     plus    de    320 

ans   avant    le    commencement    de    l'Ere    Cnrétienne.     Il 

a  fajt,  comme  l'autre,  la  gloire  et  l'ornement  de  sa  patrie, 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    79 

tant  par  son  savoir  que  par  ses  écrits.  "  Ces  deux  illustres    euthymenes. 
Marseillois,  qui  passent  pour  avoir  écrit  autant  en  Philo-  ,  i,aii  ;„<,  préi  c 
sophes  et  en  Mathématiciens ,   qu'en  Géographes ,  ont  l'a-  1 9-  p-  s'Jt.  m. 
vantage  d'avoir  paru  dans  nos  Gaules  plus  de  cent  ans  avant 
qu3  liome  eût  produit  aucun  Ecrivain. 

'  On  supose  que  la  République  de  Marseille  envoïa  Eu-  Cass.  t.  t.  p.  530. 
thymenes  reconnoîlre  les  pais  du  Sud.  comme  nous  avons  '■ 
vu  qu'elle  avoit  envoie   Pytheas  découvrir  les  contrées  du 
Nord.  '  Il  est  certain  par  un  passage  que  Seneque  raporte  Senec.  ibiii. 
d'Euthymenes,  que  celui-ci  avoit  navigé  sur  la  Mer  Atlan- 
tique. 11  écrivit  sa  relation  en  grec  qui  étoit  la  langue  de 
son  pais,  où  le  latin  n'étoit  pas  encore  connu;  et  il  a  mé- 
rité par-là  de  tenir  rang  entre  les  anciens  Géographes. 

Ce  que  Pytheas  avoit  déjà  trouvé  en  la  personne  de  Po- 
lybe,  Euthymenes  le  trouva  depuis  en  celle  de  Seneque  : 
un  rigide  et  severe  censeur  de  ses  sentimens.   '  Ce  Philo-  ibid. 
sophe,  qui  avoit  lu  les  écrits  d'Euthymenes,  ne  put  souf- 
rir   impunément   qu'il   y   raportât  les   causes   du  déborde- 
ment au  Nil  à  la  vertu  'des  vents  Etesiens ,  qui  poussant 
selon   lui  '  les   eaux  de   l'Océan  et  de  la  mer   extérieure  •*'«*•  »i»iJ- 
dans  ce  fleuve,  le  faisoient  enfler  et  répandre  hors  de  son 
lit  ordinaire.  '  C'est  ce  que  Seneque  apuïé,  comme  il  pré-  Senec.  iiu.  p.  753. 
tend,  sur  une  nuée  de  témoins,  traite  de  fable,  et  réfute  '^' 
par  plus  d'une  raison.  En  effet,  dit-il,  si  le  débordement 
du  Nil  venoit  des  vents  Etesiens,  il  faudroit  que  ce  fleuve 
se  grossit  à  proportion  que  ces  vents  soufflent  avec  plus 
d'impétuosité.    Il   faudroit   qu'il   commençât  à   s'enfler   du 
côti'  que  viennent  ces  vents.  Or  rien  de  tout  cela  n'arive. 
D'ailleurs  ses  eaux  seroient  d'un  verd  .de  mer,  au  lieu  qu'el- 
les sont  troubles,  lorsqu'il  déborde.  '  Thaïes  le  Philosophe  piui.  ibij. 
étoit  néanmoins  dans  la  même  opinion  que  notre  Géogra- 
phe, touchant  l'inondation  du  Nil  causée  par  la  vertu  des 
vents  Etesiens. 

'  Euthymenes  avançoit  encore  dans  son  Ouvrage ,  que  Senec.  îwa.  p.  752. 
les  eaux  de  la  mer  qui  enfloient  le  Nil  étoient  douces  :   • 
ce  qu'il  jugeoit  aparemment  sur  ce  que  '  celles  de  ce  fleuve  p.  75*.  |  piu't.  ibia. 
le  sont  au-dessus  de  toutes  les  autres  eaux.  '  Mai»  Sene-  senec.  uùd. p.  753 
que  ne  lui  peut  passer  cette  opinion,  non  plus  que  la  pré- 
cédente. Il  ajoute  à  ce  sujet  une  réflexion,  qui  achevé  le 
parallèle   entre    Euthymenes   et   Pytheas.    On    avoit   beau 
mentir ,  dit-il ,  et  compter  des  fables  en  ce  tems-là ,  que 


80 


ETAT   DES   LETRES 


EUTHYïiENEs.    l'on  n'avoit  pa^  de  ces  faits  une  connoissance  aussi  parfaite 
que  l'on  a  eue  dans  la  suite. 

Outre   les  Auteurs  que  nous  avons  déjà  cités  entre  les 

voss.  h.gr.  ).  3.p.  anciens,  '  Artemidore  d'Ephese  fait  aussi  mention   de   la 

"*■  description   des  pais  étrangers  qu'Euthymehes  avoit  laissée 

à  la  postérité.  Cet   ouvrage   ne  s'est  perdu,   comme   Ton 

vient  de  voir,  que   depuis   le    siècle   de   Seneque   tout  au 

plutôt. 

Euthymenes  avoit  encore  laissé  un  autre  écrit  de  sa  fa- 
lom.  Alex.  sii.  1.  çon,  que  l'on  ne  trouve  plus  depuis  plusieurs  si^'cles.  '  C'c'- 
I.  p.  3m.  iti.i  j^-j  y^g  espèce  de  chronique,  ou  Histoire  des  tems ,  com- 
me il  paroit  par  ces  paroles  de  S.  Clément  d'Alexandrie. 
qui  s'en  est  servi  pour  prouver  en  quel  tems  vivoit  Home- 
re ,  K'ueu(;.7(vY,;  ^E  èv  Tot;  ypovixoîç.  C'est  ainsi  que  la  cite 
ce  Père  entre  les  autorités  de  plusieurs  autres  Historiens 
très-anciens ,  tels  que  Philochore ,  Aristarque ,  ApoUo- 
dore,  Aquemaque.  Ce  dernier  étoit  de  même  sentiment 
qu'Euthymencs,  touchant  le  tems  auquel  Homère  avoit 
vécu.  L'un  et  l'autre  le  faisaient  contemporain  d'Hésiode 
sous  Acastes,  et  disoient  qu'il  étoit  né  à  Chio  environ  deux 
cens  ans  après  la  destruction  de  Troïes,  ainsi  vers  l'an  du 
monde  2967,  cent  quatre-vint  treize  ans  avant  le  com- 
mencement des  Olympiades. 

C'est-là  tout  ce  que  l'on  trouve,  qui  puisse  ou  mériter 
d'entrer  dans  l'histoire  d'Euthymenes ,  ou  nous  donner 
quelque  éclaircissement  sur  ses  écrits  (IX). 


ERATOSTHENES, 

Philosophe    et  H i s t o u i e n . 


EILVTOSTHENES. 


Suel. 
10. 


ill. 


grani.  c. 


Egass.  Bul.  t. 
101. 


LE  nom  d'Eratosthenes  est  fort  connu  dans  la  république 
des  Letres.  '  On  y  trouve  un  Eratosthenes  de  Cyiene, 
qui  le  premier  entre  les  anciens  Ecrivains  prit  le  titre  de 
Philologue,  pour  la  diversité  des  sciences  qu'il  possedoit. 
'  On  y  trouve  aussi  un  Eratosthenes  Gaulois,  qui  s'aquit  de 
la  réputation  par  sa  science  dans  les  Mathématiques  et  dans 
l'Astronomie.  Le  premier  fleurissoil  dès  la  cent  trente- 
cinquième    Olympiade,    et    vécut    très-Iong-tems.    L'autre 


ne 


DANS  LES  GAULES  AVANT  .1.  C.    81 

ne  parut  dans  le  monde  qu'environ  un  siècle  après  l'épo-  eratosthenes. 

que  précédente,  vers  l'Olympiade  cent  soixante  et  deuxié- 

me,  et  la   cent  trentième  année  avant  le  commencement 

de  notre  Ere  vulgaire.  On  croit  qu'il  étoit  ou  de  Marseille 

même,  ou  au  moins  de  cette  partie  des  Gaules,  à  qui  l'on 

donna  depuis  le  nom  de  Narbonoise. 

Si  jusqu'ici  ce  dernier  n'est  pas  devenu  plus  célèbre,  il 
faut  s'en  prendre  aux  malheurs  des  tems,  qui  l'ont  fait  con- 
fondre avec  Eratosthenes  de  Cyrene,  qui  a  toujours  été 
plus  connu.  De  sorte  que  la  conformité  des  noms,  souvent 
avantageuse  à  certains  Auteurs ,  n'a  été  que  fatale  à  celui 
qui  fait  le  sujet  de  cet  article.  Non  seulement  elle  lui  a  ra- 
vi un  des  plus  beaux  traits  de  sa  gloire,  en  faisant  atribuer 
à  un  autre  des  ouvrages  qui  sont  de  lui  ;  mais  peu  s'en  est 
même  fallu,  qu'à  la  faveur  de  la  confusion  elle  ne  l'ait  fait 
entièrement  disparoitre  lui-même. 

11  est  vrai  qu'il  ne  faut  pas  être  surpris,  que  des  Ecri- 
vains qui  ne  sont  venus  que  plusieurs  siècles  après  les  deux 
dont  il  est  ici  question,  les  aient  confondus  ensemble.  Rien 
n'est  plus  ordmaire  que  cette  sorte  de  confusion.  '  Ne  thi.  h.  e.  i.  s.  p. 
voïons-nous  pas  que  S.  Grégoire  de  Nazianze ,  l'un  des  ^*'- 
plus  célèbres  Pères  de  l'Eglise  Gréque,  est  tombé  dans  la 
même  faute  à  l'égard  de  S.  Cyprien  Evêque  de  Carthage, 
et  de  S.  Cyprien  Evêque  d'Antioche  en  Orient?  Ce  saint 
Docteur  étoit  cependant  de  l'Eglise  d'Orient  comme  le 
dernier  de  ces  deux  Saints,  et  vivoit  au  même  siècle  que  lui. 
De  même  le  Poète  Prudence  a  confondu  aussi  plusieurs 
saints  Hippolytes  ensemble ,  quoiqu'il  ne  fût  pas  lort  éloi- 
gné de  leur  tems.  Doit-il  donc  paroître  étonnant  qu'E- 
tienne de  Byzance ,  qui  n'écrivoit  tout-au-plûtôt  qu'au 
cinquième  siècle,  ait  pareillement  confondu  Eratosthenes 
le  Gaulois  avec  Eratosthenes  le  Cyrenéen?  C'est  néanmoins 
ce  qu'il  a  fait,  et  que  nous  allons  montrer. 

'  Ce  Géographe  en  citant  une  ancienne  histoire  des  Gau-  stephan.  By^.  p- 
lois,  qui  portoit  le  nom  d'un  Eratosthenes,  l'atribue  à  ce-  -'*• 
lui  de  Cyrene,  dont  il  cite  quelques  autres  écrits.  Mais  on 
peut  assurer  qu'elle  n'est  pomt  de  cet  Eratosthenes;  et  un 
endroit  qu'Etienne  en  raporte  lui-même,  nous  fournit  le 
commencement  des  preuves  pour  le  démontrer.  En  cet  en- 
droit, qui  a  été  tire  du  septième  livre  de  l'histoire,  l'Au- 
teur  parlant  de  Boos-cephale ,  dit,  selon  Etienne,  que  ce 

Tome  I.  Prem.  Part.  L 

1  0  * 


82  ETAT   DES    LETRES 

ERAT0STHENE8.  fut  le  lieu  du  Combat  entre  Prusias  et  Atlale,  l'un  Roi  de 
Bithynie,  et  l'autre  de  Pergame. 

Poiyb.  1. 1.  n.  1.2.       '  Or  il  cst  constant  par  un  Historien,  qui  a  été  des  plus 

I  Syn.  chr.  p.  16SÔ.  proches  de  ces  tems-là,  que  ces  deux  Rois  ne  se  firent  la 
guerre  que  vers  la  cent  cinquante-quatrième  ou  même 
cent  cinquante-sixième  Olympiade,   et  qu'ils  conclurent  la 

'  paix  entre  eux  par  l'entremise  des  Romains  la  seconde  an- 

née de  la  même  Olympiade  :  c'est-à-dire  plus  de  quarante 

Pineii.  lirev.  p.  762.  ans  après  la  mort  d'Eratostlienes  de  Cyrene.  Car  '  cet  Auteur 
étant  né  en  la  cent  vingt-sixième  Olympiade ,  et  n'aïant 
vécu  que  quatre-vints  ans ,  ce  qui  est  encore  beaucoup , 
il  mourut  vers  la  fin  de  l'Olympiade  cent  quarante-cinquiè- 
me. Il  n'est  donc  pas  possible  qu'il  ait  parlé  d'un  fait  qui 
n'arriva  que  plusieurs  années  après  sa  mort. 

De-là  il  resuite  clairement  que  l'histoire  des  Gaulois 
connue  sous  le  nom  d'Eratosthenes ,  n'est  point  l'ouvrage 
du  Cyrenéen ,  et  qu'elle  apartient  à  Eratosthenes  le  Gau- 
lois. Et  assurément  n'est-il  pas  et  plus  naturel  et  plus  con- 
venable que  ce  soit  un  homme  de  la  nation  qui  ait  écrit  sur 
ce  sujet,  plutôt  qu'un  étranger? 

Cîcs.  bel.  Gai.  1. 6.       Il  paroît  que  c'est  cette  même  histoire  '  que  César  avoit 

''•  **'•  en  vue ,  lorsqu'il  parle  de  la  Forêt  noire   ou  d'Hercynio  ; 

et  il  semble  même  qu'il  ait  évité,  en  la  voulant  citer,  la  con- 
fusion où  est  tombé  Etienne  de  Byzance.  Ce  qui  fait  naî- 
tre cette  pensée  est  d'une  part  le  détail  que  fait  César  en 
cet  endroit  de  l'établissement  des  Teotosages,  anciens  peu- 
ples Gaulois,  lo  long  de  cette  forêt,  et  de  l'autre,  la  ma- 
nière dont  il  s'exprime,  en  disant  que  celle  forêt  a  été  con- 
nue d'Eratosthenes  (1)  et  de  quelques  Grecs.  Cette  derniè- 
re expression  est  à  remarquer.  On  y  voit  que  Cé.sar  opose 
et  distingue  Eratosthenes  des  Auteurs  grecs,  quoiqu'il  soit 
constant  qu'Eratosthenes  le  Cyrenéen  ait  été  toujours  mis 
de  leur  nombre.  Or  je  demande  si  César  eût  ainsi  parlé, 
s'il  avoit  voulu  désigner  un  Historien  grec?  Au  contraire 
il  pou  voit  et  devoit  même  s'exprimer  de  la  sorte,  s'il  avoit 
en  vue  Eratosthenes  le  Gaulois.  Car,  quoique  celui-ci  eût 

(1)  II  e<!t  A  propos  de  faire  obmrrn-  ici  quam  Eraloitheni  et  quibutdam  Graei$  fa- 

le  peu  de  justesse  de  la  tra  luclion   de  M.  ma  notam  esse  video.  Et  M.  il'Ablancourt 

■l'Ablancoui'l,   qui   détruit   l'oposilion    que  traduit  :  "  Le  long  de  la  Forêt  rjoire  ,  qui 

César  établit  en  cet  endroit  entre  Eralo-  "  a  été  connue  d.;s   Grecs ,  commi-  il  pt- 

CsM.  ibid.  sllienc»  et   les  Historiens  grecs.  '  Le  texte  "  roil   par    Eratosthenes  et  quelques    au- 

de  César  porte  :  ct'rcum //«rcvoiOiHSiVvani,  "  Irej.  ' 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    83 

écrit  en  grec,  la  langue  latine  n'étant  pas  encore  de  son   eratosthenes. 
tems  en  usage  dans  les  Gaules,  on  savoit  fort  bien  au  sié-  ' 

cle  de  César  que  cet  Auteur  étoit  Gaulois  et  non  pas  Grec 
de  nation. 

L'Histoire  qu'il  laissa  à  la  postérité,  et  que  l'on  ne  trouve 
plus  aujourd'hui,  '  est  citée  par  Etienne  de  Byzance  sous  le  sioph.  Byz.  ibid. 
titre  de  raXa-rixôiv ,  c'est-à-dire  de  rébus  Gallicis^  Histoire  des 
Gaules,  ou  des  Gaulois.  '  Car  on  sait  de  reste  que  les  Grecs  Amm.  ub.  isp.OT. 
nomment  les  Gaulois  Galatœ  :  Ita  entm  Gallos,  dit  Ammien 
Marcellin,  sermo  grœcus  appellat. 

Cette    Histoire    devoit    être    un    ouvrage    consideiable, 
'  puisqu'elle  contenoit  au  moins  trente-trois  Livres ,  com-  sieph.  Byzan.  i«. 
me  il  paroît   par  Etienne,  qui  en  cite  le  trente-troisième.  '**" 
'  11  est  aisé  de  juger  par  ce  qu'en   raporfe  ce  Géographe  p-.ssi,  soi,  679. 
dans  ce   recueil,    qu'Eratosthenes    y   parloit   avec   quelque    "*' 
étendue  des  conquêtes  de  nos  anciens  Gaulois  en  Asie.  Il 
avoit  un  sujet  particulier  d'y  parler  d'Attale   Roi   de   Per- 
game,  dont  il  y  faisoit  effectivement  mention.  '  Ce   Prin-  Poiyb.  i.  s.  n.  7. 
ce,  après  que  le»  Gaulois  par  succession  de  tems  eurent  pé- 
nétré dans  ses  Etats,  leur  promit  des  terres  à  cultiver,  et 
leur  permit  de  se  répandre  vers  l'Hellespont,  où  ils  s'ha- 
bituèrent. 

Que  si  Etienne  de  Byzance  ne  cite  de  cette  Histoire  que 
des  particularités  qui  regardent  la  Gallo-Giéce,  ou  Ga- 
latie,  ce  n'est  pas  à  dire  qu'elle  ne  traitât  des  autres  pais 
qui  étoient,  ou  avoient  été  sous  la  domination  des  Gau- 
lois. Mais  c'est  ou  qu'il  n'a  plu  à  cet  Auteur  d'en  choisir 
que  ces  traits,  ou  que  les  autres  qu'il  en  pouvoit  raporter, 
sont  perdus  avec  la  plus  grande  partie  de  l'ouvrage  de  ce 
Géographe,  dont  nous  sommes  prives. 


LUCIUS   PLOTIUS, 

Rhéteur. 

PLOTIUS 

ROme  '  fut  le  théâtre  où  ce    Rhéteur  parut  avec  le  plus  Hier.  chr.  p,  m. 
d'éclat;  mais  ce  fut  dans  les  Gaules  qu'il  prit  naissan- 
ce. '  Quelques  modernes  prétendent,   sans   en   aporter   de  ^gass.  bui.  1. 1. 
preuves,  qu'il  étoit  de  l'une  des  provinces  que  l'on  nomma 


t 


Ij  I  Suct.  ibid. 


84  ETAT   DES   LETKES 

PLOTius.     depuis    Lyonoises.    '   D'autres  veulent    qu'il   eût   été  élevé 

•  Long.doiaud.Fi.  ^^^^  l'école  de  Lyon  même  ;  quoiqu'il  ne  paroisse  nulle  part 

qu'il  y  eût  dès  ce  tems-là  une  école  dans   cette   ville.    Sa 

qualité   d'homme   versé   dans  l'éloquence   latine  fait  juger 

Ju'il   étoit  plutôt  de   la   Gaul  Narbonoise,  où  l'on  parloit 
ès-lors  assez  communément  la  langue  latine. 
Hier.  ibid.  I  scnoc.       '  Plotius  quitta  sa  patrie,  pour  aller  s'habituer  à  Rome, 
ïn'i  SuoL'c'i.''RfÎ!  v^^'^     ^^     dix-septiéme     Olympiade,    plus    de    quatre-vint 
c.  2.  p.  84i.         dix  ans  avant  le  commencement  de  l'Ere  Chrétienne.  II  y 
ouvrit  la  première  école  de  Rhétorique  qu'on  y  eût  encore 
vûë,  et  enseigna  aux  Romains  l'art  de  parler  eloquemment 
Quint,  insi.  or.  1.  leur  propre  langue.  '  Il  s'acquit  dans  cette  profession  une 
2.  c.  4.  p.  97.        réputation  extraordinaire  :  insignis  maxime  Plotius  fuit,  dit 
Bail.  jug.  pivj.  c.  Quintilien    en    faisant   son    éloge.    '   Rome  ne  feroit  donc 
'  "  '"'    "       que  lui  rendre  justice,  en  le  regardant  comme  le  Père,  ou 
le  Maître  de  ses  premiers  Rhéteurs,  et  de  ses  plus  grands 
Orateurs  jusqu'à  Ciceron. 
cic.  frag.p.  16911.      '   Gclui-ci,   qui   alors   n'étoit   encore    qu'un    enfant,    se 
plaint   avec  amertume,   de   n'avoir  pas  eu  l'avantage  d'ê- 
tre disciple  d'un  homme  si  célèbre.   ,,  Je  me  souviens,  dit- 
,,  il,  dans  une  de  ses  Iclres,  dont  il  ne  nous  reste  qu'un  frag- 
,,  ment,  qu'en  mon  enfance  un  certain  Lucius  Plotius  com- 
,,mença  à  donner  des  préceptes  pour  bien  parler  le  latin. 
. ,  Comme  je  voïois  qu'il  enseignoit  avec  un  concours  pro- 
,,  digieux  d'auditeurs,    car  tous   ceux   qui  avoient  le  plus 
,,  d'amour  pour  les   letres  alloient   prendre   de  ses  leçons, 
,,j'étois  bien  fâché  de  ne  pouvoir  les  imiter.  Je  me  trou- 
,,vois  retenu  par  de  très-habiles  gens,  qui  croïoient  que  le 
,,grec  étoit  plus  propre  pour  former  l'esprit  de  la  jeunes- 
suci.  ibid.  c.  I.  p.      se  ,,.  '  En  effet  ce  fameux  Orateur  suivit  tellement  cet 

8-40 

avis,  qu'il  plaida  toujours  en  cette  langue  jusqu'à  sa  Prétu- 
re,  et  ne  plaida  en  latin  que  sur  ses  vieux  jours, 
c.  2.  p.  8ij.  '  11  ne  tint  pas  à  Marcus  Cœlius,  que  notre  Rhéteur  ne 

perdît  la  haute  réputation  qu'il  s'étoit  acquise.  Cet  Ora- 
teur indigné  de  ce  que  Plotius,  comme  il  croïoit,  avoit 
composé  le  plaidoïer  qu'Atracinus  prononça  contre  lui,  en 
se  portant  pour  son  accusateur,  le  traita  avec  beaucoup  de 
mépris,  et  même  de  la  manière  la  plus  injurieuse,  dans  le 
discours  qu'il  fit  pour  sa  défense.  Mais  cela  n'empêcha  pas 
cic.  pro  \ïd\.  n.  que  Plotius  ne  fût  toujours  en  grande  estime  à  Rome.  '  Ma- 
n.  p.  313.  j.jyg  gj^jj.g  autres  avoit  pour  lui  une  amitié  toute  singulière. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    85 

dans  Tesperance  qu'il  pourroit  un  jour  emploïer  ses  talens     plotius. 

à  faire  passer  à  la  postérité  les  actions  mémorables  de  sa  

vie. 

11  ne  paroît  point  cependant  que  Plotius  ait  jamais  ten- 
té cet  ouvrage  ,  ni  même  qu'il  en  ait  formé  le  dessein. 
'  Mais  Quintilien  nous  aprend  qu'il  avoit  écrit  un  Traité  Q"!"'-  "W|  '•  "• 
du  geste  de  l'Orateur ,  qu'il  témoigne  avoir  lu.  Plotius 
V  prescrivoit  entre  autres  choses  à  son  Orateur  de  porter 
la  robe  traînante  ,  comme  les  Grecs  portoient  leur  man- 
teau. C'est  tout  ce  que  nous  savons  de  cet  écrit ,  qui  ne 
subsiste  plus  depuis  long-tems. 

'  Plotius  vécut  jusqu'à  une  extrême  vieillesse.  Il  est  sans  suet.  iwd. 
doute  différent  '  de  ce  Lucius  Plotius  ,  qui  selon  Pline  l'Hi-  pun.  lùst.  i.  is.  c. 
storien  ,  fut  proscrit  par  les  Triumvirs  ,  et  contraint  de  s'al-  ^" 
1er  cacher  à  Salerne.  Celui-ci  étoit  frère  de  Lucius  Plancus 
deux  fois  Consul  et  Censeur.  '  Velleius  Paterculus  le  nom-  Paier.  i.  2.  n.  ei. 
me   Plancus   Plotius  ,  '  et  Valere  Maxime  ,   Caïus   Plotius  vai.  Max.  1.  6.  c. 
Plancus.  Ainsi  Pline  ,  qui   paroit  avoir  tiré  ce  trait  d'Hi-  *'  "'  *' 
stoire  de  Valere  Maxime ,  pouroit  fort  bien  avoir  écrit  un 
prénom  pour  un  autre. 


MARCUS     ÂNTONIUS 
GNIPHO, 

Professeur  de  Belles-Lettres  et  d'Eloquence. 


GNIPHON. 


M 


Arc  '  Antoine  Gniphon  naquit  dans  les  Gaules  suet.  m.  cram. 
d'une  famille  libre  ,  plus  d'un  siècle  avant  notre  Ere  '"  '*'  *^'  . 
vulgaire.  Peu  de  tems  après  sa  naissance  il  fut  exposé  et 
abandonné  par  ses  parens.  Celui  qui  le  trouva  en  ce  mal- 
heureux état  ,  et  qui  voulut  bien  se  charger  de  son  éduca- 
tion ,  prit  soin  de  le  faire  étudier  ,  et  lui  rendit  sa  liberté. 
L'on  prétendoit,  au  tems  de  Suétone  ,  qu'il  avoit  été  en- 
voie à  Alexandrie  ,  et  qu'il  y  avoit  été  instruit  des  letres 
en  la  compagnie  de  Denys  Scythobrachion.  Mais  cet  Hi- 
storien avoit  de  la  peine  à  se  le  persuader  ,  parce  que  les  tems 
ne  convenoient  pas.  Et  pourquoi  envoïer  si  loin  Gniphon 
chercher  des  écoles?  N'y  avoit-il  pas  à  Marseille  une  Aca- 


86  ETAT   DES   LETRES 

CNiPHON.     demie  ,  qui  passoit  dès-lors  pour  l'une  des  plus  célèbres  de 

l'Univers?  '  Aussi  croit-on  que  ce  fut  en  celle-ci  qu'il  élu- 

20.**"'   "■'■'■  ''•  dia.  *  Comme  il  avoit  beaucoup  d'esprit ,  et  une  mémoire 

•  suei.  ibia.  prodlgieuse  ,  il  aprit   parfaitement  la  langue   gréque  et  la 

latine. 

Avec  de   telles  avances   Gniphon   alla  à  Rome  ,  où   il 
trouva   Lucius   Plotius   son   compatriote  ,  qui   y  enseignoit 
ii.i.i.  l'éloquence   depuis  plusieurs  années.   '  Gniphon  commença 

c.  4.  j).  8i8.  par  y  faire  la  profession  de  Grammairien  :  '  état  incompara- 
blement plus  honorable  et  plus  relevé  en  ces  lems-là  ,  qu'il 
ne  l'est  aujourd'hui.  Par  Grammairien  on  entendoit  alors 
un  homme  versé  dans  la  literature  ,  qui  savoit  parler  ou 
écrire  sur  quelque  sujet  ,  non  seulement  avec  exactitude  , 
mais  aussi  avec  esprit  et  habileté. 
,,„j  '  Les  Grammairiens  de  ce  genre  enseignoient  souvent  la 

Rhétorique  ;  quoiqu'ils  ne  laissoient  pas  de  donner  les  prin- 
cipes pour  parler  correctement  la  langue  en  laquelle  ils  en- 
Quiiii.  inst.  or.  1.  seignoient.    Gniphon    paroît    l'avoir    fait   lui-même.    '    Au 
''"'  ■        moins   Quintilien  le  met-il   au   nombre   de  ces   Grammai- 
riens ,  qui  se  donnoient  la  licence  de  changer  la  terminai- 
son de  certains  noms  ,  tant  au  nominatif  qu'aux  cas  obli- 
3ues.  Quelques-uns  ,  dit  cet  Orateur  ,  vouloient   que  l'on 
it  robor  et  ebor,  pour  robutelebur;  et  la  raison  qu'ils  en  don- 
noient ,  est  que  le  génitif  de  ces  noms  est  en  oris.  Gniphon 
au  contraire  prétendoit  que  l'on  devoit   faire  le  génitif  de 
ces  noms  en  uris,  parce  que  leur  nominatif  est  en  ur. 
su«i.  ibid.  c.  7.  p.      '  D'abord   Gniphon    enseigna   dans  la  maison   de  Jule 
***■  César  ,  qui  n'étoit  encore  alors   qu'un   enfant.  Depuis  ,  il 

établit  son   (cole  dans   l'endroit  même  où  il  faisoit  sa  de- 
meure. Il  y  professa  la  Rhétorique  avec  tant  de  reputa- 
p.  8*5.  tion ,  '  que  les  personnes  les  plus  distinguées  dans  Rome  , 

et  Ciceron  même  qui  étoit  alors  Préteur ,  se  faisoienl  un 
plaisir  de  l'aller  entendre.  Mais  quoiqu'il  donnât  tous  les 
jours  des  leçons  d'éloquence  ,  on  remarque  au'il  ne  décla- 
moit  jamais  dans  son  école.  Seulement  il  le  laisoit  dans  les 
lieux  où  l'on  tenoit  les  foires  et  le  marché, 
c.  II.  p.  8i8 1  Bail.  '  Au  même-tcms  qu'il  enseignoit  ainsi  dans  cette  capitale 
p""3(Ki?^*'' ^'^^  ^u  monde,  Valerius  Cato  un  autre  de  ses  compatriotes  y  fai- 
soit aussi  la  même  fonction.  Il  y  avoit  toutefois  cette  diffé- 
rence entre  l'un  et  l'autre  ,  que  la  méthode  de  Gniphon 
tendoit  à  faire  des  Orateurs  ,  et  celle  de  Caton  à  former 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    87 

des  Poètes.  '  Gniphon  se  distinguoit  encore  des  autres  Pro-      gniphon. 
fesseurs  par  sa  douceur  ,  son  affabilité  ,  son  désintéressement.  ,  g^^,  y^jj  ^  , 
II  n'exigeoit  de  ses  disciples  pour  son  salaire  ,  que  ce  que  p-  sa*, 
leur  libéralité  les  pouvoit  porter  à  lui  donner.  Et  celte   li- 
béralité ,  remarque  l'un  de  ses  Panégyristes  ,  lui  valoit  mieux 
que  ce.  qu'il  auroit  pu  exiger  lui-même.  Que   ces  heureux 
tems  sont  aujourd'hui  changés  ! 

'  Gniphon  ne  vécut  pas  au-de-là  de  l'âge  de  cinquante  p.  sas. 
ans.  Il  ne  laissa  pas  dans  l'espace  d'une  vie  aussi  courte  ,  et 
malgré  le  tems  que  lui  emportoient  ses  leçons  publiques  , 
de  composer  plusieurs  ouvrages.  Néanmoins  Atleïus  le  Phi- 
lologue ,  qui  avoit  été  l'un  de  ses  élevés  ,  ne  lui  atribuoit 
que  deux  volumes  écrits  en  latin  ,  et  prétendoit  que  les  au- 
tres qui  avoient  paru  sous  son  nom ,  étoient  de  la  composi- 
tion de  ses  disciples. 

On  ne  dit  point  de  quoi  traitoient  ces  ouvrages  de  Gni- 
phon. Seulement  '  Macrobe  dit  qu'il  en  avoit  fait  un  sur  Macr.  sat.  i.  3.  c. 
ce  que  les  anciens  nommoient  Festra  ;  c'est-à-dire  la  petite  **'  •"■  *'*'  *"' 
ouverture  du  lieu  consacré  aux  fausses  Divinités  du  Paganis- 
me. Macrobe  ajoute  que  l'Auteur  avoit  recueilli  dans  ce 
Traité  plusieurs  choses  trè.s-curieuses  de  l'antiquité  la  plus 
reculée. 

'  Gniphon  eut  au  moins  un  fils  nommé  Lucius  Hermas  ,  snoi.  c.  lo.  p.  827. 
qui  enseigna  aussi  à  Rome  ,  où  il  eut  comme  son  père  ,  At- 
teïus  le  Philologue  pour  disciple.  Celui-ci  écrivit  diverses 
letres  l\  Hermas  ,  dans  l'une  desquelles  il  lui  recomman- 
doit  fortement  de  faire  valoir  auprès  des  savans  leur  ouvra- 
ge intitulé  Hyles.  Ce  titre  qui  est  grec  ,  ne  veut  pas  dire 
aparemment  que  l'ouvrage  fût  en  cette  langue  ,  mais  seule- 
ment qu'il  contenoit  une  abondance  de  matières  et  de  sen- 
tences. Aussi  ces  deux  Auteurs  y  avoient-ils  recueilli  en 
huit  cens  Livres  tous  les  differens  genres  d'érudition  et  de 
literature. 


CATON. 


88  ETAT   DES   LETRES 

VALERIUS^'^  CATO, 

Poète  et  Grammairien. 


8  I. 
HISTOIRE    DE   SA   VIE. 

suei.  iii.  Gram.  c.  ^TOici    '    pncorc    UD    savant    que   nos    Gaules   formèrent 

"■  •*■  ***■  y  pour   la   ville   de  Rome.    On  ne  marque  pas  précisé- 

ment quelle  fut  celle  de  nos  Provinces  qu'il  eut  pour  pa- 
trie. Mais  la  présomption  est  en  faveur  de  la  Gaule  Nar- 
bonoise,  qui  donna  naissance  à  tous  les  savans,  dont  nous 
avons  déjà  parlé,  et  presque  à  tous  les  autres,  dont  nous 
parlerons  sur  ces  premiers  tems. 

Valere  Caton  vint  au  monde  un  peu  plus  d'un  siècle  avant 

ibid.  le  commencement  de  l'Ere   Chrétienne.  '  Quelques-uns  le 

vouloient  faire  passer  pour  l'affranclii  d'un  certain  Burse- 
nus;  mais  il  assure  lui-même  qu'il  étoit  né  libre.  Etant 
Epi.^eijwf.  encore  jeune,  et  déjà  orphelin,  il  se  vit  dépouillé  de  tous 
'  "  *"  ses  biens,  et  contraint,  quoiqu'innocent,  de  se  bannir  lui- 
même  de  sa  patrie,  à  l'ocasion  d'une  guerre  civile  qui  s'y 
étoit  élevée  au  tems  du  fameux  Sylla. 

'  Après  tant  de  pertes  Caton  se  retira  à  Rome,  comme 
le  lieu  le  plus  propre  à  se  relever  de  sa  mauvaise  fortune, 

snei,  ibi.i.  '  et  y  ouvrit  une  école  publique.  Bien-tôt  il  eut  entre  ses 

disciples  plusieurs  enfans  des  meilleures  maisons  de  la  ville, 

p.  fijR.  et  s'acquit  la  réputation  d'un  excellent  maître.  '  Il  passoit 

pour  un  très-habile  Grammairien.  Nous  avons  déjà  mar- 
qué ailleurs  l'idée  que  les  anciens  avoient  de  cette  sorte  de 

p.  f^  savans.    Mais   il    étoit   encore    un  plus   grand  Poëte.  '  U" 

avoit  sur  tout  un  talent  merveilleux  pour  former  les  autres 

ibid  j  Epi.^  et^poê.  à  la  Poésie.  '  C'est  ce  qui  a  donné  lieu  à  ces  deux  vers  pom- 
peux, qui  suffiroient  seuls  pour  faire  son  éloge.  Us  sont  du 


ibid 

vel.  I.  2.  p.  64 


ibiil 


vet.  i.  I.  p.  S8. 


u       r        «10             '^)     Moreri,  on  ses  eonlinnatears  don-  télé  des  Poësiesqui  noDs  restent  de  Galon, 

Mor.  i..  p.  *»!*.  I.    nent  encore  à  Caton  le  prénom  de  Mar-  ne  loi  donnent  point  d'autre  prénom  que 

eus  ;  mais  on  ne  Toit  pas  sur  quel  fond»-  celui  de  Valere.  (\.) 

ment.  Ni  Snetone,  ni  le  litre  qui  est  i  la 

Poêle 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    89 

Poëte  Marcus  Furius  Bibaculus,  ami  particulier  de  Caton.       *^'^^"''- 


Cato  Grammaticus,  latina  sircn. 
Qui  solus  legit,  ac  facit  Poctas. 

'  Valere  Caton  amassa  d'abord  quelque  bien  ,  en  profes-  suci.  iWii.  p.  82«. 

.      •       •    1  .  ,    I  ■■?  A  839.    Epi.  cl  uoc- 

sant  ainsi  la  grammaire  et  la  poétique,  et  se  ménagea  une  uuu.  p.  36. 
maison  de  campagne  près  de  la  ville  de  Tusculum.  Mais 
ses  affaires  s'étant  ensuite  dérangées,  ou  par  défaut  d'œ- 
conomie,  ou  autrement ,  il  lut  obligé  de  céder  cette  mai- 
son à  ses  créanciers ,  qui  éloient  en  grand  nombre  .  Ainsi 
dépouillé  de  tout  ce  qu'il  avoit  de  biens,  il  se  retira  dans 
un  très-vil  [apartemenl.  11  y  vécut  jusqu'à  une  extrême 
vieillesse  dans  une  grande  pauvreté  :  sort  ordinaire  des 
gens  de  letres  qui  virent  sans-  se  souvenir  de  faire  fortu- 
ne. Cet  état  d'indigence  auquel  se  voïoit  réduit  un  si 
grand  homme,  et  qu'il  soùtenoit  avec  une  constance  hé- 
roïque, quoique  païenne,  a  fait  l'admiration  de  ceux  gui 
ont  vécu  après  lui.  C'est  à  ce  sujet  que  Bibaculus  s'écrie , 
en  comparant  la  constance  de  son  ami  à  celle  de  Zenodote 
et  de  Craies  : 

Calonis  modo,  Galle,  Tusculanum 
Tota  créditer  urbc  vcndilabat. 
Mirai!  sumus  unicum  magistrum, 
Summum  Gramnialicum,  Optimum  i'oOlam 
Ouines  solvere  possc  qua;sliones, 
Unum  diriicilc  expcdirc  nomeii. 
En  cor  Zenodoti,  en  jecur  Gratelis. 

'Le   même   Poëte ,  décrivant   un   peu   auparavant  la   vie  ibid. 
pauvre  de  Caton,  nous  en  a  laissé  une  triste  peinture  dans 
les  huit  vers  suivans  : 

Si  quis  forte  mei  aomum  Catonis, 
Depiclas  minio  assulas,  et  illos 
Custodis  videt  Iiortulos  l'riapi, 
Miratur,  quibus  ilie  disciplinis 
Tantam  sit  sapientiam  assequutus, 
(.tuem  très  cauliculi,  et  felibra  faiTis. 
lîacerai  duo  tegula  suli  uua 
Ad  summam  propo  nulriant  seneclam 
Tome  I.  Prem.  Part.  M 


90  ETAT   DES   LETRES 

CATON.  *  On  a  cru  assez  long-tems  qu'Horace  faisoit  mention  de 

f"^~ — ^r~J^^  Valere  Caton  ,  dans  huit  vers  qu'on  lisoit  autrefois  au 
(lia.  4.  p.  195.  not.  commencement  de  la  dixième  satyre  de  son  premier  Li- 
iior.  1. 1.  sat.  10.  vre,  '  et  que  l'on  trouve  encore  dans  quelques  manuscrits 
p.  t,99.  noi.  jgg  ouvrages  de  ce  Poëte .    Caton  y   est  représenté  comme 

un  des  admirateurs  de  Lucilius  ,  quoiqu'il  ne  laissât  pas  de 
Gif.  ibiii,  corriger   quelques-uns  de  ses   vers.  '  Mais    Colomiès  nous 

avertit    que   Içs   plus    habiles    critiques  ont   retranché   des 

œuvres  d'Horace  ces  huit  vers  ,  comme  n'étant  point  de 
Suei.  ibid.  c.  2.  p.  cc  famcux  Poëtc.  '  Il  est  néanmoins  vrai,  selon  Suétone  , 
**■  que  Caton  faisoit  quelquefois  ses  délices  de  la  lecture   des 

poésies  de  Lucile.  (XI) 

SU. 

SES   ECRITS. 

Sud.  ibid.  c.  II.  p.  /^ATON  '  laissa  plusieurs  ouvrages    de  sa  façon,   tant   en 

**•  \Jprose   qu'en   vers.    Mais    il   nous    en   reste    aujourd'hui 

peu  de  connoissance. 

i,,i,,  1».  '  Dans  la  classe  des  premiers,  Suétone  marque  divers 

Traités  de  Grammaire  ,  ou  qui  concernent  la  Grammaiie  , 
Grammaticos  libellas^  dit  cet  Historien,  sans  en  spécifier  au- 
cun en  particulier.  C'est  peut-être  autant  pour  ces  écrits 
sur  la  Grammaire,   que   pour  la  profession   de   Grammni- 

c.  1.  p.  ffiî.  rien  qu'avoit  exercée  Caton ,  '  que  Messala  Corvinus  le 
qualifioit  homme  d'érudition,  Literatore  Catone. 

c.  II.  p.  Ki8.  2".  '    Valere   Caton    avoit   encore   composé  divers  poè- 

mes, dont  les  plus  estimés  étoient  ceux  qui  portoient  pour 
titre  Lidia  et  Diana.  Le  premier  de  ces  deux  poëmes  me- 
ritoit,  au  sentiment  du  Poëte  Caïus  Ticida,  d  être  lu  des 
savans  avec  un  soin  extrême  : 

Lydia  doctorum  œaxima  cura  liber. 

Epi.  et  poë.  vet.  1.  C'étoit  aparemment  l'éloge,  ou  l'adieu  que  faisoit  '  Ca- 
*■  P-  ^*-  ton  à  sa  chère  Lydie,  qu'il  fut  contraint  ae  quiter  avec  sa 

patrie,  ses  parens,  ses  neritages,  et  dont  le  souvenir  lui 
tenoit  plus  au  cœur  que  toutes  choses  au  monde,  comme 
il  s'en  exprime  lui-même  ailleurs.  On  trouve  des  vers  ly- 
riques, qui  commencent  par  ces  mots,  Lydia  bella  pue  lia. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    91 

Ils  ont   long-tems  porté  le  nom  de  Cornélius  Gallus;  mais       caton. 
les  critiques  conviennent  qu'ils  ne  sont  pas  de  lui.  Il  ne  pa- 
roît  pas  non  plus  qu'ils  soient  de  Valere  Caton. 

3°  '  Le  poème  intitulé  Diana  ,  n'étoit  ni  moins  beau  ni  sa«t.  ibij. 
moins  estimable    que  le  précèdent,  selon  le  jugement  qu'en 
a   porté   un  autre  Poète.  C'est   Caïus  Helvius  Cinna  ,   qui 
en  parle  ainsi  : 

Sxcula  pcrmancat  nostri  Diana  Galonis. 

4°,  '  Valere  Caton  avoit  fait  un  autre  poème,  qui  mal-  Epi-  «t  poe.  vei.  i. 
gré  le  malheur  des  temps  est   venu  jusqu  à  nous.  Il  porte  *'  '"'  '"'■"*■ 
pour   titre   Dirœ.    Imprécations.'   Le   Gyraldi  auroit  voulu  Gyr.  poc.  wst.  dia. 
substituer  à  ce  titre  celui  d'mrf/f/wo/ib,  qui  pouvoit  signifier  *p*^3- 
la  même  chose.'  Il  me  semble  même  qu'au  tems  de  Suétone  il  Suet.  iwa 
étoit  ainsi  intitulé.   Car   il   ne  paroït  pas  y  avoir  lieu    de 
douter  que  ce  ne  soit  le  même  ouvrage  qu'il  marque  sous 
ce  même  titre. 

'  Ce   poème   avoit   été   précédé   par  quelques  autres  du  Epi.  et  poë.  ibi<i. 
même  Auteur,  et  sur  le  même  sujet,  aparemment  par  ce-  ^' 
lui  de  Lydia.  C'est  ce  que  font  juger  les  deux  vers  suivans, 
qui  sont  à  la  tête  du  poème. 

Batlare,  cycneas  rcpetamus  carminé  voces. 
Divisas  itcrum  scdes,  et  rura  canamus. 

'  L'Auteur  y  déplore  le  malheur  de  son  sort,  de  se  voir  p-  64. 
obligé   malgré   lui   de   quiter   son  païs  et  sa  chère  Lydie. 
Ecoutons-le  parler  lui-même  sur  ce  triste  sujet  : 

Tuque  iniinica  tui  soniper  discordia  civis. 
Exul  ego,  indemnatus,  egens  mea  rura  rellqui, 
Miles  ut  accipiat  funesti  pnBinia  belli. 
Hic  ego  de  tumulo  mea  rura  novissima  visam  : 
Hinc  ibo  in  silvas  :  obstabunt  jam  milii  colles, 
Obstabunt  montes,  campos  nec  adiré  licebit. 
Dulcia  rura  valete,  et  Lydia  dulcior  illis, 
Et  casti  fontes,  et  felix  nomen  agelli. 

On   a    long-tems  atribué  ce    poème  à  Virgile,  entre  les 
catalectes  duquel  il  a  presque  toujours  été  imprimé.   Mais 

Mij 


92  ETAT   DES   LETRES 

CATON.  les  meilleurs  critiques  l'ont  enfin  rendu  à  son  véritable  Au- 
~^_  ;;  teur.  '  Il  est  inséré  sous  son  nom  dans  le  recueil  dos  an- 
k^^'cl"''""'  ciennes  épigrammes  et  petites  poésies,  qui  parut  à  Paris 
1.  Mor.  c.  p.  239.  l'an  1590  en  un  volume  in-12.  ^  On  marque  même  une 
"■  édition  particulière    de  ce  poëme,    faite  à  Leyde  sous  le 

nom  de  notre  Poëte,   l'an  1632,  avec  les  notes  de  Chri- 
stophe Arnod. 

Comme  Pline  l'ancien  dans  le  dénombrement  qu'il  don- 
ne des  Auteurs  dont  il  s'est  servi  pour  son  histoire,  nomme 
deux  Gâtons,  Cato  Censorius,  et  Caton  simplement  dit, 
on  pourroif  croire  que  ce  dernier  est  Valerius  Cato.  Ne 
seroit-ce  point  encore  lui,  '  que  Lenœus,  affranchi  de  Pom- 
pée, auroit  voulu  désigner  dans  un  de  ses  écrits  ?  C'est  la 
satyre  qu'il  fit  pour  décrier  les  ouvrages  de  Saluste  l'Hi- 
storien, et  où  entre  autres  défauts  il  lui  reproche  d'avoir 
été  un  très-ignorant  plagiaire  des  expressions  de  ceux  qui 
avoient  écrit  avant  lui,  et  nommément  de  Caton. 


Suet.   iliiil.  f-  1 
p.  83t.  R32. 


Q.    ROSCIUS, 

GOMEDIE.N. 


ROSCIUS. 


QuiNTL's  '  Roscius  ,  le  plus  fameux  Comédien  qui  ait 
paru  dans  toute  l'antiquité,  étoit  Gaulois  de  nation, 
niîsc."r.  To.'p.^asîîi  et  selon  toute  aparence  de  la  Gaule  Narbonnoise.  La  na- 
crin.poe.iai.  1. 2.  ^^^^  l'avoit  omé  de  toutes  les  qualités  imaginables  pour  le 
théâtre:  aussi  passa-t-il  pour  un  prodige  en  ce  genre,  seu- 
lement il  avoit  les  yeux  un  peu  de  travers,  et  la  vûë  dif- 
cic.  ii>i«|.  I.  3.  p.  forme.  '  Mais  cela  ne  diminuoit  rien  de  la  bonne  grâce  qu'il 
^^'  "■  ■'■  avoit  à  parler,  et  ne  l'obligea  jamais  à  se  servir  de  masque. 

Des  Gaules,  Roscius  passa  à  Rome,  comme  le  lieu  le  plus 

sym.  I.  I.  pp.  '2.-i|  pi'opre  à  exercer  sa  proies.sion.  '  Il  s'y  trouva  en  même-lems. 

1. 10.  «p.  2.  qu'Esope,  cet  autre  personnage  si  fameux  pour  les  jeux  de 

théâtre.    Il   s'y   firent   l'un  et  l'autre  une   réputation   très- 

éclatante,  mais  qui  ne  fut  pas  égale  :  Neque  par  JEsojm  et 

Roscio  fama  processit .  Autant  qu'Ambivius  l'emportoit  pour 

la  déclamation  au-dessus  de  Publius  Pollio,  autant  Roscius 

Q»'"'  "■■  '  "  <^   l'emporta  pour  le  théâtre   au-dessus  d'Esope.  '  Celui-ci  qui 

'  '"'     ■  ne  représentoif  que  des  pièces  tragiques  avoit  plus  de  gra- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    03 

vite  que  Roscius;  mais  Roscius,  qui  ne  jouoit  que  des  co-      nosciiis. 
médies,  avoit  plus  de  feu  qu'Esope.  '  L'un  étoit  un  homme  ; ,~ ^  ,  ^    ~\' 
grave  et  sérieux ,  selon  Horace ,  et  l'autre,  selon  le  même  p.  «si. 
Poëte ,  étoit  un   homme   docte   et   ingénieux  :  quœ  gravis 
JBsopus,  quœ  dodus  Roscius  egit. 

Tout   est    plein   des   éloges   de   Roscius.    Ciceron    entre 
autres  semble  avoir   épuisé   son   éloquence   à  relever   son 
mérite   et  ses  talens .  '  Lorsqu'il  paroissoit  sur  le   théâtre  ,  ci.-.  d«  or.  .  i.  p. 
c'éfoit  toujours   avec  un  air   et   une  grâce  qui  charmoient  ^^'  ""  '"' 
tous  les  spectateurs.  Ses  discours,  son  geste,  ses  moindres 
mouvemens,  tout  étoit  de  la  plus  grande  justesse  et  de  la 
dernière   régularité.    C'est   à   ce  Comédien ,   comme    à  un 
modèle   achevé   de  ce  que  doit   ôtre  un   homme  qui  parle 
en  public ,  que  Ciceron  renvoie  son  Orateur.  '  Et  qui  dou-  p-  <i»-  ".  2.",. 
te ,  dit-il ,  qu'en  ce  genre  de  personnage ,  un  Orateur  n'ait 
besoin  d'imiter  le  geste ,  le  port ,  la  bonne  grâce  de  Ros- 
cius î  '  Oui ,  il  faut  qu'il  sache  comme  lui ,  s'atirer  de  fre-  do  cia.  or.  p.  aw. 
quens    aplaudis.semens,  exciter  de    fréquentes  saillies   d'ad-  "  "** 
miration ,  faire  rire  lorsqu'il  veut ,  faire   pleurer   lorsqu'il 
lui  plaît.  De  sorte  que  ceux  qui  ne  le  peuvent  voir  que  de 
loin  ,  comprennent  néanmoins ,  sans   savoir  de  quoi  il  s'a- 
git, qu'il  a  le  don  de  plaire,  et  que  c'est  Roscius  qui  est  sur 
le  théâtre. 

'On  regardoit  ce  Comédien  comme  un  homme  si  acom-  <inor.  1.  1.  p.  120. 
pli  dans  sa  profession  ,  que  pour  relever  le  mérite  de  ceux  "'  ^" 

aui  excelloient  en  quelque  art   que  ce  pût  être ,  on  disoit 
'eux  en  espèce  de  proverbe  :  C'est  un  autre  Roscius.  '  Ci-  1. 2.  p.  103.  n.  201 
ceron  ne  fait  pas  difficulté  de  dire,  qu'il  auroit  regardé  ou  jj'"",,'^"'"'-  "•  **• 
comme  effrontés  ceux  qui  auroient  osé  représenter  quelque 
pièce  en   présence  de  ce  Comédien;  ou    comme   gens   qui 
auroient  voulu  risquer  leur  réputation,  ceux  qui  se  seroient 
émancipés  d'entrer  en  lice  avec  lui.  '  Il  étoit  en  une  estime  pro  Ro».  com.  n. 
si  extraordinaire ,  que  tous  ceux  qu'il  formoit  pour  le  theâ-  *  "  '"'  "''' 
tre,  passoient  pour  savoir  beaucoup  plus  qu'ils  ne  savoient 
effectivement. 

Et  ce  qu'il  y  a  de  singulier  '  pour  Roscius ,  c'est  que  ce  vai.  Max.  1.  s.  c. 
ne   furent  point  les  jeux  de  théâtre   qui  le  rendirent  cèle-  '"  "'  '• 
bre;  mais  ce   fut  plutôt  lui-même   qui    rendit   célèbres   les 
jeux  de  théâtre.  Car  on  remarque  qu'il   ne  s'hazarda  ja- 
mais de  jouer  aucun  personnage,  non  pas  même  de  faire  un 
seul  geste  en  public,  qu'il  ne  s'y  fût  exercé  en  son  parti- 
culier. 
1  1 


94  ETAT   DES   LETRES 

Roscius.         Ce  n'est  encore  là  que  la  moindre  partie  de   l'éloge  de 
Roscius.  Il  ne  possedoit  pas  seulement  tous  les  talens  pour 
le  théâtre,  il  réunissoit  aussi  en  sa  personne  toutes  les  qua- 
lités qui  font  l'homme  d'honneur  et  de  probité.    Il  ne  lui 
en  manquoit  qu'une ,  sans  laquelle  les  autres  n'étoient  rien 
aux   yeux  de   Dieu    :   la  grâce   de   connoitre   l'Auteur  de 
tous  ces  dons,  et  de  lui  en  raporter  toute  la  gloire.  A  cela 
cicer.  pro.  Ros.  près  '  les  vcrtus  intérieures  de  Roscius  l'toienl  au-dessus  de 
com.  n.  6.  p.  242.  ^^^g   g,,g  taig^g  extericurs.   Il  avoit   encore  plus  de  bonne 
foi   que  d'industrie  ,  plus   de   sincérité   que   d'habileté  ,  et 
passoit  parmi  les  Romains  pour  plus  grand  homme  de  bien, 
qu'habile   homme   pour  le  théâtre.    Autant   que  son   indu- 
strie à  jouer  des  pièces  comiques  le  mettoit  au-dessus  de 
tout  autre  pour   le  théâtre  :  autant  sa  tempérance  le  ren- 
doit  plus  digne  que  tout  autre  do  remplir  une  place  dans 
pro  Quint,  n.  25.  le  Sénat.  Eu  un  mot,  '  s'il  étoit  si  habile  Comédien  qu'il 
lî'v.  1. 1.  n."!'.  """■  sembloit  être  le  seul   digne    de   monter    sur  le  théâtre ,  il 
étoit  si  grand  homme  de  bien  ,  qu'il  sembloit  être  le  seul 
cic.  pro  uos.  com.  qui  n'y   dût  jamais   paroitre.  '  Personne   ne   passoit    pour 
•"■  ^*^"  avoir  ni   des  mœurs  plus  réglées ,  ni  plus  de   pudeur  ,  ni 

plus  d'humanité,  ni  plus  de  zèle  pour  obliger,  ni  plus  de 
libéralité  que  Roscius. 
n.  9.  p.  247.  '  Il  fit  toujours  voir  ,  même  avant  qu'il  fût  devenu  ri- 

che ,   qu'il   étoit    et  très-liberal    et    très-généreux.    Mais    il 
donna   encore  dans  la   suite  de  plus  grandes   marques  de 
Macr.  sai.  1. 2.  c.  son    dcsinteressemeut  et   de   sa  générosité.  '  La  République 
10.  p.  360.  j^j  paioit  par  jour  cent  deniers   de  pension ,  sans  y  com- 

piin.  hist.  I.  7.  c.  prendre  ce  qu'elle  donnoit  à  ceux  de  u  suite  .  '  Cette  pen- 
sion alloit  par  an,  selon  Pline,  à  une  somme  de  sesterces 
qui  faisoient  environ  cinquante  à  soixante  mille  livres  de 
*^'«- »''''' •IP'''>>W  notre  monoïe.  '  Roscius  fut  dix  ans  de  suite  sans  être 
paie  de  sa  pension,  et  négligea  ainsi  d'amasser  une  somme 
de  six  cent  mille  livres,  sans  cesser  néanmoins  les  représen- 
tations de  théâtre.  C'est  ce  que  Ciceron  avec  son  éloquen- 
ce ordinaire  relevé  comme  le  trait  de  la  plus  grande  gé- 
nérosité. 
Val.  Max.  ibi.i.  '  Tant  d'excellentcs  qualités  gagnèrent  h  Roscius  l'af- 

fection du  Peuple,  l'estime  et  les  bonnes  grâces  des  Grands. 
Cic.  ibid.  n.  6.  p.  '  Pisou  ct  Sylla  Butrc  autres  avoient  pour  lui  une  estime  sin- 
2«|  Macr.  ibid.  p.  gQ^gre;  et  ce  dernier,  lorsqu'il  étoit  Dictateur,  lui  fit  pré- 
sent d'un  anneau  d'or. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    95 

'De   même   Ciceron,   cet   Orateur  si  célèbre,  avoit  con-      noscius. 
tracté   une   si   étroite   amitié   avec  Esope  et  Roscius,  qu'il  .  ji^cr.  ibid. 
se  faisoit  un  mérite  d'emploïer  son  éloquence  pour  les  louer 
ou  les  défendie  en  toute   rencontre.    On   en   trouve  d'illu- 
stres preuves,  dit  Macrobe,  tant  dans  ses  epîtres,  que  dans 
ses  autres  écrits.   '  Ce  fut  en  considération  de  Roscius,  que  *'c-  pro.  Quint,  n. 
cet  Orateur  entreprit  de  plaider  la  cause  de  Publius  Quin-     "  '*' 
tius,  qui  avoit  épousé  la  sœur  de  notre   Comédien,  contre 
'  Sextus  Nœvius  pour  qui  Q.  Hortensius  devoit  plaider.      *         n.  2.  p.  n..  u. 

'  Il  nous  reste  encore  un  autre  plaidoïer  de  Ciceron  en  pro.  Ros.  com.  p. 
faveur  de  Roscius  même,  contre  C.  Fannius  au  sujet  du  dif-  '^^-'"''^ 
ferend  qu'ils  avoient  enlre-eux.  Celui-ci  avoit  donné  à  l'au- 
tre un  esclave  pour  le  former  aux  jeux  de  théâtre,  à  con- 
dition que  l'esclave  leur  apartiendroit  en  commun.  L'escla- 
ve déjà  instruit,  un  nommé  Q.  Flavius  Tarquinensis  le  tua 
et  s'accommoda  ensuite  avec  Roscius.  Voilà  le  sujet  du  dif- 
férend. 

'  Ciceron  avoit  coutume  d'entrer  agréablement  en  dis-  Macr.  ibid. 
pute  avec  Roscius,  à  qui  des  deux  exprimeroit  la  même 
sentence  en  plus  de  diflerenles  manières,  ou  l'un  par  ses 
gestes  et  le  mouvement  de  ses  yeux,  ou  l'autre  par  les  di- 
vers tours  de  son  éloquence.  Celle  émulation  piqua  no- 
blement Roscius,  et  lui  inspira  une  nouvelle  estime  pour 
son  art.  Il  poussa  même  la  confiance  jusqu'à  ce  point,  qu'il 
composa  un  Livre  pour  faire  le  parallèle  des  jeux  de  théâ- 
tre avec  l'éloquence.  On  ne  nous  aprend  rien  davantage  de 
cet  unique  écrit,  que  nous  sachions  être  sorti  de  la  plume 
de  Roscius. 

'  Cet  homme  si  fameux  mourut  à  Rome  sous  le  Consulat  ciccr.  pro.  Arch. 
de  M.  Puppius  Piso  Frugi,  et  de  Marcus  Valerius  Messala  i'"^- «i- »■  p- s*'- 
Niger,  61  ans  (1)  avant  le  commencement  de  notre  Ere 
vulgaire.  Nous  tirons  cette  époque  d'un  discours  que  Ci- 
ceron prononça  cette  même  année,  et  dans  lequel  il  pleu- 
re la  mort  de  Roscius  comme  récente,  et  comme  aïant  été 
un  sujet  de  douleur  à  toute  la  ville.  Il  ne  craint  pas  d'y 
dire  que  bien  que  Ro.«cius  fût  mort  dans  une  heureuse 
vieillesse,  il  sembloit  néanmoins  qu'il  ne  dût  jamais  mou- 
rir, tant  à  cause  de  sa  bonne   grâce   à   parler  en   public, 

(t)  'La  dernière  édition  dn  Dictionnaire      a  Touin  dire  sans  doute 80  ans  avant  J.  C.    nforeri  R  p   197  i 
de  Moreti  porte ,   que  ce  Comédien  très-       puisqu'il  est  constant  que  Roscius  monrot 
fameux  flonssoit  vers  l'an  50  do  J.  C.  On      assez  long-lemps  avant  Ciceron.  (XU.) 


96  ETAT    DES   LETRES 

r,  ose  lus.      que   de    son    habileté    extraordinaire    pour    les    jeux    de 
Ineâlre. 


DIVITIAC, 

Philosophe. 


blVITlAC. 


CiCERON,  "  qui  avoit  connu  personnellement  ce  Philoso- 
I).  o.  1..Z/U.  P^^-    ^^"^    ^^    représente    comme    un    des   plus  savans 

entre  ceux  de  la  secte  des  Druides.  En  effet  Divitiac  avoit 
une  ronnoissance  particulière  des  secrets  de  la  Nature,  cl 
se  mêloit  même  de  pénétrer  dans  les  secrets  de  l'avenir, 
tant  par  le  moïen  des  augures,  que  par  les  autres  sortes  de 

ibid.  I  ca-Oxti.Cai.  divinatious.  '  Il  étoit  un  des  premiers  de  la  ville  d'Aulun, 

■'^-    ■    ■  ^Jl^   son   savoir,   sa   probité,   son  amour  pour  la  patrie  lui 

avoient  acquis  un  grand  crédit. 

ctrs.  iiiii.  p.  30-      '  Les  Etats  des  Eduens  dont  Autun  étoit  la  capitale,  ne 

33 1 1.  e.  p.  223.  pouvant  arêter  les  ravages  des  Germains,  des  Sequanois, 
et  des  Auvergnats  ligués  ensemble,  se  résolurent  d'avoir  re- 
cours aux  Romains.  Divitiac  fut  choisi  pour  aller  à  Rome 
implorer  du  secours.  Il  se  chargea  de  la  commission  avec 

Pau.  p.  2.S7.  plaisir,  et  fit  le  voïage.  '  Arrivé  à  Rome,  il   fut  introduit 

dans  le  Sénat,  et  le  harangua  apuïé  sur  son  bouclier.  On 
lui  acorda  l'effet  de  sa  demande  ;  et  il  fut  ainsi  le  premier 
qui  introduisit  les  Romains  dans  cette  partie  des  Gaules, 
où  ils  n'avoienl  point  encore  pénétré. 

ç.Ts.  ibiti.  1.  I.  p.  '  Après  que  César  y  fut  entré  à  la  tête  de  dix  légions, 
et  qu'il  eut  vaincu  les  llelveticns,  presque  toutes  les  prin- 
cipales villes  des  Gaules  lui  envoïerent  des  Ambassadeurs, 
qui  étoient  des  premiers  de  leurs  ciloïens,  poui'  cojjgru- 
luler  ce  General,  et  le  prier  de  les  délivrer  des  incursions 
des  Germains,  et  des  entreprises  d'Arioviste   leur   chef,   et 

^^.TO-ssii.  c.  p.  (le  celles  des  Sequanois.  '  Divitiac,  qui  avoit  si  bien  réu.ssi 
dans  sa  première  ambassade  fut  chargé  de  porter  la  paro- 
le pour  tous  les  autres.  Il  prononça  en  cette  ocasion  un 
autre  discours,  dont  C4ésar  nous  a  conservé  lui-même  le 
précis,  et  qui  est  important  pour  ce  point  d'histoire.  César 
louché    des    raisons   de  Divitiac,    .se  prêta  aux  besoins  des 

Eduens, 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    97 

Eduens,  et  rétablit  bien-tôt  leurs  Etats  dans  leur  première     divitiac. 
splendeur. 

'  Ce  fut  dès-lors  que  ce  Capitaine   Romain  connoissant  ^^^  ^^^  ,  ^ 

tout  le   mérite  de  Divitiac ,  voulut  l'avoir  toujours  près  de  «. 

sa  personne.  Il  étoit  celui  de  tous  les   Gaulois  en  qui  Cé- 
sar eût  plus  de  confiance,  et  qui  eût  aussi  plus  de  crédit 
auprès  de  César.  '  Il  le  logea  chez  lui  à  Autun ,  et  fut  son  cic.  itij. 
Panégyriste  en  toute  rencontre. 

'  Divitiac  avoit  un  frère  nommé  Domnorix,  esprit  aussi  ?f*;,''','|.'',P,v?' 

„  ,      .  -Il  ■  •       16.  17. 1 1.  "i.  p.  ici. 

inquiet  et  remuant ,  que  son  Irere  etoit   tranquille  et  paci-  les. 
fique.    Domnorix   fit  de  grands   mouvemens   pour  secouer 
le  joug  des  Romains,   et  dominer  à  leur  place  dans  les 
Gaules.  De   telles   entreprises  ne   pouvoient   qu'irriter  l'es- 

Erit  de  César  :  '  mais  à  la  considération  et  h  la  prière  de  ce  p-  ^^ 
livitiac ,  il  pardonna  généreusement  et  à  Domnorix  et  aux 
autres  Eduens  qui  avoient  trempé  dans  sa  révolte. 

'César,  pressé  par  le  grand  nombre  d'autres  révoltes  qui  '■  2.  p.  es.  oc. 
se  faisoient  dans  la  Belgique,  confia  à  Divitiac  les  forces 
de  son  pais,  pour  entrer  dans  les  Etats  de  ceux  de  Beau- 
vais,  tandis  que  lui  César  entreroit  dans  un  autre  pais. 
'Divitiac  en  cette  ocasion  fit  le  métier  de  Capitaine  contre  p.  '*•  ^^^ 
ceux  de  Beauvais,  et  bien-tôt  après  le  personnage  d'entre- 
metteur pour  leur  obtenir  grâce  de  César. 

On  ne  sait  point  ce  que  devint  depuis  ce  grand  homme, 
dont  César  ne  parle  jamais  qu'avec  éloge.  Il   ne  le  faut 
pas  confondre   au  reste  '  avec  un  autre  Divitiac  qui  avoit  p.  03 
régné  peu  de  temps  auparavant  dans  le  Soissonois  et  dans  la 
grande  Bretagne. 


C.   VALERIUS   PROCILLUS, 

Favori  et  Ambassadeur  de  Cesar. 

procillus. 

CAïus  °   Valerius  Procillus   étoit  le  premier   et  le  .  cœs.  hci.  Gai.  i. 
plus  honête  homme  de  la  Gaule   Narbonoise.  "  Il  eut  ••  p-  i^'  '^■ 
pour  père  Caïus  Valerius  Caburus ,  qui  avoit  été  fait  ci-  *  p-  '^^• 
toïen  Romain  par  Caïus  Valerius  Flaccus.  A  sa  noblesse 
et  à  sa  probité  Procillus  joignoit  beaucoup  d'éloquence  et 
de  courage.  '  Toutes  ces  qualités  le  rendirent   aimable  à  p.  «9-  eo. 

Tome  I.  Prem.  Part.  N 

1  1  * 


98  ETAT    DES  LETKES 

PROc ILEUS.    César,  qui  l'aiant  connu  pour  avoir  logé  chez   lui,   lui 

donna  depuis  toute  sa  confiance. 

Cas.  bol.  Cal.  1. 1.       Commc  Procillus  possedoit  parfaitement  la  langue  gau- 

p-  Î53.  loise,  et  qu'il  éloit  d'une  fidélité  éprouvée.  César  le  choi- 

sit avec  Marcus  Muttius  pour  ses  Ambassadeurs  auprès 
d'Arioviste,  Roi  de  ces  Germains  qui  après  avoir  passé  le 
Rhein  ,  s'étoient  établis  dans  la  Sequanoise.  Mais  ce  Roi , 
violant  le  droit  des  gens,  fit  charger  de  chaînes  Procillus 

p.  60.  et  son  collègue  ,  et  les  garda  ainsi  dans  son  camp.  '  On 

jetta  môme  jusqu'à  trois  différentes  fois  le  sort  en  pré- 
sence de  ce  nome  Gaulois ,  savoir  si  on  le  feroit  brûler 
sans  délai ,  ou  si  on  le  reserveroit  à  un  autre  tems. 
Heureusement  pour  lui  le  sort  voulut  que   son  suplice  fût 

p.  59.  différé.    '   Au   bout  de    quelque    tems    César    aïant    défait 

Arioviste  ,  trouva  son  Ambassadeur  en  ce  triste  état ,  et 
l'en  délivra  '  avec  autant  de  joie  ,  comme  il  le  témoigne 
lui-même,  qu'il  en  eut  de  triompher  de  son  ennemi. 

L'antiquité  ne  nous  fournit  rien  davantage  pour  pousser 
plus  loin  l'histoire  de  Procillus.  Seulement  Pline  l'ancien 
dans  le  dénombrement  qu'il  fait  des  Auteurs,  dont  il  s'est 
servi  pour  composer  son  histoire  naturelle ,  marque  un 
Procillus,  comme  aïant  profité  de  ses  écjits  pour  son  hui- 
tième et  treizième  Livre.  Mais  nous  n'osons  pas  assurer 
que  ce  soit  le  même  dont  nous  venons  de  donner  l'éloge  ; 
quoique  la  présomption  soit  en  sa  faveur. 

Hani.   inj.  aiic.       '  Pour  cc  qui  cst  dc  cc  Procillus  ,  cité  dans  Varron  au 

piin.  p.  127.  quatrième  Livre  de  la  langue  latine,  et  qualifié  le  plus  ex- 
cellent Grammairien  de  son  siècle  par  Trebellius  Pollio 
dans  Emilien,  il  ne  paroît  pas  y  avoir  de  doute,  qu'il  ne 
soit  différent  de  Procillus  le  Gaulois  ,  comme  aïant  fleuri 
assez  long-tems  avant  lui. 


T  E  L  0  N  et 
GYAUE'E. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    99 

TELON 

ET 

G  Y  A  R  E'  E, 

AsTROiNOMES    ET    MATHEMATICIENS. 

LA  '  nature  avoit  uni  ces  deux  frères  par  tant  de  divers  Lucan.  bel.  dv.  i. 
endroits,  qu'il  n'y  a  pas  moïen  de  les  séparer.  Ils  na-  ^'  ''  *'"^"®''*" 
quirent  jumeaux  en  Provence,  ou  à  Marseille  même,  vers 
le  même-tems  que  Juh;  Cé.sar  à  Rome.  Il  y  avoit  entre 
eux  deux  une  si  parfaite  ressemblance,  pour  le  corps,  l'es- 
prit et  les  manières,  que  leurs  propres  parens  prenoient 
souvent  l'un  pour  l'autre, 

'Leur  inclination,  qui  se  trouvoit  aussi  la  même,  les  v. 592.  eoo. 
porta  l'un  et  l'autre  a  s'apliquer  aux  mêmes  sciences.  Ils 
firent  leur  étude  particulière  des  Mathématiques  et  de  l'A- 
stronomie, et  excellèrent  sur-tout  dans  l'art  de  la  Marine. 
C'ejt  ce  qui  fait  dire  à  Lucain,  qui  nous  a  conservé  leur 
mémoire,  au'ils  firent  la  gloire  de  leur  patrie,  comme  ils 
avoient  fait  la  fécondité  de  leur  mère. 

'  Stant  fratres  getnini  fccundsc  gloria  matris.  v.  go3. 

'  Jusque-là,    au    sentiment   de   ce  .  Poëte,    l'on    n'avoit  y.  sw-soc. 
point  encore  vu  ni  un  plus  savant  Astronome,  ni  un  plus 
habile  homme  de  mer  que  Telon. 

Dirigit  hue  puppira  miscri  quoquc  dextra  Tclonis, 
Qua  nullam  mclius  pelago  turbante  carinse 
Audivere  manum,  nec  lux  est  notior  ulli 
Crastina,  seu  Phœbum  videat,  seu  cornua  Lunae, 
Semper  venturis  componere  carbasa  venlis. 

'  Au  commencement  de  la  guerre  entre  Pompée  et  Ce-  cœs.  bel.  cw.  1. 1. 
sar,    le    premier   aïant  su  gagner  les  Marseillois,  ceux-ci  ^' 
refusèrent  d'ouvrir  leurs  portes  à  son  compétiteur.   César 

N  ij 


100  ETAT   DES   LETRES 

T  E  L  0  N  et  piqué  de  cet  affront,  résolut  de  s'en  venger,  et  de  faire  le 
GYARE  E.     gj^gg  jjg  Marseille.  *  Avant  qu'il  en  vînt  à  l'exécution,  les 

•  Cacs.  ibid. p.  493.  MurseiUois    excités    par  Domitius,    l'un  des  premiers  Offi- 

b  i!'2.  p.  826-539.  ciers  de  Pompée,  voulurent  tenter  un  combat  naval.  ""  Il 

Lncan.  ibid.  1  Cîcs.  y  cu  cut  même  deux  qui  se  suivirent  d'assez  près.  '  Telon 

ut  p.  527.  **"  '  6t  Gyarée  eurent  le  commandement  des  vaisseaux  de  la 
ville,  et  se  distinguèrent  à  cette  action  avec  toute  la  va- 
leur des  plus  braves  Capitaines,  et  la  conduite  d'hommes 
de  mer  les  plus  habiles  et  les  plus  expérimentés. 

Lucan  ibid.  '  ^^j*^   Tclon    avoit  Considérablement  endommagé   quel- 

ques vaisseaux  romains,  lorsqu'il  reçut  un  trait  dans  l'esto- 
mac. Gyarée  qui  s'en  aperçut,  voulant  sauter  dans  le  vais- 
seau de  son  frère  pour  le  secourir,  fut  aussi  percé  d'une  flè- 
che, qui  lui  passant  par  les  flancs,  l'attacha  à  son  vaisseau, 
et  lui  ôta  la  vie. 

V.  609.  631.  '  Telon  non-seulement  survécut  à  sa  blessure,  mais  don- 

na encore  depuis  dans  le  même  combat  des  maraues  pro- 
digieuses d'un  courage  et  d'une  valeur  plus  qu'héroïque. 
Car  aïant  ensuite  perdu  la  main  droite,  il  ne  laissa  pas  de 
combatre  encore  et  de  manœuvrer.  Il  perdit  peu  après 
la  main  gauche;  et  bien  loin  de  se  mettre  à  fond  décale, 
comme  étant  hors  de  combat,  il  voulut  demeurer  exposé 
aux  traits  des  ennemis.  En  cet  état,  ne  pouvant  plus  leur 
nuire  autrement,  il  se  jetla  tout  percé  de  coups  dans  un  de 
leurs  vaisseaux,  comme  .si  par  le  poids  de  son  corps  il  eût 
voulu  le  couler  à  fond.  Enfin  il  fallut  céder  au  sort.  Le 
vaisseau  faisant  eau  de  toutes  parts",  périt,  et  fît  périr  tous 
ceux  qui  étoient  dessus,  Telon  comme  les  autres.  Le  Poè- 
te, tout  païen  qu'il  cloit,  faisant  réflexion  sur  ce  genre  de 

V.  601.  mort,  '  on  prend  ocasion  de  se  rire  de  l'opinion  de  ceux  qui 

croient  que  les  frères  jumeaux  ont  le  même  sort,  comme 
nés  sous  la  même  constellation. 

1. 3.  V.  709-713.  '  Dans  ce  même  combat  naval,  où  Telon  et  Gyarée  fu- 
rent  tués,    un    nommé   Lygdame  soldat  Marseillois  perdit 

Gnes.  Ma.s3. 1. 1.  aussi  la  vic.  '  Le  P.  Guesnai,  qui  le  nomme  Lydan,  nous  le 
doime  pour  un  Philosophe  qui  fit  honneur  à  sa  patrie  par 
sa  science  dans  les  Mathématiques,  comme  excellent  dans 
les  fortifications  et  la  composition  des  machines  de  guerre. 

Lucan.  ibid.  '  Mais  Lucain,  qui  est  peut-être  le  seul  des  anciens  qui  nous 

fasse  connoître  ce  Lygdame,  ne  nous  le  représente  que 
comme  un  homme  très-adroit  à  jetter  la  fronde.  Ce  fut 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.   101 

avec  cette  sorte  d'armes  qu'avant  que  de  recevoir  le  coup  telon  e-, 
qui  lui  ôla  la  vie,  il  fit  sortir  les  yeux  de  la  tête  à  un  sol-  ^yare  e. 
dat  Romain,  nommé  Tyrrene. 


CORNELIUS    GALLUS, 

Poète. 


S-  I- 
HISTOIRE   DE   SA  VIE. 

CORNELIUS  *  Gai.lus,    l'un     des    plus    célèbres     Poëtes     "  ^  ^  ^  "  ^' 
de   l'empire   d'Auguste,  naquit  à   Frejus   (i)   dans   la  ■  Hier.  chr.  p. «. 
Gaule   Narbonoise,    en   la   178  Olympiade,  vers  l'an  688 
de   la   fondation   de    Rome.  '  Il   étoit  de  basse  condition  ;  guet.  cxs.  i.  2  n 
mais  son  mérite  et  la  faveur  du  Prince  relevèrent  dans  la  ee. 
suite  à  de  grands  honneurs. 

'  Gallus   quitta   sa   patrie  pour  s'aller  établir  à  Rome,  m.  gram.  c.  ic.  p. 
comme  en  usoient  alors  tous  ceux  qui  vouloient  ou  faire  ^^' 
fortune,   ou   briller   entre  les  beaux  esprits.  Il  commença  ••»<ii  anv 

par  y  signaler  son  amour  pour  les  gens  de  letres,  en  rece- 
vant chez  lui  avec  beaucoup  de  bonté  Quintus  Cœcilius 
Epirola,  Précepteur  de  la  femme  de  Marcus  Agrippa,  qui 
avoit  été  disgracié.  L'on  fît  depuis  à  Gallus  un  crime  de 
cet  acte  de  générosité  envers  Epirota,  qui  devint  ensuite 
un  célèbre  Professeur  de  Grammaire. 

'  Le  principal  talent  de  Gallus  fut  pour  la  Poësie.  Il  ex-  virg.  eà.  e.  y.  64- 
celloit  particulièrement  dans  l'élégie  et  le  poëme  épique,  ^io^^f^cr^^poi' 
Rien~tôt  il  s'acquit  une  estime  générale,  et  passa  pour  un  '»'•  '•  3.  c.  «. 
des  plus  grands  favoris  des  Muses.  En  cette  qualité  '  il  lia  serv.  iwd  1  cnn. 
une  étroite  amitié  avec  les  plus  illustres  Poëtes  de  son  vôss.L^t■.g■r.^'.  2. 
tems.    Parthenius   l'un   d'entre  eux,  qui  fleurissoit  dès  le  '•'• 

(1)  Comme  le  terme  latin  dont  se  sert  alors    une    colonie  Romaine  pins  célèbre 

S.  Jérôme  pour  exprimer  la  patrie  de  Gai-  que   le   Frioul.   D'ailleurs ,    outre    que  le 

lus ,  sigoiûe  et  la  ville  de  Frejus  en  Pro-  nom  de  Gallus  supose  un  homme  origi- 

yence,    et   le  Frioul   en  Italie,    quelques  nairement    Gaulois  ,    S.    Jerùme   marque 

ItaUens  suivis  par  quelques  [François  mo-  ici  le  lieu  fixe  de  la  naissance  de  ce  Poëte, 

dernes ,    l'ont   entendu   en    cette   dernière  plutôt  que  le  nom  gênerai  et  indéterminé 

signification.    Mais   il    paroit   indubitable  de  son  pais, 
qu'il  faut  l'entendre    de  Frejus,  qui  étoit 


102  ETAT   DES   LETRES 

G  AL  LUS.     commencement  de  l'empire  d'Auguste,   lui  dédia  l'Ouvra- 

ge  erotique   que  nous  avons  encore  de  lui,  et  qui  est  fort 

estimé  de  ceux  qui  aiment  ces  sortes  de  poèmes.  C'est  enco- 
re à  Gallus  que  le  Poëte  Bibaculus  adresse  les  vers  qu'il 
fit  sur  Valere  Caton,  et  que  nous  avons  raporlés  ailleurs. 

i!"n.  p!"iU.^""''  '  Mais  le  plus  intime,  comme  le  plus  illustre  ami  de  Gal- 
lus entre  les  savans  de  profession,  fut  le  Poêle  Virgile.  Ce- 
lui-ci emploïa  sa  plume  en  diverses  rencontres,  pour  faire 
l'éloge  de  Gallus.  Il  y  avoit  consacré  le  quatrième  Livre 
de  ses  Georgiques,  depuis  le  milieu  jusqu'à  la  fin.  Mais  il 
fut  obligé  dans  la  suite  par  ordre  d'Auguste,  de  substituer 

_ier.  cir.  p.  ^  ^^^  endroit  la  fable  d'Aristée.  '  Il  est  néanmoins  des 
Ecrivains,  qui  croient  que  c'est  toujours  de  Gallus  sous  le 
nom    du    pasteur   Aristée,  que  Virgile  y  parle,  en  faisant 

Crin.  ibiJ.  allusiou  à  la  fable  prise  du  18"  Livre  de  l'Iliade.  '  De  mê- 

me quelques  autres  estiment,  que  c'est  aussi  de  notre  Poë- 
te sous  le  nom  de  Melibée  que  prétend  encore  parler  Vir- 
gile dans  sa  première  églogue. 

Scrv  ibid.  '  Après  que  Cytheris  affranchie  de  Volumnius,  et  l'une 

des   maîtresses    de    Gallus,    eut    quilé    notre    Poëte,   pour 

I  s'attacher   à   Antoine,    Virgile    entreprit  à  ce  sujet  sa  10° 

églogue,  afin  d'adoucir  la  peine    que    cette    infidélité  cau- 

virc  ibid  ^^^^  ^  ^^^  '^^^-  '  ^^  ^^'^^  cucorc  dc  lui  daus  sa  6°  églogue  une 

mention  beaucoup  plus  honorable,  en  nous  le  réprésentant 

comme  un  Poëte  célèbre,  chéri  des  Muses,  et  comparable 

à  Hésiode. 

suct  ca-s  I  2  n       '  ^ugustc  dc  son  côté  prit  Gallus  en  une  telle  affection, 

60.  '      •  —  •  qy'ii  l't',leva  aux  premières  charges  de  l'Empire.  "  D'abord 

•  Dio.  1. 5i.p.  513.  [\  lui  confia  le  commandement  de  quelques  troupes  contre 

Marc  Antoine,   sur  qui   Gallus   prit  la  ville  de  Pareloine, 

s'o  s»!  snet   ^'*  ^^^^  ^^  '^^^^  '^  ^^^^  ^^'^^  ^^^^^  ^^  '^^''*  '  Aussi-tôt  après 
ibid'i  ffier'.  chr.  p.'  la  défaite  d'Antoinc  et  de  Cleopatre,  Auguste  réduisit  l'E- 

41.  M73!' '■ '"■  gypte  en  une  Province  de  l'Empire,  et  en  donna  le  gou- 
vernement à  Gallus,  la  seconde  année  de  la  187'  Olym-' 
piade,  lorsque  commençoit  la  nouvelle  Ere  Egyptienne. 
Gallus  eut  ainsi  l'honneur  d'être  le  premier  Préfet  qu'eu- 
rent les  Romains  dans  cette  Province;  et  son  gouverne- 
ment fut  de  quatre  ans. 

'Mais   Gallus   oubliant   bien-tôt  une  faveur  si  signalée, 

M.""?.  787. ' '^'°* ''  ^®  '^^^^  ^  ^^^  mauvais  génie,  et  s'alira  l'indignation  de 
l'Empereur  par  une  conduite  indigne  d'un  favori  de  Prin- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.   103 

ce.  '^  Non  seulement  il   ne  se  servit  de  l'autorité  que  lui      gallus. 

donnoil  sa  charge,  que  pour  amasser  des   richesses,  épui-  ~~      ' 

sant  en  particulier  la  ville  de  Thebes  ;  ^  il  se  comporta  en-  is9."""'  '     "  ^' 

core  comme  s'il  n'avoit  point  eu  de  Maître  au-dessus  de  lui.  "  •*'»•  »'''J- 

Il  se  fit  dresser  des  statues   par   toute   l'Egypte,  fit  graver 

ses   grandes  actions    sur    les   pyramides,   et  répandit  dans 

le  public  plusieurs  choses  injurieuses  à  son  souverain.  '  Il  Sm-.  iwa. 

conspira  même  contre  l'Empereur,  s'il  en  faut  croire  Ser-. 

vins. 

'  Auguste,  qui  ne  pouvoit  se  livrer  à  tous  les  mouve-  ^uct.  iwa.  i  Dio, 
mens  de  son  indignation  contre  les  personnes  qu'il  avoit 
une  fois  aimées,  se  contenta  d'abord  de  bannir  Gallus  de 
tous  ses  Etals.  Ensuite  il  l'abandonna  à  la  discrétion  de  ses 
acusateurs,  et  au  jugement  du  Sénat,  qui  le  condamna  à 
mort.    '  A  cette  nouvelle  Gallus  voulant  sans  doute  éviter  pip,  iud.  |  iiier; 
une  mort  et  plus  cruelle  et  plus  honteuse,  se  tua  de  sa  pro-  ''^'^' 
pre    main.   S.  Jérôme  place  cet  événement  en  la  seconde 
année  de  la  188*  Olympiade,  et  la  40"  de  l'âge  de  Gallus, 
26  ans  avant  le  commencement  de  l'Ere  Chrétienne.  '  Ovi-  ovùi.  am.  i.  s.  ci. 
de  et  Porperce  font  mention  de  cette  mort,  qui  avoit  pré-  l'  ^j  "^jj'  ^y%l] 
cédé  celle  de  Tibulle,   de  Catulle,  et  de  Calvus,   trois  ce-  02.  '     ' 
Icbrcs  Poètes  du  même-tems. 

Sanguinis  atque  anima)  prodige  Galle  tuœ,  ,  ^^jj 

dit  Ovide. 

Quelques  modernes  ont  confondu  par  erreur  notre  Poëte 
avec  C.  Mlixis  Gallus,  qui  a  écrit  sur  la  signification  des  ter- 
mes qui  regardent  le  Droit  Civil.  '  Mais  Strabon  intime  ami  strab.  1.  n.  p. 
de   cet   JElius    Gallus,    le   distingue   clairement   de    Cor-  *^- 
nelius   Gallus.  Celui-ci,   selon    Strabon,    fut  le   premier   à 
qui    Auguste    confia    le  gouvernement  d'Egypte;  et  Mhus 
Gallus  ne  l'eut  qu'après  Caïus  Petronius,  qui  avoit  succé- 
dé à   notre   Poëte  dans  cette  dignité.  On  1  a  aussi  confon- 
du quelquefois,  sans  plus  de  fondement,  avec  les  divers  au- 
tres Gallus,  dont  parle  Properce:  ce  qui  lui  a  fait  donner 
difTerens  prénoms.  Il  est  encore  différent  d'un  autre  '  Cor-  y^,  j,^,  ,   g  ^ 
nelius  Gallus,  qui  au  raport  de  Valere  Maxime,  et  de  Pline  12.  n.  8ii>un.  iiist! 
l'ancien  après  lui,  avoit  été  Préteur,  et  qui  perdit  la  vie 
dans  une  action  infâme. 


G  A  L  L  U  s. 


104  ETAT   DES   LETRES 

S-  n. 

SES   ECRITS. 

LEs  anciens  Ecrivains  qui  parlent  de    Gallus,    lui  atri- 
buent  divers  ouvrages.  Mais  il  ne  nous  en  reste  peut- 
être  rien  aujourd'hui,  ni  en  tout  ni  en  partie;  quoique  son 
nom  paroisse  à  la  tête  de  quelques  pièces  de  poésies. 
Senr  in  virg.  p.       1".  '  Servius  assurc  que   Gallus  avoit  écrit  quatre  Livres 
*"■  de   ses   amours   pour  Cytheris,  qu'il  y  nommoit  Lycoris, 

Ovid.  trisu  1.  2.  T.  afin  de  déguiser  son  nom  au  public.  '  Ovide  paroît  mar- 
quer assez  clairement  cet  Ouvrage,  lorsqu'il  dit  : 

Ncc  fuit  opprobrio  célébrasse  Lycorida  Gallo. 

am.  1. 1.  cl.  15.  V.  '  Ce  fut  encore  à  l'ocasion  de  ces  poésies  de  Gallus,  que  le 
même  Poëte  faisant  l'éloge  des  plus  illustres  Poètes,  dont 
les  écrits  dévoient  être  immortels,  dit  de  Gallus  en  par- 
ticulier : 

Gallus  et  Hesperiis,  et  Gallus  notus  Ëoïs  : 
Et  sua  cum  Gallo  nota  Lycoris  crit. 

Mart.  1.  8.  «pi.  73.  '  Le  même  Ouvrage  a  fait  naître  à  Martial  la  pensée,  que 
c'étoit  Lycoris  qui  avoit  inspiré  à  Gallus  le  génie  qu'il 
avoit  pour  la  poésie. 
Virg-  e«J-  .^0  Ino'l  2".  '  Gallus  mit  de  grec  en  vers  latins  une  partie,  ou  mê- 
87^'  '"  '^'  ^'  me  tout  l'ouvrage  d'Euphorion  Poète  de  Chalcide,  Biblio- 
thécaire d'Antiochus  le  grand.  Roi  de  Syrie.  On  croit 
que  c'est  à  cette  traduction  de  Gallus,  que  Virgile  fait 
allusion  dans  sa  10*  églogue,  où  il  fait  amsi  parler  notre 
Poète  : 

Ibo  et  Chalcidico  quœ  sunt  mihi  condita  versu 
Carmina  pastoris  Siculi  modulabor  avena. 

Crin.  poï.  lat.  1.      3".  '  Gallus  laissa  un   recueil   d'élégies,    où    brilloient, 

3.  e.  «.  dit-on,  les  beautés  de    son    esprit  et  de  son  style.  Nous 

avons  déjà  observé  qu'il  avoit  un  talent  particulier  pour 

cette  sorte  de  poésie;  et  Diomede  soutient  qu'il  mérite  en 

Qoint.  or.  !.  10.  c.  cela  d'aller  de  pair  avec  TibuUe  et  Properce.  '  Quintilien 

I.  p.  639.  "^  •  *^  ,  . 

neanmoms 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    105 

néanmoins  n'est  pas  tout  à  fait   de  ce  sentiment,  avouant      gallus. 
que  Gallus  n'a   pas   la  douceur   et  l'élegance  de  ces  deux 
autres  Poêles:  l] troque  durior  Gallus.  Quoi  qu'il  en  soit,  ce  . 
recueil  d'élégies  si  vanté  n'est  peut-être  autre  chose  que  les 
quatre  Livres  des  amours  de  Gallus  pour  Lycoris,  qui  ne 
se  trouvent  plus  nulle  part. 

'  On  voit  six  autres  élégies,  avec  des  vers  lyriques,  qui  Poif.  i.ii.  cor,>.  p. 
commencent  par  ces  mots,  Lydia  bella  puella  :  le  tout  sous  le  Jf^.'  Jn."  i!  î!**p; 
nom  de  notre  Poète,  et  souvent  imprimé  à  la  fin  des  Oeu-  "*•  -• 
vres  de  Tibulle,  Catulle,  Properce,   et   ailleurs.  '  Les  mo-  «aii.  jhr.  pos.  la-. 
dernes  sont  fort  partagés  de  sentiment  sur  ces  six  élégies,  p-  124-127. 
tant  pour  leur  mérite  propre,  que  pour  la  personne  de  leur 
Auteur. 

'  Quant  à  leur  mérite,  le  P.  Rapin  y  trouve  une  grande  '^a.  p.  121. 
pureté,  beaucoup  de  délicatesse,  et   les  juge   mieux  soute- 
nues et  plus  rondes  que  celles  et  de  Mecenas  et  de  Catul- 
le. '  Au  contraire  Scaliger  le  père,  outre   plusieurs  autres  i>-  «^e.  127. 
défauts,  y   remarque   la   dureté   que    Quintilien   avoit  déjà 
obsei-vée  dans  les  véritables  poésies  de  Gallus.  '  Il  ne  lais-  p.  120. 
se  pas  toutefois  d'avouer,  que  cette  dureté  est  moins  desa- 
gréable à  cause  de  certaines  beautés,  et  de   quelques  grâ- 
ces que  l'Auteur  y  a  su  répandre.  Pour  les  vers  lyriques, 
il  estime  qu'ils  ne  peuvent  venir  que  d'un  Auteur  fort  im- 
pertinent et  fort  inepte  des  tems  po.stcrieurs. 

'  Les  autres  critiques  vont    encore  plus   loin,   et  jugent  p-  ^-' 
que  le  Poëte  qui  a  prêté  sa  plume  à  ces  pièces,    étoit  un 
barbare,  qui  ne  savoit  pas  la  langue  latine;    qu'elles   sont 
Irès-infames    pour    les   choses    qu'elles    contiennent;     que 
tout  y  est  puérile,  extravagant  et  peu  correct. 

On  ne  sauroit  néanmoins  disconvenir,  qu'il  n'y  ait 
quelques  beaux  endroits  dans  ces  élégies.  Dans  quel  Au- 
teur païen  trouvera-t-on  rien  et  de  plus  juste  et  de  plus 
sensé  que  ce  que  ce  Poëte  dit  sur  la  mort,  et  sur  l'ava- 
rice? De  même,  la  peinture  qu'il  fait  de  la  vieillesse  en 
un  endroit,  est  aussi  instructive  qu'humiliante.  Le  Lecteur 
en  jugera  par  lui-même. 


Tomel.  Prcm.  Part.  0 


106  ETAT  DES  LETHES 

G  A  L  L  U  s. 


Pov.  lat.  Corp.  ibib. 


SUR   LA   MOUT. 

Omnibus  est  cadem  lethi  via,  non  tamcn  unus 
Est  vitœ  cuactis  cxiliiquc  inodus. 
llac  pucri  atquc  soncs  pariler  juveacsquc  feriuntur  : 
Hac  par  divitibus  paupcr  egenus  crit. 

SUR    L'AVARICE. 

Ouid  mihi  divitiaj  quarum  sidcnicris  usum, 

Uuaravis  largus  opum,  scmpor  cgcnusero  ? 

Imo  ctiam  pœna  est,  partis  imcumk^re  rcbus, 
Quas  cum  possidcas,  est  violarc  nefas. 

Non  aliter  sitiens  vicinas  Tantalus  undas 
Captât,  et  appositis  abstinct  ora  cibis. 

SUR    LA    VIEILLESSE. 

Strat  dubius  trcmulusquc  soncx,  scmperque  nialorum 

Gredulus,  et  stultus  quio  facit  ipsc  timet. 
Laudat  pnuteritos,  pncsentcs  despicit  annos. 
lloc  tantum  rectum  quod  facit  ipse  putat. 

Ortus  cuucla  suos  repetunt,  mortemque  requirunt. 
Et  redit  ad  nibilum,  quod  fuit  ante  nihil. 

Hinc  est  quod  baculo  iiicumbens  ruilura  8onectus, 
Assiduo  pigram  verberc  puisât  humum . 

Et  numcrosa  movens  ccrto  vcstigia  passu, 
Talia  rugato  crediturorcloqui  : 

Suscipc  me  gcnitrix,  nati  miserere  laborum  ; 
Membravelis  grcmio  fessa  fovcre  tuo. 

Mais  il   faut   aussi   avouer   que   touh^s   ces  beautés  suut 

eclypsées   par   divers  autres   endroits,   tout  à  fait  indignes 

d'un  lecteur  qui  a  les  yeux  et  le  cœur  chastes. 

t'ab.  lib.  iat.  p.  .ii|       A  l'égard  de  l'Auteur  de  ces  poésies,  '  presque  tous  les 

i»^i.  ibui.  p.  12 .  modernes  depuis  le  Gyraldi,    s'acordent   à  dire  qu'elles  ne 

sont  point  de  Cornélius  Gallus.  U  n'y  a  guéres  que  le  P. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    107 

Rapin,  qui  les  supose  de  ce  Poëte.    On   les  donne  le  plus      gallus, 
ordinairement  à  un  certain  Maximien  peu  connu  d'ailleurs. 
'  Cest  sous  son  nom  que  Pierre  Pithou  les  fit  imprimer  en  p'-  «|,p<»«-  ^«1.  '. 
1690,  dans  son  recueil  des  petites  pièces  de  poësie  des  an- 
ciens. L'Auteur  en  divers   endroits   s'y  représente   comme 
un  vieillard,  et  se  i)laint  des  incommodités  de  la  vieillesse. 
En  faudroit-il  davantage  pour  refuser  ces  élégies  à  Gallus, 
qui  finit  ses  jours  à  la  fleur  de  son  âge  ?  D'ailleurs  l'endroit 
qui  traite   de   la   mort,    n'étant   visiblement   qu'une    imita- 
tion des  pensées  suivantes  d'Horace  sur  le  môme  sujet,  su- 
pose  un  Auteur  postérieur   au    siècle   d'Auguste.  Voici  les 
vers  d'Horace  qui  ont  fourni  la  matière   à  ceux  qu'on  at- 
tribue à  Gallus. 

scd  una  manel  nox ,  Hor.  I.  i.  od.  23." 


Et  calcanda  semed  vialcllii. 

'sc'd  improvisa  letlii  '•  2.  od.  lo. 

Vis  rapuit,  rapielnuc  gcntcs. 

'  a>qua  tellus  od.  IR. 

Pauperi  rccluditur, 
Regumque  pueris. 

. '  œquà  loge  nécessitas  ••  3.  od.  i. 

Sortitur  insignes  et  imos. 

'  Il  y  a  une  autre  élégie  que  M.  Pithou  dans  le  même  chor.  poc.  1. 1  p. 
recueil  a  laissée  sous  le  nom  de  notre   Poëte,    et   qu'Aide  cfpo'i;.  vet.'i.  a.'î'); 
Manuce  avoit  publiée  long-tems  auparavant  sous   le  même  *'**'*-■ 
nom.  Mais  on  n'ose  pas  garantir   qu'elle   soit  de   l'ancien 
Gallus,  quoiqu'elle  paroisse  faite  sous   l'empire   d'Auguste, 
et  qu'elle  traite  de  Lycoris  en  particulier.  Elle  est  plus  en- 
tière dans  le  recueil  de   Pithou,   que   dans   le   chœur   des 
Poètes.  Il  y  manque  néanmoins   plusieurs  vers  dans  l'une 
et  l'autre  édition. 

'  On  trouve  encore  sous  le  nom  de  Cornélius  Gallus  une  |^P'-^e'  po'--  vei.  i. 
épigramme  adressée  à  Auguste,  au  sujet  de  l'exil  du  Poëte     ''■   ' 
Virgile,  et  à  la  louange  de  son  Enéide.  On  l'a  même  mi- 
se à  la  tête  de  plusieurs  éditions  de  ce  Poëte.  Mais  on  re- 
marque qu'elle  n'est  pas  de  notre  Gallus,   n'étant   qu'une 
imitation  de  Sulpice  de  Carthagc. 

A".    '  Quinlilien     fait    mention    d'une    harangue    contre  9"'"^°'-  ''  '  '^' 
Pollio,    que    les    uns  attribuoient   à   Labienus,    d'autres  à  "''  '' 

0  i  j 


108  ETAT  DES  LETRES 

GALLUS.      Cornélius   Gallus.   C'est   peut-être  sur  ce  fondement,  "  que 
,  P^i,  i,,ij  quelques  Ecrivains  donnent  à  Gallus   la  qualité   d'Orateur 

"Quint. ibiJ.  avcc  cellc  de  Poëte.  ■•  L'Auteur  dans  cette  pièce  emploïoit 
le  terme  gaulois  Casnar,  au  lieu  d'Assectator,  pour  signi- 
fier un  homme  qui  recherche  une  fdlc  pour  lui  ravir  son 
honneur. 


PUBLIUS    TERENTIUS 
VARRO, 

Poète    et   IIistouien. 


S-  I- 

l^IISTOIRE    DE    SA    VIE. 

VARRON.      -pUBLins     "     Terentîi's     Varro    commença     à     paroître 

— : — -7— -  Je  sur  le  Parnasse  dès  le  tems  de  Jule  César  et  des  Trium- 

î.  c"To.  ""  '   '  '  '  virs,  et  continua  à  fleui'ir   plusieurs   années  .sous  l'empire 
Hier.  ciir.  p.  40.      d'Auguslc.  '  Il  étoit  né  cl  Atace  petit  bourg  sur  la  rivière 
d'Aude,  dans  la  Gaule   Narbonoise,    la   seconde   année   de 
la   174''   Olympiade,   l'an   671    d&  la  Fondation  de  Rome. 
C'est  du  lieu  de  sa  nai.ssance,  que  les  anciens  lui  ont  donné 
le  surnom  d'Atacinus,  pour   le  distinguer   de  Marcus   Te- 
rentius  Varro,  le  Père  de  l'érudition    Romaine,   avec    le- 
quel divers  modernes  l'ont  confondu. 
Cyr.iiisi.  poi'.diai.       '    Il  s'e.st  toutefois  trouvé  des  Ecrivains,  qui  prétendoient 
i.  i>.  âo».  qyg  çg  surnom  de  notre  Poëte  étoit  Atratinus,  et  non  pas 

Atacinus,   comme   étant   descendu   d'une   ancienne  famille, 
de  Rome   nommée   Atralina.    Mais   cette  nouvelle  opinion, 
remarque  un  Italien  même,  ne  peut  prescrire  contre  l'auto- 
rité   de    S.    Jérôme    et    de    Porphirion,   qui   le  font  natif 
d' Atace  dans  la  province  de  Narbone. 
i"c"'33Ti'3'*''53'  Varron  étoit  un  très-bel  esprit,   et   avoit   des   disposi- 

tions merveilleuses  pour  la  poésie.  Il  s'y  apliqua  avec  suc- 
cès,  et   mérita  d'être   mis   au   nombre  de  ceux  qui  excel- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    109 

loient  dans  l'élégie  et  le  poëme  épique.  "  Mais  il  tenta  en       varuon. 
vain,  selon  Horace,  de  réussir  dans  la  satyre.  ^ 

Il  quitta  sa  patrie  pour  aller  à  Rome,  qui  étoit  alors  le  v.  le.' 
centre  des  beaux  esprits,  et  le  théâtre  des  savans.  Il  y  fit 
connaissance,  et  lia  même  amitié  avec  les  plus  célèbres 
Poëtes  de  son  tems,  Horace,  Virgile,  Ovide,  Properce, 
qui  ne  parlent  de  lui  qu'avec  honneur.  Virgile,  le  grand 
Virgile,  faisoit  en  particulier  tant  d'estime  de  ce  qui  sor- 
toit  de  la  plume  de  notre  Poëte,  qu'il  ne  craignoit  point 
de  se  deshonorer  '  en  imitant  ses  pensées  et  ses  expressions,  Frag.  poë.p.  304. 
et  en  empruntant  même  quelques-uns  de  ses  vers. 

Varron  ne  se  borna  pas  seulement  à  la  poésie,  il  s'apli- 
qua  encore  à  l'étude  de  l'histoire  ;  et  par  1  aplication  qu'il 
y  donna  en  écrivant  en  ce  genre  de  literature,  il  joignit 
au  titre  de  Poëte  celui  d'Historien.  '  Afin  de  mieux  réus-  Hier,  iiii.i.  1  Cnn. 
sir  à  imiter  le  génie  et  l'érudition  des  Grecs,  il  étudia  leur  '''"'■  '■  ""  "'  '^'' 
langue,  étant  alors  âgé  de  35  ans.  Un  travail  aussi  ingrat 
auroit  pu  rebuter  tout  autre  homme  de  cet  âge,  qui  auroit 
eu  moins  d'ardeur  de  se  perfectionner  dans  toutes  les  belles 
connoissances.  On  peut  juger  du  progrès  que  fit  Varron 
dans  cette  langue,  par  l'estime  aue  les  anciens  témoignent 
des  traductions  qu'il  fit  de  grec  en  latin. 

Il  vêquit  encore  plusieurs  années  depuis  ce  travail.  Mais 
il  semble  qu'il  n'étoit  plus  au  monde,  '  lorsque  Properce  Prop.  1. 2.  ci.  sv. 
disoit  de  lui 


V.  a".,  «i. 


Hœc  quoque  perfccto  ludebat  Jasonc  Varro  ; 
Varro  Leucadiii:  maxima  (lamina  suiB. 

Cette  Leucadie  étoit  la  Maîtresse  chérie  de  Varron,  en 
quoi  il  a  fait  voir  qu'il  étoit  sujet  aux  mêmes  foiblesses  que 
les  autres  Poëtes  païens.  '  Velleïus  Paterculus  le  compte  Paierc.  i.  2.  n.  33. 
parmi  les  plus  grands  génies  qui  illustrèrent  le  règne  d'Au- 
guste: tels  que  furent  Gorvinus,  Asinius  Pollio,  Saluste, 
Lucrèce,  Virgile,  Rabirius,  Catulle,  Tibulle,  Ovide. 


1  2 


VAUUON. 


110         ETAT  DES  LETRES 

S-  II- 
■  SES  ECRITS. 

A  quelques  vers  près  des  poésies  de  Varron,  qui  se 
trouvent  dans  les  anciens  Auteurs,  le  malheur  des 
tems  nous  a  envié  tout  le  reste.  Nous  n'avons  même  qu'u- 
ne connoissance  fort  imparfaite  des  Ouvrages  qu'on  lui 
atribuë,  et  qui  ne  sont  peut-être  que  la  moindre  partie  (Je 
ceux  qu'il  avoit  composés, 
voss.  iiist.  lat.  1. 1.  1°-  'Il  fil  6n  vers  l'histoire  de  la  guerre  des  Sequanois. 
clé.  C'est  aparemment  de  celle  *  dont  parle   César,  lorsque  les 

G.'^pf'm'  ^*''  ''  Sequanois  ligués  avec  les  Germains  et  les  Auvergnats,  ra- 
vagèrent les  Etats  des  Eduens  :  ce  qui  obligea  ceux-ci  à 
apeller  les  Romains  à  leur  secours.  '  Priscien  en  cite  le  se- 

Voss.  ibid.  '^    j  I,  • 

cond  l:ivre. 
a,i.i.  2°.  '  Varron  traduisit  de  grec  en  latin  le  poëme    qu'A- 

f)olloniu3  de  Rodes  avoit  composé  en  quatre  Livres,  sous 
e  titre  d'Argonautes,  où  il  décrit  la  conquête  de  la  Toi- 
son d'or  par  Jason.  Ovide,  Properce,  Stace,  Valerius 
Probus,  et  encore  quelques  autres,  font  mention  de  celle 
traduction  par  notre  Poëte.  Il  paroît  assez  clairement  par 
le  texte  de  Properce  que  nous  avons  raporté  plus  haut, 
Ovi.i.  ar.  am.  1. 3.  quc  cctto  traductiou  étoit  en  vers.  '  Ovide  la  marque  en 
V.  33...  33e.  ^j^y^  differens  endroits  de  ses  poésies. 

Dictaque  Varroni  fulvis  insignia  villis 

Vellera  German;r,  Phryxc,  qucrcnda  tuac, 

Ara.  1. 1.  cl.  iri.  V.  '  Varronem,  prlmamque  ratcm  quaî  ncsciet  actas, 

-'•  •'•-•  Aurea  yKsonio  tcrgapetita  duci? 

Quint,  or.  I.  10.  c.       '  Quintilicu  parle  aussi  de  cet  Ouvrage  de   Varron  avec 

I.  p.  G37.  u.!8.        quelque  estime.  Quoiqu'il  ne  le  trouvât  pas  assez  riche  en 

«'ixpi-essions  pour  servir  à  former  son  Orateur,  il  ne  laisse 

pas  d'avouer    qu'il    a  fait  honneur  à  son  Auteur,  et  qu'il 

n'est  pas  à  mépi-iser.  Attacinns  Varro,per  quœ  est  nomen  asse- 

quntiis,  iriterjtres  operis  alicni,  non  spcrnendus  qxiidcm,  etc. 

i»rop.  1. 2.  <i.  31.       3°.  '  On  tire  de  Properce,  que  Varron  avoit  composé  di- 

L.Ti^rM.'^''  vers  poëmes  ou  élégies  à  l'honneur  de  sa  chère  Leucadie. 

En    effet    ce  Poëte   témoigne   en   formes  assez  clairs,  que 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.        lil 

Varron  avoit  fait  en  faveur  de  Leucadie,  ce  que  lui  Pro-  varron. 
perce  avoit  fait  pour  sa  Cynthie,  Gallus  pour  sa  Lycoris, 
Catulle  pour  sa  Lesbie,  et  Calvus  pour  sa  Quintillie.  Ainsi 
il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  que  Varron  n'ait  écrit  quelque 
Ouvrage  erotique,  dont  nous  sommes  privés  sans  avoir 
fait  une  grande  perte. 

4";  '  Festus  au  raport  de  Vossius,  cite  de  notre  Poëte  un  Voss.  ibMiPoc.iai. 

,...,,    ,\r,  _,,         ,.  ,,  c.  2.  p.  237.  I. 

autre  écrit  mtitule  1  Liirope.  L  est-la  tout  ce  que  1  on  nous 
en  aprend,  et  que  nous  pouvons  peut-être  espérer  d'en  sa- 
voir. 

11  semble  '  que  c'est  sous  le  nom  de  notre  Varron,  que  Macr.  saïunu  i.  a. 
Macrobe  parlant  des  honneurs  que  les  païens  rendoienl  à 
Hercule,  cite  une  satyre  intitulée  irjpl  xtpauvoù  de  la  fou- 
dre. Plusieurs  raisons  le  font  juger  ainsi.  1".  Il  est  certain, 
selon  Horace,  que  notre  Poëte  composa  quelques  satyres, 
quoiqu'il  n'eût  pas  autant  de  dispositions  pour  ce  genre  de 
poésie  que  pour  d'autres.  2°.  Nous  avons  vu  qu'il  savoit 
le  grec;  ainsi  il  pouvoit  exercer  sa  muse  en  cette  langue, 
comme  en  sa  langue  naturelle.  3°.  Macrobe  en  nommant 
l'Auteur  de  cette  satyre,  lui  donne  le  prénom  de  Teren- 
tius;  et  lorsqu'il  cite  Varron  le  Romain,  ou  il  lui  donne  le 
prénom  de  Marcus,  ou  il  le  désigne  par  d'autres  endroits 
qui  le  font  aisément  connoître.  II  paroît  donc  par  Macro- 
be, que  cette  satyre  apartient  à  Varron  d'Atace. 

On  pourroit  faire  à  peu  pt-ès  le  même  raisonnement 
'  sur  deux  autres  satyres  citées  sous  le  nom  de  Varron  par  l'iJn'iisi.pr.p.io. 
Pline  l'ancien.  Elles  sont  intitulées,  l'une  Se^cM/y^-se^,  com- 
me s'il  vouloit  dire,  Sesqui-Ulysses,  et  l'autre  Flextabida. 
Pline  reprend  l'Auteur  de  ce  que  dans  la  première  il  a  fait 
trop  sérieusement  de  Furius  Bibaculus  un  homme  fin, 
adroit,  poli,  ingénieux,  et  d'avoir  élevé  au-dessus  d'Ulys- 
se, cet  homme  qui  n'étoit  que  ce  que  porte  son  nom.  Cet- 
te circonstance  nous  autorise  à  croire  que  ces  satyres  sont 
plutôt  de  Varron  d'Atace,  que  de  Varron  le  Romain.  Car 
celui-ci  étant  beaucoup  plus  ancien  que  le  Poëte  Bibacu- 
lus, mourut  sans  doute  avant  lui.  Et  il  y  a  bien  de  l'apa- 
rence  que  la  satyre  Sesqui-Ulysses  étoit  l'apothéose  de  ce 
Poëte,  qu'aura  faite  Varron  d'Atace  qui  le  survêquit.  '  Ces  noi.  p.  lo.  t.  % 
deux  satyres  se  trouvent  encore  citées  sous  le  nom  de  Var- 
ron par  Nonius  en  divers  endroits.  '  Au  reste  la  ressem-  voss.  po  .  lat.  c. 
blance  des  noms  a  fait  souvent  atribuer  à  l'un  de  ces  Var-  '■  ^'  "i"' 


112  ETAT  DES  LETRES 

VARRON.  rons,  des  écrits  qui  apartiennent  à  l'autre.  Le  (ïy raidi  est 
tombé  lui-même  dans  cette  faute,  en  donnant  à  Varron 
le  Romain  les  deux  vers  suivans,  qui  sont  de  Varron  d'A- 
tace. 

Marmorco  Licinus  tumulo  jacct,  at  Cato  parvo  ; 
Poinpcïus  nullo  :  credimus  esse  Dcos  ? 

Il  faut  bien  que  les  écrits  de  notre  Poëte  aient  été  fort 
célèbres  dans  l'antiquité,  pour  les  voir  ainsi  cités  par  les 
anciens  Ecrivains.  Car  outre  ceux  que  nous  venons  de 
nommer,  Probus,  Seneque  le  père,  Priscien,  Servius  et 
quelques  autres  en  font  encore  mention,  et  en  raportent 
même  des  vers  entiers.  Pline  l'Historien  avoue  en  avoir 
profilé  pour  les  Livres  3*,  4%  5",  et  6%  de  son  Histoire  na- 
turelle. Ce  n'est  pas  tout, 
scnoc.  cont.  ibi.i,  '  JuHus  Montanus,  habile  Poëte  du  tems  de  Tibère,  té- 
moignoit  qu'il  y  a  dans  Virgile  des  vers  imités  sur  ceux  de 
Varron  d'Atace.  Seneque  le  père,  qui  raporle  le  fait,  ra- 
porte  aussi  les  vers  qu'il  dit  être  excellens.  Les  voici. 

Desicrant  latiare canes,  urbcsquc  silebant. 
Omnia  noctis  craat  placida  composta  quicte. 

C'est  en  prenant  la  pensée  de  ces  deux  vers,  que  Virgile  a 
fait  les  deux  suivans. 

Nox  crat,  et  terras  animalia  fessa  per  omnes, 
Alituum  pecudumque  gênas  sopor  altus  liabebat. 

Ovide  portant  son  jugement  sur  les  deux  vers  de  Var- 
ron, prétendoit  qu'ils  auroient  mieux  valu,  si  l'Auteur 
en  avoit  retranché  la  fin,  et  qu'ils  eussent  fini  par  Omma 
noctis  erant.  Mais  Seneque  soutient  le  contraire,  et  prend 
contre  Ovide  la  défense  de  leur  beauté.  Autre  seroit,  dit 
Seneque,  la  signification  du  vers  ainsi  coupé;  autre  est  la 
signification  du  vers  entier.  Ovide  trouvoit  sa  pensée  dans 
l'un  ;  Varron  a  fort  bien  exprimé  la  sienne  dans  l'autre. 
Kr.ig.  poc.  p.  3(!t  I  '  c3n  nous  a  encore  conservé  de  notre  Poëte  les  sept  vers 
pov.  lai.  corp.  p.  suivans,  que  Virgile  a  aussi  imités  pour  les  pensées,  et  dont 

il 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    113 

il  a  même  copié  un  vers  entier  au  second  livre  de  ses  Geor-      varron. 
giques. 

Tum  liceat  Pelagi  volucrcs  tardœque  paludis 
Cernere  inexpleto  studio  cerlarc  lavandi, 
Etvclut  insolitum  pennis  infundere  rorem. 
Aut  arguta  lacus  circumvolitavit  hirundo. 
Et  bos  susplciens  cœlum  (mirabilc  visu) 
Naribus  aërium  patulis  decerpsit  odorcm  : 
Nec  tcnuis  formica  cavis  non  cveliit  ova. 

'L'on  remarque  encore  que  Virgile  a  emprunté  de  Var-  Frag.  i>oi;.  p.  3(i.-j j 
ron  d'Atace  cet  autre  vers,  qui  se  lit  au  même  endroit  de  "'  *  '"'^'""' 
ses  poésies. 

Frigidus  et  silvis  aquilo  dccussit  honorem. 

'  Priscien  voulant  montrer  la  justesse  des  pensées  de  no-  ciin.  ibi.i. 
trc  Poëte,  en  raporte  ces  trois   vers,  que   l'on  a  recueillis 
dans  le  corps  des  anciens  Poètes  latins,  et  ailleurs. 

Ergo  intcr  solis  stationem,  et  sidéra  scptem 
Exporrecta  jarel  tellus  :  huic  extima  fluclu 
Oceani,  InteriorNeptuni  cingitur  ora. 

'  Geux  qui  ont  pris  le  soin  de  ramasser  les  petites  pièces  '•"i"-  <■'  p»*'-  vot.p. 
des  anciens  Poëtes,    y    ont   inséré    l'épigramme   suivante, 

aue  l'on  croit  être  de  Varron   d'Atace,  et  qui  a  beaucoup 
e  raport  aux  trois  vers  précedens. 

At  qninque  œtherius  Zonis  adcingitur  orbis  ; 
Acvastantimashiemes,  raediaraque  calores 
Sic  terne  extremas  inter  mediamque  coluntur, 
Quam  solis  valido  nunquam  vis  auferat  igné, 

'  Priscien  et  Gharisius  citent  du  même  Poëte  les  vers  sui-  •;'»?•  p"iî-  p-  seo  i 
vans,  pour  montrer  que  mare  chez  les  anciens  se  disoil  à  ''"*'• '•"•'^*"'i''''- 
l'ablatif. 

Cingitur  Oceano,  Lybicomare,  llumine  Nilo. 

De  même,  Gharisius  raporte  de  lui  cet  autre  vers,  pour 
Tome  I.  Prem.  Part.  p 

.12* 


114  ETAT  DES   LETRES 

VAURON.      prouver  quartf^uis  est  du  f/minio  :  ce  que  fait  aussi  Nonius 
pour  le  même  sujet. 

Ciijus  ut  aspcxit  torta  caput  anguo  rcvincluni. 


TROGUS    POMPEIUS, 

HISTORIEN. 


S-  I- 

ITISTOÏHE  DE  SA  VIE. 

T  u  0  G  u  E  T\E  tous  les  Savans  dont  nous  avons  parlc^  jusqu'ici  , 
voMi'KE.      Uaucun   n'a  fait   plus  d'honneur  à   sa   patrie   que    celui 

jnsi.  I.  a.  c.  5.p.  dont   nous  entreprenons   l'élo^'e.  '  Il  tiroit  son   origine   du 

<!'*•  pais  des    (1)  Vocontiens,   qui  éloient  alliés  des  Romains, 

et  dont  Vaison  dans  la  premio-e  V^iennoise  étoit  la  capita- 
le. Sa  famille  paroît  avoir  été  une  des  plus  distinguées  des 
Ciaules,  tant  par  les  chaires  honorables  qu'elle  avoit  exer- 
cées, que  par  1(!S  grands  services  qu'elle  avoit  rendus  à  la 
République. 

ii,io.  Troguo'  aïeul   paternel   d<'   noire  Historien,   se   signala 

dans  la  guerre  de  Serlorius,  et  merila  par  sa  valeur  le 
droit  de  citoïen  Romain.  Cné(!  Pompée  en  l'élevant  à  cet 
honneur,  lui  donna  l(!  sui'iiom  d(!  Pompée,  qui  passa  depuis 
à  ses  descendans. 

ji,i.i.  '  Les  enfans   de  Trogue   soutinrent  dignement   la  gloire 

de  leui-  naissan<'('.  L'un  fut  Ti-ibun  ou  (Jeneral  d'une  par- 
tie de  la  cavalerie  Romair)e  du  temsde  la  guerre  contie  Mi- 
thridat(î  sous  h  même  Pompée  L'autre  se  vit  Secrétaire 
du  cabinet,  et  fut  emploie  en  diverses  ambassades  sous  Ju- 

itiii.  jiig.  pr.'j.  c.  le  César.'  On  sait  que  ces  deux  emplois  demandoient 
beaucoup  de  savoir  et  d'éloquence ,  et  supo.soient  un  ha- 
bile homme.  C'étoit  en  pailiculier  aux  Secrétaires  d'Etat 
à  dresser  les  letres  ,  les  rcscrits,  les  harangues  etc.  des 
Souverains  qui  les  emploïoient 

(1)  On   voit   par-là    que  c'est  s;inii  siijol    (juc  Jean   de  Giione  a  prélcniln  qnn  Tro- 
ïuc  Pompée   étoil  Esptii;nol. 


ij.  !).  p.  mi. 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    115 

•'  Ce  fut  de   ce   Secrétaire  que   naquit   Trogue   Pompée     t  r  o  g  u  e 
notre    Historien.    Le   fils  n'eut  ni  moins    d'éloquence,    ni       ''"^p*'^'' 
moins  de  savoir  que  le  père  ;  et  s'il  ne  paroît  pas  avoir  eu  •  jnsi.  ibiu. 
des  emplois   aussi   éclatans  ,  sa  réputation  le  devint  davan- 
tage.   Il   possedoit  parfaitement  l'ancienne   Géographie,  et 
savoit  à  fond  la  langue   gréque    cominti  la  latine.  Le  goût 
qu'il   avoit   pour   les   sciences,    le   porta   principalement  à 
I  histoire.  Avec  tant  d'avances,  et  le  travail  qu'il  y  joignit, 
il  s'acquit  la  gloire  d'un  des  plus  célèbres  Historiens  de  son 
tems,  où  les  belles  letres  étoient  dans  toute  leur  splendeur. 

'  Il  entreprit  un  dessein  presque  immense,  qui  deman-  inef.  p.  i. 
doit  beaucoup  de  tra\ail  et  un  grand  courage,  et  qui  pa- 
roît à  Justin  aussi  hardi  en  son  genre,  que  le  fut  l'entrepri- 
se d'Hercule.  Ce  dessein  ne  se  borna  à  rien  moins  qu'à 
écrire  une  histoire  générale  de  tout  ce  qui  s'étoit  passé 
dans  le  monde,  depuis  le  commencement  jusqu'au  tems 
où  il  vivoit.  '  Pour  y  réussir  il  ramassa  tout  ce  que  les  Grecs  p-^- 
avoient  écrit  en  différens  tems  sur  cette  matière  ;  puis  en 
aïant  retranché  tout  ce  qui  lui  parut  inutile,  il  fit  du  reste 
le  fonds  de  son  histoire. 

'  Un  des  motifs  qui  l'engagèrent  à  se  charger  d'un  travail  ii>i'i- 
aussi  pénible,  fut  le  désir  de  procurer  au  public  la  satisfa- 
ction de  lire  en  latin  l'histoire  des  Grecs,  comme  il  avoit 
déjà  le  plaisir  de  lire  en  grec  l'histoire  des  Romains.  Quel- 
que vaste  que  fût  l'entreprise  de  Pompée,  '  personne  n'a  Bail,  iinii.  p.  308. 
mieux  soutenu  que  lui  la  dignité  de  l'histoire,  tant  par  la 
gravité  du  sujet,  que  par  la  manière  de  le  traiter. 

'  Trogue    Pompée  écrivoit   sous   Auguste,    et  vêquit  au  J^;'-  '•  "•  «■  ^- 1'- 
moins  jusqu'après  que  cet  Empereur  eut  vaincu  les  Espa- 
gnols, et  réduit  leur  pais   en  une  province  de    l'Empire. 
'  Quelques  savans  le  font  contemporain  de  J.  G.  mais  il  y  voss.  iiisi.  lai.  i.i. 
a  plus    d'aparence  qu'il   étoit  mort  quelques  années  avant  "'  *^' 
la  Naissance  du  Sauveur,  ou  au  moins  avant  le  commence- 
ment de  notre  Ere  vulgaire.  On   ne  doit  donc  point  s'ar- 
rêter '  ni  à  ceux  qui  ne  le  font  vivre  que  sous  Tite  Anto-  Jusi.  not.  p.  ± 
nin,  'ni  à  ceux  qui  ne  placent  son  père  que  sous  l'empire  Quim.  aeci.  pr.  i». 
de  Caligula.  '  Saluste  et  Tite-Live  avoient  néanmoins  pu-  Jusi.  i.  as.  c.  y.  p. 
blié  déjà  leurs  ouvrages,  lorsque  Pompée  mit  le   sien  au  ^''' 
jour;  puisqu'il  les  acuse  l'un  et  l'autre  d'inexactitude  à  sui- 
vre les  règles  de  l'histoire. 

Il  est  peu  d'Ecrivains  dans  l'antiquité,  qui  aïejit  reçu 

Pij 


'  Pliii.  Iiist.  I.  1 
1 1  i.  11.  (iOG. 


ilO  ETAT  DES  LETRES 

TROGUK      (Je  la  pari  de  ceux  qui  les  ont  suivis,  des  éloges   plus  nia- 

''"*"'*''''•       gnifiques,   qu'en  a   reçu  notre   Historien.  °  Pline  l'ancien 

le  qualifie  un  Auteur  très-sévere,  et  ipsc  auctor  severinsvmis  : 

ce  qui  donne  une  grande  idée  et  du  jugement  et  de  la  crili- 

jusi.  pr.  p.  1.  que  de  Trogue  Pompée.  '  Justin  son  abreviateur  le  nom- 
me par   excellence   l'homme   de  l'ancienne   éloquence,  vir 

vop.  vil.  Ain.  11.  prisae  eloquentiœ.  '  Vopisque  dans  la  vie  d'Aurelien  n'a  pas 
cru  pouvoir  mieux  marquer  l'estime  qu'il  en  faisoit,  que 
de  le  mettre  de  niveau  avec  les  Historiens  du  premier  or- 
dre, Saluste,  Titc-Live,  Tacite. 

%•    II- 
SES   ECRITS. 

L'msToinE  que  laissa  Trogue  Pompée  ,  étoit  sans  doute 
un  ouvrage  très-considerable  ;  '  puisqu'elle  compre- 
noit  4i  Livres  ou  volumes,  qui  en  faisoient  la  division.  Il 
est  aisé  de  juger  du  mérite  de  ce  grand  ouvrage  par  tout 
ce  que  nous  avons  dit  et  des  qualités  de  l'Auteur  et  du  soin 
qu'il  aporla  à  le  composer. 

'  Il  y  suivit  l'ordre  chronologique,  et  la  suite  des  choses 

ii>i.i.  p.  1.  -1.  comme  elles  s'étoient  passées.  '  11  y  marquoit  les  règnes  des 
Rois,  et  les  évenemens  les  plus  remarquables  qui  étoient 
arrivés  chez  toutes  les  Nations   de  la  terre,    en   remontant 

p.  :i.  jusqu'aux  premières  origines  de  toutes  choses.  '  Il  y  donnoit 

une  description  des  Roïaumes  et  des  Provinces,  comme 
l'annonce  le  titre  de  son  ouvrage,  tel  qu'il  se  lit  dans  quel- 
ques manuscrits  et  en  plusieurs  éditions. 

Vo.is.  hisi.  lai.  1. 1.       '  Pompée  l'intitula  les  Histoires  Philippiques,  ù  l'imita- 

[;;'î\l •''''''■ '"''■''"■  tion  de  Theopompe,  qui  avoit  déjà  publié  en  grec  un  ou- 
vrage sous  le  même  titre.  Trogue  Pompée  en  usa  de  la 
sorte,  parce  que  le  règne  de  Philippe,  à  qui  le  Roïaurae 
de  Macédoine  devoit  son  origine,  étoit  un  des  principaux 
sujets  qu'il  entreprenoit  d'y  traiter.  Il  y  emploïoit  elTecli- 
vement  depuis  le  7"  Livre  jusqu'au  \\\ 

Ue  tout  ce  grand  ouvrage  il  ne  nous  reste  aujourd'hui 
que  l'abrégé  qu'en  a  fait  Justin.  L'on  ne  sauroit  trop  en  dé- 
l)lorer  la  perte;  et  .si  l'abrégé  devoit  faire  périr  l'oiiginal, 
comme  il  y  a  tout  lieu  de  croire  qu'il  l'u  faitj  la  postérité 
.se  seroil  fort  bien  passée  du  travail  de  l'Abreviateur.  ,; 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    117 

"  Le  slile  do  cet  abrégé  est  néanmoins  élégant  et  fleuri,  et      t  it  or.  i;  i-: 
la  diction  plus  pure  que  ne  le  sembloit  permettre  le  siècle       i'ompék. 


où  vivoit  Justin.  11  ne  faut  pas  s'en  étonner.  C'est  un  éfel  ,  j„si.  r,,  ,„. 
sans  doute  des  beautés  de  l'ouvrage  de  Pompée,  que 
Justin  aura  retenues  en  partie.  Quelque  estimable  au  reste 
que  soit  cet  abrégé,  il  ne  peut  nous  consoler  qu'imparfai- 
lement  de  la  perle  de  son  original.  '  Car  outre  les  fautes  ''■';'■  I  p.'.;'" 
sur  1  lustou'c  des  Juits  en  particulier,  outre  les  négligen- 
ces, les  contrariétés  qui  s'y  trouvent,  et  que  l'on  doit  plu- 
tôt mettre  sur  le  compte  de  l'Abreviateur  que  de  les  re- 
jetler  sur  notre  Historien,  les  tems  y  sont  tellement  con- 
fondus, '  que  l'on  n'y  découvre  aucune  trace  de  l'ordre  que  jhm.  n.  pr 
Justin  assure  lui-même  avoir  été  suivi  par  l'Auteur  origi- 
nal. De  sorte  que  si,  selon  la  remarque  d'un  savant,  la 
clironologie  est  l'œil  de  l'ijisloire,  on  peut  dire  que  l'abré- 
gé de  Justin  est  aveugle. 

'  Justin  ne  qualifie  son  abrégé  qu'un  petit  recueil  de  ■'"^i- 1»  i>.  ± 
(leui-s,  ou  de  ce  qu'il  y  avoit  de  plus  important  dans  le 
grand  ouvrage  de  Trogue  Pompée.  11  a  beau  dire  qu'il 
n'en  a  retrancbé  que  ce  qu'il  a  cru  ne  devoir  pas  [)laire  à 
.ses  lecteurs,  ou  ne  servir  de  rien  pour  leur  instruction,  il 
nous  donne  suflisamment  à  juger  que  les  retrancbemens 
qu'il  a  faits  sont  Irès-considerables.  Pourquoi ,  par  exem- 
ple, n'avoir  rien  inséré  dans  son  abrégé  des  sept  premicu-s 
làvres  de  l'original,  qui  comprenoient ,  comme  l'on  croit, 
ce  que  nous  annonce  le  titre  de  l'histoire  '  que  Justin  a  i>  '<■ 
retenu  lui-même  1 

Il  est  des  Ecrivains  qui,  .sans  y  faire  attention,  ont  pré- 
tendu que  ce  Justin  Abreviateur  de  Trogue  i^ompée,  étoit 
.son  propre  fils,   il  est   néanmoins  comme  certain  qu'il  n'a 
fleuri  tout  au  plutôt  que  sous  l'empire   de  Tite  Antonin, 
vers  le  milieu  du  second  siècle  de  l'Egli.se.  '  On  supose  mê-  Jmsi.  fi.  \n: 
me  qu'il  dédia  son  abrégé  à  cet  Empereur.  '  Mais  d'autres  Kai).  bib.  un 
qui  paroissent  avoir  examiné   la  chose  de  plus  près,   soû-  **'' 
tiennent  que  cette  suposilion  ne  vient  que  de  ce  qu(;  par 
une  erreur  assez  grossière  on  a  confondu  ce  Justin  avec  l'il- 
lustre S.    Martyr  de  même   nom,  qui  vivoit   effectivement 
sous  Antonin  le  débonnaire,  à  qui  il  adressa  une  apologie 
pour  les  Chrétiens.  EfTeclivement  Jacques  Bongars,  au  ra- 
port  de  M.  Fabricius,  a  observé  que  l'inscription  ou  dédi- 
cace prétendue  de  l'Abreviateur   de  notre  Historien   à   cet 


\ 


118  ETAT  DES  LETIIES 

T  R  0  G  u  E      Empereur,  ne  se  trouve  dans  aucun  manuscrit.  Ainsi  l'on 
POMPÉE. pj.yjj  qy'ji  y  jj  pjyg  J'apareucc  qu'elle  n'a  point  eu  d'au- 
tre   réalité  que  dans  l'imagination   de  ceux  qui   l'ont  in- 
ventée. 

Grand  nombre  d'anciens   Ecrivains,    tant  ecclésiastiques 
que  profanes,  entre  autres  S.  Jérôme,  S.  Augustin,  Oro- 
se,  Solin,  Pline  l'ancien,  Priscien,  Servius,  Vopisque  ci- 
tent dans  leurs  écrits  l'histoire  de  Troguc  Pompée,  et  sous 
son  nom.  Il  se  pouvoit  faire  néanmoins  que  quelques-uns 
d'entre  eux  n'en  eussent  que  l'abrégé  par  Justin,  il  semble 
Aii;;.  <iv.  1.  i.c.G.  en  effet  '  que  S.  Augustin  ne  l'avoit  point  autrement;  puis- 
que pour  montrer  que  Ninus  Roi  d'Assyrie  fut  le  premier 
qui  fit  la  guerre  à  ses  voisins,  afin  d'étendre  les  terres  de  ses 
états,  il  cite  le  commencement  de  cette  histoire   tel    qu'il 
est  dans  l'abrégé, 
iii.r.  in  Dan.  |.i.       '  H  y  a  toutcfois  dcs  prcuvcs  qu'elle  subsistoit  encore  en 
p-  "»"*  I  '  ■  ■••  p-  son  entier  au  commencement  du  cinquième  siècle.  S.  Jé- 
rôme l'avait  lûë  avec  l'abrégé  par  Justin  ;  et  il  s'en  est  servi 
pour  expliquer  le  Prophète  Daniel, 
r.isn.  iiih.  un.  1. 1.       'Aide  laîné    et    George    Major  prétendoienf  même   au 
!lii."\"«î'-  ibM°p.'  commencement  du   10''  siècle,    que  cette   histoire  originale 
'"•  .se  trouvoit  encore  alors  chez  un  savant,  qui  faisoit  espérer 

de  la  donner  bien-tôt  au  public.  Mais  Vossius  croit  avec 
raison ,  que  c(;  savant  avoit  imposé  à  ceux  à  qui  il  a  fait 
naître  cette  espérance. 

Trogue  Pompée  est  un  des  Auteurs  dont  Pline  l'Histo- 
rien a  le  plus  profité  pour  composer  son  histoire  naturelle. 
11  avoue  lui-même  s'en  être  servi  particulièrement  pour 
treize  de  ses  Livres,  depuis  le  6°  exclusivement  jusqu'au 
18°  inclusivement  et  pour  le  31". 
piin.  iiisi.  1. 7.  c.  'Au  septième  Livre  il  raporte  d'après  Pompée,  qu'en 
'  •'■  '■'■  i^gypte  une  femme  avoit  acouché  de  sept   garçons  à  une 

Solin.  c.  1.  p.  i.     .seule  fois.  '  Solin  dit  la  même  chose  d'après  notre  Ilisto- 
piin.  ibi.i.  rien.  '  Pline  copie  ailleurs  un  assez  long  texte  du  même  Au-' 

teur,  touchant  les  indices  ou  présages  que  les  anciens  ti- 
noi.  i.  a.  [>.  «00.  roient  des  traits  du  visage  de  l'honmie.  '  On  observe  que 
Pompée  avoit  pris  cet  endroit  d'Aristote,  qui  dit  la  même 
chose  et  en  mêmes  termes  au  chapitre  9'  du  premier  Livre 
de  l'histoire  des  animaux.  Quelque  crédule  que  fût  Pline, 
1. 17.  '  il  ne  laisse  pas  de  relever  comme  pou  vrai-semblables  cer- 

tains endroits  de  l'ouvrage   de  notre  Historien.  Par  exem- 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  C.    119 

|)1p,  il  ne  peut  croire  ce  qu'il  y  avançoit  sérieusement,  en      ^ifoMi'KV' 
(lisant,  que  de  semer  des  feuilles  de  palmier  an  pais  de 


liabylone,  il  en  naissoit  des  arbres.   'De  même,  Yopisque  Yoll.^il.  Am. n. s. 
lémoigne  qu'il  se  Irouvoil  dans  celle  histoire  bien  des  cho- 
ses que    Trebellius  IVdIio  convainquoit  de  fausseté. 

'On  ne  sait  ce   que  signifie  le  litre  d'un  ouvrage,  que  voss.  u.i.i.  .■.  33. 
nous  donne   Thomas  James  sous  h',  nom  de  Trogue  Pompée 
en  ces  termes:  Epitomn  historinruni  por  Trofjnm  Pompeïmn, 
libn  IV.   James  dit  que   cet  ouvrage  se  trouve   manuscrit 
dans  la  Bibliothèque  du  nouveau  Collège  d'Oxford. 

'  Cliarisius  cite  le  Livre  des  animaux  par  Trogue  Pom-  y",^'=-.i';';i-  <"•  '"  I 
pee  :  ce  qui  jouit  à  ce  que  notre  l^listorien  avoit  emprun- 
!♦'  d'Aristote,   comme   nous  venons  de  le   remarquer,  fait 
juger  qu'il  avoil  effectivement  i^crit  sur  cette  matière. 

%.   IIL 
Editions  (h  ce  qui  nous  reste  fie  ses  Ecrits. 

ON  ne  sauroil  disconvenir ,  que  l'abrégé  que  Justin 
nous  a  laissé  de  l'histoire  de  Trogue  Pompée ,  n'apar- 
tienne  encore  plus  à  l'Auteur  original  qu'à  son  Abrevia- 
teur.  C'est  ce  qui  nous  porte  à  en  marquer  les  principales 
éditions,  sans  nous  arrêter  à  presqu'une  infinité  d'autres 
de  moindr(^  conséquence,  faites  en  divers  endroits  pour 
l'usage  de  la  jeunesse  qui  suit  le  Collège. 

'Les   premières   éditions   de   cet   ouvrage  que  l'on  con-  «'i'  an.j!tmo.i.  i. 
noisse,  sont  celles  de  1470,  par  Nicolas  Jenson,  et  de  1472  "'  ''  "  " 
par  Sueinheim   et   Pannarts   qui   iniprimoient  à  Rome  en 
même-tems.  '  Il  y  en  eut  une  troisième  édition  en  un  volume  Fab.  lùb.  lai.  p. 
in-folio,  à  Milan,  l'an    1476,    et  une  quatrième  en  même  '"' 
volume,  l'an  1479,  à  Venise,  où   elle   parut   de    nouveau 
aussi    in-folio,   les  années   1493,  et  1494.  *  Denys  Uoce,  itii».  i.ng.i-itai.  p. 
Imprimeur  à  Paris  sur  la  fin  du  quinzième  siècle,  en  pu-  *"lt',  "'  „  ,.    , 

11-  I  1-  •  I  •       /  11       1  1.  -         *  II'''-      ff-   lri«J- 

blia  une  édition  en  un  volume  m-Y.  sans  nulle  date.  "On  ùvai. 

en    trouve    deux  autres  éditions   faites   aussi  à  Paris  sans  "  ••  •  cas.  B«n. 

date   comme   la  précédente  :   l'une  en  un  petit  in-¥.  avec 

Lucius  Florus  et  Sextus  Aurelius   Victor,   chez  Jean  Petit. 

Celle-ci  fut  faite  sur  celle  de  Marcus  Antonius  Sabellicus, 

qui   par  conséquent  avoit   déjà   publié   le  même  ouvrage. 

'L'autre   est  aussi   en   un   volume   inA".  chez  Jean  Petit,  •  •  •■  ff.  Prœd.  ton. 


oisâ.  cen. 


120  ETAT  DES  LETRES 

T  n  0  c  u  K     mais  l'Imprimeur  fut  Jean  de  Bonncmere.  Elle  paroil  avoir 

poMPfeR. ét^  donnée  par  les  soins   de  Jean   Lermite   de  Montmirel, 

dont  il  y  a  une  épigramme  à  la  tête.  On  y  a  joint  Lucius 
Florus,  comme  à  l'autre;  mais  au  lieu  d'Aurelius  Victor, 
on  y  a  mis  Sextus  RufTus. 

itii).  an.ctinoii.  I.       '  C'est  de  l'uue  de  ces  deux  éditions  que  prétend  parler 

''•  ''■  "^  ■  l'Auteur  de  la  bibliothèque  ancienne  et  moderne,  lorsqu'il 

dit  qu'il  s'y  trouve  des  endroits  plus  corrects  que  dans  les 
précédentes,  mais  qu'elle  n'est  pas  fort  bonne  d'ailleurs. 

...Vatic.  'Celle   que  donna  Sabellicus    se  trouve  dans   la  biblio- 

thèque du  Vatican.  On  n'y  voit  ni  date,  ni  nom  d'Impri- 
meur, ni  rien  qui  indique  le  lieu  où  elle  a  été  faite.  L'E- 
diteur y  a  joint  l'abrégé  de  Lucius  Florus.  Ces  deux  abré- 
gés furent  ensuite  réimprimés  à  Venise  chez  Jean  Tacuini 
en  1507,  avant  Pâques.  Cette  édition  fui  faite  sur  celle  de 
Sabellicus;  et  l'on  y  a  joint  l'ouvrage  de  Strabon. 

...Cas.  Bon.  'Pierre  Danès  aïanl  revu  le  texte  de  Justin  sur  un  ma- 

nuscrit du  Collège  de  Lisieux  ancien  do  300  ans  ou  envi- 
ron, le  fit  imprimer  avec  Florus  et  RufTus  à  Paris  chez  An- 
toine Assurde  pour  Jean  Petit  en  un  volume  in-folio.  L'é- 
dition qui  est  fort  belle,  se  trouve  sans  date  ;  mais  on  peut 
la  prendre  d'une  letre  de  l'Editeur  écrite  à  l'Imprimeur  au 

...  s.  stcph.Niv.  mois  de  juillet  1519,  et  placée  à  la  tête  de  l'édition.  'En 
1524  Josse  Bade  réimprima  ces  trois  mêmes  Historiens  en 
un  volume  in-folio. 

jusi.  pr.  '  L'année  suivante  les  Juntes  publièrent  à  leur  tour  l'a- 

brégé de  Trogue  Pompée,  en  y- joignant  Cornélius  Nepos 
et  Velleïus  Paterculus.  Graevius  fait  beaucoup  de  cas  de 
cette  édition  de  Florence,  et  avoue  en  avoir  beaucoup  pro- 

Gi'sn.  i.ih.  II 1.  t.  fité  pour  celles  qu'il  donna  dans  la  suite  au  public.  '  Aide  im- 

'■  ''■  "*■  prima  aussi  l'abrégé  de  Justin  sous  le  titre  De  externis  historiis. 

On  ne  caractérise  pas  davantage  cotte  édition,  qui  nous 
paroît  être   une  des  trois  de  Venise,  que  nous  avons  déjà 

Bill.  Coii).  I.  i.i>.  remarquées.  'Car    celle  qu'il  publia  en  1522  m-8°.  porl« 

*""'■  pour  titre  :  Abrégé  de  l'histoire  de  Trogue  Pompée. 

iiib.  s.  vi  c.  ce!i.  '  En  152G  parut  à  Hanaw  chez  Jean  Seer  en  un  volume  in- 
4°.  l'édition  qu'avoit  préparée  Jean  Major.  Cet  Editeur  y 
a  joint  une  liste  de  tous  les  divers  Empires  de  l'antiquité, 
en   y   marquant  le   tems   que   chaque   souverain  a    régné. 

c-sii.  iiiiii.  '  Major  revit  depuis   l'ouvrage,  le  confronta  avec  les  Histo- 

riens grecs  et  latins,  et  le  fit  réimprimer  à  Cologne  chez 

Jean 


DANS  LES  GAULES  AVANT  J.  G.    121 

Jenn   Gymnicus   l'on    lo43   en  même  volume.  Melanchlon     trogue 
témoigne   beaucou[)   d'estime    pour   celle    édition.   "Il    y  en       l'cm'Éi!:. 
eut  une  autre  à  Paris  chez  de  Colines  l'an  ISSOenunvo-  •  Bib.  coib.  iwd. 
lume  î>i-8°. 

'  Jean  Sichard   de   son   côté,  après  avoir  revu  l'ouvrage  cesn.  iwj. 
sur  divers  imprimés,  le  donna  au  public  avec  de  savantes 
scholies  de  sa  façon.  L'on  ne  marque  point  en  quelle  an- 
née il  fut  imprimé  de  la  sorte  pour  la  première  fois  ;  mais  gib.  rr.  ivad.  ba- 
il le  fut   pour  la  seconde  fois  en  un  volume  m-8°.  ou  petit  ^'^'• 
4°.    l'an    lo32,   à    Lyon  chez  Melchior  et  Gaspar  Trechel, 
'et   pour  la  Iroi-siéme  fois  en  1542  à  Cologne  chez  Henri  ccsn.  ibid. 
Pelri. 

'La   même   année   Simon  Gryné  fit  paroître  à  Lyon  on  nib. cas.Ucn. 
un  volume  m-S".  le  même  ouvrage,  auquel  il  joignit  Sex- 
lus   Aurelius   Victor.  Cette  édition  sortit  de  la  boutique  de 
Sebastien    Gryplie, 'qui  remit  l'ouvrage  sous  la  presse  l'an  ...n.  Prud. cen. 
1551  en  un  volume  m-16.  'ce  qu'il  fit  encore  l'an   1573  ...  s.  Fior.  saim. 
en  un  volume  m-8°.  toujours  avec  Aurelius  Victor,  et  apa- 
remment  sur  l'édilioii  de  Gryné. 

'A  Paris  Robert  Etienne  et  .lean  Louis  Tiletan  publièrent  •••  s-  l'cr  Mon] 
aussi  l'abrégé  de  Justin  seul,  l'an  1543  en  un  volume  m-8". 

'En  1553  parut  à  liâle  le  même  ouvrage  avec  les  notes  ...  itarb.  1. 1.  p. 
et  les  corrections  de  Sichard  et  de  Major  en  môme  volume  ''"'■  -■ 
qu'à  Paris.   'Six  ans  après,  c'est-à-dire  en  1550,  on  1ère-  ...  Anpci. 
imprima  à  Venise  en  un  volume  m-12.  '  Il  y  en  eut  une  au-  i'«J'-  '>'•'•  ''•*'•  p- 
tre  édition  en  même  volume  à  Bâle  l'an  1562,  avec  les  no- 
tes de  Henri   Loriti    Glareani.   Une  des  meilleures  éditions 
est  '  celle  que  Jacques  Bongars  donna  à  Paris  en  un  volume  l'ab.  ibid. 
m-8%  après  avoir  revu  le  texte  sur  les  manuscrits  de  Cujas, 
de   Du   Puy   et  six  autres.  Cette  édition,  dont  on  ne  mar- 
que ni  la  date  ni  le  nom  de  l'Imprimeur,  est  enrichie  de 
notes  très-savantes   et  de   tables  clironologiques  très-utiles. 
'  Denys  Duval  Imprimeur  à  Paris  en  fit  paroître  une  autre  "'''•  •>■  «'«  i-of''- 
fort    belle    édition,    avec  des  notes,  une  chronologie  et  des 
Variantes,  l'an  1581,  en  un  volume  in-8".     Il  y  en  eut  une  •••  Angci. 
autre  la  même  année  à  Strasbourg  m-16. 

'Après   celle-ci   vinrent  celles  que  Jérôme  de  Marnef  et  ...  s.  Aib.  And. 
la    veuve    Guillaume   Cavellat   publièrent  aussi  à  Paris  en 
1585,  et  celle  qu'Elie  Vinet  publia  en  1590.  On  en  pro-  Fab.  ibid  i  Uodi. 
duit  deux  autres  l'une  et  l'autre  de  Francfort  en  1587,  et  '^''^■ 
1591.  Celle-ci  fut  dirigée  par  François  Modius,  qui  la  re- 

l'ome  1.  Pron.  Part.  Q 


122  ETAT  DES  LETRËS 

T  II  0  G  u  E  vit  dans  la  suite,  et  l'enrichit  d'une  table  de  toutes  les 
POMPÉE.       monarchies.   Après   quoi   elle   parut  de  nouveau  à  Anvers 

~  l'an    IGIO,  en  un  volume  m-8",  comme  la  première  fois. 

On  la  fit  encore  paroître  depuis  à  Lyon,  à  Cologne,  et 
ailleurs. 

Uodi.  ibi.1.  'Il  s'en  trouve  d'autres  éditions  faites  à  Lyon  l'an  1593 

en  un  volume  m-8°,  à  Anvers  1600  en  un  volume  m-12, 

itib.  Jt;iii).  iiiiii.  à  Strasbourg  1002  'et  ICI  3  en  un  volume  iw-8°,  avec  les 
notes  de  Victorinus  Slrigelius.   '  Celle-ci  vit  encore  le  jour 

Fai).  ibid.  *^^  divers  autres  endroits.  '  En  IGOo  et  IGlO  on  réimprima 

itoji.  ibi.i.  Je  même  ouvrage  à  Cologne,  en  1612  à  Marpurgen  un  vo- 

lume m-8°,  avec  les  notes  de  Bongars,  de  Modius  et  de 
Gruter;  et  en  1610  à  Francfort  en  un  volume  m-16,  après 

iiib  Aii'-i.  1^*^  ^^  ^6^^6  ^u'   ^^^  ^^^^   ^^^'  ^^^  manuscrits.   '  Il  y  en  a 

encore  une  édition  en  même  volume  faite  à  Amsterdam 
en  1621. 

lab.  ibia.  1).  in.  '  Daniel  Paré  entreprit  de  publier  à  son  tour  l'abrégé  de 
Trogue   Pompée,  et  le  fil  imprimer  à  Francfort  l'an  1630 

iiib.  b.  l'ior.  p.  en  un  volume  in-H"  '  L'année  suivante  il  fut  réimprimé  à 
Strasbourg  tn-4\  par  les  soins  de  Matthias  Bernegger  ou 
n.  p.  502.  Berneccer;  '  et  depuis  en  1653,  et  "  1666  encore  au  même 
endroit  en  un  volume  in-S",  avec  les  notes  de  Bongars,  et 
de  quelques  autres  savans,  et  la  table  de  Jean  Freinshe- 
mius. 

'A  Amsterdam  1638  Jansson  en  donna  une  nouvelle  édi- 
tion m-16  ,  dont  le  public  est  redevable  à  Boxhornius. 
'  Cette  même  édition  y  reparut  de  nouveau  en  même  vo- 
lume l'an  1680.  '  En  1640  parut  à  Leyde  en  un  volume  in- 
12.  celle  que  le  savant  Vossius  avoit  préparée.  'Elle  fut  re- 
nouvellée  à  Amsterdam  en  même  volume  les  années  1650, 
et  1673.  '  Au  même  endroit  l'an  1644  la  veuve  Jean  Libert 
en  donna  au  public  une  autre  édition  m-16.  'On  en  trouve 
une  de  Paris  chez  les  Cramoisi  en  1654  m-12,  avec  des  no- 
tes, sans  nom  d'Editeur. 

'  Antoine  Thysius  dès  1650  fit  remetre  à  Leyde  l'ouvra- 
ge sous  la  presse,  avec  les  notes  de  divers  savans,  en  un 
volume  m-12.  '  Il  y  eut  une  autre  édition  à  Amsterdam 
chez  les  Elzevirs  l'an  1659,  en  un  volume  m-8",  avec  les 
notes  de  Bernegger,  de  Bongars,  de  Vossius,  de  Thysius 
et  autres. 

iiist.  pr.  '  Après  cette  édition  vint  celle  de  Grœvius,  qui  la  pu- 


17. 


■  Kiib. 


bu>. 

Tell. 

ibid. 

...  Kon.  ibitl. 

Fab 

.  ibiU. 

BU). 

Kon. 

ibid. 

S.  Mau. 

... 

Miss. 

Ceu. 

rail 

.  ibid, 

1 

liib. 

Tell. 

ibid. 

DANS  LES   GAULES  AVANT  J.  C.        123 

l)lia  à  Utrecht  l'an  1G68,  comme  il  le  témoigne  lui-même;      ^po^im^k'^ 
quoique  M.   Fabricius,  qui  l'estime  comme  très-correcte, 


ne  la  marque  que  de  l'année  suivante.  ■*  Cette  même  édi-  '„*''■""'!:    , 

,    T         -^     ,,,  ...  /^  •  ,1  "  Ilib.  s.  \in.  (,en. 

tion  après  avoir  été  revue  par  dra^vms  parut  de  nouveau 
à  Leyde  chez  llaak,  l'an  1G83   ?>?-8°.  'et  à  Amsterdam  1694  Fab.  ibi.i. 
m-12.  C'est  sans  contradiction  une  des  plus  belles  et  des 
plus  utiles  pour  les  savantes  noies  et  observations  de  l'E- 
diteur. 

'Elle  n'empêcha  pas  néanmoins  que  dès  1009  Cornélius  iiùd.  i  ition.  ii.i.i. 
Schrevelius  n'en   publiât  une  de  sa  façon  ,  qui  fut  faite  à 
Amsterdam  en  un  volume   in-H",  avec   les   notes  de  divers 
sa  vans ,   {varionini)  et   renouvel  lée   depuis   à   Leyde   et   à 
Breslaw  en  diverses  années.  Deux  ans  après,  c'esf-à-dire  Dib.  n.  tin  Lorch. 
en  1071,  Tannegui  le  Fevre  fit  réimprimer  à  Saumur  l'a- 
brégé de  Justin,  avec  des  éclaircisseniens  qui  lèvent    bien 
des  difficultés.    Celte   édition   parut  chez   René   Pean ,  in- 
12.  'Grffvius   fait   beaucoup   de   cas   du  travail  de  le   Fe-  Just.  pr. 
vre.  '  L'année  suivante  Jean  Vorslius  remit  sous  la  presse  à 
Leipsick  le  même  abrégé  ,  en   profilant  des   remarques  de 
Gra^vius,  dont  il  s'est  fait  honneur  comme  d'un  bien  pro- 
pre. L'édition  de  Vorslius  parut  do   nouveau   à  Berlin  dès  Fab.  ibi.i. 
1073,   en  un  volume  m-8".  En   1074,'  un   savant  Anglois  Jusi,  pr. 
Anonyme  en  publia  une  autre  à  Oxford ,  de  laquelle  Grœ- 
vius  témoigne   avoir  tiré  du   secours  pour  reloucher  celle 
qu'il  nous  donna  en  1083.  'C'est  aparemment  celle  de  cet  "'•'•  '^""  '''■''• 
Anglois  qui  fut  renouvellée  à  Oxford  en  1705 ,  en  un  vo- 
lume iw-8°. 

'Le  Père  Cantel  Jésuite  en  publia  une  nouvelle  à  l'usage  •  •  s.  vin.  Ccn. 
de   M.  le  grand   Dauphin.  Cette  édition ,  qui  est   acompa- 
gnée   de    savantes    observations    historiques    et   geographi  - 
ques,  parut  à  Paris  chez  Frédéric  J^eonard  l'an  1077,  en 
un   volume   in-i".  'L'année  suivante   vit  paroîlre   en  deux  Fab. ibidi Jusi.pr. 
differens  endroits,  à  Upsal  et  à   Hambourg,  en  un  volume 
m-S".  l'édition   du  même  ouvrage  que  Jean  Schefler  avoit 
préparée   avec  de  savantes  remarques.    Elle  fut  retouchée 
depuis  sur  celle  qui  avoit  paru  à  Oxford.  '  On  ne  dit  point  uib.  Kon.  p.  soi. 
de  qui  e.st  celle  qui  fut  faite  à  Utrecht  in-%" ,  l'an  1708. 

'A  Londres  1713  parut  en  un  volume  îw-12.  une  nou-  ?■''''":;' "rî!'  ' 
velle  édition  de  Justin  chez  Tonson  et  Wats.   Mais  on   re-  "*   ^ 
marque  que  ceux  qui  l'ont  donnée ,  auroient  dû  imprimer 
les  argumens  ou  sommaires  des  Livres  de  Trogue  Pompée 

Qij 


12i  ETAT  DES  LETRES 

THOGUK     qui  sont  à  la  fin  de  l'abrégé  de  Justin,  sur  les  corrections 
^*^"'''^'^       qu'en  a  faites  Dom  Bernard  de  Montfaucon  dans  son  Dia- 
rium  Italicum. 

f]'*!*"*»*)'""*''' '  ^^-  Abraham  Gronovius,  fils  du  savant  Jacques  Grono- 

vius,a  publié  une  dernière  édition  de  ce  qui  nous  reste  des 
écrits  de  Trogue  Pompée,  avec  les  notes  de  plusieurs  sa- 
vans,  et  les  siennes  propres.  Cette  édition  ,  qui  est  assez 
correcte  et  bien  conditionnée  ,  est  sortie  de  la  boutique  de 
Haak ,  Libraire  à  Leyde,  en  un  volume  m-8" ,  l'an  1710. 
Elle  est  faite  sur  differens  manuscrits  très-estimés,  et  sur 
les  plus  anciennes  éditions  de  notre  historien. 

Il  y  a  eu  en  divers  tems  au  moins  quatre  différentes  tra- 

Bib. s. Fior. Salin,  ductious  françoises  de  l'abrégé  de  Justin.  'La  première  fut 
imprimée  à  Paris  l'an  1540  en  un  volume  m-8" ,  par  Denys 
Janot  pour  Arnoul  et  Charles  les  Angeliers ,  sous  ce  titre  : 
Justin  vrai  Historiographe  sur  les  Histoires  de  Trogtce  Pompée, 
contenant  44  Livres.  L'Auteur  de  cette  traduction  fut  Guil  - 
laume  Michel  dit  de  Tours,  dont  le  nom  se  trouve  à  la  fin 
de  l'ouvrage.   Le  privilège  pour  l'imprimer  fut  acordé  dès 

.  .D.  JeLorcii.  1537.  '  Avant  celle-là,  Claude  de  Seyssel  nommé  à  l'Evê- 
ché  de  Marseille  ,  en  avoit  fait  une  qu'il  dédia  au  Roi 
Louis  XII;  mais  qui  ne  fut  imprimée  qu'en  1559  en  un 
volume  in-folio^  à  Paris  chez  Vascosan. 

...  s.  Petr.  But-       '  Le  Sieur  de  CoUomby  Cauvigny  donna  au  public  une 

^*'''  autre  traduction  du  même  abrégé,   qui  fut  imprimée  plu- 

sieurs fois.  Nous  n'en  avons  encore   pu  voir  que  l'édition 
qui  parut  à  Saumur  chez  Dominique  François  de  Gouy  l'an 
1686,  quelques  années  après  la  mort  de  Tannegui  le  Fevre, 
s  Vin  cen     ^^^  l'avoit  rctouchée. 

'Enfin  une  habile  plume,  qui  a  caché  son  nom  sous  ces 
trois  letres  initiales  D.  L.  M.  s'est  donné  la  peine  de  tra- 
duire de  nouveau  le  même  ouvrage  en  notre  langue.  Cet- 
te dernière  traduction  est  imprimée  à  Paris  chez  Thomas 
Guillain  l'an  1693 ,  en  deux  volumes  m-12.  On  trouve  h. 
la  fin  de  chaque  Livre  des  remarques  fort  judicieuses,  tant 
pour  redresser  que  pour  éclaircir  l'Abreviateur  de  Tro- 
gue Pompée. 

.  .Angoi.  I  vaiic.  '  Lcs  Italiens  ont  aussi  voulu  avoir  le  plaisir  de  lire  Justin 
en  leur  langue  maternelle.  On  en  trouve  une  traduction 
Italienne  imprimée  à  Venise  l'an  1526  en  un  vol.  m-12,  et 
reimprimée  au  même  endroit  l'an  1500  i«-4° ,  et  dès  1560 
en  même  volume.  (XII.) 


HISTOIRE 


LITERAIRE 


DE  LA  FRANCE 


PREMIER  SIECLE  DE   L'EGLISE 


ETAT  DES  LE  TRES  DANS  LES  GAULES 

en  ce  Siècle. 

CE  seroit  en  vain  que  le  titre  que  nous  donnons  à  ce 
siècle ,  vous  feroit  naître  l'espérance  d'y  voir  traiter 
de  quelque  Auteur  ecclésiastique,  ou  même  de  l'é- 
tablissement de  la  Religion  Chrétienne  dans  les 
Gaules.  Quelques  dispositions  que  parussent  avoir  nos  Gau- 
lois au-dessus  de  tant  d'autres  Nations,  pour  se  rendre 
à  la  lumière  de  l'Evangile,  par  la  persuasion  où  ils  étoient 
communément  de  l'immortalité  de  l'ame,  Dieu  néanmoins, 
dont  les  desseins  sont  impénétrables ,  ne  leur  fit  pas  si-tôt  an- 
noncer la  parole  de  vie.  Il  est  cependant  vrai  que  plusieurs  de 

/.  Part.  *Qiij 

1  3 


126  ETAT  DES  LETRES 

nos  Ecrivains  modernes  ont  prétendu,  que  dès  ce  siécle-ci  la 
foi  avoit  été  prêchée  et  reçue  dans  nos  Provinces.  Mais  c'est 
ce  qu'ils  ont  avancé,  sans  que  personne  se  soit  mis  en  devoir 
de  le  prouver.  Et  comment  auroil-on  pu  le  faire?  Bien  loin 
qu'il  se  trouve  quelques  preuves  positives  pour  l'établir,  il  y 
en  a  plusieurs  qui  la  détruisent,  et  qui  ne  sont  pas  de  peu  de 
poids.  Telles  sont  les  autorités  de  S.  Sulpice  Seyere,  cet  Ecri- 
vain si  célèbre  et  si  respectable  ;  de  l'Auteur  des  actes  de  S. 
Saturnin  de  Toulouse ,  qui  écrivoit  au  moins  dès  le  cinquiè- 
me siècle  de  l'Eglise;  et  de  S.  Grégoire  de  Tours,  que  nous 
regardons  comme  le  Père  de  nôtre  histoire.  Il  s'agit  d'un 
fait;  et  tous  les  raisonnemens  que  l'on  pourroil  faire,  ne  sau- 

(»)  Voyez  la  note  roicut  l'établfr,  si  le  témoignage  des  anciens  le  dément  ('). 

lame."  "''"'^"^°'  II.  Après  vous  avoir  représenté  en  un  aussi  grand  détail 
que  nous  avons  fait,  l'état  des  letres  dans  les  Gaules  pendant 
les  siècles  précédons,  il  nous  reste  peu  de  choses  à  vous  dire 
sur  celui  qui  se  présente.  Les  révolutions  qui  y  arrivèrent  dans 
la  literature,  ne  furent  pas  à  beaucoup  près  si  sensibles  que 
celles  qu'on  y  vit  arriver  dans  l'Etat.  Les  sciences  néanmoins 
ne  laissèrent  pas  d'y  souffrir  quelque  peu  d'altération.  Et  par 
quelle  espèce  de  merveille  se  seroient- elles  entièrement  ga- 
ranties des  desordres  que  causèrent  dans  tout  l'Empire  des 
règnes  aussi  fâcheux  et  turbulens, que  ceux  d'un  Tibère,  d'un 
Caligula ,  d'un  Claude  ,  d'un  Noron  ,  d'un  Domitien?  Car  il 
y  a  toujours  eu,  et  il  y  aura  toujours  une  étroite  liaison  entre 
le  gouvernement  et  l'Etat  et  la  république  des  letres.  Le  lustre 
de  celle-ci  dépend  de  la  gloire  de  l'aulre.  La  tranquillité,  les 
avantages,  la  splendeur  de  l'un  et  de  l'autre  sont  entièrement 
connexes.  Il  en  est  de  même  de  leur  affoiblissement  et  de  leur 
décadence.  Mais  ce  que  les  sciences  eurent  à  souffrir  ne  fut 
pas  encore  considérable.  Sur  la  fin  du  règne  d'Auguste ,  et 
sous  le  règne  entier  de  Tibère,  les  choses  se  maintinrent  à  peu 
près  sur  le  même  pied  qu'auparavant. 

III.  Nos  Gaulois  voïant  donc  que  les  sciences  contl- 
nuoient  à  être  la  voie  ordinaire,  pour  parvenir  aux  char- 
ges de  l'Empire,  ils  continuèrent  aussi  à  les  cultiver  avec 
une  ardeur  merveilleuse,  et  à  les  faire  fleurir  avec  un  nou- 
vel éclat.  Les  écoles  se  multiplièrent  dans  leurs  Provin- 
ces ,  et  y  devinrent  très- florissantes.  Jamais  il  ne  parut 
parmi  eux  un  plus  grand  nombre  d'Orateurs.  Jamais  ils  ne 
l'ournirent  à  la  ville  de  Home  plus  de  Maîtres   d'éloquen- 


DANS  LES  GAULES,  l.  SIECLE.  127 

ce  ,  et  à  l'Etat  plus  de  Magistrats ,  plus  de  Capitaines , 
plus  de  Financiers.  Nous  sommes  en  droit  de  comprendre 
tous  ces  Officiers  au  nombre  des  savans.  On  sait  de  reste 
que  les  charges  qu'ils  exerçoient ,  demandoient  des  hom- 
mes de  letres  et  d'érudition,  et  qu'en  ces  heureux  tems  on 
n'y  en  mettoit  point  d'autres.  Qu'est-il  besoin  d'en  donner 
des  preuves?  L'histoire  de  ce  siècle  en  fournit  cent  exem- 
ples. A  peine  vit-on  sortir  des  Romains  naturels  plus  de 
ces  hommes  de  letres  ,  qu'il  en  sortit  des  Gaulois.  De  sorte 
qu'on  auroit  été  dès -lors  en  droit  d'établir  entre  Rome  et 
les  Gaules'  par  raport  aux  belles  -  letres  et  aux  plus  hautes  Ans.  mos.  ▼.  ssi- 
sciences,  le  parallèle  qu'Ausone  établissoit  en  son  tems  en-  ^'^' 
tre  cette  Maîtresse  du  monde  et  l'une  de  nos  Provinces. 
Non,  ce  n'étoit  pas  seulement  à  Rome  qu'il  falloit  cher- 
cher d'autres  Gâtons,  et  des  hommes  qui  parloient  élo- 
quemment  la  langue  latine,  non  plus  qu'à  Athènes  d'autres 
Aristides.  11  s'en  Irouvoit  en  bon  nombre  dans  nos  Gaules 
et  des  uns  et  des  autres. 

.£mula  te  latix  décorât  facundia  linguiU. 


^cc  sola  aniiquos  ustcntut  Iloiiia  Culoues. 
Autuuus  tantum  justi  spcctalui-  ut  luqui 
Poilet Aristides,  vetercsque  illustrât  Alhcnas. 


IV. 'C'est  ce  que  l'Empereur  Claude  reconnoissoit  lui-  Tac. an i. n.  n. 24. 
même,  et  dont  il  nous  a  laissé  quelques  preuves  dans  la  ha-  ^ù^'"^"'  ''"'"^' 
rangue  qu'il  fit  au  Sénat,  en  faveur  de  l'entrée  qu'il  postu- 
loit  pour  les  Gaulois.  On  y  en  avoit  déjà  admis  plusieurs 
de  la  Gaule  Narbonoise  ;  et  l'on  y  en  admit  encore  plu- 
sieurs autres  des  villes  de  Lyon  et  d'Autun.  Et  tous  ceux  qui 
y  furent  reçus,  ne  firent  pas  moins  d'honneur  à  cette  au- 
guste compagnie,  que  les  naturels  du  pais.  Num  Italiens  Se- 

nator provinciali  potior  est?'  Nvmpcenitet insignes  viros  e  Ta«.  ibid.  n.  n. 

Gallia  Narbonensi  trnnsivisse?  V^nlre  ces  illustres  Gaulois,  qui 
firent  un  des  plus  grands  ornemens  de  Rome  et  de  son  Sénat, 
'  Claude  nous  fait  connoître  un  Lucius  Vestinus  l'un  de  ses  inscr.  iwa. 
plus  chers  favoris ,  qu'il  emploïoit  dans  ses  affaires  dôme  - 
stiques ,  et  dont  il  vouloit  élever  les  enfans  à  la  dignité  du 
Sacerdoce,  afin  de  les  pousser  ensuite  à  d'autres  plus  grands 


128  ETAT  DES  LETllES 

honneurs.  11  nomme  encore  un  Persicus  issu  d'une  des  plus 
anciennes  noblesses  et  son  favori,  qui  avoit  merilé,  comme 
ses  ancêtres ,  d'avoir  une  statue  à  I^ome.  Veslinus  et  Persi- 
cus étoient  de  la  Viennoise.  Lalro ,  dont  le  nom  a  quelque 
chose  de  dur  et  d'odieux,  puisqu'il  signifie  un  voleur,  étoit 
de  la  même  Province.  11  fit  paroître  une  adresse  si  surpre- 
nante en  toutes  sortes  d'exercices,  qu'elle  le  fit  nommer  le 
prodige  des  jeux.  11  eut  la  gloire  d'avoir  mis  le  Consulat 
dans  sa  famille,  avant  que  sa  colonie  eût  acquis  le  droit  de 
Bourgeoisie  à  Rome.  11  avoit  un  frère  qui  est  loué  comme 
lui  par  l'Empereur  Claude ,  comme  un  homme  d'un  mérite 
extraordinaire  ,  et  qui  auroit  été  un  excellent  Sénateur , 
sans  le  malheur  qu'il  eut  de  se  voir  l'entrée  fermée  dans  le 
Sénat ,  par  sa  qualité  d'étranger  ,  avant  que  Vienne  eût  ob- 
tenu le  droit  d'y  entrer. 

s.;ncc.  (le  coiisi.  c.       V.  Il  faut  joiudrc  à  ceux-là  '  Valerius  Asiaticus,  cet  hom- 

m  l' i^TÎi'i.'Knii..'!;  ^c  si  célcbre  dans  l'histoire  |)our  son  courage  et  sa  probité. 

I.  p.  197.  aid.  Il  ^\[^J[[  (i,j  Vienne.  Ses  grandes  alliances  et  ses  richesses  le 
rendirent  puissant  dans  la  Province.  Il  se  vit  à  deux  différen- 
tes fois  él(;vé  à  l'honneur  du  Consulat.  Caligula  en  fit  un  de 
ses  plus  infimes  amis.  Mais  cet  Empia-eur  abusant  de  son  au- 
torité ,  deshonora  depuis  le  mariage  de  ce  fidèle  courfisan , 
et  lui  en  faisoit  ouvertement  des  railleries.  Asiaficus,  homme 
de  cœur  et  de  resolution  ,  ne  put  .souffrir  long-tems  celle 
injure ,  .sans  en  tirer  vengeance.  Comme  il  étoit  d'ailleurs 
fatigué  du  mauvais  gouvernement  de  Caligula,  il  entra  sans 
peine  dans  la  conjuration  contre  ce  Prince;  et  après  sa  mort 
il  eut  la  fermeté  de  dire  en  plein  Sénat,  qu'il  voudroit  l'a- 

Tiii.  p.  'iii).  voir  tué  lui-même.  '  11  étoit  si  universellement  estimé  ,  que 

l'on  songea  à  l'élire  même  Empereur  à  la  place  de  Caligu- 

p.  liu.  117.  la.  '  Cependant  sa  propre  grandeur  et  ses  grandes  richesses 

furent  cause  de  sa  perte.  Messaline  jalouse  de  l'une,  et  en- 
vieuse des  autres,  trouva  le  secret  de  se  défaire  de  ce  grand 
homme ,  malgré  la  force  avec  laquelle  il  repoussa  toutes 
les  fausses  acusafions  de  celle  méchante  Princesse.  On 
nous  pardonnera  ,  si  nous  nous  sommes  un  peu  étendus  sur 
l'éloge  (le  cet  illustre  Gaulois,  et  si  nous  en  usons  de  même 
à  l'égard  de  quelques  autres.  Nous  n'aurons  point  d'autres 
ocasions  de  parler  d'eux  ;  et  l'on  nous  pouroit  blâmer  de 
ne  pas  faire  connoître  de  si  dignes  élevés  des  écoles  Gauloi- 
ses. 

VI. 


DANS  LES  GAUI>ES.    I   SIECLE.         129 

VL  '  Peu   de  tems  après  on  vit  briller  dans  les  armées  Tac.  wst.  i.  i.  n. 
Romaines    un    autre    Valerius   Asiaticus,   qui  nous  paroît  4^|,.V  "^*' '' 
avoir  été  fils  du  précèdent.  D'abord  il  fut  un   des   princi- 
paux Officiers   de   l'armée   de   Vindex  contre  Néron,  puis 
Gouverneur  de  la  Gaule  Belgique,  et  désigné  Consul  avec 
Mucien   pour   l'an  70.   Lorsqu'Othon  eut  envahi  l'Empire, 
Asiaticus   se   déclara  des  premiers   pour  Vitellius,  qui  fut 
bien-tôt  Empereur,  et  qui  lui  promit,  ou  donna  même  sa 
fille  en  mariage.  '  Caïus  Julius  Vindex,  qui  descendoit  des  tui.  ibid.  p.  lei- 
anciens  Rois  d'Aquitaine,  et  soûtenoit  sa  naissance  par  de  a'^p.^s.'ij.^'i:}.'' 
grandes  qualités,  exerça  aussi  vers  le  même  tems  une  des 

f)rincipales  charges  de  l'Empire.  Il  étoit  Gouverneur  de 
a  Gaule  Celtique  sous  le  titre  de  Propréteur.  Il  avoit  de 
la  prudence,  beaucoup  de  cœur  et  de  hardiesse,  une  gran- 
de expérience  dans  la  guerre,  et  autant  d'amour  pour  la 
gloire  que  d'aversion  pour  la  servitude.  Indigné  des 
cruautés  de  Néron,  qui  tenoit  alors  l'Empire,  il  fut  le 
premier  qui  se  souleva  contre  lui,  et  se  déclara  pour  Gal- 
ba. Quoiqu'il  n'eut  point  de  troupes  dans  sa  Province,  il 
eut  néanmoins  bien-tôt  amassé  une  armée  de  cent  mille 
hommes,  tant  on  étoit  mécontent  du  règne  de  Néron. 
Mais  il  eut  le  malheur  de  sucomber  sous  le  poids  de  cette 
entreprise.  Il  fut  défait  près  de  Besançon,  et  contraint 
de  se  tuer  lui-même  la  dernière  année  de  Néron,  68*  de 
nôtre  Ere  commune. 

VIL  '  Poppœus  Vopiscus  étoit  en  si  grande  considéra-  Tac.  hist.  1. 1.  n. 
tion  à  Vienne  sa  patrie,  que  ce  fut  pour  obliger  cette  vil-  lu]  '"''"•'*"''•  p 
le  que   l'Empereur    Othon    lui   céda   le  Consulat.  G'étoit, 
comme  on  sait,  la  première  dignité  de   l'Empire  pour  un 
particulier,  à  laquelle  on  n'élevoit  encore  que  des  person- 
nes de  savoir  et  de  mérite.'  En  69,  lorsque  Vitellius  et  Ves-  Tac.  ibid.  i.  3.  n. 
pasien  se  disputoient  l'Empire,  Valerius  Paulinus  natif  de  f.'*à} 
Frejus,   étoit  Intendant   de   la  Gaule  Narbonoise.  Il  savoit 

fiarfaitement  la  guerre,  et  avoit  beaucoup  de  crédit  parmi 
es  Prétoriens,  dont  il  avoit  été  auti-efois  l'un  des  Tribuns 
ou  Colonels.  Comme  il  étoit  ami  de  Vespasien  avant  mê- 
me son  élévation,  il  avança  considérablement  ses  affai- 
res, en  faisant  déclarer  pour  lui  la  ville  de  Frejus,  avec  la 
côte  de  tous  les  pais  voisins.  '  yEbutius  Liberalis,  qui  étoit  senec.  ep.  9i  i  tui. 
de  Lyon,  se  distingua  aussi  par  une  charge  assez  conside-  '  '  '  ^' 
rable  qu'il  exerça  dans  les  troupes.  '  Mais  de  tous  les  Gau-  Tac.  an.  i.  u.  n. 

T  T     D   '  n      ^  n  40|hist.l.a.  n.8G. 

Tomel.  Frein.  Part.  R 

1  3  « 


n.  I  I  not.  ibid. 


130  ETAT  DES  LETRES 

Iqîs  qui  parurent  h  la  tête  des  armées,  personne  ne  se 
signala  ni  avec  plus  de  valeur  ni  avec  plus  de  succès  qu'An- 
tonius  Primus  surnommé  Bec  de  coq.  Ces  troia  grands 
hommes  savoient  aussi  bien  manier  la  plume  que  l'épée, 
et  ne  firent  ,guévc&  moins  d'honneur  aux  letres,  quaux 
armes  qu'ils  portèrent.  Nous  aurons  ocasion  de  parler 
plus  amplement  d'eux  dans  la  suite, 
jui.  Cap.  Ant  viu  VIII.  Ici  u'oublious  pas  '  Titus  Aurelius  Fulvius  ou 
Fulvus,    aïeul   paternel   de  Tite  Antonin  le  meilleur  et  le 

Rlus  équitable  de  tous  les  Empereurs  païens.  Il  étoit  de 
fisme  dans  la  Gaule  Narbonoise.  Divers  honneurs  aux- 
3uels  il  fut  élevé,  le  conduisirent  jusqu'à  la  Préfecture 
e  Rome,  et  au  Consulat.  Il  remplit  cette  dernière  digni- 
té à  deux  différentes  fois,  la  première  en  85  avec  Domi- 
tien,  et  la  seconde  en  89  avec  Atratinus,  Aurelius  Fulvius 
son  fils,  loué  pour  l'intégrité  de  ses  mœurs,  fut  aussi  Con- 
sul comme  son  père,  mais  subrogé  à  quelque  autre  ;  puis- 
que son  nom  ne  se  trouve  pas  dans  les  fastes  consulaires. 
Titus  Fulvius  avec  toute  sa  famille  quitta  les  Gaules,  pour 
s'aller  établir  en  Italie,  et  fut  le  premier  des  Gaulois  qui 
en  usa  ainsi.  Il  choisit  pour  le  lieu  de  sa  demeure  le  village 
de  Lanuvium.  Ce  fut  là  que  Tite  Antonin,  depuis  Empe- 
reur, prit  naissance,  et  passa  sa  jeunesse  sous  la  discipline  de 
son  aïeul.  Il  ne  paroît  pas  y  avoir  lieu  de  douter,  que  Ful- 
vius ne  contribuât  autant  que  tout  autre,  à  former  le  jeu- 
ne Antonin  à  cette  rare  éloquence,  et  à  cette  belle  litera- 
ture,  que  l'Auteur  de  sa  vie  loua  depuis  en  cet  Empereur. 

IX.  Nous  n'entreprenons  pas  de  faire  ici  une  énume- 
ration  exacte  de  tous  les  Officiers  que  les  Gaules  donnè- 
rent à  l'Empire  en  ce  siècle.  Il  s'en  faut  de  beaucoup  que 
l'antiquité  nous  les  fasse  tous  connoître.  Nous  marquons 
ceux  qui  se  présentent  d'eux-mêmes,  afin  de  faire  juger 
que  le  nombre  en  doit  avoir  été  considérable,  pour  que 
la  connoissance  de  ceux-ci  ait  échapé  aux  injures  des  tems. 
Une  autre  conséquence  que  l'on  en  doit  tirer,  et  qui  est 
plus  importante  pour  notre  sujet,  c'est  qu'il  faut  que  les 
écoles  Gauloises  fussent  encore  alors  bien  florissantes.  En 
effet,  qui  avoit  formé  tous  ces  grands  hommes  et  tant 
d'autres,  et  les  avoit  rendus  capables  de  remplir  aussi  di- 
gnement les  premières  charges  de  l'Etat?  N'éloitHje  pas 
les  académies  publiques  que  nos  Provinces  avoient  ouver- 


DANS  LES  GAULES.    I   SIECLE.         lâl 

tes  à  leur  jeunesse?  '  Aussi  ce  fut  à  ce  dessein,  que  les  Em-  Pan.  b.^  p.  n*. 
pétèuts  dans  les  siècles  suivans  prirent  un  soin  particulier  '*^  "  ° 
dé  rétablir  dans  nos  Gaules  les  écoles  qui  étoient  tom- 
bées en  décadence,  et  de  mettre  à  leur  tète  de  dignes 
Modérateurs,  qui  formassent  de  dignes  sujets  pour  les  be- 
soins de  l'Empiré.  Quoique  les  illustres  Gaulois,  dont 
nous  venons  de  faire  le  dénombrement,  aient  moins  brillé 
dâfla  lés  lélres  qu'à  la  tête  des  armées,  dans  le  gouverne- 
ment dés  Villes  et  des  Provinces,  et  dans  râdministrâliôn 
des  finances,  ils  ne  laissent  pas  de  nous  être  une  preuve 
éclatante  dé  l'aplicâtion  avec  laquelle  on  cullivoit  lès 
sciences  dans  nos  Gaules  en  ce  siècle. 

X.  A  tous  ces  grands  hommes  de  robe   et  d'épée   nous 
devons  joindre  quelques  Orateurs,   qui   pour   n'avoir  paru 
qu'en  certaines  occasions   dans  nos   Provinces,  n'en  méri- 
tent  pas    moins   de   trouver   place   parmi  nos  hommes  de 
letres.  '  Tels  furent  Julius  Auspex   et   Tullius  Valenlinus,  Tac.  hi»i.  i.  4.  n. 
dUi    donnèrent    quoique    différemment   quelques    marques 
aê    leur    éloquence    dans    l'assemblée   des   Gaules  lenuë  à 
Reims.    C'élôit    en    l'an   70;    et  il  s'agissoit  de  délibérer, 
s'il   étoit   à   propos   ou  de  profiter  des  divisions  entre  Vi-    • 
tellius  et  Vespasien  pour  se  procurer  la  liberté,  ou  dé  de- 
meurer dans  l'ôbéiâsance,  Valentin  Urateur  et  député  des 
peuplés    de    Trêves,    âpres    avoir    préparé    une    harangue 
pompeuse,    parla  avec  beaucoup  de  véhémence,  et  contre 
la   domination   des    Romains,    et  en  faveur  de  la  guerre. 
Auspex   au    contraire,    l'un    des    premiers    de   la  ville  de 
Reims  et  son   Orateur,   esprit  aussi  modéré   et  pacifique, 
que  Valentin  étoit  remuant  et  emporté,   parla  à  son  tour 
avec  tant  de  force  et  de  sagesse  cfes  avantages  de  la  paix, 
et  des  suites  funestes  de  la  guerre,  que  son  avis  fut  suivi  dé 
la  plupart  des  peuples  des  Gaules,  comme  le  plus  sage  et 
le  plus  utile   Sapientmimum  quemque,  dit  Tacite  en  parlant 
de  ce  discours  d  Auspex,  reverentia  fideqtie,  juniores  penculo 
ac  The  tu  continuil. 

XL  '  Les  Helvetiens,    qui  faisoient   encore    alors   partie  '•  '•  •»•  87.  ev. 
dés  Gaules,  avôiènt  en  ce  même-tems  en  la  personne  de 
Claudius  Cossus  un  Orateur  encore   plus   célèbre   que  les 
pfécédéns.    C'étoit,    selon   Tacite,    un   homme  d'une  élo- 

3uenéé  reconnue.  Cossus  en  sut  faire    usage  pour  lo  bien 
é  sa  pâtriç.  La  ville  d'Avenehe  étant  tombée  avec  le  reste 

Rij 


132  ETAT  DES  LETRES 

du  pais  au  pouvoir  de  Caecina,  elle  fut  remise  à  la  discré- 
tion de  Vitellius.  En  cette  extrémité  Cossus  fut  député 
vers  le  nouvel  Empereur,  à  qui  il  parla  avec  tant  d  élo- 
quence en  faveur  des  siens,  que  ce  Prince  auparavant  ir- 
Faii.  bii).  lai.  app-  rite,  SB  laissa  fléchir,  et  leur  pardonna.  '  L'on  trouve  un 
P'  ''■  Claudius,   qui   a  traduit  de  grec  en  latin  les  Annales  Ro- 

maines   de    Caïus  Acillius.     Mais,    comme    quelques-uns 
nomment  ce  Traducteur   Clodius   Licinius,    nous   ne   pré- 
tendons pas  assurer  qu'il  soit  le  même  que  l'Orateur  Glau- 
Tac  ihid.  n.  68.     dius  Cossus.  Cclui-ci  pouvoit  être  frère  '  de  Claudius  Se- 
verus    que    les   Helvetiens    avoient   choisi   pour   leur  chef 
dans  leur  révolte.  Ne  seroient-ils   point   descendus  l'un  et 
Appian.  i)ci.  Gai.  l'autre  '  d'uu   Claudius   Paulus  qui  a   écrit  des  Annales, 
""■  "^"  comme  nous  l'aprend  Appien   dans  son  abrégé  de  la  guerre 

des  Gaules  ?  Ce  Claudius  Paulus  relevoit  dans  son  ouvrage 
les  victoires  que  les  anciens  Tigurins  avoient  remportées 
sur  l'armée  de  Pison  et  de  Lucius  Cassius  :  ce  qui  pouroit 
faire  penser  que  cet  Auteur  étoit  du  pais  des  Helvetiens. 
Si  l'on  en  avoit  des  preuves,  cet  Historien,  quoique  très- 
peu  connu  d'ailleurs,  augmenteroit  le  catalogue  de  nos 
anciens  Ecrivains  Gaulois. 

XII.    Ce    n'est    encora     à   que    la    moindre   partie   des 
preuves    que    ce    siècle  nous  fournit,   pour  vous  montrer 
quel  honneur  y  ont  fait   les   Gaulois  à   la   république   des 
letres.  Vous  allez  vous  en  convaincre  à  n'en   pas  douter, 
en  considérant  ceux  qui  ont  fait  une  profession  particulière 
des  sciences,  et  que  nos  Gaules  ont  presque  tous  prêtés  à 
Rome,    soit  pour   ses   écoles,  soit  pour  le  barreau.  Ici  se 
sen.ir.  I.  t.  loni.  prcseutc   dcs   premiers  '  Vibius  Gallus  qui   fit  l'admiration 
uii'.'icom.'ao"'  ^^s  plus  célèbres  Orateurs  dans  cette  Capitale  de  l'Univers. 
'•  5.  pr.  Oscus  ou   Oscius,    quoique   son   éloquence    ne   filt  pas  du 

goût  de  tout  le  monde,  à  cause  des  pointes  malignes  dont 
elle  étoit  hérissée,  ne  laissa  pas  d'y  faire  un  des  ornemens 
1. 3.  coni.2o|i.  i.  du  barreau.  '  Votienus  Montanus,  dont  Seneque  le  père 
ne  parle  qu'avec  éloge,  y  parut  avec  éclat  entre  les  hom- 
mes les  plus  éloquens.  Au  même-tems  que  celui-ci  y  bril- 
loit  par  son  éloquence,  Julius  Montanus  son  frère  s'y  di- 
Tac.  vit.Agr.  n.4i  stiuguoit  par  SOU  talent  pour  la  Poésie.  '  Julius  Graecinus 
scncc.  de  bon.  1.  ^  ^^^  ^^^^^^  d'houncur  au  Sénat  par  sa  probité,  qu'aux 
letres  par  ses  écrits  sur  l'agriculture.  Claude  le  plus  savant 
Empereur  qu'eut  Rome  en  ce  siècle,  prit  naissance,  et  re- 


cont.  24-'2;). 


DANS   Li:S  GAULES.    I  SIECLE.  133 

eut  sa  première  éducation  dans  les  Gaules.  Pétrone  cet 
Ecrivain  si  délicat,  fit  les  délices  de  la  Cour  de  Néron, 
par  sa  politesse  et  son  bon  goût  pour  les  belles-letres, 

XIIL  Ne  passons   pas  si    légèrement    sur   les   Orateurs. 
En  voici  encore  d'autres,  qui  ne  firent   pas   moins  d'hon- 
neur à  la  ville  de  Rome,  qui  fut  le  théâtre  où  ils  parurent, 
qu'aux  Gaules  qui  furent  le  lieu  de  leur   naissance.  '  Do-  Dw.  i.  59.  p.  7531 
mitius  Afer  s'acquit   dans  celte  grande  ville  la  réputation  an'^^i.'n.'ss.'eG'!''' 
du   plus  célèbre   Avocat    qui    y   eût  paru  depuis  l'empire 
d'Auguste,  et  s'y  vit  élevé  aux  premières   dignités   de   la 
République.  '  Agrotas,    qui    semble    n'avoir    plaidé   qu'en  Senec.  1.  2.  com. 
grec,    s'y   fit  admirer  au-dessus  des  Grecs  naturels,  sinon       ^' 
par  la  politesse  du  discours,  au  moins  par  l'énergie  de  ses 
sentences.  '  Clodius  Quirinalis  y  enseigna  avec   un  si  grand  Hier.  chr.  i.  2.  p. 
succès,  qu'il  mérita  de  passer  pour  un  des  plus  fameux  Rhe-  **'• 
teurs  de   son   tems.  '  Julius  Florus  et  Julius  Secundus,  on- 
cle et  neveu,  dont  Quinfilien  qui  les  avoit  connus,  relevé 
l'éloquence   par   de  grands  éloges,  n'y  brillèrent  pas  avec 
moins  d'éclat.  '  Sextus  Julius  Gabinianus  y  poussa  sa  repu-  Diai.  Ueor.  n.  «e. 
tation  jusqu'à  passer  pour  tenir  le  premier  rang  entre  les 
Rlieteurs  de  son  siècle,  comme  Ciceron  le  tenoit  entre  les 
Orateurs   de  son   tems.  '  Marcus  Aper  un  des  plus  beaux  "•  s-  in- 
génies  qu'on   vît   alors,   y   illustra   le   barreau  autant  que 
tout  autre,  et  y  mérita  d'aller  de  pair  avec  les  Avocats  les 

f)lus    célèbres.'  L'Orateur  RufTus,   qui  se  piquoit  de  par-  Juv.  sat.7.  v.213. 
er  si  purement  que  les  écrits  de  Ciceron   même  n'étoient  *'*'    '"'  '''^^' 
pas  à  couvert  de  sa  censure,  fît  aussi  quelque  personnage 
sur  ce  théâtre  des  savans.  '  N'oublions  pas  Artanus,  ce  Ju-  Man.  i.  s.  epi.  72. 
risconsulte  de  Narbone,   dont  Martial   qui    l'avoit  connu  à 
Rome,  nous  a  laissé  l'éloge. 

XIV.  Si  de  l'art  de  l'éloquence  et  de  la  science  des  loix 
nous  passons  à  la  Médecine,  nous  verrons  que  nos  Gaulois 
y  ont  excellé  comme  dans  les  autres  sciences,  et  que  Ro- 
me a  encore  tiré  des  Gaules  des  secours  consideratles  en 
ce  genre.  En  effet  '  Charmis  et  Crinas  après  le  milieu  de  Piin.  Wsi.  1.29.  e. 
ce  siècle  y  exercèrent  la  Médecine  avec  un  succès  prodi- 
gieux; quoiqu'ils  y  suivissent  une  méthode  extraordinai- 
re, et  qu'ils  s'y  fussent  fraïé  des  routes  nouvelles.  Demo- 
sthene  autre  Médecin  célèbre,  ne  s'acquit  pas  seulement 
de  l'estime  parmi  les  Romains,  sa  réputation  s'étendit  en- 
core jusques  chez  les  Grecs,  où  il  a  eu  pour  admirateurs 


m  ETAT  f)ÊS  LETftES 

Galiên  l'un  de  leurs  plus  fameux  Médecins,  et  ouél(^ilêà 
autres  après  lui.  Pendant  que  ces  doctes  Gaulois  misoiônt 
un  des  plus  grands  ornemens  de  la  ville  de  Rome  par  leur 
savoir,  d'autres  contens  de  briller  dans  leur  propre  pais, 
s'apliquoient  à  communiquer  le  leur  à  leurs  compatriotes. 
L'histoire  qui  tie  nous  aprend  pas  tout,  he  nous  fait  Con- 
noître  qu'un  Pacatus,  un  Castor,  et  un  Stâtius  Ursulus  OU 
Surculus,  qui  enseignoient  la  Rhétorique:  les  deux  pre- 
miers à  Marseille,  et  le  troisième  à  Toulouse.  En  un  môl 
l'amour  que  les  Gaulois  avoient  pour  les  sciences,  jettâ  si 
loin  Son  éclat  en  Ce  siècle,  qu'il  n'y  eut  pas  jusqu'à  fa  gran- 
de Bretagne,  ce  pais  que  la  mer  semble  séparer  du  resté  du 

Tac.  fit.  Agr.  n.  mOude,  qui  ne  Se  ressentît  de  Ses  effets.  '  Agricole  qui  en 
fut  Gouverneur  sous  Domitien,  y  établit  les  études  âVéô 
tant  de  succès,  que  les  peuples  du  pals,  quelque  barbares 
qu'ils  fussent,  devinrent  passionnés  pour  l'éloquence. 

XV.  Il  nous  est  aisé  de  juger  par  tous  ces  traits,  com- 
bien les  études  étoîent  encore  alors  florissantes  dans  nos 
Provinces,  et  que  leurs  écoles  n'avoient  encore  rien  per- 
du de  leur  première  splendeur.  Oui,  encore  alors  Marseil- 
le |)assoit  pour  une  des  plus  célèbres,  comme  une  des  jplus 
anciennes  Académies  du  monde.  Encore  alors  elle  étôit  le 
séjour  des  Muses,   la  source  des  beaux  arts,  la  mère  et  la 

sirab.  1. 4.  p.  123-  pcpinicre  des  savans.   '  Comme  les  Marseillois  avoient  égâ- 

**f-  lé  les  Lacedemoniens  par  leurs  richesses,  les  Rhodiens  par 

le  nombre  de  leurs  vaisseaux:  aussi  égaloienl-ils  lés  Athé- 
niens par  la  profession  de  toutes  les  sciences.  Encore  alors 
on  y  cultivoit  particulièrement  TAslrologié,  la  Médecine, 
la  Philosophie,  la  Jurisprudence,  les  Belles-Letres.  Enco- 
re alors  les  Romains,  celte  Nation  si  polie,  oubliûient 
l'Athènes  des  Grecs,  et  quittoient  Rome  même,  pour  ve- 
nir à  Marseille  l'Athènes  des  Gaules,  aprendre  à  bien  par- 
ler, et  à  bien  vivre.  On  y  conservoit  encore  en  ce  premier 
siècle  cet  amour  des  sciences  et  de  la  sagesse,  que  les  Pho- 
céens qui  la  fondèrent,  y  avoient  âporté  du  fond  dé  la 
Grécê.  Encore  alors  le  luxe,  le  faste,  la  débauche,  la 
licence,  la  comédie  en  étoiént  entièrement  bannis;  et 
l'on   y   voïoit   régner   la  gravité,    la  modestie,  l'honnêteté, 

tm.  vit.  Agr.  n.  la  poIltesse,  la  frugalité.  En  un  mot,  '  Marseille  étoit  en- 
core une  école  publique  de  sagesse  et  de  scietuje,  où  l'on 
aprenoit  et  à  régler  ses  mœurs,  et  à  devenir  savant.  C'est 


4. 


DANS  LES  GAULES.    I   SIECLE.        135 

autant  à  l'éducation  qu'Agricole  y  avoit  reçue  ,  qu'à  son 
heureux  naturel,  que  Tacite  son  gendre  attribue  le  mé- 
rite et  les  vertus  de  son  beau-pere. 

XVL    Après  Marseille  '  Autun   devint   en   ce  siècle  un  an.  i.  3.  n.  45.  >■ 
lieu  de  très  grand  abord  pour  l'étude  des  belles -lettres. 
Cette  ville  passoit  pour  une  des  plus  riches  de  toutes  les 
Gaules,  '  et  se  vantoit  d'en  être  une  des  plus  nobles ,  com-  |^[   "  ''"*    '' 
me  elle  en  étoit  une  des  plus  asservies  aux  superstitions 
idolâtres    L'enceinte   de  ses  murs  étoit  d'une  fort  grande  Amm.    1.  15.  p 
étendue.    Nous    avons  parlé    ailleurs   de   l'ancienneté   de  ^o^. 
cette  ville,  et  nous  l'avons  représentée  comme  un  lieu  con- 
sacré aux  sciences  dés  son  origine,  par  la  destination  qu'en 
avoient  fait  nos  anciens  Philosophes  pour  y  tenir  leurs  as- 
semblées les  plus  ordinaires.  'Elle  avoit  ses  aqueducs,  son  i-ips.  in.Tac.1.3. 
capitole,  et  les  autres  édifices  publics,  comme  la  ville  même  ^' 
de  Rome.'  Ses  écoles,  qu'on  nommoit  Menienes,  étoient  Pan.  b.  p.  1*3.  n. 
ftur-tûut  fameuses  tant  par  la  magnificence  et  la  beauté  de 
leurs  édifices ,  que  par  le   grand  concours   des  étudians. 
'  Elles  se  trouvoient  situées  à  l'entrée  de   la  ville  entre  le  p-  i»*  n.  9 1 153. 
temple  d'Apollon  et  le  capitole  ,  où  il  semble  qu'il  y  eût  "  "' 
aussi  un  temple  dédié  à  Minerve  la  Déesse  des  sciences  et 
des  beaux  arts.  '  Dès  l'empire  de   Tibère   les  enfans    des  Tac.  lUd. 
meilleures  familles  des  Gaules  y  alloient  étudier  en  foule  : 
nobilisstmam  Galliamm  Sobolem  liberalibus  studiis  ibi  opera- 
tam.  L'expression  dont  se  .sert  ici  Tacite,  fait  juger  qu'on  y  en- 
seignoit   toutes  les  sciences   en   usage    chez   les   Romains. 
Vous  verrez  dans  la  suite,  '  que  les  Empereurs  regardoient  Pan.  b.  p.  1*4. 
ces  écoles  comme  étant  d'un  grand  secours  pour  le  gouver-  **''  "'  '' 
nement  de  l'Empire. 

XVIL  L'histoire  de  ce  siècle  ne  nous  fournit  rien  de 
particulier  touchant  les  autres  écoles  de  nos  Provinces. 
Mais  quoique  l'on  ne  nous  en  aprene  rien  ,  il  ne  laisse  pas 
d'y  avoir  beaucoup  d'aparence  que  le  nombre  en  étoit 
déjà  grand.  En  efîet  il  n'est  pas  croïable  que  des  villes 
aussi  illustres  que  l'étoient  Narbone  ,  Arles ,  Vienne  ,  et  • 
tant  d'autres,  n'eussent  imité  Marseille  et  Autun  en  un  éta- 
blissement aussi  honorable  pour  la  patrie  qu'avantageux 
pour  le  bien  de  l'Etat.  Il  en  faut  dire  autant  des  colonies 
que  les  Mar^eillois  avoient  établies  dans  la  Gaule  Nar- 
bonoi»e.  Le  grand  nombre  de  gens  de  letres  sortis  de  di- 
vers endroits  de  cette  Province  en  ce8  premiers  siècles, 


136  ETAT   DES   LETRES 

strab.  1. 4.  p.  130.  fortifie    puissamment    nôtre  conjecture  '  pour    Toulouse  , 
que    la   célébrité    de   son   temple    fameux   rendoit    depuis 
long-tems  une  ville  de  très -grand  abord  ;  il  n'y  a  guéres 
Hier.  chr.  1.  2.  p.  lieu  de  douter  qu'elle  n'eût  dès  ce  tems-ci  ses  écoles.  '  On 
*"'■  trouve  effectivement  en  ce  premier  siècle  un  Slatius  Surcu- 

lus  de  Toulouse,  qui  enseignoit  la  Rhétorique  dans  les 
Gaules  avec  beaucoup  de  réputation.  Ne  peut-on  pas  faire 
le  même  raisonnement  en  faveur  des  autres  endroits  de  nos 
Provinces ,  où  nous  avons  vu  paroître  quelques  Orateurs  , 
comme  à  Avenche  dans  le  païs  des  Helvetiens  ,  à  Trêves 
et  à  Reims  dans  la  Belgique  ? 

XVIII.  11  faut  bien  que  Vienne  cultivât  les  letres  d'u- 
ne manière  particulière,  pour  avoir  eu  en  ce  siècle  autant 

Mari.  1. 7.  ep.  87.  ^c  savaus  qu'elle  avoit  de  citoïens.  '  C'est  l'idée  que  le 
Poète  Martial  nous  en  donne  ,  en  nous  aprenant  que  de 
son  vivant  même  le  recueil  de  ses  poésies  ètoit  fort  répan- 
du dans  cette  ville.  On  l'y  voïoit  entre  les  mains  de  tout 
le  monde.  Les  femmes  comme  les  hommes  ,  les  jeunes 
gens  comme  les  vieillards  ,  tous  l'y  lisoient ,  et  en  faisoient 
leurs  délices.  Un  tel  honneur  flatoit  extrêmement  l'amour 
propre  de  ce  Poète ,  qui  témoigne  l'avoir  plus  estimé  que 
tout  l'or  que  le  Tage  jette  sur  son  rivage ,  et  tout  ce  que 
l'Afrique  et  la  Sicile  ont  de  plus  délicieux.  Ecoutons  -  le 
s'en  expliquer  lui-même. 

Pertur  habere  meos,  si  vera  est  faina,  libellos 

Inter  delicias  pulcra  Vienna  suas. 
Me  legit  oranis  ibi  senior,  juvenisque  puerque, 

Et  coram  tetrico  casta  puellaviro- 
Hoc  ego  nialucritn,  quam  si  mea  carmina  cantent 

Qui  Nilum  ex  ipso  protinusore  bibunt  : 
Quam  meus  Hispano  si  me  Tagus  impleat  auro, 

Pascal  et  Hybla  mcas,  pascat  Hymettos  apes. 

Cet  endroit  de  Martial  en  nous  montrant  que  Vienne  étoit 
remplie  de  gens  de  letres,  nous  montre  aussi  que  le  latin  y 
étoit  la  langue  vulgaire,  comme  nous  avons  dit  ailleurs 
qu'il  l'étoit  dans  toutes  les  Gaules. 

XIX.  Si  dès  les  commencemens  la  ville  de  Lyon  n'eut 
suet.  Cîcs.  1.4. n.  pas  une  école  réglée,  'elle  eut  au  moins  l'avantage  de  voir 

en  ce  siécle-ci  établir  dans  l'enceinte  de  ses  murs  des  jeux 

literaires. 


DANS  LES  GAULES.    1  SIECLE.         137 

literaires,  qui  dévoient  inspirer  une  émulation  merveilleu- 
se pour  les  belles-letres.  Dans  ces  jeux  ou  exercices ,  qui 
se  laisoient  en  grec  et  en  latin ,  les  Orateurs  s'exerçoient  à 
qui  réussiroit  le  mieux.  Ils  prononçoient  leurs  pièces  d'é- 
loquence en  public  ;  et  ceux  qui  étoient  vaincus  étoient 
obligés  de  fournir  le  prix  dû  aux  victorieux,  et  de  faire  leur 
éloge.  Ceux  qui  avoient  tout  à  fait  mal  réussi,  et  que  les 
auditeurs  avoient  siffles,  étoient  condamnés  à  effacer  leurs 
pièces  ou  avec  une  éponge ,  ou  avec  leur  langue  ;  à  moins 
qu'ils  n'aimassent  mieux  subir  la  peine  de  la  férule  ,  ou 
être  jettes  dans  la  rivière.  Ces  combats  literaires  se  li- 
vroient'  à  un  des  deux  autels  qui  étoient  dans  le  fameux  sirub.  i.  4.  p.isj. 
temple  consacré  à  l'honneur  d  Auguste  au  confluant  du  v.  *t. 
Rhône  et  do  la  Saône.  La  honte  dont  étoient  couverts 
ceux  qui  y  réussissoient  mal  ,  et  la  peine  à  laquelle  ils 
étoient  condamnés  ,  rendoient  ordinairement  ces  Ora  - 
teurs  pâles  et  tremblans.  '  C'est  ce  qui  a  fait  dire  à  Ju-  Juv.  ibia.  v.  «. 
vénal  : 


et  sic 

Piillcat,  ut  nudisprcssit  quicalcibusan^'ucm, 
Aut  Lugdununscm  Rlictur  dicturus  ad  aram. 


■<«-„■-• 


'  Lyon  fut  redevable  de  l'établissement  de  ces  exercices  à  suci.  ma.       * 
l'Empereur  Caligula  ,  qui  les   y  établit  la  troisième   année 
de  son  règne,  quarantième  de  notre  Ere  vulgaire.  'Le  tem-  Tiii.H.  E.i.a.p. 
pie  où  ils  se  faisoient,  avoil  été  dédié  par  Drusus  l'an  742  "'^^' 
de  la  fondation  de  Rome  ,  quelques  années  avant  la  nais- 
sance de  J.  Cj.  '  On  croit  qu'il  étoit  nommé   Athanacum,  p.  26. 
pour  Athenœum,  qui  signifie  un  lieu  destiné  aux  exercices 
des  letres,  et  que  c'est  au  même  endroit  que  fut  bâtie  dans 
la  suite   l'Abbaïe  d'Aînai,  qui  porta  le   même   nom   latin , 
et  qui   a  été   convertie    depuis   quelques   années    en   une 
Eglise  collégiale. 

XX.  Vous  voïez  donc  que  non -seulement  Vienne,  mais 
que  nos  autres  principales  villes  aussi  étoient  remplies  de 
gens  savans  ,  et  que  l'on  cultivoit  dans  les  Gaules  ailleurs 
qu'à  Marseille  et  dans  la  Narbonoise  ,  la  langue  gréque 
avec  la  latine.  Les  combats  literaires  ,  dont  nous  venons 
de  parler,  en  sont  une  preuve  éclatante  pour  Lyon,  et 
sans  doute  aussi  pour  le  pais  circon voisin.  On  sait  qu'avant 
Tome  I.  Prem.  Pari.  S 


106.  107. 


138  ETAT  DES  LETRES 

ce  lems-ci  cette  ville  étoit  un  lieu  de  très  grand  abord. 
L'assemblée  qui  se  trouvoit  à  cette  sorte  de  spectacle  nou- 
veau, ne  pou  voit  donc  qu'être  fort  nombreuse.  Or  il  fal- 
loit  que  les  auditeurs  sussent  bien  le  grec  et  le  latin  pour 
juger ,  comme  on  supose  qu'ils  jugeoient ,  des  pièces  d'é- 
loquence qu'ils  entendoient  prononcer  en  l'une  et  l'autre 
langue.  Et  jusqu'où  de  tels  exercices  n'en  dévoient -ils  pas 
étendre  la  connoissance  ?  Il  arriva  sur  la  fin  de  ce  siècle 
un  autre  événement ,  qui  ne  put  qu'être  préjudiciable  à  la 
ville  de  Rome  pour  les  sciences;  mais  qui  ne  servit  qu'à 
les  répandre  davantage  dans  quelques -unes  de  nos  Pro- 
vinces, qui  ne  paroissent  pas  s'y  être  fait  beaucoup  de  re- 
Tiu.  Emp.t.  *.p.  putation  auparavant.  '  Vers  l'an  94  l'Empereur  Domitien 
""  '"'  publia   un   édit   contre   tous  les    Philosophes  ,  qui   étoient 

alors  en  grand  nombre  à  Rome ,  d'où  se  voïant  expulsés , 
ils  se  dispersèrent  en  divers  pais  éloignés.  Quelques-uns 
se  retirèrent  dans  les  extrémités  les  plus  occidentales  des 
Gaules  ,  et  y  communiquèrent  les  connoissances  qu'ils 
avoient  acquises. 

XXI.  Autant  que  l'on  s'apliquoit  dans  les  Gaules  à  y 
cultiver  les  sciences  ,  autant  on  y  avoit  soin  d'y  faire  fleu- 
rir les  beaux  arts.  Vous  pouvez  juger  sur  quel  pied  ils  y 
piin.hi»t.i.s4. e.  étoient '  par  ce  que  Pline  l'Historien  nous  aprend  de  la 
cizelure,  de  la  sculpture  ou  art  statuaire.  On  ne  voïoit 
point  en  ce  siècle  ni  à  Rome  ni  dans  tout  le  reste  de  l'Em- 
pire d'aussi  habiles  maîtres  en  ces  arts  qu'il  y  en  avoit 
dans  nos  Gaules.  Un  certain  Zenodore  entre  autres  s'ac- 
quit la  réputation  d'un  des  plus  excellens  graveurs  et  sculp- 
teurs qui  eussent  jamais  paru.  Il  laissa  divers  ouvrages  de 
sa  façon ,  dont  les  anciens  faisoient  une  estime  extraordi  - 
naire.  Il  fît  dans  la  capitale  de  l'Auvergne  une  statue  d'u- 
ne grandeur  énorme  ,  qui  representoit  Mercure  ,  et  que 
l'on  estimoit  quatre  millions  de  nôtre  monnoïe.  Zenodore 
emploïa  dix  ans  pour  finir  cet  ouvrage.  Pendant  qu'il  y 
Iravailloit,  il  cizela  avec  tant  de  perfection  deux  coupes 
sur  deux  autres  d'un  prix  infini ,  gravées  par  Calamide , 
qu'on  ne  trouvoit  nulle  différence  entre  la  copie  et  l'ori- 
ginal. La  grande  réputation  où  étoit  Zenodore  ,  porta 
l'Empereur  Néron  à  Vapeller  à  Rome.  Cet  habile  homme 
fit  le  fameux  Colosse  qu'on  avoit  résolu  d'ériger  à  ce  Prin- 
ce ,  et  qui  fut  ensuite  dédié  à  l'honneur  du  Soleil,  après  que 


18 


DANS  LES  GAULES.    I  SIECLE.         139 

Dieu  eût  délivré  l'Empire  d'un  si  méchant  Empereur.  C'é- 

toit  une   pièce  de  cent  dix,  '  ou  même   six-vingt  pieds  de  soet.cœs  i.e.  n. 

hauteur.  "  Les  Romains  se  plaisoient  fort  à  hanter  le  labo-  .pun.  ibid. 

raloire   de  notre  sculpteur,  et  ne  pouvoient  assez  admirer 

son  habileté   à  faire   des   figures   de   terre   et  d'osier,   qui 

étoit  la  première   manière  de  travailler  en  cet  art.  Pline , 

qui  nous  aprend  tous  ces  traits  d'histoire  ,  étoit  lui-même 

un  des  admirateurs  de  Zenodore. 

XXIL  Après   tout  ,   quelque  florissantes  que  fussent  les 
belles-letres   dans  nos  Gaules    et   Us    autres   Provinces  de 
l'Empire  en  ce  siècle,  l'éloquence  ne  laissa  pas  d'y  souffrir 
quelque   altération,  en   perdant  quelque  chose  de  ses  pre- 
mières  beautés.  '  Ce  seroit  se  tromper  que   de  s'imaginer  Quim.  mst.  or.  i. 
qu'il  en  a  été  de   ce  bel   art  comme  de  quelques  autres ,  **'  ''  "'  •*■  "*' 
qui   se  sont  perfectionnés  par  la  suite  des  tems.  '  A  cette  Petr.  sat.  p.  s.  9. 
noble  manière  de  s'énoncer  pure  et  sans  fard,  et  qui  bien 
loin  d'avoir  rien  d'empoulé,  sa  voit  se  soutenir  par  sa  beauté 
naturelle,  '  on  commença  en  ce  siècle  à  lui  substituer  des  p-  '^■ 
expressions  enflées,  et  une  vaine  cadence  de  mots,  qui  ne 
sont  que   des   phanlômes  d'éloquence  ,  et  qui   ne   servent 
qu'à   énerver  la   force   du   discours.  '  Les  choses   allèrent  D'»'  «r  »•  ' 
jusqu'à  ce  point,  «ju'au  lieu  de  ces  grands  Orateurs  qui  par 
la  beauté  de  leur  génie  ,  et  la  majesté  de  leur  éloquence 
faisoienl  la  gloire   des  siècles  passés,    à  peine  trouvoit-on 
en  celui-ci  quelqu'un  qui  méritât  le  nom   de  véritable  Ora- 
teur. C'est  ae  quoi  se  plaignoient  amèrement  divers  savans 
des  règnes   de   Néron   et  de  Vespasien.  Le  mal   venoit  de 
différentes  causes  qu'ils  ont  eu   soin  de  marquer  ,  et  qui 
nous  paroissent  trop  importantes  pour   ne  les  raporter  pas 
ici  d'après  eux.  Elles  méritent  d'autant  plus  d'être  connues 
dans  tous  les  tems,   qu'elles  ont  produit   encore   de   plu» 
mauvais   efi"els  dans  le   nôtre  ,  qu'au   siècle  de  ceux  qui  •' 

s'en  sont  plaints  les  premiers. 

XXin.  '  Le  peu  de  soin  que  les  parens  prenoient  de  la  "•  **• 
première  éducation  de  leurs  enfans ,  fut  la  première  cause 
de  la  décadence  de  l'art  de  bien  parler  en  ce  siècle.  Autre- 
fois les  mères  se  faisoient  un  devoir  indispensable  de  les 
nourrir  elles-mêmes.  Elles  mettoient  leur  principale  gloire 
à  les  élever,  et  à  veiller  sur  leur  domestique.  Les  Dames 
de  la  plus  grande  distinction  ne  s'en  dispensoient  pas  plus 
que   les  autres.  Nous  en  avons  d'illustres  exemples   en   la 

Sij 


140  ETAT   DES   LETRES 

personne  de  Cornelie  mère  des  Gracques,  d'Aurelie  mère  de 
César,  et  d'Attie  mère  d'Auguste.  Aussi  ce  devoir  est-il 
de  droit  naturel  pour  toutes  les  mères  en  gênerai ,  et  de- 
vient d'une  double  obligation  pour  des  mères  chrétiennes. 
Lorsque  les  enfans  étoient  sevrés ,  on  les  faisoit  passer  sous 
la  conduite  d'une  sage  matrone  de  la  famille ,  dont  la 
gravité  imprimoit  le  respect  à  tous  les  domestiques  ,  et  la 
présence  les  tenoit  dans  le  devoir.  Cette  matrone  faisoit 
son  capital  de  veiller  sur  toutes  les  paroles  et  les  moindres 
actions  de  ses  élevés,  et  ne  leur  souifroit  rien  qui  i)ût  bles- 
ser la  plus  severe  honnêteté.  Telle  étoit  dans  les  siècles 
passés  la  conduite  que  tenoient  les  parens  envers  leurs 
enfans  dans  leur  plus  tendre  jeunesse. 

Diaj.  or.  n.  29,  XXIV.  '  En  celui  -  ci  au  contraire  ,  si-tôt  qu'un  enfant 
étoit  né ,  on  le  donnoit  à  nourrir  à  quelque  étrangère  gré- 
que  ou  autre  ,  à  laquelle  on  associoit  un  indigne  laquais  ; 
et  l'enfant  sucçoit  avec  le  lait  les  vices  du  langage  et  les 
mauvaises  manières  de  ses  nourriciers.  On  le  négligeoit 
tellement,  que  personne  ne  se  mettoit  en  peine  de  lui  don- 
ner en  cet  âge  tendre  la  moindre  leçon,  soit  pour  bien  par- 
ler, soit  pour  former  ses  mœurs.  Ainsi  les  parens  bien  loin 
de  l'acoûlumer  de  bonne  heure  à  garder  les  règles  de  la 
modestie ,  et  à  prendre  les  premières  teintures  de  l'honnête 
homme  ,  l'abandonnoient  à  un  libertinage  ,  qui  avoit  tou- 
jours de  très-fâcheuses  suites.  Une  des  premières,  c'est  que 
ses  nourriciers  qui  n'entendoient  rien  à  l'éducation  de  la 
jeunesse  ,  faisoient  paroître  leurs. jeunes  élevés  au  théâtre, 
aux  combats  des  gladiateurs ,  aux  courses  des  chevaux ,  et 
autres  semblables  amusemens.  Qu'arrivoit- il  de-Ià  ?  L'es- 
prit de  l'enfant  se  remphssant  de  ces  spectacles,  se  nourris  - 
soit  de  leurs  idées,  ne  se  plaisoit  qu'à  en  parler  ,  et  perdoit 

"•28  par -là  presque  toute  aptitude  pour  les  arts  libéraux.  '  On 

observe  que  le  mal  commença  par  l'Italie  ,  et  que  de-là  il 
se  répandit  bien-tôt  dans  les  autres  Provinces  de  l'Em- 
pire. 

n.  29.  XXV.    'Une  autre  cause  de   l'afTolblissement    de   l'élo- 

3uence  vint  de  la  part  des  Maîtres  ,  et  de  leur  maniera 
'enseigner.  '  En  effet  les  Rhéteurs  de  ce  siècle  furent  les 
premiers ,  qui  commencèrent  à  corrompre  la  vraie  élo  - 
(juence  en  acoûtumant  leurs  disciples  à  des  expressions  dé  - 
hcatement  tournées ,  et  à  ne  parler  qu'avec  un  assortiment 


DANS   LES  GAULES.   1  SIECLE.         141 

de  paroles  qui  n'étoit  pas  natureL  De  sorte  que  bien  loin 
de  conduire  dans  le  vrai  chemin  de  l'éloquence  ceux  qui 
souhaitoient  d'arriver  à  sa  perfection  ,  ils  emploïoient  des 
manières  si  enflées  ,  et  une  pompe  de  discours  si  vaine, 
qu'elles  ne  servoient  à  autre  chose  aux  jeunes  gens  ,  lors- 
qu'ils entroient  dans  le  Barreau,  qu'à  leur  faire  croire  qu'ils 
étoient  transportés  dans  un  autre  monde.  Et  comment 
ceux  qu'on  élevoit  de  la  sorte,  auroient-ils  pu  parvenir  à 
la  délicatesse  du  goût  si  nécessaire  pour  la  belle  éloquen- 
ce? Ils  étoient  aussi  peu  capables  de  le  faire,  selon  l'ex- 
pression d'un  Ecrivain  fort  poli  ,  qu'il  est  possible  de  con- 
server une  odeur  gracieuse  en  fréquentant  les  cuisines. 
'  D'ailleurs  on  ne  voïoit  plus  en  ces  maîtres  d'éloquence  Diai.  or.  n.  29. 
cette  aplication  ,  cette  assiduité  ,  cette  émulation  si  loua- 
ble des  anciens  à  connoître  le  fort  et  le  foible  de  leurs  dis- 
ciples ,  à  les  exercer  selon  la  portée  de  leur  esprit ,  à  s'en  - 
tretenir  avec  eux  pour  les  former.  La  plupart ,  pour  ne 
pas  dire  tous  ceux  qui  se  mêloient  d'enseigner ,  avoient  des 
disciples ,  moins  pour  les  conduire  selon  les  sages  règles 
d'nne  severe  discipline ,  que  pour  s'attirer  leurs  saluts,  leurs 
louanges ,  leurs  aplaudissemens. 

XXVI.  '  Anciennement  un  Orateur  qui  entreprenoit  ».  n*. 
d'en  former  d'autres  ,  ne  les  perdoit  point  de  vûë.  Non 
seulement  ils  assistoient  avec  assiduité  à  ses  leçons  particu- 
lières; mais  il  vouloit  encore  qu'ils  l'acompagnassent  par- 
tout où  il  avoit  à  parler  en  public,  au  Barreau  ,  et  aux  au- 
tres lieux  d'assemolée.  Il  les  obligeoit  même  de  se  trouver 
à  ses  disputes  personnelles,  et  d'en  recueillir  ce  qu'ils  pou- 
voient ,  afin  qu'ils  aprissent  à  combattre ,  pour  ainsi  dire , 
dans    le   combat   même.   Quels   avantages    n'en   devoit-il 

f)oint  revenir  à  des  jeunes  gens ,  qui  étudioient  ainsi  sous 
es  yeux  de  tout  le  monde  ,  et  au  milieu  des  dangers  ,  où 
personne  ne  pouvoit  avancer  impunément  aucune  parole  , 
soit  mal  à  propos  ,  soit  à  contre  sens  ,  qu'elle  ne  fût  aussi- 
tôt ou  rejettée  par  le  Juge  ,  ou  relevée  par  la  partie  adverse  , 
ou  enfin  sifflée  par  les  autres  Orateurs  ?  Us  ne  pouvoient 
manquer  de  se  former  bien-tôt  le  jugement ,  et  a'acquerir 
en  peu  la  hardiesse  et  les  autres  qualités  nécessaires  pour 
parler  eux-mêmes  en  public.  Quoiqu'ils  ne  suivissent  qu'un 
Orateur  ,  ils  ne  laissoient  pas  de  connoître  tous  les  autres, 
qui  se  trouvoient  à  ces  fréquentes  assemblées.  Ils  y  étoient 
1  ♦ 


142  ETAT   DES    LETRES 

témoins  des  divers  jugemens  que  portoit  le  peuple,  et  qui 
leur  faisoient  aisément  comprendre  ce  qu'il  avoit  goûté  et 
ce  qui  lui  avoit  déplu,  llsavoient  par -là  un  excellent  mai- 
tre ,  qui  leur  montroit  non  le  phantôme ,  mais  la  réalité  de 
l'éloquence.  Des  émules  et  des  adversaires,  ils  étoient  as- 
surés de  n'y  en  jamais  manquer,  qui  savoient  attaquer  et 
se  défendre  en  braves.  Et  afin  qu'il  n'échapât  rien  de  ce 
qui  s'y  disoit  de  bon  et  de  mauvais,  il  s'y  trouvoit  toujours 
un  auditoire  composé  de  personnes  bien  et  mal  affection- 
nées. 
Diai.  or.  n.  33.  XXVII.  '  En  ce  siecle  au  contraire  ,  on  se  contentoit 
d'envoïer  les  jeunes  gens  aux  écoles  ,  où  il  seroil  difficile 
de  dire  ce  qui  leur  gâtoit  le  plus  l'esprit  et  le  jugement , 
ou  le  lieu  ,  ou  les  condisciples ,  ou  enfin  les  études.  Le 
lieu  ,  on  n'y  observoit  ni  ordre  ni  discipline  ,  et  il  n'étoit 
ouvert  qu'a  des  ignorans  :  les  disciples  ,  c'étoient  des 
enfans  avec  d'autres  enfans,  des  jeunes  gens  avec  d'au- 
tres jeunes  gens  ,  qui  parloient  entre  eux  et  s'entre-écou- 
toient  avec  la  même  assurance  :  les  études  ,  elles  leur 
étoient  nuisibles  pour  la  plus  grande  partie.  Car  les  Rhé- 
teurs de  ce  tems  se  bornoient  à  dos  pièces ,  ou  de  dispute 
ou  de   persuasion.   Ils  occupoient   les  enfans  à    celle&^i  , 

f)arce  qu'elles  demandoient  moins  d'esprit  ,  et  laissoient 
es  autres  à  ceux  qui  étoient  plus  avancés.  Mais  quelles 
pièces  pouvoient  sortir  de  telles  plumes?  On  faisoit  ser- 
vir à  cet  exercice  des  sujets  honteux ,  oposés  à  la  vérité , 
et  par  conséquent  plus  propres  à  gâter  l'esprit  qu'à  le 
former.  Tantôt  c'éloit  le  prix  accordé  à  des  meurtriers 
de  tirans,  qu'il  falloit  relever  par  de  grands  discours. 
Tantôt  c'étoit   quelque    autre   sujet    encore   plus    indigne , 

Petr.  au.  p.  4. .%.  qu'il  falloit  amplifier  par  des  raisonnemens  imaginés.  '  Ici 
c'étoient  des  pirates  qui  paroissent  sur  un  rivage  préparant 
des  chaînes  ;  là  des  Tirans  faisant  des  ordonnances  cruel  - 
les;  ailleurs  des  réponses  d'oracles  qui  ne  respirent  que  le 
sang.  On  tornboit  ainsi  dans  deux  défauts  essentiels  ,  en 
aprenant  d'une  part  à  cette  jeunesse  ce  qu'elle  auroit  dû 
ignorer,  et  de  l'autre,  en  ne  lui  enseignant  pas  les  choses 
qui  sont  de  l'usage  ordinaire. 

p-  **•  XXVlII.  '  Il  est  vrai    que ,    selon  Peirone  ,  le   mal    ne 

venoit  pas  tant  des  Professeurs  d'éloquence  ,  que  des 
parens  de  la  jeunettse.  Ceux-là  étoient  contraints  de  suivre 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  143 

la   manie  des  jeunes   gens  qu'ils  enseignoient ,   sans  quoi 
leurs   écoles   se   seroient  trouvées   désertes.  '  Mais   le    mal  Petr.  sat.  p.  is. 
venoit  en  particulier   de  la   faute   des  parens ,  qui  pous- 
soient  trop  tôt  leurs  enfans  au  Barreau.  '  Ils  agissoient  en  p-  •*• 
cela  avec  tant  de  contradiction,  que  bien  qu'ils  avouassent 
qu'il  n'y  a  rien  de  plus  grand  que  l'éloquence,  ils  en  fai- 
soient    faire   profession   à  des  enfans    qui    étoient    encore 
dans  la  première  jeunesse  ,  et  qui  n'avoient  que  des  étu- 
des  mal    digérées.  '   Et  c'est    ce    qui    fait   distinguer   une  w»'-  or.  n.  29. 
troisième  cause  d'afToiblissement  de  l'éloquence  en  ce  siè- 
cle. '  Les   anciens   avoient  soin    de   faire  précéder  la  leur  n.  30.  31. 
par  l'étude  de  tous  les  arts  libéraux.  Personne  ne  s'y  apli- 
quoit ,    qu'il    n'eût   apris    auparavant    la  Grammaire  ,    la 
Géométrie  ,  la   Philosophie  ,  ou    Dialectique ,    la   Morale  , 
la   Musique   même  ,  et   surtout   la   Jurisprudence.  '    Lors-  "•  ^• 
qu'un   jeune  homme  possédoit  toutes    ces   connoissances  , 
et  non  plutôt  ,  son  père  ou  ses  proches  le  presentoient  à 
l'Orateur  ,  qui  avoit  le  plus  de    réputation  aans  la  ville  ; 
et  le  jeune  homme  le  suivoit    assiduëment ,  comme  nous 
avons  déjà  dit  ,  soit  au  Barreau  ,  soit  à  son  école  ,  ou  ail- 
leurs, afin  de  se  former  sur  son  modèle  et  celui  des  autres 
Orateurs. 

XXIX.   '    On    commença    en  ce  siècle  à  s'écarter  d'une  «•  »• 
si  excellente  méthode.    On    apliquoit  les  enfans  à   l'étude 
de  l'éloquence  ,  avant  qu'ils  eussent  pris  une  connoissance 
nécessaire  de   l'antiquité ,  de    la   nature    des    choses ,    du 
caractère  des  hommes  ,   de  la  propriété  des  tems.  '  On  les  Veu.  sat.  p.  u. 
poussoit  au  Barreau  ,  sans  qu'on  les  etlt  fait  passer  par   les 
degrés  du  travail ,  et  qu'on   les  eût .  rendus   dociles    par 
l'assiduité  à    la  lecture  ,  et  maîtres  de  leurs  passions  par  les 
préceptes  de  la  Philosophie.  On  en  vouloit  faire  des  maî- 
tres dans  l'art  de  bien  parler,  avant  qu'ils  eussent   apris  à 
corriger  sans  complaisance   les    défauts  de  leurs  composi- 
tions ,  '  à  écouter   long-lems   les   choses    qu'ils   avoient  à  p-  »5- 
imiter  ,  enfin  à  mépriser  ce  qui  est  du  goût  ordinaire  des 
jeunes  gens.   Ce  fut  pour  avoir  discontinué  de   suivre   ce 
bel  ordre  des  anciens ,  que  l'on  ne  vit  plus  l'éloquence  pa- 
roître  avec  la  grandeur  et  le  poids  de  cette  majesté  qu'elle 
avoit   autrefois.  '  Les   Ecoliers   de   ce  siècle  traitoient  l'é-  p.  ib. 
tude  comme  un  jeu  ,  et  n'y  faisoient  des  progrès  que  très- 
superficiellement .   Aussi    se   faisoient-ils    siffler ,  lorsqu'ils 


144  ETAT  DES  LETUES 

paroissoienf  au  Barreau  ,  où  se  trouvoient  encore  plusieurs 
de  ces  grands  Orateurs  formés  sur  le  modèle  des  an- 
ciens. Telles  furent  les  principales  causes  de  l'altération 
que  l'éloquence  eut  à  souffrir  en  ce  siècle. 

XXX.   Il   faut  avouer   que   les   gens  de   Letres    de  ce 

tems-là  ,   s'étant  fraïé   de  nouvelles    routes  pour   parvenir 

à  l'éloquence  ,    celle  qu'ils  acquirent  ,   ne  pouvoit  qu'être 

Diai.  or.  n.  18.     différente  de  celle  des  anciens.  '  Et  c'est  de  quoi  l'un  des 

{)lus  zélés  Partisans  de  la  nouvelle  éloquence  ,  convenoit 
ui-même  sans  peine.  Mais  il  prétendoit  en  même-tems  , 
que  celle-ci  pour  être  nouvelle  n'en  étoit  pas  moins  esti- 

n.  a.  mable  que  l'autre.  '  Il  portoit  même  sa  confiance  jusqu'à  la 

lui  préierer  ,  et  à  dire  qu'il  en  étoit  de  celte  nouvelle  élo- 
quence par  raport  à  l'ancienne  ,  comme  de  celle  du  tems 
de  Ciceron  à  l'égard  de  celle  des  siècles  précedens.  Tout 
ce  que  l'on  pourroit  néanmoins  accorder  à  celui  qui  rai  - 
sonnoit  de  la  sorte,  c'est  que  l'on  ne  vit  jamais  plus  de 
personnes  qu'en   ce  siècle,  courir  après  l'éloquence,   parce 

n.  36.  qu'elle  étoit  encore  '  ou   recompensée  par  des  charges   et 

des  dignitez ,  ou  suivie  d'autres  avantages  très-considera- 
bles.  En  effet  les  Orateurs  continuèrent  en  ce  siècle  , 
comme  auparavant ,  à  se  voir  comblés  d'honneurs,  à  en- 
trer dans  la  faveur  du  Prince,  à  acquérir  du  crédit  dans 
le  Sénat,  à  gagner  l'estime  du  peuple  ,  à  étendre  leur 
réputation  jusques  chez  les  étrangers  le  plus  éloignés. 
C'étoient  eux  qui  remplissoient  encore  les  places  dans  le 
Sénat.  C'étoient  eux  qui  le  gouvernoient  par  leur  conseil ,  et 
le  peuple  par  leur  autorité.  L'on  étoit  encore  persuadé  que 
quiconque  n'avoit  point  d'éloquence  ,  étoit  mcapable  de 
remplir  les  places  honorables  cfe  la  République ,  et  même 
indigne  du  droit  de  citoïen  Romain. 


VIBIUS 


DANS  LES  GAULES.  1  SIECLE.         US 


VIBIUS   GALLUS, 

Orateur. 

ViBiDS  •  Gallus,     l'un     des    plus     éloquens     Ora-  vibius  gallus. 
leurs    de    son    tems ,  vint  au  monde  dans  les  Gaules,  

sans  qu'on  sache  précisément  en  quel  endroit  il  prit  nais-  pr^  p^'^èàVei  iTs! 
sance.  Pour  le  tems,  il  paroît  qu'il  étoit  plus  âgé  de  quel-  ^^,'-  ?^  p-  ^^  j 
ques    années    que    Seneque    le    père,    de   qui    nous  âpre-  7.  j'.  9.  p.  soi'. 
nons  le  peu  que  nous  savons  de  son  histoire.  Il  naquit  par 
conséquent    au    siècle    de    Ciceron ,     lorsque    l'éloquence 
étoit  dans  sa  plus  grande  splendeur.  Mais  il  ne  fleurit  que 
sous    l'Empire   d'Auguste,   où    il  commença  à  s'introduire 
divers    changemens    dans     l'ancienne     éloquence.     Il   fut 
néanmoins   un   de   ceux   qui  lui  firent  plus  d'honneur  de- 
puis Ciceron. 

'  Il  alla  à  Home  hanter  le  Barreau,  et  y  plaida  avec  senec.  1.  1.  cont. 
distinction,  au  même-tems  que  les  autres  fameux  Ora-  ''' 
teurs  que  Seneque  suivit  dans  sa  jeunesse  :  Porcins  Latro, 
Marillius ,  Cestius  Pius ,  Arellius  Fuscus  le  père ,  Junius 
Bassus,  Albutius  Silus,  Argentarius,  Pompeïus  Silo,  Fa- 
bianus,  Triarius,  Gorgias,  Hispo  Romanus,  et  tant  d'au- 
tres, qu'il  seroit  trop  ennuïeux  de  nommer  ici.  Il  est  aisé 
de  juger  et  de  l'affluence  des  cliens  qui  avoient  recours  à 
notre  Orateur,  et  de  la  réputation  qu'il  s'acquit  dans  le 
Barreau ,  par  le  grand  nombre  des  causes  qu'il  y  plaida. 
Il  parut  avec  éclat  dans  presque  toutes  celles  qui  s'y  plai- 
dèrent pendant  le  jeune  âge  de  Seneque.  Celui-ci  faisoit 
tant  de  cas  de  son  éloquence,  qu'il  a  cru  devoir  nous  en 
conserver  quantité  de  traits  dont  il  a  grossi  le  Recueil  pr.  p-  «. 
qu'il  a  dressé  sur  cette  matière  pour  laisser  à  la  postérité 
quelque  connoissance  des  grands  hommes  qui  avoient  il- 
lustré le  Barreau  de  son  tems. 

'  Seneque,    pour    nous   donner   quelque    idée  du  succès  '.  «•  ont.  9.  p. 
avec    lequel    plaidoit   Vibius  Gallus,  a  eu  la  complaisance  *"'  *"' 
de    nous   décrire    avec    auelaue    détail  la  manière  dont  il 
défendit   la  cause  d'un  nls  désavoué  par  son  père.  Il  s'a- 
gissoit  d'un  homme,  qui  aïant  déshérité  ses  trois  fils  pour 
Tome  I.  Prem.  Part.  T 


146  ETAT   DES   LETRES 

viBius  GALLUS.  Certaines  raisons,  avoit  demandé  à  un  pauvre  homme 
le  fils  unique  qu'il  avoit,  afin  de  l'adopter  à  la  place  de 
ceux  qu'il  avoit  deshérités.  Le  pauvre  acorde  volontiers 
son  fils;  mais  ce  fils  refusant  constamment  de  se  séparer 
de  son  propre  père  pour  se  donner  à  un  étranger,  son 
senoc.cont.  1.2.9.  perc  le  desavoùa.  '  Vibius  entreprit  la  défense  du  fils 
a.  p.  160.  p.  162.  ^jggj^yQJi^.    gt   quoique  Fabianus  eût  plaidé  la  même  cause 

avec  beaucoup  d'art  le  jour  précédent ,  Vibius  le  sur- 
passa :  et  par  la  force  de  son  raisonnement,  et  par  la 
douceur  de  son  éloquence,  il  eut  le  secret  de  persuader 
à  son  auditoire  tout  ce  qu'il  voulut,  et  réussit  particuliè- 
rement à  lui  inspirer  beaucoup  de  mépris,  et  même  dé 
l'horreur  pour  les  richesses. 

ibid.  '  Dès    lors   notre    Orateur   fit  paroître  quelques  traits  de 

l'état  humiliant  où  il  tomba  depuis.  En  faisant  la  des- 
cription des  richesses,  ce  qu'il  exécuta  avec  un  grand  flux 
d'éloquence ,    il    lui    échapa   de    dire   souvent   avec    une 

p.  160.  espèce  de  fureur  :  Je  veux  décrire  les  richesses.  '  Prenant 

dans  la  suite  cette  espèce  de  fureur  pour  un  agrément 
de  l'esprit,  il  la  poussa  si  loin,  et  s'habitua  tellement  à 
cette  manière  de  s'écrier  dans  ses  descriptions,  qu'il  fie 
plaisantoit  point  qu'il  ne  décrivit  l'amour,  et  qu'à  chaque 
Irait  de  cette  description  il  ne  s'écriât  avec  un  enthousias- 
me de  furieux:  Je  veux  décrire  l'amour.  Puis  continuant 
sa  description,  il  s'écrioit  encore  :  c'est  l'amour  que  ie 
veux  décrire.  Enfin  après  avoir  fait  ainsi  le  furieux,  il  le 
devint  réellement,  et  tomba  dans  un  excès  de  folie,  qui 
le  rabaissa  autant  aux  yeux  des  hommes,  que  l'éclat  de 
son  éloquence  l'y  avoit  auparavant  élevé.  De  sorte , 
remarque  Sencque,  qu'il  devint  fou  par  sentiment,  au 
lieu  que  les  autres  ne  le  deviennent  que  par  quelque  acci- 
dent fâcheux  (Xlll). 


DANS  LES  GAULES.   1  SIECLE.         147 

0  S  C  U  S, 

Orateur. 


Os  eu  s,    '    ou  Ose  II' s    selon    d'autres,    paroîl   par    ses      ose  us. 
habitudes    avoir   été    de   Marseille,    ou    du    voisinage  ;;Senec.  com.  i. 
de    cette   ville.  '    Quelques    modernes   prétendent   qu'il    y  Ègass.  Bui.  t.  i. 
enseigna  d'abord   la    Rnétorique  avec  un  grand  concours  ,  préf"c'.^7!''g^"9! 
et  qu'il  fut  ensuite  la  professer  à    Rome,   où   il   prit  des  p-  3<>3- 
leçons    d'éloquence    du    fameux    Orateur    Porcius   Latro. 
Mais  c'est  de  quoi  les  anciens  auteurs  qui  nous  font  con- 
noître   Oscus   ne  nous  aprennent  rien.  'Ils  démentent  mê-  Scnee.ibid.p.333. 
me  cette  dernière  circonstance;  et  il   est     visible    que    les 
modernes  qui  l'avancent  ont  entendu   d'Oscus  ce   qui   est 
dit  du  Rhéteur  Sparsus. 

'Seulement  il  est  certain    qu'Oscus   alla  de   Marseille  à  ibid.p.  ssaisuei. 
Rome   hanter  le  Barreau,    et   qu'il  y  parut  entre  les  plus  ''  '*' 
célèbres    Orateurs    de    l'Empire   d'Auguste    et   de    Tibère. 
'  Mais  il  eut  le  malheur  de  ne  s'y  faire  ni  aimer  ni  beau-  «mi.  p.  352. 
coup    estimer ,    pour    la    passion    qu'il    avoit  d'hérisser  de 

f (ointes  aiguës  et  malignes  ses  discours  familiers,  et  même 
'éloquence  qu'il  emploioit  dans  ses  déclamations.  Nous 
ne  pouvons  mieux  faire  connoître  son  génie,  qu'en  co- 
piant le  jugement  qu'en  a  porté  Seneque  le  père,  qui 
l'avoit  souvent  entendu  plaider. 

»' Oscus,  dit-il,  ne  déclamoit  pas  mal;  mais  il  fit  beau-  oàa. 
»  coup  de  tort  à  sa  réputation,  en  ne  prononçant  jamais  de 
»  discours  sans  y  mêler  en  mots  couverts  quelque  chose  de 
«piquant  et  de  malin.  Son  style  étoit  mauvais,  et  dénué  de 
»  figures.  Un  jour  au  matin  que  le  Rhéteur  Pacatus  le  ren- 
»  contra  à  Marseille,  il  lui  dit  plaisamment  en  le  saluant: 
»  je  pourrois  bien  dire  avec  raison  ave  Osce.  »  Pacatus  faisoit 
par-là  allusion  ,  et  aux  impertinences  qu'Oscus  avoit  a- 
coutumé  de  débiter,  et  à  son  nom  latin  qui  exprimoit  un 
tel  caractère.  '  En  effet,  les  anciens  croient  que  le  terme  Fesi.  p.  3i6. 31-. 
obscenus  est  venu  de  celui  d'Oscus,  pai?ee  que  les  Osques 
étoient  habitués  à  se  servir  de  paroles  obscènes. 

TiJ. 


148  ETAT   DES    LETRES 

0  s  c  u  s.  »  »  Ce    n'est  pas  sans  sujet ,  ajoute  Seneque,  que  Paca- 

~~         »  tus    traitoit    Oscus .  de  la  sorte  ;  puisqu'il  étoit  bien  éloi- 

«  ne».  1 1  .  ^^  g^^  jg  j^  vraie  éloquence  ,  et  qu'il  sembloil  n'être  né 
»  que  pour  dire  des  injures  à  tout  le  monde.  Quand  une 
»  fois  il  avoit  noté  quelqu'un  en  lui  donnant  un  nom 
»  odieux,  celui-ci  ne  pouvoit  plus  éviter  de  porter  une 
»  telle  qualification.  C  est  ainsi  que  le  célèbre  Passicnus 
»  porta  un  nom   infâme,    parce   qu'Oscus  avoit   changé  la 

p-  3S3.  „  première  syllabe  (*)  de  son  nom.  '  En  une  autre  occasion 

»  Oscus  fit  une  injure  sanglante  au  Rhéteur  Fulvius  Spar- 
»  sus,  lui  disant  en  public  pour  lui  reprocher  sa  stupidité  : 
»  comment  pourriez-vous  entendre  quelque  chose  à  un 
»  plaidoïer ,  vous  qui  ne  comprenez  pas  même,  lorsque 
»  vous  levez  de  terre  une  tuile?  » 

p-  352.  '  Après    tout ,    quoique    Seneque    ne    fit    pas    beaucoup 

d'estime  de    l'éloquence    d'Oscus ,    comme    l'on    vient    de 

p.  347.  voir ,  '  il  ne  laisse  pas  de  le  mettre  au-dessus  de  plusieurs 

autres  Orateurs  de  son  tems,  dont  la  réputation  ne  s'é- 
toit  pas  étendue  au-delà  des  bornes  de  leur  vie,  et  d'a- 
voir inséré  dans  son  Recueil  plusieurs  traits  de  ses  décla- 
mations ou  plaidoyers.  Il  paroîl  qu'0.scus  n'étoit  plus  au 
monde,  lorsque  ce  Rhéteur  Romain  parloit  ainsi  de  lui  à 
ses  enfans,  vers  le  milieu  de  l'Empire  de  Tîbére. 

(•)  Les    savans    soni    partagés    sur    le  qu'il  faut   lire  in  Grat,  pour  in  gru-rum, 
changement   de  celte   première   syllabe  du  et  qu'au  lieu   de  Passicnus  on  diroit  Gras- 
nom  de   Passicnus.    On   a   inséré   dans   le  sicnus,  qui   aprochoit   de    la    signiflcation 
texte  qu'Oscus  l'aNoil  changé  en  une  syl-  i'hircosut. 
labe    gréque.    Mais     d'autres     prétendent 


DANS  LES  GAULES.   I  SIECLE.        149 


AGROTAS, 

Orateur. 
ET 

P  A  C  A  T  U  S  , 

Rhéteur. 

Au  *   même- temps  que   Vibius   Gallus    et   Oscus ,    dont  agrotas  et 
nous  venons  de  donner  les  éloges  ,    hantoient   le    Bar-     pacatus. 
reau  à  Rome,  Agrotas  y  parut  aussi  entre  les  autres  Ora-  .  sonec.  i.  a.  cont. 
teurs.  Il  étoit  de  Marseille ,  et   ne    plaidoit    qu'en    Grec ,  "■  p-  *«• 
qui   étoit  la  langue  naturelle  de  sa  patrie  ,    comme   nous 
avons    dit    ailleurs.     Quoiqu'Agrotas    ne   la  parlât   pas  si 
poliment  que  les  Grecs  naturels ,    son  style  étoit  beaucoup 
plus  nerveux  el  plus  énergique   que   le  leur.    On    recon- 
noissoit  aisément  par-là  ,    remarque   un    ancien,  que  cet 
Orateur   étoit  né   sujet  des    Romains,  plutôt  qu'en  Grèce. 
Il  semble  néanmoins  qu'il  ne  fut  pas  si  emploie  dans  le 
Barreau  que  les  autres  Orateurs  de  son  temps.  Car  Sene- 
que  le  père,  qui  l'y  avoit  suivi,  ne  raporte  dans  son  Re- 
cueil qu'une  seule  sentence  de   ses   déclamations  ou  plai- 
doïers. 

'  Tout  ce  que  l'on  sait  de  bien  certain  sur  l'Histoire  de  ibu.  i.  s.  pr.  p. 
Pacatus  ,  c'est  qu'il  étoit  contemporain  d'Oscus  ,  et  qu'il  ^^ 
enseignoit  la  Rhétorique  à  Marseille.  Cette  ville ,  comme 
nous  l'avons  montré  en  son  lieu  ,  cultivoit  encore  alors 
toutes  sortes  de  sciences  avec  une  émulation  merveilleuse. 
Il  n'y  a  pas  sujet  de  douter,  qu'elle  ne  fût  redevable  en 
partie  à  ce  Rhéteur  de  la  réputation  qu'elle  conserva  en- 
core en  ce  siècle  pour  les  letres  ,  même  chez  les  étran- 
gers. 

'  Mais   on  a  peine  à    comprendre   la  raison   pourquoi , 
certains    critiques   ne  placent  Pacatus  que  sous  les  règnes  Bail.  jug.  préj.  c. 
de  Galba  et  de  Vespasien.    On  vient  de  voir  par  Seneque  ^'  ^'  ^'  ^'  ^'  ^*' 
le  père,  qui  vivoit  de  son  temps,  qu'il  portoit  déjà  le  titre 
de    Rhéteur ,   avant    qu'Oscus   dont  la  mort   précéda  celle 


150  ETAT    DES   LETRES 

A  G  R  0  T  A  s  et  (Je  Seneoue  ,  quittât  Marseille  pour  aller  à  Rome  faire 
PACATus.  preuye  de  son  éloquence.  Ainsi  puisque  Pacatus  étoit 
contemporain  d'Oscus  ,  il  est  plus  conforme  à  la  vérité 
de  le  mettre  sous  Auguste  et  sous  Tibère,  que  sous  Galba 
et  Vespasien,  plus  ds  cinquante  ans  après  qu'il  eut  com- 
mencé à  paroître  sur  le  Théâtre  des  savans. 

Baii.iug.DréUbid.       '  On  fait  uuc  autre  faute  aussi  énorme,   en  donnant  à 

as/i."''        '  ^'  Pacatus  le  prénom    de  Minutius  ,    parce   qu'on    paroît    le 
confondre  par-là ,   comme  a  réellement  fait  André  Schot , 

suid.  ir  p.  4.         '  avec  Minucius  Pacatus  Irenœus  Grammairien  Grec  natif 

,  d'Alexandrie.    Celui-ci  a  écrit  par  ordre  alphabétique  sept 

livres  sur  le  dialecte  des  Alexandrins,  ou  sur  le  Grécisme  ; 

trois  autres  livres  sur  l'usage  des  Attiques;    sur   l'Atticis- 

me  ;  sur  les  propriétés  du  dialecte  Attique  et  du  Dorique  ;  et 

{>lusieurs  autres  ouvrages.  H  y  a  bien  de  l'aparence  que 
e  prénom  de  Minutius  aura  été  donné  à  ce  Grammairien 
Egass.  Bol.  1. 1.  p.  pour  la  même  raison  '  qui  le  fit  porter  à  Lucius  Prœco- 
*"■  nimus  :  c'est-à-dire,   pour  s'être  trop  attaché  à  des  minu- 

ties dans  ses  écrits.  Nous  verrons  encore  reparoître  le  nom 
de  Pacatus  en  la  personne  de  plusieurs  autres  savans  Gau- 
lois des  siècles  suivans. 


CASTOR, 

Rhéteur. 

CASTOR.     /QUELQUES  *  Ecrivains  modernes   nous  donnent  un  Castor 
l^qu'ils    font    natif    de   Marseille ,    et   qu'ils    prétendent 
p.^'^o'i' Ban.'  jug!  avoir  enseigné  la  Rhétorique   dans  les  Gaules   avec  beau- 
préj.  c.  7.  8.  9.  p.  coup    (le    réputation.    Mais  ,    comme  ils  ne  citent  aucun 
ancien  auteur   pour   leur    garant ,    on    peut    légitijuenaent 
douter,  ce  semble,  de  l'existence  de  ce  Rhéteur.   En  effet , 
on   ne  voit  qu'incertitude  et  confusion  dans  tout  ce  qu'on 
en  dit  ;  et  l'on  a  même  poussé  les  choses  sur  ce  sujet,  jus- 
qu'à tomber  dans  des  anachronismes  intolérables. 
Ega.ss.  Bill.  ibia.         S'il  Cil    faut  croirc   un  de  ces  modernes,   '  Castor  étoii 
fils  de  Secondaire,  et  fut  le  maître,  ou  même  le  père  du 
fameux  Pétrone.    N'aïant    reçu  qu'une  naissance  obscure  , 
il  trouva  le    moïen    de    la  relever  de   la  naanière  la  plus 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  151 

glorieuse  ,  en  épousant  la  fille  de  Dejotare  Roi  de  Gala-  castor. 
lie,  qui  le  fit  mourir  dans  la  suite  du  temps.  Mais  qui  ne 
voit  que  l'on  confond  ici  un  Rhéteur  de  1  Empire  de  Ti- 
bère ,  avec  le  gendre  de  Dejotare  ,  qui  vivoit  près  d'un 
siècle  auparavant ,  du  temps  de  Ciceron  et  de  César  ,  et 
qui  ne  put  guéres  vivre  après ,  puisque  son  beau-pere  le 
fit  mettre  à  mort  ? 

Ce  n'est  encore  là  que  le  moindre  anachronisme.  En 
voici  un  autre  beaucoup  plus  monstrueux.  '  Castor  ,  cet  Egass.  bui.  ibid. 
éloquent  Orateur  laissa  ,  dit  -  on  ,  divers  ouvrages  de  sa 
façon  fort  bien  écrits  •  des  traités  sur  Babylone ,  sur  l'art 
de  bien  parler,  sur  la  manière  de  persuader  ;  un  recueil  d'i- 
gnorances chronologiques ,  et  quelques  autres  écrits  rem- 
plis d'érudition.  Mais  il  est  visible  que  l'on  confond  en- 
cot-e  ici  notre  Rhéteur,  avec  un  autre  Castor  plus  ancien 
que  lui  d'environ  deux  cens  ans.  '  Joseph  fait  mention  de  J»»;  i.  2.  in  Ap.  p. 
celui-ci ,  qu'il  qualifie  Chronographe ,  et  qu'il  place  après 
Timagenes  et  avant  Apollodore  pour  l'ordre  des  tems. 
'  Aussi  remarque-t-on  que  ce  Castor  auteur  des  ignorances  Bayi'  d.  p.  10*8.  i. 
Chronologiques  vivoit  tout  au  plus  tard  sous  Ptolemée 
Evergete  ;  puisque  ses  écrits  sont  cités  par  Apollodore  qui 
fleurissoit  alors  ,  vers  l'an  de  Rome  625.  Or  il  ne  paroît 
nulle  part  que  ni  ce  Castot ,  ni  le  gendre  de  Dejotare 
aient  été  de  Marseille;  et  il  est  évident  qu'ils  ont  vécu 
l'un  et  l'autre  fort  lohg-tems  avant  le  Rhéteur  qui  fait  le 
sujet  de  cet  article. 

De  tous  ceui  que  l'on  sait  avoir  porté  le  nom  de  Cas- 
tor dans  l'antiquité  ,  nul  n'aproche  pluâ  du  tems  de  ce 
Rhéteur  Gaulois ,  '  qu'un  Antoine  Castor  célèbre  Bota-  pun.  hisi.  1.  %-,.  c 
niste  ,  (jUi  entretenoit  un  jardin  des  plus  curieux  et  des  ^' 
pluâ  riches  en  toutes  sortes  de  simples.  11  vivoit  encore  du 
tehis  de  Pline  l'ancien,  âgé  de  plus  de  cent  ans,  sans  avoir 
jamais  été  malade.  Pline  l'avoit  connu  personnellement , 
et  «tvoit  visité  son  jardin.  Dira-t-on  que  cet  Antoine  Castor 
Vdisin  de  Pline  ,  comme  il  paroît ,  soit  le  même  que  le 
Rhéteur  de  Marseille  ?  Nori  âans  doute  ;  quoique  le  P. 
Hardoûin  ait  aVaticé  à  ce  sujet  un  paradoxe  aussi  insoute- 
nable ,  en  prétendant  que  cet  Antoine  Castor  étoit  le 
gendre  de  Dejotare  <  qui  ne  put  vivre  jusqu'au  temps  de 
Plirië  )  puisque  son  beau-pere  l'avoit  fait  mourir  plus  de 
soixante  ans  auparavant  (XIV). 


152  ETAT    DES   LETRES 

GERMANICUS 
CÉSAR. 

HISTOIRE    DE   SA   VIE. 

GERMANICUS    i-\  N    ne   trouve  nulle    part   dans  les   anciens  quel  fui  le 
c^SAR.       yj  lieu  de  la  naissance  de  Germanicus.  Mais  la  suite   de 
l'histoire    fait  juger  qu'il  naquit  à  Lyon,  comme  l'Empe- 
reur Claude  son  frère  puis- né,    pendant  qu'Antonia  leur 
mère  y  faisoit  sa  résidence,  environ  l'an  740  de  la  fonda- 
tion de  Rome ,    et    que   Drusus   leur    père  étoit   ocupé    à 
Tac  an.  I.  2.  n.  domtcr  Ics  Grisons  et  les  Germains.   '  Du    côté  paternel  il 
n.  1. 7*''  ^*'  '     se  trouvoit  neveu  de    Tibère  ,    et  du  côté   maternel  petit- 
fils  de  Marc   Antoine  ,    et    petit-neveu    d'Auguste.    11    fut 
ensuite    adopté  dans  la    famille    de  l'Empereur,  et  donna 
lui-même  un  Souverain  à  l'Empire  en  la  personne  de  Cali- 
gula  l'un  de  ses  fils. 
Dio.  I.  .17.  p.  705.1       '  Germanicus  vint  au   monde    avec   toutes   les  qualités 
T^'iud!i"l.  n'  qui  font  les  plus  grands  Princes.  On  ne  vit  jamais  tant  de 
33'*-  dons  de  la  nature  réunis  ensemble,  qu'il  en  parut  en  lui, 

soit  pour  l'esprit  soit  pour  le  corps.  Il  étoit  parfaitement 
bien  fait  ;  et  ron  ne  pouvoit  assez  admirer  la  bonne  grâce 
qu'on  découvroit  en  son  port  et  en  ses  discours.  Bien  diffé- 
rent de  Tibère,  qui  étoit  un  esprit  altier  et  d'une  humeur 
difficile  :  Germanicus  dès  son  jeune  âge  se  montra  gra- 
cieux ,  poli ,  obligeant ,  officieux  envers  tout  le  monde  , 
et  fit  voir  qu'il  avoit  un  talent  merveilleux  pour  gagner 
les  cœurs.  Aussi  fut-il  uniquement  aimé  et  chéri  de  tous" 
les  Romains ,  à  qui  tant  d'excellentes  qualités  faisoient 
espérer  qu'il  rétabliroit  un  jour  la  République  dans  son 
premier  lustre.  Sa  douceur  étoit  incomparable  ,  et  alloit 
jusqu'à  tenir  contre  les  injures  les  plus  sanglantes  et  les 
plus  mauvais  services.  Il  n'avoit  pas  cependant  moins  de 
valeur  et  de  courage,  que  de  bonté  et  de  clémence. 

Atout 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  lo3 

"  A  toul  cela  se  trouvoieiil  joints  tous  les  talents  de  l'es-    germanicus 
prit.  Et  comme  il  étoit  né  dans  le  siècle  le  plus  florissant        ^'^•'^^^'^- 
pour  les  letres  ,    on  eut  soin  de  l'en  faire  instruire  d'une  .  suei.  ibhi. 
manière  convenable  à  sa  naissance.  '  11  n'y  a  pas  de  doute  i.  2.  n.  64. 
qu'il  ne  fût  un  de  ces  petits-fils  d'Auguste,  à  qui  cet  Empe- 
reur, selon  le  témoignage  d'un  de  ses  Historiens,  se  plai- 
soil   d'enseigner   lui-même  les   letres  et  l'art  de  l'écriture. 
'  (jiermanicus  y  fil  des   progrès   proportionnés   à   la  gran-  i-  ♦  n.  3. 
deur  de    son  génie.    Son    inclination  le  porta  particulière- 
ment à  l'éloquence  et  à  la  poésie  en  l'une  et  l'autre  langue, 
la  gréque  et  la  latine.  Il  sut  se  servir  de  l'éloquence  pour 
haranguer  dans  le  Sénat  et  plaider  dans  le  barreau,  où  il 
plaida  même   après  avoir  reçu  les  honneurs  du  triomphe, 
il  fit  usage  de  la  poésie,  pour  se  délasser  quelquefois  des 
fatigues  de  Mars  par  ce  doux  et  innocent  amusement;  '  et  ovi.i.  Fasi.  1.  1. 
il  y  réussissoit  foit  bien  au  jugement  d'un  des  plus  célèbres  l""' 
Poètes  de  son  siècle. 

'Tel  étoit  Oermanicus  aux  veux  de  tous  les  Romains  et  pio,  1  .>;,",,  p.  «37 1 

j,  .  ,  .  .  •'.  ,         .  ..  Siiel.  ibid.  n.  1.  41 

d  Auguste  même,    qui  connoissant  mieux  son  mente  que  Tac.ibiri.i.i.n.sl 
personne ,   pensa  sérieusement  à  l'adopter   pour  son  fils  et  ''  ''  "'  '''■ 
son  successeur.  Mais  vaincu  par  les  importunitès  de  sa  fem- 
me, il  se  trouva  comme  forcé  à  adopter  Tibère.  Il  ne  le  fit 
néanmoins   qu'à   condition   que   Tibère    adopteroit    lui-mê- 
me Germanicus  ,  quoiqu'il  eût  déjà  un  fils  à  lui.   '  Cette  Paicic.i.'j.n.ios. 
double  adoption  se  fit  le  27  de  Juin  de  la  25*  année  d'Au-  l^\,[  ^"-  '^'"»'-  '• 
guste,  et  la  4'  de  nôtre  Ere  commune. 

Bien-tôt  Germanicus  quoiqu'encore  jeune   entra    dans  suet.  ihid.  n.  i. 
les  charges  publiques.   11  fut  Questeur  cinq  ans  avant  qu'il 
eût  ateint  l'âge  requis  pour   exercer  celte  charge.  Elle  lu 
fraïa  la  voie  au  Consulat  ,    auquel   il    fut    élevé  aussi-tôt 
après,  '  l'an  de  Rome  705  ,   douzième  de  l'Ere  vulgaire,  oio,  1.  50.  p.  6m. 
avec   C.    Fonteius   Capito    pour  collègue.   '  Soit  avant  ou  suei.  ibiri.  |Tac. 
après  celle  époque,    Auguste  l'envoïa  commander  les  huit  '''''*•  '•'•  "■  ^■ 
légions  qui    étoienl  sur  le  Rhin,  (iermanicus  à  la  tête  de 
celte  puissante  armée  vainquit  les  ennemis  de  l'Etal,  et  en 
alla  triompher  à  Rome.  '  Il  se  signala  ensuite  dans  la  guerre    p.,terc.  iwa.  n. 
de  Dalmalie  ,    où  il  s'acquit  la  réputation  de  grand  Capi-  ^"'' 
laine.  '  De-là  on  le  lit  passer  en  Orient,  toujours  à  la  tête  ^"'='-  '*''''•  "•  ^• 
des  armées,  pour  y  rétablir  les  affaires  de  la  République. 
Il  subjugua  le  Roi  d'Arménie  et  réduisit  la  Cappadoce  en 
une   province   de  l'Empire.   '•  Tibère  voulant  en  quelque  Dio,  1.57.  p.  c^o. 
Tome  I.  Prem.  Part.  V 


154  ETAT    DES    LETRES 

GERMANicus    sortc  reconnoîlrc  tant  de  services,  l'éleva  pour  la  seconde 
CESAR.        fois  au  Consulat,    en  le  prenant  pour  collègue  dans  cette 
dignité  ,  l'an  de  Rome  772 ,  dix-huitiéme  de  l'Ere  Chré- 
tienne. 

Mais  quelque  glorieux  que  fussent  pour  Germanicus 
Dio,  ibid.  n.  705 1  tous  CCS  hcurcux  succès,  ils  furent  beaucoup  au-dessous  '  et 
Tac.  ibid.  i.  a.  ^^  j^  modéralion-avec  laquelle  il  sut  soutenir  la  grandeur 
et  le  poids  de  la  plus  haute  fortune,  et  de  la  sagesse  qu'il  fit 
paroître  dans  toute  sa  conduite.  Il  fut  si  prudent  et  si  cir- 
conspect dans  toutes  ses  démarches ,  qu'il  évita  toujours 
de  rien  faire  ,  ou  que  Tibère  pût  blâmer ,  ou  qui  fût  ca- 
pable de  lui  atirer  l'envie  de  Drusus  son  fils. 
Dio.ibi.i.  p.  693  1  '  Ce  qu'il  fit  en  ce  genre  à  la  mort  d'Auguste,  est  du  plus 
suei.  ibid.  n.  1.  hcroïque.  A  la  nouvelle  de  cette  mort ,  les  légions  qu'il 
commandoit  en  Germanie  se  mirent  en  devoir  de  le  pro- 
clamer Empereur  à  la  place  de  Tibère,  et  en  vinrent  pres- 
que à  une  sédition  ouverte  pour  l'engager  à  y  consentir. 
Mais  ce  Prince  sage  et  modéré  en  tout  ce  qu'il  faisoit , 
refusa  constamment  les  offres  de  cette  nombreuse  armée , 
et  sortit  même  des  bornes  de  sa  modération  naturelle  , 
pour  arrêter  un  zélé,  qui  bien  que  juste  en  lui-même,  lui 
paroissoit  indiscret.  On  ne  sauroit  dire  ce  qui  éclata  le  plus 
en  cette  ocasion,  ou  la  modestie  de  Germanicus  à  refuser 
ainsi  l'Empire,  ou  sa  grandeur  d'ame  à  concilier  à  Tibère 
l'affection  des  soldats.  Exemple  rare  ,  et  peut-être  unique 
dans  toute  l'antiquité  !  Il  eut  l'adresse  de  donner  aux  trou- 

Fes  au  nom  du  nouvel  Empereur,  comme  s'il  en  eût  reçu 
ordre  de  sa  part ,  le  double  de  ce  qu'Auguste  leur  avoit 
Dio,  ibid.  p.  706.  Icgué  par  SOU  testament.  'Ce  ne  fut  pas  la  seule  rencontre 
où  il  auroit  pu  se  faire  Empereur,  s'il  l'avoit  voulu.  Mais 
il  le  méprisa    toujours  ;    et   ce  mépris  l'en  rendoit  encore 
plus  digne. 

Tant  de  signalés  services  rendus  à  la  République,  et  à  la 
personne  de  Tibère  en  particulier,  ne  furent  point  capa-* 
blés  de  mettre  Germanicus  à  couvert  des  traits  de  la  mé- 
chanceté de  cet  Empereur  naturellement  jaloux  et  défiant, 
p.  705. 706  ijac  '  Aïaut  SU  gagucr  Pison  et  Plancine  sa  femme  pour  se  dé- 
suet, iî.'id.  n.l.  5.  faire  de  ce  grand  homme,  il  se  servit  de  leurs  artifices  pour 
lui  donner  un  poison  lent,  qui  lui  ôta  la  vie  en  la  34e  année 
de  so<i  âge,  lorsqu'il  étoit  à  Antioche  en  Syrie.  Ainsi  mou- 
rut cet  excellent  Prince ,   comparable  en  tout  à  Alexandre 


6. 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  155 

le  grand.  Sa  mort  fut  pleurée  non-seulement  de  toute  la  germanicus 
province,  mai.s  aussi  de  tous  les  peuples  des  environs.  Les  ^'^'^^^ 
nations  mêmes  les  plus  éloignées ,  comme  les  Parthes  ,  et 
leurs  Rois  avec  elles,  en  témoignèrent  leur  regret  par  un 
deuil  public.  Rome  en  parut  incontrôlable,  sans  que  ni  les 
édils  de  l'Empereur  pour  prévenir  les  saillies  de  sa  conster- 
nation, ni  tout  autre  chose  fût  capable  d'adoucir  sa  juste 
douleur.  Tibère  fut  le  seul  à  qui  cette  mort  fatale  donna  de 
la  joie. 

'  Germanicus  avoit  épousé  Agrippine,  fdle  de  M.  Agrip-  snot.  ibid.  n.  .. 
pa  et  de  Julie,  et  en  eut  neuf  enfans.  Deux  moururent  dans 
leur  première  enfance ,  et  un   troisième  un   pou  plus  âgé. 
Les  autres  survécurent  le  père.  Il  y  avoit  trois  garçons  et 
trois  filles.  Les   garçons   étoient ,  Néron    qui  épousa  Julie 
petite-fille  de  Tibère;  Drusus,  et  Caligula  qui  fut  Empe- 
reur. Néron  et  Drusus  moururent  de  faim.   Les  trois  filles 
étoient  la  fameuse  Agrippine  mère   de  l'Empereur  Néron  , 
Drusille  qui  épousa  Lucius Cassius  ,  et  Liville,ou  Julie  se- 
lon Tacite,  qui  fut  mariée  à  M.  Vinicius.  Les  anciens  Hi- 
storiens   sont  pleins   des  éloges  de  (iermanicus.  '  Il  n'y  a  Paten-.    m<i.  a. 
que  Velleïus  Paterculus,  qui  bien  qu'il  lui  rende  justice  en  ""  **"' 
un  endroit,    en  parle  très-mal  en  un  autre,   par  des  vues 
d'une   politique    qu'on   ne  sauroil    lui    pardonner.  '  Voici  Epi.  eipoë.  vei.  i. 
son  épitaphe  telle    qu'on  nous  l'a  conservée   de   la   façon  ^'  ^  ^'' 
d'un  ancien  Poète. 

Parce  hospes  tumulo,  Cîesar  Germanicus  hic  sum  : 

Sœpe  etiatn  ignotis  ipse  dedi  requiem. 
Quod  si  quem  tumnlinihil  hujus  gratia  tangit, 

Admoneat  patriae  fraude  quod  hicjaceo. 
Sed  jaceo,  quamvis  non  vita  et  plenus  honore  : 

Hoc  une  ingratus  quod  genui  patrire  : 
Testata  est  mores  lacrymis  plebesque  patresque. 

Hsec  sunt  sinceri  judicia  ingenii. 

S-  IL 
SES   ECRITS. 

QUOIQUE    Germanicus  fît  sa    principale    ocupation    du 
commandement  des  armées,  il  ne  laissa  pas  de  culti- 
ver, beaucoup  les  letres,  et  de  leur  faire  honneur.  C'est  le 

Vij 


150  ETAT   DES    LETRES 

GEiiMANicus   témoignage   que  lui   rendent   presque  tous  les  anciens   qui 
^''-^■^'''-        parlent  de  lui.  *  Ovide  entre  autres  en  lui  dédiant  ses  Fa- 
•  ovid.  fosi.  I.  I.  stes,  relevé  avec  éloge  la  beauté   de  son  génie  ,  son    élo- 
'"  quence,  sa  grande  érudition  ,  le   talent  qu'il   avoit  pour  la 

suet.  c:is.  1. 4.n.  poësie.  '  11   laissa   divers  monumens  de   son  savoir,  entre 
^'  lesquel  Suétone  marque  des  comédies  en  grec.  Il    ne  pa- 

roît  plus  rien  des  pièces  gréques  de  Germanicus,  non  plus 
que  de  ses  harangues  ou  pièces  d'éloquence.  Il  en  avoit 
cependant  prononcé  plusieurs  ,  tant  au  barreau  que  dans 
Tac.  an.  1. 2.  n.  le  Sénat,  et  en  d'autres  ocasions.  '  Il  faut  seulement  en 
excepter  certains  petits  fragmens  de  quelques-unes  entre 
celles  qu'il  fit  à  la  tête  des  troupes  et  au  lit  de  la  mort. 
Tacite  qui  semble  les  avoir  vues  en  entier,  a  pris  soin  de 
nous  en  conserver  ce  qui  en  reste. 
p.,ë.  lat.  corp.  p.  '  Germanicus  laissa  aussi  des  épigrammes  de  sa  façon.  On 
!^.'i.'  îi.'"p.*49!*5o".  ^n  voit  encore  aujourd'hui  quelques-unes  latines  sur  divers 
sujets,  tant  dans  le  corps  des  Poètes  latins  ,  que  dans  le 
recueil  des  épigrammes  et  petites  poésies  des  anciens.  Il 
y  en  a  une  fort  ingénieuse  sur  un  enfant  de  Thrace,  qui  se 
jouant  un  jour  sur  l'Ebre  qui  étoit  glacé ,  rompit  la  glace 
et  périt  dans  l'eau.  L'on  ne  sait  sur  quel  fondement  on 
donne  à  Germanicus  à  la  tète  de  cette  épigramme  le  pré- 
nom de  Caïus  et  la  qualité  d'Auguste.  Une  autre  de  ces 
épigrammes  de  Germanicus  est  faite  pour  orner  le  tom- 
beau d'Hector.  Elle  est  immédiatement  suivie  de  quatre 
autres  sur  Caton,  et  d'une  cinquième  sur  Scœvola,  qui  ne 
portant  avec  elles  aucun  nom  d'Auteur,  paroissent  être 
du  même  Poète.  Toutes  ces  épigrammes  sont  en  vers  éle- 
giaques. 
Fab.  Bib.  lat.  p.  '  Le  principal  ouvrage  qui  nous  reste  de  Germanicus, 
p.''n3'!'^"*'''''*'  est  une  traduction  latine  des  phénomènes  d'Aratus  de  Ci- 
licie.  Ces  phénomènes  .sont  un  poème  grec  sur  les  constel- 
lations, dont  S.  Paul  au  17''  chapitre  des  Actes  des  Apô- 
tres, où  il  parle  aux  Philosophes  d'Athènes,  cite  le  com- 
mencement du  5®  vers  :  m\>  yip  "«î  Y'^°î  «'«[a^v.  Ciceron 
en  sa  jeunesse  et  Rufus  Festus  Avienus  avoient  déjà  tra- 
duit le  même  poème.  Mais  la  traduction  de  Germanicus 
a  sur  celles  des  autres  l'avantage  d'être  enrichie  de  notes 
qui  passent  pour  un  commentaire.  Elle  est  en  vers  hexamè- 
tres et  assez  bien  exécutée,  quoiqu'avec  un  peu  de  liber- 
té. II  s'y  en  trouve  moins  cependant  que  dans  les  tradu- 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  157 

étions  ni  de   Ciceron   ni   d'Avienus ,  que  l'on   ne  regarde    germanicus 

presque  que  comme  des  paraphrases.  ^^^'s^*^- 

'  Aux  phénomènes  d  Aratus  se  trouvent  joints  des  frag-  pab.  ibid.  p.  w. 
mens  de  progno-stiques ,  qui   ne  sont  pas  tant  pris  d'Aratus  *'• 

3ue  des  autres  Astrologues  Grecs,  et  qui  ont  été  aussi  tra- 
uits  en  vers  latins  par  Germanicus.  Divers  critiques  ont 
tenté  d'ôter  cette  traduction  à  ce  Prince,  pour  la  donner  à 
l'Empereur  Domitien,  qui  porta  le  surnom  de  Germanicus 
pour  avoir  vaincu  les  Germains.  Mais  d'autres  savans  ont 
fait  voir  par  des  preuves  convaincantes  qu'elle  apartient 
à  notre  Germanicus. 

'  Cette   traduction   des  phénomènes  et   des  prognostiques  p  47. 
a  été   fort  souvent  imprimée.  On  en  trouve  une   ancienne 
édition  faite   à   Boulogne   dès  1474,  peu  de   temps   après 
l'invention  de  l'Imprimerie.  'Il  y  en  eut  une  autre  à  Ve-  biI).  Tim».  1.3.  p. 
nise  sans  le  texte  original,  mais  avec  les  notes  ou  le  commen-  b^,'.  p.'  (u'.'''d^'  ~ 
taire  de   Germanicus  ,  la  paraphrase    d'Avienus  ,  et  quel- 
ques  autres   anciennes   pièces.    Cette   édition   est    de    Tan 
1488  en  un  volume  m-4°.  '  La  traduction  de  Germanicus     .  „  .   ,  . 

...  Barl).  t.    I.  p. 

acompagnée   du   texte    grec   d  Aratus   et   de   la  paraphrase  «*•  a- 
d'Avienus,  fut  réimprimée   au    même   endroit    les    années 
1500  et  1502.    On  joignit  à  cette  dernière  édition  le  com- 
mentaire dont  Germanicus  avoit   enrichi  sa  version  ;  mais 
on  en  retrancha  celle  d'Avienus. 

'Il  semble  que  ce  fut  cette  même  édition  de  Venise  qui  ...Lugii.-Bat.ib. 
servit  de  modèle  à  celle  qu'on  vit  paroître  à  Basle  l'an  1549, 
en  un  volume  m-S°,  avec  l'Astronomicon  de  C.  Julius  Hy- 
ginus. 

'  Morel  publia  à  son  tour  à  Paris  l'an  1 559  en  un  volume  ma. 
in-A"  la  traduction   de  Germanicus  et  son  commentaire.  11 
y  joignit  le  texte  grec  de   l'Auteur  original  ,  les  traductions 
gréques   de  Theon  et  de  Léonce   le   Mechaniste,  avec   les 
versions  latines  de   Ciceron ,  d'Avienus ,  et  l'Astronomicon 
d'Hyginus.  '  Cette  édition  revûë   par  Morel   fut   renouvel-  Bib.  Barb.  ibid. 
lée  à  Cologne  l'an  1568  en  un  volume  in-folio.  'On  la  vit       LugdBai  -ib. 
renaître  in-S"  l'an  1589  chez   Saint-André,  qui  n'y  laissa  i  ^a''  '•>»'' 
avec  le  texte  grec  que  l'ouvrage  de  Germanicus,  et  ce  qui 
nous  reste  des  paraphrases  de  Ciceron  et  d'Avienus;  mais 
qui  y  ajouta  le  Scholiaste  de  notre  Poëte  recouvré  en  Sici- 
le, et  quelques  autres  pièces  étrangères. 

'  En  1600  Hugues  Grotius   encore  jeune  publia  sous  la  fab.  ibid.  p.  48. 
1  5 


158  ETAT   DES   LETRES 

cERMANicus  direction  de  Joseph  Scaliger  un  recueil  des  écrits  d'Aratus, 
<^*^'SAH-  où  il  insera  la  traduction  de  ses  phénomènes  par  Germani- 
cus,  avec  des  notes  de  sa  façon,  dont  il  enrichit  ce  re- 
cueil. L'édition  qui  est  en  un  volume  m-4'*,  et  faite  à  Ley- 
de,  passe  pour  la  plus  parfaite  et  la  plus  entière  de  toutes 

«a.  Bsri).  iiii.i.  I.  celles  qui  avoient  vu  le  jour.  '  La  traduction  de  (iermani- 
CU3  fut  encore  imprimée  à  Lyon  l'an  1608  ,  avec  le  texte 
grec  d'Aratus.  (XV.) 


VOTIENUS   MONTANUS, 

Oratkhr. 


VOTIENUS        -^T  o  T  I  E  N  II  S  "    M  o  N  T  A  N  II  S  ,    l'uu    dcs     grauds 

MowTANiis.  y  hommes  de  Letres  de  son  siècle,  naquit  à   Narbone, 

•  iiari.  1. 8.  «pi.  quclqucs    années    avant    le    commencement    de    l'Empire 

'*■  d' Auguste.  **  Il  avoit  reçu  de  la  nature  un  génie   des  plus 

S8.  p.  335.  heureux,  mais  n  n  eut  pas  som  de  le  cultiver  autant  quil 

auroit  été  à  souhaiter.  C'est  ce  qui  l'a  fait  qualifier  par  un 

ancien  ,  qui  l'avoit  connu  personnellement ,  homo  ranssimi, 

p.  335.386.  etiamstnonemendatissimiingenn.  '  11  ne  laissa  pas  néanmoins 

d'acquérir    beaucoup    d'éloquence  ,  et  de  devenir  un    des 

plus  habiles  déclamaleurs  du  règne   d'Auguste  et  de  celui 

de  Tibère. 

ibid. i.s.coni.ao.       'il   quitta  sa  patrie    [»our  aller  à  Rome  suivre  le   bar- 

^  ***■  rcau  ,  où  il    plaida  av(;c    une    réputation  peu  commune  ; 

quoique  son  éloquence    ne  fût  pas  sans  quelques   défauts 

considérables.    Son    coup   d'essai    fut   son   plaidoïer   pour 

Galla   Numisia    en    présence    de    tout    le    Sénat.    Montan 

y   avança  plusieurs   trjiils  si  admirables  d'éloquence  ,  que 

Seneque  le  père  qui  s'y  trouva  présent,  a  cru  devoir  les 

cont.  85.  p.  .w.  conserver  en  partie   à  la  postérité.  '  Car  quand  il    vouloit 

s'en  donner  la  peine,  il  traitoit  son    sujet  d'une  manière 

coni.  2M.  p.  .340.  majestucusc.  '  Il   avoit   sur-tout  le    secret  de   faire    sentir 

avec  une  adresse  fine  et  [jolie  le  foible  des  personnes;  et  il 

en  faisoit  quelquefois   usage  pour   tourner  en  ridicule  les 

inepties  des  Rhéteurs. 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  159 

•  Mais  ces  grandes  qualités  étoient  un  peu  ternies  par     von  en  us 
un  défaut  auquel  il  se  trouvoit  sujet,  et  que  ses  meilleurs      mowtawus. 
amis  n'ont  pu  lui  passer.  C'est  qu'il  gâtoit  ses  discours  par  «seneci-s.  eom. 
trop    de   fréquentes   répétitions    des    mêmes  choses.    Pour  *■  *'■  3^'*- 
avoir  négligé  de  s'en  corriger  d'abord  dans  ses  harangues  , 
où   l'on  s'en   apercevoit  moins  ,  il   le    fit  passer  dans  ses 
plaidoïers  ,  où  il  étoit  intolérable   à  cause  de  la   précision 
que  demandent  ces  sortes  de  pièces.    Comme   l'on  repro- 
choit   le   mêmç   défaut    au   Poëte   Ovide   contemporain   de 
Montan ,  le   célèbre   Scaurus   avoit  pris  de-là    ocasion    de 
surnommer  Montan   l'Ovide   des  Orateurs  ,  et  de  qualifier 
Montaniana  les  répétitions  d'Ovide. 

'Montan  poussoit  ce  défaut  si  loin,  qu'il  alloit  quel-  i.  :$.  ront.  ao.  p. 
quefois  jusqu'à  répéter  même  ce  que  d'autres  avoient  dit.  ^'■-**^'- 
On  en  remarque  un  exemple  bien  irapant.  Un  jour  que  cet 
Orateur  fut  acusé  juridiquement  devant  l'Empereur,  par 
Vinitius  Avocat  de  la  ville  de  Narbone  sa  partie  adverse, 
il  ne  fit  presque  que  répéter  pour  sa  défense  ce  que  Vi- 
nitius avoit  dit  contre  lui  :  de  sorte  qu'on  auroit  pensé 
qu'il  faisoit  le  personnage  d'acusateur. 

Ce  défaut  qui  marquoit  en  Montan  une  grande  .stéri- 
lité ,  ne  venoit,  sans  doute  ,  que  de  la  négligence  qu'il  i.  t.  pr.  ,>.  a». 
avoit  à  se  préparer,  lorsqu'il  étoit  obligé  à  parler  en  pu- 
blic. Seneque  son  ami  s'en  étant  apeççu  ,  lui  demanda  un 
jour  la  raison  d'une  telle  conduite.  C'est ,  lui  dit  Montan 
entre  autres  choses  ,  pour  éviter  une  mauvaise  coutume 
que  je  ne  puis  souffrir.  En  effet ,  ajouta-t-il ,  celui  qui  se 
prépare  pour  déclamer ,  le  fait  non  pour  gagner  sa  cause , 
mais  pour  plaire  à  son  auditoire.  Il  laisse  la  force  du  rai- 
sonnement ,  parce  qu'elle  l'incommode  ,  et  qu'elle  ne 
fournit  aucune  fleur  d'éloquence  ,  '  et  ne  s'atache  qu'à  p-  !ioi. 
des  sentences  choisies  et  à  des  narrés  ;  parce  qu'il  sait 
qu'ils  plairont.  Il  se  contente  de  flater  les  oreilles  et  de 
se  faire  aplaudir  ,  sans  se  mettre  en  peine  du  droit  qu'il 
défend.  Il  ne  recherche  que  des  choses  spécieuses  ,  et 
laisse  les  nécessaires  :  ce  qui  est  un  défaut  pernicieux  dans 
le  barreau.  '  Seneque  le  père  qui  nous  a  conservé  cette  p-  sno. 
réponse  judicieuse  de  Montan,  mais  qu'il  ne  faut  prendre  . 
qu'avec  ménagement  et  discrétion  ,  remarque  à  la  louan- 
ge de  cet  Orateur  ,  qu'il  ne  parla  jamais  en  public  par 
ostentation,  ou  pour  se  faire  admirer.  Bel  exemple  à  imi- 


100 


ETAT    DES    LETRES 


Hier.  clir.  1. 
15N. 


Scliot.  (•!.    Rli.  p. 

ai.  I. 


voTiEM's     ter  pour    les    Orateurs   de   nos  jours  ,    qui    travailleroienl 
"Q'^^^^'^-      d'ailleurs  à  éviter  les  défauts  de  Montan  ! 
Tac.an.  i.*.n.«.       '  Ce  graiid  homme,  après  avoir  illustré  assez  long-tems 
le    barreau ,  eut  le    malheur    d'encourir   l'indignation    de 
Tibère.    Le   sujet   de  sa   disgrâce  vint  de    ce   qu'Jîmilius 
homme  de  guerre  ne  songeant  qu'à  montrer  que  cet  Ora- 
teur étoit  coupable  ,  l'acusa   d'avoir  dit  de  ce  Prince  tout 
ce  que  l'on    en  disoit  effectivement  dans  le  secret.   Il  n'en 
fallut    pas    davantage  pour  charger  Montan   du   crime   de 
leze-Majesté.  '  En  punition  il  fut  exilé  aux  isles   Baléares, 
où    il    mourut    quelque    lems    après  ,    la    14"    année   de 
l'Empire   de   Tibère ,    28''   de   notre  Ere  commune.   C'est 
ainsi   que   ce   méchant   Empereur    fit   périr   plusieurs   des 
grands    hommes   qui  avoient  immortalisé    le  siècle   d'Au- 
guste. 
Tac.ibi.i.|.seiicc-.i.       '   Tacitc    s'acordc   avec    Seneque    pour  nous  représenter 
i.coiii.sa.p.ax,.  jviuiitan   comme    un    des  beaux  esprits  de  son  tems.  Quel- 
ques   modernes   en  ont  voulu  faire    un    Poëte  ;  mais  c'est 
pour    l'avoir    confondu    avec    Julius   Montanus   son  frère, 
dont    nous   allons  parler.    Outre  Seneque   le  déclamateur, 
Votienus    Montanus    avoit   encore   pour    ami   particulier 
l'éloquent     Marcellus    Marcius  ,   dont     il    faisoit     souvent 
mention  dans  ses  écrits. 

On  voit  par  -  là  qu'au  tems  de  Seneque  il  se  trouvoit 
quelques  ouvrages  de  notre  Orateur.  11  faut  que  ce  fût 
autre  chose  que  ses  déclamations  ou  plaidoïers  ;  puisque 
nous  avons  montré  qu'il  ne  les  redigeoit  jamais  par  écrit 
On  ne  sait  point  au  reste  ce  que  ce  pouvoit  être;  et  il 
ne  nous  reste  plus  de  lui  que  quelques  fragmens  insérés 
dans  le  recueil  de  Seneque,  tels  qu'il  se  souvenoit  de  les 
avoir  entendus  au  barreau  de  la  bouche  de  Montan. 


Pciicc.     cont.    20. 
p.   .SU. 


JULIUS    MONTANUS, 


Poète. 


JLLIUS 
MONTANUS. 


C'est   assurément  une  preuve  fort  équivoque  ,  que  la 
seule  identité  de  nom  qui  se  rencontre  en  deux  per- 
sonnes différentes  ,  pour  les  croire  ou  frères  ou  de  la  fa- 
mille. 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  161 

mille.  Mais  lorsque  cette  preuve  se  trouve  fortifiée  par  des  julius  mon- 
circonstances  qui  la  fixent,  en  ce  cas  on  ne  peut  raisonna-  '^^'^'^^- 
blement  se  reiuser  à  la  probabilité  qu'elle  établit.  Ainsi  de 
dire  simplement  que  Julius  Montanus  étoit  frère  de  Vo- 
tienus  Montanus,  parce  que  l'un  et  l'autre  portoient  le  même 
nom  ,  ce  seroit  avancer  une  conjecture  assez  frivole.  On 
pourroit  penser  la  même  chose  de  diverses  autres  person- 
nes de  même  nom ,  comme  de  Montanus  Hispo  ,  Monta- 
nus Traulus ,  Curtius  Montanus ,  Lucius  Titius  Monta- 
nus, et  autres  que  nous  omettons.  Mais  lorsqu'avec  l'iden- 
tité de  nom  on  voit  que  deux  personnes  vivoient  en  mê- 
me-tems,  qu'elles  suivoient  la  même  Cour,  qu'elles  ont 
couru  la  même  fortune ,  que  la  disgrâce  de  l'une  a  été 
suivie  de  celle   de   l'autre  :  alors   on  convient  sans  peine, 

^ue   ces    deux    personnes  pouvoient  être  réellement  ireres. 
l'est    aparemment    pour    ces   raisons,  '  que  quelques  mo-  Egass.Bui.t.  i.  p. 
dernes    ont    cru,    et    que   nous   le  croïons  après  eux,  que 
Julius    Montanus   étoit    frère   de  Votienus,  Montanus,    dont 
nous  venons  de  faire  l'éloge. 

Sur    ce   principe  ,    Julius  étoit  de  la  ville  de  Narbone  , 
d'où  il  passa  ensuite  à  Rome,  le  centre  des  gens  de  Letres 
et  des  beaux  esprits.  '  Il  parut  sur  ce  Théâtre  des  savans  oyid.  pont.  iv.  ei. 
avec    la    plupart    de    ces  grands    hommes    qui  illustrèrent  ?.®xcont?'ir*p! 
l'Empire    d'Auguste    et    celui    de    Tibère.    Son    génie    le  '^^s. 

Porta  à  la  poésie,  dont  il  fit  sa  principale  ocupation;  et 
on  soutient  qu'il  y  acquit  beaucoup  de  gloire.  En  effet 
Seneque  le  père  ou  le  déclamateur,  qui  l'avoit  connu  per- 
sonnellement à  Rome,  nous  le  donne  pour  un  excellent 
Poëte,  et  un  homme  d'une  grande  politesse  :  qui  comis 
fuit,  quique  egregius  Poëta.  '  De  même,  Ovide  son  contem-  Ovid.  ibid. 
porain  ,  comme  Seneque  ,  le  met  au  nombre  des  plus 
célèbres  Poètes  latins  qui  avoient  paru  jusqu'alors  ,  et 
fait  une  estime  particulière  de  ses  pièces  en  vers  héroï- 
ques et  elegiaques. 

Quique  vel  imparibus  numeris,  Montane,  vel  aequis 
Sufficis,  el  gemino  carminé  nomen  habes. 

Toutefois    Seneque    le  fils  ou  le  Philosophe  ne  portoit  !f^-  *?•  ***•  p- 
pas   de   Montan  un  jugement  aussi  avantageux.  Il  se  con- 
tentoit    de    le    regarder  comme    un    Poëte   du    commun  : 
tolerabilis   Poëta;    n'en   jugeant    sans  doute  ,  que  par  les 
Tome  I.  Prem.  Part.  X 

1  5  * 


162  ETAT   DES    LETRES 

juLjus  HON-  poésies  qu'il  en  avoit  lues.  Car  autre  chose  est  de  ne  faire 
'''^'^'"^-      que  lire  les    pièces    des    Poètes  :  autre    chose  de  les  leur 

Senec.  Fra«.  37  entendre  prononcer.  '  Dans  leur  bouche  rien  n'est  plus 
harmonieux  :  hors  de  là ,  elles  perdent  presque  toutes 
leurs  beautés,  et  deviennent  comme  muëtes.  C'est  Julius 
Montanus  qui  mettoit  lui-même  cette  différence  entre 
les  vers  de  Virgile  sur  le  papier,  et  les  mêmes  vers  en  la 
bouche  de  ce  Poëte.  Il  disoit  à  ce  sujet,  qu'il  lui  auroit 
volontiers  enlevé  certains  endroits  de  ses  poësies ,  s'il 
avoit  pu  lui  enlever  également  sa  voix  ,  sa  manière  de 
prononcer,  et  son  geste. 

ep.  129.  p.  10.  '  Nous  aprenons  du  même  Seneque  ,  que  l'Empereur 
Tibère  fit  d'abord  paroître  beaucoup  d'amitié  pour  notre 
Poëte  ,  mais  qu'ensuite  il  eut  pour  lui  autant  d'indiffé- 
rence: Ei  amicitia  Tiberii  notus  et  frigore.  Ce  fut  seloij 
toute  aparence  à  l'ocasion  de  la  disgrâce  où  tomba  Vo- 
tienus  Montanus  son  Irere,  comme  nous  avons  dit  en  son 

a""'  49**'  '*''  ''  ^*^""    '  Crinilus    paroît    confondre    les    deux    fr«!res  ,    atri- 

•  Tac. an.  1.13. n.  buaut    à   JuHus    Ics   défauts    de    Votienus.    "Tacite   parle 

*=i  d'un   Julius   Montanus,    qui    fut    contraint  de  se  tuer  lui- 

même  au  commencement  de  l'Empire  de  Néron ,  qui  ne 
lui  put  pardonner  d'avoir  voulu  s'oposer  à  ses  violences. 
Mais  ce  Julius  Montanus  étoil  de  1  ordre  des  Sénateurs  , 
et  beaucoup  plus  jeune  que  celui  qui  fait  le  sujet  de  cet 
éloge  :  ce  qui  doit  suffire  pour  l'en  distinguer. 

Senec.  ibid.  De    toutcs    Ics   piéccs  de  nolrc  Poëte,  '  il  ne  nous  reste 

plus  que  six  vers ,  que  Seneque  le  Philosophe  nous  a 
conservés.  Us  paroissoient  avoir  fait  partie  d'un  poëme 
sur  le  jour  et  la  nuit.  Les  voici  ,  afin  que  le  lecteur  en 
puisse  juger. 

Incipit  ardentes  Pliœbus  producere  flammas, 

Spargere  se  rubicunda  dies,  jam  tristis  hirundo 

Argutia  rcditura  cibos  immitterc  nidis  ,p 

Incipit,  et  molli  partitos  orc  minislrat. 


ibid. 


Jam  sua  pastores  stabuli.s  armenta  locarunt  ; 
Jamdaru  sopitis  nox  iiigra  silentia  terris 
Incipit.  .  . 

Montan  prenoit  tant  de  plaisir  à  réciter  ses  poésies 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  163 

Ïu'il  déclamoit  volontiers  depuis  le  malin  jusqu'au  soir,  julius  mon- 
lela  déplaisoit  beaucoup  à  ceux  de  ses  auditeurs ,  qui  "^f^^^^- 
aimoient  mieux  un  bon  repas  qu'une  pièce  de  poésie.  Un 
jour  qu'il  récitoit  le  poëme  dont  nous  venons  de  donner 
un  fragment ,  Varus  Chevalier  Romain  ,  homme  de  bon- 
ne chère ,  qui  devoit  aller  souper  chez  Atilius  Buta  ,  in- 
terrompit brusquement  notre  Poëte  ,  lorsqu'il  en  fut  aux 
deux  derniers  vers  cités  ,  quoique  ce  ne  fût  qu'une  partie 
de  la  pièce  ,  et  dit  hautement  qu'il  étoit  déjà  nuit  ,  et 
qu'il  alloit  trouver  Buta. 


JULIUS    GRyECINUS, 

Philosophe. 

S-  I. 

HISTOIRE   DE   SA   VIE. 

LA  *   ville  de   Frejus ,  ancienne  et  illustre  colonie  des  ^u^ius  gR;€- 
Romains   dans   la   Gaule    Narbonoise ,    fut  le  lieu   de       <^^^^^- 
la    naissance    de  ce   grand    homme.    Il  eut  pour  père  un  *  Tac.  vit.  Agr.  n. 
Chevalier  Romain  ,    qui    avoit  été  Procureur  du  Fisc  ,  ou 
Intendant    de    province  :  charge   qui  consistoit   à   faire  la 
recette   et   la  mise  des  impôts  et  autres  revenus  de  l'Em- 
pire.   Greècinus    fit    une   étude    particulière  de  ce  que  les 
honnêtes    païens   entendoient    par   l'amour   de  la  sagesse; 
et   il  acquit   assez  de  vertu  pour  se  rendre  odieux  à  ceux 
qui   n'aimoient   que  le  vice.  Il  s'apliqua  aux  belles  Letres 
avec  tant   de   succès ,    qu'il   se  fit  la  réputation  d'homme 
éloquent ,  '  et   qu'il  devmt  un  des  Ecrivains  le  plus  poli  coiu.  1. 1.  c.  i.  p. 
de  son  siècle.  "• 

Sa  vertu  lui  mérita  une  épouse  digne  de  lui  pour  sa  tac.  ibid. 
rare  chasteté.  Elle  se  nommoit  Julia  Procilla ,  et  avoit  eu 
pour  père  un  autre  Chevalier  Romain  ,  qui  avoit  aussi 
exercé  la  Charge  d'Intendant  de  province.  De  ce  ma- 
riage naquit  le  célèbre  Agricole  ,  '  qui  se  vit  élevé  aux  n.  7-0.  is. 
premières  dignités  de  l'Empire ,  et  dont  nous  parlerons 
dans  la  suite  de  cette  histoire. 

Xij 


164  ETAT   DES   LETRES 

juLius  GRiC-       'On  sut  reconnoître  le  mérite  de  Grœcinus,  en  lui  acor- 
ct^"^-       dant   une   place   dans   le   Sénat,    à  laquelle  on  peut  dire 
•  Tac.  ibid.  n.  t.  qu'il  fit  autaut  d'honncuF,  qu'elle  put  lui  en  procurer  elle- 
scnec.  de  ben.  1.  même.  Eu  effet  il  soutint  le  rang  de  Sénateur  '  par  une  pro- 
Î09.'      *""■    '^'  bité  et  une  grandeur  d'ame,  dont  on  trouvie  peu  d'exemples 
parmi  les  Païens.  Seneque  le  Philosophe  en  étoit  si  grand 
admirateur ,     qu'il    ne    parle   jamais   de    Grœcinus    que 
comme     d'un    homme    d'un    mérite    tout    extraordinaire: 
Vi'r  egregiiis,  le  qualifie-t-il  en  divers  endroits  de  ses  écrits. 
Il    a   même    cru    ne    pouvoir   mieux   édifier  la   postérité , 
qu'en    lui   conservant  quelques  traits  de  la  vertu  et  de  la 
générosité  de  ce  grand  homme, 
jjen.  ibid.  '  Gràecinus    portoit    l'une    et    l'autre   jusqu'à    ce  point, 

qu'il  ne  pouvoit  souffrir  le  vice  ,  ni  avoir  aucune  commu- 
nication avec  les  personnes  mal  notées,  non  pas  même 
rien  recevoir  de  leur  part ,  de  quelque  qualité  qu'elles 
fussent.  Un  jour  Fabius  Persicus  ,  nomme  Consulaire,  lui 
aïant  envoie  une  grande  somme  d'argent  pour  fournir  aux 
frais  des  jeux  publics,  que  Grœcinus  devoit  donner,  ce- 
lui-ci refusa  constamment  de  l'accepter.  Et  comme  ses 
amis  le  blâmoient  de  son  refus ,  il  leur  fit  cette  réponse 
si  judicieuse  :  «  Voudriez- vous,  leur  dit-il,  que  je  reçusse 
«  une  faveur  d'un  homme  avec  qui  je  rougirois  de  me 
»  trouver  à  table?  »  Quelque  tems  après  Rebilus  ,  autre 
homme  Consulaire  ,  mais  aussi  mal  noté  que  Persicus  ,  lui 
envoïa  à  son  tour  une  somme  encore  plus  considérable 
que  la  précédente  ,  avec  de  grandes  instances  pour  l'en- 
gager à  la  recevoir.  Mais  Grœcinus  s'en  défendit  encore, 
en  disant  pour  excuse  :  «  Eh  !  je  n'en  ai  pas  même  voulu 
»  recevoir  de  Persicus  ;  lui  laissant  inférer  :  à  plus  forte 
»  raison  n'en  recevrai-je  pas  de  vous  ,  puisque  vous  êtes 
»  une  personne  aussi  iniame ,  et  d'une  moindre  naùs- 
»  sance.  » 
op.  29.  p.  108.109.  '  Seneque  raporte  un  autre  trait  de  l'histoire  de  Grœ- 
cinus ,  qui  montre  le  grand  cas  que  l'on  faisoit  de  son 
jugement.  Les  beaux  esprits  de  Rome  se  trouvant  em- 
barassés  à  assigner  une  secte  au  Philosophe  Ariston  ,  qui 
ne  sortoit  jamais  de  la  chaise  où  il  se  jfaisoit  porter,  soit 
pour  disputer,  soit  pour  composer  ses  ouvrages ,  s'adressè- 
rent à  Grœcinus  pour  savoir  ce  qu'il  en  pensoit.  Scaurus 
avoit  déjà  dit:  «  Assurément ,  Ariston  n'est  pas  Peripate- 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  165 

»  ticien.  »  Grœcinus  consulté  à  son  tour,   répondit  :  «  Je  julius  GRit- 
»  ne  puis  vous  en  rien  dire  ;  car  je  ne  connois  pas  même       ^'^"^- 
»  sa  démarche.  » 

'  Grœcinus  se  faisoit  de  plus  en  plus  honneur  par  sa  sa-  Ta*,  iwd. 
gesse  et  sa  probité ,  lorsqu'il  devint  la  victime  de  celle-ci. 
L'Empereur    Caligula  ,   qui    regnoit  alors  ,  et  qui  haïssoit 
autant    la   vertu  qu'il  aimoit  le  vice,  lui  commanda  de  se 
porter    pour    acusateur    contre    Marcus    Silanus.  Grœcinus 
en    eut    horreur  ,   et   refusa  généreusement  de  le  faire.  Il 
n'en   fallut  pas  davantage  pour  porter  ce  Prince  inhumain 
à    lui    faire    ôter  la  vie  ,  vers  l'an   40  de  notre  Ere  vul- 
gaire ,    lorsque  Grœcinus  étoit  encore  jeune  ,'  puisque  son  n.  *.  u. 
fils  n'avoit  tout  au  plus  que  deux  ans  en  ce  tems-là.  '  Se-  Senec.  i)«n.  iWd. 
neque    parlant    avec    indignation  de  cette  mort ,  et  propo- 
sant   Grœcinus    pour    le    modèle  d'Un   grand  courage  ,  dit 
que  Caligula  ne  le  fit  tuer ,  que  parce  que  Grœcinus  étoit 
meilleur    qu'il    ne    convenoit  à    personne   d'être  à  l'égard 
d'un  tiran. 

Telle  fut  la  fin  de  cet  excellent  homme  ,  à  qui  il  sem- 
ble qu'il  ne   manguoit   que  d'être   Chrétien.   Je  ne  sais  si 
cette    grâce    ne    fut    pas    acordée    peu    de   tems  après    à 
quelqu'un  de  sa  famille,)  et  si  'la  célèbre  Pomponia  Grœ-  Tac.  an.  i.  13.  n. 
cina  ,    l'une    des  premières  Dames  de  Rome  ,  *  qui  fut  a-  ,  tui.  h.  e.  t.  2. 
cusée     comme    Chrétienne    l'an    57    sous    Néron  ,    n'étoit  p-  ™- 
pas    sœur    ou  proche  parente  de  notre  Sénateur.  Il  est  au 
moins   certain   que    la    vertu    dont    cette    famille    Païenne 
faisoit   profession  ,    étoit   une   grande  disposition  pour  em- 
brasser le  Christianisme. 

§.    IL 
SES  ECRITS. 

COLUMELLE  '  faisant  d'abord  l'énumération  de  ceux  coiu.i.  i.  c.  i.p. 
qui  avoient  écrit  avant  lui  sur  l'agriculture  ,  puis  ve- 
nant à  ceux  qui  l'avoient  fait  en  son  siècle  ,  nous  aprend 
que  Julius  Grœcinus  avoit  laissé  deux  livres  de  sa  façon 
sur  la  manière  de  cultiver  les  vignes.  Comme  Cornélius 
Celsus  avoit  déjà  composé  un  traité  particulier  sur  le  mê- 
me sujet ,  et  que  Grœcinus  en  avoit  profité  pour  son  ou- 
vrage ,  Columelle  ajoute  que  celui-ci  avoit  imité  Celsus  , 
comme  s'il  avoit  été  son  disciple. 


•  Plin.  hi;it.  I.  U 
c.  4.  p.  H9. 


90 


166  ETAT   DES    LETRES 

JULius  GR*-  •  Pline  l'Historien  ,  qui  avoit  dans  sa  Bibliothèque  les 
'^^""^  écrits  de  notre  Auteur  ,  prétend  aussi  qu'il  aroit  copié 
Celsus.  Mais  cela  ne  doit  pas  se  prendre  à  la  letre;  et  il 
est  à  croire  que  Grœcinus  n'avoit  pas  si  litéralement  co- 
pié Celsus  ,  qu'il  n'eut  inséré  dans  son  ouvrage  bien  des 
choses  nouvelles.  Cela  est  si  vrai  ,  que  Pline  lui-même  , 
qui  s'étoit  servi  de  Celsus  pour  son  histoire  naturelle , 
avoue  néanmoins  avoir  pris  de  l'ouvrage  de  Grœcinus 
divers  endroits,  sur-tout  pour  ses  livres  14,  15,  16,  17, 
et  18. 

Coin.  ibid.  '  Une   autre    différence   remarquable  entre  les  écrits  de 

ces  deux  Auteurs,  c'est  que  ceux  de  Grœcinus  l'empor- 
toient  de  beaucoup  sur  ceux  de  Celsus  ,  et  pour  l'agré- 
ment du  style  et  pour  l'érudition.  On  ne  trouve  plus  de- 
puis long-tems  l'ouvrage  de  notre  Ecrivain.  II  est  ou 
perdu  ,    ou    enseveli   dans   la  poussière  de  quelque  Biblio- 

piin.  hist.  1. 16.  c.  théquc.  '  Graeciuus  y  avancoit  entre  autres  observations  , 
que  les  vignes  pouvoient  durer  soixante  ans  ,  sans  être 
renouyellées. 


CLAUDE, 

Empereur. 


S  t. 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

CLAUDE  ,    "  depuis  Empereur,  naquit  à  Lyon  dans  les 
Gaules    le    premier    jour    d'Août ,    sous    le    Consulat 

•  senec  de  m.  cl.  dc  Julius  Autonius  et  de  Fabius  Africanus ,  environ  quin- 

F.5.  n.  s!''   **    ze    ans   après    le    rétablissement  de  cette  ville,  et  dix  ans. 
avant   le   commencement  de  l'Ere  Chrétienne.  Il  se  nom- 
moit   Tiberius   Claudius    Drusus;    et  après  que  son    frère 
aîné  eut  été  adopté  dans  la  famille  de  l'Empereur  ,  il  prit 

Tiii.  Emp.  1. 1.  p.  le  surnom  de  Germanicus.  '  On  trouve  qu'il  portoil  en- 
core le  prénom  de  Nero  avant  celui  de  Drusus;  mais  il 
n'est   guéres   connu    dans    l'histoire   que    sous  le  nom  de 

snet.  ibid.  n.  1.5)  Glaudc ,  qui  étoit  celui  de  sa  famille.   '  Par  sa  mère  An- 

■  •  OU*  p.    7D«.  ^ 


CLAUDE. 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  167 

tonia,     il     «'toit   petit-fils     de    Marc-Antoine,  et    d'Octavia      claude. 
sœur  d'Auguste;  et  par  son  père  Drusus,si  célèbre  par  la  ~ 

conquête  de  la  Germanie  et  ses  autres  grands  emplois 
militaires,  il  se  trouvoit  petit-fils  de  Livie  femme  d  Au- 
guste, neveu  de  Tibère,  et  oncle  de  Caligula. 

'  Dès  sa    plus   tendre  jeunesse   on   l'apliqua   aux  études  Snet.  ibid  n.  .■». 
kl        \  e     i  A  ■  .    1   j  42 1  Dio.  ibid. 

convenables  a  un  cnlant  de  sa  naissance;  et  il  donna  sou- 
vent des  marques  publiques  du  progrès  qu'il  y  faisoit.  Il 
se  rendit  même  assez  habile,  pour  composer  dans  la  suite 
divers  ouvrages  en  grec  et  en  latin.  '  Quoiqu'il  eût  une  suet.  iwa.  n.  a. 
difficulté  de  langue  qui  l'empêchoit  de  parler  distincte- 
ment, néanmoins  il  ne  déclamoit  pas  mal,  au  jugement 
de  ceux  qui  s'interessoient  le  plus  à  son  avancement  dans 
les  sciences. 

Il  s'en  faut  de  beaucoup  que  l'on  prît  le  même  soin  de 
former  ce  jeune  Prince  aux  bonnes  mœurs,  que  l'on  avoit 
eu  de  le  faire  instruire  dans  les  Letres.  '  On  lui  laissa  me-  "•  s  I  dio,  p.  76* 
ner    une    vie    privée    en    la    compagnie   des  femmes,   des 
affranchis,  et  des  gens  les    plus  débauchés;  et  cette  mau- 
vaise éducation   en  fit  un  Prince  lâche ,  timide ,  efféminé, 
et  presque  imbécile.  'Comme  il  passoit  pour  n'avoir  ni  ju-  soet.  n.2|Dio,i. 
gement  ni  capacité,  cela  fut  cause  qu'on  le  méprisa  long-  '^^'  •"■  "^' 
tems,  et  qu'on  le  laissa  dans  le  rang  de  simple  Chevalier, 
jusqu'à   l'âge  de  quarante-six  ans.  Alors  l'Empereur  Cali- 
gula le  fît  Sénateur,  et  le  prit  pour  collègue  dans  le  Con- 
sulat.   A    ces    défauts    Claude    en  joignoit  d'autres    beau- 
coup plus  insuportables,  et    qui    venoient    peut-être   de  la 
même   source.  'Il  étoit  fort   sujet  à    toutes   sortes  d'excès  suet.  n.  33. 
de  vin  et  de  viandes   et  aux  autres  qui  en  sont  la  suite, 
et  avoit  une  passion  démesurée  pour  le  jeu. 

'  Tout  cela  néanmoins  ne  l'empêcha  pas  d'arriver  à  "•  *"• 
l'Empire.  Il  y  fut  élevé,  lorsqu'il  s'y  atendoit  le  moins, 
par  le  ministère  des  soldats,  le  25  de  Janvier  de  l'an  41 
de  notre  Ere  vulgaire,  après  la  mort  de  Caïus  Caligula 
son  neveu.  Claude  étoit  alors  en  la  cinquantième  année 
de  son  âge.  '  Avant  son  élévation  il  avoit  épousé  Valeria  n.2.'>.  ac, 
Messalina,  si  fameuse  dans  l'histoire  pour  ses  crimes  et  ses 
débauches.  C'étoit  sa  troisième  femme,  en  aiant  épousé 
deux  autres  qui  lui  donnèrent  divers  enfans.  Il  avoit  eu 
de  Messaline  une  fîlle  nommée  Octavia,  qui  fut  ensuite 
mariée  à  l'Empereur  Néron.  Claude  déjà  parvenue  l'Em- 


168  ETAT   DES    LETRES 

CLAUDE,      pire  en    eut  encore  un  fils,  nommé  d'abord  Claudius  Ti- 
j)jg      „3  oerius  Germanicus,  et  depuis  Britannicus  César.  '  Mais  il 

eut  la  modestie  de  ne  lui  point  donner,  non  plus  qu'à  sa 
Suet.  n.  26.  mère,  le  titre  d'Auguste.  '  Non  content  de  tant  de  maria- 
ges, il  épousa  encore,  par  un  inceste  sans  exemple  chez 
les  Romains,  Agrippine  sa  propre  nièce,  fille  de  Germa- 
nicus. 

Le  règne  d'un   tel  Prince   ne    pouvoit   être  ni   heureux 
senec.  ib.  p.  85*.  pour  SCS  sujets,  ni  glorieux  pour  lui-même.  '  Aussi  ne  fut- 
778.'  '*'"  '  ^'  "*"  il  gueres  moins   cruel  et   sanglant  que    l'avoient   été  ceux 
de  Tibère   et  de    Caligula;  et  l'on  a  dit  de   Claude  qu'il 
tuoit    des    hommes    comme   un    chien  des  mouches.  L'on 
comptoit  plus  de  cinq  cens  soixante   personnes  tant  Séna- 
teurs et  Chevaliers  qu'aulres,  à  qui  il  avoit  ôté  la  vie.  Il 
en   vouloit  sur-tout  à  ses  amis  qu'il  épargnoit  moins   que 
les  autres, 
suei.  n.  29 1  Tac.       '  D'aillcurs  sa  timidité  naturelle,  qui   alloit  jusqu'à  l'ex- 
lî' n  "("blo ''■  ^^*'    ^^  rendoit  incapable   de    la   fermeté   nécessaire  pour 
764 1  i>hii.  vit.Ap.'  rcmcdicr  ou   réprimer    les   desordres.  Elle   l'empêchoit   de 
I.  5.  c.  8.  p.  233.  g'^igygj.  au-dessus  de  ceux  qui  abusant  ou  de  sa  simplicité, 
ou    de    sa   foiblesse,   changeoient    souvent    ce    qu'il    avoit 
réglé,  mettoient  tout  à  prix,  et  le  dominoient  entièrement. 
Tels  furent   entre   autres   ses    principaux   affranchis,   Mes- 
Dio,p.  770, 786.    saliue  et  Agrippine  ses  femmes.  '  De  sorte  que  Claude  étoit 
moins  leur  Prince,  que  le   ministre   de   leur  intérêt  et  de 
leurs  passions.  Nous  ne  chargerons  point  cette  histoire  de 
toutes   les   infamies    dont   ses    femmes    et    ses  favoris  ont 
deshonoré  son  règne.  Il  faut   tirer  un  rideau  sur   tout  ce 
qui  ne  peut  ni  instruire  ni  édifier. 
p.765|Suet. n.33.       'Sa  timidité  le   porta,  lorsqu'il  fut  parvenu  à  l'Empire, 
à  ordonner  que    nul  n'aprocheroit   de    sa  personne,  qu'on 
ne  l'eût   auparavant   visité,    pour    voir   s'il    n'auroit    point 
quelque   poignard   caché   sous   ses    habits.    Cette    coutume 
Dio,  p.  764.         s'observa  jusqu'à  Vespasien,  qui    l'abolit.  '  Claude  fut  le 
premier  entre   les  Romains  qui    se    servit  d'une    chaise  à 
porteurs  qui  fût  couverte  ;  et  l'usage  en  passa  dans  la  suite 
p.  777.  aux  autres  Empereurs,  et  aux  personnes  Consulaires.  '  Il 

fut   si  prodigue  du  droit  de  bourgeoisie  Romaine,  que  cet 
honneur  qui  coûtoit  des  sommes  immenses,  tomba  alors  en 
s«n»e.ibid.p.648.  uu  très-graud  mépHs.  '  On    disoit  par  dérision  qu'on  l'a- 
voit  pour  un  verre  cassé;  et  Seneque   prétendoit  que  si  ce 

Prince 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  169 

Prince   eut   vécu   un    peu    plus    long-tems,    il    auroit   fait      claude. 
citoïens  Romains    teus   les   Grecs,  les   Gaulois,    les   Espa- 
gnols  et  les  Bretons. 

Il  faut  pourtant  dire  à  la  louange  '  de  Claude,  qu'il  ne  Dio,  p.  765. 
laissa  pas  de   faire  quelque    bien,    lorsque  revenant  à  lui- 
même,  il  savoit  se  rendre  maître  de  ses  passions.  '  On  re-  t»»-  h.  e.  1. 1.  p. 
marque  même  qu'il    avoit  de    la  douceur  et    de  la    bonté 
pour    les  peuples;  Dieu    lui   aïant    inspiré    ce   bon  esprit, 
pour  donner  à  son  Eglise  qui  commençoit  alors  à  se  former  à 
Rome,   le   loisir  de  croître   et  de  se  fortifier  dans  la   paix 
et  le  repos.  '  En  effet  S.  Jérôme  a  cru  que  ce  fut  en  la  se-  Hier.  chr.  i.  2.  p. 
conde  année  de    l'empire   de   Claude,  que    S.    Pierre  alla  '^' 
prêcher  l'Evangile  dans  cette  capitale  du  monde. 

'  Sitôt   que   ce   Prince  se    vit   Empereur,   il    remédia  à  Dio,  p.  7C6. 
divers   abus  qui   s'étoient  introduits   sous    le  règne   précè- 
dent,   reforma    plusieurs    choses   mal    établies,    et    rapella 
d'exil  tous   ceux  qui  y  avoient   été   condamnés  sans   sujet. 
'  11    fit   même   paroître   qu'il   avoit   quelque    connoissance,  iWJ.  I  Suet.  n.  u. 
et  quelque  amour  pour   la  justice.  Il  s'apliquoit  volontiers  *"*     "««-p-s^^. 
à  vuider  les  procès,  quoiqu'il  ne  le   fît  pas  toujours  avec 
la  même  atention  et  la   même  prudence.    Les   Avocats  fu-  ,,- 

rent  sous  lui  en  leur  règne.  Les  Jurisconsultes  au  con- 
traire avoient  alors  peu  de  crédit;  parce  qu'il  étoit  moins 
atentif  à  la  rigueur  des  loix  qu'à  ce  que  l'équité  de- 
mandoit  dans  les  circonstances  particulières.  '  Mais  com-  Tac.  an.  1. 11.  n. 
me  ceux-là  faisoient  un  commerce  sordide  de  leur  élo-  '*'''• 
quence,  tirant  de  leurs  parties  de  très-grandes  sommes, 
il  ordonna  qu'ils  ne  pourroient  exiger  qu'un  certain  sa- 
laire qui  leur  fut  marqué. 

Les  vues  de    Claude,  quoique    bornées,  allèrent    encore 
plus  loin  pour  le  bien  public.  '  Il  augmenta  l'enceinte  de  1. 12.  n.  23. 
la  ville  de  Rome  ;  '  il   acheva  avec    de    très-grandes  dé-  suoi.  n.  20. 
penses  l'aqueduc  que    Caligula  avoit  commencé,   il  entre- 
prit avec  des  travaux  immenses  de  sécher  le  lac  Fucin;  '  il  iwaiDio,  p.  7-2. 
fit   construire   auprès    d'Ostie   le  fameux   port    qui   retient 
encore  aujourd'hui   le  nom  de  Porto  :    ouvrage  digne  de 
la  grandeur  et  de  la  puissance  Romaine. 

Quoiqu'il  ne  fut   ni    grand  capitaine,  ni    grand    politi- 
que, il  ne  laissa  pas  néanmoins  de  se  maintenir  dans  les 
conquêtes  de  ses  prédécesseurs,  'et  d'en  faire  de  nouvelles.  Di.,,  p. 770.-71. 
Il  acheva    de  réduire  la  Mauritanie,   qu'il   divisa  en  deux 
Tome  I.  Prem.  Pari.  Y 


170  ETAT    DKS    I.FVrRHlS 

CLAUDE.       Provinces,  la  TingiUine  el    la   Césarif^nne.  '    II  eut  encore 
l'avantage  de  conquérir  la  grande  lirelacrne,  ce   que  Cali- 

•  Tac.  vit.  Agr.  11.  i'-,  '^,  |  ^ 

13.  gula  n  avoil  ose  enlrepreiuire. 

Tel  fut   l'Empire  de  Claude,  mêlé  de    bien  et  de  mal, 

siiet.  n.  43.  4*.  I    selon  ceux  qui  le  consi'illoient.  '  Enfin  après  avoir  régné 

Dio,  p.  789-191.     treize  ans,  huit  mois,  et  vingt  jours,    il   fut    empoisoimé 

par  Agrippine,  pour  mettre  sur  le  thrône  Néron  son  fils, 

au'elle  avoit  eu  le   crédit   de    faire  adopter,  au    préjudice 
e  liritannicus,  propre  fils  de  Claude.  Celte  mort  tragique 
arriva    le    13*^  jour    d'Octobre   de    l'an    ."ii    de    notre  Ere 
vulgaire,    lorsque   Claude    étoit    en    la   soixante-quatrième 
Dio,  p.  7^.  année  de  son   ûge.  '  On  croit  que  ce  fut  dans  un   ragoût 

de  champignons  qu'on  avoit  caché  le  poison  (jui  lui  ôta  la 
vie.  Et  comme  l'on  ne  craignit  pas  de  vouloir  mettre  au 
rang  des  Dieux  un  homme  qui  étoit  mort  de  la  sorte, 
Néron  son  successeur  en  prit  ocasion  de  dire  ce  bon  mot, 
qui  marque  fort  bien  la  folie  d'une  telle  prétention:  «  Les 
»  champignons ,  disoil-il ,  sont  devenus  la  viande  des 
»  Dieux,  puisque  Claude  est  devenu  Dieu  pour  en  avoir 
»  mangé.  » 
senec.  .le  m.  d.  p.  '  Mais  ricu  n'aprochc  pour  la  dérision,  de  la  plaisante 
***'*^'  apothéose  que  Seneque  lit  de  ce  Prince,   et    dans    laquelle 

il  le  représente  proprement  comme  une  bête,  et  le  trans- 
forme en  courge.  La  philosophie  de  ce  prétendu  sage 
n'étoit  pas  assez  forte,  pour  l'empêcher  de  se  venger  par- 
là  de  l'exil  auquel  cet  Empereur  l'avoit  condamné,  peut- 
être  sans  sujet, 
suet.  n.  30  i  Dio,  '  Claudc  étoit  bicu  fait  de  corps,  et  avoit  une  taille 
P-  ''**•  avantageuse.  Mais  il   lui  étoit  resté   de  ses  grandes  mala- 

dies une  foiblesse  qui  lui  causoit  un  tremblement  de  tête 
et  de  jambes,  avec  une  espèce  de  bégaiement.  D'ailleurs 
ses  gestes  et  sa  contenance  étoienl  de  mauvaise  grâce. 

'  Malgré  ses  défauts  de  corps  et  d'esprit,  il  ne  laissoit 
pas  d'avoir  quelques  bonnes  qualités  pour  les  mœurs.  Il  " 
étoit  au-dessus  de  l'avarice,  et  n'aimoit  ni  le  faste  ni  la 
vanité.  '  Quoiqu'il  ait  passé  pour  un  Prince  cruel  et  san- 
guinaire, '  il  avoit  néanmoins  de  la  bonté,  point  de  fiel, 
ni  de  passion  pour  la  vengeance.  De  sorte  que  ce  n'est  pas 
sans  sujet,  que  l'on  njelle  sur  Messaline  et  ses  favoris  les 
cruautés  que  l'on  vit  sous  son  règne.  Il  étoit  populaire, 
'  libéral  sur-tout  envers  les  soldats,  et  généreux  à  l'égard 


Till.  Kmp.  1. 
SIO.  211. 

1.  p. 

Snet.  n.  34. 

Dio,  p.  763 
773. 

-770. 

TiU.  ibid.  p. 

tm. 

DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  171 

des  Princes.    Exemt    de   jalousie,  il    ne    mettoit    point   sa       ci.aude. 
gloire   à    étouffer  celle    des   autres,    comme    l'on  avoit  vu 
sous  Tibère  et  Caligula. 

'  11  donna  en  plusieurs  ocasions  des  preuves  de  sa  mo-  tui.  iwa.  p.  sas. 
destie.  En   faisant  jurer  l'observation  des  loix  d'Auguste, 
il  ne  voulut  point  qu'on  fit  la  même  chose  pour  les  sien- 
nes. Il  refusa  plusieurs  honneurs  que  le  Sénat  lui  offrit,  et 
ne  se  mit  jamais  en  peine  d'en  faire  ordonner  ni  pour  lui 
ni  pour  les  siens.  '  Le  Consul  Vipsanius  voulant  qu'on  lui  J^-  »"•  '•  "•  "■ 
donnât    le  titre   de   père    du    Sénat,  Claude   s'oposa  à  son 
zèle,    qui    marquoit    trop  d'adulation.  '  Il    ne   voulut   pas  suei.  n.  is. 
même  pi-endre  le  titre  d'Empereur. 

Exemple  rare  dans  un  Souverain!  '  Lorsqu'il  donnoit  Dio,  p.  772. 773 
des  charges  ou  des  emplois  à  quelqu'un,  il  ne  pouvoit 
souffrir  qu'on  l'en  n^merciàt;  disant  que  c'étoit  lui  qui 
devoit  êtri!  obligé,  de  ce  qu'il  se  trouvoit  des  personnes 
qui  voulussent  bien  p(»rler  avec  lui  une  partie  du  poids  de 
son  gouvernement. 

Nous  ne  poinons  mieux    finir  l'éloge   de  cet  Empereur 
que  par   les   <|uatre    vers    suivans,  qui    peuvent   lui  servir 
d'épitaphe.  '  Ils  sont  du   l*oëte  Ausone,  qui  y  a  fort  bien  Ans.  Cœs.  p.  <ei9. 
pris  le  caractère  de  Claude. 

Claudius  irrisac  privato  in  temporu  vitio, 

In  regno  spedmen   prodidit  infjinii. 
Libertina  lamen  nuptaruin  ut  crimina  passus, 

Non  facicodo  nocens,  sed  patiendo  fuit. 

$•    II. 

SON  SAVOIR  ET  SES  ECRITS. 


S 


I  '  Claude  a  passé  pour  n'avoir  aucun  jugement,  il  n'é-  Suet.  caes.  1.  s.  n. 

toit  pas  néanmoins   sans  quelque    génie.  "  Jean  de  Sa-  ^"sares.  pouci.  «. 
lisberi  prétend    même,  suposé   que  cela  se  doive  entendre  •=•  io- 
de Claude,  que  c'étoit    un  homme   de    beaucoup    d'esprit, 
et  de  beaucoup  de  prudence.  Mais  cette  opinion  ne  se  peut 
soutenir.    Seulement    il    est   certain,  comme   nous   l'avons 
montré,  que  ce  Prince  avoit  a.ssez  bien  réussi  dans  ses  pre- 
mières études.  '  Il  avoit  une  grande  connoissance  du  grec  suet.  ibid.  n.  4t. 
et  du  latin,  et  faisoit  souvent  des  harangues  publiques  en   * 

Yij 


172  ETAT  DES   LETRES 

CLAUDE,      l'une  et    l'autre  langue.  Il   préferoit  toutefois  la  gréque  à 
la  latine,  et  ne  pouvoit  s'empêcher  de  le  faire  paroître  en 

f)resque  toute  ocasion.  Il  possedoit  si  bien  Homère,  qu'il 
e  citoit  presque  toujours  dans  ses  jugemens.  Il  aimoit  les 

Tac.  an.  1. 13. n. 3.  belles-letrcs,  et  ceux  qui  en  faisoient  profession;  '  et  ses 
discours,  lorsqu'il  vouloit  prendre  la  peine  de  les  méditer, 
ne  manquoient  ni  d'ornement  ni  de  politesse. 

Dio,  1. 60,  p.  78i.  '  Il  n'étoit  point  ignorant  dans  l'astronomie.  Il  en  don- 
na une  preuve  publique,  étant  déjà  Empereur.  Prévoïant 
une  année  qu'il  devoit  y  avoir  une  éclypse  de  soleil  le  jour 
anniversaire  de  sa  naissance,  et  craignant  que  cela  ne  cau- 
sât quelque  tumulte  parmi  le  peuple,  il  l'annonça  lui-mê- 
me au  public,  en  lui  en  détaillant  les  causes  naturelles. 

suei.  n.  41.  '  Claude  en  sa  jeunesse  s'apliqua  beaucoup  à  l'histoire,  à 

la  solicitation  de  Tite-Live;  et  avec  le  secours  de  Sulpi- 
cius  Flavius  il  entreprit  d'écrire  en  ce  genre  de  literature. 
Il  forma  le  dessein  de  deux  histoires  différentes.  L'une 
commençoit  après  la  mort  de  César,  et  comprenoit  deux 
livres  ou  volumes.  L'autre  commençoit  à  la  paix  civile. 
Mais  comme  l'Auteur  n'avoit  pas  la  liberté  de  dire  la  vé- 
rité en  parlant  de  ceux  qui  étoient  élevés  au-dessus  de  lui, 
sa  mère  et  l'une  de  ses  aïeules  tâchèrent  souvent  de  le  dé- 
tourner de  son  entreprise.  Leurs  remontrances  néanmoins 
ni  le  peu  de  cas  qu'on  avoit  paru  faire  de  quelque  essai  de 
ses  écrits,  qu'il  avoit  soumis  à  la  censure,  ne  l'empêche- 
rent  pas  de  pousser  cet  ouvrage  jusqu'à  41  Livres. 

n.  49.  '  L'aplication  qu'il  donna  à  l'étude,  lui  fit  inventer  trois 

caractères  nouveaux,  qui  lui  parurent  être  assez  nécessai- 
res pour  mériter  d'entrer  dans  l'ancien  alphabet.  Il  com- 
f)osa  même,  lorsqu'il  n'étoit  encore  que  simple  particu- 
ier,  un  traité  sur  celte  matière.  Et  lorsqu'il  fut  parvenu 
à  l'empire,  il  fit  une  ordonnance  pour  faire  passer  ces  trois 

tm.  an.  1. 11.  n.  nouveaux  caractères  dans  l'usage  commun.  '  Il  n'en  vint  à 

14 1  Suei.  iud.  jjjjyj  qu'avec  peine  ;  mais  après  sa  mort  on  ne  tint  plu^ 
compte  de  son  ordonnance.  On  voïoit  encore  du  tems  de 
Tacite  et  de  Suétone  ces  trois  caractères  en  divers  monu- 
mens  propres  à  les  conserver  à  la  postérité. 

Tac.  not.  ibiu.  j  '  L'on  convieut  que  le  digamme  Eolique  F,  et  l'ante-sigma 
"'"  8.'not.  pî^'59.'  DC  étoient  deux  de  ces  trois  letres  inventées,  ou  ajoutées  à 
l'alphabet  latin  par  notre  Empereur.  On  ignore  la  forme 
de  la  troisième  ;  et  puisque  les   anciens  n'ont  pas  jugé  à 


I.   c 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  173 

propos   de  nous  la  conserver,  pourquoi  perdre  du  tems  à       cl  au  de. 
en  faire  la  recherche  ?  '  Quintilien   aïant  trouvé  de   l'utili-  Quint,  ibid. 
té  dans  l'usage   du  digamme  ,  il   est   surprenant  que  l'on 
n'ait  pas  continué  à  s'en  servir. 

'  Jean  de  Salisberi  cite  le  Livre  de  l'Analogie  sous  le  nom  sares.  ibid. 
de  l'Empereur  Claude  :  ce  qui  désigne  clairement  le  traité 
sur  ces  trois  letres  dont  nous  venons  de  parler.  '  Mais  M.  Trist.  com.  wst.  t. 
Tristan  soutient  qu'il  s'est  glissé   une  erreur  dans  le  texte  '■  •*■  ***• 
de  cet  Ecrivain  par  la  faute  des  Copistes  ,  et  qu'au  lieu  de 
Claudium  Cœsarem,  il  faut  lire  Càium  Cœsarem ,  Jule  César 
pour  Claude.  '  Il  est  certain  que  César  composa  deux  Li-  Quint,  p.  eo  i  suet. 
vres  de  l'analogie  des  mots.  Ainsi  il  y  a    plus  d'aparence  i<n-5<5. 
que  c'est  cet  écrit  que  Jean  de  Salisberi  a  eu  en  vûë  ;  puis- 
qu'il donne  à  l'Auteur  les  titres  d'homme  de  beaucoup  d'es- 
f)rit,  et  de  beaucoup  de  prudence,  ce  qui  ne  convient  nul- 
ement  à  l'Empereur  Claude. 

'  Suétone  nous  aprend  que  ce  Prince,  avant  que  de  mon-  Snet.  i.  5.  n.  33. 
ter  sur  le  thrône ,  avoit  composé  un  traité  du  jeu  des  dez, 
qu'il  aimoit  à  la  fureur.   '  Seneque   en  plaisantant  sur  sa  Senec  do  m.  ci.  p. 
mort  ,  et  faisant  allusion  à  cette  passion  de  Claude ,  le  fait 
condamner  aux   enfers  à  continuer  ce  jeu  avec   un  cornet 
percé  parles  deux  bouts. 

Asinius  Gallus  avoit  fait  un  ouvrage  ,  dans  lequel  il  éta- 
blissoit  le  parallèle  d'Asinius  Pollio  son  père  avec  Ciceron , 
mais  en  élevant  le  premier  au-dessus  de  l'autre.  Claude  ne 
put  souffrir  l'injure  qu'on  faisoit  en  cela  au  plus  célèbre 
Orateur  entre  les  Romains.  '  Il  entreprit  donc  l'apologie  Soet.  n.  « 
de  Ciceron  contre  l'écrit  d'Asinius  Gallus  ,  et  l'exécuta 
avec  quelque  érudition. 

'  Après  que  ce  Prince  fut  chargé  du  gouvernement   de  iwd. 
l'Empire  ,  il  ne  discontinua  point  pour  cela  à  donner  toû  - 
jours  du  tems  à  l'étude.  Il  trouva  même  assez  de  loisir  pour 
composer  plusieurs  autres  ouvrages  ,  qu'il  avoit  grand  soin 
de  faire  lire  devant  les  gens   de   letres.   On  nomme  entre 
ces  derniers  écrits  l'histoire  de  sa  propre  vie.'  Auguste  et  i.  2.  n.  85 1 1.  a.  n. 
Tibère  lui  en  avoient  déjà  donné  l'exemple  ,  qui  fut  imité  ^*' 
dans  la  suite  par  divers  autres  Princes.  '  Cette  vie  de  Clau-  i-  s.  n.  4i. 
de  étoit  divisée  en  huit  Livres.  On  y  trouvoit  de  l'élegan- 
ce  ,  mais  peu  de  jugement.  '  Tous  les  ouvrages  de   Claude  "•  **•  *'• 
que  nous  venons  de  nommer,  étoient  écrits  en  latin. 

'  D  en  fit  deux  autres  en  grec  :   l'un  intitulé  TuppYivixwv ,  ».  «. 

1  5 


174  ETAT  DES  LETRES 

CLAUDE.'      c'est-à-dire    l'histoire     de    Tyr   (*)  ;    l'autre    Kapyin^ovwxwv   '^".^^p^^^^^"^^^ 
l'histoire  de  Carthage.    La  première   étoit  divisée   en  vingt  Eirusq^s"'"" 
Livres,  et  la  seconde  en  huit.  Pour  empêcher  que  ces  deux 
ouvrages  ne  tombassent  si-tôt  ou  dans  l'oubli,  ou   dans  le 
mépris ,  Claude  fit  ajouter  un  nouveau  Musée  à  l'ancien  , 

Tiii.  Emp.  t.  s.  p.  '  établi  comme  l'on  croit  par  Ptolemée  Philadelphe  ,  qui 
y  avoit  mis  sa  Bibliothèque.  C'étoit  un  apartement  dans 
le  palais  d'Alexandrie  ,  où  étoient  logés  et  entretenus  des 
hommes  de  letres  ,  partagés  en  plusieurs  compagnies  ou 
collèges  ,  selon  les  sciences  ou  les  sectes,  dont  ils  faisoient 

sii«t.ibid.  profession.  '  Ensuite  Claude  ordonna  que  ces   deux    histoi- 

res seroient  lues  en  entier  à  certains  jours  de  chaque  armée, 
l'une  dans  l'ancien  Musée,  l'autre  dans  le  nouveau  ,  et  que 
chacun  des  Académiciens  feroit  tour  à  tour  cette  lecture, 
comme  en  un  auditoire  réglé.  Malgré  cette  précaution , 
il  ne  nous  reste  plus  rien  depuis  long-tems  de  ces  écrits  de 
Claude,  non  plus  que  des  autres  du  môme  Auteur.  11  sem- 
ble que  ce  soient  particulièrement  les  deux  histoires  gré- 
qucs  dont  nous  venons  de  parler,  que  Pline  l'ancien  a  vou- 
lu marquer ,  lorsque  dans  l'énumeration  des  Auteurs  dont 
il  s'est  servi  pour  son  histoire  naturelle  ,  il  témoigne  en  di- 
vers endroits  avoir  profité  des  écrits  de  cet  Empereur  pour 
la  composer. 

suid.  8.  p.  590.  '  On  est  redevable  en  quelque  façon  à  Claude  de  l'ouvra- 

ge do  Dyctis  sur  la  guerre  de  Troïes.  Car  il  prit  soin  d'en 
faire  multiplier  les  exemplaires  ,  après  qu'on  eut  recouvré 
l'original  dans  l'ouverture  d'un  sépulcre,  qu'un  tremble- 
ment de  terre  avoit  fait  entre-ouvrir  à  Crète  (XVI). 

T^.  an.  1.  11.  n.  '  Tacitc  uous  a  conservé  la  harangue  que  Claude  ,  soit 
par  inclination  pour  les  Gaulois  ses  compatriotes  ,  soit  par 
quelque  autre  motif ,  prononça  devant  le  Sénat ,  afin  d'en 
tirer  un  décret ,  pour  que  les  Peuples  des  Gaules  ,  qui  joùis- 
soient  déjà  du  droit  de  citoïens  Romains ,  pussent  être  re- 
çus au  nombre  des  Sénateurs.  C'est  l'unique  pièce  qui  soit 
venue  jusqu'à  nous  des  productions  de  ce  Prince.  '  Elle  eut 
son  eflet  ;  et  dès-lors  on  admit  dans  le  Sénat  quelques  Gau- 
lois qui  étoient  d'Autun. 

Au  XVI  siècle  on  trouva  sur  la  côte  S.  Sebastien  deux 
tables  de  cuivre,  que  l'on  conserve  à  Lyon  dans  l'Hôtel  de 
ville  ,  et  sur  lesquelles  est  gravée  en  partie  la  harangue  dont 
il  est  ici  question.  Mais  elle  n'y  est  pas  en  si  beau  style  que 


D.  95. 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  175 

Tacite    la   met  en  la  bouche  de  Claude.    Guillaume  Para-       claude. 
din  l'a  copiée  d'après  les  tables  de  cuivre  ,  pour  la  mettre 
à  la  tête  de  son  histoire  de  Lyon,  où  elle  se  lit  avec  quel- 

3ues  fautes  qui  sont  corrigées   '  dans  l'autre  édition  qu'il  a  inscr.  am.  p.  415 
onnée  de  cette  pièce  à  la  tête   de  ses  anciennes  inscrip- 
tions. 

'  Claude  fit  diverses  loix  et  ordonnances  pour  établir  le  suet.^n.  25 1  Dio 
bon  ordre  dans  l'Empire.    Une   des  principales  fut  de  dé-  •" 
fendre  à  toutes  sortes  de  personnes  de  pratiquer  la  religion 
des  Druides.  Ce  n'est  pas  à  dire ,  comme  nous  l'avons  ex- 
pliqué ailleurs ,  qu'il  aJsolit  la  secte  de  ces  Philosophes.  Il 
abolit  seulement  leurs  sacrifices ,  où  ils  répandoient  le  sang 
humain,  et  leurs  divinations  ,  qui  n'étoient  pas  moins  cruel- 
les que  leurs  sacrifices.  '  Il  travailla  toutefois   à  conserver  Tac.  ibid.  n.  15 
la  vaine   science  des  Aruspices,  qui    prétendoient  trouver 
l'avenir  dans  les  entrailles  des  bêtes. 


JULIUS  FLORUS, 

Orateur. 

ON  ne   peut  placer  la  mort  de  cet  Orateur  guéres    plus  julius  florus. 
tard  qu'en   ce  tems-ci ,    c'est-à-dire  vers    le   commen- 
cément  de  l'Empire  de  Néron.  C'est  de  quoi  l'on  se  con- 
vaincra sans  peine  par  la  suite  de  sa  vie.  '  Quintilien  fait  Quini.  inst.  or.  1. 
en  deux  mots  l'éloge  de  Julius  Florus,  en  lui  donnant  le  glo-  *""  *•  '■  *•  ®'"- 
rieux  titre  de  Prince  de  l'éloquence  des  Gaules. 

Presque  tous  les  modernes  sur  cet  endroit  de  Quintilien , 
n'ont  fait  nulle  difficulté  de  regarder  Florus  comme  Gau- 
lois de  nation.  Ce  n'est  pas  sans  sujet.  Le  texte  cité  le  su- 
pose  suffisamment  (  *  )  ;  et  nous  ferons  voir  sur  de  bonnes 

(1)  Il  est  vrai  qne  QDJntilien   semble  ne  y  avoient  brillé   ou  dans  le  iiarreau  ,  ou 

qnaUGer  de  la  sorte   Florus  ,   qu'à  cause  daas  les  écoles,  pour  venir  ensuite  dans 

qu'il  avoit  fini  sa  vie  en  professant  l'élo-  les  Gaules,  à  moins  qu'ils  ne  fussent  eux- 

quence  dans  les  Gaules  :  ce  qui  nous  suffi-  mêmes   Gaulois.  Nâtre  nation    étoit  assez 

roit  pour  lui  donner  place  dans  notre  hi-  féconde  en  cette  sorte  de  savans,  pour  n'é- 

stoire.  Mais  le   texte   de  cet  Orateur  bien  tre  pas  obligée  à  en  mandier  d'ailleurs.  Au 

entendu    supose    encore    autre    chose.    Ce  contraire,  c  étoit   une  chose   fort  coinmu- 

p'étoil  du  tout  point  la   coutume  de  voir  ne  de  voir  les  Orateurs  quitter  leur  patrie, 

des  Orateurs  quitter  la  ville   de  Rome,  qui  pour  aller  à  Rome  ou  y  hanter  le  barreau, 

étoit  le  centre  des  beaux  esprits,  et  le  lieu  ou  y  ouvrir  des  écoles  publiques.   Nous  en 

le  plus  propre  à  (aire  fortune,  après  qu'Us  avons  déjà  donné  grand  nombre  d'exem- 


176  ETAT  DES  LETRES 

juLius  FLORus.  preuvcs  que  Julius  Secundus  ,  neveu  par  son  père  de  Ju- 
lius  Florus,  étoit  réellement  Gaulois. 

D'ailleurs  nous  ne  voions  pas  que  rien   puisse  empêcher 
de  croire   que   notre   Orateur  ne  fût  de  la   même  famille, 

Tac.  an.  1. 3.  n.      '  quo  Cet  autre   Julius  Florus   son   contemporain   natif  de 

*°'  Trêves.    Celui  -  ci   descendoit  de   parens   nobles  ,  qui  pour 

les  grands  services  qu'ils  avoient  rendus  à  l'Empire  ,  avoient 
été  honorés  du  droit  de  bourgeoisie  Romaine  ,  ce  qui  étoit 
encore  fort  rare  en  ces  temps-là  ;  puisque  cela  dut  se  faire 

"•**•  ou  sous  César  ou  sous  Auguste.  'Mais  ce  Florus  de  Trêves, 

aïant  eu  le  malheur  de  se  soulever  contre  les  Romains  avec 
Julius  Sacrovir  d'Autun,  vers  la  sixième  ou  septième  an- 
née de  Tibère  ,  il  prit  le  misérable  parti  de  prévenir  par 
une  mort  volontaire  ,  la  juste  peine  que  meritoit  sa  rébel- 
lion. 

senec.  1.  4.  coni.       Florus   l'Orateur    après   ses    premières    études,  '  alla  à 
'  ''■     ■  Rome  ,  où  il  se  perfectionna  dans  l'éloquence  sous  la  dis- 

156^'  '^^''  '■  ^'  ^'  cipline  du  fameux  Porcins  (*  Latro.  '  Il  faut  que  cela  soit 
arrivé  avant  la  quatrième  année  de  la  194"  Olym- 
piade ,  et  l'an  de  Rome  753,  auquel  tems  S.  Jérôme  place 
la  mort  de  ce  déclamateur.  On  peut  tirer  de-là  que  Flo- 
rus étoit  né  18  à  19  ans  auparavant,  et  ainsi  environ  20 
ans  avant  le  commencement  de  l'Ere  Chrétienne.  11  ne 
lais.sa  pas  de  faire  du  fruit  sous  la  discipline  de  Latro,  mal- 

s«nce.  ibid.  gré  '  sa  manière  assez  bizarre    d'enseigner.  Car  il  étoit  le 

seul  entre  les  Latins  qui  vouloit  que  ses  disciples  se  bornas- 
sent à  l'écouler  ,  sans  qu'ils  s'exerçassent  eux-mêmes  à  la 
déclamation  ;  disant  pour  raison  qu'il  étoit  non  un  maître , 

p-  311.  mais  un  modèle.  '  Enseigner  de  la  sorte,  dit  plaisamment 

Seneque  le  père ,  c'étoit  vendre  son  éloquence,  plutôt  que 

pies  ;  et  l'on  en  verra  encore  bcanconp  éloquence,  il  rotonma  finir  ses  jours  dans 
d'autres  dans  la  suite.  Il  arrivoit  quelque-  les  Gaules  en  continuant  sa  profession.  Ce 
fois  que  ces  Orateurs  Gaulois,  après  s'r-  raisonnement  soutenu  par  celui  que  nous 
tre  acquis  de  la  réputation  dans  cette  ca-  ferons  sur  la  patrie  de  Julius  Secundus, 
pitale  dit  i'KmpJre,  revenoienl  ensuite  dans  prouve  de  reste  que  Florus  étoit  réelle- 
leur  pais.  C'est  justement  ce  qui  .sera  arri-  ment  Gaulois.  Nous  avons  cru  devoir  don- 
vé  à  Julius  Florus  ;  et  Quinidicn  a  .seule-  uer  cet  éclaircissement,  pour  ne  laisser  au- 
ment  voulu  dire,  qu'apns  que  cit  Ora-  cun  lieu  aux  difficultés  que  l'on  pourroit 
tour   se   fut  fait   admirer  à  Home  par  son  faire  naître  à  ce  sujet. 

Schot.  cl.    Rli.  p.        (I)  '  André    Schot   doute  que  notre   Ora-  Rome   oii   Latro   cnseignoit,   comme  il  pa- 
*5.  2.                         leur  soit  le  même  que  Florus  disciple   de  roit   par   Seneque   le   père,   et  non  pas  en 
Porcins   Latro,    parce   que   ce   Latro   étoit  Espagne,  que  Florus  l'aura  eu   pour  mal- 
Espagnol.   Mais  que  cela  fait-il  7  C'est  à  tre  dans  l'éloquence. 

sa 


DANS  LES  GAULES.  I  SIECLE.  177 

sa  patience  et  son  travail.  Ce  fut  pourquoi  les  disciples  de  julius  floris. 
Latro  se  nommèrent  auditeurs  par  dérision  :  terme  qui  est 
passé  depuis  chez  les  Latins  pour  signifier  un  disciple. 

'  Florus  supléa  de  reste  à  ce  foible  secours,  par  la  force  Quim.  ibid. 
de  son  génie  ,  et  par  son  aplication  à  l'étude.  Bien-tôt  il  de- 
vint un  des  plus  éloquens  nommes  de  son  siècle ,  et  mérita 
de  passer  pour  un  Orateur  digne  du  tems  des  anciens  :  inter 
paucos  dùertus,  et  dignusillapropinquitate.  '  Il  parut  avec  di-  senec.  iinj. 
stinction  dans  le  Barreau  ,  où  il  plaida  sous  Auguste  et  Ti- 
bère au  moins.  Seneque  qui  avoit  assisté  quelquefois  à  ses 
plaidoïers  ,  nous  a  conservé  quelques   traits  de  celui  qu'il 
fit  contre  Flaminius.  '  Ce  Préteur  avoit  été  acusé    du  cri-  p.  soi.  su. 
me  de    leze-Majestc,  pour  avoir  fait  contre  les   loix    exé- 
cuter un  criminel  pendant  un  festin,  alin  de  plaire  à  une 
courtisane  ,  qui    disoit    n'avoir   jamais    vu    décoller   per  - 
sonne. 

'  Depuis  ,  Florus   revint  dans   les  Gaules  ('),  où  il  con-  Quim.  ibi.i. 
tinua  jusqu'à  la  fin  de  ses  jours  la  profession  d'Orateur,  soit 
en  plaidant  devant  les  Préfets   du  Prétoire  ,  soit  en  ensei- 
gnant   publiquement    l'art    de    bien    parler.  '  On    prétend  Ega-ss.  Bui.  t.  r.  p. 
'qu'il  le  fit  dans  l'école  de  Lyon,  et  que  Julius  Secundus,  *'-• 
son  neveu  ,  autre  Orateur  fort   célèbre  ,  dont  nous   parle- 
rons   ensuite ,  y  avoit  étudié.  '  Celui  -  ci   étoit   encore  sous  Quim.  p.  aux 
la  férule,  lorsque  Florus  le  trouva  un  jour  triste  et  pensif. 
Florus  lui   demanda  la  cause   de   son  embaras.   Secundus 
lui  avoua  ,  qu'il  y  avoit  déjà  trois  jours  qu'il  avoit  beau 
mettre  son  esprit  à  la  torture,  et  qu'il  n'avoit  pu  néanmoins 
venir  à  bout  de  l'exorde  du  sujet  qu'on  lui  avoit  donné  à 
traiter  :  ce  qui  lui  faisoit  beaucoup  de  peine  ,  et  le  jettoit 
dans  le  desespoir  pour  la  suite.    Alors  Florus  lui  dit  en  sou- 
riant :  «  Est-ce  que  vous  prétendez  mieux  écrire  que  vous 
»  n'êtes  capable  de  le  faire  ?  »  En  efi'et,  ajoute  Quintilien , 
tout  consiste  à  aporter  ses  soins  pour  réussir  de  son  mieux  ; 
mais  au  reste  il  le  faut  faire  selon  sa  capacité. 

Florus    ne     pouvoit    qu'être    vieux,    lorsqu'il    mourut. 


(')  11   soroit   inutile   de   chicaner  sur  le  exemple  qui   puisse  apuier  la  prétention 

texte   de  Quintilien,  et   de   le  vouloir  en-  que  Galliœ  au  pluriel  signifie  la  Gaule  cis- 

tendre  de  la  Gaule  cisalpine  par  raport  aux  alpine ,  que  les   anciens  nomment  presque 

Romains ,      comme     quelques     modernes  toujours   GalUa  togata,  Gallia  cispadana, 

l'ont   prétendu.    Car   cet  Écrivain  se  sert  trantpadana,  afin   d'écarter  toute  équivo- 

dn    nom    plurier    Galliarum.  Or   il   .seroit  que. 
difficile   de   produire   dans   l'antiquité   un 

Tome  I.  Prem.  Part.  Z 

1   6  H 


lat  1.  1.  c.  30. 


178  CLODIUS    QUIIUNALIS. 

I  s  JE  CLE.  Nous  avons  vu  qu'il  étoit  né  environ  20  ans  avant  le  com- 
mencement   de    l'Ere   Chrétienne  ;  et    il  vêquit   au   moins 

(iumi.  ibid.  jusques  vers  l'an  55  ou  5G  de  la  même  Ere  :  '  puisqu'il  vit 

Julius  Secundus  son  neveu  dans  son  adolescence  ,  et  que 
Secundus  étant  de  l'âge  de  Quintilien,  n'avoit  alors  guéres 

iWd._no(|Voss.  hist.  plus  de  15  à  16  aus  '  Plusieurs  modernes  ont  cru  que  Lucius 
Julius  Annaeus  Florus,  Auteur  d'un  abrégé  de  l'histoire  Ro- 
maine ,  étoit  descendu  de  notre  Orateur.  C'est  ce  que  nous 
examinerons  plus  à  fond  dans  la  suite.  La  Popeliniere  au 
6*  Livre  de  son  histoire  page  304 ,  a  avancé  sans  y  penser , 
que  Florus  l'Orateur  étoit  le  même  que  Florus  l'Historien , 
qui  n'écrivit  que  sous  l'empire  de  Trajan. 


CLODIUS  QUIRINÂLIS, 

Rhetkiîr. 

Hier.  ebr.  1. 2.  p.       f  T  ^  '  scul   trait  de  l'histoire  de  ce  Rhéteur,  que  nous 

U  aprenons  de  S.  Jérôme  ,  nous  fait  juger   que  c'étoit 

un   très -grand   homme    de   Lelres.    Mais  ce  ne  sont   pas 

toujours  ceux    dont   les   actions  nous    sont   plus   connues. 

Suet.  cl.  Rii.  noi.  Nous  ue  savons  que  très-pou   de  choses  de  celui-ci ,  '  par 

^-  **^-  h\   perte  que  nous  avons  faite  de  la   vie  que  Suétone   en 

avoit  écrite ,  avec  celles  de  plusieurs  autres  Rhéteurs , 
qui  ne  sont  pas  toutes  venues  jusqu'à  nous,  comme  nous 
aurons  encore  ocasion  de  le  remarquer  plus  d'une  fois. 

Hier.  ibid.  '  Quirinalis  étoit  natif  de  la  ville  d  Arles  dans  la  Gaule 

Narbonoise.  Il  s'apliqua  avec  tant  de  succès  à  l'étude 
des  belles  Letres,  qu'il  se  trouva  en  état  de  les  enseigner 

eues.  an.  Mass.  p.  au-x  aulres  avcc  honueur.  '  On  croit  qu'il  commença  d'a- 
bord à  le  faire  à  Marseille  ,  et  qu'il  fut  un  de  ces  Rhé- 
teurs qui  contribuèrent  à  illustrer  en   ce   siècle  les  écoles 

Hi.!r.  ibi.i.  de  colle  ville.  '  Mais  il  passa  ensuite  à  Rome  ,  où  il  profes- 

sa publiquement  la  Rhétorique  avec  une  réputation  très- 
éclatante  :  Romœ  insignissime  docct.  C'est  ce  que  S.  Jérôme 

Gnes.  ibid.  placc  vors  la  sccondc  année  du  règne  de  Claude  .  '  Quel- 

ques-uns néanmoins  ne  le  font  Heurir  que  sous  Vespasien , 
environ  trente  ans  après  :  ce  qui  ne  se  peut  soutenir  , 
puisqu'il  paroît  qu'il  mourut  dès  les  premières  années  de 
l'Empire  ae  Néron. 


RHETEUR.  179 

En  effet  il  y  a  toute  l'aparence  possible,  que  notre  R  hé-  i  siècle. 
leur  est  le  même  '  que  ce  Clodius  Quirirtalis,  qui  au  ra-  Tac.  a»,  i.  n.  n. 
port  de  Tacite  éloit  Préfet  ou  Intendant  des  forçais  que  so. 
l'on  entretenoit  à  Ravenne.  On  sait ,  et  noiis  en  aVortfe 
donné  divers  exeniples,  ôh  sait  que  les  gens  de  Letres 
étoient  alors  presque  toujours  élevés  au*  Charges  et  di- 
gnités de  l'Etat.  Quirinalis  eut  le  malheur  d'encoUrir  l'in- 
dignation du  Prince ,  pour  les  malversations  commises 
dans  sa  charge.  Afin  de  satisfaite  son  inhumanité  ,  et  de 
fournir  à  ses  dépenses  excessives,  il  exerça  des  concussions 
criantes  sUr  l'Italie  ,  comme  si  c'eût  été  h  dernière  et  iâ 
plus  méprisable  pt-ovince  de  l'Empire.  Il  fut  donc  enve- 
lopé  dans  la  proscription  que  Néron  fit  de  quelques  Of- 
ficiers. Mais  Quirinalis  évita  la  juste  peine  qile  méritoient 
ses  crimes  ,  en  se  faisant  mourir  lui-même  par  le  poison. 
Tacite  met  cette  mort  sous  le  Consulat  de  P.  Volusius  et 
de  P.  Cornélius  Scipio  ,  qui  se  trouve  lié  avec  la  cin- 
quante sixième  année  de  notre  Ere  commune,  et  la  se- 
conde du  Iregne  de  Néron. 

'  Il  y  a  dans  Martial  une  épigramme  sur  un  Quirinalis  ,  Man.  1. 1.  epi.  «s. 

3 ne  ce  Poëte  raille  finement  de  ce  que  faisant  profession 
u  célibat,  il  ne  laissoit  pas  d'avoir  des  enfans  de  ses  es- 
claves ,  qui  liii  servoient  de  femmes.  Comme  Martial 
mourut  fort  âgé  sous  l'Empire  de  Trajan  ,  après  avoir 
passé  sa  jeunesse  à  Rome,  et  y  avoir  demeuré  long-tems, 
on  pourroit  croire  que  cette  épigramme  regarde  ClodiuS 
Quirinalis. 


IJ  R  S  U  L  U  S 

ou 

SURCULUS, 

Rhéteur. 

IL    nous   reste   peu   de  connoissance  de   l'histoire   de  ce 
Rhéteur.     Suétone    avoit    écrit    sa    vie    avec    celles    des 
autres    illustres    Rhéteurs  '  que  nous  avons  encore  de  lui.  Snet.  ci.  rh.  not. 
Mais   cette    vie    est   perdue  ,  aussi-bien  que  celles  de  plu-  ** 

Zij 


180  Ur.SULUS  ou  SURG  ULUS. 

i  SIECLE,      sieurs    autres  ,  dont  on  trouve  les  titres  à  la  tête  de  l'ou- 
vrage     de    Suétone    dans    deux    divers    manuscrits.    Notre 
Hier.  chr.  1. 2.  p.   Rhéteur  y  est  nommé  Lucius  Statius  Ursolus,  '  S.  Jérôme 
"••  dans    sa    chronique    lui  donne  le  nom  de  Surculus  ,  et  le 

prénom    seul    de    Statius.     Personne    ne  doute  néanmoins 
que  ce  ne  soit  le  même  Rhéteur,  dont  ces  deux  Ecrivains 
ont  voulu  parler. 
j,,ij  '  Surculus  étoit  de  Toulouse  :  ce  que  les  éditions  de  la 

chronique  de  S.  Jérôme  par  Scaliger  et  le  Mire  expriment 
par  Tolosensis.  Mais  l'édition  par  de  Pontac  porte  Tolosanus, 
qui  écarte  l'équivoque ,  et  tranche  toute  difficulté.  Il 
enseigna  la  Rhétorique  dans  les  Gaules  avec  beaucoup 
de  réputation ,  sous  l'Empire  de  Néron ,  vers  l'an  58  de 
l'Ere  Chrétienne  :  in  Galliis  celé  berrime  Rhetoricam  docet ,  dit 
S.  Jérôme. 
Quint,  deci.pr.p.  'Pierre  Pithou  a  même  prétendu  qu'Ursulus  avoit  exercé 
aussi  la  même  profession  à  Rome;  et  il  y  a  toute  apa- 
rence  que  cela  s'est  fait  ainsi.  La  preuve  se  présente  d'elle- 
même.  S'il  est  vrai  que  Suétone  ait  écrit  la  vie  d'Ursulus, 
.-.■.,  comme    l'on    n'en    peut    guéres  douter,  c'est  une  marque 

sii.fi.  iii.  fir.  p.  que    celui-ci    avoit    effectivement  enseigné  à  Rome.  '  Gar 
p' ''s;»' 842.' 8*3.'"'  Suétone    s'est   borné  à  ne  donner  les  éloges  que  des  Rhé- 
teurs   et    des    Professeurs    des    belles    Letres ,   qui  avoient 
brillé    dans    cette  capitale  de  l'Empire.  Il  y  a  lieu  de  s'é- 
tonner   de    ce   que  S.  Jérôme  ,  qui  est   atentif  à  marquer 
ailleurs  ces  sortes  de  cfrconstances,  ne  l'ait  pas  fait  ici. 
Vos»,  pos.  lat.  c.       Le  prénom  de  Statius   que  portoit  Ursulus,  '  et  la  qua- 
^'Jljfa.'^.'p.i'il;  lité    de    Poêle   qu'il  joignoit  à  celle  de  Rhéteur  ,  l'ont  fait 
confondre    mal    à    propos  par  quelques-uns  ,  avec  Publius 
Papinius    Statius  Auteur  de  la  Thebaïde  ,  que  nous  avons 
encore.    Ge    dernier   étoit  natif    de  Sella  en  Epire  ,  ou  de 
Naple    selon    quelques    autres ,    et  ne  fleurissoit  que   sous 
l'Empereur  Domitien  à  la  fin  de  ce  siècle. 


U  -' 


DOMITIUS  AFER.  181 

-  I    SIECLE. 


DOMITIUS    ÀFER, 

Orateur. 

S-  I- 

HISTOIRE    DE   SA   VIE. 


0 


N    vit    en    la   personne  de  cet   Orateur  deux  extrémités 
fort  oposées  :  beaucoup  d'excellentes  qualités  ,  et  beau- 
coup   de  grands  défauts.  '  Il  avoit  pris  naissance  à  Nisme  Hier,  ciir.  i.  s.  p. 
capitale    du    pais   des   Arecomiciens ,    qui  fait  aujourd'hui 

{)artie    du    Languedoc  ,  environ  quinze  ou  seize  ans  avant 
e  commencement  de  l'Ere  Chrétienne.  '  Frontin,  outre  le  Froni^.  de  aq.  i.  2. 
prénom    de    Domitius ,   lui    donne    encore  celui  de  Gnaeus  ''  '"  ' 
qu'il  place  le  premier.  '  Mais  il  ne  le  faut  pas  confondre  tui.  Emp.  1. 1.  p. 
avec   un  autre  Cnœus  Domitius  Afer,  qui  vivoit  sous  Ves-  ^^'  *'  "*'■  '' 
pasien,  et  peut-<;tre  encore  assez  long-tems  depuis;  au  lieu 
que  celui  qui  fait  le  sujet  de  cet  éloge,  mourut  sous  Néron, 
comme  nous  dirons  dans  la  suite. 

Afer  au  sortir  des  écoles  de  son  pais,  '  alla  à  Rome  han-  û»»ni-  inst.  or.  i. 
ter  le   Barreau  ,    où    il    passa    pour  un  prodige  d'éloquen-     •'*•?•  '"^• 
ce.  '  Il  se  vit  même  élevé  aux  premiers  honneurs  dans  cet-  dio,  1. 59.  p. 753 1 
te  capitale  du  monde,  et  contmua  à  y  briller  sous  quatre  52  j  Front. 'ibu.  "' 
Empereurs     consécutifs  ;     Tibère ,     Caligula ,     Claude     et 
Néron.    Il    fut    Prêteur    sous  Tibère,  Consul  subrogé  sous 
Caligula ,    et    Intendant    des    eaux    sous    Claude  et  Néron 
l'espace  d'onze  ans. 

Au  reste  quelques    honorables    que  fussent  pour  Afer  ces 
Charges  et  ces  dignités  ,  il  se  seroit  acquis  encore  plus  de 
gloire  par  son  éloquence  ,  '  s'il  n'avoit  terni  sa  réputation  Tac.  ibid.  n.  52. 
par    une   horrible   corruption  de  moeurs.  Joignant,  comme  ^" 
il  faisoit ,    une   vie  licentieuse  à  une  grande  éloquence  ,  il 
ne  pouvoit  manquer  de  faire  dans  le  Barreau  plus  de  mal 
que  de  bien.  '  Aussi  Dion  assûre-t-il  qu'il  fut  le  plus  puis-  dio,  1.  eo.  p.  790. 
sant   Avocat   qu'eurent   les   criminels   de  son  siècle.  '  De  Tac.  ibid.  n.  st. 
même    Tacite   le    blâme   d'avoir  fourni  beaucoup  plus  par 
l'heureux   succès   de  son  éloquence  ,  que  par  la  régularité 


182  DOMITIUS    AFER, 

1  SIECLE,      de   sa  conduite  ,  le  modèle  à  former  les  acusations  ,  ou  à 
défendre  les  criminels. 

ibid.  '  Sous  Tibère  il  ouvrit  eh  quelque  sorte  la  roïe  à  la  per- 

te   d'Agrippine  ,    en    acusant    Claudia    Pulcra  «a  cousine  , 

n.  66.  et  lui   reprochant   ses   crimes.  '  Peu  de   tems   après  il    se 

porta  encore    pour    acusateur   contre   Varus  Quintilius   fils 

n.  52.  de   Claudia-  et    proclic    parent    de    l'Empereur.  '  Et    après 

avoir  donné  en  ces  ocasions  et  autres  semblables  des 
preuves  de  son  esprit ,  il  tint  bien-tôt  un  des  premiers 
rangs  entre  les  Orateurs  ,  sur  tout  lorsqu'on  vit  que  Ti- 
bère même  lui  donnoit  le  titre  d'éloquent. 

Quint,  ibid.  1. 5.       '  Il    mcritoit   justement   cette    qualité   selon    Qùintilieti  , 

séo^'e^'"' '^^■'*'  qui  avoit  été  son  disfcijîle ,  et  qui  assure  qû6  de  loUJ<  les 
Orateurs  qu'il  avoit  connus ,  il  n'eti  avOit  point  trouvé 
de  plus  excellens  que  Domitius  Afet*  et  Julius  Africanus. 
Mais  le  premier  ,  à  soii  avis  ,  étoit  préférable  à  l'autre,  et 
pour  Tarangement  des  expressions  ,  et  pour  tout  ce  qui 
fait  un  bon  Orateur.  Il  ne  craignoit  pas  m^me  de  le  ttiet- 
tre   de   niveau    avec  les  plus  grands  Orateurs  de  l'antiqUi- 

Dia.  or.  n.  15.  té.  '  Il  faut  pourtaut  avouer  aVec  un  autre  Ecrivain  du 
même  tems  ,  que  l'éloquence  au  siècle  d'Afer  avoit  bien 
dégénéré   de  ce  qu'elle  étoit  au  siècle  de  Ciceroh  et  d'Asi- 

ft"'"f- '  1^- c"-  nius.  '  Quoi  qu'il  en  soit,  il  est  au  moins  vrai  qu'Afer  pas- 
soit    sans    nulle    contradiction  pour  le  premier   homme  du 

r'm'  lia"''  **  Barreau  en  son  tems  ,  et  pour  un  Orateur  acOmpli.  *  On  ob- 
serve   que     sa   manière    de    déclamer    étoit    grave    et    po- 

Quint  i.  u.  c.  3.  sée,  '  et  qu'il  y  évitoit  les  gestes  et  trop  frequens  et  tt-op 
vehemens. 

Dio.  1.  59.  p.  752.  '  Son  èloqueuce  toutefois  pensa  lui  coûter  bien  cher 
sous  l'Empereur  Caligula.  Ce  l'rince  par  une  sotte  vanité 
s'imaginant  être  le  plus  éloquent  homme  de  son  siècle  , 
fit  un  crirne  à  Dottutius  Afer  ,  de  ce  que  sa  réputation  lui 
disputoit  cette  gloire.  Il  prit  ocasioil  de  l'inqilieter  d'u- 
ne inscription  qu'Afer  avoit  fait  mettre  à  une  statUë  qu'il  ' 
avoit  érigée  à  cet  Emperetir.  L'Inscription  portoit  qtie 
Caligula  à  vingt-sept  arts  avoit  été  Consul  pour  la  se- 
conde fois.  Mais  bien  loin  que  cette  action  fût  de  quel- 
que mérite  potir  Afer ,  et  qu'elle  lui  atirâl  quelque  ré- 
compense, il  fut  mis  en  jtlstice  sur  cela  tnême,  corhme  s'il 
eut  VtJtllu  reprocher  à  l'ErHpereur  sa  jeunesse  et  le  viole- 
ment  àêé   hit ,    qtii    défendoient   d'entrer   si  jeune  dans 


ORATEUR.  183 

les  charges.    Caligula  voulut  être  lui-même  son  acusateur,     i  siècle. 
et    lut    en    plein    Sénat    un  grand  discours  qu'il  avoit  fait 
contre  lui. 

'  Afer  étoit  perdu  s'il  y  avoit  voulu  répondre.  Aussi  il  ibia. 
s'en  donna  bien  de  garde.  Mais  il  évita  le  coup  par  un 
tour  des  plus  ingénieux.  Il  commença  à  loiier  le  discours 
du  Prince  ,  comme  s'il  n'eût  pas  été  contre  lui ,  et  qu'il 
n'en  eût  été  qu'un  simple  auditeur.  Il  lui  donna  do 
grands  éloges  ,  en  admira  la  force  et  l'éloquence,  en  ré- 
péta tous  les  mots  ,  les  pesa  chacun  en  particulier  ,  en 
releva  la  beauté.  Puis  quand  on  lui  eut  ordonné  de  ré- 
pondre, il  n'emploïa  que  les  suplications  et  les  larmes. 
Enfin  s'étant  prosterné  en  terre ,  il  demanda  pardon  à 
Caligula ,  moins  comme  à  un  Prince ,  que  comme  au 
maître  de  l'éloquence.  L'Empereur  s'imaginant  qu'il  lui 
cedoit  volontairement  la  gloire  de  la  parole,  fut  si  aise  de 
sa  soumission,  qu'à  la  prière  de  Calliste  son  aflVanchi  et 
ami  d'Afer,  il  s'apaisa  et  laissa  là  cette  affaire.  C'est  ainsi 
qu'Afer  feignant  d'avoir  perdu  l'usage  de  l'éloquence , 
évita  sa  condamnation. 

'  En  son  tems  il  s'introduisit  dans  le  Barreau  une  maxi-  PUn.  i.  2.  ep.  n. 
me  pernicieuse  à  l'éloquence.  On  s'avisa  d'y  donner  des  ^'  *^'  '*'' 
aplaudissemens  publics  aux  Orateurs ,  lorsqu'ils  plai- 
doient.  On  prioit ,  on  gageoit  même  un  certam  nombre 
d'auditeurs  pour  cet  efl'et.  Cette  nouvelle  invention  pour 
faire  valoir  les  Orateurs  devoit ,  disoit-on ,  son  origine 
à  Largius  Licinius.  Afer  ne  pouvant  la  souffrir  ,  usa  du 
stratagème  suivant  pour  l'abolir.  C'est  Quintilien  qui  le 
racontoit  à  Pline  le  jeune  son  disciple ,  après  en  avoir 
été  lui-même  témoin  oculaire. 

'  Un  jour  Afer  plaidant  une  cause  devant  le  Sénat,  en-  p  '23. 
tendit  un  bruit  extraordinaire  au  tribunal  le  plus  proche 
de  celui  où  il  plaidoit.  Il  faut  savoir  qu'il  y  en  avoit  qua- 
tre dilîerens  dans  la  sale  où  s'assembloient  les  Séna- 
teurs. Afer  parut  étonné  de  ce  bruit ,  et  se  tut.  Le  si- 
lence aïant  succédé  au  tumulte ,  il  reprit  son  discours. 
On  fit  encore  du  bruit;  il  se  tut  de  nouveau:  et  après 
que  le  bruit  eut  cessé,  il  revint  à  son  discours  pour  la 
troisième  fois.  Enfin  il  demanda  qui  plaidoit  au  tribunal 
voisin  ;  on  lui  répondit  :  c'est  Licius.  Alors  laissant-là 
le    sujet  qu'il  traitoit,  il  s'adressa  aux  Juges  ,  et  leur  dit  : 


184  DOMITIUS   AFER, 

1  SIECLE.     Messieurs,    cet   artifice    n'est   plus   de    saison.  Et  certes, 
ajoute    Pline,   il    commençoit    réellement    à   tomber ,    dès 
qu'il  paroissoit  à  Afer  l'être  déjà, 
ibid.  '  Il    n'en  restoit  presque  plus  aucun  vestige  au  tems  de 

p.  122.  Pline,  '  qui  ne  le  pouvoit  souffrir  non  plus  qu'Afer.  Pen- 

dant   qu'il    fut   en  usage,  il  étoit  inutile  de  prêter  l'oreille 
aux    plaidoïers  des    Avocats.    On  devinoit  sans  peine  celui 
qui    faisoit  le  plus  mal.  G'étoit  toujours  celui  qui  recevoit 
le  plus  d'aclamations. 
Quint,  i.iî.c.  II.       'Afer   vêquit  jusqu'à  une    extrême   vieillesse.    Il  perdit 
5.'  n'.  52.  '^'  ""'  '  alors    beaucoup   de    la    gloire    qu'il    avoit    acquise  ;   parce 
qu'aïant    l'esprit    et    le  corps   usés  par  son  grand  âge  ,  il 
voulut    continuer    à    plaider ,    au    heu   de   renoncer  à  cet 
Qoini.  ibid.  p.  757.  excrcice.    '    Quintilieu    cite    cet  exemple  pour  autoriser  ce 
qu'il    établissoit    touchant    les    qualités    nécessaires    à    un 
Orateur.    Elles    ne    consistent   pas  ,  dit-il  ,  ces  qualités  en 
une    science    qui    se    perfectionne   à  mesure  qu'on  avance 
en    âge;     mais    elles    consistent    en    la    voix  ,    la  vigueur 
du    corps  ,    et    une    bonne  poitrine.  Si  cela  vient  à  man- 
quer soit    par  vieillesse  ou  maladie  ,  il  n'y  a  plus  d'Ora- 
teur. 
Tac.  an.  .  H.  n.       '  Tacite    lie    la    mort   d'Afer  avec  celle  de  Marcus  Ser- 
*^'  vilius,    autre    Orateur    qui    alloit    de    pair    avec   Domitius 

Afer,  tant  pour  l'esprit  et  l'éloquence  ,  que  pour  les  hon- 
neurs ausquels  ils  avoient  été  élevés  l'un  et  l'autre.  Mais 
il  y  avoit  cette  différence  entre  ces  deux  Orateurs,  que 
Servilius  s'étoit  rendu  aussi  recommandable  par  la  régu- 
larité de  sa  vie  ,  qu'Afer  insuportable  par  la  dissolution 
de  la  sienne.  La  mort  de  celui-ci  eut  quelque  conformité 
ibid.  I Hier. chr.  1.  avcc  sa  vie.  Car'  il  mourut  dans  un  repas  pour  y  avoir 
S-  p  leo-  mangé  avec  trop  d'excès,   sous  l'Empire    de  Néron,  et  le 

Consulat    de    Caïus  (')  Vipsanius   et  de   Fonteius    Capito, 
piin.  1.  8.  ep.  18.  la    cinquaute-ueuviéme  année    de    notre  Ere    vulgaire.  '  Il 
p.  523. 527.         semble   qu'il   ne   laissa   point  de   postérité,   puisqu'il  avoit 
adopté  pour  ses   fils  Domitius   TuUus  et  Domitius  Luca- 

nus 

(*)  Le   dernier    Dictionaire   de  Moreri  on  plutôt  de  notre  Ere  vnl(çaire;  el  il  est 

fdace  la  mort  d'Afer  l'an  60  de  J.-C.  sons  visible  par  le  texte  de  Tacite  qno  cette 

e  Consulat  de  C.  Cxsonins  Paetus  et  de  mort  arriva  l'année  à  laquelle  nous  la  ra- 

C .  Petronins  Tnrpilianns.  Ce  sont  deux  portons   :  ce  qui  se  peut  confirmer  par 

fautes  à  la  fois.  Car  il  est  certain  que  ce  Frontin.)  (XVIl.) 
Consulat  est  lié  avec  l'année  61*  de  J.  C. 


ORATEUR.  185 

nus  frères.  Pline  le  jeune  raporte   quelques-unes  de  leurs     i  siècle. 
avantures  assez  plaisantes. 

§.  II. 
SES   ECRITS. 


D 


OMiTius  Afer  ne  se  borna  pas  à  faire  usage  de  son 
savoir  pour  plaider  seulement  de  vive  voix;  il  sut 
encore  l'employer  à  écrire  divers  ouvrages  pour  la  posté- 
rité. Mais  il  y  a  long-tems  qu'ils  ne  subsistent  plus;  et  il 
ne  nous  reste  de  lui  que  quelques  Sentences  que  l'on  trou- 
ve dans  Quintilien,  Dion  et  Pline  le  jeune. 

1"  '  Il  avoit  fait  un  traité  divisé  en  deux  Livres  sur  Qui»,  insi.  or.  i. 
les  témoins  que  l'on  doit  oùir  dans  les  causes.  Quinti-  ^-  '•  '•  ^  -^'■' 
lien  traitant  le  même  sujet  dans  les  instructions  gu'il  don- 
ne à  son  Orateur,  parle  avec  éloge  de  cet  écrit  d'Afer. 
Il  ne  fait  pas  difficulté  de  dire  qu'il  suffisoit  pour  prendre 
une  entière  connoissance  de  cette  matière,  sans  qu'il  fût 
besoin  de  rien  écrire  de  nouveau  sur  ce  sujet.  Afer  y  éta- 
blissoit  comme  un  point  fondamental  que  le  principal 
devoir  de  l'Orateur  à  l'égard  des  témoignages  qui  regar- 
dent les  causes  qu'il  doit  plaider,  est  de  s'instruire  fa- 
milièrement de    toutes   les  circonstances  de   l'affaire. 

2"    Du  tems  qu'écrivoit  Quintilien,  '  il  se   voioit  encore  i.  e.  c  3.  p.  378. 
des   recueils    puolics    des    bons   mots    de   Domitius   Afer. 
Ceux    qui    l'ont    mieux    connu,    remarquent  qu'étant   fort 
poli  et  fort   agréable,    il   avoit   un   talent  particulier  pour 
ces   sortes   de  saillies   d'esprit  fines  et  enjouées.   '  Quinti-  p.  373. 378. 391. 
lien  en   étoit  si  charmé,  et  les  trouvoit    acompagnées   de  ^'*^- 
tant  de   grâce  et  douceur,    qu'il   les  donne   souvent  pour 
modèle    à   ceux   qu'il    entreprend    de    former    à   la    belle 
éloquence. 

3°  '  11  y  avoit  aussi  de  notre  Orateur  un  recueil  public  p  i^»  I  '  lo.  c. 
de  ses   plaidoïei"s,    dans  lesquels  on   trouvoit  quantité   de    '  ''■     ' 
ses  bons  mots,  tant  ils  lui  étoient  familiers. 

'  En    général    Quintilien     fait    beaucoup    d'estime    des  1. 5.  c.  7.  p.  aeg— 
écrits    de   Domitius    Afer ,    et    témoigne    avoir    beaucoup  '■  ^"'  ' 
profité  de  leur  lecture.  Il  y  avoue  aussi  n'avoir  pas  moins 
tiré  de    fruit    des   entretiens  de  ce   grand   Orateur,   qu'il 
avoit  fort  cultivé   dans  sa  jeunesse,  lorsqu'Afer  étoit  déjà 

Tome  I.  Prem.  Part.  A  a 


186  DOMITIUS  AFER,  ORAT. 

I  SIECLE,     avancé   en   âge.  "  Il  raporte  quelques    préceptes   touchant 
•  I.  11.  c3. p.  708?  le  g^ste  de  l'Orateur  qu'il  en  avoit  apris.  Afer  blâmoit  les 
gestes   trop   frequens,  aussi-bien  que   ceux  qui   marquent 
1. 9.  c.  4.  ]).  ,^>92 1    trop  de   vivacité.    '   L'on    observe  qu'il    usoit   souvent  de 
transpositions   dans  ses    pièces,    particulièrement   dans  ses 
exordes,    non    pour   rendre  ses  périodes  plus   complètes, 
mais  pour   rendre  son  discours  plus  simple,  et  ne  pas  de- 
venir suspect  à  son  auditoire  par  un  art  trop  étudié, 
nio.  1.  (10.  p.  790.       •  Dion  raporte  un  des  bons  mots  d'Afer  qui  peut  trou- 
ver ici  sa  place.   Une  personni;  l'aïant  prié  de  plaider  sa 
cause    dont    l'Orateur   Julius    Galicus    avoit   refusé    de  se 
charger,  Afer  ne  fit  que  lui  répondre  :  «  Qui  vous  a  dit 
»  que  j'étois  meilleur  nageur  que  Galicus?  »  Par  où  il  fai- 
soit   allusion    à    l'ordre  que  Claude  avoit  donné  de  jetter 
Galicus  dans  le  Tibre. 


PETRONE, 

Poète. 


S  I 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

L  n'est  peut-Atre  point  d'Auteur  parmi  les- anciens,  qui 
ait  plus  partagé  les  modernes ,  que  celui  dont  nous  en- 
treprenons l'éloge.  Nous  n'avons  garde  toutefois  d'entrer 
dans  le  détail  de  tout  ce  qui  s'est  dit  de  part  et  d'autre, 
soit  sur  sa  personne,  ou  sur  ses  écrits.  Cette  discussion  de- 
•nanderoit  un  autre  personnage  que  celui  que  nous  faisons 
ici.  Nous  nous  bornerons  simplement  à  en  raporter  ce  qui 
uoxvi  paroitra  et  le  plus  autorisé  et  le  plus  convenable  à 
notre  sujet, 
r.ir.  fat.  p.  I.  '  Pétrone   portoit  le  prénom   de   Tile,  selon  Pline  l'an- 

Tac.  an.  1.  16.  n.   cieu  ct  PlutarquB.  '  Néanmoins  le  texte   vulgaire  de  Taci- 
.  Petr.  vie,  p.  24.  '^  '®   nommc  Caïus  Petronius  ;  *  mais  on  ne  doute   pas  au- 
jourd'hui que  ce  ne  soit  un  vice  des  copistes,  qui  transcri- 
vant les  premiers  manuscrits  de  cet  Historien,  auront  mis 
proie»  p  un  C.  pour  un  T.  Caïus  au  lieu  de  Titus.  '  Les  anciens  et 


I 


PETRONE,  POETE.  187 

les  modernes  s'acordent  assez  uniformément  à  lui  donner     i  sieclk. 

le  surnom  d*Arbiter,  sous  lequel  ils  le  citent  presque  aussi  ' 

souvent  que   sous  celui   de   Pétrone.    Cela   lui   sera   venu 

sans  doute  '  ou  de  ce  qu'il  passoit  pour  l'arbitre  des  plaisirs  Tac.  n.  is. 

de  Néron,  ou  de  ce  que  Tacite  le  qualifie  elegantiœ  arbiter, 

comme  étant  l'homme  le  mieux  fait  et  le  plus  poli  de  son 

tems. 

'  Il  naquit  aux    environs  (')  de  Marseille  dans  la  Gaule  sj'i-  car.  23.  v. 
Narbonoise,    où   son   père    pouvoit    alors    exercer  quelque 
charge.  Car  pour  sa  famille,  il  y  a  toute  aparence  qu'elle 
étoit  la  même  '  que  celle  des  Petrones  originaire  des  Sa-  i>eu.  vie,  p.  1. 
bins,  qui  a  donné  tant  de  grands   hommes  à  la  Ilépubli- 
que.   '  Il  pouvoit  descendre  en  ligne  directe  de  Publius  Pe-  iv. 
tronius, 'qui  succéda  à  Cornélius  Gallus  au  Gouvernement  sirab.  1,  n.  p.  ses. 
de  l'Egypte  '  et  qui  étoit  Chevalier  Romain  :  qualité    que  l'oir.  pi. 
l'on  donne  également  à  notre  Poëte. 

'  On  ne  doit  pas  douter  que  Pétrone  ne  fut  élevé  avec  vie.ibid. 
tous  les  soins  que  l'on  donnoit  dans  l'Empire  à  l'éducation 
des  enfans  de  naissance.  Il  s'adonna  particulièrement  aux 
belles  Letres  ;  et  ses  écrits  font  juger  qu'il  s'atacha  sur- 
tout au  bon  goût,  qu'il  acquit  ave(;  toute;  s.i  délicatesse. 
Après  qu'il  eut  fini  ses  premières  études,  on  le  vit  paroî- 
tre  à  la  Cour  de  l'Empereur  Claude,  '  Mais  l'assiduité;  qu'il  i'  - 
y  fit  voir,  ne  l'empêcha  pas  de  se  perfectionner  dans  les 
sciences.  Il  s'exerça  à  la  déclamation  ,  comme  faisoient 
en  ce  tems-là  les  jeunes  gens  de  la  première  qualité,  alin 
de  se  former  à  parler  en  public. 

Nous  avons  déjà  montré  ailleurs  quelle  étoit  la  Cour  de 
Claude.  Il  n'est  pas  étonnant  '  que  Pétrone  qui  étoit  por-  iM. 


(1)  '  Qnelqnos  Ecrivains  ponr  inlirmer 
l'aatorilé  de  S.  Sidoine  qui  éublit  la  iiais- 
saric'!  de  Pétrone  aux.  environs  de  Marseil- 
le, s'expriment  ainsi  «  :  Il  y  a  aparence, 
»  disonlils,  qu'Apollinaire  dit  que  Pulro- 
»  ne  étoit  Mar^teillois  de  nation  et  par  sa 
»  liberté  do  parler  peu  lionnelenieul,  se- 
»  Ion  le  proverbe  ancien,  Mn^sHinm  na- 
»  tijet.  »  Mais  ces  Ecrivains  vuodront 
hi«n  que  l'on  observe  qu'il  n'ont  pas  fait 
assez  d'atention  à  la  force  du  ces  deux 
vers  de  s  .Sidoine  :  Et  le  Mauilirvsinm  per 
hortoi  tacri  $tipUis,  Arbiter,  colunum.  \.a 
sens  qu'ils  y  prétenlent  donner,  pourroit 
se  trouver  dans  levers  suivant  :  llellr.spon- 
tiaeo  parem   Pridpo.    D'ailleurs   ils   con- 


\ieIinout  oux-mèines  qnc  d'autres  apli-  Mor.P.p.  894. 
queni  aux  MsLSsyliens  (leuples  d'.\friquo  lo 
proverbe  ancien  qu'ils  a|i<irlent  en  preu- 
ve. Ce  n'est  pas  sans  raison  ;  puisque  nous 
avons  montre  ailleurs,  que  l'on  ne  voïoit 
point  cheï  les  païens  ilo  mœurs  plus  ré- 
glées et  plus  édifiantes,  que  celles  des  an- 
ciens Itlarscillois.  La  remarque  de  ces 
critiques  Mo  fait  donc  rien  contre  l'autorité 
lie  s.  Sidoine,  qui  se  trouve  apuïée  par 
une  inscription  déterrée  en  1.">(J0.  Selon 
cette  inscription  il  semble  que  Pétrone 
avoit  donné  son  nom  à  un  villa^'c  du;Dio- 
cése  de  Sisteron,  dit  Petruit,  en  latin^l'i- 
eus  Petronii. 


Aaij 


188  PETRONE, 

1  SIECLE,  té  aux  plaisirs  par  tempérament,  devînt  insensiblement 
voluptueux   dans   un  tel   séjour.    On   remarque  néanmoins 

Pcir.  vie, p.  3.  ^u'il  n'aimoit  pas  '  les  plaisirs  de  l'amour  jusqu'à  la  bruta- 
lité, ni  ceux  de  la  table  jusqu'à  la  crapule.  Seulement  il 
goùtoit  les  uns  et  les  autres  d'une  manière  galante  et  déli- 
cate, qui   satisfaisoit   encore  plus  son   esprit  que  ses  sens. 

Ta»,  ibid.  n.  18.  '  De  Cette  sortc  il  emploïoit  la  plus  grande  partie  du  jour 
au  sommeil,  et  donnoit  toute  la  nuit  aux  plaisirs  et  aux  af- 

Petr.  vie,  ibid.  faircs.  '  Sa  maison  étoit  le  rendez-vous  de  tous  les  honnê- 
tes gens  de  Rome.  II  passoit  agréablement  la  vie  avec  ceux 

Tac.  ibid.  qui  le  visitoient.  '  Et  comme  les  autres  se  rendent  célèbres 

par  intrigue,  Pétrone  se  mit  en  réputation  par  une  agréa- 
ble oisiveté.  II.  savoit  si  adroitement  donner  à  ses  maniè- 
res d'agir  un  air  aisé  et  négligé,  que  plus  elles  étoient  li- 
bres, et  mieux  elles  étoient  reçues  sous  cet  air  de  simpli- 
cité aparente.  Enfin  il  dépensoit  son  bien  ,  non  comme 
un  débauché  et  un  prodigue  ,  mais  comme  un  homme 
habile  dans  la  science  des  voluptés. 

ibid.  |Pctr.vie,p.4.  '  Cependant  il  se  vit  obligé  de  mettre  vn  intervalle  à 
ses  plaisirs ,  pour  aller  exercer  la  charge  de  Proconsul 
en  Bythynie.  Il  en  remplit  les  fonctions  avec  aplaudisse- 
ment,  et  fit  voir  tout  ensemble  et  l'étendue  de  son  esprit, 
et  sa  capacité  pour  les  premiers  emplois.  Après  son  retour 
à  Rome,  Néron  qui  avoit  succédé  à  Claude,  voulant  ré- 
compenser ses  services  le  fit  Consul,  aparemraent  subro- 
gé ;  car  son  nom  ne  paroît  pas  dans  les  Fastes  consulaires. 
Cette  nouvelle  dignité  donna  à  Pétrone  un  grand  accès 
auprès  du  Prince,  qui  l'honora  d'abord  de  son  estime, 
puis  de  son  amitié.  Pétrone  eut  soin  de  cultiver  l'une  et 
l'autre  par  les  fêtes  galantes  qu'il  préparoit  quelquefois  à 
Néron,  pour  le  délasser  de  la  fatigue  des  affaires. 

Tac.  ibid.  H  y  réussit  avcc  tant  de  succès,  '  qu'il   devint  bien-tôt 

l'un  des  confidens  de  l'Empereur,  qui  ne  trouvoit  rien  de 
bien  entendu  que  ce  que  Pétrone  avoit  ordonné.  Et  cette 
possession  où  il  étoit  de  décider  du  bon  goût,  lui  fit  don- 
ner  le   surnom   d'Arbiter,   comme  à  celui  qui  en  étoit  le 

Potr.vip,  p.  5.  maître.  '  Pendant  que  Pétrone  avoit  ainsi  l'intendance  des 
plaisirs  de  Néron,  ce  Prince  changea  et  à  l'égard  du  gou- 
vernement de  l'Empire,  et  à  l'égard  de  sa  propre  personne. 

p  8  '  Il  écouta  d'autres  conseils  que  ceux  de  Pétrone  ;  et  s'enga- 

geant  insensiblement  dans  une   débauche  brutale  ,  il  s'a- 


.POETE.  189 

bandonna  tout  entier  à  ses  passions,  et  devint  un  aussi  mé-      i  siècle. 

chant  Prince,  qu'il   avoit  auparavant  paru    doux   et    équi- 

tabl^. 

'  D'ailleurs  la  faveur  où  Pétrone  étoit  élevé,  lui  avoit  p«tr.  vie,  p.  7. 
atiré  la  jalousie  de  ceux  qui  prétendoient ,  aussi-bien  que 
lui.  aux  bonnes  grâces  du  Prince,  et  entre  autres  celle  de 
Tigillin,  Capitaine  des  Gardes,  qui  étoit  un  dangereux  ri- 
val. Cet  homme  de  basse  naissance,  s'étant  rendu  maître 
de  l'esprit  de  Néron,  '  entreprit  la  ruine  de  son  concur-  t»c.  ibid. 
rent ,  qu'il  savoit  être  un  plus  habile  maître  que  lui  en 
fait  de  volupté.  II  en  vint  à  bout,  mais  pau"  les  voies  les 
plus  odieuses.  Il  commença  par  faire  à  Pétrone  un  crime 
de  l'amitié  qu'il  portoit  à  Scevin,  et  excita  par  ce  moïen 
la  cruauté  du  Pnnce,  qui  étoit  la  plus  violente  de  ses  pas- 
sions. Il  corrompit  un  esclave,  pour  s'en  servir  dans  son  des- 
sein, ôta  à  Pétrone  tout  moïen  de  se  justifier,  et  fit  jetter 
dans  les  fers  la  plupart  de  sa  famille. 

'  Pétrone  se  vit  bien-tôt  après  arrêté   lui-même  à  Cu-  n.  19. 
mes  par  ses  ordres,  durant  un  voïage  que  l'Empereur  y 
fit.  '  Mais  comme  l'on   fut  quelque  tems  a  délibérer,  si  l'on  Petr.  rie,  p.  12. 
feroil  mourir  un  homme  de  cette  considération,  'il  se  ré-  Tac.ibid. 
solut  à  s'ôter  lui-même  la  vie  ,  sans  atendre  l'issue  bonne 
ou  mauvaise  qu'auroit  son  affaire.  Néanmoins  pour  ne  pas 
se  donner  une  mort  précipitée,  il  se  fit  ouvrir  les  veines, 
et  ensuite  se  les  fit  bander,  afin  de  laisser  couler  le  sang  à 
sa  volonté,  et  d'avoir  ainsi  le  tems  de  s'entretenir  avec  ses 
amis.  En  ces  derniers  momens  qu'il  s'entretint  avec  eux , 
il  ne  leur  parla ,  et  ne  voulut  qu'ils  lui  parlassent ,  ni  de 
l'immortalité  de  l'ame,   ni  de  ce  qui  lui  pouvoit  acquérir 
une  constance  héroïque,  ni  des  axiomes  aes  Philosophes; 
en  un  mot  de  rien  de  sérieux,  naais  de  certains  vers  légers, 
et  de  poésies  galantes. 

'  Enfin  pour  mieux  cacher  son  genre  de  mort,  il  conti-  iWd. 
nua  ses  fonctions  ordinaires.  Il  entra  dans  le  détail  de  son 
domestiçjue,  recompensa  quelques-uns  de  ses  esclaves,  en 
fit  châtier  d'autres.  Il  prit  même  du  sommeil,  ou  fit  sem- 
blant d'en  prendre.  De  sorte  que  sa  mort,  quoique  vio- 
lente, parut  aux  yeux  de  ses  amis  de  même  que  si  elle  eût 
été  naturelle. 

'  Comme  Pétrone  avoit  en  horreur  les  gens  du  caractère  Piin.  hist.  1. 37. 
de  Néron  "  et  de  Tigillin,  il  n'eut  pas  la  bassesse  d'imiter  ïiac  ibid. 
î  7 


190  PETRONE, 

1  SIECLE,  la  complaisance  de  ceux  qui  mourant  en  ces  tems-là  par 
les  ordres  du  Prince,  le  faisoient  leur  héritier,  et  rem- 
plissoient  leurs  testamens  des  éloges  de  ce  tyran,  et  de  son 

piin.  ibi.i.  favori.  '  Au  contraire  il   brisa  un   vase  très-précieux  qu'il 

avoit,   afin   que   Néron  qui    s^en   seroit  emparé   après  sa 

Tac.  ibid.  mort,  ne  le  pût  servir  à  sa  table.  '  Et  il  trouva  à  propos 

de  ne  lui  envoïer  pour  tout  présent  que  la  satyre  ingé- 
nieuse qu'il  avoit  composée  contre  les  débauches  de  ce 
Prince.  Ensuite  il  rompit  son  cachet  avec  lequel  il  l'avoit 
cacheté,  de  crainte  qu'après  sa  mort  on  ne  le  ftt  servir 
d'instrument  pour  la  perte  de  ceux  entre  les  mains  de  qui 
on  l'eût  trouvé. 

n  20.  '  Néron  voïant  que  les  infamies  qu'il  avoit  cru  dérober 

à  la  connoissance  de  Pétrone,  lui  éloient  connues,  en  eut 
un  extrême  chagrin.  Après  avoir  porté  ses  soupçons  sur 
ceux  qui  pouvoient  lui  avoir  révélé  ses  secrets;  il  les  ar- 
rêta enfin  sur  la  femme  d'un  Sénateur  nommée  Silia,  par- 
ce qu'elle  étoit  beaucoup  des  amies  de  Pétrone.  S'imagi- 
nant  donc  que  par  un  chagrin  particulier,  elle  s'étoit  ba- 
zardée à  découvrir  ce  qu'elle  avoit  néanmoins  d'autant 
plus  d'intérêt  de  cacher  elle-même,  qu'elle  y  avoit  eu  la 
meilleure  part,  elle  fut  envoiée  en  exil.  Pétrone  mourut 
sous  le  Consulat  de  Caïus  Suetonius  Paulinus,  et  de  L. 
Pontius  Telesinus,  l'an  66  de  l'Ere  Chrétienne. 

l'eu,  pr.fr.  1).  13.  '  Comme  il  ne  seroit  pas  laisonnable  de  chercher  un 
Chrétien  en  la  personne  de  Pétrone,  on  doit  être  satisfait 
si  l'on  y  trouve  un  honnête  païen,  un  homme  de  bon  sens, 
qui  ail  raisonné  et  vécu  suivant  le>  véritables  principes  de 
la  connois.sance  «laluielle,  qui  ne  laisse  rien  à  espérer  au- 
de-là  du  (repas.  C'est  ce  qu'un  moderne  a  cru  découvrir 
en  la  personne  de  notre  Poëte,  et  il  le  justifie  particuliè- 
rement j)ar  la  manière  dont  il  mourut.  En  effet,  dit-il, 
cette  mort  est  la  plus  belle  de  toutes  celles  que  l'anticjuité 
païenne  a  admirées.  On  ne  peut  y  remarquer  ni  cramle, 
ni  alfection,  ni  désespoir,  ni  orgueil. 

i>.  u  I  Tac.  iin.i.  11.       '  11  cst  remarquable  d'ailleurs  que  Tacite  n'a  pas  osé  di- 

"■  rc  que  Pétrone  étoit  voluptueux,   mais   seulement  que  sa 

conduite  en  avoit  les   aparences,  par  le  désir  de  plaire  h 

l'ctr.  ibid.  l'Empereur,  revoluhisadvitia ,  seu  vitiorum  vmitationem .  '  On 

peut  encore  moins  conclure  que  ses  mœurs  étoient  cor- 
rompues, parce  qu'il  a  fait  des  peintures  libres  des  débau- 


POETE.  191 

ches  de  Néron  et  de  sa  Cour.  Celte  manière  d'écrire  étoit     i  siècle. 
en  usage  de  son  tems.  On  se  donnoit  par-là  un  air  de  Phi- 
losophe   sévère,  qui  découvroit   librement  les  vices,  et  qui 
nommoit  chaque  chose  par  son  nom. 

Il  faut  pourtant  avouer  que  la  conduite  de  Pétrone, 
jointe  à  ses  écrits,  ne  présente  pas  d'abord  à  l'esprit  une 
idée  aussi  avantageuse  de  sa  personne.  Aussi  '  s'est-il  trouvé  proUg.  p.  ao. 
des  Auteurs  qui  l'ont  regardé  comme  un  vrai  Epicurien  : 
'  ce  qui  pouroit  se  confirmer  par  l'éloge  qu'il  fait  d'Epi-  sai.  p.  *a». 
cure  en  le  qualifiant  le  père  de  la  vérité.  Mais,  puisqu'on 
a  cru  depuis  devoir  user  d'indulgence  à  son  égard,  nous 
n'y  contredirons  pas. 

Au  reste  on  ne  peut  disconvenir  que  Pétrone  ne  fût  un 
homme  d'érudition,  et  un  esprit  élevé,  vif,  enjoué,  qui 
savoit  mêler  avec  art  le  plaisant  avec  le  sérieux,  11  est  mô- 
me peu  d'Ecrivains  parmi  les  païens,  '  qui  soient  plus  polis,  Quenisi.  p.  63. 
plus  agréables,  et  plus  dignes  d'admiration  en  toutes  cho- 
ses; mais  il  en  faut  toujours  excepter  ses  obscénités. 

g.  II. 

SES  ECRITS. 

QUELQUE  ocupé  que  nous  aïons  représenté  Pétrone , 
soit  à  satisfaire  ses  passions,  soit  à  remplir  les  fonc- 
tions de  ses  charges,  il  paroit  néanmoins  qu'il  donnoit 
un  tems  considérable  à  l'étude  et  a  la  composition.  Outre 
l'ouvrage  qui  nous  reste  de  lui,  il  en  avoit  composé  quel- 
ques autres  dont  nous  sommes  privés  depuis  long-tems. 

'  Fabius  Planciades  Fulgentius  fait  mention  d'un  de  ses  Faig.  virg.  com. 
écrits  intitulé  Eustion,  que  l'on  ne  connoît  point  d'ailleurs. 
Pétrone   y    qualifioit    un    certain    Avocat   le    Cerbère  du 
Barreau.  '   Il   semble  que   le    même  Auteur   lui   attribue  Myih.  1. 1.  p.  23. 
encore  un  autre  ouvrage,  qui  avoit  pour  titre  AlbtUia,  et 
qui  paroît  avoir  été   une   espèce   d'apologie  pour  justifier 
les   temmes   de  leur  trop    grand    parler.  '   D'autres   l'ont  Petr.  pr.  fr.  p.  le. 
pris  ou  pour  une  satyre  contre   les  amans  d'Albutia,  qui 
étoit  une    Dame  que  Pétrone   aimoit  beaucoup,  '  ou   pour  saty.  p.  sic.  not  • 
une  pièce  de    vers  tendres  à  la    louange    d'Albucilla,   si 
fameuse  par  ses  amours  sous  l'empire  de   Tibère.  '  Mais  Tac.  an.  1.  e.  n 
cette   Albucilla  aiant  voulu  se  tuer  elle-même,   et   s'étant  **• 


192  PETRONE, 

I  SIECLE,  seulement  blessée,  fut  mise  en  prison  plus  de  trente  ans 
avant  la  mort  de  Pétrone,  et  par  conséquent  avant  qu'il 
fût  en  âge  de  composer  des  écrits  pour  le  public. 

Gyr.  hist.  poë.  dia.       '  Scrvius  au   raport  de   Gyraldi   témoigne    que  Pétrone 

4  p.  856.  j^yqJi  £gjj  yjj  traité  sur  les  mœurs  des  Marseillois.  On  n'a 

point    d'autre    connoissance   de  cette   ouvrage.    Seulement 

p«tr. sat.p. 511.  'on  trouve  quelques  traits  sur  cet  matière  à  la  tin  de 
la  satyre  qui  nous  reste  de  Pétrone,  lesquels  on  cher- 
cheroit  inutilement  ailleurs.  Mais  cela  ne  peut  que  foi- 
blement  insinuer  qu'il  ait  traité  ce  sujet  dans  un  ouvrage 
particulier. 

De  tous  les  écrits  de  Pétrone,  si  l'on  en  excepte  peut- 
être  quelques  petites  poésies,  nous  n'avons  aujourû'hui 
que  sa  fameuse  satyre,  qui   a  fait  tant   de  bruit  dans  le 

A.  Gel.  noc.  au.     mondc  savaut.  Elle   est  du  genre  '  de  celles  que  Varron 

'■  *■  *■  **■  avoit    composées    à    l'imitation    de    Menippe  ,    en    mêlant 

agréablement  la  prose  avec  les  vers,  et  qu'il   avoit  intitu- 

Poir.  pr.  fr.  p.  17.  l^es  Satyres  Menippées.  '  Ce  genre  d'écrire  qu'on  nom- 
me aussi  mixte  ou  mêlé,  pour  le  distinguer  des  satyres 
composées  toutes  en  vers  de  même  mesure,  se  renou- 
vella  en  France  avec  quelque  éclat  vers  la  fin  du  XVI. 
siècle. 

ibid.  '  Ce  mot  Satyricon  qu'on  lit   à  la   tête  de   l'ouvrage  de 

Pétrone,  et  qui  paroît  y  avoir  été  ajouté  par  les  premiers 
copistes,  fait  voir  qu'ils  l'ont  considéré  comme  une  véri- 
table satyre.  Jean  de  Salisberi  n'en  a  point  eu  d'autre 
idée,  lorsqu'il  a  dit  au  sujet  de  cet  écrit  :  Fere  totus  mun- 
dus  exkrhitri  nostri  sententia  rrdmum  videtur  implere,  adco- 

Macr.  som.  Seip.    mediam  suam  respiciens.  '  Avant  lui  Macrobe  n'a  point  non 

1.  i.c.  2.  p.  6.  pjjjg  regardé  autrement  l'ouvrage  dont  il  est  ici  question, 
que  comme  un  roman  fait  pour  censurer  les  débauches  de 
ce  tems-là. 

Pe'r-  >i»'d-  '  Il  faut   donc  convenir  que  c'est  un  roman  satyrique , 

qui  nous  représente  Rome,  ou  pour  parler  plus  juste,  la 
Cour  de  Néron,  sa  propre  personne,  et  sa  vie  cachée. 
C'est  ce  que  l'Auteur  de  la  traduction  françoise  qui  parut 
de  cette  satyre  sur  la  fin  du  dernier  siècle,  prouve  fort 
bien  et  dans  la  préface  qu'il  a  mise  à  la  tête,  et  par  la 
clef  des  principaux  personnages  qui  paroissent  dans  la 
satyre. 

Mais  il  suffit  pour  notre  dessein   d'en   donner  quelques 

preuves 


POETE.  193 

preuves  tirées  de  l'ouvrage  même,  auxquelles  il  a'ost  pas     i  siècle. 

possible  que  des  personnes  raisonnables  se  refusent.  '  Petro-  s^rriT l  mi'  rjT 

ne  dans  la  description   du  festin  de  Tiimalcion  fait  ainsi 

parler  un  homme,  à  qui  il  avoit  demandé  qui  étoit  une 

certaine  femme  agissante  qu'il  voioit  aller  de  côté  et  d'autre 

par  la  salle  du  festin  :  «  C'est  la  femme  de  Trimalcion,  lui 

»  répond  cet  homme.   Elle  se   nomme   Fortunata,  et  me- 

»  sure  les  écus  au  boisseau.  Vous  me  pardonnerez  si  je 

»  ne  vous  dis   point  ce  qu'elle   étoit,  il    n'y  a  pas  long- 

»  tems.   Il  suffit  que  vous  n'eussiez   pas  daigné   prendre 

o  du .  pain  qu'elle  vous  auroit  présente.   Mais  je  ne  vous 

»  puis  dire  pourquoi  ni  comment  elle  est  à  présent  aussi 

»  heureuse,  que  si  elle  étoit  dans  le  ciel.  C'est  le  tout  de 

»  Trhnalcion.   Enfin  elle  a  un  si  grand  pouvoir  sur  son 

»  esprit,  que  si  en  plein  jour  elle  lui  disoit  qu'il  fait  nuit, 

»  il  la  croiroil.  » 

On   ne  peut  s'y  tromper.   On   reconnoît  aisément  dans 
ce  portrait  '  l'Histoire  d'Aclée  sous  le  nom  de  Fortunata.  p.  i9o.  not. 
'  C'étoit  une  affranchie  de   Néron,    qui   l'aimoit  si   éper-  cief. 
dûëmenl    que    voulant    l'épouser  à   toute    force,   il   gagna 
des  personnes  Consulaires  pour  assurer  le   Sénat   qu'elle 
étoit  de  sang  Roial. 

Ajoutons  pour  finir  son  portrait  '  ce  que  Pétrone  con-  s*'-  f""  p-  *^^ 
tinuë  à  en  dire.  «  Celte  bonne  ménagère,  dit-il,  a  le  soin 
»  de  tout;  et  elle  est  si  agissante,  que  souvent  elle  se  trou- 
»  ve  dans  des  lieux  où  l'on  ne  l'atend  pas.  Elle  boit  peu  ; 
»  elle  est  sobre  et  de  bon  conseil;  toutefois  sa  langue  est 
»  dangereuse.  Quand  elle  a  la  tête  sur  le  chevet,  elle 
»  cause  comme  une  pie.  Lorsqu'elle  aime,  elle  aime  bien; 
»  mais  elle  haït  de  même  ce  qu'elle  prend  en  aver- 
»  sion.  » 

11  n'est  guéres  moins  possible  de  ne  reconnoître  pas 
Néron  au  portrait  que  Pétrone  trace  de  lui  sous  le  nom 
ingénieux  de  Trimalcion.  '  Ce  nom  qui  selon  la  force  des  ='«'• 
deux  mots  grecs  dont  il  est  composé,  signifie  un  homme 
consommé  en  toutes  sortes  de  débauches,  lui  convient  à 
merveille.  On  assiire  même  qu'on  voïoit  anciennement  cet 
Empereur  représenté  sur  des  Médailles  avec  ces  mots  : 
C.  NERO.  AUGUST.  IMP.  et  sur  le  revers,  TRIMAL- 
CHIO.  «  '  Cet  homme ,  dit  Pétrone  en  nous  le  dépei-  sai.  p.  193. 
«  gnant,  a  des  fonds  de   terre  d'une  aussi   grande  éten- 

Tomc  I.  Prem.  Part.  B  b 


194  PETRONE, 

I  SIECLE.      »  due    qu'un    Milan  en    peut    passer  d'un    vol.  »  Et   un 

peu  plus  bas  :  «  il  est  si  riche,  qu'il  ne  sait  pas  la  quantité 

»  des  biens  qu'il  possède.  Outre  cela,  il  jouit  de  beau- 
»  coup  de  rentes;  cl  même  il  y  a  plus  d'argent  dans  la 
»  loge  de  son  portier,  qu'aucun  homme  de  la  plus  haute 
»  fortune  n'en  possède  de  nos  jours.  Ouant  au  nombre 
»  de  ses  domestiques,  hélas!  il  est  si  grand,  que  je  crois 
»  en  vérité  que  la  dixième  partie  ne  connott  pas  son 
»  maître,  lîlnlin  ils  le  craignent  si  fort,  qu'il  les  feroit  met- 
»  tre  dans  un  trou.  »  En  voilà  bien  assez  pour  y  recon- 
noîlre  un  Empei-eur  tel  qu'éloil  Néron ,  sur-tout  si  l'on 
y  joint  les  traits  d'extravagance  et  de  folie,  dont  Pé- 
trone charge  ce  portrait  dans  toute  la  suite  du  festin, 
pr.  fr.p.  2:»  Après  cela  on  a  sujet  '  d'être  surpris  de  ce  que  certains 

modernes  ont  prétendu  que  le  Pétrone  de  Tacite  n'est 
pas  le  même  que  l'Auteur  de  cette  satyre,  et  qu'elle  n'a 
point  été  composée  pour  Néron.  Conmienl  pouvoir  dou- 
ter d'une  chose  aussi  claire?  En  elfet  on  y  voit  par-tout 
un  parfait  raport  avec  les  mteurs  de  Néron,  et  les  coutu- 
mes de  son  tems.  On  y  trouve  Seneque ,  Lucain ,  Silia , 
Aclée,  et  les  alfranchis  de  Néron.  Comment  refuser  de 
Tac,  an.  1. 16.  n.  reconuoître  cette  satyre'  dans  le  livre  que  Pétrone,  au 
'9-  raport  de  Tacite ,  envoïa  à    Néron ,    avant   que   de   mou- 

rir, et  dans  lequel   il   décrivoit  sous  des  noms  de  débau- 
chés et  de  femmes  perdues  les  vices  de  ce  Prince? 

La  plupart  des  vers  insérés  dans  cette  satyre  de  Pétro- 
ne sont  d'une  grande  beauté,  et  font  voir  que  l'Auteur 
avoit  beaucoup  de  talent  pour  la  poésie  Le  poëme  sur 
la  guernî  civile,  ou  le  renversement  de  la  République 
Romaine,  est  sans  contredit  la  plus  considérable  de  ces 
l'eir.  Rat.  p.  417  intcrcalalious  poétiques.  '  Pétrone  semble  l'avoir  fait 
pour  critiquer  celui  de  Lucain ,  qui  lui  paroissoil  trop 
endé  et  hors  du  naturel.  Mais  il  lui  est  échapé  à  lui-même 
]..  4ï-,  428.  quelques  vers    où   se   trouvent   les    mêmes    défauts.    '  Ce 

sont  ceux  où  il  parle  des  tombeaux  de  César,  de  Pompée 
et  de  Crassus.  Voici  ses  paroles  : 

Très  tulcrat  Fortuna  Duces,  quos  obruit  onines 
Armorum  strue  divei*8à  l'eralis  Enyo. 
Crassum  l'arllius  liabct,  Libycojaccl  aequore  Magnus; 
Jiilius  ingratam  porfudit  sanguine  Roraam. 


POETE.  19;5 

Et  quasi  nuit  |)osset  tôt  telius  Turrc  se|iiilcni                                            [  s  l  K  c  L  E. 
Divisit  cincres  ;  hos  gloria  nnldit  honores.  


Or  on  demande  où  se  trouvent  dans  ces  deux  derniers 
vers  la  justesse,  la  vérité,  ou  au  moins  la  vrai-semblance 
que  l'on  doit  garder  en  quelque  genre  que  Ton  écrive?  11 
n'y  a  que  trois  tomlx^aux;  et  l'Auteur  parle,  comme  s'il 
y  en  avoit  une  quantité  prodigieuse,  tôt.  (juel  plus  grand 
fardeau  pour  la  terre  de  porter  les  ctîudrcs  de  ces  trois 
Héros  réunies  ensemble ,  que  de  les  porter  divisées  et 
séparées  les  unes  des  autres?  Uira-l-on  ou  que  l'idée  de 
la  grandeur  de  ces  Maîtres  de  la  t(;rre ,  ou  que  la  magni- 
ficence des  monumens  superbes  érigés  à  leur  mémoire , 
suffit  pour  justifier  la  pensée  de  Pétrone?  Mais  qu'étoit 
devenue  leur  grandeur  après  leur  mort?  Et  qu'étoit- ce 
que  les  monumens  qu'on  leur  avoit  élevés?  Crassus  n'eut 
point  de  maust»lée.  F.e  tombeau  de  Pontpco  ne  mériloit 
pas  le  nom  de  tomboau ,  ou  pour  mieux  dire ,  il  n'en 
eut  point  du  tout,  'selon  l'exon-ssion  d'un  ancien  Poëte.  voss.  po..  iji.  <-. 

•^  '  I.  p.  tXt. 

Mannoreo  Ijriniis  Uimulû  jiu'«t,  ut  Cato  parvo, 
Pompetiis  nullo. 

'  Ce  p(Jëme  de  Pétrone  sur  le   renversement  de  la   Hé-  Fab.  iiii.  ui.  p. 
publique  Romaine  a  été  démembré  de   la  satyre   dont   il  p' î-i^'rbSs.*  "' 
fait    partie,    et    imprim«    avec   diverses   autres   pièces  <le 
poésie  des  anciens.  On  le  trouve  aussi  à  la  lin  de  la  tra- 
duction des  œuvres  de    Lucain  par  Mr.  de   Mamies ,  im- 
primée à  Paris  en  lO'ii.  Il  y  est  joint  à  la  traduction  Fran- 
çoise <ju'en  a  fait  le  même  Traducteur,  et  dont  les  Savans 
connoissent  assez  les  défauts.  '  A  la  suite  de  ce  {K»ëme,  dans  <:ii«r.  p..r.  ibi.i.  y. 
le  chœur  des  Poètes  on  a  mis  les  autres  poëmes  de  Pctro-  ^^^^** ' 
ne  qui  se  trouvent  in.serés  dans  sa  prose. 

On  ne  doute  presque  point  que  la  plupart  des  petites 
poésies,  qu'on  a  mises  à  la  fin  de  la  satyre  de  Pétrone ,  et 
qui  composent  ce  au'on  nctnnne  le  jeu  sur  Priape ,  ne 
soient  de  la  façon  de  notre  Poëte.  Elles  sont  tout-à-fait 
de  son  génie.  On  porte  le  même  jugement  de  plusieurs 
épigrammes  qui  se  trouvent  à  la  fin,  particulièrement  de 
celles  qui  ont  en  tête  le  nom  de  quelque  Pétrone.  'Quel-  Tiii.  Emp.  i  i  p 
ques  Savans  prétendent  néanmoins,  qu'il  y  en  a  beau-  ***• 
coup  qui  apartiennent  au  Poëte  Publius  Optalianus  Por- 
phyrius. 

B  b  ij  , 


196  PETRONE, 

I  SIECLE.         "Raphaël    cle  Voltcrre  a  atribiié  à  notre    Pétrone   quel- 

«Gesn.  iiih.  un.  t.  ^"08  vcrs  sur  la   M('decine.    Mais    Gesner  croit   avec   rai- 

I.  p.  5*2.  2.         son   que  cet   Ecrivain  a  confondu  en  cela   Petronius   avec 

iMin.  hist.  1. 22.  c.  Petrichus,    '  que  Pline    l'Historien    assure    avoir    écrit  en 

vers  sur  la  même  matière. 

$•  IH. 
SA  MANIERE  D'ECRIRE. 

ivii  pr.  fTioi'T  '  le    monde  n'a  pas   porté    le    même    jugement  de 

X  la  manière  d'écrire  de  Pétrone.  Quelques  -  uns  ont 
envisagé  .son  ouvrage  comme  un  ramas  de  toutes  sortes 
d'obscénités,  que  l'Auteur  auroit  écrites  sans  ordre ,  et 
sans  d'autre  but  que  de  se  satisfaire.  Mais  on  ne  peut 
s'empêcher  d'avouer  que  ce  jugement  est  outré.  Ce  que 
nous  avons  déjà  dit  et  de  l'Auteur  et  de  l'ouvrage,  suffi- 
roit  pour  détruire  une  telle  idée. 

lijii.  I  proi.)g.p.i4.  '  D'autres  au  contraire  ont  non  seulement  fait  l'apolo- 
gie de  ce  Livre,  mais  ont  encore  poussé  son  éloge,  jus- 
qu'à dire  qu'il  n'y  en  avoit  point  de  plus  propre  à  don- 
ner l'intelligence  de  ce  que  Saint  Piiul  dit  des  desordres 
des  Romains  et  des  Grecs  dans  ses  Epîtres  aux  Ro- 
mains, aux  Corinthiens  et  aux  Galates.  Penser  de  la 
sorte ,  c'est  donner  dans  un  autre  extrémité ,  et  établir 
une  opinion  aussi  outrée  qu'elle  est  oposée  à  la  précé- 
dente. 

Nous  croïons  devoir  tenir  un  milieu,  en  louant  dans 
Pétrone  ce  qu'il  y  a  de  bon,  et  en  y  blâmant  ce  qu'il  y  a 
de  mauvais.  Mais  assurément  le  dernier  l'emportera  tou- 
jours sur  l'autre.  Il  faut  convenir  que  le  style  en  est  beau , 
énergique,  noble,  élevé.  Sa  douceur,  son  élégance, 
sa  déhcatesse  sont  inimitables.  Le  tour  aisé  qu'il  donne  à 
ses  pensées  y  ajoute  un  prix  que  l'on  ne  sauroit  trop  esti- 

Rut.it...oi.p.2i8|   mer.  '  C'est  ce  qui  l'a  fait  qualifier  par  quelques  Ecrivains, 

«on.  riot.  auc.  p.  £ iQq^ç^Uggijrnus  et  doctissimus  scriplor  Petronius  Arbiter  : 
et  par  d'autres,  purissimœ  latinitatis  hnpurissimus  scriptor. 
Toutefois  malgré  ces  belles  qualités,  la  lecture  de  Pé- 
trone sera  toujours  dangereuse  :  à  moins  qu'armé  d'une 
solide  vertu,  on  ne  le  lise  comme  une  satyre  fine  et  in- 
génieuse, où  l'Auteur  ne    décrit    les    vices    que    pour    les 

il    '.     i\ 


POETE.  197 

rendre    odieux.    Encore    y    anra-t-il    à    craindre    du    côté      i  siècle. 

de  ses  expressions  trop  vives   et   trop   frapanles  contre    la 

pudeur. 

Les  anciens  et  les  modernes,  qui  ont  le  mieux  étudié 
Pétrone,  l'ont  regardé  dans  ce  même  point  de  vue.  Nous 
en  avons  déjà  donné  quelques  preuves ,  auxquelles  il  ne 
sera  pas  inutile  d'ajouter  celle-ci.  'Un  ancien  Poëte,  Epi.etpoo.  vet.  i. 
dont  on  nous  a  conservé  l'épigramme  suivante ,  où  la  '  ^'  ^*' 
longueur  du  tems  a  laissé  glisser  quelques  fautes,  s'en  ex- 
plique de  la  sorte.  1 

Pctioni  carmcn  divino  pondère  currit, 

Qao  Juvcnum  mores  .iiguit  atque  Sonum. 
Quarc  illc*  prœsa  paudet  lasciva  puclla, 

At  qiioque  deliciits  frigida  sentit  anus. 
Nam  *  iler  diri  .-«cripsitquc  Ncronis  amk  tu 

Abriter,  arbitrio  dictus  et  ipsc  suo. 

'  Pétrone  dans  son  ouvrage ,  remarquent  quelques  mo-  Petr.  pr. 
dernes,  fait  le  personnage  d'un  jeune  homme,  quoiqu'il  y 
paroisse  avec  toute  l'expérience  d'un  vieillard.  Comme  un 
espion  adroit  il  parcourt  la  mer  et  la  terre,  pour  y  ob- 
server tout  ce  qui  s'y  passe.  Il  entre  dans  toutes  les  par- 
ties de  plaisir  ;  il  se  met  de  tous  les  voïages;  il  se  mêle 
dans  toutes  les  assemblées  ;  il  se  glisse  à  la  Cour,  au  Bar- 
reau ,  dans  les  écoles,  les  cabinets  d'étude ,  les  sales  de 
festin,  les  ménages,  en  un  mot  les  lieux  les  plus  secrets, 
et  en  raporte  fidèlement  tous  les  desordres  pour  les  cen- 
surer avec  autant  d'esprit  que  de  délicatesse. 

Tantôt  c'est  une  critique  vive  des  injustices  que  com-  iW'i- 
mettoient  les  Juges,  et  des  calomnies  que  faisoient  entrer 
les  Avocats  dans  les  affaires  qui  se  plaidoient  au  Barreau. 
Tantôt  c'est  une  censure  mordante  des  concubinages 
honteux  des  faux  Prêtres,  du  luxe  et  des  dépenses  exces- 
sives des  festins,  de  la  légèreté  et  de  la  coqueterie  du  beau 
sexe,  des  actions  infâmes  qui  se  pa.ssoient  dans  les  bains 
publics.  Ici  c'est  une  déclamation  pathétique  contre  l'hy- 
pocrisie et  la  dissimulation  des  Philosophes,  les  mœurs 
corrompues  de  ceux  qui  etoient  préposés  pour  élever  la 
jeunesse,  la  paresse  et  la  négligence  que  Ton  aportoit .  à 
cultiver  les  sciences  et  les   beaux    arts.    Ailleurs  c'est   un 


198  PETRONE, 

SIECLE.  tour  ridicule  ingénieusement  donné  à  la  siniplicité,  ou 
plutôt  à  la  folie  de  certains  testateurs,  qui  se  laissant  aller 
aux  flatteries  de  gens  avares,  les  rendoient  leurs  héritiers 
au  préjudice  de  ceux  qui  dévoient  l'être  naturellement; 
et  aux  supercheries,  aux  fraudes,  aux  duplicités,  aux 
bassesses  dont  usoient  ces  avares  pour  se  suplanter  les  uns 
les  autres. 

^  fr  p  *»  '  C'est  ce  qui  a  fait  dire  à  un  autre  moderne,  qu'il  ne 

faut  pas  se  récrier  sur  la  manière  d'écrire  de  Pétrone; 
puisau'étant  consid(;rée  du  bon  côté ,  elle  censure  plutôt 
la  débauche  qu'elle  ne  l'autorise ,  et  qu'elle  est  très-diffé- 
rente de  celle  des  autres  Poëtes,   qui    expriment   les   cho- 

p.  15.  i«.  ses   avec  moins  d'honnêteté   que  lui.    '  Dans  les  plus  vives 

descriptions  qu'il  fait  des  déoauches  de  l'Empereur  et  de 
ses  favoris,  u  en  adoucit  toujours  les  images  par  des  ter- 
mes dont  l'honnêteté  et  la  modestie  ne  peuvent  être  bles- 
sées. Jamais  on  ne  le  voit  emploïer  aucuns  de  ces  mots 
grossiers,  dont  Catulle ,  Martial  et  tant  d'autres  sembla- 
bles se  trouvent  remplis;  quoique  le  latin  permette  une 
certaine  liberté  que  la  pudeur  ^ie  notre  langue  ne  peut 
souffrir. 

I»  «3  '  Il  témoigne  par-là  que  ce  n'est  point  par  un  esprit  de 

corruption  qu'il  a  écrit,  mais  plutôt  par  le  chagrin  d'un 
Courtisan  philosophe,   dont    la   vûë    etoit   bles.sée   par   les 

p  "  desordres  de  l'Empereur  et  de  sa  Cour.     C'est  une  .satyre, 

comme  on  l'a  montré.  L'ouvrage  est  donc  a.«;sez  distingué 
par-là  de  ceux  qui  sont  faits  pour  llatter  les  vices  ;  et  le 
titre  seul  lui  sert  d'apologie. 

1-.  s.  'Tout  est    exquis  dans  cet    ouvrage,    au    sentiment    de 

l'Ecrivain  moderne  déjà  cité.  Soit  que  l'Auteur  ataque 
les  défauts  de  l'esprit,  soit  qu'il  combate  les  foiblesses  du 
cœur,  il  se  soutient  par- tout  de  même  force,  suivant 
les  differens    caractères  de   ses  personnages.  Mais  s'il  est 

p.  «.  vrai  de  dire  que   les   hommes    ont   rarement    les   mêmes' 

pensées ,  comme  ils  se  rencontrent  encore  moins  dans  la 
manière  de  les  exprimer,  Pétrone  est-  encore  plus  distin- 
gué des  autres  Auteurs  par  le  tour  de  l'expression,  que 
par  les  pensées  mêmes.  El  au  lieu  que  la  plupart  sont  lus 
seulement  pour  les  choses  qu'ils  ont  écrites,  celui-ci  est 
également  chéri  et  pour  les  pen.sées,  et  pour  les  manières 
dont  il  les  a  exprimées.  Il  est  le  seul  de  tous  les  anciens 


POETE.  199 

qui  a  connu  la  véritable  galanterie,  qui   fait  aujourd'hui      '  siècle. 
un  des  caractères  de  la  politesse.  11  a  su  la  distinguer  de 
la  tendresse  et  de  l'emportement;  et  comme   elle  consiste 
principalement  dans  les  expressions,  il  a  eu  un  soin  parti- 
culier de  choisir  celles  dont  il  s'est  servi. 

'  Aucun  Auteur  de  l'antiquité  n'a  écrit  avec  plus  de  pu-  '*'■•  '  •  p-  " 
reté,  plus  de  force,  ni  plus  galamment.  '  Son  style  est  un  p-  -^ 
style  de  Cour.  Ses  expressions  sont  fines,  délicates,  et  la 
noblesse  de  sa  latinité  fort  élevée.  De  sorte  que  pour 
l'entendre,  il  n'est  pas  si  nécessaire  d'être  savant,  que 
d'avoir  le  bon  goût,  afin  d'entrer  en  le  lisant  dans  le 
caractère  de  son  espi'it. 

Tant  de  beautés  qui  s'y  présentent  à  ceux  qui  le  lisent 
comme  il  faut,  '  lui  ont  atiré  une  foule  de  partisans.  Car  p  9 
dans  l'opinion  de  quelques  Ecrivains  ,  Pétrone  n'est  pas 
moins  estimé  aujourd'hui  ,  qu'il  l'étoit  dans  l'ancienne 
Rome.  '  On  prétend  même  que  M.  le  Prince  de  Condé  p.  lo. 
faisoit  tant  de  cas  de  cet  Auteui-,  qu'il  entretenoit  auprès 
de  lui  des  hommes  d'érudition  pour  lui  en  faire  la  lec- 
ture. 

$.  IV. 

Histoire  abrégée  de  la  décoiiver le  de  ses  derniers  fragmena. 


^NE  certaine    destinée    n'aïant   pas  voulu  que    l'ouvra-  Pe«r.  pr.  fr.  p.  is. 

Ige  de  Pétrone  passât  d'abord  tout  entier  jusqu'à 
nous ,  n'a  permis  qu'il  y  vînt  que  par  morceaux  ,  en 
nous  en  faisant  de  tems  en  tems  des  presens  par  de  nou- 
velles découvertes.  Jusqu'au  dernier  siècle  on  n'en  avoit 
reçu  de  la  première  antiquité  ,  que  de  simples  frag- 
mens  ,  qui  passoient  pour  des  collections  qu'un  studieux 
avoit  faites  de  quelques  lieux  choisis  de  cette  satyre. 

'  En  1663  on  en  recouvra  un  autre  fragment  conside-  uot.  p.  73. 
rable,  qui  contient  la  suite  du  récit  de  ce  repas  magnifi- 
que ,  que  Trimalcion  donne  à  ses  amis.  On  est  redevable 
de  la  découverte  de  ce  monument  à  Mr.  Petit,  qui  ne 
se  fit  d'abord  connoître  que  sous  le  nom  suposé  de  Mari- 
nus  Statilius.  Il  déterra  ce  fragment  à  Trau  en  Dalmatie 
dans  la  Bibliothèque  de  Nicolas  Cippius.  Mais  à  peine 
l'eut-on  exposé  au  grand  jour,  qu'il  excita  parmi  les  Sa- 


200  PETRONE, 

I  SIECLE,  vans  une  fameuse  dispute.  Les  uns  se  déclarèrent  pour, 
les  autres  contre.  Les  principaux  entre  ceux-ci  lurent 
Henri  Valois ,  Mr.  de  Wagenseil  et  Thomas  Ileinesius , 
qui  publièrent  divers  écrits  pour  tâcher  de  montrer  la  su- 
position  de  la  pièce  nouvellement  découverte.  Adrien 
Valois  vint  à  leur  secours  par  une  petite  dissertation  dont 
il  fit  présent  au  public  en  106G. 

ibid.  '  Mr.    Petit  se  voiant  de  si  puissans  adversaires  sur  les 

bras,  pensa  tout  de  bon  à  leur  faire  tête.  H  prit  la  plu- 
me ,  et  composa  une  apologie ,  pour  défendre  le  nouveau 
fragment  contre  les  injures  dont  on  le  chargeoit.  El  pour 
faire  voir  qu'il  n'imposoit  pas  au  public,  il  envola  le  ma- 
nuscrit nouvellement  découvert  à  Mr.  Grimani  Ambassa- 
deur de   la  République   de  Venise  à  la  Cour  de  Rome  , 

p.  74.  '  à  dessein  de  le  soumettre  à  l'examen  et  au  jugement  des 

connoisseurs.  11  y  eut  à  ce  sujet  une  assemblée  à  Rome  le 
28  d'Août  1668,  dans  laquelle  le  manuscrit  fut  reconnu 
pour  être  du  XV  siècle ,  au  caractère  de  l'écriture  et  à 
la  nature  du  papier.  Ce  manuscrit  est  passé  depuis  à  la 
Bibliothèque  du  Roi. 

En  France  il  se  tint  quelques  conférences  sur  ce  célè- 
bre différend  en  présence  de  M.  le  Prince  de  Condé;  et 
il  paroîl  qu'elles  ne  furent  qu'avantageuses  aux  préten- 
tions de  l'Auteur  de  la  nouvelle  découverte.  Tout  cela 
réveilla  l'atention  des  Savans  ,  dont  quelques-uns  se  dé- 
clarèrent publiquement  en  faveur  de  Mr.  Petit.  Mr. 
Manlel  sous  le  nom  de  Caïus  Tilebomenus,  qui  est  l'ana- 
gramme de  son  nom  latin,  se  signala  entre  les  autres.  La 
cause  de  Mr.  Petit  prit  le  dessus;  et  le  fragment  de  Trau 
se  trouva  victorieux  de  tous  ceux  qui  lui  avoient  déclaré 
la  guerre. 

Aussi -tôt  on  l'inséra  dans  l'ancien  texte  de  Pétrone  , 
comme  faisant  naturellement  partie  de  son  ouvrage.  Il  y 
en   eut  toutefois   avant  et  après   différentes  éditions   parli- 

i>  n.  culières.    '  D'abord  il  fut  imprimé  à  Padoûe  en  1663  avec 

beaucoup  de  fautes,  et  plus  correctement  l'année  suivante 
au  même  endroit  par  les  soins  de  Paulus  Trambrottus. 
L'année  suivante    1664,  Mr,  Mantel    en    donna  une  nou- 

Kai..  iiib.  lai.  p.  velle  édition  '  à  Paris  ,  où  il  eut  soin  de  faire  encore  rè- 

**'  imprimer  l'ouvrage  l'an  1666   en  un    volume    m-S"  avec 

l'apologie   de   Mr.  Petit.   En  1665  Jean  Scheffer  le  publia 

à  Upsal 


I 


POETE.  201 

à  Upsal  avec  des  notes  de  sa  façon,  et  Thomas  Reinesius      i  siècle. 
à  Leipsik  en  1666   avec  les  mêmes  notes  ,  et  de   nouvel- 
les  observations  critiques.  '  Ce  fragment    parut    encore    à  peir.  not.  ibid. 
Nuremberg  l'an    1667,  avec  un  précis  de  ce  que  l'on  avoit 
alors  écrit  pour   et  contre.   '  En    1670   et    1671    il  y   en  Fab. sbidiBibs. 
eut  deux   autre?  éditions  à  Amsterdam   chez   Jean  Blaeu  , 
auxquelles  on  joignit  l'apologie  de  Mr.   Petit.   On  en    trou- 
ve aussi   une  édition  faite  h  Rome,  la  même  année  que  le 
manuscrit  qui  contient  ce  fragment  y  fut  examiné. 

Pendant  que  le  fragment  de  Trau  joùissoit  ainsi  des 
avantages  de  sa  victoire ,  on  crut  recouvrer  à  Belgrade  en 
1688  ,  le  reste  qui  manquoit  à  l'ouvrage  de  Petrone«' 
Nous  aprcnons  les  avantures  de  cette  dernière  décou- 
verte prétendue,  d'une  Ictre  de  Mr.  Nodot  à  Mr.  Char- 
pentier Directeur  de  l'Académie  Françoise  ,  en  date  de 
Strasbourg  le  12  d'Octobre  1690.  Mr.  Dupin  Gentil- 
homme François,  qui  s'étoit  engagé  au  service  de  l'Em- 
Çereur  dès  le  commencement  de  la  guerre  contre  le 
'urc,  se  logea  h  la  prise  de  Belgrade  chez  un  Grec  re- 
négat. Ce  fut  \k  qu'il  trouva  parmi  les  manuscrits ,  dont 
ce  renégat  avoit  hérité  do  son  père  homme  savant  ,  les 
nouveaux  fragmens  dont  il  est  ici  question. 

Sitôt  que  Mr.  Nodot  eut  avis  d'une  si  heureuse  décou- 
verte, comme  il  pensoit,  il  mit  tout  en  œuvre  pour  avoir 
une  copie  du  manuscrit.  Il  y  réiiss-t,  et  la  communiqua 
sans  délai  à  Mr.  Charpentier,  pour  savoir  ce  que  lui  et 
les  autres  Savans  en  penseroient.  Le  jugement  qu'en  por- 
tèrent d'abord  quelques-uns  ,  fut  tout  en  faveur  du  ma- 
nuscrit nouvellement  recouvré.  L'on  crut  y  apercevoir 
un  discours  suivi  et  sans  interruption ,  par-tout  le  même 
esprit  qui  conduit  l'ouvrage ,  par-tout  le  même  style  ,  les 
mêmes  pensées ,  les  mêmes  expressions  ,  en  un  mot  tout  le 
génie  de  Pétrone. 

On  ne  tarda  pas  à  donner  au  public  sur  la  copie  du 
manuscrit  de  B»  Igrade  Pétrone  en  son  entier,  ainsi  qu'on 
le  suposoil ,  espérant  que  les  gens  de  Letres  auroient  un 
vrai  plaisir  de  se  voir  ainsi  en  état  d'admirer  les  beautés 
de  cet  ancien  Auteur  dans  toute  leur  étendue.  Il  y  en 
eut  qui  se  laissant  éblouir  à  la  première  lecture ,  ne  tirent 
nulle  difficulté  de  prendre  les  nouveaux  fragmens  pour 
le  vrai  ouvrage  de  Pétrone  :  tant  les  liaisons  leur  parois- 

Tome  I.  Prem.  Part.  C  c 


202  PETRONE, 

I SIECLE,  soient  naturelles,  et  le  style  semblable  entre  ce  que  nous 
avions  déjà  de  cet  Ecrivain  et  ces  mêmes  Iragmens. 
L'ardeur  qu'on  montra  à  les  avoir  fut  si  grande ,  qu'on 
en  fit  aussi-tôt  plusieurs  éditions  en  France ,  en  Ale- 
magne,  en  Angleterre  et  en  Hollande. 

Cependant  d'autres  Savans  moins  crédules,  et  plus  sur 
leurs  gardes  que  les  autres,  ne  pouvant  se  persuader  que 
notre  siècle  fût  assez  heureux  pour  recouvrer  les  restes 
qui  manquoient  à  l'ouvrage  de  Pétrone  ,  examinèrent 
selon  toutes  les  régies  de  la  bonne  critique  les  nouveaux 
fragmens ,   et    reconnurent    qu'ils    n'avoient    été   fabriqués 

aue  pour  imposer  au  public.  Un  d'entre  eux  entreprit 
'en  montrer  la  suposilion,  et  l'exécuta  par  un  assez  long 
écrit  sous  le  titre  d'observations.  Il  y  prouve  par  de  puis- 
santes raisons  ,  que  les  derniers  fragmens  de  Pétrone  ne 
sont  rien  moins  qu'une  production  de  la  plume  de  cet 
Auteur  ,  et  qu'ils  ont  tout  l'air  de  pièces  suposées  ,  com- 
me pleins  de  Gallicismes  et  même  de  barbarismes.  De 
sorte  que  ces  observations  furent  prises  pour  le  tombeau  du 
faux  Pétrone  de  Belgrade.  Cela  n'empêcha  pas  que  Mr. 
Nodot  environ  six  mois  après  n'y  fil  une  réponse,  qu'il 
donna  au  public  comme  le  triomphe  des  nouveaux  frag- 
mens. Mais  cet  écrit  n'a  point  eu  l'effet  que  l'Auteur  en 
atendoit  ;  et  tout  le  monde  savant  ne  regarde  point  autre- 
ment le  prétendu  Pétrone  de  Belgrade,  que  comme  une 
pure  su  position. 

Ce  n'est  pas  à  dire  pour  cela  que  Mr.  Nodot ,  qui  sou- 
tient le  contraire,  après  avoir  été  le  premier  qui  a  publié 
ces  fragmens  ,  soit  le  fourbe  qui  les  a  fabriqués  pour  du- 
per le  public.  Il  s'ensuit  seulement  que  les  aïant  reçus 
d'une  main  étrangère,  comme  il  l'assure,  il  n'y  a  pas  re- 
gardé d'assez  près,  et  que  sa  bonne  foi  l'a  empêché  de 
soupçonner  que  d'autres  fussent  capables  d'en  manquer 
dans  une  chose  de  cette  nature.  Mais  quel  sera,  dira-t- 
on, l'homme  assez  babile  pour  avoir  assez  bien  pris  et 
imité  le  génie  et  le  tour  des  pensées  de  Pétrone?  Une 
lecture  assidue  et  méditée  de  cet  Ecrivain  étoil  suffisante 
pour  y  réussir.  De  quelque  manière  au  reste  que  la  chose 
ait  pu  se  faire,  les  Gallicismes  et  les  expressions  barbares 
qui  se  trouvent  dans  celte  pièce  de  raport,  découvri- 
ront toujours  l'imposteur  ,  et  trahiront  ses  précautions. 


I  SIECLE. 


POETE.  203 

S-  V. 

EdUwmde  sa  Satyre. 

ON  'compte  jusqu'à   plus  de  trente   Grammairiens  de  petr.  pr.  fr.  p.  sa. 
toutes  les  Nations  ,  qui   ont  éclairci  la  satyre  de  Pé- 
trone, ou  par  des  notes  ,  ou  par  des  commentaires  ,  et  qui 
presque  tous  en  ont  donné  diflerentes  éditions. 

'On  en  trouve  une  m-i°.  à  laquelle  on  a  joint  les  pane-  wb.  vatic. 
gyriques  de  Pline  et  des  autres  anciens  Orateurs.  Elle 
est  parfaitement  belle  ;  mais  on  n'y  voit  ni  marque  du 
tems,  ni  nom  du  lieu  où  elle  fut  faite.  Seulement  on  y 
lit  le  nom  de  l'Editeur  qui  fut  François  du  Puits  ou  de 
Pouzzol ,  lat.  Puteolaniis.  Si  c'dtoit  ce  François  du  Puits 
de  Lyon  ,  Docteur  en  l'un  et  l'autre  droit  ,  et  ensuite 
Prieur  de  la  grande  Chartreuse  vers  1530,  cette  édition 
auroit  paru  avant  l'entrée  de  l'Editeur  dans  le  cloître  ,  où 
il  n'est  pas  juste  de  croire  qu'il  se  fût  ocupé  à  un  travail 
de  cette  nature.  Elle  auroit  été  faite  par  conséquent  avant 
la  fin  du  XV  siècle. 

'  La  première  que  l'on  connoisse  porter  quelque  date,  Fab  Bib.  ut.  p. 
est  celle  qui  fut   faite  à  Venise  en  1499.  Mais  on  ne  dit 
point  si  le  texte  de  Pétrone  parut  seul ,  ou  s'il  fut  acom- 
pagné  de  quelques  notes  dans  cette  édition  ,  non  plus  que 
dans  la  suivante. 

'  En   1500  il  y  en  eut  une  autre  édition  à  Leipsic  chez  peir.  proieg.  p.  8. 
Jaques  Tanner.    Celle-ci    avoit    été    précédée  d'une   autre  ^- 
faite  à  Milan  ,  mais  dont  on  ne   marque  pas  l'année.    A 
Paris  l'an  1520   Regnaud   Chaudière  remit  sous  la  presse 
l'ouvrage  de   Pétrone  ,  sur   une  des  éditions   précédentes  , 
que  l'on  ne  spécifie  pas. 

'  Jean  Sambucus  le  fit  réimprimer  à  Vienne  en  Autriche  p.  «s. 
l'an  1564  ,  sur  une  édition  faite  à  Paris  ,  il  y  avoit  plus 
de  quarante-cinq  ans  :  ce  qui   montre   qu'elle   étoit  diffé- 
rente de  celle   de   Chaudière.  Il  revit  le  texte  sur  un  ma- 
nuscrit qui  lui   apartenoit ,  y  corrigea  quantité  de  fautes, 
et  y  joignit  les  notes  de  Pulman  ,  d'Adrien  du  Jon  ou  Ju- 
nius  ,  et  celles  de  sa   façon.  '  Cette   édition    ainsi   ornée  Bib.  s.  ser^.  auj. 
parut  de  nouveau  l'année  suivante   1565  à  Anvers  chez 
Christophe  Plantin  en  un  volume  m-S".  '  Nous  ne  savons  ...  A^t  .  t.  2.  p 
si   ce  fut  sur  celle  de   Paris  ou   sur  celle  de  Vienne ,  que  *""•  *■ 

G  c  ij 


204  PETRONE, 

1  SIECLE.      Robert  Etienne   réimprima   à   Paris   l'ouvrage  de   Pétrone 
dès  1564  en  même  volume. 
...s.  Fior.  sai.         '  Jean  de  Tournes  Imprimeur  à  Lyon  donna  au  public 
en  1575  le  texte  seul  de  Pétrone  ,  sans  aucunes   notes  en 
...D. Fior.  même  volume.  'Cette  édition  fut  suivie  de  près  par  celle 

qui  se  fit  à  Paris  en  1577.    Six  ans  après  ,  c'est-à-dire  en 
1 583 ,  Jean  Dousa  ou  de  Doès  en  publia  à  Leide  une  de 
Bib.  Tcu.  p.  397.  sa  façon  ,  qu'il  enrichit  de  noies,  '  et  qui  vit  encore  le  jour 
au  même  endroit  chez  Jean  Pacts ,  avec  des  additions  con- 
...Barb.  iuj.        sidcrablcs,  l'an  1585,  en  un  volume  m-8°.  '  et  à  Paris  deux 
...Cora.  p.  «9.     ans  après,  en  1587.  '  La  même  année  on  en  vit  paroître  une 
autre  à  Paris  chez  Guillaume  Linocier  en  même  volume  , 
par  les  soins  de  Jean  Sichard  qui  l'acompagna  de  ses  re- 
marques. 
Petr.    Proieg.  p.       '  Jcan  dc  Wowercu  travailla  à  son  tour  sur  le  texte  de 
"■  Pétrone  ,  et  en  prépara  une   nouvelle  édition   qu'il  dédia 

Bib.  Miss.  cen|     à   Joscnh  Scaligcr.    Elle  parut  à  Leide  en  1595,'  puis  à 
Petr.  pr.  p^j^  ^'j^^^  Etienne  Vallet  en  1601,  et  encore  à  Leide  en 

Bib.  Cord.p.  540.   1623  m-12.  '  11  y  en  eut  une  autre  à  Francfort  sur  le  Mein 
l'an   1610  en   un  volume  in-S".    avec  les  observations  de 
p«ir.  pr.  divers   Savans.  '    On  l'atribuë  à    George   Erhard  ,    qui  s'y 

est  caché  sous  un  nom  emprunté. 
Bib.  D.  de  Lorch.  En  1615  Paul  Frcllon  Imprimeur  à  Lyon  remit  sous  la 
presse  l'ouvrage  de  Pétrone  ,  et  y  joignit  les  notes  de  plu- 
sieurs Auteurs,  dont  il  fit  avec  le  t«.\te  un  assez  gros  vo- 
lume m-12.  Cette  édition  est  belle,  et  a  l'avantage  sur 
les  précédentes  d'être  et  plus  ample  et  plus  correcte. 
...Cord.  ibid.  '  L'année  1618  ,  en  enfanta   deux  autres  éditions  tout  à 

la  fois  ,  l'une  en  un  volume  in  -  8° .   à  Leide  chez  Jean 
Marc  ,  l'autre  en  même  volume  à  Paris  chez  baac  Mes- 
Fab.ibid.  nicr ,  avcc  les  commentaires  de  Jean  Bourdelot.  'En  1621 

il  en  parut  encore  une  autre  à  Francfort  en  même  volume 
avec  des  notes  et  des  observations. 

Ce  que  l'on  avoit  déjà  vu  en  1618,   on   le  vit  encore, 
en  1629  :  deux  éditions  de  notre   Auteur   tout  à  la  fois. 
pei.^1  Bib. Cord.  '  Pierre  Lotichius  prit  soin   d'en  publier  une  à  Francfort 
'''  chez  Wolfgang  Hofman  en  un  volume  in -4".   avec   les 

commentaires     de    Joseph    Antoine    Gonsale    de    Solas. 
Bib.  s.  Vint.  cen.  '  L'autre  a  été  faite  chez  Jean  Mercier  Imprimeur  à  Ge- 
nève. Elle  est  en  même  volume  que  la  précédente,  mais  en 
très -mauvais   papier.  Théodore  de    Juges ,  qui    a   donné 


POETE.  205 

son  travail  à  celle-ci,  a  trouvé  le  secret  de  la  rendre  plus      i  siècle. 
ample  qu'aucune   autre   qui  ait  encore  vu  le  jour,  par  la 
préface  ,    les   longs    prolégomènes ,   et    la  grande  quantité 
d'observations  dont  il  l'a  chargée. 

'En  1645  on  réimprima   à  Leide  l'ouvrage  de  Pétrone  Baii.jug.  rosiat. 
avec   les  notes    de   Mr.    Bourdelot.  Les  bons   connoisseurs  **■  ^^' 
font  beaucoup  d'estime  de  cette  édition. 

'  Dix  ans  après,  en  1654  Simon  Abbes  Gabbema  en  Bib.  tbIi.  iwi. 
doima  une ,  qui  parut  à  Utrecht  chez  Gilbert  Azill  en  un 
volume  m-S".  On  l'a  enrichie  de  notes  ,  et  mis  à  la  fin  ce 
qu'on  nomme  le  Jeu  sur  Priape  ,  et  d'autres  semblables 
pièces,  qu'il  auroit  mieux  valu  laisser  ensevelies  dans  la 
poussière  d'où  on  les  a  tirées,  que  de  les  exposer  au  grand 
jour. 

'  On  trouve  une  autre  édition  de  la  satyre  de  Pétrone  ,        K»n.  p.  s», 
faite  à  Amsterdam  en  1663  ,  avec  les  fragmens  du  même 
Auteur ,   sans    doute     ceux    qui    furent    recouvrés    celte 
même  année  à  Trau,  comme  nous  avons  dit. 

'L'année  suivante  1664  Michel  Hadrianides  fit  impri-  ••■TbII.  iwd. 
mer  encore  celte  satyre  à  Amsterdam  chez  Jean  Blaeu 
en  un  volum3  m-8".  'Elle  fut  réimprimée  au  même  en-  .-.s.  vjac.  cen. 
droit  l'an  1669  par  les  soins  du  même  et  en  un  même  volu- 
me. Cette  édition  est  la  plus  complète  et  la  mieux  assor- 
tie qu'aucune  autre  de  celles  qui  avoient  paru  aupara- 
vant. On  y  a  inséré  en  son  lieu  le  fameux  fragment  trou- 
vé à  Trau;  et  on  l'a  enrichie  de  quantité  de  savantes 
notes  choisies.  A  la  fin  se  trouvent  en  façon  d'appendice 
le  Jeu  sur  Priape  et  les  autres  poésies  de  cette  nature  , 
dont  on  crut  devoir  accompagner  Pétrone.  '  C'est  sur  ...  d.  deLorch. 
cette  édition  et  sur  dix-neuf  autres  qui  l'avoient  précé  - 
dée  ,  que  Jean  Boschius  en  publia  une  autre  en  un  petit 
m-24  l'an  1677,  à  Amsterdam  chez  Adrien  Gaesbequius. 
Il  la  revit  aussi  sur  quelques  manuscrits.  Cette  édition 
acompagnée  des  notes  de  l'Editeur  ,  dont  la  date  est  de 
l'année  précédente,  paroît  fort  rare  en  France.  •' • 

'  A   Paris   en    1677   sortit   de   la   boutique   de    Claude  «bid. 
Audinet  en  un  volume  m-12,  une   autre  fort   belle  édition 
de  Pétrone  ,  avec  les  notes  de   Bourdelot.    Elle  contient  le 
fragment  de  Trau  ,  et .  les   poésies  étrangères  à  la   satyre 
de  Pétrone  ,  comme  l'édition  d'Hadrianides. 

Depuis  la    prétendue    découverte  faite    à  Belgrade    de 

1  8 


206 


PETRONE, 


I  SIECLE. 

Mbr.P.  p.  894.  I  I 
Bib.  Casan. 


Bih.  Kon.  p.  529. 


Petr  nr.  fr.  p.  2. 


Bib.  Till.  ibid. 


nous  avons 
original    de 


ce  qui  manquoit  h  Pétrone,  on  l'a  remis  plusieurs  fois 
sous  la  presse  tel  qu'on  suposoit  l'avoir  recouvre^.  '  Il  fut , 
dit-on,  imprimé  de  la  sorte  dès  1092,  à  Londres  ,  à 
lloterdam  et  ailleurs.  Il  y  en  a  une  édition  faite  à  Paris 
chez    Jean-Baptiste    Langlois    en    un    volume    m-12.    l'an 

1693,  '  et  une  autre  beaucoup  plus  ample  faite  à  Utrec!  t 
chez  Van  de  Water  l'an  1709  ,  en  deux  volumes  m -4". 
On  est  redevable  de  celle-ci  h  Mr.  Burman  ,  qui  l'a  en- 
richie des  notes  de  Mrs.  Ileinsius  et  Goësius.  Mr.  le  Clerc 
n'en  parle  pas  avantageusement.  Voilà  ce  que 
pu  découvrir  touchant  les  éditions  du  texte 
Pétrone.  Il  ne  nous  reste  plus  qu'à  parler  des  traductions 
que  l'on  en  a  publiées  en  notre  langue  ,  et  auxquelles  on  a 
ordinairement  joint  le  texte  latin. 

Jusqu'à    la    traduction    qu'en    donna    Mr.     Nodot     en 

1694,  '  ce  qui  avoit  paru  traduit  de  la  satyre  de  Pétrone  , 
étoit  très  -  imparfait.  Les  uns  s'étoient  bornés  à  en  tra  - 
duire  ou  paraphraser  quelques  morceaux.  D'autres 
avoient  poussé  un  peu  plus  loin.  Mais  personne  n'avoit 
touché  ni  au  festin  de  TrimnIcion  ,  ni  aux  vers  intercalés 
dans  la  satyre,  ni  à  ce  qui  se  rencontre  de  plus  difficile  dans 
cet  ouvrage.  Mr  l'Abbé  de  MaroUes  est  celui  qui  en  a  plus 
fait  que  tout  autre ,  au  sentiment  de  Mr.  Nodot.  Mais  son 
travail  n'a  pas  eu  un  succès  plus  heureux  que  ses  autres  tra- 
ductions. '  11  parut  néanmoins  en  1687  ,  un  an  avant  la  dé- 
couverte du  manuscrit  de  Belgrade  ,  une  nouvelle  traduc  - 
tion  de  Pétrone,  imprimée  à  Cologne  chez  P.  Marteau  en 
un  volume  in-l2.  Le  Traducteur  avoiie  avoir  trouvé  dans 
son  travail  deux  embarras  particuliers  :  la  crainte  de  salir 
l'imagination  de  ses  Lecteurs  ,  et  la  difficulté  de  bien  en- 
tendre et  d'exprimer  plusieurs  endroits  de  Pétrone.  Il 
a  surmonté  le  premier  en  suprimant  les  ordures  les  plus 
grossières  ,  et  l'autre  en  y  supléant  par  des  paraphrases  : 
ce  qui  l'a  obligé  de  faire  des  observations  qu'il  a  mises  à 
la  fin  de  sa  traduction.  Il  a  aussi  laissé  deux  poèmes  de  son 
Auteur  sans  les  traduire. 

La  traduction  qu'en  publia  Mr.  Nodot  est  entière  , 
aiant  été  faite  sur  l'édition  du  texte  de  Pétrone  impri- 
mé à  Cologne  ,  tel  qu'on  avançoit  l'avoir  recouvré  à 
Belgrade.  Afin  de  mieux  faire  paroître  et  l'exactitude  et 
la  justesse   de  son  travail ,  Mr.    Nodot  a  mis  le  latin   a 


POETE.  207 

côté  de  son  franoois,  rendant  les  vers  latins  par  d'autres  i  siècle 
vers  en  notre  langue  :  ce  qui  doit  lui  avoir  beaucoup  coû- 
té.  Il  a  orné  les  marges  de  sa  traduction  de  notes  latines, 
qui  servent  à  expliquer  les  termes  les  plus  difficiles  de 
Grammaire;  et  au  bas  des  pages  il  a  mis  des  remarques 
historiques,  qui  éclaircissent  plusieurs  endroits  de  son  Au- 
teur par  des  faits  tirés  de  l'antiquité. 

Outre  la  vie  de  Pétrone  que  le  Traducteur  a  placée  à 
la  tête  de  l'ouvrage,  après  ravoir  puisée  dans  les  meil- 
leurs Auteurs,  il  y  a  encore  mis  une  préface  pour  rendre 
compte  de  l'exécution  de  son  dessein.  Dans  cette  préface 
Mr.  Nodot  montre  l'eslime  que  l'on  a  toujours  faite  de 
Pétrone,  et  prouve  fort  bien  que  son  livre  est  une  vérita- 
ble satyre  des  débauches  de  Néron  et  de  ses  favoris,  et 
qu'il  est  facile  de  le  justifier  des  reproches  qu'on  lui  fait 
pour  en  empêcher  la  lecture.  Après  cette  préface  suit  la 
clef  pour  donner  l'intelligence  des  principaux  personnages 
que  l'Auteur  a  fait  entrer  dans  sa  satyre. 

Cette  traduction  ainsi  enrichie  fut  imprimée  l'an  Bib.  s.  vinc.  cen 
1694  en  deux  petits  volumes  m-12.  à  Cologne  chez 
Pierre  Groth,  suivant  l'inscription  qui  se  lit  au  frontispi- 
ce de  l'ouvrage  ;  mais  plutôt  à  Paris  ou  quelque  autre 
ville  de  France,  comme  il  est  aisé  d'en  juger  et  par  le 
papier  et  par  les  caractères. 

Mr.  Nodot  retoucha  cette  traduction  dans  la  suite; 
et  après  y  avoir  fait  quelques  additions,  il  la  donna  de 
nouveau  au  public  en  deux  volumes  m-8°.  C'est  sur  cette 
édition  qu'a  été  faite  'celle  qui  a  paru  l'an  1713  en  deux  ...  d.  do  rch 
volumes  m-12.  sans  nom  ni  de  lieu  ni  d'Imprimeur.  Cel- 
le-ci se  trouve  enrichie  de  plusieurs  remarques  et  addi- 
tions considérables,  et  de  la  contre -critique  ou  réponse 
aux  observations  du  Censeur  des  fragmens  de  Pétrone 
trouvés  à  Belgrade. 

Dès  1691,  avant  qu'eût  paru  la  traduction  de  Pé- 
trone, '  par  Mr.  Nodot,  Mr.  Venette  Médecin  de  la  Ro-  ''is' 
chelle  entreprit  le  même  travail  à  la  solicitation  de  l'illus- 
tre Mr.  Begon.  Sa  traduction  fut  imprimée  à  Amsterdam 
six  ans  après  en  1697.  Elle  paroît  fort  rare;  et  quelques 
mouvemens  que  nous  nous  soïons  donnés,  il  ne  nous  a 
pas  été  possible  de  la  voir.  Mr.  Venette  avoit  aussi  com- 
posé un     Dictionaire   raisonné  pour    mieux   entendre    Pe- 


T 


208  DEMOS  TH  EN  E, 

I  SIECLE.  trône;  mais  cet  ouvrage  quoique  plein  d'érudition,  est 
demeuré  manuscrit.  Nous  aprenons  tout  ceci  d'une  per- 
sonne d'esprit  et  de  mérite  de  la  Rochelle  même,  qui  peut 
avoir  connu  ce  Traducteur.  (XVIII.) 


DEMOSTHENE, 

Médecin. 

ROIS    Médecins    Gaulois  ,    que     nous     trouvons     avoir 
fleuri   ensemble  sous  l'Empire    de   Noron ,    font   juger 
que    nos  Gaules  en  avoient   produit  bien    d'autres  en  ces 
premiers  tems.  Ce   n'est  point  là  de  ces  conjectures  bazar- 
dées.  Le  soin  qu'aportoient  et  nos  anciens  Druides   et  les 
Marseillois  à  cultiver    la   Médecine  avec   les   autres  arts   et 
sciences  dont  ils  faisoient  profession,  autorise  de  reste  nô- 
tre  conjecture.    L'antiquité    néanmoins  jusqu'au   II   et  IV 
siècle  ne   nous   fait  connoître    que    Demosthene,   Charmis 
et   Crinas    entre   ceux   qui    ont    exercé   la    Médecine    avec 
quelque   éclat  :  Demosthene  est  devenu   sans    contradiction 
le  plus  célèbre  des  trois, 
r.ai.rem.  p«r.  Ren.       '  H  étoit  dc  Marscillc,  cl  sc  trouve    quelquefois  nommé 
■■'■'■''"    '  simplement   le    Marseillois    dans    le   texte    original  de  Ga- 
lien  ,    dc    qui   nous   aprenons  le   plus  de  particularités  de 
diff.  pnis.i.  4.C.*.  son    histoire.    '   Il    eut  pour    maître  Alexandre    surnommé 
sirab.  1.  12.  p.  Philalcthc,  c'est-à-dire  ami  ou  amateur  de  la  vérité.   '  Cet 
^''^'  Alexandre    du    tems   de  l'Empereur  Tibère  ,  étoit  à  la  tê- 

te d'une  célèbre  école  de  Médecine  de  la  secte  d'Herophi- 
le,  située  prés  de  Laodicée  en  Phrygie.  On  juge  de-là  que 
Demosthene  ne  commença  à  briller  que  plusieurs  années 
après,  et  qu'il  continua  à  le  faire  jusques  sous  l'Empire 
de  Néron. 

L'on  ne  pouvoit  nous  mieux  marquer  combien  il  fut  un 
Gai.ibid.  digne  '  disciple  de  son  maître,  qu'en  nous  aprenant  qu'il 

mérita  de  porter  comme  lui  le  glorieux  surnom  de  Phila- 
piin.hisij. Î6.C.  Icthc.  La  sectc  qu'ils  suivoient  l'un  et  l'autre,  '  passoit pour 
la  plus  rafinée  de  toutes  les  sectes  des  Médecins;  et  il 
falloit  être  habile  dans  les  letres  pour  pouvoir  l'embras- 
ser.   Herophile,    qui    l'établit  vers  la  53  *  Olympiade,   fut 

le 


«  I  I.  29.    R.  s. 


MEDECIN. 


209 


le  premier  Médecin  qui  introduisit  l'usage  de  commencer  i  siècle. 
par  rechfircher  les  causes  des  maladies  pour  y  remédier.  — — — — 
En  établissant  sa  secte,  il  fit  tomber  toutes  les  autres.  Mais 
la  sienne  eut  ensuite  le  même  sort;  et  elle  étoit  presque 
tombée  elle-même  dès  le  tems-  que  Pline  écrivoit  son  hi- 
stoire. Nous  marquons  ces  circonstances  ,  parce  qu'elles 
servent  à  nous  donner  une  idée  avantageuse  du  savoir  et 
de  l'industrie  de  Demosthene.  Les  anciens  qui  l'ont  suivi 
n'en  font  pas  moins  d'estime.  Galien  entre  autres  se  décla- 
re son  partisan  en  divers  endroits  de  ses  écrits. 

'Demosthene  laissa  de  sa  façon  trois  Livres  sur  lesdiffe-  Gai.ibid.c.siAa. 
rentes  maladies  des  yeux,  et  le  secret  d'y  remédier.  Il  trai-  -so.'tÎ'.  73!  u.  *9. 
toit  de  la  chassie,  des  inflammations,  des  fluxions,  ou 
épanchement  de  quelque  humeur  sur  les  yeux;  des  pail- 
les, des  moucherons  ,  ou  autres  choses  semblables  qui  s'y 
jettent  quelquefois;  de  la  foiblesse  ou  débilité  de  la  vue; 
du  renversement  des  paupières;  des  abscès  internes  et  ex- 
ternes qui  s'y  forment;  des  lagophthalmes  ,  ou  maladies  ,  .<»  1 1 
des  yeux,  lorsqu'on  ne  peut  fermer  les  paupières  comme 
les  lèvres.  En  traitant  de  ces  difl"erentes  sortes  de  mala- 
dies, notre  Médecin  avoit  soin  d'enseigner  aussi  la  maniè- 
re de  les  guérir.  Galien  témoigne  que  cet  ouvrage  étoit 
fort  estimé.  Il  nous  en  reste  quelques  fragmens  considé- 
rables insérés  parmi  les  écrits  d'Aëce  d'Amide.  De- 
mosthene avoit  écrit  en  grec  ,  qui  étoit  sa  langue  natu- 
relle, et  celle  du  pais  où  il  avoit  étudié,  et  peut-être  aussi 
composé  son  ouvrage.  Car  il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  que 
ce  fut  plutôt  en  Asie  où  il  étoit  allé  voiager  ,  qu'en  son 
propre  pais,  qu'il  étudia  sous  Alexandre. 

'  Oribase  ,  parlant  du  collyre  de  l'invention  de  notre  Orib.  Syn.  i.4.p. 
Médecin,  le  loue  comme  un  remède  spécifique  contre  les 
indispositions  invétérées  de  la  vûë.  C'est  aparemment  dans 
ses  Livres  sur  les  maladies  des  yeux,  que  Demosthene  don- 
noit  le  secret  de  ce  collyre.  Mais  on  ne  sauroit  assurer  si 
c'est  du  même  ouvrage,  plutôt  que  de  quelque  autre  qu'il 
auroit  composé  sur  d'autres  matières  de  Médecine  ,  '  que  Gai.  ibid. 
Gahen  a  pris  ce  qu'il  nous  aprend  des  opinions  et  des  se- 
crets de  ce  Médecin.  Touchant  le  pouls  ,  il  dit  que  De- 
mosthene en  donnoit  la  même  définition  qu'Alexandre 
son  maître,  et  qu'il  établissoit  la  diff'erence  des  pouls  dans 
la  dilatation,  ou  la  contraction  du  cœur  ou  des  artères  se- 

Tome  I.  Prem.  Part.  D  d 

18* 


210  CRINAS, 

I  SIECLE.      parement,  et  dans  la  dilatation  ou  la  contraction  des  deux 

ensemble.  "  Ailleurs  il  raporte  la  composition  de  Son  erti- 

i^p^îT'  '""'■  '  plâtre  pour  guérir  les  dartres  ou  feux  volages  ;  '  et  en  un  au- 

iiPar.  gen.i.  5.C.   tre  eudroit  celle  de  son  remède  contre  les  charbons  depe- 

•'••''•'*"•  ste,  dont  il  ateste  l'efficacité. 

Anu-Baii.  t.  i.  e.        'M.    Meuagc   daus  son  Anti-Baillet  relevé   la  bévue  du 

~  '^'    '  Mazzoni ,    qui  dans  son   commentaire   sur   la   comédie  de 

Dante  ,  a   confondu   Demosthene  le  Médecin  avec   Demo- 

sthene  de  Bithynie,  en  atribuant  au  premier  le  poëme  des 

Bithyniaques,  qui  apartient  à  l'autre. 


CRINAS, 

Médecin. 

piin.  hisi.i.î9.  c.   /CRINAS  '  est   mis   par    Pline  l'Historien  au  nombre  de* 

5.  p.  666.  Ij  Médecins  ,    qui    passent    pour    auteurs    de   sectes  parti- 

culières dans  la  médecine.  Il  étoit  de  Marseille  ,  comme 
Demosthene  dont  nous  venons  de  parler  ,  et  fleurissoit  aU 
même  tems  que  lui. 

Après  avoir   professé  quelque  tems  la  médecine  en  son 

p.  66.S.  «;«.        pais,  '  il  alla  à  Rome  sous  l'Empire  de  Néron.  Il  y  trou- 
va toute  la  ville  éprise  des  nouveautés  de  Thessale  ,  autre 

not.  ibid.  fameux  Médecin  ,  '  chef  de  la  secte  des  Méthodiques,  "(^Ui 

•  p.  665.  à    force   de    déclamer    contre    les  autres  Médecins  qui  1  a- 

voient    précédé  ,    s'étoit    fait   une  telle  réputation  que  tout 

p.  6(«5.  le  monde  couroit  à  lui.  '  Lors  qu'il  paroissoit  darts  les  rues, 

il  étoit  suivi  d'une  multitude  de  peuple  ,  comme  si  c'eût 
été  ou  un  Comédien  qui  alloit  au  théâtre  ,  ou  un  Athlète 
qui  alloit  au  cirque. 

„,i,,  '  Crinas  ne  fut  pas  long-tems  ,  non-seulement  à  parta- 

ger les  pratiques  de  Thessale,  mais  aussi  à  s'atirer  et  plus 
d'estime  et  plus  de  confiance  que  ce  fameux  Médecin.  Pour 
-  agir  avec  plus  de  précaution  et  moins  de  risque  dans  ses 
remèdes,  il  avoit  joint  l'étude  des  mathématiques  et  de  l'a- 
strologie à  la  connoissance  de  la  médecine.  C'est  pourquoi 
Pline  semble  le  faire  auteur  d'une  secte  que  l'on  pour^oit 
qualifier  la  secte  des  latromathematiciens.  Il  se  regloit  stll* 
le  cours  des  astres  dans  tout  ce  qu'il  ordonnoit  à  ses  mala- 


MEDECIN.  211 

des,  jusqu'au  boire  et  au  manger:  '  maxime  dont  Juvenal      i  sieclk. 
dès  ce  tems-là  ou   peu  après  se  rioiten  la  personne  du  Ma-  .  juv.  sat.e.  378. 
thematicien    Petosiris ,    qui    la   mettoit    en    pratique    com- 
Die  Crinas. 

-capiendo  nuUa  videtur 


379. 


Aptior  hora  cibo,  nisiquamdederit  Petosiris. 

Cela    n'empêcha  pas  néanmoins  que  Crinas  n'amassât  pi»"-  'WJ- 
des  richesses  immenses  dans  sa  profession.  Il  légua  par  son 
testament  dix  millions  de  sesterces  ,  '  qui  font  un  million  not.  ibid. 
de    notre    monnoie  ,    selon    l'évaluation  d'un  savant  ,  '  ou  Cass.  t.*. p. 532. 
même    douze    cent    mille  livres  suivant  la  suputation  d'un 
autre,  '  pour  les  fortifications  de  Marseille  sa  patrie.  Et  il  p""-  '•>'''• 
n'en    avoit   guéres   moins  dépensé  a  faire  fortifier  d'autres 
villes. 

Il  y  avoit  peu  de  tems  que  Crinas  n'étoit  plus  au  mon- 
de, lorsque  Pline  écrivoit  son  histoire  sous  le  règne  de 
Vespasien,  vers  l'an  74.  C'est  ce  qu'il  est  aisé  déjuger  par 
la  manière  dont  cet  Historien  parle  de  lui. 

Si  Crinas  laissa  quelques  écrits  de  sa  façon,  comme  il  y 
a  tout  sujet  de  le  croire  d'un  homme  aussi  célèbre  ,  que 
l'on  nous  représente  comme  chef  d'une  nouvelle  secte  dans 
la  médecine,  l'antiquité  ne  nous  en  donne  nulle  connois- 
sance. 


D 


CHARMIS, 

Médecin. 

ANS  '  le  même-tems  que  Crinas,  dont  nous  venons  de  PUn.  hist.i.so.c. 

parler  ,  et  Thessale  son  émule  partageoient  entre  eux  '  •*■  **"' 
presque  toutes  les  pratiques  de  Rome  pour  la  médecine  , 
on  y  vit  paroître  avec  un  certain  éclat  Charmis  autre  Mé- 
decin de  Marseille.  Poussé  ou  par  la  passion  de  faire  fortu- 
ne, ou  par  le  désir  de  s'acquérir  de  la  réputation,  il  quita 
les  Gaules  ,  et  acourut  dans  cette  capitale  de  l'Empire  y 
faire  parade  de  ses  nouveaux  secrets. 

'  En  effet ,  il  se  distingua  entre  les  autres  Médecins  en 
renversant  leurs  systèmes  ,  et  se  fraïant  dans  son  art  des 
routes  nouvelles,   Il  condamnoit  les  bains  chauds  ,  et  or- 

Ddij 


ibi.l 


212  CHARMIS,   MEDECIN. 

I SIECLE.      donnoit  à  ses  malades  des  bains  d'eau  froide,  même  pen- 

dant  les  plus  grands  froids  de  l'année.  J'ai  vu  moi-même, 

dit  à  cette  ocasion  Pline  l'Historien,  qui  vivoit  du  tems 
de  Charmis  ,  j'ai  vu  des  vieillards  hommes  consulaires  se 
soumettre  aveuglement  aux  bizarres  ordonnances  de  ce 
Médecin,  et  se  faire  gloire  de  prendre  des  bains  froids  dans 
la  plus  grande  rigueur  de  l'hyver.  Seneque ,  ajoute  Pline  , 
s'en  faisoit  lui-même  avec  toute  sa  sagesse  une  espèce 
Senoc.  ep.53|ep.  d'honucur.  '  On  voit  effectivement  que  ce  Philosophe  parle 
83. 11.181. 340.        ^^^^    ^^g   certaine    ostentation   dans    quelques-unes  de  ses 

letres,  de  ces  bains  froids  dont  il  usoit  au  mois  de  Janvier, 
piiu.  ibid.  p.  666.       '  PHue  jugcoit  saus  doute  plus  sainement  de  ces  sortes  de 
^^''-  remèdes,  que  ni  Seneque  m  ces  anciens  Consuls  ,  lorsqu'il 

invectivoit  avec  feu  contre  une  telle  bizarrerie,  et  qu'il  trai- 
toit  en  vrais  charlatans  ceux  qui  en  étoient  les  auteurs.  II 
avoit  bien  raison  ,  puisqu'il  étoit  hors  de  doute  que  ces 
gens-là  ne  cherchoient  par  leurs  nouveautés  affectées,  qu'à 
s'acquérir  de  la  réputation,  et  à  faire  un  profit  sordide  aux 
dépens  de  la  vie  des  hommes. 
Lon".  or.  deiaud.  '  ^n  uc  pcut  néanmoins  s'empêcher  de  convenir  ,  qu'il 
T»"""  faut  que  Charmis  eût  et  beaucoup  d'industrie  et  un  grand 

fonds  d'éloquence  ,  pour  changer  de  la  sorte  les  règles  de 
la  médecine ,  et  faire  ainsi  prévaloir  ses  nouvelles  ordon- 
nances aux  anciens  avis  de  Chrisippe,  d'Erasistrate,  d'He- 
rophile ,  d'Asclepiade,  et  des  autres  Médecins  de  l'anti- 
quité tant  Grecs  que  Romains. 

A  dire  le  vrai,  Charmis  n'étoit  pas  le  premier  Médecin 
qui  eût    mis  en  usage  les  bains  d'eau  froide  ,  en  quelque 
HiPi.  I.  i.ep.  18.  saison  que  ce  fût.  Dès  l'Empire  d'Auguste  '  AntoniusMu- 
"^^^  -''■'■  sa   en   avoit  fait  quelque  expérience  en  la  personne  d'Ho- 

race, à  qui  il  avoit  défendu  les  bains  des  eaux  chaudes  de 
Baies,  et  ordonné  des  bains  d'eau  froide  au  milieu  même 
de  l'hiver.  C'est  dequoi  semble  se  plaindre  ce  Poëte,  en  se 
soumettant  néanmoins  à  une  aussi  cruelle  ordonnance. 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  paroit  que  Charmis  amassa  de  grands 
l'iin.  ibid.  C.8.  p.  biens  dans  sa  profession,  '  et  qu'il  faisoit  païer  bien  cher  les 
"^''  soins  qu'il  prenoit  de  ses  malades.  Car  pour  avoir  conduit 

un  homme  de  province  dans  une  maladie ,  et  une  rechute 
iioi.  ibid.  qui  la  suivit,  il  en  tira  deux  cens  mille  sesterces,  '  ou  vingt- 

mille  livres  de  notre  monnoie. 

On   ne   noua   aprend  point  si  Charmis  écrivit  quelque 


^.BUTIUS  LIBERALIS,  PHILOS.        2i3 

chose  pour  soutenir  son  nouveau  système.  Il  y  a  néanmoins      i  siècle. 
tout  lieu  de  le  présumer. 


je: 


iEBUTlUS    LIBERALIS, 

Philosophe. 

iBUTius  '  LiBERALis  étoit  de  la  ville  de  Lyon.  Il  Senec.  cp.  91.  p. 
iquita  depuis  les  Gaules  ,  et  alla  à  Rome  ,  soit  pour 
se  perfectionner  dans  les  sciences,  soit  pour  s'avancer  dans 
les  charges.  Mais  quelque  éloigné  qu'il  fût  de  sa  patrie, 
il  conserva  toujours  pour  elle  la  tendresse  et  l'atachement 
d'un  bon  citoïen. 

'A  Rome  il  lia  une  étroite  amitié  avec  Seneque  le  Phi-  uad.  ideben.i.i. 

losophe  ,    qui   le  choisissoit   quelquefois  pour  son  Mécène  ,  * 

en  lui  dédiant  quelques-uns  de  ses  ouvrages.  Cette  union 
forma  entre  eux  un  commerce  de  literature  ,  particulière- 
ment sur  des  matières  de  philosophie  ,  dont  la  postérité  a 
tiré  quelque  fruit. 

Liberalis  meritoit  à  bon  droit  de  porter  la  qualité  de 
Philosophe  ,  non-seulement  parce  qu'il  s'ocupoit  à  l'étude 
de  la  philosophie,  mais  aussi  parce  qu'il  avoit  su  faire  pas- 
ser dans  ses  mœurs  les  préceptes  qu  elle  donne  pour  bien 
vivre.  '  C'étoit  un  homme  incomparable,  selon  l'éloge  deben.  1. 5.  c.  1. 
que  nous  en  a  laissé  Seneque  son  ami.  Sa  bonté  lui  avoit 
mérité  le  glorieux  titre  de  meilleur  de  tous  les  hommes. 
Sa  libéralité  ,  sa  générosité  ,  sa  grandeur  d'ame  n'avoient 
point  d'exemples.  Personne  n'avoit  plus  d'inclination  à 
obliger  et  à  rendre  service  ;  et  lorsqu'il  le  faisoit ,  c'étoit 
non-seulement  sans  ostentation  ,  et  avec  désintéressement , 
mais  il  vouloit  encore  paroitre  rendre  plutôt  ce  qu'il  avoit 
reçu,  que  d'acorder  une  laveur. 

'  Autant  qu'il  se  plaisoit  à  priser  les  moindres  grâces  >bW- 
qu'il  recevoit ,  autant  il  avoit  de  peine  à  entendre  louer 
celles  qu'il  acordoit  aux  autres.  '  Il  s'étoit  fait  une  loi  de  c.  2. 
rendre  toujours  au-de-là  de  ce  qu'il  recevoit.  Il  regardoit 
même  comme  une  chose  indigne  d'un  cœur  généreux  de 
se  laisser  vaincre  dans  le  genre  d'obliger  :  ttirpe  est  beneficiis 
vinci  ^   disoit-il    souvent   avec   complaisance.    Ce   fut  sans 


214  GABINIEN, 

I  SIECLE.      doute    autant    en  considération   de  ces  excellentes  qualités  , 

3"  u'à  titre  d'ami  et  d'homme  de  letrcs  ,  '  que  Seneque  lui 
edia    son   traité    des   bienfaits.  Pouvoit-il  trouver  quelque 

autre  personne  à  qui  cette  dédicace  convint  mieux? 

cp.  9i.p.  «8.  '  Toutefois    quelque   constance   et  quelque  courage  dans 

les  adversités  que  l'étude  de  la  philosophie  eût  inspiré  à 
Liberalis  ,  il  ne  put  tenir  contre  la  nouvelle  de  l'embra- 
sement de  Lyon  sa  patrie,  sans  se  laisser  aller  à  une  dou- 

p.  4SI.  leur  extrême.  '  Cet  accident  arriva  vers  65,  un  peu  moins 

de    cent    ans    après    que   Plancus  avoit  rétabli  cette  ville. 

p.  417.  '  C'est  ce    que   Seneque   nous  aprend  dans  une  fort  belle 

letre  à  Lucillus  ami  particulier  de  Liberalis  et  le  sien.  Il 
y  prend  de-là  ocasion  de  décrire  en  Philosophe  la  fragilité 
des  choses  de  ce  monde  ,  et  le  peu  de  cas  que  les  hommes 
en  doivent  faire. 

Jos. bel. Jaa.i. 7.       '  On  trouve  un  Liberalis'  Capitaine  des  Gardes  de  Tite 

*■  "*■  qui  fut  depuis  Empereur.  Il  y  a  toute  aparence  que  c'est  le 

même  que  celui  qui  fait  le  sujet  de  cet  article.  Liberalis 
exerçoit  cette  charge  au  moins  dès  l'an  70  ,  auquel  il  se 
trouva  avec  ce  Prince  à  la  destruction  de  Jérusalem.  Ce  fut 
ce  Capitaine  qui  eut  ordre  d'empêcher  l'incendie  de  cette 
malheureuse  ville  ,  et  de  frapper  sur  les  soldats  qui  refu- 
seroient  d'éteindre  le  feu  ,  afin  de  pouvoir  conserver  le 
Temple.    Mais    les  ordres  de  l'Empereur  ,  et  les  soins  du 

Ez«:ii.  «t.  48.      Capitaine    furent    inutiles  ;   '  parce  que  c'étoit  le  Seigneur 

3U1  avoit  allumé  ce  second  feu  ,  comme  le  premier  qui  re- 
uisit  en  cendres  la  même  ville  au  tems  du  Prophète  Eze- 
chiel. 

I  Le  texte  grec  de  Joseph  nomme  Liba-  rencontres;  comme  de  mettre  Jolie  ponr 
ralisAlêspapîoçtmaisonsaitquecelHisto-  Livie.  ot  ainsi  de  quelques  autres  noms 
rien  se  trompe  quelquefois  en  semblables       ^    " 


GABINIEN, 

Rhéteur. 

I  l'antiquité    nous    fournit  peu  de  chose  pour  l'histoire 
'  de  ce    Rhéteur ,    il    faut    s'en  prendre  à  la   négligence 
_  ,     ,   „.        qu'on  a  eue  de  nous  conserver  '  la  plupart  des  vies  des  illu- 

Snet.    cl.    Rn.    p.     i  ,  •      i    »      /         >     i  •    /      ¥i 

845.  stres  Rhéteurs  que  Suétone  avoit  laissées  a  la  postérité.  11 


s: 


RHETEUR.  215 

avoit  composé  celle  de  Gabinien  ,  qui  n'existe  plus  aujour-     i  siècle. 

d'hui,  non  plus  que  celles  de  plusieurs  autres.  Il  l'y  nom- 

moit    Sexlus    Julius    (Jabinianus;    et    c'est    par  corruption  sciiot.  ci.  Rh.  p. 

qu'il    se    trouve    nommé    Gabinius    dans  quelques    autres  '^-  *• 

Ecrivains. 

On    ne    dit    point  de  quel  pais  étoit  Gabinien  ,  quoique 
la  présomtion   soit  en    faveur  de  nos  Gaules.  '  Seulement  Hier.  ci.r.  i.  *.  p. 
on    nous    aprend   qu'il    y    enseigna    la  rhétorique  environ  *"^' 
vingt  ans  après  le  milieu  de  ce  premier  siècle  sous  l'Em- 
pire de  Vespasien  ,  et  qu'il  acquit  dans  cette  profession  une 
réputation  très-éclalante  :  celeberrimi  nominis  Rhetor,  dit  S. 
Jérôme.  '  C'étoit ,   selon    le    même  Père,  un  torrent  d'é-  inis.pr.g.  p.swr. 
loquence;    et    ses  discours  passoient  pour  des  pièces  ache- 
vées. 

'  On  peut  même  le  re^rder  comme  le  Prince  de  l'élo-  Dia.  or.  ».  *s. 
quence  du  siècle  qui  suivit  celui  d'.Vuguste.  C'est  au  moins 
l'idée  que  nous  en  donne  un  Auteur  contemporain.  Car  si 
les  Orateurs  de  ce  tems-là  ,  enflés  de  leur  propre  suffisan- 
ce ,  et  infatués  de  la  nouvelle  éloquence  qui  avoit  pris  la 
place  de  celle  des  anciens  ,  ne  faisoient  pas  difficulté  de  se 
mettre  au-dessus  de  Ciceron,  ils  avoient  au  moins  la  mo- 
destie de  ne  se  mettre  qu'après  Gabinien. 

'  Il  ne  paroit  nulle  part  aujourd'hui  aucun  écrit  sous  le 
nom  de  ce  Rhéteur.   '  Il  est  toutefois  certain  qu'au  tems  de  Hier.  iwj. 
S.  Jérôme  il  se  trouvoit  un  recueil  de  ses  discours  ou  ha- 
rangues;   puisque  ce  Père  y  renvoie  ceux  qui  aiment  une  ""  ''' 
éloquence    féconde,  et  se  plaisent  à  la  délicatesse  et  à  l'é- 
legance    du    style.    On  doit  même  juger  que  ces  écrits  de 
Gabinien    étoient    fort  estimés;  car  S.    Jérôme  les  met  de 
pair    avec    ceux   de  Ciceron  ,  de  Quintilien  et  de  Gallion. 
Qui  si  flitmen  eloquentiœ,  dit-il  ,  et  conannas  declamationes  '■' 
desiderant ,  legant  Tullium ,  Quintilianum ,  Gallionem  el 
Gabinianum . 


216  JULIUS  SECUNDUS, 


I  SIECLE. 


JULIUS   SECUNDUS, 

Orateur. 

Qtiint.  or.  1.  10.    T u F. I u S  '   Secundus,    quoique  mort  dans  un  âge  peu 
*■■''■  «avancé,  ne  laissa  pas  de  s'acquérir  la  réputation  d'Ora- 

c.  3.  p.  653.        teur  célèbre.  '  II  étoit  neveu  par  son  père  de  Julius  Florus, 
dont    nous    avons   donné    l'éloge  ,    et  Gaulois  '  de  nation 
comme   lui.    Mais    on   ne  sait  pas  ■  précisément  quel  fut  le 
gaw.Bui.i.  i.p.  lieu  de  sa  naissance.   '  On  dit  qu'il  fit  ses  premières  études 
dans    l'école    de    Lyon  ,    où    son  oncle  enseignoit  l'art  de 
bien  parler.  On  ne  peut  au  moins  douter  que  ce  ne  fût  dans 
Quini.  ibid.         les    Gaulcs.    Nous    avons  raporté  ailleurs  '  l'embaras  où  il 
se  trouva  un  jour,  lorsqu'il  étoit  encore  sous  la  férule,  et 
de  quelle  manière  son  oncle  l'en  délivra. 
DU,  or.  n.  t.  5.       '  Secuudus  alla  ensuite  à  Rome  hanter  le  barreau.  Il  lo- 
gea quelque  tems  avec  Saleïus  Bassus  célèbre  Poëte  de  ce 
tems-Ià,  dont  il  se  fit  un  intime  ami.  Il  contracta  aussi  une 
amitié   très-étroite    avec    Marcus  Aper  son  compatriote  ,  et 
Qnint.  ibid.  I  cl.  divcrs  autres  beaux  esprits,  '  sur-tout  avec  Quintilien,  qui 
''■  **'■  étant    de    même    âge    que  Secundus  ,  s'étoit  d'autant  plus 

ataché   à  lui ,  qu'il  avoit  découvert  de  plus  grands  talens 
en  sa  personne. 

I  La  preuve  que  Julias  Secundus  étoit  cios  Latro  mort  un  an  avant  le  commeoce- 
Quint.  or.  1.  10.  Gaulois,  se  prend  non-seulement  '  de  ce  ment  de  notre  Ere  vulgaire;  ainsi  il  devoit 
c.  3.  p.  653.  qu'il  étoit  neveu  par  son  père  de  Julius  être  né  environ  18  &  19  ans  auparavant. 
Florus,  que  nous  avons  montré  être  de  la  Le  neveu  étoit  de  même  .  ge  que  Quinti- 
méme  nation;  mais  elle  se  tire  encore  des  lien,  comme  celui-ci  le  dit  lui-même;  de 
écoles  où  Secundus  faisoit  ses  premières  sorte  qu'en  la  56*  année  de  l'Ere  Chrétien- 
études.  Unintilien  nous  donne  assez  clai-  ne  il  puuvoit  avoir  15  &  16  ans.  lorsque 
rement  à  entendre  que  ces  écoles  étoient  Flurns  son  oncle  en  avuit  75  i  76.  Colui- 
dans  les  Gaules.  Car  il  dit  d'une  part  que  ci,  selon  Qui  tilien,  a  fini  le  cours  de  sa' 
la  dernière  ocupation  de  Florus  fut  d'y  en-  vie,  qui  ne  peut  gueres  avoir  excédé  ce 
seigner  la  rhétorique,  et  de  l'autre  que  Se-  terme,  en  professant  l'éloquence  dans  les 
cundus  étant  encore  écolier  fut  repris  par  Gaules.  Donc  c'est  dans  les  Gaules  qun 
Florus  de  ce  qu'il  mettoit  trop  son  esprit  A  Secundus  son  neveu  étudioit,  avant  que 
la  torture  puur  mieux  réussir  qu'il  n'en  d'aller  à  Rome;  et  par  conséquent  on  est 
étoit  capable.  Or  ce  dernier  fait  n'a  pu  en  droit  de  le  regarder  comme  Gaulois, 
arriver,  que  lorsque  Florus  enseignoit  ou  Nous  avons  détruit  ailleurs  toutes  les  au- 
plaidoit  dans  les  Gaules.  Pour  s'en  con-  très  chicaneries  que  l'on  pourroit  faire  sur 
vaincre  il  n'y  a  qu'à  raprorher  les  unes  des  le  texte  de  Quintdien  contre  notre  opi- 
autres  les  époques  de  làge  de  l'oncle  et  du  nion. 
neveu.  L'oncle  avoit  été  disciple  de  Por- 

Secundus 


ORATEUR.  217 

*  Secundus  s'apliqua  avec  tant  de  succès  à  l'éloquence,      i siècle. 
qu'il  y  fit  bientôt  des  progrès  merveilleux ,  *•  et  qu'il  passa 
pour  un  des  plus  célèbres  Avocats  de  son   siècle.  Ses  dis-  653"'"'  '^'      ^' 
cours  étoient  élegans  ,  concis  ,  et  aussi  coulans  qu'on  pou-  "Wiai-  «f-  "•  2- 
voit  souhaiter  ;  quoique   de   mauvais  esprits   eussent  tenté 
de  le  faire  passer  pour  un  homme  qui  ne  parloit  pas  aisé- 
ment. '  On   y    trouvoit    toutes    les    grâces    de    l'éloquence  n.  23. 
réunies  ensemble  :  la  majesté  et  la  politesse  dans  les  termes, 
le  choix  dans  l'invention,  la  netteté  dans  les  pensées ,  la  ju- 
stesse dans  le  raisonnement ,  le  bel  ordre  dans  la  division, 
enfin  un  style  ou  difTus  ou  serré  ,  selon  que  le  sujet  le  de- 
mandoit. 

'  Quintilien  se  plaint  seulement  de  ce  que  notre  Ora-  Qnint.  Uiid. 
teur  se  donnoit  trop  de  peine  à  travailler  ses  pièces , 
'  et  de  ce  qu'il  avoit  plus  d'égard  à  ses  expressions  qu'aux  c.  i.p.  ms. 
choses  mêmes.  Il  jugeoit  aussi  qu'il  n'avoit  pas  assez  de 
feu.  Mais  c'étoient  des  défauts  que  Secundus  tâchoit  de 
corriger  tous  les  jours  ;  et  il  le  faisoit  avec  tant  de  succès  , 
que  s'il  eût  joui  d'une  plus  longue  vie ,  il  auroit  acquis  tou- 
tes les  qualités  qui  font  les  plus  grands  Orateurs. 

'  L'Auteur  du  dialogue  sur  la  corruption  de  l'éloquence  Diai.  or.  n.j.s.s. 
ne  laisse  pas  néanmoins  de  nous  le  représenter  comme   un     '     '     " 
Orateur   très-suivi  ,  et    de  le  faire  paroitre    avec    beaucoup 
de  distinction  dans  cette  savante  dispute.  '  Elle  se  passa  la  n.  9. 
6*  année  de  l'Empire  de  Vespasien,  74*  de  l'Ere  Chrétien- 
ne. '  Secundus  vivoit  encore  alors  ,  comme  on  le  voit    par-  n.  2. 
là.  '  Mais   il    n'étoit   plus   au   monde,    lorsque   Quintilien  Quint,  ibu. 
faisoit  son  éloge  dans  ses  Livres  de  l'Orateur  ,  '  qu'il  com-  an.  n.  21.22.26. 
posa  entre  les  années  86  et  94.  De  sorte  qu'on  peut   pla- 
cer la  mort  de  Secundus  vers  l'an  80  de  nôtre  Ere  commu- 
ne, lorsqu'il  n'avoit  environ  que  40  ans. 

Vipsanius  Messala  l'un  des  personnages  du  dialogue  ,  wai.  or.  n.  u. 
dont  nous  venons  de  parler ,  faisoit  alors  espérer  au 
public  divers  ouvrages  de  la  façon  de  Julius  Secundus. 
Mais  on  ne  nous  a  conservé  la  notion  d'aucun  de  ces  écrits  , 
sinon  de  la  vie  de  Julius  Asiaticus  ,  à  laquelle  notre  Ora- 
teur travailloit  dès-lors  :  encore  ne  sait-on  s'il  y  mit  la 
dernière  main.  C'est  peut-être  l'unique  monument  de  l'an- 
tiquité ,  où  il  soit  fait  mention  de  cet  ouvrage  de  Secun- 
dus. 

Tome  I.  Prem.  Part.  E  e 


218  fMARCUS  APER, 


I  SIECLE. 


MARCUS    APER, 

Orateur. 


§•  1- 
HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

Diai.  or.  11.  s.  7.       TiffARciis    ApER,  '   l'un    des    plus    beaux    génies     du 

*"•  iTJ.    Barreau  en    son    tems ,  étoit  Gaulois    de    nation. 

L'endroit  des  Gaules  ,  où  il  prit  naissance  ,  ne  nous  est 
désigné  que  par  un  lieu  qui  n'avoit   pas   encore  été  grati- 

"•  "•  fié     du     droit    de     Bourgeoisie     Romaine.  '  L'inclination 

d'Aper  en  son  jeune  âge  le  porta  à  voïager;  et  il  la  suivit 
quelque  tems.  Il  poussa  ses  courses  jusques  dans  la  grande 
Bretagne ,  où  il  assure  avoir  vu  un  homme  qui  avoit  porté 
les  armes  du  tems  que  César  passa  dans  cette  isle  pour  la 
subjuguer. 

"•  '•  'Aper  alla   ensuite   à   Rome,    où  il   paroît   qu'il  fixa  sa 

n.  3.  demeure.  '  Il  se  mit  d'abord  à  hanter  le  Barreau  ;  et  il  s'y 

acquit  beaucoup  de  réputation  tant  par   la   beauté  de  son 

■>•  ■»•  esprit ,  que  par   la  force  de  son  éloquence.  '  Quoiqu'il  fût 

reconnu  à  Rome  pour  étranger,  il  ne  laissa  pas  de  s'y 
voir  élevé  aux  plus  hautes  dignités.  Il  fut  Sénateur  , 
Questeur ,  Tribun  ,  et  Préteur.  Mais  s'il  l'en  faut  croire  , 
tous  les  agrémens  attachés  à  ces  Charges  honorables 
avoient  moins  d'attrait  pour  lui,  que  l'exercice  de  sa  pre- 
mière profession. 

n.  s.  '   En  effet  il  estimoit  l'éloquence  au-dessus  de  tout  le 

reste,  fondé  sur  ce  principe,  que  tous  nos  desseins  com- 
me toutes  nos  actions  doivent  tendre  à  l'utilité  publi- 
que. Or  que  peut-il  y  avoir  de  plus  utile  ,  disoit-il ,  que 
l'éloquence  ?  Avec  cet  art  admirable  on  est  en  état  de 
protéger  ses  amis,  de  servir  les  étrangers ,  de  secourir  les 
oprimés  ,  de  se  mettre  au-dessus  de  ses  jaloux,  et  de  ré- 
primer ses  ennemis.  '  C'est  aparemment  sur  le  même  prin- 
cipe, qu'il  ne  pouvoit  souffrir  les  Poètes,  dont  les  ocu- 
pations  ne  sont  le  plus  souvent  que  de  vains  amusemens. 


n.  4. 


ORATEUR.  219 

'  Apliqu*!!  tout  entier  aux  exercices    du  Barreau  ,   Aper       i siècle. 
suivoit  moins  la  manière  des  anciens   Orateurs  ,  que  celle 
des    nouveaux    Rhéteurs    de  son   temps  ,  '  dont   il  fut   un  uiai.  or.  n.  i*. 
partisan    très-zélé.  '  Outre    la   beauté    de  l'esprit,  on  rc-  JJ;  I4; 
marquoit  en  lui  du  feu ,  de  l'art ,  de  l'érudition  ,  du   bril- 
lant ,  et  un  torrent  d'éloquence. 

'  Néanmoins  quelque  grande  que  fût  sa  réputation  ,  ses  n.  s. 
jaloux  ou  ses  ennemis  ne  laissèrent  pas  de  tenter  à  la  faire 
échouer,  Pour  y  réussir  ils  s'avisèrent  de  semer  dans  le 
public  ,  qu'Aper  en  étoit  plus  redevable  à  la  trempe  de 
son  esprit  et  à  l'heureux  naturel  de  son  génie  ,  qu'au  soin 
qu'il  auroit  pris  de  cultiver  l'étude  des  belles  Letres. 
Mais  en  quoi  cela  pouvoit-il  nuire  au  mérite  de  notre 
Orateur  1  C'étoit  déjà  faire  son  éloge  que  de  convenir 
des  grands  talens  qu'il  avoit  reçus  de  la  nature.  11  est 
vrai  qu'il  sembloit  affecter  de  mépriser  l'érudition  ,  quoi- 
qu'il n'en  manquât  pas  ,  à  dessein  de  faire  paroître  davan- 
tage l'heureux  caractère  de  son  esprit,  et  de  monlrer  qu'il 
tiroit  tout  de  son  propre  fonds. 

'  Cela  n'empêchoit  pas  toutefois  qu'Aper  ne  fût  en  une  iWd. 
très-grande  estime  à  Rome.  On  le  suivoit  non  -  seulement 
au  Barreau,  mais  aussi  en  tous  les  lieux  où  il  avoit  à  parler. 
On   couroit   même    à    ses   leçons    particulières  ,  afin   d'en 
recueillir  les  plus  beaux  endroits. 

'Aper  est  un  des  Orateurs  qui  brillent  le  plus  dans  le 
fameux  dialogue  sur  la  corruption  de  l'éloquence.  '  Le  n.  i-va». 
principal  but  de  la  pièce  est  pour  soutenir  l'opinion  que 
notre  Orateur  défendoit  en  faveur  des  avantages  de  la 
nouvelle  éloquence  au-dessus  de  l'ancienne.  '  Ce  dialo-  n.  17. 
gue  se  tint  la  sixième  année  de  l'Empire  de  Vespasien , 
.soixante -quatorzième  de  notre  Ere  commune.  Ainsi  Aper 
vêquit  au  -  delà  de  cette  époque  ;  puisqu'il  paroît  qu'il 
étoit  encore  alors  dans  une  grande  vigueur.  Mais  il  sem- 
ble qu'on  ne  peut  placer  sa  mort  guéres  plus  loin  qu'en 
l'année  85.  Il  faut  se  souvenir  qu'il  avoit  vu  dans  la  grande 
Bretagne  un  homme  ,  qui  avoit  porté  les  armes  du  tems 
de  César  :  circonstance  qui  porte  à  juger  qu'il  ne  put  faire 
ce  Yoiage  plus  tard  que  vers  l'an  30  ,  lorsqu'il  avoit  envi- 
ron vingt  aps. 


E  e  ij 


SIECLE. 


220  MARCUSAPER, 

S-  n. 

SES  ECRITS. 


0 


N   a   atribué   pendant  fort  long-tems  tantôt  à  Quin- 
tilien  ,  tantôt  à  Tacite  le  fameux  dialogue  des  Ora- 
Tiii.Emp.  1. 1.  p.  teurs  sur  la  corruption  de   l'éloquence.   'Mais  les  Savans 
n^M?'^"'"'*"'  <îui  ont  examiné  ce  point  de  critique  avec  le  plus  de  soin, 
conviennent  aujourd'hui    qu'il   n'est  ni  de  l'un  ni  de  l'au- 
tre  de   ces   deux   célèbres   Ecrivains.    Après    avoir   mûre- 
ment pesé  toutes  choses  à  notre  tour,  il   nous  paroit  qu'il 
y  a  des  preuves  suffisantes  pour  donner  cette  pièce  à  Mar- 
cus  Aper. 
Mal- ni.  1».'  Elle   est  faite   exprès  pour   établir  le   sentiment   où 

étoit  Aper  ,  que  l'éloquence  de  son  tems  méritoit  la  pré- 
férence sur  l'éloquence  des  anciens.  C'est  par  où  déoute 
l'Auteur  du  dialogue  avec  un  espèce  de  triomphe. 

2°.  L'opinion  d'Aper  y  est  soutenue  avec  plus  de  feu 
que  celle  de  son  adversaire.  Que  si  les  raisons  de  celui- 
ci  paroissent  plus  solides  ,  il  faut  l'atribuer  à  la  bonté  de 
la  cause  qu'il  défend.  D'ailleurs  il  manque  à  cette  pièce, 
comme  nous  le  dirons  dans  la  suite  ,  au  moins  une  autre 
partie  ,  qui  devoit  comprendre  la  réplique  d'Aper  aux 
raisons  de  son  adversaire. 

3°.  '  Les  personnes  qu'on  avoit  prises  pour  Juges  dans 
ce  différend  ,  comme  Julius  Secundus  qui  s'étoit  déjà  dé- 
claré pour  les  Poëtes ,  et  Materne  qu'Aper  avoit  d'a- 
bord ataqué  ,  aplaudissent  avec  éloge  à  son  raisonnement. 
4°.  Les  particularités  de  la  vie  d'Aper  sont  beaucoup 
plus  détaillées  dans  ce  dialogue ,  que  celles  de  l'histoire 
d'aucun  autre  des  personnages  qui  y  paroissent. 

On  pourroit  à  la  vérité  répliquer  ,  que  les  mêmes  rai- 
sons pour  lesquelles  on  refuse  ce  dialogue  à  Quintilien  et  à 
Tacite  ,  empêchent  qu'on  ne  l'atribue  à  Marcus  Aper.  Car 
il  est  faux  que  ce  dernier  ,  'en  la  sixième  année  de  Vespa- 
sien,  k  laquelle  se  tint  ce  dialogue  ,  fût  un  jeune  homme, 
et  même  un  très  jeune  homme,  juvenis  admodum. 

Mais  qui  ne  voit  que  cet  endroit  du  dialogue  est  une 
pure  fiction  de  l'Auteur,  afin  de  se  dérober  à  la  connois- 
sance  du  public  ?  En  effet  est-il  croïable  que  cet  Ecrivain 
quel   qu'on  le  puisse  suposer,  ait   été   long-tems  après  en 


n.  3.  5.   13.  24. 


a.  1.  17. 


ORATEUR.  221 

état  de  rédiger  par  écrit  ce  dialogue  avec  le  secours  de  i  siècle. 
sa  mémoire,  memoria  et  recordatione ,  et  avec  tant  d'exacti- 
tude qu'il  n'y  avoit  rien  oublié,  iisdem  nunc  numeris  iis- 
demque  rationibus,  pour  y  avoir  seulement  assisté  à  un  âge 
aussi  jeune  qu'il  veut  le  faire  entendre?  Assurément  cela 
paroît  impossible;  vu  sur-tout  la  diversité  des  faits,  des 
noms,  des  époques,  et  l'abondance  d'érudition  dont  la 
pièce  est  remplie.  Il  faut  donc  avouer  Qu'elle  ne  peut 
mieux  convenir  qu'à  notre  Orateur,  qui  l'aura  entrepri- 
se pour  faire  triompher  son  opinion  favorite  à  l'avantage 
des  Orateurs  de  son  siècle,  que  les  personnes  de  meilleur 
goût  mettoient  beaucoup  au-dessous  des  Orateurs  de 
l'antiquité.  C'est  ce  qui  paroîtra  encore  mieux  par  l'œ- 
conomie  du  dialogue  que  nous  allons  donner. 

'  Justus  Fabius  s'étant  plaint  plusieurs  fois  en  présence  Diai.  or.  n.  i. 
d'Aper,  de  ce  que  les  Orateurs  de  leur  tems  étoient  bien 
différens  de  ceux  qui  avoient  brillé  dans  les  siècles  pas- 
sés, et  de  ce  qu'à  peine  quelqu'un  méritoit  le  nom  de  vé- 
ritable Orateur,  Aper  entreprit  de  répondre  à  ses  plain- 
tes par  le  dialogue  dont  il  est  ici  question.  Afin  de  l'exé- 
cuter avec  plus  d'agrément  et  de  facilité,  il  a  recours  à  la 
fiction  suivante.  11  promet  de  ne  raporter  précisément 
qu'une  conférence  à  laquelle  il  s'étoit  trouvé  étant  en- 
core fort  jeune,  et  dans  laquelle  en  traitant  doctement 
ce  sujet,  on  avoit  fait  paroîlre  beaucoup  de  mépris  pour 
l'éloquence  des  anciens,  et  donné  la  préférence  à  celle 
des   modernes. 

'  Aper  supose  que  l'ocasion  de  cette  conférence  fut  tel-  n.  s. 
le.  Materne  célèbre  Avocat  en  ce  tems-là  avoit  composé 
quelques  tragédies.  Son  Caton  entre  autres  faisoit  beau- 
coup de  bruit  dans  le  public,  comme  si  les  puissances  en 
avoient  été  offensées.  Marcus,  Aper  et  Julius  Secundus 
en  prennent  ocasion  de  rendre  visite  à  Materne  '  et  le  trou-  n.  .35. 
vent  ocupé  à  composer  son  Thyeste.  Aper  le  voïant  ainsi 
plongé  dans  la  poésie,  lui  fait  des  reproches,  de  ce 
qu'aïant  autant  de  talens  qu'il  en  avoit  pour  le  Barreau, 
il  en  négligeoit  l'exercice,  et  préféroit  une  ocupation 
aussi  vaine  que  celle  de  composer  des  tragédies,  aux  nobles 
et  utiles  fonctions  d'Avocat. 

'  Ces  reproches  poussés    vivement    engagèrent    Materne  n.  ii-i*. 
à  prendre  la  défense  de  l'exercice  de  la  poésie  ;  et  les  ré- 

1  9 


222 


MARCUS  APER, 


I  SIECLE. 


n.  lô. 


n.  15-23. 


n.  24-26. 


n.  33-41. 


Till.  ibid.   p.   3R. 


Dial.  of.  n.    42. 


ponses  de  celui-ci  atirerent  de  nouvelles  répliques  de  la 
part  de  l'autre.  La  dispute  sV'chauffojl,  lorsque  parut 
Yipsanius  Messala,  qui  venoit  aussi  rendre  visite  à  Mater- 
ne. On  lui  dit  le  sujet  de  la  dispute,  '  qu'Aper  ranima 
aussi-tôt,  en  la  faisant  tomber  insensiblement  sur  ce  qui  fait 
le  principal  sujet  du  dialogue. 

'  11  s'agissoit  de  savoir  laquelle  des  deux  sortes  d'élo- 
quence est  préférable  à  l'autre,  si  c'est  l'éloquence  des 
anciens,  ou  celle  du  siècle  après  Ciceron.  Aper  se  dé- 
clara hautement  en  faveur  de  celle-ci,  prétendant  ne 
faire  que  ce  que  Ciceron  avoit  fait  lui-même  avant  lui, 
Comme  ce  célèbre  Orateur  Romain  avoit  soutenu  que 
l'éloquence  de  son  tcms  étoit  beaucoup  au-dessus  de  celle 
des  siècles  passés  :  de  même  Aper  prétend  qu'on  doit  porter 
le  môme  jugement  de  l'éloquence  de  son  siècle,  et  la  pré- 
férer à  l'éloquence  des  anciens.  '  Il  passe  ensuite  à  critiquer 
les  principaux  Orateurs  du  siècle  de  Ciceron  ;  puis  il  vient 
à  prouver  son  sentiment  par  tous  les  avantages  qu'il  croit 
atachés  à  la  nouvelle  éloquence,  et  finit  en  donqaqt  4e> 
très-beaux  préceptes  pour  y  réussir. 

'  Au  contraire  Messala  prend  la  défense  de  l'éloquence 
des  anciens,  et  l'élevé  au-dessus  de  celle  des  modernes 
par  divers  raisonnemens  très-solides.  Après  en  avoir  don- 
né les  premières  preuves,  '  il  entre  dans  le  détail  des  cau- 
ses de  la  corruption  de  l'éloquence,  et  apuie  par-là  le  sen^ 
timent  qu'il  avoit  entrepris  de  défendre. 

'  Au  reste  ce  dialogue  est  imparfait,  et  n'est  que  comme 
une  première  partie,  qui  en  demande  au  moins  une  se- 
conde. '  C'est  ce  qui  paroît  visiblement  par  la  fin,  qui  en 
fait  espérer  une  suite.  '  D'ailleurs  le  dessein  de  l'Auteur 
de  la  pièce  étant  de  donner  la  préférence  à  l'éloquence 
de  son  siècle,  et  n'aïant  fait  qu'en  aporter  les  premières 
preuves,  contre  lesquelles  Messala  en  avoit  donné  d'au- 
tres en  faveur  de  1  opinion  oposée,  il  restoit  au  premier  à 
répliquer  aux  raisons  de  l'autre,  et  è  confirmer  les  sien- 
nes ;  ce  qui  ne  se  trouve  pas  dans  ce  dialogue. 

La  pièce  est  remplie  d'érudition,  et  de  faits  importans 
pour  l  histoire.  La  critique  qui  y  règne,  est  le  plus  sou- 
vent juste  et  judicieuse.  Le  style  en  est  beau  et  agréable, 
quoi  qu'on  y  trouve  des  expressions  qui  ne  sont  pas  de  la 
plus    pure    latinité.    On    nommé    cette    pièce   indifferem- 


ORATEUR.  223 

ment   ou  dialogue   des  Orateurs,    parce  que  ce   sont   tous      i  siècle. 
Orateurs  qui  y   parlent  ;  ou  dialogue  sur  la  corruption  de 
l'éloquence,    parce  qu'on  y  traite  ce   sujet  fort   au   long, 
quoique  par  incidens. 

'  Ce  dialogue  se  tint  la  sixième  année  de  l'Empire  de  Diai.  or.  n.  17. 
Vespasien,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  six  vints  ans 
après  la  mort  de  Ciceron.  Comme  on  l'a  long-tems  a- 
tribué  et  à  Quintilien  et  à  Tacite,  on  le  trouve  ordinai- 
rement à  la  suite  des  œuvres  de  ces  deux  Ecrivains.  Les 
meilleures  éditions  de  cette  pièce  que  nous  connoissions, 
sont  celles  de  Leide  et  de  Roterdam,  à  la  fin  de  Quinti- 
lien de  l'année  1665  m-8°  et  d'Amsterdam,  à  la  fin  de 
Tacite  de  l'année  1685  en  même  volume.  Nous  avons 
une  traduction  en  notre  langue  de  ce  dialogue,  faite  par 
Mr.  Giry  de  l'Académie  Françoise,  qui  n'y  a  pas  mis 
son  nom.  Elle  a  été  imprimée  à  Paris  l'an  1626  en  un 
volume  in-i"  avec  une  Préface,  qui  est  de  Mr.  Godeau 
Evêque  de  Yence.  (XIX.) 


ANTOlMUS  PRIMUS, 

Poète. 

E  genre  de  vie  où  Primus  brilla  davantage  ,  fut  la 
profession  des  armes.  11  ne  laissa  pas  toutefois  d'étu- 
dier les  belles  Letres,  et  de  s'atacher  à  ceux  qui  les 
cultivoient.  Il  mérita  même  leur  estime  et  leurs  éloges  , 
autant  pour  son  propre  savoir  que  pour  l'affection  qu'il 
leur  portoit. 

'  Il  naquit  à  Toulouse    après    les   premières   années  de  Man.i.g.ep.  1001 

■■'  ..     ~  .-..,  ,  .  Suet.  cxs.  1.7.11. 

18. 


L 


ce  siècle  ;  et  il  fut  selon  Martial ,  un  des  grands  ornemens 
de  cette  ville.  Il  se  nommoit  Marcus  Antonius  Primus  , 
et  avoit  porté  dans  son  enfance  le  surnom  de  bec  de  coq. 
'  D'abord  il  fut  honoré  d'une  Charge  de  Sénateur  à  Tac.  hist.  1;  2.  n 
Rome.  Mais  il  fut  chassé  du  Sénat  sous  Néron,  pour  *"" 
avoir  fait  une  fausseté.  Il  y  rentra  néanmoins  dans  la 
suite  sous  Galba,  qui  le  fit  Tribun  de  la  septième  Lé- 
gion. 

'  Primus    étoit   un    homme    d'intrigue  et  d'exécution,  Ta';\^',  î*- ° 

o  '    40   itud.   1.4.n.90 


90. 


21G*  ANTONIUS  PRIMUS, 

I  SIECLE.      hardi  de  la  langue  et  de  la  main,  propre  à  décrier  qui  il 
vouloit,   promt  à  piller  et  à  prodiguer,  impérieux  et  arro- 
gant jusqu'à  ne  pouvoir  souffrir  d'égaux  ,  pernicieux  dans 
Tac.  hisi.  1. 3.  n.  la    paix,    et  de   grand   service    dans   la  guerre.  '  Il  avoit 
'"■  d'ailleurs  de   l'éloquence   et    des   manières   propres  à  tou- 

cher un  peuple  et  des  soldats. 
1.  2.  n.  86.  '  Avec   toutes  ces  qualités    tant  bonnes  que  mauvaises , 

il   se  fit  lui-même  Général   d'Armée,   et  s'oiïrit  à  Othon 
qui  méprisa  ses  services.  Primus  volant  depuis  le  mauvais 
état  de  Vitellius  ,   qui   peu  après  avoit  succédé   à  Othon  , 
il  prit  le  parti  de   Vespasien.  Personne  ne  servit  ce  nou- 
veau contendant  à  l'Empire   ni   avec  plus  de  valeur ,    ni 
1. 3.n.i6-34| Jos.  avec  plus  de  succès  que  Primus.  'Il  poussa  si  vigoureuse- 
p^'ooat  si»ei.''iWd.'  ^^^^  1^  parti  de  Vitellius,  qu'en  peu  de  jours  il  remporta 
plusieurs  victoires,   prit   et   brûla  Crémone  deux  cens-qua- 
tre-vint-six  ans  apfès    sa    fondation,    subjugua    toute    l'I- 
talie,   et  se  rendit  enfin  maître  de  Rome,  où  Vitellius  fut 
tué   et  tous   ses  gens  défaits.    Il  donna  sur-tout  des  mar- 
ques prodigieuses  de  valeur  à  la  bataille  de  Bedriac ,  au- 
jourd'hui Caneto,    où  il   fît   tout    ensemble  le    métier   de 
capitaine   et  de    soldat.   Ce  fut  aparemment  en  reconnois- 
Tar.  iiisi.  1.4.  n.  sance  de   ses  services,  '  qu'il  fut  fait  Consul,  mais  seule- 
ment subrogé,  puisque  son  nom  ne  se  trouve  pas  dans  les 
fastes  Consulaires. 
Mari.  1.1.  epi.6 1  ï^  paroît  quc  Primus  se  retira  ensuite  dans  le  lieu  de 

In"'  'Si'  ^^J,\-  sa    naissance,    peut-être   après    que    Domitien   eut  succédé 

10.epi.23. 32. 73  I      ,     rp-.      ri         .  "  J       \'  ■  1  •       •      1 

1.  6. epi.  11.  a  Tite  iils  et  successeur  de  vespasien.  La  prmcipale,  pour 
ne  pas  dire  l'unique  ocupation  de  Primus  dans  sa  retraite, 
fut  l'étude  des  belles  Letres  et  l'exercice  de  la  poésie.  Il 
avoit  toutes  les  qualités  nécessaires  pour  y  réussir,  beau- 
coup d'esprit,  une  grande  éloquence,  de  l'érudition  au- 
tant que  tout  autre.  C'est  l'idée  que  nous  en  donne  Mar- 
tial, qui  l'avoit  connu  à  Rome ,  et  qui  étoit  lié  avec  lui 
d'une  amitié  très-étroite.  Ce  Poète  regarde  Primus  com- 
me un  de  ses  Mécènes  ;  et  nous  avons  encore  plusieurs  de 
ses  épigrammes  qui  lui  sont  adressées. 
1.6.  epi.  H  |i.n.  '  Le  retour  de  Primus  à  Toulouse  ne  fut  point  capable 
cpi.iooi  i.io.epi.  d'interrompre  le  commerce  de  literature  qu'il  avoit  avec 
Martial.  Celui-ci  avoit  soin  de  lui  envoler  de  Rome  ses 
ouvrages  ,  comme  à  un  ami  judicieux ,  et  capable  d'en 
juger  sainement.  Primus  de  son  côté  les  lisoit  avec  com- 
plaisance , 


ORATEUR.  217 

plaisance ,   et  en  savoit  faire  tout  le  cas  possible,  souvent  i  siècle. 
même  au-delà   de   ce   qu'ils  méritoient.  Pour  reconnoître  " 

le  plaisir  que  Martial  lui  faisoit,  il  lui  envoïa  en  une  oca- 
sion  une  robe  de  grand  prix.  Ce  présent  acompagné  d'un 
jugement  aussi  avantageux  en  faveur  de  ses  ouvrages , 
flatloit  extrêmement  l'amour  propre  de  Martial.  C'est  à 
cette  robe  que  ce  Poëte  fait  allusion  dans  plusieurs  de  ses 
■  épigrammes,  où  il  en  relevé  le  prix  jusqu'à  dire  que  ni 
Apicius  avec  tout  son  faste,  ni  Mecenas  avec  toute  sa 
magnificence  n'auroient  pas  craint  de  se  deshonorer  en  la 
portant  (XX). 

'  Primus  ,  selon  Martial ,  vêquit  au  moins  jusqu'à  l'âge  Man.  i.  lo.  epi. 
de  soixante -quinze  ans.  S'il  en  faut  croire  ce  Poëte  ,  Pri-  ^^■^*' 
mus  éloit  non-seulement  un  bel  esprit,  et  un  homme  d'une         ^^^^ 
valeur   extraordinaire  ;  mais  il  étoit  encore  d'une  probité 
si  scrupuleuse,  qu'il  n'auroit  jamais  eu  rien  à  se  reprocher. 
C'étoit   autant   pour  ces  belles  qualités  ,  qu'à  titre  d'ami  , 
que    Martial    gardoit   précieusement  son    portrait.   '   Mais  Tac.  Ust.  i.  3.  n. 
un  Historien  qui  connoissoit    peut-être  mieux  le  caractère  *^' 
de  Primus  que   Martial,    est  bien  éloigné  de  convenir  de 
sa   prétendue   probité ,   et  découvre  en  lui  ,  comme  nous 
avons  déjà  vu,  beaucoup  de  vices  contraires. 

'  Martial  fait   mention  d'un  recueil  d'épigrammes  de  la  Mart  1. 1.  epi.  e. 
façon  de   Primus.  Mais  il  ne  nous  reste  plus  rien  de  ses 
écrits,  '  que   quelques  harangues   ou  fragmens  de  haran-  Tac.  imt.  i.  3. 
gués,    et  des   letres    que   Tacite  nous  a  conservées.  *  Le  \^^  '^'^^  ^^ 
même  Historien  parle  aussi  de    la  relation    que  Primus 
dressa  de  ce  qui  s'étoit  passé  en  Germanie  avant  la  jour- 
née de  Crémone,  et  qui  fut  apuïée  de  l'Edit  de  Gœcina. 

SATRIUS   RUFUS, 

Orateur; 

ET 

A  R  T  A  N  U  S , 

Jurisconsulte. 

Nous    réunissons    ensemble    ces   deux   savans    Gaulois , 
tant  parce   qu'ils    fleurissoient    en    même-tems   sous 
l'Empire  de  Vespasien,  qu'à  cause  qu'il  nous  reste  peu  de 

Tome  I.  Prem.  Part.  F  f 

19* 


218*  SAÏRIUS  RUFUS,  ORATEUR. 

I  SIECLE,    chose  pour  leur  éloge.  '  Juvenal  met  Rufus  au  nombre  de 
^  ceux  qui  professoient  de  son  tennips  les  letres  et  l'éloquence 

«4  Vnot^'p''.' 236!  à  Rome.  Rufus,  selon  l'ancien  Scholiaste  de  ce  Poëte,  étoit 
'■  Gaulois   de   nation.  Il    fit  à  Rome  même  successivement 

divers  personnages.  Il  paroît  qu'il  y  enseigna  d'abord  la 
jeunesse,  en  quoi  il  n'eut  pas  1  agrément  qu'il  auroit  été 
en  droit  d'atendre  de  ses  travaux.  Non  seulement  les 
gens  de  letres  ,  et  nommément  les  professeurs  ,  étoient 
alors  mal  récompensés;  mais  la  jeunesse  étoit  encore  si  in- 
solente, qu'elle  se  révoltoit  impunément  et  insultoit  à  ceux 
qui  prenoient  soin  de  l'instruire.  C'est  ce  qui  a  donné  oca- 
sion  à  la  septième  satyre  de  Juvenal,  qui  nous  y  représente 
Rufus  comme  un  des  plus  maltraités, 
piin.  1. 1.  ep.  5.  p.  '  Rufus  se  mit  ensuite  à  hanter  le  Barreau,  où  il  acquit 
13 1  Juv.  noi.  ibid.  jg^  réputation  d'un  des  plus  diserts  Orateurs  de  son  siècle. 
Il  avoit  tant  de  délicatesse  pour  l'éloquence ,  qu'il  ne  souf- 
froit  qu'impatiemment  celle  qui  étoit  en  usage.  Il  poussa 
même  la  hardiesse  à  ce  sujet,  jusqu'à  oser  disputer  la  pal- 
juv.  su.  iu.i.  me  à  Ciceron.  '  En  effet  aux  termes  dont  en  parle  Juve- 
nal, il  paroît  qu'il  se  piqu  oit  de  parler  si  purement  latin, 
que  Ciceron  n'étoit  pas  exemt  de  sa  critique  ,  le 
nommant  un  AUobroge  ou  un  barbare  à  cause  de  certains 
termes  qu'il  ne  pouvoit  souffrir  dans  ses  écrits. 
Dia.or.  n.  18.  '   H   est  vrai  que  Rufus  n'étoit  pas  le  premier  qui  eût 

trouvé  à  redire  a  l'éloquence  de  Ciceron .  Calvus  et  Bru- 
tus  long-lems  avant  lui  y  avoient  repris  des  défauts  consi- 
dérables, ne  le  trouvant  ni  assez  nerveux,  ni  assez  bien  soute- 
nu. Mais  cela  suffisoit-il  pour  autoriser  la  hardiesse  de  Rufus? 
piin.  1. 5.  ep.  21 1  '  Nous  avous  dcux  letres  de  Pline  le  jeune  sur  divers 
i.7.cp.23.  sujets,  adressî^es  à  un  Rufus  son  ami,  qui  ne  nous  paroît 

pas  différent  de  celui  dont  nous  donnons  ici  l'éloge. 
1. 1.  op.  5.  p.  13.       '  Comme  Pline  le  nomme  ailleurs  Satrius  Rufus,  on  pour- 
Frori.  de  aq.  1.  8.  ^'^^^  CToite  qo  il  dcsccndoit  '  de  ce  Satrius  Rufus  qm  suc- 
p.  a.ii.  coda   à    Atteins   Capito   dans   la   Charge    d'Intendant   des 

eaux  à  Rome,  sous  le  consulat  de  L.  Martius  et  d'Antistius 
Vêtus ,  quelques  années  avant  le  commencement  de  no- 
wiD.ibid.n..!.  tre  Ere  vulgaire.  'Un  Savant  s'est  même  persuadé  que  no- 
tre Orateur  exerça  lui-même  cette  Charge ,  et  que  c'est 
Ini  que  Frontin  nomme  dans  l'énumeration  qu'il  fait  des 
Intendans  des  eaux.  Mais  le  tems  où  Frontin  place  ce 
Satrius  Rufus  est  bien  éloigné  de  celui  où  fleurissoit  no- 
tre Orateur. 


I 


ET  ARTANUS,  JURÏSCONS.  219* 

•  Artanus  nous  est  représenté  comme  un  Jurisconsulte ,    i  s  i  e  c  l  e. 
qui  par  son  savoir  faisoit  un  des  grands  ornemens  de  son  «Man.  i.8.e|.i.  7i. 
pais.  '  Mais  nous  avons   la  douleur  de    voir   au'il    est    du  g^,   .        .. 
nombre  de  ceux  dont  le  temps  nous  a  envié  les  écrits,  et  i.  j.  9.  p.  310.' 
dont  il  ne  nous  reste  qu'une  légère  connoissance. 

'  Il  étoit  né  à  Narbone  ,  d'où  il  alla  ensuite  à  Rome  se  Man.  aid. 
perfectionner  dans  la  Jurisprudence  et  les  autres  connois- 
sances  convenables  à  sa  condition.  Ce  fut  dans  cette  ca- 
pitale du  monde,  qu'il  se  lia  d'amitié  avec  le  Poëte  Mar- 
tial ,  qui  y  brilloit  alors  sous  l'Empire  de  Domitien.  Ar- 
tanus tut  depuis  rapellé  dans  le  lieu  de  sa  naissance  pour 
y  exercer  quelque  Charge  de  Magistrature  ,  et  y  faire  usa- 
ge de  la  science  des  loix  qu'il  avoit  acquise.  A  son  dé- 
part Martial  auroit  bien  souhaité  de  l'acompagner  dans 
son  voiage  :  mais  il  fut  contraint  de  se  borner  à  lui  faire 
des  vœux  de  prospérité.  Et  pour  lui  donner  quelque  mar- 
que de  son  attachement ,  il  lui  fit  présent  d'un  exemplai- 
re de  ses  poésies,  quoique  l'ouvrage  ne  fût  pas  encore 
Korté  à  sa  perfection.  On  y  lit  l'épigramme  suivante  que 
[artial  composa  à  ce  sujet. 

Nondum  murice  cultus,  asperoque 
Morsu  pumicis  aridi  politus, 
Artanum  properas  sequi,  libelle  : 
Quem  pulcherrima  jam  redire  Narbo, 
Docti  Narbo  paterna  Voticni 
Ad  leges  jubet  annuos([ue  fasces  : 
Yotis  quod  paribus  tibi  petendura  est, 
Continget  locus  Hle,  et  bic  amicus. 
Quam  vellem  fleri  meus  libellas  ! 


AGRICOLE, 

Gouverneur  de  la  Grande  Bretagne. 

COENUS    '     JULIUS      AgRICOLÂ,     l'un    des   plus   il-  Tm.    vit.  Agr.  n. 
lustres  Conquerans  delà  grande  Bretagne,    et  le   pre-  **''^' 
mier  Instituteur  de  l'étude  des    letres  dans  cette  isle  ,  na- 
quit à  Frejus  ,  ancienne  et  célèbre  Colonie  Romaine  dans 
les  Gaules.  '  Le  texte  de  Tacite  place  cette  naissance  au  a.u. 
treizième  jour  de  Juin  sous  le  troisième  Consulat  de  Ca- 
ligula;  '  mais  il  faut  lire  sous  le  second,  l'an  38  de  l'Ere  tui.  Em?.  t.s.  p. 

538. 

Ffij 


Tac.  iUid.  n.  ♦. 


ibid 


220*  AGRICOLE, 

I  SIECLE.  Chrétienne,  comme  il  paroît  par  la  (')  suite  de  cet  Historien. 
'  Agricole  eut  pour  père  le  Sénateur  Julius  Graecinus  , 
dont  nous  avons  parlé  en  son  lieu  ,  et  qu'il  perdit ,  lors- 
qu'il n'avoit  pas  encore  trois  ans  accomplis.  Sa  mère  qui  se 
rendit  fort  recommandable  pour  sa  rare  chasteté,  se  nom- 
moit  Julia  Procilla.  Après  en  avoir  reçu  la  première  édu- 
cation ,  il  fut  envoie  tout  jeune  à  Marseille  ,  pour  y  faire 

sirab.  1.4. p.  125.  SCS  études.  '  Les  Romains,  comme  nous  l'avons  vu,  préfé- 
roient   depuis   long-tems  cette   ville  à  Athènes  pour  cette 

Tac.  ibid.  sorte  d'exercice.  '    Elle   étoit  encore  alors  le   Siège  et  la 

Maîtresse  des  sciences  et  des  beaux  arts;  et  l'on  y  voïoit 
encore  régner  une  excellente  police  ,  avec  toute  la  poli- 
tesse des  Grecs,  soutenue  par  la  tempérance  Gauloise. 

'  Ce  fut  là  qu'Agricole,  à  la  faveur  d'un  heureux  natu- 
rel ,  d'un  esprit  élevé  et  pénétrant  qu'il  avoit  aportés  en 
naissant ,  fit  de  très-grands  progrès  dans  la  vertu,  et  dans 
la  connoissance  des  belles  Letres  et  des  plus  hautes  sciences. 
Il  se  sentoit  tant  de  passion  pour  arriver  au  faîte  de  la 
gloire,  que  si  sa  mère  n'eût  eu  la  prudence  de  le  retenir, 
il  auroit  poussé  dès  sa  première  jeunesse  l'étude  de  la 
Philosophie  et  de  la  Jurisprudence  au-delà  des  bornes  pres- 
crites à  un  Romain  et  à  un  Sénateur.  L'â^e  et  la  raison  vin- 
rent aussi  au  secours,  et  aidèrent  à  corriger  cette  noble  im- 
pétuosité pour  l'étude,  et  à  le  garantir  lui-même  de  l'osten- 
tation assez  ordinaire  aux  personnes  qui  savent  beaucoup. 

'  Après  ses  études  il  suivit  la  profession  des  armes ,  et 
alla  en  faire  le  premier  essai  dans  la  grande  Bretagne  sous 
Suctonius  Paulmus.  Bien  loin  de  se  servir  de  cette  profes- 
sion pour  mener  une  vie  oisive  et  voluptueuse,  comme  en 
usoient  la  plupart  des  jeunes  gens ,  Agricole  s'apliqua  sé- 
rieusement a  se  former  au  métier  de  la  guerre.  11  se  don- 
na tout  entier  tantôt  à  prendre  des  leçons  des  plus  habi- 
les, et  à  imiter  les  plus  estimés,  tantôt  à  connoître  la 
province  ,  et  à  se  faire  connoître  lui-même  à  l'armée  au- 
tant par  sa  prudence  que  par  sa  bravoure. 

'  Lorsqu'il  eut  fait  quelques  campagnes  avec  la  qualité 
de  Tribun  ou  Colonel,  il  alla  ensuite  à  Rome,  pour  en- 
trer  dans   quelque  Charge  de   Magistrature.    Ce  fut   dans 

(<)  '  En  effet  Tacite    disant  qu'Agricole  troisième   Consulat  de  Caligula,   qui  tom- 

vAqnit  ^6    ans,  et   qu'il   mourut  sous  le  boit   en    l'an    40,   mais   du  second,   deux 

Consulat  de  Collega  et  de  Prisque,  c'est-  ans  auparavant.    On  ne  voit  point  d'au- 

à'dire  l'an  93  de  notre  Ere  commune,  ce  tre  molen  de  corrifer  le  texte  défectueux 

terme  de  56  ans  doit  m  compter,  non  du  de  Tacite. 


n.  5. 


n.  6. 


ibid. 


I 


GOUV.  DE  LA  GRANDE  BRETAGNE.    221* 

ce   voïage   qu'il    épousa   à    Rome    même    Domitia    Deci-     i  siècle. 
diana,  issue  d'une  famille  illustre  :   alliance  qui  lui  fraïa 
une  voie  honorable  pour  arriver  à  une  plus  haute  fortune. 

'  Bien-tôt  il  repassa  dans  la  grande  Bretagne,  où  il  eut  tm.  11.7.8. 
le   commandement    de  la  vintiéme  légion  ,  et  où  il  donna 
de  nouvelles  preuves  et  de  sa  sagesse  et  de  sa  valeur.  '  A  n.o. 
son  retour   à  Rome  l'Empereur  Vespasien  l'honora  de  la 
dignité  de  Patrice  et  lui  donna    le   Gouvernement  d'Aqui- 
taine, qui  lui  faisoit  espérer  le  Consulat,  auquel  le  Prince 
l'avoit  destiné.    II    ne   gouverna  pas  cette    province  trois 
ans  entiers,  '  et  fut  ensuite  Consul  subrogé  l'an  77.   Dès  nu.  iWd.  p.  sa. 
ce  tems-là  il  promit  sa  fille  (')  en  mariage  à  Tacite  l'Histo- 
rien, '  et  la  lui  donna  effectivement  après  son  Consulat.  Tao.  iwa.  n.  19 

'  Aussi-tôt  après  ce  mariage  en  78,  vers  le  milieu  de  n.  9.18. 
l'Eté  ,  Agricole  fut  renvoie  dans  la  grande  Bretagne  avec 
le  titre  de  Gouverneur.  Quoique  la  campagne  fût  déjà 
fort  avancée  ,  il  ne  laissa  pas  de  gagner  une  bataille  ,  et 
de  réduire  sous  l'obéissance  des  Romains  le  païs  de  Norl- 
Galles  avec  l'Isle  d'Anglesey  qui  y  est  jointe.  Et  dès  sa 
troisième  campagne  il  poussa  ses  conquêtes  jusqu'au  Gol- 
fe du  Tay  rivière  d'Ecosse. 

'  Ces    expéditions    heureusement    terminées ,    Agricole  n.  19. 
s'apliqua  à  établir  dans  le  païs  une  bonne  discipline.  Afin 
d'y  mieux  réussir,  il  commença  par  sa  propre  maison  :  ce 
qui,  selon  Tacite,  n'est  pas  moins  difficile  à  quelques-uns 
que   de   gouverner   une   Province.    Il    eut  grand  soin  de 
modérer  la  rigueur  des  impôts,  et  de  les  proportionner  aux 
facultés  d'un  chacun.  Il  n  eut  pas  moins  d'attention  à  re- 
trancher toutes  les  vexations  ,  que  l'avarice  a  de  coutume 
d'y  ajouter.  '  Par  cette  sage  conduite  il  éloigna  les  révoltes,  n.21. 
affermit  et  fît  aimer  la  paix.   Il  fit  encore  plus  ;   il  porta 
les  peuples  à  suivre  les  mœurs  des  Romains,  à  faire  passer      i  ..,  s,-,  m 
h  leur  usage  le  bain,  les  festins,  la  splendeur  des  habits , 
la  magnificence  des  bâtimens. 

Quant  aux  études,  il  les  y  établit  avec  tant  de  succès,  ibw. 
que   les   Bretons  qui  avoient   auparavant   en    horreur   la 
langue  latine ,  devinrent  passionnés  pour  la  belle  éloquen- 

(•)  '  L»  dernier  Dictionaire  de  Moreri ,  fiUo  en  mariage.    C'est  ce  qui  est  certai-    Mor.  a.  p.  18t.  *. 

entre  plusieurs  autres  fantes  qu'il  fait  dans  nement  contraire  an  texte  de  Tacite,  '  qui   f^  jj^j   „    g 

l'article   d'Agricole,   brou. Ile  extrêmement  dit  bien   clairement  que  ce  fat  Agricole,  *        •    •     • 

ce  qui  regarde  le  trait  au  sujet  duquel  nous  déjà  mané  et  pire  d'une  fille  nubile,  qui 

faiso  nt  eatt*  note.  Il  dit  que  Vespasien  en  lui  promit  à  lui  Tacite  sa  fille  en  mariage, 

faisant  Consul  Agricole ,   loi   promit    sa  (XXI.) 


222*  AGRICOLE,  GOUV.  DE  LA  GR.  BRET. 

I  s  I  E  c  L  E .    ce.  •   C'est  peut-être  à  cet  événement  si  honorable  pour 


•  Juv.    sat.  15.  T. 
111.  112. 


nos  Gaules,  que  Juvenal  fait  allusion,  lorsqu'il  dit 

Gallia  Gausidicos  docuit  facunda  Britannos, 
De  conducendo  loquitur  jam  Rhetore  Thule. 


Tac.  ibid.  n.  s9.       '  Agricolc  siguala  sa  huitième  campagne  par  la  défaite 

'■'■  des  Calédoniens  au   mont   Grampius   ou    Grantzbain  :   ce 

qui   acheva  de  domter   et    de  soumettre  toute  la  grande 

1-23.  Bretagne.  '   Ensuite  il   fit  faire  le  tour  de  cette  Province 

par  sa  flotte,  et  s'assura  par  lui-môme  que  la  grande  Bre- 

n-  39.  tagne  est  une  Isle.  '  Il  dressa  une  relation  de  tous  ces  ex- 

ploits :    ce    qui   pouvoit   comprendre  un  détail  des  divers 

•    "  évenemens  de    son  Gouvernement  ,   et   former  ainsi    une 

histoire  des  guerres  de  la  grande  Bretagne  pendant  les 
huit  ans  qu'il  la  gouverna. 

Il  39.  «.  '  Domitien,  à  qui  il  l'envoïa,  la  reçut  avec  une  joïe  apa- 

rente ,  mais  avec  une  inquiétude  réelle.  Cet  Empereur 
jaloux  et  envieux  de  tant  de  victoires  qu'Agricole  avoit 
remportées ,  et  de  la  haute  réputation  qu'il  s'étoil  acqui- 
se ,  le  rapella  à  Rome  l'an  85 ,  et  l'y  reçut  fort  froide- 
ment. Belle  recompense  pour  tant  de  signalés  services 
qu'il  avoit  rendus  à  l'Empire  !  Agricole  se  voïant  ainsi  re- 
çu, eut  besoin  et  de  toute  sa  prudence  et  de  toute  sa  nao- 
dération  ,  pour  n'irriter  pas  la  mauvaise  humeur  du  Prin- 
ce ,  qui  le  craignoit  pour  ses  bonnes  qualités  ,  et  qui  se 
seroit  inhumainement  défait  de  lui  ,  comme  de  tant  d'au- 
tres. C'est  ce  qui  le  porta  à  refuser  le  Proconsulat  d'Asie 
et  d'Afrique  qu  on  lui  offrit ,    et  lui  fît  prendre  le  parti 

Crin. poj-u».  1.4.  dépasser  le  reste  de  ses  jours  en  simple  particulier.  '  il  se 

'■  '^"  lia  alors  avec  divers  Savans  de  Rome ,  et  fit  sans  doute 

comme  eux  sa  principale  ocupation  de  la  belle  Literature. 

Tac  ibid.  n.  44.     '  Cc  grand  homme  mourut  le  vingt -troisième  jour  d'Août 
de  l'an  93,  dans  la  cinquante-sixième  année  de  son  âge. 

Nous  avons  sa  vie  écrite  par  Tacite  son  gendre  ;  et  ce  que 
•  ''  nous  en  venons  de  raporter  n'est  qu'un  abrégé  de  ce  pré- 
cieux monument.  On  y  a  pu  remarquer  combien  Agricole 
dès  sa  jeunesse  aima  les  belles  Lettres ,  et  cultiva  les  plus 
hautes  sciences.  Ce  qu'il  fit  dans  la  grande  Bretagne  en  y 
établissant  les  études ,  est  encore  une  preuve  éclatante  de 
son  amour  pour  la  Literature.  Du  reste  nous  n'avons  aucun 

n.  03. 31.  monument  subsistant  de  son  savoir,  '  sinon  une  de  ses  ha- 

rangues que  Tacite  nous  a  conservée  dans  sa  vie. 


HISTOIRE 


LITERAIRE 


DE  LA  FRANCE 


SECOND    SIECLE  DE   L'EGLISE 

ETAT  DES  LETRES  DANS  LES  GAULES 

en  ce  Siècle. 


JosQu'ici  nous  n'avons  encore  vu  dans  nos  Gaules,  qu'une 
Philosophie  purement  humaine  et  des  sciences  toutes  pro- 
fanes. Mais  le  siècle  où  nous  entrons,  nous  y  va  découvrir 
l'établissement  de  la  véritable  sagesse,  et  de  la  science 
qui  fait  les  Saints.  Nos  Gaules  n'a  voient  pas  mérité  d'être  pré- 


16«.  159. 


224  ETAT  DES  LETRES 

férées  à  tant  d'autres jpaïs  qui  avoient  déjà  élé  instruits  de  la 
connoissance  du  vrai  Dieu,  et  du  mystère  de  la  redemtion  des 
hommes.  C'est  une  grâce  qui  ne  dépent  que  de  la  pure  miséri- 
corde de  Dieu,  qui  la  fait  à  qui  il  veut,  et  lorsqu'il  lui  plaît, 
sans  que  personne  ait  lieu  de  s'en  plaindre,  et  de  lui  dire  :  pour- 
quoi en  usez-vous  de  la  sorte?  Mais  au  moins  en  ce  siècle  il 
voulut  bien  regarder  d'un  œil  favorable  nos  vastes  Pro- 
vinces, et  faire  à  quelques-unes  une  grâce  qu'il  n'a  pas 
encore   accordée   à  tant  d'autres   pais   éloignes   de    nous. 

Act.  Mar.  p.  110.  '  Après  douc  quc  la  foi  eut  été  annoncée  peu  à  peu  et 

"■'■  comme  par  degrés  dans  l'Occident ,   elle  se  répandit ,   à 

mesure  du  progrès  qu'elle  faisoit,  jusques  dans  les  Gaules. 
On  y  vit  alors  des  ouvriers  Evangeliques,  qui  y  répan- 
dant la  lumière  de  l'Evangile  ,  en  chassèrent  avec  le  tems 

Sui.  hiit.  I.  ï.  n.  les  ténèbres  du  Paganisme.  '  De  sorte,  dit  le  célèbre  S. 

46.  p.  366.  Sulpice,  que  ce  ne  fut  qu'un  peu  tard  que  le  Christianis- 

me s'établit  en  deçà  des  Alpes,  et  l'on  ne  commença  à  y 
voir  des  Martyrs  que  sous  Marc  Aurele  (XXII). 

En».r^5.  e.  1.  p.  IL  '  Mais,  quoique  dès  ce  siécle-ci  l'on  vît  des  Evo- 
ques et  des  Eglises  formées  dans  les  Gaules,  on  ne  vit 
encore  que  très-peu  de  monumens  de  la  science  que  les 
Chrétiens  y  professoient.  Ce  n'est  pas  qu'ils  eussent,  com- 
me les  Druides  du  Paganisme,  la  bizarn;  fantaisie  ou  de 
ne  rien  écrire,  ou  de  se  cacher  dans  les  bois  pour  donner 
leurs  leçons;  mais  c'est  qu'ils  s'apliquoient  beaucoup  plus 
à  bien  vivre,  qu'à  laisser  après  eux  des  marques  de  leur 
savoir.  Us  ne  manquoient  ni  de  matière  ni  de  capacité 
pour  faire  usage  de  leur  plume  ;  mais  ils  avoient  plus  à 
cœur  de  pratiquer  les  vertus  Chrétiennes  pour  former  par 
leur  exemple  ceux  qui  vivoient  de  leur  tems,  que  d'en 
écrire  pour  instruire  une  postérité  éloignée.  Ils  ne  lais- 
soient  pas  néanmoins  de  le  faire  quelquefois,  lorsqu'il  y 
avoit  nécessité  ;  et  il  est  aisé  de  juger  ae  ce  qu'ils  auroient 
été  capables  de  mettre  au  jour,  par  le  peu  de  leurs  écrits 
qui  nous  a  été  conservé.  Quoi  de  plus  admirable,  par 
exemple,  que  ce  qui  nous  reste  de  la  letre  des  Eglises  de 
Lyon  et  de  Vienne  aux  fidèles  d'Asie  et  de  Phrygie  sur  la 
mort  de  leurs  premiers  Martyrs?  Le  Paganisme  a-t-il  ja- 
mais produit  un  monument  ae  literature,  qui  puisse  entrer 
en  parallèle  avec  celui-là,  soit  pour  le  sens,  soit  pour  le 
style  d'une  noble  simplicité? 

III 


DANS  LES  GAULES.  II  SIECLE.        225 

III.  Dieu  se  servit  du  ministère  des  Grecs  pour  com- 
muniquer à  nôtre  pais  les  premières  lueurs  de  l'Evangile, 
comme  il  s'en  étoit  autrefois  servi  pour  y  introduire  les 
maximes  et  les  coutumes  de  la  Grèce  Païenne.    Quelque 

chose  que  l'on  puisse  dire,  '  S.   Pothin  sorti  d'Asie,  où  il  Gr.  t.  h.F.  1. 1. 
avoit  pu   être  instruit  par  les  Apôtres  mêmes,    et  depuis  sip'io^'m^'' 
premier   Evêque    de   Lyon,  S.   Irenée   son  Prêtre,    et  en- 
suite son  successeur,  avec  quelques  autres  disciples  de  S. 
Polycarpe,  sont  les   premiers  que  nous  sachions  certaine- 
ment être  venus  prêcher  la  foi  dans  les  Gaules.  '  S.  Ire-  cr.  t.  iwd. 
née  en  particulier  travailla  avec  tant  de  zélé  et  tant  de 
soin  à  l'étendre    dans  Lyon,  qu'en  peu  de  tems  il  rendit 
Chrétienne   presque  toute  la  ville   entière.  'Dès   le   tems  Eus.  i.  s.  ci.  p. 
de    S.    Pothin,  sous  l'Episcopat  duquel    parurent  les  pre-  *«>3 1  Sui.  jbiu. 
miers  Martyrs  que  l'Eglise    Gallicane  ait   enfantés ,    il   y 
avoit  aussi  à  Lyon  un  Chrétien  nommé  Alexandre ,  né  en 
Phrygie  et  Médecin  de  profession,  qui  aïant  reçu  de  Dieu 
quelque  part   à  la  grâce  Apostolique,  contribua  beaucoup 
à  l'œuvre  du  Seigneur.    Imitant  1  exemple   d'Aquila  autre 
laïque  comme  lui,   si  célèbre  dans  les  Actes  des  Apôtres 
et  les  Epîtres  de  S.  Paul,  Alexandre  se  distingua  par  son 
grand  zèle  envers  Dieu,  et  sa  généreuse  liberté  à  annon- 
cer la  parole  de  vie. 

IV.  De  Lyon  la  prédication  de  l'Evangile  se  répandit 
bientôt  en  divers  autres  endroits  des  Gaules.  Avant  l'Epis- 
copat de  S.  Irenée  il  y  avoit  à  Vienne  une  Eglise  tou- 
te formée,  et  intimement  unie  à  celle  de  Lyon,  comme  en 

aïant  tiré  son  origine.    '  D'un  autre  côté,  S.  Marcel,  apa-  rm.  iwa.  p.  35. 
remment  disciple  de  S.  Pothin,  remontant  la  Saône  à  main  ^• 
droite  du  côté  de  la  Sequanoise,  alla  porter  la  foi  aux  en- 
virons de   Châlons,  où  il  souffrit  le  martyre.  S.   Valerien 
son  compagnon  en  fit  de  même  du  côté  du'  château  de  Tre- 
norque,    au  pied  duquel  est  aujourd'hui  la  ville  de  Tour- 
nus.  S'il  faut  s'en  raporter  aux  actes  de  S.  Bénigne  et  de 
ses  compagnons ,  ce  Saint  accompagné  de  S  .  Andoche  et 
de  S.    Thyrse  disciple  de  S.  Polycarpe,  auxquels  on  joint 
S.  Félix  marchand  de  Saulieu  au  diocèse  d'Autun,  allèrent 
aussi  prêcher  l'Evangile  dans  ce  dernier  diocèse.  S.  Béni- 
gne et  S.  Andoche  étoient  Prêtres,  et   S.   Thyrse    Diacre. 
'  D'Autun  S.  Bénigne  passa  à  Langres,  et  de-là  à  Dijon,  où   p.  39.  *i.  48. 
il  scella  de  son  sang  la  foi  qu'il  annonçoit. 

Tome  I.  Prem.  Part.  G  g 


226  ETAT  DES  LETRES 

V.  Ce  que  les  disciples  de  S.  Polycarpe  et  de  S.  Pothin  firent 
en  faveur  de  la  propagation  de  l'Evangile  à  Lyon,  à  Autun, 
et  dans  les  autres  lieux  des  Gaules  que  nous  venons  de  nom- 
mer, ceux  de  S.  Irenée  le  firent  dans  nos  Gaules  mêmes  et  en 
d'autres  païs  éloignés.  S.  Ferreol  Prêtre,  et  S.  Ferrulien 
Diacre,  S.  Félix  Prêtre,  S.  Fortunat  et  S.  Achillée  tous 
deux  Diacres,  que  le  saint  Evêque  avoit  formés  pour  les 
Gaules,  allèrent  établir  le  Christianisme,  les  deux  pre- 
miers à  Besançon,  et  les  trois  autres  à  Valence  en  Dauphi- 
né.  De  même  Caïus  Evêque  des  Nations  et  Docteur  de 
l'Eglise,  et  S.  Hippolyte  Evêque  et  Martyr,  l'un  des  plus 
illustres  Pères  de  l'Eglise  au  III  siècle,  tous  deux  disci- 
ples de  S.  Irenée,  allèrent  porler  la  foi  en  divers  endroits 

Tui.  ibid.  p.  17*.  parmi  les  Nations  étrangères,  '  sans  avoir  ni  aucun  peu- 
ple ni  aucun  diocèse  limité.  Evénement  tout-à-fait  digne 
de  remarque  pour  l'histoire  de  l'Eglise  Gallicane  !  En  effet 
on  y  peut  observer  qu'à  peine  nos  Gaules  eurent  reçu  les 
lumières  de  la  foi,  qu'elles  devinrent  une  pépinière  d'illus- 
tres ouvriers  Evangeliques,  qui  allèrent  dans  les  lieux 
éloignés  comme  dans  les  circonvoisins  convertir  les  peu- 
ples idolâtres  et  les  gagner  à  J.  C. 

Eus.  1.3. c. 37. p.  VI.  '«Ces  hommes  divins,  pour  parler  d'après  Eusebe, 
»  imitant  le  zélé  de  leurs  maîtres,  élevoient  l'édifice  des 
»  Eglises,  dont  les  Apôtres  avoient  jette  les  fondemens.  Ils 
»  travailloient  avec  une  application  infatigable  à  la  prédi- 
»  cation  de  l'Evangile  ,  et  répandoient  par  toute  la  terre 
»  la  semence  divine  de  la  parole.  Car  la  plupart  de  ceux  qui 
»  embrassoient  alors  la  foi,  étant  remplis  de  l'amour  d'une 
»  sainte  philosophie ,  commençoient  par  distribuer  leurs 
»  biens  aux  pauvres ,  et  alloient  ensuite  en  divers  pais  faire 
»  les  fonctions  d'Evangelistes,  annoncer  J.  C.  à  ceux  qui 
»  n'en  avoient  point  encore  oui  parler  ,  et  leur  donner  les 
»  Livres  sacrés  de  l'Evangile.  Lorsqu'ils  avoient  ainsi  posé 
»  les  fondemens  de  la  Religion  dans  un  pais  d'infidèles,  ils- 
»  y  établissoient  des  Pasteurs  à  qui  ils  confioient  le  soin  des 
»ames  qu'ils  avoient  acquises  à  J.  C.  et  puis  ils  passoient 
»  en  d'autres  païs .  Dieu  travailloit  par-tout  avec  eux  par 
»  la  force  de  la  grâce.  Car  le  S.  Esprit  operoit  encore  alors 
»par  ses  serviteurs  un  grand  nomore  de  Prodiges  extra- 
'.*  »  ordinaires.  De  sorte  que  dès  qu'ils  commençoient  à  prê- 

»  cher  dans  un  païs,  on  voïoit  quelquefois  des  peuples  en- 


DANS  LES  GAULES.   Il  SIECLE.        227 

»  tiers  embrasser  tout  d'ua  coup  la  croïance  du  vrai  Dieu, 
»  et  recevoir  dans  leur  cœur  les  règles  de  la  piété.  » 

VII.  En  voilà  assez  pour  vous  donner  une  juste  idée  de 
la  manière  que  la  foi  Chrétienne  s'établit  dans  les  Gaules, 
et  du  progrès  qu'elle  y  fit  dès  ce  second  siècle.  Ce  pro- 
grès doit  d'autant  moins  nous  surprendre,  que  les  Gaulois 
dévoient  avoir  moins  d'éloignement  que  les  autres  nations 
idolâtres  pour  embrasser  le  Christianisme.  Ils  étoient  dé- 
jà, comme  nous  l'avons  observé  ailleurs,  dans  l'opinion 
de  l'immortalité  de  l'ame,  et  d'une  vie  élernelle  dont  cel- 
le-ci devoit  être  suivie.  Et  c'est  ce  que  la  doctrine  de  l'E- 
vangile leur  annonçoit,  en  leur  on  donnant  des  preuves 
incontestables,  et  leur  en  découvrant  les  suites  avanta- 
geuses qui  leur  étoient  inconnues.  De  sorte  que  les  scien- 
ces que  les  Gaules  cultivoient  avec  tant  de  soin  depuis 
long-tems,  '  entrèrent  dans  le  dessein  que  Dieu  avoit  de  ciom.  aux.  tu. 
les  apeller  un  jour  à  la  vraie  Religion.  C'est  la  pensée  de  "  ''' 
S.  Clément  Alexandrin,  qui  soutient  que  ce  ne  fut  que  par 
une  providence  particulière  de  Dieu,  que  les  Gentils  s'a- 
donnerent  aux  sciences,  qu'il  comprend  sous  le  nom  de 
philosophie,  avant  qu'on  leur  prêchât  l'Evangile.  En  ef- 
fet, dit  ce  Père,  les  sciences  furent  pour  les  Gentils  ce  que 
la  loi  fut  pour  les  Hébreux.  Comme  la  loi  a  servi  de  con- 
ducteur à  ceux-ci  pour  les  conduire  comme  des  enfans  à 
J.  C.  il  en  a  été  de  même  de  la  philosophie  et  des  autres 
sciences  par  rapport  aux  Gentils. 

YIII.  Si  les  sciences  profanes  furent  de  quelque  secours 
pour  le  progrès  de  l'Evangile,  l'Evangile  à  son  tour  favorisa 
encore  davantage  le  progrès  des  sciences.  On  se  trompe- 
roit  beaucoup  si  l'on  croïoit  que  l'établissement  du  Christia- 
nisme dans  nos  Gaules  en  eût  chassé  la  politesse  et  les  scien- 
ces que  les  étrangers  y  admiroient  auparavant,  et  y  ve- 
noient  puiser  des  divers  endroits  fort  éloignés.  Non  ;  la 
véritable  Religion  ne  préjudicie  en  rien  à  la  politesse.  "Tant 
s'en  faut.  Comme  elle  enseigne  les  bonnes  mœurs,  elle  en- 
seigne par  conséquent  la  seule  politesse  qui  mérite  de  justes 
louanges.  De  même,  bien  loin  qu'elle  soit  contraire  aux 
letres,  elle  ne  fait  que  les  perfectionner  où  elle  les  trouve 
déjà  étabhes,  et  sert  à  les  établir  et  les  répandre  où  elles 
ne  sont  pas  encore  connues.  Combien  pourrions-nous 
compter  de  nations,  qui  n'ont  eu  connoissance  des  letres 

G  g  ij 


228  ETAT  DES  LETRES 

Ram.  mor.  Gai.  p.  quc   par  la   prédication    de    l'Evangile  ?    '  Les   Alemands 
'^'■''  nos  voisins  avouent  eux-mêmes  qu'ils  sont  de  ce  nombre. 

Disons  plus,  jamais  nos  Gaules  ne  produisirent  ni  de  plus 
grands  hommes,  ni  en  plus  grand  nombre,  que  depuis 
qu'elles  furent  éclairées  des  lumières  de  la  foi.  C'est  de- 
quoi  la  suite  de  celte  histoire  fournira  toutes  les  preuves 
nécessaires. 

IX.  Il  est  vrai  qu'il  ne  nous  reste  que  très-peu  de  mo- 
numens  de  ce  second  siècle  de  l'Eglise.  Nous  n'enten- 
dons parler  que  de  ceux  qui  ont  vu  le  jour  dans  nos 
Gaules.  Mais  combien  en  est-il  péri  ?  Combien  avons- 
nous  perdu  d'actes  de  Martyrs  et  de  Conciles,  et  d'autres 
ouvrages  aussi  précieux?  Nous  n'avons  que  la  moindre 
partie  de  ceux  qui  sont  sortis  de  la  plume  de  S.  Irenée, 
et  de  celle    des    Eglises  qu'il    gouvernoit.    Néanmoins    le 

Ficii.  di   a.n.  17.  peu  qui  nous  reste  est  un  thrésor  inestimable.  Encore'  est- 
!'•  ■'S-  ce  un  miracle   que   ce  peu   d'écrits  nous  ait  été  conservé 

au  travers  de  quinze  siècles,  après  tant  d'inondations  de 
peuples  barbares,  tant  de  pillages  et  d'incendies.  Ajou- 
tés encore  la  fureur  des  infidèles,  la  malice  des  héréti- 
ques, l'ignorance  de  cinq  à  six  des  derniers  siècles.  N'impoi^ 
te,  ce  peu  d'écrits  avec  la  notion  que  nous  avons  des  au- 
tres dont  nous  sommes  privés,  et  de  ceux  qui  ont  paru 
dans  la  suite  des  sircles  de  l'Iîglise,  nous  prouve  de  reste 
que  le  Christianisme  n'a  fait  que  favoriser  les  letres.  Nous 
verrons  même  dans  le  cours  de  cette  histoire,  que  sans 
lui  elles  seroient  entièrement  tombées,  sans  espérance  de 
se  relever  jamais. 

X.  Les  premiers  ouvriers  de  l'Evangile  qui  parurent 
dans  les  Gaules,  particulièrement  ceux  qui  s'arrêtèrent  à 
Lyon,  ne  s'y  trouvèrent  pas  tout-à-fait  étrangers.  On  y 
parloit  assez  communément  leur  langue  qui  étoit  la  gré- 
que.  C'est  dequoi  il  ne  paroît  pas  que  l'on  puisse  douter 
pour  ce  qui  legarde  Lyon  et  les  lieux  circonvoisins.  Leur 
proximité  du  pais  qu'on  a  depuis  nommé  Provence,  et  où 
l'usage  de  cette  langue  étoit  établi  depuis  long-tems;  le 
commerce  continuel  de  Lyon  avec  Marseille,  où  le  grec 
étoit  la  langue  naturelle  du  pais,  les  jeux  publics  et  les 
combats  literaires  qui  se  donnoient  à  Lyon  en  grec  et  en 
latin  depuis  l'Empereur  Caligula ,  et  dont  nous  avons 
déjà  fait  la  description  ;  l'abord  du  grand  monde  de   l'Em- 


3 


DANS  LES  GAULES.   II  SIECLE.        229 

pire  ,  que  ces  spectacles  et  la  résidence  des  Gouverneurs 
atiroient  dans  cette  ville  :  tout  cela  joint  à  ce  que  l'on  sait 
que  la  langue  gréque  étoit  alors  fort  connue  dans  tout 
1  Empire  Romain  ,  ne  permet  pas  que  l'on  révoque  en 
doute  qu'elle  ne  fût  très-commune  dans  cette  partie  de 
nos  Gaules  en  particulier.  Ce  n'est  pas  encore  tout  ;  en 
voici  d'autres  preuves. 

XI.  La    conduite    qu'y    tinrent    ces   hommes   Evangeli- 

aues  ,  ajoute  à  tout  ce  gue  nous  venons  de  dire  un  degré 
e  force,  auquel  il  est  difficile  de  se  refuser.  En  effet  c'est 
une  maxime  ordinaire  aux  ouvriers  de  l'Evangile,  lors- 
u'ils  vont  annoncer  la  foi  en  quelque  endroit ,  d'apren- 
re  la  langue  qu'on  y  parle ,  s'ils  ne  la  savent  déjà,  et  de 
faire  leurs  instructions  en  celte  même  langue.  Or  bien 
loin  que  non  seulement  S.  Pothin ,  S.  Irenée,  et  les  autres 
Grecs  qui  vinrent  à  Lyon  prêcher  l'Evangile  ,  mais  enco- 
re leurs  disciples  qui  étoient  pour  la.  plupart  du  pais,  s'y 
servissent  ou  de  la  langue  gauloise  ou  de  la  latine ,  nous 
voïons  au  contraire  que  dans  tout  ce  qu'ils  font,  et  dont  il 
nous  reste  ou  quelque  monument  ou  quelque  autre  con- 
noissance ,  ils  n'emploient  par-tout  que  la  langue  gréque. 
S'agit-il  d'écrire  l'histoire  de  ceux  d'entre  les  fidèles  que 
Dieu  apelloit  à  lui  par  le  martyre  ?  C'est  en  grec  qu  on 
l'écrit;  et  cette  histoire  est  autant  pour  l'instruction  des 
Eglises  de  Lyon  et  de  Vienne,  que  pour  celles  des  autres  Egli- 
ses qui  parloient  cette  langue,  et  auxquelles  elle  est  envolée. 
Faut-il  écrire  ou  au  Pape  ou  à  d'autres  sur  les  affaires  de 
l'Eglise?  C'est  encore  la  langue  gréque  qu'on  emploie;  et 
ceux  qui  écrivent  sont  des  fidèles  du  lieu  qui  le  font  au 
milieu  des  fers.  S.  Irenée  se  trouve-t-il  obligé  d'écrire 
contre  les  hérésies  ?  Il  le  fait  aussi  en  grec  ;  'et  son  ouvra-  iren.  j.  i.  c.  is 
ge  n'est  pas  seulement  pour  réfuter  les  hérétiques,  il  est 
encore  pour  faire  revenir  de  l'erreur  jusqu'aux  femmes 
qu'ils  avoient  séduites  le  long  du  Rhône. 

XII.  Si  à  ces  faits  incontestables  vous  voulez  joindre 
le  raisonnement ,  vous  aurez  une  nouvelle  preuve  du  sen- 
timent que  nous  établissons  ici.  Il  est  hors  de  doute  que 
le  premier  but  que  se  proposa  S.  Irenée  en  écrivant  son 
ouvrage ,  fut  d'instruire  le  peuple  que  Dieu  avoit  confié  à 
ses  soins.  C'est  à  quoi  l'obligeoit  essentiellement  sa  char- 
ge Pastorale.    Et  cette  raison   a  paru  si  puissante  à  quel- 

2  0 


n.7. 


230  ETAT  DES  LETRES 

que»  écrivains  ,  qui  ne  pensent  pas  comme  nous  sur  la 
Tiii. ibid.p. 9i.  connoissancc  de  la  langue  gréque  à  Lyon,  'qu'ils  ont  su- 
posé  que  le  saint  Evêque  fit  traduire  son  ouvrage  en  la- 
tin ,  si  ses  autres  ocupations  ne  lui  purent  pas  permettre 
de  le  traduire  lui-même.  Mais  cette  prétendue  traduction 
latine,  que  l'on  se  plaît  à  faire  remonter  si  haut,  est  une 
pure  fiction,  comme  nous  nous  flatons  de  le  faire  voir  en 
son  lieu.  Si  donc  la  langue  gréque  n'eût  pas  été  commu- 
ne à  Lyon  et  dans  le  voisinage,  lorsque  S.  Irénée  y  écrivit 
sur  la  fin  de  ce  siècle,  les  fidèles  de  cette  Eglise,  pour  les- 
quels il  composoit  particulièrement  son  ouvrage  ,  au- 
roient  été  frustrés  du  fruit  de  son  travail.  Eh  !  quelle  dif- 
ficulté après  tout  à  croire  que  le  grec  étoit  alors  tout 
commun  à  Lyon ,  sachant  qu'au  IV  et  même  au  VI 
siècle  il  l'étoit  encore  à  Arles  ?  Car  il  faut  bien  que  le 
peuple  de  cette  ville  l'entendit  communément ,  puisqu'on 
lui  fit  en  cette  langue  l'oraison  funèbre  de  Constantin  le 
Cjcs.  vit.  noi.  p.  jeune  mort  en  340,  '  et  que  sous  S.  Césaire  on  emploioit 
^*^*'  la  même  langue   dans  les   offices   de   l'Eglise.  Ignore-t-on 

qu'en  ces  premiers  siècles  on  se  servoit  dans  les  offices  de 
l'Eglise  de  la  langue  la  plus  connue  en  chaque  pais? 

XIIL  De  ce  que  nous  venons  de  dire  il  scroit  aisé  de 
conclure  que  le  grec  étant  la  langue  naturelle  des  pre- 
miers ouvriers  de  l'Evangile  à  Lyon,  et  cette  même  lan- 
gue y  étant  entendue  communément  ,  on  l'auroit  em- 
Êloïée  dans  les  offices  divins ,  comme  dans  les  affaires 
ecclésiastiques.  Mais  nous  ne  prétendons  pas,  il  est  vrai, 
qu'on  l'y  parlât  dans  toute  sa  pureté.  Au  contraire  il  y  a 
beaucoup  d'aparence  qu'elle  y  étoit  fort  corrompue  par- 
mi le  peuple,  qui  parlant  aussi  le  gaulois  et  le  latin,  pou- 
iron.i.i.pr.n.  3.  voit  faire  un  mauvais  mélange  de  ces  trois  langues.  '  C'est 
pourquoi  S.  ïrenée  s'excusant  sur  son  style,  dit  que  s'il 
n'écrivoit  pas  assez  purement,  il  faut  s'en  prendre  à  la 
résidence  qu'il  faisoit  au  milieu  des  Gaulois  ,  avec  les- 
quels il  étoit  obligé  de  parler  un  langage  barbare.  Paro- 
les remarquables,  qui  fortifient  ce  que  nous  venons  d'é- 
tablir ;  puisqu'elles  suposent  une  corruption  dans  la  lan- 
gue dont  le  saint  Evêque  se  servoit,  sans  quoi  son  excuse 
n'auroit  pas  été  valable.  Jugeoiis-en  par  ces  exemples.  Une 
personne  qui  sait  bien  le  latin  ,  ne  perd  point  la  pureté 
de  cette  langue,  non  plus  qu'un  François  qui  possède  bien 


DANS  LES  GAULES.   II  SIECLE.        231 

celle  de  sa  nation ,  quoique  l'un  et  l'autre  se  trouve  obli- 
gé d'user  d'une  langue  étrangère  ,  quelque  barbare  qu'el- 
le soit.  Mais  si  ces  deux  personnes  que  nous  su  posons  sa- 
voir bien,  l'une  le  latin,  et  l'autre  le  françois,  se  trouvent 
en  un  pais,  où  l'on  parle  un  latin  ou  un  françois  corrom- 
pu, il  est  aisé  que  l'une  et  l'autre  ne  conserve  pas  sa  lan- 
gue dans  sa  pureté.  Il  est  encore  à  observer  aue  S.  Irenée 
ne  dit  pas  que  le  langage  barbare  ,  auquel  il  étoit  ac- 
coutumé dans  les  Gaules,  lui  a  fait  oublier  sa  langue  ma- 
ternelle ;  mais  il  dit  seulement  qu'il  peut  y  avoir  fait  quel- 
que altération.  Il  s'agissoit  donc  d'un  grec  corrompu. 

XIV.  Pour  ce  qui  est  de  la  langue  latine  ,  elle  étoit 
aussi  commune  dans  nos  Gaules  en  ce  siècle,  que  le  gau- 
lois même.  Ce  que  nous  avons  déjà  dit  ailleurs  sur  ce 
sujet,  est  plus  que  suffisant  pour  n'y  laisser  aucun  doute. 
Si  néanmoins  vous  en  souhaitez  de  nouvelles  preuves  pour 

ce  siècle  en  particulier,  '  vous  les  trouverez  dans  les  actes  Eas.  i.  5  c.  1.  p. 
des  premiers  Martyrs  de  Lyon.  Il  y  est  expressément  *®'"'^^- 
marqué  que  le  Diacre  Sanctus  étant  interrogé  au  milieu 
des  tourmens  ,  répondit  toujours  en  latin  :  Je  suis  Chrétien. 
De  même  le  Martyr  Attale  obligé  de  parler  au  peuple  au 
milieu  des  suplices  de  son  martyre  ,  lui  parla  aussi  en  la 
même  langue.  C'étoit  encore  en  latin  qu'on  avoit  mis 
les  paroles  de  l'écriteau  qui  prècedoit  le  saint  Martyr , 
lorsqu'on  lui  fit  faire  le  tour  de  l'amphiteatre  pour  le  faire 
corinoîtî  e  au  peuple ,  qui  étoit  extrêmement  animé  con- 
tre lui,  parce  que  ce  Saint  s'étoit  rendu  très-cèlebre  par 
son  attachement  et  son  zèle  pour  la  Religion  Chrétienne. 
On  lisoit  donc  en  latin  sur  cet  écriteau  les  paroles  sui- 
vantes :  Cest  le  Chrétien  Attale.  Tout  cela  prouve  de  reste 
<pie  les  Gaulois  entendoient  communément  alors  la  langue 
latine. 

XV.  Ajoutez  encore  que  le  raisonnement  que  nous 
avons  fait  ailleurs  à  ce  sujet  par  raport  aux  poésies  de 
Martial  ,  qui  se  Irouvoient  à  Vienne  entre  les  mains  de 
tout  le  monde  ,  nous  le  pouvons  faire  ici  à  l'égard  des 
écrits  de  Pline  le  jeune  et  de  divers   autres  Auteurs.  Dès 

le  commencement  de  ce  siècle  au  moins  '  il  y  avoit  à  Lyon  pun.  1.  9.  ep.  n 
des    Libraires   qui   y    débitoient    les    livres   des    étrangers  p-  '^■ 
comme   ceux   des  écrivains  du  ^aïs.  Pline   en   écrivant  à 
Geminius  son  ami,  qui  y  faisoit  alors  sa  demeure,  et  qui 


232  ETAT  DES  LETRES 

y  composoit  lui-même,  se  réjouit  beaucoup  de  ce  que  ses 
ouvrages  étoient  passés  de  Rome  dans  cette  ville  des  Gau- 
les, et  qu'ils  y  avoient  acquis  la  même  estime  qu'ils  avoient 
déjà  en  Italie.  A  cette  occasion  Pline  témoigne  beaucoup 
de  sensibilité  de  savoir  que  les  Gaulois  faisoient  autant 
d'honneur  à  ses  écrits,  que  ses  propres  concitoïens.  Il  ajoute 
qu'il  ne  pouvoit  s'empêcher  de  regarder  comme  parfait 
en  quelque  sorte,  ce  que  tant  de  gens  s'acordoient  à  esti- 
mer. Voilà  donc  en  ce  siècle  les  ouvrages  de  Pline  entre 
les  mains  des  Gaulois,  comme  y  étoient  au  siècle  précè- 
dent ceux  du  Poëte  Martial.  Par  conséquent  les  Gaulois 
de  ce  siècle,  comme  les  Gaulois  du  siècle  précèdent  en- 
tendoient  également  le  latin ,  qui  est  la  langue  en  laquel- 
le ces  écrits  sont  composés.  Mais  pourquoi  tant  s'arrêter 
à  prouver  un  fait  qui  n'est  déjà  que  trop  constaté  ?  Re- 
venons à  l'utilité  dont  fut  la  Religion  Chrétienne  pour  les 
letres  dans  les  Gaules. 

XVI.   Autant  qu'il   s'y   formoit    d'Eglises  particulières , 
c'étoit  autant    d'écoles    Chrétiennes    qui    s'y   ètablissoienL 
Eni.  1.  5  c.  10.  '  L'histoire  nous  représente  à  Alexandrie  une  école  de  cette 
■  **■     ■  nature ,  établie  au  moins  dès  ce  second  siècle ,  et  nous  en 

aprend  des  choses  merveilleuses.  Elle  étoit  gouvernée  par 
de  très-habiles  maîtres  ;  et  l'on  y  enseignoit  l'Ecriture  sain- 
te ,  k  quoi  l'on  joignoit  une  explication  des  dogmes  de  la 
Religion.  Ces  instructions  se  faisoient,  selon  Euscbe  ,  tant 
par  écrit  que  de  vive  voix.  C'est  de  cette  école  qu'il  sor- 
tit en  ce  siècle  et  le  suivant  tant  de  saints  et  savans  hom- 
mes, dont  quelques-uns  furent  la  lumière  de  l'EgUse.  A 
la  vérité  nous  ne  trouvons  pas  de  vestiges  d'écoles  si  cé- 
lèbres dans  nos  Gaules  en  ces  premiers  siècles.  Mais  il  est 
hors  de  doute  que  les  villes,  où  le  Christianisme  étoit 
établi,  n'étoient  pas  sans  instruction.  Il  y  avoit  des  Caté- 
cumenes  à  instruire,  et  des  Clers  à  former.  On  y  faisoit 
donc  en  quelque  manière  ce  qui  se  pratiquoit  à  Alexan- 
dï'ie.  Oui ,  l'on  a  des  preuves  que  nos  saints  Evêques  dès 
ces  tems  heureux  ne  se  bornoient  pas  à  faire  avancer 
leurs  disciples  dans  la  vertu ,  mais  qu'ils  les  portoient 
Act.  Mart.  p.  63.  cucorc  à  S  avauccr  dans  les  letres.  '  C'est  ce  qui  paroît  par 
n.3 1  Tiii.  ibid.  p.  l'exemple  de  S.  Epipode  et  S.  Alexandre  discioles  de  S. 
Pothin  ,  lesquels  firent  de  grands  progrès  dans  les  letres  , 
quoiqu'en  un  âge  peu  avancé.  C'est  ce  qui  parut  avec  en- 
core 


DANS  LES  GAULES.   II  SIECLE.       233 

core  plus  d'éclat  dans  la  suite  en  la  personne  de  Caïus 
et  celle  de  S.  Hippolyte  ,  l'un  et  l'autre  disciples  de  S. 
Irenée. 

XVII.  Les  Eglises  où  les  Fidèles  s'assembloient  étoient, 
à  proprement  parler  ,  des  écoles  pour  eux.  Là  les  Evo- 
ques ,  et  quelquefois  les  simples  Prêtres  ,  leur  cxpli- 
quoient  les  saintes  Ecritures  ,  après,  que  les  Lecteurs  en 
avoient  lu  ce  qui  convenoit ,  et  leur  donnoient  des  in- 
structions proportionnées  et  à  leurs  besoins,  et  '  à  leurpor-  fuu.  dis.»,  d.  14. 
tée.  Ils  avoient  une  atention  toute  particulière  à  les  en-  ^'^^' 
tretenir  dans  la  doctrine  de  l'Eglise,  à  les  précautionner  et 
à  les  fortifier  contre  les  hérésies,  et  à  leur  donner  des  ré- 
gies pour  la  conduite  et  la  correction  des  mœurs.  De 
sorte  que  la  morale  et  les  hérésies  du  tems  sont  la  matiè- 
re de  tous  les  Sermons  des  Pères.  Sans  cette  clef  souvent 
on  ne  les  entend  pas,  ou  du  moins  on  ne  les  peut  goûter. 
'  Ils  savoient  raporter  à  leurs  lectures,  et  faire  entrer  dans  p-  10. 
leurs  discours  tout  ce  qu'ils  jugeoient  le  plus  utile  pour 
l'instruction  de  leur  troupeau.  C'est  ce  qui  Ls  obligeoit 
souvent  à  quitter  le  sens  litéral  de  l'Ecriture,  pour  suivre 
le  sens  moral  et  allégorique,  el  revenir  toujours  à  certain 
point  de  doctrine.  Comme  ces  instructions  étoient  fré- 
quentes, et  que  les  Fidèles  étoient  assidus  à  s'y  trouver,  il 
est  aisé  de  juger  du  progrès  qu'ils  pouvoient  faire  dans  la 
science  convenable  à  des  Chrétiens. 

XYIII.  '  Au  reste  les  Pères  étoient  fort  retenus  sur  les  ibid. 
questions  de  Religion.  Us  n'ignoroient  pas  qu'elles  atirent 
trop  souvent  après  elles  des  disputes  qui  ne  servent  qu'à 
aliéner  ou  même  aigrir  les  esprits,  et  à  affoiblir  la  piété.  Us 
se  contentoient  donc  de  résoudre  celles  qu'on  leur  propo- 
soit,  sans  en  proposer  de  nouvelles.  Ils  reprimoient  mê- 
me avec  soin  la  curiosité  des  esprits  légers  et  remuans,  et 
ne  pormeltoienl  pas  à  tout  le  monde  de  disputer  sur  la 
Religion.  '  Ils  n  étudioient  eux-mêmes  ni  pour  satisfaire  n.  i».  p.  71. 
leur    curiosité    naturelle ,    ni    pour    s'atirer    l'admiration 

Ïa'excite  dans  les  ignorans  la  connoissance  des  choses  rares. 
s  étoient  bien  au-dessus  de  ces  puérilités.  Toute  leur  Théo- 
logie consistoit  dans  l'étude  et  la  connoissance  des  saintes 
Ecritures.  C'est  là  qu'ils  alloient  puiser  la  science  des  Saints. 
'  Elle  n'étoit  pas  alors  cette  divine  science  ce  qu'elle  est  de-  cr.  Nai.  or.  r.  . 
venue  depuis,  un  art  méprisable,  comme  parle  S.  Grégoire  ^'  '*^' 

Tome  I.  Prem.  Part.  H  h 

2  c  * 


234  ETAT   DES   LETRES 

de  Nazianze,  et  un  exercice  bizarre  de  vaines  subtilités,  sem- 
blables à  ces  tours  de  mains  dont  les  charlatans  trompent 
les  yeux  d'une  populace  ignorante,  sans  se  proposer  d'au- 
tre but  que  de  se  faire  admirer  des  spectateurs. 

XIX.  Quiconque  portoit  le  nom  de  Chrétien,  prou- 
voit  les  mystères  de  la  Religion ,  non  par  des  raisonne- 
mens  de  Philosophie,  ni  par  des  principes  de  Métaphysi- 
que ,  mais  par  l'autorité  de  l'Ecriture  et  de  la  tradition , 
par  les  paroles  expresses  de  Jesus-Christ   et   des  Apôtres, 

f)ar  la  pratique  constante  établie  dans  l'Eglise.  C'étoit-là 
es  deux  seules  sources  où  les  Fidèles  de  ces  premiers  tems 
puisoient  la  science  dont  ils  faisoient  profession.  Comme 
l'Ecriture   étoit  commune  et  aux  Catholiques   et  aux   hé- 

p'"to.'^'^'  "■  ^*'  retiques,  '  ceux-ci  en  tiroient  leurs  objections,  et  les  au- 
tres leurs  réponses  :  et  lorsque  les  premiers  dispu- 
toient  avec  les  autres,  ils  se  bornoient  au  sens  literal;  ou 
s'ils  suivoient  un  sens  figuré ,  c'étoit  celui  dont  leurs  ad- 
versaires convenoient.  Dans  ces  disputes  les  Catholiques 
savoient  aussi  faire  à  propos  usage  de  la  tradition,  qui  leur 
fournissoit  toujours  des  armes  invincibles.  C'est  pourquoi 
ils  avoient  un  soin  extrême  de  la  conserver  cette  tradi- 
tion ,  et  de  la  transmettre   aux  autres  avec  une  entière  fi- 

Aag^injui.  1.  2.  délité.  '  Ils  out  gaidé,  disoit  S.  Augustin  en  son  tems,  ce 
qu'ils  avoient  trouvé  établi  dans  l'Eglise.  Ils  n'ont  ensei- 
gné que  ce  qu'ils  avoient  apris;  et  ils  ont  été  atentifs  à 
enseigner  à  leurs  enfans  ce  qu'ils  avoient  reçu  de  leurs 
pères. 

XX.  Les  écoles  dont  nous  venons  de  parler ,  et  les  in- 
structions que  l'on  y  donnoil,  éloient  communes  et  aux 
Clers  et  aux  simples  Fidèles.  Mais  cela  n'empêchoit  pas 
'  que  les  Evêqucs  n'eussent  d'ordinaire  auprès  d'eux  un 
certain  nombre  de  jeunes  Clers,  qu'ils  instruisoient  avec 
un   soin    particulier  comme  leurs   enfans,    et  qui  dans  la 

dH^.  3.  n.  21.  p.  gyjjg  devenoient  maîtres  eux-mêmes.  '  Ces  disciples,  en 
aprenant  la  science  Ecclésiastique,  se  formoient  en  même- 
tems  sous  les  yeux  de  l'Evêque  et  aux  bonnes  mœurs  et 
aux  fonctions  de  leur  ministère.  C'est  ainsi  que  se  sont  for- 
més tous  les  grands  Evoques  et  autres  savants  hommes, 
qui  dans  presque  tous  les  tems  ont  éclairé  nos  Gaules  et 
d'autres  pais  par  la  lumière  de  leur  doctrine.  S.  Pothin 
sous  S.  Polycarpe,  et  peut-être  même  sous  S.  Jean  l'Evan- 


Flcn.  ibid.  n.   1 
p.  (H. 


DANS  LES  GAULES.  II  SIECLE.         235 

geliste  et  S.  Philippe  l'Apôtre;  S.  Irenée  sous  S.  Polycar- 

fie  et  S.  Pothin;  le  Prêtre  Caïus  et  S.  Hippolj^te  sous  S. 
renée;  et  dans  les  siècles  postérieurs  S.  Martin  sous  S. 
Hilaire  de  Poitiers ,  et  sous  S.  Martin  et  S.  Hilaire  d'Arles 
la  plupart  de  saints  Evoques  qui  illustrèrent  nos  provin- 
ces aux  IV  et  V  siècles. 

XXI.  En  ces  premiers  tems   il   n'y  avoit   donc  presque 
point    d'autres   maîtres   pour  les  Chrétiens   que   les   Evê- 

3ues.  '  Ils  étoient  et  les  Prédicateurs  et  les  Théologiens  di».  4.  n..  lo.  p. 
e  leurs  Eglises.  Ils  présidoient  ordinairement  aux  assem-  *^"*' 
blées  des  Fidèles ,  ofTroient  le  sacrifice ,  et  l'acompa- 
gnoient  de  discours  instructifs  et  édifians.  Ils  entroient , 
autant  qu'il  étoit  possible,  dans  le  détail  de  l'instruction 
des  Catecumenes ,  de  la  conversion  des  pécheurs ,  de  la 
conduite  des  pénitens ,  de  la  réfutation  des  hérésies.  Com- 
me ils  se  rendoient  les  modèles  du  troupeau  qu'ils  gou- 
vernoient ,  non  par  un  honteux  désir  du  gain  ,  mais  par  une 
charité  désintéressée ,  s'ocupant  uniquement  du  spirituel  , 
la  Religion  étoit  merveilleusement  soutenue  par  leur  con- 
duite. La  parole  de  Dieu  avoit  tout  un  autre  poids  dans 
leur  bouche ,  soutenue  par  l'autorité  de  leur  place  et  de 
leurs  vertus ,  que  dans  la  bouche  des  simples  Prêtres  sou- 
vent étrangers  ou  mercenaires.  I^a  Théologie  étoit  trai- 
tée plus  sérieusement  et  plus  noblement  par  ces  Pasteurs 
si  ocupès ,  qu'elle  ne  l'a  été  dans  la  suite  des  tems  par  des 
Docteurs  oisifs ,  qui  ne  cherchoient  qu'à  subtiliser ,  et  à 
renchérir  les  uns  sur  les  autres  par  de  nouvelles  ques- 
tions. 

XXII.   Quels  fruits  ne   dévoient   pas    produire   les   in- 
structions  de   si   dignes'  maîtres?  '  Les  anciens  ont    défini  sen«c.  com.  i.  j. 
l'Orateur,  un  homme  de  bien  qui  a  le  don  de  la  parole,  p'^p-^- 
'En  effet  la  confiance  fait  la  moitié  de  la  persuasion.  Ce-  Fieu.  ai»,  in.  le. 
lui  qui  passe  pour  méchant  et  artificieux ,  n'est  pas  écou-  •"■  "' 
té.  L'on  se  défie  de  celui  que  l'on  ne  connoît  pas.    Pour 
écouter  volontiers  il    faut    croire    celui   qui    parle ,  égale- 
ment   instruit    et    bien  intentionné.    Il    faut  être  persuadé 
qu'il   est    incapable   de    tromper  et  de  ne  rechercher  que 
son  intérêt   propre.    Sans  cela  il  devient    suspect,    et   ses 
discours  ne  font  aucune  impression.   Il  seroit  l'homme  le 
plus  éloquent  du  monde,   s'il  ne   réunit  en   sa  personne 
toutes  ces  qualités,  il  ne  viendra  jamais  à  bout  de    per- 

H  h  ij 


13, 


236  ETAT  DES  LETRES 

suader  personne.  Après  cela,  que  ne  dévoient  point  per- 
suader des  Evêques  d'une  vertu  si  éprouvée,  d  une  capa- 
cité si  connue,  d'une  telle  autorité?  Ils  n'avoient  qu'à 
ouvrir  la  boucho,  qu'à  se  montrer.  On  étoit  convaincu 
qu'ils  ne  recherchoient  que  l'avantage  de  leur  troupeau, 
et  qu'ils  ne  parloient  que  pour  le  leur  procurer.  C'en  étoit 
assez  pour  engager  à  les  écouter,  et  à  retenir  ce  qu'ils 
disoient. 

XXflI.    Dans  la  suite  des  siècles  le  nombre  des  Fidèles 
venant   à    croître   prodigieusement,   chaque    Evêque   éten- 
dit bien  loin  au-delà  de   l'enceinte   de  sa  ville  Episcopale 
joiy  ecoi.  1. 1.  c.  les  limitcs  de  son  Diocèso.  '  Les  Eglises  Cathédrales   pri- 
rent aussi  leur  acroissement  et  leur  forme.  Alors  on  y  éta- 
blit des  écoles  réglées,  tant  pour  les  Clers  que  pour  ceux 
qui  aspiroient  à  entrer  dans  le  Clergé.   L'on    y   enseignoit 
le  chant  et  les  Ictres  humaines.  Mais  comme    les  Evêques 
n'auroient  pii  fournir  à  tant  de   fonctions,  on  choisit  quel- 
que personne  du  corps  du   Chapitre  de  ces   Eglises    pour 
prenare  soin    de    ces  sortes   d'écoles.    On  nomma  ce  Mo- 
dérateur   quelquefois    Ecolâtre    ou    Scholastique  ;    d'autre- 
fois Chancelier,  Primicier  ou  Giiefcier  :  dignités   qui    sub- 
sistent encore  dans  plusieurs  Cathédrales,    mais    seulement 
de  nom,    quoiqu'il  y   ait  des  revenus  considérables  qui  y 
sont  atachés.    Les  Monastères  de  leur  côté  ouvrirent    aussi 
des   écoles,   qui  de   particulières    qu'elles   étoient    d'abord 
ne   tardèrent   pas  à  devenir  publiques.    On   vit  ensuite  se 
former    divers   Collèges,    où   l'on    enseigna    généralement 
toutes  les   sciences  en   usage,   et  dont  on  se  servit  depuis 
pour  ériger   ce   que   l'on    nomme   aujourd'hui  Université. 
Mais  comme   ces   établissemens   ne  se  firent  qu'à  diverses 
reprises  et  divers  temS;    nous   atendons  à    en  parler   avec 
quelque  détail  sur  les  siècles  qui  les  ont  vus  naître. 

XXIV.  Avant  le  IV  siècle  il  ne  paroît  pas  que  les  Chré- 
tiens étudiassent,  au  moins  dans  les  écoles  publiques,  les 
sciences  profanes,  la  Rhétorique  ,  la  Poétique,  la  Dialec- 
tique ,  et  le  reste  de  la  Philosophie ,  la  Géométrie  et  les 
autres  Mathématiques.  Ils  les  regardoient  comme  des 
études  étrangères  à  la  Religion,  parce  que  c'étoit  les 
Païens  qui  les  avoient  cultivées.  Ils  n'avoient  point  non 
plus  encore  alors  de  ces  écoles  publiques  à  leur  usage  pour 
ces  sortes  d'études.  Les  Païens    ne  l'auroient  pas  sounert. 


DANS  LES  GAULES.  II  SIECLE.        237 

Mais  dès  le  IV  siècle  au  moins  nous  voïons  par    Ausone 
que  les  Chrétiens  comme  les  Païens  fréquentoient  ces  éco- 
les publiques,  qui  étoient  alors  communes  aux  uns  et  aux 
autres.    Au    reste  ,    quoique    les    maîtres  qui   enseignoient 
parmi  les  Chrétiens  se  bornassent  à  la  Théologie  et  à  la 
morale,  telle  que  nous  les  avons   expliquées,    ils    ne  lais- 
soient  pas  '  de  regarder  les  sciences  humaines  comme  utiles  ciem.  Aiex.  str.  i. 
à  la  Religion  ,  et  de  quelques  secours  pour  ceux  qui  vou-  ^' 
loient  joindre  le  raisonnement  à  l'autorité  afin  de   s'affer- 
mir dans  la  foi.  'Ils  alloient  même  plus  loin,  et  les  regar-  lert.  test.  an.  p. 
doient  comme  nécessaires  en  certaines  occasions.    Oui,    di-  **^*' 
soit  Tertulien,  la  connoissance    de  la  Théologie   Païenne, 
enseignée  par  les  Poètes  et  les  Philosophes,  est  nécessaire 
aux  défenseur.^  de  la  vérité ,  soit  au'ils  agissent  contre   les 
Païens  pour  les  réfuter  et   les  combatre  par    leurs  propres 
armes,  '  soit   qu'ils   agissent  contre  les  hérétiques,  dont  les  in  nerm.  p.  m. 
Philosophes  ont  été  les  Patriarches. 

XXV.'  Les  Pères  vouloient  cependant  qu'on  y  aportât  Ong.  phii.1.13.  p. 
une  modération  réglée  par  une  prudence  chrétienne.  Et  *^'  "*'■  *"" 
lorsqu'il  dépendoit  d'eux,  ils  faisoient  toujours  passer  l'é- 
tude des  sciences  profanes  avant  celle  des  Livres  sacrés. 
I^  raison  qu'ils  avoient  d'une  telle  conduite,  étoit  le  dan- 
ger oîi  l'on  se  seroit  exposé,  en  passant  de  celle-ci  à  celle 
des  scienses  humaines,  à  laisser  corrompre  sa  foi,  et  à 
mêler  les  idoles  du  mensonge ,  comme  parle  Origene  , 
avec  les  vérités  qu'on  auroit  puisées  dans  la  parole  de  Dieu. 
'C'est  ce  qui  portoit  S.  Augustin  à  louer  Dieu  de  ce  qu'il  Aug^^nf.  1.7.  c. 
lui  avoit  fait  lire  d'abord  les  Philosophes,  et  ensuite  les  Li- 
vres sacrés,  parce  que  s'il  les  eût  lus  après  avoir  goûté  dans 
les  saintes  Ecritures  combien  le  Seigneur  est  doux,  ils  au- 
roient  peut-être  détruit  en  lui  le  fondement  de  la  piété. 
'  Les  Pères  ne  faisoient  donc  point  difficulté,  lorsqu'ils  orig.  ibid.  p.  loe. 
trouvoient  des  esprits  curieux  et  élevés,  d'emploïer  les 
sciences  humaines ,  la  Grammaire ,  la  Rhétorique ,  la 
Géométrie,  l'astronomie  et  la  Musique  même,  pour  les 
préparer  à  la  vraie  Philosophie.  C'est  ainsi  qu'Origene  in- 
struisit S.  Grégoire  Thaumaturge  ;  et  il  semble  que  S.  Ire- 
née  avoit  aussi  été  instruit  de  la  même  sorte, 

XXVI.  Ainsi  ce  ne  pouvoit  qu'être  un  avantage 
pour  l'Eglise,  lorsque  la  connoissance  des  sciences  profa- 
nes se  trou  voit  en  ceux  qu'on  élevoit  au  sacré  ministère. 


107. 


238  ETAT  DES  LETRES 

Fioa.  dis.2.  n.  13.  Mais  généralement  parlant  '  il  n'étoit  pas  nécessaire  de  les 

•"■  ^'  **■  posséder  pour  être  Prêtre  ou    Evêque.   On   savoit   que   les 

Apôtres  et  leurs  disciples  ne  s'y  étoient  point  apliqués; 
et  l'on  ne  croïoit  pas  devoir  l'exiger  de  leurs  successeurs. 
La  connoissance  des  langues  paroissoil  encore  moins  né- 
cessaire. On  faisoit  par-tout  les  lectures,  les  instructions 
et  les  prières  publiques  en  la  langue  la  plus  commune  du 
pais.  Aussi  la  plupart  des  Prêtres  et  des  Evêques  n'en 
savoient  point  d'autres:  c'est-à-dire,  le  latin  dans  l'Occi- 
dent, et  le  grec  dans  la  plus  grande  partie  de  l'Orient, 
et  dans  quelques  endroits  de  nos  Gaules  ,  comme  nous 
l'avons  fait  voir.  Toute  la  science  que  l'on  demandoit  à 
un  Prêtre  ou  à  un  Evêque,  étoit  d'avoir  lu  et  relu  l'Ecri- 
ture sainte,  jusqu'à  la  savoir  par  cœur  s'il  étoit  possible; 
de  l'avoir  bien  méditée  pour  y  trouver  les  preuves  de 
notre  foi,  et  les  règles  des  mœurs  et  de  la  discipline;  de 
savoir  les   Canons,   et   d'en   avoir  soigneusement   conservé 

p.  69.  l'usage.  '  Ces  dispositions  jointes  et  à  une  solide  piété  et  à 

une  grande  prudence  pour  le  gouvernement ,  suffisoient  ; 
et  l'on  n'en  demandoit  pas  davantage  à  ceux  à  qui  l'on 
confioit  la  conduite  df^s  âmes  et  l'instruction  des  Fidè- 
les. 

XXVII.  Mais  quoique  les  Pères  de  ces  premiers  siè- 
cles n'eussent  pas  étudié  pour  l'ordinaire  les  sciences  hu- 
maines, il  ne  faut  pas  néanmoins  s'imaginer  qu'ils  n'eussent 

n.  15.  p.  7*.  ni  science  ni  éloquence,  'Quand  on  prendroit  le  nom  de 
science  improprement,  comme  fait  le  vulgaire,  en  nom- 
mant savans  ceux  qui  par  une  lecture  assidue  ont  acquis  la 
connoissance  d'un  grand  nombre  de  faits  ;  les  anciens 
Pères  ne  manquoient  pas  de  cette  espèce  de  science,  ou 
plutôt  d'érudition.  Combien  en  voïons  nous  dans  les 
(crits  de  S.  Irenée,  de  Lactance,  de  S.  Hilaire  de  Poitiers? 
Il  est  vrai  qu'ils  étudioient  peu  les  langues  étrangères 
pour  les  raisons  que  nous  en  avons  aportées.  Nos  Gaulois  • 
se   bornoient   au   grec  et  au  latin.  Encore   le  grec   n'étoit 

p-  w-  guéres  cultivé  qu'en  certaines  Provinces  des  Gaules.  '  Mais 

si  nous  avons  égard  à  ce  qui  mérite  proprement  le  nom 
de  science,  où  en  trouverons-nous  plus  que  chez  les  Pères  ? 
Je  dis  cette  vraie  Philo.sophie,  cette  Philosophie  subtile , 
sublime  et  solide,  qui  se  servant  d'une  exacte  dialectiçïue  re- 
monte par  la  Métapnysique  jusqu'aux  premiers  principes,  et 


DANS  LES  GAULES.  II  SIECLE.  239 

à  la  connoissance  du  vrai  bon  et  du  vrai  beau,  pour  en  tirer 

{)ar  des  conséquences  sûres  les  régies  des  mœurs,  et  rendre 
es  hommes  fermes  dans  la  vertu,  et  heureux  autant  qu'ils 
en  sont  capables?  Les  Ecrivains  Ecclésiastiques  qui  ont 
paru  dans  nos  Gaules  ,  ne  sont  guéres  inférieurs  en  cela  à 
ceux  des  autres  pais  qui  ont  illustré  l'Eglise.  Qu'elle  su- 
blimité de  pensées  ,  quelle  force  de  raisonnement  ne  trou- 
ve-t-on  point  dans  leurs  ouvrages? 

XXVIII.  '   Pour   la   méthode  ,   les  anciens  Pères  ne  la  iwa. 
découvroient    point   sans   besoin  ,    et  la  diversifioient  selon 

les  sujets.  Il  n'écrivoient  que  dans  l'ocasion ,  ou  même 
par  nécessité  ,  pour  réponare  à  quelqu'un  qui  demandoit 
instruction,  ou  pour  réfuter  les  hérésies  qui  s'élevoient. 
Ainsi  ils  ne  suivoient  pas  d'ordinaire  la  méthode  Géomé- 
trique ,  '  qui  ne  s'atache  qu'à  l'ordre  des  vérités  en  elles-  p-  ". 
mêmes ,  mais  la  méthode  dialectique  qui  s'acorde  aux 
dispositions  de  celui  à  qui  l'on  parle,  et  qui  est  le  fond  de 
la  véritable  éloquence.  Elle  travaille  cette  méthode  à 
ôter  les  obstacles  que  les  passions,  oij  les  préjugés  ont  mis 
dans  l'esprit  de  1  auditeur.  Puis  ayant  netoïé  la  place , 
elle  y  trace  la  vérité  ,  profitant  de  ce  qu'il  connoît ,  et 
dont  il  convient ,  pour  1  amener  à  ce  qu'on  lui  veut  per- 
suader. '  Que  si  les  Percs  ne  parlent  pas  le  grec  et  le  la-  n.  le.  p.  73. 
tin  aussi  purement  que  les  anciens  Orateurs  ,  il  n'en  faut 
pas  conclure  qu'ils  en  soient  moins  éloquens.  Il  faut  bien 
distinguer  l'éloquence  de  l'élocution  qui  n'en  est  que  l'é- 
corce.  Quelque  langue  que  l'on  parle ,  et  quelque  mal 
qu'on  la  parle  ,  on  sera  éloquent ,  si  l'on  sait  choisir  les 
meilleures  raisons,  et  les  bien  arranger;  si  l'on  emploie 
des  images  vives  et  des  figures  convenables;  si  l'on  sait 
parler  ou  se  taire  à  propos  ,  de  quoi  il  faut  parler,  et  les 
mouvemens  qu'il  faut  ou  apaiser  ou  exciter.  Le  discours 
pour  n'être  pas  plus  poli ,  n  en  sera  pas  moins  persuasif, 
mais  seulement  moins  agréable. 

XXIX.  Après  cela  si  nous  passons  à  faire  l'aplication 
de  ces  régies  ,  elle  ne  pourra  qu'être  glorieuse  pour  notre 
nation.  En  effet  qui  les  a  mieux  suivies  ces  régies  que  les 
anciens  "Ecrivains  de  l'Eglise  Gallicane?  Voïez  l'usage  ad- 
mirable qu'en  ont  fait  S.  Irenée  contre  les  hérétiques  de 
son  tems  ,  malgré  les  cahos  et  les  épines  de  sa  matière; 
Lactance   contre    les   ennemis  de  la  Religion  Chrétienne; 


240  ETAT  DES  LETRES 

S.  Hilaire  de  Poitiers  contre  les  Ariens  et  leurs  fauteurs: 
S.  Prosper  contre  les  Semipelagiens  ces  ennemis  si  rusés, 

auoique  mitigés  ,  de  la  grâce  de  Jesus-Christ;  S.  Eucher 
ans  son  incomparable  letre  à  Valerien  pour  le  retirer  de 
l'erreur.  Et  s'il  s'agit  même  de  l'élocution ,  ou  politesse 
de  la  langue  ,  qui  a  écrit  plus  poliment  que  le  même  Lac- 
tanci3,  S.  Severe  Sulpice,  et  Salvien?  Il  faut  convenir  que 
l'on  auroit  bien  de  la  peine  à  trouver  dans  toute  l'Eglise 
latine  des  Ecrivains  et  plus  polis  et  plus  éloquens.  Mais 
ce  que  nous  ne  disons  ici  qu'en  peu  de  mots  et  par  ocasion, 
nous  le  montrerons  avec  quelque  détail  en  son  lieu. 

XXX.  Outre  la  voie  d'mstruction  que  l'on  emploïoit 
envers  les  Glers  et  les  simples  Fidèles,  la  convocation  des 
Conciles  que  l'on  commença  à  mettre  en  usage  dès  ce  sié- 
cle-ci  dans  l'Eglise  des  Gaules,  fut  encore  un  moïen  pour 
y  étendre  et  affermir  la  doctrine.  Les  Evêques  avoient 
grand  soin  de  se  trouver  à  ces  saintes  assemblées,  à  moins 
qu'ils  ne  fussent  retenus  par  des  empèchemens  insurmon- 
dii.  3.  n.  20.  p.  tables.  '  Là  se  trouvant  ensemble  ,  ils  s'entretcnoient  de 
leurs  devoirs ,  et  s'instruisoient  mutuellement.  On  y  exa- 
minoit  avec  atenlion  et  maturité  les  affaires  Ecclésiasti- 
ques, ce  qui  regardoit  le  relâchement  introduit  dans  la 
morale,  dans  la  discipline ,  et  les  erreurs  qui  se  glissoient 
dans  le  dogme.  L'Ecriture  et  la  tradition  contenue  dans 
les  écrits  des  Pères  et  les  Canons  des  Conciles  qui  avoient 
précédé  ,  étoient  les  régies  des  jugemens  que  l'on  pro- 
nonçoit   dans   ces   saintes   assembléei.    On  les  lisoit  avant 

3ue  d'opiner  sur  chaque  article;  et  personne  ne  s'avisoit 
'y  faire  prévaloir  ses  sentimens  particuliers  pour  domi- 
ner sur  la  foi  de  ses  confrères.  Le  premier  Concile  que 
l'on  sache  s'être  tenu  dans  les  Gaules,  fut  celui  qui  s'as- 
sembla au  sujet  du  différend  sur  le  jour  auquel  on  devoit 
célébrer  la  fête  de  Pâque.  Reprenons  les  cnoses  de  plus 
haut,  afin  de  mettre  tous  nos  lecteurs  plus  au  fait  de  cet- 
te fameuse  dispute  qui  fut  agitée  en  ce  siècle  avec  beau- 
coup de  chaleur. 
E.^s.  hist.  1. 5.  c.  aXXL  '  Une  partie  des  Fidèles  croïoit  qu'il  falloit  finir 
ï3.  p.  190.  jj^  jeûne    du  car.5me  ,   et  célébrer  la  fête  de  la  Résurrec- 

tion du  Seigneur  le  quatorzième  de  la  Lune  du  premier 
mois,  quelque  jour  de  la  semaine  qu'il  arrivât,  conformé- 
ment à  l'usage  des  Juifs  qui  faisoient  leur  Pâque  ce  même 

jour. 


DANS  LES  GAULES.    II  SIECLE         241 

jour.  Les  Eglises  d'Asie  éloient  les  seules  dans  cette  pra- 
tique,  'et  prétendoient  suivre  en  ce  point  la  tradition  de  e.is.  iiisi.  c. si.p. 
l'Apôtre  S.  Jean.  "Toutes  les  autres  Eglises  du  monde  Tc^/ij.,,.  i-». 
Chrétien  soiàtenoient  au  contraire  qu'on  ne  pouvoit  finir 
le  jeûne,  et  célébrer  la  Pàque  que  le  Dimanche.  '  Dès  le  c.  24.  p.  193. 
tems  du  Pape  S.  Anicet,  vers  l'an  158,  S.  Polycarpe  Evê- 
que  de  Smyrne  fit  un  voiage  à  Rome  pour  régler  sur  ce 
point  la  discipline  Ecclésiastique  ,  et  la  rendre  uniforme 
dans  toutes  les  Eglises.  Ces  deux  saints  Evêques  ,  après 
avoir  conféré  ensemble ,  ne  purent  s'acoraer ,  aucun 
d'eux  ne  voulant  se  départir  des  usages  établis  dans  son 
Eglise  dès  le  commencement.  Mais  ils  convinrent  de  ne 
point  rompre  les  liens  de  la  charité  et  de  la  communion 
pour  ce  point  de  discipline.  Ils  se  séparèrent  en  paix;  et 
cette  paix  étoit  commune  à  toutes  les  Eglises  qui  célé- 
broient  la  Pâque  ou  le  quatorzième  jour  de  la  Lune,  ou 
le  dimanche  d'après. 

XXXII.  '  Sous  le  Pontificat  de  S.  Victor,  vers  l'an  194  c.  53.  s*,  p.  191. 
ou  196  ,  cette  dispute  se  rechaufTa,  et  fut  agitée  de  part  et 
d'autre  avec  beaucoup  plus  de  chaleur  qu'auparavant 
On  assembla  sur  cela  plusieurs  Conciles  en  diverses  pro- 
vinces, où  il  fut  arrêté  que  l'on  ne  feroit  point  la  Pâque 
le  quatorzième  de  la  Lune  comme  les  Juifs,  mais  tou- 
jours le  Dimanche.  Les  Eglises  des  Gaules  que  S.  Irenée 
gouvernoit,  assemblèrent  aussi  leur  Concile ,  dont  nous 
donnerons  l'histoire  en  son  lieu ,  et  se  trouvèrent 
unies  dans  le  même  sentiment  de  ne  célébrer  que  le 
Dimanche    la    fête   de    la   Résurrection.    S.  Victor  n'aïant 

fiû  engager  Polycrate  Evêque  d'Ephese  ,  ni  les  autre? 
églises  d  Asie  à  se  départir  de  leurs  anciennes  coutumes  , 
il  fut  prêt  de  les  déclarer  excommuniés.  Le  zélé  inconsi- 
déré de  ce  Pontife  déplut  à  beaucoup  d'Evêques.  S.  Irenée 
entre  autres  le  blâma  avec  beaucoup  de  générosité.  Il  lui 
écrivit  au  nom  des  Chrétiens  des  Gaules  ,  dont  il  étoit  le 
chef ,  une  letre  dans  laquelle  il  tombe  d'acord  qu'il  faut 
célébrer  la  Résurrection  le  Dimanche  ,  mais  que  l'on  ne 
doit  point  pour  cela  se  séparer  de  la  communion  des  au- 
tres Eglises.  II  en  écrivit  aussi  une  autre  intitulée  du  Schis- 
me ,  à  Rlaste  Prêtre  de  Rome  ,  qui  avoit  voulu  ,  ce  sem- 
ble ,  se  conformer  aux  usages  des  Asiatiques.  Comme 
Eusebe    ne    dit    rien    davantage  de  cette  dispute  ,  il  est  à 

Tome  1.  Prem.  Part.  I  i 


242  ETAT  DES  LETRES 

croire  que  S.  Irenée  la  calma  par  sa  prudence  ,  et  qu'il 
arrêta  le  schisme  qui  étoil  sur  le  point  de  diviser  les  Egli- 
ses d'Asie  et  d'Occident. 

XXXIII.  Dieu  ne  permet  point  de  mal  qu'il  n'en  sa- 
che tirer  un  plus  grand  bien  ;  et  cela  est  de  l'ordre  de  sa 
souvrraine  sagesse.  On  ne  connoît  point  de  plus  grand 
mal  que  les  hérésies.  Cependant  elles  procurent  toujours 
un  très-grand  bien  dans  l'Eglise.  Car  outre  qu'elles  ser- 
vent à  séparer  de  la  paille  le  bon  grain  ,  et  à  discerner 
ceux  qui  ont  une  vertu  éprouvée  ,  comme  parle  S.  Paul  , 
elles  sont  toujours  d'une  grande  utilité  pour  l'avancement 
et  la  perfection  des  sciences.  Elles  engagent  à  l'étude  et 
ceux  qui  enseignent  l'erreur,  et  ceux  qui  veulent  s'en  dé- 
fendre et  la  combatre.  De  cet  exercice  il  naît  toujours 
de  nouveaux  éclaircissemens  pour  mieux  connoitre  la  vé- 
rité ,  et  très-souvent  des  ouvrages  considérables  ,  qui  ser- 
vent à  la  perpétuer  ,  après  l'avoir  mise  dans  un  nouveau 
jour.  C'est  ce  qui  est  arrivé  dans  l'Eglise  des  Gaules  pres- 
que en  tous  les  siècles,  avec  un  avantage  qui  lui  est  glo- 
rieux dans  l'esprit  de  tous  ceux  qui  en  savent  connoître  le 

Erix.  Ce  siécle-ci  et  les  trois  suivans ,  sans  descendre  plus 
as,  en  fournissent  d'illustres  exemples.  A  peine  les  héré- 
sies de  Valentin  ,  de  Novatien  ,  d'Arius  et  des  Semipela- 
giens  y  eurent-elles  paru,  qu'elles  y  furent  puissamment 
ataquées  et  combatues  par  des  ouvrages  pleins  de  lumière. 
Mais  ne  prévenons  pas  les  tems,  et  ne  nous  atachons  qu'au 
siècle  que  nous  parcourons. 

XXXIV.  L'hérésie  des  Valentiniens  ,  que  l'Orient 
irmi.  1. 3.C.  4.  n.  avoit  vu  naître  vers  l'an  13.'),  '  se  répandit  en  Occident 
'■                    sur  la    fin    de    ce  second  siècle.  Valentin  auteur  de  cette 

secte  fit  un  voïage  à  Rome  du  tems  du  Pape  S.  Hygin,  et 
y  demeura  sous  S.  Pie  ,  S.  Anicet ,  et  jusqu'au  Pontifi- 
iren.  i.i.e.  13.  n.  cat  dc  S.  Elcuthcrc  son  sucesseur.  '  Un  de  ses  disciples 
7iHjer.  1...C.64.I».  nommé  Marc,  natif  d'Egypte,  passa  dans  les  Gaules,  et* 
y  sema  ses  erreurs  particulièrement  dans  les  provinces 
qu'arrose  le  Rhône.  Il  y  séduisit  plusieurs  personnes  ,  et 
sur-tout  grand  nombre  de  femmes.  On  nomma  ses  disci- 
ples Marcosiens  ou  Gnostiques.  S.  Irenée  Evêquede  Lyon, 
ne  pouvant  voir  les  peuples  confiés  à  ses  soins  embrasser  la 
nouvelle  hérésie ,  sans  y  aporter  de  remède,  entreprit  d'é- 
crire son  ouvrage  contre  les  hérésies,  que  nous  avons  en- 


p.  474. 


DANS   LES  GAULES.   II  SIECLE.        243 

core.  II  y  ataque  particulièrement  les  Valentiniens ,  et 
y  découvre  d'une  manière  admirable  le  ridicule  de  leur 
secte.  C'est  de  quoi  nous  parlerons  plus  en  détail  au  siècle 
suivant ,  au  commencement  duquel  on  raporte  la  mort  du 
saint  Prélat.  Telle  étoit  la  première  constitution  des  letres 
parmi  les  Chrétiens  des  Gaules  en  ce  second  siècle  de  l'E- 
glise. Il  nous  reste  à  dire  quelque  chose  de  l'état  où  elles 
étoienl  en  ce  même  siècle  parmi  les  Païens. 

XXXV.  'Depuis  Pline   le  jeune,  qui  avoit  travaillé  avec  Bail.  jug.  préj.  c. 
succès  à  soutenir  l'éloquence    Romaine,  on  la  vit  tomber  ''•*•^•'^• 

à  Rome  dans  presque  une  entière  décadence.  Mais  elle  se 
maintint  encore  glorieusement  avec  la  Gréque  dans  les 
principales  villes  des  Gaules  en  ces  premiers  siècles.  '  C'est  Juv.  sat.  7.  t.  1*7 
pourquoi  le  Poëte  Juvenal  avant  la  fin  du  règne  de  Domi- 
tien,  y  renvoïoit  ceux  qui  souhaitoient  de  se  perfectionner 
dans  l'art  de  bien  parler.  En  effet  nos  Gaules  eurent  enco- 
re la  gloire  de  fournir  à  l'Empire  ses  plus  célèbres  Rhé- 
teurs, ses  Orateurs  et  ses  Panégyristes  les  plus  estimés. 
Qui  ne  sait  que  les  deux  Mamertins,  Eumcne ,  Nazaire, 
Arbore ,  Patere  ,  Minerve  ,  Alcime  ,  Delphide ,  Ausone , 
Drcpane ,  ces  grands  Maîtres  d'éloquence  étoient  tous 
Gaulois?  La  suite  de  cette  histoire  vous  en  découvrira 
bien  d'autres ,  qui  '  dédommagèrent  am[)lement  l'Empire  Bail,  itid 
de  la  stérilité  des  autres  provinces  de  l'Occident.  De  sorte 
qu'il  est  vrai  de  dire  que  nos  Gaules  furent  le  pais  où  l'é- 
loquence se  conserva  le  plus  long-tems  et  avec  le  plus  de 
splendeur.  Ce  que  nous  disons  de  l'art  de  bien  parler, 
nous  le  pouvons  dire  aussi  des  autres  sciences  que  l'on  avoit 
acoutQmé  d'y  cultiver. 

XXXVI.  Mais  sans  nous  transporter  hors  du  siècle 
qui  fait  le  sujet  de  ce  discours ,  nous  sommes  en  droit  de 
suposer,  que  les  écoles  établies  dans  les  Gaules  dès  les  siè- 
cles précèdens  ,  y  subsistèrent  encore  pendant  celui-ci 
avec  honneur,  tant  que  nous  ne  les  trouverons  point  tom- 
bées en  décadence.  Ainsi  il  y  avoit  encore  des  écoles  flo- 
rissantes à  Marseille  ,  à  Autun,  h  Lyon,  à  Arles,  à  Nar- 

bone,  à  Toulouse  et  ailleurs.'  On   n'en   peut  douter  pour  Pan.  B.p.  157.  n, 
Autun ,    où    le    grand-pere    de   l'Orateur   Eumene  ,    natif  *^ 
d'Athènes ,    après  avoir   enseigné    la   rhétorique    à    Rome 
avec    une   très-grande    réputation  ,   vint  s'élablir ,  et  exer- 
cer le  même  emploi  ;  ce   (ju'il  continua  à    faire  jusqu'au- 


t.  1.  p.  41. 


244  ETAT  DES  LETRES 

de-là  de  l'âge  de  80  ans.  Bien  davantage.  Il  y  a  tout  lieu 
de  croire  que  les  écoles  qui  devinrent  si  célèbres  dans 
les  deux  siècles  suivans  à  Trêves,  à  Besançon,  à  Bour- 
deaux  ,  à  Auch,  à  Poitiers,  à  Angoulême ,  et  en  diver- 
ses autres  villes  ,  prirent  leurs  commencemens  au  moins 
Guy.  hisj.  dOri.  dès  ce  second  siècle.  '  A  l'égard  d'une  espèce  d'Académie 
ou  Université ,  que  l'on  dit  avoir  été  érigée  à  Orléans  par 
les  soins  de  l'Empereur  Marc  Aurele ,  c'est  une  pure  ima- 
gination ,  qui  n'est  appuïée  sur  aucune  preuve  solide.  Le 
Yigilius  que  l'on  se  plaît  à  mettre  à  la  tête  de  cette  Aca- 
démie imaginée,  est  inconnue  toute  l'antiquité. 

XXXVII.  Au  reste  quelque  nombreuses  et  florissantes 
que  pussent  être  encore  les  écoles  Gauloises  ,  l'histoire  ne 
nous  fait  connoître  que  très-peu  de  leurs  élevés  en  ce  siè- 
cle. Les  premiers  dont  nous  allons  donner  les  éloges  , 
avoient  fleuri  dès  le  siècle  précédent ,  et  continuorent  à 
illustrer  celui-ci.  Mais  si  ceux  qui  ne  furent  formés  ,  et 
ne  commencèrent  à  briller  qu'en  ce  second  siècle,  se  trou- 
vent en  petit  nombre ,  leur  mérite  peut  supléer  à  ce  dé- 
faut. Il  en  est  peu  en  tous  les  autres  tems,  qui  aient  fait 
plus  d'honneur  à  leur  patrie  par  leurs  grands  talens  pour 
les  letres.  Tel  est  un  Sentius  Augurinus,  dont  les  poésies 
ont  fait  le  sujet  de  l'admiration  de  Pline  le  jeune  cet  Ecri- 
vain si  poli.  Tel  est  un  Favorin  le  plus  célèbre  Sophiste  de 
son  tems ,  qui  après  avoir  fait  preuve  de  son  savoir  dans 
les  Gaules,  alla  se  faire  admirer  et  à  Athènes  et  à  Rome, 
où  il  ne  se  trouva  que  le  seul  Plularque  qui  lui  fût  compa- 
rable pour  le  grand  nombre  d'écrits  qu'il  donnoit  au  pu- 
bic.  Tel  est  un  Marcus  Cornélius  Fronto,  le  second  Maî- 
tre de  l'éloquence  Romaine  après  Ciceron.  Tel  est  encore 
Lucius  Florus  cet  Historien  si  fleuri  et  si  agréable  ;  car 
nous  ferons  voir  que  nos  Gaules  sont  au  moins  autant  en 
droit  de  le  compter  au  nombre  de  leurs  savants  citoïens, 
que  l'Espagne  de  le  mettre  au  rang  de  ses  Ecrivains , 

XXXVIII.  Comme  l'on  ne  nous  a  conservé  la  connois- 
sance  que  de  peu  d'hommes  de  letres  de  ce  siècle  ,  de  mê- 
me il  ne  nous  reste  que  peu  de  productions  de  leur  savoir. 
Mais  il  est  certain  qu'il  s'en  est  perdu  un  très-grand  nom- 
bre. Outre  ce  que  nous  avons  déjà  remarqué  au  sujet  des 
monumens  ecclésiastiques  ,  nous  sommes  privés  de  quan- 
tité d'écrits  profanes  ,  que   ce  siècle   avoit  vu   sortir   de  la 


DANS  LES  GAULES.   II  SIECLE.        245 

plume  de  nos  savans  Gaulois.  Nous  n'avons  rien  ni  des 
îetres  que  Valerius  Paulinus ,  Geminius  et  Trebonius  Rufi- 
nus  ont  écrites  à  Pline  le  jeune  leur  ami  commun,  ni  des 
discours,  plaidoiers,  harangues  de  ceux  de  nos  Orateurs 
qui  parurent  en  ce  siècle.  De  même  la  multitude  d'ouvra- 
ges dont  Favorin  avoit  enrichi  la  république  des  Ietres,  et 
qui  auroient  suffi  pour  coniposer  une  petite  bibliothèque, 
est  entièrement  perie  ,  si  vous  en  exceptez  quelques  en- 
droits que  l'on  trouve  cités  dans  les  Ecrivains  qui  l'ont  sui- 
vi de  près.  Le  malheur  des  tems  nous  a  aussi  envié  tou- 
tes les  poésies  de  Sentius  Augurinus.  De  sorte  que  ce  qui 
est  venu  jusqu'à  nous  en  genre  de  literature  profane ,  se 
borne  presque  à  l'histoire  abrégée  de  Florus.  On  voit  par 
cet  ouvrage ,  que  la  beauté  de  l'histoire  et  la  majesté  des 
belles  Ietres  se  soûtenoient  encore  au  commencement  de 
ce  siècle.  '  Mais  on  remarque  qu'elles  commencèrent  à  voss.  wsi.  lat. i.  2. 
dégénérer  après  l'Empire  des  deux  Antonins,  et  que  l'on 
doit  regarder  la  fin  de  ce  siècle  comme  l'époque  de  la 
vieillesse  et  de  la  décadence  de  l'histoire. 


c.  1. 


PAULIN, 

Sénateur. 

YALERius    Paulinus     fleurissait    plusieurs    années  Tac.  lùst.  1.  3.  n. 
avant   la  fin  du  siècle   précèdent.    Nous  y  avons  déjà  **•  *^- 
donné  quelques    traits  de  son   histoire.  Il    étoit  de  Frejus  (xxni) 
dons   la    Gaule    Narbonoise ,    dont   il   fut    Intendant  dans 
la  suite.    Il    exerça  depuis  la  charge  de  Tribun  ou  Colo- 
nel dans  les   Prétoriens,   et   donna  à  Vespasien  de  gran- 
des  marques  de    son  attachement,  même  avant   qu'il   fût 
reconnu   pour  empereur.  '   On  trouve  vers  le  même-tems  Jos.  bel.  jud.  1. 7. 
un   Paulin   Gouverneur  d'Alexandrie,   qui  avoit   succédé  à  '■  **'  ^'  ^^' 
Lupus.  Mais  on  ne  sauroit  assurer  si  c'est  le  même  que  ce- 
lui qui  fait  le  sujet  de  cet  éloge. 

Après  que  Paulin   se  fut  distingué  dans  ces  divers  em- 
plois, '  il  se  retira  à  Rome,  où  il  fut  reçu  au  nombre  des  PUn.  1.  *.  ep.  9. 
Sénateurs.   Il  se  fit  beaucoup  de  réputation  dans  cette  au-  ^■"'' 
guste  compagnie  par  sa  fermeté  et  son  amour  pour  la  justi- 

2  1 


246  PAULIN,   SENATEUR. 

II  SIECLE,     ce.  Le  loisir  que  lui  pouvoit  laisser  cette  nouvelle  charge, 
^      25^ l,  9   '  il  l'eraploïoit  à  l'étude  ,  ne  s'ocupant  jamais  de  rien  que 
êp.3.  p.554.  555!  de  grand  et  d'immortel.  Mais  c'est  un  Païen  qui  parle  ainsi 
d'un  autre  Païen,  et  qui  par  conséquent  ne  connoissoit  pas 
en  quoi  consiste  la   véritable  grandeur  et  la  véritable  im- 
mortalité. 

'  Paulin  entra  en  commerce  avec  les  gens  de  letres  qui 
""'eti' iTiPUi!.  brilloient  de  son  tems  à  Rome ,  et  se  lia  d'amitié  particu- 
16*1  i*'*5"cp.' 19*^:  lierement  avec  le  Poëte  Martial  et  Pline  le  jeune.  Le  pre- 
9-  cp-  3.  mier  lui  adressa  quelques-unes  de  ses  épigrammes  ,  et  1  au- 

tre plusieurs  de  ses  letres.  Il  paroît  que  celui-ci  et  Paulin 
s'écrivoient  règlement.  Paulin  aïant  été  quelque  tems  sans 
le  faire,  Pline  lui  porta  ses  plaintes  d'une  telle  négligence, 
et   lui  déclara   qu'il  n'en    recevroit  point   d'autre   excuse 

au'un  grand  nombre  de  très-longues  letres.  Il    faisoit  tant 
e  cas  du  mérite  de  Paulin,  qu'il  lui  communiquoit  com- 
me à  un  ami  sage  et  judicieux  les  réflexions  qu'il  faisoit 
tous  les  jours  ,  afin  de  cesser  d'en  faire,  si  elles  ne  se  trou- 
voient  pas  de  son  goût, 
piin.  1. 4.  ep.  iG.      '  Eu  uuc  ocasiou  que  Pline  avoit  plaidé  durant  sept  heu- 
^'  '^^'  res  avec  un  concours  extraordinaire  ,  il  en  donna  avis  à 

Paulin  ,  et  prit  de-là  ocasion  de  l'animer  à  travailler  soit 
à   quelques  discours   pour  être   prononcés  de  vive  voix , 
p.  249.  soit  à  quelque  ouvrage  pour  la  postérité.  '  Il  lui  proposoit 

pour  motif  l'honneur  qui  accompagnoit  encore  alors  l'o- 
cupation  des  gens  de  letres  :  adhuc  honor  stvdiis  durât.  Mais 
l'on  ne  trouve  plus  rien  aujourd'hui ,  ni  de  ces  écrits  de 
Paulin  ,  suposé  qu'ils  aïent  jamais  existé  ,  ni  du  grand 
nombre  de  letres  que  produisit  son  commerce  avec  Pline 
et  les  autres  Savuns. 
.p.  37.  p.  612.  '  L'Empereur  Trajan  ne  faisoit  pas  moins  d'estime  du 
fiii.tfiip.  t  mérite  de  Paulin,  qu'en  faisoit  Pline  lui-même;  puisqu'il 
"''  le  désigna  Consul  ,  comme  l'on  croit ,  pour  l'année  101' . 

Pline  son  ami ,  ne  pouvant  se  trouver  à  la  cérémonie  de 
son  entrée  dans  le  Consulat,  lui  en  écrivit  pour  s'excuser. 
On  ne  trouve  point  toutefois  le  nom  de  Paulm  dans  les  fas- 
tes Consulaires;  et  l'on  ne  sauroit  dire  qu'il  fut  seulement 
Consul  subrogé ,  parce  que  les  termes  de  Pline  ne  peuvent 
s'entendre  que  de  Consul  ordinaire.  On  ne  peut  pas  dire 
non  plus  que  la  mort  empêcha  que  Paulin  n'entrât  dans 
cette  dignité,  si  honorable  pour  un   particulier;   car  il  pa- 


I.  9.  cp.  37 

til4  I 

t.  p.  177. 


p.  730. 


GEMINIUS,   HOMME  DE  LETRES.        247 

roît   assez  visiblement   qu'il    vêquit  au-de-là   de   l'époque    ii  siècle. 
que  nous  venons  de  marquer. 

'  Paulin,  pour  dernière  preuve  de  l'amitié  qu'il  portoit  à  Pim^.  lo.  ep.  los. 
Pline,  lui  céda  à  la  mort  le  droit  qu'il  avoit  sur  ses  affran-  "  "" 
chis  ;  et  Pline  leur  obtint  de  Trajan  le  droit  de  Bour- 
geoisie à  Rome.  Si  les  letres  de  Pline  suivent  l'ordre  des 
tems  ,  comme  on  le  croit,  celle  où  il  parle  de  cette  cession 
paroît  écrite  vers  l'an  104,  qui  auroit  été  la  dernière  année 
de  la  vie  de  Paulin. 


GEMINIUS, 

Homme  de  Letres. 

'/^  EMFNius    étoit     un    savant    Gaulois,     qui    faisoit     sa  pun.  i.  o.  ep 
VJ   résidence  ordinaire  à  Lyon,  où   aparerament  il   avoit  ^'  '^' 
aussi  pris  naissance.  11  fleurissoit  dès  le  siècle  précédent,  et 
continua  à  briller  au  commencement  de  celui-ci.  De  Lyon 
'  Geminius  faisoit  d'assez  fréquens  voïages  en   Italie,    et  à  ep.  30.  p.  ew. 
Rome  même,  soit  pour  y  visiter  ses  amis,  soit  pour  les  af- 
faires ou  de  quelque  charge  qu'il  exerçoit,  ou  de  sa  propre 
famille.  L'un  des  plus  intimes  comme  des  plus  illustres  amis 
qu'il  acquit  en  ce  païs-là,  fut  Pline  le  jeune,  '  avec  qui  il  1.7,  ep.  «ii.  s. 
avoit  lié  un  commerce  réglé   de  letres,    tant  sur  la  litera-  ^  s^**  I '•  9- «p- 
ture,  que  sur  les  affaires  du  tems.  Nous  en  avons  encore 
cinq  de  celles  que  Pline  lui  écrivit  :  et  il  paroît  par-là  qu'il 
ne  se  passoit  presque  rien  de  considérable  que  Pline  n'en  .,-. 

donnât  avis  à  Geminius.  Celui-ci  en  usoit  de  même  à  l'é- 
gard de  son  ami. 

'  Leur  commerce  étoit  si  réglé,  que  Pline  n'aïant  pas  1.  «.  ep.  22.  p.  539. 
d'autre  matière  pour  une  letre,  prenoit  quelque  sujet  de  **"' 
morale  pour  lui  en  servir ,  afin  de  n'être  pas  trop  long- 
tems  sans  écrire  à  Geminius.  Et  cette  morale,  quoique  de 
Païen  à  Païen  ,  seroit  capable  de  confondre  celle  de  plu- 
sieurs Chrétiens  de  nos  jours.  Comme  elle  servoit  d  en- 
tretien à  l'un  et  l'autre  ,  il  ne  peut  qu'être  glorieux  pour 
ces  deux  grands  hommes  ,  d'en  raporter  quelques  traits 
choisis. 

«  '  Je  ne  connois  point  de  plus   grande  perfection  ,  dit      ma. 
ft  Pline  à  son  ami,  que  de  pardonner  avec  autant  de  bon- 


II  SIECLE. 


248  GEMINIUS,  HOMME  DE  LETRES. 

»  té,  que  si  chaque  jour  nous  tombions  en  des  fautes  que 
»  nous  voudrions  qu'on  nous  pardonnât,  et  de  les  éviter 
»  avec  autant  de  soin  que  si  personne  ne  nous  pardonnoit. 
»  Nous  ne  devons  avoir  rien  plus  à  cœur  ,  ajoute  Pline  , 
»  dans  toute  la  conduite  de  notre  vie  ,  soit  dans  notre  do- 
»  mestique  ,  soit  parmi  le  grand  monde ,  que  d'être  inexo- 
»  râbles  pour  nous-mêmes,  et  indulgens  pour  les  autres  , 
»  même  pour  ces  sortes  de  gens  qui  ne  savent  excuser 
»  qu'eux  seuls.  » 
piin.  1.  d.  19. 30.  Rien  n'est  plus  édifiant  que  ce  que  Pline  dit  ailleurs  à 

p.  602. 603.  Geminius  sur  le  détachement  des  richesses  ,  et  la  manière 

de  les  répandre.  Geminius  lui  avoil  fait  l'éloge  de  la  li- 
béralité de  Nonius  son  ami.  Pline  lui  répond  que  la  li- 
béralité est  toujours  digne  de  loiiange,  parce  qu'elle  est 
fort  rare  ,  l'avarice  s'élant  tellement  emparée  du  cœur  de 
l'homme,  qu'il  semble  qu'il  soit  plus  possédé  par  ses  ri- 
chesses qu'il  ne  les  possède  lui-même.  Mais  que  la  libéra- 
lité a  ses  règles.  Qu'il  faut  d'abord  être  content  de  ce  que 
l'on  a,  puis  en  aider  ceux  que  nous  savons  en  avoir  plus  de 
besoin.  Que  la  véritable  libiiralité  consiste,  non  à  imiter 
ces  personnes  qui  ne  donnent  qu'à  ceux  qui  sont  en  état  de 
rendre  davantage  ,  mais  k  donner  à  ceux  qui  sont  réelle- 
ment pauvres,  entre  lesquels  on  peut  distinguer  ses  pro- 
ches, ses  alliés,  ses  amis,  ses  compatriotes,  pour  les  pré- 
férer aux  autres. 

Ces  traits  de  morale  doivent  nous  faire  regreter  la  perte 
que  nous  avons  faite  des  letres  de  Geminius,  qui  en  trai- 
cp.  11.  p.  366.       toient  comme   celles  de  Pline,'  et  qui  faisoient  les  délices 
de  celui-ci.   Nous  n'avons  rien   non  plus  des  autres  écrits 
que  Geminius  préparoit  pour  le  public,  et  pour  la  perfec- 
tion desquels  il  avoit  demandé  des  mémoires  à  Pline. 
Hier,  in  joy.  1. 1.       '  On  trouvc  uu  Varius  Geminius  ('),  qui  étoit  un  excel- 
''•"''■  lent   Orateur,    selon   S.    Jérôme,    et  dont  le    même   Père 

écrivant  contre  Jovinien  ,  cite  cette  belle  sentence  :  Qui 
non  litigat ,  cœlebs  est.  Il  faut  se  résoudre  à  ne  point  prendre 
de  femme,  si  l'on  veut  passer  sa  vie  sans  dispute  et  sans  que- 
relle. Mais  nous  n'avons  point  de  preuve  que  cet  Orateur, 
très-peu  connu  d'ailleurs,  soit  le  même  que  Geminius, 
dont  nous  venons  de  faire  l'éloge. 

(11  Les  anciennes  éditions  de  S.   Jérdme   le  nomment  ainsi,   quoique  la  dernière  porte 
Varias  Geminos. 

RUFIN. 


RUFIN,  ORATEUR.  249 

============.       II  SIECLE. 


T 


RUFIN, 

Orateur. 

-^HEiiOMUS  '  Rl'fini's  ,  autrc  ami  de  Pline  le  jeune,  pim.  i.  *.  cp.  22. 
naquit  à  Vienne  capitale  de  la  Viennoise,  où  il  exer-  p-  **^- 
ça  depuis  une  des  premières  charges  de  Magistrature  de  la 
ville.  Il  fleurissoit  sous  l'empire  de  Trajan,  à  la  fin  du  siè- 
cle précèdent ,  et  au  commencement  de  celui-ci.  Pline 
n'en  parle  qu'avec  éloge,  et  comme  d'un  homme  d'un  mé- 
rite extraordinaire.  Aussi  réunissoit-il  en  sa  personne  tou- 
tes les  qualités  d'un  bon  citoïen ,  avec  cette  noble  liberté 
et  cette  prudence  qui  faisoient  le  caractère  des  Romains  de 
l'antiquité. 

'  Rufin  avoit  de  l'éloquence,  dont  il  semble  qu'il  avoit  fait  iwd. 
usage  en  hantant  le  Barreau  à  Rome.  Ce  fut  là  sans   dou- 
te qu'il   contracta  une  étroite  amitié  avec   Pline.  '  Ils   en-  1.  «.  ep.  is.  p. 
trerent    depuis  en  commerce  de  letres,  s'écrivant  ordinai-  *25-i3o. 
renient  l'un  à  l'autre  ce  qui  se  passoit  de   remarquable  dans 
leurs  villes.  Ils  en  usoient  ainsi,  tant  pour  leur  satisfaction 
mutuelle,  que  pour  se  former  par  la   connoissance  des  éve- 
ncmcns  divers.  Ce  sont  les    motifs  que  Pline   proposoit  à 
Rufin,  pour  l'engager  à  continuer  cet  aimable  commerce. 
Mais  de  toutes  les   letres  qu'ils  s'écrivirent  l'un  à  l'autre, 
il  ne  nous  en  reste  qu'une  seule  de  Pline,  dans  laquelle  il 
raconte  à  son  ami  quelques  avantures  assez   plaisantes  des 
fils  adopUfs  de  l'Orateur  Domilius  Afer. 

Il  se  présenta  sous  Trajan  une    ocasion ,  qui  fit  voir  que 
Rufin  étoit  un  aussi  grand  homme  de  bien,  que  le  pouvoit 
être  un  homme  élevé  dans  le    paganisme  ,  et  qui    donna 
beaucoup  de  relief  à  sa  vertu.  '  En  conséquence  du  testa-  ^^- «p- 2î.  p- 257. 
ment  d'une  certaine  personne,  on  avoit  établi  à  Vienne  des 
combats  où  des  hommes  tous  nuds  s'exerçoient  à  la  lutte,  (xxiv). 
Rufin  s'apercevant  que  cet  exercice  infâme  étoit  une  sour- 
ce de  corruption  pour  les  mœurs  de  ses  concitoïens,  '  l'a-  p*58. 
bolit  sans  détour,    pendant  qu'il  exerçoit   les  foncfions  du 
Duumvirat.    C'étoit  une   charge  établie  dans  les  villes    qui 
joùissoient  du  droit  de  Bourgeoisie  Romaine.  On  la  nom- 

Tome  I.     Prem.  Part.  K  k 

2  •  * 


p.  2,")7 
•  p.  258. 


250  ABASCANTE,  MEDECIN 

Il  SIECLE,     moit    Duumvirat,    parce    qu'elle    s'exerçoit  par  deux   per- 
sonnes  conjointement. 

De  mauvais  esprits  firent  à  Rufm  un  crime  d'une  action 
aussi  digne  de  louange,  prélc-i.dant  qu'il  n'avoit  pas  pour 
l'iin.  1. 4.  ep.  22.  ccla  unc  autorité  suffisante.'  L'affaire  fut  portée  à  Rome 
devant  l'Empereur.  '  Rufin  y  alla,  et  plaida  lui-même  sa 
cause  avec  autant  de  succès  que  d'éloquence.  Il  parla  avec 
tant  d'énergie,  de  sagesse  et  de  gravité,  que  non-seule- 
ment le  Sénat  aprouva  ce  qu'il  avoit  fait,  mais  que  même 
quelques  Sénateurs  opinèrent  à  ce  qu'on  en  fit  autant  à 
Rome. 


ABASCANTE, 

Médecin. 

Gai.  de  ani.  1.2.  i  lUscANTE  '  cxcrçoit  la  Médccinc  ù  Lyon  vers  les 
c.  12.  p.  233.  ^  commencemens  de  ce  second  siècle.  Il  paroît  qu'il  se 
rendit  célèbre  dans  sa  profession.  Galien  qui  ne  fleurissoit 
que  plusieurs  années  après  lui,  et  dans  des  lieux  assez  éloi- 
gnés de  Lyon,  a  eu  connoissance  et  de  sa  personne  et  de 
ses  écrits.  Il  témoigne  même  en  avoir  fait  quelque  estime 
par  l'honneur  qu'il  lui  a  fait  de  lui  donner  rang  entre 
les  Médecins,  dont  il  avoiie  avoir  profité.  Il  est  vrai  qu'il  en 
raporte  peu  de  chose,  ne  nous  aïant  conservé  que  le  secret 
,  de  son  antidote  ou  contre-poison. 

On  voit  par-là  qu'Abascante  avoit  écrit  sur  la  Médeci- 
ne ;  mais  on  ne  connoît  point  d'ailleurs  ses  ouvrages.  Seu- 
lement on  peut  juger  qu'ils  éloient  en  grec,  que  nous   a- 
vons  montré  avoir  été  une  langue  fort  connue  à  Lyon.  Ce 
qui  porte  à  en  juger  ainsi,  c'est  qu'il   n'étoit   pas  ordinaire 
aux  Grecs  de  lire  et  de  citer  des  Auteurs  latins.  C'est  tout 
ce  que  l'on  sait  et  peut-être   même  tout  ce  que  l'on   peut 
se  ilater  de  savoir  de  certain  touchant  ce  Médecin  Gaulois. 
Le  reste  se  réduit  à  de  simples  conjectures. 
K»,Ms».i(uî.t.  1.  p.       '  Un  Ecrivain  moderne  a  cru  qu'il  éloit  le  même    que 
cet  Abascante,    en  faveur  de    qui  Pline  le  jeune  écrivit   à 
l'Empereur  Trajan,   pour  lui  en  obtenir  le  droit  de   Bour- 
piin.i.  10.  p.  12.  geoisie  Romaine.'  Dans  ce  cas    notre  Médecin    se   seroit 
"*■  ^^"  nommé  Lucius  Salrius  Abascantius.  Mais  outre    que    Ga- 


SALVIUS  LIBERALIS,  ORAT.  251 

lien  ne  lui  donne  que  le  seul  nom  d'Abascante,  et  non  pas     ii  siècle. 
Abascance,  Pline    ne   le   qualifie   point  Médecin,  quoiqu'il 
en  use  de  même  dans  la  même  letre  à  l'égard  de  Posthu- 
mius  Marinus.  De  sorte  qu'il  y  a  tout   lieu  de  douter  que 
ce  soit  notre  Médecin  dont  parle  Pline  en    cette   ocasion. 

'  L'on  nous  a  conservé  une  épigramme  latine,  qui  porte  Epi.  et  po«.  vet.  i. 
le  nom  d'un  Quintus  Sulpitius  Abascantus.  Elle  est  sur  la  *•  ''•  '*"• 
passion  qu'il  avoit  conçue  pour  une  femme  de  mauvaise 
vie.  Mais  nous  n'avons  point  d'autres  preuves  pour  la  croi- 
re d'Abascante  qui  fait  le  sujet  de  cet  article,  que  l'identi- 
té de  nom,  ce  qui  est  un  assez  léger  fondement.  Au  reste 
cette  pièce  ne  feroit  pas  honneur  à  sa  mémoire,  même 
devant  d'honnêtes  Païens. 


SALVIUS   LIBERALIS, 

Orateur. 

TL  n'y  a  point  de  preuves  précises  que  cet  Orateur  ait 
été  Gaulois  de  nation.  Nous  ne  laissons  pas  néanmoins 
de  lui  donner  place  dans  cette  Histoire,  sur  ce  qu'il  nous 
paroit  avoir  été  ou  de  la  même  famille  qu'^Ebutius  Libe- 
ralis,  ce  Philosophe  de  Lyon,  dont  nous  avons  parlé  ail- 
leurs; ou  le  même  '  que  ce  Salvius  député  ou  Orateur  d'A-  pun.  i.  s.  ep.  n. 
quitaine,  à  qui  l'Empereur  Adrien  adresse  un  rescrit,  selon  p"^""^- 
Calistrate. 

Liberalis,  de  l'aveu  de  Pline  le  jeune,  qui  le  connois-  PUn-  ïij'J- 
soit   personnellement,  et  qui    étoit  bien   capable   d'en  ju- 
ger,   avoit   de    l'éloquence,    du   feu,   de    la    subtilité,   et 
beaucoup   d'ordre   dans   ses  pièces.  '  Il  hantoit  le  Barreau  Suet.  cm.  i. 
à  Rome  dès  l'Empire  de  Vespasien,  et  plaidoit  dès  lors  "' 
avec  quelque  réputation.    En   une    ocasion    qu'il  défendoit 
la  cause  d'un  homme  riche  en  présence  du  Prince,  il  lui 
échapa  de  dire  avec  véhémence  :  Que  cela  fait-il  à  l'Em- 
pereur qu'Hipparque  ait  un  million  de  bien?  Cette  saillie  tou- 
tefois ,  quoiqu'un  peu  hardie ,  remarque  Suétone  ,  ne  dé- 
plut pas  à  Vespasien,  qui  .étoit  naturellement  bon. 

Liberalis  continua  à  faire  usage  de  son  éloquence  dans  pun,  ii.i.i 
le  Barreau  sous  trois  autres  Empereurs  au  moins  :  Tite 

Kk  ij 


252       SALVIUS  LIBERALIS,  ORATEUR. 

H  SIECLE.     Domitien  et  Trajan,  l'espace  de  plus  de  quarante  ans.  On 
~  peut  juger  en  quelle  estime  il  éloit  à  Rome,  par  le  choix 
que  fit  de  lui  Marius  Priscus  pour  dc^fendrc  sa  cause  con- 
tre   le  célèbre  Tacite,   qui   de  voit  plaider  pour  sa   partie 
adverse. 

piin.  ibid.  p.  101.  '  Priscus  avoit  été  Proconsul ,  ou  Gouverneur  d'Afri- 
que, et  y  avoit  fait  des  concussions  criantes.  Il  en  fut  a- 
cusé  par  les  Africains;  et  sans  chercher  d'autre  voie  pour 

p.  103.  se  justifier,    il  demanda  à  paroître  en   justice   réglée.  'La 

cause  fut  plaidée  par  les  plus  habiles  Avocats  en  présence 
de  Trajan  et  de  tout  le  Sénat.  Liberalis  ne  pouvoit  trou- 
ver une  plus  belle  ocasion  pour  faire  valoir  son  éloquence. 

p.  108.  '  Aussi,   ajoute   Pline,  mit-il   en   usage  tout  ce  qu'il  avoit 

d'habileté.  Mais  cela  n'empêcha  pas  que  sa  partie  ne  fut 
condamnée,  comme  elle  le  méritoit. 

Si   notre    Orateur  est  réellement  le  même   que  Salvius, 
dont  parle  Calistrate,  il  aura  vécu  jusques  sous  l'Empire 

noi.  ihid.  d'Adrien.' On  dit  qu'il  fut  acusé  sous  Uomilien,  sans  nous 

en  apprendre  le  sujet.  11  n'étoit  alors  que  trop  ordinaire  de 
voir  d'honnêtes  gens  mis  en  cause,  sans  qu'ils  fussent  cou- 
pables. 


SENTIUS   AUGURINUS, 

PoETE. 


D 


E   tous  les  hommes  de  letres  dont  nous   avons   parlé 
jusqu'ici,  il  n'en  est  point  qui  ait   reçu  des  louanges 
plus  pompeuses  que  le  Poëte  qui  fait  le  sujet  de  cet  arti- 
cle. Aussi   a-t-il  eu   pour  Panégyriste  un  des  Ecrivains  le 
piin.  1. 4.  cp.  27 1    plus  poli  de  son  siècle.  '  C'est  Pline  le  jeune  son  ami  par- 
L^j.  op.  8.  p.  2(i3.  tieulier,  à  qui  il  sera  peut-être  arrivé  d'en   parler    plutôt 
selon  les  sentimens  de  son  cœur,  que  suivant  les  lumières 
de  son  discernement.  Au  moins  a-t-il  prévu  lui-même  qu'on 
pourroit  l'en  soupçonner, 
p.  865.  SMÎT.  'Augurin,  selon  cet  Auteur,  faisoit  dès  sa  jeunesse  l'or- 

nement de  son  siècle,  et  par  la  beauté  de  son  esprit,  et 
par  l'éclat  de  ses  vertus,  qui  n'étoient  néanmoins  que  des 
vertus  Païennes.  Dès  lors  son  mérite  étoit   si   connu,  et 


SENTIUS  AUGURINUS,  POETE.  253 

rendoit  sa  personne  si  aimable,  que  les  vieillards  les  plus  ii  siècle 
respectables  et  les  plus  distingués  dans  Rome,  se  tenoient 
honon's  de  sa  société.  En  ce  jeune  âge  il  passoit  son  tems 
partie  avec  le  célèbre  Vestricius  Spurinna  son  allié,  par- 
tie avec  l'illustre  Arrius  Anloninus  aïeul  maternel  de  l'Em- 
pereur Tite  Antonin.  '  11  eut  par-là  un  moïen  favorable  pun.  i.  3.  «p.  1 1 1. 
pour  cultiver,  pour  perfectionner  même  les  heureuses  dis-  Î53.''i^5.'ai8^  sss! 

f)Ositions  qu'il  avoit  pour  les  belles  lelres.  Les  deux  il- 
ustres  amis  avec  lesquels  il  étoit  lié,  en  faisoient  profes- 
sion dans  le  repos  honorable  dont  ils  joûissoient  alors,  et 
passoient  pour  gens  très-habiles  dans  l'une  et  l'autre  lan- 
gue, la  gréque  et  la  latine. 

Outre  les  qualités  du  cœur  et  de  l'esprit,  Augurin  avoit 
encore  de  quoi  soutenir  ses   liaisons,  par  le  relief  que  lui 
donnoit  sa   naissance.    '  Il   étoit   fils   de    Cnœus    Sentius  ,  «<>«•?  ses. 
Gaulois  de    nation,   qui   portoit  le  titre   d'Illustre,  le  plus 
honorable  parmi  les  Romains,  et  qui  s'étoit  signalé  dans 
la  guerre  contre  les  Juifs  et  les  Bretons.  '  C'est  sans  dou-  Pim.  làst.  1.  u.  c. 
te  le  même  Sentius  que  Pline  l'ancien  avoir  vu  exercer  la  "'  ''■  '**" 
Charge  de   Préteur.    De  même  il  y   a   tout  lieu  de  croire 
que  son  fils  dont  nous  parlons,  est  ce  Sentius  Augurinus 
qui  fut  Consul   l'an  132  avec  Arrius  Severianus. 

'  Augurin  hanta  le  Barreau,  où    il   plaidoit  quelquefois.  Piin.  1.  a.  op.  27. 
Nous  avons  observé  ailleurs,  que  les  anciens  Poètes,  jus-  ^'  ^^' 
(ju'à  Trajan,  en   usoient   ainsi.  '  Mais  son  talent   particu-  p.  ses. 
her  fut   pour  la   poésie.  Les   premières  productions  de  sa 
Muse   charmèrent  les    Savans  jusqu'à  l'admiration.   Il  in- 
titula  ce   premier  Recueil  Poëmatia,   c'est-à-dire   petites 
Poésies.  Il  y  en  avoit  de  toutes  les  espèces,  de  délicates, 
de  sublimes,  de  galantes,   de  tendres,  de    satyriques.  Jus- 
ques-là,  au  jugement  de   Pline  le  jeune,  on  n'avoit  rien 
vu  de  plus   achevé  en    ce   genre.  '  Les  pensées  en  étoient  p.  «er. 
vives  et  ingénieuses,  les  aplications  justes,   les  expressions 
énergiques,  et  tout  l'ouvrage  parfaitement  soutenu. 

'Ces  poésies  n'avoient  point  encore  paru  dans  le  public,  uud. 
lorsque  Pline  en  parloit  avec  tant  d'éloge  à  Falcon  son 
ami,  à  qui  il  en  promettoit  un  exemplaire,  sitôt  qu'elles 
auroient  vu  le  jour.  Seulement  Pline  en  avoit  eu  commu- 
nication. '  Elles  ne  tardèrent  pas  à  devenir  publiques,  et  i-  9-  «p-  s.  p.  56î. 
nous  ayons  encore  une  lettre  de  Pline  à  Augurin,  pour  le 
remercier  de  lui  avoir  donné    une  place  honorable  dans 


254  SENTIUS  AUGURINUS,  POETE. 

II  SIECLE,     son    Recueil.    Pline  le  félicite   dans   cette  letre   et  sur  la 

beauté  de  ses  vers,  et  sur  le  soin  extrême  avec  lequel  il 

écrivoit  toujours  en  faveur  de  ses  amis, 
piin.  1.  4.  cp.  27.  'Pline  nous  a  conservé  lui-même  l'endroit  de  ces  poë- 
l^^^  I  i'riap.  p.  gjgg  ^yj  |g  regarde.  On  le  trouve  encore  ailleurs  plus  cor- 
rectement que  dans  cet  Ecrivain.  Le  voici,  afin  que  le 
Lecteur  en  puisse  juger.  Ce  sont  des  vers  de  onze  syl- 
labes. 

Canto  cannina  versibus  minutis 
His,  olim  quibusct  meus  CatuIIus, 
Et  Calvus,  veteresque;  sed  quidad  me? 
Uaus  Plinius  est  mihi  prior  (')  :  is 
Mavult  versiculos  foro  rclicto, 
Et  quœrit  quod  amet  :  juvalque  araare 
Ulos.  Plinius  iile,  quid  Calones? 
I  nunc,  qui  sapias  amare  noli.  (XXV.) 

On  voit  par- là   que  Pline    aimoit  mieux  voir    Augurin 
ocupé  à  faire  des  vers,  qu'à  suivre  le  Barreau.  Il  y  a  pour- 
tant bien  de   la  différence  entre  l'ocupation  d'un  Poète  et 
celle  d'un  Orateur. 
Priap.  ii,i,i.  '  On   trouve  quelques  autres   vers    d' Augurin  parmi  les 

petites  poésies  imprimées  ordinairement  à  la  fin  de  la  saty- 
re de  Pétrone  sous  le  titre  d'Erronés  Venerei.  Mais  com- 
me ce  ne  sont  que  des  vers  erotiques,  ils  ne  valent  pas  la 
peine  que  l'on  s'y  arrête.  Nous  ne  savons  point  que  l'an- 
tiquité nous  ait  conservé  autre  chose  de  toutes  les  produc- 
tions de  notre  Poëte. 

(I)  On  Ut  prions  dans  le  texte  de  Plino  :  ce  qui  est  une  faute  assez  visible,  que  le  der- 
nier Editeur  a  sentie  sans  la  corriger. 


LUCIUS  ANN^US  JULIUS  FLORUS.      255 

LUCIUS  ANN^EUS  JULIUS 
FLORUS, 

Historien  et  Poète 


II  SIECLE. 


8- I- 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

ICI  se  présente  à  éclaircir  une  de  ces  contestations ,  que 
l'amour  pour  la  gloire  de  la  patrie  fait  quelquefois  naîr 
tre  entre  deux  nations  différentes,  sans  altérer  la  paix  qui 
règne  entre  elles.  En  voici  le  sujet  en  peu  de  mots.  '  Les 
Espagnols  prétendent  que  Florus  étoit  de  leur  nation;  et 
en  conséquence  ils  l'ont  mis  au  nombre  de  leurs  Ecrivains. 
C'est  ce  que  nous  croïons  ôtre  en  droit  de  leur  disputer , 
prétendant  h  notre  tour  qu'il  étoit  plutôt  Gaulois  (ju'Es- 
pagnol.  Il  seroit  fort  inutile  pour  apuïer  la  prétention  de 
nos  Contendans,  d'alléguer  la  possession  où  ils  se  sont  mis 
de  cet  Historien.  Un  titre  de  cette  nature  est  assez  frivo- 
le, et  toujours  insuffisant  pour  prescrire.  Il  s'agit  d'une 
sorte  de  bien,  qui  ne  souffre  jamais  de  {)rescription.  Lors- 
qu'on a  droit  d  y  prétendre ,  on  est  toujours  reçu  à  le  re- 
vendiquer. 

Mais  quelle  est  la  prétention  la  plus  légitime  et  la  mieux 
fondée?  Est-ce  celle  des  Espagnols?  Est-ce  la  nôtre?  Le  lec- 
teur judicieux  en  va  juger  lui-môme? 

'  D'abord  nos  Contendans  conviennent  que  la  leur  n'est 
apuïée  sur  aucune  preuve  décisive.  Nous  convenons  de 
la  même  chose  par  raport  à  la  nôtre.  Il  ne  se  trouve  rien 
ni  dans  le  texte  de  l'ilistorien  dont  il  est  ici  question,  ni 
dans  les  Auteurs  contemporains,  ou  ceux  qui  l'ont  suivi 
de  près,  sur  quoi  l'on  puisse  se  fonder  pour  le  faire  plutôt 
Espagnol  que  Gaulois  ,  plutôt  Gaulois  qu'Espagnol.  Jus- 
qu'ici nous  nous  trouvons  égaux  en  preuves  de  part  et 
d'autre. 

Il  y  a  deux  autres  choses  qui  peuvent  aider  à  décider  le 


Itib.  Hisp.  l. 
79.  n.  351 . 


I.  p. 


n.  35t. 


256     LUCIUS  ANN^US  JULIUS  FLORUS. 

II  SIECLE,     différend  :   la  tradition  des  siècles  postérieurs  à  notre  His- 

— torien,  et  les  divers  noms  qu'il  a  portés.  Pour  la  tradition, 

si  nous  la  reprenons  du  plus  loin,  elle  n'est  pas  assurément 
favorable  aux  Espagnols  ;  et  l'Auteur  de  la  Bibliothèque  de 
leurs  Ecrivains  l'a  bien  senti. 

En  effet  depuis  le  règne  de  la  critique,  tous  ou  presque 
tous  ceux  qui  ont  parlé  de  notre  Historien,  ou  l'ont  pris 
pour  Julius  Florus  l'Orateur,  comme  la  Popeliniere;  ou 
pour  Julius  Secundus,  comme  Raphaël  MafTei  de  Volter- 
Quini.  ins.  1.  10.  TC,  ct  par  couséqucut  l'ont  regardé  comme  Gaulois  :  '  ou 
Lu  iTumII^so;  bien  ils  l'ont  cru  descendu  de  l'un  de  ces  deux  Orateurs 
Gaulois,    comme   Raphaël   le    Roi,    Turnebe,  Vossius,  ce 

aui  revient  à  la  même  chose  par  raport  au  point  que  nous 
iscutons.  '  D'autres,  comme  Christophe  de  Longueil,  qui 
*"'■*"'=•  fleurissoit  dès    le    commencement  du  XVI  siècle,  sont  en- 

core allés  plus  loin,  et  n'ont  point  fait  difficulté  de  compter 
Florus  au  nombre  des  Savans,  que  nos  Gaules  ont  donnés  à  la 
République  des  letres.  Ce  n'est  pas  tout. 

Cette  tradition,  à  la  bien  prendre,  remonte  bien  plus 
haut  que  le  XV  siècle,  où  vivoienl  quelques-uns  des  ga- 
rants que  nous  en  venons  de  citer.  Car  ou  Florus  portoit 
originairement  le  prénom  de  .Tulius  que  lui  donnent  les 
manuscrits,  ou  il  ne  lui  a  été  donné  que  dans  la  suite  des 
tems.  S'il  le  portoit  originairement,  cela  ne  peut  que  fa- 
voriser notre  opinion,  puisque  cet  Auteur  aura  eu  les  deux 
noms  que  portoit  la  famille  des  Florus.  S'il  ne  lui  a  été 
donné  que  dans  la  suite,  on  ne  l'a  fait  que  parce  qu'on  l'a 
cru  descendu  de  cette  même  famille.  Or  comme  les  ma- 
nuscrits où  il  porte  ce  prénom ,  sont  anciens ,  la  tradition 
qui  le  fait  Gaulois  de  nation  ne  peut  aussi  être  qu'an- 
cienne. 

Tout  le  fondement  de  la  prétention  des  Espagnols  se 
réduit  donc  au  seul  nom  d'Annaeus ,  que  notre  Historien 
se  trouve  avoir  porté.  L'on  ne  peut  disconvenir  que  ce. 
nom  ne  soit  celui  d'une  famille  Espagnole ,  qui  étoit  celle 
des  Séneques.  Mais  l'on  doit  convenir  aussi  que  le  nom  de 
Florus  qu'il  portoit  également,  et  sous  lequel  il  a  toujours 
été  plus  connu,  est  le  nom  d'une  famille  Gauloise.  Nous  voilà 
donc  de  ce  côté-là  aussi  autorisés  que  les  Espagnols  à  reven- 
diquer cet  Historien. 
Mais  quoi  !  aura-t-il  été  et  Gaulois  et  Espagnol  ?  Non , 

disent 


HISTORIEN  ET  POETE.  257 

disent  nos  Contendans.   Le   nom  de  Florus  ne  lui  sera  ve-     ii  siècle. 
nu,  que  de  ce  qu'il  aura  été  adopté  dans  la  famille  de  ce  ' 

nom,  qui  étoit  Gauloise.  On  ne  peut  rien  de  plus  ingé- 
nieux. Mais  d'où  sait-on  ce  fait  sur  lequel  l'histoire  garde 
un  profond  silence?  Vossius,  dit-on,  le  croit  ainsi.  Vossius 
est  un  habile  homme;  mais  il  est  aussi  un  Auteur  trop  récent, 
pour  le  croire  sur  un  fait  qu'il  n'a  tiré  que  de  son  propre 
fonds,  sans  en  avoir  nulle  preuve.  De  sorte  que  nous  som- 
mes autant,  et  peut-être  plus  en  droit  que  lui,  de  dire 
que  le  prénom  d'Annœus  que  porte  Florus,  lui  sera  venu 
de  son  adoption  dans  la  famille  d'Annaea,  qui  étoit  Es- 
pagnole. 

Nous  disons  que  nous  sommes  peut-être  plus  en  droit 
de  faire  cette  conjecture,  que  Vossius  la  sienne.  En  voici 
la  raison.  C'est  que  depuis  la  fin  de  l'Empire  d'Auguste 
presque  tous  ceux  que  l'on  connoît  avoir  été  adoptés  par 
d'autres,  prenoient  pour  prénom  le  nom  de  la  famille  de 
ceux  qui  les  adoptoient.  Les  letres  de  Pline  le  jeune  nous 
en  fournissent  plusieurs  exemples.  Or  Florus  avoit  Annœus 
pour  prénom,  et  paroît  par  conséquent  avoir  été  plutôt  adopté 
par  les  Annœus  que  par  les  Florus. 

Peut-être  trouvera-t-on  mauvais  que  nous  nous  soions 
si  fort  étendus  sur  cette  dispute.  Mais  la  crainte  d'être 
soupçonnés  de  trahir  en  cette  rencontre  la  cause  de  notre 
nation,  n'a  pu  nous  permettre  de  dissimuler  ce  qui  nous  a 
paru  le  plus  vrai-semblable  sur  ce  point  de  critique. 

Florus   étoit  donc   probablement  Gaulois  de   nation.   Il 
pouvoit  descendre  ou  de  l'Orateur  de  même  nom,  ou  de 
Julius  Secundus  son  neveu.  '  Il  fleurissoit  dès  l'Empire  de  pior.  pr.  p.  3. 
Trajan,  '  et  continua  à  briller  sous  celui  d'Adrien.  Il  pa-  spr.  vit.  Adr.  n. 
roît  qu'il  passa  presque  toute  sa  vie  à  Rome.  '  Il  prenoit  J  ^ 
beaucoup  de  plaisir  à  la  versification.  Aussi  le  style  de  l'his-      "''  ^'' 
toire  qu  il  nous  a  laissée,  se  sent-il  d'un  naturel  porté  à  la 
poésie.  '  Il  est  sans   doute  le  même  que  le  Poëte  Florus,  spar.  iwa. 
qui  s'exerçoit  avec  l'Empereur  Adrien  à  faire  des  vers.  Ils 
en   faisoient    quelquefois    l'un    contre   l'autre.  Il   nous   en 
reste  d'Adrien  contré  lui,  lesquels  ne  sont  pas  honorables 
à  sa  mémoire.  Florus  y  est  représenté  comme  un  homme 
mal-propre  qui  hantoit  les  cabarets  :  ce  qui  étoit  très-in- 
fame  même  parmi  les  Païens.  '  Il  ne  laissa  pas  de  se  faire  pior.  iwd. 
de  la  réputation  par  son  talent  pour  la  poésie,  '  et  encore  Quim.  ibid  1  Bon. 
Tome  I.  Prem.  Part.  Ll  -'-p-^- 


258      LUCIUS  ANNyEUS  JULIUS  FLORUS. 

M  SIECLE,     plus  par  celui  qu'il  avoit  pour  écrire  l'histoire.  On  le  regarde 
communément  comme  le  meiller.r  Historien  qui  ail  paru  de- 
puis les  siècles  de  la  pure  latinité. 

g.    IL 

SES   ECRITS. 


G 


lOîME  Florus  étoit  Historien  et  Poëte,  il  laissa  di- 
vers ouvrages  en  l'un  et  l'autre  genre  de  literature. 

Fior.  r-  3-100.  i"-  '  Nous  avons  de  lui  un  abrégé  de  l'Histoire  Romai- 

ne, depuis  Romulus  ju.squ'à  Auguste  inclusivement.  Il  est 
divisé  en  quatre  livres,  dont  le  premier  commence  à  Ro- 
mulus, le  second  à  la  première  guerre  Punique,  le  troisiè- 
me à  la  guerre  de  Jugurlha,   et  le   quatrième  à  celle  de 

pr.  \).  2.  Catilina.    '  L'Auteur   avertit ,  qu'épouvanté    par    la   gran- 

deur et  la  diversité  de  sa  matière ,  qu'il  se  croïoil  incapa- 
ble de  traiter  avec  étendue,  il  a  imité  les  Géographes, 
qui  représentent  en  petit  les  vastes  païs  qu'ils  ont  dé- 
couverts. 

up.s.  dcc.  1.  2.  c.       '   Ce  n'est  point  un  abrégé  de  Tite  Live,  comme  quel- 

aues  Ecrivains  l'ont  avancé,  et  comme  on  l'a  mis  à  la  tête 
c  quelques-unes  des  éditions  de  cet  abrégé;  puisque  sou- 
vent  Florus    ne  s'accorde  pas  avec  cet  Historien.  L'Abre- 
viateur  a  puisé  ce  qu'il  raporte,  dans  divers  Auteurs  qu'il 
a  négligé  de  nommer. 
Tiii.  Emp.  t.  2.  p.      '   On  ne  s'acorde  pas  unanimement  sur  le  tems  auquel 
rfiyris'uih'pii.p.'  t'iorus    a   écrit    son    abrégé.  Les  uns  veulent  que  ce  soit 
k-,.  2.  sous  Trajan ,  d'autres  sous  Adrien  ;  et  quelques  autres  en 

reculent  même  l'époque  jusqu'à  l'Empire  de  Severe ,  à  la 
fin  de  ce  second  siècle.  Il  faut  avouer  que  l'opinion  de  ces 
Fior.  pr.  p.  3.  dcmicrs  trouve  son  fondement  '  dans  le  texte  même  de 
notre  Historien,  qui  ne  compte  guères  moins  de  deux  cens 
ans  depuis  la  mort  d'Auguste  jusqu'au  temps  qu'il  écrivoit.- 
not.  '  Mais  il  y  a  toute  apparence  que  cet  endroit  est  corrompu, 

et  qu'au  lieu  de  cent,  écrit  originairement  en  chiffre  Ro- 
main, les  copistes  peu  atentifs  auront  mis  deux  cens, 
pr-  p.  3.  Cet  endroit  ainsi  rétabli,  '  et  ce  que  Florus  dit  du  lustre 

3ue   reprenoit   l'Empire  sous  le  règne  de  Trajan,  comme 
'une  cnose  qui  se  passoit  actuellement  alors,  nous  déter- 
mine à   croire  que  notre  Historien  a  fait  son  abrégé  sous 


HISTORIEN  ET  POETE.  259 

le  règne  de  cet  Empereur,  vers  l'an  110,  environ  quatre-  usiecli:. 
vint-quatorze  ans  après  la  mort  d'Auguste.  Voilà  juste- 
ment  l'espace  de  guéres  moins  de  cent  ans  qu'il  compte 
lui-même  selon  la  correction  que  nous  venons  de  marquer, 
depuis  Auguste  jusqu'au  tems  qu'il  travailloit  à  son  ouvra- 
ge. On  a  beau  raisonner  ,  les  paroles  suivantes  qui  termi- 
nent la  petite  Préface  de  Florus  ,  désignent  nettement  le 
règne  actuel  do  Trajan,  et  ne  peuvent  souffrir  toute  autre 
opinion  :  Nïsï  quod  sub  Trajano  principe  movet  lacertos,  et 
prœter  ipem  omnium,  aenectus  imperii,  quasi  reddita  juven- 
tute ,  revirescit, 

'L'Abrégé  de  Florus  est  fort  estimé  même  des  plus  habi-  Tai.ibid.iBon.iiui. 
les  connoisseurs.  Le  style  en  est  concis,  élégant,  agréable  ;  "*""■  ''"  "''■ 
et  il  y  a  beaucoup  de  choix  dans  la  matière.  On  blâme  tou- 
tefois   l'Abreviateur    d'avoir    renversé  en  quelques  endroits 
l'ordre    des  tems  ,  '  et  de  s'ocuper  si  entièrement  à  loiier  Fab.  uib.  i.a.  \>. 
les  grands  exploits  du  peuple  Romain  ,  qu'il  fait  moins  le  **^- 
personnage    d'Historien    que   d'Orateur.  On  juge  aussi  que 
son  style  est  trop  fleuri,  et  qu'il  aproche  plus  de  celui  d'un 
Poëte,  que  de  celui  d'un  Historien. 

2".  Ou  n'est  pas  éioigné  de  croire  que  les  abrégés,  ou  p.  isc  |  Tiii.  ilm. 
sommaires  des  livres  de  l'histoire  de  Tite  Live  ,  qui  se 
trouvent  à  la  tête  de  cet  Historien,  et  à  la  fin  de  plusieurs 
éditions  de  Florus,  aparticnncnt  à  notre  Abreviateur.  Ils 
sont  au  nombre  de  cent  quaraîite  ,  et  ainsi  des  Livres  de 
Tite  Live  que  nous  avons  perdus,  comme  de  ceux  qui  nous 
restent.  Il  a  pu  néanmoins  se  faire  que  l'idée  qu'on  a,  que 
ces  sommaires  sont  l'ouvrage  de  Florus,  ne  soit  venue  que 
de  l'opinion  de  ceux  qui  ont  cru  mal-à-propos  que  son  his- 
toire éloit  un  Abrégé  de  celle  de  Tito  Live. 

3".  '  11  nous  est  resté  quelques  petites  pièces  de  poésies  de  simr.  v;i.  Aar.  n. 
Florus.  Spartien  nous  en  a  conservé  trois  vers  badins  con-  î"!  p.''?!)'/'"''" '"' 
tre    l'Empereur    Adrien  ,  qui  y  répond  par  quatre  autres. 
On  a  réimprimé  ailleurs  ces  mêmes  vers  qui  sont  très-peu 
de  chose. 

'  Divers  Savans  croient  devoir  donner  aussi  à  Florus  le  f.^iî,' ;  ""'■  ^gy*^^' 
petit  poëme  de  qualitate  vitœ,  et  l'épigramme  (*)  sur  lesro-  sa'iVab.'  iuu.  p'. 
ses.    Pierre   Pithou   avoit  d'abord  publié  le  poëme  sous  le  *"'' 
nom  de  Floride.  Il  se  trouve  ailleurs  plus  correct;  et  M. 

(>)  Cet!»  é:>igrainino  est  diCfércntu  du  Tlttyllo  d'Ausono  sor  lu  mcuc  sujet. 

L  1  ii 


260     LUCIUS  ANN^US  JULIUS  FLORUS, 

Il  SIECLE  Scriverius  assure  que  le  manuscrit  d'où  il  l'a  tiré,  l'atribue 
à  Florus,  aussi-bien  que  l'épigrarame  sur  les  roses.  Il  n'est 
pas  même  éloigné  de  croire  que  le  Pervigilium  Veneris  est 
aussi  de  notre  Poëte.  Vossius  lui  donne  encore  la  tragédie 
intitulée  Octavie  ,  qui  est  la  dernière  de  celles  qui  portent 
le  nom  de  Seneque.  Mais  il  n'en  aporte  point  de  preuve; 
8i'''n"i59.'  '■'■''■  '  ^*  1®  ^-  ^"^'  prétend  que  c'est  faire  injure  à  Florus  que 
de  lui  atribuer  cette  pièce. 

§.  m. 

EDITIONS   DE   SON  HISTOIRE. 

L'estime  qu'on  a  toujours  faite  de  l'abrégé  de  Florus , 
nous  en  a  procuré  un  grand  nombre  d'éditions;  et 
l'usage  qu'en  fait  la  jeunesse  qui  suit  le  Collège,  a  beau- 
coup contribué  à  les  multiplier.  Mais  la  plupart  de  cel- 
les-ci ne  valent  pas  la  peine  qu'on  s'y  arrête.  Ainsi  nous 
les  laisserons,  pour  ne  parler  que  des  plus  considérables. 
On  ne  sait  pas  précisément  quelle  a  été  la  première  édi- 
tion de  cet  ouvrage  ,  parce  qu'il  s'en  trouve  quatre  dif- 
férentes sans  nulle  date  ;  quoiqu'elles  paroissent  ou  de  la 
fin  du  XV  siècle,  ou  tout  au  moins  du  commencement  du 
Bib.  Vatic.  suivaut.  '  La  première  de  ces  quatre  éditions  est  celle  que 

Marc-Antoine  Sabellicus  donna  au  public  ,  avec  l'abrégé 
de  Trogue  Pompée  par  Justin.  Ni  le  lieu  où  elle  parut  , 
ni  le  nom  de  l'Imprimeur  n'y  sont  point  marqués.  On  lit 
à  la  fin  une  petite  épigramme  où  1  on  fait  entendre  sans 
sujet,  que  l'histoire  de  Florus  est  un  abrégé  de  Tite  Live. 
...  Lugd-Bat.  p.  'La  seconde  de  ces  quatre  éditions  sans  date  est  en  un  volu- 
**■*•  '•  me  in-folio,  sans  nom  ni  d'Imprimeur  ni  de  lieu  où  elle  a  été 

...  ff.  Praed.  Cen.  £j^'|g  /  [^a  troisiémc  sortit  des  presses  de  Jean  de  Bonne- 
mere  Imprimeur  à  Paris,  et  se  débita  chez  Jean  Petit. 
Elle  est  en  un  volume  2«-4°,  dans  lequel  on  a  joint  l'abre-. 
gé  de  Justin  et  Sextus  Rufus.  L'Editeur  parolt  avoir  été 
Jean  Lermite  de  Montmirel ,  dont  il  y  a  une  épigramme 
...Cas.  Ben.  qui  sc  lit  à  la  tête  du  volume.  '  La  quatrième  se  débita 
aussi  à  Paris  chez  Jean  Petit  en  un  volume  m-8°  avec  Justin 
et  Sextus  Aurelius  Victor.  Il  y  est  marqué  qu'elle  fut  faite 
sur  celle  qu'avoit  déjà  publiée  M.  Ant.  Sabellicus. 
...  Hisp.  t.  r.  p.      'En  IblO  Aide  imprima  à  Venise  l'ouvrage  de  Florus. 


t*  »  ^* 


HISTORIEN  ET  POETE.  261 

On  ne   caractérise   point   autrement   cette  édition.  Freins-     ii  siècle 
hemius  en  fait  beaucoup  de  cas. 

'Deux  ans  après  en  1512  parut  à  Paris  en  un  volume  Bib.Lugd.-Bat. 
in-folio  celle  dont  Philippe   Beroalde    enrichit  la  Républi-  '^'^• 
que  des  letres. 

'  Pierre  Danès  en  fit  présent  d'une  autre  au  public  ,  a  •■•  cas.  Ben. 
laquelle    il    joignit   l'abrégé    de   Trogue  Pompée  et  Sextus 
Rufus.  Cette  édition  qui  est  aussi  en  un  volume  in-folio,  fut 
faite   à  Paris  chez   Antoine   Assurde  pour  Jean  Petit  l'an 
1519. 

'  A  Venise   Aide  réimprima  en  1521  l'ouvrage  de  Flo-  cesn.  Bib.  «ni.  «. 
rus,  avec  cinq  livres  de  l'histoire  de  Polybe,  sur  la  revi- 
sion   qu'en    avoit  faite  Nicolas  Perotti.  '  Cette  édition  fut  Bib.  s.  steph. mr. 
suivie  de  celle  que  Bade  publia  à  Paris  l'an  1524  ,  avec 
Justin  et  Sextus  Rufus,  le  tout  en  un  volume  in-folio. 

'  Jean    Riculius   Vellini ,   Cordelier,  surnommé  Camers  ...  cas.  Ben| ... 
du  lieu  de  sa  naissance,  revit  l'abrège  de  Florus,  qu'il  en-    "''" 
richit  de  notes,  et  le  fit  imprimer  à  Strasbourg  chez  Jean 
Hervagius  l'an  1528  en  un  volume  m-S".' L'Auteur  de  la  . . .  Lugd-Bat.  iwa. 
Bibliothèque  des   Ecrivains  Espagnols  met  par  erreur  cette 
édition  à  Basle,    où  l'ouvrage  ne  parut  que  l'an  1532,  en 
un  volume  in-folio  avec  Sex.  Rufus.  Ce  fut  sur  l'édition  de 
Jean  Camers,    et  avec  ses  notes  que  Florus  fut  réimprimé 
dans  les  villes  suivantes:  '  à  Cologne  chez  Gemnycus  l'an  Gesn.  iwd. 

1537  en  un  volume  2n-8":  '  à  Maience  l'an  1547,  en  mê-  Bib.  s.  vin.  cen. 
me    volume  ,    dans  lequel  se  trouvent  aussi  Sex.  Rufus  et 

Messala   Corvinus  ,    ce   dernier  imprimé  pour  la  première 

fois:  '  à  Basle  chez  Henri  Pétri  l'an  1557,  avec C.  Julius  ...  ff. Min.  cen. 

Solinus  et  Pomponius  Mêla,  le  tout  en  un  volume  in-folio  : 

'  à  Paris  chez  Jérôme  de  Marnef  l'an  1564.  Mais  au  lieu  ...  s,  Aib.  And. 

de  Solin  et  de  Mêla,  cette  édition  qui  est  m-8°  est  acom- 

pagnée    de   Velleïus  Paterculus  ,    Sex.    Rufus    et  Messala 

Corvinus. 

'  En   1533  les  héritiers  d'Aide  réimprimèrent  à  Venise  •••  s.  Pet.  Burg. 
en  un  m-8'',  l'ouvrage  de  Florus  ,  avec  les  sommaires  de 
Tite-Live    qu'ils   placèrent    à  la  tête.  '  Cinq  ans  après  en  ...ff.  Min.  cen. 

1538  François  Gryphe  le  remit  aussi  sous  la  presse  à  Pa- 
ris. Cette  édition  est  en  un  volume  in-^"  et  parfaitement 
belle. 

'  Il  y  eut  une  autre  édition  de  Florus  l'an  1542,  encore  •••  Hi«p.  ibid. 
à  Paris  chez  Chrestien  Wechel,  qui  y  joignit  Sex.  Rufus, 

2  2 


Il  SIECLE. 

•  Dlb.  S.  Vin.  ccn. 

...   Colb.   l.  2.  p. 
538. 

.  . .  BodI.  ibid. 

262     LUCIUS  ANNiEUS  JULIUS  FLORUS, 

et  une  autre  à  Maïence  l'an  1551  en  un  volume  tn-i". 
"  Celle-ci  fut  suivie  d'assez  près  de  l'édition  qui  parut  à 
Paris  chez  Thomas  Richard  l'an  1556  m-4°. 

'  Elle  Vinet  à  son  tour  donna  aussi  l'ouvrage  de  Florus, 
qu'il  croïoit  être  un  abrégé  de  Tite  Live.  Son  édition 
parut  à  Poitiers  en  1563,  puis  '  à  Paris  l'an  1575  en  un  m- 
4°  où  il  est  marqué  que  c't'loit  pour  la  troisième  fois  que 
l'Editeur  avoit  revu  le  texte.  Nous  n'avons  pu  décou- 
vrir l'autre  édition  de  Vinet,  qui  semble  avoir  précédé 
celle-ci. 
..  a.  Prœd.  cen.  '  Aorès  tant  d'éditions  de  Florus,  Jean  Stadius  Profes- 
seur d'histoire  et  de  mathématiques  à  Paris,  en  prépara 
une    nouvelle ,    qui  parut  d'abord  chez  Christophe  Plantin 

...  Hisp.  ibi.j|Boid.  à  Auvcrs  l'an  1507  m-S".  '  Elle  vit  de  nouveau  le  jour  à 

Bib.  b.st.  p.  170.  Cologne  en  1569.  Depuis  Jérôme  Stadius,  fils  de  l'Edi- 
teur, la  revit  après  la  mort  de  son  père,  et  la  fit  paroitre 
derechef    à  Anvers  chez    Planlin  en   1584,   et  à  Cologne 

Bib.  cord.  p.  228.  les  anuécs  1592  et  1600.  'Elle  fut  encore  renouvellée  à 
Anvers    chez    Martin   Natius  l'an  1607  en  même  volume, 

...  s.  Pot.  Mon.     '  et  à  Oxfort  l'an  1631  en  un  volume  m-12. 

Depuis  la  troisième  édition  de  Stadius  ,  l'abrégé  de 
Florus  fut  inséré  dans  le  recueil  des  Ecrivains  de  l'histoire 
Romaine  imprimée  différentes  fois,  comme  à  Francfort 
en  1588,  à  Genève  en  1609,  à  Ilanaw  en  1611,  et  encore 
à  Genève  en  1653. 

Boid.  ibii.  'Jean  Gruter  voulut  aussi   enrichir  le  public  d'une  nou- 

velle  édition   de   Florus.    Celle    qu'il    en    prépara ,  parut 

uib.  ff.  piiiîd.  Cen.  chcz   Commcliu  l'an    1597   en   un  volume  m-S",  '  puis  à 

Lyon  chez  Claude  Morillon  l'an   1606  en  un  volume  m- 

. .  Coni.  ibiti.       16,  '  ensuite  à  Ileidelberg  chez  Commelin  l'an  1606  m-8°. 

Un    a   joint    dans    cette  dernière  édition  les  notes  de  Sau- 

. .  s.  Scrg.  And.  maisc  à  celles  de  Gruter.  '  La  même  édition  vit  encore  le 
jour  à  Paris  chez  Sebastien  Cramoisy  l'an  1636  en  un  in- 
16  dans  lequel  on  a  uni  à  Florus,  Sex.  Rufus  Festus  revu 
par  Pierre  Pithou. 

Boid.  ibid.  '  Oi»    trouve  encore  d'autres  éditions  de  Florus  faites  h 

Bib.  s.  Vin.  Ccn.  Lyou  cu  1599  2w-4°,  à  Cologne  1595  2^-8",  '  à  Genève  chez 
Jean  Vignon  l'an  1606,  avec  les  notes  d'Elie  Vinet,  de  Jean 
Camers,   de  Juste  Lipse,   de  Gruter ,  et  les  sommaires  de 

...  Cord.  p.  230.  Titc  Livc  avcc  les  notes  de  Sigonius.  '  Florus  a  aussi  été 
imprimé    à   Leyde   chez  Rafflenghen  l'an  1607  m-8°  arec 


HISTORIEN  ET  POETE. 


263 


Velleïus  Paterculus  et  quelques  autres  HistoFiens  :  ,,  à 
Amsterdam  chez  Guillaume  Jansson  l'an  1625 ,  ''  et  au 
même  endroit  chez  Jean  Jansson  l'an  1630  m-16.  sans  no- 
tes ,  mais  avec  les  Historiens  précédens  :  '  à  Leyde  chez 
Jean  de  Maire  l'an  1632  en  même  volume  et  avec  les  mê- 
mes Historiens  et  les  notes  de  Marc  Boxhorn-Zuerius  :  '  et 
dès  1631  à  Rouen  chez  Jean  de  la  Marc  en  un  volume 
m-12.  Cette  édition  est  remarquable  en  ce  qu'elle  donne 
à  Florus  le  prénom  de  Séneque. 

'  Celle  que  Jean  Freinshemius  avoit  préparée  ,  parut  à 
Strasbourg  l'an  1632  en  un  volume  m-8°.  Elle  est  enrichie 
de  notes,  d'une  chronologie  et  de  tables  très-utiles;  et  les 
Savans  en  font  beaucoup  de  cas.  Ce  fut  sur  cette  édition 
que  l'on  réimprima  encore  Florus  les  années  1636  '  et 
1669  au  même  endroit  chez  Dolhophius ,  et  en  même 
volume. 

Dès  1633  parut  î/î-8°  à  Ilardervik  chez  Nicolas  de 
Viengen  une  autre  édition  de  Florus  avec  les  notes  poli  - 
tiques  de  Jaques  Zovecotius  ;  '  et  depuis  à  Amsterdam 
chez  Jansson  en  1633  îw-24,'  et  encore  à  Ilall  en  1665 
m-12. 

'  Il  y  en  eut  une  autre  édition  avec  Lucius  Ampelius ,  et 
les  notes  de  Saumaise  et  d'autres  Savans.  Celle-ci  qui  est 
en  même  volume  que  la  précédente,  fut  faite  en  1638  à 
Leyde  chez  les  Elzovirs ,  '  qui  remirent  Florus  sous  la  pres- 
se en  1648,  et  y  joignirent  les  mêmes  notes  avec  quelques 
autres  nouvelles  :  le  tout  en  un  volume  ïw-8°.  Le  texte  de 
cette  édition  avoit  été  revu  par  Blanchard. 

'  En  1655  on  vit  paroître  au  même  endroit  et  en  même 
volume  celle  que  Saumaise  avoit  préparée  en  revoïant  le 
texte  sur  un  manuscrit  ancien  de  huit  cens  ans.  Elle  est 
enrichie  de  notes  ,  et  fort  estimée.  '  Elle  servit  de  modèle 
à  celles  qui  furent  faites  au  même  endroit  l'an  1657  m-12 
avec  Lucius  Ampelius  :  à  Roterdam  l'an  1670  en  même 
volume  :  '  et  dès  1660  à  Amsterdam  chez  les  EIzevirs  in- 
8°.  '  Florus  fut  encore  réimprimé  à  Paris  chez  Claude  Thi- 
boust  en  1661  m-16  avec  les  notes  de  Jean  Isaac  du  Pont. 
'  Rutger  Hermand  en  donna  une  nouvelle  édition  à  Ni- 
megue  en  1662.  '  Ensuite  Arnoul  Leers  réimprima  à  Ro- 
terdam l'Abrégé  de  Florus  avec  les  observations  de  Jean 
Minellienl664etl670. 


IISIECLE. 

«  Bib.  D.  do  Lorcli. 
"...  S.  Flor.  Sal. 
...ff.    PrseJ.   Cen. 

...S.    Pet.   Mon. 


...  Bal.  (.  I.  p. 
760  I  Fab.  I!ib.  lat. 
p.  tiô. 


Blouin.  Cens.  aut. 
p.  186. 


Bib.  Corp.   p.  23S. 

.. .  Hisp.  iliid. 
...  Kon.  p.  483. 

...  S.   Serg.  And. 


...  T.!ll.  n.  i>78. 


...  Lugil.'Da!.  il). 


...  Kon.  ibid. 


. . .  Hisp.  ibid. 
. . .  Miss.  cent. 

Fab.  ibid. 
Bib.  Hisp.  ibid. 


264     LUCIUS  ANNyEUS  JULIUS  FLORUS, 

II  SIECLE.        ,  L'année  1672  en  vit  deux  différentes  éditions  ,  l'une 
ui  fut  faite  à  Amsterdam  chez  les  Elzevirs  avec  les  notes 


3U1  lut  laite  a  Amstcraam  cnez  les  tLizevirs  avec  les  noies 
_.^ „.  e  divers  Savans,  et  l'autre  qui  parut  à  Saumur  chez  René 

Pean  m-16,  par  les  soins  de  Tannegui  le  Fevre. 
Bib.  s.  Vin.  cen.       '  j)gyj  g^j^g  j^p^^g  gj^  ^^74  ^jjj^g  \q  Pevrc  sa  fille,  depuis 

Madame  Dacier  ,  donna  la  belle  édition  du  même  Florus 
à  l'usage  de  M.  le  Dauphin.  Celle-ci  parut  à  Paris  chez  Fré- 
déric Léonard  en  un  volume  m-4°  enrichi  de  notes  fort  judi- 

ibid.  cieuses.  '  La  même  année  on  vit  éclore  une  autre  édition, 

qui  fut  faite  à  Amsterdam  chez  les  Elzevirs  en  un  m-8".  Le 
texte  a  été  imprimé  sur  l'édition  de  Commelin,  et  se  trou- 
ve accompagné  de  L.  Ampelius ,  et  des  notes  choisies  de 
Saumaise  et  autres  Savans. 

Bib.  Bal.  ibid.  '  Tant  d'éditious  de  Florus  n'empêchèrent   pas  le  docte 

M.  Grœvius  de  dérober  quelques  momens  à  ses  savantes 
ocupations  ,  pour  nous  en  donner  une  nouvelle.  Celle 
qu'il  publia,  parut  à  Utrecht  chez  Jean  Ribbius  l'an  1680 
en  un  volume  in-S"  avec  des  médailles  et  les  observations 

Fab.ibidjBib.Kon.  dc   l'Editcur.  '  On  la   renouvella  depuis  à  Amsterdam  les 

''"'*■  années  1692  et  1702 ,  toujours  en  même  volume;  et  l'on 

eut  soin  de  l'enrichir  des  notes  de  Grœvius  ,  de  Saumaise  , 
de  Jean  Camers ,  de  Stadius ,  de  Vinet ,  de  Gruter  et  de 
Freinshemius.  Nous  ne  savons  si  ce  ne  fut  point  la  même 

Bib.  an.  et  mod.  t.  édition ,  qui   scrvit  de   modèle  '  à  celle   qu'on  donna  l'an 

4.  p.  144.  ^^^g    ^    Londre   chez  Tonson    et   Walf  en   un   volume 

m-12. 

...  ff.  Min.  con.  '  Lcs  Frauçois  non  contens  d'avoir  le  texte  original  de 
Florus,  ont  voulu  aussi  le  lire  en  leur  langue  maternelle. 
L.  Constant  le  mit  en  François  ,  et  le  publia  l'an  1580  en 
un  in-S".  Cette  traduction  fut  imprimée  avec  celle  d'Eu  - 
trope  chez  Jaques  Rerjon  ,  et  dédiée  au  Vicomte  de  Tu- 
renne. 

...  cord.  p.  228.  '  Au  siéclc  suivaut  Nicolas  Coëffeteau  Prédicateur  or- 
dinaire du  roi  Louis  XIII ,  en  donna  une  nouvelle  tra  - 
■  "  duction  ,  qui  se  débita  chez  Sebastien  Cramoisy  l'an  1618 
s  Vin  ccn      ^"  même  volume   que  la  précédente.   '  Elle  fut  réimpri- 

coib.t.  i-p-^iàV.  mée  depuis  en  1625  et  1629,  avec  l'Histoire  Romaine 
que  le  Traducteur  composa ,  comme  pour  servir  de  suite 
à  Florus  ,  après  l'avoir  tirée  de  divers  Historiens.  Le  tout 
est  en  un  volume  in-folio.  '  Cette  traduction  de  Florus  par 
Coëffeteau  fut  encore  imprimée  ,   mais  séparément  en  un 

petit 


HISTORIEN  ET  POETE. 


26o 


petit  m-16*  à  Lyon  chez  Antoine  Ciiard  l'an  1628  ••  et  à     ii  siècle. 
Paris  chez  Guillaume  Buray  l'an  1632  en  un  volume  in-  .  Bib.s.serg.Anj 
4°  qui  contient  aussi  l'Histoire  Romaine  du  Traducteur.  b  ibià. 

'  11  y  a  eu  une  autre  traduction  de  Florus  en  notre  lan-  Bib.  Coib.  i.  j.  p. 
gue,  mais  qui  est  fort  rare.  On  la  donne  à  M.  Philippe  de  ""'  "'*' 
France  Duc  d'Orléans,  frère  unique  du  roi  Louis  XIV. 
Elle  parut  en  un  volume  m-S"  l'an  1661,  sans  nom  de  lieu 
ni  d'Imprimeur.  On  y  trouve  le  latin  à  côté  du  françois , 
avec  une  chronologie  ,  et  des  remarques  de  François  de  la 
Mothe  le  Vayer  le  fils. 

On  trouve  dans  la  Bibliothèque  de  M.  le  Cardinal  Bib.  ouob. 
Otloboni  à  Rome  ,  une  traduction  espagnole  de  l'abrégé 
de  Florus  sous  ce  titre,  Compendio  de  las  décodas  de  Tito 
Livt'o.  Elle  fut  imprimée  à  Strasbourg  l'an  1550  en  un 
volume  m -8°.  Le  litre  feroit  juger  que  ceneseroit  qu'une 
traduction  des  Sommaires  de  Tite  Live  que  l'on  croit  être 
de  Florus.  Mais  comme  cette  traduction  peut  avoir  été 
faite  sur  l'ancienne  édition  de  notre  Auteur  ,  qui  supose 
son  histoire  tirée  de  Tite  Live  ,  ainsi  que  nous  l'avons 
remarqué  ,  ce  peut  être  réellement  l'abrégé  même  de 
Florus  traduit  en  espagnol.  (XXVI.) 


FAVORIN, 

Historien,  Philosophe  et  Orateur. 


mod  .(M.! 


SI. 

HISTOIRE   DE   SA   VIE.  - 

FAVORIN,'    l'un    des    plus   savans    hommes    de    son  f"''- JÎÎÔ-is'Pj  '• 
tems  ,  naquit  à  Arles  ,  entre  le  milieu  et  la  fin  du  pre -  ailm  \  Tiu.'hisî; 
mier  siècle  de  l'Eglise.  Il  commença  à  se  faire  de  la  repu-  '^'°''-  '*•  ^^^■ 
tation  dès  l'Empire  de  Trajan  ,  et  continua  à  briller  sous 
le  règne  entier  d'Adrien  ,  et  une  partie  de   celui  de  Tite  , 

Antonin.  On  remarque  qu'il  vint  au  monde  hermaphro  - 
dite,  et  que  c'est  pourquoi  il  n'eut  jamais  de  barbe,  mê- 
me dans  sa  vieillesse,  et  qu'il  avoit  la  voix  aiguë  ,  comme 
l'ont  ordinairement  les  Eunuques.  On  ne  laissa  pas  toute - 

Tome  I.  Prem.  Part.  M  m 

2  2  * 


266  FAVORIN, 

II  SIECLE,     fois  de  l'acuser  de  crimes  dont  les  hommes  de  cette  espèce 

semblent  être  incapables;  '  et  Lucien  paroît  avoir  cru  qu'il 

Luci.  Dem.  i..     y  avoit  dooné  ocasioii . 

Mais  si  la  nature  avoit  fait   de   Favorin    une  espèce  de 
monstre   pour  le  corps  ,  elle  le  dédommagea    amplement 
du  côté  de  l'esprit.  On   peut  juger  et  de  la   beauté  et  de 
Gai.  opt.  doc.  «en.  l'étenduë  dc  son  génie  par  la  grandeur  de  son  savoir.  '  Il 
p.  59. 61.  gg  rendit  très-habile  dans  le  grec  et  dans  le  latin.  Il  étudia 

la  Philosophie ,  et  suivit  la  secte  des  Académiciens  et  des 
Pyrrhoniens  ,  qui  disputoient  sur  tout  ,  sans  prendre  aucun 
parti.  Il  en  poussa  les  sentimens  si  loin ,  qu'il  alla  jusqu'à 
enseigner  l'mcomprehensibilité  de  toutes  choses.  Il  osoit 
même  nier  que  l'on  pût  comprendre  qu'il  y  a  un  Soleil 
qui  nous  éclaire. 
Pbii.  ibid.  '  L'étudc  de  l'éloquence  qu'il  joignit  ensuite  à  celle  de 

la  Philosophie  ,  le   rendit  très<;élébre  entre   les   Sophistes, 
j).  486.  '  On   nommoit  ainsi   dans    l'antiquité   ceux    qui    faisoient 

profession    de    la    Rhétorique    et   de    la    Philosophie    tout 
ensemble. 
p.  495.  '  Favorin  parloit  avec  beaucoup  de  facilité  et  sans  pré- 

p.  540.  511.  paration.    '   Certains     Philosophes     jugeoient      néanmoins 

qu'il  étoit  trop  grand  parleur.  C'est  ce  qui  faisoit  dire  de 
lui,  par  allusion  à  sa  qualité  d'Eunuque,  qu'il  étoit  du  ca- 
ractère de  toutes  les    vieilles  femmes.    Ouoiqu'il   en   soit , 
Gai.  pr*cog.  c.  5.  '  il  avoit  un  génie  si  fécond  ,  qu'il  se  trouvoit  en  état  de 
•*■  *'*■  disputer  tous  les  jours  sur  quelque  sujet  qu'on  pouvoit  lui 

Phii.  ibid.  p.  4U5.  proposcr.  '  Lorsqu'il   parloit    en    public   il    le  faisoit   avec 
grâce  et  d'un  air  riant ,  mais  cependant  avec  quelque  né- 
Luci.  Dem.  p.  864.  gligeuce.  '  Ou  prétend  aussi  que   son  style    non    plus  que 
son   énonciation   et  sa  cadence  n'étoienl   pas  assez   graves 
Bail.  jug.  prcj.  c.  pour  uu  Philosophc.  '  Muis  cela  n'empêcha  pas  qu'il  n'ef- 
7.  i  11.  p.  309.      jQ^f,.^i   les  Géomètres  ,  les   Rhéloriciens  ,  les   Astrologues  , 
et  qu'il  ne  passât  pour  un  des  plus  savans  Historiens  de  son 
siècle. 

Avec  tant   d'avances  Favorin  entreprit  de   voiager  dans 
les  pais  étrangers  qui    avoient  le  plus  de  réputation  pour 
Phii.  ibid.  p.  41)4-  Ics  scienccs.  U  passa  en  Asie,  '  demeura  assez  long-tems  à 
*^'  Athènes  ,  à  Ephese  et  puis  alla  se  fixer  à  Rome.  Il  vit  dans 

ses  voïages  les  hommes  les  plus  célèbres  de  ce  tems  -  là 
pour  les  Letres,  et  fit  connoissance  avec  eux.  Il  se  rendit 
disciple  de    Dion   Chrysostome  ;    quoiqu'au  jugement    de 


I 


I 


HISTORIEN,  PHILOS.   ET  ORAT.  267 

Philoslrate  il  fut   aussi  éloigné  de  l'imiter,  que  ceux  qui      ii siècle. 
n'avoient  jamais  pris  de  ses  leçons.  '  Il  semble  qu'il  eut  aussi  ~~  ' 

Ëour  maître  le  Philosophe  Lpictete.  '  il  se  lia  d  amitie  avec  n.  c.  19. 
[erodes  Atticus  le  père,  fameux  Sophiste  d'Athènes,  Plu-  •  pi»". «wd. p. *9*. 
tarque  et  plusieurs  autres.  Il  regardoit  (')  le  premier  de  ces 
deux  grands  hommes    comme    son   père  et    son    maître. 
'  L'autre  lui  adressa  dès  le  règne  de  Trajan  un  de  ses  ou-  Jons.  1. 3.  c.  7  p. 
vrages  intitulé  De  primo  frigido  ,  et  une  letre  sur  l'amitié, 
qui  est  perdue. 

'  Favorin  ne  fut  pas  aussi  heureux  pour  gagner  les  bon-  pi"'-  ib'd-  p-  *95 
nés  grâces  de   Polemon  autre  Sophiste   comme  lui.  Il  s'é- 
leva entre   eux   deux  une  forte   dispute  ,  qui   alla  jusqu'à 
partager  les   esprits ,  ceux  d'Iconie    tenant   pour   Favorin  , 
et  ceux  de  Smyrne   pour  Polemon.  '  Celui-ci    ne   mettant  p.  535. 
point  de  bornes  à  sa  passion  s'échapa  de  prononcer  publi- 

3uement  plusieurs  discours  contre  le  mérite  et  l'honneur 
e  Favorin.  Mais  quoiqu'il  fût  obligé  de  lui  en  faire  ex- 
cuse dans  la  suite  ,  comme  font  les  enfans  qui  craignent 
la  férule,  '  leur  dispute  qui  avoit  commencé  à  Ephese  ,  ne  p.  495. 
laissa  pas  de  s'aigrir  encore  davantage  à  Rome  ,  et  de  faire 
tort  à  leur  réputation.  Car  sur  ce  que  les  premiers  de  la 
ville  se  trouvoienl  partagés  dans  le  jugement  et  l'estime 
que  l'on  faisoit  de  ces  deux  Sophistes  ,  ils  s'échauffèrent  de 
telle  manière  l'un  contre  l'autre,  qu'ils  firent  voir  à  tout  le 
monde  que  leur  vieillesse  n'étoit  exemte  ni  de  jalousie  ni  de 
vaine  gloire. 

'  Cependant  de  tous  les  hommes  de  letres  que  l'Empe-  Spar.  tu.  Adr.  n. 
reur  Adrien  affectoit  d'avoir  à  sa  suite  ,  il  n'y  en  avoit  au- 
cun qui  di.sputât  à  Favorin  l'honneur  des  bonnes  grâces  de 
ce  Prince.  Aussi  savoil-il  le  ménager'  en  habile  courtisan, 
faisant  céder  à  propos  la  sincérité  et  la  droiture  dont  se 
piquent  les  Philosophes  ,  à  la  complaisance  qu'inspire  la 
politique.  '  L'Empereur  qui  se  croïoit  plus  savant  que  tout  n.  15 
autre  ,  l'aïant  un  jour  repris  de  quelque  expression  comme 
n'étant  pas  assez  pure  ,  Favorin  lui  céda  sans  disputer  , 
quoiqu'il  l'eût  pu  faire   avec  avantage.  Et  ses  amis  s'éton- 

(<)  Quelijues  *criTains  consultant  moins       „,,! .„  :  F,TTir/)(îe'.oTaTO?  uiv  ôuv  Hoti- 
le  texte  ori|iaal  de  Pbilostrate   que   U  tra-        »         ^  _       /xn/       V, 

iJuclion   latine,   ont   avancé   que  cet  Hero-       OTiç  To>  ÇOÇiirrt  tyeveTO,   otoa<7xaÀOV 

de  avait  été  digciple  de  FavoSn   •  Mais  le  i^youu.<vw,  etc.  On  a  confond.!  en  eeci»  .  Phil.  p.  49*. 

Wxte   grec    porte    expressément   que    cest       •'  -i  i>"'j^*'>î»>  „      .  ^,         ,.         ......  f.  ■■s». 

Kaforin  oui  regardoit  Hered*  csmma   son       *«'oa«  A«*l«»  aV*e|«rod«  ion  fils  quifut  oJons  1.  3.  c.B.  p. 

ri^liemenl  wnciple ne  Favorin  et  Hun  héritier.  240. 

M  m  ij 


268  FAVORIN, 

II  SIECLE.  liant  qu'il  se  fût  rendu  avec  tant  de  facilité,  il  leur  répondit 
en  riant  :  «  Est-ce  que  vous  ne  voulez  pas  que  je  croie  qu'un 
»  Prince  qui  a  trente  légions ,  est  le  plus  habile  homme  du 
»  monde  ?  » 

Phii.  ibid.  494.  '  En    uuc    autrc  ocasion  Favorin  aïant  été   élu  Grand- 

Prêtre  par  ses  Concitoïens  ,  il  cessa  de  se  mêler  de  Philo- 
sophie ,  conformément  aux  lois  de  son  pais.  L'Empereur 
lui  en  sut  mauvais  gré.  Mais  Favorin  s'étant  aperçu  de 
son  mécontentement  ,  trouva  le  secret  de  l'apaiser  par 
cette  adresse.  Il  le  fut  trouver,  et  lui  dit  :  «  Je  ne  puis  mon 
»  Prince  ,  me  dispenser  de  vous  faire  part  de  ce  qui  m'est 
»  arrivé  en  songe,  il  m'a  semblé  voir  Dion  mon  maître  , 
»  qui  m'a  recommandé  de  ne  rien  faire  contre  la  justice  , 
»  m'avertissant  que  nous  ne  sommes  pas  seulement  nés  pour 
o  nous-mêmes,  mais  encore  pour  nôtre  patrie.  C'est  pour- 
»  quoi,  mon  Prince,  je  ne  puis  ni  refuser  la  sacrificature  ,  ni 
»  désobéir  à  mon  maître  .»  L'Empereur  parut  satisfait  ;  et 
l'on  remarque  qu'il  en  fut  encore  plus  atentif  qu'aupara- 
vant à  consulter  les  Sophistes  et  les  Philosophes. 

sui.i.  a.  |i.  57.  '  La  complaisance   de  Favorin  ne  put  néanmoins   l'em  - 

porter  sur  la  légèreté  d'Adrien  ,  et  la  jalousie  qu'il  avoit 
contre  ceux  qui  le  .surpassoient  en  quelque  chose.  Ce 
Prince  se  dégoûta  enfin  de  lui ,  et  tâcha  de  le  rabaisser 
par  divers  moïens  ,  même  en  lui  préférant  des  gens  sans 

piiii.  ibid.  p.  494.  mérite.  '  Sur  le  bruit  qu'il  n'étoit  plus  dans  les  bonnes 
grâces  de  l'Empereur,  les  Magistrats  et  le  peuple  d'Athè- 
nes coururent  abattre  la  statue  d'airain  qu'ils  lui  avoient 
dressée.  Favorin  l'aïant  apris ,  ne  fit  que  dire  sans  s'émou- 
voir :  II  eût  été  heureux  pour  Socrate  si  les  Athéniens, 
»  au  lieu  de  lui  donner  du  poison,  se  fussent  contentés  de 
»  le  traiter  comme  moi.  » 

p.  403.  '  On  ne  sait  si  ce  fut  en  cette  ocasion  que  Favorin  aïant 

eu  dispute  avec  Adrien  ,  il  ne  lui  en  arriva  aucun  mal  :  ce 

snij.  ibid.  que   l'ou   rcgardoit   comme    fort  extraordinaire.  '   Car  cet 

Empereur  aïant  la  sotte  vanité  de  vouloir  passer  pour  le 
plus  savant  homme   du  monde  ,  il  ne  pouvoit  souffrir  ceux 

piiii.  ibid.  qui  en  savoient  plus  que  lui.  'Cette  circonstance  de  l'his- 

toire de  Favorin  jointe  à  deux  autres  que  nous  avons  déjà 
marquées  ,  lui  faisoit  dire  à  lui-même  ,  qu'il  se  trouvoit 
dans  sa  vie  trois  choses  qui  tenoient  du  prodige.  !•.  De 
ce  qu'étant  Gaulois  il  se  servoit  de  la  langue  gréque.  S*. 


HISTORIEN,  PHILOS.    ET   ORAT.        ?69 

De   ce  que  se   trouvant   Eunuque   on   l'avoit    acusé   d'à-     ii  siècle. 
dultere.  3°.  De  ce  qu'aiant  eu  dispute  avec  un  Empereur , 
tel  qu'étoit  Adrien,  il  ne  lui  en  avoit  pas  coulé  la  vie. 

Durant  le  tems  que  Favorin  enseigna  à  Rome  ,  il  y  in-  pui.  iwd.  p.  496 
spira  à  tout  le  monde  une  émulation  merveilleuse  pour  les 
letres.  Ceux  mêmes  qui  n'avoient  aucune  connoissance  de 
la  langue  gréque,  ne  laissoient  pas  d'assister  à  ses  leçons  et 
à  ses  discours.  Ils  y  étoient  attirés  par  l'harmonie  de  sa 
voix  ,  et  le  langage  de  ses  yeux  ,  qui  savoient  annoncer  à 
leur  manière  ce  qu'il  exprimoit  par  la  parole. 

'  Entre  les  principaux  disciples  qu'il   eut  dans  cette  ca-  Geii.  noct.  au.  i. 
pitale  de  l'Empire,  on  compte  le  fameux  Aulu  Celle  ,  .  et  I*ion*,*iiid'*^' 
Herode   fils   du  Sophiste  Herodes    Atticus.  '  Le     premier  ccii.  iWd.  p.  tst- 
se  trouvant  un  jour  embarassé  à  prononcer  sur  une  affaire  '^'''• 
que  les   Préteurs   avoient  laissée  à  sa  décision  ,  et  où  il 
craignoit  de  juger  contre   sa  conscience  ,  il  alla   consulter 
Favorin ,  à  qui  il  avoit  recours  dans  ses  difficultés.  Il  s'a-  '"' 

gissoit  d'un  nomme  qui  demandoit  à  un  autre  une  somme 
d'argent  ,  qu'il  assûroit  lui  avoir  prêtée.  Le  demandeur  ne 
le  prouvoit  que  par  des  indices  fort  foibles  ,  n'aiant  ni 
actes  ni  témoins.  Mais  c'étoit  constamment  un  homme 
d'honneur  ,  d'une  vie  irréprochable  ,  et  d'une  intégrité 
reconnue.  Sa  partie  qui  nioit  la  dette  ,  étoit  au  contraire 
un  homme  avare  et  sordide.  Il  y  avoit  même  des  preuves 
u'il  avoit  été  souvent  convaincu  de  mensonge ,  de  frau  - 
e  et  de  perfidie.  Sur  cela  Favorin  lui  raporta  un  endroit 
de  Caton  ,  qui  dit  qu'en  cette  sorte  de  rencontre  ,  où  il 
n'y  a  point  de  preuves  ,  l'ancienne  maxime  des  Romains 
étoit  d'examiner  lequel  des  deux  étoit  le  plus  homme  de 
bien.  Que  s'ils  l'étoient  également,  de  juger  en  faveur  de 
celui  à  qui  l'on  demandoit.  De-là  Favorin  concluoit 
qu'entre  les  deux  personnes  si  différentes ,  dont  lui  parloit 
Aulu  Celle  ,  il  n'y  avoit  point  de  difficulté  à  croire  un 
homme  de  bien  contre  un  méchant.  -^ 

'  On  met  encore   au   nombre    des   disciples   de   Favorin  Jom.  i.  4.  p.  351. 
Alexandre   de  Seleucie   surnommé  Peloplaton ,  qui  fut  de- 
puis Secrétaire   de  l'Empereur  Marc  Aurele   en  la  langue 
gréque  ,  '  et  Demetre  d'Alexandrie.  Celui-ci  avoit  coûtu  -  Gai.  iwa. 
me  ,  comme  son  maître  ,  de  disputer  publiquement  tous 
les  jours  sur  quelque  sujet  qui  se  présentât. 

'  Favorin  en  mourant  institua  Herode  son    héritier ,  et  J*j'-  *W.  p.  •»»♦. 


3: 


270  FAVORIN, 

II  SIECLE,     lui  légua  ses  livres  avec  la  maison  (ju  il  avoit  à  Rome,  où 
il  paroît  avoir  fini  ses  jours.  Il  y  joignit  un   Indien  extrê- 
mement noir  qu'il  avoit  à  son  service ,  et  qui  servoit  de 
Uoii.  ibid.  I.  î.  c.  bouffon  à  l'un  et  à  l'autre.  '  Il  semble  avoir  vécu  jusques 
56^1    >"•      •  p-  après  le  Consulat  de   Cornélius   Fronto,  c'est-à-dire  jus- 
ques bien  avant  sous  le  règne  de  Tile  Antonin. 

La  vie  de  Favorin  a  été  écrite  par  Philostrale ,  qui  parle 
de   lui   avec    beaucoup  d'estime.    Grand    nombre    d'autres 
Ecrivains  de   l'antiquité    n'en  parlent  aussi  qu'avec  éloge. 
Geii.  ibid.  1.  9.  c.  '  Aulu  Celle  nous  le  donne  pour  un  des  plus  grands  Philo- 
sophes  de  son  siècle,  et  le  plus  fidèle  à  citer    les  anciens 
Fab.  Bib.  p.  t.  4.  qui  l'avoicnt  précédé.  '  Phrynicus  Arabius  ,  qui    fleurissoit 
•'■''**■  sous    Commode   ,   regardoit    notre    Sophiste    comme    un 

homme  fait  pour  l'éloquence  ,  âvÀp  Xoyou  â^toç  et  qui  sem- 
bloit  éclypser  tous  les  (3recs.  Diogene  de  Laerce  témoi- 
gne assez  le  cas  qu'il  en  faisoit  par  le  grand  usage  qu'il  a 
Eu?,  chr.  p.  212 1  fait  de  ses  écrits.  '  Eusebe  et  Suidas  n'en  parlent  que  com- 
Suid.  (p  p.  572.  jj^g  j.yjj  homme  très  -  célèbre  ,  et  très -profond  en  toute 
sorte  de  literature. 

S-  n. 

SES   ECRITS. 

Suid.  (p  p.  573.  Tri  A  von  IN  '  laissa  un  très-grand  nombre  d'ouvrages 
f  de  sa  façon.  Il  disputoit  dit-on  ,  avec  Plutarque  à  qui 
en  feroit  davantage.  Mais  de  cette  multitude  d'écrits  au  - 
cun  n'est  venu  jusqu'à  nous.  Il  ne  nous  en  reste  que  quoi  - 
ques  endroits  cités  par  les  Ecrivains  qui  l'ont  suivi ,  et  les 
titres  avec  les  notions  que  nous  en  allons  donner  d'après 
ceux  qui  nous  les  ont  conservés.  On  voit  que  tous  ces 
écrits  étoient  partie  sur  l'histoire,  partie  sur  des  matières 
de  morale  ou  de  Philosophie,  et  qu'il  s'y  trouvoit  quel- 
ques pièces  d'éloquence.  Le  tout  èloit  écrit  en  grec. 

Diog.  vit.  ph  1. 2.       1°.  Un   des   principaux  ouvrages  de  notre  Sophiste  étoit. 

Byi.'  p°i97.  TO».'''  celui  '  qui  portoit  pour  titre  ,  iiavro^aTTTi  î(rTopia  ,  Histoires 
diverses ,  ou  Recueil  de  toutes  sortes  d'histoires  ,  selon  le 
titre  que  lui  donne  Etienne  de  Byzance.  Cet  Ecrivain  et 
Diogene   de    Laërce   ont   tiré    beaucoup    de    choses  de  cet 

Diog.  1. 3.  n.  24  i    ouvrage  ,  '  qui  contenoit  au  moins  huit  livres;  puisque  ce 

I.  8.  n.  12.  dernier  en  cite  le  huitième. 

i.s.D.1.80  I  1.  ».      'L'Auteur  y  avoit  semé  mille  circonstances  curieuses  de 

a.  s.  19.  M.  '' 


HISTORIEN,  PHILOS.  ET  OHAT. 


271 


l'histoire  des  plus  fameux  Philosophes  de  l'antiquité,  que 
le  même  Diogene  a  eu  soin  de  recueillir  en  partie  dans  les 
vies  qu'il  en  a  écrites.  Favorin  y  aprenoit  à  la  postérité, 
qu'Anaximandre  fut  le  premier  qui  composa  une  Géogra- 
phie générale,  et  qui  trouva  le  secret  du  Gnomon ,  dont 
il  fit  l'expérience  à  Lacédemone.  Que  Socrate  fut  aussi  le 
premier,  qui  avec  son  disciple  yEschinès  ouvrit  une  école 
pour  former  des  Orateurs.  Que  Platon  est  le  premier  Au- 
teur de  la  manière  d'écrire  par  dialogue.  Il  y  detailloit 
plusieurs  autres  traits  de  l'histoire  de  ce  Philosophe.  '  Il 
en  usoit  de  même  à  l'égard  des  Philosophes  Bion,  Car- 
neadès,  Demetre,  Pythagore  et  Alcmaeon.  Il  comptoit 
celui-ci  pour  le  premier  entre  ceux  qui  avoient  (crit  sur  la 
nature.  '  Il  y  rapportoit  que  Démocrite,  qui  avoit  eu  Pro- 
togoras  pour  disciple  ,  assuroit  que  les  sentimens  qu'Ana- 
xagoras  avoit  publiés  sur  le  Soleil  et  la  Lune  ,  n'étoient 
pas  de  lui ,  mais  qu'il  les  lui  avoit  dérobés  à  lui  Démo- 
crite. 

2".  'Un  autre  ouvrage  très-considerable  de  Favorin  ,  et 
que  l'on  croit  devoir  distinguer  du  précédent ,  quoiqu'en 
même  genre  de  literature ,  étoit  '  ses  'A7;o;AV7;fioveu|AaTa , 
c'est-à-dire  ses  commentaires.  Diogene  de  Laërce  a  beau- 
coup profité  de  cet  ouvrage,  dont  il  cile  les  trois  premiers 
livres  avec  le  cinquième.  On  trouve  plus  de  quarante  pas- 
sages tant  de  ces  commentaires  que  des  histoires  diverses, 
insérés  dans  les  écrits  de  cet  Auteur.  Favorin  y  touchoit 
comme  dans  l'ouvrage  précédent  plusieurs  particularités 
de  la  vie  des  anciens  Philosophes.  Entre  les  principales 
qu'on  nous  a  conservées,  il  prétendoit  que  le  livre  atri- 
bué  à  Platon  sous  le  titre  d'Alcyon,  n'est  point  de  ce  Philo- 
sophe, mais  d'un  certain  Léon.  Il  y  marquoit  la  mort  du 
Bremier  en  la  treizième  année  du  règne  de  Philippe  Roi  de 
[acédoine.  Il  y  montroit  que  le  discours  de  Polycrate  con- 
tre Socrate  étoit  une  pièce  suposée,  en  ce  qu'il  s'y  trouvoit 
des  faits  qui  n'étoient  arrivés  oue  six  ans  après  la  mort 
de  Socrate.  Il  y  raportoit  les  chefs  d'acusation  contre  ce 
Philosophe,  que  Diogene  copie  d'après  Favorin,  et  quel- 
ques-uns des  bons  mots  de  Cratès. 

Peut-être  est-ce  dans  l'un  de  ces  deux  ouvrages  '  que 
Favorin  disoit  ce  que  nous  en  aprend  Aulu  Gelle  au  sujet 
d'un   pigeon  de   bois  de   la  façon   d'Archytas  de  Tarente 


Il  SIECLE. 


I.  4.  n.  M.  63  11. 
5.  n.  5.  9.  77  |  1. 
8.  n.  15.  83. 


I.  9.  n.  3i.  50. 


Voss.  hist  gr.  lat. 
I.  2.  c.  10.  p.  122. 
1. 

Diog.  ibid.  1.1.  n. 
79  I  I.  2.  n.  23.  39. 
40  I  1.3.  n.  25.  40. 
62  I  1.  4.  n. 5  11.5. 
11.76  I  1.6.n.80|  1. 
8.  n.  12  I  1.  9.  n. 
23. 


Gell.  noct.  tu.  1. 
10.  c.  12.  p.  525. 


16. 


Î75  l'AVORIN. 

Il  SIECLE.  Philosophe  tt  Méchaniste.  Ce  pigeon  voloit  en  l'air  jus- 
qu'à  ce  qu'il  se  posât  ;  mais  sitôt  qu'il  se  posoit,  il  ne  pouvoit 
plus  reprendre  son  vol. 

stepii.Byi. p. t>55.  3".  Etienne  de  Byzance,  ou  le  Géographe,  cite  sous  le 
nom  de  Favorin  une  histoire  abrégée  de  la  Pamphylie  , 
qui  ne  faisoit  que  la  quatrième  partie  d'un  ouvrage. 

?'^"8s.  2i3.  ^°-      ^^  ^^^  atribue  aussi  une  histoire  de  €yreiie,  et  •  le 

cite  en  divers  autres  endroits  sans  nommer  ses  écrits.  Il 
ne  dit  pas  d'où  il  a  tiré,  que  Favorin  assûroit  qu'en  Bisal- 
tie  Province  de  Macédoine ,  on  prenoit  des  lièvres  qui 
presque  tous  avoient  deux  foies. 

Hoht.in  sieph.p.  '  A  l'égard  du  traité  ou  apparat  aux  noms  des  nations, 
que  quelques-uns  atribuent  à  notre  Philosophe ,  suivant 
la  citation  d'Etienne  au  mot  Ethiopien  ,  cela  ne  vient  que 
d'une  leçon  corrompue  dans  le  texte  original  ,  et  rétablie 
par  Berkel,  et  encore  mieux  par  Holstenius. 

Diog.  ibid.  not.  I.       5°.  '  Il  faut  aparcmment  mettre  aussi  au  nombre  des  écrits 

'•"■*'•  de  Favorin  sur  l'histoire,  celui  qu'il  composa  wepl -niî  Axa- 

Sifi(i.ai!CYiç  5iaôé«wî ,  sur  l'étabUsscment  de  la  secte  des  Aca- 
démiciens. On  croit  que  Favorin  le  fit  pour  répondre  à 
celui  que  Plutarque  avoit  publié  pour  prouver,  que  Platon 
n'étoit  point  l'Auteur  de  cette  secte.  Il  lui  donna  pour  titre 

Gd^op.  doc.  geu.  le  nom  du  Philosophe  auquel  il  répondoit.  '  Galien  fait 
mention  de  ce  livre  sous  le  même  titre.  Mais  il  semble 
qu'on  a  mal  traduit  le  grec  qui  exprime  le  sujet  dont  il 
traitoit ,  en  le  rendant  par  ces  mots  latins  De  affectixme 
Academica. 

phu.  Tii.  soph.  1.       6",  '  Philostrate   témoigne  beaucoup   d'estime  pour    les 

ii^f.' afri.' iLc!  livres    de   morale    et   de  philosophie,  qui  étoient  sortis  de 

s.  p.  585.  la  plume  de  Favorin.  Il  estime  particulièrement  ceux  qu'il 

composa  sur  les  maximes  des  ryrroniens.  Il  y  en  avoit 
dix  qui  étoient  intitulés  nup^wvtiwv  Tpoirwv.  Aulu  Celle 
assure  que  cet  ouvrage  étoit  écrit  avec  beaucoup  d'art  et 
de  subtilité.  Philostrate  remarque  que  l'Auteur  n'y  ôtoit- 
point  aux  Pyrroniens  la  faculté  de  juger  des  choses,  quoi- 
•  qu'ils  fissent  profession  de  ne  se  fixer  à  rien. 

7°.  '  Il  est  aisé  de  juger  combien  ces  sentimens  tenoient 
au  cœur  à  Favorin,  par  le  grand  nombre  d'écrits  qu'il  a 

ç»i.ibid.  fait»  pour  les  apuïer.  '  Il  composa  un  autre  ouvrage  divisé 

en  trois  livres,  dont  l'un  étoit  adressé  à  Adrien,  1  autre  à 
Dyson  ou   Dryson  ,   et  le  troisième  à  Aristarque.  Ils  por- 

toient 


HIST.  PHILOS.  ET  ORAT. 


273 


toient  tous  trois  pour  titre  ,  que  t imagination  a  la  faculté  de  \\  siècle. 
comprendre.  Mais  malgré  ce  titre  spécieux  ,  il  ne  tendoit 
à  rien  moins  qu'à  y  établir  l'incomprehensibilité  de  toutes 
choses.  Il  y  donnoit  pour  la  meilleure  manière  d'ensei- 
gner ,  celle  des  Académiciens  ,  qui  ne  consistoit  qu'en  des 
problêmes  continuels  sans  définir  ou  assurer  rien  certaine- 
ment ,  et  à  nier  même  quelquefois  que  l'on  pût  compren- 
dre ce  qui  est  le  plus  clair. 

8".  '  De  même  dans  un  autre  ouvrage  de  même  nature  ,  Gai.  ibid. 
adressé   à   Alcibiade  ,  Favorin  établissoit   encore   qu'il   lui 
sembloit  probable  ,  que  l'on  ne  peut   savoir   rien   certaine- 
ment. 

9".  '  Il  porta  si  loin  le  caprice  Académicien  ,  qu'il  fit  un  p.  ci. 
écrit  particulier  pour  prouver  ,  qu'il  n'est  pas  même  pos- 
sible  de   comprendre   qu'il    y   a  un   Soleil   qui  éclaire  la 
terre. 

'  Ce  fut  pour  détruire  l'absurdité  de  ces  principes  ,  que  p-»"-'"- 
Galien  écrivit  contre  nôtre  Sophiste  son  traité  de  la  meil- 
leure manière  denseigtier,  que  nous  avons  encore.  Comme  '"- 
Favorin  tomboit  quelquefois  en  contradiction  avec  lui  - 
même  dans  ses  écrits  ,  admettant  dans  les  uns  certaines 
connoissances  ,  louant  en  d'autres  ceux  d'entre  les  Acade  - 
miciens  qui  permettoient  à  leurs  disciples  de  choisir  ce 
qui  leur  paroissoit  le  plus  vrai  entre  des  opinions  oposées  : 
Galien  sait  profiter  avec  esprit  de  cette  contradiction  ,  et 
réfute  par  des  raisonnemens  très  -  solides  ,  quoi  qu'en  peu 
de  mots,  le  faux  système  de  son  adversaire. 

10"  '  Galien  prit  encore  une  autre  fois  la  plume  contre  p.  59. 
Favorin  en  faveur  d'Epictete.  Mais  cet  ouvrage  ne  paroit 
plus  aujourd'hui.  C'étoit  aparemment  pour  répondre  à 
celui  que  Favorin  avoit  adressé  à  ce  Philosophe  ,  et  dans 
lequel  il  introduisoit  Onesime  valet  de  Plutarque  disputant 
avec  le  même  Epictete,à  qui  il  pouvoit  faire  dire  des  cho- 
ses qui  ne  plaisoient  pas  à  Galien.  On  voit  par-là  que  cet 
écrit  de  Favorin  étoit  une  espèce  de  dialogue. 

11°.  '41  ne  paroît  pas  non  plus  que  l'on  nous  ait  conser-  iwa. 
vé   un  autre   ouvrage  de   Galien   contre  notre  Sophiste  en 
faveur  de  Socrate.  '  Il  semble   que   Favorin   étoit   un  peu  oiog.  vii. 
prévenu   contre   ce   Philosophe  ;  puisqu'il   avoit   affecté   de  "  "    " 
recueillir  dans  ses  commentaires  les  chefs  d'accusation  con- 
tre lui.  De  sorte  qu'il  pouvoit  n'en  parler  pas  avantageu- 

Tome  I,  Prem.  Part,  N  n 


2.  n.  40. 


PU.    I. 


274  FAVORI  N, 

II  SIECLE,     sèment  •  dans  un  de  ses  écrits  qu'il  avoit  intitulé  de  Socrate 

'   suid.  <p  p.573.  ^^  (^^^  ^^^  «^'^  d'aimer. 

ibid.  12°.  Favorin  laissa  aussi  de  sa  façon  un  recueil  de  Senten- 

ces, ou  de  bons  mots.  Aulu  Gelle  son  disciple  en  raporte  plu- 
sieurs dans  ses  Nuits   Atfiques.    Une   des  plus  remarqua - 

Geii.  ibij.  1. 9.  c.  blés  est  '  celle   qui   regarde   les  gens   qui   possèdent  beau- 

8.  p.  473.  gQyp  (jg   choses.   Favorin   disoit   d'eux  ,  que  plus   ils  ont , 

plus  il  leur  manque.  On  en  liouve  jusqu'à  quinze  autres 
insérées  dans  la  compilation  de  Jean  Stobée.  Il  y  a  de  l'es- 
prit en  quelques-unes.  Mais  on  ne  sait  qui  a  pu  porter  le 
Compilateur  à  recueillir  les  autres  ,  quoiqu'assez  longues  ; 
car  il  n'y  paroît  ni  sel  ni  beauté. 

soid.  ibid.  1 3°.  Outre   tous  ces   écrits  ,  '  Suidas   atribue   encore   à 

Favorin  les  suivans  :  un  traité  De  la  l'hilosophie  d Homère , 
dont  il  ne  nous  aprend  rien  davantage. 

jy,,  14°.  'Un  autre  traité  Sur  P/</^// ,  qui  paroît  devoir  être 

distingué  de  l'ouvrage  qu'il  intitula  Plutart/ue,  et  dont  nous 
avons  parlé  plus  haut. 

ibid.  1 5°.  '  Un  troisième  traité  Sur  le  genre  de  viedes  Philosophes. 

dont  ni  Suidas  ni  d'autres  ne  nous  donnent  point  de  plus 
grande  connoissance. 

Fabr.  Bib.gr.  I.*.       16".  '  Il  faut  comptcr  aussi  entre  les  écrits  philosophi- 

P  "'-*'•  ques  de   Favorin,  celui  que   Phrynicus   Arabius   lui  atri- 

bue sous  ce  titre  nspl  î5eô>v  ,  traité  des  idées  ,  que  l'on  ne 
connoit  point  d'ailleurs. 

ibid.  17°.  '  ].e  même   Ecrivain  lui  en  donne  encore  un  autre 

qu'il  nomme  nepl  èu/tï;  ,  du  souhait  ou  du  désir  ,  du  vœu 
ou  du  suffrage;  car  le  mot  grec  peut  souffrir  toutes  ces 
interprétations. 

Phii.  vit.  Ap.  1. 4.       18°.  'Quant  aux  pièces  d'éloquence   de  Favorin,  Phi- 

c.  8.  p.  181.        lostrate   témoigne  qu'au   tems   qu'il   écrivoit,    c'est-à-dire 
sous  l'Empire  de  Severe,  il  y  avoit  un   recueil  des  haran- 
gues de  nôtre  Sophiste.  Philostrate  le  cite  lui-même  au  su- 
jet  de   Demetre  Philosophe  de   Corinthe  ,   dont  il   y  étoil  ' 
parlé  avec  éloge. 

viLSoph.  1.  i.p.  19°.  '  On  ne  sauroit  dire  si  les  discours  pour  les  gladia- 
teurs, pour  les  bains  et  sur  un  avorton,  que  le  même  Ecri- 
vain cite  ailleurs ,  faisoient  partie  du  recueil  précèdent. 
Quoi  qu'il  en  soit  ,  Philostrate  les  reconnoit  pour  être  ve  - 
ritablement  des  écrits  de  Favorin  ,  pleins  d'éle^ance.  Mais 
il  soutient  que  ceux  qu'on  lui  prétoit  contre  Proxene  ,  n'é- 


495. 


11!  ST.    PHILOS.    ET  OR  AT.  27;i 

toient  point  de  lui,  n'aïant  pu  avoir  pour  Auteur   qu'un      ii  siècle. 
homme  ou  yvre  ou  furieux. 

20".  '  Aulu  Celle  nous  a  conservé  un  fragment  de  la  ha-  ceii.  iind.  i.is.  c. 
rangue  que  Favorin  prononça  contre  le  luxe  et   les  festins  ^^  ^'  ^^'  *"*" 
du  soir.  Comme  l'on  ne  sait  pas  si  cette  harangue  étoit  en- 
trée  dans   le   recueil   dont   nous  venons  de  parler  ,    nous 
avons  cru  devoir  lui  donner  un  article  à  part. 

21".  '  Une  des  plus  belles  pièces  d'éloquence  de  Fa  orin  Fab.ibiJ. 
étoit ,  au  jugement  d'un  Auteur  grec  ,  celle  qu'il  avoit  in- 
titulée   Ilspl  rr.i   Ar.fia^oj;   W9:o':vivT;  ,    l'éloge     de    la    SagCSSC  , 

tempérance  ,  ou  modération  de  Démadès.  Les  beaut!;s 
qu'Arabius  trouvoit  dans  cet  écrit ,  lui  ont  fait  dire  que 
Favorin  y  sembloit  s'élever  au-dessus  de  tous  les  Grecs. 

22°.  '  Non-seulement  Favorin  exerçoit  sa  plume  à  Irai  -  «■eii.  iuii.  i.  i7.c;. 
ter  des  sujets  graves  et  sérieux  ;  mais  il  se  plaisoit  aussi  quel-  ''  ' 
quefois  à  écrire  sur  des  matières  plaisantes  et  enjouées.  îl 
en  usoit  de  la  sorte  lant  pour  égaïer  l'esprit  ,  que  pour 
avoir  lieu  d'éclaircir  des  difficultés,  ou  s'exercer  à  la  dis- 
pute. Aulu  Celle  dit  qu'il  composa  en  ce  genre  d'écrire 
reloge  de  la  laideur  sous  le  nornde  Thersitas  et  [éloge  de  la 
fièvre  quarte,  qu'il  traitoit  non  en  Médecin  ,  mais  en  Orateur 
ou  Sophiste.  Le  même  Ecrivain  témoigne  que  Favorin  avoit 
fait  entrer  dans  ces  deux  écrits  quantité  de  choses  aussi 
rares  qu'agréables. 

'  Favorin  au  reste  n'est  pas  le  seul  entre  les  anciens,  qui  nui.  jbhi.  p.  •.vu. 
se  soit  amusé  à  traiter  des  sujets  de  cette  nature.  Synese 
laissa  l'éloge  d'une  tête  chauve  ,  Aristophanes  celui  de  la 
pauvreté ,  Alcidamas  celui  de  la  mort.  Philostrate  fait 
mention  d'un  jeune  homme  ,  qui  composa  aussi  les  éloges 
de  la  goûte  ,  de  la  surdité  et  de  l'aveuglement.  De  même 
parmi  les  modernes  Passerat  nous  a  donné  à  son  tour  l'élo- 
ge de  l'aveug'ement ,  Cardan  celui  de  la  goûte  ,  et  Erasme 
celui  de  la  folie. 

23°.  '  Frisius  remarque  qu'Adrien  du  Jon  cite  Fouvrage  Fns.  hiu  i>ii.  |.. 
de  Favorin  intitulé  la  corne  d'abondance  ;  mais  il  ajoute  que  ^'  *• 
cet  écrit  ne  subsiste  plus  aujourd'hui.  Il  ne  faut  pas  croi  - 
re  non  plus  qu'il  existât,  lorsque  du  Jon  le  citoit.  L'on  ne  , 

dit  point  où  il  avoit  puisé  la  connoissance  qu'il  paroit  en 
avoir  eue. 

C'est-là  tout  ce  que   nous  avons   pu   découvrir  touchant 
les  écrits  de   Favorin.    Mais    quoique    le   nombre   en  soit 

N  nij 


276  1  AVORIN,  HIST.  PHIL.  kic. 

II  SIECLE,  grand,  on  peut  dire  que  ce  n'est  encore  qu'une  petite  par- 
tie  de  tous  ceux  qu'il  composa.  Si  le  8"  Livre  des  iNuits 
Attiques  d'Aulu  Gelle,  dont  il  ne  nous  reste  que  les  som- 
maires des  chapitres,  fût  venu  en  son  entier  jusqu'à  nous, 
peut-être  nous  auroit-il  apris  quelques  autres  parliculari- 
Gei.  1. 8.  p.  447.  tés  dcs  ouvrages  de  Favorm.  '  il  est  certain  qu'il  y  parloit 
*^'  amplement  de  ce  Sophiste,  qu'il   y  raportoit  diverses    cho- 

ses qu'il  en  avoit  aprises,  et  qu'il  y  décrivoit  la  dispute  en- 
jouée qu'eut  Favorin  avec  un  autre  sur  l'ambiguilé  des 
mots. 


MENEGRATE, 

Jurisconsulte. 

Luci.  lox.  p.  49.     '  H/f  E  N  E  c  R  A  T  E  ,  dout   uous   entreprenons    de    parler  , 
ItA  ne  doit   pas    être  confondu  avec    les   Historiens ,    les 
Poëtes  ,  les   Grammairiens  et  les  Médecins  qui  dans  l'anti- 
quité ont  porté  le  même  nom.  11  naquit  à  Marseille  d'une 
famille  noble,  qui  lui  laissa  de  grands  biens,  et  remplit  une 

Gués.  an.  1.3.  cor.  place  daus  le  Sénat  de  la  ville.  '  On  dit  qu'il   se  distingua 

"■  par   la  science  du  droit  parmi  les  Jurisconsultes  ,  et  qu'il 

étoit  si  habile  dans  la  jurisprudence  ,  qu'on  le  nommoit 
communément  un  second  Scœvola.  On  croit  même  qu'il 
laissa  quelques  ouvrages  de  sa  composition  ,  mais  dont  les 
malheurs  des  tems  nous  ont  privés. 

Luci.  ibid.  '  Ce  qu'il  y  a  de  plus  certain   dans  son   histoire  ,  c'est 

qu'aïant  eu  le  malheur  de  prononcer  une  sentence  injuste, 
il  fut  dégradé  de  sa  noblesse,  et  tous  ses  biens  confisqués. 
Telle  étoit  alors  la  riguelir  des  loix  de  Marseille  ,  et  ce  ne 
seroit  qu'un  bien  qu'elles  fussent  encore  aujourd'hui  en  vi- 
gueur dans  tous  les  Etats.  Menecrate  se  vit  donc  tout  d*ur\ 
coup  déclaré  infâme ,  déchu  d'une  haute  fortune  et  d'une 
condition  brillante,  et  réduit  à  une  extrême  pauvreté. 

'  Pour  comble  de  malheur  ,  il  se  trouvoit  chargé  d'une 
fille  déjà  nubile  ,  mais  très-laide,  contrefaite ,  et  presque 
acablée  de  deux  différentes  maladies  très  -  fâcheuses. 
Néanmoins  ce  qui  sembloit  le  rendre  plus  malheureux  , 
fut  contre  son  atente  la  source  de  son  rétablissement.  En 


8. 


iUd. 


MENECKATE,  JURISCONSULTE.         277 

effet  il  trouva  en  la  personne  de  Zenothemis  un  ami  gène-      ii  siècle. 

reux,  qui  non  seulement  partagea  ses   richesses  avec   lui, 

'  mais  qui  oubliant  encore  et  sa  noblesse  et  sa  fortune,  pour  Lud.  ibid.  p.  50. 

se    livrer  tout    entier    aux   nobles   sentimens  de   l'amitié , 

voulut  bien  épouser  sa  fille  malgré  tous  ses  défauts. 

De  ce  mariage  vint  le  plus  bel  enfant  du  monde,  qui  ibid. 
fut  comme  l'Avocat  de  son  grand-pere  auprès  du  sénat. 
Car  un  jour  Menecrale  aïant  mis  à  cet  enfant  une  robe 
noire  et  sur  la  tête  une  couronne  d'olivier,  afin  d'exciter 
la  compassion  de  tous  ceux  qui  le  verroient,  il  le  porta  au 
milieu  des  Sénateurs  assemblés.  L'enfant,  bien  loin  de  s'é- 
pouvanter de  la  gravité  de  ces  Juges,  se  prit  à  leur  souri- 
re, et  sembla  leur  aplaudir  en  frapant  des  mains.  Ce  specta- 
cle inopiné  toucha  si  fort  toute  l'assemblée,  qu'elle  annul- 
la  la  confiscation  des  biens  de  Menecrate,  et  le  rétablit 
dans  ses  premiers  honneurs. 


TITE  ANTONIN, 

Empereur. 

S-  I- 

HISTOIRE   DE   SA   VIE. 


t; 


I 


IITUS   AUREÏ.IUS   FULVIUS  RoiONIUS  AnTONINUS,    JuI.  Cap.  vit.  Ani. 

plus  connu  sous  le  nom  d'Antonin  le  bon,  étoit  ori-  "' ' 
ginaire  de  la  ville  de  Nisme  dans  la  Gaule  Narbonoise, 
lieu  de  la  naissance  d'Aurelius  Fulvius  son  père,  et  de  Ti- 
tus Aurelius  son  aïeul,  qui  firent  entrer  à  trois  différentes 
fois  le  Consulat  dans  leur  maison.  Il  naquit  le  19'  jour  de 
Septembre  de  l'an  86,  à  Lanuvium  ou  Lavinium  dans  la 
campagne  de  Rome,  où  sa  famille  s'étoit  allée  établir. 
La  cause  de  cette  transmigration  fut  peut-être  le  maria- 
ge d'Aurelius  Fulvius  avec  Arria  Fadilla,  qui  fut  mère  de 
nôtre  Empereur.  Elle  étoit  fille  '  d'Arrius  Antoninus,  per-  ibid  i  riin.i.  i.ep. 
sonnage  aussi  recommandable  pour  ses  mœurs  qu'illustre 
par  son  savoir  et  les  grands  honneurs  auxquels  il  fut  élevé  ; 
aïant  été  Proconsul  d'Asie,  et  deux  fois  Consul  ordinaire. 
2  3 


3.  18. 


278  TITE  ANTOMN, 

II  SIECLE.  •  Antonin  passa  une  partie  de  sa  jeunesse  sous  les  yeux  de 

•  jui.  Cap.  ibid.  ^^^  ^^^^^  paternel,  qui  ne  contribua  pas  peu  à  cultiver  en 
lui  les  excellentes  qualités  qu'il  aroit  aporlées  en  naissant. 
"•3.  '11  étoit  un  des  hommes  le  mieux  faits  de  son  siècle.  Il 

avûit  un  visage   majestueux  ,  une   humeur  agréable  ,   des 
manières   aisées  ,  beaucoup   d'esprit.    II   étoit   doux  ,  libé- 
ral, ennemi  des  injustices,  en  un  mot  louable  en  toute  sa 
conduite   ,   et    digne   d'être    comparé  à   Numa   Pompilius 
Suid-,a.  p-  23*i    '  comme  Trajan  avoit   mérité    do   l'être   avec   Ilomulus.  A 
"'*'*■    '  ■       mesure  qu'il  crût  en  âge  et  qu'il  s'avança  dans  les  charges  ,  il 
donna  de  plus  grandes  preuves  de  cet  heureux  naturel.   11 
se  rendit  si    aimable  à  tout  le  monde  par  sa  bonté  et  ses 
bons  offices,  que  dès  qu'il  fut  Empereur,  le  Sénat  lui  don- 
na le  surnom  de  débonnaire  ou  de  bon. 
jui.  Cap.  ibid.  '  X  ces  qualités  naturelles  il  en  joignit  d'acquises,  qui  ne 

le  rendirent  pas  moins   recommandable.   Il   acquit  sur-tout 
une  rare  éloquence  et  une  grande  connoissance  de  la  belle 
literatiire  :  singularis  eloquentirc,  nitidœ  liieralinœ,  dit  un  de 
ses  Historiens, 
iirfd.  '  Quoiqu'il  aimât  beaucoup  la  campagne,  où  il  passa  une 

grande  partie  de  sa  vie,  il  ne  laissa  j)as  d'entrer  dans  les 
emplois,    et   d'y   réussir   avec  l'estime    et   l'aprobation    de 
tout   le   monde.    D'abord   il   fut   Qucsieur,    puis   Séiiateur, 
ensuite  Préteur  et  Consul  avec  Catilius  SeviTus  l'an   120. 
'  Quelque  tems  après  l'Empereur  Adri(ni  lui  confia  en  qua- 
lité  de   Consulaire   le  gouvernement  do  la  quatrir^me  par- 
tie de  l'Italie,  où  Antonin  possedoit  de  grands  biens.  Après 
quoi  il  le  fil   Proconsul  d'Asie;    et  il  exerça  celte   nouvel- 
le charge  avec  encore  plus  de  repulr.lion,  que  n'avoit  fait 
son   aïeul  maternel  qui  s'y  étoit  atiro   l'affection  des  peu- 
ples, 
joi.  Cap.  ibid.  11.       'Autoniu  épousa   Anna   Galeria    Faustina,   tante   pater- 
p.'3»i."   '"''■'^'  nelle  do  Marc  Aurcle  son  .succisseur  à  l'Empire.  Il  en  eut 
deux  fils  et  deux   iilles,  dont  l'ainée  fut  inariée  à  Lamia 
Silanus,  et  l'autre  nommée  Anna  l'austina,  fut  ftmme  tîe 
Marc  Aurele  son  cousin  germain.  Quant  aux  deux  garçons, 
il  est  à  croire  qu'ils  moururent  jeunes;  puisqu'il  n'en  est 
jamais  parlé  dans  l'histoire. 
jui.c»p.ii.4.|Tm.       '  Antonin  fut  adopté   par  l'Empereur   Adrien  le  25   de 
p.  339. 3*0.  Février  138,  et  eut  dès-lors  le  titre  de  César,  la  puissance 

proconsulàire  avec  celle    du  Tribunal,    et  peut-être   même 


EMPEUEUR.  279 

la  qualité  d'Empereur.   En  reconnoissance  il  prit   les  noms     n  siècle. 
d'yLlius    Adrianiis  ,    '  et  adopta  lui-même  Marc  Aurele  et  spar.  vit.  Adr.  n. 
Lucius  Verus,  comme  Adrien  en  étoit  convenu  avec  lui. 

'  .\drieu  étant  mort  leJO  de  Juillet  de  celte  même  an-  "•  23- 
née,  '  Anlonin  se  vit  seul  maître  de  tout  l'Empire.  Ce  fut  Jui.  cap.  n  5  1 
alors   qu'il    donna  de  nouvelles  marques  encore  plus  écla-    """'  '^"^' 
tantes  de  sa  bonté  et  de  son  atachement  pour  le  bien  pu- 
blic.   Il    conserva  dans  leurs  charges  tous  ceux  qu'Adrien 
y  avoit  établis,  et  eut  soin  d'envoier  tous  les  sept  ou  tous 
les  neuf  ans   de  bons   Gouverneurs  dans  les  provinces.  Il 
eut    plusieurs    guerres  ,  qu'il  soutint  glorieusement  par  le 
ministère  de  ses  Généraux. 

'  Il  gouverna  ses  sujets  avec  autant  d'aplication,  et  prit  ^"J,';  ^?p-  ";,  Y 
un  aussi  grand  soin  de  tout  ce  qui  leur  apartenoit,  que  s'il  «os 
eût    été  leur  propre  père.   Sous  .son  empire  les  provinces 
furent    plus  florissantes  que  jamais.   Il  en  bannit  les  con- 
cu.ssions  ;    et  on  ne  vit  point  ces  proscriptions  cruelles  et 
fréquentes  des  gens  de  bien  ,    qui  avoient   deshonoré  tant 
de    règnes  précedens.   '  Il  fut  un  Empereur  vraiment  pa-  jui.  cap.  n.  9. 
cifique  ,  aianl  souvent  à  la  bouche  cette  belle  sentence  de 
Scipion  :   c.   Qu'il  aiinoit  mieux  conserver  un  seul  citoïen  , 
que  de  mettre  à  mort   mille  ennemis  ».  Tant  d'excellentes 
qualités  lui  méritèrent  '  le  glorieux  titre  de  père  de  lapa-  Eus.  chr.  p.  212. 
trie. 

'  Nul   cependant   de  ses  prédécesseurs  n'eut  ni  plus  de  J!''-.^*?".''.',^"''- 

J-»    j  l'n         •  •       1  1'       .      •.•       i  I  '1  vic.ibid  ]  Suid.  ib. 

crédit  dans  i  Empire  m  plus  d  autorité  chez  les  étrangers. 
Ses  letrcs  seules  suffisoient  pour  contenir  les  Princes  voisins 
dans  le  devoir;  et  toutes  les  nations  le  regardoient  plutôt 
comme  leur  protecteur  et  leur  arbitre,  que  comme  un  Em- 
pereur ou  un  Maître.  'Lorsqu'il  s'élevoit  quelque  sédition,  Jui.  cap..n.  is. 
il  la  reprimoit  non  par  l'effusion  du  sang,  mais  par  sa  mo- 
destie et  sa  gravité  ;  '  et  son  plus  grand  plaisir  étoit  de  sui-  n.  10. 
vre  l'extrême  inclination  qu'il  avoit  à  pardonner. 

'  Philostrate  à  cru  édifier  la  postérité  en  lui  en  aprenant  !*'"••  ^''-  soph.  1. 
un  trait  qui  mérite  de  trouver  ici  sa  place,  Antonin  se  "* 
trouvant  à  Smyrne  en  Asie,  lorsqu'il  étoit  Proconsul  de  la 
province  ,  on  le  logea  dans  la  maison  du  Sophiste  Pole- 
mon,  comme  la  plus  belle  de  la  ville.  Polemon,  qui  étoit 
absent,  arriva  chez  lui  durant  la  nuit,  et  voiant  son  logis 
ocupé,  cria  si  haut  à  l'injustice,  qu'Antonin  fut  contraint 
d'aller  loger  ailleurs.  Le  l'roconsul,  bien  loin  de  se  venger 


280  TITE  ANTONIN, 

II  SIECLE,      d'une  telle  insulte,  n'oublia  rien  pour  montrer  qu'il  l'avoit 
entièrement    oubliée.    Il    voulut  qu'on  donnât  à  Polemon 
dans    les    édits    impériaux  le  titre  de  Conseiller  d'Etat,  et 
procura  encore  à  ce  Sophiste  d'autres  honneurs. 
Phii.  vit.  Sopii.  1.       '  Au  bout  de  quelque  tems  un  Comédien,  qui  étoit  d'u- 
1.  V.  53*.  jjg   tragédie    que  Polemon  avoit  fait  représenter  aux  Jeux 

Olympiques ,  s'étant  allé  plaindre  à  Antonin  de  ce  que 
Polemon  l'avoit  chassé  dès  le  commencement  de  son  rôle, 
le  Proconsul  lui  demanda:  à  quelle  heure  cela  vous  est-il 
arrivé?  Le  Comédien  lui  répondit:  environ  midi.  «  Et 
moi  repartit  agréablement  Antonin,  j'ai  été  chassé  à  mi- 
nuit, et  néanmoins  je  n'en  ai  fait  aucune  plainte.  » 
Jui.  Cap.  n.  H.  '  Cette  modération  et  cetle  bonté  l'accompagnèrent 
toujours.  Elevé  sur  le  thrône,  il  vêquit  avec  ses  amis, 
comme  s'il  n'eût  encore  été  qu'une  personne  privée.  En  un 
mot  il  ne  se  servit  de  la  souveraine  dignité  d'Empereur , 
que  pour  donner  des  marques  plus  éclatantes  de  sa  géné- 
rosité, de  sa  sagesse  et  de  sa  modestie, 
n.  11.  1».  'Il  avoit  beaucoup  d'estime  pour  les  Rhéteurs  et  les  Phi- 

losophes, et  assigna  des  pensions  et  des  privilèges  à  ceux 
qui  enseignoient  dans  les  Provinces  ,  comme  à  ceux  de  la 
ville  capitale.  Il  retenoit  près  de  sa  personne  plusieurs  sa- 
vans  Jurisconsultes,  par  le  conseil  desquels  il  fit  grand 
Il  8.  nombre    de  reglemens  pour  la  police.  '  Il  rétablit  ou   éleva 

de  nouveau  plusieurs  bâlimens  publics  à  Rome,  aux  envi- 
rons et  ailleurs.  Il  fit  construire  le  port  de  Gaieté,  rétablit 
celui  de  Terracine ,  acheva  le  palais  d'Agrippa  et  d'A- 
drien ,  avec  le  tombeau  de  celui-ci.  Il  bâtit  le  palais  de 
Lorie  ,  les  bains  d'Ostie  ,  l'aqueduc  d'Anzio  ;  et  plusieurs 
autres  villes  se  ressentirent  de  ses  libéralités. 
ii.iaiTiii.ihid.p.  '  Enfin  cet  Empereur,  à  qui  il  ne  manquoit  que  d'être 
■''•''  Chrétien,    mourut   dans   le   palais  de  Lorie  le  7'  jour  de 

Mars  de  l'an  161.  Et  quoiqu'il  eût   régné  22  ans,  7^'^   mois 
et  26  jours,  et  qu'il  eût  vécu  au-de-là  de  73  '*'  ans,  il  fut  re- 
jiii.  Cap.  n.  i.i|   greté  comme  s'il  fût  mort  à  la  fleur  de  sa  jeunesse.  '  On 
fiii.  ibid.  p.  313.  pgnjgpq^e   comme  une  chose  mémorable   ot  glorieuse  pour 

Eus.  clir.  p.    212.        |ij  '  Euaobe  no  lui  ilonno  que  22  ans  et  trois  mois  de  règne. 

Hier.  elir.  I.  2.  p.  (2)  '  S.  Jerdme  prolonge  sa  yiejusqo'à       ne  en  un  endroit  75  ans  de  vie,  et  en  nn 

lt)9.  l'âge  de  77  ans.  •  Capitnliii   ne  le  mit  ({ur       autre   seulement   72.    Ily   a  encore  diver- 

•  Jul.  Cap.  n.  12.  septuagénaire,   i"  Aurclius   Victor  lui  don-       ses  autres  opinion*  sur  ci>  fait  liistoriqup. 

*  Aur.  Vie.  Cœs.p.  i, ,; 
172  1  epit.  p.   806.  »^1' 


EMPEREUR.  281 

lui,  que  non  seulement  il  n'a  fait  aucune  persécution  contre     ii  siècle. 
les  Chrétiens,  mais  qu'il  est  même  presque  le  seul  Empe- 
reur  Païen  qui  ait  vécu  sans  répandre  au  sang  soit  de  ses 
sujets,  soit  de  ses  ennemis,  autant  qu'il  a  pu  l'empêcher. 
Jule  Capitolin  a  écrit  la  vie  de  ce  Prince,  que  nous  n'a- 
vons presque  fait  qu'abréger  dans  ce  que  nous  en  venons 
de  dire.  '  Gordien  qui  prit  le  nom   d'Auguste  à  Carthage  Tiii.  ibid.  p.  360. 
l'an   237,  et  qui  mourut  la  même   année,   avoit  composé 
l'Antoniade,  C'étoit  un  poëme  où  il  répresentoit  en  30  Li- 
vres les  guerres  d'Antonin  et  de  Marc  Aurele.    Mais  cette 
pièce  ne  subsiste  plus  aujourd'hui.  '  Nous  mettons  ici  en  aus.  cas.  p.  223. 
manière  d'épitaphe  ce  que  dit  Ausone  de  notre  Empereur. 

Antoninus  abhinc  regimea  capit  :  ille  vocatu, 

Consultisqae  PIUS,  nomen  habens  meriti  ; 
Filius  huic  fato  nullus  :  ssed  ,  lege  suonim  , 
A  patria  sumsit,  qui  regeret  patriani. 

S-  II- 

SES  ECRITS. 


N' 


DUS  avons  déjà  remarqué  que  Tite  Antonin  avoit 
beaucoup  d'éloquence  et  d'érudition ,  et  qu'il  aimoit 
et  protegeoit  les  gens  de  letres.  '  Avant  que  Capitolin  écri-  Jui.  cap.  ibid.  «. 
vît  sa  vie,  on  avoit  publié  divers  discours  sous  le  nom  de  "" 
cet  Empereur,  à  qui  cependant  plusieurs  les  disputoient. 
Mais  Marins  Maximus,  au  raport  du  même  Auteur,  soû- 
tenoit  qu'ils  étoient  véritablement  d'Antonin  le  bon. 

De  tous  les  écrits  de  ce  Prince  ceux  qui  lui  ont  fait  lê 
plus  d'honneur,  sont  les  letres  qu'il   écrivit  en  faveur  des 
Chrétiens.  '  S.  Justin  fait  mention  de  celle  qu'il  adressa  à  xiii.  ibid.  p. 
toute  la  province  d'Asie  en   date   de  la  15'  année  de  son 
Empire,  et  Eusebe  de  celles  qu'il  écrivit  pour  le  même  su- 
jet aux  Athéniens,  aux  Thessaloniciens ,  à  c«îux  de  Larisse 
en  Thessalie,  et  à  tous  les  Grecs.  'Il  ne  nous  reste  aujour-  p.  418. 
d'hui  que  cette  dernière  letre ,  qui  est  la  même  que  celle 
dont  parle  S.  Justin.  On  la  croit  écrite  en  l'année  152,  à 
peu  près  dans  le  tems  que  ce  saint  Martyr  paroît  lui  avoir 
présenté  son  apologie,      ou  écrit  contre  les  Gentils  en  fa-  Hier,  vir.iii.c.33. 
veur  des  Chrétiens,  dont  on  ne  voit  point  que  l'Empereur 

Tome  I.  Prem,  Part.  0  0 

2  3  *  . 


II   SIECLE. 


282  TITE  ANTONÏN,  EMPEREUR. 

s'irritât,   quoique  le  Saint  y  parlât  avec  autant  de  libertf^ 
que  de  force. 

Tiii.  ibid  |  Eus.  1.       '  Cette  Ictre  se  trouve  dans  Eusebe,  dans  S.  Justin  à  la 
4.  c.  13.  p.  1 7.  ^^^    jg   g^^  apologie  ,   dans  la   chronique   d'Alexandrie  et 
ailleurs.    On  la  peut   regarder   comnie   la  justification,   ou 
plutôt  le  panégyrique  des  Chrétiens,  prononcé  par  la  bou- 
Tiii.  ibid.  p.  1.94.  che  d'uu  Prince   idolâtre.   '  Il  est  vrai  qu'il  y  a  quelques 
Savans    qui  atribuent  cette  letre  à  Marc  Aurele;  mais  Mr. 
de  Tillemont  refuie  si  soHdement  les  raisons  sur  lesquelles 
ils  apuient  leur  sentiment,   qu'il  lui  ôte  toute  probabilité, 
p.  3G0.  '  S.  Augustin  cite  scius  le  nom  de  l'Empereur  Antonin  un 

rescrit,  qui  ne  peut  être  que  de  celui  dont  nous  venons  de 
Ang.  conj.aiitii.t.  faire  l'éloge.  '  Par  ce  rescrit  Tite  Antonin  ordonne  qu'un 
^'  "•  ^  mari  ne  pourra  poursuivre  sa  femme  comme  adultère,  s'il 

ne  lui  donne  lui-même  l'exemple  de  la  chasteté  conjugale; 
que  si  l'on  trouve  par  les  informations  que  l'un  et  l'autre 
est  coupable ,  ils  seront  aussi  tous  deux  punis ,  étant  tout- 
à-fait  injuste,  ajoute  ce  Prince,  qu'un  mari  veuille  obliger 
sa  femme  à  lui  garder  la  fidélité ,  lorsqu'il  ne  la  lui  garde 
pas  lui-même.  Ce  rescrit  est  raporté  dans  le  second  Livre 
des  mariages  illégitimes,  où  il  est  marqué  qu'il  se  trouvoit 
not.  p.  40'.  dans  le  code   Grégorien.  '  Il  se  lit  eflectivement   dans  le 

peu  qui  nous  reste  de  ce  recueil  ;  mais  on  croit  qu'il  y  a 
été  inséré,  après   avoir  été  tiré  de  S.    Augu.stin.   On    en 
trouve  aussi  une  partie  dans  Ulpien. 
jdi  rap.  ibid.  n.       '  Il  paioît  par  CapitoHu  qu'il  y  avoit  beaucoup  d'autres 
'^-  rescrits,   Joix,   ordonnances  de  notre  Empereur.   Mais   les 

malheurs  des  tems  en  ont  privé  la  postérité. 


FRONTON, 

Orateur. 

S-  I 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

i;eii.  noc».  au.  I.  HfARcus     CoRNELius    Fronto,     homme     Consulai- 
i.  c.'26|i.»9.c.8.  Jjl  re     passoil    en  son   tems   pour  le  second   Maître   de 

lu  I  l'an.  It.  p.  176.    ,.  ,,  '         .-^  •  ,         n-'^  ia«»«  

I..I4.  1  éloquence    Romaine   après    Ciceron  ,    ou    plûlôt   comme 


FRONTON,  ORATEUR.  283 

égal  à  lui,  quoiqu'en  un  autre  genre  :  Romanœ  eloquentiœ  non     1 1  siècle. 
secundtim.sedalteinim  deais.  '  Quelques-uns  le  font  natif  d' Au-  r      „  ,  .  , 
vergne ,  d  autres  de  Perigord ,  et  quelques   autres   d  Aqui-  57  1  Marcel,  wsi. 
taine  indeterminément.  Quoiqu'il  en  soit,  il  semble   qu'on  ''''***• 
ne  peut  guéres  douter  qu'il  ne  fût  Gaulois  de  nation.  '  11  sm.  s.  1. 4.  cp.211 
est  certain  qu'à  la  fin  du  IV  siècle  et  au  commencement  du  yj;  ^iH^-  p-  ^^*- 
V,  il  y  avoit  à  Cbrmont  en  Auvergne  une  famille  du  nom 
de  notre  Orateur,  et  que  S.  Sidoine  le  compte  au  nombre 
des   aïeux  du   docte   Léon ,   qui   étoit   de  Narbone ,  et  Mi- 
nistre du  Roi  Euric. 

'  Fronton  passa  la  plus  grande  partie  de  sa  vie  à  Rome,  g«ii.  umi. 
cil  son  logis  étoit  comme  le  centre ,  ou  le  lieu  d'assemblée 
des  gens  de  letres  et  des  beaux  esprits.  Aulu  Celle ,  qui 
s'étoit  rendu  son  disciple ,  loue  beaucoup  son  érudition  et 
sa  politesse.  Il  assure  ne  l'avoir  jamais  été  voir,  ce  qu'il 
faisoit  souvent  en  son  jeune  âge ,  .sans  y  aprendre  beau- 
coup. 

'Dès  l'Empire   d'Adrien,    Fronton  étoit  regardé  comme  m.  vm.  1.  1.  noi. 
le  plus  célèbre   Avocat  de  Rome.  "  11  fut  choisi    pour  en-  ''■.'*\!       .    „ 

.f  ,  »    >     I         •         A-  •    •■'ul-Cai).  vil.  M. 

saigner  1  éloquence  a  Marc  Aurele  et  a  Lucms  Verus,  qui  Ant.n.21  vu.  ver. 
furent  ensuite  élevés  à  l'Empire  l'un  et  l'autre.  '  Il  fit  mê-  "jr^Ant.  1. 1.  a 
me  l'office  de  Philosophe  à  l'égard  du  premier.  Ce  Prince  "• 
témoigne   en  effet  avec   reconnoissance ,   que    Fronton    lui 
avoit  apris  à  détester   cet   esprit   malin ,    envieux ,   trom- 
peur ,  dissimulé ,  que  l'on   voit  avec  horreur  dans  les  Ty- 
rans, et  à  se  défendre  contre  une  certaine  indifférence  trop 
ordinaire  aux  personnes  de  qualité  pour  leurs  propres  en- 
fans. 

'  Marc  Aurele  poussa  encore  plus  loin  sa  reconnoissance  Jui.  cap.  \n.  m. 
pour  Fronton.  Non  seulement  il  le  considéra  toujours  plus  '^"''  "'  *' 
que  tous  ses  autres  maîtres  ;  mais  il  lui  fit  même  décerner 
une  statue  par  le  Sénat,  '  et  le  fit  Consul  pour  deux  mois,  .Vus.  Cous.  p  7u. 
subrogé  à  quelque  autre ,  sans  qu'on  en  sache  précisément 
l'année.  '  On  croit  néanmoins  que  cela  se  fit  dès  le  règne  Tiii.  Emp.  t.  a.  p. 
de  Tite  Antonin,  c'est-à-dire  avant  l'an  IGO.  '^''• 

'  Fronton   vêquit  au-de-là  de   cette   époque.    Eusebe  le  Eu.s.  chr  p.  m  \ 
fait  particulièrement  fleurir  sous  l'Empire  de  Marc  Aurele  ;  "é"' ''"^'  '-^i'- 
et  S.  Jérôme  parle  de  lui  sur  l'an  164  comme  d'un  très-illu- 
stre Orateur.  '  Quelques  années   avant  sa  mort  il  fut  sujet  Geii.  iwd. 
à  de  grandes  douleurs   de  pieds ,  qui  l'obligeoient  souvent 
à  garder  le  lit.  Il  ne  laissoit  pas  malgré  son  mal  de  donner 

0  0  iJ 


284  FRONTON, 

II.  SIECLE,    toujours  dans  les  conversations  de  grandes  marques  de  son 
profond  savoir  et  de  sa  belle  éloquence.    Les  plus  doctes 
personnages  qui  l'alloient  visiter  ,  ne   pouvoient  assez   ad- 
mirer l'un  et  1  autre. 
Tiu.  ibid.  '  La  postérité  de   Fronton   fut  très-florissante.    Aufidius 

Victorinus,  qui  paroît  avoir  été  son  gendre,   Fronton   son 

f»etit-fils  ,   et   Marcus  Aufidus  Fronto   son  arriere-petit-fils  , 
iirent  tous  trois  Consuls  avant  la  fin  de  ce  siècle.  '  Cata- 
not.  p.  «w.         ^^^  ^  confondu  sans  raison  notre  Orateur  avec  Fronto  Ca- 
tius  célèbre  Avocat  sous  Trajan,  dont  Juvenal  et  Pline  le 
jeune  parlent  avec  éloge, 
sid.  s.  1. 1.  ep.  I.       '  Fronton   eut   beaucoup  de  partisans  de  son  éloquence  , 
P-  ®^'  qui  formèrent  une  secte  ,  et  se  firent  gloire  de  porter  son 

nom.  Cela  étoit  assez  ordinaire  dans  les  bons  siècles  de  la 
latinité ,  par  raport  aux  gens  de  letres  qui  avoient  le  plus 
noi.ibid.  de  réputation.   '   L'on  sait  que  Virgile  et  Ovide  parmi  les 

Poètes  ,  Cassius  et  Proculianus  parmi  les  Jurisconsultes  eu- 
rent aussi  leurs  sectateurs ,  de  même  que  les  Orateurs  les 
plus  célèbres. 

L'éloquence   de  Fronton  dilTeroit  de  celle   des  Orateurs 
qui  l 'avoient  précédé  ,  en   ce  qu'elle  étoit   et  plus  grave  et 
Macr.  sat.  I.  s  c.  moins    flcurie.  '  C'est   pourquoi   Macrobe    distingue  quatre 
1.  p.  «6.  sortes  de  style  ,  ou  genres  d'écrire  :  un  style  riche   et  dif- 

fus, dans  lequel  Ciceron  a  excellé  ;  un  style  concis,  qui  est 
propre  à  Saluste  ;  un  style  moueleux  et  et  fleuri  ,  auquel  Pli- 
ne le  jeune  s'est  exercé;  et  un  style  sec,  sans  figures  et  sans 
ornement  qu'il  dit  avoir  été  celui  de  Fronton, 

S-  II. 

SES  ECRITS. 


0 


N  ne    nous  a   conservé  la  connoissance   que  de  peu 
d'écrits  de  Fronton.   Encore   nous   reste -t- il  très -peu 
de  chose  de  ceux  qu'on  nous  fait  connoître. 
\uci.  ani.  iai.  p.       '  1°.  Nous  avous  de  lui  quelques  extraits  d'un  traité  sur 
1347-1333.  |j^  propriété  des  mots.  L'Auteur  y  fait  voir  de  quelle  ma- 

nière on  doit  se  servir  des  mots  propres  ,  de  peur  que 
trompé  par  la  ressemblance  ,  on  ne  les  confonde  avec  les 
synonymes.  11  marc^ue  ,  par  exemple ,  la  difl'erence  qu'il 
y  a  entre  ultio  et  vindicta,  prœda  et  rapina ,  cur  et  quare , 


ORATEUR.  28o 

delictum  cX  peccatum,  sans  garder  autrement  aucun  ordre,     ii  siècle. 
'  On  remarque  qu'Ammonius  parmi   les   Grecs  a  écrit  sur  ccsn.  Bib.  un.  l 
la  même  matière.  *•  p-  is^-  à- 

Il  est  aisé  de  reconnoître  dans   cet  ouvrage   tout   le  gé- 
nie de  Fronton,  quand  on  a  lu'  une  dispute  qu'il  eut  un  Ceii.  noct.  ait.  i. 
jour  avec  un  célelare  Poëte  de   ses  amis  touchant  la   pro-  '^•''■*- 
prieté  des  mots.  On  ne  peut  guéres   pousser  plus   loin  la 
délicatesse   sur   ce  sujet ,  qu'il   faisoit   dans   cette  dispute  , 
dont  Aulu  Gelle  nous  a  conservé  la  relation. 

'  Ces  extraits   du    traité   de   notre    Orateur   se   trouvent  Gesn.iuiu. 
dans  les  recueils  des  anciens  Grammairiens  et   Auteurs  de 
la  langue  latine  ,  imprimés  à  Basle  chez   Adam  Pétri  l'an 
1537  ,  et    plusieurs  autres    fois   ailleurs,  nommément   les 
années  1585  et  1595  en  un  volume  in-folio.  '  Frisius  assure  Fris.  hisi.  vu.  p. 
qu'il   V   eut   une   édition    particulière   faite    à  Leipsick   en  '*'  ^" 
1569." 

'  Raphaël    de    Volterre    raporte    dans    sa    Géographie  cesn.  iWd. 
qu'en   1494  ,  on  trouva  à  Bobio  en  Italie  les  élégances  la- 
tmes  de  Cornélius  Fronto.    Mais  Gesner  croit  avec  raison, 

3ue  cet  écrit  n'est  pas  différent  de  celui  que  nous  venons 
e  marquer.  '  Frisius  n'a  pas  laissé  néanmoins  d'avancer  Fris.  ibid. 
peut-être  sur  la  foi  de  Raphaël  de  Volterre ,  que  l'on 
voïoit  encore  manuscrites  ces  élégances  de -Fronton  rédi- 
gées par  ordre  alphabétique.  Si  cela  étoit  bien  vrai ,  au- 
roit-on  manqué  d'en  faire  présent  au  public? 

2°.  '  Fronton  avoit  laissé  plusieurs  discours  de  sa  façon,  sid.  i.*.  ep.  3|i. 
qui  subsistoient  encore,  au  moins  en  partie  ,  du  tems  de  ïojT '"  '  "'"■''' 
S.  Sidoine  ,  qui  en  loue  la  gravité.  Mais  il  n'en  paroît  plus 
aucun  aujourd'hui.  Le  plus  estimé,  au  jugement  des  an- 
ciens ,  éloit  celui  contre  Pelops.  On  prétend .  que  Fron  - 
ton  qui  surpassoit  les  autres  Orateurs  dans  ses  autres  pie- 
ces  d'éloquence  se  surpassa  lui-même  dans  celle-ci  :  de 
même  que  Ciceron  .  qui  s'étant  élevé  au-dessus  de  tous  les 
Orateurs  de  son  siècle  dans  ses  autres  oraisons  ,  s'éleva 
au-dessus  de  lui-même  dans  celle  qu'il  fit  pour  A.  Cluen- 
tius.  On  vit  encore  la  même  chose  en  la  personne  de  Pli- 
ne le  jeune  ,  qui  s'acquit  plus  d'estime  par  son  plaidoïer 
pour  Attia  Viriola  ,  qu'il  n'avoit  fait  par  son  excellent  pa  - 
negyrique  de  Trajan.  S.  Sidoine  ,  qui  porte  ce  jugement , 
en  rend  aussi-tôt  raison.  C'est ,  dit-il ,  que  les  habiles  Ora- 
teurs font  plus  paroitre  leur  esprit  en  traitant  de  petits 
sujets,  que  lorsqu'ils  en  traitent  de  grands. 


286  FRONTOiN,   ORATEUR. 

Il  SIECLE.  'Eumene  dans  un  de  ses  Panégyriques  fait  mention 
•  Pan.  B.  p.  lîG.  d'uue  Butre  harangue  ,  que  Fronton  prononça  à  la  loûan- 
"•  **■  ge  de  l'Empereur  Tite  Antonin  ,  sur  l'heureux  succès  de  la 

TiU.  ibiu.  p.  347.  gucrrc  de  la  grande  Bretagne.  '  Cette  guerre  n'est  apa  - 
remment  autre  chose  que  l'incursion  des  Brigantes  qui 
ocupoient  le  Roïaume  de  Norlhumberland  ,  et  qui  s  é- 
lant  jetés  sur  les  pais  sujets  aux  Romains,  furent  vaincus 
par  Lollius  Urbicus  Gouverneur  de  la  province  pour  l'Em- 
pereur. C'est  ce  qui  arriva  au  commencement  du  règne 
de  Tite  Antonin  vers  l'an  138. 
M.  Ant.  I.  i.noi.  '  On  trouvc  dans  Sosipater  Charisius  quelques  mots 
•*     ■  ■  d'une  autre   harangue  ,  ou   letre   de   Fronton  à  Marc  Au- 

rele  ,  au  sujet  de  sa  reconnoissance  envers  ce  Prince  pour 

-    ;(   les  honneurs  auxquels  il  l'avoit  élevé. 

Maci .  Sat  I  7.  c.      30.'  Macrobc,  sclou  Jean   de  Salisberv  ,  comploit  Fron - 

3.  p.   58e  I    Salis.  ,  ,  ,     j      •        j  .- 

l'ofyc.i.s.c.  10.  ton  au  nombre  de  ceux  qui  ont  écrit  des  questions  pour 
servir  d'entretien  à  table ,  en  le  joignant  ainsi  à  Aristote  , 
Plutarque  et  Apulée  ,  qui  l'ont  fait.  Mais  à  dire  le  vrai ,  il 
pourroit  se  faire  qu'en  cet  endroit  on  prît  un  autre  Fron- 
ton pour  notre  Orateur. 
Min.  oct.  p.  K8-  4°.  '  Il  y  a  dans  Minutius  Félix  un  assez  long  fragment 
115.303.  j'yjj  discours  très  -  véhément  et  calomnieux  à  Texcès  con- 

tre les  Chrétiens,  où  l'Auteur  leur  fait  les  plus  horribles 
reproches.  Il  y  est  d'abord  cité  sous  le  nom  indéterminé 
d'un  Orateur  de  Cirte  ,  qui  est  une  ville  d'Afrique  ,  puis 
sous  le  nom  d'un  Fronton  Orateur.  Ces  expressions  dési- 
gnent assez  naturellement  Fronton  de  Cirte  célèbre  au 
11.  p.  89.  1  303.  commencement  du  III  siècle.  '  Néanmoins  plusieurs  Sa  - 
Lt'.  ibùi.*"' '■  *■  vans  prétendent  qu'il  les  faut  entendre  de  Cornélius  Fron- 
to  dont  il  est  ici  question.  (XXVII.) 


287 


CHARMOL^US 

ET 

ZENOTHEMIS, 

Ju  RISCONSULTF.S. 


II  SIECLE. 


Ox   a   déjà   vu    à   l'article   de  Menecrate  quelques  traits 
de     l'histoire    de    Zenothemis.    '  C'étoit    un    des    pre-  Uci.  lox.  p.  48. 
miers    citoïens   de   la  ville  de  Marseille  ,  tant  pour  les  ri- 
chesses, que  pour  la  naissance,  et  un  des  hommes  le  mieux 
faits  de  son  tems.  '11  eut  pour  père  Charmolœus,  que  l'on  cues.an.i.  3.  cor. 
nous   représente   comme   un   <;élébre  Jurisconsulte  ,  qui  fit  c.'?.".  9."p.  sio! 
beaucoup  d'honneur  à  son  nais  par  sa  science  dans  le  droit.  ^"• 
Zenothemis  marchant  en  cela  sur  les  traces  de  son  père  , 
acquit  aussi  une  grande  connoissance  des  loix,  et  se  distin- 
gua par  son  expérience  et  l'équité  de  ses  oracles.   Ils  ne  se 
contentèrent  pas  l'un  et  l'autre  de  servir  leur  patrie  seule- 
ment de  vive  voix  ;  ils  le  firent  encore  ,  comme  l'on  pré- 
tend, par  des  écrits  sur  la  Juri.sprudence ,  qui  malheureu- 
sement ne  sont  pas  venus  jusqu'à  nous. 

'  Zenothemis  en  particulier  a  immortalisé  sa  mémoire  luh.  ibiu.  p.  4». 
en  une  autre  manière  encore  plus  éclatante;  faisant  voir 
en  sa  personne  une  générosité  d'ami ,  dont  il  seroit  diffi- 
cile de  trouver  beaucoup  d'exemples.  Il  étoit  intime  ami 
de  Menecrate  ,  ce  Sénateur  dont  nous  avons  parlé.  Ce- 
lui-ci se  voïant  tombé  d'une  brillante  fortune  dans  un 
état  très-pauvre ,  comme  nous  l'avons  dit ,  trouva  une 
source  abondante  de  consolation  dans  l'amitié  de  Zeno- 
themis. Ce  qui  rendoit  Menecrate  plus  sensible  à  sa  misè- 
re ,  c'est  qu'il  se  voïoit  chargé  d'une  fille  nubile,  âgée 
de  dix-huit  ans ,  contrefaite  ,  percluse  de  la  rnoitié  du 
corps  ,  ataquée  d'une  fluxion  sur  les  yeux  ,  et  que  l'on 
disoit  épileptique. 

'  Menecrate  répandant  un  jour  dans  le  sein  de  son  ami  iwd. 
les    justes  sujets  de  son  chagrin,  Zenothemis,  sincèrement 
touché    de  sa  peine,  ne  se  borna  pas  à  lui  dire  quelques 
paroles    de  consolation;  mais  il  voulut  encore  lui  montrer 
qu'il    la   partageoit  réellement  avec   lui.    11  prit  donc  Me- 


288       GHARM0L7KUS    ET  ZENOTHEMIS. 

II  SIECLE,  necrate  par  la  main,  le  conduisit  à  son  logis,  et  le  mit  en 
possession  de  la  moitié  de  ses  biens.  Ce  ne  fut  encore  là 
Luci.  ibiii.  p.  30.  qu'une  partie  de  la  générosité  de  Zenolhemis.  '  Il  assem- 
bla une  compagnie  choisie  ,  et  après  un  somptueux  festin 
il  dit  à  Menecrate  qu'il  vouloit  épouser  Cydimaque  ,  c'é- 
toit   le   nom  de  sa  fille  ,  Menecrate  frappé  d'une  telle  pro- 

gosition  ,  répondit  qu'il  ne  souffriroit  jamais  que  son  ami 
t  une  telle  folie.  Mais  il  eut  beau  lui  remontrer  combien 
il  seroit  deshonoré  par  une  telle  alliance  ,  toutes  ses  re- 
présentations furent  inutiles.  Le  mariage  fut  conclu;  et 
Zenothemis  qui  pouvoit  espérer  d'épouser  une  fille  qui 
auroit  beaucoup  de  biens  et  de  la  beauté  ,  méprisa  l'un  et 
l'autre  pour  l'amitié  qu'il  portoit  à  Menecrate  ,  et  voulut 
bien  épouser  sa  fille  ,  qui  avec  des  biens  immenses  n'auroil 
pas  osé  prétendre  s'allier  avec  le  dernier  des  hommes  d'u- 
ne condition  libre. 
W'«.  '  Mais  ce  qui  n'est  ni  moins  charmant  ni  moins  merveil- 

leux ,  c'est  que  Zenothemis  soutint  cette  alliance  avec  la 
même  générosité  qu'il  l'avoit  contractée.  Il  eut  toujours 
pour  sa  femme  la  tendresse  d'un  bon  mari  ,  et  ne  faisoit 
presque  point  de  voïage  qu'elle  ne  fût  de  la  partie:  com- 
me se  faisant  un  honneur  de  montrer  par  son  exemple  , 
que  l'amitié  doit  toujours  l'emporter  et  sur  la  beauté  et 
sur  les  richesses.  De  cette  femme  si  disgraciée  Zenothe- 
mis (!ut  le  I  plus  bel  enfant  du  monde,  qui  servit ,  comme 
nous  l'avons  dit  ailleurs,  a  rétablir  la  fortune  de  son  aïeul 
maternel. 


LES  PREMIERS 

i.> 

MARTYRS   DE    LYON. 

• 

Tiii.  H.  E.  t.  3  p.  T  ES  Saints  Martyrs  qui  sont  le  sujet  de  cet  article  ', 
*■  Ju  sont    peut-être    ceux    de    toute   l'Eglise    dont   l'histoire 

est  plus  belle ,  plus  illustre,  et  en  même-tems  plus  certai- 
suip.  hist.  !.  2.  n.  nc.  '  S.  Scvcrc  Sulpicc  les  compte  pour  les  premiers  qui 
*Ac!.  lïr."  p.  47.  aient  soufi'ert  dans  les  Gaules.  (XXVIII)  'On  fait  communément 
n  3-  monter  leur  nombre  jusqu'à    quarante-huit.    Il  y  en  avoit 

de  tout  sexe  ,  de  tout  âge  .  et  presque  de  toute  condition. 

Ils 


LES  PREMIERS  MARTYRS  DE  LYON.  289 

Ils    furent    tous    illustres    par    leur  qualité  de  Martyrs,     ii  siècle. 
bien    que    quelques-uns  ,   comme   Sainte   Blandine ,  soient 
aujourd'hui   plus   célèbres  par  leur  culte.    Le  plus  remar- 
quable  pour   sa   dignité   étoit   sans  contredit  '  le  bienheu-  Eus.  i.  s.  c.  i.  p. 
reux    Evêque  Pothin  ,  âgé  de  plus  de  quatre-vint-dix  ans.  ^^^' 
'  Il  est  reconnu  pour  le  premier  Evêque  de  Lyon,  et  pou-  cr.  t.  hist.  Fr.  i. 
voit    aisément    avoir   été    disciple    des   Apôtres  mêmes.  Il  îi"*^'  ii.p. lo. 
fut  de  la  sorte  le  Pontife  de  ce  grand  sacrifice  de  son  peu- 
ple; '  et  malgré  son  âge  aussi  avancé,  et  la  foiblesse  de  son  Eus.  iwa. 
corps  ,  il  fit  paroître  un  grand  courage  et  beaucoup  d'ar- 
deur pour  le  martyre. 

'  Un  des  plus  distingués  par  la  naissance ,  étoit  Vettius  p-  isg. 
Epagathus,    homme  illustre    par  sa  qualité.  '  Leocade  qui  Cr.  t.  ibid.  n.  m. 
descendoit    de    lui ,    est  qualifié  par  b.  Grégoire  de  Tours 
le  premier  Sénateur  des  Gaules.    On  sait  d'ailleurs  que  la  tui.  iwa.  p.  s. 
famille    de   Yettes    ou    Vectes    a   été    long-tems   célèbre  à 
Rome.   '   Mais    il    devint  encore  plus  recommandable  par  ^m.  iwd.  p.  155. 
une  vie  passée  dans  l'innocence  ,    par   son    amour    pour 
Dieu,  par  sa  charité  pour  le  prochain,  par  son  zèle  pour 
la  Religion,  qu'il  ne  l'éloit  par  sa  naissance.  On  le  nomma 
dans  la  suite  l'Avocat  des  Chrétiens,  pour  avoir  repris  hau- 
tement la  passion  du  Gouverneur,  et  avoir  demandé  permis- 
sion   de   parler  pour  leur  défense;  promettant  de  prouver 
clairement  qu'ils  n'étoient  coupables  ni  de  crimes  ni  d'im- 
piété. 

'Tous  ces  saints  Martyrs  souffrirent  à  Lyon,  non  en  la  Ad.  Mar.  p.47.n. 
cent  soixante-septième  année  de  l'Ere  Chrétienne  ,  comme  IJ^^'"- '*"'•  p- '• 
le    prétend  Dodwel ,  ou  la  cent  soixante-quinzième ,  com- 
me le  veut  Pearson  son  maître  ;  mais  en  la  cent  soixanle- 
dix-septiéme ,    la   dix-septiéme    de    l'Empire  de  Marc  Au- 
rele  ,   au    commencement    du  Pontificat  de  S.  Eleuthere. 
Leur  genre  de  mort  fut  différent,  quoique  la  cause  en  fût 
la  même.  '  Les  uns  rendirent  l'esprit  dans  la  prison  ;  d'au-  Aci.  Mar.  iwd.  n, 
très  furent  exposés  aux  bêtes;  et  tous  les  autres  eurent  la 
tête    tranchée  ,    comme   Citoïens  Romains.  Les  Eglises  de 
Lyon    et   de    Vienne  écrivirent  aussi-tôt  l'histoire  de  leur 
martvre,  ainsi  qu'on  va  incessamment  le  voir.    - 

L'hérésie    des    Montanistes  troubloit    alors  l'Eglise;    et  Eus.  1. 5,  c.  s.  p 
les^  saints  Martyrs   de   Lyon  ,   plus  sensibles  à  ce  trouble  *^*' 
qu'à    leurs    propres   souffrances,    oublièrent    tout    le  reste 
pour    travailler   à    lui  procurer  la  paix.  Au  milieu  même 
Tome  I.  Prem.  Part.  P  p 


290    LES  PREMIERS  MARTYRS  DE  LYON. 

iisiKCLK     de  leurs  liens  ils  écrivirent  diverses    letres  sur  ce  sujet  aux 
Eglises  d'Asie  et  de  Phrygie,  que  ce  trouble  regardoil  par- 

Eus.  1.5.  c.  4.  i>.  ticulierement  ;  et  au  Pape  Eleuthere,  '  à  qui  ils  députèrent 

•  c.'s  p.  no.         S.  Irenée  alors  Prêtre  '  et  depuis  Evêque  de  Lyon. 

Tiii.  ibid.  p.  19.       '  On  ne  sauroit  dire   si  ces  Eglises,  dont  celle  de  Lyon 

**■  tiroit  ,    comme   l'on    croit  ,  son    origine  , .  avoient  consuité 

nos  saints  Martyrs  ;  ou  si  ce  fut  la  seule  charité  qui  les  en- 

p.^.  gagea  à  prendre  part  à  leurs  maux.  'Ces  letres,  aussi-bien 

que    celle    qui    étoit   adressée  au  Pape,  étoient  écrites  en 
grec  ,    que    nous    avons  montré  avoir  été  une  langue  fort 

P*'-  commune  à  Lyon.   '  Elles  furent  toutes  envolées  à  Rome, 

avec  celle  qui  contenoit  l'histoire  de  leur  martyre. 

Assurément  c'est  une  grande  perte  pour  l'Eglise,  que  la 

Eus.  I. .',.  c.  4.  p.  privation  où  elle  est  de  monumens  aussi  respectables.  '  11 
ne  nous  en  reste  qu'un  très-pelit  fragment  qu'Eusebe  nous 
a  conservé.  Ce  fragment  regarde  la  députation  que  les 
saints  Martyrs  avoient  faite  de  S.  Irenée  à  Rome  vers  le 
Pape  S.  Eleuthere.  C'est  le  commencement  de  leurs  letres 
à  ce  Pontife  ,  et  l'éloge  abrégé  de  S.  Irenée  ,  qui  n'étoit 
alors  que  simple  Prêtre ,  et  qu'ils  qualifient  leur  frère, 
leur  collègue  ,  et  un  zélé  partisan  de  la  loi  de  Jesus-Christ. 
Leur  dessein  étoit  que  ce  saint  Prêtre  fût  le  porteur  de 
leurs  letres  en  Asie  comme  à  Rome  :  mais  il  y  a  toute  apa- 

e. ...p.  170.  rence  que  cela  ne  fut  pas  exécuté  ,  '  à  cause  de  l'élection 

que  l'Eglise  de  Lyon  fit  de  ce  Saint  pour  son  Evêque  aussi- 
tôt après  le  martyre  de  S.  Pothin. 


LES 

ÉGLISES  DE  LYON 


n    ,i<:.ij    ,.M 


Ku>.  I.  H.  c.    I.  p. 

i.M  :.';u. 


t    i: 


ET 

DE  VIENNE. 

APRÈS  '  que  les  saints  Martyrs  ,  dont  nous  venons  de 
parler ,  eurent  consommé  leur  sacrifice  ,  les  Fidèles 
des  Eglises  de  Lyon  et  de  Vienne  qui  avoient  été  les  té- 
moins, et  ce  semble  même  les  compagnons  de  leurs  souf- 
frances, se  hâtèrent  d'en  aprendre  l'histoire  à  leurs  frères 
d'Asie  et  de  Phrygie.  Ils  la  dressèrent  en  forme  de  letre 
qu'ils  écrivirent  en  grec,  avec  ce  titre  à  la  tête  :  Les  Ser- 


LES  EGLISES  DE  LYON  ET  DE  VIENNE.      291 

viteurs  de  JESUS-CHRIST  qui  demeurent  a  Vienne  et  à     ii  siècle 
Lyofi  de  Gaule,  aicx  Frères  dAsie  et  de  Phrijgie,  qui  ont  la  ~ 

même  foi  et  la  même  espérance.  Que  J .  C.  notre  Seigneur 
vous  donne  la  paix,  la  grâce  et  la  gloire. 

'  Cette  letre,  comme  l'on  voit,  est  au  nom  des  Fidèles  tiii.  h.e.i.  3.  p. 
de  Vienne  et  de  Lyon,  soit  parce  que  la  persécution  avoit 
été  commune  à  ces  deux  Eglises,  et  avoit  envelopé  les 
principaux  membres  de  l'une  et  de  l'autre;  soit  parce 
qu'étant  les  principales  des  Gaules  et  très-voisines  ,  elles 
se  joignoient  ensemble  dans  les  ocasions  importantes.  On 
croit  que  c'est  particulièrement  ceux  de  Lyon  qui  l'écri- 
virent ,  et  qu'ils  nommèrent  par  civilité  ceux  de  Vienne 
les  premiers,  '  On  l'atribuë  même  à  S.  Irenée,  alors  Prê-  p-2. 
tre  de  l'Eglise  de  Lyon. 

'  Eusebe  l'avoit  insérée  tout  entière  dans  son  recueil  des  Eus.  1.  •;.  c.  ipr.  1 
Actes    des   Martyrs  ,  tant  il  la  jugeoit  digne  d'une  éternel-  îèe.'  '*'  *^^'  ***"" 
le  mémoire  ,   comme  il  le  dit  lui-même.   '  Il  y  a  quelque  Cr.  t.  wsi.  Fr.  1. 
lieu  de  croire  qu'elle  se  trouvoit  encore  en  son  entier  au  *'  "'  **' 
tems  de  S.    Grégoire    de   Tours.    Mais    aujourd'hui   il  ne 
nous  en  reste  qu'une  partie,  qui  paroît  néanmoins  la  plus 
considérable.    Nous   en   avons  l'obligation  au  même  Euse- 
be ,    qui  la  raporte  aux  chapitres  1,2    et  3  de  son  cin- 
quième livre;  el  c'est  peut-être  le  plus  bel  endroit  de  son 
Histoire  Ecclésiastique.  '  Ce  qui  nous  en  reste,  a  été  tra-  Boii.ajun^. lea. 
duit   en  latin  par  Rufin  et  ensuite  par  M'  Valois.  La  tra-  I^^m.**^''        ''■ 
duction  du  premier  se  trouve  au  second  jour  de  Juin  dans 
le    recueil    des    Continuateurs    de    BoUandus ,    et  celle  de 
l'autre  entre  les  Actes  choisis  de  Dom  Ruinart.  '  11  y  en  a  tiii.  iwd.  p.  3. 
aussi   une   traduction  françoise  ,  qui  fut  publiée    en  1 067 
après  la  mort  de  M' le  Maître  qui  en  est  le  Traducteur,  avec 
la  vie  de  S.  Ignace  Martyr  traduite  par  le  même,  et  quel- 
ques autres  vies  des  Saints. 

Les  Fidèles  de  Lyon  et  de  Vienne  relèvent  parliculie-  eo».  l_s.'  c  i.  p. 
rement    dans    leur    letre   le  mérite  de  Vettius  Epagathus ,   '''-^•''•" 
la   constance  ,   le   coui'age  ,  la  force  de  Sancte,   Diacre  de 
l'Eglise  de  Vienne  ,   de  Mature,   Néophyte  ,    d'Attale  natif 
de   Pergame,   mais  qui  avoit  toujours  été  l'apui  et  le  sou- 
tien des  Eglises  de  Vienne  et  de  Lyon,  et  de  Sainte  Blan- 
dine  ,    qui    bien    que    d'une  complexion  fort  délicate  ,  fut 
la    plus   cruellement  tourmentée.    '  Malgré  la  violence  des  p.  ns. 
suplices  ,    on   ne   put  jamais  tirer  autre  chose  de  "Sancte, 


292  LES   EGLISES 

II  SIECLE,     sinon  ces  paroles  qu'il  proferoit  en  latin  :  Je  suis  Chrétien. 

Eus.  1  5  c.  1.  p.      '  ^'^  y  parlent  de  la  douleur  la  plus  amere  qu'ils  eurent 

1Û6."  de   voir    environ    dix   des  Confesseurs  céder  à  la  violence 

des  tourmens.  Mais  leur  nombre  ne  tarda  pas  à  être  rempli 

p  1S9.  par  d'autres  qui  étoient  dignes  de  prendre  leur  place.  '  Il 

paroît  par  la  réponse  de  l'un  des  Martyrs,  que  les  Chré- 
tiens observoient  encore  la  défense  de  ne  point  manger  du 
sang  des  animaux. 

p.  ^^5  '  Ils   nous  y  ont  laissé  des  traits  remarquables  de  leurs 

sentimens  sur  la  toute-puissance  de  la  grâce.  En  y  faisant 
la  relation  de  ce  que  les  saints  Martyrs  eurent  à  souffrir  et 
de  la  constance  au  ils  firent  paroître  dans  leurs  tourmens  , 
ils  disent,  que  c  est  la  grâce  de  Dieu  qui  combattoit  pour 
eux  contre  le  démon  ;  que  c'est  cette  même  grâce  qui  lui 
oposa  les  forts  comme  autant  de  colonnes  inébranlables,  et 
qui  soutint  les  foibles  contre  ses  ataques. 

c.  2.  p.  166.  '  On  trouve   encore   dans  cette  excellente  letre  des  vesti- 

ges remarquables  de  l'humilité  profonde  des  saints  Mar- 
tyrs ,  qui  bien  qu'ils  eussent  souffert  plusieurs  differens 
genres  de  suplices,  ne  vouloient  pas  qu'on  leur  donnât  le 
titre    de   Martyrs ,   ne   prenant  que  celui  de  vils  et  mépri- 

p.  167.  sables   Confesseurs.   '  On  y  voit  des  traits  admirables  de 

leur  charité  envers  leurs  frères  tombés  ,  qu'ils  retirèrent 
de  la  puissance  du  diable  par  l'ardeur  et  l'assiduité  de  leurs 
prières. 

c.  l' p.  16S.  '  ^  y  ^^*   ^*^*  mention  des  Foires  solennelles  qui   se  te- 

noient    à    Lyon  et  à  Vienne,  et  auxquelles  se  rendoit   une 
'  infinité  de  personnes  de  toutes  sortes  de  nations. 

pr.  p.  154.  '  Cette    letre  des  Eglises  de  Lyon  et  de  Vienne  n'étoit 

pas  seulement  pour  aprendre  aux  Chrétiens  d'Asie  et  de 
Fhrygie   l'histoire    de    leurs  Martyrs;  elle  contenoit  encore 

C.3.  p.  168.  des  instructions  importantes.  '  Les  Fidèles  des  Gaules  y 
donnoient  aussi  leur  jugement  touchant  l'affaire  des  Mon- 
tanistes.  Eusebe  n'exprime  point  quel  étoit  leur  sentiment- 
sur  cela.  Il  se  contente  de  dire  seulement  qu'il  étoit  très- 
sage,  et  conforme  à  la  pieté  et  à  la  foi  Orthodoxe.  Cette 
partie  de  la  letre  nous  manque. 

CoD.  «up.p.  1.  '  A    l'ocasion    du   jugement  qu'on  y  portoit  sur  l'affaire 

des  Montanistes,  M'  Delalande  établit  un  Concile  tenu 
dans  les  Gaules  ,  et  composé  des  deux  provinces  de  Lyon 
et  de   Vienne.  Mais  on  ne  trouve  rien  dans  Eusebe,  qui 


DE  LYON  ET  VIENNE.  293 

est  le  seul  qui  en  parle  ,   pour  autoriser  l'idée  qu'on  se  for-     ii  siècle. 
me  d'une  assemblée  de  cette  nature. 

Il  seroit  difficile  de  renchérir  sur  les  éloges  que  l'on  a 
faits  du  précieux  monument  dont  il  est  ici  question.  '  Les  Tiu.iWd.p.î. 
plus  habiles  connoisseurs  le  regardent  comme  plein  de 
pieté  et  d'une  éloquence  toute  sainte.  Le  style  ,  disent  - 
ils,  en  est  si  grave  ,  si  saint,  si  édifiant  ,  que  toutes  les  pen- 
sées et  les  paroles  respirent  cette  vigueur  évangelique  et 
cette  vertu  mâle  et  héroïque  de  l'Eglise  primitive. 

'  M'  Bosquet ,  Evêque  de  Lodeve  et  ensuite  de  Mont-  Bosq.  i.  a.  c.  is. 
pellier  ,  dans  son  Histoire  Ecclésiastique  de  France  ,  a  té-  ^*^- 
moigné  l'estime  extraordinaire  qu'il  faisoit  de  cette  letre 
toute  apostolique  ,  en  s'écriant  comme  par  un  transport 
d'admiration  :  «  Qui  est  celui  qui  oseroit  entreprendre 
»  d'imiter  l'éloquence  de  ces  Pères?  Le  bienheureux  esprit 
»  de  ces  Martyrs  est  encore  vivant  dans  ces  paroles  toutes 
»  mortes  qu'elles  sont.  Le  sang  répandu  pour  Jesus-Christ 
»  y  paroît  encore  tout  bouillant.  Us  ne  parlent  que  des  cho- 
»  ses  qu'ils  ont  vues ,  qu'ils  ont  touchées,  qu'ils  ont  endu- 
»  rées  ;  et  ils  ne  raportent  que  des  paroles  qu'ils  ont  recueil- 
»  lies  de  la  bouche  de  ces  Saints  ,  ou  celles  qu'ils  ont  em- 
»  ploïées  pour  les  exhortera  remporter  la  victoire  sur  l'ido- 
»  latrie  .» 

'  Joseph  Scaliger,  quoique  séparé  du  sein  de  la  véritable  thi.  ibid.p.  3. 
Eglise  ,  n'a  pas  laissé  d'écrire  ces  paroles  mémorables  tou- 
chant les  actes  de  S.  Polycarpe  et  ceux  des  saints  Martyrs 
des  Gaules  :  «  '  La  lecture  de  ces  saints  Martyres,  qui  sont,  eus.  chr.  noi.  p. 
»  dit-il ,  les  plus  anciens  de  l'Eglise  ,  édifie  et  touctie  telle-  **' 
»  ment  l'esprit  des  Lecteurs  dévots  et  religieux  ,  que  l'on  ne 
»  s'ennuie  jamais  de  les  lire;  et  il  n'y  a  personne  qui  parlant 
»  selon  les  mouvemens  de  sa  conscience,  ne  reconnoisse  cet- 
»  te  vérité.  Pour  moi ,  aioûte-t-il ,  je  puis  dire-  que  je  n'ai 
»  jamais  rien  lu  dans  l'histoire  Ecclésiastique ,  qui  m'em- 
»  porte  si  fort  hors  de  moi-même,  qui  me  laisse  si  transpor- 
»  té  de  zélé  et  d'ardeur  pour  la  foi,  et  qui  me  change  en  une 
»  autre  personne  que  je  ne  suis.  »  Et  parlant  en  particulier 
de  l'histoire  des  Martyrs  de  Lyon.  «  Peut -on  rien  lire, 
»  dit-il ,  dans  les  monumens  de  l'antiquité  Chrétienne ,  qui 
»  soit  et  plus  auguste  et  plus  digne  de  respect  ?  » 


2  4 


294 


Il   SIECLE. 


F  A  U  S  T  E, 

AiiTEun  DES  Actes  de  S.  Andoche  et  de  ses  Com- 
PAr.NONS,  Martyrs. 

Act.  M.  p.  G9.  n.  Tp  A  u  S  t  E   '  étoit  d'AutuD  et  d'une  famille  illustre  ,  qui 
i^iBoii^iT.ian.p.  JH  Jqj^jjj^  jgj^g  Ij^  ^^jjg  plusieufs  Martyrs  à  l'Eglise.  Il  te- 

noit  à  Autun  le   rang  de  Sénateur  avec    les  marques  de 

Tiii.  II.  E.  1.3.  p.  Préteur.  'C'est-à-dire  aparemment  qu'il  étoit  du  nombre 

■"*  des   Décurions   qui   formoient    le   conseil    et   le   corps  de 

ville ,  et  qu'il  en  avoit  été  Duumvir ,  ou  l'un  des  premiers 

Ad.  Mar.  ibid.  i  p.  Magistrats.  '  Dieu  lui  donna  une  épouse  parfaitement 
digne  de  lui  pour  sa  foi  vive  ,  et  son  zèle  pour  le  Christia- 
nisme. De  ce  mariage  vint  un  fils  nommé  Symphorien , 
Qu'ils  eurent  soin  de  faire  instruire  dans  la  connoissance 
es  letres  et  dans  la  science  des  bonnes  mœurs,  et  qui  fut 

Boii.ib.  ip.  74.n.  depuis  uu  des  plus  illustres  Martyrs  de  nos  Gaules.  '  On 

*■  donne  aussi  à  Fauste  pour  sœur  une  sainte  Dame  nommée 

Leonille  ,  qui  demeurait  à  l^angres  ,  où  elle  se  rendit  cé- 
lèbre par  son  habileté  dans  l'art  de  la  Médecine  ,  et  qui 
fut  aïeule  des  trois  martyrs  connus  sous  le  nom  des  trois 
Jumeaux. 

p.  77.  n.  5.  '  Fauste  faisoit  déjà  profession  de  la    Religion   Chrétien- 

ne, mais  seulement  en  secret ,  à  cause  de  la  violence  de  la 
persécution  ,  lorsque  S.  Bénigne,  S.  Andoche  et  S.  Thyrse 

•  .X.I,    -,'..  -n     allèrent  prêcher  la  foi  à  Autun.  Il  les  logea  chez  lui  avec 

'*    beaucoup   de   charité  ;  et  sachant    qu'ils    étoient    Prêtres , 

il  leur  lit  baptiser  sa  famille  et  quelques-uns  de  ses  amis. 

n.  6.  '  11  engagea  ensuite  S.  Bénigne  à  aller  à  Langres  ,  rendre 

le  même  office  de  charité  à  la  famille  de  Leonille ,  et  faire 
dans  la  ville  ce  qu'ils   avoient  commencé  à  faire  à  Autun. 

ibid.  '  Après  le  martyre  de  S.  Andoche  et  de  ses  Compagnons, 

qui  suivit  d'assez  près  ,  et  qui  paroit  être  arrivé  sous  l'Em- 

Tiii.  U).  p.  40.  pire  de  Marc  Aurele  ,  '  Fauste  avec  Symphorien  son  fils 
prit  soin  d'enterrer  leurs  corps.  Et  afin  de  conserver  à  la 
postérité  la  mémoire  de  leurs  soufl'rances  ,  Fauste  dressa 
l'histoire  de  leur  martyre.  C'est  ce  qu'on  aprend  des  actes 

p.  eo3. 1.  de  ces  Saints  ,  qui  nous  restent  aujourd'hui.  '  Ils  ne  sont 

encore  que  manuscrits  ;  peut-être  ne  valent-ils  pas  la  pei- 
ne   de  les  imprimer.    Un  en  peut  juger  par  ce  trait.    Ils 


FAUSTE,  AUTEUR  DES  ACT.  DE  S.  AND.  etc.  295 

commencent  par  une  aparilion  de  S.  Irenée ,  déjà  mort,  à  ii  sieclk 
S.  Polycarpe.  M'  de  Tillemont  n'a  pas  laissé  d'en  tirer  di- 
verses choses  pour  l'histoire  des  saints  Martyrs.  Il  semble 
que  M'  du  Saussay  en  ait  vu  d'autres  differens  de  ceux-ci , 
mais  qui  ne  valent  peut-être  pas  mieux.  On  peut  assurer 
que  ni  les  uns  ni  les  autres  ne  sont  point  ceux  que  Fauste  , 
aont  nous  parlons  ,  laissa  à  la  postérité.  Son  ouvrage  doit 
être  mis  au  nombre  de  ceux  dont  l'Eglise  se  trouve  privée. 
C'est  une  vraie  perte.  Il  auroit  servi  sans  doute  à  eclair- 
cir  l'histoire,  d'ailleurs  fort  obscurcie,  delà  première  pré- 
dication de  l'Evangile  dans  les  Gaules. 


I.  CONCILE   DE  LYON. 

IL  '  est  des  Ecrivains  qui   mettent  deux  Conciles  k  Lyon  Eus.  noi.  p.  105. 
sur  la  fin  de  ce  siècle  :  l'un  où  Valentin  etMarcion  furent  *'  ""'   ""''  "*  *' 
dit-on  condamnés,  et  l'autre  où  il  fut  arrêté  que  la  fête   de 
Pâque  ne  se  devoit  célébrer  qu'au  jour  du  Dimanche.  '  Le  e»»-  «biJ- 
premier  de  ces  Conciles  est   fort  incertain  selon   le   juge- 
ment qu'en  portent  les  plus  habiles  connoisseurs.  En  effet 
on  n'en  a  de  connoissance  que  par  le  Synodique ,  livre  de 
trop  peu  d'autorité  pour  y  pouvoir  fonder  quelque  certi- 
tude. 

'  L'opinion  de  M'  Valois  est ,  que  comme  S.  Irenén  a  ibid. 
écrit  contre  Valentin  et  les  autres  hérétiques  de  cette 
trempe  ,  l'Auteur  du  Synodique  en  aura  pris  ocasion  de 
suposer  que  le  saint  Evêque  avoit  assemblé  un  Concile 
pour  condamner  solennellement  ces  hérétiques.  C'est -là 
aparemment  tout  le  fondement  de  ce  prétendu  Concile  : 
à  moins  qu'on  ne  l'établisse  ,  '  comme  fait  M'  Delalande  cone.  sup.  ibid.  1 
sur  ce  que  dit  Easebe  du  jugement  que  les  Eglises  de  Lyon 
et  de  Vienne  portoient  touchant  l'affaire  des  Montanistes 
dans  leur  letre  aux  Fidèles  d'Asie  et  de  Phrygie.  Mais  rien 
ne  nous  oblige  à  reconnoître  ici  l'assemblée  d'un  Concile 
en  forme.  Ces  Eglises  s'étant  assemblées  pour  dresser  une 
relation  des  souffrances  de  leurs  Martyrs  ,  y  insérèrent  , 
sans  beaucoup  de  façon  ,  ce  qu'elles  pensoient  de  l'hérésie 
des  Montanistes  ,  et  du  scandale  qu'elle  causoit  dans  l'E- 
glise. Eusebe  ne  nous  en  donne  point  d'autre  idée. 


Kiis.  1.  5.  c.  3.  p. 
168. 


296  I.  CONCILE  DE  LYON. 

II  SIECLE.        *  Il  n'en  est  pas  de  même  du  Concile  touchant  le  jour 

~ — ^^1  .jj.j  ■  auquel  il  falloit  célébrer  la  fête  de  Pâque.  Ce  Concile  se 
trouve  bien  expressément  marqué  dans  Eusebe.  Nous 
n'entreprenons  donc  de  parler  que  de  celui-ci  ,  que  nous 
comptons  pour  le  premier  de  Lyon  ,  n'aïant  aucune 
preuve  certaine  qu'il  s'y  en  soit  tenu  quelque  autre  aupa- 
ravant. 

Eus.  1.5.  c.  22.  p.      '  Sous  l'Empire  de   Commode  qui  regnoit  depuis    dix 

c!23!p!i90.  *ns,  et  le  commencement  du  Pontificat  de  S.  Victor ,  '  il 
s'éleva  dans  l'Eglise  une  grande  dispute  à  l'ocasion  du  jour 
auquel  on  devoit  célébrer  la  résurrection  du  Seigneur. 
Toutes  les  Eglises  d'Asie  apuïées  sur  une  ancienne  tradi- 
tion ,  faisoient  cette  fête  le  quatorzième  de  la  lune,  au- 
quel les  Juifs  avoient  reçu  ordre  d'immoler  l'Agneau  Pas- 
cal ,  quelaue  jour  de  la  semaine  que  tombât  ce  quator- 
zième. Elles  fmissoient  par  conséquent  ce  même  jour  le 
jeûne  du  Carême.  Au  contraire  toutes  les  autres  Eglises 
du  monde  Chrétien  ,  sur  une  tradition  qui  venoit  des  Apô- 
tres ,  ne  célébroient  cette  solennité  ,  et  ne  finissoient  leur 
jeûne  que  le  jour  du  Dimanche. 

ibid.  '  C'est  ce  qui  fut  confirmé  dans  plusieurs  Conciles  as- 

semblés en  divers  lieux  sur  ce  sujet  :  à  Rome  ,  en  Palestine, 

p.  191.  '  dans  le  Pont ,  dans  l'Osdroene  ,  à  Corinthe.  Les  Eglises 

des  Gaules,  qui  avoient  S.   Irenée   à  leur  tête  ,  assemblè- 
rent aussi  leur  Concile  ,  et  confirmèrent  ces  mêmes  points 

c.  24.  p.  lOi.  193.  de  discipline.  '  On  voioit  encore  leur  letre  synodale  au 
tems  d'Eusebe,  qui  nous  en  a  conservé  un  fragment  con- 
sidérable. Elle  étoit  au  nom  des  Frères  que  S.  Irenéé  gou- 

noi.  p.  105. 2.  vernoit  dans  les  Gaules.  '  Par  le  nom  de  Frères  emploie 
en  cet  endroit ,  quelques  Savans  croient  qu'il  faut  enten- 
dre des  Evêques.  Le  P.  Sirmond  en  compte  jusqu'à  treize, 
qu'il  supose  avoir  composé  ce  Concile  avec  S.  Irenée  à  leur 
tête.  Mais  ce  que  l'on  peut  dire  de  plus  certain  sur  cela , 
c'est  que  l'on  ne  sait  rien  de  leur  nombre. 

Le  Concile  ne  se  borna  pas  seulement  à  établir  que  le 
mystère  de  la  Résurrection  du  Seigneur  ne  se  doit  célé- 
brer que  le  Dimanche  ;  il  crut  encore  devoir  interposer 
son  crédit  et  ses   remontrances,   pour  procurer   la  paix   à 

1.5.  c.  24.  p.  192.  l'Eglise  troublée  à  ce  sujet.  Car  '  le  pape  Victor  voïant 
que  les  Eglises  d'Asie  persistoient  à  suivre  leur  ancienne 
coutume   dans  la  célébration  de  ce  mystère  ,  il   entreprit 

aussi  tôt 


I.  COiNCILË  DE  LYON.  297 

aussi-tôt  de   les  excommunier.  ^  11  les  excommunia  même    n  siecli;. 

effectivement    si    l'on    s'en  raporte  à  Eusebe  et  à  Socrate.  — 

••  Mais    cette    conduite  aïant    déplu    à    divers  Evêques,  ils  àâ.p.U*"'  '^''' 
écrivirent    fortement    au    Pape,   pour  le  porter  à  avoir  des  "Eus.  ibid. 
sentimens  plus  conformes  à  la  paix,  à  l'union  et  à  la  cha- 
rité Chrétienne. 

'  Le  Concile  de  Lyon  se  signala  en  cette  rencontre,  ibid. 
Sans  sortir  du  respect  dû  au  souverain  Pontife,  il  le  pria 
de  ne  point  séparer  ainsi  de  la  communion  un  aussi  grand 
nombre  d'Eglises,  pour  ne  faire  que  suivre  une  coiitume 
qu'elles  avoient  reçue  de  leurs  pères.  Il  lui  représenta  au 
sujet  du  jeûne  ,  qu'il  ne  s'agissoit  pas  seulement  du  jour 
auquel  on  le  finissoit,  mais  encore  de  la  manière  de  jeû- 
ner. Que  quelques-uns  ne  croïoient  devoir  jeûner  qu'un 
jour ,  d'autres  deux ,  quelques  autres  davantage.  Qu'il 
s'en  trouvoit  même  qui  fixoient  leur  jeûne  à  quarante 
heures,  '  en  y  comprenant  la  nuit  comme  le  jour.  Que  p- 193. 
cette"  variété  de  discipline  étoit  déjà  ancienne  dans  l'Eglise  ; 
quoiqu'elle  eût  aparemment  sa  source  dans  la  négligence 
des  Pasteurs,  et  la  simplicité  des  Fidèles.  Que  néanmoins  ce 
n'avoit  jamais  été  un  sujet  pour  rompre  la  paix.  Que  même 
à  le  bien  prendre  ,  la  variété  dans  ce  point  de  discipline 
servoit  à  relever  l'unanimité  de  la  foi  dans  le  dogme. 

Et  afin  de  persuader  le  Pape  par  des  exemples  domesti- 

3ues,  '  le  Concile  lui  rapelle  la  conduite  de  ses  saints  pré-  ibid. 
écesseurs  Anicet,  Pie,  Hygin,  Telesphore  et  Xyste,  qui  tous 
conservèrent  inviolablement  la  paix  avec  ceux  des  Eglises 
où  l'on  suivoit  des  prati(jues  différentes  de  celles  qu'ils  sui- 
voient  eux-mêmes.  Jamais,  dit  le  Concile,  ils  ne  retranchè- 
rent de  leur  communion  personne  pour  ce  sujet.  Ils  conti- 
nuèrent toujours  à  leur  envoier  l'Eucharistie,  comme  une 
marque  de  leur  union  mutuelle.  «  Bien  plus,  ajoute  le  Con- 
«  cile,  lorsque,  sous  le  Pontificat  de  S.  Anicet,  S.  Polycarpe  fit 
«  le  voiage  de  Rome,  ces  deux  Saints  ayant  eu  entre  eux  quel- 
ce  que  légère  contestation  sur  certaines  choses,  ils  se  recon- 
«  cilierent aussi-tôt,  sans  se  mettre  beaucoup  en  peine  delà 
«  diversité  qui  partageoit  leurs  Eglises  sur  ce  point  de  di^ 
«  cipline.  Ni  S.  Anicet  ne  put  persuader  à  S.  Polycarpe  de 
«  quitter  une  coutume  qu'il  avoit  toujours  observée  après 
«  S.  Jean  l'Evangeliste  et  les  autres  Apôtres ,  dont  il  avoit 
a  ét^  disciple  ;  ni  S.  Polycarpe  pareillement  ne  put  ame- 
Tome  I.  Prem.  Part.  Q  a 

2  4  *  ^  . 


298  1.  CONCILE  DE  LYON. 

1 1  s  1  li  c  L  K.  «  lier  S.  Anicet  à  suivre  sa  pratique  ;  ce  Pape  se  croiant  obli- 
«  gé  à  observer  celle  qu'avoient  suivie  ses  prédécesseurs.  Les 
«  choses  en  demeurèrent  là  ;  et  ces  deux  grands  hommes  com- 
«  muniquerent  ensemble  sans  difficulté.  S.  Anicet  fit  encore 
«  davantage.  Il  acorda  par  honneur  à  S.  Polycarpe  d'offrir  les 
«  saints  mystères  dans  sa  propre  Eglise.  Enfin  ils  se  séparèrent 
«  en  paix,  conservant  l'un  et  l'autre  la  communion  avec  l'E- 
«  glise  universelle,  malgré  la  diversité  de  leurs  pratiques.  »  -: 
Telles  sont  en  partie  les  remontrances  que  le  Concile  de 
Lyon  fait  au  Pape  S.  Victor;  et  il  y  a  tout  lieu  de  croire 
qu'elles  eurent  leur  effet.  La  letre  synodale,  qui  les  con- 
tenoit ,  fut  dressée  par  S.  Irenée  comme  le  Président  et  l'a- 
me  du  Concile.  Les  malheurs  des  tems  nous  ont  envié  cette 
pièce  en  son  entier.  Nous  n'en  avons  qu'une  partie  qui  se 
trouve  dans  l'Histoire  Ecclésiastique  d'Eusebe.  Ce  peu  qui 
nous  en  reste  nous  doit  faire  extrêmement  regreter  ce  qui 
Kus.  ibiii.  iioi.  p.  s'en  est  perdu,  '  et  meritoit  bien  de  trouver  place  dans  la 
'**■'*■  collection  des  Conciles  do  France,  et  dans  les  autres  colle- 

ctions générales  des  Conciles.  M.  Valois  avoit  averti  le  P.  Sir- 
raond  de  ne  le  pas  oublier  dans  son  recueil.  Mais  ce  Père  s'est 
contenté  d'en  dire  un  mot  dans  sa  préface,  et  a  commencé 
con;.  .ui).  p.  2.  sii  collection  à  Constantin  le  grand.  '  Il  est  vrai  que  M.  Dela- 
lande  son  neveu  a  supléé  à  son  défaut,  aïant  inséré  la  version 
latine  de  ce  précieux  monument,  dans  ce  qu'il  a  publié  pour 
servir  de  suplément  à  l'édition  des  Conciles  de  son  oncle. 
Bal.  oi.-.  p.  7-10.  'M.  Baluze  nous  a  aussi  donné  ce  même  fragment  en  grec, 

avec  la  version  latine  de  Rufîn  et  celle  de  M.  Valois. 
p.ci.:oiic..,up.p.  1.       '  On  place  ordinairement  ce  I  Concile  de  Lyon  vers  l'an 
i:us.  i.5.c.'w.i(.  198  de  l'Ere  Chrétienne.  Cependant  Eusebe  '  témoigne  que 
p.  i«9.  m.  J.J  grande  dispute  qui  en  ocasionna  la  tenue,  se  passa  dès  le 

commencement  du  Pontificat  de  S.  Victor,  qui  monta  sur 
le  S.  Siège,  comme  l'on  croit,  en  l'année  194.  Il  est  vrai 
que  la  suputation  d'Eusebe  n'est  pas  exacte  en  cet  endroit; 
puisqu'il  lie  cette  époque  avec  la  dixième  année  de  l'Em- 
pire de  Commode,  qui  fut  empoisonné  dès  192,  après  douze 
ans  de  regntj.  Mais  il  peut  s'être  trompé  en  cela,  sans  qu'il 
l'ail  fait  en  mettant  vers  le  commencement  du  Pontificat  de 
S.  Victor  la  dispute  dont  nous  venons  de  parler.  Et  comme 
il  paroît  que  l  on  commença  par  tenir  des  Conciles  pour 
éclaircir  (  t  constater  la  vérité  qui  faisoit  le  sujet  de  la  dis- 
pute, on  pourroil  avaiK^cr  au  moins  de  deux  ans  le  Concile 
dont  il  est  ici  question,  cl  le  placer  en  l'année  196. 


I 


HISTOIRE 


LITERAIRE 


DE  LA  FRANCE 


TROISIEME    SIECLE  DE   L'EGLISE 


r 


ETAT  DES  LE  TRES  DANS  LES  GAULES 

en  ce  Siècle. 


LES  œuvres  de  Dieu  dans  l'ordre  des  créatures 
ont  leur  commencement  et  leur  progrès,  comme 
celles  des  hommes  ;  avec  cette  différence  toutefois , 
que  la  fin  qu'il  s'y  propose,  a  toujours  infailliblement 
son  effet,  et  qu'il  pourroit  faire  tout  d'un  coup  ce  que  sa  sou- 
veraine sagesse  ne  juge  à  propos  de  faire  que  par  degrés.  Ne 


300  ETAT  DES  LETRES 

soiez  donc  pas  surpris  de  ne  voir  pas  encore  toutes  les  Gaules 
devenues  Chrétiennes.  Non,  quelque  heureux  succès  qu'y  ait  eu 
la  prédication  de  l'Evangile  au  siècle  précèdent,  et  quelque 
progrès  qu'elle  continuât  à  y  faire  en  colui-ci,  elle  n'y  fut  pas 
néanmoins  embrassée  de  tout  le  monde.  Une  partie  de- 
meura opiniâtrement  attachée  aux  erreurs  damnables  de 
son  infidélité,  pendant  que  l'autre  se  soumit  volontiers  au 
joug  salutaire  du  Christianisme.  Ainsi  l'on  vit  encore  nos 
Gaulois  former  comme  deux  peuples  distingués  l'un  de 
l'autre  par  les  différentes  religions  dont  ils  faisoient  pro- 
fession. Les  uns  abandonnés  à  leurs  propres  ténèbres,  con- 
tinuèrent à  vivre  en  Païens  :  les  autres  aïant  ouvert  les 
yeux  à  la  lumière  de  la  foi,  ne  vêquirent  plus  qu'en  dis- 
ciples de  l'Evangile.  Ceux-ci  ne  cultivèrent  presque  plus 
que  les  sciences  qui  convenoient  au  nouvel  étal  qu'ils 
avoient  embrassé  :  ceux-là  ne  s'apliqnerent  qu'à  celles 
qui  étoient  connues  dans  le  Paganisme.  De  sorte  que  pour 
vous  donner  une  juste  idée  de  l'état  des  letres  dans  les 
Gaules  en  ce  siècle,  il  faut  y  distinguer  deux  genres  de  li- 
terature ,  la  .sacrée  et  la  profane.  Parlons  d'abord  de  la 
première,  ensuite  nous  passerons  à  l'autre. 

II.    La  literature    sacrée,  ou  les  sciences  ecclésiastiques 
se   developerent    et   s'étendirent    dans  les  Gaules  à  mesure 

3ue  le  Christianisme  y  prit  ses  acroissemens.  Vous  avez  vu 
ans  ce  que  nous  avons  dit  sur  le  siècle  d'où  nous  sortons, 
en  quoi  les  Chrétiens  faisoient  consister  ces  sciences.  Il  ne 
s'agit  ici  que  de  vous  montrer  quel  fut  leur  progrès  dans 
nos  Gaules  en  ce  troisième  siècle.  Il  seroit  à  souhaiter  pour 
vous  satisfaire  pleinement,  que  nous  fussions  mieux  instruits 

3ue  nous  ne  sommes ,  de  l'histoire  particulière  de  l'Eglise 
es  Gaules.  Nous  n'en  savons  que  trè.s-peu  de  choses  pour 
ce  qui  concerne  ces  premiers  siècles;  et  nous  en  avons  dé- 
jà touché  ailleurs  quelques  raisons.  (Vest  que  les  Fidèles 
de  l'Eglise  primitive,  tout  occupés  à  pratiquer  les  précep- 
tes de  l'Evangile,  se  mettoient  peu  en  peine  d'écrire  leurs 
annales.  Que  si  quelques-uns  1  ont  fait,  et  que  leurs  écrits 
nous  aient  été  conservés,  ou  voit  qu'ils  ne  s'y  sont  pres- 
que attachés  qu'à  ce  qui  regardoit  l'Eglise  en  gênerai. 
Ou  s'ils  ont  laissé  quelque  ouvrage  qui  regardât  l'Eglise 
des  Gaules  en  particulier,  il  n'est  point  venu  jusqu'à  nous. 
Tels   sont  les  actes  de  S.  Irenée,  que  l'on  croit  avoir  été 


l 


DANS   LES  GAULES.    III  SIECLE.       301 

écrits  dès  ce  siècle,  et  qui  ne  se  trouvoient  plus  du  tems 
de  S.  Grégoire  Pape.  Tels  sont  encore  les  actes  de  S.  De- 
nys  de  Paris,  et  les  vies  des  autres  saints  Missionnaire? 
qui  furent  envoies  dans  les  Gaules  avec  lui.  Quel  secours  ne 
tirerions-nous  point  de  ces  monumens  pour  notre  histoire? 
Mais  il  faut  se  contenter  du  peu  que  la  providence  nous  a 
conservé.  L'on  ne  laissera  pas  d'y  voir  en  partie  les  pro- 
grès que  firent  les  sciences  ecclésiastiques  parmi  les  Gau- 
lois en  y  considérant  ceux  qu'y  fil  la  Religion  Chrétienne. 

lil.  Il  est  aisé  déjuger  de  l'état  florissant  où  étoient  les 
Eglises  des  Gaules  au  commencement  de  ce  siècle,  par  les 
soins  qu'aporta  S.  Irenée  à  les  gouverner.  Outre  que  le 
sang  qu'y  avoient  répandu  les  Martyrs,  étoit  devenu  une 
semence  féconde,  qui  y  avoit  multiplié  les  Chrétiens , 
quels  fruits  n'y  dévoient  pas  produire  les  travaux  qu'en- 
treprit ce  grand  Evêque  pour  y  étendre  la  foi,  détruire 
les  hérésies,  et  former  des  disciples  (|ui  fussent  capables 
d'en  faire  autant  à  leur  tour?  Quelles  impressions  n  y  dé- 
voient pas  faire  les  exemples  éclatans  qu'il  y  donna  de  son 
amour  pour  l'unité,  de  son  zélé  contre  l'erreur  et  de  son 
attachement  pour  la  saine  doctrine?  Son  amour  pour  l'u- 
nité se  fit  connoître  dans  tout  ce  qu'il  entreprit  pour  pro- 
curer la  paix  aux  Eglises  divisées  touchant  le  jour  auquel 
on  devoit  célébrer  la  Pâque.  Son  zélé  contre  l'erreur  se 
manifesta,  non  seulement  par  les  livres  qu'il  écrivit  contre 
les  hérétiques  de  son  teins,  qui  tâchoient  de  séduire  son 
troupeau,  mais  encore  par  la  vigueur  avec  laquelle  il  la 
poursuivit  jusque»  dans  Rome  même,  où  Florin  et  Blaste, 
qu'il  terrassa  par  ses  écrits,  avoient  la  hardiesse  de  l'ensei- 
gner. Son  attachement  pour  la  saine  doctrine  se  fit  admi- 
rer par  l'attention  qu'il  aporta  à  instruire  son  peuple  de  ce 
qu'il  devoit  croire,  en  même  tems  qu'il  lui  montroit  ce 
qu'il  devoit  rejetter,  par  la  réfutation  qu'il  faisoit  des  dog- 
mes aussi  ridicules  qu'impies,  que  l'on  osoit  répandre  dans 
le  public. 

IV.  Non,  ce  saint  et  savant  Evêque  ne  se  bornoit  point 
dans  ses  écrits  à  reprimer  la  licence  des  hérétiques;  il  tâ- 
choit  encore  d'y  affermir  la  foi  qu'il  avoit  prêchée,  et  de 
former  les  mœurs  des  Fidèles.  Dans  le  peu  qui  nous  en 
reste  on  trouve  établies  presque  toutes  les  vérités  fonda- 
mentales de  la  Religion  Chrétienne  :  l'unité  d'un  Dieu  en 


302  ETAT    DES    LETRES 

trois  Personnes  ;  l'incarnation  du  Verbe  dans  le  sein  d'u- 
ne Vierge;  son  éternité  et  son  égalité  avec  son  Père;  la 
vérité  de  sa  chair,  de  sa  passion,  de  sa  résurrection;  la  chu- 
te de  l'homme,  et  les  suites  funestes  de  cette  chute;  la  re- 
demlion  du  genre  humain  par  J.  G.  la  nécessité  de  sa 
grâce  pour  le  salut;  la  liberté  de  l'homme;  le  mystère  de 
l'Eucharistie;  la  confession  des  péchés  secrets  comme  des 
autres;  le  jugement  dernier;  la  résurrection  de  la  chair. 
On  y  trouve  les  règles  et  des  exemples  d'une  sainte  mora- 
le :  autant  d'humilité  que  de  prudence,  autant  de  chari- 
té que  de  zélé  et  de  vigueur.  En  y  enseignant  la  manière 
de  combatre  les  hérésies,  il  y  marque  en  même-tems  l'o- 
bligation de  le  faire  sans  cesser  d'aimer  ceux  qui  les  sou- 
tiennent. Quelles  instructions  ne  contenoient  point  tant 
d'autres  Livres,  dont  il  avoit  enrichi  l'Eglise,  et  dont  nous 
avons  le  malheur  d'être  privés?  C'est  par-là  que  cette 
grande  lumière  de  tout  l'Occident  ne  cessa  point  de  luire 
et  d'éclairer,  même  après  que  la  tyrannie  d'un  Empereur 
Païen  l'eut  éteinte.  C'est  par-là  que  cet  Oracle  des  Eglises 
des  Gaules  continua  encore  à  parler,  même  après  qu'on 
lui  eut  fermé  la  bouche  par  le  martyre  qu'on  lui  fit  souf- 
frir vers  l'an  202. 

V.  Non  seulement  S.  Irenée  continua  après  sa  mort  à 
instruire  les  Eglises  des  Gaules  par  les  écrits  dont  il  les 
avoit  enrichies  ;  il  le  fit  encore  par  le  ministère  des  disci- 
ples qu'il  avoit  rendus  les  héritiers  de  sa  doctrine  et  de  son 
zélé.  Nous  avons  déjà  touché  quelques  traits  de  ceux  qu'il 
forma  et  pour  des  païs  éloignés  et  pour  quelques-unes  de 
nos  provinces.  La  connoissance  que  nous  avons  de  ceux 
là,  doit  nous  faire  juger  du  mérite  des  autres  qui  nous  sont 
inconnus.  On  ne  nous  aprend  rien  de  ceux  qu'il  retint  près 
de  sa  personne.  Mais  il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  qu'ils  ne 
fussent  de  dignes  élevés  d'un  aussi  excellent  maître.  Sa 
place  fut  remplie  selon  toute  aparence  par  quelqu'un  d'en- 
tre eux,  qui  sut  y  enseigner  ce  qu'il  avoit  apris,  et  y  con- 
Cyp-ep.  07.  tinuer  ainsi  la  tradition  de  la  doctrine  des  Apôtres.  '  Il  est 

au  moins  certain  que  vers  le  milieu  de  ce  siècle  le  Siège  de 
Lyon  étoit  encore  ocupé  par  un  S.  Evêque,  fort  zélé  pour 
Eus.  1. 5.  r.  20.  p.  la  pureté  de  la  docirine  de  l'Eglise.  'Il  a  échapé  aux  mju- 
"""  res    des    tems  un  Irait  précieux  de  la  conduite  que  tenoit 

S.  Irenée  envers  ses  disciples,  pour  leur  inspirer  du  respect 


187 


DANS  LES  GAULES,  lli  SIECLE. 


303 


et  de  l'attention  à  conserver  pure  lu  tradition  ecclésiasti- 
que. C'est  ce  que  nous  aprend  l'instante  prière  qu'il  faisoit 
à  ses  copistes ,  de  transcrire  ses  ouvrages  avec  une  exacti- 
tude la  plus  scrupuleuse.  Précaution  qui  a  paru  si  impor- 
tante, qu'elle  est  passée  de  l'Eglise  des  Gaules  dans  les  au- 
tres Eglises  d'Orient  et  d'Occident  ;  jjlusieurs  Pores  grecs 
et  latins  s' étant  fait  un  devoir  de  l'iniitcr. 

VL  Mais  de  tous  les  disciples  qui  sortirent  de  l'école  de 
S.  Irenée,  nous  n'en  connoissons  j)oint  qui  le  fissent  mieux 
revivre  après  sa  mort,  que  Cajus  et  S.  Hippolyte.  Formés 
l'un  et  l'autre  sur  cet  excellent  modèle,  ils  le  copièrent 
parfaitement.  Il  auroit  été  difficih;  de  se  tromper  à  re- 
connoitre  le  maître  dans  ces  deux  disciples.  11  est  vrai  que 
l'Eglise  des  (jaules  qui  les  avoit  élevés,  ne  jouit  pas  long- 
tems  des  fruits  de  l'éducation  qu'ils  y  avoient  prise.  Ils  al- 
lèrent les  produire  dans  des  terres  élrangercs;  soit  que  la 
violence  de  la  persécution  qui  éclata  sur-tout  dans  les  Gau- 
les au  commencement  de  ce  siècle,  ne  leur  permit  pas  de 
se  fixer  dans  nos  provinces;  soit  que  les  limites  des  Gau- 
les fussent  trop  étroites  pour  la  grandeur  de  leur  zélé  ; 
soit  enfin  que  S.  Irenée  les  eût  destinés  lui-même  pour 
porter  la  foi  dans  les  pais  éloignés.  Mais ,  quoique 
l'Eglise  des  Gaules  n'ait  pas  toujours  joui  de  leur  pré- 
sence, on  ne  pourra  jamais  lui  ravir  la  gloire  d'avoir  in- 
struit et  formé  ces  deux  grands  hommes.  Il  sera  toujours 
glorieux  pour  elle,  de  savoir  que  ce  fut  dans  son  sein  qu'ils 
puisèrent  le  premier  fonds  de  cette  profonde  érudition, 
qui  les  fit  regarder  l'un  et  l'autre  comme  deux  des  plus  cé- 
lèbres Docteurs  de  l'Eglise  en  ce  siècle.  Il  sera  toujours  vrai 
de  dire  que  la  source  de  cette  éminente  doctrine,  qu'ils  ré- 
pandirent en  tant  de  divers  endroits  par  leurs  préaications, 
et  dont  ils  remplirent  le  grand  nombre  de  Livres  qu'ils 
laissèrent  à  la  postérité,  remontoit  jusqu'à  l'Eglise  de  Lyon. 

VIL  (juels  avantages  ne  tira  point  toute  l'Eglise  des 
travaux  de  ces  deux  grands  Docteurs?  Fidèles  imitateurs 
de  celui  qui  les  avoit  formés,  ils  firent  en  presqu'une  infi- 
nité de  lieux,  ce  qu'il  avoit  fait  le  premier  avec  tant  de 
succès  dans  les  Gaules.  Caïus  imitant  son  zélé  contre  les 
hérésies,  '  combatit  celle  des  Montanistes  en  la  personne  Eus.  i. c.c. 20. p. 
de  Procle  ou  Procule,  *  celle  contrôla  divinité  de  J.  C.  dans  f^,,^,  ^  ^^ 
les  hérétiques  Artemon   et  Theodote,   et  les  erreurs  gros-  30.37.'  '''       '"' 


304  ETAT   DES    LETRES 

sieres  des  Grecs  qui  se   prétendoient  plus  anciens  que  le 
Eus.  1. 3.C  ;i8.  p.  Peuple  de  Dieu,  en  la  personne  d'un  certain  Alcinoùs.  '  Il 

100  I   Thdrt.  hoir.  r  ,1     '^  »v       if   1  •      u  1  J 

1. 2.  c.  2.  p.  220.  poussa  même  son  zélé  jusqu  a  réluter  ceux  qui  abusant  de 
l'endroit  de  l'Apocalypse,  où  il  est  parlé  d  un  calme  de 
mille  ans,  établissoient  un  règne  imaginaire  et  charnel  de 
même  durée  pour  J.  C.  et  ses  Elus.  De  sorte  que  si  ce 
lut  une  tache  pour  l'Eglise  des  Gaules,  d'y  voir  paroitre 
les  erreurs  des  Millénaires,  ce  fut  une  plus  grande  gloire 
pour  elle  d'avoir  formé  un  Docteur  qui  portât  les  premiers 
coups  à  ces  erreurs  naissantes.  Ce  ne  fut  pas  une  moindre 

iiier.vir.iii.  c.r.t.  gloire  pour  cette  Eglise,  'd'avoir  donné  en  la  personne  de 
S.  Hippolyte  un  savant  Interprête  de  l'Ecriture,  qui  servit 
et  de  motif  et  de  modèle  au   grand   Origene  pour  entre- 

iren.  1. 3.  c.  7.  n.  prendre  le  même  travail.  'S.  Irenée  est  le  premier  des  Pe- 

ildiss.  2.n.  41.    ^^^  ^^^    j,^^  connoisse   avoir  travaillé  à   éclaircir  Quelque 

Livre  de  l'Ecriture.  S.  Hippolyte  son  disciple  est  allé  bien 
plus  loin,  et  a  travaillé  sur  ce  sujet  peut-être  plus  qu'au- 
cun des  anciens.  En  effet  il  est  peu  de  Livres  de  l'Ecriture 
sur  lesquels  il  ne  composât  des  commentaires,  ou  dont  il 
n'expliquât  les  principales  difficultés.  Il  confondit  enco- 
re par  ses  écrits,  comme  S.  Irenée  avoit  fait  par  les  siens, 
tous  les  hérétiques  qui  parurent  depuis  la  (in  du  II  siècle 
jusqu'à  son  tems. 

VIII.  Dieu  ne  fut  pas  long-tems  sans  dédommager 
l'Eglise  des  Gaules  des  deux  élevés  qu'elle  avoit  cédés  à 
(,r.  T.  hisi.  Fr.  I.  d'autrcs  Eglises.  Pour  ces  deux  Missionnaires  '  il  lui  en  en- 
I ,  n_.  28 1  Gi.  conf.  ^^^-^^  g^pj  ^utrcs,  quc  l'ou  croit  être  tous  venus  de  Rome.  S.  Ga- 
tien  qui  fixa  son  siège  à  Tours,  S.  Trophime  à  Arles,  S. 
Paul  à  Narbone,  S.  Saturnin  à  Toulouse,  S.  Denys  à  Pa- 
ris, S.  Austremoine  à  Clermont  en  Auvei^ne,  et  S.  Mar- 
tial à  Limoges.  Ce  fut  par  la  prédication  de  ces  grands 
Evêques,  que  la  lumière  de  l'Evangile,  qui  dès  le  siècle 
précèdent  s'étoit  répandue,  comme  vous  l'avez  vu,  dans 
la  Gaiile  Celtique  par  le  ministère  des  disciples  des  Apô- 
tres et  des  hommes  Apostoliques  de  la  Grèce,  pénétra 
dans  presque  tout  le  reste  des  Gaules.  De  sorte  que  la  do- 
ctrine que  S.  Pierre  et  S.  Paul  avoient  enseignée  en  Occi- 
dent, et  celle  que  les  Apôtres  S.  Jean  et  S.  Philippe  avoient 
prêches  en  Asie,  se  trouvèrent  réunies  dans  nos  Gaules, 
pour  y  former  ce  que  l'on  nomme  aujourd'hui  l'Eglise 
Gallicane.  Prérogative  aussi  avantageuse  que  remarquable  ! 

Prérogative 


DANS  LES  GAULES.    III  SIECLE.       30r) 

Prérogative  dont  peu  d'autres  Eglises  pourroient  se  van- 
ter !  Telles  furent  les  sources  d'où  sortirent  les  ruisseaux  de 
celte  eau  salutaire  qui  arrosa  nos  provinces.  Telle  est  l'o- 
rigine de  la  doctrine  que  l'on  y  enseigne  encore  aujour- 
d'hui d'une  manière  beaucoup  plus  pure  qu'en  tout  autre 
pais,  par  le  soin  que  l'on  y  a  aporté  dans  tous  les  siècles  à 
conserver  dans  sa  pureté  ce  que  l'on  avoit  reçu  par  le  ca- 
nal de  ces  Apôtres  de  nôtre  foi. 

IX.  Comme  ceux  qui  jetterent  les  premiers  fondemens 
de  l'Eglise  des  Gaules  éloient  Grecs,  et  qu'ils  se  servoient 
de  la  langue  gréque,  au  moins  dans  les  affaires  ecclésias- 
tiques, il  y  a  tout  lieu  de  croire  qu'ils  suivoient  aussi  le  rit 
grec,  tel  qu'il  se  pratiquoit  dans  les  Eglises  d'Asie.  11  en 
faut  néanmoins  excepter  quelques  points  particuliers , 
comme  de  l'aire  la  Pâque  le  quatorzième  de  la  Lune.  Sur 
le  même  principe  il  n'y  a  pas  sujet  de  douter  qu'ils  ne  se 
servissent  aussi  de  l'Ecriture  Sainte  en  grec,  du  texte  ori- 
ginal pour  le  nouveau  Testament ,  et  de  la  version  des 
Seplante  pour  l'ancien.  Mais,  lorsque  les  sept  Evoques, 
dont  nous  venons  de  parler,  y  vinrent  de  Rome  fonder 
de  nouvelles  Eglises,  il  est  hors  de  doute  qu'ils  y  intro- 
duisirent le  rit  latin,  qui  ne  tarda  pas  à  y  prendre  le  des- 
sus. De  même  il  y  a  toute  aparence  qu'ils  y  aporterent 
dès-lors  l'ancienne  Italique,  ou  version  latine  de  l'ancien 
et  du  nouveau  Testament.  Il  est  au  moins  certain  qu'elle 
étoit  en  usage  dans  les  Gaules  au  IV  siècle.  Delà  il  est 
tout  naturel  de  conjecturer  que  cette  introduction  fit  né- 
gliger le  texte  original,  et  tomber  insensiblement  l'usage 
de  la  langue  gréque  dans  les  Eglises  où  il  s'étoit  introduit. 
Delà  il  arriva  encore  que  les  Ecclésiastiques  en  particulier 
venant  à  négliger  la  langue  gréque,  négligèrent  aussi  de 
conserver  les  ouvrages  écrits  en  la  même  langue.  C'est-là, 
comme  il  paroît,  la  source  primitive  des  pertes  irréparables 
qu'a  fait  l'Eglise  des  Gaules  de  plusieurs  ouvrages  grecs, 
nommément  de  ceux  de  S.  Irenée,  dont  il  ne  nous  reste 
en  leur  langue  originale  que  ce  que  les  Pères  de  l'Eglise 
gréque  nous  en  ont  conservé. 

X.  '  De  la  manière  que  S.  Grégoire  de  Tours  parle  de  Cr.  t.  lùst.  Fr.  i. 
la  Mission  de  ces  sept  Evêques,  on  s'imagineroit  qu'ils  se- 

roient    venus    en  même  tems  dans  les  Gaules.  '  Mais  cela  *«.  Man.  p.  lus. 
ne  s'est  pas  fait  ainsi.  Le  but  de  cet  Historien  en  plaçant 
Tome  I.  Prem.  Part.  H  r 


306  ETAT  DES  LETRES 

cette  mission  sous  l'Empire  de  Dece  vers  250,  qui  est  l'é- 

f)oque  de  celle  de  S.  Saturnin,  n'est  autre  que  de  désigner 
e    tems    de    la   mission  des  six  autres,  qu'il  croïoit  d'ail- 
leurs   l'avoir  acompagné  dans  les  Gaules.  II  est  au  moins 
indubitable    que    S.    Trophime    y  étoit  venu,  et  avoit  fixé 
son  Siège  à  Arles  assez  long-tems  avant  S.  Saturnin  à  Tou- 
Cyp.  op.  G7.  p.  louse.    Ou    u'cu    pcut   doutcr  ,    lorsque  l'on  fait  alention  ' 
Ihr'no"  i'.  r^p!  qu'avant    253    il    avoit    pour    successeur  à  Arles  l'Evêque 
•'-'■  Marcien  ,  engagé    dès-lors    dans    l'hérésie  de  Novatien  ,  et 

qu'entre  S.  Trophime  et  ce  Marcien  il  y  a  eu  au  moins 
un  autre  Evêque,  qui  est  S.  Régule.  C'est  ce  qui  est  clair 
et  par  les  anciens  catalogues  des  Evêques  d'Arles ,  et  par 
la  soixante-septième  letre  de  S.  Cyprien  au  Pape  S.- 
Etienne,  écrite  avant  leur  difîérend  au  sujet  de  la  rebap- 
tisation.  De  sorte  qu'il  faut  avancer  de  trente  ans  ou  en- 
viron la  mission  de  S.  Trophime  dans  les  Gaules.  Il  en 
peut  aisément  avoir  été  de  même  des  autres  cinq  Evê- 
ques. Les  uns  seront  venus  plutôt,  les  autres  plus  tard; 
quoique  nous  n'aïons  pas  les  mêmes  preuves  pour  l'assu- 
rer. Comme  Arles  étoit  alors  une  des  principales  villes 
des  Gaules,  et  des  plus  voisines  d'Italie,  il  paroît  fort  na- 
turel qu'elle  fut  une  des  premières,  où  quelqu'un  de  ces 
saints  Missionnaires  établit  son  Siège. 
Tiii.  H.  R.  t.4.  p.  XI.  '  On  ne  doute  point  que  ces  sept  Evêques  ne  fus- 
**■'■  sent    accompagnés  de  plusieurs  autres  Ministres  inférieurs. 

On    ne    doit    pas    douter    non   plus   qu'avant  que  de  fixer 
leurs  Sièges  dans    les    Gaules,    ils    n'eussent  prêché  la  foi 
Aci.  M.  d.  110.  n.  en    divers    lieux  sur  leur  passage  ou  autrement.  '  Jusqu'a- 
-  lors    la    prédication    de  l'Evangile  ne  s'étoit  répandue  que 

foiblement  dans  nos  provinces.  On  n'y  voïoit  que  peu 
d'Eglises  élevées  en  quelques  endroits  par  la  dévotion  des 
Fidèles,  pendant  que  les  temples  des  idoles  fumoient  de 
tous  côtés  par  les  sacrifices  que  l'on  y  offroit  au  démon  , 
Cr.  T.  ibij.  '  Mais    après    l'arrivée  de  ces  saints  Missionnaires,  on  vit 

les  peuples  auparavant  Païens  se  convertir  en  foule  à  Je- 
sus-Christ ,  et  la  lumière  de  la  foi  pénétrer  presque  par- 
Tiii.  H.  E.  t.  3.  p.  tout.  Ces  grands  hommes  '  après  avoir  baptisé  leurs  disci- 
ples, les  instruisoient  dans  les  choses  de  la  Religion,  et 
même  dans  les  letres ,  lorsque  les  peuples  les  ignoroient. 
Ainsi  en  détruisant  l'idolâtrie  et  les  superstitions  Païennes, 
ils    n'inlerdisoient    point   les  letres  humaines  et  la  Philoso- 


.•{03. 


DANS  LES  GAULES.  III  SIECLE.        307 

phie.  Ils  ne  faisoienl  que  les  perfectionner ,  en  y  ajoutant 
la  connoissanee  des  sciences  qui  regardent  le  Christianis- 
me. Il  y  eut  donc  alors  dans  les  Gaules  autant  d'écoles 
Chrétiennes,  qu'on  y  vit  d'Eglises  établies  et  formées.  Et 
jusqu'à  quel  point  ne  s'y  multiplierent-elles  pas  en  peu  de 
tems,  malgré  les  efforts  de  Satan  pour  en  empêcher  le 
progrès?  Ce  ne  sera  point  sortir  de  notre  sujet,  que  d'en- 
trer dans  quelque  détail.  Vous  vous  souvenez  de  l'obser- 
vation que  nous  avons  déjà  faite.  Le  progrès  de  la  pré- 
dication de  l'Evangile  dans  les  Gaules,  prouve  le  progrès 
qu'y  firent  les  letres. 

XIL  '  S.  Saturnin  aïant  établi  son  Siège  Episcopal  à  Tiii.  ibu.  p.  soe 
Toulouse  vers  250,  y  forma  avant  que  de  souffrir  le  mar- 
tyre plusieurs  disciples  qui,  étant  imbus  de  sa  doctrine, 
allèrent  la  répandre  en  d'autres  lieux,  et  y  fonder  des 
Eglises.  L'histoire  ne  nous  les  fait  pas  connoître  tous. 
Mais  on  croit  que  S.  Honorât  son  successeur  immédiat 
dans  le  Siège  de  Toulouse,  S.  Papoul,  qui  donna  son  nom 
à  l'Eglise  qu'il  établit ,  S.  Honeste  ,  Pi-êlre  de  Nisme , 
Apôtre  de  la  Navarre  ,  et  le  B.  Cerace  premier  Fondateur 
de  l'Eglise  d'Eause ,  furent  tous  disciples  de  S.  Saturnin. 
Cette  dernière  Eglise  étoit  autrefois  Métropole  du  pais 
que  l'on  a  depuis  nommé  la  Gascogne;  mais  le  Siège  en  a 
été  transféré  dans  la  suite  à  Auch.  On  prétend  même 
que  S.  Saturnin  ,  soit  après  s'être  arrêté  à  Toulouse ,  soit 
auparavant ,  avoit  établi  diverses  Eglises  en  Espagne.  '  Ses  ,,.  303.  sot. 
disciples  formèrent  des  élevés  ,  dont  Dieu  se  servit  pour 
étendre  le  Christianisme  en  d'autres  parties  des  Gaules. 
On  met  de  ce  nombre  particulièrement  S.  Firmin  ,  qui 
après  avoir  été  instruit  par  S.  Honeste  ,  et  ordonné  Evo- 
que ,  alla  prêcher  l'Evangile  en  Albigeois  ,  en  Auvergne  , 
en  Anjou  ,  d'où  il  passa  à  Beauvais  ,  et  de  Beauvais  à  Amiens, 
dont  il  est  considéré  comme  le  premier  Evêque  ,  et  où  il 
reçut  la  couronne  du  martyre  vers  l'an  287.  '  Il  y  a  bien  caii.  cur.  nov.  1. 
de  l'aparence  que  l'Eglise  d'Albi ,  qui  fut  fondée  au  moins  *''"^' 
dès  avant  la  fin  de  ce  siècle  ,  eut  pour  Fondateur  quelque 
élevé  ou  de  S.  Saturnin  ou  de  ses  disciples. 

XIII.  Ce  que  vous  venez  de  voir  s'être  fait  par  le  mi- 
nistère de  S.  Saturnin  et  de  ses  disciples ,  en  faveur  de  la 
propagation  de  la  foi  dans  les  provinces  voisines  de  Tou- 
louse, les  autres  missionnaires  et  leurs  disciples  le  firent  de 

R  r  ij 


308  ETAT   DES  LETRES 

Gr.  T.  ibid.  n.  29.  leur  côté  en  d'autres  endroits.  '  C'est  ce  que  S.  Grégoire 
de  Tours  reconnoît  en  particulier  au  sujet  de  l'Eglise  de 
Bourges,  dont  il  raporte  la  fondation  à  un  des  élevés  des 

Gi.  conf.  c.  80. p.  Apôtres  de  nôtre  foi.  '  Quoiqu'il  dise  ailleurs  que  le  pre- 

**'  mier  Evêque  de  cette  Eglise  reçut  sa  mission  des  Disciples 

des  Apôtres  mêmes,  cela  ne  doit  pas  tirer  à  conséquence. 
C'est  une  manière  de  parler,  qui  à  la  vérité  a  été  trop  sou- 
vent prise  à  la  letre,  mais  qui  ne  signifie  autre  chose  dans 
la  plupart  des  Ecrivains ,   que  recevoir  sa  mission  de  Ro- 

Hisi  Fr.  :.  t   n.  me  ,  qui  est  le  Siège  Apostolique.  '  Dès  l'Empire  de  Vale- 


.10.  M. 


«7 


rien  et  Gallien ,  peu  après  le  milieu  de  ce  siècle,  il  y  avoit 
une  Eglise  à  Cabales  en  Gevaudan ,  gouvernée  par  S.  Pri- 
vât.   Celui-ci    pouvoit  être    disciple  de    S.    Austremoine , 
Gaii.  chr  noT.  t.  qui  saus  doutc  en  forma  bien  d'autres,  et  dont  '  le  Puy  en 
a.  p.  (>8.s.  Vêlai ,  qui  est  une  ancienne  Eglise  dans  le  voisinage  d'Au- 

vergne ,  put  recevoir  S.  Grégoire  son  premier  Evêque. 
De  même  les  autres  Eglises  de  l'autre  partie  de  l'Aquitai- 
ne ,  eurent  selon  toute  aparence  leurs  premiers  Evêques 
TjM.  H.  K.  t  i.  p.  de  la  main  de  S.  Martial.  '  On  croit  en  effet  que  S.  Au- 
sone  premier  Evêque  d'Angoulôme  fut  l'un  de  ses  disci- 
ples. Kien  n'empêche  que  les  Fondateurs  des  Eglises  de 
Bourdeaux ,  de  Saintes ,  de  Poitiers ,  de  Perigueux  et 
peut-être  d'Agen ,  n'aient  eu  le  même  avantage.  Il  est  au 
moins  vrai  que  ces  Eglises  étoient  trop  célèbres  dès  le 
commencement  du  IV  siècle,  pour  n'avoir  pas  été  établies 
dès  le  siècle  précédent.  Ce  n'est  pas  encore  tout. 

XIV.   Si   nous   continuons    le  détail,    combien    trouve- 
rons-nous d'autres  Eglises  fondées  dans  les  Gaules  en  ce 
siècle?  Celles  de  Chartres,  de  Senlis  et  de  Meaux  doivent 
Gaii.  ciir.  nov.  t.  saus  doute  leur  origine  à  S.  Denys  de  Parb.  '  La  tradition 
i.p.ôii.  j.jg   effectivement  (|ue  S.   Régule  ou  Ricule  son  disciple 

fut  Evêque  de  Senlis ,  après  l'avoir  été  d'Arles.  11  y  a 
néanmoins  plus  d'aparence  qu'il  le  fut  d'abord  de  Senlis , 
et  ensuite  d'Arles ,  où  la  violence  de  la  persécution  qui 
emporta  S.   Denys  ,   et  fît  tant    d'autres  Martyrs   en  ces 

?uartiers-là ,  le  contraignit  d'aller  chercher  un  azyle.  De 
aris  la  foi  put  aisément  se  répandre  dans  la  Belgique,  et  le 
long  de  la  Seine  du  côté  de  Rouen.  L'Eglise  de  Cologne, 
qui  avoit  un  Evêque  fort  célèbre  au  commencement  du 
iV  siècle  en  la  personne  de  S.  Materne ,  est  aparemment 
redevable   de  son  établissement  à  quelqu'un  des  disciples 


DANS  LES  GAULES.    III   SIECLE.        309 

de  S.  Ueny3  ,  ou  des  élevés  de  ses  disciples.  Il  en  faut 
dire  autant  des  Eglises  du  Mans ,  d'Angers  ,  et  peut-être 
de  quelques-unes  de  l'Armorique,  par  raport  à  S.  Gatien 
premier  Evêque  de  Tours.  Il  y  a  tout  lieu  de  croire  qu'il 
avoit  instruit  et  ordonné  S.  Julien,  que  la  première  de  ces 
Eglises  honore  comme  l'Apôtre  du  Maine.  De  même  en- 
fin les  villes  les  plus  considérables  du  voisinage  d'Arles  et 
de  Narbone,  qui  n'avoient  point  encore  reçu  la  foi  à  l'ar- 
rivée de  S.  Trophime  et  de  S.  Paul  dans  les  Gaules ,  ne 
tardèrent  pas  à  voir  former  des  Eglises  dans  leurs  encein- 
tes par  le  ministère  de  ces  deux  grands  Evoques.  Vous 
aurez  pu  remarquer  que  si  l'on  avoit  eu  égard  à  l'ancien- 
neté des  Eglises  pour  les  ériger  en  Métropoles ,  Paris , 
Clermont  et  Limoges  auroient  dû  jouir  de  cette  préroga- 
tive. Mais  c'est  le  rang  qu'elles  tenoient  dans  le  gouverne- 
ment civil  qui  a  fait  donner  cette  prééminence  aux  unes 
plutôt  qu'aux  autres. 

XV.  Outre   le  grand   nombre   d'Eglises ,   dont  nous  ve- 
nons de  faire  l'énumeration  ,  et  oii  vous  pouvez  observer 
une  succession  de  doctrine  ,  il  y  avoit  encore  des  Evoques 
dans  presque  toutes  les  autres  principales  villes  des  Gau- 
les, où  ils  vinrent  s'établir  de  divers  endroits.  '  Quelques-  tui.  ibid.  p.  48o. 
uns  y  furent  envoies  de  Rome,  même  comme  les   sept 
dont  nous  avons  parlé.   L'on  met  de  ce  nombre  S.  Pere- 
grin ,   envoie  à  Auxerre  sous  Sixte  II  en  257  ,  ou  258  , 
'  S.  Genoul  ou  Genulfe   à  Cahors  sous  le  même  Pape,  et  caii.  chr.  iwd.  p. 
sans  doute  plusieurs  autres  qui  nous  sont  moins  connus.  "*• 
D'autres  y  purent  venir  d'ailleurs.  La  plupart  enfin  y  fu- 
rent ordonnés   par  ceux  qui  y  étoient  établis  les  premiers, 
'  On  parle  avec  éloge  de  l'éloquence  d'un  nommé  Eodal  ,  tui.  ibid.  p.  48s. 
l'un  des  Païens  que  S.  Savinien  premier  Evêque  de  Sens 
convertit  à  la  foi  de  Jesus-Christ.  Si  après  tant  d'établisse- 
mens  d'Eglises  dans  les  Gaules,  il  se  trouva  encore  quel- 

3ue  pais  où  la  lumière  de  l'Evangile  n'eût  pas  pénétré 
es  ce  siécle-ci ,  Dieu  se  servit  d'un  autre  moïen  assez  ex- 
traordinaire pour  y  porter  le  flambeau  de  la  foi.  Mais 
tout  instrument  réussit  en  la  main  de  ce  souverain  Maî- 
tre. Divers  peuples  barbares  firent  en  ce  siècle  de  fré- 
quentes irruptions  dans  les  Gaules;  et  ce  fut  ces  irrup- 
tions mêmes  qui  achevèrent  d'y  étendre  la  Religion 
Chrétienne ,  et  qui  la  firent  passer  à  ces  peuple» ,  qui  n'en 

2  S 


310  ETAT  DES   L  ET  H  ES 

soz.  1.  9.  c.  G.  p.  avoiciit  nulle  connoissance  auparavant.  '  Parmi  les  prison- 
Èmp/t'i  'p.  43!).'  niers  que  celte  multitude  composée  de  diverses  nations 
**'•  emmeiioit  avec  elle,   il  se  trouvoit  plusieurs  prêtres  d'une 

vie  irrépréhensible ,  d'une  vertu  au-dessus  de  toute  sorte 
de  reproches,  qui  guérissoient  même  les  malades,  et  déli- 
vroient  les  possédés  par  l'invocation  de  Jesus-Christ.  Plu- 
sieurs des  barbares  ,  touchés  par  la  sainteté  et  les  miracles 
de  ces  Prêtres ,  les  prirent  pour  leurs  Docteurs ,  écoutè- 
rent avec  respect  leurs  instructions ,  reçurent  le  baptême , 
adorèrent  le  même  Dieu,  et  fondèrent  des  Eglises. 

XVI.  Après  vous  avoir  exposé  le  progrès  du  Christia- 
nisme dans  les  Gaules ,  il  est  de  l'ordre  de  vous  montrer 

Cyp.  ep.  67.  p.  qucI  y  éloit  l'état  de  la  doctrine.  Vers  l'an  232 ,  '    l'héré- 

*''*■  sie    de    Novatien    trouva    moien    d'y    pénétrer.    Marcien 

Evêque  d'Arles  l'embrassa  ;  mais  il  fut  le  seul  d'entre  les 
Evêques  Gaulois,  qui  prit  le  parti  de  l'erreur.  Contre  le 
sentiment  de  tous  les  Evêques  Catholiques  il  refusoit  la 
paix  aux   pénilens.    C'est  ce  qui  réveilla  le  zèle  et  l'alen- 

Amm.  1.  is.  p.  lion   dcs  Evêques   de  la   province   de  Narbone ,  qui  com- 

»  ci'p.  ibia.  prenoit  alors  et  la  Viennoise  et  la  Lyonoise.  '  Plusieurs  de 

ces  Prélats  instruits  de  la  doctrine  de  l'Eglise,  et  zélés 
pour  sa  défense  ,  n'aïant  pu  sans  doute  remédier  au  mal 
par  eux-mêmes,  ni  vaincre  l'obstination  de  leur  confrère, 
s'adressèrent  à  Rome  pour  en  tirer  quelque  secours  contre 
un  mal  si  dangereux.  S.  Faustin  de  Lyon  y  signala  son 
zèle  entre  tous  les  autres.  Non  content  d'avoir  écrit  au 
Pape  avec  ses  collègues  à  ce  sujet,  il  en  écrivit  encore  au 
moins  deux  fois  à  S.  Cyprien  de  Carthage.  Celui-ci  joi- 
gnit ses  instances  à  celles  des  Evêques  Gaulois;  et  comme 
l'obstination  de   Marcien  dans   le  schisme  et  l'hérésie  étoit 

p.  116.  notoire  ,  '  il  prioit  le  Pape ,  qui  étoit  alors  S.  Etienne,  de 

prononcer  lui-nn'me  l'excommunication  ,  et  d'engager  les 
iwèmies  de   la  province  à  déposer  Marcien  ,  et  les  Fidèles 

p.  117.  d'Arles  à   élire   un  autre  Evêque.  '  11  semble  que  Marcien 

avoit    été   déjà  jugé   par   les  Evêques  ses  comprovinciaux, 

p.  11.'..  '  mais  que   n'aïant   point   été   encore   excommunié  par  le 

Pape  ni  par  les  Evêques  d'Afrique,  il  en  étoit  devenu  et 
plus  orgueilleux  et  plus  insolent. 

XVII.  On  ne  sait  point  au  juste  quelle  fut  l'issue  de 
cette  grande  affaire.  H  y  a  ru'anmoins  beaucoup  d'apa- 
rence  que  l'on  fil  porter   à  Marcien  la  [>eine  que  mériloil 


DANS   LES  GAULES.    III   SIECLE.        311 

son  crime,  et  qu'il  fut  déposé;  car  son  nom  ne  se  trouve 
point  dans  les  plus  anciens  catalogues  de  l'Eglise  d'Arles. 
On  ne  voit  point  d'ailleurs  que  l'hérésie  qu'il  avoit  em- 
brassée ,  fit  alors  aucun  progrès  dans  les  Gaules.  Seule- 
ment il  y  a  quelque  sujet  de  croire  ,  ou  qu'il  y  en  resta 
quelque  germe  qui  servit  î\  l'y  reproduire  dans  la  suite , 
ou  qu'elle  y  fut  introduite  de  nouveau  par  quelque  autre 
moïen.  En  effet  il  ne  paroît  pas  qu'il  y  eût  de  raison  plus 
naturelle ,  que  les  suites  de  cette  hérésie  dans  les  Gaules, 
qui  pût  porter'  S.  Retice  Evêque  d'Autun  ,  l'un  des  plus  Hier.  vir.  iii.c.sa. 
illustres  Prélats  de  l'Eglise  des  Gaules  au  commencement  ''  "'^' 
du  IV  siècle ,  à  prendre  la  plume  pour  la  combatre  dès 
la  fin  de  ce  siécle-ci.  C'est  ce  qu'il  exécuta  par  un  grand 
ouvrage ,  dont  les  anciens  ne  parlent  qu'avec  éloge.  Cet 
écrit  qui  subsisloit  encore  du  tems  de  S.  Jérôme  '  et  de  S.  Aug.  in  Jui.  i.  i. 
Augustin  ,  ne  se  trouve  plus  aujourd'hui.  Il  ne  nous  en  reste  p]  m^'  ""^■''  *' 
qu'un  passage  que  ce  dernier  Père  a  beaucoup  fait  valoir 
contre  les  Pelagiens  ,  comme  établissant  clairement  le  pé- 
ché originel  et  ses  suites,  ce  que  nioient  ces  hérétiques. 
S.  Retice,  en  y  parlant  du  baptême  ,  disoit  pour  réfuter  la 
prétention  de  Novatien  ,  que  c'est  là  la  grande  et  princi- 
pale indulgence  qu'acorde  l'Eglise  ,  et  qu'elle  n'en  exclud 
personne. 

XVIII.    L'ouvrage  de    S.   Retice   contre  Novatien  ,  n'est 
pas  le  seul  monument  ecclésiastique  de  ce  siècle,  que  nous 
avons   perdu.  Nous  n'avons  point  non  plus  '  le  commen-  Hicr.ibid. 
taire   qu'il   composa  sur  le   Cantique   des  Cantiques  avant 
la  fin   de  ce   siècle  ,  comme  il  paroît ,  '  et  dans  lequel  S.  op.  crit.  p.  622. 
Jérôme  reconnoissoit  beaucoup  d'éloquence  et  de   travail ,  ^'^^  "^^  *'  ^'  *' 
quoiqu'il  y  trouvât  bien  des  fautes  d'ailleurs.  Et  pour  re- 
monter plus  haut  ,  on  ne  nous  a  conservé  aucune  des  le- 
tres  que  S.  Faustin  de  Lyon  et   les  autres  Evêques  de  la 
Narbonoise  écrivirent  sur    l'affaire  de  Marcien   d'Arles.   II 
nous  manque  encore  'plusieurs   écrits  de   S.  Irenée  :  son  Eus.  i.r..c.  15.20. 
livre  contre  Marcion ,  ses  dialogues,  ses  letres,  ses  traités  uîifls!'"'  "■"' 
de    la    Monarchie ,    de    l'Ogdoade  ,    du    Schisme ,    de    la 
science  contre   les  Gentils  ,  de   la  discipline ,  de  la  prédi- 
cation des    Apôtres ,  '    et  peut-être  un  traité  pour  faciliter  iren.  i.  3.  c.  7 1 
l'intelligence    des    Epitres    de   S.    Paul.    De    même    nous  ''"'■  ^-  '•  *'• 
avons    perdu     les    ouvrages    de    Caïus    contre   Artemon , 
Theodote  ,  les    Montanistes  ,   les    Millénaires  ,     Alcinoûs , 


312  ETAT  DES  LETRES 

et  les  erreurs  de  Platon.  De  plus  de  trente  ouvrages  que 
l'on  sait  être  sortis  de  la  plume  de  S.  Hippolyle ,  il  nous 
en  manque  plus  de  vingt  en  leur  entier,  la  plupart  sur 
l'Ecriture.  Des  autres  ,  nous  n'en  avons  qiue  de  simples 
fragmens  ;  si  néanmoins  vous  en  exceptez  peut-être  le 
traité  sur  l'Antéchrist  et  le  cycle  pascal.  Voilà  sans  doute 
bien  des  écrits  perdus.  Mais  on  peut  assurer  que  ce  n'est 
pas  encore  tous  ceux  que  ce  siècle  avoit  vus  naître  dans 
l'Eglise  des  Gaules ,  ou  sortir  de  la  plume  de  ses  élevés  , 
et  dont  nous  .sommes  privés.  Ce  n'en  est  même  peut-être 
que  la  moindre  partie  ;  les  malheurs  des  tems  nous  aïant 
enlevé  jusqu'à  la  connoissance  des  autres. 

XIX.  Ceux  qui  nous  restent  ,  quelque  précieux  qu'ils 
soient ,  sont  peu  de  chose  en  comparaison  des  autres  dont 
nous  souffrons  la  perte.  Nous  n'avons  que  les  cinq  livres 
de  S.  Irenée  contre  les  hérésies.  Encore  ne  les  avons-nous 
pas  en  leur  langue  originale.  On  nous  a  aussi  conservé  , 
comme  nous  avons  dit ,  quelques  morceaux  de  ceux  de  S. 
Hippolyte ,  avec  deux  ou  trois  de  ses  opuscules.  Mais  c'en 
est  assez  avec  la  connoissance  que  nous  avons  de  ceux  qui 
n'existent  plus  ,  pour  nous  donner  une  idée  du  goût  et  du 
génie  des  Ecrivains  Ecclésiastiques  qu'ont  produits  nos 
Gaules  en  ce  siècle.  On  y  voit  qu  ils  traitoient  digne- 
ment la  Théologie  ,  s'atachant  à  prouver  par  l'Ecriture  et 
la  tradition  ce  qu'ils  vouloient  persuader  à  ceux  qui  ad- 
meitoient  l'une  et  l'autre.  On  y  voit  qu'ils  n'écrivoient 
ni  par  curiosité,  ni  par  le  désir  de  se  produire,  mais  uni- 
quement ou  par  ocasion  ou  par  nécessité  :  pour  réfuter 
les  hérétiques ,  convertir  les  Païens ,  instruire  les  Fidèles. 
On  y  voit  qu'ils  savoient  à  propos  faire  usage  des  con- 
noissances  que  l'on  cul  ti  voit  dans  le  Paganisme  ,  de  la 
Théologie  fabuleuse ,  et  de  tout  ce  qui  entre  dans 
l'érudition  profane.  Ne  soïez  point  surpris  au  reste  de 
ce  que  presque  tous  les  livres  que  nous  venons  de  nom- 
mer ,  fussent  ou  pour  réfuter  les  hérésies  ,  ou  pour  ex- 
pliquer les  livres  sacrés.  Il  n'est  point  de  siècles  où  il 
s'élevât  plus  de  differens  hérétiques  qu'en  celui-ci  et 
le  précédent.  Et  comme  ils  abusoient  des  saintes  Ecri- 
tures pour  apuïer  leurs  erreurs  ,  il  étoit  important  de 
les  expliquer  en  un  sens  catholique.  On  voit  cepen- 
dant par  le  peu   qui  nous   reste  de   ces  explications  ,  que 

l'on 


r 


DANS   LES  GAULES.   III  SIECLE.       313 

l'on  donnoit  beaucoup  dans  la  figure.  S.  Hippolyte  y 
donna  le  plus  ,  et  fraïa  le  chemin  aux  autres.  Aussi  croit- 
on  qu'Origene,  qui  fut  lui-même  un  si  grand  Figuriste  , 
avoitété  son  disciple. 

XX.  Il  s'en  faut  de  beaucoup  que  la  literature  profane 
ftt  dans  les  Gaules  en  ce  siècle  le  même  progrès  que  la 
literature  sacrée.  On  peut  toutefois  assurer  qu'elle  s'y 
soutint  encore  avec  plus  d'honneur  qu'en  nulle  autre 
province  de  l'Empire.  Vous  avez  déjà  vu  que  l'on  regarde 
communément  la  fin  du  second  siècle  de  l'Eglise  ,  comme 
l'époque  de  la  vieillesse  et  de  la  décadence  de  l'histoire 
et  des  belles-letres.  En  ce  siécle-ci  le  mal  ne  fit  qu'al- 
ler en  croissant.  Ce  n'est  pas,  (1)  comme  le  remarque  ju- 
dicieusement un  Savant  moderne  ,  que  le  vrai  goût ,  la 
vraie  manière  d'écrire  ne  subsiste  toujours  essentielle- 
ment ;  puisqu'elle  n'est  atachée  qu'à  l'idée  que  les  hom- 
mes se  doivent  former  de  la  justesse  ,  de  l'ordre  et  des 
bienséances  du  langage.  Mais  les  hommes  frapés  de  quel- 
que autre  chose  ou  plus  sensible  ,  ou  plus  séduisante  , 
n'aportent  pas  toujours  le  soin  nécessaire  pour  se  former 
cette  idée.  Mille  incidens  sont  capables  de  les  en  détour- 
ner. Que  ceux  ,  par  exemple  ,  qui  pourroient  le  plus  con- 
tribuer à  soutenir  les  sciences  ,  soit  par  l'estime  qu'ils  en 
feroient  ,  soit  par  les  récompenses  qu'ils  atacheroient 
aux  soins  que  l'on  prendroit  de  les  faire  fleurir  ,  viennent 
à  les  mépriser  :  il  n'en  faut  pas  davantage  pour  que  les 
autres  négligent  de  prendre  les  moïens  propres  à  les  cul- 
tiver. Qu'il  s'élève  des  guerres  civiles  dans  l'Etat  ;  qu'il  y 
arrive  d'autres  fâcheux  évenemens ,  qui  en  troublent  la 
tranquillité  ,  et  qui  exposent  la  vie  ,  les  biens  ,  la  liberté 
des  citoïens,  c'en  est  assez  pour  leur  faire  oublier  tout  le 
reste  ,  afin  de  ne  penser  qu'à  ce  qui  les  touche  et  les  inte- 
resse. Voilà  les  principales  causes  de  la  décadence  des  bel- 
les letres  en  ce  siècle  dans  nos  Gaules  comme  ailleurs. 

XXI.  Quel  progrès  voudriez-vous  qu'elles  y  eussent 
fait,  par  exemple ,  sous  l'Empire  d'un  Caracalla  ?  Ce 
Prince ,  qui  bien  que  fils  d'une  mère  très-savante  ,  et  bien 
qu'instruit  lui-même  par  un  des  plus  habiles  Sophistes  de 
son  tems  ,  n'avoit    néanmoins  que  du  mépris  et  de  la  hai- 

(1)  L'Auteur  anonyme  des  letres  à  Mr.   Houtoville,  lotro  2. 

Tome  1.  Prem.  Part.  S  s 

2  s  ♦ 


3U  ETAT   DES   LETRES 

ne  pour  les  gens  de  letres  ;  qui  les  faisoit  même  tuer 
cruellement  ,  et  qui  avoit  déclaré  une  guerre  ouverte  aux 
écrits  des  anciens?  De  même,  quel  progrès  pouvoient- 
elles  faire  dans  ces  tristes  irruptions  que  firent  dans  les 
Gaules  plusieurs  nations  barbares ,  à  la  faveur  des  guer- 
res civiles  qui  s'y  excitèrent  en  ce  siècle?  dans  ces  mou- 
vemens  continuels  ,  et  ce  renversement  presque  général  , 
toiijoiirs  funeste  aux  Muses  ennemies  du  bruit  et  du  tu- 
multe? Au  lieu  que  chacun  ne  devoit  agir  que  pour  Ife 
bien  commun,  et  concourir  à  la  tranquillité  de  l'Empire  , 
chacun  ne  songeoit  ou  qu'à  se  défendre  contre  les  barba- 
res, où  qu'à  avancer  sa  propre  fortune.  II  n'y  avoit  pres- 
que   point   d'Officier  d'armée  ,  pour  peu  de  crédit    qu'il 

Tiii.  Emp.  i.  3.  p.  eût  sur  les  soldats ,  qui  n'aspirât  à  l'Empire.  '  .lamais  on  ne 

448-1,9.  ^j^  pj^g  ^g  tyrans  à  la  fois.    Les  Gaules    sur-tout  furent 

étrangement  divisés  par  ces  factions  ,  ce  qui  dura  plu- 
sieurs années ,  après  avoir  commencé  vers  l'an  260.  Pos- 
tume  y  régna  environ  sept  ans  en  qualité  d'Empereur ,  et 
y  eut  des  successeurs  de  sa  tyrannie  plusieurs  années  après 
lui.  L'on  peut  aisément  juger  combien  tous  ces  troubles 
étoient  contraires  à  la  tranquillité  si  nécessaire  au  progrès 
des  sciences. 

p.  Ml.  r,î±.  Kis.  XXIL  '  11  y  a^oit  treize  ans  que  les  Gaules  étoient  ainsi 
démembrées,  lorsque  l'Empereur  Aurelien  les  aiant  re  - 
couvrées ,  les  réunit  à  l'Empire.  Mais  elles  ne  jouirent 
pas  long-tems  du  calme  que  leur  procura  ce  Prince.  Dès 
275  on  y  vit  fondre  les  peuples  d'Allemagne  ,  les  Lyges  , 
les  François ,  les  Bourguignons  ,  les  Vandales  ;  qui  rom- 
pant les  barrières  que  les  Romains  leur  avoient  oposées 
au-delà  du  Rhin  ,  se  jetterent  dans  nos  Provinces  ,  et  y 
ocuperent  en  un  ou  deux  ans  soixante-dix  villes  les  plus 
riches  et  les  plus  considérables.  Ces  barbares  en   demeu- 

p.  565.  reront  comme  les  maîtres,  '  jusqu'à  ce  que  Probe  le»  en 

chassa  en  277 ,   après  les  avoir  vaincus  en  divers  combats, 

p.  573.  et  leur  avoir  tué  quatre  cens  mille  hommes.  '  A  ces  trou- 

bles succéda  la  révolte  de  Procule  et  de  Bonose  ,  qui  ne 

i.  4.  p.  9.  ii.  finit  que  par  leur  défaite  en  580.  '  Mais  à  peine  commen- 
çoil-on  à  respirer ,  -qu'arriva  le  soulèvement  d'Elien  et 
d'Amand  chefs  des  Bagaudes  ,  dont  on  ne  vit  la  fin  que 
vers  le  milieu  de  l'année  287.  Après  quoi  suivirent  encore 
de  nouvelles  courses  de  la  part  des  Allemans ,  des  Bour- 


DANS   LES  GAULES.    III   SIECLE.         31o 

guignons,  des  Hernies,  des  Chaibons  ou  Gavions  par  terre, 
des  François  et  des  Saxons  par  mer.  Parmi  les  maux  que  cau- 
sèrent aux  Gaules  ces  fréquentes  irruptions ,  elles  ne  laissè- 
rent pas  de  procurer  un  bien.  Elles  furent  une  ocasion  de 
faire  connoître  Jesus-Christ  à  divers  peuples  idolâtres  ,  qui 
n'en  avoienl  jamais  oui  parler.  '  Elles  atirerent  même  jiii.  Emp.  t.  3.  p. 
dans  les  Gaules  ,  on  ne  sait  comment  ,  un  Grammairien  ,  ^^* 
gui  y  enseigna  quelque  tems  ,  après  y  avoir  épousé  une 
femme  du  païs.  Ce  Grammairien  devint  sur-tout  fameux  , 
pour  avoir  donné  naissance  au  lyran  Bonose  ,  dont  nous 
venons  de  parler. 

XXIII.  Autant  que  les  irruptions  des  barbares  dans  les 
Gaules  y  furent  préjudiciables  aux  sciences  et  aux  beaux 
arts  :  autant  leur  y  fut  favorable  la  présence  des  Empe- 
reurs ,  qui  y  vinrent  faire  leur  séjour  avant  la  fin  de  ce 
siècle.  On  sait  de  reste  que  la  Cour  Impériale  atiroit  tou- 
jours les  gens  de  letres  et  les  personnes  habiles  ,  qui  y 
acouroient  comme  à  la  source  des  recompenses  et  des  fa- 
veurs ,  avec  plus  ou  moins  d'empressement ,  à  proportion 
de  l'amour  qu'avoient  ces  Princes  pour  les  letres,  et  de 
l'estime  qu'ils  faisoient  de  ceux  qui  prenoient  soin  de  les 
cultiver.  Dans  ce  changement  de  résidence  ils  choisirent 
la  ville  de  Trêves  pour  leur  séjour  ordinaire  ,  afin  d'être 
plus  à  portée  de  repousser  les  ennemis  au-delà  du  Hhin. 
'Postume  el  Tetrice  en  usèrent  ainsi.  Maximien  Hercule,  t.  4.  p.  15. 
et  ceux  qui  régnèrent  dans  les  Gaules  après  lui,  imitèrent 

leur   exemple.'  Ce   fut  là    qu'en   289  et  291  Claude  Ma-  j>an.  b.  p.  «2:1.  n. 
mertin  prononça,  en  présence  de  cet  Empereur,  deux  pane-  '*' 
gyrigues  à  sa  louange.  '  Trêves  étoit  aussi  le  siège  du  Pré-  Tiii.  ibid. 
let  (les  Gaules,  qui  avoit  encore   sous  lui  l'Espagne  et  la 
grande  Bretagne.  C'est  pourquoi  les  Evêques  de  cette  ville 
avoient    un    rang  distingué    et    une   grande  autorité  dans 
l'Eglise  durant  le  IV   siècle.    Tout   concouroit  alors  à  fai- 
re de  Trêves  une  ville  célèbre   et  d'un  grand  abord.  Mais 
dès  le  commencement  du  siècle  suivant   les  barbares  de- 
venus les   plus  forts ,  la  ravagèrent  plusieurs  fois  ,  et  les 
Préfets  furent  obligés  d'aller  résider  à  Arles. 

XXIV.  Trêves  étoit  ainsi  devenue  la  ville  capitale   de  p  21. 23. 
l'Empire ,  lorsqu'en  292  Constance  Chlore  père  du  grand 
Constantin    y   vint  fixer    sa  demeure.    C'ètoit   un   Prince 

très  -  puissant,  quoiqu'il  ne  fût  encore  que   César.    L'Em- 

S  s  ij 


316  ETAT  DES  LETRES 

pire  aïant  été  partagé  entre  les  deux  Empereurs  et  les  deux 
Césars,  il  avoit  eu  pour  son  apanage  les  Gaules,  la  gran- 
de Bretagne  ,   l'Espagne    et  la  Mauritanie   Tingitane,    qui 

p.  81. 8i.  étoit    une    dépendance    de   cette    dernière    province.  'Jus- 

ques-là  on  n'avoit  point  encore  vu  de  gouvernement  ni  plus 
paisible  ni  plus  heureux  que  celui  de  ce  Prince.  Son  rè- 
gne ,  lorsqu'il  eut  succédé  à  l'Empire  ,  eut  les  mêmes  avan- 
tages. De  sorte  que  sous  lui  les  Gaules  jouirent  d'une 
paix  profonde  et  d'une  entière  liberté  ,  tant  pour  l'exerci- 
ce du  Christianisme  ,  que  pour  la  profession  des  sciences  et 
des  beaux  arts.  Bien  davantage  ;  quoiqu'il  n'eût  pas  étu- 
dié lui-même  ,  il  ne  laissa  pas  de  travailler  à  faire  fleurir 
les  sciences  dans  ses  Etats  ,  et  de  protéger  les  gens  de 
letres.  On  peut  juger  de  son  zélé  à  cet  égard  ,  et  par 
l'empressement  avec  lequel  il  sollicita  Eumene  à  prendre 
soin  de  la  jeunesse  d'Autun  ,  et  à  enseigner  la  Rhétorique 
dans  cette  ville ,  et  par  la  générosité  qu'il  fit  paroilre 
dans  les  apointemens  considérables  qu'il  lui  assigna.  Doit- 
on  douter  que  ce  Prince  en  fit  moins  pour  Trêves  sa  ville 
capitale  ,  qu'il  n'en  fit  en  cette  ocasion  pour  Autun? 

XXV.  Tout  conspira  donc  en  quelque  sorte  à  faire  de 
Trêves,  dès  avant  la  fin  de  ce  siècle  ,  comme  une  autre 
Rome  ,  comme   le   centre  de  la    politesse ,  des  sciences  et 

Au..  .Mu3.  V.  381-  des  beaux  arts  dont  les  Romains  faisoient  profession.  '  11 
est  au  moins  certain  qu'au  siècle  suivant  cette  ville  avec 
son  territoire  étoit  devenue  une  pépinière  de  gens  de  le- 
tres et  de  beaux  esprits ,  qui  faisoient  revivre  les  Aristides 
d'Athènes  ,  les  Catons  et  les  Orateurs  de  l'ancienne  Ro- 
p.  tiit.  me.  '  Il  n'est  pas  moins  certain  que  ses  écoles  étoient  alors 

'^*''-  en  grande   réputation  ,    et  qu'elles   avoient  de  très-habiles 

Professeurs  à  leur  tête.  Cela  ne  se  fit  pas  tout  à  coup. 
Ainsi  il  y  a  tout  lieu  de  croire  qu'elles  commencèrent  dès 
ce  siécle-ci  à  devenir  célèbres.  En  efl'et  la  résidence  qu'y 
faisoient  les  Empereurs  ,  étoit  fort  propre  à  y  atirer  de 
bons  Maîtres.  Les  Professeurs  d'éloquence,  de  poétique  , 
de  droit  Romain ,  de  Philosophie ,  assurés  de  trouver 
dans  une  certaine  ville  et  de  1  ocupation  et  la  récompense 
de  leurs  travaux ,  n'en  cherchoient  point  d'autres.  C'en 
étoit  assez  pour  les  y  atirer.  Or  où  pouvoient-ils  mieux 
rencontrer  ces  avantages  que  dans  la  ville  impériale  ?  Les 
étudians  de  leur  côté  ,  assurés  d'y   trouver   de  bons   maî- 


,188, 


Cl'. 


DANS  LES  GAULES.  111  SIECLE.         317 

très  avec  toutes  les  commodités  de  la  vie  ,  dévoient  s'y 
rendre  en  foule  de  toutes  parts.  Et  combien  la  qualité 
de  résidence  ordinaire  de  la  Cour,  qu'avoit  alors  la  ville 
de  Trêves  ,  pouvoit-elle  multiplier  le  nombre  de  ces  étu- 
dians  ? 

Parmi  les  Savans  qui  y  brilloient  à  la  fin  de  ce  siècle, 
'  nous    connoissons  en   particulier    un  Claude   Mamertin  ,  Pan.  b.  p.  los. 

3ui  y  prononça  publiquement ,  comme  nous  avons  déjà 
it ,  deux  panégyriques  à  la  louange  de  Maximien  Her  - 
cule.  On  ne  peut  presque  pas  douter  que  Mamertin  n'y 
enseignât  l'éloquence  ,  et  qu  il  n'y  formât  plusieurs  autres 
Orateurs .  '  Il  est  cerlain  qu'au  commencement  du  IV  sié-  i>-  *»"•  '-■>s 
cle,  on  y  en  vit  paroître  au  moins  un  autre  ,  qui  y  pro- 
nonça aussi  publiquement  deux  panégyriques  à  la  louange  " 
de  Constantin  le  grand  ,  dont  il  se  qualifie  le  panégyriste 
ordinaire.  '  Or  de  la  manière  que  cet  Orateur  parle  et  de  r-^i:. 
son  pais  et  de  son  éducation,  il  paroît  qu'il  étoit  de  la 
Belgique  ,  et  qu'il  avoit  effectivement  fait  ses  études  à 
Trêves.  Lui  et  Mamertin  ne  furent  pas  les  seuls  panegj'- 
ristes  ,  que  les  Gaules  donnèrent  dès-lors  à  l'Empire.  Eu- 
mene  le  célèbre  Eumene  ,  en  augmenta  le  nombre ,  et 
mérita  d'y  tenir  un  des  premiers  rangs.  Il  nous  reste  en- 
core de  lui  quatre  panégyriques ,  deux  desquels  furent 
prononcés  avant  la  fin  de  ce  siècle.  Il  semble  que  ces  trois 
panégyriques  inspirèrent  tant  d'émulation  à  leurs  compa- 
triotes, que  ceux-ci  se  firent  depuis  une  espèce  de  devoir 
de  ne  point  céder  aux  étrangers  la  gloire  de  cette  noble 
fonction.  En  effet  nos  Gaules  devinrent  dès  ce  siécle-ci 
ce  que  Rome  avoit  été  auparavant  ;  la  mère  et  la  nourri- 
ce des  Panégyristes  de  l'Empire  ,  qui  durant  les  IV  et  V 
siècles  n'en  eut  presque  point  d'autres  que  ceux  qu'elles  lui 
fournirent. 

XXVII.  La  résidence  ordinaire  que  la  Cour  Impériale 
faisoit  à  Trêves,  pou  voit  en  rendre  les  écoles  plus  brillan- 
tes, que  n'étoient  celles  d'Autun.  Mais  il  y  a  toutefois 
cette  différence  entre  les  unes  et  les  autres,  que  nous  som- 
mes un  peu  mieux  instruits  de  l'histoire  de  celles-ci,  que 
de  ce  qui  regarde  celles  de  Trêves.  Autun  ,  comme  vous 
l'avez  vu ,  étoit  une  des  villes  les  plus  considérables  des 
Gaules.  Ses  écoles  se  soûten oient  encore  avec  éclat  au 
siècle  précédent  '  sous  la  conduite  du  grand-pere  d'Eume-  p.  107.  n.  n. 


318  ETAT   DES   LETRES  '^//^ A<1 

ne,  qui  continua  à  les  gouverner  encore  en  ce  siècle  avec 
beaucoup  de  réputation.  Etant  mort  âgé  de  plus  de  qua- 
Pan.B.p.ws.n.  3.  tre-viuts  ans ,  '  OU  lui  donna  pour  successeur  un  autre  très- 
habile  homme ,  '  à  qui  en  succéda  un  troisième  qu'Eumene 
semble  nommer  Glaucus.  Celui-ci  n'étoit  pas  grec  ,  com- 
me le  premier  des  trois  ;  mais  il  possédoit  parfaitement  la 
langue  gréque.  Malgré  l'habileté  de  ces  grands  maîtres 
d'éloquence ,  '  les  écoles  d'Autun  ne  laissèrent  pas  de  per- 
dre en  ce  siècle  une  partie  de  leur  ancienne  splendeur.  '  On 
discontinua  même  d'y  enseigner,  avant  qu'Eumene  en- 
trât dans  sa  jeunesse,  c'est-à-dire,  vers  l'an  270.  Cette  in- 
terruption vint  sans  doute ,  '  des  ravages  que  les  barbares, 
nommément  les  Bagaudes,  firent  dans  la  ville.  'Car  l'his- 
toire nous  aprend  qu'Autun  fut  ruiné  sous  l'Empire  de 
Claude  II ,  pour  avoir  invité  ce  Prince  au  recouvrement 
des  Gaules.  '  Il  paroît  que  les  édifices  du  Collège,  qui 
étoient  magnifiques,  ne  furent  pas  plus  épargnés  que  les 
autres. 

XXVIII.  '  Un  Empereur  avoit  déjà  fait  travailler  avec 
quelque  magnificence  aux  réparations  de  la  ville  ,  '  lors- 
que Constance  Chlore  entreprit  de  la  rétablir  dans  sa 
première  splendeur  et  la  rendre  comme  la  mère  des  au- 
p»n.  1».  144-ufi.  très.  '  Ce  Prince ,  qui  n'étoit  encore  que  César ,  touché 
155.  n.  5.  .6.  li.  jjgg  heureuses  dispositions  qu'il  trouvoit  dans  la  jeunesse 
Gauloise  pour  les  sciences  ,  n'oublia  rien  pour  rétablir  le 
Collège.  Dans  le  dessein  formé  de  le  rendre  aussi  florissant  que 
jamais  en  faveur  de  cette  jeunesse  ,  qui  venoit  de  perdre 
un  habile  Modérateur ,  Constance  s'adressa  aux  deux  Em- 
pereurs, afin  de  mieux  exécuter  son  entreprise.  II  en  ob- 
tint un  rescrit  adressé  à  Eumene ,  cet  Orateur  si  recom- 
mandable  par  son  éloquence  et  la  probité  de  ses  mœurs , 
pour  l'engager  à  se  charger  de  la  conduite  et  de  l'instruc- 
tion des  écoles  d'Autun.  Eumene  exerçoit  actuellement  la 
Chaire  de  Secrétaire  d'Etat,  ou  n'en  étoit  sorti  que  de-- 
puis  peu.  Mais  on  ne  regardoit  point  alors  la  profession 
de  Maître  d'éloquence  indigne  d'un  homme  de  ce  rang. 
Au  contraire  les  Empereurs  jugeoient  eux-mêmes  qu'elle 
n'étoit  propre  qu'à  lui  donner  un  nouveau  relief;  n'y 
aïant  rien ,  disent-ils ,  de  plus  grand ,  que  de  former  la 
jeunesse  dans  les  sciences  et  les  bonnes  mœurs  pour  le»  be- 
soins  de   l'Etat.    Aussi  Eumene    accepta-t^il  volontiers  la 


p.  137.  n.  17. 

p.   U3.  II.  3.  4. 

p.   l.-,7.  11.  17. 

p.  143.  n.  3.  4. 

Till.  Emp.  l.  4. 
28. 

P 

Pan,  ibid. 

p.  144.  n.  4. 

Till.  ibiil.  P.  29. 

DANS  LES  GAULES.  111  SIECLE.       319 

chaire  d'éloquence  qu'on  lui  ofîroit.  Et  comme  il  joùissoit 
déjà  d'une  pension  considérable  atachée  à  sa  charge  de 
Secrétaire  d'Etat,  'on  lui  doubla  ses  âpointemens,  qui  Pan.p. ix4.  n.  n 
montoient  à  plus  de  vingt-six  mille  livres  de  notre  mo- 
noïe.  Mais  par  un  trait  de  générosité  bien  rare,  il  voulut 
que  ce  riche  honoraire  fût  emploie  au  rétablissement  du 
Collège.  Tout  cela  se  pas^a  en  296  et  297  ;  et  dès  le  com- 
mencement du  siècle  suivant,  avant  l'an  310,  ces  écoles 
étoient  devenues  si  florissantes  ,  '  qu'elles  avoient  donné  p-  *".  n.  ïs. 
grand  nombre  de  sujets  de  mérite ,  dont  plusieurs  bril- 
loient  dans  le  Barreau  ,  et  d'autres  dans  les  premières  char- 
ges de  l'Empire, 

XXIX.  Nous  avons  observé  dans  le  discours  sur  le   siè- 
cle précédent,  que  dès-lors  il  pouvoit  y  avoir  eu  des  éco- 
les à  Besancon.  '  Elles  y  étoient  au  moins  llorissantes  avant  Aus.cons.p.  7ii 
le  milieu  de  ce  III  siècle,  sous  la  conduite  de  Jule  Titien,  ^"loi.ie.  p.G36 
qui  gouvernoit  aussi  celles  de  Lyon  à  l'alternative.  Auso- 

ne  nous  le  donne  assez  à  entendre  ,  en  témoignant  que 
Titien  se  fit  plus  d'honneur  par  cette  profession  ^  que  par 
l'exercice  du  Consulat  auquel  il  fut  élevé.  D'ailleurs  la 
réputation   où   il   étoit,    et   le  grand  savoir  qu'il  avoit  ac- 

auis,  font  juger  de  reste  qu'il  soutint  dignement  la  gloire 
e   ces  deux  écoles.  '  On    ne  peut  douter  qu'il  ne  fût  un  jui.  cap.va.  Max. 
des  plus  célèbres  Rhéteurs  de  son  tems;  puisque  l'Erape-  ^°"' "  '• 
reur    Maximin   I   le  choisit  pour  enseigner  l'éloqueuce  au 
jeune  Maximin   son  fils  vers  l'an  235.  'Titien  n'étoit  pas  ibid.  i  aui. ep.  ic. 
seulement   Rhéteur  ;    il    étoit  encore  et    Poète   et    Geogra-  ^'  ^^■ 
phe.  Ce  fut  aparemment  en  faveur  de  la  jeunesse  qui  hali- 
toit  ses  écoles ,  qu'il  mit   de  vers  grecs  en  prose  latine  les 
fables  d'Esope.  Il  laissa  aussi  particulièrement  sur  la  Geo- 
graphie  divers  autres  écrits,   dont  les  anciens  he  parlent 
qu'avec  élose.   Tel   étoit  le  Modérateur  des  écoles  de  Be- 
sançon et  de  Lyon  en  ce  siècle;  et  l'on  conviendra  sans 
peine  gu'elles  ne  pouvoient  qu'être   célèbres  soUS  la  con- 
duite d  un  si  savant  homme.  Ce  n'est  donc  pas  sans  sujet 
que  nous  soutenons  que  celles  de  Lyoa  en  particulier,   si 
célèbres  dès  le  premier  siècle  par  ces  disputes  publiqties 
qui   s'y  faisoienl   en  grec  et  en   latin,   cotitinueretità  se 
maintenir  dans  leur  première  splendeur. 

XXX.  Rien   n'empêche  de  croire  la  même  choéë  des 
autres  dont  vous  avez  déjà  v&  l'établissement  aux  siècles 


320  ETAT   DES   LETRES 

passés.  Il  est  même  hors  de  tout  doute  ,  qu'il  s'en  établit  en- 
core beaucoup  d'autres  dans  les  principales  villes  de  nos 
provinces,  quoiqu'il  ne  nous  reste  pas  d'anciens  monu- 
mens  pour  le  justifier.  Si  le  commencement  de  celles  de 
Bourdeaux ,  qui  furent  si  florissantes  au  siècle  suivant ,  et 
où  l'on  voioit  en  même  tems  plusieurs  chaires  de  Profes- 
seurs en  l'une  et  l'autre  éloquence ,  la  gréque  et  la  latine, 
Aus.  par.  c.  iG.  p.  nc  remoutc  pas  plus  haut ,  '  nous  avons  des  preuves  pour  le 
130^1^  Vin.  in  Aus.  pjg^ggj.  g^^  moins  en  ce  III  siècle.  On  y  vit  effectivement 
paroître  un  Eusebe ,  inconnu  d'ailleurs ,  qui  fit  dès-lors  à 
Bourdeaux ,  ce  que  tout  le  monde  sait  y  avoir  fait  Ausone 
au  siècle  suivant,  en  y  enseignant  les  belles  lelres.  C'est 
ainsi  que  l'on  croit  devoir  entendre  ce  qu'Ausone  dit  lui- 
même  de  cet  Eusebe,  dans  l'éloge  de  Veria  Liceria,  arriëre- 
petite-fille  d'Eusebe,  et  femme  d'Arboré  neveu  d'Ausone 
par  sa  sœur.   Voici  le  texte  de  ce  Poète. 

procul  et  de  manibus  iniis, 


.Vrcessenda  esset  vox  proavi  Eusebii  ; 

Qui  quoniam  functo  jam  pridem  conditus  œvo, 

Transcripsit  partes  in  mea  verba  suas. 

Il  seroit  difficile  de  dire  combien  fut  utile  au  progrès 
des  sciences  dans  les  Gaules  l'institution  de  ces  Collèges. 
Le  zèle  et  l'émulation  qu'elle  y  inspira  pour  les  letres, 
faisoient  étudier  à  l'envi  et  les  maîtres  et  les  disciples.  Et 
cette  émulation  étoit  d'autant  plus  grande  ,  qu'il  y  avoit 
plus  de  maîtres  qui  enseignoient  comme  à  la  vùë  les  uns 
des  autres. 

XXXI.  Outre  les  hommes  de  letres,  dont  nous 
avons  déjà  donné  quelque  notion  dans  ce  discours ,  nous 
ne  connoissons  presque  point  d'autres  élevés  des  écoles 
Gauloises,  qui  aient  paru  en  ce  siècle  avec  quelque  dis- 
tinction. Mais  on  sait  assez  que  l'antiquité  ne  nous  a  pas 
apris  tout  ce  qui  s'est  passé  sous  ses  yeux.  11  faut  toute- 
fois joindre  aux  grands  hommes  que  nous  avons  déjà  nom- 
més ,  Jule  Titien  le  père ,  dont  quelques  modernes  font 
un  célèbre  Orateur,  et  à  qui  ils  atribuent  les  ouvrages  qui 
sont  plus  vraisemblablement  de  Jule  Titien  son  fils.  Quant 
aux  autres  personnes  de  marque  que  produisirent  nos  Gau- 
les en  ce  siècle,   l'on  compte  jusqu'à  six  ou  sept  Princes 

qu'elles 


DANS  LES  GAULES.  III  SIECLE.         321 

qu'elles  donnèrent  à  l'Empire.  Mais  ils  ne  lui  lirent  pas 
tous  également  honneur.  Personne  n'ignore  quel  fut  Cara- 
calla  ,  qui  étoit  né  à  Lyon  ,  et  dont  nous  serons  peut-être 
*  obligés  de  parler  ailleurs.  Carus ,  qui  avait  pris  naissance 
à  Narbone ,  tient  le  milieu  entre  les  bons  et  les  mauvais 
Empereurs.  Carin  et  Numerien  ses  fils  et  ses  successeurs, 
étoient  des  esprits  bien  difîerens  l'un  de  l'autre.  Nume- 
rien devint  aussi  aimable  que  Carin  se  rendit  odieux. 
Bonose  fils  de  ce  Grammairien ,  que  vous  avez  vu  être  ve- 
nu s'établir  dans  les  Gaules,  trouva  le  secret  de  se  faire 
proclamer  Empereur  par  les  troupes  qu'il  commandoit 
sous  Tempire  de  Probe.  Mais  après  avoir  joui  quelque 
tems  du  titre  qu'il  avoit  usurpé ,  il  fut  enfin  vaincu ,  et  ter- 
mina sa  vie  par  un  genre  de  mort  infamant.  Saturnin,  qui 
se  trouva  comme  forcé  à  prendre  la  pourpre,  auroit  été 
un  bon  Prince ,  si  la  providence  l'avoit  placé  sur  le  thrône, 
et  qu'il  n'y  fût  pas  monté  de  lui-même. 

XXXII.  Il  y  a  plus  de  choses  à  dire  sur  Carause,  les- 
quelles ne  reviendront  pas  ailleurs.  '  Il  passoit  pour  l'un  Pan.  n.  p.  120 
des  plus  savans  hommes  dans  la  Marine,  que  l'on  eût  en-  Tp.' lî.'ia'."''  '' 
core  vu.  Mais  comme  il  avoit  apris  cette  science  plutôt 
par  un  long  et  fréquent  exercice  ,  que  par  l'étude  des  Li- 
vres qui  en  traitoient ,  nous  ne  parlons  de  lui  avec  quel- 
que détail ,  que  pour  ne  pas  laisser  absolument  ignorer  son 
histoire.  Il  étoit  de  fort  basse  condition ,  et  avoit  pris  nais- 
sance ,  non  dans  le  pais  que  l'on  a  depuis  nommée  la  Hon- 
grie, mais  dans  celte  partie  de  la  Gaule  Belgique  à  la- 
quelle on  a  donné  le  nom  de  Flandre  ou  de  Brabant.  Ca- 
rause dès  sa  jeunesse  s'étoit  exercé  à  conduire  des  vaisseaux, 
pour  avoir  de  quoi  vivre.  Il  acquit  par  cet  exercice  une 
parfaite  connoissance  de  la  mer.  Il  fut  ensuite  emploie 
dans  les  armées  navales ,  où  il  parut  avec  éclat ,  sur-tout 
dans  la  guerre  contre  les  Bagaudes.  Mais  étant  devenu  ou 
suspect  ou  odieux  à  Maximien  Hercule ,  ce  Prince  donna 
ordre  qu'on  le  fit  mourir.  A  cette  nouvelle  '  Carause  prit  iiu>.  d.i-.i..  2-;. 
le  titre  d'Auguste  en  287,  passa  dans  la  grande  Bretagne, 
avec  la  flote  qu'il  commandoit  pour  défendre  les  Gaules, 
et  trouva  moïen  de  s'y  faire  reconnoître  Empereur.  Il  sou- 
tint cette  hardie  entreprise  avec  autant  de  courage  qui? 
d'habileté;  'et  les  deux  Empereurs  Diocletien  et  Maximien  Tiii.  i^ii.  j..  .:. 
furent  obligés  de  traiter  avec  lui,  et  de  le  laisser  jouir  6  à 
Tome  I.  Prem.  Part.  T  t 


322  ETAT   DES    LETRES  « 

'  7  ans  '  du  fruit  de  sa  conquête ,  et  du  titre  qu'il  avoit  usur 
pé.  L'on  voit  encore  une  preuve  de  cet    acord  dans   une 
médaille ,  qui  porte  pour  inscription  :  La  paix  des  trois  Au- 
gustes. Carause  fut  tué  dans  la  grande  Bretagne  par  Ale- 

*  cte  '  un  de  ses  Officiers ,  qui  prit  la  pourpre ,  et  régna  envi- 
ron trois  ans. 

XXXIII.  Les  écrits  qu'enfanta  dans  les  Gaules  en  ce 
siècle  la  literature  profane ,  n'eurent  pas  un  sort  plus  heu- 
reux que  les  ouvrages  eclésiastiques.  L'antiquité  peu  soi- 
gneuse pour  l'avenir  ,  s'est  contentée  d'en  profiter  ,  sans 
prendre  de  justes  mesures  pour  les  faire  passer  jusqu'à  nous. 
L'on  ne  nous  a  rien  conservé  de  tout  ce  que  Titien  écrivit 
sur  la  Géographie  ,  l'Agriculture ,  la  Rhétorique  et  quel- 
ques autres  sujets.  On  doit  croire  qu'il  avoit  beaucoup 
écrit  ;  puisque  S.  Isidore  de  Seville  le  compte  entre  les  Ora- 
teurs qui  avoient  le  plus  contribué  à  soutenir  l'éloquen- 
ce. Nous  n'avons  rien  non  plus  des  déclamations  et  des 
poésies  de  l'Empereur  Numerien.  Il  nous  manque  aussi 
quelques  pièces  d'éloquence  de  Claude  Mamertin.  Voilà 
les  écrits  perdus  dont  nous  avons  quelque  connoissance  en 
genre  de  literature  profane.  Mais  combien  en  est-il  péri 
d'autres ,  dont  il  ne  nous  reste  ni  le  moindre  vestige  ni  la 
moindre  notion?  Tout  ce  que  nous  possédons  aujourd'hui 
en  ce  genre  de  literature,  se  réduit  à  quatre  panégyriques, 
deux  de  Mamertin  et  deux  d'Eumene.  Car  pour  les  deux 
autres  de  cet  Orateur,  ils  ne  furent  faits  et  prononcés 
qu'au  siècle  suivant.  On  voit  par  ce  peu  de  monumens  que 
1  éloquence ,  qui  tomboit  sensiblement  dans  les  autres  pro- 
vinces de  l'Empire,  se  conservoit  encore  avec  quelque  lu- 
stre dans  nos  Gaules.  Elle  étoit  à  la  vérité  bien  difl'eren- 
te  de  celle  des  bons  siècles.  Au  lieu  de  cet  air  aisé  et  na- 
turel ,  qui  fait  le  prix  de  l'éloquence  comme  de  la  poésie, 
au  lieu  de  ces  expressions  nobles  et  majestueuses,  au  lieu 
de  cette  justesse  et  de  ce  bel  arangement  que  l'on  admire 
dans  les  écrits  des  siècles  de  Ciceron  et  d'Auguste  :  le  gé- 
nie des  Orateurs  de  ce  tems-ci  étoit  de  s'exprimer  par  des 
pensées  guindées,  des  tours  de  phrase   embarassés,   et  un 

Ens    ibid    D  VU        O  '  Ei"^'''^  ''i'  1"^  Carause  ne  régna  que   trois  ans  ;  ne  comptant   peat-étra  que 
•  p.        •    iij  jgjjjj  qij.y  fagnjj  paisiblement. 

Qùà,  (3)  '  Le  même  HistorieD  nomme  Asclapioiiota  cet  Alecte  qui  tua  CarauM. 


DANS  LES  GAULES.   III  SIECLE.        323 

assemblage    confus    de   mots  qui  souvent  ne  signifient  pas 
grand'chose. 

XXXIV.  Les  superstitions   fondées  sur  l'Astrologie,    ont 
presque  toujours  régné  dans  les  Gaules  et  dans  la  Erance. 
On  y  a  consulté  les  Devins  en  tout  tems;  et  nous  ne  ver- 
rons  presque   aucun    siècle,  où  cette  superstition,  ennemie 
de  la  vérité,  n'ait  infecté  la  republique  des  letres.  '  En  ce  Lamp.  vu.  ai.  n, 
siècle    l'Empereur    Alexandre    Severe    étant  allé  au-devant  ^' 
des  Germains  qui  ravageoient  les  Gaules,  une  femme  Drui- 
de lui  prédit  en  quelque  manière  sa  mort,  en  lui  disant  en 
langue  Gauloise  :   Allez,  mais  n'espérez  pas  la  victoire,  et 
ne   vous  fiez  pas  à  vos  soldats.  Lampride  met  ces  paroles 
entre   les  présages  de  la  mort  de  ce  Prince,  qui  fut  tué  en 
235.    '    L'Empereur    Aurelien    consulta   d'autres    femmes  vopi.  vit.  Aur.  n. 
Druides,   qui  se  mêloient  encore  dans  les  Gaules,  comme  **  p.^Tg.  *^'"''  ' 
la    précédente ,    de    deviner  l'avenir  ,    et  leur  demanda  si 
l'Empire    demeureroit    dans    sa    famille.    On  tient  qu'elles 
lui    répondirent ,    qu'aucune  famille  ne  seroit  plus  illustre 
parmi  les  Romains,  que  la  postérité  de  Claude  II.  La  pré- 
diction   fut    acomplie  en  la  personne  de  Constance  Chlore 
père  du  grand  Constantin.   '  De  même  une   autre    Druide  vo...  vit.  Num.  n 
prédit   à  Diocletien  ,  qui  n'étoit  encore  que  simple  soldat,  vit.  Aur.  noi.  p. 
qu'il  seroit  un  jour  Empereur.  '  La  profession  dont  se  mê-  '^'  *■ 
loient   ces    femmes    Druides,    a  fait  dire  à  Saumaise,  qui 
veut    qu'on    les    nomme   Dryades,  qu'elles  n'étoient  autres 
que  ces  Nymphes  des  bois,  ou  ces  Fées,  dont  nos  romans 
ont    fait  tant   de   contes   fabuleux.    Pomponius   Mêla  nous 
les  caractérise  encore  mieux,    lorsqu'il  nous  les  représente 
comme    des    Prêtresses  Vierges  Gauloises  ,  qui  usoient  de 
charmes  pour  exciter  des  tempêtes  sur  mer,  guérir  les  ma- 
ladies qui   paroissoient    incurables ,    et   prédire  des  choses 
avenir. 


I 


t»j 


324 


lil    SIF.OLG. 


S.  IRENÉE, 

EvESQUE  DE  Lyon,  Docteur  de  l'Eglise  et  Martyr. 

S   I- 

HISTOIRE    DE    SA    VIE. 

ii.li.  pr.  p.  ifi4.  '  c»  Irenée  ,    la  lumière  des  Gaules  et  de  tout  l'Occident, 
dUs.  i.  M.  1.  2.      O.  comme    le    qualifie    Theodoret ,  '  étoit    Grec  de  na- 
1  tion.    Il   vint  au  monde  vers  l'an  130'  de  nôtre  Ere  vul- 
gaire, dans  l'Asie  mineure,  peut-être  à  Smyrne  même  ou 
1. 3.C.3.  n.4|Eus.  dans  le  voisinage.  C'est  ce  que  fait  juger  la  manière 'dont 
I.5.C.  ao.pi88.  ji         Ye    de  S.  Polycarpe  Evêque  de  cette  ville.  Il  eut  le 
honneur  d'être  instruit   dans  la  pieté  dés  sa  première  jeu- 
nesse   par  ce  grand  Maître,  qui  avoit  été  lui-même  disci- 
ple des  Apôtres.  Dès  cet  âge  si  tendre  il  avoit  un  soin  par- 
u        ticulier   d'observer    tout   ce    qu'il  voïoit  en  la  conduite  de 
ce  saint  Vieillard,  pour  le  faire  passer  dans  la  sienne.   Il 
écoutoit    atentivement    toutes    ses    paroles,   les  gravoit  non 
sur  des  tablettes,  mais  dans  le  plus  profond  de  son  cœur, 
et  les  rouloit  continuellement  dans  son  esprit.  De  sorte  qu'à 
un  âge  un  peu  avancé  il  avouoit  les  avoir  plus  présentes, 
que  ce  qui  s' étoit  passé  depuis  peu  sous  ses  yeux.  Tout  ce- 
la fait  croire  que  nôtre  Saint  naquit  de  parens  Chrétiens, 
et  qu'il  fut  toujours  élevé  dans  la  vraie  Religion. 

Outre  S.  Polycarpe  '  il  eut  encore  pour  Maître,  comme 
il  le  témoigne  lui-même  ,  un  Elevé  des  disciples  des  Apô- 
tres, qu'il  cite  souvent  sans  le  nommer,  et  dans  la  suite  S. 
Pothin  Evêque  de  Lyon.  '  Par  cet  Anonyme  quelques  mo- 
dernes   entendent  Papias.  '  Mais  Papias  avoit  été    disciple 

(1)  Quelques  modernei  font  naître  S.  très-grand  âge.  Que  cela  sigoifie-t-il ,  si- 
Irenée  dès  l'an  120  oa  environ.  D'autres  non  que  S.  Irenée  éloit  encore  jeune,  lors- 
ne  placent  cette  naissance  que  20  ans  plus  qu'en  1C6  S.  Polycarpe  souffrit  le  Marty- 
tarcl.  Mais  les  premiers  n'ont  pas  fait  assez  re  ?  De  ne  mettre  aussi  la  naissance  de  S. 
d'atention ,  que  ce  Saint  disant  que  dés  Irenée  qu'en  140,  c'est  ce  que  les  autres 
sa  première  jeunesse  il  avoit  été  disciple  de  circonstances  de  sa  vie  ne  permettent  pas, 
S.  Polycarpe,  il  donne  pour  preuve  de  ce  comme  on  le  verra  par  la  suite, 
fait  que  ce  S.   Martyr  vSquit  jusqu'à  un 


Iron, 
1. 

.  I. 

4.C 

.27, 

vie, 

P- 

16. 

1.  5. 

c. 

33. 

n.  . 

s.  IRENÉE,  EVEQUE  DE  LYON,  etc.      32o 

des    Apôtres    mêmes;  et  lorsque  notre  Saint  le  cite,  il  le    m  siècle. 
fait  en  le  nommant.  '  Cela  n'empêche  pas  toutefois  que  S.  Hier.  ep.  53.  p. 
Jérôme  ne  dise  que  S.  Irenée  fut  effectivement  sous  sa  dis-  ssi- 
cipline  :  ce   qu'il    n'aura    peut-être  avancé  qu'en   prenant 
lui-même    Papias    pour   l'Anonyme    dont   nous  venons  de 
parler.  Quoiqu'il  en  soit,  '  on  ne  peut  nier  que  S.  Irenée  iivn.iwj. 
ne  fit  depuis  une  étude  particulière  de  ses  écrits,  et  qu'il 
n'y  puisât  les  sentimens  des  Millénaires. 

'  A  la  science   ecclésiastique  il  joignit  l'étude  des  letres  iiiss.  2.  n.  4. 
humaines,    et   la    connoissance    de    la    théologie    Païenne, 
comme   on   le    remarque    par  les  fréquentes  citations  qu'il 
fait  des  Poètes  et  des  Philosophes  le  moins  connus.  '  C'est  Ten.  in  vai.  r.  .n. 
ce  qui  fait  dire  à  Tertulien,  que  S.  Irenée  avoit  aprofondi  ^'  **'■ 
toutes    les   sciences  avec  beaucoup  de  soin  et  de  lumière: 
Omnium  doctrinarum  curiosissimus  explorator. 

'  Il  est  vrai  que  notre  Saint  avoue  lui-même  n'avoir  ja-  iren.i.  1.  pr.  u.a. 
mais  apris  à  composer  des  Livres,  ni  étudié  les  règles  de  la 
rhétorique;    qu'il  déclare  ignorer  la  politesse  du  discours, 
et  l'art  de  persuader  adroitement.  Mais  il  faut  prendre  cet 
aveu  pour  des  sentimens  que  son  humilité  lui  avoit  inspirés, 
et   lui    faisoit  croire   très-veritables.    D'ailleurs   il  pouvoit 
fort  bien  n'avoir  pas  étudié  à  dessein  de  devenir  Auteur; 
mais  il  ne  laissa  pas  de  se  rendre  très-habile  et  par  les  ta- 
lens  qu'il  avoit  reçus  de  la  nature,  et  par  l'aplication  qu'il 
donna   à    l'étude.  '  L'érudition  profane,  selon  les  Pères,  diss.  2.  n.4.|  tiii. 
étoit    nécessaire  pour  réfuter  les  erreui-s  des  Païens;  et  il  m-^^'^p-»»- 
n'y  a  pas  lieu  de  douter  que  S.  Irenée  n'eût  emploie  une 
partie  de  son  tems  à  l'acquérir. 

'  En  effet  quelque  épineuse  et  embarassante  que  soit  la  ••»<!•  l  Hier.  îu. 
matière   qu'il  traite  dans  ses  livres  contre  les  hérésies  ,  et 
quelque   barbares    que  soient  et  le  peu  du  texte  grec  qui 
nous  en  reste,  et  encore  plus  la  version  latine  que  nous  en 
avons,  S.  Jérôme  n'a  pas  laissé  d'y  trouver  beaucoup  d'é- 
loquence   et  d'érudition.  De  même  les  Connoisseurs  y  re- 
marquent un    génie   vif,    agréable  ,  élevé  :  ce.  qui  paroît 
dans  les  comparaisons  dont  il  se  sert,  et  dans  quelques  au- 
tres endroits  où  s'elevant  au  dessus  de  son  sujet,  il  donne 
nie  liberté  à  son  esprit. 
n  ne  sait  ni  quand  ni  à  quelle  ocasion  S.  Irenée  vint  iren.  dis».  2.  n  5, 
dans  les  Gaules.  On  ignore  également  par  qui  il  y  fut  en- 
voïé.  '  Seulement  S.  Grégoire  de  Tours  rapporte  cette  Mis-  cr.x.  hisi.Fr.  .i. 

2  5  "■  "• 


326         S.  IRENÉE,  EVEQUE  DE  LYON, 

(II  SIECLE,  sion  à  S.  Polycarpe.  'D'autres  ont  conjecturé  qu'Irenée 
•  iifn.vic,  1.  i.p.  ''liant  fait  le  volage  de  Rome  avec  ce  Saint  en  157,  on  l'en- 
25. 20. 29-31.        voïa  de  Rome  à  Lyon,  sur  les  remontrances  de  S.  Anicet 

à  (jui  S.  Pothin  avoit  demandé  du  secours  pour  son  Eglise. 

Mais  cette  conjecture  n'a  nul  fondement,  et  paroît  démen- 
1  tie  par  la  manière  '  dont  notre  Saint  parle  de  lui-même. 

Il  y  a  plus  d'aparence  qu'il  passa  dans  les  Gaules  avec 
quelques-uns  de  ces  autres  Grecs  Asiatiques,  qui  y  vinrent 
établir  l'Eglise  de  I^on,  et  peut-être  avec  S.  Pothin  mô- 
me, quelque  tcms  avant  que  S.  Polycarpe  entreprît  son 
voïage  de    Rome.  Irenèe  étoit  alors  encore  jeune,  n'afant 

?«?■  Lt  v'r*i?r  *I"^  ^^  '^  ^^  *"^-  ^^"^  '*  ^"^*^'  '^^  I^olhin  l'ordonna  Prê- 
c.  3s.  "'•*'■•'  •  tre,  pour  servir  en  cette  qualité  l'Eglise  dont  il  étoit  Evê- 

que.  Les  premiers  Martyrs  de  Lyon  font  en  deux  mots  l'élo- 
ge de  ce  saint  Prêtre,  en  disant  que  c'étoit  un  zélé  partisan 
de  la  loi  de  J.  C.  Us  ne  trouvèrent  personne  entre  leurs 
frères  et  leurs  collègues,  qui  fût  plus  propre  qu'Irenée, 
pour  porter  en  177  les  letres  qu'ils  écrivirent  dans  leur 
Eus.  c.  3.  p.  168.  prison  au  Pape  S.  Eleuthere,  '  et  aux  Eglises  d'Asie  et  de 
c.  4  p.  i««.  Phrygie    sur    l'hérésie   de  Montan.  '  Ils  le  choisirent  donc 

pour    faire   les  voïages  de  Rome  et  d'Asie.   Mais  Dieu  en 
disposa    aulrement ,  au   moins  quant  à  ce  dernier  et  plus 
long  voïage. 
c.  5.  p.  170  iGr.       '  .\près  que  S.  Pothin  cul  souffert  le  martyre,  ce  qui  ai^ 
î».''p'30»'.'""  *    "^^  '*  même  année  177,  comme  nous  l'avons  montré  ail- 
leurs, S.  Irenée  fut  mis  en  sa  place,  et  fut  le  second  Evê- 
que  de  Lyon.  Cette  élection  ne  permit  pas  sans  doute  qu'il 
abandonnât  une  Eglise  affligée,  persécutée  et  privée  de  son 
.i;  i«n|  i,«»i  Pasieur,  pour  faire  le  voïage  d'Asie  auquel  on  l'avoit  de- 
stiné.   11    est  néanmoins   des    Ecrivains    qui  prétendent  le 
En»,  noi.p.92.1.     contraire.   '  Mais    Mr.    Valois  réfute  solidement  leur  opi- 
nion, et  soutient  même  qu'il  ne  fit  point  le  voïage  de  no- 
Hier.  ibid  I  Iran.     me.  'S.  Jcrôme  l'assure  néanmoins;  et  rien  n'empêche  qu'il 
ne  l'ait  effectivement  fait,  .soit  avant,  soit  après  son  élection. 
Il   y  a   même  quelque  lieu  de  croire  que  ce  fut  à  Rome 

|t)  En  effet,  comment  S.  Irenée  qni  pour  qu'on  lui  donne  alors  ;  et  qo'il  Taroit  «e- 

aiiluriser  >-e  iin'il  av.inri-,  ilit  qu'il  avuit  vu  com|Kignù   UaiiM    Sus  voïages,  si   comme  on 

•  ^   t  dans  «a  plus  tendre  jt'Dne!>se  le  saint  vieil-  le  prûlund.  il  avoit  réellement  (ail  le  vola- 

lanl    l'of^'carpo,    ne    diroit-il    pas    plûltH  ge   de   Rome,   «1  conversé   &  un  Ige    mâr 

qu'il   avoit   passé  plusieurs    années   en    sa  avec  cal  iiomme  Apostoliqno  ? 
compagnie,  et  jusqu'à   i'ége  de  36  *  37  ans 


a 


b 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    327 

u'il    reçut    l'ordination   épiscopale;  quoiqu'il    y    ait  plus    m  siècle. 
'aparence  que  ce  fut  dans  les  Gaules  mêmes. 

'  S.  Irenée  élevé  à  l'Episcopat,  y  brilla  par  une  sainteté  cr.  t.  ïMd.      , 
admirable;  et  en  peu  de  tems  il  rendit  par  ses  prédications  '    '    ' 

la  ville  de  Lyon  presque  toute  Chrétienne.  '  Il  eut  beau-  i'»»-  "^m.  n.n. 
coup  à  travailler,  pour  y  reparer  les  ravages  que  la  fureur 
des  Païens  y  avoit  causés.  Mais  ce  travail  ne  fut  point  au- 
dessus  de  son  zélé;  'et  il  ne  borna  pas  ses  soins  à  la  seule  rui.ib.p.  83. 
Eglise,  ni  même  au  Diocèse  de  Lyon.  Il  forma  plusieurs 
disciples  pour  porter  la  lumière  de  la  foi  en  divers  autres 
endroits.  On  le  vit  quelquefois  lui-même  aller  chercher 
l'erreur  jusques  dans  Rome,  pour  la  combatre  en  la  per- 
sonne de  Blaste  et  en  celle  de  Florin. 

'  On  lui  atribue  beaucoup  de  miracles  pour  la  conversion  p  m. 
des  infidèles.  Cela  peut  être  vrai;  '  puisqu  il  nous  assure  lui-  iren.i.î.c.  si.  n. 
même  comme  témoin  oculaire,  que  de  son  tems  il  se  faisoit     ''••'*•"•*•''• 
grand    nombre  de  merveilles  dans  l'Eglise,  et  qu'il  auroit 
été  impossible  de  faire  l'enuraeration  des  dons  et  des  grâ- 
ces  qu'elle   recevoit    de    Dieu,   et  qu'elle  répandoit  encore 
tous  les  jours  par  toute  la  terre  sur  les  Gentils  au  nom  de 
J.  C.  crucifié.  '  "' 

'  On  sait  peu  de  choses  en  détail  de  la  vie  de  ce  grand  Tiii.U).  p.  ss. 
Evêque.    Seulement    il    paroît  qu'elle  fut  toute   ocupée  ou 
à  soutenir  la  vérité  en  combatant  les  hérétiques  et  de  vive 
voix    et  par  écrit,  ou  à  former  les  Eglises  des  Gaules  en 
les  instruisant  de  la  doctrine  apostolique.  Mais  autant  qu'il 
avoit   de    zélé    pour    combatre  l'erreur,  autant  il  avoit  de 
charité  pour  ceux  qui  l'enseignoient.  '  Rien  ni  de  plus  tou-  iren.  i.  3.  e.  25.  n. 
chant  ni  de  plus  instructif,  que  ce  qu'il  dit  lui-même  de  ' 
cette  charité  sincère  qu'il  portoit  aux  hérétiques. 

'  Ce  fut  autant  l'effet  de  cette  charité  que  le  devoir  de  i.i.pr.n.  s|e.  13 
sa  charge  pastorale,    qui  l'engagea  à  écrire  le  grand  nom-  "'  '' 
bre  d'ouvrages  dont  il    enrichit   l'Eglise,  et  dont  nous  fe- 
rons le  dénombrement  en  son  lieu.  Il  ne  nous  en  reste  mal- 
heureusement  que  celui    qu'il   fit  contre   les  hérésies  qui 
avoient   paru  jusqu'à  son  tema.  Il  eut  une  ocasion  particu- 
lière d'écrire  sur  ce  sujet  à   cause  des  hérétiques  Marco- 
siens,  '  ou   Gnosticjues,   comme  les  nomme  S.  Jérôme,  qui  Hier.  in.  u.  e.  64. 
aïant  d'abord  séduit  quelques  femmes  de  qualité  dans  les  mi"*  '  *'*'  "'' 
pais   qu'arrosent    le    Rhône  et  la  Garonne,   en   firent  de 
même  en  Espagne. 


328        S.  IRENÉE,  EVEQUE  DE   LYON, 

m  SIECLE.        Personne  n'étoil  ni  plus  propre  ni  plus  capable  do  refu- 

•  iren.  1. 3.c.  3.     ter  ces  hércsies,  que  l'étoit  S.  Irenée.  Non  seulement  *  il 

"•  *■  avoit  été  instruit  par  les  disciples  des  Apôtres;  •>  non  seu- 

pr.  p.  164.        lement    Dieu   l'avoit    préparé   à  ce  combat  en  lui  donnant 

une    foi  très-pure  et  une  lumière  très-pénetrante  des  plus 

grandes    vérités,    et  en  le  comblant  de  tous  les  dons  céle- 

i.i.pr.n.2.  stes  du   S.    Esprit,  comme  parle  S.  Epiphane  :' mais  il  avoit 

encore    une    connoissance    parfaite   de  toute  la  doctrine  de 

..3.  pr.11.2.  ggg  hérétiques,  qu'il  avoit  étudiée  à  fond.  '  Aussi  ne  fait- 
il  pas  difficulté  de  dire  lui-même,  sans  sortir  des  bornes 
de  son  humilité,  que  ceux  qui  avoient  entrepris  avant  lui 
de  la  réfuter,  n'y  avoient  pas  tout-à-fait  réussi,  parce 
qu'ils  n'en  avoient  pas  assez  connu  les  faux  principes. 
A    ce    zèle   ardent  pour  combatre  l'erreur,  si-tôt  qu'elle 

Eus.  1. 5.  c.  24.  p.  osoit  se  montrer,  '  S.  Irenée  savoit  joindre  un  amour  ex- 
trême pour  la  paix.  Il  fit  voir  à  tout  le  monde,  dit  Eusebe, 
que   son  nom   qui  signifie  pacifique,  n'étoit  point  démenti 

T.i.ibii.  par  ses  actions.  '  Mais  cet  amour  de  la  paix  dans  ce  grand 

Evêque  n'étoit  point  un  amour  du  repos  au  préjudice  de  la 

Eus.  ib.  c.  23. 24.  vcritè.   '  Il    en    donna   des  preuves  éclatantes  dans  les  fa- 

p.191.  i9i.  meuses  disputes  au  sujet  du  jour  auquel  on  devoit  célébrer 

.,;,<  la  Pàque.    Gardant    en    cette  rencontre  un  juste  tempéra- 

ment ,  si  d'un  côté  il  soutint  la  vérité  de  la  tradition  que  les 
Asiatiques  combatoient,  de  l'autre  il  s'oposa  fortement 
au  Pape  S.  Victor,  qui  vouloit  troubler  la  paix  en  séparant 
de  la  communion  de  l'Eglise  ces  mêmes  Asiatiques. 
Nous  avons  raporté  ailleurs  avec  quelque  détail  ce  que 
.,}  fit  S.  Irenée  en  cette  rencontre;  et  nous  avons  déjà  don- 
né l'histoire  du  Concile  qu'il  assembla  à  ce  sujet,  et  dont 

r- i9i  i!)i  I  l'iiut.  il  fut  l'ame,  et  conduisit  toute  l'action.  'Outre  la  Letre 
Synodale  de  ce  Concile,  que  l'on  regarde  comme  l'ouvra- 
ge de  notre  Saint,  il  en  écrivit  plusieurs  autres  tant  au  Pa- 
pe qu'aux  Evêques  pour  assoupir  cette  dispute,  en  quoi  il 
réussit  heureusement. 

ireii.diss.  2.11.30.  '  Lcs  mouvemeus  qu'il  se  donna  pour  procurer  la  paix  à 
l'Eglise,  et  le  soin  qu'il  prit  d'achever  son  grand  ouvrage 
contre  les  hérésies,  lurent  des  dernières  actions  de  sa  vie. 

.»,  II  la  finit  par  le  martyre  l'an  202,  dans  cette  violente  per- 

sécution qu'excita  contre  l'Eglise  l'Empereur  Severe  la  12" 
année  de  son  règne.   La  mort  de  notre  Saint  est  marquée 

1*0  •»  i^iso"''  31^28*  de  Juin  dans  les  anciens  Martyrologes.  '  Son  corps 

fut 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    329 

fut  inhumé  entre  ceux  de  S.  Epipode  et  S.  Alexandre  sous    m  siècle. 
l'Autel  de  l'Eglise  de  S.  Jean. 

'La  plupart  des  anciens  Pères  de  l'Eglise  renchérissent  iron.pr. p.  ig3. 
les  uns  sur  les  autres  en  faisant  l'éloge  de  nôtre  saint  Evê- 
que.  Tertullien  le  compte  entre  les  Pères  les  plus  recom- 
mandables  pour  leur  sainteté  et  leur  excellence  ,  et  qui 
ont  refuté  les  hérétiques  par  les  écrits  les  plus  achevés. 
Eusebe  et  S.  Epiphane  le  regardent  comme  un  défenseur 
intrépide  de  la  loi  Catholique ,  qu'il  a  soutenue  pendant 
toute  sa  vie  '  avec  une  lumière  qui  a  dissipé  toutes  les  illu-  p-  ">*• 
sions  et  les  vaines  chimères  des  hérétiques ,  et  triomphé 
de  tous  leurs  efforts.  S.  Augustin  le  produit  contre  les 
Pelagiens  sur  le  péché  originel ,  en  le  qualifiant  un  ancien 
homme  de  Dieu  ,  un  défenseur  de  la  vérité  ,  un  Docteur 
célèbre  pour  sa  doctrine ,  devant  qui  les  Pelagiens  les 
plus  obstinés  eussent  été  contraints  de  rougir  et  de  se  ren- 
dre à  la  vérité.  Theodoret  le  nomme  un  homme  aposto- 
lique ,  un  homme  admirable ,  qui  a  répandu  la  lumière  de 
la  vérité  dans  les  Gaules  et  dans  tout  l'Occident. 

S.  Irenée  forma  un  nombre  considérable  de  disciples , 
qui  tous  furent  illustres  ou  par  leur  pieté,  ou  par  leur  sa- 
voir, et  dont  quelques-uns  eurent  le  bonheur  de  verser 
leur  sang  pour  la  foi.  Les  plus  célèbres  furent  le  Prêtre 
Caïus  et  S.  Hippolyte ,  dont  nous  donnerons  bien-tôt 
l'histoire,  comme  aïant  été  instruits ,  et  peut-être  étant 
nés  dans  les  Gaules.  Pour  les  autres ,  nous  en  avons 
déjà  parlé  ailleurs  en  plus  d'un  endroit  ;  et  nous  ne  répé- 
terons pas  ce  que  nous  en  avons  dit. 

§.    II. 
Ecrits  qui  nous  restent  de  lui. 

DE  tous  les  ouvrages  que  S.  Irenée  laissa  de  sa  façon , 
il  n'est  venu  jusqu'à  nous  que  ses  cinq  livres  contre 
les  hérésies.  Encore  ne  les  avons -nous  pas  tous  en  leur 
langue  originale ,  ni  peut-être  même  en  tout  leur  entier. 
Au  moins  '  paroît-il  quelques  lacunes  tant  dans  l'ancienne  iren.  i.  i.  c.  u. 
version  que  dans  le  texte  grec  du  premier  livre.  n.  *  i  c.  la.  n.  2. 

'  Les  motifs  qui  portèrent  l'Auteur  à  y  mettre  la  main,  1.  i.  pr.  n.  2. 

étoient  dignes  et  de  son  zélé  et  de  sa  charité.  D'une  part, 

il  craignoit  de  voir  périr  par  sa  faute  plusieurs  Fidèles,  qui 

ne  sachant  pas  discerner  les  loups  sous  la  peau  empruntée 

Tome  I.  Prem.  Part.  V  v 

2  6  • 


7 


n.  3. 


n.  7. 


330        S.    IRRNEE,  RVEQUE  DE  LYON. 

III  SIECLE,    des  brebis  dont  ils  tâchoient  de  se  couvrir,  seroient  deve- 

iren.  1. 1.C.13.  n.  Hus  leur  proïe.  '  De  l'autre  il  desiroit  de  retirer  de  l'erreur 
grand  nombre  de  femmes ,  que  les  disciples  d'un  certain 
Marc   avoient   séduit  dans  les  provinces  qu'arrose  le  Rhô- 

n.i.  ne.  '  Ce    Marc  étoit   un   des  plus  insignes  imposteurs  de  la 

secte  de  Valentin ,  et  un  homme  très-habile  dans  l'art  de 
la  magie.  S.  Irenée  ne  fait  pas  difficulté  de  le  qualifier  le 
vrai  précurseur  de  l'Antéchrist.  Avec  ses  charmes  et  ses 
prestiges  il  séduisit  quantité  de  personnes  de  l'un  et  de 
l'autre  sexe.  '  Il  s'altaquoit  particulièrement  aux  femmes, 
et  en  vouloit  sur-tout  a  celles  qui  éloient  et  de  qualité 
et  les  plus  riches.  Tel  étoit  le  Maître  ,  '  et  tels  furent  ses 
disciples. 

Ce  fut  donc   pour  détruire  en  particulier  les  ern  urs  des 
Valenliniens  et  des  Marcosiens ,  que  S.  Irenée  entreprit  ce 

pr-  n.  2.  grand  ouvrage  ;  '  se  proposant  tout  à  la  fois  d'en  garantir 

1.4.  c.  41.  n.  4.  les  Fidèles,  et  de  confondre  ceux  qui  les  enseignoient , 
pour  les  faire  revenir  de  leurs   égaremens. 

I.  I.  pr.  n.  2.  '  Mais  avant   que  d'y  travailler,  il  prit  toutes  les  mesu- 

res possibles  pour  y  réù.ssir.  Il  eut  soin  de  s'instruire  à  fond 
des  sentimens  de  .ses  adversaires  ,  tant  par  la  lecture  des 
écrits  des  disciples  mêmes  de  Valenlin  ,  que  par  des  co-i- 
fererices  qu'il  enl  avec  eux.  Ainsi  c*'  ne  fut  qu'après  avoir 
sondé  la  profondeur  de  leurs  mystères .  comme  il  parle  lui- 
î>:ême,  qu'il  eiitr'pril  d'en  montrer  et  les  extravagances  et 

'•■  "  n   '  les impielés.  'En  le  faisant  il  se  sert  de  leurs  propres  ter- 

mes, iifin  d'en  faire  mieux  .sentir  le  ridicule. 

pr.  ».  3-  '  Il   marque  ex;>ress('menl   que   ce    fut   dans   les    Gaules 

u'il  composa  cet  ouvrage.     Mais  il   n'y  mil  la  main  qu'à 
iderenli's  reprises.  C'e.'st  ce   qui    paroit    par    les   préfaces 


l 


I.  ;«.  .-.  3.  n.  :!.     qu'il  a  mises  à  la  lête  de  chaijue  livre.  '  Les  trois  premiers 
furent  achevés  avant  ia  mort  ilu   l'ape  S.  Eleuthere,   que 
l'Auteur  compte   pour   le   douzième   Evêque  de  Rome  ue- 
Tiii.H.  K  t.3.  |i.  puis  les  Apôtres.  On   croit   que  les  deux  autres  livres  ne 
furent  faits  que  sous  le  Ponlilicat  de  S.  Victor  ,    et   peut- 
être  même   les  dernières  années  de   la   vie   de  S.  Irenée. 
iren.  1. 1.  pr.  11.    '  Ils  sout  touR  adre.s.>^és  à  un  ami  intime  du  Saint,  qui  ne  le 
3;pi.ri.'^l.'pr.*|!;  nomme   nulle   part.    Mais   on    ne  peut  presque  pas  douter 
•  *"  que  ce  ne  fût  un  Evêque,   et  un  Evoque  de  mérite.  C'est 

ce  qui   parolt   par   le  portrait  qu'il  nous  en  a  tracé.  Il  lui 
parle  comme  h  une  personiu;  qui  avoit  plus  de  savoir  que 


DOCTEUK  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    331 

lui,    qui  éloit  iui-mètne  capable  de  réfuter  la  doctrine  des    m  sikclk. 
hérétiques,  et  qui  devoit  insti-uire  les  autres,  et  les  garan-  " 

tir  de  l'erreur.  S.  Iren;'e  avoit  un  autre  molif  de  lui  adres- 
ser son  ouvrage  ;  puisque  cet  ami  l'avoit  souvent  pressé  de 
l'entreprendre. 

'  Eiisebe  et  Photius  nous  ont  conservé  en  grec  le  titre  de  kus.i.s.  c.  7.  i>. 
cet   ouvrage,    que  ""  I  interprète   de   saint   Irenee   a  traduit  ^,.  .m. 
ainsi  :  Exposition  et  renversement  de  la  doct  mie  qui  porte  finis-  m.  2.  i.r.  n.i  1  \.i. 
sentent /e?iom  de  science.  ].e\i\l\nii'pùletncove^  ou  contre  les  hé- 
résies, ce  qui  revi(;nt  au  mêine.  Cet  ouvi-age  est  divisé  en  cinq 
livres,  comme  nous  avons  déjà  liit. 

'  L'Auteur  en   l'ait  lui-même  l'analyse  en  peu  de  mots,   ii-  "•  '■  s.  pr. 
Le  premier  livre,  dit-il,  contient  les  sentimens  des  héré- 
tiques ,  leurs  maximes,  et  les  traits  qui  caractérisent  leurs 
personnes.    Dans   le   second   on  trouve  renverséfs  et  réfu- 
tées   leurs    im[)ertinences    et  absurdités ,     après    les    avoir 
dévoilées    et    montréi's    telles    (pi'elles    sont.    Le    troisième 
livre  est  emploie  à  raportcr  les  preuves  de  l'Flcriiure  o|)o- 
sées   aux    rêveries    des   h  rétiques.  '  Dan>    le  quatrième  on  i.+.rr.n.i  1  <•.  ti. 
les  réfute   par   les  propres  paroles  du  Sauveur,  el  dans  le  "''   '■'''■ 
cinquième  par  celles  de  S.   Paul,  expliquant  en  particulier 
quelques  endroits  de  cet  .Apôtre  dont   les  hérétiques  abu- 
sent criminellement.   Donnons  à  cette  anâly.se  un  peu  plus 
d'étendue. 

'Dans  le  premier  livre  S.  Irenée  fait  une  exposition  1.1.  ci-;!, 
exacte  des  foies  imaginations  de  Valentin  et  de  ses  disci- 
ples. 11  leur  opose  ensuite  la  doctrine  de  toutes  les  Eglises 
du  monde ,  qu'il  explique  brièvement ,  et  qu'il  soîiiient 
être  la  même  dans  chacune ,  quoique  ces  Eglises  se  trou- 
vent éloignées  les  unes  des  autres  ,  et  qu'elles  usent  de 
difterentes  langues  :  au  lieu  que  la  doctrine  des  Valenti- 
niens  étoit  diverse  et  changeante,  y  aïant  parmi  eux  pre^-- 
que  autant  de  différentes  opinions ,  qu'd  y  avoit  de  sect.;- 
teurs.  11  met  à  la  fin  une  énumeration  de  tous  les  héréti- 
ques qui  avoient  paru  jusqu'alors,  suivant  l'ordre  des  tems, 
depuis  Simon  le  Magicien,  qu'il  regarde  comme  la  tige 
d'où  sont  sortis  tous  les  autres,  jusqu'à  Tatien  disciple  de 
S.  Justin  Martyr. 

S.   Irenée  emploie   le  second  livre  à  réfuter  par  divers  i-  2  c.  1-35. 
raisonnemens  solides    les   rêveries  et  extravagances  qu'il    a 
détaillées    dans   le    premier.    Il    y  démontre    qu'il    n'y    a 

V  V  ij 


332        S.  IRENEE,  EVEUUE  DE  LYON, 

111  siKr, Li:.  qu'un  seul  Dieu,  qu'il  ne  peut  y  en  avoir  davantage;  que 
ce  Dieu  est  un  Etre  suprême  et  très-simple ,  le  Père  de 
nôtre  Seigneur  Jesus-Christ ,  que  c'est  par  son  Verbe ,  et 
non  par  le  Dieu  de  Marcion ,  ou  par  les  Anges,  que  le 
monde  a  été  créé.  De  là  il  passe  à  prouver  que  l'on  ne 
doit  point  rechercher  avec  curiosité  à  savoir  autre  chose 
de  Dieu  que  ce  que  nous  en  aprenent  les  saintes  Ecritures, 
qui  parlent  de  lui  d'une  manière  claire  et  sans  ambiguité. 
H  donne  ensuite  de  beaux  préceptes  pour  l'intelligence 
de  l'Ecriture  ,  réfute  la  métempsycose ,  et  établit  l'immor- 
talité de  l'ame. 

I.3.C.1-25.  '  Dans   le  troisième  livre  S.  Irenée  prouve  l'unité  d'un 

Dieu  Créateur  du  ciel  et  de  la  terre,  l'unité  et  la  divinité 
de  Jesus-Ghrisl,  son  incarnation  dans  le  sein  d'une  Vierge, 
la  vérité  de  sa  chair  et  de  sa  passion;  qu'il  y  a  un  S.  Esprit 
distingué  du  Père  et  du  Fils ,  qui  nous  a  donné  la  grâce 
et  le  secours  nécessaire  pour  le  salut.  Et  comme  les  héré- 
tiques convaincus  de  l'évidence  de  ces  vérités  par  les  qua- 
tre Evangiles,  se  plaignoient  de  ce  qu'ils  avoient  été  cor- 
*  rompus  ,  et  en  apelloient  à  la  tradition  ,  il  leur  montre 
que  c'est  dans  l'Eglise  Catholique  (jue  se  trouve  cette  tra- 
dition pure  et  sans  mélange  ,  et  que  c'est-là  qu'il  faut  cher- 
cher la  vérité;  étant  impossible  que  toutes  les  Eglises  du 
monde  se  fussent  accordées  pour  changer  la  doctrine  des 
Apôtres.  Aïant  eu  ocasion  de  parler  d'Adam  ,  il  soutint 
contre  Tatien  et  ses  sectaleurs  que  Dieu  lui  avoit  remis  son 
péché,  et  fait  misericoide. 

II.  c.  i-ii.  '11  établit  dans  le  quatrième  livre   l'inspiration  des  Li- 

vres sacrés,  et  emploie  leur  autorité  pour  continuer  à 
prouver  l'unité  d'un  Dieu ,  Auteur  de  l'ancien  et  du  nou- 
veau Testament.  11  montre  que  c'est  le  même  Père,  qui  a 
été  annoncé  dans  l'une  et  1  autre  alliance  ;  que  le  Verbe 
en  se  faisant  voir  aux  anciens  Patriarches  et  aux  Prophè- 
tes, a  fait  connoître  la  divinité  d'un  seul  Dieu  ,  et  que  ce 
seul  Dieu  est  son  père.  11  a  soin  de.raporler  de  tems  en 
tems  les  objections  des  hérétiques  pour  les  réfuter  :  ce  qu'il 
fait  quelquefois  en  se  servant  de  leurs  propres  armes.  Il  y 
montie  en  particulier  que  c'étoit  en  vain  qu'ils  tâchoient 
de  se  servir  des  paroles  de  l'Evangile  pour  apuïer  leur 
mauvaise  cause.  Après  avoir  donné  ses  preuves,  il  dit  qu'il 
n'en  faut  pas  davantage  pour  condamner  les  Juifs,     les 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    333 

Gentils,   les  Marcionites  ,  les  Valentiniens ,    et  toute   sorte    m  sikcli;. 

de  faux  Prophètes ,  d'Hérétiques   et   de   Schismatiques.    11 

finit   en  établissant  la  liberté  de  l'homme ,   et   en  réfutant 

l'opinion  de  ceux  qui  prétendoient  que  les  hommes  étoient 

les  uns  natureliemen);  bons  ,  les  autres  naturellement  mé- 

chans. 

'  Il  emploie  le  cinquième  livre  à  établir  la  Rédemption  i.  s.  c.  i-sg. 
des  hommes  par  Jesus-Christ,  dont  il  prouve  l'incarnation 
et  la  divinité  contre  les  Valentiniens  et  les  Ebionites.  Et 
comme  ceux-là  nioient  la  ri^'surrection  des  corps ,  S.  Ire- 
née  insiste  sur  cette  vérité  qu'il  prouve  par  divers  raison- 
nemens  invincibles.  Il  traite  ensuite  du  jugement  dernier , 
de  l'Antéchrist ,  de  son  nom,  de  son  avènement,  de  son 
règne,  de  sa  tyrannie,  de  l'état  des  âmes  après  la  mort. 
A  cette  ocasion  il  s'étend  beaucoup  sur  le  legne  terrestre 
de  Jesus-Christ  et  de  ses  Elîis,  inventé  par  Papias  chef  des 
Millénaires. 

Les  anciens  ont  fait  beaucoup  de  cas  des  écrits  de  S. 
Irenée.  On  a  déjà  vu  avec  quels  éloges  Terlullien,  S. 
Epiphane,  S.  Jérôme,  S.  Augustin  et  d'autres  en  parlent 
en  louant  sa  personne.  '  Eusebe  relevé  en  particulier  la  vi-  kus.  i.  i.  c  n.  i>. 
gueur  et  la  constance  avec  lesquelles  nôtre  Saint  va  cher-  *'*■ 
cher  les  secrels  les  plus  obscurs  des  hérétiques  dans  les 
antres  et  les  ténèbres  où  ils  se  cachent,  pour  les  décou- 
vrir à  la  lumière  du  jour,  et  pour  que  l'on  ait  de  ces  ser- 
pens  l'horreur  qu'ils  méritent. 

'Le   même   Auteur,  S.  Epiphane,  Theodoret,  S.  Jean  l'i.iij.  7.  p.  i7iv 
de  Damas  et  autres,  ont  beaucoup  lu  l'ouvrage  de  S.  Ire-     "  "  ' 

née,   et   en  ont  tiré  plusieurs  choses  dont  ils  ont  enrichi 
leurs  écrits.  C'est  de-là  que  le  premier  a  lire  le  catalogue 
des  Papes  depuis  les  Apôtres  jusqu'à  S.  Eleuthere  inclusi- 
vement, et  les  preuves  qu'il  donne  de  la  continuation  des 
miracles ,  des   dons  de   prophétie   et  des  langues  que  l'on 
voïoit    encore    dans    l'Eglise    après   le   siècle  des  Apôtres. 
'  C'est  encore  là  qu'il  a  puisé  ce  qu'il  dit  des  quatre  Evan-  «•  «•  i'  '7--  '"•' 
giles  ,  de  l'Apocalypse,  de  l'Antéchrist,  et  touchant  divers 
autres  points  importans.  '  De  même  S.  Epiphane  a  copié  cesn.ui.iMi. 1. 1. 
de  mot  à  mot  une  partie  considérable    du  même   ouvrage  ''" 
de  S.   Irenée. 

'  Dès  le  vivant   même  de  nôtre  saint  Docteur  ses  écrits  tui.  lu.  t..  oi. 
étoient    devenus  si.  célèbres,  que  S.  Clément  d'Alexandrie 


334      S.  IRENEE,  ÊVEQUE  DE  LYON, 

lu  SIECLE,    son  contemporain,  en  eut  connoissance  et  en  fit  usage  pour 
composer  les  siens. 

Il  est  étonnant  de  voir  que  des  S.ivans  aient  été  par- 
tagés sur  la  langue  en  laquelle  les  cinq  livres  contre  les 
hérésies  ont  été  écrits  originairement.  Il  suffisoit  de  lire 
avec  la  moindre  atention  la  version  latine  que  nous  en 
avons  ,  pour  juger  cerlainenient  qu'ils  n'avoicnt  pas  été 
écrits  en  latin.  Ni  le  second*  ni  le  troisième,  nous  pouvons 
même  dire,  ni  le  quatrième  siècle  n'ont  jamais  rien  enfan- 
té de  si  barbare  en  cette  langue.  Que  si  ces  livres  n'ont 
pas  été  écrits  en  latin  ,  il  faut  qu'ils  l'aient  été  en  grec  ; 
puisque  ces  deux  langues  éloient  les  plus  usitées  dans  l'Em- 
pire en  ces  tems-là.  Et  c'est  ce  que  devoit  faire  juger  îe 
grand  usage  que  les  Pères  grecs,  peu  ou  point  du  tout 
acoûti/més  à  citer  les  latins,  ont  fait  de  ces  écrits  aux  IV 
H  V  siècles.  D'ailleurs  ignoroit-on  que  ce  fut  en  cette 
même  langue  que  les  Fidèles  de  Lyon  et  de  Vienne,  du 
nombre  desquels  étoit  alors  S.  Irenée.  que  l'on  croit  mê- 
me avoir  tenu  ia  plume  en  cette  ocasion,  avoient  écrit  les 
actes  de  leurs  premiers  Martyrs  ?  Pourquoi  donc  n'auroit- 
il  pas  emploie  la  même  langue  à  écrire  contre  les  héré- 
sies? On  peut  se  rapeller  ce  que  nous  avons  dit  ailleurs  de 
l'usage  tout  commun  de  la  langue  gréque  dans  les  Gau- 
les en  ces  premiers  siècles ,  surtout  à  Lyon  et  dans  la  Nar- 
bonoise. 

Cependant    malgré   ces   preuves  qui  se  présentent  d'el- 

Fab^bib.  lat.app.  les-mêmcs,  '  Erasme  a  douté  si  S.  Irenée  avoit  écrit  en 
grec  ou  en  latin.  Possevin  et  Feuardent  ont  cru  qu'il  s'é- 
toit    d'abord    servi    de  la  première  de  ces  deux  langues 

vi(i-M;irv.  i.  i.  p.  puis  de  la  seconde  :  ce  qui  revient  h  l'opinion  '  de  M.  Huel, 

*''^*-  qui  semble  avoir  supposé  que  S.  Irenée  est  lui-même  Au- 

teur de  la   traduction   latine  que  nous  avons  de  ses  cinq 
livres.  Mais  tous  les  bons  critiques  sont  aujourd'hui  reve- 

Tiii.  ib.  p.  89.       jjyg  (jg  ggg  erreurs,  '  et  conviennent    que  ce  fut   en    grec" 
qu'écrivit    nôtre    Saint.  En  elTet  il  est  visible  que  le  texte 
grec  de  son  ouvrage  est  un  discours  aussi  naturel,  que  le 
latin  est  une  traduction  barbare  et  forcée. 

Il  ne  nous  reste  plus  de  ces  cinq  livres  en  leur  langue 
originale  que  le  premier,  qui  s'est  trouvé  presque  tout  en- 
tier cité  dans  S.  Epiphane.  Il  se  trouve  aussi  quelques  pe- 
tits fragmens  des  autres    livres  dans  Eusebe,  S.  Basile , 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.      335 

Theodoret,  S.  Jean  de  Damas,  et  dans  les  chaînes  des  an-    m  siècle. 
ciens  Pères  grecs.  *  Quelques  Savans,  que  la  pieté  dont  ils  .  sand.  vet.  «cri. 
faisoient   profession  rendoit  croïables,  avoient  assuré  qu'ils  ecci.  p.  24. 
avoient   vu   dans  la  Bibliothèque  de  la  République  de  Ve- 
nise un  exemplaire  grec   de  l'ouvrage  de   S.  Irenée.  Mais 
lorsqu'eux- mêmes  ou  d'autres  allèrent  l'y  chercher,  il  ne 
s'y  trouva  plus.  D'autres  disent  qu'on  en  a  vu    un   autre 
exemplaire    grec   dans    la    Bibliothèque  du  Vatican  :  mais 
on  ne  doit  plus  y  compter  après  toutes  les  recherches  que 
le  dernier  Editeur  de  S.  Irenée  a  fait  faire  dans  cette  Bi- 
bliothèque pour  recouvrer  ce  précieux  monument. 

'  Quant  à  la  traduction  latine  que  nous  en  avons  .  Jean  cesn.  iwd. 
Cornaro  reconnoît    qu'elle   est    fort   défectueuse,  et  assure 
que  l'on  auroit  pu  plus  aisf'ment  la  corriger  sur  le  texte  de 
S.  Epiphane,  qu'elle  n'auroit    pu   servir  elle-même  à  en- 
tendre   le    texte    grec    de  ce   Père.'   Quelques   Savans    la  iren.djss.a.n. 531 
croient   plus   ancienne  que  Tertullien;  mais  la  plupart  la  Mtrv.îbîa!  '  ^^'' 
jugent    plus     récente ,     quoiqu'ils     prétendent    qu'elle  ait 
néanmoins    précédé    la   fin    du   IV   siècle.  Quelques-uns , 
comme  Dodwel  qui  a  fait  une  dissertation  sur  ce  point  de 
critique  ,    en    fixent    l'époque  à  l'an  385  ,  à  l'ocasion  des 
Priscillianistes.  Si  c'est  là  faire  honneur  à  cette  traduction, 
ce  n'est  pas  assurément  en  faire  beaucoup  au  siècle  où  on 
la  place.  ^  _  ,   „„,  .,iiT 

En  effet,  au'il  nous   soit  permis  de  demander  que  l'on 
produise   quelque    pièce  latine  de  ce  siècle,  ou  même  du 
suivant,  écrite  en  un  langage  aussi  corrompu  que  l'est  cet- 
te  traduction.    Sans   parler    de    la  construction  grammati- 
cale et  de  l'arrangement   des    termes ,   dans   quels  monu- 
mens    de    ces    tems-là  trouvera-t-on  des  mots  aussi  barba- 
res'que  ceux-ci  et  autres  semblables  qui  se  lisent  en  une  iren.  1.1.  pr.  n.  .. 
infinité  d'endroits  de  cet  ouvrage  :  Sr;adenter,  blasphematio ,  *.!|'|/;2"pr.'n'. 'i 
qxiatematio,  mysterinlitei\  impudorate  ^prœconare  ,perexivi-  '  *]|"|*3  'c'  ??' 
mus,  adfationes,  postremitas,  fiens,  efficabde,  incapabilis  ?  n.'  s. 
il  n'est  presque  point  de  page  de  cette  traduction  ,  qui  ne 
pût  fournir   de    semblables  façons  de  s'énoncer.  Que  con- 
clure  de-là  ?    Sinon    qu'elle  n'aura  été  faite  qu'après  que 
la  barbarie  eut  pris  la  place  de  la  bonne  latinité  ,  c'est-à- 
dire   au  VI  siècle,  et  tout  au  plutôt  avant  la  fin  du  Pon- 
tificat   de    S.    Grégoire  le  grand.  '  Peut-être  la  demande  Gr.  m.  i.  ii.ep. 
que  fît  à  ce  Pape  Ethere  de  Lyon,  en  le  priant  de  lui  com-  **■ 


336     S.  IRENEE,  EVEQUE  DE  LYON,  ' 

m  SIECLE,    muniquer  les  écrits  de  S.  Irenée,  et  la  réponse  de  S.  Gre- 

"        goire    qui    l'assura    qu'il   n'avoit   encore    pu  les  déterrer  , 

quoiqu'il    les   eut    cherchés,    firent-elles  naître  le  désir  de 

les    rechercher  avec   un   nouveau  soin,  et  l'ocasion  de  les 

traduire  en  latin.  (XXIX.)    . 

iroii. ,iis«.  2  n.M.  'On  8  beau  dire  en  faveur  de  l'ancienneté  de  cette 
version  ,  qu'elle  se  trouve  citée  dans  ïerlullien,  S.  Cy- 
prien  et  S.  Augustin  :  cette  raison  ne  peut  tenir  contre 
celles  que  nous  venons  de  donner.  11  est  vrai  que  ces  trois 
Pères  latins  citent  quelques  endroils  de  S.  Irenée  ;  mais 
outre  qu'il  ne  les  citent  pas  dans  les  mêmes  termes  qui  se 
lisent  dans  la  traduction  latine,  le  Traducteur  n'aura-t-il 
pas  pu  profiter  de  ce  qu'il  en  aura  trouvé  de  traduit  dans 
ces  Pères?  De-lù  la  conformité  qui  se  trouve  entre  ces 
endroits  cités  et  la  traduction. 

Il  ne  serviroit  de  rien  d'alléguer  l'ignorance  de  S.  Cy- 
prien  et  de  S.  Augustin  ,  dans  la  langue  gréque,  pour 
donner  à  entendre  qu'il  faut  qu'ils  aient  eu  une  ver- 
sion latine  pour  citer  ce  qu'ils  citent  de  S.  Irenée.  Car 
s'ils  ne  savoient  pas  açsez  de  grec  pour  cela,  n'onl-ils  pas 
pu  s'adresser  à  des  personnes  qui  le  savoient ,  comme  cela 
s'est  toujours  pratiqué,  et  se  pratique  encore  aujourd'hui 
entre  les  Savans  par  raport  aux  langues  étrangères  ? 

Tiii.  iind.  p.  77.  '  Il  a  semblé  à  un  très-habile  homme,  que  l'ouvrage  de 
S.  Irenée  aroit  été  aussi  traduit  en  Syriaque.  Il  établit  cette 
opinion  sur  ce  que,  dans  un  discours  sur  la  vertu,  atribué  à 
Ephrem,  il  en  est  raporté  un  assez  long  endroit,  et  que  la 
langue  syriaque  est  la  seule  qu'entendit  S.  Ephrem.  Mais 
la  remarque  que  nous  venons  de  faire  sur  un  sujet  presque 
semblable  k  l'égard  de  S.  Cyprien  et  de  S.  Augustin ,  dé- 

';,■  truit  les  preuves  qu'on  donne  de  cette  opinion. 

I  '    __  Au  reste  quelque  barbare  et  défectueuse  que  soit  la  ver- 

.«»  ■■)  sion  latine  des  cmq  Livres  de  S.  Irenée,  elle  ne  laisse  pas 

d'être  un  monument  très-précieux  pouf  l'Eglise.  Il  es^ 
néanmoins  vrai  qu'elle  nous  fera  toi!ijours  regreter  la  per- 
te que  nous  avons  faite  du  texte  original  des  quatre  der- 
niers Livres  et  de  quelques  chapitres  du  premier.  Si  l'on 
trouve  tant  de  beautés  dans  cette  version,  par  raport  à  la 
force    du   raisonnement,  la  justesse  des  comparaisons,  l'é- 

"*"  "  levation  d'esprit,  le  choix  des  pensées,  que  seroit-ce  si  nous 

pouvions  lire  cet  ouvrage  en  sa  langue  originale?  Nous  y 

trouverions 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    337 

trouverions  sans  doute  autant  '  d'éloquence  qu'y  en  trouve   m  siècle. 

S.  Jérôme.  •  Hier.  ep.  53.  p. 

••  Les  critiques  ne  laissent  pas  de  juger  du  style  de  nôtre  ssi. 
Saint  par  le  peu  qui  nous  reste  de  son  texte  grec.    Ils  le  p."^^"' ®'''' *"  '• 
trouvent  serré,  net  et  plein  de  force,  mais  peu  élevé.  Aussi 
sa  matière  ne  demandoit  point  d'élévation  dans  le  style  ; 
et  d'ailleurs  ce  n'éloit  pas  le  génie  des  Auteurs  ecclésiasti- 
ques en  ces  siècles  de  simplicité.  'S.  Irenée  assure  lui-mê-  iren. i.i.pr. n.3. 
me  qu'il  a  traité  son  sujet  sans  art,  et  sans  y  rechercher  au- 
tre chose   qu'à  faire   connoître   la   vérité  telle   qu'elle  est. 
Que  pour  la  beauté  du  style,  il  ne  s'en  est  pas  mis  beau- 
coup en  peine,  se  servant  d'une  langue  vulgaire,  qui  n'é- 
toit  pas  dans  toute  sa  pureté   dans  les  Gaules  où  il  écri- 
voit.    En  effet  les  Gaulois,  comme  nous  avons  dit  ailleurs, 
parlant  la  langue  Gauloise,  et  la   latine  avec  la  gréque, 
pouvoient   avoir    corrompu    considérablement   celle-ci.    En 
général  on  peut  dire  '  après  Erasme  que  les  écrits  de  S.  Ire-  cesn.ibid.  p.  «e. 
née  respirent  cette  ancienne  vigueur  de  l'Evangile,  et  que  ^■ 
son   style  marque   un  cœur  tout  préparé  au  martyre.  Ils 
sont  particulièrement   précieux,  en    ce    qu'ils   contiennent 
beaucoup  de  traditions  que  le  Saint  avoit  aprises  de  S.  Po- 
lycarpe,  et    des    autres    hommes    Apostoliques,  aussi-bien 
que  de  leurs  disciples. 

Entre  les  Auteurs  ecclésiastiques  qu'y  cite  S.  Irenée,  on 
remarque  Ilermas ,  S.  Clément  Pape ,  S.  Ignace  Martyr  , 
S.  Polycarpe,  Papias,  S.  Justin  Martyr,  Joseph,  quelques 
Anonymes  disciples  des  Hommes  Apostoliques,  et  entre 
les  hérétiques ,  Ptolemée  Valentinien ,  et  divers  Anony- 
mes. Entre  les  profanes  il  cite  Homère ,  Hésiode ,  Pinda- 
re,  Platon,  Sophocle,  Menandre,  Antiphane. 

§.  m.  r„ 

SES  ECRITS  PERDUS. 

OUTRE  les  cinq  Livres  contre  les  hérésies,  dont  nous 
venons  de  parler,  S.  Irenée  en  composa  plusieurs  au- 
tres. Mais  par  un  malheur  que  nous  ne  saurions  assez  dé- 
plorer, il  ne  nous  en  reste  ou  que  de  très-petits  fragmens, 
ou  même  que  les  simples  titres. 

1°.  '11  écrivit  contre  Florin  un  traité  De  la  Monarchie,  Eus.  1. 5.  c.  20.  p. 
Tome  I.     Prem.  Part.  X   x  35.  '      ' 


338       S.   IRENEE,    EVEQIJE   DE  LYON, 

m  SIECLE,    c'est-à-dire  d'un  seul  principe,  pour  montrer  que  Dieu  n'est 
'  ]       point  autour   du  mal.   '  De-là   on  pouroit   conjecturer,  dit 

^  s.  no .  p.  .  .  jyjr  Valois,  que  Florin  admettoit  deux  principes,  l'un  au- 
teur du  bien,  l'autre  auleur  di;  mal,  suivant  les  erreurs  de 
iren.diss. 2.ii.;.8.  Marciou  et  de  Cerdon.  'Mais  ii  pnroit  par  les  paroles  de 
S.  Irenne  même,  que  l'erreur  de  Florin  étoit  encore  plus 
grave  ;  puisqu'il  lui  dit  qu'aucun  autre  hérétique  n'auroit 
osé  l'avancer. 
Eus.  I.  s  r.  20.  p.       'Nous   avops  daus  Eusebe  un  précieux  fragment  de  ce 

I  UT       -1  fis 

traité ,  ou  letre ,  comme  la  nomment  quelques  ancie/is , 
d'où  nous  aprenons  plusieurs  circonstances  remarquables 
de  la  vie  de  S.  Irenée,  de  S.  Polycarpe,  et  de  Florin  mê- 
me. Celui-ci  étant  encore  jeune,  se  trouvoit  dans  l'Asie 
mineure  à  la  suite  de  qi:f;lque  (Hu(;ier  de  l'Ëtnpire,  à  (jui  il 
faisoit  sa  cour  en  bon  politique.  Frappé  de  la  grande  ré- 
putation de  S.  Polycarpe,  (jui  vivoit  encore.  Florin  se  ren- 
dit son  disci[)le.  Ce  fui  une  ocasion  à  S.  Irenee,  qui  l'éloit 
aussi,  de  ronnoitre  Florin.  Dans  la  suite  étant  obligé  d'é- 
crire contre  lui,  il  sut  faire  usage  de  cette  circonstance,  et 
lui  reproclier  la  nouveauté  de  ses  sentimens,  bien  difFc^rens 
de  la  saine  doctrine  qu'ils  avoient  puisée  l'un  et  l'autre  au- 
près dç  cet  homme  Apostolique.  11  ne  craint  pas  de  lui 
dire,  que  si  ce  grand  homme  l'avoit  entendu  avancer  des 
erreurs  aussi  étonnantes,  il  se  seroit  écrié,  comme  il  avoil 
coutume  de  faire  en  semblables  rencontres  :  «  0  mon 
Dieu  !  à  quels  (ems  m'avez-vous  re-^ervé  ,  pour  voir  des 
choses  aussi  affligeantes  ?  »  et  se  seroil  enfui  en  faisant  cette 

c.  ir,.  p.  HR.  exclamation.  '  Depuis  Florin  entra  dans  le  Clergé,  et  fut 
fait  Prêtre  de  l'Eglise  de  Rome.  Mais  l'obstination  dans 
ses  erreurs  le  fit  déposer  du  Sacerdoce.  On  ne  dit  point 
quelle  impression  fit  sur  lui  ce  premier  écrit  de  S.  Irenée. 

c.  80.  p.  187.  2°.  '  Seulement  on  sait  qu'il  embrassa  ensuit  •  l'hérésie  de 

Valentin.  S.  Irenée  qui  avoit  son  salut  à  cœur  ne  se  rebu- 
ta point  et  le  suivit  dans  ses  écarts.  11  reprit  la  plume  con-  • 
tre  lui,  et  lui  adressa  un  traité  De  rOgrloade,  ou  nombre  de 

iron.  ijjiii.  huit  ;  '  c'est-à-dire   des  huit  premiers  Eons  de   Valentin , 

3u'il  ataquoit  comme  la  base  et  le  fond<ment  de  son  ri- 
icule  système.  On  croit  que  ce  traité  étoit  comme  le  pré- 
cis du  gr;md  ouvrage  contre  les  hérésies,  auquel  S.  Irenée 
travailloit  peut-être  dè.s-lors,  ou  auquel  il  mit  bien-tôt 
après  la  main. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    339 

^  Dans  ce  second  écrit  contre  Florin,  le  Saint  marquoit  m  sieclk. 
qu'il  avoit  touché  à  la  première  succession  des  Apôtres.  ."iiTs.Tbld.  1  hiit. 
Éusebe  et  S.  Jérôme  nous  en  ont  conservé  la  fin,  qui  con-  ■'>''*• 
lient  cette  célèbre  et  instante  prière  que  l'Auteur  faisoit 
pour  reveiller  l'exactitude  de  ses  copistes.  Il  les  conjure  par 
J.-C.  et  son  avènement  glorieux,  d'avoir  un  soin  extrême 
de  copier  exactement  son  écrit,  de  collationner  leur  copie 
à  l'original,  et  d'y  ajouter  la  même  prière,  afin  que  les  au- 
tres copistes  en  usas;-enl  de  même  dans  la  suite,  et  que  l'é- 
crit pût  passer  dans  sa  pureté  aux  siècles  à  venir.  C'est  le 
même  motif  qui  a  porté  Eus<'be  à  nous  conserver  cette 
prière.  Il  déclare  lui-même  qu'en  nous  remettant  ainsi 
sous  les  yeux  la  conduite  de  ces  grands  hommes  de  l'anti- 
quité, qui  passent  sans  contradiction  pour  les  plus  saints 
personnagts  de  l'Llglise,  il  a  dessein  de  nous  laisser  l'illu- 
stre exemple  d'une  exactitude  scrupuleuse  à  copier  les  Li- 
vres des  anciens. 

'  Il  a   été  lui-même  des  premiers  (|ui  l'ont  imité,  aïant  Eus.  ciu.  pr.  3. 
mis  à  la  tête  de  sa  chronique  la  même  prière  pour  ses  co- 
pistes, que  S.  Irenée  pour  les  siens,  telle  que  nous  la  ve- 
nons de  voir.  'C'est  aussi  ce  que  quantité  d'autres  anciens  Hior.  iWii.  not.  p. 
Ecrivains  ecclésiastiques  ont  imité;  et  M"^  Eabricius  et  Li-  '*" 
lienlhal    nous   ont   donné   plusii'urs   de   leurs   formules   de 
priires,  l'un  au  ;>*  tome  de  sii  Bibliothèque  gréque,    l'au-       •  ,1  i»  ■.«.-» 
tre    dans    un    traité  de   l'Iùorcisme   lileraire,    imprimé   en 
1713. 

3*.  '  S.    Irenée   écrivit  encore  contre  Blaste ,  autre  Pre-  k»»-  '  &   c.  15. 
tre  de  Rome,  dépos^^  comme  Florin.   Blaste  étoit  un  Grec  iVe/ibid.  n.'ssl  1 
Asiatique  ,   qui   vouloit   ramener  le  .Judaïsme,   et  s'atachoit  "'"^f'"  «-^s 
à   c  lebrer  la   Pàque    le  H""  jour   de  la  première  lune.   II 
troubloit   par-là   l'Eglise,    et  y  causoit  des  divisions  perni- 
cieuses.  S.    Irenée  lui   adressa  un  traité  Du  Schisme.  On 
croit  que  cet  écrit  fut  composé  sur  la  fin  du  Pontificat  de 
S.   Eleuthere. 

4*.  '  A  l'ocasion  des  disputes  qui  s'élevèrent  dans  l'Egli-  *^°*-,^-,^3  •=•  '-^ 
se  sous  le  Pane  S.  Victor ,  Ifmchant  le  jour  auquel  on  de-  "*' 
voit  cf'lebrer  le  mystère  de  la  résurrection  du  Sauveur,  ce 
Pontife  aïant  voulu  pour  ce  sujet  séparer  de  sa  commu- 
nion ceux  qui  faisoient  celte  fêlt;  le  14*^  de  la  lune,  S.  Ire- 
née lui  adressa  une  letre  au  nom  des  Fidèles  qu'il  gouvei^ 
noit  dans  les  Gaules,  pour  le  porter  à  avoir  des  sentimens 

X  X  ij 


340    S.  IRENEE,  EYEQUE  DE  LYON, 

m  SIECLE,  plus  conformes  à  la  paix.  Cette  letre  étoit  comme  le  ré- 
sultat  du  Concile  que  nôtre  Saint  assembla  sur  ce  différend, 
et  dont  nous  avons  donné  l'histoire  ailleurs.  Eusebe  nous 
a  conservé  un  fragment  considérable  de  cette  letre,  digne 
en  toute  manière  de  celui  qui  l'avoit  écrite.  Elle  nous 
aprend  divers  traits  précieux  d'histoire  et  de  discipline, 
socr.  1. 5.  c.  22.  '  Socrate  la  regarde  comme  pleine  de  force  et  de  vigueur, 
•*■  ***•  et  dit  que  S.  Irenée  ne  faisoit  pas  difficulté  d'y  blâmer  la 

trop    grande    chaleur    que    fit    paroître    Victor   en    cette 
ocasion. 
Hier.ibid.  i  piiot.       'S.  Jcrôme  et  Photius  comptent  plusieurs  letres  de  nôtre 
c.  120.  p.  301.      gg^in^  Q^  même  Pape  sur  le  même  sujet.  Le  premier  de  ces 
deux  Ecrivains  témoigne   qu'elles  existoient  encore  de  son 
Eus.  ibid  p.  19*.  tems.  '  Euscbe  en  reconnoît  encore  d'autres  de  S.  Irenée  à 
ireo.  ibij.  n.  60|  divcrs  Evêqucs  sur  la  même  affaire.  '  On  croit  que  c'est  de 
Tiii.H.E.t.3.  p.  quelqu'une  de  ces  letres  que  l'Auteur  des  questions  et  des 
réponses  aux  Orthodoxes  parmi   les  œuvres  de  S.  Justin, 
parle  sous  le  nom  de  S.  Irenée,  de  la  coutume  qu'avoient 
reçu  les   Chrétiens  dès  le  tems  des  Apôtres ,    comme   le 
saint  Docteur  le  remarguoit,  de  ne  se  mettre  point  à  ge- 
noux ni  le  Dimanche,  ni  les  50  jours  du  tems  pascal,  pour 
marque  de  la  joie  que  doit  nous  inspirer  la  grâce  de  la  ré- 
surrection du  Sauveur. 
Eus.  c.  16.  p.  m.       5".  '  Eusebe  nous  aprend  encore  que  S.  Irenée  avoit  com- 
posé un  ouvrage  très-court  à  la  vérité,  mais  très-nécessai- 
re contre  les  Grecs,  ou  les  Gentils,  selon  d'autres.  11  avoit 
pour  titre  De  la  Science ,  et  subsistoit  encore  du  tems  d'Eu- 
Hiar,  ibid.  sebc.  '  Il  Semble  que  saint  Jérôme  ait  divisé  ce  titre , .  et 

-     ■ "'    d'un  seul  écrit  en  ait  fait  deux,  qu'il  nomme,  VunContre 

les  Gentils,  l'autre  De  la  Discipline. 
Eus.  ibid.  I  Hier.       6".  '  Mais  ce  Pcrc  et  Eusebe  s'acordent  en  nous  aprenant 
''"'*•  que  S.  Irenée  avoit  fait   un  autre  ouvrage  dédié  à  Mar- 

cien,  que  le  Saint  qualifioit  son  frère.  Cet  écrit  étoit  pour 
faire  connoître  quelle  avoit  été  la  prédication  des  Apô^ 
Hier.  ibid.  not,  p.  tres.  '  Quclqucs  Savans  ont  crû  mal  à  propos  que  cet  ou- 
vrage étoit  contre  Marcion,  trompés  a'une  part  par  la 
presque  ressemblance  des  noms  ae  Marcion  et  de  Mar- 
cien,  et  apuïés  de  l'autre  sur  ce  que  saint  Irenée  avoit 
promis  d'écrire  contre  Marcion.  " 

?•.  Eusebe  donne  aussi  à  nôtre  Saint  un  Recueil  de  diver- 
ses disputes,  AiaX^Çewv  5ia(popwv  dans  lequel  l'Auteur   faisoit 


105 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    341 

mention   de  l'Epîlre  aux  Hébreux,  de  la  Sagesse  de  Salo-     m  siècle. 
mon,  et  en  citoil  quelques  endroits.  *  S.  Jérôme  entend  par  a;iier.  ibid.  c.  s:;, 
cet  ouvrage  un  recueil  de  divers  traités,  et  Kufm  des  dia-  Eus.  not.  p.  loi. 
logues,  ce  qui    plaît  davantage.  *• 

8°.  'S.  Irenée  avoit  promis,  comme  l'on  vient  de  voir,  irou.i.  i.c. 27.11. 
d'écrire  en  particulier  contre  Marcion,  et  de  le  réfuter  par  *!  na'.'"^"' ^' 
des  raisonnemens  tirés  de  ses  propres  écrits.  On  ne  doit 
pas  douter  que  le  saint  Docteur  n'ait  exécuté  ce  dessein 
projeté  et  digne  de  son  zélé.  Eusebe  eri  effet  le  met  au 
nombre  de  ceux  qui  ont  fait  des  ouvrages  considérables 
contre  cet  hérésiarque. 

9°.  '  On  conjecture  avec  fondement  de  ce  que  dit  saint  iren.diss.a.  n.4i. 
Irenée  au  chapitre  7*  de  son  troisième  Livre  contre  les 
hérésies,  touchant  la  figure  hyperbate  emploiée  souvent 
par  saint  Paul,  qu'il  avoit  écrit  quelque  traité  particulier 
sur  ce  sujet.  Il  assure  effectivement  qu'il  avoit  montré  ail- 
leurs fort  au  long,  que  cette  figure  étoit  très-familiere  à 
saint  Paul.  Or  comme  il  n'en  parle  en  nul  autre  endroit 
de  ces  Livres  contre  les  hérésies,  on  est  fondé  à  croire 
qu'il  en  aura  fait  quelque  traité  particulier. 

10". 'S.  Maxime  Abbé  et  Confesseur  cite  de  saint  Jre-  '"'''^s- P-^^- 
née  Evéque  de  Lyon  des  discours  sur  la  foi,  adressés  à 
Demetre  Diacre  de  Vienne,  et  en  raporte  le  commence- 
ment et  un  autre  endroit.  C'est  tout  ce  qui  nous  en  reste. 
'  Car  pour  le  fragment  latin  d'un  autre  discours  au  même  J'»'-  >i>»ii- 
Demetre  raporté  par  Feuardent,  les  Savans  le  regardent 
comme  fort  suspect. 

11°.  Nous  avons  parlé  ailleurs  assez  au  long  de  la  belle 
letre  des  Eghses  de  Lyon  et  de  Vienne  sur  les  souffrances 
de  leurs  premiers  Martyrs.  '  De  très-habiles  gens  sont  per-  Tiii.  iwa.  p.  s», 
suadés  que  saint  Irenée  en  fut  l'Auteur.  Il  est  même  dif- 
ficile, disent-ils,  qu'un  autre  que  lui  ait  pu  faire  une  pie- 
ce  aussi  digne  de  sa  piété,  de  son  esprit  et  de  sa  science. 
'  Aussi  l'on  assure  qu'elle  est  citée  sous  son  nom  dans  le  "Wd.  1  ircn.ihid.n. 
commentaire  d'Oecumenius  sur  la  première  Epîlre  de  saint  ^' 
Pierre. 

'Si  l'on  s'en  raportoit  à  ce  qu'on  lit  dans  la  chronique  Hier.  chr.  1.2.  p. 
de  saint  Jérôme,  et  dans  l'éloge  qu'il  a  fait  de  saint  Jean  p'^^gn/"''"  '**■ 
l'Evangeliste,   on   croiroit  que  saint  Irenée  auroit  composé 
un    commentaire    sur    l'Apocalypse.     On    ne    sauroit    dire 
comment  cette  faute  a  pu  se  glisser  dans  les  deux  endroits 
2  7 


342         S.  IRENEK,  EVEQUE  DE  LYON, 


III  SIECLE. 


Ircn.l.4.c.4! 
4. 


marqués  de  cet  Ecrivain.  Mais  il  nous  suffit  de  savoir  que 
ce  qu'on  y  lit  à  ce  sujet,  est  une  faute.  Que  c'en  soit  une, 
cela  est  évident.  Car  outre  que  ni  Eusebe ,  ni  saint  Jérôme 
même   en   donnant  le  catalogue  des  écrits  de  notre  Saint , 

Eus.  chr.  p.  80.  nc  foiit  nullc  meuliou  de  ce  prétendu  commentaire  ,  '  le 
texte  giec  de  la  chronique  d'Eusehe  corrige  l'endroit  de 
celle  de  saint  Jérôme,  qui  n'en  est,  comme  l'on  sait,  qu'u- 

Hitr.  chr.  ii)id.  ne  traduction  paraphrasée.  '  Celle  de  ce  dernier  porte , 
que  saint  Jean  relégué  dans  l'isle  de  Patmos,  reçut  la  Ré- 
vélation  ou  Apocalypse  que  saint  Irenée  interpréta  depuis. 

Eus.  ibiu.  '  Au  lieu  de  ces  dernières  paroles  on  lit  dans  le  texte  ori- 

ginal d'Eusebe  ,  w?  â'Yioç  6  EipTivaîoç  (pTiffi  comme  le  témoigne 
saint  Irenée. 
(i)  De  même  ceux  (i)  qui  prétendent  que  sain!  Irenée  avoit 
formé  le  dessein  de  composer  un  commentaire  sur  l'Evan- 
gile et  les  Epîtres  de  saint  Paul,  n'ont  pas  mieux  rencontré 
que  les  auteurs  de  la  faute  que  nous  venons  de  relever. 
J/endroit  où  ils  croient  avoir  trouvé  des  vestiges  de  ce 
dessein  ,  digne  d'ailleurs  de  l'éruditinn  et  du  zélé  de  saint 
Irenée,  '  est  la  lin  de  son  4"  livre.  Le  Saint  y  dit  à  la  vé- 
rité qu'après  avoir  réfuté  les  hérétiques  par  les  paroles  du 
Sau -eur,  il  va  entreprendre  de  les  combalre  par  celles  de 
saint  Paul,  en  expliquant  sa  doctrine,  et  montrant  qu'ils 
ne  l'enlendoient  pas,  quoiqu'ils  l'ojmsassent  aux  Catholi- 
ques. (Ju'il  y  joiiMJroit  les  paroles  les  plus  précises  et  les 
j)lus  claires  de  J.-C.  .sans  y  emploïer  ses  f)araboles.  Qu'il 
rci^ervoit  tout  cela  pour  un  autre  Livre.  Mais  il  s'agit  du 
Livre  suivant ,  qui  e<t  le  cinquii'-me  de  son  ouvrage ,  et 
non  de  quelque  commentaire  particulier.  C'est  de  quoi 
l'on  conviendra  sans  peine  ,  pour  peu  d'atention  que 
l'on  aporle  à  lire  cet  endroit  des  écrits  de  nôtre  saint 
Docteur. 

Phoi. c.  48. p.  3G.  '  l'holius  témoigne  que  quelques-uns  atribuoient  en- 
core à  saint  Irenée  un  Livre  infilulé  fk'  lavattrre  de  Vlhn- 
vers,  ou  suiatanre  du  monde.  Mais  il  a,->>uie  en  même  lems 
que  cet  ouvrage  éloit  plutôt  de  Caius  Prcire  de  Rome, 
disciple  de  saii>t  Irenée. 

Avant   que   de    linir   ce  qui  regarde  les  écrits  de  nôtre 

ircn.  pi.  p.  KH.    Saint ,    il   est   bon   d'avertir ,  '  qu'il   contribua   autant   que 

(1)    Remarques   sur  la   Bibliolliuquo  des  Auinurs  ecclésiastiiiue»  ilo  Mr.  Dupin,  to.  i, 
page  15i. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.     343 

tout  autre  à  conserver  à  la  postérité  l'hisloire  du  martyre  m  siècle. 
de  saint  Polycarpe.  Peut-être  même  lui  sommes-nous  re- 
devablcs  de  ce  qu'elle  est  venue  jusqu'à  nous.  Car  il  prit 
soin  lie  faire  lui-même  une  copie  de  la  letre  de  l'Eglise  de 
Smyrne ,  où  ce  martyre  étoit  décrit  ;  et  sa  copie  se  multi- 
plia ensuite  par  le  moien  de  Caïus  l'un  de  s^  disciples,  qui 
la  transcrivit ,  et  après  celui-ci  Socrate  de  Corinthe. 

$■  IV. 
Divers  points  particuliers  de  sa  Doctrine. 

Nous  avons  déjà  touchf'  plusieurs  points  importans 
de  la  doctrine  de  S.  Irenée ,  dans  l'analyse  que  nous 
avons  faite  de  ses  cinq  livres  contre  les  hrrésies;  outre 
ceux-là  il  s'y  en  trouve  encore  d'autres  dignes  de  remar- 
que. 

On  y  voit  des  vestiges  de  la  confession  des  péchés  ca-  iren.i.i.  c.  13.  n. 
elles  et  secrets  comme  ..es  autres.  Car  en  parlant  des  fem-  ''' 
mes  que  Marc  avoit  séduites ,  S.   Ironce  dit  qu'étant  reve- 
nues à  l'Eglise  ,  elles  confcssoient  et  les  pèches  de  la  chair 
qu'elles  avoient   commis  avec  lui ,  et   l'excès   de   l'amour 
impur  qu  elles  lui  portoicnt. 

'On  y  trouve   l'exemple   d'une  pénitence  prolongée  jus-  ibiti. 
qu'à  la  mort ,  en  la  personne  d'une  femme  d'un  Diacre  de 
Lyon ,   laquelle  avoit  eu  le  malheur  de  se  laisser  corrom- 
pre par  le  même  imposteur. 

'S.  Irenée  s'apuïant  sur  ce  que  les  Juifs  répondirent  à  1.2.  c. 22.  n.  s.  g. 
J.-C.  qu'il  n'avoit  pas  encore  cinquante  ans ,  soutient 
contre  les  Valent! niens ,  qui  prétendoient  qu'il  n'avoit 
prêché  qu'un  an,  et  qu'il  étoit  mort  à  trente  ans  acomplis, 
qu'il  avoit  vécu  au-delà  de  quarante.  Et  il  ajoute  que 
c'étoit  le  sentiment  de  S.  Jean  l'Evangeliste ,  des  autres 
Apôtres  et  de  leurs  disciples. 

Il  dit  que  S.  Matthieu  écrivit  son  Evangile  en  hébreu,  1. 3.  c.  i.  n.  i. 
lorsque  S.  Pierre  et  S.  Paul  fondoient  l'Eglise  de  Rome  , 
en  y  prêchant  la  foi  de  Jesus-Christ.  '  Il  établit  comme  c.  t.  n.  1. 
un  pnncipe  incontestable ,  que  c'est  dans  l'Eglise  seule 
que  se  trouve  la  vérité ,  et  que  c'est  là  que  les  Apôtres  ont 
mis  comme  dans  un  riche  thrésor  tout  ce  qui  concerne 
cette  vérité  immuable. 


344  S.  IRENEE,  EVEQUE  DE  LYON, 

iiisiRCLE.        *  Il  assure  que  de  son  tems  il  y  avoit  parmi  les  nations 
>îrM~\    i  n  •»    barbares  des  Eglises  qui  se  conservoient  dans  la  pureté  de 
"la  foi  qu'elles  avoient  reçue  des  Apôtres ,  sans  avoir  nulle 
1.1.  c.  10. 11.2.    écriture.  '11  fait  mention  des  Eglises  de  Germanie  et  d'Es- 
pagne. 

I.  i.  c.  2.  n.  7.         'Il  établit  clairement  le  péché  originel  et  ses  suites  ,  en 

disant  que  les  hommes  ne  sont  guéris  de  l'ancienne  plaïe 

du   serpent ,   qu'en  croiant   en   celui   qui ,   aïant  été  élevé 

de  la  terre  sur  le  bois  de  la  Croix,  selon  la  ressemblance 

de  la  chair  du  péché,   a  atiré  tout  à  lui,  et  donné  la  vie  à 

AuK.in.  Jui.  1.  1.  tous  le.s  morts.  '  C'est  un  des  endroits  de  ce  Père  que  S. 

"■  *■  Augustin  cite  contre  Julien  disciple  de  Pelage,  pour  prou- 

ireii.  1.  3.  c.  20.  ver  le  péché  originel.  'En  un  autre  endroit  S.  Irenée  re- 

"•  ^-  connoît  que   le   bien  qui  nous  conduit   au  salut  vient  de 

Dieu  et  non  pas  de  nous-mêmes. 
Tiii.ii.  li.s.c.p.       'Ceux  qui  ont  étudié  la  matière  avec  plus  de  soin,  sou- 
tiennent que   hors   le  terme  de  consubstantiel ,  qui  n'étoit 
pas  encore  en  usage,  aucun  des  Ecrivains  qui  ont  défendu 
la  foi  de  Nicée ,   sans  en  excepter  S.  Athanase ,    n'a  parlé 
du  Verbe  d'une  manière  plus  digne  de  lui ,  que  S,  Irenée. 
De  même  aucun  des  anciens  Pères  n'a  établi  ni  plus   soli- 
dement  ni  plus  clairement   les   autres  grands  mystères  de 
nôtre  Religion,   comme   ceux   de  la  Trinité,  de  l'Incarna- 
htn.i.4.c.'.7.n.  tiou,  '  ct  nommément  celui  de   l'Eucharistie.  Il  insiste  en 
y.'il.a^.  lYs^cU;  plusieurs   endroits   sur  celui-ci,   comme   contenant   réelle- 

II.  2.  i!         ""  ment  le  corps  et  le  sang  de  Jesus-Christ.    C'est  ce  qu'il 

prouve  tant  par  les  paroles  du  Sauveur,  que  par  les  pré- 
parations et  dispositions  qu'exige  ce  sacrifice ,  et  par  les 
effets  qu'il  produit. 

A  ces  traits  plus  importans  de  la  doctrine  de  S.  Irenée, 
I.  5.(. 31.  n.i'.     nous   en   pouvons  ajouter  d'autres  qui  le  sont  moins.  '  Il 
I.  5.  c.  a:5.  n.  a.  excuse  l'inceste  des  filles  de  Lot  sur  leur  simplicité.  '  Il  a 
cru   qu'Adam  et  )'>e  étoient  tombés  dans  la   désobéissance 
à  pareil  jour  qu'ils  avoient  été  créés;    que  ce  jour  étoit  le 
sixième  de  la  semaine,  et  que  Jésus-Christ  est  mort  à  pa- 
c.  28.  M.  3.  reil  jour.  '  Il   conjecture  que   comme   le   monde  a  été  six 

jours  à  recevoir  sa  perfection  ,  il  subsistera  autant  de  mil- 
liers d'années,  avant  que  d'être  détruit.  Il  établit  sa  conjec- 
ture sur  ce  que  les  milliers  d'années  sont  figurés  par  les 
six  jours.  Ce  n'est  pas  le  seul  endroit  où  S.  Irenée  donne 
dans  la    ligure.   I!  s'en  trouve  beaucoup  d'autres  dans  ses 

écrits 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    345 

écrits;   mais    nous    ne    nous    arrêterons   pas    à    les    mar-    m  siècle. 


quer. 

'  II  confond  l'Antéchrist  avec  la  Bête  dont  parle  Daniel  hen.i.s.c.as-ao. 
dans  sa  prophétie,  et  S.  Jean  dans  son  Apocalypse.  Quant 
à  son  nom  ,  qui  doit  comprendre  le  nombre  de  six  cens 
soixante-six  ,  il  veut  que  l'on  atende  l'acomplissement  de 
la  prophétie,  avant  que  de  le  déterminer.  Il  ne  laisse  pas 
de  proposer  trois  divers  noms  ,  où  se  trouve  le  nombre 
marqué.  '  11  soutient  avec  S.  Justin  qu'il  cite  que  Satan  igno  «•  *»•  "•  *• 
roit  sa  condamnation  avant  l'avènement  de  Jesus-Christ. 

'  Etienne  Gobare  citi*  par  Photius  dit  que  S.  Irenée  ne  phoi.  c.  •ai.  i>. 
reconnoissoit    pas    l'Epître  aux  Hébreux  pour  l'ouvrage  de 
S.  Paul.  Mais  outre  que  c'est  un  hérétique  qui  parle  ainsi, 
'  il    est    certain   par  Eusebe  que  S.  Irenée  regardoit  cette  eos.  i.  ji.  c  ib.  i». 
Epître    comme    faisant    partie  des  Livres  sacrés,  puisqu'il  ""■ 
l'a  citée  comme    Ecriture   sainte.  '  D'ailleurs  quand  il  auroit  Phoi.  iwd. 
été  dans  l'opinion  que  l'on  prétend,  elle  ne  lui  étoit  point 
particulière;    lui    étant    commune    avec  S.  Clément  Pape, 
S.  Hippolyle   et  Eusebe.  '  Mais  ce  qu'il  y  a  encore  de  plus  Hipp.  i.  2.  p.  «i. 
puissant    pour    lepousser    l'acusation   de  (Jobare,  c'est  que 
nôtre  Saint  dans  un  de  ses  fragmens  publiés  en  1715  par 
Mr.   Pfatf,  cite  sous  le  nom  même  de  S.  Paul  un  endroit 
pris  du  treizième  chapitre  de  celle  même  Epilre. 

On  lui  rej)roche  au  contraire  de  citer  le  livre  d'Her-  iren.  Uis».  3.  u.  t. 
mas  comme  Écriture  sainte.  Mais  plusieurs  Pères  grecs 
eu  ont  usé  de  la  sorte,  comme  il  est  aisé  de  le  voir  par  les 
passages  qu'en  a  publiés  Mr.  Cotelier  à  la  tête  de  ce  même 
livre.  Il  est  vrai  que  les  Latins  n'ont  jamais  eu  autant  de 
vénération  pour  1  ouvrage  d'Hermas  ;  et  c'est  ce  qui  a 
fait  voir  qu'il  n'y  avoit  point  une  tradition  constante  qu'il 
fût  écrit  par  l'inspiratiuji  du  S.  Esprit. 

D'autres  Eciivains,  ceux-ci  poussés  par  un  certain  inté- 
rêt qu'ils  ont  d'affoiblir  l'autorité  respectable  des  Pères 
de  l'Eglise,  ceux-là  faute  d'avoir  aporté  toute  l'atention 
requise  à  lire  leurs  ouvrages,  ont  imputé  à  S.  Irenée  d'au- 
tres erreurs  beaucoup  plus  grossières  que  les  précédentes. 
Mais  comme  il  en  a  été  pleinement  justifié  par  plusieurs 
habiles  plumes,  nous  nous  contenterons  d'y  renvoier.  On 
peut  voir  à  ce  sujet  le  P.  Halloix  dans  la  vie  de  S.  Irenée; 
M'  de  Tillemont  dans  la  cinquième  note  sur  l'histoire  du 
même    Saint;    le  piemier  volume  des  Remarques  des  Be- 

lotne  l.   Prein.   Pari.  Y  v 


346  S.  IRENÉE,  EVEQUE  DE  LYON, 

III  SIECLE,  iiedictins  de  S.  Vanne  sur  la  Bibliothèque  des  Auteurs 
Ecclésiastiques  de  M'  du  Pin  ;  et  sur-tout  la  troisième  dis- 
sertation de  Dom  Massuet  à  la  tête  de  l'édition  qu'il  a 
publiée  des  œuvres  de  S.  Irenée,  où  il  discute  avec  autant 
de  soin  que  d'érudition  et  d'étendue  tous  les  divers  points 
de  la  doctrine  de  nôtre  Saint. 

11  seroit  à  souhaiter  qu'on  le  pût  aussi  bien  justitier  des 
erreurs  qu'il  a  avancées  sur  l'état  des  âmes  après  la  mort. 
ircii.i.o.c.31.11  a.  Mais  il  n'y  a  pas  moïen  d'y  réussir.  '  11  dit  nettement 
que  les  âmes  des  Justes  au  sortir  de  leur  corps  vont  dans 
un  lieu  invisible  que  Dieu  leur  a  assigné,  et  aue  là  elles 
atendent  la  résurrection  de  leurs  corps,  qui  se  lera  au  der- 
nier jour, 
c.  .i'i-M.  '  D'ailleurs    frapé    de   l'autorité  de  quelques   anciens,  et 

sur-tout  de  Papias,  qu'il  savoit  avoir  été  disciple  de  S. 
Jean  l'Evaugeliste ,  il  embrassa  le  sentiment  des  Mil- 
lénaires. Il  établit  clairement  après  cette  vie  et  avant  le 
jugement  dernier  un  règne  terrestre  pour  les  Justes.  Ce 
règne  selon  lui  sera  le  commencement  de  leur  incorrup- 
lion  et  comme  un  essai  de  ce  Roiaume  éternel,  oùilsjoiii- 
ront  de  la  vûë  de  Dieu.  Us  y  feront,  dit-il,  comme  un 
aprentissage  de  la  gloire  à  laquelle  ils  seront  un  jour  élevés 
avec  les  saints  Anges. 

Cette  erreur  ne  fut  i)as  long-tems  sans  être  combatuë. 
iii.iii.  iiii-i.  1. -j.  Caïus  disciple  de  S.  Irenée  même'  l'ataqua  bien-tôt  après, 
c.  t.  1..  i-jo.  ^^  i-éfutant  un  livre  de  Cerinthe  qui  avoit  enchéri  sur  ce 
que  Papias  en  avoit  débité.  S.  Denys  d'Alexandrie  en  fit 
iiiri.  ml..  1.  i«.  autant  contre  le  même  Cerinthe,  '  ou  selon  S.  Jérôme  con- 
!"•  tre  S.  Irenée  même.  C'est  sans  doute  à  cause  de  cette  er- 

reur que  nôtre  Saint  avoit  établi  dans  les  cinq  derniers 
chapitres  de  son  ouvrage,  que  l'on  en  avoit  retranché  ces 
mêmes  chapitres  dans  la  plupart  des  manuscrits. 

Au  reste  il  faut  se  souvenir,  que  lorsque  S.  Irenée  a 
avancé  ces  erreurs,  les  points  de  la  doctrine  catholique* 
auxquels  elles  sont  contraires,  n'avoient  pas  encore  été 
éclaircis,  comme  ils  l'ont  été  dans  la  suite,  et  que  l'Eglise 
n'avoit  encore  rien  défini  à  ce  sujet.  D'ailleurs  quelles 
qu'aient  été  ces  erreurs,  le  saint  Martyr  les  a  suffisamment 
lavées  dans  le  sang  qu'il  a  répandu  pour  la  foi  de  Jesus- 
Christ. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  MARTYR.    347 

m    SIECLE 


Oc 


Editions  de  ses   Ouvrages. 

N  nous  a  donné  dans  l'espaco  d'un  p(m  moins  de  iren.pr.  p. .%.  o. 
Meux  siècles  six  principales  éditions  des  cinq  livres 
de  S.  Irenée  contre  les  hérésies.  Erasme  fut  le  premier 
qui  les  tira  de  la  poussière.  L'édition  qu'il  en  prépara  sur 
trois  divers  manuscrits,  parut  pour  la  première  fois  à  Basle 
chez  Jean  Froben  l'an  1520  en  un  volume  in-folio.  Mais 
quelque  habile  que  fût  cet  Editeur,  et  quelque  soin  qu'il 
aportât  à  son  travail,  celle  édition  est  .'^i  remplie  de  fautes 
et  de  lacunes,  qu'en  la  li.sant  on  cherche  quelquefois  S. 
Irenée  dans  S.  Irenée  même. 

'  Deux  ans  après,  c'est-à-dire  en  lo?8,  Erasme  l'aïanl  ^'''-  f»"'  "•■"•  ' 
revûë,  la  fit  paroître  de  nouveau  un  peu  plus  correcte  que 
la  première  fois,  au  même  endroit,  chez  le  même  Impri- 
meur et  en  même  volume.  'Elle  y  vit  encore  le  jour  pour  •••«•  Snip.  Bii. 
la  troisième  fois  aussi  in-folio  l'an  lo34,  '  et  ensuite  à  Paris  ...ff.  Min.  Con, 
chez   Vivant  Gaultherot  en  1;]45  î>j-8". 

'  En  1548  Jérôme  Froben  et  Nicolas  Episcopius  Impri-    -s.  vin.  c^n. 
meurs  à   Basle,   réimprimèrent  in-folio   les  œuvres  de  S. 
Irenée    sur  les   éditions  précédentes.  '  Ils  le  firent  encore  ...  Barb.  1. 1.  p. 
les  années  1534  et  1560  en  même  volume.  "On  en  trouve  gr'i!.l^p!''(!-.'''' 
aussi  deux  autres  éditions  faites  sur  celle  d'Erasme,  à  Pa-  *  B''»' t<-Ii.  p.  27. 
ris  chez  Oudin  ou  Audoin  le  Petit  les  années  1563  et  1567 
en  un  volume  /«-8". 

'  La  seconde  édition  de  S.  Irenée  fut  publiée  en  1570  à  if"-  a»'!-  p  «• 
Genève  chez  Jean  le  Preux,  par  les  soins  de  Nicolas  Gal- 
lais  Ministre  du  même  endroit.  Erasme  qui  n'avoit  con- 
sulté que  trois  manuscrits,  a  donné,  comme  nous  l'avons 
dit,  une  édition  peu  exacte  et  pleine  de  fautes.  Gallais  les 
a  copiées  dans  la  sienne  :  ce  qui  fait  voir  qu'il  n'a  revu  le 
texte  de  S.  Irenée  sur  aucun  manuscrit.  Seulement  il  y  a 
ajouté  de  nouveaux  sommaires,  une  traduction  latine , 
mais  peu  fidèle,  des  passages  grecs  cités  par  S.  Epiphane, 
et  des  notes  de  sa  façon,  dans  lesquelles  il  tâche  de  ren- 
dre S.  Irenée  favorable  à  Calvin. 

La   troisième    édition   est  celle  de  Jean   Jaque  Grynée  ibi.i. 
autre    Calviniste.    Celle-ci    parut  à  Basle  l'an  1571  en  un 

Yy  ij 


348    S.  IRENEE,  EVEQUE  DE  LYON, 

Ht  SIECLE,  volume  m-8°,  et  l'on  ne  voit  point  qu'elle  ait  été  renou- 
"  vellée  depuis,  non  plus  que  celle  de  Gallais.  Aussi  n'en 
valoient-elles  pas  la  peine  ni  l'une  ni  l'autre.  Cette  troi- 
sième édition  n'est  point  différente  de  celles  d'Erasme  et 
de  Gallais,  si  non  en  ce  que  l'Editeur  a  retranché  la  ver- 
sion latine  des  premiers  chapitres  du  premier  livre  cités 
en  grec  par  S.  Epiphane,  et  y  a  substitué  la  traduction 
latine  de  Jean  Cornaro  sans   y  ajouter  le  texte  grec. 

iren.  iwd.  '  Nous    sommcs   redevables   de  la  quatrième  édition  de 

S.  Irenée  à  Franç«is  Feuardent  Cordelier  Docteur  de  Sor- 

Kib.  s.  Vin.  ccD.  bone,  '  qui  la  publia  d'abord  à  Paris  chez  Sebastien  Ni- 
velle les  années  1575  et  1576  en  un  volume  in-folio.  Il  la 
donna  ,  comme  il  dit  lui-même,  sur  les  trois  précédentes 
et  sur  un  ancien  manuscrit.  Il  l'enrichit  de  la  traduction 
latine  des  dix-huit  premiers  chapitres  du  premier  livre 
faite  sur  le  grec  par  Jaque  de  Billi,  et  ajouta  à  la  fin  du 
cinquième  livre  les  cinq  derniers  chapitres  qui  manquoient 
dans  les  autres  éditions.  Enfin  il  mit  à  la  tête  la  vie  de 
l'Auteur  tirée  de  ses  propres  écrits  et  des  meilleurs  Histo- 

sand.  vei.  script,  ricus.    Quclquc   imparfaite  que  fût  cette  édition,  '  l'on  ne 

e'ci.  p.  2t.  laissa  pas  de  s'en  servir  pour  réimprimer  en  un  volume  m- 
8».  le  texte  de  S.  Irenée  à  Paris  l'an  1577,  et  à  Cologne 
Tan  1595  in-folio. 

ircn.  iwdiFab.       '  Dcpuis,    Feuardcut  remit  la   main  à  son  ouvrage,  et 

MUs.  Ln^  ^'^'  """^vit  le  texte  latin  sur  deux  manuscrits,  l'un  du  Vatican 
et  l'autre  encore  plus  ancien,  par  le  moien  desquels  il  rem- 
plit plusieurs  lacunes,  et  corrigea  beaucoup  de  fautes.  Il 
y  joignit  le  texte  grec  des  dix-huit  premiers  chapitres  du 
premier  livre  raportés  par  S.  Epiphane,  et  divers  autres 
fragmens  grecs  qu'il  tira  des  autres  Pères,  avec  quelques 
fragmens  de  S.  Polycarpe,  la  dispute  entre  Arnobe  et  Se- 
rapion,  et  les  éloges  de  S.  Irenée  pris  des  anciens  Ecri- 
vains Ecclésiastiques  qui  en  ont  parlé.  Il  enrichit  ce  re- 
cueil des  observations  de  Jaque  de  Billi  et  de  Fronton  Ip 
Duc,  et  des  notes  de  sa  façon.  Cette  édition  ainsi  ornée 
parut  à  Cologne  chez  Birckman  pour  Arnoul  Milius  l'an 
1596  en  un  volume  in-folio,  et  a  servi  de  modèle  à  toutes 
celles  qui  sont  venues  depuis  jusqu'en  1702. 

Ainsi    ce    fut   sur  cette  dernière  éditioo  de  Feuardent , 

itib.s.  serg.  And.  '  quc  les  œuvrcs  de  S.  Irenée  furent  réimprimées  à  Colo- 
gne chez  Birckman    pour  Herman  Milius    l'an  1625  in- 


DOCTEUR  DE  L'ÉGLISE  ET  MARTYR.   340 

foHo,  "  ensuite  à  Paris  au  grand  navire  l'an  1639  enmême    m  siècle. 
volume.  ••  En  1G7,')  il  y  en  eut  une  autre  édition  au  même  .     ^.V.  ~~r7 
endroit  aussi  in-folio.  Depuis  on  insera  le  texte  de  b.  Irenee  b...  miss.  oen. 
au  second  tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères  de  Lyon  en 
1677. 

'  Quoique  l'édition  de  Feuardent  passât  pour  la  plus  ir^"'  ii'''" 
complète  qu'on  eût  encore  vûë,  il  s'en  falloit  bien  qu'elle 
ne  fût  parfaite.  Les  notes  de  l'Editeur,  savantes  à  la  véri- 
té, sont  trop  longues  pour  la  plupart;  et  le  Lecteur  y 
trouve  peu  de  lumière  pour  entendre  le  texte  original. 
D'ailleurs  ce  texte  est  encore  plein  de  fautes;  et  l'Editeur 
a  négligé  de  l'acompagner  des  secours  nécessaires  poUl" 
abréger  le  travail  de  ceux  qui  en  voudroient  faire  Usage. 

Toutes  ces  raisons  avoient  fait  naître   le  dessein  à  divers 
Savaiis  de  donner  une  nouvelle  édition  de  9.  Irenée  ;  '  quoi-  d  pin,  nii).  1. 1. 
que  M',  du  Pin  l'eût  jugé  inutile,  à  moins  que  l'on  ne  re-  •''  "  ' 
couvrât    le   texte  grec  de  ce  Père.  '  Matthias  Launoi    Con-»  F"''-  "''J- 
seiller  à  Anvers  avoit  entrepris  de  l'exécuter;  '  et  Dodvvel  Bib.  lat.  app.  p. 
avoit  promis  d'y  mettre  aussi  la  main.  Mais  ni  l'un  ni  l'au- 
tre   n'a    exécuté    son    dessein  projeté.  Après  ces  tentatives 
'  Jean   Ernest  Grabe  de  la  Religion  Anglicane,  aïant  reçu  Bii..  s.  vin.  c.n. 
ce    qu'avoit    déjà    préparé   Dodwel,  se   chargea  de  rentre- 
prise,   et  nous  donna  une  cinquième  édition  de  l'ouvrage. 
Elle  a  paru  à  Oxford  l'an  1702  en  un  volume  in-folio,  fort 
bien  conditionnée  pour  le  papier,  le  caractère  et  les  orne- 
mens   du   frontispice.  '  Grabe  a  enrichi  cette  édition  de  iren.  ii.id. 
plusieurs   fragmens   nouveatix,   et  de  notes   fort  étendues. 
Mais   on    lui  reproche   avec  raison  d'y  paroitre  trop  par- 
tial, en  s'y  atachaut  moins  à  éclaircir  le  texte  de  son  Au- 
teur qu'a  y  faire  Voir  contre  l'évidence,  les  principes  et  les 
dogmes  de  la  Religion  qu'il  professoit. 

'  Enfin  la  sixième  et  dernière  édition  des  œuvres  de  S.  Bib.  s.  vin.  d-n. 
Irenée,  est  celle  qu'a  publiée  Dom  René  Massuet  Reli- 
gieux Bénédictin  de  la  Congrégation  de  saint  Maur.  Elle 
est  sortie  de  l'Imprimerie  de  Jean-Baptiste  Coignard  Im- 
primeur Libraire  à  Paris  l'an  1710  en  un  volume  m-/b/ïo 
fort  bien  conditionné.  L'Editeur  l'a  revûë  sur  les  précé- 
dentes et  sur  trois  manuscrits,  dont  l'un  est  ancien  au 
moins  de  huit  cens  ans.  Il  l'a  enrichie  de  nouvelles  notes, 
dans  lesquelles  il  s'est  particulièrement  ataché  à  éclaircir 
le  texte  original.  Il  a  mis  à  la  tête  trois  dissertations  aUssi 

2  B 


3oO  S.  IRENÉE,  EVEQUE  DE  LYON, 

III  SIECLE,  savantes  que  curieuses.  Dans  la  première  il  fait  connoître 
les  hérétiques  contre  qui  saint  Irenée  a  écrit .  et  develo- 
pe  savamment  leurs  erreurs  et  leurs  mystères.  Dans  la 
seconde  il  traite  à  fond  de  la  vie  et  des  ouvrages  de  saint 
Irenée.  La  troisième  est  emploïée  à  examiner  les  divers 
points  de  la  doctrine  de  ce  Père. 

Ces  dissertations  sont  suivies  des  témoignages  que  les 
anciens  ont  rendus  et  aux  écrits  et  à  la  personne  de  sainl 
Irenée.  Après  le  texte .  des  cinq  livres  '  l'Editeur  a  mis  tous 
les  divers  fragmens  qui  nous  restent  des  autres  ouvrages 
de  notre  Saint,  et  ceux  que  l'on  a  cités  sous  .son  nom.  En- 
suite vient  un  recueil  curieux  de  tous  ceux  des  écrits  des 
Gnostiques  que  l'on  a  pu  ramasser.  Les  différentes  préla- 
ces, prolégomènes  ,  notes  ,  observations  de  tous  ceux  qui 
ont  travaillé  sur  le  texte  de  saint  Irenée,  terminent  cette 
édition.  A  tout  cela  Dom  Massuet  a  eu  soin  de  joindre  les 
glossaires  et  tables  nécessaires  pour  soulager  le  travail  des 
Lecteurs.  De  sorte  que  l'on  peut  dire  avec  sujet,  que  cette 
édition  est  la  plus  exacte  et  la  plus  acomplie  de  toutes  cel- 
les qui  ont  paru  jusqu'ici. 

Tant  de  soins  aporlés  pour  lui  donner  ce  degré  de  per- 
fection,   n'ont    pas    empêché    que    M'.    Grabe,    et  d'autres 
iiiki.  sni.  i.  I.  p.  après  lui  n'aient  pris  la  plume  pour  la  décrier.  '  Casimir 
-•^  Oudin    entre   autres    n'a   pas   rougi  d'acuser  Dom  Massuet 

d'avoir  inséré  diverses  choses  dans  le  texte  de  son  Auteur, 
en  vue  de  flatter  le  saint  Siège,  à  qui  ces  changemens 
étoient  favorables.  Pour  être  en  droit  de  former  une  acu- 
sation  aussi  grave,  il  falloit  qu'Oudin  eût  examiné  les  ma- 
nuscrits dont  s'est  servi  Dom  Massuet,  et  qu'il  eût  marqué 
les  endroits  changés  ou  altérés.  Ne  l'aïant  pas  fait,  et  ne 
donnant  aucune  autre  preuve  de  son  acusation,  qui  croira 
sur  sa  simple  parole  un  homme  qui  a  été  capable  de  renon- 
cer à  la  foi  de  ses  pères  et  à  la  profession  monastique  qu'il 
avoit  embrassée?  Les  traits  dont  lui  et  les  autres  ont  voulu 
percer  Dom  Massuet,  se  sont  tournés  contre  eux-mêmes; 
et  le  public,  qui  est  un  juge  équitable  et  désintéressé,  n'a 
point  cessé  de  rendre  justice  au  travail  du  dernier  Editeur 
de  saint  Irenée.  (XXX.) 
Bii).  an.eimnd.t.  '  Dcpuis  Cette  demierc  édition.  M'.  Pfaff  a  publié  qua- 
•!.  p.  440.  tre   fragmens    des  écrits    de  ce  Père,  qu'il  a  trouvés  dans 

quelques   chaînes   manuscrites   de    la  Bibliothèque  de  Tu- 


DOCTEUR  DE  L'ÉGLISE  ET  MARTYR.    3ol 

rin.  Ces  fragiiiens  acoinpugnés  des  dissertations  et  reiiiar-  m  siècle. 
ques  de  M'.  PfafT,  ont  paru  à  la  Haye  chez  Scheurleer  ~~"~ 
l'an  1715  en  un  volume  m-8».  L'Editeur  n'a  pas  oublié 
d'en  prendre  ocasion  de  relever  l'opinion  de  sa  secte 
touchant  l'Eucharistie,  et  de  faire  valoir  ses  préjugés 
sur  cette  matière,  malgré  la  dissertation  qu'il  y  a  jointe 
sur  les  préjugés  Théologiques,  et  qui  dépose  contre  lui- 
même. 

'Après  IVr.  Pfair,  M'".  Fabricius  nous  a  donné  en  grec  Hipi).  i.  2.  p.  o*. 
et  en  latin  ces  mêmes  fragmens  dans  son  spicilege  des  ''''■ 
Pères  du  III  siècle,  qui  passe  pour  le  second  tome  des  œu- 
vres de  saint  Hippolyte,  et  qui  parut  à  Hambourg  en  1718. 
On  ne  peut  douter  que  ces  quatre  fragmens  n'aient  fait 
partie  des  ouvrages  de  saint  Irenée.  On  y  trouve  la  plu- 
part des  caractères  de  sa  doctrine. 

'  Dans  le  premier  saint  Irenée  établit  en  quoi  consiste  v-  <>»• 
la  vraie  science  pour  l'oposer  à  celle  dont  se  glorifioient  les 
(jiiostiques.  II  fait  ensuite  un  abrégé  de  la  doctrine  des 
Apôtres,  et  de  la  foi  qu'ils  ont  laissée  aux  Fidèles.  «  Cet 
»  abrégé,  dit-il,  est  à  la  portée  des  gens  grossiers  comme  des 
»  Savans.  Il  consiste  à  éviter  les  généalogies  qui  n'ont  point 
»  de  fin,  et  à  s'apliquer  avec  soin  à  reformer  ses  mœurs  ;  de 
»  peur  que  se  rendant  indigne  des  grâces  du  saint  Esprit, 
»  on  ne  perde  l'héritage  céleste.  Car  la  première  chose  ne- 
»  cessaire  est  de  se  renoncer  soi-même,  et  de  suivre  Jesus- 
»  Christ.  Quiconque  tient  cette  conduite,  tend  à  la  perfec- 
»  tion,  et  acoinplissant  ainsi  la  volonté  du  Sauveur,  devient 
»  fils  de  Dieu  par  la  regénération  spirituelle,  et  héritier  du 
»  Roiaume  des  Cieux.  »  S.  Irenée,  comme  l'on  sait,  touche 
<;es  mêmes  points  dans  ses  livres  contre  les  hérésies,  nom- 
mément dans  le  quatrième  d'où  il  y  a  bien  de  l'aparencc 
que  ce  fragment  aura  été  tiré. 

De  même,  le  second  fragment  paroit  faire  une  suite  na- 
turelle du  17"  chapitre  du  même  Livre.  Ce  chapitre  tel  que 
nous  l'avons  dans  les  éditions  de  saint  Irenée  est  seulement 
en  latin  ;  et  très-court  dans  quelques-unes.  Il  traite  du 
même  sujet  que  ce  second  fragment.  '  11  s'y  agit  du  sacrili-  i'-  •>'•  i-i- 
ce  nouveau  que  J.  C.  a  institué  dans  la  nouvelle  loi,  selon 
la  prédiction  du  Prophète  Malachie.  S.  Irenée  l'entend  et 
de  l'Eucharistie  et  des  prières  des  Saints.  '  En  parlant  de 
l'oblatioii  de  l'Eucharistie  en  particulier,  il  dit,  «    Qu'elle 


2  8  * 


352    S.  IRENÉE,  EVEQUE  DE  LYON, 

11  SIECLE.  »  ne  se  fait  point  d'une  manière  ciiarnelle,  mais  toute  spi- 
»  rituelle,  en  quoi  elle  est  pure.  On  ofTre  à  Uieu,  poursuil- 
»  il,  du  pain  et  le  calice  de  bénédiction,  en  rendant  grâces 
»  au  Seigneur  de  ce  qu'il  fait  produire  à  la  terre  ces  fruits 
»  pour  nôtre  nourriture.  Après  l'oblalion  nous  invoquons 
w  le  S.  Esprit,  afin  que  le  pain  et  le  vin  deviennent  le  corps 
»  et  le  sang  de  J.  C.  et  que  ceux  qui  y  participeront,  recoi- 
»  vent  la  remission  de  leurs  péchés  el  méritent  d'avoir  part 
»  à  la  vie  éternelle,  n 

Peut-on  parler  plus  clairement  du  mystère  de  l'Euchari- 
stie, tel  qu'on  l'a  toujours  cru  dans  l'Eglise  catholique  1 
Que  l'on  se  donne  la  peine  de  raprocher  ici  les  autres  en- 
droits marqués  plus  haut,  où  saint  Ireiiée  établit  la  mô- 
me vérité  en  écrivant  contre  les  hérésies,  el  que  l'on  ju- 
ge si  c'est  avec  raison  que  M'.  PfafT  se  prévaut  de  ce  frag- 
ment en  faveur  de  l'opinion  de  son  Eglise  sur  l'Eucliarislie. 

ibki.  '  c'est  dans  ce  même  fragment  que  saint  Irenée  cite  sous 

le  nom  tie  saint  Paul  un  endroit  pris  du  13*^  chapitre  de 
l'Epître  aux  Hébreux. 

ibid.  '  Le  3"'  fragment  roule  sur  les  fêles  et  les  jeûnes  que  iiou.- 

devons  observer  ,  et  semble  tout  nalurellement  avoir  fait 
partie  de  quelqu'une  des  leires  qu'écrivit  saint  Irenée  au 
sujet  des  troubles  touchant  le  jour  auquel  on  devoit  faire 
la  Pâque.  «  Nous  faisons  consister  nos  fêtes,  dit  ce  Père, 
»  dans  le  levain  de  la  malice  et  du  péché  ;  nous  déchirons 
»  l'Eglise  de  Dieu  ;  nous  observons  des  cérémonies  exte- 
»  rieures  et  laissons  des  pratiques  plus  excellentes,  comme 
»  celles  de  la  foi  et  de  la  charité.  Ces  sortes  de  fêtes  et  de 
»  jeûnes,  ajoute  S.  Irenée,  ne  sont  point  agréables  au  Sei- 
)i  gneur.  » 

iiii>i).  ibiu.  '  Le  4'"  fragment  semble  avoir  été  tiré  du  5"  Livre  de  nô- 

tre Saint  contre  les  hérésies,  et  regarde  les  deux  avéne- 
mens  de  J.  C.  «  Il  est  venu,  dit-il,  la  première  fois  dans 
»  la  plénitude  des  teras,  afin  de  nous  délivrer  de  la  servitu- 
»  de  du  pcché,  nous  purifier  par  son  sang,  et  nous  représen- 
»  ter  sans  tache  à  son  Wre.  comme  ses  enfans,  si  néanmoins 
»  nous  nous  rendons  dociles  à  ce  qu'il  exige  de  nous.  II 
»  viendra  de  nouveau  à  la  fin  des  tems,  pour  détruire  tou- 
»  le  sorte  de  malice,  reconcilier  li>utes  choses,  et  mettre  lin 
M  à  toutes  les  iniquités.  » 

-  ANÏONIN 


353 


m  SIECLE. 


ANTONIN    CARACALLA, 

Empereur. 

SI  dans  l'histoire  literaire  il  ne  devoit  entrer  que  des 
hommes  de  letres,  le  Prince  qui  se  montre  ici,  devroit 
en  être  exclu.  Mais  comme  l'on  y  parle  de  tout  ce  qui 
concerne  la  literature,  il  mérite  d'y  trouver  place  pour 
les  dommages  qu'il  lui  a  causés,  et  la  guerre  qu'il  fit  aux 
Savans  et  à  leurs  écrits.  De  sorte  que  son  éloge  sera  ici  à 
peu  près  ce  qu'est  l'ombre  dans  un  tableau. 

'Il  naquit  à  Lyon  le  4" 'jour  d'Avril  de  l'an  188,  lors-  spar.  va.  sev.  n. 
que  Severe  son  père,  qui  fut  depuis  Empereur,  gouvernoit  p.'^i7|'nn.Emp. 
la  Lyonnoise  pour  les  Romains.  Il  eut  pour  mère  la  fameu-  '•  '•  p-  *"•  '*'*■ 
se  Julie,  qui  vouloit  passer  pour  Philosophe,  mais  dont  les 
mœurs  ne  répondoient  nullement  à  cette  qualité.  Il  porta 
d'abord  le  nom  de  Bassien,  '  qui  demeura  aooli  dans  la  sui-  Tiii.  na.  p.  44. 
te,  lorsque  Severe  lui  eut  donné  ceux  de  Marc  Aurele  An- 
tonin.  '  Et  après  qu'il   eut  aporté  des  Gaules  à  Rome  les  spar.  vii.  carac. 
Caracalles,  sortes  d'habits  qui  descendoient  jusqu'aux  ta-  ""  ^' 
Ions,  et  que  les  Romains  nommèrent  Antoninienes  à  cause 
de  lui,  il  lui  en  revint  à  lui-même  le  surnom  de  Garacal- 
la,  sous  lequel  il  est  plus  connu  dans  l'histoire. 

'  On  croît  que  ce  Prince  eut  une  nourrice  Chrétienne  par  ™-  "''''•  p-  ^* 
le  moïen  de  Procule  Torpacion,  qui  faisoit  profession  du 
Christianisme,  et  qui  après  avoir  guéri  Severe  d'une  mala- 
die, demeuroit  dans  son  palais.  On  vit  en  lui  quelques 
fruits  de  ce  lait  Chrétien,  pendant  ses  premières  années. 
'  En  effet  il  fit  paroître  alors  les  plus  excellentes  inclina-  Spar.  iWd.  n.  t. 
tions.  Il  étoit  doux ,  clément ,  libéral ,  officieux ,  et  se 
portoit  avec  ardeur  à  l'étude  des  letres.  S'il  voioit  quel- 
ques malheureux  exposés  aux  bêtes,  il  en  détournoit  ses 
yeux,  comme  ne  pouvant  suporter  la  vùë  d'un  si  cruel  spe- 
ctacle. De  sorte  qu'il  se  rendoit  aimable  à  tout  le  monde. 

'  Mais  à  peine  fut-il  sorti  de  l'enfance,  que  ces  heureu-  n.  s. 
ses  dispositions   se  changèrent  en  autant  de  vices  oposés, 
et  qu'il  devint  aussi  odieux,  qu'il   étoit  chéri  auparavant. 
Pour  tout  dire  en  un  mot,  il   sembla  renchérir  sur  les 

in  '  Selon  d'autre»   le  cinquième  ou   le  vingt-septième  dn  même  mois.  xrist.  com.  bist.  t. 

To77ie  n  Prem.  Part.  Z  z  2.p.i48.' 


351  ANTONIN  CARACALI.A 

m  SIECLE,  cruautés  de  Tibère,  de  Caligula  et  de  iNeron  ;  el  ses  pro- 
»res  Historiens  ne  le  représentent  eux-mêmes  que  comme 
'horreur  du  genre  humain.  Il  porta  le  caprice  jusqu'à 
vouloir  s'égaler  à  Alexandre  le  Grand.  Il  ayoit  continuel- 
lement à  la  bouche  et  le  nom  et  les  actions  de  ce  Héros. 

Anr.  Vie.  ibui.  p.  '  H    affcctoit  même   d'en   imiter   la   contenance,  et  vouloil 

-'-•  qu'on  lui  en  donnât  le  nom. 

Tiii.  ii>i.i.  p.  109.  '  Il  ne  manquoit  pas  d'esprit,  quoiqu'il  l'eût  plus  vif  que 
solide.   Il   avoit   beaucoup  de  conception,   pensoit  bien,   et 

]..  110.  s'énonçoit    a\ec    facilité.    '  Severe   ne   négligea   rien    pour 

cultiver  de  telles  qualités  qui  faisoient  beaucoup  espérer. 
Il  lui  donna  les  plus  habiles  maîtres,  et  le  fit  instruire 
dans  tous  les  exercices  du  corps  et  de  l'esprit,  et  pour  les 
mœurs  et  pour  les  sciences.  Il  lui  faisoit  même  étudier  la 

!'•  loo.  philosophie   la  plus  grande  partie  du  jour.  '  Mais  tout  ce- 

la fut  inutile.  Caracalla,  soit  faute  de  jugement,  soit  par 
défaut  d'aplication,  ne  fit  aucun  progrès  dans  les  letres. 
Il  avouoit  lui-même  son  ignorance,  qui  étoit  entière,  et 
qui  lui  faisoit  mépriser  toutes  les  personnes  d'érudition. 

p.  4.1.  .;;?.  '  En  196  il  fut  fait  César;  et  deux  ans  après  il  reçut  la 

spar.  vil.  sev.  n.  puissancc  du  Tribuuat.  'Dès  la  13*  année  de   son   âge  les 

i  Tiii.  ii.i.i.  p.  00  soldats  l'associèrent  à  l'Empire   avec   .son   père,  "  qu'il  eut 

«i-  aussi  pour  collègue  dans  le  Consulat    en  202.  Avant  qu'il 

eût  achevé  la  ^ô"  année  de  sa  puissance  Tribunitienne ,  il 
épousa  Plautille,  fille  de  Plautien  Préfet  du  Prétoire  ;  et 
il  eut  de  ce  mariage  une  dot,  qui  auroit  .suffi  pour  marier 
cinquante  Reines. 

p.  112.  '  Le  4'"de  Février  211  il  .se  vit  maître  de  l'Empire  par  la 

mort  de  son  père,  qu'il  avoit  avancée  selon  quelques  Hi- 
storiens. Mais  il  semble  qu'il  ne  monta  sur  le  thrône,  que 

Spar  ibiii.  n.  21.  pQjjj.  pxerccr  plus  impunément  sa  tyrannie.  '  Il  commença 
par  faire  tuer  Gelé  son  frère  entre  les  bras  de  .sa  propre 
mère,  afin  d'avoir  lui  seul  toute  la  puissance  souveraine, 
et  continua  à  se  signaler  par  de  semolables  cruautés  tout 
le  reste  de  son  règne.  11  en  vouloit  sur-tout  aux  hommes 
de  letres.  Le  célèbre  Papinien,  que  l'on  regardoit  com- 
me un  thrésor  inépuisablede  jurisprudence,  et  l'asyle  de  la 
science  du  droit,  fut  une  des  victimes  qu'il  immola  à  sa 
fureur.  '  Il  fit  tuer  de  même  presque  tous  les  Médecins, 
parce  qu'ils  refusoient  d'exécuter  se»  ordres  sanguinaires, 
et  de  donner  du  poison  à  ceux  dont  il  vouloit  se  défaire. 


J(ins.   1.  .1.  c.  n. 


EMPEREUR.  355 

'  Plan  lien,  qu'il  devoit  respecter  pour  l'alliance  qu'il  avoit   m  siècle. 
contractée  avec  lui,  ne  lut  pas  plus  épargné   que   les  au-  .Tiii.iwd.  p.  eo. 
très.  Il   seroit   difficile  de  faire   l'énumeratïon  de    tous  les  ***'• 
autres  meurtres  qui  souillèrent  son  règne. 

Ce  n'étoit  pas  assez  pour  satisfaire  la  cruauté  de  ce  mé-  J""^-  'wa. 
chant  Prince,  que  de  persécuter  les  personnes  vivantes,  il 
étendit  encore  sa  fureur  sur  celles  que  la  mort  sembloit 
en  avoir  mis  à  couvert.  Ne  pouvant  faire  pis,  il  déclara 
une  guerre  ouverte  à  leurs  écrits.  Il  se  déchaîna  parti- 
culièrement contre  ceu.x  d'Aristote.  parce  qu'il  s'imagi- 
noit  qu'il  avoit  élé  cause  de  la  mort  d  Alexandre  le  grand, 
dont  il  prélendoit  que  l'ame  étoit  passée  dans  son  corps. 
'  A  tant   de   cruautés  et  de  parriciaes  il  joignit  encore,  si  Spar.ibid  i  vu  c.i5 

,,  ...  -,,.         '.  ,,.  ,"•    ,"        ,  ,,,      ,         rac.  11.  10    I    Hier. 

1  on  en  croit  plusieurs  Historiens,  1  inceste  le  plus  détesta-  iiir.  i.  a.  p.  m. 
ble,  en  épousant  Julie  sa  propre   mère,  après  la  mort  de 
l'Empereur  Severe. 

'  Dieu  arrêta  enfin  le  cours  d'une  vie  aussi  odieuse,  et  ^i»;-  \'\;..,t^':™';- 

,    Il        p»  •      ,  /■  ,        Vi     r>    ■  11.  0.7.  1  llll.ibi't. 

permit  qu  elle  tut  terminée  par  une  mort  luneste.  Le  Frin-  p.  139. 
ce  qui  avoit  fait  assassiner  tant  de  inonde,  fut  assassiné  lui- 
même  par  Macrin,  qui  régna  après  lui.  Il  finit  ainsi  sa  vie. 
le  8"  d'Avril  217,  lorsqu'il  n'avoit  encore   que  29  ans  et 
i  jours.  'Spartien  et  Eusebe  disent  qu'il  étoit  dans  la  43"  l'y"!^'  .ii^j**- "jj^ 
année  de  son  âge,  lorsqu'il  fut  tué.  Mais  c'est  une  faute    "*'  ''"^'  ^'  ' 
dans  ces  deux  Ecrivains.  '  Ausone  exprime  assez  bien  le  ca-  aus.  «ei.  p.  225. 
ractere  de  ce  malheureux  Prince  dans  les  vers  suivans,  qui  ^^' 
peuvent  lui  servir  d'épitaphe. 

Uissimiliâ  virtutc  patri,  el  mullo  magis  illi 

Cujus  adoplivo  uouiine  te  perliibus, 
Fralris  morte  iioceus ,  punitus  fiae  crucatu , 

la  risu  populi  tu  Garacalla  mugis. 

'  Caracalla  est  le  dernier  des  Empereurs,  qui  a  fait  met-  t»"-  ''"J-  i>  m- 
tre  le  titre  d'imperator  sur  ses  médailles.  Les  Empereurs 
suivans  ont  négligé  ce  titre,  qui  servoit  à  donner  quelque 
éclaircissement  à  l'histoire.  '  Il  laissa  unfils,  qui  régna  dans  spuv.  iwi  \  nui. 
la  suite  sous  le  nom  de  M.  Antonin  Heliogabale.  Entre 
le  peu  de  bonnes  actions  que  fit  Caracalla  pendant  son  rè- 
gne, on  remarque  une  fort  belle  rue  qu'il  fit  faire  de  nou- 
veau à  Rome  avec  d'autres   édifices.   Mais  on  relevé  sur- 

Z  z  ij 


356  ÂNTONIN  CARACALLA,   EMP. 

m  SIECLE,  tout  les  thermes,  ou  bains  publics  qui  portoient  son  nom, 
et  où  se  voïoient  des  choses  qui  paroissoient  inimitables. 
On  parle  aussi  avec  éloge  d'une  galerie  somptueuse,  qu'il  fit 
construire,  et  où  étoient  représentées  les  guerres,  les  triom- 
phes et  les  autres  grands  exploits  de  l'Empereur  son  père. 
Tiii.ihid.  ip.ie?!  Il  fit  aussi  quelques  loix  pour  le  gouvernement  de  l'Etat, 
jonï.  ibiu.  c.  12.  g|  donna  plusieurs  rescrits,  dont  divers  Ecrivains  font  men- 
tion. 


C  A  I  U  S, 

EVEQUE    DES   N.VTIONS,    ET   DOCTEUU    DE    l'EgLISE. 


0 


s- 1. 

HISTOIRE  DE  SA  VIE." 

N   ne  sait  pas   précisément  quel  est  le  païs  qui  donna 
_  naissance  à  Caïus ,  dont  nous  entreprenons   ici   l'élo- 
Vui.  Sacr.  p.  937.  ge.  '  M',  le  Moyne  conjecture  qu'il  étoit  Grec  de  nation, 
"*"'  et  né  à  Corinthe.  C'est  ce  qu'il  paroît  établir  sur  un  pas- 

sage d'un  certain  Socrate  de  la  même  ville  ;  et  sur  la  con- 
noissance  particulière  qu'avoit  Caïus  de  la  langue  gréque, 
en  laquelle  il  a  écrit  tous  ses  ouvrages.  Mais  ces  fonde- 
mens  sont  bien  équivoques,  pour  y  asseoir  quelque  pro- 
babilité. En  effet,  le  témoignage  de  ce  Socrate  est  plus 
contraire  que  favorable  à  la  prétention  de  M',  le  Moyne  ; 
et  ce  que  nous  avons  dit  ailleurs  de  l'usage  tout  conrimun  de 
la  langue  gréque  dans  quelques-unes  de  nos  provinces  en 
particulier,  fait  voir  de  reste  que  l'on  pouvoit  écrire  en- 
cette  langue,  sans  être  Grec  de  nation. 

U  y  a  bien  plus  d'aparence  à  croire  que  Caïus  étoit  né 
dans  les  Gaules.  Au  moins  la  prévention  est-elle  en  leur 
faveur;  puisqu'elles  furent  le  théâtre,  où  Caïus  fit  son 
ircn.  p..  i).  mu  premier  personnage.  '  Car  il  est  certain  par  l'aveu  du  mê- 
me Socrate,  qu'il  avoit  été  disciple  de  S.  Irenée,  non 
comme  le  fut  dans  la  suite  S.  Prosper  de  S.  Augustin  qu'il 


CAIUS,  EVEQUE  DES  NATIONS,  etc.     357 

ne  vil  jamais  en  personne  ,  mais  en  demeurant  et  conver-    m  siecli;. 
sant  avec    ce  saint  Evêque  et   Martyr,    ôç    xal    'ï.wmokni^-  [ 

laTo  TM  KîpT,vatw.  Or  cela  ne  put  ariver  qu'à  Lyon, 
comme  il  est  visible  par  l'histoire  de  saint  Irenée,  telle 
que  nous  l'avons  donnée  sur  les  monumens  les  plus  autori- 
sés. Ainsi  il  est  au  moins  hoi"s  de  doute,  que  Caïus  puisa 
dans  l'école  de  l'Eglise  de  Lyon  la  doctrine  qu'il  alla  en- 
suite répandre  ailleurs.  Il  ne  nous  en  faut  pas  davantage 
pour  être  en  droit  de  le  mettre  au  rang  de  nos  hommes  de 
letres. 

On  ignore  à  quelle  ocasion,  ou  pour  quel  sujet  Caïus 
se  sépara  de  saint  Irenée.  On  pourroit  faire  sur  cela  di- 
verses conjectures,  dont  il  n'y  en  auroil  peut-être  nulle 
de  vraie.  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  'c'est  qu'il  se  retira  à  Kus.  i.s.  c.«i|i. 
Rome,  où  il  passa  quelque  tems.  S.  Irenée  pouvoit  l'y  ^"jH^^r.  !ir.  m! 
avoir  envoie  pour  les  alFaires  de  son  Eglise  ;  et  Caïus  y  «•  sa- 
aïant  aparemment  reçu  la  nouvelle  de  son  martyre,  et  de 
la  persécution  qui  ravageoit  l'Eglise  des  Gaules,  se  dé- 
termina à  s'atacher  au  Clei^é  de  Rome.  Il  y  brilloit  sous 
le  Pontificat  de  saint  Zephyrin  et  l'Empire  d'Anfonin  Ca- 
racalla,  au  commencement  de  ce  III  siècle.  Il  s'y  distin- 
gua entre  les  Ecrivains  Ecclésiastiques  et  par  son  zèle  à 
défendre  la  foi  Orthodoxe,  et  par  son  éloquence.  Il  y 
eut  sur-tout  une  conférence  avec  Procle  ou  Procule,  l'un 
des  principaux  chefs  des  Montanistes,  laquelle  contribua 
beaucoup  à  rendre  son  nom  illustre. 

'  Pholius  nous  aprend   qu'il   fut   élevé   à  la   dignité   du  '''«"•  «•  **••  i'-  *i- 
Sacerdoce  ,    dont    quelques-uns    prétendoient    qu'il    avoit 
fait   les  fonctions   dès  le  tems  du  Pape  saint  Victor.  Dans 
la   suite   il   fut   ordoinié   Evêque   des   nations,  'pour  aller  tîii.h.e.  i. 3.  y. 
porter  la  foi  dans  les  pais  des  infidèles,  sans  avoir  aucun  "*' 
peuple  ni  aucun  Diocèse  limité.  Ainsi  l'on  ne  doit  pas  s'ar- 
rêter à  l'opinion  de  quelques  modernes  qui   en   ont  voulu  Var.  sacr.  p.  w*. 
faire  un  Evêque  de  Milan. 

L'histoire  ne  nous  aprend  rien  du  tems  de  la  mort  de 
Caïus.  Seulement  il  paroît  par  ce  que  nous  venons  de 
dire,  qu'il  vêquit  au-delà  du  règne  de  Caracalla,  qui  finit 
en  217.  'Il  est  étonnant  de  ne  voir  pas  paroître  le  nom  xiii.ibid.  p.  177. 
de  ce  grand  homme,  qui  a  tant  travaillé  pour  l'Eglise, 
dans  les  Martyrologes  Romains,  où  l'on  en  a  placé  beau- 
coup d'autres,  qui  ne  le  méritoient  peut-être  pas  à  si  juste 
titre. 


3o8        CAIUS,  EVEQUE  DES  NATIONS, 

jii  siKCLE.  Quoiqu'il  fùl  disciple  de  saint  Ireuée,  il  ne  le  suivit 
point  dans  l'erreur  des  Millénaires.  11  a  même  la  gloire 
d'être  le  premier  Ecrivain  que  nous  sachions  avoir  com- 
batu  ce  sentiment  erronné.  Mais  il  ne  regardoit  point, 
dit-on,  l'Epitre  aux  Hébreux  comme  l'ouvrage  de  saint 
Paul. 

$.  II. 
SES  ECRITS. 

("ï  Aïus    enrichit    l'Eglise    de    plusieurs    ouvrages    de    sa 
><façon.  Mais   nous   avons  le   malheur  de   nous   en   voir 
privés.  Il  ne  nous  en  reste  aujourd'hui,  que  certains  traits 
que  nous  ont  conservés  Eusebe,   saint  Jérôme,   Theodoret 
et  Photius. 
Kus.  i.a.c.isii.       1».  '  Le  plus  célèbre  des  écrits  de  Caïus,    paroît  avoir 
c.' ai.^!  6»!  loo!  été   la  conférence  qu'il   eut  à  Rome   avec  Procle,  comme 
{"^ijf*^  'sgi*'''-  l'on  a  déjà  vu.  Eusebe  en  cite  plusieurs  endroits;  et  c'est 
l'unique   des   ouvrages  de  Caïus  que  saint  Jérôme  marque 
Tm  il" Vi  3**i'   ^^"^  l'éloge  qu'il  nous  a  laissé  de  cet  Auteur.  '  Caïus  aïant 
173.    '"'  convaincu  son  adversaire  de  la  fausseté  des   nouvelles  opi- 
nions de   Montan ,   rédigea   par    écrit  la  conférence  qu'il 
Kuvi.  :i.  c.;5i.|..  eut  à  ce    sujet.    L'ouvrage  étoit  en  grec,  'et  en  forme  de 
p. "Je'.' 37.'  "^^  '**■  dialogue.  Au  moins  Eusebe  et  Photius  lui    en   donnent-ils 
le  titre.   Celui-ci  en   fait  beaucoup  d'estime,   et  témoigne 
que  la  pièce  étoit  travaillée  avec  soin. 
Eus.  1.2.  c.2op.       'C'est  de  cet  écrit  qu'Eusebe   raporte  le  beau    passage 
'^'  touchant  les   tombeaux   des  Apôtres  saint  Pierre  et  saint 

Paul,   dont  l'un  selon  Caïus  étoit  au  Vatican,  et  l'autre 
1. 0. c. *j.  1». 2i3 1    sur  le  chemin  d'Ostie.  'L'Auteur  y   réfutant  la  témérité 
Hier.  ii,.,i.  I  phoi.  qu'avoienl    les    Montanistes    de    fabriquer    de    nouveaux 
écrits  qu'ils  donnoient  pour  l'Ecriture  sainte,  ne  comptoit 
(jue  treize  Epitres  de    saint  Paul,  omettant  celle  aux  Hé- 
breux, comme  ne  la  croïant  pas  de  cet  Apôtre.  Ce  senti.- 
ment  au  reste  ne  lui  étoit  pas  particulier.  Quelques  Latins, 
dit  Eusebe,  pensoient  la  même  chose. 
Th.iri.iiim. i.-j. c.       2».' Theodoret  assure  que  Caïus  écrivit,  aussi    bien   que 
;i.  p.  sio.  g    Denys  d'Alexandrie,  qui  ne  fleurit  que   plus   de   trente 

ans  après  lui,  un  Livre  contre  Cerinthe  auteur  de  l'opi- 
nion des  Millénaires.  De  sorte  que  Caïus  eut  l'avantage 
do  porter  les  premiers  coups  à  cette  erreur,  peu   de   tems 


I 


t 


F/r  DOCTEUR  DE  L'EGLISE.  :r>9 

après  sa  naissance.  "11  sVtoit  déjà  déclaré  contre  dans   sa    m   siècle. 
conférence  avec  Procle,  comme  on  le  voit  par  Eusebe  qui  iias.i.a.e.is.  ^ 
en  cite  cet  endroit.  ^"o- 

3°.  '  Photius  témoigne  qu'il  y  avoit  encore  de  Caïus   un  p''»'  ''»'!•  p-  "î'- 
Livre  particulier  contre  1  hérésie  d'Artemon  ,  '  ou  Artemas  App.  a.i.  bh..  pp, 
disciple    de    Theodote    le    Corroïeur ,     qui    soûtenoit    que  ''  ''  '''  '^^"' 
.1.  C.  n'étoit  qu'un  pur  homme.  '  Il  paroil  presque  hors  de  kus. i. ,-,..-.  as.  |.. 
doute  que  cet  écrit  est  le  même  dont  parle  Eusebe,  com-  ,',"'17!^'*''"  ''' 
me   fait   contre   l'hérésie   d'Artemon  et  do  Theodote,  mois 
dont  il  ignoroit  le  nom  de  l'Auteur,  (jui  n'étoit  pas  nom- 
mé  dans   son   exemplaire.    Cet   Ecrivam    en   raporte  quel- 
ques   endroits    fort   i-emarquables.    On    y    voit   que    Caïus 
eombatoit  Artemon  par   l'autorité   des  Pères   qui   l'avoienl 
précédé,   nommément   de  saint  Justin,  de  Tatien,  de  saint 
Irenée ,    de   saint   Clément   Alexandrin ,    de   saint   Miltiade 
et   de   saint  Meliton.  '  Theodoret   en  parlant  de  cet  ouvra-  Th.in.  iiii.i. 
ge,  le  nomme  le  petit  Labyrinthe,  et  dit  que  quelques-uns 
l'atribuoient    à    Origene,    quoique    le    style    fît    assez   voir 
qu'il  n'en  pouvoit  être. 

4".  'Photms  parle  aussi  d'un  Livre  intitulé  le  Labyrinthe,  p^""  '''•'  p-  ^' 
aue  quelques  Ecrivains  donnoient  au  même  Origene,  et  que 
d'autres  assuroient  être  de  Caïus  Prêtre  de  Rome  sous  Ze- 
phyrin.  On  voit  par-là  que  Theodoret  et  Photius  marquent 
le  même  traité.  Mais  il  y  a  cette  différence  entre  ces  deux 
Auteurs,  que  Photius  paroîl  distinguer  le  Labyrinthe  d'a- 
vec l'ouvrage  contre  Artemon  :  au  lieu  que  Theodoret 
confond  l'un  avec  l'autre.  On  ne  nous  fournit  point  d'au- 
tres lumières  poui'  débrouiller  ce  fail. 

5".  '  L'Auteur  du  Labyrinthe  témoignoil  à  la  fin  avoir  wm.  p.  m\. 
composé  un  traité  sur  la  substance  de  t  Univers.  Mais  ce  trai- 
té se  trouvant  sans  nom  d'Auteur  dans  .son  origine,  les  uns 
le  donnèrent  ensuite  à  Joseph  à  cause  de  la  conformité  de 
style,  d'autres  à  saint  Justin,  quelques  autres  à  .saint  Ire- 
née, et  d'autres  enfin  à  Caïus.  Photius,  qui  supose  que  le 
Labyrinthe  étoit  l'ouvrage  de  Caïus ,  ne  croit  pas  lui  de- 
voir refuser  le  traité  De  T Univers,  ou  De  la  causede  f  Univers  ; 
car  cet  écrit  porfoit  tous  ces  titres.  Mais  il  n'ose  pas  assu- 
rer que  celui  qu'il  a  lu,  soil  !<-  même  que  celui  qu'avoit 
composé  Caïus. 

'Quoi  qu'il  en  soit,  l'ouvrage  dont  parle  Photius,    étoit  ""''• 
divisé    en   deux   Livres.    L'Auteur   y  montroit   que   Platon 


360     CAIUS,  EVEQUE  DES  NATIONS,  etc. 

m  SIECLE,  n'étoit  pas  d'acord  avec  lui-même.  11  y  Iraitoit  de  la  ma- 
tiere,  de  l'ame,  de  la  résurrection,  et  y  réfutoit  les  faux 
raisonnemens  et  les  absurdités  d'un  certain  Alcinoùs.  Il  y 
établissoit  ensuite  ses  propres  sentimens,  qu'il  oposoit  à 
ceux  qu'il  avoit  entrepris  de  réfuter,  et  prouvoit  que  les 
Hébreux  étoient  beaucoup  plus  anciens  que  les  Grecs.'  Il 
y  traitoit  encore  de  la  création  du  monde,  mais  seulement 
en  abrégé.  Il  y  parloit  dignement  de  Jésus  ,  lui  donnant 
la  qualité  de  Christ,  et  y  établissant  fort  bien  la  naissance 
ineffable,  qu'il  tire  de  son  Père  :  ce  qui  suffit  pour  ne  pas 
atribuer  cet  ouvrage  à  Joseph.  Seulement  Pnotius  juge 
que  les  sentimens  de  son  Auteur  sur  la  nature  de  l'ame, 
n'étoient  ni  conformes  à  la  doctrine  des  Juifs,  ni  dignes 
des  autres  savans  écrits  qu'il  avoit  composés  ;  puisqu'il 
atribuoit  à  l'ame  la  figure  du  corps  humain. 

noi.  p.  n-ii.  '  Hœschelius  dans  ses  notes  sur   Photius   nous  a   donné 

un  fragment  grec  qu'on  lui  avoit  envoie  d'Italie,  comme 
une  pièce  que  l'on  croioit  faire  partie  du  Li\re  De  l' Univers 
atribué  à  Joseph.  Il  y  est  parlé  de  l'état  des  Justes  et  des 
Impies,  après  la  mort,  de  l'enfer  et  du  paradis,  comme  en 
parleroit  un  Chrétien.  L'Auteur  avoit  lu  assurément  l'E- 
vangile et  les  Epîtres  de  S.  Paul,  auxquelles  il  fait  allusion 
en  divers  endroits,  pour  ne  pas  dire  qu'il  en  cite  les  pro- 
pres termes. 

iron.  pr.  p.  if.i.  Nous  avons  observé  ailleurs  '  que  Caïus  a  contribué 
après  saint  Irenée  son  Maître  à  conserver  à  la  postérité 
l'histoire  du  martyre  de  saint  Polycarpe,  par  le  soin  qu'il 
eut  d'en  fail*e  une  copie  sur  l'exemplaire  ae  saint  Irenee. 


S.  HIPPOLYTE, 


s.    HIPPOLYTE, 

EvEQUE,    Docteur  de   c/Er.LisE,  et  Martyr. 
HISTOIRE    DE   SA    VIE. 


--—      lit    SIKCI.K. 


I 


L  est  surprenant  que  l'on  n'ait  que  peu  de  chose  à  di- 
re sur  riiisloire  d'un  Père  de  l'Eglise  aussi  célèbre,  que 
l'a  été  saint  Uippolyte.  Mais  ce  n'est  pas  toujours  les  plus 
grands  hommes  ,  dont  les  actions  nous  sont  le  plus  con- 
nues. '11  fut  disciple  de  saint  Irenée  Evêque  de  Ljon,  au-  Phoc.  c.  121.  p. 
prés  duquel  il  paroît  qu'il  passa  un  tems  considérable.  Il  '"'■ 
assuroit  lui-même  dans  un  écrit  que  nous  n'avons  plus , 
que  tout  ce  qu'il  avoit  avancé  dans  un  de  ses  principaux 
ouvrages  ,  n'étoit  qu'un  abrégé  de  ce  qu'il  avoit  apris  sur 
le  sujet  qu'il  traitoit ,  de  la  bouche  même  de  ce  grand  Pré- 
lat. Il  s'est  acquis  par-là  la  qualité  d'Elevé  de  l'Eglise  de 
Lyon  ;  et  l'on  peut  assurer  que  jamais  personne  n'a  sou- 
tenu plus  glorieusement  ce  titre. 

Nul  ancien  Ecrivain  ne  parle  du  lieu  de  sa  naissance. 
'  Mr.  Basnage  entre  les  modernes  le  fait  naître  en  Orient  ,  Canis.  b.  «.  i.  p. 
et  le  supose  Prêtre  établi  en  Arabie.  Mais  comme  il  ne  ^ 
nous  donne  aucunes  preuves  de  son  opinion  ,  il  est  un  Au- 
teur trop  récent  pour  l'en  croire  sur  sa  parole  à  l'égard 
d'un  fait  aussi  éloigné  de  lui.  Son  sentiment  paroît  même 
oposé  à  ce  que  saint  Uippolyte  nous  a  apris  de  lui-même, 
et  que  nous  venons  de  raporter. 

On  est  mieux  fondé  à  dire  qu'il  naquit  dans  quelque  lieu 
de  nos  Gaules.  Ce  fut-Ià  qu'il  commença  à  se  faire  con- 
noître  dans  le  monde.  Ni  son  nom  qui .  est  grec  ,  '  ni  la  Hier.  ep.  83.  p. 
qualité  de  Sénateur  Romain  que  lui  donne  saint  Jérôme  ,  ^'^' 
ne  seroient  point  des  raisons  pour  empêcher  de  le  croire. 
On  sait ,  et  nous  l'avons  remarqué  ailleurs ,  que  les  noms 
propres  grecs  étoient  fort  communs  dans  les  Gaules  en  ces 

fjremiers  siècles  ,  et  que  les  Gaulois  avoient  entrée  dans 
e  Sénat  de  Rome  dès  l'Empire  de  Claude  ,  et  même  au- 
paravant. Ses  ouvrages   écrits  en  grec  ne  font  rien  non 

Tomff  I.  Prem.  Part.  A  a  a 

2  s 


362  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

II  SIECLE,   plus  contre  le  sentiment  que   nous   proposons.    On    a  vu 

—  dans   les   siècles  précédons   plusieurs  Gaulois ,    qui  n'ont 

écrit  qu'en  cette  langue. 

Saint  Hippolyte  ne  pouvoit  faire  que  de  grands  progrès 
dans  les  sciences,  sous  la  discipline  d'un  aussi  habile  Maî- 
ibid.|ep.53.p.579.  trc  quo  saiut  Ircnée.  '  Aus.si  saint  Jérôme  assure  qu'il  se  ren- 
dit  très-éloquent ,   et  qu'il   acquit  une  grande  connoissan- 
ce  de   la   Philosophie   et   des  autres  sciences  profanes.  On 
sait  de  reste  que  les  plus  grands  hommes  de  l'Eglise  ne 
regardoient   point   cette   sorte   d'érudition     comme  indigne 
d'un    véritable   Théologien.    Pour  ce  qui  est  de  la  Litera- 
ture  sacrée,  le  grand  nombre  d'écrits  qu'il  composa  en  ce 
genre,  est  une  preuve  completle  qu'il  y  étoit  parfaitement 
Ea».  1.6.  e. «.p.  versé.  De  même  ,  '  les  divers  ouvrages  qu'il  fit  pour  trou- 
^l'in^*c\u"'  ver  et  déterminer  le  jour  auquel  on  doit  faire  la  Pâque, 

montre  qu'il  possedoit  à  fond  la  science  des  tems. 
Act.  Mar.  p.  155.       '  Commc   il  s'cst  trouvé   plusieurs  Saints  illustres  ,   qui 
"•  *•  ont  porté  le  nom  d'Hippolyte  ,   on  les  a  souvent  confon- 

dus; et  cela  no   doit  pas   surprendre.   Prudence,  qui  étoit 
assez  près  de  leur  tems  ,   en  a  confondu  lui-même  trois  tout 
Tm.H.  E.  t.3.p.  à  la  fois.  'Mais  l'on  convient  que  le  plus  célèbre  dans  tou- 
•  p.  239.  te   l'antiquité  ,  est  celui   qui  fait  le  sujet  de  cet  éloge,  *  et 

qui  a  réuni  en  sa  personne  les  qualités  d'Evêque  ,  de  Do- 
cteur de  l'Eglise  et  de  Martyr. 

Il  quita  l'Eglise  de  Lyon  ,  sans  que  l'on  puisse  dire  pré- 
cisément pour  quel  sujet.  Peut-être  la  violence  de  la  per- 
sécution à  la  mort  de  saint  Irenée  ,  le  contraignit- elle 
d'aller  chercher  ailleurs  un  asyle  plus  assuré.  Peut-être 
aussi  le  désir  d'annoncer  J.-C.  aux  nations  qui  n'en  avoient 
pas  encore  entendu  parler,  lui  fit-il  former  le  dessein  d'al- 
ler porter  le  flambeau  de  la  foi  dans  les  païs  étrangers. 
Eus.  1.6.  e.  80.  p.  '11   fut   dcpuis  élcvé  à    l'épiscopat.    Mais  ceux  qui   étoient 

attS    Hier.  ibid.  ,         ,  T'       i      i  .11  1  . 

plus  a  portée  de  le  savoir ,  ne  nous  aprenent  point  quelle 
67î'  e's'  rê^'  ^ë^^^^  ^ï  '^  gouvernée.  '  De  -là  tant  de  diverses  opinions 
p.  éï.i.       "*'  entre  les  Ecrivains  (')  des  siècles  suivans,  qui  ont  entrepris 


Canis.B.ibid.  p. 3.  (I)  '  L«  premier  qui  a  fixé  nn  siège  à  S.  autrv  chose,  sinon  que  Berylle  étoit  Evé- 
Hippolyle,  est  le  Pape  Gelase  à  la  fin  du  que  de  Boslre  en  Arabie,  et  que  S.  Hip- 
V  siècle.  Mais  ce  Ponlife  en  le  faisant  polyte  avoit  aussi  gouverné  une  aatre 
Métropolitain  d'Arabie  ,  n'a  avancé  celle  Eglise  en  certain  lieu  :  ôioaÛTtoç  8à  *a\  \Kr.6- 
opinion  qu'en  prenant  mal  le  sens  de  Ru-  XuTO«hspo«7couxat(iuTbîj:poEOTÔ>{l>odr,'j(a«. 
fin,  qui  avoit  mal  traduit  lui-même  le  Voilà  donc  cette  première  et  plus  ancien- 
texte   grec    d  Ensebe.    Ce    texte  ne  porte  ne  opinion  détraite  par  Eusebe  même  sur 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.    363 

de  le  deviner  :  entreprise  qui  a  plus  embrouillé  le  point  d'his-    m  siècle. 

toire   que  l'on   vouloit  developer  ,   qu'elle  n'a  servi  à  l'é- 

claircir.    '  De  sorte  qu'on   est  encore  aujourd'hui  réduit  à  Tiii.  p.  î39. 

dire  ,  qu'il  est  aussi  certain  que  saint  Hippolyte  a  été  Evê- 

que  ,  comme  il  est  incertain  quel  siège  il  a  rempli.  Et  qui 

pourroit  se   flater  de  le  savoir  ,  '  après  que  saint  Jérôme  n'a  Hier.  ibid. 

pu  y   réussir  ,   malgré   toutes  les  recherches  qu'il  fit  pour 

cela  dès  le  IV  siècle  1 

Si  Eusebe  ne  donnoit  pas  à  saint  Hippolyte  une  certai- 
ne Eglise  quoiqu'indéterminée  ,  nous  croirions  volontiers 
qu'il  n'auroit  point  eu  de  siège  fixe,  et  qu'il  auroit  été 
Evêque  des  nations ,  comme  Caïus  son  condisciple  ,  dont 
nous  avons  déjà  parlé.  Cette  opinion  paroît  sans  contre- 
dit la  plus  naturelle  ,  et  s'acorde  parfaitement  avec  l'his- 
toire de  nôtre  Saint.  Dans  ce  cas  on  ne  seroit  plus  emba- 
rassé  à  rendre  raison  de  ce  qu'il  paroît  en  Orient  et  en 
Occident ,  comme  on  le,  voit  par  le  peu  que  nous  savons 
de  ses  actions.  Qu'il  ait  été  en  Orient ,  on  n'en  peut  dou- 
ter ;  '  puisque  dans  un  de  ses  écrits  il  assuroit  avoir  eu  Ori-  «Wd. 
gène  au  nombre  de  ses  auditeurs,  ce  qui  n'a  pu  arriver  en 
Occident.  De  même  on  ne  peut  révoquer  en  doute  qu'il 
n'ait  demeuré  en  Occident ,  depuis  même  qu'il  eut  quité 
l'Eglise  de  Lyon.  La  preuve  en  est  sans  réplique;  puisque 
l'on  voit  qu'il  suivoit  la  suputation  des  tems  à  l'usage  des 
Latins  ,  prèférablement  à  celle  des  Alexandrins  que  sui- 
voient  tous  les  Orientaux. 


qui  l'on  apnïoit.  Les  antres  qui  se  sont 
formées  daiis  la  suite  n'ont  pas  plus  de 
fondement.  En  effet,  celle  qui  fait  nâtre 
Saint,  Evèqae  de  Porto,  et  qui  paroît 
avoir  été  U  plus  géiiéralemcnt  suivie  en 
ces  derniers  siècles,  n'est  établie  selon  tou- 
te aparence  que  sur  la  confusion  qu'on  a 
faite  du  grand  S.  Hippolyte  dont  nous 
parlons,  avec  un  autre  Saint  du  même 
nom,  qui  souffrit  le  martyre  à  Porto,  et 
dont  Prudence  a  Tlécrlt  l'histoire.  Ce  n'est 
que  pour  sauver  l'opinion  qui  établit  le 
siège  de  S.  Hippolyte  à  Porto  ,  •  que  Mr. 
le  Moyne  a  avancé  la  sienne  qui  le  fait 
Evêque  du  Port  que  les  Romains  avoient 
anciennement  en  Arabie.  Il  faut  avouer 
que  cette  opinion  est  la  plus  ingenieu-'e; 
mais  elle  n'a  pas  plus  de  certitude  que  les 
antres.  On  ne  trouve  nulle  part  que  ce 
Port  des  Romains  eût  un  siège  épiscopal 
en  ces  premiers  siècles.   De  prétendre  en- 

2  9  * 


fin  que  S.  Hippolyte  a  été  Evêque  de  Ti- 
voli ,  parce  qu  on  a  trouvé  en  ces  dernier* 
tems  sa  statué  près  de  cette  ville,  c'est 
s'apuler  sur  un  fondement  bien  ruineux. 
En  effet ,  la  découverte  de  cette  statue 
n'est  point  une  marque  certaine  que  le 
Saint  qu'elle  représente  v  eût  été  inhumé. 
Pourouoi  ?  c'est  que  l'on  puuvoit  fort 
bien  ravoir  fait  faire  à.  l'ocasion  de  quel- 
que cliapelie  érigée  en  son  honneur. 
Quant  à  l'oDinion  qui  fait  S.  Hippolyte 
Evêque  de  Rome,  nous  ne  nous  y  arrê- 
tons pas.  Elle  est  aujourd'hui  rejetée  de 
tous  les  Savans.  Mais  comme  ce  sont  les 
Grecs  qui  l'ont  particulièrement  qualifiée 
de  la  sorte,  on  pourroit  fort  bien  croire 
qu'ils  ne  l'ont  fait  que  pour  donner  à  en- 
tendre qu'ils  le  regardoient  comme  Evê- 
que Latin,  et  non  Grec.  Car  on  sait  qu'en 
leur  langue  les  termes  Latin  et  Romain 
sont  synonymes. 


•  Var.  Sacr.t.i. 
29.   30. 


Aa  ij 


364  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

III  SIECLE.        Quoi  qu'il  en  soit,  l'obscurité  du  siège  que  remplit  saint 
Eus  1  6.C  sj.p.  Hippolyte    ne    s'est  point  étendue  sur  sa  personne.  '  Il  est  re- 
3J3 1  chr.  p.  219.  gardé  comme  l'un  des  plus  illustres  Pères  de  ce  III  siècle, 
au  commencement  duquel  il  fleurissoit.    Il   paroissoit  avec 
éclat  sur-tout  en  228  entre  les  plus  savans  hommes  de  l'E- 
glise.   Quelque    peu   de  connoissance  que  nous  aïons  du 
grand  nombre  d'ouvrages  qu'il  composa  ,  nous  ne  laissons 
pas  d'en  tirer  assez  de  lumière  pour  juger  que  toute  sa  vie 
lut  emploïée  ou  à  instruire  les  peuples  que  la  providence 
avoit  confiés  à  ses  soins  ,  ou  à  combatre  les  hérésies  de  son 
tems ,  ou  enfin  à  éclaircir  les  difficultés  de  l'Ecriture.  Il 
est  peu  de  Pères  en  ces   premiers   siècles,   qui  aient  plus 
travaillé  sur  les  Livres  sacrés  que  saint  Ilippolyte.  Il   faut 
même  qu'il  l'eût  fait  avec  beaucoup  de  succès  et  d'aplau- 
Hi«r.  ibid.  disscment  ;   '  puisqu'Ambroise   homme    riche    d'Alexandrie 

se  servit  de  son  exemple  pour  porter  Origene  à  entre- 
prendre le  même  travail. 

La  plupart  des  anciens  et  tous  les    modernes  s'acordent 
Tiii.  ibid.  p.  2«.  à  donner  à  nôtre  Saint  le  titre  de  Martyr.  '  Mais  on  igno- 
re et  le  tems  et  le  lieu  où   il  a  soufîerl.  On  croit  cepen- 
dant qu'il   a  vécu  jusqu'en     235 ,  et  peut-être  même  jus- 
canis.  B.  t.  I.  p.  qu'cn  250.  '  M'.  Basnage  refuse  de  mettre  son  martyre  sous 
^-  1  Empire   d'Alexandre ,   parce   qu'il   n'y  eut   alors    aucune 

persécution  contre  les  Chrétiens.  Mais  un  soulèvement  de 
quelques  Païens  no  suffisoit-il  pas  pour  lui  ôter  la  vie?  Il 
seroit  plus  porté  à  placer  cette  mort  sous  Maximin  I  suc- 
cesseur d'Alexandre ,  qui  régna  depuis  la  fin  de  l'Empire 
v-  s  de  celui-ci  en  233  jusqu'en  238.  '  Il  ne  laisse  pas  toutefois 

de  suposor  que  nôtre  Samt  put  vivre  encore  jusqu'au  règne 
de  Zenobie  Reine  de  Palmyre  :  ce  qui  est  prolonger  sa  vie 
au-delà  d'un  terme  raisonnable. 

L'estime   et  la   vénération   qu'ont    eu    les  anciens   pour 
saint   Ilippolyte ,  paroissenl   par   les   éloges  qu'ils    lui    ont 
Hipp.  t  I.  pi.  p.  donnés.  '  S.  Chi^sostome,  ou  un  autre  ancien  Auteur  sous 
^'  son  nom  ,  lui  atribuë  un  génie  excellent  et  une  éloquence 

très-suave  ,  et  ne  fait  pas  difficulté  de  le  mettre  en  paral- 
lèle avec  saint  Ignace  Martyr,  et  saint  Denys  de  Corinthe 
Tiii.  ibid.  p.  âio.  OU  d' Alexandrie.  '  Theodoret  le  regarde  comme  une  de  ces 
fontaines  spirituelles,  par  le  moïen  desquelles  Dieu  ré- 
pand la  source  de  ses  lumières  sur  son  Eglise.  Un  saint  Con- 
fesseur du  VII  siècle ,  c'est  saint  Anaslase ,  le  qualifie  plu- 


7*o«t-  ■  f^p  ttt-Ui  *^Y»  ^ ,  a  (tB 


In.  S'€4i-9  nut' 


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Vrbi*inayroVa'MiaaiuiotSfi.»tu>.BiSL,rlhei><xmVajticanainir^nj/ata..9,.lSxf^^  pmr 


illl.p* 


uil't.  Ttud Vaptmi.-Aj^s. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.  365 

sieurs  fois  un  grand  et  très-sacré  Docteur,  un  fidèle  té-   m   siècle. 
moin  de  la  vérité,' un  organe  du  S.  Esprit.  *  Léonce  de  By-      [     ~ 
zance  le  compte  entre  les  plus  illustres  Pères  de  l'Eglise,  '"'•'*'■  '^"'' 
qui  ont  fleuri  depuis  J.-C.  jusqu'à  l'Empire  du  grand  Con- 
stantin. 

Ecrits  qui  nous  restent  de  lui. 

RrE>  n'a  plus  contribué  à  rendre  célèbre  le  nom  de 
saint  Hippolyte  dans  toute  i'antiquité  icclésiastique, 
que  le  grand  nombre  d'ouvrages  dont  il  a  enrichi  l'Egli- 
se. Il  est  aisé  de  juger  de  l'estime  extraordinaire  qu'on  a 
fait  de  ses  écrits,  par  les  fréquentes  citations  qu'on  en 
trouve  dans  les  Pères  tant  Grecs  que  Latins.  Ils  étoient  si 
généralement  estimés,  qu'on  en  gravoit  quelquefois  les 
listes  sur  le  marbre,  pour  en  conserver  au  moins  les  titres 
h  la  postérité.  Malgré  cette  précaution,  les  siècles  d'igno- 
rance et  les  autres  malheurs  des  tems  nous  ont  enlevé  la 
plus  grande  partie  de  ces  monumens  précieux.  Nous  al- 
lons marquer  d'abord,  selon  l'ordre  que  nous  nous  som- 
mes prescrit,  le  peu  qui  nous  en  reste  en  son  entier.  Nous 
parlerons  ensuite  de  ceux  dont  nous  n'avons  que  quelques 
fragmens,  ou  seulement  une  simple  notion. 

1".  Entre  ceux  que  l'on  nous  a  conservés  en  leur  entier, 
on  peut  mettre  au  premier  rang  '  son  Cycle  Pa.scal.  Il  ne  Hipn.  can.  p.  i\ 
nous  restoit  plus  que  le  nom  de  ce  Cycle,  lorsqu'on  le  vit  luî.il'.'E^V.^p. 
comme  renaître  en  1551.  En  fouillant  alors  dans  les  ma-  ***• 
sures  d'une  ancienne  Eglise  dédiée  à  un  autre  saint  Hippo- 
lyte,  sur  le  chemin  de  Tivoli  du  côté  de  Saint- Laurent, 
on  trouva  une  statue  de  marbre  assise  dans  une  chaise  de 
même  matière.  Aux  deux  côtés  du  bas  de  la  chaise  étoient 
gravés  en  letres  gréques  des  Cycles  de  seize  ans,  les  qua- 
torzièmes de  la  lune  d'un  côté,  les  Dominicales  de  l'autre. 
Ces  Cycles  commencent  à  la  première  année  de  l'Empire 
d'Alexandre  Severe,  qui  étoit  la  222*  de  l'Ere  Chrétien- 
ne, et  étant  redoublés  sept  fois,  regloient  la  fête  de  Pâ- 
que  pour  112  ans,  c'est-à-dire  jusqu'en  333.  Quoique  le 
nom  de  saint  Hippolyte  ne  paroisse  pas  sur  ce  rare  monu- 
ment ,  personne  ne  douta  que  ce  ne  fût  et  sa  statue  et  son 
Cycle  Pascal.   On  en  fut  particulièrement  convaincu  ,  lors- 


366  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

Il  SIECLE,    qu'on  vit  à  côté  une  table  des  titres  de  quelques  ouvrages 

qui  sont  certainement  de  lui.  La  statue  avec  la   chaise  et 

ses  inscriptions  fut  mise  dans  la  Bibliothèque  du  Vatican, 

où   elle  fait  encore  aujourd'hui  l'objet  de  la  curiosité  des 

Savans.  Nous  croïons  faire  plaisir  à  nos  Lecteurs  de  leur 

en    mettre    ici    l'estampe   sous    les    yeux ,  telle   que    nous 

l'avons  reçue  de  Rome.  Elle  est  même  nécessaire  à  cause 

des  titres  qui  s'y  lisent  de  divers  ouvrages  de  nôtre  Saint. 

Eu».  1. 6. c. îs. p.       'Ce  Cycle  de  seize  ans  ne  faisoit  qu'une  partie  de  deux 

^gl"'*'"  ^""'       ou  trois  autres  ouvrages  de  saint  Hippolyte  sur  la   Pâque, 

desquels  nous  parlerons  dans  la  suite.  Il  est  reconnu  pour 

être  de  nôtre  Saint,  non  seulement  par  Eusebe  et  saint  Je- 

Bncb.  p.  439.       rômc,  '  mais  encore  par  Anatole  Evêque  de  Laodicée  en 

Syrie ,  qui   vivoit    au    même    siècle   que   saint  Hippolyle, 

Hier.  ibid.  '  C'cst  ce  Cycle  qui  selon  saint  Jérôme  donna  ocasion  à  Eu- 

liiu.ori.  1.6.C.17.  scbe  d'en  composer  un  autre  de  19  ans.  '  S.  Isidore  de  Sevil- 

•*■  "■  le  l'a  regardé  comme   le    premier  Cycle  Pascal  qui  ait  été 

Tui.  ibid.  jamais  fait  dans  l'Eglise.  '  Il  est  au  moins  le  plus  ancien  que 

nous  aïons. 

Gruter  l'a  inséré  en  grec  avec  la  liste  des  titres  d'ouvra- 
ges parmi  ses  anciennes  inscriptions,  et  Joseph  Scaliger 
dans  la  seconde  édition  de  son  grand  ouvrage  de  la  Cor- 
rection des  (ems.  '  M'.  Fabricius  l'a  mis  ensuite  avec  la 
même  liste  dans  le  recueil  qu'il  a  publié  des  écrits  de  saint 
Hippolyte .  '  Scaliger  a  fait  davantage.  Après  avoir  ex- 
pliqué l'un  et  l'autre  par  d'assez  longs  commentaires,  il  fit 
imprimer  le  tout  à  Leyde  l'an  1595  en  un  petit  volume  m- 
4".  '  Après  lui  le  P.  Giles  Boucher  a  mis  ce  Cycle  en  latin, 
et  l'a  expliqué  dans  sa  collection  des  Cycles  de  Pâque.  '  De- 
puis, M'.  Bianchini  de  Vérone,  dans  une  fameuse  disserta- 
tion publiée  à  Rome  en  1703,  a  expliqué  de  nouveau  le 
Cycle  de  saint  Hippolyte,  et  prétend  que  ni  Scaliger,  ni 
le  P.  Boucher  ne  l'ont  pas  bien  entendu.  Le  P.  Petau,M'. 
Cassini  et  peut-être  encore  quelques  autres  ,  ont  travaillé 
sur  le  même  monument  et  en  ont  donné  leurs  explications. 
On  peut  joindre  à  ceux-là  M'.  Vignoli  Garde  de  la  Biblio- 
thèque du  Vatican ,  qui  a  publié  deux  savantes  disserta- 
tions sur  la  première  année  du  règne  d'Alexandre  Severe, 
dont  il  est  parlé  dans  ce  Cycle. 

2".  Un  des  plus  célèbres  ouvrages  de   saint  Hippolyte 
sw'  p^'ss» *""■  '   ^^*  *^"  ^""^^'^  ^^^  l'Antéchrist.  '  On  savoit  qu'il  avoit  tra- 


Uipp.  t.l. 

p.  38-40. 

Bib.  S.  Vinc. 

Cen. 

Bacb.  p. 

891-3ia. 

F«b.  Bib. 
p.  304. 

gr. 

1.  5. 

DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.     367 

vaille  sur  ce  sujet,  par  le  témoignage  de  saint  Jérôme  et    m  siècle. 
de  Photius,  qui  avoient  lu  l'un  et  l'autre  ce  qu'il  en  avoit 
publié.  '  Mais  nous  en  avons  été  privés  jusqu'en  1661,  (jue  Fab.iWd.p.  aosi 
l'écrit  fut  tiré  de  la  poussière  des  Bibliothèques  de  Reims  "*pp-  '•  *•  P'  ^• 
et  d'Evreux,   et   donné   au   public.    Nous   sommes  redeva- 
bles de  cette   heureuse   découverte  à   M'.  Marquardus  Gu- 
dius ,  non  Hollandois  comme  quelques-uns   l'ont   qualifié , 
mais  d'Holstein   en  basse  Saxe ,  depuis  Conseiller  du  Roi 
de  Dannemark. 

'  Les  manuscrits  d'où  l'ouvrage  a  été  tiré ,  lui  donnent  Hipp.  ibid.  p.  8. 
pour  titre  Airo^ei^iç  irspl  XpisTo-j  xal  AvTiypi(rroù,  Traité  sur 
Jesus-Curist  et  sur  l'Antéchrist.  Photius  l'intitule  de  la 
même  manière.  Mais  comme  l'ouvrage  n'a  paru  à  M'.  Gu- 
dius  traiter  que  de  l'Antéchrist,  il  a  cru  en  devoir  retran- 
cher la  première  partie  du  titre,  qu'il  regardoit  comme 
une  faute  des  Copistes,  à  laquelle  Photius  auroil  donné 
ocasion  ;  aimant  mieux  s'en  raporter  à  saint  Jérôme  qui 
ne  l'intitule  que  de  l'Antéchrist. 

'  S.  Hippolyte  le  composa  ensuite  d'une  conférence  qu'il  p  *■  n.i. 
avoit  eue  avec  un  nommé  Théophile ,  qu'il  qualifie  son 
très-cher  frère ,  et  qui  faisoit  paroître  une  grande  passion 
de  s'instruire  sur  celte  matière.  En  lui  adressant  son  ouvra- 
ge,'  il  lui  marque  le  soin  infini  que  nous  devons  aporter  p  s.  n.  2. 
pour  ne  rien  changer  à  ce  que  nous  aprenons  de  nos  Maî- 
tres. Ensuite  il  le  prie  de  s  unir  à  lui  pour  l'aider  par  ses 
prières  auprès  de  Dieu ,  afin  qu'il  le  conduise  dans  l'éclair- 
cissement qu'il  entreprend  de  donner  aux  passages  de  l'E- 
criture qui  parlent  de  l'Antéchrist. 

'  Venant  au  dessein  de  son  ouvrage ,  il  dit  qu'il  va  ta-  p.  7.  n.  s. 
cher  de  montrer  par  l'Ecriture ,  quel  sera  l'avènement  de 
l'Antéchrist  ;  en  quel  tems  précis ,  et  de  quelle  manière  se 
manifestera  cet  impie  ;  d'où  il  sortira ,  de  quelle  tribu  il 
prendra  naissance  ;  quel  sera  son  nom  marqué  par  le  nom- 
bre exprimé  dans  l'Ecriture  ;  comment  il  séduira  les  peu- 
ples en  les  assemblant  des  extrémités  de  la  terre  ;  quels 
seront  les  maux  et  la  persécution  qu'il  fera  souffrir  aux 
Saints  ;  comment  il  s'élèvera  comme  s'il  étoit  Dieu  ;  quel- 
le sera  sa  fin  ;  comment  se  fera  la  manifestation  de  J.-C.  ; 
quand  il  viendra  du  del  ;  quel  sera  l'embrasement  qui 
consumera  l'Univers  ;  enfin  quelle  sera  la  roïauté  glorieuse 
et  céleste  des  Saints  qui  régneront  avec  J.-C.  et  le  suplice 
que  les  méchans  souffriront  par  le  feu.  ''i 


368  S.   HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

m  siKchE.  •Entrant  ensuite  en  matière,  il  dit  que  l'Antéchrist  ré- 
.  iiip,).  ibid.n.e.  tablira  l'ancien  temple  de  Jérusalem ,  "*  et  qu'il  naîtra  de  la 
bp.tt-u.  tribQ  de  Dan:  ce  qu'il  tâche  de  prouver  par  les  paroles 

que  Jacob  adressa  à  son  fils  de  même  nom ,  et  par  plusieurs 
p.  85,  n.  50.  endroits  des  Prophètes.  '  Lorsqu'il  en  vient  au  nom  de  la 
Bête ,  il  déclare  au'il  n'a  ni  la  présomption ,  ni  assez  d'in- 
telligence pour  déterminer  ce  que  l'Auteur  sacré  a  voulu 
signifier  par-là.  11  propose  néanmoins  quelques  noms, 
comme  Titan  et  Euanthas ,  où  se  trouve  le  nombre  666. 
Mais  il  ajoute  aussi-tôt,  que  s'il  s'agit  d'un  nom  d'hom- 
me ,  ce  sera  un  Latin ,  plutôt  qu'un  Grec  ou  tout  autre. 

Saint  Hippolyte  ne  fait  que  toucher  succinctement  les 
points  qu'il  s'est  proposé  de  traiter.  Il  ne  détermine  point 
le  tems  auquel  paroîtra  l'Antéchrist ,  quoiqu'il  eût  promis 
de  le  faire.  11  confond  avec  l'Antéchrist  la  première  et  la 
seconde  Bête  dont  parle  saint  Jean  ;  quoiqu'il  paroisse  par 
le  texte  même  que  ce  sont  des  choses  différentes.  Au  reste 
M'.  Gudius  a  été  trop  scrupuleux  pour  avoir  retranché  la 
première  partie  du  titre  de  cet  ouvrage.  Il  y  est  dit  assez 
de  choses  de  J.-C.  pour  porter  le  titre  entier  au'il  a  dans 
les  manuscrits  et  dans  Photius.  S.  Hippolyte  y  donne  beau- 
coup dans  la  figure, 
p.  i8.n.36 1  p.».       '  Il  y  reconnoît  en    divers    endroits    l'Apocalypse    pour 

11.50.  I,  •'  ,  .     .      T  /  »»    •  '■  ""i-i        '^    • 

Tiii.  ib.  p.  8iG.  1  ouvrage  de  samt  Jean.  Mais  on  remarque  qu  il  y  cite 
comme  de  l'Ecriture  certaines  paroles  qui  n'en  sont  pas. 
11  n'y  parle  au  reste  qu'avec  beaucoup  de  reserve,  comme 
en  usoient  plusieurs  des  anciens  Pères,  qui  ne  parloient  de 
la  vérité  qu'avec  peine,  de  peur  de  n'en  pas  parler  d'une 
manière  digne  de  Dieu  et  propre  à  édifier  les  autres. 
Piioi.  ibid,  '  Photius ,  qui  avoit  lu  ce  traité ,  témoigne  que  les  pen- 

sées en  sont  simples ,  et  qu'elles  portent  un  caractère  d'an- 
ti<]|uité  ;  mais  qu'il  y  a  des  choses  qui  ne  sont  pas  dans  l'exa- 
ctitude que  l'on  a  gardée  dans  la  suite. 

Après  l'édition  que  M'.  Gudius  en  publia  à  Paris  ea 
Bib.^pp.i.aT.p.  1661 ,' le  P.  Combefis  en  fit  une  traduction  latine  qu'il  a 
•iii'pp.  il .  p.  4-  mise  au  27*  volume  de  la  Bibliothèque  des  Pères.  '  M'.  Fa- 
"  bricius  en  donnant  de  nouveau  l'écrit  au  public  à  la  tête 

des  œuvres  de  saint  Hippolyte ,  où  il  est  en  grec  et  en  la- 
tin ,   l'a  revu   sur  l'édition  de  M'.  Gudius ,  et  y  a  corrigé 
plusieurs  fautes  qu'avoit  faites  le  P.  Combefis. 
P  273-877  I  DU).      30.  '  Le  même  Editeur  de  saint  Hippolyte  nous  a  donné 

pp.  ib.  p. 9.  1-10.  ^^     "' 


en 


DOCTEUR   DE    L  EGLISE,  ET   MARTYR.  369 

en  grec  et  en  latin  une  courte  explication  de  l'histoire  de   m  siècle. 
Susanne ,  que  le  P.  Combefis  n'avoit  publiée  qu'en  latin  à  "' 
la  suite  du  traité  sur  l'Antéchrist.  Il  ne  paroît  pas  y  avoir 
de   doute   que  cet   opuscule  ne   soit  de  nôtre  Saint.  On  y 
remarque  sans  peine  le  caractère  de  son  génie.  Il  y  a  sur- 
tout beaucoup  de   conformité   entre    l'explication   mystique 
de    cette  histoire,  '  et  l'endroit  du  traité  sur  l'Antéchrist,  Hipp.  p.  sa.  n.ss. 
où   saint    Hippolyte  exphque  les   premiers   versets   du  18^ 
chapitre    d'Isaie.  '  D'ailleurs  on  sait  par  le  témoignage  de  p.  272. 
George   le    Syncelle,    que  nôtre   Saint  avoit  écrit  sur  l'his- 
toire de  Susanne. 

'Le  petit  commentaire  dont  il  est  ici  question,  expli-  Bib.  pp.  ibid 
que  cette  histoire  d'une  manière  mystique.  L'Auteur  dit 
que  Susanne  étoit  la  figure  de  l'Eglise;  Joachim,  de  J.-C. 
Que  le  Verçer  signifie  la  vocation  des  Saints,  qui  sont 
plantés  dans  l'Eglise  comme  des  arbres  fruitiers.  Que  les 
deux  Vieillards  sont  le  symbole  des  deux  peuples,  les  Juifs 
et  les  Gentils,  qui  ne  cessent  de  tendre  des  embûches  à 
l'Eglise. 

'  Sur  ce  que  l'histoire  de  Susanne  se  trouve  à  la  fin  du  p-  9  « 
livre  de  Daniel,  quoiqu'il  soit  constant  qu'elle  soit  arrivée 
avant  presque  tous  les  autres  faits  raportés  par  le  Prophè- 
te, saint  Hippolyte  dit  qu'il  est  assez  ordinaire  aux  Ecri- 
vains sacrés  de  renverser  l'ordre  des  tems.  Qu'ils  en  usent 
de  même  par  un  dessein  particulier  de  Dieu,  de  peur  que 
le  Diable  comprenant  ce  qui  a  été  révélé  aux  Prophètes 
en  paraboles,  n'en  prît  ocasion  de  tendre  de  nouvelles 
embûches  aux  hommes  pour  les  perdre.  Cette  pensée 
aprocbe  beaucoup  de  celle  que  saint  Jérôme  attribue  à 
saint  Ignace  Martyr,  touchant  le  mariage  de  la  sainte 
Vierçe  avec  saint  Joseph. 

Au    reste  ce  petit  écrit  ne  contient  rien  d'indigne  de  S. 
Hippolyte.   Le  tems  même  auquel    il  a  été   composé   con- 
vient fort  bien  au  siècle  de  ce  Père  ;' puisqu'on  voïoit  en-  ibid. 
core    alors,   comme    il    le  marque,  les  Juifs  et  les  Gentils 
conspirer  contre  l'Eglise,  '  et  des  Chrétiens  acusés  d'aller  p.  10. 1. 
contre   les  ordres  des  Empereurs,  conduits  aux  tribunaux 
et   condamnés  à  mort.  '  Il  paroît  par  la  fin  que  cette  peti-  s. 
te  explication  est  une  homélie  prêchée  au  peuple. 

4".  '  Nous  avons  encore  de  saint  Hippolyte  un  discours  Hipp.  t.  i.p.îei- 
ou    homélie   sur    la  Theophanie  en  grec  et  en  latin.  Elle  ***" 

Tome  /.  Prem.  Part.  B  b  b 

3  0 


370  S.   HIPPOLYTE,    EVEQUE, 

m  SIE^CLE.    commence    par    ces    mots,     navra     [tèv     y.alk    xal     xa>.à    Xiav, 

Toutes  les  œuvres  de  Dieu  sont  souverainement  bonnes  :  paro- 
les qui  paroissent  prises  du  39"  chapitre  de  l'Ecclésiastique,  et 

pr.  p.  7.  faire  le  texte  de  l'homélie.  '  La  version  latine  de  cette  pie- 

ce  est  de  M'.  Fabricius,  qui  en  avoit  reçu  d'Angleterre 
le  texte  grec.  M'.  Wolsius  l'avoit  tiré  d'un  manuscrit  apar- 
tenant  à  Thomas  Gale. 

Cette  homélie  semble  avoir  été  prononcée  devant  les 
Gentils.  Elle  traite  particulièrement  au  baptême  de  J.-G. 
et  de  ses  effets,  sur-tout  par  raport  aux  hommes.  Tantôt 
l'Auteur  s'y  adresse  à  une  seule  personne,  tantôt  à  plu- 
sieurs. On  n'y  trouve  rien  qui  ne  convienne  et  à  la  doc- 
trine et  au  tems  de  saint  Hippolyte.  On  y  aperçoit  mê- 
me tout  son  style,  et  quelques  façons  de  s'exprimer  qu'il 
emploie  dans  d'autres  ouvrages  qui  sont  certainement  de 
lui. 

On  pourroit  croire  avec  quelques   Savans,   que  cette  ho- 

Hi«r.  ibid.  mcHe  cst  la  même  '  que  saint  Jérôme  marque  entre  les  au- 

tres écrits  de  saint  Hippolyte,  sous  le  titre  d'Homélie  à  la 
louange  du  Sauveur.  Mais  on  n'y  lit  point  ce  qu'ajoute  saint 
Jérôme,    savoir  que   nôtre  Saint  y  disoit  avoir  eu  Origene 

Fab.  Bib.  gr.  t.  5.  au  uombrc  de  ses  auditeurs.  '  Il  est  vrai  que  pour  lever  cet- 

p]  m.'i^"*' ""'  ^6  difficulté  l'on  prétend,  que  ce  trait  avancé  par  saint 
Jérôme  n'est  qu'une  erreur,  qui  doit  sa  naissance  aux  pa- 
roles mal  entendues  du  23*  chapitre  de  6*  Livre  d'Eusebe, 
et  que  M".  Huet  et  Valois  ont  réfutée.  Mais  cela  ne  passe 

{)as  pour  aussi  constant  qu'on  le  donne.  S.  Jérôme  ne  par- 
e  point  ici  d'après  Eusebe.  11  parle  de  Livres  qu'il  a  lus 
lui-même.  Ainsi  il  y  a  toute  aparence  que  l'homélie  mar- 
quée par  ce  Père  est  perdue  comme  plusieurs  autres  du 
même  Auteur.  C'est  de  quoi  nous  pourrons  parler  dans  la 
suite. 
Posi.  app.  t.  2.p.  5°.  '  En  1G06  Possevin  publia  dans  son  Apparat  un  petit 
'*"'*■  traité    latin  contre  les  Juifs  sous  le  nom  de  saint  Hippoly- 

te. François  Turrien  l'avoit  déjà  tiré  de  la  poussière,  sans 
donner  le    texte   grec  sur  lequel  il  avoit  fait  sa  traduction 
Hipp.  t.  i.p.  218.  latine.  'Depuis  M'.  Fabricius  a  inséré  cette  version  dans  le 
M  's.  p.  2-5.       premier  volume    des   œuvres  de  nôtre  Saint.  '  Mais  aïant 
ensuite  recouvré  le  texte  original  par  le  moïen  de  Dom  de 
Montfaucon    qui    l'avoit    eu  d'un  manuscrit  du  Vatican,  il 
nous   a  donné  l'un  et  l'autre  au  2"  tome  de  son  édition. 
<3  a  M 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.  371 

L'exemplaire   grec   ne  qualifie  saint  Hippolyte  que  simple   m  siècle. 
Evêque  et  Martyr. 

'  Cet  écrit  n  est  que  le  fragment  d'un  plus  long  ouvrage. 
L'Auteur   y   commente  succintement  le  Pseaume   68,  qui 
contient  plusieurs  traits  prophétiques  de  la  passion  du  Sau- 
veur,   et  s'en  sert  pour  combatre  les  Juifs.  '  M'.  Basnage  canis.  b.  1. 1.  pr. 
regarde    cet    opuscule   comme  un  ouvrage  suposé   à    saint  P"  ^' 
Hippolyte,    sans   néanmoins  en  donner  de  bonnes  raisons. 
'  M',  du  Pin  se  contente  de  dire  qu'il  n'est  pas  certain  qu'il  du  Wn,  Bib.  t.  i. 
soit    de    lui.   Mais  quiconque  voudra  le  lire  avec  atention,  P"'*** 
n'y    trouvera  rien  d'indigne  de  nôtre  saint  Docteur,  ni  de 
contraire  à  son  siècle.  On  y  apercevra  même  ses  fréquen- 
tes apostrophes,  et  la  manière  dont  il  faisoit  usage  de  l'E- 
criture. '  Il  y  cite  plusieurs  fois  le  Livre  de  la  Sagesse,  sous  Hipp.  1. 1.  p.  21», 
le  nom  de  Salomon  :  ce  qui  convient  fort  bien  à  un  disciple 
de  saint  Irenée,  qui  en  usoit  de  même,  comme  on  l'a  vu. 

Il  y  a  quelques  autres  petites  pièces  de  saint  Hippoly- 
te, mais  qui  ne  sont  que  des  fragmens  d'ouvrages  perdus. 
C'est  pourquoi  nous  remettons  à  en  parler  dans  l'article 
suivant. 

S.  II. 

SES   ECRITS    PERDUS. 


C 


E  que  l'on  nous  a  conservé  des  écrits  de  saint  Hippo- 
lyte, est  bien  peu  de  chose  en  comparaison  de  ce  qui 
s'en  est  perdu.  L'on  va  être  surpris  de  la  grandeur  de  nô- 
tre perte,  par  la  liste  que  nous  allons  faire,  et  la  connois- 
sance  que  nous  allons  donner  d'après  les  anciens  de  tous 
les  ouvrages  que  le  Saint  avoit  composés,  et  qui  ne  se  trou- 
vent plus  aujourd'hui.  Il  est  peu  de  Livres  sacrés  sur  les- 
quels il  n'eût  travaillé  pour  en  aplanir  les  difficultés,  et 
les  rendre  intelligibles.  De  même  il  avoit  écrit  sur  quan- 
tité d'autres  sujets  interessans  pour  l'Eglise.  Entrons  dans 
le  dénombrement. 

l'.  '  Eusebe  et  saint  Jérôme  nous  assurent  que  saint  Hip-  Eus.  1.  e.  c.  22.P 
polyte   avoit  composé  un  Hexameron,  ou  traité  sur  les  six  ?**6i.^'"'^"' 
jours  de    la  création    du    monde.  '  M',    le  Moyne  prétend  var.^r.  t. 
que  cet  ouvrage  est  le  premier,  qui  se  trouve  marqué  dans 
la  table  gréque,   que  1  on  déterra  avec  la  statue  de  nôtre 
Saint,  et  qui  contient  les  titres  de  plusieurs  autres  de  ses 

B  b  b  ij 


s.  p. 
989-992. 


372  S.  HIPPOLYTE,  ËVEQUE, 

iii  SIECLE,  écrits.  De  sorte  que  de  la  fin  de  ce  mot  grec  lors,  et  de 

~"  celle   du    suivant   nias,    dont   Scaliger   fait    |aX(Aoù«  (Aera- 

voi'aî,  Pseaumes  de  la  pénitence,  cet  Ecrivain  voudroit 
que  le  premier  fût  le  reste  du  mot  npnTonAAXTorx,  el 
le  second  le  reste  de  ces  mots-ci  i^al  irepi  Mc^'j-fa^tixi , 
ou  î^cdoyoviaç;  ce  qui  fcroit  ce  sens,  sur  l'état  de  nos  pre- 
miers Pères,  et  sur  la  création  du  monde,  ou  les  choses 
qui  ont  vie.  Mais,  quoique  cette  pensée  soil  el  plus  ingé- 
nieuse et  plus  naturelle  que  celle  qui  y  trouve  les  Pseaumes 
de  la  pénitence,  on  peut  dire  qu'elle  n'est  pas  plus  assurée. 
Elle  dépend  uniquement  de  l'imagination;  et  une  troisiè- 
me personne  qui  voudroit  tenter  d'y  trouver  autre  chose, 
Hipp.  t.  8.  p.  s.  y  pourroit  encore  mieux  réussir.  '  Tels  sont  ceux  qui  croient 
"•"•  y   découvrir  la  fin  du   mot  lou^aîouç,  qui  pourroit  être  la 

lin  du  titre  suivant ,  Airw&eHtTixr,  irpô;  lou^aiouç  ,  Dé- 
monstrations, ou  traité  contre  les  Juifs,  dont  nous  avons 
parlé. 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  n'est  pas  moins  vrai  que  saint  Hip- 
Damw. parai.  1. 1.  polytc  avoit  fait  uu  Hexamcrou.  '  S.  Jean  de  Damas  dans 
P  '*'•  ses  Parallèles  nous  a  conservé  un  passage  de  cet  écrit,  qui 

contient  la  réfutation  de  ceux  qui  établissoient  dans  le  ciel 
le   paradis    terrestre,    et    nioienl    qu'il  fût  du  nombre  des 
Hier.  ep.  41.  p.  creaturcs  de  cet  Univers.     S.  Ambroise,  au  raport  de  saint 
^*"  Jérôme ,   suivoit   dans    son    Hexamerou    plus    particulière- 

ment   les   sentimens   que   sainl   Hippolyte   el  saint  Basile 
avoient  avancés  dans  les  leurs. 
vir.  iii.  c.  6i.  2°.   '  Outrc    l'ouvragc   précèdent,   le    même    S.   Jérôme 

témoigne  que  sainl  Hippolyte  avoit  aussi  composé  un 
Commentaire  sur  la  Genèse.  Eusebe  ne  marque  point  cet 
ouvrage;  mais  on  peut  bien  s'en  raportei-  h  saint  Jérôme, 

3ui  assure  l'avoir  lu,  comme  les  autres  du    même  Auteur 
ont  il  fait  l'énumeration.  '  D'ailleurs  il  y  a  toute  aparen- 
ce    qu'Eusebe    a    compris    ce  commentaire   avec  celui  que 
saint   Hippolyte   composa,    comme  il  dit  lui-même,  sur  ce 
qui  suit  les  six  jours,    c'est-à-dire  assez  naturellement   sur 
not.  p.  an.  i.      le    reste  de  la  Genèse.  '  M'.  Valois  néanmoins  et  Scaliger 
avant   lui  entendent  cet  endroit  d'Eusebe,  du  second  cha- 
pitre seulement  de  ce  Livre. 
Hipp  t.  i  p.  tt.      '  Mais   il   n'y  a  pas  lieu  de  douter  que  le  Commentaire 
^'  dont  il  est  ici  question,  ne  fût  sur  toute  la  Genèse,  depuis 

que  M'.  Fabricius  nous  en  a  donné  en  grec  et  en  latin  plu- 


b 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.    37:^ 

sieurs  fragmens.  Il  y  en  a  sur  le  1,  le  3,  et  presque  sur  tout    ii  i  siècle. 
le  49   chapitre.  "De  plus,   saint  Jérôme  entreprenant  de  .  Hier.  ep. crii.  p. 
donner   quelque   explication  sur   Melchisedech ,  dit  qu'il   a  570.  mi. 
eu    recours    à    saint    Hippolyte.    .\insi   il  paroît  témoigner 
par-là  que  nôtre  Saint  avoit  écrit  sur  le  14*  chapitre ,   où 
il  est   parlé  de    Melchisedech.  '  Le  même  Père  cite  encore  p  se», 
de  ce  Commentaire  un  long  passage  sur  Isaac  et  Rebecca , 
c'est-à-dire   sur   le   27*  chapitre.  '  Mr.  Fabricius  a  tiré  les  Hipp.  ibW. 
fragmens  qu'il  raporte,  d'un  recueil  de  88  Pères  sur  la  Ge- 
nèse ,   lequel  .se   conserve  manuscrit   dans   la  Bibliothèque 
de  l'Empereur  à  Vienne  en  Autriche.  Sur  le  27*  verset  du 
49*  chapitre  ,  qui  contient  les  bénédictions  de  Jacob  à  ses 
enfans,  saint  Hippolyte  fait  à  .saint  Paul  l'aplication  de  ce 
qui  regarde  Benjamin  :  aplication  qui  a  été  imitée  dans  la 
suite  par  saint  Augustin  ,  et  d'autres  Pères  de  l'Eglise. 

3". 'Saint   Jérôme  donne  encore    à   saint  Hippolyte   un  Hier.  nr. iii. c. ei. 
Commentaire  sur  l'Exode,  '  qu'Eusebe   peut  avoir    voulu  Eus.  i.e.  c.îs.p. 
marquer  en  général ,  lorsqu'il  assure,  comme  nous  venons  ***' 
de  dire  ,  que  nôtre  Saint  avoit  écrit  sur  ce  qui  suit  les  six 
jours  dans  les  Livres  de  Moyse.  '  Saint  Jérôme  avoit  vu  cet  Hier.  iwd. 
ouvrage;   et  nous  ne  devons  pas  douter  qu'il  n'ait  existé. 
'  Cependant  M',  le  Moyne  paroît  être  tomné  dans  ce  dou-  var.  s«r.  iwd.p. 
te;  prétendant  sans   raison  que  saint  Jérôme   ne  parle   du 
Commentaire   sur   l'Exode  ,  que   pour  avoir  mal  entendu 
les    paroles   d'Eusebe.  '  Celui-ci ,    ajoute    M',    le  Moyne ,  Eu»,  ibid. 
après  avoir  marqué  l'Hexameron  ,   dit  que  saint  Hippoly- 
te écrivit  aussi  sur  ce  qui  suit  les  six  jours  eî?  rà  \utk  tàv  iIol-t,- 
(upov  :  '  paroles ,  reprend  M',  le  Moyne  ,  qui  ne  signifient  v«r.  s«er.  lud. 
que  ce  qui   regarde  Adam ,   Eve ,  le  paradis  terrestre ,   le 
serpent ,  l'arbre  de  vie  et  celui  de  la  science.  Mais  ce  Sa- 
vant n'a  pas  pris  garde  que  saint  Jérôme  ne  parle   point 
d'après  Eusebe ,  '  mais  comme  aiant  vu  lui-même  les  Livres  Hier.  iWd. 
qu'il  nomme  :  E  guibus,  dit-il ,  hos  reperi  ,  in  é^afl'jiepov,  et 
in  Exodum.  Cela  est  clair  et  ne  souffre  nulle  difficuUé. 

4*.  'On  trouve  des  preuves  pour  donner  à  saint  Hippo-  %?.  t.  i.p.s67 1 
lyte  un  écrit  ou  commentaire  sur  les  endroits  du  premier  ™w-e  »'p- 
Livre  des   Rois  ,   qui   parlent  d'Helcana  père  ,  et  d'Anne 
mère  de  Samuel.  Theodoret  dans  ses  dialogues  nous  a  con- 
servé quelques  passages  de  cet  écrit ,  raportés  par  M'.  Fa- 
bricius dans  l'édition  des  oeuvres  de  nôtre  Saint. 

a*.  'De  même  S.   Hippolyte  avoit  fait  aussi  un  ouvrage  Hipp.iwd.icao.p. 


374  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

III  SIECLE,  sur  les  autres  endroits  du  même  livre  de  l'Ecriture,  qui 
traitent  de  Saûl  et  de  la  Pythonisse.  On  remarque  à  ce 
sujet  qu'il  lui  étoit  assez  ordinaire  de  prendre  ainsi  quel- 
que partie  de  l'Ecriture  pour  expliquer ,  plutôt  que  de 
composer  des  commentaires  de  suite.  Ce  que  nous  avons 
déjà  dit ,  et  que  nous  dirons  dans  la  suite ,  confirme  cette 

Hier.  ibid.  pcnséc.  '  L'écrit  sur  Saûl  et  la  Pythonisse  est  marqué  par 

saint  Jérôme  entre  les  autres  ouvrages  de  nôtre  saint 
Docteur. 

Hipp.  can.  p.u  I       '  L'on  convient   même  qu'il  est  designé  dans   la  table 

var.  sacr.'  p.  99S.  gréque  par  ce    mot   itas   tpimïgots  ,  dont   on    croit  de- 

993.  1011     Canis.    O    .  'l  f  . 

B.  1. 1.  pr.  p.  7.  voir  faire  ErrASTPiMïeoN,  qui  est  le  nom  que  les 
Septante  donnent  à  la  Pythonisse  d'Endor  ,  qui  par  son 
art  magique  fît  paroître  1  ombre  de  Samuel  quelque  tems 
après  sa  mort.  Il  paroît  hors  de  doute  que  c  est  plutôt  de 
cette  Pythonisse ,  que  de  celle  dont  il  est  parlé  au  seiziè- 
me chapitre  des  Actes  des  Apôtres  ;  quoique  Scaliger  croie 
qu'on  peut  l'entendre  plus  vraisemolablement  de  celle- 
ci. 
Hier,  ibid  6".  '  S.   Jcrômc  Continuant  le  catalogue  des  ouvrages  de 

S.  Hippolyte ,  marque  un  commentaire  sur  les  Pseaumes. 
Var.  Sacr.  ibid.  p.  '  M',  le  Movuc  dit  qu'Eusebc  donne  aussi  ce  commentaire 
^^-  à  S.  Hippolyte;  mais  nous  ne  le  trouvons  ni  dans  le  texte 

ibid.  I Hipp.  ibid.  d'Euscbe  ni  dans  la  traduction.  '  L'on  convient  qu'il  est 
indiqué   dans  la  table   gréque   par   la  fin   de  la  troisième 
ligne  qui  porte  AAMors,  comme  s'il  y  avoit  eu  originaire- 
icr.  ibid.  ment  eix  vaamotï  ,  sur   les  Pseaumes.  '  De    la    manière 

qu'en  parle  S.  Jérôme,  il  semble  l'entendre  de  tout  le  Pseau- 
Hipp.  ibid.  I  Var.  tier.  '  Scaliger  et  le  Moyne  n'en  doutent  nullement.  Ce- 
saer.  p.  977.  99».  \^\.(.{  prétend  même  que  cela  paroît  incontestable  par  un 
passage  qu'il  raporte,  tiré  d'un  manuscrit  que  l'on  con- 
Hipp.  1. 1.  p.  Î68.  serve  dans  une  Bibliothèque  de  Florence.  '  Theodoret 
269.  cite  des  endroits  de  ce  commentaire  sur  les  Pseaumes  2 , 

Fab.  Bib.  gr.  t.  5.  22  et  23  (*).  '  Dc  même  la  Bibliothèque  de  Bodlei  fait  men- 
P'  ^^'  tion   d'un  manuscrit  qui  contient  l'exposition   de  S.  Hip- 

•       polyte  sur  le  neuvième  Pseaume. 
Hipp.  can.  p.  13.       '  Outre  ce  commentaire  sur  tout  le  Pseautier ,  Scaliger 

■  H'nn    1        ihM  (•)   *  Mr.   Fabricius   dit   qn«  Theodoret  entendant  mal  les  paroles  de  ce  Père,  »  qtii 

nipp.  ».  I.  iDia.  ^.^  ^^^^.   1^  jjêjjj  Commentaire   sur  le  signifient  non  ce  Pseaume,  mais  le  Caoti- 

>>En8.  not.  p.  123.  Pseanme   118  selon   nous ,  on    419   selon  que  des  Cantiques. 

2.  les  U^reux  :  mais  il  ne  l'avanoe  qu'en 


DOCTEUR  DE  L'ÉGLISE,  ET  MARTYR.    375 

lui  en  atribue  encore  un  particulier  sur  les  sept  Pseaumes  m  siècle. 
de  la  pénitence.  Mais  comme  ce  sentiment  n'est  fondé 
que  sur  une  interprétation  forcée  de  la  fin  des  deux  pre- 
mières lignes  de  la  table  gréque  ,  on  ne  peut  s'y  arrêter. 
Scaliger  a  bien  senti  lui-même  qu'il  n'étoit  point  naturel 
d'y  lire  [Aeravoiaç,  de  la  pénitence  ;  puisqu'il  s'en  prend  au 
graveur ,  et  l'accuse  d  avoir  fait  une  faute  en  mettant 
NIA2,  pour  NOIA2.  '  D'aillcurs  y  a-t-il  la  moindre  v».  s«r.». 2.  p.' 
aparence,  remarque  judicieusement  M',  le  Moyne ,  que 
cette  table  marquant  assez  clairement  à  la  troisième  ligne 
un  ouvrage  sur  les  Pseaumes  ,  en  indique  un  autre  à  la  pre- 
mière ligne  sur  le  même  sujet?  On  pourroit  encore  deman- 
der si  au  tems  de  saint  Hippolyte  on  connoissoit  déjà  les 
Pseaumes  de  la  pénitence  sous  ce  titre?  'Il  est  vrai  que  Aug.  vu.  c.  si.  p. 
Posside  dans  la  vie  de  saint  Augustin  en  fait  mention  ;  mais 
c'est  peut-être  le  plus  ancien  vestige  que  l'on  en  trouve  , 
et  qui  ne  remonte  pas  au-delà  du  V  siècle. 

7".  '  Eusebe  et  saint  Jérôme  comptent  encore  entre   les  Eus. p. «m  i  not.p. 
ouvrages  de   saint  Hippolyte  un  commentaire  sur  le  Can-  '*^  *  '  *''*'^  ''"  ' 
tique    des   Cantiques;    et   Theodoret   le    cite    dans    son 
dialogue    intitulé    l'Kraniste.  '  Ce    Commentaire     subsis-  Hipp.  «.  i.  p.  «70. 
toit  encore  au  Vil  siècle;  puisque  saint  Anastase  le  Sinaïle 
l'avoit  lu.  Il  nous  en  a  même  conservé  un  passage  consi- 
dérable ,  raporté  en  grec  et  en  latin  par  l'Eaileur  de  saint 
Hippolyte.    Le  Saint  y  reconnoît   le  Livre   de  la  Sagesse 
pour   être   de   Salomon  ,   comme  le  sont  les  Proverbes , 
l'Ecclésiaste,  et  le  Cantique  des  Cantiques    même.  Il  y  dit  -  *i 

S[u*en  donnant  à  ce  dernier  le  titre  qu'il  porte,  on  a  voulu 
iaire  entendre,  qu'il  comprend  lui  seul  tout  ce  que  Salo- 
mon avoit  dit  en  cinq  mille  vers  ou  cantiques.  Entrepre- 
nant à  cette  ocasion  d'expliquer  ce  que  raporte  l'Ecriture, 
touchant  le  choix  que  les  amis  d'Ezechias  firent  de  tous 
les  écrits   de  Salomon  ,    saint   Hippolyte  témoigne   qu'ils  v*^ 

choisirent  et  réservèrent  ce  qui  pouvoit  servir  à  l'édifica- 
tion de  l'Eglise.  Que  pour  le  reste  qui  consistoit  en  para- 
boles et  cantiques  sur  les  plantes,  les  animaux  de  la  terre, 
les  volatiles  ,  les  poissons  ,  et  les  secrets  pour  guérir  les 
maladies  ,  Ezechias  l'avoit  entièrement  suprimé  ,  de  peur 
que  le  peuple  grossier  et  peu  instruit ,  n'y  eût  trop  de 
confiance  dans  ses  besoins  ,  et  ne  négligeât  de  s'adresser 
à  Dieu  pour  les  lui  demander.  Suidas  et  quelques  autres 


376  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

III  SI  El  LE.    Ecrivains  disent  la  même  chose,  et  l'ont  aparemment  pris 

de  saint  Hippolyte. 

H,er.  ibid.  8".  '  S.  Jérôme  assure  qu'il  avoit  vu  aussi  un  commentai- 

suid.j.p.  in.      16  de  nôtre  Saint  sur  les  Proverbes  de  Salomon.  '  Suidas 

Htpp.  1. 1.  p.2-0.  confirme  la  même  chose.  '  M'.  Fabricius  nous  a  donné  de 
ce  commentaire  quelques  passages  latins ,  qui  se  trouvent 
en  leur  langue  originale  entre  les  autres  Pères  Grecs  qui 
forment  la  chaîne  sur  les  Proverbes.  Ces  passages  expli- 
quent le  titre  du  livre  ,  et  le  onzième  ou  douzième  verset 

p.  282.  du  premier  chapitre.  '  Il  y  en  a  un  autre  encore  plus  con- 

sidérable raporté  par  le  même  Editeur,  et  que  M'.  Pfaff 
a  tiré  d'un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  de  Turin.  Il  est 
im  grec  et  en  latin,  et  contient  l'explication  de  saint  Hip- 
|)olyte  sur  le  neuvième  chapitre  des  Proverbes,  On  y  re- 
connoît  toute  la  manière  d'expliquer  l'Ecriture ,  que  le 
Saint  emploie  ailleurs. 

Hier-ibid.  9",  '  Au  Commentaire  sur  les  Proverbes,  saint  Jérôme  en 

joint  un  autre  du  même  Auteur  sur  l'Ecclesiaste.  Savoir  si 
o'étoit  un  commentaire  suivi,  comme  il  paroît  qu'étoit  le 
précédent ,  ou  s'il  étoit  seulement  sur  quelques  parties  de 
ce  livre,  selon  la  coutume  que  suivoit  quelquefois  saint 
Hippolyte,  c'est  ce  que  nul  des  anciens  ne  nous   a  apris. 

Cans.Kt.i.  p.».  Seulement  'on  dit  qu'il  y  a  dans  la  Bibliothèque  de 
l'Empereur  un  manuscrit  qui  contient  des  commentaires 
de  saint  Hippolyte  sur  les  livres  de  Salomon.  La  chose 
vaudroit  bien  la  peine  d'être  un  peu  plus  dévelopée. 

Hwr.  ibid.  10°.  '  Nous  aprenons  de  saint  Jérôme,   que  saint  Hip- 

polyte avoit  aussi  écrit  sur  la  prophétie  d'Isaïe.  Mais  il 
ne  dit  point  si   nôtre  Saint  avoit  commencé  tout  ce  Pro- 

Tbdrt.  iiia.  I.  p.  phéte,  ou   seulement  une  partie.  '  Theodoret   cite  quelque 

''*•  chose  de  cet  ouvrage  sur  le  commencement  de  ce  même  Pro- 

phète, sans  nous  en  donner  d'autre   éclaircissement. 

Hipp  1. 1. p.  271.  'Michel  Glycas  raporte  l'opinion  de  saint  Hippolyte 
touchant  la  longueur  du  jour  ,  auquel  se  fit  la  rétrogra- 
dation sur  le  cadran  d'Achaz  ,  en  signe  que  Dieu  proloii- 
geoit  la  vie  au  Roi  Ezechias  ,  comme  il  est  marqué  au 
vingt-huitième    chapitre    d'Isaïe.    Saint    Hippolyte    prétend 

fiib.coisi.p.  215.  que  ce  jour  avoit  duré  trente-deux  heures.  '  Dom  de 
Montfaucon  aïant  averti  que  dans  un  manuscrit  cotté 
193  de  la  Bibliothèque  de  M'.  Coislin  ,  il  se  trouve  un 
fragment  de  saint  Hippolyte  sur  Ezechias  ,  et  quelque  au- 
tre 


t 


DOCTEUR  DE  L'ÉGLISE,  ET  MARTYR.   377 

tre  chose  contre  le  destin ,  '  M'.  Fabricius  y  a  eu  recours ,  1 1 1  s  i  e  c  l  e. 
et  nous  a  donné  ce  fragment  en  grec  et  en  latin.  C'est  «Hipp.  i.a.  p.31. 
précisément  le  même  qui  est  cité  par  Glycas. 

H". 'Saint  Hippolyte  au  raport  d'Eusebe  avoit  aussi  eus. ibu. p.  224. 
commenté  quelques  parties  du  Prophète  Ezechiel.  On  ne 
nous  en  aprend  pas  davantage.  '  On  dit  toutefois  qu'il  y  Hipp.  1. 1.  p.  271. 
a  dans  la  Bibliothèque  de  liodlei  un  manuscrit  qui  porte  ce 
titre,  Hippolyti  de  dimensionet empli  Salomoms.  Traité  d'Hip- 
polyte  sur  les  dimensions  du  Temple  de  Salomon  ,  dont 
parle  aparemment  Kzechiel  au  40*  et  41'^  chapitre  de  sa 
Prophétie. 

1 2».  '  Mais  Hippolyte  avoit   plus    particulièrement   tra-  Hier.  iwj.  1  Phoi. 
vaille  sur  Daniel.  S.  Jérôme  marque  en  général  son  com-    '      ^' 
mentaire  sur  ce  l*rophelo.  Photius  qui  l'avoit  lu,  en  parle 
dans  un  assez  grand  détail  ,  et  dit  que  ce  n'étoit  pas  une 
explication   suivie   de  tout   le    texte  ,   quoique  l'Auteur  ne 
laissât  pas  d'en  éclaircir  toutes  les  pensées. 

'  Puis  venant  5  on  j)orter  son  jugement ,  il  ajoute  qu'il  w>oi.  iwd. 
se  trouvoit  dans  cet  ouvrage  diverses  choses ,  qui  se  sen- 
toient  de  ces  premiers  siècles ,  et  qui  n'étoient  pas  dans 
l'exactitude  que  l'on  a  gardée  dans  la  suite.  Mais  il  a  soin 
d'avertir  qu'il  ne  seroit  pas  raisonnable  de  le  condamner 
pour  cela.  Il  en  donne  la  raison.  C'est  qu'à  l'égard  de  ces 

fiersonnes  qui  ont  commencé  h  déveloper  les  secrets  de 
'Ecriture,  bien  loin  de  les  blâmer  de  ce  qu'elles  n'ont  pas 
entièrement  réussi  ,  l'on  doit  au  contraire  loiier  leur  zèle 
qui  leur  a  fait  entreprendre  une  chose  aussi  difficile  ,  et 
recevoir  avec  joie  et  reconnoissance  les  éclaircissemens 
qu'elles  nous  ont  donnés. 

'  Photius  ne  peut  cependant  s'empêcher  de  blâmer  lud. 
l'Auteur  de  ce  commentaire  ,  de  ce  qu'il  a  osé  déterminer 
à  la  fin  de  six  mille  ans  depuis  la  création  du  monde,  ef 
de  cinq  cens  ans  depuis  la  venue  du  Sauveur,  le  tems  au- 
quel arriveroit  le  jugement  dernier  :  ce  que  Jesus-Christ 
même  n'avoit  pas  jugé  à  propos  de  découvrir  à  ses  Apô- 
tres. Le  style  de  cet  ouvrage  étoit  clair  et  net ,  quoique 
l'Auteur  y  eût  négligé  les  règles  de  l'éloquence  Attique. 
'  Theodoret  dans  son  commentaire  sur  le  même  Prophe-  c.  203. 
te  s'acordoit ,  selon  Photius ,  en  plusieurs  choses  avec 
saint  Hippolyte  ,  mais  il  en  differoit  aussi  en  divers  autres 
points. 

Tome  I.  Prem.  Part.  C  c  c 


380 


378  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

1 1 1  s  I E  c  L  E.  °  Saint  Jérôme  écrivant  sur  Daniel  raporte  quelques 
•  Hier. in  Dan.  c.  sentimcns  de  l'ouvrage  de  nôtre  Suint  dont  il  est  ici  ques- 
9.  p.  iiu.  tion.  ''Œcumenius  en  fait  aussi   mention   dans   sa   préface 

Hipp.°'t.  1.'  p.'  sur  l'Apocalypse.  "  On    trouve   dans   la  chaîne  des   Pères 
grecs  sur  les  Psaumes  et  les  Cantiques,  un  passage  de  saint 
ïlippolyte   sur  le   Cantique  des  trois  jeunes  Hébreux  dans 
la  fournaise.    Or  on   .sait   que  ce   Cantique  fait  partie  du 
1.-2.  p.  3î.  troisième   chapitre   de   Daniel.   De   même  '  Eustrate  Prêtre 

de  Constanlinople  au   VII  siècle,    raporte  de  S.  Hippolyte 
un   autre   endroit  sur   le  même  Cantique.  Il  témoigne  l'a- 
voir tiré  du   second   discours  ou  traité  de  saint  Hippolyte 
t.  i.p.  277.  sur  Daniel.  '  On  cite  aussi  de  saint  Anastase  le  Sinaïte  un 

autre  passage  de  nôtre  Saint  sur  le  même  Prophète.  Mais 
comme  ce  passage  se  lit  en  mêmes  termes  dans  son  traité 
sur  l'Antéchrist ,  nombre  2G  et  43,  on  peut  douter  duquel 
des  deux  ouvrages  il  aura  été  tiré. 

Nous   avons   parlé  ailleurs  de   la  courte   explication  de 
l'histoire  de  Susanne,  qui  pouvoit  faire  partie  du  grand 
Bii).  pp.  t.  27.  p.  ouvrage   sur  Daniel.  '  Après  ce  petit  commentaire  suit  dans 
10. 2-12. 2.  j^   Bibliothèque  des  Pores ,   un    fragment  latin  d'un  autre 

ouvrage  plus  considérable.  Il  e&l'mliiulé  S anciisstrm  Hippo- 
Hipp.  1. 1.  p.  278.  lyii  liomœ  Episcopi.  '  M'.  Fabricius  nous  l'a  donné  depuis  en 
*'^-  grec   et   en   latin.    C'est   le   commencement  ou  le  prélude 

d'un  Auteur,  qui  avoit  promis  d'écrire  sur  le  tems  de  la 
captivité  de  Babylone ,   et  de  commenter  le  Prophète  Da- 
niel.   Tout  cela   convient  fort  bien  à  S.  Hippolyte.  Aussi 
Tiii.ib. p. 247.      'M',    de   Tillemont  juge-t-il   ce  fragment  assez    conforme 
à  l'idée  que  Photius  nous  donne  du   commentaire   de  nô- 
Du  Pin,  ibid.         tre   Saint  sur   Daniel.  '  M^   du   Pin  prétend  au  contraire 
que   ni  -«e   fragment   ni   la   petite   explication  de  l'histoire 
de  Susanne  ne  paroissent  pas  de  ce  tems-là.  Mais  quicon- 
que voudra  se  donner  la  peine  de  comparer  cette  dernière 
Hier.  ep.  crit.  p.  piece  '  avcc  lo  loug    passagc  de  saint  Hippolyte   sur  Isaac 
^"^  et  Rebecca  cité  par  saint  Jérôme,   y  trouvera  une  entière. 

conformité  et  de  génie  et  de  manière  de  s'exprimer. 
Mab.  iter  11.   p.       '  Enfin  Dom   Mabillon   témoigne  avoir  vu   dans  un   ex- 
^-  cellent  manuscrit  grec  ancien  de  huit  cens  ans  au  moins, 

qui  contient  quelques  livres  des  Prophètes,   un  commen- 
taire  de   saint  Hippolyte   Evêque   et  Martyr  sur  le  songe 
de  Nabuchodonosor ,   qui  fait  comme  l'on  sait  partie  du 
Hipp.i.  i,p.272.  livre  de  Daniel.  'George  le  Syncelle  cite  aussi  un  passage 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.    379 

de  saint  Hippolyte  sur  le  même   Prophète ,   mais  indéter-   ni  siècle. 
minement. 

13°. 'Saint  Jérôme  atribuc  encore  à  saint  Hippolyte   un  luer.vir.ui.  cci. 
commentaire   sur   Zacharie,    le   pénultième   des  douze  pe- 
tits Prophètes.  C'est  tout  ce   qu'il   en    dit   en   cet   endroit. 
'  Mais   écrivant    depuis  sur  le   même    Prophète ,    et    aïant  in  zach.  pr.  t.  p. 
ocasion  de   parler   de  ce  commentaire   et  de  ceux   d'Ori-  "^' 
gène  et  de  Dydime,    il   l(^moigne   qu'ils   étoient   tous   allé- 
goriques, et  qu'à  peine  ces  Interprètes  y  touchoient    quel- 
3ues  points  d'histoire.  Voilà  ce  que  nous  savons  du  travail 
e  S.  Hippolyte  sur  l'ancien  Testament. 

14°.  Quant  à  ce  qu'il  a   écrit   sur  le   nouveau,    Eusebe 
n'en   dit  rien  ;  '  et  saint   Jérôme   en  donnant   le   catalogue  vir.  iii.  ibid. 
des  ouvrages  de  nôtre  Saint,  ne  fait  mention  que   de  son 
commentaire   sur   l'Apocalypse.    Mais  ce   Père   n'avoit   pas 
encore  vu   selon   toute   aparence  '  les  opuscules  du   même  iiipp.  i.  i.p-aso. 
Auteur   sur  saint  Matthieu ,    qu'il   cite   dans   quelques-uns  ***  ' 
des   écrits    qu'il   composa    dans   la    suite.    Théodore!    cite 
aussi  les  traités  ou  discours  do  saint  Hippolyte  sur  la  dis- 
tribution des  dix  talens,  et  sur  les  deux   Larrons.    Il    pa- 
roît  donc  par-là  que  nôtre  Saint  avoit  écrit  au   moins   sur 

Suelques  parties  de  l'Evangile   de   saint   Matthieu  ,   et   sans 
oute  aussi  sur  quelques  endroits  de  celui  de  saint  Luc,  où  ' 

l'histoire  des  deux  Larrons  est  plus  dévelopée. 

15°.  '  La    table    gréque    déterrée    avec    le    cycle  Pascal,  Hipp. can. p. 2. 
et  déjà  si  souvent  citée ,  marque  clairement  que  saint  Hip- 
polyte avoit  écrit   sur  l'Evangile   selon   saint  Jean   et   sur 
l'Apocalypse    :   tiiep     toy     kata     miaishn      ktaiteaiot        ,  ^,,, 
KAi      AnoKAAPiEni:.      '      Saint     Jérôme      confirme       ce  Hier,  ibi.i. 
dernier    ouvrage ,    comme   nous   le  venons  de   dire.  '  On  var.  sair.  t.  2.  p. 
sait  les  contestations  qu'il  y  eut  sur  ces  deux  Livres  sacrés  **"*■ 
à  la  fin  du  II  siècle  de  l'iîglise  et   au   commencement  du 
m ,  non  seulement  à  cause  de  Cerinlhe ,  mais  aussi  d'Ar- 
temon  et  ses  semblables ,  qui  nioient  la  divinité  de  Jesus- 
Christ.  Ces   hérétiques  ne   pouvant   répondre   aux   preuves 
que  l'on  tiroit  de  ces  livres  contre  leurs  erreurs ,  '  prirent  p.  1012. 
le  parti   d'en   nier   l'autorité.    Ils  ataquerent   sur-tout   l'A- 
pocalypse. '  C'est   pourquoi   les   Pères   de   l'Egliae   de   ces  p-  •<"* 
tems-là ,    comme    saint    Justin ,    saint    Irenée ,    Théophile 
d'Antioche,    saint    Clément    d'Alexandrie,     saint    Meliton 
de  Sardes  et  saint  Hippolyte   eurent  une  atention   parti- 

C  c  c   ij 


III 

SIECLE. 

Canis 
p.  7. 

.  B.  t 

.  1. 

pr. 

Hipp. 

ibid. 

P- 

14. 

380  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

culiere  à  défendre  ce  livre  comme  l'ouvrage  de  saint  Jean. 
'  Mais  de  prétendre ,  comme  le  remarque  judicieusement 
M'.  Basnage,que  nôtre  Saint  auroit  entrepris  d'écrire  sur 
ce  livre  pour  cette  raison ,  ce  seroit  vouloir  deviner. 

'  Scaliger  néanmoins  paroU  avoir  été  dans  ce  sentiment  ; 
prétendant  que  l'écrit  de  saint  Hippolyte  sur  l'Apoca- 
Ivpse ,  n'étoit  autre  chose  qu'une  apologie  pour  en  défen- 
dre l'autorité  contre  les  ennemis  de  la  divinité  de  Jesus- 
Canis.a'id.  |  Hipp.  Christ.  '  Hebed  Jésus,  à  la  vérité  témoigne ,  au  raport  de 
«•  «•  p- 280.  Messieurs  Basnage  et  Fabricius ,.  que  les  Caldéens  mon- 
troient  une  apologie  de  saint  Hippolyte  pour  l'Apocalyp- 
se et  l'Evangile  de  saint  Jean.  Mais  quel  fonds  peut-on 
faire  sur  le  témoignage  d'un  Uabbin  ? 

16°.  Outre  le  cycle  Pascal  dont  nous  avons  déjà  parlé, 
ehs.i.  0.  c.22.p.  '  Eusebe  et  saint  Jérôme   atribuent   encore   à  saint  Hippo- 

223.22*  I  Hier.  ib.    ,    ,        i  ,  i  a  •   »       r<  -i 

lyte  deux  autres  ouvrages  sur  le  même  sujet.  Comme  ils 
les  distinguent  clairement  l'un  de  l'autre ,  nous  devons  aussi 
les  distinguer  après  eux.  Dans  le  premier  de  ces  ouvrages 
saint  Hippolyte  faisoit  une  chronologie  qu'il  conduisoit 
jusqu'à  la  première  année  de  l'Empire  d'Alexandre,  c'est- 

Eu».  p.  223.         à-dire  jusqu'à  222  de  l'Ere  Chrétienne.  '  Il  s'y  bornoit  se- 

ibid.  I  luor.  ibid.  Ion  Euscbc  à  décrire  les  tems ,  '  mais  toujours  par  raport  à 
la  Pâque ,  afin  de  trouver  le  tems  précis  auquel  on  doit  la 
célébrer.  C'est   pour   cela   que   dans   le   même   ouvrage   il 

Hipp.  can.  p.  2.  proposoit  uu  cvcle  de  seize  ans.  '  Cette  chronologie  peut 
fort  bien  être  1  écrit  marqué  dans  la  table  gréque  en  ces 
termes  AnoAEisi2  xponon  Tor  oaska,  Démonstration  des 
tems  de  Pâque. 

Tiii.  ibid.  p.  241.       17°.  '  M',    de   Tillemont     distinguant    cette    chronologie 

***•  d'un  autre  écrit  sur  le  même  sujet,  à  qui  il  donne  le  nom 

de  chronique ,  dit  que  saint  Hippolyte  marquoit  dans  cel- 
le-ci les  Pâques  sur  les  règles  de  son  cycle.  Il  ajoute  qu'il 
y  mettoit encore  à  la  fin  une  table  des  jours,  auxquels  il 
croïoit  que  l'on  devoit  faire   Pâque   à   1  avenir  durant   un 

Hier.  ibid.  certain  nombre  d'années.  '  C'est  ce  que  peuvent  signifier 

les  paroles  suivantes  de  saint  Jérôme  au  sujet  de  ce  même 
ouvrage  :  Rationem  Paschœ  temporumque  canones  scripsit. 

Tiii.  ibid.  677.  '  Aiusi  ccttc  chroniquc  aura  contenu  probablement  tout  l'ouvra- 
ge sur  la  Pâque. 

Eas. ibid. I Hier. ib.  'Après  qu'Euscbc  et  s.  Jérôme  ont  parlé  du  travail  de 
saint  Hippolyte  sur  le  calcul  des  tems  par  raport  à  la  Pâ- 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.  381 

que,  et  donné  les  titres  de  plusieurs  autres  ouvrages  de  m  siècle. 
nôtre  Saint,  ils  marquent  encore  un  écrit  sur  Pâque; 
seroit-ce  la  chronique  que  M',  de  Tillemont  distingue  de 
la  chronologie  ?  ou  ne  seroit-ce  point  plutôt  quelque  trai- 
té de  morale  ?  L'histoire  ne  nous  fournit  aucune  lumiè- 
re pour  le  déterminer.  'Seulement  on  trouve  que  le  Con-  Hipp.  t.r  psœi. 
cile  de  Latran  tenu  en  649 ,  cite  un  endroit  de  l'homélie  de 
saint  Hippolyte  sur  le  Dimanche  de  Pâque. 

18°.  '  Dans  la  suite  du  dénombrement  que  saint   Jérôme  Hier.  iWii. 
fait  des  écrits  de  saint  Hippolyte ,   il   lui  atribue  un   livre 
sur  la  Résurrection.  'Cet  ouvrage  se  trouve  marqué  dans  la  Hipp.  can.  p.  2. 
table  gréquc,   mais  avec  ce   titre   qui   en   donne   plus   de 
connoissance ,      hepi    eEov     kai     2apko2     ANArrASEns , 
de  Dieu,  et  de  la  résurrection  de  la  chair.  '  M^    Fabricius  t.  1.  p. 2«. 
raporte  un  fragment  de  saint  Hippolyte  sur  ce  sujet ,  qu'il 
a  tiré  de  saint  Anastase  le  Sinaïte ,  et  qui  y  est  cité  sous  le 
titre  de  la  résurrection  et  de  l'incorruption.  '  M',  le  Moyne  var.  sacr.  t.  2.  p. 
croit    que    nôtre    saint    Docteur    composa    cet  écrit   contre  *"'* 
Berylle    et    les    autres    Arabes,   qui   nioient   l'immortalité 
de  l'amc ,  cl   par   conséquent   la   résurrection  de   la  chair. 
Mais,  comme  cet  Ecrivain  n'apuie  son  opinion  que  sur  le 
long  séjour  que  fit  saint  Hippolyte  en  Arabie ,  elle  est  très- 
incertaine. 

'  Scaliger  veut  au  contraire  que  cet  ouvrage  ne  soit  au-  Hipp  ;i  i-  16. 
tre  chose ,  que  le  traité  des  deux  natures  en  Jesus-Christ 
composé  par  nôtre  Saint,  selon  le  témoignage  de  Theo- 
doret.  On  ne  voit  pas  bien  la  connexion  qu'il  peut  y  avoir 
entre  la  pensée  de  Scaliger,  et  le  titre  de  l'ouvrage  dont 
il  s'agit  ici.  Il  paroît  qu'il  l'a  confondu  avec  l'écrit  suivant 
qui  étoit  sur  Tmcarnation. 

19°.  '  Canisius  et  Messieurs  Basnage  et  Fabricius  après  can.  b.  t.  i.  p. 
lui   nous   ont  donné  le  premier  en   latin   seulement ,   les  i'"^'.^!''  *'  *' 
deux  autres  en  grec  et  en  latin ,  huit  passages  tirés,  .selon 
le  titre,  d'un  ouvrage  de  saint  Hippolyte  sur  l'incarnation, 
contre  les   hérétiques  Beron  et  Heiicon  ('),  disciples  de  Va- 
lentin.    'BuUus,   M',    de  Tillemont,   et  M'.   Fabricius  ne  Tiii.ibid.  p.249j 
font   aucune   difficulté    de   regarder    ces    extraits    comme  p'^T^'*'"  ^"^^  '"  ^' 
étant  véritablement  de  saint  Hippolyte.    M',    du   Pin   doute 
qu'ils  soient  de  lui.  Le  P.  Alexandre ,  '  le  P.  Petau ,  Sandius  sand.  yet.gcri.ec- 
et  M'.  Basnage  soutiennent  qu'ils  n'en  sont  pas.    Les  rai-  B?'ibfd.  ^'iomÎ! 

.    (1)  On  lisoit  antrefois  Félix  et  Heiix. 


382  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

III  SIECLE,    sons  qu'ils  en  aportent,  consistent  à  dire,  que  l'Auteur  y 

f)arle  trop  clairement  d'une  hérésie  qui  n'est  née  que 
ong-tems  après  lui;  que  l'on  y  découvre  des  endroits 
qui  aprochent  de  l'erreur  d'Eutichès,  et  quelques  autres 
qui  marquent  le  Sabellianisme;  que  Theodoret  qui  cite 
contre  les  ennemis  des  deux  natures  en  Jesus-Chnst  tant 
de  passages  des  anciens,  ne  fait  nulle  mention  de  ceux- 
ci. 

Hipp.  t.  a  n.5i.  Mais  il  est  aisé  de  répondre  à  ces  difficultés.  '  En  eflet 
il  est  clair  par  le  traité  de  Tertullien  contre  Praxeas,  que 
l'erreur  sur  la  confusion  des  deux  natures  en  Jesus-Christ 
est  aussi  ancienne  que  le  III  siècle,  et  par  conséquent  an- 
térieure à  Apollinaire  et  à  Entichés.  Tertullien  dans  ce 
livre  s'exprime  en  latin  sur  ce  sujet ,  à  peu  près  de  la  mê- 
me manière  que  saint   Ilippolyte   en   grec   dans  ces  frag- 

Can.  B.p.  12.  mcus.  '  D'ailleurs  M'.  Basnage  avoue  lui-même  que  Theo- 
doret raporte  d'autres  témoignages  des  écrits  de  nôtre 
Saint ,  qui  ont  quelque  ressemblance  avec  ceux  dont  il  s'agit 
ici  :  aveu  qui  seul  peut  suffire  pour  ne  lui  refuser  pas  ces 
derniers. 

Rien  donc  n'empêche  que  ces  huit  fragmens  ne  soient 

Tiii.  ibid.p.2«|  de  saint  Hippolyte.  '  Nous  en  sommes  redevables  aux  soins 
Q  Anastase  Apocrisiairc  du  Pape ,  mort  en  666 ,  qui  les  a 
garantis  du  naufrage  où  est  péri  le  reste  du  traité.  Cet 
illustre  Confesseur  de  la  foi  des  deux  volontés  contre  les 
Monothelites ,  n'aïant  pu  transcrire  tout  le  livre  de  saint 
Hippolyte ,  comme  il  souhaitoit,  parce  que  les  ennemis  de 
la  vérité  le  lui  avoient  enlevé  aussi-tôt,  il  fut  contraint  de 
se  borner  aux  huit  passages  que  nous  en  avons  dans  ses  con- 
férences. Ce  seroit  assurément  faire  injure  à  sa  mémoire 
que  de  ne  les  pas  regarder  comme  faisant  partie  de  l'écrit 
de  saint  Hippolyte  ;  n'y  aïant  sur-tout  aucune  preuve 
positive  pour  détruire  l'autorité  d'un  Ecrivain  aussi  re- 
spectable qu'Anastase  ,  qui  avoit  le  livre  entier  entre  les  ' 
mains. 

Outre  les  endroits  indiqués  où   se  trouvent    ces  passa- 

Bib.  pp.  t.  3.  p.  ges ,  '  on  les  a  aussi  insérés  en  latin  dans  la  Bibliothèque 

•  canis.B.  t.i.p.  dcs  Pcrcs  ;  "  ct  M'.  Basnage  à  la  fin  du  premier  tome  de  sa 

164-160.  jjgijg  édition  de  Canisius,  nous  a  donné  les  remarques  de 

M'.  Caperonnier  Professeur  Roïal  à  Paris ,  sur  la  traduction 

Hipp.  1. 1.  p.  228.  latine  de  ces  mêmes  fragmens.  'Beron  ,  selon  le  témoigna- 


Hipp.  t.  1.  p.  225. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.    383 

ge  de   nôtre    Saint,  étoit  un   hérétique,  qui    aiant    quité    m  siècle. 

avec   quelques  autres  les  rêveries  de  Valentin,  étoit   lom- 

bé   avec    eux    dans    une    plus    grande   impieté.  Ils  soûte- 

noient   qu'après   l'incarnation   du   Verbe,  il  s'étoit  fait  un 

tel    mélange  et  une  telle   confusion  en  Jesus-Christ   que  la 

nature   humaine  avoit  les  mêmes  opérations  que  la  nature 

divine ,  et   que    celle-ci   étoit   sujette   aux  mêmes   passions 

que   l'autre.  '  Anaslase  au   reste   fait   beaucoup   de  cas  de  uipp.  1. 1.  p.  223. 

1  ouvrage  de  saint  Hippolyte,  qu'il  qualifie  un  livre   sacré, 

digne   d'être   recherché  avec  soin.  Il  en  donne  le  titre  en 

ces  termes:  contre  Reron  et  Hélix,  ou  Ilelicon. 

'  L'Editeur  des  œuvres  de  nôtre  Saint  raporte  d'après  Hipp.  t.  2.  p.  32. 
M'.  Renaudot,  deux  autres  passages  sous  le  nom  de  saint 
Hippolyte,  pris,  l'un  de  son  traité  contre  ceux  qui  com- 
batoient  l'incarnation  du  Verbe  à  cause  de  sa  consubstan- 
tialité  avec  son  Père,  l'autre  du  traité  de  l'union  du  corps 
de  Jesus-Christ  avec  sa  divinité .  '  Mais  cet  Editeur  soup-  pr. 
çonne  M'.  Renaudot  d'avoir  mis  ici  le  nom  de  saint  Hip- 
polyte pour  celui  du  Pape  .Iule. 

20".  'Un   autre   ouvrage  de  saint  Hippolyte,  qui  paroit  Eus.  i.6.c.22.p. 
avoir  été  fort  considérable,  et  qui  lui  est  atribué  par  Eu-  crVi"'*"^' ^"''"' 
sebe  et  saint  Jérôme,  est  son  traité  contre  toutes  les  héré- 
sies :  c'est-à-dire  sans   doute  toutes  celles  qui  avoient  paru 
depuis  saint  Irenée,  jusqu'à  son  tems.  'Il  se  trouve  encore  Hipp.  1. 1.  p.  22:1- 
cité  sous  le  même   nom   par  plusieurs  autres  anciens,  "et  fp'i,oi.  c.  121.  p. 
subsistoit   encore   au   tems    de  Photius  ,  qui  l'avoit   lu  ,  et  |^M  Ti'i-  iij'J-  p- 
qui  en  a  porté  son  jugement  selon  sa  coutume.  Saint  Hip- 
polyte y  réfutoit   trente-deux   sectes ,  depuis  celle  des   Do- 
sithéens,  jusqu'à   celle  de  Noët,  qui   commença  à  se  faire 
connoître   sous   l'Empire   d'Alexandre ,    environ    l'an    230. 
'  II  y  témoignoit  qu'il   n'avoit   dessein  que  d'y  représenter  phot.  ib. 
en  abrégé  ce  qu'il  avoit  apris  des  entretiens  de  saint  Ire- 
née et  de  ses  discours  au  peuple  contre  les  hérésies.  Aussi 
y  trouvoit-on  divers  points  de  la  doctrine  de  ce  Père  ,  qui 
l'avoit  eu  pour  disciple.  Il  n'y  reconnoissoit  j)oint  l'Epitre 
aux  Hébreux  pour  être  de  saint  Paul. 'Il  condamnoit   for-  Hipp.  ibid.  p.  2251 
tement  Nicolas  l'un  des  sept  premiers  Diacres ,   que   saint        ^  ^"-  '^^■ 
Irenée  qualifie  de  Père  des  Nicolaites. 

'Il  n  y  a  aucun  lieu  de  douter  que  cet  ouvrage  ne  soit  iwd. 
le  Mémoire  de  saint  Hippolyte,    dont  le   Pape   Gelase   ra- 
porte  deux    passages,    le   premier   desquels  est  fort  long. 


384  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

m  SIECLE.    "L'Auteur,  dit  Photius,  y  traitoit  son  sujet  avec  précision 

•  Phoi.  ibid. ^*  gravité  :  mais  au  reste  sa  manière  d'écrire  n'aprochoit 

pas  des  beautés  de  l'élégance  Attique. 

Cet  ouvrage  ne  paroît  plus  aujourd'hui  nulle  part.  Seu- 

Bib  ••?•  '•  3-  p-  lement  '  nous  avons  dans  la  Bibliothèque  des  Pères  un 
écrit  sous  le  nom  de  saint  ïlippolyte  Martyr,  avec  le  titre 
à' Homélie  sur  un  seul  Dieu  en  trois  personnes  et  le  mystère  de 

Hipp  ibiJ.iTiii.ib.  V  Incamûtion  contre  F  hérésie  de  Noët.  '  Les  Savans  qui  ont 
examiné  la  chose  avec  plus  de  soin,  sont  persuadés  que  cet 
écrit  n'est  que  le  fragment  d'un  plus  long  ouvrage,  et  la 
conclusion  du  traité  de  nôtre  Saint  contre  les  hérésies. 
On  y  voit  refutée  colle  de  Noët ,  qui  étoit  la  dernière 
des  trente-deux ,  dont  parloit  saint  Hippolyte ,  comme 
nous  avons  dit.  On  y  trouve  d'ailleurs   tant  de  caractères 

Du  Pin  ibia.  propres  à  ce  saint  Docteur  ,  qu'il  y  a  lieu  de  s'étonner  '  de 
ce  que  M',  du  Pin  nie    qu'il  soit  de  lui. 

Mais  une  preuve  bien  puissante,  et  qui  seule  suffiroit 
pour  ne  le  lui  pas  refuser,  c'est  que  le  premier  des  deux 
passages,  que  le  Pape  Gelase  cite  du  Mémoire  de  saint 
Hippolyte  contre  les  hérésies,  est  pris  entièrement  de  la  fin 
du  fragment  dont  il  est  ici  question.  Toute  la  différence  qu'il 
y  a ,  c'est  que  Gelase  pour  abréger ,  a  retranché  en  divers 
endroits  quelques  mots,  qui  n'étoient  pas  essentiels  à  son 

Tiii.  p  -u\.  dessein.  De  même  '  l'on  observe  que  tout  ce  que  saint  Epi- 
phane  dit  contre  les  Noëtiens  ,  n'est  presque  que  la  pre- 
mière partie  de  ce  fragment  qu'il  emploie  sans  le  citer, 
comme  il  fait  encore  en  divers  autres  endroits.  Voici  quel- 
ques traits  de  ce  reste  d'ouvrage.  L'idée  qu'ils  en  donne- 
ront confirmera  le  sentiment  que  nous  venons  d'établir. 

Hipp.  t.  9.  p.  c.  n.       '  Noët  et  ses  sectateurs ,   selon  saint  Hippolyte  ,  préten- 

*  doient  que  Jesus-Christ  étoit  le  même  que  Dieu  le  Père, 
et  que  c'étoit  celui-ci  qui  s'étoit  fait  homme  ,  et  qui  avoit 

p.  6. 7.  souffert.  '  Ils  établissoient  leurs  erreurs  sur  divers  passa- 

p.  8-20.  ges   de  l'Ecriture.  '  Le  Saint  entreprenant  de  les  réfuter ,. 

commence  par  expliquer  quel  est  le  vrai  sens  des  passages 
dont  ils  abusoient ,  en  les  tronquant  malicieusement , 
comme  il  s'en  plaint.  Ensuite  il  étaolit  par  l'Ecriture  mê- 
11.3.8.9.14.15.  me  les  dogmes  qu'ils  avoient  la  témérité  de  nier.  '  11  y 
adresse  la  parole  à  des  personnes  qu'il  qualifie  ses  frères, 
et  y  cite  l'Apocalypse  sous  le  nom  de  saint  Jean.  Il  y  par- 
le dignement  du  Verbe  comme  égal  h  son  Père  en  toutes 

choses , 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  Et  MAUTYH.  385 

choses,  et  du  saint  Esprit  comme  égal  à  l'un  et  à  l'autiv.    m   siècle 

11    ne    nomme   point  d'hérétique    plus    récent  que   Noët  ; 

quoiqu'il  dise  qu'il  en  a  paru  grand  nombre  dans  l'Eglise. 

'  Ainsi  c'est  avec  raison  que  Sandius  avoue ,  qu'il  ne  trouve  sand.  iwa. 

rien  dans  ce  fragment  qui  ne  convienne  au  tems  de  saint 

Hippolyte  ,    au   style   et   à  la  doctrine  des  Pères  du  lU. 

siècle. 

M'  Fabricius  en  a  fait  passer  de  la  Bibliothèque  des  Pè- 
res dans  le  premier  tome  des  œuvres  de  saint  Hippolyte  , 
la  version  latine,  qui  est  de  Turrien.  En  aïant  depuis  recou- 
vré le  texte  grec  par  la   libéralité  de  Dom  de  Montfaucon 
qui  l'avoit  eu  d'un  manuscrit  du  Vatican ,  '  il  a  inséré  l'un  Hipp.  t.  2.  p.  5- 
et  l'autre   dans  le  second  tome  de  son  édition.  Il  y  porte 
ce  titre.  Homélie  de  S.  Hippolyte  At^chevéque  et  Martyr  contre 
r hérésie  d'un  certain  Noët.  '  Ce  fragment  se  trouve  encore  Fab.  wb.  gr.  t.  5. 
dans   les  Bibliothèques  des   Pères,    éditions  de  Cologne  et  ''■  **'^' 
de  Paris,  et  dans  le  premier  tome  du  suplement  deMorel. 
'  On  l'a  aussi  imprimé  dens  un  recueil  m-4°.  qui  contient  buj.  s.  vin.  cen. 
divers    opuscules   de    Saint    Grégoire    Thaumaturge ,    de 
saint  Basile  et  de  saint  Jean  Chrysostome,  et  qui   parut  à 
Maience  en  1604,  par  les  soins  de  Gérard  Vossius,  qui  l'a 
enrichi  des  notes  de  sa  façon. 

21°' Outre  l'ouvrage  contre  les   hérétiques  en  général.  Eus.  ibiii.p.aa*! 
saint  Hippolyte  en   composa  un  autre  contre  l'hérésiarque  """^'  ''"'*■ 
Marcion   en   particulier.  Eusebe  et  saint  Jérôme  marquent 
expressément   cet   ouvrage,    en    le    distinguant    clairement 
de  celui  contre  les  hérésies;  '  et  Theodoret  en  parle  com-  Thdn.  hacr.  1.  i. 
me   d'un   écrit   où   Marcion   étoit   très-bien  refuté.  L'on  a  ""  ^'  '^'  **'*■ 
vu  d'ailleurs  que  S.   Irenée  avoit  écrit  contre  le  même 
hérésiarque. 

22°.  'Il  a  semblé  à   quelques   Savans   que  ce  traité  de  thi.  ibw.  p.  2**. 
saint    Hippolyte    contre    Marcion  ,    pourroit    bien     être  '  iiipp.  cm.  p.  2. 
celui   qui  est  marqué  dans  la  table  gréque  sous  ce  titre , 

HEPI       TAFAGOY       KAI      nO0EN      TO      KARON ,      Du     bien     et 

de  P origine  du  mal.  '  Scaliger   veut  au  contraire  que  ce  p  le- 
dernier  ouvrage  fût  écrit  contre    le    Prêtre    Florin  ,    qui 
enseignoit  en  ces  tems-là  que   Dieu  étoit  auteur  dn  mal. 
'  Mais    cette   opinion    est  refutée   par  M'^  le   Moyne  ,    qui  va.-.  sacr.  1.  a.  p. 
soutient  que  c'étoit  pliitôt  contre  les  disciples  de  Cerdon  ,  ^^"' 
de  Marcion   et   d'Hermogene,  que  contre    Florin.    Celui- 
ci  ,    comme    nous   avons   dit  sur   S.    Irenée ,    n'admettoit 

Toma  I.  Prem.  Part.  D  d  d 

3  1 


386  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

III   SIECLE,    qu'un  Dieu  et  qu'un  seul  principe  ,    à  qui  il  atribuoit  le 

mal  et  le  bien  :  au  lieu  que  les  autres  élablissoient  au  moins 

deux  principes ,  raportant  le  bien  à  l'un  et  le  mal  à  l'autre. 
Au  reste  ce  ne  sont  là  que  des  conjectures,  qui  n'établissent 
rien  de  certain.  11  suffit ,  ce  semble  ,  pour  distinguer  ces 
deux  ouvrages  ,  de  trouver  deux  titres  differens  ,  apuïés 
par  des  garans  aussi  autorisés  que  le  sont  Eusebe,  saint  Jé- 
rôme et  la  table  gréque, 

23».  La  même  table  contient  encore  les  titres  de  quel- 
ques autres  écrits  de  saint  Hippolyte  ,  desquels  Eusebe  et 
saint  Jérôme  ne  font  nulle  mention  dans  le  catalogue 
qu'ils  en   ont  dressé.   Mais   ce   qui   nous  autorise  à  faire 

Eas.ibid.iHier.ib.  fouds  sur  ccux  quc  uous  présente  celte  table,  '  c'est  que 
ces    Auteurs   avertissent    qu'il    y    avoit  bien   d'autres   ou- 

Hipp.  can,  p.  2.  vrages  de  nôtre  Saint  qu'ils  n'avoient  pas  lus.  '  Dans  la 
suite    de    la    table    on    trouve     un    traité    intitulé     riKPi 

p  14.  XAPiïMATnN  ,  sur  les  dons,  '  peut-être  sur  ceux   dont  il  est 

parlé  au  douzième  chapitre  de  la  première  épitre  aux  Co- 
rinthiens. Sur  quoi  Scaliger  observe  que  cela  prouve  la 
maxime  ordinaire  à  saint  Hippolyte  ,  de  commenter  plu- 
tôt quelques  endroits  choisis  de  l'Ecriture  ,  que  des  livres 

Tiii.ibid.  entiers.  '  M""   de   Tillernont  joignant   le  titre  de  cet  ouvra- 

ge avec  le  suivant  qu'il  transpose  en  le  mettant  le  premier, 
n'en  fait  qu'un  des  deux  ,  et  lui  donne  ce  sens  :  De  la  tra- 
dition Apostolique  sur  les  dons ,  aparemment  pour  réfu- 
ter les  Montanistes.  Ces  titres  ainsi  réunis  font  un  sens 
fort  naturel ,  qui  trancheroit  beaucoup  de  difficultés  ,  s'il 
étoit  aussi  certain  qu'il  est  ingénieux.  Mais  l'ordre  que  suit 
la  table ,  ne  paroît  pas  souflrir  celte  transposition. 

iiipp.  iiiid.  p.  2.  24".  '  Après  le  titre  du  traité  sur  les  dons,  on  y  lit  le  sui- 
vant ,  AiioiTOAiKH  nAi'AAO^sis,  Im  TrodittOii  Apostolique, 
ou  des  Apôtres.  Les  Savans  sont  })artagés  sur  le  Livre 
qu'annonce   ce  titre.    Nous  venons  de  voir  de  quelle  ma- 

p.  u.  15.  niere  l'entend  M''  .  de  Tillemont.  '  Scaliger  croit  que  l'Au- 

teur y  Iraitoit  le  même  sujet  que  saint  Irenée  ne  fait  que 
toucher  dans  le  2"  et  le  S*^  chapitre  de  son  troisième  Livre 

var.  sacr.  i.  2,  p.  coutrc  Ics  liérésics.  '  M'  le  Moyne  ne  s'éloigne  pas  de  cette 

'"***■  opinion,   et  pense   que  cet  ouvrage  traitoit  de  la  doctrine 

ou  tradition  des  Apôtres.  Il  s'apuie  sur  ce  qu'au  siècle  de 
saint  Hippolyte  on  voïoit  divers  écrits  sur  cette  matière , 
tant  de  la  part  des  hérétiques  que  de  celle  des  Orthodoxes. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.  387 

Ceux-là  se  vantant  de  tenir  des  Apôtres  les  fausses  maxi-    m  siècle. 
mes  qu'ils  suivoient ,  tâchoient  de  le  prouver  par  des  écrits  '~~' 

de  leur  façon.  Ceux-ci  de  leur  côté  y  oposoient  d'autres 
ouvrages ,  où  ils  montroient  quelle  étoit  la  vraie  doctri- 
ne Apostolique. 

'  Le  même  Ecrivain  a  douté  si  l'écrit  de  saint  Hippoly-  var.  sacr.  t.  2.  p. 
te  ,  dont  nous  venons  de  donner  le  titre ,  ne  seroit  pas  un 
petit  traité  qui  porte  son  nom  dans  la  Bibliothèque  des  Pè- 
res, et  cette  inscription  :  Sur  les  douze  ^pâtres,  en  quel  lieu 
chacun  d'eux  a  prêché.  Ce  qui  lui  a  fait  naître  ce  soupçon, 
c'est  que  cet  écrit  ne  lui  a  pas  paru  ancien,  se  trouvant  cité  sous 
le  nom  de  nôtre  Saint  par  Théodore  Metochite,  Il  est  vrai 
que  M'  le  Moyne  a  soin  d'ajouter  avec  raison  ,  que  l'on 
peut  légitimement  révoquer  en  doute  si  l'Hippolyte  cité 
par  ce  Théodore  est  le  même  que  le  grand  saint  Hippoly- 
te  dont  nous  traitons  ici.  '  Il  y  a  même  tout  lieu  de  croi-  p.  loss. 
re  que  ce  ne  l'est  pas.  En  effet  l'Auteur  du  petit  traité  y 
parle  de  diverses  choses ,  qui  certainement  ne  sont  pas  du 
siècle  de  nôtre  saint  Docteur.  D'ailleurs  quand  Théodore 
Metochite  auroit  atribué  cet  écrit  au  grand  saint  Hippo- 
lyte ,  cela  seroit  sans  conséquence  ,  parce  qu'il  est  un 
Auteur  trop  récent  pour  mériter  quelque  créance  sur  ce 
point. 

'  D'autres  ont  cru  que  l'ouvrage  annoncé  par  le  titre  de  Fab.  Bib.  gr.  t.  5. 
Tradition  Apostolique ,  pourroit  bien  être  le  Didascalia,  ou  ^'  **' 
Doctrine  de  saint  Hippolyte  ,  dont  il  est  fait  mention  par- 
mi les  manuscrits  de  Bodlei  ;    ou  le  manuscrit  grec ,    qui 
dans  Lambecius  I.  8.  p.  429  porte  pour  titre,  Constitutions 
des  saints  Apôtres  par  Hippolyte.  '  Pea^rson  et  Dodwel  assu-  ibid.  1  canis.B.  t. 
rent  que  ce  dernier  écrit ,  pour  la  plus  grande  partie,   est  *  p""-  p-  '• 
inséré  dans  le  S^  Livre  des  Constitutions  Apostoliques  ,  à 
quelques  différences  près  que  M'.  Grabe ,  de  qui  est  cette 
observation  ,  promettoit  de  donner  (')  dans   son   Spicilege  n) 


(1)  '  Mr.  Grabe  n'a  point  aqaitté  sa  pro-  vérité  le  nom  de   S.  Hippolyte  dans  deux    Hipp.  t.  1.  p,  3i5. 

messe.    Nais  Mr.   Fabricios  aïant  re^u   ce  manuscrits  grecs  d  l'endroit  qui  traite  des   259. 

que  l'autre  en  avoit  recueilli  avec  sa  ver-  Ordinations  en  gênerai.   Mais    tout  ce  que 

ston  latine,  il   l'a  inséré  dans  le  premier  l'on   en   peut   légitimement  conclure,  cest 

tome  des   œuvres   de  S.    Hippolyte.   Il  se  ou    que   celui  qui  a   dressé  le  recueil  des 

trouve   d'assez   grandes  différences    entre  Constitutions    Apostoliques ,      aura      tiré 

l'édition     de     ce     huitième  chapitre  des  cet  endroit  des   écrits  de    S.    Hippolyte, 

Constitutions   Apostoliques,     tel    qu'il   se  ou  que  S.  Hippolyte  lui-même  l'aura  fait 

lit  dans   le   recueil   de  Mr.  Cotelier,  et  ce  passer     des     Constitutions     Apostoliques 

qn'm  a  pablié  Mr.  Fabricius.  On  lit  à  la  dans  son  ouvrage. 

D  d  d  i j 


388  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

m  SIECLE,  des  Pères  du  III  siècle.  "  Mais  à  dire  vrai,  tout  ce  que 
•  canis.  ibid.  '^^s  Critiques  peuvent  dire  pour  nous  donner  quelque  no- 
tion do  ce  que  contenoit  le  vrai  ouvrage  de  saint  Hippo- 
lyte,  se  bornera  toujours  à  de  simples  conjectures  :  à 
moins  que  la  providence  ne  le  fasse  sortir  de  la  poussière, 
où  elle  l'auroit  conservé  jusqu'à  présent, 
iiip.  cm.  p.  2.  25°.  '  La  table  gréque  nous  représente  encore  en  quatre 
lignes    le    titre  suivant,   xponikon    rpos    eaahnas     kai 

nP02      HAATtiNA     H      KAI      HEPI     TOT     HANTOS  ,     LivrC     dcs 

chroniques  contre  les  Gentils  et  contre  Platon,  ou  de  l'U- 
p.  ir..  I  Canis,  II.  nivcrs.  '  Scaliger  et  quelques  autres  Savans  croient  devoir 
'^^^'  diviser  ce  titre  ,    et  en  faire  plusieurs  de  divers  ouvrages. 

Mais  il  paroît  assez  naturel  de  croire  que  ce  n'étoit  qu'un  seul  et 
var.  sâcr.  t.  2.  p.  inAmo  é(!rit ,  '  dans  Ie(|uel  saint  Hippolyte  avoit  entrepris 
1078. 1  Canis. ibid.  j^  réfutcr  la  fausse  antiquité  que  les  Gentils  s'alribuoient, 
et  l'espèce  d'éternité  que  Platon  donnoit  au  monde.  Le 
Saint  ne  faisoit  en  cela  que  suivre  l'exemple  de  saint  Clé- 
ment Alexandrin  ,  son  contemporain  ,  de  Caïus  son  con- 
disciple ,  et  de  quelques  autres  anciens  qui  ont  fait  de 
semblables  ouvrages.  Dans  la  suite  il  a  été  imité  lui-mê- 
me par  d'autres. 

Aujourd'hui  il  ne  nous  reste  rien  de  cet  ouvrage  de  saint 
Hippolyte  qui  devoit  Ctre  fort  considérable  ,  si    non   peut- 
être  un  fragment ,  le  même  dont  nous  avons  parlé  à  l'ar- 
Pboi.  not.p.o-12.  ticle  de  Caïus.  '  Il  se  trouve  sous  le  nom  de  Joseph  dans 
l(;s  notes  d'Hreschelius  sur  la  Bibliothèque  de  Photius.  Cet 
lîditeur  est    le  premier  qui  l'a  publié  en  grec   seulement. 
Var.  sacr.  1. 1 .  p.  'Dcpuis,   M'.  Ic  Movnc  l'a  inséré  avec  sa  traduction  lati- 
^'n^"^-  .  .     o.>n    ne  dans  ses  Varia  sacra,  "  d'où  M',  Fabricius  l'a  fait  passer 

»  llipp.  I.  1.  p.  Z2U-  .  ,'  ,  -.Iflil»- 

'iri'i.  dan.'j  le  premier  tome  des  œuvres  de  saint  Hippolyte.  L  in- 

scription porte  qu'il  est  pris  du  Lmre  contre  les  Grecs,  qui  est 
intitulé  contre  Platon  de  la  cause  de  l'Univers.  C'est  véritable- 
ment la  (in  d'un  plus  long  ouvrage  ;  et  l'on  y  découvre 
■  assez  l'air  et  le  style  des  autres  écrits  de  nôtre  Saint,  avec 

Var.  Sacr.  1. 2.p.  (juclqucs  traits  (Ic  la  doctrine  de  saint  Irenée.  '  Aussi  M"  le 

Ijw.  945  I  llipp.  ivjoyne  et  Fabricius  croient  que  l'on  ne  peut  refuser  ce 
fragment  à  saint  Hippolyte  ,  et  soutiennent  qu'il  ne  peut 
êlre  de  Joseph. 

llipp.  ibid  p  2*i.  'L'Auteur  y  fait  mention  d'un  autre  ouvrage,  où  il 
avoit  traité  plus  parliculieremenl  de  J.  C.  en  faveur  de 
ceux  qui  recherchent  la  vérité.  Ce    pouroit  être  ou  le  trai- 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.  389 

té  sur  J.-G.  et  l'Antéchrist ,  ou  son  homélie  à  la  louange  n  siècle. 
du  Sauveur.  »  Il  y  établit  l'immortalité  de  l'ame  et  la  ré-  .Hipp.ibid.p.220. 
surrection  des  corps  ,  et  y  détruit  la  métempsycose.  *»  Mais  221. 
il  s'y  attache  en  particulier  à  faire  une  description  de  l'en-  "  P'  ^^■*^- 
fer.  11  le  représente  comme  divisé  en  deux  parties  ,  dont 
l'une  est ,  dit-il ,  destinée  pour  le  repos  des  âmes  des  Justes, 
qui  y  sont  détenues  ,  jusqu'à  ce  qu'elles  passent  au  roïau- 
me  éternel  qui  leur  est  préparé.  Il  nomme  cette  partie  le 
sein  d'Abraham.  Les  Justes,  continuë-t-il ,  y  sont  con- 
duits à  travers  une  lumière  ,  et  en  la  compagnie  d'Anges 
qui  chantent  des  hymnes.  Le  lieu  est  très-lumineux  ,  et 
les  Justes  y  jouissent  d'une  espèce  de  félicité  ,  soutenue 
par  l'espérance  d'un  nouveau  bonheur  qui  leur  est  prépa- 
ré et  qu'ils  onl  toujours  présent  à  l'esprit.  Ce  sentiment, 
comme  l'on  voit ,  est  presque  tout  semblable  à  celui  de  S. 
Irenée  touchant  l'état  des  âmes  après  la  mort.  L'autre 
partie  de  l'enfer ,  selon  l'Auteur  du  fragment ,  est  un  lieu 
très-obscur,  où  brûle  un  feu  qui  ne  s'éteindra  jamais.  Les 
méchans  néanmoins  n'en  souffrent  pas  encore  la  peine  ; 
mais  ils  sont  extrêmement  tourmentés  en  diverses  autres 
manières  par  le  ministère  des  démons ,  et  surtout  par  l'at- 
tente du  dernier  jugement. 

26*.  '  Les  deux  lignes  suivantes  de  la  table  gréque  portent:  cani».  p.  2. 
npoTPEnTiKOï    npo2    sebhpeinan  ,   Letre    d'exhorta- 
tion à  Séverine.  'Theodoret  raporte  quelques  endroits  d'u-  t.  i.p.  qi.' 
ne  letre  de  nôtre  Saint  écrite  à  une  Reine.  'Cette   circon-  Var.  sacr.  i.  2.  p, 
stance  jointe  au  nom  de  Séverine  a  porté  plusieurs  Savans  iiîu.  "2Î3! 
à  croire  qu'il  s'agit  ici  de  l'Impératrice  Sevére,  femme  de 
l'Empereur  Philippe,  à  laquelle  Origene  a  aussi  écrit,  et  qui 
passe   pour  avoir  été   Chrétienne.    Cette   conjecture  paroît 
d'autant  plus  vraisemblable,  que  le  terme  grec  dont  se  sert 
Theodoret ,  peut  aussi  bien  signifier  une  Impératrice  qu'u- 
ne Reine. 

Quelque  plausible  néanmoins  que  paroisse  cette  opinion, 
elle  ne  laisse  pas  de  souffrir  plus  d'une  difficulté.  L'in- 
scription porte  Séverine,  et  non  pas  Sevére,  et  ne  dit  point 
qu'elle  fût  ou  Reine  ou  Impératrice.  Que  si  Theodoret 
cite  une  letre  de  saint  Hippolyte  à  une  Reine,  ce  n'est 
point  une  preuve  que  ce  soit  celle  à  Séverine.  '  Le  Saint  e^s.  i.e.  c.  20  p 
avoit  écrit  à  plusieurs  personnes,  soit  Reines  ou  autre»; 

car  entre  ses  écrits  que  saint  Alexandre  Evêque  de  Jeru- 

3  1* 


390  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE, 

III  SIECLE,  salem  prit  soin  de  ramasser,  pour  enrichir  sa  Bibliothèque, 
il  est  lait  mention  de  ses  letres  comme  faisant  un  recueil. 
11  faut  ajouter  à  tout  cela  qu'on  n'a  nulle  preuve  d'ailleurs, 
que  saint  Hippolyte  ait  vécu  au-de-là  de  l'empire  de  Sévè- 
re Alexandre, 
canis.  B.  t.  1.  pr.  '  }/[r  ,  Basnage ,  qui  fait  plus  valoir  qu'un  autre  la  pre- 
'"'   '  miere  difficulté,  bien  loin  de  la  résoudre,  comme  il  pré- 

tend ,  ne  fait  que  l'augmenter  davantage ,  en  prétendant 
que  c'est  à  Zenobie  Reine  de  Palmyre  que  saint  Hippoly- 
te adressoil  la  letre  dont  il  est  ici  question.  C'est  ce  qui 
non-seulement  n'est  apuïé  sur  aucune  preuve,  mais  qui  est 
encore  contre  toute  aparence.  Pour  que  cela  fût  proba- 
ble, il  faudroit  que  saint  Hippolyte ,  qui  avoit  été  disci- 
ple de  saint  Irenée  mort  en  202,  eût  vécu  jusqu'au  règne 
de  l'Empereur  Aurelien  en  270,  qui  est  le  tems  vers  lequel 
Zenobie  commença  à  régner.  De  plus,  il  faut  ou  suposer 
aue  Zenobie  portoit  aussi  le  nom  de  Séverine,  ou  rejetter 

I  inscription  qui  nomme  ainsi  la  personne  à  qui  la  letre  s'a- 
dressoit. 

Hipp.  t.  2.  p.  32.       '  L'Editeur  de  saint  Hippolyte  raporte  un  endroit  de  la 
Letre    Synodale    de  Jean  d'Antioche   à  Mennas  d'Alexan- 
drie, où  est  citée  une  letre  de  saint  Hippolyte  à  saint  De- 
pr.    ;  nys   Evêque   de  Chypre.  '  L'endroit  de  cette  letre  est  pris 

de   l'histoire   des  Patriarches  d'Alexandrie  par  M^  Renau- 
dot,   qui  a  mis,  dit-on,  le  nom  de  saint  Hippolyte  pour 
,  ,  celui  (lu  Pape  Jule. 

cin.p. 2.  27°.  'Nous  trouvons  encore  dans  la  table  gréque  le  ti- 

tre  d'un   autre   ouvrage   que  saint  Hippolyte  avoit  compo- 
sé, et  qui   est   nommé ,   oaai     n    haïas;     taï     rPA«i>A2: 
var.  sacr.  t.  2.p.  Cautiqucs  sur  toutes  les  Ecritures.  '  M^.  le  Moyne  prétend 
1086-1087.  qy'jj  y  ^  |v^y|g  jjj^j^g  l'inscription ,    et  qu'il  faudroit  lire  : 

Ouvrage   contre  toutes   les  hérésies.  Mais  qui  ne  sent  que 

ce  changement  est  trop  notable  pour  souffrir  une  telle  le- 

canis.  iwa.  p.  0..  çou?  '  Ccllc  qu'y  substitue  M^  Basnage  est  beaucoup  plus 

naturelle,    et  supose   un  changement  moins  considérable. 

II  voudroit  qu'au  lieu  du  mot  grec  qui  signifie  Cantiques, 
on  lût  w(Ai>îai,  Des  homélies  sur  toute  l'Ecriture.  Assuré- 
ment cette  leçon  ainsi  rétablie  ne  souffriroit  aucune  diffi- 
culté. Elle  est  même  fortifiée  par  l'idée  que  présente  le 
grand  nombre  d'écrits  que  saint  Hippolyte  composa  sur 
diverses  parties  des  Livres  sacrés,  comme  on  l'a  vu.  Mais 


I 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.    391 

enfin  l'inscription  ne    la  souffre    pas;  *  et  M'.  Basnage  en    m  siècle. 
voulant   l'établir  a  oublié   le  principe  qu'il   avoit  posé  un  .canis.iwd.  p.  s. 
peu    auparavant ,  savoir  :  ou   qu'il   faut   rejetter  la    table 
gréque  comme  pleine  de  fautes  ,  et  indigne  de   la  moindre 
créance  ,  ou  qu'il  n'y  faut  rien  changer. 

Après  tout ,  pourquoi  se  faire  une  difficulté  ,  où  il  n'en 
paroit  aucune  ?  Quel  inconvénient  trouve-t-on  à  lire  w^«i, 
Des  Cantiques?  Et  qui  empêche  que  saint  Hippolyte  n'en 
ait  fait  en  faveur  ,  ou  pour  la  défense  des  Ecritures,  dont 
il  auroit  établi  l'inspiration  et  la  divinité? 

28°.  A  l'égard  de  ses  homélies ,  on  ne  peut  douter  qu'il 
n'en  ait  composé  un  très-grand  nombre  ,  qui  n'est  point 
venu  jusqu'à  nous.  Nous  avons  déjà  observe,  '  que  nous  Hier.  vir.  iii.  cet. 
n'avons  point  celle  qu'il  avoit  faite  à  la  louange  du 
Sauveur,  et  que  S.  Jérôme  spécifie  entre  les  autres  ouvra- 
ges de  nôtre  Saint ,  comme  un  écrit  considérable.  S.  Hip- 
polyte y  témoignoit  qu'Origene  avoit  honoré  quelquefois 
son  auditoire.  S'il  étoit  bien  vrai  que  le  Saint  eût  jamais 
prêché  en  Arabie  ,  il  seroit  aisé  '  qu'Origene  qui  y  passa  var.  sacr.  1. 1.  p. 
quelque  tems,  se  fût  trouvé  à  quelques-uns  de  ses  discours.         *"*• 

'  Le  Concile  de  Latran  tenu  en  649  cite  un  endroit  pris  Hipp.  t,  i,  p.  asi. 
de  l'homélie  de  S.  Hippolyte  Evêque  et  Martyr  ,  sur  le  '"  *  ''■  *^ 
Dimanche  de  Pâque,  et  un  autre  tiré  d'un  de  ses  discours 
sur  la  théologie  ;  c'est-à-dire  ,  comme  l'explique  le  Con- 
cile même ,  sur  la  Divinité.  Ces  deux  homélies  nous  man- 
quent ,  comme  tant  d'autres.  Car  il  ne  paroît  point  par 
les  paroles  que  le  Concile  cite  de  la  dernière  ,  qu'elle  soit 
la  même  que  la  conclusion  du  traité  des  hérésies,  laquelle 
porte  dans  quelques  manuscrits  le  titre  d'homélie  sur  un 
seul  Dieu  en  trois  personnes. 

29".  '  S.  Jérôme  répondant  à  un  certain  Lucinius,  Espa-  Hier-  «p    »«• 
gnol ,  qui  lui  avoit  demandé  si  l'on  pouvoit  jeûner  le  jour  "' 
du  Dimanche  et  recevoir  tous  les  jours  la  sainte  Euchari- 
stie ,  comme  cela  s'observoit  dans  l'Eglise  de  Rome  et  cel- 
le d'Espagne  ,  le  renvoie  à  ce  qu'avoit  écrit  sur  ce  sujet  S.  '"''  '""•>' 
Hippolyte   avec   son   éloquence  ordinaire.   Au  reste  on  ne 
sauroit  dire   précisément  si  nôtre  Saint  avoit  composé  un 
traité  particulier   sur  ces  points  de  discipline  ,    ou  s'il  les 
avoit    seulement    touchés    dans    quelque    autre   ouvrage , 
comme  dans  celui  de  la  tradition  des  Apôtres. 

30*.  De  même  l'antiquité  ne  nous  fournit  point  assez  de 


392 


S    HIPPOLYTE,  EVEQUE, 


Canis.  B.  t.  1.  pr. 
p.  9. 


Hipp.  t.  t.  p.  383. 
284. 


III  SIECLE,  lumière,  pour  déterminer  si  saint  Hippolyte  avoit  fait  un 
—■~~~~~"  écrit  exprès  sur  le  nombre  impair,  ou  s'il  n'en  avoit  fait 
que  parler  en  traitant  quelqu'autre  matière.  Quoiqu'il  en 
in  jovin.  p.  241.  soit ,  '  saiut  Jérôme  le  met  au  nombre  de  ceux  qui  entre 
les  Grecs  et  les  Latins  ont  écrit  sur  ce  sujet  :  comme  saint 
Clément  Alexandrin  ,  Origene  ,  saint  Denys  ,  Eusebe  et 
Didyme  entre  les  premiers  ;  Tertullien ,  saint  Cyprien  , 
Victorin ,  Lactance  et  saint  Hilaire  de  Poitiers  entre  les 
autres. 

31°.  '  Léonce  de  Byzance  a  cité  sous  le  nom  de  saint  Hip- 
polyte un  traité  des  bénédictions  de  Balaam.  Mais  cet  Auteur 
est  si  infidelle  à  raporter  les  témoignages  des  anciens,  qu'il 
ne  mérite  pas  beaucoup  de  créance.  Il  a  pu  se  faire  néan- 
moins que  saint  Hippolyte  selon  sa  coutume  ait  pris  ces  Bé- 
nédictions pour  le  sujet  de  quelques-uns  de  ses  traités  ou 
homélies,  d'où  Léonce  aura  tiré  ce  qu'il  en  cite. 

32°.  '  Pallade  dans  son  histoire  Lausiaque  raporte  deux 
histoires ,   qu'il   dit   avoir   tirées  d'un    Livre  d'Hippolyte , 

aui  avoit  vfîcu  avec  les  Apôtres.  C'est  ce  que  l'on  croit 
«voir  entendre  de  nôtre  Saint.  Mais  si  l'on  prend  les 
choses  à  la  letre ,  cela  ne  lui  peut  convenir  ;  puisqu'il  n'a 
été  que  disciple  de  ceux  qui  l'avoient  été  des  hommes 
Apostoliques.  On  ignore  au  reste  quel  pouvoit  être  ce 
livre.  Une  de  ces  deux  histoires  regarde  une  Vierge  de 
Corinthe. 

Voilà  tout  ce  que  nous  avons  pu  trouver  de  plus  auto- 
risé touchant  les  écrits  qu'on  a  atribués  à  S.  Hippolyte 
comme  véritablement  de  lui ,  et  qui  ne  sont  pas  venus 
•  jusqu'à  nous.  Nous  avons  cru  devoir  nous  en  tenir  aux 
Ecrivains  oui  ont  été  plus  proches  de  son  tems  ,  comme 
aiant  eu  plus  de  connoissance  de  ce  qui  concerne  son  his- 
toire et  ses  ouvrages.  Nous  y  avons  joint  ceux  dont  la 
table  gréque  déterrée  avec  sa  statue  nous  fournit  les  titres. 
Ces  autorités  nous  paroissent  irréfragables  ;  et  nous  ne 
canis.  ibid.  comprenous   pas  comment  '  M'.    Basnage   voudroit   telle- 

ment se  borner  aux  écrits  marqués  dans  cette  table , 
qu'il  ait  osé  avancer  ,  qu'il  faut  absolument  rejetter  cet 
ancien  monument,  si  l'on  prétend  attribuer  à  S.  Hippo- 
lyte d'autres  ouvrages  que  ceux  qu'il  nous  présente.  Quoi  ! 
il  ne  faudra  avoir  nul  égard  ni  à  Eusebe  ni  à  saint  Jérô- 
me ,  qui  lui  en  donnent  plusieurs  autres,  et  qui  néanmoins 

ne 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.    393 

ne   font   le   dénombrement  que   de   ceux   qu'ils   ont  vus  !    m  siècle. 

Assurément  cela  n'est  pas  raisonnable;   et  M'.    Basnage  a 

bazardé   cette  pensée  sans  y  réfléchir.   D'ailleurs  auroit-il 

voulu"  répondre  que  ceux  qui  ont  dressé  la  liste  des  titres 

d'ouvrages  qui  se  lit  sur  la  table ,  eussent  connu  tous  ceux 

qu'avoit  composés  saint  Hippolyte  ?    Us  y  auront  mis  ou 

ceux  qu'ils  avoient  entre  les   mains  ,  ou  ceux  qu'ils  sa- 

voient  être  de  lui  sans  d'autres  recherches  ,  au  teras  que 

la  table  fut  faite. 

j;.  IV. 

Ecrits  qu'on  lui  a  suposés. 


I 


L  y  a  d'autres  ouvrages  qui    portent   le   nom   de  saint 

Hippolyte  ,  mais  qui  lui  ont  selon  toute  aparence  été 
alribués  ou  pour  leur  donner  plus  d'autorité ,  comme 
étant  le  plus  illustre  de  ceux  qui  ont  porté  ce  nom  ,  ou 
pour  remplacer  quelques-uns  de  ceux  que  l'on  savoit  être 
sortis  de  sa  plume ,  et  que  l'on  ne  voïoit  plus  paroître. 
C'est  ce  que  nous  entreprenons  'de  discuter  ici. 

1".  Le  plus  fameux  ouvrage  que  l'on  a  supposé  à  nôtre 
Saint ,  est  '  celui  qui  porte  pour  titre,  Dùcours  de  saint  Hip-  sand.  vei.  scri.  ec- 
polyte  Evéque  et  Martyr,  sur  la  fin  du  monde,  F  Antéchrist ,  et  E*'|f  '  "  p™?"  j 
le  second  avènement  de  Jesus-Christ.  M'.  Picot  '  Président  aux  Hipp.  t.  i.app.  p. 
Enguêtes  et  depuis    Chanoine  de    Nôtre-Dame  de   Paris  , 
le  fit  imprimer  à  Paris  grec  et  latin  avec  le  titre  que  l'on 
vient  de  lire,  et  qui  se  trouve  a  la  tête  du  manuscrit  grec 
de  Venise  ,  d'où  il  en  vint  une  copie   à  l'Editeur.  Cette 
édition    est  de    1567.  L'ouvrage  est  passé  depuis   dans  le 
douzième   tome  de   la   Bibliothèque   des   Pères ,    dernière 
édition  de   Paris  ,  '  et  dans  le  troisième  tome  de  celle  de  buj.  pp.  i.  3.  p. 
Lyon.  " On  le  trouve  aussi  à  la  fin  du  premier  tome  des  Vv,^^.\hi<i.  p. *. 
œuvres  de  nôtre  Saint.  *• 

Comme  l'on  savoit  que  saint  Hippolyte  avoit  laissé  un 
traité  sur  ce  sujet ,  personne  ne  douta  d'abord  que  ce  ne 
fût-là  son  ouvrage.    Mais   on  ne    fut   pas  fort  long-tems 

(1)  Son  nom  latin   est   Picut,  ce  qui  l'a  son  véritable  nom  franco»  est  Picot,  com- 

fait  nommer   Pic   en   nôtre  langue,  par  di-  me   nous  l'avons   trouvé  dans  un  privilège 

vers  Savans,  '  et  qui  l'a  fait  prendre  pour  pour  imprimer  ses  ouvrages.  Du  Pin.  Bib.  t.  1. 

Pic   de   la   Nirande  par  Mr.  du  Pin.  Mais  p.  341. 

Tom  1.  Prem.  Part.  E  e  e 


39i     JM     S.   HIPPOLYTE,   EVRQUE, 

111  SIECLE,    (jai^g   ggtjg   erreur.  '  Dès   1612   André   Rivet   prouva   fort 
'R'v.onx  1.2.  c.  bien   que  cet  écrit   étoit  indi.Lçne  do   saint  Hippolyle  ;    que 
''  ce  n'étoit  que  l'ouvrage  d'un  ignorant,  qui  établissoit  des 

1  absurdités  grossières  ;  qu'il  méritoit  pou  d'estime  par  lui- 
même  ;  et  qu'il  n'avoit  pas  plus  d'autorité  que  celui  qui 
l'avoit  composé.  Tous  les  habiles  Catholiques  suivirent 
ce  sentiment  ;  et  l'on  y  fut  confirmé  ,  lorsque  l'on  vit 
paroître  par  les  soins  de  W.  (judius  le  véritable  traité  de 
nôtre  Saint  .sur  r.Vntechrist.  Il  sulfisoit  ,  ce  semble  ,  de 
lire  des  choses  extraordinaires  et  contraires  à  la  doctrine 
de  saint  Hippolyle  dans  l'écrit  qu'on  lui  alribuoit  d'abord 
pour  cesser  de  le  lui  donner, 
ipp  ibij  '  Telles   sont    entre  autres    les   deux    opinions    que    son 

Auteur  établit  touchant  saint  Jean  l'Evangeliste  et  l'An- 
téchrist. Il  prétend  que  celui-là  n'est  pas  mort ,  et  qu'il 
doit  venir  avec  Henoch  et  Elie  un  peu  avant  qu(^  l'Anté- 
christ paroisse.  Quant  à  celui-ci,  il  soutient  que  ce  ne 
sera  point  un  homme  ,  maïs  un  démon,  contre  ce  que  nous 
en  aprend  saint  Paul  ,  qui  le  nomme  le  lils  de  perdition, 
i.  I.  1..9.I1.UI  |i.  l'homme  de  péché.  '  On  trouve  des  sentimens  tout  con- 
traires dans  le  véritable  écrit  de  saint  Hippolyte.  Il  y 
est  dit  nettement  que  saint  Jean  est  mort  comme  Daniel , 
et  que  l'Antéchrist  sera  un  homme  qui  descendra  de  la 
tribu  de  Dan. 
Kiv.  ibid.  i.  2*.  '  Il  faut  porter  le  même  jugement  d'un  autre  ouvra- 

ge ,  qui  approche  de  la  nature  du  précèdent ,  si  néanmoins 
il  en  est  différent,  et  que  l'on  atribue  encore  à  saint  lîip- 
six.  Bill  I.  i.  p.  polyte.  '  C'est  une    espèce    de    commentaire    sur   l'Apoca- 
*"  '  lypse  que  l'on  trouva  à  Basie  ,  selon  Sixte  de  Sienne,  sous 

le  nom   de  nôtre  Saint ,    mais  à   qui  il  doutoit   lui-même 
qu'on  pût   l'atribuer  ,     à   cause   du  peu  d'érudition  et  du 
mauvais  style  de  l'ouvrage. 
Bib.  l'i».  I.  .-..  t>.       3°.  'Nous  avons  sous  le  nom  de  saint  Hippolyte  dans  la 
*'*  Bibliothèque   des  Pères  un   très-petit  traité  qui  y  porte  ce 

titre  :  Des  douze  Apôtres,  et  des  lieux  où  chacun  d  eux  a  pré- 
B.b.  Coisi.  !..  iiu.  ché ,  et  fini  sa  vie.  '  Il  se  trouve  sous  le  même  nom  parmi 
Hipj).  i.  i.app.  |..  les  manuscrits  grecs  de  M',  de  Coislin  ;  '  et  on  l'a  mis  en- 
suite en  grec  et  en  latin  à  la  fin  du  premier  tome  des  œuvres 

ili  H  en  faut  excepter   ue   que  l'Auteur  ,\    dit  i\e  l'éteroité   (tu   Verbe,   du   sacrifice   da 
corps  el  lin  saii;;  de  J.   ('..   i'«  qui    |)Oiirr(iil    fort  hii-ii   roiiVHiiir  a  S.   Hippalyle. 


it  31    il. 


DOCTEUR  DE  1/ EGLISE.  ET  MARTYR.    39:; 

de  saint  llippolytc.    On  remarque  qu'il   est  cité   sous  son    ni  sikcle. 

nom   par   George  Cedrenus   et   Michel  Glycas.    Mais   cela  

n'autorise  pas  à  le  croire  de  lui.  11  contient  trop  de  cho- 
ses incertaines  et  souvent  inexcusables,  pour  ne  pas  dire 
fausses  et  absurdes,  qui  le  rendent  indigne  de  nôtre  saint 
Docteur. 

4".  Ce  que  nous  venons  de  dire  du  petit  traité  sur  les 
douze  Apôtres,  il  faut  l'apliquer  au  petit  écrit  suivant, 
qui  se  trouve  dans  les  mêmes  manuscrits  grecs,  'et  que  M^  Hipp.  i.  i.app.  . 
Fabricius  nous  a  donné  en  grec  et  en  latin  :  Des  soixante-  *'*"' 
dix  Apôtres,  ou  plutôt  Disciples.  C'est  très-peu  de  chose, 
n'étant  qu'un  catalogue  mal  concerté  de  70  Disciples , 
avec  leurs  principales  qualités,  la  plupart  imaginées, 
comme  le  sont  aussi  plusieurs  noms  de  ceux  à  qui  on 
les  atribue.  Par  exemple,  on  y  fait  entrer  plusieurs  per- 
sonnes qui  ne  furent  converties  à  la  foi,  que  du  tems  de  la 
prédication  de  saint  Paul,  et  qui  par  conséquent  n'avoient 
jamais  été  en  la  compagnie  du  Sauveur.  On  y  distingue  deux 
Rarnabés  que  l'on  fait ,  l'un  Evêque  de  Milan ,  l'autre 
d'Heraclée.  On  y  donne  à  Crescent  le  titre  d'Evêque  de 
(-alcedoine  dans  les  Gaules. 

.')".  '  On  parle  encore  sous  le  nom  de  saint   Hippolyle  de  Tiii.  ibH. 
quelques  autres  opuscules  de  même  structure^  et  de  même 
mérite  que  les  deux  précedens  :  d'une  généalogie  de  saint 
Joseph  et  de  toute  .sa  famille  ;  d'un  livre  de  la  naissance  et 
de  la  famille  de  la  sainte  Vierge ,  qui  n'est  qu'un  extrait 
de  l'autre.  '  C'est  sans  doute  ce  que  W.  Rasnage  nous  a  don-  Canis.  u.  i. .?.  p. 
né  dans  ses  observations  sur  la  chronique  d'IIippolyte  de  ^^^^' 
Thebes,    coumie   des    fragiuens  de  l'ouvrage  de  cet  Ecri- 
vain, '  qui  ne  vivoit  qu'après  Melaphraste  qu'il  cite.  Hipp.  tii.  cIh-.  p 

6°.  '  On   trouve  dans   Lambecius   un   fragment  de   cette  var.  sacr.  t.  a.p. 
chronique   d'Hippolyle   de   Thebes,    que   Canisius   nous  a  b'^*'.' 3"p"« ^34: 
donné  plus  ample  en   grec  et  en  latin.    Des  Auteurs  qui  *"• 
n'ont  pas   assez  distingué    les  personnes   qui  ont   porté  le 
nom  d'Hippolyte ,   ni  les  tems  où  elles  ont  vécu ,   ont  atri- 
bue ce  fragment  au  Saint  dont  nous  traitons  ici;    croïant 
que  c'étoicnt  les  chroniques  marquées  dans  la  table  gréquc. 
L'erreur  cependant  est  assez  grossière  pour  se  faire  sentir  par 
elle-même  ;  et  il  est  surprenant  qu'on  ne  l'ait  pas  d'abord 
aperçue.   11   est   visible   que   l'Auteur   de   ce  fragment  n'a 

E  e  e  ij 


• 


396  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE,  i 

m  SIECLE,    pas  vécu  au-dessus  du  X  siècle.  On  ne  pouvoit  guéres  s'y 
Hipp.  Th.  ibid.      tromper  ;  '  puisqu'il  cite  souvent  Metaphraste. 
Hipp.  t.  1.  p.  49-      7°.  '  On  donne  encore   à  nôtre  Saint  la  première  partie 
**•  d'une  autre  chronique,  publiée  aussi  par  Canisius,  réim- 

canis.  B.  i.  2.  i.  primée  un  peu  plus  complette  par  M\  Fabricius,  '  et  de- 
part.  p.  154-826.     ^^^^  ^^  ^^^^  ^^^  entier  par  M'.  Basnage.  Elle  va  jusqu'au 

tems  de  Charlemagne.  Mais  il  n'est  ici  question  que  de  la 
première  partie,  où  l'on  remarque  quelques  petites  diffé- 
rences dans  les  deux  éditions  de  M'.  Basnage  et  de  M'.  Fa- 
bricius. L'on  convient  qu'elle  a  été  dressée  sous  l'empire 
de  Severe  Alexandre;  quoiqu'il  fût  plus  vrai  de  dire  qu'el- 
le ne  l'a  été  tout  au  plutôt ,  que  sous  son  successeur  Maxi- 

Hipp.  ibid.  p.  59.  min  I;' puisque  selon  l'exemplaire  de  M^  Fabricius  elle 
marque  tout  le  tems  du  règne  d'Alexandre  en  ces  termes  : 
Alexander  annis  tredecim,  diebus  novem.  Or  ce  terme  nous 
conduit  jusqu'à  l'an  235  inclusivement,  au-delà  duquel  il 
n'est  pas  certain  qu'ait  vécu  saint  Hippolyte. 

Nous  ne  voïons  rien  d'ailleurs  qui  puisse  nous  porter 
avec  quelque  fondement  à  lui  donner  cette  première  par- 
tie de  chronique.  Il  est  vrai  que  nous  aprenons  d'Eusebe 
et  de  saint  Jérôme ,  qu'il  en  avoit  fait  une ,  mais  c'étoit 
par  raport  au  jour  de  Pâque.  Assurément  ce  n'est  point 
celle  dont  il  s'agit  ici.  L'on  n'y  aperçoit  aucun  trait  d'un 
ouvrage  de  cette  nature.  Il  est  encore  vrai  que  la  table, 
qui  contient  plusieurs  titres  des  ouvrages  de  saint  Hippo- 
lyte, lui  atribue  un  Livre  de  chroniques  contre  les  Grecs 
et  contre  Platon.  Mais  celle  qui  fait  le  sujet  de  ce  point 
de  critique,  ne  présente  rien  qui  puisse  déterminer  à  croi- 
re que  ce  soit  la  même. 

Il  y  a  beaucoup  plus  d'aparence ,  et  il  est  bien  plus  na- 

canis.  ib.  p.  148.  turcl  '  de  dire  avec  M'.  Basnage ,  que  cette  première  par- 
lie  de  chronique  est  de  Jule  l'Africain ,  qui  fleurissoit  sous 
l'empire  d'Alexandre.  Voici  probablement  tout  le  dé- 
nouement de  la  difficulté.  L'on  savoit  en  général  que  saint 
Hippolyte  avoit  composé  une  chronique  :  il  a  fallu  en 
trouver  une  pour  la  lui  donner.  D'abord  s'est  présentée 
celle  d'Hyppolyte  de  Thebes;  et  on  l'a  faussement  atri- 
buée  à  nôtre  Saint.  Ensuite  on  s'est  aperçu  qu'elle  ne 
pouvoit  être  de  lui  ;  et  l'on  s'est  avisé  de  lui  donner  celle 
de  Jule  l'Africain. 

Hipp.  i.  2.  p.  37-      8°,  '  Enfin  M'.    Fabricius   a  fait  imprimer  des  extraits 

44. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  MARTYR.    397 

d'une  chaîne  des  Pères  sur  le  Pentateuque  Arabe.  Le  nom  ni  siècle. 
d'Hippolyte  s'y  trouve  avec  ceux  de  plusieurs  autres  Pères 
du  III ,  IV ,  et  V  siècle  ;  et  il  y  a  environ  quarante  en- 
droits que  cet  Hippolyte  a  commentés.  Mais  il  ne  paroît 
en  nulle  manière  que  ce  soit  le  même  que  nôtre  saint  Do- 
cteur; et  l'on  peut  assurer  que  ces  fragmens  ou  extraits  ne 
sont  point  de  lui.  Bien  loin  d'y  apercevoir  les  caractères  et 
de  son  esprit  et  de  sa  doctrine ,  on  y  en  trouve  de  tout 
oposés.  On  y  voit  beaucoup  de  traits  du  génie  d'un  Rab- 
bin, et  quelques  rêveries  de  gens  de  sa  sorte.  D'ailleurs 
cet  Hippolyte  y  est  toujours  qualifié  Commentateur  ou 
Interprête  du  Targum,  et  jamais  ni  Martyr  ni  Evêque; 
quoique  les  autres  Pères  y  aient  leurs  qualifications  con- 
venables. S.  Athanase,  par  exemple,  y  est  qualifié  Patriar- 
che d'Alexandrie;  S.  Basile,  Evêque  de  Césarée;  S.  Epi- 
phane,  Evêque  de  Chypre,  ainsi  des  autres. 

S-  V. 
Son  érudition ,  aa  doctrine  et  sa  manière  (V écrire. 

IL  faut  que  saint  Hippolyte  eût  un  grand  fonds  d'érudi- 
tion, pour  avoir  autant  écrit  que  nous  venons  de  le 
montrer.  Encore  ne  nous  ilatons-nous  pas  de  connoître 
tous  les  ouvrages  qui  sont  sortis  de  sa  plume ,  encore 
moins  de  les  avoir  tous  marqués.  On  voit  au  moins  qu'il 
a  écrit  en  presque  tous  les  genres  de  lileralure  ecclésiasti- 
que. De  sorte  qu'on  pourroit  à  juste  titre  lui  donner  tout 
ensemble  les  qualités  d'Interprète,  de  Canoniste,  de 
Théologien ,  de  Controversiste ,  d'Historien ,  de  Chro- 
nologiste,  d'Orateur  et  de  Poëto  Chrétien.  Aussi  saint 
Jérôme  le  compte-t-il  sans  difficulté  entre  les  Pères  de 
l'Eglise,  dans  les  écrits  desquels  on  ne  sait  ce  qui  paroît 
le  plus  digne  d'admiration,  ou  la  science  ecclésiastique, 
ou  l'érudition  profane. 

On  a  pu  remarquer  par  ce  que  nous  avons  dit  sur  le  peu 
qui  nous  reste  de  ses  ouvrages,  qu'il  y  a  beaucoup  de  con- 
formité entre  sa  doctrine  et  celle  de  saint  Irenée  son  Maî- 
tre. C'est  ce  qu'il  ne  faut  pas  atribuer  seulement  à  la  qua- 
lité de  disciple,  'mais  aussi  à  l'atention  extrême  qu'avoit  ijipp.  ii.  p.  s.  ». 
nôtre  Saint  à  ne  rien  changer  à  ce  qu'il  avoit  apris  de  ceux 


398  S.  HIPPOLVTK,   EVEQUE,         ,) 

III  SIECLE,  qui  avoieiit  précédé.  Comme  .«laint  Irenée  ,  il  a  puissam- 
ment  établi  la  divinité  du  Verbe  éternel  ;  et  il  est  peu  de 
Pères  postérieurs  même  au  Concile  de  Nicée  ,  (jui  en  aïeni 
parlé  plus  dignement.  Presque  tout  ce  qui  nous  reste  de 
ses  ouvrages  ,  est  parsemé  de  traits  qui  établissent  daire- 
sand.  hisi.  ecci.i.  mcut  cetto  doctrine.  On  peut  juger  par-là  de  l'injure  '  que 
*"'^'  lui  a  fait  Sandius  en  l'acusant  d'avoir  donné  dans  des  sen- 

Hipp.  t.  .  p.  50-  timens   oposés.  '  Mais   Bnllus   l'a   si   pleinement  justifié  de 
^'  cette  fausse  acusation  ,  qu'il  ne  peut  plus  y  avoir  de  diffi- 

culté sur  cela. 

S..  Hippolyte  a  encore  suivi  la  doctrine  de  son  Maître 
en  établissant  l'immortalité  de  l'ame,  et  la  résurrection  des 
corps  :  deux  vérités  de  la  llcligion  Chrétienne,  qui  ctoicnl 
fort  combatues  en  son  tems.  Il  a  aussi  détruit  l'opinion 
de  la  métempsycose  ,  et  soutenu  l'autorité  de  l'Apocalyp- 
se ,  comme  le  vrai  ouvrage  de  saint  Jean  l'Evangeliste.  Il 
est  même  allé  jusqu'à  épouser  le  sentiment  qu'on  atribue 
à  saint  Irenée  touchant  l'Epitre  aux  Hébreux  ,  qu'il  ne 
croïoit  pas  être  de  .'^aint  Paul.  Ce  n'est  pas  à  dire  néan- 
moins qu'il  ces.sât  de  la  regarder  comme  l'Ecriture  sainte.  Il 
parott  aussi  qu'il  embrassa  au  moins  en  partie  son  opinion 
sur  l'état  des  âmes  après  la  mort,  et  sur  la  durée  du  mon- 
de ,  qu'ib  fixoient  l'un  et  Tautre  à.  six  mille  ans. 

Mais  il  a  surpassé  son  Maître  par  son  grand  travail  sur 
l'Ecriture  sainte,  et  a  fait  voir  par-là  qu'il  regardoit  l'in- 
telligence des  Livres  sacrés  comme  très-importante  pour 
la  Religion.  Il  a  la  gloire  d'être  le  premier  des  Pères  qui 
ont  le  plus  écrit  sur  cette  matière,  et  d'avoir  servi  de  mo- 
tif et  de  modèle  au  grand  Origene  pour  entreprendre  un 
travail  aussi  utile  à  l'Eglise.  Il  est  vrai  que  sans  en  excep- 
ter Origene  même,  aucun  des  Pères  n'a  plus  donné  dans 
le  sens  figuré  que  saint  Hippolyte.  C'est  au  moins  l'idée 
que  nous  en  donne  le  peu  qu'on  nous  a  conservé  de  ses 
Phot.  c.  204.  p.  Commentaires.  '  Photius  remarque  même  qu'il  avan-. 
çoit  quelquefois  des  sentimens  peu  exacts,  mais  il  l'entend 
de  cette  exactitude  qui  ne  fut  connue  que  long-tems  après 
qu'il  écrivoit. 

Quant  à  sa  manière  d'écrire  ,   elle  a  tous  les  caractères 
Hier.  ep.  52.  p.s79.  dc   ccttc  aimable  simplicité  des  premiers  siècles.  '  S.  Jérô- 
me ne  laisse  pas  toutefois  de  lui  atribuer  une  grande  élo- 
quence :  ce  qui  est  fort  compatible  avec  la  simplicité  que 


DOCTF.UR  DE  I/EGLJSR,  ET  MARTYR.    399 

nous   remarquons  dans   ses   écrits.    Car   on    est   éloquent,    m  siècle. 
quelque  simple  que  soit  le  style  qu'on  emploie,   lorsqu'on  ~  " 

sait  persuader  ;  et  l'on  persuade ,  lorsqu'on  sait  emploïer 
à  propos  les  raisons  les  plus  propres  à  exciter  ou  apaiser 
les  mouvemons  que  l'on  se  propose. 

Du  reste  'son  style  était  grave,  clair,  net,  concis,  nul-  fhoi.r.  iutni. 
lemcnt  embarassé  de  choses  inutiles,  et  tout-à-fait  conve-  ^' 
nable  à  un  Interprète  de  l'Ecriture.  Mais  il  n'avoit  ni  les 
beautés  ni  les  agrémens  de  l'élégance  des  Athéniens  ;  et 
les  règles  de  la  politesse  du  discours  y  étoient  quelquefois 
négligées.  C'est  ainsi,  comme  on  a  vu,  qu'avoit  écrit 
Saint  henéc,  en  se  servant  d'un  style  le  plus  commun. 

S    VI. 

Ëditioim  de  ses  Ouv rayes. 


N 


oiis  avons  déjà    parlé  en  son   lieu  des  éditions  qui  on! 

paru  séparément  de  quelques  opuscules  de  S.  Hip- 
polyte.  Il  ne  s'agit  ici  que  d'une  édition  de  tout  ce  qui  nous 
reste  de  ses  écrits  réunis  ensemble. 

'  Personne  jusqu'au  commencement  de  nôtre  siècle,  Hipp.  i.i.  pr.p.s. 
n'avoit  paru  songer  h  recueillir  ces  pi-écieux  restes  pour  en 
faire  présent  au  public.  M'.  Millius  est  le  premier  que  nous 
sachions  en  avoir  formé  le  dessein.  Mais  la  mort  en  pré- 
vint l'exécution.  Après  son  décès  on  faisoit  espérer  que 
M'.  Janus  Docteui-  de  l'Uinversité  de  Wittemberg ,  qui 
avoit  hérité  des  mémoires  de  M'.  Millius,  donneroit  l'é- 
dition que  celui-ci  avoit  projetée. 

Cependant  M'.  Fabricius,  Docteur  et  Professeur  au  iWd. 
Collège  d'Hambourg  ,  à  qui  la  république  des  letres  est 
redevable  de  plusieurs  ouvrages  pleins  d'érudition,  entre- 
prit d'exécuter  ce  dessein,  sans  sa.oir  quelle  seroit  l'issue 
du  projet  de  M^  Janus.  Aïant  fait  toutes  les  recherches 
possibles,  pour  recueillir  ce  qui  a  échapé  des  écrits  de  saint 
Hippolyte  aux  malheurs  des  tems,  '  il  en  publia  deux  pe-  Bit.  s.  vi.i  cr-n. 
tits  volumes  in-folio,  qui  furent  imprimés  à  Hambourg, 
l'un  en  171 G  chez  Chrétien  Licbezeit,  et  l'autre  en  1718 
chez  Liebczeil  et  Théodore  Christophe  l-Vlginer. 


400  S.  HIPPOLYTE,  EVEQUE. 

m  SIECLE.        Le    premier  volume    contient   les   ouvrages  entiers,  qui 

■  sont  certainement  de  saint  Hippolyte,   et  dont  nous  avons 

parlé  au  second  article  de  son  histoire.  Le  Cycle  Pascal 
s'y  trouve  acompagné  des  principaux  Commentaires,  que 
les  modernes  ont  publiés  pour  l'éclaircir.  Aux  ouvrages 
entiers  l'Editeur  a  eu  soin  d'ajouter  tous  les  fragmens  d« 
même  Père,  qu'il  a  pu  déterrer  dans  les  anciens  Ecrivains. 
C'est  de  quoi  nous  avons  parlé  en  détail,  à  mesure  que 
l'ocasion  s'en  est  présentée,  en  faisant  le  dénombrement 
des  écrits  perdus.  11  y  a  joint  encore  une  ancienne  Chro- 
nique, comme  étant  de  saint  Hippolyte,  mais  que  d'au- 
tres soutiennent  avec  plus  de  vraisemblance,  comme  nous 
l'avons  montré,  être  l'ouvrage  de  Jule  l'Africain.  A  la 
fin  du  volume  est  un  appendice  qui  comprend  plusieurs 
écrits  qu'on  a  faussement  atribués  à  saint  Hippolyte.  Tou- 
tes ces  pièces  sont  enrichies  de  notes  et  d'observations  sa 
vantes  et  judicieuses,  qui  y  répandent  beaucoup  de  lu- 
mière. 

Pour  le  second  volume,  c'est  moins  une  continuation 
des  œuvres  de  saint  Hippolyte,  qu'un  Spicilege  des  écrits 
des  Pères  de  ce  III  siècle.  Il  y  a  néanmoins  à  la  tête  de 
précieux  morceaux  des  ouvrages  de  nôtre  Saint.  Tels  sont 
les  textes  grecs  de  ce  qui  nous  reste  des  écrits  contre  les 
Juifs,  et  contre  l'hérésie  de  Noët.  Tels  sont  encore  les 
fragmens  du  Commentaire  sur  la  Genèse  et  de  celui  sur 
Isaïe.  Quant  aux  fragmens  du  Commentaire  sur  le  Pen- 
tateuque  Arabe ,  nous  avons  fait  voir  au'ils  ne  sont  point 
du  grand  saint  Hippolyte,  quoiqu'on  les  donne  sous  son 
nom  dans  ce  recueil.  (XXXI.) 


TITIEN, 


401 


TITIEN, 

Géographe,  Orateur  et  Rhéteur. 
HISTOIRE  DE  SA  VIE. 


m    SIECLE. 


JULiiJs  TiTiANus,   •   l'ua  des  plus  savans  hommes  de  son  jui.  oap.vii.Mas. 
tems,    fleurissoit   entre   le   commencement   et   le   milieu  fj";  2!  pt'i^i! 
de    ce  siècle.    Il  étoit    fils  d'un   père   du  même  nom  ,   à  * 
qui    la  plupart  des  modernes  raportent  par  erreur  *  un  des  j 
principaux   traits   de  l'histoire  du   fils.  Quelques  autres  se 
sont   enttore   plus  trompés,    en   confondant   nôtre  Orateur, 
ceux-ci  avec  Titien  Préfet  des  Gaules  en  346,  ceux-là  avec 
Tiberius  Fabius  Titianus  Consul  en  391.  L'erreur  auroit  été 
moins  grossière,  si  l'on  ne  fût  pas  sorti  de  ce  III  siècle,  et 
qu'on  l'eût  pris  pour  Tiberius  Fabius  Titianus,  qui  exerça 
le  Consulat  en  245  avec  l'Empereur  Philippe. 

L'antiquité  ne  nous  fournit  point  assez  de  lumière  pour 
fixer  le  lieu  de  la  naissance  de  Jule  Titien.  'Mais  les  mo-  vin.iMAns.  g.ti.. 
dernes  étrangers  et  domestiques,  qui  ont  touché  ce    point 
d'histoire,  croient  que  lui  et  les  autres  Titiens  aue  nous  ve- 
nons de  nommer,  étoient  tous  Gaulois  de  nation. 

'  La  grande  réputation  oii  étoit  nôtre  Orateur,  le  fit  Jui.  cai).  ibi.i. 
choisir  par  l'Empereur  Maximin  I  pour  enseigner  l'élo- 
quence latine  au  Prince  Maximin  son  fils.  Ce  fut  selon  tou- 
te aparence  en  235,  lorsque  Maximin  parvint  à  l'Empire, 
que  Titien  commença  à  exercer  les  fonctions  de  Rhéteur 
auprès  du  jeune  Prince,  qui  pouvoit  être  alors  dans  la  17" 


(I)  On  lit  Tatianaa  dans  le  texl9  de  Jule 
Capitolin.  Hais  tous  les  critiques  con- 
viennent qu'il  faut  lire  Titianus.  C'est 
ain^i  qu'Ausone,  S.  Sidoine  et  les  autres 
anciens  le  nomment. 

(i)  Cette  erreur  consiste  :\  raporter  à  Ti- 
tien le  père  ce  que  dit  Capitolin  des  écrits 
de  Titien  le  iils  ;  et  elle  est  venue  de  l.i 
manière  dont  s'exprime  cet  Historien.  •  En 
|)arlant  des  Maîtres  qu'eut  Maximin  le  jeu- 
ne dans  les  belles  Ictres,  il  dit  de  Titien  en 
particulier  :  Uiui  ttt. . .   Tatiano  filio  Ta- 


Tome  I.  Prem.  Part. 


iiani  lenioris,  qui provinciarum  libro$pul- 
cherrimos  êcripsit.    Selon    la   construction 
ordinaire  il  faudroit  raporler  le  qui  à  Ti- 
tien le  père.  Mais  ce  n'est  pas  là  le  sons  de 
Capitolin,   qui  entreprend  de   faire   l'éloge 
de  Titien  le  fils,  Maître  de  ce  Prince  pour 
l'éloquence  latine,  comme  il   fait   les  élo-    ■  j„i.  (j^p.  iijicl. 
gcs   de   ses   autres  Maîtres  pour  l'éloquence 
gréque  et  la  grammaire  gréque   et  latine. 
•>  Cest  dans  ce  sens  qu'Etie  Vinet  et  le  P.    ''Aus.   cp.    Ki.   p. 
Sirmortd  entendent   le   texte  de  Capitolin;    fi^O.  noi.  I  Sir.  in 
et  ce  que  dit  Ausonc  de  Titien  le  fils,   pa-    Sid.  p.  8iS. 
rolt  le  confirmer. 

F  ff 


3  2 


i02  TITIKN, 

m  SIECLE,    année  de  son  âge.   H  ne  put  les  continuer  long-tems;  "  le 
"v.  u    "c         pw<î  et  If'  fils  aiant  été  tués  dès  l'an   238  devant  Aquilée 

»\il.  Max.  Sen.ii.     "    ...  .  .  ...  ,    .  ,,  •  i»i       * 

•-«.2:1  qu  ils  assiegeoient.      11  ne  laissa  pas  d  en  retirer  1  iionneiir 

7 (-"'il 3"'"*"  **'  "'^  Consulat,  auquel  ces  Princes  avant  leur  mort  l'avoienl 
élevé  par  reconnoissance .  Mais  souvent  dès-lors  cette  hau- 
te dignité  étoil  plus  de  nom  que  d'eflet,  comme  le  té- 
moigne Ausone  en  parlant  de  Titi(!n  même.  Son  nom  ne 
paroissant  point  dans  les  fastes  Consulaires,  il  est  à  croi- 
re qu'il  ne  fut  que  Consul  subrogé. 
i>.  713-  '  11  s'acquit  plus  de  gloire  à  gouverner  les  écoles  de  Lyon 

1..  714.  (3t  de  IJesançon,  auxquelles  il  pré.'^idoit  à   ralternative.  '  [i 

linit  ses  jours  dans  l't  xercice  de  cd  emploi,  qui  au  reste 
éloit  bien  au-dessous  du  mérite  d'un  aussi  giand  homme, 
qui  s'étoit  vu  Consul  et  Précepteur  d'un  César.  C/esl  ce 
qui  a  porté  Ausone  à  dire  de  lui  :  Non  œtate  quidcm,  sed  ci- 
Mate  connenuit. 

Les  services  que  Tili;  11  rendit  à  la  république  des  letres, 
ne  se  bor;;erent  pas  seulement  à  instruire  un  César,  et  à 
Jui.  cip.  vii.M;i\.   prendre  soin  des  écoles  de  deux  vilh's  tout  à  la  foi».    '  11 
^^6"lsîd!s.'^"^'.%.  enridiit  encore   la  lilerature  de  divers  ouvrages  fort  esti- 
'  !  •"^«'•'"si- '••-^'    niés,  el  li-availla  avec  laiit  de  /éle  sur-lnul  à  faire  fleurir 
'^''  '  "    le  bel    art  de  l'éloquence,   qu'il  a   mérité   de  partager  les 

éloges  qu'on  a  cru  devoii-  donner  aux  plus  célèbres  Ora- 
teurs de  l'antiquité  jwur  le  même  travail,  l'.n  effet ,  dit 
S.  Isidore  de  Seville,  la  rhétorique  aiant  été  inventée  par 
les  Crées,  fut  établie  parmi  les  Latins  par  les  soins  de  Ci- 
\ii>.  il..  ceridi,  de  Quintilien  et  de  Titien.  '  Ausone  rend  aussi  té- 

Jui.c;i|..ibiii.  is,.i.   nioignage  au  talent  qu'avoit  Titien  pour  l'éloquence.  '  Mais 
'''"'•  comme  il  affecloil   d'iuu'ter  tous  les   Orateurs  qui  l'avoient 

précédé,  on  le  nomma  li!  Singe  de  son  tems.  Titien  doit 
celle  qualilication  à  la  jalousie  des  partisans  de  Fronton 
l'Orateur. 

%.    IL 

SES   ECRITS. 

-*70ssiL's  et  la  plupart  des  autres  Ecrivains  modernes, 
V  s'apuïant  sur  le  tcxie  de  Capitolin,  qu'ils-  prennent 
trop  à  la  letre  ,  atribuent  ■-  Titien  le  père  des  ouvrages  , 
qui  sont  plus  vraisemLlablement  de  Titien  le  fils,  dont 
nous  parlons  ici.  C'est  ce  qui  paroît  par  l'observation  que 


GEOGRAPHE.  ORATEUR  ET  RHETEUR.   403 

nous  avons  déjà  faite  sur  ce  texte,  et  qui  nous  autorise  à     m  sie<;lk. 

rendre  ces  écrits  à  leur  véritable  Auteur.  Elie  Vinet  et  le 

P.    Sirmond  ont  été  dans   le  même  sentiment  que  nous  à 

ce  sujet.    Voici   donc   le   catalogue   des   ouvrages  que  l'on 

sait  être  sortis  de  la  plume  de  nôtre  Orateur  ,   mais  dont 

il  ne  nous  reste  plus  rien  aujourd'hui. 

1°.    II    laissa   de   très-beaux   écrits   ."^ur    la    Géographie.  Jui.  cap  vn.  »iax. 
C'étoit   une  Chorographie   ou  description  des  provinces  de  '"" 
l'Empire.  '  Servius  sur  le  quatrième  livre  de  l'Enéide  cite  s-y.  in  sid.  p.  .1. 
cet  ouvrage  de  Tilien  ,   qui   put  le  composer  à  l'imitation 
de  celui   que    Ciceron  ,   au   raport  de  Pris(Men  ,  avoit  fait 
dans  le  même  genre  et  sous  le  même  titre.    On  ne  doute 
point  que  cet  ouvrage  de  .Iule  Titien  ne  soit  le  même,  que  cas.K  in«t.  <-.  2.-.. 
la  Cosmographie  de  .Iule  l'Orateur  ,    dont  Cassiodore  avoit  ^'    "■ 
fourni    sa    bibliothèque.     Cet    Abbé    en    faisoit    beaucoup 
d'estime  ,    et   en    recommandoit    la   lecture   à  ses  Moines  , 
comme  d  un  écrit   très-propre  à  leur  donner  connoissance 
des  divers  lieux  dont    il    est  parlé   dans  l'Ecriture.   L'Au- 
teur ,  selon  Cas.siodore  ,  divisoit  .son  ouvrage  en  quatre  par- 
ties ,  et  y  traitoit  des  mers  ,  des  isles  ,  des  montagnes  les 
plus  célèbres  ,    des  provinces  ,    des  villes ,    des  rivières  et 
des  diiïerentes  nations.    Il  y  a  toute  aparence  que  c'est  ce  isi^-or-i  ■!•■>•■'.! 
livre  qu'avoit  en  vûë  S.  Isidore  de  Seville,  lorsqu'il  a  cité  ''   "' 
Titien   en    parlant   des   Amazones.    On  remarque    que    le  *••*'•  ''•"''""'• 
traité  de  Cosmographie  que  l'on  atribuë  à  yEthique  ,    por- 
te le  nom  de  Jule  l'Orateur  dans  un  manuscrit  qui  a  apar- 
tenu  à  M',  de  Thou. 

2".  .Iule  Titien  composa  au.ssi  des  letres  sous  le  nom  des  si.i.  s.  1.  t.  ep.  1. 
femmes  illustres,  où  il  tâchoit  d'imiter  le  style  de  Ciceron.  ^-  *^"- 
-Mais  il  ne  réu.ssit  pas  à  en  retenir  les  agrémens,  .s'il  en  faut 
croire   saint  Sidoine,  qui  paroît  avoir  lu  l'ouvrage.    Com- 
me  Titien  afîectoit   d'imiter   tous   ceux   qui    avoient    écrit 
avec   réputation,'  il    put   aus.si  emprunter  de  Virgile  plu-  ser>. in Virr.  1. 10. 
sieurs  façons   de   s'exprimer.  Au  moins  Servius  le  témoi-  '   " 
gne-t-il,  en  assurant  qu'il  en  avoit  même  tiré  tous  les  su- 
jets qu'il  avoit  traités.'    Mais  il   n'y  a  pas  Heu  de  douter  voss.  i.isi.h.i  i.^ 
qu'il  n'eût  pris  pour  modèle  dans  le  dessein  de   cet  ouvra-  "■  '■ 
ge,    le   Poète    Ovide,   qui   avoit   déjà   écrit   de   semblables 
letres   sous   le  nom  des   Heruïnes.  '  Ce  fut  cette  aflèclation  j..i.  cap.  ib. 
à   imiter  toutes   choses,    qui    fit   donner  à  Titien  ,  comme 
nous  avons  dit,  le  surnom  de  Singe  de  son  lems,  selon  ('a- 

F  I"  ï  il 


404        TITIEN,  GEOGRAPHE,  ORATEUR,  etc. 

III  SIECLE,    pitolin ,  *  ou  le  Singe  des  Orateurs,   selon  saint  Sidoine. 

.  jjij  ji,  "  ''  Savaron  a  cru  que  ces  letres  de  Titien  n'étoient  point  dif- 

b  sav.il).  ferentes  de  sa  Cnorographie.  Mais  c'est  ce  qu'il  a  avancé 

sans  preuves,   et  contre   le  sentiment  des  Savans  qui  l'a- 

voss.  ib.  voient   précédé ,  '  et   ce   qui   a  été  rejeté  par  ceux  qui  l'ont 

suivi. 

Sir.  in  siit.  p.  838.  3°.  '  Sur  ce  quc  nous  avons  raporté  plus  haut  de  saint 
Isidore  de  Seville,  touchant  le  travail  de  Titien  pour  éta- 
blir la  Rhétorique  parmi  les  Latins,  les  Savans  jugent  qu'il 
publia  quelques  règles  pour  l'art  de  l'éloquence.  Mais  ni 
les  anciens  ni  les  modernes  ne  nous  font  point  autrement 
connoître  cet  ouvrage. 

ibid.  I  sav.  ib.  4°.  '  On   croit  aussi   qu'il   avoit   écrit   sur  l'Agriculture. 

On  apuie  cette  opinion  sur  ce  que  Diomede  et  Pompo- 
nius  Sabinus  citent  nôtre  Orateur  sur  cette  matière.  Sa- 
binus  raporte  même  un  endroit  de  son  ouvrage  ,  où  Ti- 
tien dit  qu'après  que  l'on  eut  trouvé  le  secret  de  faire 
porter  à  la  terre  les  fruits  qu'elle  produit,  les  hommes 
commencèrent  à  se  gouverner  par  des  loix. 

Ans.  op.  16.  p.       5°.  '  Nous  aprenons  d'Ausone ,  que  Titien  avoit  mis  de 

*'*''  vers  grecs  en  prose  latine  les  fables  d'Esope.  Ce  Poète  en 

les  envolant  à  Probe  ainsi  traduites,  avec  quelques  vers 
de  sa  façon  qu'il  y  avoit  joints,  en  parle  en  ces  termes: 

p.  03;;.  '  iBsopiam  trimetriam 

Quatn  verlit  exili  stylo, 
Pédestre  concinnans  opus , 
Fandi  Titianus  artifex. 

p.  «38.  '  Et  à  la  fin  de  cette  même  letre  Ausone  dit  encore  : 

Sed  jam  ut  loquatur  Julius  , 
Fandi  modum  invila  accipe 
Volucripes  dimetria. 

voss.  poi-,  lai.  p.  '  Vossius  ne  faisant  pas  assez  d'atention  aux  termes  d'Au- 
sone ,  a  avancé  que  Titien  avoit  tourné  ces  fables  en  vers 
ïambiques,  et  en  conséquence  a  donné  rang  au  Tradu- 
cteur entre  les  Poètes  Latins.  Mais  le  terme  pédestre  qu'em- 
ploie Ausone,  ne  peut  souffrir  cette  interprétation. 


I  I    1 


403 


m    SIECLK. 


I 


F  A  U  s  T  I  N, 

EvEQUE  DE  Lyon. 

FAUSTiN  mérite  ù  plus  d'un  litre  de  trouver  place 
dans  cet  ouvrage.  Non  seulement  il  étoit  en  commer- 
ce de  letres  avec  saint  Cyprien  ,  Evêque  de  Carthage  en 
Afrique;  mais  il  paroit  encore  avoir  été  un  Prélat  fort  in- 
struit de  la  doctrine  de  l'Eglise  ,  et  très-zélé  pour  en  dé- 
fendre la  pureté.  '  Il  succéda  à  Helie  dans  le  siège  épis-  oaii.  ciir.  nov. 
copal  de  Lyon  vers  l'an  250  au  plus  tard.  On  trouve  peu  *'  ^'  " 
de  choses  pour  son  histoire  ;  mais  la  conduite  qu'il  tint 
dans  la  grande  affaire  que  nous  allons  raporter ,  fait  voir 
qu'il  fut  un  digne  successeur  du  grand  saint  Irenée. 

Peu  de  tems  après  qu'il  eut  été  élevé  à  l'épiscopat,  l'hé-  cyp.  ep.  67.  p. 
resie  de  Novalien,  qui  avoit  fait  schisme  sous  le  Pape  saint 
Corneille,  aïant  pénétré  dans  les  Gaules,  et  Marcien  Evê- 
que d'Arles  aïant  eu  le  malheur  de  l'embrasser  ,  Faustin 
se  crut  obligé  à  aporler  du  remède  à  un  mal  aussi  dange- 
reux. Pour  y  réussir  il  écrivit  au  moins  une  fois  au  Pape 
Etienne ,  ce  que  firent  aussi  les  autres  Evêques  de  la  pro- 
vince ,  et  deux  fois  à  saint  Cyprien.  Les  letres  de  Faustin 
ne  subsistent  plus  ;  mais  elles  ont  donné  ocasion  ,  et  four- 
ni la  matière  à  la  67'  '.  de  saint  Cyprien  au  même  Pape,  i 
dans  laquelle  on  trouve  le  précis  de  ce  qu'elles  conte- 
noient. 

'  Faustin    y  dètailloit  la  chute  malheureuse  de  Marcien,  p-  "s.  «e. 

(1)  •  Mr.  de  Launoy  a  regardé  celte  letre  la  tyrannie  de  Marcien,  annt«  ittù  «uperiort-    >  Lau.  deâ.  Dio.t. 

comme   saposée,   et   assure   qu'elle   ne   se  but.  «  Mais  tout  cela   n'empêche  pas  que    2.  p.  77. 

trouve  point  dans  plus    de   dix  manuscrits  les  plus  habiles  critiques  qui  sont  venus  ue- 

qui  contiennent  les  autres  ouvrages   de  S.  puis  ,    ne    reconnoissent     cette    letre     pour 

Cyprien.     Il    faut    avouer    qu'elle   ne   s'a-  être    véritablement   de    S.    Cyprien,    et   ne 

corde   pas  >>  avec   ce    que    S.    Grégoire  de  soutiennent  que   Mr.  de  Launoy  n'a  pas  eu    (,p     t    C  i  P     I 

Tours   nous   aprend   des   premiers  Evêques  raison    de   la  rejeter.  En  effet   l'autorité  de      ''''•'•'"''•"■•'• 

d'Arles,  dont  il   ne   place   le   premier    qui  Grégoire   de   Tours   en    ce   qui   s'est  passé    '•"•■"'• 

est  s.  Trophime,   que  vers   250.    Or  ce  fut  aussi  loin  de  son  tems  ,  n'en  étoit  pas  une 

vers    C3    même    tems,    ou    peu   après,    que  légitime.  Les  actes  de  S.  Saturnin  qu'il  ci- 

Mari-ien  successeur  de   S.  Trophime   après  te  pour  garant  de  l'époque   qu'il   assigna  à    «  Cyp.  not.  p. 486. 

S.   Régule   tomba  dans  l'hérésie  de  Nova-  la  mission    de    S.    'Trophime,    n'en    disent 

tien.  Car  S.  Cyprien  dans  la  letre  en  que-  rien.  De   sorte   que,  comme   nous   l'avons 

slion  écrite   avant   sa  dispute  avec  le  Pape  montré  ailleurs,  on  peut  sans  nulle  difficul- 

S.  Etienne,  dit  qu'il   y   avoit  déjà  quelques  té  placer  cette  mission  environ   30  ans  plil- 

années   que   l'Eglise  d'Arles  gemissoit  sous  tôt.  (xxxii.) 
3  2  • 


400  FAUS TIN,  EVEQUR  DE  LYON. 

m  siKGLE.  son  schisme  avec  l'Eglise  Catholique,  sa  séparation  du 
corps  sacerdotal  pour  s'atacher  au  parti  de  Novalicn  ,  la 
dureté  de  sa  conduite  dans  le  refus  qu'il  faisoit  d'acorder 
la  pénitence  à  ceux  qui  la  demandoieiit  par  leurs  gémisse- 
mens  et  leurs  larmes  ,  son  obstination  inhumaine  à  aimc^r 
mieux  les  abandoimer  en  proie  aux  loups  ravissans  et  au 
démon  même,  que  de  -leur  rendre  la  paix  et  la  commu- 
nion :  obstination  qui  avoit  été  cause  que  plusieurs  Fidè- 
les éloient  morts  depuis  quelques  années  sans  reconcilia- 
tion ,  et  qui  faisoit  que  le  troupeau  de  cette  Eglise  éloit  ou 
dispersé  ,  ou  couvert  de  plaies  ,  sans  que  le  Pasteur  s'en 
mît  en  peine.  Tel  étoit  le  sujet  des  letres  de  Faustin  ;  et 
sans  ces  letres  nous  aurions  ignoré  un  point  important  de 
l'histoire  de  l'Eglise  des  Gaules  en  ce  siècle. 

Tiii.  H.  E.  1. 1. 1..  '  On  croit  que  ce  qui  obligea  Faustin  à  s'adresser  au  moins 
une  seconde  fois  à  S.  Cyprien  ,  fut  qu'il  ne  trouva  pas  dans 
le  Pape  toute  la  correspondance  et  tout  le  zélé  qu  il  espe- 

Cyp.  ibiii.  p.  n.i.  roit.  '  Mais  saint  Cyprien  à  la  solicitation  de  Faustin  sut 
ranimer  la  charité  du  Ponlifc  11  le  pre.ssa  d'écrire  des 
leli-es  fortes  aux  Fidèles  d'Arles  et  aux  Evêques  des  fiau- 

P  '"^  '"•  les,    afin   qu'ils   déposassent  Marcien ,   qui   avoit   été  déjà 

jugé  par  les  Prélats  de  sa  j^rovince ,  et  qu'ils  missent  un  au- 
tre Evêque  à  sa  [)lac\ 

Tiii  ihi'i.  '  Il  y  a  quelque  aparence  que  nos  Evêques  l'exécutèrent. 

r<e  qui  le  fait  juger  ainsi ,  c'i'St  que  l'on  ne  trouve  point  le 
nom  de  Marcien  dans  une  ancienne  liste  des  h] vêques  d'Ar- 
les ,  comme  aïant  été  eftacé  des  diptyques ,  c'est-à-dire 
lie  la  table  où  l'on  metloit  les  noms  des  Evêques  morts  dans 
la  communion  de  l'Eglise. 


S.     MARTIAL, 

PkKMIKR    EvKQliE    DE    LiMCHiES. 

<;i.  T.  lli^l.Kl.  1.  r»  Martial,  l'un  de  ces  sept  illustres  Missionaires  que  la 
k5»  providence  ,  selon  saint  Cn^goire  de  Tours,  envoïa 
en  ce  siècle  dans  nos  (Jaules,  pour  y  annoncer  l'Evangile, 
(ixa  son  siège  à  Limoges,  et  en  fut  le  premier  Evêque. 
Nous  avons  notnmè   ailleurs   les  six  antres  Evêques  qu'on 


I.    II.  ■^H. 


s.  MARTIAL,  1  EVEUUE  DE  LIMOGES.    407 

lui  donne  ordinairement  pour  collègues.  " S.  Grégoire  de  m  siècle. 
Tours  dit  qu'il  fut  envoie  par  les  Evoques  de  Rome  ,  et  .ci.  conf.  .-.27. 
que  néanmoins  il  vint  des  parties  d'Orient. 

'On  ne  s'est  pas  toujours  acordé  sur  l'époque  de  sa  mis-  i>aii..ic2.  Wo.  p. 
bion.  Il  s  est  lormé  a  ce  suiet  deux  lameux  sentimens ,  qui 
en  divers  tems  ont  partagé  les  esprits.  L'un  qui  est  le  plus 
ancien ,  place  cette  mission  sous  le  Consulat  de  Decius  et 
de  Gratus  l'an  250.  C'est  celui  de  saint  Grégoire  de  Tours, 
et  des  siècles  qui  ont  suivi  jusqu'au  IX.  Alors,  il  se  forma 
une  autre  opinion,  suivant  laquelle  on  prétendoit  que  le 
Saint  avoit  été  envoie  par  siiint  Pierre  même.  Quoique 
cette  seconde  opinion  fut  combatuë  presque  dès  sa  nais- 
sance, elle  ne  laissa  pointdeprévaloir  dans  la  suite,  jusques 
vers  le  milieu  du  XV^II  siècle.  Depuis  on  a  fait  revivre  h; 
premier  sentims-nt ,  qui  est  le  seul  à  suivre ,  comme  étant 
le  seul  autorisé. 

Il  ne  faut  pas  néanmoins  prendre  tellement  à  la  lelre 
le  texte  de  siiint  Grégoire,  que  l'on  fixe  la  mission  de  .saint 
Martial  dans  les  Gauhis  précisément  à  l'an  250.  Il  put  ai- 
.sénient  y  venir  quelques  années  plutôt ,  ou  même  plus 
tard ,  comme  nous  l'avons  montré  ailleurs  de  quelques 
aulres  de  ses  collègues.  L'époque  marquée  par  saint  (îre- 
goire  ,  n'est  précise  que  pour  .saint  Saturnin  de  Toulouse. 

Dieu  donna  tant  de  vertu  aux   travaux  apostoliques  de  gi-t.  o.. 
saint  Martial,  qu'en  peu  de  tems  il  vint  à  bout  de  détruire 
le  Paganisme  dans  la  ville  de  Limoges.  '  Il  passa  su  vie  dans  ("«t.  Ft.  lU. 
une   grande  sainteté  ,    et  tout   ocupé   à  la   conversion  des 

f)euples  idolâtres.  Enfin  après  avoir  répandu  en  divers 
ieux  la  foi  de  J.  G.  il  quila  la  terre  pour  aller  au  ciel  avec 
le  glorieux  titre  de  Confesseur.  Saint  Grégoire  raportc 
quelques  miracles  qui  se  firent  à  son  tombeau. 

Lorsqu'on  eut  établi   l'opinion  qui  faisoit  saint  Martial  w.  101.1.1.  is.ai 
contemporain   des  Apôtres  ,  on  s'avisa ,    peut-être  à  dessein 
d'affermir  ce  sentiment,    de  lui  suposer  deux  fameuses  letres 
écrites ,   l'une  aux    Bourdelois ,    l'autre   aux   Toulousains. 
On    ne  voit   point  que  ces  pièces  aient  èlé  connues  avant 
l'an  1521 ,  que  Josse  Bade  les  publia  à  Paris.  '  Elles  furent,  R»  mi.i.i.  c' 
dit-on,   trouvées  dans  la  sacristie  de  l'Eglise  de  saint  Pierre  '*'  *"'''' 
de   Limoges  ,   enfermées  dans  une    urne  de  pierre  cachée 
dans  la  terre.  Elles  étoient ,   ajoûte-t-on ,    si  rongées  et  si 
antiques,  qu'on  avait  peine  à  les   lire.  '  On  les  a  insérées  .vpp.  aa  i.ib.  h». 


408  S.  MARTIAL, 

III  SIECLE,    depuis   dans  les  Orthodoxographes  et  les  Bibliothèques  des 
\         Pères.  11  y  en  a  même  eu  encore  plusieurs  éditions    par- 
ticulières. Elles  ont  été  imprimées  de  la  sorte  à  Venise  en 
1546;   à  Basle  en  1550,  à  Cologne  en  1570;  à  Paris  en 
Riv.  ib,  1565,  1576,  1589,  1610;  '  à  Bourdeaux  en   latin   et  en 

Bib.  s.  Vin.  cen.  frauçois   l'an   1573; 'à   Lyon  chez -Guillaume    Rouille  en 
1584  avec  les  œuvres  de  saint  Denys  l'Areopagite   et  les 
App.  ib.  letres    de  saint   Ignace    Martyr  ;  '  avec   les  œuvres  d'Abdias 

Bib.  Bal.  i.  i.'p.  cu  1571  et  1614; 'et  la  même  année  avec  le  traité  de  Gen- 
*^-  nade   des  dogmes  ecclésiastiques   et  l'homélie   d'un  ancien 

Théologien,  par    les    soins    de    Geverhart    Elmenhorstius , 
non  à  Helmstad ,   comme   dit  Mr.  du  Pin  ,  mais  à  Ham- 
DuPin.  bib.  1. 1.  bourg.  '  Cet  Ecrivaiu  en  marque  deux  autres  éditions  fai- 
•"■  ^^"  tes,  l'une  à  Cologne  en  1560,  et  l'autre  à  Basle  en  1655. 

Mais  nous  ne  prétendons  pas  les  garantir.  Enfin  le  sieur 
Poillevé  célèbre  Avocat  à  Limoges  mort  dans  le  dernier 
siècle ,  eut  la  complaisance  de  mettre  ces  deux  letres  en 
vers  françois,  et  les  donna  encore  au  public.  Elles  furent 
imprimées  de  la  sorte  à  Limoges  chez  Antoine  Voisin  l'an 
1694  en  un  petit  volume  m-12. 

A  la  faveur  de  l'ignorance  elles  passèrent  d'abord  pour 
être   véritablement   de   saint   Martial.    Mais  la  critique  ve- 
nant à  répandre  ses  lumières  ,    on  s'aperçut  sans  beaucoup 
de    peine  que   ces  letres   ne   pouvoient  être  que   l'ouvrage 
•  >''•  d'un  imposteur.  '  Le  premier  qui  tenta  à  en  faire  connoî- 

tre  la  fausseté ,  paroît  avoir  été  Jaques  de  Bordes  Ministre 
Calviniste   à   Bourdeaux   dans   l'édition   latine   et  francoise 
p.  U3. 1.  qu'il  publia  de  ces  letres  en  1573.    Bellarmin  ne  tarda  pas 

à  témoigner  qu'il  n'en  pensoit  pas  autrement;  et  personne 
ne  doute  plus  aujourd'hui  que  ce  ne  soit  un  ouvrage  su- 
posé. 

Les  preuves  de  la  suposition  sont  visibles ,   et  se  tirent 
iwa.  des  letres  mêmes.  '  L'Auteur  s'y  qualifie  Apôtre  ,  quoiqu'il 

soit  constant  qu'il  ne  le  fût  point.  Il  y  parle  d'un  certain 
Sigebert ,  nom  Allemand,  qui  n'étoit  point  encore  en  usa- 
App.  ail  bib.  pp.  ge  dans  les  Gaules.  '  Il  s'y  représente  comme  aïant  vécu 
i.  i.p.  167.  ica.  jjygg  j  c.,  comme  aïant  été  témoin  de  ses  miracles,  de  sa 
mort ,  de  sa  sépulture ,  de  sa  résurrection ,  de  son  ascen- 
sion :  circonstances  qui  ne  peuvent  convenir  à  un  homme 
qu'il  conste  d'ailleurs  n'avoir  vécu  qu'au  III  siècle.  Il  ajou- 
te qu'il  étoit  présent ,  lorsque  Judas  donna  au  Sauveur  le 

baiser 


PREMIER  EVEQUE  DE  LIMOGES.        400 

baiser  de  trahison  :  ce  qui   est  contraire  à  l'Evangile,'  qui    m  sieclr. 
marque  expressément  que  J.-C.  n'avoit  pris  avec  lui  que  les 
douze  Apôtres  ,  lorsqu  il  se   retira  dans  le  jardin  des  Oli- 
viers. Ce  n'est  pas  encore  tout. 

'L'Auteur  supose  que  dès  ce  tems-là  il  y  avoit  des  Rois  p.  les. 
dans  les  Gaules  ;  que  l'on  y  éleva  plusieurs  temples  à  Dieu 
sur  les  ruines  de  ceux  des  idoles  ,  et  diverses  autres  choses 
contraires  à  la  vérité  de  l'histoire.  11  y  cite  quelquefois 
l'Ecriture  selon  nôtre  vulgate ,  qui  ne  fut  faite  que  plu- 
sieurs siècles  après.  Il  y  raporte  même  un  texte  ,  qui  pa- 
roit  pris  du  Symbole,  atribué  à  saint  Athanase. 

Il  n'en  faut  pas  davantage  pour  établir  la  suposilion  de 
ces  deux  letres.  Elles  semblent  avoir  eu  le  même  Auteur 
que  la  vie  de  saint  Martial ,  autre  ouvrage  qui  porte  avec 
lui  encore  plus  de  marques  de  suposition  et  d'imposture 
que  les  letres.  Nous  en  pourrons  parler  ailleurs  sur  le  siè- 
cle où  nous  croïons  qu'elle  a  été  fabriquée  (XXXIIl). 


SATURNIN, 

Tyran  sous  Probe. 

SEXTUS     Juuus  Saturninus     passe     sans    contradiction  vop.yu.sai.n. 7. 
pour    le   plus    célèbre  des    Tyrans  que   l'on    vit    dans  "  572'.  msT" '" 
l'Empire   en  ce  III  siècle.    Il   étoit    Gaulois  de   nation;   et 
l'on  ne  le  doit  pas  confondre  ni  avec  Publius  Sempronius 
Saturninus ,   qui  se   révolta  sous  Gallien ,  ni  avec  Firmus 
Saturninus  Proculus,  qui  prit  la  pourpre  sous  Aurelien.  '  Il  vop.  ib.  n.io. 
étudia  d'abord  la  rhétorique  en  Afrique  où  il  avoit  peut- 
être  suivi  son  père  qui  pouvoit  y  exercer   quelque   charge 
de  l'Empire.    C^est  aparemment  pour  cela  que  Zosime   le 
fait    Maure    d'origine  ;    car  les    Gaulois    n'avoiént  pas  de 
coutume  d'aller  étudier   en   ce  païs-là.   D'Afrique ,    Satur- 
nin passa  à  Rome ,    où   il  étudia  encore  les  belles  letres . 
dont  il  acquit  une  grande  connoissance.  Fuit  re  vera  non 
parum  literatus,  dit  l'Auteur  de  sa  vie. 

'  Mais  son  talent  particulier  fut  pour  la  guerre  ,  où  il  n.  7. 
parut  avec  éclat  sous  les  règnes  d'Aurelien  ,    de  Tacite  et  ^  .  .^ 

de  Probe.  Le  premier  de  ces  Empereurs  connoissant  tout 
Tome  I.  Prem.  Part.  G  g  g 


'     410  SATURNIN, 

MI  SIECLE,    le  mérite  de  Saturnin,  le  fit  Général  des  frontières  de  l'O- 
rient;    et  l'on  convenoit  qu'il   étoit  le  plus  habile  de  tous 

vop.ib.  n.  9.  Ics  Généraux  qu'emploïât  ce  Prince.  '  Entre  les  grandes 
actions  qui  rendirent  sa  mémoire  célèbre  ,  il  rétablit  les 
Gaules,  délivra  l'Afrique  des  Maures  qui  s'en  étoient  mis 

Eus.  chr.  p.  222.  cu  posscssion ,  et  douna  la  paix  à  l'Espagne.  '  Eusebe  noui> 
aprend  aussi ,  qu'avant  de  se  révolter ,  il  avoit  com- 
mencé à  faire  une  nouvelle  Antioche  :  ce  que  l'on  entend 
de  quelque  nouveau  quartier  seulement ,  qu'il  avoit  com- 
mencé à  bâtir  dans  la  grande  Antioche  de  Syrie. 

vo|..  ib.  n.  7. 9.  '  De  Général  plein  de  gloire  et  d'heureux  succès ,  Satur- 
nin se  vit  ensuite  un  Empereur  infortuné.  Quelque  aflaire 
l'aïant  apellé  à  Alexandrie  sous  le  règne  de  Probe,  les 
Alexandrms ,  peuple  naturellement  vain  et  léger ,  le  saluè- 
rent aussi-tôt  par  flatterie  du  nom  d'Auguste.  Saturnin  qui 
i)aroît  avoir  été  fort  éloigné  de  cette  injuste  adulation , 
it  ce  qu'un  homme  sage ,  tel  qu'il  étoit ,  devoit  faire  en 
pareille  rencontre.  Il  quita  promptement  Alexandrie,  et 
s'en  retourna  en  Palestine. 

n.9.  '  Mais  s'imaginant  qu'après  ce  qui  étoit  arrivé  il  ne  pou- 

voit  plus  vivre  en  sûreté  comme  particulier,  il  se  crut  obli- 

"•"•  gé  de  prendre  la  pourpre  et  le  titre  d'Auguste,  '  sinon  pour 

sauver  sa  vie  au  moins  pour  différer  sa  mort.  Probe  tou- 
tefois étoit  bien   différent   de  ces   Empereurs   qui   ne   sa- 

"•"•  voient    point    pardonner   de   semblables    révoltes.  'Il  écri- 

vit à  Saturnin  plusieurs  letres  très-obligeantes,  pour  l'assu- 
rer de  sa  grâce.  Mais  les  soldats  de  celui-ci  ne  pouvant  se 
fier  à  ces  promesses,  et  d'ailleurs  étant  bien  aises,  comme 
il  paroît,  d'avoir  pour  Empereur  un  Général  qu'ils  ai- 
moient,   et   dont  ils  atendoient   quelque   recompense,   au 

n  *o-  lieu  de  la  punition  que  Probe  en  auroit  pu  tirer ,  '  ils  le 

forcèrent  en  quelque  manière  à  soutenir  sa  révolte  invo- 
lontaire. 

"•  3*<*-  '  Saturnin  sentant  tout  le  danger  auquel  il  s'exposoit,  ne. 

répondit  aux  acclamations  de  celte  solennité  que  par  ses 
gémissemens,  ses  larmes  et  ses  plaintes.  Rien  n'est  plus  pa- 
thétique que  le  discours  qu'il  fit  en  cette  occasion  tant  sur 
les  périls  qui  acompagnent  inséparablement  la  puissance 
souveraine,  que  sur  le  malheur  qu'il  prévoïoit  fort  bien 
devoir  suivre  sa  proclamation  à  l'Empire. 

Tili.ibid.p.sTs.        '  Probc  ne  tarda  pas  à  faire  marcher  contre  lui  des  Irou- 


TIRAN  SOUS  PROBE.  411 

pes,  qui  affoiblirent  tellement  son  parti,  que  bien-tôt  Sa-  m  siècle. 
turnin  se  trouva  assiégé  dans  le  château  d'Apamée  ,  et  fut 
enlin  tué  presque  contre  la  volonté  de  Probe  qui  l'aimoit 
beaucoup.  Sa  mort  éteignit  entièrement  sa  faction  ;  et 
l'Orient  se  vit  dans  un  calme  entier.  On  ne  convient  pas 
précisément  de  l'année  à  laquelle  commença  la  révolte  de 
Saturnin  ,  ni  du  tems  qu'il  a  régné.  Mr.  de  Tillemont  pla- 
ce sa  proclamation  à  l'Empire  en  l'an  280  ;  '  et  Eusebe  dit  Eus.  iUii. 
qu'il  lut  tué  aussi-tôt. 

'  Vopisque  Historien  de  Saturnin  nous  a  conservé  un  vop.ib.  n.9.  lo. 
fragment  du  discours  qu'il  fit  à  son  armée  ,  lorsqu'elle  le 
proclama  Empereur.  On  voit  dans  ce  fragment  une  élo- 
quence digne  des  bons  siècles.  C'est  à  cette  ocasion  que 
Vopisque  assure  que  Saturnin  avoit  un  grand  fonds  de  li- 
terature. 


C  A  R  U  S, 

Empereur. 

ARGUS     Au  RE  MUS     C.ARUS  ,     originaire    de   Rome  vop.  vu.  car.  n. 

par   ses  ancêtres,    étoit    Gaulois   de    naissance,    se-  a^'imer.'^chr.  u 
Ion  le  grec  de  la  chronique  d'Eusebe.  11  naquit    à  Narbo-  iil'vl'^gef™.' 
ne,  suivant  le  témoignage  de  la  plupart  des  meilleurs  Ilis-  Emp.  t.  3.  p.  sso. 
toriens  ,    et  fit  ses  études  à  Rome.   H  avoit  beaucoup  de 
cœur  ,  un  génie  rare  ,  et  une  habileté  singulière  pour  la 
guerre.    Toutes  ces  grandes  qualités  étoient  soutenues  par 
une  conduite,  qui  faisoit  revivre  en  sa  personne  cette  an- 
cienne intégrité  Romaine   si    louée  dans  l'histoire.  En  un 
mot  il  étoit  tel  qu'on  auroit  estimé  heureuse   la    Républi- 

Îue  ,  si  elle  avoit  pu  avoir  plusieurs  semblables  citoïens. 
,'Empereur  Probe  se  servit  de  lui  avec  succès  dans  ses  ex- 
péditions militaires;  et  pour  reconnoître  son  mérite  et  sa 
probité  ,  il  lui  fit  ériger  une  statue  équestre  ,  et  bâtir  une 
maison  de  marbre  aux  frais  du  public. 

'  Après  avoir  passé  par  les  honneurs  civils  et  militaires ,  vop.  ib.  n. 
avoir  été  Proconsul  de  Gilicie,  Consul  ordinaire  ou  subro- 
gé, et  Préfet  du   Prétoire,  Carus  fut   enfin  élevé  à   l'Em- 
pire ,  comme   le   plus   digne   de  succéder  à   Probe.  '  Cette  Tiii.ibid.  p.  m. 

Gggij 


M 


412  CARUS,  EMPEREUR. 

m  SIECLE,  élection  se  fit  par  l'armée  vers  le  commencement  du  mois 
d'Août  l'an  282.  Une  des  premières  actions  du  nouvel 
Empereur  fut  de  venger  la  mort  injuste  de  celui  dont  il 
remplissoit  la  place  ;  et  il  le  fit  avec  beaucoup  de  vigueur 
et  de  sévérité. 

Quoique  son  règne  ne  fût  que  de  très-peu  de  durée  ,  il 
ne  laissa  pas  de  faire  beaucoup  de  grandes  choses  pour  l'a- 
Tiii.  ibiJ.  p.  682-  vantage  de  l'Empire.  '  Il  vainquit  les  Sarmates  ,  affermit 
584 1  op.i  .n.  .  |'jHyj.jg  ^  gg  signala  contre  les  Perses,  subjugua  les  Sege- 
tans  leurs  voisins  ,  et  se  rendit  maître  de  la  Mésopota- 
Eus.ibiiiisid.ibid.  mic.  '  Daus  le  tcmps  qu'il  songeoit  à  pousser  encore  plus 
"'       '  loin  ses  conquêtes,  il  fut  arrêté  dans  sa  course  par  un  coup 

Tiii.  ibia.  p.  585.  de  foudre  qui  lui  ôta  la  vie ,  '  peut-être  en  punition  d'a- 
voir souffert  qu'on  lui  atribuât  do  son  vivant  par  un  hor- 
rible sacrilège  le  titre  de  Dieu.  Tel  fut  le  genre  de  mort  de 
Vop.  ib.  n.  8.  Carus  ,  selon  la  plupart  des  Historiens.  '  Cependant  Junius 
Calphurnius  l'un  de  ses  Secrétaires  dans  une  letre  qu'on 
nous  a  conservée  ,  assure  qu'il  étoil  mort  de  maladie  ,  et 
que  comme  dans  ce  moment  il  s'étoit  élevé  un  orage  fu- 
rieux mêlé  d'un  grand  tonnerre,  on  en  avoit  pris  ocasion 
de  faire  courir  le  bruit  que  ce  Prince  avoit  été  frappé  de  la 
Tiu.  ibid.  foudrc.  '  Sa  mort  arriva  vers  la  fin  de  l'an  283  :  de  sorte 

que  son  règne  ne  fut  environ  que  de  seize  mois, 
vop.ib.  n.  4. 9.         '  Carus  ,  sclou  la  remarque  de  l'un  de  ses  Historiens,  tient 
le  milieu  entre  les  bons  et  les  mauvais  Princes,  quoiqu'il 
aproche  plus   des  premiers.  Il   auroit   encore    passé    pour 
meilleur,  s'il  n'eût  pas  laissé  pour  héritier  de  son  sceptre 
un  aussi  méchant  fils  que  Carin  ,  qui  lui  succéda  avec  Nu- 
merien  son  autre  fils,  dont  nous  allons  parler. 
Egas.  Bui.  1. 1.  p.       '  On  a  de  Carus  diverses  lois  et  rescrits  pleins  d'équité, 
^-  que  l'on  a  insérés  dans  le  Code  Juslinien,  et  qui  servent  à 

Vop.  ib.  n.  4. 5.7.  enrichir  le  droit  civil.  '  Vopisque  raporte  quelques  frag- 
mens  des  letres  et  harangues  de  cet  Empereur,  et  fait  men- 
tion de  quelques  autres  letres ,  où  il  déploroit  son  mal- 
heur d'avoir  un  aussi  indigne  fils  que  Carin . 


M 


413 

■  m  SIECLE. 

N  U  M  E  R  I  E  N, 

Empereur. 

ARCUS        AURELIUS       NUMERIANUS     ,       fils      de      l'EmpC   -   Hier.  chr.  1.  2.  p. 

reur  Garus  dont   nous  venons  de  donner  l'éloge  ,  et  "^^^;  ^'"■'  *' 
frère  puîné   de  Carin  aussi  Empereur ,  naquit  à  Narbone 
comme  son  père.  '  Il  vint  au  monde  avec  des  inclinations  Aot.  vic.  Caes.  p. 
excellentes ,  et  propres  à  en   faire  un  Souverain   vraiment 
digne  de  régner  ,  si  Dieu  lui  eût  acordé  une  plus   longue 
vie.    '  Il  fut  aplicjué  à  l'étude   de  très-bonne    heure  ,  et  y  tmi.  Emp.  t.  3.  p. 
fit  des  progrès  si  prodigieux,  qu'il  commença  à  déclamer  s^p.'^'.^m ""■  *' 
étant  encore  tout  jeune.  C'est  ce  qui  a  fait  dire  de  lui  à  un 
Poëte   de   son    tems ,  qu'il   s'étoit  diverti   à   plaider    entre 
les  bras  de  sa  mère  :  matemis  causam  qui  lusù  in  ulnis. 

'  Carus  son   père,  après   avoir  été  élevé  à  l'Empire  en  vop. vic.cam.i.i 
282,  le  fit  César  avec  Carin  son  frère;  et  lorsqu'il  fut  en-  Ti"- ib.  p. ss*. 
tré  dans  la  seconde  année  de  son  règne ,  il  leur  donna  à 
l'un  et  à  l'autre  le  titre  d'Auguste.  Mais  les  inclinations  et 
les  mœurs  de  ces  deux  Princes  étoient  bien   différentes. 
'Carin  étoit  efféminé,  voluptueux,    fier,  cruel,  odieux  à  vop. ib.  1  vit. car. 
son  propre  père,  ne  se  signalant  que  par  ses  crimes,  et  ne  "'  ^^'  "' 
se  plaisant  qu'avec  ceux  qui  lui  ressembloient .  '  Numerien  tU.  car.  n.  t  1  vi . 
au  contraire  étoit  un   Prince  tout  aimable ,   très-bien  in-  """'■  "'  "' 
struit,  éloquent,  fort  réglé  en  sa  conduite,  en  un  mot  tout 

Propre  à  régner,  et  faisoit  les  délices  de  Carus.  Celui-ci 
auroit  volontiers  préféré  à  son  aîné  dans  les  emplois  im- 
portans ,  si  son  jeune  âge  l'eût  pu  permettre.  Mais  il  se 
borna  à  le  mener  avec  lui  dans  ses  expéditions  de  guerre  ; 
et  Numerien  eut  quelque  part  aux  victoires  du  père  sur  les 
Perses. 

'  Carus  étant  mort  vers  la  fin  de  l'an  283,  comme  nous  eqs.  chr.  p.  2221 
avons  dit,  les  deux  frères  furent  aussi-lôt  reconnus  Empe-  '''"•'''''•  '**^- 
reurs.   Depuis  Marc  Aurele  et  Lucius  Verus  qui  avoient 
régné    ensemble ,    on    avoit    encore    vu    quelques    autres 
exemples  de  deux  Souverains  légitimes  à  la  fois  dans  l'Em- 
pire .  '  On  ne  parle  que  des  jeux  magnifiques  que  les  deux  vop.  vit.   Carin. 
frères    donnèrent  à  Rome  le  12  Septembre  284  ,  com-  "isiTiU.ib. 
me  de  ce  qu'il  y  a  eu  de  plus  mémorable  durant  leur  re- 


414  NUMERIEN, 

m  SIECLE,    gne.  Aussi  fut-il  trè»-court,  et  ne  leur  donna  pas  le  tems 
de  faire  beaucoup  de  choses. 

vop.  Tit.  Nom.  n.       '  Numerien    avoit   épouse  la  fille   d'Arrius  Aper    Préfet 

12. 13  1  Eus.  ib. p.  du  Prétoire,  homme  ambitieux  et  cruel,  qui  pour  con- 
tenter son  ambition ,  eut  l'inhumanité  de  faire  tuer  secrè- 
tement son  propre  gendre.  Mais  au  lieu  d'un  Empire  qu'il 
croïoit  avoir  de  cette  action  barbare,  il  n'y  trouva  qu'une 
prompte  et   misérable  mort,  de  la  main  même  de  Diocle- 

Eus.  ib.  I  Tiii.  ib.  tien  qui  fut  élu  en  la  place  de  nôtre  jeune  Empereur.  '  On 
croit  que  la  mort  de  Numerion  arriva  peu  de  jours  après 
les  jeux  qu'il  donnai  Home,  et  avant  le  17  de  Septembre 
de   la   même   année   ?84  ,    à   laquelle   Eusebe  la  raporte. 

Tiii.  Ib.  p.  887.  '  Ainsi  son  règne ,  depuis  la  mort  de  son  père  ,  fut  de  8 
à  9  mois;  quoique  George  le  Syncelle ne  lui  donne  que  30 
jours  ,  ce  qui  paroît  aux  Savans  absolument  insoutenable. 
Nous  avons  une  loi  sous  le  nom  de  Carin  et  de  Numerien 
en  date  du  12"  de  Janvier  de  cette  même  année,  par  où 
l'on  voit  qu'ils  regnoient  au  moins  dès  ce  tems-là. 

Trùt.  com.  t.  3.p.       '  On  ne  trouve  nulle  part  le  tems  de  la  naissance  deNu- 

**•  merien  ;    et   l'on   ne  sait  point  par  conséquent  à  quel  âge 

il  fut  tué.  Mais  ses  médailles  le  représentenl  comme  un 
jeune  homme  ,  qui  avoit  au  moins  25  ans.  On  se  persua- 
dera sans  peine  qu'il  vêquit  jusqu'à  cet  âge,  et  même  au- 
delà  ,  si  l'on  fait  atenlion  au  grand  savoir  qu'on  lui  atri- 
buë. 

Vop.  ibia.  n.  11.  '  Il  cst  vrai  que  dès  un  âge  peu  avancé  il  passoit  pour  un 
des  plus  savans  hommes  de  .son  siècle.  C'éloit  un  prodige 
d'éloquence.  Mais  il  suivoit  plus  le  style  des  Déclamateurs, 
que  la  belle  manière  d'écrire  des  anciens  Orateurs  com- 
me Ciceron.  Il  publia  quelques-unes  de  ses  pièces  d'élo- 
quence ,  qui  subsistoient  encore  du  tems  de  Vopisque  l'Hi- 
storien de  sa  vie,  qui  ne  parle  de  ses  écrits  qu  avec  éloge. 
Il  fait  en  particulier  mention  d'une  de  ses  harangues,  qui 
aïant  été  envoïée  au  Sénat,  fut  si  estimée  pour  l'éloquen-  ^ 
ce  qui  y  brilloit ,  qu'il  fut  ordonné  que  l'on  dresseroit  à 
son  Auteur  une  statue  dans  la  Bibliothèque  de  Trajan  , 
non  comme  à  un  César  ,  mais  comme  au  premier  Ora- 
teur de  son  tems,  avec  cette  inscription  :  Numeriano  Cœsari 
Oratori  temporibus  suis  potentissimo . 

ibij.  '  Pour  la   Poésie ,   Numerien   l'emportoit  aussi  sur  tous 

les  Poètes  de  son  siècle.  Il  entroit  quelquefois  en  lice  avec 


s. 


EMPEREUR.  415 

Olympius   Numerianus ,  '  qui   passoit  pour   un   très-bel    es-     iiisiECLn. 
prit ,    et  celui    de   tous   les  Auteurs  d'Afrique  qui  écrivoit  •  Fab.  bib.ui.  p. 
avec  le  plus  de  politesse   et  d'élégance;  ""et  toutes  les  fois  ^*'- 
qu'il  lui  disputa  la  palme,  il  le  fit  avec  avantage.  De  m  ê-  '^"P'''- 
me  ,    Aurelius  Apollinaris  ,  autre  Poëte  fort  célèbre  ,  aïant 
composé  un  poëme  sur  la  vie  de    l'Empereur  Carus,  Nu- 
merien   entreprit  de  traiter   le  même   sujet,  et  son  poëme 
éclipsa   entièrement    celui   d'Appollinaire.    Aujourd'hui     il 
ne  nous  reste  plus  rien  de  lous  les  écrits  de  ce  jeune  Empe- 
reur. 


S.    EUGENE, 

Martyr. 

EUGENE  ,    dont  nous   ne   parlons  ici   que  parce  qu'on  uu.  de  2.  Dio.  1. 
►.  lui  atribuë  quelques   poésies  Chrétiennes,   étoit  com-  tjh''' h^'^é^'i  i 
pagnon   ou   disciple  de  saint  Deriys  premier  Evêque  de  Pa-  p-  "<"■ 
ris.  Quelques  actes  des  Saints  le  font  venir  de  I{ome  dans 
les  Gaules  avec  saint  Denys ,  saint  Quentin  ,    saint  Lucien 
et  autres.    Mais  comme   ces  actes  ne  sont  point  originaux, 
ni  conformes  à  la  vérité  en  plusieurs  points  ,  on  pourroit 
aussi  bien  croire  que  nôtre  Saint  fut  un  de  ceux  que  saint 
Denys    convertit    dans    les    Gaules    par   ses    prédications. 
Nous  dirons  peu  de  choses  de  lui ,  parce  qu'il  y  en  a  peu 
d'assurées.  Après  avoir  aidé  saint  Denys  dans  les  fonctions 
du  ministère  de  la  parole  de    l'Evangile,  '  il  souffrit  le  Mar-  tiii.  ibu.  p.  «3. 
tyre  pour  J.-C.    au   village   de  Deuil  près  de  Montmoren- 
cy ,  peu  de  tems  après  ou  même  avant  saint  Denys ,  vers 
l'an  286.  L'Eglise  de  Deuil  porte  encore  son  nom  ;  et  cel- 
le de  Paris   l'honore  comme  Martyr   le  15"  de  Novembre. 
Son  corps  fut  depuis  porté  en   l'Abbaïe  de   S.  Denys  ;    et 
vers  920  les  Moines  en  donnèrent  une  partie  à  saint  Gé- 
rard Abbé  de  Brogne  au  diocèse  et  Comté  de  Namur. 

'Dans   la  suite   des  tems  on  a  fait  nôtre  saint  Martyr  pi" 
Evêque  de  Tolède  en  Espagne  ,  mais  sans  nul  fondement 
légitime.    Tous    les    Ecrivains    Espagnols,  jusqu'à    l'année 
1148,   n'ont  reconnu   que  deux  Eugenes  Evêques  de  To- 
lède,  tous    deux  de  beaucoup  postérieurs  à  saint  Denys  et 


410  S.    EUGENE,  MARTYR, 

m  SIECLE,  à  ses  compagnons  de  Martyre.  '  Voici  selon  toute  aparen- 
•  ibidiLau.ibid.p.  ^^'  '^  source  de  l'erreur.  Le  second  des  deux  Eugenes  de 
301. 304.  Tolède   aïant  fait  diverses  poésies  publiées  en  1619  par  le 

P.  Sirmond  ,  et  l'Abbé  Hilduin  aïant  cité  une  hymne  de 
cet  Eugène  sur  saint  Denys  ,  on  en  aura  pris  occasion  de 
donner  à  saint  Eugène  martyrisé  au  Diocèse  de  Paris,  la 
qualité  d'Evêque  de  Tolède  ,  sur-tout  depuis  qu'on  a  atri- 
bué  à  ce  saint  Martyr  quelque  poésies  Chrétiennes  ,  où 
il  s'en  trouve  sur  saint  Denys. 
Mol.  ss.  Bel.  p.  '  Ces  poésies  consistent  en  une  prière  à  Dieu  comprise 
263. 1.  2.  gjj    22  vers  hexamètres  ,  que  Molanus  rapporte  entière,  et 

une  hymne  sur  saint  Denys  l'Areopagite  et  Martyr.  Ces 
deux  pièces  ,  au  raport  de  Molanus  ,  se  trouvoient  au  tems 
qu'il  écrivoit ,  dans  un  très-ancien  manuscrit  de  saint  Eu- 
gène apartenant  à  l'Abbaïe  de  Brogne.  La  prière  est  très- 
édifiante  et  très-instructive  ,  et  ne  peut  être  que  l'effusion 
d'un  cœur  Chrétien  ,  qui  pénétré  de  ses  besoins  s'adresse  à 
Dieu  pour  le  prier  de  les  remplir.  Il  y  demande  tout  ce 
qui  est  nécessaire  pour  passer  tranquillement  et  saintement 
la  vie.  Mais  quel  que  soit  le  mérite  de  cette  pièce  ,  elle 
nous  paroît  avoir  moins  l'air  des  ouvrages  du  III  siècle  , 
que  celui  des  écrits  des  si<écles  suivans.  Aussi  se  lit-elle  en- 
tre les  poésies  d'Eugène  de  Tolède.  Il  a  pu  aisément  se 
faire  que  l'équivoque  du  nom  de  l'Auteur ,  ait  fait  alri- 
buer  cette  pièce  à  un  autre  Eugène. 
i„iu.  iLid.  p.  29*.  '  Quant  a  l'hymne  qui  commence  par  ces  mots  :  Cœli 
cives  applaudite,  elle  ne  se  trouve  point  parmi  les  poésies 
d'Eugène  de  Tolède  ;  mais  on  l'a  vûë  autrefois  dans  un 
manuscrit  de  Reims  ,  qui  contenoit  la  vie  de  saint  Eu- 
g(!ne  le  Martyr  dont  nous  parlons  ,  et  à  qui  cette  hymne 
est  attribuée.  C'est  la  même  aparemment  que  l'Abbé  Hil- 
duin cite  sous  le  nom  d'Eugène  de  Tolède.  Mr.  de  Launoy 
la  regarde  comme  une  pièce  suposée  à  l'un  et  à  l'autre. 
Nous  n'avons  point  de  preuves  pour  contredire  son  senti- 
p.295|Moi.iib.f.  mcut.  Au  Contraire,  '  l'hymne  étant  sur  saint  Denys  de 
Paris  et  le  confondant  avec  l'Areopagite  ,  ou  le  Sophiste  , 
comme  porte  le  manuscrit  dont  parle  Molanus ,  et  qui 
semble  n'être  pas  différent  de  celui  de  Reims ,  c'est  un 
puissant  préjugé  de  suposition  de  la  pièce  (XXXIV). 


CLAUDE 


417 


III  SIECLE. 


CLAUDE   MAMERTIN, 

Orateur. 


S-  I- 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

ON    ne  trouve  rien   pour  l'histoire  de  cet  Orateur ,  que 
ce   qu'on   en   tire  de  deux  Panégyriques  qui  nous  res- 
tent de  lui.  Ils  furent  faits  environ  dix  ans  avant  la  fin  de 
ce  siècle.  On  voit  par-là  en  quel  teins  a  fleuri  leur  Auteur. 
'  Mamertin  les  prononça  dans  les  Gaules,  et  à  Trêves  mê-  Pan.  b.  p.io9. 
me ,   qui  comme  nous  l'avons  déjà  dit ,  étoit  devenue   le  ^^-  "  '*• 
séjour  ordinaire  des  Empereurs  ,  lorsqu'ils  étoient  dans  les 
Gaules.  '  Il  y  a  toute  aparence  que  Mamertin  étoit  né  dans  p.ue.  121. 123. 
cette  ville,  ou  au  moins  qu'il  y  enseignoit  alors  les  belles 
letres.   En    effet  c'est  là  qu'on  le  voit  paroître  sur  le  théâ- 
tre des  Savans,  et  donner  les  premières  preuves  que  l'on 
sache   de  son  éloquence.  Il  est  certain  qu'il  parle  dans  ses 
écrits  comme  un   naturel   du  pais,  et  qu'en  y  parlant  du 
Rhein  il  le  nomme  nôtre  rivière  :  fluvius  hic  noster. 

Ce  fut  donc  aux  soins  de  Mamertin  en  particulier  que 
les  écoles  de  Trêves  furent  redevables ,  sinon  de  leur  in- 
stitution ,  au  moins  du  lustre  qu'elles  acquirent  sur  la  fin 
de  ce  siècle.  Ce  fut  encore  sur  son  modèle  ,  et  peut-être 
aussi  sous  sa  discipline,  que  se  formèrent  '  les  Orateurs  que  p.  188. 230. 
l'on  vit  briller  dans  cette  ville  au  commencement  du  IV. 
siècle  ,  et  dont  quelques-uns  devinrent  les  panégyristes  or- 
dinaires du  grand  Constantin.  Mais  pour  Claude  Mamer- 
tin ,  il  a  l'honneur  d'être  le  premier  Panégyriste  de  l'Em- 
pire, que  l'on  connoisse  avoir  exercé  cette  profession  dans 
les  Gaules  ,  et  avoir*"  fraie  la  voie  aux  autres  Gaulois  ses 
compatriotes  pour  remplir  à  leur  tour  une  aussi  glorieuse 
fonction.  Son  exemple  eut  un  heureux  succès.  Nos  Gau- 
lois se  portèrent  avec  tant  d'émulation  à  l'imiter ,  que  de- 
puis ce  tems-là  jusqu'au  V  siècle  inclusivement ,  ce  fut  des 
Gaules  que  sortirent  presque  tous  les  Panégyristes  de  l'Em- 
pire. 

Tome  I.  Prem.  Part.  H  h  h 

3  3 


418  CLAUDE  MÂMERTIN, 

m  SIECLE.  "Mamerlin  a  mérité  les  éloges  d'un  pieux  Cardinal,  qui 
•  Bon  noiit  auct  '^  qualifie  un  Panégyriste  illustre  et  élégant  :  Mamertinus 
p. 30.'  elegans  et  insignis.  Il  avoit  véritablement  de  l'éloquence, 

mais  de   cette   éloquence   telle  qu'elle  étoit  en  son  siècle  , 
après  qu'elle  avoit  perdu  la  plupart  de  ses  anciennes  beau- 
Pan.  p.  115.  «6.  tés.   Pour  la  religion ,  '  Mamertin  montre  en  plusieurs  en- 
120. 127. 130.        dfoits  de  ses  écrits  ,  qu'il  ne  reconnoissoit  que  Jupiter  pour 

le  souverain  Dieu, 
p.  109. 1.  'Comme  l'on  vit  paroître   dans  l'Empire  ,  mais  plus  de 

70  ans  après  ,  un  autre  Claude  Mamertin  ,  Panégyriste  de 
Julien  l'Apostat,  quelques  Savans,  éblouis  par  l'identité  de 
nom  et  de  profession ,  semblent  les  avoir  confondus  l'un  et 
p.  282. 2.  l'autre.  'Le  P.  de  la  Baune  a  hésité  lui-même,  savoir  s'il 

en  falloit  faire  deux  differens  Orateurs,  ou  dire  que  Ma- 
mertin d'après  le  milieu  du  IV  siècle  est  le  même  que  celui 
qui  fait  le  sujet  de  cet  article.  Mais  il  paroît  assez  visible- 
ment que  le  long  espace  de  tems  qu'il  y  a  entre  l'un  et  l'au- 
tre ,  doit  lever  toute  difficulté ,  et  qu'il  suffit  de  reste 
pour  les  distinguer.  Quel  Orateur  pour  parler  en  public  , 
qu'un  homme  qui  auroit  près  de  cent  ans  ,  ou  même  da- 
vantage !  C'est  néanmoins  l'âge  aprochani  qu'auroit  eu  en 
392  le  Panégyriste  dont  nous  parlons,  s'il  étoit  réellement 
le  même  que  celui  de  Julien  l'Apostat,  qand  même  on  ne 
lui  donneroit  que  30  ans  ,  lorsqu'il  prononça  son  second 
Panégyrique.  Non  il  n'étoit  point  le  même  ;  mais  il  pou- 
voit  fort  bien  être  le  fils  de  celui  de  la  fin  de  ce  siècle,  com- 
me nous  dirons  plus  amplement  en  son  lieu. 

8-  "• 

SES  ECRITS.. 

l'an.  u.  p.  110. 139.  TVT  CHS  avous  dc  Claudc  Mamertin  ,  '  comme  nous  l'a- 
W  vous  déjà  dit ,  deux  Panégyriques ,  qu'il  prononça 
en  divers  tems  à  la  louange  de  Maximien  Hercule.  C'est  ce 
qui  porte  l'Auteur  à  établir  dans  ces  deux  pièces  une  com- 
paraison presque  continuelle  entre  cet  Empereur  et  Hercu- 

noi.  p.  108.1.110.  le,  ce  Héros  si  fameux  dans  les  poètes.  'On  tire  de-là  une 

*•  preuve  que  ces  deux  pièces  sont  sorties  de  la  même  plume  : 

ce  que  persuade  aussi  la  ressemblance  du  style  jointe  à  plu- 

p  129.  n.  5.         sieurs   autres  circonstances.  '  L'Auteur  du  second  Panegy- 


ORATEUR.  419 

rique  dit  bien  clairement,  qu'il  en  avoit  déjà  prononcé  un     m  siècle. 
autre  en  présence  du  même  Prince.   En  faut-il  davantage  " 
pour  convenir  que  l'un  et  l'autre  sont  du  même  Auteur  ef 
que  cet  Auteur  qui  ne  se  trouve  nommé  que  dans  le  pre- 
mier, est  Claude  Mamertin? 

1°.  Pour  garder  l'ordre  chronologique  en  parlant  de  ces 
deux   pièces  d'éloquence,  '  la  première   fut    prononcée   à  p. loo.i. 
Trêves,   ainsi   qu'on  l'a  dit  ailleurs,   le  jour  anniversaire 
que  l'on  célebroit  la  fondation  de  Rome.  Le  P.  de  la  Rau- 
ne  attache  ce  jour  au  11*  des  calendes  de  Mars,  ou  le  19*  de 
Février  de  l'année  292.  '  Mais  ce  fut  plutôt  le  21*  d'Avril  tui.  Emp.  t.  *.  p. 
289 ,   ou  l'année  suivante  au  plus  tard ,  comme  l'observe  ®^'* 
Mr.  de  Tillemont.  '  En  effet  ce  fut  le  21*  jour  d'avril  que  Lab.  cur.  i.  s.  p. 
la  ville  de  Rome  fut  fondée .  Ainsi  il  faut  lire  dans  les  re-  "' 
marques  du  P.  de  la  Raune  XI.  Kal.  Mai.  et  non  pas  Mort. 

'  Mamertin    semble  diviser  ce  premier  Panégyrique  en  Pm.  p.  io9. 
deux  parties.  Dans  la  première  qu  il  ne   fait  que   toucher , 
sans  presque  s'y  arrêter  ,  il  parle  de  ce  qu'avoit  fait  Maxi- 
mien ,  avant  que  de  parvenir  à  l'Empire  ;  et  dans  la  secon- 
de, qui  est  la  principale ,  de  ce  qu'il   fit  depuis.  '  La   pièce  p.  lu.  iis. 
fut  prononcée  en  présence  de  l'Empereur  même,  dont  on 
y  relevé  la  suffisance,  qu'il  avoit  fait  paroître  tant  dans  les 
fonctions  du  Consulat,  que  dans  celles  du  commandement 
des  armées.   En  faisant    l'éloge  de  ses  exploits  militaires, 
l'Auteur  loue   particulièrement  ce  Prince  d'avoir  défendu  p-iu. 
les  Gaules  contre   les   incursions  des   Bourguignons,    des 
Alemans ,  des  Chaibons  ou  Cavions  et  des  Erules ,    et  d'à-  p.  us. 
voir   étendu    les  limites   de  l'Empire    au-delà  du   Rhein , 
qui  sembloit  en  devoir  borner  l'étendue ,    comme  il  bornoit 
celle  des  Gaules  de  ce  côté-là. 

Il  a  soin  de  reserver  quelques  éloges  pour  Diocletien,  p.  ns-ng. 
qui  regnoit  avec  Maximien  Hercule  ,  et  le  loue  d'avoir  pous- 
sé ses  conquêtes  au-delà  de  l'Euphrate  ,  comme  celui-ci  les 
siennes  au-delà  du  Rhein,  et  d'avoir  vaincu  les  Perses, 
comme  Maximien  avoit  subjugué  les  Germains.  Il  passe 
ensuite  à  la  bonne  intelligence  qui  étoit  entre  les  deux 
Empereurs,  et  prend  ocasion  de  les  comparer  à  ces  deux 
fameux  frères  jumeaux  ,  qui  avoient  régné  ensemble  à  La- 
cedemone.  '  Il  parle  des  préparatifs  de  la  flote  qu'ils  des-  p- 120. 
tinoient  pour  combatre  Carause ,  que  nôtre  Orateur  ne 
désigne  que  par  ie  nom  général  de  Pirate.   Mamertin  finit  p.  123. 

H  h  h  ij 


420  CLAUDE  MAMERTIN, 

m.  SIECLE,  sa  pièce  en  apostrophant  la  ville  de  Rome,  qu'il  dit  être 
plus  heureuse  sous  le  règne  des  deux  Empereurs ,  qu'elle 
ne  le  fut  jamais  sous  celui  de  Remus  et  Romulus. 

p.  «w.  2°.  '  Le  second  Panegyriaue  ne  porte   point  dans  les  an- 

ciens manuscrits  le  nom  de  Mamertin.  On  ne  laisse  pas 
toutefois  d'être  persuadé  qu'il  est  de  lui ,  comme  le  préce- 

p-  '*"•  dent.  Nous  en  avons  déjà  donné  les  preuves.  '  Il  est  en- 

core à  la  louange  de  Maximien  Hercule,    en    présence  de 

p»**-  oui  il  fut  prononcé  '  à  Trêves  en  l'année  292  ,  selon  le  P. 

Tiii.ib.  p.  15.601.  de  la  Raune,  qui  dit  que  le  jour  en  est  certain.  '  Mr.  de 
Tillemont  lui  assigne  le  21"  de  Juillet  de  l'an  291.  On  pa- 
roît  avoir  été  partagé  pour  savoir  si  ce  fut  ou  le  jour  de 
la  naissance  de  l'Empereur  ou  celui  auquel  il  commença 
son  règne.  Le  titre  de  Genethliacus ,  que  porte  ce  Panégy- 
rique ,  et  qui  signifie  qu'il  est  sur  l'horoscope  de  ce  Prince , 

l'an.  p.  lae.  139.  est  trop  équivoque  pour  lever  la  difficulté.  '  Mais  l'Auteur 
la  levé  lui-même  en  marquant  expressément  qu'il  a  fait 
cette  pièce  pour  le  jour  de  la  naissance  des  deux  Empereurs 

p.  lit.  '  Maximien   et  Diocletien  ,   qu'il    ne  sépare   point   l'un  de 

l'autre. 

'ij»»!-  '  Mamertin  y  loue  leur   piété  envers  leurs    faux  Dieux  , 

et  le  respect  qu'ils  se  portoient  mutuellement.  C'est  ce  qui 
fait  le  sujet  de  la  première  partie  du  discours.  Dans  la  se- 

p-<38.  conde  il  relevé   la   félicité  des  deux  Princes  ,  et  '  conclud 

par  dire  que  cette  grande  félicité  est  le  fruit  de  leur  piété 
commune.  L'Auteur  au  reste  dans  ce  Panégyrique  non  plus 
que  dans  le  premier  ,  ne  fait  que  toucher  en  général  les 
grands  exploits  de  ces  deux  Empereurs.  Tel  il  s'est  montré 
dans  l'un  ,  tel  il  se  montre  dans  l'autre,  c'est-à-dire  un  vrai 
Païen, 

^'  **■  3".  '  Mamertin  dans  ce  second  Panégyrique  fait  mention 

d'un  troisième  qu'il  avoit  composé  pour  la  ,5*  année  de 
l'Empire  de  Maximien,  qui  lomboit  en  290.  Mais  n'aïant 
pu  le  prononcer  alors  ,  il  témoigne  qu'il  esperoit  le  faire  la 
10*  année  de  son  règne.  On  ne  sait  point  s'il  fit  ce  qu'il 
esperoit;  et  nous  n'avons  point  ce  3*  Panégyrique.  Ce  n'est 
peut-être  pas  le  seul  de  cet  Orateur  que  nous  avons  perdu. 
Khenanus  par  une  espèce  de  dédomagement  lui  a  atribué 
le  premier  de  ceux  qu'Eumene  prononça  à  la  louange  de 
Maximien  Hercule  et  de  Constance  Chlore  au  nom  de  la 
ville  d'Autun  :  ce  qui  est  une  faute  inexcusable. 


ORATEUR 

421 

§.  III. 

m  SIECLE. 

ÉDÎ 

[TIONS  DE  SES  ECRITS. 

LES  deux   discours  qui  nous  restent  de  Claude  Mamer- 
tin  ,   ont  été  fort  souvent  imprimés  avec  ceux  des  au- 
tres célèbres  Panégyristes  de  l'Empire  ,  presque  tous  Gau- 
lois. Ces  autres  Panégyristes  sont  Pline  le  jeune,  Eumene, 
Nazaire ,    deux   Anonymes ,   un    autre    Claude   Mamertin , 
Drepane,  Ausone ,  et  quelquefois  S.  Ennode  de  Pavie.  'La  Bib.  VaUe.- 
première  édition  que  1  on  en  connoisse,  est  celle  que  l'on 
trouve  en  un  volume   m-i".  sans  date  ni  nom  de  lieu  et 
d'Imprimeur.  On  en  est  redevable  à  François  du  Puits  ou  de 
Pouzzol ,  lat.  Piiteolanus ,  qui  a  fait  aussi  imprimer  la  Saty- 
re de   Pétrone.  '  Il  parut  une   autre  édition  des  pièces  de  --Angei. 
Mamertin  et  des  autres  Panégyristes  à  Bruges  l'an  1486,  en 
un  volume  m-8°.  La  troisième  édition  fut  celle  que  '  Bea-  ..s.vin.  Cen. 
tus  Rhenanus  publia  à  Basle  chez  Froben  l'an  1520,  en  un 
petit  in-4".  ou  grand  2/2-8°.  Cette  édition  est  remplie  de  fau-  ■ 

tes ,  et  ne  suit  aucun  ordre  pour  placer  les  Panégyriques. 
Elle  confond  même  les  Auteurs ,  atribuant  à  quelques-uns 
des  pièces  qui  apartiennent  à  d'autres.  La  plupart  de  ces 
fautes  peuvent  venir  du  défaut  de  manuscrits ,  dont  l'Edi- 
teur avoue  lui-même  avoir  manqué. 

'  Au  même  siècle  Henri  Estienne  faisant  imprimer ,  ou  ibid. 
imprimant  lui-même  les  letres  de  Pline ,  mit  à  la  suite  les 
pièces  d'éloquence  de  ces  Panégyristes.  L'édition  est  en  un 
volume  m-16.  sans  date.  Elle  a  été  faite  sur  celle  de  Rhe- 
nanus ,  comme  il  paroît  en  ce  que  l'on  y  a  copié  les  mê- 
mes fautes.  'Il  y  en  eut  une  autre  à  Venise  l'an  1576,  en  Bib.  Barb.  i.  1.  p. 
un  volume  m-8».  *'*^*- 

'En  1599,  Jean  Livineius  de  Gand  donna  au  public  une  ^'^-  ^-  JoLorcii. 

autre  édition  de  ces  Panégyristes.  Elle  parut  à  Anvers  chez 

Jean  Moret  en  un  volume  m-8°.  Quoiqu'elle  soit  encore 

fort  défectueuse  ,   elle  n'a  pas  laissé  de  corriger  plusieurs 

fautes  considérables   des    deux  précédentes ,   surtout    par 

raport  à  l'atribution  des  pièces  aux  Auteurs  de  qui  elles 

sont  veritablament ,  et  à  l'ordre  chronologique  ,  qui  y  est 

assez  exact.  '  Le  P.  de  la  Baune  la  marque  comme  aïant  pa-  •*»"•  b.  pr.  p.  1. 

ru  dès  1594.  Peut-être  est-ce  une  faute  de  l'Imprimeur. 

'On  en  trouve  deux  autres  éditions,  l'une  m-4°.  faite  à  bu».  Barb.  ib.  1.2. 
3  3  * 


422  CLAUDE  MAMERTIN, 

iiisiECLE.  Genève  en  1602,  l'autre  in-S'.  à  Francfort  en  1605,  avec 
les  notes  de  Livineïus  et  d'autres  critiques. 

Fab.  Bib.  lat.  p.      '  Jean  Gruter  en  1607  fit  réimprimer  les  mêmes  discours 

m.  I  Bib.  M.SS.  gjj  yj^  volume  m-12.  au  même  endroit  chez  Nicolas  Hoff- 
man,  avec  les  notes  de  Livineïus,  de  Valens  Acidalius,  de 

Pan. ibid.  Conrad  Rittershusius ,  et  celles  de  sa  façon.  'Le  P.  de  la 

Baune  dit  que  cette  édition  fut  publiée  17  ans  après  celle 
de  Livineïus  :  ce  qui  ne  s'acorde  ni  avec  la  date  qu'il  as- 
signe à  celle-ci ,  ni  avec  celle  que  nous  en  avons  marquée. 

ibid.  '  Claude  du  Puy  Conseiller  au  Parlement  de  Paris,  com- 

prenant que  toutes  ces  éditions  étoient  imparfaites  ,  tra- 
vailla à  en  donner  une  nouvelle  qu'il  collationna  sur  divers 

p.  8.  manuscrits,  '  et  qu'il  enrichit  des  notes  des  Savans  que  nous 

avons  déjà  nommés ,  et  de  celles  de  Marie  Catanée,  d'Her- 
man  Rayan ,  de  François  Baudoin  ,  de  Juste  Lipse,  de  Pier- 
re Fabri ,  de  San-Jorî ,  de  François  Juret,  de  Théodore  Pul- 
man,  et  d'Antoine  Schonovius.  Du  Puy  y  en  joignit  de 
nouvelles  de  sa  façon ,  et  mourut  avant  que  de  publier  son 

Fab. ibid.  édition  ,  qui  ne  parut  qu'en  1643  '  en  deux  volumes  m-12. 

Les  mêmes  Panégyriques  se  trouvent  encore  imprimés , 
hors  ceux  d'Ausone  et  de  S.  Ennode,  à  la  fin  des  fetres  de 
Pline  dans  les  éditions  m-o°.  faites  à  Francfort  sur  l'Oder 
les  années  1650  et  1665. 

Pan. B. p.  1.2.  'Ce  fut  sur  les  éditions  de  Rhenaims,  de  Livineïus,  de 

Gruter  et  de  Mr.  du  Puy,  que  le  R.  P.  Jûques  de  la  Baune 

Bib.  s.  Vin.  Con.  Jesuite  en  publia  une  nouvelle,  '  qui  parut  à  Paris  chez  Si- 
mon Benard  l'an  1677  en  un  volume  m-4°.  à  l'usage  de  Mgr. 
le  Dauphin.  L'Editeur  l'a  enrichie  de  notes  choisies  et  néces- 
saires pour  mieux  entendre  le  texte ,  avec  de  courtes  inter- 
prétations des  endroits  qui  en  ont  le  plus  de  besoin,  lia  eu 
soin  de  mettre  aussi  à  la  tête  de  chaque  Panégyrique  un  abré- 
gé chronologique  de  la  vie  de  chaque  Empereur,  à  la  louan- 
ge desquels  ces  harangues  ont  été  prononcées,  à  quoi  il  a 
joint  les  médailles  de  ces  Princes.  Il  y  a  mis  ensuite  ce  qu'il 
a  trouvé  de  plus  remarquable  sur  la  vie  des  Auteurs  de  ces 
Panégyriques .  qu'il  a  placés  suivant  les  tems  auxquels  ils 
ont  été  prononcés.  De  sorte  qne  cette  édition  est  sans  con- 
tredit la  plus  belle  et  la  plus  parfaite  de  toutes  celles  qui  ont 
paru  jusqu'ici. 

Pan.  B.  pr.  p.  4.  '  Elle  nc  Contient  que  douze  Panégyriques,  savoir  le  pre- 
mier de  Trajan  par  Pline  le  jeune;  le  second  par  Claude 


ORATEUR.  423 

Mamertin  pour  l'Empereur  Maximien  Hercule;  le  3'.  du  m  siècle 
même  Orateur  à  la  louange  du  même  Prince;  le  4*.  d'Eu- 
mené  pour  le  rétablissement  des  écoles  d'Autun;  le  5'.  du 
même  Orateur  à  la  louange  de  Constance  Chlore  César; 
le  6*.  d'un  Anonyme  à  la  louange  de  Valere  Maximien  et 
de  Constantin;  le  7*.  d'Eumene  à  la  louange  de  Constance 
Chlore  ;  le  8*.  action  de  grâces  du  même  Eumene  au  nom 
des  citoïens  d'Autun  à  l'Empereur  Constantin  ;  le  9'.  à  la 
louange  du  même  par  un  Auteur  inconnu  ;  le  10*.  de  Na- 
zaire  pour  le  même  Empereur;  le  11".  de  Claude  Mamer- 
tin pour  remercier  Julien  l'Apostat  de  l'avoir  élevé  à  la 
dignité  de  Consul;  enfin  le  12*.  de  l'Empereur  Theodose 
par  Latinus  Pacalus  Drepanius. 

'  Depuis  cette  édition  par  le  P.  de  la  Baune  il  y  en  a  eu  Bik.  s.  viu.  Ceu. 
une  autre  faite  à  Vienne  en  Autriche  chez  Martin  Endter 
l'an  1694  en  un  volume  m-12.  Celle-ci  contient  les  mê- 
mes Panégyriques,  mais  dans  un  ordre  bien  différent.  On 
y  a  ajouté  aux  douze  déjà  nommés  celui  d'Ausone  à  Gra- 
tien,  et  l'oraison  funèbre  que  Jule  César  Scaliger  prononça 
sur  la  mort  de  son  fils  Audecte.  '  Le  P.  de  la  Baune  remarque  Pan.  b.  pr.  p.  3. 
avec  raison  que  chaque  édition  assigne  un  ordre  différent  à 
ces  Panégyriques.  Il  faut  en  excepter  celle  de  Livineïus, 
qui  retient  presque  le  même  ordre  qu'a  suivi  le  P.  do  la 
Baune  (XXXV). 

S.        G    E    N    È    S, 
Martyr  a  Arles. 

AVANT  que  de  devenir  illustre  dans  l'Eglise ,  S.  Genès  Paui.  vit.  cen.  n. 
se  rendit  célèbre  dans  le  monde  par  son  talent  par-  '* 
ticulier  d'écrire  en  notes.  Il  étoit  originaire  et  peut-être  na- 
tif de  la  ville  d'Arles  dans  la  Gaule  Narbonoise,  dont  il  de- 
vint ensuite  le  glorieux  Patron  par  le  mérite  de  la  mort 
qu'il  souffrit  pour  la  foi.  Quoiqu'encore  jeune  il  se  trouvoit 
engagé  dans  des  emplois  qui  regardent  l'administration  de 
la  Justice.  La  charge  qu'il  y  exerçoit,  étoit  celle  de  Greffier 
ou  Notaire.  En  cette  qualité  il  écrivoit  les  plaidoïers  des 
Avocats,  mais  avec  tant  d'habileté,  que  par  la  vitesse  de  sa 
main  et  le  secret  de  ses  notes  il  égaloit  ta  rapidité  de  leurs 
paroles.  '  De  sorte  qu'on  peut  à  juste  titre  lui  apliquer  ce  «a»-  »*••  i-  *•  v. 


424  S.   GENES,  MARTYR  A  ARLES. 

m  SIECLE,    qu'un  Poëte  païen  disoit  à  ce  sujet  environ  300  ans  avant  le 
S.  Martyr. 

Hic  et  Scriptor  crit  velox  cui  litera  vcrbum  est, 
*  Quique  notis  linguam  superet,  cursimque  loquentis 

Ëxcipiat  longas  nova  per  compendia  voces. 

Emis.  H.  50.  p.  '     '  Ce  fut  l'exercice  de  cet  emploi  qui  fit  naître  à  S.  Genès 
'^^'^'  ^  l'ocasion  de  son  martyre.  Obligé  par  sa  charge  à  être  pré- 

sent devant  le  tribunal  des  Juges,  il  y  étoit  témoin  des  ar- 
rêts de  sang  que  l'on  prononçoit  et  des  tourments  que  l'on 
faisoil  souffrir  aux  Martyrs  de  J.-C.  La  rigueur  des  su plices 
qui  portoit  la  crainte  et  la  terreur  dans  l'ame  des  bourreaux 
mêmes,  bien  loin  d'épouvanter  Genès,  lui  inspira  une  sain- 
Paui.  ib.  n.  9.  te  générosité.  '  Il  eut  horreur  de  tracer  sur  la  cire  des  pa- 
roles sacrilèges,  et  empêcha  sa  main  de  rien  écrire  contre 
Emis.  ibid.  J.-C.  comme  de  sacrifier  au  démon.  '  11  jetta  ses  registres 

aux  pieds  du  persécuteur,  condamnant  hautement  ses  édits 
et  ses  arrêts  impies  avec  toute  la  liberté  d'un  Martyr,  et 
ibi.i  I  Pani. ib.       déclarant  en  même  tems  qu'il  étoit  Chrétien.  '  Il   n'étoit 
cependant  que  simple  Catécumene ,  et  n'avoit  point  encore 
reçu  le  Baptême    qu'il  désiroit  ardemment,  pour  s'affermir 
de  plus  en  plus  dans  la  foi  qu'il  professoit  déjà.  Mais  quel- 
que mouvement  qu'il  se  donnât  pour  parvenir  à  celte  grâ- 
ce, il  ne  fut  point  autrement  baptisé  que  dans  son  propre 
sang. 
Km'l- »''•  p-  323.      '  Le  Juge  irrité  de  la  déclaration  de  Genès,    rougit  de 
voir  sortir  un  défenseur  de  la  foi  du  milieu  des  ennemis  de 
la  foi  même,  et  de  ce  que  l'Eglise  aïant  acoutumé  d'envoïer 
les  Martyrs  aux  tribunaux  des  Juges,  le  tribunal  du  persé- 
cuteur donnoit  au  contraire  un  Martyr  à  l'Eglise.    II  tour- 
na donc  toute  sa  fureur  contre  Genès,    et  tous  les  efforts 
Paul.  ibid.  n.  2  |   dcs  infidélcs  furcut  emploies  pour  sa  perte.  '  Cependant   le 
Emis.  p.  324. 1.     ^^^^^  Martyr  pour  se  conformer  à  l'Evangile  avûit  pris  la 
Tiu.  H.  E.  t.  s.  p.  fuite.  '  Enfin  après  avoir  passé  d'une  ville  à  une  autre,  et 
être  revenu  à  Arles,  l'exécuteur  lui  ôta  la  vie  d'un    coup 
d'épée  dont  il  lui  trancha  la  tête.  On  ignore  le  temps  pré- 
cis de  son  martyre,  bien  que  quelques  -  uns  le  mettent  sous 
Diocletien.  Mais  le  jour  de  sa  fête  est  marqué  au  25*  d'Août, 
et  dans  le  Martyrologe  qui  porte  le  nom  de  S.  Jérôme  et 
dans  ceux  du  IX  siècle. 

FIIV  de  la  première  Partie. 


57Î. 


NOTES.  425 


I 


NOTES 

ET   OBSERVATIONS   DIVERSES 

àUR   LA    PREMIÈRE   PARTIE    DU    TOME    PREMIER. 


I. 

TlTHE. 


L'adjcclif /itfraHv,  ou  littéraire,  étoit  assez  nouvellement  introduit  dans  la 
langue  françoise  quand  parut  ce  premier  volume.  On  le  devoit  à  l'ingénieux 
Père  Bouhours  qui,  en  1701 ,  avoit  terminé  le  premier  tome  des  Mémoires  de 
Trévoux,  par  une  sorte  de  revue  qu'il  intituloit  Nouvelles  Littéraires.  Le  mot 
fut  aussitôt  jugé  nécessaire  et  admis  sans  contrôle  ;  mais  on  ne  s'accorda  pas 
avec  les  Jésuites  de  Trévoux  sur  l'ortographe  du  nouvel  adjectif.  On  écri- 
vit souvent  avec  un  seul  (  literal  et  Uteratiire,  comme  Richelet  dans  l'exemple 
qu'il  avoit  proposé  :  «  Monsieur  Arnaud  est  un  homme  de  grande  literature.» 
D'ailleurs  les  latins  écrivoient  literœ,  literarius,  literatura,  bien  que  dans 
les  éditions  modernes  l'usage  du  t  redoublé  ait  prévalu.  Il  faut  voir  l'indigna- 
tion du  bon  Calepin,  édition  de  1578,  contre  les  fauteurs  de  cette  innovation  : 
«  Superflua  anxietas  eorum  potest  videri  qui  priraam  hujus  dictionis  {litera) 
«  syllabam  producere  non  audent,  nisi  gemina  consonante.  Insignis  illorum 
«  temeritas  qui  eam  nuUo  veterum  exemple  corripiunt,  frivoloque  atque  in- 
«  certoetymo  freti,ab  unanimi  omnium  consensu  non  dubitant  discedere.  » 

On  remarquera  dans  l'ortographe,  dans  la  ponctuation  et  dans  l'accentua- 
tion de  l'Histoire  Littéraire  plus  d'une  habitude  surannée  ou  même  particu- 
lière aux  auteurs.  Ainsi,  une  disposition  générale  à  suprimer  les  consonnes 
redoublées,  comme  dans  ocasion,  aplaudir,  raport,  apareil,  etc.,  etc.  Quel- 
quefois cependant  ils  redoublent  quand  nous  avons  cessé  de  le  faire.  Dom 
Rivet  parlant  en  son  nom,  et  employant  dans  ce  cas,  la  première  personne 

lii 


426  NOTES. 

du  pluriel ,  ne  s'astreint  pas  au  solécisme  moderne,  qui  supprime  au  parti- 
cipe le  signe  de  ce  pluriel;  il  dit  :  «  Nous  sommes  obligés,  et  non  pas  :  nous 
sommes  obligé.  »  Il  emploie  certaines  expressions  qu'on  retrouve  ailleurs 
rarement,  comme  «  teinperie  (le  l'air,  »  qw  justifieroit  assez  bien  le  bon  mot 
intempérie.  Il  est  vrai  qu'en  revanche  nous  disons  tempéré,  en  excluant  in- 
temperé.  Dans  le  premier  volume,  dialecte  est  fi'minin  ;  D.  Rivet  est  revenu, 
dans  le  second,  à  l'usage  plus  gênerai  qui  le  fait  masculin.  Volume  a  pres- 
qu'exclusivemenl  chez  lui  le  sens  de  format.  A  tout  prendre,  cependant,  on 
voit  que  pour  l'accentuation  et  la  ponctuation,  Dom  Rivet  a  souvent  hésité, 
souvent  varié;  par  exemple,  ses  virgules  sont  distribuées  plutôt  pour  marquer 
les  repos  de  l'orateur  que  pour  distinguer  les  parties  et  les  incidences  de 
la  phrase.  Nous  avons  cru  devoir  modifier  rarement  cette  disposition  que 
suivent  encore  aujourd'hui,  de  préférence,  les  écrivains  allemands.  Il  nous 
suffit  d'en  faire  ici  la  remarque,  (nouvel  éditeur.) 


II. 

Préface.   Page  ii,   note. 

Un  autre  écrivain  plus  moderne. 

Sans  doute  le  PèrcNiceron,  qui  avoitdéj'i  donné  vingt  volumes  des  Mémoi- 
res pour  servir  à  l'histoire  des  Hommes  illuslresde  la  République  des  Lettres. 
Paris,  17:27-1732.  in-12°.  Les  ouvrages  du  Père  Labbe,  du  Père  Louis  Jacob 
auxquels  se  rapporte  la  première  ligne  de  la  note  sont  la  Noi<a  bibliotheca 
manuscriptoriim  librorum,  Parisiis  1657,  et  le  De  Claris  Scriptoribus  Cabil- 
lonensibus,  'm-\°.  —  Les  deux  auteurs  de  la  fin  du  xvi«  siècle  qui  avoient 
frayé  la  route  à  une  si  généreuse  entreprise  doivent  être  La  Croix  du  Maine 
et  Duverdier.  (n.  e.) 


m. 

EÎTAT  DES  LETRES  AVANT  J.  C.  Page  9,  ligne  25. 

Que  les  Gaulois  aient  ou  non  reçu  leur  croyance  à  l'immortalité  de  l'âme 
de  Japhet  et  des  premiers  patriarches,  le  raisonnement  de  dom  Rivet  n'en 
sera  pas  moins  rigoureux.  Un  peuple  qui  s'élève  à  la  distinction  de  l'àme  et  du 
corps  dans  la  personnalité  humaine,  doit  avoir  pu  facilement  descendre  de  là 
à  l'étude  des  sciences  qui  ne  sont  que  du  ressort  des  sens,  ou  de  la  réflexion 
produite  par  l'exercice  des  sens.  (n.  e.) 


N  0  T  E  S. 


427 


IV. 


Ibid.  Page  14,  ligne  12  (fin  de  l'alinéa). 

Il  faut  avouer  que  l'asseilion  de  Bouterouc  pouvoit  être  combatue  par  do 
meilleures  raisons.  L'ancien  usage  des  caractères  grecs  se  prouve  aussi  bien 
par  les  anciennes  monnoies  gauloises  que  par  le  texte  de  César.  Et,  chose  re- 
marquable, celles  qui  offrent  un  ensemble  de  lettres  grecques  ou  un  mélange 
de  lettres  grecques  et  latines  appartiennent  non- seulement  au\  colonies 
massiiiennes  dont  plus  d'une  fois  les  types  disputent  de  pureté  avec  les  plus 
belles  médailles  grecques  ;  mais  encore  aux  provinces  qui  reconnurent  le  plus 
facilcmenl  la  domination  romaine.  Ainsi,  ces  caractères  sont  des  plus  ordinai- 
res dans  les  monnoies  des  llcmi  et  des  Suessiones.  Le  beau  Diviliacus  roi  de 
Soissons  est  bilingue  :  d'un  côté  les  lettres  grecques,  de  l'autre  les  let- 
tres latines.  IjC  Galba,  autre  prince  du  môme  territoire,  est  seulement  en  grec. 
Pour  les  pièces  des  Arvernes,  elles  n'ont  pas  généralement  de  légende;  la  figure 
d'un  renard,  dont  le  nom  celtique  etoit  Luarn,  fait  aujourd'hui  reconnoître 
aux  numismates  les  pièces  qui  appartiennent  au  célèbre  Luerne,  roi  des 
Arvernes,  dont  il  est  parlé  plus  loin,  page  27. 

Mais  il  ne  faut  pas  conclure  de  l'usage  primitif  de  l'alphabet  grec  dans  les 
Gaules,  à  l'usage  général  de  la  langue  grecque.  Le  passage  si  controversé  de 
César  où  l'on  voit  qu'il  a  recours  aux  lettres  grecques  pour  correspondre 
sûrement  avec  Giceron,  n'offriroit  pas  même  de  difficulté  sérieuse,  si  l'on 
vouloit  admettre  qu'il  eût,  en  ce  cas,  recours  à  la  langue  grecque,  et  non  pas 
seulement  à  l'alphabet  grec. 

Amaury  Duval,  dans  le  Tome  xvii'  p.  4()fJ,  a  attribué  h  dom  Rivet,  en  ren- 
voyant à  cette  page  14,  une  opinion  que  dom  Rivet  n'a  jamais  exprimée,  (n.  e.) 


V. 


Ibu).  Page  16,  ligne  8. 


Paul  Aringhi ayant,  en  1651,  inséré  cette  inscription  dans  sa  Roma  subter- 
ranœa,  2  vol.  in-f- ,  dom  Rivet  a  dû  naturellement  la  croire  à  l'abri  de 
toute  incertitude  :  on  a  depuis  acciuis  la  preuve  de  sa  supposition.  De  préten- 
dus aiitiiiunires  chargés  par  je  ne  sais  quel  voyageur  étranger  de  faire  de 
nouvelles  recherches  dans  les  catacombes,  avoient  pris  le  parti,  pour  obtenir 
un  salaire  plus  élevé,  dinventer  eux-mêmes  des  inscriptions  et  de  les  tracer 
sur  plusieurs  pierres  de  ces  antiques  souterrains.  Au  nombre  de  celles  qu'ils 


428  NOTES. 

fabriquèrent  étoit  l'epitaphe  de  Gordien  reproduite  par  dom  Rivet.  Aujourd'hui 
que  la  fraude  est  devenue  manifeste  par  le  procès  qui  fut  intenté  aux  coupa- 
bles, procès  dit  des  Periti,  la  plus  légère  attention  nous  fait  reconnottre  la 
supposition  :  les  caractères  grecs  semblent  tracés  par  la  main  inhabile  de 
quelque  écolier  de  collège.  Je  dois  ces  précieux  renseignements  à  M.  Edmond 
le  Blmt,  le  judicieux  et  savant  auteur  du  Recueil  des  Inscriptions  chrétiennes 
de  la  Gaule.  Paris  1856,  in-4°.  (n.  e.) 


VI. 

Ibid.  Page  23,  ligne  15. 

De  CODEX  est  venu  le  nom  français  de  cahier. 

Telle  étoit  aussi  l'opinion  de  Robert  Estienne  et  de  Nicot,  préférable  en 
tous  cas  à  celle  de  Ménage,  qui  fait  venir  cahier  de  scopus.  Mais  il  est  plus 
naturel  de  demander  l'origine  de  ce  mot  h  quaternus,  réunion  de  quatre  feuil- 
lets {quaer-cahier.)  Le  mot  latin  en  a  produit  au  moins  deux  françois  :  carne  du 
jeu  de  trictrac,  et  cahier.  Quaternio,  quiavoitun  sens  analogue,  avoit  fait  au- 
trefois quareignon  ou  careignon  :  mot  dont  le  sens  avoit  été  mal  saisi  par 
l'éditeur  de  la  chanson  d'Antioche  ;  I.  v.  71 . 


Oi  l'avés  couler  en  une  autre  chanson, 

Rimée  est  de  novel  et  mise  en  quareignon.  {n.  e.|. 


VII. 

Ibid.  Page  60,  ligne  36. 

Les  deux  exemples  :  kalaaux  et  enphounil  sont  bien  contestables.  Kalaaux, 
ou  caillaux,  se  retrouve  dans  la  plupart  des  autres  dialectes  françois  avec  ce" 
même  sens  de  noix:  on  peut  l'entendre  fruit  à  écaille  ou  coque;  car  on  dit 
aussi  caller,  ecaler,  écailler  des  noix.  —  Enphounil  peut  s'entendre  pour 
enfoumil,  ustensil  à  entonner,  enfourner. 

Fauriel,  Histoire  de  la  Poésie  Provençale  I.  p.  198,  et  Ampère  après  lui 
ont  dressé  une  liste  de  plus  en  plus  longue  des  mots  provençaux  venus 
directement  du  grec,  et  de  l'ancien  usage  du  grec  dans  le  midi  de  la  France.  Ces 
listes  donneroient  assurément  lieu  aux  mêmes  réserves.  (.>.  e.) 


NOTES. 


429 


VIII. 


Pytheas,  pages  71-78. 


Un  savant,  apparemment  de  Marseille,  ou  de  quelque  autre  endroit  de  Pro- 
vence, nous  a  témoigné  trouver  mauvais  que  nous  nous  en  soïons  plus  rap- 
poi-tés  à  Polybe  et  à  Strabon  qu'à  Gassendi,  pour  sçavoir  ce  qu'il  faut  penser 
de  Pythéas.  Mais  quand  cela  seroit  aussi  vrai  qu'on  le  prétend,  nous  n'aurions 
fait  que  suivre  les  règles  de  la  bonne  critique.  Polybe  et  Strabon  avoient  en 
main  les  écrits  de  cet  illustre  Cosmographe ,  et  pouvoienl  en  juger  plus 
sainement  que  Gassendi,  qui  ne  les  avoit  pas.  Cependant,  si  l'on  veut  bien  relire 
avec  un  peu  d'attention  cet  article,  qu'on  déclare  n'avoir  fait  que  parcourir, 
on  verra  que  nous  n'avons  rien  négligé  de  ce  que  Gassendi  et  d'autres  mo- 
dernes ont  dit  pour  la  justification  de  ce  premier  Écrivain  Gaulois.  Nous 
avons  encore  fait  davantage.  Nous  y  avons  joint  les  témoignages  de  ses  plus 
anciens  partisans,  et  n'avons  pas  tellement  donné  dans  la  censure  de  Polybe 
et  de  Strabon,  que  nous  n'aïons  fait  remarquer  qu'il  y  a  trop  de  passion,  de 
chicane  et  de  fausse  subtilité.  (Dom  Rivet,  tome  II.  1733.  Avertissement, 
p.  X  et  XI.) 

—  Dans  la  première  partie  du  1"  volume,  Dom  Rivet  a  parlé  de  Pythéas, 
le  plus  ancien  écrivain  des  Gaules  que  nous  connoissions  ;  il  a  remarqué  que 
Polybe  et  Strabon  ont  maltraité  cet  auteur  sur  sa  Cosmographie.  Un  savant 
académicien  a  donné  depuis  des  éclaircissements  sur  la  vie  et  les  voyages  de 
Pythéas  qui  sont  très  curieux  et  très  intéressants.  Pythéas  y  est  vengé 
par  M.  de  Bougainville  contre  les  reproches  de  Polybe  et  de  Strabon,  qui 
semblent  avoir  pris  plaisir  à  décrier  cet  auteur  et  ses  ouvrages  ;  et  contre 
Bayle,  qui  souscrit  au  jugement  rigoureux  de  ces  deux  anciens  auteurs. 
Nous  invitons  nos  lecteurs  à  avoir  recours  à  ces  soUdes  et  judicieux  éclaircis- 
sements qui  ont  été  insérés  dans  les  Mémoires  de  l'Académie  Royale  des  In- 
scriptions et  Belles-Lettres.  T.  XIX,  p.  146  — 163.  (Doms  Poncet,  Colomb, 
Clemencetet  Clememt,  Tom.  XI.  Avertiss.,  p.  II). 

—  Depuis  le  mémoire  de  Bougainville,  lu  dans  une  assemblée  publique  de 
l'Académie  en  1746  et  publié  en  1733,  d'autres  recherches  sur  la  navigation 
de  Pythéas  à  Thulé  ont  été  communiquées  à  la  même  compagnie  par  d'Anville 
et  imprimées  dans  son  recueil  en  1774,  tome  XXXVII.  p.  436-442.  Au 
ï.  XLV,  depuis  la  p.  26,  M.  de  Keralio  fait  encore  l'apologie  de  Pythéas.  La 
nouvelle  série  des  Mémoires,  T.  1,  p.l38  et  suiv.,  présente  aussi  l'extrait  des 
travaux  de  M.  Gosselin  sur  ce  navigateur,  plus  développés  dans  la  Géogra- 
phie des  Grecs  analysée  et  dans  les  Recherches  sur  la  Géographie  systéma- 
tique des  Anciens.  En  1773,  avoit  paru  dans  les  nouveaux  Mémoires  de  U 


430  NOTES. 

Société  de  Gf.ttingen,  l.  VI.  p.  89  et  suiv.  celui  de  J.  P.  Muray,  de  Pythea 
Massiliensi.  On  peut  consulter  encore,  outre  les  ouvrages  généraux  sur  la  lit- 
térature grecque ,  sur  la  Géographie  ancienne  et  sur  Ihistoire  de  Marseille 
d'autres  dissertations  particulières  donl  Pythéas  est  le  sujet.  Pytheae  mas- 
siliensis  fragmenta,  variis  ex  auctoribus  collegil  etcommentariis  illustravit 
Andr.  Arw.  Arwesdon,  Upsal,  1824  in-4*.  Maximil.  Fuhr,  de  P^/Acamas- 
siliensi  dissertatio,  Darmstadt,  ISaSin-S";  traité  de  148  pages,  qui  commence 
par  la  longue  énuraération  de  ceux  qui  ont  parlé,  même  indirectement,  de 
Pythéas  ;  Joachim  Lelewel,  Pytliéas  de  Marseille,  ou  la  Géographie  de  son 
temps,  publiée  par  Jos.  Straszcwitz,  Paris  1836.  in -8",  etc.  — v.  l.c— (Victor 
Leclerc,  tom.  XI,  nouvelle  édition.  Paris  18il,  p.  1). 

—Le  Supplémentau  Dictionnaire  de  Moréri,  2  vol.  1735,  rédigé  presque  en 
entier  par  l'i^bé  Gouget,  après  avoir  reconnu  que  l'article  Pythéas  de  l'édi- 
tion de  1732  étoit  trop  superficiellement  écrit,  n'a  fait  que  résumer,  pour  y 
suppléer,  l'excellente  notice  de  dom  Rivet,  en  conservant  môme  la  plupart 
des  phrases  du  savant  Bénédictin.  Il  en  a  usé  à  peu  près  de  même  pour  les 
notices  suivantes.  Ce  n'est  donc  pas  à  Gouget  que  peuvent  s'adresser  les 
reproches  mérités  par  les  Dictionnaires  et  Biographies  modernes ,  qui  ont 
trop  souvent  pris  de  seconde  main  connoissance  de  notre  Histoire  littéraire. 

(«.  E.) 


IX. 


EtTfHYMÈNES,  pagcs   78-80. 

Une  autre  personne  fort  versée  dans  la  belle  Litérature,  paroit  surprife 
que  nous  ayons  placé  Pythéas  avant  Eulhijmenes.  La  raison  qu'elle  en  alli'*- 
gue,  c'est  qu'Hérodote  fuit  mention  du  système  de  celui-ci  touchant  le 
débordement  du  Nil:  d'oii  l'on  conclud  qu'il  est  vraisemblable  qu'Euthyme- 
nes  est  même  plus  ancien  qu'Hérodote.  Cela  seroit  effectivement  et  Euthy- 
menes  auroit  vécu  plus  d'un  siècle  av?nt  Pythéas,  s'il  étoit  vrai  qu'il  eût 
écrit  avant  Hérodote  et  que  celui-ci  eût  pris  de  lui  le  système  qu'il  rapporte. 
Mais  c'est  ce  qu'il  est  impossible  de  prouver  ni  par  son  texte  ni  par  aucun  • 
autre  ancien  monument.  Il  est  incontestable  qu'Hérodote  ne  nomme  Euthy- 
mcnes  nulle  part ,  et  qu'il  ne  fait,  liv.  ï,[n"  XIX,  XXII,  que  rapporter  les 
trois  différents  sentiments  qui  partageoientMes  Grecs  sur  la  cause  du  débor- 
dement du  Nil,  sans  les  attribuer  nommément  à  aucun  anteur  en  particulier. 
Il  est  seulement  vrai  que  la  première  de  ces  opinions,  qu'il  réfute  comme  les 
deux  autres,  est  la  même  qu'Euthymenes  épousa  dans  la  suite.  C'est  là  tout 
ce  qu'on  peut  tirer  à  ce  sujet  de  l'autorité  d'Hérodote.  (  D.  Rivet.  Tome  II. 
Averliss.,  p.  XI.) 


NOTES.  431 


Valéhius  Caton,  page  88.  Noie. 

La  méprise  reprochée  à  Moréri  a  été  reconnue  dans  le  Sup/)it'menf  de  1735; 
et  l'abbé  Gouget,  profitant  comme  à  son  ordinaire  de  la  notice  de  l'Histoire 
littéraire,  corrige  la  date  donnée  p.  92,  par  dom.  Rivet,  ou  plutôt  par  son 
imprimeur ,  à  l'édition  du  poërae  de  Galon,  Dirae,  Leydc  1652,  non  1632.  — 
La  nouvelle  Biographie  universelle  dans  le  résume,  d'ailleurs  bien  fait,  de  ce 
que  l'on  avoil  recueilli  sur  Valérius  Caton,  dit  «  qu'on  avoit  prétendu  qu'il 
étoit  d'origine  gauloise,  et  l'affranchi  d'un  certain  Bursenus  :  mais  que  lui- 
même  s'étoit  défendu  de  cette  dernière  assertion,  dans  un  poëme  intitulé  : 
Indignatio.  »  De  ce  qu'il  avoil  réclamé  contre  son  affranchissement,  cela  ne 
prouve  pas  qu'il  eût  en  même  temps  répudié  son  origine  gauloise.  D'ailleurs 
on  semble  faire  à  tort,  dans  cet  article,  deux  poëmes  de  VIndignatio  et  du 
Dirae.  (n.  e.) 


XI. 

Roscius,  page  95.  Note. 

Cette  autre  faute  de  Moréri  a  de  même  été  corrigée  dans  le  Supplément  de 
1735  qui  reproduit  en  l'abrégeant,  la  notice  entière  de  Dom  Rivet. 

La  notice  suivante,  sur  Divitiacus,  est  de  même  fidèlement  reproduite, 
sauf  un  membre  de  phrase  très  malheureux,  ajouté  par  Gouget  :  «  Il  se  mêloit 
de  vouloir  pénétrer  dans  les  secrets  de  l'avenir,  par  les  augures  et  par  les 
autres  sortes  de  divinations,  ce  qui  fait  de  l'honneur  à  la  justesse  de  son 
esprit.»  Je  suppose  que  l'abbé  Gouget  a  voulu  dire  :  peu  d'honneur,  (n.  e.) 


XII. 

Trogue  Pompée,  pages  1191-24. 

Depuis  que  notre  premier  volume  est  sorti  des  presses,  il  a  paru  en 
France  un  ample  catalogue  de  livres  imprimé  à  La  Haye  en  1732  sous  ce 


432 


NOTES. 


titre  :  Bibliolheca  exquisitissima  insignium  et  prœstantissimorutn  libro- 
rum  etc.  Nous  y  trouvons  quelques  éditions  de  l'abrégé  de  Trogue  Pompée 
et  de  quelques  autres  auteurs,  que  nous  avions  omises,  et  qu'un  savant  de 
nos  amis  avoit  eu  la  bonté  de  nous  indiquer,  avant  que  ce  catalogue  fût 
venu  jusqu'à  nous. 

Outre  les  trois  premières  éditions  de  Venise  in-folio  que  nous  avons  mar- 
quées, il  nous  en  présente  une  quatrième  faite  au  môme  endroit  et  en  même 
volume,  l'an  1477.  Celle  qui  suit,  aussi  in-folio,  et  qui  est  sans  date  et  nom 
de  lieu  et  d'imprimeur,  nous  paroU  la  même  que  celle  de  Sabeilicus,  dont  nous 
avons  parlé.  Il  semble  que  c'est  la  même,  qui  fut  renouvelée  à  Venise,  en  même 
volume,  l'an  1503.  Le  catalogue  que  nous  parcourons  nous  donne,  page  248, 
une  autre  édition  du  même  ouvrage,  faite  à  Milan,  chez  Christophe  Valderser 
l'an  1476  Jn-4°.  C'est  la  même  que  nous  avons  marquée  in  folio  sur  l'autorité 
de  M.  Fabricius.  Nous  y  en  trouvons  une  autre  de  Basic  in-4'',  de  l'an  1S39, 
que  nous  ne  connoissions  point  auparavant.  A  celle-ci  se  trouvent  joint  Florus 
et  Sextus  Rufus.  On  apprend  du  même  catalogue,  tome  2,  p.  91,  que  l'abré- 
gé de  Trogue  Pompée,  revu  par  Isaac  Vossius,  et  publié  d'abord  à  Leyde  en 
1640,  puis  à  Amsterdam,  comme  nous  l'avons  dit,  fut  réimprimé  en  ce  der- 
nier endroit,  chez  les  Elzévirs,  les  années  1656  et  1673  en  un  volume  in-12. 
L'édition  que  nous  en  avons  marquée  d'Utrecht  en  1708,  est  la  même  que  celle 
de  Grsevius,  qui  avoit  déjà  paru  en  1683,  ainsi  que  nous  l'avons  observé,  et  qui 
suivant  la  remarque  d'un  savant  de  nos  amis,  fut  renouvellée  à  Amsterdam 
l'an  1694  in-8°.  Nous  apprenons  de  la  même  personne  que  dès  1602  il  y  en 
eut  une  autre  à  Ursel  en  Allemagne.  Le  texte  de  celle-ci  avoit  été  revu  par 
Cujas,  du  Pin  et  autres  ;  et  on  l'a  accompagnée  des  commentaires  de  Victorius 
Strigellius. 

Aux  différentes  traductions  du  même  ouvrage  dont  nous  avons  déjà  parlé, 
il  en  faut  joindre  une  autre  faite  en  Allemagne  et  imprimée  à  Ausbourg  l'an 
1531  in  folio.  La  première  édition  de  la  traduction  françoisc  du  sieur  Colomby 
dont  nous  avons  parlé  fut  faite  à  Tours,  8"  en  1616.  (Dom  Rivet,  tome  II. 
Avertissement,  p.  XI  et  XII.) 

—  A  ce  que  nous  avons  dit  des  traductions  de  l'abrégé  de  Trogue  Pompés, 
tant  à  la  page  124  de  la  première  partie  de  notre  premier  volume  qu'à  la 
page  12  de  l'averUssement  à  la  tête  du  second,  il  faut  ajouter  que  la  traduc- 
tion qu'en  avoit  faite  Claude  de  Seyssel  fut  réimprimée  in-12  à  Paris,  chez 
Claude  Micard,  l'an  1577. 

Jour» .  de,  sçavan,  Dom  Favicr,  ci-devant  Augustin  Déchaussé,  aujourd'hui  reUgieux  Benedic- 
1737.  p-  s^,ns.  ^jq^  prédicateur  du  Roi,  et  prieur  de  Sainte-Vaubourg,  vient  d'en  publier  une 
p.  sW^-'obter-  nouvelle,  enrichie  de  deux  cartes  géographiques  des  pa'is  dont  parle  l'auteur, 
écriiTmôri  7*  et  d'un  petit  dictionnaire  de  ces  mêmes  pais,  suivant  l'ancienne  et  la  moderne 
""iîr"'  '  '  '  géographie.  Les  critiques  sont  partagés  sur  le  mérite  de  cette  traduction. 
L'ouvrage  est  imprimé  à  Paris  cliez  G.  le  Mercier,  cette  année  1737,  en 
deux  volumes  in-12.  (d.  Rivet.,  tom.  IV,  1738.  AverUssement,  p.  XXXVII.) 


Du  Vent,  Bibl. 
193,  i96. 


NOTES.  433 

—  Sans  essayer  de  remplir  les  lacunes  peu  importantes  que  peut  présenter 
la  longue  liste  des  éditions  de  Justin,  antérieures  à  la  publication  de  notre 
premier  volume,  nous  nous  contenterons  de  signaler  les  plus  importantes  de 
celles  qui  ont  parues  depuis  ce  temps-là. 

D'abord  celle  de  1760,  in-S»  «curante  Abrah.  Gronovio.»  Lugd.  Batav. 
destinée  à  la  collection  EIzévirienne  Variorum. 

—  Celle  de  Barbon,  1770,  in-12,  donnée  avec  les  soins  de  Capperonnier. 

—  Historiœ,  textum  graîvianum,  passim  refinxit,  arguraentis  et  tabula 
chronolog.  prœmissis,  notis  crit.  et  histor.  subjectis,  indicibusque  illustravit 
J.  Ch.  F.  Wetzel.  Lignitiœ,  Siegert,  1806,  in-8". 

Eœdem,  cura  noiis  et  interpretatione  ad  usum  Delphini,  notis  variorum 
variis  lect.  et  indice  locupletissimo,  accuratè  recensita.  London,  Valpy. 
1822.  2  vol.  in-S"  (n"'  43  et  44,  de  la  Collection  des  ad  usum  dédiés  au  Régent 
d'Angleterre.) 

—  Esdem,  texlum  Wetzelianum ,  tabulas  chronologicas,  argumenta, 
prologos ,  notas ,  indices  rerum  et  verborum ,  novis  additamentis  illustravit 
N.  E.  Lemaire.  Parisiis,  Lomaire,  1823,  8°. 

—  Eœdem,  secundum  vetustissimos  codiccs  prius  neglectos,  recognovit. 
brevi  adnotalione  critica  et  historica  instruxit  Fr.  Deubner.  Accessit  index 
rerum  locupletissimus.  Linsiœ,  Deubner,  1831,  8".  (Dans  cette  édition 
importante,  le  texte  est  revu  sur  quatre  manuscrits  de  Prague,  Gotha  e( 
Cracovie.  ) 

—  Les  Historiée  de  Justin  ont  été  traduites  deux  fois  pour  le  moins  en 
grec.  La  première  fois  en  1686,  in-4»;  Venise.  —  La  secondé  fois  en  1817, 
in  graeco  vulgari,  a  Demetrio  Philippide.  Lipsiœ  ;  Tauchovitz,  in-8». 

Aux  trois  traductions  italiennes,  publiées  à  Venise  en  1326,  in-12,  en 
1560  et  1590,  in-4'',  il  faut  joindre  encore  celle  qui  fut  faite  »  a  l'espesse  di 
JohannedeColonnaetJohanneGherétzen,»  1477,  petit  in-folio.  Elle  est  accom- 
pagnée d'une  épitre  d'Hieronymo  Squrzafico,  l'auteur  présumé  de  cette 
traduction. 

Enfin,  parmi  les  traductions  françoises  il  faut  encore  distinguer  celle  de  l'abbé 
Paul,  avec  des  notes  critiques  et  historiques.  Paris,  Barbou,  1774,  2  vol. 
in-12,  et  celle  de  Jules  Pierrot  et  Boitard.  Paris,  Panckoucke,  1829,  2  voL 
in-8'.  (N.  E.) 


XUI. 

ViBius  Gallds,  page  146. 

Il  devint  fou  par  sentiment ,  au  lieu  que  les  autres  le  deviennent  par 
queliiue  accident  fâcheux.  Il  semble  que  Seneque  ait  voulu  dire  que  Vibius 

3*  Kkk 


434  NOTES. 

ne  dut  accuser  de  sa  folie  que  lui-même  et  non  quelqu'accident  fortuit  sans 
lequel  il  eût  conservé  sa  raison.  «  Hinc  accidisse  uni  scio,  ut  in  insaniam  non 
casu  incideret,  sed  judicio  perveniret.  »  —  Vibius  Gallus  n'a  pas  d'article 
dans  nos  Biographies  universelles.  (N.  E.) 


XIV. 

Castor,  page  181. 

La  Nouvelle  Biographie  universelle,  1854,  donne  au  grammairien  Castor 
le  surnom  de  Rhodien,  et  ajoute  qu'il  «  cloit  sans  doute  de  Rhodes,  de  Mar- 
seille ou  de  la  Galatie.  »  Il  Êiut  convenir  que  voilà  un  sans  doute  bien 
douteux.  (N.  E.) 


XV. 

Germanicus,  pages  152-158. 

jouru.  det  Siav.  A  la  fin  dc  l'article  Germanicus,  il  faut  ajouter  ce  qui  suit  :  En  1715,  on  a 
im,  page  «i,  imprimé  à  Cobourg  en  Franconie,  chez  Maurice  Ha«en,  les  œuvres  poétiques 
tant  grecques  que  latines  dc  Germanicus,  in-S";  et  l'on  y  a  joint  quelques 
vers  de  Jules  César,  d'Auguste  et  de  Néron,  avec  les  Notes  entières  de 
Grotius,  dc  Morel,  de  TurnclMî,  de  Joseph  Scaligcr,  de  Saumaisc,  etc.  On  est 
redevable  de  cette  édition  à  M.  Schwarts,  qui  y  a  ajouté  dc  nouvelles  notes  dc 
sa  façon.  Il  n'a  mis  dans  son  recueil  que  deux  épigrammes  latines  sous  le 
nom  de  Germanicus;  quoiqu'il  paroisse,  comme  nous  l'avons  observé,  que 
les  cinq  suivantes  sans  nom  d'auteur  dans  les  autres  recueils  dont  nous  avons 
parlé ,  appartienent  au  môme  Poêle.  Les  deux  latines  sont  suivies  de  trois 
autres  grecques.  (D.  Rivet,  tom.  II.  Avcrtiss.,  p.  xn  et  xm.) 

—  La  traduction  d'Aratus  par  Germanicus  a  été  insérée,  depuis,  dans 
l'édition  grecque  et  latine  des  Phœnomena  et  diosemeia,  donnée  par  Joan.- 
Theoph.  Buhle,  Lipsiœ,  1793-1801 ,  2  vol.  in-8».  —  En  1838,  parut  à 
Londres  une  nouvelle  édition  des  œuvres  attribuées  à  Germanicus,  sous  ce 
titre  :  Germanici  Cœsaris,  inchjti  ducis,  poetœ  elegantis  quœ  extant  omnes, 
ex  recensione  et  cum  notis  Jo.  Gasp.  Orellii;  additis  prœterea  notis  omnibus 
Gasp.  Barthii,  Jani  Brœkhusii,  P.  Biirmanni  secundi,  Hug.  Grotii, 
H.  Meyeri,  Guill.  Morelli,  Cl.  Salmasii,  Jos.  Scaligeri,  J.-C.  Schtvarzii, 
H.  Turnebi,  Jani  Ultitii,  et  aliorum  :  quibus  etiam  scholia  vetera  auctoris 


NOTES.  435 

incerti,  ex  editione  Buhliana,  adjunxit  Jo.  Allen  Gilis.  8°.  Cette  édition, 
dit  M.  Brunet,  n'a  été  tirée  qu'à  cent  exemplaires. 

A  la  page  156  lig.  37,  il  eût  été  plus  exact,  à  notre  avis,  de  dire  «  mais 
«  les  manuscrits  de  la  traduction  de  Germanicus  ont  l'avantage  d'être  en- 
«  richis  d'anciennes  scholies,  qui  tiennent  lieu  de  commentaire.  »  Autrement 
on  seroit  tenté  de  penser  que  les  scholies  sont  encore  l'œuvre  de  Germani- 
cus, et  non  celle  d'un  ancien  rhéteur  anonyme.  La  collection  Lemaire  a 
inséré  les  traductions  d'Aratus,  accompagnées  des  anciennes  et  des  modernes 
scholies  dans  le  VI'  volume  des  Poetœ  minores;  Paris,  1826;  tome  83*  de  la 
Collection. 

La  Bibliothèque  Impériale  de  Paris  possède  un  précieux  manuscrit  de  la 
traduction  d'Aratus  qui  nous  semble  remonter  au  ix'  siècle.  Il  provient  du 
cabinet  de  Pierre  Pithou,  et  porte  aujourd'hui  le  n"  7886.  Le  texte  est 
accompagné  d'un  simple  commentaire,  sans  doute  celui  qu'a  signalé  dom  Ri- 
vet. On  doit  remarquer  le  titre  du  poëme  :  Claudii  Cœsaris  Arati  phœno- 
mena.  Et  dans  tous  les  cas,  il  ne  paroît  pas  avoir  été  consulté  par  les  divers 
éditeurs  du  poëme.  Ainsi  le  vers  70  des  éditions  : 

Clara  ariadneos  qua  sacrata  est  igné  corona, 

est  ici  précédé  d'un  vers  inédit  : 

Tarn  fessi  super  costas  atqne  ardna  terga, 
Clara  ariadneos  sacrata  est  igné  corona  ; 
Uonc  illi,  etc.      (N.  E.) 


XVI. 

Claude,  page  174,  ligne  24. 

Le  premier  auteur  du  récit  mensonger  de  la  découverte  du  manuscrit  ori- 
ginal de  Dictys,  dans  le  tombeau  de  ce  Dictys,  rapporte  la  découverte  à  la 
treizième  année  du  règne  de  Néron.  On  ne  devoit  donc  pas  blâmer  ou  louer 
Claude  d'avoir  multiplié  les  exemplaires  de  ce  curieux  apocryphe.  (N.  E.) 

XVII. 

DoMiTius  Afer,  page  184.  Note. 

n  étoit  facile  à  l'abbé  Gouget,  dans  le  Supplément  du  Moreri  de  1732,  de 
redresser  la  méprise  signalée  par  dom  Rivet,  et  à  la  Nouvelle  Biographit 

3  4  * 


43fi  N  0  T  E  S. 

Iniverselle,  d'emprunter  h  nolro  ;iiileiir  la  date  d<>  la  mort  d'\fer.  Ils  ne 
l'ont  fait  ni  l'un  ni  l'aulrp.  (N.  E.  t 


XVIII. 

l»KTBO?iE,  pages  186-2(»S. 


Diverses  personnes  de  piété  et  de  sçavoir  nous  ont  fait  quelques  reproches, 
pour  avoir  pirlé  trop  fivorablemeiii  de  Pélrone  et  de  ses  écrits.  Il  nous 
semble  némmoins  que  pour  sa  personne,  nous  ne  l'avons  représenté  que 
comme  un  véritable  épicurien  :  ce  que  nous  avons  montré  pouvoir  se  confir- 
mer par  l'éloge  qu'il  fait  d'Éjjicure,  en  le  qualifiant  le  père  de  la  vérité.  A. 
l'égard  de  ses  écrits,  nous  avons  cru  devoir  tenir  un  juste  milieu,  en  y  louant 
ce  qu'il  peut  y  avoir  de  l)on,  et  y  blâmant  ce  qu'il  y  a  de  mauvais.  MArs, 
ASSunÉMF.NT,  avous-nous  ajouté  aussitôt,  le  dernier  l'emportera  toujours 
SUR  l'autre.  C'est  sur  ce  même  principe  que  nous  disons  ensuite  que  la  lec- 
TUHE  DE  Pétrone  sera  toujours  dangereuse.  D'ailleurs,  quelque  éloge  que 
nous  fassions  de  sa  manière  d'écrire,  surtout  en  vers,  nous  n'avons  point 
dissimule  qu'il  sort  quelquefois  du  naturel.  Qu'on  se  donne  la  peine  de  lire  la 
politc  crili(jue  que  nous  faisons  à  ce  sujet,  aux  pages  194  et  193. 

Nous  avons  marqué  une  édition  de  Pétrone  l'aiie  à  Paris,  en  1693;  mais  on 
Mdus  donne  avis  que,  la  même  année,  il  en  parut  une  autre  à  Rotterdam,  en 
rnAnii'  volume,  qui  est  un  in-14.  Oi  nous  avertit  aussi  que  le  poème  de  Pétrone 
sur  la  guerre  civile  avec  le  supplément  de  Thomas  Miïus,  se  trouve  joint  à 
l.uciin,  de  l'édition  d'Amsterdam  chez  les  EIzevirs,  do  l'année  1638,  8°.  Nous 
avons  encore  oublié  de  dire  qu'il  a  paru  à  Paris,  chez  Ganneau,  depuis  peu 
d'années,  une  belle  traduction  du  foslin  de  ïi'imalcion,  par  M.  de  Lavau. 

L'n  sçavant  de  kiHaye,  dont  la  modestie  nous  dérobe  le  nom,  a  bien  voulu 
interrompre  ses  travau.\  literaires  pour  nous  dcmner  avis  qu'il  a  vu  une  édition 
de  la  .«satyre  dePéIrone,  en  assez  beau  caractère,  de  l'an  1470,  en  un  vol.  petit 
in-i",  oii  l'on  a  réuni  les  anciens  pancgyri(|ues  avec,  la  vie  d'Agricola  par 
Tacite.  Celle  édition  ne  porte  aucun  lieu  ni  nom  d'imprimeur.  (D.  Rivet; 
tome  II,  1735.  Avertiss.,  p.  xtii,  .\iv.) 

Journ.  des  Sçar.  —  Kn  1736,  trois  ans  après  que  notre  premier  volume  oii  nous  parlons  de 
1736,  p.  563.  pétponc  et  de  sa  fameuse  satyre  éloit  entre  les  mains  du  pul)lic,  a  paru  à 
Londres,  chez  J.  Osborn,  les  œuvres  de  cet  écrivain  en  prose  et  en  vers,  tra- 
duites du  latin  en  anglols  par  le  célèbre  M.  Addisson.  L'élilion  est  en  un  volume 
iii-12,  dans  lequel  on  a  joint  la  vie  de  l'auteur  et  le  caractère  de  ses  écrit.s, 
p.irM.  de  Sainl-Evrcmont.  (D.  Rivet,  t.  IV,  1738.  Avertiss.,  p.  xxwii.) 

—  X  la  suite  de  la  traduction  du  poëme  de  Pétrone  sur  la  Guerre  civile. 


NOTES.  437 

par  l'abbé  de  Marolles,  il  faut  en  ajouter  une  nouvelle,  faite  par  le  président 
Bouhier,  imprimée  en  Hollande,  in-4",  l'an  1737.  Elle  a  été  remise  sous 
presse  l'année  suivante,  et  publiée  à  Paris,  in-12,  sous  ce  titre  :  Recueil  de 
traductions  françaises,  contenant  le  Poëme  de  Pétrone,  etc.,  par  le  Prési- 
dent Bouhier.  (DD.  Po?(cet.  Colomb,  Ci-emencet  et  Clément.  Tome  XI,  1759. 
Avertissement,  p.  11.  ) 

—  Au  grand  nombre  d'éditions  de  la  s.ityrc  de  Pétrone  que  nous  avons 
détaillées,  il  faut  ajouter  celle  qui  sortit,  en  1396,  des  presses  de  Plantin,  et 
parut  à  Anvers,  chez  François  Raphelinjç,  dans  le  format  iji-16,  avec  les  notes 
de  différens  critiques.  Le  catalogue  imprimé  de  la  Biblioth^que  du  Roi  nous 
a  fait  aussi  connoitre  trois  traductions  de  cet  ouvrage  différentes  de  celles 
que  nous  avons  déjà  rapportées  tant  à  l'article  Pétrone  que  dans  l'aver- 
tissement du  XI'  volume.  La  première,  qui  est  en  vers,  par  M.  L.  D.  B., 
fut  mise  au  jour,  à  Paris,  chez  Claude  Barbin,  l'an  1637.  La  seconde  en 
prose,  ouvrage  de  M.  de  Lavaur,  fut  publiée  dans  la  môme  ville  l'an  1726,  chez 
Ganneau.  La  troisième  pareillement  en  prose,  attribuée  à  M.  de  Boispréaux, 
maître  des  requêtes,  pseudonyme  de  Dujardin,  fut  imprimée  en  deux  vo- 
lumes à  La  Haye,  l'an  1741,  avec  de  savantes  notes  critiques.  Ces  trois  tra- 
ductions sont  dans  le  format  in-12.  (Dom  Fr.  Clément.  Tome  XII.  1763. 
Avertiss.,  p.  vi.) 

—  A  la  suite  de  la  réimpression  du  XII"  volume,  faite  en  1830  par  les 
soins  de  la  Commission  de  l'Institut  chargée  de  la  continuation  de  l'Histoire 
littéraire,  on  trouve  la  liste  pour  ainsi  dire  innombrable  de  toutes  les  éditions 
de  Pétrone  postérieures  à  l'année  1763,  date  de  ce  douzième  volume.  Les 
principales  ont  été  :  celles  de  Leipsig,  1781;  d'Alteuibourg,  1782;  de  Berlin, 
1785:  des  Deux-Ponts,  1790,  toutes  ïa-S";  celle  de  Renouard,  Paris,  1797, 
2  vol.  in-18. 

De  Guérie,  en  1798,  en  avoit  donné  une  traduction  en  vers  françois,  in-8*; 
elle  fut  réimprimée  en  1814  et  1816.  Durand  en  lit  une  nouvelle  en  prose  en 
1803,  2  vol.  in-8".  La  Porte  du  Theil  en  avoit  fait  une  autre,  accompagnée  de 
notes  savantes  ;  mais  il  en  détruisit  tous  les  exemplaires  qui  alloient  paroitre 
en  1800.  Cette  dernière  année,  fut  publié  à  Baie  un  prétendu  Fragmentum 
Pi'tronii,  avec  une  traduction  françoise  de  Lallemand.  L'auteur  de  cet  opuscule 
qui  prétendoit  l'avoir  trouvé  à  Saint-Gall  se  nommoit  .Marchena. 

Les  éditeurs  de  l'Académie  ont  également  complété  la  liste  des  éditions 
plus  anciennes,  donnée  par  Dom  Rivet  et  ses  successeurs;  mais  ils  ont  eu  tort 
d.'  compter  parmi  celles  qui  avoient  échappé  à  la  recherche  des  Bénédictins  l'édi- 
tion princeps  de  1476,  mentionnée  dans  l'avertissement  du  second  volume;  le 
volume  publié  par  le  président  Bouhier,  en  1730  et  il.il,  signalé  dans  le 
l'avertissement  du  XI"  volume;  et  li  traduction  en  vers  d'Addisson,  indiquée 
dans  l'avertissement  du  tome  IV.  Comment  éviter  toutes  les  méprises,  quand 
des  savans  scrupuleux,  tel  que  Daunou,  viennent  ainsi  relever,  dans  l'ouvrage 
même  qu'ils  réimpriment  et  continuent,  des  omissions  que  l'on  n'y  doit  pas 
regreter  ! 


438  NOTES. 

Enfin  M.  Victor  Leclerc,  dans  les  notes  ajoutées  en  18il  à  la  réimpression 
de  notre  tome  XI,  complète  ainsi  la  notice  de  Pétrone  : 

«  Ni  les  confrères  de  D.  Rivet  ni  leurs  continuateurs  n'ont  dit  à  quel 
«  ouvrage  il  fait  allusion,  tome  I",  p.  202,  en  s'exprimant  ainsi  :  Un  d'entre 
«  eux  entreprit  de  montrer  la  supposition  du  fragment  de  Belgrade,  et 
«  l'exécuta  par  un  assez  long  écrit  sous  le  titre  d'Observations.  »  Voici  le 
«  titre  de  cet  écrit  :  <t  Observations  sur  le  Pétrone  trouvé  à  Belgrade,  en  4688, 
«  et  imprimé  à  Paris,  chez  la  veuve  Daniel  Hortmels,  1694,  in-12  de 
«  244  pages.  L'auteur  est  Claude-Ignace  Brugier,  sieur  de  Barante,  qui  s'est 
«  fait  appeler,  dans  le  Privilège  du  Roi,  Georges  Pellissier... 

«  L'édition  de  Pétrone,  commencée  par  La  Porte  du  Theil,  n'a  pas  été  en- 

€  tièreraent  détruite  :  les  restes  qui  s'en  conservent  dans  la  Bibliothèque  de 

«  l'Institut  comprennent  le  texte  latin  et  des  observations  en  français  sur 

«  l'Introduction,  qui  s'arrôtent  à  la  page  320.  Quelques  détails  sur  ces  frag- 

«  ments  du  tome  II  de  l'ouvrage,  imprimé  à  Paris,  chez  Baudouin,  de  4796  à 

«  4800,  se  trouvent  dans  les  Nouvelles  Recherches  bibliographiques  de 

«  M  Brunet;  Paris,  4834.  T.  III,  p.  47.  » 

Ajoutons  que  l'abbé  Gouget,  dans  le  Supplément  du  Moréri  de  4735,  a 
complété  l'article  Pétrone  par  la  reproduction  littérale  de  ce  que  lui  fournissoit 
la  notice  de  nos  Bénédictins.  Il  en  convient,  tout  en  remarquant  que  «  ces  ha- 
»  biles  écrivains  disent  que  M.  Nodot  envoya  sa  copie  du  manuscrit  de  Bel- 
»  grade  à  M.  Charpentier  ;  mais  que  M.  Nodot  dit,  au  contraire,  qu'il  n'en 
»  envoya  qu'une  partie  à  cet  académicien.  Ils  disent  encore,  ajoute-t-il,  que 
»  la  traduction  de  M.  Nodot  a  été  imprimée  en  4694  en  2  vol.  in-42  sous  le 
»  titre  de  Cologne.  Ces  savans  religieux  ont  ignoré  sans  doute  l'édition  in-8' 
»  faite  à  Paris,  4694,  chez  Moëtte,  avec  des  figures.  Nous  ne  connoissons 
»  pas  l'édition  donnée  sous  le  titre  de  Cologne.  »  Tant  pis  pour  Gouget,  s'il 
ne  la  connuissoit  pas.  Il  eût  mieux  fait  de  dire  qu'en  signalant  l'édition  an- 
noncée comme  étant  de  Cologne,  D.  Rivet  avoit  fait  observer  qu'elle  étoit 
plutôt  de  Paris,  ou  de  quelque  autre  ville  de  France,  comme  il  étoit  aisé  d'en 
juger  et  par  le  papier  et  par  le  caractère.  Il  y  a  toute  apparence  qu'il  y  eut 
de  cette  édition  trois  tirages  pour  le  moins,  l'un  avec  le  nom  du  libraire 
Pierre  Groth,  l'autre  avec  celui  de  Pierre  Marteau,  que  j'ai  sous  les  yeux;  le 
troisième,  enfin,  auroit  été  tiré  à  Paris  en  grand  papier  pour  Moëtte;  c'est 
la  seule  édition  dont  l'abbé  Gouget  eût  connoissance. 

Remarquons  enfin  que  c'étoit  une  opinion  tout  à  fait  gratuite  que  celle  des 
savants  allégués  par  D.  Rivet,  et  qui  auroient  parlé  d'une  médaille  du  règne 
de  Néron,  portant  le  nom  de  Trimalchio.  Jamais  les  antiquaires  n'en  ont 
entendu  parler.  (N.  E.) 


NOTES,  439 

XIX. 

Margus  âper,  pages  218-223. 

On  ne  sçauroil  dire  comment  il  s'est  fait  que  la  traduction  du  Dialogue  des 
Orateurs,  par  M.  Giry,  se  trouve  marquée  de  1626  '  au  lieu  de  1630,  qui  est  gut.    de  rAcad. 
la  véritable  année  oii  elle  fut  imprimée.  Quatre-vingts  ans  après  celle-ci,  en     ^4^^'—'jlurn. 
1710,  il  en  parut  une  autre  sous  le  nom  de  M.  de  Maucroix  ,  chanoine  de      de$' Sçav.  ^^i3, 
l'Eglise  de  Rheims,  et  avec  l'approbation  de  M.  Despreaux.  Mais  des  personnes     ^'  *'**• 
instruites  assurent  qu'elle  est  l'ouvrage  de  M.  l'abbé  d'Olivet.  Cela  n'a  pas 
empêché  qu'au  bout  de  douze  ans,  M.  Morabin  n'ait  pubUé  une  troisième  tra- 
duction du  môme  dialogue.  Elle  a  paru  à  Paris,  chez  François  Foumier,  l'an 
1722,  en  un  vol.  in-12. 

'  Le  traducteur  y  a  joint  le  texte  latin  à  côté  du  françois,  après  y  avoir  fait  p.  i^*• 
passer  les  leçons  que  les  plus  habiles  critiques  ont  substituées  à  des  mots 
barbares  et  estropiés  qu'on  yUsoit  dans  les  éditions  précédentes.  Entreprise 
au  reste  qui  doit  parollre  un  peu  hardie,  puisqu'on  ne  dit  point  qu'elle  soit 
appuiée  de  quelque  bon  manuscrit!'  A  la  tête  se  ht  une  assez  longue  préface,  p.  171. 
où  M.  Morabin  tache  de  découvrir  quel  est  l'auteur  de  ce  dialogue.  Après  avoir 
parcouru  et  refuté  les  différentes  opinions  sur  ce  sujet,  il  en  propose  une  nou- 
velle '  qu'il  s'efforce  de  prouver  par  plusieurs  raisons,  qui  tendent  à  donner  p-  i7i.  173. 
l'ouvrage  à  Materne,  un  des  interlocuteurs.  Mais  nous  osons  dire  avec  tout  le 
respect  que  nous  devons  à  cet  habile  Écrivain,  que  celles  que  nous  avons  éta- 
bhes  en  faveur  de  Marcus  Aper,  qui  y  fait  un  des  principaux  personnages, 
mérite  la  préférence,  comme  étant  et  plus  fortes  et  plus  naturelles.  Au  reste, 
nous  n'aviuns  nulle  connoissance  de  l'opinion  de  ce  savant ,  lorsque  nous 
avons  proposé  la  nôtre  ;  et  il  est  glorieux  pour  nous  de  nous  trouver  penser 
comme  lui  sur  l'attribution  de  ce  Dialogue,  qui  certainement  est  l'ouvrage 
d'un  des  Orateurs  qui  y  parlent,  plutôt  que  ni  de  Suétone,  ni  de  Tacite ,  ni  de 
Quintilien,  auxquels  on  l'a  donné  indifféremment,  (dom  rivet,  t.  II,  1735. 
Avertiss.,  p.  xiv,  xv.) 

—  Jusqu'à  présent,  la  traduction  du  Dialogue  des  Orateurs,  publiée  parmi  les 
œuvres  posthumes  de  Maucroix,  ne  lui  étoit  pas  contestée;  cependant  l'opinion 
de  dom  Rivet,  qui  pouvoit  fort  bien  tenir  la  reserve  qu'il  exprime  de  l'abbé 
d'Olivet  lui-même,  mérite  une  grande  considération.  Il  est  vrai  qu'il  eût 
fallu  que  ce  fût  un  ouvrage  de  la  première  jeunesse  de  d'Olivet,  d'ailleurs  assez 
peu  scmpuleux  quand  il  s'agissoit  de  prétendre  une  part  dans  les  œuvres 
d'autrui.  L'approbation  donnée  à  cette  traduction  par  Despreaux,  qui  étoit  en 
relations  suivies  avec  Maucroix  et  non  pas  avec  l'abbé  d'Olivet ,  est  encore  un 
préjugé  favorable  au  chanoine  de  Reiras. 

M.  Brunet  cite  encore  parmi  les  éditions  de  ce  Dialogue  celle  de  d'Ericus 


440  NOTES. 

Benzelius,  cu7n  notis  intenris  Schelii,  Pithœi,  LipsiL  etc,  selectis  veto  Mu- 
reti,  Pichenœ  et  Acidalii,  llpsal,  1706,  8",  et  celle  de  J.  H.  Schullzc, 
Lips.  1788,  8°.  Enfin  les  traductions  françoises  de  Bourdon  de  Sijtrais,  Paris! 
17<S2,  in-l'a.de  Dureaudc  La  Malle,  dans  la  2"  édition  de  sa  traduction'dc  Ta- 
cite, Paris,  1803,  in-8%  et  de  Ch.  Dallier,  Reims  et  Paris,  1809,  in-8'.  La 
Nouvelle  Biographie  place  Marcus  Aper  un  siècle  avant  l'ère  vulgaire  ;  c'est 
une  évidente  méprise.  (N.  E.) 


u.i  .1.  XX. 

Amo.ml's  Primls,  page  217  *,  ligne  3. 

Il  lui  envoya  en  une  occasion  une  robe  de  grand  prix. 

Cette  occasion  avoil  été  préparée  par  3Iar(ial,  dans  l'Epigramme  11  du 
6*  livre,  qui  fait  plus  d  honneur  ù  son  esprit  qu'à  son  caractère. Si  lu  veuxque 
je  t'aime,  lui  dit-il,  partage  avec  moi  ion  opulence.  Je  te  chérirai  en  propor- 
tion de  tes  dons. 


<}uo(l  non  sil  P)  ladeit  hoc  tempore,  non  sit  Uresl«s, 

Miraris  !  Pylodes,  Marce,  bibebat  idem. 
Née  melior  panis,  lurdusve  dabatur  Oresii: 

Sed  pir,  aiquc  eadem  ccnna  duoiius  erat. 
Tu  lucrina  vora.<  ;  me  pa.scil  aqiiosa  pelons  ; 

Non  minus  ingenua  est  uiibi,  Narce,  gala. 
Tu  cadmoa  Tyros,  me  pinguis  Gallia  vestit  ; 

Vis  le  purpureum,  Marce,  sagalus  amem? 
Ut  prestem  Pyladem,  ali  luis  mihi  prxstet  Oresteni  : 

Hoc  non  fit  verbij;  Marce  ul  umeris  ama.       (24.  E.) 


XXI. 

Agricola,  page  221  '.  Noie. 


Labbé  Gouget  n'a  pas  corrigé  en  1733  celle  méprise  du  Moreri  de  1732.  Le.^ 
deux  Biographies  universelles ,  Michaut  et  Didot,  accusent  Domitien  d'avoir 


NOTES.  441 

fait  mourir  Agricola.  On  ne  voit  rien  de  pareil  dans  Tacite,  auquel  nous  devons 
tout  ce  que  l'on  sait  d'Âgricola,  son  beau-père.  (n.  e). 


XXII. 

Etat  des  Lettbes,  n'  siècle,  page  224,  ligne  IS. 

De  sorte,  dit  k  célèbre  S.  Sulpice,  que  ce  ne  fut  qu'un  peu  lard  que  le 
Christianisme  s'établit  en  deçà  des  Alpes  ;  et  l'on  ne  commença  à  y  voir 
des  martyrs  que  sous  Marc-Aurèle. 

C'est  là  comme  on  sait  la  thèse  ardemment  soutenue  par  les  Bénédictins 
et  par  Launoy.  Les  travaux  de  la  critique  moderne  tendent  aujoui"d'hui  à  dé- 
montrer d'une  façon  plus  satisfaisante,  que  le  Christianisme  fut  apporté  dans 
les  Gaules  plus  d'un  siècle  avant  Marc-Aurele,  à  une  époque  assez  rapprochée 
de  l'apostolat  de  Saint  Pierre.  Nous  n'avons  pas  l'intention  do  traiter  ici  cette 
grave  et  intéressante  question  ;  il  doit  nous  suffire  de  renvoyer  au  très  re- 
marquable travail  de  M.  l'abbé  Darras,  Saint  Denis  l'Areopagite,  Etudes  sur 
les  origines  chrétiennes  des  Gaules.  Paris,  L.  Vives,  1863,  in-S».  D'ailleurs 
le  passage  cité  de  Sulpice  Severe  n'estpas  aussi  décisif  que  le  pensoitDom  Ri- 
vet. Le  voici  :  Sub  Aurelio  deinde  Antonii  filio,  persccutio  quarta  agitata. 
Ac  tum  primum,  intra  Gallias,  martyria  visa,  serius  trans  Alpes,  Dei  reli- 
gione  suscepta.  » 

Sulpice  avoit  dit  dans  la  phrase  précédente  que  la  paix  de  l'Eglise 
n'avoit  pas  été  troublée  sous  Antonin  le  pieux,  prédécesseur  de  Maro-Aurele. 
Les  premiers  martyrs  dans  les  Gaules  ont  donc  pu  fort  bien  ne  pas  être  les 
premiers  ajJÔ^jÉ's  des  Gaules.  J'irai  même  au  delà  de  MM.  Darras,  d'Arbelot  et 
de  Bausset-Roquefort,  en  proposant  de  rapporter  le  Serius  de  Sulpice  aux  per- 
sécutions qui  auroient  frappé  assez  tard  sur  la  (iaule,  déjà  convertie  au  Chris- 
tianisme. C'est  ainsi,  je  le  pense,  que  l'eût  entendu  dom  Rivet  lui-même  s'il  n'eût 
pas  écouté  dans  la  discussion  des  faits  de  cet  ordre  une  passion  regretable. 
Chose  singulière  !  le  savant  bénédictin  veut  (p.  138)  que  l'édit  de  Domitien 
rendu  en  94  contre  les  philosophes  ait  fait  refluer  aussitôt  dans  les  Gaules  les 
études  philosophiques,  et  il  n'admet  pas  que  les  nombreuses  persécutions  faites 
contre  les  Chrétiens  durant  les  deux  premiers  siècles  aient  fait  refluer  dans 
les  Gaules  les  Chrétiens  chassés  de  Rome,  et  les  prédications  evangeliques. 
Bien  qu'ici  l'opinion  particulière  du  nouvel  éditeur  n'ait  aucune  autorité,  il  se 
croit  obligé  d'avouer  qu'il  a  longtemps  professé  les  mêmes  sentiments  que 
Sirmond,  Tillemont  et  dom  Rivet  sur  les  origines  asiatiques  du  Christianisme  ; 
mais  les  nouveaux  arguments  présentés  par  les  soutiens  de  l'opinion  contraire 
l'ont  complètement  ramené  à  la  conviction  que  Rome  oii  le  Christianisme  fai- 
soit  chaque  jour  de  nouveaux  progrès  depuis  le  règne  de  Néron,  Rome  qui 
avoit  déjà  fait  aux  partisans  de  la  foi  nouvelle  quatre  grandes  persécutions  suc- 

L  1  1 


442  NOTES. 

cessives,  Rome  éloit  dans  un  rapport  trop  immédiat,  trop  continuel  avec  les 
Gaules,  pour  que  les  prêtres  et  les  confesseurs  chrétiens,  obligés  de  lutter 
dans  le  cirque  contre  les  lions  et  les  tigres,  ou  de  se  réfugier  dans  les  cata- 
combes, n'eussent  pas  fréquemment  passé  dans  les  Gaules,  pépinière  constante 
de  rhéteurs,  de  philosophes  et  de  grammairiens,  qui  ne  cessoient  d'aller  et 
venir  de  Roftie  à  Lyon,  Arles,  Marseille,  Toulouse,  Nismes  et  Narbonne. 
Non,  cela  nous  semble  aujourd'hui  moralement  impossible  :  car  nos  grandes 
cités  gauloises  vivoient  de  la  vie,  des  sentiments,  des  mœurs  de  la  Rome  impé- 
riale ;  et  supposer  que  le  Christianisme  qui  avoit  déjà  envahi  les  Gcrmanies 
et  l'Espagne  n'eût  pas  alors  assez  de  retentissement  pour  que  le  bruit  en  arrivât 
dans  les  Gaules,  c'est  aller  contre  le  sentiment  de  Senèque,  de  Pline  et  de  Ta- 
cite ;  c'est  fermer  les  yeux  à  la  lumière  de  l'histoire,  (w.  e. 


XXIII. 


Paulin,  page  24S,  ligne  24. 

Il  était  de  Frejus,  dans  la  Gaule  narbonnoise. 

Cela  est  incontestable;  Sacy,  le  traducteur  des  lettres  de  Pline  le  jeune, 
s'est  donc  mépris  quand  il  a  traduit  le  nom  de  cette  ville  par  celui  de  Frioul. 
C'est  dans  la  lettre  19*  du  ¥•  livre,  quand  Pline  avertit  son  ami  Paulin  de  l'in- 
tention qu'il  a  d'envoyer  Zosime,  un  de  ses  affranchis,  dans  la  Gaule  narbon- 
noise pour  y  rétablir  sa  poitrine  malade,  comme  en  pareil  cas  on  le  fait  encore 
aujourd'hui.  Voici  le  passage  :  Cet  affranchi  veteris  infirmitatis  tussieulâ  ad- 
monitus,  rurstis  sanguinem  reddit.  Qua  ex  causa  destinavi  eum  mittere  in 
prœdia  tua,  qua  Forojulii  possides.  AudiVi  enim  te  sœpe  referentem,  esse 
ibi  et  aerem  salubrem,  et  lac  ejtismodi  curationibus  accomodatissimum. 
€  Pour  essayer  de  le  guérir,  »  traduit  M.  de  Sacy,  »  j'ai  résolu  de  l'envoyer  à 
t  votre  terre  de  Frioul.  » 

Les  deux  épigrammes  de  Martial  adressées  à  Paulin  tendent  à  nous  donner 
de  celui-ci  l'opinion  d'un  gastronome.  Dans  la  première,  le  poëte  raille  le 
parasite  Selius  des  peines  qu'il  se  donne  pour  être  invité  à  la  table  de  Paulin; 
la  seconde,  liv.  III,  p.  79,  contient  un  jeu  de  mots  sur  le  nom  de  Palinure, 
dont  on  va  comprendre  le  sel. 

Minxisti  carrente  semel ,  Panlline,  carinà  ; 
Meiere  vis  iterum,  jam  Palinnrus  eris. 

La  postérité,  je  pense,  n'anfoit  pas  regreté  la  perte  d'un  pareil  disti- 
que, (n.  K.) 


NOTES. 


443 


XXIV. 

Rupis.  Page  249,  ligne  31. 

Des  combats  où  des  Iwmmes  tout  nuds  s'exerçoient  à  la  lutte. 

Cette  circonstance  ne  se  trouve  pas  indiquée  dans  la  lettre  de  Pline,  qui  se 
contente  de  signaler  le  danger  moral  des  jeux  supprimés  dans  Vienne  par 
Rufus  :  Placuit  agona  tolli  qui  mores  Yiennensium  infecerat ,  ut  noster  hic 
omnium. 

La  nudité  des  hommes,  on  le  voit  assez  dans  Martial,  Apulée,  Suétone,  etc., 
n'étoit  pas  le  seul  danger  redoutable  pour  les  bonnes  mœurs  dans  les  jeux 
publics  de  la  Rome  impériale,  (n.  e.) 


XXV. 

Sentius  Augurinus.  Page  2S4,  ligne  9. 

On  ne  s'accorde  pas  sur  le  meilleur  texte  de  cette  petite  pièce  d'Augarinus. 
Le  quatrième  vers  peut  aussi  bien  se  lire.  (J'en  demande  pardon  h  Dom 
Rivet)  : 

Unas  Plinias  est  mihi  priores. 

Le  sixième  et  le  septième  sont  ainsi  donnés  dans  l'édition  des  Lettres  de 
Pline  de  1829,  in-12, 1. 1,  p.  274. 

Et  qnxrit  qaod  âmes ,  patatqne  amari  ; 
lUe ,  o  Plinias  ille  I  Uaid ,  Catones  ! 

Mais  ici  la  leçon  de  D.  Rivet  nous  semble  bien  préférable  et  dans  tous  les 
cas  plus  latine. 


XXVI. 

Flords.   Pages  255-265. 


Outre  les  éditions  de  l'abrégé  de  cet  historien,  que  nous  avons  déjà  mar-  ^,j,|io«e    exini- 

quées,  '  le  catalogue  cité  plus  haut  nous  en  fournit  encore  quelques  autres,  \iusi.  imign.  \'t 

Il  y  en  eut  une  à  Trevise  en  Italie ,  chez  Jean  de  Verseil,  en  1485,  en  un  vol.  ^m!''îL  Haye' 

L  1  1  ij  iTsa'  t.  i.  p  76! 


444  NOTES. 

in-/b/io,  dans  lequel  on  a  joint  Tite-Live  h  Florus.Ces  deux  Historiens  furent 
réimprimés  ensemble  à  Paris,  chez  Josse  Bade,  l'an  1320,  en  môme  volume, 
avec  les  notes  de  Sabellicus  et  de  Bade.  En  153:),  Florus  fut  encore  mis  sous 
la  presse  à  Paris,  chez  Vascosan,  en  un  volume  in-4°,  où  se  trouvent  réunis 
Sextus  Rufus  et  Messala  Corvinus.  Florus,  dans  cette  édition,  est  enrichi  des 
notes  de  Jean  Camers.  On  le  trouve  aussi  dans  l'édition  de  Tite-Live,  in-/b/io, 
faite  à  Paris  en  1573.  C.  A.  Rupert  fit  des  observations  sur  Florus,  qui  furent 
imprimées,  en  1659,  à  Nuremberg,  in-8".  Il  y  a  encore  quelques  autres  édi- 
tions du  même  historien  qui  nous  ont  échappé.  Telle  est  celle  qui  parut  à 
Venise  en  1696,  in-S",  avec  les  notes  de  De  Pont;  telle  est  aussi  celle  de 
Leipsick,  en  1704,  avec  les  observations  de  Juncker,  in-8°.  On  nous  avertit 
que  dès  1519  il  y  en  eut  une  à  Venise,  en  même  volume,  oîi  l'on  a  joint  Tite- 
Live  ;  mais  nous  ne  la  trouvons  point  ailleurs.  I^a  traduction  de  Florus  en 
notre  langue  dont  nous  avons  parlé,  comme  attribuée  à  M.  Philippe  de  France, 
duc  d'Orléans,  frère  unique  du  Roi,  est,  dit-on,  l'ouvrage  de  M.  l'abbé  Le  Vayer, 
dont  nous  avons  observé  qu'étoient  la  chronologie  et  les  remarques.  Il  y  en  a 
une  édition  faite  îi  Lyon,  dont  on  ignore  la  date.  (Dom  Rivet,  t.  Il,  1733. 
Avertiss.,  p.  XV.) 

— Lorsque  D.  Rivet  a  rendu  compte,  p.  263,  des  traductions  faites  en  notre 
langue,  de  l'abrégé  de  l'Histoire  Romaine  de  Lucius  Annseus  Julius  Florus,  il 
n'a  pas  manqué  de  faire  connoltre  celle  qu'on  donne  à  Philippe  de  France,  duc 
d'Orléans,  frère  unique  de  Louis  le  Grand.  Mais  il  s'est  glissé  une  fauté  con- 
sidérable sur  l'année  que  cette  traduction  a  parue.  Il  est  dit  que  ce  fut  en 
1661,  au  lieu  qu'il  falloit  mettre  1636.  C'est  là  sa  véritable  époque,  telle 
qu'elle  est  marquée  dans  la  bibliothèque  de  Colbert,  conformément  à  l'im- 
primé, dont  nous  avons  vu  un  exemplaire  dans  la  bibliothèque  de  Beaulieu, 
près  le  Mans,  sous  ce  titre  :  Epitome  de  l'Histoire  Romaine  fait  en  quatre 
livres,  par  Lucius  Annœus  Florus,  et  mise  en  français  sur  les  traductitms 
de  Monsieur  frère  unique  du  Roi,  à  Paris,  chez  Augustin  Courbé,  1656,  in-8°. 
Cette  traduction  est  suivie  de  la  table  chronologique  de  Florus  et  des  remar- 
ques sur  la  traduction,  qui  sont  de  M.  de  la  Mothe  Le  Vayer,  fils  unique  du 
précepteur  de  ce  prince.  Le  texte  original  est  imprimé  d'un  côté  et  la  traduc- 
tion de  l'autre.  (D.D.  Poncet, Colomb  et  Ci.eme>cet,  Tome  X,  iloQ,  Additions 
et  corr.,p.  IX.) 

— Les  principales  éditions  faites  depuis  le  travail  de  nos  Bénédictins  sont  : 
Florus  et  Lucius  Ampelius,  cum  integris  Salmasii,  Freinshemii,  Grœvii 
et  selectis  aliorum  animadversion  ibus,  recensuit,  suasque  adnotationes  ad- 
didit  Car.  And.  Dukerus,  Lugd.  Batav.,  174 i,  in-S".  Bonne  édition,  qui  toute- 
fois n'est  guères  que  la  reproduction  de  celle  que  le  même  éditeur  avoit  don- 
née en  1718.  —  Nouvelle  édition  plus  ample,  Leipsig,  Koeler,  1832,  2  vol. 
in-8». 

Florus,  ex  recensione  Graivij,  cum  animadversationibus  ejusdem ,  accessit 
pneter  Ampelium  libellumque  varianun  lectionum  prsefatio,  F.  J.  Fischcri, 
Lipsiae,  Fritch,  1760,  in-8». 

L'édition  in-18  de  la  collection  du  Prince  Régent,  Londres,  1818.— L'autre 


NOTES.  445 

édition  de  la  nouvelle  collection  du  Régent,  in-K",  2  vol.,  Londres,  Valpy, 
1822.  —  L'édition  de  la  collection  Lemaire,  Paris,  Jules  Didot,  1827,  in-8». 
Diverses  traductions  françoises  doivent  être  ajoutées  aux  listes  précédentes. 
Celle  de  l'abbé  Paul,  Paris,  Barbou,  1774,  in-12.  —  Celle  de  F.  Ragon,  avec 
une  notice  de  M.  Villemain,  Paris,  Panckoucke,  1827,  in-8°.  —  Celle  de 
M.  Ch  Du  Rozoir,  Paris,  Belin,  1829,  in-8''  ;  et  enfin  celle  de  Camille  Paganel, 
Paris,  Verdiere,  1833.  (N.B.) 


XXVII. 

Fronton.  Pages  282-286. 


En  1818,  Ângelo  Mai,  pins  tard  cardinal  et  associé  étranger  de  notre  Aca- 
démie des  Inscriptions,  découvrit  dans  un  manuscrit,  sous  les  actes  du  concile 
de  Chalcedeine,  les  vestiges  d'autres  caractères  qui  présentoient  des  fragments 
considérables  et  entièrement  inédits  de  Fronton.  M.  Maî  s'empressa  de  publier 
cette  découverte  sous  le  titre  suivant  :  Af.  Cornelii  Frontonis  opéra  inedita, 
cutn  epistolis  item  ineditis  Antonii  Pu,  M.  Aurelii,  L.  Vert  et  Appiani,  nec 
non  aliorum  veterum  fragmentis...  Adduntur  édita  seu  cognita  ejtudem 
Frontonis  opeia.  Mediolani,  typisregiis,  1815.  2  parties  in-8°. 

Les  morceaux  déjà  connus  et  qu'on  retrouve  dans  cette  édition  sont  :  l' les 
fragments  de  cinq  chapitres  d'Aulu-GelIe,  où  Fronton  prend  part  à  desdiscus- 
àons  sur  les  noms  des  couleurs  et  sur  divers  mots  grecs  ou  latins;  2°  le 
livre  De  Differentiis  verborum,  inséré  dans  la  collection  des  anciens  gram- 
mairiens; 3»  des  extraits  de  Terence,  Ciceron,  Salluste,  Virgile,  etc.,  sous  le 
litre  d'Exempla  locutionum,  extraits  de  plusieurs  manuscrits  attribués  à 
Volusianns  ou  Arusianus,  et  qui  sont  ici  reproduits  sur  une  leçon  de  la  Bi- 
bliothèque Ambrosienne,  plus  correcte  que  celle  qu'on  avoit  jusqu'à  présent 
suivie.  C'est  apparemment  l'ouvrage  dont  parle  Dom  Rivet  sur  la  foi  de  Ra- 
phaël de  Voltere  sous  le  nom  i'Elegances  de  Fronton. 

Les  fragments  découverts  par  Angelo  Maï  enlèvent  malheureusement  tous 
les  droits  que  pouvoit  avoir  l'histoire  littéraire  de  la  France  sur  les  ouvrages 
de  Fronton.  Lui-même  s'est  proclamé  originaire  de  Cyrta,  en  Numidie,  dans 
la  dernière  de  ses  epîtres  adressées  aux  citoyens  de  cette  ville,  qu'il  se  flatte 
d'avoir  honoré  au  moins  par  les  fonctions  publiques  dont  il  a  été  revêtu.  Ail- 
leurs, dans  une  lettre  grecque  adressée  à  la  mère  de  Marc-Aurele,  Fronton 
s'excuse  d'écrire  incorrectement  dans  cette  langue,  t  Lyblen  que  je  suis,  » 
dit-il,  c  je  ressemble  au  philosophe  Anacharsis,  non  en  sagesse,  mais  en  bar- 
«  barie.  »  R  ne  reste  donc  plus  le  moindre  doute  sur  la  patrie  de  Fronton.  Et 
quant  aux  fragments  retrouvés  et  publiés  par  Angelo  Maï,  on  peut  lire 
l'excellent  compte  rendu  qu'en  a  donné  M.  Daunou,  dans  le  Journal  des  Sa- 
vans,  septembre  1816. 
3  S 


446  NOTES, 


XXVIII. 


Les  premiers  Marttrs  de  Lyoih.  Page  288. 

Severe  Sulpice  les  compte  pour  les  premiers  qui  aiml  souffert  dans  les 
Gaules. 

Je  suis  obligé  de  remarquer  que  Sulpice  Severe  ne  parle  nulle  part  des 
martyrs  de  Lyon,  et  qu'il  se  contente  de  la  phrase  rappelée  précédemment 
page  224.  Sub  Ajtrelio  Antonini  filio,  primum  intra  Gallias  martyria  visa, 
serius  irons  Alpes,  Dei  religione  suscepta. 

A  la  page  suivante,  ligne  6,  D.  Rivet  cite  Grégoire  de  Tours  pour  établir 
que  S.  Pothin  c  est  reconnu  pour  le  premier  evèque  de  Lyon.  »  Grégoire  de 
Tours  dit  seulement  que  le  premier  des  martyrs  de  Lyon  fut  Pothin,  evêque 
de  Lyon.  C'est  ainsi  que  l'a  entendu  M.  Guadet,  le  dernier  traducteur  de  cet 
historien  :  In  Galliis  muUi  pro  Christi  nomine  sunt  martyi-um  gemmis  cœ- 
lestibuscoronati...  Ex  quitus,  et  ille  primus,  Lugdunensis  ecclesiœ  Pothi- 
nus  episcopus  fuit. . . Beatissimus  vero  Irenœus  hujus  successor  martyris,qui 
a  beato  Polycarpo  ad  hanc  urbem  directiis  est,  admirabili  virtute  enituil... 
(Lib.  I,  §  27.)  Remarquez  cette  distinction  entre  saint  Pothin  et  Irenée,  son 
successeur.  C'est  le  dernier  seulement  que  saint  Polycarpe  auroit  envoyé 
dans  les  Gaules  ;  non  pas  saint  Pothin  qui  s'y  trouvoit  avant  lui.  Grégoire  de 
Tours  cité  précédemment,  page  225,  ne  dit  assurément  pas  que  saint  Pothin 
fût  «  venu  d'Asie.  » 

Dom  Rivet,  page  290,  pense  que  les  lettres  des  martyrs  de  Lyon  adressées 
au  pape  étoient  écrites  en  grec,  comme  celles  que  reçurent  les  Églises  d'Asie 
et  de  Phrygic.  Celle  présomption  ne  semble  fondée  sur  aucun  témoignage 
historique  et  n'est  réellement  pas  vraisemblable.  On  conçoit  (sans  en  avoir  la 
certitude)  que  les  relations  envoyées  aux  églises  de  l'empire  grec  fussent 
écrites  en  grec;  on  ne  devine  pas  pourquoi  le  clergé  de  Lyon,  écrivant  au 
Pape,  n'auroit  pas  écrit  dans  la  seule  langue  que  l'on  parlât  à  Rome  et  qu'as- 
surément ce  clci^é  connoissoit  et  parloit  lui-môme.  Ces  efforts  persistans  de 
rattacher  aux  seuls  confesseurs  grecs  la  conversion  des  Gaulois  de  la  Lyon- 
noise  entraînent  malgré  lui  notre  auteur  au  delà  de  la  critique  severe  qui  loi 
est  ordinaire. 

Page  294.  —  La  défense  encore  observée  par  les  Chrétiens  de  manger  de 
la  chair  des  animaux,  est  en  effet  justifiée  par  ces  paroles  de  Sainte  Blandine 
aux  bourreaux,  paroles  qui  rappellent  les  odieuses  accusations  faites  aux 
chrétiens  :  «  Vous  errez  grandement  povres  gens,  pensant  que  ceux  mangent 
«  les  entrailles  des  enfans,  qui  ne  mangent  pas  tant  seulement  de  la  chair 
«  des  Lestes  brutes.  »  (Euseb.,  liv.  x,  §  1,  traduct.  de  Cl.  de  Seyssel.) 


NOTES.  447 

Je  réanis  ici  tout  ce  que  j'entends  repondre  à  la  thèse  soutenue  par  dom 
Rivet  et  par  tous  ceux  qui  cherchent  le  fondement  de  ce  qu'on  appelle  les  li- 
bertés de  l'Église  Gallicane  dans  l'origine  asiatique  de  la  prédication  Evan- 
gelique  en  Gaule  : 

A  la  page  293,  à  propos  du  Premier  Concile  de  Lyon,  dom  Rivet  pense  que 
l'existence  d'un  Concile  antérieur,  présidé  par  Saint  Irenée,  n'estjustifiée  que 
par  le  Synodique,  livre  de  peu  «  d'autorité.  »  Elle  est  mieux  justifiée  encore 
par  Euscbe,  qui  donne  la  substance  d'une  lettre  de  Saint  Irenée  :  €  Irenée,  » 
dit-il,  c  dans  la  lettre  qu'il  écrit  au  nom  de  ses  frères,  dont  il  présidait  la 
€  réuninn ,  etc.  »  Et  le  père  Sirmond,  un  des  champions  les  plus  ardents 
des  origines  asiatiques,  ne  met  pas  môme  en  doute  ce  premier  concile.  «  Je 
a  sais,  >  dit-il,  c  qu'il  y  eut  dans  les  Gaules  des  conciles  antérieurs  an 
«  siècle  de  Constantin.  Le  premier,  qui  condamna  les  hérésies  de  Valentin  et 
€  de  Marcibn,  se  composa  suivant  la  tradition  de  dau%e  évêques;  treize  assis- 
«  tèrent  au  second  qui  décréta  que  la  fête  de  Pâques  devoit  être  célébrée  le 
«  dimanche.  »  Des  reunions  de  douze  et  treize  évêques  présidées  par  l'un  d'en- 
tre eux,  n'est-ce  pas  des  conciles  de  la  nature  de  tous  les  premiers  conciles? 
Et  si  dès  l'année  190,  S.  Irenée  put  réunir  treize  évêques,  admettra-t-on  que  ces 
évêques  fussent  tous  venus  d'Orient,  et  que  les  villes  de  Lyon  et  de  Vienne 
fussent  les  seules  chez  qui  la  lumière  de  l'Evangile  fût  encore  parvenue  ? 

Ce  qu'on  doit  encore  remarquer,  c'est  que  le  premier  acte  public  de  cette 
réunion  d'évêques,  institués  sous  l'inducnce  prétendue  de  l'Eglise  d'Orient, 
est  de  s'écarter  de  la  tradition  suivie  en  Orient,  sur  le  jour  où  l'on  devoit  cé- 
lébrer la  fête  de  Pâques. 

Enfin,  on  peut  assurément  tirer  l'induction  de  la  prédication  de  la  foi  non- 
velle  dans  les  Gaules,  à  une  époque  plus  rapprochée  des  Apôtres,  dans  ce  pas- 
sage cité  par  D.  Rivet,  p.  344,  de  la  quatrième  lettre  de  saint  Irenée  :  «  De 
notre  temps  encore,  y  dit-il,  il  ya  des  contrées  barbares,  telles  que  l'Espagne, 
la  Germanie,  qui  se  c<>nservcnt  dans  la  pureté  de  la  foi  qu'elles  ont  reçue  des 
apôtres,  et  sans  le  secours  d'aucune  écriture.  »  Et  dans  le  livre  Contra  H<z- 
reses,  l.  i,  §  10  :  Et  si  in  mundo  loquelœ  dissimiles  sunt,  virtus  traditionix 
una  et  eadem  est.  Et  neque  aliter  credunt  quœ  in  Germania  sunt  fundatat 
ecclesiœ,  neque  quœ  in  Iberis,  neque  quœ  in  Celtis  sunt.  A  qui  fera-t-on 
croire  que  la  Gaule  seule  eût  échappé  pendant  près  de  deux  siècles  à  ces 
traditions ,  à  ces  prédications  qui  se  faisoient  en  Espagne,  en  Germanie  et  in 
Celtis  ?  (n.  e.) 

XXIX. 


SAnrr  Irenée.  Pages  335  et  336. 

On  pourroit,  il  me  semble,  tirer  de  la  demande  d'Ethere  de  Lyon,  à  Saint 
Grégoire  une  conséquence  conti-aire.  Ethere  assurément  n'eiît  pas  été  capable 


448  NOTES. 

de  lire  un  livre  grec  ;  s'il  recherche  donc  les  œuvres  de  Saint  Irenée,  c'est 
parce  qu'il  les  croyoit  écrites  en  latin;  et  l'on  en  doit  conclure  que  la  traduc- 
tion latine  (si  toutefois  l'original  étoitgrec)  étoit  antérieure  au  vi*  siècle.  Voici 
d'autres  motifs  de  penser  que  Saint  Irenée  dut  écrire  ses  livres  en  latin.  A 
qui  les  destinoit-il  î  Aux  chrétiens  des  Gaules  d'abord,  à  ceux  de  Rome  en- 
suite. Or  la  langue  assurément  la  plus  répandue,  sinon,  comme  je  penche  à  le 
croire,  la  seule  usitée  de  son  temps  en  Gaule  et  en  Italie,  étoit  la  langue  la- 
tine. La  barbarie  grammaticale  de  ces  livres  ne  doit  pas  surprendre  chez  un 
Grec  d'origine  ;  mais  ce  Grec  parloit  assurément  et  pouvoit  écrire  en  latin. 
Comment  auroit-il  alors,  voulant  écrire  pour  l'instruction  des  fidèles,  préféré 
la  langue  qu'on  parloit  si  peu,  si  toutefois  on  la  parloit,  dans  les  pays  dont  il 
avoit  la  direction  spirituelle  t  L'argument  des  citations  latines  de  ces  ouvra- 
ges par  Saint  Augustin,  Saint  Cyprien  et  Tertulien,  a  d'ailleurs  plus  de  force 
que  ne  veut  leur  en  reconnoitre  Dom  Rivet,  (n.  e.) 


XXX. 

Ibid.  Pages  3SU,  ligne  38. 

La  bonne  édition  des  œuvres  de  Saint  Irenée,  due  à  Don  Massuet ,  fut  suivie, 
en  1734  d'une  seconde,  en  deux  volumes  in-^,  dans  lesquels  furent  ajout(is 
les  fragments  retrouvés  par  Pfaff.  La  critique  la  plus  violente  que  l'on  ait 
faite  du  travail  de  Dom  Massuet  parut  in-4°  à  Leipsig,  en  1721,  sous  le  titre  : 
Sal.  Deylingii  IrenœusàRen.  Massuetipravis  explicationibus  vindicatus.  On 
l'a  reimprimée  plusieurs  fois.  (n.  e.) 

XXXI. 

Saint  Hippolyte.  Page  400. 

Ce  saint  martyr  a  fait  un  traité  de  l'Antéchrist,  dont  notre  prédécesseur  a 
parlé,  page  366;  mais  il  a  oublié  une  traduction  françoise  de  ce  traité,  faite 
sur  le  grec  sous  ce  titre  :  «  Vrai  discours  du  règne  de  l'Antéchrist,  de  la 
<  consommation  du  monde,  des  misères  et  calamités  qui  adviendront  aux 
t  derniers  temps,  et  du  second  avènement  de  Notre-Seigneur  Jésus-Christ, 
«  traduit  du  grec  de  Saint  Hippolyte,  par  L.  N.  C.  Robert  Coulombet,  1579.» 
Le  traducteur  a  mis  à  la  tête  un  court  avertissement  dans  lequel  il  dit  : 
«  qu'il  lui  a  semblé  bon  et  expédient  de  faire  voir  de  rechef  cet  ouvrage  au 
(  public,  >  (ce  qui  suppose  au  moins  une  édition  précédente)  «  demandé  par 
€  plusieurs  personnes,  et  en  particulier  par  les  dames  religieuses  de  Chelles, 
«  qui  avoient  intéressé  pour  cet  effet  leur  procureur  et  receveur  qui  étoit  son 


NOTES.  449 

t  ami.  »  (DD.  Poncet,  Colomb,  Clemenckt  et  Clément.  T.  XI,  1759.  \vert., 
p.m.) 

—  Depuis  l'édition  des  œuvres  de  Saint  HipQpIyte  donnée  par  Fabricius  en 
1716-1718,  elles  n'ont  été  réimprimées  qu'une  fois,  en  1766,  à  Venise,  par 
André  Gallandi,  dans  la  Bibliothèque  des  Pères,  t.  II,  p.  409,  530,  avec  des 
prolégomènes,  p.  XLIV-XLIX.  En  176i,  C.  Chr.  Woog  avoit  publié  à  Leip- 
sig,  in-4*,  un  fragment  des  Scholies  d'Hippolyte  sur  les  Proverbes,  ix,  1-3. 
Plus  récemment,  en  1825,  M.  Mai  a  donné  aussi  des  fra^ents  du  même  ou- 
vrage, dans  sa  nouvelle  collection,  in-4°,  d'écrivains  anciens  d'après  les  ma- 
nuscrits du  Vatican,  t.  i,  seconde  partie,  p.  223. 

Plusieurs  écrits  de  Saint  Hippolyte  et  des  Pères  de  l'Église  qui  suivent, 
comme  Lactance,  Saint  Hiliiire,  etc.,  font  partie  dfrla  ColleclioS.  S.  Ecdesice 
Patrutn,  publiée  à  Paris  depuis  182S  en  latin  seulement,  dont  il  a  déjà  paru 
plus  de  cent  volumes  in-8%  et  qu'il  suffit  d'indiquer  une  fois.  Ce  Père  n'a 
qu'une  très  courte  Notice  dans  la  Bibliothèque  choisie  des  Pères  de  l'Eglise 
grecque  et  latine,  par  M.  l'abbé  Guillon,  Paris,  1824-1829,  26  vol.  in-8»; 
mais  la  plupart  des  autres  y  sont  traduits  en  abrégé. 

Parmi  les  écrivains  qui  s'étoient  occupés  de  Saint  Hippolyte,  et  qui  étoient 
déjà  fort  nombreux  en  1759,  nos  prédécesseurs  ont  oublié  Christophe  Aug. 
Heumann,  auteur  d'une  dissertation  publiée  à  Gottingenenl737, 10-4».  Vbi, 
et  qualis  episcopus  fuerit  S.  Ilippolytus.  Il  faudroil  y  joindre  aujourd'hui  : 
Ehr.  Andr.  Fraumann,  Interpretaliones  Novi  Testamenti  ex  Hippolyto  col- 
lectœ;  Cobourg,  1763,  in-4».;  De  Magistris,  Ada  martyrumad  ostia  Tibe- 
rina,  Rome,  1795,  in-f .  Em.  Jul.  Kimmel,  De  Hippolyti  vita  et  scriptis, 
lena,  1839,  in-8"';  M.  Greppo,  correspondant  de  l'Académie  des  Inscriptions,  • 
Notes  historiques,  biographiques,  archéologiques  et  littéraires  concernant  les 
premiers  siècles  chrétiens,  Lyon,  1841,  in-8°,  p.- 167-186. 

La  statue  de  Saint  Hippolyte,  placée  au  Vatican  vis-à-vis  celle  du  rhéteur 
Aristide,  est  fort  célèbre.  Winckelmann,  qui  en  dit  quelques  mots  dans 
l'Histoire  de  l'Art,  éd.  de  Rome.  t.  u,  p.  404,  est  un  de  ceux  qui  la  croient 
du  temps  d'Alexandre  Sévère.  Un  habile  archéologue,  notre  confrère, 
M.  Raoul-Rochette,  nous  communique  la  note  suivante  sur  ce  monument 
d'antiquité  chrétienne  :  «  La  statue  de  Saint  Hippolyte,  qui  se  voit  dans  la 
«  bibliothèque  du  Vatican,  et  qui  a  été  publiée  plusieurs  fois,  en  dernier 
«  lieu  par  M.  d'Agincourt,  dans  l'Histoire  de  l'art  par  les  monuments,  — 
«  Sculpture,  pi.  UI,  n»  1,  éditien  italienne,  parolt  bien  réellement  un  ouvrage 
«  du  m'  siècle,  quoique,  sous  le  rapport  de  l'exécution,  par  la  roideur  de  son 
€  attitude  et  par  le  style  de  la  draperie,  elle  soit  inférieure  aux  sculptures  ro- 
«  maines  de  ce  temps,  et  qu'elle  annonce  une  décadence  plus  prononcée, 
e  C'est  ainsi  qu'en  a  jugé  d'Agincourt,  dont  l'opinion  me  paroît  très-juste. 
«  Winckelmann,  qui  cite  cette  statue  dans  son  Histoire  de  l'Art,  1.  xii,  c.  2, 
«  §  25  (t.  III,  p.  905,  éd.  de  Prato),  la  regardoit  comme  le  plus  ancien  ouvrage 
€  de  sculpture  chrétienne,  en  ronde  bosse,  qui  fût  venu  jusqu'à  nous,  et,  à  cet 
«  égard,  il  pouvoit  avoir  raison  ;  mais,  du  reste,  il  n'avoit  pas  examiné  ce  mar- 

M  m  m 


450  NOTES. 

«  bre  avecbeanconp  d'attention,  puisqu'il  ne  parle  pas  dé  la  tête,  qui  est  mo 
«  depne.  Sur  ce  point,  il  ne  sauroit  y  avoir  de  diflBculté.  G.  Fea,  le  savant  com- 
«  mentateur  de  Winckelraann,  le  déclare  positivement;  M.  d'Agincourt  est  du 
«  môme  avis,  et  c'est  l'opinion  que  j'ai  moi-même  exprimée  dans  mon  Discours 
«  sur  les  types  imitatifs  de  l'art  du  christianisme,  p.  8S,  2,  sans  qu'il  se  soit 
«  élevé,  que  je  sache,  la  moindre  contradiction.  Il  y  a  longtemps,  d'ailleurs, 
«  que  Vignoli  a  donné  tous  les  renseignements  qui  concernent  cette  statue,  la 
«  découverte  qui  en  fut  faite  en  1551,  près  de  Saint-Laurent-hors-des-Murs,  sur 
«  la  route  de  Tivoli  et  la  dénomination  qu'elle  porte  encore,  non  moins 
«  certaine  que  l'anliquilé  de  ce  monument  et  sa  véritable  valeur,  comme  sculp- 
«  ture  chrétienne  du  iii«  siècle  de  noire  ère.  »  (Vict.  Le  Clerc,  réimpression 
du  tome  XI,  1841.  Note  des  nouveaux  éditeurs,  p.  2.  3.) 


XXXII. 

Faustin.  Page  405,  Note. 

Voilà  bien  prise  sur  le  fait  la  critique  passionnée  de  Lannoy.  La  soixante- 
septième  lettre  de  saint  Cypricn  atteste  l'antiquité  de  l'église  d'Arles,  et 
prouve  qu'il  ne  faut  pas  ajouter  foi  au  célèbre  passage  de  Grégoire  de  Tours, 
qui  semble  rapporter  seulement  au  milieu  du  m*  siècle  l'épiscopat  de  Saint 
Trophime  ;  que  fait  Lannoy  î  il  déclare  la  lettre  supposée.  Dom  Rivet  montre 
ici  plus  de  loyauté,  plus  de  critique  :  il  fait  même  un  grand  aveu,  c'est  que 
l'autorité  de  Grégoire  de  Tours  «  n'en  étoit  pas  une  légitime.  »  Mais  toutefois 
le  passage  de  la  lettre  de  saint  Cyprien  :  Facere  et  te  opoi-tet  plenissimas  lite- 
ras  ad  coepiscopos  nostros  in  GalUa  conslitutos,  prouve  que  le  christia- 
nisme étoit  alors  en  plein  exercice  dans  les  Gaules,  ce  qui  contredit  mieux 
encore  le  passage  isolé  de  Grégoire  de  Tours,  (n.  e.) 


XXXIII. 

Saint  Martial.    Pages  406-409. 

On  peut,  à  l'occasion  de  cette  notice,  consulter  le  livre  remarquable  de 
l'abbé  d'Arbelot  :  Dissertation  sur  l'apostolat  de  saint  Martial,  Paris,  V.  Di- 
dron,  1855,  8°.  Pour  contrôler  le  sentiment  de  dom  Rivet,  M.  d'Arbelot,  entre 
autres  témoignages  de  la  tradition  bien  antérieure  au  ix'  siècle,  qui  fait 
de  Saint  Martial  un  juif  disciple  soit  des  apôtres,  soit  de  Jésus-Christ  même, 
allègue  des  vers  de  Fortunat  qui  auroicnt  pu  trouver  place  dans  cet  endroit 
de  l'Histoire  littéraire.  Ces  vers  qu'on  a  reconnus  dans  un  manuscrit  du  viii* 


NOTES. 


151 


au  IX*  siècle,  du  couvent  de  la  Minerve  à  Rome,  avoient  d'abord  été  imprimés 
en  1782  d'après  un  autre  manuscrit  du  xii"  siècle  de  la  Bibliothèque  Lauren- 
lienne,  avec  le  nom  de  Fortunat,  dont  ils  rappellent  d'ailleurs  parfaitement 
le  style  maniéré  : 

Qupnli  sit  meriti  praeclarus  aposlolus  isie 
Dicere  vcl  prosa  vel  pulcliri  carmino  metri . . . 
Tullius  atque  Maro  vcniant  :  sit  lingua  faccta 
Versibns  aat  cnrrens,  ant  prosae  mella  relcxens, 
Non  tua,  sancte  pater,  potorunt  dopromcro  gcsta. 
Tcllar  te  romana ,  quibus  te  gallica  lollus 
Post  Petram  recolunt  juniorem,  parte  seconda, 
Cnm  Peiro  recoinnt  aequalem  sorte  ]>riori. 
Benjamila  trilios  te  gessil  sanguine  claro, 
Urbs  te  nnnc  retinet  Lcmovica  corporo  sancto. 

Voilà  donc  un  témoignage  plus  ancien  môme  que  Grégoire  de  Tours  pour 
faire  du  premier  évêque  de  Limoges  un  juif  de  race  et  un  collègue  de  Saint 
Pierre. 

Quant  aux  lettres  imprimées  dans  le  xvi»  siècle  sons  le  nom  de  Saint  Mar- 
tial, y  a  longtemps  que  tous,  catholiques,  gallicans  ou  uitramontains ,  en 
avoient  reconnu  la  grossière  supposition.  Il  étoil  peut-être  inutile  d'en  faire 
le  fonds  de  toute  la  notice  consacrée  à  Saint  Martial,  (n.  e.] 


XXXIV. 

Saint  Eugène.  Page  416. 

Dom  Rivet  a  toute  raison  de  ne  pas  attribuer  à  Saint  Eugène  martyr, 
l'hymne  en  l'honneur  de  Saint  Denis  aréopagite  ;  mais  il  a  tort  de  se  contenter 
de  l'opinion  de  Launoy  pour  regarder  cette  hymne  comme  une  pièce  supposée. 
Plusieurs  manuscrits  du  viii'  ou  du  ix'  siècle  s'accordent  à  l'attribuer  à  un 
Eugène,  sans  doute  Eugène  III,  évoque  de  Tolède  au  vu"  siècle.  MM.  Darras 
et  d'Arbclot  ont  rompu  de  bonnes  lances  en  faveur  de  cette  attribution  qui 
ne  peut  plus  guère  être  contestée,  et  qui  prouve  une  fois  de  plus  que  la  tradition 
qui  confond  l'èvëque  de  Paris  Denis  avec  DeuLs  l'arèopagite  remonte  au  delà 
du  IX'  siècle,  (n.  e.) 


XXXV. 

Claude  Mamertin,  pages  417-423. 


A.UX  différentes  éditions  des  anciens  panégyristes  de  l'Empire,  dont  nous 
faisons  le  dénombrement  à  l'article  de  Claude  Mamertin,  il  faut  joindre  la  sui- 


452  NOTES. 

vante,  que  nous  avons  oubliée.  En  dernier  lieu,  M.  Lau.  Patacol,  Vénitien,  a 
publié  une  nouvelle  édition  des  mêmes  harangues,  qu'il  a  accompagnées  d'une 
traduction  italienne,  et  enrichies  de  notes  historiques  et  de  médailles,  sur  le 
modèle,  ou  à  l'imitation  de  celles  du  P.  de  la  Baune.  Cette  dernière  édition 
a  paru  à  Venise,  chez  Pizzàna,  l'an  1708,  en  un  volume  in-S". 

L'observation  suivante  n'a  pas  autant  de  fondement  que  celle  qui  précède. 
On  observe  que  le  catalogue  imprimé  de  1708  de  la  BibUothèque  des  Augus- 
tins  de  Home,  ne  fait  nulle  mention  de  l'édition  des  anciens  panégyriques, 
dont  nous  parlons  à  la  page  421,  comme  faite  à  Bruges  en  1486,  et  se  trou- 
vant dans  cette  bibliothèque.  Ce  n'est  point  sur  la  foi  de  ce  catalogue  que 
nous  indiquons  cette  édition,  mais  sur  les  mémoires  d'un  ami  qui  assure  en 
avoir  vu  un  exemplaire  dans  la  bibliothèque  même.  (D.  Rivet,  t.  ii,  1733, 
Avertiss.,  p.  xv-xvi.) 

— A  toutes  les  différentes  éditions  des  Panégyriques,  ou  harangues  faites  aux 
Empereurs,  dont  nous  avons  fait  l'énumération,  tant  aux  pages  421-423  de  la 
première  partie  de  notre  premier  volume  qu'aux  xv  et  xvi  de  l'Avertissement 
à  la  tête  du  second,  il  faut  en  ajouter  encore  une  autre.  Elle  fut  faite  au  Mans 
chez  Jérôme  OUvier  en  1653,  pour  l'usage  du  collège  de  l'Oratoire  de  la 
même  ville.  Cette  édition  est  in-12°  et  ornée  de  notes  choisies;  mais  elle  ne 
comprend  que  les  panégyriques  de  Pline,  de  Pacatus  Drepanius,  les  deux  de 
Mamertin  et  ceux  d'AusoNE.  Il  est  surprenant  qu'en  si  peu  de  temps  les 
exemplaires  en  soient  devenus  d'une  rareté  extrême,  dans  la  ville  même  où 
elle  a  été  faite.  (D.  Rivet,  Tom.  V,  1740.  Avertiss.,  p.  i.) 

— En  mentionnant  la  première  édition  des  Panégyristes,  due  à  François  Pu- 
téolanus  t  qui  a  fait  aussi  imprimer  la  satyre  de  Pétrone,  »  Dom  Rivet  entend 
dire  que  les  fragments  alors  connus  de  Pétrone  et  la  Yita  Agricolœ  de  Tacite 
faisoient  partie  du  même  volume.  Elle  passe  pour  avoir  été  imprimée  à  Mi- 
lan vers  1482,  suivant  M.  Bninet  dont  l'article  est  fort  loin  de  rendre  inu- 
tile la  notice  biographique  de  D.  Rivet. 

D'autres  éditions  des  Panégyriques  parues  depuis  nos  volumes  de  l'Histoire 
Littéraire méTïlent  d'être  signalées:  l»celle  de  Nuremberg,  1778,  2vol.  in-8» 
offrant  la  récension  des  remarques  de  Wolfg.  Jeager,  à  laquelle  il  faut 
joindre  un  Appendix  observationum,  pubUé  en  1790,  dans  la  même  ville  ; 
2*  la  grande  édition  de  Henry  Arntzenius,  cum  notis  et  animadversionibus 
virorum  eruditorum.  Traject.  ad  Rhen,  Wildet  Alter,  1790-1797,  2  vol.  gr. 
in-4°;  3»  celle  de  Londres,  Valpy,  1828,  4  parties  en  5  vol.  in-8''. 

On  doit  un  essai  de  traduction  des  Panégyristes  à  l'abbé  Coupé,  sous  le 
litre  de  Spicilege  de  littérature  ancienne  et  moderne.  Tomes  1  et  2,  Paris,' 
1802,  in-S".  (n.  e.) 


FIN  DES  NOTES. 


Pams.  —  Imprimerie  Padl  Dopont,  rue  de  Grenelle-Stwnt-Uonoré,  45. 


I 


HISTOIRE 


LlTERÀinE 


DE   LA  FRANCE 


TOME  I.    PARTIE  II. 


HISTOIRE 

LITERAIRE 

DE  LA  FRANCE 

OU    L'ON    TRAITE 

DE  L'ORIGINE  ET  DU  PROGRÈS,  DE  LA  DÉCADENCE 

et  du  rétablissement  des  Sciences  parmi  les  Gaulois  et  parmi  les  François 
Du  goût  et  du  génie  des  uns  et  des  autres  pour  les  Letres  en  chaque  siècle 
De  leurs  anciennes  Ecoles  ;  De  rétablissement  des  Universités  en  France 
Des  principaux  Collèges  ;  Des  Académies  des  Sciences  et  des  Belles  Letres 
Des  meilleures  Bibliothèques  anciennes  et  modernes;  Des  plus  célèbres 
Imprimeries  ;  et  de  tout  ce  qui  a  un  rapport  particulier  à  la  Literature. 

AVKC. 

Ije%  Eloges  historiques  des  Gaulois  et  des  François  qui  s'y  sont  fait  quelque  réputation , 
Le  Catalogue  et  la  Chronologie  de  leurs  Ecrits  ;  Des  llemarques  historiques  et 
critiques  sur  les  principaux  Ouvrages  ;  Le  dénombrement  des  différentes  Editions  : 
Le  tout  justifié  par  les  citations  des  Auteurs  originaux. 

Pah  des  Religieux  Bénédictins  de  la  Congrégation  de  S.  Maijr. 
TOME  \.  PARTIE  IL 

Qui  comprend   le  quatrième  Siècle  de  l'Eglise. 

NOUVELLE  ÉDITION,    ENTiftRKMENI    i.ONFORME    »    LA    PRÉCÉDB^ITI' 

Par    M.    PAULIN    PARIS,     Membre    de    l'Institut. 
'^ — nno     ■    I         — 

A    PARIS. 

[.ibrairie  de  VICTOR  PALMÉ,    22,  rue  Saint  -  Sulpice. 


M.    DCCC     LXV 

KRAUS  REPRINT 

Nendeln/Lieditenstein 

1973 


Réimpression  avec  L'accord  de 
L'Académie  des  Iriscriptions  et  Belles -Lettres,  Paris 

KRAUS   REPR'NT 

A  Division  of 

KRAUS-THOMSON  ORGANIZATION  LIMITED 

Ncndeln/Liedilensfein 

1973 

Printed  in  Germany 
Lessingdruckerei  Wiesbaden 


AVERTISSEMENT 


SUR 


CETTE    NOUVELLE    ÉDITION. 


Ceux  qui  dans  les  temps  modernes  ont  étudié  les  temps  pas- 
sés, ont  été  beaucoup  plus  occupés  des  faits  que  des  idées.  Le 
mouvement  intellectuel,  ou,  pour  parler  plus  nettement,  l'his- 
toire littéraire,  tient  dans  leurs  livres  trop  peu  de  place.  Tout  en 
promettant  de  passer  en  revue  tous  les  faits  importans  de  nos 
annales,  on  accorde  avec  peine  quelques  chapitres  superficiels 
et  de  seconde  main  à  l'examen  et  à  la  revue  de  l'état  des  sciences, 
des  arts  et  des  lettres.  C'est  assurément  un  oubli  que  nous  ne 
saurions  trop  regretter  dans  les  études  historiaues,  même  les 
plus  estimables  de  notre  temps.  La  vie,  les  écrits  de  Grégoire 
de  Tours,  d'Eginhard,  de  samt  Bernard  ou  de  saint  Anselme, 
de  Chrestien  de  Troyes,  d'Alain  Chartier  ou  de  Philippe  de  Me- 
zieres,  nous  intéresseroient  pour  le  moins  autant  que  la  vie  et 
les  actes  de  Clovis  II,  des  Childeric  et  de  tant  d'autres  rois  qui 
n'ont  pas  eu  la  moindre  influence  sur  l'esprit,  les  mœurs  et  les 
tendances  de  leur  siècle.  Les  productions  de  l'art  et  de  la  litté- 
rature ne  sont-ils  pas  le  flambeau  naturel  des  événemens  et  de 
la  révolution  lente  ou  rapide  des  sociétés  ?  Comment  apprécier 


1  * 


—  2  — 

avec  la  moindre  justesse  h  physionomie  du  xf  siècle,  si  l'on 
n'a  pas  lu  les  chansons  de  geste,  étudié  la  poésie  provençale  et  re- 
connu l'origine  essentiellemei)t  françoise  (comme  vient  de  l'éta- 
blir avec  tant  de  sûreté  M.  \  iollet-le-Duc)  de  l'architecture 
chrétienne?  Notre-Dame  de  Paris,  la  Sainte-Chapelle,  l'ancien 
Palais  de  Justice  et  le  château  de  Vincennes  ne  répandent-ils 
pas  un  précieux  jour  sur  les  règnes  de  Philippe-Auguste,  de 
saint  Louis,  de  Philippe  le  Bel  et  de  Charles  V?  Les  œuvres 
de  l'art  et  de  la  littérature  sont  donc  une  parlie  nécessaire,  in- 
dispensable, de  l'histoire  proprement  dite.  Afens  agitât  molem: 
telle  est  l'influence  de  l'expression  des  idées  sur  l'enchaîne- 
ment des  faits. 

Il  y  a  deux  manières  de  comprendre  et  d'écrire  l'histoire  lit- 
téraire. Les  uns  ne  consultent,  en  se  vouant  à  cette  œuvre,  que 
leur  imagination,  leur  fanlaisie;  les  autres,  mieux  inspirés,  à 
notre  avis,  l'enlroprennent  sans  aucun  parti  pris  :  bien  décidés 
.seulement  à  faire  exactement  connoîtrc;  les  écrivains  tels  qu'ils 
ont  été,  et  les  éciits  .sous  leur  véritable  caractère.  Ils  rédigent 
après  être  remontés  aux  .sources;  ils  n'acceptent  gratuitement 
aucun  des  jugemens  portés  avant  eux;  ils  interrogent  les 
manuscrits,  secouent  la  poussière  des  livres  les  plus  oubliés,  et 
s'ils  découvrent  des  I résors  inattendus,  s'appliquent  à  les  offrir 
dans  le  jour  qui  leur  convient  le  mieux.  Ils  poursuivent  la 
chasse  de  ce  que  le  lemps  n'a  pas  enseveli  dans  un  irréparable 
oubli;  le  nom  des  auteurs,  l'époque  des  travaux,  l'intérêt  qui 
s'est  attaché  ou  peut  s'attacher  encore  aux  questions  traitées; 
la  valeur  littéraire,  philosophique  ou  morale  de  chaque  ouvrage, 
ils  n'entendent  rien  dédaigner  de  ce  que  l'on  peut  ressaisir; 
rien  ne  les  rebute,  ils  lisent  tout,  ils  disent  tout.  Telle  fut 
rœu\Te  de  Dom  Rivet,  des  religieux  qu'il  as.socia  à  la  compo- 
sition de  ['Histoire  littéraire  de  la  France,  et  de  ceux  qui 
la  continuèrent  après  sa  mort. 

Le  plan  de  Y  Histoire  littéraire  est  simple  et  facile  à  saisir. 
L'ordn^  chronologique  est  la  ba.sc  du  monument.  Les  siècles 
sont  étudiés  l'un  après  l'anlre,  tels  qu'ils  ont  été  d'abord  dans  la 
(iaule  païenne,  puisdans  la  France  chrétienne.  Avant  de  passera 
l'analyse  approfondie  des  productions,  le  résumé  de  l'influence 
littéraire  de  chaque  siècle  est  pré.senté  dans  un  discours  sur 
l'étal  des  Lettres  et  des  Arts  :  excellente  méthode  qui  permet 


—  ;^  — 

de  comprendre  IVripril  général  dont  furent  animées  les  généra- 
tions successives,  sans  avoir  besoin  d'en  suivre  les  preuves 
dans  tout  leur  détail.  Pour  bien  connoîlre  une  grande  ville,  il 
faut  longtemps  se  perdre  dans  le  dédale  de  toutes  ses  rues; 
mais  pour  résumer  l'impression  qu'on  doit  en  garder,  il  faut 
planer  au-dessus  d'elle.  La'plupart  de  ces  Discours  sur  l'état 
des  lettres  et  des  Arts  sont  autant  de  chefs-d'œuvre  auxquels 
la  critique  moderne  peut  ajouter  sans  doute,  mais  ne  sauroit 
trouver  à  retrancher.  Leur  réunion  mériteroit  déjà  les  hon- 
neurs de  la  réimpression  (jue  nous  nous  proposons  d'accorder 
à  l'ouvrage  entier  dont  ils  forment  la  belle  et  judicieuse  intro- 
duction. 

Dans  les  notices  biographiques  et  analytiques  consacrées  à 
chacun  de  nos  auteurs  françois,  les  Bénédictins  ont  jugé  con- 
venable de  donner  à  la  France  ses  frontières  naturelles,  le 
Rhin,  les  Pyrénées,  l'Océan  et  la  Méditerranée.  Les  Gaules 
Rhénane,  Belge  et  Cisalpine  ont  été  de  leur  domaine,  et  les 
écrivains  de  la  (Jermanie,  de  l'Italie  septentrionale  et  des  Pays- 
Bas  ont  dû,  plus  d'une  fois,  à  ce  large  plan  d'être  tirés  de 
l'oubli  huit  à  dix  fois  séculaire  qui  les  recouvroit  et  qui,  sans 
Dom  Rivet,  les  auroit  peut-être  à  jamais  engloutis.  Unconnoîtla 
sévérité  de  la  critique  bénédictine  :  elle  n'a  jamais  éclaté  mieux 
que  dans  cette  belle  œuvre.  Le  style,  ordinairement  simple  et 
naturel,  s'anime  dans  la  discussion  des  témoignages  et  la  com- 
paraison des  jugemens.  Mais  ce  qui  doit  être  aujourd'hui  pour 
nous  un  sujet  de  surprise  et  d'admiration,  ces  grands,  pieux, 
savans  et  modestes  contemporains  de  Voltaire  et  de  l'école 
encyclopédique,  école  qui  desséchoit  autour  d'elle  tous  les 
rameaux  de  l'histoire  et  de  l'archéologie  nationales,  semblent 
ne  pas  soupçonner  l'existence  et  ne  pas  subir  la  moindre 
influence  de  ces  noms  fameux  et  retentissans  qui  alloient,  quel- 
aues  années  plus  tard,  conduire  la  France  à  la  transformation 
de  tous  les  élémens  de  son  ancienne  constitution  politique, 
morale  et  religieuse.  Nos  Bénédictins  n'auroient  pas  autrement 
écrit,  jugé  et  pensé,  s'ils  avoient  appartenu  à  la  génération  des 
Sirmond,  des  Du  Gange,  des  Baluze  et  des  Mabillon.  Cet  éloi- 
gnement,  je  dirois  volontiers  cette  ignorance  du  mouvement  et 
des  tendances  de  leur  siècle,  devoit  grandement  nuire  au  succès 
et  à  la  juste  appréciation  de  leurs  ouvrage;  s'ils  avoient  alors 
obtenu  de  leurs  contemporains  un  plus  juste  tribut  d'éloges  et 


—  i  — 

d'admiration,  on  peut  assurer  qu'ils  ne  le  niériteroient  plus  et 
qu'ils  ne  l'obtiendroient  pas  aujourd'hui  :  tant  il  est  vrai  (ju'il 
faut  parfois  nous  défendre  de  régler  notre  pas  sur  celui  du 
siècle  où  nous  vivons.  Comment  auroit-on  rendu  pleine  justice  à 
la  grande  entreprise  de  nos  Bénédictins,  quand  Voltaire  et  les 
encyclopédistes  déclaroient  nettement  qu'il  n'y  avoit  rien  à 
retenir,  rien  à  louer,  rien  à  recommander  en  France  avant  le 
règne  de  Heni  IV?  que  nous  n'avions  pas  un  seul  écrivain  digne 
de  mémoire  avant  Malherbe,  et  que  le  véritable  patriotisme  datoit 
de  l'ère  despotiquef  du  cardinal  de  Richelieu?  C'est  avec  peine 
encore  que  nous  échappons  au  poids  séculaire  de  ces  préven- 
tions; mais  enfin  chaque  jour  nous  en  affranchit  davantage,  si 
bien  que  le  moment  nous  a  paru  favorable  pour  remettre  en 
lumière  cette  Histoire  littéraire  de  la  Frafice,  assurément 
un  des  plus  glorieux  monumens  de  la  critique  françoise. 

L'ouvrage,  disons -nous,  avoit  obtenu  peu  de  succès  en 
France  :  il  avoit  été  mieux  accueilli  dans  les  pays  étrangers,  et 
voilà  comment  les  exemplair-^s  en  sont  devenus  de  la  plus 
extrême  rareté.  On  peut  attribuer  à  la  difficulté  de  les  consulter 
le  peu  de  profit  qu  en  ont  su  tirer  jusqu'à  présent  les  auteurs 
de  nos  grands  Dictionnaires  historiques  et  de  nos  Biographies 
dites  universelles.  Ce  trésor  d'érudition  patiente  et  de  saine  cri- 
tique demeure  encore  aujourd'hui  caché,  je  ne  dis  pas  seule- 
ment aux  gens  du  monde,  mais  même  à  la  plupart  de  nos 
écrivains  les  plus  sérieux,  les  plus  considérables.  Une  seconde 
édition  devra  donc  produire  un  effet  plus  général  et  plus  utile 
que  n'avoitfait  la  première.  Car  nous  n'avons  plus  aujourd'hui, 
grâce  à  Dieu,  cette  ardeur  fébrile  qui  poussoit  le  xvni"  siècle 
à  la  recherche  de  voies  entièrement  nouvelles,  et  lui  faisoit 
regarder  avec  impatience  tout  ce  qui  l'obligeoit  à  rejeter  les 
yeux  sur  un  passé  qui  pouvoit  ralentir  son  enthousiasme. 
Nous  avons  entièrement  perdu  cet  entraînement;  nous 
consentons  à  reprendre  l'étude  du  passé  avec  des  préventions 
moins  défavorables.  Nous  admettons  que  le  moyen  âge  eut  son 
art  et  ses  artistes,  sa  philosophie ,  sa  littérature,  .ses  grands  pro- 
sateurs et  ses  grands  poètes  ;  autant  de  concessions  qui  auroient 
assurément  fait  sourire  de  pitié  la  critique  philosophique  du 
XVIII*  siècle.  Depuis  les  travaux  des  Guizot  et  des  Monta- 
lembert,  des  Raynouard ,  des  Victor  Le  Clerc ,  des  Léopold 
Delille  et  des  Du  Merii  ;  des  VioUet-le-Duc  et  des  de  Laborde,  on 


—  s  — 


conviendra  que  nous  avons  une  tout  autre  façon  d'apprécier  la 
littérature  et  l'art  des  prédécesseurs  de  Villon  et  de  Philibert 
de  Lorme. 


V Histoire  littéraire  de  la  France  comprend  en  ce  moment 
vingt-trois  volumes  in-4",  et  s'arrête  au  xiv*  siècle.  Les  douze 
premiers  volumes  sont  l'œuvre  des  Religieux  bénédictins  de 
la  Congrégation  de  Saint-Maur,  les  autres  ont  été  composés  par 
une  commission  de  quatre  écrivains  choisis  dans  le  sein  de  1  A- 
cadémie  des  Inscriptions.  Cette  commission,  plus  d'une  fois  re- 
nouvelée ,  en  raison  des  vides  que  la  mort  ne  cesse  de  creuser 
autour  de  nous,  a  réuni  les  noms  de  Dom  Brial ,  Daunou,  Pas- 
toret,  Ginguené,  Eméric  David,  AraauryDuval,  Petit-Radel, 
Fauriel,  Lajard,  Paulin  Paris,  Victor  Leclerc,  Emile  Littré, 
Ernest  Renan. 


Les  volumes  ainsi  publiés  sous  les  auspices  de  l'Académie 
des  Inscriptions  ne  sont  pas  encore  devenus  rares  ;  malgré  leur 
valeur  incontestable  et  généralement  reconnue,  la  difficulté  de 
réunir  les  douze  volumes  des  Bénédictins  a  singulièrement  nui 
à  la  vente  de  ceux  qui  les  continuoient.  Ces  nouveaux  volumes 
sont  d'ailleurs  la  propriété  de  l'Académie,  et  tant  que  la  pre- 
mière édition  n'en  sera  pas  épuisée ,  nous  nous  garderons  de 
solliciter  la  permission  d'en  publier  une  seconde. 


Notre  édition  de  l'oeuvre  des  Bénédictins  rappellera  tres- 
exaclemenl  la  disposition  et  même  la  pagination  de  la  pre- 
mière. Préfaces,  Avertissemens,  Discours  sur  l'état  des  Lettres, 
Tables  des  notices ,  Tables  des  matières ,  Tables  des  citations , 
Notes  et  Manchettes  marginales  ;  même  orthographe ,  même 
nombre  de  pages  formées  du  même  nombre  de  lignes,  et,  autant 
que  possible,  même  aspect  de  papier  et  de  caractères ,  voilà  ce 
qu'on  retrouvera  dans  les  deux  éditions  ;  car  nous  nous  sommes 
préoccupés  du  soin  de  remplacer  exactement  chacun  des  vo- 
lumes que  nous  réimprimions,  de  façon  à  ce  qu'on  ne  pût 
trouver  aucun  avantage  dans  la  première  sur  la  seconde,  et  que 
les  citations  indiquées  dans  les  ouvrages  où  l'on  a  mïsV  Histoi?'e 
littéraire  à  profit  pussent  être  vérifiées  avec  la  même  facilité 


—  «  — 


dans  la  nouvelle  édition  et  dans  la  précédente.  Les  seuls  chan- 

f;emens  que  nous  ferons  ne  seront  pas  de  nature  à  troubler 
'uniformité  de  la  disposition  générale  et  de  l'ancienne  pagina- 
tion. Ils  se  rapporteront  aux  points  suivans  : 


1*  Les  Bénédictins  avoient  placé  des  Errata^  ou  fautes  à 
corriger  et  additions  à  faire,  sur  les  derniers  feuillets  de  cha- 
cun de  leurs  volumes.  Ces  conections  sont  toutes  fort  courtes  ; 
elles  pourront  donc  être  remplacées  dans  le  corps  du  texte,  pour 
le  plus  grand  avantage  des  lecteurs. 


2"  Nos  auteurs,  toujours  désireux  d'améliorer  leur  ouvrage, 
ont  fait  suivre  ou  précéder  chaque  volume,  à  partir  du  second, 
d'additions  et  corrections  plus  développées  que  celles  des  errata; 
souvent  même  ils  sont  revenus  à  plusieurs  reprises  et  dans  plu- 
sieurs volumes  sur  certains  passages  d'un  précédent  volume. 
Nous  avons  cru  pouvoir  réunir  toutes  les  additions  et  correc- 
tions de  ce  genre  disséminées  dans  tout  l'ouvrage.  Gomme  ces 
additions  ou  ne  sont  pas  paginées,  ou  bien  ont  une  pagination 
particulière ,  leur  réunion  à  la  fin  du  volume  auquel  elles  se 
rapportent  ne  pourra  rien  changer  à  la  disposition  générale  de 
ce  volume. 


3°  A  ces  additions  ,  nous  réunirons  les  observations  que  le 
texte  de  l'ouvrage  nous  aura  suggérées.  Nous  aurons  grand  soin 
de  les  marquer  d'un  signe  qui  les  fera  aisément  distinguer  de 
l'œuvre  originale.  " 


Le  nouvel  éditeur,  membre  depuis  vingt-cinq  ans  de  la  com- 
mission académique  chargée  de  continuer  Y  Histoire  littéraire 
de  la  France,  ne  s'est  pas  proposé  de  modifier  ou  de  soumettre 
à  un  examen  rigoureux  la  grande  œuvre  des  Bénédictins.  La 
tâche  eût  été  certainement  au-dessus  de  ses  forces.  Il  s'est  enga- 
gé seulement  à  revoiries  textes  allégués,  à  réunir  et  coordonner 
les  additions  jusque-là  disséminées  dans  les  volumes  suivans, 
à  différentes  époques  ;  à  y  joindre  quelques  discrètes  rectifica- 


i 


lions  ;  à  continuer  jusqu'à  nos  jours  la  liste  des  anciennes  édi- 
tions, à  signaler  les  plus  anciens  textes  manuscrits  conservés 
dans  les  bibliothèques  publiques  et  particulières  :  partie  im- 
portante de  la  critique  bibliographique  que  Dom  Rivet  et  ses 
continuateurs,  ordinairement  éloignés  de  Paris,  n'avoient  guère 
osé  aborder.  Mais  il  ne  s'agissoit  pas  do  refaire  ou  de  compléter 
la  grande  œuvre  bénédictine  ;  on  s'est  donc  contenté  de  men- 
tionner les  travaux  plus  récents  qui  ont  apporté  quelque  modi- 
fication aux  jugemens  antérieurs,  ou  bien  ouvert  quelques  nou- 
veaux points  de  vue  dont  il  convenait  aujourd'hui  de  tenir 
compte. 


i 


HISTOIRE 


LITERAIRE 


DE  LA  FRANCE 


QUATRIEME   SIECLE   DE    L'EGLISE 


ETAT  DES  LE  TRES  DANS  LES  GAULES 


en  ce  Siècle. 


LE  siècle  où  nous  entrons ,  est  sans  contredit  plus  brillant 
pour  les  Sciences,  qu'aucun  autre  que  nos  Gaules  nous 
aient  encore  présenté,  et  qu'elles  nous  présenteront  de 
long-lems  dans  la  suite.  Ne  vous  atendez  pas  néanmoins 
à  y  voir  revivre  cette  beauté  dans  l'éloquence,  cette  élé- 
vation et  cette  délicatesse  dans  la  poësie,  cette  majesté  dans 


7'ome  f.  Scr.  Part. 


2  ETAT  DES  LETRES 

i'histoire,  en  un  mot,  ce  goût  tin  et  délicat  pour  les  Belles- 
Letres,  qui  a  fait  le  caractère  des  siècles  passés.  Non.  Le  règne 
d'Auguste  ne  reviendra  plus  ;  et  nul  autre  ne  nous  ramènera 
qu'imparfaitement  le  lustre  qu'il  donnaaux  sciences  et  aux  beaux 
arts.  A  cela  près ,  jamais  les  études  ne  furent  plus  florissantes 
iij.r.  cp.  <r..  p.  dans  nos  Gaules  qu'en  ce  siècle.  '  C'est  le  jugement  qu'en  ont 

f)orté  à  la  gloire  des  Gaulois,  les  étrangers  mêmes  qui  étoient 
eplus capables d'enjuger.  StudiaGalliarum,  disoitde  ce  tems- 
ci  S.  Jérôme,  quœ  vel  florentissima  sunt.  En  effet,  on  y  vit  les 
collèges  se  multiplier,  et  grand  nombre  d'illustres  Profes- 
seurs travailler  comme  à  l'envi  des  uns  des  autres  à  y  soutenir 
les  sciences,  et  à  étendre  leur  règne  dans  toutes  nos  principa- 
les villes.  De  sorte  qu'alors  les  Gaules  sembloient  être  deve- 
nues, comme  autrefois  Rome  et  Athènes,  une  pépinière  de  Sa- 
vans  ;  d'où  les  autres  provinces  de  l'Empire ,  oxy  les  sciences 
tomboient  sensiblement,  tiroient  souvent  des  Professeurs  de 
grammaire  et  d'éloquence.  Mais  avant  que  d'entrer  dans  le 
détail  d'évenemens  aussi  glorieux  pour  nôtre  nation,  il  est  de 
l'ordre  de  marquer  ce  qui  fraïa  les  voies  à  cet  heureux  progrès 
des  sciences  dans  les  Gaules. 

II.  L'ardeur  au'avoient  naturellement  nos  Gaulois  pour  les 
letres,  fut  sans  doute  ce  qui  contribua  le  plus  à  les  leur  faire 
cultiver  en  ce  siècle  avec  un  nouvel  éclat.  Mais  à  quelque  point 
qu'ils  eussent  pu  porter  cette  noble  inclination,  elle  auroit  été 
assez  stérile,  si  Dieu  n'eût  levé  les  obstacles  qui  en  auroient  em- 
pêché les  heureux  effets.  Ils  consistoient  d'une  part  ces  obsta- 
cles dans  le  trouble  et  les  ravages  que  les  Barbares  causoient 
dans  les  Gaules,  et  de  Tautre  dans  les  persécutions  et  la  tyran- 
nie que  les  Payens  exercoient  contre  nos  Eglises.  Ceux-là 
avoient  banni  de  nos  provinces  le  calme  et  la  tranquillité  si  né- 
cessaires aux  sciences  toujours  ennemies  du  tumulte.  Ceux-ci 
troubloient  nos  Evê(jues  et  les  autres  Ecclésiastiques  dans  les 
fonctions  de  leur  ministère,  et  les  simples  Fidèles  dans  l'exer- 
cice de  leur  religion.  La  divine  Providence  qui  a  toujours  des 
ressources  pour  remédier  aux  maux  de  ceux  qu'elle  protège, 
sut  lever  tous  ces  obstacles  d'une  manière  qui  mérite  d'être  ad- 
mirée. En  apellant  les  Empereurs  dans  les  Gaules  pour  y  faife 
leur  résidence  plus  ordinaire  pendant  tout  ce  siècle,  elle  en 
éloigna  les  Barbares  qui. les  troubloient,  et  en  convertissant  dès 
mêmes  Empereurs  à  la  foi  de  Jesus-Christ,  elle  donna  à  l'E- 
glise une  paix  charmante,  qui  ne  fut  troublée  que  par  la  guerre 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE.  3 

que  se  firent  les  Chrétiens  entre  eux  ;  mais  qui  bien  loin  de 
préjudicieraux  Sciences,  ne  fit  que  les  favoriser. 

III.  '  Constance  Chlore,  Prince  sage  et  religieux  selon  les  ^op.  ju.  cariu. 
principes  du  Paganisme,  vint  dès  la  fin  du  III  siècle,  comme 

vous  l'avez  vu,  fixer  son  séjour  à  Trêves.  Quoiqu'il  n'eût  pas 
encore  toute  l'autorité  souveraine,  il  ne  laissa  pas  d'établir  la 
paix  dans  les  Gaules,  et  d'y  faire  d'excellens  reglemens  pour 
la  police.  Il  y  ramena  même  l'ardeur  qu'avoient  les  Gaulois 
pour  les  letres,  et  que  les  incursions  des  Barbares  avoient  ou 
ralentie  ou  interrompue.  I^a  tranquillité  et  le  bon  ordre  qu'il 
y  établit  dès  la  fin  cfe  l'autre  siècle  et  au  commencement  de 
celui-ci,  y  furent  heureusement  maintenus  par  Constantin  son 
fils  et  son  successeur  à  l'Empire.  '  Ce  nouvel  Empereur  ne  son-  Tiii.  Kinj..  1. 1.  p. 
gea  qu'à  faire  régner  dans  ses  Etals  la  paix,  la  douceur,  la  po- 
litesse, l'équité.  Il  repoussa  et  vainquit  les  Barbares;  et  les  vic- 
toires qu'il  remporta  sur  eux  arêterent  pour  quelque  tems 
leurs  courses  dans  les  Gaules.  '  Il  semble  qu'il  eut  sa  Cour  et  p  '6«- 
son  Palais  à  Arles,  où  lui  naquit  en  316  un  fils  de  sa  femme 
Fauste.  '  Mais  il  faisoit  souvent  sa  résidence  à  Trêves,  lieu  du  pi"- 
séjour  ordinaire  de  Constance  son  père.  Vers  389  il  fit  réparer 
les  murailles  de  cette  Ville,  et  l'orna  de  plusieurs  édifices  pu- 
blics, qui  annonçoient  sa  magnificence.  On  y  voïoit  des  Ba- 
siliques, un  grand  Cirque,  une  belle  Place,  un  Palais  pour  la 
Justice  :  et  tout  cela  étoit  un  effet  de  sa  libéralité  impériale.  Ce 
qu'il  avoit  fait  en  faveur  de  la  ville  de  Trêves ,  '  il  le  fit  ensuite  p.  uo. 
pour  celle  d'Autun,  dont  il  répara  les  ruines  et  devint  le  se- 
cond Fondateur.  '  Tous  les  autres  endroits  par  où  il  passoit,  p.  m. 
soit  dans  les  Gaules  ou  ailleurs,  se  sentoient  des  effets  de  sa  gé- 
nérosité. Il  est  aisé  de  juger  par-là  du  lustre  que  prirent  nos 
Provinces  sous  son  empire. 

IV.  Mais  tout  cela  fut  peu  de  chose  en  comparaison  des 
avantages  qu'en  retira  le  Christianisme.  '  L'aparition  miracu-  p  '*«  'S'^- 
leuse  de  la  Croix,  dont  Dieu  gratifia  cet  Empereur  dans  les 
Gaules  mêmes,  et  dont  toute  gon  armée  fut  témoin  oculaire  ; 

la  conversion  de  ce  Prince  et  de  presque  toute  la  Famille  Im- 
périale qui  suivit  de  près  ;  les  victoires  qu'il  remporta  sur  ses 
ennemis  par  un  secours  particulier  du  Ciel  :  tout  cela  contri- 
bua beaucoup  à  y  assurer  la  tranquillité,  à  y  étendre  et  affer- 
mir la  Religion  Chrétienne.  '  Aussi  I^ctance  temoigne-t-il  i>  «"■ 
que  ce  fut  en  faveur  de  son  établissement,  que  Constantin  com- 
mença à  ùiàre  usage  de  sa  nouvelle  autorité,  et  qu'il  public  sa 

A  ij 


4  ETAT  DES  LETRES 

première  Ordonnance.  De  si  heureux  commencemens  ne 
pouvoient  avoir  que  d'heureuses  suites.  Nos  Gaulois  naturelle- 
ment studieux  se  voïant  jouir  d'une  tranquillité  si  désirée,  en 
surent  profiter  pour  faire  fleurir  tout  de  nouveau  les  sciences  , 
dont  ils  faisoient  profession  depuis  long-tems.  La  Théologie 
en  particulier  prit  chez  eux  de  nouvelles  perfections.  Elle  com- 
mença h  y  être  traitée  avec  plus  d'exactitude  et  de  profondeur 
que  jamais.  Le  grand  nombre  d'étrangers  que  la  Cour  Im- 
périale atiroit  dans  les  Gaules,  et  parmi  lesquels  il  se  trouvoit 
plusieurs  personnes  de  letres,  concourut  à  y  exciter  une  ému- 

Tiii.  Kmp.  t.  4.  p.  lation  merveilleuse  pour  les  sciences.  '  Le  célèbre  Lactance, 
que  Constantin  y  apella  pour  prendre  soin  des  Etudes  de 
Crispe  son  fils  aîné,  y  brilla  entre  tous  les  autres  par  son  esprit, 
ses  lumières,  sa  pieté,  son  savoir  et  ses  écrits. 

V.  Ce  que  fit  Constantin  en  faveur  des  sciences  en  parti- 
culier, contribua  encore  plus  directement  que  tout  le  reste  à 
étendre  leur  règne  dans  toutes  les  provinces  de  l'Empire  Ro- 
main. Comme  ce  Prince  étoit  lui-même  fort  savant,  il  ne  né- 
gligea rien  pour  inspirer  à  ses  Sujets  du  goût  pour  les  letres, 
et  leur  procurer  les  moïens  de  les  cultiver.  Divers  Empereurs 
depuis  long-tems  avoient  ataché  certains  privilèges  à  la  pro- 
fession de  Médecin  et  de  Rhéteur.  Mais  personne  n'étendit  da- 

cmi.  Tii.  i].,tj.  vantage  ces  prérogatives  que  Constantin.  '  Nous  avons  de  lui 
plusieurs  Loix  qu'il  publia  à  cet  efl'et.  Dès  321  il  ordonna  que 
les  Médecins,  les  Professeurs  des  Belles-Letres,  et  générale- 
ment tous  ceux  qui  enseignoient  la  jeunesse,  seroient  exems 
eux  et  leurs  biens  de  tout  impôt  ou  autre  charge  publique.  Qu'on 
seroit  exact  à  leur  païer  leur  salaire.  Qu'ils  ne  pourroient  point 
être  mis  en  justice.  Que  ceux  qui  leur  feroient  quelque  tort, 
païeroient  une  amende  très-considerable.  Qu'ils  pourroient,  si 
c'étoit  de  leur  goût,  être  élevés  aux  honneurs  de  la  Republi- 
que; mais  que  l'on  ne  pourroit  point  les  y  contraindre,  s'ils  y 
avoient  quelque  répugnance.  Par  une  autre  Loi  en  date  du  27 
de  Septembre  333,  le  même  Prince  étendit  ces  privilèges  d'im- 
munité jusqu'aux  femmes  et  aux  enfans  des  Médecins  et  de 
tous  les  Professeurs  des  Belles-Letres.  Le  motif  qu'il  aporte 
de  cette  exemption,  fait  voir  combien  est  louable  le  but  qu'il 
s'y  proposoit.  C'est,  dit-il,  afin  qu'ils  aient  plus  de  facilité  d'en- 
seigner à  un  plus  gratid  concours  d'Etudians  les  Arts  et  les 
Sciences  qu'ils  professent  :  Qiio  facilius  liberalibus  studiis 
memoratis  artibus  multos  instituant.  Rien  ne  pouvoit  mieux 


I    1.  o.  p.  i3.  27. 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE.  îi 

inspirer  une  noble  émulation  et  aux  Professeurs  et  à  ceux  qui 
étudioient  sous  eux. 

VI.  Nous  avons  observé  ailleurs  que  les  superstitions  fon- 
dées sur  l'Astrologie,  toujours  ennemies  de  la  vérité,  étoient 
fort  enracinées  dans  les  Gaules.  Constantin  voulant  les  détrui- 
re peu  à  peu  comme  un  reste  de  Paganisme,  '  fit  une  Loi  le  çod.  th.  9. 1.  ic. 
15  de  Mai  319  pour  défendre  sous  de  très-grieves  peines  de  '  '  ^' 
consulter  les  Aruspices  dans  aucune  maison  particulière,  ne  le 
permettant  qwe  dans  les  lieux  publics.  '  L'Empereur  Constan-  '■  *-^p-  "»  i  '•  ^^ 
ce  son  fils  alla  beaucoup  plus  loin  par  deux  autres  Loix  très- 
severes,  qui  tendoient  à  abolir  entièrement  toutes  ces  supersti- 
tions. La  première,  qui  est  du  25  de  Juillet  357  ,  condamne 
au  dernier  suplice  ceux  qui  auroient  consulté  les  Augures,  les 
Aruspices,  et  quelque  autre  sorte  de  Devins.  Par  l'autre  Loi , 
qui  est  en  date  du  13  de  Juillet  de  l'année  suivante,  Constance 
déclare  que  les  Magiciens,  les  Astrologues  ,  les  Augures,  et 
généralement  tous  ceux  qui  se  mêlent  de  deviner,  doivent  être 
regardés  comme  ennemis  du  genre  humain,  et  que  ceux  de  ce 
métier  qui  se  trouveront  à  la  Cour  d'un  Prince,  pourroient  être 
regardés  comme  criminels  de  leze-Majesté.  '  De  même  l'Em-  1.  »o. 
pereur  Valentinien  I,  étant  à  Trêves  en  370,  fit  à  son  tour  une 
autre  Loi  pour  ordonner  de  faire  le  procès  à  tous  les  Magi- 
ciens. Toutefois  malgré  des  Loix  aussi  rigoureuses,  il  ne  fut 
pas  possible  de  déraciner  entièrement  ces  foies  superstitions , 
tant  nos  Gaulois  y  étoient  attachés.  C'est  pourquoi  Valenti- 
nien fut  obligé  d'excepter  de  .son  Ordonnance  l'Art  des  Arus- 
pices, qu'il  déclare  n'avoir  pas  dessein  de  condamner  absolu- 
ment. 

VIL  '  Après  que  Constantin  le  Grand  eut  quitté  les  Gau-  ™-  "'•  p-  *^'' 
les  pour  passer  en  Illyrie  et  de-là  en  Orient,  il  envoïa  Con- 
stance son  fils  les  gouverner  vers  331  ou  332.  Et  lorsque  le  mê- 
me Empereur  eut  partagé  l'Empire  entre  ses  trois  fils ,  Con- 
stantin le  jeune  vint  pareillement  faire  son  séjour  dans  les  Gau- 
les, qui  lui  étoient  tombées  en  partage  avec  la  grande  Breta- 
gne, l'Espagne  et  une  partie  de  l'Afrique.  De  sorte  qu'avant 
le  milieu  de  ce  siècle  nos  Gaulois  virent  encore  au  milieu  d'eux 
une  Cour  Impériale  ;  ces  deux  Princes  y  ayant  fait  successive- 
ment leur  résidence  plus  ordinaire.  Mais  leurs  règnes  furent 
bien  differens  l'un  de  l'autre.  Constance  aïant  eu  le  malheur 
de  se  laisser  séduire  par  les  Ariens,  sembla  n'être  parvenu  à 
l'Empire  que  pour  troubler  l'Eglise  et  l'Etat  par  la  persecu- 


6  ETAT  DES  LETRES 

lion  ouverte  qu'il  exerça  contre  tous  ceux  qui  refusoient  de 
professer  l'Arianisme.  Vous  en  verrez  quelques  tristes  effets 
dans  la  suite.  Constantin  au  (contraire  toujours  in\iolablement 
ataché  à  la  foi  orthodoxe ,  ne  régna  en  quelque  sorte,  que 
pour  la  protéger  et  la  faire  régner  elle-même.  11  en  donna  des 

Aih.  apo.  in  At.  n.  marqucs  éclatantes  '  à  l'égard  de  S.  Athanase  le  ferme  soutien 

"'■  de  la  vérité.  Ce  grand  Evêqueaïant  été  exilé  à  Trêves,  Con- 

stantin l'y  reçut  avec  tous  les  témoignages  possibles  d'estime 
et  de  vénération,  et  eut  toujours  pour  lui  tous  les  égards  ima- 

Tiii.  11.  K.  i.  «.  ginables.  'Cet  exil  qui  dura  près  de  deux  ans  et  demi,  depuis 

■'"  ''•'■  la  fin  de  l'an  335,  ou  le  commencement  de  l'année  suivante , 

jusqu'au  17  de  Juin  338  ,  ne  put  qu'être  avantageux  pour 
l'Eglise  des  Gaules.  En  effet  les  grands  Hommes  ,  sur  tout  les 
Saints  Docteurs  de  l'Eglise  sont  comme  le  soleil.  Ils  ne  parois- 
sent  point  qu'ils  n'éclairent  les  lieux  où  ils  se  montrent. 

Emp.  ib.  p.  «ri.  VllI.  '  Constant  après  la  mort  de  Constantin  son  frère, 
dont  les  Etats  lui  étoient  tombés  en  partage,  vint  comme  lui 
habiter  et  gouverner  les  Gaules.  On  voit  par  plusieurs  Loix  et 
quelques  traits  de  la  vie  de  saint  Athanase,  qu'il  avoit  choisi  la 
Yille  de  Trêves  pour  son  séjour  ordinaire.  C'étoit  un  Prince 
fort  religieux,  ennemi  des  Païens,  des  Ariens  et  des  Dona- 
tistes.  Son  règne  fut  non  seulement  pacifique  ;  mais  il  procura 
encore  divers  avantages  et  à  l'Eglise  et  aux  Letrcs.  En  diver- 
ses occasions  ce  Prince  se  fit  un  mérite  de  consoler  celle-là 
des  afflictions  que  lui  causoit  l'Empereur  Constance,  et  fil 

p.  360.  5fii.  r.(i5.  voir  qu'il  aimoit  et  protegeoit  les  Savans.  '  11  apella  dans  les 
Gaules  Proëiese  Sophiste  très-celebre  à  Athènes,  mais  qui  pre- 
feroit  la  gloire  d'être  Chrétien  à  celle  de  posséder  la  belle  élo- 

Kiin.  p.  LW.  quence.  '  Eunape  son  Disciple  ne  rend  pas  justice  aux  Gaulois, 

en  disant  que  n'étant  pas  capables  d'estimer  l'esprit  et  l'éloquen- 
ce de  ce  Sophiste,  ils  se  contentèrent  d'admirer  sa  haute  tail- 
le, sa  bonne  mine  et  sa  patience  à  endurer  les  plus  grands 
fioids  de  leur  pais.  Proëresc  put  bien  être  dans  les  Gaules  un 
sujet  d'admiration  pour  ses  grandes  qualités  ;  mais  il  est  faux 
qu'il  s'y  trouvât  comme  dans  une  terre  où  l'on  n'auroit  su  ni 
priser  ni  cultiver  l'éloquence.  La  plupart  de  nos  villes  en  ce 
temps-là  auroient  pu  le  disputer  sur  ce  point  à  la  Grèce  mê- 
me. C'est  de  quoi  vous  aurez  des  preuves  suffisantes  avant  la 
fin  de  ce  discours. 

Tiii.  il),  p.  3.-.  IX. 'Cette  heureuse  tranquillité,  dont  avoient  joui  les  Gau- 
les pendant  plus  d'un  demi  siècle,  fut  malheureusement  trou- 


:vi8. 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE.  7 

blée  p5ir  la  mort  funeste  de  Constant.  Magnence  l'aïant  fait 
cruellement  massacrer  l'an  350,  envahit  ses  Etats,  et  y  exerça 
sa  tyrannie.  '  Dès  l'année  suivante  cette  révolte  fut  suivie  de  Tiu.iijid.  p.  370. 
l'incursion  des  AUemans,  qui  ravagèrent  nos  'principales  vil- 
les, et  les  réduisirent  en  un.état  déplorable,  ce  qui  dura  jus- 
qu'en 357.  '  Deux  ans  avant  cette  dernière  époque,  Julien  de-  p  «i  1  h.  e.  i.  e. 
puis  si  fameux  par  son  Apostasie,  aïant  été  envoie  dans  les  Gau-  ''' 
les  en  qualité  de  César  par  Constance  son  cousin,  y  rétablit  la 
paix,  et  les  délivra  des  ravages  qu'y  faisoient  sans  cesse  les  Bar- 
bares depuis  plusieurs  années.  D  abord  le  gouvernement  de  ce 
nouveau  Prince  parut  assez  favorable  à  l'Eglise  et  aux  Lelres. 
Il  rendit  généreusement  la  liberté  aux  Eglises,  en  les  affran- 
chissant de  la  tyrannie  des  Ariens;  '  et  aidé  des  sages  conseils  Emp.  ib.  p.  505. 
de  Saluste  Préfet  des  Gaules,  il  fit  beaucoup  de  bien  dans  le 
pais.  11  y  rétablit  la  justice;  il  y  fit  cesser  les  vexations  qu'y  exer- 
çoient  ses  Ministres  avec  inhumanité,  '  et  paroissant  lui-même  p  *'«• 
à  la  tête  d'une  troupe  de  Savans,  il  voulut  faire  voir  en  quel- 
que sorte  qu'il  n'avoit  procuré  la  paix  à  ses  Etats ,  que  pour 
pouvoir  s'apliquer  plus  tranquillement  à  cultiver  les  sciences. 
X.  Paris  qui  est  aevenu  depuis  la  capitale  du  Royaume  ,  et 
le  centre  des  Sciences  et  des  beaux  Arts  ,  '  éloit  alors  peu   de  p.  425. 
chose.  '  Il  avoit  néanmoins  des  Fauxbourgs  et  une  place  pour  Amm.  noi.  p.  4»o. 
ses  exercices,  à  peu  près  comme  Rome  son  champ  de  Mars , 
et  Conslantinople  son  Hebdomon.  '  Ce  fut  la  ville  que  Julien  tiii.  ibu. 
choisit  pour  sa  résidence  dans  les  Gaules  :  ce  qui  commença  à 
la  rendre  célèbre,  et  lui  procura  diverè  acroissements.  Avant 
que  ce  Prince  vfut  proclamé  Empereur  en  360  par  les  troupes 
qu'il  commandoit,   '  il  en  avoit  déjà  fait  comme  un  théâtre  de  p.  499. 
Savans.  Car  comme  il  s'y  apliquoit  à  la  Philosophie  d'une 
manière  particulière  ,  ceux  qui  faisoient  profession  des  Scien- 
ces, y  acouroient  de  toutes  parts.  '  Un  des  plus  fameux  qu'il  orib.  med.  coi.  pr. 
y  atira,  fut  le  Médecin  Oribase,  qui  s'y  fit  particulièrement  ''^*^^" 
(îonnoître  par  l'abrégé  des  Ouvrages  deGalien,  qu'il  y  publia , 
et  qui  servit  à  y  perfectioner  la  Médecine.  '  La  vie  dure  et  aus-  Jui.  misop.  p.  359. 
tere  que  Julien  en  qualité  de  Philosophe  menoit  dans  les  Gau-  ^^' 
les,  étoit  fort  du  goût  des  gens  du  Pais,  qui  n'aimant  que  les 
ocupations  sérieuses,  ne  connoissoient  point  la  folie  des  Théâ- 
tres, ni  les  crimes  abominables  qui  en  sont  les  saites  funestes, 
et  regardoient  comme  des  fous  et  des  furieux  ceux  qui  s'amu- 
feoient  à  danser.  C'est  le  témoignage  que  Julien  rend  lui-mê- 
me au  caractère  des  Gaulois  de  son  tems.  ,JJil..u^iC  .  . 


8  ETAT   DES   LETRES 

XI.  Mais  si  la  conduite  de  ce  Prince  parut  d'abord  favora- 
ble au  progrès  des  sciences  dans  nos  Gaules,  elle  leur  fut  in- 
comparablement plus  préjudiciable  dans  la  suite.  Il  est  hors  de 
doute  que  nos  provinces  se  ressentirent  comme  tout  le  reste  de 

Amm    1.  22.  p.  l'Empire,  '  de  cette  fameuse  mais  très-injuste  Ordonnance  , 
f\là'^\'ii!^'  *^'  qu'il  fit  pour  tâcher' d'éteindre  la  connoissance  des  letres,  et 
d'introduire  une  ignorance  entière  dans  tout  le  monde  Chré- 
tien. Non  seulement  il  défendit  d'y  enseigner  la  Grammaire 
et  la  Rhétorique  ;  il  fit  encore  défense  d'y  donner  des  leçons 
de  Médecine,  et  d'y  faire  les  fonctions  de  Sophiste  :  profession 
qui  consistoit  à  former  les  jeunes  gens  pour  les  mœurs  com- 
Tiii.  li.E.  1. 7.  p..  me  pour  l'éloquence.  '  Julien  fit  cette  Loi  dès  le  commence- 
3*4. 31.'..  ^gj^j  ^g  g^j^  empire  ;  et  elle  s'étendoit  même  jusqu'à  défendre 

aux  Chrétiens  d'aprendre  les  letres  humaines,  et  d'étudier  les 
Aiig.  civ.  1. 18.  c.  Auteurs  Païens  comme  les  autres.  '  Ce  n'est  donc  pas  sans  su- 
'"•  "■  ■  jet  que  S.  Augustin  comptoit  cette  fatale  défense  entre  les  plus 

cruelles  persécutions  que  l'Eglise  avoit  eu  à  souffrir  de  la  part 
des  Empereurs.  Mais  Dieu  dans  sa  miséricorde  abrégea  un 
règne  aussi  pernicieux  à  la  religion  qu'il  l'éloit  pour  les  letres, 
et  qui  ne  tendoit  qu'à  ramener  le  Paganisme  en  introduisant 
l'ignorance. 

XII.  Julien  aïant  été  proclamé  Auguste,  quitta  les  Gaules  ; 
mais  elles  ne  furent  pas  long-tems  sans  avoir  encore  une  Cour 
Impériale.  Valentinien  I  ,  Prince  severe  pour  le  maintien  de 
la  Discipline  et  du  bon  ordre,  les  choisit  pour  le  lieu  de  son  sé- 

Tiii.Emj).  1. 3.  p.  jour,  presque  aussi-tôt  qu'il  fut  pervenu  à  l'Empire.  '  Après 
avoir  passé  à  Paris  età  Reims  une  partie  des  années  365  et  366, 
il  alla  fixer  sa  résidence  à  Trêves,  où  il  passa  presque  tout  le 
reste  de  sa  vie.  Ce  fut-là  qu'il  apella  le  célèbre  Ausone  pour 

c.),i.  Ti|  13.  1.3.  instruire  le  jeune  César  Gratien  son  fils.  'Entre  les  louables 
Ordonnances  que  publia  cet  Empereur  pour  le  bien  de  l'Etat, 
il  y  en  eut  quelques-unes  en  faveur  des  letres  et  de  ceux  oui 
les  culti voient.  Une  des  premières  fut  pour  rendre  aux  Ecoles 
Chrétiennes  la  liberté  que  leur  avoit  ôtée  Julien  l'Apostat. 
Ainsi  dès  le  mois  de  Juin  364  il  ordonna  que  ceux  qui  au- 
roient  les  qualité.s  requises  pour  enseigner  la  Jeunesse,  c'est-à- 
dire  assez  de  politesse  et  de  probité  dans  les  mœurs,  et  une  élo- 
quence suffisante  ,  ou  reprendroient  l'exercice  de  leur  premiè- 
re profession  ,  ou  pourroient  ouvrir  une  nouvelle  école.  Quoi- 
Iue  les  Gaules  en  ce  siècle  l'emportassent  sur  Rome  pour  l'art 
e  l'éloquence,  nos  Gaulois  ne  laissoient  pas  de  fréquenter 

«rite 


I  li.  p.  :tj 


l 


DANS  LES  GAULES.    IV  SIECLE.  9 

cette  ville  pour  y  étudier  la  Jurisprudence  Romaine  :  ce  qui 
se  pratiqua  jusqu'au  V  siècle  inclusivement.  Valentinien  alen- 
(if  à  tout,  et  désirant  de  prévenir  tout  ce  qui  auroit  pu  rendre 
cette  sorte  d'étude  ou  infructueuse,  ou  moins  utile,  fit  une  au- 
tre ordonnance,  qui  contient  de  sages  reglemens  pour  la  jeu- 
nesse. '  Par  cette  loi,  qui  est  du  mois  de  Mars  370,  et  don-  ^oi.  .-is  ^  ^^ 
née  à  Trêves,  il  est  défendu  aux  étudiant  d'assister  trop  sou-  '''■  ''' 
vent  aux  spectacles,  et  de  se  trouver  fréquemment  aux  festins. 
De  plus,  injonction  leur  est  faite  de  vivre  dans  la  règle  et  la 
modestie,  qui  convient  à  ceux  qui  font  profession  des  arts  li- 
béraux, sous  peine  d'être  foûetés  publiquement  et  renvoies 
en  leur  pais. 

XIIL  '  Gratien  comme  son  père  fit  sa  demeure  ordinaire  à  ™-  ■'»  i'-  '♦*• 
Trêves  '  qu'il  qualifie  dans  une  de  sesloix  une  ville  très-illus-  co.i.  th.  i3.  i.  3 
tre ,  pour  avoir  été  le  lieu  du  séjour  de  tant  d'Empereurs.  Nul  •  •  p  ■ 
d'entre  eux  ne  fut  plus  favorable  aux  letres,  que  le  fut  ce  Prin- 
ce. Comme  il  avoit  été  parfaitement  instruit  par  un  des  plus  ha- 
biles hommes  de  son  siècle,  il  n'oublia  rien  pour  les  faire  fleu- 
rir, sur-tout  dans  les  Gaules.  Il  voulut  qu'il  y  eût  dans  toutes 
les  principales  villes  d'habiles  maîtres  pour  instruire  la  jeunesse, 
c'est-à-dire,  des  Rhéteurs  pour  l'éloquence,  et  des  Professeurs 
des  belles-letres  en  l'une  et  l'autre  langue;  la  Grécjue  et  la  La- 
tine. Et  afin  de  les  atacher  davantage  à  leur  profession,  il  leur 
assigna  des  apointemens  fixes  sur  son  épargne,  ne  voulant  pas 
que  leur  salaire  dépendît  du  caprice  des  villes  où  ils  ensei- 
gnoient.  C'est  ce  qu'il  régla  par  une  loi  célèbre  en  date  du  23 
de  Mai  376.  Après  que  le  Tyran  Maxime  eut  usurpé  le  titre 
d'Empereur,  et  envahi  les  Gaules  avec  quelques  autres  pro- 
vinces de  l'Empire,  il  choisit  encore  la  ville  de  Trêves  pour 
la  capitale  de  ses  états.  De  même  Valentinien  II,  aïant  défait 
ce  Tyran,  passa  aussi  les  dernières  années  de  sa  vie  dans  les 
Gaules.  '  Mallius  Theodorus  homme  docte  et  éloquent  en  étoit  xm.  ib.  p.  507. 
Préfet  vers  la  fin  de  ce  siècle.  Les  sciences  eurent  en  lui  un 
zélé  et  généreux  protecteur.  Non  seulement  il  favorisoit  les 
gens  de  letres  ;  il  se  faisoit  encore  «n  mérite  de  travailler  à  em- 
pêcher que  de  son  tems  et  dans  la  postérité ,  on  pût  se  plain- 
dre qu'il  y  eût  eu  de  son  vivant  plus  d'ignorance  et  moins  de 
personnes  habiles  que  dans  les  autres  siècles.  Tels  furent  les 
moïens  qu'emploia  la  Providence  pour  ranimer  en  celui-ci  l'an- 
cienne ardeur  des  Glaulois  pour  les  sciences,  eties  rendre  par- 
mi eux  plus  florissantes  que  jamais. 

Tom.  l.  Sec.  Part.  *  B 

2  * 


10  ETAT  DES  LETRES 

XIV.  Après  tout  cela  il  ne  doit  pas  vous  paroître  étrange , 
que  Trêves  entre  nos  autres  principales  villes  arrivât  alors  à  ce 
point  de  lustre  et  de  gloire,  auquel  nous  avons  commencé  à 
vous  la  représenter  dès  le  siècle  précèdent.  Rien  n'est  plus  pom- 
peux, quoiqu'il  puisse  y  avoir  quelques  traits  un  peu  flattés, 
que  le  Portrait  qu'un  Poëte  de  ce  tems-là,  qui  devoil  la  bien 

Ans.  urb.  c.  i.  p.  connoître,  nous  a  tracé  de  sa  splendeur.  Non  seulement  '  elle 

'^'''  passoit  alors  pour  la  sixième  ville  entre  les  plus  illustres  de  l'U- 

nivers, et  pour  la  force  de  l'Empire  à  qui  elle  fournissoit  et  les 

Mo».  V.  400.  411.  armes  et  les  autres  munitions  de  guerre  :  '  mais  elle  étoit  en- 
core regardée  en  quelque  sorte  au-dessus  de  Rome  même ,  et 
comme  la  mère  et  la  nourrisse  des  Jurisconsultes,  des  Ora- 
teurs et  de  toute  sorte  de  gens  habiles  à  remplir  les  premières 
{)laces  de  la  Robe  et  de  l'Epée.  Elle  avoit  son  Sénat  particu- 
ier ,  qui  paroît  avoir  été  une  compagnie  aussi  intègre  qu'au- 

V.  384.385.  guste,  éclairée  et  brillante.  '41  sembloit  même  que  la  nature 
conspirât  à  rendre  les  citoïens  de  cette  ville  propres  aux  gran- 
des choses,  en  leur  donnant  un  génie  aisé  et  des  mœurs  qui 
rapelloient  l'ancienne  sévérité  de  celles  des  Romains.  Pour 
l'éloquence  latine,  nous  avons  déjà  dit  ailleurs,  qu'elle  étoit 
à  Trêves  et  dans  le  pais  d'alentour  presque  ce  qu'elle  étoit  au- 
trefois à  Rome  même  ;  c'est  au  moins  l'idée  qu'en  donnent  les 
verssuivans: 

Te  clari  proceres,  tu  bello  exercita  pubes, 
A^mula  te  LatisD  décorât  facundia  linguiB. 
Quin  ctiam  mores,  et  lœtum  fronte  scvera 
Ingeniuai  natura  tuis  concessit  alumnis. 

S)m.  1. 9.  ep.  5i.  XV.  '  C'cst  sans  doute  à  Trêves  que  l'on  voïoit  cette  éco- 
le Gauloise  du  Palais ,  si  célèbre  dans  Symmaque.  Tout  le 
inonde  ne  convient  pas  de  sentiment  sur  la  nature  de  cette 
école.  Mais  il  paroît  assez  visiblement  que  ce  n'étoit  qu'un  lieu 
particulier  dans  le  l'alais,  où  pendant  la  résidence  des  Empe- 
reurs dans  les  Gaules  on  tenoit  les  assemblées  et  les  conféren- 
ces. 11  y  avoit  de  ces  sortes  de  lieux  pour  les  Questeurs  et  leurs 
Secrétaires.  Il  y  en  avoit  aussi  pour  les  autres  Officiers,  soit  de 
Finance  ou  de  Judicature.  Il  y  en  avoit  enfin  pour  le  conseil 
particulier  de  l'Empereur.  Cette  sorte  d'école  étoit  une  voie 

Amm.  1.  u.  propre  à  parvenir  aux  honneurs  et  aux  dignités.  '  Ammien 
Marcellin  nous  donne  à  entendre,  que  c'étoit  particulièrement 
les  Avocats  qui  en  soûtenoient  les  exercices.  Aussi  ne  vit-on 


► 


DANS  LES  GAULES.   IV  SIECLE.  li 

jamais  dans  les  Gaules  le  Barreau  plus  hanté  qu'il  l'étoit  alors. 
La  raison  en  est  bien  naturelle.  '  C'est  que  l'on  ne  montoit  aux  sir^  in  Enn.  p. 
dignités  de  la  République  et  du  Sénat,  qu'après  avoir  passé  par 
les  honneurs;  et  qu'on  n'arivoit  aux  honneurs  que  par  les  exer- 
cices du  Barreau.  C'est  de-là  qu'on  tiroit  ordinairement  les 
Consuls,  les  Gouverneurs  de  province,  les  Questeurs,  et  les 
autres  Officiers  à  qui  la  connoissance  des  letres  étoit  nécessai- 
res pour  les  fonctions  de  leurs  charges.  On  ne  trouve  rien 
dans  l'Histoire  touchant  la  Bibliothèque  du  Palais  Impérial  à 
Trêves.  Mais  il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  qu'il  n'eût  la  sienne, 
comme  avoient  les  autres  Palais  des  Empereurs  à  Rome  et  à 
Constantinople.  On  peut  juger  des  autres  par  celles  de  cette 
dernière  ville.  '  Elle  paroît  avoir  été  fort  considérable  sous  çod.  n^u.  t. 
l'Empereur  Valens.  Outre  le  Bibliothécaire  on  y  entretenoit 
sept  Scribes  ou  Copistes,  quatre  pour  le  Grec  et  trois  pour  le 
Latin,  afin  défaire  transcrire  les  livres  nouveaux  qui  parois- 
soient ,  et  de  reuouveller  les  anciens. 

XVI.  Comme  le  Barreau  étoit  une  pépinière  d'où  l'on 
tiroit  les  divers  Officiers  de  l'Empire  :  de  même  les  collèges 
étoient  des  séminaires  où  se  formoient  les  sujets  pour  le  Bar- 
reau. '  Le  collège  de  Trêves  étoit  sur-tout  florissant  en  ce  sié-  aus.  ib.  a.  403 
cle.  Ausone  qui  n'en  parle  que  comme  le  connoissant  par  lui- 
même  ,  assure  qu'on  y  enseignoit  alors  l'éloquence  avec  tant 
d'éclat  et  de  .succès  ,  qu'il  pouvoit  aller  de  pair  avec  la  fameuse 
école  de  Quintilien. 

Quos  praetextali  œlebris  facundia  ludi 
Gontulit  ad  veteris  prccoaia  Quintiliani. 

Dès  la  fin  du  dernier  siècle  vous  y  avez  vu  briller  quelques 
Orateurs  célèbres.  '  Au  commencement  de  celui-ci  il  y  en  Pan.  b.  p.  190. 2.10. 
parut  au  moins  un  autre,  qui  étoit  le  Panégyriste  ordinaire  de 
Constantin  le  Grand,  et  qui  faisoit  sans  doute  les  fonctions  de 
Professeur  de  Rhétorique.  La  présence  de  la  Cour  Impériale, 
et  celle  du  savant  Ausone ,  oui  après  avoir  enseigné  30  ans  les 
Belles-Letres  à  Bourdeaux,  lut  apellé  à  Trêves  pour  y  instrui- 
re le  jeune  César  Gratien,  purent  beaucoup  servir  à  inspirer 
dans  les  écoles  de  cette  ville  une  nouvelle  émulation  pour 
les  letres.  Mais  rien  n'y  contribua  davantage,  '  que  la  loi  cod.  tii.  3.  t.  3. 
que  Gratien  alors  Auguste  publia  en  faveur  de  l'instruction  de  la  ''  "  ''■  ^^'  *"' 
jeunesse  de  Trêves  en  particulier.  Afin  d'y  attirer  les  plus  ha- 

Bij 


404. 


233. 


C!:il.  pr 


if  ETAT  DES  LET«ES 

biles  Rhéteurs  et  Professeurs  des  Belles-Letres  tant  en  Grec 
qu'en  Latin,  il  ordonna  qu'ils  auroient  de  plus  grands  apoin 
temens  que  les  Professeurs  des  autres  villes,  et  qu'ils  leur  se- 

Aii^-.   ep.  is.  p.  roient  paies  sur  les  revenus  de  son  fisc.  '  Ausone  nous  fait  con- 

rtu-f.49.  noître  deux  de  ces  Professeurs  qui  enseignoient  alors  à  Trêves  : 

Harmonius  qui  passoit  pour  un  des  plus  savans  hommes  de  son 

siècle,  et  Ursule  qu'il  qualifie  l'illustre  Collègue  d'Harmonius. 

XVII.   Ce  fut  sans  doute  autant  la  réputation  où  étoient 

ces  écoles  que  la  qualité  de  Ville  Impériale  qu'avoit  Trêves , 

iiii^rop.  i.p.  3.  'qui  y  atira  vers  371  S.  Jérôme  et  Bonose  son  ami.  Le  mo- 
tif de  leur  voïage  paroît  avoir  été  ou  de  lier  connoissance  avec 
les  Savans  qui  y  brilloient,  ou  de  perfectionner  leurs  études 
*ur  ^'^'^  '  '"  qu'ils  venoient  de  finir  à  Rome.  '  Pendant  le  séjour  qu'ils  firent 
dans  cette  capitale  des  Gaules,  S.  Jérôme  y  copia  de  sa  propre 
main  deux  des  principaux  ouvrages  de  S.  Hilaire  de  Poitiers  : 
son  livre  des  Synodes,  et  son  Commentaire  sur  les  Pseaumes. 
Mais  le  progrès  dans  les  sciences  ne  fut  pas  le  seul  avantage 
qui  lui  revint  de  son  séjour  dans  cette  ville.  Il  en  retira  encore 
un  autre  beaucoup  plus  excellent.  Nous  entendons  parler  de 

op.  1.  p.  3.  sa  conversion.  '  En  effet  ce  fut  à  Trêves  qu'il  commença  à  sor- 

tir de  l'égarement  où  il  avoit  été  jusqu'alors,  et  à  vouloir  se 
consacrer  tout  entier  au  service  de  J.  C.  De-là  on  peut  légiti- 
mement conclure  que  le  libertinage  si  ordinaire  dans  les  au- 
tres collèges  en  tous  les  tems,  ètoit  banni  de  celui  de  Trê- 
ves, et  que  ceux  qui  le  hantoient,  comme  ceux  qui  se  mê- 
loient  d'y  enseigner,  n'inspiroient  pas  moins  le  goût  pour  la 

Coll.  Th.  13.  1.3.  pieté  Chrétienne  que  l'amour  pour  les  letres.  'Aussi  Tinten- 

I.  (•>.  p.  32.  ^Jqj^  ^pg  Empereurs  étoit-elle  que  les  Professeurs  préposés  pour 

instruire  la  jeunesse  dévoient  être  aussi  réglés  dans  leurs  mœurs, 
que  versés  dans  l'éloquence  :  vild  pariter  et  faciindid  idoneus. 

1  11.  p.  39.  u).  XVIII.  '  Selon  la  Loi  de  Gratien,  que  nous  avons  déjà  ci- 
tée ,  il  devoit  y  avoir  d'habiles  Professeurs  de  Rhétorique  et  des 
Belles-Letres,  tant  pour  le  Grec  que  pour  le  Latin  dans  toutes 
les  villes  les  plus  peuplées  de  nos  provinces:  Optimi  qtiique 
erudiendœprœsideai)i  jucentuti,  lihetores  loquimur  et  Gram- 
maticos  Atticœ  Romanœque  doctrinœ.  Cet  endroit  seul  suffit 
pour  faire  juger  que  le  nombre  des  collèges  étoit  alors  fort  grand 
dans  les  Gaules.  Mais  nous  ne  sommes  point  instruits  de  l'His- 
toire de  chacun  en  particulier.  Ce  qu'on  nous  aprend  de  quel- 
.  fi.  p.  32.  ques-uns,  se  réduit  à  peu  de  chose.  En  général  on  sait  '  qu'on  ne 
souifroit  point  que  personne  y  enseignât  qu'il  ne  fût  reconnu 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE.  13 

pour  homme  de  bien,  el  qu'il  ne  possédât  le  don  de  la  paro- 
le. On  n'y  voit  point  paroîlre  en  ces  premiers  siècles  aucun 
Professeur  ni  de  Philosophie  ni  de  Droit  Romain.  Ces  scien- 
ces ne  s'enseignoienl  encore  publiquement  qu'à  Rome  pour 
l'Occident  ;  et  ce  ne  sera  qu'après  les  premières  années  du  V 
siècle  que  vous  verrez  quelques  vestiges  de  leçons  publiques 
de  Philosophie  dans  les  Gaules.  En  celui-ci  l'on  s'y  bornoit  à 
donner  la  connoissance  des  Belles-Letres,  et  à  enseigner  l'é- 
loquence. Outre  les  Professeurs  qui  s'aquitoient  de  ces  fonc- 
tions dans  chaque  collège,  il  y  avoit  de  plus  un  Principal  ou 
Modérateur,  qui  enseignoil  quelquefois  lui-même,  et  un  Sous- 

{)rincipal.  Au  moins  les  choses  étoient-elles  ainsi  établies  dans 
e  collège  de  Bourdeaux. 

XIX.  Ce  collège  étoit  sans  contredit  un  des  plus  brillans 
que  l'on  vit  alors  dans  les  Gaules.  C'est  l'idée  qu  Ausone,  qui 
en  fit  un  des  plus  beaux  ornemens,  nous  en  donne  par  les 
éloges  qu'il  nous  a  laissés  des  Professeurs  qui  y  enseignoient 
en  ce  siècle.  Il  nous  en  fait  connoître  au  moms  une  trentaine , 
tant  Rhéteurs  que  Giammairiens,  Grecs  et  Latins ,  presque 
tous  d'un  mérite  distingué.  Par  le  terme  de  Grammairien, 
comme  nous  l'avons  déjà  remarqué  ailleurs ,  on  n'entendoit 
pas  simplement  alors  un  homme  qui  donne  des  préceptes 
pour  parler  et  écrire  correctement  une  langue.  On  y  ata- 
choit  une  idée  plus  relevée  ;  et  on  l'emploioit  pour  signifier 
un  Professeur  des  Belles-Letres.  C'est  pourquoi  l'on  donnoit 
quelquefois  à  ces  Grammairiens  les  noms  de  Philologues  ,  ou 
gens  d'érudition.  Le  collège  de  Bourdeaux  s'étoit  fait  une  ré- 
putation si  éclatante,  que  les  Savans  des  pais  étrangers  y  ve- 
noient  quelquefois  chercher  de  l'emploi ,  et  que  les  autres 
villes  des  Gaules  et  même  celles  de  Rome  et  de  Constanti- 
nople ,  vouloient  avoir  ou  de  ses  Professeurs,  ou  au  moins  de 
ses  Elevés  pour  enseigner  chez  elles.  Il  seroit  trop  ennuieux 
de  vous  faire  ici  le  dénombrement  de  tous  les  élevés  de  mé- 
rite, qui  sortirent  alors  de  ce  collège.  Vous  en  pourrez  re- 
morquer plusieurs  dans  la  suite  de  l'Histoire  de  ce  siècle  et  du 
suivant.  Il  paroît  par  ce  que  nous  en  trouvons  dans  Ausone  , 
que  le  collège  étoit  commun  et  aux  Chrétiens  et  aux  Païens , 
et  que  le  beau  sexe  y  prenoit  quelquefois  des  leçons  publi- 
ques. 

XX.  Vous  pouvez  sans  peine  vous  rapetler  qu'elle  étoit 
la  situation  et  de  la  ville  et  des  écoles  d'Autun  au  siècle  pré- 


14  ETAT  DES  LETRES     -^    ' 

cèdent.  En  celui-ci  il  paroît  que  l'on  avoit  rétabli  les  édifices 

Pan.  B.  p.  116.  du  collége.  '  Mais  on  n'avoit  point  encore  relevé  toutes  les 

p.  140. 1.  ruines  de  la  ville.  '  Cet  ouvrage  étoit  réservé  à  la  magnificen- 

ce et  à  la  générosité  de  l'Empereur  Constantin,  qui  en  331 
visitant  cette  ville,  lui  remit  une  partie  des  impôts,  afin  qu'- 
elle pût  être  en  état  de  travailler  à  son  parfait  rétablissement. 
Autun  sensible  à  une  faveur  aussi  signalée,  députa  Eumene  à 
Trêves,  pour  rendre  à  ce  Prince  par  une  pièce  d'éloquence 

p.  217.  n.  23.  les  actions  de  grâces  de  toute  la  Ville.  '  Ce  fut  par  les  soins 
que  prit  cet  illustre  Orateur  de  continuer  à  y  enseigner  la  Rhé- 
torique, que  le  collége  d'Autun  recouvra  son  ancienne  splen 
deur.  Dès-lors  plusieurs  de  ses  élevés  se  distinguoient  et  dans 
le  Rarreau  et  dans  les  premières  charges  de  l'Empire.  Il  est 
vrai  que  depuis  le  tems  d'Eumene  on  ne  trouve  plus  rien 
pour  l'Histoire  de  ce  collège.  Mais  s'il  ne  paroît  pas  avoir  si 
bien  soutenu  sa  réputation  pendant  tout  le  cours  de  ce  siècle 
que  celui  de  Dourdeaux,  il  a  au  moins  l'avantage  sur  ce  der- 
nier, d'avoir  commencé  avant  lui  à  devenir  célèbre.  l\  vous 
souvient  sans  doute  combien  il  l'étoit  sous  l'Empire  de  Tibè- 
re ,  et  même  dès  long-tems  auparavant ,  lorsque  nos  anciens 
Druides  faisoient  d'Autun  le  lieu  le  plus  ordmaire  de  leurs 
conférences  académiques . 

XXI.  A  Toulouse,  les  écoles  que  vous  y  avez  vues  établies 
aux  siècles  précédens,  étoient  llorissantes  en  celui-ci,  sur-tout 

Aus.  par.  c.  3.  p.  pour  l'art  de  bien  parler.  '  Ausone  qui  en  son  jeune  âge  y 
'  ■  "*■  avoit    étudié,   nous  aprend  qu'Arbore  son  oncle  maternel , 

après  avoir  plaidé  avec  réputation  devant  les  Préfets  des  Gau- 
les et  d'Espagne,  alla  enseigner  l'éloquence  dans  cette  ville 

prof.c.i7.  p.  177.  sous  l'empire  du  Grand  Constantin.  Après  Arbore,  '  Exu père 
autre  habile  Rhéteur  donna  aussi  des  leçons  de  Rhétorique 

c.  19. 179. 180.  dans  le  même  collége.  '  Sedatus  y  exerça  les  mêmes  fonctions 
vers  le  milieu  de  ce  siècle  ;  et  ses  enfans  après  lui  y  remplirent 

c.  17.  p.  177.  encore  une  chaire  d'éloquence.  '  De  Toulouse  Exupere  passa 
à  Narbone,  où  il  continua  d'exercer  sa  profession  de  Rhéteur  , 
et  où  il  eut  la  gloire  de  voir  au  nombre  de  ses  disciples  les 
Princes  Dalmace  et  Annibalien.  Presque  au  même  tems  qu'- 

c.  18.  p.  178.  Exupere  y  donnoit  des  leçons  d'éloquence,  '  Marcel  y  ensei- 
gnoit  les  Belles-Letres.  Quoique  l'antiquité  ne  nous  apren- 
ne  pas  autre  chose  de  ce  collége,  on  ne  doit  pas  douter  qu'il 
ne  répondît  à  la  réputation  de  la  ville,  l'une  des  plus  peuplées 

e.  ao.  p.  180. 181.  et  des  plus  illustres  des  Gaules.  Il  en  faut  dire  autant  '  d'Auch 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE.  15 

dans  la  Novempopulanie,  où  l'on  ne  voit  paraître  en  ce  siè- 
cle qu'un  seul  Professeur  de  Rhétorique,  mais  qui  passoit  pour 
un  très-savant  homme,  et  qu'Ausonc  regardoit  comme  son 
père  et  son  Maître. 

XXIL  Si  jusqu'ici  Poitiers  n'avoit  point  eu  d'écoles  pu- 
bliques pour  l'instruction  de  sa  Jeunesse,  il  en  eut  au  moins 
vers  le  milieu  de  ce  siècle.  Avant  que  Gratien  eût  donné  la 
loi  dont  nous  avons  parlé,  touchant  l'institution   des   Pro- 
fesseurs ,  on  y  voïoit  comme  dans  les  plus  grandes  Villes ,  une 
chaire  pour  les  Belles-Letres  et   une  autre  pour  l'éloquen- 
ce. 'La  première  étoit  remplie  par  un  certain  Anastase,  qui  prof.  c.io.  piu;). 
n'aïant  qu'un  fort  médiocre  savoir ,  ne  s'y  fit  pas  beaucoup  de 
réputation.  'Le  Rhéteur  Rufus,  qui  n'étoitguéres  plus  habile  ep.  si.p.  3«. 
qu'Ana.stase,  ocupoit  la  chaire  d'éloquence  sans  la  remphr. 
Mais  il  ne  faut  pas  juger  du  mérite  de  ce  collège  par  celui 
de  ces  deux  Professeurs.  L'éloquence  que  l'on  vit  en  S.  Hilai- 
re  de  Poitiers,  est  une  preuve  que  l'on  faisoit  de  bonnes  étu- 
des dans  cette  ville  dès  le  commencement  du  siècle.  '  Quel-  Kga».  Bhi.  t.  i.p. 
ques  Ecrivains  modernes  prétendent  que  ce  Saint  avant  son  "  ^' 
Episcopat  y  avoit  enseigné  lui-même  les  Belles-Letres  ,    et 
formé  plusieurs  disciples,  qui  se  rendirent  célèbres  dans  la 
suite.  Mais  c'est  ce  que  l'on  avance  sans  aucune  preuve  certai- 
ne. Vers  la  fin  de  ce  siècle  '  on  trouve  des  vestiges  d'un  col-  Aus.  ep.  i-i.  p. 
lége  à  Angoulême  ,  dont  l'origine  remonte  sans  doute  plus  ^^' 
haut.  Tétrade  qui  avoit  un   talent  particulier  pour  la  poésie 
satyrique  ,  y  faisoit  les  fonctions  de  Professeur  des  Belles-Le- 
tres.   Quoique  l'Histoire  de  ce  siècle  ne  nous  aprene  rien 
des  autres  collèges  autrefois  si  fameux  à  Marseille  ,  à  Arles , 
à  Lyon  ,  à  Besançon  ,  il  ne  faut  pas  croire  pour  cela  qu'ils 
en  fussent  moins  brillans,  encore  (')  qu'on  y  eût  cessé  d'ensei-  m'eut-éirefaut-a 

gner.  liie:i:aeoremoiai. 

XXIIL    En  général  les  écoles  Gauloises  étoient  alors  si 
célèbres  ,  que  les  pais  étrangers,  où  l'on  cultivoit  même  les 
études  avec  le  plus  de  soin  ,  en  tiroient  souvent  deâ  Profes- 
seurs pour  soutenir  la  gloire  de  leurs  collèges.  '  On  sait  que  Prof.  c.  i  i  Hior. 
Patere  ,  l'un  de  nos  plus  illustres  Rhéteurs  de  la  fin  de  l'em-  *p-  ''^  "*''•  p  *'^' 
pire  de  Constantin  le  Grand  ,  enseigna  à  Rome  où  il  forma 
plusieurs  grands  hommes  à  l'éloquence,  Doctor  potentum  Rhe- 
torum,  dit  Ausone.  '  Quelque  tems  après  vers  353,  Tiberius  Hi.>r.  chr.  i.  2.  p. 
Victor  Minervius,  après  avoir  donné  des  leçons  publiques  de  *8*IAns.ibid.c.i. 
Rhétorique  à  Gonstantinople ,  alla  continuer  la  même  profes- 


i(î  ETAT  DKS  I.KTIIKS 

Ans.  par.  c.  3.  p.  sioii  à  Houic ,  OU  il  s'aoquit  une  très-gi-andc  rôpulalidii.  '  .Ivui- 
"*■  lius  Magnus  Arborius  l'ut  aussi  apcllé  à  Constanlinofilc  par 

l'Empereur  Constantin,  pour  instruire  les  Princes  ses  enl'ans. 
Aiig.  conf.  1. 1.  c.  'A  Rome  on  vit  encore  une  chaire  d'éloquence  remplie  par 
21!  noiT    '     "'  Icaire  ou  Hiere,  homme  très-éloquent  en  <jrec  et  en  Lalm , 
Ans.  prof.  c.  19.    st  lUs  de  Théodorc    Secrétaire  d'Etat,  illustre  Gaulois.  'Les 
enfans  du  Rhéteur  Sedatus  enseignoient  aussi  la  Rhétorique  à 
Rome,  lorsqu'Ausone  faisoit  l'éloge  de  leur  père.  C'est  selon 
syiii.  1. 9.  ep.  83.  (QQte  aparcuce  sous  Minervius  '  que  le   célèbre  Symmaque 
l'Orateur  se  forma  à  l'art  de  bien  parler.  A  cette  ocasion  Sym- 
maque se  déclare  grand  partisan  de  l'éloquence  Gauloise  et 
allie  de  nos  écoles.  Il  a  même  cru  devoir  aprendre  à  la  pos- 
térité ,  qu'il  étoit  redevable  de  tout  ce  qu'il  avoitd'élo(|uence 
à  ce  vieux  Professeur  d'Aquitaine,  comme  il  le  nomme, 
•i»"'-  XXIV.  '  Symmaque   au   même  endroit  parle  avec  éloge 

d'un  autre  savant  Gaulois,  dont  il  ne  nous  a  pas  conservé  le 
nom,  mais  qu'il  désigne  assez  clairement  comme  différent 
d'Ausone  pour  qui  on  le  pourroit  prendre.  Cet  Anonyme  étoit 
chargé  de  l'instruction  d'un  jeune  Empereur  plusieurs  années 
avant  la  fin  de  ce  siècle ,  ce  qui  ne  peut  mieux  s'entendre  que 
1.1.  ep.  1  88|i.  de  Valenlinien  II.  Quelque-tems  après  '  les  Gaules  donne- 
^^ip.  o     .b.ep.  ^^^^  encore  à  Rome  deux  habiles  Professeurs  de  Rhétorique: 
Pallade  dont  Symmaque  relevé  beaucoup  l'éloquence  ,  et  un 
autre  Gaulois  sans  nom,  qu'Eusebe  ami  de  Symmaque  avoit 
Aus.  prof.  c.  23.  apcllé.  '  Avaut  que  ces  Rhéteurs  enseignassent  à  Rome,  Dy- 
''■      ■  name  natif  de  Bourdeaux  profcssoit  les  Belles-Letres  à  Leri- 

da  en  Espagne.  Voilà  une  partie  des  grands  hommes  que 
fournirent  nos  écoles  en  ce  siècle,  pour  soutenir  celles  des 
pays  étrangers.  Mais  si  l'antiquité  ne  nous  fait  connoître  que 
ceux-là  ,  on  n'aura  pas  de  peine  à  croire  qu'il  y  en  eut  beau- 
coup d'autres  qui  eurent  le  même  avantage,  et  que  les  révo- 
lutions de  tant  de  siècles  ont  dérobés  à  notre  connoissance.  De 
cet  empressement  des  pais  /-trangers  à  tirer  de  nos  écoles  tant 
de  Professeurs  de  Belles-Letres,  il  s'ensuit  naturellement  qup 
la  réputation  de  ces  collèges  devoit  atirer  dans  les  Gaules 
grand  nombre  d'Etudians  de  toutes  les  diverses  Provinces  de 
l'Empire.  De  sorte  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  que  plusieurs 
autres  étrangers  passionnés  pour  les  letres,  n'imitassent  saint 
Jérôme  et  Bonose  son  compagnon,  que  vous  avez  vus  venir 
à  Trêves  hanter  nos  Savans. 

XXV.  Après  tout ,  ce  n'est  encore  là  que  le  moindre  en- 
droit 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE  17 

droit  par  où  l'on  peut  connoître  le  mérite  éclatant  des  éco- 
les Gauloises  en  ce  siècle.  Pour  en  prendre  quelque  juste  idée, 
il  faut  entrer  dans  le  détail  des  poètes,  des  orateurs  et  autres 
grands  hommes  de  letres  qu'elles  formèrent  pour  leur  pro- 
pre pais.  Entre  les  orateurs  on  vit  briller  dès  le  commence- 
ment du  siècle  Eumene,  cet  illustre  modérateur  du  collège 
d'Autun,  et  l'orateur  anonyme  panégyriste  ordinaire  du  Grand 
Constantin,  qui  reviennent  encore  ici  l'un  et  l'autre  sur  les 
rangs.  Peu  de  tems  après,  Nazaire,  qui  avoit  une  fille  qui  no 
lui  cédoit  en  rien  dans  l'art  de  bien  parler,  se  fit  beaucoup 
de  réputation  par  son  éloquence.  Tiberius  Victor  Minerviu.s 
étoit  non-seulement  un  très-habile  rhéteur;  il  excelloit  en- 
core pour  le  panégyrique,  et  possedoit  tous  les  talens  qui  font 
les  bons  orateurs.  De  même  Censorius  Atticus  Agrœcius  pas- 
soit  pour  un  des  hommes  d'éloquence  le  plus  acompli  qu'on 
vît  dans  les  Gaules  en  son  tems.  Alcime  qui  paroît  avoir  été 
le  panégyriste  de  Julien  l'Apostat  et  de  Saluste  préfet  des 
Gaules,  surpassoit  tous  les  autres  par  la  force  de  son  éloquen- 
ce. Claude  Mamertin  fils  d'un  autre  orateur  de  même  nom, 
fut  aussi  un  des  panégyristes  de  l'Empire.  Delphide,  selon  S. 
Jérôme,  fit  l'ornement  des  Gaules,  tant  par  son  éloquence, 
que  par  son  talent  pour  la  poésie.  Ausone  mérite  aussi  d'être 
compté  entre  les  bons  orateurs,  aussi-bien  que  Drepane  l'un 
des  panégyristes  du  Grand  Théodose.  Axius  Paulus  ami  d'Au- 
sone  n'étoit  pas  moins  bon  orateur  qu'habile  poète.  A  tous 
ces  orateurs  latins  joignez  l'orateur  grec  panégyriste  de  Con- 
stantin le  jeune. 

XXVI.  Nos  poètes  en  ce  siècle  n'étoient  ni  moins  nom- 
breux ni  moins  illustres  que  les  orateurs.  La  plupart  de  ceux- 
ci  se  mêloient  de  poésie  comme  d'éloquence.  Delphide  com- 
mença dès  sa  plus  tendre  jeunesse  à  faire  des  vers,  et  rempor- 
ta la  palme  pour  la  poésie  à  un  âge  peu  avancé.  Alcime  étoil 
encore  un  excellent  poète.  Citarius,  qui  étoit  de  Sicile,  mais 
qui  enseignoit  à  Bourdeaux,  s'acquit  la  réputation  de  poète 
comparable  à  Simonide  pour  la  beauté  de  ses  poésies  gréques. 
L'Empereur  Gratien,  que  nos  Gaules  sont  en  droit  de  regar- 
der comme  l'un  de  leurs  plus  illustres  élevés,  et  qui  gavoit 
manier  la  plume  comme  l'épée,  ne  réûssissoit  pas  moins  à  faire 
des  vers  qu'à  remporter  des  victoires.  Syagre  qui  fut  consul  en 
382,  passoit  aussi  pour  un  poète  célèbre.  Axius  Paulus  excel- 
loit dans  le  genre  de  pièces  dramatiques,  et  Tétrade  dans  la 

Tome  I.  See.  Par/.  Q 


là  ETAT  DES  LETRES 

Satyre.  Les  pièces  de  celui-ci,  au  jugement  d'Ausone,  étoient 
comparables  à  celles  de  Luciile.  Drépane  que  nous  avons 
compté  entre  les  orateurs,  n'avoit  pas  moins  de  talent  pour 
la  poësio,  que  pour  l'éloquence.  Procule  méritoit  encore  le 
litre  d'habile  poëte,  quoiqu'il  travaillât  plus  pour  sa  propre 
satisfaction  que  pour  le  public,  à  qui  il  avoit  de  la  peine  de 
communiquer  les  productions  de  sa  muse.  Theoii  qu'Ausone 
railloit  finement  quelquefois  sur  sa  muse  champêtre,  ne  laissa 
pas  de  passer  pour  assez  bon  poëte,  puisque  ses  pièces  étoient 
fort  du  goût  d'Ausone.  Mais  le  plus  connu  de  tous  nos  poè- 
tes de  ce  siècle,  et  celui  sur  lequel  nous  avons  de  quoi  porter 
un  jugement  assuré,  fut  Ausone  lui-même.  Nous  pouvons  en- 
core mettre  au  nombre  de  nos  poëtes  Gaulois  le  fameux  Ru- 
,(-•»•-  Tiicddose.  fin  ministre  d'État  sous  Tlu  odore  (*)  l'ancien,  pour  la  fable  de 
Pasiphaé  en  vers,  que  nous  croions  être  de  lui. 

XXVII.  Uuant  aux  historiens  qui  se  formèrent  dans  nos 
collèges  en  ce  iV  siècle  ,  on  n'en  connoit  que  très  -  peu  , 
quoique  le  nombre  en  ait  pu  être  considérable.  Nous  pou- 
vons cependant  y  comprendre  Eutropc,  qui  nous  a  laissé  une 
histoire  romaine,  et  (]ue  nous  montrerons  avoir  été  Gaulois. 
Les  fastes  consulaires  d'Ausone,  ses  éloges  des  professeurs  de 
Bourdeaux,  avec  ceux  des  principales  personnes  de  sa  famil- 
le, et  les  quatrains  sur  les  vies  des  Empereurs,  depuis  Jules 
César  jusqu'à  son  tems,  méritent  à  leur  auteur  le  titre  d'his- 
torien. On  croit  aussi  qu'Alcime  fut  l'historien  de  Julien  l'A- 
postat; quoiqu'il  y  ait  plus  d'aparence  qu'il  ne  fut  que  son 
panégyriste.  On  peut  joindre  à  ce  peu  de  nos  historiens  de 
ce  siècle,  S.  Severe  Sulpice  et  Protade  qui  commencèrent  à 
y  fleurir,  et  qui  dès  ce  tems-là  entreprirent  le  dessein,  l'un  de 
son  histoire  sacrée',  l'autre  d'une  histoire  des  Gaules,  dont 
on  ignore  l'issue.  Pour  ce  qui  est  des  médecins,  on  ne  nous 
a  conservé  la  mémoire  que  d'un  très-petit  nombre.  Il  est  néan- 
moins certain  d'ailleurs  que  nos  anciens  Gaulois  étoient  fort 
adonnés  à  la  médecine.  Outre  Julius  Ausonius  père  du  poêle- 
Ausone,  et  le  premier  médecin  de  l'Empereur  Valentinieii  I, 
ce  siècle  ne  nous  présente  qu'Avitien  son  autre  fils,  homme 
d'esprit ,  mort  à  un  âge  peu  avancé,  et  Marcel  surnommé 
l'Empirique.  Mais  comme  ce  dernier  vécut  jusques  dans  le 
siècle  suivant,  nous  y  renvoions  son  histoire. 

XXVIIL  A    tous    ces   grands   ijommes  que  nos  collèges 
formèrent  en  ce  siècle  pour  la  république  des  letres,  nous 


DANS  LES  GAULES.   IV  SIECLE.        V^ 

en  pouvons  joindre  divers  autres,  qui  pour  n'avoir  pas  porté 
les  titres  pompeux  de  poëte  et  d'orateur,  n'en  ont  pas  moins 
fait  d'honneur  à  leur  patrie  par  leur  éloquence  et  leur  savoir. 
'  Arbore  aïeul  maternel  d'Ausone  étoit  habile  astronome,  et  Ans.  p;».  c 
possedoit  par  conséquent  les  Matliémaliques.  '  Nepolien  qu'-  Pros.  c.  i:;. 
Ausone  nous  donne  pour  un  célèbre  riiéteur,  avoit  aussi  la 
réputation  de  grand  philosophe.  '  Tibericn  qui  étoit  d'Aqui-  iiiei .  cin-.  p.  i«i  i 
taine,  et  qui  fut  préfet  des  Gaules  en  337,  passoit  pour  un  0'"'"- "i^"^'- 1"'*- 
des  plus  éloquens  hommes  de  son  siècle.  '  Salusle,  autre  pré-  Amm.  i.  21.   p. 
fet  des  Gaules  sa  patrie  sous  Julien  l'Apostat,  s'y  fit  admirer  4'*,'.  Tili. '''"''  '' 
par  la  connoissance  qu'il  avoit  des  loix,  et  par  ses  ordonnances 
pleines  d'équité.  '    Hellesponce  philosophe   Gaulois  mériloit  Eunap.  p.ass.an. 
au  raport  d'Eunape  le  second  rang  entre  tous  les  sophistes 
de  son  tems,  n'y  aiant  au-dessus  de  lui  que  le  seul  Chrysan- 
te.  '  Victorius  sousprincipal  du  collège  de  Bourdeaux  avon  aus.         r.  aa. 
tout  ce  qui  est  nécessaire  pour  faire  un  savant,  s'il  avoit  eu 
plusdegoûlet  de  discernement  dans  son  genre  d'étude.  '  Théo-  Amm.  1.  '«>.   p. 
dore  secrétaire  d'Etat  fut  toujours  par  son  savoir  et  ses  autres  "'*"■  ■'^■'' 
grandes  qualités,  au-dessus  de  toutes  les  dignités  ausquelles 
il  fut  élevé.  '   L'Empereur  Valcntinien  il,  l  un  des  plus  il-  Sjm.  1. 1.  .p.  .io. 
lustres  élevés  de  nos  (iaules,  qui  l'eurent  ensuite  pour  Sou- 
verain ,  avoit  beaucoup  d'éloquence  ,    et  avoit  acordé  aux 
muses  une  place  honorable  dans  son  palais.  Mais  vous  ju- 
gerez encore  mieux  du  mérite  de  tous  ces  grands  hommes, 
lorsque  vous  verrez  leurs  éloges  en  entier  dans  le  cours  de 
cette  histoire. 

XXIX.  Aussi  ne  faisons-nous  que  vous  les  indiquer  dans  ce 
discours.  En  voici  néanmoins  deux  sur  lesquels  nous  ne  devons 
pas  passer  si  légèrement,  aïant  diverses  choses  à  dire  sur  leur 
sujet,  qui  ne  reviendront  |)lus  dans  la  suile.   '  C'est  Phroné-  Amm.  1.  ■m.  p. 
me  et  Euphrase  tous  deux  Gaulois ,   qu'Ammien  Marcellin  "'"' 
nous  représente  comme  deux  hommes    très-recommandables 
pour  la  grande  connoissance  qu'ils  a>  oient  des  sciences  et  des 
beaux  arts,  Institutis  bonarum  artium  spectntissimi.  Sans  nous 
faire  connoître  autrement  l'honneur  qu'ils  firent  aux  letres  ,  il 
nous  aprend  que  Phronéme  après  l'inva-sion  de  Procope  fui 
élevé  à  la  dignité  de  préfet  du  Prétoire  de  Constanlinople  à 
la  place  de  Césaire,  et  qu'Euphrase  fui  établi  maître  des  of- 
fices.  'Ces  deux  Gaulois  ne  turent  pas  long-tems  sans  porter  i'- »''• 
la  peine  de  leur  rébellion  ,  en  s'atachant  à  un  usurpateur  de 
l'Empire.  Us  furent  exilés  dans  les  Gaules  et  abandonnés  à  la 

Cij 


20  ETAT  DES  LETRES 

discrétion  de  Valentinien  I.  Euphrase  toutefois  obtint  sa  grâ- 
ce. Mais  il  n'y  en  eut  point  pour  Phronéme,  parce  qu'il  avoil 
eu  part  aux  bonnes  grâces  de  Julien  l'Apostat  ;  et  il  fut  relé- 
gué dans  la  Chersonese.  Nous  ne  disons  encore  rien  des 
grands  Hommes  de  letres  ,  qui  parurent  dans  l'Eglise  des 
Gaules.  Nous  reservons  à  le  faire  plus  à  propos,  loi-sgue  dans 
peu  nous  vous  exposerons  l'état  de  cette  Eglise  en  ce  siècle. 

XXX.  Vous  jugez  sans  peine  que  tant  de  savans  en  tout 
genre  de  literature  ont  dû  laisser  à  la  postérité  quantité  de 
monumens  de  leur  savoir.  Votre  jugement  est  juste,  et  quoi- 
que nous  n'aïons  pas  connoissance  de  tous  ceux  qu'ils  ont  lais- 
sés, ce  que  nous  en  connoissons,  suffit  pour  le  justifier.  Mais 
il  ne  nous  reste  que  très-peu  de  ces  précieux  monumens.  Ou- 
tre l'histoire  d'Eutrope  et  le  recueil  des  œuvres  d'Ausone, 
.ious  n'avons  de  ce  siècle  en  genre  de  literature  profane,  que 
quelques  panégyriques.  On  nous  en  a  conservé  deux  de  l'ora- 
teur Eumene,  qui  sont  les  deux  derniers  qu'il  prononça  ;  les 
deux  autres  de  cet  orateur  apartenant  au  III  siècle,  comme 
nous  l'avons  déjà  dit.  Nous  avons  encore  deux  autres  pané- 
gyriques d'un  Anonyme  à  la  louange  de  Constantin  le  Grand, 
et  un  troisième  de  Nazaire  à  la  louange  du  même  Empereur. 
L'Antiquité  nous  a  aussi  transmis  l'oraison  funèbre  de  Con- 
stantin le  jeune,  prononcée  en  Grec  par  un  Anonyme  d'Ar- 
les. 11  est  encore  venu  jusqu'à  nous  deux  autres  panégyriques  : 
l'un  de  Claude  Mamertin  panégyriste  de  Julien  l'Apostat,  et 
l'autre  de  Latinus  Pacatus  Drepanius  panégyriste  de  Théo- 
dose l'ancien.  Ce  n'est  là  que  la  moindre  partie  de  toutes  les 
productions  de  la  plume  de  nos  savans  Gaulois  en  ce  siècle. 
Vous  en  allez  être  convaincu  par  le  dénombrement  de  celles 
que  nous  savons  s'être  perdues,  sans  parler  de  celles  que 
nous  ne  connoissons  pas. 

,XXXI.  L'orateur  Nazaire  avoit  prononcé  au  moins  un  autre 
panégyrique  qui  ne  paroît  plus  aujourd'hui.  Il  ne  nous  reste  rien 
des  poésies  gréques  et  latines  de  Citarius,  ni  de  celles  d'Alcime> 
non  plus  que  des  pièces  d'éloquence  de  ce  dernier,  sur-tout  cel- 
les où  il  louoit  l'Empereur  Julien  et  Saluste  préfet  des  Gaules, 
Jule  Ausone,  Sibure  et  Eutrope  avoient  fait  quelques  écrits  sur 
la  médecine,  qui  nous  manquent  comme  les  précedens.  Nous 
avons  aussi  perdu  les  diverses  poésies  de  Procule  et  de  Theon. 
De  même  l'on  ne  voit  plus  rien  de  celles  de  l'Empereur  Gratien, 
qui  se  délassoit  quelquefois  des  travaux  de  Mars  par  les  dou- 


DANS  LES  GAULES.   IV  SIECLE.         21 

ces  ocupations  des  Muses.  L'Antiquité  s'est  contentée  de  pro- 
liter  des  poésies  d'Afranius  Syagrius,  sans  nous  en  avoir  con- 
servé aucunes,  non  plus  que  des  pièces  dramatiques  d'Axius 
Paulus,  et  de  ses  harangues  ou  déclamations.  Il  y  avoit  au- 
trefois des  satyres  de  Tétrade,  que  l'on  ne  trouve  plus  nulle 
part.  Grégoire  Préfet  des  Gaules  avoit  publié  quelques  pièces 
d'éloquence  fort  louées  par  Symmaque,  mais  que  nous  n'a- 
vons point.  Il  s'est  encore  perdu  plusieurs  letres  et  diverses 
poésies  du  poëte  Ausone.  Il  nous  manque  aussi  les  fastes  qu'il 
avoit  composés  et  conduits  jusqu'à  son  tems.  Nous  n'avons 
point  non  plus  quelques  pièces  de  poésie  qu'avoit  laissées  l'o- 
rateur Drepane.  A  tous  ces  ouvrages  perdus  ajoutons  enco- 
re les  poésies  profanes  de  S.  Paulin  de  Noie  avant  sa  péni- 
tence, et  le  panégyrique  de  l'Empereur  Théodose,  qu'il  com- 
posa dans  sa  retraite  avant  la  fin  de  ce  siècle. 

XXXII.  Vous  voïez  par  l'énumeration  de  tous  ces  écrits 
quel  étoil  le  génie  dominant  de  nos  Gaulois  de  ce  siècle  pour 
la  literature.  On  se  portoit  particulièrement  à  l'éloquence  et 
à  la  poésie.  L'une  et  l'autre  n'étoient  plus  ce  qu'elles  avoient 
été  dans  les  bons  siècles.  Elles  se  sentoient  considérablement 
aprocher  de  leur  vieillesse.  L'éloquence  ne  laissoit  pas  néan- 
moins de  conserver  encore  quelques  traits  de  sa  première 
beauté,  mais  elle  étoit  presque  entièrement  déchue  de  cet  air 
aisé,  de  cette  manière  de  s'exprimer  noblement,  de  ce  tour 
fin  et  délicat  qu'on  y  découvroit  autrefois  et  pour  les  pensées 
et  pour  l'arangement  des  termes.  De  même  la  poésie  conser- 
voit  encore  du  feu  et  de  l'élévation,  comme  il  paroît  par  quel- 

aues  pièces  d' Ausone,  sur-tout  par  sa  Moselle.  Mais  quelle 
ifférence  entre  les  vers  de  ce  poète  et  ceux  d'Horace  et  de 
Virgile  !  Quelle  douceur,  quelle  harmonie,  (quelle  délica- 
tesse dans  ceux-ci  !  Quelle  dureté,  quelle  mauvais  son,  quelle 
rudesse  dans  les  autres  !  L'histoire  est  le  genre  de  literature 
qui  se  soutint  le  mieux  en  ce  siècle.  11  avoit  à  la  vérité  déjà 
perdu  de  son  ancienne  majesté  ;  mais  il  ne  laissa  pas  de  rete- 
nir plus  de  ses  premières  beautés  que  tout  autre  genre  d'écri- 
re. C'est  de  quoi  il  est  aisé  déjuger  et  par  l'histoire  d'Eutrope, 
et  par  la  vie  de  S.  Martin  que  composa  Saint  Severe  Sulpice 
avant  la  fin  de  ce  siècle.  On  doit  porter  le  même  jugement 
du  style  épistolaire. 

XXXIII.  Vous  avez  aussi  sans  doute  observé  que  nos 
Gaulois  cultivoient  encore  avec  quelque  soin  la  langue  Gré- 


M!     n     !» 


p.  i.a.  *55. 


22  ETAT  DES  LETRES 

que.  11  y  en  avoil  des  professeurs  publics  dans  presque  toutes 
les  grandes  villes  des  Gaules.  11  est  certain  qu'à  Bourdeaux 
en  particulier  il  y  eut  des  chaires  pendant  tout  ce  siècle  pour 
des  grammairiens  grecs  comme  pour  les  latins.  On  trouve 
même  des  preuves  qui  font  juger  que  cette  langue  étoit  com- 
munément entendue  à  Arles;  puisqu'en  quelques  occasions  les 
orateurs  l'emploioient  en  parlant  en  public.  Pour  la  langue 
Latine ,  elle  étoit  encore  la  langue  vulgaire  dans  toutes  nos 
Gaules.  Les  femmes  l'entendoient  et  la  parloient  comme  les 
hommes.  C'est  en  cette  langue  que  S.  Hilaire  et  S.  Sulpice 
écrivoient,  l'un  à  sa  fille  à  Poitiers,  l'autre  à  sa  belle-mere  à 
Trêves.  Vous  faut-il  d'autres  preuves  de  cette  vérité?  Le  fait 
ni.  vit.  Mail.  n.  suivaut  Suffira  pour  la  constater.  '  Saint  Sulpice  décrivant  de 
quelle  manière  Défenseur  Evêque  d'Angers ,  celui  des  prélats 
assemblés  qui  s'oposoit  le  plus  à  l'élection  de  S.  Martin  pour 
remplir  le  Siège  Episcopal  de  Tours,  fut  confondu  en  pré- 
sence de  tout  le  peuple,  raporte  ce  trait  d'histoire  qui  est  de- 
venu si  fameux.  Le  lecteur  du  jour  ne  se  trouvant  point  pour 
lire,  un  des  assistans  prit  le  Pseautier,  et  à  l'ouverture  du  livre 
il  lut  ces  paroles  \Ex  ore  infantium  et  lactentium  perfecisti 
laudem  propterinimicos  tuos,  ntdestruns  inindcum  et  defen- 
sorem.  C'est  ainsi  qu'on  lisoit  alors  ce  verset  du  Pseaume  8,  sui- 
vant l'ancienne  Italique.  A  ces  derniers  mots  le  peuple,  qui 
les  enlendoit  par  conséquent,  s'écria  tout  d'une  voix,  voïant 
que  Dieu  se  déclaroit  d'une  manière  si  admirable  en  faveur  de 
1  élection  qu'il  venoit  de  faire ,  et  qu'il  confondoit  ceux  qui 
s'y  oposoient  opiniâtrement. 

XXXIV.  Après  avoir  exposé  quel  fut  le  progrès  des  scien- 
ces dans  les  Gaules  en  ce  siècle,  par  raport  à  la  literature  pri- 
se en  elle-même,  il  nous  reste  à  montrer  quelles  en  furent  les 
suites  par  raport  à  l'Eglise.  11  est  hors  de  doute  que  l'Eglise 
n'en  pouvoit  tirer  que  de  grands  avantages  ;  car  si  la  religion 
a  qu(  Iquefois  servi  à  établir  la  connoissance  et  l'amour  des  le- 
tres,  les  letres  à  leur  tour  ont  contribué  à  étendre  et  affermir 
la  religion.  C'est  un  secours  mutuel  qu'elles  se  sont  prêté  en 
tous  les  tems  dans  nos  Gaules  comme  ailleurs.  Les  letres  y 
étant  donc  en  ce  siècle  plus  florissantes  que  jamais,  l'Eglise  y 
fut  aussi  dans  sa  plus  grande  splendeur.  Les  grandes  villes  qui 
n'avoient  point  encore  eu  d'Évêques,  en  eurent  alors;  et  le 
christianisme ,  qui  étoit  ordinairement  concentré  dans  l'en- 
0.  p.  458.      ceinte  des  villes ,  '  se  répandit  dans  la  campagne  par  réclat 


DANS  LES  GAULES.   IV  SIECLE.         23 

des  vertus  et  la  solicitude  des  Evêques.  C'est  ainsi  que  saint 
Martin',  par  exemple,  remplit  d'Eglises  ou  de  Monastères  les 
environs  de  Tours,  où  regnoit  auparavant  une  idolâtrie  gros- 
sière. '  Embrun  qui  jusqu'ici  avoit  été  sans  Evêque,  en  eut  un  boii.  i  c.  apr 
peu  après  le  milieu  de  ce  siècle.  S.  Marcellin  étant  venu  d'A-  ^^' 
frique  dans  les  Gaules  prêcher  l'Evangile ,  en  fut  ordonné  pre- 
mier Evèque  par  S.  Eusebe  de  Verceil.  Il  y  convertit  beaucoup 
de  monde  à  la  foi,  et  envoia  de-là  deux  de  ses  compagnons 
de  voïage  Domnin  et  Vincent  fonder  l'Eglise  de  Digne.  '  Saint  tui-  h.  K..t.  ^.  p. 
Domnin  en  fut  le  premier  Evêque,  et  eut  S.  Vincent  pour  son 
successeur.  Ces  exemples  suffisent  pour  faire  juger  de  ce  qui 
se  passa  dans  les  autres  endroits  des  Gaules. 

XXXV .  Pendant  que  la  lumière  de  l'Evangile  y  achevoit 
de  dissiper  les  ténèbres  du  Paganisme,  la  religion  s'y  forti- 
fioit  d'une  manière  admirable  dans  les  lieux  où  elle  éloit  déjà 
établie.  L'Eglise  Gallicane  s'aquit  alors  une  si  grande  réputa- 
tion et  pour  la  science  et  pour  l'intégrité  de  la  foi  ,  '  que  les  opi.  1. 1.  n.  2*. 
Donatistes  du  parti  de  Majorin  en  Afrique  voulurent  avoir  de 
nos  Prélats,  pour  juges  du  diflerent  qu  ils  avoient  avec  Céci- 
lien  de  Carthage.  Ils  présentèrent  à  cet  effet  en  313  une  re- 

3uête  à  l'Empereur  Constantin,  qui  aiant  choisi  Saint  Retice 
'Autun,  S.  Materne  de  Cologne  et  S.  Martin  d'Arles ,  '  les  éus.i.  10.  c  r.  p. 
envoia  à  Rome  pour  terminer  cette  grande  affaire  avec  le  Pa-  '^*' 
pe  S.  Miltiade.  Là  s'assembla  un  Concile,  où  après  ce  Pontife 
nos  Evêques  Gaulois  eurent  la  meilleure  part  à  ce  qui  se  fit. 
Les  Donatistes  y  furent  condamnés,  et  Cécilien  absous.  'Ces  11.392  1  Auh,  e.i. 
Schismatiques  mécontens  de  l'issue  du  Concile  de  Rome,  et  "•  "•  '• 
ne  voulant  point  se  soumettre  à  son  jugement,  demandèrent 
un  autre  Concile  plus  nombreux,  et  prièrent  Constantin  de  le 
convoquer  daus  les  Gaules.  Un  leur  acofda  leur  demande  ; 
et  le  Concile  se  tint  à  Arles  le  premier  jour  d'Août  314.  Il  s'y  cons.t.  i.  p.  u*». 
trouva  33  Evêques  des  diverses  provinces  qui  obeïssoient  alors  '**'■ 
à  Constantin  parmi  lesquels  on  compte  16  prélats  Gaulois. 
Cécilien  y  fut  encore  absous,  el  ses  acusateurs  condamm's. 
On  y  régla  plusieurs  autres  choses  importantes,  comme  l'on 
verra  dans  l'histoire  de  ce  Concile  que  nous  donnerons  en  son 
lieu,  et  qui  fournira  de  nouvelles  preuves  de  la  doctrine  et  de 
la  suffisance  de  nos  anciens  Evêques . 

XXXVÎ.  Seulement  il  paroît  tout-à-fait  étrange  que  de  tant 
de  prélats  célèbres  qui  gouvernoient  les  Eglises  des  Gaules  au 
commencement  de  ce  siècle,  et  dont  plusieurs  avoient  brillé 


24  ETAT  DES  LETRES 

irf  Tm'  iwîi  ^'  ^^^^  l'affaire  des  Donatistes,  '  il  ne  s'en  trouvât  qu'un  seul  au 
(i.  )i.  Cil.'         ■  Concile  de  Nicée,  qui  se  tint  onze  ans  après  celui  d'Arles. 
C'est  de  quoi  l'on  ne  sauroit  rendre  raison .  Il  paroît  toutefois 
bien  naturel  qu'un  de  ces  Evêques  aïant  fait  le  voïage  pour  se 
trouver  à  cette  Sainte  assemblée,  plusieurs  autres  pouvoient 
également  le  faine .  Cependant  Nicaise  que  l'on  croit  avoir  été 
Evêque  de  Die  dans  la  Viennoise,  fut  le  seul  prélat  Gaulois  qui 
y  assista.  Il  porta  dans  les  Gaules  la  définition  du  Concile.  Mais 
iiii.  .In  syn.  n.  01.  on  cut  si  Dcu  desoiu  de  l'y  répandre,  que  25  ans  après  '  le  sym- 
bole de  Nicée  n'y  étoit  plus  connu.  Il  est  au  moins  vrai  que  S. 
Hilaire  de  Poitiers  n'en  entendit  parler  qu'en  Phrygie,  où  il 
fut  relégué  en  356.  Ici  revient  assez  naturellement  ce  que  di- 
soit  le  même  Saint  Hilaire  en  une  autre  ocasion  différente . 
<«.  «  '  L'Eglise  Gallicane,  c'est  ainsi  qu'il  parloit,  aïant  eu  le  bon- 

«  heur  et  la  gloire  de  conserver  pure  dans  son  cœur  la  foi  qu'- 
«  elle  avoit  reçue  des  Apôtres,  ne  se  mettoit  point  en  peine 
«  des  professions  de  foi  écrites  sur  le  papier.  Ses  Evêques  n'a- 
«  voient  pas  besoin  de  la  letre,  eux  qui  possedoient  l'esprit  de 
«  ce  qu'elle  contenoit.  11  n.'avoient  que  faire  de  rien  écrire, 
«  parce  qu'ils  professoient  hautement  de  bouche  pour  le  salut 
«  ce  qu'ils  croïoient  dans  le  cœur  pour  la  justice .  Il  leur  étoit 
«  inutile  de  lire  étant  Evêques  ce  qu'ils  avoient  apris  n'étant 
«  encore  que  Néophytes .  »  Ils  pouvoient  donc  se  passer  de  la 
définition  du  Concile  de  Nicée,  puisqu'ils  croïoient  et  faisoient 
profession  de  tout  ce  qu'elle  contenoit. 

XXXVII.  Telle  étoit  la  situation  de  l'Eglise  Gallicane, 
lorsque  l'hérésie  d'Arius,  qui  prit  naissance  à  Alexandrie  vers 
320,  et  qui  depuis  fit  de  si  terribles  ravages  en  Orient  et  en 
Occident,  s'éforça  de  répandre  son  venin  dans  les  Gaules.  Mais 
elle  y  trouva  nos  Evêques  munis  contre  ses  traits  empoisonnés, 
et  eut  en  eux  de  puissans  adversaires.  A  quelques-uns  près  foi- 
bles  ou  intéressés  qui  souscrivirent  à  l'erreur,  les  autres  fermes 
dans  la  foi,  et  généreux  dans  la  défense,  n'abandonnèrent  ja- 
mais les  intérêts  de  la  vérité  ni  le  parti  de  S.  Athanaseson  illus- 
tre défenseur.  Il  faut  pourtant  en  excepter  la  chute  fatale  qu'ils 
firent  au  Concile  de  Rimini,  mais  dont  ils  ne  furent  pas  long- 
tems  sans  se  relever.  Entrons  dans  quelque  détail,  autant  que 
notre  dessein  le  pourra  permettre.  S.  Athanase  aïant  été  banni 
à  Trêves,  comme  nous  1  avons  déjà  dit,  il  y  fut  reçu  avec  beau- 
coup d'honneur  et  de  charité  par  S.  Maximin  Evêque  du  lieu, 
qui  le  consola  dans  son  exil,  et  l'imita  depuis  dans  la  défense 

de 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE. 


25 


de  la  foi.  '  Ce  fut  pour  soutenir  les  intérêts  de  ce  S.  Prélat,  et  conc.  i.  a  p.  07.1- 

de  la  vérité  persécutée  en  sa  personne,  que  S.  Maximin  assista  ^^'''• 

en  347  au  Concile  de  Sardique,  à  la  convocation  duquel  il 

avoit  eu  beaucoup  de  part.  '  Là  son  zélé  pour  la  foi  de  la  con-  p.  etn.  es». 

substantialité  lui  fit  mériter  les  excommunications  et  les  ana- 

themes  des  Eusebiens.  '  C'est  pourquoi  S.  Athanase  plus  par  Atu.  cp.  aj.  ci.isl-. 

justice  que  par  reconnoissance,  le  met  au  nombre  des  nommes  '^'  "'  "' 

Apostoliques  de  son  tems,  dont  la  foi  étoit  à  l'épreuve  et  de 

l'erreur  et  deia  foiblesse. 

XXXVin.  Paulin  son  successeur  dans  le  siège  episcopal 
de  Trêves,  ne  fit  paroître  ni  moins  de  zélé  ni  moins  de  ferme- 
té. En  353  l'Empereur  Constance  aiant  fait  assembler  un  Con- 
cile à  Arles  pour  y  faire  condamner  S.  Athanase,  ce  Prince 
y  assista  lui-même  en  personne,  afin  d'imprimer  plus  de  terreur 
par  sa  présence,  menaçant  même  d'exil  ceux  qui  refuseroienl 
de  souscrire  la  condamnation  de  ce  grand  Evêque.  Vincent 
de  Capoue  légat  du  pape  Libère,  et  les  autres  prélats  intimi- 
dés par  la  présence  et  les  menaces  de  l'Empereur,  signèrent 
la  condamnation  d' Athanase.  Paulin  seul  refusa  généreusement 
d'y  souscrire  ;  et  pour  prix  de  sa  fermeté  il  fut  relégué  en  Phry- 
gie,  où  il  mourut  en  358.  Préférant  ainsi  l'exil  à  une  lâche  com- 
plaisance pour  un  Prince  qui  pouvoit  tout  ce  qu'il  vouloit,  et 
aïant  ainsi  résisté  le  premier  à  la  tyrannie  des  Ariens,  il  eut  l'a- 
vantage de  donner  à  tout  l'Occident  l'exemple  d'une  généro- 
sité vraiment  episcopale.  Ce  Concile  qui  mérite  à  juste  titre 
le  nom  de  brigandage,  fut  comme  le  signal  ou  le  coup  d'essai 
de  la  persécution  Arienne  contre  l'Eglise  latine.  Bien-tôt  elle 
se  trouva  dépouillée  de  tout  ce  qu'elle  avoit  d'Evêques  saints 
et  généreux.  L'Italie  se  vit  enlever  le.  pape  Libère,  S.  Denys 
de  Milan,  S.  Eusebe  de  Verceil,  Lucifer  de  Cagliari,  qui  fu- 
rent bannis  aux  extrémités  de  l'empire.  De  même  l'Espagne  se 
vitaracher  plusieurs  de  ses  prélats,  entre  autres  le  grand  Osius, 
le  plus  bel  ornement  de  cette  Eglise.  Nous  omettons  ce  que 
Saint  Athanase  et  tant  d'autres  Evêques  d'Egypte  et -d'Orient 
souffroient  depuis  plusieurs  années  pour  la  même  cause. 

XXXIX.  Pendant  que  toute  l'Eglise  combattoit  ainsi  pour 
la  divinité  de  J.  C.  l'Eglise  Gallicane  eut  le  bonheur  d'entrer 
dans  ces  saints  combats.  Animée  et  soutenue  par  l'exemple  et 
le  courage  de  S.  Paulin  de  Trêves  et  de  S.  Hilaire  de  Poitiers, 
elle  eut  encore  la  gloire  de  soutenir  presque  seule  tous  les  ef 
forts  des  Ariens,  et  l'on  peut  dire  qu'elle  fut  celle  de  toutes 

Tome  /.  Sec.  Part.  D 

3  • 


26  ETAT    DES    LETKES 

les  Eglises  qui  se  signala  contre  eux  avec  le  plus  de  zélé  et  le 

fdus  de  succès.  Saturnin  Evêque  d'Arles,  bien  loin  de  suivre 
es  traces  de  ces  illustres  Confesseurs,  se  rangea  du  côté  des 
Ariens.  Ce  prélat  dévoué  à  toutes  les  volontés  do  l'Empereur, 
et  aussi  corompu  dans  les  mœurs  quedans  la  doctrine,  aïant 
juré  comme  les  autres  Ariens  la  perte  de  saint  Alhanase,  il  le 
condamna  dans  un  Concile  de  plus  de  380  Evêques  assemblés 
à  Milan  au  commencement  de  l'année  355.  Comme  il  avoit 
des  liaisons  étroites  avec  Ursace  et  Valons,  deux  des  princi- 
paux chefs  des  Ariens,  la  plupart  des  Evoques  des  Gaules,  S. 
îïilaire  à  leur  tête,  se  séparèrent  de  sa  communion.  Saturnin 
cherchant  àjse  venger  de  cet  affront,  comme  il  prétendoit, 
trouva  moïen  de  faire  assembler  un  Concile  à  Besiers  en  356. 
S.  Hilaire  toujours  plein  de  zélé  pour  les  intérêts  de  la  foi,  ne 
manqua  pas  de  s'y  tiouver;  et  sa  présence  y  fut  d'un  grand 
poids.  Il  y  dénonça  avec  beaucoup  de  fermenté  les  protecteurs 
de  l'hérésie,  et  invita  les  Evoques  assemblés  à  en  prendre  con- 
noissance. 

XL.  Mais  les  Hérétiques  qui  craignoient  de  se  voir  con- 
fondus publiquement,  ne  voulurent  point  souffrir  que  S.  Hi- 
laire fût  écouté.  Ils  allèrent  encore  plus  loin.  S'apercevant 
sans  peine  qu'ils  auroient  toujours  en  lui  un  adversaire  puissant 
et  incommode,  ils  formèrent  le  dessein  de  le  mettre  hors  d'é- 
tat de  leur  nuire.  Pour  y  mieux  réussir,  i's  eurent  recours  au 
mensonge  et  à  l'imposture,  ressources  ordinaires  aux  ennemis 
de  la  vérité.  Saturnin  que  la  ('énonciation  faite  par  S' Hilaire 
regardoit  personnellement,  dressa  une  fausse  relation  de  ce  qui 
se  passoit  dans  l'assemblée,  et  renvoïa  à  l'Emperetir  Constance 
le  protecteur  déclaré  des  Ariens.  Cet  artifice  lui  réussit.  11.  ob- 
tint du  Prince,  à  qui  il  avoit  fait  entendre  tout  ce  qu'il  avoit 
voulu,  un  ordre  pour  bannir  S.  Hilaire  et  l'envoïer  en  Phrygie, 
ce  qui  fut  exécuté  sans  retardement.  Ce  saint  prélat  ne  se  trou- 
va pas  le  seul  dans  le  Concile,  qui  s'oposât  à  l'hérésie.  Ro- 
dane  Evêque  de  Toulouse  s'y  déclara  généreusement  aussi  pour 
la  foi  orthodoxe  trahie  et  persécutée,  et  mérita  le  même  sort 
que  S.  Hilaire.  Il  fut  banni  avec  lui,  et  mourut  dans  son  exil 
comme  S.  Paulin  de  Trêves.  Vous  verrez  dans  la  suite  bien 
d'autres  marques  du  zélé  et  de  la  générosité  de  nos  Evêques 
contre  l'erreur. 

XLI.  En  effet,  quoique  les  Eglises  des  Gaules  eussent  per- 
du parle  banissement  de  S.  Hilaire  leur  plus  illustre  ornement 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE.  27 

et  leur  plus  ferme  apui,  elles  ne  laissèrent  pas  de  se  conserver 
dans  là  pureté  de  la  foi,  et  de  fermer  toutes  les  avenues  à  l'hé- 
résie. '  Les  Evêques  Gaulois  unis  en  esprit  avec  lui,  et  toujours  hu.  on  s,»,  n.  2 
attachés  à  la  même  foi,  rejetterent  constamment  la  commu- 
nion de  Saturnin  auteur  de  son  exil.  Ils  rejetterent  avec  la  mê- 
me fermeté  la  seconde  formule  de  foi  dressée  à  Sirmich  en 
3i)7  par  les  Ariens,  formule  que  saint  Hilaire  qualifie  de  blas- 
phéma d'Osius  et  de  Potame,  parce  qu'on  l'atribuoit  particu- 
lièrement à  celui-ci,  et  que  l'autre  avoit  eu  le  malheur  de  la 
souscrire.  I-^e  venin  de  l'erreur  s'y  montroit  de  lui-même;  et 
les  bons  Catholiques  n'eurent  pas  de  peine  à  l'y  découvrir.  On 
y  établissoit  ouvertement  et  sans  détour  l'hérésie  d'Arius,  en 
retranchant  le  mot  non-seulement  de  consubstantiel,  mais  en- 
core celui  de  semblable  en  substance,  et  '  en  soutenant  comme  l'hob.  p.  mi.  a. 
un  dogme  de  l'Eglise  catholique,  que  le- Père  est  plus  grand 
que  le  Fils  en  honneur,  en  dignité,  en  gloire,  en  majesté. 
'  Que  s'il  s'y  trouvoit  quelques  termes  communs  et  à  la  vérité  p.  300.  -i. 
et  à  rerre\ir,  il  y  en  avoit  beaucoup  d'autres  dont  l'impiété 

f)aroissoit  visiblement.  En  un  mot  la  perfidie  d'Ursace,  de  Va- 
ens  et  (le  Potame  s'y  faisoit  sentir  d'une  manière  palpable.  'Il  p.  sot.  1. 
coufoit  aussi  d'autres  écrits  manifestement  impies  de  la  part  de 
qijelques-uns  de  ceux  qui  avoient  envoie  cette  formule  dans 
les  Gaules. 

XLU.  Quand  elle  n'auroit  pas  été  si  visiblement  mauvaise, 
nos  Evêques  n'auraient  eu  garde  de  la  recevoir.  U  auroit  suffi, 
ou  qu'ils  y  eussent  aperçu  une  duplicité  envelopée,  'qui  auroit  p.  302. 1. 
donné  lieu  à  interprêter  en  mal  des  termes  qui  étoient  sus- 
ceptibles d'un  bon  sens,  ou  qu'ils  y  eussent  trouvé  quelque  cho- 
se contraire  aux  dogmes  catholiques.  Car  ils  étoient  persua- 
dés que  recevoir  un  seul  article  de  cette  nature,  ç'auroit  été 
perdre  entièrement  la  foi.  '  Ils  ne  se  contentèrent  donc  pas  de  ua.  ibu.  n.  2.  3. 
résister  h  ce  dernier  effort  que  l'hérésie  faisojt  pour  les  abatre 
9vec  la  même  vigueur  qu'ils  avoient  déjà  fait  paroître  contre 
ses  premières  ataques  ;  ils  eurent  encore  la  force  de  condam- 
ner hautement  cette  indigne  formule  de  Sirmich.  Ce  fut  daqs 
un  Concile  assemblé  en  358,  que  les  Evêques  des  Gaules  la  re- 
jetterent et  anathematizerent.  Mais  nous  n'avons  ni  la  letre 
^ynodique,  ni  les  autres  actes  de  ce  Concile.  On  ne  sait  pas 
même  en  quel  endroit  il  fut  tenu,  ni  quels  Evêques  y  assistèrent, 
'  Mr  Delfilande  le.  met  à  Yaison,  et  le  compte  pour  le  pre-  Conni.  supp.  p.  ? 
mit^rCoqçile  tenu  en  cette  ville    JI  non^me  entre  les  Evêques  ' 


Till. 
HT. 


28  ETAT  DES  LETRES 

2u'il  prétend  y  avoir  assisté  Nectaire  de  Vienne,  S.  Phebade 
'Agen,  S.  Servais  de  Tongres,  et  Gavidius  qu'il  fait  Evêque 
de  Perigueux.  Mais  tout  cela  est  avancé  sans  aucune  preuve  cer- 
taine, et  ce  Gavidius  que  nous  verrons  paroître  au  Concile  de 
Rimini,  ne  pouvoit  être  alors  Evêque  de  Perigueux,  dont  le 
siège  était  rempli  par  Paterne  fameux  Arien. 

XLIII.  Au  défaut  de  la  letre  synodique  et  des  autres  actes 
H.  K.  t.  6.  p.  jjg  çg  Concile,  '  il  nous  reste  un  traité  de  S.  Phebade  Evêque 
d'Agen,  qui  est  un  illustre  monument  du  courage  de  nos  Evo- 
ques de  ce  tems-là.  On  y  trouve  réfutée  avec  beaucoup  d'es- 
prit, de  solidité  et  d'érudition  cette  seconde  formule  oe  Sir- 

piieb.  p.  300  aori.  mich,  '  qu'il  dit  mériter  la  qualification  non  de  profession  de 
foi,  mais  de  perfidie.  Il  y  parle  autant  au  nom  des  autres  Evê- 
ques  Gaulois,  qu'en  son  nom  propre,  et  y  découvre  d'abord 
avec  beaucoup  de  pénétration  les  subtilités  étudiées,  les  équi- 
voques affectées,  et  les  expressions  tortueuses,  sous  lesquel- 
les ils  cachoient  le  venin  de  l'erreur.  Ensuite  il  passe  à  mon- 
trer qu'ils  la  proposoient  même  en  quelques  endroits  sans  dé- 
tour ni  ménagement.  Enfin-après  y  avoir  établi  par  les  passa- 
ges de  l'Ecriture  les  dogmes  catholiques  de  l'Incarnation  et 

p.  MT,.  I.  ^g  |g^  Xrinité,  S.  Phebade  conclut  ainsi  :  «  '  C'est  ce  que  nous 

»  croïons,  c'est  ce  que  nous  professons,  parce  que  c'est  ce  que 
»  nous  avons  reçu  des  Prophètes,  ce  que  nous  annoncent  les 
»  Evangelistes,  oe  que  nous  ont  enseigné  les  Apôtres,  ce  que 
»  les  Martyrs  ont  confessé  dans  leurs  souffrances.  Nous  sommes 
»  si  fortement  atachés  à  cette  foi,  que  si  un  Ange  même  du 
»  ciel  nous  annonçoit  le  contraire,  nous  lui  dirions  anathême.  » 
Et  comme  l'on  objectoit  à  nos  Evêques  la  chute  du  grand 
Osius,  afin  do  leur  faire  quelque  impression,  S.  Phebade  ré- 
pond judicieusement,  qu'un  tel  exemple  ne  peut  prescrire 
contre  tant  de  preuves  mcontestables.  D'ailleurs  tout  le  mon- 
de sait,  ajoûte-t'il,  ce  qu'il  a  cru  jusqu'ici,  et  avec  quelle  con- 
stance il  a  toujours  condamné  les  Ariens.  Que  s'il  a  été  près 
de  90  ans  dans  l'erreur,  je  ne  croirai  jamais  qu'à  un  si  grand 
âge  il  ait  rectifié  ses  sentimens.  Que  s'il  ne  commence  qu'au- 
jourd'hui h  être  dans  la  vraie  foi,  que  doit-on  penser  de  ceux 
qui  sont  déjà  morts  dans  la  môme  croïance?Kt  qu'auroit-on 

Sensé  de  lui-même,  s'il  eût  quitté  le  monde  avant  l'assemblée 
e  Sirmich  où  il  est  tombé  ? 
Mil.  <w  svn.  n.  3.       XLIV.  '  Bien-lôt  l'éclat  de  celte  générosité  épiscopale  se 
répandit  dans  les  Eglises  des  pais  éloignés,  et  y  eut  un  heu- 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE. 


20 


Till.  iliid. 
4it. 


roux  succès.  Aïant  pénétré  en  Orient,  il  y  reveilla  les  esprits 
de  quelques  prélats;  et  leur  inspirant  de  la  honte  d'avoir  si 
long-tems  souffert  racroissement  de  cette  hérésie,  sans  y  résis- 
ter, il  les  porta  à  y  oposer  (Quelques  décrets  en  faveur  de  la 
vérité.  '  Ce  fut  en  cette  ocasion  que  Basile  d'Ancyre  et  quel- 
ques autres  Evoques  qui  passoient  pour  demi-Ariens,  tinrent 
un  Concile  à  Ancyre  en  358,  un  peu  avant  Pâque.  D'abord  ils 
y  firent  un  anathême  contre  la  Consubstantialité,  maisils  le 
suprimerent  bien-tôt  après  ;  et  ils  condamnèrent  les  blasphè- 
mes les  plus  grossiers  de  l'Arianisme.  Ils  obtinrent  même  de 
Constance  la  .supression  de  la  .seconde  formule  de  Sirmich, 
et  l'exil  des  principaux  et  des  plus  impies  entre  les  Evêques 
Ariens.  '  Pour  revenir  à  nos  prélats  Gaulois,  ils  persistèrent  hiI.  ii.id. 
constamment  à  refuser  leur  communion  à  Saturnin  d'Arles;  et 
toujours  inviolablement  atachés  à  S.  Hilaire,  ils  lui  écrivi- 
rent des  letresde  communion,  pour  lui  témoigner  qu'ils  pre- 
noient  part  à  son  exil  par  l'union  d'une  même  foi  et  d'un  mê- 
me esprit.  Ils  lui  aprirent  en  même  tems  ce  qu'ils  avoient  fait 
contre  la  formule  impie  de  Sirmich,  dont  nous  venons  de 
parler. 

XLV.  C'est  ainsi  que  la  foi  se  con.servoit  et  triomphoit  mê- 
me dans  l'Eglise  des  Gaules  par  le  zélé  de  nos  Evêques,  tan- 
dis qu'elle  tomboit  en  Orient  par  la  perfidie  des  Eusebiens  et 
la  lâcheté  des  Orientaux.  '  C'est  sur  quoi  S.  Hilaire  les  félicite 
dans  son  livre  des  synodes  qu'il  écrivoit  en  Phrygie,  et  qu'il 
leur  adressa  du  lieu  de  son  exil,  pour  leur  aprendre  ce  qui  se 
passoit  en  Orient.  «  Les  Eglises  orientales,  leur  dit-il,  sont 
»  dans  un  tel  péril,  qu'il  est  rare  d'y  trouver  même  parmi  les 
»  Evêques  cette  foi  que  je  vous  raporte.  Je  vous  parle  com- 
»  me  savant  de  ce  que  j'ai  ouï  et  de  ce  que  j'ai  vu  moi-même. 
»  Hors  l'Evêque  Eieuse  et  quelques  prélats  avec  lui,  la  plus 
»  grande  partie  des  dix  provinces  d'Asie  où  je  .suis,  ne  con- 
n  nois.'sent  point  Dieu,  ou  ne  leçon noissent  que  pour  le blas- 
»  phémer...  Tout  est  })lein  de  .scandales,  de  schismes  et  d'in- 
»  tidelité...  Au  milieu  de  ce  désastre,  que  vous  êtes  heureux 
»  d'avoir  conservé  dans  sa  pureté  la  foi  apostolique,  d'avoir 
»  ignoré  jusqu'ici  ces  professions  écrites,  et  de  vous  être  con- 
»  tentés  de  professer  de  bouche  ce  (jue  vous  croïez  de  cœur  ! 
»  '  0  qu'il  vous  est  glorieux  de  ne  vous  être  jamais  départis  de  nnm.  i, 
»  la  véritable  foi  !  Que  votre  religion  établie  sur  la  solidité  de 
«  la  pierre  vous  fait  d'honneur,  et  qu'il  est  beau  pour  vous  d'être 


11.7.  p. 


n.  (5.1. 


30  ETAT    DES   LETRES 

»  demeurés  fermes  et  inébranlables  au  milieu  des  tempêtes!  » 
XLVl.  Helas!  qui  se  seroit  atendu  qu'une  foi  aussi  pure, 
aussi  animée,  aussi  trioniphante  se  seroil  un  jour  éclipsée?  Ce- 
la n'est  pourtant  que  trop  vrai.  Le  Concile  de  Rimini  tenu 
en  359,  au  même  tems  que  celui  de  Selcucieen  Isaurie,  fui 
le  nuage  fatal  qui  obscurcit,  quoique  pour  peu  de  tems,  cette 
brillante  lumière.  Nos  Evoques  firent  un  personnage  trop  écla- 
tant dans  cette  assemblée,  pour  n'en  pas  rapeller  ici  quelques 
traits.  Nous  suivrons  dans  ce  que  nous  en  allons  dire,  S.  Sc- 
vere  Sulpice,  qui  savoit  ce  qui  s'y  passa  de  la  bouche  même 

stii.  iiisi.  1. 2.  n.  d'un  des  Evoques  qui  y  avoient  assisté.  '  Ce  Concile  fut  con- 

67  p.  899-401.  voqué  des  Evêques  d'Italie,  d'Illyrie,  d'Afrique,  d'Espagne, 
des  Gaules  et  de  la  Grande  Rrétagne,  c'est-à-dire,  de  tout  l'Oc- 
cident, au  nombre  de,  400  ou  environ.  Le  dessein  qu'avoit 
l'Empereur  dans  cette  convocation,  étoit  de  réunir  tous  h'n 
Evêques  dans  le  même  point  de  croïance.  Afin  que  porsonne 
ne  pût  s'excuser  d'assister  à  cette  assemblée  sous  prétexte  du  la 
dépense,  le  Prince  fournit  aux  Irais  du  voiage.  Mais  les  Evê- 
ques d'Aquitaine  piqués  d'une  noble  générosité,  ne  voulurent 

n.  59.  p.  408.  poinl  profiter  de  celte  faveur.  Entre  ceux-ci  se  Irouvoient  '  S. 
Phebade  ou  Fegade  d'Agen,  et  Gavidius  dont  on  ignore  le 
siège.  Des  autres  Evê(|ues  Gaulois  on  ne  nomme  que  Saint 

n.  .17.  p.  wi.  Servais  ou  Servalion  de  Tongrcs.  '  Parmi  tous  les  Prélats  qui 
composaient  le  Concile,  il  n'y  eu  avoil  d'Ariens  déclarés  tout 
au  plus  que  80.  Tous  bs  autres  éloienl  Catholiques,  aussi  ata- 
chés  à  la  foi,  que  ces  80  éloienl  livrés  à  l'iiéresie. 

p.  M13.  XLVII.  '  D'abord  les  Catholiques  ouvrirent  une  voie  qui 

réussit  mii'uxà  leurs  adversaires  qu'à  eux-mêmes.  Us  firent  une 
dépulation  de  dix  d'entre  eux  vers  l'Empereur,  pour  lui  re- 
présenter que  les  seiitimens  des  uns  et  des  autres  étant  aussi 
différens  sur  la  foi,  il  n'y  avoil  pas  moïen  de  communiquer 
avec  des  Hérétiques.  Ceux-ci  à  l'imitation  des  Catholiques  dé- 
putèrent aussi  dix  de  leur  cabale  vers  Constance.  Mais  plus 
avisés  que  les  autres,  ils  choisirent  pour  ce!  effet  les  plus  an- 
ciens d'entre  eux,  gens  ru-s^'is,  pleins  (''artifices,  cl  acouluii.fîs 
depuis  long-tems  à  la  perlidie.  ils  n'i:urent  pas  de  peine  à 
trouver  par-là  plus  ce  crédit  sur  l'esprit  du  Prince,  déjà  tout  à 
leur  devoliqn,  que  les  députés  Catholiques,  qui  éloient  de 

n.  59.  p.  90T.  jeuues  Prélats  sans  expérience  et  peu  sur  leurs  gardes.  '  L'Em- 
pereur en  renvoïaiit  ceu  -ci,  les  chargea  d'une  formule  de  foi 
env.^-lopée  sous  des  termes  trompeurs,  qui  monlroient  en  apa- 


DANS   LES  GAULES.  IV  SIECLE.  31 

rence  un  sens  orthodoxe,  mais  qui  en  effet  contenoit  tout  le 
venin  de  l'iiéresie.  Car  sous  une  raison  spécieuse  cette  formu- 
le abrogeant  le  t(;rmc  de  substance  comme  ambigu,  témérai- 
rement emploie  par  les  Pères,  et  non  usité  dans  l'Ecriture,  elle 
tendoit  à  empêcher  que  l'on  ne  crilt  le  Fils  de  la  même  sub- 
stance que  le  Père.  De  sorte  que  la  formule  établissoit  bien  la 
ressemblance  entre  l'un  et  l'autre  ;  mais  la  fraude  qui  y  étoil 
artificieusement  cachée,  consistoit  en  ce  que  faisant  le  Fils 
s.'mblable  au  Père,  elle  ne  le  faisoit  pas  égal  à  lui.  (*)  n  Errai.  senii.i.i- 

XLVIII.  '  Les  Députés  ainsi  renvoies  avec  injonction  de  sui.''hist.  i.  a.  u 
s'unir  de  communion  avec  les  Ariens,  le  préfet  Taurus  mo-  ^^-  p-  *^-  **•' 
dératour  du  Concile  reçut  ordre  de  ne  le  point  dissoudre,  '  que  p.  408. 
tous  les  Evêqu es  n'eussent  signé  la  forunile.  L'ordre  ajoûtoit 
que  s'il  s'en  trouvoit  qui  refusassent  de  souscrire,  on  les  exi- 
lât, pourvu  néanmoins  que  leur  nombre  n'allât  pas  au-delà  de 
15.  Les  Députés  qui  paroissent  avoir  été  gagnés  les  premiers,  ' 

eurent  beau  prier  lesEvêques  assemblés  de  ne  pas  irriter  la  co- 
lère de  l'Empereur;  ce  fut  en  vain.  Les  Catholiques  persévé- 
rèrent à  refuser  de  communiquer  avec  les  Ariens.  Mais  cela 
ne  dura  pas.  Si-tôt  que  l'on  eut  connoissance  des  ordres  me- 
naçans  du  Prince,  le  trouble  coniinença  à  saisir  les  esprits.  Au 
trouble  succéda  la  crainte,  et  la  d(!route  ne  tarda  pas  à  suivre. 
Bien-tôt  la  plupart  d^'s  Catholiques  se  laissant  vaincre  peu  à 
p(  u,  soit  par  pusillanimité,  soit  par  l'ennui  de  se  voir  éloignés 
de  leurs  Eglises,  se  rangèrent  du  parti  de  leurs  adversaires, 
dont  1  •  nombre  grossissoit  tous  les  jours  depuis  le  retour 
dos  Députés.  Et  aïant  une  fois  commencé  à  lâcher  pied 
et  à  perdre  (  ourage,  ils  se  joignirent  par  troupes  aux  Ariens, 
sans  rougir  de  leur  désertion  criminelle. 

XLIX.  '  De   tant  d'Evêques  enuijinis  de  l'Arianisme  qui  ibid. 
(;omposoient  ce  Concile,  il  ne  s'en  trouvoit  plus  que  vingt 

3ui  demeurassent  fermes.  Mais  plus  ils  voïoient  leur  nombre 
iininuer,  plus  ilss'armoient  de  courage.  S.  Phebade  et  Saint 
Servais  se  signaloient  entre  tous  les  autres  par  leur  constance 
et  leur  fermeté.  '  I.,e  modérateur  du  Concile,  homme  ambi-  p.  too. 
tieux  et  adroit  pour  venir  à  bout  de  ses  vues,  à  qui  l'Empereur 
avoil  promis  le  consulat  pour  prix  de  son  adresse  à  faire  tom- 
ber les  Orthodoxes,'  '  voïant  ses  espérances  presque  tombées,  p.  los. 
fit  tous  les  personages  qu'il  crut  propres  à  mériter  la  récom- 
pense qu'on  lui  avoit  promise.  N'aïant  pu  intimider  ce  peu  de 
bons  Evoques  ni  par  la  crainte  ni  par  les  menaces,  il  s  éforça 


ifâ  ETAT    DES    LETKES 

de  les  atendrir  par  ses  prières  et  ses  larmes.  El  tel  arlilice  uc 
lui  aïant  pas  réussi,  il  vint  à  faire  le  philosophe,  ou  si  l'on  veut 
le  théologien,  afin  d'essaïer  de  convaincre  par  le  raisonnement 
ceux  qu'il  ne  pouvoit  ni  fléchir  ni  abatre.  Il  leur  proposa  l'e- 
xemple de  la  multitude,  et  prélendoit  que  le  grand  nombre 

sui.  lusi.  I.  ij.  u.  devoit  être  une  autorité  suffisante  pour  les  déterminer.  '  Mais 
''■      '  tout  ce  qu'il  sut  mètre  en  œuvre  fut  inutile.  S.  Phebade  à  la 

tête  des  autres  déclara  généreusement  qu'il  ne  recevroit  jamais 
de  formule  dressée  par  les  Ariens  ;  qu'il  étoit  tout  disposé  à 
aller  en  exil,  et  à  subir  tout  autre  suplice  que  l'on  voudroit. 
Heureux  s'il  eut  persévéré  dans  cette  sainte  resolution  ! 

•Wii.  L.  Mais  que  la  foiblesse  de  l'homme  est  grande  !' Quel- 

ques jours  s'étant  passés  à  combatre  de  la  sorte,  celui  qui  avoil 
si  généreusement  résisté  aux  efforts  et  aux  artifices  d'un  préfet 
armé  de  toute  l'autorité  de  l'Empereur,  se  laissa  aller  aux  [»er- 

!>•  no.  suasions  frauduleuses  d'Ursace  et  de  Valens.  '  Ces  deux  fourbes 

f)Our  le  gagner,  lui  proposèrent  d'ajouter  à  la  formule  ce  que 
ui  et  les  autres  Evêques  de  son  sentiment  jugeroient  à  propos, 
et  promirent  de  passer  leur  addition.  Les  Catholiques  fatigués 
de  la  longueur  du  Concile,  et  désirant  de  mètre  fin  à  celle 
grande  aflaire,  trouveront  la  proposition  raisonnable  et  l'accep- 
tèrent. S.  Phebade  et  S.  Servais  se  mirent  donc  en  devoir  de 
dresser  des  formules,  dans  lesquelles  ils  condamnoient  Arius 
avec  toute  son  hérésie,  et  déclaroient  le  Fils  de  Dieu  égal  au 
Père,  et  Eternel  comme  lui.  Alors  Valens  faisant  l'homme 
officieux,  leur  suggéra  d'y  ajouter  les  motssuivans,  qui  renfer- 
moient  la  fraude,  sans  la  montrer  :  Que  le  Fils  de  Dieu  n'est 
point  une  créature  comme  les  autres  créatures.  La  fraude  eut 
son  effet;  et  nos  Evêques  donnèrent  dans  le  piège  sans  sen 
apercevoir.  Car  en  niant  que  le  Fils  fût  une  créature  comme 
les  autres,  on  ne  laissoit  pas  de  le  reconnollre  réellement  pour 
I'.  m.  créature,  mais  pour  une  créature  plus  excellente.  '  C'est  ainsi 

3ue  finit  ce  Concile,  heureux  dans  son  commencement,  et 
éplorable  dans  sa  fin.  '  Après  tout,  nul  des  deux  partis  n'avoii 
sujet  ou  de  se  croire  vaincu,  ou  de  se  flater  d'être  victorieux. 
En  effet,  si  les  souscriptions  étoient  pour  les  Ariens,  tant  de 
formules  rejettées,  où  se  montroit  l'hérésie,  déposoient  en  fa- 
p.  411.  veur  des  Catholiques.  '  Cependant  la  clause  que  Valens  avoil 

fait  ajouter  n'étant  pas  d'abord  entendue,  ce  ne  fut  qu'après 
un  certain  lems  qu'on  s'aperçut  de  la  fraude  qu'elle  cachoit. 
LL  L'issue  du  CojiciJe  de  Seleucie  ne  fut  gueres  plus  heu- 
reuse , 


DANS  LES  GAULES.   IV  SIECLE.  33 

reuse,  que  la  conclusion  de  celui  de  Rimini.  Seulement  St.  n.58.p.404  4C9. 
Hilaire  de  Poitiers,  dont  il  semble  que  Dieu  n'avoit  permis 
l'exil,  que  pour  le  mettre  dans  l'ocasion  de  se  trouver  à  cette 
assemblée  d'Evêques  Grecs  et  Orientaux,  y  soutint  toujours 
avec  autant  de  constance  aue  de  zélé  la  vérité  orthodoxe  aban- 
donnée par  presque  tous  les  autres.  I^  chute  de  tant  d'Eve-  . 
ques  à  la  fois  dans  l'un  et  l'autre  Concile  tenu  en  même  tems  , 
'  fit  apercevoir  au  monde  entier,  selon  l'expression  de  St.  Jerô-  Hier.in  Lneif.  i.  . 
me ,  que  sans  y  penser  il  étoit  devenu  Arien .'  C'est  ce  qui  a  fait  y""'  Vj^ 

dire  aussi  à  Vmcent  de  Lerins  ,  que  le  poison  de  l'Arianisme  319' 

aiant  infecté  presque  tous  les  Evêques  de  l'Occident,  il  s'étoit 
répandu  non  dans  une  petite  partie  de  la  terre,  mais  dans  pres- 
que tout  l'univers.  L'Eglise  ne  laissoit  pas  néanmoins  de  bril- 
ler au  travers  de  cet  obscurcissement  presque  général  de  la  foi. 
Elle  brilloit  dans  ce  peu  de  généreux  Evêques,  qui  aïant  pré- 
féré leur  devoir  à  leur  repos ,  et  l'exil  aux  bonnes  grâces  d'un 
Empereur  Arien,  souffroient  une  persécution  ouverte ,  sans  y 
succomber.  Elle  brilloit  dans  ces  pieux  solitaires  de  l'Egypte 
formés  par  le  grand  Antoine  l'ennemi  implacable  de  l'Arianis- 
me. '  Elle  brilloit  enfin  dans  une  multitude  de  simples  fidèles  ,  sai.  aid.n.  ss.  p 
qui  conservoient  avec  toute  la  diligence  imaginable  la  foi  de  '®'" 
leurs  pères,  tandis  que  leurs  Pasteurs  ou  l'abandonnoient  par 
foiblesse,  ou  la  sacrifioient  honteusement  à  leurs  propres  in- 
térêts. 

LII.  Grâces  à  Dieu  un  si  grand  scandale  ne  dura  pas  long- 
tems,  et  l'Eglise  des  Gaules  eut  la  gloire  d'être  la  première 
qui  y  aportât  un  remède  salutaire.  Dès  l'année  suivante  360  , 
S.  Hilaire  de  retour  à  son  Eglise,  où  l'Empereur  crut  devoir 
le  renvoier,  pour  éloigner  de  l'Eglise  d'Orient  le  fléau  le  plus 
terrible  des  Ariens,  '  il  travailla  à  rapeller  tout  le  monde  à  la  n.6o.p.«7. 4i5. 
pénitence.  Quelques  autres  étoient  d'un  avis  différent,  ne  vou- 
lant pas  que  l'on  admît  à  la  communion  ceux  qui  avoient  eu 
le  malheur  de  se  laisser  aller  à  la  séduction.  Mais  le  sentiment 
de  S.  Hilaire  prévalut,  comme  le  plus  sage  et  le  plus  confor- 
me à  l'esprit  de  l'Eglise.  Ce  grand  Evêque  assembla  donc  à 
cet  effet  plusieurs  Conciles  dans  les  Gaules,  où  l'on  condam- 
na ce  qui  s'étoit  fait  à  Rimini.  De  sorte  que  presque  tous  les 
Evêques  reconnurent  et  rétractèrent  l'erreur  où  ils  étoient 
malheureusement  tombés.  De  tous  ces  Conciles  nous  ne  con- 
noissons  que  celui  qui  se  tint  à  Paris  en  361 ,  et  dont  vous  au- 
rez l'histoire  dans  la  suite.  Au  même  tems  que  l'on  travailloit 
Tome  /.  Sec.  Part.  E 


34  ETAT   DES   LETRES 

à  réparer  le  scandale  de  Riraini,  il  se  présenta  un  autre  mal 
très-dangereux,  qui  tiroit  son  origine  des  maximes  outrées  de 
quelques  Evêques,  sur-tout  de  Lucifer  de  Gagliari,  dont  le 
zélé  mal  réglé  tendoit  à  faire  autant  de  désespérés  qu'il  y  avoit 

ocniu  scii. .-.  31.  (jg  pénitens.  11  falut  donc  remédier  à  ce  second  scandale.  '  C'est 
ce  qu'entreprit  l'Evêque  Paul,  qui  nous  paroit  le  même.'  que  le 
prélat  de  ce  nom  qui  gouvernoit  alors  l'Eglise  de  Paris ,  et 
qui  publia  un  traité  pour  tâcher  de  consoler  les  pénitens ,  et  les 
exhorter  à  ne  se  laisser  pas  aller  au  désespoir  par  un  excès  de 
tristesse  mal  entendue. 

LUI,  Depuis  que  les  Evêques  des  Gaules  se  furent  rele- 
vés de  leur  chute,  ils  témoignèrent  plus  de  zélé  que  jamais 
contre  l'hérésie  d'Arius,  et  ne  laissèrent  passer  aucune  ocasion 
sans  le  signaler.  Nous  verrons  ailleurs  ce  que  fit  Saint  Hilaire 

Ami.,  aci.  aq.  p.  coutrc  Auxencc  dc  Milan.  '  Dans  la  suite  deux  autres  Evêques 
d'Italie  Pallade  et  Secondien  continuant  à  soutenir  l'Arianis- 
me,  l'Empereur  Gratien  assembla  contre  eux  en  381  un  Con- 
cile à  Aquilée.  Nos  evêques  Gaulois  voulurent  y  prendre 
part,  et  y  députèrent  Saint  Just  Evêque  de  Lyon  ,  Constance 
d'Orange ,  Procule  de  Marseille ,  Théodore  d'Octodure  ou 
Martigni  dans  le  Valais,  Domnin  de  Grenoble  et  Amance 
de  Nice.  S.  Valerien  d' Aquilée  présida  au  Concile  ;  mais  Saint 
Ambroise  en  fut  l'ame,  et  conduisit  toute  l'action.  L'hérésie 
d'Arius  y  fut  solermellement  proscrite,  et  les  deux  Evoques 
Ariens  avec  un  prêtre  nommé  Attale  condamnés  et  déposés 

.!..<).  IS.1.  du  sacerdoce.  Le  Concile  écrivit  sur  cela  aux  Evêques  des 
Gaules  une  letre  très-glorieuse  h  leur  mémoire,  pour  les  re- 
mercier des  députés  qu'ils  lui  avoient  envolés.  Cette  letre  se 
trouve  parmi  celles  de  S.  Ambroise  ;  et  ce  grand  Evêque  qui 
l'avoit  écrite  au  nom  du  Concile,  y  dit  que  l'atachement  qu'- 
ont toujours  eu  les  Evêques  des  Gaules  pour  l'ancienne  doc- 
trine ,  a  donné  beaucoup  de  poids  et  d'autorité  aux  décisions 
de  l'assemblée.  Prœscriptamajorumsequentes  non  médiocre 
addidistis  pondus  sententiis  nostris,  cum  quibus  etiam  vestrœ  • 
Sanctilatis  convemt  professio. 

LIV.  S.  Ambroise  se  trouvoit  si  bien  des  lumières  de  nos 
Evêques  Gaulois,  qu'il  étoit  atentif  à  en  profiter  dans  les  oca- 

.  p.  i-î.  11.  li.  sions.'  La  fameuse  hérésie  de  Jovinien  l'aiant  obligé  d'assem- 
bler en  390  un  Concile  à  Milan,  où  se  trou  voient  alors  Théo- 
dore d'Octodure  et  Constance  d'Orange,  dont  nous  venons 
de  parler,  le  S.  Prélat  voulut  qu'ils  fussent  de  l'as-semblée  ,  et 


DANS  LES  GAULES.   IV  SIECLE.  35 

qu'ils  eussent  part  à  la  condamnation  de  l'erreur  et  au  triom- 
phe de  la  vérité.  Leurs  noms  se  lisent  avec  ceux  de  S.  Am- 
broisc  et  des  autres  pères  du  Concile  dans  la  letre  écrite  au  pa- 

f)e  Sirice  à  ce  sujet.  C'est  sans  doute  les  mêmes  Evêques  Gau-  «p  si.  n.  «. 
ois,  avec  lesquels  le  même  S.  Ambroise  dit  ailleurs  qu'il  te- 
noit  un  autre  Concile,  lorsqu'on  lui  aporta  la  nouvelle  du 
meurtre  de  Thessalonique.  Cette  dernière  assemblée  ,  dont 
parle  ici  S.  Ambroise,  regardoit  la  grande  affaire  des  Itha- 
ciens,  comme  nous  dirons  dans  peu.  Ce  n'étoit  pas  seule- 
ment dans  les  Conciles  et  les  Conférences  familières,  que  ce 
grand  Evêque  de  Milan  consultoit  nos  Evêques  Gaulois  ;  il  le 
faisoit  encore  par  écrit.  On  sait  qu'il  avoit  lié  commerce  de 
letres  avec  quelques-uns,  nommément  S.  Phebade  d'Agen  et 
S.  Delphin  de  Bourdcaux.  L'histoire  ne  nous  a  pas  conservé  la 
connoissance  des  autres. 

LV.  A  peine  les  Evêques  des  Gaules  commençoient-ils  à 
respirer,  après  tous  les  mouvemens  et  les  fatigues  que  leur 
avoit  causé  l'Arianisme,  qu'ils  se  virent  engagés  derechef  dans 
de  nouveaux  combats  pour  le  maintien  de  la  vérité.  L'hérésie 
des  Priscillianistes  aïant  commencé  à  se  faire  connoîlre  sur  la 
fin  de  ce  siècle  ,  leur  fit  naître  l'ocasion  d'exi^rcer  le  zélé  qu'ils 
avoient  si  souvent  fait  paroîlre  pour  la  défense  de  la  foi.  '  Cet-  Sdi.  iiii.i.  n.  «i.  p. 
te  hérésie  se  répandit  particulièrement  en  Espagne  par  les  ar- 
tifices d'un  certain  Marc  Egyptien,  qui  séduisit  une  femme 
nommée  Agape,  et  ensuite  un  rhéteur  nommé  Elpide.  Ceux- 
ci  instruisirent  Priscillien  homme  noble  '  et  riche,  dont  cette  Pros.  chr.  p.  731. 
secte  prit  le  nom.  '  Ils  l'ordonnèrent  depuis  Evêque  de  Labi-  «sni.  ibi.i.  n.  63. 
ne,  ou  Labile  que  l'on  croit  être  Avila  compris  alors  dans  la 
Galice.'  Hygin  ou  Adhygin  Evêque  de  Cordouë  fut  le  pre-  n.  oa.  p.  420. 422. 
mier  qui  poursuivit  ces  hérétiques.  Mais  il  se  laissa  depuis  hon- 
teusement corrompre,  et  les  reçut  à  sa  communion.   Pour  ar- 
rêter le  cours  de  cette  hérésie,  qui  avoit  déjà  infecté  la  plus 
grande  partie  de  l'Espagne  et  même  quelques  Evêques,  nom- 
mément Instantius  et  Salvien,  nos  Evêques  d'Aquitaine,  qui 
étoient  alors  du  département  de  l'Espagne,  s'assemblèrent  à 
Saragoce  en  380  ,  avec  lesEvêques  Espagnols.  '  Parmi -les  conc.i.â.p.  looij. 
Evêques  Gaulois  qui  se  trouvèrent  à  ce  Concile,  les  plus  dis-  tuiÎh^e;  u's.p. 
tingués  étoient  S.   Phebade  d'Agen,  qui  est  nommé  le  pre-  *^- 
mier,  et  S.  Delphin  de  Bourdeaux.  On  y  condamna  Elpide  et 
Priscillien  laïaue,  et  les  Evêques  Instantius  et  Salvien.  On  y 
excommunia  Hygin  de  Cordouë,  qui  avoit  reçu  les  hérétiques 

E  ij 


36  ETAT   DES   LETRES 

après  les  avoir  dénoncés  le  premier.  On  y  fit  aussi  huit  Canons 
dans  lesquels  on  établit  une  doctrine  et  une  discipline  oposées 
aux  erreurs  des  Priscillianistes. 

LVI.  Après  l'Espagne,  les  Gaules  furent  le  théâtre  où  cet- 

Aag.  Hier.  70.  tc  scctc  fît  plus  d'éclat.  '  Elle  étoit  caractérisée  par  un  mélan- 
ge confus  et  horrible  de  toute  sorte  d'impiétés,  qui  s'y  étoient 

Pros.  ibid.  ramassécs  comme  dans  un  cloaque.  '  Ceux  qui  la  suivoient , 

étoient  tout  ensemble  Gnostiques,  Manichéens,  Marcionites, 

Sol.  ibid.  n.61.65.  SabclUens,  Photinicus.  A  la  corruption  dans  le  dogme, 'ils 

p.  420.  4Î9.  joignoient  des  mœurs  aussi  corrompues  que  leur  doctrine , 
quoique  sous  un  extérieur  réglé,  modeste  et  même  severe. 

n.  63.  p.  82. 483.  '  Après  Icur  condamnation  dans  le  Concile  de  Saragoce, 
dont  nous  venons  de  parler,  Priscillien  et  quelques-uns  de  ses 
principaux  sectateurs  allèrent  en  Italie  y  chercher  de  l'apui. 
Us  prirent  leur  route  par  l'Aquitaine,  où  aïant  été  fort  biien 
reçus  par  les  ignorans,  ils  y  répandirent  les  semences  de  leurs 
erreurs ,  sur-tout  à  Eause ,  dont  le  peuple  étoit  comme  natu- 
rellement porté  à  la  pieté.  S.  Delphin  Evêque  de  Bourdeaux, 
qui  les  connoissoit  pour  ce  qu'ils  étoient,  les  empêcha  d'en- 

pag.  42».  trer  dans  sa  ville  épiscopale.  '  Mais  aïant  trouvé  un  hospice 

dans  les  terres  d'Eucrocie  veuve  du  célèbre  orateur  Delphi- 
de,  ils  y  passèrent  quelque  temps,  et  y  infectèrent  diverses  per- 
sonnes. Eucrocie  elle-même  et  Procule  sa  fille  furent  de  ce 
nombre,  et  n'eurent  pas  honte  d'acompagner  avec  une  trou- 
pe d'autres  femmes  aussi  peu  retenues,  Priscillien  et  ses  asso- 
ciés, lorsqu'ils  partirent  de  chez  elle  pour  se  rendre  à  Rome. 

Ibid.  p.  425.  LVII.  '  Leur  voïage  fut  sans  fruit.  Le  pape  S.  Damase  ne 

voulut  pas  même  les  écouter.  S.  Ambroise  n'en  témoigna  pas 
moins  d'horreur.  Frustrés  de  leur  espérance  de  ce  côté-là  ,  ils 
eurent  recours  à  l'Empereur  ;  et  à  force  de  présens  et  de  so- 
licitations  auprès  des  Ministres  de  Gratien  ils  furent  rétablis 
dans  leurs  Eglises.  Ithace  leur  principal  acusateur  fut  même 
contraint  à  sortir  d'Espagne,  et  à  venir  chercher  un  asyle  dans 

p.  fm  I  Pros.ibid.  les  Gaulcs.  '  Ce  fut  lui  qui  après  la  défaite  et  la  mort  de  Gra- 

•*■  '*'■  tien  obtint  de  Maxime  qui  avoit  usurpé  l'empire,  la  convoca- 

tion du  Concile  de  Bourdeaux  contre  ces  hérétiques.  On  se 
préparoit  à  leur  y  faire  bonne  justice,  comme  vous  le  verrez 
par  l'histoire  que  nous  en  donnerons,  lorsque  Priscillien,  pour 
en  éviter  le  jugement,  apella  à  l'Empereur  Maxime,  et  évo- 
qua l'affaire  à  son  tribunal.  Mais  cet  apel  lui  fut  plus  funeste 

Sui.  ibid.  p.  427.  qu'il  ne  s'y  seroit  atendu.  'Lui  et  ses  complices  furent  donc 


DANS  LES  GAULES.   IV  SIECLE.         37 

conduits  à  la  cour ,  qui  étoit  alors  à  Trêves,  où  Idace  et  Itha- 
ce  leurs  acusateurs  les  suivirent ,  '  et  les  poussèrent  avec  trop  Sui.  n.  es.p.  4îi. 
de  chaleur.  Ces  malheureux  y  furent  jugés  et  punis  avec  la  *'^  '  ^^°'''  ""*'■ 
sévérité  que  tout  le  monde  sait,  plusieurs  aïant  été  décollés , 
et  les  autres  relégués  dans  les  isles  éloignées.  A  Bourdeaux 
on  étoit  si  indigné  contre  ceux  de  cette  secte,  que  la  popu- 
lace lapida  une  femme  nommée  Urbique ,  parce  qu'elle  ne 
vouloit  pas  renoncer  à  soti  impieté. 

LVIII.   Quoique  cette  affaire  fut  évoquée  au  tribunal  de 
l'Empereur ,  cela  n'empêcha  pas  qu'après  le  Concile  de  Bour- 
deaux, S.  Martin  et  divers  autres  Evêques  des  Gaules  ne  té-  Wat.  p  m*. 
moignassent  même  par  un  jugement  solennel,  comme  ils  sem- 
ble, qu'ils  ne  pou  voient  regarder  Priscillien  et  ses  sectateurs 
que  comme  des  hérétiques.  Un  tel  jugement  supose  la  con- 
vocation d'un  Concile  que  l'on  ne  connoît  point  d'ailleurs. 
Seulement  '  un  auteur  du  XII  siècle,  et  par  conséquent  fort  Spic.  1. 12.  p. «os. 
éloigné  de  ces  tems-ci,  nous  aprend  que  Maxime  assembla 
plusieurs  Evêques,  entre  lesquels  se  trouvèrent  S.  Ambroise  et 
a.  Martin,  et  qu'ils  tinrent  un  Concile  pour  condamner  cet- 
te hérésie.  Mais  quel  qu'ait  été  ce  Concile,  ce  ne  fut  pas  as- 
surément lui  qui  décerna  la  peine  que  l'on  fit  porter  aux  Pris- 
cillianistes.  D  aussi  Saints  Evêques  que  S.  Ambroise  et  Saint 
Martin  n'auroient  eu  garde  d'aprouver,  encore  moins  d'or- 
donner une  telle  cruauté.  Ils  étoient  trop  instruits  de  l'esprit 
de  l'Eglise,  qui  a  toujours  eu  en  horreur  l'effusion  du  sang  , 
même  de  ses  plus  cruels  persécuteurs.  '  C'est  ce  que  S.  Mar-  Sni.  ibid.  p.  428. 
tin  en  particulier  témoigna  par  ses  instances  auprès  de  Maxi-  p*^86i!*56«'."'**' 
me  pour  épargner  à  ces  malheureux  le  genre  de  suplice  au- 
quel ils  furent  condamnés.  C'est  ce  qu'il  blâma  encore  hau- 
tement en  présence  de  cet  Empereur  et  d'Ithace  même.  'S.  Ainb.ep.24.n.«. 
Ambroise  en  fit  autant,  et  fut  suivi  par  le  Pape  Sirice  et  par  le 
I  Concile  de  Turin,  comme  nous  le  dirons  ailleurs.  ' 

LIX.  L'opinion  contraire  ne  laissa  pas  néanmoins  de  trou- 
ver des  partisans.  Ithace  le  principal  auteur  de  la  mort  de  ces 
hérétiques,  en  fut  le  chef,  et  leur  donna  son  nom.  De-là  se 
forma  le  parti  des  Ithaciens,  qui  causa  de  si  étranges  divisions 
dans  l'Eglise  des  Gaules.  '  L'autorité  de  la  justice,  l'aparence  sùi.  iiisi.  1.  a.  n. 
du  bien  public,  et  peut-être  encore  plus  que  tout  le  reste  l'a-  f.\t  J^^w?!*''' 
pui  que  l'Empereur  donnoit  à  Ithace  et  à  ceux  de  son  parti , 
empêchèrent  d'abord  qu'on  ne  les  traitât  comme  le  meritoient 
des  Evêques  qui  avoient  procuré  la  mort  à  des  personnes, 


38  u  .i     ETAT   DES    LETKES 

Tiii.  ibid.p.  511.  quoique  Criminelles.  '  Cela  se  passoit  non  en  l'année  386, 

f»ros.  ibid.  coHime  le  supose  Baronius,  mais  dès  l'année  précédente.  '  Peu 

de  tems  après,  c'est-à-dire  en  388,  on  agit  tout  de  bon  con- 
tre les  Ithaciens,  qui  selon  S.  Prosper  furent  privés  de  la  com- 

Tiii.  ibid.  munioD  de  l'Eglise.  '  On  croit  que  ce  fut  les  Evoques  des 

Gaules  qui  portèrent  cette  sentence,  et  qu'au  mois  d'Avril 
390  ils  allèrent  à  Milan  pour  la  faire  confirmer  par  S.  Ambroi- 

Amb.  ep.  51.  n. 6.  sc.  '  Ce  Saint  prélat  parle  effectivement  d'un  Concile  qu'il  tint 
vers  ce  tems-là  à  l'arivée  des  Evéques  Gaulois.  A  Trêves  ce- 

Sui.dia.i6.p.562.   pendant  SC  fit  unc  asscmbléc  d'autrcs  Evêqucs,  '  où  Ithace  fut 

"   ■      ■  déclaré  innocent.  11  semble  qu'elle  fut  composée  des  prélats 

qui  étant  allés  dans  cette  ville  pour  l'Ordination  de  Félix  , 
communiquoient  tous  les  jours  avec  Ithace,  de  sorte  que  sa 
cause  leur  étoit  devenue  commune  avec  lui.  Mais  elle  parois- 
soit  si  odieuse  aux  yeux  du  public,  que  les  Païens  mêmes  la 
blâmoient  avec  des  traits  de-  reproches  qui  ne  faisoient  pas 
d'honneur  à  ces  Evêques.  Nous  en  pourrons  raporter  quel- 
ques-uns en  un  autre  endroit. 

LX.   Une  conduite  aussi  oposée  entre  nos  Evêques  causa 

ist.  i.2.n.66.p.  dans  les  Gaules  '  une  discorde  continuelle,  qui  pendant  plus 
de  15  ans  y  eut  des  suites  très-fâcheuses,  sans  que  l'on  pût 
trouver  le  moïen  de  l'éteindre.  Presque  toutes  choses,  dit  S. 
Sulpice,  étoient  troublées  et  confondues  par  les  divisions  de 
ces  Evêques,  qui  regloient,  ou  pour  mieux  dire,  qui  perdoient 
tout  en  suivant,  au  lieu  de  la  justice,  les  impressions  de  leur 
haine  ou  de  leur  affection  particulière,  et  ne  se  conduisoient 
que  par  des  mouvemens  de  crainte  ,  d'inconstance  ,  d'envie  , 
de  faction,  d'avarice,  d'arrogance,  etc.  On  voioit  le  plus  grand 
nombre  résister  aux  bons  avis  des  autres,  pour  n'écouter  que 
leurs  folles  imaginations,  sans  d'autre  motit  qu'une  opiniatre- 

dia.  ibij.  p.  561.  té  déraisonnable.'  On  portoit  l'injustice  et  la  licence  jusqu'à 
taxer  d'hérétiques  les  gens  à  la  seule  vûë.  Il  suffisoit  de  voir  un 
visage  pâle,  et  un  habit  de  certaine  figure,  aparemment  plus 
modeste  que  celui  du  commun,  pour  y  atacner  la  note  d  hé- 

hist.  ibid.  resie.  '  Cependant  le  peuple   de   Dieu  et  les  personnes  ver- 

tueuses servoient  de  jouet  à  la  mahce  et  à  l'insolence  des  au- 
tres. Ces  funestes  divisions  n'étoient  point  encore  entièrement 
apaisées  en  l'an  400,  qu'écrivoit  Saint  Sulpice  qui  nous  en  a 

Amb.  .looi).  Val.  laissé  le  triste  récit.'  S.  Ambroisequine  les  voïoitpasdesi 
près,  ne  laissoit  pas  de  les  déplorer  lui-même;  et  il  nous aprend 
que  souvent  elles  furent  cause  qu'il  s'excusa  de  se  trouver 


n.  85. 


DANS  LES  GAULES.   IV  SIECLE.         39 

aux  Conciles  que  tenoient  les  Evêques  des  Gaules. 

LXI-.  On  ignore  quels  furent  ces  Conciles  dont  parle  ici 
Saint  Ambroise.  Seulement  il  en  désigne  un  comme  tenu 
vers  le  mois  de  Mai  392  ,  l'année  de  la  mort  de  Valenti- 
nien  II.  Ce  pourroitbien  être 'celuLqui  se  tint  à  Nîmes,  et  sui.^ia.  a.n.i! 
auquel  Saint  Martin  refusa  fle  se  trouver  ,  mais  des  décisions  ^' 
et  de  la  conduite  duquel  il  fut  aussitôt  instruit  par  un  Ange. 
C'est  ce  que  nous  examinerons  plus  particulièrement  ailleurs. 
Il  manqueroit  au  reste  quelque  chose  à  l'abrégé  de  l'histoi- 
re des  Ithaciens  que  nous  venons  de  faire  ,  si  l'on  ne  trouvoit 
pas  ici  le  portrait  d'ithace  leur  chef  que  nous  a  tracé  un  his- 
torien du  tems.  '  Ithace,  dit  cet  Ecrivain,  étoit  un  homme  h^t.  i.  2.  n.M.p 
sans  souci ,  en  qui  l'on  ne  voïoit  aucune  marque  de  la  sainte- 
té du  caractère  episcopal  dont  il  étoit  revêtu.  Grand  parleur, 
plein  de  faste  ,  audacieux  jusqu'à  l'impudence  ,  il  n'avoit  de 
goût  que  pour  la  bonne  chère,  et  ppussoit  l'indiscrétion,  pour 
ne  pas  dire  la  folie  ,  jusqu'à  donner  le  nom  odieux  de  Priscil- 
lianistes  à  ceux  qui  s'apliquoient  à  l'élude,  ou  qui  faisoient 
profession  d'une  vie  austère  et  pénitente.  Il  ne  rougissoit  pas 
même  d'enveloper  sous  cette  oaieuse  qualification  le  grand 
S.  Martin  ,  qui  passoit  pour  un  homme  comparable  aux  Apô- 
tres. Tel  étoit  le  fameux  Ithace  ,  le  père  des  ithaciens  ;  et  l'on 
a  pu  s'apercevoir  par  le  peu  que  nous  avons  dit  de  ses  parti- 
sans, qu'ils  ne  lui  ressembloient  pas  mal. 

LXII.  Ce  n'étoit  pas  seulement  avec  S.  Ambroise  que  nos 
Evêques  et  les  autres  personnes  studieuses  des  Gaules  en- 
tretenoient  un  commerce  de  literature  en  ce  siècle.  Us  avoient 
encore  de  semblables  liaisons  avec  les  personnages  les  plus  cé- 
lèbres des  autres  pais  étrangers.  Ils  en  avoient  avec  a.  Jérô- 
me en  Palestine ,  S.  Augustin  en  Afrique  ,  S.  Paulin  d'abord 
retiré  à  Barcelone  et  depuis  à  Noie.  Us  en  avoient  avec  le  fa- 
meux Orateur  Symmaque  à  Rome  ,  et  sans  doute  avec  beau- 
coup d'autres  dont  l'antiquité  nous  a  dérobé  la  connoissance. 
Comme  ce  noble  commerce  continua  encore  au  siècle  sui- 
vant ,  nous  en  parlerons  alors  dans  un  plus  grand  détail.  Dès 
ce  siécle-ci  il  produisit  quantité  d'écrits,  comme  letres,  trai' 
tés,  pièces  de  poésie  ,  et  autres.  Mais  il  en  est  peu  qui  aient 
échapé  aux  injures  des  tems.  La  plupart  des  autres  précieux 
monumens  dont  ces  grands  Evêques  des  Gaules  ,  ou  nés  dans 
les  Gaules ,  que  vous  avez  vu  paroître  dans  la  suite  de  ce  dis- 
cours ,  avoient  enrichi  l'Eglise  ,  ont  eu  le  même  sort ,  et  ne 


40  ETAT   DES   LETRES 

se  trouvent  plus  aujourd'hui.  De  sorte  qu'outre  quelques  actes 
de  Conciles ,  et  un  ou  deux  traités  de  S.  Phebade  d'Agen  ,  il 
ne  nous  reste  de  toutes  ces  richesses,  que  ce  que  nous  en  avons 
dans  les  recueils  de  S.  Hilaire  de  Poitiers,  de  S.  Ambroise  de 
Milan ,  et  de  Lactance.  Nous  mettons  ce  dernier  au  nombre 
de  nos  savans  Gaulois  pour  Tassez  long  séjour  qu'il  fit  dans  les 
Gaules  ,  où  il  publia  ses  principaux  ouvrages. 

LXIII.  Mais  quelques  estimables  que  soient  ces  précieux 
restes ,  ils  ne  peuvent  nous  empêcher  de  déplorer  la  perte  qu'a 
fait  l'Eglise  par  la  privation  où  elle  est  de  tant  d'autres  écrits  , 
ou  ensevelis  dans  la  poussière,  ou  entièrement  perdus.  Il  est 
certain  que  Lactance,  S.  Hilaire  et  S.  Ambroise  avoient  lais- 
sé plusieurs  autres  ouvrages  de  leur  façon  ,  que  ceux  qu'on 
nous  en  a  conservés.  Nous  ne  nommerons  ici  que  les  plus 
considérables.  Quelle  perte  que  celle  des  commentaires  de  S. 
Hilaire  sur  Job  et  sur  le  Cantique  des  Cantiques,  de  ses  letres  à 
diverses  personnes,  de  son  traité  des  mystères,  et  du  recueil  de 
ses  hymnes!  Quelle  perte  encore  que  celle  des  commentai- 
res de  S.  Ambroise  sur  les  proverbes,  surisaïe  et  les  Prophètes, 
de  ses  courtes  remarques  sur  les  épîtres  de  S.  Paul ,  et  de  son 
traité  des  sacremens ,  ou  de  la  philosophie  !  Nous  avons  aussi 
perdu  ce  que  S.  Maximin  de  Trêves  et  S.  Paulin  son  succes- 
seur avoient  écrit ,  au  laport  de  S.  Athanase,  contre  l'hérésie 
d'Arius.  De  même  S.  Servais  de  Tongres  ,  que  nous  montre- 
rons être  ce  Sabbatius  Evêque  Gaulois ,  dont  parle  Gennade  , 
avoit  composé  un  traité  sur  la  foi  contre  divers  hérétiques,  le- 
quel s'est  perdu  comme  les  précedens.  On  ne  nous  a  point 
conservé  non  plus  ni  l'ouvrage  de  Paul  Evêque  de  Paris,  dont 
nous  avons  déjà  parlé,  ni  le  traité  des  principes  du  prêtre  He- 
liodore  compagnon  d'étude  de  S.  Hilaire  de  Poitiers. 

LXIV.  Et  si  nous  entrions  dans  un  entier  détail,  com- 
bien découvririons-nous  d'autres  monumens  ecclésiastiques  , 
qui  n'existent  plus  aujourd'hui  ?  Combien  d'actes  de  Martyrs 
et  de  vies  des  Saints  nous  ont  été  enlevés,  ou  par  l'injure  des 
tems,  ou  par  la  négligence,  et  peut-être  la  malice  des  hom- 
mes ?  Combien  avons-nous  perdu  d'actes  de  Conciles  ?  Vous 
avez  pu  remarquer  dans  ce  discours  qu'il  s'en  étoit  tenu  un 
grand  nombre  dans  les  Gaules  ,  tant  au  sujet  de  l'Arianisme  , 
que  sur  les  grandes  affaires  des  Priscillianistes  et  des  Ithaciens: 
cependant  il  ne  nous  reste  presque  rien  de  tous  ces  Conciles. 
Combien  encore  de  letres  particulières  perdues?  Nous  n'avons 

lien 


DANS  LES  GAULES.  IV  SIECLE.  41 

rien  de  toutes  celles  que  nos  Evêaues  écrivirent  à  S.  Hilaire 
dans  son  exil ,  et  qui  étoient  sans  doute  des  monumens  dignes 
de  passer  à  la  postérité  la  plus  reculée.  Ce  qui  se  fit  pour  ap- 
puier  l'erreur,  s  est  perdu  comme  le  reste.  Il  ne  paroîtplus  rien 
ni  des  écrits  de  Saturnin  d'Arles  en  faveur  de  l'hérésie  arienne, 
ni  des  divers  libelles  que  Vigilance  publia  tant  contre  la  ré- 
putation de  S.  Jérôme,  que  pour  établir  ses  nouvelles  erreurs. 
Quoique  nous  raportions  avec  quelque  étendue  l'histoire  de 
cet  hérésiarque  au  siècle  suivant ,  nous  ne  pouvons  pas  nous 
dispenser  d'en  dire  quelque  chose  dès  ce  siecle-ci ,  où  il  com- 
mença à  se  faire  connoître  et  à  éclater. 

LXV.  L'EgHse  des  Gaules ,  qui  jusqu'ici  avoit  été  en  gar- 
de contre  les  erreurs  étrangères  qui  pouvoient  corrompre  la 
pureté  de  sa  foi,  eut  la  douleur  de  voir  naître  l'hérésie  dans 
son  propre  sein  vers  la  fin  de  ce  IV  siècle.  '  Vigilance,  le  pre-  Hier,  in  Vi».  p 
mier  monstre  ,  dit  S.  Jérôme  ,  que  les  Gaules  aient  produit,  ***"  "*■ 
débita  plusieurs  erreurs  contre  la  religion  et  les  pieuses  prati- 

Îues  établies  et  autorisées  dans  l'Eglise.  Il  blâmoit  comme 
ovinien  la  profession  de  la  continence.  Il  condamnoit  le  res- 
pect que  l'on  rend  aux  reliques  des  Martyrs,  et  donnoit  à  ceux 
3ui  les  honorent  la  qualification  odieuse  de  Cendriers  et  d'I- 
olâtres.  Il  traitoit  de  superstition  païenne  l'usage  d'allumer 
en  plein  jour  des  cierges  en  leur  honneur.  Il  soûtenoit  qu'a- 

firès  la  mort  on  ne  pouvoit  plus  prier  les  uns  pour  les  autres. 
1  disoit  que  les  miracles  qui  se  faisoieiit  aux  sépulcres  des 
Martyrs  ,  n'étoient  que  pour  les  Infidèles.  Il  condamnoit  les 
veilles  publiques  dans  les  Eglises ,  excepté  la  nuit  de  Pâques. 
Il  blâmoit  ceux  qui  vendoient  leur  bien  pour  le  donner  aux 
pauvres,  et  qui  embra.ssoient  la  vie  monastique.  Nous  dirons 
ailleurs  de  quelle  manière  cette  hérésie  fut  découverte  par  les 
soins  de  deux  prêtres  de  l'Eglise  des  Gaules ,  Ri  paire  et  Di- 
dier ,  et  ensuite  combatuë  et  refutée  par  la  plume  de  S.  Jé- 
rôme. 

LXVI.  D'abord  elle  fut  suivie  par  les  personnes  crédules 
et  charnelles ,  parce  qu'elle  favorisoit  leurs  passions.  '  Mais  on  tui.  ibid.  1. 12. p. 
ne  voit  point  (qu'elle  ait  eu  de  suite  ;  et  S.  Augustin  n'en  fait  *^' 
aucune  mention  dans  le  dénombrement  des  autres  hérésies.  On 
croit  qu'elle  fut  moins  étouffée  par  les  écrits  qu'y  oposa  S. 
Jérôme ,  et  par  les  soins  des  Evêques  ,  que  par  les  ravages 
affreux  que  firent  les  Barbares  dans  les  Gaules  au  commence- 
ment du  V  siècle ,  tant  en  punition  de  cette  hérésie  même  , 

Tome  I.  Sec.  Part.  F 

4  * 


42  ETAT    DES    LETRES 

que  pour  cliâtier  les  Gaulois  à  cause  de  leurs  autres  crimes. 
On  ne  voit  point  non  plus  qu'on  ait  eu  besoin  d'aucun  Con- 
cile pour  la  condamner,  tant  elle  étoit  contraire  à  la  Iradi- 
nii.  iiog.  c.  73.  tion  de  l'Eglise  universelle.  '  Gennade  néanmoins  près  d'un 
siècle  depuis  ne  laissoit  pas  d'y  faire  allusion  ,  lorsque  dans  ses 
dogmes  catholiques  il  parle  ainsi  :  «  Nous  croïons  ,  dit-il,  que 
«  les  corps  des  Saints ,  et  particulièrement  les  reliques  des  SS, 
«  Martyrs  doivent  être  honorées  avec  sincérité ,  comme  les 
«  membres  de  J.  C.  Nous  croïons  que  les  basiliques  qui  por- 
«  tent  leur  nom ,  doivent  être  visitées  avec  un  sentimi^nt  de 
c.  pieté  et  une  dévotion  entière  ,  comme  étant  des  lieux  desti- 
«  nés  au  culte  de  Dieu.  Quiconque  est  dans  une  autre  croïan- 
«  ce ,  nous  le  regardons  comme  un  disciple,  non  de  J.  C. 
«  mais  d'Eunome  et  de  Vigilance.  »  C'est  ainsi  que  parloit  à 
la  fin  du  V  siècle  un  prêtre  de  l'Eglise  de  Marseille  ,  en  ren- 
dant compte  de  sa  loi  au  pape  3-  Gelase. 

LXVIl,  Nous  finirons  ce  discours  par  ce  qui  se  présen- 
te à  dire  sur  l'institut  de  l'ordre  monastique  ,  dont  Dieu  se  ser- 
vit pour  garantir  les  letres  d'une  entière  décadence  ,  et  con- 
tribuer à  conserver  la  pureté  de  la  religion.  L'on  sait  de  res- 
te en  effet  que  les  monastères  ont  presque  toujours  été  au- 
tant d'écoles  et  pour  la  pieté  et  pour  les  letres.  L'on  commen- 
ça à  en  voir  dans  les  Gaules  peu  après  le  milieu  de  ce  siècle. 
Soi  vit.  M.  II.  i.  '  Le  premier  que  l'on  sache  y  avoir  été  établi ,  doit  son  origi- 
p.  448.4*9.  jjg  ^  g   Martin  depuis  Evêque  de  Tours.  Ce  Saint  le  bâtit  à 

Ligugé,  à  une  pelile  distance  de  la  ville  de  Poitiers,  lorsqu'il 
se  fut  mis  pour  la  seconde  fois  sous  la  discipline  de  S.  Hilaire , 
après  que  ce  S.  prélat  eut  été  renvoie  à  son  Eglise  en  360.  S. 
Martin  en  fit  le  lieu  ordinaire  de  sa  retraite  jusqu'à  son  épis- 
copat ,  et  pendant  qu'il  l'habitoit.  Dieu  l'illustra  par  un  mira- 
cle éclatant ,  en  ressuscitant  un  mort  à  la  prière  de  son  servi- 
teur. Ce  monastère  conlinua  à  être  célèbre  dans  les  siècles  sui- 
vans,  et  nous  en  verrons  sortir  quelques  personnes  de  letres. 
Enfin  après  avoir  servi  à  l'instruction  et  à  la  sanctification  de 
quantité  de  Moines,  il  est  passé  en  ces  derniers  tems  aux  Jé- 
suites de  Poitiers,  qui  en  on  fait  leur  maison  de  plaisance,  où 
ils  vont  ordinairement  se  délasser  des  fatigues  inséparables  du 
soin  qu'ils  j)rennent  d'instruire  la  jeunesse. 
...7.1..  45a.  455.  LXVin.  '  S.  Martin  aïant  été  élevé  sur  le  siège  épiscopal 
de  Tours,  ne  perdit  rien  de  son  amour  pour  la  solitude.  C'est 
ce  qui  le  porta  à  bâtir  à  une  demie  lieuë  de  la  ville  un  autre 


DANS   LES   GAULES.    IV   SIECLE. 


43 


7,1!). 


monastère,  qui  est  aujourd'hui  la  célèbre  abbaïe  de  Marmou- 
tier.  En  peu  de  tems  il  y  assembla  jusqu'à  80  Moines,  qui  vi- 
voient  en  Cénobites.  L'austérité  y  étoit  grande  et  pour  la 
nourriture  et  pour  le  vêtement  ;  quoique  plusieurs  de  ces  so- 
litaires fussent  de  famille  noble,  et  eussent  été  élevés  d'une 
manière  bien  différente.  Mais  ce  qui  étoit  dur  à  la  nature, 
les  atraits  de  la  grâce  le  leur  rendoient  doux  et  aimable.  Ce 
monastère  étoit  tout  à  la  fois  et  une  pépinière  d'Evêques  et 
une  école  pour  les  letres.  Il  n'étoit  point  d'Eglise,  dit  S.  Sul- 
pice,  qui  ne  voulût  avoir  pour  la  gouverner,  un  sujet  formé 
dans  ce  saint  lieu.  Tout  le  travail  des  solitaires  consistoit  à  co- 
pier des  livres.  On  n'y  emploïoit  toutefois  que  les  plus  jeu- 
nes ;  les  anciens  n'aiant  point  d'autre  ocupation  que  la  priè- 
re. Entre  les  grands  hommes  qui  se  formèrent  en  ce  sanc- 
tuaire ,  même  avant  la  fin  de  ce  IV  siècle ,  '  nous  connois-  Pros.  cUr.  p 
sons  S.  Héros  Evêque  d'Arles;  'Eusebe  à  qui  Saint  Sulpice  Sui.  ad  Eus. 
adresse  une  de  ses  letres,  et  qui  fut  aussi  élevé  à  l'épiscopat , 
S.  Severe  Sulpice  lui-même  qui  y  passa  quelques  années  du 
vivant  de  S.  Martin,  et  encore  plus  de  tems  après  sa  mort; 
'  Victor  l'un  des  Saints  qui  étoient  associés  avec  S.  Paulin  de  Paui.  o.p.  as.num 
Noie;  S.  Clair  le  disciple  chéri  de  S.  Martin;  '  Gallus  qui  sùf.uiai.  i.  n.  4 
parle  presque  toujours  dans  les  dialogues  de  S.  Sulpice,  et  le  **  '  "*'*'•  *•  "•  ' 
prêtre  Evagre  dont  nous  parlerons  plus  amplement  ailleurs. 
On  pourroit  encore  mètre  de  ce  nombre  '  le  célèbre  S  Patri- 
ce Apôtre  de  l'Hibernie,  qui  peu  après  la  mort  de  S.  Martin 
se  retira  près  de  ses  disciples,  et  y  passa  au  moins  trois  ans. 

LXIX.  Presque  aussi-tôt  que  ce  monastère  eut  été  formé, 
il  devint  comme  une  ruche  féconde,  d'où  il  sortit  plusieurs 
essains  mystiques  qui  se  répandirent  ailleurs.  C'est  de-là  sans 
doute  que  S.  Martin  tira  les  premiers  Moines  qu'il  envoia 
peupler  '  les  nouveaux  monastères  ,  dont  il  remplit  les  envi- 
rons de  Tours,  selon  l'expression  de  l'auteur  de  sa  vie.  De  sor- 
te que  dès-lors  Marmoutier  aquit  la  qualité  de  chef  d'ordre  : 
ce  qui  lui  fît  donner  depuis  le  nom  latin  de  maj'us  monaste- 
rium,  dont  on  a  formé  celui  qu'il  porte  aujourd'hui.  '  Aux  en- 
virons de  Trêves  on  vit  aussi  avant  l'an  385  les  commence- 
mens  d'un  autre  monastère,  par  le  soin  qu'y  prirent  quelques 
serviteurs  de  Dieu  de  se  retirer  dans  une  cabane  pour  y  me- 
ner une  vie  ascétique.  Ce  fut  chez  eux  que  l'on  trouva  un  des 
premiers  exemplaires  de  la  vie  de  S.  Antoine,  qui  eussent  en- 
core paru  dans  les  Gaules.  Il  vous  est  aisé  de  juger  par  ce  que 

F  ij 


Bail. 
216. 


n.  m.vrs,  p. 


Sul.  vil. 
p.  458. 


M.  n. 


Aug. 
15. 


conf.  I.  8.0. 


nea.  H.  F..  I.  49. 

I).  ;h. 


U  EUMENE, 

nous  venons  de  dire,  que  l'ordre  monastique,  au  moins  dans 
nos  Gaules,  fit  dès  sa  première  origine  une  profession  parti- 
culière de  cultiver  les  letres.  Le  travail  à  copier  les  livres,  qui 
dès  lors  faisoit  une  des  principales  ocupalions  des  moines,  se 
continua  toujours  chez  eux  dans  la  suite,  jusqu'à  la  découver- 
te du  secret  admirable  de  l'imprimerie.  Aussi  les  historiens 
les  plus  équitables  rendent-ils  aux  anciens  moines  la  justice 
de  reconnoître  que  c'est  à  leurs  soins  et  à  leurs  travaux  que 
nous  sommes  redevables  de  ce  qui  nous  reste  des  livres  de  la 
bonne  antiquité  ecclésiastique  et  profane. 

EUMENE, 

Orateur  et  Rhéteur. 

8-  I 

HISTOIRE   DE   SA   VIE. 

UMENE  cet  illustre  orateur  et  professeur  d'éloquence, 
I  dont  nous  avons  déjà  fait  si  souvent  mention  ,  fleurissoit 

pm.  n.  p.  157.  sur  la  fin  du  III  siècle  et  au  commencement  du  IV.  '  D  étoit 
originaire  d'Athènes,  d'où  son  aïeul  passa  à  Rome,  et  y  en- 
seigna la  rhétorique  avec  beaucoup  de  réputation.  De  Rome 
il  vint  à  Autun,  dont  les  citoïens  lui  témoignèrent  tant  d'ar- 
deur pour  l'éloquence,  qu'il  fixa  sa  demeure  dans  cette  ville  , 
et  y  continua  sa  profession  de  rhéteur  jusqu'à  l'âge  de  80  ans 
et  au-delà. 

p.  u2.  224.  '  Ce  fut  à  Autun  qu'Eumene  prit  naissance,  quelques  an- 

nées après  le  milieu  de  ce  siècle;  puisqu'il  étoit  encore  enfant 
sous  l'empire  de  Claude  II  vers  l'an  269.  Il  ne  tarda  pas  à  fai- 
re voir  que  l'éloquence  étoit  un  bien  héréditaire  dans  sa  fa- 

p.  iM.  1.14.  157.  mille.  '  Il  l'enseigna,  comme  son  aïeul,  à  la  jeunesse  d'Au- 
tun  ;  et  de  cette  chaire  d'éloquence,  il  fut  élevé  à  la  charge  de 

p.  iB.-;.  secrétaire  d'Etat.  '  Après  l'avoir  exercée  quelque-tems  ,  on  lui 

permit  de  se  retirer,  et  d'aller  vivre  en  repos  à  la  campagne. 

p.  i*.-..  146.  n  y  goûtoit  avec  plaisir  les  douceurs  de  la  retraite  et  de  la  vie 

champêtre,  ocupé  des  études  particulières  d'un  de  ses  enfans, 
lorsque  le  collège  d'Autun  vint  à  perdre  son  modérateur  ou 
principal.  Aussi-tôt  Constance-Chlore  jetta  les  yeux  sur  Eu- 

r>.  i.'.4. 155.         mené,  par  l'estime  qu'il  faisoit  non-seulement  de  son  éloquen- 


e: 


ORATEUR  ET  POETE.  45 

ce,  mais  encore  de  la  dignité  de  ses  mœurs,  pour  remplir     iv  siècle. 
cette  place  vacante. 

'  Ce  Prince  n'étant  alors  que  César,  eut  recours  à  l'autorité  pan.  b.  imu 
des  Empereurs  Maximien  Hercule  et  Diocletien,  afin  d'enga- 
ger Eumene  à  se  charger  de  l'administration  du  collège  et  du 
soin  d'y  enseigner  de  nouveau  la  rhétorique.  Il  en  obtint  une 
letre  ou  rescrit  adressé  à  Eumene  même,  et  aussi  glorieux  à 
sa  mémoire  qu'honorable  à  la  jeunesse  d'Autun,  en  qui  l'on 
voïoit  les  plus  belles  dispositions  du  monde  pour  les  sciences. 
Comme  Eumene  joûissoit  encore  de  la  pension  de  secrétaire 
d'Etat,  les  Empereurs  la  lui  doublèrent,  et  l'assurèrent  qu'il  ne 

[)erdroit  rien  du  rang  ni  des  privilèges  que  ses  autres  emplois 
ui  avoient  acquis. 

'  Ce  grajid  homme  se  rendit  à  de  si  puissantes  solicitations,  p.  153.  is4. 
et  accepta  la  chaire  d'éloquence  avec  les  apointemens  que 
l'on  y  atachoit.  Ils  étoient  considérables,  faisant  plus  de  vingt- 
six  mille  livres  de  notre  monnoïe.  Mais  par  un  trait  de  déta- 
chement et  de  générosité  que  l'on  ne  sauroit  assez  louer,  il  ne 
voulut  point  en  profiter,  et  les  apliqua  au  rétablissement  du 
collège  d'Autun.  C'est  ce  que  nous  aprenons  d'un  discours 

Su'il  fit  devant  un  des  gouverneurs  des  Gaules,  pour  deman- 
er  que  ce  collège  fût  compris  dans  les  édifices  publics  que 
Constance  faisoit  rebâtir,  aun  de  rendre  à  Autun  sa  première 
splendeur. 

'  Eumene  dans  un  autre  de  ses  discours  prononcé  en  310,  p-  soi- 
semble  dire  qu'il  n'étoit  alors  que  dans  la  50*  année  de  son  âge. 

11  avoit  néanmoins  dès  lors  un  de  ses  fils  qui  étoit  avocat  du  p.  su. 
fisc.  Il  se  voïoit  quatre  autres  enfans,  qu'il  recommande  à 
Constantin  le  Grand  dans  le  même  discours.  '  On  ne  sait  point  p.  no.  2. 
s'il  vêquit  au-delà  de  l'an  311,  où  nous  conduit  ce  qui  nous 
reste  de  ses  écrits,  ni  s'il  renonça  au  Paganisme  dont  il  faisoit 
profession,  pour  embrasser  la  foi  de  J.  C.  à  l'exemple  de  Con- 
stantin, le  dernier  des  Empereurs  sous  lesquels  il  fleurissoit. 

S-  II. 

SES  ECRITS. 

EUMENE  n'a  pas  seulement  mérité  la  qualité  de  rhéteur, 
pour  avoir  si  long-tems  et  si  dignement  enseigné  l'art  de 
bien  parler.  Il  s'est  encore  acquis  le  litre  d'orateur  et  de  pané- 
gyriste de  l'epipire  par  l'usage  qu'il  a  fait  lui-même  de Télo^ 


■  j/it 


46  '•'        EUMENE,     '"^ 

IV  SIECLE,  quence  dans  plusieurs  païK^gyriques  qu'il  a  prononcés  en  pu- 
blic.  Il  ne  nous  en  reste  néanmoins  aujourd'hui  que  -juatre  de 
sa  façon. 

Pan.B.p.iii.t6o.  '  Le  premier  fut  prononcé  à  Autun  en  faveur  du  collège  de 
cette  ville,  et  en  présence  du  gouverneur  de  la  Gaule  Cel- 
tique ou  Lyonoise,  que  l'on  croit  avoir  été  Riotiovare.  Eu- 
mene  le  divise  eh  deux  parties.  Dans  la  première,  il  montre 
combien  il  est  juste,  utile  et  avantageux  pour  le  public  de  ré- 
tablir dans  leur  première  splendeur  les  écoles  d'Âutun,  qui 
étoient  autrefois  si  magnifiques  par  leurs  édifices,  et  si  célè- 
bres par  le  concours  des  étudians.  Il  emploie  la  seconde  par- 
tie pour  faire  voir  que  l'on  pouvoit  exécuter  ce  dessein,  sans 
être  à  charge  au  public,  en  prenant  les  moïens  qu'il  propose, 
s'ofTrant  généreusement  à  céder  pour  ce  grand  ouvrage  tout 
ce  qu'il  rctiroit  de  la  libéralité  des  Empereurs. 

p-  ^♦s.  lu.  '  Il  y  parle  des  dommages  qu 'Autun  venoit  de  recevoir  tout 

de  nouveau,  sur-tout  par  les  incursions  des  Bagaudes.  Il  y 
toutîhe  la  magnificence  qu'un  Empereur  avoit  déjà  fait  paroî- 
tre  dans  les  réparations  de  cette  ville,  et  le  soin  que  les  Em- 
pereurs regnans  prenoient  de  les  faire  continuer,  en  y  em- 
ploïant  des  ouvriers  qu'ils  avoient  fait  venir  d'au-delà  la  mer, 

p.  ir,3.  m.  c'est-à-dire,  de  la  grande  Bretagne.  '  Eumene  y  fait  mention 
de  sa  charge  de  secrétaire  d'Etal,  et  des  apointemens  qui  y 

!'■  '"•  étoient  atachés.  '  C'est  dans  ce  même  discours  qu'il  nous  fait 

p.  160.  connoître  son  aïeul.  '  Il  le  finit  en  priant  le  gouverneur  de- 

vant qui  il  le  prononçoit,  d'écrire  aux  Empereurs,  et  de  leur 
''       faire  agréer  le  dessein  qu'il  proposoit  de  rétablir  le  collège 

p.^i40|Tiii.Emp.  d'Autun.  '  On  croit  que  ce  disôours  fut  prononcé  en  296; 

Quoique  d'autres,  peut-être  avec  raison,  ne  le  placent  que 
eux  ans  plus  tard 'en  298.  '  On  y  trouve  insérée  la  letre  que 
les  Empereurs  Maximien  Hercule  et  Diocletien  écrivirent  à 
Eumene,  pour  l'engager  à  se  charger  une  seconde  fois  d'in- 
struire la  jeunesse  d'Autun,  comme  nous  l'avons  déjà  dit. 

p.  165. 181.  '  L,.  second  discours  de  notre  orateur  est  à  la  louange  de- 

Constance  Chlore,  qui  n'étoit  encore  que  César,  et  en  présen- 
ce de  qui  il  fut  prononcé  à  Trêves,  au  nom  de  la  ville  d'Au- 
tun. Eumene  y  relevé  les  victoires  de  ce  Prince.  Mais  le  sujet 
principal  qu'il  y  traite,  est  la  conquête  de  la  grande  Bretagne, 
après  la  défaite  de  Carause  qu'il  qualifie  le  chef  des  Pirates, 
et  d'Allecte  qui  s'étoit  élevé  à  sa  place. 

P;  a^ia" "''''•  *    '  Les  critiques  ne  conviennent  pas  entre  eut  de  l'ailnée  à 


ORATEUR   ET  POETE.  47 

laquelle  ce  panc^gyrique  fut  prononcé.  Les  uns  le  placent  le  iv  siècle. 
premier  des  quatre  qui  nous  restent  d'Earaene  ;  et  les  autres 
ne  le  comptent  que  pour  le  second.  On  trouve  dans  le»  deux 
pièces  de  quoi  apuïer  l'un  et  l'autre  sentiment.  Le  P.  de  la 
Baune  met  celui  dont  il  est  ici  question  en  2Q6,  après  que 
Constance  Chlore  eut  recouvré  les  isles  Britanniques,  et  avant 
la  victoire  de  Langres,  dont  il  n'y  est  pas  dit  un  mot.  Il  ne 
laisse  pas  de  ne  le  melre  que  lé  second  des  quatre.  Mr  de  Til-^ 
lemont,  qui  le  compte  pour  le  premier,  le  raporte  à  l'année 
suivante,  sur  ce  qu'il  y  est  parlé  du  premier  jour  de  Mars,  au- 
quel Constance  avoit  été  fait  César,  et  que  l'on  peut  présumer 
f[u'il  fut  prononcé  à  la  solennité  de  sa  cinquième  année,  qui 
inissoit  en  297.  '  Il  y  est  fait  mention,  comme  dans  le  pre-r  pan,  p.  isi. 
mier,  des  ouvriers  que  Constance  emploïoit  au  rétablissement 
de  la  ville  d'Autun,  après  que  ce  Prince  les  eut  amenés  de  la 
grande  Bretagne. 

Rhenanus  a  atribué  ce  second  discours  à  Claude  Mamer-  p.  i4o.  2. 
tin,  ou  à  quelque  autre  auteur  de  la  Gaule  Belgique,  C'est 
pourquoi  dans  son  édition  au  lieu  du  terme  latin  Heauensium, 
il  a  mis  Cliviensium,  lieu  inconnu  alors.  Mais  il  est  certain 
qu'outre  la  ressemblance  de  style  entre  ce  panégyrique  et  le 

f (recèdent,  Eumene  y  est  si  bien  caraçterisî',  qu'on  ne  peut  le 
ui  refuser. 

Le  troisième  fut  encore  prononcé  à  Trêves  l'an  309  ou  ibidiTui.ibid.  p. 
310,  en  présence  de  Constantin  le  grand,  au  jour  qu'il  cèle-  *"' 
broit  la  fondation  de  cette  ville.  '  Il  roule  particulièrement  sur  Pan.  p.  201.  217. 
les  victoires  de  ce  nouvel  Empereur,  et  sur  l'éloge  de  Con- 
stance-Chlore son  père,  qu'il  place  bien  haut  dans  le  ciel, 
?[uoique  mort  dans  le  paganisme.  Eumene  témoigne  que  ce 
ut  Constantin  lui-même  qui  le  chargea  de  ce  panégyrique, 
et  qu'il  le  fit  sur  le  champ.  En  parlant  des  victoires  de  ce  Prin- 
ce, il  relevé  particulièrement  celles  qu'il  avoit  remportées  sur 
les  François,  dont  il  avoit  défait  les  Rois  ou  les  Ducs.  Il  fait 
mention  du  siège  qu'il  avoit  mis  devant  Marseille  en  308,  et 
de  sa  marche  contre  Maximien  Hercule,  à  qui  il  reproche 
avec  véhémence  de  ce  que  s'(''tant  jusqu'à  trois  fois  volont&i-t 
rement  démis  de  l'Empire,  il  l'avoit  repris  autant  de  fois,  Eu- 
mene y  donne  des  marques  non  équivoques  de  la  religion 
Païenne  qu'il  professoit.  Il  dit  que  les  mauvaises  actions  des 
hommes  sont  des  suites  du  destm,  et  leurs  vertus  de?  dons  de 
la  divinité. 


48    EUMENE,  ORATEUR  ET  POETE. 

IV  SIECLE.         '  Sur  la  fin  de  ce  discours  il  invite  Constantin  à  honorer 

Pan.  p.  S16.  217.  d'uuc  dc  SCS  visitcs  la  viUe  d'Autuu ,  et  l'exhorte  à  achever  de 
la  rétablir.  Mais  il  n'ose  pas  se  promettre  que  son  âge  avancé 
lui  permette  de  voir  ce  rétablissement.  Il  semble  néanmoins 
par  un  trait  de  cette  pièce,  qu'Eumene  n'avoit  alors  que  50 
ans.  Il  finit  en  recommandant  à  l'Empereur  cinq  enfans  qu'il 
avoit,  dont  l'un  servoit  ce  Prince  en  qualité  d'avocat  du  fisc, 
et  ses  disciples  dont  plusieurs  étoient  déjà  emploies  dans  les 
premières  charges  de  la  Cour  et  de  l'Etat. 

p.  219.  a».  '  Le  quatrième  et  dernier  panégyrique  d'Eumene'est  un  re- 

merciment  à  l'Empereur  Constantin  de  la  part  des  citoïens 
d'Autun.  C'est  pourquoi  le  titre  latin  porte  qu'il  a  été  pronon- 

p.  140.2.  iTiii.ib.  ce  Flaviensium  nomine,  '  parce  que  cette  ville  sensible  aux 
bienfaits  de  ce  Prince,  avoit  pris  le  nom  de  Flavia,  qui  étoit 
celui  de  la  famille  de  Constantin.  En  effet  sur  la  fin  de  l'an 
311,  cet  Empereur  passant  par  Autun,  déchargea  les  Bour- 
-  ''*'  geois  d'une  partie  des  impôts  qu'ils  païoient,  et  leur  fit  quel- 
ques autres  gratifications.  Si-tôt  qu'il  fut  de  retour  à  Trêves, 
où  il  faisoit  sa  résidence  ordinaire,  la  ville  d'Autun  lui  députa 
Eumene  pour  lui  rendre  leurs  actions  de  grâces.  On  faisoit 
alors  à  Trêves  la  cérémonie  des  cinq  ans  de  l'empire  de  Con- 

Paii.  p.  2io.        stantin,  '  et  tous  les  seigneurs  des  environs  et  les  ambassadeurs 
des  Princes  s'y  étoient  rendus  pour  cette  solennité.  Ce  fut  en 
'  ■'''•  cette  occasion  qu'Eumene  prononça  son  quatrième  discours. 

p.'aig.  82».  '  Il  y  parle  d'abord  de  l'ancienne  noblesse  d'Autun,  et  de 

son  alliance  avec  les  Romains,  qui  leur  ouvrit  la  voie  à  la 
conquête  des  Gaules.  Il  passe  ensuite  à  ce  que  fit  cette  ville 
pour  le  service  de  l'Empereur  Claude  II,  dont  Constantin 
étoit  issu  du  côté  des  femmes  ;  et  delà  à  ce  que  fit  Claude  pour 
reconnoître  les  services  d'Autun.  Il  y  fait  une  description  du 
triste  état  auquel  cette  ville  avoit  été  réduite  dans  la  suite  des 
tems,  et  des  faveurs  dont  cet  Empereur  venoit  de  la  gratifier. 

En  faisant  le  caractère  de  l'éloquence  telle  qu'elle  étoit  en 
usage  aux  III  et  IV  siècles,  nous  avons  donné  une  idée  suffi- 
sante de  celle  qui  se  trouve  dans  ces  quatre  panégyriques. 
On  peut  voir  par  les  traits  que  nous  en  avons  raportés,  qu'ils 
sont  encore  plus  considérables  pour  les  faits  historiques  qu'ils 
contiennent,  que  pour  l'éloquence. 

Ds  ont  été  imprimés  plusieurs  fois  avec  les  autres  harangues 
des  anciens  panégyristes  de  l'Empire.  Nous  en  avons  déjà 
marqué  les  oifferenles  éditions  à  rarticle  de  Claude  Mamer- 

tin. 


MASSUS,  EVEQUE  DE  PARIS.  49 

tin,  et  il  seroit  inutile  de  les  répeter  ici.  Dans  l'édition  qu'en  iv  sieci-e. 
publia  Rhenanus  en  1520,  outre  le  défaut  d'ordre  chronolo- 
gique  entre  ces  quatre  harangues ,  il  n'y  a  que  la  première 
qui  porte  le  nom  d'Eumene.  La  seconde  est  atribuée  à  Ma- 
mertin,  et  les  deux  autres  à  des  inconnus.  Mais  il  n'y  a  qu'à  les 
lire  avec  atention,  pour  convenir  qu'elles  sont  d'un  seul  et  mê- 
me auteur,  et  que  cet  auteur  est  l'orateur  Eumene.  C'est  aussi 
de  quoi  tous  les  modernes  conviennent  aujourd'hui.  ' 

'  11  y  a  eu  une  édition  particulière  du  premier  de  ces  qua-  Biui.  s.  jni.  Tnr. 
tre  panégyriques  d'Eumene,  c'est-à-dire,  de  celui  qui  est  fait 
pour  le  rétablissement  du  collège  d'Autun.  Il  fut  imprimé  avec 
celui  de  Latinus  Pacatus  Drepanius  à  la  louange  du  grand 
Théodose,  par  les  soins  de  François  Baudoin,  qui  les  enrichit 
d'observations  de  sa  façon.  Cette  édition  parut  à  Paris  chez 
Sebastien  Nivelle,  l'an  1577  en  un  volume  inA". 


L' 


MASSUS, 

EvEQUE  DE  Paris. 

ES  fastes  de  l'Eglise  de  Paris,  au  raport  du  P.  Dubois  âOnb.  hist.  «cci. 
qui  en  a  fait  l'histoire  ,  ne  nous  aprennent  rien  de  cet  ^'"-  '•  ^  "•  "■ 
Evêque  que  son  nom  seul.  ^  On  nous  le  donne  communément  KCaii.chr.  vet.  i. 
pour  le  successeur  immédiat  de  Mallo,  qui  avoit  succédé  im-  *  v-^^- 1 
médiatement  à  Saint  Denys  premier  Evêque  de  cette  Eglise. 

L'épiscopat  de  Massus  fut  fort  tranquille  sous  le  gouverne-  Oub.  ïMi. 
ment  de  Constance  Chlore,  Prince  pacifique,  à  qui  les  Gau- 
les obéissoient  alors. 

'Un  ancien  catalogue  des  Evêques  de  Paris,  raportéparde  Monch.  de  mis. 
Mouchy  ou  Democharès,  et  depuis  inséré  dans  la  Gaule  Chré-  can.^iirTiiL  ' 
tienne,  porte  que  Massus  avoit  écrit  les  actes  du  martyre  de  S. 
Denys  et  de  ses  compagnons  S.  Rustique  et  S.  Eleuthere.  Ces 
actes,  suposé  qu'ils  aient  réellement  existé,  doivent  passer  pour 
originaux.  Leur  auteur,  comme  l'on  voit  par  ce  que  nous  ve- 
nons de  dire,  pouvoit  avoir  vécu  du  tems  de  S.  Denys  mê- 
me, non  dès  le  premier  siècle  de  l'Eghse,  ainsi  que  ce  cata- 
logue l'établit,  mais  sur  la  fin  du  III.  Il  pouvoit  remplir  le  siè- 
ge épiscopal  de  Paris  avant  la  fin  de  ce  même  siècle,  et  conti- 
nuera l'occuper  pendant  les  premières  années  du  siècle  suivant, 
jusques  vers  312.  Car  entre  Massus  et  Paul  qui  étoit  Eve-  . 

Tome  I.  Sec.  Part,  G 


iSé  MASSUS,  EVEQUE  DE  PARIS. 

IV  SIECLE,    que  de  la  même  Eglise  au  tems  du  premier  Concile  de  Pa- 
ris  en  361,  on  ne  met  que  trois  autres  Evoques. 

Pour  ce  qui  est  des  actes  qu'il  laissa,  ce  n'est  assurément  pas 
iiosq.  t.  2.  p.  68  '  ceux  que  nous  avons  dans  Mr  Bosquet,  l.'auti'ur  de  ceux- 
"■  ci  avoue  lui-même  qu'il  étoit  bien  éloigné  des  tems  de  Saint 

Denys  ;  puisqu'il  dit  qu'il  a  composé  son  histoire,  moins  sur 
ce  qu'il  avoit  apris  dans  les  monumens  airciens,  ou  qu'il  avoit 
vu  lui-même,  que  sur  ce  que  portoient  les  traditions  de  son 
tems.  Nous  parlerons  ailleurs  plus  amplement  de  ces  derniers 
actes.  Il  suffit  d'observer  ici  que  les  savans  qui  en  jugent  le 
plus  favorablement ,  ne  les  croient  pas  plus  anciens  que  le 
Vl  siècle,  et  que  d'autres  les  renvoient  au  VII,  et  même  au 
VIII,  Il  y  a  tout  lieu  de  croire  (jue  lorsqu'ils  furent  faits , 
ceux  que  Massas  avoit  écrits ,  comme  on  le  supose,  n'éloient 
plus  connus,  et  même  qu'ils  étoient  perdus  entièrement. 

Nous  ajoutons  ,  comiTiH  cm  It?  supose  ,  parce  que  les  monu- 
mens qui  atestent  que  Massus  écrivit  ces  actes,  paroissent  un 
peu  suspects,  en  ce  qu'ils  font  S.  Denys  disciple  de  S.  Paul  ,  et 
par  conséquent  le  même  que  l'Areopagite. 


ANONYME, 

Panégyriste    de    l'Empire. 

'  T  'orateur  Anonyme  qui  fait  le  sujet  de  cet  article,  étoit 
JLi  d'un  païs  oii  l'on  parloit  à  la  vérité  la  langue  latine,  mais 
oîi  elle  n'étoit  pas  naturelle.  C'est  dire  bien  nettement  qu'il 
n'étoit  pas  Romain  de  naissance,  mais  de  quelque  province 
de  l'Empire  ,  ce  que  l'on  no  peut  mieux  interpréter  que  de  la 
Gaule  Belgique.  En  effet,  comme  il  fleurissoit  à  Trêves  au 
commencement  de  ce  siècle ,  et  que  ce  ful-là  qu'il  prononça 
les  pièces  d'éloquence  que  nous  avons  de  lui,  il  y  a  tout  lieu 
de  croire  qu'il  avoit  pris  naissance  dans  celte  ville  ou  aux  en- 
virons, et  qu'il  étoit  un  des  élevés  de  Claude  Mamertin  ,  qui 
y  enseignoit  sur  la  fin  du  siècle  précédent.  Il  put  y  professer 
lui-même  l'éloquence  après  Mamertin,  et  être  un  de  ces  rhé- 
teurs qui  soutinrent  en  ce  siècle  la  réputation  de  cette  école. 
im.  t.  '  Sigonius  n'a  pas  laissé  de  croire  que  cet  Anonyme  ètoit  plu- 

tôt d'Autun  que  de  Trêves.  Mais  c'est  de  quoi  il  n'aporte  au- 


.11.  II.  i>.  VDi. 


cune  raison. 


ANONYME,  PANEGYRISTE.  51 

Notre  orateur  se  donne  lui-même  pour  le  pan(^gyriste  or-    iv  siècle. 
dinaire  de  l'Empereur  Constantin  le  Grand  :  Quisemper  res  à  pan  e  u  23'> 
numine  tuo  yestas prœdicare  solitus  essem.  Cet  endroit  porte 
naturellement  à  croire  qu'il  avoit  fait  et  prononcé  plusieurs  pa- 
négyriques. Nous  n'en  connoissons  cependant  que  deux  de  sa 
façon,  et  on  nous  les  a  conservés  l'un  et  l'autre. 

'  Le  premier  fut  projioncé  à  Trêves  en  présence  de  Maxi-  p  i88-i9o. 
mien  Hercule  et  de  Constantin  le  Grand.  Celui-ci  y  est  qua- 
lifié un  nouvel  Empereur,  Oriens  Imperator  :  Ce  qui  fait  voir 
qiie  ce  fut  en  307,  lorsque  Constantin  fut  déclaré  Auguste. 
'  L'auteur  semble  diviser  son  discours  en  deux  parties.  L'élo-  p-  isg-i-ji. 
ge  de  Constantin  fait  le  sujet  de  la  première,  et  celui  de  Ma- 
ximien la  matière  de  la  seconde.  Il  fut  fait  à  l'ocasion  du  ma- 
riage de  Fausle  fille  de  ce  dernier  Empereur  avec  Constan- 
tin, '  qui  sans  doute  avoit  alors  perdu  Minervine  sa  première  tiii.  Enn).  i.  t.p. 
femme.  '""' 

L'orateur  y  relevé  les  victoires  de  Constantin  sur  les  Fran-  Pm.  p.  i!«. 
çois,  et  '  y  fait  mention  de  la  20*  année  de  l'empire  de  Ma-  p.  195. 
ximien,  de  son  abdication  et  de  son  retour  au  gouvernement 
de  l'Etat.  '  Il  y  parle  de  la  mort  de  Constance  Chlore  père  de  p.  «9). 
Constantin,  et  ne  fait  pas  difficulté  de  le  placer  bien  haut 
dans  le  ciel.  11  paroît  par  tout  le  cours  de  la  pièce  que  son  au- 
teur étoil  Païen. 

Le  second  discours  de  notre  panégyriste  fut  encore  pro-  p-.  «0. 1. 1  liii. 
nonce  à  Trêves  en  Janvier  313,  en  présence  de  l'Empereur  '*"''  ''  '" 
Constantin,  qui  y  étoit  dès  le  mois  de  Novembre  et  Décem- 
bre de  l'année  précédente.  '  Il  est  fait  particulièrement  pour  Pan.  p.  230.  s. 
célébrer  la  victoire  de  ce  Prince  sur  Maxence,  '  ce  que  plu-  p.  tu. 
sieurs  autres  orateurs  avoient  déjà  fait  tant  à  Rome  que  dans 
les  Gaules.  L'auteur  semble  avoir  eu  dessein  de  diviser  sa  pie- 
ce  en  deux  parties.  Il  emploie  la  première  à  relever  la  valeur 
de  Constantin  contre  Maxence;  la  seconde,  à  montrer  l'heu- 
reux succès  de  cette  victoire,  qui  fut  suivie  de  la  reddition  de 
Suse,  de  Turin,  de  Milan,  de  Vérone,  d'Aquilée,  et  de  son 
entrée  triomphante  dans  Rome. 

On  trouve  en  divers  endroits  de  cette  pièce  des  vestiges  »  ^^3.  «m. 
de  la  religion  de  l'auteur,  qui  étoit  le  paganisme,  comme  on 
l'a  déjà  vu.  U  y  fait  mention  de  la  postérité  qu'avoit  Constan- 
tin, '  ce  que  l'on  croit  devoir  entendre  de  la  naissance  de  Con-  ik.i. 
stantin  le  jeune,  que  cet  Empereur  auroit  déjà  eu  de  son  ma- 
riage avec  Fauste.  Mais  nous  dirons  ailleurs  que  ce  Prince 

G    ij 


52  ANONYME,  PANEGYRISTE. 

IV  siBCLK.  ne  naquit  qu'en  316.  Ainsi  ou  c'est  Crispe,  filsaîné  deConstan- 
tin  le  grand,  que  notre  orateur  désigne  en  cet  endroit,  ou 
c'est  quelque  autre  enfant  qui  naquit  à  ce  Prince  avant  Con- 
stantin le  jeune. 

Quelques  écrivains  ont  voulu  atribuer  ce  panégyrique  à 
l'orateur  Nazaire.  Mais  ni  les  circonstances  que  nous  avons 
marquées  ci-dessus,  ni  la  nature  du  style  ne  permettent  pas  de 
le  donner  à  d'autre  qu'à  l'orateur  Anonyme  dont  nous  parlons. 
Il  y  fait  paroître  comme  dans  le  précédent,  un  fonds  d'éru- 
dition et  quelque  élévation  dans  la  plupart  des  pensées.  Le 
style  de  l'un  et  de  l'autre  est  assez  coulant  et  assez  poli  pour  le 
siècle.  Les  antithèses  sont  la  figure  qui  y  domine. 

Ces  deux  panégyriques  ont  été  imprimés  avec  ceux  de 
Claude  Mamertin,  d'Eumene  et  des  autres  anciens  panégy- 
ristes de  l'Empire.  On  en  peut  voir  les  différentes  éditions  à 
l'article  du  premier  de  ces  orateurs. 


I.  CONCILE  D'ARLES. 

s- 1- 

HISTOIRE  DE  SA  CONVOCATION  ET  DE  SA  TENUE. 

APRÈS  le    Concile  de  Rome  tenu  en  313,   où  Cécilien 
de  Carlhage  avoit    été   absous,    et   les  Donatistes   ses 
adversaires  condamnés  par  19  Evêques,  le  Pape  S.  Miltiadeà 
leur  tête,  ces  Schismatiques,  mécontens  de  l'issue  de  ce  Con- 
cile, eurent  encore  l'audace  d'en  demander  un  autre  à  Constan- 
toiic.i.  i.p.  liii.  tin.  '  Ils  coloroientde  divers  prétextes  leur  mécontentement 
'***•  et  leurs  murmures.  Ils  se  plaignoient  de  n'avoir  pas  été  en- 

tendus sur  tout  ce  qui  concernoit  leur  affaire  ;  que  leurs  Ju- 
ges avoient  été  en  trop  petit  nombre  ;  qu'ils  s'étoient  comme 
cachés;  qu'ils  avoient  précipité  leur  jugement;  et  qu'ils  y 
avoient  moins  suivi  les  règles  de  la  justice  que  les  vues  de  leur 
propre  intérêt. 

'  L'Empereur  fatigué  par  les  plaintes  de  ces  esprits  inquiets 
et  turbulens,  résolut  d'assembler  un  Concile  plus  nombreux  à 
Arles.  Il  ordonna  à  cet  effet  à  Elien  vicaire  d'Afrique  d'y  fai- 
re venir  par  la  route  la  plus  courte  et  les  voitures  publiques 
Cécilien  avec  quelques  personnes  qu'il  choisiroit,  et  d'autres 


Opt.  I.  I.ii.  •îS-ii. 


Uil.  UiJ. 


PREMIER  CONCILE  D'ARLES.  53 

Evêques  de  toutes  les  provinces  d'Afrique ,  savoir  de  la  pro-    i  v  siècle. 
consulaire,  de  la  Byzacene,  de  celle  de  Tripoli,  des  Numi- 
dies  et  desMauritanies.  Il  eut  soin  de  marquer  qu'il  falloit  qu'il 
y  en  eût  aussi  quelqu'un  du  parti  contraire  à  Cécilien,  et  que 
chacun  pourroit  amener  avec  lui  ceux  qu'il  jugeroit  à  propos. 

'Il  écrivit  en  même  tems  une  letre  circulaire  à  tous  les  conc.  i.i.p.ns*. 
Evêques  d'Italie,  d'Afrique,  d'Espagne ,  des  Gaules  et  de  la  "^-  "^'^• 
grande  Bretagne ,   c'est-à-dire ,    de  toutes  les  provinces  de 
l'Empire  qui  étoient  de  son  obéissance ,  '  afin  qu'ils  eussent  à  p- 1*2*. 
se  rendre  à  Arles  pour  le  premier  jour  d'Août ,  chacun  avec 
deux  personnes  du  second  ordre  qu'il  choisiroit.  Constantin 
dans  sa  letre  expliquoit  le  sujet  de  la  convocation  de  cette  as- 
semblée. C'est,  dit-il,  pour  examiner  avec  un  nouveau  soin  le 
différend  scandaleux  qui  divise  les  Evêques  d'Afrique  ,  et  le 
terminer  par  l'unanimité  des  suffrages  de  tant  d'Evêques  res- 

{)ectables,  à  l'édification  de  l'Eglise,  le  bien  de  la  religion  et 
a  bonne  intelligence  dans  l'épiscopat. 

'Les  Evêques  s'assemblèrent  donc  à  Arles  au  jour  nom-  p.:i*26.ui9.i43o. 
mé,  sous  le  consulat  de  Volusien  et  d'Aniane,  c  est-à-dire, 
l'an  314.  Mais  il  ne  s'y  trouva  que  44  Eglises,  la  plupart 
par  leurs  Evêques  en  personne,  les  autres  par  les  députés  du 
second  ordre.  Il  y  eut  en  tout  33  Evêques,  14  Prêtres,  26 
Diacres,  7  Exorcistes  et  deux  Lecteurs,  dont  les  noms  se  lisent 
dans  les  souscriptions  du  Concile.  '  Le  Pape  S.  Silvestre  ne  p.  use.  1429. 
pouvant  y  assister  ,  parce  que  sa  présence  étoit  nécessaire  à 
Rome,  y  envoïa  deux  prêtres  Claudien  et  Vite,  avec  deux 
diacres  Eugène  et  Cyriague. 

'  Entre  les  Evêques  du  Concile,  le  nombre  des  Gaulois  fut  p.  1*25. 1429. 
le  plus  grand.  On  y  en  voit  douze,  tant  parmi  les  signatures  **^' 
que  dans  l'inscription  de  la  letre  synodale  :  Marin  d'Arles, 
Âgrece  de  Trêves  ,  Vocius  de  Lyon  ,  Verus  de  Vienne  , 
Retice  d'Autun ,  Imbetause  de  Reims ,  Materne  de  Cologne , 
Avitien  de  Rouen,  Oriental  de  Bourdeaux,  Daphnus  de  Vai- 
son,  Orese  de  Marseille,  et  Mamertin  d'Eause  ou  de  Toulou- 
se selon  d'autres.  Outre  ces  Evêques  Gaulois ,  les  Eglises 
d'Orange,  de  Nice,  d'Apt  et  de  Gabale,  aujourd'hui  Mande,  y 
envolèrent  les  unes  des  prêtres,  les  autres  des  diacres, 

'  Marin  d'Arles,  dont  le  nom  se  lit  le  premier  à  la  tête  de  p.  142*5. 
la  letre  synodale, 'présida à  l'assemblée.  On  commença  par  opt.  lust.  Don. p. 
examiner  la  cause  de  Cécilien  qui  étoit  présent.  Les  Donatis-  "' 
tes  avançoient  contre  lui  deux  chefs  d'acusation,  l'un  person- 


54  PREMIER  CONCILE 

IV  SIECLE,  nel,  d'avoir  empêché  de  porter  la  nourriture  aux  Martyrs  qui 
étoient  en  prison.  I/autre  chef  d'acusation  étoilque  lesordi- 

Conc.  p.  1*25.  naleurs  de  Cécilien  avoient  hvré  les  écritures.  '  Les  Evoques 
du  Concile  ne  trouvant  aucune  preuve  des  crimes  jirélendus  , 
déclarèrent  Cécilien  absous,  et  condamnèrent  ses acusat;urs. 

opt.  ibid.  '  On  croit  que  ce  Concile,  pour  établir  une  paix  durable  en- 

tre les  Catholiques  d'Afrique  et  les  Donatistes,  ordonna  la  mê- 
me chose  que  celui  de  Rome  de  l'année  précédente.  Ce  rè- 
glement consistoit  en  ce  que  les  clercs  ordonnés  par  les  Do- 
natistes demeureroient  dans  leurs  grades.  Qu'à  l'égard  des  Evo- 
ques, s'il  ne  s'en  trouvoit  <ju'un  seul  du  parti  de  Majorin  dans 
une  Eglise,  il  y  continueroU  ses  fonctions  d'Evêque.  Que  s'il 
s'y  en  trouvoit  deux,  l'un  de  la  communion  de  Cécilien,  l'au- 
tre de  celle  de  Majorin,  celui  qui  y  auroit  été  établi  le  pre- 
mier ,  continueroit  à  la  gouverner,  et  que  l'on  donneroit  à 
l'autre  une  nouvelle  Eglise;  pu  bien  qu'il  demeur.'roit  dans  la 
première  avec  le  titre  et  la  dignité  d'Evêque,  jusqu'à  ce  que 
son  collègue  venant  à  mourir  il  en  prît  la  place. 

S-  n- 

SES  REGLEMENS. 

Coiic.  p.  14Î5.  T  ^  sujet  qui  avoit  fait  assembler  le  Concile  ,  étant  ter- 
-Liminé  comme  nous  venons  de  le  dire ,  les  pères  avant 
que  de  se  séparer  firent  divers  réglemens  de  discipline  com- 
pris en  22  Canons. 

p.  1426. 1J27.  Le  premier  regarde  la  fête  de  Pâques.  Les  Evêques  veu- 

lent que  partout  elle  soit  célébrée  le  même  jour,  afin  que  les 
fidèles  ne  soient  pas  divisés  dans  un  des  plus  importans  de- 
voirs de  notre  religion.  Us  demandent  à  cet  effet  que  l'Evè- 
que  de  Rome  éciive  à  tous  les  autres  selon  la  coutume,  à 
quel  jour  il  la  faudra  faire  chaque  année. 

p.  ,427.  '  Le  second  canon  fait  voir  l'union  de  toute  l'Eglise,  à  vou- 

loir que  les  ecclésiastiques  demeurent  dans  les  endroits  où  ils 
ont  été  ordonnés. 

H^j.  '  Le  troisième  sépare  de  la  communion  les  soldats  qui  quit- 

tent les  armes  durant  la  paix  ;  '  c'est-à-dire  ceux  qui  abandon- 
nent la  milice  sans  congé  des  capitaines,  et  sans  y  être  obligés 
par  la  nécessité  de  sauver  leurs  âmes,  comme  cela  arrivoit 
auparavant  sous  les  Empereurs  Païens,  durant  la  guerre  des 
persécutions.  On  peut  croire  aussi  que  les  Evêques  dans  ce 


p.  H3«. 


D'ARLES.  55 

canon  eurent  en   vue  d'empêcher  les  soldats  Chrétiens  de    iv  siècle. 
quiter  le  service,  de  peur  que  leur  désertion  ne  diminuât  le 
zélé  que  Constantin  nouvellement  converti  à  la  foi  témoi- 
gnoit  pour  la  religion  chrétienne. 

'  Le  quatrième  canon  prive  de  la  communion  les  fidèles  conc.  p.  ust. 
qui  conduiront  les  chevaux  dans  les  jeux  du  cirque,  tant  qu'ils 
seront  dans  cet  exercice. 

'  Le  cinquième  ordonne  la  même  peine  contre  ceux  qui  iwa. 
montent  sur  le  théâtre. 

'  Le  sixième  enjoint  d'imposer  la  main  à  ceux  qui,  étant  iwd. 
malades,  veulent  embrasser  la  foi  ;  '  ce  qui  paroit  ne  vouloir  rni.  h.  k.  t.e.p. 
signifier,  sinon  que  quand  un  malade  demande  à  se  conver- 
tir, il  faut  le  faire  catécumene,  sans  atendre  ou  qu'il  soit  gué- 
ri pour  aller  à  l'Eglise  recevoir  l'imposition  des  mains  ,  ou 
qu'il  soit  en  danger  de  mort. 

'  Le  septième  veut  que  les  fidèles  qui  sont  élevés  aux  char-  Conc.  itid. 
ges  et  aux  gouvernemens ,  prennent  des  letres  de  leur  Evê- 
que,  pour  atester  qu'ils  sont  de  la  communion  de  l'Eglise  ca- 
tholique, et  que  néanmoins  l'Evêque  du  lieu  où  ils  seront, 
prenne  soin  d'eux,  et  '  puisse  les  séparer  de  la  communion  ,  p.  i4î8, 
s'ils  font  des  fautes. 

'  Le  huitième  canon  regarde  les  Africains  qui  avoient  de  iwa. 
coutume  de  rebaptiser  les  hérétiques,  et  ordonne  que  si  quel- 
qu'un quitte  leur  hérésie  et  revient  à  l'Eglise,  on  l'interroge 
sur  le  Symbole.  Que  si  l'on  recnnnoît  qu'il  a  été  baptisé  au  nom 
du  Père,  du  Fils  et  du  S.  Esprit,  on  lui  imposera  seulement  les 
mains,  afin  qu'il  reçoive  le  S.  Esprit.  Mais  si  étant  interrogé 
il  ne  reconnoît  pas  le  mystère  de  la  'Trinité,  on  le  rebaptisera. 

Les  Africains,  qui  font  le  sujet  de  ce  canon,  sont  les  Do- 
natistes,  dont  le  Concile  taît  ici  le  nom  par  charité  et  ména- 
gement. '  On  sait  que  ces  Schismatiques  rebaptisoient  ceux  p.  i«3. 
qui  avoient  reçu  le  baptême  dans  l'Eglise  Catholique,  les  re- 
gardant comme  impurs.  Ainsi  ce  Concile  termine  la  céhhre 
question  de  la  rebaptisation  des  hérétiques,  en  définissant  que 
tout  baptême,  donné  selon  la  forme  usitée  dans  l'Eglise  ca- 
tholique, est  bon  et  ne  doit  pas  être  réitéré,  quand  même  on 
l'auroit  reçu  dans  les  sectes  des  hérétiques.  C'est  sur  ce  canon 
que  se  fondent  avec  sujet  ceux  qui  soutiennent  que  c'est  de  ce 
I  Concile  d'Arles  que  parle  S.  Augustin  contre  les  Donatistf  s , 
en  le  qualifiant  un  Concile  plenier,  un  Concile  de  l'Eglise 
universelle.  ^        . 


56  PREMIER  CONCILE 

IV  SIECLE.         'Le   neuvième   canon  ôte  aux  confesseurs  aussi  bien  que 
r        „„  ,,,a  le  vinet-cinquiéme  du  Concile  d'Elvire,  le  droit  qu'ils  usur- 

(.onc.  p.973.  1428  •         °  i        i^  /^  i    i  i         i  i  • 

iTiii.  ibi.i.  poient  de  donner  aux  lideles  des  letres  de  communion  qu  us 

dévoient  recevoir  des  Evêques. 

c.nc.ib.p.u28.  '  Le  dixième  ordonne  que  l'on  porte  autant  que  l'on  pour- 
ra les  fidèles  à  ne  point  se  remarier,  lorsqu'ils  auront  surpris 
leurs  femmes  en  adultère,  tant  que  ces  femmes  vivront. 

ibid.  '  L'onzième  ordonne  de  séparer  pour  quelque  tems  de  la 

communion  les  filles  qui  épousent  des  Païens. 

ii)i.t.  '  Le  douzième  se  fondant  sur  l'ordre  de  Dieu ,  prive  de 

la  communion  les  clercs  usuriers. 

ihii.  '  Le  treizième  ordonne  d'abord  que  ceux  qui  seront  con- 

vaincus d'avoir  livré  les  écritures  ou  les  vases  sacrés,  ou  d'a- 
voir décelé  ceux  qui  les  avoient,  seront  tous  dégradés  de  la 
clèricature.  Il  ajoute  qu'il  faut  que  le  crime  soit  certifié  par 
des  actes  publics  et  non  point  par  de  simples  paroles.  C  est 
qu'il  y  en  avoit  beaucoup  qui,  contre  la  règle  de  l'Eglise,  pré- 
tendoient  se  rendre  dénonciateurs  sur  des  dépositions  de  té- 
moins qu'ils  avoient  achetées. 

ibid.  '  Le   quatorzième  canon  porte   que  ceux  qui  accuseront 

faussement  leurs  frères,  ne  seront  admis  à  la  communion  qu'à 
la  mort. 

ibi.i.  '  Le  quinzième  défend  aux  diacres  d'offrir  le  sacrifice,  ce 

qu'ils  entreprenoient  en  divers  endroits. 

p.  lii!).  '  Le  seizième  ordonne  que  ceux  qui  auront  été  privés  de 

la  communion  en  un  endroit,  ne  pourront  y  être  rétablis  que 
dans  le  lieu  même. 

ii.ki.  '  Le  dix-septième  défend  aux  Evêques  de  se  troubler  les  uns 

Tiii.  ii.i  1.  p.  M.  les  autres,  '  en  usurpant  les  droits  qui  apartiennent  à  leurs  con- 
frères. 

ibi  I.  '  Le  dix-huitième  défend  aux  diacres  des  villes  de  rien  fai- 

re sans  la  participation  des  prêtres,  qu'ils  doivent  respecter. 

iiii.i.  '  Le  dix-neuvième  veut  que  les  Evêques  qui  vont  dans  les 

villes  de  leurs  confrères,  puissent  y  offrir  le  sacrifice. 

liii.i.  '  Le  vingtième  établit  qu'un  Evêque  soit  ordonné  par  sept 

autres,  ou  tout  au  moins  par  trois,  et  jamais  par  un  seul.  Le 
Concile  excepte  sans  doute  les  cas  de  nécessité,  suivant  l'an- 
cien usage  établi  dans  l'Eglise. 

Ibi  I.  '  Le  vingt-unième  canon  porte  que  les  prêtres  et  les  diacres 

qui  ne  voudront  point  se  réduire  à  servir  les  lieux  où  ils  sont 
atachès,  seront  déposés. 

Pans 


D'ARLES.  o7 

'  Dans  le  vingt-deuxième  enfin,  qui  est très-sévere  contre    iv  siècle. 
ceux  qui  aiant  renoncé  à  la  foi,  n'en  font  point  pénitence,  mais  ^^;~j~j^^ 
atendent  qu'ils  soient  malades  pour  se  présenter  à  l'Eglise  ,  et 

f)Our  demander  la  communion  ;  le  Concile  ordonne  qu'on  la 
eur  refusera  alors,  et  qu'on  ne  la  leur  acordera  qu'en  cas  que 
revenant  en  santé,  ils  fassent  de  dignes  fruits  de  pénitence. 

'  Les  Pères  du  Concile  jugèrent  à  propos  d'adresser  ces  ca-  i'.  i«5-  i«t>- 
nons  au  Pape  S.  Silvestre,  afin  que  ce  fût  lui  particulièrement 
qui  les  fît  savoir  à  tout  le  monde.  C'est  pour  cela  que  le  Con- 
cile lui  écrivit  une  letre  que  nous  avons  encore,  mais  très- 
imparfaite  et  fort  corrompue.  Les  autres  actes  n'en  sont  point 
venus  j  usqu'à  nous . 

'  Voilà  ce  qui  nous  reste  de  ce  grand  Concile,  le  plus  illus-  tiii.  ïb.  p.  is.  sa. 
tre  que  l'Eglise  eût  vu  jusau'alors.  Car  si  ce  n'étoit  pas  un  Con- 
cile général  de  toute  l'Eglise,  c'en  étoit  un  au  moins  de  tout 
l'Occident  et  de  tous  les  pais  qui  obéissoient  alors  à  Constan- 
tin. Aussi  l'on  voit  qu'il  prend  l'autorité  de  régler  même  ce 
qui  regardoit  1  Eglise  Romaine;  puisque  les  dix-huitiéme  etdix- 
neuviéme  canons  paroissent  la  regarder  plus  qu'un  autre.  '  Le  conc.  ibïd.  1*33. 
P.  Sirmond  ne  fait  pas  même  difficulté  de  aire  que  c'est  le 
Concile  le  plus  considérable  que  l'Eglise  ait  encore  après  les 
Conciles  œcuméniques,  soit  pour  l'importance  des  choses  qui 
y  ont  été  réglées,  soit  pour  l'étendue  des  provinces  dont  il  étoit 
composé.  C'est  par  ce  Concile  que  ce  Père  commence  la 
collection  qu'il  nous  a  donnée  de  ceux  qni  se  sont  tenus  en 
France. 

'  Quelque  respectable  que  fût  l'autorité  de  cette  assemblée,  p.  iisi. 
elle  ne  fut  point  capable  de  fixer  l'esprit  brouillon  et  remuant 
desDonatistes,quieurent  encore  l'audace  d'en  apeller  à  l'Em- 
pereur. C'est  de  quoi  ce  Prince  se  plaint  lui-même  dans  la  letre 
de  congé  qu'il  écrivit  aux  Evêques  du  Concile  pour  les  ren- 
voïer  à  leurs  Eglises.  '  S.  Augustin  long-tems  après  lui  se  plai-  Aug.  ep.  43.  n.  *. 
gnoit  de  la  même  chose.  Les  Donatistes,  dit-il,  persistant  tou- 
jours dans  leur  schisme  détestable,  etn'aïant  aucun  égard  au 
Concile  de  Rome  et  à  celui  d'Arles,  voulurent  que  Constan- 
tin connût  lui-même  de  leur  affaire.  '  C'est-à-dire,  comme  ep.  les.  11..6. 
s'explique  ce  saint*  docteur,  que  n'aïant  pu  oprimer  Cécilien 
dans  ces  deux  Conciles,  ils  voulurent  le  traîner  devant  le  tri- 
bunal de  cet  Empereur. 

Tome  1.  Sec.  Part.  H 

s  * 


58  ARBORE, 


IV   SIECLE. 


ARBORE, 

ASTRONOME     ET    PHILOSOPHE. 

Àns.par.  c.  *.  p.       ' /^ /«ciLius  Argicius  Arboiius,  aïeul  maternel  du  poëte 
"**•  \J  Ausone,  étoit  de  la  ville  d'Aulun.  Sa  famille  passoit 

pour  une  des  plus  considérables  du  pais,  et  se  trouvoit  alliée 
avec  plusieurs  maisons  nobles  des  environs.  Mais  son  père  et 
son  aïeul  aïant  été  proscrits  dans  les  troubles  qui  agitèrent  les 
Gaules,  du  tems  que  M.  Aurelius  Piauvonius  Victorinus  y 
usurpa  l'Empire  vers  204,  ils  se  virent  dépoiiillés  de  leurs  grands 
p.  117.  biens.  'Arbore  fut  alors  obligé  de  s'enfuir  à  l'extrémité  des 

c.  5.  p.  119.        Gaules  vers  Dax  et  liaïone.  ',  Lu  il  épousa  iEmilia  Corinthia 
c.  4.  p.  117.         Maura,  'qui  ne  lui  aporta  pour  dot  que  de  (juoi  s'entretenir 
dans  une  honnête  médiocrité.  Pour  comble  de  malheur ,  il 
p.  117. 118.  perdit  un  œil  dans  sa  vieillesse.  '  Mais  la  grandeur  future  d'Au- 

sone  son  petit-fils  (ju'il  présagea  dès  sa  naissance,  lui  fut  un 
grand  sujet  de  consolation  au  milieu  de  tant  de  traverses, 
p.  117.  '  U  mourut  âgé  de  plus  de  90  ans,  et  laissa  un  fils  et  (rois 

Prof.  c.  16.         filles  :  '  ./Emilius  Magnus  Arborius  illustre  rhéteur,  dont  nous 
V:i.  c.  t.  parlerons  dans  la  suite  :  'TEmilia  TËonia,  qui  fut  mère  d'Au- 

sone  :  yEmilia  Dryadia,  qui  mourut  sans  uUi.mce  et  prête  à 
marier  :  et  iîîmilia  Ililaria.,  qui  préféra  l'amour  de  la  virgini- 
té au  mariage,  et  devint  célebi-e  par  sa  vertu  et  par  la  connois- 
sance  de  la  médecine.  On  peut  juger  par-là  qu  Arbore  étoit 
chrétien,  et  que  sa  famille  iaisoit  même  profession  de  pieté, 
r.  1.  p.  118.  '  Aussi  Ausone,  en  finissant  son  éloge,  ne  fait  pas  difficulté  de 
dire  qu'il  étoit  entré  dans  l'héritage  des  Saints. 

Cependant  une  des  sciences  qu'il  professoit,  n'étoit  guéres 

p.  117.  propre  à  l'y  introduire.  '  il  savoit  fort  bien  l'Astronomie,  ce 

qui  supose  la  connoissance  des  mathématiques,  et  se  mêloit 

aussi  de  l'astrologie  judiciaire.  Mais  il  avoit  la  discrétion  de 

ne  s'y  apliquer  qu'en  son  particulier.  11  avoit  tiré  l'horoscope 

d'Ausone  qu'il  crai[;iioit  de  montrer,  et  qui  seroit  demeuré 

caché  sans  l'industrie  de  la  mère  de  ce  poëte,  qui  sut  le  dé- 

1'-  lin.  couvrir.  '  Ausone  a  justifié  la  vérité  de  cet  horoscope  par  les 

charges  qu'il  exerça  dans  la  suite.  Voici  de  quelle  manière  il 

-     parle  du  savoir  d'Arboré. 


k 


ASTRONOME. 

'  Tu  Cœli  numéros  et  conscia  sidéra  fati 
Callebas,  sludium  dissiniulanter  agens. 

Non  ignota  tibi  nostra  quoque  formula  vitœ  : 
Signatis  quam  tu  condideras  tabulis; 

Prodita  non  nunquam.  Sed  matris  cura  rctexit 
Sedula,  quam  timidi  cura  tegebat  avi. 


59 


IV  SIECLE. 


Ans.  pan.  c.4.  p. 
117. 


S.     R  E  T  I  C  E, 

EVEQUE    d'AuTUN. 


R 


ili.  il.  O.'Ui. 


p.  9.-> 


S-  I- 

HISTOIRE   DE   SA   VIE. 

ETiCE  étoit  d'une  maison  très-noble  dans  les  Gaules,  {|;''"t^'^,  ''^^^f, 
où  il  lleurissoit  au  commencement  du  VI  siècle  sous  75.  p.  ».-..-.. 
l'empire  du  grand  Con.stantin.  11  se  rendit  et  fort  recomman- 
dable  par  les  excellentes  qualités  de  son  esprit ,  et  illustre  par 
la  connoissance  des  letres.  Après  avoir  passé  sa  première  jeu- 
nesse dans  la  pratique  de  la  pieté  chrétienne,  il  épousa  une 
femme  qui  n'étoit  ni  moins  noble,  ni  moins  riche,  ni  moins 
vertueuse  que  lui.  '  La  qualité  de  vierge  que  S.  Grégoire  de  Gr.  t 
Tours  donne  n  cette  femme,  même  après  sa  mort,  fait  juger 
qu'elle  vécu!  avec  son  mari  dans  une  parfaite  continence.  '  Ce 
qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  leur  société  parut  toute  sainte, 
et  établie  sur  l'union  du  cœur  et  de  l'esprit .  Ils  passèrent  plu- 
sieurs années  dans  cette  aimable  union  ;  et  peu  de  tems  après 
la  mort  de  cette  pieuse  femme,  Retice  fut  fait  Evêque  d'Autun. 

'  11  remplit  avec  tant  de  zèle  et  d'exactitude  tous  les  de- 
voirs d'un  bon  pasteur,  'que  S.  Augustin  le  loue  comme  un  *"|g°P-.^'5|' 
homme  de  Dieu,  et  un  prélat  qui  étoit  de  très-grande  auto-  l'.  7.  ' '"  " 
rite  dans  la  maison  du  Seigneur.   S.  Jérôme  en  parle  aussi 
comme  d'un  Evêque  des  plus  savans  de  son  siècle . 

'En  313  S.  Retice,  à  la  prière  de  l'Empereur  Constantin, 
alla  à  Rome  pour  terminer  dans  un  Concile  l'affaire  des  Do- 
natistes.  A  ce  Concile  auquel  présida  le  Pape  S.  Miltiade,  assis- 
tèrent Materne  de  Cologne ,  Marin  d'Arles ,  quinze  Evêques 
d'Italie,  Cécilien  de  Carihage  avec  dix  Evêques  catholiques, 

Hij 


p.  956. 


1.1. 
il. 1.1. 


Eus.  1.10.  c.  r..  p. 
3111  I  Opt.  I.  1.  n 
St3.24. 


60  SAINT  RETICE, 

IV  SIECLE.  dixEvêques  du  parti  de  Majorin,  àlalète  desquels  étoUDo- 
nat  de  Cases-noires,  et  S.  Retice,  qui  y  eut  la  première  place 
après  le  Pape.  Cécilien  y  fut  absous,  et  son  ordination  confir- 

«onc.  1. 1.  p.  1429.  mée.  'S.  Retice  se  trouva  aussi  l'année  suivante  au  Concile 

pug.  U25.  d'Arles  assemblé  pour  la  même  affaire,  '  où  Cécilien  fut  enco- 

re absous,  et  ses  acusateurs  condamnés. 

Oaii.  chr.  vet.  t. 2.       '  Quclqucs  écrivains  ont  prétendu  que  S.  Retice  fut  le  pre- 

""■  ^'  mier  qui  instruisit  dans  la  foi  l'Empereur  Constantin  après  la 

vision  miraculeuse  qu'il  avoit  eue  de  la  croix  en  311  ou  312. 
Mais  c'est  ce  qu'ils  ont  avancé  sansaucun  fondement  solide.  On 
ne  sait  rien  de  l'histoire  de  ce  saint  prélat,  que  ce  que  nous 
en  venons  de  raporter.  On  ignore  même  l'année  de  sa  mort , 
et  il  n'y  a  point  de  preuve  constante  qu'il  ait  vécu  au-delà  de 
l'an  314,  qui  est  l'époque  du  Concile  d'Arles  auquel  il  assista. 
Le  rang  qu'il  tint  dès  l'année  précédente  au  Concile  de  Ro- 
me fait  juger  qu'il  étoit  dès  lors  fort  ancien  dans  l'épiscopat. 

n  v.  t.  4.  p.  329.  Cela  n'empêche  pas  que  quelques  savans  ne  lui  prolongent 
la  vie  jusqu'en  334.  Mais  les  raisons  sur  lesquelles  il  s'apuïent, 
ne  nous  paroissent  pas  suffisantes  pour  contrebalancer  celle 
que  nous  venons  de  marquer . 

Gr.  T.  ibid.  Quoi  qu'il  en  soit,  '  S.  Retice  arriva  enfin  à  sa  dernière  heu- 

re par  les  divers  degrés  des  grâces  spirituelles  dont  Dieu  le 
remplissoit,  et  par  la  pratique  constante  de  toutes  les  vertus. 

p.  955.9.s(5.  '  Son  corps,  selon  S.  Grégoire  de  Tours,  fut  mis  dans  le  mê- 
me sépulcre  que  celui  de  sa  pieuse  femme,  ainsi  qu'elle  l'avoit 
souhaité  en  mourant  ;  afin  qu'après  avoir  conservé  la  chasteté 
dans  un  même  lit,  ils  pussent  avoir  la  consolation  d'être  réunis 
dans  un  même  tombeau.  S.  Grégoire  raporte  quelques  circon- 

Bibi.  pp.  t.  27.  p.  stances  assez  extraordinaires  de  cet  enterrement,  '  qui  se  trou- 

^"^'  '  "■  vent  néanmoins  autorisées  par  un  poète  contemporain  dont 

nous  pourrons  parler  dans  la  suite. 

r.T.  T.  ibid.  not.  '  On  voit  eucorc  aujourd'hui  dans  l'Eglise  paroissiale  de  S. 
Pierre  de  l'Etrié  sous  une  petite  voûte  pratiquée  dans  le  mur, 
le  tombeau  de  S.  Retice,  avec  cette  inscription  d'une  main 
assez  récente  : 

SCS  RHETITIUS  EPS  ^DUENSIS.  CCCXIV. 


0 


i 


EVÉQUE  D'ÂUTUN.  6i 

§.    II.  '  V    SIECLE. 

SES    ECRITS. 

N  ne  trouve  nulle  part  aucun    des  ouvrages  que  S.  Re- 

tice  avoit  laissés  à  la  postérité.  Il  en  avoit  au  moins 
laissé  deux  qui  étoient  encore  fort  connus  au  V  siècle  de  l'E- 
glise, comme  il  paroît  par  S.  Jérôme  et  S.  Augustin. 

1°.  L'un  de  ces  écrits,  que  nous  croïons  devoir  regarder 
comme  la  première  production  de  la  plume  de  S.  Retice,  '  est  Hier  vir.  m.  c.sa. 
son  traité  contre  Novatien,  que  S.  Jérôme  nous  donne  pour 
un  grand  ouvrage,  grande  volumen.  Nous  avons  déjà  observé 
ailleurs  que  S.  Retice  pouvoit  l'avoir  composé  avant  la  fin  du 
III  siècle.  En  effet,  nous  ne  connnoissons  point  d'ocasion  plus 
capable  de  lui  avoir  fait  former  ce  dessein,  et  de  l'avoir  porté 
à  l'exécuter,  '  que  le  mal  que  l'hérésie  de  Novatien  avoit  alors  Cyp.ep.  cT.p.us. 
causé  dans  nos  Gaules.  On  sait,  et  nous  l'avons  déjà  dit ,  on 
sait  que  Marcien  Evêque  d'Arles  avoit  embrassé  cette  hérésie, 
et  qu'à  la  faveur  et  par  le  crédit  de  ce  prélat ,  elle  s'étoit  ré- 
pandue en  divers  endroits,  et  avoit  causé  de  grands  scandales. 
Quelques  remèdes  que  l'on  y  aportât,  il  n'est  peut-être  que 
trop  vrai  qu'elle  y  eut  des  suites  fâcheuses.  Ce  fut  donc,  ce 
semble,  poUr  éteindre  les  restes  de  cette  hérésie,  que  S.  Reti- 
ce publia  l'ouvrage  dont  il  est  ici  question,  et  que  nous  ne  con- 
noissons  guéres  d'ailleurs. 

'  On  croit  néanmoins  que  c'est  de  ce  traité  que  S.  Augustin  Aug.  in  Jui.  i.  \. 
a  pris  un  célèbre  passage  qu'il  cite  en  deux  differens  endroits  p.'^gge.'' ""''    '' 
de  ses  écrits  contre  Julien,  pour  lui  prouver  le  péché  originel 
et  la  nécessité  du  baptême.  Ce  grand  homme,  s'écrie  S.  Au- 
gustin en  citant  S.  Retice  entre  divers  autres  premiers  pères 
de  l'Eglise,  S.  Irenée,  S.  Cyprien,  S.  Hilaire  de  Poitiers  ,  S. 
Olympe  et  S.  Ambroise,  ce  grand  homme  aïant  ocasion  de 
parler  du  baptême,  s'exprimoit  en  ces  termes  :  «  Personne 
«  n'ignore  que  le  baptême  ne  soit  la  première  indulgence  dont 
«  l'Eglise  use  envers  nous.  C'est  là  que  nous  nous  déchargeons 
«  de  tout  le  poids  de  notre  ancien  crime.  C'est  là  que  nous 
«  nous  lavons  des  anciennes  souillures  de  notre  ignorance  cri-    ^ 
«  minelle.  C'est  là  enfin  que  nous  nous  dépouillons  du  vieil 
«  homme  avec  ce  qu'il  aporte  de  criminel  en  naissant.  » 

Selon  ces  expressions,  on  pourroit  croire  que  l'ouvrage  de 
S.  Retice  que  cite  S.  Augustm,  étoit  plutôt  un  traité  du  bap- 
tême que  tout  autre  ouvrage.  Mais  à  bien  prendre  la  chose, 


62  SAINT   RETICE, 

V  SIECLE,    cela  ne  fait  rien  contre  l'opinion  de  ceux  qui  croient  que  cet 

endroit  est  pris  du  traité  contre  Novatien,  dans  lequel  S.  iie- 

tice  avoit  eu  ocasion  de  parler  du  baptême,  comme  de  la  plus 
grande  marque  de  tendresse  de  l'Eglise  envers  ses  enfans  ,  et 
comme  d'un  exemple  tout  naturel,  qui  condamnoit  la  dureté 
inoùie  de  Novatien  envers  les  pénitens. 

Hier  ibid.  2°.  '  L'autre  ouvrage  dont  S.  Retice  enrichit  l'Eglise,  étoit 

ep.  4.  p.  6.  Pn  commentaire  sur  le  cantique  des  cantiques,  '  écrit  d'un  style 

sublime.  S.  Jérôme  en  aïant  eu  connoissance,  s'adressa  à  Pio- 
rent  par  une  letre  écrite  en  366,  pour  le  prier  de  demander 
à  Runn  cet  ouvrage,  parce  qu'il  avoit  dessein  de  le  faire  tran- 
ep.  crii.  p.  622.  scrire.  Alors  S.  Jérôme  en  faisoit  beaucoup  de  cas.  '  Mais  ce 
^^  même  père  dans  une  autre  letre  écrite  à  Sainte  Marcelle  vers 

l'an  383,  porte  un  jugement  peu  avantageux  de  ce  commen- 
taire. Voici  comme  il  en  parie. 

ibi'i.  u  'Comme  je  lisois  dernièrement,  dit-il,  les  commentaires 

«  de  Retice  Evoque  d'Autun  sur  le  cantique  des  cantiques,  ou- 

«  tre  plusieurs  endroits  qui  n'ont  rien  que  de  fade  et  d'insipide, 

«  je  fus  fort  surpris  de  voir  qu'un  homme  comme  lui,  qui  d'ail- 

«  leurs  est  éloquent,  ait  pris  le  nom  de  Tharsis  pour  la  ville  de 

«  Tarse ,  d'où  l'apôtre  S.  Paul  étoit  natif,  et  l'or  d'Ophaz  pour 

ft  S.  Pierre,  à  cause  que  cet  apôtre  est  nommé  Géphas  dans 

«  l'évangile...  Il  y  a  dans  ces  commentaires  plusieurs  autres 

«  explications  qui  font  pitié.  Il  est  vrai  que  le  style  de  cet  au- 

o  teur  est  étudié,  rapide  et  même  sublime  ;  mais  convient-il 

«  à  un  interprète  qui  doit  écrire,  non  pour  faire  un  pompeux 

«  étalage  de  son  érudition  et  de  son  éloquence ,  mais  seule- 

«  ment  pour  faire  comprendre  à  .ses  lecteurs  les  choses  de  la 

a  même  manière  «qu'il  les  entend  lui-même  ?  Les  autres  In- 

«  terpretes  lui  manquoient-ils  ?  Ne  pouvoit-il  pas  consulter 

«  quelqu'un  qui  sût  1  Hébreu,  et  lui  demander  l'explication  de 

«  ce  qu'il  n'entendoit  pas  1  Mais  il  a  eu  assez  mauvaise  opi- 

«  nion  des  autres  pour  croire  qu'il  n'y  auroit  personne  capa-, 

«  ble  de  découvrir  ses  fautes.  Il  est  donc  inutile  que  vous  me 

«  demandiez  ces  commpntaires,  où  je .  trouve  bien  plus  de 

«  choses  à  redire  qu'à  aprouver.  » 

Quelque  mépris  que  S.  Jérôme  *  témoigne  dans  cette  le- 

Mor  R  n  9%  2  '  '  I^^  ■''^''niers  Editeurs  de  Moreri  marqnont  par  errenr  qne  S.  Angnstin  ne  fait  pas 
grand  cas  des  commentaires  de  S.  Hctice.  Ils  ont  sans  doute  todIo  dire  S.  Jérôme  an  heu 
de  S.  Augustin,  qui  ne  parle  nulle  part  de  cet  onvra^. 


I 


EVÊQUE  D'AUTUN.  63 

tre,  et  pour  l'ouvrage  de  S.  Rctice  et  même  pour  sa  person-     iv  siècle. 
ne,  '  il  nt-  laissa  pas  dans  la  suite  de  donner  de  grands  éloges  ~    \    ~ 
à  notre  Saint  Evêque  dans  son  catalogue  des  hommes  illus- 
tres. 'On  remarque  qu'il  se  trouve  un  endroit  de  ces  com-  Conc. t.i.p.i57i. 
mentaires  de  S.  Retice  dans  l'apologie  d'un  certain  Beringer  , 
que  l'on  ne  nous  fait  point  connoître  autrement. 


DIVERS  GRAMMAIRIENS 

A     BOUKUEAUX. 

ENTRE  les  professeurs  qui  enseignèrent  la  grammaire  la-  Aus.piof.c.  lo.ii. 
tine  au  collège  de  Bourdeaux  vers  le  commencement 
de  ce  siècle  ,  Ausone  nous  fait  connoître  Thalasse  ,  Phœbi- 
tius,  Concordius  ,  Macrinus  et  Sucuro.  On  peut  se  souvenir 
de  l'observation  que  nous  avons  faite  ailleurs  touchant  l'idée 
que  les  anciens  atachoient  au  terme  de  Grammairien.  Dans 
1  antiquité,  un  Grammairien  et  un  homme  qui  enseigne  les 
Belles-Letres  ,  étoit  la  même  chose.  C'est  ce  qui  fait  qu' Au- 
sone donne  indiirercmment  à  ceux  dont  nous  entreprenons  de 
parler  ici,  le  titre  de  Grammairiens  et  de  Philologues. 

Thalasse  commença  à  donner  des  leçons  de  grammaire  c.  12.  p.  «a. 
dès  la  fin  du  111  siècle,  et  continua  à  le  faire  dans  le  siècle 
suivant.  Ausone,  qui  a  cru  en  devoir  conserver  la  mémoire  à 


la  postérité,  étoit  alors  si  jeune,  qu'il  ne  se  souvenoit  point 
de  l'avoir  vu,  et  qu'il  ignoroit  quelle  étoit  sa  famille  et  le  lieu 
de  sa  naissance.   Il  paroît  par  tout  ce  qu'il  en  dit,  que  ce  pro- 


I 


fesseur  s'étoit  acquis  si  peu  de  réputation  ,  que  tout  ce  qu'on 
savoit  de  lui,  c'est  qu'il  avoit  commencé  fort  jeune  à  ensei- 
gner. 

jEtas  nil  de  te  posterior  célébrât 
Grammaticum  juvenem  tantum  te  fema  fcrcbat. 

'  Vers  la  fin  de  ce  siècle,  il  y  eut  un  Thalasse  qui  fut  gen-  sym.  1. 1.  ep.  i-j. 
dre  d'.'Vusone,  '  et  qui  est  qualifié  proconsul  d'Afrique  dans  tmi.  Emp.  t.  s.p. 
deux  loix  du  30  de  .tanvier  378.  Il  avoit  sîins  doute  succédé  "''• 
immédiatement  dans  cette  charge  à  Ilespere ,  dont  il  étoit 
beau-frere,  '  et  l'avoit  exercée  avant  la  mort  de  Jule  Au-  aus. cpic.  p. soi. 
sone  aïeul  de  sa  femme.  On  pourroit  croire  que  ce  Thalasse 
étoit  descendu   du   professeur  dont   nous  parlons  ,   si  ce 


64  DIVERS 

IV  SIECLE,     n'est  qu'Ausone  n'en  dit  rien  dans  l'éloge  qu'il  en  a  fait. 
•  prof.  c.  4.  10. 1    -  '  Phœbicius,  père  d'un  fils  de  même  nom  et  du  rhéteur 
viiiiiiAiig.  8145.  !   Patere,  dont  nous  parlerons  dans  la  suite  ,  étoit  de  Baïeux  ,  et 
^i^i.^a.v.  su  ».  .  gj.g^jjjj  prêtre  du  dieu  Apollon,  que  les  Gaulois  adoroient  sous 
le  nom  de  Belenus.  Il  descendoit  des  anciens  Druides ,  com- 
me on  le  croïoit  au  tems  d'Ausone  ;  et  c' est-là  peut-être  un 
des  derniers  vestiges  que  nous  trouvions  de  ces  philosophes 
dans  les  Gaules.  Sur  la  fin  de  ses  jours,  Phœbicius  ne  retirant 
plus  aucun  profit  de  sa  dignité  de  grand  prêtre  ,  sans  doute  à 
cause  de  la  conversion  des  Païens  à  la  foi  de  J,  C.  il  se  trou- 
va contraint  d'embrasser  une  autre  profession  qui  lui  donnât 
de  quoi  vivre,  Patere  son  fils,  qui  s'étoit  acquis  un  grand  cré- 
dit par  son  savoir,  lui  obtint  une  chaire  de  grammaire  à  Bour- 
deaux,  où  Phœbicius  enseigna  au  commencement  de  ce  siè- 
cle, mais  avec  beaucoup  moins  de  réputation  que  son  propre 
fils. 
Aus.  ibiu.  c.  10.       '  Concordius  aïant  été  chassé  de  son  pais,  qui  nous  est  in- 
''■  '*'■  connu,  vint  enseigner  la  grammaire  à  Bourdeaux,  où  il  pa- 

roît  n'avoir  acquis  ni  bien  ni  réputation. 

Et  tu,  Concordi, 
Qui  profugus  patria, 
Mutasti  sterilem 
Urbe  alia  cathedram. 

C'est-là  tout  ce  qu'Ausone  nous  aprend  de  ce  professeur, 
ibid.  '  Macrinus  ,  le  premier  maître  qu'eut  ce  poëte  dans  son 

enfance,  fut  plus  heureux  dans  sa  profession  que  Concordius. 
Il  a  rendu  sa  mémoire  immortelle  par  la  douceur  et  par  la  dis- 
crétion dont  il  usoit  envers  les  enians  qu'il  enseignoit,  et  par 
le  progrès  qui  leur.faisoit  faire  dans  l'étude  des  letres. 

Sit  Macrinus  in  bis, 

Sobrius  in  pueris , 

Et  puerorum 

Utilis  ingeniis.  • 

Huic  mea  principio 

Crédita  puerities. 

Ibid.  '  Pour  Sucuro,  tout  ce  que  l'on  sait  de  lui,  c'est  qu'il  étoit 

de  condition  servile,  et  qu  aïant  été  affranchi ,  il  se  mit  à  en- 
seigner les  premiers  principes  de  la  grammaire  à  la  jeunesse 
de  Bourdeaux.  '"  '* 

Au 


GRAMMAIRIENS.  65 

'Au  même-tems  que  ces  professeurs  donnoient  des  leçons  iv  siècle. 
de  grammaire  latine  dans  le  collège  de  cette  ville,  Corinthe,  ~  ~ — ~ 
Sperchée  et  Menesthée  son  fils  y  faisoient  la  même  fonction 
pour  le  grec.  Ils  faisoient  paroître  tous  trois  beaucoup  de  zèle 
dans  l'exercice  de  leur  profession.  Néanmoins  ils  y  firent  peu 
de  fruit ,  et  n'eurent  qu'un  petit  nombre  d'étudians.  Ausone 
qui  eut  les  deux  premiers  pour  maîtres  dans  la  langue  gréque  , 
témoigne  n'avoir  fait  sous  eux  qu'un  médiocre  progrès  :  ce 
qu'il  atribuë  toutefois  plutôt  à  son  peu  de  disposition  et  à  la 
mauvaise  coutume  qu'ont  les  enfans  de  négliger  celte  langue  , 
qu'à  quelque  défaut  de  la  part  de  ces  grammairiens,  dont  il 
ne  parle  qu'avec  éloge. 

LACTÂNCE, 

Orateur   et   défenseur   de   l'Eglise. 

S-  I. 
HISTOIRE   DE    SA   VIE. 

ous  joignons   ici   l'éloge   de    Lactance    à   ceux  de  nos 
savans    Gaulois,    non    que  nous  aïons  des  preuves  pour 
le  faire  Gaulois  lui-même,  mais  parce  qu'il  est  mort  dans  les 
Gaules,  après  les  avoir  illustrées  plusieurs  années  par  sa  pieté, 
son  savoir  et  les  écrits  qu'il  y  publia.  '  S.  Jérôme  ne  lui  don-  nicr.  vir.  iii.  i. 
ne  que  les  noms  de  Firmianus  Lactantius  ;  mais  les  plus  an-  '*" 
ciennes  éditions  de  ses  ouvrages,  comme  les  autres,  y  ajoutent 
les  prénoms  de  Lucius  Cœlius  ou  Cœcilius.  '  Gesner  remar-  o.sn.  wb.  uni.  t. 
que  qu'on  y  joint  aussi  quelquefois  celui  de  Codus,  sans  nous  *  '  p*^-  *• 
dire  néanmoins  sur  quel  fondement  on  le  fait. 

'  On  ne  sait  rien  de  la  famille  de  Lactance.  Quant  à  son  tiii.h.e.  t.cii. 
pais,  il  y  a  de  puissans  indices  pour  le  croire  Africain  de  nation.  *°*'  "^' 
En  effet  ce  tut  en  Afrique  qu'il  fit  ses  premières  études,  sous  Hier.  ibid.  t.  ïo. 
la  discipline  d'Arnobe  l'ancien,  qui  y  enseignoit  dans  la  ville  ^' 
de  Sicque.  '  Lactance  fit  tant  de  progrès  dans  les  letres,  qu'il  chr.  p.  iso. 
devint  ensuite  le  plus  savant  homme  de  son  tems,  '  et  l'un  des  Euch.  ad.  vai.  p. 
plus  éloquens  qu'ait  eu  le  christianisme.  '  Il  n'étudia  cepen-  i^ct.  insi.  i.  3.  n. 
dant  l'éloquence  qu'autant  qu'il  étoit  nécessaire,  pour  se  ren-  "•  p-  "'• 
dre  capable  de  l'enseigner  aux  autres,  et  n'en  fit  jamais  usage 
dans  le  barreau,  .\ussi  ne  fait-il  pas  difficulté  d'avouer  lui-mê^ 
Tome  I.  Sec.  Part.  I 


n; 


66  LACTANCE, 

IV  SIECLE,    me  par  .un  trait  d'humilité,  qu'il  n'éloit  pas  éloquent,  et  que 
s'il  paroissoit  tel  dans  ses  écrits,  il  falloit  l'atribuer  à  la  bonté 
de  la  cause  qu'il  y  défend. 
Hier,  ibid.f.fioi        '  Sous  l'empire  de  Diocletien,  c'est-à-dire,  vers301,onle 
2^'.' «8^" '"'■"■   fit  passer  d'Afrique  à  Nicomedie,  pour  y  professer  la  rhétori- 
que. II  y  trouva  peu  d'écoliers,  parce  qu'on  y  parloit  plus  grec- 
que latin,  et  qu'il  n'enseignoit  qu'en  cette  dernière  langue. 
Mais  il  sut  profiter  de  ce  loisir  pour  s'apliqiier  à  écrire.  Cela 
n'empêcha  pas  néanmoins  qu'il  ne  professât  long-tems,  soit  à 
1%'.  a"'*''' '■'■"■  Nicomedie  ou  ailleurs.'  D'abord  il  enseignoit  à  ses  disciples 
non  à  connoître  et  à  aimer  la  vertu ,  mais  à  devenir  habiles  et 
Tiii.  ibij.  rusés  à  faire  le  mal.  '  Il  paroît  par-là  qu'il  n'étoit  pas  encore 

chrétien  ;  mais  il  ne  tarda  pas  à  le  devenir.  Mr  de  Tillemonl 
prouve  assoz  bien  qu'il  l'étoit  au  moins  du  tems  de  la  persécu- 
tion de  l'Empereur  Diocletien,  qui  éclata  en  303.  C'en  seroit 
une  preuve  complète,  s'il  étoit  vrai  que  ce  fût  vers  ce  tems- 
iv?.'*.^''  °'^"  •'■  '^  ^"^  Lactance  publia  son  traité  De  T ouvrage  de  Dieu,  '  dans 
lequel  il  parle  avec  éloge  de  la  pureté  de  conscience  d'un  de 
ses  disciples  nommé  Demetrien,  qui  malgré  les  embaras  des 
eniplois  civils,  où  il  étoit  engagé,  avoit  som  d'élever  son  es- 
prit aux  choses  du  ciel, 
iiii.i.  '  Lactance  commença  dès   lors  à  mépriser  et  presque  à 

p.  tnn,  condamner  absolument  la  profes.sion  de  rhéteur,  '  résolu  de 

consacrer  désormais  son  tems  et  sa  plume  à  la  défense  de  la 
i.si.  i.i.n.i.p.3.  religion.  '  Il  avoue  cependant  que  sa  profession  lui  fut  d'une 
grande  utilité  dans  la  suite  pour  défendre  la  vérité,  qui  s'insi- 
nue, dit-il,  dans  les  esprits  ,  avec  d'autant  plus  de  succès,  que 
les  ornemens  de  l'éloquence  la  rendent  et  plus  claire  et  plus 
agréable  ,  quoiqu'elle  puisse  se  soutenir  sans  le  secours  de  tous 
ces  apuis  étrangers.* 

Ce  fut  par  ces  voies  que  Dieu,  dont  la  providence  sait  faire 
réussir  toutes  choses  pour  sa  gloire,  prépara  Lactance  à  deve- 
nu.!, nir  un  des  plus  puissans  défenseurs  de  l'Eglise.  '  Détrompé  en- 
fin de  la  vanité  de  l'éloquence  profane  qu'il  professoit ,  il  y' 
renonça  sans  détour,  et  se  donna  tout  entier  à  la  recherche 
de  la  vraie  sagesse.  Il  s'aplaudit  lui-même  d'y  être  entré  com- 
me dans  un  port  assuré,  qui  faisoil  ses  plus  chères  délices. 
Tiii.  i  i.i.  p.  âM.       '  On  croit  qu'il  demeura  à  Nicomedie  ,  qui  étoit  alors  le 
*'■                  siège  de  la  (Tour  de  Diocletien  pendant  tout  le  tems  de  la  per- 
sécution de  cet  Empereur,  c'est-à-dire,  jusqu'en  313,  et  qu'il 
y  fut  témoin  oculaire  des  cruautés  barbares  que  l'on  y  exerçoit 


,1      »>K 


ORATEUR.  67 

contre  les  Chrétiens.  '  Il  est  au  moins  vrai  qu'il  parle  de  la    iv  siècle. 
destruction  des  Eglises,  comme  d'évenemens  arivés  sous  ses  LacT^aTTsTiT 
yeui.  *■  P-  *'*• 

'  De  Nicomedie,  il  fut  apellé  dans  les  Gaules  par  l'Empe-  Hier.  vir.  m.  cso  i 
reur  Constantin  ,  qui  lui  confia  l'inslruction  de  Crispe  son  fils  '^"^'  '^' 
aine,  déjà  César.  Lactance  lui  montra  l'éloquence  latine  ;  et  il 
étoit  dès  lors  dans  un  âge  fort  avancé.  Mais  quelque  éclatan- 
te que  pût  être  aux  yeux  du  monde  '  cette  qualité  de  précep-  Tiu.  iwd.  p.  aoe. 
teur  d'un  César,  et  du  fils  aîné  d'un  Empereur,  Lactance 
néanmoins  ne  parle  nulle  part  de  cet  emploi,  qu'il  ne  devoit 
qu'à  son  mérite,  et  ne  fait  mention  d'aucune  autre  chose  qui 
pût  le  relever  devant  les  hommes.  De  même,  quelque  libéral 
que  fût  Constantin,  sur-tout  envers  ceux  qui  étoient  à  son  ser- 
vice, et  quelque  délicieux  que  pût  être  le  séjour  à  la  cour,  tout 
cela  n'empêcha  point  Lactance  d'honorer  et  de  pratiquer  la 
vertu.  '  11  porta  la  pauvreté  jusqu'à  manquer,  non-seulement  Hier.  chr.  iWd. 
des  commodités  de  la  vie,  mais  aussi  des  choses  les  plus  né- 
cessaires. 

'  Il  avoit  cette  vertu  en  si  grande  recommandation,  qu'il  sem-  Uct.  inst.  i.  e.  n. 
ble  ne  rien  oublier  pour  en  inspirer  l'amour  aux  autres  ,  par  "'  ^'  ^"'  '*'" 
les  témoignages  glorieux  qu'il  lui  rend  dans  ses  écrits.  '  Entre  opif.  n.  i.  p.  456. 
les  avis  qu'il  donne  à  Demetrien  son  disciple,  il  a  soin  de  lui 
en  recommander  la  pratique  et  le  mépris  de  toute  la  prospé- 
rité du  siècle ,   pour  ne  pas  tomber  dans  ses  pièges,  qui  sont , 
dit-il,  d'autant  plus  dangereux  qu'ils  paroissent  avoir  plus  de 
charmes. 

'  On  peut  juger  des  autres  vertus  de  ce  grand  homme ,  par  inst.  ».  e.n.js.p. 
l'excellent  abrégé  d'une  conduite  chrétienne  qu'il  trace  à  la  ^^•'*>- 
fin  du  sixième  livre  de  ses  institutions.  Car  on  ne  peut  dou- 
ter qu'il  n'a  prescrit  aux  autres  en  cet  endroit  que  ce  qu'il  pra- 
tiquoit  lui-même.  11  y  demande  entre  autres  choses  une  pro- 
fonde humilité,  une  crainte  sincère  de  Dieu  ,  une  pieté  soli- 
de ;  et  l'on  voit  par  tous  ses  écrits,  et  par  les  motifs  qui  les 
lui  firent  entreprendre,  qu'il  possedoit  éminemment  toutes  ces 
vertus. 

'  Ni   les   incommodités  de  la  pauvreté,  ni  les  ocupations  opif .  n.  ».  p.  49s 
qu'il  pouvoit  avoir  d'ailleurs,  ne  l'empêchèrent  point  de  con- 
sacrer tous  ses  talens  à  réfuter  toutes  les  vaines  subtilités  des 
philosophes  de  son  siècle,  et  à  éclaircir  la  vérité  de  notre  reli- 
gion. 

'  Il  r^ardoit  à  la  vérité  cette  entreprise  comme  au  deastw  p.  m. 


6»  LACTANCE, 

I V  s  1  Ec  L  E.  de  ses  propres  forces  ;  mais  il  esperoit  en  venir  à  bout  par  cel- 
les  qu'il  altendoit  de  Dieu.  Persuadé  d'ailleurs  que  son  travail 
et  sa  vie  même  ne  pouvoient  être  mieux  emploies  qu'à  reti- 
rer quelques  personnes  de  l'erreur,  et  les  conduire  dans  le 
chemin  du  ciel  ,  il  esperoit  au  moins  qu'il  lui  seroit  plus  glo- 
rieux de  succomber  sous  le  poids  d'une  si  haute  entreprise, 
que  de  manquer  de  zélé  pour  la  défense  de  la  religion. 

Telle  fut  en  partie  la  vie  de  ce  grand  homme,  et  l'on  peut 
juger  de  ses  autres  actions  que  nous  ne  savons  pas,  par  celles 
Ba.  mise. t.  2.  p.  Que  uous  vcuons  de  raportcr.  '  On  croit  qu'il  vêquit  jusqu'en 
'^''  1  année  325,  et  qu'il  mourut  vers  le  même  tems  que  Crispe 

'  son  disciple,  plutôt  à  Trêves  qu'en  tout  autre  lieu  ;  puisaue 
c'étoit  alors  la  principale  ville  ues  Gaules,  et  le  séjour  le  plus 
ordinaire  de  la  Cour ,  comme  nous  l'avons  dit  ailleurs.  De 
sorte  que  Lactance  passa  onze  à  douze  ans  dans  nos  Gaules. 

S.  n. 

>       ECRITS  QUI  NOUS  RESTENT  DE  LUI. 

ACTANCE  laissa  à  la  postérité  un  assez  grand  nombre  d'écrits 
idont  la  plupart  ont  eu  le  même  sort  que  tant  d'autres  des 
premiers  écrivains  ecclésiastiques,  qui  ne  sont  pas  venus  jus- 
qu'à nous.  Nous  allons  d'abord  donner  le  catalogue  de  ceux 
qui  nous  restent,  puis  nous  ferons  le  dénombrement  de  ceux 
qui  sont  perdus. 
Hier.vh.  iii.c.80.       1°  '  Le  traité  De  V ouvrage  de  Dieu,  auquel  S.  Jérôme  don- 
Tiii.  H.E.  t.  c.p.  ne  aussi  le  titre  de  la  formation  de  l'homme,  '  paroît  à  quelques 
**'  savans  être  le  premier  fruit  de  la  pieté  de  Lactance,  et  com- 

posé en  303,  lorsque  la  persécution  de  Dioclétien  étoit  déjà 
ouverte.  Il  est  au  moins  certain  qu'il  est  le  premier  des  ouvra- 
Laci.  insi.1.2.  n.  ges  Quc  uous  avous  de  SOU  autcur,  '  et  Qu'il  fut  fait  avant  Ics 
mstitutions,  ou  il  se  trouve  cité.  De  la  manière  que  Lactance. 
en  parle  lui-même,  on  voit  qu'il  y  avoit  peu  de  tems  qu'il 
avoit  fini  ce  traité,  lorsqu'il  mettoit  la  main  à  ses  institutions. 
Quia  nuper proprium  de  ea  re  librum  ad  Demetrianum  audi- 
torem  meum  scripsi.  Ce  sont  ses  propres  termes.  Or,  comme 
les  institutions  nefurent  achevées  que  vers  320  ou  321 ,  Quoique 
Lactance  eût  pu  y  travailler  dès  316,  il  s'ensuivroit  que  le  traité 
de  l'ouvrage  de  Dieu  auroit  été  plutôt  composé  vers  310,  ou 

hier  chr  p  181  '  '  S.  Jérôme  marque  la  mort  de  Crispe  sar  l'an  3t6  de  noire  ère  ynlgaire,  '  et  Soio- 
Sox  1  1  c  5  D  o'^i'"  '^  place  en  la  vingtième  année  de  l'empire  de  Constantio  :  ainiiT«r«  325,  puisque 
fO^ ^'    ConsHintia  commeoça  à  régner  dès  306. 


l; 


10.    p.  iKi. 


.'S*   (j  A«  .  r. 


ORATEUR.  69 

même    314,   qu'en    303,   auquel   tant  d'autres  le  placent,     iv siècle 

'  L'auteur  adresse  ce  traité  à  Demetrien  l'un  de  ses  disciples,  opif.  p.  455. 496. 
à  qui  il  parle  comme  à  un  chrétien,  quoiqu'engagé  dans  les 
emplois  civils.  Il  entreprend  d'y  expliquer  la  nature  de  l'esprit 
et  du  corps  de  l'homme,  et  de  prouver  qu'il  a  été  créé  de  Dieu, 
afin  d'établir  sur  ce  principe  la  foi  de  la  providence.  Il  y  fait 
une  courte  description  de  chaque  partie  du  corps  humain,  en 
relevé  les  propriétés,  les  proportions  et  l'harmonie  qu'elles  ont 
entre  elles,  pour  de  là  conduire  à  l'admiration  de  1  habileté  et 
de  la  grandeur  de  celui  qui  l'a  formé.  Il  y  dit  beaucoup  de  cho- 
ses sur  l'esprit  de  l'homme.  Puis  venant  à  son  ame,  il  en  établit 
l'immortalité.  Il  dit  que  les  philosophes  ne  s'étoient  point  en- 
core acordés  et  ne  s'acorderoient  peut-être  jamais  sur  la  natu- 
re de  l'ame ,  qu'il  prouve  néanmoins  être  immortelle  et  in- 
corporelle. 

'  Lactance  nie  que  l'ame  vienne  par  transfusion,  assurant  n.  19.  p.  493, 
qu'elle  ne  peut  tirer  son  être  qu'immédiatement  de  Dieu,  '  qui  n.  17.  p.  491. 
1  a  créé  pour  animer  le  fruit,  aussi-tôt  que  Dieu  l'a  formé 
dans  le  sein  de  sa  mère.  '  Car  la  conception  et  la  formation  n.  19.  p.  493 
du  corps,  dit-il,  l'inspiration  de  l'ame  qui  doit  l'animer,  l'en- 
fantement même,  et  tout  ce  qui  concourt  à  la  conservation  de 
l'homme,  tout  vient  de  Dieu,  et  ne  peut  être  qu'un  effet  de 
sa  bonté  infinie. 

'  Dès  le  commencement  du  traité,  l'auteur  avertit  qu'il  en-  n.  i.  p.  457. 
treprend  d'y  traiter  avec  quelque  étendue  ce  que  Ciceron  n'a- 
voit  fait  que  toucher  dans  plusieurs  de  ses  écrits.  '  Cela  n'em-  Hier.  ep.  sa.  p. 
pêche  pas  que  S.  Jérôme  écrivant  à  Magnus,  ne  lui  dise  qu'il  ^'^' 
trouvera  dans  ce  livre  de  Lactance  et  dans  l'autre  du  même 
auteur  intitulé  de  la  colère  de  Dieu,  un  abrégé  des  dialogues 
de  Ciceron.   Il  seroit  au  reste  bien  difficile  de  donner  une 
bonne  raison  de  la  pensée  de  S.  Jérôme. 

'  A  la  fin  de  ce  traité,  Lactance  promet  à  Demetrien  de  lui  laci.  ibid.  n.  so. 
enseigner  un  jour  plus  amplement  et  avec  plus  de  solidité  la  '''  *^'' 
vraie  philosophie  ;  lui  témoignant  qu'il  est  résolu  de  travailler 
le  plus  qu'il  pourra  en  faveur  de  la  vérité.  Il  y  a  aparence 
que  Lactance  avoit  dès  lors  dessein  d'entreprendre  ses  institu- 
tions, ou  qu'il  désigne  les  letres  qu'il  écrivit  depuis  à  Deme- 
trien. 

'  On  trouve  plusieurs  éditions  de  ce  traité  de  l'ouvrage  de  Bib.  s.  Per.  de 
Dieu,  faites  séparément  des  autres  écrits  de  Lactance.  Il  y  en  ^""' 
a  une  édition  en  un  volume  in-S".  qui  parut  à  Paris  chez  Vi- 

6 


70  LACTANCE, 

IV  SIECLE,    doue  pour  Gilles  Gourmont  l'an  1529,  avec  le  traité  d'Eras- 

n  Bibi  uni  t    ™^  intitulé  Itt  veuvc  Chrétienne.  '  L'ouvrage  fut  encore  impri- 

1.  p.  ♦86.  I  Hier',  nié  la  même  année  et  en  même  volume  en  deux  differens.en- 

vir.  iii.not.p.i66.  ^jpQJjg  .  ^  g^jg  pj^g^  Ffoben,  et  à  Cologne  avec  les  scholies 

Bib.  Barb.t.i.p.  d'Erasmc.  '  En  1542  il  fut  réimprimé  à  Slrasbourg  età  Frauc- 
S94. 1  iTiii.p.  24.  £qp|  j^ygg  ]gg  observations  de  médecine  de  Josse  Willich,  et 

le  traité  d'Hipocrate  rfe  Semme,  traduit  par  l'éditeur,  le  tout  en 

un  volume  in-S". 

Hier.  ibid.  p.  80.       2°.  '  Lactancc  selon  S.  Jérôme  composa  aussi  un  livre  de  la 

Kai.  mise.  t.  2.  p.  persscution.  '  C'est  tout  ce  que  nous  en  savions  jusqu'en  l'an- 

**^-  née  1679,  que  Mr  Baluze  nous  le  donna  sous  le  litre  c?e /a  mor/ 

des  persécuteurs,  dans  le  second  volume  de  ses  Miscellanées, 

Tiii.  ibid.  p.  208.    sur  uu  manuscrit  ancien  de  800  ans  ou  environ.  '  Aussi-tôt  des 

protestans  Anglois  se  hâtèrent  de  le  faire  réimprimer  comme 

une  pièce  très-authentique  et  très-importante.  Nous  ne  croïons 

pas  en  effet  que  personne  puisse  raisonnablement  douter  que 

ce  ne  sOit  un  véritable  ouvrage  de  Lactance. 

Mr  de  Tillemont  en  pensoit  ainsi  peu  de  tems  avant  sa  mort, 
ne  prévoïant  pas  ce  qui  arriva  environ  douze  ans  après.  Alors 
Dom  Nicolas  le  Nourry,  fort  connu  dans  la  république  des 
letres,  donna  une  nouvelle  édition  de  ce  livre  faite  à  Paris  en 
1710,  sous  le  nom  de  Lucius  Cœcilius,  qu'il  prétend  être  dif- 
férent de  Lactance,  quoique  presque  son  contemporain.  Pour 
affermir  cette  nouvelle  opinion,  Dom  le  Nourry  eut  soin  de 
mettre  depuis  à  la  fin  du  2  volume  de  son  Aparat  imprimé  en 
Hier.  ibid.  not. p.  1715,  unc  assez  longuc  disscrtation  à  ce  sujet.  'Mais  lessa- 
'**  vans  n'ont  pas  trouvé  ses  raisons  assez  fortes  pour  les  déter- 

miner à  ôter  ce  livre  à  Lactance,  et  le  donner  à  un  auteur  in- 
connu. Le  témoignage  de  S.  Jérôme,  qui  atribuë  à  Lactance 
un  livre  de  la  persécution,  et  le  style  du  traité  dont  il  s'agit 
ici,  en  tout  semblable  au  style  des  autres  écrits  de  cet  orateur 
chrétien,  sont  des  preuves  suffisantes  pour  ne  pas  douter  qu'il 
en  est  le  véritable  auteur. 
Lact.  mor.  per.  n.       '  Comme  Lactaucc  y  fait  mention  de  la  mort  funeste  de  la 
Tiii.  ibid.  p.  209.    femme  et  de  la  fille  de  Diocletien,  '  on  doit  croire  qu'il  ne  le 
Laci.  ibid.  n.  52.    composa  au  plutôt  qu'à  la  fin  de  l'année  314.  '  Cela  pourroit 
se  confirmer  par  la  fin  du  traité,  où  l'auteur  parle  de  la  paix 
que  Dieu  avoit  donnée  à  son  Eglise  depuis  dix  ans  :  c'est-à-di- 
re, peut-être  depuis  l'année  305,  lorsque  Diocletien  et  Maxi- 
mien abdiquèrent  l'empire  le  premier  jour  de  Mai  de  la  mê- 
Bai.  ibid.  p.  348.  me  année.    Lactance  adresse  cet  ouvrage  à  un  confesseur  nom- 


ORATEUR.  71 

mé  Donat,  sorti  de  prison  au  mois  de  Mai  341,  après  y  avoir    iv  siècle. 
demeuré  six  ans  pour  la  foi  de  J.  C. 


'  Le  dessein  de  l'auteur  n'est  pas  d'y  faire  une  histoire  sui-  Bai.  ibid.  p.  354. 
vie  de  la  pers  fution,  '  mais  seulement  de  faire  adorer  la  jus-  Lact.  iwa.  n.  1. 
tice  de  Dieu  dans  la  punition  et  la  mort  des  Princes  païens, 
qui  avoient  été  les  auteurs'de  la  persécution  contre  la  religion 
chrétienne.  '  Il  s'y  étend  particulièrement  sur  les  vices  et  les  n.  7.  11. 
cruautés  de  Dioclétien.  '  Il  assure  qu'il  n'y  avance  rien  qu'il  n.  5«. 
ne  sache  certainement,  et  qu'il  a  entrepris  cet  ouvrage,  tant 
pour  empêcher  que  de  si  grands  évenepiens  ne  tombassent 
dans  un  éternel  oubli,  que  pour  prévenir  les  fautes  que  pour- 
roient  faire  ceux  qui  tenteroient  d'écrire  les  mêmes  choses, 
sans  se  mettre  en  peine  de  le  faire  comme  il  conviendroit. 

'Il  y  place  la  mort  deJ.  C.  au  23*  jour  de  Mars  sous  le  n.  s. 
consulat  des  deux  Geminus,  et  dit  que  25  ans  après  S.  Pierre 
alla  à  Rome,  où  il  établit  la  religion  chrétienne  sous  l'empire 
de  Néron,  et  où  il  fut  ensuite  ataché  à  une  croix,  et  S.  Paul 
mis  à  mort  par  l'ordre  de  cet  Empereur.  '  En  faisant  le  por-  n.  s. 
trait  des  autres  Princes  païens  qui  ont  persécuté  l'Eglise ,  il 
rend  justice  à  la  probité  de  Constance  Chlore,  qu'il  dit  n'avoir 
point  ressemblé  aux  autres,  et  qu'il  assure  avoir  été  le  seul  di- 
gne de  l'Empire. 

Les  critiques  conviennent  que  ce  traité  de  Lactance  est  DnPiu.Bib.  t.  1. 
écrit  avec  beaucoup  de  netteté  et  de  force,  et  qu'on  peut  le  **  ^*"' 
regarder  comme  une  histoire  très-agréable  de  la  révolution  de 
l'Empire,  pendant  les  règnes  de  ces  Empereurs,  dont  il  y  dé- 
couvre la  politique,  les  desseins  et  la  vengeance  que  Dieu  en 
a  tirée.  On  y  trouve  peu  de  choses  touchant  la  doctrine  des 
Chrétiens;  mais  l'auteur  yraporte  divers  faits  inconnus  jus- 
qu'à sa  publication,  et  en  éclaircit  plusieurs  autres. 

'  Après  la  première  édition  de  ce  traité  publiée  en  1679  par  Hier.not.ibid. 
les  soins  de  Mr  Baluze,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  les 
Anglois  en  donnèrent  une  nouvelle,  qui  parut  à  Oxford  l'an 
1680  en  un  volume  m-12,  dans  lequel  on  joignit  de  courtes 
remarques,  et  les  actes  de  S'"  Perpétue  et  de  S**  Félicité.  Ce  fut 
sur  cette  édition  que  Jean  Colombi  donna  la  sienne  avec  de 
savantes  notes,  à  Abo  en  Suéde  l'an  1684  en  un  volume  iu-S". 
L'année  suivante  Thomas  Sparck  '  insera  ce  traité  dans  son  Lact.  mor.  per.  p.. 
édition  de  Lactance  faite  à  Cantbrige,  et  y  ajouta  des  notes  **'•  "* 
tirées  de  celles  de  Mr  Baluze,  avec  la  chronologie  de  l'em- 
pire de  Dioclétien. 


72  LACTANCE, 

IV  SIECLE.        'Cinq  ans  après,  c'est-à-dire  en  1690,  Mr  Toinard  fit  im- 
— —— — — —  primer  à  Paris  chez  Arnoul  Seneuse  des  notes  sur  le  même  trai- 
té en  un  volume  m-12.  Depuis,  Paul  Bauldri  les  recueillit  avec 
celles  de  Mr  Baluze,  de  Cuper ,  de  Colombi,  de  Sparck,  de 
Graevius,  d'Elie  Boliereau,  de  Pierre  AUix,  de  Paul  Colomiès, 
et  les  fit  imprimer  avec  le  texte  de  Lactance,  et  de  nouvelles 
remarques  ae  sa  façon.   Cette  édition  parut  à  (Jlrecht  chez 
Hier.  not.  ibid.      Broëdclct  cn  uu  volume  m-8°,  l'an  1693.  '  Mr  Fabricius  nous 
avertissoit  en   1718   que  Ludolphe  Buneman  principal  du 
collège  de  Misden  préparoit  une  nouvelle  édition  du  même 
ouvrage,  qui  paroitroit  enrichi  des  notes  de  Gérard  Von  Mas- 
tricht  et  de  Miegius. 
ibMiDibi.Tcii.p.       '  Dès  1680,  Mr  Maucroix  chanoine  de  l'Eglise  de  Reims, 
^'^'  publia  une  traduction  françoise  de  ce  traité  imprimée  à  Paris, 

chez  Muguet  en  un  volume  m-12.  Gilbert  Burnet  en  donna 
une  autre  à  Londres  en  1686 ,  laquelle  fut  réimprimée  à 
Utrecht  l'année  suivante  en  un  volume  m-S". 

3°.  Le  principal  ouvrage  de  Lactance   et  le  troisième  de 
ceux  qui  nous  restent  de  lui ,.  selon  les  tems  ausquels  ils  ont  été 
laci.  iftst.  1.1.  n.  composés,  sont  ses  institut  ions  divines.  Il  les  composa  à  l'imi- 
^■P'  ^-  tation  des  jurisconsultes,  mais  par  des  motifs  incomparable- 

ment plus  relevés  que  ceux  qu'ils  pourroient  se  proposer  eux- 
p.  i.  mêmes.  '  Le  désir  de  remédier  à  deux  erreurs  générales,  la 

source  de  toutes  les  autres,  fut  ce  qui  le  porta  à  entreprendre 
ce  grand  ouvrage.  L'une  de  ces  erreurs  consistoil  en  ce  que 
la  connoissance  de  la  vérité,  qui  est  un  don  de  Dieu,  étoit  de- 
venue méprisable  aux  yeux  des  savans ,  parce  qu'on  ne  l'ac- 
quiert que  par  des  raisonnemens  conformes  à  sa  nature.  li'au- 
tre  erreur  consistoit  en  ce  que  cette  connoissance  étoit  deve- 
nue odieuse  aux  ignorans,  à  cause  de  l'austérité  dont  elle  est 
toujours  inséparablement  acompagnée,  et  que  la  nature  de 
l'homme  portée  au  vice  ne  peut  souffrir.  De-là  il  arrivoit  que 
la  vertu  se  trouvant  mêlée  d'amertume,  et  le  vice  de  volupté, 
les  hommes  rebutés  de  l'une  et  atirés  par  les  amorces  trom- 
peuses de  l'autre,  couroient  au  précipice,  et  y  trouvoient  leur 
perte.  Ce  fut  donc  pour  rapeller  les  savans  à  la  vraie  sagesse, 
et  les  ignorans  à  la  vraie  religion,  que  notre  auteur  mit  la  main 
I.  :i.  n.  1.  p.  236.  à  la  plume.  '  Que  si  son  dessein  n  avoit  pas  cet  heureux  effet, 
il  se  flatoit  qu'il  serviroit  au  moins  à  affermir  dans  la  vérité  les 
chrétiens  chancelans  et  foibles  dans  leur  foi. 
1. 3.11,  1. 1).  114.      '  Lactance  nous  assure  qu'il  ne  s'est  point  porté  à  exécuter 

sou 


ORATEUR.  73 

son  entreprise  par  une  présomption  aue  lui  auroit  inspiré  son    iv  siècle. 

éloquence,  mais  par  la  confiance  qu  il  avoit  en  la  force  de  la 

venté.  11  reconnoissoit  au  contraire  qu'elle  étoit  au-dessus  de 

ses  propres  forces  ;  mais  il  esperoit  ^ue  Dieu  supléeroit  à  ce  qui 

lui  manquoit.  Il  se  consoloit  sans  peme  de  n'avoir  qu'un  esprit 

et  une  éloquence  médiocre  à  emploïer  à  une  telle  entreprise, 

parce  que  la  vérité  n'a  pas  besoin  d'ornemens  pour  se  montrer 

et  se  faire  goûter,  et  que  son  plus  grand  brillant  consistant  dans 

sa  simplicité  ;  elle  n'est  jamais  plus  aimable  que  lorsqu'elle 

paroît  toute  nuë. 

'  On  ne  doute  point  que  ces  institutions  n'aient  été  faites  thi.  ibid.  p.  •m. 
pour  exécuter  le  dessein  qu'avoit  pris  Lactance  dès  sa  conver- 
sion au  christianisme,  '  de  répondre  à  tous  ceux  qui  avoient  déjà  ^act.  iWd.  n.  *.  p. 
ataqué  notre  religion,  et  qui  pourroient  l'ataquer  dans  la  suite. 
Mais  comme  il  ne  pouvoit  répondre  à  chacun  en  particulier  , 
il  assortit  tellement  son  ouvrage  qu'il  se  flatoit  d'y  renver- 
ser tout  ce  qu'avoient  écrit  ceux  qui  avoient  déjà  paru,  et  d'ô- 
ter  à  ceux  qui  viendroient  dans  la  suite,  tout  moïen  de  le  faire 
avec  succès. 

Lactance  cependant  n'exécuta  ce  grand  dessein  que  plu- 
sieurs années  après,  et  lorsqu'il  étoit  déjà  dans  les  Gaules  à  la 
cour  impériale.  '  C'est  ce  que  prouvent  assez  clairement  divers  i-  '•  "•  ••  p-  »  i '• 
endroits  de  l'ouvrage,  dans  lesquels  l'auteur  adresse  la  parole 
au  grand  Constantin,  et  sur- tout  celui  où  il  déclare  que  ce  fut 
sous  les  auspices  de  ce  Prince,  le  premier  Empereur  qui  eût 
connu  et  adoré  le  vrai  Dieu,  qu'il  commença  à  y  mettre  la  main. 
'  Ceux  qui  ont  examiné  de  plus  près  cette  difficulté  qui  a  par-  Tik'' ^j''''  p-  "'^• 
tagé  les  savans,  fixent  l'époque  de  la  perfection  de  cet  ouvrage 
à  l'an  320  ou  321  ;  quoique  Lactance. eût  pu  y  travailler  quel- 
ques années  auparavant.  Rien  n'empêche  que  nous  ne  sui- 
vions cette  opinion  ,  qui  nous  paroît  la  mieux  apuïée,  sans 
qu'il  soit  nécessaire  '  de  distinguer  deux  différentes  éditions  de  Bai.  iWd.  p.  sis. 
cet  ouvrage,  l'une  faite  en  Bithynie,  et  l'autre  dans  les  Gaules, 
que  l'auteur  auroit  adressée  à  Constantin. 

'  11  le  divisa  lui-même  en  sept  livres,  comme  nous  l'avons  Lact.  iwa.  i.  i.n. 
encore  aujourd'hui.  Il  avertit  qu'il  y  recueillera  en  abrégé  une  '^'  ' 
infinité  de  choses  que  lui  présente  son  sujet,  et  que  ce  qu'il  y 
dira  sera  si  clair  et  si  facile  à  comprendre  (jue,  bien  loin  d'a- 
voir de  la  peine  à  le  lire,  on  y  trouvera  du  plaisir.  Il  donne  à 
chaque  livre  son  titre  particulier,  qui  marque  le  sujet  qu'il  y 
traite . 

Tome  I.  Sec.  Part.  '  K 

6  * 


74  LACTANCE, 

IV  SIECLE.        'Le  premier  est  intitulé  de  la  fausse  religion,  et  est  emploie 

~~^ îi  prouver  la  fausseté  et  le  ridicule  de  la  religion  Païenne.  Pour 

''"  préparer  ses  lecteurs  à  ce  qu'il  y  doit  dire,  il  y  établit  pour 

principes  qu'il  n'est  point  de  nourriture  plus  agréable  à  l'esprit 
que  la  connoissance  de  la  vérité,  et  que  l'abrégé  de  cette  con- 
noissance  est  enfermé  en  ces  deux  mots  :  Qu'on  ne  doit  em- 
brasser aucune  religion  qui  ne  soit  établie  sur  la  vraie  sagesse, 
et  qu'on  ne  doit  reconnoître  pour  vraie  sagesse  que  celle 
qui  est  inséparable  de  la  vraie  religion  :  Ut  neque  religio  ulla 
sine  sapientia  suscipienda  sit,  neculla  sine  religione probanda 
sapientia. 
j.  2.  p.  61. 118.  '  Le  second  livre  a  pour  titre  de  l'origine  de  l'erreur.  Lac- 

tance  y  découvre  toutes  les  causes  qui  ont  contribué  à  trom- 
per les  hommes,  pour  leur  faire  croire  d'abord  qu'il  y  avoit 
d'autres  divinités  que  le  seul  Dieu  vivant,  et  à  leur  persuader 
ensuite  ù  continuer  de  leur  rendre  un  faux  culte.  Il  y  promet 
un  trailé  particulier  sur  la  colère  de  Dieu,  qu'il  composa  de- 
puis, comme  nous  le  dirons  en  son  lieu. 

1. 3.  p.  113. 178.         '  L'auteur  donne  pour  titre  à  son  troisième  livre,  de  la  fausse 

sagesse ,  afin  qu'aïant  découvert  dans  le  premier  la  fausseté  de 
toutes  les  religions,  et  dans  le  second  la  source  de  toutes  les 
erreurs,  il  montre  dans  ce  troisième  combien  vaine  et  fausse 
est  la  philosophie  des  Païens.  Il  s'y  propose  de  prouver  effec- 
tivement que  les  raisonnemens  de  ces  prétendus  philosophes 
sont  pleins  de  folie,  comme  l'écriture  nous  en  assure  elle- 
même. 

1. 4.  p.  173. 833.         '  Le  quatrième  livre  est  intitulé  de  la  vraie  sagesse;  et  l'au- 

teur entreprend  d'y  montrer  qu'elle  est  inséparable  de  la  vraïe 
religion.  Après  avoir  prouvé  que  les  prétendus  sages  du  paga- 
nisme n'étoient  rien  moins  que  sages,  et  avoir  établi  l'unité 
d'un  seul  Dieu,  il  emploïe  les  chapitres  suivans  de  ce  livre 
depuis  le  5"  jusqu'au  30%  à  faire  une  exposition  de  la  foi  des 
chrétiens,  qu'il  apuïe  sur  les  écritures  et  sur  les  oracles  des  Si- 
bylles, en  prévenant  les  objections  que  l'on  y  pourroit  faire, 
et  réfutant  celles  qu'on  y  faisoit  dès  lors. 

'  Il  conclud  cette  exposition  par  ces  paroles  remarquables  : 
«  Il  n'y  a,  dit-il,  que  l'Eglise  catholique  qui  retienne  la  vraïe 
«  religion.  C'est-là  que  se  trouve  la  source  de  la  vérité.  C'est 
«  cette  Eglise  qui  est  le  domicile  de  la  foi  et  le  temple  de  Dieu. 
«  Ceux  qui  n'y  entrent  point ,  comme  ceux  qui  en  sortent ,  s'é- 
«  loignent  de  l'espérance  de  la  vie  et  du  salut  éternel.  Il  est 


p.  a3î. 


ORATEUR.  75 

«  donc  de  la  dernière  conséquence,  continue-t'il ,  que  per-  iv  siècle. 
a  soniie  ne  s'amuse  à  disputer  opinialrément,  puisqu'il  s'agit  de 
«  choses  aussi  intéressantes.  »  Pour  discerner  l'Eglise  catholi- 
que, il  dit  que  c'est  celle  où  se  trouvent  la  confession  et  la 
pénitence,  qui  sont  les  rejnedes  salutaires  contre  les  péchés 
ausquels  la  foiblesse  humaine  est  sujete. 

Le  cinquième  livre  porte  pour  titre,  de  la  justice.  Lac-  1.5.  p.  «»».«36. 
tance  y  fait  voir  que  la  véritable  justice  ne  se  trouve  point 
chez  les  Païens,  mais  seulement  dans  la  religion  chrétienne. 
Ce  qui  le  porta  à  intituler  ainsi  ce  livre,  fut  le  dessein  qu'il 
avoit  de  convaincre  d'injustice  les  écrivains  du  paganisme,  et 
de  les  forcer  à  rendre  plus  de  justice  aux  Chrétiens.  Entre  ces 
écrivains,  il  parle  de  deux  en  particulier,  gens  fort  éloquens 
à  la  vérité,  mais  encore  plus  ignorans,  qui  avoient  écrit  sous 
ses  yeux,  et  qu'il  réfute  en  abrégé  dans  les  premiers  chapitres 
de  ce  livre. 

'  Le  sixième  est  intitulé,  du  vrai  culte.  L'auteur  y  enseigne  1.  e.  p.  W7.350, 
de  quelle  manière  et  par  quelle  sorte  de  sacrifice  il  faut  ho- 
norer Dieu,  en  quoi,  dit-il,  consiste  le  devoir  essentiel  de 
l'homme,  le  point  capital  de  toutes  choses,  et  tout  ce  qui 
contribue  à  la  félicité  de  la  vie.  Il  ajoute  que  cet  Etre  souve- 
rain n'exige  de  l'homme  que  l'innocence  et  la  pureté  des 
mœurs,  et  que  celui  qui  a  le  bonheur  de  lui  offrir  ce  sficrifi- 
ce,  satisfait  à  tout  ce  que  demandent  la  pieté  et  la  religion. 
Lactance  ne  parle  ici  que  d'un  chrétien,  qui  par  conséquent 
connoît  Dieu  et  J.  C.  son  Fils,  et  qui  est  instruit  de  ses  mys- 
tères. 

'  Il  finit  ce  sixième  livre  par  un  excellent  abrégé  d'une  con-  p.  34».  3so. 
duite  chrétienne.  Il  veut  que  notre  religion  ,  pour  être  agréa- 
ble à  Dieu,  soit  établie  surune  profonde  humilité,  une  crain- 
te sincère  de  Dieu  et  une  pieté  solide  et  éclairée.  Il  demande 
une  profonde  humilité,  de  peur,  dit-il,  qu'aïant  trop  de  con- 
fiance en  la  pureté  de  sa  vie,  l'homme  ne  tombe  dans  le  cri- 
me de  présomption  ,  et  ne  perde  le  don  de  la  vertu.  Il  veut' 
encore  que  l'homme,  pour  être  agréable  et  pur  aux  yeux  de 
Dieu,  implore  continuellement  sa  miséricorde,  et  que  tou- 
tes ses  prières  tendent  à  demander  pardon  pour  ses  péchés  , 
quand  même  il  n'en  auroit  point  commis  ;  parce  que  s'il  a  be- 
soin d'autres  choses,  il  n'est  pas  nécessaire  de  le  demander  à 
celui  qui  connoît  parfaitement  tous  les  désirs  de  notre  cœur, 
11  exige  outre  cela,  que  lorsqu'il  arrive  à  l'homme  quelque 

K  ij 


76  LACTANCE, 

IV  SIECLE,  chose  d'agréable,  il  en  rende  grâces  ;  que  si  au  contraire  il  lui 
arrive  quelque  chose  de  fâcheux,  il  l'atribue  à  ses  péchés  ,  et 
qu'il  ne  laisse  pas  d'en  remercier  Dieu.  Que  dans  l'adversité 
comme  dans  la  prospérité  il  soit  toujours  content,  toujours  le 
même,  toujours  uniforme  dans  sa  conduite.  Qu'il  ne  s'imagi- 
ne pas  qu'il  soit  seulement  obligé  à  remplir  tous  ces  devoirs 
dans  l'Eglise  ;  mais  qu'il  y  est  encore  tenu  dans  son  domesti- 

3ue  et  les  lieux  les  plus  secrets.  Qu'enfin  il  porte  toujours  Dieu 
ans  son  cœur,  parce  qu'il  en  est  le  temple.  C'est  en  cela,  ajou- 
te Lactance,  que  consiste  la  perfection  de  la  justice  chrétienne. 
.  7.  p.  351-W9.  '  Le  septième  et  dernier  livre  des  institutions  est  intitulé,  de 
la  vie  bienheureuse  ou  de  la  béatitude.  C'est-là,  dit  l'auteur, 
le  terme  où  conduit  tout  ce  que  j'ai  dit  dans  les  livres  précé- 
dens  ;  et  sans  ce  teime  la  connoissance  de  tous  les  sujets  que 
j'y  ai  traités,  deviendroit  inutile.  Il  commence  ce  septième 
livre  par  montrer  contre  le  sentiment  de  Platon  et  d'Aristote  , 

Ïue  le  monde  a  eu  un  commencement,  et  qu'il  aura  une  fin. 
lans  les  derniers  chapitres,  il  fixe  celte  fin  du  monde  à  six  mille 
ans,  comme  nous  avons  vu  que  la  fixoit  S.  Irenée.  Au  bout 
de  ce  terme,  selon  Lactance,  viendra  le  règne  de  mille  ans, 
qui  ne  sera  que  pour  les  élus  du  Seigneur,  et  après  lequel  Dieu 
renouvellera  le  monde.  Le  ciel  sera  plié  comme  une  chose 
que  l'on  roule  ;  la  terre  sera  changée,  et  les  hommes  transfor- 
més à  la  ressemblance  des  Anges,  seront  toujours  en  la  pré- 
sence de  Dieu,  et  le  serviront  éternellement.  Lactance  à  la 
fin  du  livre  prescrit  d'excellens  avis  pour  se  préparer  à  ce  der- 
nier jour. 
p.  403.  Mfi.  '  Entre  le  dernier  chapitre  et  l'épilogue  du  même  livre,  se  lit 

dans  quelques  éditions  une  espèce  de  compliment  à  l'Empe- 
reur Constantin.  Mais  on  observe  que  cet  endroit  ne  se  trouve 
point  dans  plusieurs  manuscrits.  Il  n'est  point  non  plus  dans 
l'édition  de  Lactance,  faite  à  Paris  en  1509. 
Hier,  in  Ecci.  c.  10.  '  S.  Jcrômc  parlant  de  ces  institutions,  en  relevé  le  mérite 
^iii"ibkp.208.  comme  d'un  excellent  ouvrage;  et  les  plus  habiles  des  der- 
niers siècles  en  ont  témoigné  faire  une  estime  extraordinaire. 
Au  moins  on  peut  assurer  que  personne  n'a  défendu  l'Eglise 
et  combattu  l'idolâtrie  avec  un  style  et  plus  beau  et  plus  élo- 
quent que  le  fait  Lactance  dans  ces  sept  livres.  C'est  ce  qui  a 
porté  à  les  mettre  si  souvent  sous  la  presse.  Mais  comme  ils 
n'ont  été  imprimés  qu'avec  les  autres  écrits  de  notre  orateur , 
nous  n'en  marquerons  les  différentes  éditions  qu'après  avoir 


ORATEUR.  77 

{)arlé  de  tous  ses  ouvrages.  Seulement  nous  dirons  ici  '  que    iv  siècle. 
es  institulions  ont  été  traduites  en  notre  langue  par  René  Fa-  Bib.  Miss.  cen.  i 
me  notaire  et  secrétaire  du  Roi  François  I,  à  qui  il  les  dédia.  App.  iui  uib.  pp.  t. 
Cette  traduction  fut  imprimée  après  la  mort  du  traducteur  ,    '  "*■ 
par  les  soins  de  Claude  Chappuis  bibliothécaire  et  valet  de 
chambre  du  Roi,  d'abord  à  Paris  chez  Pasquier  le  Tellier 
pour  Etienne  Bosset,  l'an  1546  m-8°,  puis  à  Lyon  chez  Bal- 
thazar  Arnouillet,  pour  Guillaume  Gaseau  l'an  1547  en    un 
volume  m-4".  '  Elle  fut  depuis  réimprimée  en  un  volume  m-1 6.  Bibi.  ff.  pra;d.  Cen. 
l'an  1563  au  même  endroit,  chez  Jean  de  Tournes,  '  et  enco-  sim.  let.  choi.  t.  s. 
re  à  Paris  en  un  volume  m-12.  l'an  1581 ,  '  Elle  l'avoit  été  dès  m.  Miss'.  Cen. 
1555  à  Lyon,  chez  de  Tournes  et  Gaseau  en  même  volume. 

4".  '   Nous  aprenons  de  S.  Jérôme  que  Lactance  avoitré-  Hier.vir.m.c  ao. 
duit  lui-même  le  grand  ouvrage  de  ses  institutions  en  un  abrégé 
compris  en  un  seul  livre,  qu'il  nomme  acéphale  ;soii  que  dès  ce 
tems-là  il  fût  sans  titre,  ou  que  le  commencement  y  manquât. 
'On  peut  néanmoins  remarquer  que  Lactance  dans  son  traité  Lact.deira,  n.  ii. 
de  la  colère  de  Dieu,  cite  lui-même  cet  abrégé  comme  l'ori-  ^' 
ginal  sous  le  titre  d'institutions.  '  Ce  que  nous  en  avons  dans  Hier.  ibid.  noi.  p. 
toutes  les  éditions  de  Lactance  qui  ont  été  faites  jusqu'en  1712,  *^' 
ne  commence  qu'au  seizième  chapitre  du  cinquième  livre  de 
l'original.  Alors  Mr  Pfaff  nous  donna  l'abrégé  en  entier ,  aug- 
menté des  55  premiers  chapitres,  tel  qu'il  l'avoit  trouvé  dans 
un  ancien  manuscrit  de  la  bibliothèque  roïale  de  Turin.  Il  fut 
imprimé  ainsi  augmenté  en  un  volume  in-S".  à  Paris  la  même 
année  1712.  Lactance  l'adresse  à  un  certain  Pentadius  qu'il 
qualifie  son  frère. 

Il  est  peu  d'écrits  entre  ceux  des  anciens  qui  soient  et  plus 
instructifs,  et  plus  remplis  d'onction  que  cet  abrégé.  Il  respire 
par-tout  la  pieté  de  son  auteur.  Lactance  y  a  semé  presque 
une  infinité  de  préceptes  ou  de  conseils  d'une  morale  la  plus 
pure.  '  Le  détail  qu'il  y  fait  des  œuvres  de  miséricorde  est  Lact.iost.  «pisL  n. 
admirable;  et  les  motifs  qu'il  propose  pour  nous  en  faire  ai- 
mer la  pratique,  ne  le  sont  pas  moins.  '  Ce  qu'il  y  dit  de  la  n.s.  p.  mo. 
pénitence,  est  encore  tout-à-fait  digne  de  remarque.  «  C'est, 
«  dit-il,  un  grand  secours  et  une  grande  consolation  que  la 
«  pénitence.  C'est  le  remède  à  nos  blessures  et  à  nos  péchés. 
«  C'est  elle  qui  est  l'espérance  et  le  port  du  salut.  Quiconque 
«  s'aviseroit  de  la  retrancher,  se  fermeroit  la  voie  qui  conduit  à 
«  la  vie  ;  parce  qu'il  n'est  personne,  pour  juste  qu'il  puisse  être, 
«  à  qui  la  pénitence  ne  soit  nécessaire.  »  Il  faudroit  transcrire 


I 


78  LACTANCE, 

IV  SIECLE,    presque  tout  le  livre  entier,  si  nous  voulions  raporter tout  ce 
qui  s'y  trouve  de  remarquable.  Nous   nous  bornerons  à  cet 

n.  10.  p.  511.  autre  trait.  «  '  La  vertu,  dit  Lacfance  en  prouvant  par-là  l'im- 
«  mortalité  de  l'ame,  est  quelque  chose  de  si  grand  que,  lors- 
«  qu'il  s'agit  de  la  foi  ou  de  la  justice,  elle  ne  craint  ni  la  di- 
«  selte,  ni  l'exil,  ni  la  prison,  ni  la  torture,  ni  la  mort  même.  » 
Au  reste,  comme  c'est  un  abrégé  des  institutions ,  on  ne 
doit  pas  être  surpris  d'y  lire  à  la  fin  l'erreur  des  Millénaires, 
qui  se  trouve  dan»  l'original. 

insi.  1. 2.  n.  17.  p.       5*.  '  LactancB  en  travaillant  à  ses  institutions ,  avoit  promis 

10!».  110.  yj.j  ^|,g-j^  particulier  sur  la  colère  de  Dieu,  à  l'ocasion  de  l'ob- 

jeclion  qu'il  se  faisoit  à  lui-même,  en  se  demandant  pourquoi 
Dieu  souffre  toutes  les  erreurs  qu'il  venoit  de  détailler,  et 
qu'il  permet  que  le  bien  soit  combattu  par  le  mal,  la  vertu  par 
le  vice  ?  A  quoi  il  répond  qu'il  est  impossible  qu'un  Etre  in- 
finiment parlait  ne  soit  aussi  infiniment  patient.  Maisqu'il  n'en 
faut  pas  néanmoins  conclure  qu'il  n'y  ait  en  lui  ni  justice  ni 
colère,  ce  qui  détruiroit  entièrement  la  vérité  et  la  religion. 

.le  ira,  p.  410. 454.  '  C'cst  cc  dessciu  projette  que  notre  orateur  exécuta  dans 
son\i\re  De  la  colère  de  Uieu,  que  nous  avons  encore.  En  trai- 
tant ce  sujet,  Lactance  a  soin  de  prévenir  ses  lecteurs  et  de 
les  avertir  qu'il  n'a  pas  la  présomption  de  se  glorifier  d'avoir 
découvert  par  la  force  de  son  esprit  les  vérités  dont  il  entre- 
prend de  parler  ;  mais  qu'il  ne  fera  que  suivre  ce  que  Dieu 
nous  en  a  apris  lui-même,  n'y  aïant  que  lui  seul  qui  puisse  sa- 
voir et  enseigner  des  secrets  de  cette  nature. 

n.  t.  p.  4ii.  '  Avant  que  d'entrer  en  matière,  il  pose  pour  principe  que 

l'on  n'arrive  à  la  connoissance  de  la  vérité  que  par  trois  degrés. 
Le  premier,  dit-il,  est  de  savoir  discerner  les  fausses  religions, 
et  rejetter  tout  culte  des  Dieux  qui  vient  de  l'invention  de 
l'homme.  Le  second  degré  consiste  à  comprendre  qu'il  n'y  a 
qu'un  seul  et  souverain  Dieu,  qui  â  créé  le  monde  par  sa  toute- 
puissance,  et  qui  le  gouA'erne  par  une  providence  toute  divi- 
ne. Le  troisième  degré  supose  la  connoissîince  de  celui  que* 
ce  Dieu  a  envoie  au  monde  comme  son  ministre  et  son  inter- 
prète, afin  de  nous  délivrer  par  sa  doctrine  des  erreurs  où  nous 
étions  engagés,  et  que  nous  aïant  formés  au  culte  du  vrai 
Dieu,  nous  aprenions  quelle  est  la  vraie  justice. 

ibid.  '11  dit  que  dans  le  second  livre  de  ses  institutions,  il  a  re- 

futé l'ignorance  de  ceux  qui  pèchent  contre  le  premier  degré. 
Que  dans  le  quatrième  livre  du  même  ouvrage  il  a  aussi  réfuté 


ï 


OKATEUR.  79 

en  partie  ceux  qui  pèchent  contre  le  troisième  degré,  et  qu'il    iv  siècle. 
les  réfutera  encore  plus  particulièrement  dans  l'écrit  qu'il  mé-  ' 

dite  de  composer  contre  toutes  les  hérésies.  Qu'enfin  le  trai- 
té de  la  colère  qu'il  entreprend,  est  destiné  pour  combattre 
ceux  qui  pèchent  contre  le  second  degré  qu'il  vient  de  pres- 
crire. '  11  réfute  ensuite  avec  sa  solidité  ordinaire  les  sentimens  Lact.   e  ira,  n.  3. 
des  anciens  philosophes  touchant  la  clémence  et  la  rigueur,  *"' 
la  miséricorde  et  la  justice  qui  sont  en  Dieu. 

'  S.  Jérôme  parle  de  ce  traité  de  Laclance  comme  d'un  Hier.  ibid. 
très-bel  ou^rage,  pulcherrimum  de  ira  Iki  librum.  '  Il  dit  in  Eph.  i.  s.  c.  4. 
ailleurs  que  l'auleur  y  fait  voir  autant  d'érudition  que  d'élo-  '^'  '"' 
quence,  et  que  cet  écrit  peut  seul  suffire  pour  la  matière  qu'il 
traite.  Laclance  y  citant  ses  institutions  et  leur  abrégé,  comme 
on  l'a  vu,  c'est  une  preu\  e  qu'il  ne  fut  composé  qu'après  ces 
deux  autres  ouvrages.  Ainsi  ce  fut  dans  les  Gaules  que  Lactance 
le  publia.  '  11  l'adresse  à  un  Donal,  que  M.  Baluze  prétend  être  Bai.  ibia.  p.  a», 
le  même  que  celui  à  qui  il  avoit  déjà  dédié  son  traité  de  la 
morirtes  persécuteurs.  '  Cependant  la  manière  dont  l'auteur  Laci.  ih.  n.  \. 

{)arle  à  ce  Donal  dans  le  premier  chapitre  du  livre  de  la  co- 
ere  de  Dieu  ne  présente  pas  l'idée  de  l'illustre  confesseur  de 
ce  nom,  dont  il  est  fait  mention  dans  l'autre  ouvrage. 

S-   HI. 
SES  ECRITS  PERDUS. 

LES  ouvrages  qui  nous  restent  de  Lactance,  et  dont  nous 
venons  de  faire  le  dénombrement,  ne  sont  que  la  moin- 
dre partie  de  ceux  qu'il  avoit  et  composés  et  projettes ,  mais 
qui  se  trouvent  perdus  aujourd'hui,  ou  qui  n'ont  jamais  reçu 
l'être,  ni  vu  le  jour.  Encore  ne  parlons-nous  que  de  ceux 
dont  nous  avons  connoissance.  11  paroît  assez  visiblement  qu'il 
en  composa  quelques  autres,  dont  les  anciens  ne  nous  apren- 
nent  rien  en  particulier.  '  En  effet  S.  Jérôme  nous  disant  que  Hier.  vir.  iii.  c.  so. 
Lactance  s'apliqua  à  écrire  pendant  qu'il  enseignoit  ia  rhéto- 
rique à  Nicomedie,  et  que  le  peu  d'écoliers  qu'il  y  avoit  lui 
en  laissoit  le  loisir,  il  désigne  divers  ouvrages  autres  que  ceux 
qu'il  avoit  vus  lui-même,  et  qu'il  nous  a  fait  connoître. 

1*.  '  On  compte  pour  la  première  production  de  sa  plume  iwd.  iTiii.H.E.i. 
le  traité  qu'il  laissa  sous  leUtre  de  Symposium,  c'est-à-dire,  le  ^'  P'  ^"' 
Banquet.  11  le  composa  étant  encore  tout  jeune,  et  freauen- 
tanl  encore  les  écoles  d'Afrique,  comme  le  porte  l'édition 


80  LACTANCE, 

IV  SIECLE,  des  hommes  illustres  de  S.  Jérôme  par  Aubert  le  Mire.  Per- 
■  sonne  ne  nous  aprend  de  quoi  Iraitoit  cet  écrit. 

Hier.  ibiu.  2°.  '  Lactance  composa  en  vers  hexamètres  une  relation  de 

son  voïage  d'Afrique  à  Nicomedie,  qu'il  intitula  ôJonropexov. 

Ce  titre  grec  raporté  par  S.  Jérôme  même,  et  le  lieu  où  l'é- 

.    crit  fut  composé,  et  où  l'on  parloit  la  langue  gréque,  pour- 

roit  faire  naître  la  pensée  que  ce  poëme  auroit  été  fait  en  la 

1101.  même  langue.  '  Jacques  Gaddius  semble  l'avoir  pris  pour  un 

ouvrage  qui  seroit  imprimé. 

Hier.  ibid.  3°.  '  Notre  oratcur  composa  un  autre  ouvrage  sous  le  titre 

Tiii.  ibid.  p.  207.  de  grammairien.  '  M.  de  Tillemont  en  raporte  la  composition 
au  même  tems  que  le  précèdent,  qui  suivit  aparemment  de 
près  l'arrivée  de  l'auteur  à  Nicomedie.  Il  étoit  assez  naturel 
que  Lactance  y  étant  allé  enseigner  publiquement,  commen- 
çât par  donner  quelques  écrits  pour  mieux  disposer  ses  disci- 
ples à  profiter  de  ses  leçons.  Ces  trois  écrits  que  nous  n'avons 

Hier.  ibid.  plus  '  subsistoiont  encorc  du  tems  qu'écrivoit  S.  Jérôme,  qui 

témoigne  les  avoir  eus  dans  sa  bibliothèque,  avec  les  autres 
du  même  auteur  dont  il  fait  le  catalogue, 

Ibid.  4°.  '  Entre  ces  ouvrages  de  Lactance,  il  y  en  avoit  deux, 

dont  S.  Jérôme  ne  donne  point  le  titre,  n'en  parlant  qu'en 
général  comme  de  deux  livres.  Ils  étoient  adressés  à  Ascle- 

Tiii.  ibid.  1).  730.  piade,  '  différent  du  S.  Martyr  de  ce  nom  Evêque  d'Antio- 
che,  qui  a  précédé  Lactance  de  tout  un  siècle,  et  que  néan- 
moins un  commentateur  de  Lactance  même  a  confondu  avec 

Laci.insi.i.  7.n.  i.  l'autrc.  '  Celui  dont  il  est  ici  question  étoit  ami  de  notre  ora- 

••■  ^'^'  leur,  et  lui  avoit  lui-même  dédié  à  son  tour  un  ouvrage,  où 

de  l'aveu  de  Lactance,  qui  est  le  seul  qui  nous  le  fasse  con- 
noîlre,  il  traitoit  fort  bien  la  matière  de  la  providence  de 
Dieu.  Nous  n'avons  plus  cet  écrit  d'Asclepiade  ;  et  c'est-là 
tout  ce  que  nous  en  savons. 

Hier.  ibid.  5°.  '  Outrc  tous  CCS  ouvrages,  Lactance  composa  plusieurs 

volumes  de  letres.  S.  Jérôme  fait  mention  de  huit  volumes, 
dont  il  y  en  avoit  quatre  adressés  à  Probe,  deux  à  Severe,  el 
deux  autres  à  Démetrien  son  disciple,  le  même  sans  doute 

Uci.opif.n.i.  80.  '  à  qui  il  avoit  déjà  adressé  son  traité  de  l'ouvrage  de  Dieu,  et 

''■  **'■  à  qui  dès-lors  il  avoit  promis  quelque  autre  écrit  encore  plus 

instructif. 

Hier.  ep.  crit.  p.       '  Le  même  S.  Jérôme  avoit  envoie  au  moins  en  partie  ces 

«61.562.  jgjj.gg  jg  Lactance  au  Pape  S.  Damase,  qui  n'en  faisoit  pas 

grand  cas,  et  ne  les  lisoit  pas  volontiers.  Il  en  donne  la  raison. 

C 


ORATEUR.  81 

C'est,  dit-il,  qu'outre  la  longueur  de  la  plupart ,  qui  va  au-    iv  siècle. 
delà  de  mille  versets,  ou  lignes,  elles  traitent  rarement  des  ~~ 

matières  de  la  religion,  ce  qui  dégoûte  de  les  lire.  Quant  à 
celles  qui  sont  courtes,  elles  ne  parlent  que  de  mesures,  de  la 
situation  des  pais,  de  questions  philosophiques,  et  convien- 
nent mieux  à  des  Avocats  et  gens  qui  font  profession  des  lo- 
tres  qu'à  des  personnes  de  notre  état.  '  Peut-être  Lactance  en  tiii.  iiii<i.  p.  211. 
avoil  composé  la  plus  grande  partie  avant  sa  conversion  à  la 
foi,  et  lorsqu'il  enseignoit  la  rhétorique,  ce  qui  l'obligeoil  à 
y  traiter  ces  sortes  de  questions.  Quoi  qu'il  en  soit,  et  des  su- 
jets dont  traitoient  ces  letres,  et  du  peu  d'estime  qu'en  faisoit 
S.  Damase,  le  style  seul  de  Lactance  leur  alireroil  aujourd'hui 
un  acueil  favorable,  si  par  un  coup  de  la  providence  on  pou- 
voit  les  recouvrer. 

'  Adrien  du  Jon  s'étoit  flaté  de  cette  espérance  au  moins  en  Hier.vîi.  ui.  11.1.1. 
partie.  En  effet,  il  témoigne  au  raport  de  Mr  Fabricius,  que  ""'• 
vers  1573  il  se  trouvoit  encore  deux  livres  de  ces  letres  de  Lac- 
tance entre  les  autres  rares  manuscrits  de  l'abbaïe  d'Egmond 
de  l'ordre  de  S.  Benoît.  Mais  il  ajoute  que  malheureusement, 
lorsque  l'on  pensoit  à  lui  envoïer  ce  recueil  pour  le  donner  au 
public,  on  découvrit  qu'il  avoit  été  furtivement  enlevé.  Plus 
de  150  ans  qui  se  sont  écoulés  depuis,  sans  qu'on  ait  vu  paroître 
ce  trésor  qu'on  n'avoit  nul  intérêt  de  cacher,  font  soupçonner 
que  l'on  avoit  imposé  à  cet  écrivain  d'ailleurs  un  peu  crédule. 

6".  '  Lactance  aïant  ocasion  de  parler  de  l'incrédulité  et  de  Lact.inst.i.  4.  n. 
l'aveuglement  des  Juifs  dans  le  septième  livre  de  ses  institu-  '  '*■  ^^^' 
tions,  promettoit  d'écrire  contre  eux  un  ouvrage  particulier, 
dans  lequel  il  devoit  les  convaincre  et  d'erreur  et  du  crime 
qu'ils  avoient  commis  en  faisant  mourir  l'Auteur  de  la  vie. 
Comme  personne  des  anciens  ne  parle  de  cet  écrit  projette, 
il  y  a  tout  lieu  de  croire  que  Lactance  ne  l'a  jamais  ni  fini, 
ni  peut-être  commencé. 

T.  '  Dès  qu'il  travailloit  à  ses  institutions,  et  depuis  en  com-  1.  *.  n.ao.p.as:»  1 
posant  son  traité  de  la  colère  de  Dieu,  il  témoignoit  avoir  des-  ''"  "■^•"•^-  ''•'"•'• 
sein  d'écrire  en  particulier  et  à  fonds  contre  toutes  les  héré- 
sies. Mais  il  paroit  hors  de  doute  qu'il  fut  prévenu  par  la  mort, 
avant  que  de  pouvoir  exécuter  une  entreprise  aussi  généreuse 
qu'elle  étoit  louable.  Un  ouvrage  de  celte  nature  n'auroit  pas 
manqué  de  devenir  célèbre,  s'il  fut  véritablement  sorti  de  la 
plume  de  ce  grand  homme  ;  et  néanmoins  on  n'en  trouve  au- 
cun vestige  dans  l'antiquité. 

7'ome  I.  Sec.  Part.  ï< 


Si  LACTANCE, 

IV  SIECLE.        '  S.  Jérôme  met  Lâctance  au  rang  de  ceux  qui  entre  les 
~  ~       Pères  grecs  et  latins  ont  écrit  sur  le  nombre  impair.  Mais  on 

Hier.    ep.    30.   p.  "    .       ,.  ,•■    r.  ■  •    ,  .       ,.     ^ 

SM.  ne  sauroil  dire  s  il  lit  quelque  traité  particulier  sur  ce  sujet, 

ou  s'il  en  avoit  seulement  parlé  par  ocasion  dans  quelqu'un  de 
ses  ouvrages  que  nous  n'avons  plus  aujourd'hui. 

ECRITS  QU'ON  LUI  A  SUPOSÉS. 

C'est  assez  peu  de  chose  que  les  écrits  que  l'on  a  Suposés  à 
Lactance,  si  l'on  n'a  égard  qu'à  la  grandeur  du  volume. 
Il  est  Surprenant  qu'après  Irs  lumières  que  la  critique  a  répan- 
dues danâ  les  XVI  et  XVII  siécleâ,  on  ait  encore  persisté  à 
lui  atribuer  des  pièces  où  l'on  ne  trouve  aucun  trait  des  beau- 
tés de  ses  Véritables  ouvrages.  D'ailleurs  il  semble  qu'il  auroit 
dû  suffifC)  pour  ne  lui  pas  donner  ceux  dont  il  est  ici  question, 
de  voir  que  S.  Jérôme  qui  avoit  une  connoisâance  particuliè- 
re des  écrits  de  cet  orateur  chrétien,  n'en  parle  aucune  part; 

l".  Entre  ces  pièces  suposées  qui  se  trouvent  imprimées  à 
la  fin  des  œuvres  de  Lactance  dans  presque  toutes  les  éditions, 
quoique  les  anciens  manuscrits  ne  les  contiennent  pas,  il  y  a 
Fab.Bib.  lat.  app.  uu  poëmc  en  vers  élegiaques  sur  l'histoire  du  phéAix.  '  Sixte 
•*■  "■  Betuleïus ,  Aubert  le  Mire ,  Nicolas  Heinsius  et  Pierfe  Lam- 

becius  ne  font  aucune  difficulté  de  le  donner  à  lactance.  Lé 
dernier  de  ces  écrivains  croit  qu'il  l'aura  composé  dans  sa  jeu- 
nesse, ce  que  Mr  Fabricius  regarde  comme  très -probable. 
Tilt.  H.  E.  t.  6.  '  Mais  d'autres  critiques  jugent  avec  raison  que  cette  élégie 
•*  ^^'  n'est  digne  ni  de  l'éloquence  ni  de  la  réputation  de  notre  ora- 

Fab.  iuj.  teur.  '  Aussi  Barthius  et  Samuel  Bochart  l'atribuent-ilâ  à  PoN 

tunat,  et  le  P.  Sirmbn  à  Theodulfe  d'Orléans, 
ibid.  p.  41  I  TOI.       2°.  '  L'élégie  sur  la  résurrection  de  noire  Seigneur,  autre 
ihid.  p.  211.        ^^^-^  suposé  à  Lactance,  dont  on  chante  encore  aujourd'hui 
une  partie  en  quelques  Eglises,  est  le  neuvième  poëme  du 
troisième  livre  de  Fortunat,  à  qui  le  donnent  les  manuscrits.  * 
C'est  donc  sans  aucune  preuve  solide  qu'on  a  voulu  l'alribuer 
à  I-actance.  Auguste  Buchner  l'a  fait  imprimer  séparément, 
avec  des  notes  en  1627,  en  un  petit  volume  m-8°. 
Tiii.  ibiii.  3°.  '  Le  poëme  sur  la  passion  de  J.  C.  qui  porte  aussi  le  nom 

de  Lactance,  est- fort  beau,  et  pourroit  lui  être  acordéj  s'il 
étoit  certain  que  de  son  tems  on  mit,  comme  nous  en  usons 
p»b.  ib.  p.  4s.  43.  aujourd'hui ,  un  crucifix  au  milieu  des  Eglises.  '  Dans  le  recueil 


ORATEUR.  83 

de  George  Fabricius,  il  porte  un  titre  différent  de  celui  qu'il  a  iv  siècle. 
ailleurs.  Cet  éditeur  s'est  émancipé  d'y  changer  un  vers  qui 
établit  l'adoration  de  la  croix,  parce  que  cette  cérémonie  n  é- 
toit  pas  de  son  goût.  Quelques  écrivains  donnent  ce  poëme 
à  Caelius  Firmianus  Symposius.  Il  ne  se  trouve  point  dans  les 
premières  éditions  de  Lactance;  et  ceux  qui  en  ont  publié  les 
dernières  ont  eu  soin  de  l'en  retrancher  avec  les  deux  autres 
précédens  sur  le  phénix  et  la  résurrection. 

4°.  Mr  Balu?e  nous  a  donné  au  second  tome  de  ses  Mis-  Bai.  mise.  i.  s.  p. 
cellanées  un  passage  sur  le  dernier  jugement  qu'il  croit  être  de  **■ 
lactance.  La  raison  qu'il  en  allègue  dans  sa  préface,  c'est  qu'il 
l'a  trouvé  dans  un  manuscrit  entre  les  institutions  et  le  traité 
de  la  colère  de  Dieu  par  le  même  auteur.  Mais  cette  raison 
est  bien  foible,  pour  atribuer  à  Lactance  un  fragment  où  l'on 
n'aperçoit  rien  digne  de  lui,  et  qui  est  très-peu  de  chose. 

5°.  '  Enfin,  quelques-uns  donnent  aussi  à  notre  orateur,  mais  Kab.  iu.  p.  51.1011 
sans  aucune  preuve,  des  argumens  ou  sommaires  sur  les  mé-  l^f.  \\  ,^p'.  ^J; 
tamorphoses  d'Ovide  et  des  notes  sur  la  Thebaïde  de  Stace. 
Mais  ces  pièces  sont  de  Lactance  Placide  grammairien  de 
profession,  qui  ne  vivoit  que  long-tems  après  notre  Lactance. 

S-  V. 

SON  STYLE,  SA  MANIERE  D'ECRIRE 
ET  DIVERS  TRAITS  DE  SA  DOCTRINE. 


U 


N  des  plus  éloauents  Pères  de  l'Eglise  Latine,  qui  étoit  merinis.  pr.s.p. 

bien  capable  d'en  juger,  regardoit  Lactance  pour   le  ^''\'>P*^f'^''- 
style  comme  un  autre  Ciceron,  qui  avoit  su  faire  passer  dans 
ses  écrits  le  fleuve  d'éloquence  qu'on  admire  en  cet  orateur 
Romain.  '  Les  critiques  modernes  n'eu  jugent  point  autre-  Dapin.Bibi.  1. 1 
ment.  U  y  en  a  même  qui  lui  donnent  la  préférence  sur  Ci-  ^'  ***' 
ceron.  Mais  c'est  aller  un  peu  trop  loin.  Il  suffit  de  dire  que 
son  style  est  pur,  égal,  naturel,  semblable  à  celui  de  Ciceron, 
et  que  c'est  à  bon  droit  qu'il  mérite  le  nom  de  Ciceron  chré- 
tien ,  non  seulement  à  cause  de  la  pureté  de  ses  termes ,  mais 
aussi  à  cause  du  tour  de  la  phrase  et  la  manière  d'écrire.  On 
ne  peut  néanmoins  disconvenir  qu'il  ne  soit  au-dessus  de  Ci- 
ceron pour  les  pensées,  parce  que  les  matières  dont  il  traite 
sont  infiniment  au-dessus  des  maximes  et  de  la  doctrine  des 
philosophes  du  Paganisme.  Un  ne  peut  non  plus  lui  refuser  la 

Lij 


84  LACTANCE, 

IV  siECLi;.     justice  d'avouer  qu'il  est  le  plus  éloquent  et  le  plus  poli  de 

tous  les  auteurs  ecclésiastiques. 

A  l'éloquence  et  la  politesse  Lactance  a  su  joindre  une  éru- 
Lact.  iu  1. 1. 5.  II.  dition  peu  commune.  '  11  avoit  fait  une  lecture  particulière  des 
■  ^''      '  écrits  de  Minutius  Félix,  de  Tertullien  et  de  S.  Cyprien  ;  et  le 

jugement  qu'il  en  porte  fait  voir  qu'il  les  possedoit  à  fond. 
Néanmoins  il  les  cite  rarement  ou  presque  point  du  tout,  non 
plus  que  les  autres  pères  de  l'Eglise  qui  l'avoient  précédé. 
Mais  on  compte  jusqu'à  plus  de  35  auteurs  profanes  les  plus 
célèbres  entre  les  Païens,  dont  il  raporte  une  infinité  de  pas- 
sages, afin  qu'après  avoir  fait  sentir  par-là  le  ridicule  des  su- 
perstitions du  Paganisme,  et  réfuté  ses  absurdités,  il  puisse  en- 
suite établir  plus  solidement  la  vérité  de  la  religion  Chrétien- 
ne. Il  insiste  beaucoup  sur  les  oracles  des  Sibylles,  parce  qu'ils 
étoient  d'un  grand  poids  parmi  les  Païens,  et  que  leur  auto- 
l'ité  se  trouvoit  établie  dans  les  écrits  de  leurs  principaux  au- 
teurs. 
ooiéc.  1.4.11.3-203.  A  l'égard  de  la  doctrine,  '  les  ouvrages  de  Lactance  ne 
sont  pas  exemts  de  fautes.  C'est  ce  qui  les  a  fait  mettre  au 
rang  des  apocryphes  par  le  Concile  de  Rome  sous  le  Pape  S. 
Gelase.  On  a  mis  à  la  tête  des  premières  éditions  de  cet  au- 
teur une  liste  des  erreurs  que  l'on  a  cru  découvrir  dans  ses 
écrits.  Mais  c'est  peu  de  chose  que  cette  liste.  11  y  en  a  une 
autre  un  peu  plus  longue  à  la  nn  de  l'édition  de  Cantbrige , 
dans  laquelle  on  a  fait  entrer  beaucoup  de  minuties.  Nous 
n'entreprendrons  point  d'entrer  dans  le  détail  de  toutes  ces 
erreurs,  soit  réelles  ou  suposées.  Ceux  qui  souhaiteroient  un 
pareil  détail  peuvent  avoir  recours  à  la  longue  dissertation 
que  Dom  le  Nourry  a  publiée  sur  les  écrits  de  Lactance  dans 
le  .second  volume  de  son  Apparat.  Nous  nous  bornerons  ici 
H  dire  quelque  chose  des  principales  erreurs  qu'on  a  atribuées 
à  cet  écrivain. 
Jiicr.  vir.iij.c.80.  '  Thomasius  l'un  des  éditeurs  de  ses  œuvres,  avertit  qu'el- 
""  ■  '*■  '■  les  avoient  été  considérablement  corrompues  par  les  hérétir 
ques.  Le  Manichéisme  en  particulier  y  étoit,  selon  lui,  si  ma- 
nifestement établi  que  l'on  auroit  cru  que  c'étoit  moins  Mâ- 
nes que  Lactance  même  qui  en  auroit  été  l'auteur.  Mais  cet 
éditeur,  à  l'aide  des  plus  anciens  manuscrits,  a  purgé  le  texte 
sini.  lei.  cil.  1.2 1  dc  Lactancc  avec  tant  de  succès  '  qu'à  peine  y  paroît-il  aujour- 
c .  -j.  p.  o  .  (j'fjyj  ig  moindre  trait  de  cette  hérésie.  On  soupçonne  tou- 
tefois Thomasius  d'avoir  moins  suivi  en  cela  les  règles  de  la 


ORATEUR.  85 

bonne  critique,  que  les  vues  et  les  maximes  du  Pape  PieV,    iv  siècle. 
l)ar  l'ordre  duquel  il  travailloit,  et  qui  avoit  formé  un  nou-  " 
veau  plan  pour  rendre  orthodoxes,  autant  qu'il  se  pourroit, 
les  auteurs  ecclésiastiques. 

'  On  acuse  encore  Lactance  de  parler  un  peu  obscurément  sand.  enuc.  iiisi. 
de  la  divinité  du  Verbe.  On  dit,  par  exemple,  en  citant  plu-  ^'■^-  '•  '■  P"^'" 
sieurs  endroits  de  ses  écrits,  qu'il  ne  reconnoît  que  le  Père 
pour  le  Souverain  Dieu,  qui  est  de  toute  éternité.  Qu'il  y  a  eu 
un  tems  où  le  Fils  n'a  pas  été.  Qu'il  a  été  fait,  produit,  créé 
par  le  Père,  et  autres  choses  semblables. 

Si  ces  endroits  de  Lactance  touchant  la  divinité  du  Ver- 
be sont  un  peu  obscurs,  il  y  en  a  d'autres  où  il  s'explique  clai- 
rement sur  ce  sujet.  Ainsi  la  bonne  critique  veut  que  l'on  ex- 
plique les  premiers  par  les  autres.  '  Dans  un  de  ceux  que  l'on  Lact.  inst.  i.  4.  d. 
objecte,  Lactance  reconnoît  nettement  le  Fils  pour  vrai  Dieu,  i^p-'S"!»^ 
pour  le  Roi  des  Rois,  pour  le  Seigneur  des  Seigneurs,  à  qui 
toutes  les  nations  et  tous  les  peuples  sont  assujetis,  à  qui  apar- 
tient  l'honneur,  le  règne  et  l'empire.  Que  cela  signifie-t-il  dans 
le  sentiment  de  Lactance,  qui  prouve  l'unité  d'un  Dieu?  '  Il  n.  w.  i>.  i3o. 
dit  ailleurs  qu'y  aiant  une  relation  essentielle  entre  le  Père  et 
le  Fils,  l'un  et  l'autre  ne  peut  avoir  que  la  même  intelligen- 
ce, le  même  esprit  et  la  même  substance. 

Nous  avons  fait  voir  ailleurs  que  Lactance  n'avoit  sur  l'o- 
rigine de  l'ame  que  des  sentimens  orthodoxes.  '  Cela  n'a  pas  Hier,  in  iiuf.  .  i. 
empêché  que  Runn  ne  l'ait  acusé  d'erreur  sur  ce  sujet.  Mais  S.  ^'  ''■  ^'""  *'^" 
Jérôme  eut  soin  de  l'en  justifier  dans  la  suite. 

Il  seroit  impossible  de  l'excuser  de  même  de  l'erreur  des  Mil- 
lénaires qu'il  établit  fort  au  long  dans  les  chapitres  24,  25, 
26,  du  septième  livre  de  ses  institutions.  Au  reste  c'est  une  er- 
reur qui  lui  est  commune  avec  plusieurs  pères  des  premiers 
siècles,  comme  nous  l'avons  déjà  remarqué, 

'  Quant  au  jugement  que  porte  de  lui  S.  Jérôme,  en  l'acu-  ep.  *i.  p.  3*5. 
sant  d'avoir  douté  comme  les  Juifs,  sur-tout  dans  ses  letres  à 
Démetrien,  si  le  S.  Esprit  étoit  une  troisième  personne,  et  de 
l'avoir  confondu  tantôt  avec  le  Père,  tantôt  avec  le  Fils;  '  il  Dapin,  ib.  p.  oi». 
se  peut  faire  que  Lactance  n'ait  rien  voulu  dire  par-là,  sinon 
que  le  nom  d'Esprit  dans  l'écriture  est  commun  au  Fils  et  au 
Père.  D'ailleurs  on  ne  trouve  point  ces  erreurs  dans  aucun  des 
ouvrages  qui  nous  restent  de  lui. 

'  Lactance  a  pensé  aussi  que  les  Anges  qui  avoient  été  en-  Lact.  ibM.i.a.n. 
voies  pour  la  garde  des  hommes,  s'étoient  perdus  étant  trom-  '*"  P"  ****' 
7 


86  LACTANGE, 

V  siECLB.    pés  par  le  diable,  et  qu'aiant  aimé  les  femmes,  ils  en  avoient 

D„pi„^  ibid.  eu  des  démons  terrestres.  '  Mais  c'est  une  opinion  qui  lui  est 

particulière,  ou  pour  mieux  dire,  c'est  une  pure  imagination 
sans  fondement. 

Tout  cela  n'empêche  pas  néanmoins  que  Lactance  ne  soit 
très-estimable,  et  qu'il  n'y  ait  bien  à  profiler  de  la  lectu- 

Tiii.  H.E.t.  6.  p.  re  de  ses  ouvrages.  '  En  etfet,  on  y  trouve  bien  des  vérités 
saintes  dévelopées  d'une  manière  claire,  vive,  élevée,  agréa- 

uopiii.ibiu.  ble,  éloquente.  '  11  réfute  avec  beaucoup  de  force  la  fausse  re- 

ligion des  Païens,  et  établit  solidement  la  religion  Chrétienne. 
11  parle  de  Dieu  d'une  manière  très-sublime,  et  décrit  la  créa- 
tion du  monde  et  le  dernier  jugement  avec  des  traits  les  plus 
vifs.  Plein  d'excellens  préceptes  de  morale,  il  enseigne  clai- 
rement les  vertus,  et  en  recommande  fortement  la  pratique. 
Découvrant  aux  hommes  le  chemin  de  la  justice,  et  les  dé- 
tournant de  la  voie  de  rinic[ai|é,  il  leur  aprend  à  honorer  Dieu 
d'un  culte  véritable,  et  à  faire  pénitence  de  leurs  péchés. 

Hier.  ibid.  '  C'cst  pour  tout  Cela  iiième  que  S.  Jérôme  conseilloit  la 

lecture  de  Lactance;  quoiqu'il  soit  celui  de  tous  les  pères 

♦p.  ♦  .  p.  567.  qu'il  a  le  plus  critiqué.  '  11  témoigne  néanmoins  que  Lactan- 
ce n'est  pas  si  heui  eux  à  prouver  les  vérités  Chrétiennes  que 

ep.  41.  p.  345.  puissant  à  détruire  le  mensonge  et  l'impielé,  '  comme  il  l'a 
fait,  dit-il,  dans  ses  institutions,  où  il  a  réfuté  avec  force  les 

^.  1. 4.  ep.  3.  p.  rêveries  du  Paganisme.  '  Aussi  S.  Sidoine  lui  atribue-l-il  le  don 
de  réfuter  les  erreurs,  comme  étant  son  caractère  particulier. 

Tui.  ibid.  p.  31S.  '  On  convient  eircctivemenl  que  ce  n'est  pas  un  auteur  que 
l'on  puisse  alléguer  sur  des  matières  contestées,  parce  qu'il  pa- 
roît  avoir  été  plus  orateur  que  théologien,  et  que  peu  instruit 
de  la  doctrine  de  l'Eglise,  il  a  traité  la  théologie  d  une  maniè- 
re trop  philosopliique. 


I 


S-  VL 
EDITIONS  DE  SES  ŒUVRES. 

L  est  peu  d'écrivains  Ecclésiastiques    dont  les  ouvrages 
aient  été  aussi  souvent  mis  sous  la  presse  que  ceux  de  Lac- 
tance. Mais  il  en  est  peu  aussi  dont  les  éditions  ne  soient  et 
sim.  let.  ch.  t.  î.  plus  entières  et  plus  uniformes.  '  La  liberté  que  les  copistes  et 
Jet.  25.  p.  loo.  151.  réviseurs  des  exemplaires  de  cet  écrivain  se  sont  donnée  dès 
les  premiers  tems,  ou  d'en  retrancher  les  erreurs  qu'ils  ont 
cru  y  trouver  en  matière  de  religion,  ou  de  retoucher  ces  en- 


ORATEUR.  87 

droits,  a  fait  que  nous  n'avons  pas  ses  ouvrages  tout-à-fait  tels  iv  siècle. 
qu'ils  sont  sortis  de  sa  plume.  D'ailleurs  chacun  aïant  fait  ces 
retranchemens  suivant  son  goût,  il  est  arriva  que  la  plupart  des 
manuscrils  se  sont  trouvés  différens  les  uns  des  autres.  Ensuite 
les  éditions  qui  ont  été  faites  sur  ces  manuscrits  se  sont  ressen- 
ties de  leur  diversité.  Nous  allons  entreprendre  l'énumeration 
de  celles  qui  sont  le  plus  connues  ;  et  nous  aurons  soin  de  re- 
marquer ce  qui  méritera  de  l'être,  à  mesure  que  le  sujet  s'en 
présentera. 

'  L'on  compte  communément  pour  les  premières  édifions  P:  «3  \  App.  ad. 
des  œuvres  de  Lactance,  celles  qui  parurent  à  Rome  en  1468  ,    '  •  •  ■  p- 

Îar  Conrard  Suweynchein  et  .\rnoul  Pannarts  tn  folio, eten 
470.  '  Mais  il  y  en  eut  une  dès  1465,  faite  à  Sublac,  en  un  Bib.  Barb.  1. 1.  p. 
volume  m  foiio,  dont  il  se  trouve  un  exemplaire  dans  la  bi- 
bliothèque de  M.  le  Cardinal  Barberin.  '  Celles  de  Rome  pa-  sim.  ibid.  p.  153. 
roissent  être  la  même  chose,  et  ont  servi  de  modèle  à  la  plu- 
part des  autres  qui  ont  suivi  jusqu'à  celle  de  Maniice. 

A  Venise  parut  une  autre  édition  de  Lactance  l'an  1472,  Oupin.iWd. 
'  et  une  au  même  endroit  chez  Jean  de  Colonia  et  Jean  Man-  Bib.imp.  p.  278.2. 
then  l'an  1478  en  un  volume  in  folio.  '  Avant  celle-ci  on  en  cay»,  p.  103.  21 
publia  deux  à  Rome  en  1474  et  1 475  in  fol.  et  une  à  Rostock  ly'^'  ""'  '"'•  ^■ 
en  1476  in  4".  On  en  vit  ensuite  d'autres  éditions  à  Venise  les 
années  1483,  •1490,  ••  1493,  chez  Vincent  Benali  en  un  vo-  .  sim.  ibid. 
lume  in  folio,  «  et  1497 ,  chez  Belvilaqua  en  même  volume.         t  Ge5n."B!b!"u^^"t: 

'En  1502,  Jean  Tacuini  imprimeur  au  même  endroit  re-  îoPL*f®v*.. 
mit  sous  la  presse  les  œuvres  de  Lactance  en  un  volume  in 
folio,  dans  lequel  il  ajouta  le  poëmede  la  résurrection  sous  le 
nom  de  Lactance  avec  l'apologétique  de  Tertullien.  Dans  cet- 
te édition  le  dernier  livre  des  institutions  est  intitulé  De  divino 
prcemio ,  ce  qui  est  autorisé  par  le  commencement  de  ce  livre  ^ 
où  Lactance  se  sert  de  ces  termes  :  divinum  prcemium  beatitu- 
dinis  œternce. 

Il  y  eut  une  autre  édition  de  notre  auteur  à  Paris,  chez  ...s.  vin. cen. 
Jean  Petit,  l'an  1509,  en  un  volume  in  4°.  sans  notes.  Gilles 
Masieres  qui  prit  soin  de  cette  édition,  y  ajouta  le  poëme  du 
phénix  et  celui  de  la  résurrection,  l'un  et  l'autre  sous  le  nom 
de  Lactance  ,  avec  l'apologétique  de  Tertullien ,  et  trois  au" 
très  petites  pièces  de  divers  auteurs. 

'On  remarque  que  les  éditions  de  1472,  1490,  1502  et  sim.  ibid.  p.  154. 
1509,  faites  à  Venise,  et  les  autres  publiées  en  France  et  en  '^" 
Allemagne,  n'ont  point  été  revues  sur  de  nouveaux  manuscrits. 


d  Bib.  s.  Serg.  And. 


86  LACTANCE, 

V  SIECLE.    On  supose  par-là  qu'en  1509  il  y  eut  à  Venise  comme  à  Pa- 

"  ris  une  édition  de  Lactance.  Il  y  en  eut  une  au  moins  en  1510 

chez  Pierre  Tacuini.  C'est  ce  que  fait  juger  une  letre  de  cet 

imprimeur  datée  de  la  même  année  ,  et  raportée  à  la  tête  de 

l'édition  de  Paris  de  1525,  que  l'on  marque  avoir  été  faite  sur 

App.  .vi.  bib.  ibid.  ccllc  de  Vcnise.  '  Dom  le  Nourry  en  marque  une  de  Venise 

en  1511,  qui  peut  être  celle  que  nous  croïons  de  1510. 

Bib.Bai.i.i.p.i65|       '  L'année  1513  ,  on  vitparoître  deux  éditions  à  la  fois  :  l'une 

cavf,  ibui.  ^  Paris  en  un  volume  m  4».  avec  les  opuscules  que  l'on  a  joints 

iiib.  Lug.  Dat.  p.  à  celle  de  1509,  et  l'autre  à  Florence.  '  Aide  Manuce  en  pu- 

^^'  *•  blia  une  nouvelle  à  Venise  l'an  1515  en  un  volume  in  8". 

...  Jiaj.  mon.  En  1521 ,  il  y  en  eut  aussi  deux  différentes  éditions.  L'une 

parut  à  Venise ,  chez  Jean  de  Tridino  surnommé  Tacuini  ,  en 

un  volume  m  /biw,  avec  les  opuscules  étrangers  déjà  nommés. 

Il  est  marqué  au  frontispice  de  cette  édition,  qu'elle  a  été  faite 

sur  celle  de  Jean  Parasius,  que  l'on  ne  nous  fait  point  connoî- 

cave,  ii)ii.  tre  d'aillcurs.  '  L'autre  vit  lejouràBasle,  où  elle  fut  renou- 

san.i.  ibid.  vellée  l'an  1523  ,  en  un  volume  m  4°.  '  Dès  1522,  il  en  parut 

une  autre  à  Lyon  m  1 2 . 
Bib.s.Peir.deenH.  '  A  Paris  Jean  Petit  remit  sous  la  presse  les  ouvrages  de 
Lactance,  qui  en  sortirent  l'an  1525  en  un  volume  m  fol.  avec 
l'apologétique  de  Tertullien  et  les  autres  opuscules  acoutu- 
més.  Celte  édition  fut  faite,  comme  on  l'a  marqué  au  fron- 
sim.  ibid.  p.  155.    tispicc,  sur  ccllc  de  Tacuini.'  Ainsi  c'est  la  même  que  celle 

de  Venise  de  1502. 
Dib.  S.  serg.  And.       '  André  Cratandre  et  Jean  Bebelius  imprimeurs  à  Basle  pu- 
blièrent à  leur  tour  les  mêmes  ouvrages  en  un  volume  in  folio 
l'an  1523.  Us  y  joignirent  pour  la  première  fois,  comme  il  sem- 
...  D.  de  Lorch.    blc,  le  poëmc  sur  la  passion  de  J.  C.  '  On  en  trouve  une  au- 
tre édition  in  8°.  faite  la  même  année  à  Anvers,  chez  Jean 
Graphaeus.  Elle  est  en  caractères  Italiques,  sans  nom  d'éditeur. 
cc-n.  ibid.  '  Gesner  en  marque  une  troisième  à  Lyon  de  la  même  année  , 

chez  Gryphe  en  un  volume  in  8". 

siin.  ibid.  I).  162 1       '  Aide  Manuce  avoit  fait  travailler  à  une  nouvelle  édition 

ii'il!'  rîn.  V's*^ '  ^^  Lactance  un  certain  Honorât  Fasitelius  ,  dont  on  relevé 

beaucoup  le  grand  savoir.  Cette  édition  fut  publiée  à  Venise 

l'an  1535,  en  un  volume  in  8°.  par  Paul  Manuce  après  la  mort 

d'Aide  son  père.  On  a  eu  soin  de  mettre  entre  deux  étoiles , 

pour  ne  pas  imposer  aux  lecteurs  ce  que  l'on  a  cru  devoir  ajoû- 

siiii.  ii.ii.  p.  153 1    ter  à  cette  nouvelle  édition,  conformément  à  d'anciens  ma- 

"."!  Mis  *''"cn^'°  '   nuscrits  de  la  bibliothèque  du  Mont-Cassin.  '  Les  éditions  que 

Gryphe 


ORATEUR.  89 

Gryphe  publia  à  Lyon  en  1541  et  1543  en  même  volume,  sont    iv  siècle. 
faites  sur  celle  desManuces.  ' 

Lactance  fut  aussi  imprimé  à  Anvers  chez  Plantin  ,  l'an  sand.  ibu. 
1539  encore  in  S",  'et  à  Cologne  chez  Pierre  Quentel  ,  l'an  Bib.  Barb.  ibia. 
1544,  en  un  volume  in  folio,  avec  les  notes  d'Erasme  ,  '  qui  App.  ibid.  p.  gss. 
avoit,  dit-on,  commencé  à  revoir  l'édition  précédente  d'An- 
vers, '  Pierre  Gaultier  imprimeur  à  Paris  le  remit  sous  la  presse  Bib.  s.  Peu-,  uuig. 
en.  1545.  Cette  édition  qui  est  in  S",  sans  notes,  fut  débitée 
chez  Jean  Rarbé  et  Claude  Garamont. 

L'année  suivante  1546  en  enfanta  deux  autres  éditions  ,  . . .  ff.  Min.  ccn 
l'une  à  Paris  chez  Pasquier  le  Tellier  pour  Etienne  Roffet 
et  Galliot  du  Pré  en  un  volume  in  8°.  '  et  l'autre  àRasle  ,  où  App.  ibid. 
il  en  parut  encore  une  nouvelle  en  1553,  qui  fut  ensuite  re- 
vue et  corrigée  par  Fasitelius. 

Dès  1548  et  en  1553  il  y  en  eut  deux  éditions  m  8°.  à  Bib.  s.  fioi.  sai. 
Lyon,  chez  Jean  de  Tournes  et  Guillaume  Gaseau.  Elles  fu- 
rent faites  sur  celles  de  Venise.  '  Lactance  fut  encore  impri-  cave.ib.  |App.  ib. 
mé  à  Anvers  chez  Plantin  en  1555  et  1556,  et  à  Rasle  chez 
•Henri  Pétri  la  dernière  de  ces  deux  années.  '  La  même  année  Hieres.  p.  soi.  5S7 
il  fut  inséré  dans  le  recueil  intitulé  héréseologie. 

Sixte  Relhuleius  principal  du  collège  d'Ausbourg  avoit  App.  ibid. 
préparé  de  longs  commentaires  sur  Lactance,  pour  les  publier 
avec  le  texte  de  cet  auteur.  Mais  le  malheur  des  guerres  et  la 
mort  prématurée  de  Rethuleius  privèrent  plusieurs  années  le 
public  de  son  travail.  '  Quoiqu'il  fût  fini  dès  1545,  comme  il  Bib.ff,  Min.cen.  j 

?aroît  par  la  date  de  l'épitre  dédicatoire,  il  ne  vit  le  jour  qu'en  """■  '^"'" 
563,  par  les  soins  d'Emmanuel  Belhuleius  fils  du  Com- 
mentateur. C'est  un  m /o//o  imprimé  àRasle  par  Henri  Pétri. 
'  Rethuleius  n'aiant  aucun  manuscrit  pour  son  édition ,  a  suivi  siin.ibid.  p.  153. 
celle  de  Gryphe  de  Lyon,  qui  avoit  été  faite  ,  comme  nous 
l'avons  dit,  sur  celle  de  Manuce  de  Venise.  '  Aussi  son  édi-  p.  isr.. 
tion  n'est  recommandable  que  par  les  commentaires  dont  il 
l'a  enrichie,  et  par  la  préface  où  il  agite  cette  question  :  S'il 
est  utile  aux  jeunes  gens  de  lire  dans  les  écoles  les  livres  de  Lac- 
tance ?  Il  soutient  l'affirmative.   '  Cave  marque  une  édition  Cave,  ib;d. 
de  Lactance  faite  à  Paris  la  même  année  que  celle  de  Rasle , 
dont  nous  venons  de  parler.  '  En  1567  il  en  parut  une  autre  à  Sand,  iWd. 
Lyon  ,  de  laquelle  Sandius  fait  beaucoup  de  cas.  Elle  n'est 
pourtant  qu'en  un  volume  m  16. 

Après  toutes  ces  différentes  éditions,  Michel  Thomasius  App.ibid. isim.ib, 
travailla  à  en  donner  une  nouvelle  au  public.  Il  revit  le  texte  ?is.'''"''  *■'''  *"''' 

Tonie  I.  Sec.  Part.  M 

7* 


90  LACTANCE, 

IV  SIECLE,    de  Lactance  sur  plusieurs  manuscrits,  dont  l'un  a  voit  près  de 
■  mille  ans  d'antiquité.  Jusques-là  on  n'avoitpoint  encore  ren- 
du à  Lactance  un  sei*vice  si  nécessaire.  On  reconnoitquecel 
éditeur  a  réiissi  à  corriger  plusieurs  endroits  par  le  moïen  des 
manuscrits.  Mais  on  avoue  en  même  lems  que  malgré  ce  tra- 
vail il  a  encore  laissé  quantité  de  fautes  dans  son  édition.  On 
le  blâme  aussi  d'avoir  négligé  d'insérer  dans  ses  notes  ce  qu'il 
ne  jugeoit  pas  à  propos  de  mettre  dans  le  texte  de  son  au- 
teur ;  et  nous  avons  déjà  vu  qu'on  le  soupçonne  d'y  avoir  eu 
plus  d'égard  au  dessein  qu'avoil  le  Pape  Pie  V  de  rendre  or- 
thodoxes les  auteurs  ecclésiastiques,  qu'aux  règles  de  la  bon- 
Bib.  Maj.  mou...  ne  critiquc.  '  Cette  édition  ainsi  revue  et  corrigée  fut  publiée  à 
Tell.  ibid.  Anvers  chez  Christophe  Plantin  les  années  1 570  et  io87  en  un 
volume  in  8°.  C'est  sur  cette  édition  que  les  ouvrages  de  i.ac- 
tance  ont  ele  insérés  dans  les  diverses  bibliuth.'ques  des  Pères. 
Bibi.  Barb.  ibid.         '  Ou  vit  plusieurs  aulrcs  éditions  du  même  auteur  en  divers 
...  s.  Petr.  Bnrg.  cudroits  :  à  Lyon  les  années  1570,  '  1579  chez  Jean  de  Tour- 
•  s;.n.i.  ibid.         ucs  cu  uu  petit  lu  8°.  saus  notes,  "  1587  et  1594,  ''  à  Rome  en 
»  Cave,  ibid.  |  Du-  1574  et  1583  )  et  à  Anvers  en  1579  et  1582.  Mais  on  ne  nous 
pin.  ibid.  aprend  point  si  toutes  ces  éditions  furent  faites  sur  celle  de 

ïhomasius  comme  la  meilleure  qui  eut  encore  paru. 
c.avciMd.  I  .\pp.       '  On  en  pubha  une  nouvelle  à  Genève  l'an  1GI3  en  un  vo- 
ibui.  p.  654.  \\xvcie  in  16.  Plusieurs  critiques  la  regardent  comme  très-exac- 

sand.  ibid.  te  ;  majs  d'autres  n'en  conviennent  pas.  '  Lactance  fut  enco- 

re remis  sous  la  presse  au  même  endroit  et  en  même  volume 
l'an  1630,  et  auparavant  à  Lyon  l'an  1616  in  16etàBasle 
l'an  1624  m  4». 
siin.  ibid.  p.  Lw.  I        '  Joseph  Isffius  uc  regardant  aucune  de  toutes  ces  éditions 
App.  ibid.  comme  parfaite  ,  travailla  à  en  donner  une  nouvelle  au  pu- 

blic. Il  revit  le  texte  de  Lactance  sur  les  éditions  des  Manu- 
ces,  ou  plutôt  de  Fasitelius,  cellts  de  France,  d'Italie  et  d'Es- 
pagne, nommément  celles  de  Home  de  1474,  de  Venise  de 
1493,  1511,  1521,  et  de  Florence  1513,  el  sur  douze  ma- 
nuscrits du  Vatican.  A  l'aide  de  tant  de  monumens  il  corrigea, 
de  son  aveu ,  environ  trois  cens  endroits  de  son  auteur,  et  en 
retrancha  ce  qui  lui  parut  y  avoir  été  corrompu  par  les  héré- 
tiques. Il  enrichit  son  édition  de  savantes  remarques,  dans 
lesquelles  il  adoucit,  autant  qu'il  lui  est  possible,  les  erreurs 
.\pp.ibid.|Sand.ib.  de  Lactancc,  qui  selou  lui  u'cu  cst  pas  l'auteur.  '  Cette  édition 
ainsi  ornée  parut  à  Césene  les  années  1644  et  1646  en  un  vo- 
sim.  ibid.  lume  inf'oUo,  puisa  Home  l'an  1650  en  même  volume.  '  Mr 


.vwv    .y.vi 


ORATEUR.  91 

Simon  fait  beaucoup  d'estime  du  travail  d'isaeus.  Seulement    iv  siècle. 
il  le  blâme  de  s'être  jette  sur  des  matières  de  controverse. 

Quel  que  soit  le  mérite  de  l'édition  dont  nous  venons  de  App.ib.  isand.ib. 
parler,  elle  n'empêcha  pas  qu'Antoine  Thysius  professeur  d'é- 
loquence dans  l'université,  de  Leyde,  n'en  publiât  une  autre 
au  même  endroit  l'an  1052  en  un  volume  in  8°.  Mais  cet  édi- 
teur avoue  lui-même  que  sans  toucher  au  texte,  il  n'a  rien  fait 
que  d'y  joindre  ses  remarques  et  ses  conjectures. 

Ij'édition  de  Thysius  fut  suivie  de  celle  de  Servais  Gai-  ibia  i  Def. .de  uct. 
laeus  Ministre  de  Zireczée  en  Zelande,  qui  fut  publiée  à  Ley-  Bib.£i»s*!cen**'' 
de,  chez  François  Hackius  et  Pierre  Lefîen  en  un  volume  in 
8".  l'an  1660.  Galloeus  déclare  que  ce  fut-là  le  premier  de  ses 
travaux  literaires,  et  que  son  principal  dessein  a  été  de  réta- 
blir sur  les  meilleurs  manuscrits  le  texte  de  Lactance  dans  sa 
pureté.  '  Ce  qu'il  y  a  néanmoins  de  meilleur  dans  son  édition,  sîm.  iwa.  p.  157. 
a  été  pris  de  celle  d'Isœus.  '  Il  est  même  tombé  dans  le  défaut  p.  isg. 
que  1  on  reproche  à  celui-ci,  en  se  jettant  trop  sur  des  matiè- 
res de  controverse,  disputes  qui  ne  devroient  jamais  paroî- 
tre  dans  cette  sorte  d'ouvrages.  11  y  a  aussi  inséré  plusieurs  mi- 
nuties purement  grammaticales  et  certaines  étymologies  ab- 
solument inutiles. 

'  Mais  ces  défauts  sont  peu  de  chose  auprès  de  la  faute  »«'•  Je  Lact.  ibid 
énorme  que  Gallaeus  a  introduite  à  la  84'  page  de  son  édition. 
Le  texte  de  Lactance  au  quinzième  chapitre  du  premier  livre 
de  ses  institutions  porte  selon  toutes  les  éditions  :  Nam  de  le- 
gibus,  quo  {Cicero)  in  opère  Plntonem  seqtmtiis,  leges  voluit 
ponere  quibu§  putaret  vsuramesse  justam  et  sapientemcivita- 
tem,  de  reliqione  ita  sanrit.  Gallœus  pour  apuïer  l'opinion 
qu'il  établit  dans  ses  notes  en  faveur  de  l'usure,  quoique  Lac- 
tance la  condamne  en  divers  endroits  de  ses  écrits,  a  jugé  à 
Propos  de  retrancher  de  ce  passage  le  mot  essentiel  civitatem. 
ar  ce  retranchement  il  a  pris  et  fait  prendre  à  ses  lecteurs  le 
mot  îAvwra/n  pour  usure,  au  lieu  que  dans  le  texte  que  nous  ve- 
nons de  copier,  il  signifie  se  servir. 

Cette  faute  qui  paroît  affectée,  jointe  aux  autres  endroits 
où  Gallaeus  établit  l'usure  comme  légitime,  a  paru  si  considé- 
rable à  Mr  Bulteau  de  la  Congrégation  de  S.  Maur,  qu'il  a  cru 
rendre  service  à"  rEglisf^  en  la  faisant  connoître  au  public,  et 
relevant  les  faux  raisonnemens  de  ce  ministre.  C'est  ce  qu'il  a 
exécuté  en  1671,  par  un  petit  volume  in  12.  qu'il  a  publié  à 
Paris  sous  ce  titre  :  Défense  des  sentimens  de  Lactance  sur  le 

M  ij 


IV 

SIECLE. 

Cave, 

,  ibid. 

Kon. 

bil).  p. 

73. 

..  S.  Vin. 

cen. 

92  LACTANCE,    ORATEUR. 

sujet  de  l'usure,  contre  la  censure  d'un  ministre  de  la  reli- 
gion prétendiie  réformée. 

'  Après  l'édition  de  Laclance  par  Gallaeus,  sont  venues  cel- 
les d'Oxfort  en  1684,  '  de  Canlbrige  en  1685,  etdeLeipsick 
en  1715,  l'une  et  l'autre  en  un  volume  m  8".  Celle  de  Canlbri- 
ge, qui  est  en  même  volume,  estde  l'imprimerie  de  Jean  Hayes.- 
'  Elle  a  été  faite  sur  celles  de  Basle  1532,  d'Anvers  par  Tho- 
masius  1587,  et  de  Leyde  par  Thysius  1652,  et  sur  deux  ma- 
nuscrits très-nouveaux,  l'un  de  1424,  et  l'autre  de  1465.  On 
a  eu  soin  de  mettre  à  la  tête  les  différentes  leçons  de  ces  deux 
manuscrits,  et  à  la  fin  une  assez  longue  liste  de  ce  qui  a  paru  re- 
prehensible  à  l'éditeur  dans  les  écrits  de  Lactance.  Du  reste, 
on  s'est  particulièrement  ataché  à  donner  pur  le  texte  de  l'ou- 
vrage, sans  l'éclaircir  par  des  notes.  On  s'est  borné  à  en  met- 

''''5G''fifier'  î'i?'  *^®  ^"  '^^^^^  ^^  '^  ^^^^  ^^^  persécuteurs.  '  Nous  sommes  re- 

i'n.''r.' so.'not.  "'  devables  de  celle-ci  à  Thomas  Sparck,  et  de  la  dernière  de 
Leipsick  à  Jean-Georges  Walchius. 

^»'»i-  >bi-i.  '    De  toutes  ces  éditions  Sandius  préfère  celles  de  Rostoch 

1476,  de  Venise  1509,  d'Anvers  1539,  et  de  Basle  1521,  à 
l'édition  du  même  endroit  1563,  et  celle-ci  à  l'édition  de  Lyon 

p-  *«  1567.  '  A  son  avis  les  plus  défectueuses  de  toutes  sont  celles  dp 

Rome  1475,  et  de  Paris  1513.  Celles  de  Thomasius  et  de 
Thysius,  selon  lui,  sont  exactes.  On  ne  trouve  point  dans  l'u- 
ne ni  dans  l'autre  le  mot  Ariani,  qui  se  lit  mal-à-propos  dans 
les  autres  éditions  au  dernier  chapitre  du  quatrième  livre  des 
institutions  de  notre  auteur.  On  ne  le  trouve  point  non  plus 
dans  celles  d'Isaeus  et  de  Cantbrige.  C'est  avec  raison  que  l'on 
a  retranché  du  texte  de  Lactance  ce  mot  qui  n'est  point  dans 
les  anciens  manuscrits,  et  qui  n'y  doit  pas  être  ;  puisque  cet 
auteur  avoit  écrit  avant  qu'eût  paru  l'hérésie  d'Arius.  (IIL) 


NAZAIRE, 

Orateur    et   Rhéteur. 

Hier.  ciir.  p.  181.    '  /^N    Sait    peu  de    chosc  de  l'histoire  de  Nazaire ,    quoi- 
V/qu'il  paroisse  s'être  fait  une  grande  réputation.  En  ef- 


fet, S.  Jérôme  nous  le  représente  comme  un  des  plus  céle- 

Aiis.  prof.  c.  M.p.  bres  rhéteurs  de  son  tems.  '  Ausone  de  son  côté  ne  croïoit  pas 

pouvoir  mieux  relever  l'éloquence  d'Agricius  qu'en  la  com- 


174 


NAZAIRE,  ORATEUR.  '^ 

parant  à  celle  qui  fît  de  Nazaire  et  de  Patere  deux  illustres  iv  siècle. 
professeurs  de  rhétorique.  On  voit  par-là  que  Nazaire  ensei- 
gna  avec  éclat  l'art  de  bien  parler  ;  mais  personne  entre  les  an- 
ciens ne  nous  aprend  en  quel  endroit  il  exerça  cette  profession. 
An  titre  de  rhéteur  il  joignit  encore  celui  d'orateur  et  de  pané- 
gyriste de  l'Empire,  par  diverses  pièces  d'éloquence  qu'il  pro- 
nonça en  public,  comme  nous  l'allons  dire. 

'  Quant  au  païs  qui  lui  donna  naissance ,  on  le  fait  commu-  §"'"'y'^*'^'- p'-  p  l 
nément  d'Aquitaine.  Si  néanmoins  on  avoit  égard  à  ses  habi-  êo.p.  m^"^'^ '^' 
tudes,  on  jugeroit  qu'il  étoil  de  Provence.  Au  reste  personne 
ne  disconvient  qu'il  ne  fût  Gaulois  de  nation.  '  L'on  trouve  un  Conr.  i.i.  p.  1*30. 
Nazaire  lecteur  que  le  clergé  de  Marseille  députa  avec  l'Evê- 
que  Oreste  au  premier  Concile  d'Arles  en  314.  Mais  il  n'y  a 
guéres  d'aparence  que  ce  soit  l'orateur  qui  fait  le  sujet  de  cet 
éloge.  Si  cela  étoit,  on  liroit  infailliblement  dans  les  écrits 
qui  nous  restent  de  lui,  des  traits  non  équivoques  de  sa  reli- 
gion. '  Il  est  vrai  qu'il  y  a  laissé  quelques  vestiges,  qui  peu-  Pan. b. p.  256.268. 
vent  le  faire  regarder  comme  chrétien.  '  Mais  à  en  lire  quel-  p.  26i. 
ques  autres  endroits,  on  jugeroit  qu'il  auroit  encore  été  enga- 
gé dans  le  Paganisme. 

'  Nazaire  brilloit  par  son  éloquence  au  moins  dès  l'année  tui.  Emp.i.  4.p. 
321,  à  laquelle  il  prononça  le  panégyrique  qui  nous  reste  de  ***' 
lui.  '  S.  Jérôme  parle  avec  éloge  de  cet  orateur  sur  l'an  325,  Hier.  p.  isi.  ist. 
et  dans  la  suite,  d'une  fille  du  même  Nazaire,  comme  égale 
à  son  père  pour  la  réputation  qu'elle  s'étoit  acquise  par  son 
éloquence.  '  Arnauld  de  Pontac,  sur  l'autorité  de  quatre  ma-  not.p.  p.  703. 
nuscrits  du  Vatican,  donne  à  cette  éloquente  fille  le  nom  d'Eu- 
nomie,  avec  le  glorieux  titre  de  vierge  chrétienne. 

Le  panégyrique  que  nous  avons  de  Nazaire  fut  pronon-  Pan.  n.  p.  231.277. 
ce  à  Rome  le  premier  jour  de  Mars  321,  à  la  solemnité  de  la 
cinquième  année  des  trois  jeunes  Césars  fils  des  Empereurs 
Constantin  et  Licinius.  Celte  cinquième  année  concouroit 
avec  la  quinzième  de  l'Empire  du  grand  Constantin  ;  et  on  lui 
faisoit  des  vœux  pour  la  vingtième.  Nazaire  prend  de-là  oca- 
sion  de  diviser  son  discours  en  deux  parties.  La  première  roule 
sur  les  louanges  des  Césars  Crispe  et  Constantin  le  jeune,  sans 
faire  mention  du  fils  de  Licinius.  La  seconde  est  emploïèe  à 
faire  l'éloge  de  l'Empereur  Constantin  père  des  deux  jeunes 
Césars,  oui  n'étoit  pas  présent  à  cette  déclamation.  L'orateur 

relevé  la  bravoure  de  ce  Prince,  son  activité,  sa  prudence, 
e  soin  qu'il  avoit  pris  de  faire  des  loix  pour  le  règlement  des 


l 


94  NAZAIRE, 

IV  siECLK.  mœurs,  les  victoires  qu'il  avoit  remportées,  sur-tout  dans  le 
recouvrement  de  l'Italie.  Il  dit  que  les  peuples  des  Gaules 
parloient  encore  des  armées  qui  s'étoient  miraculeusement 
aparues  à  cet  Empereur.  11  veut  sans  doute  signifier  par  cette 
expression  la  vision  céleste  du  signe  de  la  croix  qu'eut  Con- 
stantin dans  les  (Jaules.  Rnfin  il  relevé  la  paix  profonde,  la 
prospérité,  la  fertilité,  l'abondance  qui  regnoient  alors  dans 
tout  l'Empire  Romain. 

On  voit  par-là  que  cette  pièce  contient  divers  évenemens 
qui  peuvent  servir  à  l'histoire  des  premières  années  de  ce  IV 
siècle.  On  y  trouve  de  l'éloquence,  mais  avec  les  défauts  qui 
s'y  étoient  dès  lors  introduits.  Le  style  en  est  un  peu  diffus. 
Elle  a  été  imprimée  avec  les  autres  harangues  des  anciens  pa- 
négyristes de  l'Empire.  Nous  en  avons  marqué  les  différentes 
éditions  à  l'article  de  Claude  Mamertin^ 

Nazaire  avoit  prononcé  au  moins  un  autre  panégyrique , 

Pan.  B.  p.  S70.  qui  n'est  pas  venu  jusqu'à  nous.  '  Celui-ci  fut  prononcé  un  jour 
avant  l'autre  dont  nous  venons  de  parler,  et  contenoit  un  élo- 
ge plus  détaillé  des  grandes  actions  de  l'Empereur  Constantin. 

p.  230. 1.2.  '  Sur  cela  Mr  Dupuy  croit  que  ce  panégyrique  de  Nazaire, 

que  nous  suposons  perdu,  est  le  neuvième  entre  les  douze 
que  nous  a  donné  le  père  de  la  Baune.  Il  apuie  son  sentiment 
sur  la  ressemblance  du  style,  et  sur  un  endroit  du  panégyri- 
que de  Nazaire,  où  l'auteur  dit  qu'il  ne  parlera  point  des  vic- 
toires de  Constantin  remportées  sur  le  "Tibre,  parce  qu'il  en 
avoit  parlé  assez  au  long  le  jour  d'auparavant.  Or,  poursuit 
Mr  Dupuy,  l'auteur  par  ces  dernières  paroles  marque  le  pa- 
négyrique dont  il  est  ici  question,  et  dans  lequel  il  truite  fort 

p.  «31. 1.  î.  au  long  de  la  défaite  de  Maxence  par  Constantin.  '  D'ailleurs 

ce  panégyrique  qui  est  sans  nom  d'auteur,  se  trouve  dans  les 
manuscrits  immédiatement  avant  celui  que  nous  avons  de  Na- 
zaire. 

Mais  on  aura  beau  dire  tout  ce  que  l'on  voudra,  ces  raisons 
ne  nous  persuaderont  jamais  que  le  neuvième  panégyrique- 
dont  il  s'agit  ici,  et  que  nous  avons  montré  ailleurs  être  l'ou- 
vrage de  l'anonyme  panégyriste  ordinaire  de  Constantin,  soit 
de  l'Orateur  Nazaire.  i".  La  ressemblance  du  style  sur  laquelle 
on  s'apuïe,  n'est  pas  si  grande  qu'on  la  supose.  Le  style  de 
Nazaire  est  assurément  plus  diffus  quf^  celui  de  l'anonyme. 
2°.  L'endroit  cité  du  panégyrique  de  Nazaire  prouve  le  con- 
traire de  ce  que  l'on  prétend.  On  sait  que  cette  pièce  futpro- 


ORATEUR.  98 

noncée  en  321,  et  que  le  neuvième  panégyrique  le  fut  dès  313.  iv  siècle. 
Or  le  même  auteur  auroit-il  pu  dire  en  321  d'un  discours  qu'il 
auroit  fait  dès  313  ces  paroles  ci  :  '  quod  et  pridie  prolixius  Pan.  b.  p.  270. 
mihi  dicta  sunt,  ce  que  je  traitai  hier  avec  plus  d  étendue?  '  Il  not.  ibid. 
est  vrai  que  le  père  de  la  Baune,  qui  a  épousé  le  sentiment  de 
Mr  Dupuy,  voudroit  après  quelques  autres,  qu'au  lieu  dejon- 
die,  on  lût  pridem.  Mais  ni  lui  ni  aucun  autre  ne  justifiant 
cette  conjecture  par  l'autorité  des  manuscrits,  elle  demeure 
pure  conjecture.  3°.  Que  le  panégyrique  anonyme  précède  dans 
les  manuscrits  immédiatement  celui  du  Nazaire,  cela  prouve 
plutôt  qu'on  ne  l'a  pas  cru  de  cet  orateur,  que  ce  que  l'on  en 
prétend  tirer.  Il  n'en  serait  pas  de  même,  s'il  le  suivoit  immé- 
diatement, et  que  cette  preuve  ne  fut  pas  combattue  par  d'autres. 
4°.  Enfin  le  panégyrique  anonyme  et  celui  de  Nazaire  lou- 
chent l'un  et  l'autre  plusieurs  des  mêmes  faits  :  ce  qui  ne  con- 
vient pas  ordinairement  au  même  orateur,  qui  parle  deux  jours 
de  suite. 


ANONYME, 

Poète  Chrétien. 

E'  NTRE  les  divers  monumens  dont  on  a  formé  le  suplé-  B'b-  pp- '•  «f-  p- 
ment  à  la  bibliothèque  des  Pères  de  Lyon,  il  se  trouve 
un  poëme  intitulé,  de laudibus Domini,  qui  apartient  à  un  écri- 
vain Gaulois.  Pour  s'en  convaincre,  il  n'y  a  qu'à  en  lire  le 
commencement.  On  verra  même  qu'il  y  a  toute  l'aparence 
possible,  que  ce  poète  étoit  d'Autun  ou  du  voisinage.  C'est  ce 
qui  paroît  par  la  description  qu'il  fait  du  pais,  et  par  le  trait 
d'histoire  qui  semble  lui  avoir  fait  naître  l'ocasion  de  compo- 
ser son  poëme. 

Mais  afin  de  se  mieux  mettre  au  fait  de  ce  que  la  contrain- 
te de  la  poésie  lui  a  fait  exprimer  un  peu  obscurément,  il  faut 
lire  le  75*  chapitre  de  la  gloire  des  Confesseurs  par  S.  Grégoi- 
re de  Tours.  En  conférant  ces  deux  endroits  l'un  avec  l'autre, 
on  s'aperçoit  sans  peine  que  le  premier  décrit  en  poète  ce  que 
l'autre  raporte  en  historien.  Quelques  circonstances  en  sont 
un  peu  différentes,  mais  le  fonds  en  est  le  même.  Cette  his' 
toire  regarde  le  mariage  de  S.  Retice  Evêque  d'Autun  avant 
son  épiscopat,  et  la  merveille  qui  arriva  à  sa  sépulture,  lorsqu'il 


96  ANONYME, 

IV  SIECLE,  fut  inhumé  avec  sa  chaste  épouse  dans  le  même  tombeau ,  com- 
me  ils  en  étoient  convenus  de  leur  vivant. 

Notre  poëte  ne  nomme  point  le  Saint  prélat  ;  mais  il  est  aisé 
de  le  reconnoître  aux  traits  qu'il  raporte  de  son  histoire.  À  une 
circonstance  près,  S.  Grégoire  et  lui  conviennent  presque  dé 
tout  le  reste.  Seulement  ils  différent  en  ce  que  S.  Grégoire  dit 
que  ce  fut  S.  Retice,  qui  sur  le  point  d'être  mis  en  terre  avec 
son  épouse  inhumée  depuis  long-tems,  reprit  ses  esprits,  et  lui 
parla  pour  lui  annoncer  leur  réunion  :  au  lieu  que  le  poëte  té- 
moigne que  ce  fut  celle-ci  qui  étendant  la  main  vers  le  corps  de 
son  chaste  époux,  donna  des  signes  de  vie. 

Au  reste  cette  différence  sert  à  faire  voir  que  ces  deux  au- 
teurs ne  se  sont  pas  copiés  l'un  l'autre.  11  paroît  effectivement 
par-là  que  S.  Grégoire  n'avoit  aucune  connoissance  du  poëme 
dont  il  est  ici  question.  Pour  notre  poëte,  il  est  certain  qu'il 
n'a  pu  copier  S.  Grégoire,  puisqu'il  vivoit  plus  de  deux  cens 
ans  avant  lui,  et  qu'il  étoit  contemporain  ou  presque  contem- 
nib.  pp.  p.  527. 1.  porain  de  S.  Retice.  '  Deux  traits  pris  de  son  propre  poëme 
ne  permettent  pas  d'en  douter.  1".  En  raportant  l'histoire  de 
ce  Saint  Evêque,  il  en  parle  comme  la  sachant  ou  par  lui-mê- 
me, ou  de  témoins  oculaires  : 

CoDjugium  memiai  summa  pietatc  iideque. 

p.  tas.  I.  2".  'Il  y  fait  mention  de  Constantin  le  grand,  comme  nou- 

vellement victorieux,  aparamment  de  Licinius,  et  de  ses  en- 
fans  comme  étant  jeunes,  leur  souhaitant  qu'ils  pussent  mar- 
cher sur  les  glorieuses  traces  de  leur  père. 

p.  527.  t.  '  Après  avoir  décrit  la  merveille  de  la  sépulture  de  S.  Reti-, 

ce,  notre  poëte  en  raporte  la  gloire  à  Dieu,  à  qui  seul  il  apar- 
tient,  dit-il,  d'opérer  de  tels  prodiges.  De-là  il  prend  ocasion 
de  le  louer  des  autres  merveilles  qu'il  a  fait  éclater  dans  la  créa- 
tion de  l'univers,  et  qu'il  continue  de  renouveller  sans  cesse 

p.  528. 1.  par  ce  qui  se  passe  dans  la  nature.  '  Il  y  touche  aussi  l'incarna^ 

tion  du  Verbe,  les  grands  avantages  qu'elle  a  procuré  aux  hom- 
mes, la  résurrection  des  morts,  la  récompense  des  bons,  la 

p.  527.1.  punition  desméchans.  '  C'est  pourquoi  l'on  a  intitulé  ce  poë- 

me, de  laudîbus  Domini,  des  louanges  du  Seigneur.  Il  con- 
tient environ  160  vers  hexamètres.  Quoiqu'il  s'y  trouve  quel- 
3ues  fautes  par  la  négligence  des  copistes,  on  ne  laisse  pas  d'y 
écouvrir  des  beautés  qui  ne  sont  pas  indignes  des  bons  siècles. 

On 


POETE   CHRÉTIEN.  97 

On  en  peut  juger  par  les  vers  suivons,  qui  sont  comme  l'exorde    iv  siècle. 
de  la  pièce. 


Quis  queritur  sera  virtatis  dote  juvari  ? 
Uuis  promissa  Dei  lento  proccdere  passu  ? 
Quis  One  hurnano  metitur  judicis  urnam 
Perpetui,  tardumque  putat  quod  saecula  debent 
Accelerare  diem  meritis  qui  praemia  reddat? 
Nobilis  ingenti  testatur  gloria  facto. 


ARBORE, 

Rhéteur. 

MiLius   *  Magnus   Arborius,   oncle   maternel  du  poëte  «Ans. par. 
Ausone,  l'un  des  plus  célèbres  rhéteurs  de  son  siècle,  '  '  p"""  •  '■  *® 


M 

étoit  originaire  d'Autun.  Mais  il  naquit  dans  cette  partie  des 
Gaules  qu'on  nommoit  la  Novempopulanie ,  du  côté  de  Dax 
et  Baione,  vers  l'an  270.  Il  eut  pour  père  Cœcilius  Argicius 
Arborius,  dont  nous  avons  déjà  parlé,  et  pour  mère  vEmilia 
Corinthia  Maura,  l'un  et  l'autre  de  noble  extraction.  L'on  peut 
voir  plus  en  détail  ce  qui  regarde  sa  famille  dans  l'éloge  que 
nous  avons  fait  de  sou  père. 

La  suite  de  la  vie  d'Arboré  fait  juger  qu'il  fut  très-bien  in-  ibid. 
struit  dans  les  letres,  et  qu'il  y  fit  de  grands  progrès.  '  Il  sema-  prof.  iWd. 
ria  de  bonne  heure,  et  épousa  une  femme  qui  avoit  de  la  no- 
blesse, et  qui  lui  aporta  une  riche  dot.  11  passa  ensuite  à  Tou- 
louse, où  il  eut  une  chaire  d'éloquence,  qu'il  remplit  avec 
beaucoup  de  réputation.  Dès  les  premières  années  qu'il  y  en- 
seigna, il  s'acquit  l'amitié  des  trois  Princes  Dalmace,  Jules 
Constance  et  Annibalien,  tous  trois  frères  de  Constantin  le 
grand,  qui  étoient  alors  à  Toulouse  en  une  espèce  d'exil.  '  Ar-  P"-  «•  '• 
bore  entre  ses  disciples  eut  Ausone  son  neveu,  dont  il  prit  un 
si  grand  soin,  que  ce  poëte  le  regardoit  comme  un  second 
père,  et  reconnoissoit  lui  être  redevable  de  tout  ce  qu'il  savoit. 

Et  mihi  quifuerisquod  pater  et  genitrix;   ' 
Qui  me  lactantem  puerum,  juvenemque  virumque 
Artibus  ornasti ,  quas  didicisse  juvat. 

Tome  I.  Sec.  Part.  N 


?. 


ô«  ^"     ARBORE, 

i-v  SIECLE.        •  De  Tonîousp,  il' seM'ble  qu'^Arbore  alla  à  Narbone  j  en- 

~i^^  i^^Tîbïd"  saigner  aussi  la  rhétorique.  Il  est  au  moins  certain  qn'il  plaidar 
avec  beaucoup  d'éclat  dans  plusieurs  endroits  de  la  Gaule 
Narbonoise,  de  la  No'Vempopulanie  et  de  l'E&pagne,  où  il 
y  avoit  des  tribunairx  pour  la  justice.  Après  avoir  ainsi  illuslr/; 
les  Gaules  et  les  païs  voisins,  la  réputation  de  son  éloquence- 

bid.  I  prof.  ibid.  le  fit  connoîtrc  dans  toute  l'Europe.  C'est  ce  qui  le  fit  apeller 
à  Constantinople  par  l'Empeteup  Constantiii»  paur  enseigner 
à  l'un  de  ses  enfans  l'art  do  bien  parler.  Arbore  s'acquita  de 
cet  emploi  avec  beaucoup  de  gloire,  et  y  amassa  de  grandes 
rof.  ihirt.  Hchesses.  '  Il  mourut  dans  cette  nouvelle  Rome  comblé  d'hon- 

neurs, vers  l'an  33.5.  L'Empereur  pour  marque  de  la  considé- 
ration qu'il  avoit  pour  lui,  même  après  sa  mort,  envoia  son 
corps  à  ses  parens  pour  être  inhumé  dans  le  tombeau  de  ses 
ancêtres. 

par.  ibid.  '  Outre  l'éloqueuce,  Ausouc  louë  eucore  en  la  personne  de 

notre  rhéteur  l'érudilion,  la  vivacité  de  l'esprit,  la  beauté  de 

Sii.  I.  5.  «p.j.  la  mémoire,  la  science  de  l'asIrtJogie.  '  S.  Sidoine,  ^ui  seo- 
ble  avoir  vu  quelque»-uns  des  discours  d'Arboré,  lut  atribua 
une  exacte  régularité,  comme  un  caractère  propre  qui  le  dis- 
tinguoil  des  autres  orateurs.  Nous  n'avons  aucune  connois- 
sance  de  ses  écrits.  Mais  pour  mieux  faire  comprendre  de  quel 
mérite  ils  pouvoienl  être,  et  quelle  étoit  la  réputation  que  leur 
auteur  s'éloit  acquise,  il  ne  sera  pas  hors  de  propos  de  rapor^ 
ter  quelques  traits  originaux  de  l'éloge  qu'on  nous  en  a  laissé. 

Te  sibi  palladis  antetulit  toga  docta  TokMaa  : 

Te  NarboneDsis  Gallia  prxposuit , 
Oraasti  cujus  latio  sermone  tribunal. 

Et  forar  Hiberorum  quseque  Novempopulis. 
ffinc  tenas  Europam,  fama  crescente,  perito 

Gonstantinopolis  rhctore  te  viguit. 
Tn  per  raille  modos,  per  mille  oracula  fandl 

Doctus,  facunduR,  tuni  celer  atque  memor. 

Sni.  Tit.  M.  n.  ».      '  S.  Scvcrc  Sulpicc  parle  de  la  guerison  miraculeuse  d'une 
p.  m.i6*.  ^ijg  (J'Arbore,  par  l'aplicalion  d'une  simple  I être  de  S.  Mar- 

tin :  ce  qui  porta  le  père  à  la  consacrer  à  la  virginité,  et  il  vou- 
lut que  ce  fût  le  S.  Evêque  lui-même  qui  la  consacrât.  Cet 


Al»,  par.  <:.  iô. 


Arbore  étoit  illustre  et  par  sa  pieté  et  par  la  dignité  de  préfet 
qu'il  avoit  remplie.  '  Il  descendoit  par  les  femmes  do  la  fa- 


V\VJ-  i    .-«K. 


.kr.t^. 


RHÉTEUR.  M 

mille  du   rhéteur  dont  nous  venons  de  faire  l'éloge,  et  se    iv  sieclk. 
trouvoit  9(Mi  petit-neveu,  fils  d'une  sœur  d'Ausone.     On  re-  xiii.H.E.  i.io.  p. 
marque  qu'il  fut  préfet  de  Rome  en  380.  On  ne  trouve  rien  sao. 
de  la  postérité  du  rhéteur  son  grand  oncle;  et  il  y  a  toute  apa- 
rence  qu'il  n'en  laissa  point. 

I  I-  -    -         -  ■   -     ^-    -  -  -  -  -  ^  -  -1^  Mfc  ^  .^^i. .  ■  ■■   ^  I ,  a  ■  —  -I   ■  -  ^  I  II.      -I-  ■     ■  ■        1         j  ■ 

CONSTANTIN  LE  JEUNE, 

Empereur. 

CONSTANTIN,  *  surnomme  le  jeune  pour  le  distinguer  du  îI|"-6|?'p- '  *•  ••• 
grand  Constantin   son  père,  étoit  fils  de  Fauste  seconde 
femme  de  cet  Empereur.  11  naquit  à  Arles  dans  les  Gaules  , 
comme  l'on  croit  avec  beaucoup  de  fondement,  le  septième 
jour  d'Août  de  Tan  '  316.  '  Dès  l'année  suivante  il  fut  fait  Ce-  p  'to  639.640. 
sar  avec  Crispe  son  frère  aîné,  et  Licinius  ou  i  icinien,  leur 
cousin  germain,  fils  de  leur  tante  paternelle  et  de  l'Empereur 
Licinius.  Cette  promotion  se  fit  le  premier  jour  de  Mars,  et 
fut  ensuite  publiée  dans  toutes  les  armées  et  toutes  les  villes, 
afin  que  chacun  rendît  aux  trois  jeunes  Césars  les  respects  qui 
leur  etoient  dûs.  '  En  320,  lorsque  notre  jeune  Prince  n'étoit  p.  ns. 
encore  que  dans  la  quatriérae^i  année"  de  son  âge,  il  fut  nom- 
mé '  Consul  pour  la  première  fois  avec  l'Empereur  son  pefe,  p.  179.211.  feg. 
et  continua  de  l'élre  les  années  321 ,  324  et  329 .    . 

'  Il  étoit  né  avec  un  génie  heureux,  qui  l'élevoit  au-degsiis  Pan.  B.p.  tu.  p. 
de  l'enfance,  et  avoil  reçu  de  la  nature  bien  d'autreg  grandes  *'*' 
qualités,  qui  donnoient  de  lui  des  espérances  encore  plus 
grandes  pour  le  bonheur  de  l'I'^mpire.  Dès  ses  plu»  tendres  an- 
nées, on  ne  doutoii  presque  point  qu'il  ne  fît  un  jour  itevivre 
rKmi)ereur  son  père,  ce  Prince  si  eh^ri  des  peuple»,  et  si  dès 
lors  il  ne  pouvoit  pas  encore  marcher  sur  se»  traces,  il  faisoit 
au  moins  déjà  paroître  les  mêmes  sentimens.  Un  de  ses  pané- 
gyristes ne  faisoil  pas  même  difficulté  de  dire  en  321  /  lorsque 
ce  jeune  Prin«e  n'aroit  pas  encore  cinq  ans  acomplis,  qu'il  sa- 
voil  déjà  écrire,  ert  qu'il  avoit  fait  des  progrès  fwématurés  dans 
les  letres.  11  esk  vrai  que  ce  ïi'est  pas  un  historien,  mais  u»  ora- 
teur qui  parle  ainsi. 

'  Pour  le  courage,  Constantin  fit  voir  qu'il  étoit  né  avec  lui  ; 

(t)  Brantre»  i«r«n«mt   cette   Aaiisanc'e   en       Anontme,   panégyriste  ordinaire  de   Con-    Trist.  Coin,  hi.-l.  L 
SI»,  M  jaroissent  amonsé»  par  l'orateur      stanliii  le  grand,  dom  non  «roBf  ftàii.        3.  p.  579. 

N  ii 


100 


CONSTANTIN    LE   JEUNE. 


IV     SIECLE. 
Amm.  I.  p.  476. 


Thdrl.  I.  2.  cl.  p. 
«9. 

Till.  iLid.  p.  860. 
^1  I  H.  E.  t.  10. 
p.  80. 


Atli.  apo.  in  Ar.  n. 
87  I  Tlidrt.  1.  1.  c. 
1 .  p.  65. 


AUi.  ibid. 


ibid.|Soc.l.3.c.::;. 


iXt 


Till.  H.  E.  t.  8.  p. 
69.  671.  672. 


Eus.vit.  £0031.1.4. 
c.  68.  69. 

Till.  Emp.  t.  i.  p. 
317.  666. 

Thdrt.l.  2. cl.  p. 

69. 

Till.  ibid. 


Monod.  p.  2. 


Socr-  !• 
83. 


c.  i.  p. 


et  il  n'étoit  encore  que  dans  la  seizième  année  de  son  âge, 
qu'il  donna  des  marques  extraordinaires  de  sa  valeur.  '  Au 
mois  d'avril  332  marchant  contre  les  Gots,  il  les  défit,  et  les 
soumit  à  l'Empire. 

De  si  heureux  commencemens  le  firent  sans  doute  recevoir 
avec  joie  '  dans  les  Gaules,  lorsqu'il  vint  les  gouverner  en  qua- 
lité de  leur  souverain.  '  Ce  fut  en  335  que  l'Empereur  son  pè- 
re les  lui  donna  pour  son  apanage,  avec  la  grande  Bretagne  , 
l'Espagne  et  une  partie  de  l'Afrique.  Tous  ces  étals  passoient 
pour  le  tiers  de  l'Empire,  et  avoient  fait  le  partage  dp  Constan- 
ce Chlore,  aïeul  paternel  de  notre  jeune  Prince ,  comme  ils 
firent  dans  la  suite  celui  deGratien. 

'  A  peine  y  fut-il  y  arrivé,  qu'il  reçut  à  Trêves,  lieu  de  son 
séjour  ordinaire,  le  grand  S.  Alhanase,  que  Constantin  son 
père,  dont  les  Arier)s  avoient  surpris  la  religion,  y  exila  en  la 
trentième  année  de  son  empire.  C'est  ici  le  plus  bel  endroit 
(lu  règne  de  notre  jeune  Empereur.  '  Non  seulement  il  eut 
.soin  de  faire  fournir  à  ce  Saint  persécuté  tout  ce  qui  lui  étoit 
nécessaire  ;  mais  il  eut  encore  une  alention  religieuse  à  le  trai- 
ter toujours  avec  respect.  '  Il  est  aisé  de  juger  de  l'estime  et  de 
la  vénération  qu'il  portoit  à  ce  Saint  docteur,  par  la  letre  où 
il  fait  l'éloge  de  sa  vertu  et  de  son  mérite,  et  qu'il  adressa  aux 
lideles  d'Alexandrie,  lorsqu'après  la  mort  de  Constantin  le 
grand  il  fut  renvoie  à  son  Eglise.  '  C'étoit  en  l'année  338  ;  et 
l'on  croit  que  notre  jeune  Prince  allant  en  Pannonie  pour  con- 
férer avec  ses  frères  sur  le  partage  de  l'Empire,  mena  avec 
lui  S.  Athanase. 

'  Dès-lors  les  trois  frères  portoient  le  titre  d'Empereur;  le 
Sénat  de  Rome  les  aiant  déclarés  Augustes,  aussi-tôt  qu'il  eut 
apris  la  mort  de  Constantin  leur  père.  '  Après  celle  de  Dal- 
mace  et  d'Annibalien  leurs  cousins  germains,  les  trois  Em- 
pereurs partagèrent  leurs  états.  De  ce  partage  '  Constantin, 
qui  étoit  l'aîné  de  Constance  et  de  Constant,  '  eut  au  moins 
la  Thrace  et  quelque  chose  de  l'Afrique.  Il  eut  même  la  ville 
de  Constantinople,  dont  il  fut  maître  pendant  un  an,  ou  quel- 
ques mois.  Mais  il  ne  jouit  pas  long-tems  de  ces  grandes  pos- 
sessions. Le  désir  de  les  étendre  les  lui  fit  toutes  perdre  avec 
la  vie. 

'  Sous  prétexte  de  la  peste  qui  ravageoit  alors  les  Gaules, 
où  il  faisoitson  séjour  ordinaire,  '  mais  en  effet  dans  le  dessein 
d'aller  combattre  Constant  son  frère,  il  en  sortit  à  la  tête  de 


CONSTANTIN   LE    JEUNE.  iOl 

son  armée.  «Il  tira  du  côté  d'Italie  et  s'avança  jusqu'à  la    iv  siècle. 
ville  d'Aquilée,  où  il  fit  la  guerre  sans  précaution  et  en  hom-  .  lin.  ibid.  p.  3*8. 
me  qui  n'avoit  rien  à  craindre  Le  sujet  de  son  mécontente-  329. 
ment  étoit  que  Constant  ne  lui  vouloit  rien  relâcher  de  ce  qui 
lui  étoit  échu  par  le  dernier  partage  de  l'Empire. 

'  Au  bruit  de  sa  marche,  Constant  qui  étoit  alors  en  Dacie,  p.  aw. 
envoïa  une  partie  de  son  armée  pour  lui  faire  tête.  Celui-ci 
fut  servi  à  merveille  ;  car  ses  généraux  aïant  atiré  Constantin 
dans  une  embuscade,  taillèrent  ses  troupes  en  pièces ,  et  le 
tuèrent  lui-même.  Le  corps  de  ce  malheureux  Prince  fut  in- 
dignement jette  dans  la  rivière  d'Aise ,  aujourd'hui  Ansa, 
d'où  il  fut  néanmoins  relire,  '  puis  porté  dans  la  ville  Impéria-  Monod.  p.  a.  *.  6. 
le,  où  il  fut  inhumé.  Après  cette  défaite  on  fit  courir  le  bruit 
que  Constantin  étoit  mort  de  peste  à  Aquilée.  '  La  ville  où  on  Tiu.ibid. 
lui  donna  la  sépulture,  n'est  autre,  comme  l'on  croit,  que 
Constantinople  ,    où  long-tems  après  on  montroit  son  tom- 
beau pçoche  de  celui  de  son  père.  '  Sa  mort  arriva  avant  le  p.  328 1  Socr.  iWd. 
9*  d'avril  340,  sous  le  consulat  d'Acindyne  et  de  Procule, 
en  la  25*  année  de  son  âge  et  la  3*  de  son  Empire. 

'  Constantin  ne  laissa  point  de  postérité,  et  ne  contracta  mê-  Monod.  p.  is. 
me  jamais  d'alliance.  Mais  lorsau'il  fut  tué,  il  avoit  envoie  en 
Espagne,  pour  en  amener  une  fille  qu'il  avoit  dessein  d'épou- 
ser, et  que  l'on  ne  nous  fait  point  connoîlre  autrement. 

'  Un  orateur  de  ce  tems-là  prononça  à  Arles  son  oraison  fu-  Tiii.  ibid.  p.  329. 
nébre  en  grec,  que  nous  avons  encore.  '  Selon  ce  qu'il  dit  de  Monod.  p.  7.  s. 
ce  Prince,  il  possedoit  plusieurs  belles  qualités  de  l'esprit  et 
du  corps.  Il  avoit  sur-tout  un  grand  soin  de  se  nourrir  ae  l'E- 
criture, et  beaucoup  d'ardeur  à  en  rechercher  les  mystères. 
Mais  il  eut  le  malheur  de  n'y  pas  conformer  ses  mœurs  et  sa 
conduite.  '  L'action  où  il  perdit  la  vie,  en  est  une  triste  et  fa-  thi.  ibid.  p.  329. 
taie  preuve,  et  le  fera  toujours  paroître  coupable  d'ambition  ^"' 
et  d'intérêt,  jusqu'à  oublier  les  devoirs  les  plus  naturels,  l'a- 
mour du  prochain,  sur-tout  d'un  propre  firere,  et  l'horreur 
des  suites  malheureuses  et  nécessaires  de  la  guerre.  '  On  voit  Monod.  p.  i.  2. 
néanmoins  qu'il  ne  manquoit  pas  d'une  certaine  bonté  de  cœur, 
et  qu'il  l'avoit  fait  sentir  dans  son  gouvernement  ;  puisque  son 
panégyriste  nous  assure  qu'il  fut  fort  regreté  de  ses  sujets. 

'  La  letre  qu'il  écrivit  en  faveur  de  S.  Athanase,  estdeve-  Thdn.  1. 2.  c.  s.p. 
nue  fort  célèbre,  et  se  trouve  dans  presque  tous  les  historiens  c^'a.™'  ^82'i  Ath. 
ecclésiastiques.  Elle  est  tout  à  la  fois  un  monument  glorieux  »p<»-  '"  ^"^^  "•  *'• 
pour  la  mémoire  de  ce  généreux  défenseur  de  la  consubstan- 


102  CONSTANTIN    LE   JEUNE. 

IV  SIECLE,  tialité  du  Verbe,  et  un  témoignage  non  suâj)ect  de  la  pure»é 
rie  la  foi  de  son  auteur.  Bien  loin  que  Constantin  se  laissât  pré- 
venir contre  ce  grand  Evêque,  comme  Constantin  sort  père 
et  Conatance,  on  voit  par  cette  letre  qu'il  avoil  une  sainte 
indignation  pour  ses  calomniateurs,  et  une  vénération  singu- 
lière pour  son  mérite.  II  l'y  qualifie  un  prophète  et  tin  prélat 
de  la  loi  adorable  de  J.  C.  et  dit  que  la  bonne  odeur  de  sa 
vertu  s'étoit  répandue  par  tout  le  monde.  Cette  letre  est  datée 

lueii^'  '■  "■  **■  ^^  Trêves  le  17*  jour  de  Juin.  '  L'année  n'est  pas  marquée  ; 
mais  on  ne  doute  point  qu'elle  ne  soif  de  l'an  338. 

(Xitre  ce  monument  digne  d'un  Empereur  Chrétien,  noud 
avoîis  du  même  Prince  dans  le  code  Théodosien  diverses  loiï 
pour  la  police  et  le  bon  ordre  de  l'Empire.  Les  unes  lui  sont 
propres  et  les  autres  communes  avec  ses  frères  Constance  61 
Constant.  On  ne  sait  point  s'il  laissa  quelques  autres  monu- 

Monod.  p.  8.         mens  de  sôH'  snvoir.  '  Il  éloiî, néanmoins',  selon  son  panégy- 

Trist.  ibid.  riste,  aiussi  saTant  philosophe  que  grand  monarque.  '  On  trou- 

ve dans  les  anciens  monumens,  qu'il  portoil  les  noms  de  Fla- 
vius Claudius  Constantinus. 


A 


ORATEUR  ANONYME. 

PRÉS  la  mort  fatale  de  l'Empereur  Constantin  le  jeune, 
dont  nous  venons  de  parler,  un  orateur  qui  ai  eu  la  mo- 
destie de  nous  cacher  son  nom,  prononça  en  grec  l'oraison 
funèbre  de  ce  Prince.  Nous  avons  encore  cette  pièce  sous  té 
titre  de  Monodie  ou  orainon  funèbre  de  Constantin  le  jeune. 
Le  public  en  est  redevable  au  savant  M.  Godefroi,  qui  la  fil  im- 

f)rimer  à  Paris  chez  Federic  Morel  l'an  1616  en  uft  petit  vo- 
ume  in-\^. 
Moiiod. p.7. 9. 11.       'On  voit  par  cette  pièce  que  son  auteur  faisoit  profession 
'*•  du  Christianisme,  et  qu-'il  avoit  même  quelque  pieté.  Mai» 

son  éloquence  tient  un  peu  de  la  nature  de  celle  des  Grecs  : 
c'est-à-aire,  qu'elle  est  un  peu  trop  ampoulé<\  Ce  serait  vou- 
loir deviner,  que  d'entreprendre  de  dire  autre  chose  de  la 
Tiist.  coni.  bisi.  t.  pcrsoune  de  cet  orateur.  '  11  est  des  savais  qui  croient  qu'il 
3.  p.  582.  gy^jj  ^j^  précepteur  du  Prince  même,  dont  il  foit  l'éloge  fu- 

nèbre ;  et  il  ne  paroît  point  y  avoir  de  difficulté  que  cela  ait 


ORATEUR  ANONYME.  103 

été.  Mais  il  y  a  encore  plus  d'aparence  qu'il  étoit  un  de  ces    iv   siècle. 

grammairiens  qui  enjieignoient  la  langue  Gréque  dans  les   " 

principales  villes  des  Gaules,  comme  nous  en  avons  déjà  vu 
à  Bourdeaux  dès  le  commencement  de  ce  siècle. 

'  L'Anonyme  prononça  son  discours  devant  les  sujets  de  Monod.  p.  .i.  u. 
Constantin,  lorsque  la  nouvelle  de  sa  mort  n 'étoit  fias  encore 
répandue  dans  tout  l'Empire.  '  On  ne  doute  point  que  ce  ne  xiii.  Emp.  t.  4.  p. 
fût  dans  les  Gaules,  et  à  Arles  même.  Il  n'y  avoit  guéres  de  ^^' 
lieuK  plus  convenables  à  cette  déclamation  que  cette  ville. 
Elle  avoit  été  quelque  tems  le  séjour  de  la  Cour  impériale, 
et  le  lieu  de  la  naissance  du  jeune  Constantin.  D'ailleurs  la 
langue  Gréque  y  étoit  communément  entendue,   et   conti- 
nua même  à  l'y  être  jusques  dans  le  VI  siècle,  comme  l'on 
verra  par  la  suite. 

'  Cet  orateur  semble   dater  excessivement  le  portrait  de  Monod.  p.  7. 8.  n. 
son  héros,  lui  atribuant  beaucoup  de  belles  qualités  d'esprit  et 
de  corps,  qu'il  n'avoit  pas  au  degré  qu'il  veut  faire  entendre. 
Il  est  néanmoins  vrai  qu'il  ne  le  llate  pas  en  tout;  '  aiant  assez  p-  ». 
de  sincérité  pour  avouer  qu'on  l'acusoitde  n'avoir  pas  culti- 
vé, autant  qu'il  auroit  dû,  la  paix  avec  Constant  son  frère. 

'Le  titre  de  la  pièce  porte,  que  ce  fut  par  des  meurtriers  p-*- 
envoies  de  la  part  de  celui-ci,  que  Constantin  perdit  la  vie. 
'  En  cela  ce  titre  favorise  l'historien  Zosime,  qui  parlant  de  Tiii.  ibu.  p.  669. 
cette  mort ,  dit  que  Constant  avoit  fait  assassinrr  son  frère  par 
surprise.  Mai»  jl  contredit  tous  (es  autres  historiens,  S.  Jérô- 
me, Socrate,  Sozomene,  les  deux  Victors,  Eutrope,  Zona- 
re.  Aussi  l'on  soupçonne  (|ue  ce  titre  a  été  pris  de  Zosime  mê- 
me après  coup.  Le  silence  de  la  pièce  sur  cette  circonstance  • 
rend  ce  soupçon  bien  fondé. 

'  Néanmoins  la  pièce  ne  s'acorde  pes  elle-même  en  eela  ^'>»'*- 
avec  les  autres  historiens.  On  sait  de  quelle  manière  Constan- 
tin finit  sa  vie;  '  et  la  pièce  ne  laisse  pas  de  dire  qu'après  laba-  Monod-  p-  *o. 
taille  donnée  entre  les  deux  freies,  et  lorsqu'ils  étoient  près  de 
se  reconcilier,  '  ce  jeune  Empereur  mourut  de  peste  dans  une  p-  '• 
ville  où  il  se  trouvoit.  '  peut-être  avoit-on  fait  courir  ce  bruit  thi.  itid. 
pour  sauver  l'honneur  des  deux  frères.  Ainsi  notre  orateur 
l'aura  suivi,  ou  i  des  em  dans  la  même  vùë,  ou  ce  qui  paroil 
plus  vraisemblable,  parce  qu'aïant  composé  sa  pièce,  lorsque 
la  nouvelle  de  la  mort  de  Constantin  n'étoit  pas  encore  répan- 
due, il  ne  savoit  pas  encore  au  juste  les  circonstances  de  cette 
mort. 


404 


ORATEUR  ANONYME. 


IV   SIECLE. 

•  Till.  ibid.  p.670. 

k  Monod.  p.  5. 

'  Till.  ibi.l. 

Trist.  ibid.  p.  582. 
583. 


Monod.  p.  14. 


Trist.  ibiil. 


'  Si  cette  faute  lui  est  pardonable ,  on  ne  lui  passe  pas  de 
même  celle  que  l'on  prétend  qu'il  a  faite ,  *■  en  disant  que  Con- 
stantin fut  conduit  au  tombeau  par  l'Impératrice  sa  mère.  'Car 
cette  Princesse,  qui  étoit  Fauste,  comme  nous  l'avons  dit, 
n'étoit  plus  au  monde  dès  326,  quatorze  ans  auparavant.  'Mais 
nous  croïons  devoir,  après  un  savant,  justifier  notre  orateur  de 
la  prétendue  faute  qu'on  lui  impute  ici.  II  est  vrai  que  le  terme 
de,  mère  se  lit  dans  son  texte ,  mais  les  circonstances  dont 
il  y  est  revêtu,  font  manifestement  voir  que  la  Princesse  dont 
il  parle,  n'étoit  point  Fauste,  mais  Entropie  mère  de  Fauste 
et  aïeule  maternelle  du  jeune  Empereur.  Que  s'il  lui  donne  la 

3ualité  de  mère  plutôt  que  d'aïeule,  c'est  que  depuis  la  mort 
e  Fauste,  elle  tenoit  lieu  de  mère  à  Constantin,  et  que  ce 
Prince  la  cherissoit  et  la  respectoit  en  cette  qualité.  D'ailleurs 
il  n'est  pas  sans  exemple  que  des  aïeules  et  des  belles-meres 
mêmes  aient  porté  le  titre  de  mère  à  l'égard  de  leurs  beaux- 
fils.  Au  reste  on  ne  peut  douter  que  ce  ne  soit  de  l'aïeule  de 
Constantin,  plutôt  que  de  sa  mère,  que  notre  Anonyme  ait 
dessein  de  parler,  puisqu'il  parle  de  sa  grande  vieillesse,  ce 
qui  n'auroit  pu  convenir  à  Fauste,  suposé  qu'elle  eût  encore 
vécu. 

'  Sur  la  fin  de  la  pièce  l'auteur  pour  consoler  son  auditoire 
dit  que  la  mort  du  Prince  dont  il  fait  l'éloge  funèbre,  n'a  été 
qu'un  passage  à  une  cité  permanente,  dont  la  magnificence 
surpasse  toutes  les  beautés  des  plus  illustres  villes  de  la  terre. 
Il  ajoute  qu'il  s'y  voit  en  la  compagnie  de  l'Empereur  son  pè- 
re, de  Crispe  son  frère  et  des  autres  Princes  ses  parens.  '  Mais 
il  ne  parle  point  de  Fauste,  quoique  déjà  morte,  sans  doute 
parce  que  ses  crimes  connus  la  rendoient  indigne  de  trouver 
place  dans  la  cité  des  Saints.  (V.) 


Till.  Rmp.  t.  t.  p. 
17.  4i.  Oti. 


Vup.  vil.  Anr.  n.  1. 


T  I  B  E  R  I  E  N, 

Préfet  des  Gaules. 

0'  N  vit  dans  les  premières  années  de  ce  siècle  plusieurs 
personnes  illustres,  qui  portoient  le  nom  de  î'iberien. 
Il  y  avoit  un  Junius  Tiberianus,  qui  exerça  le  consulat,  et  deux 
fois  la  préfecture  de  Rome .  '  Ce  fut  celui-ci  qui  engagea  Vo- 
pisque  dès  la  fin  du  111  siècle  à  écrire  la  vie  de  l'Empereur 

Aurelien. 


TIBEKIEN.  105 

Aurelien.  "  11  y  avoit  encore  un  Annius  Tiberianus  Comte    iv  sikcle. 
d'Afrique  en  326  ou  327.  Enfin  on  vit  paroître  un  autre  Ti-  rrnlbidTMÎI 
berien,  que  l'on  ne  trouve  point  avoir  porté  d'autre  nom,  et  «jj. 
qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  les  précédents.  C'est  de  ce 
dernier  que  nous  entreprenons  de  parler  ici. 

'  11  a  paru  à  Mr  Pithou  avoir  été  d'Aquitaine,  et  cet  écrivain  uuim.  ueci.  pr.  p. 
ne  fait  pas  difficulté  de  le  compter  au  nombre  de  ces  illustres 
Gaulois,  qui  par  leur  habileté  dans  les  letres  ont  fait  la  gloire  de 
cette  province.  '  S.  Jérôme  en  effet  releva  avec  éloge  l'éloquen-  mer.  chr.  p.  isi. 
ce  de  Tiberien.  Il  n'étoit  pas  sans  doute  moins  versé  dans  la 
jurisprudence  et  la  connoissance  des  loix,  qu'il  étoit  éloquent, 
puisqu'il  mérita  d'être  élevé  aux  premières  charges  de  judica- 
ture  de  l'Empire.  '  Dès  336  au  moins ,  sous  le  règne  du  grand  Tiu.  iwd.  p.  ««. 
Constantin  et  de  son  fils  de  même  nom,  Tiberien  fut  Vicaire 
du  préfet  d'Espagne.  '  De-là  il  passa  à  la  préfecture  des  Gau-  Hier.  ibu. 
les,  qu'il  paroît  avoir  exercée  dès  l'année  suivante  337.  '  On  Qoint.  iWd. 
ne  nous  aprend  point  ce  qu'il  devint  dans  la  suite.  Seulement 
on  assure  qu'il  s'acquitta  des  fonctions  de  cette  charge  avec 
autant  de  sagesse  et  d'intégrité,  que  de  suffisance. 

'Divers  critiques  ont  cru  que  notre  préfet  est  le  même  que  Gyr.hist.poët.diai. 
ce  Tiberien  célèbre  dans  Servius  et  dans  Planciades  Fulgen-  pèë?.' uf  c'.  4°*p. 
tius;  et  nous  ne  voions  rien  qui  contredise  leur  sentiment.  **'•*• 
Dans  cette  suposition  Tiberien  avoit  laissé  divers  écrits  de  sa 
façon ,  dont  ces  deux  anciens  auteurs  nous  ont  conservé  quel- 
que connoissance. 

'  Servius  témoigne  qu'il  avoit  suposé  une  letre  aportée  des  cyr.  iWd. 
antipodes  par  le  moïen  du  vent ,  avec  cette  inscription  :  Supe- 
ri  inferis  salutem.  A  cette  ocasion,  dit  Servius,  'libérien  trai- 
toit  de  la  communication  qu'on  disoit  être  entre  les  antipo- 
des et  notre  hémisphère. 

Fulgence  de  son  côté  fait  mention  d'un  livre  que  Tibe-  Fnig.myth.i.s.  n. 
rien  avoit  composé  sous  le  titre  de  Promethée ,  et  dans  lequel  '* 
il  avançoit  que  les  Dieux  avoient  donné  à  l'homme  ce  que 
chacun  d'eux  possédoit.  '  Ailleurs  il  lui  atribue  un  autre  livre  virg.  com.  p.  im. 
sur  Socrate,  dans  lequel    Tiberien  raportoit  que  Diogene  **'• 
le  cynique  s'étant  emparé  de  la  succession  de  Platon ,  il  n'y 
trouva  autre  chose  qu  une  langue  d'or.  '  Fulgence  cite  encore  exp.ser.ant.p.i83. 
de  Tiberien  quelques  vers  ,  ce  qui  feroit  juger  qu'il  auroit  été 
poëte. 


Tome  I.  Sec.  Part.  0 

8* 


V    SIECLE. 


106    LEONTIUS,  JUCUNDUS  ET  GLABRIO. 

LEONTÏUS,  JUCUNDUS  ET  GLABRIO, 

Grammairiens. 


S 


I  ces  grammairiens  trouvent  place  dans  cette  histoire , 
ce  n'est  point  qu'ils  se  soient  fait  une  certaine  réputation 
par  leur  savoir,  non  plus  que  quelques  autres  dont  nous  avons 
déjà  parlé,  ou  dont  nous  pourrons  parli-r  dans  la  suite.  Il  suf- 
fit pour  la  mériter,  qu'ils  aient  travaillé  ,  comme  ils  ont  fait , 
à  étendre  ou  soutenir  l'Kmpire  d  -s  letns  dans  les  Gaules.  C'est 
pour  cela  qu'Ausone  n'a  pas  jugé  lui-même  enson  temsleur 
mémoire  indigne  de  passeï'  à  la  posti'rité. 
A**,  prof.  r.  7.  '  I.eontius  llcurissoit  avant  le  milieu  de  ce  siècle,  etensei- 

gnoit  dès-lors  la  grammaire  à  Bourdeaiix.  Il  ne  s'y  acquit  pas 
beaucoup  de  gloir.-;  n'aïant  de  savfïr  qu'autant  qu'il  en  fal- 
loit  pour  ex'Tcer  celte  prof-ssion.  Il  possédait  si  parfaitement 
le  caractère  d'homme  plaisant,  agréable  et  enjoué,  qu'on  lui 
en  fît  porter  le  surnom  de  lascif.  (VI.)Mais  quoique  la  conduite 
de  sa  vie  ne  méritât  pas  cette  qualification  odieuse  en  elle-mê- 
me, il  ne  s'en  défendit  néanmoins  jamais,  parce  qu'-lle  plai- 
soit  à  ses  amis.  Il  étoit  beaueoup  plus  âgé  qu'Ausone  :  ce  qui 
n'empêclia  pas  qu'il  ne  fût  le  compagnon  inséparable  de  ce 
poëte  en  sa  jeunesse,  comme  il  le  témoigne  lui-même  par  ces 
deux  vers  : 

Tu  vacsD  scmpcr  socias  juvcntœ  , 
Pluribus  quamvis  cuuiulutus  anuis. 

cap.  9.  '  Leonlius  avoit  un  frère  nommé  Jucundus,  qui  exerçoit  la 

même  profession  que  lui,  et  dans  la  même  ville.  Celui-ci  avoit 
encore  et  moins  de  savoir  et  moins  de  capacité  que  l'autre , 
et  ocupoit  ainsi  une  cliaire  de  graniroaire,  sans  la  remplir.  Il 
passoit  même  communément  pour  ne  pas  mériter  le  titre  de 

Vin.  in  Ans.  $153.  grammairien.  '  Vinet  a  cru  que  ces  deux  frères  pouvoient  des- 
cendre d(^  cette  ancienne  famille  des  Leonfius ,  moins  illustre 
jar  sa  vertu  et  son  propre  mérite,  que  par  les  faveurs  dont  elle 
[ut  comblée,  comme  nous  l'aprenons  de  Plante. 


r. 


LEONTIUS,  JUCUNDUS  ET  GLABRIO.     107 

•  Acilius'  Glabrio  éloit  fils  d'Aquilinus,  et  issu  d'une  illus-     iv  siècle. 
tre  famille ,  qui  tiroit  son  origine  de  l'ancienne  Troie.  ''  Eu-  «Ans.  ibid.  e.u. 
nape  dans  la  vie  de  Porphyre  fait  mention  d'un  Aquilinus,  b  Eunap.  p.  le. 

3ui  avoit  étudié  à  Rome  avec  ce  fameux  philosophe  vers  la  fin 
u  III  siècle,  et  dont  il  dit  qu'il  y  avoit  quelques  écrits,  mais 
peu  estimés.  '  Il  y  avoit  aussi  un  Vettius  Aquilinus  consul  en  idat.  fasi.  p.  332. 
l'année  286  avec  Junius  Maximus.  On  ne  sauroit  dire  si  ces 
deux  Aquilinus  ne  sont  qu'un(î  même  personne,  ni  assurer  si 
l'un  ou  l'autre  fut  le  père  de  notre  grammairien.  Quoiqu'il 
en  soit,  '  il  paroît  ass-z  croiable  qu'il  descendoit  d'un  autre  vin.ibd.  g.  i69. 
Glabrio,  qui  fut  consul  avec  Commode,  et  qui  selon  Héro- 
dien  étoit  un  illustre  Sénateur,  et  faisoit  remonter  l'origine  de 
sa  famille  jusqu'à  Enée.  Savoir  comment  les  descendans  de 
cette  ancienne  maison  passèrent  à  Bourdeaux,  d'où  il  semble 
que  Glabrio  étoit  natif,  c'est  ce  que  personne  ne  nous  aprend. 

'  Glabrio  fît  ses  études  avec  Ausone  ;  et  celui-ci  aïant  eu  en-  Ans.  iWii. 
suite  une  chaire  d'éloquence,  Glabrio  en  eut  une  de  gram- 
maire dans  la  même  ville  qui  étoit  Bourdeaux.  Il  s'acquit  de 
la  réputation  dans  sa  profession  de  grammairien,  qu'il  relevoit 
par  plusieurs  excellentes  qualitf-s.  Il  étoit  humam ,  affable, 
complaisant ,  enjoué ,  tempérant,  aussi  disposé  à  donner  con- 
seil, que  retenu  à  s'en  glorifier  après  l'avoir  donné.  Il  hanta 
quelque  tems  le  barreau,  où  il  plaida  quelmiefois.  U  avoit  du 
goût  pour  l'agriculture,  qui  servoit  à  le  délasser  de  tems  en 
tems  de  ses  ocupations  pli's  sérieuses.  Il  se  maria,  et  eut  des 
enfans.  Mais  lorsqu'il  commençoit  à  soutenir  la  gloire  de  ses 
ancêtres,  et  à  faire  l'ornement  de  sa  patrie,  une  mort  préma- 
turée l'emporta  à  la  fleur  de  son  âge.  C'est  ce  qu'Ausone  dé- 
crit encore  mieux  dans  les  vers  suivans,  qu'il  a  consacrés  à  la 
mémoire  de  Glabrio. 


DoctriniB  vitteqne  pari  bre vitale  caducum , 
Glabrio,  te  mœstis  commemorabo  elegis. 

Stcmmate  nobilium  doductum  nomea  avorum, 
Glabrio  Aquiline,  Uardana  progenies. 

Tu  quondam  puero  compar  mihi  discipulos  :  mox 
Me  de  hinc  facto  rhetorc,  grammaticus. 


•  '  Le  prénom  de  Glahrio  dans  les  ma-  Glabrions  se  trouvent  dans  la  famille  Aci-    gcal.  in  Au».  I.  i. 

nnscriU  et  dans  le»  premières  impressions  liene  ;  et  l'on  a  suivi  cette  leçon  dans'  les    ^  jj 

d'Ansone  est  Atiliiis  :  mais  Joseph  Scaliger  dernières  impressions. 
croit  qu'il  IiMit  lire  Acilins,  parce  que^Jes 


Oij 


108  fil.ARRTO. 

IV    SIECLE. 

Inque  foro  tutela  reis,  et  cuttor  in  agris, 

Digne,  diu  partis  qui  fruerere  bonis. 
Commode,  lœte,  bénigne,  abstcmie,  tara  bone  dandis 

Semper  consiliis,  quam  taciturne  datis.    ■ 
Tam  decus  omne  tuis,  quam  mox  dolor,  omnia  acerbo 

Funere.pnereptus,  Glabrio ,  destituis. 
Uxore  et  nalis,  genitore  et  matre  rclictis, 

Bhcu  quam  multis  perdite  nominibus! 
Flete  diu  nohis ,  nunquani  satis,  accipe  acerbum, 

Glabrio  in  œternum  commemorate,  vale. 


I  CONCILE  DE  COLOGNE. 

^Conc. i.t.p.ei5.  •  r-vNnous  produit  les  actes  d'un  Concile  tenu  à  Cologne, 
vJ  qui  étoit  alors  une  ville  des  Gaules ,  le  douzième  jour 
de  Mai  après  le  consulat  d'Amance  et  d'Albin ,  ce  que  l'on 
raporte  à  l'an  346.  Le  sujef  de  la  convocation  de  ce  Concile 
fut,  disent  les  actes ,  la  déposition  d'Euphrate  Evêque  de  la 
même  ville.  Ce  prélat  se  trouvant  acusé  par  ses  propres  diocé- 
sains de  soutenir  que  J.  C.  n'étoit  pas  Dieu,  mais  seulement 
un  pur  homme,  ce  qui  formoit  l'hérésie  de  Photin  ;  et  ses  blas- 
phèmes étant  venus  à  la  connoissance  de  tout  le  monde,  le 
»      Concile  s'assembla  pour  le  juger. 

11  s'y  trouva,  dit-on,  quatorze  '  Evêques  :  S.  Maximin  de 
Trêves,  qui  est  nommé  le  premier,  comme  aïant  présidé  à  l'as- 
semblée; Valentin  d'Arles,  S.  Donatien  de  Châlons-sur-Sao- 
ne,  Severin  de  Sens,  Optatien  de  Troïes,  Jessé  de  Spire, 
Victor  de  Vormes,  Valerien  d'Auxerre,  S.  Simplice  d'Autun , 
Amand  de  Strasbourg,  Justinien  de  Basle,  Euloge  d'Amiens, 
S.  Servais  de  Tongres,  et  Dyscole  de  Reims.  Outre  ces  14 
prélats,  il  y  eut  encore,  continuent  les  actes,  dix  députés  d'au- 
tant d'autres  Eglises ,  de  Maïence,  de  Metz,  de  Langres,  de 
Besançon,  de  Verdun,  de  Paris,  de  Cambrai,  de  Soissons,  de 
Rouen  et  d'Orléans. 

p.  615.  en.  '  Après  la  lecture  de  la  letre  du  Clergé  de  Cologne ,  les 

pères  du  Concile  dirent  leur  avis ,  et  conclurent  tous  à  la  dé- 

Cone.ibid.p.  1803.       *  '  Le  P.    Sirmond  donne    ailleurs  les      me  atant  assisié  àceConcile.  Mais  ce  nom- 
^805.  souscriptions  de  34  Evéques  Gaulois  com-^      bre  ne  s'acorde  pai  avec  le*  actes. 


PREMIER  CONCILE  DE  COLOGNE.  109 

position  d'Euphrate.  Quelques-uns  opinèrent  même  à  le  pri-     iv  siècle. 
\er  de  la  communion  laïque.  Telle  est  en  peu  de  mots  l'histoi- 
re  de  ce  Concile,  qui  est  devenue  célèbre  en  ces  derniers  siè- 
cles par  l'embaras  qu'il  a  causé  aux  savans,  pour  concilier  les 
faits  qu'il  nous  présente  avec  le  reste  de  l'histoire  de  ce  tems-là. 

Il  s'y  rencontre  effectivement  tant  de  difficultés  et  si  insur- 
montables, que  le  plus  sûr  parti  seroit  peut-être  de  le  rejeter 
entièrement.  'C'est  ce  qua  fait  le  P.  Alexandre;  et  Mr  de  Til-  Tiii.  h.  e.  i.  e.  p. 
lemont  ne  paroît  pas  en  faire  plus  de  cas,  comme  il  est  aisé 
d'en  juger  par  tout  ce  qu'il  dit.  '  Après  avoir  fait  sentir  toutes  p.76î.76t. 
les  difficultés  qu'ont  à  lever  ceux  qui  veulent  en  soutenir  les 
actes,  '  il  remarque  ailleurs  avec  son  discernement  ordinaire,  i.  s.  p.  769.  no. 
qu'ils  ne  sont  apuïés  que  d'une  vie  de  S.  Servais  de  Tongres, 
faite  par  un  très-mauvais  auteur,  qui  aïant  ignoré  tout  ce 
qu'il  y  a  de  plus  vrai  dans  l'histoire  de  ce  Saint,  paroît  n'en  "''  ^"^ 

avoir  guéres  su  davantage,  que  ce  qu'il  y  a  inséré  de  faux.  '  Le  Conc.  ibid.p.  6«. 
P.  Sirmond  avoit  déjà  observé  de  son  côté,  qu'il  n'avoit  pu 
trouver  ces  actes  dans  aucun  manuscrit.  '  Un  autre  savant  est  tsu.  ibi.i.  t.  e.  p. 
dans  l'opinion  que  les  noms  des  Evêques  que  l'on  fait  paroî-  '^**' 
tre  dans  ce  Concile  ,  ont  été  copiés  sur  les  signatures  des  pères 
du  Concile  de  Sardique  tenu  en  347,  ce  qui  paroît  par  la  con- 
formité qu'il  y  a  entre  les  uns  et  les  autres.  Enfin  les  plus  ha- 
biles ne  croient  pas  qu'il  soit  parlé  de  celui  de  Cologne  dans 
aucune  histoire  avant  le  VIII  siècle  ;  et  il  n'y  a  presque  pas  lieu 
de  douter  qu'il  n'a  pas  été  connu  de  Flodoard,  puisque  dans 
l'histoire  qu'il  a  faite  de  l'Eglise  de  Reims ,  il  ne  parle  aucune 
part  de  Dyscole  qui  paroît  dans  ce  Concile  entre  les  autres 
Evêques. 

Nous  craindrions  d'ennuier  nos  lecteurs ,  si  nous  entrepre- 
nions de  toucher  les  autres  difficultés  que  les  actes  de  ce  Con- 
cile font  naître.  Nous  dirons  seulement  que  cet  Euphrate  con-  p.  762.76s. 
damné  dans  cette  assemblée  comme  hérétique  et  pire  qu'un 
Arien,  se  trouve  non-seulement  au  Concile  de  Sardique  l'an- 
née suivante,  mais  se  trouve  encore  député  par  ceux-mêmes 
qui  l'avoient  déposé  un  an  auparavant,  pour  aller  en  Orient 
obtenir  de  Constance  le  rétablissement  de  S.  Athanase.  C'est 
assurément  ce  qui  est  très-contraire  à  la  discipline  des  premiers 
siècles  de  l'Eglise.  '  On  établira  ,  si  l'on  veut ,  deux  personnes  p.  lOi. 
de  même  nom,  Evêques  de  Cologne  l'un  après  l'autre.  Mais 
l'on  tombe  par-là  dans  d'autres  difficultés  qui  ne  sont  guéres 
moins  insurmontables  que  celle  que  l'on  prétendoit  lever  en 


HO  SAINT  MAXIMIN, 

IV  SIECLE,     raisonnant  de  la  sorte ,  sans  néanmoins  avoir  de  preuves  pour 
un  tel  raisonnement. 


S.   MAXIMIN, 

EvEQUE  DE  Trêves. 

•  Tm.  H.  E.  i.  7.  »|-  E  personnage  que  fit  S.  Maximin  dans  l'Eglise,  et  les 
Li  grands  services  qu'il  lui  rendit,  le  font  regarder  com- 
me le  premier  Evêque  qui  fût  d*^  son  tems  dans  les  Gaules. 

swr.  29.  Mai.  p.  '  jj  j^pii  (j*q„e  aucieiine  noblesse  de  Poitou,  et  frère  de  S.  Ma- 

Tiii.  ibid.  xence  Evêque  de  Poitiers  avant  S.  Ililaire.  'La  tradition  du 

pais  porte  qu'il  naquit  à  Silé  village  près  f.oudun,  dont  l'E- 

sur.  ibid.  glise  paroissiale  est  dédiée  sous  son  nom.  '  Il  reçut  une  éduca- 

tion conforme  à  sa  naissance  ,  et  fut  très-bien  instruit  dans  la 
religion  Chrétienne.  Il  quitta  dcpuLs  sa  p.itrie,  et  se  retira  à 
Trêves,  attiré  par  la  réputation  de  la  sainteté  d'Agr.  ce  Evê- 
que du  lieu.  Il  fut  quelque  tems  .sous  sa  di.sdpline,  eii.suite  mis 
au  nombre  des  clercs  de  son  Eglise ,  et  enfin  élu  pour  son  suc- 
cesseur par  le  suffrage  unanime  du  peuple. 

Bj.ii.  29.  M«i.  p.  '  Un  des  auteurs  de  la  vie  de  notre  Saint,  met  son  ordina- 
tion en  la  27*  année  de  l'empire  du  grand  ('onstantin,  c'est-à- 
dire  en  332  ;  mais  on  n(!  peut  point  compter  sûrement  sur  celle 

Tiii.  ibid.  p.  248.  autorite.  'Ce qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  S.  Maximin  étoit 
Evêque  avant  le  commencement  de  l'an  336.  Ce  fut  alors 

Hi.r.chr.  p.  183.  '  qu'il  rcçut  à  Trêves  S.  .Vthanase  exilé  par  les  intrigues  et  les 
fourberies  des  Ariens.  S.  .lerôme  parle  avec  éloge  du  respect 
avec  lequel  notre  Saint  traita  cet  illustre  persécuté  pendant 
son  exil  :  exil  où  l'un  trouva  autant  d'avantage  que  l'autre  de 
consolation.  Car  si  S.  Maximin  servit  beaucoup  à  S.  Atlianase 
pour  adoucir  les  amertumes  de  .sa  disgrâce,  S.  Athanase  fut 
d'un  grand  secours  k  S.  Maximin,  en  lui  servant  d'exemple 
dans  la  défense  de  la  foi.  Notre  Saint  l'imita  avec  d'autant 
plus  de  succès,  qu'il  avoil  plus  d'autorité  pour  s'oposer  aux 

Tiii.  ibid.  p.  248.  euncmis  de  l'Eglise.  '  Trêves  étoit  alors  Ijs  séjour  ordinaire  d;  s 
Princes,  lorsqu'ils  residoieul  dans  les  (Jaules;  K  ses  EvAques 
avoient  par-là  une  autorité  éminente  au-dessus  des  autres  de 
la  même  nation. 

Ibid.  'S.  Maximin  s'en  servit  avec  avantage,  et  pour  rejeter  les 

députés  et  les  erreurs  des  Eu.sebiens,  et  pour  faire  rétablir  les 


\ 


EVEQUE  DE  TRÊVES.  111 

Evêques  Catholiques  qu'ils  avoient  chassés  de  leurs  sièges,     iv  siècle 

C'est  ce  qu'il  fit  entre  autres,  non  seulemeni  à  îi'égard  de  S.  " 

Athanase,  mais  aussi  à  l'égard  de  S.  Paul  de  Constantinople. 

'  11  avoit  eu  la  même  ocasion  de  connoitre  tout  le  mérite  de  Bail.  29.  Mai.  p. 

celui-ci,  et  de  lui  rendre  les  mêmes  devoirs  (ju'à  l'autre,  lors-  '**^' 

qu'aïant  été  expulsé  de  son  l'église  par  la  faction  des  Ariens,  il 

se  relira  à  Trêves,  où  S.  Maximin  lui  tint  lieu  de  tout. 

'  En  342,  les  Ariens  lâchèrent  de  surprendre  la  religion  de  xiii.  Emp.  i.  *.  p. 
l'Empereur  Constant.  A  cet  effet  ils  députèrent  dans  les  Gau-  '^" 
les  quaire  de  leurs  plus  habiles  Kvêcjues,  qui  lui  aporterent 
une  déclaration  captieuse  de  leur  doctrine.  S.  Ma.ximin  instruit 
de  l'intrigue,  s'opusa  fortement  à  ieur  dessein  ;  et  tout  le  fruit 
de  leur  voiagefulque  Constant  demeura  persuadé  de  l'inno- 
cence de  S.  Athanase,  et  des  autres  qu'ils  persecutoient,  et  se 
déclara  dans  la  suite  ouvertement  leur  protecteur. 

'  Trois  ans  après,  en  343,  S.  Maximin  .-^e  trouva  au  Concile  Bail.  ibid.  p.  45*. 
de  Milan,  où  les  députés  des  Eusebiens  furent  encore  reje- 
tés. '  Il  eui  la  consolation  de  revoir  en  cette  ville  S.  Athanase  Ath.  apo.  ao.  Con». 
que  l'Empereur  Constant  y  a.oit  fait  venir  de  Home.  Cesdeux  p  *^'' 
grands  prélats,  qui  desiroient  ardemment  de  voir  l'Eglise  en 
paix,  furent  les  premiers  qui  solicitèrent  auprès  de  Constant 
un  Concile  général,  comme  le  sûr  moïen  pour  établir  cette 
paix  si  désirable. 

'  Le  Concile  fut  effectivement  convoqué  à  Sardique,  où  il  conc.  t.  ï.  p.  679. 
se  tint  en  347.  S.  Maximin  y  assista  avec  plusieurs  autres  Evê- 
ques Gaulois.  '  S.  Athanase  y  fut  rétabli  de  nouveau,  et  les  plus  mi.  fr.  s.  m.s. 
zélés  des  Eusebiens  déposés.  '  Ceux-ci  indignés  de  voir  que  conc.ibid.  p.  697. 
leurs  intrigues  n'avoient  pas  le  succès  qu'ils  en  atendoient,  se  ®^" 
retirèrent  de  Sardique,  et  allèrent  à  Philippople  tenir  un  con- 
ciliabule, qu'ils  qualifièrent  Concile  de  Sardique,  pour  tâcher 
f>ar  cette  équivoque  d'abolir  la  mémoire  du  véritable  Conci- 
e  tenu  dans  cette  ville.  Ils  y  excommunièrent  nommément 
S.  Maximin  avec  le  Pape  Juîe,  Osius  de  Cordouë  et  plusieurs 
autres  Saints  Evêques.  Entre  les  prétendus  crimes  dont  ils 
chargeoient  notre  saint  Prélat,  mais  qui  ne  servoient  qu'à  fai- 
re son  éloge,  ils  l'acusoient  de  n'avoir  pas  voulu  recevoir  à 
Trêves  les  quatre  députés  qu'ils  avoient  envoies  vers  Constant  ; 
d'avoir  communiqué  le  premier  avec  Paul  de  Constantinople, 
et  d'avoir  été  cause  de  son  rétablissement  dans  son  siège. 

'Au  zèle  et  à  la  pieté  par  lesquels  il  releva  son  épiscopat,  snr.ibid.  p.  429. 
Dieu  joignit  le  don  des  miracles,  '  et  le  rendit  puissant  en  cr.T.his.Fr.  1. 1. 

D.3S. 


112  SAINT    MAXIMIN, 

IV  siECLK.  toutes  sortes  d' œuvres  de  sainteté.  '  Un  mérite  aussi  éminent  et 
77,1,  jp  ,j  t;^  aussi  généralement  reconnu  ''  porta  S.  Athanase  à  mettre  notre 
•■  -fig.  n.  '9  Saint  peu  de  tems  après  sa  mort,  au  nombre  des  hommes  Apos- 

toliques de  son  tems,  dont  la  foi  étoit  à  l'épreuve  et  de  la  foi- 
blesse  et  de  l'erreur. 

Comme  l'on  ignore  l'année  précise  de  l'ordination  de  S. 
Maximin,  on  ne  sait  point  non  plus  précisément  l'année  de  sa 
Boii. ibid.  p. 22. 1.  mort.  'Une  de  ses  vies  porte  qu'aïant  rempli  le  siège  de  Trê- 
ves 17  ans  et  30  jours,  il  mourut  dans  son  pais,  où  il  étoit 
P-2J.  i-  allé  faire  un  voïage.  '  Les  continuateurs  de  Bollandus  rapor- 

Tiii.ibid.  p.  219.  teut  ccttc  mort  au  douzième  de  Septembre  349.  '  Les  marty- 
rologes de  l'Eglise  de  Trêves  la  marquent  au  même  jour  ; 
quoiqu'elle  se  trouve  au  29°  de  mai  dans  ceux  de  Bede  et  dans 
les  postérieurs. 

S.  Maximin  ne  servit  pas  seulement  l'Eglise  par  les  mou- 
Aib.  ibid.  vcmcns  qu'il  se  donna  en  faveur  de  la  vérité  '  et  de  l'innocen- 

ce oprimée,  il  y  emploia  aussi  sa  plume.  Il  est  clair  par  la  ma- 
nière qu'en  parle  S.  Athanase,  qu'il  avoit  fait  quelques  écrits 
que  l'on  ne  connoît  point  d'ailleurs.  Il  paroît  seulement  que 
c'étoient  quelques  traités  pour  la  défense  des  points  de  foi  que 
combatoient  alors  les  Ariens.  Voici  de  quelle  manière  ce 
saint  Docteur  s'en  explique.  Nous  suivons  le  texte  grec,  qui 
est  plus  expressif  que  la  traduction  latine.  «  Si  les  écrits  qu'ils 
«  publient,  dit-il  en  parlant  des  Ariens,  venoient  de  la  part 
«  des  orthodoxes,  tels  que  seroient  ceux  du  grand  confesseur 
«  Osius,  de  Maximin  de  Gaule,  ou  de  son  successeur,  de  Phi- 
«  logone,  ou  d'Eustathe...  il  n'y  auroit  aucun  sujet  de  s'en 
«  défier.  Car  la  manière  d'écrire  de  ces  hommes  apostoliques 
«  est  exemte  de  toute  fourberie  et  duplicité.  » 

C'est  sur  ce  témoignage  que  Josias  Simler  a  mis  au  nom- 
bre des  Auteurs  ecclésiastiques  S.  Paulin  de  Trêves  désigné 
ici  sous  le  nom  de  successeur  de  S.  Maximin.  Il  est  vrai  que 
Simler  ou  son  imprimeur  par  une  erreur  grossière  ne  le  met 
qu'au  XV  siècle,  comme  nous  le  dirons  dans  la  suite. 


^.^  LUCU)i>US 


LUCIOLUS,   MINERVIUS  113 

=========================        V  SIECLE. 


LUCIOLUS,  MINERVIUS 

ET  STAPHYLIUS, 

Rhéteurs. 

LUCIOLUS  '  étoit  du  nombre  de  ces  professeurs  qui  ensei-  aus.  prof.  c.  3. 
gnoient  publiquement  l'éloquence  à  Rourdeaux  avant 
le  milieu  de  ce  IV  siècle.  Ausone  loue  beaucoup  la  douceur 
et  la  régularité  de  sa  conduite  :  qualités  nécessaires  à  ceux  qui 
sont  chargés  de  l'instruction  de  la  jeunesse.  D'abord  il  fut  con- 
disciple d'Ausone.  Il  devint  ensuite  son  maître,  aïant  eu  une 
chaire  d'éloquence  avant  lui.  Enfin  ils  se  trouvèrent  tous  deux 
collègues,  enseignant  l'un  et  l'autre  à  Rourdeaux  dans  le  mê- 
me tems.  Luciolus  fut  emporté  par  une  mort  violente,  et 
laissa  un  garçon  et  une  fille,  qui  ne  soutinrent  pas  le  rang  de 
leur  naissance.  Il  étoit  aussi  bon  maître  que  bon  ami  et  fidèle 
époux,  et  avoit  des  manières  honnêtes,  prévenantes  et  gracieu- 
ses envers  tout  le  monde.  Il  excelloit  tant  en  prose  qu'en 
vers,  et  l'on  jugeroit  qu'il  auroit  laissé  quelques  pièces  en  l'un 
et  l'autre  genre  d'écrire,  par  la  manière  qu' Ausone  parle  de 
son  éloquence  et  de  son  érudition. 

Facundum  doctumque  viram  seu  lege  metrorum 
Condita,  seu  prosis  solveret  orsa  modis. 

'  Alethius  Minervius  autre  professeur  d'éloquence,  et  fils  ^p.  6. 
du  célèbre  Rhéteur  Tiberius  Victor  Miner, ius,  naquit  à  Rour- 
deaux entre  le  commencement  et  le  milieu  du  IV  siècle.  Il 
vint  au  monde  avec  toutes  les  qualités  qui  font  les  grands 
hommes.  Dès  sa  jeunesse  il  mérita  une  chaire  de  rhétorique, 
et  enseigna  dans  le  lieu  de  sa  naissance  avec  une  réputation 
qui  égala  dès  lors  celle  de  son  père.  Il  épousa  malgré  celui-ci 
une  fille  de  condition,  qui  lui  aporta  de  grands  biens.  Mais 
une  mort  prématurée  l'enleva  au  monde  et  à  sa  patrie,  dont 
il  commençoit  à  faire  l'ornement  et  la  gloire.  Il  mourut  avant 
son  père,  et  ne  laissa  point  de  postérité. 

'  Staphylius  est  le  seul  professeur  étranger  à  l'égard  deRour-  c»p.  20. 
deaux,  dont  Ausone  nous  ait  laissé  l'éloge.  Tous  les  autres 
dont  il  parle,  ou  avoient  pris  naissance  dans  cette  ville,  ou  y 
Tome  I.  Sec,  Part,  P 


114  STAPHYLIUS. 

IV  SIECLE,  avoient  enseigné.  Sfaphylius  naquit  à  Auch  dans  la  Novem- 
■  populanie,  et  y  professa  la  rhétorique  après  les  premières  an- 
nées du  IV  siècle.  C'éloit  un  génie  rare  et  d'une  profonde  éru- 
dition. 11  possedoit  parfaitement  l'histoire  gn^que  et  la  latine, 
et  méritoit  pour  son  savoir  d'aller  de  pair  avec  le  docte  Var- 
ron,  si  l'on  en  croit  Ausone.  Il  avoit  toutes  les  qualités  requi- 
ses pour  un  parfait  orateur  :  la  parole  gracieuse  et  animée,  la 
prononciation  grave,  ni  trop  précipitée,  ni  trop  lente,  et  ce 
qui  est  le  principal,  le  don  de  persuader.  Pour  les  belles  le- 
tres,  il  égaloit  les  Scaures  et  les  Probes,  les  plus  habiles  gram- 
mairiens de  l'antiquité. 
A11.V  prof.  ibid.  '  Ausoue  ne  nous  aprend  point  quels  services  il  avoit  reçus 
de  Staphylius  ;  mais  il  nous  dit  qu  il  le  regardoit  et  comme  un 
autre  père,  et  un  autre  Arbore  son  oncle  maternel,  qui  avoit 
pris  soin  de  l'élever  et  de  l'instruire.  Notre  Rhéteur  vêquit  jus- 
ques  dans  une  heureuse  vieillesse,  dont  il  ne  sentit  jamais  les 
incommodités.  Jamais  il  ne  fut  sujet  à  la  colère,  et  passa  tou- 
jours pour  un  homme  d'une  droiture  à  l'épreuve.  Sa  mort  fut 
aussi  douce  que  la  vie  qu'il  avoit  menée.  Voici  les  propres 
termes  avec  lesquels  Ausone  nous  a  fait  son  portrait. 

Hactenns  observata  mihi  lex  commemorendi 

Cives,  sive  domi ,  seu  docuere  foris. 
Externum  sed  fas  conjungere  civibus  unum 

Te,  Staphyli,  genitum  8tjrpe  Noveinpopulis. 
Tu  mihi  quod  geoitor,  quod  uvunculus,  udus  utrumque 

Aller  ut  Ausonius,  altcr  ut  Arborius. 
Grammatice  ad  Scaurum,  atquc  Probum,  promtissime  Rbetor, 
'  Historiam  callens  Livii  et  Herodoti, 

Omnis  doctrina  ratio  tibi  cognita,  quantam 

Condit  seïcentM  Varro  Toluaiinibus. 
Aurea  mens,  vox  fluada  tibi,  tum  senno  quietus; 

Nec  cuQctator  eras,  nec  properaote  eono. 
Paiera  seaecta,  nitens  habitus ,  procul  ira  dolusque. 

Et  placids  vitse  congrua  meta  fuit. 


xibli 


II  CONCILE  D'ARLES.  115 


IV  SIECLE. 


II  CONCILE  D'ARLES. 

APRÈS  le  concile  de  Sardique  en  347 ,  et  le  conciliabule 
de  Philippople,  Us  divisions  que   i'Aiianisuie  avoit  cau- 
sées dans  l'Eglise,  s'aigrirent  plus  que  jamais.  Ce  fut  pour  tâ- 
cher de  les  appaiser  '  que  l'on  convint  d'assembler  un  Concile  hii.  fr.  b.  n.  3. 
à  Aquilée.  Il  y  avoit  déjà  du  tems  que  l'on  avoit  formé  ce 
dessein,  '  lorsqu'au  commencement  de  Novembre  353  l'Em-  Amm.  1.  1*.  p.  s. 
pereur  Constance  se  trouva  à  Arles,  où  il  passa  le  printems  de  ^^' 
l'année  suivante.  '  Pendant  qu'il  y  étoit,  le  Pape  Libère  lui  en-  hii.  fr.  5.  n.a  1  fr. 
voia  Vincent  de  Capouë,  Marcel   de  Campanie  et  quelques  ^°'^' 
autres  prélats,  pour  lui  demander  la  convocation  du  Conci- 
le dont  on  étoit  convenu.  Il  s'y  rencontra  encore  plusieurs 
autres  Evêques  d'Italie,  que  le  même  sujet  y  avoit  conduits. 
'  Ursace  avec  ses  complices,  qui  sans  doute  étoient  en  grand  Sui.  inst.i.s.  n.si. 
nombre,  et  qui  avoienl  de  coutume  de  suivre  la  cour,  s'y  trou-  ' 
verent  aussi.  L'Empereur  voiant  tant  d'Evêques  tout  rendus  à 
Arles  près  de  sa  personne,  en  prit  ocasion  d'y  assembler  ie 
Concile  que  l'on  demandoit. 

'  Les  circonstances  du  tems  n'étoient  néanmoins  guéres  au.,  ep.  ad.  mon. 
propres  à  faire  rien  espérer  de  bon  de  cette  assemblée.  Con- 
stance indigné  depuis  quelque.^  tems  de  voir  quantité  d'Evê- 
ques communiquer  avec  S.  Athanase,  avoit  oublié  toutes  les 
protestations  qu'il  avoit  faites,  et  à  l'Empereur  Constant  son 
irere,  et  à  S.  Athanase  même  de  ne  le  plus  troubler  dans  la 
suite,  et  mettoit  tout  en  œuvre  '  pour  détacher  tout  le  mon-  num.  31. 
de  de  la  communion  de  ci;  grand  Prélat.  Ce  n'etoil  que  letres 
menaçantes  et  courriers  envoies  dans  toutes  les  villes  pour 
soliciter  les  Evêques  et  les  magistrats  sous  peine  d'exil,  de 
prison,  de  perte  de  ses  biens,  à  s'unir  aux  Ariens,  et  souscrire 
a  la  condamnation  d'Alhanase.  Et  de  peur  que  les  courriers 
du  Prince  ne  négligeassent  leur  commission,  Ursace  et  Valens 
oubliant  leur  caractère  d'Evêques,  avoient  bien  voula  se  char- 
ger de  veiller  sur  eux,  et  de  dénoncer  à  l'Empereur  les  ma- 
gistrats qui  s'y  porteroient  avec  moins  de  zèle.  Ceux-ci,  qui 
se  voïoient  menacés  d'une  grosse  amende,  s'ils  n'engageoienl 
leurs  Evêques  à  se  rendre  aux  volontés  du  Prince,  usoient  de 
beaucoup  de  violence  dans  la  crainte  d'être  traduits  ccanme 

Pij 


116  II  CONCILE   D'ARLES. 

IV  SIECLE,  s'ils  les  eussent  épargnés.  On  leur entendoit  diredetoutes  parts 
'  aux  Evêques  avec  un  ton  menaçant  :  ou  souscrives,  ou  quit- 
tés vos  Eglises  ;  l'Empereur  le  veut  ainsi. 
ibid.  11.  33.  '  Constance  agissant  aussi  de  son  côté,  et  faisant  venir  quel- 
quefois les  Evêques  en  sa  présence,  il  leur  disoit  la  même 
chose.  Et  lorsque  ceux  qui  étoient  plus  attachés  à  la  vérité  qu'à 
leur  repos  ou  à  leur  fortune,  lui  répondoient  que  les  loix  de 
l'Eglise  ne  leurpermettoient  pas  de  se  prêtera  ce  qu'il  exigeoit, 
il  leur  répliquoit  :  «  ce  (jue  je  veux,  doit  passer  pour  loi  ;  et 
»  les  Evêque*  de  Syrie  (il  entend  les  Eusebiens)  n'en  discon- 
»  viennent  pas.  Obéissez  donc,  ou  attendez-vous  à  être  exilés. .. 
»  Comme  si  l'on  pouvoit,  s'écrie  S.  Athanase,  faire  goûter  la 
»  vérité  par  la  violence,  et  non  par  la  voie  de  persuasion  et 
»  de  raisonnement.  Et  y  a-t-il  lieu  à  la  persuasion,  où  tout  re- 
»  tentit  des  menaces  du  Prince  ?  » 

Telle  étoit  la  triste  situation  de  l'Eglise,  lorsqu'on  assem- 
bla le  II  Concile  d'Arles.  Ainsi  l'on  ne  doit  pas  être  surpris, 
Hii.tr.5.ii.i|Sui.  '  de  ce  que  les  Ariens  voulurent  que  l'on  y  commençât  par 
'  ■  '  contraindre  les  Evêques  à  condamner  Athanase.  Les  Catho- 

liques au  contraire  demandèrent  conformément  à  la  letre  du 
Pape  à  l'Empereur,  qui  contenoit  les  mêmes  prières,  qu'a- 
vant que  d'exiger  cette  condamnation,  on  traitât  la  cause  de 
la  foi  qui  étoit  bien  plus  importante.  Mais  on  le  demanda  en 
vain.  Les  Ariens  n'eurent  pas  la  hardiesse  d'entrer  en  dispute 
sur  les  matières  de  la  foi. 
ih.  u>id.n.  31.  'L'Empereur  qui  étoit  présent  à  cette  assemblée,  et  qui 
appuïoit  ouvertement  les  hérétiques,  ne  manqua  pas  d'y  faire 
tout  ce  qu'ils  lui  suggérèrent;  ou  pour  mieux  dire,  ils  y  firent 
eux-mêmes  tout  ce  qu'ils  voulurent,  et  mirent  tout  le  monde 
sous  leurs  pieds,  par  la  puissance  Impériale  dont  ils  se  trou- 
Hii.  ibid.  n.  3.  voicut  autorisés.  '  De  sorte  que  les  légats  du  Pape  cédant  à 
leurs  violences,  demeurèrent  d'accord  d'acquiescer  à  la  volon- 
té des  Orientaux,  et  firent  cette  offre  par  écrit.  Mais  ce  ne  fut 
qu'à  condition  que  ceux-ci  condamneroient  de  leur  côté  rhé7 
résie  d'Arius.  On  mit  l'affaire  en  délibération;  et  après  l'avoir 
examinée,  on  dit  aux  légats  pour  toute  réponse,  que  l'on  ne 
Ibid  I  socr.  I.  a.  c.  pouvoit  Condamner  la  doctrine  d'Arius,  '  mais  qu'il  falloit  pri- 
se, p.  131.  y^j,  Athanase  de  la  communion,  et  que  c'étoit  la  seule  chose 
que  l'on  demandoit.  Socrate,  qui  confond  ici  ce  qui  se  passa 
à  ce  Concile  avec  ce  que  l'on  fît  à  celui  de  Milan  qui  le  sui- 
vit de  près,  ajoute  que  le  dessein  des  Ariens  étoit  d'empê- 


Il   CONCILE  D'ARLES. 


117 


cher  Saint  Athanase  de  retourner  jamais  à  son  Eglise.  iv  siècle. 

'  Les  Evêques  Catholiques  s'apercevant  que  la  manœuvre  ^^~^j^[ 
des  Ariens  tendoit  au  renversement  de  la  foi,  s'écrièrent  avec 
véhémence  qu'une  telle  conduite  cachoit  des  artifices  perni- 
cieux à  la  religion  Chrétienne  ;  que  les  acusations  formées 
contre  saint  Athanase  étoient  autant  de  faussetés,  et  n'avoient 
été  inventées  que  pour  détruire  la  foi.  '  S.  Paulin  de  Trêves  Sai.  ibiii.  p.  as*. 
entre  autres  s'offrit  bien  à  la  vérité  de  souscrire  à  la  condamna- 
tion de  Photin  et  de  Marcel  ;  mais  pour  celle  de  S.  Athana- 
se, il  déclara  qu'il  ne  pouvoit  en  aucune  manière  l'aprouver. 
'  Il  fit  paroître  en  cette  ocasion  tant  de  zèle  et  de  fermeté  pour  B"-jj^- ■'",{* 
la  défense  de  la  foi,  tant  d'horreur  de  la  conduite  des  Ariens  ,  sni.ibid. 
et  d'éloignement  pour  prendre  aucune  part  à  l'hypocrisie  et 
à  la  perle  des  autres ,  qu'il  fut  exilé  en  Phrygie  par  ordre  de 
l'Empereur. 

C'est-là  ce  que  nous  savons  de  principal  de  ce  II  Concile 
d'Arles,  qui  ne  fut  proprement  qu'un  conciliabule,  où  la  vé- 
rité fut  abandonnée  et  trahie  par  le  plus  grand  nombre.  '  Il 
se  tint,  comme  l'on  a  pu  l'observer,  ou  à  la  fin  de  l'an  353  , 
ou  au  commencement  de  l'année  suivante.  On  voit  par  S.  Sul- 

Kice  au'on  y  faisoit  souscrire  la  condamnation  de  Photin  et  de 
larcel  d'Ancyre  conjointement  avec  celle  de  S.  Athanase. 
Nous  n'avons  point  les  actes  de  cette  assemblée ,  qui  ne  nous 
est  connue  que  par  ce  qu'on  en  trouve  dans  les  auteurs  que 
nous  venons  de  citer.  '  S.  Hilaire  en  avoit  fait  l'histoire ,  et  mi.fr.  i 
commençoit  par-là  l'ouvrage  contre  Ursace  et  Valens,  com- 
me l'on  croit,  duquel  il  ne  nous  reste  plus  que  des  fragmens. 


lad 
81 


Till.  H.  F.  l.  6.  p. 
360. 


n.  6. 


I  CONCILE  DE  BEZIERS. 

LES  Ariens  malgré  toutes  leurs  violences,  n'aïant  pu  con- 
traindre tous  les  Evêques  Catholiques,  ni  dans  le  Con- 
cile d'Arles  dont  nous  venons  de  parler,  ni  dans  celui  de  Mi- 
lan qui  le  suivit  de  près,  à  souscrire  à  la  condamnation  de  S. 
Athanase,  ils  en  firent  assembler  un  troisième,  qui  fut  com- 
me une  suite  des  deux  autres.  '  Il  se  tint  à  Beziers  dans  la 
Gaule  Narbonoise  avant  le  mois  de  Juin  de  l'année  366.  Sa- 
turnin Evêque  d'Arles,  l'un  des  faux  apôtres  de  ce  tems-là, 
comme  parle  S.  Hilaire,  c'est-à-dire,  l'un  des  plus  dévoués  à 
l'Arianisme,  qui  en  cette  qualité  avoit  tout  crédit  auprès  de 


Hil.  inCoDsI.  n.2| 
Till.  H.  E.  I.  6.  p. 
396  I  t.  7.  p.  Ml. 
749. 


118 


I    CONCILE    DE    BEZIERS. 


Hil.  lie  Syn. 
11511.  llol  - 
Consl.  D.  i. 


Siil.  Iiist.   I.  ± 
ra.  p.  388. 


ilil.   in  Const. 
2  I  S.I2.  1.  4.  c. 
p.  .'i47. 
TUl.  ibid.  l.  7. 


IV  SIECLE.  l'Empereur  Constance,  eut  le  plus  de  part  à  la  convocation 
de  cette  assemblée.  11  ne  la  procura,  ce  semble,  que  pour  ta- 
cher de  se  dédommager  de  ce  que  lui  et  la  mauvaise  (  ause 
qu'il  défendoit,  a\oient  perdu  auprès  des^jEvêques  des  CJau- 
les.  '  Car  ceux  de  la  Belgique,  de  la  Lyonoise,  de  l'Aquitai- 
ne ,  avec  Hodane  de  Toulouse  et  les  Evêques  de  la  grande 
Bretagne,  toujours  atachés  à  la  vtrité,  s'étoient  séparés  de  la 
communion  de  Saturnin  et  de  ses  complices,  Ursace  et  Va- 
lens.  '  Le  but  de  ce  Concile  étoit  encore  la  condanmalion  de 
S.  Athanase ,  quc  l'Empereur  vouloit  l'aire  souscrire  à  tous  les 
Evêques. 

'  Entre  ceux  qui  composèrent  l'assemblée  ,  on  ne  connoît 
nommément  de  la  part  des  Catholiques,  que  S.  Uilaire  de 
Poitiers  et  Rodane  de  Toulouse  :  '  du  côté  des  Ariens  Satur- 
nin d'Arles,  qui  paroit  y  avoirjjrésidé,  et  Paterne  de  Périgueux. 
Comme  les  actes  de  ce  conciliabule  ne  sont  pas  venus  jusqu'à 
nous,  on  ignore  tout  ce  qui  s'y  passa.  Un  juge  néanmoins  par 
le  peu  de  conjioissance  que  nous  donne  S.  Ililaire  ,  que  les 
Ariens  y  firent  autant  de  mal,  qu'ils  avoient  de  puissance.  Et 
jusqu'où  ne  la  portoient-ils  pas,  puisque  l'Empereur  les  apuioit 
en  tout  1 1ls  y  trouvèrent  toutefois  deux  généreux  adversaires 
en  la  [lersonne  de  S.  Uilaire  et  celle  de  Rodane. 

'  Celui-là  sur-lout  y  agit  avec  toute  la  vigueur  d'un  zèle 
vraiment  épiscopal.  11  s'y  oposa  ouvertement  aux  blasphèmes 
des  hérétiques,  et  s'y  rendit  dénonciateur  des  fauteurs  de  l'A- 
rianismi-'.  Il  présenta  môme  des  témoins  contre  eux ,  et  s'of- 
frit de  justifier  qu'ils  étoient  dans  l'hérésie.  '  Il  y  dit  beaucoup 
de  choses  importantes  qui  découvroient  les  ruses  et  les  dain- 
nables  inlenlions  des  ennemis  de  la  foi.  Il  piouva  qu'ils  ten- 
doienl  à  sapper  l'Evangile  par  ses  fonuemens,  à  renverser  la 
religion,  et  à  deshonorer  J.  C.  par  leurs  blasphèmes  sous  pré- 
texte de  lui  rendie  témoignage.  Mais  on  lui  refusa  la  liberté 
de  parler  avec  toute  l'élenduë,  l'ordre  et  la  netteté  que  le  su- 
jet demandoit.  Plus  il  pressoit  qu'on  lui  donnât  audience,  plus 

m  Coiisi.  II.  2.  les  ennemis  de  la  vérité  s'obstinoient  à  la  lui  refuser.  '  Us  crai- 
gnoient  de  se  voir  confondus  à  la  lumière  du  pubhc.  Ainsi  ils 
refusèrent  d'écouter  ce  que  ce  grand  Evêque  vo.uloit  leur  di- 
re, dans  la  iausse  pensée  qu'une  ignorance  volontaire  pourroit 
les  justifier  devant  Dieu  de  ce  qu'ils  dévoient  faire  dans  la  sui- 
te avec  connois.sance  de  cause. 

Tiii.  ibid.  p.  441.        '  11  n'en  fallut  pas  davantage  pour  atirer  à  S.  Uilaire  toute 


Hil.  de  syn.  o.  2  | 
in  Coost.  n.  2. 


fr.  2.  n.  5. 


I   CONCILE    DE    BEZIERS.  H9 

l'indignation  des  Ariens,  qui  le  déposèrent,  s'il  en  faut  croire  le     iv  siec  le. 
fameux  Auxence  Evêque  de  Milan  l'un  d'entre  eux.  Non  con-  '  ' 

tens  de  leurs  propres  violences,  ils  trompèrent  Julien  alors 
César,  qui  étoit  venu  dans  les  Gaules  à  la  fin  de  l'année  335  , 

et  l'engagèrent  à  donner  quelque  ordre  contre  cet  invincible  mi.  ad  Consi.  i.  2. 
Prélat,  quoiqu'il  eût  été  tr'moin  de  l'injustice  <ivec  laquelle  on 
Tavoit  traité.  Enfin  sur  une  fausse  relation  de  ce  qui  s'éloit  pas- 
sé dans  cette  assemblée,  que  l'on  avoit  eu  soin  d'envoïer  à 
Constance,  ce  Prince  relégua  S.  Hilaire  en  Phrygie.  '  Floda-  SoribiJ.  • 
ne  de  Toulouse  eut  le  même  sort,  et  fut  exilé  dans  la  même 
province,  où  il  mourut  bien-tôt  après. 

Une  tyrannie  aussi  criante  contre  deux  des  plus  grands  Hii.inConst.  n.  ii. 
Evêques  des  Gaules,  et  tant  d'autres  vexations  exercé;^s  con- 
tre les  Catholiques  et  des  Eglises  entières,  '  ne  furent  point  n.  2 1  do  syn.  n.  2. 
capables  d'intimider  nos  autres  Pr'lats  (Jaulois.  Ils  eurent  assez 
de  courage  et  de  générosit '■  pour  excommunier  Saturnin  et 
les  autres  plus  zélés  partisans  de  l'Arianisme ,  et  persévérèrent 
constamment  à  leur  refuser  leur  communion,  et  à  s'atacher  à 
S.  Hilaire.   De  sorte  que  le  conciliabule  de  Beziers  n'eut  point 
l'effet  que  les  Ariens  s'en  étoient  promis,  non  plus  que  ceux 
d'Arles  et  de  Milan,  '  qui  ne  servirent  de  même  qu'à  faire  Ath. p.  ad.  mon.  n. 
des  confesseurs  de  la  consubstantialité  du  Verbe  ;    S.  Denys 
de  Milan,  S.  Eusebe  de  Verceil  et  Lucifer  de  Cagliari  aïant 
été  exilés  dans  ce  dernier,  et  S.  Paulin  de  Trêves  dans  l'au- 
tre, pour  s'être  oposés  aux  ennemis  déclarés  de  ce  dogme  de 
foi. 


G  E  N  N  A  D  E, 

Orateur; 
CRISPUS,    URBICUS,    HERCULANUS, 

GrA  M  MAIRIE  ISS. 


L  n'y  a  aucune  preuve  certaine  pour  croire  ce  Gennade 
Gaulois  de  nation,  ou  même  d'origine.  Nous  ne  laissons 
pas  néanmoins  de  lui  donner  place  dans  cette,  histoire  ,  parce 
u'un  écrivain  moderne  le  mit  natif  d'une  de  nos  provinces, 
'est  Aubert  le  Mire,  qui  dans  l'édition  de  la  chronique  de 


I 


ï 


120  GENNADE,  ORATEUR, 

V  SIECLE.    S.  Jérôme  qu'il  a  donnée  au  public,  fait  cet  orateur  du  pais  de 

Forés  au  diocèse  de  Lyon.  II  établit  sa  prétention  sur  un  des 

termes  dont  se  sert  S.  Jérôme  pour  faire  l'éloge  de  Gennade. 

iii.jr.  c\ir.  I.  s.  p.  Lcs  voici  '.  '  Genuodius  forensis  orator  Romçe  insignis  habe- 
tur.  Le  Mire  prétend  que  forensis  ou  foronensis,  comme  porte 
son  édition  ,  signifie  un  homme  de  Forés  ,  qui  faisoit  autrefois 
partie  de  la  province  des  Segusiens.  C'est  ce  qu'il  explique  lui- 
même  à  la  marge  par  Forosegusianus.  Maison  peut  assurer 
que  ce  n'est  pas-là  la  signification  du  terme  de  S.  Jérôme.  Le 
Forés  ne  paroît  pas  avoir  été  dés-lors  connu  sous  ce  nom ,  et  ne 
s'exprimoit  pas  très-certainement  par  le  mot  latin  dont  le  Mire 
•fait  venir  Foronensis. 

noi.  p.  p.  721.  '  De  Pontac  dans  ses  notes  sur  la  même  chronique  qu'il  a 

donnée  aussi  au  public,  remarque  que  dans  deux  manuscrits 
de  cette  chronique ,  au  lieu  de  forensis,  ou  foronensis,  on  lit 
forojuliensis ,  de  Fréjus.  Cette  leçon  peut  être  la  véritable.  Car 
il  paroît  assez  inutile  que  S.  Jérôme  eût  joint  le  terme  de /b- 
rensis  à  celui  d'orateur  ;  puisque  la  principale  ocupation  des 
orateurs  de  ces  tems-là  étoit  de  hanter  le  barreau  et  d'y  plai- 
der. Après  tout  il  pourroit  fort  bien  nous  avoir  voulu  faire  en- 
tendre par-là  que  Gennade  ne  faisoit  point  d'autre  usage  de 
son  éloquence  que  dans  le  barreau.  Ainsi  c'étoit  un  avocat  cé- 
lèbre à  Rome  peu  après  le  milieu  de  ce  IV  siècle. 

Au  même  tems  qne  Gennade  brilloit  à  Rome  par  son  élo- 

Ans.  prof.  c.  81.    queucc.  '  Crispus  et  Urbicus  illustroient  le  collège  de  Bour- 

deaux,  où  ils  enseignoient  ensemble  la  grammaire  gréque  et 

latine.  Ils  étoient  l'un  et  l'autre  de  condition  libre  ;  mais  ils 

Seal,  in  Un».  11. e.  mauquoieut  de  preuves  pour  le  justifier.  '  De-là  quelques  sa- 

"■  vans  conjecturent  que  ces  deux  grammairiens  avoient  été  ex- 

posés par  leur  parens,  et  élevés  par  des  étrangers,  comme  il  est 

An<i.  ii.i  I.  arrivé  à  plusieurs  autres  hommes  de  letres.  '  Us  avoient  toutes 

les  qualités  nécessaires  pour  soutenir  dignement  leur  profession. 
Ils  étoient  fort  versés  dans  la  lecture  des  bons  auteurs  ,  parti- 
culièrement des  poètes,  et  possedoient  parfaitement  l'histoire 
et  la  fable.  Ils  joignoient  à  tout  cela  une  grande  facilité  à  en 
faire  usage  dans  les  ocasions. 

il»'  I  '  On  remarque  d'Urbicus  en  particulier,  qu'il  réunissoit  en 

sa  personne  les  trois  genres  d'éloquence  que  les  poètes  ont 
loués  en  trois  fameux  Héros  de  l'antiquité,  Menelaùs,  Ulysse 
et  Nestor:  c'est-à-dire,  la  brièveté,  la  rapidité  et  la  douceur 
du  discours.  Il  négligea  dans  la  suite  la  langue  latine  pour  se 


URBICUS,    HERCULANUS.  121 

donner  tout  entier  à  la  gréque  dans  laquelle  il  excella.  "  L'on     iv  siècle. 
trouve  un  Urbicus,  qui  avoit  lié  commerce  de  letres  avec  l'o-  ,  sym.  i.  s.  cp.  sî. 
rateurSymmaque.  Mais  celui-ci  étoit  beaucoup  plus  jeune  que 
le  grammairien,  dont  nous  venons  de  faire  l'éloge. 

'  Pomponius  Maximus  Herculanus  enseigna  aussi  quelque  Aas.  par.  c.  n  | 
tems  la  grammaire  à  Bourdeaux  en  même  tems  que  Cnspus  et  ^"°  '  *''  "' 
Urbicus.  '  Il  étoit  neveu  du  poëte  Ausone  par  sa  mère  Julia  par.  c.  u.  m. 
Dryadia,  et  fils  de  Pomponius  Maximus,  qui  mourut  à  la 
fleur  de  son* âge,  et  fut  fort  regreté  du  sénat  de  Bourdeaux  , 
où  il  semble  qu'il  remplissoit  une  place.  '  Il  avoit  pour  frère  c.  is. 
le  jeune  Arbore ,  dont  nous  avons  dit  ailleurs  quelque  chose  , 
'  et  pour  sœur  Megentrie  ,  qui  épousa  Paulin  intendant  de  Li-  as.  n. 
bye,  puis  gouverneur  de  la  province  Taraconoise.  '  Hercu-  «•  i7. 
lanus  joignoit  à  un  génie  heureux  toutes  les  qualités  du  bel 
homme.  Il  avoit  beaucoup  de  vivacité,  une  grande  discrétion 
dans  ses  paroles ,  savoit  la  musique  ,  et  possedoitla  bonne  élo- 
quence. '  Dès  sa  première  jeunesse  Ausone  le  regardoit  com-  proLcii. 
me  devant  faire  un  jour  l'ornement  et  la  gloire  de  sa  famille. 
Après  avoir  fait  ses  études  sous  le  même  Ausone,  il  se  trou- 
va ensuite  son  collègue  dans  la  même  école,  et  auroit  hérité 
de  sa  chaire  d'éloquence,  si  une  mort  prématurée  n'avoit  fait 
avorter  ce  dessein,  comme  elle  fît  tomber  les  grandes  espéran- 
ces que  l'on  avoit  conçues  de  son  mérite  extraordinaire. 

S.  PAULIN, 

EvEQUE  DE  Trêves  et  Confesseur. 

ON  sait  peu  de  chose  de  l'histoire  de  ce  grand  Evêque  ; 
mais  le  peu  qu'on  en  sait,  nous  donne  une  haute   idée 
de  son  mérite.  Il  fut  le  premier  confesseur  qui  souffrit  en  Oc-  i 

cident  pour  la  divinité  de  J,  C.  et  l'un  des  plus  zélés  défen- 
seurs de  l'innocence  de  S.  Athanase,  dont  la  cause  étoit  in- 
séparable de  celle  de  la  foi  :  traits  glorieux  qui  suffîroient  seuls 
pour  faire  son  éloge. 

La  vie  de  S.  Agrece  nous  représente  Paulin  comme  le  fils  boIi.  is.  jan.  p. 
spirituel  de  S.  Maximin,  et  natif  du  même  pais  que  lui,  c'est-  ''*""-^'- 
à-dire  de  Poitou,  ainsi  qu'on  l'a  vu.  '  Après  la  mort  de  S.  Ma-  »•  mai.  p.  23. 1 1 
ximin  en  349,  Paulin  fut  élu  à  sa  place  ;  et  Ton  peut  dire  que  ml  "^'  """•  ''■ 
l'on  ne  pouvoit  mieux  réparer  la  perte  que  venoit  de  faire  le 
siège  métropolitain  de  Trêves.  Ses  premières  actions  ,  dès 

Tofnel.  Sec.  Part.  Q 

9  * 


122  S.  PAULIN, 

V  SIECLE,     qu'il  eut  été  élevé  à  l'épiscopat,  lurent  en  faveur  de  la  foi ,  alors 
rr^        '.    T  étrangement  ataquée  par  les  Ariens.  '  Il  semble  qu'aussi-lôt  il 

Atn.   iipo.    m   Ar.    ^      ,  "  ce  ■■  \    w  /•       i     l^ 

II.  58.  fit  à  cet  (alet  un  voiage  a  nome,  et  que  ce  lut  de-la  qu  il  en- 

vola à  S.  Athanase  l'acte  de  retractation  d'Ursaco  et  de  Valens. 

ep.ad.roon.n.76|        '  Eu  353,  l'Empereur  Constance  aiant  convoqué  à  Arles 

?'''n.''3*iiS"  coli!t.'  I<i  Concile  dont  nous  avons  parlé,  S.  Paulin  s'y  trouva  en  per- 

"•  *'■  sonne,  et  s'y  signala  cnln;  les  autres  iilvêques  Catholiques  par 

son  zèle  tout  de  feu  pour  ia  défense  de  la  foi  et  de  l'innocen- 
ce oprimée.-  Ni  la  chute  de  Vincent  de  Capouë  légat  du  Pa- 
pe Libère  ne  fut  point  capable  de  l'alfoililir,  ni  la  présence 
de  l'Empereur  de  l'intimidi-r,  ni  les  caresses  dont  ce  Prince 

a.1  Const.  1. 1.  11.  8.  usa  onvcrs  lui,  de  le  corrompre.  '  Non-seulement  il  s'oposa 
comme  un  mur  d'airain  aux  blasphèmes  les  plus  grossiers  des 

Aih.  ibid.  Ariens  ;  '  mais  il  eut  encore  la  générosité  de  faire  tête  à  un 

Empereur  qui  voubit  violer  impunément  les  loix  de  l'Egli- 
se, et  donner  ateinte  aux  droiti»  sacrés  de  l'épiscopat. 

BiHi.in  Ar.ibid.  '  Ursace  cl  Valeus  toûjiiurs  in.séparables  et  zélés  pour  faire 

le  mal,  oubliant  la  reiractaliin  qu'ils  avoienl  envoiée  au  Pa- 
pe Jule,  par  laquelle  ils  desavouoient  les  calomnies  dont  ils 

ep.  ad  Mou.  ibid.  avoicnl  cuargé  S.  Athanase,  '  et  malgré  leur  réunion  avec  ce 
Saint  persécuté,  ne  laissèrent  pas  dans  la  suite  de  fiire  revivre 
ces  anciennes  calomnies.  11  paroîl  même  qu'ils  lui  imputèrent 
de  nouveaux  prétendus  crimes  dans  le  Concile  d'Arles.  Saint 
Paulin  à  la  lêle  des  aulres  Evêques  qui  étoient  demeurés  fer- 
mes dans  la  vérité,  represenia  avec  une  sainte  vigueur  qu'Ur- 
sace  et  Valens  s'éiant  une  fois  reiraclés,  ne  meriioient  plus 
aucune  créance.  A  ces  mois  l'Empereur  (i)  se  leva  et  prit  la 
parole.  «  C'est  moi,  dif-il  d'un  ton  de  Souverain  ,  c'est  moi 
«  qui  suis  l'acusaleur  d'Alhanase  ;  et  vous  devez  par  respect 
«  pour  moi  ajuûler  foi  à  ce  qu'ils  diseni  centre  lui.  »  Les  bons 
Evêques,  entre  lesquels  S.  Alhanase  nomme  toujours  S.  Pau- 
lin le  premier,  lui  fîrenl  voir  l'injustice  de  sa  prétention  ,  et 
la  différence  qu'il  y  a  entre  un  jugement  purement  civil,  où 
l'on  pourroit  s'en  raporier  à  la  décision  du  Prince,  et  un  juge- 
ment ecclésiastique,  où  il  s'agissoil  de  l'honneur  d'un  Evèque 
que  l'on  ne  pouvoit  juger  sans  l'entendre. 

Ibid  ^M.  hisi.  I.  s.       'De  si  justes  remontrances  ne  firent  qu'aigrir  l'esprit  du 

"■''^■''■"  Prince.  La  cabale  des  Ariens  à  la  faveur  de  la  crainte  qu'ins- 

piroil  la  présence  de  l'Empereur  ,  prit  le  dessus  ;  el  l'on  con- 

II)  s.  Albnnase  ponrrnit  bien  confondre      pa^sa  àArIps,  qnoiqn'il  nomme  S.  Paulin, 
ici  e«  qui  se  passa  à  Milan  atee  m  qui  se      qui  étoit  «xilé  avant  i*  Concile  de  Milan. 


EVEQUE  DE  TREVES.  123 

dut  à  la  condamnation  de  S.  Athanase.  S.  Paulin  soutenant  ivsiecl  . 
toujours  le  caractère  d'Evêque,  à  qui  la  vérité  étoit  plus  pré- 
cieuse  que  toutes  choses  au  monde,  refusa  constamment  de  se 
prêter  à  une  injustice  aussi  criante.  Lorsqu'on  lui  présenta  la 
formule  du  Concile  à  souscrire,  il  déclara  qu'il  consentoit  vo- 
lontiers à  la  condamnation  de  Photin  et  de  Marcel,  mais  que 
pour  celle  de  S.  Athanase,  il  ne  pouvoit  en  aucune  manière 
raprouver.  '  Il  témoigna  à  cette  ocasion  toute  l'horreur  qu'il  mi.  fi.  i.n.c. 
avoit  des  Ariens,  et  son  éloignement  infini  de  prendre  part  à 
la  dissimulation  et  à  la  perte  de  ceux  qui  consentoient  à  leur 
perfidie. 

'  Cette  sainte  générosité  digne  du  siècle  des  apôtres,  lui  ati-  iwd. 
ra  l'indignation  des  Evêques  Ariens  qui  le  déposèrent,  et  cel- 
le de  l'Empereuf  qui  l'exila.  (')  '  Son  exil  fut  d'autant  plus  dur,  in  const.  n.  ii. 
que  Constance  s'efforça  davantage  de  lasser  sa  patience,  en  le 
reléguant  sans  cesse  d'un  lieu  en  un  autre  jusqu'à  sa  mort.  Il 
eut  même  la  cruauté  de  l'envoïer  dans  des  pais  oii  le  nom 
Chrétien  étoit  inconnu,  et  dans  d'autres  où  il  n'y  avoit  que  des 
Monlaiiistes,  afin  qu'il  fût  réduit  ou  à  mourir  de  faim,  ou  à  se 
nourrir  de  viandes  souillées  par  l'hérésie.  Ainsi  l'Eglise  de  Trê- 
ves se  vit  privée  de  ce  grana  Evêque,  qui  dans  cette  persécu- 
tion publique  et  générale  de  l'Egli.se,  acquit  le  premier  en 
Occident  le  titre  glorieux  de  contesseur,  et  mérita  par-là  la 
qualité  d'homme  bienheureux  dansses  souffrances,  que  lui  don- 
ne S.  Hilaire  de  Poitiers. 

'  Il  mourut  en  Phrygie  l'an  359,  après  cinq  ans  ou  environ  Hier.  chr.  i.  2.  p. 
d'exil.  Il  y  a  quelque  lieu  de  croire  qu'il  n'étoit  plus  au  monde  ^^' 
dès  le  mois  de  septembre  de  la  même  année;  puisou'il  ne  fut 
point  apellé  au  Concile  de  Seleucie ,  qui  se  tint  alors,  com- 
me le  fut  S.  Hilaire  exilé  dans  la  même  province. 

Telle  fut  la  fin  '  de  cet  excellent  Evêque,  de  ce  prédicateur  Aih.apo.fni?.n.4| 
de  la  vérité,  de  cet  homme  apostolique,  comme  le  qualifie  S.  *p- '"' ^p^»- ■'•  « 
Athanase,  de  ce  confesseur  intrépide  de  la  divinité  du  Verbe, 
dont  tout  le  crime  consistoit  h  s'être  refusé  à  l'impiété  Ariene, 
et  à  avoir  pris  la  défense  de  l'innocence  reconnue.  '  Un  écrivain  Notk.  m\.  scri.  c. 
du  IX  siècle  ne  fait  pas  difficulté  de  regarder  S.  Paulin  comme  ""  ''"  "' 
comparable  aux  plus  grands  hommes  que  l'Orient  a  donnés 

tu  s.  Jerdme  marque  l'exil  de  S.  Paulin  plus  tard  eD  3.>4.  Mais  c'es(  qae  S.  Jerdm^,    p.  18*. 

avec  ceux  de  Rodam-,  de  S    Eusebe.  de  S.  comme    presque  tons    les  autres  écrivains 

Di-nys  et  de  Lucifer  sur  l'an  356;  quoiqu'il  des  IV  et  V  siecirs,  a  confondu  ce  qui  s'est 

soit  constant  que  notre  Saint  fnt  exilé  aussi-  passé  dans  les  Conciles  d'Arles ,  de  Beziers 

idt   après    le  II»  Concile  d'Arles  tenu  an  et  de  Milan. 


124  S.   PAULIN. 

IV  SIECLE,  à  l'Eglise,  et  de  le  compter  entre  les  plus  bVillantes  lumières  de 
l'iii.  II.  i;.  t.  G.  p.  l'Eglise  d'Occident.  '  Sa  fête  se  célèbre  le  31*  d'Août,  auquel 
<^'-  jour  son  nom  est  marqué  dans  les  martyrologes  anciens  et  mo- 

dernes, comme  d'un  confesseur  mort  en  paix  dans  son  exil. 

Nous  avons  déjà  remarqué  en  parlant  de  S.  Maximin  de 
Trêves,  que  S.  Paulin  son  successeur  avoit  laissé  comme  lui 
quelques  traités  de  sa  façon  en  faveur  de  la  vérité  alors  com- 
Aiii.ep.a(iEp.ieg.  batuë  par  les  Ariens.  '  C'est  ce  qui  paroît  manifestement  par 
'•'''•  un  endroit  de  la  letre  de  S.  Athanase  aux  Evêques  d'Egypte 

et  de  Libye.  Comme  nous  avons  déjà  raporté  cet  endroit  à  la 
fin  de  l'éloge  de  S.  Maximin,  nous  ne  le  répéterons  pas  ici. 
simi.  p.  842.  Josias  Simlcr,  qui  met  S.  Paulin  de  Trêves  au  nombre  des 

écrivains  ecclésiastiques,  en  lui  atribuant  un  livre  pour  l'affer- 
missement de  notre  foi  contre  les  hérétiques,  ne  paroît  point 
avoir  eu  d'autres  fondemens  pour  le  faire,  que  ce  que  nous 
en  aprend  S.  Athanase  dans  l'endroit  cité.  Mais  il  s'est  glissé 
une  faute  grossière  dans  le  texte  de  Simler,  où  l'on  fait  vivre 
S.  Paulin  au  XV  siècle,  au  lieu  du  IV,  auquel  il  fleurissoit 
effectivement. 


PATERE, 

Rhéteur. 

Ans.  prof.  c.  4.  .-S.  '  i  TTius  Patera  ,  l'un  des  plus  célèbres  Rhéteurs  de  son 
iVtems,  étoit  fils  du  Grammairien  Phœbicius,  dont  nous 
avons  parlé,  et  père  de  l'orateur  Delphide,  dont  nous  don- 
nerons l'éloge  dans  la  suite.  '  Son  nom  de  Patere  semble  être 
plutôt  un  nom  apellatif  qu'un  nom  propre,  suivant  la  force 
de  ces  deux  vers  a  Ausone  : 


10 


Ihiil.  I  c.  10. 


Tibi  Paterœ;  sic  ministres  nuncupant 
Appollinaris  mystici. 

'  Sa  famille  étoit  de  Raïeux  dans  l'ancienne  Armoriaue,  et  ses 
ancêtres  de  l'académie  des  Druides  (VII).  Au  moins  le  croioit- 
on  ainsi  au  tems  d' Ausone. 

Ce  fut  aparemment  la  réputation  des  écoles  de  Rourdeaux, 

„,j,)  qui  l'atirerent  dans  cette  ville.  '  Il  y  enseigna  la  rhétorique 

après  les  premières  années  de  ce  siècle  ;  et  c'est  pour  cela  qu'- 

Ausone  lui  donne  rang  entre  les  professeurs  de  ce  collège. 


PATERE,  RHETEUR.  125 

»  Il  eut  le  crédit  d'y  faire  donner  une  chaire  de  grammaire  à    iv  siècle. 
Phœbicius  son  père,  qui  ne  trouvoit  plus  le  moien  de  vivre  r^^^TiTTiô! 
dans  sa  dignité  de  grand  prêtre  d'Apollon.  '  Patere  se  fit  ad-  c.  ♦. 
mirer  dans  Bourdeaux  et  par  la  régularité  de  sa  vie  et  par  ses 
grands  talens.  Il  avoit  beaucoup  de  mémoire,  et  personne 
en  son  tems  n'avoit  ni  plus  d'érudition  ni  plus  d'éloquence. 
Ses  discours  étoient  coulans,  polis,  pleins  d'ornemens  et  de 
sel,  mais  exemts  de  ces  pointes  piquantes  qui  sentent  le  satyre. 

'  Ausone  en  faisant  l'éloge  de  notre  Rhéteur,  insiste  particu-  iwa. 
lierement  sur  son  éloquence,  comme  sur  le  talent  qui  lui  don- 
noit  le  plus  de  relief  :  Paiera  fandi  nobilis .  '  Voulant  ailleurs  c.  14. 
faire  connoître  otuelle  gloire  s'étoit  acquise  Agricius  par  son 
éloquence,  il  ne  fait  que  la  comparer  à  celle  que  Nazaire  et  Pa- 
tere s'étoient  acquise  eux-mêmes  par  la  leur.  '  S.  Jérôme  con-  mer.  pp.  ad  Hed. 
vient  aussi  que  Patere  et  Delphide  son  fils  excelloient  et  dans  ''■  *^" 
l'art  de  bien  parler  et  dans  la  connoissance  des  sciences  pro- 
fanes. Mais  ils  eurent  le  malheur  avec  tout  leur  savoir  de  ne 
pas  sortir  des  ténèbres  du  Paganisme  où  ils  étoient  nés.  C'est 
ce  que  le  même  père  témoigne  assez  clairement  dans  une  de 
ses  letres  écrite   à  Hédilie  Dame  de  pieté  et  de  mérite ,  qui 
étoit  de  la  famille  de  ces  Rhéteurs. 

'  De  Bourdeaux  Patere  alla  à  Rome,  où  il  continua  à  ensei-  iwd  i  ehr.  1.  2.  p. 
gner  la  Rhétorique  avec  une  réputation  extraordinaire  :  Paiera  ***' 
Rhelor  Romœ  gloriosissime  docel.  Il  y  brilloit  dans  l'exercice  '' 
de  cet  emploi  dès  avant  la  naissance  de  S.  Jérôme,  et  même  dès 
l'an  337  au  moins.  '  On  remarque  entre  les  autres  principales  aus.  ii>id.  c.  «. 
circonstances  de  sa  vie ,  qu'il  forma  tant  à  Rome  que  dans  les 
autres  endroits  où  il  enseigna,  d'habiles  Rhéteurs  :  Doctorpo-  ' 

leHlum  Rhelorum.  Il  parvint  jusqu'à  une  heureuse  vieillesse, 

dont  il  ne  sentit  jamais  les  incommodités,  '  et  vécut  assez  pour  "■  » "  ■■•'■ 

voir  la  disgrâce  de  Delphide  son  fils,  dont  nous  parlerons  bien- 
tôt. '  Quoique  Patere  ne  fût  qu'un  païen,  Ausone  n'a  pas  laissé 
de  trouver  dans  sa  pudeur  et  sa  tempérance  matière  à  son  éloge. 
Nous  en  allons  copier  une  partie,  afin  de  mieux  connoître  ce 
grand  homme. 


Doctrina  nulli  tanta  in  illo  tempore, 
Cursusque  tôt  fandi  et  rotae. 

Memor,  disertus,  lucida  facundia, 
Canore,  cultu  pneditus. 


e.  4. 


126  PATERE,  RHETEUR. 

IV  SIECLE.  Salibus  modestus  fdle  nullo  pcriitis. 

Viiii  cibiquu  altstcmius, 

LaituR,  piidicua,  pulclier,  in  senio  quoque,  ut 
Aquilui  scni'ctus  autcqui. 


MINERVIUS, 

Orateur  et  Rhéteur. 

Ans.  prof.  c.  1.  '  rpiBERius  VictoF  Mincrvius  est  le  premier,  non  par  son 
J-  ancienneté,  mais  par  .son  mérite,  dont  Aiisone  fait  l'é- 
loge entre  les  professeurs  de  Bourdenu-:.  Il  naquit  dans  cette 
ville  tout  à  la  fin  du  III  siècle,  et  aporta  en  naissant  de  très- 
grandes  qualités.  Il  avoit  une  mémoire  si  heureuse,  qu'il  n'ou- 
Blia  jamais  ce  qu'il  avoit  ou  lu  ou  entendu  une  seule  fois,  et 
qu'il  le  savoit  à  pouvoir  s'y  fi»  r  aussi  sûrement  qu'aux  livres 
mêmes.  Il  étoit  d'une  humeur  douce,  agréable  et  enjouée 
dans  la  conversation,  et  railloit  finement  sans  savoir  piquer. 
Son  éloquence  étoit  vive  ,  pure  et  abondante.  H  possedoit 
éminemment,  ajoute  Au.sone,  tout  ce  que  Demostnene  de- 
mande pour  faire  un  parfait  orateur,  et  n'avoit  pas  moins  d(j 
talens  pour  bien  écrire,  que  pour  bien  parler.  Il  exccUoit  dans 
le  panégyrique  et  le  genre  de  déclamalion,  en  quoi  on  le  ju- 
geoil  comparable  à  Ouintilien. 
ibw.  '  D'abord  Minerve  enseigna  la  rh'^orique  à  Bourdeaux,  de- 

là à  Constantinople,  puis  à  Rome,  d'où  il  revint  dans  le  lieu 
Hier.  chr.  1. 2.  p.  de  sa  naissaucc  y  continuer  le  même  emploi.  '  A  Rome  en 
*^'  particulier,  où  il  enseignoit  vers  354,  il  brilla,  selon  S.  Jerô- 

An«.  ibid.  me,  avcc  un  éclat  tout  extraordinaire.  '  Il  ne  fil  pas  moins 

d'honneur  aux  écoles  de  cette  grande  ville,  qu'il  s'acquit  de 
gloire  à  lui-même.  Mais  ce  ne  fut  pas  sans  y  ressentir  les  traits 
malins  de  l'envie,  qui  n'en  veut  ordinairement  qu'aux  gens- 
d'esprit  et  de  mérite.  '  C'est  ce  qui  a  fait  dire  de  lui  à  Ausone  : 


e.6. 


nie  .supc-rbœ 
Mœnia  Romae, 
Fama  et  mcritis. 
Non  sine  morsu 
Gravis  invidix, 
laclytus  auxit. 


MINERVIUS,  ORATEUR  ET  RHETEUR.  127 

•Minerve  savoit  soutenir  par  une  vie  réglée  la  gloire  que    iv  siècle. 
son  éloquence  lui  a  voit  acquise.  Sa  table  étoit  propre,  mais  .j^us.  ibid.  et. 
frugale,  et  telle  que  Pisoii  même  n'auroit  pas  fait  difficulté 
de  l'aprouver.  Que  si  queljuefois  il  se  trouvoit  obligé  de  don- 
ner quelque  fête,  il  le  faisoit  avec  une  générosité  proportion- 
née à  son  petit  revenu. 

'  Tant  de  riches  talens  et  de  rares  qualités  réunies  en  la  iwd. 
même  personne,  ont  fait  regarder  Minerve  comme  un  des 

firincipaux  ornemens  de  la  ville  et  du  collège  de  Bourdeaux. 
1  y  mourut  à  l'âge  de  00  ans,  regieté  de  tout  le  monde,  com- 
me l'est  un  propre  père,  ou  comme  s'il  ne  fût  mort  qu'à  la 
fleur  de  son  âge.  Divers  trails  de  son  éloge  font  juger  qu'il 
laissa  quelques  pièces  d'éloquence  de  sa  façon;  mais  on  ne  les 
connoît  point  d'ailleurs.  '  Il  lUt  un  fils  nommé  Alethius  Mi-  c.  6. 
nervius  aussi  Rhéteur  dont  nous  avons  dnja  pau'lé;  mais  il  eut 
la  douleur  de  le  voir  mourir  avant  lui. 


E 


EXUPERE, 

Rhéteur, 
ET    CITARIUS, 

GrAMMAIRIEiN. 

xupERE    ttoit   natif  de   Bourdeaux  ;  et  c'est  pour  cela  Ans.  prof.  e.  n. 

qu'Ausone  a  fait  son  éloge  entre  ceux  des  professeurs 
de  celle  ville,  quoiqu'il  n'y  eût  pas  enseigné.  Il  avoit  tous  les 
talens  qui  font  les  granus  uraù  urs,  et  les  soûlenoit  par  plu- 
sieurs autres  belles  qualités.  Il  éloil  parfaitement  bien  fait, 
grave  dans  sa  démarche,  et  a-oit  les  manières  les  plus  aima- 
bles du  monde.  Il  enseigna  d'abord  la  rhélcjrique  à  Toulouse; 
mais  il  n'y  fut  pas  long-!ems.  Aïant  ét('  obligé  d'easortir,  il 
se  retira  à  Narboime,  où  il  continua  à  donner  des  leçons  d'é- 
loquence. Pour  h;  peu  de  tems  qu'il  enseigna  A  Toulouse,  il 
eut  l'honneur  d'y  instruire  dans  les  lelres  les  deux  Princes 
Dalmace  et  Annibalien,  pelits-fîls  de  Constance  Chlore,  et 
neveux  par  leurs  pères  de  même  nom  qu'eux,  de  l'Empereur 
Constantin  alors  régnant.  Ces  deux  Princes,  dont  l'un  fut  fait 
César  en  335,  et  l'autre  Roi  de  Pont  et  d'Arménie,  reconnu- 
rent le  soin  qu'Exupere  avoit  pris  de  leur  instruction  par  la 


128     EXUPERE  RHET.  ET  CITARIUS  GRAMM. 

IV  SIECLE,    charge  de  gouverneur  d'Espagne  qu'ils  lui  procurèrent.  Exu- 

père  après  l'avoir  exercée  quelque  tems,  et  y  avoir  amassé  (Je 

grandes  richesses,  revint  dans  les  Gaules,  et  alla  s'établir  à  Ca- 

hors,  où  il  mourut  en  paix. 

Har.  an.  ♦05.11.  Gi|       '  Divers  écrivains  sont  tombés  dans  des  erreurs  deconfu- 

ii'  U8'i"vin!  !o  sion  presque  impardonnables  à  l'égard  de  ce  Rhéteur.  Les  uns 

Aus.  j.  161.  j»Qj^j  pj.jg  pQjjj.  jg  prêtre  ou  œconome  de  l'Eglise  de  Rour- 

deaux  de  même  nom  que  lui,  dont  S.  Paulin  de  Noie  fait  men- 
tion dans  ses  letres;  et  l'ont  fait  Evoque  de  Toulouse.  D'au- 
tres ont  cru  que  c'est  le  même  qu'Exupere  Evêque  de  Cahors 
en  ce  IV  siècle.  Mais  ce  sont  quatre  personnes  réellement 
distinctes  les  unes  des  autres,  quoique  de  même  nom.  Il  est 
certain  que  notre  Rhéteur  n'est  point  le  même  que  S.  Exupere 
Evêque  de  Toulouse  qui  vivoit  encore  en  409  ou  même  411, 
comme  il  paroît  par  S.  Jérôme,  puisqu'il  étoit  mort  lorsqu'- 
Ausone  faisoit  son  éloge,  et  qu'Ausone  n'étoit  plus  lui-même 
au  monde  à  la  fin  du  IV  siècle.  On  doit  faire  le  même  rai- 
sonnement à  l'égard  d'Exupere  prêtre  de  Rourdeaux.  On  ne 
peut  pas  dire  non  plus  qu'il  soit  l'Evêque  de  Cahors  de  mê- 
me nom.  Car  il  n'est  pas  croïable  qu'Ausone  qui  étoit  si  bien 
instruit  de  l'histoire  de  sa  vie,  et  qui  en  relevé  des  traits  oui 
n'en  valent  pas  la  peine ,  eût  oublié  son  épiscopat  dans  l'élo- 
ge qu'il  nous  a  laissé  de  ce  Rhéteur. 

Vers  le  même  tems  qu'Exupere  professoit  l'éloquence  à 
Narbone,  ou  qu'il  joûissoit  des  avantages  que  lui  avoit  pro- 
Aus.  prof.  c.  13.  curés  sa  profession,  '  Cilarius  enseignoit  la  grammaire  gréque 
à  Rourdeaux,  Il  étoit  natif  de  Siracuse  en  Sicile.  Mais  aparem- 
ment  la  réputation  du  collège  de  Rourdeaux  l'atira  dans  celte 
ville.  Il  contribua  beaucoup  à  y  faire  fleurir  les  sciences  tapt 
par  son  aplication  à  instruire  la  jeunesse  que  par  son  talent  à 
laire  des  vers.  Ausone  qui  avoit  été  son  ami  le  compare  à 
Aristarque  et  à  Zenodote  pour  l'érudition  ,  et  à  Simonide 
pour  la  beauté  de  sa  poésie  gréque,  dans  laquelle  il  excelloit 
Seal.  leci.  in  Aus.  même  dès  sa  jeunesse.  '  Scaliger  croit  que  l'épigramme  quç 
1. 1.  c.  12.  ^^^g  avons  sur  les  pasteurs,  est  de  ce  grammairien.  '  Citarius 

épousa  à  Rourdeaux  une  femme  noble  et  riche,  et  y  mourut 
sans  enfans.  Voici  l'éloge  entier  qu'Ausone  a  consacré  à  sa 
mémoire. 

Et  Gitari  dilecte  mihi  memorabere,  dignus 
R>  v^q  1J<      Grammaticos  inter  qui  celebrere  bomos. 

Esset 


Aus.  ibid. 


I 


l  CONCILE  DE  PARIS.  129 

Esset  Aristarchi  tibi  gloria  Zenodotique  IV   SIECLE. 

Graiorum,  antiquus  si  scqueretur  honos. 
Carminibus,  qua;  prima  tuis  sunt  condita  in  annis, 

CoDcedit  Cei  Musa  Simonidci. 
Urbe  satus  Sicula,  nostram  peregrinus  adisli  : 

Excultam  studiis  quam  prope  reddideras. 
Conjugium  nactus  cilo  nobilis  et  locupletis, 

Invidia  fati  non  genitor  moreris. 
At  nos  defunctum  memori  celebramus  honore, 

Fovimus  ul  vivum  munere  amicitiœ. 


I  CONCILE  DE  PARIS. 

ON  ne  convient  pas  unanimement  de  l'année  en  laquelle 
se  tint  ce  Concile.  Quelques-uns  le  placent  dès  l'an  360, 
d'autres  le  renvoient  en  362,  et  quelques  autres  le  rejelent 
encore  plus  loin.  Mais  l'opinion  la  mieux  fondée  est  celle  qui 
le  met  en  361.  '  En  effet  il  paroît  certain  qu'il  fut  un  de  ceux  tju.  h.  e.  t.«.  p. 

Îu'assembla  S.  Hilaire  de  Poitiers  aussi-tôt  après  son  exil,  d'où  *^' 
revint  avant  la  fin  de  l'an  360,  comme  on  le  verra  dans  la 
suite. 

'  On  a  un  juste  sujet  de  présumer  que  ce  grand  Evêque,  sni.hht.i.  2.n.60. 
que  Dieu  par  un  miracle  tout  extraordinaire  de  sa  providen-  ses"*.'*»'"  ""' 
ce  avoit  rétabli  dans  son  siège  au  même  tems  qu'on  chassoit 
les  autres  des  leurs,  n'eut  rien  de  plus  pressant  que  de  réparer 
le  tort  qu'avoit  fait  à  la  foi  le  Concile  de  Rimini .  '  S.  Jérôme  Hier.  chr.  i.  ».  p. 
dit  expressément  qu'en  celte  même  année  les  Gaules  condam-  '**' 
nerenl  les  fourberies  de  ce  faux  Concile.  '  D'ailleurs  la  ré  vol-  tui.  ibid. 
te  de  Julien,  qui  vers  ce  même  tems  prit  le  titre  d'Auguste 
dans  les  Gaules,  put  bien  faciliter  cette  condamnation ,  et  '     '  ' 

donner  aux  Evoques  de  l'Eglise  Gallicane  le  moïen  de  se  ren- 
dre en  cela  l'exemple  de  toute  l'Eglise. 

'  D'abord  S.  Hilaire  ne  savoit  à  quoi  se  résoudre,  parce  que  sni.  uiid.  p.  «is. 
la  plupart  étoient  d'avis  de  n'admettre  point  du  tout  à  la  com-  *"• 
munion  ceux  qui  avoient  aprouvé  le  concile  de  Rimini.  Mais 

fiour  lui,  il  jugea  plus  à  propos  de  rapeller  tout  le  monde  à 
a  pénitence.  11  assembla  donc  à  cet  effet,  dit  S.  Sulpice,  plu- 
sieurs Conciles  dans  les  Gaules.  Là  presque  tous  les  Evêques 
aïant  reconnu  l'erreur  où  il  étoient  tombés,  S.  Hilaire  fit 

Tome  I.  See.  Part.  R 


î 


130  I  CONCILE  DE  PARIS. 

IV  SIECLE,    condamner  ce  qui  s'étoit  fait  à  Rimini,  et  rétablit  ainsi  la  foi 
■  de  l'Eglise  en  l'état  où  elle  étoit  auparavant. 

On  voit  par-là  quel  fut  le  motif  de  la  convocation  du  Con- 
sul, iiid.  p.  «5.     cile  de  Paris  et  une  partie  de  ce  qui  sly  passa.  '  Cefutapa- 
remment  dans  cette  même  assemblée  que  Paterne  de  Péri- 
gueux  homme  lâche,  qui  refusoit  de  reconnoître  qu'il  avoil 
pris  part  à  la  perfidie  Ariene,  se  vit  déposé  de  l'épiscopat.  On 
y  confirma  l'excommunication  déjà  portée  contre  Saturnin 
d'Arles ,  convaincu  d'hérésie  et  devenu  odieux  pour  ses  cri- 
mes. Ce  coup,  qui  priva  les  Ariens  de  leur  chef  dans  les  Gau- 
les, y  affoiblit  considérablement  leur  parti.  L'on  pardonna 
aux  autres  Evêques  qui  eurent  assez  d'humilité  pour  recon- 
noître leur  faute. 
Nous  ignorons  quels  furent  les  Evêques  qui  composèrent 
ttM-  cette  assemblée  et  en  quel  nombre  il  s  y  trouvèrent.  '  Il  pa- 

roît  néanmoins  indubitable  que  S.  Hilaire,  qui  aux  termes  de 
S.  Sulpice  eut  le  plus  de  part  à  sa  convocation,  y  assista  en 
personne,  et  en  fut  même  comme  l'ame.  Tout  le  monde  con- 
venoit  effectivement  que  ce  fut  par  les  soins  de  ce  grand  Evê- 
1 .»  .a  .1       que,  que  nos  Gaules  furent  purgées  du  crime  de  l'hérésie  Arie- 
ne. On  a  aussi  un  légitime  sujet  de  croire  que  S.  Servais  de 
Tongres  et  S.  Phébade  d'Agen,  qui  avoient  eu  le  malheur  de 
tomber  à  Rimini,  saisirent  l'ocasion  du  Concile  de  Paris  pour 
se  relever  de  leur  chute,  et  qu'ainsi  ils  augmentèrent  le  nom- 
Hii.  fr.    11.  p.  bre  des  Evêques  qui  le  composèrent.  '  Nous  sommes  redeva- 
bles à  S.  Hilaire  de  la  letre  synodale  de  ce  Concile,  qu'il  avoit 
insérée  dans  son  grand  ouvrage  sur  le  progrès  de  l'Arianisme 
en  Occident,  et  que  nous  avons  encore  parmi  les  fragmens 
qui  nous  restent  de  cet  ouvrage. 
Tiii.  ibid.  p.  457.      '  Cette  Ictrc  est  comme  la  réponse  à  une  autre  letre  des 
Evêques  d'Orient,  déposés  et  bannis  par  le  Concile  de  Cons- 
Hii.  ibid.  n.  2.      tautinople  au  commencement  de  l'an  360.  '  Ce  qui  le  per- 
suade, est  la  teneur  même  de  la  letre.  Les  Evêques  des  Gau- 
les y  parlent  du  Concile  de  Rimini  comme  d'une  chose  ré- 
cente, et  s'en  retractent  comme  ne  l'aïant  point  encore  fait 
jusqu'alors.  Ilss'yjustifientdusoupçondeserreursdeSabellius, 
dont  les  Orientaux  les  croïoient  tachés,  ainsi  qu'il  paroît  par  la 
justification  que  S.  Hilaire  fut  obligé  d'en  faire  au  Concile  de 
sui.  ibiii.  n.  19. 60.  Seleucic.  '  Ces  Prélats  donc,  qui  un  an  auparavant  avoient 
•*■  admis  S.  Hilaire  comme  Evêque  dans  ce  dernier  Concile,  et 

TiiLibid.  qui  avoient  connu  son  courage  àConstantinople,  'lui  écri- 


1  CONCILE  DE  PARIS.  \M 

virent  à  dessein  peut-être  de  se  soutenir  dans  leur  opression ,    iv  siècle. 

par  la  société  et  l'union  de  ce  grand  Evêque  et  des  autres  Oc-  ~ 

cidentaux.  '  Par  leur  letre  ils  aprou voient  le  terme  de  substan-  hu.  ibid.  n.  4. 
ce,  et  demandoient,  1".  que  l'on  tînt  pour  excommuniés  Au- 
xence,  Ursace,  Valens,  Caïus,  Megase  et  Justin  ;  2".  que 
l'on  rejetât  aussi  tous  les  Evêques  apostats  mis  à  la  place  de  ceux 
que  l'on  avoit  chassés;  3".  que  l'on  condamnât  quelques 
propositions  qu'ils  avoient  jointes  à  leur  letre. 

'  Les  pères  du  Concile  de  Paris  répondant  à  ces  Evêques  n.i. 
d'Orient,  rendent  d'abord  grâces  à  Dieu  de  les  avoir  délivrés 
eux-mêmes  de  l'hérésie,  et  de  leur  avoir  fait  connoître  les  vé- 
ritables sentimens  des  Orientaux.  '  Ensuite  faisant  une  profes-  n.î.3. 
sion  ouverte  de  leur  foi,  avec  une  retractation  du  Sabellianis- 
me,  et  une  explication  très-claire  de  la  consubstantialité,  sans 
rejeter  néanmoins  le  terme  de  semblable  au  Père,  '  ils  revo-  „.  4. 
quent  et  retractent  tout  ce  qui  s'étoit  fait  par  ignorance  con- 
tre leur  devoir.  Ils  promettent  de  plus  d'exécuter  tout  ce  que 
les  Orientaux  demanaoient  d'eux,  sous  peine  de  déposition  et 
d'excommunication  contre  ceux  oui  y  contreviendroient  dans 
les  Gaules,  sur  tout  au  sujet  de  l'excommunication  d'Auxen- 
ce  et  des  autres.  Ils  finissent  en  les  avertissant  que  Saturnin 
d'Arles  avoit  été  excommunié  par  tous  les  Evêques  des  Gau- 
les ,  qui  avoient  déjà  écrit  deux  letres  touchant  son  excom- 
munication. 

'  Cette  letre  synodale  porte  pour  titre  :  Incipit  fides  catholica  p.  1353. 
exposita  apud  Fariseam  civitatem  ab  Episcopis  Gallicanis  ad 
Orientales  Episcopos.  '  Et  finit  ainsi  :  Explicit  fides  catholica  p.  law. 
exposita  apud  Fariseam  civitatem,  etc.  Mais  depuis  que  cette 
pièce  a  paru  dans  le  public,  personne  n'a  douté  qu'il  nefalût  lire 
Parisiam,  pour  Fariseam.  Nicolas  le  Févre  est  le  premier  qui  la  Conc.  t.  2.  p.  823. 
publia  entre  les  fragmens  de  S.  Hilaire.  Le  P.  Sirmond  l'aïant 
trouvée  depuis  dans  un  ancien  manuscrit  de  S.  Rémi  de  Reims, 
l'inséra  dans  sa  collection  des  Conciles  de  France,  d'où  elle  est 
passée  dans  lesautres  collections  générales  des  Conciles,'  et  dans  Dnb.  hist.  ecc.  par. 
l'histoire  de  l'Eglise  de  Paris  par  le  P.  Dubois.  *•  '•  "■  ®- 


Rij 


IV  SIECLE. 


132  PAUL. 

PAUL 

EvEQUE  DE  Paris. 


A 


VANCER  des  conjectures  sans  en  donner  de  raisons,  ou 
au  moins  les  apuïer  de  quelques  vraisemblances  ,  c'est 
s'exposer  à  ouvrir  une  voie  aux  contestations,  plutôt  que  de 
fournir  un  moien  propre  à  découvrir  la  vérité.  Mais  on  évite  cet 
inconvénient  lorsqu'apuïé  sur  un  fondement  If^gitime,  quoi- 

3ue  seulement  aparent,  on  avance  une  opinion  pour  tâcher 
'arriver  à  la  connoissance  d'une  chose  qui  n'est  pas  encore 
connue.  Alors  la  conjecture  d>it  être  admise,  jusqu'à  ce  qu'il 
vienne  de  nouvelles  lumières  suffisantes  pour  éclaircir  entiè- 
rement le  fait  dont  il  est  question.  C'est  sur  ce  principe  que 
nous  donnons  ici  une  conjecture  au  sujet  de  Paul  Evêque  de 
Paris. 
Genn.  vir.  ui.  c.  '  Gcunade  entre  les  premiers  Ecrivains  ecclésiastiques  qui 
"•  composent  son  catalogue,  parle  d'un  Evêque  nommé  Paul, 

qui  avoit  écrit  un  traité  de  la  pénitence .  Dans  cet  opuscule  l'au- 
teur prescrivoit  pour  règle  aux  pénilens,  de  concevoir  une  tel- 
le douleur  de  leurs  péchés,  qu'ils  ne  se  laissassent  point  em- 
porter par  un  excès  de  tristesse  dans  l'abyme  du  désespoir. 
G'esl-là  tout  ce  que  Gennade  nous  aprend  de  cet  auteur  et 
de  son  ouvrage,  qui  ne  subsiste  plus  aujourd'hui. 

11  est  sans  difficulté  que  le  nom  et  la  dignité  de  cet  Ecri- 
vain conviennent  à  l'Evêque,  qui  fait  le  sujet  de  cet  article. 
Le  tems  n'y  convient  pas  moins,  comme  l'on  va  s'en  convain- 
Monch.  demis.  I.  crc.  '  Ce  Prélat  est  compté  pour  le  septième  entre  ceux  qui  ont 
Gaii.*ch?.TTt.*i.  gouverné  l'Eglise  de  Paris  depuis  S.  Denys  son  premier  Evê- 
p-  *«3-  que.  Il  vivoit  du  tems  du  Concile  de  Paris,  dont  nous  venons 

ae  parler,  c'est-à-dire  en  361  ;  et  il  n'y  a  pas  de  doute  qu'il  ne 
fût  du  nombre  des  pères  qui  le  composèrent.  Or  il  paroît  que 
ce  fut  en  ce  même  tems,  ou  peu  après  que  fut  composé  l'ou- 
vrage en  question.  C'est  ce  que  fait  juger  le  principal  sujet 
dont  il  traitoit.  Selon  les  termes  de  Gennade,  il  étoit  fait  en 
particulier  pour  munir  les  pénitens  contre  le  désespoir.  Cette 

[trecaiition  convenoit  parfaitement  dans  les  Gaules  en  ce  tems- 
à.  Elle  y  étoit  même  nécessaire. 
Ici  il  faut  se  rapeller  qu'alors  la  conduite  pleine  de  dureté. 


EVEQUE  DE  PARIS.  133 

et  les  écrits  peu  mesurés  de  Lucifer  deCagliarine  tendoient    iv  siècle. 

à  rien  moins  qu'à  faire  autant  de  désespérés  qu'il  y  avoit  de 

pénitens.  Les  maximes  outrées  de  cet  Evêque  firent  de  l'éclat 

particulièrement  dans  les  Gaules.  '  Non  seulement  il  blâma  la  Hii.acsyi.pr.n.9. 

charité  et  la  condescendance  dont  S.  Hilaire  de  Poitiers  avoit 

usé  dans  son  traité  des  Synodes;  ce  qui  engagea  ce  S.  Prélat 

à  en  faire  l'apologie;  '  mais  il  publia  aussi  vers  ce  même  tems,  Bib.pp.i.4.p.8i7| 

c'est-à-dire  en  360,  un  ouvrage  que  nous  avons  encore  sous  JIb';"^'  '•  '•  •"• 

ce  titre  :    Quil  ne  faut  point  épargner  ceux  qui  pèchent 

contre  Dieu. 

Qui  nous  assurera  que  Lucifer  n'ait  pas  également  blâmé 
'  le  pardon  que  l'on  acorda  dans  les  Conciles  des  Gaules  aux  suKMsU^a.n.eo. 
Evêques  tombés  à  Rimini?  Il  est  certain,  selon  S.  Sulpice,  ^' 

au'il  se  sépara  de  leur  communion.  11  y  a  même  beaucoup 
'aparence  que  c'étoit  sur  ses  principes  que  plusieurs  Prélats 
Gaulois,  dont  nous  avons  parlé  au  sujet  du  Concile  de  Paris, 
ne  vouloient  pas  que  l'on  rapellât  à  la  pénitence  ceux  qui 
étoient  tombés.  Au  moins  sa  conduite  le  fait-elle  légitime- 
ment présumer.  Tout  cela  fut  d'autant  plus  capable  de  jetter 
la  terreur  dans  les  consciences  timorées,  que  Lucifer  avoit 
alors  et  plus  d'autorité  et  plus  de  réputation,  en  qualité  de 
confesseur  de  la  foi  de  la  consubstantialité.  L'on  peut  donc 
aisément  croire  '  que  nos  Evêques  tombés  à  Rimini,  mais  ra-  p.  «4. 
pelles  à  la  pénitence  par  S.  Hilaire,  et  relevés  de  leur  chute 
dans  le  Concile  de  Paris,  ne  furent  pas  insensibles  aux  traits 
de  la  doctrine  de  Lucifer,  et  qu'ils  eurent  besoin  d'être  con- 
solés par  quelque  écrit  qui  les  rassurât  contre  ses  maximes 
outrées. 

C'est  justement  ce  que  semble  avoir  fait  l'auteur  du  traité 
dont  il  est  ici  question.  De  sorte  qu'il  n'y  a  point  de  tems  au- 

3uel  on  puisse  mieux  le  raporter,  qu'au  tems  que  nous  venons 
e  marquer,  ni  de  lieu  où  il  fût  plus  nécessaire  que  dans  nos 
Gaules.  Son  auteur  étoit  un  Evêque,  et  se  nommoit  Paul; 
l'Evêque  de  Paris,  qui  vivoit  alors,  portoit  ce  nom,  et  pou- 
voit  mieux  que  bien  d'autres  être  instruit  de  toutes  les  circon- 
stances marquées  :  on  peut  donc  conclure  que  de  tous  les  Evê- 
ques, qui  en  ce  IV  siècle  ont  porté  le  nom  de  Paul,  nous  n'en 
connoissons  point  à  qui  l'on  puisse  plus  légitimement  atribuer 
ce  traité  de  la  pénitence  qu'à  Paul  Evêque  de  Paris. 

Que  cet  auteur  au  reste  ait  vécu  dans  le  siècle  où  nous  le 
pla:çons,  cela  est  certain  par  le  rang  que  lui  assigne  Gennade. 

1  0 


134  PAUL,  EVEQUE  DE  PARIS. 

IV  SIECLE.  Car  bien  que  cet  Ecrivain  ne  garde  pas  un  ordre  exactement 
chronologique  entre  les  auteurs  dont  il  parle,  il  est  néanmoins 
vrai  que  les  38  premiers  chapitres  de  son  catalogue  ne  con- 
tiennent que  des  auteurs  qui  ont  fleuri  ou  commencé  à  fleu- 
rir dans  le  IV  siècle,  et  que  le  31'  traite  de  l'auteur  dont  il 
s'agit  ici. 

Autre  observation  qui  confirme  admirablement  notre  con- 

Apo.despp.p.21.  jecture.  'Elle est  du  savant  Auteur  de  l'Apologie  des  Pères. 
Gennade  en  dressant  son  catalogue,  l'a  particulièrement  com- 
posé des  Ecrivains  ecclésiastiques  des  Gaules,  comme  lui  étant 
plus  connus.  Ainsi  l'on  est  fondé  à  regarder  comme  Gaulois 
plutôt  que  comme  étranger,  l'Evêque  Paul  qu'il  y  a  inséré. 

Geun.  ibid.  not.  p.  '  Il  n'importe  que  quelques  manuscrits  de  l'ouvrage  de  Gen- 
nade à  l'article  de  ce  Paul  le  nomment  Paulin.  Les  plus  an- 
ciens manuscrits,  comme  celui  de  Corbie  qui  a  près  de  mille 
ans  d'antiquité,  retiennent  constamment  la  leçon  que  nous 
suivons.  La  faute  des  autres  ne  sera  aparemment  venue  que 
de  l'inadvertance  de  quelque  copiste,  qui  sachant  que  S.  Pau- 
lin de  Noie  avait  écrit  un  traité  de  la  pénitence,  et  ne  pre- 
nant pas  garde  que  Gennade  lui  donne  son  titre  dans  la  suite, 
se  sera  imaginé  qu'en  cet  endroit  il  aura  voulu  désigner  S. 
Paulin  de  Noie. 


SATURNIN, 

EvEQUE  d'Arles. 

CE  Prélat  a  fait  un  trop  grand  personnage  dans  le  parti 
des  Ariens,  pour  ne  pas  raporter  ici  ce  que  l'on  sait  de 
son  histoire.  D'ailleurs  il  composa  quelques  écrits,  qui  quel- 
que mauvais  qu'ils  fussent,  ne  nous  permetent  pas  de  l'ou- 
blier dans  le  recueil  de  nos  Ecrivains. 
uaii.chr.nov.  il.       '  ^^  succcda  dans  le  siège  épiscopal  d'Arles  à  Valentin,  dont 
I'  ■•**•  le  nom  se  lit  entre  ceux  des  autres  Evêques  qui  ont  souscrit 

au  Concile  de  Sardique  tenu  en  347.  Mais  il  semble  qu'il  ne 
fut  ordonné  qu'après  le  fameux  conciliabule  d'Arles  en  353 
ou  354;  puisqu'on  ne  l'y  voit  point  paroître. 
lin.  fr.  11.  n.  2 1         Autant  que  nos  bons  Evoques  témoignèrent  de  zèle  pour 
V6 '  fi''''"'3»7  *iis    '"  'i'^^'^^se  et  le  maintien  de  la  foi  catholique,  autant  Satur- 
'  '  ''^  uin  fil  voir  d'ardeur  pour  acréditer  l'Arianisme  auquel  il  s'é- 


SATURNIN,  EVEQUE  D'ARLES.  135 

toit  livré.  G'étoit  un  très-méchant  homme,  d'un  esprit  entie-     iv  siècle. 

rement  corrompu,  qui  à  l'infamie  de  l'hérésie  avoit  ajouté 

plusieurs  crimes  énormes.  Factieux  et  emporté,  il  tyrannisoit 

les  Eglises  des  Gaules,  tandis  que  les  autres  Evêques  s'effor- 

çoientdeles  défendre  contre  la  fureur  des  Ariens.  'Pour  in-  Hu.dejyn.n.s. 

timider  tout  le  monde  il  em'ploïoit  les  menaces,  les  violences 

et  la  crainte  des  Magistrats.  En  un  mot  il  étoit  dans  les  Gaules 

pour  l'Arianisme,  ce  qu'Ursace  et  Valens  étoient  en  Illyrie  et 

dans  tout  l'Orient.    IJni  de  sentimens  et  de  conduite  avec  fr.  2.  n.  ts. 

ces  deux  fameux  Ariens,  il  fut  un  des  plus  ardens  persécuteurs 

de  S.  Athanase.  '  En  cette  qualité  il  avoit  tout  crédit  auprès  r.aii.  chr.  iWti.  p. 

de  l'Empereur  Constance,  aussi  ataché  aux  Ariens  qu'ennemi  '**• 

de  ce  samt  Docteur. 

'  La  conduite  scandaleuse  et  tyrannique  de  Saturnin  étant  Hii.  de  syn.  n.  2 1 
venue  à  la  connoissance  de  tout  le  monde,  S.  Hilaire  et  grand  i"i^^"'i."'  *  '  '' 
nombre  d'autres  Evêques,  particulièrement  ceux  des  Gaules, 
se  séparèrent  de  sa  communion.  Ces  derniers  publièrent  mê- 
me son  excommunication  par  leurs  letres.  '  Saturnin  et  ceux  in  const.  n.  t  \  in 
de  sa  faction,  ne  pouvant  souffrir  cette  flétrissure  sans  en  ti-  ^"*'  "'• 
rer  vengeance,  firent  assembler  à  Beziers  en  356  le  Concile 
dont  nous  avons  donné  l'histoire.  Notre  Prélat  y  assista  en  per- 
sonne avec  d'autres  Evêques  Ariens.  11  y  a  même  (juelque  apa- 
rence  qu'il  y  présida,  puisque  ses  partisans  faisoient  courir  le     • 
bruit  qu'il  y  avoit  condamné  S.  Hilaire  de  Poitiers. 

Mais  ils  n'y  firent  pas  tout  le  mal  qu'ils  voulurent,  sans  y 
trouver  de  fortes  opositions.  '  Le  même  S.  Hilaire  s'y  oposa  de  syn.  n.  a  1  in 
ouvertement  aux  blasphèmes  des  hérétiques,  et  s'y  rendit  dé-  ^"''*'"'*- 
nonciateur  contre  les  fauteurs  de  l'Arianisme,  s'offrant  de  jus- 
tifier que  Saturnin  entre  autres  étoit  coupable  d'hérésie.  Les 
Ariens  ne  se  défendirent  que  par  les  fourberies  et  les  violen- 
ces, leurs  armes  ordinaires.  Saturnin  au  nom  du  Concile  dres- 
sa une  fausse  relation  de  ce  qui  s'y  étoit  passé,  et  l'envoïa  à 
l'Empereur  pour  le  tromper,  et  en  obtenir  l'exil  de  S.  Hilai- 
re. Ce  projet  d'iniquité  réussit,  et  le  Saint  fut  relégué  en  Phry- 
gie.  'On  lui  associa  Rodane  de  Toulouse,  cjui  l'avoit  imité,  sui. iwd. n. 53.  p. 
en  résistant  dans  le  même  Concile  aux  ennemis  de  la  foi.  ^^^" 

'  En  335  Saturnin  se  trouva  aussi  au  Concile  de  Milan,  et  eut  Bar.  m.  355.  n.  e. 
sans  doute  part  aux  vexations  des  Eusebiens,  qui  y  dominè- 
rent. Une  des  suites  de  cette  assemblée  fut  l'exil  de  S.  Eusebe 
de  Verceil,  de  S.  Denys  de  Milan  et  de  Lucifer  de  Cagliari, 
tous  défenseurs  intrépides  de  la  consubstantialité  du  Verbe. 


i36  SATURNIN,  EVEQUE  D'ARLES. 

IV  SIECLE.  D'Occident  Saturnin  passa  en  Orient,  pour  trouver  plus  d'o- 
casion  de  signaler  son  faux  zèle  en  faveur  de  l'Arianisme.  En 
360  il  assista  au  Concile  de  Constantinople,  qui  ne  fut  guéres 

Hii.ad  Coi.g.  1.  2.  moins  fatal  à  la  foi  et  à  ses  défenseurs  que  celui  de  Milan.  '  Ce 

"•'  '•  fut  en  cette  ocasion  que  S.  Hilaire,  qui  au  retour  du  Concile 

de  Seleucie  se  trouvoit  à  Constantinople,  présenta  une  requê- 
te à  l'Empereur  pour  avoir  une  conférence  réglée  avec  Satur- 
nin, s'offrant  de  le  contraindre  à  avoiier  les  faussetés  qu'il  avoit 
avancées.  Mais  le  rusé  Prélat  éluda  un  si  juste  défi. 

de»yn.n.3.  'Ni  868  artificcs,  ni  ses  violences,  ni  tout  ce  qu'il  sut  met- 

tre en  usage,  ne  furent  point  capables  d'ébranler  la  fermeté 
des  bons  Evoques  des  Gaules.  Ils  persistèrent  toujours  con- 

t.  u.D.  4.  stamment  à  lui  refuser  leur  communion.  '  Us  firent  encore  da- 

vantage. Car  après  qu'il  eut  été  convaincu  d'hérésie  et  de  plu- 
sieurs crimes  abominables  que  l'on  dissimuloit  depuis  long- 
tems,  il  fut  déclaré  indigne  du  nom  d'Evêque  dans  le  Conci- 
le de  Paris  en  361,  déposé,  chassé  de  l'Eglise,  et  dénoncé 

Mab. «na. 1. 3. p. *.  commc  tel  aux  Evêques  Orientaux.  'C'est  sans  doute  pour 
ces  raisons  que  le  nom  de  .ce  Prélat,  non  plus  que  celui  de 
Marcien  l'un  de  ses  prédécesseurs,  ne  se  trouve  pomt  dans  une 
ancienne  liste  des  Evêques  d'Arles  que  l'on  croit  tirée  des 
diptyques  de  cette  Eglise.  On  ignore  ce  que  Saturnin  devint 
dans  la  suite. 

Outre  la  fausse  relation  de  ce  qui  s'éloit  passé  dans  le  Con- 
cile de  Beziers,  dressée  par , ce  Prélat,  comme  nous  avons  dit, 

Hii.fr.  11.  n.  4.  '  la  Ictrc  syuodale  du  Concile  de  Paris  nous  aprend  en  géné- 
ral qu'il  avoit  encore  composé  d'autres  écrits,  mais  qui  ne  res- 
piroient  que  l'impiété  de  la  nouvelle  hérésie  des  Ariens.  Ainsi 
il  nous  importe  peu  de  savoir  en  détail  quels  étoient  ces  écrits  ; 
et  ce  n'est  pas  une  grande  perte  pour  l'Eglise  de  ce  qu'ils  ne 
subsistent  plus  aujourd'hui. 


ALCIME, 

Historien,  Orateur  et  Poète. 

Au.,  prof.  e.  s.       '  â  LCiME   quc   l'on    dcvroit  plutôt    nommer   Aléthe,   puis- 

iVqu'il  portoit   les  noms  de  Latinus   Alcimus   Aletnius, 

et  que  le  dernier  nom  des  personnes  qui  en  avoient  plusieurs, 

étoit  leur  nom  propre,  passoit  pour  l'un  des  plus  doctes  et  des 

plus 


ALCIME,  HIST.,  ORATEUR  ET  POETE.    137 

plus  éloquens  hommes  de  son  siècle.  •!!  étoit  de  l'Agenois,    iv  siècle. 
ou  de  la  ville  même  d'Agen,  selon  S.  Sidoine.  ••  Ausone  le  r^JTYTTT* 
met  au  nombre  des  professeurs  (^ui  ont  enseigné  publiquement  "•  p-  i'o78. 1079.' 
l'éloquence  à  Bourdeaux,  et  lui  donne  le  second  rang,  non  "  ^'"-  ''''''• 
pour  l'ancienneté,  mais  pour  le  mérite.  '  S.  Jérôme  dit  en  mer.  chr.  1.  î.  p. 
en  effet  qu'Alcime  et  Delphide  avoient  professé  la  rhétorique  en  '**' 
Aquitaine  avec  une  très-grande  réputation. 

'Dans  l'éloge  qu'Ausone  nous  a  laissé  d'Alcime,  il  ne  sait  aus.  ibid. 
ce  qu'il  doit  lé  plus  louer,  ou  l'intégrité  de  ses  moeurs,  ou  ses 
divers  talens  pour  les  letres.  Il  relevé  beaucoup  sa  modestie, 
sa  douceur,  sa  gravité,  sa  libéralité  envers  les  mdigens,  sa  vie 
exemle  d'ambition  et  toujours  réglée  jusqu'à  la  mort  :  quali- 
tés qui  passèrent  même  à  ses  enfans.  Pour  les  letres,  Alcime 
n'étoit  pas  moins  habile  dans  le  Grec  que  dans  le  Latin,  ni 
moins  bon  Poëte  que  grand  Orateur.  Il  ne  se  borna  pas  seule- 
ment à  enseigner  l'éloquence  aux  autres,  il  en  fit  lui-même 
usage  dans  le  barreau,  où  il  brilla  avec  autant  d'éclat  que  sur  le 
Parnasse.  En  un  mot  Alcime  seul,  au  jugement  d' Ausone,  éga-  - 
loit  tous  les  anciens  tant  Grecs  que  Romains. 

Opponit  unum  quem  vins  prioribas    . 

iEtas  recentis  temporis. 
Palmœ  forensis  et  Camœnarum  decus, 

Exemplar  unum  ia  literis  ; 
Quas  aut  Athenis  docta  coluitGrœcia, 

Aut  Roma  per  Latium  colit.' 

'Alcime  composa  quelques  ouvrages,  où  il  parloit  avec  tant  u,id. 
d'éloge  de  Julien  l'Apostat  et  de  Saluste  préfet  des  Gaules  sous 
son  règne,  qu'Ausone  ne  craint  pas  de  dire  qu'ils  étoient  plus 
propres  à  immortaliser  Julien  que  la  pourpre  dont  il  avoitété 
revêtu,  et  qu'ils  faisoient  plus  d'honneur  à  Saluste  que  le  con- 
sulat même  auquel  il  avoit  été  élevé. 

Et  Julianum  tu  magis  famse  dabis, 

Quam  sceptra  quse  tenuil  brevi. 
Sallustio  plus  confèrent  libri  tui, 

Quam  consulatus  addidit. 


9. 


On  ne  sait  pas  au  reste  quels  éTôîétlt  ce?  êdtiiÉ  d*Alcime.  sc»i.  uet.  m  am. 
'  Scaliger  croit  que  c'étoit  l'histoire  de  son  teins,  c'est-à-dire  '*'■  ° 

Tome  1.  Sec.  Part.  S 

1  0  * 


138  SEDATUS, 

IV  SIECLE,    de  l'Empire  de  Julien.  Le  terme  dont  se  sert  Ausone,  fait  ju- 

ger  que  ce  pouvoit  être  quelque  gros  ouvrage.  Sans  cela  on 

seroit  porté  à  croire  que  ce  n'éloit  que  quelque  panégyrique 
ou  même  quelque  poëme.  11  ne  nous  reste  plus  rien  de  tous 
ces  écrits.  Ce  que  nous  avons  sous  le  nom  d'Alcime,  est  d'un 
autre  auteur  bien  différent,  avec  lequel  néanmoins  quelques 
Ecrivains  n'ont  pas  laissé  de  confondre  notre  poëte.  Il  faut 
pourtant  en  excepter  l'épigramme  sur  Homère  et  Virgile,  qui 
porte  le  nom  d'Alcime,  et  qui  nous  paroîl  être  celui  qui  lait 
le  sujet  de  cet  éloge.  La  voici. 

Ep.  ei  poct.  vet.  1.  '  Maconio  Vati  qui  par  aut  proximus  esset, 

*■  P ••■"•  Consultas  Pean  risit,  et  hiuc  cecinit  : 

Si  poluit  nasci  quem  tu  sequereris,  Homère, 
Nascetur  qui  te  possit,  Homère,  sequi. 


SEDATUS, 

HllÉTElîR. 

AiH.  prof.  c.  19.  'cKDATiis,  dout  AusouB  son  Compatriote  nous  a  aussi  con- 
Oservé  la  mémoire,  naquit  à  Bourdeaux  à  la  fin  du  III  sié- 
(^le,  ou  tout  au  plus  tard  au  commencement  du  suivant.  Il  y 
fut  instruit  dans  la  connoissance  des  belles  letres,  et  alla  en- 
suite les  enseigner  ailleurs.  D'abord  il  ne  fil  qu'errer  d'un  en- 
droit à  un  autre,  sans  avoir  de  lieu  fixe;  mais  enfin  une  chai- 
re d'éloquence  le  fixa  à  Toulouse,  où  il  s'acquit  la  réputation 
d'un  des  plus  célèbres  Rhéteurs  de  son  siècle. 

Et  fama  magno  qualis  est  par  Rlietorl. 

Il  se  maria  dans  celte  ville,  et  y  amassa  des  biens  considéra- 
bles, dont  il  jouit  jusques  dans  une  heureu.se  vieillesse. 

11^^  'Après  que  ce  Rhéteur  eut  paie  le  tribut  à  la  nature,  ses 

parens  et  les  autres  ciloïcns  de  Bourdeaux  firent  transporter 
son  corps  dans  le  lieu  de  sa  naissance,  afin  que  n'aïanl  pu  joiiir 
de  sa  présence  pendant  sa  vie,  ils  eussent  au  moins  la  conso- 

iii.iiiAns.i.  163.  J^'io"  *ie  posséder  sa  dépouille  après  sa  mort.  '  Mais  pour  mar- 
quer d'une  manière  plus  éclatante  l'estime  qu'ils  faisoient  du 
merile  de  ce  grand  homme,  et  en  conserver  la  mémoire  à  la 
j)osterité,  ils  firent  tirer  son  portrait  en  pierre.  On  voïoit  en- 


RHETEUR.  139 

core  cette  figure  à  Bourdeaux  au  lieu  que  Ton  nomme  le  pui-  iv  siècle. 
de-Paùlin ,  du  tems  que  Vinet  et  Scaliger  écrivoient,  c'est- 
à-dire  après  le  milieu  du  XVI  siècle.  C'étoit  un  buste  qui  re  : 
présentoit  un  homme  vénérable ,  vêtu  d'une  robe  de  profes- 
seur, et  tenant  de  la  main  pn  livre  sur  sa  poitrine ,  avec  cette 
inscription  : 

D.  M. 

SEDATUS. 

'Le savoir  de  Sedatus  ne  mourut  point  avec  lui.  Outre  le  Aw.ibid. 
grand  nombre  de  disciples  qu'il  forma  en  divers  lieux,  sur- 
tout à  Toulouse ,  il  laissa  des  enfans  héritiers  de  sa  science  et 
de  sa  profession,  qui  lorsqu'Ausone  faisoit  l'éloge  de  leur  pè- 
re, Iravailloient  avec  succès  à  soutenir  l'empire  chancelant 
des  belles  lelres  à  Rome  et  à  Narbone.  C'est  ce  que  ce  poëte 
a  voulu  dire  dans  les  deux  vers  suivans  : 

Est  tua  nuac  soboles  :  moremque  sequuta  parentis 
Narbonem  ac  Romain  nobilitat  stucliis. 


S.  HILAIRE, 

ÊVEQUE  DE  POITIERS,  DOCTEUR 

DE  l'Egmse  et  Confesseur.         'u 

S-  I- 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

'^   HiLAiRE,  qui  a  toujours  été  regardé  comme  l'un   des  An?,  in  jni.  i.  i. 
O.  plus  zélés  défenseurs  de  la  foi  orthodoxe  contre  les  hé-  "'  ^' 
rétiques,  '  naquit  à  Poitiers  vers  le  commencement  du  IV  Hier,  in  Gai.  i.  a. 
siècle,  d'une  des  meilleures  familles  des  Gaules.  *  Plusieurs  5~-.p-  ^^'^i  J?""- 

,.,    ,      .         ,  y»  _^,  ,  .  ,  .  ,  IJ.  jan.  p.  790. 

croient  qu  il  etoit  né  Païen.  U  autres  a  qui  les  raisons  n  en  pa-  •  jHii.  vit.  n.  3.  e  i 
roissent  pas  convaincantes,  pensent  le  contraire,  et  s'autori-  JsijSIv.^'  ''^■^" 
sent  de  Fortunat  auteur  de  la  vie  de  notre  Saint.  Le  premier 
des  deux  sentimens  est  néanmoins  le  plus  commun,  comme 
le  mieux  apuïé  ;  et  nous  ne  faisons  pas  difficulté  de  l'embrasser. 
Ce  que  les  anciens  nous  aprennent  de  l'éloquence  et  de 
l'érudition  de  S.  Ililaire,  et  les  écrits  qui  nous  restent  de  lui, 

Sij 


140      S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,     montrent  qu'il  avoit  étudié  les  belles  letres,  et  qu'il  y  avoit 

fait  de  grands  progrès.  Nous  avons  fait  voir  ailleurs  combien 

elles  étoient  alors  florissantes  dans  les  Gaules. 

Hii.deTrin.i.i.n.       '  S.Hilaire  se  convertit  à  la  foi  par  la  lecture  des  livres  sa- 

*•  *'•  crés ,  et  reçut  ensuite  une  nouvelle  naissance  par  le  baptême. 

ep.  n.  T.  '  11  étoit  marié;  et  il  eut  de  son  mariage  au  moins  une  fille 

nommée  '  Abra.  Sa  femme  et  sa  fille  embrassèrent  comme  lui 
la  foi  de  J.  C.  soit  après  ou  avant  sa  conversion. 

dïiyn.  n.  91.  '  Dcpuis  le  baptême  de  S.  Hilaire  jusqu'à  son  épiscopat,  il 

se  passa  un  assez  long  espace  de  tems,  dont  il  ne  nous  a  rien 

Tiu.  ibid.  p.  438.  apris.  Peu  d'années  avant  son  exil,  qui  arriva  en  356  ,  '  il  fut 
élevé  sur  la  chaire  épiscopale  de  Poitiers,  ce  que  l'on  rapor- 

Bou.  ibid.  te  à  l'an  350,  peut  être  un  peu  trop  tôt.  '  Sa  pieté,  son  érudition, 

une  «'.onduite  régulière  ,  un  mérite  universellement  reconnu 
lui  atirerent  les  sufi'rages  de  toute  la  ville.  On  se  porta  d'autant 
plus  volontiers  à  l'élire  pour  Evêque,  qu'il  paroissoit  plus  di- 
gne de  l'être.  Car  n'étant  encore  que  laïque  et  engagé  dans  le 
mariage,  il  sembloit  posséder  déjà  la  grâce  du  sacerdoce. 

Mais  si  par  sa  vertu  il  mérita  les  honneurs  de  l'épiscopat ,  il 
sut  encore  mieux  en  remplir  les  devoirs  par  son  zèle  et  sa  vi- 

Ang.  doci.  chr.  1. 2.  gilaucc.  Ce  fut  alors  qu'il  fit  un  merveilleux  usage  '  pour  la 

"■**■  construction  de  l'Arche,  des  trésors  de  l'Egypte,  dont  il  s'étoit 

enrichi  dans  le  Paganisme,  c'est-à-dire,  de  tout  ce  que  les  au- 

Boii.  ibid.  p.  791.  teurs  Païcus  contiennent  de  meilleur.  '  Bien-tôt  sa  réputation 
se  répandit  au-delà  des  Gaules,  et  même  par  toute  la  terre. 

Soi.  vit.  M.  h. 4.  p.  '  Elle  atira  près  de  sa  personne,  et  au  nombre  de  ses  disciples 
le  grand  S.  Martin,  qui  devoit  être  après  lui  la  gloire  et  l'or- 
nement de  l'Eglise  Gallicane,  et  qui  fut  dans  les  Gaules  le 
premier  instituteur  de  la  vie  monastique. 

'  Dès  l'an  355,  lorsque  l'Eglise  étoit  horriblement  troublée 
par  l'Arianisme,  S.  Hilaire  commença  à  se  déclarer  par  une 

Hii.»dCon»t.  1. 1.  requête  qu'il  envoïa  à  l'Empereur  Constance.  '  Il  y  conjure 
cePrinced'arrêter  les  persécutions  que  soufîroient  les  Eglises 
Catholiques  de  la  part  de  plusieurs  Evêques  ;  de  défendre  aux 
juges  séculiers  de  se  mêler  des  affaires  de  l'Église;  de  ne  don- 
ner aucun  apui  aux  Ariens;  de  rapeller  les  Evêques  exilés  ;  de 
Permettre  aux  fidèles  d'écouter  la  parole  de  Dieu,  et  de  céle- 
.  ^. ^.  .„.     rer  les  saints  mystères  avec  leurs  pasteurs.  '  C'est  ainsi  que  S. 

Hilaire  en  qualité  d'Evêque  se  considérant  comme  le  père  de 


446  I  dial.3,  n.  Si. 


Bar.  an.  355.  n.  72. 


n.  1.  3.  4. 


440. 


Mor.  H.  p.  609.  i.        '   '  ^^  derniers  éditeurs  de   Moreri  ont  confondu  le  nom  de  U  fille  de  S.   Hilaire 
avec  celui  de  eafeoune  que  l'on  i|nore. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  GONFESS.     141 

toute  l'Eglise,  crut  devoir  s'oposer  comme  un  mur  pour  la    iv  siècle. 
maison  d'Israël.  Et  certes  il  étoit  digne  de  lui  de  ne  pas  alen- 
dre  qu'on  le  vînt  ataquer,  mais  de  prévenir  l'ennemi,  et  de 
s'exposer  lui-même  au  péril  pour  tâcher  d'en  tirer  les  autres. 

'  L'année  suivante  356 ,  le  zèle  de  ce  grand  Evêque  parut  iwd. 
encore  avec  plus   d'éclat  dans  le  Concile  de  Beziers,  dont 
nous  avons  donné  l'histoire  en  son  lieu.  S.  Hilaire  s'y  oposa  hh.  de»yn.  n.  s. 
ouvertement  aux  blasphèmes  des  hérétiques,  et  s'y  rendit  dé- 
nonciateur devant  les  Evêques  des  Gaules  contre  ceux  qu'il 
croioit  être  les  fauteurs  de  l'Arianisme.  '  Il  s'offrit  de  justifier  inCon»».  n.aifr. 
comment  ils  étoient  hérétiques.  Il  représenta  que  sous  le  nom  '  "•  *•  '■ 
de  S.  Athanase  on  ne  prétendoit  rien  moins  que  de  condam- 
ner la  vérité  orthodoxe.  Il  fit  voir  que  l'on  corrompoit  l'Evan- 
gile, que  l'on  ruinoit  la  foi,  et  qu'à  la  faveur  d'une  fausse  con- 
fession du  nom  de  J.  G.  on  introduisoit  le  blasphème  dans  l'E- 
glise. 


Mais  l'iniquité  prévalut.  Au  sortir  du  Concile  S.  Hilaire  in  const.  n.  s,  i  ad 

.1.  2.  n. 2  I 
cbr.  I.   2.  p. 


fut  banni  par  les  orâres  de  Constance,  que  des  hommes  sans  ni'","'  '  '  "  *  ' 


religion  avoient  prévenu,  en  lui  envolant  une  fausse  relation,  **♦ 
où  ils  chargeoient  ce  grand  Evêque,  quoiqu'il  eût  pour  témoin 
de  son  innocence  Julien  même  alors  César.  '  Non  seulement  Hn.detyn.  n.78. 
il  accepta  volontiers  son  exil,  mais  il  eût  encore  été  ravi  d'y  fi- 
nir sa  vie,  si  par-là  il  eût  pu  contribuer  à  éclaircir  la  vérité 
qu'il  défendoit.  '  Il  auroit  pu,  comme  il  le  dit  lui-même,  pour  u.  i.  n.  s. 
peu  qu'il  eût  voulu  se  fermer  les  yeux  sur  ce  qui  se  passoit,  et 
se  prêter  à  la  corruption  de  la  vérité  évangelique,  vivre  com- 
me tant  d'autres  Evêques  dans  l'abondance  de  toutes  les  com- 
modités du  siècle ,  jouir  en  paix  de  ses  délices,  avoir  part  aux 
faveurs  de  la  Cour,  et  se  rendre  formidable  par-tout.  Mais  il 
aima  mieux  s'exposer  à  souffrir  toute  sorte  de  mauvais  traite- 
mens  pour  la  cause  de  Dieu,  que  d'aspirer  à  cet  état  de  félici- 
té aparente  et  de  fausse  élévation,  en  trahissant  aussi  criminel- 
lement et  sa  conscience  et  sa  foi.  '  La  Phrygie  fut  le  lieu  de  Hier.  iwd. 
son  exil.  'Il  y  eut  pour  associé  Rodane  Evêque  de  "Toulouse,  sui.i.i»t.i.â.n.55. 
qu'il  avoit  merveilleusement  soutenu  par  son  exemple  et  son  ^'  ^''" 
union  avec  lui  à  résister  aux  ennemis  cle  la  vérité. 

'  Sur  la  fin  de  l'an  357  S.  Hilaire  reçut  des  nouvelles  de  hh  de  syn.  n.  a  i 
l'atachement  que  les  Evêques  des  Gaules  conservoient  pour    '    .'..','' 
lui  et  pour  la  foi  de  l'Eglise.  Le  saint  Confesseur  de  son  côté 
prit  soin  de  leur  écrire  le  plus  souvent  qu'il  luifut  possible,  afin 
de  les  informer  des  mesures  qu'il  prenoit  avee  le»  bons  Eve- 


2 


142      S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,    ques  d'Orient  pour  la  défense  de  la  vérité.  'Ce  lui  étoil  un 
al  ConM  I.  2.  n.  g^aud  sujet  de  consolation  de  se  voir  ainsi  en  communion  avec 
toutes  les  Eglises  des  Gaules,  et  de  penser  que  bien  qu'«;xilé 
il  ne  laissoit  pas  de  distribuer  encore  l'Eucharistie  à  son  trou- 
rp  n.  1. 7.  peau  par  le  ministère  de  ses  prêtres.  'Ce  fut  aussi  en  ce  même 

tems  qu'il  reçut  des  letres  de  sa  fille  Abra,  à  laquelle  il  fit  ré- 
ponse en  lui  envoiant  deux  hymnes,  l'une  pour  le  matin,  l'au- 
tre pour  le  soir, 
desyn.n.  5.  '  Entre  les  Evêques  Gaulois  qui  lui  écrivirent,  quelques- 

uns  le  prioicut  de  leur  expliquer  quels  étoient  les  desseins  des 
Orientaux  dans  tant  de  diverses  professions  de  foi  qui  couroicnt 
par-tout,  et  de  leur  faire  savoir  ce  qu'il  en  pensoit  lui-même. 
S.  Hilaire  sensible  à  leur  prière,  écrivit  son  livre  des  Synodes 
rieirin.  1. 10.  n.  *.  pour  Satisfaire  leur  juste  désir.  '  Cet  ouvrage  fut  suivi  de  près, 
s'il  ne  fut  pas  même  précédé  des  douze  livres  de  la  Trinité, 
qui  sont,  comme  l'autre,  un  fruit  de  l'exil  du  Saint  Confesseur, 
sni.  ibiu.  11. 58 1        '  Il  y  avoit  déjà  plus  de  deux  ans,  ou  même  plus  de  trois, 
1  . 1 1  .  p.  450.  gg|^^  g  Sulpice,  que  S.  Hilaire  étoit  exilé,  lorsqu'au  mois  de 
septembre  359,  il  fut  apellé  avec  les  autres  Evêques  au  Con- 
sul, ibid.  cile  de  Seleucie  en  Isaurie.  '  L'Empereur  n'avoit  point  donné 
d'ordre  en  particulier  de  l'y  envoïer  :  mais  le  Vicaire  du  Préfet 
et  le  Modérateur  du  Concile  sur  la  commission  générale  qu'ils 
avoient  d'y  assembler  tous  les  Evêques,  l'obligèrent  à  s'y  ren- 
dre, et  lui  firent  fournir  ce  qui  étoit  nécessaire  pour  le  voïage. 
Dieu,  remarque  S.  Sulpice,  le  voulut  ainsi  par  un  dessein  par- 
ticulier de  sa  providence ,  afin  qu'un  Evêque  si  bien  instruit 
de  la  théologie  se  trouvât  présent  aux  disputes  que  l'on  auroit 
sur  la  foi  dans  cette  a.ssemblée.  Arrivé  à  Seleucie,  on  lui  fit  un 
acueil  extraordinaire,  et  si-tôt  qu'il  y  fut  connu,  il  gagna  tous 
les  cœurs. 
Hii.  m  Consi.  M.       '  A  cc  Coucilc  sc  trouvcrcnt  100  Evêques,    105  deini- 
**■                   Ariens ,  19  Anoméens,  et  autant  de  blasphémateurs  qu'il  plut 
à  Con.stance  d'y  en  assembler.  S.  Hilaire  fut  le  seul  avec  quel- 
ques-uns de  ceux  d'Egypte,  qui  y  soutinrent  généreu.scmcnt  la  ' 
Sui.  ibid.             consubstantialilé  du  Verbe.  '  D'abord  il  commença  par  rendre 
un  témoignage  authentique  à  la  foi  des  Occidentaux,  qui  n'é- 
loient  pas  encore  tombés  au  Concile  de  Rimini,  qui  se  leiioit 
alors,  assurant  qu'ils  n'avoicnl  point  d'autre  foi  (jue  celle  du 
Concile  de  Nicée.  Ensuite  il  fut  mis  au  nombre  de  ceux  qu' 
Ha.  ibid.  n.  13. 14.  devoicut  opincr  daus  l'asscmblée.  'Mais  il  eut  la  douleur  d'y 
entendre  ûes  blasphèmes  si  horribles,  qu'il  ne  pe.ut  les  raporter 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.     143 

sans  exécration.  "L'on  ne  laissa  pas  néanmoins  d'y  déposer    jy  siècle. 
quelques  Evoques  qui  furent  jugés  les  plus  coupables,  et  qui  ^ — — — — 
se  retirèrent  aussi-tôt  h  Constantinople  auprès  de  l'Empereur,  *"'  ^''  ' 
où  ils  savoicnt  trouver  une  protection  assurée. 

'  S.  Hilaire  après  le  Concile,  alla  lui-même  à  Constantino-  sui.ibid.  n.co. 
pie  avec  ces  Prélats,  pour  savoir  ce  que  Constance  ordonne- 
roit  (le  lui.  I!  eut  encore  la  douleur  d'y  voir  comme  à  Seleucie, 
la  vérité  entièrement  oprimée  par  le  crédit  des  purs  Ariens 
qui  dominoient  à  la  Cour.  '  Là  se  rendirent  presque  en  même  hii.  adconsi.  i.  2. 
tems  les  députés  du  Concile  de  Rimini  avec  une  relation  de  fr.*o.''^^.'a.'3.*' 
tout  ce  qui  s'y  étoit  passé.  A  ces  nouvelles  S.  Hilaire  se  crut 
obligé  d'oposer  une  profession  publique  de  la  divinité  du  Ver- 
be. 11  soutint  donc  publiquement  que  J.  C.  est  véritablement 
Dieu,  que  Dieu  est  véritablement  son  père,  qui  l'a  engendré 
avant  tous  les  tems.  Mais  cettegénéreuse  confession  ne  fit  qu'ir- 
riter les  bérétiques  qui  l'entendirent  ;  et  ces  misérables  s'éle- 
vèrent avec  de  grands  cris  contre  le  saint  Evoque ,  en  donnant 
une  explication  toute  Ariene  à  l'éternité  du  Fils  de  Dieu. 

'  Ce  fut  en  celte  ocasion  que  S.  Hilaire  présenta  à  l'Empe-  .j  oonst.  1.  2  1 
riMu-  une  seconde  requête  célèbre  dans  l'antiquité,  pour  obte-  ^^^-  ^'"-  '"  '■ 
nir  de  lui  une  conférence  réglée  avec  l'auteur  de  son  exil.  Ce- 
loi  l  Saturnin  d'Arles,  qui  se  trouvoit  alors  à  Constantinople. 
'  Il  s'y  prometloit  d'obliger  son  adversaire  à  avouer  les  fausse-  hu.  ibu.  n.  2. 3. 
tés  qu'il  avoit  mises  en  œuvre  pour  le  perdre;  s'engageant  lui- 
même  à  vieillir  dans  la  pénitence  au  rang  des  simples  fidèles, 
si  l'on  pouvoit  prouver  qu'il  eût  commis  quelque  chose  d'in- 
digne non  seulement  de  la  sainteté  d'un  Evêque,  mais  de  la 
probité  même  d'un  laïque.'  Il  suplioit  ensuite  l'Empereur  de  lui  n.s.  lo  |  Sui.  ibid. 
acorder  une  audience,  où  il  pût  traiter  de  la  foi  selon  les  Ecri-  p  *'* 
tures,  tant  en  sa  présence  de  lui  Empereur,  que  de  tout  le  Con- 
cile, et  même  à  la  vùë  de  tout  lo  mOnde.  Mais  les  Ariens  em- 
pêchèrent le  Prince  de  lui  rien  acorder.  Et  comme  ils  con- 
noissoient  la  force  des  armes  du  saint  Confesseur,  et  qu'ils  en 
redoutoient  les  coups,  ils  prirent  h;  parti  de  le  faire  renvoïer 
dans  les  Gaules,  comme  un  homme  qui  troubloit  la  paix  de 
l'Orient. 

'  Alors  S.  Hilaire  voiant  et  que  sa  requête  et  que  toute  la  Bar.  an.  36o.  n.  s 
modéraUon  dont  il  avoit  usé  jusques  à  présent,  étoient  inuti- 
les ,  crut  qu'il  ne  devoit  plus  rien  ménager.  '  Il  écrivit  donc  Hu.inConsi. 
le   livre,   ou    plutôt  l'invective  contre  Constance  que  nous 
avons  encore,  '  et  dont  le  style  n'est  propre  qu'à  un  homme  thi.  iuid.  p.  453. 


144      S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS. 

IV  SIECLE,    qui  a  le  martyre  dans  le  cœur,  •  comme  témoignoit  l'avoir 
notre  Saint  par  les  paroles  suivantes  de  cet  endroit  :  Ad  mar- 

fr.  l'r.' i!'.  13.  /ynt/m  per  cas  voceveareamM^. 'On  croit  que  ce  fut  aussi  vers  ce 
tems-là  qu'il  composa,  ou  plutôt  qu'il  commença  à  composer 
son  ouvrage  contre  Ursace  et  Valens,  où  il  faisoit  l'histoire 
des  Conciles  de  Seleucie  et  de  Rimini. 

Après  avoir  donné  dans  l'Orient  des  marques  aussi  éclatan- 
tes de  son  zèle ,  ce  généreux  Confesseur  revint  à  Poitiers  en 

Hier.  ciir.  1. 4.  p.  360,  OU  tout  au  plus  tard  '  au  commencement  de  l'année  sui- 

sui.  ibid.  I  vil.  M.  vante  361.  '  Il  y  fut  renvoie,  dit  S.  Sulpice,  sans  que  l'on  re- 

D.  4.  p.  m.  voquât  l'ordre  qui  l'avoit  d'abord  exilé.  Il  put  aussi  se  faire  que 
Constance  se  repentant  de  l'avoir  banni,  ce  repentir  le  portât 

Tiii.ibid.  p.  45*.  ensuite  à  le  renvoïer.  '  Quoiqu'il  en  soit,  on  peut  juger  quelle 
joie  eut  toute  l'Eglise  des  Gaules,  et  celle  de  Poitiers  en  par-' 

Hier,  in  Lucif.  p.  ticuHer,  du  rctourdc  ce  saint  Evêque.  '  Il  y  fut  reçu,  selon  l'ex- 
pression de  S.  Jérôme ,  comme  un  victorieux  qui  revenoit 
triomphant  du  combat. 

Soi.  hi-=t.  n.  60 1        '  Uu  dc  sBs  premiers  soins  fut  de  travailler  à  rapeller  à  la  pé- 

'"  '  "  nitence  ceux  qui  avoient  eu  le  malheur  de  tomber.  Pour  cet 

effet  il  assembla  divers  Conciles  dans  les  Gaules,  où  il  fit  re- 

Bar.  an.  Mi.  n.  tracter  cc  qui  s'étoit  fait  à  Rimini.  '  L'on  ne  doute  point  que 

aîid.  p^.  75».  '  l'un  de  ces  Conciles  ne  soit  celui  de  Paris ,  dont  nous  avons 
la  letre  synodale  dans  les  fragmens  de  notre  Saint ,  qui  s'y 

Sui.  ibid.  trouva  présent.  '  De  sorte  que  tout  le  monde  a  reconnu  que 

nos  Gaules  furent  redevables  à  S.  Hilaire  seul  du  bonheur 
qu'elles  eurent  de  se  voir  délivrées  de  l'hérésie. 

iccr.  1. 3.  r.  10.  p.       '  L'état  dc  la  religion  ainsi  affermi  dans  les  Gaules ,  le  Saint 

13.  'p."ii4  )  fiiL  voulant  procurer  le  même  avantage  à  l'Italie,  y  passa  l'an  363. 

"''''■  •*•  *'■*■  Là  de  concert  avec  S.  Eusebe  de  Verceil ,  autre  Confesseur 
de  la  consubstantialité  du  Verbe,  il  y  rétablit  la  foi  de  Nicée 

Tiii.  i.sid.  p.  459.  gf  la  paix  des  Eglises.  '  Il  y  étoit  encore ,  lorsque  Valentinien  , 
élu  Empereur  le  26  de  février  364 ,  se  trouva  à  Milan  vers  le 
mois  de  novembre  de  la  même  année.  Ce  Prince  qui  aimoit 

Hii.  in  Aux.  n.  7.  Ja  paix,  '  fît  UD  édit  très-fâcheux,  mais  coloré  du  prétexte  de 
l'amour  de  l'unité,  par  lequel  il  obligeoit  tout  le  monde  à  se 
soumettre  à  Auxence  Evêque  de  Milan,  afin  de  réiinir  cette 
Eglise  divisée.  S.  Hilaire  ne  put  le  souffrir  ;  et  sans  craindre  de 
passer  ou  pour  téméraire  ou  pour  importun,  il  présenta  une 
requête  à  l'Empereur,  par  laquelle  il  dénonçoit  Auxence  com- 
me blasphémateur  et  ennemi  caché  de  J.  C. 

ibid.  '  Valentinien  touché  de  cette  déclaration ,  ordonna  qu'Hi- 

laire 


DOCTEUR  DE  L'ÉGLISE  ET  CONFESS.      145 

laire  et  Auxence  conféreroient  ensemble  avec  dix  autres  Eve-    iv  siècle. 

ques,  en  présence  du  Questeur  et  du  grand  Maître  du  palais.  

Auxence  se  trouva  étrangement  embarassé  ;  et  voïant  le  dan- 
ger qu'il  y  avoit  à  se  déclarer  contre  la  foi  catholique,  il  aima 
mieux  dire  qu'il  croioit  que  le  Fils  est  vrai  Dieu,  et  qu'il  a  la 
même  substance  et  la  même  divinité  que  le  Père.  On  fit  écri- 
re cette  profession  ;  et  de  peur  que  la  mémoire  de  ce  qui  s'é- 
toit  passé,  ne  vînt  à  se  perdre,  S.  Hilaire  en  dressa  une  rela- 
tion. Il  la  présenta  aussi-tôt  à  l'Empereur,  et  la  joignit  au  li- 
vre qu'il  écrivit  incontinent  après  contre  Auxence. 

'  Toute  l'assemblée  fut  aussi  d'avis  que  ce  Prélat  fit  une  con-  Mab.  ana.  iwd. 
fession  publique  de  ce  que  contenoit  sa  déclaration.  Mais  il 
s'en  acquitta  d'une  manière  si  tortueuse  et  si  enveloppée,  '  que  n.  7.8. 
sous  le  son  de  termes  catholiques  il  eut  le  secret  de  cacher 
tout  le  venin  de  l'hérésie,  et  de  tromper  l'Empereur  par  cet 
artifice. 'Ce  Prince  qui  le  croioit  sincère,  s'atacha à  sa  com-  n. 9. 
munion.  Mais  S.  Ililaire  ne  fut  pas  long-temps  sans  démasquer 
l'hypocrite,  et  découvrir  le  mystère  d'iniquité.  C'est  ce  qu'il 
manifesta  au  grand  jour,  en  se  plaignant  hautement  qu'Au-  ' 

xence  se  joûoit  et  de  Dieu  et  des  hommes. 

'Cependant  comme  S.  Hilaire  troubloit  la  fausse  paix  dont  Tiii.  ibij.  p.  46!*. 
on  étoit  bien  aise  de  jouir,  '  on  lui  signifia  un  ordre  qui  lui  en-  Hii.  iWd. 
joignoit  de  sortir  de  Milan.  Il  obéit  ;  mais  ce  ne  fut  qu'après 
avoir  adressé  à  tous  les  Evéques  et  les  peuples  catholiques  un 
écrit  contre  Auxence,  par  lec^uel  il  leur  aprend  ce  qui  s'étoit 
passé  en  cette  ocasion.  L'apui  et  le  crédit  que  cet  Evêque  Arien 
avoit  trouvé  auprès  de  l'Empereur,  et  à  la  faveur  desquels  il 
soûtenoit  son  hérésie,  donnent  sujet  à  notre  Saint  d'insérer 
dans  cet  écrit  d'excellens  avis,  qui  sont  de  tous  lesteras.  C'est 
sur-tout  par  ces  derniers  travaux  qu'il  a  mérité  '  les  qualités  de  Socr.  ibi.i  1  soz 
restaurateur  de  la  saine  doctrine  dans  les  Gaules  et  l'Italie,  et  '''''' 
de  défenseur  invincible  de  la  foi  de  Nicée,  que  lui  donnent  1 

Socrate  etSozomene. 

Depuis  ce  tems-là  on  ne  trouve  plus  rien  de  ce  qu'a  fait 
S.  Hilaire  jusqu'à  sa  mort.  ;Seuleraent  il  est  à  présumer  qu'il 
emploïa  le  reste  de  ses  jours  à  instruire  son  troupeau  de  vive 
voix,  et  à  composer  pour  toute  l'Eglise  une  partie  de  ses  ou- 
vrages. '  Enfin  arrivé  à  une  plénitude  de  foi  et  de  sainteté,  il  cr.T.bisi.Fr.i.i. 
mourut  à  Poitiers  sous  l'empire  de  Valentinien  et  de  Valens,  ."i  ?hid"l'il';  iblV 
le  13°-jour  de  janvier  de  l'an  368.  *  Sa  fête  est  marquée  en  ce  n.isGiTiii.iuV 

"'  ^  1>.  463.  464. 

1    La  plupart  defi   écrivains  ne  Vacordent  pas  sur, l'année  de  reHe  mort.  S.  iSoIpica 

Tome  I.  Sec.  Part.  T 


SCS. 


14fl    S.  HILAIRE,   EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,    jour  dans  le  martyrologe  qui  porte  lo  nom  de  S.  Jérôme,  et 
généralementdanstou.s  les  latins.  S.  Ililaire  a  cela  de  particu- 
lier avec  S.  Martin  son  disciple,  qu'ils  sont  les  deux  premiers 
Mnh.  lit.  I.  3.  p.  Confesseurs  connus  dont  l'Eglise  a  fait  l'office  public,  On  voit 
177.  n.  6.  même  par  un  très-ancien  missel  à  l'usage  de  la  France,  écrit 

après  le  commencement  du  VI  siècle,  mais  qui  est  passé  de 
France  dans  la  bibliothèque  de  la  Reine  de  Suéde,  que    l'on 
faisoit  mention  de  ces  deux  saints  Confesseurs  dans  le  canon 
Boii.  ibid.  p.  79i.  de  la  messe  après  S.  Côme  et  S.  Damien.  '  Dieu  gratifia  notre 
"'  saint  Evêque  du  don  des  miracles  et  pendant  sa  vie  et  après 

sa  mort.  On  dit  même  qu'il  ressuscita  un  enfant  mort  sans  bap- 
tême. Mais  tout  ce  que  DieU  fit  par  son  ministère  en  faveur 
de  la  foi  de  l'Eglise,  est  encore  un  plus  grand  miracle , 

S.  Ililaire  réùnissoit  en  sa  personne  toutes  les  excellentes 
Rnf.  I.     c.  31.  p.  qualités  qui  font  les  grands  Evêques.  '  A  un  naturel  doux  et 
paisible,  a  un  don  particulier  de  s'insinuer  dans  les  esprits  et 
Fuig.degr.  i.4.n.  de  persuâder,  '  il  joignoit  une  sainte  vigueur,  qui  a  servi  de 
Fac.  in  Moc.  p.  diguc  aux  hérésies  naissantes.  '  S'il  a  fait  admirer  sa  prudence 
dans  le  gouvernement  de  l'Eglise,  il  y  a  fait  éclater  aussi,  lors- 
que l'occasion  l'a  demandé,  un  zèle  et  une  fermeté  apostolique 
cms. lie inc. I. T. c.  quft  rïen  ne  pouvoit  abatre.'  Oui,  dit  l'abbé  Cassien,  S.  Ili- 
2».  p.  1H7-11I8.    jgjpgg  possédé  toutes  les  vertusavec  toutce  qui  peut  relever 
le  mérite  d'un  homme  incomparable.  Il  n'a  pas  été  moins  il- 
lustre par  sa  vie  que  par  son  éloquence.  Comme  il  étoit  le  Do- 
cteur et  l'Evêque  des  Eglises,  il  a  ajouté  aux  fruits  de  sa  pro- 
pre justice  ceux  que  ses  instructions  et  sesécrits  ont  produits 
dans  les  autres.  Il  a  été  si  ferme  et  si  immobile  parmi  les  tem- 
p<Hes  des  persécutions,  que  la  force  de  sa  foi  toujours  invin- 
Tiii.  ibid.  p.  433.    ciblc,  lui  a  acquis  le  glorieux  titre  de  Confesseur,  '  pendant 

3ue  tant  d'autres  ne  méritoient  que  la  qualité  de  lâches  et 
'apostats. 
Fort.  i.c.  c.  7.  p.        Tant  de  rares  vertus  l'ont  fait  connottre  et  révérer  depuis 
ÎAàg.'nJoii- 1-  1*  Grande  Bretagne  jusqu'aux  Indes."  Non,  ajoute  S.  Augu- 
"  ^-  slin,  il  n'est  personne  qui  puisse  ne  pas  connoître  cet  Evêque. 

si  vénérable,  ce  défenseur  si  invincible  de  l'Eglise  catholique 
contre  l'hérésie,  en  un  mot  ce  Prélat  si  relevé  entre  tous  les 
autres  par  ses  mérites,  si  célèbre  et  si  illustre  dans  tout  le  mon- 

la  met  en  la  lixiéme  année  après  qiie  le  Flenri  la  met  dus  .te?.  Dans  celte  diver- 

Saint   fat  revenu  de   Phrygie.    Robert  dn  site  d'opinions  nous  avons  cm  devoir  nous 

Mont  saivi  de  Vincent  de  Beauvais  et  de  en  tenir  à  8.  Jerdme,  comme  le  plus  an- 

Guillaame   Cave,    la    place    en   3G9.   Tri-  cien,  qni  Hv  place  en  368. 
theiP0   la  renvoie  à  t'.innée  371  j   et  Mr 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  GONFESS.     147 

de.  »  "  Ne  vous  semble-t-il  pas,  dit  S.  Jérôme  à  S** Eustoquie    iv  siècle. 

»  qu'IIilaire  cet  insigne  confesseur  de  notre  tems,  et  S.  Gy-  .  Hier,  in  is.  c.  eo. 

»  prien  ce  martyr  si  disert  et  si  éloquent,  qui  ont  été  l'un  et  p  «2. 

w  l'autre  comme  deux  grands  cèdres  dans  le  siècle,  ont  le  plus 

w  contribué  à  élever  l'édifice  de  l'Eglise  de  Dieu  ?»  On  n'a 

point  d'épitaphe  originale  de  S.  Hilaire.  Mais  les  vers  sui- 

vans,  qui  sont  de  Forlunat  de  Poitiers,  peuvent  lui  en  servir. 

Us  représentent  assez  bien  son  principal  caractère,  et  tiennent 

même  quelque  chose  du  genre  de  l'épitaphe. 


Si  Hilaiium  quxTig  quis  ait  cognoscere,  Icctor  ;  pon.  1.  a.  c.  ic.  p. 

Allohrogus  refcrunt  l'iclaviis  gcnilum.  ^• 

Cuiii  populum  roguret  ilivina  mente  saccrdos, 

.Servabal  Icgis  fœdera  sollicilus. 
Improbus  ut  vidit  plèbes  quod  scinderet  error, 

Uniicorum  \  irii8  protulit  in  inodiuin, 
Vipereo  promunt  seniper  qui  ex  corde  vcnena, 

Filins  ut  dicaul  quia  est  creatura  Dei. 
Queis  magis  auxilium  jinestal  sapicntia  mundi, 

De  ingenito  genitum  quic  negat  esse  Deum; 
Ouam  mole  complexus,  rupiens  calcarc  Prophelas, 

Arriua  infelix,  cura  rctinet,  crepuit. 
Bgregius  Uoctur  velerum  nionimcnta  sequulus, 

Uucin  Stephanus  vidit,  comprobat  esse  Dcum. 
Vinclus  amoru  Dei,  contcmto  principe  mundi, 

Intcraerata  fides  pertulit  exsilium. 
In  Pâtre,  qui  omnipolens  Deus  est,  cognoscere  Natum, 

Divinis  tantum  vocibus  insinuât. 
Pcrpeluum  lumen  Cbristum,  Duminumque  Dcumque 

liissenis  populos  cdocet  esse  libris. 


S-  H- 
ECHITS  QUI  NOUS  RESTENT  DE  LUL 

S    Hilaire  n'a  pas  seulement  été  utile  à  l'Eglise  pendant  sa  tiii  h.  e.  t.  7.  p. 
•  vie  par  ses  lumières,  sa  sagesse  et  son  courage  ;  il  l'a  en-  ***  "' 
coro  servie  après  .sa  mort  par  ses  écrits,  qui  l'ont  toujours  fait 
honorer  comme  l'un  de  ses  plus  illustres  Docteurs  et  de  ses 
Pères.  Nous  en  avons  dc-ja  touché  quelque  chose  dans  l'histoire 
de  sa  vie  ;  mais  c'est  ici  le  lieu  d'en  parier  avec  quelque  détail. 


148    S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

I V  siKC  LE.        1".  ■  Son  commentaire  sur  P Evangile  de  S.  Matthieu  paroît 
.  „ ,   .    ~       être  selon  l'ordre  des  temsle  premier  des  ouvrages  qui  nous  re- 

•  Hil.    m   Mal.    p.  1       1     •     K  n     1       «  i  •    >    i         i  mi 

(i09-75i.  stenl  de  lui.  "  S.  Jérôme  dans  son  traite  des  hommes  illustres 

ïoo!*"^  ^"'  "'  "'  ^6  lui  attribue  positivement,  et  en  fait  mention  avec  éloge  en 
Hii.  ibui.  aiim.  n.  divcrs  autres  endroits.  'On  le  croit  écrit  vers  l'an  352.  Il  y  a 
"■  au  moins  tout  sujet  de  croire  qu'il  le  fut  avant  que  S.  Hilai- 

re  eût  oui  parler  des  Ariens,  ou  qu'il  eût  connu  leurs  subtili- 
tés, et  par  conséquent  avant  les  faux  Conciles  d'Arles  et  de 
Beziers,  C'est  ce  que  fait  juger  la  manière  dont  il  explique  et 
le  témoignage  que  le  Père  Eternel  rendit  àJ.  C.  dans  son  bap- 
tême, et  la  confession  de  S.  Pierre.  En  ces  deux  endroits 
non  plus  qu'ailleurs,  il  ne  dit  rien  qui  ait  rapport  à  l'Arianisme, 
comme  il  fait  dans  les  autres  écrits  qui  ont  suivi  ce  commen- 
taire. 

Si  S.  Hilaire  n'est  pas  le  premier  Père  Latin  qui  ait  écrit 
sur  S.  Matthieu,  son  commentaire  est  au  moins  le  plus  ancien 
de  tous  ceux  qui  nous  restent  des  Ecrivains  de  l'Eglise  Lati- 
num.  7.  ne  sur  cet  Evangeliste.  '  U  y  a  même  bien  del'aparence  que 

nul  autre  Latin  ne  l'avoit  commenté  avant  lui.  Sans  cela  il  ne 
l'auroit  pas  entrepris.  C'est  ce  qu'il  paroît  témoigner  lui-mê- 
me en  avertissant  qu'il  ne  dit  rien  sur  l'Oraison  Dominicale, 
qui  en  fait  partie,  parce  qu'il  sa  voit  que  S.  Cyprien  et  Ter- 
tuUien  l'avoient  expliquée.  . 
nuui.3.  '  Le  style  de  cet  ouvrage  est  serré,  concis  et  nerveux,  l'Au- 

teur y  disant  beaucoup  de  choses  en  peu  de  mots.  Il  faut  pour- 
tant avouer  qu'il  s'y  rend  souvent  obscur,  à  force  de  vouloir 
être  court ,  et  que  l'on  a  quelquefois  de  la  peine  à  entendre 
ce  qu'il  veut  dire  à  moins  que  l'on  n'ait  lu  auparavant  le  tex- 
te qu'il  commente.  On  remarque  aussi  qu'il  ne  s'est  pas  tou- 
jours ataché  scrupuleusement  aux  règles  de  la  grammaire.  Son 
but  principal  est  d'y  découvrir  le  sens  spirituel  et  caché  sous 
c.  21.  II.  13.  la  letre.  'Car  il  reconnoît  lui-même  qu  outre  le  sens  literal, 
f.  19.  n.  4.  le  S.  Esprit  en  a  eu  encore  un  autre  en  vue,  '  et  que  les  faits  ra- 

portés  dans  l'Evangile  contiennent  des  ligures  de  ce  qui  de7 
c.  7.  n.8.  voit  arriver  dans  la  suite.  '  Mais  il  a  soin  d'avertir  que  dans  le 

genre  d'écrire  qu'il  a  choisi,  il  n'a  point  suivi  son  esprit  parti- 
culier, ni  accommodé  son  texte  à  sa  manière  de  penser,  mais 
sa  manière  dépensera  son  te.xte.  Non  nos  intelligentiam  fin- 
(jimus,  sed  gesta  ipsa  intelligentiam.  impertiuntur.  Il  y  a  insé- 
ré plusieurs  excellentes  remarques  historigues  et  morales. 
AJ"  "•«•  Ce  Commentaire  se  trouve  porter  divers  titres  dans  les 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.    149 

manuscrits.  Dans  les  uns  il  est  intitulé  Traités,  dans,  d'autres     [>•  siècle. 
Exposition,  et  enfin  dans  la  plupart  Commentaires.  Ce  dernier 


titre  est  celui  sous  lequel  S.  Jérôme  en  parle; 'et  il  semble  na. ibu. c.  s. u.  i. 
par  un  endroit  de  l'ouvrage  que  c'est  aussi  celui  que  S.  Hilaire 
avoit  emploie  lui-même.  '  Il  avoit  mis  à  la  tête  de  ce  Commen-  cass.  do  inc.  i.  t.  c. 
taire  une  préface  que  Cassien  avoit  lue,  et  dont  il  cite  quel-  ^* 

3ues  endroits.  '  Nous  ne  l'avons  plus  aujourd'hui»  Mais  au  lieu  un.  ii.ij.  adm.  n 
e  cette  préface  on  trouve  dans  les  anciennes  éditions  une  li-  "• 
ste  des  articlos  contenus  dans  l'ouvrage  avec  ce  titre  Elenchus 
Canonum  au  nombre  de  33.  Dans  la  nouvelle  édition  l'on  a 
substitué  à  ce  titre  celui-ci  Capitula,  conformément  aux  meil- 
leurs manuscrits. 

2».  L'autre  écrit  de  S.  Hilaire  qui  suivit  de  plus  près  celui 
dont  nous  venons  de  parler,  '  est  sa  première  requête  à  l'Em-  m,  a,i  consi.  i.  i. 
pereur  Constance.  Il  la  lui  présenta,  comme  nous  l'avons  dit  p  '^''-i^i*. 
ailleurs,  dès  l'an  355.  Il  est  certain  qu'elle  ne  peut  avoir  été 
faite  plutôt  ;  '  puisqu'il  y  est  parlé  du  Concile  de  Milan  tenu  la  num.  8. 
même  année.  '  S.  Hilaire  y  parle  dans  le  commencement  au  n.  i.tiTiii.  h.e 
nombre  plurier,  pour  avoir  peut-être  porté  plusieurs  Evoques  '•  '•  ''•  '*"• 
des  Gaules  à  la  signer,  ou  à  la  présenter,  afin  qu'elle  eût  plus 
de  force.  '  Mais  sur  la,fin  il  y  parle  au  nombre  singulier.  'C'est  nii.  ii,j,i.  n.  s.  • 
ce  qui  peut  servir  à  confirmer  l'opinion  de  quelques  Savans,  «adm.  n.  «. 
qui  croïoient  ou  qu'il  manque  quelque  chose  à  cet  écrit  , 
ou  gu'il  aura  été  mêlé  avec  quelque  autre,  auquel  on  l'au- 
ra joint  dans  la  suite.  Il  est  clair  par  ce  qu'il  dit  du  Concile 
de  Nicée  au  nombre  huitième,  qu'il  en  avoit  déjà  parlé  dans 
le  même  écrit.  Cependant  on  n'en  lit  rien  dans  tout  ce  qui 
précède.  '  Quoiqu'il  en  soit,  cette  pièce  se  trouve  avec  cette  num.  s. 
imperfection  dans  les  plus  anciens  njanuscrits.  '  Ce  peut  être  u.  p.  ise?. 
de  cette  requête  qu'a  été  pris  le  passage  qu'Arnobe  le  jeune 
raporte  de  S.  Hilaire  d'après  le  Pape  S.  Celestin  I,  et  que  l'on 
trouve  entre  les  fragmens  de  notre  Saint. 

'  L'endroit  de  l'écrit  qui  supose  que  S.  Hilaire  y  parloit  du  '•  *•  "•  »• 
Concile  de  Nicée,  raproché'de  la  fin  de  son  traité  des  Syno-  deSyn.n.gi. 
des,  où  il  dit  qu'il  n'avoit  oui  parler  de  ce  Concile  qu'à  la 
veille  de  son  exil,  ne  seroit-il  pas  un  sujet  l^itime  de  juger 
que  la  requête  ne  fut  faite  et  présentée  qu'en  356,  peu  avant 
le  Conciliabule  de  Beziers?  Peut-être  n'y  a-t'on  pas  encore  fait 
assez  d'atention.  Nous  n'avons  pas  laissé  néanmoins  de  suivre 
l'opinion  commune  qui  lui  assigne  l'année  précédente. 

'  Le  dessein  de  S.  Hilaire  dans  cet  écrit,  est  d'engager  l'Em-  "J  consi.i.  i.  n. 
11- 


IV  SIECLE. 


ad  Consi.  I. 
5.6. 


num.  7. 


l.n.8. 


num.  (>. 


uum.  ;i. 


llinr. 
1UU. 


Vir.   ill.    c. 


Hil.    de    Syn. 
lUy-!20(J. 

pr^  n.  1. 


!'• 


150    S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

pereur  à  interposer  son  autorité  pour  faire  cesser  les  violences 
et  les  persécutions  des  Ariens,  et  à  accorder  quelque  protec- 
tion aux  Catholiques  qui  les  soufl'roient  en  paix.  '  Afin  de  fai- 
re plus  d'impression  sur  l'esprit  du  Prince,  il  lui  représente  d'u- 
ne manière  pathétique  la  grandeur  des  maux  que  ces  héréti- 
ques faisoient  à  l'Eglise,  et  des  scandales  qu'ils  y  causoienl. 
»  '  Ils  sont^si  grands,  ajoute  S.  Ililaire  après  en  avoir  fait  la 
»  peinture,  que  si  l'histoire  nous  raportoit  de  semblables  cho- 
»  sesdestems  passés,  nous  ne  pourrions  les  croire.  Et  ce  qu'il 
»  y  a  de  plus  déplorable,  c'est  qu'ils  n'usent  de  tant  de  vio- 
M  lences,  que  pour  contraindre  tout  le  monde  non  à  se  ren- 
w  dre  Chrétien,  mais  à  devenir  Arien.  » 

'  De  celte  violence  qu'emploioient  les  héréliques,  S.  Ili- 
laire prend  ocasion  de  représentiT  à  Constance  qu'une  telle 
conduite  est  lout-à-fait  contraire  et  à  l'esprit  do  Dieu  et  à  la 
pratique  de  l'Eglise.  Il  lui  dit  que  Dieu  n'a  point  extorqué, 
mais  enseigné  lui-même  la  connoissance  de  sa  divinité.  Qu'en 
rendant  ses  précef)les  dignes  de  créance  par  ses  œuvres  tou- 
tes célesles  qui  ont  atiré  l'admiration  des  hommes,'il  a  mon- 
tré qu'il  lejeltoit  une  volonté  qui  le  coiifesseioit  et  le  reconnoî- 
ti"oit  malgré  elle.  Que  si  l'on  s'avisoit  d'u.ser  de  pareille  vio- 
lence pour  forcer  à  embrasser  la  vraie  foi,  les  Evoques  Ca- 
tholiques sauroient  bien  la  reprimer,  en  y  oposant  la  doctri- 
ne de  l'Eglise. 

'A  la  peinlure  des  violences  des  Ariens,  S.  Hilaire  joint  une 
courte  description  de  leurs  ruses  et  de  leurs  artifices  :  de  leurs 
ruses  à  séduire  les  simples  sous  le  voile  d'expressions  recher- 
chées et  l'aparence  du  nom  Chrétien,  afin  de  les  faire  donner 
dans  leurs  filets,  et  de  les  env(;lop(;r  avec  eux  dans  leur  per- 
te :  'de  leurs  artifices  à  gagner  la  faveur  de  la  Cour,  à  surpren- 
dre la  religion  du  Prince,  à  en  obtenir  des  ordres  pour  sévir 
coulre  ceux  qui  refusoient  de  se  soumettre. 

'  S.  Jérôme  paroît  n'avoir  pas  connu  cette  première  requê- 
te de  S.  Hilaire  àConslance.  Il  e.stau  moins  vrai  qu'il  n'en 
dit  rien  dans  le  dénombrement  de  .ses  autres  écrits;  quoiqu'il 
y  fasse  mention  de  la  seconde  et  de  la  troisième,  dont  nous 
parlerons  dans  la  suite. 

'  3".  Le  livre  on  traité  îles  Synodes  ou  de  la  foi  des  Oinen- 
tmix,  suii  selon  l'ordre  des  lems  la  première  requête  à  l'Empe- 
reur. '  Erasme  et  Scullet  prétendent  que  S.  Hilaire  le  composa 
ottdans  le  Concile  de  Seleucie,  ou  après  ce  Concile  lors<ju'il 


I 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.    151 

(•toit  à  Constantinople,  ou  même  après  qu'il  fut  revenu  de  iv  siècle. 
son  exil.  Mais  ils  se  trompent  en  toutes  ces  différentes  opi- 
nions.  Il  est  constant  par  plusieurs  traits  de  cet  écrit  qu'il  fut 
fait  après  le  mois  d'Août  358,  et  avant  le  mois  de  Mai  de  l'an- 
née suivante,  par  conséquent  et  durant  l'exil  de  S.  Hilaire,  et 
avant  le  Concile  de  Seleucife  qui  ne  se  tint  qu'au  mois  de  Sep- 
tembre 359.  Il  n'y  a  qu'à  lire  le  nombre  8  de  ce  traité  pour 
ne  pas  douter  un  moment  de  ce  que  nous  avançons. 

'L'ouvrage  est  adressé  aux  Evêques  des  Gaules,  des  deux  aeSyn.p.nr;o. 
Germapies,  de  la  grande  Bretagne,  au  Clei^é  de  Toulouse, 
dont  l'Evêque  Rodane  étoit  alors  exilé,  et  aux  peuples  de  la 
province  de  Narbone,  où  Saturnin  d'Arles  fameux  Arien  do- 
minoit.  Ce  furent,  comme  nous  l'avons  remarqué  ailleurs,  les 
Evoques  des  Gaules  qui  firent  naître  à  S.  Hilaire  le  dessein  et 
l'ocasion  de  composer  cet  écrit.  '  Ils  l'avoient  prié  durant  son  •>«>">.  r;.  t. 
exil  de  leur  expliquer  ce  que  prétendoient  les  Orientaux  par 
tant  de  différentes  formules  de  foi  qu'ils  publioient  depuis  le 
Concile  de  Nicée. 

Outre  le  désir  de  satisfaire  à  leur  demande,  S.  Hilaire  avoit  nom.  s. 
deux  autres  puissans  motifs  qui  le  portèrent  à  mettre  la  main 
à  la  plume.  L'un  étoit  d'éclaircir  les  différens  soupçons  que  les 
Evêques  des  Gaules  et  ceux  d'Orient  avoient  les  uns  contre 
les  autres.  '  Car  ceux  d'Orient  étoient  ou  coupables  ou  au  Tiii.ii)i<i.  i>.  tis. 
moins  suspects  d'Arianisme;  '  et  les  Ariens  acusoient  ceux  des  sui.iiist.  i.s.n.w» 
Gaules  d'être  dans  les  sentimens  des  Sabelliens.  *  L'autre  mo-  rin^'ibi,!, 
lif  qu'avoif  S.  Hilaire  d'entreprendre  cet  ouvrage,  étoit  de 
préparer  et  d'instruire  les  Evêques  auxquels  il  l'adresse,  pour 
tes  Conciles  à  venir.  Il  avoit  apris  que  bien-tôt  il  s'en  devoit 
tenir  deux,  l'un  à  Ancyre,  d'où  néanmoins  il  fut  transféré  ?t 
Seleucie  où  il  se  tint,  l'autre  à  Rimini,  où  l'on  devoit  con- 
voquer tous  les  Evêques  des  Gaules ,  ou  au  moins  deut  de 
chaque  province.  Il  étoit  bien  aise  qu'ils  fussent  en  état  d'y 
paroîlre  avec  honneur,  et  d'y  briller  même  entre  les  autres 
Prélats.  Ainsi  il  souhaitoit  qu'ils  n'ignorassent  pas  même  jus- 
qu'à l'interprétation  des  nouveaux  termes  qu'on  mettoit  en  usa- 
ge, afin  qu'ils  pussent  se  soutenir  dans  l'unanimité  de  sentimens 
où  ils  étoient  sur  la  foi  qu'ils  avoient  reçue  des  Apôtres,  sans 
s'en  écarter  le  moins  du  monde. 

'  Entrant  en  matière  S.  Hilaire  commence  par  faire  l'éloge  mim.  2.  s.  7. 
de  l'intégrité  de  leur  foi,  et  de  leur  générosité  à  la  soutenir. 
Puis  passant  à  l'explication  de  ces  formulaires  des  Orientaux, 


152     S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV SIECLE,     il  les  soumet  à  leur  jugement,  en  déclarant  néanmoins  que 

s'il  y  a  des  fautes,  il  ne  prétend  point  en*  répondre,  parce  qu'il 

Hii.  ibiu.  n.  10.  11.  ne  fait  que  raporter  ce  qui  s'est  passé.  '  Sans  garder  l'ordre  des 
tems  où  les  choses  se  sont  faites,  il  raporte  quatre  formulai- 
res ou  professions  de  foi  des  Orientaux  :  1 .  la  seconde  de  Sir- 
mich,  qu'il  qualifie  toujours  le  blasphème  des  Ariens,  et 

nom.  a.  13.  quelquefois  nommément  d'Osius  et  de  Potamius ,  '  et  à  la- 
quelle il  opose  les  Anathématismes  du  Concile  d'Ancyre,  qu'il 

num.  S8.  29.  a  soiu  d'cxpliqucr  :  2.  '  celle  qui  fut  dressée  au  Concile  d'An- 
tioche  à  l'ocasion  de  la  dédicace  de  cette  Eglise  en  341  :  3. 

num.  33. 3*.         '  celle  du  Concile  de  Sardique  assemblé  en  347  de  plusieurs 

nnm.  38.  provinccs  de  l'Empire  :  4.  '  enfin  celle  qui  fut  signée  au  Con- 

cile de  Sirmich  contre  Photin  en  351 . 

Tiii.  ibid.  '  Comme  ce  traité  n'est  pas  fait  pour  soutenir  la  foi  contre 

les  hérétiques,  mais  pour  en  éclaircir  les  difficultés,  S.  Hilai- 
re  y  fait  paroître  toute  la  modération  et  toute  la  douceur  que 
les  Historiens  lui  atribuent.  Il  y  donne  un  borf  sens  à  tout  ce 
qui  en  est  susceptible  ;  il  y  excuse  tout  ce  qui  se  peut  excuser  ; 
il  y  justifie  tout  ce  qui  n'est  pas  absolument  mauvais.  Il  en 
usoit  ainsi  sans  doute,  et  pour  tâcher  de  diminuer  le  nombre 
des  ennemis  de  la  vérité,  et  pour  faire  en  sorte  de  réunir  les 

Hii.  ibiti.  n.  «.  32.  espHts,  au  cas  que  cela  se  pût,  sans  préjudice  de  la  foi.  '  Mais 
il  a  soin  d'avertir  plus  d'une  fois,  que  l'on  ne  juge  point  de 
son  sentiment  que  par  la  fin  de  son  livre,  qui  en  est  la  plus  bel- 
le partie,  où  il  se  déclare  ouvertement  pour  la  consubstantia- 
lité  du  Verbe. 

Hii  ibid.n.  6.  sa.  'Il  conclut  en  demandant  pardon  à  ses  confrères,  d'avoir 
entrepris  de  traiter  une  matière  aussi  relevée  et  aussi  difficile. 
Mais  il  ajoute  qu'il  n'a  pu  le  refuser  ni  à  l'amitié  qu'il  avoit 
pour  eux,  ni  à  ce  qu'il  devoit  en  qualité  d'Evêque  et  à  l'Egli- 
se et  à  la  vérité.  Enfin  il  les  exhorte  à  se  souvenir  de  lui  dans 
leurs  prières,  et  à  conserver  toujours  leur  foi  dans  sa  pureté, 
comme  ils  avoient  fait  jusqu'alors. 

pr.n.  4.  '  Scultet  après  Gillot  a  avancé,  l'on  ne  sait  sur  quel  fonde- 

ment, que  ce  traité  des  Synodes  avoit  été  traduit  de  latin  en 
grec.  Erasme  au  contraire  soutient  que  S.  Hilaire  l'a  traduit 
lui-même  de  grec  en  latin.  L'un  est  aussi  peu  vrai  que  l'autre. 
Seulement  S.  Hilaire  a  mis  de  grec  en  latin  les  formules  do 

iiosyn.  n.  0.  foi  qu'il  y  raporte  :  '  ce  qu'il  dit  avoir  déjà  été  fait  auparavant 
de  mot  <i  mot,  d'où  il  pouvoit  naître,  oomme  il  l'avoit  aper- 
çu lui-même,  quelque  obscurité,  à  cause  de  la  difi'érence  qui 

se 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.    153 


IV  SIECLi;. 


Hier,  ibid  |  rp. 
p.  6. 


Hil.  [r.  1.  n.   4.6 


se  trouve  entre  le  génie  de  l'une  et  l'autre  langue. 

'  S.  Jérôme  en  plusieurs  endroits  reconnoît  cet  écrit  pour 
un  véritable  ouvrage  de  S.  Hilaire.  Il  l'avoit  même  copié  de 
sa  propre  main,  lorsqu'il  éloit  à  Trêves,  tant  il  en  faisoit  d'esti- 
me. A  cette  ocasion  il  le  nomme  un  très-long  traité,  prolixum 
vaide  de  Synodis  librum.  Cet  écrit  est  néanmoins  assez  court  ; 
et  l'on  n'y  trouve  plus  aujourd'hui  de  quoi  justifier  la  prolixi- 
té que  lui  atribuë  S.  Jérôme.  C'est  ce  qui  feroit  soupçonner 
qu'il  y  avoit  anciennement  quelque  autre  chose  qui  faisoit 
comme  une  seconde  partie  de  ce  traité,  et  qui  se  sera  perdue 
dans  la  suite.  '  On  trouve  dans  les  fragmens  de  S.  Hilaire  de- 
quoi  apuïer  ce  soupçon.  L'on  voit  en  effet  par-là,  que  ce  S.  Do^:- 
teur  avoit  fait  touchant  ce  qui  s'étoit  passé  en  Occident  dans 
la  grande  atTaiie  de  l'Arianisme,  un  ouvrage  à  peu-près  sem- 
blable au  traité  des  Synodes  qui  traite  de  ce  qui  s'étoit  passé 
en  Orient.  Mais  il  y  avoit  cette  différence  entre  l'un  et  l'au- 
tre, qu'il  parloit  dans  le  second  avec  autant  de  vigueur,  qu'il 
avoit  usé  de  modération  dans  l'autre.  Il  commençoit  ce  der- 
nier écrit  par  ce  qui  s'étoit  passé  au  faux  Concile  d'Arles  en 
353.  '  Il  y  avoit  inséré,  comiue  il  le  dit  lui-même,  les  actes 
originaux  de  ce  qui  s'étoit  fait  et  par  les  Evêques  assemblés, 
et  par  les  particuliers.  '  C'est  ce  qui  paroît  par  la  letre  synodale 
du  Concile  de  Paris,  par  les  diverses  letres  du  Pape  Libère,  et 
par  quelques  autres  monumens,  qui  se  trouvent  sans  ordre  dans 
les  manuscrits  parmi  les  fragmens  dont  nous  parlons.  Nous  ne 
disons  rien  des  autres  pièces  qui  y  sont  contenues,  et  qui 
peuvent  être  les  débris  de  l'ouvrage  contre  Ursace  et  Valens, 
comme  nous  le  dirons  ailleurs. 

De  sorte  que  l'écrit  que  nous  suposons  sur  un  fondement 
aussi  légitime,  traitant  des  Conciles  en  Occident,  comme  le 
livre  des  Synodes  traite  de  ceux  d'Orient  sur  le  même  sujet, 
il  pouvoit  être  assez  étendu,  et  passer  pour  faire  une  suite,  ou 
même  la  seconde  partie  de  l'autre.  Par-là  il  est  aisé  de  com-  ■' 

prendre  que  S.  Jérôme  les  joignant  ensemble,  aura  eu  sujet 
de  nommer  l'ouvrage  un  très-long  traité. 

4°.  '  A  la  fin  du  livre  des  Synodes,  nous  avons  une  espèce  de  apo.  p.  laoe-isos. 
petite  apologie  de  ce  même  écrit.  Ce  ne  sont  cependant  que 
de  courtes  notes  marginales  que  S.  Hilaire  ajouta  dans  la 
suite  aux  endroits  que  certaines  personnes  en  avoient  blâmés. 
'Elles  n'avoient  point  encore  paru  dans  le  public.  Nous  en  deSyn. pr.  ».  t.b. 
sommes  redevables  à  Dom  Pierre  Goûtant  dernier  éditeur  de 


fr.  1.  n. 


fr.  10.   11.  12. 


1    1  * 


Tome  I.  Sec.  Pari. 


154     S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS,   ' 

IV  SIECLE.     S.  llilaire,  qui  les  aïant  trouvées  dans  divers  anciens  manus- 

'      iijij  crits,  '  les  a  jointes  à  la  nouvelle  édition  des  œuvres  de  ce  Pè- 

re. Elles  y  portent  ce  titre,  Apologetica  ad  reprehensores  libri 
de  Synodis  responsn . 

Tiii.ibid.  p.  447.  '  Dans  CCS  Hotcs  S.  Ililairc  parle  avec  le  même  esprit  de 
paix  et  de  douceur,  qui  l'avoit  porté  à  ménager  les  Orientaux 

Uii.  ibid.n.  ♦.  10.  daus  le  corps  de  l'ouvrage.  '  Il  y  fait  néanmoins  sentir  qu'avec 
ces  ménagemens  il  n'a  pas  prétendu  les  aprouver,  ni  eu  des- 
sein de  les  louer  :  puisqu'il  dit  expressément  qu'il  les  a  épar- 
gnés, et  que  leur  déclarant  qu'ils  donnoient  une  grande  apa- 
rence  de  rétablir  la  vraie  foi,  il  leur  a  dit  assez  ouvertement 

n.  i.  6.  qu'ils  n'y  étoient  pas  encore.  '  Il  s'y  adresse  quelquefois  à  un 

Lucifer,  avec  des  termes  qui  font  juger  qu'il  étoit  Evoque. 

dcSyn.  pr.n.  9.  '  Aussi  croit-OH  quc  c'cst  le  même  que  l'Evêque  de  Cagliari 
de  ce  nom  ;  et  la  conduite  qu'il  tint  dans  la  suite,  ne  laisse 
aucun  lieu  d'en  douter. 

ip.  p.  iio!)-i2is.  5°.  '  Nous  avons  encon;  de  S.  llilaire  une  letre  qu'il  écrivit 
du  lieu  de  son  exil  à  sa  tille  Abra,  comme  il  paroît  par  les 

adin.  premières  lignes.  Erasme  n'a  pas  craint  toutefois  de  dire  que 

cette  pièce  est  la  production  d'un  homme  ignorant  et  oisif  qui 
cherche  à  badiner  :  nugamentum  hominis  otiose  indocti.  Gil- 
lot,  Scultet  et  M.  Dupin  la  donnent  à  Forlunat.  Mais  il  est  plus 
juste  d'en  croire  Fortunat  lui-même,  qui  l'atribue  à  S.  llilai- 
re, et  qui  assure  que  de  son  tems,  c'est-à-dire  deux  siècles  après 
la  mort  du  Saint  Docteur,  on  la  gardoit  encore  à  Poitiers 

op.ibiu.  écrite  de  la  main  de  S.  lUlaire  même.  'Cette  letre  est  pour 

détourner  sa  fille,  sous  une  allégorie  aussi  pieuse  qu'ingénieu- 

Tiii.  ibid.  p. 741.  se,  de  prendre  d'autre  époux  que  J.  C.  '  11  est  vrai  que  le  sty- 
le n'en  est  pas  relevé  comme  celui  des  autres  ouvrages  de  S. 
Hilaire.  Mais  il  ne  s'y  trouve  rien  de  bas  et  d'indigne  de  la  no- 
blesse, de  l'esprit  et  de  la  pieté  de  ce  S.  Evêque.  D'ailleurs 
il  faut  se  souvenir  que  c'est  un  père  qui  parle  à  sa  fille,  qui  est 

uii.ibid.  n.  7.  représentée  comme  fort  jeune.  '  On  voit  par  la  fin  de  la  letre 
que  la  mère  de  cette  enfant,  femme  de  S.  Hilaire,  vivmt  encore. 

UAi.  6°.  'A  cette  letre   le  S.   Docteur  avoit  joint  deux  hymnes 

pour  servir  de  prières  à  sa  fille,  l'une  pour  le  matin,  l'autre 

p. iii3i2u.  jiour  le  soir.  ' Nous  avons  encore  la  première,  à  laquelle  il 
paroît  néanmoins  qu'on  a  ajouté  après  coup  la  dernière  stro- 
phe, qui  contient  la  doxologie.  Quant  à  l'autre  hymne  nui 
étoit  pour  le  soir,  elle  n'est  pas  venue  jusqu'à  nous.  A  sa  pla- 
ce on  en  trouve  dans  quelques  manuscrits  une  autre,  que 


Hil.    de  Trin. 
765-1114. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.    155 

Dom  Coûtant  n'a  pas  laissé  de  nous  donner.  Mais  il  avertit     iv  siècle, 
qu'elle  ne  lui  paroît  pas  être  de  S.  Hilaire. 

7°.  '  Le  principal  ouvrage  de  S.  Ililaire  sont  ses  douze  livres 
de  la  Trinité^  qu'il  composa  pour  la  défense  de  la  foi  contre  les 
Ariens.  L'on  ignore  quel  titre  précis  l'Auteur  leur  donna  d'ar 
bord.  C'est  sans  doute  pourquoi  '  ils  s'en  trouvent  porter  tant 
de  difTérens  dans  les  manuscrits  et  les  autres  monumens  de 
l'antiquité.  '  S.  Jérôme  les  intitule  les  livres  contre  les  Ariens. 
Ailleurs  il  ne  les  nomme  que  les  douze  livres  de  S.  Hilaire  , 
dans  lesquels,  dit-il,  il  a  suivi  le  nombre  de  ceux  de  Quinti- 
lien,  comme  il  y  a  imité  le  style.  '  Après  tout  il  n'est  pas 
croiable  que  S.  Hilaire,  qui  bien  qu'il  ait  entrepris  cet  ouvrage 
contre  les  Ariens ,  a  néanmoins  pris  à  tâche  de  ne  les  y  jamais 
nommer,  lui  ait  fait  porter  le  titre  que  lui  donne  S.  Jérôme, 

'  On  pourroit  avec  autant  de  sujet  l'intituler  contre  toug  les 
hérétiques,  ou  contre  toutes  les  hérésies,  que  contre  les  Ariens 
ou  l'Arianisme  ;  puisque  non  seulement  S.  Hilaire  y  réfute  les 
principales  de  celles  qui  avoient  déjà  paru,  mais  qu'il  y  don- 
ne encore  les  principes  pour  combattre  toutes  les  autres.  Aus- 
si se  trouve-t'il  intitulé  de  la  sorte  dans  quelques  manuscrits  ; 

et  l'exemplaire  que  l'Abbé  Ansigise  en  avoil  mis  dans  sa  bi-  Spic 
bliolheque  de  S.  Germer  au  commencement  du  IX  siècle  , 
portoit  pour  titre,  Contre  les  hérétiques. 

On  vient  de  voir  par  le  témoignage  de  S.  Jérôme,  que  dès 
le  siècle  même  de  S.  Hilaire  ces  livres  étoient  constamment 
regardés  comme  l'ouvrage  du  Saint  Evêque.  '  Gela  n'a  pas 
toutefois  empêché  que  quelques  Ecrivains  ou  Copistes  du 
moïen  Age  ne  les  aient  atrioués  à  S.  Athanase.  Mais  depuis 
long-tems  personne  ne  doute  au'ils  ne  soient  de  S.  Ililaire. 

'  Il  n'y  a  pas  nop  plus  lieu  de  douter  qu'ils  ne  soient  un  fruit 
de  son  exil.  Il  le  dit  si  clairement,  '  que  l'on  ne  peut 
assez  s'étonner  de  ce  que  Mr.  Dupin  '  prétende  le  contraire. 


pr.  n.  2-3. 


Hier.  Vir.   ill.    c. 
100  I  ep.  83.  p.  657. 


Hil.  ibid.  n.8. 


n.  S. 


n.  3. 


1.3.  p.  2*1. 


Hil.  ib.  n.  I. 


I.  10.  n.4. 

Dupin,  bib. 
286.2. 


1.2.  p. 


<  '  M.  Dupin  prétend  que  S.  Hilaire 
composa  ses  liTres  de  la  Triniln  avant  son 
exil .  Kt  pour  le  prouver,  il  cite  un  passage 
tiré  do  dixième  livre  n.  4,  '  où  S.  Hilaire 
fait  voir  que  l'état  malheureux  01)  se  trou- 
voit  alors  la  reliKion,  étoit  un  accomplis- 
sement de  cette  prophétie  de  l'Apotre  S. 
Paul  :  Erit  teminis  cum  $anam  doctritiam 
nontn»tinebunt,sedndtuadetiderincnneer- 
vabuHliibi  magistroi  etc.  Voici  le  passage 
de  S.  Hilaire  :  Sed  licet  nune  a  multis, 
coacervantibui  tibitecundum  desideria  tua 


magittrot,  tana  doctrina  exiulet  ;  non  la-    Ibid. 

men  a  Sanctii  miibiuque  prœdieationisve- 

ritat  ex$ulabit.  Liiquemur  enim  extulti  per 

hot  libros,  et  termo  Dei,  qui  vineiri  non    Hil.  ibid.  n.  i. 

point,  liber  excurrft,  de  hoo  eodem  apotto- 

licœ  propheliœ  admonent  lempore:  utcum 

audituê  veritatii  impatient  deprehenditur, 

et  secundum  desideria  humana  coacervati 

maqiitri  reperiuntur  jam  de  tempore  non 

amhigatur;  $eil  in  eo  coexsulare,  exsulan- 

tihus  tanœ  fidei  prœdicatoribui,  veritas  tn- 

telligatur.Acdetemporibus  non  queremur 

Vij 


Mil.  ibiil.  1.3.  n.  3. 


156     S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,  jvjous  en  faisons  juges  les  Lecleurs.  Qu'ils  se  donnent  la  pei- 
ne de  lire  le  passage  que  nous  renvoïonsdansla  note  ,  et  ils 
verront  si  l'on  peut  dire  avec  ce  Savant  que  ces  livres  sont 
écrits  avant  l'exil  du  S.  Docteur.  Il  paroît  qu'ils  l'ont  été  à  dif- 
férentes reprises  ;  mais  il  seroit  difficile  d'en  fixer  les  époques. 
Tout  ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  l'Auteur  y  a  travaillé 
pendant  son  exil,  et  qu'ils  étoient  finis  avant  l'an  360. 

Entre  les  motifs  oui  portèrent  S.  Hilaire  à  les  entrepren- 
dre, il  marque  d'abord  la  nécessité  qu'il  y  avoit  de  résister  aux 
hérétiques,  qui  par  leur  fausse  et  pernicieuse  doctrine  met- 
1.  c.  n.  2.  toient  en  danger  la  foi  de  l'Eglise.  'Ensuite  il  dit  qu'il  l'a  fait 

par  l'obligation  que  l'Eglise  en  l'élevant  à  l'épiscopat,  lui  im- 
posoit  de  prêcher  la  vérité,  et  par  le  désir  qu'il  avoit  de  ser- 
vir au  salut  de  plusieurs  âmes,  dans  la  confusion  et  le  péril  où 
l'impiété  de  l'hérésie  les  avoit  jeflées. 

'  -  "■  --  ^-  '  Comme  il  entreprend  d'y  traiter  des  choses  qui  sont  infini- 

I.  I  M  S-.  38,  ment  au-dessus  de  la  portée  ordinaire  de  l'homme,  '  il  recon- 
noîtavec  humilité  qu'il  est  incapable  d'y  réussir  sans  la  grâce , 
la  miséricorde  et  les  lumières  de  Dieu.  Et  pour  les  obtenir  ,  il 
lui  adresse  une  prière  d'autant  plus  touchante,  qu'elle  est  plus 
humble.  Il  la  finit  par  le  prier  de  lui  éclairer  l'entendement , 
afin  de  comprendre  la  signification  des  termes  ,  et  de  parler 
d'une  manière  propre  à  faire  honneur  à  son  sujet  ;  de  lui  acor- 
der  la  grâce  de  croire  la  vérité  qu'il  va  annoncer  ,  et  celle  de 
l'annoncer  conformément  à  sa  croïance. 

On  ne  sauroit  assez  admirer  avec  quel  respect  il  traite  sa 

matière,  et  s'atache  scrupuleusement  h  la  foi  ae  l'Eglise  en  la 

1. 7.  n.  3.  traitant.  '  Il  déclare  que  ce  au'il  y  avance,  il  ne  le  tire  point  de 

I.1.II.  iH.  gQjj  propre  fonds,  mais  de  la  doctrine  des  Apôtres  :  Ailleurs 

il  avertit  que  lorsqu'il  est  question  des  choses  de  Dieu,  il  faut 

s'en  raporter  à  lui-m/^me  pour  ce  qui  regarde  sa  connoissan- 


quin  etiam  gauilebimui,  quia  iniquilat  se  expressif  quo  celui-ci  'f   L'on    auruit  t)eau 

per  hoc  exsilii  nottri   lempui  ottenderit,  dire  qu'eu  ccl  endroit  S.  Hilaire  parle  de 

iiuoveritatitimpatiennanœdoetrinieprw-  l'exil  do  S.    Paulin  de  Trêves,    relégué  rn 

iticatoret,utteatndumde$ideria$ua  coacer-  Phrygie  dés  353,  de  celai  de  S.  Eusebo  de 

vel  tibi  magistrat,  relegnt  :  txsilio  nostro  Verc(ùl   cl   de   Lucifer  de  C.agliari,  bannis 

latanUi  et  extultanles  in  Domino,  eontti-  en  3.'>5,  et  du   sien   propre  comme  dcTant 

titteinnot>itplenitudlnem  upoitolieaipro-  l)ien-tcit  arriver:  cette  explication  est  for- 

phetiie.  cce,  ut  n'dte  rien  de  la  force  <la  passage. 

P""-   "•  -'•  Ceux    qui    soutiennent   que  S.     Hilaire  '  On  a  été  si  persuadé  dans  l'antiquité  quo 

composa   ses   livres   de  la  Trinité  pendant  cet  ouvra^je  fut  composé  dans  l'exil  do  S. 

on   exil  (lourroient-iU  prouver  leur  son-  Hilaire,    <|uo  plusieurs  anciens  manuscrits 

ment  par  un   passaKO  pins  flair  ot  plus  lo  portent  expressément. 


IJOCTRUU  DE  L'ÉGLISE  ET  CONFESS.    îoT 

ce.  Qu'il  n'y  a  qu'à  se  soumettre  avec  un  respect  acompagné     iv  sikcle. 

de  pieté,  à  ce  qu'il  lui  plaît  de  nous  en  aprendre.  Qu'il  sait 

bien  se  rendre  témoignage  à  lui-même,  et  que  ce  n'est  que 

par  lui  seul  qu'on  le  connoît.  «  C'est  ce  que  j'ai  apris,  dit-il  i.  g.  11.20. 

«  encore  en  taisant  le  détail  de  quelques  points  de  notre  foi  ; 

«  c'est  ce  que  j'ai  cru,  et  j'y  suis  si  fortement  ataché,  que  je  ne 

«  veux,  ni  ne  puis  même  avoir  d'autre  croïance.  » 

'  Le  premier  des  douze  livres  est  comme  la  préface  de  tout  1. 1.  „.  1-33. 
l'ouvrage,  et  contient  des  sommaires  dos  onze  livres  suivans. 
D'abord  S.  Hilaini  y  décrit  par  quels  degrés  il  est  parvenu  à 
la  connoissance  de  la  vérité,  et  instruit  par-là  les  autres  à  y 
arriver  en  prenant  la  même  route.  Il  raporte  et  réfute  les  di- 
vers sentimens  des  philosophes  et  ceux  de  la  populace  tou- 
chant la  béatitude  et  la  Divinité,  et  montre  que  c'est  dans  les 
livres  sacrés  qu'il  en  faut  puiser  la  vraie  connoissance.  De  la 
connoissance  d'un  seul  Dieu  tout-pui.?sant,  il  passe  à  la  con- 
noissance de  l'incarnation  du  Verbe  ;  et  de  l'une  et  de  l'autre 
il  conclud  l'immorlalité  de  l'ame  et  sa  vraie  béatitude.  Mais  il 
a  soin  d'avertir  que  ces  sublimes  connoissances  ne  sont  pas  du 
ressort  de  l'esprit  humain  ,  et  que  l'on  n'y  peut  ateindre  que 
par  la  foi.  Il  fait  observer  que  c'est  pour  avoir  voulu  les  me- 
surer sur  la  petitesse  de  l'esprit  de  l'homme  ,  que  sont  venues 
les  hérésies.  Il  se  propose  d'encombaltre  deux  en  particulier  , 
celle  d'Arius  et  celle  de  Sabellius.  Il  donne  ensuite  d'excel- 
lentes ràglt's  pour  lire  la  parole  de  Dieu,  et  finit  par  la  prière 
dont  nous  avons  déjà  parlé,  et  que  nous  avons  raportée  en 
partie. 

Ce  qu'il  dit  de  la  manière  de  lire  la  parole  de  Dieu  ,  peut 
s'apliquer  à  toute  autre  lecture,  et  ne  devroit  être  ignoré  de 
personne.  «  '  Un  Lecteur,  dit  S.  Hilaire,  fait  voir  qu'il  ml  num.  12. 
«  lire  comme  il  faut,  lorsqu'à  mesure  qu'il  lit,  il  prend  le  sens 
«  des  paroles  au  lieu  de  leur  donner  le  sien,  et  que  bien  loin 
«  d'y  substituer  sa  pensée,  il  prend  au  contraire  celle  de  l'au- 
«  teur.  11  ne  doit  pas  non  plus  vouloir  à  toute  force  y  décou- 
«  vrir  ce  que  ses  préjugés  auroient  voulu  y  trouver,  avant  que 
«  de  le  lire,  »  • 

'  Le  second  livre  est  emploie  à  traiter  de  la  foi  de  la  Tri-  1.2.  n.  1-35. 
nité  en  général,  et  de  chacune  des  Trois  Personnes  en  particu^ 
lier.  Il  débute  par  dire  qu'il  suffiroit  aux  Chrétiens  d'en  avoir 
la  connoissance  qu'ils  en  ont  reçue  dans  le  baptême,  par  les 
paroles  de  l'Evangile  que  l'on  y  emploie.  Mais  que  les  héré- 


158     S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,  tiques  le  forcent  par  leurs  blasphèmes  à  expliquer  avec  plus 
d'étendue  des  mystères  qui  sont  au-dessus  de  l'espril  humain. 
De-là  il  passe  à  l'origine  des  hérésies,  et  dit  nuelque  chose  en 
particulier  de  celles  qui  ataquoient  la  foi  ae  la  Trinité.  Il 
nomme  Sabellius  et  llebion  ;  mais  il  ne  fait  que  désigner  les 
Ariens,  sans  les  nommer.  Après  avoir  raporté  ce  qu'il  croit 
du  Père,  il  montre  qu'il  est  impossible  d'expliquer  par  des  pa- 
roles la  grandeur  de  cet  Etre  souverain.  Il  vient  ensuite  à  par- 
ler du  Fils.  Il  avoue  que  sa  génération  est  incompréhensible  , 
et  reprend  sévèrement  ceux  qui  voudroient  rexpli(juer.  Il  lail 
voir  quelle  seroit  leur  témérité  de  le  tenter,  vu  qu'il  y  a  tant 
de  choses  dans  l'ordre  de  la  nature,  dont  ils  ne  sauroicnl  ren- 
dre raison.  Il  montre  néanmoins  que  bien  qu'elle  ait  été  in- 
connue aux  Sages  du  siècle,  aux  Juifs  et  aux  hérétiques,  elle 
se  trouve  pourtant  dévelopée  dans  l'Evangile  de  S.  Jean.  Kii- 
fin  il  passe  à  l'existence  du  S.  Esprit,  dont  il  établit  la  divinité 
et  la  distinction  entre  le  Père  et  le  Fils.  Il  parle  rvw.  rpiel- 
que  détail  de  ses  efl'ets,  de  ses  dons,  du  besoin  que  nous  en 
avons,  et  finit  par  exhorter  à  le  demander  avec  instance,  à 
tâcher  de  le  mériter,  et  à  le  retenir  par  la  foi  et  l'observation 
des  commandemens  de  Dieu. 
I.  3.  n.  1-26.  '  Dans  le  troisième  livre  S.  Hilaire  y  établit  la  généralion 

éternelle  du  Verbe,  sur-lout  par  ces  paroles  de  J.  C.  pri.scs  (h; 
S,  Jean  :  Je  suis  dans  mon  Père,  et  mon  Père  est  dans  moi. 
Après  quoi  il  fait  voir  par  le  changement  de  l'eau  on  vin,  et  la 
multiplication  des  pains  raporlée  dans  l'Evangile,  que  I)i<'u 
peut  faire  beaucoup  de  choses,  que  l'esprit  humain  ne  j)eul 
comprendre.  Il  raporte  ensuite  le  raisonnement  que  l'on  faisoit 

{)Our  prouver  qu'il  ne  peut  y  avoir  de  naissance  en  Dieu  ,  et 
e  réfute  par  plusieurs  raisons  :  \ .  parce  que  ce  rai.sonnf^ 
ment  ne  vient  que  de  la  prudence  de  la  chair,  que  Dieu 
dans  ses  Ecritures  a  promis  de  détruire  :  î.  parce  qu'il  vaut 
mieux  s'en  raporter  à  J.  C.  qui  s'est  fait  homme  pour  nous  in- 
struire des  cho.ses  divines:  3.  parce  que  ne  ptui  vaut  même- 
comprendre  les  actions  extérieures  de  J.  C.  il  nous  est  fi  plus 
forte  raison  impossible  de  comprendre  .sa  génération  éternelh;  : 
4.  enfin  parce  que  c'est  le  propre  de  la  nature  humaine,  en- 
tant qu'elle  est  créée  et  imparfaite,  de  ne  pouvoir  compren- 
dre son  Créateur  qui  est  un  Etre  parfait  et  infini.  Il  pas.se  de-l;\ 
à  louer  la  sagesse  des  fidèles,  qui  renoncent  à  leurs  propres 
lumières  et  à  la  raison  même,  jtour  s'en  raporter  à  la  toule- 
puissance  de  Dieu  on  ce  qui  le  regarde. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.    159 

"  S.  Hilaire  emploie  le  quatrième  livre  à  munir  la  simplici-  i  v  siècle. 
té  des  fidèles  contre  les  ruses  et  les  artifices  des  ennemis  de  .  i.  4.  n.  i-*9. 
la  divinité  du  Verbe,  dont  il  prend  la  défense.  Afin  de  mieux 
fairo  sentir  le  loible  et  le  ridicule  de  leurs  faux  raisonnemens  , 
il  les  raporte  en  détail,  et  y  joint  la  profession  de  foi  qu'A - 
rius,  qu'il  s'abstient  néanmoins  de  nommer,  et  ceux  de  son 
parti  envoïerent  à  Alexandre  Evoque  d'Alexandrie.  Il  réfute 
ensuiliï  le.-  mauvais  sens  qu'ils  donnoient  aux  endroits  de  l'E- 
crilui(!  dont  ils  se  scrvoient  pour  apuïer  leurs  erreurs,  et  dé- 
clare que  l'Eglise  les  déteste  et  ne  les  connoît  point.  Il  s'ata- 
clu;  en  particulier  à  réfuter  le  tour  artificieux  qu'ils  donnoient 
à  l'endroit  de  Moyse,  qui  établit  l'unité  d'un  Dieu,  et  montre 
par  plusieurs  passages  de  l'ancien  Testament,  que  bien  que 
l)i(!U  soit  un  par  sa  nature,  il  n'est  pas  néanmoins  un  Dieu  so- 
litaire, puisqu'il  a  un  Fils  qui  participe  à  sa  nature  et  à  sa  di- 
vinité. Dans  ce  quatrième  livre  comin(^  dans  le  suivant,  S.  Hi- 
laire a|)uïe  beaucoup  sur  les  aparitions  faites  aux  Patriarches , 
firétendant  avec  plusieurs  autres  Pères  de  l'Eglise  que  c'est 
e  Fils  qui  s'est  rendu  visible  aux  hommes  dans  ces  rencontres. 

l^e  cinquième  livre  est  une  continuation  du  sujet  traité  1.  5.  n.  1-39. 
dans  le  livre  précédent.  Sur  la  fin  S.  Hilaire  y  j)rouve  que 
le  Pcre  et  le  Fils  ne  sont  qu'un  seul  Dieu  en  deux  Person- 
nes distinctes  l'une  de  l'autre.  Il  répond  par-là  au  sophisme 
des  Ariens,  qui  nioienl  que  le  fils  fût  Dieu,  sous  prétexte 
d'éviter  et  l'erreur  qui  fait  deux  Dieux  du  Père  et  du  Fils  ,  et 
l'hérésie  de  Sabellius  qui  de  l'un  et  de  l'autre  ne  faisoit  qu'une 
mêmi!  Personne.  Dans  ces  deux  livres  S.  Hilaire  n'emploie 
que  des  passages  pris  de  l'ancien  Testament.  '  Il  donne  en  un  n.  ai 
endroit  une  règle  qu'il  seroità  souhaiter  que  l'on  eût  toujours 
observée  dans  les  écoles.  «  Il  faut  bien  se  donner  de  garde, 
«  dit-il,  de  parler  autrement  de  Dieu,  qu'il  nous  a  aprislui- 
«  même  à  en  parler  en  s'acommodant  à  notre  portée.  » 

'  Après  avoir  touché  dans  le  sixième  livre  quelque  chose  du  1.  «.  n.  i-sa. 
progrès  de  la  nouvelle  hérésie  et  de  ses  pernicieux  effets,  et 
découvert  quelques-uns  des  motifs  qui  lui  ont  fait  prendre  la 
plume  pour  la  combattre,  il  transcrit  de  nouveau  la  profession 
de  foi  d'Arius  ;  afin  que  l'aïant  réfutée  dans  les  livres  précé- 
dens  par  le  témoignage  de  la  Loi  et  des  Prophètes,  il  la  réfu- 
te dans  celui-ci  par  l'autorité  de  l'Evangile  et  des  écrits  des 
Apôtres.  Il  passe  ensuite  à  établir  la  foi  de  l'Eglise  sur  la  divi- 
nité du  Fils.  Et  comme  il  avoit  déjà  prouvé  qu'il  est  le  vrai 


IV  SIKCI.  K. 


n.  I. 


f.  7.  n.  i-il. 


160  S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

Fils  du  Père,  il  monire  ici  qu'il  n'est  point  Fils  adoptif,  mais 
Fils  naturel  de  Dieu.  C'est  ce  qu'il  exécute  en  se  servant  du 
témoignage  du  Père,  de  celui  du  Fils  même,  de  l'aveu  des 
Juifs,  des  Gentils  et  même  de  celui  des  démons.  '  Dès  le  com- 
mencement du  livre  il  y  taxe  d'impudence  la  hardiesse  qu'a- 
voient  les  Ariens  de  se  prévaloir  de  leur  grand  nombre,  et  de 
s'en  servir  pour  acréditer  leur  secte,  en  le  donnant  pour  preu- 
ve du  parti  où  se  trouve  la  vérité,  et  en  faisant  entendre  qu'il 
y  a  moins  de  danger  d'errer  avec  la  multitude. 

'  S.  Hilaire  avertit  lui-même  que  le  septième  livre  peut  être 
regardé  comme  le  premier,  ou  le  principal  des  six  autres  pré- 
cédens  pour  l'importance  du  sujet  qu'il  y  traite.  11  y  décrit 
d'abord  en  peu  de  mots  les  ruses,  les  subtilités,  les  artifices 
dont  usoit  la  nouvelle  hérésie  pour  se  faire  des  partisans,  el 
touche  eu  passant  les  motifs  qui  le  portent  à  la  combatre.  il 
montre  ensuite  le  risque  que  l'on  court  en  réfutant  les  enne- 
mis de  la  Trinité.  Car  lorsqu'on  eu  réfute  les  uns,  on  semble 
favoriser  les  autres.  Il  fait  néanmoins  voir  que  leurs  erreurs 
par  leur  contrariété  et  leur  oposition  entre  elles,  se  combat- 
tent et  se  détruisent  les  unes  les  autres  à  l'avantage  de  l'Eglise 
qui  demeure  triomphante  de  leur  victoire.  Victoria  enimeo-, 
•um  Ecclesiœ  triiimphits  ex  omnibus  est.  a  Oui,  dit-il ,  la 
force  de  la  vérité  est  si  grande,  que  bien  qu'elle  puisse  se 
faire  connoître  par  elle-même,  elle  ne  devient  toutefois  ja- 
mais plus  brillante  que  lorsqu'on  lui  résiste.  Toujours  im- 
mobile de  sa  nature ,  elle  ne  fait  qu'acquérir  tous  les  jours 
un  nouvel  affermissement  par  les  ataques  qu'on  lui  livre. 
En  effet,  ajoûte-t-il,  c'est  le  propre  de  l'Eglise  de  vaincre, 
lorsqu'on  la  blesse  ;  de  se  faire  connoître,  lorsqu'on  lui  in- 
sulte ;  de  demeurer  victorieuse,  lorsqu'on  l'abandonne. 
Elle  voudroit  bien  à  la  vérité  que  tous  leshommes  lui  fussent 
unis,  et  demeurassent  dans  son  sein  :  elle  souhaiteroit  n'avoir 
jamais  la  douleur  de  voir  les  uns  s'y  perdre,  et  d'être  obligée 
d'en  chasser  d'autres  qui  se  rendent  si  indignes  de  la  société 
d'une  telle  mère,  et  de  les  priver  de  la  paix  qu'ils  y  goûtoient. 
Mais  lorsqu'il  arrive  que  les  hérétiques  en  sortent  d'eux- 
mêmes,  ou  qu'elle  les  en  chasse,  autant  qu'elle  perd  par-là 
en  se  voïant  privée  de  l'ocasion  de  leur  communiquer  le  salut, 
autant  elle  gagne  par  un  autre  endroit  en  faisant  connoître  à 
l'avantage  de  la  foi,  que  c'est  en  elle  seule  qu'on  trouve  le 
vrai  bonheur.  »  Le  reste  du  Hvre  est  pour  établir  l'unité  de 

nature 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.  161 

nafttrë  entre  le  Père  et  le  Fils.  C'est  ce  que  S.  Hilaire  prouve  i  v  ^iÉCLK. 
par  la  naissance  que  le  Fils  tire  du  Père,  et  par  son  égalité 
avec  lui.  Il  prouve  ensuite  cette  naissance  et  cette  égalité  par 
le  nom  de  Dieu  qui  est  donné  au  Fils  dans  tout  le  nouvea* 
Testament ,  et  par  ce  qui  est  raporté  de  sa  naissance,  de  sa 
piriàsance,  de  ses  actions,  qui  sont  les  mêmes  par  raport  au 
Fils  que  par  raport  au  Père. 

'  Le  huitième  livre  est  emploie  à  détruire  d'abord  lessub*  i.s.  n,  i.  sa. 
lilités  dont  les  Ariens  se  servoient  pour  tâcher  d'établir  entré 
le  Père  et  le  Fils  une  union  seulement  de  volonté  et  de  senti- 
ment ;  et  ensuite  à  soutenir  le  dogme  catholique  qui  y  recon* 
noîl  une  unité  d'essence  et  de  nature.  S.  Ililaire  y  prouve  cet- 
te vérité  par  onze  raisonnemens  démonstratifs.  Mais  en  y  éta- 
blissant 1  unité  essentielle  du  Fils  avec  le  Père  contre  la  nou- 
velle hérésie,  il  a  soin  d'y  établir  aussi  la  distinction  des  pôf'- 
sonnes  pour  éviter  de  paroître  donner  dans  le  Sabellianisme.  »<  «•-»« 

'  Entre  les  raisonnemens  dont  il  se  sert,  il  en  emploie  un  tiré  num.  i». 
de  la  présence  réelle  de  J.  C.  dans  l'Eucharistie  ;  ce  qui  est  re*- 
hiarquable.  '  Nous  ne  devons  pas  passer  non  plus  sans  le  re*  num.  i. 
marquer,  ce  qu'il  dit  des  principales  qualités  nécessaires  atrx 
Pasteurs  de  l'Eglise.  S.  Hilaire  veut  après  S.  Paul  qu'il  cite  et 
qu'il  explique,  qu'ils  réunissent  en  leur  personne  la  sainteté  de 
vie  avec  la  science  ecclésiastique.  L'une  sans  l'autre  ne  suffit 
pas.  Car  s'ils  n'ont  que  de  la  pieté,  sans  avoir  de  la  science, 
ils  ne  seront  utiles  qu'à  eux  seuls  :  de  même  s'ils  n'ont  que  du 
savoir  sans  avoir  de  la  pieté,  leur  doctrine  sera  sans  poids,  «t 
par  conséquent  sans  fruit.  «  Il  faut  donc,  conclud  S.  Hilaire;  .1*  .iwwi 

«  que  le  savoir  dans  un  Evoque  soit  relevé  par  la  sainteté  de  sa 
«  vie,  et  que  la  sainteté  de  sa  vie  donne  du  relief  à  son  savoir  : 
«  ut  et  vita  ejm  ometur  docendo,  et  doctrina  vivendo,  » 

'Après  avoir  établi  dans  le  livre  précédent  l'unité  d'ebwn-  1.9.11.1.75. 
ce  et  de  nature  entre  le  Père  et  le  Fils,  S.  Hilaire  emploïfe  le  !  ■ 

neuvième  à  réfuter  les  objections  qu'y  oposoient  les  hérétiques. 
Elles  consistent  en  cinq  fameux  passages  tirés  de  l'Evangile 
dont  les  Ariens  abusoient  pour  soutenir  leur  hérésie.  S.  Hilai- 
re y  répond  par  ordre  l'un  après  l'autre,  et  en  découvre  le  sens 
véritable  et  naturel,  bien  différent  de  celui  qu'y  atachoierrt  le» 
Ariens.  Mais  avant  que  d'en  venir-là,  il  pose  deux  principe^ 
incontestables  qui  sont  comme  des  réponses  générales  :  1 .  qae 
pour  prendre  le  sens  propre  et  naturel  de  l'Ecriture,  il  ne  faut 
pas  en  expliquer  les  endroits  en  les  détachant  du  reste,  mais 
Tome  I.  Sec.  Part.  X 


lt>2     S.  lilLAiKE,  EVEUUE  DE  POITIERS, 

IV  siECLp.    en  les  joignant  à  ce  qui  suit  et  à  ce  qui  précède,  et  en  aïant 

— ' égard  au  sujet  dont  ils  traitent  :  2.  qu'il  ne  faut  pas  confondre 

en  J.  C.  les  deux  natures  qui  y  sont  réunies,  l'une  selon  la- 
quelle il  est  Fils  de  Dieu,  l'autre  selon  laquelle  il  est  Fils  de 

I  homme. 

1.10.  n.  I.  71.  '  Dans  le  dixième  livre  S.  Hilaire  entreprend  de  résoudre 

les  objections,  que  les  Ariens  tiroient  en  faveur  de  leur  héré- 
sie, des  passages  de  l'Ecriture  où  il  est  dit  que  J.  C.  a  été  su- 
jet à  la  faim,  à  la  soif,  à  la  tristesse,  à  la  douleur,  etc.  Le  Saint 
y  répond  par  un  genre  de  raisonnement  qui  dans  l'opinion  où 
éloient  ces  hérétiques,  devoit  à  la  vérité  leur  fermer  la  bouche, 
mais  où  il  se  trouve  certaines  expressions,  qui  ne  paroissent  pas 
d'abord  tout-à-fait  conformes  au  sentiment  de  l'Eglise.  Mais 
il  faut  faire  ici  ce  que  l'Auteur  prie  que  l'on  fasse  dans  son  li- 
vre des  Synodes,  c'est-à-dire,  ne  juger  de  son  sentiment  que 

nnm.oï.  par  la  fin  du  livre.  '  On  y  voit  en  elTet  qu'il  s'y  explique  très- 

exactement,  en  raportanl  les  souffrances  de  Jesus-Christ  à  la 
nature  humaine,  qui  est  unie  en  lui  avec  la  nature  divine, 
.r  *  as  qui  y  a  fait  en  même  tems  remarquer  .ses  opérations.  C'est  ce 
qui  lui  fait  dire  :  Habes  in  conquerente  ad  mortetn  relictwn  se 
esse,  quia  homo  est  :  habes  eum  qui  morilur,  profitentem  se 

nam.  il.  tn  parodixo  regnare,  quia  Deus  est.  '  A  l'égard  de  la  sueur  de 

sang  et  de  l'Ange  qui  aparut  pour  fortifier  Jesus-ChrisI,  comme 
S.  Luc  le  raporte,  S.  hilaire  observe  que  cet  endroit  ne  se  trou- 
ve point  dans  plusieurs  exemplaires  grecs  et  latins  de  cet  Evan- 
geliste.  Ainsi  il  n'ose  avancer  ou  qu'il  manque  dans  ceu.\-là, 

num.  M.  ou  qu'il  soit  de  trop  dans  les  autres.  '  Aïant  eu  ocasion  de  par- 

ler de  l'origine  de  l'ame,  il  enseigne  qu'elle  ne  vient  point  par 
transfusion  ,  mais  qu'elle  est  immédiatement  créée  de  Dieu.  11 
y  enseigne  aussi  par  oca.sion  la  doctrine  touchant  le  péché  ori- 
r,  .  ginel. 

I.  M.  II.  i-w.  Dans  l'onzième  livre  S.  Hilaire  fait  d'abord  observer  qu'il 

ji'y  a  qu'une  foi,  comme  il  n'y  a  qu'im  Dieu  et  un  baptême, 
et  "que  cette  foi  qui  est  une,  ne  se  trouve  [«tint  chez  les  Ariens, 
Ou  ils  se  servent  de  l'incarnation  du  Fils  de  Dieu  pour  lui 
disputer  sa  divinité;  prenant  ainsi  d'un  mystère  qui  a  opéré  le 
salut  du  monde,  des  sujets  d'établir  une  impielé  monstrueuse. 

II  vient  ensuite  à  détruire  les  objections  <pii'  les  Ariens  tiroient 
de  divers  passiiges  de  l'Evangile  et  des  écrits  des  Apôtres, 
lui  regardent  J.  C.  ressuscité  et  glorieux.  S.  Hilaire  y  répond 
le  manière  à  montrcj-  que  ces  endroits  de  l'Ecriture  établis- 


l 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  COxNFESS.    103 

sent  tout  Ifî  contraire  de  ce  que  prétendoient  ces  héréliqiii  s ,     iv  sieclk. 
et  qu'ainsi  la  vérité  se  trouve  dans  ce  qu'ils  emploient  même  '  ' 

pour  la  combattre  :  ut  iUic  veritas  reperiatur,  ubin-^gatur. 
'  En  citant  un  passage  de  l'FilpîIre  aux  Ephèsiens,  il  a  recours  mim.  17. 
au  texte  grec,  comme  plus  énergique  que  la  vulgate.  '  En  un  num.  24. 
autre  endroit  il  donne  d'excellens  avis  pour  ne  pas  rougir  de 
changer  de  sentiment,  lorsqu'on  s'aperçoit  en  avoir  de  con- 
traires à  la  vérité. 

'Le  douzième  et  dernier  livre  est  emploie  à  défendre  la  1. li.  n.  1.  57. 
naissance  éternelle  et  tonte  divine  de  J.  C.  contre  ces  fameux 
axiomes  des  Ariens  :  Que  le  Fils  n'étoit  point  avant  que  de 
naître  :  Qu'il  a  été  tiré  des  choses  qui  n'avoient  ))oint  1  être  : 
axiomes  qu'ils  avoient  toujours  à  la  bouche,  et  qu'ils  apuïoient 
sur  ce  passage  des  Proverbes,  c.  8.  v.  22.  où  la  Sagesse  par- 
lant d'clloméme  dit  :  Dieu  mn  créée,  le  commencement  de  wv 
voies.  *  S.  Ililaire  expliquant  cet  endioit  de  l'incarnation  du 
Verbe,  montre  par  ce  qui  précède  et  par  ce  qui  suit  dans  le 
même  chapitre,  qu'il  n'y  a  jamais  eu  un  seul  instant  où  cette 
sagesse  n'ait  été  et  qu'elle  possedt^  tous  les  mêmes  caractères  de 
di\'inité  que  le  Père.  Sans  alfoiblir  en  rien  les  autres  objections 
des  hérétiques  qu'il  combat,  il  les  met  dans  toute  leur  force, 
et  les  réfute  avec  la  même  solidité  qu'il  a  fait  toutes  les  au-  **  "^ 

très  dans  les  livres  précédens.  Il  finit  celui-ci  par  une  profes- 
sion de  foi  touchant  le  Père,  le  Fils  et  le  S.  Esprit.  Il  y  joint  "  " 
une  courte  prière  pour  demander  à  Dieu  qu'il  conserve  sans 
tache  dans  son  cœur  jusqu'au  dernier  .soupir  cette  même  foi 
qu'il  vient  de  professer,  et  qu'il  avoit  déjà  professée  dans  son 
baptême  :  «  afin,  dit-il  à  Dieu,  que  je  vous  adore,  vous  qui 
«  êtes  notre  Père,  et  votre  Fils  avec  vous,  et  que  je  mérite  de 
«  recevoir  votre  S.  Esprit  qui  procède  de  vous  par  votre  Fils 
«  unique.» 

'  Comme  S.  Hilaire  entreprend  dans  ce  douzième  livre  d'é-  Tiii.  oàd.  p.  4*9. 
tablir  et  de  défendre  la  divinité  du  S.  Esprit,  quelques  Savans 
en  ont  pris  sujet  de  juger  que  l'ouvrage  ne  fut  fait  qu'après 
que  Macédonius  eut  commencé  à  dogmatiser.  'Mais d'autres  hu. iwj. pr. n. is. 

f)rétendent  qu'il  n'y  agit  que  contre  les  Ariens,  comme  dans 
es  autres  li  \  res,  et  soutiennent  qu'il  étoit  de  son  dessein  d'établir 
contre  eux  la  divinité  du  S.  Esprit,  après  avoir  prouvé  celle 

*  C'eit  ainsi  qn'on  lisoit  C6t  endroit  an  porte  :  Lt  Seigneur  m'a  pottédée  au  com- 
tamt  de  S.  Hilaire,  conrurmément  à  la  meneemettt  de  tet  vuïet,  ce  qui  expriim* 
version  gréqne  :  au  lieu  que  notre  vulgali;       mieux  l«  texte  hobreo. 

X    ij 


IVSliCL^. 


Till.ibid.  p.  450. 


CasJ.  inst.e.l6.  p. 
M9.  3. 

Hil.  ib.  n.  35. 


.ing.  ep.  180.  n.  3. 


Hiar.  ep.   crit.  p. 
163. 


«p.  83.  p.  657. 
Uil.  ibid.  . 


.K|   .tM'l 


I.  t.  ad  CoDst.  p. 
f-iiS.  lias  I  Hier. 
Vir  iU.  ibid. 


164      S.  HILAIRE,  EVEQUË  DE  POITIERS, 

du  Verbe,  sans  quoi  il  ne  les  auroit  pas  entièrement  réfutés  et 
vaincus. 

'  Les  Pères  tant  grecs  que  latins  ont  fait  beaucoup  d'esti- 
me de  cet  ouvrage,  et  s'en  sont  souvent  servis  contre  les  Nes- 
toriens  et  les  Eutychiens.  Cassien  et  S.  Ephrem  d'Antiocjie 
les  nomment  les  livres  de  la  foi,  ou  sur  la  foi.  '  Cassiodore  re- 
connoît  qu'ils  sont  écrits  avec  autant  d'éloquence  que  de  pé- 
nétration .  Cet  Ecrivain  y  compte  treize  livres,  '  ^çms  doute 
parce  qu'il  joignoit  aux  douée  ordinaires,  le  livre  des  Syno- 
des, comme  quelques  copistes  en  ont  usé  dans  d'anciens  ma- 
nuscrits de  plus  de  mille  ans,  où  ce  traité  est  mis  immédia- 
tement après  les  douze  livres  de  la  Trinité,  et  compté  pour 
le  treizième.  '  S.  Augustin  admire  la  manière  lumineuse  avec 
laquelle  S.  Hilaire  explique  dans  le  neuvième  livre  ces  paro- 
lescélebres  de  l'Evangile  :  que  le  Fils  de  l'homme  ne  sait  pas  le 
jour  dit  jugement.  '  Et  S.  Jérôme  renvoie  à  l'onzième  livre  le 
)rêtre  Amand  qui  l'avoit  prié  de  lui  expliquer  comment  le 
î'ils,  après  que  toutes  choses  lui  auront  été  soumises,  sercftt 
ui-même  soumis  au  Père.  C'est  une  question,  dit-il,  que  S. 
Hilaire  a  fort  bien  éclaircie  dans  son  onzième  livre  contre  les 
Ariens. 

'  Le  même  S.  Jérôme,  comme  on  l'a  déjà  remarqué,  r«- 
connoissoit  dans  cet  ouvrage  de  S.  Hilaire  le  ipême  style  .dwU 
s'étoit  servi  Quintilien.  '  Mais  quelques  modernes  n'en  jugent 
pas  de  même,  et  n'y  croient  apercevoir  d'autre  ressemblance 
qu'en  ce  qui  re;garde  une  certaine  affectation  de  subtilité.  Il  y 
a  néanmoins  cette  différence  entre  la  subtilité  de  ces  (Jeux 
Ecrivains ,  que  celle  de  Quintilien  peut  être  affectée;  ms^s 
que  celle  de  S.  Hilaire  ne  vient  que  de  l'élievation  naturelle  de 
sop  esiprit.  Ce  *er,pit  lui  fa^re  injure  que  de  penser  aplr/a^B^t, 
et  de  croire  qu'il  eîlt  écrit  comme  il  a  fait,  pour  faire ipjyrade 
d'uije  vaine  éloquence .  Etant  le  premier  des  Latins  qui,»  écrit 
çjjfttre  les  Arieuis,  doit-il  paroître  étrange  qu'il  se^itexprf^- 
in^  en  4es  terpies  differens  de  ceux  qui  sont  aujourd'hui  à  now 
tf«  usa^e,  q.uoiqu'il  pensât  comme  nous  surnosmystefÇiB?^. 
Augustin  observe  que  S.  Hilaire  s'est  étudié  entre  autre*  chÀr 
sfis  à  y  être  court  ;  mais  il  s'y  est  encore  plus  apliqyié  à  y^^» 
dier  (|e  l'iOrçlie  et  de  la  méthode. 

8°.  '  La  seconde  requête  de  S .  Hilaire  à  l'Empereur  Con- 
stsmcp  wivjt  ^'#^e;f  près  les  douze  livres  (Je  la  Ifm^ ,  Jglle 
fut  faita.et  préseiitée  à  Çonstguitiflople,  où  le  l^^çii  sje  trimi^pjt 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE   ET  CONFESS.   165 

W  retour  du  Concile  de  Seleucie.  Nous  avons  marqué  ailleurs     iv  siècle. 
quels  furent  le  motif,  le  dessein  et  l'ocasion  de  cet  écrit.  S.  '~ 

Hilaire  y  parle  tout  à  la  fois  en  exilé  et  en  défenseur  de  la 
foi  de  l'Eglise,  en  sujet  plein  de  respect  pour  son  Prince,  et 
en  Evêque  qui  ne  sait  rien  craindre  que  de  manquer  à  son  de- 
voir. 

'  II  commença  par  déclarer  qu'il  est  un  Evêque  catholique  nam.  a. 
des  Gaules,  exilé  non  pour  aucun  crime,  mais  par  les  brigues 
d'hommes  satis  foi  et  sans  religion.  '  Ensuite  il  demande  deux  num.  3. 
grâces  à  l'Empereur  :  une  conférence  publique  avec  Saturnin 
d'Arles  auteur  de  son  exil,  afin  de  le  convaincre  des  fausses 
acusations  dont  il  l'avoil  chargé  ;  '  et  une  audience  en  pré-  nom.  s. 
sence  du  Concile  qui  se  tenoit  alors,  afin  de  pouvoir  parler  en 
faveur  de  la  foi  conformément  à  la  parole  de  Dieu.  '  Comme  nom.  3. 
la  première  grâce  le  regardoit  personnellement,  il  n'insiste 
pas  pour  l'obtenir.  '  Mais  il  demande  l'autre  avec  beaucoup  nom.  3.  s. 
d'instance,  comme  regardant  le  bien  public,  l'avantage  de 
toutes  les  Eglises,  et  celui  de  l'Empereur  même.  '  Afin  de  num.  10. 
mieux   engager  ce  Prince  à  la  lui  acorder,   il  lui  proteste 
qu'aiant  à  parler  devant  lui  et  en  présence  d'un  Concile  divisé 
sur  une  affaire  de  cette  importance,  il  ne  dira  rien  qui  ne  soit 
à  l'honneur  de  son  Empire  et  de  sa  religion,  et  qui  ne  tende 
à  l'union  et  ;i  la  paix  de  l'Orient  et  de  l'Occident.  '  Et  pour  nom.  s.  10. 
Dje  le  pas  laisser  douter  de  la  parole  qu'il  lui  donne,  ill'assure 
qu'il  n'emploiera  que  les  expressions  propres  de  l'Ecriture. 

'  Il  ne  laisse  pas  néanmoins  de  lui  représenter  dans  cet  écrit  nom.  *.  7. 
d'une  manière  aussi  vive  qu'admirable,  la  confusion,  le  désor- 
dre, le  danger  où  mottoient  la  foi  tant  de  différens  synaboles 
et  formulaires  que  l'on  fabriquoit  tous  les  jours.  «  Quand  nom.  *. 
«  une  fois,  dit- il,  on  a  pris  le  parti  de  faire  de  nouvelles  for-  • 
«  mules  de  foi,  au  lieu  de  s'en  tenir  à  celles  qu'on  avoit  re- 
«  eues  de  ses  pères,  on  ne  se  met  plus  en  peine  de  défendre 
«  celles-ci,  et  l'on  ne  tient  pas  fortement  aux  autres.  De  sorte 
«  que  la  foi  est  devenue  la  foi  des  tems  plutôt  que  la  foi  de 
«  lEvangile :  Et facta est  fides temporum potïus quam Evan- 
«  geliorum.  C'est  ce  qui  arrive  pour  vouloir  faire  tous  les  ans  de 
«  nouveaux  symboles,  au  lieu  de  s'en  tenir  à  la  foi  que  nous 
«  avons  professée  au  baptême.  C'est  une  chose  tout4i-fait  déplo- 
«  rable  que  le  danger  qui  nous  menace.  On  voit  aujourd'hui  au- 
«  tant  de  ces  différens  symboles  qu'il  plaît  aux  particuliers  d'en 
«  proposer .  Nous  sommes  aussi  parIagéS;aurla,4Qctrijje,  que  ^î- 
1  2 


166      S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

I V  siEc  L E.  «  ferens  en  nos  manières  d'agir.  Autant  de  reproches  que  l'on 
«  se  fait,  autant  de  sources  de  blasphèmes,...  De  sorte  qu'à 
«  force  de  varier  sur  la  foi,  l'on  commence  à  n'en  avoir  au- 
«  eu ne. 

nom. 6.  «  '  On  la  cherche  ensuite  cette  foi,  comme  sî  nous  n'en  avions 

«  point.  On  la  rédige  par  écrit,  comme  si  elle  n'étoit  pas  déjà 
«  écrite  dans  notre  cœur.  Après  avoir  reçu  par  la  foi  une  nou- 
«  velle  naissance,  on  veut  no;is  remetire  à  oprendre  notre  foi, 
«  comme  si  cetle  nouvelle  naissance  avoit  pu  se  faire,  sans  que 
«  nous  fussions  instruits  de  ce  que  nous  devons  croire.  On  veut 
(.  nous  instruire  sur  Jesns-Christ  après  notre  baptême,  comme 
«  s'il  pouvoit  y  avoir  un  baptême  '  sans  la  foi  et  la  connoissance 

nom.  5.  «  de  Jesus-Christ.  '  Hélas  !  tandis  que  l'on  se  bat  sur  des  termes, 

«  que  la  nouveauté  partage  les  esprits,  que  l'on  fait  servir  ce 
«  qui  a  un  double  sens  à  entretenir  ses  divisions,  que  tout  re- 
«  tentit  des  plaintes  que  l'on  fait  contre  ceux  qui  écrivent ,  que 
«  l'on  fait  les  difficiles  pour  s'acorder,  que  l'on  se  traite  mutuel- 
«  lement  d'hérétique,  on  est  bien  près  de  voir  que  personne  ne 
«  sera  à  J.  G.  » 
Il  faudroit  copier  l'écrit  en  entier,  si  nous  voulions  en  ra- 

nnm.  M.  porter  tous  les  traits  dignes  de  remarque.  '  S.  Ililaire  le  termi- 

ne par  une  belle  profession  de  foi  sur  la  consubslantialité  du 
Verbe. 

incongt.  p.  1137.       9°.  '  Le  livrc  ou  l'invective  contre  l'Empereur  Constan- 

**®"  ce  fut  fait  aussi-tôt  après  la  seconde  requête  à  ce  Prince, 

et  à  l'ocasion,  comme   il   paroît,  du  relus  qu'il  fit  d'écou- 

Hier.  vir.  iii.  c.  ter  la  pricre  de  Saint  Hilaire.  '  Saint  Jérôme  prétend  néan- 

*""■  moins,  et  quelques  autres  après  lui ,  qu'il  ne  fut  composé 

qu'après  la  mort  de  cet  Empereur.  Mais  il  n'y  a  qu'à  lire  le 
commencement  de  cet  écrit  pour  se  convaincre  de  l'époque 

HU.ibid.  n.  j.  que  nous  lui  assignons.  '  S.  Hilaire  y  compte  clairement  cmq 
années  commencées  depuis  que  lui  et  les  autres  Evêques  des 
Gaules  s'étoient  séparés  de  la  communion  de  Saturnin  d'Ar- 
les, d'Ursace  et  de  Valens  :  ce  qui  revient  à  l'an  360,  lorsque 
le  Saint  étoit  encore  à  Constantinople. 

TOI.  ibid.  p.  751.       '  D'ailleurs  il  seroit  hors  de  toute  aparence  qu'un  homme 

™'  aussi  grave  et  aussi  sincère  que  S.  Hiiaire,  eût  été  capable  de 

faire  un  livre  tel  que  celui-là  après  la  mort  de  Constance, 

*   s.   Hilaire  parle   ici  da    baptême  tel       l'on  avoit  grand  soin  d'ia>traire  tnptn- 
qu'on  le  confaroit  de   son  tcms.  Alors  on      vant  des  mystères  de  notre  foi. 
ne  le  donnoit  presque  qu'aux  adultes,  que 


753. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  GONFESS.    167 

lorsque  tout  ce  qu'il  y  dit  auroit  été  faux,  et  n'auroit  plus  sub-     iv  siècle. 
sisté.  Mais  ce  qui  a  pu  tromper  S.  Jérôme,  c'est  que  S.  Hilaire 
ou  par  le  conseil  de  ses  amis  ,  ou  par  d'autr<  s  motifs  aura  pu 
suprimer  ce  livre  jusqu'après  la  mort  de  cet  Empereur.  '  En  Fieu.  h.  e.  t.  3.  p. 
effet  on  croit  qu'il  ne  le  publia  qu'après  la  mort  de  ce  Prince;  ^"' 
et  plusieurs  doutent  qu'il  soit  achevé.  '  Cependant  le  dernier  hh.  iWd.  diss.  n. 
Editeur  des  ouvrages  de  S.  Hilaire  assure  qu'il  est  entier,  quoi-  "" 
qu'il  paroisse  avoir  reçu  des  additions  considérables  par  des 
endroits  des  livres  de  la  Trinité  que  l'on  y  a  joints,  depuis  le 
nombre  28  jusqu'au  33  :  additions  que  cet  Editeur  a  mises  en 
caractères  differens  de  ceux  du  reste  de  l'ouvrage,  pour  mar- 
quer qu'elles  lui  sont  étrangères. 

'  S.  Hilaire  parle  dans  cet  écrit  avec  beaucoup  de  feu  ,  et  in  Const.  n.  7.  a. 
y  déclame  avec  véhémence  contre  la  conduite  de  l'Empe-  "•*^*'- 
reur  En  y  décrivant  la  persécution  qu'il  faisoit  ii  l'Eglise,  il  ne 
craint  pas  de  dire  qu'elle  surpassoit  celles  qu'elle  avoit  autrefois 
souffertes  de  la  part  des  Nerons,  des  Dtces,  des  Maximiens. 
Il  va  même  jusqu'à  traiter  plusieurs  fois  Constance  d'Anté- 
christ. De  sorte  que  l'on  ne  peut  nier  que  le  style  de  cet  écrit 
ne  soit  très-vif  et  très-véhément. 

'  Mais  les  circonstances  des  tems  le  demandoient.  La  per-  diss.  n.  7. 
sécution  s'échauffoit  de  nouveau;  et  un  style  froid  et  plus  mo- 
déré n'auroit  produit  aucun  fruit.  Les  esprits  étoient  frapés  de 
la  terreur  que  jcUoient  par-tout  les  cdils  du  Prince  ;  et  il  fal- 
loil  crier  pour  se  faire  entendre.  Ce  seroit  faire  injure  à  un  S. 
Evêque  aussi  brûlant  de  charité,  aussi  rempli  de  douceur,  et 
aussi  porté  ;i  la  modération,  que  l'etoit  S.  Hilaire,  comme  il 
paroit  par  tout  ce  que  nous  en  avons  dit  jusqu'ici,  que  de  croi- 
re que  le  feu  et  la  vivacité  qu'il  fit  paroître  en  cette  ocasion , 
fussent  l'tffet  de  quelque  passion  déréglée',  comme  de  son  res- 
sentiment contre  Constance  qui  Tavoit  exilé,  ou  du  mépris 
«ju'il  auroit  fait  des  puissances  séculières. 

'  Il  a  eu  soin  de  prévenir  lui-même  ces  deux  fausses  idées  inConst.  n.  2.  3. 
que  l'on  auroit  pu  prendre  de  son  (crit.  Il  dit  à  l'égard  de  la 

Première,  que  si  l'on  fait  atention  à  l'injure  qu'il  a  reçue  par 
exil  qu'il  souffre  en  paix  depuis  tant  d'années,  et  au  silence 
qu'il  a  gardé  depuis  ce  tems-là ,  de  peur  qu'il  ne  passât  pour 
un  homme  qui  ne  pensant  qu'à  lui  seul  auroit  cherché  à  se 
justifier,  personne  qui  fera  usage  de  sa  prudence  ordinaire, 
ne  jugera  que  ce  soit  ni  l'impatience  ni  la  colère  qui  le  fasse 
parler  de  la  sorte.  '  Ce  n'étoit  pas  non  plus  le  mépris  pour  les  fr.  1.  n.  5. 


108     S.   HILAIRÉ,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,  puissances,  puisqu'il  étoit persuadé,  comme  ilTen^ifigne  hii- 
même,  que  l'on  ne  peut  avoir  trop  de  respect  pour  son  Sou- 
inconst.  n.  6.  vcraiu,  la  roïauté  étant  d'institution  divine.  '  Il  est  vrai  qu'il  a 
scnli  lui-même  que  c'étoit  pousser  bien  loin  la  hardiesse,  et 
que  l'on  pourroit  le  taxer  de  témérité,  que  d'oser  donner 
à  Constance  la  qualification  d'Antéchrist.  Mais  il  prouve  en 
même  tems  que  de  le  faire  dans  les  circonstances  et  dan»  le 
dessein  qu'il  le  faisoit,  cette  espèce  de  témérité  n'étoit  que  l'ef- 
fet d'une  constance  soutenue  par  la  foi,  et  une  saillie  de  sa- 
gesse, non  de  légèreté;  de  confiance,  non  d'emportement, 
nnm.  1.  '  H  n'y  cut  donc  que  de  saints  motifs  qui  le  portèrent  à  par- 

ler avec  tant  de  force  et  de  liberté.  11  nous  les  découvre  lui- 
même  ces  motifs ,  et  ils  valent  bien  la  peine  d'être  remarqués. 
Ce  fut  1 .  le  désir  de  justifier  son  silence  sur  les  maux  de  VE- 
glise,  silence  qu'il  regardoil  comme  une  marque  de  défiance 
et  de  pusillanimité  plutôt  que  comme  un  effet  de  modéra* 
tion  et  de  retenue  ;  parce,  dit-il.  qu'en  ce  cas  il  n'y  a  pas  moins 
de  péril  à  se  taire  toujours,  qu'à  toujours  parler  :  quia  non  mtnUs 
nnm.  3. 9.  pericuH €st semper  tdcuisse ,  quammmquam.  2.'  L'obligation  où 

il  se  croioit  être  de  parler,  et  de  parler  pour  la  défense  de  la  cause 
nom.  1.  de  J.  C.  cui ex  reliquo  me  intelligo  dcbere,  ne  taceam.  3.  '  L'a- 

mour de  la  vérité  qui  lui  faisoit  craindre  que  manquant  à  l'an- 
noncer, comme  il  s'y  sentoit  intérieurement  porté,  il  ne  fût  en- 
traîné dans  le  mensonge  par  l'esprit  d'erreur  :  et per  Spiritum 
Sanctum  sequamur  veritatem,  ne  per  spiritum  erroris  credth- 
mus  mendacio.  4.  Enfin  l'ardeur  qu'il  avoit  pour  le  martyre, 
ce  qu'il  exprime  par  ces  paroles  toutes  de  feu  :  ad  martyrium 
per  ea*  voces  exeamus. . .  commoriamur  Christo. 

De  sorte  que  cet  écrit,  à  le  bien  prendre,  n'est  qu'une  jus- 
tification du  silence  que  S.  Hilaire  se  reprochoit  d  avoir  gar- 
dé si  long- tems,  malgré  la  nécessité  de  parler,  et  un  effet  du 
juste  zèle  qui  l'animoit  pour  la  défense  de  la  foi,  qu'il  voïoit 
(Usa.  n.  î.  ataquée  si  puissamment  de  toutes  parts.  '  Au  reste  quelque  dif- 

férence qu'il  y  ail  entre  le  style  de  cet  écrit  et  celui  du  traité 
des  Synodes,  il  ne  faut  pas  croire  pour  cela  que  S.  Hilaire  eût 
cliangé  ni  de  dessein  ni  de  sentiment,  ou  qu'il  eût  moins  dans  le 
in  Const.  n.  2.  cœur  l'amour  de  la  paix.  '  Il  y  déclare  expressément  qu'il  étoit 
toujours  disposé  à  écouter  les  justes  propositions  qu'on  poor- 
disj.ibia.  roit  lui  faire.  '  Seulement  la  face  des  choses  étant  changée, 

il  s'étoil  trouvé  engagé  à  changer  aussi  sa  manière  de  parler. 
Cet  écrit  contiefit  plusieurs  faits  curieux  et  interessans,  qui 

regardent 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.     169 

regardent  l'histoire,  sur-tout  les  vexations  des  Ariens  contre    iv  siècle 
les  Catholiques.  Et  l'on  y  doit  d'autant  plus  faire  de  fonds, 
'que  l'auteur  proteste  plus  solennellement  ne  rien  avancer  inconst.n. 6.  u. 
qui  ne  soit  certainement  vrai.  L'on  y  trouve  aussi  quelques  **• 
particularités  touchant  le  Concile  de  Seleucie,  que  Ton  cher- 
cheroit  inutilement  aiih uis.  Le  Saint  y  a  encore  inséré  di- 
vers raisonnemens  qu'il  opo3e  à  la  plupart  des  subtilités  qu'em- 
ploient  les  Ariens  pour  soûtt  nir  leur  hérésie.  C'est  ce  qui 
a  donné  occasion  d'y  faire  des  additions  prises  des  livres  de 
la  Trinité,  dont  nous  avons  déjà  parlé.  '  Il  est  à  observer  que  num.  e.  " 
S.  Hilaire  y  cite  comme  Ecriture  sainte  le  second  livre  des 
Maccabées,  et  qu'il  donne  le  titre  de  Martyr  à  l'un  de  ceux 
dont  il  porte  le  nom. 

Cet  opuscule  de  S.  Ililaire  contre  Constance  et  ses  deux 
requôtes  au  même  Prince,  sont  placés  de  suite  dans  la  nou- 
velle édition  de  ce  Père,  suivant  l'ordre  que  nous  leur  don- 
nons, et  qui  est  le  plus  naturel.  Mais  dans  les  éditions  pré- 
cédentes cet  ordre  est  si  renversé ,  que  le  livre  contre  Con- 
stance y  tient  le  premier  rang. 

10".  '  Nous  avons  de  S.  Ililaire  un  autre  ouvrage,  ou  plù-  fr.p.  UTS-iâe». 
tôt  les  débris  d'un ,  ou  même  de  deux  autres  ouvrages ,  sous  le 
titre  de  Fragmens.  La  suite  du  titre  porte  que  ces  fragmens 
sont  tirés  du  livre  de  S.  Ililaire  de  Poitiers  dans  la  province 
d'Aquitaine ,  qui  explique  entièrement  de  quelle  manière , 
)Our  quelles  raisons,  et  à  l'instance  de  qui  l'on  assembla  sous 
'Empire  de  Constance  le  Concile  de  Rimini  contre  le  sym- 
3oIe  de  Nicée  qui  avoit  réprimé  toutes  les  hérésies.  On  a  abré- 
gé ce  titre  au  haut  des  pages,  où  on  lit  les  fragmens  de  l'ou- 
vrage historique  de  S.  Hilaire ,  '  conformément  à  ce  qu'on  adm.  nnm.  j. 
trouve  dans  les  manuscrits  à  la  fin  d'un  des  fragmens. 

'  Personne  ne  doute  que  ces  précieux  débris  n'aient  fait  au-  n.  ♦.  s. 
Irefois  partie  de  quelque  ouvrage  de  S.  Hilaire.  Quelque  con- 
fusion qu'il  s'y  trouve,  sur-tout  dans  les  manuscrits,  et  quel- 
ques défigurés  qu'en  soient  certains  endroits,  on  y  reconnoît 
encore  tout  le  génie  du  S.  Docteur.  Il  ne  faut  même  que  lire 
le  premier  fragment  pour  découvrir  tous  ses  caractères. 

On  ne  fait  pas  non  plus  difficulté  de  croire  que  l'ouvrage  n- 12  i3. 
d'où  ces  fragmens  ont  été  pris ,  ne  soit  '  l'écrit  contre  Ursace  Hier.  ibid. 
et  Valens,  qui  contenoit  l'histoire  des  Conciles  de  Seleucie 
et  de  Rimini,  et  que  S.  Jérôme  compte  entre  les  autres  ou- 
vrages de  S.  Hilaire.  La  plupart  des  pièces  que  contient  le 

Tome  I.  Sec.  Part.  Y 

1  2  * 


170      S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,  recueil  dont  nous  parlons,  justifient  de  reste  cette  idée,  par 
raport  au  Concile  de  Rimini.  Mais  il  n'y  paroît  rien  pour  assu- 
rer la  même  chose  du  Concile  de  Seleucie.  11  ne  faut  peut- 
être  s'en  prendre  qu'à  l'Abréviateur,  qui  aura  pris  ce  qui  au- 
ra été  de  son  goût,  et  laissé  le  reste.  Car  il  y  a  toute  aparence 
que  ce  recueil  de  fragmens  n'est  autre  chose  qu'un  abrogé 
mal  assorti,  que  quelque  personne  peu  habile  et  de  mauvais 
goût  aura  dressé  dans  les  siècles  d'ignorance,  où  les  gros  livres 
n'étoient  ni  lus  ni  goûtés ,   pour  quelque  dessein  particulier 

au'il  avoit  en  vùë.  Ensuite  cet  abrégé  aura  fait  négliger  et  per- 
re  l'original,  comme  il  est  arrivé  à  tant  d'autres.  Après  tout 
si  l'on  se  fût  bien  passé  du  travail  de  l'Abréviateur,  on  doit 
néanmoins  lui  avoir  obligation  pour  les  pièces  originales  qu'il 
a  insérées  dans  son  abrégé. 

Quoiqu'il  en  soit,  outre  l'ouvrage  contre  Ursace  et  Valens 
que  l'on  reconnoît  en  partie  (lans  ces  fragmens,  on  y  aperçoit 
encore  le  dessein  et  des  débris  d'un  autre  ouvrage  encore  plus 
considérable.  C'est  ce  qui  paroît  a.ssez  visiblement  et  par  la 
préface  dont  on  a  fait  le  premier  fragment,  et  par  divers  au- 
tres endroits  de  la  suite.  N'importe  que  le  litre  ne  fasse  men- 
tion que  d'un  seul  écrit.  Il  est  clair  que  ce  titre  est  arbitraire, 
et  ajouté  après  coup.  La  préface  en  particulier  annonce  quel- 
que chose  de  plus  que  l'histoire  des  Conciles  de  Seleucie  et 
ae  Rimini. 
»!.  fr.  1.  n.  4.  '  En  effet  S.  Ililaire  y  promet  un  ouvrage  d'importance  et  de 

très-grande  étendue ,  ùpiis  tcnto  grave  et  multiplex  :  un  ouvrage 

3ui  soutTroit  de  grandes  difficultés,  et  qui  deinandoit  beaucoup 
'esprit,  à  cause  des  ruses  diaboliques  dont  les  hérétiques  s'é- 
toient  servi  dans  le  personnage  qu  ils  avoient  joué  :  un  ouvrage 
contre  lequel  la  dissimulation  de  plusieurs  et  Ja  crainte  des  au- 
tres feroient  naître  de  forts  préjugés,  et  qui  surprendroit  dans  les 
lieux  mêmes  où  les  choses  s'étoient  passées,  et  où  lui  qui  le  com- 
posoit,  se  trouvoit  actuellement,  parce  que  l'on  ne  s'atendoit 
pas  à  une  telle  production  :  un  ouvrage  qui  devoit  contenir  des 
choses  déjà  passées  depuis  long-tems,  mais  que  le  silence  que 
l'on  avoit  gardé,  rendoit  nouvelles  :  un  ouvrage  dont  à  l'oca- 
sion  d'une  paix  masquée  conclue  depuis  long-tems,  on  avoit 
presque  oubhé  le  sujet  qu'il  se  proposoil  d'y  traiter,  mais  que 
d'insignes  trompeurs  faisoient  revivre  par  une  fourberie  recen- 
I""".  s.  te  et  pleine  d'impiété  :  '  un  ouvrage  où  il  alloit  examiner  avec 

un  soin  tout  particulier  toute  la  grande  affaire  de  l'Arianisme , 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.      171 

propensiore  curarem  omnemhocvolumine placuit  exponere:*    iv  sikcliï. 
un  ouvrage  enfin  qui  devoit  commencer  par  ce  qui  s'étoit  passé  Tm~û~i~îrT 
au  Concile  d'Arles  en  353,  et  où  l'on  trouveroit  les  actes  de  ce  nnœ.  7. 
grand  nombre  de  Conciles  tenus  sur  cette  affaire,  avec  les 
letres  écrites  sur  le  même  sujet.  Voilà  l'idée  juste  que  S.  Hi- 
laire  donne  lui-même  de  s'on  ouvrage  :  idée  magnifique  qui 
doit  nous  faire  extrêmement  regreter  la  perle  d'un  monument 
aussi  précieux. 

Il  est  clair,  sans  qu'il  soit  besoin  de  s'arrêter  davantage  à  le 
prouver,  que  tous  ces  caractères  suposent  autre  chose  qu'une 
simple  histoire  des  Conciles  de  Seleucie  et  do  Riniini,  qu'ils 
ne  présentent  rien  de  moins  à  l'esprit  que  l'idée  d'une  histoire 
entière  de  l'Arianisme  en  Occident.  Nous  disons  en  Occident  : 
1°.  parce  que  cette  histoire  commençoit  par  le  Concile  d'Ar- 
les, qui  fut  le  premier  coup  d'éclat  des  Ariens  dans  cette  se- 
conde partie  du  monde  :  2°.  parce  que  S.  Hilaire  parlant  des 
lieux  où  les  choses  s'étoionl  passées,  et  où  il  demeuroit  lors- 
qu'il les  écrivoit,  et  nommant  ensuite  la  ville  d'Arles,  il  dési- 
gne l'Occident  :  3°.  parce  qu'il  avoit  déjà  fait  pour  la  plus  gran- 
de partie  l'histoire  de  ce  qui  s'étoit  passé  en  Orient  dans  son 
traité  des  Synodes. 

Ici  l'on  ne  sauroit  légitimement  nous  oposer  le  silence  de  S. 
Jérôme,  comme  s'il  n'avoit  pas  connu  l'ouvrage  de  S.  Hilai- 
re dont  il  est  question.  Nous  avons  montré  ailleurs  qu'il  est 
très-probable  que  ce  Père  en  a  eu  connoissance,  et  que  l'aïant 
pris  pour  une  suite,  ou  même  pour  la  seconde  partie  du  livre 
des  Synodes,  parce  qu'il  traitoit  en  particulier  des  Conciles 
tenus  en  Occident  dans  l'affaire  de  l'Arianisme,  c'est  pour  cela 
'  qu'il  nomme  le  livre  des  Synodes  un  très-long  iTQ\iè,prolixum  Hier.  ep.  ♦.  p.  « 
valde  de  Synodis  librum.  S.  Jérôme  auroit-il  pu  avec  vérité 
nommer  ainsi  cet  écrit,  qui  est  très-court  tel  que  nous  l'avons, 
s'il  n'avoit  pas  eu  une  suite  ou  une  autre  partie  encore  plus  con- 
sidérable? 

Il  doit  donc  demeurer  pour  constant  que  les  fragraens  qui 
nous  restent  de  S.  Hilaire,  outre  l'ouvrage  contre  IJrsace  et 
Valens,  suposent  encore  une  histoire  entière  de  l'Arianisme 
en  Occident.  '  S.  Hilaire  entreprit  celui-là,  comme  l'on  croit,  hu.  fr.  n.  n.  u. 
et  commença  à  y  travailler  dès  qu'il  étoit  à  Çonstantinople 
en  360.  Mais  il  ne  le  continua  que  par  intervalles,  et  n'y  mit 
la  dernière  main  que  plusieurs  années  après. 

'  A  l'égard  de  l'autre  ouvrage,  S.  Hilaire  ne  le  composa  fr  <•  »•  »•  *• 

Y  ij 


172    S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,    qu'après  son  exil,  mais  du  vivant  de  l'Empereur  Constance  : 

.  ce  que  l'on  doit  raporter  à  l'an  301.  C'est  ce  qui  paroît  par  la 

préface  que  l'on  nous  en  a  conservée  en  son  entier,  comme 

i:ii  fi.  i.D.  1.2.  il  semble,  et  qui  est  vraiment  digne  de  son  Auteur,  '  S.  Hi- 
laire  y  parle  d'abord  des  avantages  de  la  foi,  de  l'espérance, 
de  la  charité,  et-  de  l'excellence  de  celle-ci  au-dessus  des  au- 

num.  3.  1res.  '  Il  dit  que  c'est  par  la  force  de  cotte  charité  qu'il  a  eu  le 

bonheur  de  rendre,  avec  plusieurs  autres,  témoignage  à  la  vé- 
rité persécutée,  de  demeurer  attaché  à  J.  C.  de  mépriser  les 
pompes,  les  délices,  les  commodités  même  de  la  vie  présente, 
et  de  leur  préférer  son  devoir. 

nom.  4. 5.  '  H  fait  cusuite  une  courte  mais  vive  peinture  de  la  persécu- 

tion que  Constance  continuoit  de  faire  à  l'Eglise. 

nom.  5.  '  S.  Hilaire  se  plaint  encore  dans  cette  préface  de  ce  que 

Constance  interposoit  son  autorité  dans  les  jugemens  des  Evo- 
ques; de  ce  qu'il  jugeoit  lui-même  sans  connoissance  de  cau- 
se; de  ce  qu'il  avoit  fait  condamner  par  force  S.  Athanase, 

nam.  4.  quoiqu'abseut.  '  Il  y  traite  d'erreur  l'opinion  où  étoit  presque 

tout  le  monde,  à  l'égard  des  Evêques  exilés  pour  avoir  refusé 
de  souscrire  à  la  condamnation  de  ce  grand  Evêque,  en  pré- 
tendant que  cela  ne  valoit  pas  la  peine  qu'ils  s'exposassent  4 

num.  6.  l'exil.  '  Il  y  rend  un  illustre  et  magnifique  témoignage  à  la  gé- 

nérosité que  fit  paraître  S.  Paulin  de  Trêves  dans  le  Concile 

num.  7.  d'Arles  en  353.  '  S.  Ililaire  finit  celte  belle  préface  par  exhor- 

ter à  lire  son  ouvrage  d'un  bout  à  l'autre  avec  une  sérieuse 
atention,  et  par  montrer  qu'il  en  vaut  bien  la  peine.  «  Il  s'y 
«  agit,  dit-il,  de  la  vraie  connoissance  que  l'on  doit  avoir  di^ 
«  Dieu,  de  l'espérance  des  biens  élernels,  du  point  précis  014 
«  l'on  pourra  trouver  la  vérité  sans  altération.  Il  est  donc  bien 
«  juste,  conclut-il,  que  s'agissant  de  choses  aussi  importantes, 
«  chacun  ne  néglige  rien  pour  s'en  instruire,  afin  qu'il  soit  en 
«  état  de  s'en  tenir  à  son  propre  jugement,  sans  être  obligé  de 
«  s'en  rapporter  à  l'opinion  des  autres.  » 

Les  autres  principales  pièces  contenues  dans  ce  recueil 
sont  la  letre  synodale  du  Concile  de  Sardique  en  347,  celle 
du  Conciliabule  de  Pliilippople  la  même  année,  plusieurs  le- 
tres  du  Pape  Libère,  quelques-unes  d'Ursace  et  de  Valens, 
divers  monuraens  qui  concernent  le  Concile  de  Rimini  e^ 
359,  la  letre  synodale  du  I  Concile  de  Paris  en  361 . 

Nicolas  le  Févre  fut  le  premier  qui  tira  de  la  poussière  ce 
recueil  de  fragmens.  Il  le  publia  à  Paris  en  1598,  sur  un  ma- 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.   173 

nuscrit  de  la  bibliothèque  de  Pierre  Pithou,  avec  une  savan-    iv  siècle. 

te  préface  de  sa  façon,  et  des  commentaires  du  même  Père  ^ 

sur  quatre  Pseaumes  qui  n'avoient  pas. encore  vu  le  jour.  Dans 

la  suite  ces  fragmens  ont  été  joints  aux  autres  écrits  de  S.  Hi- 

laire  dans  les  éditions  qui  en  ont  été  faites.  Les  pièces  qui  les 

composent  y   sont  placées  fort  confusément.  Dom  Coûtant 

dans  la  dernière  édition  de  ce  Père  a  cru  les  devoir  mettre 

selon  l'ordre  chronologique  :  ce  qui  y  répand  beaucoup  de 

lumière. 

11°.  '  L'écrit  ou  Manifeste  contre  Auxence  Evéque  Arien  de  m\.  m  a«x.  p. 
Nilan  est  adressé  aux  Evêques  et  à  tous  les  peuples  qui  demeu-  **^-**'*' 
rent  dans  la  foi  de  leurs  pères,  et  qui  détestent  l'hérésie  Arie- 
ne.  '  S.  Jérôme  en  parle  comme  d'une  fort  belle  ^lece^  elegans  Hier.vir.  m.  ibid. 
libellus.  '  S.  Hilaire  la  composa  en 364,  lorsqu'il  étoit  à  Milan,  hii.  ibid.  .i.im.  n. 
comme  nous  l'avons  déjà  dit.  Toutefois  Baronius  et  Blonde!  **• 
trompés  par  une  fausse  leçon,  ont  cru  qu'il  ne  l'avoit  faite 
qu'en  369  ;  mais  il  y  avoit  un  an  que  le  Saint  n'étoit  plus  au 
monde.  '  Elle  est  diversement  intitulée  dans  les  manuscrits,  num.  g. 
Les  uns  lui  donnent  pour  titre  Letre  aux  Catholiques  tou- 
chant Auxence  ;  d'autres,  Traité  ou  Livre  contre  les  Ariens 
ou  Auxence  de  Milan. 

'  Comme  l'Empereur  Valentinien  \,  qui  avoit  d'ailleurs  du  in.  Aux.  n.  7. 
Christianisme,  avoit  publié  un  fâcheux  édit  pour  rétablir  la  • 

paix  dans  l'Eglise  de  Milan  entre  les  Catholiques  et  les  Ariens, 
et  que  ceux-ci  se  couvroient  du  spécieux  prétexte  de  paix  pour 
se  maintenir,  '  S.  Hilaire  débute  par  établir  en  quoi  consiste  nnm.  i. 
une  paix  véritable.  11  soutient  qu'il  n'y  en  a  point  d'autre  que 
celle  de  J.>^j.  et  que  cette  paix  supose  un  acord  parfait  de  l'E- 
glise avec  l'Evangile.  11  ajoute  que  c'est  cette  paix  ou  trou- 
blée ou  même  bannie  qu'il  a  tâché  de  rapoller  et  de  suivre; 
mais  que  les  désordres  de  son  siècle  lui  ont  envié  ce  mérite, 
et  que  les  mauvais  ministres  de  l'Eglise  précurseurs  de  l'An- 
téchrist y  ont  formé  un  obstacle  insurmontable. 

'  Il  déplore  ensuite  les  malheurs  de  son  temps,  où  Ton  croïoit  nnm.  3.  i.  s. 
les  secours  humains  nécessaires  pour  soutenir  la  cause  de  Dieu, 
et  où  l'on  emploïoit  à  force  la  puissance  temporelle  pour  dé- 
fendre l'Eglise  de  J.  C.  Il  montre  qu'il  n'en  a  pas  été  de  mê-  num.3.4. 
me  du  tems  des  Apôtres  et  de  leurs  successeurs.  '  C'est  pour-  num.  3. 
quoi  il  exhorte  ceux  à  qui  il  adresse  son  écrit,  de  ne  pas  re- 
chercher la  protection  des  Rois  de  la  terre  ;  parce  que  i'Eglii» 
se  ne  s'est  acruë  qu'au  milieu  de  leur  haine  et  de  leurs  perse- 


174     S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,    cutions.  'Il  les  conjure  de  ne  pas  faire  consister  la  paix  dans 

.„;,  j  .„  „  ,,  des  bâlimens  de  bois  et  «Je  pierre,  de  peur  de  lomb  r  dans 
1  heresie,  en  sataclianl  avec  excès  a  ces  Eglises  maiérieiles, 
où  l'Antéchrist  doit  s'asseoir  un  jour. 

nnm.6.  '  S.  Hilaire  y  réfute  aussi,  mais  en  pf^u  de  mots,  quelques- 

uns  di  s  Sopliismes  des  Ariens,  et  s'atache  plus  particulière- 
ment à  réfuter  la  profession  de  foi  d'Aiixence.  Il  en  pesé  les 
termes,  en  découvre  les  ruses  et  les  subtilités  affectées,  en  fait 
sentir  le  venin  ;  et  afin  que  tout  le  monde  en  puisse  juger  par 

nom.  13-15.  la  lecture,  '  il  la  raporte  en  son  entier  à  la  fin  de  son  écrit.  "  Il 

•  num.  7.  y  avoit  joiut  aussi  la  relation  de  ce  qui  s'étoit  passé  dans  la 

conférence  qu'il  eut  avec  cet  iCvêque  Arien,  mais  elle  ne  s'y 
trouve  plus  aujourd'hui.  Peut-être  y  avoit-il  ajouté  encore  la 
requête  qu'il  présenta  à  l'Empereur  pour  obtenir  cette  con- 
férence. 

Il  faut  avouer  qu'Auxence  n'est  point  épargné  dans  tout  cet 
écrit.  11  n'y  a  pas  au  reste  de  quoi  s'en  étonner.  S.  Hilaire  fait 
voir  qu'il  étoit  un  Arien  dangereux,  et  qu'il  y  alloit  du  .salut 
de  beaucoup  de  monde  de  le  faire  connoître  pour  ce  qu'il 
étoit.  Il  y  avoit  plus  de  preuves  qu'il  ne  falloit,  que  c'étoit  un 

num.  8.  Arien  déclaré.  '  Il  avoit  été  ordonné  Prêtre  dans  la  secte  mê- 

me d'Arius  à  Alexandrie  sous  le  fameux  Grégoire  usurpateur 

fr.  11.  n.  4.  du  siège  du  grand  Athanase  ;  '  et  il  y  a  toute  aparence  que  c'est 

ce  même  Auxence  que  le  Concile  de  Paris  en  361,  excom- 
munia avec  Ursace,  Valens,  et  (laïus,  à  la  prière  des  Evê- 

in  Au»,  n.  5.  qucs  d'Oricut.  '  Ce  qui  le  fait  croire,  c'est  que  S.  Hilaire  comp- 
te Auxence  avec  ces  mêmes  insignes  Ariens,  qu'il  lui  asso- 
cie, pour  autant  de  successeurs  d'Arius. 

inPs.  p.  1-596.         12".  '  Enfin  nous  avons  de  S.  Hilaire  un  commentaire  sur 

adm.  n.  8.  les  Pseaumcs,  '  que'l'on  regarde  comme  l'un  desderniers  fruits 

de  ses  veilles.  11  est  au  moins  certain  qu'il  fut  composé  après 

in  Ps.  67.  n.  15.  SCS  livrcs  dc  la  Trinité,  '  qu'il  indique  en  écrivant  sur  le  Pseau- 
me  67,  où  il  touche  les  hérésies  d'Ebion,  de  Photin,  d'Arius 

adm.  ibjd.  et  de  Sabellius.  '  On  croit  même  trouver  dans  l'ouvrage  de. 

quoi  prouver  que  S.  Hilaire  ne  le  fit  qu'après  son  retour  de 

num.  M.  SB.  Milan  en  364.  On  donne  aussi  d'assez  bonnes  preuves  pour, 
nous  persuader,  qu'il  aura  d'abord  prononcé  ce  commentai- 
re devant  son  peuple  en  forme  d'homélies;  après  quoi  il  le 
rédigea  en  la  forme  que  nous  l'avons  en  y  faisant  quelques 
changemens. 

iu  Pi.  p.  1-596.         '  Nous  n'avons  aujourd'hui  dans  ce  commentaire  que  les 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.    17o 

explications  de  79  Pseaumes:  des  1,  2,9, 13, 14, depuis  le  51*    iv  siècle. 
jusqu'au  69%  du  91%  et  depuis  le  1 1 8  jusqu'au  dernier.  'S.  Je-  Hier.  vir. iii. iwd.i 
rôme,  qui  parle  souvent  d  •  cet  ouvrage,  et  qui  l'avoit  à  lui,  «p.  4.  p.  6. 
dit  qu'il  consistoit,  selon  ce  qu'il  en  avoit  dans  son  recueil,  en 
un  commentaire  sur  les  mêmss  Pseaumes  que  nous  venons  de 
marquer,  hors  les  9,  13,  1  i,  03,  Oi,  G.'),  0(5,  67,  68,  69,  et 
91.  '  Cassiodore  ne  recoimoit  pareillement  de  S.  Hilaire  que  casd.iMt.  c.  4.p. 
des  explications  de  quelques  Pseaumes.  **'■  *" 

'Mais  cela  n'empêche  pas  que  l'on  ne  croie  que  notre  Saint  Hn.inPs. »dm.  n. 
a  comment*^  tout  le  Pseautier.  C'est  ce  qui  paroit  tant  par  les  *'  '" 
commentaires  sur  plusieurs  Pseaumes  que  nous  avons,  et  qui 
manquoient  à  S.  Jérôme,  que  par  plusieurs  auteurs,  dont  S. 
Ililaire  fait  lui-même  mention  en  divers  endroits  de  ses  écrits. 
'  Aussi  Fortunat  Auteur  de  la  vie  de  ce  Saint  dit-il  en  parlant  nom.  7. 
de  cet  ouvrage,  que  c'étoit  une  explication  complète  de  tous  les 
Pseaumes  :  librum  Psnlmorwn,  ou  Scr/pta  Davidici  carminis 
sermone  cothurnato  per  sinf/u/a  reseravit.  '  S.  Jérôme  même,  Hier.  cp.  7.  p.6î7. 
qui  depuis  qu'il  avoit  lini  son  traiti'  des  Ecrivains  Ecclésias- 
tiques, avoit  peut-être  recouvré  ce  qui  lui  manquoit  de  ce  com- 
mentaire, reconnut  dans  la  suite  qu'il  étoit  entier.  C'est  dans 
sa  letre  74*  à  S.  Augustin,  où  faisant  l'énumôralion  de  ceux 

3ui  ont  écrit  sur  les  Pseaumes,  et  ne  prétendant  jiarler  que 
e  ceux  qui  ont  expliqué  tout  le  Pse^utior,  sed  nunc  de  intsgro 
psatmorum  corpore  dicimus,  met  expressément  S.  Hilaire  de 
ce  nombre,  apiid  iMùios  aulem  Ililarius  Pictaviensis . 

On  ne  peut  donc  raisonnablement  douter  que  S.  Hilaire 
n'ait  commenté  tous  les  Pseaumes.  C'est  ce  que  supose  assez 
manifestement  la  préface  qu'il  met  à  la  tête  de  son  ouvrage.  Il 
n'y  a  qu'à  la  lire  avec  atention  pour  en  convenir  de  bonne 
foi.  'En  effet  après  qu'il  y  a  éclairci  en  peu  de  mots  les  prin-  iiii.in.  Pi.  pr.  n. 
cipales  difficultés  qui  regardent  les  Ps'-aumes  en  général,  il  dit  *^- 
sans  user  de  restriction  qu'il  va  les  expliquer  eux-mêmes.  Ce- 
pendant nous  n'a  ons  point  ces  commentaires  entiers,  com- 
me l'on  vient  de  voir.  11  nous  en  manque  plusieurs  traités,  qui 
sont  ou  perdus,  ou  cachés  dans  les  bibliothèques.  Peut-être 
en  sortiront-ils  peu  à  peu.  Le  dernier  Editeur  de  S.  Hilaire  en 
a  encore  recouvré  deux,  et  le  commencement  d'un  troisième, 
qui  n'avoient  pas  encore  paru.  C'est  l'e.xplication  des  Pseau- 
mes 9%  91*,  et  des  premiers  versets  du  13*. 

'  S.  Hilaire  dans  sa  préface  ne  reconnoît  point  tous  les  Pseau-  nom.  i.  s. 
mes  pour  être  de  David.  Il  atribuë  ceux  qui  portent  un  autre 


176      S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,    nom  dans  le  titre,  aux  Prophètes  qui  y  sont  nommés.  C'eèl 

pourquoi  il  ne  voudroit  pas  que  l'on  dit,  les  Pstaumes  de  Da- 
vid, mais  le  livre  des.Pseaumes  conformément  au  titre  que 

nom.  3. 4.  lui  donnent  les  Actes  des  Apôtres.  '  Il  prétend  sur  une  ancien- 

ne tradition  qu'il  dit  dans  la  suite  être  venue  d'Esdras,  que  les 
Pseaumes  qui  sont  sans  nom  d'Auteur,  apartiennent  au  Pro- 

nnm.  «.  phéto  qui  cst  uommé  à  la  tête  de  celui  qui  précède.  '  Il  remar- 

que cependant  que  ceux  qui  portent  dans  quelques  exemplai- 
res les  noms  de  Jérémie,  d'Aggée  et  de  Zacharie,  ne  sont 
point  de  ces  Prophètes.  La  raison  qu'il  en  donne,  e.st  qu'ils 
ne  portent  point  ces  noms  dans  les  meilleurs  exemplaires  de 
la  version  des  Septante,  qu'il  regarde  comme  autnentique, 
ni  dans  quelques  autres  exemplaires  grecs  et  latins. 

num.  5.  6.  'Il  soutient  que  tout  ce  que  contiennent  les  Pseaumes,  re- 

garde la  nouvelle  alliance  ;  (ju'il  n'y  faut  chercher  que  J.  C. 
ses  mystères  et  son  Eglise  ;  qu'on  ne  peut  en  avoir  l'intelligen- 
ce qu'en  l'entendant  de  celte  sorte  ;  et  que  c'est  pour  cela  que 

nnm.  «.  les  Pseaumcs  sont  un  livre  scellé  par  les  gens  charnels.  '  11 

fait  mention  de  la  coutume  qu'observoient  les  fidèles  de  ne 
point  jeûner  ni  se  prosterner  dans  la  prière  les  jours  de  Diman- 
che. 

nnm.  8.  '  Il  marque  croire  sur  la  tradition  que  ce  fut  Esdras  qui  re- 

cueillit en  un  volume  les  Pseaumes  auparavant  épars.  Mais  il 
soutient  que  ce  fut  les  Septante  qui  les  mirent  dans  l'ordre 

Su'ils  ont,  et  qui  les  divisèrent  comme  nous  les  avons  aujour- 
'hui. 
■n  p».  I.  n.  6.  '  Sur  le  second  verset  du  premier  Pseaume,  il  observe  que  le 

Prophète  exige  autre  chose  que  la  crainte  pour  l'observance 
de  la  loi  de  Dieu.  C'est  pourquoi,  dit-il,  heureux  estl'honvme 
num.  7.  qui  y  demeure  ataché  non  par   crainte,  mais  par  amonr.  'Il 

y  explique  admirablement  de  quelle  manière  on  peut  médi- 
ter jour  et  nuit  cette  sainte  Loi,  et  prier  sans  cesse  suivant  le 
f)récepte  de  S.  Paul.  On  s'acquite  de  ses  devoirs,  dit-il,  si 
g  jour  et  la  nuit  on  se  conduit  conformément  à  cette  loi,  et 
que  l'on  ne  fasse  rien  que  d'agréable  à  Dieu,  et  qui  tende  4 
sa  gloire, 
in  p».  s.  n.  s3.  '  En  Commentant  le  second  Pseaume,  il  parle  avec  beaucoup 

d'éloge  et  du  savoir  des  Septante,  et  de  leur  version  gréque 
de  l'Ecriture.  Il  dit  qu'ils  étoient  les  dépositaires  des  myste- 
,  .,     re»  les  plu»  secrets  de  la  Loi,  et  que  ce  dépôt  étoit  passé  de 
num.  16.  main  eii'  iMW  depuis  Moyse  jusqu'à  eveH.  'Dans  h  suite  du 

commentaire 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  CONFESS.  177 

commentaire  il  établit  fort  bien  la  liberté  de  l'homme,  et  re-    iv  siècle. 

jeté  toute  prémotion  nécessitante.  '  Il  y  parle  des  deux  natu-  „„„.  23. 

res  en  J.  C.  presque  comme  l'on  a  fait  depuis  l'hérésie  qui  les 

a  confondues.  '  Sur  la  (in  il  enseigne  clairement  qu'aussi-tôt  num.  48. 

après  la  mort  les  médians  sont  précipités  dans  l'enfer,  et  les 

justes  conduits  j)ar  les  Anges  dans  le  séjour  des  bienheureux. 

Nihil  illic  dilationis  nul  morœ  est. 

'  Le  traité  sur  le  neuvième  Pseaume  ne  contient,  tel  que  inP».  9.  n.  1.  *. 
nous  l'avons,  que  l'explication  du  titre  seul.  On  y  trouve  à  la 
fin  de  quoi  justifier  ce  (jue  nous  avons  avancé,  savoir  que  S. 
Ililaire  avoit  d'abord  prononcé  ces  traités  devant  son  peuple, 
avant  que  de  leur  donner  la  forme  de  commentaire.  'La  mê-  inP».  13.  n.  e. 
me  preuve  se  rencontre  à  la  fin  du  treizième  Pseaume. 

Saint  Ililaire  l'expliquant  y  montre  d'abord  avec  quel  res-  nnm.  1. 
pectondoit  ou  traiter,  ou  entendre  la  parole  de  Dieu.  'Il  y  nom.  3-5. 
parle  ensuite  de  la  chûlo  du  genre  humain,  des  péchés  qu'elle 
a  atirés  après  elle,  et  de  la  nécessité  où  il  étoit  d'un  souverain 
Médecin.  «  Ni  Moyse,  dit  il,  ni  Elie,  ni  les  autres  Prophètes 
«  ne  l'avoient  pu  donner.  Toutes  les  œuvres  de  la  loi  etoient 
«  trop  impuissantes  pour  guérir  de  si  grands  maux.  Il  falloit  un 
«  Médecin  qui  par  un  seul  et  même  remède  pût  guérir  un  si 
«  grand  nombre  de  diverses  maladies  dont  tout  le  monde  est 
«  infecté.  » 

'  Sur  le  quatorzième  Pseaume  il  enseigne  que  hors  de  l'Eglise  m  p».  14.  n.  4. 
il  n'y  a  point  de  ciel  à  espérer,  '  et  que  les  meilleures  actions  nnm.  8. 
sans  la  loi  ne  rendent  point  saints  ceux  qui  les  font.  '  11  y  par-  nom.  10. 
le  du  mensonge  officieux  comme  utile  en  certaines  ocasions, 
par  exemple,  pour  tromper  un  malade  que  l'on  ne  peut  gué- 
rir autrement;  '  mais  il  est  à  croire  que  S.  Hilaire  avoit  pris  not.  iwd. 
ce  sentiment  d'Origen(;,  comme  oii  l'a  marqué  à  la  marge 
dans  l'une  des  premières  éditions  de  ses  ouvrages.  '  Dans  la  nnm.  15. 
suite  il  condamne  fortement  l'usure  comme  tout-à-fait  indi- 
gne d'un  Chrétien.  Ce  qu'il  dit  à  ce  sujet,  est  très-pathétique. 

'  Sur  le  51''  Pseaume  il  enseigne  que  quelques  bonnes  œu-  inP».  51.  n.  53. 
vres  qu'on  puisse  avoir  faites,  et  quelque  sainteté  qu'on  ait  ac- 
quise, on  a  toujours  besoin  de  la  miséricorde  de  Dieu,  qui 
est  un  plus  grand  mérite  que  tout  le  reste. 

'En  expliquant  le  P.scaume  suivant,  il  parle  du  renonce-  in Ps. ss. n.  12. 
ment  de  S.  Pierre,  comme  ne  lui  aiant  pas  fait  perdre  la  foi 
et  la  résolution  de  confesser  Jésus-(^lirist  jusqu'à  l'effusion  de 
son  sang.  'Au  verset  troisième  de  ce  Pseaume  il  fait  une  sortie  nnm.  13. 

Tome  I.  Sec.  Pari.  Z 


178    S.  IIILAIRE,    EVEQUE  DE  POITIERS, 

fv  sjKCT.E.  sur  ces  Pasteurs  qui  mangent  le  peuple  deDifu,  comme  por- 
te  ce  verset;  «  qui  selon  l'expression  de  l'Apôtre,  f.nt  leur 
«  l^ieu  de  leur  ventre  ;  (|ui  convertissent  leur  ministère  en  un 
«  négoce  honteux  ;  qui  s'enrichissent  des  ofVrandes  et  des  dons 
«  du  peuple  ;  qui  se  font  faire  des  festins  somptueux  sous  pré- 
«  texte  de  religion,  qui  remplissent  leurscaves  et  leurs  greniers 
«  de  ce  que  la  pif'lé  dos  fidèles  leur  fait  offrir,  sans  qu'ils  en 
«  aient  besoin,  et  qui  devroit  servir,  suivantl'instilMtion  des  Apô- 
«  treS;hla  nourriture  journalier'  de  ceux  qui  renoncent  au  mon- 
«  de,  ou  qui  sont  dans  l'indigence.  » 

1.  n.7.8.  'Kn  expliquant  le  l's'annie  118%  il  dit  que  tout  ce  monde 

est  r  mpli  d'Anges,  (  t  qu'il  n'est  rien  à  quoi  leur  ministère  ne 
s'élend<'.  Qu'ils  sont  témoins  non  seulement  de  toutes  nos  ac- 
tions, mais  aussi  de  nos  plus  secrètes  pensf^-es.  De-là  il  tire  cet- 
te belle  reflexion  morale,  qui  si  l'on  craint  de  faire  le  mal, 
lorsqu'on  a  quelqu'un  pour  tr'moin  de  son  action,  l'on  doit  à 

f)lus  forte  raison  craindre  de  commettre  le  moindre  péché  sous 
es  yeux  de  ces  bienlieureux  Esprits  à  qui  rien  n'échape. 

Nous  passerions  les  bornes  que  nous  nous  sommes  prescri- 
tes, si  nous  poussions  plus  loin  ces  extraits.  En  voil;\  assez  pour 
faire  juger  du  mérite  de  l'ouvrage.  Il  est  parsemé  de  mille  au- 
tres traits  sur  le  dogme,  la  morale  et  la  discipline,  semblables 
à  ceux  que  nous  venons  de  raporter^  et  toucliés  avec  une  lu- 
mière qui  éclaire  l'esprit,  une  pieté  qui  embrase  le  cœur, 
une  onction  qui  inspire  du  goût  et  de  l'amour  pour  les  véri- 
tés qui  y  sont  énoncées. 
Ang.injni.  x.i.n.  '  Lcs  Peres  I  atinsont  fait  beaucoup  de  cas  de  ce  commen- 
*'■*''  taire  de  S.  Hilaire.  S.  Augustin  en  a  emploiV'  plusieurs  passa- 

mer,  «p.  crit.  p.  ges  contre  les  Pélagiens.  De  même,  '  quoique  S.  Jérôme  pa- 
roisse y  reprendre  quelques  fautes,  il  ne  laisse  pas  d'en  parler 
in  Mich.  1.  2.  pr.  avcc  élogc  cu  plusicurs  endroits.  'Il  est  vrai  qu'il  reconnoît 
6J7*f«po.Tï!p.'  que  S.  Hilaire  s'y  est  beaucoup  servi  d'Origene,  et  qu'il  en  a 
"'•  pris  quantité  de  choses,  ce  qu'il  dit  aller  à  près  de  quarante 

mille  versets,  tant  pour  ce  commentaire  sur  les  Pseaumes,  que  • 
«p.  33.  p.  851.  pour  celui  qu'il  composa  aussi  sur  Joh.  '  Mais  il  avoue  lui-mê- 
me en  même  tems  que  S.  Hilaire  s'est  tellement  servi  des 
écrits  d'Origene  pour  composer  ceux-là,  que  sans  s'assujetir 
servilement  à  la  letre,  comme  feroient  des  ignorans,  il  s'est 
rendu  maître  de  son  Auteur,  et  en  a  pris  ce  qu'il  a  jugé  à  pro- 
pos en  l'acommodant  au  génie  de  la  langue  en  laquelle  il  écri- 
vit :  sfid  qnast  captivo.9  sensus  in  mam  linguam  victoris  jure 


DOCTEUR  DE  L'EtlLlSE  ET  CONFESS.    179 

trmisposuït .  "Et  ailleurs  S.  Jérôme  loue  ces  endroits  que  S.  Hi-    iv  siec;.:: 
laire  a  fait  passer  di'S  écrits  d'Origene  dans  les  siens,  comme  .  «p.4i.p.  ^,40. .. 
traduits  non  avec  la  contrainte  d'un  interprète,  mais  avec  la  li- 
berté d'un  Auteur  qui  compose  de  son  propre  fonds.  'En  un  vir.  m.  i\u. 
mot  S.  llilaire  imita  de  telle  sorte  Urigeue  dans  son  commen- 
taire sur  l»;s  Pseaumes,  que  de  l'aveu  même  de  S.  Jérôme  il  y 
ajouta  diverses  choses  de  sa  propre  invention.  'C'est  de  quoi  hii. in p».  adm. 
le  dernier  Editeur  de  S.  llilaire  donne  des  preuves  plus  que  """"■  '*  "* 
suffisantes. 

'Les  critiques  observent  que  parmi  lt;s  sermons  imprimés  in  p<.  «1.  4i*i 
plusieurs  fois  sous  le  nom  de  Zenon  de  Vérone,  il  s'en  trouve  î^.eyîî!'''  '^'  '' 
quelques-uns  qui  apartiennenl  à  S.  llilaire.  'Sixte  de  Sienne  six. bit.  1.4. p. 333. 
en  particulier  assure  que  ceux  qui  sont  sur  les  Pseaumes  de- 
puis le  126"  jusqu'au  130  inclusivement,  ont  été  pris  de  mot 
à  mot  du  commentaire  des  Pseaumes  de  ce  Père. 


c 


S-  m. 

SES   ECRITS    PERDUS. 

E  que  nous  venons  de  dire  des  ouvrages  qui  nous  restent 
de  S.  llilaire,  joint  à  l'édification  et  au  fruit  qu'en  tire 
tous  les  jours  l'Eglise,  doit  nous  faire  beau('oup  legreter  la 
perte  de  ceux  qui  ne  .sont  pas  venus  jusqu'à  nous.  Voici  le  dé- 
nombrement de  ceux  qui  ont  (-lé  coinius  des  anciens,  el  dont 
le  malheur  des  tems  nous  a  privés. 

1°.  '  S.  Jérôme  en  plus  d'un  endroit  fait  mention  d'un  opus-  Hier.  vir.  ai.  e. 
culecjueS.  llilaire  composa  contre  un  médecin  nommé  Dios-  *<><•  i  «p- «^.p. 657. 
eore,  et  dans  lequel  il  montroit  quelle  etoit  son  érudition, 
quid  in  literis posset  osteiidil.  Dans  les  éditions  des  œuvres  de 
notre  Saint  cet  écrit  se  trouve  intitulé,  contre  le  Préfet  Salus- 
te,  et  contre  Dioscore  médecin.  'C'est  ce  qui  a  fait  croire  à  B*r.  «n.  3<a.  n. 
Baronius  que  ce  livre  étoit  écrit  contre  les  violences  de  Sa-  **'' 
lusle  préfet  des  Gaules  sous  l'Empire  de  Julien  l'Apostat,  et 
que  Dioscore  étoit  son  Vicaire  ou  lieutenant  de  la  Préfectu- 
re. 'Mais  comme  Théodoret  témoigne  que  Saluste  persuada  Thdrt.  1. 3.  e.  11. 
à  cet  Empereur  de  faire  cesser  la  pi  rsécution  contre  les  Chré-  ^'  "'' 
tiens,  '  il  est  à  croire  qu'il  étoit  eniieni  de  la  cruauté,  et  que  Jiu.  pr.n.  19. 
S.  llilaire  s'adressa  à  lui  pour  se  plaindre  de  Dioscore,  qui  peut- 
être  exécutoit  avec  trop  de  rigueur  les  ordres  du  Prince.  Ainsi 
cet  ouvrage  n'étoit  pas  intitulé  contre  Saluste,  mais  à  Saluste 
contre  Dioscore,  comme  porte  un  très-ancien  manuscrit  de 

Zij 


180         S.  niLAIBE,  EVEgUE  DE  POITIEHS, 

IV  SIECLE.    Corbie,  sur  lequel  Uom  Martianay  a  donné  le  traité  des  Ecri- 
~. — „    ...  ....   vains  Ecclésiastiques  par  S.  Jrrômo  ;  '  et  cette  leçon  a  été  re- 

Hir.  Vir.  ill.  ibid.  .  T    .       ï  '  *•,       ,  c     ti- 

nul.  p.  188.  tenue  dans  les  éditions  qui  en  ont  paru  dans  la  suite.  *  b.  Hi- 

•  Fien.  H.  E.  t.  *.  Jairc  le  composa,  lorsijue  Julien  avoit  été  déjà  déclaré  Augus- 
"*'    "  te  :  ce  que  M.  l'Abbé  Eleury  raporte  en  l'an  362,  ajoutant  que 

cet  écrit  étoit  aparemment  pour  la  défense  de  la  religion  Chré- 
tienne. 
Hier.  Vir.  ill.  ibid.       2°.  '  Saint  Jérôme  nous  aprend  encore  que  S.  Ililaire  avoit 
in  ep.  Gai.  1.8.  pr.  laissé  de  sa  façon  un  recueil  entier  d'hymnes,  '  dans  l'une  des- 
quelles il   traitoit  d'indociles  les  Gaulois  ses  compatriotes, 
isid.  o«.  1.  i.c.6.  'Notre  Saint  passe  véritablement  pour  le  premier  entre  les 
Latins,  qui  ait  exercé  sa  plume  à  cette  sorte  de  poésie  (îhré- 
Hii.  pr.  n.  20.        tienne.  '  Nous  aprenons  du  treizième  Canon  du  IV  Concile 
de  Tolède  tenu  en  633,  que  lui  et  S.  Ambroise  en  avoient 
composé  plusieurs  pièces  à  l'honneur  de  Dieu  et  sur  les  triom- 
nuni.2i.  phes  des  Apôtres  et  des  Martyrs.    Il  est  même  probable  que 

l'on  en  emploïoit  quelques-unes  dans  l'office  de  l'Eglise. 
up.  bU).  t.  2.  th.  p.       '  C'est  aparemment  sur  ces  principes  qu'en  1  i80  on  impri- 
''■  ma  à  Paris  avec  un  commentaire  un  recueil  d'hymnes  sous  le 

nom  de  S.  Hilaire,  qui  fut  réimprimé  à  Rouen  en  1505.  Mais 
on  est  persuadé  aujourd'hui  que  ce  recueil  n'est  point,  et  ne 
■*  contient  peut-être  rien  qui  apartienne  à  notre  S.  Evêque.  Il 

faut  porter  le  même  jugement  des  cinq  hymnes,  qui  se  trou- 
vent sous  son  nom  à  la  fin  du  Pseautier  de  Thomasius  et  par- 
Bou.  13.  Jan.  p.  mi  Ics  collectious  de  Bartliius.  '  Toutefois  quelques  Ecrivains 
'^'  n'ont  pas  laissé  de  croire  que  l'hymne  de  S.  Jean  qui  commen- 

ce par  ce  vers  :  Ut  queant  Iaxis,  ctc,  et  celle  de  la  Passion  :  Pon- 
ge lingua  gloriosi prœlium  certamims,  sont  de  la  façon  de  S. 
Hilaire.  Mais  nous  ferons  voir  en  son  lieu  que  la  dernière  apar- 
tient  à  Mamert  Claudien  Prrtre  de  l'Eglise  de  Vienne. 
Mab.  Ut.  1. 3.C.  4.  'Alcuin  et  plusieurs  autres  qui  lonl  suivi  en  cela,  préten- 
**■  "*■  dent  que  S.  Hilaire  est  encore  Auteur  de  l'hymne  Glona  in  ex- 

Tiii.  H.  E.  t.8.  p.  celsis,  que  nous  chantons  à  la  messe.  '  Mais  on  ne  voit  point 
*^'  sur  quoi  Alcuin  apuïe  cette  opinion.  Il  semble  même  que  cet- 

te hymne  est  plus  ancienne  (|ue  S.  Hilaire,  puisqu'elle  se  trou- 
ve dans  les  Constitutions  Apostoliques.  Elle  est  aussi  dans  le 
Ann.ben.t.4.app.  livre  de  la  Virginité  atribué  à  S.  Athanase.  'Abbon  Abbéde 
''■     ■  Fleuri  à  la  fin  du  X  siècle  dans  ses  réponses  à  quelques  ques- 

tions de  certains  Moines  d'Angleterre,  atribuë  encore  à  S. 
Tiii.  ibid.  1. 13.  p.  Hilaire  le  célèbre  cantique,  Te  Deum  laudamus.  '  Mais  on  le 
donne  <^  tant  d'autres  anciens  .\iileurs,  qu'il  est  difficile  de 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS-        181 

savoir  de  qui  il  est  précisément.  De  sorte  que  nous  sommes    iv  siècle. 
obligés  d'avouer  que  de  toutes  les  hymnes  que  S.  Hilaire  a 
pu  composer,  nous  ne  sommes  point  assurés  d'en  avoir  d'au- 
tre que  celle  qu'il  adressa  à  sa  fille, -et  dont  nous  avons  déjà 
parlé. 

3"  '  S.  Jérôme  continuant  le  catalogue  des  ouvrages  de  S.  œer.vir.  ui.  lUd. 
Hilaire  ,  nomme  encore  un  livre  des  Mystères  ,  qui  paroît  par- 
là  avoir  été  un  écrit  d'importance.  '  Mais  il  ne  nous  en  reste  Hu.pr.n.83. 
plus  que  ce  titre.  On  peut  néanmoins  croire  que  l'ouvrage 
aura  été  inséré,  ou  en  tout  ou  en  partie,  dans  les  offices  de 
l'Eglise.  Il  sera  ensuite  arrivé  que  par  les  divers  changemens 
qu'on  y  a  faits ,  le  nom  de  Saint  Hilaire  aura  disparu.  Presque 
la  même  chose  est  arrivée  au  Sacramentaire  de  Saint  Gré- 
goire, qui  pour  avoir  été  acommodé  à  l'usage  propre  de  cha- 
aue  Eglise ,  se  trouve  à  peine  retenir  le  nom  de  son  Auteur 
ans  quelques  exemplaires. 

4°,  '  Nous  aprenons  encore  de  S.  Jérôme  qu'il  y  avoit  des  Hier.Und. 
letres  de  S.  Hilaire  à  diverses  personnes.  '  Il  paroît  en  efl'et  par  mi.  de  Syn  n.  i. 
quelques  endroits  de  S.  Hilaire  même,  qu'il  en  avoit  écrit 
plusieurs  ;  et  le  personnage  qu'il  a  fait  pendant  plus  de  dix  ans 
dans  l'Eglise  ne  permet  pas  d'en  douter.  '  S.  Severe  Sulpice  sui.  hm.  i.  s.  n. 
fait  mention  de  ces  letres  de  S.  Hilaire,  et  dit  que  le  Saint  y  ^  ^  ^^' 
raportoit  la  chute  d'Osius  alors  âgé  de  plus  de  cent  ans.  La 
manière  dont  en  parle  cet  Historien,  feroit  juger  qu'il  y  en 
avoit  un  recueil.  Il  ne  nous  reste  cependant  que  celle  à  sa  fil- 
le Abra.  L'on  voit  à  Rome  dans  la  bibliothèque  de  M.  le  Car^ 
dinal  Ottoboni  un  manuscrit  qui  pourroit  tromper  par  son 
aparence  ceux  qui  desireroient  recouvrer  ce  précieux:  monu- 
ment de  S.  Hilaire.  Il  porte  en  tête  ce  titre  spécieux,  le  mê- 
me que  l'on  trouve  dans  Saint  Jérôme  :  Epistolœ  S.  Hilariiad 
diversos.  Mais  ce  manuscrit  sous  un  si  beau  dehors  ne  contient 
que  la  letre  à  Abra,  et  quelques  autres  pièces  de  peu  d'au- 
torité. 

5°  Un  des  plus  célèbres,  comme  peut-être  un  des  plus  con- 
sidérables écrits  de  S.  Hilaire,  entre  ceux  que  nous  avons  per- 
dus, '  sont  les  traités  sur  Job.  C'est  ainsi  que  S.  Jérôme  nom-  mer.  ibiji  apo.  i. 
me  cet  ouvrage  dans  son  catalogue  des  Ecrivains  Ecclésiasti-  p.  \,^^  '  *''■  ^' 
ques,  où  il  dit  que  S.   Hilaire  les  avoit  traduits  du  grec  d'O- 
rigene,  dont  il  avoit  pris  le  sens,  sans  se  laisser  asservir  par  la 
letre.  Ailleurs  il  donne  à  cet  ouvrage  le  titre  d'homélies  ;  '  et  Aug.  in  Jui.  1. 1.  b. 
c'est  sous  ce  nom  que  S.  Augustin  le  cite  contre  Julien  le  Pé-  "■ 


!V 

SIECLE. 

72. 

ual. 

el 

«!'■    II. 

»Hil. 
1366. 

fr. 

P- 

1365. 

182         S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

lagien.  Ce  dernier  Père  en  cet  endroit,  '  et  dans  le  62*  cha- 
pitre de  son  livre  de  la  nature  et  de  la  grâce,  nous  a  conser- 
vé deux  passages  de  ces  homélies,  *•  que  Ion  a  eu  soin  de  ra- 
porter  à  la  fin  de  la  nouvelle  édition  de  S.  Hilaire  après  les 
autres  fragmens.  S.  Hilaire  dans  le  premier  de  ces  passages 
établit  clairement  le  péché  originel  et  ses  suites,  et  relevé  la 
bonté  ineffable  de  Dieu  d'avoir  avantageusement  n'paré  les 
perles  que  nous  avons  faites  en  Adam,  et  de  faire  tourner  par  sa 
miséricorde  la  malice  même  du  Diable  à  notre  sanctification. 

cnsd.  inst.  c.  6.  p.       '  Gassiodorc  parle  d'un  livre  anonyme  sur  Job,  qu'il  jugeoit 

543. 1.  pgj.  jg  gj^jg  p(juyoif  êij.g  jg  s  Hilaire,  et  dont  il  recomman- 

de la  lecture  à  ses  Moines.  On  ne  sait  point  d'ailleurs  ce  que 

iiab.it.itai.p.208.  pouvoit  être  cet  écrit.  '  Dom  Mabillon  dans  le  cours  de  son 
voïage  d'Italie  trouva  à  Polironne  ou  San-Benedetto  abbaie 
de  Bénédictins  près  de  Mantouë,  un  manuscrit  qui  contient 
trois  homélies  sur  Job,  tirées  d'Origene  avec  une  préface.  Il 
y' est  marqué  que  ces  livres  ont  été  traduits  par  l'Evêque  Hi- 
laire. Mais  Dom  Mabillon  ne  juge  pas  que  ce  soit  là  son  sty- 
le ;  et  il  assure  que  l'on  n'y  trouve  point  le  passage  cité  par  S. 

Hii.pr.n.25.  Augustiu.  '  M.  Hucl,  au  raport  de  Dom  Coûtant,  témoigne 
même  que  cet  Auteur  rejeté  le  terme  de  consubslantiel  ,  et 
donne  de  grands  éloges  à  S.  Lucien  dont  les  premiers  Ariens 
se  disoient  les  disciples  :  ce  qui  est  fort  oposé  et  à  la  foi  et  à  la 
doctrine  de  S.  Hilaire. 

Vit.  n.  44.  'Quelques  Savans  croient  que  ce  fut  pendant  son  exil  que 

ce  Père  travailla  à  son  commentaire  sur  Job.  La  raison  qu  ils 
en  donnent  est  qu'entre  tous  les  livres  de  l'Ecriture  sainte, 
il  n'en  est  point  dont  la  médilalicn  soit  plus  utile  et  plus  pro- 
pre à  inspirer  du  courage,  et  à  soutenir  la  constance  au  milieu 
des  peines  inséparables  de  l'exil.  Mais  peut-être  S.  Hilaire 
eut-il  as.sez  d'ocupalion  du  traité  des  Synodes  et  des  li- 
vrets de  la  Trinité  qu'il  composa  pendant  ce  tems-là  ;  sans 
parler  des  letres  qu'il  fut  obligé  d'écrire,  et  des  autres  distrac- 
tions que  lui  atirerent  et  le  Concile  de  Seleucie  et  les  besoins 
des  Eglises  du  pais.  D'ailleurs  le  titre  d'homélies  que  S.  Jé- 
rôme et  S.  Augustin  donnent  à  ce  commentaire ,  fait  tout  na- 
turellement naitre  l'idée  que  c'étoit  un  recueil  des  instructions 
que  S.  Hilaire  a  oit  faites  à  .son  peuple  ,  à  mesure  qu'on  lui 
lisoit  le  livre  de  Job,  suivant  l'usage  de  ces  premiers  siècles. 

Hier.  apo.  1.  1.  p.       '  Cc  quc  S.  Jcrôme  a  pensé  du  commentaire  de  S.  Hilaire 

«Î.'mô.  ■  **■  *■  sur  les  Pseaumes,  par  raport  à  l'usage  qu'il  y  avoit  fait  des 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.        1»3 

écrits  d'Origene,  il  l'a  pensé  aussi  de  ses  Homélies  sur  Job.    iv  siècle. 

Ainsi  Fon  doit  juger  de  ce  dernier  ouvrage  par  l'idée  que  nous 

avons  donnée  de  l'autre.  '  Au  reste  quelque  chose  que  S.  Hi-  ep.  36.  p.  276 1  ep. 

laire  prit  d'Origene,  il  eut  soin  de  n'en  prendre  que  ce  qui     '^' 

étoit  utile  et  irrépréhensible.  C'est  ainsi  qu'Eusebe  de  Verceil 

et  S.  Jérôme  même  qui  le  raporte,  en  usèrent  :  Uterque  nos- 

trûm,  dit  ce  Père,  noxia  qnœque  detnincans,  utiliatranstulit. 

11  semble  néanmoins  que  S.  Hilairo  en  particulier  avoit  traduit 

quelques  homélies  sous  le  nom  même  d'Origene  ;  '  puisqu'il  Ruf.  i.  3.  p.  mt. 

1  avoit  fait  de  manière  que  le  bien  et  le  mal  qui  s'y  trouvoit,  ne 

pou  voit  rtre  atribué  au  Traducteur  ,  mais  à  l'Auteiîr  original. 

'  De-Ià  on  conjecture  que  l'une  des  causes  pour  lesquelles  nous  mi.  pr.  n.sg. 

avons  perdu  tant  d'ouvrages  de  S.  Hilaire,  est  qu'en  son  siècle 

et  les  suivans  on  étoit  persuadé  qu'il  avoit  traduit  et  imité  dans 

ses  écrits  beaucoup  d'endroits  d'Origene,  dont  le  nom  étoit  alors 

odieux. 

6°.  '  S.  Jérôme  marque  aussi  un  ouvrage  sur  le  Cantique  mer.vir.  iii.  ibid. 
des  Cantiques,  qu'il  n'avoit  pas  vu  à  la  vérité ,  mais  que  quel- 
ques-uns atribuoient  àS.  Hilaire.  C'est-là  tout  ce  que  l'on  nous 
en  aprend  ;  et  peut-être  ne  devons-nous  pas  nous  atendre  à 
en  savoir  davantage.  Après  tout  il  y  a  quelque  difficulté  à  croi- 
re que  '  S.  Hilaire  qui  n'a  pas  voulu  expliquer  l'Oraison  Do-  Hii.  in  Mati.  e.  5. 
minicale,  parce  qu'il  savoit  que  TertuUien  et  S.  Cyprien  l'a-  """"■  *' 
voient  fait  avant  lui,  ait  entrepris  d'écrire  sur  le  Cantique  des 
Cantiques,  '  que  S.  Retice  d'Autun  avoit  commenté  en  notre  hw.  ibid.  c.  ss. 
langue  quelques  années  auparavant. 

7°.  '  Le  même  S.  Jérôme  citant  les  Pères  tant  Grecs  que  «p.  30  p.  241 1  hii. 
Latins  qui  avoient  avantageusement  parlé  du  nombre  impair  ,  {bij.";*.^.  esl'"" 
nomme  entre  autres  S.  Cyprien  et  S.  Hilaire.  Puis  il  ajoute  , 
comme  le  portent  les  anciennes  éditions  de  ses  œuvres  ,  que 
S.  Hilaire  a  fait  voir  dans  son  livre  à  Fortunat  quelle  estime 
il  faisoit  du  nombre  de  Sept  :  ce  qui  se  trouve  dans  le  livre 
de  l'exhortation  au  martyre  par  S.  Cyprien,  chapitre  11.  C'est 
sur  cette  autorité  que  Marianus  Victorius  atribuë  à  S.  Hilaire 
cette  exhortation  au  martyre.  De -là  naissent  naturellement 
deux  Questions  :  la  première  ,  savoir  si  ce  traité  qui  a  toujours 
porté  le  nom  de  S.  Cyprien,  doit  être  atribué  à  S.  Hilaire  , 
comme  le  prétend  Victorius  l'un  de  ses  Editeurs  ?  la  seconde  , 
savoir  si  S^  Hilaire  n'a  pas  aussi  écrit  sur  le  nombre  impair  "? 

'Quant  à  la  première  question,  elle  ne  souffre  plus  de  dif-  cyp.  not.  p.  sos. 
ficulté,  dit  le  dernier  Editeur  de  S.  Cyprien,  depuis  l'éclair- 


184         S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,    cissement  qu'en  ont  donné  Dom  Coulant  et  Dom  Martianay. 

Hii.  ibid.  |  Hier.     En  effet  CCS  deux  Editeurs  l'un  de  S.  Hilairo,  l'autre  de  S. 

ibid.  noi.  Jérôme,  ont  fait  voir  que  Marianus  Victorius  avoit  été  trom- 

pé par  une  leçon  corrompue  ;  puisque  tous  les  anciens  manus- 
crits que  l'on  a  consultés  pour  la  nouvelle  édition  de  ce  der- 
nier Père,  portent,  quorum  Cyprianus,  au  lieu  de,  quorum 

Tiii.ibid.  Hilarius,  comme  on  lit  dans  les  anciens  imprimés.  '  D'ailleurs 

il  est  impossible,  remarque  M.  de  Tillemont,  d'avoir  lu  le  trai- 
té dont  il  s'agit  ici,  sans  reconnoître  que  le  style,  l'air  et  les 
pensées  sont  entièrement  de  S.  Cyprien  ;  et  ni  Bellarmin  ni 
Kivet  ne  disent  pas  même  que  ce  livre  lui  soit  contesté. 

A  l'égard  de  l'autre  question,  savoir  si  S.  Hilaire  n'a  pas 

Hier.  ep.  30.  p. 24.  aussi  écHt  sur  le  nombre  impair  ?  '  C'est  de  quoi  S.  Jérôme  ne 
laisse  aucun  lieu  de  douter.  Il  le  nomme  expressément  entre 
les  Grecs  et  les  Latins,  qu'il  assure  avoir  écrit  sur  ce  sujet. 
Mais  nous  manquons  de  preuves ,  pour  assurer  que  S.  Hilaire 
ait  composé  là-dessus  quelque  traité  particulier.  Peut-être  S. 

Hii.  in  Ps.  118.  \.  Jérôme  en  parlant  ainsi  de  S.  Hilaire,  n'â-t'il  eu  en  vùë  '  que 
ce  qu'il  avoit  lu  de  lui  touchant  le  nombre  de  sept  dans  son 
explication  du  Pseaume  118.  S.  Hilaire  y  relevé  beaucoup 
ce  nombre,  et  donne  diverses  raisons  pour  le  regarder  com- 
me un  nombre  sacré. 

Spic.t.  4.P.483.  8».  '  Hariulfe  Moine  de  S.  Riquier  dans  le  Ponthieu,  Au- 
teur du  XI  siècle,  témoigne  que  depuis  plus  de  deux  cens 
ans  l'on  conservoit  dans  la  bibliothèque  de  son  monastère  les 
questions  de  S.  Hilaire  sur  le  Pentateuque,  avec  celles  de  S. 
Cyprien,  de  S.  Jérôme,  de  S.  Augustin  ,  et  de  S.  Avite  sur  les 
mêmes  livres.  Comme  cet  Ecrivain  dans  le  même  article  et 
immédiatement  auparavant  nomme  les  livres  de  la  Trinité  de 
notre  S.  Docteur,  il  ne  laisse  aucun  lieu  de  douter  qu'il  ne  dé- 
signe S.  Hilaire  de  Poitiers  plutôt  que  tout  autre.  Au  reste 
l'on  ignore  absolument  quel  pouvoit  être  cet  ouvrage  ;  et  S. 
Jérôme  ne  l'a  point  connu. 

Hu.  pr.  n.  27.  9».  '  Le  douziémc  canon  du  ii  Concile  de  Seville  fait  men- 

tion de  l'explication  d'une  des  Epitresde  S.  Paul  àTimothée, 
faite  par  S.  Hilaire.  On  y  en  a  même  inséré  un  passage  que 
l'on  trouve  à  la  fin  des  œuvres  de  ce  Père  entre  ses  autres  frag- 
mens.  Cela  feroit  croire  que  S.  Hilaire  auroit  écrit  sur  les  Epî- 
tres  de  S.  Paul,  au  moins  sur  une  des  deux  à  Timothée.  Mais 
l'on  n'en  a  point  d'autres  preuves  ;  et  S.  Jérôme  n'en  parle 
nulle  part. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.        185 

10".  Trithéme,  qui  est  néanmoins  un  Ecrivain  trop  modor-  iv  sif.ci.e. 
ne  pour  faire  quelque  autorité  de  poids  en  des  choses  aussi 
éloignées  de  son  siècle,  sur-tout  lorsqu'il  ne  parle  point  d'après 
les  anciens,  '  atribuë  encore  à  S.  Ililaire  un  livre  sur  les  héré-  inih.  scripi.  ecei. 
sies.  D'abord  on  pourroit  croire  que  par  ce  dernier  ouvrage  '•  '"• 
il  entend  les  livres  de  la  Trinité,  ou  l'écrit  contre  Ursace  et 
Valens,  ou  môme  celui  contre  Auxcnce  de  Milan  ,  qui  est 
aussi  intitulé  contre  les  Ariens,  ou  enfin  le  traité  des  Syno- 
des. Mais  Trithéme  éloigne  lui-même  cette  idée  ,  puisqu'il 
spécifie  tous  ces  ouvrages  dans  le  catalogue  qu'il  fait  de  ceux 
de  S.  Hilaire.  Tout  ce  qui  paroît  avoir  trompé  cet  Ecrivain  , 
c'est  que  les  livres  de  la  Tnnité  ont  porté  dans  quelques  ma- 
nuscrits, comme  nous  l'avons  déjà  remarqué,  cet  autre  titre  , 
contre  toutes  les  hérésies.  De  sorte  que  Trithéme,  n'y  regar- 
dant pas  autrement  de  trop  près,  aura  divisé  cet  ouvrage  en 
deux  à  cause  de  ses  deux  difîérens  titres.  La  même  chose  lui 
est  arrivée  à  l'égard  de  l'écrit  contre  Auxence,  dont  il  en  a 
fait  deux,  l'un  contre  Auxence,  l'autre  contre  les  Ariens.  Pour 
ce  qui  est  du  livre  de  Chroniques  qu'il  donne  à  S.  Hilaire  ,  on 
n'en  trouve  nul  vestige  dans  toute  l'antiquité. 

'  L'on  ne  sauroit  dire  précisément  de  quel  ouvrage  perdu  Ha.  fr.  p.  ises. 
de  S.  Hilaire  a  été  pris  ce  beau  passage  qu'en  raporte  le  IV 
Concile  de  Tolède.  C'est  une  explication  de  ces  paroles  de 
l'Evangile  :  Donnez-nous  aujourd'hui  notre  pain  de  chaque 
jour.  «  Qu'est-ce,  dit  S.  Hilaire,  que  Dieu  désire  davantage, 
«  sinon  que  J .  -C .  qui  est  le  pain  de  vie ,  le  pain  qui  est  descendu 
«  du  ciel,  demeure  tous  les  jours  en  nous  1  Ainsi  comme  cette 
a  prière  est  pour  chaque  jour,  on  prie  pour  obtenir  ce  pain 
«  aussi  chaque  jour.  » 

S-  IV. 

SES  ECRITS  SUPOSÉS.  , 

ON  est  si  convaincu  depuis  long-tems  que  les  ouvrages 
dont  il  est  ici  question,  n'apartiennent  point  à  S.  Hilai- 
re, qu'il  seroit  presque  inutile  d'en  parler.  De  peur  néanmoins 
qu'il  ne  parût  manquer  quelque  chose  à  son  histoire,  nous  en 
allons  faire  l'énumeration,  sans  nous  y  arrêter  beaucoup. 

1°.  '  Louis  le  Mire  dans  l'édition  de  S.  Hilaire  qu'il  publia  ffii.  apo.  p.  laen. 
en  1544,  y  inséra  sous  son  nom  un  poëme  sur  la  Génese  qu'il  ""  «.'p.  m.  1. 
avoit  tiré  de  la  bibliothèque  de  S.  Victor.  Depuis  il  a  été  im- 
primé plusieurs  fois  encore  sous  le  nom  du  même  Père,  Mais 

Tome  I.  Sec.  Part.  A  a 

1   3  * 


186         S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POIT/ERS, 

IV  SIECLE,  on  a  peine  à  comprendre  comment  on  a  alribué  une  pièce  à 
S.  Hilaire  de  Poitiers,  à  la  tête  de  laquelle  on  voïoit  paroltre 
le  nom  du  Pape  S.  Léon  à  qui  elle  est  adressée.  C'est  ce  qui 
l'a  fait  donner  à  S.  Hilaire  d'Arles.  Si  c'est  avec  plus  d'aparen- 
ce,  ce  n'est  peut-être  pas  avec  plus  de  vérité.  Nous  en  parle- 
rons plus  amplement  en  faisant  son  histoire, 
nor.  bib.  p.  198.  2».  '  En  IGOo,  le  P.  du  lîosc  Célestin  publia  encore  sous  le 
*"*•  nom  de  S.  Hilaire  un  poëme  sur  le  martyre  des  Maccabées. 

Il  est  vrai  qu'il  marque  avoir  douté  si  cette  pièce  apartient  à 
S.  Hilaire  de  Poitiers  plutôt  qu'à  S.  Hilaire  d'Arles  ,  quoiqu'il 
levé  aussi-tôt  son  doute  en  déclarant  que  le  style  aproche  plus 
de  celui  du  premier.  11  en  juge  par  sa  conformité  avec  le  style 
du  poëme  précédent  sur  la  Ciénese,  ce  qui  ne  prouve  rien. 
Aussi  convient-on  que  ni  l'un  ni  l'autre  de  ces  poëmes  n'est 
de  notre  S.  Docteur. 
Hii.  ibid.  j>.  1M3-       3".'  On  porto  le  même  jugement  des  petits  traités  qui  ont 
"'?  'luv'fb'iS'*^'  P**^^  ^^^^  ^°"  ^^^^^  '"^'^^  ^^^  titres  de  l'unité  et  de  l'essence  du 
297. 1.    ■         *  Père  et  du  Fils.  Dès  1535  qu'on  mit  le  premier  sous  la  presse, 
on  s'aperçut  que  ce  n'étoit  qu'une  rapsodie  formée  de  divers 
endroits  du  second,  et  particulièrement  du  neuvième  livre  de 
la  Trinité,  avec  une  addition  tirée  d'ailleurs  sur  les  divers  noms 
de  J.-C.  Le  traité  de  l'essence  contre  les  hérétiques  n'est  non 
plus  qu'un  tissu  assez  mal  assorti  de  divers  endroits  des  douze 
livres  de  la  Trinité. 
Hii.  ibid.  p.  1377.       4».  '  On  donna  aussi  en  1578  sous  le  nom  de  S.  Hilaire  un 
"''"•  fragment  de  sermon,  comme  l'on  croïoit ,  dont  on  avoit  fait 

des  leçons  pour  la  fêle  de  la  Trinité.  Leunclavius  l'avoit  trou- 
vé en  grec  sous  le  nom  du  S.  Evêque.  Mais  on  a  reconnu  de- 
puis que  ce  n'est  autre  chose  que  ce  qu'on  nomme  la  foi  d'Al- 
cuin.  Dès  le  IX  siècle  Enée  de  Paris  l'avoit  citée  sous  ce  titre 
en  la  donnant  à  son  véritable  Auteur. 
Riy  ibid  5°.  '  Enfin  l'on  a  cru  pondant  quelque  tems  que  les  deux  le- 

Ires  qui  portent  le  nom  d'Hilaire,  et  qui  sont  adressées  à  S. 
Augustin,  étoicnt  de  S.  Hilaire  de  Poitiers.  L'erreur  étoit  assez 
grossière  pour  se  faire  sentir  par  elle-même.  En  effet  ces  lelres 
portent  avec  elles  toutes  les  marques  nécessaires,  pour  y  re- 
connoître  un  Auteur  qui  n'est  venu  que  long-tems  après  lui. 
Elles  sont  adressées  à  S.  Augustin,  qui  ne  commença  à  fleu- 
rir qu'à  la  fin  du  IV  siècle;  et  il  y  est  parlé  des  suites  de  l'héré- 
sie ae  Pelage  qui  ne  fut  connue  qu'au  siècle  suivant. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.         187 

e       V,  •  ÏV  SIECLE. 

SA   MAiNIERE    D'ECRIRE,    SON   ERUDITION 

ET    SA    DOCTIUNE. 

APRÈS  ce  que  nous  avons  déjà  dit  des  ouvrages  qui  nous 
restent  de  S.  Hilaire,  et  les  extraits  que  nous  en  avons 
donnés,  l'on  seroit  en  état  de  juger  de  sa  manière  d'écrire.  En 
parlant  de  son  commentaire  sur  S.  Matthieu,  nous  avons  ob- 
servé que  le  style  en  est  serré,  concis,  nerveux,  et  que  l'Au- 
teur y  a  trouvé  le  secret  d'y  dire  beaucoup  de  choses  en  peu 
de  mots.  Tels  sont,  ou  peu  s'en  faut,  les  caractères  du  style 
qu'il  a  emploie  dans  ses  autres  écrits.  Seulement  il  est  un  peu 
plus  diffus  dans  son  commentaire  sur  les  Pseaumes.  Le  grand 
usage  qu'il  a  fait  d'Origene  pour  composer  cet  ouvrage  en  est 
peut-être  la  cause.  Peut-être  aussi  S.  Hilaire  enaura-t'il  usé  de 
la  sorte  pour  se  rendre  plus  intelligible  à  son  peuple,  devant 
qui  il  y  a  toute  aparence  qu'il  prononça  ces  explications  des 
Pseaumes,  avant  que  de  leur  donner  la  forme  de  commen- 
taire. 

En  général  les  expressions  di;  S.  Hilaire  sont  nobles,  éner- 
giques, convenables  à  son  sujet,  quoiqu'elles  ne  soient  pas 
toujours  bien  latines.  Uy  a  beaucoup  de  justesse  dans  ses  pen- 
sées, de  force  dans  ses  raisonnemens  ;  et  le  tour  ingénieux 
dont  il  les  acompagne,  leur  donne  un  nouveau  prix.  Ses  des- 
criptions sont  vives  et  pathétiques,  ses  instructions  lumineuses 
et  pleines  d'onction,  sa  critique  sévère,  mais  juste  et  bien  sou- 
tenue, ses  figures  fréquentes  et  pour  l'ordinaire  placées  à  pro- 
pos. En  un  mot  son  éloquence  est  telle  qu'elle  frappe,  qu'elle 
étonne,  qu'elle  abbat,  qu'elle  instruit,  qu'elle  presse  ;  et  il  est 
difficile  que  l'esprit  et  le  cœur  ne  se  laissent  entraîner  par  sa 
force  et  sa  rapidité.  'C'est  ce  qui  a  fait  dire  à  S.  Jérôme  que  Hier.  ap.  1.2.  p. 
S.  Hilaire  étoit  non  seulement  très-éloquent,  et  l'homme  le  *\l \\aEkupi.  S'. 
plus  disert  de  son  siècle,  mais  qu'il  étoit  même  un  torrent  de  p-  ^3. 
l'éloquence  latine,  latinœ  eloqiientiœ  Rhodanus,  et  que  par  sa 
rapidité  il  s'étoit  rendu  célèbre  dans  tous  les  pais,  où  le  nom 
Romain  étoit  connu.  '  C'est  pour  cela  encore  qu'il  renvoie  aux  in  is.  pr.  s- p.  sot. 
écrits  de  S.  Hilaire  les  personnes  qui  recherchent  un  fleuve 
d'éloquence,  et  qui  aiment  le  bel  ordre  et  l'arrangement  dans 
le  discours.  A  cette  ocasion  il  ne  fait  pas  difficulté  de  mettre  de 
niveau  les  écrits  de  notre  Saint  avec  ceux  des  plus  célèbres 

Aaij 


188         S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

lY  SIECLE.  Orateurs  du  Paganisme,  et  des  plus  éloquens  Por -s  de  l'E- 
Kuf.i.  i.c.  3i.p.  g'ise.  '  Rufin  n'en  fait  pas  moins  de  cas  pour  la  noblesse  el  les 
**»•  grandes  beautés  du  style. 

8id.  1. 4.  ep.  3.  p.       'Entre  tous  ces  traits  d'éloquence,  S.  Sidoine  découvroit 
une  élévation  merveilleuse,  qu'il  marque  comme  un  caractè- 
re propre  à  l'éloquence  de  S.  Ililaire.  En  effet  l'élévation  de 
style  lui  est  si  naturelle,  que  c'est  ce  qui  peut  contribuer  à  le 
Hier. p. 83.^657 1    rendre  moins  clair.'  Car  bien  que  S.  Jérôme  reconnoisse  qu'il 
*''■*■*'■  a  imité  le  style  de  Quintilien,  il  avoue  néanmoins  ailleurs 

qu'il  est  un  peu  enflé,  et  que  les  longues  périodes  qu'il  y  mê- 
le selon  le  génie  Gaulois  avec  les  beautés  de  la  Grèce,  em- 
barassent  son  discours,  et  le  rendent  moins  intelligible  à  ceux 
«■p. 57.  p. 596.       qui  n'ont  ou'une  érudition  médiocre.'  Cela  n'empêchoit  pas 
au  reste  qu  il  ne  jugeât  ses  écrits  à  la  portée  du  sexe  le  moins 
letré,  à  qui  il  en  conseille  la  lecture, 
la.  in  Pi. 8. n.8.       'S.  Hilaire  paroît  avoir  eu  quelque  légère  teinture  de  la 
Hier.  ep.  crit.  p.  lauguc  hébraïque.  '  Mais  il  étoit  bien  éloigné  de  la  posséder, 
selon  S.  Jérôme.  Il  étudia  la  gréque  avec  plus  de  succès; 
quoic^u'au  jugement  du  même  Père  il  ne  la  sût  pas  à  fonds.  Il 
ne  laissa  pas  d'entreprendre,  comme  on  l'a  vu,  de  traduire 
ep.  33.  p.  «51.       divers  ouvrages  d'Origene  ;  'et  il  le  fit  de  manière  à  s'atirer 
ep.  crii.ibid.         l'aprobatiou  desSavans.  'Il  est  vrai  que  S.  Jérôme  qui  lui  rend 
ce  témoignage,  dit  que  S.  Hilaire  fut  aidé  dans  ce  travail  par 
un  Prêtre  de  ses  amis  nommé  Heliodore.  Quoiqu'il  en  soit, 
en  raprochant  les  endroits  de  S.  Jérôme  les  uns  des  autres, 
on  sera  toujours  en  droit  d'avancer  que  S.  Hilaire  savoit  assez 
bien  le  grec. 
Aug.  d^et.  chr.  1.       '  Pour  la  literature  profane,  S.  Augustin  reconnoît  qu'il  s'en 
étoit  enrichi,  et  qu'il  l'avoit  fait  servir  à  l'édification  de  l'E- 
glise. On  voit  en  efl'et  par  la  lecture  de  ses  écrits,  qu'il  n'a- 
voit  pas  négligé  les  mt;illeurs  Auteurs  profanes.  L'usage  qu'il 
a  fait  des  écrits  d'Origene,  doit  faire  juger  qu'il  avoit  à  cœur 
de  s'instruire  de  ce  que  les  Pères  tant  Grecs  que  Latins,  qui 
l'avoient  précédé,  avoient  laissé  à  la  po.stcrilé  sur  la  doctrine. 
Outre  Origene  il  avoit  au  moins  lu  Tertullien  et  S.  Cypriti. 
Cependant  il  ne  grossit  point  ses  ouvrages  par  les  citations  de 
'  H  :  ceux  qui  avoient  écrit  avant  lui.  Parfaitement  instruit  de  l'E- 

criture et  de  la  tradition,  il  tire  de  ces  deux  sources  tout  ce 
qu'il  avance,  et  renvoie  continuellement  ou  à  l'une  ou  à  l'au- 
tre, et  souvent  à  toutes  les  deux, 
de  Trin.  1. 6.  n.  11.       '  Une  éfudition  de  cette  nature  lui  a  acquis  les  titres  de  Père  de 


DOCTEUR  DI-;  L'EGLTSE  ET  CONFESS.        189 

l'Eglise,  qui  avoit  une  aiUoril*^  particulière,  soil  en  expliquant    iv  sikcle. 
l'Ecriture,  soit  en  élab1iss;uil  les  dogmes  de  la  foi;  'd'honi-  inj,,,  ,  o  „_^ 
me  docte,  qui  avoit  un  lalnil  parlicu'ier  pour  la  dispute;  Me  r^ss.  insi.  ,■.  is. i>. 
Docteur  subtil  et  profond;  d'itit;  r[»reto  sage  et  discret  des  I>  "'"  " 
critures,  qui  en  sonde  avtc  respect  les  divins  abymes ,  qui 
avec  le  secours  de  la  lumière  de  Dieu    dévelope   clairement 
les  paraboles  et  les  énigmes,  '  qui  pénètre  et  aprofondit  les  inPs.pr.  c.  12.  p. 
choses  divines  d'une  manière  toute  lumineuse.  *'  *' 

Si  de  l'éloquence  et  de  l'érudition  de  S.  Hilaire  nous  pas- 
sons à  sa  doctrine,  nous  verrons  qu'elle  est  encore  plus  admi- 
rable. Il  n'est  point  de  dogme  dans  notre  religion  qu'il  n'ait 
ou  établi,  ou  défendu  contre  ceux  qui  les  ataquoient.  Per- 
sonne n'a  expliqué  plus  clairement  que  lui  le  mystère  de  la 
Trinité,  la  distinction  des  Personnes,  la  divinité  du  Fils  et  du 
S.  Esprit.  Personne  non  plus  n'a  parlé  de  Dieu  et  de  ses  divins 
atributs  d'une  manière  plus  sublime,  plus  noble,  en  un  mot 
plus  digne  de  cet  Etre  sUi)rême.  Il  avoit  une  si  haute  idée  de 
sa  grandeur,  '  qu'il  veut  que  nous  reconnoissions  que  non  seu-  Hii.  inPs.  us.  j. 
lement  la  première  lueur  de  notre  sîdut  vient  de  Dieu  ;  mais  ^'  "'  *' 
qu'il  n'y  a  même  en  nous  aucun  bien  qui  n'émane  de  cette 
source  comme  de  son  principe.  '  Qu'il  y  a  autant  de  folie  que  in.  Pi.si.  n.  m. 
d'impiété  à  ne  pas  reconnoître  que  nous  ne  vivons  que  dépen- 
damment  de  Dieu  et  sous  son  souverain  domaine,  et  à  aimer 
mieux  nous  confier  en  nos  propres  forces,  qu'en  cet  Etre  tout 
puissant  de  qui  nous  vient  tout  ce  que  nous  avons.  '  Que  puis-  in  Ps.  123.  n.2. 
que  toutes  choses  nous  viennent  de  lui,  et  qu'en  toutes  cho- 
ses nous  avons  besoin  de  sa  miséricorde,  nous  n'avons  par  con- 
séquent aucun  sujet  de  nous  glorifier  en  nous-mêmes. 

On  sait  que  S.  Hilaire  est  le  premier  entre  les  Latins  qui  a 
pris  la  défense  de  la  consubstantialité  du  Verbe,  et  que  ce 
fut  pour  cela  qu'il  écrivit  ses  douze  livres  de  la  Trinité.  Il  a 
encore  établi  le  mystère  de  l'Incarnation  dans  toutes  ses  par- 
ties, la  Conception  de  J.-C.  la  réalité  de  sa  chair  prise  dans  le 
sein  d'une  Vierge,  la  vérité  de  ses  souffrances  et  de  sa  mort, 
sa  présence  réelle  dans  l'Eucharistie,  la  distinction  des  deux 
natures  et  leur  union  hypostatique.  Il  soutient  l'immortalité  de 
l'ame,  sa  nature  spirituelle  et  différente  de  celle  du  corps  ;  la 
chute  d'Adam,  le  péché  originel  et  ses  suites;  la  nécessite  d'un 
Médiateur,  le  dogme  du  libre  arbitre  et  le  mérite  des  bonnes 
œuvres,  la  nécessité  de  la  grâce  non  seulement  pour  éclairer 
l'entendement  et  avoir  l'intelligence  de  la  loi,  mais  aussi  pour 


190         S.  HILAIRE,  EVEQUE  DE  POITIERS, 

IV  SIECLE,  faire  agir  la  volont,',  pour  acomplir  les  préceptes,  pour  re- 
pousser  les  tentations,  en  un  mot  pour  acquérir  la  vie  éternelle. 
On  a  déjà  vu  qu'il  reconnoit  que  les  justes  et  les  réprouvés 
aussi-tôt  après  leur  mort  sont  heureux  ou  malheureux  :  ainsi  i  I 
n'a  point  donné  dans  les  erreurs  des  Millénaires.  Il  fait  con- 
sister la  béatitude  dans  la  vûë  de  Dieu.  Il  parle  admirable- 
ment en  plus  d'un  endroit  du  ministère  des  Ang(  s  ;  et  ce  qu'il 
en  dit,  inspire  beaucoup  de  respect  pour  ces  bienheureux  Es- 
prits et  une  grande  confiance  en  leur  protection.  H  loue  l'in- 
vocation des  Saints  et  la  vénération  de  leurs  reliques.  Il  re- 
commande la  pénitence,  le  jeûne,  la  mortification  des  sens, 
et  élevé  le  célibat  au-dessus  du  mariage. 

Sa  morale  est  aussi  exacte  que  sa  théologie,  et  la  discipline 
au'il  enseigne,  aussi  sainte  que  sa  morale  est  exacte.  Il  con- 
damne, et  déclame  souvent  contre  le  luxe,  la  mollesse,  l'a- 
varice, l'insensibilité  pour  les  besoins  des  pauvres,  l'usure,  la 
simonie,  etc. 
Aug.  in  Joi.  I.  2.  '  C'est  pour  sa  doctrine  en  particulier,  que  dès  le  siècle  qui 
nnin.26.  g^jj  immédiatement  sa  mort,  il  mérita  les   glorieux   titres 

d'homme  de  Dieu  et  d'illustre  Docteur  de  l'Eglise,  que  lui 
Hier.  ep.  57.  p.  donuc  S.  Augustin.  '  S.  Jérôme  rend  un  insigne  témoignage  à 
■''^"  la  doctrine  de  S.  Ililairc,  lorsqu'écrivant  à  Lœta  et  lui  conseil- 

lant à  elle  et  aux  autres  personnes  de  son  sexe  la  lecture  des 
écrits  de  ce  Père,  il  lui  dit  qu'elle  les  peut  lire  avec  la  même 
sûreté  que  ceux  de  S.  Athonase,  sans  craindre  d'y  rien  trou- 
ver qui  puisse  blesser  ou  affoiblir  sa  foi  :  Athanasii  epistolas,  et 
Conc. t.  4. p. IÏ62.  HUarii  Uhros moffcruo dectivrat pede.  'Le  Concile  de  Rome 
tenu  en  494  sous  le  Pape  S.  Gclase,  et  composé  de  70  Evo- 
ques, n'en  avoit  pas  une  idée  moins  avantageuse.  En  eflet  cet- 
te assemblée  faisant  le  dénombrement  des  écrits  que  reçoit 
l'Eglise  pour  règle  de  sa  foi,  marque  ceux  de  S.  Hilaireavec 
ceux  de  S.  Cyprien,  de  S.  Athanase  et  des  autres  anciens  Pè- 
res de  l'Eglise. 

Malgré  des  aprobations  aussi  respectables  en  faveur  de  la 
doctrine  de  S.  Ililairc,  on  n'a  pas  laissé  de  voir  s'élever  cer- 
tains Censeurs,  qui  l'ont  jugé  répréhensible  en  divers  points. 
Hii.  dd  Trin.i.  1.  Dc  sortc  qu'oubliant  les  règles  '  qu'il  donne  lui-même  pour  li- 
"■  "■  re  les  écrits  des  autres,  et  dont  la  première  est  de  bien  pren- 

dre le  sens  de  l'Auteur  au  lieu  de  lui  prêter  le  sien,  ils  se  sont 
imaginé  de  voir  dans  ses  ouvrages  des  endroits  qui  leur  ont  pa- 
ru s'éloigner  de  la  saine  doctrine,  mais  qui  ne  leur  auroient 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.         191 

pas  paru  tels,  s'ils  se  fussent  donné  la  peine  de  les  bien  en-    iv  siècle. 
tendre. 

'  On  lui  reproche,  1°.  d'avoir  cru  que  J.-G.  n'avoit  point  re-  hu.  pr.  n.  4i. 
çu  de  la  Sainte  Vierge  la  matière  dont  son'  corps  étoit  formé. 
2".  '  D'avoir  dit  que  les  Fidèles  éloient  une  même  chose  avec  num.  76. 
le  Père  et  le  Fils  par  nature,  et  non  point  par  adoption,  ou 
par  conformité  de  sentiment  et  de  volonté.  3°.  '  D'avoir  nié  num.  98. 
que  J.-C.  ait  été  sujet  à  la  faim,  à  la  soif,  à  la  crainte,  à  la  dou- 
leur, etc.  4°.  '  D'avoir  avancé  qu'avant  que  J.-C.  eût  expiré  num.  leo. 
sur  la  croix,  le  Verbe  s'étoit  séparé  du  corps  auquel  il  s'étoit 
uni.  5".  '  Que  dans  J.-C.  ressuscité  et  glorieux  il  ne  restoit  plus  num.  iss. 
rien  de  l'homme,  parce  que  la  nature  humaine  dans  cet  état 
de  gloire  avoit  été  entièrement  changée  et  transformée  en  la 
nature  divine.  6°.  '  Qu'à  la  fin  des  siècles  les  Fidèles  ne  su-  num.  220. 
biroient  point  le  Jugement,  parce  que  leur  foi  n'étoit  pas  dou- 
teuse, et  que  les  Infidèles  n'y  seroient  point  admis*  parce 
qu'ils  étoient  déjà  jugés,  et  que  leur  infidélité  étoit  constatée. 
■7".  '  De  n'avoir  reconnu  pour  livres  canoniques  de  l'ancien  inPj.pr.n.15. 
Testament  que  les  vingt-deux  que  recevoient  les  Juifs,  et  d'a- 
voir rejeté  ceux  que  l'on  nomme  deuterocanoniques. 

Voilà  les  principales  erreurs  que  quelques  Ecrivains  ont 
imputées  à  S.  Hilaire.  Mais  Dom  Piere  Coûtant  dernier  Edi- 
teur des  œuvres  de  ce  Père ,  montre  clairement  que  ces  im- 
putations ne  viennent  que  faute  d'avoir  bien  pris  sa  pensée 
et  bien  entendu  ses  termes.  C'est  ce  qu'il  fait  voir  et  dans  la 
belle  préface  qu'il  a  mise  à  la  tête  de  son  édition,  et  dans  les 
savantes  notes  dont  il  a  orné  le  corps  de  l'ouvrage.  Il  y  justi- 
fie S.  Hilaire  sur  tous  ces  points  d'une  manière  si  solide  et  par 
des  passages  si  précis,  qu'il  ne  paroît  plus  aucun  doute  sur  la 
foi  et  la  doctrine  de  ce  grand  Evêque.  Après  tout  s'il  y  en 
avoit  encore ,  '  il  seroit  dissipé ,  dit  excellemment  un  ancien  et  ci.  m.  de  an.  1.2. 
célèbre  Auteur,  par  la  gloire  de  ses  soufi'rances;  et  tout  ce  «^^  9- p- <o»- *• 

3ue  l'on  pourroit  reprendre  en  lui ,  ne  diminueroit  jamais  rien 
e  son  mérite. 

S-  VL 
ÉDITIONS  DE  SES  ŒUVRES. 

LA  première  édition  des  ouvrages  de  S.  Hilaire  fut  faite  hïi.  pr.  n.  5. 
par  les  soins  de  George  Cribellus;  mais  on  ne  marque 
point  en  quelle  année,  ni  en  quel  volume  elle  parut.  Elle  com- 
prenoit  seulement  les  livres  de  la  Trinité  et  aes  Synodes ,  les 


192         S.  HILAIRE,  EVEQUE  IJE  POITIERS, 

IV  siK CLE.  opuscules  adressés  à  Conslaiico  avec  ceux  qui;  S.  llilairc  com- 
posa  contre  cet  Empereur  et  contre  Auxcnce  de  Milan.  Jean 
Solidus  de  Cracovie  donna  ensuite  le  commentaire  sur  les 
Pseaumes. 
iwa  I  Bibi.cass.  '  En  1510  '  avant  Pâques  Josse  Bade  publia  une  autre  édi- 
tion de  S.  Hilaire  en  un  volume  in-folio ,  qui  outre  ces  pre- 
miers ouvrages  là  comprcnoit  encore  la  letre  à  Abra  et  les 
commentaires  sur  S,  Matthieu,  gue  Guillaume  le  Petit  con- 
fesseur du  Roy  avoit  tiré  de  la  bibliothèque  de  S.  Bénigne  de 
Dijon.  Ce  fut  Robert  Fortunat  de  S.  Malo  qui  travailla  à  cet- 
te édition. 
Cave.  p.  135.  '  Six  aus  après  en  1516  Erasme  en  publia  une  autre  en  mê- 

me volume ,  mais  peu  exacte.  Elle  fut  faite  à  Basle  chez  Fro- 
Hii.  ibid.  p.  c|   ben,  'où  elle  parut  de  nouveau  en  1523.  Erasme  y  fit  quel- 
Bit,  cat.  Bail.       qygg  corrections  sur  les  livres  de  la  Trinité  ;  mais  il  ne  toucha 
presque  point  aux  autres  ouvrages.  Il  mit  à  la  tête  de  celte 
édition  une  préface  dans  laquelle  il  maltraite  étrangement  S. 
Hilaire ,  et  lui  atribue  plusieurs  erreurs  pour  avoir  sujet  d'ex- 
cuser les  adversaires  du  S.  Evêque.  Aussi  cette  préface  si  in- 
jurieuse à  la  mémoire  de  ce  S.  Docteur  a-t-elle  été  censurée  et 
par  l'Inquisition  de  Rome,  et  par  la  Faculté  de  Théologie  de 
Fris.  bibi.  ph.  p.  Paris.  'Cela  n'empêcha  pas  que  Henri  Pétri  Imprimeur  au 
**■  *■  même  endroit  ne  donnât  de  nouveau  cette  même  édition  au 

Hu.  ibid  I  Bib.  ca-  public  cu  1526.  '  C'cst  cc  que  Froben  fit  encore  en  1535, 
**"■  en  y  joignant  un  petit  traité  faussement  atribué  à  S.  Hilaire 

sous  ce  titre,  de  l'unité  du  Père  et  du  Fils. 

Hii.ibid.n.8|Bib.       'En  1550  ccttc  même  édition  parut  tout  de  nouveau  au 

s.  vin.  cen.         même  endroit  chez  le  même  Imprimeur.  Elle  fut  revûë  par 

Martin  Lypsius,  qui  y  corrigea  quelques  fautes  d'impression, 

mais  qui  se  mit  peu  en  peine  de  la  revoir  sur  les  manuscrits, 

ni  même  sur  celle  de  Pans  dont  nous  allons  parler  : 

Hii.ibid.p.7|Bib.      Celle-ci  fut  dirigée  par  Louis  le  Mire,  et  publiée  à  Paris 

ffr."tad  cenl.""*"  chcz  la  veuvc  Charlotte  Guillar  en  un  volume  in-folio  dès  l'an 

1544.  Elle  est  beaucoup  plus  exacte  et  plus  correcte  que  cellç 

d'Erasme.  Elle  est  aussi  devenue  fort  rare.  On  l'a  cnerchée 

inutilement  dans  la  plupart  des  Bibliothèques  de  Paris.  Elle 

se  trouve  dans  èelle  du  grand  Couvent  des  Carmes.  Il  s'en 

trouve  aussi  deux  exemplaires  dans  le  Maine,  l'un  à  l'Abbaïe 

deN.  D.  d'Evron,  l'autre  chez  les  Dominicains  du  Mans.  Le 

Dupio,   bibl.  t.  S.       1  H.  Dopin,  qui  fait  quelques  autres  fautes  en  parlant  des  éditions  de  S.    Hilairs, 
p.  'SU.  S85.  met  celle  de  Josse  Bade  en  ISOO. 

Mire 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     193 

Mire  y  ajouta  le  traité  de  l'essence  du  Père  et  du  Fils  ;  le  Poë-     iv  siècle. 

me  sur  la  Genèse;  et  les  deux  letres  à  S.  Augustin  :  ouvrages  

suposés,  que  nous  avons  observé  n'être  pas  de  S.  Hilaire. 

'  Cette  édition  de  le  Mire  parut  derechef  à  Basle  chez  Eu-  hh.  ib.  n.  9. 
sebe  Episcopus  l'an  1570  en  un  volume  in-folio.  L'on  mit  à 
la  tête  une  vie  de  S.  Hilaire  composée  par  Jean  Jaques  de  Gri- 
gny,  ce  que  personne  n'avoit  encore  fait.  Mais  cette  vie  est 
pleine  de  fautes.  Une  des  plus  grossières  est  que  de  Grigny 
atribue  à  S.  Hilaire  Evêque  de  Poitiers  ce  que  S.  Jérôme  dit 
contre  le  Diacre  Hilaire  qui  rejetoit  le  baptême  des  héréti- 
ques, et  que  ce  Père  nomme  par  ironie  le  Deucalion  de  l'u- 
nivers. 

'  En  1572  Jean  Gillot  fit  remetre  sous  la  presse  les  œuvres  ^ù/cen^'*''  *''' 
de  S.  Hilaire  à  Paris  chez  Nivelle  et  Michel  Sonnius  en  un 
volume  in-folio.  Il  réfuta  à  la  vérité  ce  qu'Erasme  dans  sa 
préface  et  de  Grigny  dans  la  vie  de  S.  Hilaire  avoient  avancé 
contre  ce  grand  Evêque  ;  mais  il  ne  corrigea  rien  dans  le  texte 
original  de  ce  père.  Les  Imprimeurs  ont  même  par  leur  né- 
gligence laissé  glisser  plusieurs  fautes  dans  cette  édition,  qui 
d'ailleurs  est  fort  bien  conditionnée  pour  le  papier  et  les  ca- 
ractères. 

'Les  Libraires  de  Paris  en  1 605  donnèrent  une  nouvelle  n/ii.is. 
édition  de  S.  Hilaire ,  dans  laquelle  on  insera  les  fragmens 
publiés  dès  1598.  '  Elle  fut  renouvellée  à  Cologne  l'an  1617  Bib.  s.  Aib.  And. 
ches  Antoine  Hierat  en  un  volume  in-folio,  où  il  est  marqué 
qu'elle  est  faite  sur  celle  de  Gillot.  '  Elle  parut  tout  de  nou-  Hii.  id.  1  Bib.  s. 
veau  à  Paris  les  années  1631  et  1652  en  même  volume.  Quoi-  ^^'  ^^' 
que  les  Imprimeurs  qui  la  donnèrent  au  public,  fissent  retou- 
cher le  texte  sur  les  manuscrits,  néanmoins  elle  est  fort  défec- 
tueuse ,    et  moins  exacte  que  celles  qui   ont  été  faites  à 
Basle. 

'  Enfin  la  dernière  édition  des  ouvrages  de  S.  Hilaire ,  est  B'b  s.  vin.  cen, 
celle  que  publia  Dom  Pierre  Coûtant  Religieux  de  notre 
Congrégation  l'an  1693  en  un  gros  volume  in-folio ^  chez 
François  Muguet  Imprimeur  à  Paris.  C'est  sans  contredit  la 
plus  belle,  la  plus  exacte,  la  plus  parfaite  de  toutes  celles  qui 
ont  paru  jusqu'à  présent;  et  elle  a  mérité  à  juste  titre  l'estime 
et  l'aprobation  de  tous  les  Savans  de  l'Europe. 

L'Editeur  a  eu  soin  de  revoir  ou  par  lui-même  ou  par  ses 
amis  le  texte  original  tant  sur  les  imprimés  que  sur  les  meil- 
leurs manuscrits  de  France  et  d'Italie ,  et  de  marquer  au  bas 

Tome  I.  Sec.  Part.  B  b 


194  HELIODORE, 

IV  SIECLE,  des  pages  les  différentes  leçons  qui  en  valent  la  peine.  Il  a 
même  augmenté  son  édition  de  quelques  opuscules  de  S.  Hi- 
laire  qui  n'avoient  pas  encore  vu  le  jour,  comme  des  traités 
sur  quelques  Pseaumes  et  la  petite  apologie  pour  le  livre  des 
Synodes.  A  la  tête  de  l'édition  se  voit  une  belle  et  savante 
préface  de  plus  de  80  pages,  dans  laquelle  Dom  Coûtant 
traite  à  fona  tout  ce  qui  regarde  et  les  écrits  et  la  doctrine  de 
son  Auteur.  Cette  préface  est  suivie  d'une  nouvelle  vie  de  S. 
Hilaire  tirée  de  ses  propres  ouvrages  et  des  Auteurs  les  plus  di- 
gnes de  foi.  Après  quoi  l'on  trouve  la  vie  qu'en  a  écrite  For- 
tunat  au  VI  siècle.  Hors  le  commentaire  sur  les  Pseaumes 
qu'il  a  placé  le  premier,  afin  de  faire  précéder  ce  qui  regarde 
1  Ecriture  Sainte ,  dans  le  reste  des  ouvrages  il  a  presque  sui- 
vi l'ordre  chronologique.  Outre  ce  qu'il  en  dit  dans  sa  pré- 
face générale,  il  a  encore  poussé  son  travail  et  son  atention, 
jusqu'à  mettre  à  la  tête  de  chaque  écrit  en  particulier  un  aver- 
tissement ou  petite  préface,  qui  y  répand  une  nouvelle  lu- 
mière. La  même  érudition  qui  se  fait  admirer  dans  la  grande 
•  préface  et  les  autres  plus  courtes ,  brille  encore  dans  les  sa- 
vantes notes  dont  il  a  orné  le  bas  des  pages  aux  endroits  qui 
demandent  quelque  éclaircissement.  Enfin  pour  rendre  son 
travail  plus  parfait  et  abréger  celui  de  ses  lecteurs ,  il  s'est  don- 
né la  peine  de  dresser  une  table  très-ample  et  très-exacte  de 
toutes  les  matières,  qu'il  a  mise  à  la  fin  ,  et  qui  peut  passer 
pour  une  espèce  de  concordance  de  l'ouvrage.  (VIII.) 


HELIODORE, 

Prêtre  a  Poitiers. 

Hier.  ep. erit.  p.  '  f\^  "6  connoît  la  personuc  de  cet    Ecrivain    que  par 
'•'•  \J  la  dignité  du  Sacerdoce  dont  il  étoit  revêtu ,  et  par  ses 

liaisons  avec  S.  Hilaire  de  Poitiers.  C'est  déjà  un  grand  pré- 
jugé en  faveur  de  son  mérite ,  que  son  union  avec  un  aussi 
Saint  et  savant  Evêque.  S.  Hilaire  pendant  son  exil  en  Phry- 
gie  aïant  pris  un  goût  particulier  pour  les  ouvrages  d'Orige- 
ne ,  forma  le  dessein  d  en  traduire  quelques-uns,  et  l'exécuta 
après  son  retour  à  Poitiers.  Il  en  fît  même  passer  plusieurs  en- 
droits dans  ses  propres  écrits.  Pour  y  réussir  il  falloit  qu'il  pos- 
sédât la  langue  gréque.  Il  en  avoit  sans  doute  une  connoissan- 


PRETRE  A  POITIERS.  195 

ce  plus  que  médiocre  avant  son  e.vil.  Nous  avons  montré  ail-  iv  siècle. 
leurs  quon  l'enseignoit  publiquement  dans  nos  principales 
villes,  et  qu'elle  étoit  même  aussi  commune  que  la  latine  en 
divers  endroits  des  Gaules.  Ce  qu'il  en  savôit  déjà,  il  eut  oca- 
sion  de  le  perfectionner  par  le  fréquent  commerce  qu'il  eut  pen- 
dant son  exil  avec  les  Orientaux ,  qui  ne  parloient  presque 
point  d'autre  langue.  Mais  ne  la  possédant  pas  encore  à  fond, 
il  choisit  le  Prêtre  Heliodore,  comme  y  étant  plus  habile,  et 
se  l'associa  dans  son  genre  d'étude.  Ce  fut  avec  son  secours 
qu'il  composa  ses  commentaires  sur  Job,  sur  les  Pseaumes,  et 
peut-être  aussi  sur  le  Cantiques  des  Cantiques,  en  y  faisant 
entrer  beaucoup  de  choses  û'Origene,  comme  nous  avons  dit 
en  son  lieu. 

'  S.  Jérôme  qui  ne  s'exprime  pas  toujours  de  la  même  ma-  Hier.  um. 
niere  en  parlant  des  mêmes  faits,   reprend  en   un  endroit 
quelques  fautes  dans  le  Commentaire  sur  les  Pseaumes,  et  les 
rejeté  sur  Heliodore.  '  Mais  à  s'en  tenir  à  ce  qu'il  dit  ailleurs  op.  33. 41.  p.  251. 
et  de  cet  ouvrage  et  des  autres  pour  lesquels  S.  Hilaire  s'é-  '** 
toit  servi  d'Origene,  on  voit  qu'il  n'en  parle  que  très-avanta- 
geusement; et  cet  éloge  retombe  sur  Heliodore,  comme  y 
aiant  eu  beaucoup  de  part. 

'  Quelques  savans  modernes  suposent  qu'Heliodore  étoit  tïii.  h.  e.  c  i.  p. 
associé  avec  S.  Hilaire  pour  ses  études  dès  avant  son  exil,  et  '**' 
qu'il  suivit  ce  Saint  Evêque  relégué  en  Phrygie.  Ce  seroit  un 
nouveau  sujet  d'éloge  pour  lui.  Néanmoins,  comme  les  Ira-  '' ' 

ductions  de  grec  en  latin  que  S.  Hilaire  fut  obligé  de  faire  des 
formules  de  foi,  insérées  dans  son  traité  des  Synodes  qu'il 
composa  alors,  sont  d'un  style  embarassé  et  peu  naturel ,  il  est 
à  croire  que  cela  ne  seroit  pas  arrivé,  si  dès  lors  Heliodore 
avoit  été  associé  avec  lui,  et  qu'il  l'eût  suivi  dans  son  exil. 

D'autres  ont  cru  que  cet  Heliodore  est  le  même  que  celui     ■*^- 
qui  fut  depuis  Evêque  d'Altino.  Mais  cette  opinion  est  insou- 
tenable. Ce  dernier  n'étoit  pas  même  encore   clerc   en  373, 
plusieurs  années  après  la  mort  de  S.  Hilaire,  du  vivant  duquel 
l'autre  étoit  déjà  Prêtre. 

Gennade  nous  aprend  qu'un  Prêtre    nommé  Heliodore  Ceu.  vir.  ni.  c.  6. 
avoit  composé  un  livre  intitulé,  De  naturis  rerum  exordia-  ^ 

Hum,  Des  principes.  C'est  ce  que  Gennade  raporte  dès  le  sixième 
chapitre  de  son  traité  des  hommes  illustres.  C'est  par  consé- 
quent une  preuve  que  cet  Ecrivain  fleurissoit  assez  long-tems 
avant  la  fin  du  IV  siècle.  On  en  a  vu  la  raison  à  l'article  de 
Paul  Evêque  de  Poitiers.  B  b  ij 


196 


SALUSTE, 


IV  SIECLE. 


Gcnn.vir.  ill.c.29. 


Nous  ne  connoissons  point  d'Heliodore  à  qui  ces  traits  con- 
viennent mieux  gu'au  compagnon  d'étude  de  S.  Hilaire.  11  y 
en  avoit  à  la  vérité  deux  autres,  qui  vivoient  dans  le  même 
siècle.  Mais  l'un  avoit  un  titre  plus  relevé  que  celui  de  Frêtre, 
puisqu'il  étoit  Evêque  d'Allino  ;  '  l'autre  étoit  un  Prêlre  d'An- 
tioche,  (jue  Gennade  a  eu  soin  de  distinguer  '  lui-même  de 
Apo.  d««  pp.  21.  celui  qui  fait  le  sujet  de  cet  article.  '  On  pourroit  apuier  ces 
,  raisons  de  la  remarque  que  nous  avons  faite  ailleurs  après  l'Au- 
teur de  l'apologie  des  Pères.  C'est  que  les  Ecrivains,  dont 
Gennade  a  composé  son  traité  des  hommes  illustres,  sont  pres- 
que tous  Gaulois. 

'  Heliodore  dans  son  ouvrage  montroit  qu'il  n'y  a  qu'un  seul 
principe.  Qu'il  ne  peut  y  avoir  rien  qui  soit  coëternel  avec 
Dieu.  Qu'il  est  tellement  le  Créateur  de  tous  les  biens,  qu'il  a 
aussi  créé  la  matière,  c'est-à-dire  l'homme,  qui  s'est  porté  au 
mal,  après  que  la  malice  s'est  introduite  dans  le  monde  ;  mais 
qui  n'est  point  pour  cela  auteur  du  mal.  Qu'il  n'est  rien  de  ma- 
tériel qui  ne  soit  redevable  de  sa  création  à  Dieu,  et  qu'il  n'y 
a  point  d'autre  Créateur  des  choses  que  lui-même.  Que  Dieu 
sachant  par  sa  science  éternelle  que  l'homme  tomberoit  dans 
la  mort,  l'avoit  averti  par  avance  de  ce  châtiment.  On  voit  par- 
là  que  cet  écrit  étoit  pour  réfuter  quelques  restes  des  erreurs  de 
Cerdon,  deMarcion,  d'Hermogene. 


G«nn.  c.  6. 


Genn.  ib.  e.  6.  29. 


532. 


Mor.    H.    p, 

Corrigé'daos  l'édit 
de  1732.) 


<  '  Gennade  distingae  bien  expressé'- 
ment  ces  deux  Heliodores  ;  puisqu'il  leur 
assigne  à  chacun  son  chapitre  particulier  : 
le  sixième  au  Prêtre  Uehodore  Auteur  du 
livre  des  principes,  et  le  vingt-neuviémp 
à  Heliodore  Prêlre  d'Anlioche.  Celui-ci 
avoit  laissé  de  sa  façon  un  excellent  traité 
de  la  Virginité.  Une  distinction  si  bien  éta- 
blie n'a  pas  empêché   '  que   les  derniers 


Editeurs  de  Moreri  n'aient  confondu  ces 
deux  Prêtres.  Nous  ne  nous  arrêtons  pas 
ici  à  raporter  ce  que  l'on  trouve  d'un  He- 
liodore  Prêlre,  dans  le  catalogue  des  dou- 
ze Docteurs  faussement  atribué  &  S.  Jerd- 
me  et  au  vénérable  Vede,  parce  que  tout 
ce  que  débite  cet  Auteur,  ne  mérite  aucu- 
ne créance. 


SALUSTE, 

Préfet  des  Gaules. 


)nl. 
252. 
ad  Ath.  not.  p. 


or.  8.  p.  247. 


98. 


Thdft.  L.  3.  e.  H. 
p  133. 


'  n  ALusTE,  l'un  des  plus  intègres  Officiers  des  règnes  de  Con- 
Î5  stance  et  de  Julien  l'Apostat,  étoit  Gaulois  de  nation.  Con- 
stance le  donna  à  Julien,  lorsque  celui-ci  vint  gouverner  les 
Gaules  en  qualité  de  César  à  la  fin  de  l'an  355,  et  le  chargea 
de  l'administration  de  la  justice.  'C'est-à-dire,  comme  l'ateste 


PREFET  DES  GAULES.  197 

Theodoret,  que  Saluste  fut  fait  Préfet  du  Prétoire.  Quoi  qu'é-     iv  siècle. 

levé  à  cette  première  charge  de  magistrature,  dont  l'exercice 

demandoit  son  homme  tout  entier,  '  il  ne  laissa  pas  de  trouver  Jui.  or.  a.  p.  2*7. 

du  tems  de  reste  pour  le  donner  aux  mêmes  études  qui  fai-  ***" 

soient  la  principale  ocupation  de  Julien.  Il  joignit  ainsi  à  la 

science  des  loix  celle  de  la  philosophie,  '  et  les  autres  connois-  or.  4.  p.  «t. 

sauces  encore  plus  vaines,  qui  amusoient  criminellement  ce 

Prince.  Saluste  y  prit  lui-même  tant  de  goût,  que  Julien  lui 

dédia  deux  de  ses  ouvrages  en  ce  genre  de  literature  :  l'un  sur 

les  Saturnales,  qui  est  perdu,  '  l'autre  sur  le  Soleil,  que  nous  p.  130. 

avons  encore. 

'  Le  premier  dessein  de  Constance  sur  Saluste  en  le  donnant  ad.  Ath.  p.  i^^. 
à  Julien,  étoit  qu'il  l'observeroit,  comme  l'on  observe  un  en- 
nemi, et  qu'il  veilleroit  à  ce  qu'il  ne  se  portât  à  quelque  fâ- 
cheuse entreprise.  'Mais  Saluste  se  rencontrant  dans  les  mêmes  or.  ».  p.  2«.  24a. 
sentimens  et  les   mêmes  inclinations  que  Julien,  ce  Prince 
'  en  sut  si  bien  profiter,  que  de  son  espion,  il  en  fit  son  meilleur  p.  24*.  24». 
ami  et  son  confident  le  plus  intime.  C'est  tout  dire  ;  il  se  forma 
entre  l'un  et  l'autre  la  même  amitié  et  la  même  union,  qu'au- 
trefois entre  Scipion  l'Africain  et  le  célèbre  Laelius.  '  Julien  p.  2<i.s48. 
en  tira  de  grands  secours  dans  la  conduite  des  affaires,  et  ne 
faisoit  rien  sans  consulter  Saluste,  à  qui  il  s'ouvroit  avec  une 
confiance  parfaite. 

De-là  il  est  aisé  de  juger  que  Saluste  n'avoit  point  d'autre 
religion  que  celle  de  Julien,  et  qu'ils  étoient  Païens  l'un  et 
l'autre.  '  Theodoret  le  dit  expressément.  Néanmoins  malgré  le  xiiin.  ib. 
Paganisme  qu'il  professoit,  n  ne  laissoit  pas  d'avoir  de  la  clé- 
mence et  de  grands  égards  pour  les  Chrétiens.  L'on  remarque 
même  qu'il  travailla  à  faire  cesser  la  persécution 'contre  eux. 
'  C'est  pourquoi  S.  Hilaire  lui  adressa  un  écrit  pour  se  plaindre  Hii.  pr.  n.  19. 
des  violences  du  Médecin  Dioscore  contre  les  Catholiques 
déjà  vexés  par  les  Ariens. 

A  la  clémence  et  la  douceur  Saluste  joignoit  une  grande  jui.  ib.  p.  243. 
prudence  et  beaucoup  de  franchise.  Non  seulement  il  don- 
noit  de  bons  conseils  à  Julien ,  mais  il  le  reprenoit  aussi  avec 
une  entière  liberté,  qu'il  savoit  assaisonner  d'amitié  et  de  ten- 
dresse, et  où  il  ne  paroissoit  jamais  ni  fierté  ni  aigreur.  De- 
sorte  que  l'on  atribuoit  à  ses  avis  tout  ce  que  ce  Prince  faisoit 
de  bon,  '  et  que  Julien  le  regardoit  comme  son  maître  et  son  p.  245. 246. 
précepteur ,  ou  comme  un  autre  Pericle ,  un  autre  Anaxa- 
goras.  .  i- 

1  « 


198  CLAUDK    MAMERTIN. 

V  SIECLE.         •  Une  union  si  étroite  excita  la  jalousie  des  autres  Officiers, 
iTâiâ  "  *I"^  rendirent  Saluste  suspect  à  Constance.  ^  Cet  Empereur  se 

b  2*3.  247  251  p.  laissaut  aller  à  ces  sinistres  impressions,  retira  Saluste  d'auprès 
de  Julien  sur  la  fin  de  357  pour  l'emploïer  quelque  tems  ou 
ad  Aih.  p.  282.      en  Thracc  ou  en  Illyrie,  '  et  lui  donna  Lucien  pour  successeur, 
or.  8  p.  240-252.     '  Julien  sentit  vivement  cette  séparation,  et  composa  à  ce  su- 
jet un  discours  que  l'on  nous  a  conservé.  En  y  disant  adieu  à 
son  ami,  il  en  fait  un  éloge  magnifique,  et  lui  donne  les  plus 
grandes  marques  de  sa  tendresse  et  de  son  atachement. 
Amm.  I.  21.  p.       '  Quel^ues  aunécs  après  Saluste  revint  dans  les  Gaules,  où  il 
353'i'T?ii'''Km*'  ^^  trouvoit  dès  l'an  361.  Julien  y  aïant  été  déclaré  Auguste 
14.  p.  526.  l'année  précédente,  y  laissa  Saluste  en  qualité  de  Préfet.  En  363 

cet  Empereur  le  prit  pour  Collègue  dans  le  Consulat  ;  et  il  pa- 
rut nouveau  qu'un  Prince  fût  Consul  avec  un  particulier.  En 
effet  cela  ne  s'étoit  point  vu  depuis  les  Consulats  de  Diocle- 
tien  et  d'Aristobule  en  285 ,  de  Maximien  et  de  Janvier  en 
288.  Saluste,  soit  qu'il  eût  quelque  pressentiment  de  la  défaite 
de  Julien,  soit  qu  il  crût  que  les  aîîaires  de  l'Etat  ne  deman- 
doient  pas  une  si  grande  précipitation,  écrivit  à  cet  Empe- 
reur à  Cereuse  en  Mésopotamie,  pour  l'engager  à  différer  son 
expédition  de  Perse.  Ce  fut  inutilement.  Julien  couroit  à  sa 
Amm.  1. 2."..  p.  perte  ;  et  il  fut  tué  la  même  année  dans  cette  guerre.  '  Après  sa 
429. 4;io.  j^Qj.j  '  Neyitg^  Dagalaïphe  et  les  plus   distingués  d'entre   les 

Gaulois,  s'acorderent  à  élire  Saluste  pour  Empereur.  Mais  il 
s'en  excusa  sur  ses  maladies  et  sur  sa  vieillesse.  On  ne  trouve 
point  ce  qu'il  devint  dans  la  suite.  Au  reste  il  ne  le  faut  pas  con- 
fondre avec  Salustius  Secundus  Préfet  du  Prétoire  d'Orient. 


CLAUDE  MAMERTIN, 

Orateur. 

DÉS  289  on  a  vu  paroître  sur  le  théâtre  des  Savans,  un  autre 
Orateur  de  même  nom  que  celui  qui  se  montre  ici.  '  Cet- 
te identité  de  nom  et  de  profession  a  fait  douter  à  quelques  mo- 
dernes si  ce  ne  seroit  pas  une  même  et  seule  personne.  Mais  il 
n'y  a  nulle  aparence  à  le  croire,  si  l'on  a  égara  au  long  espace 
de  tems  qui  s'est  passé  depuis  289,  que  l'un  commença  à  se 
faire  connoître,  jusqu'en  361 ,  que  l'autre  commença  à  figu- 
rer dans  le  monde.  Plus  de  70  ans  qui  se  trouvent  d'une  épo- 


ORATEUR.  199 

aue  à  l'autre,  suffisent  assurément  de  reste  pour  distinguer  ces    i  v  s i e c  l  e. 
eux  Orateurs. 


'  On  ne  trouve  nulle  part  en  quel  païs  avoit  pris  naissance  ce-  pa».  b.  p.  ssa.  i. 
lui  qui  fait  le  sujet  de  cet  éloge.  Le  P.  de  la  Baune  a  penché 

fiour  le  faire  de  Messine.  Sa  conjecture  paroît  sans  fondement. 
1  y  en  a  davantage  à  le  croife  fils  de  l'autre  Orateur  de  même 
nom,  et  par  conséquent  Gaulois  de  nation  comme  lui.  Il  est 
certain  qu'en  ces  premiers  tems  les  noms  de  Mamert  et  Ma- 
mertin  ont  été  assez  communs  dans  nos  Gaules.  On  en  a  déjà 
vu  des  preuves  ;  et  l'on  en  verra  encore  plusieurs  autres  dans  la 
suite.  D'ailleurs  il  n'est  pas  moins  certain  que  cet  Orateur 
étoit  né  en  Occident,  et  qu'il  avoit  passé  quelques  années  au- 
près de  Julien,  lorsque  ce  Prince  faisoit  sa  résidence  ordinaire 
a  Paris. 

'  Mamertin  a  eu  soin  de  se  peindre  lui-même  en  partie  dans  p-  sss  »» 
ce  qui  nous  reste  de  ses  écrits.  Il  n'étoit  pas  riche  des  biens  de 
la  lortune.  Mais,  s'il  l'en  faut  croire,  il  l'étoit  beaucoup  en 
vertu,  telle  qu'on  la  voioit  chez  les  Païens.  Il  avoit  de  la  gé- 
nérosité, du  désintéressement,  une  douceur  à  l'épreuve  des  in- 
jures, et  une  constance  qui  avoit  toujours  tenu  contre  l'envie. 
Jamais  il  n'avoit  usé  ni  de  flaterie  ni  de  bassesse.  Jamais  en  un 
mot  il  n'avoit  rien  fait  d'indigne  d'un  homme  d'honneur.  Ce  fut 
pour  toutes  ces  belles  qualités  que  Julien  l'éleva  aux  premiè- 
res charges  de  l'Empire.  Il  le  fit  Thresorier  gênerai  de  son 
épargne,  Préfet  du  Prétoire  et  enfin  Consul.  Mamertin  avoue 

Îtu'il  n'auroit  pas  osé  porter  ses  prétentions  au-delà  de  la  Pré- 
ecture,  lorsqu'on  lui  vint  annoncer  qu'il  étoit  désigné  pour 
remplir  le  Consulat.  Il  éloit  déjà  vieux  ;  et  quoiqu'il  eût  désiré 
dès  son  enfance  cette  haute  dignité,  il  proteste  néanmoins 
ne  l'avoir  jamais  recherchée  ni  demandée,  ce  qu'il  dit  être 
sans  exemple.  '  Il  paroît  qu'il  avoit  quelque  naissance,  puis-  Amm.  i.  21.  p. 
qu'Ammien  Marcellin  reproche  à  Julien  de  lui  avoir  donné  *"' 
pour  Collègue  Nevite  qui  n'en  avoit  point. 

'  Ce  fut  peu  de  tems  après  son  avènement  à  l'empire  et  dès  i-  ai-  ^6.  p.  m. 
361,  que  Julien  donna  à  Mamertm  la  charge  de  Thresorier 
gênerai  de  son  épargne  et  la  Préfecture  d'IUyrie.  Il  y  ajouta 
depuis  celles  d'Italie  et  d'Afrique;  et  Valentinien  I,  qui  suc- 
céda à  Julien  en  364,  le  conserva  dans  ces  trois  Préfectures. 
'  Comme  il  avoit  suivi  Julien  à  Constantinople,  ce  Prince  l'asso-  1.  s*,  p.  «96. 
cia  avec  quelques  autres  à  Saluste  Second,  Préfet  du  Prétoire 
d'Orient,  pour  l'exercice  de  la  chambre  de  justice  qu'il  avoit 


tSS.  303.  453. 


200        CLAUDE  MAMERTIN,  ORATEUR. 

lY  SIECLE,    établie.  Cela  se  passa  en  361.  "  L'année  suivante  Mamertin  se 
o  I.  21. 22. 26.  p.  vit  élevé  au  Consulat.  Il  étoit  alors  à  Constantinople  ,   où  il 

Prononça  le  jour  de  la  cérémonie  un  discours  à  la  louange  de 
Empereur,  et  où  il  donna  les  jeux  du  cirque  le  troisième  jour 
de  Janvier  et  les  deux  suivans. 

1. 87.  p.  491 1  Tiii.       '  Malgré  sa  prétendue  probité,  Mamertin  ne  laissa  pas  d'être 

Emp.  t.  5.  p.  29.  acusé  dc  peculat  en  367  par  Avitien  autrefois  Vicaire  d'Afri- 
que .  Il  fut  mis  en  justice  ;  et  il  ne  paroît  pas  qu'il  se  soit  justi- 
fié de  cette  acusation.  On  ne  voit  pas  non  plus  ce  qu'il  devint 
dans  la  suite.  Mais  il  est  visible  qu'aïant  vécu  au  moins  jus- 
qu'en 367  il  ne  peut  pas  être  cet  autre  Orateur  qui  figuroit  dès 
289,  et  peut-être  auparavant. 

Pan.  D.  p.  283 1  '  Nous  avons  cncore  le  discours  que  fit  Mamertin  le  jour  qu'il 
^*-  entra  dans  le  Consulat.  C'étoitle  premier  de  Janvier  362.  Il  fut 

prononcé  en  présence  de  Julien,  et  à  Constantinople  même, 
que  l'Auteur  nomme  le  lieu  de  la  naissance  de  ce  Prince.  La 
première  partie  est  emploïée  à  faire  l'éloge  de  Julien,  et  la  se- 
conde à  lui  marquer  la  reconnoissance  de  Mamertin,  pour  l'a- 
voir élevé  au  Consulat  et  aux  autres  charges  dont  nous  avons 
parlé.  Les  louanges  excessives  qu'il  donnoit  à  cet  Empereur 
idolâtre,  qu'il  ne  craint  pas  de  représenter  comme  un  Prince 
exemt  des  vices  des  autres  hommes  ;  l'éloge  qu'il  fait  de  son 
genre  de  philosophie,  qui  étoit  la  magie  la  plus  détestable,  et 
des  mystères  d'Eleusine  qu'il  avoit  rétablis  ;  l'impiété  par  la- 
quelle il  atribue  à  Jupiter  ce  qui  ne  convient  qu'au  vrai  Dieu  : 
tout  cela  fait  voir  que  ce  Panégyriste  n'avoit  point  d'autre  reli- 
gion que  celle  du  Prince,  qui  étoit  le  Paganisme.  Du  reste 
ce  discours  contient  peu  de  faits ,  hors  ceux  qui  regardent 
l'histoire  de  l'Orateur,  et  où  il  paroît  un  amour  propre  ex- 
cessif, avec  une  assez  grande  éloquence,  mais  telle  qu'elle 

p.  2ni.  ètoit  alors  en  usage.  '  On  ne  sauroit  se  tromper  à  l'atribuer  à 

Claude  Mamertin  ,  puisqu'il  a  eu  soin  d'insérer  lui-même  ses 
deux  noms  dans  le  corps  de  la  pièce.  Elle  a  été  imprimée 
avec  celles  de  l'autre  Mamertin  et  des  autres  Panégyristes  de 
l'Empire.  On  en  peut  voir  les  difl"erentes  éditions  à  l'article  du 
premier  de  ces  Orateurs. 


HELLESPONCE 


201 


HELLESPONCE, 

Orateur  et  Philosophe. 


IV    SIECLE. 


H 


p.  807. 


ELLESPONCE  fleurissoit  au  même  tems  que  le  fameux  Eunap'  p.  203. 
Chrysanlhe,  après  le  milieu  du  IV  siècle.  Il  étoit  Gau- 
lois de  nation,  ou  avoit  au  moins  pris  naissance  dans  les  Gau- 
les. On  ne  dit  pas  en  quel  endroit.  Comme  la  langue  gréque 
lui  étoit  fort  familière,  on  pourroit  croire  que  ce  fut  en  quel- 
que lieu  de  l'ancienne  Narbonoise.  Eunape,  qui  l'avoit  connu 
personnellement,  assure  qu'il  réunissoit  en  sa  personne  toute 
sorte  d'excellentes  qualités.  Il  acquit  une  si  grande  réputation 
pour  son  savoir  et  l'intégrité  de  ses  mœurs,  qu'il  passoit  sans  dif- 
ficulté pour  le  second  Sophiste  de  son  tems;  n'y  aiant  que 
Chrysanlhe  qui  pût  lui  disputer  la  palme. 

'  Poussé  par  le  désir  de  trouver  quelqu'un  plus  habile  que  lui,  ibid. 
et  la  passion  de  faire  de  nouvelles  découvertes  dans  la  philoso- 
phie, il  entreprit  une  infinité  de  voïages,  et  parcourut  presque 
toute  la  terre.  Il  trouva  enfin  à  Sarde  de  Lydie  en  la  personne 
de  Chrysanlhe  ce  qu'il  cherchoit  depuis  long-tems.  '  Si-tôt 
qu'il  eut  entendu  raisonner  ce  fameux  Sophiste,  il  fut  si  épris  de 
la  beauté  de  ses  discours,  qu'il  ne  lui  en  falut  pas  davantage 
pour  fixer  ses  courses.  Il  quita  toute  autre  entreprise,  s'atacha 
à  ce  nouveau  Maître,  et  se  rendit  son  disciple.  Comme  il  étoit 
déjà  avancé  en  âge,  il  croïoit  rajeunir  en  écoutant  ses  leçons. 
Il  s'imaginoit  découvrir  de  si  excellentes  choses  dans  sa  doctri- 
ne, qu'il  déploroit  le  tems  qu'il  avoit  perdu  à  d'autres  recher- 
ches. Son  atachement  pour  Chrysanlhe  alloit  jusqu'à  ce  point, 
que  voiant  un  jour  qu'on  lui  avoit  tiré  du  sang  un  peu  trop 
en  abondance  pour  un  vieillard  de  son  âge,  il  entra  en  une 
espèce  de  fureur  contre  Eunape,  qui  avoit  fait  l'opération. 
Mais  s'apercevant  ensuite  que  le  vieillard  ne  s'en  portoit  que 
mieux,  il  reprit  son  calme  de  Philosophe,  et  loua  le  Médecin. 
'  11  avoit  des  assiduités  particulières  auprès  de  ce  Sophiste,  et 
n'entreprenoit  rien  sans  le  consulter;  Eunape  semble  même 
dire  qu  il  le  soulageoit  dans  le  soin  qu'il  prenoit  d'instruire  ses 
disciples. 

'  Sur  la  fin  de  ses  jours  Hellesponce  fut  ataqué  d'une  colique 
Tame  I.  Sec.  Part.  C  c 


p.  206. 


1    4  * 


202  AGRICE, 

IV  SIECLE,    fâcheuse,  qui  l'obligea  ù  se  retirer  à  Apamée en  Bitliynie. 
Ce  fui  là  qu  il  mourut  avant  Chrysanthe  son  Maître.  En  mou- 
rant il  recommanda  fort  à  Procope  son  compagnon  d'étude , 
de  ne  point  s'atacher  à  d'autre  Maître  que  ce  Sophiste,  comme 
ibid.  I  jons.  1. 1.  r.  étant  le  plus  habilequ'il  sauroit  jamais  trouver;  '  Ce  Chrysanthe, 
"  quoique  Philosophe  de  la  secte  des  Pythagoriciens ,   n'éloit 

cependant  qu'un  Magicien  outré,  qui  n'avoit  d'autre  religion 
que  le  Paganisme.  Ilellesponce  paroît  avoir  suivi  en  tout  le 
génie  de  son  Maître  ;  et  l'on  ne  voit  point  qu'il  ait  rien  écrit 
non  plus  que  lui. 


AGRICE, 

Rhéteur. 

Seal.  in.  Aus.  1. 1,  '  i->t  ENSORHis  Alticus  Agricius,  OU  Agrœtius,  ne  doit  pas  être 
i.  "s.^'"  '"*"'■     ^  confondu,  comme  quelques  Savans  semblent  l'avoir  vou- 
lu faire,  avec  Argicius  aïeul  du  Rhéteur  Arbore,  et  bis-aïeul 
Ans  prof.  c.  1*.     maternel  du  Poète  Ausone.  '  11  est  environ  le  vingtième  des 
l*rofe.sseurs  de  Rourdeaux,  dont  celui-ci  nous  a  laissé  les  éloges. 
.  *  .,  Mais,  quoiqu'il  ne  le  place  qu'après  plusieurs  autres,  il  avoue 
néanmoins  au'il  auroit  mérité  pour  la  beauté  de  son  éloquence 
de  tenir  un  des  premiers  rangs. 

Ëloquii  mcrito  primis  sequandc  ,  fuisti , 
Agrici ,  positus  posteriore  loco. 

ibid.  '  Agrice  étoit  issu  d'une  famille  aussi  illustre  par  sa  nobles.se 

qu'il  le  devint  ensuite  lui-même  par  la  gloire  qu  il  s'acquit  dans 
l'art  de  bi-n  parler.  Il  possedoit  parfaitement  toutes  les  beau- 
tés de  la  langue  gréque  et  de  la  latine  ,  et  pouvoit  à  juste  titre 
aller  de  pair  en  ce  genre  de  literature  avec  Nazaire  et  Paté- 
re,  ces  célèbres  Professeurs  de  rhétorique,  dont  nous  avona 
parlé. 

Tarn  gencris  libi  cuisus  apex ,  quam  gloria  fandi  : 

Gloria  Allicnasi  cognila  st-de  loci  ; 
Naiario  et  claro  quondam  dclata  Patène  , 
'  "  Egregie  mullos  qui  excoluit  juvenes. 

sid.  1. 5.  op.  10.  p.      '  C'est  ainsi  qu'Ausone  s'en  explique.  S.  Sidoine  de  son  côté 


RHETEUR.  203 

voulant  relever  le  mérite  des  écrits  de  Sapaude,  qui  faisoit     iv siècle. 
un  des  plus  grands  ornemens  des  Gaules  pour  les  letres  au  " 
V  siècle,  dit  que  l'on  y  voïoit^  toute  la  régularité  du  discours 
que  l'on  avoit  admirée  dans  Agrice. 

'  Le  même  siècle,  qui  avoit  vu  naître  ce  Rhéteur,  le  vit  mou-  aus  ib. 
rir.  Il  pouvoit  être  né  vers' 315,  et  il  paroît  qu'il  n'étoit  plus 
au  monde  vers  370:  Il  laissa  une  veuve  et  des  enfans,  dont  il 
n'y  avoit  qu'une  fille  qui  fût  établie.  On  ti-ouve  peu  après  le 
milieu  du  siècle  suivant  '  un  Agréce  Evêque  dans  les  Gaules,  Ler.  p.  784. 

aui  aida  de  ses  libéralités  S.  Rustique  pour  faire  bâtir  l'église     , 
e  Narbone.   Il  pouvoit  descendre  de  la  famille  de  nôtre 
Rhéteur. 

'  Nous  avons  sous  Ib  nom  d'un  Agréce  un  traité,  ou  fragment 
de  traité  de  la  propriété  et  de  la  différence  dé  la  langue  latine.  Auct.  am.  lat.  p. 
Cet  Agréce  est  sans  difficulté  le  même  que  celui  dont  parle  S.  ^^*^'  ""' 
Sidoine  ;  et  il  ne  paroît  pas  y  avoir  lieu  de  douter  que  celui 
de  S.  Sidoine  ne  soit  l'Agricius  d'Ausone.  Agréce  dans  ce  trai- 
té examine  la  différence  qu'il  y  entre  les  termes  qui  paroissent 
synonymes  :  par  exemple,  entre  temperantia,  temperalin  et 
temperies.  Il  avertit  que  le  premier  se  dit  des  personnes ,  le  se- 
cond des  choses,  et  le  troisième  de  l'air  et  des  vents.  De  même 
entre  percussus  et  perculsus.  On  se  sert,  dit-il,  du  premier 
loi-squ'il  s'agit  du  corps  ;  et  de  l'autre,  lorsqu'on  parle  de  l'es- 

[)ril.  11  appuie  ce  qu'il  avance  de  l'autorité  des  meilleurs  Auteurs 
atins,  comme  Terence,  Giceron,  Horace,  Tite-Live  et  Vir- 
gile. On  voit  par-là  combien  il  éloit  versé  dans  la  lecture  des 
Auteurs  de  la  belle  latinité. 

'  Ce  reste  de  traité  a- été  imprimé  plusieurs  fois  avec  les  an-  Kon.  wb.  vet.  etc. 
ciens  Grammairiens,  qui  ont  écrit  sur  le  même  sujet.  George  bSJ.iat.'app.'p^ss! 
Fabricius  fut  le  premier  qui  le  donna  au  public.  Ensuite  Ro- 
naventure  Vulcanius  le  fit  reimprimer  à  Rasle  l'an  1577,  à  la 
fin  des  origines  de  S.  Isidore  de  Seville.  Il  parut  encore  à 
Hanawen  1605  par  les  soins  d'Elie  Putschius,  toujours  avec 
les  anciens  Grammairiens  lafins.  Dès  1585  Denys  Godefroy 
l'inséra  dans  son  gros  recueil  des  anciens  Auteurs  de  la  langue 
latine,  qui  a  été  souvent  mis  sous  la  presse.  (IX.) 


Ce  ij 


204 


V  SIECLE. 


Ans.   prof.  c.  4-  S. 


DELPHIDE, 

Rhéteur,  Orateur  et  Poète. 

ATTius  Tiro  Delphidius  étoit  fils  du  Rhéteur  Patere,  dont 
nous  avons  donné  l'éloge.  II  tiroit  son  nom  de  la  ville 
de  Delphe  ;  comme  Phœbicius  son  aïeul  paternel  et  un  de  ses 
oncles  de  même  nom  tiroient  le  leur  d'Apollon,  à  qui  cette 
n.  s.  ville  étoit  consacrée.  '  Delphide  vint  au  monde  avec  d'excellen- 

tes qualités.  Il  avoit  l'esprit  vif,  agréable,  enjoué,  une  gran- 
de facilité  à  parler  et  à  écrire,  et  un  talent  merveilleux  pour  la 
poésie.  Il  sut  soutenir  ces  qualités  naturelles  par  une  éloquen- 
ce et  une  érudition  qui  le  rendirent  célèbre  dans  les  pais  éloi- 
gnés comme  dans  sa  propre  patrie. 

Gelebrata  varie  cujus  eloquentia 
Domi  forisque  claruit. 

ibid.  '  Dès  les  premières  années  de  son  âge  il  réussit  à  faire  des 

vers;  et  il  n'étoit  pas  encore  sorti  de  l'enfance,  lorsqu'un  de 
.  ses  poèmes  remporta  le  prix,  et  lui  mérita  un  des  premiers 
rangs  sur  le  Parnasse.  Bientôt  cet  heureux  succès  lui  inspira  de 
plus  hauts  desseins.  Il  entreprit  le  genre  de  poëme  épique  ;  et 
l'on  convient  que  personne  n'avoit  plus  de  dispositions  que  lui 
pour  cette  sorte  de  poésie.  Heureux  s'il  se  fût  borné  à  cette 
douce  et  tranguille  ocupation  des  Muses  !  Il  auroit  garanti  sa 
réputation  de  ai  verses  taches  qui  la  ternirent  dans  la  suite. 

Ibid.  '  Mais  peu  content  de  sa  fortune,  il  voulut  s'avancer  dans 

les  charges.  Il  entra  dans  le  barreau,  et  y  exerça  la  profession 
d'Avocat.  Ce  nouvel  emploi  lui  fut  plus  nuisible  qu'avanta- 
geux. Car  il  y  ménagea  si  peu  le  monde^  qu'il  s'attira  la  haine 

Amm.  1.  18.  p.  publiouB.  '  En  358  il  acusa  de  péculat  devant  Julien  alors  Cé- 

'"*■  sar,  Numerius  Gouverneur  de  la  Narbonoise.  Celui-ci  nia  les 

faits  qu'on  lui  objectoit.  Delphide,  ne  pouvant  les  prouver, 
s'écria  avec  sa  véhémence  ordinaire  :  «  Quel  coupable,  illus- 
«  tre  César,  ne  passera  pas  pour  innocent,  s'il  suffit  de  nier  ses 
«  crimes?  »  Surquoi  Julien  lui  fit  sur  le  champ  cette  réponse  si 
sage,  remarquée  par  plusieurs  Historiens  :  «  Et  quel  innocent 
«  ne  passera  pas  pour  coupable ,  s'il  suffit  d'être  acusé ?  » 

Ans  ib.  '  Delphide  déjà  odieux  au  public  pas  son  ambition,  courut 


DELPHIDE,  RHETEUR,  ORATEUR,  etc.   205 

risque  de  se  perdre  sans  ressource,  en  croïant  s'élever  dans  le     i  v  s  i  e  c  l  e. 
parti  d'un  Tyran  près  duquel  il  semble  qu'il  eût  obtenu  quel- 
que  charge.  'On  croit  que  ce  Tyran  est  Procope  qui  se  révolta  rm.  Emp.  1. 1.  p. 
sous  Valens  en  365.  'Mais  Delphide  fut  sauvé  de  sa  perte  par  "us.  ib. 
les  larmes  de  Paterius  son  père. 

'  Toujours  mécontent  de  son  état  et  toujours  passionné  de  iwa. 
passer  de  lui-même  à  un  autre,  sans  l'atendre  de  l'ordre  de  la 
providence,  il  ne  fit  que  courir  après  Ic;  charges,  sans  en  pos- 
séder aucune,  quoiqu'il  eût  mérité  d'en  posséder  plusieurs,  s'il 
avoit  eu  plus  de  conduite.   Enfin  se  voïant  le  jouet  de  son  am- 
bition, il  prit  le  parti  de  se  mettre  à  professer  l'éloquence.  11 
étoit  né  pour  cet  emploi  ;  '  et  il  l'exerça  avec  une  très-grande.  Hier.  ehr.  p  ist. 
réputaUon ,  selon  S.  Jérôme.  '  Ausone  témoigne  néanmoins  aus.  ib. 
qu'il  n'y  donna  pas  toute  l'assiduité  qu'il  devoit  :  ce  qui  l'em- 
pêcha de  faire  d'aussi  bons  écoliers  qu'il  y  avoit  sujet  de  l'a- 
tendre. 

'  Delphide  fut  arrêté  au  milieu  de  sa  course  par  une  mort  ib.sui.  ws.  i.  s.  n. 
prématurée,  qui  lui  épargna  la  douleur  de  voir  le  suplice  d'Eu-  ll\  |  Pr;,f.''cbr*".' 
crocie  sa  femme  et  la  honte  de  Procule  sa  fille.  Celle-ci  s'é-  '^e. 
tant  laissée  surprendre  par  les  Priscillianistes  vers  l'an  380, 
on  l'acusa  de  s'être  abandonnée  à  Priscillien  même  que  sa  mè- 
re avoit  reçu  dans  une  de  ses  terres,  et  d'avoir  étouffé  son  fruit 
par  des  médicamens.  Eucrocie  s'étant  engagée  dans  les  mê- 
mes erreurs,  eut  la  tête  tranchée  à  Trêves  vers  l'an  385  avec 
plusieurs  autres  personnes  de  cette  secte.  '  Son  suplice  à  la  vérité  p*»-  i>  ses. 
fut  desaprouvé  par  les  Chrétiens  les  mieux  instruits  des  règles 
de  l'Eglise,  et  par  les  Païens  mêmes.  Pacatusl'un  d'entre  ceux- 
ci,  qui  écrivoit  quelques  années  après,  ne  s'arrêtantqu'à  la  pro- 
fession extérieure  d'une  vie  plus  austère  que  faisoient  les  Pris- 
cillianistes, entreprend  la  justification  d'Eucrocie  en  ces  ter- 
mes:  «  Quels  étoient,  dit-il  les  crimes  atroces  de  cette  Da- 
«  me  veuve  d'un  illustre  Poète,  qui  meritoient  qu'on  la  traînât 
w  au  suplice  avec  un  crocîOnnel'acusoitque  d'être  trop  reli- 
«  gieuse;  on  ne  lui  reprochoit  qu'un  trop  grand  atachement  au 
«  culte  de  la  Divinité.  » 

Il  paroît  par  ce  qu'en  dit  S.  Jérôme,  que  Delphide  étoit  "'«r.  ep.  ad  Hed. 
Païen  comme  Paterius  son  père.  Mais  s'il  eut  le  malheur  de  "''  *^^' 
ne  point  sortir  des  ténèbres  du  Paganisme,  et  d'avoir  une  fem- 
me et  une  fille  engagées  dans  l'hérésie,  sa  famille  eut  la  gloire 
de  donner  avant  la  fin  de  ce  siècle  un  excellent  sujet  en  la 
personne  d'Hcdibie,  célèbre  au  siècle  suivant.  C'éloit  une  veu- 


206  ANASTASE,  GRAMMAIRIEN, 

IV  SIECLE,  ve  d'une  pieté  ejiemplaire,  qui  paroît  avoir  été  instruite  des 
belles  Ifitres,  et  qui  s'apliquoit  particulièrement  à  la  lecture  des 
livres  saints.  Ce  fut  ellequi  proposais.  Jérôme  douze  ques- 
tions, sur  l'Ecriture,  qui  ont  lourni  la  matière  à  la  belle  letre 
que  le  Saint  lui  écrivit. 

Hier.  ibid.  'Il  06  nous  restc  plus  aujourd'hui  aucun  des  ouvrages  de  Del- 

phide,  Il  est  néanmoins  certain  qu'il  en  avoit  composé  plu- 
sieurs en  prose  et  en  vers.  C'est  ce  qui  fait  dire  de  lui  à  S.  Je- 

si<j.  1. 3.  ep.  10.  rôme  :  omnes  Gallias prosœ  versw/tie  siio  illiiMravit  mfjem'o.' 
S.  Sidoine  reconnoissoit  dans  les  écrits  de  Delphide  une  abon- 
dance, qui  en  faisoit  comme  le  caractère  dislinctif. 


ANASTASE, 

GnAMMAiniKN, 

ET    R  U  F  U  s, 

Rhéteui». 

Au5.  prof.  c.  10.  '  i  MMOisius  Anastasius  nAquit  à  Bourd(  aux  vers  le  com- 
iVmejicement  du  IV  siècle.  11  y  enseigna  quelque  tems 
la  grammaire.  Comme  il  avoit  et  peu  de  caj)acité  et  peu  de 
mérite,  il  ne  s'acquit  pas  dans  cet  emploi  une  grande  réptila- 
tion.  Se  rapellant  peut-êtn-  l'avis  di;  l'Kvangile,  que  nul  n'est 
Prophète  en  son  pais,  et  se  datant  qu'il  pourroit  faire  fortune 
ailleurs,  il  quita  sa  patrie  pour  se  retirer  h  Poitiers.  II  y  pro- 
fessa la  grammaire  comme  à  Bourdeaiix,  mais  avec  aussi  peu 
de  fruit  ;  de  sorte  qu'il  avoit  bien  de  la  peine  à  y  subsister.  Il 
y  mourut  pauvre  et  presque  sans  nom,  dans  un  âge  fort  avan- 
cé. Le  peu  d'honneur  qu'il  fit  aux  Ictres  malgré  sa  profession, 
a  fait  déclarer  à  Ausone,  qu'il  ne  parle  de  lui,  que  pour  ne  pas 
laisser  son  nom  enseveli  avec  ses  cendres. 

Ce  que  nou3  venons  de  dire  d'Anastase,  fait  voir  à  la  lelrc- 

»pi.  i;u>.  en sapersonne l'acomplissement'd'uneépigrammed'Ausone, où 

ce  Poëte  prétend  que  l'on  ne  vit  jamais  un  Grammairien 
faire  fortune  et  devenir  heureux  selon  le  monde,  et  que  s'il 
est  arrivé  que  quelqu'un  le  soit  devenu,  c'est  un  de  ces  phénoT 
mw^  extraordinaires. 

F;etix  Qrammaticus  non  est ,  sed  nec  fuit  unquam  : 
Ntc  quis^am  est  felùi  noraine.  Graramaticui: 


ET  RUFUS,  RHETEUR.  207 

At si  quis  felix  prœtcr ralum  cxstitit  unquam  ,  IV  SIECLE. 

Is  demum  excessit  grammalicos  canoncs. 

'  Au  même  lems  qu'AnasIase  enseignoU  la  grammaire  a  «pi-  m  l  Egas.  Bai 
Poitiers,  un  nommé  lUifus  y  professoit  la  rhétorique.  Mais  ce  '  "* 
Rhéteur  y  acquit  encore  moins  de  réputation  que  le  Gram- 
mairien. C'étoit  un  homme  sans  nul  talent  pour  la  profession 
qu'il  exerçoit.  Elle  con.sistoit  à  enseigner  l'art  de  bien  parler  ; 
et  il  éloit  presque  aussi  muet  qu'une  image.  C'est  ce  qu'Auso- 
ne  a  assez  ingénieusement  exprimé  dans  les  deux  épigrammes 
suivantes  : 

Ore  pulcro  et  ore  muto  ,  sciro  vis  quae  sim?  Volo. 

Imago  Rufi  Rhctoris  Pictavici. 
Uiccretsed  illc  vcIIiot  Rhctor  hoc  ml.  Non  po^-st. 

Cur  T  Ipse  Rhctor  est  ima;;o  imaginis. 
/Ha>c  Ruii  tabula  est.  Nil  verius.  Ipso  uhi  Rufus?  *"*•  *P'-  *''• 

In  callicdra.  Uuid  agit?  hoc  quod  cl  iii  tabula. 

'  Ce  sujet  faisoit  tant  de  plaisir  à  la  Muse  d'Ausone,  qu'il  en  ep«  *»  at. 
prit  ocasion  de  composer  huit  épigrammes  que  nous  avons 
encore. 

Il  n'y  a  donc  nulle  aparence  suivant  ce  portrait  de  Ru-  Ega».  bui  ii.. 
fus,  '  qu'il  soit  le  même  que  Scxtus  Rufus  Auteur  d'un  abrégé 
de  l'histoire  Romaine,  qui  présenta  son  ouvrage  à  Valenti- 
nicn  I.  C'est  néanmoins  ce  qu'ont  cru  quelques  Écrivains,  au 
raport  de  M'  du  Boulay,  qui  ne  paroît  pas  éloigné  du  même; 
sentiment. 


URSULUS  ET  HARMONIUS, 

GltAMMAIRIENS. 

Rsi'Lus    et  Ilarmonius  enseignoient  ensemble  h  gram-  aus.  ep.    is. 
maire    à  Trêves   sous    l'empire  de  Valentinien  I.   Les  *»**  **^- 
A  écoles,  comme  nous  l'avons  remarqué  ailleurs,  y  éloient  alors 

I  très-florissantes.  La  cour  y  faisoit  son  séjour  ordinaire,  et  con- 

tiibuoit  à  y  attirer  les  plus  habiles  Professeurs  et  grand  nom- 
\  hre  d'étudians.  Ausone  qui  la  suivoit  alors,  en  qualité  de  Pré- 

I  cepteur  du  jeune  Gratien  depuis  Empereur,  étoit  fort  lié  avec 

I  les  deux  Grammairiens  dont  nous  parlons,  et  se  faisoit  un  plai- 

£ 

k 


u 


208  URSULUS  ET  HARMONIUS, 

IV  SIECLE,    sir  de  leur  rendre  service  dans  les  rencontres.  C'est  ce  que  nous 
aprenons  d'une  de  ses  lelres  à  Ursulus. 
Vin.    in  Ans.  ?.       '  Depuis  fort  long-temps  les  Empereurs  avoient  de  coutume 
*"  de  donner  au  commencement  do  chaque  année  des  étrenes 

aux  personnes  qu'ils  honoroient  de  leur  bienveillance.  Les  Pro- 
fesseurs qui  prenoieni  le  soin  d'instruire  la  jeunesse,  avoient 
ordinairement  part  à  cette  sorte  de  libéralité,  sur-tout  lors- 
Ans,  ib.  p.  6ii.  qu'ils  étoient  à  portée.  '  Il  arriva  cependant  qu'une  année  Ur- 
.sulus  fut  oublié  dans  la  distribution  qui  se  fit  des  largesses  de 
p.  645. 616.  l'Empereur.  '  Il  eut  recours  à  Ausone  son  ami,  alors  Questeur 

de  l'Empire,  qui  lui  obtint  une  somme  assez  considérable, 
p.  646.  618.  C'est  ce  qui  fait  le  sujet  de  sa  letre  h  Ursulus.  '  Mais  la  manière 

entortillée  dont  Ausone  s'explique  sur  le  nombre  des  écus  qu'il 
fil  donner  à  Ursulus,  a  fort  embarassé  les  Savans.  Il  paroît 
néanmoins  que  toutes  ses  différentes  expressions  étudiées  ne 
signifient  que  le  nombre  de  douze.  Après  tout,  ce  qu'il  y  a 
de  plus  remarquable  dans  cette  letre  pour  l'histoire  d'Ursulus, 
c'est  qu'il  donnoit  six  heures  de  son  tems  chaque  jour  à  l'in- 
struction de  la  jeunesse  dans  les  belles  letres. 
p.  Gio.  '  Harmonius  son  collègue  dans  la  môme  profession  passoit 

pour  un  homme  d'une  érudition  consommée.  S'il  en  faut  croire 
Ausone,  il  n'étoit  pas  indigne  d'aller  de  pair  en  genre  de  li- 
terature  avec  les  Scaurus,  les  Claranus,  les  Varrons  et  les 
autres  Savans  les  plus  célèbres  de  l'antiquité.  Il  possedoit  par- 
faitement le  grec  et  le  latin  ;  et  il  y  a  toute  aparence  qu'il  don- 
noit des  leçons  en  l'une  et  l'autre  langue.  Ne  pouvant  plus 
suporter  le  triste  état  où  il  voïoil  les  poésies  d'Homère,  qui 
se  trouvoient  alors  fort  négligées,  il  entreprit  d'en  faire  un  re- 
cueil :  ce  qu'il  exécuta  en  y  ajoutant  des  notes  de  sa  façon, 
pour  faire  observer  ce  qui  s'étoit  glissé  d'étranger  dans  le  texte 
de  cet  ancien  Poète.  C  est  en  partie  à  ses  soins  que  nous  som- 
mes redevables  de  ce  que  nous  avons  d'Homère  aussi  entier 
qu'il  est  aujourd'hui.  Pour  ne  rien  ôter  au  portrait  que  l'on 
nous  a  laissé  d'Harmonius,  nous  allons  donner  ici  les  propre? 
traits  avec  lesquels  Ausone  l'a  peint  en  écrivant  à  Ursulus  son 
Cjollegue. 

Ursule  Collega  nobilis  Harmonio, 
Harmonio.quem  Claranus,  quem  Scaurus  et  Asper, 

Quem  siii  ffonferret  Varro  priorque  Crates  : 
Quique  sacri  lacerum  collegit  corpus  Homeri  , 

Quique  notas  spuriis  Versibus  apposuit  : 

CecropiiP 


I.  CONCILE  DE  VALENCE. 


iiY.\ 


Cccrojiiiu  coininuno  decus,  Latia'qui.'  Caniœiui', 
Soluï!  qui  (Jliiuin  luisci'l  ol  Aiiimiiicuin. 


IV  SIECI.K. 


Till.  II.  E.  t. 
551. 

p.  800. 


I.   CONCILE   DE    VALENCE. 

EN  374  le  douzième  jour  de  Juillet  sous  le  Consulat  de  com-.  t.  a.  p.  904 
Gralien  et  d'Equice,  on  tint  Concile  à  Valence  dans  la  ^'^' 
Viennoise.  Il  s'y  trouva  vint  et  un  Evêques,  ou  même  trente 
s'il  faut  s'en  raporter  à  un  manuscrit.'  Il  y  en  avoil  de  plusieurs  p.  i807. 
provinces  des  Gaules;  mais  la  plupart  étoient  de  l'ancienne 
Narbonoise.  '  De  sorte  que  l'on  peut  regarder  cette  assemblée  Tiii.  ii.  e.  t.  ».  p. 
comme  un  Concile  gênerai  de  toutes  les  Gaules. 

'  Les  noms  des  Prélats  qui  y  assistèrent,  se  trouvent  et  dans 
l'inscription  des  letres  de  ce  Concile  et  dans  les  signatures 
qui  se  lisent  au  bas.  Mais  ils  y  sont  avec  un  ordre  bien  diffé- 
rent, dont  on  n'a  pu  encore  donner  de  bonnes  raisons.  Il  n'y 
est  point  marqué  de  quelles  Eglises  ces  Prélats  étoient  Evê- 

aues.'  M"*  de  Sainte-Marthe  croient  que  S.  Florent,  Evêque  Gaii.chr.  Vet.  t.i. 
e  Vienne,  présida  à  ce  Concile,  comme  tenu  dans  sa  pro-  p-  "'^■ 
vince.  Les  autres  principaux  Evêques  qui  y  assistèrent,'  furent  cone.  ib.  p.iso?  | 
S.  Phébaded'Agen,  qui  est  nommé  le  premier  dans  l'inscription  ^ni-ib.  p.  s-^u. 
des  letres  sous  le  nom  de  Foegadius,  et  qui  paroît  par-là  y  avoir 
présidé  plutôt  que  S.  Florent  de  Vienne;  Emilien  Evêque  de 
Valence,  qui  l'a  aussi  été  de  Die  selon  quelques-uns  ;  Emere, 
ou  Eumere,  ou  bien  Evemere  de  Nantes;  Arteme  d'Embrun, 
qui  avoit  succédé  depuis  peu  à  S.Marcellin;  S.  Paul  de  Tri- 
castin  ou  Troischasteaux;Simplice  de  Sens,  ou  plutôt  d'Au- 
tun  ;  S.  Just  de  Lyon  ;  S.  Euvort  d'Orléans;  Britton,ou  Brit- 
tanne,  ou  même  Pritane  de  Trêves;  Concorde  d'Arles;  Ni- 
cet  de  Maience  ;  et  Constance  d'Orange. 

'  Le  sujet  de  la  convocation  de  ce  Concile  fut  quelque  di- 
vision arrivée  dans  l'Eglise  Gallicane.  Maison  n'a  pas  jugé  à 
propos  d'en  conserver  la  connoissance  à  la  postérité.  Celte  af- 
laire  heureusement  terminée,  divers  Prélats  proposèrent  de  re- 
médier à  quelques  désordres  trop  criminels  pour  être  soufferts, 
mais  aussi  trop  communs  pour  être  condamnés  avec  la  sévé- 
rité qu'ils  meritoient.  '  Les  Pères  du  Concile  firent  donc  qua-  p.  905. 
tre  Canons  pour  éloigner  de  l'Eglise,  comme  ils  parlent  eux- 
mêmes,  les  scandales  qui  la  deslionoroient,  et  y  maintenir  la 
sainteté  des  mœurs  qui  lui  convienl. 

Tome  I.  Sec.  Part.  1)  d 


Couc. 
1887. 


ibU.  p.  901. 


210  l.    CONCILE   DE   VALENCE. 

IV  SIECLE.        '  Le  premier  Canon  regarde  ceux  qui  aïant  été  mariés  deux 

(;„„f  ibi,|.  fois,  OU  qui  aïant  épousé  des  veuves,  étoient  élevés  àM'état 

ecclésiastique.  Le  Concile  déclare  que  cela  n'est  jamais  per- 
mis, non  pas  même  quand  ces  mariages  auroient  précédé  le 
baptême.  Mais  il. ne  dépose  point  ceux  qui  auroient  été  élus 
de  la  sorte,  s'ils  n'avoient  fait  quelqu'autre  faute  qui  les  auroit 
rendus  indignes  de  leur  ministère. 

ibki.  '  Le  second  Canon  ne  veut  pas  même  que  l'on  acorde  ai- 

sément la  pénitence  aux  jeunes  femmes,  qui  après  s'être  con- 
sacrées à  Dieu,  étoient  passées  volontairement  à  l'état  du  ma- 
riage. Il  ajoute  que  si  on  la  leur  acorde,  elles  ne  doivent  point 
être  admises  à  la  communion,  qu'elles  n'aient  pleinement  sa- 
tisfait à  Dieu. 

ibid.  '  Dans  le  troisième  les  Pères  du  Concile  se  fondant  sur  celui 

de  Nicée,  acordent  à  C(îux  qui  étoient  tombés  dans  l'idolâ- 
trie, ou  qui  s'étoient  fait  rebaptiser,  la  grâce  de  pouvoir  salis- 

Tiu.  ibid.  p.  552.  faire  à  l'Eglise  par  la  pénitence  canonique.'  II  semble  qu'ils 
avoient  en  vue  le  treizième  Canon  de  Nicée.  Mais  au  lieu 
que  le  onzième  du  même  Concile  acorde  aux  apostats  la 
communion  après  douze  ans  de  pénitence,  les  Pères  de  Va- 
lence n'en  fixent  le  terme  qu'au  dernier  jour  de  la  vie.  Encore 
n'est-il  pas  clair  s'ils  leur  acordent  la  communion  à  la  mort. 
Aussi  c'étoit  un  bien  plus  grand  crime  d'abandonner  la  foi  vic- 
torieuse et  triomphante  que  de  la  renoncer,  lorsqu'elle  étoit 
persécutée. 

oone.  ib.  p.  905.       '  Le  quatrième  Canon  est  remarquable.  Il  se  trouvoit  des 

"•'""•  personnes  qui  pour  éviter  l'état  ecclésiastique,  qui  leur  paroissoit 

redoutable,  se  declaroient  chargés  de  quelque  péché  mortel, 
qoi  les  en  excluoit  selon  les  Canons.  Les  Pères  du  Concile 
louent  leur  modcsCe  et  leur  fraïeur  religieuse.  Mais  voïant 
d'un  côté  avec  regret  que  cet  aveu  laissoit  de  mauvaises  im- 
pressions dans  l'esprit  du  peuple,  toujours  porté  à  croire  le 
mal;  et  de  l'autre  qu'ils  ne  pouvoient  se  condamner  eux- 
mêmes  non  plus  qu'une  tierce  personne,  ils  ordonnèrent  que* 
ceux  qui  se  trouveroient  dans  le  cas,  seroient  crus  sur  leur  pa- 
role. En  conséquence  ils  les  excluent  du  Sacerdoce ,  comme 
coupables  ou  du  crime  dont  ils  s'acuseroient,  ou  de  mensonge 
contre  eux-mêmes. 

p.  906. 907.  '  Pendant  la  tenue  de  ce  Concile  les  Pères  eurent  une  oca- 

sion  de  mettre  cette  ordonnance  en  pratique.  L'Eglise  de  Fré- 
jus  avoit  élu  depuis  peu  tout  d'une  voix  pour  son  Evêque  une 


THEODORE,  SECRETAIRE  D'ETAT.       211 

personne  nommée  Accepte,  qui  se  trouvoit  justement  dans  le 
cas  du  Canon.  Concorde  l'un  des  Evêques  du  Concile  en  ren- 
doit  un  très-bon  témoignage  à  l'assemolée.  Mais  les  Pères  ne 
crurent  pas  devoir  violer  le  Canon  qu'ils  venoient  d'établir. 
Ils  prirent  le  parti  d'écrire  à  l'Eglise  de  Fréjus  une  letre,  par 
laquelle  ils  lui  rendent  compte  de  leur  ordonnance. 

'  Nous  avons  encore  cette  lelre  avec  une  autre  du  même 
Concile,  dans  laquelle  sont  insérés  les  quatre  Canons  dont 
nous  venons  de  parler.  C'est  tout  ce  qui  nous  reste  des  actes 
de  ce  Concile.  La  lelre  qui  contient  les  Canons,  est  adressée 
à  tous  les  Evêques  des  Gaules,  '  et  à  ceux  des  cinq  provin- 
ces :  c'est-à-dire  à  ceux  de  la  Lyonoise  et  de  la  Belgique,  qui 
sont  proprement  ce  que  l'on  nommoit  alors  les  Gaules  ;  de 
l'Aquitaine,  qui  ne  faisoit  encore  que  deux  provinces  ;  et  de 
la  Narbonoise,  qui  pouvoit  bien  n'être  encore  divisée  qu'en 
trois.  '  On  cite  quelques  autres  Canons  ou  décrois  du  Conci- 
le de  Valence  ;  mais  ils  ne  sont  pas  assez  autorisés  pour  les 
compter  entre  ses  véritables  décisions. 


IV  SIECLE. 


Conc.  ibid. 
907. 


p.  904. 


p.  1807  I  Till.  ibid. 
p.  553. 


Conc.  ibid.  p. 907. 


i9  I  nol.    ibid. 
Till.    Emp.    I. 
p.  702. 


THEODORE, 

Secuétaiui;  d'Etat. 

'rpnEODouE,  dont  nous  entreprenons  l'éloge,  est  fameux  Amm.  i.  «)._  p 
idans  les  écrits  de  S.  Chrysoslonie  et  d'Ammien  Mar- 
cellin.  11  est  certainement  le  même  dont  parlent  l'un  et  l'au- 
tre, quoiqu'en  dise  le  Cardinal  Ikironius.  Mais  il  ne  le  faut 
pas  confondre  avec  un  autre  Théodore  Consul  en  399,  à  qui 
Symmaque  adresse  plusieurs  letrcs  de  son  cinquième  livre. 
Selon  S.  Chrysostome,  Théodore  étoit  né  en  Sicile,  où  son 
père  pouvoit  exercer  quelque  charge,  lorsque  sa  mère  le  mit 
au  monde.  Mais  Ammien  MarccUin  assure  qu'il  étoit  Gaulois 
de  nation,  et  que  sa  famille  tenoil  dans  les  Gaules,  un  rang 
distingué  par  l'ancienneté  de  sa  noblesse. 

'  Théodore  reçut  une  éducation  conforme  à  sa  naissance.  Dès  Amm.  ib. 
sa  première  jeunesse  il  fit  paroîlre  be;iucoup  de  modestie,  de 
prudence,  de  bonté  et  de  politesse.  Il  s'apliqua  à  l'étude  des 
belles  letres  avec  tant  de  succès,  qu'il  .s'y  rendit  très-habile, 
Hteris  omatissimus.  Il  étoit  parfaitement  bien  fait  en  sa  taille  et 
sa  figure  ;  et  personne  ne  savoit  mieux  que  lui  retenir  sa  langue. 

D  d  ij 


212  AUSONE, 

IV  SIECLE.  Mais  autant  qu'il  avoit  de  discrétion  pour  ne  rien  dire  d'im- 
prudent,  autant  il  avoit  de  liberté  à  parler,  lorsque  l'ocasion 
ou  la  nécessité  le  demandoient.  En  un  mot  il  réunissoit  en  sa 
personne  tant  d'excellentes  qualités,  qu'il  parut  toujours  au- 
dessus  des  grandes  charges  qu'il  remplit,  et  qu'il  se  rendit  ai- 
mable à  tout  le  monde. 

Amm.  ibid.p.Ms.  '  Tous  ccs  avautagcs  de  l'esprit  et  du  corps  le  firent  choisir 
par  l'Empereur  Valens  pour  son  second  Secrétaire.  C'étoit  une 
charge  qui  demandoit  un  homme  de  beaucoup  d'esprit  et  de 
savoir,  et  qui  donnoit  tout  accès  et  un  grand  crédit  auprès  du 

p.  548.554.  Prince.  '  Il  y  avoit  déjà  quelque  lems  que  Théodore  la  rem- 

plissoit  avec  honneur,  lorsque  les  Païens  ermuiés  du  règne  de 
Valens,  conspirèrent  contre  lui,  et  voulurent  savoir  par  la 
magie  qui  lui  succederoit.  Ililaire  et  Patrice  fameux  Magiciens 
furent  emploies  pour  le  découvrir.  Il  leur  parut  que  ce  seroit 

p.  548.  Théodore  dont  nous  parlons.  '  Et  certes,  dit  Ammien  Mar- 

cellin,  il  étoit  bien  digne  de  l'Empire.  Théodore  étoit  Païen. 
Ainsi  il  n'est  pas  surprenant  qu'un  Auteur  Païen  parle  de  lui 

p.  554.  aussi  avantageusement.  '  Quoique  d'abord  il  ne  sût  rien  de  ce 

qui  se  passoit,  l'ambition  ne  laissa  pas  ensuite  de  trouver  en- 
trée dans  son  cœur,  et  de  le  faire  consentir  sans  peine  à  ce 
dont  les  prétendus  oracles  le  flatoient.  Mais  la  conspiration 
aïant  été  bien-tôt  découverte,  il  fut  convaincu  de  trahison, 
sur-tout  par  les  letres  qu'il  avoit  écrites  furtivement  à  ce  sujet 
à  Hilaire,  l'un  des  deux  Magiciens  dont  on  s'étoit  servi  pour  la 

p.  555.  divination.  '  Théodore  porta  donc  la  peine  de  son  ambition, 

et  découvrit  par-là  la  fausseté  des  oracles.  Il  eut  la  tête  tran- 

Tiii.  ib.  p.  107.  chée  avec  ses  complices  '  l'an  de  .T.  C.  374,  le  onzième  de 
l'Empire  de  Valens.  Il  laissa  un  fils  nommé  Iquere  ou  Hiere, 
qui  se  rendit  célèbre  par  son  savoir.  Nous  en  parlerons  en  son 
heu. 


AUSONE, 

Médecin. 

Ans.  cpic.  p.  297.  '  j  uLius  Ausouius  nâquit  à  Basas  en  Aquitaine  vers  l'an  287. 

«^  I  par.  c.  1.  p.  J  jj  g^ijj^  depuis  s'établir  à  Bourdeaux,  et  y  exerça  la  méde- 
cine qui  étoit  la  profession  qu'il  avoit  embrassée.  Il  s'acquit 
dans  cet  art  beaucoup  de  réputation,  et  mérita  de  passer  pour 


MEDECIN.  213 

un  des  premiers  Médecins  de  son  temps.  *  Sans  s'arrêter  à  la    iv  siècle. 
méthode  ni  d'Hippocrate  ni  de  Galien,  ni  d'aucun  autre  Me-  .  vin.  in.  Ans.  i 
decin  de  l'antiquité,  il  s'y  fraïa  des  routes  nouvelles,  ''  qui  eu-  J^^^        ^ 
rent  un  heureux  succès.  Mais  quoiqu'il  ne  suivît  pas  la  métho- 
de d'Hippocrate,  il  imitoit  néanmoins  son  exemple,  '  en  exer-  epic.  p.  sm. 
çant  gratuitement  la  médecine  envers  tout  le  monde.  Ainsi 
il  n'amassa  point  de  richesses  dans  cette  profession,  et  demeu- 
ra toujours  dans  une  honnête  médiocrité  des  biens  de  la  fortu- 
ne, non  opulens,  nec  egens. 

'  Il  étoit  encore  jeune,  lorsqu'il  se  maria;  et  ses  enfans  au-  ep.  i.  p.  ses. 
roient  pu  être  ses  frères.  '  Il  épousa  yEmilia  yEonia  fille  d'Ar-  par.  c.  i.  2. 
bore  d'Autun.  '  De  ce  mariage,  où  ils  passèrent  45  ans  avec  epic.  p.  3001  par. 
une  union  et  une  fidélité  inviolable  de  part  et  d'autre,  sor-  ''  ""  ""  "'  ^' 
tirent  quatre  enfans,  deux  garçons  et  deux  filles.  Le  Poëte 
Ausone,  dont  nous  parlerons  en  particulier,  fut  l'aîné  des  gar- 
çons, et  le  plus  illustre  de  toute  la  famille.  Avitien  homme 
d'esprit  et  de  grande  espérance  fut  le  second.  Il  embrassa  la 
proiession  de  son  père;  mais  il  fut  enlevé  de  ce  monde  dès  la 
fleur  de  son  âge.  i^îmilia  Melania  l'aînée  de  tous  mourut  étant 
encore  à  la  mamelle.  Julia  Dryadia  la  plus  jeune  des  filles, 
qui  est  louée  pour  ses  mœurs  et  son  savoir  au-dessus  de  son 
sexe,  épousa    Pomponius    Maximus   Sénateur  à  Bourdeaui , 
qui  la  laissa  veuve  de  bonne  heure. 

'  Jule  Ausone  ne  se  rendit  pas  seulement  célèbre  par  son  epic.  p.  J97. 300. 
habileté  dans  l'art  de  la  médecine,  il  le  devint  encore  da- 
vantage par  une  régularité  de  conduite,  où  brillèrent  toutes 
les  vertus  morales.  '  Sa  sagesse  étoit  si  universellement  recon-  par.  c.  i. 
nue,  que  son  siècle  le  regardoit  sans  difficulté  comme  l'un 
des  sept  sages  de  l'ancienne  Grèce.  On  disoit  tout  communé- 
ment de  lui  :  «  Comme  Ausone  n'avoit  personne  qui  put  lui 
«  servir  de  modèle  dans  son  genre  de  vie,  de  même  il  n'a  per- 
«  sonne  qui  l'imite  aujourd'hui.  » 

Si  le  portrait  qu'on  nous  a  laissé  de  ses  vertus,  n'est  point 
flaté,  Ausone  pouvoit  à  juste  titre  passer  pour  le  Philosophe 
le  plus  acompli  de  son  tems.  '  Toujours  égal  à  lui-même,  «pic  p.  ms. 
il  fut  toute  sa  vie  uniforme  en  sa  table,  ses  habits  et  ses  ma- 
nières. '  Comme  il  étoit  naturellement  vif  et  porté  à  la  colère,  p.  300. 
il  avoit  un  soin  infini  pour  en  retenir  les  saillies;  et  s'il  lui  arri- 
voit  quelquefois  de  se  laisser  surprendre,  il  s'en  punissoit  sé- 
vèrement lui-même.  Infiniment  éloigné  de  tout  esprit  de  fac- 
tion et  de  cabale,  il  passa  toute  sa  vie  sans  procès  et  sans  con- 

15 


2i4  A  U  S  0  N  E  , 

IV  SIECLE,  teslation,  et  n'entra  jamais  dans  aucun  jugement,  sur-tout 
contre  les  coupables.  Aussi  réservé  à  mentir  qu'à  jurer,  il  eut 
encore  une  horreur  extrême  et  pour  la  calomnie  et  pour  la 
médisance.  Toujours  atentif  à  répondre  à  la  bonne  opinion 
qu'on  avoit  de  lui,  il  ne  manqua  jamais  aux  devoirs  mêmes 
ae  la  bienséance,  et  sut  toujours  rendre  ce  qu'il  devoil  aux 
personnes  selon  leur  rang  et  leur  qualité.  Il  garda  toujours  à 
ses  amis  une  fidélité  sincère  et  inviolable.  Jamais  la  curiosité, 
les  vaines  espérances,  les  solicitudes  pour  l'avenir  ne  trou- 
blèrent son  esprit.  Jamais  non  plus  ni  l'envie  ni  l'ambition  ne 
trouvèrent  entrée  dans  son  cœur.  Indiffèrent  pour  les  riches- 
ses, mais  œconome  sans  avarice,  il  conserva  le  bien  qu'il  avoit 
reçu  de  ses  pères  sans  l'acroître.  Il  eut  toujours  de  l'aversion 
pour  le  tumulte,  les  cohues,  les  fausses  amitiés  des  Grands.  Il 
se  trouvoit  par-là  exemt  de  llaterio.  Et  ce  qu'il  y  a  de  plus  ad- 
mirable, c'est  qu'il  passoit  pQur  un  homme  acompli  aux  yeux 
des  autres,  sans  en  avoir  de  vaine  complaisance  en  lui- 
même. 

Ans.  cpi.  p.  299.       '  Scs  maximes  de  morale  étoient  aussi  édifiantes  que  sa  con- 

^-  duite.  Il  faisoit  consister  l'honneur  à  ne  rien  faire  contre  son 

devoir,  et  à  prévenir  les  loix  par  les  bonnes  mœurs.  11  estimoit 
heureux,  non  celui  qui  a  ce  qu'il  désire,  mais  celui  qui  ne 

r«r.  c.  1.  désire  point  ce  qu'il  n'a  pas.  '  Il  fit  lui-même  consister  en  cela 

son  propre  bonheur.  Tout  ce  qu'il  voulut,  lui  n-ussit;  et  tout 
ce  qu'il  souhaita,  il  le  vit  arriver  comme  il  l'avoit  souhaité, 
parce  qu'il  ne  souhaita  jamais  rien  que  dans  l'ordre. 

Dans  tout  cet  éloge,  où  le  Poêle  Ausone  nous  représente 
son  père  comme  un  grand  Philosophe,  il  ne  dit  pas  un  mot 
de  son  Christianisme.  On  iw  peut  pas  néanmoins  douter  qu'il 

i.2t>.  ne  fût  ChnHien;  '  puisque  l'on  a  des  preuves  que  sa  famille 

faisoit  même  profession  de  pieté. 

ipif .  p.  ««  I  Vil.  '  Un  mérite  aussi  émiiient  joint  à  sa  science  dans  la  médeci- 
ne, valut  à  Ausone  la  dignité  de  premier  Médecin  de  l'Em- 
pereur Valentinien  I,  à  laquelle  il  fut  élevé.  Son  fils  étoit 
alors  Précepteur  du  jeune  Gratien  ;  et  peut-être  que  son  cré- 
dit auprès  du  Prince  contribua  beaucoup  à  l'élévation  du  pe- 

ej.ic.p.  .wi-Tiii.  re.  Quoiqu'il  en  soit,  Au.sone  ne  tarda  pas  '  à  se  voir  encore 

Kmp.  t. .-..  p.  148.  ^jgy^  j,  (j  autres  hoimeurs.  Car  bien  qu'il  ne  les  recherchât  pas, 

.     il  ne  les  refusa  pas  non  plus,  lorsqu'on  les  lui  offrit.  Il  fut  fait 

Préfet  de  l'Illyrie,  aparemment  ajprès  Probe,  qui  exerça  long- 

tems  cette  charge  sous  Valentinien  I,  avec  la  Préfecture  de 


MEDECIN.  215 

l'Italie.  *  Il  n'étoit  point  alors  étrange  de  voir  les  personnes  de  iv  siècle. 

la  profession  d'Ansone ,  sur-tout  les  premiers  Médecins ,  mon-  .  ooa.  Tu.  i.  3. 

ter  aux  plus  hautes  charges  de  l'Empire.  Sous  le  règne  de  ^4 ,  ^u  ' 'côlif  •[• 

Graticn  ,  Yindicien  fut  Proconsul  et  Vicaire  des  Préfets.  On  4.c.  3.  ' 

en  pourroit  nommer   beaucoup  d'autres.   '  Mais  il  semble  aus.  u».  i  tiu.  ib. 
qu'Ausone  n'avoit  seulement  comme  honoraire ,  que  le  titre,  le 

rang  et  les  apointemens  de  Préfet.  '  Il  fut  de  même  Sénateur  Aus.  ib.  p.  «98. 
honoraire  dans  deux  différens  Sénats  à  Rome  et  à  Bourdeaux. 

'  Arrivé  enfin  à  une  heureuse  vieillesse ,  il  mourut  paisible-  p.  300.  soi.  303 
ment ,  après  avoir  vu  les  deux  Préfectures  de  son  fils  aîné  ,  et 
le  Proconsulat  d'IIespere  son  petit-fils ,  qui  l'exerça  en  376 
et  partie  de  377.  Mais  il  ne  vil  point  le  Consulat  du  premier 
en  379 ,  ni  la  Préfecture  du  second  en  378.  Ainsi  sa  mort  ar- 
riva en  377 ,  lorsqu'il  achevoit  la  90'  année  de  son  âge.  '  Il  par.  c.  i. 
est  marqué  ailleurs  qu'il  ne  vécut  que  22  Olympiades,  qui 
font  88  ans.  Mais  il  y  a  aparence  que  la  contrainte  des  vers 
en  cet  endroit  n'a  pas  permis  que  l'on  exprimât  les  deux  an- 
nées de  la  23"  Olympiade  commencée.  Le  Poète  Ausone 
nous  a  laissé  deux  différens  éloges  de  notre  Médecin.  Nous 
n'avons  proprement  fait  que  copier  le  plus  long,  (*)  et  nous  don-  C)  Dans  ce  quon 
nons  l'autre  ici  en  son  entier,  pour  lui  servir  d'épitaphe. 


vient  (le  lire. 


Cura  Dci,  placidœ  functus  quotl  honore  sciicctac,  ,^jj 

Undfcies  binas  vixit  olympiades. 
Omniu  qiKB  voluit,  qui  prospéra  vidit  :  et  idem 

Optavit  quidquid,  coutigit  ut  voluit. 
Non  quia  fatorum  niiiiia  indulgcntia,  sed  quod 

Tam  moderata  illi  vota  fucrc  viro. 
Uucin  sua  contundit  septeni  Sapientibus  œtas, 

Quorum  doctrinam  moribus  cxcoluit  : 
Viverct  ut  potius,  quam  diceret  arte  Sophorum . 

Quaiiquam  et  facundo  non  radis  ingénie. 
Pneditus  et  vitas  liominuni  ratione  medeudi 

Porrigerc,  et  latis  amplilicarc  moras. 
Inde  et  perfuncta^  manet  hajc  rcverentia  vitap, 

iEtas  nostra  illi  quod  dcdit  hunciitulum  ; 
Ut  nuiluni  Ausonius,  qucm  sectaretur ,  liabebat, 

Sic  nuUum ,  qui  se  nunc  imitetur,  habet. 

'  Ju le  Ausone  avoit  deux  frères,  Claudius  Contentus  et  Ju-  c.  7. 
lius  Calippo.  Le  premier  mourut  à  la  fleur  de  son  âge  dans  la 


216  AUSONE,  MEDECIN. 

IV  SIECLE,  grande  Bretagne,  où  il  avoit  amassé  de  grands  biens  par  son 
trafic.  L'autre  vécut  jusqu'à  la  vieillesse,  mais  sans  bien  et  sans 
avoir  figuré  dans  le  monde.  Ni  l'un  ni  l'autre  ne  laissèrent  de 

Ans.  ib.  C.Î6.27.  postérité.  '  Il  avoit  aussi  deux  Sœurs,  Julia  Vcnera  etJulia 
Calaphronia.  Celle-ci  préfera  l'amour  de  la  virginité  au  ma- 
riage ,  et  passa  toute  sa  vie  dans  les  exercices  de  la  pieté  Chré- 

c.  M.  tienne.  '  L'autre  fut  mariée ,  et  eut ,  ce  semble  ,  de  son  ma- 

riage Julia  Idalia,  que  le  poëte  Ausone  qualifie  de  sa  cousine  , 

ep.  24.  p.  687.  fille  dc  sa  tante  maternelle.  '  Il  y  avoit  entre  Ausone  et  le  pè- 
re de  S.  Paulin,  depuis  Evêque  de  Noie ,  une  étroite  amitié , 
3ui  fut  le  principe  de  l'union  mutuelle  qui  se  forma  entre  leurs 
eux  fils,  comme  l'on  verra  par  la  suite. 

par.  c.  1.  '  Jule  Ausone  ne  manquoit  ni  d'érudition  ni  de  noblesse 

dans  ses  pensées;  quoiqu'il  se  fût  beaucoup  plusapliqué  à  imi- 
ter les  mœurs  des  Anciens ,  qu'à  acquérir  leur  savoir  et  leur 

epic.  p.  298.  éloquence.  '  Il  avoit  quelque  difficulté  à  parler  la  langue  la- 
tine. Mais  il  possedoit  parfaitement  et  parloit  de  même  Ta  gré- 
que  ;  parce  aparemment  que  l'étude  de  la  médecine  l'avoit 
engagé  à  la  cultiver  plus  que  l'autre,  qui  devoit  lui  être  plus 
naturelle.  (X.) 

Mar  de  Med.  pr.       '  Il  laissa  quclqucs  écrits  sur  la  médecine,  dont  les  malheurs 

'*'  ^^'  des  tems  nous  ont  privés.  Nous  n'en  avons  d'autre  connois- 

sance  que  ce  que  nous  en  aprend  Marcel  surnommé  l'Empi- 
rique ,  qui  écrivoit  au  commencement  du  V  siècle ,  et  qui  té- 
moigne s'en  être  servi  pour  composer  les  siens.  Ceux-ci  sont 
vjenus  jusqu'à  nous  au  moins  en  partie.  Mais  on  n'y  découvre 
point    autrement  ce  que    Marcel  a  pris  de  ceux  d'Ausone. 

.r.  25.  p.  353.  Seulement  à  l'article  des  remèdes  propres  à  guérir  la  sciati- 

que,  il  est  fait  mention  d'un  qu'Ausone  avoit  éprouvé  sur  lui- 
même  avec  succès,  et  dont  il  avoit  fait  usage  à  l'égard  d'autres 
personnes,  qui  ne  pouvant  se  remuer  qu'avec  des  douleurs 
extrêmes,  avoient  été  guéries  dans  l'espace  de  sept  jours  par 
la  vertu  de  ce  remède. 


MARCEL 


217 


IV  SIECLE. 


Ans.  prof.  V,.  18. 


C.18. 


MARCEL, 

Gra.mm.\irien  ; 

ET     NEPOTIEN, 

GRAMMAiniEN    ET   RuETEUR. 

MARCEL  et  Nepotien  paroisserit  avoir  fleuri  en  même 
tems,  quoiquen  différens  lieux.  C'est  pour  cela  en  par- 
tie que  nous  réunissons  leurs  éloges.  '  Le  premier  naquit  à 
Bourdeaux  quelques  années  après  le  commencement  de  ce 
siècle.  Il  étoit  fils  d'un  père  de  même  nom  que  lui.  Sa  mère, 
qui  meritoit  mieux  la  qualité  de  marâtre  cruelle,  n'aiant  ja- 
mais pu  le  souffrir,  le  chassa  enfin  de  la  maison  paternelle,  et 
lui  fit  quitter  la  ville.  La  bonne  fortune  de  Marcel  le  condui- 
sit à  Narbone.  Là  Clarentius  l'un  des  premiers  Citoiens  de  la 
ville,  touché  de  son  malheur,  le  reçut  généreusement  dans  sa 
maison,  et  lui  fit  ensuite  épouser  une  de  ses  filles.  Bien-tôt  ""  ' 

Marcel  ouvrit  une  école  de  Grammaire,  où  il  enseigna  avec 
un  grand  concours  d'étudians.  Il  amassa  dans  cette  profession 
des  richesses  considérables.  Mais  son  peu  de  conduite,  son 
mauvais  génie,  et  d'autres  défauts  qu'Ausone  n'a  pas  jugé  à 
propos  de  relever,  lui  firent  tout  perdre  à  la  fois. 

'Quelques  Ecrivains  prétendent  que  ce  Grammairien  étoit  vin.inAus.  jimi 
fils  de  Marcel  célèbre  Médecin,  et  l'un  des  premiers  Officiers  p*^'.  *""•  '*■ 
de  l'Empereur  Théodose  le  grand.  Us  pou  voient  à  la  vérité 
sortir  de  la  même  famille,  puisqu'ils  étoient  de  Bourdeaux  l'un 
et  l'autre;  mais  l'opinion  de  ces  Ecrivains  est  contre  toute 
aparence.  Ce  seroit  plutôt  le  Médecin  qui  auroit  pu  être  fils 
du  Grammairien.  Car  celui-ci  étoit  déjà  mort  depuis  quelques 
années,  lorsqu'Ausone  faisoit  son  éloge  vers  386  :  au  lieu  que 
Marcel  le  Médecin  n'écrivoit  qu'au  commencement  du  V 
siècle,  et  ne  commença  à  être  célèbre  que  vers  l'an  395.  (XL) 

'  Du  temps  de  Marcel  qui  fait  le  sujet  de  cet  article,  vivoit  tiii.  Emp.  t.  *.  p. 
un  autre  Grammairien  de  même  nom,  avec  lequel  il  ne  le  faut  *'*• 
pas  confondre.   Celuici  portoit  le  prénom  de  Nonius,  et  a 
laissé  un  ouvrage  de  sa  façon  sur  la  propriété  des  termes  la- 
lins.  Le  titre  de  son  livre  nous  aprend  que  l'auteur  étoit  de 
Tivoli. 


Tome  1.  Sec.  Part. 


£  e 


218      MARCEL,  GRAM.  ET  NEPOTIEN,  RIIET. 

lY  SIECLE.        •  On  ne  nous  dit  point  quel  fut  le  lieu  de  la  naissance  de 

•  Au»  ibid  c  15  Nepotien.  Mais  on  sait  qu'il  étoit  un  des  plus  célèbres  Pro- 
fesseur du  Collège  de  Bourdeaux  après  le  milieu  du  IV  siècle. 
Il  y  enseigna  d'abord  la  grammaire,  et  y  donna  ensuite  des 
leçons  d'éloquence.  Il  réùnissoit  en  sa  personne  toutes  les  qua- 
lités qui  font  l'homme  de  mérite  et  l'homme  de  letres. 

Ibid.  '  Naturellement  doux,  poli,  honnête,  on  n'entendit  jamais 

sortir  de  sa  bouche  que  des  paroles  obligeantes  et  gracieuses. 
Quoique  d'une  humeur  enjouée  et  agréable,  qu'il  conserva 
jusqu  à  la  vieillesse,  il  parloit  très-peu.  Mais  lorsqu'il  le  fai- 
soit,  c'étoit  avec  une  grâce  qui  charmoit  tous  ceux  qui  l'enten- 
doient,  et  qui  monlroit  combien  il  étoit  habile  dans  l'art  de  sa- 
voir mêler  le  sérieux  avec  l'agréable  :  Tarn  seriorum  guam 
jocorum  particeps.  Il  joignoil  à  tout  cela  beaucoup  de  retenue 
et  de  modestie.  Il  étoit  économe,  frugal,  sobre,  et  d'une  pro- 
bité reconnue.  Ausone  son  ajni  inséparable,  qui  l'avoit  logé 
chez  lui,  témoigne,  qu'il  faisoit  ses  plus  chères  délices  de  sa 
compagnie,  et  qu'il  ne  connoissoit  point  d'homme  d'un  meil- 
leur conseil. 

Ibid.  '  Pour  les  letres,  Nepolien  pouvoit  à  juste  titre  aller  de 

pair  avec  les  plus  sa  vans  hommes  de  son  siècle.  Il  sa  voit  par 
cœur  tous  les  écrits  des  célèbres  Scaurus  et  Probus,  qui  ont 
traité  à  fond  de  la  grammaire.  Il  possedoit  parfaitement  la 
dialectique,  et  ne  cédoit  à  nul  autre  llhêteur  pour  bien  écrire  : 
Facunde,  nulli  Rhetorum  cedens  atylo.  Il  avoit  la  mémoire  si 
heureuse,  qu'Ausone  ne  fait  pas  difficulté  de  le  comparer  en 
ce  point  au  fameux  Gineas  Ambassadeur  du  Roi  des  Epirotes, 

Vin.  in.Ansj.  139.  '  qui  le  lendemain  de  son  entrée  dans  Rome  salua  tous  les  Sé- 
nateurs et  tous  les  Chevaliers  chacun  par  son  nom. 

Au»,  ibid.  '  Nepotien  vécut  jusqu'à  l'âge  de  90  ans,  et  laissa  deux  fils, 

que  l'histoire  ne  nous  fait  pas  autrement  connoître.  Il  paroît 
par  le  vers  suivant  qui  fait  partie  de  son  éloge,  qu'il  avoit  exer- 
cé quelque  charge  dans  la  Préfecture  ou  le  gouvernement  de 
quelque  province,  et  qu'il  s'y  étoit  acquis  beaucoup  de  gloire. 

Honore  gesti  i)i-œsidatus  iaclytos. 


219 


IV  SIECLE. 


S.    J  U  S  T, 

Disciple  de  S.  IIilaire  de  Poitiers. 


468. 


IbiU. 


E'       NTRE  les  disciples  de  S.    Hilaire  de  Poitiers,  que  l'on  Bouck.  ann.  1. 1 
connoît  peu,  si  l'on  en  excepte  S.  Martin,  on  nomme  un  ""  *"" 
S.  Just  que  l'on  assure  avoir  écrit  la  vie  de  ce  S.  Docteur.  C'est 
ce  qui  nous  engage  à  parler  ici  et  de  la  personne  et  de  l'ou- 
vrage de  cet  Ecrivain.  '  On  raporte  beaucoup  de  choses  de  Mar.  gaii.  p.  930 
sa  personne.  Nous  n'en  dirons  néanmoins  que  très-peu  ;  parce 
qu  il  y  en  a  peu  ou  même  point  du  tout  d'assurées,  il  fut,  dit- 
on,  ordonné  Prêtre  par  S.  IIilaire  même,  '  puis  envoie  en  Pé-  Boucii.  ibid.  c.  h 
rigord,  où  il  mourut,  et  fut  inhumé  à  quatre  lieues  de  Limo- 
ges. '  M.  du  Saussay  dans  son  martyrologe  de  France  marque  Mar.  Caii.  iwj. 
sa  fête  au  25  do  Novembre.  '  Mais  tout  ce  que  lui  et  Jean  Tiii.  h.  e.  t.  7.  p 
Bouchet  nous  en  débitent,  dépend  des  pièces  qu'ils  ont  vîiës, 
et  que  nous  n'avons  point.  Car  pour  leur  autorité  seule,  quel- 
que respectable  qu'elle  soit  sur  d'autres  faits,  ils  sont  des  Ecri- 
vains trop  modernes,  pour  s'y  arrêter  en  ce  qui  regarde  des 
tems  aussi  éloignés  d'eux. 

'  Quant  à  l'histoire  de  S.  Hilaire  que  l'on  attribue  à  S.  Just, 
et  que  l'on  disoit,  il  y  a  plus  de  deux  siècles,  se  conserver  à 
Poitiers  dans  le  thrésor  de  S.  IIilaire  le  grand,  on  en  raporte 
des  choses  si  étranges,  que  l'on  ne  peut  avoir  égard  à  tout  ce 
que  l'on  en  cite.  D'ailleurs  cette  pièce  neparoU  point;  et  les 
faits  extraordinaires  que  l'on  dit  s'y  trouver,  suffisent  seuls 
pour  faire  juger  qu'elle  n'est  pas  d'un  disciple  de  S.  Hilaire. 

'Il  ne  faudroit  même  que  la  fable  plus  qu'insoutenable  d'une 
dispute  entre  S.  Hilaire  de  Poitiers  que  1  on  confond  ici  avec 
S.  Hilaire  d'Arles,  et  entre  S.  Léon,  pour  prouver  que  l'his- 
toire où  elle  se  trouve,  est  une  pièce  suposée.  C'est  en  vain 
que  Bouchet  cite  Fortunat  pour  apuïer  cette  fable.  Il  est  cer- 
tain qu'il  n'en  dit  pas  un  mot.  Que  si  elle  se  trouvoit  dans  la 
vie  qu'il  nous  a  laissée  de  S.  Hilaire,  cette  vie  seroit  à  rejeter 
comme  celle  qu'on  atribuë  à  S.  Just. 

Outre  cette  mauvaise  pièce  que   l'on  voit  clairement   ne 

fjouvoir  être  l'ouvrage  d'un  disciple  de  S.  Hilaire,  '  Bollandus 
ui  donne  le  premier  livre  de  celle  qui  a  été  écrite  par  Fortu- 
nat. U  prétend  que  S.  Just  l'aura  composé  aussi-tôt  après  la 

E  e  ij 


p.  757. 


..t.diJ 


Boll.    13.  Jan.  p. 
785. 


220  EUTROPE,  HISTORIEN. 

IV  SIECLE,     mort  du  Saint,  et  qu'ensuite  Foitnnal  l'aura  retouchée  en  son 

Bail.  13  jan.  lab.  temp,  et  y  aura  ajouté  le  second  livre.  '  MrBailletest  presque 

«"'•  dans  la  même  opinion,  et  soutient  que  Fortunat,  dont  le  nom 

se  lit  à  la  tête  de  cette  vie  de  S.  Hilaire,  en  est  moins  l'Auteur 

original,  que  le  Paraphraste  et  le  Continuateur. 

Mais  si  l'on  y  fait  de  sérieuses  réflexions  :  pourra-l'on  se  per- 
suader qu'un  disciple  de  S.  Hilâire  entreprenant  d'écrire  sa  vie, 
y  auroil  oublié  les  plus  beaux  traits  de  son  histoire?  Ne  se  sent- 
on  aucune  difliculté  à  croire  qu'il  n'y  auroit  parlé  ni  du  Con- 
cile de  Beziers,  où  S.  Hilaire  lit  un  si  beau  personnage,  ni  de 
l'affaire  de  Saturnin  d'Arles,  h  laquelle  il  eut  tant  de  part,  ni 
enfin  de  ce  qui  se  passa  à  Milan  entre  lui  et  Auxence,  et  qui 
fit  tant  d'éclat  dans  l'Eglise  d'Occident?  C'est  de  quoi  néan- 
moins l'écrit  que  l'on  \  eut  donner  à  S.  Just,  ne  fait  nulle  men- 
tion. Il  est  donc  plus  raisonnable  de  dire  que  S.  Just  n'est  pas 
plus  l'Auteur  du  premier  livre  de  la  vie  de  S.  Hilaire  qui  por- 
te le  nom  de  Fortunat,  qu'il  l'est  de  celle  que  lui  a  voulu  prê- 
ter Jean  Bouchet.  (XII.) 

>. ^ . 

EUTROPE, 

HISTORIEN. 

S-  I- 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

E  nom  d'Eulrope  fut  fort  commun  dans  l'Empire  en  ce 
J  siecle-ci  et  le  suivant.  11  y  parut  plusieurs  grands  hom- 
mes qui  le  portoient  :  ce  qui  dans  la  suite  a  donné  ocasion  de 
les  confondre  les  uns  avec  les  autres.  Nous  tâcherons  d'évi- 
ter ici  lemêmeécueil. 

Mar.  de  mei.  pr.  p.  '  Cclui  dout  uous  entreprenons  l'éloge,  étoit  de  même  pais 
que  Jules  Ausone,  dont  nous  avons  déjà  parlé,  c'est-à-dire, 
ou  de  Bourdeaux,  ou  de  quelque  aulre  endroit  d'Aquitaine 

Sjm.  iib.3.  p.  53.  du  côté  de  Basas.  '  Symmaque  ami  particulier  d'Eutrope  con- 
firme ce  sentiment,  en  disant  qu'il  avoit  des  terres  contigues 
à  celles  du  Consul  Ausone  fils  de  Jule  '.  On  voit  par-là  qu'Eu- 

<  Il  est  visible  qu'il  sVst  glissé  une  faute  admirator  luus,  tcripto  ex  Atia  nuperal- 
dans  la  lelre  où  Symmague  rend  ce  téinoi-  lato  mutilari  agrot  tuoi  qui  tuit  conjun- 
gnage.  On  y  lit  :  Auiontui  vir  Consularis,       gtmtur,   accepit.  11  est  certain  qa'Ausone 


L 


m 


EUTROPE,    HISTORIEN.  221 

Irope  fleurissoit  en  même  lems  qu'Ausone  le  fils,  qui  étoit  un    iv  siècle. 
de  ses  grands  admirateurs,  et  du  fameux  Symmaque,  dont 
nous  avons  un  recueil  de  Ictres.  '  GVsl  ce  qui  s'acorde  parfai-  Mar.  ibid. 
tement  avec  ce  que  nous  en  aprend  Marcel  le  Médecin,  qui 
écrivoit  au  ccmmenceuient  du  V  siècle.  Celui-ci  ajoute  qu'Eu- 
trope  fut  élevé  à  de  grands  honneurs,  sans  néanmoins  nous 
les  faire  autrement  connoîlre.  Sur  cette   idée   on  pourroit 
prendre  aussi  Eutrope' pour  le  Proconsul  d'Asie  de  même  nom,  Amm.  i.  29.  p. 
dont  parle  Ammien  Marcellin  sur  les  années  371  et  373,  et  *'*l"°''  "*• 
qui  fut  Préfet  du  Prétoire  en  380  et  381.  Mais  on  sait  d'ail- 
leurs que  ce  Proconsul  étoit  neveu  et  disciple  d'Acace,  et  So- 
phiste Grec  de  nation  :  ce  qui  ne  convient  pas  à  celui  dont 
nous  faisons  l'histoire  ;  quoiqu'il  pût  fort  bien  exercer  aussi  vers 
le  même  tems  quelque  charge  considérable  en  Orient.  11  n'é- 
toit  du  tout  point  nouveau  de  voir  en  même  tems  deux  per- 
sonnes de  même  nom  dans  les  premières  charges  de  l'Etat. 
On  avoit  déjà  vu,  sous  Constance  et  Julien  un,  Saluste  Préfet 
d'Orient,  et  un  autre  Saluste  Préfet  des  Gaules. 

'  Eutrope  étoit,  ce  semble,  à  la  Cour,  qui  faisoit  sa  rési-  sym.ibid.  «p  so. 
dence  hors  d'Italie,  '  lorsque  le  Rhéteur  Pallade,  par  qui  Sym- 
maque lui  adressa  une  de  ses  letres,  y  fut  apelé  de  Home.  Il 
semole  aussi  qu'il  exerçoit  quelque  charge.  '  Symmaque  dans  1.  3.  ep.  47. 50. 
cette  lelre  comme  dans  les  sept  autres  qu'il  lui  a  écrites,  lui  **'  ^' 
parle  toujours  comme  à  un  homme  d'un  savoir  éminent.  '  11  ep.  47. 
y  en  a  une  entre  autres,  où  il  nous  a  fait  plus  particulièrement 
son  caractère  par  raport  à  son  talent  pour  les  letres.  C'est  la 
47  du  3*  livre.  Elle  ml  écrite  sous  le  règne  de  Gratien,  et 
selon  toute  aparence  en  378,  après  que  cet  Empereur  eut  dé- 
fait les  Allemans. 

'  D'abord  Symmaque  reproche  agréablement  à  Eutrope  de  ibid. 
se  donner  du  loisir  et  d'aporter  de  la  négligence  à  contmuer 
d'écrire,  en  un  tems  où  l'on  voïoit  l'Empire  auparavant  chan- 
celant reprendre  sa  première  vigueur  sous  Gratien,  qui  avoit 
autant  de  bonheur  à  le  gouverner,  qu'il  y  faisoit  paroître  de 


n'eat  jamais  de  bion  f»nds  en  Asie,  et  que  d'Anch  métropole  de  Basas,  et  non  pas  ex 

ses    terres    ctoiunt  situées  et  en  Saintonge  Asia. 

et  prés   d<3   Basas.    Comnifnl  donc   aunut- 

il    apris    d'Asie    qu'on     i-nvahissoit     une*  1-    H  y   avoit  alors  denx  Cours  impéria- 

fiartie  de  ses  terres  ?  D'ailleurs  on  verra  par  les,   celle  de  Valens   en   Orient,  l'autre  de 

a  suite  qu'Eiiti ope  à  >iui  Symmaque  mande  Gntien  à   Trêves   dans   les    Gaules.   C'est 

celte  parliculnril<>,  étoit  lui-mcme  en  Asie.  pliUot   de   la   première   que  de  la  seconde 

Il  faut  'Jo.'ic  li  e  dans  ce  texte  :  Ex  Autcia  qu'il  s'agit  ici. 


222  EUTROPE. 

IV  SIECLE,  sagesse  et  de  puissance.  Ensuite  craignant  d'entrer  dans  le  dr- 
tail  des  grandes  actions  de  ce  Prince,  Symmaque  dit  à  Eutro- 
pe  que  l'exécution  de  son  histoire  est  réservée  à  sa  plume  pré- 
férablement  à  celle  de  tout  autre  Ecrivain,  parce  qu'il  a  un  ta- 
lent tout  particulier  pour  écrire  :  Sed  hœc  stylo  exsequenda  tibi 
ante  alios,  cm  pollet  Minerva,  roncedimus. 

On  a  été  fort  long-tems  en  peine  pour  trouver  dans  l'anti- 
quité les  caractères  personnels  d'Eutrope  l'Historien.  C'est  ce 
qui  a  fait  naître  sur  ce  sujet  divers  sentimens  aussi  peu  fondés 

Eotr.  pr.  2.  les  uus  quc  les  autres.  '  Les  uns,  comme  Elie  Vinet,  ont  cru 

que  cet  Historien  étoit  de  Constantinople,  ou  Grec  de  Na- 

snid.  E.  p.  914.  tiou.  '  D'autrcs,  commc  Suidas,  voïant  bien  par  son  histoire 
qui  est  en  latin  et  en  un  style  bien  dilTérent  de  celui  des  Grecs, 
que  son  Auteur  n'étoit  point  Grec  lui-même,  en  ont  fait  un 
Sophiste  Italien.  Jusqu'ici  ces  deux  opinions  ont  partagé 
tous  les  Savans.  Mais  quiconque  voudra  bien  se  défaire  d»; 
tout  préjugé,  et  faire  atention  à  ce  que  nous  venons  de  rapor- 
ter  de  la  vie  d'Eutrope,  y  reconnoîtra  sans  peine  la  personne 
de  l'Historien. 

Pour  s'en  convaincre  davantage,  il  n'y  a  qu'à  raprocher  de 
la  fin  de  l'histoire  d'Eutrope  écrite  avant  l'an  375,  ce  que 
Symmaque  lui  écrivit  en  378,  et  que  nous  venons  de  copier. 
Il  est  visible  que  Symmaque  dans  sa  letre  fait  allusion  à  cet  en- 

Euir.  1. 10. p.  140.  droit  d'Eutrope.'  Eutrope  en  effet  y  avertit,  qu'aïant  poussV 
son  abrégé  d'histoire  jusqu'à  Valentmien  et  Valens,  il  reserve 
celle  de  l'Empire  de  ces  deux  Princes  pour  la  traiter  en  par- 
ticulier et  avec  plus  de  soin.  C'est  justement  pour  le  faire  res- 
souvenir d'acquiler  sa  promesse  et  peut-être  le  porter  à  y  join- 
dre l'histoire  de  Gratien,  que  Symmaque  sous  le  règne  flo 
rissant  de  celui-ci,  hii  parle  comme  on  vient  de  le  voir. 

Mar.  ibid.  '  Quoiquc  Marccl  témoigne  s'être  servi  des  écrits  qu'Eutro- 

pe  avoit  laissés  sur  la  médecine  pour  composer  ceux  que  nous 
avons  de  lui,  ce  n'est  pas  à  dire  pour  cela  qu'Eutrope  fût  M''- 
decin..  Marcel  a  soin  d'avertir  lui-même  que  tous  ceux  qui* 
avoient  écrit  sur  cette  matière,  et  dont  il  avoit  tiré  du  secours, 
ne  faisoient  pas  néanmoins  profession  do  médecine.  Tels  sont 
entre  autres  les  deux  Plines  qu'il  nomme. 

Divers  Ecrivains  prétendent  qu'Eutrope  étoit  Chrétien. 
Mais  ce  n'est  peut-être  qu'en  le  confondant  mal-à-propos  avec 
un  Prêtre  de  même  nom,  comme  on  le  verra  dans  la  suite. 
A  en  juger  par  l'ouvrage  qui  nous  reste  de  lui,  il  seroit  diffi- 


HISTORIEN.  223 

cile  de  dire  précisément  quelle  religion  il  professoit.  'En  ef-    iv  siècle. 
fet  il  paroît  d'une  part  qu'il  n'aprouvoit  pas  le  Paganisme;  et  .  Eutr.  pr.  s. 
de  l'autre  il  n'est  pas  assez  clair  qu'il  suivit  la  religion  Chré- 
tienne. '  Il  est  vrai  qu'en  parlant  de  Julien  TApostat,  qu'il  loue  i-  «o.  p.  139. 
néanmoins  excessivement,  il  remarque  qu'il  poursuivit  les 
Chrétiens  avec  trop  d'animosité.  Mais  il  n'est  point  d'Histo- 
rien Païen  qui  se  piquant  de  fidélité  dans  l'histoire,  n'en  dît 
autant.  Ammien  Marcellin   peut  servir  d'exemple  en  ceci. 
'  D'ailleurs  si  Eutropeavoit  été  véritablement  Chrétien,  il  n'au-  T'»-  Emp.  t.  s. 
roit  pu  s'empêcher  de  se  déclarer  en  parlant  de  Dioclétien  et  de  *"' 
Constantin  le  grand. 

'  Il  dit  lui-même  qu'il  suivit  la  profession  des  armes  sous  Eutr.  ibid.  p.  las. 
Julien ,  et  qu'il  se  trouva  avec  lui  à  la  guerre  de  Perse ,  où 
cet  Empereur  perdit  la  vie.  On  ignore  quel  rang  Eutropetint 
dans  les  armées,  et  à  quels  autres  honneurs  il  fut  élevé  dans 
la  suite.  Il  est  néanmoins  certain ,  comme  on  l'a  déjà  vu ,  qu'il 
exerça  des  charges  assez  considérables.  '  On  lui  donne  à  la  tiii.  ibid. 
têle  de  (juel(|ues  éditions  de  ses  ouvrages  le  titre  de  Clarissi- 
rae ,  qui  étoit  celui  des  Sénateurs.  Il  paroît  qu'après  la  mort 
de  Julien  et  de  Jovien ,  dont  le  règne  fut  de  peu  de  durée , 
Eutrope  suivit  la  Cour  ou  l'armée  de  Valens.  '  Ce  fut  en  effet  Eutr.  1. 1.  p.  a. 
à  la  prière  cet  Empereur  qu'il  composa  l'abrégé  d'histoire 
que  nous  avons  de  lui. 

'  Sigonius  et  Balthasar  Boniface  donnent  à  cet  Historien  pr.  4.  sinot.ibid. 
le  prénom  de  Flavius.  Mais  il  y  a  toute  aparence  qu'ils  l'ont 
fait  de  leur  autorité  privée.  Ni  les  imprimés  de  son  ouvrage 
qui  avoient  paru  avant  ces  deux  Ecrivains ,  ni  les  manuscrits 
que  les  Savans  en  ont  vus ,  ne  le  nomment  de  la  sorte. 

Pour  avoir  négligé  de  prendre  connoissance  de  l'histoire  de 
sa  vie,  on  l'a  confondu  avec  plusieurs  autres  personnes  de  mê- 
me nom.  '  Les  uns  ont  cru  qu'il  étoit  le  même  qu'Eutrope  Amm.  1.  ta.  p. 
Proconsul  d'Asie  et  Préfet  du  Prétoire  d'Orient,  célèbre  dans  S.  "*'  '"*'' 
Grégoire  de  Nazianze  et  dans  le  Sophiste  Libanius.  '  D'autres  Eutr.  pr.  3 1  Geno. 
par  une  erreur  intolérable  l'ont   pris  pour  le  prêtre  Eutrope  ^"'- •"•  *•  *®- 
dont  parle  Gennade ,  et  qu'il  leur  a  plû  de  faire  disciple  de 
S.  Augustin,  sans  penser  que  cette  circonstance  trahissoit  leur 
opinion.  '  Codin  au  contraire  le  fait  vivre  un  siècle  auparavant,  Eutr.  ibid. 
et  dit  qu'il  vit  la  fondation  de  Constantinople ,  et  qu'il  en  a 
même  laissé  quelque  écrit.   Si  cela  est ,   il  faut  qu'il  fût  bien 
jeune  alors  ;  puisqu'il  ne  commença  guéres  à  se  faire  connol- 
tre  que  près  de  50  ans  après,  du  teins  que  fleurissoient  le  Poëte 


224  EUTROPE, 

IV  SIECLE.  Ausone  et  l'Orateur  Symmaque  vers  374.  On  ne  voit  pas  '  que 
•  Fab.  bib.  lat.  p.  CB  que  d'autres  raportent  d'Eutrope ,  en  le  faisant  Secrétaire 
""•  d'Etat  sous  Constantin  le  grand ,  ait  un  fondement  plus  solide. 

Enir.  iiiij.  '  Enfin  il  ne  faut  pas  confondre  notre  Historien  avec  un  Gram- 

mairien de  même  nom  que  lui  cilé  par  Priscien. 

8-  II. 

SES   ECRITS. 

Suia.  E.  p. 9ii.  '  ■f-j'UTROPE,  selon  Suidas,  laissa  divers  écrits  de  sa  façon. 
LjLe  plus  connu,  et  l'unique  qui  nous  reste  de  lui,  est 
"  '  un  abrégé  de  l'histoire  Romaine ,  divisé  en  dix  livres.  Le  pre- 
mier commence  à  Remus  et  Romulus  ;  le  second  à  l'an  365 
de  la  fondation  de  Rome  ;  le  troisième  à  la  première  guerre 
Punique  ;  le  quatrième  à  celle  contre  Philippe  Roi  de  Macé- 
doine ;  le  cinquième  à  la  défaite  des  Consuls  Marcus  Mani- 
lius  et  Quintus  Caepio  par  les  Cimbres,  les  Teutons  et  les  au- 
tres; le  sixième  au  Consulat  d'yEmilius  Lepidus  et  Quintus 
Catulus  l'an  de  Rome  67S  ;  le  septième  à  la  mort  de  César  et 
à  l'avènement  d'Auguste  à  l'Empire  ;  le  huitième  au  règne  de 
Néron  ;  le  neuvième  à  celui  de  Maximin  I  ;  le  dixième  enfin  à 
celui  de  Constance  Chlore  et  de  Galère  Maxime  ,  et  finit  à  Jo- 
vien  inclusivement. 

Entr.  1. 1.  p.  2 1       '  Cc  fut  SOUS  l'Empire  de  Valentinien  et  de  Valens ,  et  par 

1.  10.  p.  140.  l'ordre  de  celui-ci  qu'Eutrope  composa  cet  abrégé.  11  l'avoit 
fini  par  conséquent  avant  375  ,  qui  est  l'année  de  la  mort  de 
Valentinien.  On  lit  à  la  tête  une  petite  préface  en  forme  d'E- 
pitre  dédicatoire  à  Valens ,  par  laquelle  il  paroît  que  ce  Prin- 
ce ignoroit  entièrement  l'histoire  de  l'Empire  qu'il  gouver- 
noit ,  et  que  c'ètoit  pour  s'en  instruire  qu'il  avoit  demandé  cet 
ouvrage.  Eutrope  lui  promet  de  lui  donner  en  peu  de  mots 
une  suite  chronologique  des  principaux  évenemens  arrivés 
dans  l'Empire,  soit  par  raport  au  gouvernement  civil,  soit  par 
raport  à  la  guerre  ,  et  d'y  joindre  les  actions  les  plus  mémoraT 

^  blés  des  Princes  qui  l'ont  gouverné. 

'  Eutrope  a  fort  bien  exécuté  son  dessein ,  et  l'on  voit  peu 
d'abrégés  d'histoire  plus  parfaits.  Non  seulement  il  nous  y  a 
donné  un  abrégé  suivi  de  toute  l'histoire  Romaine  jusqu'à  son 
tems,  mais  il  y  a  encore  inséré  des  faits  pris  de  Saluste  et  de 

Gesn.  b«)i.  ani.  Titc-Live  qui  ne  subsistent  plus  dans  les  originaux.  '  On  croit 
aussi  y  trouver  des  endroits  d'autres  Historiens  plus  corrects, 


pr.  3.  4. 


t.  1.  p.  238.  I. 


HISTORIEN.  225 

qu'ils  ne  sont  pas  dans  les  éditions  de  leurs  propres  ouvrages,    i  v  siècle. 
A  tous  ces  avantages  Eutrope  a  encore  joint  celui  de  bien 
prendre  le  caractère  des  personnes  dont  il  parle. 

'  Quant  à  son  style,  A'ossius  et  Sigonius  y  trouvent  peu  d'é-  Euir.  Md. 
legance.  '  Il  est  vrai  qu'Eutrope  n'a  pas  la  politesse  des  an-  i>f-  ^■ 
ciens  Ecrivains  de  l'histoire  Romaine,  et  que  souvent  même 
ses  expressions  sont  peu  latines.  Mais  quoiqu'il  soit  un  des  der- 
niers, et  qu'il  use  quelquefois  de  termes  barbares,  il  n'a  pas 
écrit  avec  moins  d'éloquence  que  les  anciens.  Et  s'il  en  faut 
croire  Sconhovius,  il  les  a  même  surpassés  pour  le  jugement. 
D'ailleurs  sa  manière  de  raporter  les  choses  en  les  abrégeant, 
est  aussi  agréable  que  commode.  En  un  mot  cet  Historien, 
bien  que  concis,  est  clair  et  point  embarassé.  On  y  sent  régner 
un  certain  air  aisé  qui  plait,  et  en  fait  aimer  la  lecture.  Sa  chro- 
nologie est  au  moins  aussi  exacte  que  celle  d'aucun  autre  His- 
torien. '  On  remarque  toutefois  qu'il  ajoute  trois  ans  de  plus  i.  <o.  p.  139.  uo. 
à  l'époque  commune  de  la  fondation  de  Rome. .  ""'■ 

'  C'est  pour  tous  ces  avantages  que  l'on  juge  Eutrope  pré-  pr.  i. 
férable  et  à  Aurelius  Victor  et  à  Florus.  Quiconque  voudroit 
entreprendre  de  les  lire  tous  trois,  devroit  commencer  par 
Eutrope.  11  tireroit  ensuite  plus  de  fruit  des  deux  autres.  '  Les  Tiii.  Emp.  t.  s.'p. 
Latins  ont  toujours  fait  beaucoup  d'estime  de  cet  Historien.  "*' 
S.  Jérôme  le  copie  souvent  dans  sa  chronique;  et  divers  au- 
tres Auteurs  le  citent  aussi.  '  Mr  Valois  entre  les  modernes  re-  Eus.  not.  p. 270.1. 
garde  Eutrope  comme  un  Historien  très-assuré,  et  même  très- 
élegant,  malgré  le  jugement  qu'en  ont  porté  Vossius  et  Sigo- 
nius. Les  Grecs  n'en  ont  pas  fait  moins  de  cas.  C'est  ce  qui 
paroît  par  les  deux  traductions  qu'ils  ont  eu  soin  d'en  faire  en 
leur  langue,  comme  nous  dirons  en  son  lieu. 

Il  y  avoit  plus  de  quatre  cens  ans  que  l'ouvrage  d'Eutrope 
conservoit  toutes  ses  beautés,  'lorsque  du  temps  de  Charlema-  Fab.  bibi.  lat.  p. 
gne  Paul  Winfroy  Diacre  d'Aquilée  les  lui  fit  perdre  en  croïant  "*  '  '^'"'''  •"■■  *' 
l'embellir.  Ce  fut  à  la  prière  d'Adilberge  fille  de  Didier  Roi 
des  Lombards  et  femme  d'Archus  ou  Arichis  Duc  de  Bene- 
vent,  qu'il  rendit  à  Eutrope  ce  mauvais  service.  Car  aiant 
entrepris  de  le  retoucher,  il  le  fit  de  manière  qu'il  en  renver- 
sa toute  l'œconomie.  Il  en  retrancha  beaucoup  de  choses,  en 
transposa  beaucoup  d'autres,  et  y  en  ajouta  encore  davanta- 
ge de  son  cru.  Il  ne  se  contenta  pas  de  retoucher  ainsi  les  dix  ., ,  \ 
livres  d'Eutrope,  il  entreprit  encore  de  le  continuer.  On  a 
recueilli  sa  continuation  dont  on  a  fait  huit  livres,  qui  con- 

Tome  I.  Sec.  Pari.  F  f 


226  EUTKOPE, 

IV  SIECLE,     duisent  jusqu'à  rEmpereur  Léon  l'isaurien,  et  à  la  déposition 
de  S.  (jîerinain  Patriarche  de  Conslantinople,  après  les  premie- 

Fai..  ibid.  res  années  du  VIll  siècle.  A  l'exemple  de  Winfroy'  Landul- 

phe  Sagax,ou  un  autre  Auteur  inconnu,  entreprit  aussi  de  con- 
tinuer cette  liistoire,  et  y  fit  des  additions  qui  vont  ju.squ'à  l'an 
de  .1.  C.  806.  L'ouvrage  ainsi  refondu  et  augmenté  contient 
24  livres,  et  porte  le  titre  d'histoire  mêlée.  Il  fut  imprimé  sé- 
parément à  Paris  en  i531 ,  et  à  Basic  eu  1509.  Canisiuset  Gru- 
ter  l'ont  inséré  depuis,  l'un  dans  ses  anciennes  leçons,  l'autre 
dans  le  recueil  d'Historiens  qu'il  fit  imprimer  à  Hanaw  l'an 
1611.  On  l'a  fait  entrer  aussi  dans  le  treizième  tome  de  la  bi- 
bliothèque des  Pères,  édition  de  Lyon;  et  Mr  Muratori  l'aïanl 
revu  sur  d'anciens  manuscrits  l'a  mis  à  la  tête  des  Historiens 
d'Italie. 

L'ouvrage  d'Eutrope  aiant  perdu  par-là  son  plus  grand  mé- 
rite, fut  fort  négligé  dans  la  suite  des  tems.  Ce  ne  fut  qu'au 
XVI  siècle  qu'il  regagna  l'estime  qu'il  avoit  perdue ,  après 
que  divers  critiques  lui  eurent  rendu  sa  première  pureté.  An- 
toine Sconhovius  passe  communément  pour  y  avoir  travaillé 

Kab.  bibi.  lat.  p.  le  premier.  '  Mais  Jean-Baptiste  Egnatius  y  avoit  mis  la  main 

'"  avant  lui  ;  et  Elie  Vinet  acheva  ce  que  les  deux  autres  avoienl 

heureusement  commencé.  C'est  ce  que  nous  dirons  plus  en 
détail  en  faisant  le  dénombrement  des  éditions  de  cet  Histo- 
rien. 

Outre  l'abrégé  de  l'histoire  Romaine  jusqu'à  Valentinien 

suid.  K.  p.  no.  et  Valens,  '  Eiitrope  au  ra[)orl  de  Suidas  lit  aussi  un  abrégé 
deTile-Live,  que  Capiton  de  Lycie  traduisit  en  grec.  On  ne 

Koin.  bis.  scri  I.  counolt  poiut  d'aillcurs  ce  second  abrégé  d'Eutrope,  '  et  Syl- 

s.p.  903.  I.  burge  soupçonne  que  Suidas  n'ait  ici  nommé  Eulrope  au  Heu 
de  Florus,  qui  avoit  dt'Ja  fait  des  abrégés  ou  sommaires  des 
livres  de  Tite-Live,. 

Mar.  denied.pr.p.  '  Marcel  l'Emjurique  at(!sle  aussi  qu'Eutrope  avoit  compo- 
sé quelques  ouvrages  sur  la  médecine,  quoiqu  il  ne  fijt  pas  Mé- 
decin lui-même.  Mais  il  ne  nous  en  donne  point  d'autre  con-- 
noissance  que  de  dire  qu'il  s'en  servit  pour  écrire  ce  qu'il  nous 
a  laissé  sur  la  même  matière  ;  et  cet  ouvrage  d'Eutrope  ne  pa- 
roît  aujourd'hui  nulle  part,  non  plus  que  celui  de  Jule  Au- 
sone  dont  Marcel  avoit  aussi  tiré  quelque  secours. 

Enir.  1. 10.  p  KO.  '  Eulropc  cu  fiuissaut  son  abrégé  de  l'histoire  Romaine  pro- 
mettoit  d'écrire  en  particulier  et  avec  plus  d'étendue  et  de  soin 
celle  de  l'Empire  de  Valentinien  I ,  et  de  Valens  son  frère. 

1    H  \Ai  ^\ 


HISTORIEN.  227 

Mais  on  ne  voit  point  qu'il  ait  acquit^  sa  promesse,  ni  qu'il    iv  siècle. 
ait  entrepris  celle  du  règne  de  Gratien,  à  quoi  Symmaque 
semble  l'avoir  voulu  porter,  comme  on  l'a  df^ja  vu. 

'  Il  parut  à  Paris  cnez  Ilobert  Etienne  l'an  1544  en  un  vo-  Bibi.  Bai.  t.  s.  p. 
lume  m-8°.  sous  le  nom  d'Eutrope  un  abrégé  de  la  guerre  des  '^ 
Gaules,  tiré  des  écrits  de  Suétone  qui  ne  sont  pas  venus  jus- 
qu'à nous.  '  Cet  abrégé  fut  encore  imprimé  ailleurs  dans  la  sui-  ...  Barb.  i.  p. 387 
te  sous  le  nom  du  même  Auteur,  nommément  à  Francfort  l'an  jiis^.""''  ''  ^  •* 
1575,  et  à  Leyde  en  1593.  '  Mais  les  Savans  ont  remarqué  ...Bai.  ibid. 
que  cet  abrégé  est  de  Paul  Diacre,  et  non  pas  d'Eutrope. 

^.  I". 
EDITIONS    DE   SON  HISTOIRE. 

OM  ne  vit  point  d'édition  du  texte  pur  d'Eutrope ,  jusqu'à 
celle  qu'en  publia  .lean-Bapli.ste   Egnatius.    Toutes   cel- 
les qui  en  parurent  jusqu'alors,  et  même  quelques  autres  de- 
puis, contiennent  son  ouvrage  défiguré,  lel  que  l'avoit  rendu 
Paul  Diacre  en  le  relouchant.  Les  premières  éditions  de  cet 
abrégé  ainsi  travesti  '  furent  faites  à  Rome  en  1471,  à  Venise  Fab.  biw.  u.  p. 
1 480  en  un  volume  in-folio^  et  à  Cracovie  1510  en  un  volu-  ""' 
me  m- 4",  par  les  soins  de  Michel  Coccinius.  '  Gesner  fait  men-  ccsn.bibi.uni.i.i. 
lion  d'une  autre  faite  à  Venise  chez  Aide  en  un  volume  ///-S",  p  '*^* 
avec  les  huit  livres  de  la  continuation  de  Paul  Diacre  et  les 
commentaires  de  César,  mais  il  n'en  marque  pas  l'armée. 

En  1512,  Nicolas  Maillard  de  Rouen  fil  réimprimer  à  Bibi.ff.Pr«P.i.c«n. 
Paris  chez  Gilles  Gourmont  pour  Gecfroi  de  Marnef  l'histoire 
d'Eutrope  avec  les  huit  livres  d'additions  de  Paul  Diacre,  (^et- 
le  édition  que  quelques-uns  marquent  de  l'année  1513  est  en 
un  volume  in-folio.  '  Il  y  en  eut  une  autre  m-S".  à  Venise  chez  .  ..coib.  i.  s.  p. 
Aide,  avec  Suétone  et  Aurelius  Victor  en  l'an  1516.  '"" 

Jean-Baptiste  Egnatius  aiant  recouvré  quelque  manuscrit  Fab.  ibid  .p.  172. 
de  l'abrégé  d'Eutrope,  tel  qu'il  étoit  sorti  de  sa  plume,  avant 
que  Paul  Diacre  y  mît  la  main,  le  fil  imprimer  dans  sa  pure- 
té. L'édition  en  parut  à  Venise  l'an  1520.  '  Dès  l'année  sui-  Bibi.  Teii.  p.  27!». 
vante  Eutrope  i\it  réimprimé  chez  Aide  au  même  endroit  et  '' 
sur  la  même  édition,  en  un  volume  m-H"  dans  lequel  on  a  joint 
à  Eutrope  Paul  Diacre  son  Continuateur,  Suétone  et  Aur.  Vic- 
tor. '  La  même  édition  servit  encore  de  modèle  pour  don-  Fab.  ibid 
ner  Eutrope  dans  la  suite  entre  les  autres  Ecrivains  de  l'histoi- 
re Romaine.  '  En  153t  Simon  de  Colines  le  remit  séparément  Bibi.  ff.  Min.  cen. 

Ffv 


228  EUTROPE, 

IV  SIECLE.  SOUS  la  presse  à  Paris,  et  le  publia  en  un  volume  m-8". 
Tell  p  273  1  Froben  imprimeur  à  Basle  en  fil  de  même  l'année  suivan- 
te 1332,  et  joignit  à  Eutrope  les  six  livres  de  Paul  Diacre  de 
l'histoire  des  Lombards,  avec  les  vies  des  Empereurs  Grecs. 
Cette  édition  qui  fut  revûë  par  Sigismond  Gelenius,  est  en 
un  volume  in-folio,  et  ne  contient  pas  le  texte  pur  de  notre 
Entr.pr.  2.  Ilistoricn.  '  Elle  est  si  ample,  dit  Elie  Vinet,  qu'il  y  a  dix  fois 

Dibi.  s.  Serg.  And.  plus  de  matière  que  n'en  contient  l'original  d'Eutrope.  '  Simon 
de  Colines  redonna  en  1539  celle  qu'il  avoit  publiée  en  1531 , 
en  même  volume  que  la  première  fois. 
Boid.  bibi.  hisi.  p.       '  En  1543,  on  réimprima  k  Basle  l'abrégé  d'Eutrope  ;  et  cel- 
les I  Eutr.  p.  5.      jg  édition  fut  regardée  comme  la  plus  correcte  de  toutes  cel- 
les qui  avoient  paru  jusqu'alors.  Le  public  en  est  redevable 
à  Antoine  Sconhovius  qui  donna  dans  celle  édition  le  texte 
de  son  Auteur  purgé  de  toutes  les  additions ,    changemens 
et  altérations  qui  y  avoit  faites  Paul  Diacre.   Sconhovius  se 
servit  pour  rendre  ainsi  à  Eutrope  sa  première  intégrité,  d'un 
manuscrit  de  l'Abbaïe  de  Saint  lîavon  à  Gand.  Ce  fut  sur  son 
édition  qu'Eutrope   entra   dans  le  recueil  des  Ecrivains  de 
l'histoire  Romaine,  qui  parut  à  Paris  chez  Henri  Estienne  l'an 
Fab.ibid.  1368  en  4  volumes  m-8".  'et  qu'il  fut  réimprimé  séparément 

en  même  volume  à  Lyon  1394.  P;ml  Merula  prit  soin  de  cet- 
te édition,  et  l'enrichit  des  notes  de  Henri  Glarean  et  d'Elie 
Boid.  ibid..  Viuet.  '  On  vit  encore  paroître  au  même  endroit  deux  autres 

éditions  d'Eutrope,  l'une  m-12".  en  1332,  l'autre  m-S".  en 
1596;  mais  on  ne  marque  point  celle  qui  leur  avoit  servi  de 
modèle,  ni  ceux  qui  y  ont  mis  la  main. 

Ce  qu'Egnatius  et  Sconhovius  avoient  déjà  fait  en  faveur 
Eutr.  pr.  2.  du  tcxtc  d'Eutropc,  '  fut  porté  à  sa  perfection  par  les  soins 

d'Elie  Vinet.  Ce  critique  se  servit  pour  cela  d'un  manuscrit  de 
la  bibliothèque  des  Dominicains  de  Bourdeaux,  sur  lequel  il 
donna  la  meilleure  édition  d'Eutrope  qui  eût  encore  vu  le 
jour.  C'est  conformément  à  ce  manuscrit  qu'il  fit  porter  à  l'ou- 
vrage le  titre  de  Breviarium,  qu'il  a  retenu  depuis.  L'édition 
Bibi.  Lug.  Bal.  p.  dc  Yinct  parut  pour  la  première  fois  à  Poitiers  l'an  1533,'  puis 
Tp.  Ut!  ""*'■  '■  à  Basle  les  années  1554  et  1559  en  un  volume  m-8».  dans  le- 
quel on  a  joint  les  notes  de  Henri  Glarean  à  celles  de  Vinet. 
Fab.  ibid.  'Elle  fut  encore  renouvellée  à  Paris  en  un  volume  m-12''.  l'an 

Bibi.  s.  Serg.  And.  1500,  '  et  derechef  quatre  ans  après  au  même  endroit  chez 
Jérôme  de  Marnef.  Cette  dernière  édition  qui  est  m-1 6.  con- 
tient et  les  notes  de  Vinet  et  la  continuation  de  Paul  Diacre. 


HISTORIEN.  229 

'Mais  la  plus  belle  de  toutes  les  éditions  d'Eutrope  qui  ont    iv  siècle. 
paru,  ou  par  les  soins  de  Vinet,  ou  sur  celles  qu'il  avoitpu-  l     ir~MÏn~cën' 
bliées,   est  l'édition  de  Poitiers  de  la  même  année  1564, 
après  que  Vinet  eut  revu  le  texte  de  l'Auteur.  Elle  est  sortie 
des  presses  d'Anguilbert  de  Marnef  en  un  volume  m-i".  'En  •  •  ff-  Prœd.  Cen. 
1620,  Jean  Libert  Imprimeur  à  Paris  donna  encore  le  texte 
d'Eutrope  sur  une  des  éditions  de  Vinet,  en  un  petit  volume 
m-24  dans  lequel  il  ajouta  les  Césars  d'Ausone. 

Après  tant' de  difl'érentes  éditions  de  l'abrégé  d'Eutrope, 
on  le  vit  passer  dans  le  recueil  diîs  Ecrivains  de  l'histoire  Ro- 
maine, imprimé  à  Francfort  chez  les  héritiers  d'André  We- 
chel  en  trois  volumes  in-folio,  les  années  1588,  1389  et  1390. 
Il  se  trouve  dans  le  premier  et  le  troisième  volume.  Dans  ce- 
lui-ci on  l'a  acompagné  de  la  version  gréque  de  Pœanius,  de 
laquelle  nous  parlerons  bien-tôt.  '  Frédéric  Sylburge ,  qui  Rom.  Ust.  t.  s.  p. 
prit  soin  de  l'édition  de  ce  recueil,  avant  que  d'y  insérer  le  ^*''°^^- 
texte  original  d'Eutrope,  le  revit  sur  un  excellent  manuscrit 
du  collège  de  Fulde,  et  sur  les  éditions  de  Sconhovius  et  de 
Vinet,  les  meilleures  qui  eussent  encore  paru. 

'  Denys  Godefroi  le  fit  aussi  entrer  dans  la  collection  des  Fab.  iWd.  app.  p. 
mêmes  Historiens  qu'il  fit  imprimer  à  Lyon  l'an  1591.  Ceux  ^''^' 
qui  se  chargèrent  de  publier  les  divers  autres  recueils  d'Ecri- 
vains de  l'histoire  Romaine,  tels  que  celui  qui  vit  le  jour  à 
Leyde  chez  Raphelenghe  en  1607  in-S".  et  ceux  qui  paru- 
rent à  Genève  les  années  1609  et  1633,  le  premier  en  un  et 
l'autre  en  deux  volumes  in-folio,  y  ont  encore  inséré  l'ouvra- 
ge d'Eutrope.  On  le  trouve  aussi  avec  Florus,  Velleius  Pa- 
terculus  et  plusieurs  autres  semblables  Ecrivains  imprimés  à 
Amsterdam  chez  Guillaume  et  Jean  Jansson  les  années  1623 
et  1630,  et  à  Leyde  chez  Jean  le  Maire  1632  en  un  volume 
m-16.  Dans  celte  dernière  édition  Eutrope  est  acompagné  des 
notes  de  Marc  Boxhorn-Zuerius. 

Outre  ces  éditions  communes  à  Eutrope  et  à  d'autres  His- 
toriens, il  y  en  a  encore  eu  plusieurs  particulières  faites  en 
divers  teras.  '  Il  fut  imprimé  de  la  sorte  dès  1592  à  Leyde  chez  Bibi.  cord.p.  f24. 
les  Elzevirs  en  un  volume  in-S".  que  l'on  a  grossi  de  la  con- 
tinuation de  Paul  Diacre.  '  Il  fut  ensuite  remis  sous  la  pressé  à  BoU.  ibid. 
Francfort  l'an  1617  en  un  volume  in-i".  avec  les  notes  de  di- 
vers Savans.  '  Christophe  Cellarius  aïant  joint  au  texte  origi-  Fab.  bibi.  ut.  p. 
nal  d'Eutrope  la  version  gréque  qui  nous  en  reste,  publia  l'un  *"' 
et  l'autre  à  Ciza  l'an  1678  en  un  volume  m-8".  qu'il  à  eu  soin 


230  EUTROPE, 

IV  SIECLE,    d'enrichir  el  des  différentes  leçons  el  de  notes  choisies.  'Cet- 
~z     ....     ,-.   te  édition  gréque  et  latine  d'Eulropi?  parut  de  nouveau  à  Ox- 

•  KoD.  bibl.  p.  479.  j-^AO  «  1 

fort  1  an  l/Oo  en  même  volume. 

Bi')i.  s.  Vin.  cen.  '  Vingt  BUS  avaut  que  celle-ci  vît  le  jour,  Mademoiselle  le 
Févre,  depuis  Madame  Dacicr,  donna  au  public  celle  qu'elle 
avoit  préparée  pour  l'usage  de  Mr  le  grand  Dauphin.  Elle  est 
faite  à  Paris  chez  Antoine  Cellier  l'an  lG83enun  petit  volu- 
me m-4''.  et  acompagnée  de  divers  orncmens  et  de  savantes  re- 
marques, où  l'on  aperçoit  sans  peine  l'érudition  du  père  mê- 
lée avec  celle  de  la  fille.  Olte  édition  d'Eutrope  est  sans 
contredit  la  plus  parfaite  que  l'on  ait  encore  vue  ,  et  peut-être 

Kon.  ibid.  aussi  la  plus  ulilc.  '  En  170a  on  réimprima  encore  cet  Histo- 

rien à  Londres  en  un  petit  volume  iw-lS". 

Euir.  pr.  1. 6.  '  Lcs  Grccs ,  commc  nous  l'avons  dit,  ont  voulu  avoir  en 

leur  langue  l'abrégé  d'Eutrope.  On  prélend  même  qu'ils  en 
ont  eu  deux  différentes  versicins.  La  promiere  fut  faite,  dit- 
on,  par  les  soins  de  Capiton  de  Lycic,  et  l'autre  par  P.ea- 
nius  nomme  peu  versé  dans  la  langue  latine,  que  le  célèbre 
Cujas  a  néanmoins  confondu  avec  Capiton,  croïant  que  ce 
n'etoil  qu'un  seul  et  même  Traducteur.  Il  ne  nous  reste  plus 
rien  de  la  version  du  premier.  On  (;roit  que  c'est  celle-là  dont 
s'est  servi  Jean  d'Anlioche  pour  faire  passer  dans  ses  écrits  di- 
vers endroits  d'Eutropt;;  et  Vim  juge  par  ce  qu'il  en  cite  que 
cette  version  étoit  plus  élégante  que  celle  de  Pîcanius.  Mais 
à  dire  le  vrai ,  l'on  i)eut  légitimement  douter  si  elle  a  j;tmais 
existé.  En  effet  on  ne  l'établit  que  '  sur  ce  qu'en  dit  Suidas.  Or 
Suidas  ne  dit  point  que  Capiton  ait  traduit  en  grec  l'abrégé, 
de  l'hi-sloire  lîomaine  par  Eulrope,  mais  seulement  l'abrégé 
de  Titc-Live,  qui  est  un  ouvrage  tout  dillérent  de  l'autre.  Et 
comme  Jean  d'Anlioche,  dans  ce  qu'il  cite  d'Eutrope,  ne  nom- 
me point  ce  Capiton,  ses  citations  n'établissent  point  la  ver- 

F.iirr.  pr.  1.  sion  gréquc  clout  il  s'agit  ici.  '  D'autre.?  Savans  remarquent 

même  que  l'on  ne  .sauroit  dire  au  juste  si  cet  Ecrivain  a  puisé 
dans  quelque  version  gréque  plutôt  que  dans  l'original  latin. 

Rom.  hiJi.  ibid.  p.       'Quaut  à  la  versioH  de  Paeanius,  qui  est  venue  jusqu'à  nous, 

*'■  Sylburge  la  croit  presque  aussi  ancienne  qu'Eutrope  môme. 

Néanmoins  elle  n'en  est  pas  plus  fidèle.  Pecanius  y  a  changé 
et  omis  plusieurs  difi'érentes  choses  importantes,  et  en  a  dé- 
tourné d'autres  en  un  sens  éloigné  de  celui  de  son  Auteur  et 
de  la  vérité  de  l'histoire.  Sylburge  est  le  premier  qui  a  publié 
cette  version.  Il  la  tira  de  la  bibliothèque  de  Mr  Pithou,  et  la 


Sai<l.  K.  r-âiO. 


(»  : 


HISTORIEN.  231 

donna  dans  le  ti'oisiéme  tome  de  son  recueil  des  Ecrivains  de  iv  sieclk. 
l'histoire  Romaine  imprimée  à  Francfort  en  l.')90,  avec  le 
texte  latin  à  côté,  comme  no«s  l'avons  déjà  dit.  Elle  a  été  de- 
puis réimprimée  de  la  sorte  en  un  volume  particulier  à  Ciza 
et  à  Oxfort.  Outre  les  défauts  de  cette  version  que  nous  avons 
marqués,  et  qui  lui  viennent  du  Traducteur  Grec,  il  y  man- 
que quelque  chose  après  le  commencement  du  sixième  et  sep- 
tième livre.  La  fin  y  manque  aussi,  c'est-à-dire,  ce  qui  re- 
garde les  règnes  de  Jovien,  de  Julien,  et  partie  de  celui  de 
Constance. 

Les  François  ont  voulu  comme  les  Grecs  avoir  le  plaisir 
de  lire  Eutrope  en  leur  langue.  'Il  en  parut  une  traduction  Biu.  ff.  miu.  cen. 
françoise  avec  celle  de  Florus  l'an  1580  chez  Jacques  Berjon 
en  un  volume  m-S".  On  en  est  redevable  h  L.  Constant,  qui  la 
dédiaàllfnri  de  la  Tour  Vicomte  de  Turene.  'Depuis  quel-  ...s.  uerm.  Par. 
ques  années  il  y  en  a  eu  une  autre  incomparablement  meil- 
leure, imprimée  l'an  1717  à  Paris  chez  les  frères  Barbou  en 
un  volume  m-12.  Elle  est  de  Mr  l'Abbé  Lezeau,  qui  l'a  en- 
richie de  notes  et  d'une  belle  disserialion,  qui  donne  une  idée 
générale  du  génie  des  Romains  et  de  leur  Empire.  On  en 
trouve  aussi  une  traduction  Italiene  imprimée  à  \enise  m-S". 
en  1544.  (XIII.) 


VICTORIUS, 

Gram.m.\irien  , 

ET    DYNAMIUS, 

Rhéteur. 

YicTORii's,  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  plusieurs  au-  au*.  prof.  c.  ai. 
très  grands  hommes  (jui  de  son  tems  porloient  le  mê- 
me nom,  lleurissoit  après  le  milieu  de  ce  IV  siècle.  Il  éloit 
Sousprincipal  du  Collège  de  Bourdeaux  :  ce  qu'Ausone,  qui 
nous  le  fait  connoître,  exprime  par  les  fermes  latins  de  Sub- 
doctor  et  Proscholus.  Il  y  donna  aussi  pendant  quelques  tems  des 
leçons  de  Grammaire.  .Mais  il  s'acquit  peu  de  réputation  dans 
l'exercice  de  cet  emploi.  Ce  n'est  pas  néanmoins  qu'il  man- 
quât de  talens.  Il  avoit  de  la  mémoire,  du  feu,  de  l'ardeur  et 


232       VICTORIUS,  GRAM.  ET  DYNAMIUS,  RH. 

IV  SIÈCLE,  de  l'assiduité  au  travail.  Il  étoil  par  conséquent  en  état  de  fai- 
re  honneur  à  sa  profession,  s'il  n'avoit  mieux  aimé  tourner 
tous  ses  travaux  à  l'étude  de  l'antiquité,  mais  d'une  antiquité 
stérile. et  méprisée,  qui  n'étoit  pas  du  goût  de  son  siècle,  com- 
me Ausone  le  lui  reprochoit  après  sa  mort.  Les  loix  fabuleu- 
ses de  Themis  et  de  Minos,  l'ancien  droit  des  Athéniens  et  des 
Lacedemoniens,  les  généalogies  des  Sabins,  les  privilèges  et 
les  usages  de  leurs  Prêtres  avant  Numa  Pompilius  second  Roi 
de  Rome,  l'histoire  des  Rois  barbares  par  un  certain  Castor, 
et  autres  semblables  monumens  faisoient  toute  l'ocupation  de 
Victorius,  et  lui  tenoient  lieu  des  bons  Auteurs.  Ce  Gram- 
mairien aïant  entrepris  un  voïage  en  Sicile,  alla  ensuite  du 
côté  de  Rome,  où  il  mourut  quelque  tems  avant  qu'Ausone 
composât  son  éloge,  que  nous  n'avons  fait  qu'abréger.  (XIV.) 

ibid.  f.  S3.  'Dynamius  naquit  à  Bourdeaux,  et  fleurit  au  même  tems 

que  Victorius.  Il  exerça  d'abord  l'emploi  d'Avocat.  Mais  aïant 
été  acusé  d'adultère,  il  quita  Bourdeaux  vers  360,  et  se  re- 
tira à  Lerida  en  Espagne,  où  il  épousa  une  femme  fort  ri- 
che. De  peur  d'être  découvert  il  changea  de  nom,  et  prit  ce- 
lui de  Flavinius.  C'est  sous  ce  nom  suposé  qu'il  enseigna  la 
Rhétorique  à  Lerida.  Après  une  assez  longue  absence  il  re- 
vint à  Bourdeaux,  mais  il  n'y  fit  pas  long  séjour.  Il  retourna 
en  Espagne,  et  mourut  à  Lerida.  11  éloit  intime  ami  d'Auso- 
ne,  qui  nous  a  conservé  sa  mémoire.  Au  reste  il  ne  faut  pas 

Amm.  1.  15.  p.76.  le  confondrc  avec  un  autre'  Dyname  fameux  par  ses  fourbe- 
ries sous  l'Empereur  Constance,  qui  l'en  récompensa  par  le 
gouvernement  de  Toscane,  quoiqu'il  n'eût  auparavant  que 
le  soin  de  tenir  le  regître  des  bêtes  de  somme. 

Para.  ver.  p.  148.       '  Mclchior  Goldast  dans  son  recueil  d'anciennes  exhorta- 

"*•  "^  tions  nous  a  donné  une  letre  qui  porte  le  nom  d'un  Dynamius 

Grammairien  à  son  disciple.  Il  témoigne  l'avoir  trouvée  dans 
deux  divers  manuscrits  avec  cette  inscription  :  Dynamius  Gram- 
maiicus  ad  discipulum  suum  ait.  Elle  est  fort  courte,  mais  elle 
est  assurément  digne  d'un  homme  animé  de  l'esprit  de  l'Evan- 
gile; et  son  style  n'est  pas  éloigné  de  celui  des  pièces  du  IV 
siècle.  L'Auteur  débute  par  déplorer  amèrement  la  condition 
des  hommes,  qui  méprisent  l'invitation  d'un  Dieu  qui  les  apel- 
le  au  ciel,  pour  suivre  aveuglément  les  suggestions  du  Démon, 
qui  ne  cherche  qu'à  les  précipiter  dans  l'enfer.  Dyname  con- 
clud  en  établissant  la  nécessité  de  nous  atacher  uniquement  à 
l'auteur  de  notre  salut. 

Goldast 


G 


GKAÏIËN,  EMPEREUR.  233 

"Goidast  et  Vossius  qui  l'a  suivi,  placent  ce  Dyname  à  la      iv  siècle. 
fin  du  V  siècle,  et  le  confondent  avec  Dyname  le  Patrice,  ;; 

qui  a  écrit  la  vie  de  S.  Maxime  Evêque  de  Riez.  Mais  cette  h,"t!'iat.V.  a.  c°i8. 
confusion  détruit  le  sentiment  qui  fait  vivre  cet  Auteur  dès  le 

V  siècle,  puisqu'il  est  constant  que  Dyname  Ecrivain  de  la  vie 
de  S.  Maxime  ne  lleurissoit  qu'à  la  fin  du  VI,  comme  on  le 
verra  en  son  lieu.  L'on  peut  assurer  que  la  lettre  dont  il  s'a- 
git ici,  est  d'un  style  beaucoup  au-dessus  de  celui  de  la  fin  du 

VI  siècle.  Amsi  le  Dyname  dont  elle  porte  le  nom,  est  plu- 
tôt Dyname  le  Rhéteur  dont  parle  Ausone,  que  Dyname  le 
Patrice  qui  a  composé  la  vie  de  S.  Maxime. 


GRATIEN, 

Empereur. 

RATIEZ,  l'un  des  Princes  le  plus  acomplis  qui  eussent  tui. Emp. t. s. p. 

jusqu'alors  gouverné  l'Empire,  naquit  en  l'année  359. 
On  ne  convient  pas  du  jour  précis.  Les  uns  sont  pour  le  18' 
d'Avril,  les  autres  pour  le  23''  du  mois  suivant.  '\ji  ville  de  vkt.  epit.  p.  231. 
Sirmich  en  Pannonie  fut  le  lieu  de  sa  naissance.  Mais  nos  Gau- 
les sont  en  droit  de  le  revendiquer  et  de  le  compter  au  nom- 
bre de  leurs  élevés.  En  effet  y  aïant  été  porté  dès  son  enfan- 
ce, il  y  passa  presque  tout  le  reste  de  sa  vie,  et  y  finit  ses  jours. 
'  Il  eut  pour  père  Valentinien  I,  qui  fut  déclaré  Empereur  cinq  xiii.  iwd. 
ans  après  en  364,  '  et  pour  mère  Valeria  Severa.  ?»«•  *• 

'Il  aporta  en  nais.sant  d'excellentes  dispositions,  qui  don-  Amm.  1.87.31. 
nerent  de  lui  de  grandes  espérances  pour  l'avenir.  Il  avoit  sur-  vict!u;id.7Au^  ' 
tout  reçu  de  la  nature  un  génie  heureux  pour  les  letres,  et  un  epl'i.'''  '*'  ^^  ' 
talent  particulier  pour  l'éloquence.    On  croïoit  voir  revivre 
en  lui  et  le  feu  de  Publius  Sulpicius,  cet  Orateur  si  célèbre 
dans  Ciceron,  et  la  gravité  de  Gracchus  l'ancien.  Autant  qu'il 
avoit  de  dispositions  pour  les  letres,  autant  il  eut  d'ardeur  à 
les  cultiver;  et  il  le  fit  avec  un  succès  égal  à  son  ardeur.  Il 
devint  bon  Poëte  et  bon  Orateur,  et  acquit  beaucoup  d'ha- 
bileté dans  les  afi"aire3.  Aussi  se  plaisoit-il  à  démêler  les  plus 
embrouillées.  Lorsqu'il  parloit  dans  le  conseil,  c'étoit  avec 
une  sagesse  et  une  éloquence  qui  charmoient  ses  auditeurs. 
'  Ce  fut  le  Poëte  Ausone  qui  prit  soin  de  l'instruire  et  de  diri-  Am.  Cods.  p.  701. 
ger  ses  éludes.  Il  eut  soin  à  son  tour  de  l'en  recompen.ser  en  If.  '  ^^'  *'  "  ** 

Tom.  I.  Sec.  Part.  •  G  g 

1  S  * 


234  GRATIEN, 

IV  SIECLE.      grand  Prince,  l'élevant  lui  et  ses  proches  aux  premières  char- 
ges  de  l'Empire. 
Aniin.i.â7.p.489 1        '  Graticu  uc  lîùsoit  que  d'entrer  dans  la  neuvième  année  de 
tiTi'Htr'c":?:  son  âge,  lorsque  le  24"  d'Août  307  l'Empereur  son  père  le  fit 
2-  p-  '8«-  déclarer  Auguste  à  la  tête  dos  armées,  (liiacun  se  porta  à  l'en- 

vi  àreconnoitre  pour  son  Souverain  un  Prince  qui  bien  qu'en- 
core enfant  donnoit  dès  lors  à  connoitre  ce  qu'il  seroit  un 
Amm.  ihid. p. 418.  jour.  La  cérémonio  s'en  fit  à  Amiens  selon  S.  Jérôme.  'Dès 
*^'  l'année  suivante  Valenlinien  le  mena  avec  lui  dans  .ses  expé- 

ditions; et  quoique  le  jeune  (iratien  fût  encore  en  un  âge 
1.  ai.  p.  638.  trop  tendre  pour  .suporter  les  fatigues  de  la  guerre,  '  il  ne  lais- 
.sa  pas  d'en  ])rofiter  pour  se  former  au  métier.  Il  devint  par-là 
un  Prince  belliqueux ,  adroit  dans  les  exercices  militaires , 
Au5.edy.i3.p.508.  prompt  et  vigilant  dans  la  guerre.  '  T)e  sorte  que  se  distinguant 
dès  lors  entre  les  plu«  anciens  Capilaines,  on  reronnoissoit 
en  lui  le  courage  el  la  valeur  de  .son  père,  et  qu'on  le  rcgar- 
doil  comme  un  des  plus  fermes  apuis  de  l'I-lmpire.  C'est  ainsi 
u'Ausone  son  maître  en  parloit  à  ^'alentinien  en  .se  servant 
es  expressions  de  Virgile. 

Tuque,  puerquc  tiius,  mngn.-B  spes  aller  Rom», 
Flo.s  velerum ,  virtusque  virûm  ,  mon  niaxiraa  cura  , 
.Norainp  avum  rcffirens,  aniino  manibusque  parenlom. 


dr 


Tiu.ibid.  p.  139.       'Valenlinicn  étant  mort  le  17*  de  Novembre  375,  Gratien 
P-  '^-  se  trouva  cliargé  du  gouvernement  de  tout  l'Empire  d'Occi- 

dent. C'est  proprement  à  cette  époque  qu'il  faut  raporter  le 
commencemeni  de  .son  règne.  Il  n'avoit  pas  encore  dix-sept 
ans  acomplis;  et  malgi-é  eelte  grande  jeunesse  il  étoit  dès  lors 
en  état  de  commander  lui-même  ses  armées.  En  moulant  sur  le 
llirûne,  il  fil  voir  qu'il  étoit  bien  éloigné  d'y  fiiire  monter  avec 
lui  celte  jalousie  qui  avoit  tyranni.sé  tant  d'autres  Empereurs 
Aus.cnns.p.  701 1    qui  l'avoiriit  précédé.  'II  commença  par  associer  à  l'Empire 

Hil.  ibid.  p.  187.        '  •  i-  Ar    i       ,•     •  ii  *  •      i  .    .    «•  i 

'  son  jeune  Irere  Naionlinien   II,  pour  qui  il  eut  toujours  les 

mêmes  «'gards  el  la  même  afleclion  que  s'il  eût  été  «on  pro- 
Tiii  p.  707.709.  prc  fils.  'Mais  comme  celui-ci  n'éloil  pas  encore  en  âge  d'à - 
ui.  gir,  Grafien  tant  qu'il  vécut,  gouverna  seul  l'Occident.  'En- 

suite il  rapclla  près  de  sa  personne  .sa  niere  Valeria  Severa 
que  .son  [<ere  avoil  répudiée  pour  épouser  Justine,  et  se  ser- 
vit ufilement  de  ses  conseils.  Vers  le  commencement  de  l'an 
376,  Valens  Empereur  d'Orient  et  oncle  paternel  de  Gratien, 

M  0  .Vvw'\  .-i^V,  A 


EMPEREUR.  235 

'  lui  députa  dans  les  Gaules  Themistius  célèbre  Philosophe.      iv  sieclk. 
On  ppfloit  alors  du  mariage  de  notre  jeune  Empereur  avec  aThem.or.  »3.  p. 
la  fille  de  Constance,  nommée  Constancie  qu'il  épousa  effecti-  '63.  lei.  i67. 
vement,  mais  qui  mourut  avant  lui. 

Gratien  signala  les  commencemens  de  son  règne  par  des 
lois  célèbres,  qui  font  voir  quel  éloit  son  amour  pour  l'Eglise 
et  pour  les  lettres.  '  Le  1 7  de  Mai  376  il  en  adressa  une  à  divers  coa.  Th.  ibij- 1. 1. 
Evêques  qui  lui  avoient  écrit,  et  qui  tenoient  alors  un  Con-  ''  ^^'  ^'  ^"'  ^"' 
cile.  Par  cette  loi  qui  est  aussi  adressée  à  Arteme,  l'Empereur 
déclare  que  les  affaires  au  sujet  de  la  religion  doivent  être 
jugées  sur  les  lieux  par  les  Conciles  de  la  province,  c'est-à- 
dire  comme  l'on  croit  devoir  l'expliquer,  du  département  d'un 
Vicaire  de  Préfet.  Mais  si  c'est  quelque  action  criminelle  qui 
regarde  les  loix,  le  Prince  veut  qu'elle  soit  portée  devant  les 
Juges  civils.  '  La  même  année  il  rendit  une  ordonnance  que  i.6.  p.  lu.  m. 
nous  n'avons  plus,  mais  qui  est  marquée  dans  quelques  loix,  *^*' 
pour  défendre  aux  Donatisles,  et  généralement  à  tous  les  hé- 
rétiques, de  tenir  aucune  assemblée  Ecclésiastique  ;  voulant 
que  tous  les  lieux  ou  il  s'asembleroicnt  hors  les  Eglises  fus- 
sent confisqués.'  11  confirma  celle  ordonnance  à  l'égard  de  •  c.t.s.i.i.p.  n*. 
tous  les  hérétiques  par  une  autre  en  date  du  22'  d'Avril  de 
l'an  378.  Dés  l'année  précédente  il  en  avoit  publié  uue  au- 
tre du  cinquième  de  Mars,  pour  exemter  des  charges  perso- 
nelles  tous  ceux  du  Clergé,  même  les  Soudiacres,  les  Exor- 
cistes, les  Lecteurs  et  les  Portiers.  Il  fit  encore  durant  son  rè- 
gne plusieurs  autres  reglemens  pour  l'avantage  de  l'Eglise  et 
de  ses  Ministres,  mais  il  seroit  trop  ennuieux  de  les  rapporter 
en  détail. 

'  La  loi  en  faveur  des  letlros  dans  les  Gaules  est  du  23'  de  is.  t.  s.  i.  ii.  p. 
Mai  376.  Elle  porte  que  l'on  augmentera  ce  que  l'épargne  ^^'  *"' 
avoit  accoutume  de  donner  aux  Professeurs  dans  toutes  les  Mé- 
tropoles, et  particulièrement  à  la  trés-illuslre  ville  de  Trêves. 
Celle-ci  est  spécifiée  en  particulier  avec  éloge,  parce  que 
depuis  long-tems  les  Empereurs  d'Occident  en  faisoient  le 
lieu  de  leur  résidence  ordinaire. 

En  '  378  Gratien  marcha  contre  les  Allemans,  et  les  défit  jiii.ibia.  p-.  ir,o. 
près  de  Cohnar  et  de  Brissac  en  Alsace.  11  donna  par-là  en  ■"*  i  *"'• ''"•'• 
une  seule  année  la  paix  aux  frontières  du  Rhin  et  du  Danube. 
'  De-là  il  mena  son  armée  au  secours  de  l'Empereur  Valens  Amm.  i.  si.p.cii. 
son  oncle  contre  les  Gots.  Mais  avant  qu'il  le  joignît,  ce  mal- 
heureux Empereur  '  périt  à  la  journée  d'Andrinople  le  neuvié-  tui.  ibid.  p.  m. 

G  154. 


23(i  G  HAT  1  EN, 

IV  siEtXK.      me  d'Août  de  la  même  aimée.  Celle  mial  reiidit  Gralien  maî- 
tre  de  l'Orient,  et  lui  ouvrit  la  voie  pour  tirer  l'Eglise  Orien- 
coj.  Th.  16.  i.s.  laie  de  l'oppression  où  (ille  /-toit.  '  Il  se  liAta  aussi-lôt  d'aller 
VV  c.'l.pMii'iT  '1  Constanliiiople.  \A  voulant  faire  éclater  la  piété  qu'il  avoil 
2^f- '•:'•«•  2- p-  dans  le  cœur,  et  montrer  (combien  il  étoit  indigné  des  vexa- 
493.   "'  '    ■  '''    lions  que  Valens  avoit  faites  au  Catholiques,  il    rapj)ela  les 
Evêques  bannis  au  gouvernement  de  leurs  troupeaux,  rendit 
les  biens  et  la  liberté  aux  autres  exilés,  et  répara  les  domma- 
ges qu'ils  avoient  soufferts.  11  fit  ensuite  une  loi  pour  permet- 
tre à  tous  ceux  qui  professoient  quelque  religion,  de  tenir  li- 
brement leurs  assemblées,  exceptant  néanmoins  de  ce  nom- 
Tiii.  ibid.  p.  i.'ii.   brc  les  Eunomiens,  les  Pholiniens,  el  les  Manichéens.  '  Le 
trouble  où  étoit  alors  l'Empire,  ne  lui  permit  pas  de  faire  cette 
fois  là  davantage  pour  l'Orient, 
cod.  ibid.  t.  6. 1. 2.       '  Mais  pour  l'Occident,  dés  le  17"  d'Octobre  de  la  même 
•■■  "  année  il  publia  une  autre  loi  contre  les  Donatistes,  qui  len- 

doit  à  détruire  entièrement  les  restes  de  cette  Secle.  Par  la  mê- 
me loi  il  déclara  généralement  qu'il  ne  prétendoil  point  que 
l'on  onseignût  d'autre  doctrine  que  colle  qui  est  conforme  à 
la  foi  de  l'Evangile  el  des  Apôtres,  el  à  la  tradition  de  l'Eglise. 
Tiidri. ibid. c. .1. p.       'Les  Gots  continuant  leurs  ravages  en  Orient,  Gralien  y 
p"*733  '''^''*'  ''"^'  fi'ivoïa  d'Espagne  le  jeune  Théodose  à  la  tête  d'une  armée 
pour  les  combattre.  Ce  Général  remporta  sur  eux  une  victoi- 
re si  complète  qu'il  les  contraignit  de  repasser  le  Danube. 
i>iosp.  ibid.  I  Aiig.  Après  celle  glorieuse  expédition,  '  Gralien  plus  passionné  d'a- 
Tiid'ruibid.c'.G^i'..  voir  un  Collègue  d'une  fid'''lilé  reconnue,  que  d'étendre  sa 
2o;i  I  Vici.ibid.       puissaucc,  scntant  d'ailleurs  nue  le  poids  d'une  si  vaste  domi- 
n.ntion  étoit  trop  pesant  pour  lui,  il  .se  résolut  par  une  sagesse 
qui  passoit  de  beaucoup  son  âge,  d'associer  Théodose  à  l'Em- 
pire. Son  choix,  dit  Aurele  Vi(  lor,  fut  aplaudi  de  tout  le  mon- 
Tiii.  ibid.  p.  I.-.7.  de.  '  11  le  déclara  Augu.ste  h  Sirmioh  le  19"  de  Janvier  379, 
"**•  '"■  el  lui  céda  l'Orient,  la  Thracf  el  l'illyrie  Orientale, 

p.  158.  i.n».  '  Au  retour  de  ce  voïage  (Jratien  pas.sa  par  l'Italie,  où  il  eut 

enfin  la  consolation  de  jouir  de  la  compagnie  de  S.  Ambroi- 
Amb.cp  1.11.1-2  I  S'.'.  '  11  porloil  à  ce  S.  Evêque  un  j-e.spect  infini.  Le  Saint  avoit 
HMi.i.  1. 1  pr.  n.  r;>,.j|)i.oq,i(;nient  pour  lui  une  tendriwe  el  un  alachemenl  sans 
bornes.  Sa  foi,  sa  vie  et  sa  gloire  faisoient  la  joïe  de  son  amc. 
Il  le  suivojt  dans  toutes  ses  démarches.  Il  ne  perdoil  point  de 
vûë  .SCS  armées,  veillant  continuellement  sur  cllfs  jmr  ses  prie- 
l'cs.  Dès  l'année  précédente  Gralien  persuadé  (pie  la  victoire 
dépend  plus  de  la  foi  du  Prince,  (pie  du  courage  de  ses  sol- 


HMPEREIJH.  237 

dais  avoit  engagé  S.  Anibioise  à  lui  (''crire  uïi  ouvrage  sur  la      iv  siècle. 

foi,  '  afin  de  Mi  munir  de  ce  boucliei-  eontre  la  puissance  for-  jotid.i.  2.c.  ig.  n. 

midable  des  Harbaros  (|u'il  vainquit  eiïeclivenient.  '  Dans  la  ^^''• 

visite  qu'il  rendit  à  Mihin,  il  l'engagea  encore  à  ajouter  aux 

deux  premiers  livres  t)(tis  autres  sur  la  même  matière.  '  Et  Conc  t.  4.  p.  lac. 

comme  l'un  ne  se  lassoil  point  de  travailler  pour  la  religion, 

ni  l'autre  de  recevoir  ce  que  le  Saint  écrivoil,  '  Gratien  exi-  Amb..ieSp.  i.  i.c 

gea  encore  de  lui  qu'il  écrivît  sur  la  divinité  du  S.  Esprit  :  ce  ^  '  "'''  ''  "'' 

que  S.  Ambroise  exécuta  pour  satisfaire  aux  pieux  désirs  de  ce 

Prince. 

'  Gratien  se  trouvoil  dans  les  Gaules  et  à  Trêves  même  sur  Aus.cons.  p.734- 
la  fin  de  l'année  379.  Ce  ful-là  et  en  sa  présence  qu'Ausone  '^" 
prononça  son  panégyrique,  pour  le  remercier  des  lionneurs 
auquels  il  l'avoit  élevé.  Cet  Empereur  paroît  avoir  été  assez 
libre  d'ennemis  les  deux  années  suivantes.  Il  profita  de  cette 
Iranquilité  pour  le  bien  de  l'Eglise,  qu'il  semble  avoir  eu  plus 
à  cœur  que  sa  propre  gloire.  '  11  fit  ou  renouvella  diverses  loix  Cod.  tii.  is.  t.  7. 
en  faveur  de  la  religion  :  les  unes  pour  protéger  les  Calholi-  371! 
ques,  d'autres  pour  absoudre  les  criminels,  et  quelques  autres 
pour  régler  les  mœurs  des  Cliréliens.  '11  convoqua,  ou  don-  ciir.p.ioii  Amb. 
na  les  ordres  pour  convoquer  le  Concile  d'Aquilée,  qui  se  '"^''   *'  "'  '  ^' 
tint  en  381  contre  les  .Ariens. 

'  Une  de  ses  plus  éclatantes  actions  fut  de  faire  ôter  l'autel  Amb.  ep.  17.  n.s. 
de  la  Victoire,  et  d'en  confisquer  au  profit  de  l'épargne  les  re-  ^'^' 
venus  destinés  aux  frais  des  sacrifices  et  à  l'entretien  des  Pon- 
tifes des  idoles.  Cet  autel  faisoit  revivre  le  Paganisme  au  mi- 
lieu de  Home.  Le  détruire  c'étoit  remporter  une  victoire  éter- 
nelle sur  le  Démon  ;  c'étoit  offrir  ses  dépouilles  à  J.  C.  et  éle- 
ver à  Dieu  un  trophée  de  pieté. 

'  Pendant  que  (îratien  travailloit  ainsi  pour  le  bien  de  l'E-  Pros.  t.  chr.p. 
glise  et  de  l'Etat,  Maxime  songeoit  à  le  détrôner.  11  étoit  Lieu-  735!  ^""'  ''"•  ^' 
tenant  pour  les  Romains  dans  la  grande  Bretagne.  S'y  étant  ré- 
volté en  383,  il  passa  au.ssitùt  dans  les  Gaules  et  y  usurpa 
l'Empire.  'Dès  lors  il  ne  songeai  d'autres  ennemis  qu'à  Gra-  thi.  iWii.  p.  177- 
tien,  et  marcha  contre  lui  avec  une  nombreuse  armée.  Gra-  "'"'■ 
tien  se  di.spos<'uit  à  lui  faire  tête,  fut  inhumainement  trahi  par 
celui  à  qui  il  avoit  confié  le  soin  de  .ses  provinces.  11  se  vit 
ensuite  abandonné  de  ses  li-oupes  qui  se  rangèrent  du  parti  de 
Maxime,  et  fui  contmint  de  se  sauver  par  la  fuite.  '  Dans  cet  Amb.  inP».  (ii.n. 
état  d'abandon  il  pioferoit  ces  paroles  louchantes  qu'il  avoil  "' 
aprises  de  celui  auquel  il  s'éloit  consacré  :  Mon  ame  n'esl-elle 


238  GKATIEN, 

IV  SIECLE,      pas  entre  les  mains  de  Dieu  seul  ?  Vous  pouvez  tuer  mon 

corps,  mais  vous  ne  pouvez  nuire  ni  à  mon  ame  ni  ù  ma  ver- 

Tiii.  ib.  p.  «79.      tu.  '  Toutefois  Dieu  voulant  peut-être  ou  purifier  ce  Prince 

des  fautes  qu'il  avoit   commises,  ou  le  préserver  de  celles 

3u'il  n'auroit  pu  éviter  dans  un  élal  aussi  dangereux  nue  celui 
'un  Empereur,  permit  qu'étant  arrivé  près  de  Lyon,  il  fut  pris 

Ir'n.^aw. ''  '^'''  ^'  ^^^  P^^  Andragathius  le  Si)  de  Juillet  sous  le  consulat  de 

Merobaude  et  de  Saturnin,  c'est-à-dire  l'an  383.  Oralien  avoit 

alors  2i  ans  passés,  et  en  avoit  régné  huit  moins  trois  h  qua- 

.\mi).  Je  ob.  Val.  trc  mois,  di'puis  la  mort  de  son  péi-e.  '  Son  corps  fut  [)orté  de- 

"■  '*■  puis  à  Milan,  où  il  fut  inhumé. 

Tiii.  ibid.  p.  181.        '  Il  avoit  épousé  en  premières  noces  Constancie  qui  mourut 
Tbdrt.  I.  5.  c.  12.  avant  lui.  11  épou.sa  ensuite  Lœtci  ;  '  mais  en  mourantil  ne  laissa 
L!m.' L  i7. 'ai'.'p.  point  d'enfant  pour  lui  succéder.  Tous  les  Historiens  qui  par- 
49;^^638^Uus^B.  lent  de  ce  jeune  Empereur,  ne  le  font  (lu'avec  éloge.  C'étoit 
un  Prince  parfaitement  bien  fait  et  pour  la  taille  et  pour  les 
traits  du  visago,  brave  et  vaillant  dans  la  guerre,  qui  à  ces  avan- 
tages extérieurs  réunissoit  toutes  lis  qualités  d'un  excellent 
cœur  et  d'un  bon  esprit,  et  qui  savoit  relever  toutes  ces  per- 
fections par  une  grandeur  d'ame  et  une  libéralité  digne  d'un 
Souverain.  Il  avoit  de  la  bonlé,  de  la  modération,  de  la  dou- 
ceur ,  de  la  prudence ,  de  la  piété  ;  et  la  manière  dont  il  gou- 
verna les  peuples,  n'annonce  autre  chose.  Non  seulement  il 
recevoitavcc  affabilité  ceux  qui  s'adressoient  à  lui;  mais  i!  les 
exhortoit  aussi  à  lui  parler  avec  une  entière  liberté,  et  préve- 
noit  ses  amis  dans  les  civilités  ordinaires.   II  poussoit  l'huma- 
nité jusqu'à  visiter  dans  leurs  maladies  les  simples  soldats  com- 
me les  personnes  de  distinction,  et  à  leur  rendre  toute  sorte 
de  bons  ofiices.  Ennemi  des  excès  du  vin  et  de  toute  autre 
débauche,  il  étoit  ft'ugal  en  ses  repas,  et  parfaitement  réglé 
Amb.  lie  ob.  Val.  en  toute  sa  conduite.  '  Aussi  chaste  de  corps  qu'il  l'étoit  de 
°""'"'  cœur,  il  ne  connut  jamais  d'autre  femme  que  la  sienne  pro- 

pre. Pour  la  piété  l'on  a  vu  par  son  histoire  jusqu'oii  il  la  por- 
Aus.  ib.  p.  726.     toit.  C'étoit  un  Prince  fidèle  au  Seigneur,  '  qui  dès  son  enian-- 
ce  n'avoit  jamais  rien  entrepris  sans  implorer  le  secours  de 
Amm.  ib.  Dieu.  '  En  un  mol  il  étoit,  selon  le  sentiment  d'un  Païen  mê- 

me, pour  égaler  les  plus  grands  Princes  de  l'antiquilé,  si  Dieu 
lui  eût  accordé  une  plus  longue  vie.  Il  est  vrai,  et  il  ne  le  faut 
•"  "I'"  pas  dissimuler,  qu'il  eut  près  de  lui  des  personnes  dont  la  mau- 
vaise conduite  fit  tort  à  ses  bonnes  qualités,  qui  n'étoient 
pas  encore  ni  assez  mtires  ni  assez  affermies  à  cause  de  son  jeu- 
ne âge. 


EMPEREUR.  239 

Gratien  fit  un  très-grand  nombre  de  loix  tant  en  faveur  de     iv  siècle. 
l'Eglise,  que  pour  maintenir  le  bon  ordre  dans  l'Etat,  com- 
me  on  l'a  pu  remarquer  dans  ce  que  nous  avons  raporté  de 
son  histoire.  On  a  enrichi  le  Code  Theodosien  de  toutes  celles 
que  l'on  a  pu  recouvrer  ;  et  elles  font  aujourd'hui  partie  de  l'an- 
cien droit  Romain.' Symmaque  parle  aussi  d'un  discours  ou  Sym.  i.  lo.  op.  •. 
déclaration  de  Gratien  en  faveur  du  Sénat.  Ce  Prince  l'avoit 
faite  pour  remédier  à  un  desordre  qui  se  glissoil  dans  le  gouver- 
nement ,  et  délivrer  les  Sénateurs  de  la  mort  dont  la  tyrannie 
du  Préfet  Ma.ximin  les  avoit  menacés.'  On  a  aussi  un  re-crit  Conc.  n.  <-p.  p. 
de  lui  pour  achever  de  soumettre  le  parti  d'Ursin  Conlendant 
du  Pape  S.  Dama.se. 

C'est  à  la  foi  et  à  la  pieté  de  Gratien  que  nous  sommes  re- 
devables ,  comme  on  l'a  vu  des  cinq  livres  sur  la  foi  et  des  trois 
sur  le  S.  Esprit  que  S.  Ambroise  composa,  et  que  nous  avons 
encore.  'La  lotre  que  cet  Empereur  lui  écrivit  à  ce  sujet,  se  Amb.  «p.  p.  s. 
trouve  à  la  tête  de  celles  de  ce  grand  Evoque.  'Elle  mérite  à  «p.  i.n.3. 4|  tu. 
juste  titre  les  éloge.s  qu'il  lui  donne;  et  les  Savans  y  reconnoi.s-  '"•  p-  *^- 
sent  autant  d'esprit  et  d'élégance  ,  que  le  Saint  y  admiroit  de 
foi,  de  pieté  et  d'humilité. 

Aussi  avons-nous  montré  que  ce  Prince  avoit  été  fort  bien 
instruit  dans  les  belles  letn-s ,  et  qu'il  y  avoit  fait  des  progrès 
proportionnés  à  l'heureux  caractère  de  son  génie  et  à  l'habi- 
leté du  Maitre  qui  dirip;eoit  ses  études.  'Un  Orateur  du  tems  Sjm.  i.  ».  «p.  i.s. 
ne  fait  pas  même  difficulté  de  le  a\ia.\i(\er,eruditissîmiis  Impera- 
tor.  '  Gratien  prenoit  tant  de  plaisir  aux  exercices  des  Muses,  aus.  epu.  p.  •.  *. 
qu'il  savoit  toujours  trouver  du  tems  pour  l'y  emploïer,  malgré 
les  embaras  de  la  guerre,  et  quoique  souvent  environné  des 
Gots,  des  Huns  et  des  Sarma'es.  Presque  toujours  aussi-tôt 
qu'il  avoit  quilé  les  armes,  il  prenoit  la  plume  pour  faire  des 
vers,  et  y  réussissoit  autant  qu'à  remporter  des  victoires.  C'est 
ce  qu'Ausone,  qui  en  éloit  et  le  témoin  et  le  juge ,  décrit  assez 
agréablement  dans  une  epigramme  qui  mérite  de  trouver  ici 
sa  place. 


Rellandi  fandique  potens  Auf,'uslus,  lionorom 
Bis  mcret  :  ut  geminel  titulo.s,  qui  pirelia  Musis 
Tempérât ,  et  Gclicum  inodcratur  A|ioIline  Martem. 
Arma  inter  Chunosque  Iruces,  furtoque  nocciitcs 
Sauromatas,  quantum  cessât  de  tcmporc  bclli , 
Indulget  Clariis  tantuni  inter  castra  Camœni.s. 


IV    SIECLE. 


240  I.  CONCILE  DE  ROIIRPEAUX. 

Vix  posuit  volucrus  stridcnliu  tcla  E;i},'itlas, 
Musarum  ad  calamos  fcitur  iiiamis,  olia  ncscit, 
Elcommutata  mcililaturaruiuliiKMiaimen. 
Sed  rarmou  nonmollo  inodis,  liclla  horrida  Marlis. 
Odrysii ,  ïlicessiKquc  viragiiiis  arma  rctraclat. 
Exsulta  iEacide  ,  celebraris  vate  supcibo 
Rursum  :  Roinanusquc  tibi  contiogil  Homerus. 


I.  CONCILE  DE  BOURDEÂUX. 


o: 


kN  a  déjà  vu  quel  étoit  le  caractère  des  Priscillianistes , 
'qui  donnèrent  ocasion  à  ce  Concile ,  et  de  quelle  ma- 
nière ils  furent  traités  en  Espagn;^  où  ils  avoient  pris  naissan- 
SuLhis.  i.s.n.63.  cc.  '  Malgré  la  condamnation  portée  contre  eux  au  Concile 
^'  ***■  de  Saragoce  en  380,  ces  hérétiques  remuèrent  encore  plus 

dans  la  suite  qu'ils  n'avoient  fait  auparavant.  Bien  loin  de  se 
soumettre  à  l'autorité  de  l'Eglise,  ils  cherchèrent  ou  à  l'éluder, 
p.  42*.  485.  ou  même  à  se  fortifier  contre  elle.  '  Ils  y  réussirent  par  le  moïen 

de  quelques  personnes  puissantes  à  la  cour,  qui  y  rendoient 
toutes  choses  vénales.  Une  grosse  somme  d'argent  donnée  à 
Macedone  Grand-Maître  du  palais,  leur  obtint  de  l'Empereur 
Gratien  un  rescrit  favorable  à  leurs  desseins.  De  sorte  qu'Itha- 
ce  leur  plus  vif  adversaire  fut  contraint  de  sortir  d'Espagne , 
et  de  venir  chercher  un  asyle  dans  quelqu'une  de  nos  pro- 
vinces, 
n.  C4.  p.  426  1  'Vers  ce  mêmetems,  ou  peu  après,  Maxime  aiant  pris  la 

Prof.  ciir.  p.  735.    pom-pj-g  ja^g  la  grande  Bretagne,  entra  dans  les  Gaules,  et  y 
agit  en  Souverain.  Lorsqu'il  fut  à  Trêves,  Ithace  qui  s'y  Irou- 
voit,  lui  présenta  une  requête,  où  il  exposoit  avec  beaucoup 
de  véhémence  les  crimes  de  Priscillien  et  de  ses  sectateurs. 
Maxime  en  fut  si  touché,  qu'il  envoïa  ordre  au  Préfet  des 
Gaules  et  au  Vicaire  d'Espagne,  de  faire  conduire  à  Bour- 
deaux  tous  ceux  qui  suivoienl  cette  secte,  afin  qu'ils  y  fussent 
Fiea.  H.  E.  t.  4.  p.  jugés  par  le  Concile  qui  devoit  bien-tôt  s'y  assembler.  '  Il  s'y 
m  H.  E.  1. 8.  p.  assembla  en  effet  dès  l'an  383,  selon  Mr.  l'Abbé  Fleuri,  '  mais 
505.'  793.  plus  vraisemblablement  l'année  suivante  384  ;  car  il  y  a  toute 

aparence  que  Maxime  ne  le  convoqua  qu'après  que  les  trou- 
bles de  l'Empire  furent  appaisés.  Or  Gratien,  comme  on  l'a 

vu. 


I.  CONCILE  DE  BOURDEAUX.  241 

vu,  ne  fut  tué  que  le  25  d'Août  383;  et  il  fallut  bien  quelque     iv  sif.Cle; 

lems  aux  Evêques  pour  s'y  rendre.  On  ignore  les  noms  de  

ceux  qui  s'y  trouvèrent ,  parce  que  l'on  n'en  a  jamais  publié 

les  actes.  '  Idace  le  Clironologiste  semble  dire  que  S.  Mar-  xm.  h.  k.  t.  h. 

tin  de  Tours  y  assista.  Mais  S.  Sulpice  ne  le  disant  point,  on  p-  '''' 

a  tout  lieu,  remarque  Mr  de  Tillemont,  de  douter  de  ce  fait, 

'  Cependant  Dom  Luc  d'Acheri  assure  comme  une  chose  cer-  spio.  i.  r,.  pr.  p.  n. 

taine,  qu'il  paroît  avoir  aprise  du  P.  Vignier.  de  l'Oratoire 

.son  ami  particulier ,  qui  avoit  entre  les  mains  les  actes  de  ce 

Concile,  que  S.  Martin  s'y  trouva  en  personne,  et  que  S.  Del- 

phin  Evêque  du  lieu  y  présida. 

'  Ce  qu  il  y  a  d'incontestable,  c'est  qu'Instance  et  Priscillien  sni.  ib.  i  Pro».  lu. 
y  furent  amenés.  Le  premier  ayant  eu  ordre  de  parler  pour  sa  •'  "f^- 
défense,  se  justifia  si  mal,  que  le  Concile  le  déclara  indigne 
de  l'épiscopat.  Priscillien  jugeant  bien  qu'il  seroit  traité  de  la 
même  manière,  refusa  de  répondre,  et  en  apella  à  l'Empe- 
reur. '  Comme  ses  crimes  étoient  certains  et  notoires,  les  Pe-  s„i.  ui.  p.  tn. 
res  du  Concile,  observe  avec  raison  S.  Sevore  Sulpice,  ne  dé- 
voient avoir  aucun  égard  h  son  oposition  ;  ou  s'ils  étoient  sus- 
pects, ils  dévoient  reser\er  la  connoissance  de  cette  cause  à 
d'autres  Evêques,  sans  la  renvoier  au  jugement  du  Prince.  Ils 
eurent  néanmoins  la  foiblesse  de  déférer  à  cet  apel  :  ce  qui 
eut  de  fâcheuses  suites,  '  et  qui  fut  blâmé  depuis  comme  une  n  «.%.  p.  4m. 
chose  inoilie  et  sans  exemple,  par  S.  Martin  en  parlant  à  l'Em- 
pereur même. 

'  Priscillien  et  ses  complices  furent  donc  conduits  à  Maxi-  n.  64.  p.  4a- 
me.  Idace  et  Ilhace,  leurs  accusateurs  trop  passionnés,  les  y 
suivirent  de  près.  '  A  la  solicitation  de  ceux-ci  et  de  leurs  as-  n.  &s.  p.  ♦«. 
sociés,  l'affaire  s'engagea  jusqu'à  répandre  le  sang  de  ces  héré- 
tiques contre  l'esprit  de  l'Eglise.  Ce  fut  en  vain  que  pour  leur 
sauver  la  vie,  S.  Martin  qui  se  trouvoit  alors  à  Trêves,  où  étoit 
la  Cour,  emploïa  ses  remontrances  et  ses  réprimandes  auprès 
d'Ithace,  son  crédit   et  ses  prières  auprès  de  l'Empereur. 
Ce  Prince  après  les  avoir  convaincus  de  diverses  infamies, 
'  fit  trancher  la  tête  à  Priscillien  et  à  quelques  autres  de  ses  p.  430 1  Pro«.  ii». 
sectateurs  vers  l'an  385.  Cette  cruauté  exercée  à  la  poursuite 
d'Ithace  et  de  ses  partisans,  donna  naissance  à  la  secte  des  Itha- 
ciens,  comme  nous  avons  dit  ailleurs.  Telles  furent  les  suites 
du  Concile  de  Bourdeaux,  qui  nous  sont  plus  connues,  que 
ce  qui  se  passa  dans  l'assemblée  même. 

On  prétend  que  le  P.  Vignier  de  l'Oratoire  en  avoit  les  Spic.  ii».  1  thi.  ib. 

Tomf  f.  fipr.  Part.  11  h         ''  '^'' 


2i2  "^  '       S.  SK15VAIS, '"'^^^    ■ 

IV  siKCLE.  actes,  et  qu'ils  ont  pass('(l(|mis  entre  l(s  mains  de  Mr  Kaiire 
(irand-VioainMl»'  lU'inis.  (le  seroil  un  pirsenl  à  faire  au  pu- 
blic, qui  n'a  rien  aulre  rhose  di^  ce  Concile,  que  <•(,'  que  S. 
Severe  Sulpiee  et  S.  l'rosper  noiis  en  ont  eonservé.  l'un  dans 
son  histoire  sacréi;,  l'aulre  dans  sa  chroniijue. 


S.     S  E  11  V  A  1  S , 

KvEQi  K  or  To\(;Rr,s. 

ON  ne  connojl  point  de  nom  qui  soit  exprimé  en  lanl 
de  diverses  manières,  que  Test  le  nom  latin  de  ce  IV- 
sui.hisi.  1-9.11.  •;!>.  latdans  les  anciens  auleiirs  qui  ont  })arlé  de  lui.  '  Les  uns, 
L'c^'s.nôub.iÂlii'.  comme  S,  Sevcre  Sulpiec  le  nomment  Serrnfio;  d'autres, 
".'"oic^nc.'^iion.V.  <'<»mrnfîS.  Grigoiredf!  Tours,  Arvatins,  Aramtiii.s  et  même 
^"'679  i^Roti' 'i3"  ^'^^'^o.tius ;  {a'xw-c'i  ,  vominv.  ^.  Allumase  et  la  lefre  synculale 
mai.  p.  21.'-°  li.  is!  du  Coucile  de  Sardique,  SnriHttw.-t  ;  ceux-là,  comme  (îenna- 
i\e^  Sahliattm ;  enlin  tous  les  autres  U\  nomment  SetTatii/\ , 
dont  nous  avons  formé  le  nom  vulgaire  qu'il  porte. 

Ce  qui  paroitra  ici  nouveau,  et  (ju'il  est  im|)ortant  de  prou- 
ver, est  que  Sabbaliiis  '  dont   pai-le  Genuade,   soit  le  même 
que  S.  Servais  Evê(|ue  de  ïon<4res.  IJien  cependant  n'est  plus 
plausible  ;  et  voici  les  niisoiis  (pii  ne  permettent  pas  d'en  dou- 
Cfna.  il».  ter:  '  1°.  la  qualité  d'I-lvêque  et  d'Evêque  de  l'Eglise  Gallica- 

ne, que  lui  donne  Gennade;  2".  la  ressenddance  du  n(»m  de 
3"^"'8i'!'^«"r' '■  ^'l'^batius  '  avec  celui  de  Sarbalius,  que  tout  le  monde  con- 
■  **  ■  '■  vient  être  b' même  que  Serbatius.  On  voit  qu'entre  Sarbatius 
et  Sabbalius  il  n'y  a  qu'une  seule  letre  cjiangée,  peut-êlie  pour 
en  adoucir  la  prononciation.  3".  La  troisiénu;  rai.son  est  fondée 
sur  le  tems  auquel  Geimade  place  Sabbalius,  qu'il  met  entre 
les  Ecrivains  du  IV  siècle.  Car  bien  que  cet  Auteur,  comme. 
nousTavonsdéja  observé  ailleurs,  ne  suive  pas  une  exactecbro- 

Siil.  Vil.  M.  n.  2.';.        1     On   Ironvo  dans  S.  Si'vi'rc  Siil|iiriHiii  Cel.is.'  on   4i)4    fuil    iiir>iiiinii    il'iin    aulre 

P-  ■*'"•  SabaliHs  disriplo  de  S.    Marlin  Kv('(|iic  <\o  Sat)l)aliiis    Mrctlqup,    donl    il    condamne 

Tours,     :i    Maiinonliur.     Mais     onln^    i|iiii  Ixs   m-iils    um-c    cxeiTHlion,    comint-   ceux 

noas  n«  .'Uivo'is  point  si  c-rlin-ri  fui  j.'iiiiais  dos    pi in»   iK'ri'tiqiii's,    <>rinllie,    Mai- 

élevfiA  l'épiiicupul,  Ion»  le»  lariuiii-nii  sous  «ion.  Vulnilln,  pU;.   Aiii.si  Ton   uiil  par-IA 

lisqui'l»  l'annn  SahIntJus  nmi.'»  rsl    ivprc-  mu-   m   licTi'liipip    n'est    point    SaWialms 

fionii.   ib.   nol.    p.    s<'nl«.    convipnn.-nt    lr<i|i    iiahinH.'uii-nl   à  dont    |iail«    (>«nnad<'.   '    Lalinus  l.:iiiriiiiii 

^,'-  8.  Servais  d«  Tonpi-cs,  pour  Ir-s  ,    ,.orlcr  h  d:ins   sa  bildiollicqun  sacrée  ci    profain-   a 

(.onc.  t.  4.  p.  1S6S.    nn  .autre.    '   bt  I  nur.ilf  do  Roinn  sous  S.  pris  reliij.ri  ptmr  S.  Pliéliadf^d'Avfi). 


EVEQUE  DE  TONliHES.  243 

iiologie,  il  est  néanmoins  certain  que  les  trente-huit  premiers  iv  siècle. 
chapitres  de  son  caialogue  des  hommes  iHustres,  ne  traitent 
que  do  ceux  qui  ont  Henri,  ou  conmicMieé  à  lleurir  an  IV  siècle 
et  que  le  vingl-cinquiéme  chapitre  est  enlploïé  à  parler  de 
Sahbatius.  4".  Enfin  le  sujet  que  Sahbalius  avoit  entrepris  de 
liaiter  dans  son  ouvrage  contre  Valentin  et  Marcion  ,  Aëtius 
et  Eunomius,  est  une  matière  qui  convient  fort  au  IV  siècle, 
etàS.  Servais  en  particulier  comme  défenseur  de  la  Consub- 
slanlialité  du  Verbe,  dont  l'ouvrage  Irailoit. 

«Juelqne  long  (|u'ait  été  l'épiscopat  de  S.  Servais,  et  quel- 
que grand  personnagi;  que  le  Saint  ail  fait  dans  l'Eglise,  on 
n'a  toutefois  que  peu  de  faits  crrtains  pour  son  histoire.  'Ses  Uoii.  ib. 
plus  anciens  actes  cités  par  un  Auteur  du  XI  siècle,  portent 
<|u'ilét(til  issu  d'une  ancicimc;  noblesse,  et  qu'il  avoit  reçu  une 
cducalidii  encore  au-dessus  de  sa  iiais.sin<'e.  Son  mérite  l'éle- 
va  ensuite  sm-  le  siège  épisc<»pal  de  Tongres  dans  la  Belgique  ; 
maison  ignore  en  queib;  année.  Il  est  compte  pour  le  dixième 
Evêqui'ùe  cette  Eglise  :  ce  qui  est  sans  doute  ou  faire  remonter 
Iroj)  haut  l'établissement  de;  la  loi  dans  ce  diocèse,  ou  donner 
trop  peu  de  temsà  l'épiscojjal  d(-  :(!S  premiers  Evéques.  (XV.) 

'Il  y  avoit  iléja  quchpi  •  teins  que  S.  Servais  gouvernoit  Couc.  t.  2.  p.  679. 
l'Eglise  de  Tungrcs,  lorsq;i'<;n  !J  17  il  se  trouva  avec  (ilusieui-s 
autres  Prélats  (iaulois  au  ('oncile  de  Sardique,  où  S.  Athana- 
se  fut  absniis.  Notre  Saint  eut  part  à  cette  bonne  œuvre,  et 
aux  autres  reglemens  qui  se  firent  dans  cette  assemblée  pour 
le  bien  de  l'Eglist;.  Il  faut  qu'il  se  fût  rendu  bien  recomman-  .vni.  il.  ».  c.  !». 
dabli'  par  son  mérite,  pour  qu<!  le  Tyran  Magnence  ne  ju- 
geât pei-sonne  plus  propre  que  lui  à  lui  m'-nager  les  bonnes 
grâces  de  l'Enqif-reur  Clonstar»;!-,  après  qu'il  eût  M;  la  vie  et 
ravi  l'Empire  à  l'Empereur  Constant  yon  frère.  11  le  députa 
donc  en  Orient  vers  ce  Prince,  et  lui  doima  pour  associés  un 
autre  Prélat  (iaulois  nommé  Maxime,  (l  deux  laïcs  de  distinc- 
tion (^Ilemence  et  Valens.  '  S.  Senais  se  comporta  en  cette  BoIi.  ib.  p.  su.n. 
occasion  à  l'égard  de  Magnence,  comme  firent  depuis  S.  Am- 
broise  et  S.  Martin  à  l'égard  du  Tyran  Maxime  après  l'assassi- 
Jiat  de  l'Empereur  (iratien.  Le  repos  de  l'Eglise  dépendoit 
de  ces  usurpateurs.  Ces  Saints  dans  cette  vûë  leur  obéirent 
comme  k  leurs  Princes  légitimes.  On  ignore  quelle  fut  l'issue 
de  l'ambassade  de  S.  Servais.  '  Seulement  oi»  sait  qu'elle  lui  ahi.  ih 
procura  la  consolation  de  voir  S.  Athanase  en  passant  par  Ale- 
xandrie. C'est  cequi  fournit  aux  ennemis  de  ce  Saint  un  faux  "    '  w  » 

Hhij 


tu  s.  SEirVAIS,  i 

IV  siECLK.  prétexte  de  le  calomnier  de  nouveau,  eu  l'acusant  auprès  d<; 
Constance  d'avoir  des  intelligences  avec  le  Tyran.  Ceci  se 
passa  en  331. 

Sui.  ib.  p.  108.  Huit  ans  après  en  359  '  S.  Servais  assista  avec  divers  autres 
Evêques  des  Gaules  au  fameux  Concile  de  Rimini.  Lui  et  S. 
Phebade  d'Agen  furent  les  deux  Prélats  Catholiques  qui  y 
firent  paroître  et  plus  de  zélé  pour  la  foi  de  Nicée,  et  plus  de 
constance  à  la  soutenir.  Ils  virent  presque  tous  les  autres  Evê- 
ques Catholiques  céder  au  tems  et  abandonner  lâchement 
la  vérité,  sans  en  être  ébranlés.  Us  n'en  devinrent  même  que 
plus  fermes.  Ce  fut  en  vain  que  le  Préfet  Taurus  Modérateur 
du  Concile,  pour  les  faire  sucomber  comme  les  autres,  em- 
ploia  les  prières  et  les  larmes,  les  raisonnemens  et  les  mena- 

p.  410.  ces.  '  Mais  ils  manquèrent  malheureusement  ou  de  force  ou 

de  lumière  pour  tenu-  également  contre  les  artifices  et  les  ruse» 
d'Ursace  et  de  Valens.  Malgré  la  sage  précaution  qu'ils  eurent 
de  dresser  eux-mêmes  des  formules  particulières  de  foi,  pour 
éviter  de  signer  celles  des  Ariens,  ils  ne  laissèrent  pas  de  se 
laisser  tromper  par  ces  deux  fourbes,  en  y  insérant  par  leur 
suggestion.  Que  le  Fils  n'est  pas  une  créature  comme  les  au- 
tres. C'étoit  néanmoins  le  reconnoître  pour  créature,  mais 
pour  créature  plus  excellente  que  les  autres  ;  et  c'est  en  cela 
que  consistoit  la  fraude  et  qu'étoit  contenu  le  venin  de  l'A- 
rianisme. 

Il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  que  S.  Servais  s'étant  ensuite 
aperçu  de  l'erreur,  comme  tant  d'autres  Prélats  Gaulois,  ne 
retractât  ce  qu'il  avoitfait  en  cette  ocasion.  Nous  avons  par- 
lé ailleurs  de  ce  que  l'on  fit  dans  les  Gaules  pour  réparer  le 
scandale  de  Rimini.  S.  Servais  y  contribua  sans  doute.  On 
peut  même  assurer  qu'il  ne  manqua  pas  de  .se  trouver  à  quel- 
qu'un des  Conciles  convoqués  à  cet  effet,  et  peut-être  même 
à  celui  de  Paris  tenu  en  361 .  Voila  ce  que  l'on  sait  de  certain 

-ii.i:  r, . ^  touchant  l'histoire  de  S.  Servais.  Ce  que  l'on  en  dit  de  plus, 

auroit  besoin  de  meilleurs  garans  que  les  Auteurs  dont  on  1« 
tire. 

Toutefois,   après  ce  que  nous  en  venons  de  raporter,  on 

Or.  T.  ib.  ne  doit  pas  faire  difficulté  '  d'en  croire  S.  Grégoire  de  Tours, 

lorsqu'il  nous  représente  S.  Servais  comme  un  Prélat  d'une 
sainteté  éminente,  qui  par  ses  veilles,  ses  jeûnes,  ses  prières 

iii.  I  iioi.  p.  5a.  I   acompagnées  de  larmes,  imploroit  sans  cesse  la  miséricorde 

BtU^  ib.  p.  213.  j^  jjig^  p^y^  |g^  besoins  de  son  troupeau.  '  L'on  prétend  que 


EVEUUE  UE  TOiNGKES.  245 

sur  les  alarmes  des  incursions  des  Huns,  ou  plutôt  des  Vanda-    i  v  siècle. 
les,  il  quita  la  ville  de  Tongres,  pour  se  retirer  à  Mastricht  sur  ' 

la  Meuse,  et  qu'il  y  mourut  le  treizième  de  Mai  384,  *  après  i 
un  épiscopat  de  plus  de  37  ans.  D'autres  ajoutent  que  ce  fut 
lui-même  qui  y  transfera  le  siège  episcopal  ;  quoique  cela  ne 
se  fît  qu'au  siècle  suivant,  après  qu'Attila  eut  détruit  la  ville 
de  Tongres.  De  Mastricht  ce  siège  a  été  depuis  transféré  à 
Liège. 

'  S.  Servais  étant  le  même  que  Sabbatius  dont  parle  Genna-  («nn.  ih. 
de,  comme  nous  l'avons  prouvé,  a  mérité  par  ses  écrits, 
quoiqu'il  ne  nous  en  reste  plus  rien,  d'être  mis  au  rang  des 
Auteurs  Ecclésiastiques.  A  la  prière  d'une  Viei^e  Chrétienne, 
il  composa  un  ouvrage  sur  la  foi  contre  Valentin  et  Mar- 
cion,  Aëtius  et  Eunomius  son  disciple.  S.  Servais  l'avoit  di- 
visé en  deux  parties.  Dans  la  première  contre  Valentin  et 
Marcion,  il  démontroit  par  la  raison  et  l'autorité  de  l'Ecri- 
lure,  qu'il  n'y  a  qu'un  seul  principe  de  la  Divinité  et  non  pas 
deux,  comme  ces  hérésiarques  l'avoient  enseigné.  Qu'il  n'y 
a  qu'un  seul  Dieu.  Que  ce  Dieu  est  auteur  de  l'éternité,  et  a 
créé  de  rien  le  monde  que  nous  voïons.  Venant  à  J.  C.  S, 
Servais  prouvoit  qu'il  a  eu  un  véritable  corps  sujet  aux  mêmes 
foiblesses  que  le  nôtre,  à  la  nécessité  de  manger  et  déboire, 
à  la  lassitude,  à  la  tristesse,  aux  souffrances,  à  la  mort  même. 
Qu'il  est  ressuscité  dans  ce  corps,  et  que  par  là  il  a  fait  voir 
qu'il  étoit  un  vrai  homme,  contre  l'opinion  damnable  de  ces 
hérésiarques,  qui  prétendoient  qu'il  n'avoit  eu  que  l'aparence 
de  la  chair. 

'  Dans  la  seconde  partie  de  l'ouvrage,  S.  Servais  faisoit  voir  ibid. 
contre  l'hérésie  d'Aëtius  et  d'Éunomius,  que  le  Père  et  le  Fils 
ne  sont  point  de  deux  natures  différentes.  Qu'ils  n'ont  l'un  et 
l'autre  qu'une  seule  et  même  essence.  Que  le  Fils  procède  du 
Père,  et  lui  est  néanmoins  coëternel. 

'Tritheme  ajoute  que  S.  Servais  avoit  encore  composé  l'iirith.  sei.  eeci. 
quelques  autres  ouvrages,  qui  n'étqient  pas  venus  à  sa  con-  "^  '^' 
noissance.  Cela  peut  être  \Tai,  et  le  grand  personnage  qu'a 
fait  S.  Servais  dans  l'Eglise  ne  permet  guéres  d'en  douter  ; 
mais  l'autorité  seule  de  Tritheme  ne  suffit  pas  pour  l'assurer 
positivement. 

t  '  La  dernière   édiUun   du  dictionaiio  plus   de  56   ans  :    m  qui  non-seolement   Mor.  S.  p.  M7.  i. 

de  Moreri  prolonge  la  vie  à  S.  Servai»  jus-  n'est  fondé  »ur  aacnne  autorité,  mais  qui 

2u'à  l'an  403,  auquel  elle  place  sa  mort.  «st  encore  contre  tonte  apai'ence. 
'est  donner  à   ce  Saint  an  épiscopat  de 

17 


246 


IV  SIECLE. 


SIBURE, 

Préfet    i>u    Puétoihe. 

Mai.  d«  nied.  pr.    'qibure   étoit  de  mêmc  païs  qu'Eufrope  el  Jule  Ausoiio, 

«jrïi.I^'coii."     ^dont  nous  avons  parlé,  c'est-à-dire,  ou  de  Bourdeaux  ou 

Th.  ciir.  p.  100.  (jg  gagas.  On  nous  le  représente  comme  un  grand  homme  de 
letres,  fort  ataché  à  la  vénérable  antiquité.  Il  fleurissoit  du  tems 
d'EuIrope  sous  l'Empire  de  Gratien,  qui  l'eleva  à  de  grands 
honneurs.  11  lui  au  moins  Préfet  du  Prétoire  eu  379,  com- 
me il  paroîl  par  un((  loi  du  troisième  de  Décembre  de  cette 
même  année.  On  ne  nous  aprend  point  quelle  Préfecture  il 
exerça.  Ce  n'étoit  pas  celle  des  Gaules,  qui  éloit  alors  ocupée 
par  le  Poëte  Ausone  et  son- lils  llespere  conjointement.  Mais 
il  y  a  toute  aparence  que  c'éfoit  culle  de  l'Italie. 

sjiii.  il),  «p.  4;i.  Dès  (|u'il  fui  en  cliaige,  '  Symmaque  son  ami  lui  écrivit 

pour  le  congratuler  de  ce  qu'il  étoit  entre  à  la  satisfaction  gé- 
nérale de  tout  le  monde  dans  des  emplois  dignes  de  son  mé- 
rite, se  ilatant  qu'il  surpasseroit  encore  toute  l'espérance  que 

qi.  i.i.  le  public  en  avoit  conçue.  '  Néanmoins  quelque  homme  de 

bien  que  pût  être  Sibure,  il  ne  fut  pas  en  son  pouvoir  d'évi- 
ter de  se  voir  chargé  d'acusations  injustes.  Mais  il  s'en  justifia 
si  parfiiitement  que  le  publie  fut  pleinemeni  convaincu  de  son 
innocence.  C'est  de  quoi  Symmaque  se  rejoiiitdansunedeses 
letres.  Il  lui  mai(jue  en  même  tems  la  peine  que  lui  causoient 
ses  fréquens  voïnges,'  qui  l'obligeoient  de  s'éloigner  de  Ho- 
me, où  il  dési roi i  extrêmement  de  le  revoir  reprendre  les  no- 
bles oeupations  du  cabinet,  la  lectiiic  et  la  conqjosition. 

'■;>.  '-i-  '■•  '  11  paroit  que  Sibure  et  Symmaque   s'écrivoi(!nt  souvent 

l'un  à  l'aulic.  (^elui-ei  relevé  beau(;oup  la  politesse  du  style  qui 
regnoit  dans  les  letres  de  son  ami.  Mais  nous  en  sommes  mal- 
heureusement privés;  el  nous  n'en  pouvons  juger  par  nous- 
mêmes.  Outre  cet  Orateur  Uomain,  Sibure  éloit  aussi  en  com- 
merce de  1(  Ires  avec  le  lameu.x  Sophiste  Ubanius,  dont  il  nous 

"•'»■  '!'•  reste  quelques-unes  des  lelres  qu'il  lui  adressa.  '  il  y  avoit  dé- 

jà du  tems  que  Sibure  n'étoit  plus  au  monde,  lorsqu'au  com- 
mencemenl  du  V  siei^le  Marcel  l'Empirique  éciivoit  son  trai- 
té des  remèdes,  dans  la  préface  duquel  il  parle  de  lui  avec 
éloge.  De  sorte  que  nous  pouvons  placer  sa  mort  vers  l'an  388. 


THEON  ET  PROCULE,  POETES.        247 

'Nous  aprenoiis  du  même  Auteur  que  Sibure  avoit  laissé    iv  siècle. 
quelques  écrits  de  sa  façon  sur  la  médecine  ;  quoiqu'il  ne  fil  Mar.  ibiR.  " 

pas  profession  de  cet  art.  Mais  il  ne  nous  en  donne  point  d'au- 
tre connoissance  que  de  dire  qu'il  en  avoit  tiré  du  secours  pour 
composer  son  ouvrage. 

'Sur  cela  Jean  Cornaro  avoit  d'abord  penché  à  croire  que  ep.ded.p.ato. 
Siburius  dont  nous  parlons,  étoit  le  même  que  Scribonius 
I^rgus,  dont  Marcel  a  inséré  les  écrits  en  entier  dans  les 
siens.  Ainsi  il  soupçon noit  (|u'il  y  avoit  faute  de  la  part  des 
Copistes  à  écrire  Siburius  pour  Scribonius.  Mais  s'étant  ensuite 
aperçu  que  Scribonius  vivoit  du  tems  de  l'Empereur  Claudel, 
et  même  dès  l'Empire  de  Tibère ,  et  que  Marcel  assure  que 
Sibnre  ne  lleurissoit  qu'au  siècle  qui  avoit  immédiatement 
précédé  celui  auquel  il  écrivoit,  il  a  mieux  aimé  dire  que  Si- 
bure a  élé  l'interprète  de  Scribonius  ;  qu'aïant  traduit  de  grec 
en  latin  l'ouvrage  île  Scribonius  ,  il  en  avoil  retranché  le  nom 
de  l'Auteur  original ,  et  qu'il  y  avoit  mis  le  sien. 

Mais  la  conjecture  de  Cornaro ,  touchant  la  traduction  de 
l'ouvrage  de  Scribonius  de  grec  en  latin  par  Sibure,  ne  peut 
se  .soutenir.  '  En  clTet  Scribonius  dit  lui-même  qu'il  a  écrit  en  smb.  com.  me.i. 
latin,  et  assure  qu'il  n'éloit  point  Crée.  'Son  ouvrage  est  in-  RTc/ ai.  prin.1.2. 
litulé.  De  la  composition  des  remèdes,  et  se  trouve  entre  les  ^JJ^ 
écrits  des  autres  principaux  Médecins,  qui  ont  écrit  depuis 
Hipocrate  et  Galien.  Pour  ce  qui  est  de  l'ouvrage  de  Sibure, 
il  paroît  entièrement  perdu,  hors  ce  que  Marcel  en  a  inséré 
dans  le  sien,  mais  qu'il  seroit  impossible  de  démêler.  Comme 
Sibure  étoit  un  homme  de  cabinet ,  selon  Symraaque  ,  il  peut 
avoir  lai.ssé  encore  d'autres  écrits  qui  .seront  également  perdus. 


187. 


«)5. 


THEON   ET  PROCULE, 

Poètes. 

iHEON  étoit  d'Aquitaine.  Il  faisoit  sa  demeure  ordinaire  aus.  ep.  4.  p.  r.7i 
à  Medounc  ou   Medoc  entre  l'Océan    et    la    Garonne.  4^.'"'  '"'  ^"^'  ^'' 
C'est  ce  qui  fait  dire  à  Ausone  en  parlant  de  lui,  qu'il  cultivoit 
des  sables  le  long  de  la  mer.  Il  paroît  que  c'étoit  un  bon  esprit, 
qui  entendoit  parfaitement  raillerie.  Son  génie  pour  les  letres 
se  porta  pnrticulicrement  à  la  poésie. 

'Dès  sa  jeunesse  il  fut  lié  d'amitié  avec  le  poëte  Ausone,  Au»,  ep. 7. p. 595. 


'Tl 


248         THEON  ET  PllUCULE,  POETES. 

IV  siECLi;.  qui  dès-lors  lui  communiquoit  les  productions  de  sa  Muse.  "Si- 
•  Ans.  «p.*.  r,n.  tôt  que  celui-ci  eut  été  choisi  pour  précepteur  de  Gralien  ,  il 
'■»'»•  eut  soin  d'en  donner  avis  à  Theon  par  sa  quatrième  letre ,  qui 

fait  encore  l'admiration  des  Savans,  tant  pour  l'érudition  que 
pour  la  galanterie  qui  y  régnent.  Il  est  vrai  qu'à  la  prendre  à 
ia  letre ,  elle  seroit  très-piquante  ;  puisque  Theon  y  est  traité 
pp.  7.  p.  ast.  de  païsan,  d'esprit  rustique  et  de  plagiaire.  'Mais  Ausone  nous 
avertit  ailleurs  que  ce  n'est-là  qu'un  jeu  et  une  ironie  conti- 
nuelle. Gomme  Theon  faisoit  sa  demeure  à  la  campagne,  et 
qu'il  y  donnoit  plus  de  tems  à  la  chasse ,  à  la  pêche  et  aux  au- 
tres ocupations  de  la  vie  champêtre  qu'aux  letres ,  et  sur-tout 
à  la  poésie  qu'il  sembloit  avoir  choisie  pour  l'objet  de  ses  amu- 
semens,  Ausone  lui  en  fait  un  reproche  enjoué  ,  qui  marque 
une  grande  familiarité  entre  ces  deux  amis, 
pp.  e.  p.  594.  'Il  en  use  de  même  dans  ses  autres  letres  à  Theon.  Si  celui- 

ci  lui  envoïoit  des  vers  de  sa  façon,  Ausone  ou  les  condam- 
«p.*.  p.  570. 588.   noit  comme  mauvais ,  'ou  acusoit  Theon  de  les  avoir  pillés 
du   Poëte  Clementinus.  C'est-là  le  véritable  sens  d'Ausone; 
soai.  in.  Ans.  ic!-i.  'quoique  Scaliger  ait  cru  que  Clementinus  fût  le  surnom  de 
1. 2.C.12.  Tneon.  C'étoit  un  Poëte  différent  du  nôtre,  et  aparemment 

Gaulois  comme  lui ,  mais  que  l'on  ne  connoît  que  par  cet  en- 
Au."!.  op.  5. 7.  p.  droit.  'Ausone  ne  fut  pas  de  retour  en  son  pais,  après  avoir 
quité  la  Cour,  qu  il  renouvella  son  ancien  commerce  de  lue- 
rature  avec  Theon.  Il  lui  écrivoit  souvent ,  et  le  pressoit  autant 
de  fois  ou  de  lui  rendre  visite ,  ou  de  lui  envoier  de  ses  vers, 
ep.  4.7.  p.  574.  '  Gettc  longuB  liaison  entre  deux  Poètes  donna  sans  doute 
ocasion  a  beaucoup  de  pièces  de  poésies  de  part  et  d  autre. 
Mais  il  ne  nous  en  reste  plus  rien  que  quatre  letres  d'Ausone 
à  Theon.  La  première,  qui  est  la  plus  considérable,  est  pour 
lui  aprendre  qu'il  étoit  précepteur  de  Gratien.  C'est  ce  qui  fait 

Îiu'Ausone  donne  à  Theon  la  qualité  de  païsan ,  parce  qu'il 
aisoit  sa  résidence  à  la  campagne,  et  que  lui  Ausone  étoit  à 
la  Cour  de  l'Empereur.  Ausone  prend  de-là  ocasion  de  plai- 
santer, et  de  tourner  en  ridicule  les  Muses  de  Theon.  Dans  la 
seconde  Ausone  se  plaint  de  ce  que  Theon  avoit  été  trois 
mois  entiers  sans  le  venir  voir.  Ausone  avoit  alors  quité  la 
Cour,  et  s'étoit  retiré  à  sa  maison  de  Lucaniac  près  de  Con- 
date.  La  troisième  letre  est  peu  de  chose ,  et  ne  contient  que 
six  vers.  Ausone  y  plaisante  encore  sur  les  poésies  de  Theon. 
La  qualricme  enfin  est  pour  se  plaindre  de  ce  que  Theon  ne 
répondoit  pas  k  ses  plaisanteries,  et  de  ce  qu'il  cessoit  de  faire? 

des 


393.  595. 


395 


THEON  ET  PKOCULE,  POETES.         "249 

des  vers.  Ausone  prit  ocasion  de  la  lui  écrire,  lorsque  Theon  lui     iv  siècle.   - 
envoïa  une  trentaine  de  belles  huitres. 

'Plusieursde  nos  Ecrivains  modernes,  qui  ont  entrepris  de  g^^^'-yj***^';  pj,'[" 
parler  du  Poëte  qui  fait  le  sujet  de  cet  éloge,  l'ont  confondu  l^'p es.*"' 
avec  le  Sophiste  Tneon  Grec  de  naissance,  qui  fleurissoit  sous 
Julien  l'Apostat,  et  dont  nous  avons  un  ouvrage  sur  la  rhétori- 
que écrit  avec  beaucoup  de  politesse  et  de  jugement. 

'Entre  les  giutres  hommes  de  letres  dont  Ausone  nous  a  con-  Ans.  epi.  31. 
serve  la  mémoire,  et  qui  faisoient  l'ornement  des  Gaulés  en 
son  tems ,  il  nous  fait  connoître  un  Procule ,  qui  au  talent 
d'écrire  et  de  parler  avec  grâce  et  politesse  joignoit  celui  de 
faire  aisément  des  vers.  Les  termes  dont  se  sert  Ausone  en 
faisant  son  éloge,  suposent  qu'il  exerçoit  quelque  charge  con- 
sidérable. '  C'est  ce  qui  a  fait  croire  à  Vinet  que  ce  Procule  vin.  ib.  a  m. 
est  le  même  que  celui  qui  est  qualifié  Préfet  du  Prétoire  dans 
divers  rescrits  des  Empereurs  Valentinien ,  Theodose  et  Ar- 
cade. Il  pouvoit  descendre  d'Alirelius  Proculus  Gouverneur 
delà  Seçjuanoise  en  295,  et  compter,  entre  les  grands  hom- 
mes sortis  de  sa  famille,  Procule  Proconsul  d'Afrique  en  340, 
et  Valerius  Proculus  Préfet  de  Rome  en  351  et  352.  Ce 
qu'il  y  a  de  moins  douteux ,  c'est  qu'il  paroît  être  le  même 
'que  Procule  à  qui  Ausone  adresse  la  troisième  épigramme  sur  Au»,  ep.  U9. 
ses  fastes.  Ausone  dans  celte  petite  pièce  flate  Procule  du 
Consulat ,  lui  faisant  espérer  qu'il  y  seroit  bien-tôt  élevé.  L'on 
ne  trouve  point  néanmoins  son  nom  dans  les  fastes  publics 
entre  ceux  des  Consuls  ordinaires.  '  Autant  que  Procule  avoit  epi.  s*, 
de  facilité  à  faire  des  vers ,  autant  il  avoit  de  retenue  à  les  pu- 
blier. C'est  pour  blâmer  sa  timidité  ou  sa  négligence,  et  lui 
inspirer  plus  d'émulation ,  qu'Ausone  lui  adressa  l'épigramme 
suivante  : 


Irascor  l*roculu,  cujus  facundia  taula  est 

Quantus  honor  :  scripsit  plarima  quae  cohibet. 
Uunc  studco  ulcisci,  et  promta  est  hxc  ultio  vati  : 

Qui  sua  non  edit  carmiaa,  nostra  legat. 
Hujus  in  arbiirio  est ,  seu  te*  juvenescere  cedro  ,  *  Libelle. 

Seujubeat  duris  vermibus  esse  cibum  ; 
lluic  ego,  quod  nobis  superest  igaobilis  oti ,  v 

Deputo  :  sive  legat  qua;  dabo,  sive  tegai. 


Tome  I.  Sec.  Part. 


250 


IV  SIECLE. 


PARMENIEN, 

EVEQUE  DONATISTK  DE  CartHAGE. 


Opt.  1. 1.  11. 

I.  2.  II.  7. 


IIISTOIRE    DE    SA    VIE. 

PARMENIEN ,  l'un  des  plus  fameux  Evêques  qu'ait  eu  le 
parti  de  Donat,  <5toit  étranger  à  l'égard  des  Africains. 
'S.  Of)tat  le  met  assez  clairement  au  nombre  des  prosélytes 
que  faisoient  les  Donatistes  en  courant  la  mer  et  la  terre  ;  et 
la  suite  de  son  raisonnement  fait  voir  qu'il  étoit  ou  d'Espagne 
ou  des  Gaules.  Nous  ne  le  trouvons  point  dans  la  bibliothè- 
que Espagnole  :  ce  qui  nous,  donne  un  nouveau  droit  de  le 
placer  dans  cette  histoire  au  rang  de  nos  hommes  de  letres. 
Au  reste  c'est  moins  pour  faire  honneur  à  notre  nation  que 
nous  en  usons  ainsi,  que  pour  satisfaire  à  l'exactitude  que  nous 
nous  sommes  prescrite. 
ib|iiisi.don.p.30|  'Tout  inconnu  qu'étoit  Parmenien  à  l'Eglise  de  Carthage, 
""  ''■  il  en  fut  ordonné  Evêque  vers  l'an  355.  Cétoit  néanmoins 

violer  les  canons   qui    défendoient   d'ordonner   Evêque  ou 
Prêtre  un  étranger.  Mais  les  Donatistes  n'étoient  pas  si  reli- 
opt.  I.  X  n.  3.     gieux  observateurs  des  loix  de  l'Eglise.  '  La  cérémonie  de  son 
ordination  se  fit ,  non  à  Carthage,  mais  dans  le  lieu  où  les 
Evoques  Donatistes  ses   consécrateurs   étoient  alors   exilés. 
C'est  au  moins  le  sens  que  présentent  les  expressions  de  S. 
Optât. 
Aug.  iii  l'ai.  I.  3.       '  Parmenien  succéda  dans  le  siège  de  Carthage  immédia- 
a.'  c.  17 1  iiisj"(ion'.  tement  au  grand  Donat ,  qui  étoit  mort  dans  son  exil  peu  de 
f.  i^l'-zis.*^'  '■'*■  ^^"^s  auparavant.  Tout  le  monde  ne  convient  pas  néanmoins 
de  co  fait,  quoiqu'il  paroisse  suffisamment  constaté.  Il  faut 
sans  doute  que  Parmenien  eût  de  bien  éminentes  qualités, 
pour  être  ainsi  choisi  par  les  Donatistes  à  la  place  de  leur 
^'hir«**'"'  "  Cloryphée.  'Au  moins  fit-il  voir  par  son  zélé  à  entretenir  leur 
.    schisme,  qu'il  n'étoit  pas  tout-à-fail  indigne  de  ce  choix.  Il  se 
rendit  même  si  célèbre  parmi  eux ,  qu'ils  en  portèrent  quel- 
quefois le  nom  de  Parmenianistes. 

Il  est  certain  qu'ils  n'eurent  point  d'Evêque  en  qui  il  parut 
et  plus  de  savoir  et  plus  d'éloquence.  Il  composa  divers  écrits 


.  rjO    .  t   ÎMniN'J  ï 


PARMENIEN,  EVEQUE  DONAT.  DE  GARTH.  251 

en  faveur  de  sa  secte.  Il  en  fit  et  contre  l'Eglise  Catholique      iv  siècle. 
et  contre  ceux  même  des  Donatistes  qui  ruinoient  les  princi- 
pes  du  parti.  '  Il  semble  même  qu'il  eut  l'avantage  d'être  le  thi.  ibw.  p.  ibo. 
premier  entre  ceux  de  sa  communion  qui  osa  prendre  la  plu- 
me pour  en  défendre  la  cause.  Mais  il  trouva  deux  puissans 
adversaires,  l'un  en  la  personne  de  S.  Optât,  l'autre  on  celle 
de  S.  Augustin,  qui  réfutèrent  avec  avantage  tout  ce  qu'il* 
avoit  écrit,  le  premier  du  vivant  même  de  Parmenien ,  et 
l'autre  après  sa  mort. 

'  Dès  avant  l'an  392  le  fameux  Primien  avoit  succédé  à  Par-  Tiu.  ibid.  p.  leo." 
menien  dans  le  siège  Donatiste  de  Carthage.  De  sorte  que  l'on 
peut  mettre  la  mort  de  celui-ci  en  390,  après  qu'il  eut  passé 
environ  35  ans  dans  l'épiscopat.  Il  est  au  moins  vrai  qu'il  y 
avoit  déjà  plusieurs  années  qu'il  n'étoit  plus  au  monde,  '  lors-  Aug.  in  Par.  1. 1; 
que  S.  Augustin  réfuta  son  écrit  contre  Ticone  :  ce  qu'il  fît 
vers  399  ou  l'année  suivante.  '  Pendant  que  Parmenien  gou-  Opt.  hisi.don.p.ao. 
verna  l'Eglise  de. Carthage  pour  les  Donatistes,  les  Catholi- 
ques eurent  successivement  pour  Evêques  dans  la  même  Egli- 
se S.  Restitule  et  Genethle. 

$.  " 
SES  ECRITS. 

ON  ne  connoît  que  deux  ouvrages  de  la  façon  de  Par-  opi.  pr.n.  s. 
menien.  Quoiqu'ils  fussent  écrite  pour  affermir  l'er- 
reur, et  qu'ils  ne  subsistent  plus  depuis  long-tems,  ils  n'ont 
pas  laissé  de  devenir  très-fameux  par  la  réfutation  qu'en  ont 
faite  S.  Optât  et  S.  Augustin.  Parmenien  dans  ces  deux  ou- 
vrages traitoit  des  sujets  différens.  Aussi  n'y  suivoit-il  pas  la 
même  division  ni  la  même  méthode.  Mais  dadis  l'un  et  dans 
l'autre  c'étoient  les  mêmes  invectives  contre  l'Eglise  Catho- 
lique. 

1".  Celui  qui  paroît  avoir  été  écrit  le  premier,  étoit  divisé  '•  i-n.c. 
en  cinq  livres  ou  articles.  '  Les  Donatistes  en  relevoient  beau-  Aug.  in  Cres.  1. 1. 
coup  l'éloquence,  mais  on  ne  nous  en  a  pas  même  conservé 
le  titre.  '  Dans  le  premier  livre  Parmenien  faisoit  de  grands  opt.  jbid.  n<  .•>.  e. 
éloges  du  baptême  ;  et  voulant  en  prouver  l'unité,  il  raportoit 
plusieurs  figures  ou  comparaisons  de  ce  sacrement,  comme  le 
déluge  et  la  circoncision.  A  l'injure  près  qu'il  faisoit  à  la  chair 
sacrée  de  J.  C.  '  qu'il  disoit  avoir  été  une  chair  pécheresse,  "«">•  s. 
mais  qui  avoit  été  purifiée  par  son  immersion  dans  le  Jour- 

1  i  ij 


I 


252  -         PAKMRNIEN. 

IV  SIECLE,    dain,  "  cette  partie  de  l'ouvrago  de  Parmenien  étoit  assez  ex- 
"T — ~     7"   acte.  Aussi  S.  Optât  lui  fit  voir  qu'elle  favorisoit  plus  les  Ca- 

tholiques  que  les  Uonatistes. 
ibM.  '  Parmenien  emploïoit  le  second  livre  ii  montrer  qu'il  n'y  a 

qu'une  seule  Eglise,  de  laquelle  les  hérétiques  sont  exclus. 
Mais  il  avoit  évité  de  marquer  où  se  trouvoit  cette  Eglise  uni- 
que, 
ibid.  '  Dans  le  troisième  il  chargeoit  d'acusations  graves  les  Tra- 

diteurs,  sans  prouver  néanmoins  qu'aucun  eût  été  convaincu 
du  crime  qu'il  prétendoit. 
iwa.  '  Le  quatrième  livre  étoit  pour  décrier  ceux  qui  avoient  tra- 

noi.  p.  163. 2.        vaille  à  rétablir  l'union,  '  c'est-à-dire  Paul  et  Macaire,  qui  par 
ordre  de  l'Empereur  Constant  avoient  tâché  de  ramener  les 
Donatistes  à  l'Eglise  Catholique. 
1.1.  n.G.  '  Enfin  dans  le  cinquième  livre  Parmenien  traitoit  en  par- 

not.  ibid.  ticulicr  de  l'huile  et  du  sacrifice  du  pécheur  :  '  expressions  qui 

1. 1. 1).  i.  marquent  tout  ce  qui  regarde  les  fonctions  du  sacerdoce.  '  Les 

autres  Donatistes  s'étoient  contentés  de  défendre  seulement 
de  vive  voix  la  cause  de  leureecte  :  Parmenien  de  peur  de  par- 
ler en  l'air  et  sans  fruit,  comme  ils  avoient  fait,  s'avisa  de 
mettre  ses  sentimens  par  écrit,  en  suivant  le  plan  que  nous 
venons  de  marquer. 
Ibid.  '  Son  ouvrage  étoit  déjà  entre  les  mains  de  beaucoup  de 

personnes,  lorsque  S.  Optât  Evêque  de  Mileve  entreprit  de  le 
réfuter.  C'est  ce  qu'il  exécuta  en  six  ou  sept  livres  que  nous 
avons  encore  sous  ce  titre  :  Du  Schisme  des  Dmmtùtes.  Nous 
disons  six  ou  sept,  parce  que  tout  le  monde  ne  convient  pas 
que  le  septième  soit  de  lui.  S.  Optât  dans  cette  réfutation 
traite  toujours  avec  honneur  la  personne  de  Parmenien,  le 
nnm.  .1.  qualifiant  son  frère  et  son  collègue  dans  l'épiscopat.  '  Il  lui  re- 

proche toutefois  de  n'avoir  eu  d'autre  dessein  dans  tout  son 
écrit,  que  d'insulter  indignement  à  l'Eglise  Catholique.  «  Mais 
«  votre  ouvrage,  lui  dit-il,  a  trahi  votre  dessein  ;  puisque  tout 
«  ce  que  vous  y  avancez,  ne  nous  est  pascontraire,  yaiantplu- 
«  sieurs  choses  qui  nous  sont  favorables.  » 
•wd.  '  11  l'acuse  ensuite  d'avoir  été  mal  instruit  des  faits  qu'il  tou- 

che, et  d'avoir  cru  trop  témérairement  ce  qu'il  n'avoit  pas 
vu.  A  cela  près,  il  lui  promet  de  lui  montrer  que  son  ouvra- 
ge contient  des  choses  qui  favori.sent  les  Catholiques,  et  qui 
préjudicient  à  la  cause  dont  il  a  pris  la  défense.  OiJ'il  s'y  en 
trouve  d'autres  qui  font  autant  pour  l'Eglise  que  pour  le  par- 


KVEQUE  DONATISTE  DE  CARTHAGE.         253 

li  (le  Donat.  Qu'cnlln  il  y  en  a  avaiici'  d'autres  par  ignorancr,      v  sikclr. 
qui  combalent  ontieremint  les  principes  de  sa  secte.  De  sor-  " 

le,  ajoùle-t'il,  (pie  si  l'on  retranchoit  de  l'ouvrage  d(;  Parme- 
nien  les  calomnies  et  les  injures,  il  soroit  tout  Catholique. 

'  S.  Optât  lui  reprocl»!  encore  de  s'être  étendu  à  pure  per-  nnm.!). 
le  à  faire  dans  son  premier  livre  une  description  ennuieuse  et 
des  hérétiques  qui  avoient  erré  sur  le  baptême,  et  de  toutes 
leurs  rêveries  à  ce  sujet  ;  vu  que  leurs  noms  comme  leurs  er- 
reurs paroissoient  être  ignorés  dans  toute  l'Afrique.  '  Ce  fut  pr.  n.  i. 
en  370  que  S.  Optât  réfuta  l'ouvrage  de  Parmenien,  qui  pou- 
voit  par  conséquent  l'avoir  publié  l'année  précédente. 

2°.  '  L'autre  écrit  de  Parmenien  fut  une  letre,  qu'il  écrivoit  Aug.  in  Par.  1. 1. 
à  Ticone  pour  tâcher  de  le  corriger  et  le  rapeller  à  ses  pre-  ""  '' 
miers  sentimens.  Ce  Ticone  étoit  un  Donatiste,  quifrapé  par 
l'éclat  des  grandes  vérités  qu'il  lisoit  dans  toutes  les  pages  des 
livres  sacrés,  se  réveilla  et  aperçut  l'Eglise  de  Dieu  répandue 
par  toute  la  terre.  Pénétré  de  cette  vérité  fondamentale,  il 
entreprit  de  la  prouver  contre  les  principes  de  sa  propre  se- 
cte, et  l'exécuta  avec  beaucoup  de  force  par  un  grand  nom- 
bre de  raisons  et  de  passages  clairs  et  précis.  Son  ouvrage  con- 
tenoit  le  détail  de  quelques  autres  vérités,  qu'il  établissoit  com- 
me la  précédente,  sans  néanmoins  sortir  des  ténèbres  du  Schis- 
me pour  suivre  la  lumière  qu'elles  lui  présentoient. 

Ce  fut  pour  réfuter  ces  écrits  que  Parmenien  mit  pour  la  iwa. 
seconde  fois  la  main  à  la  plume.  '  Mais  il  n'oposoit  à  la  force  nnm.  s. 
éclatante  des  passages  allégués  par  Ticone,  que  l'autorité  de 
son  propre  témoignage  :  comme  si  elle  eût  dû,  remarque  S. 
Augustin,  l'emporter  sur  celle  de  Dieu.  '  Parmenien  dans  cet  inCres.  i.  .rn.ai. 
ouvrage,  au  raport  du  même  Père,  faisoitparoître  une  arro- 
gance et  un  orgueil  insuportable,  prétendant  contre  l'auto- 
rité de  l'Ecriture  et  des  Pères  de  l'Eglise,  que  le  grain  étoit 
déjà  séparé  de  la  paille,  ce  qui  ne  doit  se  faire  qu'au  derniei- 
jour. 

'  Il  y  usoit  de  menaces  envers  Ticone,  et  n'osoit  néanmoins  op.  93.  n.  «.  4i. 
contester  les  faits  que  celui-ci  avoit  allégués.  Il  n'y  avoit  qu'- 
un point  sur  lequel  Parmenien  le  pressoit  jusqu'à  l'étouffer. 
C'est  que  si  l'Eglise  devoit  être  répandue  par  tout  le  monde, 
et  que  personne  n'y  fût  souillé  par  les  péchés  des  autres,  com- 
me Ticone  le  prétendoit,  il  avoit  grand  tort  de  demeurer 
dans  le  parti  de  Donat,  et  de  rejeter  la  communion  de  leurs 
adversaires  communs  h  cause  des  Traditeiirs,  En  cela  Parme- 


1.  l.n.1. 


elr.  I.  8.  c.  17. 


"lU  SAINT   JUST, 

IV  SIECLE,     nien  raisonnoit  cons<^quemment  et  convainquoit  Ticone   de 
ne  pas  agir  confornif^menl  à  ses  lumières. 

Tiii.  H.  E.  t.  6.  p.  ^  On  met  l'écrit  de  Ticone  vers  l'an  372.  La  réfutation 
qu'en  fit  Parmenien  semble  avoir  suivi  de  près,  et  doit  être 

Aug.  in  Par.  p.  9-  placée  en  la  même  année  ou  la  suivante.  '  Ce  ne  fut  qu'en  309 
ou  400,  que  S.  Augustin  réfuta  à  .son  tour  l'écrit  de  Parme- 
nien, contre  lequel  il  composa  un  ouvrage  divisé  en  trois  livres 
que  nous  avons  encore.  Il  emploie  le  premier  livre  à  détruire 
les  injures  dont  Parmenien  chargeoit  les  Catholiques,  et  les 
deux  autres  à  examiner  les  passages  de  l'Ecriture  dont  il  abu- 
soit,  et  à  montrer  quel  en  est  le  véritable  sens.  '  Il  débute  par 
déplorer  amèrement  l'obstination  de  Parmenien  et  des  autres 
Donatistes,  qui  bien  loin  de  se  rendre  aux  vérités  que  Tico- 
ne leur  montroit  si  clairement,  aimèrent  mieux  les  combatre 
avec  opiniâtreté  ,  que  de  reconnoître  que  les  Catholiques 
avoient  raison.  '  S.  Augustin  témoigne  ailleurs  traiter  et  résou- 
dre dans  ce  même  ouvrage  contre  Parmenien  cette  grande 
question,  savoir  si  dans  l'unité  et  la  communion  des  mêmes 
sacremens  les  méchans  ne  souillent  point  les  bons,  et  faire 
voir  Qu'ils  ne  les  souillent  point  en  effet. 

Telle  est  l'idée  que  S.  Optât  et  S.  Augustin  nous  donnent 
des  ouvrages  de  Parmenien.  II  ne  nous  en  reste  plus  rien  au- 
jourd'hui, que  ce  que  ces  Pères  nous  en  ont  conservé  dans 
la  réfutation  qui  en  a  été  faite. 


S.  JUST, 

•EvEQiiE   DE   Lyon. 

snr.  î.  Sept.  p.  6.  'o  JusT  fut  d'abord  Diacre  de  l'Eglise  de  Vienne.  De-là 
Tiii.  H.  E.  I.  8.  p.  O.  il  passa  ensuite  à  la  dignité  d'Evéque  de  Lyon,  '  qui 
'***■  étoit  alors  la  Métropole  de  tout  ce  qui  portoit  le  nom  de  Gau- 

le Celtique.  Il  est  compté  pour  le  treizième  des  Evêques  qui 
ont  rempli  ce  siège,  et  passe  pour  le  plus  illustre  qu'ait  eu  cet- 
te Eglise  depuis  S.  Irenée  jusqu'à  S.  Eucher.  On  ne  nous 
aprend  point  en  quelle  année  il  fut  ordonné  Evêque.  Seule- 
mi.  fr.2.  n.  I.  15.  meut  on  tient  qu'il  succéda  à  Verissime,  '  dont  on  trouve  la 
souscription  dans  la  letre  synodale  du  Concile  de  Sardique  as- 
snr.  ibid.  semblé  en  347,  '  et  qu'il  pas.^a  plusieurs  années  dans  l'épiscopat. 


EVEQUE  DE  LYON.  255 

•En  374  il  assista  au  Concile  de  Valence  dans  la  Viennoi-    iv  siècle. 
se,  et  eut  part  aux  reglemens  qui  s'y  firent  pour  la  discipline  rconc.  t.  8  p  906 
Ecclésiastique,  '  On  ne  fait  aucun  doute  que  ce  ne  soit  ce  Just,  thi.  ibia. 
à  qui  sont  adressées  deux  letres  de  S.  Âmbroise,'  qui  supo-  p.M7. 
sent  une  grançle  union  entre  ces  deux  Saints  Prélats. 

'  S.  Just  releva  son  épiscopat  par  beaucoup  d'autres  endroits,  sm.  iwa. 
Une  pureté  exemplaire  dans  les  mceurs,  une  intégrité  exem- 
te  de  reproches,  une  humble  modestie,  une  patience  à  l'é- 

f»reuve,  un  soin  particulier  des  besoins  des  pauvres,  une  fide- 
ité  exacte  à  acomplir  la  loi  de  Dieu,  une  aplication  infatiga- 
ble aux  fonctions  de  sa  chaîne  et  à  l'avancement  de  son  peu- 
file,  furent  autant  de  vertus  qui  le  rendirent  célèbre  parmi  les 
plus  illustres  Pontifes  du  Seigneur. 

'  Mais  s'il  fut  grand  dans  l'épiscopal,  il  le  devint  encore  da-  p-  '• 
vantage  par  l'abdication  volontaire  qu'il  en  fil.  '   Une  faule  p  « 
qu'il  crut  avoir  commise  en  livrant  au  peuple  de  Lyon  un 
meurtrier  qui  s'étoit  réfugié  dans  l'Eglise,  el  à  qui  ce  peupli; 
contre  sa  promesse  et  son  serment  ôla  aussi-tôt  la  vie,  fut  la 
cause  de  son  abdication.  '  Il  exécuta  le  dessein  qu'il  en  avoit  p.  7|  Ainh.aci.AK. 
formé,  a|)rès  qu'il  fut  de  retour  du  Concile  d'Aquilée,  où  il  'îi»^  wj.'    '  "  ''* 
assista  au  mois  de  Septembre  381 ,  en  (jualité  de  député  de  la 
(îaule  Celtique,  et  où  il  condamna  des  premiers  Pallade  Evè- 
que  Arien.    Revenu  dans  les  Gaules,  il  évita  de  retourner  à  sm.  iua. 
Lyon  de  peur  que  l'affeclion  de  son  troupeau  ne  l'y  retînt,  et 
alla  s'embarquer  à  Marseille,  d'où  il  passa  en  Egypte.  Là  il 
se  mit  au  nombre  des  Saints  Ermites,  qui  y  étoient  alors  en 
une  si  haute  réputation  de  sainteté.  Et  afin  de  pouvoir  plus 
aisément  pratiquer  l'humifité,  qui  étoit  le  principal  sujet  de 
sa  fuite,  il  eut  soin  de  leur  cacher  et  son  nom  et  sa  dignité 
d'Evé(]ue.  Ce  pieux  artifice  lui  réussit,  jusqu'à  ce  qu'une  per- 
sonne de»  Gaules  étant  allée  visiter  les  Solitaires  de  ce  paï.s- 
là,  reconnut  le  Saint  Evêque,  et  le  fit  connoître  aux  autres 
pour  ce  qu'il  étoit. 

Après  avoir  passé  plusieurs  années  dans  le  déserta  mener  im. 
une  vie  presque  angélique,    S.  Just  quila  la  terre  pour  aller 
au  ciel  le  14"  jour  de  Septembre  vers  l'an  390.  '  Les  citoiens  p-s- 
de  Lyon  ne  tardèrent  pas  à  aller  chercher  son  orps,  qu'ils 
rapcffterent  en  leur  pais.  'Il  fut  inhumé  dans  une  Eglise  qui  sia.  1. .%. ep.  ij. p. 
porta  depuis  le  nom  de  notre  Saint,  et  qui  étoit  fort  célèbre  uô.inr  '  ''  "*" 
dès  le  V  siècle.  Les  Evêques  Catholiques  qui  en  499  finrent 
à  Lyon  une  C(»nférence,  où  les  Ariens  furent  ewifondus,  atri- 


256  S.  JUST,  EVEUUE  DE  LYON. 

IV  si.EOLE.  huèrent  particulièrement  à  l'intercession  de  S.  .(ust  la  victuin; 

fiaii.chr.vot.  I.  i.  9^8  Dicu  leur  acorda  en  celte  ocasion.  '  L'on  trouve  encore 

•  Tm'ibia  p  !i«).  ^°"  épilaphe  telle  que  nous  la  donnons  ici.  '  Elle  paroît  assez 

55«-        •  •••   •  jjjgjj  lig^^g  pjj^j.  g|j.g  jj^  jy  Q^  Y  sigçig    Peut-être  est-elle  du 

même  Auteur  qui  écrivit  la  vie  du  Saint  Evêque,  et  que  l'on 
croit  être  le  célèbre  Constance  Prêtre  de  l'Eglise  de  Lyon. 


MM.  Clu.  ibiJ.  '  Hic  patris  aiUiqui  coudigno  uomiae  JUSTI , 

In  spe  perpétuas  ruquiescunt  pignora  vibB  ; 
Membra  beata  satis,  quae  semper  dcdita  Christu, 
Per  varios  semet  cruce  conflxêre  laborca , 
Ut  melius  céleri  rapiantur  in  aërc  nubc 
Cum  cœlo  adveniens  Judex  efTulserit  ipse. 
Hic  fuit  egregius  primum  Levita  Viennas , 
Inde  gregem  Domini  doctrina  insignis  et  actu  , 
Gonspicuus  Prœsul  LUGDUNl  pavit  in  urbc. 

Post  anachoreticic  vits  nammatus  amore, 
Longinquae  <!Egypti  sitiens  déserta  petivit , 
Uuo  senibus  sacris  pietatis  fœdere  junclus 
Cum  miram  extremo  clausisset  luniine  vitaiu  , 
PIcbis  amore  suse  patriam  revocatus  ad  urbem , 
Cum  Viatore  pio  Ghristi  tuniulatur  ad  aram  : 
Ut  qoos  pervigili  vivens  pietate  nutrivit , 
Gontinuis  precibus  foveat  per  sœcula  nato.s. 


ibid.  'Cette  épitaphe,  comme  on  le  voit,  nous  représente  S.  Just 

comme  un  Prélat  célèbre  par  sa  doctrine.  Outre  les  marques 
qu'il  en  donna  dans  les  divers  Conciles  auxquels  il  assista  pen- 

Amb.  ep.  7.  K.  liant  son  épiscopat,  '  nous  en  trouvons  encore  d'autres  plus 
particulières  dans  les   letres  de  S.  Ambroise,  avec  lequel  il 

cp.7.11. 1.  étoit  en  grande  relation.'  Ce  S.  Docteur  nous  yaprend  que 

S.  Just  l'avoit  prié  de  consentir  qu'ils  quitassent  les  discours 
ordinaires  dont  on  remplit  les  letres,  et  qu'ils  fissent  des  Sain- 
tes Ecritures  le  sujet  de  leurs  entretiens.  Paroles  remarqua- 
bles, qui  su  posent  et  une  grande  pieté  dans  S.  Just,  et  un  fré- 
quent commerce  de  letres  entre  ces  deux  SS.  Evêques.  De 
toutes  les  letres  qu'ils  s'écrivirent  cependant,  il  ne  nous  en  re- 
ste plus  que  deux.  Elles  sont  toutes  deux  de  S.  Ambroise,  oui 
y  répond  aux  éclaircissemens  que  S.  Just  lui  avoit  demandés 
sur  certains  endroits  de  l'Ecriture.  On  voit  par-là  que  notre 
Saint  suivit  exactement  le  plan  qu'il  avoit  lui-même  tracé. 


ICÂIRE,  COMTE  iJ'ORiENT.  2Î>7 

•'Dans  la  première  S.  Ambroise  éclaircit  un  endroit  de  l'Exo-     iv  sinctt:. 
de,  dont  S.  Just  lui  avoit  demandé  l'explication.  "Dansl'au-  avmi).  op.  7.  n. 
Ire  letre  S.  Ambroise  montre  que  bien  que  les  Ecrivains  sa-  [  j^-^  ^  ^^^ 
crés  aient  écrit  selon  la  grâce  et  conformément  à  ce  que  le  S. 
Esprit  leur  inspiroit,  ce  qui  est  au-dessus  de  tout  art,  l'Ecritu- 
re néainnoins  ne  manque  point  de  l'art  qui  lui  est  nécessai- 
re .  G'étoit  pour  répondre  à  la  demande  que  S .  Just  lui  avoit 
faite,  savoir  s'il  étoit  vrai,  comme  quelques-uns  le  préten- 
doient,  que  les  Auteurs  sacrés  eussent  écrit  sans  art? 

'  Notker  le  Bègue  qui  vivoit  à  la  fin  du  IX  siècle  et  au  com-  Pez^îuiecd^i.^i._pr. 
mencement  du  X,  atribnë  à  nôtre  S.  Evêgue  un  Commen-  Lri.  c.2" 
taire  sur  le  Cantique  des  Cantiques,  qu'il  dit  être  un  ouvrage 
fort  sententieux,  quoique  fort  court.  '  Mais  il  y  a  toute  apa-  Rayu.  i. s.  p.  74. 
rence   que    Notker  confond  ici  S.  Just  de  Lyon  avec  Just 
Evéque  d'Urgel  en  Espagne,  '  qui  selon  S.  Isidore  deSeville  a  isid.  Scn.  c.  ti. 
véritablement  compose  un  semblable  Commentaire  que  nous 
avons  encore.  De  manière  qu'il  ne  nous  reste  plus  aujourd'hui 
aucun  monument  du  savoir  de  S,  Just,  suposé  qu'il  en  soit  sorti 
d'autres  de  sa  plume  que  les  letres  qu'il  écrivit  à  S.  Ambroise. 


I 


ICAIRE, 

Comte    d'Orient. 

CAIRE  l'un  des  plus  savans  hommes  de  son  siècle,  étoit  au^.  Cont.  1. 1.  e. 

fils  de  Théodose  Secrétaire  de  l'Empereur  Valens,  dont  Emp.L*5.^p"i«7. 
nous  avons  donné  l'histoire.  Il  eut  pour  mère  une  personne  ^^-  ™- 
de  mérite  et  de  condition,  qui  à  la  mort  funeste  de  son  mari 
aïant  perdu  ses  biens  et  sa  liberté,  se  vit  réduite  à  servir  pour 
pouvon-  subsister.  Nous  parlons  de  cet  Icaire  comme  étant  le 
même,  ainsi  qu'il  y  a  tout  lieu  de  le  croire,  qu'Icherius  ou 
Ilierius,   '  Professeur  de  Rhétorique  à  Rome  et  célèbre  dans  1 
S.  Augustin.  'Son  père  étoit  certainement  Gaulois.  Mais  on  Amm.  1.29.  p.3i9. 
ne  sauroit  précisément  dire  si  Icaire  naquit  dans  les  Gaules, 
ou  en  Orient.  'S.  Augustin  lui  donne  le  surnom  de  Syrien,  par-  Aug.  lu. 

1  C'est  ainsi  qa'il    est  nomiUK  dans    la  Iclicrius.  S.  Oic^'ulm  ilu  Naziuiiiie  lU  Lilj;i- 

(lernierc  vJition  «les  œuvres  de   S.    Aupu-  iiius,   qui  ont   cciil  en   Grec,   le  nomment 

Hlin.   Mais  ilans  les  éilitions  de  BuJe,  d'A-  Ixiptoç,    qui  est  le    même   nom   différem- 

mei'hacli,  d'Erasme  et  dans  quatre  anciens  nient   exprimé    et   dont    nous    avons    fait 

manuscrits  du  même  Père,  il  est  nomme  Icaire. 

Tome  I.  Sec.  Part.  K  k 


258  ICAIRE, 

IV  81  Ec  i.E.  ce  qu'il  ^toit  né,  ou  avoit  ëlé  élevé  en  Syrie,  lorsque  son  père 
y  exerçoit  quelcjue  charge. 

Aiij.ibid.  '  Icaire  aprit  en  perfection  la  langue  gréque  et  toutes  les 

beautés  de  l'éloquence  latine.  Il  enseigna  cêlle*ci  à  Rome,  au 
même  tems  que  S.  Augustin  exerçoit  le  même  emploi  à  Mi- 
lan. 11  passait  pour  être  tout  ensemble  et  un  maitre  incompa- 
rable  et  un  des  plus  savons  Philosophes  de  son  siècle.  S.  Au- 
guslin  ne  l'avoit  jamais  vu,  mais  il  l'aimoit  pour  la  réputation 
de  son  savoir  éminent.  Aiant  oui  raporter  de  lui  quelques  pa- 
roles qui  lui  avoient  paru  fort  belles,  il  conçut  le  desir  d'être 
connu  de  ce  Professeur,  pour  qui  il  avoit  une  si  haute  estime. 
Son  genre  d'étude  et  un  ouvrage  qu'il  venoit  de  finir  lui  four- 
nirent le  moïen  de  verjir  à  la  connoissance  de  cet  homme  si 

1. 13.  n.  M.  célèbre.  Il  lui  adressa  donc  '  ses  livres  De  la  bienséance  et  de  h 

beauté,  qu'il  avoit  composés  vTrs  l'an  380. 

A  la  faveur  de  son  savoir  Icaire  s'avança  dans  les  charges 

Greg.  Naz.  ep.  76.  dc  l'Empirc.  'Il  cu  cxorçoil  qucIqu'unc  fu  Orient  dès  l'année 
382 .  Car  dès-lors  il  écrivit  avec  Olympe  de  la  part  de  l'Empe- 
reur à  S.  Grégoire  de  Nazianzc  pour  l'engager  à  retourner  à 
Constantinople,  où  il  avoit  déjà  refusé  de  se  trouver.  S.  Gré- 
goire lui  fit  réponse  pour  s'en  ex(!user  de  nouveau. 

Tiii.  ibid.  p.  227.  '  Vers  384  ou  385  Prccule  Comte  d'Orient  aiant  été  déposé, 
Icaire  fut  mis  à  sa  place.  Celte  dignité  éloit  considérable  et 
avoit  de  grandes  prérogatives.  Elle  donnoit  entrée  dans  le 
Conseil  du  Prince  et  la  première  part  aux  faveurs  et  à  l'auto- 
rité. En  quelque  degré  d'élévation  qu'elle  mit  Icaire,  il  ne 
laissa  pas  de  lier  avec  le  fameux  Sopliiste  Libanius  une  étroi- 
te amitié,  qui  se  trouvoit  soutenue  par  la  profession  qu'ils  fai- 
soient  l'un  et  l'autre  des  mômes  sciences,  et  peut-être  de  la 
même  religion.  H  est  au  moins  vrai  que  si  Icaire  n'étoit pas 
Païen  comme  Libanius,  Ttiéodore  son  père  l'avoit  été,  ainsi 
qu'on  l'a  vu  dans  son  histoire. 

p.  2!».  '  Libanius  paroît  s'être  tenu  fort  honoré  d'une  telle  union. 

Il  fit  à  la  louange  d'icaire  un  discours  qui  est  perdu,  et  lui  en 
adressa  au  moins  un  autre  que  nous  avons  encore.  Mais  si  ce 
Sophiste  y  relevé  les  bonnes  qualités  d'icaire,  comme  de  ne 
s'être  jamais  laissé  vaincre  ni  à  l  avarice,  ni  au  sommeil,  ni  aux 
atraits  des  femmes,  il  n'y  taîlpas  ses  défauts.  Ill'acuse  sur-tout 
d'avoir  été  un  esprit  déliant  et  soupçonneux:  cequil'empê- 
choit  de  profiter  des  bons  conseils  de  ses  amis,  et  qui  lui  lai- 
soit  donner  sa  confiance  à  des  gens  de  néant,  qui  le  trom- 


SYAGRE,  POETE.  259 

poient  et  lui  faisoient  faire  de  grandes  fautes.  Icaire  manqua     iv  siècle. 
aussi  et  de  conduite  et  de  compassion  dans  la  famine  qui  afili- 
gea  la  ville  d'Antioche,  lorsqu'il  entra  en  charge. 

On  ne  nous  aprend  point  si  un  homme  aussi  habile  dans 
les  sciences  et  aussi  éloquent  laissa  quelque  monument  de  son 
savoir. 


SYAGRE, 

Poète. 

AFRANius   Syagrius  étoit   ou   de  Lyon  même,  ou  du  voi-  sid. s. 1. 1. ep.  7 1 
sinage  de  cette  ville.  Sa  famille  où  il  fit  entrer  les  pre-  ^;  *97i"| 'sym.'î' 
mieres  dignités  de  l'Empire,  fut  long-tems  en  très-grand  hon-  **p-  *^- 
neur  dans  les  Gaules.  Aux  deux  noms  d'Afranius  Syagrius 
qu'il  portoil,  Onuphre  a  encore  ajouté  celui  de  Postumius, 
Mais  les  savans  conviennent  que  c'est  .sans  nul  fondement. 
On  ne  nous  aprend  rien  de  l'éducation  de  Syagre.  Seulement 
il  paroit  par  le  peu  que  l'on  sait  de  son  histoire,  qu'il  fut  fort 
bien  instruit  dans  les  belles  letres ,  et  qu'il  cultiva  particuliè- 
rement et  avec  succès  l'éloquence  et  la  poésie. 

Ce  furent  sans  doute  encore  plus  son  savoir  et  son  mérite 
que  le  bénéfice  de  sa  naissance,  qui  l'éleverent  aux  premiers 
honneurs  de  la  république.  '  Il  se  vil  trois  fois  Préfet  du  Pré-  sid.  i.  i.ep.7 1 1.7. 
loire  et  une  fois  Consul  avec  Antoine,  qui  pouvoit  être  le  ?oJ9VTiiî'..'Emp- 
beau-pere  d(i  l'Empereur  Théodose.  En  380  et  382  il  exer-  »•  *•  p-  *<*'•  '*>• 
çoil  la  Préfecture  d'Italie,  et  en  3  "51  celle  des  Gaules.  Sur  la 
fin  de  la  même  année  il  alla  à  Milan,  comme  il  semble,  pour 
y  commencer  son  Consulat  au  premier  de  Janvier  382.  '  Com-  tui.  iwa.  p.  719. 
me  Flavius  Syagrius  avoit  été  Consul   l'année   précédente, 
cette  circonstance  jointe  à  la  ressemblance  des  noms  a  fait 
confondre  ces  deux  Consuls,  et  a  fait  dire  que  Syagre  dont 
nous  parlons,  l'avoit  été  deux  fois.  Mais  c'est  ce  qui  étoit  alors 
très-rare  pour  des  particuliers,  et  sans  exemple  dans  deux  an- 
nées de  suite. 

'  Le  mérite  de  Syagre  et  le  rang  qu'il  tenoit,  lui  donnoient  sym.  1.  1.  ep.ss 
beaucoup  de  crédit  à  la  Cour.  Il  n'avoil  gueres  moins  de  bon-  *"'' 
té  à  s'en  servir  en  faveur  des  autres.  C'est  un  des  sujets  de  son 
éloge  dans  Symmaque,  qui  connoissant  les  nobles  et  géné- 
reuses disposilions  de  son  cœur,  savoit  les  mètre  souvent  à 

K  k  ij 


260  SYAGRE,   POETE. 

IV  SIECLE,  l'épreuve  en  lui  recommandant  la  cause  de  diverses  personne.* 
de  ses  amis.  Il  y  avoit  une  étroite  amitié  entre  ces  deux  grands 
hommes,  quoique  de  dilTerenle  religion.  Car  Syagre  éloit 
Chrétien,  et  Symmaque,  comme  l'on  sait,  un  Païen  zélé.  11 
nous  reste  encore  quatorze  lelres  de  leurs  mutuelles  relations. 
Elles  sont  toutes  de  Symmaque,  et  les  dernières  de  son  pre- 
mier livre.  On  y  trouve  divers  témoignages  de  l'éloquence  do 
Syagre.  Symmaque  lui  adressoit  quelquefois  ses  plaidoïers, 
comme  à  un  homme  d'un  profond  examen  et  d'une  critique 
severe;etil  paroît  que  l'estime  qu'il  en  faisoit,  inspiroit  à 
Symmaque  une  nouvelle  émulation. 
Anv  pr.  2.  ▼.  .•».  '  Entre  les  autres  amis  de  distinction  et  gens  de  letres  avec 
**■  lesquels  Syagre  étoit  uni,Ausone  semble  avoir  tenu  un  des 

premiers  rangs.  Ce  poëte  faisoit  tant  de  cas  du  savoir  du  Sya- 
gre, qu'en  publiant  le  premier  recueil  de  ses  poésies,  il  le 
choisit  pour  son  Mécène,  et  voulut  que  son  nom  parût  à  la 
tête  de  ses  ouvrages.  Il  en  usa  de  la  sorte,  comme  il  le  dit 
lui-même,  afin  que  l'on  pût  aussi-tôt  les  atribuer  à  Syagre 
qu'à  leur  vrai  Auteur, 
sid.  1.  5.  ep.  r..  p.  '  Syagre  publia  lui-même  des  poésies  de  sa  façon,  qui  se 
*"  lisoient  encore  plus  de  70  ans  après  sa  mort.  S.  Sidoine  qui 

les  avoit  entre  les  mains,  en  relevé  la  beauté  avec  éloge.  Il 
dit  à  ce  sujet  que  le  savoir  et  l'habileté  de  ce  Poëte  lui  au- 
roient  fait  ériger  des  statues,  si  les  grandes  dignités  dont  il 
avoit  été  revêtu  ne  lui  eussent  déjà  procuré  cet  honneur. 
Aujourd'hui  il  ne  nous  reste  plus  rien  des  productions  de  sa 
*p.  17.  p.  990.  Muse.  '  Nous  aprenons  du  même  Ecrivain  que  Syagre  fut 
inhumé  près  de  l'Eglise  S.  Just,  à  quelque  distance  de  la 
ville  de  Lyon,  où  l'on  voioit  encore  son  tombeau  après  le 
milieu  du  V  siècle.  De-là  on  pourroit  conjecturer  que  Syagre 
ne  seroit  mort  que  plusieurs  années  après  S.  Just,  et  après 
qu'on  lui  eût  bâti  une  église.  Mais  celle  où  il  fut  enterré  exi- 
stoit  déjà  auparavant,  et  portoit  le  nom  des  Maccabées.  Ce 
ne  fut  que  dans  la  suite  qu'elle  prit  celui  de  S.  Just.  Ainsi  rien 
n'empêche  que  Syagre  n'eût  quité  cette  vie  la  même  année 
que  ce  Saint  Evêque  de  Lyon ,  ou  peu  après. 


261 

=^       IV    SIECLE. 


VALENTINIEN  II, 

Empereur. 

VALENTimEN  II  du  noiïi ,  qui  auroit  fait  un  des  plus 
grands  ornemens  de  l'Eglise  et  de  l'Empire ,  si  Dieu  lui 
eût  acordé  une  plus  longue  vie,  nâguit  dans  les  Gaules  '  sur  Tiii.  Emp.  i.  r..  p. 
la  fin  de  l'an  371.  Le  lieu  de  sa  naissance  fut  tr^s-probable-  ^'^•^^-  • 
ment  la  ville  de  Trêves.  C'étoit-là  que  l'Empereur  Valenti- 
nien  I  son  père  faisoit  sa  résidence  la  plus  ordinaire,  depuis 
qu'il  eut  partagé  l'Empire  avec  son  frère  Valens,  et  qu'il  eut 
passé  les  années  365  et  366  en  diverses  villes  des  Gaules.  II 
eut  pour  mère  l'Impératrice  Justine,  qui  lui  donna  trois  sœurs, 
Justa,  Grata  et  Galla.  Celle-ci  fut  seconde  femme  de  l'Em- 
pfreur  Theodose;  et  les  deux  autres  vécurent  toujours  dans 
le  célibat.  Valentinien  eut  aussi  pour  frère  l'Empereur  Gra- 
tien;  mais  d'une  première  femme  de  son  père,  comme  nous 
l'avons  dit  ailleurs. 

'  Il  vint  au  monde  avec  un  riche  naturel,  des  inclinations  snz.  i.  ?.  e..  n.  p. 
comme  naturellement  portées  au  bien,  et  avec  toutes  les  quali-  ''^^' 
tés  qui  font  les  grands  Princes.  '  Il  n'avoit  encore  que  4  ans,  Amm.  i.  30.  p. 
lorsqu'au  mois  de  novembre  395  il  perdit  son  père,  et  que  l]'^;_  sllp.^m'* 
les  principaux  Officiers  de  l'armée  le  déclarèrent  Empereur. 
Cette  proclamation  se  fit  en  Ulyrie.'  Gratien^  qui  étoit  alors  Ans.  con».  p.  toi. 
dans  les  Gaules,  la  confirma  peut-être  sans  le  savoir,  en  asso- 
ciant ce  jeune  Prince  à  l'Empire,  par  une  affection  et  une 
tendresse  qui  le  lui  firent  toujours  regarder  comme  s'il  eût  été 
son  propre  fils. 

'  Dès  l'année  suivante  Valentinien  fut  fait  Consul  avec  l'Em-  tiii.  ih.  \>.  «3. 
pereur  Valens  son  oncle.  On  ne  sait  rien  de  bien  positif  tou- 
chant son  éducation  ;  mais  on  ne  doit  pas  douter  qu'elle  n'ait 
été  conforme  à  sa  naissance.  Il  passa  toute  sa  jeunesse  en  Uly- 
rie et  en  Italie,  '  qui  avec  l'Afrique  devinrent  son  apanage  p.  157. 
dans  la  suite.  Nous  disons,  dans  la  suite  ;  parce  que  Gratieti 
ne  partagea  l'Empire  avec  lui,  '  quoiqu'ils  portassent  l'un  et  p-  ne.  70-. 
l'autre  le  titre  d'Empereur,  qu'en  379  après  la  mort  de  Va- 
lens, lorsqu'il  fit  Theodose  Empereur,  à  qui  il  céda  l'Orient. 

'  Comme  Valentinien  étoit  encore  enfant,  Justine  sa  mère  p-  «* 
ovoit  toute  l'autorifé,  et  regnoit  sous  le  nom  du  fils.  Mais  si- 
1  8 


26? 


VALENTINIEN  H, 


IV  SIECLE. 


>  Amm.  ib. 
o  TiU.  ih. 


Thilrt.  I.  5.  (' 
p.  218. 


m. 


Till.  ib.   p.  284. 


p.  tas.  298. 


|i.  2!)S. 


tôt  qu'il  eût  atteint  l'Age  de  12  à  13  ans,  aïant  alors  perdu  Gra- 
tien  "  qui  malgré  sa  jeunesse  lui  tenoit  lieu  de  père,  ''  il  neman- 
quoit  gueres  dans  les  ocasions  un  peu  importantes  de  consul- 
ter Theodose.  Les  conseils  de  ce  pieux  Empereur  lui  furent 
aussi  salutaires,  que  le  secours  qu'il  lui  prêta  contre  le  Tyran 
Maxime  lui  fut  avantageux.  '  En  effet  Theodose  le  guérit  d'a- 
bord des  plaies  que  la  doctrine  impie  de  Justine  sa  mère, 
Ariene  déclarée,  avoit  faite  à  son  âme,  et  le  fil  rentrer  dans 
la  foi  des  Pères.  '  Ensuite  aïant  armé  puissamment  contre  Ma- 
xime, qui  non  content  d'avoir  envahi  la  grande  Bretagne  et 
les  Gaules  sur  Gratien,  à  qui  il  avoit  fait  inhumainement  ôter 
la  vie ,  vouloit  encore  dépouiller  Valentinien ,  ce  généreux 
Empereur  '  défit  entièrement  l'Usurpateur,  et  rétablit  nôtre 
jeune  Prince  dans  ses  Etats  et  dans  ceux  que  son  frère  avoit 
possédés. 

'  Presque  en  même  tems  Valentinien  perdit  l'Impératrice  sa 
mère.  Il  se  vit  alors  en  une  pleine  liberté  pour  ne  se  conduire 
que  par  les  impressions  de  Theodose  et  sur-tout  de  S.  Am- 
broise.  Ce  fut  par  leurs  avis  qu'il  rétablit  la  foi  Catholique 
dans  l'Italie  et  dans  les  autres  provinces  de  son  Empire.  Depuis 
cette  mort  il  aima  et  s'atacha  S.  Ambroise  avec  d'autant 
plus  d'affection,  qu'il  l'avoit  autrefois  persécuté  avec  plus  d'in- 
Anib.  de  ob.  Val.  justicc  à  la  pcrsuasiou  de  Justine.  '  S.  Ambroise  de  son  côté 
n  1.  ,v  7.n.  80.  avoit  pour  cet  Empereur  un  alachement  tendre  et  sincère;  et 
les  éloges  qu'il  nous  en  a  laissés  en  divers  endroits  de  ses  écrits, 
montrent  assez  quelle  estime  il  faisoit  et  de  sa  vertu  et  de  ses 
talens. 
.1.3. 19 1  pp.  17.  11.  '  Avec  les  instructions  de  ce  Saint  Docteur  Valentinien  de- 
:i  I  .p.  18.  11.  I.  yj,j,  y^  Prince  vraiment  Chrétien,  aimé  de  Dieu  et  chéri  des 
peuples;  et  quoique  dans  un  âge  encore  jeune,  il  avoit  déjà 
les  mœurs  et  la  giavilé  d'un  vieillard,  et  l'ardeur  de  sa  foi  le 
.leob.  Val.  n.  1».  rcudoit  uu  liomme  parfait.  '  Sa  foi  et  sa  pieté  éclatèrent  par- 
lieulierement  dans  le  refus  généreux  qu'il  fit  au  Sénat  de  l'au- 
tel do  la  Victoire,  malgré  l'avis  de  quelques-uns  de  ses  Con- 
.seillers,  qui  bien  que  Chrétiens  opinoieni  à  le  rendre,  et  à 
faire  ainsi  revivre  le  Paganisme  dans  Rome.  '  Autant  que  ce 
jeune  Prince  avoit  de  religion,  autant  il  avoit  d'équité  et  de 
tendresse  pour  ses  sujets.  Plein  de  lumière  et  de  vigueur,  ja- 
mais nulle  considération  ne  l'empêchoit  d'aller  droit  à  ce 
qu'exigeoit  la  justice.  Se  regardant  comme  le  père  et  le  pro- 
tecteur de  .ses  peuples,  il  ne  voulut  jamais  souffrir  qu'on  les 


20, 


Till.    il>. 


MC. 


EMPEREUR.  2G3 

chargeât  de  nouveaux  impôts.  "  Il  aimoit  ses  amis  jusqu'à     iv siècle. 
souhaiter  de  mourir  plutôt  que  de  les  exposer  pour  lui.  *■  Il  avoit  ,  xui.  ii,.  p  341. 
beaucoup  de  modération  et  d'amour  pour  la  paix  et  la  tfen-  b  p.  309. 340. 3*9. 

auillité.  Mais  il-n'avoit  pas  moins  de  courage  ;  et'  il  en  donna 
es  preuves  en  diverses  oçasions  contre  les  Sarmates  et  les 
François. 

'Tel  étoit  le  jeune  Valentinien,  orné  de  toutes  les  qualités  p.  348.  354. 
de  l'esprit  et  du  corps,  qui  le  rendoient  parfaitement  digne 
de  régner,  '  lorsque  le  Comte  Arbogaste  Général  de  ses  ar-  p.  ssr.  1  p»os.  «hr. 
mées,  par  une  cruauté  la  plus  barbare  le  fit  étrangler,  pour  fi  "^,'  |'Hie°"'ep. 
s'emparer  de  l'Empire,  et  le  céder  au  Tyran  Eugène.  L'est  ^s.  p.  273. 
ce  qui  s'exécuta  près  de  Lyon,  ou  à  Vienne  même  où  Valen- 
tinien éloil  venu  depuis  quelques  années.  '  Ce  Prince  vrai-  tui.  ib.  p.  33c. 
ment  digne  d'un  meilleur  sort,  perdit  la  vie  le  15  de  Mai  veil- 
le de  la  Pentecôte  de  l'an  393,  étant  alors  dans  la  vingt-et- 
uniéme  année  de  son  âge,  après  avoir  porté  16  ans  et  quelques 
mois  le  titre  d'Auguste. 

Comme  il  n'étoit  que   Catécumene,  il  avoit  écrit  à  S.  Amb.  ep.  la.  ».  1. 
Ambroise  pour  l'engager  à  venir  lui  donner  le  baptême,  qu'il 
désiroit  recevoir  de  sa  main.  Mais  il  fut  prévenu  par  la  mort, 
avant  qu'il  pût  recevoir  cette  consolation.  '  Son  corps  fut  por-  tui.  ib.  p.  mm. 
té  à  Milan  et  enterré  auprès  de  celui  de  l'Empereur  Gratien. 

A  la  cén'monie  de  ses  obsèques  S.  Ambroise  prononça  son  Amb.  Ou  ob.  vai. 
oraison  funèbre  ,  que  nous  avons  encore.  Entre  les  éloges  "'  ''  ^^'  ^^' 
qu'il  y  fait  du  mérite  et  de  la  vertu  de  ce  Prince,  il  ne  craint 
pas  de  nous  assurer  de  son  salut,  quoique  mort  sans  baptême. 
lien  donne  aussi-tôt  la  raison.  C'est,  dit-il,  qu'il  l'avoit  de- 
mandé ;  et  que  s'étant  purifié  dans  sa  foi,  il  avoit  reçu  de  J.  C. 
même  ce  qu'il  n'avoit  pu  recevoir  par  le  ministère  des 
hommes. 

Valentinien  aimoit  les  letres  et  ceux  qui  les  eu Iti voient. 
C'est  sur  cette  considération  que  divers  Auteurs  de  son  règne 
le  choisirent  pour  leur  Mécène.  '  Sextus  Rufus   Eestus  Avie-  Fab.  bib.  )at.  p. 
nus  lui  adressa  un  abrégé  dos  victoires  et  des  provinces  du  ^^^-  *"^'  *^- 
peuple  rumain.  Flavius  Vegetius  Renatus  lui  dédia  un  abré- 
gé d'instructions  pour  la  guerre.  '  Symmaque  relevé  beaucoup  sym.  1. 1.  ép.  .mî. 
son  éloquence,   et  le  loue  d'avoir  acordé  dans  son  palais  une 
place  honorable  aux  Muses.  La  letre  où  cet  Orateur  s'expri- 
me de  la  sorte,  est  sans  inscription.  Mais  elle  paroit  écrite  à 
Valentinien,  qui  y  est  qualifié  un  jeune  Empereur. 

■  Nous  avons  dans  le  Code  de  Theodose  et  dans  l'appen- 


a  Till.  ib. 

P- 

246. 

260. 

309 

1 

tod. 

Th. 

app. 

P- 

722 

72.$. 

Tii. 

73S 

264  I.  CONCILE  DE  iNlSMES. 

IV  SIECLE,    dice  qu'en  a  donné  le  P.  Sirinon,  plusieurs  loix  que  Valen- 

tinien  publia  pour  le  règlement  de  l'Empire.  11  s'y  en  trouve 

quelques-unes  qui  portent  des  marques  éclatantes  de  sa  pieté 
et  de  son  amour  pour  l'Eglise  et  pour  ses  Ministres.  Une  de  celles 
qui  lui  acquit  le  plus  d'estime  est  l'Ordonnance  générale  et 
perpétuelle  qu'il  fil  pour  délivrer  les  prisonniers  ton»  les  ans  à 
Pâque.  Il  en  excepte  néanmoins  les  sacrilèges,  les  adultères, 
les  faux  monnoïeurs,  les  empoisonneurs,  les  homicides, 
les  criminels  de  leze-majesté,  et  ceux  qui  étoient  coupables 
Tiu.  H.  E.  i.  10.  de  rapt  et  de  maléfices.  '  Cette  loi  d'indulgence  et  de  bonté 
'■■"'*■  fut  publiée  à  Milan  le  25  de  Février  385. 

Il  paroît  par  l'histoire  de  Valentinien  qu'il  écrivit  grand 
nombre  de  letres  tant  à  S.  Âmbroise  et  à  Theodose,  qu'au 
Sénat  et  à  ses  Officiers.  Mais  de  toutes  ces  letres  on  n'en  trou- 
ve plus  qu'une  que  Baronius  nous  a  conservée.  Elle  est  écrite 
à  Saluste  Préfet  de  Rome,  pour  faire  rebâtir  l'Eglise  de  S. 
Krap.  ib.  p.  737.  Paul  auprès  de  la  ville.  '  C'est  à  nôtre  Empereur  que  s'adressent 
'^'  presque  toutes  les  letres  qu'écrivit  Symmaque  étant  Préfet  de 

Rome,  et  qui  font  la  plus  grande  partie  de  son  dixième  livre, 
quoique  plusieurs  portent  une  autre  inscription. 


738, 


N- 


I,   CONCILE  DE  NISMES. 

ous  avons  déjà  fait  plus  d'une  fois  une  observation  que 
nous  ne  saurions  trop  répéter.  Les  malheurs  des  tems 
nous  ont  enlevé  tant  d'actes,  et  même  dérobé  la  connoissan- 
ce  de  tant  de  Conciles  tenus  dans  les  Gaules  comme  ailleurs, 
que  les  moindres  particularités  qui  ont  échapé  du  naufrage, 
nous  en  deviennent  très-précieuses.  C'est  ce  qui  nous  porte  à 
recueillir  ici  avec  soin  le  peu  que  l'on  trouve  de  l'histoire  d'un 
Concile  tenu  à  Nismes  vers  la  fin  de  ce  IV  siècle. 
Nui.oiai.  a.  11.13.  Tout  ce  que  l'on  en  sait  de  certain,  se  tire  de  S.  Severe 
i..  5«.  Sulpice.  Cet  Ecrivain  nous  aprend  donc  que   S.  Martin  y 

aïant  été  invité  refusa  constamment  de  s'y  trouver.  Mais  que 
comme  le  Saint  Prélat  désiroit  fort  néanmoins  de  savoir  ce 
qui  s'y  passeroit,  il  en  fut  instruit  par  un  Ange,  lorsqu'il  étoit 
en  un  voïage  par  eau  avec  le  même  S.  Sulpice;  Qu'enfin  ses 
disciples  après  la  tenue  du  Concile  s'étant  exacteinent  enquis 
de  ce  qui  s'y  étoit  fait,  reconnurent  qne  tout  étoit  conforme 
pour  le  jour  de  l'assemblée  et  pour  les  décrets  que  l'on  y 


I.  CONCILE  DE  NISMES.  265 

avoit  arrêtés,  à  ce  que  l'Ange  en  avoit  apris  à  S.  Martin,     iv  siècle. 
'  On  ne  convient  point  de  l'année  en  laquelle  se  tint  cette  .■:      t:      ~ 

I     •  •  1»         7fcr»rk     /  T\»  1        ^onc.  t.  z.  p.  840. 

assemblée.  Quelques-uns  lui  assignent  1  an  389.    D  autres  la  Tiii.  h.  e.  t.  lo.  p. 
rejetent  jusqu'en  393,  et  même  encore  plus  loin.  '  Ce  qu'il  suip.,uai.3.  n.  ts. 
y  a  d'incontestable,    c'est   que   dès  386,  S.  Martin  à  son  p  ■>^^-  '^■ 
retour  de  Trêves,  où  il  avoit  été  obligé  malgré  lui  de  com- 
muniquer avec  les  Ithaciens,  avoit  pris  la  résolution  de  ne 
plus  assister  à  aucun  Concile,  et  qu'il  vécut  plusieurs  années 
depuis  sans  s  y  trouver.  Ainsi  il  est  hors  de  doute  que  celui  de 
Nismes  auquel  il  refusa  d'aller  ,  se  tint  dans  cet  espace  de 
temps-là. 

Mais  on  peut  douter  si  ce  n'est  pas  '  ce  Concile  dont  parle  Amb.  de  ob.  v»i. 
S.  Ambroise  dans  l'oraison  funèbre  de  Valentinien  le  jeune, 
et  qui  se  tenoit  vers  le  tems  de  la  mort  de  cet  Empereur, 
c'eest-à-dire  vers  le  mois  de  mai  392.  S.  Ambroise  décrivant 
l'empressement  avec  lequel  Valentinien  désiroit  qu'il  le  vînt 
trouver  dans  les  Gaules,  où  étoit  alors  ce  Prince,  pour  rece- 
voir le  baptême  de  sa  main,  dit  qu'il  l'avoit  assuré  que  s'il  lui 
faisoit  tant  d'instances  pour  venir,  ce  n'étoit  point  pour  assi- 
ster au  Concile  des  Evêques  des  Gaules,  mais  seulement  afin 
qu'il  le  baptisât.  Ces  paroles  marquent  bien  clairement  qu'il  se 
tenoit  alors  ,  ou  devoit  bien-tôt  se  tenir  un  Concile  dans  les 
Gaules.  Or  comme  ce  Concile  ne  nous  est  point  connu  d'ail- 
leurs, et  que  l'on  sait  que  celui  de  Nismes  se  tint  vers  ce  mê- 
me tems,  on  peut  croire  que  c'est  le  même  dont  parle  S.  Am- 
broise. Au  reste  il  étoit  à  propos  que  Valentinien  voulant  ati- 
rer  ce  Saint  Prélat,  l'avertit  que  ce  n'étoit  pas  pour  se  trouver 
à  ce  Concile  qu'il  le  mandoit,  parce  que  le  Saint  s'étoit  sou- 
vent excusé  d'assister  aux  assemblées  aes  Evêques  Gaulois,  à 
cause  de  leurs  trop  fréquentes  divisions. 

On  ignore  et  le  sujet  de  la  convocation  de  ce  Concile  et 
ce  qui  y  fut  décidé.  Il  paroit  néanmoins  par  ce  que  nous  en 
avons  raporté  d'après  S.  Sulpice,  que  S.  Martin  en  avoit  in- 
struit ses  disciples,  et  qu'eux-mêmes  l'avoient  apris  d'ailleurs. 
Il  est  fâcheux  que  Gallus,  qui  étoit  du  nombre,  et  qui  parle 
par  la  plume  de  S.  Sulpice,  nen  ait  rien  dit  dans  sa  relation. 
Après  tout,  il  semble  qu'il  n'y  ait  pas  lieu  de  douter  que  ce  ne 
fût  pour  l'affaire  des  Ithaciens,  qui  causoit  alors  tant  de  trou- 
bles dans  l'Eglise  des  Gaules,  que  l'on  assembla  ce  Concile. 
'Ce  fut-là  le  sujet  de  plusieurs  autres  assemblées,  ou  confe-  conc.  ib.  p.  io3c. 
rences  d'Evêques  sur-tout  à  Trêves,  dont  on  a  voulu  faire  '°^'' 
Tome  I.  Sec.  Part.  Ll 

1  8  * 


IV    SIECLE. 


266 


I.  CONCILE  DE  NISMES. 


quel(jues   Conciles   réglés;    mais    elles  parnissent  avoir  ùiè 
trop  irrégulieres  pour  mériter  le  nom  de  Concile. 


S.     P  H  E  B  A  D  E, 

EvEQUE    d'AgEN. 


Till. 
427. 


H.  E.  t.  6. 


Mil.  de  Syn. 
3.  10. 


n.  2. 


Pliuib.  p.  300.  304. 


Sul.hist.I.  2.n.57. 
59. 


I. 


HISTOIRE  DE  SA  VIE. 


ON  ignore  quelles  furent  et  la  naissance  '  et  l'éducation 
de  S.  Phébade.  *0n  ne  sait  point  non  plus  en  quelle 
année  il  fut  élevé  à  l'épiscopat.  Mais  le  peu  que  l'on  nous  a 
conservé  de  son  histoire,  nous,aprend  qu'il  devint  un  des  plus  il- 
lustres Prélats  de  l'Eglise  (lallicane  en  ce  IV  siècle,  et  un  des 
plus  zélés  défenseurs  de  la  foi  (Catholique  contre  les  Ariens. 

Il  ocupa  long-tems  le  siège  d'Agen,  pour  lequel  la  provi- 
dence l'avoit  formé.  '  Son  nom  ne  paroît  point  entre  les  sous- 
ciiptions  des  autres  Evéques  Gaulois  au  Concile  de  Sardi- 
quetenu  en  347.  On  juge  de-là  qu'il  ne  fut  fait  Evêque  qu'a- 
près ce  tems-là.  Il  l'étoit  au  moins  dès  357,  '  lorsqu'on  envoïa 
dans  les  Caules  la  seconde  formule  de  Sirmich, fabriquée  par 
Potamius  Evêque  de  Lisbone  et  signée  par  Osius  de  Cordouë. 
S.  Phébade  ne  se  contenta  nas  de  la  rejeter  et  la  condamner 
avec  les  autres  Prélats  de  l'Eglise  (lallicane  ;  '  il  la  réfuta  enco- 
re d'un  bout  à  l'autri;  av(!c  beaucoup  d'esprit  et  de  solidité. 

Après  avoir  doimé  en  cette  oca.sion  des  marques  aussi  écla- 
tantes de  son  juste  zélé  contre  l'Arianisme,  '  il  alla  avec  les  au- 
tres Evêques  des  Gaules  au  Concile  de  Ri  mi  ni  assemblé  en 
359.  L'Empereur  vouloit  fournir  aux  frais  du  voiag(î  ;  mais  S. 
Phébade  ai  les  autres  Evêqu(!s  d'Aquitaine  refusèrent  géné- 
reusement de  profiter  de  cette  faveur.  C'étoit  non-.seulement 
marquer  du  désintéressement  ;  c'étoit  encore  faire  voir  qu'ils 
désiroient  de  jouir  d'une  entière  liberté.  Leur  désir  ne  fui  pas 


1  Quelques  Ecrivains  oui  Iciiié  de-  l« 
fair*  KspafrnnI  ilo  nation.  Mais  oulro 
qu'ils  u'cti  (luiiiii-nt  aucune  preuve  suliilc, 
son  nom  qui  osl  grec  supose  qn'il  iHoit  ou 
de  la  Gaule  Narbonoise  nu  d'AquilainB. 
On  a  vn  combien  celle  sorte  ■'•••  noms  et 
la  langus  graque   màoie  étoieni  commans 

IJ 


dans  ces  deux  provinces. 

2  Son  nom  se  irnnvA  ilirreremmcnt  e«- 
primé  dans  les  ancien»  niduumens.  oâ  il 
est  nommé  Sij^.iec,  Sebadi\  Kegade, 
KiUulo.  Il  esl  aujourd'hui  connu  suns  U 
nom  du  Kiari  parmi  le  peuple  du  païs. 


s.  PHEBADE,  EVEQUE  D'A-GEN.         267 

acompli.  S.  Phébade  se  lia  d'une  manière  plus  particulière    iv  siècle. 
avec  S.  Servais  Evêque  de  Tongres.  '  Le  Concile  étant  ou-  ^I7~d7~s~^ 
vert,  eux  et  les  autres  Prélats  Catholiques  y  soutinrent  la  foi  722.  n.  ».  ' 
du  Concile  de  Nicée  avec  beaucoup  de  zélé  et  de  fermeté, 
et  déposèrent  Ursace,  Valens  et  les  autres  Evêques  Ariens, 
qui  ne  voulurent  pas  s'y  soûmelre. 

'  Cependant  l'Empereur  envoïa  à  Rimini  une  nouvelle  for-  iiidn.  1.  2.  c.  ih. 
mule  signée  à  Nice  en  Thrace  par  les  Députés  du  Concile,  '':  37^  p^ti.'"  ^" 
et  entièrement   conforme  à  la  seconde   de  Sirmich,  excepté 
qu'elle  déclaroit  le  Fils  semblable  au  Père,  sans  ajouter  en 
toutes  choses.  '  Constance  avoit  aconipagné  cette  formule  d'un  Sui.  ib.  p.  407 
ordre  qui  enjoignoit  aux  Evêques  d'y  souscrire  et  de  ne  se 
point  séparer  sans  l'avoir  signée.  La  plupart  des  Evêques  vain- 
cus, partie  par  foiblesse,  partie  par  enimi  d'un  si  long  séjour 
dans  un  pais  étranger,  se  soumirent  à  ce  que  l'on  demandoit 
d'eux  ;  et  les  Catholiques,  qui  faisoient  d'abord  le  plus  grand  i' ' 

nombre,  se  virent  réduits  à  vingt.  A  leur  tête  étoient  S.  Phé- 
bade et  S.  Servais,  (|ui  montaient  d'autant  plus  de  courage 
qu'ils  se  voïoient  moins  soutenus  des  autres. 

'  Alors  le  Préfet  Taurus  Mod/rateur  du  Concile,  s'apper-  p.  «s. 
cevant  qu'ils  étoient  h  l'épreuve  de  la  crainte  et  des  menaces, 
les  ataqua  par  ses  prières,  ses  larmes,  ses  raisonnemens. 
Rien  ne  put  ébranler  la  constance  de  S.  Phébade  en  particu- 
lier. 11  prolesta  hautement  qu'il  aimoit  mieux  souffrir  l'exil  et 
la  mort  même  que  de  souscrire  à  la  formule  de  foi  des  Ariens. 
11  tint  ferme.  Mais  au  bout  de  quelques  jours  Ursace  et  Va- 
lens lui  alant  persuadé  de  dresser  lui-même  une  formule  de  sa 
façon,' le  désir  de  terminer  cette  grande  affaire  lui  fît  pren-  5. 410. 
dre  cette  voie.  S.  Phébade  et  S.  Servais  dressèrent  donc  leurs 
formules  dans  lesnuelles  ils  condamnoient  sans  détour  la  per- 
sonne et  l'hérésie  d  Arius,  et  reconnoissoient  non  seulement 
l'égalité  du  Fils  avec  le  Père,  mais  encore  son  éternité. 

Valens,  à  qui  comme  aux  autres  Ariens,  cette  formule  ainsi  'Wd. 
conçue  auroit  enlevé  tout  sujet  de  triomphe,  engagea  nos 
deux  Evêques  à  y  ajouter,  Que  le  Fils  n'est  pas  une  créature 
comme  les  autres  créatures.  '  Cette  proposition  artificieuse  ren-  "j  l  Amb.  de  nd.  1. 
fermoit  tout  le  venin  de  son  hérésie,  sans  le  montrer.  Car  sous 
prétexte  de  distinguer  ainsi  le  Fils  des  créatures,  c'étoit  en  faire 
une  véritable  créature,  seulement  relevée  au-dessus  des  autres. 

'  S.  Phébade  et  les  autres  Evêques  qui  pensoient  comme  lui,  sui.  ib  1  Amb.  ib. 

,  Tl^Tr  '[j   129-131 

n  y  soupçonnant  aucune  ruse,  se  laissèrent  surprendre  par  cet 

L  1  ij 


268  S.  PHEBADE, 

IV  SIECLE  artifice.  Ilsavoient,  dit  S.  Ambroise,  la  simplicité  delà  co- 
lombe  ;  mais  ils  manquoient  de  l'adresse  du  serpent.  Trompés 
par  le  son  des  paroles,  ils  n'aperçurent  pas  le  piège  qu'on  leur 
tendoit  ;  et  ne  songeant  qu'à  s'atacher  à  la  foi,  ils  eurent  le 
malheur  de  prendre  l'hameçon  de  l'hérésie. 
Tiii.  ib.  p.  457.  '  On  croit  que  les  professions  de  foi  dressées  en  cette  ocasion 
*^"  par  S.  Phébade  et  S.   Servais  ne  sont  autre  chose  que  les 

anathémes  raportés  par  S.  Jérôme.  Ce  Père  dit  les  avoir  tirés 
des  actes  mêmes  du  Concile  de  Rimini,  tels  qu'ils  étoient  alors 
dans  les  archives  de  toutes  les  Eglises,  mais  qui  ne  sont  pas 
venus  jusqu'à  nous. 
Sui.  ib.  p.  m.  '  On  fut  quelque  tems  sans  ouvrir  les  yeux  sur  la  fourberie 

Hier,  in  Lucif.  1.  dcs  Aricns.' Mais  enfin  on  se  reveilla  sur-tout  au  bruit  qu'ils 
'  "  *■  publioient  hautement  que  la  foi  de  Nicée  avoit  été  condam- 

née. Alors  tout  le  monde  se  vit  avec  étonnement  devenu 
sui.  il).  II.  -M.  Arien,  sans  y  penser,  et  gémit  de  cette  surprise.  '  Aussi-tôt  les 
Evêques  des  Gaules,  et  sans  doute  S.  Phébade  des  premiers, 
comme  un  des  plus  atachés  à  la  foi  de  la  Consubstantialité, 
avouèrent  presque  tous  leur,  erreur,  et  condamnèrent  ce  qui 
Hii.  fi.  II.  s'étoit  fait  a  Rimini.  '  C'est  ce  que  l'on  a  vu  dans  l'histoire  du 

Concile  de  Paris,  où  nos  Evêques  confessèrent  que  leur  sim- 
plicité avoit  été  abusée  par  les  fourberies  de  ceux  qui  leur 
avoient  fait  suprimer  le  terme  de  Substance. 
Thdri.  ib.  o.  n.  p.       '  On  vit  même  paroître  un  écrit  composé  à  ce  sujet.  Les 
**'*■  Evêques,  dit  Theodoret  qui  nous  aprend  ce  fait,  y  décla- 

roient  qu'ils  avoient  été  surpris,  et  qu'ils  avoient  regret  de  ce 
que  l'on  avoit  abusé  de  leur  simplicité,  n'aïant  jamais  eu  in- 
tention de  rien  faire  contre  les  décisions  du  Concile  de  Nicée. 
Hier.  Ttt.  iii.  c.  Si  cct  écrit  n'est  pas  un  '  de  ceux  dont  S.  Phébade   enrichit 
"**■  l'Eglise,  il  est  au  moins  presque  certain,  comme  nous  le 

Amb.  app.  p.  345.  moutrcrons  daus  la  suite,  '  qu'il  en  publia  un  autre  que  nous 
***■  avons  encore,  pour  combatre  le  Concile  de  Rimini,  et  re- 

lever l'autorité  de  celui  de  Nicée,  dont  il  raporte  et  explique  le 
symbole. 

S.  Phébade  ainsi  relevé  de  sa  chute,  fut  depuis  en  quelque 
sorte  dans  l'Eglise  d'Occident  ce  qu'étoit  Osius  avant  la  sienne 
dans  toute  l'Eglise  Catholique,  un  des  principaux  apuis  de  la 
i;oiic.  t  a.  p- 'jo«.  foi  et  le  père  des  Conciles.'  Il  se  trouva  à  ceux  de  Valence 
et  de  baragoce  :  1  un  tenu  en  374  au  sujet  de  quelque 
différend  arrivé  dane  cette  Eglise,  l'autre  en  380  contre  les 
Priscillianistes.  Il  est  même  à  croire  qu'il  présida  à  l'un  et  à 


<0U!).  1807. 


EVEQUE  D'AGEN.  269 

l'autre.  Au  moins  est-il  nommé  le  premier  dans  les  souscrip-    iv   siècle. 
lions,  quoique  S.  Delphin  de  Bourdeaux  son  Métropolitain  lût  " 
présent  à  celui  de  Saragoce.' C'est  un  rang  que  la  dignité  de  thi.  ii).  p.  *i»\ 
son  siège  ne  lui  pouvoit  donner.  Mais  le  respect  pour  son  '■  *  ''•  '^^*' 
âge,  sa  pieté  et  sa  science  le  lui  auront   procuré,   comme 
autrefois  à  Osius  au  Concile  de  Sardique.  La  même  chose  se 
fit  encore,  selon  S.  Basile,  à  l'égard  de  Musone  Evêque  de 
Césarée  dans  le  Pont. 

'  S.  Phebade  étoil  lié  par  une  sainte  amitié  avec  S.  Delphin  Amb.  ep.  87. 
et  S.  Ambroise.  Celui  ci  leur  écrivit  quelquefois  à  l'un  et  à 
l'autre.  Mais  leur  union  étoit  si  étroite,  qu'ils  ne  vouloient  pas 
même  qu'il  séparât  leurs  noms.  De  sorte  que  ses  letres,  dont 
il  ne  nous  reste  plus  qu'une  seule,  étoient  adressées  à  tous  les 
deux  ensemble.  Ils  en  usoient  de  même  de  leur  côté,  lors- 
qu'ils écrivoient  à  S.  Ambroise,  le  faisant  par  une  même  lelre 
qui  leur  étoit  commune. 

'  Il  paroit  que  S.  Phébade  gouverna  l'Eglise  d'Agen  prés  Tiii.  ib.  t.  c. 
de  40  ans  au  moins;  '  puisqu'il  vivoit  encore,  mais  dans  un  Hier.  ib. 
âge  décrépit,  en  392.  C'est  ce  que  nous  aprenons  de  l'éloge 

3ue  nous  en  a  laissé  S.  Jérôme,  (jui  écrivoil  alors  son  traité 
es  Auteurs  Ecclésia.stiques.  '  L'Eglise  d'Agen  fait  aujourd'hui  boii.  a;,  api.  p. 
mémoire  de  notre  S.  Kvêque  le  2.)  du  mois  d'Avril.  ^^''  "  '"' 

8  n. 

SES   ECRITS. 

S.  Phébade  ne  se  borna  pas  à  défendre  el  soutenir  de  vive- 
voix  la  foi  de  l'Eglise  ;  '  il  le  fit  encore  par  ses  écrits.  Il  en  Hi«i.  vu.  iii.  c. 
composa  plusieurs,  selon  le  témoignage  de  S.  Jérôme,  qui  '"*' 
néanmoins  n'en  avoit  encore  lù  qu'un  seul  en  392,  lorsqu'il 
en  parloit.  Les  autres  nous  sont  absolument  inconnus,  si  tou- 
tefois nous  en  exceptons  un,  que  nous  croions  devoir  rendre 
à  nôtre  Saint,  comme  aïant  des  preuves  suffisantes  pour  mon- 
trer, qu'il  lui  apartient  plutôt  qu'à  tous  les  autres  Auteurs  à 
qui  on  le  donne.  C'est  ce  que  nous  examinerons,  après  que 
nous  aurons  parlé  de  celui  que  personne  ne  lui  dispute. 

1".  '  L'unique  ouvrage  qui  porte  aujourd'hui  le  nom  de  S.  Phœb.  p.  3o«.  sus 
Phébade ,  est  un  traité  contre  les  Ariens,  et  le  même,  ce  sem- 
ble, qu'avoit  lu  S.  Jérôme;  puisqu'il  lui  donne  le  même  titre. 
S.  Phébade  le  composa  pour  l'oposer  à  la  seconde  formule  de 
Sirmich,  qu'il  y  réfute  d'un  bout  à  l'autre.  Il  y  établit  en  par- 


270  S.  PHEBADE, 

IV  SIECLE,    ticulier  par  des  passages  choisis  de  l'Ecriture  le  mystère  de  la 

' ■  Trinité.  Il  y  relevé  l'autorité  des  Pères  de  Nicée,  et  soutient 

'•"■'^  qu'il  n'y  a  en  Dieu  qu'une  substance,  et  qu'il  faut  conserver 
ce  terme  et  celui  de  Consubstantiel  que  l'on  avoit  retranché  de 
la  formule  qu'il  combat. 

piiœb.  p.  301. 1.  '  II  y  traite  aussi,  mais  en  passant,  du  mystère  de  l'Incarna- 
tion. Il  en  prit  ocasion  d'une  letre  de  Potame  de  Lisbone,  en- 
voïée  par  tout  l'Orient  et  l'Occident,  et  remplie  d'erreurs 
i  grossières.  Cet  Evêque  Arien  y  disoit  entre  autres  impertinen- 

ces, que  la  chair  et  l'esprit  de  .1.  C.  étant  unis  par  le  sang  de 
Marie,  et  réduits  en  un  seul  corps,  Dieu  étoit  devenu  passible; 
en  sorte  que  de  l'esprit  de  Dieu  et  de  la  chair  de  l'homme  il 
s'étoit  formé,  je  ne  sais  quelle  troisième  chose,  qui  n'é- 
toit  proprement  ni  Dieu  ni  homme.  S.  Phébade  montre  donc 
par  l'Ecriture  les  propriétés  différentes  des  deux  substances  en 
J.  C.  Voilà  une  idée  générale  de  ce  Traité.  Mais  il  s'y  trou- 
ve divers  traits  particuliers  qui  ne  sont  pas  indignes  de  re- 
marque. 

p.  300.1.  '  D'abord  S.  Phébade  déclare  que  ce  qui  l'a  obligé  à  pren- 

dre la  plume,  est  le  péril  extrême  où  il  voïoit  lafoi.  [/héré- 
sie, dit-il,  a  tellement  gagné  presque  tous  les  esprits,  qu'ils 
faut  y  souscrire  et  l'embrasser  nous-mêmes,  si  nous  voulons 
que  l'on  nous  donne  le  nom  de  Catholiques.  Il  se  promet 
néanmoins  que  son  écrit  sera  un  témoignage  de  sa  foi  et  le 
fera  reconnoîiro  pour  orthodoxe  par  ceux  qui  se  seront  mis 
au-dessus  de  la  crainte  et  de  l'ambition  du  siècle. 

ib.  '  Venant  ensuite  à  la  formule  de  foi  qu'il  entreprend  de  ré- 

futer, il  la  qualifie  la  perfidie  des  Ariens,  et  montre  qu'elle  est 
pleine  d'artifices  et  de  fourberies  en  ce  qu'elle  contient  même 
de  meilleur  en  aparcnee.  Qu'elle  ne  parle  pas  même  de  l'unité 
d'un  Dieu,  et  n'en  exclut  pas  toute  pluralité,  sans  cacher 

28 1 303.  1.  quelque  fraude  sous  ces  expressions  catholiques.'  Que  si  les 

Ariens  d'alors  n'y  parloient  pas  si  ouvertement  que  ceux  qui 
les  avoient  précédés,  ils  n'en  pensoient  pas  moins  que  le  Fils 
étoit  une  pure  créature.  Qu'ils  n'usent  de  plus  de  subtilité,  que 

p.  300.  s.  pour  mieux  séduire  les  simples  et  les  ignorans.  '  Qu'il  est  aisé 

de  reconnoître  dans  cette  pièce  le  langage  et  les  artifices  d'Ur- 
sace,  de  Valens  et  de  Potame. 

n».  '  De-là  S.  Phébade  passe  à  expliquer  les  endroits  de  l'Ecritu- 

re dont  les  Ariens  abusoient  pour  tâcher  de  prouver  que  le 
Fils  est  inférieur  au  Père.  Il  leur  fait  voir  qu'ils  confondent 


EVEQUE   D'AGEN.  «71 

dans  ces  textes  les  deux  étals,  ou  difTerentes  natures  qui  sont  Vf  siècle. 
en  J.  C.  la  nature  humaine  selon  laquelle  il  est  inférieur  au 
Père,  et  la  nature  divine  qui  le  rend  égal  à  lui.  '  Et  comme  ils  piiœb.  p.  302. 2. 
insistoient  sur  ce  que  le  Père  est  plus  grand  que  le  Fils  en  hon- 
neur ,  en  gloire ,  et  en  majesté  ;  S.  Phébade  y  réponds  par  ces 
raisonnemens  invincibles.  «  Si  cela  est ,  dit-il ,  pourquoi  Dieu 
«  nous  ordonne-t'il  d'honorer  le  Fils  comme  le  Père?  Si  cela 
«  est ,  nous  proferons  des  blasphèmes  autant  de  fois  que  nous 
«  rendons  grâces ,  ou  que  nous  offrons  le  sacrifice;  puisque  ces 
«  actes  de  religion  s'adressent  au  Fils  comme  au  Père ...  La 
«  majesté  qui  convient  à  un  seul  Dieu  ,  dit-il  encore  ,  ne  peut 
«  être  que  parfaite.  Or  elle  ne  sera  point  telle,  ajoùte-t-il,  si 
«  elle  est  inégale  par  raport  au  Père  et  par  raport  au  Fils  ;  et 
«  elle  devient  inégale,  si-tôt  qu'elle  est  moindre  dans  le  Fils  :  ce 
«  qui  est  la  détruire  entièrement.  » 

'  A  l'égard  d'un  commencement  d'être  que  les  Ariens  p.  303.  2. 
vouloient  donner  au  Verbe  ,  S.  Phébade  les  réfute  de  la  sorte. 
«  Prouver,  dit-il,  que  le  Fils  n'a  pas  été  avec  le  Père  et  clans 
«  le  Père  avant  tout  commencement ,  c'est  prouver  que  le  Père 
«  a  pu  être  un  tems  sans  sa  Sagesse,  sans  son  Verbe,  sans  Rai- 
«  son,  sans  sa  Puissance,  sans  son  Esprit.  Tout  manque  au  Père, 
«  si  quelque  chose  lui  manque.  Or  il  lui  manque  quelque  chose, 
«  s'il  y  a  eu  un  tems  où  son  Fils ,  c'est-à-dire  la  plénitude  de  pa 
«  Puissance  n'avoit  pas  été.  » 

'  Il  acuse  ses  adversaires  de  travailler  à  détruire  la  vérité  p.  301.  1. 
pour  établir  sur  ses  ruines  le  mensonge ,  qui  ne  savoit  se  soute- 
nir sans  cela.  Mais  cette  vérité,  ajoûte-t'il,  est  incorruptible 
par  sa  nature  ;  il  est  impossible  do  la  détruire.  Elle  subsistera 
toujours,  et  punira  les  mains  sacrilèges  qui  auront  osé  aten- 
ter  sur  elle. 

'  11  y  touche  et  réfute  en  divers  endroits  l'hérésie  de  Sa-  p.  302.  2. 30t.  2. 
bellius,  qui  ne  faisoit  du  Père  et  du  Fils  qu'une  seule  et  mê-  "''■  *' 
me  Personne  sous  deux  noms  différens.  'il  soutient  que  J.  G.  a  p.  303. 1. 
détruit  et  cette  hérésie  et  colle  d'Arius  tout  ensemble  .par  cette 
seule  parole  :  Je  suis  dans  mon  Père,  et  mon  Père  est  en  moi. 

'  S-  Phébade  dans  cet  écrit  suit  la  manière  de  parler  de  p-  30*.  2. 
Tertullien,  nommant  corps  tout  ce  qui  subsiste:  nom  qu'il 
étend  jusqu'aux  êtres  spirituels  et  invisibles,  sans  en  excepter 
Di<  u  même.  '  Il  y  cite  le  livre  de  la  Sagesse  sous  le  nom  de  Sa-  p-  •■502. 2. 
lomon.  '  II  adresse  son  ouvrage  à  ses  très-chers  frères,  que  p.  300.  1 
l'on  croit  avec  beaucoup  d'aparence  être  les  autres  Evêques 
des  Gaules. 


272  S.  PHEBADE, 

IV  SIECLE.  '  Il  le  finit  par  établir  le  mystère  de  la  Sainte  Trinité,  un 
rrr — .  ^  Dieu  en  trois  Personnes  réellement  distinctes,  le  Père,  le  Fils 
et  le  S.  Esprit,  qui  toutes  trois  néanmoins  ne  font  qu'un  seul 
et  même  Dieu.  Ensuite  il  dit,  quec'est-là  sa  foi  et  celle  des 
autres  Catholiques  ;  que  cette  foi  est  fondée  sur  les  Prophètes 
et  les  Evangelistes  ,  et  ateslée  par  les  souffrances  des  Martyrs. 
Après  quoi  il  prononce  analhéme  contre  quiconque  s'éinan- 
ciperoit  d'en  enseigner  une  autre  ,  fut-il  un  Ange  même.  En- 
fin il  répond  à  l'objection  aue  l'on  auroit  pu  tirer  de  la  chute 
d'Osius.  Mais  nous  avons  déjà  rapporté  ailleurs  ce  qu'il  répond 
à  ce  sujet. 

Cet  ouvrage  fut  fait  en  357  ou  358  au  plus  tard.  Il  est  écrit 
avec  justesse  et  précision  ,  sans  ce  que  la  brièveté  que  l'Auteur 
s'y  est  prescrite   le   rende  obscur ,  ou  diminue  la  force  des 
DnPin.bib.  i.  2.  raisonnemeus.  '  Les  Critiques  observent  que  le  style  en  est 
''■  ''^"  clair,  net,  assez  poli,  et  le  sujet  traité  d'une  manière  fort  dé- 

gagée. Qu'il  s'y  trouve  de  tems  en  tems  des  saillies  d'esprit, 
qui  font  voir  que  l'Auteur  avoit  beaucoup  de  feu  et  de  fa- 
cilité. 
Amh.  app.  p.  .■»«.  '  L'ouvragc  fini,  S.  Phébadele  communiqua  à  un  de  ses 
amis,  qui  l'aiant  trouvé  de  son  goût,  en  prit  une  copie.  Il  le 
pria  ensuite  de  le  faire  savoir  aux  Savans ,  sans  néanmoins  en 
faire  connoître  l'Auteur  ,  afin  que  par  leur  avis  il  pût  en  re- 
trancher ce  qu'ils  y  trouveroient  de  superflu  ,  ou  y  ajouter  ce 
qu'ils  jugeroient  y  manquer.  Que  si  toutefois  l'ouvrage  leur 
p.  S46.  paroissoit  exact ,  il  pourroit  en  ce  cas  le  donner  au  public.  '  Ce- 

la arriva  ;  l'ouvrage  fut  généralement  aplaudi  de  tout  ceux  oui 
le  lurent.  Mais  comme  quelques-uns  en  le  lisant  avec  plus 
d'attention  ,  y  trouvèrent  certaines  choses  qui  leur  parurent 
mériter  quelque  éclaircissement ,  l'Auteur  reprit  la  plume  et 
composa  un  autre  écrit  pour  les  satisfaire.  Voilà  l'origine  de 
l'autre  ouvrage  que  nous  soutenons  apartenir  à  S.  Phébade, 
comme  nous  l'allons  montrer,  après  avoir  parlé  des  différen- 
tes éditions  du  premier. 
Bib.  Tell.  p.  M.  '  Dès  1570  Beze  le  publia  avec  les  quatre  livres  de  S.  Ba- 
îôs^'not"''  *""  *■  sile  contre  Eunomius  ,  les  dialogues  de  la  Trinité  sous  le 
nom  de  S.  Athanase  et  quelques  autres  anciens  opuscules. 
Ce  recueil  fut  imprimé  par  Henri  Ëstienne  en  un  volume  in- 
8'.  Depuis  cette  édition ,  l'ouvrage  de  S.  Phébade  est  passé 
dans  toutes  les  Bibliothèques  des  Pères,  tant  de  Paris,  que  de 
Cologne  et  de  Lyon. 

'En 


EVEQUE  D'AGEN.  273 

"En  1586  Pierre  Pithou  le  donna  de  nouveau  au  public    iv  siècle. 
parmi  les  écrits  des  divers  anciens  Théologiens  Gaulois,  et  .  Bib.  leii.  ib.  27. 
sous  le  titre  suivant  que  l'on  ne  voit  point  autrement  fondé  :  2 1  Hier.  ib. 
Liber  contra  epistolam,  sive  edictum,  sub  nomine  Constatith 
emùsum  in  Synodo  Mediolanensi.  Cette  édition  est  faite  à  Paris 
chez  Nivelle  en  un  volume  in-¥.  '  Mr  du  Pin  la  marque  de  Du  Pin,  ib.  p.  313. 
i  589  ;  mais  il  y  a  toute  apparence  que  c'est  une  faute  d'Impri- 
meur, qui  aura  mis  un  9  pour  un  6.  '  Gaspar  Barthius  revit  Bib.  Teu.p.  32. 2.1 
depuis  l'ouvrage  de  S.  Phébade,  et  l'aiant  enrichi  de  notes  de  "'*'"  '*'■ 
sa  façon,  il  le  fit  reimprimer  séparément  en  un  volume  m-8°. 
à  Francfort  chez  Wechel  l'an  1623.  'Enfin  Mr  Delalande  Conc.  Si.iip.  p  s--'. 
dans  son  suplément  des  Conciles  de  France  imprimé  en  1666, 
nous  a  donné  le  même  ouvrage,  à  la  place  des  actes  qui  nous 
manquent  du  Concile  où  les  Evêques  des  Gaules  rejetèrent 
la  formule  de  Sirmich. 

2.  Outre  l'écrit  dont  nous  venons  de  parler,  et  que  person- 
ne ne  refuse  à  S.  Phébade,  il  y  en  a  un  autre  qui  ne  porte 
point  son  nom,  et  que  nous  sommes  néanmoins  persuadés  être 
de  lui.  Le  Lecteur  judicieux  verra  lui-même  si  c'est  à  tort  ou 
avec  raison.  Nous  le  faisons  juge  de  nos  preuves.  Cet  écrit 
est  le  quarante-neuvième  discours  entre  ceux  de  S.  Grégoire 
de  Nazianze.  D'abord  il  paroît  étrange  qu'on  se  soit  avisé  de 
donner  à  un  Père  Grec,  comme  originairement  écrit  en  cette 
langue,  un  ouvrage  dont  la  simple  lecture  supose  un  Auteur 
Latin  à  l'exclusion  d'un  Grec.  La  même  surprise  saisit,  lors- 
que l'on  voit  attribuer  à  Rufin  comme  une  traduction  faite  sur 
le  grec,  une  pièce  originairement  latine.  La  chose  est  si  pal- 
pable par  elle-même,  que  plusieurs  depuis  long-tems  s'en  sont 
desabusés,  et  ont  attribué  cet  ouvrage  à  S.  Ambroise.  Il  se  trou- 
ve effectivement  imprimé  sous  son  nom  dans  quelques-unes 
des  premières  éditions  de  ses  œuvres;  et  il  est  à  croire  qu'en 
cela  on  a  suivi  les  manuscrits. 

La  critique  s'étant  perfectionnée  dans  le  dernier  siècle,  '  on  Amb.  n..  p.  343. 
a  fait  voir  que  l'écrit  en  question  n'est  d'aucun  de  ces  deux  p^tL?'"'  '''■ 
Pères.  En  effet,  il  ne  convient  point  à  leur  tems,  et  paroît 
devoir  se  rapporter  à  la  fin  du  règne  de  Constance.  Il  combat 
le  Concile  de  Rimini,.  et  ataque  assez  clairement  Ursace  et 
Valens,  qui  vi voient  et  troubloient  encore  l'Eglise  par  la  puis- 
sance impériale.  D'ailleurs  en  parlant  du  S.  Esprit,  ce  qu'il 
fait  avec  exactitude,  il  ne  dit  rien  des  contestations  que  ce 
point  avoit  fait  naître  au  tems  de  S.  Ambroise  et  de  S.  Gre- 
Tome  1.  Sec.  Part.  M  m 


274  S.  PHEBADE, 

IV  SIECLE,  goire  deNazianze,  et  en  condamnant  les  hérésies  d'Arius, 
do  Sabellius  et  de  Pliotin,  il  ne  fait  nulle  mention  de  celle 
de  Macedonius.  Do  sorte  que  tous  ces  caractères,  et  beau- 
coup d'autres  que  l'on  verra  dans  la  suite,  montrent  que  cet 
écrit  fut  fait  (;n  360  ou  361  au  plus  tard,  peu  de  tems  après 
le  Cohcile  de  Rimini. 

Amb.  il),  p.  3Hi.  '  Mais  après  que  l'on  a  ôté  cet  ouvrage  à  ces  deux  Pères 
de  l'Eglise,  et  que  l'on  s'est  mis  en  devoir  de  lui  assigner  un 
Auteur ,  les  Critiques  se  sont  partagés  à  ce  sujet.  Les  uns, 
comme  le  P.  Chifflet,  ont  tenté  de  le  donner  à  Vigile  do 
Tapse.  D'autres,  comme  le  P.  Quesnel,  l'ont  atribué  à  Gré- 
goire d'Elvire.  Les  uns  et  les  autres  ont  allégué  diverses  rai- 
sons pour  apuier  leurs  sentimens.  Celles  des  premiers  ne  na- 
roissent  pas  avoir  persuadé  personne.  Aussi  sont-elles  très-loi- 
blcs.  Celles  des  autres  ont  fait  plus  d'impression  sur  les  esprits. 
Mais  nous  osons  dire  que  celles-ci  comme  les  autres,  ne  sont 
que  de  simples  conjectures,  qui  ne  sauroient  tenir  contre  la 
solidité  des  preuves  que  nous  allons  donner,  pour  rendre  à  S. 
Phébade  comme  à  son  véritable  Auteur  l'ouvrage  dont  il  est 
question.  La  plupart  même  de  ces  conjectures  favorisent  nos 
preuves;  et  celle  qui  entre  les  autres  paroît  la  plus  forte,  ne 
l'est  qu'en  aparence.  On  en  va  juger. 

1,00.  cii.si.  4.  p.       '  Elle  est  établie  sur  une  citation  que  fait  S.  Augustin  de  l'au- 

719. 720.  torité  de  S.   Grégoire  de  Nazianze  touchant  l'invisibilité  de 

Dieu  par  sa  nature,  au  moment  même  qu'il  se  faisoit  voir  aux 
Patriarches.  De-là  on  conjecture  que  comme  ce  sentiment  se 
trouve  établi  dans  l'ouvrage  en  question,  c'est  le  même  que 
S.  Augustin  a  eu  en  vue,  et  qu'ainsi  il  faut  que  dès  le  tems  de 
ce  Père  il  portât  le  nom  de  quelque  Grégoire.  Voilà  la  plus 
forte  conjecture.  Gar  pour  celle  que  l'on  fonde  sur  le  titre 
que  porte  l'ouvrage,  et  sur  l'autorité  de  Gennade  qui  témoigne 
que  Grégoire  d'Elvire  en  avoit  composé  un  sous  le  même 
titre,  elle  est  très-équivoque.  En  effet  cet  ouvrage  n'a  pas  tou- 
jours porté  le  même  titre.  Ici  il  est  intitulé  De  la  foi  ;  ailleurs- 
il  a  pour  titre  De  la  divinité  et  consuhstantialité  du  Fils.  De 
plus,  la  conjecture  que  l'on  tire  du  témoignage  de  Gennade  en 
faveur  de  Grégoire  d'Elvire,  on  la  peut  tirer  également  en 
On.         11  ,-.  faveur  de  S.  Phébade;  '  puisque  cet  Ecrivain  assure  qu'il  avoit 

^'  laissé  divers  écrits  de  sa  façon,  dont  il  avoit  lû  celui  qui  étoit 

contre  les  Ariens. 

Quant  à  la  citation  de  S.  Augustin  dont  on  s'autorin*!,  il 


EVEQUE  D'AGENi  275 

est  très-facile  d'y  répondre,  et  d'y  répondre  sans  réplique.  1°.     iv  s  clk. 

'  Ce  Père  ne  marquant  point  nommément  l'ouvrage  de  Saint  ^„  e,,.  1 48^,7 

Grégoire  de  Nazianze,  dont  il  a  pris  le  sentiment  qu'il  en  ra-  lo^ 

porte,  on  ne  peut  point  dire  qu'il  l'ait  pris  du  49*  discours, 

par  exemple,  plutôt  que  d'un  autre  où  ce  même  sentiment 

se  trouveroit.  '  Or  il  se  trouve  clairement  établi  dans  le  34*  creg.  Naz.  or  3*. 

discours;  et  ce  discours  est  incontestablement  de  S.  Grégoire  v-^*^- 

de  Nazianze.  2°  S.  Augustin  étoit  et  trop  habile  et  trop  aten- 

tif,  pour  citer  sous  le  nom  d'un  Père  Grec  un  ouvrage  qui 

porte  sur  son  front  tous  les  caractères  et  toutes  les  marques 

qu'il  a  été  originairement  écrit  en  latin.  Cela  posé,  venons  aux 

preuves  qui  ne  permettent  pas  de  refuser  cet  ouvrage  à  Saint 

Phébade. 

1°.  '  L'Auteur  dit  qu'il  y  avoit  déjà  du  tems  qu'il  avoit  pu-  a  .  iwa.  345. 
blié  un  autre  écrit  contre  les  Ariens  :  Jampridem  adversu^  Arïa- 
nos  libellum  edideram.  C'est  ce  qui,  pris  à  la  letre,  convient 
parfaitement  à  S.  Phébade,  comme  on  l'a  vu,  et  ne  peut  s'apli- 
quer  à  Grégoire  d'Elvin;. 

2°.  Le  style  de  l'écrit  contesté  est  le  même  que  celui  du  trai- 
té de  S.  Phébade.  Il  n'y  a  qu'à  les  lire  l'un  après  l'autre  pour 
s'en  convaincre.  C'est  la  même  manière  de  citer,  et  de  se  ser- 
vir des  citations  de  l'Ecriture.  C'est  le  même  tour  et  la  mê- 
me force  de  raisonnement.  Ce  sont  enfin  souvent  les  mêmes 
termes.  Dans  l'un  et  dans  l'autre  écrit  le  symbole  de  Nicée  est 
nommé  Nicœnœ  synodi  tractatus,  ou  Nicœnus  tractatus. 

3°.  Non  seulement  c'est  le  même  style  dans  les  deux  écrits  ; 
mais  c'est  encore  la  même  doctrine.  Dans  l'un  et  dans  l'autre 
c'est  la  même  manière  de  s'expliquer  sur  la  vûë  de  Dieu  par 
raport  à  Moyse.  Que  l'on  se  donne  la  peine  de  confronter  la 
seconde  colonne  de  la  303'  page  du  premier  traité  avec  la  355* 
du  second.  Dans  l'un  et  dans  l'autre  le  livre  de  la  Sagesse  est 
cité  sous  le  nom  de  Salomon.  Dans  l'un  et  dans  l'autre  on 
joint  la  condamnation  de  l'hérésie  de  Sabellius  à  la  condam- 
nation de  celle  d'Arius  :  circonstance  remarquable  qui  dési- 
gne un  Auteur  Gaulois  plutôt  qu'un  autre.  Il  n'y  a  qu  à  se  sou- 
venir de  ce  que  nous  avons  dit  ailleurs  au  sujet  de  l'acusation 
de  Sabellianisme  que  l'on  portoit  contre  nos  Evoques  Gau- 
lois, et  du  soin  qu'ils  avoient  de  se  justifier  de  cette  fausse  im- 
putation. Nous  pouirions  aporter  plusieurs  autres  traits  de 
conformité  de  doctrine  entre  les  deux  écrits,  si  cela  n'étoit 
et  trop  long  et  trop  ennuieux.  Nous  dirons  cependant  enco- 

M  m  ij 


276  S.  PHEBADE, 

[V  SIECLE,    re  que  dans  le  premier  écrit  on  insiste  beaucoup  sur  l'autorité 
du  Concile  de  Nicée.  Dans  le  second  on  le  fait  encore  da- 
vantage ;  et  tout  ce  qu'on  y  dit,  n'est  proprement  qu'une  ex- 
plication du  symbole  de  ce  Concile. 
Amb.  ibid.p.  346.       4".  '  L'écrit  contesté  supose  manifestement  le  premier  do  S. 
Phébade,  et  en  est  un  éclaircissement.  C'est  l'Auteur  qui  le  dé- 
clare lui-même.  Et  afin  qu'on  ne  prenne  pas  le  change  en  l'en- 
tendant de  tout  autre  ouvrage,  il  a  soin  de  le  caractériser  par 
tant  de  traits  ressemblans,  qu'il  est  presque  impossible  de  h; 
p.  345.  méconnoître.  '  Il  dit  que  ce  premier  écrit  étoit  contre  les  A- 
p.  .347.  riens.  '  Qu'il  y  avoit  condamné  l'hérésie  de  Sabellius:  ce  que 
l'on  y  trouve  effectivement  en  trois  endroits  bien  marqués. 
Qu'il  y  avoit  établi  la  distinction  des  Personnes  suivant  leurs 
dénominations,  en  se  servant  du  texte,  Effo  et  Pater  unum  su- 
pinKii.  p  304.       mus:  '  C'est  ce  qui  s'y  lit  expressément.  Nous  omettons  beau- 
coup d'autres  traits,  qui  reviendront  dans  la  suite. 

5"  Enfin  dans  l'un  et  dans  l'autre  écrit  c'est  le  même  Auteur 
qui  combat  les  mêmes  adversaires.  On  ne  peut  s'y  tromper  ; 

fmisqu'il  les  peint  avec  les  mêmes  couleurs.  Dans  l'un  et  dans 
'autre  ce  sont  des  hérétiques  qui  veulent  retrancher  et  abo- 
lir le  terme  de  substance,  non  pas  tant  parce  qu'il  ne  se  trou- 
ve pas  dans  l'Ecriture,  qu'à  cause  que  sa  signification  les  in- 
commode :  des  hérétiques  qui  se  servent  artificieusement  d'au- 
tres expressions  orthodoxes,  afin  de  mieux  séduire  les  person- 
nes simples. 

En  faut-il  davantage  pour  restituer  à  S;  Phébade  l'ouvrage 
contesté?  Il  seroit  peut-être  bien  difficile  de  trouver  entre 
deux  autres  écrits  d'un  même  Auteur  autant  de  conformité, 
que  nous  en  venons  de  marquer  entre  le  traité  que  tout  le 
monde  acorde  à  S.  Phébade,  et  celui  que  nous  soutenons  lui 
apartenir.  Ce  que  nous  en  allons  extraire,  fortifiera  encore 
nôtre  juste  prétention,  et  ne  permettra  pas  de  douter  que  ce- 

Amb.  p.  348.  lui-ci  ne  soit  un  fruit  de  ses  veilles  aussi-bien  que  l'autre.  '  Com- 
me il  y  ataque  en  particulier  ceux  qui  avoient  retranché  le 
terme  de  Consubstantiel,  pour  lui  substituer  celui  de  sembla- 

Tiii.  ibid.  blc  en  substance,  '  il  y  a  toute  aparence  que  S.  Phébade  le 

composa  pour  se  relever  de  la  faute  qu'il  avoit  faite  à  Rimini. 

Amb.  Und.  p.  343.  '  L'écrit  cu  lui-mêmc  est  proprement  un  commentaire  ou 
une  explication  du  symbole  de  Nicée  que  l'Auteur  a  mis  en 
son  entier  à  la  tête  de  l'ouvrage.  Mais  comme  il  y  agit  contre 
des  adversaires  qui  niant  que  le  Fils  fût  de  la  même  .substance 


EVEQUE  D'AGEN.  277 


IV    SIIÎCI.K. 


que  le  Père ,  rejetoient  le  terme  de  Consubstantiel ,  quoiqu'ils 
admissent  celui  de  semblable  en  substance,  et  qui  prétendoient 
que  le  Fils  n'étoit  point  invisible  et  immuable  par  sa  nature , 
puisqu'il  s'étoit  fait  voir  aux  Patriarches  :  l'auteur  s'atache  par- 
ticulièrement à  réfuter  ces  deux  erreurs.  Il  montre  donc  que 
les  Ariens  par  le  retranchement  du  terme  de  Consubstantiel 
renouvelloient  l'hérésie  d'Arius  en  tout  son  entier.  Après  quoi 
il  répond  aux  faux  raisonnemens  qu'ils  faisoient  pour  s'autori- 
ser à  rejeter  ce  terme  ;  leur  prouvant  que  le  mot  de  substan- 
ce se  trouve  emploie  dans  l'Ecriture,  et  que  bien  qu'on  ne 
puisse  ni  comprendre  ni  expliquer  clairement  cette  unité  de 
substance  entre  le  Père  et  le  Fils,  on  ne  doit  pas  néanmoins  la 
rejeter.  Il  passe  ensuite  à  prouver  que  le  Fils  pour  s'être  ren- 
du quelquefois  visible,  n'avoit  rien  perdu  de  son  invisibilité 
et  de  son  immutabilité.  Qu'il  l'avoit  fait  d'une  manière  pro- 
portionnée à  la  foiblesse  de  l'homme,  sans  rien  perdre  de 
Sa  Majesté,  ni  changer  son  essence  en  nulle  manière.  A  tout 
cela  il  a  soin  de  joindre  une  exposition  de  sa  foi  touchant  la 
distinction  des  Personnes ,  afin  d'éloigner  de  lui  tout  soupçon 
de  Sabellianisme.  Il  enseigne  donc  à  ce  sujet  qu'il  y  a  en  Dieu 
trois  Personnes  distinctes  l'une  de  l'autre,  sans  que  néanmoins 
cette  distinction  établisse  une  pluralité  de  Dieux. 

'Après  avoir  raporté  le  symbole  de  Nicée,  et  avant  que  Amb.  iind.p  3r. 
d'entrer  en  matière,  l'Auteur  a  fait  une  petite  préface  ,  dans 
laquelle  il  nous  aprend  d'abord  quel  fut  le  sort  de  son  premier 
ouvrage ,  comme  nous  l'avons  raporté  d'après  lui.  Il  entre- 
prend ensuite  d'expliquer  certains  endroits  de  ce  même  ou- 
vrage, qui  avoient  paru  souffrir  quelque  difficulté.  L'on  avoit 
jugé  que  le  terme  de  Verbe  dont  il  s'étoit  servi  dans  son  pre- 
mier écrit  pour  exprimer  la  personne  du  Fils,  pourroit  s'en- 
tendre comme  l'entendent  les  Grammairiens.  Il  commence 
par  montrer  que  ce  n'a  point  été  là  son  sens.  On  s'étoit  ima- 
giné en  second  lieu,  qu'en  se  servant  de  l'expression  d'un  seul 
Dieu  ,  il  sembloit  nier  la  pluralité  des  Personnes.  C'est  ce  qu'il 
prouve  n'être  nullement  fondé,  et  rapelle  à  ce  sujet  les  rai- 
sonnemens qu'il  avoit  emploies  dans  son  premier  écrit  et  la 
condamnation  expresse  qu'il  y  fait  de  l'hérésie  de  Sabellius. 
On  avoit  cru  aussi  qu'il  prétendoit  que  le  Fils  étoit  une  ex- 
tension et  une  partie  du  Père.  Il  nie  encore  que  ce  soit  là  sa 
pensée,  et  donne  une  profession  claire  et  précise  de  sa  foi  tou- 
chant la  Trinité;  reconnoissant  un  seul  Dieu  en  trois  Person 

1  9 


3*7. 


278  S.  PHEBADE, 

IV  siKCLB.    nés,  qui  ont  la  môme  essence,  la  même  majesté,  la  même  puis- 
sance,  et  qui  néanmoins  ne  font  qu'un  seul  Dieu. 

Tel  est  le  sujet  de  celte  préface  qui  fournit  des  preuves 
non  équivoques  que  ce  second  écrit  est  l'ouvrage  de  S.  Phé- 

l'ii.ib.  p.  3w.  1.  bade.  '  Dans  le  premier  il  avoit  emploie  ce  premier  verset 
du  Pseaume  ii  :  Eructavit  cor  meum  verbum  bonum.  C'est  jus- 
tement ce  qui  put  faire  naître  la  pensée  qu'il  réfute  d'abord  dans 
sa  préface.  De  même ,  pour  établir  la  naissance,  éternelle  du 
Fils ,  il  s'étoit  servi  de  ce  passage  de  S.  Jean  :  Ego  de  Pâtre  px- 
ivi  et  de  sinu  Patris.  De-là  sera  venu  le  soupçon  de  l'extension 
prétendue  qu'on  lui  impufoit. 

Ami),  ib.  p.  352.1.  'Dans  le  corps  de  l'ouvrage  l'Auteur  cite,  comme  nous 
l'avons  déjà  remarqué,  le  livre  de  la  Sagesse  sous  le  nom  de 
Salomon,  et  la  prophétie  de  liaruch  sous  le  nom  de  Jeremie. 

p  3"'i  'Il  y  raisonne  de  la  grandeur  de  Dieu  à  peu  près  comme 

l'on  a  vu  que  S.  Hilaire  de  Poitiers  en  raisonnoit  lui-même. 
On  n'en  a ,  dit-il ,  une  digne  idée,  que  lorsque  l'on  comprend 

p  •■'•w  qu'il  est  incompréhensible.  '  Il  faut  croire  qu'il  est  tout  ce  qu'il 

a  voulu  qu'on  le  crût  être,  et  tout  ce  qu'il  est  par  lui-même. 
H  ajoute  (jue  d'entreprendre  d'établir  des  comparaisons  entre 
Dieu  et  les  créatures  poui-  jugtîr  de  cet  Etre  suprême,  c'est 
moins  rendre  raison  di;  ce  qu'il  est ,  qu'entretenir  les  disputes  et 
nourrir  les  altercations. 

ibiu.  '  En  ra portant  les  divers  noms  que  l'Ecriture  donne  au  Fils 

de  Dieu,  par  exemple,  lorsqu'elle  le  nomme  la  pierre  de  l'an- 
gle, l'agneau,  le  lion,  etc. ,  il  dit  que  ces  noms  lui  sont  donnés 
improprement,  non  pour  signifier  ce  qu'il  e.^t  par  lui-même, 

I'  ^'^>  mais  pour  marquer  ^;cs  opérations  divines.  '  En  acordant  qu'il 

s'est  rendu  visible  aux  Patriarches,  il  dit  que  les  diverses  for- 
me.s  sous  lesquelles  il  leur  a  aparu  ,  étoient  des  figures  de  ce 
(|ui  devoit  arri\er  dans  l'Eglise.  S'il  s'est  montré  à  Abraham  , 
dit-il,  et  à  Jacob  s(us  la  forme  d'un  h(»mnie,  c'étoit  pour  an- 
noncer (ju'il  se  feroit  liomme  dans  les  derniers  tems.  S'il  s'est 
fait  voir  aux  Israélites  dans  une  nuée  j)endant  le  jour  et  dans 
un(!  colonne  de  feu  pendant  la  nuit,  c'étoit  j)Our  figurer  le 
baptême  parla  nuéi-,  et  le  don  du  S.  Esprit  par  le  feu. 

p.  3«.  '  11  avoit  déjà  prié  ses  Lecteurs  dans  sa  préface,  que  si  aprt'S 

les  éclaircissemens  qu'il  y  donne,  ils  trouvoient  encore  quel- 
que ambiguïté  dans  ses  termes ,  ils  eussent  la  bonté  de  les 
confi-on  1er  avec  ses  .senlimens,  afin  d'en  avoir  la  véritable  in- 

V  35<;  lelligence.  '  Dans  le  corps  de  l'ouvrage  il  les  prie  encore  îiu 


EVE  QUE  D'AGEN.  279 

nom  de  Dieu  de  ne  point  donner  un  tour  d'ambiguité  à  la     iv  siècle. 
simplicité  de  ses  sentimens,  et  de  ne  point  prendre  ce  qu'il  dit  ' 
en  un  autre  sens  qu'il  n'a  intention  de  le  dire. 

'Il  finit  en  condamnant  expressi'ment  les  hérésies  d'Arius,  Ami.  ïbM.  p.  357. 
deSabellius,  de  Photin,  et  s'il  y  en  a,  dit-il,  quelques  autres  ^^' 
semblables  et  contraires  à  la  règle  de  la  vérité.  'Il  avoit  déjà  p-  35*. 
condamné  plus  haut  celle  de  Sabellius,  '  et  avoit  rapellé  dans  p.  347. 
sa  préface  la  condamnation  qu'il  en  avoit  portée  dans  son  pre- 
mier écrit.  '  11  ajoute  tout  à  la  fin  du  second,  que  lui  et  les  au-  p.  358.  . 
très  Catholiques  s'atachent  de  toute  leur  force  au  symbole  de 
Nicée,  comme  fait  pour  repousser  toutes  les  hérésies ,  et  ren- 
dre la  vérité  triomphante. 

'Il  a  eu  soin  de  marquer  la  situation  où  se  trouvoit  l'Eglise,  p.  351. 
lorsqu'il  écrivoit.  Elle  étoit  encore  troublée  et  agitée  par  les 
vexations  des  Ariens.  Qm  etiamnunc,  leur  dit-il,  en  s'adressant 
à  un  d'entre  eux,  vi,  ambitione  et  potentia  exagitant ,  turhant 
omnia  :  ce  qui  montre  que  l'écrit  fut  fait  au  tems  où  nous  le  pla- 
çons, c'est-à-dire  vers  la  fin  du  règne  de  Constance. 

Pour  ce  qui  est  du  style  de  cet  ouvrage  ,  nous  avons  déjà 
remarqué  qu'il  est  semblable  à  celui  du  premier  traité  de  S. 
Phébade.  Seulement  les  apostrophes  et  les  saillies  d'esprit  y 
sont  plus  vives  et  plus  fréquentes  que  dans  l'autre. 

'  Celui  dont  il  est  ici  question  a  été  imprimé  séparément  Lco.  iua.p.  7i<j. 
deux  difîérentes  fois  sous  ce  titre,  De  la  foi.  Il  parut  pour  la  pre- 
mière fois  à  Strasbourg  en  lîiOS,  puis  à  Lcipsich  en  1522. 
Ensuite  on  l'inséra  parmi  les  œuvres  de  S.  Creffoire  de  Na-  Creg.  Nm.  or.  w. 
zianze,  dont  il  fait  encore  aujourd'hui  le  49*  discours.  *0n  le  .  Amb  apn  p  345. 
trouve  aussi,  mais  mutilé,  entre  les  écrits  de  S.  Ambroise,  à 
ui  l'on  a  cru  long-tems  qu'il  apartenoit.  '  Le  dernier  Editeur  p-  315-358. 
e  ce  Père  l'a  donné  en  son  entier,  mais  comme  une  pièce 
n'en  lui  a  suposée.  C'est  pourquoi  il  l'a  renvoïée  dans  l'appen- 
ice  de  son  édition ,  où  elle  est  divisée  en  huit  chapitres  avec 
ce  titre,  rfe  la  foi  orthodoxe  contre  les  ariens.  Au  lieu  de  ce  titre 
elle  portoitdans  les  autres  éditions  celui-ci.  De  la  divinité  et 
de  la  consubstantialité  du  Fils.  Autrefois  on  en  a  détaché  un 
fragment  pour  le  coudre  au  traité  de  l'unité  du  Père  et  du  Fils, 
ui  a  porté  le  nom  de  S.  Hilaire,  et  au  113"  sermon  entre  ceux 
e  l'appendice  de  S.  Augustin.  On  doit  juger  par-làtle  l'estime 

Sue  l'on  a  faite  de  cet  écrit,  pour  l'avoir  ainsi  atribué  à  tous  ces 
ères  de  l'Eglise. 
3°.  Il  y  a  encore  un  autre  petit  écrit  que  nous  créions  être 


l 


280  '  S.  PHEBADE, 

IV  SIECLE,    en  droil  de  revendiquer  pour  le  rendre  à  S.  Phébade.  "C'est  le 
.  Léo  ibij  SO^  discours  entre  ceux  de  S.  Grégoire  de  Nazianze.  Les  Sa- 

vans  conviennent  que  cet  opuscule,  qui  est  intitulé  De  la  foi  de 
Mce'e,.nes[  ni  de  ce  Père,  ni  d'aucun  autre  Auteur  Grec, 
p.  720.  Ti-2.  mais  que  c'est  la  production  d'un  Ecrivain  Latin.  Sur  cela  le 
P.  Quesnel  prétend  et  prouve  fort  bien  qu'il  est  du  même  Au- 
teur que  le  49"  discours  qui  le  précède  dans  le  même  recueil 
de  S.  Grégoire  de  Nazianze.  Or  comme  nous  avons  montré 
d'une  manière  qui  nous  paroît  convaincante  et  sans  réplique, 
que  ce  49"  discours  apartient ,  non  à  Grégoire  d'Elvire,  ainsi 
que  le  supose  leP.  Quesnel,  mais  à  S.  Phébade;  par  conséquent 
le  50"  dih:(îOurs  est  également  do  lui.  Cet  écrit  est  très-court , 
ne  contenant  qu'une  page  in-4''.  C'est  proprement  une  profes- 
sion de  foi,  qui  contient  avec  quelques  courtes  explications 
la  foi  de  Nicée.  Elle  paroît  assez  visiblement  tirée  du  discours 
précédent ,  qui  n'est ,  comme  on  l'a  vu ,  qu'une  plus  ample  ex- 
plication de  la  même  foi.  Seulement  dans  la  plus  courte  il  y 
a  à  la  fin  un  article  sur  la  résurrection  des  corps ,  qui  ne  se 
trouve  pas  dans  lautre.  A  cela  près,  la  plus  courte  est  un  pré- 
cis ou  un  abrégé  de  la  plus  ample. 
7ii.  72J  'Il  est  vrai  que  le  P.  Quesnel ,  après  avoir  parfaitement  bien 

prouvé  que  ces  deux  pièces  sont  du  même  Auteur,  ne  réussit 
pas  également  à  montrer  que  la  plus  ample  n'a  été  faite  que 
pour  expliquer  la  plus  courte.  De  sorte  que  celle-ci  seroit  l'ou- 
vrage que  l'Auteur  dit  dans  sa  préface  avoir  publié  quelque 
lems  auparavant  contre  les  Ariens.  Ici  l'Editeur  de  S.  Léon 
emploie  avec  esprit  beaucoup  de  raisonnemens  pour  prouver 
son  opinion. 

Mais  tout  ce  qu'il  dit,  montre  fort  bien  que  le  petit  discours 
est  un  précis  de  l'autre ,  mais  non  pas  que  l'ouvrage  marqué 
dans  le  plus  ample  soit  ce  plus  petit  discours.  Deux  raisons  seu- 
les en  vont  convaincre. 

1°.  il  est  hors  de  doute,  pour  peu  que  l'on  veuille  faire  aten- 
tion  aux  termes  et  les  peser,  que  l'Auteur  en  disant  qu'il  avoit 
déjà  composé  un  traité  contre  les  Ariens ,  désigne  non  une 
simple  profession  de  foi  aussi  courte  que  l'est  le  [)etit  discours 
en  question ,  mais  un  ouvrage  polémique,  où  il  s'atachoit  à 
ri'futer  l'Arianisme  en  particulier.  Or  on  trouve  à  la  letre  dans 
le  traité  de  S.  Phébade  contre  les  Ariens  l'idée  complette  de 
l'ouvrage  annoncé  ;  et  on  ne  peut  pas  dire  avec  vérité  qu'on 
la  trouve  dans  la  petite  profession  de  foi ,  qui  est  autant  con- 
tre 


EVEQUE  D'AGEN.  281 

tre   les  Valentiniens,  les  Photiniens,  les  Sabelliens  et  autres    ivsieclk. 
anciens  hérétiques,  que  contre  les  Ariens.  Joignez  à  cela  que 
la  brièveté  de  celte  pièce,  sa  nature,  sa  constitution  ne  pré- 
sentent nullement  à  l'esprit  l'ouvrage  que  l'on  cherche. 

2".  L'Auteur,  comme  l'on  a  vu,  assure  que  dans  cet  ouvra- 
ge il  condamnoit  nommément  l'hérésie  de  Sabellius.  Or  quoi- 
que la  petite  profession  de  foi  contienne  les  principes  oposés 
H  cette  hérésie,  elle  ne  la  nomme  cependant  ni  elle  ni  aucu- 
ne autre.  Au  contraire  nous  avons  montré  que  S.  Phébade  la 
nomme  et  la  condamme  spécialement  en  trois  différens  en- 
droits de  son  premier  traité.  Nous  pourrions  ajouter,  si  cela 
n'étoit  plus  que  suffisant,  que  si  l'Auteur  dans  son  premier  écrit 
s'étoit  expliqué  sur  la  distinction  des  Personnes,  d'une  ma- 
nière aussi  claire  et  aussi  précise  qu'il  le  fait  dans  sa  profession 
de  foi,  jamais  on  ne  l'auroit  acusé,  comme  il  arriva,  de  les 
avoir  confondues,  et  en  avoir  semblé  nier  la  pluralité. 

'  Au  reste  cette  profession  de  foi  a  été  souvent  imprimée  en  Creg.  Nai.  or.  î>o. 

f^  r  —      TCMî      TOT 

divers  recueils.  Elle  fait,  ainsi  qu'on  l'a  dit,  le  50*  discours  de       '  ' 
S.   Grégoire  de  Nazianze.  Usserius  nous  l'a  donnée  dans  la 
suite  à  la  fin  de  son  traité  des  Symboles,  '  et  le  P.  Quesnel  en-  i^o.  t.  a.  p.  719 
tre  les  monumens  dant  il  a  acompagné  les  œuvres  de  S.  Léon. 


A  U  S  0  N  E, 

Rhetel'k,     Orateur    et     Poète. 


S-  I- 
HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

MAGNUs  '  Ausonius   naquit   à  Bourdeaux  sous  l'Empire  aus.  uA.  c  ^^. 
du  grand  Constantin  vers  l'an  309.  '  Il  eut  pour  père  Ju-  p-ass  1  pr.  2ip.ir. 
le  Ausone  célèbre  Médecin  dont  nous  avons  donné  l'éloge  ,  ' 

1  Quelques  écrivains  lui  onl  encore  qui  ne  signifioit  que  Divus,  et  dont  on 
donné  le  prénom  de  Decius,  ou  plutôt  aura  fa't  Uecius  et  Decimus.  Bade  à  la  tê- 
Decimus  qu'ils  placent  avant  Magnns.  te  de  l'édition  de  ce  Poète,  ajoilte  à  tous 
Mais  on  ne  trouve  rien  dans  son  histoire  ces  prénoms  celui  de  Pa;onius,  que  l'on 
pour  fonder  ce  prénom.  Il  y  a  toute  apa-  aura  formé  de  Pseonus  Médecin  des  Dieux, 
rence  qu'il  ne  lui  sera  venu  que  de  l'erreur  célèbre  dans  le  cinquième  livre  de  l'Ilia- 
de ceux  qui  le  prenant  pour  S.  Ausone  de,  et  que  l'on  aura  donné  au  Poète  Au- 
Evêquc  d'Angouléme,  comme  Trithéme,  sone  en  le  confondant  avec  Ausone  son  pe- 
script.  eccl.  c.  lU,  l'auront  cilé  avec  un  rc  Médecin  de  profession . 
n.   majuscule  devant  «on  proprn  nom  :  r-' 

Tome  I .  Sec.  Part.  N  11 

1   9  * 


282  AUSONE. 

IV  SIECLE,     et  pour  mero  yKmilia  /Konia,  fonime  sage  et  vertueuse,  qui 
Ans.  par.  c.  3.  i.  *^'*^'  ^'^  ^^''^'  quoiqu'oiif^ifiaire  d'Aulun  par  son  père.  '  La  na- 
ture avoit  gratifié  Ausone  de  tant  d'heureuses  dispositions  , 
qu'on  augura  d^s  son  enfance  qu'il  feroit  un  jour  la  gloire  et 
<:•  23.  l'ornernenl  de  sa  famille.  '  /l'imilia  Dryadia  sa  tante  maternelle 

Prof.  c.  10.  prit  soin  de  sa  première  éducation.  '  Après  quoi  il  s'apliqua  à 

l'étude  des  Ictrcs.   Il  y  eut  pour  premier  Maitre  Macrin,  un 
f-ip  «•  des  tîrammairiens  du  Collège  de  Bourdeaux.  '  DcTélude  de 

la  grammaire  il  passa  à  celle  d»'  l'éloquence.  11  aprit  celle-ci 
sous  Tiberius  Victor  Minervius.  qui  après  l'avoir  enseignée 
avec  réputation  à  Bourdeaux,  à  Constanliiiople  et  à  Rome, 
revint  en-uile  conliniici'  les  mêmes  fonctions  à  Bourdeaux  sa 
••'p  »  patrie.   '  .Ausone  doima  aussi  quelque  tems  à  l'élude  de  la  lan- 

gue gréque.  Mais  il  n'en  acquit  qu'une  connoissance  medio- 
pr.  ï  I  p.ii .  .-.  3 1  cre,  comme  il  le  témoigne  lui-même.  '  Avec  ces  avances  il 
alla  de  I^ourdeaux  à  Toulous(i  se  perfectionner  dans  l'éloquen- 
ce, sous  ylùniliiis  Magnus  Arhorius  son  oncle  maternel,  qui 
enseignoit  la  Bhéloiique  dans  celle  ville, 
pi  '-î  Ses  éludes  tiiii(;s.  Ausone  hanta  le  barreau,  où  il  plaida 

quelque  Icms.   Mais  il  aima  mieux  s'apliquer  à  enseigner.  Il 
professa  d'abord  la  (irammaire,  puis  la  Bhétorique  à  Bour- 
deaux même  .  et  continua  long-tems  l'exercice  de  ces  em- 
P«i   c.  «.  ;>.         plois.  '  Etant  cep(!ndant  en  Age  d»;  se  marier,  il  épou.sa  Attusia 
Eucana  Sabina,  (ille  d'Atlu.sius  Lucanus  Tali-sius  d'une  des 
premières  famill(;s  de  Senateui  s  à  Bourdeaux.  Ils  ne  vécurent 
ensemble  tjue  peu  d'années;  la  mort  lui  aïant  enlevé  celte  di- 
gne épouse,  lors(|u'ils  éloient  (sncore  jeunes  l'un  et  l'autre. 
Aiis(»n(î  ne  pensa  plus  Ji  se  remarier,  et  demeura  veuf  tout  le 
<•  10.  M.  H.        reste  de  sa  vie.  '  Il  eut  néanmoins  de  son  mariage  trois  enfans, 
i'.uii.  eiicii.  V.  •n.  deux  {farcons  et  une  tille.  '  Les  rarcons  .se  nommoient,  l'un  Au- 
■"■        .som;  qui  mourui  en  .son  enlance,  et  I  autre  llespere,  qui  après 
avoir  été  élevé  aux  premières  charges  de  l'Empire,  vivoil  en- 
core au  commencement  du  V    siècle.  La  fille  ne  se  trouve 
Vus  pioi.  p.  .iii.  nommée  nulle  part.   '  Il  semble  qne  son  père  la  fil  étudier  et 
pir.  0.  14 1  Tiii.  suivre  les  classes  du  (Collège.  '  l'allé  contracta  deux  illustres  al- 
7Aiî'  '■  '  ''"  '**    liances.  D'abord  elle  épou.sa  \  alerius  Latinus  Euronius  issu 
d'une  ancienne  noblesse;,  et  qui  passa  par  les  plus  grands  hon- 
neurs ;  et  en  secondés  noces  elle  s'allia  avec  Thalasse  Procon- 
sul d'Afrique  en  378. 

Ausone  ne  fut  prs  moins  heureux  en  disciples  qu'en  enfans. 
Il  en  forma  un  grand  nombre  aux  belles  letres.  Le  plus  cèle- 


U3-l(6. 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.    283 

bre  pour  la  pielécomino  pour  la  IWsie,  lut  sans  difficulté  S.     iv  siècle. 
Paulin-  depuis  Evrque  de  Noie.  '  Non  seulement  Ausoue  prit  Au,..p.  21. 23.  p- 
le  soin  de  lui  former  l'esprit,  et  de  lui  donner  les  premiers  prin-  I.'^rio'^^^;  y'"^!; 
cipes  d'une  éducation  Clirélienne;  il  le  poussa  encore  aux  pre- 
mières charges  et  dignités  de  l'Empire.  C'est  ce  que  S.  Paulin, 
depuis  même  qu'il  eut  renoncé  au  monde,  reconnoissoit  avec 
autant  de  justice  que  de  gratitude.  Rien  n'est  plus  tendre  et  en 
même  lems  plus  honorable  pour  .\usone,  que  ce  qu'il  lui  dit 
à  ce  sujet. 

Tibi  disciplinas,  dijçnitatcm  ,  lilcras , 

Linguœ ,  lopc,  famas  ducua  , 
Provectus,  altus,  institutus  duboo, 

Patrone,  pnvcep(or,  patur. 


—  qui  (l)eus)  si  quid  in  aclu 

Ingcniovc  nioo  sua  di-rnuin  ad  niunia  vidil  . 
Gralia  prima  tibi ,  tibi  ^doiia  del)ita  a-det , 
Cujus  pra.'ceptiâ  parluin  estquod  Cbristus  aioarcl. 


'  Il  y  avoit  30  ans  ou  environ,  qu'Ausone profe.ssoit  les  bel-  \iis.  m.  2.  v.  it 
les  letres  à  Bourdeaux,  lorsque  l'Empereur  Vaîintinien  lia-  ^.  ""*  •'•''""*■ 

fella  à  la  cour,  qui  éloit  à  Trêves,  pour  instruire  le  jeune 
Jratieh  son  fils  déjà  déclaré  Auguste  en  307.  Il  faut  sans  dou- 
te que  ce  Profes.sem-  se  fill  acquis  ime  réputation  bien  éclatan- 
te, et  qu'il  eût  un  mérite  bien  conim  pour  êlre  ainsi  choisi 
Précepteur  d'un  César,  préferablement  à  tant  d'autres  per- 
sonnes d'érudition,  comme  il  l'avoue  lui-même.  Cette  pla- 
ce lui  valut  les  premières  charges  et  les  plus  hautes  digni- 
tés de  l'Empire.  Il  fut  d'abord  Comte  du  Pahiis,  puis  Questeur, 
ensuite  Préfet  du  Prétoire  et  etiliu  Consul.  Gratien  ne  borna 
pas  à  Au.sone  seul  sa  libéralité  et  sa  reconnois.sance  pour  les 
soins  qu'il  prit  de  l'instruire;  il  les  étendit  encore  à  ses  pro- 
ches qu'il  éleva  à  de  très-grands  honneurs.  'Depuis  même  ihem  01.  g.  1 
qu'il  eut  succédé  à  l'Empire,  il  conserva  pour  Au.«one  un  res- 
pect extraordinaire  et  toute  la  soumission  d'un  simple  parti- 
culier. 

Il  se  trouve  des  Ecrivains  qui  prétendent  (ju'Ausone  eut 
aussi  l'honneur  d'enseigner  Yalenlinien  II  frtre  de  Gratien. 
Mais  cela  ne  peut  se  soutenir;  puisque  ce  Prince  passa  pres- 
que toute  son  enfance  en  lilyrie,  et  toute  sa  jeunesse  en  Ita- 

N  ij 


125. 


2U  AU SUN H, 

IV   siKOLK.    lie,  et  que  la  Cour  qu'Ausone  suivoit,  faisoit  sou  séjour  or- 
dinaire à  Trêves  dans  les  Gaules. 


prot.  p.  317.  '  Ausone  exerça  la  Questure  sous  deux  Empereurs  consécu- 

tivement, Valentinien  I  et  Gratien  son  fils  :   Quœstor  ut  Atigu- 
Sjm.,1.  I  cp.  17.  slis,  patri  natoque  crearer.  '  Nous  avons  encore  une  letre  que 
Symmaque  lui  écrivit,  pour  le  féliciter  de  cette  promotion. 
Cette  charge  étoit  des  plus  considérables.  Elle  donnoit  entrée 
dans  le  conseil  du  Prince,  rendoit  celui  qui  y  étoit  élevé  com- 
me l'arbitre  des  faveurs  d(;  la  Cour,  et  lui  confioit  le  soin  de 
dresser  les  loix  pour  le  règlement  des  affaires. 
Ans.  epic.  p.  3W|       '  Quaut  à  la  Préfecture,  Ausone  déclare  qu'il  ne  la  devoil 
7Î8|T^iii.™!i.j™p:  ^"'^  '*  ^^"^^  libéralité  de  Gratien.  Il  eut  deux  fois  cette  char- 
707.  711.' 712.'      ge,  premièrement  pour  l'Italie  et  l'Afrique  avant  377,  et  en- 
suite pour  les  Gaules  à  la  fin  de  378,  et  pendant  toute  l'année 
379,  et  peut-être  même  la  suivante.  11  est  au  moins  vrai  qu'il 
possedoit  encore  cette  dernière  Préfecture  à  la  fin  de  son  Con- 
sulat. Il  l'exerçoit  conjointement  avec  Hespere  son  fils,  en 
faveur  de  qui  il  paroit  qu'on  l'avoit  partagée.  C'est  ce  que  sem- 
ble dire  Ausone  lui-même,,  en  s'exprimanl  ainsi  à  ce  sujet: /î- 
heralius  divisa  quam  juncta^  quum  teneanms  duo  ititegram. 
Aus.e(ivi.8.p.!i45|         Ce  fut  à  Sirmich  au  milieu  des  Barbares,  que  Gratien  en 
(ik.ns.  703.   718.  3yg  nomma  Ausone  et  Olj^brius  pour  être  Consuls  l'année 
suivante.  Et  comme  on  lui  demanda  lequel  des  deux  devoit 
être  le  premier,  il  répondit  que  cet  honneur  apartenoit  sans 
cons.  p.  708. 7«o.  difficulté  à  Ausonc,  parcc  qu'il  étoit  Préfet. 'Ce  Prince  lui  écri- 
p.  7:23.  vit  lui-même  pour  lui  donner  avis  de  sa  nomination,  '  et  lui 

envoïa  la  robe  consulaire.  C'étoit  l'habit  que  portoient  les  Em- 
p.  705. 706.         pereurs,  lorsqu'ils  triomphoient.  'Ausone  assure  n'avoir  jamais 
ni  souhaité,  ni  recherché,  encore  moins  brigué  celte  éminen- 
te  dignité,  au'il  témoigne  ne  devoir  qu'à  la  seule  bonté  de 
edji.  a.  p  343-310.  Graticu,  'Elle  ne  laissoit  pas  toutefois  de  flaler  agréablement 

ep.  p.  92.  93.  ,..  .  *  -i  11     °     ..   I     •        » 

son  ambition  et  son  amour  propre,  comme  il  1  avoue  lui-mê- 
me dans  ses  écrits.  Aussi  étoit-elle  le  comble  de  l'honneur 

Sun.  1.  ),op.  li.  pour  un  particulier.  '  Symmaque  son  ami  lui  en  faisant  com- 
pliment, le  flate  encore  à  ce  sujet,  en  lui  disant  qu'il  n'en  étoit 
redevable  qu'à  la  gravité  de  ses  mœurs  et  aux  charmes  de  son 
érudition. 

Cous  p  ru.  735.  '  Gratien  n'aïant  pu  assister  à  la  cérémonie  de  l'entrée  d'Au- 
sone  dans  le  Consulat,  voulut  au  moins  .se  trouver  à  celle  de 
sa  sortie.  Ausone  dit  même  que  cet  Empereur  acourut  des  ex- 
trémités de  la  Thrace  avec  une  diligence  incroïable  pour  ho- 


KHÉTEUH,  UKATEUU  ET  POETE.   2H5 

nurer  cette  solennité  par  sa  présence.  "La  cérémonie  se  lit  à    iv  siècle. 
Trêves.  Ce  fut  en  cette  ocasion  qu'Ausone  prononça  devant  ^TTis. 
(jratien  le  panégyrique  que  nous  avons  encore ,  pour  remer- 
cier ce  Prince  du  Consulat  et  des  autres  dignités  dont  il  l'avoit 
gratifié. 

A  tous  ces  honneurs  par  lesquels  Ausone  avoit  déjà  passé , 
on  croit  que  l'Empereur  Théudose,  dont  notre  Poëte  éloil  Arcji.  i.i«.  fug.  i.  ;. 
Irès-consideré ,  ajouta  encore  la  dignité  de  Patrice.  Mais  on  '"'  '  ' 
ne  fonde  cette  opinion  que  sur  la  letre  obligeante  de  cet  Em- 
pereur à  Ausone,  dans  laquelle  on  n'en  trouve  rien. 

Tant  que  (ïratien  Aècut,  Ausone  ne  quita  point  la  Cour. 
Ni  l'embaras  du  grand  monde,  ni  le  tumulte  et  le  bruit  des 
armes,  lorsqu'il  acompagnoil  le  Prince  dans  ses  expéditions 
militaires  ;  ni  les  délices  du  palais  d'un  Empereur  ne  lui  firent 
rien  perdre  de  son  amour  pour  les  belles  letres.  Elles  furent 
toujours  sa  passion  favorite,  comme  elles  firent  sa  principale 
ocupation.  11  s'y  rendit  si  habile,  qu'il  passa  pour  un  des  hom- 
mes le  plus  éloquens  et  un  des  meilleurs  Poêles  de  son  siècle. 
Cette  réputation  soutenue  par  le  crédit  qu'il  avoit  à  la  Cour, 
(;l  les  charges  qu'il  avoit  remplies ,  le  lia  d'amitié  avec  tout  ce 
qu'il  y  avoit  de  plus  savant  et  de  plus  distingué  dans  l'Empire. 

Après  la  mort  de  Gratien  en  383  '  Ausone  se  retira  d'abord  aus.  «p.  :;.  s.  14. 
à  Bourdeaux  sa  patrie,  et  de-là  en  une  de  .ses  terres.  Il  en  avoit  ^  ' 
au  moins  deux,  l'une  près  de  Condate  nommée  Lucaniac ,  et 
l'autre  en  Saintonge.  11  nous  a  lai.ssé  une  description  de  la  pre- 
mière ,  qu'il  dit  avoir  été  l'héritage  de  son  père,  de  son  aïeul 
elbis-aieul.  Il  avoit  dans  l'autre,  qu'il  nomme  quelque  part 
le  nid  de  sa  vieillesse,  une  bibliothèque  choisie,  riche  sur-tout 
en  Poêles  et  autres  Auteurs  de  la  belle  literature.  Il  paroît  par 
ses  letres  qu'il  passa  le  reste  de  sa  vie  alternativement  dans  l'u- 
ne et  dans  l'autre  de  ces  terres ,  occupé  des  divertissemens  or- 
dinaires de  la  campagne,  la  chasse,  la  pêche ,  le  soin  de  bien 
acueillir  ses  amis,  les  exercices  du  cabinet.  11  s'apUqua  néan- 
moins d'une  manière  plus  particulière  à  la  poésie  ;  et  ce  fut 
dans  sa  retraite  et  sa  vieillesse  qu'il  composa  la  plupart  des 
écrits  qui  nous  restent  de  lui. 

'  11  donnoit  aussi  un  tems  considérable  à  entretenir  dans  les  |P-  s-  »5.  n.  10. 
pais  éloignés  comme  dans  sa  patrie  un  commerce  de  literature 
avec  les  Savans  de  sa  connoissance.  Il  en  avoit  jusqu'à  Rome. 
Le  plus  connu  ,  comme  le  plus  illustre  selon  le  monde ,  étoit 
l'Orateur  Symmaque.  Entre  ceux  de  son  voisinage,  S.  Paulin 


286  AUSOiNE, 

IV  SIECLE,     étoit  sans  contredit  le  plus  célebri!  pour  la  Poésie,  comme  le 

■ plus  illustre  pour  la  pieté.  Aiisone  n'oultlioit  rien  envers  lui  cl 

envers  les  autrfs  de  ses  voisins,  qui  avoient  quelque  talent 
d'écrire  en  vers  ou  en  prose,  pour  leur  inspirer  une  noble  ému- 
lation. De  sorte  que  sa  retraite  en  [trovince  y  fut  d'un  grand 
secours  pour  y  ranimer  les  éludes  languissantes.  Elle  y  reveil- 
fa  de  leur  assoupissement  les  hommes  de  letres ,  et  y  fit  pro- 
duire quantité  de  pièces  de  poësieet  autres,  que  les  malheurs 
des  tems  nous  ont  enlevées, 
cp.  23-25  I  Paul.       '  Lcs  dcmieres  actions  d'Ausone,  dont  nous  avons  connois- 
?03.'  203^  "'  *  *'  5*ûnce,  sont  quelques-unes  de  ses  letres  à  S.  Paulin  déjà  retiré 
du  monde  et  caclié  dans  sa  solitude  de  Barcelone.  Ils  avoieni 
coutume  de  s'écrire  l'un  à  l'autre,  comme  l'on  vient  de  voir. 
Mais  le  Saint  n'écrivant  plus  depuis  sa  j-etraite  en  Espagne, 
où  les  letres  n'étoient  pas  rendues ,  le  bruit  coiumençoit  à 
se  répandre  qu'il  vouloit  quiler  le  moniltî  et  vendre  .son  bien. 
Ausone,  qui  pensoit  et  vivoit  bien  dilVéremment,  lui  écrivit 
sur  cela  une  grande  leire,  où  il  se  plaint  de  ce  (|ue  Paulin 
rompoit  l'amitié  si  étroite  qui  les  unis.soit  depuis  si  long-lems. 
il  va  même  jusqu'à  le  traiter  d'impie,  connue  coupable  d'a- 
voir violé  la  foi  qu'il  devoit  à  un  si  ancien,  si  fidèle  et  si  cher 
ami,  qui  avoit  pris  le  soin  de  l'instruire  et  de  le  pousser  aux 
premières  charges  de  l'Empire.  Ausom-  ne  recevant  point  de 
réponse  à  cette  première  letre  di^  re})ioches ,  eu  écrivit  une 
seconde,  où  il  se  plaint  amèrement  du  silence  de  Paulin ,  et 
le  pique  encore  sur  le  suj»t  de  l'amitié.  S.  l'aulin  ne  i  épon- 
dant  point  non  plus  à  celle-ci.  Au.sone  en  hazarda  une  troisiè- 
me qui  est  perdue.  C'éloit  apareiniiienl  dans  celle-là  qu'il  se 
plaignoit  de  ce  qu'il  il  y  avoit  déjà  trois  ans  que  S.  Paulin  avoit 
quité  son  pais.  Enfin  il  lui  en  écrivit  une  quatrième  ,  où  il 
continue  à  se  plaindre  de  sii  fierté  <  l  de  son  obstination  à  ne 
point  répondre  ;  l'acusant  d'avoir  changé  de  mœurs,  d'avoir 
perdu  sa  douceur  ordinaire,  délie  devenu  tout  sauvage  et  un 
misanthrope.  11  finit  j)ar  un^;  prière  qu'il  adresse  aux.:iuses,. 
afin  qu'elles  rapellassent  h;  iSaint  à  l'amour  de  la  poésie. 
Paul.  car.  10.  li.        Auboiit  de  quatre  ans  S.  Paulin  reçut  trois  de  ces  leires 
p.  26-37.  d'Ausone  tout<s  à  la  l'ois.  Comme  elles  étoient  en  vers,  il  y 

ré[)ondit  de  même  ;  et  sa  r/'ponse  forme  ses  deux  excellens  poè- 
mes à  Ausone,  le  10'  et  11'  que  nous  avons  encore.  Le  Saint 
y  joignant  la  douceur  à  la  force ,  les  protestations  d'amitié  aux 
marques  de  reconnoissaiice   et  d'atachement  pour  son  cher 


RHÉTEUR,  ORATEUR  ET  POETE.    287 

Maître,  à  qui  il  avoue  devoir  tout  ce  qu'il  a  été  dans  le  mon-  iv  siècle. 
de,  il  lui  témoigne  que  rien  n'est  capable  de  faire  échouer  le 
dessein  qu'il  a  pris  de  renoncer  au  siècle  et  de  se  consacrer  en- 
tièrement à  Dieu.  Que  toutes  les  instances -qu'il  lui  fait  pour 
retourner  aux  Muses  profanes,  sont  inutiles.  Qu'il  leur  a  dit 
im  adieu  éternel,  et  qu'il  ne  vouloit  plus  vivre  que  pourJ.  C. 

On  ne  sait  point  si  une  résolution  aussi  généreuse  et  aussi 
Chrétienne,  et  un  exemple  aussi  frapant  firent  quelques  salutai- 
res impressions  sur  le  cœur  d'Ausone,  pour  lui  faire  quiter 
tant  d'inutilités  qui  l'ocupoient  dans  sa  \ieillesse,  et  le  faire 
pensera  une  éternité  qui  n'étoit  pas  loin.  En  effet  'on  croit  Egas.  Bui.  1. 1.  p. 
qu'il  mourut  en  cette  4'  année  de  la  retraite  de  S.  Paulin  qui  ''^' 
éloit  la  SSW  de  notre  ère  vulgaire.  Il  avoitalois  85  ans  ou  en- 
viron. Personne  que  nous  sachions,  ne  s'est  mis  en  devoir  de 
faire  l'épilaphe  d'Ausone ,  qui  en  avoit  tant  fait  lui-mAme  pour 
d'autres.  Mais  voici  une  pièce,  qui  peut  d'autant  mieux  lui 
en  servir,  qu'elle  est  plus  originale  ,  et  qu'elle  aproche  davan- 
tage du  genre  d'épitaphe.  Elle  est  d'Ausone  même ,  qui  y  a 
fait  un  abrégé  de  toute  sa  vie. 


'  Ausonius  gcnitor  nobis  :  ego  nomine  eoilcm  *"»■  P'-  '• 

Qui  sim,  qua  secta ,  stirpn ,  lare  et  patiia , 
A(lscri|)si,  utnosses,  l)one  vir,  quicumque  fuissem  , 

Et  notuin  memori  me  colères  aairno. 
Vasates  patria  est  patri  :  gens  ^ua  inatri  : 

De  pâtre  Trabellis,  Fcii  genitrix  ab  Aquis. 
Ipse  ego  Curdigaluigcnitus.  Divisa  pcrurbcs 

Quatuor  anliquas  stirpis  oi'igo  ineo!; 
Hinc  late  fusa  i-st  cognatio  :  nurnina  niultis 

Ex  iio.-^lra,  ut  placitum,  ducta  doino  veniant 
Dcrivata  aliis;  iiobl.'^  ab  stcnimalc  primo 

Et  non  cognali ,  scd  gcnitiva  placent. 
Sed  redeo  ad  seriein  :  genitor  studuit  medidnaa, 

Disciplinarum  qua;  dédit  una  Duum. 
Nos  ad  grammaticen  sludium  convertimus,  et  mox 

Rhrtori  es  etiam  quod  satis  attigimus. 
Nec  fora  non  citlubrata  miiii  :  sed  cura  docendi 

Cultiur,  et  Domt-n  drammatici  merui  : 
Non  tam  grande  quidcm  quo  gloriu  nostra  subiret 

iEmilium  anl  Scauruni .  Berytiumque  Probum  • 


288  AlISONE,     r<-in-^rxy 

s I RC  L E.  5;^^  q^Q  nostrates,  Aquitanica  nomina ,  multo» 


Collatus,  non  et  subditus,  ndspicercfli. 
Exatisquc  dehinc  per  trina  dccennia  fastis 

Asserui  doclor  municipatem  operam. 
Aurea  et  Augusli  palatia  jussus  adirc 

Augustam  sobolcm  Grammuticus  docui  : 
Mox  ctiam  Rlietor.  Nec  cnim  fiducia  nobis 

Vana,  aut  non  solidi  glorin  jndicii. 
Cedo  tamen  fuorint  fania  potion-,  Miigistri , 

Dumnulli  fucrit  discipulusmclior. 

fiujus  ego  Cornes,  et  Qu'estor  et  culmen  lionoruni , 
Prœfeclus  Gallis  et  Libya?.  et  Lalio  : 

Et  prior  indeptus  fasces,  Latiamque  curulem  , 
Consul,  Collega  posteriorc,  fui. 

Hic  ego  Ausonius 


Presque  tous  les  anciens  et  les  modernes,  qui  ont  parlé 
d'Ausone,  ont  fait  beaucoup  d'eslime  de  son  mérite  et  de  son 
savoir.  C'est  ce  que  nous  examinerons  plus  particulièrement 
dans  la  suite. 

Il  est  tout  à  fait  surprenant  de  trouver  des  Ecrivains  diamé- 
tralement oposés  les  uns  aux  autres  au  sujet  de  la  religion  d'Au- 
sone, sans  qu'aucun  des  deux  partis  ait  donné  dans  la  vérité. 
Tiiih.  scri.  c.  u*.  '  Ceux-ci ,  comme  Trithéme,  en  ont  fait  un  S.  Evêçjue  d'An- 
Fris.bib.ph.p.68.  goulêmc,  'ou  uu  Evêque  de  Bourdeaux,  comme  Frisius.  Ceux- 
"■  là  au  contraire  ont  même  douté  qu'il  fût  baptisé,  et  ont  mis 

son  Christianisme  en  problème.  Il  est  certain  que  l'opinion  des 
uns  est  aussi  intolérable  que  celle  des  autres.  Celle  des  premiers 
a  été  déjà  rejetée,  il  y  a  long-tems.  Celle  des  autres  ne  mérite 
gueres  moins  de  l'être. 

Il  est  vrai  que  la  licence ,  quelquefois  efl'renée ,  qu'Ausono 
s'est  donnée  en  quelques  endroits  de  ses  poésies,  est  une  preu.- 
ve  qu'il  n'avoit  ni  le  cœur,  ni  l'esprit,  ni  peut-être  les  mœurs 
assez  chastes  pour  un  Chrétien.  Mais  il  n'y  a  qu'à  lire  quelques 
autres  de  ses  pièces,  comme  son  Ephemeride  et  son  Idylle 
sur  la  fête  de  Pâque ,  pour  ne  pas  douter  un  seul  moment  do 
son  Christianisme.  Un  y  voit  un  homme,  qui  non  seulement 
est  parfaitement  instruit  de  nos  principaux  mystères,  mais  qui 
ilans  la  prière  cpi'il  y  a  insérée,  parle  même  à  Dieu  avec  beau- 
coup 


RHÉTEUR,  ORATEUR  ET  POETE.   289 

coup  de  foi  et  de  pieté.  D'ailleurs  soutenir  qu'Ausone  étoit  iv  sieclr. 
Païen  pour  la  religion,  c'est  d'une  part  faire  abstraction  de  la 
pieté  éminente  de  S.  Paulin  et  de  Gratien  ses  deux  disciples 
favoris,  et  de  l'autre  oublier  ce  qu'étoit  Valentinien  I,  qui 
l'avoit  choisi  entre  tant  d'autres  pour  Précepteur  de  Gratien. 
Comment  pouvoir  allier  l'indignation  Chrétienne  et  héroique, 
que  ce  Prince  avant  son  élévation  à  l'Empire,  témoigna  pour 
l'idolâtrie  sous  le  règne  et  les  yeux  même  de  Julien  l'Apostat 
qui  l'autorisoit,  avec  le  dessein  de  confier  à  un  Païen  l'éduca- 
tion de  son  fils  aîné?  Il  ne  faut  pas  non  plus  oublier  ici  la  pie- 
té dont  les  parens  d'Ausone  faisoient  profession,  et  qui  forme 
une  nouvelle  preuve  en  faveur  de  son  Christianisme.  '  iEmilia  Ans.  par.  <■.  g. 
Hilaria  sœur  de  sa  mère  embrassa  la  virginité,  et  devint  cé- 
lèbre par  sa  vertu.  '  De  même  Julia  Cataphronia  sœur  de  son  c.  26. 
père  préfera  aussi  la  virginité  au  mariage,  et  y  vécut  jusqu'à 
un  âge  fort  avancé. 

Tout  ce  que  nous  venons  de  dire  de  la  famille  d'Ausonr 
dans  le  cours  de  son  éloge,  et  ce  que  nous  en  avons  déjà  dit 
ailleurs  en  parlant  de  Jule  Ausone  son  père  et  d'Arboré  son 
oncle  maternel,  est  plus  que  suffisant  pour  la  faire  connoître. 
Il  en  reviendra  encore  quelque  chose  dans  l'histoire  du  siècle 
suivant.  Nous  ajouterons  seulement  ici,  '  qu'Ausone  comptoil  <•.  i;.  is. 
entre  ses  alliés  Pomponius  Maximus  et  Flavius  Sanctus,  qui 
étoient  l'un  et  l'autre  ses  beaux-freres.  '  Le  premier  étoit  Se-  c  u.  r,. 
nateur  à  Bourdeaux,  où  il  étoit  très-estimé,  et  avoit  épousé 
Julia  Dryadia  sœur  d'Ausone.  '  De  ce  mariage  sortirent  Pom-  c.  iT. 
ponius  Maximus  Herculanus,  qui  réiinissoit  en  sa  personne 
toutes  les  belles  qualités  de  l'esprit  et  du  corps,  mais  qui  mou- 
rut tout  jeune ,  '  et  Megentire  femme  d'un  Paulin  ,  qui  fut  r.  23. 2*. 
Gouverneur  de  la  Tarragonoise ,  et  exerça  divers  autres  em- 
plois considérables.  '  Il  semble  aussi  qu'Arbore  le  jeune  qui  c  m. 
fut  Préfet  de  Rome  en  380,  étoit  frère  de  Megentire.  Celui- 
ci  avoit  épousé  Veria  Liceria  arrière-petite  fille  d'un  Eusebe 
célèbre  par  son  savoir  dès  le  siècle  précédent.  '  Quant  à  Fia-  <■.  is.  m. 
vins  Sanctus,  il  avoit  épousé  Namia  Pudentilla  sœur  de  Sabi- 
ne femme  d'Ausone,  et  fut  Gouverneur  de  la  grande  Bretagne. 


<ti    ai  ' 


Toinp  I.  Spc.  Part      .  0  o 


IV  SIECLE. 


200  AUSONE, 

S-    H. 
SES  ECRITS. 


V 


ES  écrits  (l'Ausnne  qui  nous  r^^slent ,  sont  presque  tous 
envers,  si  l'on  en  excopte  une  seule  do  sos  lolres  et  son 
panégyrique  de  Gratien.  Il  seroit  très-difficile  dans  le  dénom- 
brement que  nous  en  allons  faire,  de  suivre  exactement  l'or- 
dre chronologique  que  nous  nous  sommes  proposé  et  que 
nous  suivons  ailleurs.  Ce  sont  pour  la  plupart  de  petites  pie- 
ces  de  poésie  faites  en  divers  tems,  qui  composent  difïerens 
recueils,  dont  les  uns  en  conli(!nnent  d'une  date  (juelquefois 
la  même,  quelquefois  diiïérento  aussi  des  pièces  qui  contien- 
nent les  autres.  De  sorte  que  pour  leur  assigner  leurs  vérita- 
bles époques,  il  faudroit  continuellement  passer  d'un  recueil 
à  un  autre,  et  de  celui-ci  à  un  troisième.  D'ailleurs  on  ignore 
en  quel  tems  précisément  ont  été  fails  la  plupart  de  ces  re- 
cueils: si  celui  des  letres,  par  exemple,  a  précédé  celui  des 
épigrammes,  ou  si  celui  des  Idylles  n'est  pas  de  plus  ancien- 
ne date  que  les  deux  autres.  Pour  éviter  celle  confusion  et  ce! 
embaras,  nous  suivrons  dans  rérniniéralion  que  nous  en  al- 
lons faire,  l'ordre  que  ces  recueils  ont  entre  eux  dans  les  der- 
nières éditions  de  nôtre  Poëte.  Cela  n'empècheia  pas  Ifluio- 
fois  qu'à  mesure  que  nous  parleron.s  des  pièces  de  chaque  re- 
cueil, nous  ne  lui  assignions  la  dale  qu'elles  nous  paroltra  avoir. 

xii».  pr.  1-x  1"  '  A  la  tête  de  ces  éditions  se  lisent  trois  diverses  préfa- 

ces d'Ausone.  La  première,  qui  est  en  vers  élegiaques,  s'a- 

viii.  it.  Ans.  •!.  I.  dre.sse  à  l'Empereur  Tliéodose,  et  paroit  être  une  réponse';! 
la  letre  que  ce  prince  lui  avoit  écrite  pour  lui  demander  ses 
écrits.  Théodose  en  avoit  déjà  lu  quelques-uns.  Mais  Au.sone 
en  aiant  publié  quelques  autres  depuis,  cet  Empereur  étoil 
d'autant  plus  ai.se  de  les  lire,  que  le  public  en  parloit  avec 
plus  d'éloge. 

Cette  préface  seule  devroit,  ce  semble,  suffire  pour  cxm- 

!ah.  iiib.  lat.  p.  stater  la  vérité  de  la  letre  dont  il  s'agit,  '  et  que  quelques  Ecri-' 
vains  ont  regardée  mal  k  propos  et  sans  sujet  comme  une  pièces 
su.specte  ou  suposée.  On  n'y  voit  ab.solurtient  rien  qui  ne  con- 
vienne et  à  Théodose  et  à  Ausone;  et  c'est  assurément  faire 
injure  à  la  mémoire  de  celui-ci,  que  de  l'avoir  retranchée  de 

Vin.  iii.  ses  œuvres,  '  à  la  tête  desquelles  Vinef  l'avoit  placée.  Théo- 

dose  l'écrivit  de  sa  propre  main.  Il  y  témoigne  beaucoup  d'e- 
stime pour  l'esprit  d'Ausone  et  pour  son  érudition.  Il  lui  mar- 


RHÉTEUR,  ORATEUR  ET  POETE.   291 

que  que  la  demande  qu'il  lui  fait  de  ses  écrits,  n'est  point  par  iv  sieoll 
l'autorité  impériale,  mais  en  considération  de  l'amitié  qu'ils 
se  portoient  l'une  à  l'autre.  Pour  mieux  l'engager  à  lui  acor- 
der,  il  lui  propose  l'exemple  des  Savans  du  tems  d'Auguste, 
à  qui  ils  s'empressoient  de  communiquer  leurs  ouvrages,  l'as- 
surant que  si  cet  Empereur  en  a  admiré  quelqu'un  plus  que 
lui  Tliéodose  n'admire  Ausone,  il  n'en  a  jamais  aimé  aucun 
|)lus  qu'il  l'aime. 

Aune  lettre  aussi  obligeante  Ausone  répond,  qu'il  n'y  a  aus.  pi.  i. 
pas  moïen  de  se  défendre  de  ce  qu'un  Souverain  comme 
Théodose  témoigne  désirer.  Qu(î  sa  demande  devient  pour  lui 
un  commandement  irréfragable.  Que  bien  qu'il  n'ait  pas  d'es- 
prit, un  tel  ordre  est  capable  de  lui  en  donner.  Qu'enlin  s'il 
méditoil  déjà  de  publier  la  suite  de  ses  poésies,  lorsque  per- 
sonne ne  les  df^mandoit,  ce  lui  seroit  maintenant  un  crime 
de  larder  à  le  faire,  et  (|ue  d'ailleurs  il  n'avoit  garde  de  se 
priver  de  la  gloire  de  se  voij"  entn;  les  mains  d'un  Empereur, 
il  [)aroit  i)ar-là  que  dès  le  vivant  d'Ausone  il  se  fit  diverses 
éditions  de  ses  poésies. 

'  La  second(!  préface  est  aussi  v.n  vers  élégiaques,  et  la  plus  im.  -. 
considéiabl(;  lies  trois.  On  y  InMive  un  abrégé  de  la  vie  d'Au- 
sone de|)uis  .sa  naissance  jusqu'à  son  Consulat  inclusivement. 
Ainsi  elle  ne  fui  faite  qu'après  l'an  ;{70.  Ausone  l'avoit  mise  à 
la  tête  d'un  recueil  de  ses  écrits,  et  l'adressoit  au  Poète  Sya- 
gre  dont  nous  avons  parlé,  et  qu'il  choisissoit  pour  son  Me 
ceiH'.  Il  en  avoit  us(;  de  la  sorte,  comme  il  dit  lui-même,  afin 
que  b;  public  voiaiit  à  la  tête  d(!  son  recueil  le  nom  de  Sya- 
gre,  pût  aussi-tôl  le  lui  attribuer  qu'à  son  véritable  auteur. 

'  La  troisième  préface  est  peu  de  chose.  Ce  n'est  qu'un  pe-  i"  -• 
lit  comjtlimenl  en  vers  saphiques  à  Latinus  Pacatus  Drepa- 
nius,  en  lui  adressant  ou  le  même  recueil  de  poésies  qu'à  Sya- 
gre,  ou  un  autre  diUéirul.  Ausone  ne  donne  point  à  Drepane 
d'aulre  titre  qu«;  celui  de  fils,  parce  que  celui-ci  étoit  beau- 
coup |>Ius  jeune  qu'Ausone.  Ue  sorte  que  celle  petite  préface 
lut  faite  avant  3'.)0,  que  Drepane  étoil  iVoconsul  d'Afrique: 
ccqu'Au.soie  n  aiiroil  pas  oublié  de  marquer,  comme  nous 
v«-rrnnsqu  il  lit  dans  la  suite  en  une  autre  ocasion.  Du  reste 
il  nous  le  représente  comme  un  des  premiers  Poêles  de  son 
siècle. 

2" 'Les  épigiammcs  d'iVusone  forment  le  premier  recueil  «pi. i>. »-!»3. 
de  st^s  jioësies.  Elles  sont  au  nombre  de  150,  en  y  ci»mpre- 

Ooij 


292  AUSOiNE, 

IV    SI  liOLE.    liant  les  4  sur  les  fastes  Romains,  qu'il  avoit  composés,  et  qui 

sont  perdus.  Ces  4  dernières  épigrammes  avec  la  première, 

qui  est  pour  louer  la  valeur  et  le  savoir  de  l'Empereur  Gra- 
tien,  sont  les  plus  considérables.  Elles  seules  valent  mieux  que 
toutes  les  autres  ensemble.  Entre  celles-ci  il  y  en  a  quelques- 
unes  toutes  en  grec,  d'autres  mêlées  de  grec  et  de  latin,  et 
plusieurs  indignes  de  la  plume  d'un  honnête  Païen,  pour  les 
obscénités  qu'elles  contiennent.  Ausone  auroit  eu  juste  sujet  de 
rougir  de  cette  partie  de  ses  épigrammes,  et  de  lui  apliquer  ce 

o.i.\ .  |i.  osj.  qu'il  disoit  de  quelques  autres  de  ses  poésies  :  '  mets  etiam  intra 
me  er-ubesco. 

pr.  '  G'est-là  une  des  raisons  pour  lesquelles  Scaliger  le  père 

est  allé  jusqu'à  souhaiter  que  nôtre  poète  ne  se  fût  jamais  avi- 
sé d'écrire  d'épigrammes.  Outre,  dit-il,  que  celles  qu'il  nous 
a  laissées,  sont  presque  toutes  peu  travaillées  et  dures  à  l'o- 
reille et  à  la  prononciation,  il  s'y  en  trouve  de  plus  quelques- 
unes  ineptes,  d'autres  froides  ou  frivoles  et  quelques  autres 
détestables  pour  leurs  obcenités,  et  non  seulement  indignes 
de  la  plume  d'un  Poète,  mais  aussi  des  yeux  ou  des  oreilles 
d'un  Lecteur.  Il  semble,  ajoûte-t'il,  que  pour  les  châtier,  il 
faudroit  les  brûler  entièrement. 

luouii.  Cens.  auci.       '  D'autrcs  Critiques  observent  qu'Ausone  parut  faire  revivre 

I'.  270.  Martial  en  écrivant  des  épigrammes.  Mais  il  y  a  autant  de 

différence  entre  les  épigrammes  de  ces  deux  Poètes,  qu'il  y 
a  de  distance  du  siècle  de  l'un  au  siècle  de  l'autre.  Du  tems 
d'Ausone,  comme  nous  l'avons  déjà  remarqué  ailleurs,  la  bel- 
le latinité  avoit  déjà  commencé  a  déchoir,  et  l'art  de  la  poë- 

.vu.s.  F.  diss,  p.  i-.  sie  à  perdre  de  ses  anciens  agréraens.  'Cela  n'empêche  pas 

"■  "■  que  les  plus  habiles  connoisseurs  ne  trouvent  beaucoup  de  dé- 

licatesse dans  quelques-unes  de  ses  épigrammes. 

S)ii.  iKjë.  ciiiiFai..       '  Quoiqu'il  en  soit,  il  paroît  qu'elles  sont  les  premières  de 

inb.  lui.  p.  177.  ggg  productions  qui  ont  vu  le  jour  depuis  le  commencement 
de  l'imprimerie.  Elles  furent  imprimées  à  Venise  dès  l'an  1496 
en  un  volume  in- fol.  avec  la  préface  de  Barthelemi  ou  Geor- 

.vus.ibid.  v.ss.  11.  ge  Merula.  '  Elles  y  parurent  même,  comme  d'autres  l'obser- 

'"  vent,  dès  1472,  puis  en  1494. 

.\u.s.  p.  97-107.  3".  L'éphemeride  d'Ausone,  qui  suit  ses  épigrammes,  con- 

tient en  vers  de  différentes  mesures  toutes  les  actions  d'une 
journée  sainte,  depuis  le  lever  jusqu'au  coucher.  Mais  nous 
'■-'  '1  "-i  ne  l'avons  point  en  son  entier.  Il  y  manque  diverses  choses 
sur  la  lin.  Elle  semble  avoir  été  faite  pour  1  usage  de  I9  jeunesse 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.    293 

qu'Âusone  prenoit  soin  d'instruire  ;  et  l'on  voit  par-là,  à  Thon-  iv  siècle. 
neur  de  ce  Poète,  qu'au  même  tems  qu'il  enseignoit  les  belles 
letres  à  ses  disciples,  il  tâchoit  de  leur  donner  aussi  les  princi- 
pes d'une  éducation  Chrétienne.  C'est  ce  que  S.  Paulin  un  d'en- 
tre eux  reconnoissoit  lui-même,  comme  on  l'a  vu.  Cette  pie- 
ce  est  assurément  la  plus  estimable  de  toutes  les  poésies  d'Au- 
sone,  et  lui  meriteroit  le  titre  de  Poëte  Chrétien,  si  quelques 
autres  de  ses  pièces  ne  l'en  rendoient  indigne.  Il  y  a  renfermé 
ce  que  la  plus  pure  philosophie  enseigne  dans  sa  morale  ;  et  il 
y  donne  tous  les  préceptes,  les  pratiques  et  les  prières  mê- 
me d'une  journée  Chrétienne.  La  prière  qu'il  y  a  insérée  pour 
demander  à  Dieu  la  grâce  de  passer  saintement  la  journée, 
ne  respire  que  la  pieté  et  une  foi  très-pure  sur  nos  mystères. 
11  y  parle  clignement  de  Dieu,  et  y  insiste  sur  l'éternité  du 
Verbe,  peut-être  à  dessein  de  munir  la  jeunesse  contre  les  er- 
reurs des  Ariens,  qui  de  son  tems  causoient  tant  de  trouble 
dans  l'Eglise.  On  ne  sera  pas  fâché  de  trouver  ici  quelque  cho- 
se de  cette  pièce,  afin  d'en  pouvoir  juger  plus  sainement. 


Omaipotuns ,  Solo  mentis  mihi  cognitc  cuitu  ,  p.  t)7. 

Ignorate  malis,  et  nuUi  ignotc  piorum  , 

Principio  extremoque  carens  :  antiquior  .tvo 

Quod  fuit,  aut  venict  :  cujui;  formamqiic  modumque 

Nec  mens  complecti  poterit,  nec  lingua  profari. 


Ipse  Opifex  reruiii ,  rébus  causa  ipsa  creandis, 
Ipse  Dei  Verbuni,  Verbum  Deus ,  anticipator 
Muadi  quem  facturus  eral  :  generatus  in  illo 
Tempore,  quo  terapus  nondum  fuit  :  editus  anlc 
Quam  jubar  et  rutilus  cœlum  illustrarct  eous  : 
Quo  sine nil  actum ,  per  quem  facta  omnia. ... 


'  Da  l'aler  învictam  conlni  omnia  crimina  mcntcm  ,  P-  îW- 

Vipereumque  nefas  nocituri  averte  veneni. 

8it  satis,  antiquam  serpens  quodperdidit  Evara, 

l)eceptumque  adjunxit  Adam  :  nos  sera  nepotum 

Scmina,  veridicis  œtas  prœdicta  Prophetis, 

Vitemus  laqueos,  quos  letifer  iraplicat  anguis. 


20 


294  AUSONE, 

IV  SIECLK.  Da  Pater  hajcnostro  Ueri  rata  vota  prccutu. 

J      ~  ■  Nil  metuani,  cupiamque  nihil ,  salis  hoc  rear  esse 

Quod  satis  est.  Nil  turpe  velim  ,  ncc  causa  pudoris 
Sim  mihi.  Non  faciani  cuiquum,  qux  tempore  euduin 
Nolim  facta  mihi.  Nec  vcro  crimine  lo^dar, 
Nec  maculer  du bio.  Paullum  distarc  videtur 
Suspcctus  verusque  reus.  Maie  posse  facultas 
Nulla  sit  :  at  beac  posse  adsit  tranquilla  potestas. 
Sim  tenui  victu,  atque  habitu  :  sim  carus  amicis.... 

,,  101.  'Ausone  dans  cette  éphemeride  marque  l'heure  du  dîner  à  1 1 

heures  du  matin. 

svii.  po.:.  ciii.  I        '  Cette  pièce  a  paru  si  Chrétienne  à  quelques  Ecrivains, 

oW.  iwe.  i.  p.  qy'iig  fyj^[  (.fy  \g^  (Jevolr  ôter  à  Ausone  pour  la  donner  à  S.  Pau- 
lin de  Noie,  à  qui  ils  ont  jugé  qu'elle  convenoit  mieux.  On  la 
trouve  sous  le  nom  de  ce  Sajnl  et  daris  l'édition  de  ses  œu- 
vres par  Rosweide,  et  dans  les  Orlliodoxographes  imprimés  à 
liasle  en  1 5G9,  comme  aussi  dans  le  chœur  des  Poètes  La- 
tins. Adam  Siberus  l'a  aussi  insérée  dans  son  Manuel  de  pie- 
té pour  la  jeunesse,  qu'il  publia  à  Leipsick  en  1580.  '  Elle  fut 
imprimée  séparément  ïn-A".  dès  1517  à  Paris  chez  Josse  Badè. 

\iiv  i.ai.  i<.  107-       4°.  '  Après  l'éphemeride  viennent  les  Parentalïa,  c'est-à-di- 


Ohor.    iM»e.    l.    p 
31» 


Aus.  1''.  ibiil. 


m. 


re  les  éloges  des  parens  d' Ausone  qui  étoient  déjà  morts,  ou 
les  devoirs  rendus  à  leur  mémoire.  Ils  sont  divisés  en  30  cha- 
pitres, sans  y  comprendre  les  deux  petites  préfaces,  l'une  en 
prose  el  l'autre  en  vers,  et  contiennent  les  éloges  de  plus  de 
30  personn(!S.  Ces  éloges  sont  presque  tous  en  vers  élegiaques. 

f.  !i.  il.  *,).  '  Ausone  les  composa  après  son  Consulat,  et  même  après  avoir 

quilé  la  Cour,  el  s'être  retiré  dans  sa  terre  en  Sainlonge.  11  y 

,,  n,7  avoit  alors  30  ans  qu'il  éloit  veuf.  '  On  aprend  de  la  petite  pré- 

lace qui  (!st  en  prose,  qu'Ausone  avoit  déjà  publié  quelques 
autres  poésies,  lorsqu'il  composa  celles  dont  il  est  ici  question. 
il  a  assez  de  modestie  pour  avouer  que  les  premières  n'avoient 
pas  été  entièrement  goûtées,  et  qu'en  cela  on  leur  avoit  ren- 
du justice.  Il  a  bien  raison,  s'il  s'agit  de  ses  épigrammes  et  de 
.ses  autres  .semblables  pièces.  Quant  aux  Parentalia,  il  dit 
qu'ils  ne  paroitront  agréables  ni  par  leur  titre,  ni  par  le  sujet 
dont  ils  traitent.  Il  faut  néanmoins  convenir  qu'ils  ne  laissent  pas 
de  nous  donner  beaucoup  de  lumière  pour  l'histoire  de  ce  IV 
siècle;  et  l'on  a  pu  s'apercevoir  que  nous  en  avons  souvent 
fait  usage.  Ce  recueil,  non  plus  que  le  suivant,  ne  se  trou- 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.       295 

vent  point  dans  les  premières  éditions  des  oeuvres  d'Ausone.  iv  siècle. 
ri".  ■'  Les  éloges  ou  épitaphes  des  Professeurs  de  Rourdeaux  Prof.  p.  im-iso. 
ne  furent  composés  qu'après  les  Parentalia.  Ils  sont  même  pos- 
térieurs au  suplice  d'Eucrocie  femme  du  Poëte  Delphide,  la- 
quelle fut  exécutée  selon  S.  Prosper  en  38?}.  Ce  recueil  con- 
tient 2i  chapilres,  sans  y  comprendre  la  petite  préface  qui  est 
à  la  tête  et  les  deux  petits  épilogues.  On  y  trouve  les  éloges 
de  plus  de  30  personnes,  en  vers  de  presque  toutes  les  diffé- 
rentes mesures.  Ausone  y  a  fait  entrer  les  étrangers  qui  ont  en- 
seigné à  Rourdeaux,  comme  les  naturels  du  pais  qui  ont  pro- 
fessé ailleurs.  '  11  semble  s'être  borné  à  n'y  parler  que  des  Pro-  p.  172. 
fesseurs  du  IV  .siècle.  '  Il  dit  expressément  qu'il  ne  donne  les  p.  t88. 
éloges  que  de  ceux  qui  étoienl  morts,  lorsqu'il  les  composoit  ; 
priant  ses  Lecteurs  d'y  chercher  moins  les  beautés  du  discours, 
que  les  marques  de  sa  vénération  pour  les  Savans  de  son  païs. 
11  déclare  de  même  qu'il  n'entreprend  point  de  parler  des 
Avocats,  des  Historiens,  des  Poètes,  des  Médecins,  des  Phi- 
losophes, mais  seulement  des  Professeurs  de  Grammaire  et  de 
Rhétorique.  C'est  assurément  une  perte  pour  l'histoire  literai- 
re  de  la  France,  de  ce  qu'il  n'ait  pas  emploie  sa  plume  pour 
nous  faire  connoîtro  ceux-là  comme  les  autres.  C'en  est  en- 
core une  plus  grande  de  ce  qu'en  chaque  siècle  et  en  chaque 
province  des  Gaules,  il  ne  s'est  pas  trouvé  autant  d'Ausones 
ui  aient  rendu  le  même  service  et  à  la  mémoire  des  Savans 
e  leur  connoissance,  et  à  la  république  des  lelres.  Le  peu  que 
nous  a  conservé  Ausone  de  ce  qu'il  savoit  de  ceux  de  son  païs, 
nous  a  été  d'un  grand  secours  pour  l'histoire  de  ce  IV  siècle. 

6"'  Les  éloges  dos  Professeurs  de  Rourdeaux  sont  suivis  ii«ro.  p.  i«9-2i*. 
des  épitaphes  des  Héros,  qui  se  trouvèrent  à  la  guerre  de 
Troïes.  Cet  ordre  est  naturel  ;  puisqu'Ausone  assure  avoir  ajou- 
té ces  épitaphes  aux  éloges  précédents,  non  pour  en  faire  com- 
me une  suite,  mais  pour  empêcher  qu'elles  ne  se  perdissent. 
11  déclare  que  ce  n'est  qu'une  traduction  latine  de  ce  qu'il  avoit 
trouvé  dans  les  écrits  d'un  Philologue  Grec.  Ces  épitaphes  sont 
au  nombre  de  26.  Ausone  y  en  ajouta  encore  12  autres  sur 
différentes  personnes  célèbres,  comme  Niobé  fille  de  Tanta- 
le, Didon,  Diogene  le  Cynique,  et  autres.  '  Nous  dirons  en  Bionn.  ib.  p.  am 
passant  que  les  Connoisseurs  font  grand  cas  des  traductions 
u'Ausone  a  faites  de  grec  en  latin,  comme  y  aïant  beaucoup 
e  subtilité,  de  sel  et  d'elegance.  Au  reste  ce  recueil  ne  nous 
présente  rien  qui  indique  le  tems  auquel  il  a  été  fait. 


a 


3: 


296  AUSONE, 

IV  SIECLE.        7".  *  On  nolrouve  non  plus  rien  qui  puisse  fixer  l'époque  des 
ri — ë 7i7  Césars  d'Ausone.   11  semble  que  ce  fut  une  des  premières 

•  Ans.  liirs.  p.  210-  1-1  »»  1-1  1  r     ,     TT 

287.  productions  de  sa  Muse,  en  ce  qu  ils  sont  adresses  a  Hes- 

pere  spn  fils.  11  étoit  aparemment  encore  tout  jeune  lors- 
qu'Ausone  les  composa  pour  lui  donner  par-là  quelque  tein- 
ture de  l'histoire  des  Empereurs.  D'abord  il  lui  représente  en 
douze  vers  la  suite  des  douze  Césars,  dont  Suétone  nous  a 
laissé  l'histoire.  En  douze  autres  vers  il  lui  trace  le  tems  du  rè- 
gne de  chacun  d'eux,  et  en  douze  autres  le  genre  de  leur  mort  : 
tous  vers  héroïques.  Enfin  il  lui  peint  en  autant  de  quatrains 
composés  de  vers  élegiaques  le  caractère  de  tous  les  Empe- 
reurs, depuis  Jule  César  jusqu'au  temps  qu'il  composa  l'ouvra- 
ge. Ce  qui  nous  en  reste,  ne  va  que  jusqu'à  Heliogabale,  en- 
core n'avons-nous  que  deux  vers  sur  ce  dernier.  On  voit  qu'- 
Ausone  dans  ces  portraits  en  racourci  a  fort  bien  pris  le  plus 
souvent  le  génie  de  ceux  qu'il  y  a  voulu  représenter. 

Syii.  poë  ciir.  '  On  a  quelquefois  détaché  ces  Césars  d'Ausone  du  corps 

de  ses  autres  poésies,  pour  les  joindre  aux  petits  Ecrivains  de 
l'histoire  des  Empereurs.  Il&se  trouvent  nommément  dans  l'é- 
dition qu'en  publia  Nicolas  Reufner  à  Leipsick  en  1572.  On 
les  a  mis  aussi  à  la  suite  de  Lucain  des  éditions  de  Basle  1551 , 

Poi'.  lai.  cor.  p.  et  de  Cologne  1560.    Les  42  premiers  vers  ont  été  imprimés 

p^'^Je.^'"^'  ''"'■  par  erreur  dans  quelques  recueils  à  la  fin  des  poésies  de  S.  Si- 
doine, comme  s'ils  en  faisoient  partie. 

Au'i.  urb.  p.  228-       8°.  '  Lcs  villcs  célebrcs  est  un  autre  ouvrage  d'Ausone,  où 

*'^'  en  14  chapitres  ou  articles  composés  de  vers  héroïques  il  a 

fait  les  éloges,  et  quelquefois  donné  la  description  de  17  vil- 
les choisies.  Voici  le  rang  qu'il  leur  donne  entre  elles  :  Rome, 
Constantinople ,  Carlhage  ,  Antioche  ,  Alexandrie ,  Trêves , 
Milan,  Capouë ,  Aquilée,  Arles,  Lerida,  Athènes,  Catane, 
Syracuse,  Toulouse,  Narbone,  Bourdeaux.  L'article  de  Ro- 
me ne  contient  qu'un  seul  vers  ;  et  personne  ne  dit  s'il  n'y  man- 
que rien,  comme  il  semble  y  manquer.  Ausone  s'étend  beau- 
coup plus  sur  Bourdeaux,  comme  le  lieu  de  sa  naissance,  que 
sur  les  autres  villes.  11  n'y  oublie  pas  les  bons  vins  du  pais.  II 
dit  qu'il  avoil  été  Consul  dans  cette  ville  comme  à  Rome  : 
ce  qui  doit  s'entendre  de  quelque  charge  de  Police,  que  l'on 
nommoit  ailleurs  Duumvirat,  et  qui  retient  encore  le  nom  de 
Consulat  dans  quelques  villes  de  Guiene.  Nous  aurions  par- 

p.  Ï.1-.  là  une  date  pour  assigner  une  époque  à  cet  ouvrage.  Mais  ce 

qu'Ausone  dit  sur  Aqnilée.  nous  en  fournit  une  plus  récente. 


RHETEUR,  URATEUR  ET  POETE.        297 

V  laisanl  mention  de  la  défaite  du  Tyran  Maxime  devant  cette     iv  siècle. 
ville  ;  ce  qui  arriva  en  388,  il  fait  voir  que  l'ouvrage  est  poste- 
rieur  à  cette  action. 

'  Ce  traité  des  villes  célèbres  parut  dans  le  public  en  un  vo-  Bihi.  TcU.  p.  27c. 
lume  séparé  l'an  1565.  On  est  redevable  de  cette  édition  à  Elie  '' 
Vinet,  qui  aiant  déterré  un  ancien  manuscrit  très-correct,  le 
fit  imprimer  la  même  année  à  Poitiers  chez  de  Marnef,  avec 
un  assez  ample  commentaire  de  sa  façon,  le  tout  en  un  volu-  '.       ■ 

me  m-8°.  Depuis,  il  est  passé  dans  le  traité  des  acroissemens  v, 

des  villes  par  Hippolytede  Colli;  lat,  aCollibus. 

9°.'  Le  jeu  des  sept  Sages  est  en  vers  dedifl'érentes  mesures,  Ans.  sap.  p.  aat- 
et  adressé  à  Latinus  Pacatus  Drepanius  qualifié  Proconsul,  *'"'■ 
par  une  petite  letre  en  vers  élegiaques.  On  voit  par  cette 
qualification  de  Drepane  que  l'écrit  ne  fut  composé  tout  au 
plutôt  qu'en  390,  qui  est  l'année  à  laquelle  il  entra  dans  son 
Proconsulat  ou  gouvernement  d'Afrique.  Ausone  a  trouvé  le 
secret  de  faire  entrer  dans  ce  traité  tous  les  beaux  senlimens 
des  anciens  Sages  de  la  Grèce,  qui  tendent  tous  à  la  vertu. 
11  y  fait  paroitre  tous  ces  Sages  en  particulier,  et  leur  met  en 
la  bouche  les  maximes  qu'ils  ont  autrefois  enseignées.  Il  n'y  a 
pas  même  oublié  les  principes  de  la  philosophie  naturelle, 
selon  les  idées  de  ces  Philosophes.  Il  y  propose  en  divers  ar- 
ticles les  sentimens  de  Pythagore,  de  Zenon,  d'Epicure  et  de 
quelques  autres.  11  s'y  trouve  trois  à  quatre  lacunes  en  divers 
endroits,  mais  elles  ne  paroissent  pas  considérables. 

'  Il  paroît  qu'on  a  fait  une  estime  particulière  de  ce  traité  Biw.  s.  vin.  Cen. 
d' Ausone,  puisqu'on  en  trouve  quelques  éditions  faites  sépa- 
rément de  ses  autres  écrits.  Il  fut  imprimé  dès  1526  à  Basle. 
chez  Jean  Froben,  avec  les  distiques-  qui  portent  le  nom  de 
Caton ,  et  les  observations  d'Erasme,  le  tout  en  un  volume  m-8°. 
Jean  Brouchier  de  Troïes  fit  depuis  un  commentaire  sur  ce 
traité,  et  joignit  l'un  et  l'autre  au  recueil  de  ses  poésies,  qu'il 

fiublia  en  même  volume  à  Paris  chez   Simon   de   Cohnes 
'an  1528.  Dans  l'une  et  dans  l'autre  édition  cetécrit  est  intitulé 
Apophthegmes  ou  Sentences  des  sept  Sages . 

10°.  '  Les  Idylles  d' Ausone  sont  sans  difficulté  la  plus  belle  Aus.  ojy.'  p.  294- 
partie  de  ses  poésies.  On  en  compte  jusqu'à  vingt;  quoique  ^^' 
dans  les  anciennes  éditions  on  en  ait  porté  le  nombre  jusqu'à 
33,  parce  qu'on  y  a  inséré  sous  le  même  titre  VEclogarium, 
ou  pièces  qui  forment  le  recueil  des  endroits  choisis  de  divers 
anciens  Auteurs.    Ces  Idylles  sont  autant  de  petits  poèmes 

Tome  I.  Sec.  Pari.  P  p 

2  c  * 


BlouD.   ib.  p.  270. 


298  AUSONK, 

IV  siKCLK.  égaies  qui  contiennent  des  descriptions  de  lieux,  et  des  narra- 
tions d'avantures  agréables.  '  Les  critiques  les  regardent  en  gé- 
néral comme  de  l'ort  bonnes  pièces  de  poésies,  et  dignes 
d'un  grand  Poëte.  11  faut  pourtant  avouer  qu'ils  ne  sont  pas 
tous  de  même  prix,  soit  pour  les  sujets  dont  ils  traitent,  soit 
j)our  la  beauté  de  la  poésie.  Il  y  en  a  d'infâmes,  comme  le 
<'ento  iivptialis.  11  y  en  a  d'excellens,  comme;  la  Mosell.,  et  de 

Ans. 0.1)1. 1. 11.    r..  dignes  d'un  Poëte  Chrétien,  '  comme  le  premier,  qui  est  sur 

*"'  la  fête  d(;  Pâque.   Ausone  y  parle  fort  bien  du  mystère  de  la 

Trinité,  et  y  insiste,  comme  dans  son  éphemeride  sur  l'éter- 
nité du  Verbe,  qu'il  recwmoît  non  seulement  semblable,  mais 
encore  égal  au  Père.  11  le  finit  par  une  prière  en  faveur  des 
deux  Empereurs  qui  regnoient  alors  et  du  (lé-sar  (i ration.  Ces 
deux  Empereurs  étoienl  les  deux  fnjres  Valeatinien  1  et  Va- 
lens.  J)e  sorte  que  cet  Idylle  fut  fait  avant  la  lin  de  l'année 
37o,  qui  est  celle  de  la  mort  du  pi-emier.  Tous  les  autriîs  sont 
composés  de  vers  ou  héroïques,  comme  celui-ci,  ou  élegiaques. 

Ans.  V.  iiii.i.  et  faits  en  divers  tems.'  Ce  premier  Idylle  a  été  imprime'' séparc;- 
inenl  m-i",  à  Paris  chez  .losse  JJade  l'an  151S. 

eiji  '.:.  p. ae7-3o:).  '  Le  second  Idylle  «'sl  intitulé  Epiccdioti.  inpatreni  sinon  .la- 
lium  Aufion'nim.  Vj\"f\\\\\  petit  poëmi;,  ou  une  éli.-gie  sur  la 
mort  de  Juie  Ausone  Médecin  (!t})ere  de  nôtre  Poëte.  Celui-(;i  y 
a  Iracé  en  abrège;  la  vie  de;  ce;  Médecin^  (;t  divers  traits  d<;  l'Iiis- 
toireî  de  sa  famille-.  Les  Crées  donne)ie;nl  le-  tilre'  d' Kj//rediou 
aux  poëines  lugub)e;s  qu'ils  eeimposoie-nl  pe)ur  le-s  ob.se-quejs  de 
leurs  morts,  et  le  tilre;  d7i'/y//«/;/r^;<  à  ce;ux  que;  l'on  ne  faisoil 
qu'après  leur  sépulture.  Suivant  celte  noiiejn  e>n  pourroil  croi- 
re-que;  e-et  Idylle;  fui  fait  de>s  les  obsèques  de  Jule  Ausone. 
Mais  la  suite  fait  \e)ir  epi'il  ne- fut  e;e)mpe)sé  qu'asse-z  long-lems 
après,  puisqu'il  y  e^l  fait  mention  du  Consulat  d'Ausone;  son 
filsejui  n'y  fui  éle-véqu'i'n  371),  et  que;  Jule- Ausone  étenl  me»rl 
dès  377.  (x' pe)ëm(' e;.st  pn-e-ede;  d'une  ()eiile;  j)réfae.'e  en  prose 
adressée-  aux  l.,ecU-urs.  Ausone-  y  avertit  quil  ave)it  composé  cet 
éle)ge  i)e)ur  être;  mis  au  bas  du  portrait  de-  sejn  ])e;i-e,  où  il 
se-  lise)il,  avant  epi'i!  le  lit  pa.ssci- dans  le  ree;ue-il  de  ses  poe-sies. 
Il  [)rote^ste  n'y  rien  avancer,  que;  ce;  ejui  éle)il  corum  de  tous 
ceux  qui  ave>i(-nl  vécu  ave.;c  le  défunt  ;  ajoùlant  qu'il  se  feroil 
le- mêmee-rime  efavancer  de-s  chose-s  fau.sse-s,  epie  de;  taire  ce 
ejei'il  y  avoilde-  vrai.  Ilprie- aus.>*i  s»-s  Lecte  uis  de-  croire-  eju'il 
s'est  bien  moins  jwrlé  à  faire  ce;  poëme  dans  le  dessein  d'alire-r 
à  son  père  des  louanges  de  la  part    de;s   hommes  ;   ce  qui 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.    200 

nofcroitque  h'  charger  après  sa  mort;  que  pour  lui  gagner    iv  sieclk. 
leur  hi<'nveillanc(!,  et  rendre  justice  h  sa  mémoire. 

'  Dans  ridylle  suivant,  qui  est  le  troisième,  Ausone  nous  a  odyi.  x  p.  .wi-ar.. 
laissé  en  vers  élegiaqucs  la  description  d'une  de  ses  terres, 
qu'il  dit  avoir  été  l'héritage  de  ses  pères.  Elle  étoit  située  à  une 
petite  distance  de  la  ville,  aparemment  de  Basas,  où  l'on  al- 
îoit  par  eau.  En  parlant  de  ce  petit  héritage,  comme  il  le 
iionnne  lui-même,  il  prend  ocasion  de  déclamer  contre  la  cu- 
pidité. Lorsqu'on  n'y  met  point  de  bornes,  dit-il,  on  n'en  met 
point  non  plus  à  la  passion  d'acumuler  richesses  sur  richesses. 
'  Au  haut  de  la  pièce  se  lit  une  inscription  qui  porte  qu'Au.sone  p-  ^fi- 
ne la  lit  (|u'après  avoir  quité  la  Cour,  et  lorsqu'il  se  fut  retiré 
dans  celle  lerre. 

'L'Idylle  i''  intitulé  ProlrrpticondeslKflïopiœt'ili, esiuneex-  p.i>i.  i  p.mvsio. 
hortation  en  vers  iKîxanietres  au  jeune  Ausone  son  petit-fils 
par  sa  (ille,  pour  le  porter  à  l'étude,  et  l'animer  à  marcher  sur 
les  traces  de  ses  pères.  {)n  trouve  dans  ce  poëme  beaucoup 
d'élégance  et  une  grande  érudition;  quoique  l'Auteur  té- 
moigne l'avoir  proportionné  à  l'âge  de  l'enfant.  Ausone  l'a- 
drr-ssa  par  une  courte  letre  en  prose  à  Ilespen^  .son  fils,  et  on- 
cle paternel  de  l'enfant,  alin  qu'il  y  lit  ses  remarques  et  ses 
corrections.  Après  avoir  exhorU'  dans  le  poëme  son  petit-fils 
à  ne  point  craindre  la  rigidité  et  lesehàtimens  de  .ses  Maîtres, 
il  lui  trace  un  plan  irétiide  convenable  à  .sa  jeunesse,  et  con- 
forme à  ce  qu'il  avoit  mis  lui-même  en  usage,  lorsqu'il  onsei- 
gnoit.  Il  lui  marque  ensuite  i)ar  ordre  les  Auteurs  qu'il  doit 
lire  avec  soin  :  Homère  et  Menandre  <'ntre  les  Grecs,  Terence. 
Ciceron,  Horace,  \irgile  entre  les  Latins.  Et  afin  de  lui 
inspirer  plus  d'émulation,  il  lui  rapelle  les  grands  honneurs 
auxquels  son  père  et  .'^on  oncle  étoient  parvenus,  et  auxquels 
il  avoit  été  élevé  lui-même  en  considération  de  son  savoir. 
Ausone  éloit  déjà  vieux,  lors^ju'il  composa  ce  4"  Idylle. 
'  Claude  Minos  y  aïant  fait  un  Commentaire  de  sa  façon  le  nih  s.  .ini.  t.h. 
publia  avec  un  autre  Idvlle  du  même  l'oëte,  à  Paris,  chez  Jean 
Richeri;i82in-8". 

'  Nous  n'avons  pas  le  5''  en  son  entier.  11  est  en  vers  de  mê-  ody.  ■..  p.  .';i»;>.  .îi. 
me  mesure  que  le  précédent,  et  a  pour  titre  Genethliacon  ad 
ciirndcm  Atisonium  nepotem.  11  fut  fait  pour  le  jour  de  la  nais- 
sance du  jeune  Ausone,  lorsqu'il  enlroitdans  la  douzième  an- 
née de  son  Age,  et  qn'Ausone  .s^)n  aiful  éloil  dans  sa  vieillesse. 

L'Idylle  6*  aussi  en  vers  héroïques  est  fort  ingénieux.  11  .mIj.  e.  p.  .'ki-.tt.'?. 


■  rf  i  \/1      "T' 


300  '    •    •     AUSONE,  ■ 

IV  SIECLE,  contient  la  fable  de  Cupidon  ataché  à  une  croix  par  les  Héroi- 
nés.  Ausone  l'adresse  par  une  petite  letre  en  prose  à  un  Gré- 
goire qu'il  qualifie  son  fils,  comme  beaucoup  plus  jeune  que 
lui,  et  peut-être  comme  aïant  été  son  disciple.  Nous  croïons 
que  ce  Grégoire  est  le  même  que  celui  qui  étoit  Préfet  des 
Gaules  en  383.  Ainsi  l'Idylle  fut  fait  avant  cette  date,  puisque 
l'Auteur  dans  le  titre  ne  fait  nulle  mention  de  cette  Préfecture. 
Ausone  dit  qu'il  tira  d'un  tableau  qu'il  avoit  vu  à  Trêves  le 
sujet  de  ce  poëme,  et  qu'il  n'y  avoit  dans  la  pièce  que  ce  sujet 
Bionn.  ibid.         scul  qui  fût  de  SOU  goût.  Cependant  les  Critiques  ne  laissent 

pas  d'en  faire  beaucoup  d'estime. 
Aus.eUyi.7.p.338.       '  On  n'a  qu'uuc  partie  du  7"  Idylle  intitulé  Bissula.  Il  est 
'**•  acompagné  de  trois   épigrammes  sur  le  même  sujet,  et  de 

deux  petites  préfaces.  La  première  en  prose  et  en  vers  s'adresse 
à  Axius  Paulus  ami  d'Ausone,  à  qui  il  avoit  demandé  ce  poë- 
me. L'autre  préface  toute  en  vers  est  adressée  au  Lecteur.  Au- 
sone y  déclare  que  la  pièce  qui  la  suit  n'est  pas  faite  pour  des 
f (^sonnes  qui  sont  à  jeun,  et  qu'il  faut  avoir  bû  pour  en  avoir 
'intelligence.  On  ne  voit  pas  au  reste  ce  qui  peut  avoir  porté 
Ausone  à  parler  ainsi  de  celte  pièce  :  à  moins  que  ce  ne  soit 
ce  qui  y  manque.  Il  paroît  par  ce  qui  nous  en  reste  que  le 
tout  étoit  três-peu  de  chose  ;  n'étant  que  le  portrait  et  les  avan- 
p.  3.3S.  tures  d'une  esclave  Germaine.  Ausone  '  semble  témoigner  que 

c'étoit-là  une  des  premières  productions  de  sa  Muse. 
o.iyi.  8.  o.p.  343-      '  Les  8°  et  9"  Idylles  furent  faits,  l'un  la  veille,  et  l'autre  le 
^"-  jour  même  qu' Ausone  entra  dans  le  Consulat.  Ils  sont  fort  courts 

l'un  et  l'autre,  et  ne  contiennent  presque  autre  chose  que  des 
vœux  pour  une  heureuse  et  abondante  année. 
r.i>i.  10.  p.  3*7-      '  L'Idylle  dixième  est  sans  contradiction  le  plus  considérable 
•  m'oon.  il..  ^6  tous,  ct  la  plus  belle  pièce  des  poésies  d'Ausone.  Elle  seule 

suffiroit  pour  mériter  le  nom  de  Poète  à  son  Auteur.  LesCon- 
noisseurs  y  remarquent  autant  d'esprit  que  d'art,  tant  pour  la 
disposition  et  l'élégance,  que  pour  la  beauté  des  figures. 
Ans.  il..  '  Ausone  y  fait  en  500  vers  héroïques  ou  environ  et  une  des- 

cription agréable  et  un  éloge  pompeux  tout  ensemble  de  la 
p.  m.  rivière  de  Moselle,  dont  l'Idylle  a  pris  le  nom.  'L'on  ne  peut 

se  tromper  en   l'atribuant  à   nôtre   Poëte  ;  puisqu'il  a  eu 
soin  de  marquer  son  nom  et  sa  patrie  dans  le  corps  de  l'ouvra- 
ge. Il  le  composa  à  Trêves,  lorsqu'il  étoit  à  la  Cour  des  Em- 
f»ereurs  Valentinien  et  Gratien  son  fils,  et  du  vivant  de  celui- 
à  :  par  conséquent  avant  375,  qui  est  l'année  de  sa  mort.  '  Il 
;■   û  ■' 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.   301 

y  fait  par  ocasion  un  petit  éloge  du  Rhin,  sur  lequel  il  pro-    iv  siècle. 
met  d'exercer  plus  amplement  sa  Muse ,  lorsque  les  Princes  ~ 
l'auront  renvoie  dans  son  pais.'  il  y  promet  aussi  de  relever  aus.  p.  4i:.-.i;H). 
par  ses  vers,  lorsqu'il  jouira  du  repos  et  du  loisir  que  la  vieil- 
lesse lui  faisoit  espérer,  les  actions  mémorables  des  Belges,  les 
mœurs,  l'éloquence  dos  grands  hommes  de  son  pais,  les  hon- 
neurs, les  charges,  les  dignités  par  lesquelles  ils  ont  passé. 

'  L'on  croit  que  c'est  ce  qu'il  exécuta  dans  la  suite  par  les  élo-  w.a.  p.  ti-. 
ges  des  Professeurs  de  Bourdeaux,  et  ceux  de  ses  parens.  Mais 
à  dire  le  vrai,  il  faut  convenir  que  ces  deux  écrits  ne  remplis- 
sent pas  l'idée  qu'Ausone  nous  donne  ici  de  sa  promesse.  De 
sorte  qu'il  paroit  assez  visiblement  qu'il  n'y  a  satisfait  qu'en 
partie,  ou  s'il  l'a  fait  en  tout,  son  ouvrage  est  perdu. 

'  Nous  avons  une    letre  de  Symmaque  à  Ausone,  dans  la-  sym.  i  i.cp.  8. 
quelle  cet  Orateur  fait  l'éloge  de  ce  poëme,  jusqu'à  le  mettre 
de  niveau  avec  les  poésies  de  Virgile.  L'éloge  est  un  peu  ou- 
tré. '  Il  est  étonnant  que  cette  pièce,  composée  exprès  pour  spic  1. 12.  p.  20c. 
faire  honneur  au  pais  de  Trêves,  y  fût  si  rare  au  Xli  siècle, 

3u'un  Auteur  de  ce  tems  étoit  obligé  de  renvoïer  à  Bour- 
eaux  pour  en  avoir  connoissance. 
'Il  y  a  eu  une  édition  particulière  de  la  Moselle  d'Ausone  iiib.Tcii.p.213.2. 
avec  les  commentaires  de  Marquardus  Freher  pour  l'expli- 
quer. Le  tout  est  imprimé  en  un  volume  in-folio  à  Heidelberg 
chez  Vœgelite  l'an  1619.  On  trouve  aussi  le  même  ouvrage 
avec  son  commentaire  à  la  fin  des  origines  Palatines  du  mê- 
me Freher.  '  Dès  161  ij  Paul  Duizius  l'avoit  publié  à  Pont-à-  Kai>.  bib.  lai.  p. 
Mousson,  avec  quelques  élégies  choisies  de  Tibulle,  dePro-  "**' 
perce  et  un  commentaire  de  sa  façon. 

'  L'Idylle  suivant,  qui  est  le  onzième,  amis  à  la  torture  tous  aus.  cjyi.  u.  p. 
les  Commentateurs  qui  ont  entrepris  de  l'expliquer.  C'est  pro-  ■*"•  "-• 
prement  une  énigme  qu'Ausone  proposa  à  table  un  jour  qu'il 
donnoit  à  manger  à  ses  amis.  Les  Anciens  avoicnt  de  coutu- 
me d'en  user  de  la  sorte.  L'Idylle  est  en  90  vers  héroïques, 
et  intitulé  Griphns,  c'est-à-dire,  projiosition  que  l'on  donne  à 
deviner  sous  des  termes  obscurs,  et  souvent  contradictoires. 
11  roule  sur  le  nombre  de  trois;  et  son  Auteur  en  traitant  un 
sujet  si  stérile  en  aparence,  a  trouvé  le  secret  d'y  faire  entrer 
divers  traits  d'érudition,  '  André  Schot  y  trouve  même  beau-  wonn.  ui.  p.  «e». 
coup  d'esprit,  et  le  Gyraldi  une  grande  variété,  des  recher-  *'"■ 
ches  curieuses,  mais  peu  de  jugement  et  aussi  peu  de  poli- 
tesse. .»;.«;.,  ,i   ...;.,„Ji 


302  A  11  S  ONE,  "" 

IV  siECLK.         Adiré  co  quo  nous  en  pensons,  la  piecf  nous  paroît  peu 
-xûTibrp.  447.  ~   inleressanto.      Ausone  néanmoins  ne  la  jugea  pas  indigne  d'ê- 
tre dédié(î  à  l'Orateur  Symmaque  par  une  assez  longue  letre 
itib,  5.  Vin.  On,     en  prosc.  'De  mf^'UK!  deux  de  nos  Critiques  du  XVI  siècle 
n'ont  pas  crû   perdre   leur  tenis  que  de  l'emploiera  enrichir 
de  leurs  commentaires  ce  même  Idylle.  Le  premier  qui  y  a 
travaillé  est  François  Dubois  ou  Silvius,  qui  publia  le  sien 
avec  le  texte  d'Ausonc  dès  l.'ilG  h  Paris  cb.ez  Made  en  un 
..s.  Jiii.  Tm.       volume  2>/-4".  '  L'aulre  est  Claude  Mignaut  ou  Minos  de  Di- 
jon, qui  fit  imprimer  b;  sien  aussi  avec  le  texte  original,  à 
Paris  chez  Denys  du  Pré  l'an  l.iTi  (u  même  volume,  i-tde- 

Fuis  encore  à  Paris  chez  Jean  Kieber  en  un  volume  m-8". 
an  158!{.  '  Ausone  lémoignc  <|ii'il  \  avoit  déjà  du  tems  qu'il 
avoit  composé  cet  Idylle,  lorsqu'il  l'envoia  à  Symmaque.  On 
n'y  trouve  rien  (jui  puisse  autrement  en  fixer  la  date. 

.•.lyi.  12.  !..  i-'i.  Il  n'en  est  pas  ainsi  '  du  douzième  intitulé  Tcrlutnpii'finio,). 
L'on  voit  par  la  première  dédicace  d<'(vlni-ii ,  (jui  eslàPaca- 
lus  l)i-epanius,  (jualilié  Proconsul,  (|u'il  ne  fut  fait  au  pinlôl 
qu'en  390  ;  ainsi  sur  la  fin  de  la  vied'Ausone.  Cet  Idylle,  de 
l'aveu  de  son  pntftre  Auteur,  ]!'(  si  qu'un  jeu  de  mots,  et  à  le 
bien  prendre,  un  anuisement  puérile,  où  il  ne  paroil  que  de 
l'imagination.  Il  traite  de  divers  s'.ijcis  qui  p'iiveiil  foi-rnir  au 
dessein  assez  bizarre  d»-  la  pièce,  eonr.nc  des  faux  Dieux,  des 
membres  du  cor[)s,  des  AJandes,  du  prinîems,  etc.  Chaque 
vers  de  la  prernien-  parti;-  coMUDcnec  par  un  monosyllabe,  et 
finit  [lar  un  autre,  i\\\\  \'m\.  le  coinnienecmcnl  du  vers  suivant. 
Dans  le  reste  A\\  poënn  b-s  ver-  lini.sscj»!  connue  les  précedens 
par  un  monosyllabe  ;  mais  ils  ne  conunencent  pas  de  même. 
De  .sorte  qu'on  |)onrrnil  le  nonnni  lie  poëme  des  monosyllabes. 
Il  est  tout-à-fait  sur]>renant  qu'Au.sone  ,  qui  avoit  de  l'esprit  et 
du  goût,  i^ii  soit  annis<;  danssa  \ifille.s.si'  même  à  une  semblable 
puérilité.  Il  la  jugea  néarnnoins  digne*  d'être  adres.sée  non- 
seulement  à  Drepane,  mais  aussi  à  S.  Paulin,  qui  s'ocufM^it 
alors  d(^  choses  incomparablement  plus  excellentes  dans  le* 
lieu  de  sa  niraite,  (»ù  il  étoil  ap!i<[iié  à  la  pratique  de  toutesles 
vertus  Chrétiennes,  (Hiur  répondri-  à  la  sainteté  qu'il  avoit  re- 
çue depuis  peu  dan.s  h;  .'sacrement  delà  régénération. 

.m|}|.  I!  p.  l'i'i-  '  J/Idylle  l;)''  adress«'  à  Axiu>  Paulus,  n'est  au  jugemenî 
d'Ausone  même,  qu'une  pièce  frivctie,  de  nul  mérite,  où  il 
nVsl  entré  ni  es|)iit,  ni  fi'ii.  et  (jui  ne  lui  a  conté  ni  peine  ni 
travail.  Il  potivoil  ajouter,  (juil  a\(iit  au  moins  réu.'^si  à  en  fai- 


iuii:tkuh,  orateur  et  poète.     303 

le  une  très-mauvaise  pièce,  tout-à-fait  indigne  d'un  Chrétien ,  i  v  s 1 1: c l k. 
et  même  d'un  honnèt(!  i*aïen.  11  a  beau  dire  cju'il  ne  la  corn- 
posa  que  par  ordre  de  l'Empereur  Valentinien  1  ;  il  a  beau 
citer  les  exemples  de  plusieurs  Poêles  de  Tuntiquitc^,  qui  bien 
que  d'une  vie  irréprochable,  n'ont  pas  laissé  d'égaïer  les  sujets 
qu'ils  ont  traités;  il  a  beau  se  parer  de  ce  vers  de  Pline  et  de 
Martial,  iMsciva  esi  nohis paijiiia^  vUaproba:  tout  cela  ne  sau- 
roit  le  justifier  d'avoir  rempli  d'obscénités  l'Idylle  dont  nous 
parlons.  11  est  tout  comixjsé  de  diverses  parties  tirées  mot 
pour  mot  des  vers  de  N'irgile,  et  cousues  ensemble  pour  for- 
mer le  plus  souvent  contre  leur  sens  propre  et  naturel,  ce 
qu'il  a  nommé  lui  même  Cenio  m/p(ialis,cesl-ix-dire  une  rapso- 
die  bizarre,  afin  d'exprimer  tout  ce  qui  se;  passe  de  plus  secret 
entre  les  nouveaux  mariés.  On  sait  que  des  personnes  Chré- 
tiennes, comme  Eudocia  et  Pr(»bii  h'alconia  ces  célehn^s 
Poétesses  de  ranfi(|nilé,  ont  imité  ce  j^enre  de  poésie,  en  com- 
|)Os<uil  coinme  Auson*;  des  Cejitons  tirés  des  vers  d'iiomere 
et  de  Virgile.  Maison  suit  aussi  qu'elles  ne  l'ont  l'ail  qu'à  la 
louange  d(!  .1.  C.  el  à  l'honneur  de  la  religion  Chrétienne. 
'  Aiisoui^  composa  lesien,  lors(jiril  insli-uisoit  le  jcime  (iratien  «dyi.  i:..  p.  :.(ts. 
dans  li!S  lelres. 

(Juoique  (rette  pièce  ne  fût  bonuiî  qu'à  brûler,  on  n'a  pas 
laissé  d'en  multiplier  les  e\eiiqilaires  iùllcurs  que  dans  les  édi- 
tions d'Ausone.  Henri  Maibomius  l'a  jointe;  aux  autres  Cen-  Sjii.  poo.  du 
Ions  tirés  de  Virgile  «pTil  lit  imprimer  l'an  l.')'.)7  en  un  volume 
in-i".  h  llelmstad.  On  la  trouve  aussi  avec  les  amours  de  JJau- 
dius,  et  à  la  lin  de  ijlusieui-s  éditions  de  Pelrone,  avec  le  J'ervi- 
tjilium  Veneris  ,  aulre  pièce;  de  même  alloi. 

'On  a  lo]ig-lems  airibué  à  Virgile  les  Idylles  li''  \(Y  17""  el  Ans.iii.  .imi.|.  -.io. 
18',  et  dans  celle  pcnsic  on  les  a  souvent  imprimés  entre  les 
petites   poésies  d(;  cet  ancien  l'oi-te.  Mais  l'on  convient  de- 
jiuis  plus  d'un  siècle  et  demi,  (|u'ils  sont  d'Ausone.    Eeli^esl  ;;'i.vi-  n.  \>.  :>•>». 
en  vers  élegiaques  ,  et  a  [)our  iilre  Les  lioses.  11  se  trouve  à  la   '''■ 
fui  d(;  quelques-unes  des  dernier(;s  éditions  de  l'elroiie.   '  Le  p.  «*>.  ■>.». 
16'  et  17"  sont  fort  courts.  Les  sujets  dont  ils  trailenl  ont  été 
pris  d(!  Pythagoie.  L'un  a  |iour  liire  ,  Ik  t homme  du  bien ,  et 
l'antre  ,  fj'  oui  et  le  non.  '  Le  18''  sur  les  âges  des  animaux  est  )••  :>n-:M. 
aussi  fort  court,  et  pris  d'Hésiode  pour  la  iiia;i:'re. 

Le  sujet  du  lo*"  est  encore  tiré  du  grec  de  Pj  ihagore  ;  Au-  p.  rm.  sis. 
sone  y  Inïite  de  l'ambiguité  sur  le  choix  d'un  genre  de  vie.  Ce 
petit  poëme,  qui  est  en  vei-s  héroïques,  a  de  gi-andes  beautés. 


30i  AUSONE, 

IV  siECLK.  L'auleur  y  i'ail  le  dénombrement  de  presque  lous  les  divers 
genres  de  vie,  et  des  peines ,  qui  en  sont  inséparables.  De-là 
il  conclud ,  non  avec  les  Chrétiens ,  mais  avec  les  Philoso- 
phes du  Paganisme ,  qu'il  n'est  point  avantageux  de  naître  ,  si 
l'on  ne  meurt  aussi-tôt  après  que  l'on  est  né.  L'on  ne  trouve 
au  reste  dans  cette  pièce  aucun  trait  qui  en  fasse  connoîlrc  la 
date. 

uib.  s.  Jui.  Tui.  '  Cet  Idylle  est  un  de  ceux  d'Ausone  que  Claude  Minos  a 
commentés.  Il  le  fit  imprimer  dès  1582  à  Paris  chez  Jean 
Richer,  en  un  volume  m-S".  avec  le  Protrejtticon  du  même 
Poète,  et  les  observations  dont  il  avoit  enrichi  l'un  et  l'autre. 
Frédéric  Jamot  de  Bethune  aiant  mis  en  vers  grecs  celui  dont 
il  est  ici  question,  le  publia  avec  le  texte  original ,  à  la  fin  des 
Idylles  de  Moschus  et  de  Bion.  Il  se  trouve  à  la  page  328  de 

Kiii.  bii).  p.  m.  l'édition  de  1584,  et  à  la  page  58  de  l'édition  de  1620.  'Il  y 
a  même  une  édition  particulière  de  cet  Idylle  d'Ausone,  faite 
à  Hambourg  l'an  1037,  en  un  volume  m-S". 

Aus.  ib.  1..  530-       'Les  deux  derniers  Idylles,  c'est-à-dire  le  ID^et  le  20*sonl 

"'**■  peu  de  chose.  L'un  traite  en  douze  vers  héroïques  des  travaux 

d'Hercule,  et  l'autre  des  inventions  et  des  offices  des  neuf  Muses 
en  onze  vers  aussi  héroïques. 

11°.  Nous  avons  déjà  remarqué  que  les  divers  petits  poèmes, 
qui  composent  ce  qu'on  nomme  V Èclogarium  d'Ausone,  c'est- 
à-dire  un  recueil  de  quelques  endroits  choisis  des  Anciens, 

cciua.  p.  538.-567.  faisoit  autrefois  une  suite  des  Idylles.  'Mais  on  a  jugé  à  pro- 
pos de  l'en  séparer  dans  les  dernières  éditions  de  ce  Poète. 
Ces  endroits  choisis  par  Ausone  traitent  de  divers  sujets.  Il  y 
en  a  sur  les  signes  célestes,  sur  les  quatre  saisons,  sur  les  mois 
et  les  jours  de  l'année ,  sur  le  solstice  dans  l'équinoxe ,  sur  les 
feries  des  Romains,  sur  les  luttes  et  les  combats  dans  le  cirque. 

rp.  P.Ô07-B98.  12*.  '  Les  letrcs  d'Ausone,  au  nombre  de  25 ,  ne  sont  sans 

doute  que  la  moindre  partie  de  celles  qu'il  avoit  écrites.  C'est 
de  quoi  l'on  verra  diverses  preuves  par  la  suite  de  ce  que  nous 
allons  dire.  Il  n'y  en  a  qu'une  seule  qui  soit  toute  entière  en 
prose.  Toutes  les  autres  sont  ou  en  vers ,  ou  mêlées  de  vers  et 
de  prose,  et  quelques-unes  de  grec  et  de  latin.  L'ordre  chrono- 
logique n'est  point  exactement  gardé  dans  le  rang  qu'on  leur 
assigne. 

p.  M7-573.  '  Les  trois  premières  ne  contiennent  rien  de  bien  intéressant. 

L'une  est  adressée  à  Jule  Ausone  père  de  l'Auteur,  pour  lui  don- 
ner avis  qu'il  lui  étoit  né  un  fils,  qui  le  faisoit  grand-pere.  Les 

deux 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.        305 

deux  autres  sont  écrites  ù  Ilespere  fils  d'Ausone,  l'une  de  Tré-     iv  siècle. 
ves  où  celui-ci  se  trouvoit  encore,  lorsque  Maxime  eut  pris  la 
pourpre,  et  l'autre  en  une  autre  rencontre. 

'  La  4*  avec  les  trois  suivantes  sont  écrites  de  divers  lieux  à  aih.  op.  p.  ,',74- 
un  Theon  Poëte,  ancien  ami  d'Ausone.  La  première  de  ces  •'" 
quatre  letres  est  particulièrement  estimée  pour  l'érudition,  les 
railleries  fines  et  le  tour  ingénieux  qui  y  régnent.  Ausone  l'é- 
crivit à  la  suite  de  l'armée  de  l'Empereur,  lorsqu'il  étoit  déjà 
chargé  de  l'instruction  du  jeune  Gratien.  La  5*  et  la  6*  sont  peu 
de  chose.  La  7"  est  une  vieille  pièce  qu'Ansone  avoit  compo- 
sée dans  sa  jeunesse  ,  et  qu'il  eut  la  complaisance  de  retoucher 
sur  la  fin  de  sa  vie.  Ce  n'est  toutefois  qu'un  jeu  de  mots  sur  une 
trentaine  d'huitres  dont  un  de  ses  amis  lui  avoit  fait  présent. 

'  Il  y  en  a  sept  adressées  à  Axius  Paulus  Rhéteur  et  ami  par-  p.  598. -csq. 
ticulier  d'Ausone.  Ce  sont  la  8^  et  les  six  suivantes.  Elles  ne 
sont  presque  ou  que  des  exhortations  pour  ranimer  les  études 
de  ce  Rhéteur ,  ou  des  billets  d'invitation  pour  le  presser  d'al- 
ler voir  Ausone  dans  sa  terre  en  Sainlonge,  où  il  dit  s'être  re- 
tiré afin  d'être  plus  à  portée  de  jouir  de  la  compagnie  de  cet 
ami.  La  13'  n'est  composée  que  de  deux  vers  grecs.  Celle  qui 
précède  et  celle  qui  suit,  sont  partie  en  grec,  partie  en  latin. 

'La  15*  n'est  intéressante,  qu'en  ce  qu'elle  nous  apprend  p.  can-ar,. 
qu'il  y  avoit  alors  à  Angoulême  une  école  publique,  à  laquel- 
le présidoit  un  Tétrade,  fameux  Poëte  à  qui  cette  letre  est 
adressée. 

'  ï^  16*  est  en  prose  accompagnée  de  vers  épodes  ou  petits  p.  cso-oss. 
vers,  et  s'adresse  à  Sextus  Petronius  Probus  Préfet  du  Prétoire. 
Ausone  l'écrivit,  lorsqu'il  étoit  à  la  Cour,  et  l'envoïa  à  Sir- 
mich  ,  où  Probe  se  trouvoit.  C'est  pour  lui  donner  avis  qu'il  lui 
adressoit  les  fables  d'Esope  de  la  traduction  de  Titien  ,  avec 
l'histoire  de  Cornélius  Nepos  pour  l'instruction  de  ses  enfans. 

'La  17'  toute  en  prose,  s'adresse  à  Symmaque,  et  fait  la  p-  cw-ch  1  sym 
26*  de  celles  de  son  premier  livre.  Ellle  contient  un  éloge  pom-    '   '  '^^'  "' 
peux  de  l'éloquence  de  cet  Orateur.  Ausone  la  lui  écrivit  pour 
s'excuser  de  lui  composer  l'ouvrage  qu'il  lui  avoit  demandé 
pour  son  instruction.  On  y  voit  divers  traits  de  l'union  un  peu 
trop  grande  d'Ausone  avec  ce  Païen,  quoiqu'ils  fu.ssent  d'un 
âge  bien  difl'erentl'un  de  l'autre.  Cette  letre  en  supose  d'aulres 
du  même  Auteur  à  Symmaque.  '  Nous  en  avons  encore  trente  sym.  ib.  p.  7-37. 
de  celui-ci  à  Ausone.  qui  sans  doute  ne  lui  en  aura  pas  moins 
écrit. 

Totiie  I.  Soc.  Part.  Q  q 


30G  AUSONE, 

IV  SIECLE.  "  Quoique  la  plus  grande  partie  de  la  1  S"  letre  ne  soit  qu'un 
•  AïK.  il.,  p.  (jii.  F"  ^^  ïï*ots  pour  exprimer  le  nombre  de  douze  ,  cette  letre  ne 
''*»  laisse  pas  d'avoir  son  mérite.  Elle  est  on  vers  élegiaques,  et 

nous  fait  connoître  deux  grands  hommes  qui  professoient  les 
belles  letres  à  Trêves  du   tems  qu'Ausone  exerçoit  la  charge 
de  Questeur, 
p.  fi.%o-c!>8.  '  Les  sept  dernières  letres  d'Ausone,  c'est-à-dire  la  19*  avec 

les  suivantes,  sont  toutes  écrites  à  S.  Paulin,  les  unes  avnnt, 
les  autres  après  sa  retraite.  Dans  la  19'  Ausone  fait  l'éloge  du 
Poëme  que  Paulin  avoit  composé  en  mettant  en  abrégé  les  trois 
livres  de  Suétone  sur  les  Rois,  et  qu'il  avoit  envoie  à  Ausone. 
La  20"  est  peu  de  chose.  L'Auteur  y  loue  encore  en  peu  de 
vers  le  talent  qu'avoit  Paulin  pour  la  poésie.  La  21*  mêlée  de 
prose  et  de  vers,  est  pour  remercier  Paulin  do  quelques  pré- 
sens qu'il  avoit  envoies  à  Ausone.  Il  y  est  aussi  parlé  d'un  opns- 
cule  que  Paulin  lui  avoit  adressé  pour  le  retoucher.  Paulin  fai- 
soit  sa  demeure  dans  sa  terre  d'Hebromage  ,  lorsqu'il  reçut 
cette  letre  et  la  suivante,  qui  est  la  22'".  Ausone  lui  écrivit 
celle-ci  en  faveur  d'un  certain  Philon  qui  avoit  été  son  fer- 
mier ou  son  homme  d'affaires  pour  sa  terre  de  Lucaniac.  Les 
vers  qui  font  la  seconde  partie  de  cette  letre  ,  y  sont  rapportés 
avecquelques  lacunes  qui  en  supposent  d'autres  perdus.  Ausone 
dit  qu'il  ajouta  ces  vers  comme  un  caractère  qui  discernoit  ses 
letres  de  celles  des  autres,  et  sans  lequel  Paulin  auroit  pu  ne 
pas  les  reconnoîlre. 

Nous  avons  déjà  assez  amplement  parlé  ailleurs  des  trois 
p.  67.v6!)8.  dernières  letres,  la  23%  24*  et  25*.  '  Elles  sont  pour  se  plain- 

dre du  silence  opiniâtre  de  Paulin  qui  étoit  alors  dans  sa  re- 
traite de  Barcelone,  /out  ocupé  des  exercices  de  la  pieté  Chré- 
tienne. Elles  en  suposent  au  moins  une  autre  sur  le  même  su- 
jet ,  mais  qui  est  perdue.  Ausone  dans  ces  trois  letres  emploie 
tous  les  traits  de  la  tendresse  d'un  ami  et  tous  les  reproches  d'un 
maître  offensé,  ou  pour  rapeller  Paulin  dans  son  pais ,  ou 
Paul.  car.  10. 11.  pour  lui  faire  reprendre  l'exercice  de  la  poésie.  '  S.  Paulin  ré-* 
pondit  enfin  à  toutes  les  importunités  d'Ausone  par  deux  poè- 
mes qui  font  le  10*  et  H*  entre  ceux  qui  nous  restent  de  lui. 
Ans.  con».  p.  599-      13».'  L'action  de  grâces,  ou  le  Panégyrique  de  Gratien, 

f)our  remercier  cet  Empereur  d'avoir  élevé  Ausone  au  Consu- 
al,  fut  prononcé  h  Trêves  dans  les  Gaules,  à  la  fin  de  l'an  379, 
lorsqu'Ausone  sortoit  de  celte  dignité.  La  pièce  est  en  prose  ; 
et  l'Auteur  semble  l'avoir  divisée  en  deux  parties.  11  emploie 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.    307 

la  première  ;i  relever  la  magnificence  de  Gratien,  sa  libéralité,    i  v  siècle. 
son  inclination  à  obliger  :  ce  qu'Ausone  fait  particulièrement  ' 

tomber  sur  le  Consulat  qu'il  avoit  reçu  de  ce  Prince,  et  les  au- 
tres honneurs  dont  il  l'avoit  gratifié  lui  et  plusieurs  personnes 
de  sa  famille.  L'autre  partie  est  emploies  à  louer  les  autres 
grandes  qualités  d<î  Gralien.  Ausone  parmi  toutes  ses  louan- 
ges n'a  pas  laissé  d'insérer  plusieurs  faits  importans  pour  l'hi- 
stoire de  ce  IV  siècle,  et  en  particulier  pour  celle  de  cet  Em- 
pereur. On  ne  peut  nier  que  ce  panégyrique  ne  contienne  de 
grandes  beautés.  On  y  trouve  du  feu,  de  l'élévation,  de  l'or- 
dre, de  la  justesse  dans  les  pensées,  du  choix  dans  les  figures  ; 
et  malgré  l'art  on  y  sent  régner  un  certain  naturel,  qui  montre 
que  c'est  autant  le  cœur  qui  y  parle  que  l'esprit.  Mais  avec 
toutes  ces  beautés,  la  pièce  pour  le  style  se  sent  un  peu  du  gé- 
nie de  .son  siècle. 

On  i'a  détachée  des  autres  écrits  d'Ausone  pour  la  placer  h 
la  suite  des  discours  des  autres  Panégyristes  de  l'Empire.  On 
la  trouve  dans  presque  toutes  les  éditions  que  nous  en  avons 
marquées  à  l'article  de  Claude  Mamertin,  si  l'on  en  excepte 
colle  qu'en  a  publiée  le  P.  de  la  Baune.  '  Il  y  en  a  même  une  nii'-  Baib.  1. 1. 1>. 
édition  particulière  faite  à  Maïence  l'an  1617,  eu  un  volume 
in-A\ 

14°.  '  Nous  avons  encore  d'Ausone  des  sommaires  sur  cha-  aus.  p.  137-772. 
que  livre  de  l'Iliade  vt  de  l'Odyssée  d'IIomere.  Ausone  y 
explique  d'abord  en  un  ou  deux  vers,  quelquefois  davantage, 
puis  en  prose  le  sujet  dont  traite  chaque  livre.  Il  a  mis  à  la  tê- 
te une  [)elite  préface  en  prose  pour  rendre  compte  de  son  des- 
sein. Il  sembleroit  qu'il  auroit  fait  cet  écrit  pour  servir  particu- 
lièrement à  la  jeunesse  qui  étudie  les  belles  letres.  Voilà  tout 
ce  qui  nous  reste  aujourd'hui  et  des  poésies  et  des  autres  écrits 
d'Ausone. 

Mais  ce  ne  sont  pas-là  tous  ceux  qui  étoient  sortis  de  sa  plume. 
Outre  grand  nombre  de  letres  qui  se  sont  perdues,  comme 
nous  l'avons  montré,  '  il  avoit  dressé  des  Fastes  Consulaires,  opi.  p.91. 
qui  seroient  sans  doute  un  ouvrage  très-intéressant,  s'il  nous 
avoit  été  conservé.  Ausone  le  commençoit  à  l'origine  de  Ro- 
me, et  l'avoit  conduit  au  moins  jusqu'à  son  Consulat.  Nous 
n'avons  de  ce  grand  ouvrage  que  l'épigramme  par  laquelle  l'a- 
dressant à  Hespere  son  lils,  il  le  prioit  de  le  continuer  après 
lui.  L'on  ne  sait  point  s'il  l'exécuta,  ni  si  l'ouvrage  étoit  en 
prose  ou  en  vers.  Voici  les  propres  termes  dans  lesquels  Au- 
sone s'en  explique.  0  <i  ij 


308  ÂUSONE, 

IV  SIECLE.  Iguola  uiterua;  ne  sint  tibi  tcmpora  Roma;, 

■ ■" ""  Rogibus  et  patrum  ducla  sub  impeiiis, 

Digessi  Fastos,  et  nomina  peqielis  œvi  : 

Sparsajacent  Latiamsiqua  pur  historiam, 
SU  tuus  hic  fructus;  Vigilatas  accipe  noctes  : 

Obscquitur  studio  nostra  lucerna  tuo. 
Tu  quoque  venturos  pcr  longum  conserc  Janos, 

Ut  mea  congessit  pagina  prajtcritos. 
Ëxemptum  jam  Patris  habes;  ut  protinus  et  tu 

Aggregct  Ausoniis  purpura  Consulibus. 

Au». cun».  1».  7U3.  '  Kn  qualité  de  Questeur  de  l'Empire,  charge  qu'Ausone 
exerça  plusieurs  années  sous  Valentinien  et  Gratien  son  fils, 
il  avoit  le  soin  de  dresser  les  loix  et  les  déclarations  que  le 
Prince  publioit  pour  le  règlement  de  l'Eglise  et  de  l'Etat.  De 
sorte  qu'il  faut  regarder  comme  l'ouvrage  d'Ausone  la  plupart 

Siui.  I.  I.  cp.  17.  de  celles  qui  parurent  sous  ces  deux  Empereurs.  '  Symmaque 
ami  d'Ausone  parle  avec  complaisance  d'une  de  ses  déclara- 
tions, que  Gratien  avoit  envoïée  à  Rome ,  et  qui  avoit  fait 
beaucoup  de  plaisir  au  Sénat.  Les  termes  dont  il  se  sert  font 
bien  voir  qu'il  savoit  que  c'étoit  son  ami  qui  l'avoit  dressée. 

Ans.  e.i>i.  10.  p.       '  Si  Ausone  a  exécuté  le  projet  qu'il  avoit  formé  d'emploïer 

4i7-»33.  gjj  Muse  à  faire  l'éloge  du  Rhein,  des  Belges,  et  ceux  de  tous 

les  grands  Hommes  de  son  pais,  comme  il  se  le  proposoit  en 
composant  sa  Moselle,  il  faut  compter  encore  ces  écrits  entre 
les  ouvrages  de  ce  Poète  que  nous  avons  perdus.  Car  il  ne 
nous  paroît  point,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà  observé  qu'il  ait 
pleinement  satisfait  à  sa  promesse  à  l'égard  du  second  de  ces 
trois  écrits,  parce  qu'il  nous  a  laissé  sur  ses  parens  et  les  Pro- 

«p.  10.  p.  C.31.  fesseurs  de  Bourdeaux.  '  De  même  il  avoit  promis  à  Sexlus  Pe- 
Ironius  Probus  Préfet  du  Prétoire  d'écrire  un  jour  l'histoire  de 
sa  vie,  comme  Chœrilus  avoit  écrit  celle  d'Alexandre  le 
grand.  Si  Ausone  l'a  fait,  c'est  encore  un  ouvrage  dont  nous 
sommes  privés. 

Fab.  bib.  lai.  app       '  Quclques  Ecrivaius  lui  atribuent  aussi  les  Distiques  qui  por* 

•*■  "■  lent  le  nom  du  Caton.  Mais  d'autres  observent  que  ce  recueil 

est  l'ouvrage  d'un  Païen,  et  qu'Ausone  n'en  peut  être  l'Auteur. 
Au  reste  on  fait  porter  à  ces  Distiques  le  nom  de  Caton,  plu- 
tôt à  cause  du  sujet  dont  ils  traitent  qu'à  cause  de  l'Auteur, 
dont  on  ignore  le  nom  comme  le  tems  auquel  il  a  vécu.  De 
sorte  qu'on  n'a  pas  plus  de  preuves  pour  le  donner  à  Ausone 
qu'à  tout  autre  Ecrivain. 


IV    SIECLE. 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.        309 

S-n. 

SON  GENIE,  SON  ERUDITION,  SA  MANIERE  D'ECRIRE. 

'  Tout  le  monde  convient  qu'Ausone  avoit  l'esprit  aisé,  sub-  aus.  pr  i  Entr.  sur 
til,  agréable,  enjoué.  Quelques-uns  jugent  même  que  son  gé-  m.  m  i Vay.  l'. 
nie  aproche  de  celui  d'Anacreon.  Il  paroît  à  quelques  autres  |^ug*V. 'i^ pÎ'to'"' 
tant  de  génie,  de  délicatesse  et  d'autres  beautés  dans  plusieurs 
de  ses  écrite-,  que  l'on  croit  lui  devoir  rendre  cette  justice, 
que  s'il  eût  vécu  du  tems  d'Auguste,  il  ne  seroit  pas  demeuré 
au-dessous  de  ces  célèbres  Auteurs,  qui  acquirent  tant  de  ré- 
putation quatre  à  cinq  cens  ans  avant  qu'il  se  montrât  sur  le 
Parnasse. 

Ce  que  la  nature  avoit  donné  de  talens  à  Ausone  pour  la  poé- 
sie, il  le  sut  cultiver  par  une  profonde  érudition.  Trente  ans 
3u'il  emploïa  à  professer  publiquement  les  belles  letres  à  Bour- 
eaux,  et  plusieurs  années  qu'il  passa  encore  depuis  à  instruire 
en  particulier  le  jeune  Empereur  Gratien,  lui  fournirent  l'o- 
casion  et  les  moïens  de  se  perfectionner  dans  la  connoissance 
de  la  belle  antiquité.  Aussi  voit-on  par  ce  gui  nous  reste  de 
ses  ouvrages,  qu'il  possedoit  presque  tous  les  meilleurs  Au- 
teurs Grecs  et  Romains.  '  On  y  trouve  répandues  avec  art  les  Aus.  pr. 
plus  belles  expressions  de  Lucille,  de  Plante,  deTerence,  de 
Lucrèce,  de  Varron,  de  Ciccron ,  d'Horace ,  de  Virgile  et 
autres.  '  C'est  sur  cela  sans  doute  que  l'Empereur  Theodose  vin.  in  auj.  ç.  i. 
ne  faisoit  pas  moins  de  cas  de  l'érudition  d'Ausone,  que  de  son 
génie,  '  et  que  S.  Sidoine  le  regardoit  comme  un  très-grand  su.  i.  i.  ep.  ii. 
Poëte.  '  ScaJiger  le  père,  qui  étoit  si  bien  capable  d'en  juger,  aus.  si». 
convient  au  moins  qu'il  étoit  le  plus- savant  de  tous  ceux  qui 
avoient  paru  depuis  l'Empereur  Domitien. 

Après  tant  de  belles  qualités,  et  acquises  et  naturelles,  réu- 
nies en  la  personne  d'Ausone,  on  seroit  en  droit  de  ne  rien 
atendre  de  lui  que  de  parfait  et  d'achevé.  Mais  on  est  bien 
éloigné  de  compte.  Et  pour  mieux  faire  sentir  combien  l'on  se 
tromperoit,  si  l'on  étoit  dans  cette  atente,  il  faut  distinguer 
deux  choses  dans  ses  écrits  :  les  sujets  qu'il  a  entrepris  d'y  trai- 
ter, et  la  manière  dont  il  les  traite.  L'un  fera  voir  qu'il  n'y  a 
le  plus  souvent  dans  ce  Poëte  ni  goût,  ni  choix,  ni  discerne- 
ment; l'autre,  qu'il  n'y  a  ni  douceur  ni  politesse  dens  la  plupart 
de  ses  poésies  ;  et  l'un  et  l'aulre  qu'il  s'y  trouve  autant  d'inéga- 
lité que  de  négligence. 
2  1 


310  •        AUSONE, 

IV  SIECLE.  Pour  les  sujets  «ju'Ausone  a  entrepris  de  traiter,  la  plus 
grande  partie  ne  valoit  pas  même  la  peine  qu'il  y  pensât.  Il 
n'y  a  qu'à  voir  ses  épigrarnmes  et  son  Technopœgnion  en  par- 
ticulier pour  en  convenir.  On  y  trouve  des  sujets  si  puériles, 
qu'un  commençant  voudroit  à  peine  s'en  servir  pour  Ifîs  pre- 
miers essais  de  sa  Muse.  Et  s'il  lui  étoit  permis  ae  choisir,  on 
peut  assurer  qu'il  feroitvoir  plus  de  goût  dans  son  choix  qu'Au- 
sone  n'en  a  montré  dans  le  sien. 

Outre  ces  sujets  qui  ne  méritoicfnt  point  d'ocuper  la  Muse 
d'un  Poêle  de  quelipie  réputation,  il  s'y  en  rencontre  encore 
d'autres,  comme  nous  l'avons  déjà  remarqué,  qui  sont  tout- 
à-fait  indignes  d'un  homme  d'honiii;ur.  Tels  sont  plusieurs  épi- 
grammes  d'Ausouj;  et  son  Cejito  nuptialis.  La  licence  qu'il 
s'est  donnée  d'y  faire  entrer  tout  ce  nue  l'imagination  la  plus 
déréglée  peut  représenter  de  plus  sale  et  de  plus  malhonnête, 
lui  a  atiré  la  juste  indignation  de  tous  les  sages  Ecrivains  qui 
Aus.  pr.  ont  parlé  de  lui.  '  Quelques-uns  en  ont  ét<'  si  frapés,  qu'ils  ont 

Tiii.  Enip.  t.  5.  p.  même  douté  que  FAuteur  fût  Chréti(în.  '  D'autres  qui  n'en  pou- 
""■  voient  douter,  ont  souhaité  pour  l'honneur  du  Christianisme 

itar.  an.  3!)i.  ».  qu'il  nc  l'cût  jauiais  été.  '  Ceux-ci  n'ont  pas  fait  difficulté  de 
*"'  dire,  qu'il  méritera  toujours  de  passer  plutôt  poui-  un  Païen 

itaii.  jug.  .les.  s,i.  que  pour  un  Chrétien.  '  iMilin  ceux-là  se  sont  plaints  de  ce  que 
poe.  lai.  p.  470.     j^g  sicclcs  sui\'ans  ont  souffert  que  tant  d'infamies  soient  ve- 
nues jusqu'à  nous. 
Aus.  ipi.  !)  I  «iiy.       '  Ausone  j)ressentit  hien  lui-même  de  son  vivant  que  la  posté- 
^■'•'"'  rilé  Chrétienne  ne  les  lui  passeroit  pas  impunément,  et  qu'u- 

ne ocupalion  aussi  indigne  d'un  honnête  homme  pourroit  pré- 
judicier  à  sa  réputation.  C'est  ce  qui  l'engagea  à  tâcher  de  se 
justifier  par  avance  sur  cela.  Il  prie  que  l'on  ne  juge  point  de 
ses  mœur.s  par  ses  vers,  s'efforçant  de  persuader  que  si  sa  Mu- 
se est  un  peu  licentieuse,  sa  conduite  n'en  est  pas  moins  régu- 
lière. 

Salv:i  mihi  vcluruin  mancat  duiu  régula  moruui, 
l.udut  peruiistis  subria  Musu  jocis. 

Mais  de  telles  excuses  ne  peuvent  gueres  servir  qu'à  le  ren- 
dre plus  coupable;  puisqu'elles  font  voir  qu'il  savoit  que  d(; 
telles  productioiis  étaient  mauvaises,  et  qu'il  ne  lais.soit  pas  d.; 
Ips  publier. 

Au  reste  iHui  faut  rendre  justice  en  ce  qu'il  la  mérite.  Si  pour 
le  malheur  de  sa  réputation  il  a  traité  des  sujets  capables  do  fai- 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.         311 

ro  rougir  un  honnête  Païon,  et  s'il  s'est  amusé  A  plusieurs  autres  iv  siècle. 
li'op  puériles,  il  a  exercé  sa  Muse  sur  quel'|iies  autres  propres 
à  lui  faire  honneur,  même  en  qualité  de  Chrélien  et  (lignes 
d'un  grand  Poète.  Tel  est  entre  ceux-là  son  Ephemeride  qui 
pourroit  porter  pour  titre,  Exercice  du  Chrétien  pour  passer 
chrétiennement  la  journée.  Tel  est  son  Idylle  sur  le  jour  de 
PAque,  où  la  foi  e(  la  pieté  parlent  de  concert.  Tel  est  son  jeu 
des  sept  Sages,  où  il  établit  une  morale  très-pure.  Tel  est  en- 
tre les  aufi^s  sa  Moselle,  que  les  plus  grands  Critiques  regardent 
comme  une  excellente  pièce  de  poésie,  et  qui  passe  pour  le 
chef-d'œuvre  de  son  Auteur.  Tel  est  encore  son  Exhortation 
à  l'étude  pour  son  pelil-fds,  où  l'on  découvre  de  grandes  beau- 
tés. Tels  sont  enfin  les  éloges  des  Professeurs  de  Bourdeaux  et 
ceux  des  personnes  de  sa  famille.  Voilà  des  sujets  dignes  d'ocu- 
per  la  Muse  d'un  Poëte  et  même  d'un  Poëte  Chrétien. 

Autant  qu'Ausone  a  fait  paroltre  peu  de  discernement  dans 
le  choix  des  sujets  qu'il  a  traités,  autant  il  montre  d'inatention 
et  de  négligence  à  soutenir  son  style  en  les  traitant.  On  juge 
de  ce  qu'il  étoit  capable  de  faire  par  quHques-unes  des  pièces 

aue  nous  venons  d»!  nommer,  où  l'on  trouve  de  l'élégance, 
e  la  politesse,  de  l'élévation.  Il  y  en  a  encore  quelques  au- 
tres qui  aproelient  du  prix  de  celles-là.  '  On  ne  peut  rien  voir, 
par  exemple,  de  plus  beau,  dit  un  Moderne,  que  son  action 
de  grâces  à  l'Empereur  Graticn  .sur  le  sujet  de  son  Consulat. 
Pline  le  jeune  lui  auroit  envié  cet  ouvrage.  De  même  rien  n'est 
plus  ingénieux  que  le  .suplice  de  ('upidon  aux  champs  Elyséens, 
et  que  le  suplice  que  lui  fireni  souffrir  les  Héroïnes  qui  avoient 
toutes  quelque  sujet  de  se  plaindre  de  lui.  '  Scaliger  trouve  aus.  pr. 
aussi  beaucoup  de  génie  et  de  bonne  poésie  dans  l'Idylle  inti- 
tulé Ctnj'phiis. 

Si  l'on  se  bornoit  à  faire  tomber  sur  ces  pièces  d'Ausone  les 
grands  éloges  que  Symmaque  et  ses  autres  partisans  ont  fait 
de  ses  écrits,  '  en  disant;  les  uns,  qu'ils  sont  comparables  à  sym.  i.  i.cp.  h. 
ceux  de  Virgile,  qu'on  y  découvre  la  douceur  et  les  agrémens  ^'• 
de  ceux  de  Ciceron  ;  '  les  autres,  que  tout  ce  qu'il  y  a  dans  juj.  des  sa.  ib.  p. 
Ausone,  est  un  fruit  de  la  bonne  latinité,  que  tout  y  est  fort  in- 
génieux, bien  choisi,  bien  travaillé  :  peut-être  ces  louanges, 
quoiqu'un  peu  excessives,  seroient-elles  tolerables.  Mais  qu'il 
s'en  faut  que  toutes  les  pièces  d'Ausone  méritent  de  tels  élo- 
ges !  On  vient  de  s'en  convaincre  par  raport  aux  sujets  dont 

1  Di-  1.1  vraii^  ni  faiissiî  l)(>aiil<''  ili'S  inivr.-ii.'es  il^^sprit,  par  Mr.  iln  la  Vultftrifi. 


♦67 -479. 


312  AUSONE, 

IV  SIECLE,    elles  trailent  ;  on  va  voir  la  même  chose  par  raport  au  style  qui 
y  est  emploie. 

Quand  les  meilleurs  critiques  ne  conviendroient  pas  de  la 
dureté,  du  style  d'Ausone,  il  n'y  auroil  qu'à  lire  la  plupart  de 

Aus.  pr.  ses  écrits  pour  n'en  pas  douter.  '  A  cette  dureté  de  style  il  y  a 

joint  une  négligence  que  Scaliger  ne  lui  peut  pardonner,  |)ar- 
ce  qu'il  étoit  capable  ae  mieux  faire.  Kn  effet,  ajoute  cet  ha- 
bile connoisseur,  il  a  as.sez  bien  réussi  dans  quelques-unes  de 
ses  pièces  ;  mais  il  fait  voir  en  d'autres  un  Auteur  tout-à-fait  né- 
gligent. De  même,  il  y  a  de  ses  ïambes  assez  bien  commencés 
et  d'une  assez  grande  pureté,  mais  dont  la  fin  est  très-mauvaise 
et  rampante  jusques  dans  la  pous.siere,  faute  d'être  soutenus, 
revus  et  corrigés. 

Entr.  ib.  D'aillcurs  quoi  de  plus  ridicule  pour  un  Poëte,  '  qui  avoit 

de  si  beaux  talens,  que  de  s'amuser  à  des  poésies  gênées  et  con- 
traintes !  En  décrivant  le  printems,  par  exemple,  il  s'amuse  à 
des  puérilités,  affectant  de  terminer  tous  ses  vers  par  un  mo- 
nosyllabe, comme  si  la  matière  n'eût  pas  eu  de  quoi  exercer 
plus  noblement  sa  Muse.  11  en  faut  dire  autant  de  ses  autres  pie- 
ces  de  même  genre,  dans  quelques-unes  desquelles  il  y  a  une 
double  affectation  ;  les  vers  y  commençant  et  finissant  par  un 
mono.syllabe.  De  sorte  que  pour  ramasser  en  deux  mois  les  di- 
vers jugemens  que  l'on  porte  des  écrits  d'Ausone,  on  peut  dire 
que  comme  il  y  a  du  bien  et  du  mal  pour  les  choses,  il  s'y  trou- 
ve aussi  du  bon  et  du  mauvais  pour  la  manière  de  les  traiter. 

Arcii.  ib.  I  Bay.  ib.  C'est  cc  qui  coustatc  '  l'extrême  inégalité  que  l'on  reconnoît 
dans  les  ouvrages  de  ce  Poëte.  11  est  vrai  que  ceux  qui  veulent 
le  traiter  avec  indulgence,  rejetent  plutôt  cette  inégalité  sur 
des  défauts  étrangers,  que  sur  celui  de  son  esprit  et  de  son  gé- 
nie. Ils  prétendent  qu  elle  vient  et  du  défaut  de  son  siècle,  et 
des  dispositions  oii  ce  Poëte  pouvoit  se  trouver  à  mesure  qu'il 
travailloit.  Que  dans  ces  momens  ou  de  pesanteur  ou  de  dissi- 
pation, il  lui  a  pu  échaper  quelques-unes  de  ces  constructions 
vicieuses ,  et  quelques  termes  peu  propres  au  sujet  qu'il  trai- 
toit.  Que  ses  Muses  étoient  peut-être  un  peu  trop  journalières. 
Que  l'on  a  pu  insérer  dans  ses  poésies  des  pièces  qu'il  n'avoil 
fait  qu'ébaucher.  Que  des  rai.sons  particulières  l'ont  pu  obliger 
à  laisser  courir  des  vers  qu'il  n'avoit  pas  eu  le  tems  de  polir. 


S- 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.   313 

§.    IV.  IV   SIECLE 

EDITIONS  DE  SES  ŒUVRES. 

On  a  pu  remarquer  par  divers  traits  de  l'histoire  d'Ausone  et 
du  sort  qu'ont  eu  ses  écrits,  qu'il  en  avoit  publié  lui-même  de 
son  vivant  différentes  éditions,  les  unes  moins  les  autres  plus 
complettes.  Les  copies  qui  s'en  sont  faites  dans  la  suite,  auront 
été  aussi  différentes  gue  les  originaux,  sur  lesquels  on  les  avoit 
tirées.  C'est  rette  différence  de  manuscrits,  qui  est  cause  que 
les  premières  éditions  des  oeuvres  de  ce  Poëte,  qui  ont  paru 
depuis  l'origine  de  l'imprimerie  ,  sont  ihcomplettes  ,  parce 
qu'on  est  tombé  d'abord  sur  des  exemplaires  qui  ne  conte- 
noient  qu'une  partie  de  ses  écrits.  De  sorte  que  plusieurs  de 
ses  opuscules  et  même  des  plus  considérables  ne  virent  le  jour 
qu'après  les  quatorze  à  qumze  premières  éditions  de  cet  Au- 
teur. 

'  La  première  édition  des  écrits  d'Ausone  réunis  ensemble,  J"a''-  wb.  lai.  p. 
que  l'on  sache  être  sortie  des  presses  de  quelque  Imprimeur,  est 
celle  qui  fut  faite  à  Milan  en  l'année  1490.  On  ne  marque  pas 
la  qualité  du  volume,  '  non  plus  que  de  celle  qui  parut  à  Par-  Bib.  Vaiikei. 
me  par  les  soins  de  Thadée  Ugoletti  en  1499.  On  lit  à  la  fin 
de  celle-ci  que  l'on  y  a  ajouté  les  épigrammes  d'Ausone  tels 
qu'on  disoit  qu'ils  étoient  sortis  de  la  bibliothèque  de  George 
Alexandre,  aparemment  sur  l'édition  qu'on  en  avoit  publiée  à 
Venise  dès  1496,  ou  même  1472,  ou  1494.  Nous  ne  rapel- 
lons  point  ici  cette  édition,  non  plus  que  les  autres  qui  se  sont 
faites  de  divers  Ofiuscules  d'Ausone  séparément  de  ses  autres 
ouvrages.  On  se  souvient  sans  doute  que  nous  les  avons  mar- 
quées à  l'article  de  chacun  de  ces  opuscules.  '  Tout  ce  que  l'on  ^«s  F-  djss.  p.  33. 
en  avoit  déterré  jusqu'alors  se  trouve  imprimé  à  Venise  chez 
Jean  Tacuini,  en  1507,  par  les  soins  de  Jérôme  Avantius, 
doi)t  on  loue  beaucoup  le  travail. 

' En  1513  Jérôme  Alexandre  aïant  préparé  une  nouvelle  édi-  ■••  S'  vin.  Ccn. 
tion  des  écrits  d'Ausone,  la  publia  à  Paris  chez  Josse  Bade  en 
un  volume  in-A".  Cet  éditeur  y  joignit  l'Idylle  des  roses,  qui 
jusques-là  avoit  été  atribué  à  Virgile,  et  imprimé  avec  ses  au- 
tres poésies.  Alexandre  ne  donna  point  alors  de  commentaire 
sur  le  texte,  et  se  contenta  seulement  de  le  promettre.  On  ne 
voit  point  qu'il  ait  satisfait  à  sa  promesse  ;  '  quoique  le  même  ■■■^-  ^"'p-  ''''• 
Imprimeur  renouvellàt  son  édition  en  1517.  '  La  même  année  ...Baib.t.i.p.os. 
en  vit  paroître  encore  une  autre  in-i".  comme  les  deux  précé-  "' 

J'orne  I.  Sec    Part  R  r 

2 1  * 


314  AUSONE, 

iv  SIECLE,     dentés.  Celle-ci  fut  faite  à  Venise.  On  no  dit  pa»  le  nom  de 
~ — '~^j.       l'Imprimeur.  '  Dès  1515  Richard  Crocus  de  son  côté  avoit 
aussi  donné  les  œuvres  d'Ausone.  Elles  furent  imprimées  en 
ntiême  volume  à  Leipsik  chez  Val  Schurtian. 
uib.  Cas.  ucu.  '  Ellcs  furcot  remiscs  sous  la  presse  en  un  volume  m-8".  à 

Basie  chez  Valentiïi  Curion  l'an  1523.  On  y  fit  quelques  cor - 
rtections  aux  Sommaires  d'Ausone  sur  chaque  livre  de  l'Iliade 
S511.  |wo.  chr.  et  de  l'Odyssée  d'IIomere.  '  A  Rome  l'année  suivante  1524 
en  parut  line  nouvelle  édition  in-folio,  avec  les  notes  de  Ma- 
Kii..  Cas.  ««11.  rie-Ange  Accursius.  '  Il  y  en  eut  une  autre  moins  considéra- 
...I!.  M.  .le  Ebro.  blc  à  Lyon  chez  Sebastien  Gryphe  l'an  1537  m-8».  '  Mais  trois 
ans  après  en  1540  le  même  Imprimeur  en  donna  une  qui 
étoit  plus  complette  qu'aucune  autre  qui  eût  encore  paru.  Cet- 
te édition  qui  est  m-8°  contient  une  partie  du  Technopœqnion 
qui  n'avoit  point  encore  vu  le  jour,  et  le  traité  des  villes  cé- 
lèbres un  peu  plus  correct.  U  est  vrai  que  ce  dernier  opuscu- 
le se  trouvant  encore  défectueux,  et  Elie  Vinet  en  aïant  re- 
couvré un  manuscrit  plus  fidèle,  le  fit  ensuite  réimprimer  sé- 
parément, comme  nous  l'avons  dit  en  son  lieu, 
itay.  a.  p.  4»t.  |  '  Ou  vit  cucorc  les  œuvres  d'Ausone  sortir  des  presses  du 
Arci..  i.  ±  1).  «I.  jjj^jjjg  Imprimeur  en  1549.  Ce  fut  de  Ducheri  qui  prit  soin  de 
i!ii..  I).  .lu  Loich.  cette  édition.  '  Deux  ans  après  en  1551  parut  à  Paris  chez  Ja- 
ques Kerver  en  un  volume  iw-lG,  par  les  soins  de  Jaques  Gou- 
pyl,  celle  qu'EIiiî  Vinet  avoit  préparée.  Celte  édition,  com- 
me presque  toutes  les  précédentes,  donne  encore  à  Ausoiie  le 
surnom  de  Pœonius  ;  vX  quelques-unes  y  ajoutent  même  le  titre 
de  Médecin,  en  le  confondant  ainsi  avec  Jule  Ausone  son 
père. 
Da).  il»  I  Aïoii.  iij.  '  Encore  à  Lyon  en  1557  Jean  de  Tournes  mit  au  jour  en 
un  volume  m-S".  une  autre  édition  d'Ausone.  Le  public  est 
redevable  de  celle-ci  à  Louis  le  Mire;  et  les  Critiqués  en  font 
beaucoup  de  cas.  (Icpendant  il  s'en  faut  de  beaucoup  qu'elle 
soit  aussi  ample  '  que  celle  que  le  même  Imprimeur  donna  l'an- 
née suivante  1558  <-n  même  volume.  Ce  fut  Etienne  Charpin 
Chanoine  de  l'Eglise  de  Lyon,  qui  prit  le  soin  de  la  préparer 
sur  un  manuscrit  de  l'abbaïe  de  l'Isle-Barbe  le  plus  complet  que 
l'on  eût  encore  pu  recouvrer.  Au  moïen  de  ce  monument  l'é- 
dition se  trouva  augmentée  d'un  poëme  au  Lecteur,  des  Parcit- 
talia,  des  éloges  dis  Professeurs  de  Rourdeaux,  des  épilaphes 
des  Héros,  de  l'Eclogarium  et  de  quelques  autres  petits  poè- 
mes, de  quelques  letres.  L'Editeur  y  ajouta  aussi  le  poëme  de 


liil).  s.  Soru'.AiiJ. 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.    315 

Sulpicia  Proba.  Ce  fut  par  les  soins  de  Guillaume  do  la  Barge     iv  sieci.e. 
Chanoine  de  la  même  Eglise,  que  cette  édition  vit  le  jour. 

'  En  1507  les  œuvres  d'Ausone  parurent  de  nouveau  à  An-  Pab.  ii.. 
vers,  '  où  elles  furent  réimprimées  l'année  suivante,  l'une  et  Bib.  aurpi. 
l'autre  fois  en  un  volume  m-10,  et  avec  les  notes  de  Théodo- 
re Pulman.  Comme  nous  n'avons  pu  voir  ces  éditions  par  nous- 
mêmes,  nous  ne  saurions  dire  si  elles  furent  faites  ou  sur  celle 
de  Charpin,  qui  étoit  alors  la  plus  complette,  ainsi  qu'on  le  vient 
de  voir,  ou  sur  quelque  nouveau  n^anuscrit. 

Elie  Vinet,  qui  dès  1551  avoit  publié  une  édition  fort  im- 
parfaite de  nôtre  Poëte,  aïant  fait  de  nouvelles  découvertes  à 
ce  sujet,  et  profitant  de  celles  des  autres,  en  prépara  une  nou- 
velle édition  qui  l'emporta  sur  toutes  les  autres  et  pour  la  fi- 
délité du  texte  et  pour  le  savant  commentaire  dont  il  l'énrichit. 
'  Cette  édition  parut  d'abord  à  Bourdeaux  m-4'*.  l'an  1570,  Bib.  coih.  p.  «ni 
puis  en  trois  endroits  différens  tout  à  la  fois  et  la  même  année,  2'''|Ba''y'.ibYAn-b. 
qui  étoit  1575;  mais  sans  le  commentaire  de  Vinet  et  seule-  'i>  i  Bit.  Miss.  cen. 
ment  avec  les  leçons  de  Joseph  Scaliger  :  h.  Bourdeaux  chez 
Simon  Millange  en  un  volume  in-A".  à  Lyon  chez  Antoine 
Gryphe  tn-H°.  et  à  Genève  chez  Jaques  Stoër  en  un  gros  volu- 
me m-16. 

'  Vinet  y  aïant  ensuite  joint  son  commentaire,  et  divers  an-  Kb.  Waj.  m.,n 
ciens  monumens  qui  peuvent  s  n-vir  à  éclaircir  le  texte  de  son 
Auteur,  comme  les  lotres  de  Symrnaque  et  les  poëmes  de  S. 
Paulin  à  Ausone,  cette  édition  reparut  comme  toute  nouvelle, 
d'abord  à  Bourdeaux  chez  le  même  Imprimeur  et  en  même 
volume  l'an  1580,  '  et  depuis  en  1588  à  Genève  chez  Stoër  Boid.bib.  bisi.  p. 
m-16,  "  et  à  Heidelberg  chez  Commelin  m-8''.  *•  Le  Catalogue  /pab.  ib. 
de  la  bibliothèque  de  M.  le  Cardinal  Barberin  en  marque  une  a-J*'^  .*"''"''■  '  ''' 
édition  faite  à  Bourdeaux  dès  1546  en  un  volume  m-4°.  avec 
les  notes  de  Vinet  et  de  Scaliger.  Mais  il  y  a  toute  aparence 
que  la  date  est  infidèle. 

'Après  que  celle  édition  eut  été  ainsi  multipliée,  Simon  .s.  vm.  dn 
Millange  Imprimeur  à  Bourdeaux,  sur  divers  avis  de  Savans 
qui  ne  jugeoient  pas  que  toutes  les  observations  dont  on  avoit 
jusques-!à  acompagné  le  texte  d'Ausone,  fussent  suffisantes,  re- 
cueillit tout  ce  que  les  plus  habiles  Critiques  avoient  fait  à  ce 
sujet,  et  le  joignit  au  texte  original.  Il  remit  de  la  sorte  Au- 
sone sous  la  presse  l'an  1590  en  un  volume  m-4".  où  l'on  trou- 
ve et  le  commentaire  de  Vinet  et  les  remarques  d'Adrien  Tur- 
nebe,  de  du  Jun,  de  Juste  Lipse,  de  Guillaume  Canter,  de 

R  r  ij 


3i0  AUSONE, 

IV  SIECLE.  Scaliger,  et  à  la  fin  la  chronique  de  Gabriel  de  Lurbe.  '  L'a- 
*r~Ançcri  s"  ^^^^^  '1^®  ^^^  '®  public  à  Ausone  si  bien  cclairci,  porta  Millan- 
Ài)'i).  Ami.  ge  à  le  réimprimer  encore  en  même  volume  les  années  1 598  et 

1604.. 
syii.  poc.ciir  I  itib.       '  Jaques  Stoër  de  son  côté  en  fit  de  même  à  Genève,  où  il 
An-'d'  I  ^"^  'Lug-  en  multiplia  les  éditions  jusqu'à  cinq  différentes  fois  en  moins 
Baf.  ib  I ...  s.jui.  (Je  18  ans  :  les  années  1591, 1595, 1596,  1598  et  1608.  Tou- 
tes ces  éditions  sont  en  un  volume  in-ld,  excepté  celle  de  1598 
Bib.  D.  Fior.        qui  cst  m-12".  Celle-ci  fut  revûë  en  partie  par  Isaac  Vossius.  Il 
y  a  aparence  que  celle  qui  parut  à  Lyon  l'an  1625  en  un  volu- 
me in-A".  fut  faite  sur  les  dernières  de  Bourdeaux. 
...  D.  (le  Lorcii  i        '  Lcs  Imprimeurs  d'Amsterdam  a  l'envi  des  autres  publie- 
syii.  poi-.  cbi.       j,gj^j  g^ygg-  |gg  Qgnyj.gg  d'Ausone,  mais  sans  notes.  On  en  trouve 

trois  éditions  m-24  fort  bien  conditionnées,  l'une  de  1621  chez 
(iuillaume  Jansson,  l'autre  de  1629,  et  la  3"  de  1631  chez 
Bib.  s.  Vin.  con.  Guillaume  Blaeu.  '  Libert  Imprimeur  à  Paris  en  donna  encore 
une  sans  notes  m- 16  l'an  1629. 

Après  tant  de  différentes  éditions  Jaques  Tollius  entreprit 
d'en  publier  une  nouvelle  encore  plus  correcte  el  plus  métho- 
dique que  toutes  les  autres.  A  cet  effet  il  mit  les  divers  opuscu- 
les d'Ausone  dans  un  nouvel  ordre,  tel  que  nous  l'avons  suivi, 
lorsque  nous  en  avons  fait  le  dénombrement,  et  corrigea  le 
texte,  non  sur  les  manuscrits,  comme  il  le  déclare  lui-même, 
mais  seulement  sur  les  observations  des  Critiques,  Puis  aïant 
choisi  entre  tout'ce  que  l'on  avoit  écrit  tant  sur  les  ouvrages  de 
ce  Poëte  en  général,  que  sur  chaque  opuscule  en  particulier, 
ce  qu'il  y  a  de  plus  propre  à  en  éclaircir  les  difficultés,  il  l'a 
apliqué  aux  endroits  qui  en  avoient  besoin.  Ce  choix  supose  du 
discernement  et  du  travail  pour  abréger  ainsi  une  matière  aussi 
ample.  Mais  sans  prétendre  rien  diminuer  du  mérite  de  l'un  et 
de  l'autre,  on  peut  dire  que  l'on  n'a  pas  encore  assez  abrégé  la 
plupart  de  ces  notes.  L'Editeur  a  encore  eu  soin  d'ajouter  à  la 
fin  de  l'ouvrage  d'autres  plus  courtes  notes  pour  augmenter, 
expliquer  ou  corriger  ce  qu'il  avance  dans  les  autres,  ou  même 
quelquefois  pour  expliquer  le  texte  original.  Ces  additions  et 
corrections  sont  suivies  des  éloges  historiques  d'Ausone  compo- 
sés par  Scaliger,  Vinet,  Crinitus  et  le  Gyraldi.  Après  quoi  vien- 
nent les  diverses  tables  toujours  utiles  dans  les  ouvrages  de 
longue  haleine.  On  ne  sait  pourquoi  Tollius  a  omis  la  letre  de 
l'Empereur  Theodose  à  nôtre  Poëte.  S'il  ne  la  jugeoit  pas  di- 
gne de  paroître  à  la  tête  du  recueil  de  ses  poésies,  comme  elle 


RHETEUR,  ORATEUR  ET  POETE.         317 

fait  dans  plusieurs  autres  éditions,  elle  mériloit  bien  do  n'être    iv  siècle. 
pas  au  moins  entièrement  oubliée. 

Celte  édition  de  Tollius  ainsi  préparée  vit  le  jour  pour  la  ■ 

première  fois  en  \  669 ,  comme  le  marque  l'Editeur  à  la  tête 
de  l'avertissement  de  la  suivante.  '  Elle  parut  depuis  pour  la  se-  bmi.  s.  vin.  du. 
conde  fois  en  un  gros  volume  in-ii°,  à  Amsterdam  chez  Jean 
Blaeu,  l'an  1671,  'et  pour  la  troisième  fois  après  avoir  été  re-  nii..  Lug.  Uii.  iii. 
touchée  par  l'Editeur,  au  même  endroit  l'an  1680  m-l2°. 

Mais  de  toutes  ces  éditions  d'Ausone  aucune  n'aproche  que 
de  loin  de  la  dernière  qu'on  a  publiée  en  1730 ,  sur  le  modèle 
de  celles  des  Auteurs  de  la  belle  latinité  à  l'usage  de  Monsei- 
gneur la  grand  Dauphin.  Le  public  en  est  redevable  à  M.  Sou- 
chay  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  belles  letres,  qui  l'a  por- 
tée à  sa  perfection.  'M.  l'Abbé  Fleuri  Chanoine  de  Chartres,  Aus.Fr.pr. p. 3.4. 
après  nous  avoir  donné  Apulée,  s'étoit  encore  chargé  d'Auso- 
ne. 11  avoit  déjà  beaucoup  avancé  l'ouvrage,  et  même  com- 
mencé à  le  faire  imprimer ,  lorsqu'il  se  vit  comme  obligé  de 
l'abandonner  par  la  faute  des  Libraires.  Après  sa  mort ,  M.  Sou- 
chay  a  bien  voulu  reprendre  son  travail ,  et  y  mètre  la  dernière 
main.  'Il  n'a  pu  revoir  le  texte  sur  les  manuscrits,  à  cause  de  p.  .i. 
leur  rareté  ;  mais  il  a  aporté  tous  ses  soins  pour  le  corriger  sur  les 
meilleurs  imprimés.  Il  a  suivi  dans  celte  édition  lemême  ordre 
que  Tollius  dans  la  sienne,  par  raportaux  écrits  d'Ausone.  Seu- 
lement il  a  renvoie  à  la  fin  les  trois  petites  préfaces  que  cet  au- 
tre Editeur  avoit  placées  à  la  têto.  De  même  il  a  détaché  du 
corps  de  l'ouvrage  ce  qu'il  y  a  de  plus  obscène ,  et  l'a  placé  à  la 
fin  comme  dans  une  espèce  d'appendice ,  afin  que  ceux  qui 
voudront  lire  Ausone,  puissent  le  faire,  sans  que  leur  pudeur 
en  soit  blessée.  Cette  édition  diffère  encore  des  précédentes ,  en 
ce  qu'elle  est  enrichie  d'une  interprétation  perpétuelle  sur  le 
texte,  et  d'une  table  très-ample  qui  doit  avoir  coûté  beaucoup 
de  travail.  D'ailleurs,  les  notes  en  sont  plus  châtiées ,  et  par 
conséquent  plus  claires  et  plus  utiles. 

M.  Souchayamisà  la  tête  une  petite  préface  pour  rendre 
compte  de  son  travail  et  de  celui  de  M.  l'Abbé  Fleuri.  Cette 
préface  est  suivie  d'une  savante  dissertation  sur  la  vie  et  les  écrits 
d'Ausone  et  les  principales  éditions  qu'on  en  a  faites.  Après 
quoi  viennent  les  letres  des  Anciens  écrites  à  ce  Poëte ,  entre 
lesquelles  M.  Souchay  n'a  pas  oublié  celle  de  l'Empereur 
Theodose.  On  trouve  ensuite  les  divers  témoignages  que  les 
Anciens  et  les  Modernes  ont  rendus  à  la  mémoire  de  nôtre 


318  PAUL, 

IV  SIECLE.  Poêle.  Tout  à  la  fin  sont  placées  en  une  espèce  d'appendice, 
d'excellenlcs  remarques  tant  historiques  que  critiques  de  la  fa- 

Pii).  s.  Vin.  en.  çoiî  du  dernier  Editeur.  'Celle  rdilion  ainsi  ornée  et  enrichii; 
est  sortie  en  un  gros  volume  in-A".  des  presses  de  Jaques  (Juc- 
rin,  Imprimeur  à  Paris,  qui  montre  par  là  qu'il  peut  taire  hon- 
neur au  bel  art  de  l'Imprimerie. 

Poi'.  lai.  cor.  p.       'Outre  toutes  ces  éditions  particulières  d'Ausone,  ses  poë- 

po6*"i'!"i^  i..*;w7-i'  sies  se  trouvent  encon;  dans  les  divers  recueils  des  anciens  Poë- 

^"*-  tes  latins.  (XVIII.) 

PAUL, 

Rhetkur    kt    Poète. 

.vus.op. ii.p.6i6.  '  A  Xiqs  Paulus  étoit  du  pais  de  Bigorre  dans  l'ancienne 
pp.  9.  p.  601 1  cjy.  xV  Aquitaine  troisième  ,  pas  loin  des  monts  Pyrénées.  11 
1.1.  p.  ;ioi.  ç^^  ggg  études  avec  le  Poëte  Ausone ,  soit  à  lîourdeaux  soit;\ 

Toulouse  ;  et  l'étroite  amitié  qu'ils  lièrent  dès-lors  ensimble  , 
.p.  10-is.  dura  toute  leur  vie.  ' Paul  s'apliqua  particulièrement  à  l'élo- 

quence et  la  poétique,  et  ne  négligea  pas  la  langue  gréquc.  Il 
fit  de  si  grands  progrès  dans  ces  divers  genres  d'étude,  qu'il 
semble  que  le  grec  lui  fût  aussi  familier  que  le  latin,  et  qu'il 
devint  un  homme  éloquent,  et  sur-tout  un  des  premiers  Poë- 
p.  008.  tes  de  son  siècle.  'C'est  ce  qui  fait  dire  de  lui  à  Ausone. 

l'auk',  Cyinœnaruin  ccichi'iiirm'  Castalinruin 
Aluiiiiic  quonilaiii,  iiuiic  patur. 

«p.  M.  p.  61  '.  'Ses  études  finies,  Axius  Paulus  se  mit  à  hanter  le  barreau, 

«p.  8.  p.  .W8.  coo.  et  y  plaida  quelque  teins.  11  quita  ensuite  cet  emploi  pour 
prendre  une  chaire  de  rhétorique.  On  ignore  précisément  l'en- 
droit où  il  professa  ainsi  l'éloquence  ;  et  dans  tout  ce  qu'Ausone 
nous  raf)orte  de  ce  llhéteur,  on  ne  trouve  rien  pour  le  déter- 

-p.  10.  p.  610.  niiner,  '  D'abord  on  pourroit  croire  que  c'étoil  a  Bourdeaux  ,. 
où  on  le  voit  quelquefois  paroître  ;  et  l'on  n(;  sauroit  tirer  une 
preuve  du  coniraire,  de  ce  qu'Ausone  ne  parle  point  de  lui  en- 
tre les  autres  Professeurs  de  cette  ville.  La  raison  en  est  qu'Au- 
sone déclare  positivement  ne  doimer  les  éloges  que  de  ceux  qui 
éloient  morts,  et  qu'Axius  Paulus  vivoit  encore,  lorsqu'il  les 
composa.  Mais  cette  o[)inion  ne  se  peut  soutenir,  lorsque  l'on 

«p.  8.  u.  p.  :m.  fait  alention  '  qu'Ausone  retiré  de  la  Cour  dans  sa  terre  de  Lu- 


RIlRTEUn  ET   POETE.  319 

caniac  sur  la  Garonne ,  écrit  à  son  ami  qu'il  a  quilé  ce  séjour  iv  siècle. 
pour  celui  de  la  terre  qu'il  avoit  en  Saintonge,  afin  d'être  plus 
à  portée  de  le  voir  et  de  jouir  de  sa  compagnie.  C'est  ce  que 
naturellement  Ausone  n'auroit  pas  fait,  si  nôtre  Rhéteur  avoit 
eu  sa  chaire  à  Bourdeaux ,  dont  la  terre  de  Lucaniac  étoil  in- 
comparablement plus  près  que  l'autre  t(;rre  d'Ausone  en  Sain- 
tonge. De  sorte  qu'il  y  a  bien  de  l'aparence  que  c'étoit  à  Sain- 
tes même  qu'enseignoit  ce  Professeur.  Mais  n'en  aiant  point  de 
preuves  positives ,  nous  n'osons  pas  l'assurer. 

Quoiqu'il  en  soit,  'Ausone  témoigne  n'avoir  point  eu  de  .vus.  cp.  r.  u. 
|)lus  grand  plaisir  à  sa  campagne ,  que  d'y  posséder  ce  Rhé- 
teur, tant  il  trouvoit  de  charmes  en  ses  ehtretiens.  Nous  avons 
encore  sept  des  letres  que  lui  écrivit  Ausone ,  dont  quelques- 
unes  sont  mêlées  de  grec  et  de  latin  ,  et  qui  toutes  sont  autant 
ou  d'exhortations  à  le  venir  voir ,  ou  de  reproches  de  ce  qu'il 
ne  le  faisoit  pas  assez  souvent.  'Ce  fut  à  sa  sollicitation  qU'An-  cdyi.  7.  p.  xvj. 
sone  publia  son  7'' Idylle,  qu'il  lui  dédia  par  une  espèce  d'épi- 
tre  qui  fait  honneur  au  savoir  de  l*aul.   Ausone  parle  ailleurs  ep.  8.  p.  ooo. 
des  pièces  d'éloquence  qui  sortoient  de  son  école  comme  de 
morceaux  dignes  de  la  curiosité  des  Savans. 

'  Nôtre  Rhéteur  toutefois  ne  donnoitpas  tellement  tout  son  11.  |cp.  10.  p.(io;<. 
tenis  aux  fonctions  de  son  emploi ,  qu'il  n'en  réservât  pour  la  ''''' 
composition.  Il  s'apliquoit  particulièrement  à  la  poésie,  pour 
laquelle  il  avoit  un  génie  extraordinaire.  Il  faisoit  des  vers  do 
toutes  les  façons  ;  '  elce  qu'il  en  publioit ,  étoit  si  achevé  ettoû-  «.lyi.  7.  p.  .«u. 
jours  si  bien  reçu,  qu'il  se  trouvoit  à  couvert  de  la  censure. 
'  Ausone  en  particulier  étoitsi  frapé  de  la  beauté  des  poésies  de  ep.  n.  p.oixuu. 
son  ami ,  qu'elles  lui  firent  suprimer,  ou  tout  au  moins  différer 
d'exposer  au  grand  jour  plusieurs  de  ses  propres  productions. 

' Quoique  Paul  travaillât  en  tout  genre  d(î  poésie,  il  paroît  «p  10  11.  h.  p. 
néanmoins  que  le  genre  dramatique  l'ocupoit  plus  que  tout  au- 
tre. Il  s'exerçoit  indifféremment  au  comique  comme  au  tragi- 
J|ue.  Ausone  fait  mention  d'une  de  ses  comédies  comme  la  plus 
amouse,  qui  étoit  intitulée  Ifelirus,  c'est-à-dire  l'Exti'avagant. 
Il  .semble  même  que  Paul  présidoit  en  persoime  aux  représen- 
tations de  ces  sortes  de  pièces,  auxquelles  la  maison  d'Ausone 
servoit  souvent  de  théâtre,  etcju'il  composoit  aussi  des  airs  pour 
les  entr'acles.  '  Au  moins  Ausone  releve-t'il  à  ce  sujet  son  ha-  p-  •*»!*•  «'3- 
bileté  dans  la  musique.  Un  homme  de  ce  caractère  étoit  assez 
digne  '  de  la  dédicace  qu'Ausone  lui  fit  de  son  Cento  nuptialis,  «••>'■  <3.  p.  499. 
que  nous  avons  déjà  fait  connoîtrc  pour  tout  ce  qu'il  vaut. 


320  GREGOIRE, 

IV  SIECLE.  'Axius  Paulus  éloil  déjà  vieux  lors  de  ce  fréquent  commer- 
•  Aus.  ep.  n.  p.  ^^  *^^^  Ausone.  S'il  a  survécu  celui-ci ,  ce  ne  peut  pas  être  de 
•i^i-  beaucoup.  Au  reste  les  siècles  suivans  ne  nous  ont  rien  conservé 

des  productions  de  sa  Muse,  quoiqu'il  paroisse  qu'elles  fussent 

fort  répandues  dès  le  vivant  de  ce  Poète. 


GREGOIRE, 

Préfet  des  Gaules. 

ON  ignore  quelle  fut  la  patrie  de  ce  Préfet.  Mais  person- 
„_, ,. ne  ne  doute  qu'il  ne  fût  Gaulois  de  nation.    Quelques 

10.  p.  iu.  Ecrivains  sont  allés  même  jusqu'à  le  faire  fils  du  Poète  Auso- 

Aus.  ca.i.G.p.32i.  ne:  ce  qui  est  absolument  faux.  '  11  est  vrai  qu'Ausone  lui  adres- 
*"•  sant  son  Idylle  de  Cupidon  ataché  à  une  croix ,  le  qualifie  son 

fils  parce  qu'il  avoit  été  son  disciple ,  et  qu'en  celte  qualité  il 
lui  étoit  tout  dévoué, 
sjm.  1.3.  op.  18.       'Grégoire  avoit  reçu  de  la  nature  tous  les  dons  du  corps  et 
**•  de  l'esprit  qui  font  les  grands  hommes.  C'étoil  un  génie  rare 

qui  faisoit  l'admiration  des  beaux  esprits  de  son  tems.  Il  avoit 
un  talent  particulier  pour  bien  écrire.  Tout  ce  qui  sortoit  de 
sa  plume  étoit  assaisonné  du  sel  d'une  sagesse  que  l'on  ne  pou- 
voit  assez  loiier.  Outre  cet  avantage  qui  en  devoit  faire  le 
principal  mérite ,  on  y  voïoit  briller  la  nouveauté  des  pensées 
sous  les  termes  de  la  savante  antiquité.  L'Orateur  Symma- 
que  un  de  ses  amis  et  un  de  ses  plus  grands  admirateurs ,  étoit 
si  charmé  de  la  beauté  de  son  style  ,  qu'il  lui  faisoit  presque 
continuellement  des  reproches ,  de  ce  qu'il  ne  lui  écrivoit  pas 
op.  i7-*i  |i.8.cp.  assez  souvent.  'Nous  avons  encore  sept  letres  de  cet  Orateur 
'^'  à  Grégoire,  qui  en  suposent  beaucoup  d'autres  de  l'un  à  l'au- 

tre, et  qui  sont  remplies  de  cette  sorte  de  reproches. 
1. 3.  cp.  18.  'Symmaque  dans  une  de  ces  letres  fait  mention  d'un  dis- 

cours de  la  composition  de  son  ami,  qu'il  insinue  avoir  reçu 
Tiii.  Einp.  t.  ,i.  p.  de  grands  aplaudissemens.  'On  croit  que  c'est  une  déclaration 
de  Gratien  que   Grégoire  avoit   envoiée  à  Symmaque  pour 
être  lûè  dans  le  Sénat  en  376.  On  juge  par-là  que  Grégoire 
étoit  alors  Questeur  de  l'Empire ,  aïant  succédé  à  Ausone  dans 
cette  charge,  qui  demandoit,  comme  l'on  sait ,  un  homme 
sym.  ibij.  cp.  17-  éloqucHt  ct  versé  dans  la  connoissance  des  loix.'  Il  est  au  moins 
^'  certain ,  suivant  ces  mêmes  letres ,  que  Grégoire  étoit  emploie 

dans 


147. 


&i 


PREFET  DES  (.AULES.  321 

dans  lesaflaircs  |)ul)li(|U('s;  •' clil  n'y  a  pas  même  lieu  de  don-     ivsiecle. 
ter,  que  ci;  ne  soit  le  inrine  qui  romplissoit  la  charge  de  Pré-  ^-liii  ibùi  ij  t^-- 
fet  du  Prétoire  des  Gaules  et  d'Espagne  avec  Probe  en  l'an- 
née 3H3. 

'  Grégoire  y  fil  paroîlre  beaucoup  de  zèle  pour  la  justice  et  Sui.hisi.i.'j.n.cs. 
pour  la  vérité  contre  les  Priscillianisles.  Ithace  persécuté  par 
ces  hérétiques,  et  contraint  de  se  réfugier  dans  les  Gaules,  eut 
recours  à  nôtre  Préfet,  et  lui  raconta  ce  qui  s'étoit  passé  en  Es- 
pagne au  sujet  de  celle  grande  alfaire.  Grégoire  l'écoula  favora- 
blement, et  donna  aussi-tôt  ordre  qu'on  lui  amenât  les  auteurs 
du  trouble.  Et  afin  que  l'Empereur  ne  se  laissât  pas  surprendre 
par  les  ruses  des  hérétiques,  il  lui  fit  un  raport  fidèle  de  toutes 
choses.  Mais  ses  bonnes  intentions  furent  frustrées,  et  sa  dili- 
gence inutile.  L'avarice  de  quelques  Courtisans,  qui  rendoient 
toutes  choses  vénales,  rompit  toutes  ses  sages  mesures.  Aumoïen 
d'une  somme  considérable  comptée  à  Macédoine,  un  des  pre- 
miers Officiers  du  Paiaisdu  Prince,  les  hérétiques  obtinrent  que 
la  connoissance  de  leur  cause  fût  ôlée  au  Préfet  et  renvoïée  au 
Vicaire  d'Espagne.  G'étoit  Marinien,  qui  gagné  comme  Macé- 
doine favorisa  les  Priscillianisles  de  tout  son  pouvoir. 

'  Grégoire avoit  au  moins  un  fils,  qui  suivant  la  coutume  de  Sym.  i.  7  ep.  rt 
la  plupart  de  nos  jeunes  Gaulois  de  ces  tems-là,  étoit  allé  à 
Rome,  hanter  le  barreau.  Nous  avons  une  letre  par  laquelle 
Symmaque  qui  étoit  prié  de  veiller  sur  ses  études,  le  recom- 
mande à  Messala  '  homme  habile  dans  lesletres,  et  depuis  Pré-  tui.  iWii.  p.  -m. 
fet  d'Italie  en  399.  'Symmaque  dans  cette  letre  parle  de  Gré-  sym  ii.i.i. 
goire  comme  d'un    homme  du  premier    mérite,  qui  n'étoit 
plus  au  monde.  De  sorte  qu'il  mourut  quelques  années  avant 
la  fin  de  ce  IV  siècle.  Il  ne  nous  reste  plus  aujourd'hui  aucun 
monument  '  de  cette  grande  éloquence  que  Symmaque  admi-  1.  ■'«p.  2.! 
roit  si  fort  en  lui,  et  qui  lui  faisoit  dire  en  lui  parlant  à  lui- 
même,  Oratione  mirabilis  es. 


RUFIN, 

MiNîSTRK    d'Etat. 

OUoique  le  Principal   personnage    que  fit   Rufin,  fût  sur 
le  théâtre    des  premières  dignités   de   l'Empire,    il    ne 
laissa  pas  de  paroître  avec  distinction  entre  les  beaux  esprits  et 

Tome  J.  Sec.  Part.  S  s 


322  HUFIN, 

IV  siKCLK.     les  hommes  de  lelrcs  do  son  tems.  ''  il  ('lojt  Gaulois  do  nation, 
"T'. — "TT      do  l'aveu  même  des  Ecrivains  ('trancers,  et  faisoil  sa  deinouro 

a  Val.  iiol.  Gall.  p.  d  •  »        •      •  •    ■>  n       .•• 

187. 'J.  |  Till.  Kmp.  aKuseou  Eause  dans  1  ancienne  Aqnitame  troisième.  Jl  hîu- 

77i'i^ym.L!3..!|.'.  nissoit  Cil  sa  pcrsonru!  toutcs  Ics  qualiti'squl  concourcnt  h  ren- 
Fièch^hi.^ de^t!.  dre  un  homme  acompli.  Parfaitement  bel  extérieur  pour  le 
1. 4.  p  «3.         corps,  grande  facilité  à  s'énoncer,  délicatesse  dans  les  bons 
mots,  politessedans  les  manières,  élévation,  vivacité,  étendue 
d'esprit  :  rien  ne  lui  manquoit.  Seulement  il  eut  été  à  sou- 
haiter, comme  l'on  verra  par  la  suite,  qu'il  eût  eu  le  cœur  aussi 
'   bien  placé  qu'il  avoit  l'extérieur  parfait  et  gracieux. 
Sym.  1. 3.op.«i  I       '  Vers  le  Commencement  de  l'Empire  de  Tliéodose,  Rufin 
Tiu.  ibid  I  Ficcii.  qjjjjg  ^^  patrie  et  alla  à  la  Cour  de  Constantinoph-  où  regnoit  ce 
Prince.  Comme  il  avoit  l'esprit  aussi  souple  et  insinuant  que 
vif  et  élevé  il  eut  bien-tôt  gagné  les  bonnes  grâces  de  l'Empereur. 
De  sorte  (|ue  Tliéodose  croiaiit  voir  en  lui  beaucoup  de  candeur 
et  de  probité,  lui  donna  toute  sa  conliance,  et  l'éleva  aux  plus 
Amb.ej).  .-,2.  n.  1  !   grauds  liouneurs.  '  Dès  l'année  3î)U  au  plus  tard  il  lui  donna 
2iÎ5''i  Tiir:  ihùLp:  la  charge  de  grand  Maître  du  Palais  ;  et  en  392  il  le  fit  Consul 
3t.%.  .m.  i2i.       avec  Arcade  son  fils  pour  Collègue.  Pendant  son  Consulat  il 
h;  revêtit  encore  de  la  dignité  de  Préfet  du  Prétoire;  et  deux 
ans  après  allant  faire  la  guerre  au  Tyran  Eugène,  il  le  laissa 
auprès  des  jeunes  Princes  Arcade  et  Honorius  maître  absolu 
de  tout  l'Orient.  On  voit  même  par  le  Comte  Marcellin  qu'il  eut 
aussi  la  dignilé  de  Patrice. 
Tiii.  ibid.  p.  423 1       '  Ce  fut  pendant  l'absence  de  Théodose  que  Rufin  fit  assem- 
H.  E.  i.  9.  p.  Kta.  j^j^j.  j^,g  pij^g  illustres  iwêqiiesd'Orient,  pour  faire  la  dédicace 
d'une  Eglise  qu'il  avoit  fait  bâUr  avec  un  palais  de  son  nom 
/  auprès  de  Calcédoine,  et  recevoir  le  baptême  h  cette  solennité. 

Au  sortir  des  fonts,  les  Evêques  le  mirent  entre  les  mains  du 
S.  Solitaire  Ammofte,  pour  les  conseils  duquel  Rufin  eut  tou- 
jours dans  la  suite  beaucoup  de  déférence  et  de  respect.  C'est-là 
peut-être  le  plus  ancien  exemple  que  nous  aïons  de  donner  des 
parains  aux  adultes. 

Tant  de  dignités  entassées  les  unes  sur  les  autres,  un  si  haut 

degré  de  faveur  auprès  d'un  Prince  aussi  éclairé  et  aussi  juste 

qu(!  l'éloit  Théodose,  des  actions  aussi-  éclatantes  de  pieté, 

suposent  dans  Rufin  un  grand  fonds  de  mérite  et  de  religion. 

Amb.  ibi.i.  '  L'estime  qu'en  faisoit  S.  Ambroise,  qui  le  regardoit  comme 

m.'"423"'''428.  "î   son  ami,  et  se  réjoiiissoit  de  son  élévation,  en  donne  la  même 

w'i''6'^c''i**'    idée.  •  Mais  l'ambition  et  l'avarice  ternirent  horriblement  tout 

•W        '      ''"  ce  qu'il  y  avoit  de  plus  louable  en  ce  Ministre.   L'une  en  fi. 


MINISTHK  MET  Aï.  323 

un  perfide,  l'autre  un  tyran.  11  poussa  celle-ci  jusqu'à  dépouil-  iv  siècle. 
Icr  les  familles  les  plus  opulentes  et  à  piller  toute  la  terre.  On 
rejeté  même  sur  lui  la  cruauté  que  Théodose  exerça  à  Thessa- 
lonique.  Il  porta  l'ambition  jusqu'à  prétendre  doimer  sa  lille 
en  mariage  à  Arcade,  et  à  faire  entrer  les  Huns  dans  l'Empi- 
re, afin  de  pouvoir  devenir  lui-même  JMnpereur.  Enfin  sa  mort 
mit  des  bornes  à  l'une  et  à  l'autre.  Il  périt  misérablement  le 
S?""  de  Novembre  305,  dix  mois  après  la  mort  de  Théodose, 
'  par  l'instigation  du  fameux  Stilicon  son  cival  irréconciliable,  piùiosi.  i.  h.  n.  3. 

'Autant  que  iîufin  fut  élevé  en  honneur  pendant  sa  vie,  au-  iiier.  e^  .t-..  p. 
tant  sa  mémoire  fut  déshonorée  après  sa  mort.  On  porta  com-  |1?| 4!^' '"'*"'  '' 
me  en  triomphe  sa  tête  par  les  rues  de  Constantinople  ;  et 
après  lui  avoir  coupé  la  main  droite,  on  la  fit  courir  de  por- 
te en  porte  comme  pour  mandier,  et  venger  par  cette  déri- 
sion les  suites  de  son  insatiable  avarice.  Le  Poëte  Claudien  de 
son  côté  pour  faire  plaisir  à  Stilicon  son  Héros  et  pour  élever 
sa  gloire  sur  les  débris  de  celle  d(!  Kufin,  composa  contre  ce- 
lui-ci une  invective  sanglante  que  nous  avons  encore. 

'  Symmaque  ami  de  Ilufin  et  un  de  ses  plus  grands  admira-  sym.  1.  :\.  op.  sa. 
teurs,  loue  beaucoup  son  éloquence,  la  beauté  de  son  style,  "''  **  ^' 
ses  saillies  d'esprit,  ses  railleries  fines  et  ingénieuses.  '  Il  nous  cp.  si-oi  1  i.h.  q.. 
niste  encore   douze  letres  de  leur  commerce  mutuel.  Elhis  " 
sont  toutes  de  Symmaque  et  il  n'en  paroît  aucune  de  Rufin, 
non  plus  qu'aucun  autre  monument  de  son  éloquence. 

Seulement  nous  croions  devoir  lui  donner'  la  fable  de  l'a-  Kpi.  ei  pœ.  voi.  1. 
siphaé  en  vers  d'autant  de  différentes  mesures  qu'il  s'en  trouve  ^oiî'p^iw.'  ''"''''' 
dans  les  Poésies  d'Horace.  Ce  qui  nous  fait  juger  que  celte 
pièce  apartient  plutôt  à  Hufin  qu'à  tout  autre ,  c'est  que  dans 
quelques  exemplaires  elle  porte  le  nom  de  Rufin  homme 
Consulaire.  On  la  trouve  dans  le  recueil  des  épigrammes  et 
p:'tites  poésies  des  Anciens,  et  à  la  fin  de  quelques  éditions 
de  Pétrone.  Cruquius,  dit-on,  fut  le  premier  qui  la  publia,  et 
après  lui  Claude  Binet  et  Jean  Dousa  ou  de  Doès. 


S  s  ij 


:\2i 


IV   SIECLE 


ANONYME, 

Homme  de  Letres. 

LE  défaut  de  titre  à  la  tête  de  plusieurs  letres  de  Symma- 
que,  est  cause  que  nous  ignorons  le  nom  du  Savant  dont 
nousentreprenons  de  parler  ici.  D'abord  il  pourroit  venir  en 
pensée  qu'il  n'est  autre  que  le  Poëte  Ausone,  dont  nous  avons 
déjà  donné  l'histoire.  Il  faut  avouer  que  presque  tous  les  traits 
avec  lesquels  on  nous  le  représente,  sont  forts  ressemblans 
avec  plusieurs  de  ceux  de  la  vie  de  ce  Poëte.  Mais  il  s'y  trou- 
ve néanmoins  entre  l'un  et  l'autre  une  différence,  qui  écarte 

s>ii.  I.  -j.  cip.  h:;,  la  première  pensée,  et  ne  permet  pas  de  les  confondre.  '  C'est 
qu'il  paroîtque  nôtre  Anonyme,  etSymmaque  qui  nous  aprend 
ce  que  nous  savons  de  lui,  ne  se  conoissoientque  de  réputation 

Ans.  «11.17,  p.  oK.  et  par  leurs  écrits,  sans  s'être  jamais  vus.  Au  contraire  'Auso- 
ne et  Symmaque,  avant  que  de  se  lier  ensemble,  s'étoient 
connus  personnellement  à  la  Cour,  celui-ci  étant  encore  jeu- 
ne, et  l'autre  déjà  avancé  en  âge.  Cela  posé,  il  est  clair  que 
nôtre  Anonyme  est  différent  d'Ausone,  quelque  ressemblance 
qu'il  paroisse  d'ailleurs  entre  l'un  et  l'autre. 

sym.  ibiii.  '  Il  étoit  Gaulois,  né  sur  la  Garonne,  peut-être  à  Toulouse, 

ou  à  Agen,  ou  même  à  Bourdeaux.  Il  avoit  beaucoup  cultivé 
les  belles  letres,  et  s'y  étoit  acquis  une  si  grande  réputation, 
qu'il  fut  choisi  pour  instruire  un  des  fils  de  l'Empereur.  Ce 
n'étoit  pas  Gratien  dont  Ausone  étoit  déjà  chargé,  mais  Va- 
lentinien  son  frère  puîné,  qui  fut  élevé  partie  à  Sirmich,  par- 
tie à  Milan ,  où  Justine  sa  mère  avoit  sa  Cour  :  au  lieu  que 
Gratien  et  Yalentinien  son  peretenoienl  la  leur  à  Trêves. 

ii'iii  '  La  réputation  de  savoir  oii  étoit  nôtre  Anonyme,  faisoit 

désirer  depuis  longtems  à  Symmaque  d'entrer  en  liaison  avec 
lui.  Mais  il  fut  retenu  de  le  tenter  parla  crainte  de  passer  pour 
un  homme  qui  auroit  recherché  la  faveur  d'une  Cour  où 
l'Anonyme  exerçoit  un  emploi  qui  l'y  meltoit  en  grand  cré- 
dit. Celui  -ci  favorisa  le  désir  de  Symmaque  en  lui  écrivant  le 
premier  à  l'ocasion  de  quelques-uns  de  ses  ouvrages  qui  étoient 
venusàsa  connoissance.  Symmaqne  charmé  de  cette  ouver- 
ture, lui  en  marqua  sa  juste  sensibilité  par  une  letre  que  nous 
avons  encore.  Il  lui  parle  dans  cette  Ictre  comme  à  un  hom- 


ANONYME,   HOMME   DE   LETRES.       325 

me  d'un  savoir  éminent  et  d'une  censure  judicieuse  dans  les     iv  sieci-e. 
ouvrages  des  autres ,  et  le  prie,  s'il  trouve  quelque  chose  de 
i^préhensible  dans  les  siens,  de  lui  en  donner  avis  afin  qu'il  le 
corrige. 

'  A  cette  ocasion  Symmaque  se  déclare  grand  partisan  de  Sym.  ibid. 
l'éloquence  Gauloise,  comme  en  aïant  été  instruit  par  un  Pro- 
fesseur Gaulois  de  même  pais  que  nôtre  Anonyme.  Ces  traits 
désignent  assez  clairement  ou  Tiberius  Victor  Minervius  na- 
tif de  Bourdeaux ,  ou  un  des  fils  de  Sedatus  son  compatriote  , 
qui  enseignoient  l'un  et  l'autre  l'éloquence  à  Rome  après  le 
milieu  de  ce  siècle ,  comme  nous  l'avons  dit  ailleurs.  Sym- 
maque passionné  de  pouvoir  encore  puiser  dans  la  même  sour- 
ce ,  prie  nôtre  Anonyme  d'en  faire  couler  quelque  ruisseau 
jusqu'à  lui ,  afin  de  continuer  à  arroser  les  heureux  commen- 
cemens  qu'il  y  avoit  déjà  puisés.  «Vous  me  le  devez,  lui 
«  ajoute  Symmaque,  puisque  je  suis  en  quelque  sorte  un  élevé 
«  de  vos  écoles ,  aiant  été  instruit  par  un  Maître  qui  en  éioit 
«  sorti  :  Est  mihicum  ScholtsvestrisperDocioremJustacogna- 
«  tïo.  Oui ,  j'avoue  que  tout  ce  que  je  sais,  quoique  ce  soit  peu 
«  de  chose,  j'en  suis  redevable  à  vôtre  pais  :  Quidquid  in  me  est, 
«  quod  scio  quam  sit  exiguum,  cœlo  tuo  debeo.  » 


S.  AMBROISE, 

EvEQUE   DE   Mn.AN,    DoCTEUft    DE    l'EgLISE    ET    CONFESSEUR. 

S-  I. 

HISTOIRE   DE   SA   VIE. 


C 


E  seroit  sortir  de  nôtre  dessein ,  que  d'entrer  dans  un  dé- 
tail entier  de  toutes  les  actions  qui  ont  rendu  S.  Am- 
broise  un  des  plus  saints  et  des  plus  grands  Evoques  de  l'Egli- 
se. Nous  nous  bornerons  presque  à  celles  qui  regardent  son 
savoir  et  sa  doctrine,  et  à  ce  qui  concerne  ses  ouvrages. 

'S.  Ambroise  étoit  issu  d'une  des  plus  illustres  familles  de  tui.  h.e.i  lo  p 
l'Empire  Romain.  On  y  comptoit  des  Consuls  et  des  Préfets.  J^^"^  ^^y^^  , 
Mais  ce  qui  est  encore  plus  glorieux  pour  lui ,  *il  s'y  trouvoit  '•  «•  si).  " 

2  2 


326  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE.  un(!  Vierge  qui  avoit  souffert  le  martyre  pour  J.  C,"  et  que 
l'Elglise  honore  sous  le  nom  de  Ste  Sotere. 

Amb.'vit.  n.  3.  '  AmbroisB ,  père  de  nôtre  S.  Docteur,  étoit  Préfet  du  Pré- 
toire des  Gaules  sons  Constantin  le  jeune.  Cette  charge  étoit 

Tiii.  ibid.  1).  xo.  alors  très-considerable ;  'sa  jurisdiclion  s'étendant  non-seule- 
ment sur  toutes  les  Gaules,  mais  encore  sur  la  grande  Breta- 
gne, l'Espagne  et  la  Mauritanie  Tingitane.  Le  Préfet  des  Gau- 
les en  ce  tems-là ,  comme  les  Empereurs  d'Occident  pen- 
dant presque  tout  ce  IV  siècle,  faisoit  sa  résidence  ordinaire 

p.  84. 749.  à  Trêves.  Ce  fut-là  plutôt  qu'à  Lyon  ou  à  Arles'  que  naquit 

S.  Ambroise  vers  lan  340.  Il  y  fut  élevé  pendant  tout  le  tems 

Amb.ihid  |  cic.de  quc  son  pcre  y  exorça  la  Préfecture.  'N'étant  encore  qu'au 

div.i.  1.  p.  483.  [jerceau ,  on  eut  un  présage  de  la  douceur  de  son  éloquence  , 
le  même  qu'on  avoii  tu  autrefois  de  celle  du  Philosophe  Pla- 
ton. Un  essain  d'abeilles  vint  se  poser  sur  son  visage ,  lorsqu'il 
dormoit  la  bouche  ouverte.  C<*  Mouch(;s  après  y  être  entrées  et 
sorties  sans  lui  faire  de  mal ,  s'envolèrent  si  haut  dans  l'air 
qu^on  les  perdit  entièrement  de  vûë. 

Amb.  ibid.  n.  1.  '  Après  la  mort  de  son  pore  le  jeune  Ambroise  demeura  à 
Rome  en  la  compagni»!  de  sa  mère,  de  Ste  Marcelline  sa  sœur 

Bar.  vii.Amb.i..3.  aînée  et  d'uue  aulrc  Vierge  qui  vivoit  avec  elle.  'L'éducation 
qu'il  recul  en  une  si  .sainte;  compagnie,  servit  beaucoup  à  le  pré- 
server des  désordres  qui  regnoient  alors  dans  cette  grande  ville, 

Amb.  vil.  n.  :..  '  U  eniploïa  sa  première  jeunesse  à  l'étude  des  letres  humai- 

Tiii.  ibid.  p.  «.-..     nos,  '  où  il  réussit  de  la  manière  qu'on  le  peut  juger  par  les  ou- 

,,  )«i.  vrages  qu'il  composa  dans  !a  suite.  '  Il  étudia  la  langue  gré- 

que  aussi  bien  que  la  laliiie.  Que  s'il  n'en  eut  pas  une  profon- 
de connoissanc*;,  on  peut  dire  au  moins  qu'après  S.  Jérôme 
il  n'est  peut-être  pas  de  Père  Latin  qui  paroisse  en  avoir  été 
mieux  inslniil  que  lui. 

ihi.i  I  Amii.  vii.ib.  'Après  ses  étude.s  il  se  mil  dans  le  barreau,  et  plaida  quel- 
que tems  hors  de  Rome  dans  l'auditoire  du  Préfet  du  Prétoi- 
re, dont  le  siège  ordinaire  étoit  à  Milan.  Il  s'aquila  de  cet 
emploi  avec  tant  d'éclat ,  que  le  Préfet  le  choisit  pour  son 
Conseiller,  c'est-à-dire  aparemmcnl  qu'il  le  fit  son  Assesseur. 
Ce  Préfet  étoit  Sextus  Petronius  Probus,  le  plus  illustre  et  le 
plus  puissant  Officier  qui  fût  alors  en  Occident. 

Amb.  ibid.  '  Bien-tôt  de  la  charge  d'Assesseur  de  Préfet  Ambroise  passa 

à  celle  de  Consulaire  ou  Gouvern(!ur  de  la  Ligurie  et  de  l'E- 

Tiii.  ibid.  p.8(i.87.  milic,  '  c'cst-ù-dirc,  ce  semble,  de  tous  les  pais  que  compre- 
nent  aujourd'hui  les  Archevêchés  de  Milan ,  de  Turin  ,  de  Gé- 


DOCTEUR  DE  L'Ef.TJSE  ET  CONFESSEUR.  327 

lies,  de  Boulogne  et  de  Ravenne.  En  partant  pour  son  gou-     iv  siècle. 
vernement  en  373  ou  374,  '  Probus  lui  dit  cotlo  parole  remar-  Amb.  ibia.  d.  8. 
quable,  que  révenem(;nt  fil  regard(T  comme  une  espèce  de 
prophétie  :  Allez,  et  agissez,  non  en  juge  et  en  Magistral ,  mais 
en  Evoque. 

A  peine  Ambroise  avoil-il  passé  quelque  tems  à  Milan  ,  le 
siège  ordinaire  du  Gouverneur  de  la  province ,  '  qu'Auxence  num.  «. 
fameux  évêque  Arien  ,  qui  avoil  tyrannisé  cette  Eglise  pendant 
près  de  20  ans  ,  fut  enlevé  du  monde.  '  Aussi-tôt  les  Evoques  tiii.  ii.  p..  .smm). 
de  la  province  s'assemblèrent  [)our  lui  donner  un  successeur. 
Mais  cette  élection  n'étoil  pas  facile  à  faire.  '  Les  citoiens  de  Ruf.  i.  a.  c.  n.p. 
Milan  divisés  entre  eux,  les  Orthodoxes  d'une  part,  les  Ariens  ^t'^I^'^J'^v.''  *' 
de  l'autre ,  chaque  parti  vouloit  avoir  un  lilvêque  de  son  sen- 
timent. La  division  alloit  à  une  sédition  ouverte.  Ambroise  ou 
pour  la  prévenir  ou  pour  l'apniser,  alla  à  l'Eglise  en  qualité  de 
Gouverneur.   Il  parla  au  |.(;iiple,  et  dit  beaucoup  de  choses 
pour  le  porter  à  faire  l'élection  sans  tumulte,  il  parloit  encore , 
lorque  dune  commune  voix  toute  l'assemblée,  tant  Ariens 
que  Catholiques,  s'écria  en  demandant  Ambroise  pour  Evo- 
que. 'On  tient  que  ce  fut  un  enfant  qui  commença  à  crier  le  Amb.  ibi.i. 
premier  et  qu'aussi-tôl  il  fui  suivi  de  tout  le  monde. 

' Ambroise frapé  delà  saintijté  éminente  que  demande  l'é-  ep.63,n.«8.fti.er,. 
{(iscopat,  '  fit  tout  son  possible  pour  l'éviter.  Mais  tous  les  vu.  n.  s.  9. 
moiens  (ju'il  sut  mettre  en  usage  pour  y  réiis.sir,  furent  inutiles. 
La  fuite  même  qu'il  emploia  à  deux  différentes  fois,  ne  lui 
servit  de  rien.  Il  lui  fallut  se  rendre  à  la  volonté  de  Dieu  qui  le 
vouloit  Evêque  de  Milan.  Valentinien  qui  regnoit  alors  en 
Occident ,  ravi  de  joie  de  ce  que  l'on  demandât  pour  Evê- 
que un  homme  qu'il  avoil  envoie  pour  Juge ,  donna  ordre 
qu'on  fit  diligence  pour  consommer  son  élection.  Aussi-tôl , 
Ambroise,  qui  n'étoit  que  Catécumene,  'fut  baptisé  le  30"  de  tjh.  ibid.  p.  9^. 
Novembre  374 ,  et  ordonné  Evêque  huit  jours  après,  le  7*  de  ^**'  '^ 
Décembre  qui  tomboit  un  Dimanche.  Si  en  celle  rencontre 
l'on  n'observa  pas  l'ordre  prescrit  par  l'Eglise  dans  les  ordina- 
tions, on  n'alla  point  pour  cela  contre  l'esprit  de  ses  loix.  Au- 
cun des  défauts  qui  ont  donné  ocasion  de  les  faire ,  n'étoil  ici 
à  craindre.  L'ordination  de  S.  Ambroise  fut  la  destruction  de 
l'Arianisme  et  le  rétablissement  de  la  foi  Catholique  dans  tou- 
te l'Italie.  Aussi  est-elle  honorée  par  une  fête  chez  les  Grecs 
comme  chez  les  Latins. 

'Si-tôt  qu'Ambroise  se  vit  Evêque,  il  signala  son  épisco-  Amb.  vit.  n.  .■w. 


328  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  siEO!,F,.  pat  parla  distribution  de  tout  son  argent  aux  pauvres,  et  de 
toutes  ses  terres  à  l'Eglise.  Seulenient  il  en  réserva  l'usufruit  à 
sa  sœur.  Après  quoi  son  premier  soin  fut  de  s'instruire  de  ses 
devoirs.  Il  comprit  aussi-lôt  que  la  charge  pastorale  est  un  état 
non  d'oisiveté  et  de  délices,  mais  de  travail ,  de  peines  et  de 
fatigues.  C'est  sur  celte  idée  qu'il  nîgla  dès-lors  toute  sa  con- 
duite. Sa  vie  ne  fut  plus  ou  qu'ime  abstinence  extraordinaire , 
ou  qu'un  jeûne  presque  contmuel ,  et  un  travail  jamais  inter- 
rompu. A  moins  que  son  corps  ne  fût  entièrement  abalu  par 
auelque  incommodité ,  il  ne  se  dispensoit  pas  même  d'écrire 
e  sa  propre  main  ce  qu'il  composoit.  '  Il  en  usoit  ainsi,  tant 
pour  être  plus  maître  de  ce  qu'il  écrivoit  et  le  peser  avec  plus 
de  maturité,  que  [)0ur  ne  [>as  incommoder  s(^s  gens ,  sur-tout 
lorsqu'il  travailloit  la  nuit.  Bel  exemple  de  bonté  et  de  dou- 
ceur !  Quoique  continuellement  acablé  d'une  foule  de  per- 
sonnes qui  avoient  afTaire  à  lui  et  qu'il  assistoit  dans  leurs  be- 
soins ;  quoique  le  peu  de  temps  qui  lui  restoit ,  lui  laissât  à  pei- 
ne le  loisir  de  réparer  les  forces  de  son  corps  par  les  soutiens 
nécessaires  à  la  vie,  et  celles  de  son  esprit  par  la  lecture,  sa 
porte  néanmoins  n'étoit  jamais  fermée  à  personne.  Tout  le 
monde  entroit  librement  chez  lui ,  sans  qu'on  l'avertît  même  de 
ceux  qui  venoient. 
offic.  c.  1.  n.  5-4.  '  Ambroisc  instruit  des  vérités  de  la  religion  ,  en  travaillant 
Aug.  cous.  t.  8.  c.  pour  en  instruire  les  autres,  '  les  expliquoit  au  peuple  tous  les 
**•  l)imanches.  Ses  discours  étoient  aussi  doctes  que  solides.  Et 

s'ils  n'avoient  pas  pour  les  expressions  et  la  grâce  de  s'expli- 
quer, tous  les  agrémens  et  les  charmes  que  l'on  remarquoit 
en  ceux  de  quelques  personnes  qui  faisoient  parade  d'une  vai- 
ne éloquence ,  il  avoient  au  moins  assez  de  douceur  pour 
plaire  à  ceux  même  qui  n'y  considéroient  que  les  paroles.  S. 
1.  n.  c.  13.  u.      Augustin  qui  parle  ainsi  de  l'éloquence  de  S.  Ambroise,  'mé- 
rite d'autant  mieux  d'en  être  cru  qu'il  en  avoit  plus  efficace- 
ment éprouvé  la  force.  Ce  fut  par  elle  et  par  l'estime  que  tout 
le  monde  en  faisoit ,  que  Dieu  atira  peu  à  peu  ce  grand  génie  à 
la  connoissance  de  la  vérité. 
Tiii.ibid.  p.  99.        ' Dès  Ics  premières  années  de  l'épiscopat de  S.  Ambroise, 
'"**■  il  se  forma  entre  lui  et  S.  Basile  une  union  mutuelle  qui  dura 

jusqu'à  la  mort.  On  en  voit  des  traits  aussi  édifians  qu'instructifs 
paK.  98.    ■         dans  les  letres  qu'ils  s'écrivirent  l'un  à  l'autre.  Mais  ce  qui 
n'est  pas  moins  glorieux  à  l'humilité  do  S.  Ambroise  qu'à  la 
réputation  de  S.  Basile ,  c'est  que  celui-là  se  servit  beaucoup 

des 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     329 

des  ouvrages  de  l'autre,  et  en  suivit  même  les  pensées  dans     iv  siècle. 


ses  écrits. 

Cependant  quelque  talent  qu'eût  S.  Ambroise  de  toucher 
les  cœurs,  '  ses  exhortations  faisoient  moins  de  fruit  à  Milan,  Amb.  deVirg.i.  i. 
que  dans  les  pais  étrangers.  C'est  ce  qui  lui  faisoit  quelquefois  '•  ^'^-  "•  "'*'''■ 
dire  agréablement,  qu'il  vouloit  y  aller  prêcher  pour  toucher 
ceux  de  Milan,  Il  avoit  continuellement  à  la  bouche  les  louan- 
ges de  la  virginité.  Les  éloges  qu'il  en  faisoit  enfantèrent  à 
J.  C.  un  grafid  nombre  de  vierges  à  Plaisance,  à  Boulogne  et 
même  jusqu'aux  extrémités  de  la  Mauritanie.  '  Ce  fut  à  leur  i-  s.  c.  i.n.  3. 

Eriere  qu'il  composa  ses  livres  de  la  Virginité.  '  Ceux-ci  furent  iw.  i- 1-  pr.  n.  i-i. 
ien-tôt  suivis  de  ceux  de  la  Foi,  qu'il  écrivit  à  la  solicitation  "''" 
de  l'Empereur  Gratien.  Il  avoit  pour  ce  Prince,  comme  nous 
l'avons  dit  ailleurs,  une  tendresse  et  un  atachement  incompa- 
rable. 

La  tendresse  et  l'humanité  dont  S.  Ambroise  étoit  capable, 
éclatèrent  sur-tout  envers  les  captifs  que  les  Gols  '  avoient  faits  tui.  ib.  p.  m. 
en  grand  nombre  en  Thrace  et  en  Illyrie.  Les  autres  facultés 
lui  manquant  pour  soulager  ces  misérables,  '  il  n'hésita  point  en  Amb,  off.  1. 2.  c. 
cette  rencontre  à  faire  rompre  les  vases  sacrés  pour  en  racheter  **"  "' 
ces  captifs.  Rare  exemple  de  désintéressement  et  de  foi,  qu 
a  servi  de  modèle  dans  la  suite  à  plusieurs  Saints,  '  et  qui  a  été  Aug.  \it.  c.  a*, 
mis  en  pratique  nommément  par  S.  Augustin  en  de  semblables 
ocasions  ! 

S.  Ambroise  sut  profiter  pour  le  bien  de  l'Eglise  de  son  union 
avec  l'Empereur  Gratien.  '  On  croit  en  effet  que  les  Loix  que  tiii.  ib.  p.  121. 
fit  ce  Prince  contre  les  hérétiques  et  en  faveur  des  Orthodo- 
xes, furent  le  fruit  des  conseils  et  de  la  pieté  de  ce  grand  Evê- 
que.  Valentinien  le  jeune,  ainsi  qu'on  l'a  déjà  vu,  ne  céda  en 
rien  à  Gratien  son  frère  pour  l'atachement  et  le  respect  envers 
S.  Ambroise.  Mais  autant  que  ces  deux  Empereurs  lui  étoient 
atachés,  '  autant  Justine  mère  de  Valentinien  lui  étoit  oposée.  Amb.  vit.  n.  \2. 
Néanmoins  tout  ce  que  son  zélé  et  son  dévouement  pour  l'A- 
rianisme  lui  firent  faire  contre  le  saint  Docteur,  ne  servit  qu'a 
faire  éclater  davantage  sa  générosité  épiscopale.  '  Il  en  donna  n.  u. 
une  preuve  particulière  en  faisant  ordonner  Anéme  Evêque  de 
Sirmich,  malgré  la  puissance  de  cette  Impératrice  et  la  conspi- 
ration du  peuple  qui  l'apuioit. 

'  Gratien  aïant  indiqué  un  Concile  à  Aquilée,  où  il  se  tint  aci.aq.  n.  i.  ;i. .;. 
au  commencement  de  Septembre  381,  S.  Ambroise  y  assista, 
et  fut  comme  l'ame  de  cette  assemblée.  Il  y  est  nommé  et  y 

r>«    e  I.  Sec.  Part.  T  t 


SM)  S.  AMBJUUSK,  EVKOIIK  DE  Mll.AN , 

IV  siKOLK.     souscrit  1(!  second  ;  son  liiimililé  lui  aïaul  fait  ccdcr  le  promior 
ranp;  à  S.  N'alcricii  Evêque  du  lieu.  Apirs  la  coudauiualion 
Ainb.  cp  !).  II.  1.  dft  Pallade  et  d(î  Sccoiidicii  grands  sectateurs  d'Arius,  '  leCon- 
*■  elle  avant  (jue  de  se  séparer  écrivit  aux  Evêques  d(;  la  province; 

de  Vienne  et  de  celli;  de  Narbone  pour  les  remercier  de  lui 
avoir  envoie  des  Députés,  vÀ  leur  faire  part  de  ce  qui  s'y  étoit 
]>assé.  La  letre  se  trouve  j)armi  celles  de  S.  Ambroise  ;  et  il  y 
a  tout  lieu  de  croire  que  ce  fut  lui  qui  eut  charge  d(;  l'écrire, 
-p.  10.  l'j.  '  On  doit  juger  la  même  chose  des  autres  (jui  la  suivent,  et  qui 

sont  adi-essées  au  nom  du  Concile  au.x  trois  Empereurs  (ira- 
lien,  Valcnlinicn  II  et  Theodo.se. 
Vit.  11.  DiTiii.  ib.       '  L'anné(!  suivante  il  fit  un  voïage  à  Homo  pour  as-sister  au 
''  '"■  Concile  qui  s'y  tint  sur  la  lin  de  l'année,  et  à  la  convocation 

Amii.  Vil.  11.  1!»  I    duquel  il  avoit  le  plus  travaillé.  '  Ajji'ès  la  mort  de  (iratien,  qui 
•p.  it.  u.  o7.        f^^  jy^.  ,^^  ^^1^  d'Août  3S:{,  il  entreprit  un  autn;  voïage  enco- 
re plus  difficile.  11  s'agissoit  d'ullcr  à  Trêves  demander  la  paix 
au  n(tm  du  jeune  Valenlinien  au  Tjran  Maxime,  vers  qui  on 
l'envoïoit  en  embassade.  Ouoique  l'on  fût  au  cœur  de  l'hiver, 
et  que  le  Saint  n'aimât  pas  à  quiter  st)ii  diocèse,  il  se  crut  néan- 
moins obligé  de  prtMidre  en  (;elte  0(;asiou  la  d(f(;nse  d(;s  inte- 
•p.  .'11.  11.  ->:;.        rets  d'un  Piinc(t  mineur.  '  Son  Noïage  eut  un  iieunux succès,  il 
(empêcha  Ma.xime  de  passer  en  Italie;  et  la  paix  fut  conclue  en- 
tn;  ce  Tyran  et  le  jeune  iilmpereur. 
Vil.  11.  i;i.  '  Dès  celle  première  ambassade  S-  .Andiroise  refusa  la  com- 

munion à  Maxime,  et  lui  rej)i(»cha  avec- sa  générosité  ordinai- 
II.  a>  I  .p. ..7. 11.  t.  re  le  meurtre  commis  en  la  p(;rsoniu!  de  Cratien.  '  11  ne  fit  pas 
moins  éclater  celti;  vigueiir  éjdscopale  en  s'oposant  à  la  de- 
mande (|ue  fit  le  Sénat  (k'  Rome  à  deux  diil'erenlos  fois,  pour 
(pi(!  les  Ihnps'icurs  lui  ri-udis.seul  i'autel  delà  Victoire.  11  em- 
{)èclia  par-là  que  l'un  ne  fil  revivre  le  Paganisme  au  milieu  d(î 
,)..  .in.  11. 1.  ■>.  11,.  Uome.  '  Il  ((ifusa  ;îvec  la  même  conslance  et  la  même  fermeté 
la  bâsiliqiic  Porliene  (pii  élnit  hms  des  murs  dt;  Milan,  et  la  ba- 
sili(|ue  n(;uve  enfermée  dans  l'eiicriaiiî  de  la    ville,  <jue  It  s 
Arif'is,  apuïésdc;  l'autorité  di;  la  Cour,  demandoient  avec  em- 
pire. 
"^70  i'tÎm.'  iii'  p.       'I*(>ur  venger  ce  refus,  et  se  défaire  d'un  adversaire  incom- 
^"-   ,  mode',  rimi)ératrice  .liisline  oubliant  h  s  si'ivices  (luc  le  saint 

ivt.  ••.vc(pie  iuj  avoil  rendus  a  elle  et  a  son  iils  auprès  de  Maxime, 

viK "i'i['i!'l  1  iK  "tiV   'ui  fit  une  perséculi(»n  oii\erte  (|ui  dura  deux  ans.  "Mais si  elk; 
î'«"ii)  '''■  ''   "    ^"^  une  autre  Jezabel  à  l'égard  de  S.  Ambroise,  on  peut  dire 
qu'elle  trouva  en  sa  personiK!  un  autre  Elie.  'vVpiès  avoir  tenté 


DOCTEUR  m  I/RGLISR  ET  CONEESSEUn.     331 

|)<>ur  l'éloigner  de  Milan  Inus  les  artifices  imaginables,  que     ivsikcij;. 
l)ieu  p.ir  une  proteelion  [)arli('uliere  rondil  innlile^,  elle  lui  lit 
signilier  un  onln-  de  s(;  retirer  où  bon  lui  sianbleroit.  Ea  crain- 
te du  peuple  qui  cliérissoit  son  iwêque  empreba  qne  l'on  ne 
prît  un  parti  \iolent.  M'abord  S.  Ambroise  voulut  se  livrer  à 
la  mauvaise  volonté  de  la  Co'iir  ;  '  mais  sur  l'avis  de  ses  Prêtres  Ami»,  ep.  30,  „.  -, 
il  se  résolut  à  demeurer,  tout  disposé  néanmoins  à  répandre  son 
sang,  non-seulemeni  pour  son  peuple,  mais  encore  pour  ceux 
(|ui  le  persécutoient.  f.e  peupb;  Catholique  de  son  côté  crai- 
gnant que  le  saint  Evêque  ne  lui  éehapât,  soit  de  son  bon  gré, 
soil  par  la  malice  de  ses  ennemis,'  passa  plusi(!urs  jours  et  plu-  Aa-.  cmf.  1.  >>. . 
sieurs  nuits  de  suite  à  le  veiller  el  le  garder  dans  l'Eglise  (').      ''  ""  ''■ 

Ce  fut  alors  que  l'on  ccmimença  à  célébrer  les  veilles  dans  Amb.  vii.  n.  n  1 
ri'>glise  de  Milan,   et  que  l'on  ordonna  que  l'on  chanleroit  ^"«- ''' 
des  hymnes,  des  antienn<rs  et  des  pseaumes  selon  l'usage  de 
ri'^glise  d'Orient,  afin  dt^  soutenir  le  peupb;  dans  un  si  long  et 
si  |)énible  travail.  Depuis,  cette  sainle  institution  continua  tou- 
jours dans  l'Eglise  de  Milan  ;  et  dès  \v.  tems  de  S.  Augustin  el- 
le étoil  déjà  passée  à  priîsque  toutes  les  autres  Eglises  de  l'Occi- 
d(nl.  '  Ce  fut  aussi  en  cette  ocasion  que  S.  Ambroise  pronon-  Ami.,  in.  \in.  n 
ça  son  excellent  discours  contre  Au,\<;nee,  fameux   Evêque  '    ' 
Arien  que  Justine  reteiioit  à  la  (]our,  et  «jui  fut  encore  plus 
mortel  ennemi  de  S.  Ambroise,  (pic  \v  premier  .Xu.xcnce  ne 
l'avoit  été  de  S.  Uilaire  de  Poitit  rs. 

'  Enfin  Dieu  arrêta  la  fureur  de  celte  persécution,  en  rêve-  vu.  n.  it.  i.-. 
lant  ù  son  serviteur  en  ce  tems-ià  (|ui  éloit  l'année  380,  les  ^"^  '''  "  '' 
corps  de  S.  (iervais  et  de  S.  Protais.  Si  <•(  l  évencriunt  n'eut  pas 
assez  de  force  pour  con\crlir  .lustiiie,  Dieu  ne  laissa  pas  de 
s'en  servir  p(»ur  diminuer  \v.  parti  des  Ari(;ns.  el  augmenter  'a 
foi  de  son  Eglise. 

'  Cette  même  année  plusieurs  désirant  de  savoir  le  sentiment  Ami.,  p]..  «.r  i.. 
(le  S.  Ambroise.  loucliani  1<;  jour  auquel  on  devoit  célébrer  **■  "'"'' 
Pàque  rann(>e  suivante,  il  ('crivif  sur  cette  matière  sa  23"  letre 
aux  Evêques  d'Emelie.  11  y  soutient  (|u'il  ialloil  fair'c;  t^ette  fêle, 
non  le  18*'  d'Avril  qui  tombeit  un  Dimanche,  [)arce  que  co 
n"<'toit  que  le  iV  de  la  lune,  mais  le  Dimanche  suivant  (jui 
éloit  le  25"  du  mi'memois.  I^'année  387  {>our  laquelle  il  avoit 

1  '  I.CS     oîîlises   (II!    rc    li-ins-l:i     (■iiiiriil  le  si'rvic?  iliviii.  ,\iiisi  IHn  ii",a  p.is  ili>  [ii'iiir»    Till.  ib.  p.   IS4. 

.iioinp;i;,'noi's  il'iiiK'  i;i,iiiili>  eiircii.lc.   ili;  li:i-  ;'i  roinpiiiKln'  n^i-  le    |.ii|]!i!  pi'it  diMiieuntr 

lirnRris.qiii  sci-voioiil  n  li.j;i'il('<  K.i'cicsiasii-  (.liisiciirs  ]oiir>;  ihms  lï'nlisi!  s;ins  imi  suilir. 
•lues,  el  uui  autres  cIukos  ii.'ii-;-:.niic  ;  poiii- 


332  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  siECMî.     ainsi  réglé  le  jour  de  Pâque,  est  devenue  célèbre  dans  l'Eglise, 
J~^  '  par  le  baptênne  que  S.  Augustin  et  S.  Alipe  y  reçurent  de  la 

Anib.  ib.  p.  195.    main  de  S.  Ambroise.  '  Peu  de  tems  après  il  fut  envoie  pour 
la  seconde  fois  en  ambassade  vers  Maxime,  pour  lui  deman- 
der encore  la  paix  et  le  corps  de  Gratien.  Ce  second  voïage 
n'eut  pas  le  même  succès  que  le  premier.  Mais  nôtre  Saint  ne 
p.  200.  tarda  pas  cà  s'en  voir  vengé,  '  par  la  défaite  et  la  mort  de  ce  Ty- 

ran, qui  arrivèrent  l'année  suivante  388. 
p.  209.  '  Le  meurtre  de  Thessalonique,  dont  Theodose  étoit  coupa- 

Amb.  pp.  51.  n.c.  blc,  arHva,  comme  on  le  croit,  en  390.  'S.  Ambroise  tenoit 
un  Concile  avec  quelques  Evêques  des  Gaules,  lorsqu'il  aprit 
ce  sanglant  événement.  Tout  le  monde  sait  de  quelle  manière 
il  se  conduisit  en  cette  ocasion.  Il  suffit  de  dire  ici  qu'elle  servit 
à  faire  voir  tout  à  la  fois,  et  avec  quelle  discrétion  il  savoit 
ménager  les  esprits  des  Princes  pour  ne  les  pas  aigrir,  et  avec 
quelle  fermeté  il  en  usoit  envers  eux  pour  les  soûmetre  à  la  pé- 
Thdrt.  I.  5.  c.  18.  nitencc.  '  On  auroit  peine  à  dire  ce  qu'il  y  eut  ici  de  plus  admi- 
•■■  *"■  rable,  ou  la  généreuse  liberté  de  l'Evêque,  ou  l'humble  obéïs- 

Fac.  1.  lii.  c.  5.  p.  sance  de  l'Empereur.  '  C'est «e  qui  a  fait  remarquer  à  un  ancien 
''''^'  Auteur,  que  l'on  Irouveroit  encore  un  Theodose,  si  Dieu  dans 

sa  miséricorde  nous  donnoit  encore  quelque  Ambroise. 
Bar.  an.  390.  n.       '  On  croit  quc  le  Concilc  de  Milan  dont  nous  venons  de 
parler,  est  celui  où  Jovinien  fut  condamné  avec  sa  pernicieuse 
doctrine.  Ce  nouvel  Hérésiarque  s'éloit  avisé  depuis  peu  de  s'é- 
Ami).  np.  12.  n.  1.  levcr  coutrc  l'honneur  des  Vierges.  '  Nous  avons  la  letre  Sy- 
nodale de  ce  Concile,  écrite  au  pajie  Sirice  au  nom  de  S.  Am- 
broise et  des  autres  Evêques  qui  composoient  l'assemblée, 
pp.  50.  II.  1.  2. 1        '  L'année  suivante  391  il  se  tint  un  aulre  Concile  à  Capouë. 
23C.'  75i'.  ''■  ""■  S.  Ambroise  fut  encore,  si  non  le  chef,  au  moins  l'ame  de  ce 
Coneile.  On  y  traita  particulièrement  de  la  réunion  de  l'Eglise 
d'Antioche  divisée  entre  Flavien  et  Evagre  ;  ce  qui  troubloit 
tout  le  monde  Chrétien.  Outre  cette  principale  alTaire,  on  y 
fit  aus.si quelques  autres  reglemens pour  le  bien  de  l'Eglise. 
Ainb.  cp.  :>3.  n.2.       Peu  de  tcms  après,  au  mois  de  mai  392,  '  S.  Ambroise  eut 
une  affliction  extrême,  qu'il  a  peine  lui-même  à  exprimer,  en 
aprenant  la  mort  du  jeune  Empereur  Valentinien.  Ce  Prince 
revenu  des  faux  préjugés  qu'il  avoit  reçus  de  Justine  sa  mère, 
iicob.  Val.  n.  79.  '  aimoit  le  S.  Evoque  comme  son  père,  et  le  respectoit  comme 
son  libérateur.  S.  Ambroise  se  mettant  au-dessus  de  sa  douleur, 
fit  lui-même  ses  funérailles,  et  y  prononça  son  oraison  fune- 
n-  78.  bre  que  nous  avons  encore.  '  C'est  un  illustre  témoignage  de 


DOCTEUR  DE  I.'EGLISE  ET  CONFESSEUR.  333 

l'atachement  de  S.  Ambroise  jiour  ce  Prince  et  pour  l'Empe-     iv  siècle. 
reur  Gratien  son  frcre,  dont  il  y  rapelle  la  mémoire. 

'  S.  Ambroise  sachant  qu'Eugène,  qui  avoit  pris  la  place  du  vit.  n.  ae.  2- 1  c-.). 
jeune  Valentinien  par  les  voies  que  personne  n'ignore,  venoit 
à  Milan,  après  avoir  rendu  au  Sénat  de  Rome  l'autel  de  la  Vi- 
ctoire avec  ses  revenus,  il  crut  devoir  s'en  absenter  pour'éviter 
la  rencontre  de  ce  Tyran  souillé  d'un  sacrilège.  '  Mais  son  ab-  vu.  n.  43 1  ep.  57. 
sence  n'empêcha  pas  qu'il  ne  lui  fit  sentir  sa  vigueur  épiscopale.  "•''•''• 
Il  lui  écrivit  pour  lui  reprocher  son  crime,  et  le  menacer  d'ex- 
communication, et  défendit  à  ses  Prêtres  de  recevoir  son  of- 
frande à  l'autel. 

'  Dieu  fit  voir  en  plus  d'une  manière  qu'il  aprouvoit  l'absen-  vit.  n.  28. 29. 
ce  du  S.  Evêque.  A  Florence,  il  ressuscita  par  ses  mérites 
le  fils  de  l'hôte  chez  qui  il  logeoit  ;  et  il  lui  fit  faire  à  Boulogne 
la  découverte  des  corps  de  S.  Vital  et  de  S.  Agricole. 

'  Enfin  le  tems  arriva  auquel  Dieu  vouloit  associer  à  Elie  ce  "•  ♦''. 
grand  Evêque,  qui  avoit  eu  tant  de  raport  avec  ce  Prophète, 

Par  l'intrépidité  avec  laquelle  il  en  usa  envers  les  Rois  et  les 
uissances  de  la  terre.  '  H  tomba  malade  ;  et  si  tôt  que  le  Com-  "•  *5- 
te  Stilicon  l'eut  apris,  il  ne  put  s'empêcher  de  dire  que  si  ce 
grand  homme  venoit  ji  moinir,  l'Ilalic  étoit  menacée  de  sa  ruine. 
La  crainte  de  l'événement  le  porta  à  engagi^  les  premiers  de  la 
ville  à  aller  trouver  le  Siiinl  poiii-  lui  persuader  de  demander  à 
Dieu  la  prolongation  de  .sa  vie.  S.  Ambroise  ne  leur  répondit 
que  par  ces  belles  pai'olcs  :  «  Je  n'ai  point  vécu  parmi  vousd'u- 
«  ne  manière  que  je  doive  avoir  honte-  de  vivre  encore  quelque 
«  temps. .!(,'  ne  crains  pas  aii.=.si  de  mourir,  pariM'qiie  nous  avons 
«  aflaire  ;"i  un  bon  iMailre.  »  Mais  céloit  un  fruit  mûr  pour 
le  Ciel  ;  et  la  terre n'éloit  j)liisdign(;de  le  posséder.  '  [/heure  de  n.  47. 
sa  mort  aprochant,  il  rr;;ul  le  .saint  Viatique  des  mains  d'Ho- 
norat  Evêque  de  Verecil.  Puis  se  in(  llani  à  j)rier  les  bras  éten- 
dus en  forme  de  croix,  il  rendit  l'cspril,  '  A^é d'environ  57  ans,  Tiii.  ii..  p.  m. 
le  4"  d'Avril  397,  qui  étoit  la  veille  de  Pâque.  ''«'■■'"- 

'  Telle  a  été  la  vie  du  plus  illustre  et  du  plus  généreux  Pré-  p-  ^' 
lat  que  le  IV  sieclt;,  le  plus  fécond  en  grands  hommes,  ait 
donné  à  l'Occident.  Ses  actions  seules  suffisent  pour  faire  son 
éloge.  Ce  seroit  l'obscurcir,  que  d'entreprendre  d'en  vouloir 
relever  l'éclat  par  des  couleurs  étrangères.  On  a  bien  vu  de 
grands  Evêques  posséder,  comme  S.  Ambroise,  la  pieté,  la 
science  et  la  sagesse,  mais  il  est  bien  rare  d'en  trouver,  qui  aient 
joint  à  ces  avantages  une  générosité  aussi  héroïque  et  un  coura- 


:\Xl       s.  AMRROISK,  KVKnUK  DE  MILAN, 

V  siKCLi;.  g(i  aussi  invincible,  (|ii<)  celui  (\\i\ni  a  pu  remarquer  clans  Joule 
la  conduite  (le  c(!  saint  Docteur.  Il  n'est  |)as  moins  rare  do  voir 
réimie  en  la  même  [lersoimc;  une  vij^ueur  aussi  épiscopaleàune 
humilité  la  plus  profonde.  Ce.sten  (juoi  S.  Amhroi.se  s'est  en- 
core rendu  admirahle.  Presque  Ions  .ses  écrits  sont  rem|»lis  de 
traits  de  cette  vertu,  (ju'il  nommr!  lui-même  la  tête  de  loules 

Tiii.  Vf.  «i.  II.  'j  les  autres.  '  Lorsqu'on  l'avertissoil  des  fautes  que  l'on  (;roïoil 
trouver  dans  ses  ouvrages,  il  rej,^u(loit  cet  avis  comme  inie 
grâce,  persuadé  qu'il  pou  voit  se  tromper  en  ce  qu'il  savoit  le 
mieux. 

C'est  par  tous  ces  endroits  que  S.  .4mhroise  s'aquit  une  ré- 
putation, (jui  s'élanl  répandue  au-delà  des  hornes  de  la  va.slo 
étendue  de  l'Empire  Uomain,  pénéira  jii.squi'schez  les  Harlm- 

vii.  n.  '■r,.  res  les  plus  éloignés.  '  On  vit  venir  de  l*(;r.sc  à  Milan  doux  des 

plus  grands  Seigni'urs  du  )taïs,  e\|)rès  pour  êtn;  témoins  eux- 

"  w-  mêmes  delà  sagesse  de  l'iionuTKMle  Dieu.  '  lùigitil  Heine  d:  .^ 

Marcomans,  que  nôtre  Saint  .avoit  convertie  à  la  foi,  entrej)rit 

»-^  le  même  voiage  et  pour  le  même  sujet.  '  On  sait  ce  que  les 

Rois  des  l'rancois,  après  leur  défaite  et  la  paix  conclu»!  avec 
Arbogaste  qt;ï  les  avoit  vaincus,  disuienIdeS.  Amhroise  hci: 
(îéneral,  qui  se  glorilioit  d'être  Son  ami.  Comte,  lui  dis(»ienl 
«  ces  Princ(!s,  il  ne  faut  pas  s'ét(inner(|ue  v(»us  demeuriez  vie- 
«  torieux;  puisque;  vous  avez  i'aiiiilié  d'un  liomnu!  qui  com- 
«  mande  au  soleil  de  s'arrêter,  et  il  .s'arrête  aussi-tôt.  » 

Les  Pères  (jr(;cs  et  les  Latins,  tant  ceux  qui  ont  vécu  du 
temps  de  ce  grand  Evê(iu(!,  que  ceux  qui  l'ont  suivi,  sont  tous 

i!:i-;.  CI»,  .vi.  |>.  8*.  pleins  de;  .ses  éloges.  '  Dès  qui!  lut  enln;  dans  l'épiscopat,  S. 
P.a^ile  relevfn't  la  grandeur  de  .sa  naissance,  la  sii|)ériorité  de  .son 
génie,  la  splendeur  de  .sa  vi<!  exemplaire,  la  force  de  .son  élo- 

riidri.  I.  :;.  I-.  1.1.  quence.  '  Theodorct  ne  parh;  jamais  de  lui  qu'avec  admira- 

•"*iiiw. 'i|!o.*L'2.  lion,  et  comme  d'un  Prélat  tout  dévoué  au  martyre.  "  Rutin 

I'  *'-•  le  regardoit  comme  la  colonne  et  la  citadelle  imprenahh; , 

non  seulement  de  l'Eglise  de  Milaji,  mais  aussi  de  toutes  les 

AiiK.  (■.«■nf.  15.  11.  j'^glises  du  ni(mde.  '  C'étoit,  .selon  S.  Augustin,  im  des  plus- 
«(xcellens  Evoques  de  l'Eglise  de  Dieu,  et  connu  pour  tel  gé- 
nérahîment  de  tout  l'univers. 

Miir.  vir.  iii.  .-.  '  n  ^,§1  y,-^j  (ju(;  J,.  .(eromr  par  liue  raison  peu  recevahie, 
.'-'excu.soil  en  392  de  jctindre  l'élogi;  de  nôtre  Saint  à  ceux  des 

•■p.  30.  p.  237.  autres  Ecrivains  Ecclésiastiques  qu'il  avoit  comius.  '  Mais  deux 
ou  trois  ans  après,  écrivant  contre  .lovinien,  il  répara  glorieu- 
sement sa  faute,  (hi  verra  dans  la  suite  par  ocasion  quelques  au- 


UOCTKIIH  l)K  L'EGI.ISK  ET  (X)NFKSSi:UI{.     33S 

1res  preuves  de  la  justice  que;  ce  Père  a  rendue  à  sa  personne  et    i  v  s  i  k  c  l  r:. 


u  ses  ouvrages. 

Les  Empereurs  ne  faisoieni  [tas  moins  d'estime  de  S.  Ain- 
broise,  que  les  Evè(iues  ses  collègues.  '  Gratien  adiniroit  par-  Ami.,  ai-i.aq.n .*. 
liculierement  deux  clioses  en  lui  ;  le  mérite  de  sa  vie  et  les 
i'rands  dons  (lue  Dieu  lui  communiquoit.  '   Valentinien  son  «i;  •'-.t  n.  s.  s  i  d« 
Irere  avoit  tant  de  conlianec!  en  ses  mentes,  qu  il  regardoil 
comme  un  grand  avantage  de  recevoir  le  baptême  de  sa  main. 
'Theodose  disoit  hautement,  (ju'il  ne  connoissoit  (ju'Ambroisc  ''"J'i  *''  p- 223. 
qui  mcrilàl  à  jusie  titre  l;  nom  d'Evèque.  De  tous  les  témoi- 
gnages rendus  à  .son  mérite,  nous  croïons  devoir  raporter  en 
entier'  celui  que  lui  rend  S.  Ennod(;  Evêque  de  Pavic,  parce  '■""•  "i"  ''•  ****• 
que  tenant  du  génie  di;  l'épilaphe,  il  pourra  en  servir  à  nôtre 
Saint. 

Egit  quod  ducuit  iiicritis  et  lioiiorr  su|km'sI(;.-< 

Ainhmsius  vaU-s  iiioiilms,  ingenio 
l'ioscidii  ifirifico  r.ui  fulsil  iiiui-ic('  liiiguii. 
Vcrc  su  •  |iiiif.'c;ii.s  {,'(;riiiiiKi  qu:i;  voluil. 
StTta  rodiinilus  {çcstidnil  lucida  Ironie, 

Uistiiii'luin  ;:('iiiiiiis  on;  pur.diiU  opus. 
liisliluil  i)()|iulos  ;.:cslu,  |irol»itiilc,  |iudorf, 

Kovit  n-spicitiis,  |»«Tc.ulit,  adinoiiuil. 
Vocis  ut  officium  iiostroinapcricula  iioscuiil. 

Sic  leiuîias  culpas  (jui  Uiiu'l  iiisuquilur. 
Succinctus  gladiis,  clyiHsi  de  puiidcrc  tulus. 

l'i'clora  claudchat  li-xlilibus  caljbis. 
Kihiis  lialjct  vin.-s  vitioruni  a'clor  cl  hoiitis  : 
Vijrrd  non  lan},'it  sr|uanjfa  tiT^si  viri. 

Nous  ne  connoissons  des  parens  de  S.  Ambroise,  '    que  Ami..  1.  ±  p.  uc. 
Marcclline  sa  sœur,  à  (jui  il  adresse  ses  trois  livres  sur  les  Vier- 
g(!S,  '  (!t  Satyre  son  frère,  dont  il  a  l'ail  l'orai.son,  funèbre,  i».  un. 
'Marcelline,  comme  on  l'a  vu,  avoil  embrassé  la  virginité.  El-  vu.  n. .%. 
le  paroil  avoir  été  l'aînée  des  deux  frères.  '  C(^  que  S.  Ambroise  Je  virg.  1.  3.  c.  i, 
dit  de  ses  vertus,  doit  nous  la  faire  regarder  comme  une  gran-  f^,^'^'  "'  **'  **' 
de  Sainte.  Il  ne  craignoit  pas  lui-même  de  lui  donner  ce  litre 
dès  son  vivant.  Satyre,  suivant  le  portrait  que  nôtre  Saint  nous 
en  a  tracé,  étoil  un  liomrne  acompli  et  un  excellent  Chrétien. 
Aj)rès  avoir  brillé  dans  le  barreau,  il  fut  pourvu  d'un  gouver- 
nement de  province,  où  il  se  conduisit  plutôt  comme  un  père 
que  comme  un  Officier  du  Prince. 


336        S.  AMBKOISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE.        Quand  aux  disciples  de  S.  Ambroise,  il  en  eut  plusieurs.  Le 
Auft  ep   147   n   P^"^  illustre  de  tous  fut  sans  difficulté  S.  Augustin.  '  Non  seule- 
r.2 1  in  Jui.  1. 1.  n.  ment  Dieu  se  servit  du  ministère  de  S.  Ambroise  pour  le  re- 
tirer de  l'erreur  et  lui  conférer  le  saint  baptême  ;  mais  il  vou- 
lut encore  se  servir  de  lui  pour  cultiver  et  arroser  les  divers 
Paul.  ep.  3.  n.  i.  dons  qu'il  avoit  mis  en  lui.  '  De  même  S.  Paulin  de  Noie  se 
glorifie  d'avoir  eu  part  aux  soins  et  à  la  charité  de  S.  Ambroi- 
se, qui  l'avoit  instruit  des  règles  du  Sacerdoce,  et  nourri  des 
instructions  de  la  foi.  S.  Alipe  peut  aussi  être  mis  au  nombre 
des  disciples  de  S.  Ambroise  ;  puisqu'il  reçut  le  baptême  de  sa 
main. 
Tiii.  ib. p.  279.  'Paulin,  qui  servoit  de  Secrétaire  au  Saint  Docteur,  lors- 

qu'il mourut,  et  qui  a  écrit  sa  vie,  est  devenu  célèbre,  et  a 
rendu  un  grand  service  à  l'Eglise  en  se  portant  pour  dénoncia- 
Amb.  vit.  n.  3s.  tcur  coulre  Pelage  et  Caeleslius  son  disciple.  '  Theodule  qui 
l'avoit  servi  en  la  même  qualité  de  Secrétaire,  gouverna  de- 
puis l'Eglise  de  Modéne  à  la  satisfaction  de  tout  le  monde.  Vé- 
nère et  Félix  deux  de  ses  Diacres,  furent  aussi  élevés  à  l'épis- 
copat,  Venere  à  Milan  après  la  mort  de  Simplicien  succes- 
seur immédiat  de  S.  Ambroise,  et  Félix  à  Boulogne.  Celui-ci 
vivoit  encore,  lorsque  Paulin  qui  nous  le  fait  connoître,  écri- 
voit.  Caste  et  Poléme,  deux  autres  Diacres  de  nôtre  Saint, 
sont  loués  comme  des  fruits  dignes  de  l'excellent  arbre  qui  les 
Ugbci.  t.5.  p.  238.  avoit  produits.  '  On  dit  aussi  que  S.  Provin  que  l'on  fait  second 
Evêque  de  Come,  fut  encore  disciple  de  S.  Ambroise. 

g.  IL 

ECRITS  QUI  NOUS  RESTENT  DE  LUL 

Ce  n'est  pas  seulement  par  sa  vie  et  par  ses  disciples,  que  S. 
Ambroise  a  édifié  l'Eglise.  Il  l'a  fait  aussi,  et  continue  encore 
à  le  faire  par  ses  écrits.  Quoiqu'il  en  ail  laissé  beaucoup  moins 
que  quelques  autres  Pères  ;  il  est  néanmoins  surprenant  com- 
ment un  Evêque  qui  avoit  tant  d'autres  ocupations,  et  qui  n'a 
pas  vécu  jusqu'à  la  vieillesse,  ait  pu  tant  écrire.  Voici  le  cata- 
logue chronologique  de  ce  qui  nous  reste  des  productions  de 
sa  plume. 
Ainb.  d(!  par.  p.  1".'  Un  Iwre  SUT  le  Parodis.  S.  AmhToisPi  lienVeuirée  de  ccl 
n6. 182.  ^pj,j^^  gj^  ^j,^çg  lg  pijjj^  jj  (j^,(.jypg  qy'ii  l'a  entrepris  pour  mon- 

trer ce  que  c'étoit  que  ce  Paradis  terrestre,  oîi  il  étoit  situé, 
de  quelle  maniera  et  par  quelle  fourberie  nos  premiers  pères  y 

ont 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.    337 

ont  été  tentés,  et  sont  tombés  dans  le  péché.  Toutefois  son  but    iv  siècle. 

principal  est  d'y  réfuter  les  disciples  d'Appellès,  qui  comba-  ' 

toient  l'autorité  de  l'ancien  Testament ,  et  sous  leur  nom  les 

Manichéens  qui  infectoient  alors  l'Eglise  de  Milan,  '  y  expli-  Amb.  (i«  par.  c.  s. 

quant  d'une  manière  mystique  la  description  de  ce  Paradis,  il  ""  '""'*• 

dit  qu'il  représente  l'ame  de  l'homme  fertile  en  vertus.  Que  la 

source  d'eau  vive  n'est  autre  que  J.  C.  Que  les  quatre  fleuves 

qui  arrosent  le  Paradis,  signifient  les  quatre  vertus  cardinales  : 

la  prudence,  la  tempérance,  la  force  et  la  justice. 

'A  l'ocasion  de  la  difficulté  qu'il  y  a  à  expliquer  ce  que  c'é-  c.  2.  n.  7. 
toit  que  l'arbre  de  vie  et  l'arbre  de  la  science  du  bien  et  du  mal, 
il  dit  que  dans  l'Ecriture  il  se  rencontre  plusieurs  choses  qu'il  ne 
faut  pas  mesurer  sur  la  foiblesse  de  nôtre  esprit,  mais  sur  la  pro- 
fondeur de  la  conduite  de  Dieu.  Que  ne  pouvant  les  enten- 
dre, nous  devons  bien  nous  garder  de  les  critiquer.  '  Sur  la  n.  10. 
tentation  de  nos  premiers  pères,  il  remarque  que  le  Diable  a 
bien  la  permission  de  nous  tenter,  mais  qu'il  n'a  pas  le  pou- 
voir de  nous  perdre,  si  nous  ne  voulons.  '  Il  montre  un  peu  au-  n.  n. 
paravant  combien  cette  tentation  nous  est  utile,  pour  éprouver 
nôlre  fidélité  envers  Dieu,  et  nous  faire  mériter  la  récompen- 
se qu'il  a  promise  à  ceux  qui  lui  sont  fidèles.  'Au  sujet  de  l'a-  c.  n.  n.  71. 
veu  qu'Eve  fit  de  sa  faute,  il  établit  la  nécessité  de  confesser 
ses  péchés  pour  en  obtenir  le  pardon.  Neque  enimpotest  guis- 
quant  justificari  a  peccato,  nisi  fuerit  peccatum  ante  confessus. 

'  S.  Ambroise  dans  une  letre  que  l'on  croit  écrite  en  389,  dit  cp.  45.  n.  1. 
qu'il  y  avoit  long-tems  qu'il  avoit  composé  ce  traité  sur  le  Pa- 
radis, n'étant  alors  que  tout  nouvellement  Evêque.  '  C'est  pour-  "le  par.   adm.  p. 
quoi  on  le  place  en  375  ou  en  376  au  plus  tard.  Mais  on  n'ose  1"  p^j'ds."'  '''  '' 
pas  assurer  que  ce  soit  son  premier  ouvrage.  Ceux  qui  entrepre- 
nent  de  lire  ce  traité,  doivent  y  joindre  la  lecture  de  la  45*  le- 
tre de  nôtre  Saint,  laquelle  contient  beaucoup  de  choses  sur 
le  même  sujet. 

2".  '  Deux  livres  sur  Cdin  et  Abel.  S.  Ambroise  dès  lecom-  Amb.  de  carn.  p. 
mencement  de  cet  ouvrage  avertit  qu'il  n'est  que  comme  une  *^"-^*- 
suite  de  celui  sur  le  Paradis.  Aussi  croit-on  qu'il  fut  fait  en  la 
même  année.  'Ces  deux  frères  oposés  l'un  à  l'autre  nous  re-  1. 1.  c.  i.  n.  4. 
présentent,    dit  S.  Ambroise,  deux  sortes  d'hommes  oposées 
aussi  l'une  à  l'autre.  Celle  qui  est  figurée  par  Caïn,  est  de  ceux 
qui  raportentà  l'esprit  de  l'homme,  comme  s'il  en  étoit  le  prin- 
cipal auteur,  tout  ce  qu'il  font,  ou  ce  qui  se  passe  dans  le  mon- 
de. L'autre  représentée  par  Abel,  est  de  ceux  qui  l'atribuent  à 

Tome  I.  Sec.  Part.  V  v 


n.  ir., 


c.  7n.  an. 


338  s.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN , 

IV  SIECLE.    Dieu,  comme  à  celui  qui  aïant  créé  toutes  choses,  les gouver- 
do  caïn  1    ^^  toutcs  avcc  la  même  puissance.  '  Il  dit  aussi  que  ces  deux 

1.  c'a.  n.  ri.'  frères  peuvent  signifier;  l'un,  le  j)euple  Juif  devenu  parricide 
et  rebelle  ;  l'autre,  le  peuple  Chrétien  ataché  au  culte  de  Dieu  : 

-.4.  n.  1S-U.  en  un  mot  celui-là,  la  Synagogue,  celui-ci  l'Eglise.  '  Il  passe 
ensuite  à  en  faire  l'aplication  à  chaque  Chrétien  ;  tant  il  trouve, 
comme  il  le  dit  lui-même,  de  mystères  profonds  cachés  sous 
la  letre  de  l'Ecriture.  II  dit  donc  que  Caïn  elAbel,  comme 
Esaù  et  Jacob,  et  ces  deux  femmes  dont  il  est  parlé  au  21* 
chapitre  du  Deuteronome,  sont  la  figure  du  vice  et  de  la  ver- 
tu, de  la  chair  et  de  l'esprit,  qui  sont  toujours  en  contradiction 
dans  chacun  de  nous.  Ici  S.  Ambroise  fait  une  description  élo- 
qiiente  et  pathétique  de  tous  les  artifices  que  la  volupté  met  en 
usage  pour  nous  séduire.  '  Après  quoi  il  détaille  avec  la  même 
éloquence  les  atraits  dont  use  la  vertu  pour  nous  garantir  de  la 
séduction  et  nous  atirer  à  elle. 

'  En  parlant  de  l'offrande  que  Gain  fit  à  Dieu,  il  en  prend 
ocasion  de  toucher  les  promesses  qu'on  lui  fait,  afin  d'en  obte- 
nir quelque  faveur.  Lorsqu'on  a  obtenu  ce  que  l'on  demandoit, 
dit-il,  c'est  une  ingratitude  de  différer  à  acquiter  sa  promesse. 
De  même,  poursuit-il,  c'est  une  stupidité  de  s'atribuer  le  bien 
que  l'on  fait,  ou  de  raporter  à  ses  propres  forces  plutôt  qu'à  la 
grâce  de  celui  qui  en  est  l'auteur,  ce  que  nous  ne  recevons  que 
de  la  bonté  de  Dieu.  Ce  n'est  pas  un  moindre  orgueil  que  de 
reconnoître  Dieu  pour  l'auteur  de  tous  les  biens,  et  néanmoins 
d'atribuer  à  nôtre  propre  sagesse  ou  aux  mérites  de  nos  autres 
vertus,  les  grâces  qui  nous  viennent  de  lui. 

'  En  marquant  les  qualités  de  la  prière, il  insiste  particuliè- 
rement sur  ce  qu'il  faut  prier  pour  tout  le  corps  de  l'Eglise, 
pour  tous  les  membres  de  celte  mère,  au  nombre  desquels  on 
se  trouve.  Il  n'y  a  nul  orgueil  à  craindre,  dit-il,  en  priant  de  la 
sorte.  Au  contraire  il  y  a  plus  d'humilité,  plus  de  mérite  ;  et 
c'est  en  quoi  l'on  fait  paroître  la  charité  mutuelle  que  l'on  se 
doit  les  uns  aux  autres. 

I.  2.  c.  !).  n.  31  |c.  '  Sur  ces  paroles,  Im  voix  du  sang  de  vôtre  frère  est  venue 
jusqu'à  moi,  et  les  suivantes,  S.  Ambroise  établit  deux  choses  : 
l'immortalité  de  l'ame  en  général,  et  la  béatitude  de  l'ame  du 
juste  après  sa  séparation  du  corps  qu'elle  animoit.  Du  reste,  S. 
Ambroise  explique  presque  toujours  d'une  manière  morale  et 
mystique,  le  texte  de  l'Ecriture  qui  contient  l'histoire  des  deux 
frères  Caïn  et  Abel.  On  a  divisé  cet  ouvrage  en  deux  livres  ; 


c.  !).  n.  34-39. 


10.  II.  ;«i.  37. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     339 

*  mais  on  observe  que  cette  division  n'est  point  naturelle,  et     iv  siècle. 
qu'elle  est  plutôt  de  quelque  Copiste  que  de  l'Auteur  origi-  i^~^      ~ 
nal.  II  paroi t  par  divers  endroits  que  S.  Ambroise  s'y  est  beau- 
coup servi  des  écrits  de  Philon  le  Juif,  mais  avec  la  liberté  d'un 
Auteur,  et  non  l'assujetissement  d'un  Copiste. 

3°.  '  Un  livre  sw^  Tobie.  Après  y  avoir  parlé  en  peu  de  mots  de  Tob.  p. 
des  vertus  de  ce  saint  homme,  S.  Ambroise  passe  à  l'usure, 
et  montre  qu'elle  est  oposée  au  droit  divin,  et  qu'elle  n'est  pas 
un  crime  moins  énorme  que  l'idolâtrie  et  l'homicide.  C'est  ce 
qui  fait  le  sujet  de  tout  l'ouvrage.  De  sorte  que  l'on  pourroit 
aussi-bien  lui  donner  pour  titre.  Traité  de  l'usure,  que  celui 
qu'il  porte.  Il  paroît  que  c'est  un  recueil  de  sermons  que  S. 
Ambroise  faisoit  à  son  peuple  sur  cette  matière,  à  mesure  qu'on 
lisoit  le  livre  de  Tobie  dans  les  assemblées  ecclésiastiques.  C'est 
ce  que  confirme  le  commencement  de  l'ouvrage. 

'  Erasme  et  quelques  autres  ont  refusé  de  l'atribuer  à  S.  Am-  adm.  v  as»- 
broise.  Mais  les  derniers  Editeurs  de  ce  Père  montrent  par  des 
preuves  invincibles  qu'il  est  véritablement  de  lui.  En  effet  tous 
les  caractères  de  l'écrit  et  l'autorité  de  S.  Augustin  qui  le  cite 
sous  le  nom  de  S.  Ambroise,  ne  laissent  aucun  lieu  a 'en  dou- 
ter. Comme  S.  Dasile  avoit  traité  la  matière  de  l'usure  dans  son 
homélie  sur  le  Pseaume  14,  S.  Ambroise  en  a  tiré  une  grande 
partie  qu'il  a  fait  passer  dans  cet  ouvrage.  Il  traduit  même 
quelques  endroits  de  mot  à  mot.  On  voit  par-là  une  nouvelle 
marque  de  l'estime  qu'il  faisoit  des  écrits  de  S.  Basile.  Au  reste 
on  croit  devoit  placer  le  livre  sur  Tobie  ou  en  376,  ou  l'an- 
née suivante. 

4".  '  Trois  livres  sur  tes  Vierges,  qui  paraissent  formés  des  «i»  virg.  1. 1.  p. 
sermons  que  S.  Ambroise  avoit  prêches  sur  ce  sujet  en  différen- 
tes ocasions.  La  préface  qu'il  a  mise  à  la  tête,  est  tout  à  la  fois 
et  un  témoignage  de  sa  profonde  humilité  et  une  preuve  de 
la  juste  crainte  où  il  étoit  de  perdre  son  tems  à  des  ocupations 
inutiles.  Après  la  préface  vient  l'éloge  de  S*"  Agnès,  qui  fait  le 
commencement  du  corps  de  l'ouvrage.  On  voit  par-là  que  ce 
premier  sermon  avoit  été  prononcé  le  jour  de  la  fête  de  cette 
Sainte.  '  C'est  de  cet  ouvrage  que  nous  aprenons  les  vives  et  ••  <•»•  s^-s'J 
salutaires  impressions  que  les  exhortations  de  S.  Ambroise  tou- 
chant la  Virginité  faisoient  sur  l'esprit  et  le  cœur  des  jeunes 
filles,  tant  dans  les  provinces  éloignées  que  dans  le  voisinage 
de  Milan.  Elles  aliroient  non  seulement  de  Plaisance  et  de  Bou- 
logne, mais  encore  du  fond  de  l'Afrique  à  Milan  des  Vierges 

V  v  ij 


340         S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

I V  s  I E  c  L  E.    qui  y  venoient  recevoir  le  voile  des  mains  du  Saint  Evêque.  '  11 
-— — -— -j-  marque  que  les  Vierges  de  Boulogne  étoient  au  nombre  de 
"i.r.'cô"   "*■  '  vingt.  Il  ajoute  qu'elles  travailloient  de  leurs  mains,  non  seu- 
lement pour  vivre,  mais  aussi  pour  faire  des  libéralités,  et  qu'el- 
les avoient  un  zélé  et  une  industrie  singulière  pour  alirer  d'au- 
D.  m.  très  filles  à  cette  sainte  profession.  '  Il  exhorte  les  filles  à  se 

n.  S9.  consacrer,  même  malgré  leurs  parens.  '  Plusieurs  d'entre  ceux- 

•  31 35.  ci  se  plaignoient  qu'il  relevoit  trop  la  Virginité.  '  Mais  de  peur 

qu'on  ne  lui  reprochât  de  désaprouver  le  mariage,  il  a  soin  de 
prévenir  cet  injuste  reproche.  Bien  loin  de  le  blâmer,  dit-il, 
je  le  conseille,  et  condamne  ceux  qui  le  blâment.  Je  ne  fais, 
ajoûte-t'il,  que  détailler  les  avantages  de  la  Virginité,  qui  sur- 
passent de  beaucoup  ceux  du  mariage . 
I.  i  "-30.  '  S.  Ambroise  composa  ce  recueil  la  3'  année  de  son  épisco- 

pat,  c'est-à-dire  en  377.  Il  y  adresse  quelquefois  la  parole  à 
sainte  Marcelline  sa  sœur,  qui  comme  nous  l'avons  dit  avoit 
1. 3. 0. 1. 3.        embrassé  à  Rome  la  profession  des  Vierges.  '  Il  y  raporte  mê- 
me le  discours  que  le  Pape  Libère  prononça  à  la  cérémonie 
de  sa  consécration  dans  1  Eelise  de  S.  Pierre  le  jour  de  Noël. 
On  juge  de-là  que  ce  fut  à  la  prière  de  sainte  Marcelline  que 
S.  Ambroise  recueillit  ainsi  en  un  corps  d'ouvrage  les  discours 
qu'il  avoit  faits  sur  la  Virginité,  parce  qu'elle  nepouvoitles 
aller  entendre,  et  qu'elle  desiroit  de  les  voir.  C'est  peut-être 
Hier.  cp.  i«.  p.  37.  aussi  pour  cela  '  que  S.  Jérôme  parlant  de  ce  recueil,  le  nom- 
cp.aa  Aig.  p.  198.  me  les  opuscules  adressés  à  la  sœur  de  S.  Ambroise.  '  Ailleurs 
"*"■  il  les  cite  sous  le  titre  des  livres  de  la  Virginité,  comme  étant 

écrits  pour  les  Vierges  en  général.  Ce  Père  non  seulement  en 
copie  plusieurs  endroits,  mais  il  en  fait  encore  valoir  l'autori- 
té et  ^s  raisonnemens.  Il  dit  que  l'Auteur  a  trouvé  le  secret 
d'y  dire  beaucoup  de  choses  en  peu  de  mots  :  m  paucis  multa 
cp.  18.  p.  37.  comprfhendens.  Et  dans  le  premier  endroit  cité  il  en  relevé 
l'éloquence,  comme  d'un  ouvrage  dans  lequel  S.  Ambroise 
a  recueilli,  et  expliqué  avec  un  ordre  merveilleux,  et  un  sty- 
le encore  plus  admirable,  tout  ce  qui  peut  servir  à  relever  le 
mérite  des  Vierges:  In  quitus,  dit-il,  tanto  seeffudit  eloquio, 
ut  quidquid  ad  laudes  Virginumpertinet ,  exquisierit,  exprès- 
serity  ordinaverit. 

Ce  n'est  pas  sans  sujet  que  S.  Jérôme  loue  la  beauté  du  style 

de  cet  ouvrage:  Les  deux  premiers  livres  sur-tout  sont  extrê- 

.Wb.  ib.  1. 2.  n,    mement  ileuris;  et  '  S.  Ambroise  lui-même  s'est  cru  obligé 

Aug  doct  chr.  \.  d'en  faire  quelque  sorte  d'excuse.  '  S.  Augustin  en  cite  deux  en- 

4.  c.  îl.  *        * 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     341 

droits  pour  servir  de  modèle,  l'un  d'une  éloquence  vive  et    iv  siècle. 
pressante,  l'autre  d'un  style  plus  simple  et  plus  tempéré. 

'  Dom  Joseph  Mege  Religieux  de  nôtre  Congrégation  a  Bib.  s.  vin.  Cen. 
traduit  en  nôtre  langue  ces  trois  livres  de  S.  Ambroise,  afln  de 
les  rendre  utiles  aux  personnes  qui  n'entendent  pas  la  langue 
originale  en  laquelle  ils  ont  été  écrits.  Il  y  a  joint  une  traduction 
de  deux  autres  traités  du  même  Père  sur  le  même  sujet,  com- 
me nous  le  dirons  en  son  lieu.  Et  afin  de  disposer  les  Vierges 
Chrétiennes  à  lire  ces  traductions  avec  plus  de  plaisir,  et  en  ti- 
rer plus  de  fruit,  il  a  mis  à  la  tête  une  savante  dissertation  sur 
l'état  des  anciennes  Vierges.  Le  tout  est  imprimé  en  un  volu- 
me m-12°.  à  Paris  chez  Arnoul  Seneuze  l'an  1689.  Il  seroit  à 
souhaiter  que  ce  Traducteur  eût  entrepris  le  même  travail  à  l'é- 
gard des  deux  autres  traités  De  la  Virginité,  eiDe  F  exhortation 
à  la  Virginité.  L'on  auroit  eu  par-là  une  traduction  entière  de 
tout  ce  que  S.  Ambroise  a  écrit  en  particulier  sur  ce  sujet. 

5°.  '  Les  derniers  Editeurs  de  ce  Père,  fondés  surlesmanus*  Amb.  de.  virg.  p. 
crits,  font  du  dernier  livre  sur  les  Vierges  un  traité  séparé  *'^"-"'- 
sous  le  titre  De  la  Virginité,  qu'ils  placent  après  celui  sur  les 
Veuves,  comme  n'étant  écrit  qu'après,  vers  l'an  378.  Nous 
créions  à  cette  ocasion  devoir  interrompre  l'ordre  des  tems 

aue  nous  nous  étions  prescrit  dans  l'énumeration  des  ouvrages 
e  S.  Ambroise,  afin  de  mètre  de  suite  ceux  qu'il  a  compo- 
sés sur  le  même  sujet.  Dans  ce  traité  de  la  Virginité  le 
Saint  a  fait  entrer  plusieurs  endroits  de  l'ancien  et  du  nouveau 
Testament,  qu'il  y  explique  d'une  manière  mystique,  mais  tou- 
jours instructive  et  convenable  au  sujet  qu'il  entreprend  d'y 
traiter.  Il  s'y  défend  contre  ceux  qui  l'acusoient  de  persuader  la 
Virginité,  et  de  défendre  le  mariage  aux  filles  consacrées  à 
Dieu.  Il  avoue  nettement  le  fait.  '  Mais  il  montre  que  la  Vir-  33.36. 
ginité,  n'est  ni  mauvaise,  ni  nouvelle,  ni  inutile.  «  On  se  plaint 
«  dit-il,  que  le  genre  humain  va  manquer.  Je  demande,  qui  a 
«  cherché  une  femme  sans  en  trouver;  quel  meurtre  ou  quelle 
«  guerre  on  a  vu  pour  une  Vierge  ?  Ce  sont  des  suites  du  maria- 
«  ge  que  de  tuer  Uadultere  et  de  faire  la  guerre  au  ravisseur.  Le 
«  nombre  des  hommes  est  plus  grand  dans  les  lieux  où  la  Virgi- 
«  nité  est  plus  honorée.  Informez-vous,  continue-t'il,  combien 
«  l'église  d'Alexandrie,  celles  de  tout  l'Orient  et  d'Afrique  ont 
«  acoûtumé  de  consacrer  de  Vierges  tous  les  ans.  Il  y  en  a  plus 
«  que  ce  païs-ci  ne  produit  d'hommes.  » 
6°.  '  Nous  avons  encore  un  autre  traité  de  S.  Ambroise  sur  mst.  virg.  p.  wo. 

274. 
2  3 


342     S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE,    le  même  sujet,  tant  il  l'avoit  à  cœur.  11  est  intitulé  De  la  conduite 
d'une  Vierge^  et  de  la  Virginité  perpétuelle  de  la  M  ère  de  Dieu. 
S.  Ambroise  le  composa  pour  l'instruction  d'une  Vierge  nommée 
Tiii.  ib.  p.  107.  Ambroisie,  et  l'adresse  à  un  Eusebe,  '  que  l'on  croit  être  le  Saint 
"*■  Evêque  de  Boulogne  de  même  nom,  et  père  ou  aïeul  d'Am- 

broisie. Il  paroît  à  quelques  Savans  que  ce  traité  est  fait  du 
sermon  que  S.  Ambroise  prononça  à  la  profession  de  cette 
Vierge,  comme  cela  lui  étoit  ordinaire.  Mais  la  pièce  est  trop 
longue  pour  que  ce  ne  soit  qu'un  discours  prononcé  de  vive 
voix.  Ce  discours  à  la  vérité  aura  fait  le  fonds  du  traité,  ce 
que  montre  le  commencement  etlafm;  mais  S.  Ambroise  en 
le  rédigeant  par  écrit  y  aura  ajouté  bien  des  choses. 
Amb.  ib.  c.  5-11.  '  Il  en  emploie  une  grande  partie  à  rélever  et  à  défendre 
rai.  ib.  contre  Bonose  la  virginité  de  la  Mère  de  Dieu.  '  L'on  voit 

par-là  que  le  traité  ne  fut  écrit  qu'après  l'an  391,  parce  que  la 
cause  de  ce  Bonose  ne  fut  jugée  qu'après  le  Concile  de  Ca- 
Amb.  ib.  p.  249.    pouë,  tcuu  à  la  fin  de  cette  même  année.  '  Aussi  les  derniers 
Editeurs  de  S.  .\mbroise  placent-ils  ce  traité  en  392,  ou  en- 
viron. Le  point  qu'y  touche  S.  Ambroise  à  l'égard  de  la  Sainte 
Vierge,  est  ce  qui  a  fait  donner  au  traité  la  seconde  partie  du 
An.  Meii.  scri.  c.  titre  qu'il  porte.  '  L'anonyme  de  Molk,  Auteur  du  XII  sie- 
"•  cle,  ne  le  marque  que  sous  cette  seconde  partie  du  titre. 

Amb.  ib.  n.  iti.        '  S.  Ambroisc  relevé  encore  dans  cet  opuscule  l'excellence 
de  la  Virginité,  comme  un  avantage,  qui  non-seulement  met 
à  couvert  du  crime  l'un  et  l'autre  sexe,  mais  qui  l'appelle  aus- 
n.  104.  si  et  l'excite  à  la  grâce.  '  Il  dit  que  les  Vierges  retracent  sur  la 

terre  la  vie  angélique,  que  nous  avons  perdue  dans  le  paradis 
„.  25.  de  délices.  '  Il  y  avance  une  opinion  assez  singulière.  Il  pré- 

tend que  le  péché  de  la  première  femme  fut  moindre  que  celui 
d'Adam.  La  raison  qu'il  en  donne,  est  que  celui-ci  ne  fui  tenté 
que  par  une  créature  inférieure,  et  qu'ainsi  sa  tentation  fut 
moins  violente.  Au  lieu  qu'Eve  fut  tentée  par  un  Ange,  mau- 
vais à  la  vérité,  et  qui  s'étoit  caché  sous  la  forme  du  serpent, 
représenté  dans  l'Ecriture  comme  le  plus  fin  et  le  plus  rusé  de 
tous  les  animaux  de  la  terre.  Ce  traité  est  un  de  ceux  que  Dom 
Joseph  Mege  a  mis  en  nôtre  langue,  et  dont  il  a  joint  la  tra- 
duction aux  trois  livres  sur  les  Vierges, 
.xh.  virg.  p.  277.  7".  '  Eu  393.  S.  Ambroisc  composa  sur  le  même  sujet  un  au- 
'"^  tre  traité,  qui  porte  pour  titre  Exhortation  à  la  Virginité.  I^ 

fonds  de  celui-ci  est  encore  pris  d'un  sermon  que  le  Saint  avoit 
prononcé  à  Florence,  où  il  se  trou  voit,  lorsqu'il  avoit  quité  Mi- 


DOCTEUR  DE   L'EGLISE    ET  CONFESS.  343 

lan  pour  éviter  la  rencontre  du  Tyran  Eugène.  Ce  traité  com-    iv  siècle. 
mence  pr  l'éloge  des  Saints  Martyrs  Agricole  et  Vital ,  parce 
que  S.  Ambroise  avoit  enrichi  de  leurs  reliques  l'église  où  il 
prêcha  le  sermon  qu'il  y  a  fait  entrer.  '11  les  avoit  aportées  exh.  vir^.  n.  i.o. 
de  Boulogne,  où  il  s'étoit  trouvé  à  la  découverte  des  corps  de  *"•  ''•^• 
ces  deux  Martyrs.  Ce  n'étoît  que  des  clous  et  du  bois  de  la 
croix,  instrument  de  leur  suplice;  car  on  ne  touchoit  pas  en- 
core aux  corps  saints  pour  en  séparer  les  parties.  Arrivé  à  Flo- 
rence ,  S.  Ambroise  déposa  ces  reliques  sous  l'autel  d'une  égli- 
se dont  il  fit  la  dédicace.  Une  sainte  Veuve  nommée  Julien- 
ne l'avoit  fait  bâtir.  '  Elle  avoit  un  fils  nommé  Laurent,  et  trois  n.  13-27. 
filles ,  qui  tous  se  consacrèrent  à  Dieu.  C'est  pourquoi  le  ser- 
mon qu'il  fit  à  cette  dédicace ,  porte  pour  titre,  Exhortation  à 
la  Virginité,  comme  étant  principalement  emploie  à  l'instru- 
ction de  ces  Vierges.  '  S.  Ambroise  y  marque  que  c'étoit  ordi-  n.  42. 
nairement  à  la  solennité  de  Pâque  que  les  Vierges  recevoient 
le  voile  sacré.  L'on  a  déjà  vu  que  sainte  Marcelline  l'avoit  re- 
çu le  jour  de  Noël.  Ainsi  c'étoit  presque  toujours  à  quelque 
grande  solennité  que  sefaisoit  cette  sorte  de  cérémonie. 

8".  '  Outre  ces  quatre  opuscules  sur  les  Vierges  et  la  Virgini-  Lap.  virK.  p.  305, 
té,  l'on  croit  deyoïr  donner  encore  à  S.  Ambroise  le  traité  sur  ^'^■ 
la  chute  et  une  Vierge  consacrée  à  Dieu .  Il  ne  paroît  pas  en  quel 
tems  précisément  le  saint  Evêque  le  composa.  C'est  une  sévè- 
re réprimande  en  forme  de  sermon,  à  une  Vierge  nommée  Su- 
sanne,  qui  après  avoir  fait  vœu  de  Virginité,  et  reçu  le  voile 
le  saint  jour  de  Pâque,  eut  ensuite  le  malheur  de  violer  ses  pro- 
messes. Ce  crime  la  jetta  dans  un  autre  encore  plus  énorme ,  à 
dessein  de  pouvoir  cacher  le  premier.  Mais  une  précaution 
aussi  criminelle  fut  inutile,  et  ne  servit  qu'à  la  rendre  plus  cou- 
pable. Elle  n'en  étoit  venue  à  cette  extrémité  que  par  degrés. 
Trois  ans  avant  sa  chute,  elle  avoit  commencé  à  se  relâcher 
de  ses  devoirs,  et  à  donner  sujet  de  mal  parler  d'elle.  Sa  chute 
y  mit  le  comble ,  et  fut  un  grand  scandale  pour  les  Juifs  et 
les  Païens.  Son  Evêque  en  étant  instruit,  mit  cette  personne 
en  pénitence  publique.  Ce  fut  alors  qu'il  prononça  ce  discours, 
où  après  lui  avoir  représenté  la  grandeur  de  son  double  crime, 
il  lui  en  fait  néanmoins  espérer  le  pardon  ;  pourvu  qu'elle  soit 
fidèle  à  en  faire  pendant  toute  sa  vie  une  pénitence  convenable 
et  proportionnée  à  son  énormité.  Il  lui  prescrit  de  réciter  tous 
lesjoursle  Pseaume  50^  . 

'  Ce  traité  a  été  atribué  à  S.  Jérôme ,  et  il  se  trouve  encore  Hier  app.  p.  ne. 

182. 


344       S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

V  s  I E  c  L  E.    enire  les  ouvrages  de  ce  Père  sous  ce  litre,  In  Smannam  lapsam 
■  objurgatio.  Mais  le  dernier  Editeur  l'a  renvoie  dans  l'appendice 
de  son  édition,  comme  lui  apartenant  moins  qu'à   S.  Am- 
Anii).  ib.  adm.  p.  broisB,-  '  à  qui  tous  les  manuscrits  l'atribuent..  11  est  vrai  que  le 
*'*•  Concile  de  Douzi  le  cite  également  sous  le  nom  de  S.  Jérô- 

me et  sous  celui  de  S.  Ambroise.  Il  est  encore  vrai  que  le  sty- 
le de  cette  pièce  est  un  peu  différent  du  style  des  autres  ouvra- 
ges de  celui-ci.  Tout  cem  joint  à  l'atribution  que  Gennade  fait 
d'un  traité  semblable  à  Nicetas  Evêque  des  Daces,  a  porté 
quelques  Savans  à  lui  donner  l'opuscule  dont  il  est  ici  question. 
Mais  l'autorité  de  tous  les  manuscrits  a  déterminé  les  derniers 
Editeurs  de  S.  Ambroise  à  le  mètre  à  la  suite  de  ses  autres  trai- 
tés sur  les  Vierges  et  la  Virginité.  Il  est  assez  ordinaire  de  voir 
qu'un  Père  traite  du  même  sujet  dont  un  autre  Père  avoit  déjà 
traité  avant  lui.  Il  ne  l'est  pas  moins  de  trouver  quelque  diver- 
sité de  style  entre  les  écrits  d'un  même  Père.  D'ailleurs  celui 
dont  il  est  ici  question,  ne  contient  rien  qui  soit  indigne  de  S. 
Ambroise ,  et  qui  ne  convienne  à  son  tems.  Aussi  le  Tradu- 
cteur de  ses  autres  traités  n'a  pas  fait  difficulté  de  traduire  en- 
core celui-ci  sous  son  nom,  et  de  le  joindre  aussi  aux  deux 
autres. 
(le  virt.  p.  i8r-2io.  9°.  '  Ze  traité  sur  les  Veuves  suivit  de  près  les  trois  livres  sur 
les  Vierges  qui  y  sont  cités  dès  le  commencement.  C'est  pour- 
quoi on  le  place  en  la  même  année  377.  Le  but  de  cet  opuscu- 
le est  de  relever  la  gloire  de  l'état  des  Veuves,  et  de  leur  mon- 
trer les  obligations  auxquelles  il  les  engage.  Il  paroît  que  S. 
Ambroise  fut  déterminé  à  y  mettre  la  main  par  une  ocasion 
particulière.  Une  veuve  affligée  de  la  mort  de  son  mari ,  s'étoit 
adressée  au  saint  Evêque  pour  y  trouver  de  la  consolation  ;  et 
il  l'avoit  exhortée  à  cesser  de  s'affliger  excessivement ,  et  mê- 
me à  quiter  les  marques  trop  éclatantes  de  son  deuil.  Mais  la 
veuve  ne  se  contentant  pas  de  suivre  cet  avis,  vouloit  encore 
se  remarier,  quoiqu'elle  eût  déjà  des  filles  ou  nubiles  ou  mê- 
me engagées  dans  le  mariage.  Ce  fut  pour  l'en  détourner  que 
S.  Ambroise  entreprit  ce  traité,  qui  semble  être  composé  de 
quelque  sermon  prononcé  de  vive  voix.  Il  y  montre  les  fâcheu- 
ses suites  qu'atirent  toujours  les  secondes  noces,  et  prouve  que 
la  viduité  est  beaucoup  plus  excellente  que  le  mariage ,  et 
qu'elle  aproche  de  l'excellence  de  la  virginité.  Mais  il  traite 
ce  sujet  avec  tant  de  discrétion,  qu'il  ne  peut  être  acusé  d'avoir 
donné  dans  l'excès,  en  condamnant  les  secondes  noces.  Il  a 

soin 


A 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.  345 

soin  de  déclarer  que  ce  qu'il  y  dit  de  la  viduité,  n'est  qu'un  con-    i  v  s  i  e  c  liî  . 
seil  salutaire  et  non  pas  un  précepte.  ' 

'  Il  y  parle  fortement  contre  un  autre  excès  encore  plus  per-  tiu.  iwu. 
nicieux ,  qui  est  de  condamner  les  premiers  mariages.  On  croit 
qu'en  cet  endroit  il  alaque  les  Marcionites,  les  Manichéens  et 
les  autres  hérétiques  qui  tomboient  dans  cet  excès,  beaucoup 
plus  par  un  esprit  de  libertinage ,  que  par  l'amour  de  la  chaste- 
té qu'ils  ne  connoissoient  gueres. 

'  Il  y  établiten  passant  l'intercession  des  Saints  en  ces  termes:  Amb.  ib.  n.  53. 
«  11  faut ,  dit-il,  prier  pour  nos  besoins  les  Anges  qui  nous  sont 
«  donnés  pour  nous  garder.  11  faut  aussi  invoquer  les  Martyrs, 
«  dont  les  corps  semblent  nous  être  des  gages  de  leur  protection , 
«  Quoiqu'ils  aient  été  autrefois  sujets  à  quelques  péchés,  ils  s'en 
«  sont  purifiés  dans  leur  sang;  et  cela  n'empêche  pas  qu'ils  ne 
«  puissent  prier  pour  les  autres.  Ils  sont  tout  à  la  fois  et  les  fi- 
«  delestém.oinsdeDieu,et  les  inspecteurs  de  nôtre  vie  et  de  nos 
«  actions.  Ne  rougissons  donc  point  de  les  prendre  pour  les  in- 
«  tercesseurs  de  nos  foiblesses.  Us  connoissent  eux-mêmes  par 
«  l'épreuve  qu'ils  en  ont  faite  dans  leur  victoire,  quelles  sont  les 
«  infirmités  de  la  chair.  » 

10°.  '  Cinq  livres  sur  la  foi  à  F  Empereur  Gratien.  C3  prince  Je  ûd.  i).4*3.59t). 
se  préparant  en  378  à  marcher  au  secours  de  Valens  son  oncle 
contre  les  Gots,  voulut  se  munir  d'un  préservatif  contre  les 
mauvaises  doctrines  qui  avoient  cours  en  Orient.  Persuadé 
d'ailleurs  que  la  victoire  dépend  plus  de  la  foi  du  prince  que 
du  courage  des  soldats,  il  étoit  bien  aise  de  se  couvrir  de  ce 
bouclier  contre  la  puissance  formidable  des  barbares.  Dans  ce 
dessein  il  s'adressa  à  S.  Ambroise,  et  lui  demanda  un  traité  qui 
établît  la  divinité  de  J.  G.  contre  les  hérétiques.  Le  saint  Evê- 
que  pour  le  satisfaire  composa  les  deux  premiers  de  ces  cinq 
livres.  11  montre  d'abord  dans  le  premier  en  quoi  consiste  la 
foi  de  l'Eglise,  établissant  l'unité  ae  la  nature  divine,  et  latri- 
nité  des  Persones.  Puis  aïant  prouvé  la  divinité  du  Fils,  il  ré- 
fute d'une  manière  précise  les  principales  erreurs  des  Ariens: 
que  le  Fils  fût  dissemblable  au  Père  :  qu'il  eût  un  commence- 
ment ;  qu'il  fût  créé.  Dans  le  second  livre  S.  Ambroise  conti- 
nue à  prouver  que  les  atributs  de  la  divinité  conviennent  au 
Fils.  Il  y  explique  comment  il  est  envoie  par  le  Père,  com- 
ment il  lui  est  soumis ,  comment  il  est  moindre.  C'est  ce  qu'il 
exécute  en  distinguant  ce  qui  lui  convient  comme  Dieu  ,  et  en 
tant  qu'homme,  et  entre  autres  les  deux  volontés.  '  S.  Ambroi-    •  isg.  ivi. 

Tome  I.  Sec.  Part.  X  x 

2  3  * 


Uiid 


346  S.  AMBROISE,  ËVEQUE  DE  MILAN , 

IV  SIECLE,    se  finit  en  promellant  à  l'Empereur  la  victoire  sur  les  (jlots, 
qu'ildilêtre  ceuxquisontnommésGogdaris  l'Ecriture;  victoire 

Tui.  ibid.  i).  110.  ^ont  il  espère  que  la  protection  de  l'Eglise  sera  le  fruit.  '  Gra- 
tien  les  vainquit  en  etTet  par  la  valeur  de  Theodose  Général  de 
ses  armées. 

'  Ces  deux  premiers  livres  de  S.  Ambroise  sur  la  foi  ont  été 
fort  célèbres  dans  l'antiquité.  Plusieurs  Pères  de  l'Eglise  les  ci- 
tent avec  éloge,  et  s'en  sont  servis  avec  succès  conire  les  hé- 

Coiic.  i.  A.  II.  &13.  résies.  '  Le  Concile  général  d'Ephese  en  431  en  raporle  di- 
vers passages,  pour  établir  le  dogme  de  la  foi  conire  Nestorius. 

Vin.  liv.  11.  5.  '  De  même  Vincent  de  Lerins  dans  son  mémoire  fait  beaucoup 
valoir  l'autorité  du  second  et  du  3"  livre  coiilri;  les  Ariens. 

r!ï' ii'-t'i  fii/'^b       'I-''année  suivante 370  Gralien  de  retour  en  Occident,  écri- 

p.'  120  kl.  "  vit  à  S.  Ambroise  pour  le  priei*  de  lui  envoier  une  seconde  fois 
les  deux  livres  dont  nous  \  enons  de  p.irler,  apWis  qu'il  y  auroit 
fait  quelques  addilions  louchairtla  di\init(''duS.  Esprit .  S.  Am- 
broise s'en  étant  excusé  pour  lors,  l'Empci-eur  passant  par  Mi- 
lan, le  pressa  encore  de  vive  voix  de  salisfiire  à  son  désir.  Les 
instances  de  ce  prince  jointes  à  quelt|ui's  objcictions  que  les 
hérétiques  avoient  faites  conire  les  deux  premiers  livres,  dé- 
terminèrent le  saint  Evêque  àeii  composer  trois  autres.  CeuxHîi 
semblent  écrits  particulièrement  coiilro  les  faux  Evêques  l*al- 
lade  et  Secondien,  qui  suivoienl  la  doctrine  des  Ariens  en  11- 
lyrie,  (juoiqu'ils  en  rejetiissent  le  nom,  parce  qu'il  étoit  alors 
trop  odieux.  Ce  sont  ces  mêmes  Evêcjues  (jui  furent  depuis 
condamnés  dans  le  Coni-ih;  d'A(|uilée  en  381 . 

i)iii>iii.  i.iii.  t..;.  |).       '  Les  Criti(jU(:s  font  beaucoup  de  cas  d(!  ces  cinq  livres  sur 

ïlii-'iij."'''  "*'  ''■  ''ifoi.  A  leur  avis,  eiilrc  le  grand  nombre  des  traités  qui  ont 
été  fails  sur  celle  matière,  il  n'y  en  a  point  où  les  dil'ficullés 
lliéologi(|ues  sur  b;  mystère  de  la  Ti-inité  soient  mieux  discu- 
tées et  mi(;ux  éclaii'cies  qu'en  ceux-ci.  Li!s  objections  les  plus 
subtiles  y  sont  proposées  d'une  manière  intelligible,  et  ré.so- 
lues  avec  une  iielielé  cjui  met  Tous  rage  à  la  portée  de  tout  le 
monde.  On  y  découvre  beaucoup  d'esprit,  de  subtilité  et  d'a- 
grément. On  reraar(|ue  néanmoins  que  l'Auteur  n'y  raisonne 
pas  toujours  ju.sle  ,  et  qu'il  y  emploie  quel(|uefois  des  [)reuves 
«jui  ne  sont  pas  fort  et  incluantes.  Divers  Ecrivains  du  moien 
âge  les  citent  sous  le  titre  du  livres  sur  la  Trinité ,  et  (|uelques 
manuscrits  retiennenl  h;  n]ême  lilre.  Mais  ils  sont  plus  connus 
sous  le  nom  de  li\res  sur  la  foi  ;  el  c'est  ainsi  <|ue  S.  Ambroise 
les  cite  lui-même.  Quoiqu'ils  soient  écrits  parliculicremeul 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     317 

contre  les  erreurs  d'Arius,  S.  Ambroise  ne  laisse  pas  d'y  réfu-    iv  siècle. 
1er  celles  des  Manichéens,  des  Sabelliens  et  des  Photiniens. 

11".  '  La  même  année  37'.),  ou  même  dès  la  précédente  S.  ^"']'-  'i'- satyr.  p. 
Ambroise  composa  deux  traités  à  l'ocasion  do  la  mort  de  S.  Sa-  iin.iV  p.  m'j.'  73',. 
lyre  son  frère.  F^e  premier  est  V  Oraison  funéhre  Ae  ce  Saint  qu'il 
prononça  en  présence  du  corps  exposé  à  découvert,  et  où  il 
pleure  sa  mort.  L'autre  est  un  discours  qu'il  prononça  le  sep- 
tième jour  après  son  décès,  lorsqu'on  revint  au  tombeau  pour 
faire  les  prières  acoiiiumétis.  '  Dans  le  premier  S.  Ambroise  '^'"•'-  '"'i''; 
fait  l'éloge  de  son  frère,  et  en  relevé  le  mérite  et  la  vertu.  Il 
loue  sur-tout  sa  simplicité,  sa  tempérance,  sa  chasteté ,  sa  libé- 
ralité envers  les  pauvres,  sa  foi  pour  l'Eucharistie.  On  y  voit 
que  les  Chrétiens  la  portoient  avec  eux  dans  leurs  voïages ,  el 
qu'ils  la  regardoient  comme;  un  préservatif  dans  les  périls.  Le 
second  discours  est  emploie  pour  montrer  comment  on  se  doit 
consoler  de  la  perte  des  personnes  (jui  nous  sont  les  plus  chè- 
res, par  la  foi  de  la  résurrection.  Aussi  cet  écrit  en  traite  avec 
étendue,  et  en  a  pris  le  titre.  '  On  croit  que  S.  Ambroise  dési-  thi.  iiiid.  p.  n». 
gne  l'un  et  l'autre ,  lorsqu'écrivant  sur  le  premier  Pseaume,  il 
cite  ses  livres  de  la  consolation  et  de  la  résurrection.  S.  Augus- 
tin les  cite  aussi  sous  ce  dernier  titre.  '  il  paroît  |)ar  le  coinmen-  '^"'''  ''•'  '•"''  "•  * 
cernent  du  second  discours  que  c(!  fut  S.  Ambroise  qui  le  rédi- 
gea lui-même  en  forme  de  traité  divisé  en  deux  livres,  comme 
nous  l'avons  aujourd'hui. 

'On  trouve  dans  l'Antidote  contre  les  hérésies  un  fragment  Amid.  p.  o*.  -m 
d'ouvrage  sous  le  nom  de  S.  Ambroise ,  touchant  la  foi  de  la 
réinsertion.  Il  ne  faut  pas  se  laisser  tromper  par  ce  titre  spé- 
cieux, qui  pourroit  faire  croire  que  ce  fragment,  rempli  de  fautes 
d'ailleurs,  seroitpris  du  second  livre  de  l'opuscule  dont  nous 
venons  de  parler.  Ce  n'est  qu'un  extrait  mal  assorti,  que  l'on  a 
tiré  du  traité  de  la  Trinité  faussement  atribué  à  S.  Ambroise. 

12".  Pour  continuer  le  catalogue  chronologique  des  écrits  du 
saint  Evêque ,  celui  qui  paroît  avoir  suivi  de  plus  près  l'épo- 
que du  précédent ,  '  est  son  livre  sur  Noé  et  de  t Arche.  "  Dans  Amb.  do  nob,  p. 
un  manuscrit  de  Corbieil  est  \x\K\\\)\k  De  ï krvhe  de  Noé;  et  c'est  «adm-  p.  aa;. 
ainsi  qu'il  est  cité  par  S.  Augustin.  Nous  ne  l'avons  que  fort 
imparfait  en  divers  endroits.  Ainsi  l'on  ne  doit  point  s'éton- 
ner de  n'y  point  trouver  les  paroles  qu'en  raporte  ce  Père.  Le 
but  général  de  S.  Ambroise  dans  ce  traité,  est  de  décrire  la 
vie  et  les  mœurs  de  Noé.  Mais  son  dessein  particulier  est  d'y 
expliquer  l'histoire  de  la  structure  de  l'Arche  et  du  déluge  uni- 

X  X  ij 


348         S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE     versel.  C'est  ce  qu'il  exécute  avec  beaucoup  d'art,  et  selon  le 
■  sens  literal  et  selon  le  sens  allégorique  ,  d'où  il  tire  à  son  or- 
dinaire d'excellentes  instructions  pour  les  mœurs. 

o;r.  1. 1.  n.  78.  '  S.  Ambroise  cite  lui-même  ce  traité  dans  ses  Offices,  mais 

seulement  en  désignant  le  8'  chapitre,  sans  nommer  l'ouvrage. 

(lo  Noii,  n.  GO.  'Dans le  17"  chapitre  il  fait  mention  comme  d'une  chose  assez 
récente ,  de  l'usage  des  indictions  qui  commençoient  l'année 

aiim.  p.  225.  au  mois  dc  Septembre.  '  Il  y  déplore  souvent  les  calamités 
publiques ,  que  l'on  croit  être  celles  qui  suivirent  de  près  la 
mort  de  l'Empereur  Valons.  C'est  une  des  raisons  qui  font  met- 
tre ce  traité  en  l'année  379.  On  y  lit  quelques  endroits  qui  pa- 
roissent  pris  du  livré  de  Philon  sur  l'agriculture. 

(in^sp.  s.  p.  coo.  13».  'Les  trois  livres  sur  le  S.  Esprit  furent  composés  à  la 
prière  de  l'Empereur  Gratien,  à  qui  ils  sont  adressés.  Ce  prince 
les  avoit  demandés ,  comme  nous  l'avons  dit ,  dès  379,  afin  de 
s'instruire  sur  cette  matière,  ainsi  qu'il  l'éloit  déjà  sur  la  divinité 
du  Fils.  S.  Ambroise  toutefois  n'y  mit  la  dernière  main  qu'en 
381 .  C'est  ce  qui  paroît  par  la  préface ,  où  il  désigne  la  mort 
d'Athanaric  Roi  des  Gots ,  arrivée  à  Constantinople  le  2.">  de 
Janvier  de  cette  même  année.  D'ailleurs  comme  il  y  nomme 
pour  Evêques  de  Rome,  d'Alexandrie  et  de  Constantinople 
Damase ,  Pierre  et  Grégoire ,  il  montre  qu'il  ignoroit  alors  la 
mort  de  Pierre  et  l'abdication  que  fit  Grégoire  dans  le  Con- 
cile général  qui  se  tint  cette  même  année  à  Constantinople. 
De  sorte  que  ne  faisant  même  nulle  mention  de  ce  Concile , 
il  faut  dire  que  l'ouvrage  fut  fini  avant  sa  tenue.  Saint  Am- 
broise y  agit  et  contre  les  Ariens  et  contre  les  Macé- 
doniens, et  y  prouve  que  le  S.  Esprit  est  Dieu ,  égal  au  Père 
et  au  Fils,  et  de  même  substance.  Que  c'est  lui  qui  a  parlé 
par  les  Prophètes  et  les  Apôtres.  Que  c'est  lui  qui  sanctifie 
toutes  les  créatures  qui  sont  saintes ,  en  quoi  éclate  son  infinie 
bonté.  Que  ses  opérations  sont  les  mêmes  que  celles  du  Père 
et  du  Fils.  Qu'on  lui  doit  par  conséquent  la  même  adoration  , 
comme  aïant  la  même  divinité. 

a.im.  p.  596.  '  Dans  quclques  manuscrits  cet  ouvrage  porte  pour  titre  De  la 

Trinité,  ainsi  que  les  cinq  livres  sur  la  foi ,  et  il  se  trouve 

*"c'  sr'n  '^4ti'  '■  ^^^^  ^^  ^*  ^^^*^  P"^^  quelques  Ecrivains.  '  S.  Augustin  témoi- 
gne que  S.  Ambroise  y  emploïa  un  style  simple ,  parce  que  le 
sujet  qu'il  y  traite  n'avoit  pas  besoin  des  ornemens  de  Vélo- 

Ami).  aim.  ibid.  queuce  pour  faire  impression  sur  lés  esprits.  '  Baronius  croit  que 
S.  Ambroise  a  tiré  une  grande  partie  de  cet  ouvrage  de  celui 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  GONFESS.  349 

que  S.  Basile  avoit  adressé  à  S.  Amphiloque  sur  la  même  ma-    i  v  siècle. 
tiere.  'Mais  S.  Jérôme  et  Rufin  assijrent  que  c'est  deDidyme  Hicr.apo.  i.  2.  pi 
d'Alexandrie  :  de  quoi  S.  Jérôme  parle  en  des  termes  que  Ru-  *32-'*34. 
fin  a  cru  devpir  repousser  comme  injurieux  à  la  mémoire  de 
S.  Ambroise. 

'  Au  reste  en  confrontant  ce  traité  avec  celui  de  Didyme,  ^^^-  "''''•  !•■  ''^*- 
l'on  ne  peut  s'empêcher  d'y  apercevoir  de  la  conformité,  sur- 
tout en  ce  que  l'un  et  l'autre  contiennent  louchant  l'effusion  du 
S.  Esprit,  la  sanctification  qu'il  opère,  sa  science  et  ses  autres 
dons.  Cela  n'empêche  pas  néanmoins  que  l'on  n'y  observe 
que  S.  Ambroise  s'y  est  aussi  servi  des  autres  Auteurs  grecs, 
comme  de  S.  Athanase,  de  S.  Grégoire  de  Nysse,  et  particulière- 
ment de  S.  Basile  dont  il  emploie  judicieusement  les  preuves  et 
les  pensées,  pour  les  faire connoître  à  l'Eglise  d'Occident.  C'est 
ce  qui  a  fait  dire  aux  Pères  du  Concile  de  Florence,  qu'il 
avoit  pris  beaucoup  de  choses  de  ce  dernier  Docteur.  '  Ces  conc.  t.  4.  p.  12c. 
trois  livres  sur  le  S.  Esprit  et  les  cinq  sur  la  foi  sont  ces  huit  li- 
vres que  le  PapeHormisdas  dit  avoir  été  faits  par  S.  Ambroise 
pour  satisfaire  à  la  letrede  Gratien  ;  l'un  ne  se  lassant  point  de 
travailler  pour  la  foi,  ni  l'autre  de  recevoir  ce  que  le  S.  Evo- 
que lui  adressoit. 

14°.  Le  traité  sur  le  mystère  de  rincarnation  du  Seigneur^  Amb.  de  im-.  p. 
ne  fut  fait  qu'après  les  cinq  livres  sur  la  foi  qui  y  sont  cités.  C'est  ™*"""- 
pourquoi  on  le  place  en  l'année  382.  S.  Ambroise  y  établit  so- 
lidement la  divmité  du  Verbe  contre  les  Ariens,  et  y  réfute 
avec  la  même  solidité  les  erreurs  des  Apollinaristes,  dont  il 
tait  néanmoins  le  nom.  Il  fait  voir  contre  les  uns  et  les  autres 
qu'il  y  a  en  J.  C.  deux  natures  complettes  :  la  nature  divine  se- 
lon laquelle  il  est  égal  au  Père,  et  la  nature  humaine  selon  la- 
quelle il  est  vrai  homme,  aiant  un  corps  réel  et  une  ame  in- 
telligente. '  C'est  ce  qui  fait  quelquefois  donner  à  ce  traité  Tiii.  ibid.  p.  itr.. 
le  nom  de  livre  contre    les   dogmes  d'Apollinaire.  Plusieurs 
Pères  l'ont  cité  avec  succès  contre  les  mêmes  erreurs,  et  en 
général  contre  les  hérétiques  qui  ont  combatu  l'Incarnation 
du  Verbe. 

'  Ce  n'est  proprement  que  le  discours  que  S.  Ambroise  avoit  Amb.  iwd.  adm. 
prononcé  devant  son  peuple  à  l'ocasion  d'une  question  que  ^'  '  "' 
deux  Chambellans  de  Gratien  lui  avoient  faite  avec  beaucoup 
do  fierté  sur  ce  sujet.  Mais  il  le  retoucha  dans  la  suite,  et  y 
ajouta  diverses  choses  suivant  sa  coutume.  '  Ces  deux  Offi-  va.  n.  is. 


350  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN?  ^'"^ 

IV  SIECLE,  ciers  Ariens  de  profession  avoient  proposé  leur  difficulté  à  S. 
Ambroise,  afin  qu'il  r('pon<lît  h)  lendemain  dans  la  basilique 
Portiene,  où  fout  le  monde  avoit  promis  de  se  rendre.  Mais 
ces  malheureux  méprisèrent  de  se  trouver  à  l'assemblée.  Pour 
l'éviter  ils  moulèrent  sur  un  cliariol,  et  allèrent  se  promener 
hors  la  ville.  Ils  portèrent  aussi-tôt  la  peine  de  leur  mépris; 
car  étant  tombés  de  leur  chariot,  ils  demeurèrent  morts  sur  la 
place.  S.  Ambroi.se  ne  sachant  rien  de  cet  accident,  se  rendit 
il  l'église  où  il  les  atendit  assez  long-tems  inulilcment.  Voïant 
qu'ils  ne  venoient  point,  il  ne  laissa  pas  de  s'aquiter  de  .sa  pro- 
messe, et  prononça  le  discours  ((u'ils  l'avoient  engagé  à  pré- 

<!<'  inr.  II.  I.  M.  parcr.  '  Afin  de  leur  donner  le  tems  de  se  rendre,  S.  Ambroise 
commença  par  expliquer  les  .sicrifices  d'Abel  et  de  Caïu.  Il 
aplique  aux  hérétiques  la  malédiction  que  Dieu  prononçacon- 
tre  le  sacrific(^  de  celui-ci,  et  fait  ensuite  un  dénombrement 
des  principales  hérésies,  jusqu'à  celle  des  Apollinaristes  inclu- 
sivement. 

i).  7Î0. -32.  '.Alafindece  traité  de  S.  Ambroisr  sur  l'Incarnation,  les 

derniers  éditeurs  nous  ont  donné  en  grec  et  en  latin  un  frag- 
ment raporté  par  Théodonit,  c(»mme  pris  d'un  livre  du  même 
S.  Ambroise  .sur  l'explication  de;  la  foi.  I^'on  ne  sait  point  au 
reste  de  quel  ouvrage  de  ce  saint  Evêque  Théodoret  a  tiré  ce 
fragment.  Comme  il  a  beaucoup  de  raport  avec  le  traité  sur 
le  mystère  de  l'Incarnation,  l'on  a  jugé  à  propos  de  le  mettre 
à  la  fin  de  ce  traité.  En  eflel  il  roule  tout  entier  sur  les  deux 
natures  en  . T.  C  Mais  il  y  a  toute  aparence  qu'il  e.sl  moins  de 
S.  Ambroise  que  d'un  Auttuir  posiérieur,  qui  avoit  connois- 
sance  des  hérésies  de  Ne.storius  et  d'Eutichès. 

.1-  .loi) ,  p.  («li.       I  -^J"-  '  ^<?*  qvatrejivres  de  la  plainte  de  Joh  et  de  David, 

""  ont  chacun  leur  titre  particulier.  Le  premier  est  intitulé  De  la 

plainte  de  Job  etde  lafoiblesse,  de  l'homme  ;  le  second  elle  qua- 
trième de  la  plainte  de  David;  et  le  troisième  delà  plainte  de 

a.ini.  11.  f.22.  «lob.  '  Ils  sc  trouvcnt  tous  quatre  sous  les  mêmes  titres  et  avec, 

le  même  ordre  dans  un  manu.scrit  ancien  au  moins  de  mille 
ans,  sur  lequel  les  derniers  éditeurs  les  ont  donnés.  Le  com- 
mencement du  premier  et  du  troisième  livre  fait  voir  que  c'esl- 
là  leur  ordre  naturel.  Les  éditicns  de  Rome  avoient  mis  dans 

t!23.  ces  livres  une  confusion  intolérable.  '  Du  premier  et  du  troi- 

sième elles  avoient  fait  un  commenlaire  sur  le  livre  de  Job; 
et  du  second  joint  au  quatrième  séparés  des  autres,  elles  avoient 
formé  des  explications  sur  les  Pseaumes  11 ,  42,  et  72. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.     351 

''  Le  second  livre  manque  dans  les  plus    anciennes  éditions    i  v  siec  l k 
de  S.  Ambroise.  Erasme  fui  le  premier  qui  le  publia  en  l'ôtant  7.,^^       ^ 
à  son  véritable  Auteur,  pour  le  donner  à  celui  qui  a  fait  le  traité 
de  la  Vocation  des  Gentils.  Mais  cette  tentative  dénuée  de 
tout  apui,  n'a  pu  l'emporter  sur  les  raisons  invincibles  qui  atri- 
buent  ce  livre  à  S.  Ambroise,  et  qui  ne  permetli  nt  pas  de 
le  séparer  des  autres  trois,  que  personne  ne  lui  ajamais  contes- 
tés. '  On  fait  voir  par  d'assez  bonnes  preuves  que  ces  quatre  p.  «as. 
livres  ont  été  écrits  vers  l'an  383,  et  composés  de  divers  ser- 
mons prêches  au  peuple. 

'  S.  Ambroise  emploie  le  premier  livre  à  expliquer  les  plain-  Md. 
tes  que  Job  et  David  font  sur  les  misères  de  l'homme,  tant  par 
raportà  l'ame  qu'au  corps,  et  particulièrement  sur  l'assujetisse- 
menl  au  péché.  C'est  ce  qu'il  exécute  en  se  servant  des  pre- 
miers chapitres  du  livre  de  Job,  et  y  faisant  aux  principaux 
endroits  des  observations  fort  instructives.  Il  continue  le  même 
sujet  dans  le  second  livre  en  y  expliquant  les  Pseaumcs  41  et 
42.  Il  y  distingue  trois diderens  sujets  de  plainte:  les  misères 
qui  acompagnent  la  vie  présente;  le  délaides  biens  futurs,  et 
sur-tout  du  dernier  avènement  de  J.  C.  et  la  nécessité  où  nous 
nous  trouvons  de  vivre  parmi  les  médians. 

Les  deux  derniers  livres  sont  emploies  pour  repousser  les  ibi.i. 
plaintes  de  ceux  qui  trouvent  ù  redire,  que  les  méchans  soient 
heureux  en  cette  vi(!,  et  les  bons  malheureux.  S.  Ambroise  y 
montre  que  ie  bonheur  des  premiers  n'est  qu'un  bonheur  apa- 
rent  (|ui  ne  peut  les  rendre  véritablement  heureux  ni  -  n  cette 
vie  ni  en  l'autre.  Qu'au  contraire  les  maiix  que  souffrent  les 
bons,  sont  un  gage  assuré  d'un  bonheur  éternel.  Uconfirme  ces 
grandes  vérités,  qui  ne  sauroient  être  trop  connues  en  tous  les 
tems,  par  une  excellente  explicalion  du  Pseauine  72. 

10°.'  Les  deux  livres  de  la  pénitence  sont  écrits  particulière-  .ic  \wi\.  p.  mi. 
nient  contre  les  Novatiens,  qui  la  détruisoient  en  prél(;ndant  *'"■ 
que  tous  les  péchés  étoient  irrémissibles.  '  En  393  S.  Ambroise  in  ps.  37.  n.  1. 
écrivant  sur  le  Pseaume   37,  disoit  en  parlant  de  ces  deux 
livres,  qu'il  y  avoit  déjà long-tems  qu'il  les  avoil  composés  :  de 
pamitentia  duos  jamdudum  scripsi  Ubellos.  '   C'est  ce  qui  'le  ikuh.  adm.  p 
joint  à  quelques  autres  circonstances  marquées  dans  ces  livres, 
les  lit  mettre  en  384,  après  la  grande  affaire  sur  l'autel  de  la 
Victoire.  S.  Augustin  en  trois  dillérens  endroits  de  ses  écrits  cite 
ces  mêmes  livres  sous  le  nom  de  S.  Ambroise,  qui  les  recon- 
noît  lui-même  comme  l'on  vient  de  le  voir  pour  être  de  lui. 


387. 


352  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN,     '^* 

IV  SIECLE.  Après  quoi  il  est  étonnant  qu'il  se  trouve  des  critiques  qui  osent 
les  lui  disputer.  C'est  ce  qu'on  apelle  vouloir  critiquer  à  pure 
perle.  Il  n'est  gueres  d'ouvrages  des  Anciens,  où  l'on  trouve 
mieux  établies  et  l'autorité  de  remettre  les  péchés  que  l'Eglise 
a  reçue  de  J.  G.  et  la  nécessité  de  les  confesser  et  d'en  faire  pé- 
nitence. 

1-  I  n.  1. 96.  •'  S.  Ambroise commence  le  premier  livre  par  l'éloge  de  la 

modération  et  de  la  douceur  Chrétienne,  pour  l'oposer  à  la 
rigueur  et  à  la  dureté  des  Novatiens.  Ensuite  il  établit  le  pou- 
voir incontestable  confié  à  l'Eglise  de  remettre  toute  sorte  de 
péchésquelsqu'ilspuissent  être,  et  montre  que  Dieu  est  plus 
porté  à  la  miséricorde  et  à  la  clémence,  qu'à  la  justice  et  à 
la  sévérité.  Après  quoi  il  emploie  le  reste  du  livre  à  résoudre 
les  objections  des  hérétiques.  11  s'arrête  particulièrement  à  celle 
qu'ils  tiroient  de  ces  paroles  de  la  première  épitre  de  S.  Jean. 
tly  aunpéché  qui  va  à  la  mort,  et  ce  n'est  pas  pour  celui-là 
que  je  vou^  dis  que  vous  priiez.  S.  Ambroise  prouve  par  S. 
Jean  mêmeaue  le  sens  qu'y  atachoient  les  Novatiens,  est  bien 
éloigné  de  celui  du  S.  Apôtre,  aussi-bien  que  la  doctrine  de  S. 
Paul  et  de  toute  l'Ecriture.  En  réfutant  ainsi  les  erreurs  des  hé- 
rétiques, et  confirmant  le  dogme  de  l'Eghse,  l'Auteur  a  soin  d'in- 
sérer d'excellens  avis  pour  porter  ses  lecteurs  à  veiller  avec 
une  circonspection  infatigable  sur  leurs  sens  et  leurs  cœurs,  afin 
de  ne  donner  aucune  entrée  au  péché . 

n.  yo.  «       '  Sur  la  fin  du  livre  on  lit  ces  paroles  remarquables  :  «  Je 

«  veux,  dit-il,  que  le  coupable  espère  le  pardon.  Je  veux  qu'il 
«  le  demande  avec  larmes  etgémissemens,  qu'il  y  emploie  mê- 
«  me  les  larmes  de  tout  le  peuple,  et  qu'il  use  d'instance  pour 
«  l'obtenir.  Que  si  l'on  diffère  deux  ou  trois  fois  de  l'admettre  à 
«  la  communion,  qu'il  s'impute  lui-même  ce  délai.  Qu'il  croie 
«  qu'il  vient  de  ce  que  ses  prières  n'ont  pas  été  assez  ardentes. 
«  Qu'il  redouble  donc  ses  pleurs;  qu'il  revienne  ensuite  dans 
«  une  posture  encore  plus  humiliante;  qu'il  se  jette  aux  pieds 
«  des  Fidèles  ;  qu'il  les  embrasse,  qu'il  les  baise,  qu'il  les  baigntî 
«  de  ses  larmes,  et  qu'il  ne  les  quite  point,  afin  que  le  Seigneur 
«  Jésus  dise  de  lui  ;  Beaucoup  de  péchés  lui  sont  remis,  par- 
ti ce  qu'il  a  beaucoup  aimé. 

n.  9»  »  '  J'ai  connu,  ajoute  S.  Ambroise  à  cette  ocasion,  j'ai  con-r 

«  nu  des  personnes,  qui  à  force  de  pleurer  pendant  le  tems  de 
«  leur  pénitence  se  sont  gâté  le  visage,  qui  ont  formé  comme 
«  des  sJlons  sur  leurs  joues  par  leurs  larmes  continuelles,  qui  se 

sont 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     353 

«  sont  prosternées  en  terre  pour  être  foulées  aux  pieds  de  tout  le     iv  siècle. 
«  inonde;  qui  par  leurs  jfîûnes  continuels  se  sont  rendu  le  visage 
«  si  pâle  et  si  défiguré,  qu'elles  portoient  dans  un  corps  vivant 
«  l'image  de  la  mort.  »  On  ne  voit  plus  de  tels  exemples  de  pé- 
nitence. 

Dans  le  second  livre  S.  Ambroise  enseigne  d'abord  qu'il  '  '  n  1. 107. 
faut  être  atentif  et  studieux  à  ne  pas  diférer  d'embrasser  la  pé- 
nitence qu'exigent  nos  péchés.  II  passe  ensuite  à  réfuter  les 
deux  principales  objections  des  Novatiens  :  prises,  l'une  du 
passage  de  l'Epitre  aux  Hébreux,  où  il  est  dit  qu'il  est  impossi- 
ble ^  ceux  qui  ont  une  fois  perdu  la  grâce  du  baptême  d'être 
renouvelles  ;  l'autre  de  ce  que  J.  C.  dit  du  péché  contre  le  S. 
Esprit.  Après  cette  réfutation  où  les  Théologiens  des  siècles  sui- 
vans  ont  puisé  tant  de  lumière,  S.  Ambroise  vient  à  exhorter 
les  Fidèles  à  la  pénitence,  dont  il  leur  explique  les  conditions, 
et  la  manière  de  la  faire.  Entre  ces  conditions  l'on  en  remar- 
que cinq  principales.  1 ,  Les  pécheurs  demandoient  eux-mê- 
mes à  être  mis  en  pénitence  ;  2,  en  les  mettant  en  pénitence 
on  les  séparoit  de  la  communion  ;  3,  ils  faisoient  pénitence  pu- 
bliquement; 4,  ils  pratiquoient  beaucoup  déjeunes,  d'austé- 
rités, d'humiliations  pendant  leur  pénitence;  5,  cette  sorte 
de  pénitence  ne  s'imposoit  qu'une  fois  :  sicutunum  baptisma, 
ita  una  pœnitentia. 

Outre  cette  sorte  de  pénitence,  S.  Ambroise  en  distingue  "  9".. 
une  autre  qui  doit  se  pratiquer  tous  les  jours.  Celle-ci  est  pour 
les  péchés  les  plus  légers  ;  au  lieu  que  la  première  étoit  pour 
les  plus  griefs.  '  En  faisant  le  détail  des  moïens  de  pratiquer  "  8i.<»(i 
l'une  et  l'autre,  il  marque  la  prière,  le  jeûne,  l'aumône,  les  lar- 
mes, les  gémissemens,  la  privation  du  sommeil  même  néces- 
saire, et  des  autres  choses  qui  Hâtent  les  sens,  le  renoncement 
au  siècle  et  à  soi-même,  afin  de  devenir  une  nouvelle  créatu- 
re. '  Mais  il  veut  que  la  foi  et  la  charité  animent  toutes  ces  pra-  "  «^ 
tiques,  faute  de  quoi  elles  seroient  inutiles.  Quid enim prodest 
cullatio  pairirnonii  sine  gratia  caritatis?  '  Il  a  aussi  porté  l'a-  "•  *♦• 
tention  à  marquer  les  défauts  que  l'on  y  doit  éviter,  comme  la 
vanité  et  la  vaine  gloire.  Ceux  qui  y  tombent,  dit-il ,  ont  déjà 
reçu  leur  récompense  dès  cette  vie,  et  n'ont  plus  rien  à  espérer 
dans  l'autre.  '  Il  ne  veut  pas  non  plus  que  l'on  se  porte  à  la  pé-  "  ^■ 
nitence  par  le  seul  remords  de  sa  conscience  et  la  seule  crainte 
de  l'enfer  ;  parce  qu'ordinairement  ces  sortes  de  personnes  n'y 
perséverentpas.  Il  faut  encore  éviter  de  se  repentir  d'avoir  fait  pé- 
Tome  I.  Sec.   Pari  Y  y 


II.  S7. 


11.89 


3rii  s.  AMBROISR,  EVEQUE  DE  MILAN, 

V  SIECLE,    nitence,  ce  que  feroient,  par  exemple,  ceux  qui  se  reproclie- 

roient  d'avoir  donné luur  bien  aux  pauvres.'  S.  Arabroise  taxe 

encore  ceux  qui  ne  demanderoient  la  pénitence,  qu'afin  d'ê- 
tre aussi-tôt  admis  à  la  communion.  «  Ceux-ci,  dit-il,  ne  desi- 
«  rent  pas  tant  d'être  déliés,  que  de  lier  le  prêtre.  En  effet, 
«  ajoûte-t-il,  ils  ne  déchargent  point  leur  conscience,  et  ne  font 
«  que  charger  celle  du  Prêtre,  à  qui  il  est  défendu  de  donner 
«  les  choses  saintes  aux  chiens,  et  de  jetler  des  pierres  pré- 
«  cieuses  devant  les  pourceaux  :  c'est-à-dire  d'admettre  faeile- 
«  ment  les  âmes  impures  à  la  communion  sacrée.  » 

Il  faudroit  traduire  ici  tout  le  reste  de  ce  livre,  si  nous  vou- 
lions raporter  tout  ce  qui  y  est  digne  de  remarques.  Nous  nous 
bornerons  à  ces  deux  autres  traits.  «  '  Il  y  en  a  d'autres,  con- 
«  tinue  S.  Ambroise,  qui  font  consister  la  pénitence  à  s'absle- 
«  nir  simplement  des  sacremens.  C'est  être  un  cruel  juge  con- 
«  Ire  soi-même;  puisque  c'est  éviter  le  remède,  et  se  prescrire 
«  une  peine  qu'il  faudroit  pleurer,  en  ce  qu'elle  nous  prive  de 
«  la  grâce  du  Ciel.  D'autres  enfin  dans  l'espérance  de  faire  un 
<f  jour  pénitence,  prennent  de-là  un  sujet  de  croire  qu'ils  ont 
«  plus  de  liberté  pour  pécher,  sans  considérer  que  la  pénitence 
«  est  un  remède  contre  le  péché,  et  non  pas  un  atrait  pour  por- 
te ter  au  péché.  C'est  à  la  plaie  que  le  remède  est  nécessaire,  et 
«  non  pas  la  plaïe  au  remède.  Ce  n'est  pas  pour  le  remède  que 
«  se  fait  la  plaïe,  mais  c'est  pour  la  plaïe  que  le  remède  se  pré- 
«  pare.  D'ailleurs  l'espérance  que  l'on  établit  sur  le  tems,  est 
«  bien  foible;  puisque  tout  tems  est  incertain,  et  que  l'espc- 
«  rance  ne  dure  pas  au-delà  du  tems.  » 

n.%.  '  Après  que  S.  Ambroise  a  ainsi  détaillé  les  conditions  re- 

quises pour  la  pénitence  et  les  défauts  que  l'on  y  doit  éviter, 
il  s'est  crû  obligé  .de  déclarer  qu'il  est  plus  facile  de  trouver 
des  personnes  qui  ont  conservé  l'innocence  de  leur  baptême, 
que  d'en  voir  qui  après  l'avoir  perdue,  en  fassent  une  péniten- 
ce convenable. 

n,K..  Dav.  p.  6-,'..       17°.'  L'Apolo(jie  du  Prophète  David  [\xi  faite  peu  après  lamort. 

"•**  de  Gratien,  que  S.  Ambroise  y  déplore  au  cnapitre  sixième. 

Elle  paroît  visiblement  composée  des  sermons  que  le  saint  Evê- 
que  avoit  prêches  devant  son  peuple.  Le  but  qu'il  s'y  propose, 
est  de  lever  l'espèce  de  scandale  que  souffroient  quelques-uns 
en  lisant  dans  l'Ecriture  la  chute  d'un  si  grand  Prophète  dans 
un  double  crime,  l'adultère  et  l'homicide.  S.  Ambroise  ne  l'en 
excuse  point.  Seulement  il  entreprend  de  montrer,  qu'aussi- 


DOCÏEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     355 

tôt  qu'il  les  reconnut,  il  en  fit  une  sérieuse  pénitence.  Qu'il  ré-    iv  siècle. 
para  sa  faute  par  quantité  de  bonnes  actions.  Que  c'est  pour  ~ 

nous  instruire,  que  Dieu  permit  qu'il  tombât  dans  ce  double 
péché.  La  plus  belle  partie  de  cet  écrit  est  l'explication  du 
IVaume  50*  qui  commence  au  8*  chapitre,  et  qui  comprend 
tous  les  suivans.  '  Dans  l'édition  de  Rome  cette  explication  se  aJ'».  p  «7t. 
trouve  séparée  de  l'Apologie  :  ce  qui  est  contre  l'autorité  des 
manuscrits  et  des  anciennes  éditions  de  S.  Ambroise. 

'  Selon  un  manuscrit  ancien  de  plus  de  mille  ans,  qui  iij. iTiii.ib.p.aih». 
a  apartenu  à  M.  de  Thou,  cette  Apologie  est  adressée  à  l'Em- 
pereur Thcodose,  h  qui  S.  Ambroise  put  fort  bien  en  envoler 
une  copie  après  le  meurtre  de  Thessalonique.  '  On  a  suivi  ce  Amii.  Apo.  Dav.p. 
manuscrit  dans  la  dernière  édition  de  ce  père,  où  se  lit  le  nom 
de  cet  Empereur  dans  le  titre  de  la  pièce,  comme  lui  étant 
adressée.   Elle  fut  faite,  ainsi  qu'on  l'a  dit,  peu  après  la  mort  aJm.  ib. 
de  (îratien,  '  et  elle  se  trouve  citée  dans^  le  Commentaire  de  in  uc.  adm.  p. 
S.  Ambroise  sur  S.  Luc,  qui  ne  fut  fini  qu'en  380,  quoique  **'^' 
commencé  dès  385.  C'est  ce  qui  détermine  à  assigner  à  celte 
Apologie  l'an  384. 

1 8".  On  vient  de  voir  par  avance  l'époque  qui  convient'  au  i»  Luc.  p.  mn. 
Commentante  sur  S.  Luc,  qui  est  un  des  principaux  ouvrages  *'**' 
de  S.  Ambroise.  '  C'est  sans  nul  fondement  que  Baronius  a  «dm.  p.  tm. 
voulu  le  placer  dès  376.  Outre  l'Apologie  du  prophète  David  qui 
y  est  citée,  comme  on  vient  de  le  dire,  S.  Amoroise  y  cite  en- 
core ses  livres  sur  les  veuves,  sur  la  foi  et  sur  le  S.  Esprit,  dont 
les  derniers  ne  furent  écrits  qu'en  381 .  11  paroit  par  plusieurs 
endroits  de  ce  Commentaire,  que  ce  n'est  qu'un  recueil  d'ho- 
mélies ou  de  sermons  que  le  saint  Evêque  avoit  prêches  de- 
vant son  peuple.  Il  les  retoucha  depuis,  et  emploïa  près  de  deux 
ans  à  les  rédiger  dans  l'ordre  que  nous  les  avons  aujourd'hui, 
divisés  en  dix  livres. 

'  Quoique  S.  Ambroise  n'ait  entrepris  d'expliquer  dans  cet  vm. 
ouvrage  que  le  texte  de  S.  Luc,  il  ne  laisse  pas  toutefois  d'y 
éclaircir  divers  endroits  des  autres  Evaiigelistes.  Il  le- fait  sur- 
tout, lorsqu'ils  paroissent  avoir  quelque  difficulté  particulière, 
ou  qu'ils  ont  été  omis  par  S.  Luc.  II  s'atache  particulièrement 
à  concilier  les  endroits  des  quatre  Evangelistes,  qui  paroissent 
opposés  les  uns  aux  autres.  De  même  quoiqu'il  se  soil  proposé 
de  suivre  le  sens  literal  et  historique,  cela  n'empêche  pas  qu'il 
ne  donne  .souvent  dans  le  sens  mystique  el  .spirituel,  dont  il 
.sait  tirer  d'exccUens  préceptes  do  morale.  Il  y  a  aussi  inséré, 

Y  y  ij 


356  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

(V  SIECLE,  lorsque  le  texte  lui  en  a  fait  naître  l'ocasion,  divers  points  de 
controverse  pour  combalre  les  hérésies  qui  avoient  cours  en  son 
tems.  Il  y  combat  entre  autres  les  Manichéens,  les  Photiniens, 
et  particulièrement  les  Ariens. 

in  i.iic.  pi.  11.  1.8.  A  la  tête  se  lit  une  préface  de  l'Auteur  pour  relever  l'ex- 
cellence de  la  sagesse  qui  brille  dans  toute  l'Ecriture,  nommé- 
ment dans  l'Evangile,  et  pour  tracer  le  caractère  des  quatre 
Evangelistes.  Il  dit  que  S.  Jean  est  le  plus  sublime  de  tous. 
Qu'il  s'est  élevé  au-dessus  des  nuées,  au-dessus  des  Vertus  cé- 
lestes, au-dessus  des  Anges,  et  jusqu'au  sein  de  Dieu  même,  où 
il  a  trouvé  le  Verbe.  Que  S.  Matthieu  s'est  plus  ataché  à  dé- 
crire la  naissance  de  J.  G.  et  à  instruire  les  nommes  sur  les 
mœurs.  Que  S.  Marc  a  su  tout  à  la  fois  et  inspirer  l'admira- 
tion, et  montrer  la  voie  qui  conduit  à  l'immortalité.  Que  S. 
Luc  s'atache  davantage  à  l'ordre  historique,  et  raporte  plus 
de  faits  que  de  préceptes. 

I  1.  n.  2.  '  Sur  les  premières  paroles  de  S.  Luc  S.  Ambroise  fait  l'é- 

numération  de  divers  Evangiles  que  l'on  voïoit  encore  de  son 
tems.  Il  nomme  celui  que  l'on  atnbuoit  aux  douze  Apôtres,  un 
second  de  Basilides,  un  troisième  que  l'on  donnoit  à  S.  Tho- 
mas, et  un  quatrième  qui  portoit  le  nom  de  .««aint  Matthias. 
«  Nous  en  lisons  quelque  chose,  dit-il,  non  pour  le  retenir, 
«  mais  pour  le  réfuter.  »  Il  ajoute  que  l'Eglise  les  rejetoit  parce 
qu'ils  n'étoient  pas  écrits  par  l'inspiration  du  S.  Esprit,  comme 
le  sont  les  quatre  qu'elle  a  à  son  usage,  et  qui  cependant  n'en 
font  qu'un  par  l'unité  de  doctrine  qu'ils  s'acordent  à  enseigner. 

a.iin.  ibid.  '  On  observe  que  S.  Ambroise  dans  les  premiers  livres  de  ce 

(^iOmmentaire  se  sert  quelquefois  des  écrits  d'Origene,  mais 
en  Tacommodant  à  .son  dessein,  et  sans  en  suivre  entièrement 
la  doctrine.  Au  reste  s'il  a  pris  des  Pères  qui  l'avoient  précédé 
certaines  choses  pour  composer  cet  ouvrage,  les  Pères  qui  l'ont 
suivi  y  en  ont  puisé  beaucoup  davantage.  S.  Maxime  de  Tu- 
rin entre  autres  en  a  tellement  enrichi  ses  sermons,  que  Lan- 
franc  cite  quelquefois  sous  son  nom  certains  endroits  de  ce 

Tiii.  ibiii.  p.  !!)'.>.  môme  Commentaire  de  S.  Ambroise.  S.  Augustin  '  et  divers 
autres  Pères  latins  le  citent  sou  vent  aussi,  et  montrent  par-là 

|:..s.i.  i,is.  c.  7.  p.  l'estime  qu'ils  en  faisoient.  '  Cassiodore  le  nomme  un  ouvrage 

•  Tiii.  i!)i.i.  admirable.  ="  S.  Jérôme  même,  qui  d'abord  en  avoit  parlé  avec 

moins  d'estime,  ne  laisse  pas  dans  ses  derniers  ouvrages  d'y 
renvoïer  ses  Lecteurs.  Aussi  es[-cv  le  premier  Commentaire 
sur  S.  Luc  qui  soit  sorti  de  la  plume  des  Pères  latins. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR:     357 

1 9°.  *  Les  deux  livres  sur  Abraham  furent  faits  peu  de  tems     i  v  siècle. 
après  le  Commentaire  sur  S.  Luc.  On  les  met  en  1  année  387.  .  Amb.  de  Abr.  p. 
Peut-être  furent-ils  précédés  du  Commentaire  sur  le  Pseaume  ^si.  352. 
H8*.Maisnous  remettons àparler  de  cet  ouvrage,  pour  le  join- 
dre à  l'explication  que  le  saint  Evêque  a  donné  de  quelques 
autres  Pseaumes.  Quelques  Ecrivains  du  moien  âge  ont  cité 
les  deux  livres  sur  Abraham,  sous  le  titre  du  livre  sur  les  Pa- 
triarches. 'S.  Ambroise déclare  néanmoins  lui-même  que  leur  »•  ••".  1 
titre  est  Abraham  :  Abraham  libri  hujus  lïtuius  est.  Il  ne  parle 
que  d'un  livre  comme  on  le  voit.  '  Cependant  il  s'en  trouve  deux  adm.  p.  !rt8. 
aujourd'hui.  L'on  croit  que  d'abord  il  n'y  en  avoit  effective- 
ment qu'un  seul,  mais  divisé  en  deux  parties,  et  que  de  ces  deux 
parties  on  en  aura  fait  ensuite  deux  livres. 

'  Le  but  de  S.  Ambroise  dans  cet  ouvrage  est,  comme  il  le  i- 1-  n.  2. 
dit  lui-même,  d'imiter  en  quelque  sorte  Platon  le  prince  des 
Philosophes,  et  Xenophon  son  condisciple.  Comme  ces  deux 
disciples  de  Socrate  ont  entrepris  de  nous  représenter,  l'un 
dans  sa  République  les  règles  d'un  bon  gouvernement,  et  l'au- 
tre dans  son  Instruction  de  Cyrus,  quel  doit  être  un  prince  vé- 
ritablement digne  de  commander  :  de  même  S.  Ambroise  se 
propose  de  nous  donner  ici  le  portrait  d'un  homme  sage  selon 
Dieu.  Mais  il  y  a  cette  différence  essentielle  entre  l'exécution 
de  son  dessein',  et  les  ouvrages  de  ces  deux  Philosophes,  que 
ceux-ci,  comme  il  le  remarque  lui-même,  ont  tiré  de  leur  ima- 
gination tout  ce  qu'ils  nous  disent,  et  qu'au  contraire  le  saint 
Evêque  ne  fait  qu'emploïer  les  traits  que  Dieu  même  a  tracés 
dans  la  conduite  d'Abraham  raportée  par  Moïse.  Dans  la  suite 
de  l'ouvrage  S.  Ambroise,  à  mesure  qu'il  relevé  les  vertus  de 
ce  Patriarcne,  s'atache  à  en  tirer  un  sens  spirituel,  eti'apliquer 
aux  voies  qui  peuvent  conduire  à  la  perfection. 

'  Le  premier  livre  est  composé  des  sermons  que  S.  Ambroi-  aum.  p.  279. 
se  avoit  fait  aux  Catécumenes,  qui  s'étoient  faits  inscrire  pour 
recevoir  le  baptême.  Pour  le  second  livre,  il  est  fort  défectueux, 
et  l'on  soupçonne  qu'une  main  hérétique  y  a  fait  des  additions, 
des  transpositions,  et  en  a  même  retranché  certaines  choses. 

20".  '  Des  autres  sermons  que  S.  Ambroise  prêcha  aux  Ca-  Jo  is»»-  355.  shi. 
técumenes  la  même  année  387,  il  a  composé  son  livre  d'Isaac 
et  de  rame.  '  Il  est  ainsi  intitulé,  remarque  Sixte  de  Sienne,  sixi.  1. 4.  p.  220. 2. 
parce  qu'à  l'ocasion  de  la  naissance  d'isaac  et  de  son  mariage 
avec  Rebecca,  S.  Ambroise  y  traite  de  l'amour  qui  est  entre 
J.  C.  représenté  par  Isaac,  et  l'ame  figurée  par  Rebecca.  '  Ce  Amb.  ibiu.  n.  7.8. 
2  4 


358  S.  AMBUOISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE     qu'il  y  dit  de  l'union  entre  J.  C.  et  l'ame,  il  le  dit  aussi  de 

adm.  p.  3.i3.  l'union  entre  J.  G.  et  l'Eglise.'  C'est  pour  mieux  exprimer  cette 
union  mystique,  qu'il  y  emploie  une  partie  du  Cantique  des 

casd.  ib.  c.  o.  p.  Cantiques,  avec  une  explication  '  qui  a  mérité  les  éloges  de 

'^'^-  *•  Cassiodore,  et  qui  peut  passer  pour  une  espèce  de  Commen- 

taire sur  ce  livre  sacré.  C'est  de  cette  explication  en  particulier 
que  Guillaume  Abbé  de  S.  Thierri  a  tire  son  Commentaire  sur 
le  même  livre,  en  y  joignant  les  autres  endroits  où  S.  Ambroi- 
se  en  explique  quelque  chose,  comme  sur  le  Pseaume  ^^8^ 

Aniij.  adm.  iijid.  '  Ou  regarde  ce  traité  sur  Isaac  et  sur  l'ame  comme  un  con- 
tinuation du  précèdent  sur  Abraham  ;  et  les  {trcmieres  paro- 

Tiii.  ib.  p.  290.  les  de  l'ouvrage  confirment  cette  opinion.  '  S.  Augustin,  qui 
t  étoit  du  nombre  des  Gatécumenes  à  qui  furent  prêches  les  ser- 
mons qui  le  composent,  devoit  bien  le  connoître.  Aussi  le 
cite-il  en  divers  endroits. 

Amb.  ibid.  u.  G.  '  S.  Ambroisc  y  fait  en  doux  mots  le  portrait  ue  l'ame  par- 
faite. «  Elle  a,  dit-il  son  corps  en  aversion.  Elle  fuit,  elle  évite 
«  tout  ce  qui  est  excessif,  tout  ce  qui  n'est  que  passager,  tout  ce 
«  qui  peut  porter  au  mal.  Elle  aune  atention  extrême  à  ne  con- 
«  tracter  aucune  souilleure.  Elle  donne  toute  son  aplication  aux 
«  choses  de  Dieu,  jusqu'à  oublier  les  soins  du  corps.  Mais  sa 
«  fuite  ne  consiste  pas  à  éviter  d'habiter  ce  monde  ;  elle  consiste 
"  à  y  pratiquer  la  justice  et  la  tempi'rance,  à  renoncer  aux  vi- 
«  ces,  et  non  à  l'usage  des  choses  nec  ssaires  à  la  vie.   » 

doiwn.moi.  p.;««).       21".'  Ce  fut  lamêmc!  année  387,  que  S.  Ambroise  compo- 

*'*■  .sa  son  livre  ^Zm  bien  de  la  mort.  Il  paroît  par  les  premiers  mots 

de  ce  traité  qu'il  est  comme  une  suite  du  précèdent,  qui  y  est 

Sa.  ii>i(i.  nommé.'  Aussi  quelques  Ecrivains  l'ont-ils  regardé  comme 

n'en  faisant  que  la  seconde  partie.  Le  titre  qu'il  porte,  lui  vient 
de  ce  que  l'Auteur  y  relevé  les  avantages  que  l'épouse  tire  de 
la  mort,  pour  s'unir  à  l'époux  et  vivre  éternellement  avec  lui. 

Amb.  iiùd.idni.p.  '  Il  est  composé  ,  ainsi  que  les  préccdens,  des  sermons  j)rêchés 
aux  Gatécumenes.  Dans  un  mannscrit  de  la  bibliothèque  du 
!U>i,  il  est  inlitulé  :  Liber  terthus  ex  lihro  de  Patriarchis,qui 
intilulatur  de  bono  înorlis. 

<■■■  I.  n.  1. 2.  'S.  Ambroise  après  avoir  montré  la  connexion  de  cet  écrit 

avec  le  précèdent  qui  trait;;  de  l'ame,  se  fait  cette  objection  : 
comment  la  mort  n'est-elle  point  nn  mal,  puisqu'elle  est  con- 
traire à  la  vie  '?  '  Sur  quoi  il  distingue  trois  sortes  de  morts  :  la 
mort  que  cau.se  le  péché  et  qui  tuë  l'ame;  la  mort  au  péché, 
qu'ilnonnne  une  mort  mystique  ;  et  la  mort  naturelle  ,  qui  ter- 


^!.  11.  :t. 


11.   i.  G. 


38. 


l.  n.  ri  I  r.').  Il 


DOCTEUFl  DE  I;EGIJSE  ET  CONFESSEUR.     359 

mine  le  cours  de  la  vie.  et  sépare  l'àme  d'avec  le  corps.  Nous    i  v  sikclk. 

convenons,  ajoûte-t-il,  que  la  première  sorte  de  mort  est  im  

très  grand  malheur,  comme  lasecondeestungrandbien.il 
n'en  est  pas  de  même  de  la  troisième,  Les  Justes  la  regardent 
comme  un  bonheur  ;  et  plusieurs  autres  la  craignent  comme 
une  grande  peine.  A  ce  sujet' S.  Ambroise  fait  remarquer  que 
celte  crainte  ne  vient  que  de  nôtre  foiblesse  et  de  l'illusion  que 
nous  font  les  faux  plaisirs  de  la  vie  présente.  '  Pour  la  dissiper 
cette  crainte,  il  fait  voir  de  combien  de  peines,  d'afflictions, 
d'amertumes,  de  ciiagrins,  d'eimuis,  de  tentations,  de  périls, 
etc.  nous  sommes  enviroimés  dans  ce  monde,  et  que  plus  nous 
y  demeurons,  plus  nous  nous  trouvons  chargés  de  péchés.  Il 
montre  ensuite  que  la  mort  nous  délivrant  de  tous  ces  maux, 
elle  doit  être  regardée  comme  un  avantage,  et  que  l'on  ne 
doit  pas  la  craindre. 

'  ('/est  ce  qu'il  appuie  par  cesconsidérations consolantes,  que 
la  mort  est  la  fin  du  péché,  et  l'faitrée  à  une  meilleure  vie  ; 
qu'elle  n'est  qu'un  passage  de  celte  vie  mi.sérable  et  mortelle 
à  un  état  de  paix,  de  bonheur,  de  gloire,  d'immortalité.'  Mais  "•"  '"•  *"  "• 
il  veut  que  l'on  s'y  prépare  par  une  mortification  sérieuse  et 
entière  de  tous  ses  sens.  Ce  que  S.  Ambroise  dit  à  ce  sujet,  est 
aussi  touchant  qu'instructif.'  Après  avoir  établi  comme  en  pas-  "•  *-  "• 
sant  le  dogme  de  l'immortalité  de  l'ame,  '  il  finit  ce  traité  par  "•  ■•'*•  ^■'• 
une  description  du  bonheur  éternel  qui  nous  est  préparé,  et 
vers  lequel  il  nous  exhorte  d'une  manière  la  plus  pathétique 
de  soupirer  sans  cesse  et  de  nous  hâter  d'arriver  .  Et  afin  de 
faire  plus  d'impression  sur  nos  cœurs,  il  nous  met  en  la  bou- 
che cette  excellente  prière  qu'il  adresse  à  J.  C.  comme  à  nô- 
tre chef  qui  nous  a  précédé  dans  ce  roiaume  éternel  pour  nous 
y  préparer  des  demeures.  '  «  Nous  y  marchons  après  vous,  Sei-  "•  ■'■*• 
«  gneur  Jésus,  mais  apellez-nous  à  vous,  afin  que  nous  vous 
«  suivions  efficacemment,  parce  quesans  vous  personne  ne  peut 
cv  aller  à  vous.  Vous  êtes  la  voie,  la  vérité  et  la  vie.  C'est  vous 
«  qui  nous  donnez  le  pouvoir  et  la  foi  ,  comme  vous  nous  don- 
«  nez  la  récompense.  Hecovez-nous  puisque  vous  êtes  la  voie  : 
«  rassurez-nous,  puisque  vous  êtes  la  vérité;  donnez-nousla  vie 
«  puisque  vous  êtes  la  vie  même.  Découvrez-nous  ce  bien  dans 
«  la  jouissance  duquel  vous  être  entré,  et  que  David  desiroit 
«  avec  tant  d'ardeur....  Montrez-nous  ce  bien  qui  est  toujours  le 
«  même,  toujours  permanent,  toujours  immuable,  où  nous  de- 
'<  viendrons  immortels  par  la  coni!ois.saîiceque  nous  aurons  de 
«  la  source  de  loul  hien.  » 


360  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

[V  SI  KG  LE.        'S.  Ambroise  dans  ce  traité  fait  beaucoup  d'usage  du  4*  li- 

; — ;: rrr  vre  d'Esdras,  qu'il  cite  comme  Ecriture  sainte.  Mais  il  déclare 

,•.".'  "'    '  lui-même  la  raison  pourquoi  il  en  use  de  la  sorte.  C'est,  dit-il, 

afin  de  montrer  aux  Païens,  que  ce  qu'ils  admirent  dans  les 
a.im.  p.  387.  écrits  de  leurs  Philosophes,  a  été  pris  de  nos  Ecritures.  '  Au 
reste  quelques  autres  anciens  Pères  avant  S,  Ambroise  avoient 
cité  le  même  livre  d'Esdras,  comme  S.  Clément  Alexandrin, 
l'Auteur  de  l'ouvrage  imparfait  sur  S  Matthieu,  et  ce  semble 
n.  4G-18.  même  S.  Cyprien.  'C'est  sur  l'autorité  de  ce  même  livre  que 

nôtre  Saint  a  avancé  certaines  choses,  qui  prises  à  la  letre 
pourroient  faire  croire  qu'il  auroit  douté  (jue  les  âmes  des  Jus- 
tes après  la  mort  jouissent  de  la  vue  de  Dieu  jusqu'après  le  ju- 
gement dernier. 

Mais  on  ne  peut  refuser  de  convenir  que  ces  endroits  sont 
obscurs,  et  que  par  conséquent,  selon  les  règles  de  la  bonne 
critique,  ils  doivent  être  expliqués  par  les  autres  endroits  du 
même  Père  sur  ce  sujet,  qui  sont  des  plus  clairs.  Or  il  s'en  trouve 
un  grand  nombre  dans  les  ouvrages  de  S.  Ambroise,  où  il  dit 
i>.  49.  nettement  '  que  les  âmes  des  Justes  jouissent  dès  à  présent  de 

la  vue  de  Dieu  ;  qu'elles  voient  cette  lumière  divine  qui  éclai- 
re tous  les  hommes  qui  viennent  au  monde  :  Justi  hanc  remu- 
7ierationem  hahent,  ut  videant  f'aciem  Dei,  et  lumen  illud 
quod  illuminât  omnem  hominem.  Ce  sont  les  propres  termes 
dans  lesquels  il  s'en  explique  dans  le  livre  même  qui  fait  naître 
de  caïn,i.  2.  n.9.  la  difficulté.'  AUlcurs  il  dit  aussi  clairement  que  ces  amesjouis- 
*'■  sent  de  de  la  lumière  éternelle  ;  qu'après  s'être  dépouillées  de 

leurs  corps,  elles  retournent  au  ciel  d'où  elles  avoient  été  créées 
pour  les  animer. 

Si  cela  ne  suffit  pas  pour  justifier  ce  grand  Evêque  d'un  tel 
de  ob.  Th.  n.  40.  soupçou,  '  l'ou  Y  peut  ajoùtcr  ce  qu'il  dit  de  l'état  où  il  croïoit 
lésâmes  de ValenUnien,  de  Theodose,  de  sainte  Pulquerie, 
de  l'Impératrice  Flacille  et  du  grand  Constantin.  Il  déclare 
bien  clairement  que  Theodose  uni  à  ces  saints  personnages, 
est  établi  dans  le  Roïaume  de  J.  C.  où  il  considère  les  beau- 
do  ob.  Val.  n.77.  tés  de  son  temple.  'Et  en  parlant  de  Valentinien  et  de  Gra- 
tien  son  frère,  il  assure  qu'ils  sont  montés  du  désert  de 
ce  monde  à  ce  lieu  abondant  en  délices,  où  ils  jouissent  du 
bonheur  de  la  vie  éternelle. 

D'ailleurs  les  endroits  qui  forment  la  difficulté,  peuvent 
s'entendre  du  corps  de  l'Eglise  en  général,  qui  ne  sera  entiè- 
rement dans  la  gloire  qu'après  la  fin  du  monde.  Cette  expli- 
cation 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     361 

cation  est  d'autant  plus  recevable,  qu'elle  est  mieux  fondée,     iv  siècle. 

étant  prise  de  S.  Ambroise  même.  'Voici  de  quelle  manière  .„,.„, 

il  s  en  explique  dans  une  de  ses  letres  a  Horontien.  «  Ouoi- 

«  que  les  Saints,  dit-il,  jouissent  en  assurance  de  la  récompense 

«  due  à  leurs  mérites,  ils  ne  laissent  pas  néanmoins  d'être  su- 

«  jets  à  la  compassion,  parce  que  la  rédemlion  du  corps  entier 

«  de  l'Eglise  n'est  pas  encore  parfaite.  El  comment  se  pourroit- 

«  il  faire  qu'y  aïant  encore  dans  les  souffrances  des  membres 

«  du  même  corps,  les  autres  membres,  quoique  déjà  dans  le 

«  ciel,  ne  compatissent  pas  à  la  peine  de  ceux  qui  sont  encore 

«  dans  les  travaux  ?  » 

22"'  On  place  en  la  même  année  387  le  irait é  de  la  fuite  Uj  fug.  p.  «7. 4io. 
du  siècle.  Il  paroîl  que  c'est  un  recueil  de  divers  discours,  ou 
même  un  seul  sermon  prêché  au  peuple,  '  particulièrement  aux  aam.  p.  nr,. 
nouveaux  baptisés  pendant  l'octave  de  Pâque.  On  ne  sait  pour- 

?[Uoi  dans  quelques  manuscrits  il  est  intitulé  D'Esaù  et  de  la 
uite  du  siècle.  S.  Augustin,  qui  le  devoit  mieux  connoitre  que 
personne,  ne  le  cite  point  autrement  que  sous  le  titre  qu'il  a 
dans  les  imprimés. 

'  S.  Ambroise  emploie  ce  traité  à  exhorter  les  Fidèles  à  fuir  n.  n. 
les  vanités  et  la  corruption  du  siècle.  Cette  fuite  consiste, 
dit-il,  à  s'abstenir  de  tout  péché,  à  retracer  en  soi  l'image  et 
la  ressemblance  de  Dieu  par  la  pratique  des  vertus  ;  à  faire  tous 
ses  efforts  pour  copier,  autant  que  la  foiblesse  de  l'homme  le 
peut  permettre,  le  modèle  que  Dieu  même  nous  a  donné.  '  11  n.  i-a. 
est  vrai,  comme  il  l'observe  lui-même,  et  qu'il  en  détaille  les 
raisons,  que  cet  ouvrage  est  au-dessus  des  forces  de  l'homme 
dénuées  d\i  secours  de  Dieu.  Mais  avec  ce  secours  l'homme  peut 
en  venir  à  bout.  '  Il  en  prescrit  la  manière  en  se  servant  de  di-  c.  2-5. 9. 
verses  allégories  prises  de  l'Ecriture,  dont  il  tire  plusieurs  in- 
structions morales  aussi  ingénieuses  qu'édifiantes. 

23°.  '  On  croit  devoir  aussi  raporter  à  la  même  année  les  Jejac.p.  U3  iso. 
deicx  livres  de  Jacob  et  de  la  vie  bienheureuse.  Dans  le  premier 
S.  Ambroise  donne  diverses  instructions  pour  la  pratique  de  la 
vertu,  en  montrant  que  les  plus  grands  maux  et  les  plus  fâ- 
cheuses adversités,  bien  loin  de  nous  être  préjudiciables  pour 
arriver  à  la  béatitude,  servent  au  contraire  à  nous  la  faire  ac- 
quérir. '  11  s'arrête  particulièrement  à  faire  voir  que  dès  cette  '  • 
vie-ci  même  l'homme  peut  être  heureux,  pourvu  qu'il  soitjuste 
et  qu'il  possède  la  vertu.  Rien  de  plus  admirable  que  la  des- 

7  orne  I.  Sec.  Part.  'L  z 

2  4  * 


1.   n.  iK.  3). 


1.  2.  n.  1. 

;«). 

n.  40.  r>:i. 

Cus.l.  il)i.l. 

c.  6 

.  |i. 

5.3.  I. 

Ainb.  il).  1 

.  I. 

II.- 

10.  *i. 

i: 


302  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE,    cription  que  fait  ici  S.  Ambroisc  avec  son  rloquence  ordinaire 
de  ce  bonheur  de  l'homme  juste. 

'  Ce  qu'il  a  avancé  dans  le  {iremier  livre,  il  le  prouve  dans 
le  second  par  l'exemple  de  Jacob.  'A  cet  exemple,  il  joint 
ceux  du  prêtre  Eleazar  et  des  saints  Martyrs  Maccabées.  '  II 
traite  l'histoire  de  ceux-ci,  remarque  Cassiodore,  avec  toutes 
les  fleurs  de  son  éloquence. 

'  Dans  le  premier  livre  S.  Arabroisc  dit  par  occasion  d'ex- 
cellentes choses  touchant  la  volonté  de  l'homme  ,  et  sa  li- 
berté, touchant  la  loi  et  la  grâce.  II  montre  que  nous  ne 
faisons  le  bien  ou  le  mal  que  volontairement.  Que  c'est  sanssu- 
et  que  nous  nous  en  prenons  à  la  fragilité  de  la  chair.  Que  c'est 
a  volonté  qui  est  l'auteur  du  péché,  et  non  pas  la  chair  qui  n'est 
que  le  ministre  de  la  volonté.  Que  la  vraie  liberté  de  l'hom- 
me consiste  à  être  soumis  à  la  justice.  Il  fait  \oir  ensuite  l'in- 
suffisance de  la  loi  sans  la  grâce  du  Rédemteur. 

a,i,n. p.  t'.i.  ^^et  ouvrage  semble  composé,  comme  les  précedens,  des 

sermons  prêches  aux  Néophytes.  Lorsqui;  S.  Ambroise  vient 
à  y  parler  d'Esaii,  il  dit  à  ce  sujet  tout  ce  qu'il  y  a  de  plus  beau 
sur  la  même  matière  dans  le  livre  de  Philon  intilulé  :  Que  tout 
homme  de  hien  est  libre. 

•le  Jos.  p.  «iso.  24".  '  Le  traité  sur  le  Patriarche  Joseph  jjaroît  formé  com- 
me les  autres,  d'un  ou  de  plusieurs  discours  prononcés  de  vive 
voix.  L'histoire  de  l'Eunuque  Calligone,  dont  ily  est  parlé, etquel- 
ques  autres  circonstances  font  voir  que  cet  écrit  fut  composé 
en  387. 

„.  I.  'S.  Ambroise  le  commence  par  ces  belles  paroles:  La  vie 

des  Saints  est  pour  les  autres  un  modèle  de  conduite.  C'est 
pourquoi  aïaiit  montr/'  dans  Abraham  le  modèle  d'une  obéis- 
sance pleine  d'ardeur  et  de  foi  ;  dans  Isaac  celui  d'une  pureté 
simj)le  el  sincère  ;  et  dans  Jacob  celui  d'une  force  d'esprit  dans 
les  travaux  et  d'une  patience  extraordinaire  :  de  ces  vertus  gé- 
nérales S.  Ambroise  vient  aux  ])articulieres.  la  lecture  de  l'E- 
criture que  l'on  faisoit  publiquement  dans  l'Eglise  avoit  con- 

„.  -j.  duit  apar(!mmenl  à  l'histoire  de  Joseph.  '  Le  saint  Evêque  s'en 

servit  pour  montrer  (in  la  personne  de  ce  Patriarche  un  exem- 
ple éclatant  de  chasteté.  Il  ne  laisse  pas  néanmoins  de  parler 
de  ses  autres  vertus.  '  Il  touche  parliculiercîment  sa  douceur  et 
sa  charité  :  sa  douceur  j)Our  ne  s'être  pas  irrité  de  l'injure  qu'il 
avoit  reçu»;  de  ses  frères  ;  sa  cliarili'  pour  n'en  avoir  pas  tiré 
vengeance  en  rendant  le  mal  pour  le  mal. 


II.  :( 


DOCTEUR  DE  1;EGL1SE  ET  CONFESSEUR.     363 

'  A  l'ocasion  de  la  haine  que  les  fn^res  tie.loseph  lui  porloient,     i  v  sikc  lk. 
S.  Amhroise  a  soin  (l'instruire  les  parens  de;  quelle  manière  ils  ,  „  ,., 
doivent  aimer  leurs  enfaiis.  Il  li'ur  fait  observer  que  la  trop 
grande  tendresse  qu'ils  ont  pour  eux  leur  est  souvent  nuisible, 
et  que  la  predilecticm  qu'ils  auroient  pour  l'un,  seroit  l'écueil 
de  l'amitié  fraternelle  qu'ils*  se  doivent  les  uns  aux  autres.  '  11  "•  7.  s. 
n'oublie  jias  de  faire  voir  que  Joseph  a  été  une  excellente  figure 
deJ.  C. 

25".  Le  traité  sur  les  bénédictions  des  Patriarches  contient  ii«  bnej.  p.  •ii- 
une  explication  mystique;  des  bénédictions  que  Jacob  donna  à 
.sesenfansau  lit  de  la  mort.    S.  Ambroise  le  composa  avant  qu'il  Tiii.  w,.  p.  *ii. 
partît  pour  sa  seconde  ambassade  vers  le  Tyran  Maxime.  '  On  Amb.  ij).  n.  ai. 
y  trouve  cité  le  3"  livre  de  son  commenlaire  sur  S.  Luc,  qui 
fut  fini,  comme  nous  l'avons  montré,  en  386.  '  De  sorte  que  adm.  p.  rai. 
ce  traité  apartienl  encore  à  l'année  387.  Il  est  comme  une  suite 
des  précedens,  sur-tout  de  celui  de  Joseph,  dont  il  semble  faire 
comme  une  seconde  partie.  '  Dès  le  commencement  du  IX*   spic  1.  3.  p.  t-.s 
siècle  ils  se  trouvoienl  l'un  et  l'autre  dans  la  bibliothèque  de 
S.  Wandrille  joints  ensemble  en  un  même  volume,  comme  ne 
faisant  qu'un  seul  et  même  écrit  sous  le  titre  De  Joseph  et  des 
douze  Patriarches.  'Il  y  a  beaucoup  d'aparence  que  tous  cestrai-  Anii>.  a.ii.i.  ii.i.i. 
tés  que  nous  mettons  de  suite,  comme  composés  la  même  année 
forment'  les  sept  livres  que  Cassiodoreatribuë  à  S.  Ambroise  sur  cisti.  ii).  p.  .'..w.  a. 
les  Patriarches.  11  est  vrai  qu'il  pourroit  aussi  y  comprendre 
ceux  de  Noé  et  de  l'Arche,  et  les  plaintes  de  Job  et  de  David. 
En  ce  cas  il  auroit  réuni  plusieurs  de  ces  traités  ensemble  pour 
n'en  faire  qu'un  de  deux.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  reconnoît  que 
S.  Ambroise  y  a  expliqué  dans  des  questions  proposées  d'une 
manière  agréable,  plusieurs  endroits  de  l'ancien  Testament. 

'  Dans  celui  qui  fait  le  sujet  de  cet  article,  S.  Ambroise  dé-  Amb.  iui.i.  ».  \. 
bute  par  établir  la  prérogative  qu'ont  les  pères  et  les  mères 
de  bénir  leurs  enfans,  et  relevé  beaucoup  le  mérite  de  cette 
bénédiction.  «  Dieu,  dit-il,  a  acordé  cette  prérogative  aux  pa- 
«  rens,  afin  de  tenir  les  enfans  dans  le  respect  et  le  devoir.  Que 
«  les  enfans  bien  nés 'honorent  donc  leur  père  à  cause  de  la 
«  grâce  atachée  à  cette  bénédiction.  Que  les  enfans  dénaturés 
«  l'honorent  aussi  pour  la  crainte  d'en  être  privés.  Que  si  leur 
«  père  est  pauvre,  et  qu'il  n'ait  point  de  grands  biens  à  leur 
«  laisser,  il  a  néanmoins  l'héritage  de  sa  dernière  bénédiction, 
«  qui  est  préférable  aux  richesses,  en  ce  qu'elle  est  une  source 
«  de  prospérité  pour  ceux  qui  lui  succèdent.  Car  c'est  un 

Z  7.  ij 


30 i  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE.    «  plus  grand  avantage  d'être  heureux  que  de  devenir  riche.  » 

T ^i  3i»       2^"-  ^"^  assigne  encore  pour  époque  l'année  387  *  au  Livre  I 

itmys.p.  ....  -.  ^^^  Mystères,  ou  rfesrfîWw*  #y.v/<?re5,  comme  portent  les  pi  us 
anciens  manuscrits,  ou  bien  de  ceux  qui  sont  initiés  aux  My- 
stères, comme  on  lit  dans  les  premières  éditions.  Il  n'y  a  qu'à 
lire  ce  traité  pour  reconnoître  S.  Ambroise,  à  ne  s'y  pas  trom- 
per. Il  s'y  montre  lui-même  tout  à  découvert  dès  les  premie- 
p.  32i-3â*.  res  lignes  de  l'ouvrage.  '  Cela  n'a  pas  empêché  qu'Erasme  n'ait 

semblé  douter  de  l'autorité  de  cet  écrit.  Quelques  Calvinistes 
après  lui  sont  encore  allés  plus  loin,  et  l'ont  combatuë  ouver- 
tement. Mais  ils  ne  l'ont  fait  que  sur  de  très-foibles  preuves, 
comme  l'ont  montré  les  derniers  Editeurs  de  S.  Ambroise, 
Tiii.  ibid.  p.  209.  gui  les  out  détruitcs  avec  beaucoup  de  solidité.  '  C'est  ce  qui 
fait  dire  à  un  grand  homme,  que  quiconque  ne  reconnoît  pas 
ce  livre  et  les  autres  de  cette  nature  pour  la  véritable  règle  de 
sa  croïance  sur  ces  matières,  fait  voir  qu'il  se  plaît  à  suivre  ses 
imaginations,  et  qu'il  ne  cherche  pas  la  vérité  de  la  doctrine 
de  l'Eglise.  Au  reste  on  pénètre  aisément  le  véritable  motif  qui 
a  porté  les  Calvinistes  à  rejeter  cet  écrit,  elle  refuser  à  S.  Am- 
broise. Leur  doctrine  n'avoit  garde  de  s'acommoder  des  sen- 
timens  qu'il  enseigne  sur  l'Eucharistie, 
ibid.  '  Cet  ouvrage  est  formé  d'un  discours  prononcé  à  Pâque  de- 

vant les  Néophytes,  qui  avoient  déjà  reçu  le  corps  de  J.  C. 
S.  Ambroise  les  y  instruit  des  mystères  du  Baptême  et  de  l'Eu- 
charistie, qu'on  n'avoit  pas  osé  leur  découvrir  auparavant.  L'é- 
crit est  fort  beau.  L'on  y  aprend  et  l'ordre  que  l'Eglise  gardoit 
dans  les  cérémonies  du  Baptême,  et  la  croïance  qu'elle  tâchoit 
d'inspirer  aux  Fidèles  sur  l'Eucharistie,  en  une  ocasion  où  il 
ne  s'agissoit  point  de  relever  les  mystères  par  des  métaphores 
et  des  figures  qui  pussent  les  embarasser,  mais  d'enseigner  sim- 
plement la  vérité  qu'elle  avoit  reçue  des  Apôtres. 
Amb.  ii)id.c.i.7.  'S.  Ambroisc,  après  y  avoir  rapeilé  aux  Néophytes  les  in- 
structions qu'on  leur  avoit  données  auparavant  sur  les  mœurs, 
emploie  les  sept  premiers  chapitres  à  leur  expliquer  par  ordre 
les  cérémonies  du  Baptême  qu'ils  venoient  de  recevoir.  11  leur 
rend  raison  pourquoi  l'on  ne  leur  avoit  pas  plutôt  découvert 
ces  divins  mystères.  C'est,  dit-il,  que  nous  aurions  crû  les  pro- 
faner plutôt  que  de  les  découvrir.  D'ailleurs  la  lumière  qui  les 

1  Dans  la  petite  préfao.o  ou  avertisse-  faute  d'impression.  On  y  lit  377  pour  387, 
ment  sur  ce  traité  oU  l'Editeur  marque  Vè-  ee  qui  a  Hi-  (■nrrifté  à  la  marine  de  la  page 
poque  qui  lui  ronvieni,  il   s'est  glissé  nnu       suivante. 


DOCTRUR  1)K  1 /EGLISE  ET  CONFESSEUR.     30:; 

acompagne  et  à  laquelle  vous  ne  vous  atendiez  pas,  vous  a    iv  siècle. 
plus  Irapés,  que  si  vous  en  aviez  eu  connoissance  auparavant.   """ 
Ici  tout  est  remarquable  ;  mais  les  bornes  que  nôtre  dessein 
nous  prescrit,  ne  nous  permettent  pas  de  raporter  tout  ce  qui 
mériteroit  de  l'être.  '  S.  Ambroise  leur  fait  remarquer  entre  au-  n.  lo.  20.  a*, 
très  choses,  que  ce  n'est  point  l'eau  dans  laquelle  ils  avoient  été 
plongés  qui  les  a  purifiés,  mais  le  S.  Esprit  descendu  autrefois 
sous  la  figure  d'une  colombe.  '  Qu'il  n'y  a  que  le  Baptême  con-  n.  20. 
feré  au  nom  du  Père,  du  Fils  et  du  S.  Esprit,  qui  remette  les 
péchés  et  confère  la  grâce.  '  Qu'il  n'y  faut  pas  avoir  égard  aux  n.  27. 
mérites  de  ceux  qui  l'administrent,  parce  que  c'est  J.  C  même 

2ui  agit  en  leur  personne.  'Que  les  habits  blancs  dont  ils  ont  n.  31. 
té  revêtus,  sont  le  symbole  de  l'innocence  qu'ils  y  ont  acqui- 
se, après  s'être  dépouillés  des  haillons  du  péché.  '  Qu'étant  amsi  n.  41.  4». 
purifiés,  ils  ont  reçu  les  sept  dons  du  S.  Esprit  en  recevant  le 
Sacrement  de  la  Confirmation. 

'Les deux  derniers  chapitres  sont  emploies  à  expliquer  ce  c.  ».  9. 
qui  regarde  l'Eucharistie ,  que  les  Néophytes  recevoient  avec 
les  deux  autres  Sacremens.  S.  Ambroise  y  exprime  clairement 
la  foi  de  l'Eglise  touchant  la  présence  réelle  dans  l'Eucharistie. 
'  11  dit  que  c'est  un  festin  où  l'on  reçoit  le  corps  et  le  sang  de  n.  «.  i<). 
J.  C.  dont  la  manne  et  le  sacrifice  de  Melchisedech  n'étoient 
que  la  figure.  «  Or  la  lumière ,  ajoûte-t-il ,  est  plus  excellente 
«  que  l'ombre,  la  vérité  que  la  figure,  le  corps  même  de  l'auteur 
«  de  la  manne,  que  la  manne  qu'il  a  fait  tomber  du  ciel.  '  Vous  p-  ♦■■«. 
«  me  direz  peut-être,  poursuit  S.  Ambroise  :  Je  vois  autre  cho- 
«  se  ;  comment  m'assurez-vous  que  je  reçois  le  corps  de  J.  C? 
«  Et  c'est  ce  qui  me  reste  à  vous  prouver.  Par  combien  d'exem- 
«  pies  pouvons-nous  vous  montrer,  que  ce  n'est  pas  le  corps  que 
«  la  nature  a  formé,  mais  que  la  bénédiction  a  consacré,  et  que 
«  la  bénédiction  a  plus  de  force  que  la  nature,  puisqu'elle  chan- 
<f  ge  la  nature  même.  »  '  S.  Ambroise  raporte  ensuite  plusieurs  n.  51.  53. 
miracles,  comme  ceux  de  Moïse,  d'Elie ,  d'Elisée ,  celui  de  la 
création  du  monde  tiré  du  néant,  enfin  celui  de  l'Incarnation 
du  Ver'be  :  d'où  il  conclud  que  si  la  bénédiction  des  hommes 
a  eu  la  vertu  de  changer  la  nature  ,  la  consécration  divine  ,  où 
les  paroles  mêmes  du  Sauveur  opèrent,  doivent  avoir  encore 
plus  de  pouvoir.  «  Quoi  !  dit-il ,  la  parole  de  J.  C.  a  pu  faire  de 
«  rien  ce  qui  n'étoit  pas  ;  ne  peut-elle  donc  pas  changer  ce  qui 
«  est  en  ce  qui  n'étoit  point  ?. . .  personne  ne  doute  qu'une  Vier- 
«  ge  n'ait  enfanté  contre  l'ordre  de  la  nature  :  et  le  corps  que 


.•.8. 


300  S.  AMBROISE,  EVEQUK  DE  MILAN, 

IV  siEoi.F,     «  nous  consarrons  est  hTiirme  i\w.  celi:i  qui  pst  né  de  la  Vier- 

«  ge.  Pourquoi  donc  cherchez-vous  dans  le  Sacrement  du  corps 

«  de  J.  C.  cet  ordre  de  la  nature,  puis(|ue  sa  naissance  d'une 
«  Vierge  est  contre  la  nature  mêir.e? 
n.  M.  «  '  J  C.  nous  dit  hautement  hii-mème  :  Ceci  est  mon  corps. 

«  Avant  la  bi'nédiction  qu'y  opèrent  les  paroles  célestes  cela  se 
«  nomme  autrement  ;  mais  après  la  consécration  on  ne  le  nom- 
«  me  point  autrement  que  le  corps  de  J.  C.  Il  nous  dit:  ('eciest 
<t  monsattg.  Avant  la  consécralioii  c(!la  est  tout  autre  chose;  mais 
«  après  la  consécration  on  le  nomme  1(^  sang  de  J.  C.  Vous  ré- 
«  pondez  vous-même  :  Amen,  c'est-à-dire,  cela  est  vrai.  Croïcz 
«  donc  intérieurement  ce  que  vous  professez  de  bouche;  et  (jue 
«  vos  sentimens  s'acordent  avec  vos  paroles.  »  On  voit  ici  que 
les  paroles  de  la  consécration  se  prononçoient  tout  haut,  puis- 
que les  Fidèles  y  répondoient  Amen. 

'S.  Ambroise  finit  ce  traité  en  disant  quehjue  chose  des  (.-f- 
fets  de  ce  divin  mystère,  et  en  recommandant  deux  choses 
principales  aux  Fidèles  ;  le  secret  et  une  conduite  sainte  et  ir- 
réprochable .  Il  leur  demande  le  secret ,  c'est-à-dire  de  n'en 
f)oint  parler  à  qui  il  ne  convient  pas ,  de  peur  de  l'exposer  à 
a  langue  trop  licentieuse  des  Païens.  Il  leur  demande  une  vie 
innocente ,  pour  n'en  pas  souiller  la  saiiitelé  par  des  mœurs 
corrompues. 

'Il  est  à  remarquer  qu'à  Milan  entre  les  cérémonies  du  Bap- 
tême on  lavoit  les  pieds  aux  Néophytes ,  lorsqu'ils  étoient  sor- 
tis des  fonts ,  et  qu'on  leur  avoit  fait  l'onction  acoûtumée.  Nous 
avons  déjà  observé  que  ce  fut  en  387  que  S.  Augustin  reçut 
le  Baptême.  De  sorte  que  ce  traité  étant  formé  du  discours  que 
S.  Ambroise  lit  cette  même  année  aux  Néophytes,  S.  Augus- 
tin s'y  trouva  présent.  Il  y  en  a  même  qui  croient  que  S.  Ani- 
Bib.  vaiiicei.        broisc  le  fit  particulièrement  à  son  ocasion.  'On  en  trouve  une 
édition  particulière  faite  à  Anvers  chez  Jean  Steelsius  en  1534. 
...Biub.t.i.p..r,.  Il  y  a  bien  de  l'aparence  que  c'est  le  même  écrit  que  celui 
'  qu'on  voit  dans  la  bibliothèque  de  M.  le  Cardinal  Barberin,  im- 

primé à  Hanaw  l'an  l.-)27  in-i".  sous  le  titre  De  l' Eucharistie. 
Amb.  hex.  p.  t.  27".  'On  pkcc  V IlexameroH ,  ou  traité  sur  les  six  jours  à  la 
'**•  tête  de  tous  les  autres  ouvrages  de.  S.  Ambroise,  parce  que 

dans  les  éditions  qui  en  ont  été  faites,  on  suit  plutôt  l'ordre 
des  matières  que  celui  des  tems.  Ce  traité  est  divisé  en  six  li- 
vres, qui  répondent  aux  six  jours  de  la  création  du  monde , 
et  ne  mt  mis  en  la  forme  que  nous  l'avons  aujourd'hui  que 


n.  31.  Xi. 


DOCTEUR  DR  J/KGLISK  ET  CONFESSEUR.     367 

vers  389.  S.  Ambroise  y  explique  le  premier  chapitre  de  la  Ge-    i  v  siècle. 
ncse,  en  y  insérant  à  son  ordinaire  plusieurs  rellexions  mysli- 
ques  et  morak's.  11  y  touche  aussi  quelcpies  points  de  contro- 
verse, 'et  débute  par  réfuter  les  erreurs  dès  anciens  Philoso-  i.  i.  n.  i.  *. 
phes  sur  l'unité  et  la  durée  du  monde.  'Il  emploie  tout  le  pé-  i.  c.  n.  5. 7*. 
nultieme  chapitre  de  son  traité  à  relever  l'excellence  du  corps 
humain,  au  sujet  de  quoi  il  dit  beaucoup  de  belles  choses.  Il 
paroît  entre  ce  chapitre  et  la  première  partie  du  livre  de  La- 
ctance,  intitulé  De  [ouvrage  de  Dieu,  un  grand  raport  au  moins 
pour  le  dessein.  Cet  ouvrage  de  S.  Ambroise  a\ec  les  huit  au- 
tres du  même  Père  dont  nous  avons  parlé ,  c'est-à-dire,  ceux 
sur  le  Paradis,  Gain  et  Abel,  Noé  et  l'Arche ,  Abraham  ,  Isaac , 
Jacob ,  Joseph ,  et  les  bénédictions  des  douze  Patriarches , 
peuvent  passer  pour  un  commentaire  entier  sur  la  Genèse,  mais 
un  commentaire  plus  spirituel  que  literal.  'On  remarque  que  admon. 
l'Ilexameron  est  composé  de  neuf  sermons ,  comme  celui  de 
S.  Rasile ,  et  (|ue  ces  sermons  furent  prêches  en  six  jours  ;  car 
S.  Ambroise  en  certaines  ocasions  prêchoit  deux  fois  par  jour, 
ainsi  que  S.  Basile  môme.  '  S.  Jérôme  assure  que  S.  Ambroise  mor.op.ii.p.sie. 
a  tiré  cet  ouvrage  particulièrement  des  écrits  d'Origene ,  en 
s'atacliant  néanmoins  davantage  aux  sentimens  de  S.  Ilippo- 
lyte  et  de  S.  Basile.    Quelques  Ecrivains  modernes  veulent  six.  qaa.  i. 
même  (jue  ce  ne  soit  presque  qu'une  traduction  de  l'ouvrage 
(jue  ce  dernier  Père  avoit  composé  sur  le  même  sujet  et  sous 
le  môme  litre.  'Mais  les  derniers  Editeurs  de  S.  Ambroise  ne  Amb.  iwa. 
sont  pas  de  cette  opinion.  Us  acordent,  ce  qui  est  vrai ,  que  nô- 
tre siiint  l'>êquea  imité  S.  Basile  et  suivi  quelques-uns  de  ses 
sentimens;  mais  qu'il  ne  laisse  pas  de  s'en  éloigner  en  plu- 
sieurs endroits  ;  qu'il  le  corrige  même  en  quelques  autres , 
quoique  sans  le  nommer  ;  qu'enfin  s'il  le  traduit  quelquefois  , 
c'est  avec  une  liberté  entière  qui  lui  fait  retrancher,  ajouter  et 
changer  ce  qu'il  juge  à  propos. 

'  Cassiodore  témoigne  que  l'on  trouve  dans  ce  traité  l'élo-  casd.  ibiJ.i. 
quence  ordinaire  de  S.  Ambri>ise.  Ce  Docteur ,  dit-il ,  qu'on 
lit  avec  d'autant  plus  d'agrément  qu'il  parle  avec  plus  de  net- 
teté. '  Motker  le  bègue  dit  qu'effectivement  l'Hexameron  de  S.  Notk.  im.  scri.  c. 
Ambroise  est  un  ouvrage  agréable  à  lire  et  à  relire  souvent  pour  '•  p-  *• 
ceux  qui  se  plaisent  à  considérer  la  beauté  des  créatures.  '  Il  y  Bib.vaiiic.i.  1 ... 
en  a  eu  une  traduction  en  Italien ,  imprimée  à  Florence  chez  '""•••  p-  ^^-  *• 
l^urent  Torrentino  l'an  1560  en  un  volume  m-8".  Le  tradu- 
cteur fut  François  Calani  de  Diacetto  Chanoine  de  Florence  el 
Protonotaire  apostolique. 


II.  t 


II.   45.  T.). 


368  S.  AMBHUISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE.         28°.  On  croit  devoir  raporler  à  l'an  390  le  traité  sur  Ëlie  et  le 

^^^j^       g|.^ —  jeûne.  'Ce  n'est  proprement  qu'une  exhortation  à  éviter  les  ex- 

•âs.  '562*  '*'  ''  ces  du  vin  et  la  bonne  chère  comme  la  source  de  tous  les  vices , 
et  à  pratiquer  le  jeûne  et  l'abstinence.  Quoiqu'il  soit  intitulé 
d'Elie,  ce  n'est  pas  que  S.  Ambroise  y  parle  beaucoup  de  ce 

n.  r,.  Prophète.  '  Il  avertit  lui-même  qu'il  évite  d'y  en  parler,  de 

peur  de  tomber  dans  des  redites,  en  aïant  traité  amplement 

aJui.  p.  531.  ailleurs.  '  Mais  c'est  qu'à  l'ocasion  du  jeûne  d'Elie,  il  y  traite 
du  jeûne,  particulièrement  de  celui  du  Carême.  C'est  pour- 
quoi ce  traité  dans  quelques  manuscrits  porte  pour  litre.  Ser- 
mon sur  le  jeûne ^  sansy  faire  mention  d'Elie.  Il  paroît  qu'il  y 
a  beaucoup  de  choses  prises  de  la  10'"  homélie  de  S.  Basile  sur 
le  même  sujet.  '  Le  commencement  fait  voir  oue  les  discours 
qui  le  composent  furent  prononcés  aux  aprocnes  du  Carême. 
Anniintiemus  solennitatis  diem,  simulnohis  et  certamen  immi- 
net et  Victoria  repromtttitur. .  .eertamen  nostnimjejimium  est. 
'D'autres  endroits  donnent àjuger  que  ce  fut  en  présence  des 
Catécuménes  qui  avoient  donné  leur  nom  pour  le  Baptême. 

aJiu.  11. 533.  '  Cet  opuscule  est  un  des  écrits  de  S.  Ambroise  qui  étoient  le  plus 
défigurés  dans  les  anciennes  éditions.  Mais  ceux  qui  ont  pris 
soin  de  la  dernière,  l'ont  rétabli  dans  sa  perfection  originale,  à 
l'aide  d'un  manuscrit  de  la  bibliothèque  de  M.  Colbert,  qui  pa- 
roît ancien  de  plus  de  mille  ans. 

,..  531.  'La  lecture  de  ce  traité  fait  assez  voir  qu'il  est  formé  de  di- 

verses pièces  de  raport,  de  sorte  qu'on  y  distingue  trois  par- 
ties. La  première  est  emploïée  à  parler  du  jeûne  du  Carême 
en  particulier.  S.  Ambroise  en  montre  l'excellence ,  les  effeLs 
salutaires,  l'ancienneté.  A  quoi  il  opose  les  suites  toujours  fâ- 
cheuses de  l'intempérance.  Dans  la  seconde  partieil  déclame 
fortement  contre  la  débauche  et  les  déreglemens  de  table  ,  qui 
étoient  très-communs  en  son  tems.  Les  femmes  même  s'y 
portoient  avec  tant  d'excès,  qu'on  les  vpïoit  quelquefois  cou- 
rir les  rues  comme  des  Baccantes,  et  y  faire  des  choses  indi- 
gnes de  leur  sexe.  Dans  la  troisième  partie  S.  Ambroise  fait  voir 
que  ces  excès  entraînent  après  eux  tous  les  autres  vices,  sur- 
tout l'avarice  et  le  désir  des  richesses,  afin  d'avoir  de  quoi  four- 
nir à  ces  débauches.  Il  finit  par  exhorter  à  fuir  tous  ces  desor- 
dres, à  racheter  .ses  péchés  par  l'aumône ,  à  s'alacher  h.  la  loi 
de  Dieu,  à  recourir  au  souverain  médecin  qui  saura  guérir  nos 
playes  sans  se  .souvenir  de  nos  ofi'enses  passées. 

ik  off.  p.  I.  i4i.       29*.  '  Les  trois  livres  des  offices  ou  devoirs  des  Ministres  fu- 

i         '  rent 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.    369 

rent  composés,  comme  l'on  croit,  en  l'année  391  ou  environ ,     iv  siècle. 

il  est  certain  par  divers  endroits  de  cet  ouvrage ,  qu'il  y  avoit  

déjà  long-tems  que  S.  Ambroise  étoit  Evêque  lorsqu'il  y  mit 
la  dernière  main.  'Dans  les  premières  éditions  et  quelques  p.  i.  not. 
manuscrits  assez  nouveaux ,  le  titre  en  étoit  tronqué ,  ne  por- 
tant simplement  que  des  offices.  Mais  les  plus  anciens  ma- 
nuscrits présentent  le  titre  tel  que  nous  venons  de  le  raporter. 
'S.  Ambroise  explique  et  justifie  lui-même  ce  titre.  Il  ne  fait  1. 1.  n.  24.  sb. 
pas  difficulté  d'avouer  que  dans  ce  genre  d'écrire  ,  il  a  imité 
Ciceron,  comme  celui-ci  avoit  imité  Panœtius,  qui  avoit  écrit 
avant  lui  sur  le  même  sujet  parmi  les  Grecs.  De  sorte  que 
comme  Ciceron  entreprit  ses  livres  des  Offices  pour  instruire 
son  fils,  de  même  S.  Ambroise  se  porta  à  composer  les  siens 
pour  former  ses  Ecclesiastiotues  qu'il  nomme  ses  enfans. 

'  Il  est  si  vrai  qu'ils  sont  mits  pour  les  Ecclésiastiques  en  par-  Tiii.  ib.p. 277.208. 
ticulier,  que  le  saint  Evêque  s'y  adresse  souvent  aux  Diacres, 
et  aux  autres  personnes  qu'il  avoit 'ciioisies  pour  le  ministère 
du  Seigneur.  11  n'oublie  rien  pour  les  y  instruire  de  leurs  prin- 
cipaux devoirs  :  en  quoi  on  voit  combien  il  étoit  exact  pour 
les  choses  importantes.  '  C'est  ce  qui  fait  dire  à  S.  Augustin  et  Aug.  ep.  82.  n.  21. 
à  Cassiodore  que  cet  ouvrage  est  plein  de  préceptes  très-uti-  f.tg^'-i!''  ''  '"  '' 
les,  et  contient  beaucoup  d'instructions  sur  la  discipline  et  la 
conduite  que  l'on  doit  observer  dans  l'Eglise.  Cassiodore  ajou- 
te que  la  manière  dont  ces  trois  livres  sont  écrits,  respire  une 
douceurcharmante,  Mellifluilibri.  Ils  sont  non-seulement  un 
des  ouvrages  de  S.  Ambroise  les  plus  agréables  à  lire ,  mais 
aussi  un  de  ceux  où  il  y  a  plus  à  profiter, 

'Le  Saint  les  comraefice  par  1  obligation  où  est  un  Evêque  Amh.iii.i.i.n  1. 
d'instruire  ceux  qu'il  élevé  pour  le  ministère  Ecclésiastique,  de  *' 
le  faire  avec  humilité,  et  de  s'instruire  lui-même  pour  être  en 
état  d'enseigner  les  autres.  C'est  ce  qu'il  montre  avec  beau- 
coup de  modestie  n'avoir  d'abord  pu  faire  lui-même,  puisque 
aïant  été  inopinément  et  tout  d'un  coup  élevé  des  tribunaux 
séculiers  à  la  dignité  épiscopale ,  il  n'étoit  point  instruit  de  ce 
qu'il  devoit  savoir. 

'Il  entre  ensuite  dans  le  détail  des  dangers  auxquels  on  est  n.  tm. 
exposé  par  salangue,  et  touche  les  avantages  du  silence.  «  Com- 
«  bien  y  en  a-t-il  qui  pèchent  en  parlant,  ce  sont  ses  termes,  lors- 
«  qu'à  peine  il  s'en  trouve  qui  pèchent  en  ne  parlant  pas  !  C'est 
«  pourquoi  il  est  plus  difficile,  ajoute  S,  Ambroise,  de  savoir  se 
«  taire  que  parler.  »  Mais  il  ne  veut  pas  que  ce  silence  soit  un  si- 
Tome  1.  Ser.  Part.  A  a  a 


370  S.  AMBROISE,  EVRQIIR  DE  MILAN,     * 

IV  SIECLE,  lence  oisif  et  infructueux.  Il  veut  au  contraire  qu'il  nous  serve 
à  aprendre  à  garder  nôtre  cœur  et  à  conduire  nôtre  langue.  Il 
enseigne  qu'il  i^st  utile  et  quelquefois  n(  (Tssaire  de  le  rompre  , 
pourvu  qu'on  h;  fasse  avec  douceur  ,  avec  modestie ,  à  propos 

II.  .11.  et  avec  circonspection.  'C'est  ainsi ,  dil-il ,  que  David  nous 

aprend  à  garder  le  silence  :  manière  de  le  garder  bien  différen- 
te de  celle  que  Pythagore  en.seignoit  à  ses  disciples. 

„.  2s-ef).  Delà  S.  Ambroise  passe  à  son  fjrincipal  dessein,  qui  est  de 

traiter  des  offices.  Il  explique  les  motifs  qui  l'ont  porté  à  l'en- 
treprendre ,  et  distingue  d'après  les  anciens  Irois  sortes  d'offi- 
ces, l'bonnêle ,  l'utile  et  l'agréable.  Mais  il  les  réduit  à  l'honur- 
te,  parce  qu'il  n'y  a  rien  d'utile,  ni  ri(;n  d'agréable  qui  ne  doive 
se  raporter  au  bonheur  de  la  vie  éternelle,  (''est  sur  cette  idée 
qu'il  a  formé  le  dessein  de  son  ouvrage,  où  il  ne  traite  que  des 
offict  s  qui  ont  raport  à  rhonncteté. 

„.  40-65.  il  y  établit  comme  en  pa.^isant  et  par  ocasion  le  dogme  de 

la  providence  de  Dieu  .  et  montre  contre  les  erreurs  des  Phi- 
losophes, qu'elle  s'étend  à  toutes  les  créatures.  Il  a  soin  de  r'- 
pondre  h  l'objection  qui  se  présente  naturellement  :  pourq-uoi 
les  méchans  sont-ils  dans  la  prospérité?  Après  y  avoir  satistail, 
il  vient  à  prescrire  les  devoirs  de  chaque  état  en  particulier. 

11.  (i.'i.  8».  'D'abord  il  touche  ceux  des  jeunes  gens,  à  qui  il  recom- 

mande fortement  la  modestie  et  la  pudeur ,  non-seulement  au 
dehors,  comme  en  leurs  habits  ,  leurs  démarches,  leurs  mou- 
vemens,  leurs  discours,  mais  encore  par  l'intérieur  en  ce  qui 
regarde  la  crainte  de  Dieu,  le  respect  di)  aux  parens,  la  nio- 

i>  K.-s!i.  df'ration  qui  r'priinf;  les  passions  de  l'ame.  '  Il  donne  ensuite 

d'excellens  avis  pour  éviter  les  écueils  de  la  modestie  et  de  la 
pudeur  qu'il  exige,  surtout  des  Ecclésiastiques.  'Il  y  en  joint 
d'autres  pour  reglef  les  [lensées  d(!  l'esprit  et  les  désirs  du  cœur. 
'  Le  reste  du  premier  livre  roule  sur  les  règles  générales  pour 
bien  faire  ses  actions,  et  sur  diverses  vertus  eu  particulier,  nom- 
mément la  prudence,  la  force,  la  tempérance  et  la  justice.  Ces 
règles  générales ,  S.  Ambroise  les  réduit  h  trois  :  à  soûmetl?-e' 
les  passions  à  la  lai-sou  ;  à  garder  une  juste  modération  dans  ce 
([ue  l'on  entreprend;  à  le  faire  dans  Idrdre  et  à  propos.  Il  dit 
sur  tout  cela  milli-  belles  choses  qu'il  confirme  par  des  exem- 
ples pris  de  la  conduite  des  jilus  saints  personnages  de  l'ancien 
tir,.  Testament.  '  Il  en  tire  au.ssi  d);  l'histoire  l"'e(lesiaslique,  i-omme 

le  martyre  de  sjiiute  Agnès  (!l  ceux  de  S.  .Xysie  et  de  S.  I  anreni, 
qu'il  propose  c(»?Time  dr-s  modèles  d'uiu'  eonslauce  héroïque 


11.   0.  un. 


11.  ur>.  si!i. 


DOCTEUR  DE  l/EGf.ISE  ET  CONFESSEUR.     371 

"  Avant  que  de  finir  S.  Ambroise  insiste  sur  la  fuite  de  l'avarice    i  v  si  k  cl  i;. 
comme  contraire  à  la  liberté  nécessaire  à  un  Ecclésiastique,  et  ,  ^^  ^^.^  ,„j 
capable  de  défigurer  en  lui  l'image  de  Dieu.  '  11  veut  que  leur  „  aj-i.  i^i. 
ministère  soit  irréprochable  ;  qu'ils  ne  soient  point  adonnés  au 
vin  ni  à  aucun  des  autres  vices  que  nomme  l'Apôtre  ;  qu'ils  vi- 
vent enfin  de  manière  qu'ils  soient  un  sujet  d'édification  pour 
tous  ceux  qui  les  connoitront,  soit  Fidèles,  soit  Païens.  'S.  Am-  n.  i-.s. 
broise  entre  les  vertus  qu'il  exige  des  E(;clesiasliques,  parle  de 
la  continnuce  comme  d'obligalion  au  moins  pour  les  Prêtres 
et  les  Diacres. 

11  emploie  le  second  livre  à  traiter  de  la  béatitude.  Après  i.  ■i.  ,,.1.  lu;. 
avoir  réfuté  les  erreurs  de  Ciceron  et  des  autres  Philosophes 
sur  ce  sujet,  il  montre  qu'elle  consiste  dans  la  connoissance  de 
Dieu  et  le  fruit  d'une  sainte  conduite.  Que  c'est-là  que  mené 
l'hoimélefé  dont  il  a  parlé  dans  le  livre  précèdent.  Que  le  bien 
utile  dont  il  parle  dans  celui-ci  n'est  autre  chose  que  l'honnê- 
teté même.  Qu'entre  les  biens  les  plus  utiles,  l'amitié,  ladou- 
«;eur,  la  libéralité,  les  conseils,  la  justice,  la  prudence,  la  fi- 
délité, l'aflabililé,  la  protection  des  pauvres,  le  desinterisse- 
ment,  l'hospitalité,  la  modération,  tiennent  le  premier  rang. 
S.  Ambroise  entre  sur  tous  ces  points  dans  un  détail  aussi  ad- 
mirable qu'instructif.  '  Ce  qu'il  dit  dans  tout  le  chapitre  24*  est  n.  ii".  i-r.. 
particulièrement  remarquable.  11  y  trace  en  abrégé  les  dispo- 
sitions où  doivent  être  les  Ecclésiastiques  par  raport  aux  ()f- 
lices  et  Rénéfices  de  l'Eglise,  et  la  manière  dont  ils  doivent 
s'y  conduire.  '  Il  veut  que  ces  Rénéfices  soient  conférés  plu-  u.  i-jii.  i-ii. 
tôt  à  des  sujets  [)auvres  qu'à  des  riches. 

'  11  revient  encore  ici  à  l'avarice  qu'il  tâche  de  bannir  de  n.  i*t.  ui. 
l'Eglise,  afin  de  lui  substituer  le  désintéressement  et  la  com- 
passion envers  les  pauvres.  «  '  L'Eglise,  dit-il  à  ce  sujet,  a  da  „.  ta. 
«  l'or,  non  pour  le  garder,  mais  pour  le  distribuer  et  subvenir 
«  aux  nécessités  des  indigens.  »  C'est  à  cette  ocasion  qu'il  en- 
seigne qu'on  doit  en  pareils  cas  rompre  même  les  vases  sacrés, 
plutôt  que  de  laiss(!r  périr  les  membres  vivans  de  J.  C.  '  11  l'a-  „.  isy. 
voit  pratiqué  lui-mêm(;  pour  racheter  des  captifs.  Ce  qui  lui 
fait  dire:  «,1e  reconnois  que  le  sang  de  J.  C.  répandu  dans 
«  l'or,  n'y  a  pas  seulement  brillé,  mais  qu'il  y  a  encore  impri- 
w  mé  la  vertu  de  la  rédemption.  »  On  voit  pai--là  ce  que  S.  Am- 
broise croioit  de  la  liqueur  contenue  dans  le  Calice.'  Com-  „.  ii3. 
me  dés  ce  tems-là  il  y  avoit  dans  les  Eglises  des  vases  consa- 
crés, et  d'autres  qui  ne  l'étoient  pas,  il  veut  que  dans  les  cas 

A  a  a  ij 


I.  3.  n.  1.  138. 


II.  27. 


372         S.  AMBROISE ,  EVEQUE  DE  MILAN , 

IV  SIECLE,     de  nécessité  l'on  commence  par  ceux-ci,  el  que  s'ils  ne  suffi- 
sent  pas,  on  y  emploie  aussi  les  autres. 

'  Le  but  principal  du  3*  livre  est  d'établir  ces  deux  grandes 
vérités  :  Qu'un  Chrétien,  et  sur  tout  un  Ecclésiastique,  doit 
toujours  préférer  l'honnête  à  l'utile.  Qu'il  est  obligé  à  cher- 
cher l'avantage  des  autres  préferablement  au  sien  propre.  De 
ces  deux  vérités  générales,  S.  Ambroise  tire  quantité  de  belles 
maximes  particulières  qu'il  apuïe  d'exemples  pris  de  l'ancien 
et  du  nouveau  Testament.  '  Sur  ces  principes  il  décide  la  ques- 
tion que  l'on  avoit  de  coutume  de  proposer  :  savoir  si  dans  un 
naufrage  un  homme  de  bon  sens  peut  légitimement  ôter  à  un 
insensé  la  planche  qu'il  auroit  saisie  pour  se  sauver  ?  S.  Am- 
broise répond  que  bien  qu'il  lui  paroisse  plus  avantageux,  se- 
lon l'usage  commun,  que  le  premier  se  sauve  plutôt  (]ue  l'au- 
tre, il  lui  semble  néanmoins  qu'un  Chrétien  ne  doit  pomt  cher- 
cher à  sauver  sa  vie  aux  dépens  de  celle  d'un  autre.  C'est  sur 
les  mêmes  principes  qu'il  soutient  qu'il  ne  lui  est  point  permis 
de  se  batre  contre  un  voleur  qui  viendroit  l'ataquer.  Il  en  rend 
raison.  De  peur,  dit-il,  qu'en  défendant  sa  vie,  il  ne  deshono- 
re sa  pieté  :  ne  dum  salutem  défendit,  pietatem  contaminet.  '• 
'  C  est  encore  sur  les  mêmes  principes  qu'il  regarde  comme 
une  usure  la  conduite  d'un  homme,  qui  aiant  recueilli  quan- 
tité de  grains,  les  garderoit  pour  les  vendre  plus  chers  dans 
un  temps  de  famine.  Lucrum  tuum,  dit-il,  en  apostrophant  cet 

:,7.  u..  homme,  damnum  publicum  est.  '  Il  fronde  également  la  con- 

duite de  ceux  qui  usent  d'adresse  pour  enlever  le  bien  d'autrui, 
et  n'oublient  rien  pour  s'enrichir  des  successions  des  autres. 
Cette  avidité,  dit-il,  est  indigne  d'un  Chrétien.  Après  quoi  il  a- 

'■'  joute  ces  belles  paroles  :  «  '  Il  est  du  devoir  d'un  Evêque  et  d'un 

«  Prêtre  de  ne  nuire  à  personne,  de  vouloir  être  utile  à  tout  le 
«  monde  ;  car  de  pouvoir  l'être  effectivement,  il  n'apartient  qu'à 
«  Dieu  seul.  »  'S.  Ambroise  finit  cet  excellent  ouvrage  par  l'é- 
loge de  l'amitié,  et  les  conditions  (jue  l'on  y  doit  aporter  pour 
qu'elle  ne  dégénère  pas  en  vice. 
uirVirii)  ,  777  ^^  *  ^^*  **"*  d'estime  de  ces  trois  livres  des  offices  dans 

les  siècles  qui  ont  suivi  celui  de  S.  Ambroise,  que  chacun  les 
vouloil  avoir.  Ceux  qui  avoient  plus  de  loisir  en  faisoient  mê- 
me des  abrégés,  que  l'on  trouve  encore  à  présent.  Il  seroit  à 
souhaiter  que  les  Chrétiens  de  nos  jours,  et  particulièrement 
les  Ecclésiastiques  eussent  la  même  émulation.  11  n'est  gueres 
d'ouvrages  plus  utiles  pour  aprendre  à  tous  les  Chrétiens  les 


II.  o7.   ii. 


II.  lii.    137. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     373 

principes  et  les  maximes  de  la  morale  toute  sainte  qu'ils  pro-    iv  sikclk. 
fessent.  C'est  ce  qui  a  contribué  à  en  multiplier  les  éditions. 
Nous  ne  parlerons  ici  que  de  celles  qui  s'en  sont  faites  sépa- 
rément. 

'  11  y  en  a  unef  très-ancienne  édition  en  un  volume  m -4°  Bib.Bai.t.i.p.ieo. 
sans  nulle  date,  ni  nom  de  lieu  et  d'Imprimeur.  '  Il  en  pa-    ...cas.  Ben.  • 
rut  une  autre  en  même  volume  à  Paris  chez  Guiot  Marchand 
l'an  1494  avant  Pâque.  'Elle  fut  suivie  de  celle  que  Jean  Petit  s.  Sui.  Bit. 
Imprimeur  au  même  endroit  mit  au  jour  l'an  1504,  en  même 
volume  que  les  deux  autres. 

'  Erasme  aïant  revu  depuis  cet  ouvrage  de  S.  Ambroise  com-  s.  vin.  cem. 
me  les  autres,  Michel  Vascosan  le  remit  sous  la  presse,  d'où 
il  sortit  par  les  soins  de  Nicolas  Strabon  l'an  1533,  m-4°.'  A  iwa. 
Anvers  Jean  Stéelsius  l'imprima  à  son  tour  en  un  volume  in- 
8».  l'an  1542.  '  En  1553  il  v  en  eut  une  autre  édition  à  Venise  Bib.  Bai.  i.  2.  p. 

■       ,n  "'  909. 

m-16. 

'  François  le  Boulanger,  en  latin  Pislorius,  revit  le  texte  ori-  ...s.  sui.  Bit. 
ginal,  et  le  publia  en  un  volume  îW-16  l'an  1565,  à  Paris,  '  où  . ...s.  Jui.  Tut. 
il  fut  réimprimé  chez  Sebastien  Nivelle  l'an  1 583  en  même  vo- 
lume et  sur  la  même  édition.  '  A  Mayence  il  s'en  fit  une  au-  ....Teii.  p.  33. 1. 
tre  édition  chez  Jean  Albin  l'an  1602,  en  un  volume  in-S".  avec 
les  trois  livres  de  Ciceron  sur  le  même  sujet,  dont  le  texte  est 
tellement  placé,  qu'il  répond  à  celui  de  S.  Ambroise.  'En  1612  ....s.  vin.  Cen. 
le  même  Imprimeur  publia  de  nouveau  le  même  ouvrage  de 
ce  Père,  mais  sans  celui  de  Cicéron,  en  un  volume  m-12. 
'L'année  1609  en  vit  deux  autres  éditions,  l'une  à  Paris  m-16,  Barb.  1. 1.  p.  a:;.  1. 
l'autre  à  Milan  m-8".  Celle-ci  est  accompagnée  de  laletrede 
S.  Ambroise  aux  Evêques  d'Emilie  touchant  le  jour  de  Pâque 
de  l'an  387,  avec  les  notes  du  Père- Boucher,  et  le  traité  de 
la  dignité  sacerdotale  atribué  à  S.  Ambroise. 

Diverses  Nations  non  contentes  d'avoir  les  Offices  de  ce  Pè- 
re en  latin,  ont  encore  voulu  avoir  le  plaisir  de  les  lire  en  leur 
langue  vulgaire.  '  François  Catani  de  Diacetto  Chanoine  de  ...vaiiicei|...imp. 
Florence,  qui  traduisit  depuis  l'Hexameron  du  même  saint  Do-  ^-  ^^'  *' 
cteur,  mit  aussi  en  Italien  les  trois  livres  des  Offices.  Cette 
traduction  fut  imprimée  au  même  endroit  chez  Laurent  Tor- 
rentino  l'an  1558,  en  un  volume m-4°.  '  Diego  Garcias  en  fit  ...Bai.  t.  2. p. 999. 
une  autre  en  Castillan,  qui  parut  à  Salamanque  en  un  volu- 
me m-8M'an  1574. 

Nos  François  n'ont  pas  moins  témoigné  d'émulation  à  ce 
sujet,  que  les  Nations  étrangères.  '  On  trouve  en  effet  deux  dif-    ...ff  pncd.  cen. 
2  5 


37i        S.  AMBKOISK,  EVKQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE.  ferentes  traductions  des  Offices  en  leur  langue.  (Jn  est  rede- 
vable  de  la  première  à  Jaques  Tigeou  Angevin,  qui  la  pu- 
blia à  Paris  chez  Guillaume  Chaudière  en  1 588.  lille  est  en  un 
volume  in-^".  grossi  par  la  traduction  de  quatre  lelres  de  saint 
Ambroise,  et  de  son  discours  contre  Auxence.  Ces  letrcs  sont 
s.  Vin.  «;uii.  les  29,  30,  32  et  3".i  des  anciennes  éditions.  '  L'autre  traduction 
Françoise  des  Offices  est  celle  de  M.  l'Abbé  de  Bellegarde, 
imprimée  à  Paris  en  1089,  chezSeneuze,  en  un  volume  m-12. 
30"  Revenons  au  dénombrement  chronologique  des  autres 

Anih.do  ob.  Val.    Ecrits  de  S.  Aiiibroïse.  '  Sou  Oraison  funèbre  de  l'Empereur 

''■      '  Valenlinien  II  fut  faite  en  392  l'année  de  sa  mort,  et  pronon- 

cée à  ses  funérailles,  lorsque  son  corps  eut  été  aporté  des  Gau- 
les à  Milan.  Elle  est  intitulét;  :  Consolation  sur  la  mort  de  Va- 

aiiiii.  1».  117^.!.  lentinien,  '  et  porte  divers  autres  litres  dans  les  manuscrits  et 
les  anciennes  éditions.  C'est  un  illustre  témoignage  de  la  ten- 
dresse qu'avoit  S.  Ambroise  pwur  cej«ïune  Empereur  eldel'es- 

,ic  u!..  V..1.  n.  I.  lime  qu'il  faisoit  d<î  son  mérite  et  de  sa  pieté.  '  11  paroît  par  l'es- 
pèce de  peti  If  préface  qui. suit  le  commencement  de  cette  pièce, 
que  S.  Ambroise  la  rédigea  par  écrit  peu  de  tims  après  qu'il 
l'eut  prononcée  de  vive  voix. 

Tiii.  ib.  p.  -:;»;.  '  On  a  peine  à  comprendre  comment  Casaubon  a  pîi  douter 

qu'elle  fût  véritablement  de  S.  Ambroise.  On  y  découvre  en 
effet  non-seulement  son  style  et  son  esprit,  mais  encore  tous 
les  caractères,  pour  ainsi  dire,  de  sa  tendresse  et  de  son  cœur. 
D'ailleurs  si  cet  Ecrit  n'est  pas  de  S.  Ambroise,  il  faut  nier  que 
sa  letre  53"  à  l'Empereur  Theodose  où  se  trouvent  plusieurs 
des  mêmes-faits  et  des  mêmes  expressions,  comme  écrite  sur 
le  même  .sujet,  soit  aussi  de  ce  siuiit  Evêquc  ;  ce  que  personne 
n'oseroit  nier. 

iiioud.  sii..  1.  2. r.  On  ik;  (Joii  pas  èlie  moins  surpris  de  voir  '  que  quelques' 
Ecrivains  aient  pris  ocasion  des  dernières  paroles  de  ce  dis- 
cours, maturd  res^urredione  compenses,  *  de  prétendre  qu<î 
.saint  Ambroise  a  été  dans  l'opinion  dis  deux  résurrections  qu'ad- 
mettoient  les  Millénaires:  mais  assurément  cet  endroit  ne  le 
prouve  point,  et  Blondel  y  trouve  avec  rai.son  un  sens  tout 
oposé.  11  est  vrai  que  le  terme  maturus  dans  Plante  et  dans 
Horace  signifie  quelquefois  subit  et  précipité  ;  mais  presque 
par-tout  ailleurs  il  signifie  le  contraire,  et  c'est  en  ce  sens  que 

Ainb.  ib.  n.  80.    l'aprisS.  Ambroiso.  Cela  est  si  vrai,  '  qu'il  l'opose  à  immaturus 

1  C'est  aiii>i  i|ii°i>ii   lit  ii:tii!f    li:s  iincicii-       formuiniinl  à  lous  les  inaniisiTits,    malurà 
nus  Hilitioiis,   mais  la  iiouvullu  |K>rtc  cuii-       rtturrtetiotu:  tuteiltt  et  rettttcitt». 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE   ET  CONFESSEUR.    375 

dans  le  même  endroit  :  Te  quœsn^  dit-il,  s^imme  Deus...  ut  iv  siècle. 
immafurum  hune,  en  parlant  du  jeune  Valentinieu  mort  dans 
la  21''  année  de  son  âge,  vitœ  istius  cursiim  matitriore  suscita- 
tione  compenses.  C'e,sl-à-dire,  Seigneur,  acordez-lui  une  résur- 
rection d'autant  plus  durabje,  que  le  cours  de  sa  vie  a  été  de 
moindre  durée.  Au  reste  nous  aurons  encore  ocasion  ailleurs 
d'examiner  si  S.  Ambroise  a  été  réellement  dans  l'erreur 
qu'on  voudroit  lui  prêter  ici. 

'  S.  Ambroise  prononça  ce  discours  en  présence  des  sœurs  n.  «-m.  . 
du  défunt  qu'il  tâche  de  consoler.  Il  y  avoit  alors  deux  mois 
qu'elles  pleuroient  leur  frère.  De  sorte  que  ce  Prince  aïant  été 
tué  le  15""  de  Mai,  ce  fut  vers  le  milieu  de  Juillet  que  se  firent 
ses  funérailles.  '  Après  l'Orai.soii  funèbre  S.  Ambroise  offrit  les  n.  se. 
saints  mystères  pour  le  repos  desoname,  et  exhorta  les  assis- 
fans  h  unir  leurs  prières  aux  siennes.  C'est  ce  qui  se  pratique 
encore  aujourd'hui  en  .'semblables  ocasions.  '  Comme  ce  Prm-  "•  m.  m.  -7. 
ce  n'avoit  point  reçu  le  baptême,  mais  qu'il  l'avoit  demandé, 
S.  Ambroise  assure  que  le  désir  qu'il  avoit  de  le  recevoir,  et 
sa  pieté  y  avoient  supléé,  ainsi  que  le  sang  y  suplée  dans  les 
simples Caticumen(îs qui  souffrent  le  martyre. 

'  A  Valenlinien  S.  Ambroi.se  joint  l'Empereur  Cratien  son  n.  r..  .i*.  7i.  m. 
frère  dont  il  renouvelle  la  mémoire  dans  ce  discours,  qui  peut 

f)asser  pour  l'Oraison  funèbre  de  l'un  comme  de  l'autre,  pour 
e  grand  nombre  de  belles  choses  qu'il  y  dit  au  sujet  de  Gra- 
tien.  '  Il  y  fait  au.ssi  mention  de  Valentinien  leur  père,  dont  n.  .v.. 
il  relevé  la  constance  héroïque  qu'il  fit  paroître  sous  Julien 
l'apostat,  en  préférant  sa  religion  aux  premières  dignités  de 
l'Empire.  '  Quoique  S.  Ambroise  ne  doutât  nullement  de  la  n.  n.  ?«. 
félicité  des  deux  jeunes  Princes  dont  il  fait  l'éloge  funèbre,  il 
s'engage  néanmoins  à  ne  les  jamais  oublier  dans  ses  sacrifices 
et  dans  ses  prières.  On  voit  par  là  ce  qu'il  pensoit  de  l'étal  des 
âmes  justes  après  la  mort,  et  de  l'effet  des  prières  qu'on  fait 
pour  les  défunts. 

'M".' L'Ciraison  fwiehre  de  r  Empereur  Theodoseful  pronon-  deobTi..]).  inn. 
cée  quarante  jours  après  le  drcès  de  ce  Prince,  qui  mourut  à  '"'* 
Milan  le  17  de  Janvier  395.  C'est  un  illustre  monument  de  l'es- 
time que  S.  Ambroise  faisoit  de  la  foi  et  de  la  tendre  pieté  de 
Theodose  le  grand,  qui  avoit  lui-même  pour  le  saint  Evêque 
d'autant  plus  de  vénération  et  de  respect,  qu'il  connoissoit 
mieux  tout  son  mérite.  '  Les  Centuriateurs  de  Magdebourg  et  adm.  p.  nixi. 
quelques  autres  ont  osé  douter  que  cette  pièce  fût  de  S.  Am- 


n.   3.  7.  54. 


:n.  r>6. 


:\ia      s.  AMBROISE,  EVEQUi:  nE  MILAN, 

IV  SIECLE,  broise.  Mais  toulos  sortes  de  preuves  tirées  et  du  style  et  des 
autres  circonstances,  soit  de  Inistoire,  soit  de  la  manière  d'ex- 
pliquer l'Ecriture,  détruisent  ce  doute  que  l'on  n'apuie  d'au- 
cune raison. 

'  S.  Ambroise  prononça  ce  discours  en  présence  de  l'Em- 
pereur Honorius  fils  du  défunt,  et  de  toute  l'armée.  Il  y  mar- 
3ue  que  les  uns  observoient  le  troisième  et  le  trentième  jour 
u  décès,  d'autres  le  septième  et  le  quarantième,  et  montre  par 
l'Ecriture  que  l'une  etl'autre  pratique  est  autorisée.*  En  apostro- 
phant l'Empereur  Honorius,  il  le  console  sur  la  douleur  qu'il 
avoit  de  n'avoir  pu  acompagner  le  corps  du  défunt  jusqu'à 

n.  6-9.  11.  Constantinople  où  il  devoit  être  inhumé.  '  En  adressant  la  pa- 

role aux  soldats,  il  leur  fait  remarquer  que  c'est  à  la  foi  de  Theo- 
dose  qu'ils  doivent  les  victoires  qu'ils  ont  remportées,  et  les 
triomphes  qui  faisoient  leur  gloire.  Il  les  exhorte  à  avoir  pour 
ses  enfans  une  fidélité  inviolable,  et  à  moins  considérer  en 
eux  la  foiblesse  de  l'âge  que  les  obligations  qu'ils  avoient  à 
leur  père. 

n.  12-14.  27.  28.  '  En  faisant  l'éloge  des  vertus  du  défunt,  il  relevé  particu- 
lièrement sa  foi,  sa  pieté,  sa  clémence,  sa  pénitence,  et  l'hu- 
milité dont  il  avoit  donné  de  si  illustres  exemples  sous  la  pour- 

n.  231.  pre  dont  il  étoit  revêtu.  '  Il  ne  craint  pas  d'assurer  ses  auditeurs 

que  ce  grand  Prince  n'a  point  quité  l'Empire,  qu'il  n'a  fait 
que  changer  celui  de  la  terre  contre  celui  du  ciel.  Que  sa  pie- 

n.  15.  té  lui  a  donné  entrée  dans  cette  céleste  Jérusalem,  '  où  il  sera 

n.  32.  un  puissant  protecteur  pour  ses  enfans,  '  où  il  jouit  de  cette 

lumière  éternelle  et  de  cette  heureuse  paix  qui  n'aura  jamais 

n.  39.  40.  ,52.  dc  fin.  '  Qu'il  s'y  voit  en  la  compagnie  des  saints,  et  de  plu- 
sieurs pieux  Princes  et  Princesses  que  S.  Ambroise  nomme 

n.  40.  48.  ici.  '  A  cette  ocasion  il  s'étend  beaucoup  sur  sainte  Hélène 

mère  de  Constantin  le  grand,  et  raporle  l'histoire  de  la  dé- 
couverte de  la  Croix  que  l'on  doit  aux  soins  de  cette  sainte 
Impératrice. 

le^Nab.  p.  .565.  'i^".  '  Le traitésuv Nûboth  fk  Jpzroel paroitcomi^osé  d'unou 
de  deux  discours  prononcés  de  vive  voix.  S.  Ambroise  y  dé- 
clame avec  son  zèle  ordinaire  contre  l'avarice  et  la  tyrannie 
des  riches  qui  opriment  trop  souvent  les  pauvres.  L'ocasion 

a.im.  p  .5fi3.        en  fut  l'histoire  du  Roi  Achab  et  du  pauvre  Naboth.  '  C'est 

{)Ourquoi  ce  traité  dans  quelques  manuscrits  se  trouve  intitu- 
é.  De  Achab  rege  et  de  NaJbuthe paupere .  '  S.  Ambroise  dé- 
bute par  dire  qu'il  y  a  des  Achabs  dans  tous  les  tems,  et  que  le 

nombre 


S88 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.      377 

nombre  en  étoit  très  grand  lorsqu'il  en  parloit.'Cet  endroit    iv  sieclç. 
joint  à  ce  qu'il  dit  plus  bas  de  l'avarice  des  Seigneurs  de  la  TTlTëT 
Cour  et  des  Magistrats ,  semble  désigner  la  fin  de  l'empire  du  adm.  ib.  i  tui.  ib. 
grand  Theodose,  lorsque  la  minorité  et  la  foiblesse  d'Honorius  p  ^^^• 
son  fils  et  son  successeur,  donnoit  aux  plus  forts  la  liberté  d'o- 

{)rimer  les  autres.  C'est  ce  qui  fait  raporter  cet  Ecrit  à  ces  tems- 
à,  vers  l'an  395  ou  396.  On  croit  y  découvrir  quelques  en- 
droits tirés  ou  imités  de  l'Homélie  de  S.  Basile  sur  l'avarice  et 
sur  les  riches! 

33".  '  Un  des  ouvrages  les  plus  intéressans  de  S.  Ambroise  A>nb.  Ep.'  p.  751. 
est  le  recueil  de  ses  letres.  Elles  sont  en  tout  au  nombre  de  91 , 
et  divisées  en  deux  classes.  On  a  rangé  de  suite  dans  la  pre- 
mière celles  qui  portent  avec  elles  quelqu'époque  ou  quelque 
date.  Entre  celles-ci  se  trouve  le  discours  contre  Auxence 
Evêque  Arien  de  Milan.  Celles  qui  ne  présentent  aucun  in- 
dice du  teros  auquel  elles  ont  été  écrites,  sont  renvoïées  dans 
la  seconde  classe.  'C'est-là  l'ordre  que  les  derniers  éditeurs  de  aJm.  p.  733. 7*6. 
S.  Ambroise  ont  crû  devoir  donner  à  ses  letres.  Us  ont  soin 
de  prouver  la  chronologie  de  celles  que  contient  la  première 
classe  par  des  raisons  ou  des  circonstances  tirées  desjetres 
mêmes. 

'  On  a  des  preuves  que  S.  Ambroise  en  avoit  écrit  un  plus  p.  733. 
grand  nombre  qu'il  ne  nous  en  reste  de  lui.  Il  paroît  sur  tout 

?[ue  nous  en  avons  beaucoup  perdu  qui  étoient  adressées  à  son 
rere  S.  Satyre  ,  et  à  sainte  Marcelline  sa  sœur  ,  à  l'Empereur 
Theodose,  au  tyran  Eugène,  à  S.  Phébade  d'Agen,  et  a  saint 
Delphin  de  Bourdeaux.  La  perte  en  est  d'autant  plus  considé- 
rable, que  les  letres  des  grands  hommes  sont  ordinairement 
leurs  plus  précieux  monumens.  C'est-là  qu'ils  ont  acoutumé  de 
se  peindre  au  naturel.  On  y  voit  le  caractère  de  leur  génie,  et 
tous  les  traits  de  leur  vertu.  Quoique  S.  Ambroise  se  fasse  as- 
sez connoître  dans  ses  autres  Ecrits ,  il  a  néanmoins  plus  parti- 
culièrement réussi  à  le  faire  dans  ses  letres  qu'ailleurs. 

'  Dans  les  unes  il  fait  paroître  tout  son  zèle  à  défendre  la  H'iJ. 
religion  Chrétienne  contre  les  efforts  des  Païens.  On  découvre 
dans  d'autres  son  attention  et  son  ardeur  pour  soutenir  les  dog- 
mes catholiques ,  jusqu'à  la  disposition  de  répandre  son  sang 
pour  une  si  juste  cause.  Dans  celles-ci  l'on  voit  briller  tous  les 
traits  de  sa  charité  et  de  sa  grandeur  d'ame  envers  ses  enne- 
mis. Dans  celles-là  on  admire  son  courage ,  sa  fermeté ,  sa  vi- 
gueur épiscopale ,  lorsqu'il  s'agit  de  traiter  avec  les  Empereurs 

Tome  I.  Sec.  Pari.  B  b  b 

2  5  * 


378     S.  AMBHUISE,  LIVEOUE  l)K  Mll.AN, 

IV  SIECLE,     et  les  Grands  du  siècle.  Dans  plusieurs  autres  on  trouve  des 
marques  éclatanlesde  sa  sol  ici  lu  de  pastorale,  non-seulement 

{)our  l'Eglise  de  Milan  en  particulier,  mais  aussi  pour  toutes 
es  autres  Eglises  du  monde  Ghn'licn  ;  et  presque  toutes  ne 
nous  présentent  autre  chose  que  des  preuves  signalées  de  son 
exactitude  pour  la  morale  Chrétienne  et  la  discipline  ecclé- 
siastique, de  sa  foi,  de  sa  piété,  de  sa  sagesse,  en  un  mot  de 
ce  profond  savoir  qui  le  faisoit  regarder  comme  l'oracle  géné- 
ral de  l'Eglise  d'Occident.  Tell«  e.st  l'idée  qu'on  doit  se  former 
des  letres  de  S.  Ambroise.  Nous  n'entreprendrons  point  d'en- 
trer dans  le  détail  de  chacune  en  particulier.  Cette  entreprise 
nous  conduiroit  trop  loin.  Seulement  nous  ferons  qui-lques 
remarques  sur  les  endroits  qui  nous  paroîtront  le  mériter  da- 
vantage. 

cp.  p.  751. 7.v>.  'A  la  tête  de  ce  recueil  de  letres  se  lit  celle  que  l'Empe- 
reur Gratien  écrivit  à  S.  Ambroise  en  379,  pour  lui  deman- 
der le  traité  sur  la  foi ,  qu'il  lui  avoit  d('jà  envoie,  (  t  le  prier 
d'y  ajouter  quelque  instruction  sur  h;  S.  Esprit,  on  l'a  ainsi  pla- 
cée, parce  que  la  première  de  S.  Ambroise  qui  commence  le 

.p.  I.  M.  I.  10.  recueil,  en  est  la  réponse.  'Cette  première  letre  de  nôtre  Saint 
contient  un  éloge  magnifique  de  la  foi  et  de  la  piété  de  Gra- 
tien, et  un  engagement  de  la  part  de  S.  Ambroisi;  de  lui  dres- 
ser un  traité  sur  le  S.  Esprit  :  ce  qu'il  fit  dans  la  suite ,  comme 
on  l'a  vu. 

cp.  -isii.  Ko.i.  '  Entre  la  8*  et  la  9"  lelre  se  trouv(!  ce  qui  nous  reste  des 

Actes  du  Concile  d'Aquilée  tenu  en  381  contre  Pallade  et  Se- 
condien  Evêques  Ariens  qui  y  furent  condamnés.  C'est  avec 
juste  sujet  que  l'on  place  ces  Actes  entre  les  écrits  de  S.  Am- 
broise, qui  y  eut  le  plus  de  part ,  s'il  ne  les  dressa  pas  lui-mê- 

«p.  y.  n.  me,  comme  aïant  été  l'ame  de  c(î  Concile.  '  Les  six  lelres  qui 

suivent  ces  actes,  sont  écrites,  les  <jualre  premières  au  nom 
de  l'assemblée  aux  Empereurs  Gi-atien,  Valentinien  le  jeune 
etTheodose,  et  aux  Evêijues  des  Gaules,  pour  les  remercie/- 
d'avoir  concouru  à  la  convocation  du  Concile,  et  leur  apren- 
dre  ce  qui  s'y  étoit  fait.  Les  deux  autres  sont  adressées  à  Theo- 
dose  seul  au  ncm  des  Evêques  d'ilalie,  louchant  les  troubles 
qui  agitoient  alors  les  Eglises  d'.\niioclie  et  de  Constantino- 
ple,  et  pour  remercier  cet  Empereur  d'avoir  rendu  li;s  Eglises 
aux  Catholiques,  et  lui  faire  agréer  qu«i  l'on  examinât  à  Rome 
dans  un  Concile  le  sujet  des  divi.sions  qui  lroubh)ient  l'Eglise 
d  Orient.  S.  Ambioise  est  nommé  le  premier  dans  l'inscriplion 


DOCTFAIR  DE  î /EGLISE  ET  CONFESSEUR.     370 

de  ces  deux  lelres  ;  et  l'on  y  reconnoît  tout  son  style,  aussi  bien     iv  siec le. 
que  dalis  les  quatre  autres  :  de  sorte  que  l'on  ne  peut  pas  dou- 
ter  que  ce  ne  soit  lui  qui  les  ail  écrites.  Les  quatre  premières 
sont  de  la  même  aimée  que  h.  Concile  d'Aquilc^e ,  et  les  deux 
autres  de  l'année  suivante  382. 

'La  17"  letre  et  la  18"  sont  des  plus  importantes.  Elles  fu-  cp.  n.i». p.ssi. 
rent  écrites  en  38i ,  et  sont  adressées  a  l'Empereur  Valenti-  "*- 
nien.  En  voici  l'ocasion  et  le  sujet.  Le  Sénat  de  Rome  où  il 
se  trouvoit  encore  alors  plusieurs  Sénateurs  idolâtres,  aïanl 
arrêté  que  l'on  demanderoit  à  l'Empereur  le  rétablissement  de 
l'Autel  de  la  Vicloire,  des  droits,  des  privilèges  ôtés  aux  Païens, 
et  la  restitution  des  biens  dont  on  les  avoit  dépouillés  ;  Sym- 
maque  l'Orateur,  Préfet  de  Rome  cette  même  année ,  et  dé- 
puté du  Sénat,  en  dressa  une  relation  en  forme  de  plainte  qu'il 
présenta  à  Valenlinien  le  jeune.  Dans  celte  relation  qui  est 
écrite  avec  beaucoup  d'arî  et  d'éloquence ,  et  que  l'on  a  pla- 
cée entre  les  deux  lelres  de  S.  Ambroise  ,  Symmaque  fait  par- 
ler Rome,  et  lui  fait  dire  entre  plusieurs  choses,  qu'elle  veut 
garder  la  religion  d(»iit  elle  s'est  bien  trouvée  ;  qu'elle  est  trop 
âgée  pour  changer  ;  qu'étant  libre,  elle  veut  vivre  à  sa  manière 
acoûtumée  ;  que  c'est  lui  faire  injure  que  de  la  corriger  dans 
sa  vieillesse  ;  que  c'est  .son  culte  envers  les  Dieux  de  ses  pères 
qui  lui  a  soumis  toute  la  terre  ;  que  c'étoitpour  l'avoir  oboli  que 
l'on  voïoit  tant  de  calamités  publiqui-s. 

'S.  Ambroise  aïant  eu  avis  de  cette  relation  ,  écrivit  aus.si-  ep.n. n.4. i(i|c|.. 
tôt  la  première  de  ces  deux  letns  à  l'Empereur  pour  empê-  '"'  "'  '' 
cher  qu'il  ne  se  laissât  prévenir  par  les  Païens.  '  Il  lui  remon-  ep.  n.  n.  i. 
tre  avec  autant  de  respect  que  de  vigueur,  que  comme  tous 
les  sujets  de  l'Empire  Rc^main  sont  obligés  de  lui  être  soumis , 
il  est  obligé  de  l'être  lui-même  au  seul  vrai  Dieu  .souverain  maî- 
tre de  toutes  choses.  '  A'  rès  ce  début  il  lui  propose  tous  les  n.  *.  n. 
motifs  qu'il  jugeoit  les  plus  propres  à  l'empêcher  d'écouter  la 
demande  des  Païens.  11  insiste  particulièrement  sur  l'exemple 
de  l'Empereur  Gratien  son  frère,  qui  avoit  contribué  à  abo- 
lir leurs  superstitions  idolâtres,  'et  prie  Valentinien  de  lui  n. isiep.is.  n.  i. 
faire  donner  une  copie  de  la  relation  de  Symmaque ,  afin  de 
pouvoir  y  répondre  plus  amplement. 

'Aïant  reçu  cette  copie,  S.  Ambroise  entreprit  de  réfuter  ep.  is.  n.  i.  39. 
la  requête  ou  relation.  C'est  ce  qu'il  exécuta  par  la  18"  letre. 
'  Il  réduit  les  moïens  de  Symmaque  à  trois  principaux.  La  de-  n.  3. 
mande  que  faisoit  la  ville  de  Rome  de  ses  anciennes  cérémo- 

R  b  b  ij 


380      S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 


IV    SIECLE. 


n.  7.  Il 


n.  12.  16. 


n.  17.  20. 


nies  ;  l'injustice  aue  l'on  prétendoit  être  faite  aux  Vestales  et 
aux  Prêtres  des  taux  Dieux;  enfin  la  vengeance  que  ces  Dieux 
en  avoient  tirées  en  envoiant  une  famine.  '  S.  Ambroise  répond 
au  premier  moïen  par  une  autre  prosopopée  qu'il  opose  a  cel- 
le de  Symmaque,  en  faisant  avouer  à  nome  qu'elle  condam- 
ne ses  anciennes  superstitions,  et  qu'elle  ne  doit  pas  ses  victoi- 
res à  ses  Dieux  qui  lui  étoient  communs  avec  ses  ennemis, 
mais  à  la  valeur  de  ses  guerriers.  '  Il  répond  au  second  en  mon- 
trant la  différence  qu'il  y  a  entre  les  Vestales  et  les  Vierges 
Chrétiennes,  entre  les  Prêtres  des  faux  Dieux  et  les  Evêques 
des  Chrétiens.  Les  Vestales  ne  gardent  la  virginité  qu'à  cause 
des  avantages  temporels  et  du  lucre  qui  y  est  alaché.  Les 
Vierges  Chrétiennes  au  contraire  ne  reclierchent  point  d'au- 
tre récompense  que  leur  propre  vertu.  Les  Prêtres  Païens  ne 
croient  pas  que  leurs  cérémonies  puissent  subsister  sans  être  lu- 
cratives :  ceux  des  Chrétiens  au  contraire  méprisent  toutes  les 
pertes  temporelles.  L'Eglise  dont  ils  sont  les  ministres  n'a  rien 
à  elle  que  sa  foi.  Si  elle  a  des  revenus,  c'est  pour  nourrir  les 
pauvres.  , 

'Enfin  S.  Ambroise  répond  au  troisième  moïen  en  faisant 
voir  que  si  ce  sont  les  faux  Dieux  qui  ont  envoïé  la  famine 
qui  avoit  désolé  l'Empire  l'année  précédente ,  il  faut  qu'ils 
soient,  ou  bien  insensibles,  ou  bien  foibles  pour  ne  pas  con- 
tinuer à  se  venger,  puisque  l'abondance  avoit  alors  succédé  à 
la  disette.  'D'ailleurs  celte  famine,  ajoute  S.  Ambroise,  n'a  point 
été  générale.  Plusieurs  Provinces,  et  entre  autres  les  Gaules,  ont 
recueilli  plus  de  grains  que  de  coutume.  '  Et  ce  qui  est  encore 
plus  remarquable,  il  y  a  plusieurs  années  que  le  culte  de  ces 
Dieux  prétendus  est  aboli  par  tout  lemonde  ;  d'où  vient  qu'ils 
s'avisent  si  tard  à  venger  1  injure  qu'on  leur  a  faite? 

'  Ces  deux  écrits  ou  letres  de  S.  Ambroise  furent  lues  dans 

le  Conseil  de  l'Empereur,  où  il  se  trouvoitun  Conseiller  Païen, 

qui  n'empêcha  pas  que  le  Prince  ne  se  rendît  aux  raisons  du 

saint  Evêque.  En  conséquence  les  Païens  se  virent  frustrés  de 

leur  demande.  '  C'est  ce  que  S.  Ambroise  explique  lui-même 

au  tyran  Eugène  dans  sa  57"  letre,  dont  la*  lecture  donne  un 

sym.  auci.  p.  318.  grand  jour  aux  deux  autres.  '  C'est  pourquoi  on  les  a  jointes 

333-  ensemble  pour  les  imprimer  à  la  fin  du  recueil  de  celles  de 

Symmaque,  où  elles  se  trouvent  au  moins  dans  les  éditions  de 

1580  et  de  1604. 

Enn.  Epi.  p.  6«.       '  Le  succès  qu'curcnt  les  deux  letres  de  S.  Ambroise,  donna 


n.  ai 


n.  19. 


op.  r>7.  n.  3. 


n.  2.  3. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.    381 

ocasion  aux  deux  vers  suivans,  qui  furent  faits  sur  le  champ  ;\    iv  siècle. 
ce  sujet.  Ils  se  trouvent  parmi  les  épigrammes  de  S.  Ennode, 
qui  éloit  alors  trop  jeune  pour  les  avoir  faits  lui-même. 

Diccndi  palmam Victoria  tollit  amico, 
Transit  ad  Ambrosium  ;  plus  favet  ira  Dcœ. 

• 

'Paulin  auteur  delà  vie  de  S.  Ambroise  paroît  avoir  réuni  la  Amb.  vU.  n.  se. 
17*  et  la  18"  lelre  qu'il  compte  pour  un  excellent  écrit  con- 
tre Symmaque.  '  Il  y  a  eu  une  édition  particulière  de  celle-ci ,  nji"  Barb.  i.  i.  p. 
faite  à  Paris  l'an  1614  en  un  volume  m-8°.  'Elles  ont  été  im-  a.'.'.TPii.  p.  409.2. 
primées  l'une  et  l'autre  en  même  volume  avec  quelques-unes 
de  celles  de  Symmaque,  et  celles  du  Grand  Turc  mises  en  latin 
par  le  Chevalier  Laudin.  Cette  édition  parut  à  Basle  chez  Fro- 
ben  l'an  1549. 'Jaques  Tigeou  les  aiant  traduites  en  nôtre  langue     -ff.  pra-n.  cen. 
avec  quelques  autres  de  S.  Ambroise,  les  publia  avec  les  trois 
livres  des  Offices,  à  Paris  chez  Guillaume  Chaudière,  l'an  1588 
m-8°.  'On  en  trouve  une  autre  traduction  imprimée  à  Paris  ...Tpii.  p.  32.  1. 
chez  Camuzat  l'an  1646  en  un  volume  m-12,  dans  lequel  on  a 
joint  une  traduction  de  la  requête  de  Symmaque. 

'  La  20*  letre  de  S.  Ambroise  est  importante  pour  l'histoi-  Amb.  ep.  20.  n.  1. 
re.  Elle  est  adressée  à  sainte  Maroelline  sa  sœur,  dont  elle  fait  ^' 
connoître  le  vif  intérêt  qu'elle  prenoit  aux  affaires  de  l'Eglise, 
et  contient  une  relation  aussi  belle  que  touchante  de  ce  qui  se 

fiassa  à  Milan  en  385,  lorsque  Justine  Impératrice  Arienne  vou- 
ut  enlever  aux  Catholiques  la  basilique  neuve  et  la  Portien- 
ne  pour  les  livrer  à  ceux  de  sa  communion.  C'est  dans  cette 
letre  que  paroît  l'intrépidité  de  S.  Ambroise  dans  tout  son  lustre. 
On  y  découvre  un  cœur  tout  disposé  et  même  tout  brûlant 
d'ardeur  pour  le  martyre.  Cette  letre  est  une  de  celles  que  Ti- 
geou a  traduites  en  nôtre  langue ,  et  fait  imprimer  avec  les  Of- 
fices. 

'  La  31*  letre  est  proprement  une  requête  envoïée  à  l'Em-  op-  ai.  n.  i.  21. 
pereur,  qui  avoit  fait  citer  S.  Ambroise  par  Dalmace  Tribun 
et  Secrétaire  à  comparoître  devant  son  Conseil  avec  Auxence 
Evêque  Arien ,  et  les  Juges  qu'ils  auroient  choisis  de  part  et 
d'autre.  Il  s'agissoit  du  refus  de  livrer  les  basiliques.  S.  Ambroi- 
se y  expose  les  raisons  qu'il  avoit  de  décliner  ce  jugement,  di- 
sant entre  autres  choses  que  les  Evêques,  selon  la  maxime  des 
Empereurs  même ,  ne  pouvoient  être  jugés  que  par  d'autres 
Evêques. 


:W2      S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  siECLK.         "C'éloiten  380;  et  comme  le  peuple  qui  avoitapris  qu'on 

•  in  Aux  n  1  ~t7  *voit  cilé  SOI!  Evêque  devant  ri.mpcrcur ,  en  étoit  alarmé, 
S.  Ambroise  pour  le  rassurer  lui  fil  un  discours  patliétique  que 
l'on  a  mis  à  la  suite  de  la  requête  précédente,  il  est  intitulé, 
Sermon  contre  Auxence  touchant  laremise  des  liasiliqucs.  On 
voit  encore  ici  des  marques  éclatantes  et  de  la  vigueur  épiscopale 
de  S.  Ambroise,  et  de  son  atacliement  pour  le  troupeau  que 
Dieu  avoit  confié  à  st^s  soins.  Nous  avons  déjà  remarqué  que 
ce  discours  a  été  traduit  en  François  et  imprimé  avec  les  Offi- 
ces en  1588. 

ep.  *».  n.  I.  Al.  '  La  22''  letre  fut  écrite  la  même  année  ?83.  Elle  est  adres- 
sée à  sainte  Marcelliue,  et  contient  l'histoire  de  l'invention 
des  corps  des  Martyrs  S.  Gervais  et  S.  Protais,  et  une  partie  du 
discours  que  S.  Ambroise  prononça  en  cette  ocasion. 

•p-  ST  2*  'A cette  même  année  apartiennent  encore  les  deux  letres 

suivantes,  la  23'"  et  la2i'".  L'une  est  adressée  aux  Evêques  d'E- 
milie pour  régler  le  jour  de  Pàque  de  l'année  suivante  387,  et 
l'autre  à  l'Empereur  Valentinien  le  jeune,  pour  lui  rendre 
compte  de  sa  seconde  ambassade  à  Trêves  vers  Maxime.  Cel- 
le-ci est  particulièrement  importante  pour  l'histoire  de  ce 
tems-là. 

«p.  p.  9^».  909.  '  La  42*  est  préc(!dée  d'une  letre  du  Pap(!  Sirice  à  l'Eglise 
de  Milan,  et  en  est  la  réponse.  C'est  proprement  une  letre  sy- 
nodale d'un  concile  tenu  à  Milan  vers  389,  dans  lequel  on 
avoit  confirmé  la  condamnation  (jue  ce  Ponfife  avoil  déjà 
faite  de  Jovinien,  d'Au.\<'nce ,  et  de  divers  autres  héréU<iues 

ep.  i2.  n.  ^.  11.  nommés  dans  sa  letre.  'Comme  ils  ala(juoient  la  virginité  de 
la  sainte  Vierge,  qu'ils  blâmoient  la  virginité  en  général ,  sous 
prétexte  de  prendre. kl  défense  du  mariage,  et  qu'ils  cundam- 
noient  la  viduité  et  le  jeûne,  cette  letre  synodale  établit  tous 
les  points  de  la  foi  catlioliqu(î  contre  les  erreurs  oposées.  On 
•  lit  à  la  tète  les  noms  de  S.  Ambroise,  de  Sabin,  de  Bassien ,  et 
à  la  fin  ceux  de  sept  à  huit  autres  Evêques.  Entre  ceux-ci  se 
trouve  un  Theodose  et  un  Constance ,  deux  Evêques  Gau-  ' 
lois,  l'un  d'Octodure,  ou  Martignac,  et  l'autre  d'Orange.  On 
y  voit  aussi  un  prêtre  nommé  Aper,  qui  ysouscrit  par  ordre  de 
(icrminien  son  Evêque  préstmt  au  Concile.  Il  y  est  encore 
marqué  que  tous  les  Ordres  avoient  souscrit  ;  maisles  souscrip- 
tions n'y  sont  pas  raportées. 

ep.  56.  n.  1.7.  '  S.  Ambroisc  adresse  la  56"  à  Théophile  d'Alexandrie.  Elle 
regarde  le  différent  entre  Evagre  et  Flavien  d'Antioche  que 


DOCTEUK  m  VEGIASE  ET  CONFESSEUR.     383 

le  Concile  de  Capouë  renvoïoil  à  la  décision  de  Théophile  et  iv  siècle. 
des  autres  Evêques  d'Egypte.  S.  Ambroise  promet  d'acquies- 
cer  à  cette  décision  ,  pourvu  qu'elle  ne  blesse  ni  la  paix  ,  ni  la 
communion  qui  est  entre  les  Evêques,  et  qu'elle  soit  du  goût 
de  l'Eglise  de  Rome,  à  qui  il  avertit  de  la  communiquer.  On 
met  cett(;  letre  en  392. 

'  A  l'ocasion  du  Concile  de  Capouë  dont  il  y  est  parlé,  on  i'-  'o"»-  '*'<»>• 
l'a  acompagnée  d'une  autre  letre  qui  paroît  être  du  Pape  Si- 
rice ,  touchant  les  erreurs  et  les  écrits  de  l'Evêque  Bonose , 
qui  prélendoit  que  la  sainte  Vierge  après  avoir  enfanté  J.  C. 
avoit  eu  encore  d'autres  enfans.  L'Auteur  est  d'avis  que  l'on 
suive  le  règlement  du  Concile  de  Capouë  qui  avoit  commis 
cette  afTaire  au  jugement  des  Evêques  de  Macédoine.  Il  y  est 
parlé  de  S.  Ambroise  comme  aïanl  été  conseillé  de  s'en  tenir 
à  ce  jugement.  On  remarque  que  cetle  letre  est  effectivement  ^«i»"  >''  v  «^i 
du  Pape  Sirice,  sous  le  nom  duquel  M.  llolstenius  l'a  donnée 
au  public.  Aussi  les  derniers  éditeurs  de  S.  Ambroise  l'ont-ils 
mise  en  un  caractère  didVrent  de  celui  des  autres  letres  de  ce 
Père,  poui-  montrer  qu'ils  ne  la  croient  pas  de  lui. 

'  La  58''  est  adressée  à  l'iwêque  Sabin,  (^l  fut  écrite  en  393.  *!"''•  «i'-  ^-  "•  '• 
Elle  contient  l'éloge  de  saint  Paulin  depuis  Evêque  de  Noie, 
et  de  Tlierasie  sa  femme,  et  l'apologie^  de  leur  conduite  con- 
tre les  Grands  du  siècle,  qui  ne  pouvoient  souffrir  l'action  hé- 
roïque qu'il  venoient  de  fain;  en  distribuant  leurs  grands  biens 
aux  pauvres,  pour  vivre  dans  la  pauvreté  volontaire  et  la  re- 
liaite. 

'  On  croit  que  la  63'"  apartienl  à  l'an  396.  C'est  la  dernière  «v-  63.  n.  i.  m. 
de  la  première  classe,  et  la  plus  longue  de  toutes  celles  de 
S.  Amoroise.  Elle  est  adressée  à  l'Eglist^  de  Verceil .  pour  tâ- 
cher d'y  faire  cesser  la  division  qui  la  privoit  d'un  Evêque  de- 
puis long-tems.  On  trouve  dans  celle  letre  une  infinité  d'ex- 
cellentes instructions,  et  sur  les  qualités  que  doit  avoir  un  Evê- 
que pour  gouverner  une  Eglise,  et  sur  la  pratique  des 
principales  vertus  Chrétiennes.'  Comme  il  y  avoit  alors  à  Ver-  «  7.  4o 
ceil  deux  Moin(;s  apostats  Sarmation  et  Barbatien  ,  qui  prê- 
choienl  contre  le  jeûne  et  la  mortification  en  général,  et  s'ef- 
forçoient  de  persuader  que  ni  rabslinence,  ni  la  virginité  n'é- 
loient  d'aucun  mérite ,  S.  Ambroi.se  emploie  une  bonne  par- 
tie de  cette  letre  à  réfuter  ces  erreurs  grossières,  et  à  relever  le 
mérite  de  ces  saintes  pratiques. 

34°  'A  la  fin  du  second  volume  des  Oeuvres  de  S.  Am-  Hym.    p.   i*ij>. 


384  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE,     broise,  on  nous  a  donné  quelques-unes  de  ses  hymnes.  *I1  est 

— ; 7ZT  constant  qu'il  en  avoit  composé  plusieurs.  C'est  ce  qui  paroît 

1217.  par  quelques  endroits  de  se  s  autres  écrits,  et  par  les  autorités 

de  Paulin  auteur  de  sa  vie,  de  S.  Augustin  ,  de  Gassiodore ,  et 

de  plusieurs  autres  Ecrivains  de  l'antiquité.  Il  passe  même  pour 

le  second,  après  S.  Hilaire  de  Poitiers,  qui  entre  les  Latins 

FaM.si.a(if,T.p.553.  s'cst  distingué  par  cette  sorte  de  poésie.  'Fauste  de  Riez  dans 

2. 53é.  i.  yjj  ouvrage  fait  avant  l'an  449,  témoigne  qu'il  se  chantoit  des 

hymnes  de  ce  Père  dans  toutes  les  Eglises  d'Italie  et  des  Gau- 

Pr.,s.T.ciir.p.2n.  Ics,  '  et  Prospcr  Tiro  observe  qu'elles  furent  les  premières  que 

l'Eglise  Latine  emploïa  dans  son  chant, 
ajm.  ib  I  syii.  i)oë.      '  G'ost  sur  cc  principe  que  l'on  en  a  fait  imprimer  en  divers 
'^'"^  tems  un  grand  nombre  sous  le  nom  du  saint  Evêque.  Mais  il 

est  très-difficile  de  discerner  celles  qui  sont  véritablement  de 
lui,  de  celles  qui  apartiennent  à  d'autres  auteurs.  Gillot  lui  en 
a  attribué  seize  qui  se  trouvent  à  la  fin  de  l'édition  qu'il  a  don- 
née des  Ouvrages  de  ce  Père.  Les  éditions  de  Rome  y  en  ont 
ajouté  dix-huit  autres,  et  les  éditions  suivantes  de  Paris  encore 
davantage  :  tout  cela  sans  nul  solide  fondement.  D'autres  Ecri- 
vains de  ces  derniers  siècles  ne  sont  pas  moins  partagés  sur  ce 
sujet  sans  en  avoir  plus  de  raison. 
Amb.  ib.  '  Enfin  les  derniers  Editeurs  de  S.  Ambroise  après  avoir 

mûrement  examiné  ce  point  de  critique,  ont  réduit  toutes  ces 
hymnes  au  nombre  de  douze,  qui  sont  incontestablement  de  ce 
Père  ,  comme  citées  de  lui ,  au  moins  en  partie,  par  les  anciens 
qui  en  ont  parlé.  Ils  ne  nient  pas  toutefois  qu'il  ne  puisse  y  en 
avoir  d'autres  qui  apartiennent  h  nôtre  Saint ,  même  entre  cel- 
les que  l'Eglise  emploie  dans  ses  Heures  canoniales.  Mais  il  est 
presque  impossible  de  les  marquer  précisément. 

Quant  au  célèbre  cantique  Te  Deum  laiidamus,  que  quel- 
ques-uns atribuent  à  S.  Ambroise,  nous  avons  déjà  remarqué 
qu'il  est  aussi  atribué  à  divers  autres  anciens  Pères.  De  sorte 
que  l'on  ne  sauroit  dire  au  juste  à  qui  il  apartient  à  l'exclusion 
de  tous  les  autres. 

35°.  S.  Ambroise  travailla  aussi  sur  lesPseaumes.Nous  avons 
de  lui  deux  differens  Ouvrages  sur  ce  sujet  que  nous  rapor- 
tons  ici  les  derniers  ,  parce  que  l'un  fut  effectivement  le 
dernier  auquel  le  saint  Evêque  mit  la  main  et  que  nous  n'en 
avons  pas  voulu  séparer  l'autre,  comme  étant  sur  la  même  ma- 
tière, 
in  Ps.  737.  908.        '  L'utt  de  ces  deux  Ouvrages  est  intitulé,  Eccplicatioîis  sur 

douze 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     385 

douze pseaumes  de  David,  c'est-à-dire,  sur  le  premier,  le  SK*"  iv  siècle. 
avec  les  cinq  suivans,  et  les  43,  45,  47,  48,  Gl.  '  Outre  le  .^^J^T'^j^  ' 
commentaire  sur  le  Pseaume  118,  dont  nous  parlerons  dans 
la  suite.  S,  Ambroisc  expliqua  encore  plusieurs  autres  Pseau- 
mes.  Mais  comme  il  ne  le  fit  que  par  ocasion,  et  à  mesure 
.  que  les  sujets  qu'il  traitoit  dans  ses  Ouvrages,  où  ces  explica- 
tions se  trouvent  insérées,  le  demandoient,  il  ne  s'agit  pas  ici 
de  cette  sorte  d'explication  intercalée.  Il  n'est  question  que  de 
celles  qui  forment  le  recueil  sur  les  douze  Pseaumes  que  nous 
avons  nommés. 

'  Elles  furent  faites  en  divers  tems,  et  prêchées  au  peuple  ibu. 
en  diverses  ocasions,  comme  il  paroît  par  plusieurs  endroits. 
On  juge  que  l'explication  du  premier  Pseaume,  et  celles  des 
quatres  derniers,  c'est-à-dire,  des  45,  47,  48  et  61 ,  sont  faites 
vers  l'an  390,  et  que  celle  du  35  et  des  cinq  suivans  '  n'ont  p-  "5. 
point  précédé  le  13*  jour  de  Septembre  393.  '  Pour  ce  qui  est  vit.  n.  «. 
de  l'explication  du  43*  Pseaume,  ce  fut  la  dernière  à  laquelle 
S.  Amoroise  travailla.  Il  la  dictoit  au  diacre  Paulin  son  Se- 
crétaire les  derniers  jours  de  la  maladie  dont  il  mourut;  et  il 
ne  put  même  la  finir.  '  On  voit  par-là  que  l'ordre  que  tiennent  in.Ps.  adm.  p. 734. 
ces  explications,  et  dans  les  manuscrits  et  dans  les  imprimés, 
n'est  point  de  S.  Ambroise,  puisqu'elles  y  sont  de  suite  selon 
l'ordre  du  Pseautier. 

'  La  préface  du  Saint  sur  ces  explications,  et  la  promesse  ibia. 
qu'il  fait  sur  le  Pseaume  36*  d'expliquer  le  57*,  ont  donné  à 
plusieurs  ocasion  de  croire  que  le  dessein  de  S.  Ambroise  étoit 
d'expliquer  de  la  sorte  tous  les  Pseaumes.  Mais  d'autres  remar- 
quent avec  plus  de  fondement,  que  cette  préface  n'est  qu'une 
imitation  de  celle  de  S.  Basile,  qui  n'avoit  point  entrepris  ce 
travail,  et  qu'elle  est  formée  d'un  discours  fait  au  peuple  sur 
l'éloge  des  Pseaumes  en  général,  sans  promesse  de  les  expli- 

3uertous.  'Un  Prêtre  Allemand  qui  vivoit  au  commencement  Mat. mus. it. p.  oc. 
u  onzième  siècle,  assure  avoir  trouvé  à  Vérone  l'explication  ^'^  *•*■ 
de  S.  Ambroise  sur  le  Pseaume  15*  où  il  étoit  traité  de  la  mort 
de  Gratien,  et  l'avoir  envoïée  à  Milan.  '  De  même  l'anonyme  An.  meii.  ?.n\.  11. 
de  Molk,  Auteur  du  siècle  suivant,  dans  le  catalogue  des  écrits 
de  S.  Ambroise,  marque  l'explication  du  Pseaume,  Domine 
guis  habitabit  etc.  qui  est  le  14*.  Par  où  l'on  voit  que  nous  n'a- 
vons pas  tout  ce  que  ce  Père  a  écrit  sur  les  Pseaumes.  Mais  ce 
n'est  pas  à  dire  qu'il  les  eût  tous  expliqués,  ni  même  entrepris 
de  le  faire.  '  Cassiodore  qui  ne  vivoit  que  deux  siècles  apI•^s  lui,  casd.ib.c.^.p.Mi. 

Tome  I.  Sec.  Part.  C  c  c 


386  S.  AMBROISE ,  EVEQUE  DE  MILAN, 


IV    SIECLE. 


parlant  de  son  travail  sur  les  Pseaumes,  dit  expressément  qu'il 
n'en  avoit  commenfé  que  quelques-uns. 

Amb.in.Ps.pr.n.7.  Rien  u'cst  plus  pompeux  que  l'éloge  que  S.  Ambroise  fait 
du  Psoautier  dans  sa  préface.  On  y  trouve  tout  ensemble,  dit- 
il,  l'histoire  qui  apreiuî  les  choses  passées,  la  prophétie  qui  an- 
nonce les  futurns,  la  loi  qui  marqi:e  le  devoir,  des  corrections 
qui  répriment  le  vice,  des  moralités  qui  inspirent  l'amour  de 
la  vertu.  Il  y  a  à  profiter  pour  tout  le  monde.  Tout  le  monde 
y  peut  puiser  des  moiens  de  salul,  et  des  remèdes  propres  à 

n.  H.  guérir  ses  passions.  '  C'est  là  que  sont  annoncés  tous  les  mys- 

n-  9.  teres  de  J.  C.  '  Il  n'est  point  d'Auteur  qui  n'ait  fait  passer  dans 

ses  écrits  quelque  chose  des  Pseaumes.  Ils  .sont  pour  Dieu  une 
source  de  louanges,  comme  il  sont  pour  le  peu[)le  une  source 
de  bénédiction.  Il  sont  la  voix  de  l'Eglise,  et  une  profession 
éclatante  de  sa  foi.  Ceux  qui  sont  dans  la  tristesse  y  trouvent 
des  sujets  de  joie,  et  ceux  qui  sont  dans  lajoie  de  quoi  l'en- 
tretenir. 

En  expliquant  les  Pseaumes,  il  le  fait  quelquefois  en  suivant 
le  sens  literal  ;  mais  il  s'atache  plus  souvent  au  sens  mystique, 
d'où  il  tire  toujours  d'excellentes  instructions  pour  les  mœurs. 

inPs.  36.  pr.  n.  2.  '  U  moutrc  que  les  Pseaumes  présentent  eux-mêmes  ce  triple 
sens,  et  qu'ils  fournisent  encore  plus  de  choses  pour  le  sens 
moral  que  pour  les  autres. 

inPs..T?.  pr.  n.ii.  '  L'cxpositiou  sur  le  Pseaume  37"  avec  la  belle  préface  qui 
est  à  la  tête,  peut  passer  pour  un  troisième  traité  sur  la  Péni- 
tence. C'est  S.  Ambroise  qui  nous  en  donne  lui-même  cette 
idée.  «  11  y  a  déjà  du  tems,  dit-il,  que  j'ai  composé  deux  trai- 
te tés  sur  la  Pénitence;  et  je  crois  devoir  encore  traiter  ce;  sujet. 
«  Premièrement,  parce  qu'il  est  important  de  demander  fous  les 
«  jours  pardon  de  ses  péchés,  et  que  d'ailleurs  mes  deux  pre- 
«  miers  traités  ne  sont  proprement  qu'une  exhortation  à  la  pé- 
«  nitence.  C'est  déjàqutlqu(!  chose  si  l'on  se  porte  à  l'embrasser. 
«  Mais  ici  je  m'en  vais  expliquer  comment  il  le  faut  faire.  Car^ 
«  il  ne  sert  de  rien  de  faire  pénitence,  si  on  ne  le  fait  comme  il 
«  faut  :  Nihil  prodest  agere,  nisi  ita  cujatur  ut  oportct.  Nous 
«  avons  un  excellent  modèle  de  celte  pratique  dans  le  saint  Roi 
«David,  qui  me  semble  n'être  tombé  dans  le  péché  que  pour 
«  aprendre  aux  autres  le  secret  pour  pouvoir  l'effacer.  »  Voilà 
le  plan  que  se  forme  S.  Ambroise  dans  l'explication  de  ce 
Pseaume  :  la  pénitence  de  David. 

Après  avoir  donné  un  modèle  de  pénitence  dans  le  Pseau- 


in.  Ps.  38.  n.  1. 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE,  ET  CONFESS.   387 

me  37%  il  se  prépose  de  nous  tracer  dans  le  suivant  un  mode-     i  v  s  i  k  c  l  e. 
li;  de  patience.'  Il  dit  sur  ce  Pseaume  plusieurs  belles  choses  ,""^7^^ 
touchant  le  silence,  '  la  circonspection  à  parler  et  l'amour  des  ,1.9.  n. 
ennemis.  '  11  y  ataqce  ouvertenionl  les  NoValiens  qui  ne  re^  "•  37. 38. 
connoissoient  ni  péniiencc,  ni  rémission  de  péchés,  et  insiste 
pai'ticulierement  sur  celle-ci. 

S.  Ambroise  explique  particulièrement  de  J.  C.  et  de  ses 
mystères,  les  Pseaumes  39,  40,  43,  et  45.'  Il  paroît  par  divers  ■;>  l's.  *o.  n.  *.  ;«>. 
endroits  du  commentaire  sur  le  Pseaume  40'",  que  ce  Père  pour 
mi(!ux  entrer  dans  le  sens  dos  Pseaumes  avoit  recours  aux  dif- 
férentes versions,  à  celles  de  Theodotion,  de  Symmaque  et 
d'Aquila.  Pour  la  version  des  Septante  ,  c'est  celle  qu'il  suit 
dans  ses  explications.  Sur  le  40"  Pseaume  '  il  observe  que  la  '"''s-  *5.  n.  ^ji. 
paix  profonde  dont  jouit  l'Empire  Romain  sous  Auguste,  lui 
fut  acordée  à  dessein  que  les  Apôtres  pussent  aller  siuis  ob- 
stacle prêcher  la  foi  part.iut  le  monde.  De-là  il  arri\aoncore 
que  tous  les  hommes  vivans  .sous  une  seule  domination  , 
aprirenl  à  reconnoîlre  et  à  se  soumettre  avec  fidélité  à  l'Empire 
du  seul  Dieu  tout-puissant.  Ici  S.  Ambroise  marque  que  de 
son  tems  on  croïoil  que  S.  Thomas  avoit  prêché  dans  les  Indes 
et  S.  Matthieu  en  Perse. 

'S.  Jérôme  en  divers  endroits  assure  que  presque  tous  les  Him.  op. 'i4.|..(M7. 
Ouvrages  de  S.  Ambroise,  et  principalement  ses  commentai-    '  L'a' wi.''  ^'' 
r(!s  sur  les  Pseaumes  sont  pleins  des  sentimens  d'Origene. 
'  C'est  ce  dont  les  derniers  Editeurs  de  S.  Ambroise  ne  discon-  aihL.  ib.  aiim.  p. 
viennent  pas,  sur  tout  par  raport  aux  expositions  sur  les  Ps(  au- 
mes  3G,  37  et  38.  Ils  avouent  même  qu'en  quelques  endroits 
il  ne  s'est  pas  assez  éloigné  des  .sentirat^ns  de  cet  ancien  Père 
Grec,  et  en  particulier  touchant  la  ré.surrection  et  la  purifica- 
tion des  Elus  parle  feu.  '  Us  marquent  ailleurs  un  de  ces  en-  inPs.  i.h.m.  noi. 
droits  où  nôtre  Saint  pourroit  paroîlre  favoriser  l'erreur  des  •'  ™'^' 
Millénaires  en  admettant  deux  résurrections. 

'C'est  dans  son  explication  sur  le  premier  Pseaume,  où  ibi.i.ii. .%«. 
après  avoir  aporté  le  texte  de  S.  Jean  pris  du  29*  verset  du  5* 
chapitre  de  son  Evangile,  dans  lequel  il  est  parlé  de  deux  sor- 
tes de  résurrections,  et  le  6«  verset  du  20'"  chapitre  de  son 
Apocalypse,  Heureux  celui  qui  aura  part  à  la  première  résur- 
rection. «  Ceux-ci,  dit-il,  parviennent  à  la  grâce  sans  subir  le 
M  jugement.  Mais  pour  ceu.v  qui  n'arrivent  point  à  la  pvena'ere 
«  résurrection, etquisontréscrvés pour  la  seconde, ils  brûleront 
«c  jusqu'à  ce  qu'ils  acomplissent  les  tems  marqués  entre  la  pre- 

Cc  c  ii 


388  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE.     «  miere  et  la  seconde  résurrection  :  ou  s'ils  ne  l'acomplissent 
_         ^^  p^g^  ils  seront  plus  long-temps  tourmentés. 

Voilà  ce  semble,  dit-on ,  deux  résurrections  clairement 
marquées.  Mais  c'est  assurément  dans  un  sens  bien  oposé  à  ce- 
lui des  Millénaires;  et  il  est  surprenant  que  l'on  ait  si  aisément 
abandonné  S.  Ambroise  sur  ce  point  de  doctrine.  Nous  avons 
déjà  montré  ailleurs  en  éclaircissant  une  difficulté  à  peu  près 
semblable,  que  ce  Père  avoit  été  fort  éloigné  de  donner  dans 
l'erreur  dont  on  le  soupçonne  ici.  Ce  que  nous  avons  déjà  dit 
en  cet  endroit,  pourroit  suffire  pour  le  justifier  de  ce  soupçon. 
Mais  il  ne  sera  pas  inutile  d'y  donner  encore  un  plus  grand 
éclaircissement.  Nous  le  tirerons  de  l'écrit  même  où  l'on  trou- 
ve la  difficulté. 

Il  n'y  a  qu'à  lire  avec  quelque  atention  celte  exposition 
même  sur  le  premier  Pseaume,  pour  se  convaincre  que  saint 
Ambroise  n'entend  par  la  première  résurrection  que  la  résur- 
rection qui  se  fait  dès  cette  vie-ci  à  la  grâce,  et  par  l'autre 
résurrection  celle  qui  se  fera  de  tous  les  hommes  au  dernier 
n  5*.  55.  jour.  '  La  première  résurrection  se  fait,  dit-il,  lorsque  dès  ce 

monde,  hic  positif  nous  sortons  du  tombeau  des  vices  qui  re- 
tiennent ensevelis  et  comme  morts  ceux  qui  y  sont  sujets. 
Lorsque  bien-loin  d'être  des  ossemens  secs  et  arides,  nous 
montrons  que  nous  avons  reçu  la  rosée  de  la  grâce  du  Fils  de 
Dieu,  et  l'onction  du  Saint  Esprit.  Lorsque  J.  C.  par  une  voix 
puissante  nous  apelle  comme  il  apella  Lazare,  et  que  nous 
aïant  délivrés  des  liens  de  la  mort  par  le  ministère  de  ses  dis- 
ciples, il  nous  introduit  dans  Bethanie,  c'est-à-dire  dans  la 
maison  d'obéissance, 
.lo  rcs.  n.  63.  '  Pour  cc  qui  cst  de  la  seconde  résurrection,  elle  se  fera  à  la 

n.  93.  fin  du  monde.  '  Alors  comme  nous  sommes  tous  venus  au  mon- 

de par  voie  de  naissance,  nous  aurons  aussi  tous  part  à  cette 
in  l's.  1.  n.  34.  résurrcction .  '  Mais  il  y  aura  cette  différence,  que  ceux  qui 
n.  56.  auront  mérité  de  participer  à  la  première,  '  c'est-à-dire,  qui 

auront  eu  une  foi  pure,  et  auront  vécu  conformément  à  leur 
foi,  résuscileront  dans  l'assemblée  des  Justes,  sans  subir  de  ju- 
gement. Les  pécheurs  qui  seront  morts  dans  la  grâce  de  Dieu, 
mais  sans  avoir  satisfait  à  sa  jusfice,  ressusciteront  non  dans 
l'assemblée  des  Justes,  mais  pour  être  jugés.  Quant  aux  im- 
pies, ils  ne  ressusciteront  ni  dans  l'assemblée  des  Justes,  ni  pour 
être  jugés,  parce  qu'ils  le  seront  déjà,  pour  n'avoir  pas  crû 
en  celui  qui  justifie  l'impie.  Seulement  ils  ressusciteront  pour 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.        389 

porter  la  peine  que  mérite  leur  impieté.  iv  siècle. 

C'est  ainsi  que  S.  Ambroise  explique  lui-même  sa  pensée 
louchant  ces  deux  résurrections.  Il  le  fait,  comme  on  le  voit 
bien  clairement,  d'une  manière  fort  éloignée  de  celle  des  Mil- 
lénaires. 'Ticon  Donatiste  dans  son  commentaire  sur  l'Apo-  Ccnn.  vitiii.c.iR. 
calypse,  où  il  entreprend  de  combatre  l'erreur  des  Millénai- 
res, ne  laisse  pas  d'admetre  les  deux  mêmes  résurrections,  et 
presque  dans  les  mêmes  termes  que  S.  Ambroise.  En  effet  il 
en  distingue  "une  qui  se  fait  dès  cette  vie-ci  par  la  grâce  du 
Baptême,  et  une  autre  générale  qui  se  fera  à  la  fin  du  monde. 

'Il  semble  même  que  S.  Ambroise  dans  un  autre  endroit  Amb.  deres.n.ca. 
ait  pris  à  tâche  de  contredire  l'opinion  erronée  sur  les  deux 
résurrections,  que  l'on  voudroit  lui  prêter.  Voici  de  quelle  ma- 
nière il  s'en  explique  dans  un  écrit  où  il  traite  expressément 
de  la  résurrection.  «  C'est  avec  raison,  dit-il,  que  la  résurrec- 
«  tion  des  morts  est  remise  à  la  fin  du  monde,  afin  qu'il  ne  nous 
«  faille  plus  revenir  dans  ce  siècle  malheureux.  C'est  pour  cela 
«  même  que  J.  C.  a  souffert  pour  nous  en  délivrer  afin  de  ne 
«  nous  pas  voir  une  seconde  fois  gémir  sous  le  poids  des  tenta- 
«  tions  de  cette  vie,  et  qu'il  ne  fût  nuisible  d'y  revenir,  si  nous 
«  y  revenions  pour  pécher.  » 

Il  seroit  inutile  de  dire  pour  soutenir  la  fausse  imputation 
que  l'on  fait  à  S.  Ambroise,  '  que  ce  Père  dans  le  même  Ou-  n.  so. 
vrage  emploie  l'expression  de  la  millième  année.  Il  ne  s'en  sert 
en  effet  que  dans  le  sens  '  que  s'en  est  servi  depuis  S.  Augus-  Aug.  civ.  i.  20.  c.  7. 
tin,  pour  exprimer  la  plénitude  des  tems  par  un  nombre  par- 
fait.   C'est  ainsi  à  peu  près  que  l'exprime  S.  Ambroise  même  Amb.  ibid.  n.  es. 
en  se  servant  dans  le  même  écrit  du  terme  d'année  lorsqu'il 
dit  :  Mundi  tempora  annus  unus  est.  ■ 

36°.'  Enfin  l'autre  Ouvrage  de  S.  Ambroise  sur  les  Pseaumes,  in  Ps.  hs.  p.  ioti. 
et  le  dernier  de  ceux  que  nous  avons  de  lui,  dont  il  nous  reste  '^^' 
à  parler,  est  un  commentaire  sur  le  Pseautne  118.  Il  est  parta- 
gé en  vingt-deux  sermons,  suivant  le  nombre  des  letres  hébraï- 
ques, qui  divisent  le  Pseaume  en  autant  de  sections.  S.  Am- 
broise commence  chaque  sermon  par  expliquer  la  letre  alphabé- 
tique qui  est  à  la  tête  de  chaque  section  du  Pseaume.  Après 
avoir  marqué  le  sens  qu'elle  présente  selon  l'interprétation  qu'il 
lui  donne,  il  en  prend  ordinairement  ocasion  d'entrer  en  matiè- 
re. '  Les  22  sermons  qui  composent  ce  commentaire  furent  pro-  adm.  p.  oeo. 
nonces  devant  le  peuple  de  Milan  en  diverses  rencontres  et  à 
divers  jours,  soit  de  jeûnes  ou  de  fêtes  de  Saints.  Il  y  est  fait 


390  S.  AMBHOISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE,  mention  de  celles  desmartyrsS.  Sebastien,  S.  Gervais,  S.  Vvo- 
lais,  quiselon  toute  aparence,  se  célébroienl  dès-lors,  comme  en- 
core à  présent,  l'une  au  20*  de  Janvier,  et  l'autre  au  1 9"  de  Juin. 
Il  semble  que  S.  Ambroise  y  marque  aussi  quelques  circonstan- 
ces qui  drsignent  la  persécution  que  lui  fit  l'Impératrice  Jus- 
tine en  385  et  38G.  Cette  époque  jointe  à  la  citation  de  ce 
commentaire  dans  le  iraité  sur  Isaacetsurl'ame  composé  en 
387,  fait  croire  que  S.  Ambroise  le  finit  l'année  précédente 
386,  ou  peut-être  seulement  les  premiers  mois  de  l'an  387, 

Tiii.  ibid  p.  769.  aprés  la  fête  do  S.  Sebastien.  '  Toutefois  M.  de  Tillemont  ne 
le  place  qr.e  deux  ans  après  au  plutôt,  en389  :  ce  que  l'on  ne 
peut  acord(ir  avec  la  date  du  traité  sur  Isuac,  où  ce  commen- 
taire se  trouve  cité. 

!..  «s.  '  Quoiqu'il  en  soit,  il  passe  pour  l'ouvrage  le  plus  beau  et 

le  plus  édifiant  de  tous  ceux  de  S.  Ambroise.  Les  hérétiques 
mêmes  en  parlent  avec  beaucoup  d'ostimo,  et  des  Catholi- 
ques très-habiles  jugent  que  S.  Ambroise  est  celui  de  tous  les 
Pères  qui  a  le  mieux  réussi  sur  un  sujet  si  difficile.  On  remar- 
que qu'il  fut  plus  de  sept  mois  sur  ce  grand  ouvrage. 

Ami.,  ib.  '  S.  Ambroise  y  explique  une  grande  partie  du  Cantique  des 

Cantiques,  et  fait  à  l'Eglise  l'aplication  des  mystères  qu'il  con- 
tient. On  y  trouve  aussi  plusieurs  points  importans  de  doctri- 

sciiii.  8  11.  48.  ne  sur  le  dogme  et  la  discipline.  Il  a  eu  .soin  d'y  établir  en 
plu.sieurs  endroits  ce  qu'il  pensoit  de  l'Eucharistie,  et  ce  qu'il 
vouloit  (|ues(;s  auditeurs  en  p(!nsassent  eux-mêmes.  C'est  se- 
lon lui  un  festin  céleste  où  l'on  reçoit  le  corps  de  J.  C.  qui  de- 
vient pour  ceux  qui  le  reçoivint  une  .source  abondante  de  gra- 

sei.  i.'i  11.  as.  CCS  pour  cette  vie-ci  et  pour  l'autre;.  '  C'est  un  breuvage  où  le 
désir  des  Fideks,  en  y  trouvant  la  remission  des  péchés,  trouve 
aussi  une  yvre-sse  qui  leur  fait  oublier  les  soins  du  siècle  pré- 
sent, et  les  m(!t  au-de.sus  de  la  crainte  et  di.'s  in(]uiétudes  de 
la  mort  :  une  yvresse  qui  bien  loin  de  faire  chancelier  le  corps, 
le  relevé,  et  lui  donne  la  vie,  et  bien  loin  de  troubler  l'esprit, 

Sor,  iK.  II.  38.  lui  communique  la  sainteté.  '  C'est  ce  pain  dont  il  est  écrit  : 
7'oi/s  cevx  qui  s  éloùfncid  de  vous,  périront.  Si  vous  vous  en 
éluigiiez,  vous  périrez.  Si  au  conlruire  vous  vous  en  aprochez, 
V(*i  s  vivrez.  C'est  le  pain  dévie,  celui  donc  qui  mange  la 
vie,  ne  peut  mourir. 

M  )  auroil  milh  autres  belles  remarques  à  faire  sur  ce  com- 
iiieiitairc,  pai-  rapoil  aux  points  de  doctrine  que  nous  avons 
nommés,  mais  nous  sortirions  des  bornes  que  nous  nous  som- 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  Et  CONFESS.         391 

mes  prescrites.  On  peut  consulter  les  endroits  cités  à  la  mar-  iv  siècle. 
ge,  ony  trouvera  plusieurs  pai  licularités  touchant  la  Com- 
munion,  le  Jeûne,  les  prières  de  l'Eglise,  etc.  qui  méritent 
de  n'être  prs  ignorées.  Il  y  a  encore  de  beaux  endroits  sur  la 
trop  grande  facilité  à  reconcilier  les  pécheurs,  sur  le  retarde- 
ment à  recourir  à  la  pénitence.  Pour  la  morale,  le  commen- 
taire n'en  est  presque  qu'un  tissu  continuel.  Dans  chaque  ser- 
mon S.  Ambroise  fait  entrer  huit  versets  du  Pseaume,  et  de 
chaque  verset  il  sait  tirer  diverses  moraliif  s  aussi  ingénieuses 
qu'édifiantes,  soit  pour  censurer  le  vice,  ou  pour  inspirer  l'a- 
mour de  la  vertu.  Il  y  a  eu  une  édition  particulière  de  ce  ^^-  Angei. 
commentaire  faite  à  Rome  en  1585.  C'est  particulièrement 
de  cet  Ouvrage,  que  (îuillaume  Abbé  de  S.  Thierry  a  tiré 
son  explication,  ou  commentaire  sur  le  Cantique  des  Canti- 
ques, imprimé  à  la  fin  du  premier  volume  des  œuvres  de  saint  . 
Ambroise . 

37°.  Avant  que  de  finir  ce  qui  regarde  les  écrits  qui  nous 
restent  de  S .  Ambroise,  il  est  à  propos  d'avertir  '  qu'on  trouve  ^^-  pp-  s-  p-  9"- 
sous  son  nom  à  la  fin  du  8"  tome  de  la  Bibliothèque  des  Pè- 
res, dernière  édition  de  Paris,  plusieurs  distiques  en  vers  he- 
xamètres sur  les  diverses  peintures  ou  représentations  de  l'an- 
ci(!n  et  du  nouveau  Testament  dont  on  avoit  orné  l'Eglise  de 
Milan.  Quoique  personne  n'ait  inséré  ces  vers  dans  le  recueil 
des  écrits  du  saint  Docteur  ils  ne  paroissent  pas  cependant 
indignes  de  lui,  et  peuvent  être  effettivement  une  production 
de  sa  Muse  Chrétienne.  Il  faut  porter  le  même  jugement  '  d'une  Enn-^car.  1. 1  noi. 
inscription  en  vers  élégiaques  (jui  porte  aussi  son  nom  dans 
quelques  monumens  ecclésiastiques,  et  que  le  Père  Sirmond 
a  insérée  dans  ses  nott^  sur  les  poésies  de  S.  Ennode.  Cette 
inscription  qui  contient  dix  vers,  est  pour  conserver  à  la  pos- 
térité la  mémoire  de  la  translation  que  S.  Ambroise  fit  des 
Reliques  de  S .  Nazaire  dans  la  basilique  des  Apôtres . 

S-  ni. 

SES  ECRITS  PERDUS. 

Non-seulement  il  s'est  perdu  plusieurs  letres  de  S.  Ambroi- 
se, et  quelques-unes  de  ses  explications  sur  les  Pseaumes,  nom- 
mément sur  le  14'  et  le  15%  comme  nous  l'avons  observé, 
mais  nous  n'avons  plus  aussi  beaucoup  de  ses  autres  Ouvra- 
ges.  On  jugera  dt;  la  grandeur  de  cette  perte  par  ce  que  nous 


392  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIÈCLE,     allons  dire  de  ces  écrits,  et  par  les  titres  que  nous  en  allons 

■  raporter. 

Amii.domys.n.i.  •    'S.   Ambroisc  témoigne  lui-môme  avoir  expliqué  les  pro- 
verbes pour  instruire  les  Calécumenos  de  la  morale  Chrétien- 
ne, et  les  préparer  au  Baptême.  Cependant  nous  n'avons  point 
c.  2.  pr.  p.  6.      ce  commentaire.  '  Il  est  vrai  qu'il  a  pu  se  faire,  comme  l'ob- 
servent les  derniers  Editeurs  de  ce  Père,  que  ces  explications 
n'auront  pas  été  rédigées  par  écrit,  et  que  S.  Ambroise  se  sera 
contenté  de  les  faire  de  vive  voix.  Mais  il.y  a  encore  plus  d'a- 
parence  qu'il  en  usa  au  sujet  de  ces  explications,  comme  il 
en  usoit  au  sujet  de  celles  qu'il  faisoit  sur  les  autres  livres  de 
l'Ecriture,  et  dont  il  avoit  soin  de  composer  des  traités. 
Casd.  insi.  c.  2.  p.       2°.  '  Il  Semble  que  nous  avons  aussi  perdu  un  sermon  sur  le 
^***""'  jugement  des  deux  femmes  publiques  rendu  par  Saloraon. 

Cassiodore  marque  cet  écrit  entre  ceux  qui  composoient  sa 
Triiu.scri.  ceci.  c.  Bibliothcquiî  j  '  et  c'est  peut-être  le  même  que  Trithême  fait 
*"■  entrer  dans  le  catalogue  des  Ouvrages  de  S.  Ambroise  sous 

Amb.  ib.  ce  titre  :  De  judiciis.  '  Néanmoins  les  derniers  Editeurs  de  ce 

Père  croient  que  ce  peut  être  une  Homélie  sur  le  même  su- 
jet qui  aura  été  jointe  au  livre  de  la  Virginité,  dont  elle  fait 
le  commencement,  et  auquel  elle  ne  paroît  pas  convenir, 
casd.ibid.c.  5.  p.       3°.'  Cassiodorc  nous  aprend  qu'outre  l'écrit  précèdent,  il 
^^^'  *■  en  avoit  encore  un  autre  de  S.  Ambroise  sous  le  titre  d'Ho- 

mélies sur  la  sagesse.  Ce  recueil  ne  paroît  plus  aujourd'hui  nulle 
part  ;  et  l'on  ne  peut  pas  dire  que  ce  soit  quelqu'un  des  com- 
mentaires du  saint  Evêque  sur  l'Ecriture,  parce  que  Cassiodo- 
re les  spécifie  presque  sous  les  mêmes  titres  qu'ils  ont  aujour- 
d'hui. 
Amb.in.Luc.pci.i.  4".  S.  Ambroisc  assure  lui-même  avoir  fait  un  commentaire 
'^-  "•  •'*•  sur  le  Prophète  Isaïe,  qu'il  cite  dans  le  second  livre  de  son 

Ouvrage  sur  l'Evangile  de  saint  Luc,  composé  en  386,  com- 
Aug.  in.  2.  cp.  1. 4.  me  on  l'a  déjà  vu.  '  Ce  commentaire  se  trouve  encore  cité  sous 
n.  20. 31.  jg  j^Qjj^  jjg  g^  Ambroise  par  S.  Augustin,  qui  en  raporte  plu- 

An  .Mei.  sci.  c.  ii.  sieurs  passages  contre  les  erreurs  des  Pélagiens.  '  L'anonyme 
de  Molk  le  marque  aussi  entre  les  autres  écrits  de  nôtre  saint 
Docteur;  et  la  manière  dont  il  en  parle,  feroit  juger  qu'il  exis- 
toit  encore  en  son  tems,  qui  étoit  le  douzième  siècle . 
Ami). de Eiia,  n. 5.  '  5*.  '  S.  Ambroisc  témoiguc  bien  clairement  qu'outre  ce 
qu'il  avoit  déjà  dit  d'Elie  dans  le  cours  de  ses  autres  Ouvra- 
ges, il  avoit  composé  un  écrit  exprès  à  sa  louange  ;  c'est  pour- 
quoi dans  son  traité  d'Elie  et  du  Jeûne,  où  il  nous  aprend  ces 

particularités 


DOCTEUR  DE  L'EULISE  ET  CUNEESS.         393 

particularités,  il  s'excuse  de  parler  au  long  de  ce  Prophète,      iv  siècle. 
de  peur  de  tomber  dans  des  redites;  nous  n'avons  point  cet 
Ouvrage  non  plus  que  les  précedens. 

6*.  '  Cassiodore  fait  encore  mention  d'un  commentaire  sur  casd.  ib.  c.  3.  p. 
les  Prophètes  en  général,  que  l'on  attribuoit  à  S.  Ambroise,  ^*"'- 
mais  que  cet  Abbé  n'avoit  encore  pu  recouvrer,  et  qui  nous 
manque  comme  lui. 

7'.  '  Le  même  Auteur  témoigne  aussi  qu'en  son  tems,  qui  c.  s.  p.  sm-i. 
étoit  le  sixième  siècle  de  l'Eglise,  S.  Ambroise  passoit  pour  avoir 
fait  des  notes  sur  toutes  les  Epitres  de  S.  Paul,  où  l'on  trou- 
voit  autant  de  lumières  que  d'agrémens.  Mais  il  ajoute  qu'il 
n'avoit  encore  pu  les  avoir  à  lui,  enjoignant  à  ses  Moines  de 
les  rechercher  avec  toute  sorte  de  soin.  '  L'Abbé  Ansigiseau  spic.  i.  3.  p.  2*1. 
commencement  du  neuvième  siècle  fut  plus  heureux  en  cela 
que  Cassiodore.  Cet  ouvrage  lui  tomba  entre  les  mains,  et  il 
en  enrichit  sa  bibliothèque  de  S.  Germer.  '  Notker  le  bègue  Noik.im.scri.c.  4. 
qui  écrivoit  à  la  fin  du  même  siècle,  parle  aussi  du  même  ou-  ^' 
vrage,  sous  le  titre  de  Commentaire  abrégé  de  toutes  les  Epi- 
tres de  S.  Paul.  '  11  semble  qu'il  existoit  encore  au  douzième  An.  Meii.  itid. 
siècle,  puisque  l'anonyme  de  Molk  en  fait  mention  en  le  joi- 
gnant au  commentaire, du  même  Père  sur  S.  Luc.  On  trouve 
encore  aujourd'hui  deux  divers  écrits  de  S.  Ambroise  sur  les 
Epitres  de  S.  Paul  ;  mais  ce  ne  sont  point  ceux  qu'il  avoit  com- 
posés, et  dont  parlent  les  anciens.  Nous  aurons  ocasion  d'en 
dire  davantage  à  ce  sujet,  lorsque  nous  en  serons  à  ses  ouvra- 
ges suposés. 

8".  Il  nous  manque  encore  '  l'excellente  letre,  comme  la  Amb.  lUs.  n.  36. 
nomme  le  Diacre  Paulin,  que  S.  Ambroise  adressa  à  Frigitil 
Reine  des  Marcomans.  Cette  Princesse,  après  avoir  embrassé 
la  foi  de  J.  C.  envola  à  Milan  demander  des  instructions  au 
saint  Evêque,  qui  lui  écrivit  la  letre  dont  il  est  question,  en 
forme  de  Catéchisme,  afin  de  rendre  plus  intelligibles  les  in- 
structions qu'il  y  inseroit.  '  Un  très-habile  homme  a  cru  que  cet  tiii.  h.  e.  1. 10.  p. 
écrit  pourroit  bien  être  ce  que  Theodoret  nomme  l'Exposition 
de  la  foi,  et  Léonce  de  Bysance  l'Explication  du  sens  du  di- 
vin Symbole.  Néanmoins  il  se  pourroit  faire  que  par  cette 
exposition  de  la  foi,  le  premier  a  entendu  le  traité  des  divins 
mystères.  Quoiqu'il  en  soit,  on  peut  assurer  que  ce  n'est  point 
l'explication  de  la  foi  dont  nous  parlerons  dans  la  suite  entre 
les  écrits  suposés  à  S.  Ambroise. 

9°.  '  Le  saint  Evêque  se  trouvant  à  Florence  en  393  ou  394,  Amb.  vit.  n.  as. 

Tome  I.  Sec.  Part.  D  d  d 

2  6  * 


394  S.  AMBROISE,  IIVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE.  lorsqu'il  évitoit  la  rencontre  du  tyran  Eugène,  y  ressuscita  un 
enfant  nommé  Pansophc,  et  composa  un  livre  pour  son  instru- 
ction. Cet  écrit  a  eu  le  même  sort  que  celui  qui  fut  adressé  à 
la  Reine  Frigitil,  et  n'est  point  venu  jusqu'à  nous. 

c.  2  ne.  p,  5.  Aug.       10*.  '  s.  Augustin  fait  souvent  mention  du  livre  de  S.  Am- 

in.Jui.  1. 2.  II.  it.  ijpQigg  intitulé  :  Des  Sacremens  ou  de  la  Philosophie,  qu'il 
nomme  aussi  quelquefois  ,  le  litjre  de  la  Philosophie  contre 
Platon,  et  ailleurs,  le  livre  de  la  régénération  du  sacrement 

Auj;.  ep.  31 .  n.  8.  OU  dc  Itt  régénération.  '  Le  même  Père  écrivant  à  S.  Paulin,  ex- 
plique encore  mieux  quel  étoit  ce  livre  de  S.  Ambroise,  qu'il  té- 
moigne souhaiter  beaucoup,  ne  l'aiant  pas  encore  à  lui.  Selon 
ce  qu'il  nous  enaprend,  il  y  en  avoit  plus  d'un  ;  et  S.  Ambroise 
les  avoit  écrits  avec  beaucoup  d'exactitude  et  d'étendue  contre 
certaines  personnes  aussi  ignorantes  que  superbes,  qui  prélen- 
doient  que  .1.  G.  avoit  apris  grand  nombre  de  choses  des  Ouvra- 
ges de  Platon  ;  prétendant  m/'me  qu'il  y  avoit  puisé  les  senti- 
n)ents  et  les  règles  qu'elles  ne  pouvoient  s'empêcher  d'admirer 
dans  son  Evangile.  Nous  sommes  encore  privés  de  cet  ouvrage 
de  S.  Ambroise,  qui  étoit  sans  doute  important,  selon  l'idée  que 
S.  Augustin  vient  de  nous  en  donner.  Ce  n'est  point  assurément 
celui  qui  se  trouve  imprimé  avec  les  autres  écrits  de  S.  Ambroi- 
se sous  le  titre  Des  sacremens,  comme  nous  le  dirons  plus  au 
long  dans  la  suite. 

Tiii.  ihid.  11"'  On  ne  trouve  point  non  plus  l'écrit  de  S.  Ambroise 

sur  le  mariage  de  la  sainte  Vierge  avec  S.  Joseph,  quoiqu'il 

Aiub.  ibid.  p.  ti.  dise  après  l'an  391  en  avoir  traité  amplem(!nt.  '  Mais  il  n'est 
peut-être  pas  nécessaire  de  reconnoître  ici  un  ouvrage  fait  ex- 
près sur  ce  sujet.  Pour  que  S.  Ambroise  pût  parler  de  la  sorte, 
il  suffisoit  qu'il  eût  traité  cette  matière  dans  quelques-uns  de 

iiiLiit.  I.  m.  1.7.  ses  autres  (crits.  'Il  l'a  fait  réellement  et  au  commencement 
Mnsi.viif;.ii.3.%.  ^g  gQ,^  Commentaire  sur  S.  Luc,  et  dans  son  instruction  pour 
la  conduite  d'ime  Vierge,  i'eut-être  en  avoit-il  traité  aussi  dans 
son  commentaire  sur  Isaïe,  à  l'ocasion  de  la  prophétie  qui  re- 
garde le  mysteie  d'une  Vierge  mère. 

Tiii.  il),  p.  305.  12".  '  11  nous  manque  aussi  les  écrits  que  S.  Ambroise  sem- 
ble avoir  faits  contre  les  Priscillianistes. 

Ainb.  i.  2.  pr.  p.  (j.  13*.  '  De  même  nous  n'avons  point  non  plus  ce  que  le  mê- 
me Père  parolt  avoir  écrit  contre  l'hérésie  d'Apollinaire.  On 
nous  aprend  au  moins  que  Paterne  Evêque  de  Brague,  qui 
avoit  embrassé  cette;  hérésie,  se  convertit  à  la  foi  par  la  lecture 
des  Ouvrages  de  S.  Ambroise  contre  les  Apollinaristes.    Le 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESS.   395 

Saint  a  bien  frondé  celte  hérésie  dans  quelques-uns  des  écrits    iv  siècle. 
qui  noiis  restent  de  lui  :  mais  il  ne  fait  que  la  toucher  en  passant  ~  ' 

et  le  trait  d'histoire  de  Paterne  supose  quelque  traité  particu- 
lier sur  ce  sujet. 

14".  Si  S.  Ambroise  a  satisfait  '  à  la  promesse  qu'il  donnoit  de  sp,  s.  i.  2.  pr. 
en  travaillant  à  ses  livres  sur  le  Saint  Esprit ,  de  traiter  à  fond  "•  **■ 
l'histoire  de  Samson,  il  faut  encore  compter  cet  Ouvrage  en- 
tre ceux  de  ce  Père  que  nous  avons  perdus. 

15".  'M.  de  Tillemont  sur  un  endroit  des  Soliloques  de  tui. ibid. p.  aoe. 
S.Augustin,  où  ce  Père  semble  désigner  S.  Ambroise,  croit 
que  celui-ci  a  encore  composé  un  traité  sur  l'immortalité  de 
1  ame,  qui  nous  manqueroit.  '11  est  vrai  que  d'autres  jugent  Amb.  t.  ».  pr.  p.7. 
que  S.  Augustin  veut  seulement  dire  que  S.  Ambroise  avoit 
traité  cette  matière  dans  ses  autres  Ouvrages,  ou  simplement 
dans  ses  prédications  non  écrites.  Mais  ce  qui  fortifie  le  senti- 
ment de  M.  de  Tillemont,  'c'est  que  Mamert  Glaudien  dans  ci.  1».  de  an.  1.  s. 
ses  livres  sur  l'ame,  composés  entre  le  milieu  et  la  fin  du  cin-  '^'  ^"  ^'  *°^"  ^ 
quiéme  siècle,  raporte  d'après  S.  Ambroise  ces  belles  paroles: 
«  Séparons-nous  du  corps,  contre  lequel  il  faut  que  nous  com- 
battions sans  cesse,  si  nous  voulons  nous  sauver.  »  Or  cet  Au- 
teur citant  ces  paroles,  comme  prises  d'un  sermon  au  peuple 
de  Milan,  tels  que  sont  presque  tous  les  Ouvrages  de  S.  Am- 
broise, et  ces  paroles  regardant  le  sujet  dont  il  s'agit  ici,  et  ne 
se  trouvant  pas  dans  les  écrits  de  ce  Père  qui  nous  restent,  il  y 
a  bien  de  l'aparence  qu'elles  ont  été  tirées  du  traité  que  saint 
Augustin  semble  désigner. 

16°.  '  L'Abbé  Cassien  dans  son  traité  sur  l'Incarnation ,  cite  Cas8.inc.i.7.c.2.5. 
aussi  un  passage  pris  d'un  sermon  de  S.  Ambroise  sur  le  jour  de  "*' 
Noël,  où  ce  Père  établissoit  la  virginité  perpétuellede  Marie  dans 
son  enfantement,  après  son  enfantement,  etavant  qu'elle  conçut 
le  Verbe  Eternel  dans  son  sein.  '  Un  Auteur  anonyme  dans  un  *»«•  '■  *•  ^pp  p- 
sermon  qui  a  porté  le  nom  de  S.  Augustin  ,  cite  aussi  quelque 
chose  du  même  passage,  mais  sans  nommer  S.  Ambroise.  Or 
ce  sermon  atribué  à  S.  Ambroise  par  Cassien ,  ne  paroît  plus 
aujourd'hui  nulle  part. 

S-  IV. 

ECRITS  QU'ON  LUI  A  SUPOSÉS. 

Si  nous  avons  perdu  plusieurs  Ouvrages  de  S.  Ambroise, 
on  a  eu  soin  de  lui  en  atribuer  par  une  espèce  de  dédommage- 

D  d  d  ij 


IV  SIECLE. 


Amb.  t. 
73*. 


l.p.707. 


p.  703-706. 


p.  7Î0.  728.  n. 
G2. 


39. 


390      S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

ment,  encore  un  plus  grand  nombre  d'autres  qui  ne  sont 
pas  de  lui.  Comme  ces  derniers  se  trouvent  pour  la  plupart  mêlés 
et  confondus  avec  les  véritables  écrits  de  ce  Père  qui  sont  ve- 
nus jusqu'à  nous  ,  il  est  important  d'en  donner  le  catalogue 
pour  les  faire  connoitre.  Sans  cette  connoissance  ,  ou  pourroit 
s'y  tromper,  surtout  en  se  servant  des  anciennes  éditions,  où 
cette  confusion  est  plus  grande,  et  où  il  se  trouve  moins  de  cri- 
tique pour  y  remédier. 

1°.  'Outre  l'Apologie  de  David  dont  nous  avons  parlé  en 
traitant  des  véritables  écrits  de  S.  Ambroise,  les  manuscrits  en 
présentent  une  autre  sous  son  nom  ,  que  l'on  a  imprimée  à  la 
suite  de  la  première.  'Les  Critiques  sont  fort  partagés  sur  l'Au- 
teur de  cette  seconde  Apologie.  Les  uns  soutiennent  qu'elle 
est  véritablement  de  S.  Ambroise,  et  ils  ont  pour  eux  l'auto- 
rité des  manuscrits.  Les  autres  apuïés  sur  de  fortes  raisons, 
prétendent  le  contraire  ;  c'est  ce  qui  a  retenu  les  derniers  Edi- 
teurs de  ce  Père,  et  les  a  empêché  de  prononcer  définitivement 
sur  cette  difficulté  qu'ils  ont  abandonnée  au  jugement  des 
Lecteurs.  Il  paroît  néanmoins  qu'il  y  a  beaucoup  plus  de  fonde- 
ment à  regarder  cette  pièce  comme  suposée ,  que  comme  une 
production  de  la  plume  de  S.  Ambroise. 

A  la  vérité  elle  a  beaucoup  d'air  de  ses  autres  Ouvrages.  On 
y  trouve  même  plusieurs  de  ses  expressions  les  plus  familières, 
et  il  lui  étoit  assez  ordinaire  de  traiter  plus  d'une  fois  le  même 
sujet.  Mais  toutes  ces  raisons  fortifiées  même  par  l'autorité  des 
manuscrits,  ne  peuvent  tenir  contre  celles  qui  les  contredisent. 
1 .  Quelqu'art  qu'ait  emploie  l'Auteur  de  cette  seconde  Apo- 
logie pour  y  réprésenter  S.  Ambroise,  on  n'yreconnoît  point  la 
force  et  la  beauté  de  son  style.  2.  L'Auteur  se  sert  d'une  ver- 
sion de  l'Ecriture  différente  de  celle  que  S.  Ambroise  suit  dans 
tous  ses  Ouvrages,  ce  qui  est  d'un  très-grand  poids.  3. 'Il  y 
parlé  des  opérations  en  J.  C.  d'une  manière  qui  n'étoit  point 
encore  connue  dans  le  quatrième  siècle  qui  étoil  celui  de  saint 
Ambroise,  ni  même  dans  le  suivant.  4.  Le  dessein  de  son  Apo- 
logie est  le  même  que  celui  de  la  première  que  l'Auteur  ne 
fait  le  plus  souvent  que  copier  ou  amplifier.  Or  quoique  saint 
Ambroise  ait  traité  plusieurs  fois  le  même  sujet  dans  ses  écrits, 
il  ne  le  fait  jamais  en  se  copiant,  comme  l'Auteur  le  copie  dans 
cette  seconde  Apologie.  Ce  seroit  même  faire  injure  à  la  fé- 
condité de  ce  Père  que  de  l'en  croire  capable. 

Quant  à  l'autorité  des  manuscrits,  il  est  aisé  qu'un  des  pre- 


DOCTEUR  DE  L'ÉGLISE  ET  CONFESS.    397 

miers  Copistes  de  S.  Ambroise  se  soit  laissé  éblouir  en  voïant    iv  siècle. 
que  cette  pièce  avoit  beaucoup  d'air  des  autres  écrits  de  ce  Père; 
ce  qui ,  sans  un  plus  séiieux  examen,  l'aura  porté  à  lui  donner 
son  nom.  Ensuite  son  exemplaire  aura  servi  de  modèle  aux  ma- 
nuscrits que  l'on  en  voit  aujourd'hui. 

2°.  'A  la  .suite  des  mystères  de  S.  Ambroise,  on  a  imprimé  »•  -■  p-  3*9-  386. 
un  autre  traité  sous  le  titre  Des  Sacremens,  divisé  en  six  livres, 
qui  paroissent  formés  d'autant  de  sermons  prêches  aux  Néo- 
phytes. 'Cet  Ouvrage  a  donné  beaucoup  d'exercice  aux  Cri-  p-  3**-3i8. 
tiques  pour  en  déterrer  le  véritable  Auteur.  Les  derniers  Edi- 
teurs de  S.  Ambroise  ont  recueilli  dans  un  bel  avertissement 
qu'ils  ont  mis  à  la  tête ,  et  qui  peut  passer  pour  une  savante 
Dissertation,  tout  ce  que  l'on  a  dit,  ou  que  l'on  peut  dire  de 
plus  important  à  ce  sujet.  II  paroît  par-là  que  cet  Ouvrage  a 
été  atribué  à  S.  Ambroise  presque  sans  variation  pendant  huit 
à  neuf  siècles.  Toutefois  malgré  une  tradition  aussi  constante 
et  aussi  longue  en  faveur  de  ce  Père,  il  y  a  des  raisons  encore 
plus  puissantes  qui  ne  permettent  pas  de  l'en  regarder  comme 
l'Auteur.  '  C'est  aujourd'hui  le  sentiment  des  plus  habiles  Cri-  ™-  h- E-.t.  lop. 
tiques,  dont  quelques-uns  prétendent  même  que  l'Ouvrage  a  i.  s',  p.^^s' 
été  corrompu.  Les  principales  raisons  que  l'on  a  pour  ne  le 
pas  atribuer  à  S.  Ambroise,  sont  presque  les  mêmes  qui  empê- 
chent de  lui  donner  la  seconde  Apologie  de  David.  Nous  ne  les 
repéterons  pas  ici.  Il  suffit  de  dire  que  le  traité  des  Sacremens 
n'est  qu'une  froide  imitation  du  traité  des  Mystères  dont  nous 
avons  parlé  en  son  lieu,  et  de  quelques  endroits  du  traité  sur  la 
conduite  d'une  Vierge.  '  Dom  Mabillon  avoit  vu  un  manuscrit  Mab.  mus.  ib.p.7. 
de  cet  Ouvrage,  ancien  de  mille  ans,  dans  lequel  il  se  trouve  sans 
nom  d'Auteur ,  et  divisé  en  sept  sermons  pour  autant  de  jours 
de  la  semaine  de  Pàque  ;  le  sixième  tel  qu'il  est  imprimé,  étant 
partagé  en  deux. 

3°.  'Ceux  qui  ont  pris  soin  de  l'Edition  de  S.  Ambroise  faite  Amb.app.p.  1.20. 
à  Rome,  nous  ont  donné  sous  son  nom  un  traité  des  quarante- 
deux  stations  des  Israélites  dans  le  désert.  Mais  outre  que  l'on 
ne  trouve  dans  ce  traité  ni  la  beauté  du  style  de  S.  Ambroise, 
ni  l'élévation  et  la  force  de  son  génie,  on  y  lit  divers  endroits 

[)ris  de  S.  Jérôme  et  d'Origene  selon  la  version  latine  de  Rufm, 
aquelle  étoit  à  peine  publique  du  tems  de  S.  Ambroise.  Ce 
traité  est  le  premier  de  l'appendice  qui  contient  les  écrits  supo- 
sés  à  ce  Père. 
A''.'\\eslS'U\vid'uncommentairesurtreizeEpitresdeS.Paul  p. 25. -sis.  p.  21. 


p.  6. 


398  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE,    'qui  a  long-tems  porté  le  nom  de  S.  Ambroise,  et  qui  est  plus 

âTÎn.lbidTV-2»ï^  conuu  SOUS  le  titre  A'Ambrodaster.  Ce  n'est  pas  sans  quelque 
fondement  que  l'on  a  alribué  ce  commentaire  au  saint  Evêque, 
puisque  les  anciens  nous  aprennent  qu'il  avoit  effectivement 
travaillé  sur  S.  Paul.  Mais  son  véritable  Ouvrage,  comme  nous 
l'avons  déjà  remarqué  ailleurs,  est  ou  perdu,  ou  enseveli  dans 
la  poussière  de  quelque  bibliothèque  ;  et  celui  qui  paroît  sous 
son  nom ,  n'est  point  de  lui.  C'est  le  sentiment  général  de  tou- 
tes les  personnes  habiles,  qui  n'y  reconnoissent  ni  son  style  ni 
sa  doctrine  et  dont  plusieurs  le  croient  d'Hilaire  Diacre  de  Rome, 
qui  fit  schisme  sous  le  Pape  Libère. 

Bib.  s.  Peir.Moi).  5".  'Il  sc  trouve  aussi  un  commentaire  sur  l'Epitre  aux  Hé- 
breux, imprimé  sous  le  nom  de  S.  Ambroise  à  Anvers  l'an  1540 
en  un  volume  ew-S".  Mais  il  n'est  point  de  ce  Père,  non  plus 

Notk.  int.sii.c.4.  quc  le  précédent,  et  pour  les  mêmes  raisons.  'C'est  sans  dou- 
te le  même  que  l'on  joignoit  au  commentaire  abrégé  de  saint 
Ambroise  sur  toutes  les  Epitres  de  S.  Paul  dès  le  neuvième 
siècle,  selon  le  témoignage  de  Notker  le  bègue,  et  que  plusieurs 
dès  ce  tems-là  soûtenoient  conformément  à  la  vérité,  n'être 
point  l'ouvrage  de  S.  Ambroise. 

Amb.  app.  p.  321.  - 6".  '  Ou  a eucorc  atribué  à  ce  Père  un  traité  sitr  laTrim'té, 
330.  autrefois  intitulé  Sur  le  Symbole  des  Apôtres.  Mais  on  a  recon- 

nu depuis  que  cet  écrit  a  été  composé  pour  soutenir  lesdécisions 
de  foi  du  I  Concile  de  Tolède  et  du  second  de  Brague  tenu 
en  563.  Il  est  par  conséquent  de  beaucoup  postérieur  à  S.  Am- 
broise. 

p.  345.-3B8.  7».  'Le  traité  de  la  foi  orthodoxe  contre  les  Arie?is ,  plus  connu 

autrefois  sous  le  titre  de  la  divinité  et  consubstantialité  du  Fils, 
a  porté  long-tems  le  nom  du  même;  Père.  Divers  Critiques  en 

M-  ^*^-  ont  fait  aussi  le  49*  discours  entre  ceux  de  S.  Grégoire  de  Na- 

zianze,  mais  les  S.ivans  ont  reconnu  dans  la  suite,  qu'il  n'apar- 

tenoit  ni  à  S.  Grégoire,  ni  à  S.  Ambroise,  et  l'ont  donné  les 

•  uns  à  Vigile  de  Tapse ,  et  d'autres  ù  Grégoire  d'Elvire,  C'est 

•     ce  que  nous  avons  montré  à  nôtre  tour  ne  pouvoir  se  soutenir ,' 

en  prouvant  que  ce  traité  est  de  S.  Phébade  d'Agen. 

p.  357. 36*.  go.  '  On  a  encore  imprimé  autrefois  entre  les  véritables  écrits 

Tiii.  ib.  p.  299.  de  S.  Ambroise,  un  traité  de  la  dignité  sacerdotale,  '  mais  il 
n'est  point  de  ce  père.  îl  convient  mieux  pour  toutes  choses  au 

Amb.  ib.  p.  X».  XI"  siècle.  'Aussi  un  manuscrit  de  S.  Martial  de  Limoges  l'a- 
tribue-t-il  à  Gilbert ,  ou  plutôt  G(;rber  le  philosophe,  qui  fut 
Pape  sous  le  nom  de  Silvestre  IL  Cet  écrit  au  reste  porte  pres- 


344 


DOCTEUR  DE  L'ÉGLISE  ET  CONFESS.      399 

que  autant  de  titres  difîerens  qu'il  s'en  trouve  de  divers  ma-     iv  siècle. 
nuscrits  :  comme  Liber  Pastoralis,  de  cura  Pastorali,  deoh- 
sei'vantia  Episcopoimm,  et  autres  semblables. 

9°.  '  L écrit  à  une  pieuse  Vierge,  qui  a  aussi  passé  pour  être  p.  ses.  ses. 
de  S.  Ambroise,  ne  présente  rien  qui  aproche  de  l'éloquence  et 
de  l'érudition  de  ce  Père.  On  croit  que  c'est  l'ouvrage  de  quel- 
que Moine,  ou  Solitaire  des  tems  postérieurs.  Dans  les  éditions 
de  Rome  il  est  intitulé,  De  la  manière  que  se  doit  conduire  une 
Vierge  :  titre  qui  a  d:i  raport  avec  celui  d'un  Ouvrage  de  saint 
Ambroise  sur  le  même  sujet,  et  qui  aura  peut-être  le  plus  con- 
tribué à  lui  faire  porter  son  nom. 

10".  '  Dans  l'appendice  des  OEuvres  de  ce  Père  que  nous  sui-  p.  391 .  «s. 
vous  ici,  l'on  a  recueilli  jusqu'à  soixante-trois  sermons ,  qu'on 
a  souvent  imprimés  entre  ses  véritables  écrits.  'Vincent  de  vin.  Bel.  1. 19. c. 
Beauvais  lui  en  a  même  atribué  jusqu'à  soixante-quinze.  "Mais  "Imb.  ib.  p.  470. 
de  tous  ceux  qui  ont  jamais  paru  sous  son  nom ,  les  derniers 
Editeurs  n'en  reconnoissent  que  quatre  '  qui  soient  véritable- 
ment de  ce  saint  Docteur.  Ces  quatre  sermons  sont  les  Orai- 
sons funèbres   de  Valentinien  II  et  de  Theodose  le  grand, 
et  les  deux  discours,  l'un  sur  les  basiliques,  et  l'autre  sur  l'in- 
vention des  Martyrs  S.  Gervais  et  S.  Protais.  Us  sont  tous  qua- 
tre insérés  parmi  les  véritables  écrits  de  S.  Ambroise  ,  et  nous 
en  avons  parlé  en  leur  lieu.  '  Tous  les  autres  lui  ont  été  prêtés  p-  367.  sso. 
sans  aucun  fondement  solide  ;  et  l'on  fait  voir  qu'ils  apartien- 
nent  à  d'autres  Auteurs ,  nommément  à  S.  Maxime  de  Turin, 
•  qui  en  a  fait  le  plus  grand  nombre.  An  reste  il  n'est  pas  surpre- 
nant que  nousaïons  aujourd'hui  si  peu  d'/crits  de  S.  Ambroise 
sous  le  titre  de  Sermons .  Nous  avons  observé  en  plus  d'un  en- 
droit, que  presque  tous  les  Ouvrages  qui  nous  restent  de  lui , 
sont  composés  des  sermons  qu'il  avoit  prêches  à  son  peuple. 

'M.  de  Tillemont  n'aprouve  pas  néanmoins  qu'on  lui  ôte  tui.  Utid.  p.  t. 
le  5*  et  le  6*  entre  ses  Homélies  diverses ,  qui  sont  le  43"  et  le 
44*  de  l'appendice  de  la  nouvelle  édition,  sur  la  seule  raison  de 
la  différence  de  style,  qu'il  assure  n'être  pas  si  sensible  qu'elle 
puisse  être  une  raison  absolue  pour  les  rejetter.  D'ailleurs  ils 
ne  contiennent  rien  qui  soit  indigne  de  S.  Ambroise.  '  Dans  ^n*-  ^-  v-  **«• 
le  premier  de  ces  deux  sermons  le  saint  reprend  le  peuple  et 
le  Clergé  de  n'avoir  pas  été  assidu  au  service  de  l'Eglise  pen- 
dant son  absence,  pour  se  trouver  à  une  assemblée  d'Evêques, 

1  On  devroit  dire  six  au  lien  de  quatre,       tyre,  et  de  celui  qui  fut  prononcé lioit  jours 
à  cause  du  discours  sur  la  mort  de  S.  Sa-       après  sur  la  résurrection. 


iOO      s.  AMBROISK,  EVEQUE  DE  MILAN, 

_iv  siBCLE^__  L'autre  semble  cire  une  suitedu  preiuier,  et  avoir  ('•té  fait  pour 

consoler  le  peuple  à  (jui  la  correction  précédente  avoit  été  un 

sujet  de  douleur  et  de  tristesse.  ApW;s  tout,  ces  deux  sermons 

sont  très-courts  et  ont  plus  l'air  d'être  des  fragmens  de  sermons 

■    que  des  sermons  entiers. 

p.  470-190.  11°.  '  Il  se  trouve  aussi  quatre  lelres  qui  ont  porté  assez  long- 

tems  le  nom  de  S.  Ambroise ,  mais  qui  ne  sont  point  de  lui  ; 

p-  "8.  '  la  fameuse  letre  à  Démétriade  que  l'on  donne  à  tant  d'autres 

célèbres  auteurs,  a  été  encore  atribuée  à  S.  Ambroise  à  qui  elle 
n'apartient  nullement,  de  l'aveu  de  tous  les  Gens  de  letres. 

p.  489-198.  12".  '  Les  deux  prières  pour  se  préparer  à  la  Messe ,  dont  on 

a  fait  jusqu'ici  S.  Ambroise  l'auteur,  ne  sont  point  non  plus  de 

Tiii.  ib.  p.  303.  ce  Père,   quoique  le  Cardinal  Bona  soutienne  le  contraire.  A 

706. 767.  j^  vérité  elles  ne  contiennent  rien  qui  les  rende  indignes  de 

lui  ;  maison  y  découvre  beaucoup  de  traits  et  d'expressions  qui 
ne  sont  pas  de  son  siècle.  D'ailleurs  on  n'y  voit  ni  le  style  ni  l'air 
des  autres  écrits  de  S.  Ambroise. 

Hib.  s.  Vin.  cen.       13».  '  Qu  lui  a  donué  aussi  quelquefois  t explication  des  sept 

590.'"  ■  ■  '^"'*'"  visions  de  l'Apocalypse^  et  l'on  en  trouve  une  édition  sous  son 
nom  faite  à  Paris  chez  Vascosan  l'an  1554  en  un  volume  in-A". 
Elle  est  plus  correcte  et  plus  entière  dans  l'appendice  de  ses 

Amb.  ibid.  p.  498.  œuvrcs.  '  Mais  il  y  a  déjà  du  tems  que  l'on  a  reconnu  que  cet 
Ouvrage  est  de  beaucoup  postérieur  à  S.  Ambroise ,  n'aïant  été 
fait  que  depuis  774.  Le  nom  de  son  véritable  Auteur  est  Beren- 
gaude,  comme  on  l'a  trouvé  écrit  d'une  manière  assez  énigma- 
tique  dans  quelques  manuscrits. 

p.  589.  606.  14°.  'A  la  suite  de  l'Ouvrage  précédent  on  a  imprimé  ww  livre 

sur  la  pénitence ,  que  Gillot  s'avisa  de  donner  pour  la  premiè- 
re fois  sous  le  nom  de  S.  Ambroise,  quoique  l'on  avouât  qu'il 
n'étoit  point  de  lui,  et  qu'à  la  fin  il  portât  le  nom  de  Victor. 
Depuis  on  a  reconnu  qu'il  apartienl  à  Victor  de  Tunes  Evêque 
Africain . 

p.  605.  608.  150,  '  Ce  fut  encore  Gillot  qui  publia  pour  la  première  fois 

un  Opuscule  sur  le  S.  Esprit,  comme  étant  de  S.  Ambroise,- 
parce  qu'il  se  trouve  à  la  fin  des  trois  livres  de  ce  Père  sur  le 
même  sujet  dans  un  manuscrit  de  l'Abbaye  de  S.  Denys  en 
France.  Mais  on  a  toujours  reconnu  que  cet  écrit  ou  fragment 
d'écrit  n'est  point  de  S.  Ambroise,  quoiqu'il  He  contienne  rien 
de  mauvais. 

p.  608. 610.  16».  '  Il  en  faut  dire  autant  du  petit  écrit  intitulé.  De  l accord 

de  S.  Mathieu  et  de  S.  LttcsurlagénéalofjiedeJ.C.  Gillotl'aïant 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.    401 

tiré  de  deux  manuscrits  qui  l'atribuent  à  S.  Ambroise,  soute-     iv  siècle. 

noit  que  le  style  et  le  sujet  conviennent  à  ce  Père.  Aujour-  ' 

d'hui  néanmoins  on  en  juge  autrement,  et  avec  raison.  Les 

seules  paroles  suivantes  qui  se  lisent  dans  cet  écrit  suffisent  pour 

convaincre  qu'il  est  d' in  Auteur  qui  n'a  vécu  que  long-tems 

apr^s  S.  Ambroise  :  Sed hiijusquœstioim  talis  àpatribus  solutio 

datur. 

il" .'  Le  traité  de  la  dignité  de  la  création  de  t  homme,  qu'on  p.  cm.  cia. 
a  donné  à  S.  Ambroise,  paroît  n'être  qu'un  fragment  d'un  plus 
long  écrit.  L'Auteur  y  montre  combien  Ihomme  est  relevé  au 
dessus  des  autres  créatures,  aiant  été  fait  à  l'image  et  à  la  res- 
semblance de  Dieu.  S.  Ambroise  a  touché  ailleurs  cette  ma- 
tière comme  nous  l'avons  observé;  mais  ce  traité-ci  ne  lui 
apartient  point.  On  en  trouve  le  commencement  et  la  fin  dans 
Alcuin  sous  ce  titre  :  Dicta  B.  AlbiniLevitœ  super  illudGene" 
seos  :  faciamus  homiiiem,  etc. 

18"-  '  L'appendice  des  Ouvrages  suposés  de  S.  Ambroise  finit  p.  eis.  eu. 
par  un  exorcisme  qui  est  inséré  dans  le  Rituel  Romain;  mais 
divisé  en  plusieurs  parties.  Il  se  trouve  entier  sous  le  nom  de 
ce  Père  dans  un  manuscrit  du  Vatican  ancien  de  600  ans. 
L'ancienneté  de  cette  pièce  paroît  en  ce  que  l'on  y  emploie 
l'Ecriture  suivant  une  version  différente  de  nôtre  Vulgate. 

19°.  '  Quelques  éditions  de  S.  Ambroise  présentent  un  traité  p.  372. 
De  r arbre  défendu.  Il  est  ainsi  intitulé,  parce  qu'il  traite  du  ''"'•  ''''''•  p-  ***• 

f)éché  d'Adam,  que  quelques-uns  prétendoient  venir,  non  du 
ibre  arbitre  de  l'homme,  mais  de  la  mauvaise  qualité  de  l'ar- 
bre défendu,  et  par-là  ils  en  faisoient  Dieu  Auteur.  'Ce  pou-  Tiii.  ibid.  p.  742. 
voient  être  quelques  Marcionites;  car  il  semble  qu'ils  reje- 
toient  l'ancien  Testament  et  ne  recevoient  que  le  nouveau. 
Ils  reconnoissoient  que  le  vin  est  bon,  ce  qui  marque  qu'ils 
n'étoient  pas  purs  Manichéens. 

Ce  traité  dans  les  anciens  manuscrits  est  divisé  assez  natu-  ibid. 
rellement  en  deux  sermons,  que  les  anciennes  éditions  et  les 
anciens  manuscrits  atribuent  à  S.  Augustin.  Il  se  lisent  encore 
dans  l'appendice  du  neuvième  tome  de  ce  Père  sous  ce  titre  : 
De  r  arbre  de  la  science  du  bien  et  du  mal.,  et  forment  le  pre- 
mier sermon  de  l'appendice  de  la  nouvelle  édition.  De  sorte  que 
ni  les  Docteurs  de  Louvain,  ni  les  derniers  Editeurs  de  S.  Au- 
gustin ne  les  croient  pas  de  lui.  '  Ceux  qui  ont  donné  lader-  Amb.  ibid. 
niere  édition  de  S.  Ambroise  en  jugent  de  même  par  raport 
à  ce  dernier  Père,  '  à  qui  ces  sermons  ne  paroissent  pas  même  Tiu.  ibid. 
Tome  I.  Sec.  Part.  E  e  e 


402      S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

V  SIECLE,    atribués  dans  les  meilleurs  manuscrits.  Au  moins  il  est  certain 
que  le  plus  ancien  qu'on  ait  vu  ne  présente  aucun  nom  d'Au- 
teur :  ce  qui  forme  un  grand  préjugé  contre  cette  pièce  parce 
que  d'ordinaire  on  n'omet  pas  le  nom  d'un  Auteur  illustre. 
Tiii.  ibid.  'Au  TCstc  OU  ne  voil  pas  que  l'on  allègue  aucune  autre  rai- 

son qui  empêchât  de  les  laisser  à  S.  Ambroise.  Il  est  visible  que 
la  matière  convient  assez  à  son  tems,  et  qu'il  s'y  trouve  plu- 
sieurs manières  de  s'exprimer,  et  divers  autres  traits  qui  se  li- 
sent dans  ses  autres  Ouvrages  les  plus  avérés.  La  chose  vaut 
bien  la  peine  qu'on  l'examine  avec  un  nouveau  soin,  si  l'on 
entreprend  jamais  de  remettre  les  œuvres  de  S.  Ambroise 
sous  la  presse. 
i>  7«*  20°.    On  a  encore  fait  paroître  sous  le  nom  de  ce  Père  quel- 

ques opuscules  sur  divers  endroits  des  écrits  de  Salomon.  Mais 
ces  opuscules  ont  été  retranchés  de  la  dernière  édition  de  ses 
Œuvres,  comme  n'étant  pas  de  lui.  Le  traité  ou  sermon  sur 
ces  paroles,  Mulierem  fortem  quis  inveniet,  etc.  qui  est  de  ce 
nombre,  apartient  à  S.  Augustin, 
p  *»•  21".  '  Le  petit  livre  intitulé  Du  mystère  de  Pdque,  qui  se 

4M.   '     ''         trouve  au  4*  tome  de  la  pénultième  édition  de  S.  Ambroise,  fait 
dans  l'appendice  de  la  nouvelle  édition  le  35*  sermon,  et  le  se- 
cond sur  Pâque,  et  n'est  rien  moins  que  l'ouvrage  de  ce  Père. 
Tai.  ib.  p.  303.         22°.  '  On  lui  a  aussi  atribué  les  deux  livres  de  la  vocation  des 
Bib.  Cas.  Bên.      Gcntils.  '  Dès  1491  OU  les  imprima  sous  son  nom  à  Milan  avec 
...s.  Vin.  con.     quclques  autres  de  ses  Ouvrages.  '  11  y  en  a  eu  depuis  des  édi- 
; ;;|;  p"^-  jj|,„-     tions  faites  séparément  à  Basle  en  1524,  et  à  Paris  en  1533  et 
1534  encore  sous  le  nom  de  S.  Ambroise.  Dans  la  suite  on  a 
donné  ces  deux  livres  à  divers  autres  Auteurs.  Mais  sans  nous 
THi  ib.  I  Apo.dos  arrêter  à  cette  difficulté,  qui  pourra  re  venir  ailleurs,'  il  est  cer- 
. .   .c.  .  p...  ^^  qu'ils  ne  sont  point  de  nôtre  saint  Evêque.  La  raison  en 
est  sans  réplique,  puisqu'il  y  est  parlé  des  Pelagiens,  qui  ne 
commencèrent  à  paroître  qu'après  sa  mort. 
Bib.  ff. min. cen.       23".  'En  1525  Mclaucthon  fit  paroître  à  Cologne  sous  le 
nom  de  S.  Ambroise  une  traduction  latine  des  cinq  livres  de  ' 
Amb.  t.  2.pr.p.4.  l'histoirc  qui  porte  le  nom  d'Hegesij)pe,  '  et  qui  n'est  qu'un 
abrégé  de  celle  de  Joseph  sur  la  guerre  dés  Juifs  et  la  ruine  de 
Jérusalem.  Mais  il  n'y  a  nulle  aparence  que  S.  Ambroise  soit 
auteur  de  celte  traduction. 
Tiii.  ib.t.4.p.74o.       24°.' Il  y  a  plus  do  800  ans  qu'on  a  atribué  à  ce  Père  les 
actes  du  martyre  de  S.  Sebastien;  et  Bollandus  ne  s'éloigne 
pas  de  ce  sentiment.  Néanmoins  M.  de  Tillemont  fait  voir 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     403 

par  de  puissantes  raisons  que  ces  actes  no  sont  point  de  nôtre    iv  siec.lk. 

saint  Docteur.  Le  style  même,  sur  lequel  s'apuïe  Bollandus  ~    

n'a  ni  la  force,  ni  la  vivacit*';  de  celui  de  S.  Ambroise.  '  Les  Amb.  ibici.p.  *. 
derniers  Editeurs  de  ses  Œuvres  en  portent  le  même  juge- 
ment. 

25°.  '  On  a  fait  aussi  porter  quelquefois  le  nom  de  S.  Am-  tïh.  ib.  t.  5.  p. 
broise  aux  actes  des  saints  Cantiens,  mais  le  style  en  est  si  bas  *^'" 
qu'il  ne  paroît  digne  que  des  siècles  les  plus  barbares. 

26°.  '  Le  traité  qui  a  pour  titre.  Du  combat  des  vices  et  des  Aig.  t,  e.  app.  p. 
vertus,  est  atribué  à  S.  Ambroise  dans  l'édition  de  ses  (Euvres 
faite  à  Rome  en  1585.  Et  afin  de  mieux  soutenir  cette  atribu- 
tion,  l'on  a  ajouté  à  ce  titre,  qu'il  étoit  adressé  à  S.  Simpli- 
cien.  On  a  aussi  donné  ce  môme  écrit  à  S.  Augustin  et  à  saint 
Isidore  de  Seville  entre  les  Ouvrages  desquels  il  a  été  impri- 
mé. Mais  il  n'apartient  à  aucun  de  ces  trois  Auteurs.  Il  est  de 
beaucoup  postérieur  à  leur  siècle,  puis(|u'il  est  de  S.  Ambroise 
Antpert  Abbé  de  S.  Vincent  à  Renevent,  qui  lleurissoit  au  mi- 
lieu du  8'  siècle  de  l'Eglise.  Ce  sera  aparemment  la  conformité 
de  nom  qui  l'aura  fait  donner  au  grand  S.  Ambroise. 

27°.  '  Il  couroit  au  5*  siècle  un  écrit  composé  par  des  héréti-  conc.  t.  *.  p.  laes. 
ques  sous  le  nom  respectable  de  S.  Ambroise,  et  avec  ce  titre, 
ÏÂber  physiologus.  Le  Concile  de  Rome  sous  le  Pape  (Jflase  en 
494  découvrit  l'imposture,  et  déclara  cet  écrit  apocryphe. 

28".  '  Divers  Ecrivains  font  S.  Ambroise  instituteur  de  l'Of-  Mab.  mus.  ii.  p. 
fice,  tel  qu'il  s'est  pratiqué  depuis  dans  l'Eglise  de  Milan,  *<**<>i- 
et  que  l'on  nomme  effectivement  l'Ordre  ou  le  Rit  Ambro- 
sicn.  D'autres  prétendent  au  contraire  que  cette  Lyturgie  n'a 

ftris  le  nom  de  S.  Ambroise,  que  parce  que  c'est  celle  de  son 
îglise,  et  qu'il  s'en  est  servi  lui-même.  '  Ce  qu'il  y  a  de  plus  p.  104.  loe. 
certain,  c'est  que  le  Rit  Ambrosien  de  nos  jours  est  sembla- 
ble en  quelques  choses,  et  dilTerent  en  d'autres  de  ce  que  l'on 
trouve  s'être  pratiqué  à  Milan  du  tems  de  S.  Ambroise.  Ainsi 
l'on  pourroit  dire  que  le  Saint  s'est  servi  de  ce  qu'il  a  trouvé 
établi  dans  son  Eglise,  et  qu'il  a  changé  ou  ajouté  ce  qu'il 
a  jugé  à  propos  :  ce  que  d'autres  auront  encore  fait  sans  doute 
après  lui. 

29°.  '  On  trouve  dans  quelques  bibliothèques  un  livre  m-8°.  wh  Ange!  1  nii. 
qui  porte  pour  titre,  ton/essio  Arnbrosiana,  et  qui  ete  nnpn-  }..  73. 
mé  à  Cologne  en  15S0  par  les  soins  de  Jean  Nopelius.   Ce 
n'est  qu'un  précis  ou  abrogé  divisé  en  quatre  livres,  des  écrits 
de  S.  Ambroise,  parliculieiement  de  ceux  qu'il  adressa  à  l'Em- 
pereur Gralien.  E  e  e  ij 


iOi  S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  SIECLE.  30".  "11  y  a  aussi  un  volume  m-/b/w  d'Homélies  Urées  des 
T^ttârMoiT  Ouvrages  de  S.  Ambroise.  C'est  le  travail  d'un  Prêtre  de  Mi- 
lan nommé  Etienne  Leïnatius,  qui  a  bien  voulu  prendre  la 
peine  de  faire  cette  compilation,  à  laquelle  il  a  donné  la  for- 
me et  le  titre  d'Homélies.  Ce  volume  est  sorti  des  presses  de 
Christophe  Plantin  à  Anvers  l'an  1525. 

31°.  Il  se  trouve  encore  soit  dans  les  manuscrits,  soit  dans 
les  anciennes  éditions  de  S.  Ambroise,  ou  de  quelques  autres 
Pères,  divers  autres  opuscules  qui  portent  faussement  son  nom. 
Tel  est  entre  autres  l'écrit  sur  les  trois  choses  impossibles  dont 
parle  Salomon  dans  les  Proverbes.  Mais  il  ne  faut  pas  mettre 
de  ce  nombre  le  traité  qui  est  danS  l'appendice  de  la  nouvelle 
édition  de  S.  Jérôme  sous  ce  titre  :  In  Susanam  lapsam  objur- 
(jatio.  Quoique  ce  traité  ait  paru  douteux  à  quelques  Criti- 
ques, nous  avons  montré  ailleurs  qu'il  apartient  à  S.  Ambroise. 
11  n'en  est  pas  de  même  de  l'écrit  sur  les  moeurs  des  Brachma- 
nes  qui  se  trouve  sous  le  nom  de  S.  Ambroise  avec  l'Ouvra- 
ge de  Pallade  touchant  les  peuples  des  Indes.  C'est  faire  in- 
jure à  nôtre  saint  Evêque  que  de  lui  attribuer  une  pièce  aussi 
ridicule. 

■        §.  V. 
SA   MANIERE   D'ECRIRE,    SON   ERUDITION, 

SA    DOCTKINE. 

Aucun  des  Pères  Latins  n'a  mieux  réussi  que  S.  Ambroise  à 
réunir  ensemble  les  deux  principales  qualités  que  les  Anciens 
exigent  d'un  Ecrivain  :  l'art  de  plaire  et  le  talent  d'instruire.  11 
est  vrai  que  la  beauté  de  son  style  ne  consiste  pas  précisément 
dans  l'élégance,  quoique  ses  écrits  n'en  soient  pas  dénués.  Il 
Amb.  dooff.  1. 1.  a  suivi  en  cela  '  le  plan  qu'il  avoit  tracé  aux  autres.  Il  veut  que 
n.ioi.  jg^  manière  d'écrire  d'un  Ecclésiastique  soit  simple,  pure,  clai- 

re, nette,  qu'elle  ait  plus  de  poids  et  de  gravité  que  d'élegan- 
ce;  mais  il  veut  aussi  que  l'on  n'y  néglige  pas  l'agrément.  Voi- 
là le  vrai  caractère  de  celle  qu'il  a  emploïée.  De  sorte  qu'à  le 
Tiii.  H.K.i.  lo.p.  bien  prendre,  '  son  style  est  plein  de  majesté,  de  grandeur  et 
•"Amb.t.i.pr.p.e.  de  force,  qui  dit  beaucoup  en  peu  de  mots.  "Mais  quoique 
I  Cas.  inst.  c.  20.  coHcis  daus  les  périodes,  il  ne  laisse  pas  d'être  diffus  dans  les 
^"  **  '   '  pensées  et  les  sentences.  De  même,  quoique  l'on  y  découvre 

toute  la  gravité  qu'il  exige  des  autres,  on  y  trouve  néanmoinà 
du  feu,  de  la  vivacité,  de  l'élévation,  et  une  certaine  violences 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     i05 

laquelle  l'esprit  se  laisse  emporter  avec  plaisir.  *  Tout  cela  est    iv  siècle. 
acompagné  d'une  douceur,  d'un  agrément,  d'une  pieté,  d'une  .  casd.  ib  c  le  p 
politesse,  d'une  onction  qui  pénètrent  jusqu'au  cœur. 'C'est  ce  519.  a. 
qui  a  fait  dire  à  Erasme  que  S.  Ambroise  mérite  à  juste  titre  le  p'^'si.  s."""  ' 
nom  de  Docteur  doux  comme  le  miel.  On  ne  sait  ce  que  l'on 
doit  le  plus  admirer  dans  ses  écrits,  ou  la  fécondité  des  pen- 
sées, ou  le  tour  naturel  et  ingénieux  qu'il  leur  donne,  ou  la  grâ- 
ce et  la  noblesse  avec  lesquelles  il  les  exprime,  ou  enfin  l'a- 
gréable diversité  de  ses  expressions. 

'  S.  Sidoine  ajoute  à  tout  cela  le  talent  de  se  soutenir  égale-  siu.  1.  4.ep.  a. 
ment  par-tout,  comme  un  caractère  particulier  à  S.  Ambroise. 
C'est  ainsi  que  nous  croïons  devoir  entendre  la  pensée  de  cet 
Auteur,  qui  l'exprime  parle  terme  de  persévérance.  Il  est  pour- 
tant visible  que  tous  ses  écrits  ne  sont  pas  de  la  même  beauté 
pour  le  style.  Il  y  en  a  qui  sont  plus  travaillés  et  plus  polis  les 
uns  que  les  autreâ.  Mais  il  est  faux  '  qu'il  y  en  ait,  comme  pré-  Dupin ,  Bib.  t.  3. 
tend  un  Critique  moderne,  qui  soient  fort  négligés.  Dans  ceux  ^'  ***' 
même  que  l'on  supose  tels,  on  trouve  plusieurs  beautés  qui  su- 
pléent  a  ce  qui  leur  manque  d'ailleurs.  On  y  découvre  de  la 
noblesse,  de  la  douceur,  de  l'agrément  et  une  gravité  épisco- 
pale  qui  en  relèvent  le  mérite. 

'  Ceux  qui  passent  pour  les  plus  excellens,  et  où  S.  Ambroi-  p-  ses. 
se  a  pris  le  plus  de  peine,  sont  ses  traités  de  morale.  Il  y  a  aussi 
quelques-unes  de  ses  letres  que  l'on  peut  regarder  comme  des 
chefs-d'œuvre,  particulièrement  celles  qui  sont  adressées  aux 
Empereurs.  '  On  sent  aisément  que  celui  qui  les  a  écrites,  est  'wa.  1  Amt.  ibid* 
une  personne  de  naissance,  élevée  à  la  Cour,  et  dans  l'éloquen- 
ce du  barreau. 

Quelque  talent  qu'eût  S.  Ambroise  pour  écrire,  il  ne  l'a 
cependant  jamais  fait  par  ostentation,  ou  sans  nécessité.  Il  ne 

f)arle  dans  ses  écrits  que  pour  instruire  ;  et  il  a  cela  de  particu- 
ier,  que  presque  tous  les  ouvrages  qui  nous  restent  de  lui,  ne 
sont  que  des  fruits  de  ses  prédications. 

Sa  manière  d'expliquer  l'Ecriture,  n'est  pas  moins  estimable 
que  sa  manière  d'écrire  en  elle-même.  '  Il  y  distingue  trois  sor-  Amb.  ibia.  p.  7. 
tes  de  sens  :  l'historique  ou  literal,  le  spirituel  ou  mystique,  et 
le  moral.  Il  est  admirable  en  quelqu'une  de  ces  trois  manières 
qu'il  explique  le  texte  sacré.  C  est  un  des  Pères  qui  a  su  le  mieux 
tirer  de  l'écorce  de  la  letre  les  mystères  de  la  religion  qui  y 
sont  cachés.  Le  sens  moral  est  celui  qui  lui  est  le  plus  fami- 
lier, comme  le  plus  propre  aux  fonctions  de  son  ministère,  qui 
2  7 


406  S.  AMBROISE,  ËVEQUE  DE  MILAN , 

IV  SIECLE,     étoit  d'instruire  et  de  former  aux  bonnes  mœurs  les  peuples  que 
Dieu  avoit  confiés  à  ses  soins.  Mais  il  s'atache  tellement  au 
sens  moral  et  à  l'allégorique,  qu'il  n'a  point  négligé  le  literal, 
Ang.  op.  147.  n.  S4.  oui  est  Ic  fondement  des  deux  autres.  '  C'est  ce  qui  a  porté  saint 
1 148.  n.  6.         Augustin  à  le  qualifier  un  docte  Interprète  des  saintes  Ecritu- 
res, et  un  homme  très-savant  dans  leur  intelligence,  qui  par 
ses  écrits  a  rendu  de  grands  services  à  l'Eglise,  et  beaucoup 
avancé  les  bonnes  études  des  Fidèles. 
Amb.  do  off.  1. 1.       '  Lorsquc  S.  Ambroise  fut  fait  Evêque,  il  n'avoit  nulle  con- 
"■  *■  noissance  des  matières  Ecclésiastiques.  C'est  ce  qu'il  avoue  lui- 

même  en  se  plaignant  de  ce  qu'aïant  été  arraché  des  tribu- 
naux de  la  magistrature  sécuUere  pour  être  aussitôt  élevé  à  l'E- 
piscopat,  il  n'avoit  pas  eu  le  loisir  d'être  disciple  avant  que  de 
devenir  maître,  et  avoit  été  contraint  d'enseigner  aux  autres 
ce  qu'il  n'avoit  pas  encore  apris.  Mais  il  paroît  par  ses  écrits 
gu'il  avoit  dès  lors  un  grand  fonds  de  literature  profane  ;  et  les 
fréquentes  maximes  de  politique  qu'il  y  a  répandues,  font  ju- 
ger qu'il  étoit  fort  versé  dans  les  grandes  affaires.  Il  possédoit 
les  Poètes,  les  Historiens,  les  Orateurs,  les  Philosophes,  sur- 
tout les  Platoniciens. 

A  cette  érudition  profane,  il  joignit  bien-tôt  la  science  Ec- 
clésiastique, par  l'aplication  infatigable  qu'il  donna  à  l'acqué- 
rir. Il  est  visible  qu'il  aprit  non-seulement  l'Ecriture  sainte, 
mais  qu'il  lut  encore  exactement  les  différons  Interprêtes  des 
livres  saints  qui  l'avoient  précédé,  car  il  les  cite  souvent.  Il  faut 
qu'il  ait  beaucoup  étudié  Origene,  puisque  S.  Jérôme  nous  as- 
sure que  presque  tous  ses  ouvrages  sont  pleins  de  pensées  de  cet 
habile  interprète.  Outre  Origene,  il  parolt  avoir  beaucoup 
profité  des  écrits  de  S.  Hippolyte,  de  Didyme,  et  particuliè- 
rement de  S.  Bazile,  quoiqu'il  écrivît  en  même  tems  que  ce- 
lui-ci, et  qu'il  ne  l'ait  pas  survécu  de  vingt  ans.  Il  avoit  encore 
d«  ruvr.  n.  28.  lû  uvcc  fruit  Philon  le  juif,  grand  homme  d'érudition ,' et 
n'avoit  pas  négligé  les  Ouvrages  des  hérétiques,  puisqu'il  cite 
le  38"  tome  d'Apellès  disciple  de  Marcion. 
«p.  48.  11.  I.  '  Ce  profond  savoir  dans  S.  Ambroise  étoit  relevé  par  un 

fonds  d  humihté  et  de  modestie,  qui  lui  faisoit  craindre  d'ex- 
poser ses  productions  au  grand  jour.  Aussi  il  ne  les  répandoil 
point  dans  le  public,  qu'il  ne  les  eût  fait  examiner  par  des 
personnes  habiles.  Sabin  Evêque  de  Plaisance  étoit  son  Cen- 
seur ordinaire,  qui  ne  pouvoit  s  empêcher  de  donner  aux  écrits 
de  son  ami  l'aprobation  qu'ils  méritoient.  Mais  c'étoit  unique- 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     407 

ment  en  vue  de  l'amour  de  l'exactitude  et  de  la  vérité  que    iv  siècle. 

S.  Anibroise  en  usoit  ainsi,  et  non  pour  avoir  des  Aprobateurs. 

'  C'est  pourquoi  il  conjure  Sabin  d'aporter  tous  ses  soins  et  la  "  ^■ 

critique  la  plus  rigide  pour  faire  cet  examen.  «  Faites  des  no- 

«  tes,  lui  dit-il ,  au  momdre.mot  qui  vous  paroltra  douteux,  ou 

«  avoir  peu  de  justesse,  afin  que  les  ennemis  de  la  vérité  ne  puis- 

«  sent  l'interpréter  en  faveurdeleurssentimens.»  Il  faudroitra- 

porter  ici  en  son  entier  sa  48*  letre,  pour  donner  une  juste 

idée  de  son  atention  à  rendre  exacts  tous  les  écrits  qui  sor- 

toient  de  sa  plume. 

Après  cela  il  n'est  point  surprenant  de  voir  que  S.  Ambroi- 
se  ait  été  si  souvent  et  si  hautement  loué  pour  l'exactitude  et 
la  pureté  de  sa  doctrine.  '  Chaque  Père  Latin  a  son  mérite  par-  Go»n.  ibid.  i. 
ticulier;  mais  S.  Ambroise,  au  jugement  d'Erasme,  est  celui 
de  tous  qui  mérite  le  plus  d'éloges.  Personne  n'a  traité  avec 
plus  de  sincérité  que  lui  les  saintes  Ecritures,  et  personne  n'a 
évité  avec  plus  de  précaution  de  donner  dans  des  sentimens 
suspects.  '  C'est  pour  cela  principalement  que  les  Grecs,  qui  tiu.  iwd.  p.  .-«e. 
ont  peu  d'estime,  et  souvent  peu  de  connoissance  des  Auteurs 
latins,  témoignent  néanmoins  un  grand  respect  pour  les  écrits 
de  S.  Ambroise.  S.  Cyrille  d'Alexandrie,  "Theodoret  et  saint 
Ephrem  entre  autres  les  citent  avec  les  plus  grands  éloges. 

'  En  431  les  Orientaux  mettoient  S.  Ambroise  entre  les  plus  Conc.  t.  3.  p.  74o. 
illustres  Pères  dont  ils  vouloient  suivre  la  foi,  comme  ils  avoient 
eux-mêmes  suivi  avec  exactitude  celle  des  Prophètes  et  des 
Apôtres.  '  Ils  envoïerent  un  de  ses  écrits  à  l'Empereur  comme  p.  730. 
une  règle  de  foi  ;  et  ils  faisoient  un  crime  à  leurs  adversaires 
de  suivre  une  doctrine  différente  de  celle  de  ce  grand  Evêque. 

Mais  leurs  adversaires,  qui  étoient  les  Pères  du  Concile  a  E-  tui.  iwa. 
phese,  n'avoient  pas  eux-mêmes  moins  de  respect  pour  lui. 

S.  Sophrone  le  qualifie  une  règle  parfaite  et  de  la  foi  ortho-  Phot.c.Mt.p.ssg. 
doxe,  et  de  la  générosité  épiscopale. 

Il  seroit  inutile  d'aporter  des  témoignages  de  l'estime  que 
les  Latins  ont  fait  de  la  doctrine  de  nôtre  Saint.  Il  y  auroit  de 
quoi  faire  un  traité  entier.  Mais  la  chose  est  si  notoire,  que 
personne  ne  la  révoque  en  doute.  Il  suffit  d'observer  '  que  le  Conc.  t.  4.p.is62. 
Concile  de  Rome  sous  le  Pape  Gelase  en  494,  met  les  écrits 
de  S.  Ambroise  au  nombre  de  ceux  que  l'Eglise  a  choisis  pour 
règle  de  sa  foi. 

Nous  n'entrerons  point  dans  le  détail  des  divers  points  de 
sa  doctrine.  Cette  entreprise  nous  conduiroit  trop  loin.  Il  n'est 


408         S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

I V  s lECLE.  gueres  de  sujets  qui  regardent  le  dogme,  la  morale  et  l'ancien- 
~  ne  discipline,  qu'il  n'ait  touch<^s  dans  ses  Ouvrages.  Nous  en 
avons  déjà  raport«5s  quelques  traits  dans  le  cours  de  leur  histoi- 
re, et  ceux-làsuffisentpour  juger  des  autres.  Quiconque  vou- 
droit  s'en  instruire  à  fond,  pourroit  consulter  le  troisième  vo- 
lume de  la  critique  de  M.  Dupiu  par  les  Bénédictins  de  saint 
Vanne.  On  a  eu  soin  d'y  recueillir  assez  au  long  tout  ce  que 
S.  Ambroise  a  avancé  de  plus  remarquable  sur  les  différentes 
matières  de  Théologie,  comme  sur  les  principaux  points  de 
l'ancienne  discipline  et  de  la  morale  Chrétienne.  On  y  a  mê- 
me joint  un  recueil  des  traits  d'histoire  les  plus  importans  qu'il 
a  répandus  dans  ses  écrits,  et  de  presque  toutes  les  remarques 
qu'il  y  fait  sur  les  livres  sacrés.  Ces  recueils  sont  propres  non- 
seulement  à  donner  une  juste  idée  de  toute  sa  doctrine,  mais 
encore  à  faire  connoître  l'étendue  de  son  érudition. 

§•  VI. 
EDITIONS   DE   SES  ŒUVRES. 

Amb.i.  1.  pr.p.i.  '  La  plus  ancienne  édition  des  Œuvres  de  S.  Ambroise,  que 
l'on  connoisse,  est  celle  qu'en  publia  MaffellUs  Venia  Reli- 
gieux de  l'Ordre  de  S.  Augustin.  Ni  l'année,  ni  le  lieu  où  elle 
a  été  faite,  ni  le  nom  de  l'Imprimeur  qui  y  a  mis  la  main,  n'y 
sont  point  marqués.  Mais  comme  elle  est  semblable  à  celle 
de  Rome  et  pour  la  forme  du  volume,  et  pour  la  figure  des 
caractères,  et  qu'elle  a  été  dédiée  à  Ambroise  Corano  ou  Co- 
riolano  Général  de  l'Ordre  des  Augustins,  qui  mourut  en  1485, 
on  a  sujet  de  croire  que  cette  édition  parut  au  plus  tard  cette 
même  année  et  en  Italie. 

I|m4.  'La  seconde  fut  faite  à  Milan  par  les  soins  d'un  Prêtre  nom- 

mé Cribellius,  et  sortit  de  l'Imprimerie  de  Léonard  Pachel 
l'an  1490.  Ces  deux  éditions  qui  sont  très-imparfaites,  et  qui 
ne  contiennent  qu'un  très-petit  nombre  de  traités,  se  trouvent 
dans  la  bibliothèque  de  sainte  Geneviève  à  Paris. 

jbid  I  Bill.  ff.  Min.  '  Deux  ans  après  Jean  d'Amerbach  Imprimeur  et  Citoïen 
de  Basle,  aiant  ramassé  grand  nombre  d'exemplaires  des  Ou- 
vrages de  S.  Ambroise,  les  donna  au  public  divisés  en  trois 
parties  et  autant  de  volumes.  Pour  rendre  son  édition  plus  utile, 
il  engagea  Jean  de  la  Pierre  Chartreux  de  Paris,  à  diviser  les 
livres  en  chapitres,  et  mettre  des  sommaires  à  chaque  chapi- 


Ci-n 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR.     409 

tre.  La  première  partie  de  cette  édition  contient  les  livres  des  iv  siècle. 
Offices  et  les  autres  Opuscules  de  S.  Ambroise.  La  seconde 
comprend  tous  ses  Ouvrages  sur  l'ancien  et  le  nouveau  Testa- 
ment. La  troisième  enferme  ses  letres,  ses  sermons  et  ses  au- 
tres écrits.  Il  auroit  été  à  souhaiter  que  le  grand  nombre  de 
traités  qu'Amerbach  y  a  publiés,  eussent  été  plus  corrects. 

'  Cela  n'empêcha  pas  que  cette  édition  ne  parût  de  nou-  Amb.ib.p.aiBib. 
veau  encore  à  Basle  1  an  1506,  '  en  trois  volumes  petit  folio,  *'*^'  *'""• 
Ce  fut  Jean'Petri  de  Langendorf  Imprimeur  et  citoïen  du 
même  endroit,  qui  prit  soin  de  la  publier.  Il  n'y  ajouta  qu'un 
grand  indice  intitulé,  Registrum  ^origerum,  qui  parut  d'une 
si  grande  utiHté  à  Conrad  Leontorms,  Moine  de  Cîteaux,  qu'il 
en  fit  l'éloge  en  vers  et  en  prose. 

'  Erasme  entreprit  ensuite  une  nouvelle  édition  des  Œuvres  Amb.ib.|Bib.Caa. 
de  S.  Ambroise,  qu'il  divisa  en  quatre  tomes.  Le  premier  ^"'" 
contient  les  Œuvres  morales  ;  le  second  les  polémiques  ;  le 
troisième  les  oraisons,  les  letres,  les  sermons;  et  le  quatrième 
les  commentaires  sur  l'ancien  et  te  nouveau  Testament.  Ces 
quatre  tomes  font  deux  gros  volumes  in-folio,  qui  parurent  à 
Basle  chez  Jean  Froben  l'an  1527.  Erasme  dans  cette  édition 
n'a  ajouté  qu'un  ou  deux  traités  à  ceux  qui  avoient  déjà  vu  le 
jour.  Il  y  a  fait  aussi  quelques  corrections,  qu'il  a  mises  au 
commencement  de  chaque  tome  ,  mais  elles  n'ont  répondu 
ni  à  l'estime  que  l'on  avoit  pour  cet  Editeur,  ni  à  l'attente  des 
Savans. 

'  C'est  pourquoi  l'édition  d'Erasme  sembla  si  imparfaite,  que  Amb.  ib.  i  Bib.  s. 
l'on  crut  devoir  la  retoucher.  On  le  fit  presqu'aussi-tôt,  en  y  **"■  **'  *^'*'' 
changeant  plusieurs  choses  dans  le  texte,  et  y  en  ajoutant  plu- 
sieurs autres  aux  marges.  Outre  ces  changemens  et  ces  addi- 
tions on  joignit  aussi  comme  dans  les  autres  éditions  qui  s'en 
firent  à  Basle,  divers  traités  qui  manquoient  dans  la  première 
édition.  Les  QEuvres  de  S.  Ambroise  ainsi  retouchées  furent 
remises  sous  la  presse  à  Paris  chez  Gervais  Chevalon  les  an- 
nées 1529  et  1539  en  deux  volumes  in-folio.  '  Dès  1538  Fro-  Gesn.  Bib.  uni.  i. 
ben  les  publia  de  nouveau  à  Basle  en  même  volume,  après  *•  P/^*- 
qu'elles  eurent  été  revues  sur  divers  manuscrits,  tant  par  Eras- 
me même  que  par  d'autres  gens  habiles,  nommément  Sigis- 
raond  Gelenius. 

'  Quelque  estime  que  l'on  fit  de  cette  édition  d'Erasme  ainsi  Bib.  s.  Pet.  Burg. 
revue,  cela  n'empêcha  pas  que  Louis  le  Mire  ne  fit  de  nou- 

«  On  lit  dans  M.  Dupin  1606,  ce  qui  est  une  fantâ  d'impression.  Dupin,  Bib.  t.    3. 


Tome  L  Sec.  Part.  Fff  ^'^' 


2  7  * 


410      S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN, 

IV  siBCLE.  velles  corrections  au  texte  du  S.  Ambroise,  qu'il  publia  à  son 
tour.  L'édition  s'en  fit  à  Paris  chez  la  veuve  Charlote  Guil- 
lard  et  Guillaume  des  Bois  en  deux  volumes  in-folio.  Elle  fut 
commencée  en  1549,  et  finie  en  1551.  Ces  deux  époques  se 
trouvent,  l'une  au  frontispice  du  premier  volume,  et  l'autre 
à  la  fin  du  second. 

Amb.  ibid.  '  Après  Le  Mire,  Jean  Costier  Chanoine  Régulier  de  saint 

Martin  de  Louvain  entreprit  de  donner  une  nouvelle  édition 
de  S.  Ambroise.  D'abord  il  revit  les  letres  sur  un  ancien  ma- 
nuscrit de  la  bibliothèque  de  S.  Laurent  de  Liège,  puis  les 
autres  ouvrages  sur  divers  autres  manuscrits,  dont  le  plus  esti- 
mable avoit  été  aporté  d'Angleterre  en  Flandre.  Costier  assure 
avoir  corrigé  plus  de  deux  mille  fautes  dans  le  texte,  et  avoir 
mis  plus  de  vmgt  versets  aux  endroits  où  ils  manquoient  dans 
les  éditions  précédentes.  Il  semble  néanmoins  avouer  qu'il  n'a 
pas  trouvé  dans  les  exemplaires ,  ou  manuscrits  ou  imprimés 
dont  il  s'est  servi,  tous  les  secours  qu'il  auroit  souhaité,  et  que 
pour  résoudre  certaines  difficultés,  il  a  fallu  avoir  recours  aux 
avis  de  quelques  Savans,  c'est-à-dire  pour  parler  plus  simple- 

itib.  cord.  p.  36.  mcut,  user  de  conjectures.  '  Cette  édition  ainsi  préparée  vit 
le  jour  à  Basle  chez  Episcopius  l'an  1555  en  trois  volumes  in- 
..Barb.t.i.p.35.  folio.  '  Elle  y  fut  renouvcllce  en  1567  par  les  soins  de  Sigis- 
mond  Gelenius,  qui  y  ajouta  les  notes  de  Pierre  Nanuiuset 
la  vie  de  S.  Ambroise  par  Paulin  avec  celle  que  Costier  en 
avoit  dressée. 

Amb.  ib.  p.  2. 3.  '  Jcau  Gillot  Champenois  aiant  remarqué  que  Costier,  à  cau- 
se du  petit  nombre  de  manu.scrits,  ii'avoit  pu  rendre  son  ouvra- 
ge parfait,  en  ramassa  un  bien  plus  grand  nombre  qu'il  trouva 
dans  les  bibliothèques  de  Paris.  Aïant  ensuite  travaillé  sur  ces 
manuscrits,  il  fit  imprimer  les  (I^^uvres  de  S.  Ambroise  à  Paris 
chez  Guillaume  Merlin,  Sebastien  Nivelle,  et  la  veuve  Guil- 
laume des  Bois  l'an  1509  en  trois  volumes  in-folio.  Son  édi- 
tion, quoique  la  plus  correcte;  qui  eût  encore  paru,  est  néan- 
moins demeurée  la  plus  inconnue,  et  a  été  entièrement  obscur- 
cie par  celle  de  Rome  qui  suivit  peu  de  temps  après. 

Amb.  ib.p.3.|itib.  '  Ce  fut  le  Cardinal  Félix  de  Montalte,  depuis  Pape  sous 
.  p.  30.  jg  j^yj^  jg  ^\xiQ  V,  qui  étant  encore  Cordelier  et  Général  de 
son  Ordre,  entreprit  ce  travail  à  la  solicitation  et  par  l'ordre 
des  Papes  Pie  lY  et  Pie  V.  Mais  divers  voïages  et  d'autres 
ocupations  indispensables  l'obligèrent  de  l'interrompre.  Aïant 
été  fait  Cardinal,  il  reprit  l'Ouvrage,  et  avec  le  secours  de 


DOCTEUR  DE  L'EGLISE  ET  CONFESSEUR,     ill 

quelques  autres  personnes ,  il  en  publia  quatre  tomes  qu'il  dé-  iv  siècle. 
(lia  au  Pape  Grégoire  XIII  dans  le  cours  des  années  1 579  ou 
1580,  1581  et  1582.  Ces  quatre  tomes  ne  font  que  deux  justes 
volumes.  Le  3*  qui  contient  le  5*  et  le  6*  tome,  ne  parut  que 
sous  le  Pontificat  de  l'Flditeur  en  1585,  et  lui  fut  dédié  par 
Jean-Baptiste  Bandini.  Cette  édition  contient  plusieurs  trai- 
tés qui  ne  sont  pas  dans  les  précédentes  ;  et  le  nouvel  arange- 
ment  que  l'on  y  a  mis  est  plus  commode  que  les  autres.  On 
a  aussi  ajouté  dans  les  trois  premiers  tomes,  pour  l'utilité  du 
lecteur,  le  texte  de  l'Ecriture,  sur  lequel  S.  Ambroise  a  tra- 
vaillé. 

'  Il  est  cependant  fôcheux  que  dans  une  édition  pour  la-  Amb.  ib.  p.  3.  j 
quelle  on  s'étoit  donné  tant  de  peine,  on  trouve  beaucoup  do 
choses  desaprouvées  avec  justice  autant  par  les  Catholiques 

auepar  les  nérétiques  ,  outre  quantité  d'autres  défauts  qui  la 
éfigurent.  M.  Dupin  les  a  fait  sentir  d'tme  manière  un  peu  vi- 
ve. Nous  ne  les  détaillerons  pas  ici ,  parce  que  cela  nous  con- 
duiroit  trop  loin.  Tout  cela  n'a  pas  empêché  que  dès  que  cette 
édition  eut  paru,  elle  ne  devînt  le  modèle  et  l'original  de  tou- 
tes celles  qui  se  firent  depuis  ce  tems-là,  sans  que  l'on  y  ait  fait 
aucun  changement  de  conséquence.  '  Dès  1.580  elle  fut  renou-  h'Ij  t«ii  p  «)  i- 
vellée  à  Paris ,  et  continua  d'y  paroître  de  nouveau  très-sou- 
vent dans  la  suite.  On  en  trouve  des  exemplaires  de  1603, 
1604,  1614, 1642.  'Elle  fut  retouchée  par  Ferdinand  Vello-  ■■■«  Pf»d  «^«n 
silli  Evêque  de  Lugo,  qui  l'aïant  enrichie  de  ses  remarques, 
la  fit  paroître  à  Cologne  l'an  1616  en  deux  volumes  in-folio. 
Cette  édition  ainsi  retouchée  paroît  fort  rare. 

Enfin  les  Religieux  de  nôtre  Congrégation  en  ont  publié 
une  nouvelle  sur  un  très-grand  nombre  de  manuscrits  dont  ils 
donnent  le  catalogue.  Non-seulement  ils  y  ont  évité  tous  les 
défauts  des  autres  éditions ,  mais  ils  n'ont  même  rien  oublié 
pour  la  rendre  parfaite.  Ils  ont  eu  soin  de  distinguer  par  une 
juste  critique  les  Ouvrages  qui  sont  certainement  de  S.  Am- 
broise, de  ceux  ou  qui  n'en  sont  pas,  ou  qui  sont  très-douteux. 
Tous  ces  derniers  sont  renvoies  dans  un  appendice  à  la  fin  du 
second  volume.  Seulement  ils  ont  laissé  parmi  les  premiers , 
on  ne  sauroit  bien  dire  pourquoi ,  la  seconde  Apologie  de  Da- 
vid, et  leslivres  des  Sacremens,  que  nous  avons  montré  ne  point 
apartenir  à  S.  Ambroise. 

Ce  qui  augmente  le  mérite  de  cette  édition ,  est  l'atention 
que  les  Editeurs  ont  eu  de  ne  rien  mettre  dans  le  texte  qui 

Fffij 


412      S.  AMBROISE,  EVEQUE  DE  MILAN,  etc. 

IV  SIECLE,  ne  soit  apuïé  sur  l'autorité  d'un  ou  de  plusieurs  manuscrits.  On 
en  a  retranché  le  texte  de  l'Ecriture  qu'on  avoit  assez  inutile- 
ment inséré  dans  l'édition  de  Rome ,  et  l'on  y  a  laissé  de  suite 
les  commentaires  de  S.  Ambroise  en  la  manière  qu'il  les  a 
composés.  L'on  y  conserve  cependant  la  distinction  des  cha- 
pitres introduite  dans  d'autres  éditions  précédentes  pour  le  sou- 
lagement du  lecteur.  On  y  a  placé  les  divers  traités  dans  un 
ordre  simple  et  naturel ,  en  marquant  à  la  marge  le  tems  au- 
quel chacun  a  été  composé.  Les  îetres  y  sont  rangées  suivant 
1  ordre  de  4eurs  dates,  autant  qu'on  a  pu  les  connoître.  Celles 
où  l'on  n'en  a  découvert  aucun  vestige,  sont  renvoiées  dans  une 
seconde  classe  à  la  suite  des  premières. 

A  la  tête  de  chaque  Ouvrage  se  lit  un  avertissement  oii  ces 
derniers  Editeurs  font  ordinairement  un  abrégé  de  chacun, 
en  marquant  le  tems  auquel  il  a  été  composé,  et  en  y  insé- 
rant divers  autres  traits  de  critique  qui  méritent  de  n'être  pas 
ignorés.  Les  bas  de  pages  sont  enrichis  de  notes  ,  qui  ne  con- 
tiennent pas  seulement  les  différentes  leçons  des  manuscrits , 
mais  où  1  on  trouve  encore  des  éclaircissemens  très-utiles  sur 
les  endroits  difficiles  du  texte,  dont  le  sens  y  est  exprimé  avec 
beaucoup  de  pénétration  et  de  justesse.  On  y  use  ordinaire- 
ment de  précision ,  sans  jamais  s'écarter  en  des  questions  étran- 
gères qui  ne  servent  de  rien  pour  l'intelligence  du  texte  de 

Dnpiii,  ib.  p.  869.  l'Autcur.  '  De  sorte  que  l'on  convient  que  cette  édition  est  la 
plus  belle  et  la  plus  correcte  qui  ait  paru  jusqu'ici.  Ceux  d'en- 
tre nos  Religieux  qui  y  ont  le  plus  travaillé  et  dirigé  tout  l'Ou- 
vrage, sont  Dom  Jaque  du  Friche  et  Dom  Nicolas  le  Nourri, 

Bib.  s.  Vin.  Cen.  '  Cette  édition  est  sortie  des  presses  de  Jean-Baptiste  Coignard 
Imprimeur  à  Paris,  en  deux  volumes  in- folio,  dont  le  premier 
parut  en  1686,  et  l'autre  en  1690. 

Comme  les  exemplaires  en  sont  devenus  très-rares,  on  pense 
depuis  plusieurs  années  à  la  renouveller,  et  l'on  y  travaille 
actuellement  Pour  l'exécuter  avec  plus  de  perfection,  l'on  a 
coUationné  deux  ou  trois  manuscrits  fort  anciens  qui  avoient 
échapé  aux  Editeurs  précedens.  Dom  Nicolas  le  Nourri  et 
Dom  Jean  Carré  ancien  Professeur  de  Théologie  avoient  com- 
mencé à  y  mettre  la  main;  mais  l'ouvrage  est  passé  depuis  à 
Dom  Louis  Lemerault  l'un  des  Bibliothécaires  de  l'Abbaie  de 
S.  Germain  des  Prés.  (XIX.) 


'■'    ■?.  413 


IV  SIECLE. 


u 


s.  MARTIN, 

EvEQUE  DE  Tours  et  Confesseur. 

N  petit  écrit  qu'on  nous  a  conservé  sous  le  nom  de  saint 
Martin,  et  la  haute  réputation  de  sa  doctrine  ne  nous 
permettent  pas  de  l'oublier  dans  cette  histoire.  'S.  SevereSul-  suip.diai.s.n.ai. 
pice  regardoit  comme  une  si  grande  faveur  l'avantage  qu'ont 
eu  nos  (jaules  d'être  illustrées  par  la  présence  de  S.  Martin  , 
qu'il  ne  fait  pas  difficulté  de  la  mettre  presque  de  niveau  avec 
le  bonheur  qu'a  eu  la  Grèce  d'être  instruite  par  les  prédica- 
tions de  S.  Paul.  On  ne  doit  pas  néanmoins  s'attendre  que 
nous  entreprenions  d'entrer  dans  le  détail  de  toutes  les  actions 
éclatantes  qui  l'ont  rendu  un  des  plus  illustres  Evoques  de  son 
tems.  Une  telle  entreprise  n'est  pas  de  nôtre  dessein. 

'S.  Martin  naquit  à  Sabarie  dans  l'une  des  Pannonies  en  vu. M.n.iicr.T. 
l'onzième  année  de  l'empire  du  grand  Constantin,  vers  l'an  31 6  •'"'•*''■■'•'•"•  '*• 
de  nôtre  ère  vulgaire.  Sa  famille  étoit  Païenne,  mais  distinguée 
selon  le  monde.  II  reçut  sa  première  éducation  à  Pavie  en  Italie. 
'  Dès  son  enfance  il  désira  d'êlre  tout  à  Dieu  ;  et  n'aïant  encore  sui.  ib.  p.  441. 

aue  dix  ans,  il  se  fit  Catécumene  malgré  ses  parens.  Il  avoit  tant 
'ardeur  pour  servir  Dieu  sans  partage  ,  que  deux  ans  après  il 
se  seroit  retiré  dans  un  désert,  si  un  âge  encore  aussi  tendre  le 
lui  eût  pu  permettre.  Il  n'avoit  de  passion  que  pour  se  faire  ou 
Clerc  ou  Moine. 

'  Mais  il  se  vit  obligé  à  l'âge  de  quinze  ans  de  suivre  la  pro-  ibw. 
fession  des  armes  en  qualité  de  fils  de  Vétéran ,  son  père  aïant 
servi  et  s'étant  avancé  jusqu'à  la  charge  de  Tribun  ou  Colo- 
nel. Martin  servit  à  son  tour  sous  Constance,  puis  sous  Julien 
l'apostat,  l'espace  de  23  ans.  Il  mena  dans  cette  profession  une 
vie  si  réglée,  qu'il  y  vécut  plutôt  en  Moine  qu'en  soldat.  '  A  dix-  n.  2.  p.  «3. 
huit  ans  il  reçut  le  saint  Baptême,  et  à  trente-huit  ou  environ  , 
'  il  demanda  son  congé  qu'il  n'obtint  qu'avec  peine.  n.  3.  p.  us. 

'Après  avoir  quité  le  service,  il  se  retira  à  Poitiers  auprès  n.  4.  p.  ut. 
de  S.  Hilaire  Evêque  du  lieu,  qui  connoissant  dès-lors  tout 
son  mérite,  voulut  l'atacher  à  son  Eglise  en  lui  conférant  le 
Diaconat.  Mais  l'humilité  de  Martin  ne  lui  permit  de  consen- 
fir  qu'à  être  Exorciste.  Bien-tôt  il  quita  Poitiers,  peut-être  à 
l'ocasion  de  l'exil  de  S.  Hilaire  en  356,  et  fit  un  voïage  en 


UA  S.  MARTIN,  EVEQIIE  DE  TOURS 

IV  s  I B  c  L  E.    son  païs.  Son  dessein  étoit  de  tâchor  i\  retirer  ses  pnrens  des  t<^- 

^  j^^  nebres  du  Paganisme.  '  Il  y  réussit  a  l'égard  de  sa  mère  ;  mais 

son  père  persévéra  dans  son  erreur.  Martin  eut  le  bonheur  de 
souffrir  dans  son  voïage  pour  la  foi  de  la  divinité  de  .1.  C,  Il  fut 
foueté  publiquement  pour  sa  défense,  puis  chassé  de  la  ville. 

i>.  +4«.  '  Il  se  relira  à  Milan,  où  il  se  bâtit  un  monastère.  Mais  Auxence 

chef  des  Ariens  en  ces  quartiers-là .  le  contraignit  bien-tôt  par 
ses  vexations  à  quiter  ce  lieu  ,  et  aller  chercher  un  asyle  dans 
l'isle  Gallinaire. 

ibki.  '  Peu  de  tems  après  Martin  aiant  apris  que  S.  Ililaire  étoit  de 

retour  de  son  exil  de  Phrygie ,  d'où  il  revint  sur  la  fin  de  360, 

II.  5.  p.  Mi».  '  il  reprit  le  chemin  de  Poitiers,  et  se  rendit  auprès  de  lui. 
Le  samt  Prélat  le  reçut  avec  une  extrême  joie.  Martin  toujours 
passionné  pour  la  solitude,  érigea  un  monastère  qui  fut  le  pre- 
mier que  l'on  eût  encore  vu  dans  les  Gaules.  Le  lieu  se  nom- 
moit  Ligugé,  etn'étoit  qu'à  une  petite  distance  de  la  ville. 

Il  7.  p.  i.-.i.  '  Au  bout  de  quelques  années  Martin  fut  enlevé  par  la  ruse 

Î[ue  tout  le  monde  sait,  pour  gouverner  l'Eglise  de  Tours.  Ce 
ùt  vers  l'an  371.  '  L'épiscopat  ne  changea  rien  ni  dans  ses 
sentimens,  ni  dans  tout  son  extérieur.  Il  continua  toujours  à 
y  vivre  en  Moine,  et  ne  se  relâcha  jamais  sur  la  modestie  et 
la  pauvreté  en  ses  habits.  Mais  quelque  méprisable  qu'il  parût 
au  dehors,  pour  n'avoir  aucun  de  ces  ornemens  dont  usoient 
les  personnes  de  sa  dignité  pour  relever  le  caractère  Episco- 
pal,  il  savoit  incomparablement  mieux  le  soutenir  qu'eux  tous. 

II.  il.  p.  w^.  Lorsque  ceux-ci  paroissoient  devant  le  Prince,  ils  ne  savoient 
lui  faire  leur  cour  que  par  des  bassesses  indignes  de  leur  rang. 
S.  Martin  étoit  le  .seul  qui  ne  savoit  point  avilir  en  ces  oca- 

p  «w.  «17.  sions  l'autorité  épiscopale.  '  On  sait  ce  qu'il  fit  mangeant  un 
jour  à  la  table  de  l'Empereur  Maxime ,  lorsqu'après  avoir  bû 
il  donna  au  Prêtre  qui  l'accompagnoit  la  coupe  que  l'Empereur 
s'atendoit  à  recevoir  "de  sa  main.  Mais  S.  Martin  ne  croïoit  pas 
que  dans  toute  la  compagnie  il  y  eût  personne  plus  digne  de 
boire  après  lui  que  son  prAtre.  Il  fit  en  cette  ocasion,  remarque  • 
S.  Sulpice,  ce  que  nul  autre  Evêque  n'auroit  eu  la  fermeté  de 
faire  à  la  table  du  moindre  Magistrat. 

Il  7.p.  4.-KI.  455.  '  Pour  éviter  la  foule  du  monde  qui  l'acabloit,  il  bâtit  un 
monastère  à  une  demi  lieue  ou  environ  de  sa  ville  épiscopale. 
C'est  aujourd'hui  la  célèbre  Abbaïe  de  Marmoutier.  On  y 
vit  sous  sa  conduite  jusqu'à  quatre-vingt  Moines,  dont  il 
ocupoil  les  plus  jeunes  à  copier  des  livres.  Il  y  en  avoil  plu- 


ET  CONFESSEUR.  415 

sieurs  de  famille  noble,  et  la  plupart  furent  élevés  à  l'Episco-     iv  sikcle. 
pat.  Car  quelle  étoit  ou  la  Ville  ou  l'Eglise,  s'écrie  S.  Sulpi- 
ce,  qui  ne  souhaitât  d'avoir  un  Evêque  formé  dans  le  mo- 
nastère de  S.  Martin  ! 

Nous  suprimons  le  détail  de  toutes  les  merveilles  que  Dieu 
opéra  par  le  ministère  de  cet  incomparable  Evêque.  Il  suffit 
pour  nôtre  dessein  d'observer  qu'il  fut  le  plus  grand  destruc- 
teur des  idoles  qu'on  eût  peut-être  encore  vu  depuis  les  Apô- 
tres, '  et  que  les  Ithaciens  n'eurent  jamais  de  plus  grand  ad-  His.  i.  2.  n.  cr,. 
versaire.  '  Avant  son  Episcopat,  presque  toute  la  campagne  vi.M.n.io.  p.458. 
aux  environs  de  Tours  étoit  encore  plongée  dans  les  ténèbres 
du  Paganisme.  Mais  bien-tôt  sa  solicitude  pastorale  et  l'éclat 
"de  ses  vertus  y  firent  un  si  merveilleux  changement,  qu'on  la 
vit  toute  remplie  ou  d'Eglises,  ou  de  Monastères. 

'S.  Martin  mourut  à  Cande  sur  les  confins  de  son  Diocèse  ad.Bass.p.iooiGi. 
le  11*  jour  du  mois  de  Novembre,  après  avoir  vécu  l'espace    ■  '  •  "•  *^- 
de  81  ans.  Pour  l'année,  quelque  célèbre  qu'elle  ait  été  au- 
trefois en  France,  où  elle  a  servi  en  quelques  lieux  comme 
d'ère  vulgaire  ,  on  n'en  convient  pas  aujourd'hui  uniformé- 
ment. Les  uns  la  placent  en  399,  d'autres  en  400,  d'autres 
encore  plus  tard.   La  petite  Chronique  de  Tiro  Prosper  la 
marque  sur  l'an  397 ,  '  ce  mii  s'acorde  assez  avec  ce  que  nous  Gr.  t.  ib. 
en  aprend  S.  Grégoire  de  Tours,  '  et  ce  qu'en  insinue  Gallus  Sui.iUai.a.  n.so. 
«  disciple  de  S.  Martin  même.  Rien  n'empêche  que  nous  ne 
nous  en  tenions  à  cette  époque  comme  la  plus  autorisée. 

'  S.  Martin  n'avoit  point  étudié  les  sciences  profanes ,  ni  vii.  m  .  n.  ■m.  p. 
l'éloquence  humaine.  Mais  par  un  prodige  assez  rare.  Dieu  *" 
ne  voulut  point  que  cet  avantage  manquât  à  son  serviteur, 
qu'il  avoit  enrichi  de  tant  d'autres  dons.  S.  Sulpice  assure  par 
écrit  ce  que  l'on  avoit  peine  à  croire,  lorsqu'il  le  raportoit  de 
vive  voix,  et  l'ateste  en  prenant  J.  C.  à  témoin,  afin  de  dissi- 
per toute  incrédulité,  qu'il  n'avoit  jamais  trouvé  en  personne 

1  '  Gallos  depais  sa  retraite  dn  monde,  r^rartoil.  Orc'étoit  en  405  que  Gallus  par-    ^i^-  2-  n-  3.  5. 

demeura  toujours  auprès  do  S.  Martin,  oi  loil  ainsi;  et  il  n'y  a  pas  de  Joute  qu'il  n'ait 

l'acompagnoit    ordinairement     dans     ses  voulu  marquer  l'époque  la  plus  récente, 

voïatîes.  II  itarolt  s'être  trouvé  à  sa  mort,  alin  que  l'on  donndt  plus  de  créance  i  son 

aprrs  laquelle  il  se  retira  auprès  do  S.  Sove-  discours.  "  Ce  calcul  touchant  la  mort  de  S. 

re  Sulpice.*  Au  bout  de  quelques  années  il  Martin  est  fortilié  par  l'opinion  commune    '"■  ^      *^'  '^' 

se  trouva  obligé  de  parler  des  merveilles  de  où  étoit  au  IS^sieclc  l'Eglise  de  Tours,  qui    t  Mm-i   »m    -ill 

S.  Martin,  et  d'en  raportcr  quelques  sen-  la  plavoit  en   la  même    année  que   nous,    »         'gl^^  •  "^"^   •    ■ 

tentes.  Lorsqu'il  le  faisoit,  il  dit  que c'cloit  connue   il   pareil    par  un  Auteur  du  païs  "  ' 

la  huitième  anuée  depuis  qu'il    avoit  oui  qui  éciivoit  en  ce  tems-là. 
de  sa  propre  bouche  une  partie  de  ce  qu'il 


416  S.  MARTIN  s  EVEQUE  DE  TOURS 

IV  SIECLE,    au  monde  ni  tant  d'esprit,  ni  tant  de  savoir,  ni  tant  de  politesse 

diai.  1.  n.  60.  ^*  d'élooiience,  qu'il  en  avoit  découvert  en  S.  Martin.  '  11  est 
vrai  qu'il méprisoit  tous  lesornemens  du  discours,  etaprenoit  à 

Vit.  M.  ibij.  ses disciples  à  en  faire  autant  :  'mais  cela  n'empêchoit  pas  qu'il 
ne  fit  parottre  dans  la  conversation  autant  de  grâce  que  de  gra- 
vité. Ses  discours  étoient  persuasifs  et  pleins  de  feu.  Il  avoit 
sur-tout  une  facilité  merveilleuse  à  résoudre  les  difficultés  sur 

Diai.3.ii.8i.p.i57.  l'EcrituTe  Sainte.  '  S.  Sulpice  va  encore  plus  loin,  et  ne  craint 
pas  de  dire  que  ni  Corinthe  ni  Athènes  n'ont  vu  ni  plus  de 
sagesse  en  Platon,  ni  plus  de  courage  et  de  fermeté  en  So- 

Diai.2.n-5.p.536.  cratc,  qu'il  en  a  paru  en  S.  Martin.  Il  pousse  même  son  élo- 
ge jusqu'à  le  comparer  aux  Prophètes  et  aux  Apôtres  aux- 
quels l'ardeur  de  sa  foi  et  le  don  extraordinaire  des  miracles 
1  ont  rendu  semblable. 

AdBass.  «1. 49â.  '  La  Ictrc  de  S.  Sulpice  à  Bassule  contient  plusieurs  senten- 
ces édifiantes  et  spirituelles  que  le  saint  Evêque  profera  au  lit 
de  la  mort,  telles  que  S.  Sulpice  les  avoit  aprises  de  la  bou- 

Diai.2.n.ii.i2.i6.  chc  do  coux  mêmes  qui  y  étoient  presens.  '  On  en  trouve  aussi 
plusieurs  autres  dans  le  second  dialogue  du  même  Auteur  dont 

n- 16.  Gallus  a  fourni  la  matière.  '  Celle  qui  regarde  la  fin  du  mon- 

de, est  particulièrement  remarquable  pour  sa  singularité.  Si 
Gallus  n'y  a  rien  changé,  Néron  et  l'Antéchrist  doivent  venir 
avant  que  le  monde  finisse.  L'un  après  avoir  subjugué  dix  Rois 
régnera  dans  l'Occident,  et  y  excitera  des  persécufions  pour 
faire  adorer  les  idoles  des  Gentils.  L'autre  établira  son  empi- 
re dans  l'Orient,  et  Jérusalem  en  sera  la  capitale.  Il  rebâtira 
•  '  *'  cette  ville,  et  rétablira  le  temple.  Sa  persécution  tendra  à  faire 
renoncer  J.  G.  et  à  se  faire  reconnoître  pour  le  Christ.  Il  fera 
circoncire  tout  le  monde  selon  la  loi  des  Juifs.  Il  exterminera 
Néron,  et  réduira  sous  sa  puissance  le  monde  entier,  jusqu'à 
ce  que  J.  C.  paroisse  en  personne  pour  détruire  cet  impie. 

Diai.  3.  n.  18.  '  Sur  la  fin  du  3*  dialogue  Gallus  raporte  deux  autres  belles 

sentences  de  S.  Martin,  qui  sont  d'autant  plus  remarquables, 
qu'elles  sont  plus  de  pratique,  et  néanmoins  plus  négligées.* 
Les  disciples  du  Saint  voulant  lui  persuader  de  retenir  pour 
l'usage  de  son  monastère  quelque  cnose  d'une  aumône  consi- 
dérable qu'on  lui  avoit  faite,  et  qu'il  avoit  ordonné  d'emploier 
à  racheter  des  Captifs,  il  répondit  :  «  l'Eglise  aura  soin  qu'il  ne 
«  nous  manque  rien  pour  la  nourriture  et  le  vêtement,  pourvu 
«  que  nous  fassions  paroître  un  entier  détachement  pour  nôtre 
«  propre  nécessaire,  »  En  une  autre  ocasion  quelques-uns  vou- 
lant 


ET  CONFESSEUR.  417 

lanl  porlor  lo  Saint  à  déposor  du  Sac(!rdocfi  le  Prêtre  Brice     iv  siècle. 
ou  Briction,  à  cause  des  injures  dont  il  chargeoit  S.  Martin, 
celui-ci  leur  répondit  avec  sa  tranquillité  ordinaire  :  «  puisque 
a  .].  C.  a  soufTert  le  traître  Judas,  pourquoi  ne  soufîrirai-je  pas 
«  ce  Brice.  » 

'  On  nous  a  conservé  sous  le  nom  de  S.  Martin  une  pro-  Bib.  pp.  i.  .-i.  p. 
fession  de  foi  touchant  le  mystère  de  la  sainte  Trinité.  C'est  '*^*- 
une  très-petite  pièce  écrite  d'un  style  fort  simple  et  obscur  en 
quelques  endroits.  Aussi  l'Auteur  reconnoît-il  que  le  sujet  qu'il 
y  traite  est  au  dessus  de  la  portée  de  l'esprit  humain.  Que  nulle 
bouche,  quelque  éloquente  qu'elle  pût  être,  ni  tous  les  livres 
que  l'on  sauroil  faire,  ne  seroient  pas  capables  de  l'expliquer. 
Que  nous  n'en  avons  de  connoissance  que  par  la  foi,  et  que 
c'est  pourquoi  la  profession  que  nous  sommes  obligés  d  en  ' 

faire,  doit  être  simple.  Tout  ce  qu'il  y  dit  de  ce  mystère,  se 
réduit  à  y  reconnoître  trois  Personnes  réellement  distinctes, 
qui  ne  font  qu'une  seule  et  même  divinité,  qui  sont  égales  en 
majesté,  en  puissance,  en  vertu,  et  qui  ont  donné  l'être  à  tout 
ce  qui  existe  en  le  tirant  du  néant.  Que  le  Père  est  tellement 
dans  le  Fils,  le  Fils  dans  le  Père,  et  le  Saint-Esprit  dans  l'un 
et  l'autre,  que  le  Père  n'est  point  le  Fils,  ni  le  Fils  le  Père,  ni 
le  Saint-Esprit  le  Père  et  le  Fils.  Que  J.  C.  est  né  du  Saint- 
Esprit  et  de  la  Vierge  Marie  pour  être  nôtre  médiateur,  et  qu'il 
est  sans  commencement  entant  que  Fils  de  Dieu. 

'  Cette  profession  de  foi  se  trouve  non-seulement  dans  la  ib.  |  Conc.  «.  8. 
Bibliothèque  des  Pères,  mais  encore  dans  le  Recueil  des  Con- 
ciles et  ailleurs.'  Il  y  en  a  eu  une  édition  dès  1512  avec  di-  bu»,  s.  vin.  Cen. 
vers  autres  traités  d'anciens  Auteurs  par  les  soins  de  Jérôme 
Clichtoue.  '  Depuis,  Thomas  Beaulxamis  y  fit  une  espèce  de  ...b.  m.  deEbr. 
commentaire,  et  fit  imprimer  l'un  et  l'autre  à  la  suite  de  la  vie 
de  S.  Martin  par  S.  Sulpice,  et  de  quelques  autres  écrits  en 
un  volume  m-8".  à  Paris  chez  Thomas  Belot  l'an  1571. 

'Au  reste  les  Critiques  même  Protestants  ne  font  pas  diffi-  Cavc.  p.  i74. 
culte  de  regarder  ce  petit  écrit  comme  étant  véritablement  de  ■'  -i 

S.  Martin.  C'est  l'unique  que  l'on  sache  être  sorti  de  la  plume 
de  ce  grand  homme. 


Tome  /.  See.  Part  Gg  g 


il  8 


IV  sieclï:. 


TETRADE, 

Poète. 

siii.  vil.  M.  n.  16.  '  >-wN  trouve  dans  la  vie  de  S.  Martin  un  Tétrade ,  hom- 

p.  «.I.  Ume  de  qualité,  qui  faisoil  quelquefois  sa  demeure  à  Trê- 

ves, et  qui  avoit  été  élevé  à  la  dignité  de  Proconsul.  De  Païen 
qu'il  étoit,  il  se  convertit  à  la  foi  de  J.  C.  à  l'ocasion  d'un  mi- 
racle que  fit  S.  Martin  en  faveur  d'un  de  ses  domestiques  qu'il 

noi.  p.  4C1.  délivra  du  démon.  '  L'on  croit  que  ce  Proconsul  fut  père  du 
Poël(;  de  même  nom  dont  nous  entreprenons  l'éloge. 

Aus.flp.i.i.p.fiii;.  'Celui-ci  fut  d'abord  disciple  dAu.sone,  soit  à  Bourdeaux, 
où  Ausone  enseigna  si  long-leins,  soit  à  Trêves  oîi,  maign* 
l'emploi  qu'il  avoit  à  la  Cour,  il  lui  putdonner  quelques  le- 
çons, sur-tout  pour  la  poétique.  Tétrade  fil  de  si  grands  pro- 
grès dans  les  belles  letres  sous  cet  habile  maître,  qu'il  se  vit 

p.  Gin.  (!«.  bien-tôt  en  état  de  les  enseigner  aux  autres,  '  et  qu'il  devint 
un  des  plus  célèbres  Poètes  de  son  siècle.  Il  remplit  avec  au- 
tant de  succès  que  de  gloire  une  chaire  de  Professeur  à  An- 
goulême,  où  il  enseignoit  encore  lorsque  vers  384  ou  383  Au- 
sone (juila  la  Cour  pour  se  retirer  dans  ses  terres. 

p.  (a;,  («fi.  'Tétrade  dans  la  suite  abandonna  cet  emploi,  et  se  donna 

tout  entier  à  la  poésie.  Il  avoit  sur-toul  un  talent  extraordinain; 
pour  la  satyre.  Ses  pièces  en  ce  genre  éloient  si  parfaites,  soit 
pour  la  richesse  des  expressions  ou  les  pointes  d'esprit,  soit 
pour  la  douceur  de  la  versification,  ou  les  autres  beautés, 

p  «i«i-  '  qu'Ausone  ne  faisoit  pas  difficulté  de  les  regarder  comme  di- 

gnes des  bons  siècles,  et  comme  comparables  à  celles  du  cé- 
lèbre Poëte  Lucille,  si  même  elles  n'étoient  plus  excellentes. 
Mais  il  .ne  nous  reste  plus  rien  aujourd'hui  de  toutes  ces  poé- 
sies tant  vantées. 

i>.  e».  '  Ausone  en  son  tems  en  faisoit  ses  délices  ;  et  de  maître  ' 

qu'il  avoit  été  auparavant  de  Tétrade,  il  en  devint  depuis  l'ad- 

p.  626.6*9.  mirateur.  '  Rien  n'est  plus  tendre,  ni  plu^  touchant  aue  ce  qu'il 

écrit  à  ce  cher  disciple,  pour  l'engager  à  lui  rendre  ae  fréquen- 
tes visites,  et  à  lui  communiquer  les  productions  de  sa  Muse. 
Pendant  qu'il  enseignoit  à  Angoulême,  il  avoit  suporté  assez 

f)atiemment  son  absence.  Mais  depuis  qu'il  s'étoit  aproché  de 
a  terre  que  lui  Ausone  avoit  en  Saintonge,  il  ne  pouvoit  plus 


TETRADE,    POETE.  419 


V     SIECLE. 


vivre  sans  lui.  Il  semble  par-là  que  Tétrade ,  après  avoir  quilé 
sa  chaire  de  Professeur,  s'éloit  retiré  ou  à  Saintes  même,  ou 
dans  quelque  autre  ville  du  voisinage.'  Là  se  retrouvoient  plu-  p.  6«). 
sieurs  autres  grands  hommes  de  letres,  entre  lesquels  Tétrade 
paroît  avoir  brillé  et  tenu  le  premier  rang.  '  Là  comme  à  An-  i,.  ois.  &ai. 
goulême  il  fut  d'un  très-grand  secours  pour  soutenir  et  per- 
fectionner les  études  ou  chancellantes ,  ou  mal  ordonnées  des 
gens  du  païs.  Mais  afin  de  laisser  à  cette  partie  de  son  éloge 
toute  son  énergie,  nous  allons  copier  les  propres  termes  qu'Au- 
sone  y  emploie. 

'  0  qui  venustos  ulmri  l'acnndià  p.  625. 

Sales  opiiiias,  Tetradi, 
(«ivcsquo,  ne  sit  tristis  et  dulci  cai-cns 

Amara  eoncinnatio  : 
Qui  ftillc  Carmen,  atquc  mello  temporaiis, 

ToriK're  Musas  non  sinis... 
'  Paiiterque  fucas,  quïeque  gustu  ignava  sunl,  p.  t>2B. 

Et  quii*  sapore  tristia, 
Rudes  Gamœnas  qui  Suessx  pneTcnis, 

Alvoque  (x-dis,  non  stylo... 

'  Peu  de  tems  après  le  milieu  du  siècle  suivant ,  S.  Sidoine  pl'^^gl'^'  "'''  *"" 
nous  fait  connoître  un  autre  Tétrade ,  qui  pouvoit  descendre 
de  nôtre  Poëte.  C'étoit  un  grand  homme  de  letres  et  d'un  ex- 
cellent conseil ,  en  qui  l'on  Irouvoit  une  source  très-pure  de 
science. 


D  R  E  P  A  N  E, 

Orateur  et  Poète. 


S-  I- 

HISTOIRE   DE    SA    VIE. 

't  atinus  Pacatus    Drepanius  fleurissoit  sur  la  fin    du   IV  Aus.  pr.  3 
J-J  siede  ,  sous  l'empire  du  grand  Theodose  et  de  ses  fils. 
'Quelques  Ecrivains  ont  voulu  le  faire  Italien  de  nation.  Mais  Pan-B.p.sos.aso. 
leur  prétention  se  trouve  démentie  par  son  propre  témoigna- 

tl  g  gij 


120  D  K  E  P  A  N  E , 

IV  siKCLE.    ge.  11  dit  bien  clairement  qu'il  étoit  Gaulois.  'En  parlant  du 

~"~  Il  ,      lieu  de  sa  naissance,  il  ne  lait  que  le  désigner  par  cette  partie 

des  Gaules,  où  les  rivages  de  l'Océan  servent  de  lit  au  soleil. 

Tiii.  Emi». i.  5.  p.  C'est  marquer  l'Aquitaine  en  général.  'On  croit  néanmoins 

SM.'i.  8.  cp.  11. p.  qu'il  étoit  natif  de  Bourdeaux  ;  '  quoiqu'à  prendre  S.  Sidoine  à 

'^'  la  letre,  on  pourroit  aussi-bien  croire  qu'il  auroit  été  d'Agen. 

Au»,  ibid.  '  Il  étoit  beaucoup  plus  jeune  qu' Ausone,  qui  le  qualifie  son 

fils.  Il  ne  laissa  pas  toutefois  de  contracter  d'étroites  liaisons 

avec  ce  Poète,  comme  étant  Poêle  lui-même.  En  etTet  il  pa- 

roît  que  le  premier  genre  de  litérature  dans  lequel  il  se  fit  de 

la  réputation,  fut  la  poésie.  Il  s'y  rendit  si  habile,  qu'il  sembloit 

éclipser  les  plus  grands  Poètes  de  l'antiquité,  si  l'on  en  excepte 

Virgile.  C'est  le  jugement  qu'en  porte  Ausone  en  lui  dédiant 

un  des  premiers  recueils  de  ses  poésies. 


Crcdemus  gremio  cui  fovonduui? 
Inveni,  trepidîc  silcte  nugro, 
Ncc  doctum  minus,  et  magis  iKsnignuin, 
Quam  qucm  Gallia  pnfbuit  Catullo. 
Hoc  nuUus  mihi  carior  meorum; 
Quem  pluiia  faciunl  novcm  sorores, 
Quam  cunctos  alios,  Marone  dcrato. 
Pacalum  haud  dubie,  poC'ta,  dicis? 
Ipso  est,  intrépide  volatc  versus. 

Siip.  pr.  p.  2ut.  'En  d'autres  ocasions  Ausone  lui  dédia  encore  auelques 
|ci)i.  ij.  p.472.  j^yjjpgg  productions  de  sa  Muse,  comme  son  jeu  des  sept 
Sages  et  son  Idylle  intitulé,  Technopœgnion.  Non-seulement 
Sap.  ib.  p.  264.  Ausouc  prcuoit  qucIquefois  Drepane  pour  son  Mécène,  il 
l'avoit  encore  choisi  pour  son  censeur  ordinaire.  Il  témoigne 
avoir  reconnu  en  lui  une  lumière  supérieure  pour  bien  juger 
des  ouvrages  des  autres.  C'est  pourt^uoi  il  s'en  raportoit  en- 
tièrement à  lui  pour  ce  qui  regardoit  ses  poésies.  Avec  son 
aprobation  il  étoit  assuré  qu'elles  pouvoient  tenir  contre  la  cen.- 
surelaplus  sévère.  Aussi  avoit-il  soin  de  la  rechercher  avant 
que  de  les  exposer  au  grand  jour.  Il  faut  encore  l'entendre  par- 
ler lui-même  sur  ce  sujet. 


36: 


Ignosccnda  isthicc,  an  cognoscenda  rcaris, 

Altcnio,  Drepani,  perlcge  judicio. 
iËquanimus  fiam  te  judicc  :  sive  Icgcnda, 


ORATEUR  ET  POETE.  421 

Sivc  tcgenda  putes  carmina  quae  dedimus.                            IV  SIECLE. 
Nam  primum  esl  meruissc  tuum,  Pacate,  favorem  ;  

Proxima  dcfcnsi  cura  pudoris  crit. 
Possum  ego  censuram  lectoris  ferre  severi, 

Et  possum  modica  laude  placere  mihi. 

Drepane  brilloit  ainsi  sur  le  Parnasse,  lorsqu'il  se  signala  en- 
core sur  le  théâtre  de  l'éloquence,  et  qu'à  la  qualité  de  Poè- 
te il  joignit  aussi  le  titre  d'Orateur  et  de  Panégyriste  de  l'Em- 
pire. Theodo^  le  grand  étant  allé  à  Rome  après  la  défaite  de 
Maxime  en  388,  Drepane  fut  député  de  la  part  des  peuples 
des  Gaules  pour  y  aller  féliciter  ce  Prince  de  sa  victoire.  Ce  " 

fut  là  qu'au  commencement  de  l'année  suivante,  il  prononça 
son  panégyrique  en  sa  présence  et  devant  le  Sénat.  Cette  dé- 
pulation  jointe  à  son  mérite  et  à  son  savoir  lui  ouvrit  la  porte 
aux  premières  Charges  de  l'Empire.  '  Il  fut,  comme  on  le  croit,  Tiii.  ibid. 
Proconsul  d'Afrique  en  390,  et  Intendant  du  domaine  en  393. 
'Rienn'est  plus  certain'qu'il  fut  Proconsul,  quoique  l'onnesache  aus.  ib  i  edyi.  la. 
pas  aussi  certainement  quelle  Province  il  gouverna  en  celte  ''*"" 
qualité.  Ausone  son  ami  lui  en  donne  expressément  le  titre  à 
la  tête  de  deux  de  ses  écrits.  'Il  y  a  quelques  letres  de  peu  de  Sym.  i.  s.  cp.  a. 
conséquence  de  l'Orateur  Symmaque  à  Drepane  qui  étoit  Païen   '  ''  ^'  *P"  ^'  ^' 
comme  lui. 

Au  reste  il  ne  faut  pas  confondre  ce  Pacatus  Drepanius  ni 
avec  un  autre  Pacatus  plus  jeune  que  lui  de  plus  de  30  ans, 
et  dont  nous  parlerons  dans  la  suite,  'ni  avec  Drepanius  Flo-  sav.  inSid.p.4M, 
rus  Auteur  du  VII  siècle,  comme  a  fait  Baronius ,  au  raport  de 
Savaron. 

8  II- 

SES  ECRITS. 


Il  est  visible  par  la  grande  réputation  que  Drepane  s'acquit 
sur  le  Parnasse ,  qu'il  laissa  quelques,  poésies  de  sa  façon .  La 
manière  dont  en  parle  Ausone  ne  permet  nullement  d'en 
douter.  Comme  cet  auteur  le  compare  à  Catulle,  on  pour- 
roit  croire  qu'il  s'étoit  particulièrement  apliqué  à  faire  des  vers 
tendres  et  erotiques.  Mais  en  quelque  genre  qu'il  ait  écrit , 
ses  poésies ,  comme  tant  d'autres ,  sont  devenues  la  victime 
du  malheur  des  tems,  et  il  ne  nous  en  reste  plu&rien  aujour- 
d'hui.        ■  --  ■"  -■■'■ 


Aus.  p..  3. 


2  8 


422  D  R  E  P  A  N  E , 

IV  SIECLE.  On  ignore  s'il  composa  d'autres  pièces  d'éloquence,"  que 
—z — - — ~  le  Panégyriaue  de  l'Empereur  Theodose  le  grand,  qui  est  la 
s».*"'   '  seule  de  sa  façon  que  l'antiquité  nous  ait  conservée.  Drepane 

la  prononça  à  Rome,  comme  nous  l'avons  déjà  remarqué, 
en  présence  de  Theodose  et  du  Sénat  l'an  389,  à  pareil  jour 
que  ce  Prince  étoit  parvenu  à  l'Empire ,  et  par  conséquent  le 
19*  jour  de  Janvier.  11  paroît  par-là  que  ce  fut  à  la  dixième  an- 
née de  son  règne  qui  avoit  coffimencé  en  379;  quoique  le 
Comte  Marcellin  ne  place  cette  déclamation  qu'au  premier  de 
Septembre  391. 
ibid.  '  L'Auteur  semble  diviser  son  Panégyrique  en  deux  parties. 

Il  loue  dans  la  première  la  vie  privée  de  Theodose ,  et  relevé 
dans  la  seconde  ce  qu'il  fit  depuis  son  élévation  à  l'Empire. 
Celte  pièce  contient  beaucoup  de  faits  importans  pour  l'his- 
toire de  ce  siècle ,  sur-tout  pour  éclaircir  la  révolte  du  tyran 
p.  330. 33.%.  II.  S4.  Maxime.  '  Drepane  y  a  tracé  une  description  vive  et  pathétique 
**■  des  vexations  et  des  cruautés  qu'il  exerça  pendant  cinq  ans  dans 

l'Empire,  et  particulièrement  dans  les  Gaules.  11  y  fait  aussi  un 
détail  fort  circonstancié  de  sa  défaite. 

Comme  les  poursuites  des  Ithaciens  contre  les  Priscillia- 
nistes  étoient  encore  toutes  récentes,  et  continuoient  à  trou- 
bler les  Eglises  des  Gaules ,  Dn^pane  crut  devoir  en  insérer 
quelque  chose  dans  sa  pièce,  pour  montrer  ce  qu'il  en  pensoit. 
11  étoit  Païen,  ainsi  que  nous  l'avons  observé;  et  en  cette  qua- 
lité ne  faisant  atenlion  qu'à  la  profession  extérieure  que  fai- 
soienl  les  Priscillianistes  d'une  vie  plus  austère  et  plus  retirée , 
p. 33*.  3r>.  II.  a).  '  il  ne  craint  pas  de  dire  qu'on  ne  les  punissoit  que  pour  avoir 
été  trop  apliqués  au  culte  de  la  Divinité.  Ce  qu'il  ajoute  tou- 
chant la  sévérité  dont  on  usa  à  leur  égard,  est  d'autant  plus 
remarquable,  que  l'Eglise  eut  plus  de  soin  de  la  condamner. 
«  Pourquoi ,  dit-il ,  m'arrêlai-je  à  parler  de  la  mort  de  tant 
«  d'hommes?  Je  n'ai  pas  oublié  que  la  cruauté  est  allée  jusqu'à 
«  répandre  le  sang  des  femmes,  et  que  l'on  a  exercé  les  dernie- 
«  res  rigueurs  contre  un  sexe  que  l'on  épargne  dans  les  guerres 
«  mêmes. »Puis  passant  au  crime  des  Evêques,  c'est-à-dire  d'I- 
tace  et  ses  associés ,  qui  avoient  poursuivi  la  mort  de  ces  misé- 
rables, Drepane  (continue  :  «  Et  qu'est-ce  que  des  Evêques  acu- 
«  sateurs  pouvoient  objecter  de  plus  criminel  ?  Car  on  vit  alors , 
«  oui  l'on  vit  de  cette  nouvelle  espèce  de  délateurs,  Evêques  de 
«nom,  soldais  et  bourreaux  en  effet.  Non  contens  d'avoir  dé- 
«  pouillé  ce  pauvres  malheureux  des  biens  le  leurs  ancêtres , 


ORATEUR  ET  POETE.  423 

rt  ils  cherchoient  encore  des  prétextes  pour  leur  ôter  la  vie .... .    i  v  s  i  e  c  l  e. 

«  Circonstance  encore  plus  odieuse  !  Après  avoir  assisté  à  ces  ju- 

rt  geraenscriminels,  et  trempé  leurs  mains  dans  le  sang  des  supli- 

«  fiés,  ils  alloient  avec  ces  mêmes  mains  toutes  sanglantes  offrir 

«  le  sacrifice,  et  souilloientaiijsi  même  extérieurement  des  céré- 

«  monies  que  leur  seule  disposition  intérieure  avoit  déjà  souil- 

«  lées.  » 

'Drepane  finit  son  Panégyrique  ,  en  disant  que  s'il  n'a  pas  p.  350.  n.  «. 
été  assez  heureux  pour  faire  une  pièce  qui  méritât  d'être 
lue ,  il  a  au  moins  ta  consolation  de  fournir  des  mémoires  à 
ceux  qui  réussiroient  mieux  que  lui ,  et  qu'on  liroit  avec  plus 
déplaisir. 

11  ne  laisse  pas  d'y  faire  paroître  beaucoup  d'érudition  ,  et 
une  grande  connoissance  de  l'histoire.  On  y  remarque  aussi  du 
génie  et  de  l'invention.  Mais  le  style  en  est  un  peu  diffus,  et 
se  sent  considérablement  du  siècle  de  l'Auteur,  où  l'éloquence 
avoit  beaucoup  perdu  de  ces  anciennes  beautés.  '  On  y  trouve  p.  sm.  xa 
même  quelques  expressions  barbares,  comme  celles-ci,  diriguit, 
converrerat. 

La  harangue  de  cet  Orateur  est  imprimée  avec  celles  des 
autres  Panégyristes  de  l'Empire  presque  tous  Gaulois,  dont 
nous  avons  marqué  les  différentes  éditions  à  l'article  de  Clau- 
de Mamertin,  sur  la  fin  du  .3*  siècle.  Il  y  en  a  eu  une  autre 
édition  qui  est  plus  rare.  '  Cette  pièce  fut  imprimée  avec  le  Bib.  s.  jui.  Tur. 
discours  d'Eumene,  pour  le  rétablissement  du  Collège  d'Au- 
tun,  à  Paris  chez  Sébastien  Nivelle  l'an  1570  en  un  volume 
m-i".  François  Baudoin  qui  procura  cette  édition  au  public  , 
l'enrichit  d'observations  de  sa  façon.'  Jean  Scheffer  a  entrepris  Fab.Bib.ut.p.iM. 
de  nouveau  le  même  travail  en  faveur  du  Panégyrique  de  Tneo- 
dose  par  Drepane ,  et  l'a  fait  imprimer  séparément  m-8',  à 
Stockolm  l'an  1651. 


424 


IV  SIECLE. 


Sitl.  1.7.  «p.  9.  p. 


P  A  L  L  A  D  E, 

Rhéteur, 

't  a  famille  des  Pallades  étoit  fort  illustre  dans  les  Gaules  au 

4«.  '  '  JL  IV  et  au  V  siècle,  et  avoit  beaucoup  figuré  dans  les  le- 
tres  et  les  dignités  Ecclésiastiques.  Il  n'y  a  presque  aucun  lieu 
de  douter  que  le  Rhéteur  qui  fait  le  sujet  de  cet  article,  ne  fût 

Sym.  I.  1.  ep.  9.  de  la  même  famille.  '  Il  paroît  au  moins  comme  certain,  qu'il 
étoit  Gaulois  ;  et  il  semble  même  qu'il  avoit  été  disciple  d'Au- 
sone.  Symmaque,  qui  témoigne  pour  son  mérite  une  estime 
extraordinaire,  ne  parle  de  lui  que  comme  d'un  étranger  qui 
étoit  allé  à  Rome  se  perfectionner  dans  le  barreau  ;  et  toutes 
les  letres  où  il  fait  son  éloge,  sont  écrites  de  Rome  ,  ou  dans  les 
Gaules ,  ou  à  des  Gaulois ,  comme  à  Eutrope,  à  Ausone  et  à 

p,  as!  Syagre.  '  Dans  une  de  celles  qu'il  adresse  à  ce  dernier,  il  don- 

ne à  Pallade  la  qualité  de  frère  :  expression  qui  feroit  croire 
que  nôtre  Rhéteur  auroit  été  ou  frère  ou  beau-frere  de  Syagre, 
que  nous  avons  montré  être  Gaulois.  Ce  qui  fait  naître  cette  pen- 
sée, est  la  coutume  qu'a  Symmaque  de  qualifier  ses  fils  et  ses 
frères,  les  fils  et  les  frères  de  ses  amis  à  qui  il  écrit.  Il  y  en  a 

ep.  9.  cent  exemples  dans  ses  letres.  '  D'ailleurs  le  soin  qu'il  prit  d'en- 

voïer  à  Ausone  le  premier  plaidoïer  de  Pallade  ;  le  détail  qu'il 
lui  fait  de  ses  perfections  et  des  applaudissemens  qu'il  avoit  re- 
çus ;  tout  cela  montre  qu' Ausone  s'intéressoit  d'une  manière 
particulière  à  ce  qui  regardoit  ce  jeune  Orateur.  Symmaque 
ajoute  môme  qu'une  telle  relation  convenoit  à  l'afl'ection  qu'Au- 
sone  lui  portoit. 

iwd.  '  Dès  la  première  fois  que  Pallade  parla  en  public  ,  il  don- 

na une  haute  idée  de  ses  rares  talens.  On  admira  la  régularité 
de  sa  division ,  la  fécondité  de  son  esprit ,  la  solidité  de  ses  rai- 
sonnemens,  la  justesse  de  ses  pensées,  la  netteté  de  son  style. 
Nos  Romains,  dit  Symmaque  à  ce  sujet,  qui  conviennent 
rarement  entr'eux  ,  s'acordent  unanimement  à  faire  l'éloge  de 
ce  nouveau  venu .  Je  crois ,  continue  Symmaque  dans  sa  letre 
à  Ausone,  qu'il  est  d'une  race  de  Rhéteurs;  car  il  a  par  na- 
ture ce  que  les  autres  n'aquierent  que  par  art  ;  et  je  le  trouve 
aussi  formé  à  l'art  de  bien  parler,  qu  à  la  manière  de  bien 
vivre. 

La 


a  ib.  1.  3.  ep.  50. 


I.  9.  ep.  1. 


mise.  p.  15. 


PALLADE,    RHETEUR.  425 

»  La  ville  de  Rome  fut  si  charmée  des  grands  talens  de  Pal-  iv  siècle. 
lade,  qu'elle  l'engagea  à  enseigner  la  rhétorique  à  sa  jeunesse. 
Il  s'aquitta  quelque  tems  de  cette  fonction  avec  succès.  Mais  la 
Cour,  comme  ilparoît,  voulant  l'élever  à  quelque  charge  ou  di- 
gnité, il  se  vit  obligé  de  quiter  son  emploi  de  Rhéteur.  'C'est  i^^i.^^p.ssu. 
de  quoi  Symmaque  se  plaint  à  plus  d'une  personne  pour  l'a- 
vantage que  Rome  en  retiroit,  quoiqu'il  s'en  réjouisse  pour 
l'avancement  personnel  de  Pallade. 

'  Quelque  tèms  après  le  même  Symmaque  lui  écrivit  com- 
me à  un  homme  qui  étoit  en  charge,  et  quiavoit  du  crédit 
à  la  Cour.  Il  lui  rapelle  leur  ancienne  et  mutuelle  amitié,  et 
lui  recommande  Benoît  son  ami,  qu'une  mauvaise  fortune, 
plutôt  gu'un  défaut  de  conduite,  avoit  privé  d'une  charge  qu'il 
exerçoit  dans  les  armées. 

n'est  évident  par  ce  que  nous  venons  de  dire  de  Pallade, 
qu'il  est  différent  du  cousin  de  Rutilius  qui  portoit  le  même 
nom,  'et  avec  lequel  certains  modernes  l'ont  confondu.  Celui 
dont  nous  donnons  l'éloge,  étoit  célèbre  dès  le  tems  d'Auso- 
ne,  et  avoit  quité  Rome  avant  la  mort  de  Syagre.  L'autre  au 
contraire  ne  commençoit  à  figurer  dans  le  monde  que  plus  de 
vingt  ans  après  ;  puisqu'en  417  il  étoit  encore  tout  jeune,  et 
fréquentoit  encore  les  écoles  de  Rome.  Mais  c'est  de  nôtre 
Rhéteur  qu'il  faut  entendre  ce  que  dit  S.  Sidoine  dans  une 
de  ses  lettres  à  Sapaude,  où  '  parlant  des  principaux  caractères  |^; '•  *•  «p-  '" 
des  Orateurs  qui  l'avoient  précédé,  il  relevé  le  style  sublime 
et  pompeux  de  Pallade,  pompam  Palladii.  On  doit  juger  par- 
là  qu'encore  après  le  V  siècle  on  trouvoit  quelques  écrits  de 
PaHade,  quoique  depuis  long-tems  il  n'en  paroisse  plus  aucun, 


I.  CONCILE  DE  TURIN, 

POUR  RETABLIR  LA  PAIX  DANS  L'EGLISE  DES  GAULES. 

HmcMAR  Archevêque  de  Reims  '  a  regardé  ce  Concile  Cone.t.i.2.p.i8io. 
comme  un  Concile  provincial  des  Gaules.  Mais  quoi- 
qu'il s'y  trouvât  plusieurs  Evêaues  Gaulois,  le  P.  Sirmond 
juge  que  c'étoit  plutôt  une  assemblée  d'Evêques  d'Italie,  con- 
voquée néanmoins  à  la  prière  de  ceux  des  Gaules ,  pour  ré- 
gler diverses  difficultés  qui  en  troubloient  alors  la  paix.'  Le  p.  «85. 
Tome  L  Sec.  Part.  Hhh 

2  8  * 


426  1  CONCILE  DE  TURIN. 

jvsiBCLE.  Concile  se  tint  dans  l'Eglise  de  Turin  le  10*  des  calendes 
d'Octobre,  c'est-à-dire  le  22''  jour  de  Septembre.  L'année  n'en 
est  pas  marquée  :  ce  qui  a  partagé  les  Savans  pour  la  fixer. 

p.  H57.  H58.       '  Les  uns,  comme  Baronius  et  Binius  le  placent  en  397  ; 

p.  1569.  '  mais  cette  opinion  ne  peut  se  soutenir.  Le  Pape  Zosime  as- 

sure qu'on  y  agita  la  cause  de  Brice  Evêque  de  Tours,  suc- 
cesseur de  S.  Martin.  Or  il  est  constant  que  S.  Martin  étoit  en- 
core au  monde  au  mois  de  Septembre  de  cette  année  397  ; 
S.  Brice  par  conséquent  ne  pouvoit  pas  lui  avoir  succédé.  C'est 
pourquoi  d'autres  renvoient  ce  Concile  à  l'an  400,  ou  même 
404.  Pour  nous,  il  nous  semble  qu'on  peut  le  mettre  dès  398 
ou  399,  ou  tout  au  plus  tard  l'année  suivante. 

Comme  l'on  ignore  l'année  précise  à  laquelle  se  tint  ce  Con- 
cile, on  ignore  aussi  quels  furent  les  l^^vêques  qui  le  compo- 

p.  1155.  1157.  serent.  Ce  qui  nous  reste  de  .s(!s  actes,  n'en  dit  rien.  '  Seule- 
ment on  y  trouve  les  noms  de  Procule  Evêque  de  Marseille, 
et  des  Evêques  Octave,  Ursion ,  Rémi  et  Trifere,  dont  on 
ignore  les  sièges.  Au  reste  il  n'y  est  point  dit  que  ces  cinq  Evê- 
ques y  aient  assisté,  mais  que;  ce  qui  les  regardoit  y  a  été  ré- 
glé :  ce  qui  supose  qu'ils  étoieni  présens.  Les  actes  font  encore 
mention,  sans  les  nommer,  des  Evêqu(!s  d'Arles  et  de  Vienne, 
et  des  Députés  de  la  part  des  Evêques  qui  étoient  en  commu- 

p.  1810.  nion  avec  Félix  de  Trêves.  'Quebjues  manuscrits  portent  qu'il 

s'y  trouva  20  Evêques.  Mais  il  est  diClieile  de  se  persuader  qu'il 

Léo,  p.  586.  |  iiot,  n'y  en  eût  pas  un  plus  grand  nombre.  '  Turin  dépendoit  alors 

''■  *^-  delà  Métropole  de  Milan  :  ainsi  il  y  a  bien  de  l'aparence  que 

ce  fut  S.  Simpliciiin  successeur  de  S.  Ambroise,  ou  Venere, 
qui  fit  assembler  ce  Concile,  et  qui  y  présida. 

ooiic.  ib.  p.  1155.  '  La  première  affaire  qui  y  fut  Irailée,  fut  celle  de  Procule 
Evoque  de  Marseille.  (Juoique  ce  Prélat  fût  de  la  Province 
de  Vienne,  il  prélendoit  néanmoins  être  Métropolitain  de  la 
seconde  Narbonoise. 

Il  apuïoit  sa  {)rétention  sur  ce  que  diverses  Eglises  de  cette 
dernière  province  avoiciit  autrefois  fait  pjirlie  de  c(îlle  de  Mar- 
seille ,  que  c'étoit  lui  qui  avoit  ordonné  l(;s  premiers  Evê- 

p.  11.^6.  (jues  des  autres  ;  'et  qu'ils  étoieni  tous  ses  disciples.  "  Ceux  de 

a  p.  1155.  cette  province  représentoient  au  contraire,  qu'il  n'étoit  pas  du 

bon  ordr(!  qu'ils  eussent  un  Métropolitain  d'une  province  dif- 
férente de  la  leur. 

ibid.  '  Pour  conserver  tout  ensemble  et  l'autorité  des  Canons  et 

la  paix  entre  les  Eglises,  le  Concile  ordonna  que  tant  que  Pro- 


I  CONCILE  DE  TURIN.  427 

cule  vivroit ,  il  auroit  le  droit  de  père  et  de  Primat  sur  ceux     iv  siècle. 
fju'il  pouvoit  regarder  comme  ses  enfans,  c'est-à-dire  sur  ceux 
qui  auroient  él(^  ses  disciples,  ou  dont  les  Eglises  auroient  été 
tirées  de  la  sienne.  De  sorte  que  ce  privilège  fut  accordé  non  à 
la  ville  de  Marseille,  mais  à  la  personne  et  au  mérite  de  Pro- 
cule,  '  qui  avoit  tant  travaillé  à  former  plusieurs  disciples  pour  Tiii.  h.  e.  1. 10. 
l'Episcopat.  Ce  règlement  a  procuré  à  la  seconde  Narbonoise  *^' 
l'avantage  d'avoir  après  Procule  un  Métropolitain  de  la  pro- 
vince même,  et  cet  honneur  a  été  ensuite  ataché  à  l'Evêque 
d'Aix. 

'  Il  y  avoit  aussi  un  différent,  qui  devint  encore  bien  plus  fa-  ^^on^-  ■''  p-  "'* 
meux  dans  la  suite,  entre  l'Evêque  de  Vienne  et  celui  d'Ar- 
les, au  sujet  de  la  primalie  et  jurisdiction  dans  la  Viennoise. 
Pour  le  terminer,  le  Concile  ordonna  que  celui  des  deux  qui 

f)rouveroit  que  sa  ville  étoit  la  Métropole,  'c'est-à-dire,  selon  lco,  not.  .p  4«o. 
a  règle  du  Concile  de  Nicée,  avoit  le  premier  rang  dans  le 
civil,' auroit  l'honneur  de  la  primatie  dans  toute  la  province,  Conc.ibM. 
«ju'il  en  ordonneroit  les  Evêques,  et  en  visiteroit  les  Eglises. 
Le  Concile  ajoute  que  pour  faire  les  choses  avec  plus  de  cha- 
rité et  de  paix,  chacun  des  deux  Evêques  auroit  la  juridiction 
sur  les  Eglises  qui  se  trouveroient  les  plus  proches  de  lui,  sui- 
vant le  choix  des  deux  Prélats.  'C'est  l'ordre  qui  subsiste  au-  '"'"•  '*•  p-  ^^• 
jourd'hui;  quoique  Patrocle  en  son  temps  emploïât  l'autorité 
du  Pape  Zosime  pour  le  troubler, 

'Le  Concile  de  Turin  jugea  encore  l'affaire  des  Evêques  ^0^^'  *•  p  "*^- 
Octave,  Ursion ,  Rémi  et  Trifere ,  tous  quatre  de  la  seconde 
Narbonoise,  selon  le  P.  Sir-tond.  'Us  étoient  accusés  d'avoir  p-  "'•« 
commis  diverses  fautes  dans  les  ordinations  :  de  quoi  ils  s'excu- 
soient  néanmoins  sur  ce  qu'on  ne  les  avoit  pas  avertis  au- 

f)aravant.  Les  Pères  du  Concile  aïanl  égard  à  leurs  excuses, 
eur  pardonnèrent  le  passé.  Mais  ils  arrêtèrent  que  quiconque 
violeroit  à  l'avenir  les  anciens  décrets  de  l'Eglise,  per- 
droit  le  droit  d'ordonner ,  qu'il  n'auroit  point  de  voix  dans 
les  Conciles,  et  que  ceux  qu'il  auroit  ordonnés  contre  l'or- 
dre des  Canons ,  seroient  privés  du  Sacerdoce.  '  En  439  le  »•  3.  p.  lass. 
Concile  de  Riez  fit  exécuter  ce  Canon  de  Turin  à  l'égard 
des  deux  Evêques  qui  avoient  entrepris  d'en  ordonner  un  à 
Embrun. 

'  Un  laïc  nommé  Pallade  avoit  calomnié  le  prêtre  Spanus  ;  «•  2.  p.  use.  157. 
et  un  autre  Prêtre  nommé  Exuperance  avoit  outragé  l'Evêque 
Trifere,  qui  prononça  sentence  contre  les  deux  coupables.  Le 

Hhhij 


L 


428  I  CONCILE  DE  TURIN. 

IV  SIECLE.  Concile  de  Turin  la  confirma,  et  voulut  que  Trifere  seul  pût 
leur  faire  grâce.  11  défendit  aussi  de  recevoir  ni  les  Clercs  d  un 
autre  Evêque,  ni  ceux  qu'il  auroit  excommuniés,  comme 
aussi  d'élever  à  un  degré  plus  éminent  ceux  qui  auroient  eu 
des  enfans  étant  ministres  de  l'Eglise,  ou  qui  auroient  été  or- 

c.  3.  p.  1*50.  donnés  d'une  manière  irréguliere.  '  Ce  décret  fut  confirmé 
pour  la  première  partie  dans  le  I  Concile  d'Orange  en  441 . 

n.  2.  p.  «57.  '  Une  autre  affaire  plus  importante  que  l'on  traita  dans  le 

Concile  de  Turin,  fut  celle  des  Ilhaciens,  qui  troubloit  l'E- 
glise des  Gaules  depuis  long-tems.  Le  Concile  se  borna  à 
faire  lire  les  letres  du  Pape  Sirice  et  de  S.  Ambroise  à  ce  su- 
jet, et  conclut  qu'il  falloit  suivre  la  même  conduite.  Ces  le- 
tres portoient  que  ceux  qui  voudroient  se  séparer  de  la  com- 
munion de  Félix ,  seroient  reçus  dans  celle  de  l'Eglise.  Fé- 
lix avoit  été  ordonné  Evêque  de  Trêves  par  les  Ithaciens; 
et  comme  il  étoit  Evêque  de  la  principale  ville  des  Gaules, 
le  lieu  ordinaire  de  la  résidence  de  la  Cour  pendant  long- 
temps ,  il  tenoit  un  rang  distingué.  La  crainte  de  perdre  son 
amitié  atachoit  beaucoup  d'Evêques  à  sa  communion ,  qui 
pouvoient  apréhender  qu'en  la  quittant  ils  auroient  de  la  pei- 
ne à  rentrer  dans  celle  de  l'Eglise.  C'est  peut-être  pourquoi 
le  Concile  voulut  les  assurer  par  avance  de  cette  faveur. 

''■  "'"''  '  La  letre  synodale  de  ce  Concile  est  adressée  aux  Evêques 

des  Gaules  et  à  ceux  des  cinq  provinces.  Par  ces  cina  pro- 
vinces que  l'on  distinguoit  du  reste  des  Gaules  dès  la  fin  du 
IV  siècle,  quoiqu'elles  en  fissent  partie,  on  entend  commu- 
nément celles  qui  composoient  l'ancienne  Narbonoise.  C'est- 
là  tout  ce  qui  nous  reste  du  I  Concile  de  Turin.  On  n'y  trou- 
ve rien  cependant,  '  de  l'affaire  de  S.  Brice,  Evêque  de  Tours, 
qui  selon  le  Pape  Zosime,  y  fut  traitée,  et  lui  déclaré  in- 
nocent. Faudroit-il  dire  qu'il  y  a  une  partie  des  actes  de  ce 
Concile  qui  seroit  perdue  ? 


p.  1S69. 


429 

===      IV  SIECLE. 


SULPICE  ALEXANDRE, 


HISTORIEN. 


S, 


l'on  voit  paroUre  ici  cet  Historien,  ce  n'est  pas  que  nous 

aions  des  preuves  qu'il  ait  été  ou  Gaulois  ou  Franc.  Nous 
ne  prétendons  pas  non  plus  le  donner  pour  l'Historiographe 
en  titre  de  l'une  ou  de  l'autre  nation.  Seulement  comme  il  a 
été  des  premiers  écrivains  que  l'on  sache  avoir  travaillé  à  faire 
connoîlre  celle-ci,  nous  n'avons  pas  cru  devoir  l'oublier  dans 
ce  recueil. 

On  sait  peu  de  choses  de  son  ouvrage,  et  encore  moins  de  sa 
personne.  Tout  ce  que  les  siècles  postérieurs  à  son  tems  nous 
en  ont  apris,  se  tire  de  S.  Grégoire  de  Tours.  '  Sulpice  Aie-  *^'"J'''':'''J!j'* 
xandre ,  çelon  cet  auteur,  écrivit  une  histoire ,  dans  laquelle  '  '  ^' 
il  avoit  inséré  plusieurs  traits  touchant  la  nation  des  Francs. 
Il  n'y  parloit  cependant  nulle  part  de  leur  premier  Roi  ;  et 
l'on  ne  savoit  pas  trop  qui  étoit  le  premier  qui  avoit  porté  ce 
titre. 

'  S.  Grégoire  qui  avoit  lu  cet  ouvrage,  sans  en  avoir  tiré,  com-  ">'<*• 
me  il  paroît,  tous  les  secours  qu'il  auroit  pu  pour  perfectionner 
son  histoire,  s'est  borné  à  en  raporter  quelques  fragmens  pris  du 
3^  et  du  4*  livre.  Ces  fragmens  commencent  à  la  défaite  du  tyran 
Maxime  près  d'Aquilée  en  388,  et  finissent  à  l'acordque  le  tyran 
Eugène  fit  avec  les  Rois  des  Francs  et  des  AUemans.  Cet  Eu- 
gène fut  tué  en  394,  après  avoir  envahi  l'Empire  en  392.  De 
sorte  que  ces  fragmens  ne  nous  donnent  connoissance  que  de 
ce  qui  s'est  passé  en  moins  de  six  ans.  Lorsqu'Alexandre 
en  vient  à  cet  accord  d'Eugène,  il  donne  le  titre  de  Roi  aux 
Ducs  qu'il  avoit  dit  auparavant  avoir  d'abord  gouverné  les 
Francs. 

Comme  S.  Grégoire  ne  cite  plus  cet  Historien  dans  la 
suite ,  ce  qu'il  n'auroit  pas,  ce  semble,  manqué  de  faire,  il 
nous  donne  à  entendre  qu'il  n'avoit  pas  poussé  plus  loin  son 
histoire,  et  qu'ainsi  il  écrivoit  dès  la  fin  du  IV  siècle.  C'est 
ce  que  paroît  aussi  montrer  le  style  de  cet  historien,  autant 
que  l'on  en  peut  juger  par  le  peu  qui  nous  reste  de  son  ou- 
vrage. On  y  aperçoit  sans  peine  le  génie  de  ce  siècle,  et  un 
assez  beau  latin.  A  l'^rd  du  grand  nombre  de  faits  qu'il  y 


430  SULPICE  ALEXANDRE,  HISTORIEN. 

IV  SIECLE,  avoit  insérés  touchant  les  Francs,  il  est  à  croire  qu'ils  regar- 
(loient  plutôt  l'origine  et  les  premiers  temps  de  cette  nalion, 
(juc  le  progrès  de  ses  armes,  sur-tout  dans  les  Gaules,  puis- 
que S.  Grégoire  qui  les  avoit  lus,  n'en  raporle  rien,  quoi- 
que son  dessein  le  demandât. 


TARLE  CHRONOLOGIQUE 


431 


TABLE  CHRONOLOGIQUE. 


Olymp. 


45. 
2. 


95. 
1. 


112. 
1. 


An.  de  in 
fondation 
de  Rome. 


155. 


354. 


422. 


An.  avant 
l'Ere  vulg. 

1700. 


1500. 


599. 


400. 


332. 


MERCURE  règne  dans  les  Gaules  et  dans  le  re- 
ste de  l'Occident.  Il  lie  les  peuples  de  son 
empire  par  la  société  du  commerce.  Il  leur  don- 
ne des  loix  qui  tendent  à  l'union  et  à  la  paix.  Il  po- 
lit leur  rudesse  par  son  esprit  et  par  son  éloquence. 

Les  Bardes,  les  Vates  et  les  Druides,  qui 
étoient  les  Poêles  ,  les  Devins  et  les  Philosophes 
des  Gaulois  ,  commencent  à  se  faire  connoîlre 
dans  les  Gaules. 

Fondation  de  la  ville  de  Marseille  par  les  Pho- 
céens sortis  de  l'Asie  mineure.  Cette  ville  devient 
dans  la  suite  une  des  plus  célèbres  académies  de 
l'Univers  ,  jusqu'à  l'emporter  sur  Athènes  et  pour 
la  politesse  et  pour  les  sciences.  L'exemple  des 
Marseillois  aprivoise  peu  à  peu  les  peuples  des 
Gaules,  leur  inspire  du  goût  pour  les  belles  con- 
noissances,  et  fait  des  Gaules  une  autre  (iréce. 

Les  Gaulois  au  nombre  de  300,000  sortent  des 
Gaules  poUr  aller  chercher  ailleurs  de  nouvelles 
habitations.  Une  partie  passe  les  Alpes  ,  entre  en 
Italie ,  prend  et  brûle  la  ville  de  Rome  ,  puis  s'ha- 
bitue dans  la  Ligurie  ,  l'IIistrie  ,  et  les  autres  pais 
en  deçà  et  au  delà  du  Pô ,  où  elle  bâtit  les  villes 
de  Milan  ,  de  Côme  ,  de  Bresse  ,  de  Vérone  ,  de 
Bergame  ,  de  Trente  et  de  Vicence.  L'autre  partie 
entre  dans  l'une  et  l'autrePannonie,  pénétre  jus- 
qu'en Grèce  et  en  Macédoine  ,  et  y  fixe  sa  demeu- 
re :  ce  qui  fit  porter  au  pais  le  nom  de  Gallogré- 
ce ,  puis  de  Galatie. 

Pylheas  et  Euthymenes,  l'un  et  l'autre  de  Mar- 
seille, entreprennent  de  longues  courses  pour  re- 
connoître  les  pais  étrangers  ,  et  écrivent  des  ou- 
vrages de  géographie. 


162. 


163. 
4. 


166. 

4. 
168. 

1. 
171. 

4. 


172. 
4. 

173. 
1. 


174. 
1. 

2. 

178. 

3. 
179. 

4. 
180. 

1. 

2. 


An.  delà 
fond.deRo. 

624. 


629. 


641. 
646. 
661. 


665. 
666. 

670. 

671. 
688. 
693. 
694. 
695. 

696. 


An.  avant 
l'Ere  vulg. 

130. 


125. 


113. 

108. 

98. 


89. 

88. 

84. 

83. 
66. 
61. 
60. 
59. 

58. 


432 


TABLE 


Vers  ce  lems-ci  fleurisspit  Eralosthenes ,  Philo- 
sophe Gaulois.  11  écrivit  l'histoire  de  sa  nation  , 
qui  ne  subsiste  plus  depuis  long-tems. 

La  partie  des  Gaules  ,  que  l'on  nomma  depuis 
la  Gaule  Narbonoise,  entre  les  Alpes,  le  Rhône 
et  la  mer  de  Ligurie,  commence  à  subir  le  joug 
des  Romains  par  les  armes  de  M.  Fulvius  Flaccus 
Consul. 

Naissance  de  Marcus  Antonius  Gnipho  ,  Gram- 
mairien et  Rhéteur. 

Naissance  de  Valere  Caton  ,  poêle  et  Gram- 
mairien. 

Lucius  Ph)tius ,  Rhéteur  Gaulois,  enseigne  la 
rhéthorigue  à  Rome  :  ce  que  personne  n'y  avoil 
encore  fait  avant  lui.  Il  y  est  suivi  d'un  grand 
concours  d'auditeurs  ;  et  Ciceron  encore  enfant 
se  plaint  de  n'avoir  pu  être  du  nombre. 

Roscius,  le  plus  fameux  Comédien  qui  eût  en- 
core paru ,  fait  l'admiration  de  Rome  par  ses  re- 
présentations du  théâtre. 

Marc  Antoine  Gniphon  enseigne  la  grammaire 
à  Rome.  11  y  voit  César  encore  jeune  au  nombre 
de  ses  disciples,  et  Ciceron  après  les  exercices  du 
barreau  ,  va  prendre  de  ses  leçons. 

Valerius  Cato  ,  autre  Grammairien  et  Poète , 
donne  aussi  des  leçons  de  grammaire  et  de  Poéti- 
que dans  la  même  ville. 

Naissance  de  Publius  Terentius  Varro  au  boui^ 
d'Atace-sur-Aude  dans  la  Gaule  Narbonoise. 

Naissance  de  Cornélius  Gallus,  Poète. 

Mort  du  Comédien  Roscius  dans  une  grande 
vieillesse. 

Naissance  de  Vibius  Gallus,  Orateur. 

Les  Eduens  apellent  les  Romains  à  leur  secours, 
contre  les  incursions  des  Germains  ligués  avec  les 
Sequanois  et  les  Auvergnats. 

César  commence  à  faire  la  guerre  dans  les 
Gaules.  En  moins  de  neuf  ans  il  subjugue  tout  ce 
vaste  païs  qui  est  depuis  les  Pyrénées  et  le  Rhône, 


Olymp. 


187. 
3. 


An  de  la 
fond. de  Ro. 


182. 

705 

4. 

183. 

70G 

1. 

185. 

715 

2. 

724. 


An  avant 
l'Ere  vulg. 


4. 

725. 

188. 

728. 

3. 

4. 

729. 

190. 

734. 

1. 

191. 

739. 

2. 

3. 

740. 

192. 

742. 

1. 

3. 

744. 

49. 
49. 


39. 


CHRONOLOGIQUE. 


433 


30. 


29. 


26. 


25. 


20. 


15. 


14. 


12. 


10. 


Tome  I.  Sec.  Pari 


jusqu'au  Rhin  el  à  l'Océan.  Dèslors  on  acorde 
à  plusieurs  Gaulois  le  droit  de  bourgeoisie  Romai- 
ne ,  el  même  à  quelques-uns  entrée  dans  le  Sénat. 
Divitiac  Philosophe  Druide ,  l'un  des  premiers  de 
la  ville  d'Autun  ,  devient  un  des  favoris  de  César. 
C.  Valerius  Procillus  gagne  la  confiance  de  ce  Gé- 
néral des  armées  Romaines  ,  qui  l'envoie  en  am- 
bassade auprès  d'Arioviste  Roi  des  Germains. 

Mort  de  Thelon  et  de  Gyarée  frères  jumeaux  , 
habiles  Mathématiciens. 

P.  Terenlius  Varro  à  l'âge  de  35  ans  étudie  le 
Grec.  Naissance  de  Votienus  Montanus ,  célèbre 
Orateur. 

L'Empereur  Auguste  vient  dans  les  Gaules  et 
y  établit  l'ordre  du  gouvernement  selon  les  loix 
romaines.  Il  y  crée  des  Préteurs,  des  Présidens, 
des  Questeurs  ,  qui  y  rendent  la  justice  en  latin. 
On  vit  alors  trois  langues  en  usage  dans  les  Gau- 
les, le  Grec,  le  latin  et  le  Gaulois. 

Cornélius  Gallus  ,  célèbre  Poëte  Gaulois  ,  est 
fait  Gouverneur  de  l'Egypte.  Ce  fut  le  premier 
Gouverneur  qu'eurent  les  Romains  dans  cette 
province  ,  qu  il  gouverna  pendant  quatre  ans. 

Vibius  Gallus  se  fait  admirer  à  Rome  dans  le 
barreau  par  la  force  et  la  beauté  de  son  éloquence. 

Cornélius  Gallus  meurt  sous  le  Consulat  d'Au- 
guste pour  la  huitième  fois. 

Fondation  ou  rétablissement  de  la  ville  de  Lyon 
par  Munacius  Plancus  ,  ou  Plancius  ,  Gouverneur 
de  la  Gaule  Narbonoise ,  et  disciple  de  Ciceron. 

Mort  de  Publius  Terentius  Varro  ,  Poëte  et  His- 
torien. Naissance  de  l'Orateur  Julius  Florus. 

Naissance  de  Cnœus  Domitius  Afer ,  un  des 
plus  célèbres  Orateurs  de  son  tems. 

Germanicus  ,  ce  Prince  si  chéri  des  Romains, 
naît  à  Lyon  dans  les  Gaules. 

Drusus  dédie  à  Lyon  un  temple  fameux ,  où  se  fi- 
rent depuis  les  exercices  literaires  en  grec  et  en  latin. 

Trogue  Pompée  écrit  son  histoire  universelle  , 
dont  il  ne  nous  reste  que  l'Abrégé  fait  par  Justin . 
Naissance  de  l'Empereur  Claude  à  Lyon. 

I  i  i 


An.  dr' 
VEre  vulij. 


5. 


AU 


TABI.E 


10. 
12. 

15. 

18. 
20. 
28. 

30. 

36. 
38. 
Ai). 


41. 

43. 
44. 

in. 


(îermanicus  est  adopt<^  par  Tibère  le  27'  de  Juin. 

Vibius  Gallus  fameux  Orateur  meurt  à  Rome  d'un  genre  de 
mort  aussi  humiliant  que  sa  réputation  avoit  été  éclatante. 
Ag rotas ,  Orateur  grec  de  Marseille  ,  plaide  à  Rome  avec 
quelque  succès. 

La  réputation  que  Tite-Live  s'étoit  acquise  par  la  douceur 
et  la  fécondité  de  son  éloquence,  attire  à  Rome  plusieurs  no- 
bles Gaulois.  Naissance  de  Marcus  Aper ,  célèbre  Orateur 
dans  la  suite. 

Oscius  et  Pacatus  enseignent  la  rhétorique  à  Marscilh;,  puis 
à  Rome.  Germanicus  est  élevé  au  Consulat  pour  la  première 
fois. 

Les  écoles  de  Marseille  soutiennent  encore  leur  première  ré- 
putation. 

Germanicus  est  fait  Consul  pour  la  seconde  fois,  et  meurt  de 
poison  à  Antioche  l'année  suivante. 

Les  écoles  d'Autun  deviennent  fort  célèbres  dans  l'Empire 
Romain. 

Mort  de  Votienus  Montanus  dans  les  islcs  Baléares  ,  où  Ti- 
bère l'avoit  relégué,  .hilius  Montanus,  aussi  habile  Poëte  que 
l'autre  étoit  habile  Orateur ,  encourt  la  disgrâce  du  môme 
Prince. 

Cn.  Domitius  Afer  est  fait  Préteur.  Valerius  Asiaticus  s'at- 
tire l'estime  ae  tout  le  monde  par  ses  excellentes  qualités. 

Claude  depuis  Empereur  est  fait  Sénateur. 

Naissance  de  Cn.  Julius  Agricola  à  Frejus  le  13  de  Juin. 

L'empereur  Caligula  établit  à  Lyon  les  exercices  de  litera- 
ture  en  grec  et  en  latin.  Il  élevé  au  Consulat  l'Orateur  Cn. 
Domitius  Afer.  Julius  Grœcinus  Si'nateur  ,  père  d'Agricole  , 
est  mis  à  mort  par  l'ordre  de  Caligula.  Naissance  do  l'Orateur 
Julius  Secundus. 

Claude  est  élevé  à  l'Empire  le  25  de  Janvier  ,  âgé  de  ."iO  ans. 

Clodius  Quirinalis  enseigne  la  Rhétorique  à  Rome  avec  un 
tns-grand  éclat. 

Messaline  fait  mourir  Valerius  Asiaticus  ,  homme  consulaire 
si  célebn;  dans  l'histoire. 

Demosthene  ,  Médecin  de  Marseille,  commence  à  se  faire 
de  la  réputation  chez  les  étrangers ,  où  il  avoit  étudié. 

Cn.  Domitius  Afer,  l'un  des  plus  excellens  Orateurs  de  son 
siècle  ,  fait  l'admiration  de  Rome.  Il  exerce  la  charge  d'Inten- 
dant des  eaux.  Julius  Florus  brille  à  Rome  par  son  éloquence. 


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l'Ere  vhIij. 

47. 


CllROxNOLOGlULE. 


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435 


19. 
52. 

54. 


55. 


:;o. 

59. 


60. 
Gl. 
65. 
06. 

68. 

69. 
70. 


74. 


L'Empereur  Claude  publie  un  édil,  pour  faire  recevoir  trois 
nouvelles  lellres  dans  l'alphabei  lalin.  Il  fail  ordonner  par  le 
Sénat  que  tous  les  (iaulois  qui  éloienl  citoïens  Homains,  pour- 
roienl  être  reçus  Séinteurs.  Dèslors'  on  en  reçut  quelques-uns 
qui  éloient  d'Aulun. 

L'Kmpereur  Claude  augmente  l'enceinte  de  Rome. 

Claude  achevé  l'aqueduc  (jue  l'Empereur  Caligula  avoit 
commencé  à  faire  construire  à  Kome. 

Mort  de  l'Empereur  Claude  le  13*  d'Octobre,  dans  la  64*  an- 
née de  son  âge. 

L.  Stralius  Ursulus  ou  Surculus  enseigne  la  rhétorique  dans 
les  Gaules  avec  beaucoup  de  réputation.  Mort  de  Julius  Flo- 
rus,  Prince  de  rélo(pience  des  Caules. 

Mort  de  Clodius  tjuirinalis,  célèbre  Orateur. 

Mort  de  l'Orateur  Cn.  Domitius  Afer.  Pétrone  devient  un 
des  premiers  favoris  de  Néron,  et  brille  à  sa  cour  par  son  es- 
prit. 

Zenodore,  habile  statuaire,  est  appelle  des  Gaules  à  Rome 
par  l'Empei-eur  Néron. 

Marcus  Anlonius  Primus  est  chassé  du  Sénat.  Seneque  le 
Pliilosoj)he  dédie  ses  livres  des  bienfaits  à  vEbucius  Liberalis. 

Crinas  et  Charmis,  deux  Médecins  Marseillois,  se  font  beau- 
coup de  réputation  à  Rome. 

Mort  de  Pétrone,  dont  il  nous  reste  une  Satyre  en  vers  et  en 
prose. 

Cajus  Julius  Vindex  Gouverneur  de  la  Celtique  se  tuë  lui- 
même.  Marcus  Anîonius  Primus  se  déclare  pour  Ves[»asien  ,  et 
pousse  si  vigoureusement  la  partie  de  Vilellius,  que  cet  Empe- 
reur fut  luù  et  tous  ses  gens  défaits. 

Valerius  Paulinus  est  fait  Intendant  de  la  Gaule  Narbonoi- 
se.  Valerius  Asialicus  le  jeune,  Gouverneur  de  la  Helgique  , 
est  désigné  Consul  pour  l'année  suivante.  Vilellius  lui  promet 
s;i  fille  en  mariage. 

L'éloquence  commence  à  déchoir  de  ses  premières  beautés. 
Claudius  Cos.sus,  Orateur  des  Helvetiens  ,  se  distingue  par  son 
éloquence.  vEbucius  Liberalis  se  trouve  à  la  destruction  de  Jé- 
rusalem. Julius  Aus|)ex  et  TuUius  Valentinus,  Orateurs,  se 
signalent  diversement  dans  l'assemblée  des  Gaules  tenue  à 
Reims. 

Marcus  Aper  et  Julius  Secundus  brillent  à  Rome  dans  le 
barreau .  Le  jjremier  écrit  le  dialogue  des  Orateurs.  ; 

li  i  ij 


An  de 
l'Ere  viilg. 


t3C. 


TABLE 


70. 


77. 


78. 
80. 


82. 
8o. 


86. 

89. 

90. 

93. 
9i. 

100. 


104. 
110. 

118. 
120. 


Gn.  Julius  Agricola  est  fait  Patrice  et  Gouverneur  d'Aqui- 
taine. Salvius  Liberalis  commence  à  se  faire  connoître  à  Rome 
dans  le  barreau  par  son  éloquence. 

Gn.  Julius  Agricola  est  élevé  au  Gonsulat ,  et  donne  l'année 
suivante  sa  fille  en  mariage, à  l'historien  Tacite.  Sextus  Julius. 
Gabinianus  enseigne  la  rhétorique  dans  les  Gaules  avec  beau- 
coup de  réputation.  Naissance  de  Favorin,  qui  devint  depuis 
si  célèbre  entre  les  Sophistes. 

Gn.  Julius  Agricola  est  fait  Gouverneur  de  la  grande  Bre- 
tagne, où  il  introduit  l'étude  des  belles  letres. 

Marcus  Antonius  Primus  retiré  à  Toulouse  sa  patrie  ,  y  en- 
tretient un  commerce  de  literature  avec  le  poêle  Martial,  dont 
il  étoit  le  Mécène.  Mort  de  l'Orateur  Julius  Secundus  dans  la 
40*  année  de  son  âge. 

Rufîus  enseigne  la  rhétorique  à  Rome. 

T.  Aurelius  Fulvius,  aïeul  paternel  de  l'Empereur  Tite  An- 
tonin,  est  fait  Consul  pour  la  première  fois.  Gn.  Julius  Agri- 
cola est  rappelé  de  la  grande  Bretagne  à  Rome.  Mort  du  cé- 
lèbre Orateur  Marcus  Aper. 

Naissance  de  l'Empereur  Tite  Antonin  le  19  de  Septembre,  f  h 

T.  Aurelius  Fulvius  est  élevé  au  Gonsulat  pour  la  seconde 
fois.  Mort  de  Marcus  Antonius  Primus. 

Les  poésies  de  Martial  passent  à  Vienne  ,  qui  en  fait  ses  déli- 
ces. Artanuï  Jurisconsulte  fleurit  à  Narbone. 

Mort  de  Gn.  Julius  Agricola  le  23  d'Août. 

L'édit  que  l'Empereur  Domitien  publie  contre  tous  les  Phi- 
losophes en  attire  quelques-uns  dans  les  Gaules. 

Libraires  à  Lyon.  Ils  y  débitent  les  écrits  de  Pline  le  jeune. 
Geminius  entretient  commerce  de  letres  avec  cet  Orateur. 
Salvius  Liberalis  plaide  à  Rome  avec  beaucoup  d'éclat. 

Mort  de  Valerius  Paulinus  homme  de  letres  ,  grand  ami  de 
Pline  le  jeune  et  de  Martial.  Abascante,  Médecin  de  Lyon,  écrit 
sur  la  médecine. 

Florus  écrit  son  abrégé  de  l'histoire  Romaine.  Sentius  Au- 
gustinus  se  fait  admirer  par  la  beauté  de  ses  poésies  et  par  son 
éloquence  dans  le  barreau.  Trebonius  Rufinus  ,  Magistrat  de 
Vienne,  entretient  un  commerce  de  letres  avec  Pline  le  jeune. 

Mort  de  Salvius  Liberalis,  après  avoir  illustré  le  Barreau 
pendant  plus  de  quarante  ans. 

Tite  Antonin,  après  avoir  été  Questeur  et  Préteur,  est  éle- 
vé au  Consulat. 


l 


i  1  i  1 


Ah.  if 
l'Ere  vulg. 

130. 
132. 
134. 

135. 


138. 

145. 
150. 
152. 

157. 

161. 

165. 
168. 

177. 


CHRONOLOGIQUE. 


437 


180. 

188. 

193. 
195. 
196. 

198. 

2  9 


Naissance  de  S.  Irenée,  depuis  Evêque  de  Lyon. 

Sentius  Augurinus  est  élevé  au  Consulat. 

Favorin  l'un  des  plus  fameux  Sophistes  de  son  siècle  brille  â 
Athènes  par  son  éloquence. 

Marcus  Cornélius  Fronto  passe  à  Rome  pour  le  plus  célè- 
bre Avocat  au  barreau.  Il  enseigne  l'éloquence  à  Marc  Aure- 
le  et  à  Lucius  Verus  depuis  Empereur. 

Tite  Antonin  est  adopté  par  l'Empereur  Adrien  le  25  de  Fé- 
vrier ,  feçoit  la  puissance  proconsulaire  et  du  Tribunat ,  avec  le 
titre  de  César.  Le  10  de  Juillet  il  se  voit  seul  maître  de  l'Empire.' 

Favorin  passe  d'Athene»  à  Rome  ,  où  il  inspire  une  nouvelle 
émulation  pour  les  belles  connoissances. 

Charmoiaeus  et  Menecrates  se  font  beaucoup  de  réputation 
à  Marseille  par  la  science  du  droit.  Mort  de  Favorin. 

Tite  Antonin  écrit  à  tous  les  Grecs  en  Faveur  des  Chrétiens. 
S.  Pothin  vient  dans  les  Gaules  et  y  jette  les  premiers  fonde- 
mens  de  l'Eglise  de  Lyon. 

La  foi  se  répand  à  Autun ,  à  Langres ,  à  Dijon  ,  à  Besançon  , 
à  Valence  dans  la  Viennoise. 

Mort  de  l'Empereur  Tite-Antonin ,  après  un  peu  plus  de  22 
ans  de  règne. 

Zenothemis  brille  à  Marseille  par  la  science  du  droit. 

Mort  de  Marcus  Cornélius  Fronto,  le  plus  célèbre  Orateur 
de  son  tems. 

S.  Pothin  ,  Premier  Evêque  de  Lyon,  souffre  le  martyre  avec 
47  autres  personnes.  Avant  leur  martyre  ils  écrivent  au  Pape 
Eleuthere  et  aux  Eglises  d'Asie  et  de  Phrygie.  Les  Fidèles  de 
Lyon  et  de  Vienne  écrivent  l'histoire  de  ce  martyre.  S.  Irenée 
est  élu  à  la  place  de  S.  Pothin.  • 

Fauste  écrit  les  actes  du  martyre  des  SS.  Andoche  et  se» 
compagnons, 

S.  Irenée  écrit  contre  Florin  et  Blaste.  Naissance  de  l'Em- 
pereur Caracalla  le  4"  d'Avril. 

S.  Irenée  écrit  ses  trois  premiers  livres  contre  les  hérésies. 

S.  Irenée  écrit  ses  deux  derniers  livres  contre  les  hérésies.    . 

Caracalla  est  fait  César.  Caïus  ,  depuis  Prêtre  et  Evêque  de* 
Nations,  et  S.  Hippolyte  depuis  Evêque  et  Martyr,  se  forment 
à  Lyon  sous  la  discipline  de  S.  Irenée. 

Caracalla  reçoit  la  puissance  du'Tribunat ,  et  peut-être  aussi 
celle  d'Auguste.  I  Concile  de  Lyon  au  sujet  du  jour  auquel  il 
falloit  célébrer  la  fête  de  Pâques. 


A  ».  '<< 

l'Ere  vulg. 

202. 


211. 
212. 

217. 
220. 

228. 


2:h. 

235. 


2iO. 
245. 


438 


TABLE 


250. 


252. 
254. 


257. 
200. 
209. 
270. 


Caracalla  est  fait  Consul  avec  Severe  son  père,  et  épouse 
IMaulille.  Martyre  de  S.  Irenée.  I^  violence  de  la  persécution 
disperse  ses  disciples.  Caïus  et  S.  Hippolyte  quittent  la  ville 
de  Lyon  ,  et  se  retirent  en  divers  lieux. 

Caracalla  parvient  à  l'Empire  le  4"  de  Février. 

Caïus,  disciple  de  S.  Irenée  brille  dans  l'Eglise  de  Rome  ,  et 
écrit  contre  divers  héreti(jues. 

Mort  de  l'Empereur  Caracalla  le  8"=  d'Avril. 

Décadence  de  la  majesté  des  belles  letres  et  de  l'histoire.  S. 
Trophime  est  envoie  dans  les  Caules  ,  et  fait  Evêque  d'Arles. 

S.  Hippolyle  Evêque  et  Martyr  ,  disciple  de  S.  Irenée  ,  pa- 
roît  avec  éclat  entre  les  plus  savans  hommes  de  l'Eglise  ,  et 
compose  plusieurs  ouvrages  en  faveur  de  la  religion. 

Les  Femmes  Druides  se  mêlent  encore  de  divination. 

Julius  Titianus  enseigne  les  belles  letres  à  Maximin  fds  de 
l'Empereur  Severe.  S.  Hippolyle  a  vécu  au  moins  jusqu'en  ce 
lems-ci. 

Julius  Titianus  enseigne  l'éloquence  tantôt  à  Lyon  tantôt  à 
Besançon,  et  compose  divers  ouvrages. 

Les  écoles  d'Autun  sont  encore  ilorissantes.  L'aïeul  de  l'O- 
raleur  Eumene  y  enseigne  avec  réputation.  S.  Saturnin  est  en- 
voie pour  prêcher  la  foi  dans  ks  Gaules.  Il  établit  diverses 
Eglises ,  et  en  particulier  celle  d'Eause  ,  dont  le  siège  a  été 
transféré  ensuite  à  Aucii. 

S.  Saturnin  établit  son  siège  à  Toulouse.  11  est  suivi  ou  pn^ 
cédé  dans  les  Gaules  par  S.  Denys  de  Paris  ,  S.  Martial  de  Li- 
moges ,  S.  Catien  de  Tours  ,  S.  Faul  de  Narbone  ,  S.  Austre- 
nioine  de  (^lermoul  en  Auvergne,  qui  exercent  le  même  mi- 
nistère. Leurs  disciples  établissent  diverses  autres  Eglises.  Faus- 
lin  succède  à  llelie  dans  le  siège  épiscopal  de  Lyon. 

L'hérésie  de  Novatien  pénétre  dans  l(!s  Gaules. 

Faustiii  Evêque  de  Lyon  écrit  au  Pape ,  et  à  S.  Cyprien  de 
Cartilage  au  sujet  de  Marcien  Evêque  d'Arles  ,  engagé  dans 
l'hérésie  de  Novati(;n . 

S.  Peregrin  établit  l'Eglise  d'Auxerre  ,  S.  Genulfe  celle  de 
Ciiliors  ,  et  S.  Savinien  quelque  tems  après  celle  de  Sens. 

Naissance  de  l'Orateur  Eumene.  Les  Gaules  divisées  par  dif- 
férentes factions. 

Uuine  de  la  ville  d'Autun  et  de  ses  écoles.  On  cesse  d'y  en- 
seigner pendant  plusieurs  années. 

Naissance  du  Hhéleur  yEmilius  Magnus  Arburius.  i 


*  î 


An  df 
l'Ere  vulg. 

275. 
276. 

277. 
280. 

282. 


CHRONOLOGIQUE. 


439 


284. 

286. 
287. 


288. 

289. 
291. 

292. 

293. 
296. 


DifTerens  peuples  barbares  s'emparent  de  70  villes  des  plus 
considérables  des  Gaules,  et  y  causent  beaucoup  de  trouble. 

Eusebe  Orateur  et  Poëte  enseigne  les  belles  lelres  à  Bour- 
deaux. 

L'Emporeur  Probe  chasse  des  Gaules  les  barbares  qui  y 
éloient  entrt^s. 

Sextus  Julius  Saturninus  prend  la  pourpre  sous  l'empire  de 
Probe  ,  et  est  tué  presque  aussi-tôt.  Défaite  de  Procule  et  de 
Bonose  qui  s'étoient  révoltés  dans  les  Gaules. 

Carus  est  élevé  à  l'Empire  au  commencement  d'Août,  et 
donne  le  titre  d'Auguste  à  Carin  el  Numerien  ses  fils. 

Mort  de  l'Empereur  Carus  le  8  décembre,  ou  le  12  de  Jan- 
vier de  l'année  suivante.  Carin  et  Numerien  ses  fils  lui  suc- 
cèdent. 

Mort  de  l'Empereur  Numerien ,  après  8  ou  9  mois  de 
règne. 

S.  Eugène  disciple  de  S.  Denys  de  Paris,  à  qui  l'on  atribuë 
quelques  poésies  Chrétiennes,  souffre  le  martyre  à  Deuil. 

Naissance  de  Julius  Ausonius  Médecin,  père  du  poëte  Au- 
sone.  Carause  le  plus  habile  homme  de  son  siècle  dans  la  ma- 
rine ,  se  fait  reconnoîlre  Empereur.  Diocletien  et  Maximien 
Hercule  sont  obligés  de  faire  la  paix  avec  lui.  Martyre  de  S. 
Firmin  premier  Evêque  d'Amiens ,  après  avoir  répandu  la  foi 
en  divers  lieux  des  Gaules. 

La  ville  de  Trêves  devient  le  siège  ordinaire  de  Empereurs 
et  des  Préfets  des  Gaules  qui  avoient  encore  sous  eux  la  grande 
Bretagne  et  l'Espagne.  On  y  voit  briller  quelques  gens  de 
letres. 

Claude  Mamertin  Orateur  prononci'  à  Trêves  le  panégyri- 
que de  Maximien  Hercule  en  présence  de  cet  Empereur. 

Claude  Mamertin  pronoitce  un  autre  panégyrique  en  pré- 
sence de  Maximien  Hercule  ,  à  la  louange  de  cet  Empereur  et 
de  Diocletieii  son  Collègue. 

Constance  Chlore  père  de  Constantin  le  grand  vient  fixer 
sa  résidence  à  Trêves  ,  et  travaille  à  faire  fleurir  les  sciences 
dans  les  (iaules. 

Carause  est  tué  par  Alecte  un  de  ses  Officiers.  Thalasse  en- 
seigne la  grammaire  à  Bourdeaux. 

Eumene  prononce  un  discours  en  présence  du  Préfet  des 
Gaules  pour  le  rélablissemenl  des  écoles  d'Aulun.  Peu  deteras 
après  il  en  prononce  un  autro  à  la  louange  et  en  présence  de 


An    de 
l'Ere  vulg. 


297. 
29S. 
300. 


440 


TABLE 


301. 
302. 
303. 
305. 

307. 
309. 
310. 

311. 


313. 


314. 


Constance  Chlore  ,  qui  l'engage  à  donner  des  leçons  d'élo- 
quence à  la  jeunesse  de  cette  ville. 

L'Empereur  Constance  Chlore  prend  un  soin  particulier  de 
rétablir  la  ville  d'Autun  et  ses  écoles.  Celles  de  Trêves  com- 
mencent à  devenir  célèbres. 

S.  Rhetice  Evêque  d'Autun  écrit  contre  l'hérésie  de  Nova- 
tien,  et  compose  peut-être  dèslors  le  commentaire  sur  le  Can- 
tique des  Cantiques. 

S.  Genès  soufTre  le  martyre  à  Arles.  Massus  Evêque  de  Pa- 
ris écrit,  dit-on  ,  les  actes  du  martyre  de  S.  Denys  l'un  de  ses 
prédécesseurs.  Les  Gaules  avant  la  fin  de  ce  siècle  deviennent 
la  mère  et  la  nourrice  des  Panégyristes  de  l'Empire.  Naissance 
de  l'Orateur  Tiberius  Victor  Minervius ,  et  ae  Sedatus  cé- 
lèbre Rhéteur  dans  la  suite. 

Lactance  va  d'Afrique  à  Nicomedio  enseigner  la  rhétori- 
que ,  d'où  il  fut  ensuite  apellé  dans  les  Gaules. 

Lactance  compose  la  relation  de  son  voïage  d'Afrique  à  Ni- 
comedie ,  et  un  traité  intitulé  le  Grammairien. 

Lactance  renonce  au  Paganisme,  se  fait  Chrétien,  et  com- 
mence à  travailler  pour  la  défense  du  Christianisme. 

Naissance  de  S.  Hilaire  depuis  Evêque  de  Poitiers.  Les  Gau- 
les jouissent  d'une  paix  profonde  et  d'une  entière  liberté  sous 
l'empire  de  Constance  Chlore. 

Un  Orateur  anonyme  prononce  à  Trêves  le  panégyrique  à 
la  louange  des  Empereurs  Maximien  et  Constantin  le  grand. 

Naissance  du  Poëte  Ausone.  L'Empereur  Constantin  le 
grand  embellit  d'ouvrages  publics  la  ville  de  Trêves. 

Eumene  prononce  à  Trêves  un  3*  discours  en  présence  de 
l'Empereur  Constantin.  Les  Gaules  sous  l'Empire  de  ce  Prince 
reprenent  un  nouveau  lustre.  Lactance  compose  son  traité  de 
l'ouvrage  de  Dieu. 

Eumene  prononce  à  Trêves  un  4"  discours  en  présence  de 
l'Empereur  Constantin  en  action  de  grâces  de  la  faveur  qu'il 
avoit  acordée  à  la  ville  d'Autun.  Aparition  .de  la  croix  à  Con- 
stantin et  à  toute,  son  armée  dans  les  Gaules  :  ce  qui  contribue 
à  y  étendre  la  religion  Chrétienne. 

Un  Orateur  anonyme  prononce  à  Trêves  un  panégyrique  à 
la  louange  de  Constantin  le  grand.  S.  Retice  d'Autun ,  S. 
Materne  de  Cologne  et  S.  Martin  d'Arles  vont  ù  Rome  par 
ordre  de  l'Empereur  pour  y  juger  les  Donatistes. 

I  Concile  d  Arles  le  premier  jour  d'Août  contre  les  Dona- 


Ail  df 
l'Ere  vulg. 


315. 

316. 

317. 
319. 

320. 


CHRONOLOGIQUE. 


441 


321, 


324. 


32 


i). 


329. 
330. 


331. 


332. 


333. 


Tome 


listes.  L'Empereur  Constantin  apelle  Laclance  dans  les  Gaules 
pour  enseigner  l'éloauence  à  Crispe  son  fils  aine.  Lactance 
compose  son  traité  de  la  mort  des  persécuteurs. 

Naissance  du  Rhéteur  Censorius  Atticus  Agricius  ou  Agrœ- 
cius. 

Nai.ssance  de  l'Empereur  Constantin  le  jeune  le  7  d'Août  à 
Arles  et  de  S.  Martin  Evêaue  de  Tours  à  Sabarie. 

Constantin  le  jeune  est  lait  César. 

L'Empereur  Constantin  défend  de  consulter  les  Aruspices 
dans  les  Gaules  comme  ailleurs,  hors  dans  des  lieux  publics. 

Mort  de  Caecilius  Argicius  Arborius,  Philosophe,  aïeul  ma- 
ternel du  Poëte  Ausone.  Constantin  le  jeune  est  fait  Consul  en 
la  4*  année  de  son  âge.  Corinthe,  Sperchée  et  Menesthée  en- 
seignent la  grammaire  gréque  à  Bourdeaux.  Phœbicius  ,  Ma- 
crinus,  Concordius  et  Sucuro  y  donnent  en  même  tems  des 
leçons  de  grammaire  latine.  Lactance  compose  ses  institutions 
divines. 

Constantin  le  jeune,  Consul  pour  la  seconde  fois.  Nazaire, 
Orateur,  prononce  le  premier  jour  de  Mars  un  panégyrique  à 
la  louange  de  l'Empereur  Constantin  le  grand.  Ce  prince  pu- 
blie une  loi  qui  contient  divers  privilèges  en  faveur  de  ceux 
qui  professoient  les  sciences  et  les  beaux  arts  tant  dans  les  Gaules 
qu'ailleurs.  Lactance  compose  son  traité  de  la  colère  de  Dieu. 

Constantin  le  jeune,  Consul  pour  la  troisième  fois.  Mort  de 
S.  Rhétice  Evêque  d'Autun. 

^milius  Magnus  Arborius  enseigne  l'éloquence  à  Toulouse. 
Mort  de  l'Orateur  Lactance  à  Trêves. 

Constantin  le  jeune.  Consul  pour  la  quatrième  fois. 

Exupere  enseigne  la  rhétorique  à  Toulouse,  où  il  voit  entre 
ses  disciples  les  Princes  Dalmace  et  Annibalien.  Leontius  et 
Jucundus,  frères,  donnent  des  leçons  de  grammaire  à  Bour- 
deaux. Staphylius  en  donne  de  rhétorique  à  Auch. 

^milius  Magnus  Arborius  est  apellé  à  Constantinople  pour 
y  enseigner  un  des  fils  du  grand  Constantin.  S.  Martin  âgé  de 
15  ans  suit  la  profession  des  armes.  Constance  est  envolé  dans 
les  Gaules  pour  les  gouverner. 

Constantin  le  jeune,  âgé  seulement  de  16  ans,  marche  contre 
les  Gots  ,  les  défait ,  et  les  soumet  à  l'Empire.  S.  Maximin 
succède  à  S.  Agrece  dans  le  siège  épiscopal  de  Trêves.  . 

L'Empereur  Constantin  publie  une  loi  pour  étendre  les  pri- 
vilèges des  Professeurs  publics. 

/.  Sec.  Part.  K  k  k 


2  9  * 


An  de 
l'Ere  vulg. 

334. 
335. 


442 


TABLK 


337. 


338. 
340. 


342. 
344. 
343. 


3i«. 
347. 


348. 
349. 


Baptême  de  S.  Martin  Evoque  de  Tours.  Kxupere  passe  à 
Narbone,  où  il  continue  à  exercer  l'emploi  de  Rhéteur. 

Constantin  le  jeune  vient  gouverner  les  Gaules  en  qualité  de 
leur  Souverain,  et  y  reçoit  S.  Athanase  qui  est  exilé  à  Trê- 
ves. Fatere  enseigne  la  rhétorique  à  Rome.  Mort  d'yEmilius 
Magnus  Arborius  h  Conslantinople  ,  d'où  Constantin  renvoie 
son  corps  dans  les  Gaules.  Tiberien  est  Vicaire  d'Espagne. 

Ausone  commence  à  enseigner  les  belles  letres  et  l'éloquence 
à  Bourdeaux  :  ce  qu'il  continue  de  faire  pendant  30  ans. 
Constantin  le  jeune  et  ses  deux  frères  prônent  le  titre  d'Auguste 
le  9  de  Septembre  ,  près  de  4  mois  après  la  mort  de  leur 
père.  Eunomie,  fille  de  l'Orateur  Nazaire,  devient  célèbre  par 
son  éloquence.  Tiberien,  de  Vicaire  d'Espagne  est  fait  Préfet 
des  Gaules.  Tiberius  Fabius  Titianus  Consul  avec  Félicien. 

S.  Athanase  quitte  Trêves,  lieu  de  son  exil,  pour  s'en  retour- 
ner à  son  Eglise.  L'Empereur  Constantin  le  jeune  écrit  en  sa 
faveur  aux  Fidèles  d'Alexandrie. 

Mort  de  l'Empereur  Constantin  le  jeune  avant  le  9  d'Avril. 
Un  Orateur  anonyme  prononce  à  Arles  en  langue  gréque  son 
Oraison  funèbre.  Naissance  de  S.  Ambroise  à  Trêves  dans  les 
Gaules.  Baptême  de  S.  Ililaire  de  Poitiers.  Constant  vient  ha- 
biter et  gouverner  les  Gaules  en  qualilé  de  leur  Souverain.  Il  y 
apelle  d'Athènes  Proërese  célèbre  Sophiste. 

S.  Maximin  Evêque  de  Trêves  déconcerte  les  Ariens  qui  tâ- 
choient  de  surprendre  la  religion  de  l'I^^mpercur  Constant. 

Leonlius  et  .lucundus,  frères,  donnent  des  leçons  de  gram- 
maire à  Bourdeaux. 

Glabrio  enseigne  tiu.ssi  la  grammaire  à  Bourdeaux,  à  la  place 
d'Ausone,  qui  passe  à  une  chaire  d'éloquence.  Luciolus  y  ensei- 
gne aussi  la  rh'îtorique  avec  Ausone.  S.  Servais  est  fait  Evêque 
de  Tongres.  Naissance;  d'llesp(;r.!  IV.  fet  des  Gaules,  fils  d'Au- 
sone. S.  Maximin  si;  trouve  au  Concile  de  Milan,  et  solicite 
avec  S.  Athanase  un  Concile  général. 

Concile  de  (  Atlttgni;,  selon  quelques  Auteurs,  au  sujet  d'Eu- 
phrate,  Evêque  de  la  ville. 

S.  Maximin  de  Trêves  après  avoir  travaillé  à  la  convocation 
du  Concile  d»;  Sardique  y  assiste  avec  Verissime  de  Lyon  et  S. 
Servais  de  Tongres.  Les  Ariens  prononcent  anathême  contre 
S.  Maximin  au  Concile  de  Philippople. 

S.  Phebade  est  élu  Evêque  d'Agen. 

S.  Maximin  de  Trêves  meurt  et  S.  Paulin  lui  succède. 


An   de 
VËrr.  vulg. 

350. 


351. 

352. 
353. 


354. 


355. 


350. 


357. 


CHRONOLOGIQUK. 


44» 


Censorius  Atticus  Agricius  ou  Agrœcius  enseigne  la  rhéto- 
rique à  Bourdeaux.  Crispus  et  Urbicus  y  donnent  en  même  tems 
des  leçons  de  grammaire  gréque  et  latine.  Exupere  après  avoir 
enseigné  la  rhétorique  à  Toulouse  et  à  Narbone,  exerce  une 
charge  considérable  en  Espagne.  Sedatus  enseigne  la  rhétori- 
que à  Toulouse.  Mort  des  Rhéteurs  Stnphylius  et  Alethius 
Minervius.  S.  Hilaire  est  élu  Evêque  de  Poitiers. 

S.  Servais  de  Tongres  est  envoie  par  Magnonce  en  ambassade* 
près  de  l'Empereur  Constance. 

S.  Hilaire  de  Poitiers  écrit  son  commentaire  sur  S.  Matthieu. 

II  Concile  d'Arles  où  S.  Paulin  Evêque  de  Trêves  est  con- 
damné à  l'exil,  pour  s'être  oposé  avec  vigueur  à  la  perfidie  des 
Ariens.  Naissance  de  S.  Paulin  depuis  Evêque  de  Noie. 

Gennade  fameux  Avocat  brille  à  Rome  dans  le  barreau. 
Pomponius  Maximus  Herculanus  enseigne  la  grammaire  à 
Bourdeaux,  et  meurt  dans  cet  exercice.  Tiberius  Victor  Mi- 
nervius, après  avoir  enseigné  l'éloquence  à  Constantinople, 
l'enseigne  à  Rome  avec  un  très-grand  éclat.  S.Martin  se  retire 
à  Poitiers  auprès  de  S.  Hilaire  Evêque  de  la  ville. 

S.  Hilaire  de  Poitiers  adresse  une  requête  à  l'Empereur 
Constance  contre  la  persécution  qu'il  faisoit  à  l'Eglise.  Par- 
menien  est  ordonné  evêque  de  Carthage,  où  il  succède  im- 
médiatement au  grand  Donat.  Saturnin  Evêque  d'Arles  se 
trouve  au  Concile  de  Milan  en  faveur  de  l'Ananisme.  Nais- 
sance de  S.  Severe  Sulpice  en  Aquitaine.  Julien,  alors  César, 
vient  gouverner  les  Gaules,  et  y  établit  la  justice  et  le  bon 
ordre.  Paris,  qu'il  choisit  pour  le  lieu  de  sa  résidence,  com- 
mence à  devenir  célèbre  pour  les  sciences. 

Alcime  et  Delphide  enseignent  la  rhétorique  avec  beaucoup 
de  réputation  en  Aquitaine.  Concile  de  Beziers  en  faveur  de 
l'Arianisme.  S.  Hilaire  de  Poitiers  et  Rhodane  de  Toulouse 
sont  exilés  en  Phrygie.  S.  Martin  quitte  Poitiers  et  s'en  retourne 
en  son  pais. 

Les  Evoques  des  Gaules  écrivent  à  S.  Hilaire  de  Poitiers  dans 
son  exil,  sur  leur  attachement  à  la  foi.  Le  Saint  leur  fait  ré- 
ponse, et  les  informe  des  mesures  qu'il  prend  avec  les  bons 
Evêques  d'Orient  en  faveur  de  la  vérité.  Il  écrit  aussi  à  Abra 
sa  fille,  à  laquelle  il  envoie  deux  hymnes.  Il  compose  ses  dou- 
ze livres  de  la  Trinité  contre  les  Ariens.  L'Empereur  Con- 
stance défend  les  augures,  les  aruspices  et  toute  autre  sorte 
de  devination  dans  les  Gaules  comme  ailleurs.   Julien  apelle 

K  k  kij 


Ah  de 
l'Er»  vulg. 


358. 


444 


TABLE 


359. 


360. 


361. 


à  Paris  le  Médecin  Oribase,  qui  y  publie  un  abrégé  de  Ga- 
lien. 

Delpliide  accuse  de  peculat,  devant  Julien  alors  César, 
Numerius,  Gouverneur  de  la  Narbonoise.  S.  Hilaire  de  Poi- 
tiers écrit  dans  son  exil  le  traité  des  Synodes,  sur  la  fin  de  cette 
année.  Mort  de  S.  Paulin  de  Trêves  dans  son  exil.  La  géné- 
rosité des  Evêques  Giaulois  porte  les  Prélats  qui  passoient  pour 
demi  Ariens  à  tenir  le  Concile  d'Ancyre,  où  ils  condamnent 
les  blasphèmes  les  plus  grossiers  de  l'Arianisme.  L'Eglise  Gal- 
licane assemblée  dans  un  Concile  que  l'on  ne  connoît  point 
d'ailleurs,  rejette  la  seconde  formule  de  Sirmich.  S.  Phébade 
d'Agen  écrit  son  traité  contre  cette  formule. 

Naissance  de  l'Empereur  Gratien.  S.  Hilaire  de  Poitiers  se 
trouve  au  Concile  de  Seleucie  en  Isaurie.  S.  Phébade  d'Agen, 
S.  Servais  de  Tongres  et  quelques  autres  Evêques  des  Gaules 
assistent  au  Concile  de  Rimlni.  Ils  y  témoignent  d'abord  beau- 
coup de  vigueur  et  de  fermeté,  et  manquent  enfin  ou  de  lumiè- 
res ou  de  force.  Le  Rhéteur  Patere  brille  à  Bourdeaux  par  ses 
grands  talens. 

Exupere  revenu  d'Espagne  à  Cahors,  y  finit  ses  jours.  Cita- 
rius  enseigne  la  grammaire  gréque  à  Bourdeaux.  Dyname, 
qui  y  donnoit  des  leçons  de  rhétorique,  quitte  cette  ville,  et 
se  relire  à  Lerida  en  Espagne,  où  il  continue  la  même  profes- 
sion. Marcel  enseigne  la  grammaire  à  Narbone.  Tiberius  Vic- 
tor Minervius  revenu  de  Rome  à  Bourdeaux,  y  donne  des  le- 
çons d'éloquence ,  et  y  meurt.  S.  Hilaire  de  Poitiers  va  de 
Seleucie  à  Con'stantinople.  On  y  tient  un  Concile,  où  se  trouve 
Saturnin  Evêque  d'Arles.  S.  Hilaire  présente  une  seconde  re- 
quête à  l'Empereur  pour  obtenir  une  conférence  réglée  avec 
ses  adversaires.  Le  Saint  compose  son  invective  contre  Con- 
stance, et  commence  son  livre  contre  Ursace  et  Valens.  Il 
revient  à  Poitiers,  où  il  est  reçu  avec  de  grandes  aclamations. 
S.  Martin  revient  auprès  de  lui,  et  bâtit  à  Ligugé  le  premier 
monastère  qu'on  eût  encore  vu  dans  les  Gaules.  Naissance  de 
Vigilance  ,  et  de  S.  Honorât  depuis  Evêque  d'Arles  ,  et  de 
Jean  Cassien.  Julien  parvenu  à  l'Empire  défend  d'enseigner 
les  letres,  ce  qui  porta  un  grand  préjudice  à  la  literature  dans 
les  Gaules.  S.  Phébade  d'Agen  compose  un  autre  traité  con- 
tre les  Ariens. 

Claude  Mamertin  est  fait  Préfet  de  l'Ulyrie ,  puis  de  l'Ita- 
lie et  de  l'Afrique,  et  Saluste  des  Gaules.  I  Concile  de  Paris , 


tt     /t      ri 


An  de 
l'Krf  vulg. 


CHRONOLOG[QUE. 


445 


3G2. 


303. 


364. 


365. 
367. 


368. 
369. 
370. 


pour  rapeller  à  la  pénitence  les  Evêques  tombés  à  Rimini.  Sa- 
turnin d'Arles  et  Paterne  de  Perigueux  y  sont  déposés.  S.  Hi- 
laire  assemble  quelques  autres  Conciles  pour  rétaolir  la  pureté 
de  la  foi  et  travaille  à  l'histoire  de  l'Arianisme  en  Occident, 
dont  il  ne  nous  reste  que  des  débris.  Paul  Evêque  de  Paris  écrit 
un  traité  de  la  pénitence.  Naissance  de  S.  Amand  depuis  Evê- 
que de  Bourdeaux,  Anastase  Grammairien  et  Rufus  Rhéteur 
enseignent  dans  les  écoles  de  Poitiers. 

Claude  Mamerlin  est  élevé  au  Consulat,  et  prononce  le 
panégyrique  de  l'Empereur  Julien.  Le  Prêtre  Heliodore  tra- 
vaille avec  S.  Hilaire  de  Poitiers  sur  Job  et  le  Pseaumes. 
S.  Hilaire  adresse  un  livre  au  Préfet  Saluste  contre  Dioscore. 

Saluste  est  fait  Consul  avec  Julien  l'Apostat.  On  veut  l'éfire 
Empereur  à  la  place  de  Julien  tué  cette  même  année  ;  mais 
Saluste  le  refuse.  S.  Hilaire  passe  en  Italie,  où  il  travaille  avec 
S.  Eusebe  de  Verceil  à  rétablir  la  foi  de  Nicée. 

S.  Hilaire  se  trouvant  à  Milan  présente  une  requête  à  l'Em- 

f)ereur  contre  Auxence  Evêque  de  la  ville.  Il  contraint  cet 
'évoque  Arien  de  s'expliquer  sur  sa  croïance,  et  adresse  à  tous 
les  Evêques  et  les  peuples  Catholiques  un  écrit  contre  lui.  Le 
Saint  est  renvoie  à  Poitiers.  Valentmien  I"  révoque  la  défense 
que  Julien  avoit  faite  d'enseigner  les  letres. 

S.  Hilaire  travaille  à  son  commentaire  sur  les  Pseaumes. 
Gratien  est  déclaré  Auguste.  Ausone   est   apellé  à  la  Cour 
pour  prendre  soin  de  l'instruction  de  ce  Prince.  Claude  Ma- 
mertin  est  acusé  de  péculat.  Les  écoles  de  Trêves  deviennent 

Elus  florissantes  que  jamais.  Mort  d'Alcime  un  des  plus  céle- 
res  Poètes  et  Orateurs  de  son  tems.  Sedalus  Rhéteur  meurt 
la  même  année. 

Ausone  reçoit  le  titre  de  Comte,  et  puis  est  fait  Questeur  de 
l'Empire.  Mort  de  S.  Hilaire  de  Poitiers  le  13*  de  Janvier. 

Parmenien  Evêque  Donatiste  de  Carthage  écrit  un  traité 
contre  l'Eglise  Catholique. 

Eutrope  écrit  un  abrégé  de  l'histoire  Romaine.  Harmonius 
et  Unsulus  enseignent  les  belles  letres  à  Trêves.  Mort  du  Phi- 
losophe Hellesponce  ,  et  de  Censorius  Atticus  Agricius  Rhé- 
teur à  Bourdeaux.  S.  Optât  de  Mileve  réfute  le  traité  de  Par- 
menien contre  l'Eglise  Catholique.  L'Empereur  Valentinien  I" 
donne  ù  Trêves  une  loi  contre  les  Magiciens,  et  une  autre  qui 
porte  de  sages  reglemens  pour  les  étudians. 


An   df. 
l'Ere  vulg. 

371. 


372. 

373. 
374. 


446 


TABLE 


375. 


376. 


;{77. 


378. 


379. 


Mort  du  Rhéteur  Delphide.  Naissance  de  l'Empereur  Valen- 
tinien  II.  S.  Martin  est  élu  Evêque  de  Tours. 

Parmenien  Evéque  Donaliste  de  Carthage  écrit  contre  Ti- 
cone  autre  Donatiste. 

S.  Ambroise  est  fait  gouverneur  de  la  Ligurie  et  de  l'Emilie. 

Théodore  Secrétaire  d'Etat  sous  Valens  a  la  tête  tranchée 
pour  avoir  voulu  aspirer  à  l'Empire.  Il  se  tient  un  Concile  na- 
tional à  Valence  dans  les  Gaules.  S.  Just  de  Lyon  et  S.  Phébade 
d'Agen  y  assistent  avec  plusieurs  autres  Evêques  Gaulois.  Elec- 
tion de  S.  Ambroise  pour  remplir  le  siège  de  Milan.  Son  bap- 
tême le  30  Novembre,  son  ordination  le  8  du  mois  suivant. 

Gratien  à  la  mort  de  son  père  se  trouve  chargé  du  gouver- 
nement de  l'Empire  d'Occident.  Il  associe  à  l'Empire  son  jeune 
frère  Valentinien  II.  S.  Ambroise  écrit  un  traité  sur  le  Para- 
dis, et  deux  livres  sur  Abel  et  Gain. 

Gratien  fait  diverses  loix  en  faveur  de  l'Eglise  et  des  letres 
dans  les  Gaules.  Grégoire  exerce  la  Questure.  S.  Ambroise 
compose  un  livre  sur  Tobie.  Hespere  est  fait  Proconsul  d'Afri- 
que, et  entre  le  lO^jourde  Mars  dans  cette  charge ,  qu'il  exer- 
ça dix-huit  mois.  Paulin,  fils  de  ce  Proconsul,  vient  au  monde  à 
Pella  en  Macédoine,  et  un  mois  après  est  porté  en  Afrique. 

Mort  de  Julius  Ausonius  Médecin.  S.  Ambroise  écrit  trois  li- 
vres sur  les  Vierges,  et  bientôt  après  un  livre  sur  les  Veuves.  Mar- 
cel le  Médecin  est  fait  Maître  des  Offices.  Mort  de  Marcel 
Grammairien  à  Narbone,  et  de  Nepotien  Rhéteur  à  Bourdeaux. 

Ausone  exerce  la  Préfecture  dans  les  Gaules  avec  Hespere 
son  fils.  Gratien  désigne  Ausone  avec  Olybre  pour  être  Consuls 
l'année  suivante.  Symmaque  écrit  à  l'Historien  Kutrope  sur  l'heu- 
reux règne  de  Gratien.  Ce  Prince  défait  les  Allemans,  et  donne 
la  paix  aux  frontières  du  Rhin  et  du  Danube.  Il  se  voit  maître 
de  l'Orient  par  la  mort  de  son  oncle  Valens.  Il  rapelle  les 
Evêques  bannis,  reprime  les  hérétiques.  S.  Ambroise  à  la  prière 
de  cet  Empereur  compose  ses  deux  premiers  livres  sur  la  foi. 
Il  joint  aux  livres  sur  les  Vierges  un  traitée  de  la  Virginité.  Il  fait 
l'oraison  funèbre  de  S.  Satyre  son  frère,  et  un  autre  écrit  pour  se 
consoler  de  sa  mort  par  l'espérance  de  la  résurrection.  S.  Paulin 
est  fait  Consul,  subrogé  peut-être  à  l'Empereur  Valens  mort 
celte  année.  Naissance  de  S.  Eucher  depuis  Evêque  de  Lyon. 

Ausone  encore  Préfet  des  Gaules  est  élevé  au  Consulat. 


An   de 
l'Ere  vulg. 


CHRONOLOGIQUE. 


447 


380. 


381, 


382. 
383. 


384. 


prononce  à  Trêves  le  panégyrique  de  Gratien.  Ce  Prince  asso- 
cie Theodose  à  l'Empire.  Sibure  est  Préfet  du  Prétoire.  S.  Am- 
broise  écrit  ses  trois  derniers  livres  sur  la  foi.  L'Empereur  Gra- 
lien  le  prie  d'écrire  aussi  sur  le  S.  Esprit.  11  publie  un  livre  sur 
Noé  et  l'Arche.  S.  Delphin  est  élu  Evêque  de  Bourdeaux.  Hes- 
pere  est  encore  Préfet  des  Gaules  cette  année-ci  et  la  suivante. 
S.  Paulin  fait  son  premier  voïage  à  Noie  et  se  voue  à  S.  Félix. 
Paulin  surnommé  le  pénitent,  n'aïant  encore  que  trois  ans,  est 
porté  d'Afrique  à  Bourdeaux  sa  patrie. 

Dyname  meurt  à  Lerida  ,  où  il  enseignoit  la  rhétorique. 
Iquere  ou  Hiere  enseignent  l'éloquence  à  Rome.  S.  Augustin  lui 
adresse  ses  livres  de  la  bienséance  et  de  la  beauté.  Ausone  adresse 
ses  Fastes  au  Poêle  Procule.  Afranius  Syagrius  est  fait  Pré- 
fet d'Italie.  Mort  de  Victorius  Grammairien  de  Bourdeaux. 
S.  Jusl,  disciple  de  S.  liilairo  de  Poitiers,  écrit,  dit-on,  la  vie 
de  ce  saint  Prélat.  S.  Phébade  d'Agen  préside  au  Concile  de 
Saragoce  contre  les  Priscillianistes.  S.  Delphin  de  Bourdeaux 
(t  quelques  autres  Evoques  d'Aquitaine  se  trouvent  aussi  à  ce 
Concile. 

Gratien  donne  les  ordres  pour  la  convocation  du  Concile 
d'Aquilée,  qui  se  tient  cette  année  contre  les  Ariens.  S.  Am- 
broise  assiste  à  ce  Concile  et  en  conduit  toute  l'action.  S.  Just 
de  Lyon,  Constance  d'Orange,  Procule  de  Marseille,  Théo- 
dore d'Octodure,  Domnin  de  Grenoble  et  Amance  de  Nice  se 
trouvent  à  ce  Concile.  S.  Just  à  son  tour  renonce  à  l'épisco- 
pat,  et  se  retire  parmi  les  solitaires  d'Egypte.  S.  Ambroise  pu- 
blie ses  trois  livres  sur  le  S.  Esprit.  Afranius  Syagrius  est  fait 
Préfet  des  Gaules.  Valerien  exerc(^la  Préfecture  dans  Rome. 

.  Afranius  Syagrius  encore  Préfet  des  Gaules  et  d'Italie  est 
élevé  au  Consulat.  S.  Ambroise  se  trouve  à  un  Concile  assem- 
blé à  Rome.  Il  écrit  un  traité  sur  le  mystère  de  l'Incarnation. 

Gratien  est  trahi  et  tué  auprès  de  Lyon.  Grégoire  exerce  la 
Préfecture  des  Gaules  et  de  l'Espagne  ave  Probe.  Ausone  se 
retire  dans  ses  terres.  S,  Ambroise  vient  dans  les  Gaules  auprès 
de  Maxime,  qu'il  empêche  de  passer  en  Italie,  et  avec  qui  il 
conclud  la  paix  au  nom  du  jeune  Empereur  Valentinien  II.  Il 
compose  ses  quatre  livres  de  la  plainte  de  Job  et  de  David. 

Tétrade  enseigne  les  belles  letres  à  Angoulême.  I"  Concile 
Bourdeaux  contre  les  Priscillianistes.  S.  Delphin  Evêque  de 
la  ville  y  préside;  et  S.   Martin  de  Tours  s'y  trouve  présent. 


/In  de 
Ere  vulg. 


448 


TABLE 


385. 


386. 
387. 


388. 


389. 

il 
390. 


S.  Ambroise  écrit  deux  livres  de  la  pénitence,  et  sa  réponse  à 
Symmaque  oui  demandoit  qu'on  rendît  au  Sénat  l'autel  de  la 
Victoire.  Il  fait  aussi  l'Apologie  de  David.  Mort  de  S.  Servais 
Evêque  de  Tongres.  Assemblée  d'Evêques  à  Trêves  contre  les 
Priscillianistes. 

Eucrocie  femme  du  Rhéteur  Delphide  a  la  tête  tranchée  à 
Trêves  à  cause  de  l'hérésie  de  Priscillien.  Iquere  ou  Hiere  est 
fait  Comte  d'Orient.  Pallade  jeune  Gaulois  enseigne  la  rhéto- 
rique à  Rome.  Les  enfans  du  Rhéteur  Sedatus  exercent  la  même 
profession  à  Rome  et  à  Narbone.  Ausone  écrit  les  éloges 
des  Professeurs  de  grammaire  ou  d'éloquence  à  Bourdeaux  et 
les  épitaphes  de  ses  parens.  Valentinien  II  publie  une  loi  d'in- 
dulgence en  faveur  des  prisonniers.  S.  Ambroise  commence 
son  commentaire  sur  S.  Luc,  qu'il  finit  l'année  suivante.  L'af- 
faire des  Ithaciens  cauSe  entre  les  Evêques  Gaulois  des  brouil- 
leries  qui  durent  plusieurs  années. 

S.  Ambroise  fait  la  découverte  des  corps  de  S.  Gervais  et  de 
S.  Protais.  Il  écrit  pour  fixer  le  jour  de  Pâques  l'année  suivante, 
et  finit  son  commentaire  sur  S.  Luc. 

S.  Ambroise  confère  le  baptême  à  S.  Augustin  et  à  S.  Alipe. 
Il  vient  dans  les  Gaules  demander  le  corps  de  l'Empe- 
reur Gratien  h  Maxime,  qui  le  lui  refuse.  Il  fait  son  commen- 
taire sur  le  Pseaume  118;  deux  livres  sur  Abraham;  traité 
d'Isaac  et  de  l'Ame;  un  autre  du  bien  de  la  mort;  deux  livres 
de  Jacob  et  de  la  vie  bienheureuse;  un  traité  de  la  fuite  du  siè- 
cle ;  un  autre  sur  le  Patriarche  .loseph  ;  un  livre  sur  les  bénédic- 
tions des  Patriarches;  le  traité  des  mystères. 

Naissance  de  S.  Germain  depuis  Evêque  d'Auxerre,  et  de 
Vincent  depuis  Mqjne  à  Lerins.  Les  Evêques  des  Gaules  con- 
damnent les  Ithaciens.  Mort  de  Sibure  Préfet  du  Prétoire. 
Pallade  remplit  une  chaire  d'éloquence  à  Rome  ,  où  il  han- 
toit  le  barreau. 

Latinus  Pacatus  Drepanius  prononce  à  Rome  le  19  de  Jan- 
vier le  panégyrique  de  l'Empereur  Theodose.  Axius  Paulus 
Poète  et  Orateur  entretient  commerce  ,de  letres  avec  Ausone. 
Les  Poêles  Theon  et  Procule  en  font  de  même.  S.  Ambroise 
compose  son  Hexameron. 

Drepane  est  fait  Proconsul  d'Afrique.  Rufin  devient  maî- 
tre du  Palais.  Mort  d'Afranius  Syagrius  Poêle.  S.  Ambroise 
tient  un  Concile  à  Milan  où  se  trouve  Théodore  d'Octodure 


An  de 
F  Ere  vulg. 


CHRONOLOGIQUE. 


449 


391. 
392. 


393. 


394. 


et  Constance  d'Orange,  et  où  Jovinien  et  sa  doctrine  sont  con- 
damnés. Il  refuse  l'entrée  de  l'Eglise  à  l'Empereur  Theodose, 
et  le  soumet  à  la  pénitence  publique.  Il  fait  un  traité  sur  Elie 
et  le  jeûne.  Il  travaille  à  l'explication  de  quelques  Pseaumes. 
Mort  de  S.  Just  Evêque  de  Lyon,  et  de  Parmenien  Evêque  Do- 
natiste  de  Carthage.  S.  Delphin  confère  le  baptême  à  S.  Pau- 
lin depuis  Evêque  de  Noie,  et  à  son  frère  dont  on  ignore  le 
nom.  Minerve,  Protade  et  Florentin  frères  vont  à  Rome  han- 
ter le  barreau.  Retraite  de  S.  Paulin  en  Espagne.  Cassienvade 
Syrie  en  Egypte,  et  à  Sceté.  Naissance  de  Salvien  depuis  Prê- 
tre de  l'Eglise  de  Marseille. 

S.  Ambroise  se  trouve  au  Concile  de  Capouë,  et  en  est  l'ame. 
Il  écrit  ses  livres  des  Offices.  S.  Amand  Prêtre  de  Bourdeaux 
lie  un  commerce  de  letres  avec  S.  Paulin  retiré  à  Barcelone. 

Rufîn  est  fait  Consul  avec  Arcade  ,  et  Préfet  du  Prétoire 
d'Orient.  Mort  de  l'Empereur  Valentinien  II.  S.  Ambroise  fait 
la  cérémonie  de  ses  funérailles  et  prononce  son  Oraison  funè- 
bre! I  Concile  de  Nîmes.  Mort  de  S.  Phébade  Evêque  d'A- 
gen.  S.  Severe  Sulpice  renonce  aux  vanités  du  siècle,  et  prend  le 
parti  de  la  piété.  Il  commence  à  se  lier  avec  S.  Martin  de  Tours, 
et  S.  Paulin  de  Noie.  Dèslors  il  forme  le  dessein  d'écrire  la  vie 
du  premier.  S.  Ambroise  écrit  contre  Bonose  sur  la  virginité 
perpétuelle  dé  la  mère  de  Dieu. 

Drepane  est  fait  Intendant  du  domaine.  S.  Ambroise  écrit 
un  traité  de  l'exhortation  à  la  virginité.  Il  ressuscite  un  en- 
fant mort  à  Florence,  oîi  il  se  trouvoit.  S.  Jérôme  écrit  à  Di- 
dier Prêtre  d'Aquitaine,  qui  prie  le  Saint  de  traduire  en  latin 
le  Pentateuque  sur  l'hébreu.  S.  Severe  Sulpice  quitte  l'Aquitai- 
ne et  se  retire  vers  Toulouse.  Protade  exerce  la  Préfecture  dans 
Rome.  S.  Amand  Prêtre,  puis  Evêque  de  Bourdeaux,  con- 
sulte S.  Jérôme  sur  diverses  difQcultés  de  l'Ecriture.  S.  Paulin 
est  ordonné  Prêtre  à  Barcelone. 

Mort  du  Poëte  Ausone  dans  une  grande,  vieillesse.  Sancte 
Poète  Chrétien  commence  à  se  faire  de  la  réputation,  et  entre- 
tient commerce  de  letres  avec  S.  Paulin.  Vigilance  entre  en 
liaison  avec  les  hommes  les  plus  célèbres  de  son  siècle.  S.  Jé- 
rôme dédie  sa  traduction  de  la  Genèse  au  Prêtre  Didier,  qui 
entreprend  un  voïage  en  Palestine  pour  voir  ce  saint  Docteur. 
S.  Paulin  se  retire  à  Noie  avec  Therasie  sa  femme  pour  le  reste 
de  ses  jours.  Il  fait  le  panégyrique  de  l'Empereur  Theodose. 
Naissance  de  Fauste,  depuis  Abbé  de  Lerins  et  Evêque  de  Riez. 

Tome  I,  Sec.  Part.  h  1  l 


Au  de 
VBrt  vulg. 

395. 


450 


TABLE 


396. 


397. 


398. 


399. 


Mort  de  Hufm  Ministre  d'Etat  le  27  Novembre.  S.  Ambroi- 
se  prononce  l'oraison  funèbre  de  l'Empereur  Theodose.  Vigi- 
lance fait  le  voïage  de  Noie  auprès  de  S.  Paulin,  et  peu  de 
tems  après  estordonn*^  Prêtre.  Florentin  est  fait  Préfet  de  Ho- 
me le  14  de  Septembre,  et  cohtinuë  de  l'être  au  moins  les  deux 
années  suivantes.  S.  Honorât  quitte  les  Gaules  et  se  retire  eu 
Grèce  avec  S.  Caprais.  Mallius  Theodorus  Préfet  des  Gaules 
travaille  à  y  faire  fleurir  les  sciences. 

S.  Ambroise  fait  un  traité  contre  l'avarice,  sous  le  titre  de 
Naboth  de  Jezraël.  Vigilance  va  en  Palestine  visiter  S.  Jérô- 
me, à  qui  il  porte  le  panégyrique  de  Theodose  composé  par  S. 
Paulin  de  Noie.  De  Palestine  il  passe  en  Egypte,  et  revient  par 
la  Palestine  dans  les  Gaules.  Vincent  succède  à  iheodore  dans 
la  Préfecture  des  Gaules,  et  exerce  cette  charge  jusqu'en  400. 
Mariage  de  Paulin  surnommé  le  pénitent. 

Mort  de  S.  Ambroise  le  4*  d'Avril,  et  de  S.  Martin  de  Tours 
le  il*  de  Nov.  Gallus  disciple  de  ce  dernier  se  retire  avec  un  au- 
tre moine  auprès  de  S.  Severe  Sulpice.  Vigilance  de  retour  dans 
les  Gaules  commence  à  y  dogmatiser,  et  écrit  contre  S.  Jérô- 
me, qui  lui  répond  par  sa  letre  56*'  adressée  au  Prêtre  Ripai- 
re,  qui  lui  avoit  fait  savoir  les  invectives  de  Vigilance.  S.  Sé- 
vère Sulpice  écrit  la  vie  de  S.  Martin  dès  le  vivant  même  de  ce 
Saint,  et  l'adresse  au  Prêtre  Didier.  Cette  vie  passe  en  Italie, 

Suis  en  lUyrie,  en  Afrique  et  en  Egypte.  Après  la  publication 
e  cet  ouvrage,  S.  Sulpice  écrit  cette  même  année  ses  letres  à 
Eusebe  et  à  Aurele  pour  supléer  à  cette  même  vie.  Minerve 
exerce  cette  année-ci  et  la  suivante  la  charge  d'Intendant  du 
domaine.  Posthumien  fait  un  voïage  en  Orient  et  en  Egypte.  Cas- 
sien  retourne  à  son  Monastère  de  Bethléem,  puis  delà  dans  le 
désert  de  Sceté.  Naissance  de  S.  Loup  depuis  Evêque  de 
Troïes. 

Pallade  quitte  la  profession  de  Rhéteur  qu'il  exerçoit  à  Ro- 
me pour  entrer  dans  quelque  charge.  S.  Sulpice  écrit  sa  letre 
à  Baasule  sur  les  circonstances  de  la  mort  de  S.  Martin.  Nais- 
sance de  S.  Maxime  depuis  Evêque  de  Riez,  et  de  S.  Prosper 
défenseur  de  la  grâce  de  J.  C. 

Mort  de  Tétrade  Poète  satyrique.  S.  Augustin  réfute  l'écrit 
de  Parmenien  Evêque  Donatiste  de  Carthage  contre  Ticone. 
Naissance  de  Pallade  Poète  et  Philosophe,  et  d'Avile  depuis 
Empereur. 


I  1  J 


A  H    lie 
l'Ere  vnlij. 

400. 


CHRONOLOGIQUE. 


4SI 


S.  Sulpice  forme  le  dessein  d'écrire,  et  commence  à  mettre 
la  main  à  son  histoire  sacrée.  S.  Paulin  de  Noie  compose  son 
poëme  21*  sur  le  naufrage  de  Martinien.  Gassien  sort  du  désert 
de  Sceté,  et  se  retire  à  Gonslantinoplé,  où  il  est  fait  Diacre  dans 
la  suite.  I  Concile  de  Turin  en  faveur  de  la  paix  des  Eglises  des 
Gaules.  Procule  de  Marseille  y  assiste  avec  quelques  autres  Evo- 
ques Gaulois.  Sulpice  Alexandre  publie  une  histoire  où  il  inse- 
ra beaucoup  de  choses  qui  regardoient  la  nation  des  Francs. 


FIN  DE  lA  TABLE  CHRONOLOGIQUE. 


L  1  1 


U 


NOTES.  453 


NOTES 


ET   OBSERVATIONS   DIVERSES 


SUR  LA   SECONDE  PARTIE   OU   TOME   PREMIER. 


I. 

ÉTAT  DES  Lettres.  Page  37;  ligne  26. 


Cest  ce  que  S.  Martin,  en  particulier,  ténungna  par  ses  instances  auprès 

de  Maxime. 

Le  passage  de  Snlpice  Severe  qui  nous  appVend  cela,  mérite  d'être  cité 
comme  un  témoignage  de  l'esprit  véritablement  chrétien  de  l'Eglise,  dans  ces 
premiers  temps  :  «Tum  Martinus  non  desinebat...  Maximum  orare  ut  san- 
guine infelicium  abstineret  :  satis  superque  sufficere  ut  Episcopali  sententia 
haeretici  judicati ,  Ecclesiis  pellerentur  :  novdm  esse  et  wauwtum  nefas  ,  bt 
CAUSAM  EccLEsiiB  judex  sœculi  judicaret.  Quodusque  Martinus  Treveris  fuit, 
dilata  (Priscillianorum)  cognitio  est,  et  mox  discessurus,  egregia  authoritate  à 
Maxime  elicuit  sponsionem ,  nil  cruentcm  in  reos  constituendum.  Sed  postea, 
Imperator...  a  mitioribus  consiliis  deflexus  causam  praefecto  Evodio,  viso 
acri  et  severo  permisit.  Qui  Priscillianum  gemino  judicio  auditum,  convictum- 
que  maleflcii,  nec  diffitentem  obscœnis  se  studuisse  doctrinis;  noctumosetiam 
tnrpium  fœminarum  egisse  conventus ,  nudumque  orare  solitum ,  nocentem 
pronnnciavit...  >  {Sulp.  Sev.  Historiœ  Sacra,  lib.  ii,  1647^  in-S**,  page  449.) 

(i«.  «•) 
3  0 


454  NOTES. 

IL 

Saint  Retice.  Page  62.  Note. 


La  méprise  reprochée  au  Moreri  de  1723,  ne  se  retrouvoit  déjJi  i)lus  dans 
'édition  de  1732,  et  l'article  Retice  fut  enticreraeul  refait  dans  le  supplément 
de  1735.  rédigé  par  l'abbé  Gouget.  (n.  e.) 


m. 

Lactance.  Images  63-92 


I/édition  des  œuvres  de  Lactance  in-folio  faite  à  Venise'  en  1 472,  dont  nous 
itibi.,  cxq.  I.  1.  avons  parlé  sur  l'autorité  de  M.  Du  Pin .  pourroit  fort  bien  être  'la  môme  que 
!'•  •*  celle  de  Rome  de  la  même  année  et  en  même  volmne .  qui  est  marquée  dans 

la  Bibl'wtheca  exquisitissimn ,  file.  Mais  celle-ci  ne  «mtieni ,  suivant  le  tili'c 
([«e  les  institutions  de  l'Auteur.  Nous  avons  oublié  d'avertir  que  M.  Le  Brun 
des  Mareltes,  à  qui  le  Public  est  redevable  de  la  deriiii^re  édition  de  S.  Paulin 
de  Noie,  en  avoit  pirparé  une  de  toutes  les  œuvres  de  Lactjince ,  à  laquelle 
nous  l'avons  vu  travailler  en  1724.  Mais  il  ne  paroit  |»as  qu'elle  ait  été  mise 
encore  sous  la  presse. 

On  nous  fait  encore  observer  que  la  traduction  françoisc  du  liviv  de  Lac- 
lance  sur  la  mort  des  Persécuteurs,  que  nous  avons  attribuée  à  M.  Burnet,  a 
été  faite  sur  la  traduction  angloise  que;  celui-ci  en  avoit  publiée ,  avec  mo 
longue  i)réface  sur  la  matière  de  la  persécution.  Elle  fut  iîr.primécî  à  Uln^chl . 
en  1687,  in-12,  mais  après  que  la  traduction  angloise  eût  paru  à  Amsterdam 
en  même  volume.  ;1)om  Rivkt.  Tome  IL  1735.  Avei-tiss.,  page  xvi.) 

—  Dans  la  secxmde  {«rtie  de  ce  volume,  où  s*-.  trouv(!nl  l'iiistoire  de  Lac- 
tance et  la  discussion  de  ses  écrits ,  nous  y  marquons,  pages  69  et  70.  quei- 

i»u  Vo.."..  itii.i.p.  ques  éditions  particulières  de  son  traité  intitulé  :  De  l'Ouvrage  de  Dieu.  'Cet 
écrit  a  été  traduit  en  notre  langue  \m  Jean  Brèche,  avocit  au  siège  presidial 
de  Toui-s.  et  sa  Iraduelion  imprimée  à  Tours  chez  îam  Rossct,  en  1544,  X». 
Li  traduction  des  institutions  du  mêm((  auteur,  jKir  René  Famé,  dont  nous 

1)11  y.ni ,  jtii.i..  |..  parlons  à  la  page  77,  '  fut  imprimée  dès  1344 ,  in-folio,  à  Paris,  chez  (ialiol 
Dn  Pré  et  Klienne  Ross<'t.  C'est  ainsi  que  se  nomme  ci'l  imprimeur,  et  non 


i;:S. 


im:>. 


NOTES.  453 

(las  Bossel,  comme  il  s'ost  jçlissc  p;ir  erreur  à  la  môme  page.  (D.  Rivet. 
ïoine  IV,  1738.  Avcrtiss.,  page  xxxviu.) 

—  A  ce  grand  nombre  d'éditions  des  œuvres  de  Lactance,  dont  nous  avons 

lait  rénumération,  il  faut  joindi'c  '  celle  qui  vient  de  paroilre  cette  année-ci,  Journal  dn  Sm., 
1741,  à  Leipsick,  cliés  Sam.  Benjamin  Walther,  en  un  volume  in-S".  Le  public  '  *'' 
la  doit  aux  soins  de  M.  Biintkmann,  qui  n'a  rien  négligé  pour  la  rendre  aussi 
exacte  et  complettc  qu'elle  puisse  l'être.  Seulement  il  est  à  craindre  que  le 
papier  et  les  caractères  ne  répondait  pas  au  travail  de  l'Editeur.  Du  reste ,  il 
en  a  revu  le  texte  sur  soixante-deux  autres  éditions,  et  l'a  collationné  à  cin- 
quante-deux manuscrits.  Il  l'a  de  plus  illustré  des  notes  choisies  de  ceux  qui 
ont  travaillé  avant  lui  sur  le  même  texte.  (Dose.  Rivet.  Tome  VI,  1742.  Aver- 
tiss.,  page  ii.) 

—  Parmi  les  éditions  de  Lactance  dont  nous  avons  jwrlé,  il  faudra  ajouter 
celle  qui  a  paru  en  1748 ,  par  les  soins  de  M.  l'abbé  Lenglet  dii  Fresnoy. 
(>:tte  édition,  préférable  à  tous  égards,  à  celles  que  nous  avons  indiquées,  est 
iini»rimée  à  Paris,  chez  de  Bure,  sous  ce  titre  :  Lucii  Cœcilii  Firmiani  Lac- 
tuntii  opéra  omnia  :  Editio  novissima,  etc.,  in-i°,  2  volumes.  (D.  Rivet. 
Tome  IX,  1780.  Averliss.,  p;ige  vi.) 

—  Au  grand  nombre  d'éditions  des  œuvres  de  lactance ,  il  faut  ajouter 
celle-ci  :  Lucii  CceciUi  Firmiani  Lactantii  opéra,  editore  Nie.  Lenglet  de 
Fresnoy.  Parisiis,  de  Bure,  1748,  in-i»,  2  volumes.  M.  Le  Brun  des  Ma- 
rettes,  acolyte  de  Rouen,  fils  de  Bonavenlure  Le  Bmn,  libraire  de  cette  ville, 
est  le  véritable  auteur  de  cette  édition  des  œuvres  de  Lactance.  Ce  savant 
homme,  aussi  reconimandable  par  sa  piété  et  par  l'innocence  de  ses  mœurs 
que  par  ses  lumières  et  jwr  ses  travaux  literaires,  avoit  entrepris  l'édition  des 
œuvres  de  Lactance,  et  y  avoit  même  mis  la  dernière  main  ;  mais  la  mort,  qui 
l'enleva  le  19  mars  1731,  dans  un  âge  très  avancé,  ne  lui  permit  pas  de  la 
donner  lui-même  au  public.  C'est  cette  étlition  que  M.  Lenglet  du  Fresnoy  a 
donnée  sous  son  propre  nom.  11  est  vrai  qu'elle  lui  apparlenoit ,  ayant  acheté 
le  manuscrit  des  parens  de  M. Le  Brun.  (UD.  Poncet,  Colomb,  Clemencet  et 
Clément.  Tome  XI,  1759.  Avertiss.,  page  m.) 

—  En  rendant  à  Le  Brun  des  Marquetés  ce  qui  lui  appartenoit,  et  ce  que 
Lenglet  du  Fresnoy,  assez  lidèle  en  cela  à  ses  habitudes,  avoit  essayé  de  lui 
enlever  au  moins  en  partie ,  les  continuateurs  de  Dom  Rivet  ont  montré  leur 
équité,  leur  fermeté  ordinaires.  Les  expressions  dont  ils  se  sont  servi  ont  été 
d'autiinl  plus  sévères,  qu'ils  avoient  été  mieux  trompés ,  en  louant  d'abord 
l'édition  qu^ls  regardoient  comme  l'œuvre  de  Lenglet,  mais  qu'un  examen  plus 
attentif  leur  avoit  fait  reconnoître  pour  être  celle  à  laquelle  Le  Brun  des  Mar- 
quetés, mort  en  1731,  avoit  rais  la  dernière  main.  On  conçoit  donc  leur  dépit 
et  leur  indignation  en  reconnoissant  que  Lenglet  s'en  étoit  attribué  la  meilleure 
part,  comme  on  en  pouvoit  déjà  juger  par  le  titre  :  Editio  novissima...  cui 
manum  primam  adhibuit  J.  B.  Le  Brun,  extremam  impostiit  N.  Lenglet 
Du  fresnoy.  Or  il  y  auroit  de  l'injustice  à  soupçonner  les  passions  jansénistes 


45(>  NOTES. 

d'avoir  dicté  le  jugement  qu'ils  portèrent  du  procédé  de  Lcnglet.  Les  Béné- 
dictins n'étoient  pas  jansénistes  ;  ils  se  contentoient  d'être  gallicatis ,  ce  qui 
n'est  pas  tout  à  fait  la  même  chose,  et  ils  ne  pouvoient  nourrir  des  préven- 
tions particulières  contre  Lenglet  qui  avoit  donné  des  gages  aux  sentimens 
qu'ils  pàrtageoient,  en  publiant,  en  1715,  une  édition  irès-augmentée  du 
Traité  de  Pithou  et  de  Du  Puy  sur  les  libertés  de  l'Eglise  Gallicane.  En  réa- 
lité, Lenglet  ne  fut  pas  mêlé  aux  querelles  des  Jansénistes  et  des  Jésuites.  Il 
n'étoit  en  contradiction  déclarée  et  permanente  qu'avec  les  bonnes  mœurs,  la 
délicatesse  des  procédés  et  des  sentimens.  C'est  pourtant  un  des  écrivains 
que  les  Biographies  modernes  ont  le  mieux  traités  ;  il  est  vrai  que  ses  incar- 
tades, ses  étourderies  et  son  inconduite  l'avoicnt  fait  traîner  cinq  ou  six  fois 
à  la  Bastille  ;  mais  la  Bastille  n'est  pas  une  attestation  de  probité. 

Si  l'on  pouvoit  oublier  la  conduite  de  cet  homme,  quand  pour  s'insinuer  dans 
les  bonnes  grâces  des  princes  légitimes,  il  avoit  rédigé  un  mémoire  contre  le 
Régent,  et  s'étoit  fait  mettre  une  première  fois  à  la  Bastille  pour  obtenir  la 
confiance  des  conjurés  qu'il  se  hAtoit  de  dénoncer  ;  si  l'on  pouvoit  oublier 
l'infâme  diatribe  qu'il  écrivit  contre  l'illustre  et  malheureux  Jean-Baptiste 
Rousseau,  coupable  d'avoir  refusé  de  le  recommander  au  prince  Eugène  et  de 
payer  à  Vienne  ses  dettes  ;  si  l'on  pouvoit  oublier  les  livres  qu'il  écrivit  sous 
des  noms  supposés ,  l'un  pour  montrer  les  dangers  de  la  lecture  des  romans, 
l'autre  pour  combattre  ce  qu'il  venoit  d'écrire  ;  enfin,  si  l'on  pouvoit  oublier 
les  nombreuses  éditions  qu'il  donna  des  Uvres  les  plus  obscènes,  on  pourroit 
s'écrier  avec  l'auteur  de  la  Nouvelle  Biographie  générale  :  «  L'abbé  Lcnglet 
est  le  véritable  modèle  de  l'homme  de  lettres  indépendant.  »  Mais  un  pareil 
jugement  auroit  fait  sourire  d'indignation,  ou  de  pitié,  les  contemporains  de  cet 
homme  doué  sans  doute  d'une  certaine  activité  d'esprit,  d'une  certaine  va- 
riété de  connoissances,  d'une  certaine  habitude  d'études  historiques  et  litté- 
raires, mais  dont  la  vie  fut  constamment  souillée  d'actions  immorales.  Delort, 
dans  son  Histoire  delà  détention  des  Philosophes  et  Gens  de  lettres,  etc.  Paris, 
1829,  porte  de  Lcnglet  un  jugement  dont  nos  J)lographes  auroicnt  dû  mieux 
profiter  :  «  Esprit  dangereux ,  brouillon  ,  intrigant,  et  le  plus  caustique  des 
hommes.  »  Il  etoit  le  fils  d'un  perruquier  de  Beauvais. 

M.  Victor  Le  Clerc  dans  la  reimprcssion  de  notre  onzième  volume  en  18il, 
a  complété  la  hste  des  éditions  de  Lactance ,  donnée  par  D.  Rivet  et  ses  con- 
tinuateurs :  1»  celle  de  Cellarius,  Leipsig,  1698,  in-8°;  —  2°  Liber  de  Opificio 
Dd;  donné  par  Goldner,  Géra,  1715,  in-8°;  —  3°  Epitomœ  divinarum  insti- 
tutionum,  par  Davies,  Cambridge,  1718,  in-8'';  — 4°  Symposium,  attribué  à 
Lactance,  par  Christ.  Aug.  Heumann ,  Hanovre,  1722,  in-8°;  —  5°  la  répé- 
tition de  l'édition  de  Walchius,  de  1715,  Leipsig,  1735;  —  6°  autre  édition 
complète,  avec  un  nouveau  commentaire  de  Christ.  Heumann,  Gottingueet 
lena,  1736,  8°  ;  —  7°  Opéra  omnia,  in-8°,  14  volumes,  1754-1759.  Rome.— 
8°  Texte  de  Biinemann,  2  volumes  in-8°.  Halle,  1764-1765  et  aux  Deux- 
Ponts,  1786  ;  —  9°  Texte  de  Le  Brun  et  Lenglet ,  dans  la  Bibliothèque  des 
Pères,  donnée  par  Gallandi,  Venise,  tome  IV,  et  à  Wurtzbourg,  2  volumes  in- 


NOTES.  457 

8",  1783.  —  lO*  Cinquième  livre  des  Institutions  divines,  revu  et  commenté 
parDalrymple  et  Hayles,  Edimbourg,  in-8»,  —  !!•  parmi  les  éditions  récentes 
celles  de  Besançon,  in-8°,  1838. 

En  1697,  Godescart  publia  une  traduction  françoise  de  la  Mort  des  Persécu- 
teurs ,  Paris ,  in-8».  Drouet  de  Maupertuis  donna  celle  du  premier  livre  des 
Institutions  divines,  Avignon,  1710.  Si  l'on  s'en  rapporte  au  témoignage  de 
Lenglet  du  Fresnoy,  Drçux  du  Radier  avoit  traduit  le  traité  de  la  Colère  de 
Dieu.  Ce  travail  n'a  pas  été  imprimé. 

Deux  autres  traductions  de  Lactance  sont  conservées  dans  la  Bibliothèque 
impériale,  en  manuscrit.  L'une ,  n"  1965 ,  supp.  fr.,  attribuée  à  Louis  Che- 
valier, président  au  Parlement  en  1726;  l'autre  du  Président  Cousin,  traduc- 
teur des  Historiens  du  Bas-Empire.  Buchon  l'a  publiée  comme  anonyme,  en 
1837,  parmi  son  C/ioù;d«  Monuments  primitifs  de  l'Eglise  chrétienne,  in-S». 

Enfin ,  ajoute  M.  Victor  Le  Clerc  :  »  pour  le  détail  des  diverses  éditions 
«  de  Lactance,  que  nous  n'avons  fait  qu'indiquer,  comme  pour  celles  que  nos 
«  prédécesseurs  auroient  pu  oublier  dans  leurs  notices  et  leurs  suppléments, 
«  et  en  général  pour  toutes  les  éditions  des  Pères  de  l'Eglise  latine ,  on  con- 
«  sultera  avec  fruit  l'ouvrage  publié  en  1792  et  1794 ,  par  Schonemann,  h 
«  Leipsig ,  sous  ce  titre  Bibliotheca  historico-litteraria  Patrum  latinorum, 
«  2  vol.  in-8°  de  672  et  1064  pages.  »  La  notice  sur  Lactance  est  au  tome  I, 
pages  177-264. 

Nous  terminerons  la  série  de  ces  observations,  en  signalant  une  excellente 
notice  sur  Lactance  insérée  dans  la  Nouvelle  Biographie  générale  ieMUl.  Fir 
min  Didot;  elle  est  de  M.  B.  Aube.  (n.  k.) 


IV. 


NAZAmE,  page  92,  ligne  33. 


Saint  Jérôme  nous  le  représente  comme  un  des  plus  célèbres  orateurs  de  son 

temps. 

S.  Jérôme,  ou  plutôt  Eusebe  dont  S.  Jérôme  traduisoit  la  Chronique.  Dans 
un  autre  endroit,  sous  l'année  337 ,  les  mêmes  auteurs  nous  apprennent  que 
Nazaire  eut  une  fille  qui  se  fit  également  une  grande  réputation  d'eloquenc*  ; 
Nàzarii  rhetoris  filia,  in  eloquentiapatri  coeeqiiatur.  {s.  e.) 

Tom.I.  Sec.  Part,  Mm  m 

3  G  * 


458  NOTES. 


ORATEin   ANONYME.  pagO  104. 

Depuis  l'édition  de  l'oraison  funèbre  prononeée  par  cet  orateur,  f;ui  parut  à 

jimrnaidi-iSçav.,  Paris  en  grec  et  en  lalin,  l'an  1616,  la  pièce  aété  reimprimée  h  la  suite  d'Ku- 

1738,  p.  45j.         j^j.^p^  ^  imprimé  k  Oxfort,  in-8",  en  1703,  parles  soins  de  M.  Thomas  Heamc. 

M.  Haveramp  l'a  mise  aussi  à  la  suite  du  môme  historien ,  qu'il  a  pul)li(5  à 

Leide,  en  1729,  in-8°.  (D.  Rivet,  tome  II,  ilS">.  Avcrtiss. ,  pa^re  xvii.) 


Leontius.  page  106.  ligne  1(1. 

On  lui  fit  \)()Tter  le  surnom  de  lascif 
Voici  le  passage  d'Ausone  : 

Qui  colis  laelos  hilamsqaR  lUurRs , 
Qui  dies  fcslos,  joc.i,  voln,  ludum, 
Annuum  funcii  memora  Leonti 

Noniinc  Thranuin. 
iste  lasinvns  piitliMis  vociri, 
Nomi^n  iniliKnnin  |>rol>itnli!  vil.'e 
Abiiuit  iiiiiiqu.iin ,  quia  i,'ralum  ail  auri'c 

Es-icl  aiuiias.     (N.  K.l 

MI. 

Patere,  pag(î  121,  ligne  31. 
Ses  ancêtres  de  l'académie  des  Driiidex. 
Il  semble  que  le  mol  académie  soit  une  méprise  d'impression,  el  que  D.  Ri- 


NOTES.  45Ô 

vet  dut  écrire  race  ou  famille;  c'est  au  moins  le  juste  sens  du  vers  d'Au- 
sone  : 


t.  !),  l>.  ST.  78. 


En  Bajocassis  stirpe  Druidaram  satus , 

Si  fama  non  fallit  fiileni , 
Buleni  sacratuni  ilutis  templu  gênas  ; 

El  iiide  vobis  uomina  : 
Tibi  Paiera; 


VUI. 

Saimt  HiLAUiE,  |»ages  139-194. 


A.U  même  temi»  que  notre  premier  volume  est  sorti  des  presses ,  ont  paru 
dans  le  public  les  derniei-s  volumes  de  la  tres-ample  collection  d'anciens  écri- 
vains, par  Dom  Martene  et  Dom  Durand.  '  Entre  les  précieux  documens  que  Man.  Aini..  coll. 
contient  le  neuvième  tome,  nous  trouvons  sous  le  nom  de  S.  Hilaire,  à  qui 
l'on  ne  peut  pas  douter  qu'elle  n'appartienne,  l'explication  de  trois  Pseaumes,  le 
quinzième,  le  trente-unième  et  le  quarante-unième.  Les  éditeurs  l'ont  tirée 
d'un  manuscrit  de  l'abbaye  d'Anchin,  qui  comprend  plusieurs  autres  ouvrages 
du  même  Père.  Celte  découverte  confirme  le  sentiment  que  nous  avons  établi 
d'aprf'S  divers  sçjvaiis,  que  S.  Hilaire  avoit  commenté  ou  expliqué  tout  le 
i'seautier  en  entier,  et  nous  fait  espérer  qu'on  pourra  ihju  à  peu  recouvrer  le 
reste  qui  nous  manque  (t). 

A  la  suite  de  l'explication  de  ces  trois  Pse;iumes,  'les  mômes  éditeurs  ont  p.  78.  si. 
publié  un  sermon  sur  Paque  dans  lequel  l'auteur  explique  le  Pseaume  cenl- 
quarante-neuviéme  ,  et  qui  leur  semble  être  au.ssideS.  Hilaire.  Mais  quoique 
cette  pièce  soit  ancienne,  il  seroit  difficile  d'y  trouver  des  preuves  non  équi- 
voques pour  appuyer  cette  opinion.  Le  manuscrit  d'oîi  elle  a  été  tirée  n'en 
l»eut  servir,  puisque,  de  l'aveu  des  éditeurs,  il  contient  d'autres  ouvrages  étran- 
gers à  S.  Hilaire. 

'  Bernon ,  abbé  de  Richenon,  écrivain  de  l'onzième  siècle,  cite  sous  le  nom  Vm,  cii.  auccu.,  t. 
de  S.  Hilaire  un  traité  des  Offices  divins,  qu'il  assure  avoir  lu  en  France,  et  1'^"''^'^  '^'^'  ^' 
dont  il  rapporte  un  passage.  M;iis  on  voit  qu'il  y  est  parlé  de  l'A  vent  qui  pré- 
cède la  naissance  du  Sauveur,  comme  déjii  universellement  établi  dans  l'Eglise 
et  comprenant  irois  semaines.  11  n'en  fiut  jjas  davantage  pour  assurer  que  le 
trait<5d'où  est  pris  ce  passjtge,  n'est  point  un  ouvrage  de  S.  Hilaire  de  Poitien;. 

(1)  L'explication  de  ces  trois  pseaumes  n'a  pas  été  comprise  dans  le  texte  des  œuvres  de 
S.  Hilaire  donné  par  l'abbé  Guillou.  {Cotlettio  seUcla  EccUiiu:  palrum).  —  Paris,  Mt'<i. 
Havart,  1830,  4  vol.  in-8«.  (n.  e.) 

M  m  m  ij 


460  NO  T  E  S. 

Ce  ne  fut  qu'un  siècle  environ  après  lui,  que  l'on  coiiiniençu  à  voir  dans  l'E 
glise  quelques  vestiges  de  cette  solennité.  D'ailleurs  ni  S.  Jérôme,  ni  aucun 
autre  ancien  auteur  ne  nous  apprennent  que  S.  Hilaire  ait  écrit  sur  celte  sorte 
de  matière.  On  pourroit  ajouter  pour  fortifier  ce  sentiment,  que  le  passage 
allégué  contient  une  explication  du  figuier  stérile  de  l'Evangile,  qui  semble 
faire  allusion  à  celle  qu'en  donne  S.  Ambroise.  (D.  Rivet,  tome  II,  1733.  Aver- 
tiss.,  pages  xvii,  xviii.) 

Nous  apprenons  de  quelques  nouveaux  monumens  de  lilcrature,  que  la 
belle  édition  des  œuvres  de  S.  Hilaire,  Evoque  de  Poitiers,  par  Dom  Pierre 
Courant,  a  été  renouvellée  à  Vérone  en  Italie,  l'an  1730.  Nous  nous  bornons 
à  cette  simple  annonce,  en  attendant  que  nous  puissions  parvenir  à  voir  par 
nous-mêmes  si  cette  copie  est  conforme  à  l'original,  ou  que  quelque  autre 
nous  en  donne  une  notice  suffisante. 

On  sera  peut-être  bien  aise  de  sçavoir  qu'un  ancien  Ecrivain,  inconnu 
d'ailleurs,  ne  pouvant  justifier  autrement  S.  Hilaire  de  l'erreur  prétendue  oii 
Ton  s'imaginoit  qu'il  ctoit  tombé,  ea niant  que  J.-C.  eût  été  sujet  à  la  dou 
leur,  s'avisa  de  lui  supposer  un  écrit  pour  rétracter  cette  opinion  erronée. 
S.  Bonaventurc  (1)  atteste  que  Guillaume,  Evéque  de  Paris,  lui  avoit  assuré 
qu'il  avoit  vu  cet  écril,  dont  personne  que  l'on  sçache  n'a  fait  auparavant  au- 
cune mention,  et  qu'on  n'a  point  vu  paroitre  dans  la  suite.  S.  Hilaire  au  reste 
n'avoit  point  besoin  d'un  pareil  expédient,  pour  se  laver  d'une  erreur  qu'il 
n'a  jamais  avancée,  et  qui  n'a  paru  telle  qu'à  ceux  qui  ne  se  sont  pas  donné 
la  peine  de  bien  entendre  ses  écrits.  C'est  ce  que  Dom  Courant,  son  dernier 
éditeur,  a  démontré,  comme  nous  l'avons  dit  à  la  page  191.  (D.  Rivet,  t.  VI, 
1742.  Avertiss.,  p.  11.) 

On  n'a  point  parlé  d'une  lettre  de  S.  Hilaire,  que  les  chanoines  réguliers 
de  Saint-Sauveur  de  Bologne  ont  publiée  sous  le  non!  de  ce  saint  Evoque, 
dans  un  recueil  d'opuscules  des  Pères  latins  ainsi  intitulé  :  Veterum  Patrum 
latinorum  opuscula  nunquam  anteJiac  édita.  La  lettre  dont  nous  parlons  se 
trouve  dans  la  première  partie  du  second  tome  de  ce  recueil,  imprimée  à  Bo- 
logne en  1751.  Elle  est  précédée  de  deux  chapitres,  dans  lesquels  l'éditeur, 
Jean-Chrysostome  Trombelh,  abbé  de  Saint-Sauveur  de  Bologne,  entreprend 
de  faire  voir  :  1»  Que  la  lettre  est  une  production  de  S.  Hilaire;  2»  Qu'elle  a 
été  écrite  à  un  Evêque.  Vient  ensuite  la  lettre  ou  opuscule  de  S.  Hilaire,  qui 
est  suivie  des  remarques  de  l'éditeur  et  de  trois  dissertations.  Le  tout  remplit 
13S  pages  petit  in-folio,  dont  le  texte  n'en  occupe  que  13.  Si  la  lettre  n'étoit 
pas  de  S.  Hilaire,  il  faudroit  convenir  que  celui  qui  en  est  l'auteur  a  bien  profité 
de  la  lecture  des  ouvrages  de  ce  saint  docteur.  Non-seulement  ses  pensées, 
mais  encore  ses  expressions  subUmes  et  énergiques  s'y  trouvent  dans  les  so- 
lides instructions  que  contient  la  lettre  sur  ce  que  la  foi  nous  enseigne  tou- 
chant la  divinité  de  Jésus-Christ,  qui  est  le  principal  objet  de  ce  petit  écrit. 

(1)  Sur  I«  [troisième  livre  du  Maître  des  Sentences,  dist.  16,  a.t.  t,  quesl.  1,  ad 
primum. 

m  «1  ^ 


NOTE  S.  461 

Les  observations  et  les  notes  dont  il  est  accomiagiié,  donnent  une  jdéc  très- 
avantageuse  de  l'érudition  des  Editeurs.  (Dom  Poncet,  Colomb,  Clemencet  et 
Clément.  Tome  XI,  1759.  Avertiss.,  p.  iv.) 

Les  continuateurs  de  dom  Rivet  auroient  pu  encore  renvoyer  au  tome  1" 
de  la  Bibliothèque  du  Poitou,  qui  est  de  1754,  et  où  Dreux  du  R^idiera  un 
article  sur  saint  Hilaire,  p.  84-99.  Mais  ce  n'est  que  plus  tard,  en  1762,  que 
parut  à  Rome  la  dissertation  oit  le  théologien  Ange-Marie  Feltre  de  Saint-An- 
toine soutient  que  la  lettre  imprimée  en  1751  n'est  point  d'Hilaire  de  Poi- 
tiers. Le  Père  Mansi,  dès  1754,  dans  son  édition  de  la  Bibliothèque  de  Fa- 
bricius,  t.  III,  p.  254,  ne  semble  pas  non  plus  éloigné  de  croire  que  la  lettre 
attribuée  à  S.  Hilaire  par  TromlKîlli  pourroit  bien  être  d'un  autre  écrivain. 

Depuis  1759,  les  œuvres  de  S.  Hilaire  ont  été  publiées  de  nouveau,  de 
1785  à  1788,  à  Wurtzbourg,  en  4  vol.  in-8»,  par  Fr.  Oberthur.  Gallandi, 
dans  la  Bibliothèque  des  Pères,  Venise,  1769,  t.  V.  p.  85-93,  n'avoit  donné 
de  S.  Hilaire  que  ce  qui  manquoit  à  l'édition  de  Vérone.  Le  traité  des  Syno- 
des, avec  un  commentaire,  fait  partie  de  la  collection  des  Conciles  des  Gau- 
les, commencée  par  les  Bénédictins  en  1789,  t.  1,  p.  165-183.  (M.  V.  Le- 
CLEnc.  Réimpression  du  tome  XI.  1841.  Note  des  nouveaux  éditeurs,  p.  5.) 


IX. 

Agiuce,  p.  203. 


Notre  bibliothèque  impériale  possède  un  précieux  fragment  du  travail  d'A- 
gricius  ou  plutôt  Agraecius.  On  y  voit  que  l'auteur  a  seulement  voulu  donner 
un  complément  au  traité  du  grammairien  Caper,  De  Orthographia  et  de  pro- 
prietatc  et  differentia  sermonum  :  «  Huic  ergo  Capri  libro  De  orthographia 
«  ef  (te  propmtafe  eMi/yerentia  sermonum,  quœdani  adjicicnda  subjcci.  »  fonds iaiin,n«740i, 
S'il  veut  ainsi  compléter  le  travail  de  Caper,  co  n'est  pas,  ajoute-l-il,  qu'il 
prétende  en  savoir  plus  que  cet  illustre  grammairien,  mais  parce  que  des 
acceptions  et  des  distinctions  qui  sembloient  trop  bien  connues  de  Caper 
pour  être  signalées,  ne  sont  plus  aussi  nettement  comprises  et  demandent 
des  explications  qu'elles  ne  reclamoient  pas  au  temps  de  Caper.  Quant  au 
fragment  d' Agraecius,  il  diffère  beaucoup  de  celui  qu'on  a  souvent  imprimé 
dans  les  collections  d'anciens  Grammairiens.  Dès  les  premiers  mots ,  l'au- 
teur avoit  eu  soin  de  donner  l'orthographe  de  son  nom  :  «  Agraetius  cum 
latine  scribas  per  diphtongon  scribendum  :  non  ut  quidam  putant,isij-j/ctMs.» 
Le  livre  de  Caper  se  trouve  dans  le  même  manuscrit,  lequel  remonte  au 
X"  siècle.  Je  ne  crois  pas  qu'on  l'ait  jusqu'à  présent  consulté. 


in-4°. 


i62  NOTES. 

Cii  qu'il  faut  remarquer  aussi,  c  esl  que  l'ouvrage  fut  écrit  à  la  pri(>re  de 
l'evôque  Eucherius,  auquel  Agraecius  envoyoit  en  môme  temps  le  Imté  de 
Gij'cr.  Cet  évoque  ne  peut  guère  être  que  S.  Eucher,  evèque  de  Lyon.  Or  si 
Eucber  n'abandonna  la  solitude  de  Lerins  pour  remplir  le  siège  de  Lyon 
que  vers  434,  ainsi  qu'on  le  verra  dans  la  notice  qui  lui  est  consacrée,  t.  11, 
p.  277,  il  faut  en  conclure  que  le  grammairien  Agraecius  n'est  pus  le  ps-ofes- 
seur  de  Bordeaux  vanté  par  Ausone;  il  laudroit  donc  rejeter  au  v'  siècle  la 
notice  qui  lui  appartient.  L'epitre  adressée  à  l'cvôciuc  Euclicr  est  toute  entière 
conservée  dans  le  manuscrit  que  nous  signalons,  et  n'a  pas  été  connue  de 
ceux  qui  ont  jusqu'à  présent  édité  lesfragmens  d' Agraecius  et  de  Gaper.  (N.  E.) 


X. 

Ausone,  médkci.n,  p.  216,  lig.  16. 


Le  dysiique,  dans  lequel  Ausone  nous  a|)itieiid  que  .son  pèreparloil  bien  le 
grec  et  difficilement  le  latin,  est  remarquable  : 


^'urinouc  impromptus  latio;  vent  :•  allica  liiigua 
Suflicit  culli  vc'cibus  i.-loiiuii. 


("i"esl-h-dire  que  pour  les  c;is  où  il  lalloit  p;»'!er  eloquemmenl,  le  medicin 
Ausone  s'en  tiroit  mieu.\  en  grec  qu'en  latin.  M;iis  cela  ne  senb!e-t-il  |)as 
lirouvcrquesa  langue  ordin  tire,  celle  qu'il  connoissoit  et  pratiquoit  d'enfance, 
n'etoit  pas  la  gi'ocque  ou  1 1  latine,  mais  une  sorte  de  ueolatin,  provençal  ou 
gasconisme  primitif.  (N.  E.) 


Xi. 

IVLlKCBL,   UÉUDCJN,  p.   217. 

Les  Biographies  universelles  n'ont  pas  compris  ce  médecin  àms  leurs  no- 
menclatures. (N.  E.) 


N'OTES.  i(i3 

s.  Ji  ST.  p.  22(». 

L'argumen talion  de  Dom  Rivet  coiilre  du  Bouchel  et  Bollandus  qui  ailri- 
buent  une  vie  de  S.  Hilaire  à  S.  Jusl  son  disciple,  ne  seml)ie  pas  ligoureusi;. 
D'alwrd  il  ne  s'agit  pas,  connue  le  dit  dom  Rivet,  de  deux  vies  distinctes  de 
S.  Hilaire,  mais  de  deux  livres  de  la  mAme  vie,  dont  le  préaml)ule  semble 
bien  annoncer  un  écrivain  presque  contenipoi-ain  du  sjùnt  evéque  de  Poitiers. 
Puis  suffit-il  que  cette  vie  laisse  à  désirer  la  mention  de  (juehiues  evencmens 
qui  se  nillurhent  à  la  vie  de  S.  Hilaire,  comme  l'affaire  de  Saturnin  d'Arles 
cl  c«lle  d'Auxence,  pour  refuser  d'admettre  qnc  S.  Jusl  en  soit  l'auteur?  Ces 
oulilis  ne  sont  assurément  pas  plus  faciles  ii  justifier  de  la  paît  de  Venancc 
l-'ortunat.  \\  semble  donc  assez  naturel  d'admettre  que  Forlunat  ait  écrit  le 
second  livre  des  miracles  tout  entier,  el  qu'il  yr.  soit  consente  de  retoucher  le 
premier  livre,  œuvre  d'un  auteur  plus  anc-ien.    (N.  V,.) 

xin. 

EiTilovE.  p.  220,  234. 


.L'édition d'Entrope  de  1552,  dont  nous  avons  fait  mention,'  parut  à  Basic  jour,  d.s Svarans, 
sur  le  modèle  de  celle  de  Vinet;  el  «-elle  qu'en  avoil  publiée  Cellarius  fut  re-  "•^^'  !•■  *•''•'' 
nouvellée  à  lene*  en  1697,  in-8".  Tannegui  le  Fevre  en  donna  une  à  Saumur  *  /'■-"(. 
l'an  IWn,  en  même  volume,'  avec  Aurelius  Victor  el  des  notes  de  s;i  façon,   inb.  .-xq.,  i.  a,  j.. 
Elle  y  pîirul  de  nouveau  en  1672,  et  depuis  à  Londres  en  1705.  On  nous  *'• 
donne  avis  qu'il  y  en  eut  une  autre  à  Leide  l'an  1670,  aussi  in-S».  '  Eutro|K;  ^l^"-  '*** '^■''*'"''' 
publié  pitr  madame  Dacier  servit  de  modèle  à  l'édition  qui  en  fol  faite  in-H" 
à  Oxfort  l'an  1696.  Celle  du  môme  endroit  de  1703,  que  nous  avons  déjà 
marquée,  est  l'ouvrage  de  M.  Thomas  Hearne,  qui  l'a  revue  sur  sept  manus- 
criLs,  cl  sur  les  meilleurs  imprimés. 

Après  tontes  ces  éditions  de  l'histoire  romaine  par  Enlroi)e,'  on  en  a  pu-  p.  ka. 
blié  une  nouvelle,  avec  la  version  grecque  de  Pae;mins,  les  notes  entières  de 
Vinet,  de  Glarean,  de  Tannegui  le  Fevre,  de  sa  fille,  de  Hearne,  et  les  notes 
choisies  de  Sylbnrge  et  de  Cellarius.  On  y  a  ajouté  Sextus  Rnffus,  Mes.sala 
Corvinus  sur  la  famille  d'Auguste,  el  l'oniison  funèbre  de  ConsUmtin  le  jeune 


464  NOTES. 

par  un  anonyme.  Le  tout  est  imprimé  à  Leide,  chez  Jean  Arnold  Laugerak, 
i',in  1729,  en  un  volume  in-S».  On  est  redevable  de  celte  édition  h  M.  Havcr- 
camp,  qui  l'a  fait  sur  les  manuscrits  de  Leide,  et  sur  celle  de  M.  Heame,  et 
l'a  enrichie  de  ses  noies  et  de  celles  de  Christophe  Auguste  Herraann. 

Outre  les  deux  traductions  françoises  de  l'histoire  d'Eutrope,  dont  nous 
avons  fait  mention,  un  scavanl  de  nos  amis  nous  en  a  indiqué  une  autre,  im- 
primée à  Paris  dès  1563,  chez  Morel,  en  un  volume  in-8°.  Le  traducteur  y 
est  désigné  de  la  sorte  :  par  G.  Bourdelois.  Il  nous  paroît  avec  beaucoup  de 
fondement  que  c'est  Girard  sieur  du  Haillan,  qui  etoit  de  Bourdeaux,  et  qui 
vers  le  même  tems  s'occupoit  à  d'autres  traductions  de  cette  nature,  oii  son 
liist.  doi'Aca.1.  fr.,  "om  se  lit  sans  équivoque.  '  En  1621,  Nicolas  Faret,  qui  fut  depuis  de  l'A 
i.  2,  p.  402.  cadémie  fhinçoise,  donna  une  autre  traduction  d'Eutrope,  qui  fut  imprimée  à 
Paris  in-18. 

[' 

Suivant  la  remarque  du  même  sçavant,  il  y  eut  une  édition  d'Eutrope  faite 

à  Milan  dès  l'an  1478,  en  un  volume  in-folio,  oh  se  trouvent  joints  Suétone 

et  les  auteurs  de  l'Histoire  d'Auguste.  (Don  Rivet.  Tom.  IL  1738.  Avertiss,, 

p.  XVIII,  XIX.)  / 

A  la  page  231  de  ce  premier  volume,  et  aux  pp.  18  et  19  de  l'avertisse- 
ment à  la  tète  du  second,  nous  donnons  la  liste  de  plusieurs  traductions  fran- 
çoises de  l'histoire  d'EuTROPE.  Du  Verdier  nous  en  fournit  une  qui  paroît 
avoir  précédé  toutes  les  autres.  Elle  est  de  la  façon  de  Guillaume  Michel,  dit 
de  Tours,  et  imprimée  à  Paris  chez  Michel  le  Noir  en  1821,  in-fol.  avec  les 
additions   de  Paul  diacre  d'Aquilée.  (Dom  Rivet.  T.  IV.  1738.  Avertiss., 

p.  XXXVIII.) 


Voici  maintenant  la  liste  des  éditions  d'Eutrope  les  plus  recherchées,  parmi 
celles  qui  ont  paru  depuis  les  dernières  indications  de  YHiitoire  littéraire. 

1.  Eutrofnus,  cum  tnetaphrasi  grceca  Pœanii  et  notis  var.  acceditRufus 
Sextus,  cum  notis  diversorum;  recensuit,  stiasque  adnotationes  addidit 
Henr.  Verheyk.  Lugd.  Bat.  1762,  in-8».  Edition  de  la  collection  Yariorum, 
avec  un  meilleur  index  et  des  notes  plus  nombreuses  que  dans  l'édition  àe 
1729,  donnée  dans  la  même  ville  d'Amsterdam. 

2.  Le  même,  Paris.  Coustelier,  1746,  in-lS".  Remise  en  vente  en  1784, 
chez  Jos.  Barbou,  qui  en  avoit  changé  le  titre. 

3.  Le  même,  par  les  soins  de  Capperonnier  avec  le  Sextus  Rufns,  Paris, 
1798. 


n.  419. 


NOTES.  465 

Bieviarium  historiœ  romanœ  recensitum  et  vii'or.  doctorum  notis  vel 
mtegris  vel  sekctis  illustratum,  adjedis  suis,  edidit  Ch.-Henr.  Tzschticka. 
Lipsiœ,  1796,  tn-8%  et  1804,  in-8». 

5.  Eutropii  historiœ  romanœ  epitome.  Sexti  Rufi  Breviarium.  Parisiis, 
Renouard,  1796,  i/i-lS». 

6»  La  traduction  grecque  de  Pîeanius  a  été  de  nouveau  imprimée  et  accom- 
pagnée d'une  seconde  traduction  en  grec  moderne  par  Néophyte  Doucas. 
Vienne,  1807,  2  vol.  in-S". 

Voici  le  singulier  titre  de  la  traduction  françoise  de  Michel,  indiquée  par 
Dom  Rivet  : 

L'ancien  trésor  historial  des  impériales  couronnes  de  Rome  et  de  toute 
l'Italie,  traduit  du  latin  d'Eutrope  et  de  Paul,  par  Guillaume  Michel.  Paris, 
Michel  le  Noir,  1521,  in-foi.  goth. 

Enfin  la  traduction  citée  de  l'abbé  Lezeau  a  été  reimprimée  à  Paris  chez 
Barbou  en  1783  et  1804.  On  doit  cette  reimpression  à  de  Wailly,  qui  avoit 
revu  la  traduction  de  Lezeau,  mais  qui  avoit  oublié  de  rappeler  le  nom  de  cet 
abbé. 

Maintenant  pour  ne  plus  laisser  rien  à  désirer  aux  précieuses  indications 
bibliographiques  de  Dom  Rivet,  il  conviendra  de  lire  avec  toute  l'attention 
qu'ils  mentent  les  prolégomènes  de  l'édition  de  YYstoire  de  H  Normant,  due 
aux  soins  de  M.  ChampoUion-Figeac.  Paris,  Jules  Renouart,  1835,  8".  L'au- 
teur de  cet  excellent  morceau  de  critique  littéraire  passe  en  revue  un  grand 
nombre  de  manuscrits  du  Breviarium  d'Eutrope,  et  nous  apprend  à  distin- 
guer en  quoi  consistent  les  additions  de  Paul  Diacre,  oii  elles  commencent, 
où  elles  s'arrêtent,  et  comment  Paul  Diacre  a  lui-même  fait  deux  éditions 
distinctes  de  ses  remanieraens,  dont  jusqu'à  présent  on  ne  pouvoit  se  rendre 
compte.  (N.  E.) 


XIV. 

VicTORius,  page  232. 

Il  convient  de  remarquer  que  c'est  Dom  Rivet  qui  semble  plutôt  qu'Âusone 
reprocher  à  Victorius  d'avoir  c  tourné  ses  travaux  à  l'étude  d'une  antiquité 
<  stérile  et  méprisée.  »  L'idée  que  le  poète  bordelais  nous  donne  de  ce  pro- 
fesseur est  celle  d'un  antiquaire ,  ou  archéologue  comme  on  aime  mieux 
dire  aujourd'hui.  S'il  eût  vécu  de  notre  temps,  Victorius  eiit  appartenu  à  no- 
tre École  des  Chartes,  et  sans  doute  auroil  sollicité  une  place  dans  l'Acadé' 
mie  des  Inscriptions. 

Tom.  1.  Sec.  .Part.  N  n  n 


466  NOTES. 


IgnoraUs 
Assiduo  in  libris,  nisi  oiieita  lu);eos, 
ICxcsas  liiii'is  opicasquc  cvolvcie  cliurtas  , 
Major  quant  proniptis  cura  tibi  in  studiis. 
Quod  jus  (loixilicuiu,  qua'  Tudera  :  sluiuma  quod  uliin 
Antc  Numuiii  fuenu  sacrificis  curibus. 
Quod  Caslur,  i.'unclis  de  Regibus  ambiguis,  quod 

Coijjugis  a  libris  cdiileral  Rbuilojif... 
.Vola  libi  polius  quam  TuUius  «l  Maro  iiosln  , 
1:11  quiJquid  Lalia  roiiditur  hisloria... 

Ces  deux  derniers  vers  ne  nous  senil)lent  pas  contenir  un  reproche;  dail- 
leurs  la  mention  des  livres  de  l'époux  de  Rhodoi)e  se  rapporte  apparemment 
à  quelque  livre  apocryphe  publié  sous  le  nom  de  cette  fameuse  courtisane  et 
qui  pouvoit  aller  de  pair  avec  le  faux  Darès,  le  faux  Callisthenes  et  tant  d'au- 
Ires  romans  historiques  de  l'antiquité.  Le  résulUit  des  recheiclies  de  Castor 
sur  les  rois  douteux,  devoit  se  trouver  dans  le  livre  de  ce  rhéteur ,  Xf ovaà 
àyvôr,;j.aTa,  Cité  pal'  Apollodopc,  tilrc  (juc  doHi  Rivct  a  traduit  assez  bien  sous 
celui  i'Iynomnces  chronologiques.  Voy.  l"  partie,  p.  ISl.  (N.  E.) 


XV. 

s.  Servais,  page  243.  ligne  18. 

Kt  ijul  csl  sans  doiUc  ou  faire  remonter  trop  haut  rétablissement  de  la  foi 
dans  ce  diocèse,  ou  donner  trop  peu  de  temps  à  l'episcopat  de  ses  prem'urs 
evéqiies. 

U  semble  (jue  don»  Rrvcl,  moins  prévenu  contre  le  premier  établissement 
(le  la  foi  dans  les  Gaules,  .seroit  ici  convenu  que  ces  neuf  evêques,  désignes 
comme  prédécesseurs  de  S.  Servais,  pai-  des  auteurs  qui  n'avoient  aucun  in- 
térêt à  le  faire,  témoignoient  encore  assez  bien  de  cet  ancien  établisse- 
ment. (N.  E.) 

XVI. 

AusoNE,  [jage  281.  Note. 
Cette  observation ,  sur  le  nom  supiwsé  de  Decius  ou  Decimus,  n'empêche 


N  0  T  E  S.  467 

|);is  M.  Chesurolles,  dans  la  Nouvelle  b'wgraphk'  universelle,  de  l'ajouter  à 
nnix  (le  Magniis  Ausono.  (N.  E.) 


XVII. 

I.F.  MftvE.  pape  291.  lifrne  C. 


Il  semble  que  ïlieodosc  st-xprime  ici  d'une  fiçon  encore  plus  dattenst' 
pour  Ausone  :  «  Qui  (\u{ïiistns)  illos  liaud  sciam  an  acqualiter  ac  ego  te  ad- 
«  niiratus  sit;  rerle  non  ampliusdiligebal.  Vale.  parens.  »  (N.  E.) 


XVIIl. 


Lr  yttyiv..  paires  281. 31  S. 

A  la  fin  (le  re  (pie  nous  disions,  page  300.  du  sixit^me  Idylle  d'Ansone. 
intitula  :  «  Cupidon  attaché  à  une  croix.  »  il  faul  ajoulei-  ce  qui  suit.  '  Cette  Jour.  i1p«  Sça., 
pièce  fui  réimprimée  séparément  à  I;  Haye,  in-S",  l'an  1712.  avec  les  notes       "'  •*■  '" 
d'Accurse.  de  Vinet.  de  Scriverius.  d'un  Anonyme.  deScdigeretdcBarthius. 
à  la  suite  du  Perrigilium  Veneris. 

La  première  édition  des  Œuvres  d'Ausone,  par  Jacques  Tollius,  fut  renou- 
vellée  à  Leyde,  l'année  suivante.  1070.  en  un  volume  in-8°,  outre  celle 
d'Amsterdam  en  1671.  dont  nous  avons  fait  mention.  (I).  Rivet.  1735.  Tom.  II; 
Avertiss.,  p.  xix.) 

—  L'écrit  du  poète  Ansone,  intitulé  :  le  Jeti  des  Sept  Sages,  dont   nous 
rapportons  quelques  éditions  particulières  h  la  page  297,  '  a  été  traduit  en  Davenlicr,  bib., 
françois  par  Charles  Fontaine,  parisien,  et  imprim(5  avec  quelques  poésies   ^''^-  '**• 

du  traducienr,  i»  Lyon,  chez  Jean  Brotot.  l'an  lf>55,  in-8».  (I^iC  siême.  1738. 
T.  rV.  Avertiss.,  p.  xxxviii."! 

—  Dans  le  dénombrement  des  éditions  du  Poëte  Auzo^e  que  nous  avons 
fait  aux  pages  ."513-318,  on  a  dit  un  mot  des  leçons  de  Joseph  Scaliger,  sur  le 

texte  de  ce  Poëte;  mais  on  n'a  point  parlé  de  'l'édition  qu'il  en  avoit  dirigée  Bib.  Aib  Mam. 
en  conférant  le  texte  à  deux  manuscrits,  l'un  de  Jean  du  Tillet,  l'autre 
dEstienne  Charpin  de  Lyon.  Cette  édition  qui  est  en  un  petit  volume  in-2i, 
sans  notes,  sortit  en  1603  des  presses.de  Plantin,  qui  étoient  alors  entre  les 

?«  n  n  ij 


i68  N  0  T  E  S. 

mains  de  Raphlenghen.  A  la  tête  se  lit  la  vie  d'Âusone  de  la  façon  de  l'Edi 
tenr.  (Le  même,  1742,  T.  VI.  Avertiss.,  p.  ii.) 

—  La  question  du  Christianisme  on  du  Paganisme  d'Ausone  a  été  longue- 
ment et  savamment  traitée  dans  le  quatrième  mémoire  du  baron  de  a 
Bastie,  sur  le  Pontificat  des  Empereurs  romains.  (Acad.  des  Inscriptions, 
T.  XV,  1743,  p.  126-138.)  L'académicien  se  prononce  pour  le  Paganisme  ; 
mais  la  plus  forte  raison  qu'il  en  donne,  c'est  que  les  pièces  chrétiennes 
attribuées  à  Ausone  ne  sont  pas  de  lui  et  doivent  être  rendues  à  S.  Paulin  et  à 
d'autres  auteurs.  C'est  un  moyen  facile  de  rompre  en  visière  aux  difficultés 
de  la  thèse.  Il  est  singulier  que  La  Bastie  n'ait  pas  même  cité  sur  ce  point 
l'opinion  si  judicieuse  et  si  réservée  de  Dom  Rivet.  D'ailleurs  on  trouve*  dans 
son  mémoire  de  curieuses  indications  sur  le  nombre  et  le  mérite  des  manu- 
scrits que  les  premiers  éditeurs  d'Ausone  ont  suivis.  Tel  est  celui  de  la  Bi- 
bliothèque de  Saint-Eustorge  qui  fournit  à  Georges  Merula  pour  l'édition  de 
1494,  la  plupart  des  Epigrammes  sur  les  villes  célèbres.  Tel  est  celui  de 
l'abbaye  de  L'isle-Barbe,  dans  lequel  Simon  Charpin,  chanoine  de  Lyon,  avoit 
trouvé  et  communiqué  à  Scaliger  VEphemeride,  les  Parentalia,  les  Profes- 
seurs de  Bordeaux,  les  Epitaphes  des  Héros,  les  Epitres  d'Ausone  à  son 
père,  à  Théo,  à  Paul.  La  Bastie  rappelle  encore  les  deux  manuscrits  anciens, 
mais  très-incomplets  de  la  Bibliothèque  du  Roi,  n»'  4740  et  4902. 

Le  catalogue  de  la  Bibliothèque  de  S.  Gall  signale  sous  le  n-  S.  259,  un 
manuscrit  remontant  à  l'année  867,  et  contenant  entr'autres  pièces  :  «  Ausonii 
c  Mosellam,  epitaphia,  versus.  >  Deux  autres  manuscrits  des  poésies  d'Au- 
sone sont  conservés  en  Espagne,  l'un  k  Valence,  l'autre  dans  l'Escurial  ;  mais 
celui-ci  ne  date  que  du  xv*  siècle.  (Voy.  Haenel,  Gatalogi  libror.  mannscript... 
Lipsiae  1830,  p.  715,  988  et  1002.) 

Depuis  la  belle  édition  de  l'abbé  Souchey,  ad  usum  Delphini,  Paris,  1730, 
signalée  par  dom  Rivet,  on  n'a  plus  à  rappeler  que  celle  de  1823,  Londres, 
3  vol.  in-8»  de  la  collection  de  Valpy,  n»  55-57.  En  1843,  M.  E.-F.  Corpet 
a  fourni  à  la  Bibliothèque  latine-française  de  Panckoucke,  Paris,  2  vol.  in-8°, 
une  traduction  plus  satisfaisante  que  celle  de  l'abbé  Jaubert.  Paris,  Delalain, 
1769,  4  vol.  in-18. 

—  Outre  les  deux  manuscrits  conservés  dans  la  Bibliothèque  Impériale 
sous  les  n°'  4902  et  4740  (aujourd'hui  n"  4887  et  8500),  et  cités  par  La 
Bastie,  la  même  Bibliothèque  en  possède  encore  deux  autres,  l'un  no  8284, 
qui  ne  remonte  qu'au  xV  siècle  et  qui  reunit  aux  Epigrammes  de  Martial  les 
plus  obscènes  d'Ausone;  l'autre,  n°  7558,  olim  6411  '.  provenant  de  la  Bi»- 
bliotheqne  de  Colbert  et  paroissant  remonter  à  la  fin  du  vin*  siècle.  Il  offre  la 
réunion  des  Epitres  d'Ausone  et  de  saint  Paulin.  Il  y  en  a  cinq  de  Paulin,  et 
quatre  d'Ausone,  mais  la  première  qui  commence  ainsi  : 

Omnipotens  solu  mentis  mihi  cognite  cnlta, 
Ignorait  malis  et  nnlli  ignote  pionim. 

semble  attribuée  à  tort  à  Sanctut  Ausonius  ;  elle  est  plutôt  de  S.  Panhn.  (N.  E.^ 


NOTES.  469 

XIX. 

Saint  Ambroise,  pages  325.412. 


A  h  page  341^  où  nous  parlons  de  la  traduction  des  traités  de  S.  Ambroisc 
sur  les  vierges  et  la  virginité,  il  faut  ajouter  ceci  :  'Le  P.  Duranti  de  Bonre-  Jonr.  des  Se»., 
cneil,  Prêtre  de  l'Oratoire,  a  traduit  de  nouveau  les  mêmes  opuscules  de       '  '  '"'  " 
S.  Ambroise,  que  Doni  Joseph  Mege  avoit  traduites,  et  y  a  joint  une  traduc- 
tion de  tous  les  autres  du  même  Père  sur  la  virginité.  De  sorte  que  son  recueil 
contient  les  trois  livres  sur  les  Vierges,  et  les  quatre  suivans  dont  nous  avons 
rendu  compte.  Ces  sept  opuscules  ainsi  traduits  en  notre  langue  sont  imprimés 
à  Paris,  chez  Jacques  Etienne,  l'an  1729,  en  un  volume  in-12.  'A  la  tête  se  p.  5i4. 
lit  un  discours  ou  dissertation  préliminaire,  où  le  traducteur  traite  de  l'anti- 
quité des  Vierges,  du  jour  destiné  pour  leur  consécration,  des  cérémonies  qui 
l'accompagnoient,  de  la  place  qu'elles  occupoient  dans  l'Eglise,  enfin  de  la 
nature  des  exhortations  que  l'Evêque  leur  faisoit  à  cette  occasion. 

La  seconde  traduction  des  letres  dix-septieme  et  dix-huitieme  de  S.  Am- 
broise, et  de  la  harangue  de  Symmaque,  dont  nous  faisons  mention  à  la 
page  381,  'est  l'ouvrage  de  M.  Giry  de  l'Académie  Françoise,  et  parut  à  Paris  Hist.  del-Ac.  Fr. 
pour  la  première  fois  en  1639,  in-12.  (D.  Rivet,  1735.  T.  II.  Avertiss.,    '    '^' 

p.  XIX,  XX.). 

—  En  1596,  Philippe  du  Bec,  d'Evêque  de  Nantes  devenu  Archevêque  de 
Reims,  publia  une  traduction  françoise  du  traité  de  S.  Ambroise  sur  les 

Veuves ,  qu'il  dédia  à  la  Reine  douairière  de  France.  '  Cette  traduction  est  Bib.  d«  Lyr. 
imprimée  sous  ce  titre  :  Traité  de  S.  Ambroise  sur  la  viduité,  etc.,  avec  les 
sermons  du  Traducteur,  à  Paris,  chez  Jean  Février,  en  un  volume  in-8',  belle 
édition.  (Le  même,  1740.  T.  V.  Avertiss.,  p.  i  et  ii.) 

—  Les  manuscrits  des  ouvrages  réels  de  Saint  Ambroise  ou  qui  lui  ont 
souvent  été  attribués,  sont  pour  ainsi  dire  innombrables.  Il  doit  suffire  ici 
de  relever  l'indication  des  textes  antérieurs  au  xii*  siècle ,  d'après  les  cata- 
logues rassemblés  par  Haenel  et  les  autres  catalogues  ou  exemplaires  que  nous 
aurons  pu  reconnottre  par  nous-mêmes.  Ainsiles  Opéra  varia  se  trouvent  à 
Orléans,  dans  un  msc.  du  ix"  siècle;  à  Montpellier,  x*  siècle;  à  Dijon,  à 
Saint-Omer,  à  Reims  et  à  Douay,  xi*  siècle. 

Orléans  a  le  livre  De  lapsu  virginis  cujusdatn,  xi'  siècle.  Montpellier  :  De 
fide,  ad  Gratianum  imp.,  «•  s.  Le  même  ouvrage,  à  Boulogne,  vii«  ou  viii» 
siècle. 

De  Satiri  excetsu.  Boulogne,  vu*  s. 

De&pirituSaneto.  S.  Gall.,  x«8.  -;    U  —    iûm» 
3  1 


470  NOTES. 

De  Incarnatione  Christi.  MonipeWïcr,  X'  s.   S.  G.iU.,  x'sitcle.  Vendôme, 
XI*  siècle. 
De  Poenitentia.  Boulogne,  vu''  s.  —  Oii<îans,  xi"  s. 
Apologia  Davidis.  Boulogne,  vu*"  s. 
In  Luca.  S.  Gall.,  ix*  ot  x*  s. 
De  bono  imirtis.  S.  Gall.,  x"  s. 
De  Jacob  etvita  beata,  texte  grec.  Basic. 
De  Joseph  Patriarclia.  Boulogne,  vii"  s. 
])e  Benediclione  Patriarcharum.  Boulogne,  vu  s. 

Dans  la  Bibliothèque  Impériale,  les  manuscrits  qui  nous  ont  paru  mériter 
d'être  signalés  sont  : 

Fonds  latin..  —  N"  1646.  xi«  siècle.  Deux  homélies. 
N°1718.  IX*  siècle.  L'//exameron  ;  le  début  manque. 
N»  1719.  XI"  s.  ],'He^ameron.  —  Le  De  Officm.  —  Les  livres  De  Jsaac. 

—  De  Bonomoi-tis.  —  De  Fuga  mculi.  -  De  Jacob.  —  De  Maehahœorum 
passione.  —  De  ParadiKo  ïerrestri.  —  De  amxolatinnc  Valentiniani .  — 
Epittola  ad  Vercellfmes.  — Liber  pastoralis.  —  De  Mnnteriis.  —  De  Saera- 
mentis. 

N"  1732.  ix*  siècle,  en  lettres  onci;iles.  Livres /)<;  EUa.  —  De  Tobia.  —  Dr 
interpellatiojie  Job.—  David.  —Apnlogia  David.  —  DeNabitth.  —  DeOf- 
/îcif-s. 

N"  1 733.  xi*  siècle.  Explanationes  in  psalnws,  1 ,  33  à  40,  43,  i?>,  48  et  61 . 

N"  1740.  XI*  s.  Commentariu.'i  in  Lucum.  —  Fides  cl  carmina  lu  illius 
laudem. 

N»'  1743  et  1746.  x*  siècle.  De  fide  contra  Aria  non,  Ubridiw.  —  DcSpiritu 
Sancto.  —  De  Incarnatione. 

N"  1747  et  1750.  xi*  siècle.  DeFide. 

N"  1751.  XI*  siècle.  De  Virginifale.  —  De  Vidnis.  —  De  lapsu  Yirgitm. 

—  Ad  corruptorem  Virginis.  —  De  A/)/.sfe)ni.s.  —  De  Sacramentis. 

N»'  1760  et  1761.  x*  siècle.  In  epistolam  PaiiU  ad  Rnmanoa. 

N»  1764.  X"  s.  De  festo  S.  Agnetis. 

N»  1770.  IX*  et  x"  siècles.  Ecriture  lombarde.  Scripta  Ambrosii.  —  Yita 
S.  Ambrosii,  authore  Paulino. 

N"  1788.  XI*  s.  Sernu)  de  S.  Petro.  —  DeinventioneSS.  Gervasii  el  Pro- 
thasii.  —  De  Victoria  crucis. 

N»  1897.  XI*  siècle.  Sermo  in  Naliritatem  B.  MarUe.  —  In  nalaliplurimo- 
rum  martyrum. 

N'igiS.  XI*  siècle.  De  haac.  —  De  bono  mortix.  —  De  fuga  saeeuli.  — 


N  0  ï  E  S.  471 

De  Jacob.  —  De  Paradisu.  —  De  consolatione  Valentiniaiii.  —  Ad  VerceU 
lenses.  ' 

N''2151.  xi"  siècle.  DeSandiss.  Tvinilate. 

N°  2341 .  IX"  siècle.  Fuies.  —  De  Superbia  carnis. 

N»  3779.  X'  s.  De  SS.  Gervado  4t  Prothasio. 

N"  3780,  3781,  3784/ 3783.  xi"  siècle.  Homilia  in  Lucam,  —  In  Mat- 
thœum.  —  De  perpétua  virginitate  Deutœ  Mariœ.  —  Adhortatio  ad  vir- 
gines.  —  Seitnones. 

N''4886.  xi"  s.  Liber  de  lirachmanis  tributtis  S.  Ambrosio. 

N»  3343.  xi'  s.  De  Jejunio. 

Supplément  LATIN.  —  N"»335  t'l33,')  bis,  xi"s.  DeOfficiis.  —David.  — De 
Nabuth.  —  De  Joseph.  —  De  Myslerns.  —  De  Sacramentis.  —  De  Excessu 
Salyri.  —  De  Paradiso.  —  De  Isaac. 

N°  438.  IX"  s.  Homiliae  et  Sermones. 

N"  394.  via'  s.  Letlres  oncial.  De  Fide. 

S.V1NT  Germain.  —  N"  48.  ix'  s.  Ouvrages  divers.    . 

N"  203.  viii"  s.  En  lettre  lombarde,  Vllexameron. 

N»  204.  IX' s.  De  Patriurclm.  —De  Poenitentia.  —  De  Excessu  Satyri.— 
De  Incarnatione.  —  Epistulae. 

N"  206.  X'  s.  Fragmentum  de^pirituSanclo. 

N"  723.  x«  s.  In  Epistula  Pauli  ad  llominos. 

N"  726.  xi"  s.  Hexameron. 

N»  843.  xi"  s.  De  fuga  saecuU. 

N»  960.  virou  viiiosiècle  ;  en  letlres onciales.  Sermo  in  capittil ,  23  Luc. 

N'  1307°  ix' ou  X' siècle.  Contra  Novatianum  de  Poenitentia. 

SoiiBONNE.  —  N"  210.  x«s.  Commentaire  sur  le  Pseaume  118. 

N»  1332.  xi«  s.  De  Officiis. 

N"  13S3.  xi«  s.  In  Psalmum,  118. 

Saint-Martin.  —  N"  73.  ix"  siècle.  De  Officiis. 

Notre-Dame.  —  N"  244.  ix' s.  De  Inventione  corporum  SS.  Gervasti  et 
Prothasii. 


PIN  DES  notes. 


TABLE 

DES   AUTEURS 

ET  DES  PRINCIPALES  MATIÈRES 

CONTENUES  DANS  CE  VOLUME. 

Les  Libraires  àiant  jugé  à  propos  de  se  servir  de  deux  pi-esses  à  la  fois 
pour  imprimer  t Ouvrage,  il  a  fallu  le  diviser  en  deux  parties.  C'est  pour 
les  distinguer  dans  cette  Table  qu'on  ajoute  un  a  aux  pages  de  la  première 
partie,  et  un  b  à  celles  de  la  seconde.  On  trouvera  joint  à  quelques  chiffres 
de  la  première  partie  un  astérisque  *.  On  l'y  ajoute  pour  distinguer  huit 
pages,  dont  on  y  a  répété  les  chiffres  depuis  ïa  217  jusqu'à  223. 


ABASCAifTE,  Médecin  i  Lyon,  p  2S0.  a. 
Cité  par  Galien,  ibid.  N'a  écrit  qu'en 
grec.  Votez  son  éloge,  p.  350.  a.  Pent-étre 
le  même  que  Q.  Sulp.  Abascantas, 
p.  251.  a. 

L.  Satr.  Abatcantiui,  différent  d'Abas- 
eante  le  Médecin,  p.  S50,  S51.  a. 

Àbra,  fille  de  S.  Hilaire  de  Poitiers,  p. 
140.  b.  Écrit  an  Saint  dans  son  exil,  p.  142. 
b.  Ce  Saint  lai  répond  et  loi  enrôle  deux 
hymnes,  p.  154.  6. 

Aeadémieieni,  lear  secte,  p.  373.  a. 

Atadémie,  yolei  :  Écolet. 

Accepte,  Evéqaeéla  de  Frejus,  p.  311.  6. 

S.  Achillée,  Diacre,  disciple  de  S.  Ire- 
née,  prêche  la  foi  dans  les  Gantes,  p.  226. 
•. 

C.  ^«illtut  a  écrit  en  grec  des  annales 
de  Rome,  p.  132.  a. 

Actée,  affranchie  de  Néron,  son  portrait 
assez  plaisant,  p.  193.  a. 

Adrien,  Empereur,  sa  jalousie  contre 
eenx  qui  passoient  pour  plus  savans  que 
lui,  p.  267.  268.  o.  Adopte  Tile  Antonin, 
p.  278.  a. 

Aetiui,  Htdtre  d'Eunomius,  ses  erreurs, 
p.  245.  b.  S.  Servais  de  'Tongres  écrit 
contre  loi,  ib. 

Tem.  I  Part.  II. 


X.m.  jEonia,  femme  d'Ansone  le  Médecin, 
et  mère  du  poète  de  même  nom,  p.  58. 
213.  282.  6. 

Dom.  An*,  célèbre  Avocat  à  Rome, 
p.  133.  181.  a.  Y  Toit  Quintillien  au  nombre 
de  ses  disciples,  p.  182.  a.  Y  est  éleTé  à 
de  grands  honneurs,  p.  181.  a.  Vo'iez  son 
éloge,  p.  181 .  184.  a.  Ses  écrits,  p.  185. 
186.  a. 

Agit,   colonie  des  Marseillois,  p.  46.  a. 

Agen,  fondation  de  cette  Eglise,  p.  308. 
a.  Grands  hommes  qui  en  sont  sortis,  6. 
p.  137.266.6. 

Agrèc'e,  Evèque  de  Trêves,  assiste  au 
Concile  d'Arles  en  314,  p.  53.  b. 

Agréée ,  Evèque  dans  les  Gaules  att 
Y*  siècle,  p.  203.  b. 

Cen.  A.  AcBicios,  on  Acr^tius,  Rhéteur, 
p.  202.  6.  Ses  grandes  qualités.  Voïez  son 
),  p.  202.  203.  6.  Ses  écrits,  p.  203.  6. 


Cn.  Jnl.  Agricola,  Gouverneur  de  la 
grande  Bretagne,  p.  219.  '  a.  Sa  naissance, 
p.  219.  320  '  a.  Ses  études,  p.  220.  '  a.  Il 
donne  sa  fille  en  mariage  à  Tacite  l'Historien, 
p.  221.  '  a.  Etablit  les  études  dans  la 
grande  Bretagne  ,  ibid.  Votez  son  éloge, 
p.  219.  222.  '  o. 

Agrotas,  Avocat,  ne  plaidoit  qu'en  Grec, 
p.  133.  a.  Son  éloge,  p.  149  a. 

Ooo 


47i 


TABLE  DES  MATIERES. 


Ainai,  Eglise  collégiale  à  Lyon,  autrcfoiii 
abbaïe,  d'où  lui  viunt  son  nom,  p.  t3T.  u. 

Albi,  comment  fat  fondée  l'Eglise  de 
cette  ville,  p.  307.  a. 

Albutia,  maîtresse  du  Pétrone,  nuJ  con- 
fondue avec  Albucilla,  p.  191.  192.  a. 
illctUamdi'afaitrclogedelamort,  P.275.U. 

Alcime  ,  Historien ,  Uratenr  et  Poëtc, 
p. 136.  6.  L'intégrité  desesmujurs.p.  137.  t. 
Ses  talcDS  pour  les  letros,  ili.  V'uïez  son 
éloge,p.l3C.  138.  6.Ses  écrits,  p.  137.138.  h. 

il/cinuûs,  SOS  absurdités  réfutées  parCaïos, 
p.  3(30.  a. 

Alcmœon  ,  le  premier  philosophe  qui  a 
écrit  sur  la  nature,  p.  371.  a. 

S.  Alexandre,  disciple  de  S.  Pothin, 
p.  332.  a. 

Alexandre  ,  Médecin  de  profession,  tra- 
vaille avec  fruit  à  étendre  la  religion  chré- 
tienne dans  les  Gaules,  p.  £25.  a. 

Alexandre  ,  surnommé  Pliilalethe ,  cé- 
lèbre Médecin,  p.  208.  a. 

Alexandre  de  Scleucie,  disciple  deFavo- 
rin,  p.  269.  a. 

Snlp.  Alexandre,  Historien,  en  quel  toms 
ilvivoit,  p.  428.  429.  6.  Voïe.z  son  éloge, 
ib.  Ce  qui  nous  reste  de  ses  écrits, 
p.  439.  6. 

S.  Alipe,  disciple  de  S.  Ambroise,  reçoit 
le  baptême  de  sa  main,  p.  336.  6. 

Amance,  Evùque  de  Nice,  assiste  eu  381 
au  Concile  d'Aquiléc,  p.  3^4.  6. 

S.  Aubroise  ,  Evèque  de  Milan ,  Docteur 
de  l'Eglise  et  Confesseur,  p.  325.  b.  Sa  fa- 
mille, p.  325.  32(i.  b.  Sa  naissance  ,  p.  326. 
6 .  Son  éducation,  ibid.  Est  fuit  Gouverneur 
de  Province,  p.  326.  327.  b.  Elu  Evûquu  do 
Milan,  p.  327.  b.  Son  baplôme,  son  oi-dinu-  ' 
tion  ,  ibid.  Sa  conduite  dans  l'épiscupat , 
p.  328.  b.  Sa  tendresse  pour  les  misérables, 
p.  329.  b.  Sa  générosité  épiscopale,  p.  320. 
332.  381.  6.  Ses  liaisons,  p.  35.  .328.  329.6. 
Assiste  en  381  au  Concile  d'Aquilée,  et  un 
est  l'amu,  p.  34.  b.  En  tient  un  autre  à 
Milan  contre  Jovinicn,  i7>.  Rejutlc  les  Pris- 
cillianisles,  p.  36.  37.  b.  lilime  leurs  adver- 
saires les  ithaciens,  p.  37.  6.  Son  atache- 
mont  pour  l'Empereur  Gralicu,  p.  236.  b. 
Travaille  pour  lui  à  divers  écrits,  p.  236. 
237.239.  6.  Sa  tendresse  par  Valentinien  II, 
p.  262.  b.  Fait  son  Oraison  funèbre,  p.  263. 
265.  6.  Refuse  do  se  trouver  aux  Conciles 
des  Evéqoes  Gaulois  i  cause  de  eurs  divi- 
sions, p.  265.  6.  Est  persécuté  par  l'Impé- 


ratrice Justine,  p.  330.  331.  b.  Sa  mort,  p.333 
b.  Vuïez  son  élogf,  p.  32.5.  336.  b.  Ses  disci 
pies,  p.  3.36.  6.  Son  caraclere,  p.  377.  ,S78.  h. 
Ecrits  qui  restent  du  lui,  p.  .336.  391.  b.  ICcrits 
perdus,  p.  391.  395.  b.  Ses  écrits  suj)- 
posés,  p. 3!)5.  404.6.  Sa  manière  d'écrire,  sa 
doctrine,  son  érudition,  p.  iOJ.  408.  6.  Sa 
doctrine  sur  l'état  d(!s  unies  ;i  la  sortie  de 
leurs  corps,  p.  360.361.  374.  387.  389.  h. 
Editions  de  ses  œuvres,   p.  408.  4t2.  6. 

Ambroise,  Préfet  des  Gaules,  {xire  du 
Saint  du  même  nom,  p.  326.  6. 

L'Ami-,  sa  nature,  p.  69.  6.  Son  origine, 
p.  162.  b.  Son  immortalité  soutenue  jKir  les 
anciens  Gaulois,  p.  9.  34-37.  o.  Qui  ren- 
seignent à  Pythagore,  p.  10.  37.  a.  Etal  de 
l'ame  des  Juslus  après  leur  sortie  des  corps, 
p.  360.  361.  374.  376.  387.  389.  6. 

Ammimius,  Auteur  qui  a  écrit  sur  la  pro- 
priété des  mots,  p.  283.  a. 

A.MSTASE,  Grammairien,  euseignu  à  Poi- 
tiers, p.  206.  6. 

Anaiimiindre ,  inventeur  du  g/iomon  , 
p.  271 .  a.  Composa  le  premier  une  géographie 
générale,  ibid. 

Ancyre,  il  s'y  tient  un  Concile  en  35, 
p.  29.  b.  On  y  rejette  la  seconde  fornmle 
de  Sirmich  ,  ibid. 

S.  Anduche,  Prêtre,  travaille  à  étendre 
la  foi  dans  les  Gaules  ,  p.  225.  294.  a.  Ou 
écrit  ses  actes,  p.  294.  a. 

Angers,  fondation  decette  Eglise,  p.  309a. 

Les  Anges  connaissent  tout  jusqu'à  nos 
pensées,  p.  178.  6.  Leur  ministère  s'étend 
■X  tout,  ibid.  Tout  le  monde  eu  est  rempli , 
ibid.  Opinion  particulière  do  Lactance  snr 
les  Anges,  p.  85.  86.  6. 

Les  Anges  Gardiens ,  lenr  intercession  et 
leur  culte,  p.  3^45.  6. 

Aiiijuulême ,  fondation  de  cette  Eglise, 
p.  308.  u.  Son  premier  Evoque,  t6»d.  Ecoles 
de  cette  ville,  p.  17.  244.  o.  418.  419.  6. 
Tétrade  y  enseigne  les  belles  letrus,  p.  17. 
418.  6. 

Annibalien,  frère  de  Constantin  le  Grand 
en  exil  à  Toulouse,  p.  97.  b. 

Auuibaliea,  fils  du  précèdent,  étudie  à 
Toulouse,  p.  127.  6. 

Anontme,  ,  Poëte  Chrétien,  étoit  d'Aulun, 
p.  95.  6.  En  quel  tems  il  a  vécu,  p.  96.  b. 
Son  poëme,  p.  95.  97.  b.  Voies  son  éloge, 
ibid. 

Anonyme,  Orateur  Grec  ,  p.  102.  6.  Pro- 
nonce à  Arles  l'Oraison  fuuebre  de  Constau- 


TABLE  DES  MATIERES. 


175 


Un  le  Jeune,  p.  lOS.d.  Etoil Chrétien,  p. 103. 
10(.  /).  Quelle  étoit  son  éloquence,  cotes  son 
éloge,  p.  102.10*.  6. 

AîiON-ïiE,  Panégyriste  do  l'Empire,  p.50. 6. 
Prononce  deux  li:irangues  à  la  louange  do 
Constantin  le  Grand,  p. 51.  6.  Editions  do 
ces  doux  pièces ,  p.  52.  f>.  vnîez  son  éloge, 

jt.m.ra.  ft. 

A>(ONYiiE ,  homme  de  Ictrcs ,  préceptenr 
de  Valvntinien  II,  p.  324.  6.  viriez  son  élogo. 
p.  324.  325.  b. 

VAntechrift ,  son  nom,  son  avènement, 
son  rogne,  p.  3.X1.  345.  367.  368.  393.  399. 
a.  Opinion  assoz,  parlicnlioro  h  son  sujet , 
p.  416.  ft. 

iin((ft«,  Colonie  des  Narseillois,  p.  46. a. 

Tile  Aktoi«!!«,  Empereor,  son  pals,  p.2T7. 
a.  T«msdo  sa  naissance,  tftid.Son  édm-a- 
lion,  p.  278.  a.  Son  éloquence,  ibid.  Esl 
adopté  par  l'Empereur  Adrien,  p.  278.  a.  Est 
élevé  à  l'Empire,  ibid.  Sa  manière  do  gou- 
verner, p.  279.  280.  a.  Adopte  M.  Anreleet 
L.  Verns,  p.  279.  a.  voïez  son  ologe,  p. 277. 
281.  n.  Ses  écrits,  p.  281.  282.0. 

Arrins  Antoninns,  aïeul  maternel  de  Tito 
Antonin,  p.  277.  n.  Kecommandable  pour 
SCS  mceur»,  p.  277.  278.  a.  Grand  homme 
de  letre»,  p.  253.  277.  a. 

Apellh  ,  disciple  de  Marcion,  a  beanconp 
écrit,  p.  406.  6.  Erreurs  de  ses  disciples  ré- 
futées par  S.  Ambrnise,  p.  337.  6. 

Ar.  Aper,  Préfet  du  prétoire  ,  donne  sa 
nile  en  mariage  à  l'Emp.  Namcrien,  p.  414. 
a.  Sa  cruauté  et  son  suplice,  ib. 

Marcns  Aper  ,  Orateur  célèbre,  brille  à 
Rome  dans  le  barreau,  p.  133.  218.  a.  Est 
élevé  à  do  grands  honneurs,  p.  218.  a. 
Grand  partisan  <lc  la  nonyclle  éloquence, 
p.  219.  222.  a.  votez  son  éloge,  p.  218.  219. 
a.  Est  Auteur  du  dialogue  sur  la  corrup- 
tion du  l'uloquence,  p.  220.  a. 

Aur.  ApoUinari$,  célèbre poëto ,  p.415.a. 

Les  ApoUinnristes,  leurs  erreurs  réfutées 
par  S.  Ambroise,  p.  394.  395.  6. 

Apollon,  surnommé  Bolcnus,  p.  8.  a.  on 
Ténération  cheï  les  Gaulois,  qui  lui  avoicnt 
érigé  plusieurs  temples,  ibid. 

Aquilée,  on  y  lient  un  Concile  en  381. 
contre  l'Arianisme,  p.  34.  237.  6.  Il  s'y 
trouve  plusieurs  Ev>iqnes  des  Gaules,  p.  34. 6. 

Aquilinus,  dont  on  voïoit  autrefois  quel- 
ques écrits,  p.  107.  6. 

Vet.  Aquilinut,  Consul  en  286,  p.  107.  6. 
Aratut  d«  Cilicie,  ses  phénomènes  tra- 


duits par  Germanicna,  Cioeron  et  Avienus, 
p.  156. 157.  a. 

Arliitrr,  surnom  de  Pétrone  ;  votes  Pé- 
trone. 

Arbogatte,  Général  des  armées  de  Valen- 
tinienll,  lui  âte  la  vio,  p.  363.  6.  Livre  l'Em- 
pire au  tyran  Eugène,  ibid. 

Mm.  Magnus  Arborios,  Rhéteur,  sa  nais- 
sance, p.  97.  ft.  Ses  grands  talons,  ibid.  En- 
seigne i  Toulouse,  tfttii.  Est  appelé  à.  Con- 
stantinople ,  p.  98.  6.  Y  meurt,  tftid.  voi«x 
son  éloge,  p.  97.  98.  ft.  Ses  écrits,  p.  98.  b. 

C.TC.  Arg.  Arborios,  astronome  et  philo- 
sophe, natif  d'Antun,  p.  58.  6.  voïez  son 
éloge ,  ibid. 

Arborius,  Préfet  de  Rome  en  380.  p.  99. 
b.  petit-fils  d'j£m.  Hag.  Arborius,  tft. 

Archyta$,  Philosophe  de  Tarcnte ,  axitenr 
d'un  pigeon  de  bois  qui  voloit,  p.  271. 
272.  0. 

L'.<4rtam>m« ,  sa  naissance,  p.  U.-  b. 
Gagne  presque  tout  le  monde,  p.  33.  268. 
ft.  S'efforce  de  pénétrer  dans  les  Gaules  , 
p.  24.  ft.  Résistance  qu'il  trouve  de  la  part 
des  Evéqucs  Gaulois,  p.  24.  34.  140.  145. 
268.  ft.  Est  condamné  dans  le  Concile  de 
Paris,  p.  Xi.  129.  131.  ft.  Dans  celui  d'A- 
quilée,  p.  .34.  6.  Conciles  au  sujet  de  celte 
hérésie,  p.  25.  27.  30.  34.  115.  119.  143 
143.  6.  Persécutions  qu'elle  excite,  p.  25.26. 
31.  140.  141.  279.  ft.  voïez  les  Ariens.  S. 
Hilaire  de  Poitiers  fait  l'histoire  de  l'Aria- 
nisme en  Orcidcut,  p.  170.  171.  6. 

Les  Ariens  ,  leurs  nises,  leurs  artifices  , 
p.  150.  160.  6.  Leurs  sublilités,  p.  161.163. 
1<».  6.  réfutas,  p.  270.  271.  276.  277.  6. 
S.  Hilaire  de  Poitiers  écrit  contre  eux,  p.  159. 
156.  ft.  Leurs  violences,  leurs  vexations, 
p.  US.  119.  12S.  123.  135. 150. 169.  b. 

ArittopUane  a  fait  l'éloge  de  la  pauvreté , 
p.  275.  o. 

Arlei,  Colonie  des  Harseillois ,  p.  46.  a. 
La  Rome  des  Gaules,  p.  49.  Son  éloge,  p.  49 
103.  o.  Ses  premiers  Evêqttes,  p.  304.  306, 
308.  a.  D'Arles  la  foi  se  répand  ailleurs, 
p.  ."iOO.  a.  Conciles  qui  s'y  sont  tenus,  p.  23. 
25.  52.  115.  6.  Ou  y  voit  une  Cour  impé- 
riale, p.  3.  103.  ft.  Grands  hommes  qu'a 
produits  celte  ville,  p.  178.  219.  421.  422. 
a.  99.  103.  ft.  Ses  Ecoles,  p.  243.  a. 

Artxkos,  Jurisconsulte  de  Narbone,  p.219. 
a.  Va  à  Rome,  d'où  il  retourne  en  son  païs, 
iftid.  Ses  liaisgns  avec  le  poëto  Martial, 
votes  son  éloge,  ibid. 

Arteme,  Evèqae   d'Embrun,  assiste  an 
I  Concile  de  Valence   p.  309.  6. 
0  00  ij 


476 


TABLE  DES  MATIERES. 


Arlemon,  oaArtemas,  disciple  de  Theo- 
dote  le  Corroïeur,  p.  259.  379.  a,  Caïas 
écrit  contre  lui.  ibid. 

Aiclepiaie,  Evèqne  d'Antioche  et  Martyr; 
enqnei  tems  il  avion,  p.  80.  b. 

Atclepîade,  Auteur  Ecclesiastiqne ,  qni  a 
écrit  sur  la  providence  de  Dieu,  p.  80.  6. 

Jnl.  Aiiatieut,  l'Orateur  Julias  Seeandus 
entreprend  d'écrire  sa  vie,  p.  217.  a. 

Val.  ilitaticut,  grand  homme  de  probité 
et  de  courage,  son  histoire,  p.  128.  a.  On 
songe  à  le  faire  Empereur  à  la  place  de  Ca- 
ligula,  ibid. 

Val.  Atiaticu$ ,  Gouverneur  de  la  Gaule 
Belgique,  p.  129.  a.  Se  déclare  pour  Vitel- 
lius,  qni  lui  donne  sa  fille  en  mariage,  ibid. 

VAêtrologie  ennemie  de  la  vérité,p.323.  a. 

Ataee  dans  la  Gaule  Narbonoise,  lieu  de 
la  naissance  de  P.  Ter-Varro,  p.  ^0S.  a. 

S.  Athanatf,  Evèque  d'Alexandrie,  pros- 
crit par  les  Ariens,  p.  122.  123.  6.  Accusé 
par  l'Empereur  Constance  même,  p.  122.6. 
Sous  son  nom  l'on  n'en  veut  qu'à  la  foi  or- 
thodoxe, p.  141.  b.  son  éloge,  p.  102.  6. 
Eiiléà  Trêves,  p.  6.  100.  b.  Avantage  qu'en 
tire  l'Eglise  des  Gaules,  p.  24.  110.  A.  Est 
traité  avec  honneur  par  Constantin  le  jeune, 
p.  100.  6.  et  par  S.  Haximin  de  Trêves, 
p.  110.  b.  Attachement  qu'ont  pour  lui  les 
autres  Evèques  des  Gaules,  p.  24.  25.  117. 
6.  Est  rétabli  dans  son  siège  par  le  Concile 
de  Sardique,  p.  111.  6.  Proscrit  de  nou- 
veau dans  le  li  Concile  d'Arles,  p.  116.117. 
6.  et  dans  celui  de  Besiers,  p.  118.  119.  b. 
Défendu  par  S.  Paulin  de  Trêves,  p.  123.  6. 

S.  Attale,  l'un  des  premiers  Martyrs  de 
l'Eglise  de  Lyon,  p.  231.  291.  a. 

L'Avarice  indigne  d'un  Chrétien,  p.  372. 
376.  377.  b.  Est  un  monstre  dans  un  Ec- 
clesiastiqne, p.  371.  b.  Laisse  toujoursdans 
l'indigence,  p.  106.  a. 

Auch,  son  premier  Evique,  p.  307.  a. 
Le  Siège  d'Eause  y  est  transféré,  t6>d.  Ses 
Ecoles,  p.  14.  15.  114.  6.  244.  a.  Grands 
hommes  qni  en  sont  sortis,  p.  114.  b. 

Audileur$,  origine  assez  plaisante  de  cette 
dénomination,  p.  177.  a. 

Avenehe,  ville  des  Helvétiens  ;  on  y  cdI- 
tivoit  anciennement  les  belles  letres,  p.  131 . 
132.  136.  a. 

Augura,  leur  profession  fort  relevée, 
p.  29.  a.  Condanuée  par  l'Empereur  Gon- 
ftance  ,  p.  5.  b. 

Sent.  Adgdkinds,  Poète  célèbre,  p.  244  a. 
Fait  les  délices  de  Rome,  p.  2,^.  a.  Est  Con- 
sul en  132,  ibid.  votez  son  éloge,  p.  252. 
Z53  a.  Ses  poésies,  p.  253.  254.  a. 


Auguste  passe  dans  les  Gaules,  et  y  éta- 
blit les  Loix  Romaines,  p.  57.  58.  a. 

S.  Augustin,  Évèque  d'Hippone,  converti 
par  les  discours  de  S.  Ambroise ,  p.  328. 
336.  6.  Reçoit  le  baptême  de  sa  main,  p.  332. 
336.  b.  Adresse  quelques  écrits  à  Icaire , 
p.  258.  6.  Réfute  les  écrits  de  Parménien, 
Evique  Donatiste,  p.  251. 254.  6. 

Sex.  Rnf.  Fest.  Avienu$  fait  nn  abrégé 
des  provinces  du  peuple  Romain,  p.  263. 
6.  Ledédie  à  Valentinien  II,  ibid. 

A  vitieu,  Evéqne  de  Rouen,  tusiste  an  Con- 
cile d'Arles,  en  314,  p.  53.  6. 

Avitien,  Médecin,  frère  du  poète  Ausone, 
p.  213.6. 

5.  Autone,  premier  Evique  d'Angoulime 
p.  308.  a. 

JuleAusoNE,  Médecin,  p.  212.  6. Se  frais 
des  routes  nouvelles  dans  son  art,  p.  213.  b. 
Passe  pour  le  philosophe  le  plus  accompli 
de  son  tems,  p.  213.  214.  6.  Est  fait  pre- 
mier médecin  de  l'Empereur,  p.  214.  6. 
Elevé  à  d'autres  honneurs,  ibid.  Sa  famille, 
p.  213.  215.  216.  6.  Sa  mort,  p.  215.  6. 
voïez  son  éloge,  p.  212.  216.  6.  Ses  écrits, 
p.  216,  b. 

AusoKE,  Rhéteur,  Orateur  et  Poëte,p.  281. 
6.  Sa  naissance,  t6td.  Son  éducation,  p. 282. 
6.  Professe  les  belles  letres  et  l'éloquence  i 
Bourdeaux,  p.  282.  283.6.  Est  choisi  pour 
précepteur  de  Gratien  ,  p.  283.  6.  Est  élevé 
aux  premiers  honneurs  do  l'Empire,  p.  283. 
284.  b.  Sa  réputation,  p.385.  6.  Ses  liaisons, 
p.  285.  286.  6.  Sa  mort,  p.  287.  b. 
Voïez  son  éloge,  p.  281.  289.  6.  Son 
Christianisme  n'est  point  un  problème, 
p.  288.  289.  6.  Ses  principaux  disciples, 
p.  283.  289.  6.  Sa  famille ,  p.  282.  289.  6. 
Ecrits  qui  nous  restent  de  lui,  p.  290.  308. 
6.  Ses  écrits  perdus ,  p.  307.  308.  6.  Son 
génie,  son  érudition,  sa  manière  d'écrire, 
p.  309.  312.  6.  Editions  de  ses  œuvres, 
p.  313.  318.  6. 

Auione,  petit-fils  par  sa  mère  du  Poëta 
du  mime  nom ,  p.  299.  6. 

}ul.  Autpex,  Oratear  de  la  ville  de  Reims, 
p.  131.  a. 

S.  Auttremoine,  premier  Evique  de  Cler- 
monten  Auvergne,  p.  304.  a.  En  quel  tems 
il  vint  dans  les  Gaules,  p.  305.  306.  a.  Ses 
disciples,  p.  308.  a. 

S.  Amb.  Autpert ,  Abbé  de  S.  Vincent  A 
Benevent,  Antcnr  de  l'écrit  da  Combat  des 
vices  et  des  vertus,  p   403.  6. 

Autun,  ses  divers  noms,  p.  50.  a.  Son 
éloge,  ibid.  Ses  citolens  admis  dans  le  Si'nat 
de  Rome,  p.  127.  a.  Constantin   rétablit 


TABLE  DES  MATIERES. 


C» 


cette  ville  et  l'embellit,  p.  3.  14.48.  6.  Ses 
Ecoles,  p.  134.  843.  316.  319.  a.  13.  14.  44. 
46.  6.  Grands  hommes  qu'elle  a  produits , 
p.  96.  394.  a.  44.  58.  S9.  95.  6. 

Auxence,  Evèque  de  Milan,  fameux  Arien, 
p.  144.  174.  b.  Excommunié  dans  le  I  Con- 
cile de  Paris,  p.  131.  6.  Ses  fourberies  dé- 
couvertes par  S.  Hilaire  de  Poitiers,  qui  écrit 
contre  lui,  p.  144. 145. 113. 114.  b.  Sa  mort, 
p.  3Ï7.  b. 

Auxenee,  autre  Evèque  Arien,  successeur 
du  précèdent,  p.  331.  381.  382.  b. 

Auxerrt,  fondât.  d«  Mtte  Eglise,  p.  309.  a. 


B 


LK  Baptême  ,  ses  efléts ,  ses  cérémonies  , 
p.  364.  365.  b.  Eloit  anciennement  ac- 
compagné de  la  Confirmation  et  de  l'Eucha- 
ristie, p.  365.  b.  Et  à  Milan,  du  lavement 
des  pieds,  p.  366.  6. 

Barbares,  leurs  irruptions  dans  les  Gaules, 
p.  309.  314.  a.  Lear  conversion  i  la  loi , 
p.  309.  310.  a. 

Les  Bardei  étoient  Poètes  et  Musiciens, 
p.  25.  a.  D'oA  leur  vient  leur  nom,  ib.  Fable 
touchant  leur  origine,  p.  2.  a.  Leurs  fonc- 
tions, p.  25.  28.  a.  Leurs  poésies,  p.  26.  a. 
Estime  et  vénération  qu'on  avoit  pour  eux , 
p.  26.  21.  a.  Confondus  avec  les  Druides, 
p.  28.  a. 

Bardut,  Roi  des  Gaulois,  p.  2.  a. 

Le  Barreau,  Séminaire  d'où  l'on  tiroit 
les  Officiers  de  l'Empire,  p.  68  a.  10.  11.  b. 
Motifs  qui  portoient  i  le  fréquenter,  p.  68. 
69. 136.  a.  Les  Gaulois  l'ont  beaucoup  illus- 
tréà  Rome,  p.  132.133.  a. 

Batat ,  grands  hommes  qu'il  a  produits , 
p.  212.  b. 

S.  Batile  le  Grand,  en  liaison  avec  S.  Am- 
broise,  p.  328.  6.  Celui-ci  a  beaucoup  puisé 
dans  les  ouvrages  de  l'autre,  p.  328.  329. 
349.  361.368.406.6. 

La  Béatitude,  on  n'en  puise  la  connois- 
sanceque  dans  les  livres  sacrés,  p.  157.  6. 

Belenue,  nom  que  les  Gaulois  donnoient  à 
Apollon,  p.  8.  a.  Ce  qu'il  signifie,  p.  8.  a. 
64.  6. 

Les  Belgei,  peuples  anciennement  féroces, 
p.  13.  a.  Les  pins  belliqueux  entre  les  Gau- 
lois, p.  28.  a. 


S.  Bénigne,  Prêtre,  prtche  la  foi  dans 
les  Gaules,  p.  225.  a. 

Berengaude ,  Auteur  d'une  explication 
des  sept  visions  de  l'Apocalypse,  p.  400.  6. 

Bergame,  ville  en  Italie,  bâtie  par  les 
Gaulois,  p.  54.  a. 

Beron,  hérétique,  ses  erreurs,  p.  381. 
383.0. 

Berylle,  hérétique  Arabe ,  ses  erreurs, 
p.  381.  u. 

Betanfon,  ses  Ecoles ,  p.  244.  319.  a. 

Betiert,  il  s'y  tient  un  fameux  Concilia- 
bule, où  les  Ariens  dominent,  et  la  vérité 
est  opprimée,  p.  26. 117. 119. 135. 141. 6. 

Bibliothèque  in  pa\iiii  impérial,  p.  11.  6. 

Sainte  Blandine,  l'an  des  premiers  Mar- 
tyrs de  l'Eglise  de  Lyon,  p.  289. 291 .  a. 

Bla$te,  Prêtre  de  l'Eglise  de  Rome,  se 
conforme  aux  Asiatiques  au  sujet  de  la  Pâ- 
que,  p.  241.  339.  a.  S.  Irenée  écrit  contre 
lui,  ibid.  Déposé  du  sacerdoce,  p.  339.  a. 

Le  Bonheur  éternel  qui  nons  est  préparé, 
p.  359.  6.  Belle  prière  pour  ceux  qui  y  as- 
pirent ,  ibid.  Les  Justes  jouissent  de  ce 
bonheur  dès  leur  sortie  de  ce  monde,  p.  360. 
361.376.  386.  389.  6. 

Bonoie ,  Evèque ,  ennemi  de  la  virginité 
de  la  mère  de  Dieu,  p.  342.  383.  b.  S.  Am- 
broise  écrit  contre  lui,  p.  342.  6.  Le  Pape 
Sirice  en  fait  autant,  p.  383.  b. 

Bonote,  fils  d'an  Grammairien,  prend  la 
pourpre  dans  les  Gaules,  p.  314.  31S.  321. 
a. 

Bourdeaux,  son  éloge,  p.  52.  a.  On  y 
assemble  un  Concile  contre  les  Priscillia- 
nistes,  p.  36.  240.  242.  6.  Ses  Ecoles,  p. 52. 
244.  320.  a.  13.  63.  65.  106.  107.  113.114. 
120.  121.  124.  128.  131.  218.  231.  b.  Les 
Professeurs  étrangers  y  viennent  chercher 
de  l'emploi,  p.  13.  6.  Grands  hommes  qui 
en  sont  sortis ,  p.  320.  a.  63.  65.  106.  107. 
113.  120.  126.  127. 138.  139.206.  217.218. 
220.231.  232.281.420.  6. 

Bourgei ,  fondation  de  l'Eglise  de  cette 
ville,  p.  208.  0. 

Brette,  ville  en  Italie,  fondée  parlesGaa- 
lois,  p.  54.  a. 

Les  Bretons  et  les  Gaulois  ne  faisoient 
originairement  qu'une  même  nation,  p.  11. 
a.  Ils  prennent  de  cenx-ci  dn  goût  pour  l'é- 
loqui>nce,  p.  69.  134.  a.  Leurs  Druides  plus 
inhumains  que  ceux  des  Gaulois,  p.  11.  a. 

Bas  Breton*,  leur  langue,  p.  64.  65.  a. 


478 


TABLE  DES  MATIERES. 


Britant  ou  Brilton ,  Evf qno  de  Trêves , 
assiste  au  I  CoDcilc  ilo  Valence,  p.  iU9-  li- 


c 


fyAhort,  fonilalion  (le  l'Eglise  de  rcttevilli^, 
Lp.  30».  a. 

Caïus  ,  disciple  do  S.  Ircnée,  Evêqno  des 
nations  et  Docteur  do  l'Efliso,  p.  226.  233. 
3ilC.  o.  Kleve  de  l'Egliso  do  Ljon,  p.  303. 
Xil.  a.  Son  piiï.s  pon  connu  ,  p.  XiH.  n.  Se 
relire  i  Rome  ,  p.  357.  a.  V  est  ordonne 
Evfiqne  des  nations,  ihid.  Combats  divers 
lioriHiqucs,  p.  303.  30t.  a.  Ecrit  contre  l<w 
Millénaires,  p.  3«>.  3.'JH.  a.  roïci  .son  clo^je, 
p.  35(i.  338.  n.  Ses  écrits,  p.  311.  312.  3.-)H. 
300.  a. 

CaitM,  Evoque  Arien ,  excommunié  dans 
le  i  Concile  de  Paris  en  361,  p.  131.  b. 

Jul.  Calippo,  frère  d'Ansonc  Médecin,  ei 
oncle  du  Poêle  Ausonc,  p.  213.  210.  h. 

Le  Cimlique  des  Cantiques  expliqué  par 
Origene,  p.  Ci.  ft.  Par  S.  lU^licc  d'Autun, 
ilnil.  Par  S.  Hilairede  Poiliers.  p.  1«3.  />. 
Par  S.  Ambroisode  Milan,  p.  X».  .3!)0.  h. 

Capiton  a  traduit,  dit-on  ,  en  grec,  l'His- 
toire d'Eutropc,  p.  230.  6. 

Ant.  Caracnlla ,  Enipercnr,  ses  divers 
noms,  p.  ,353.  o.  Sa  naissance,  ihid.  Son 
éilncation  ,  ihid.  S«îs  bonnes  et  ses  mau- 
vaises qualités,  p.  3.'>3.  XH.  a.  Ses  cruau- 
tés, p.  331.  .?.%5.  a.  voifz  son  bisloirc  , 
p.  353.  356.  a.  Sa  mort,  p.  .3.Vi.  o.  Ses 
loix  et  ses  rescrits,  p.  356.  a. 

Caracalles,  sorte  d'habit  (gaulois,  p.  35.3.  n. 

Caractère»  à  écrire  on  nsago  chez  les 
Gaulois,  p.  12.  IG.  20.  a.  D'où  ils  leur  sont 
venus,  ibid.  Leur  flgure,  p.  16.  a.  Quels 
étoiont  aucieiincnient  les  caractères  Grecs  et 
Homains,  p.  IK.  a.  D'où  ils  sont  venus  au\ 
Grecs  et  aux  Italiens,  p.  19.  a.  Qnols  sunt 
ceux  des  Ej,'ypliens  et  <les  (Chinois,  ihid. 
Les  Germains  n'en  avoient  point  ancienne- 
ment à  leur  usage ,  p.  20.  a.  Différentes 
manières  de  ^teindre  les  caractères,  p.  2. 
21.  a. 

Carautf,  savant  homme  dans  la  marine, 
p.  321 .  a.  Sa  naissance,  tViid.  Sa  haute  for- 
tune, ibid.  Sa  mort  funeste,  p.  .'t22.  a. 

Cardam  a  fait  l'éloon  dn  Ui  Kontte,  p.  275  n. 


0pp.  Caret  enseigne  dans  la  Gaule  Ci- 
.s,-il|iine  ,  p.  33,  a. 

Cnriu,  Km|iereur,  .ses  mauvaises  qualités, 
p.  .'121 .413.  a.  S.  eh.arge  il  son  propre  père. 
p.  412.  a. 

M.  Aur.  Oariis,  Empereur,  p.  ,32i.  a. 
Paii.se  par  lespremicTS  honneurs  de  la  Hépu- 
hliquo,  p.  ill.  ((.Tient  rang  entre  les  huns 
et  les  mauvais  Princes  ;  vuïez  sou  éloge , 
p.  411.  412.  a.  Ses  rescrits,  ses  letres,  p. 412. 
a.  Sa  vie  écrite  en  vers,  p.  M~,.  a. 

Catiuir ,  mot  Gaulois,  ce  qu'il  signifie, 
p.  lOH.  n. 

Caste,  un  des  dlsciplis  de  S.  Ambroiso, 
p.  .^36.  /«. 

Castou,  Rhéteur,  p.  l.TO.  a.  Diverses  per- 
sonnes qui  ont  porté  le  même  nom,  et  avec 
qui  on  l'a  confondu,  p.  150.  151.  (i. 

Jul.  CalapUrtiiiiii,  so'ur  du  Médecin  An- 
sone,  p.  2K9.  /(. 

Val.  Cato,  Poète  et  Grammairien,  p. 88.  a. 
Sa  naiss.'incc,  ihid.  Enseigne  la  poëlii|uc  :l 
Homo  ,  p.  .'53.  HH.  a.  vaïez  son  ('lope,  p.  88. 
no.  n.  Ses  ('ei ils,  p.  «10.  92.  a. 

Cnliiii,  les  Di-^tiques  qui  portent  son  nom 
altrihm'-s  Adivi'rs  Auteurs,  p.  .308.  h. 

Cécilieii  ,  Evêque  do  C.irtliage ,  absous 
dans  le  Concile  de  Itoine  en  313,  p.  23.  .52. 
6.  Dan.s  celui  d'Arles  en  314,  p.  53.  .'U.  b. 

Le  Cèdre,  ancictmemeiit  fort  emploie  pour 
écrire,  p.  23.  o. 

Les  CfVv»  ont  donné  leur  nom  i  la  Cel- 
libcrie,  p.  VM.  a.  Ils  sont  les  mêmes  que  les 
Gaulois;  vi>iez  Canluit. 

La  Cdliberit  .ainsi  nommée  des  Cel- 
tes. Ses  liahilaiis,  p.  56.  a.  Savans  qu'elle 
a  produits  dans  lus  premiers  tcms,  ibid. 

La  Celtique,  pa'is  des  Celtes  ;  quelle 
étoil  .son  étendue,  p.  63.  a.  Son  ancienne 
lan;;ue,  p.  62.  65.  a. 

Le  B.  Ceraee,  premier  évt'^ne  d'Eause. 
p.  .'107.  n. 

Cerintke,  fameux  hérésiar(iue,  ses  er. 
reurs  réfutées  par  S.  Dciiys  d'Alexandriit 
et  |Kir  Caïus,  p.  346.  a. 

Céiar  fait  la  conquête  des  Gaules,  p. 
67.  a. 

Cbakhis,  Médecin  de  Marseille,  passe  A 
Ronii!,  p.  133.  211.  (t.  S'y  fait  de  la  répn- 
Ijiliou,  ibid.  Se  fraie  dans  .son  art  des 
roules  nouvelles,  p.  211.212.  a.  ruiez  son 
éloge,  ihid. 


TABLE  DES  MATIERES. 


479 


Ch^rmoi/evs,  Jurisconsulte  du  Marseille, 
eu  que  l'on  sait  do  loi,  p.  ^87.  a. 

Chartres,  fondation  de  l'Eglise  de  cette 
vill.!,  p.  3()8.  a. 

Le  Cil  f ne  en  sin|;uliun;  vénération 
clii't  les  Gaulois,  p.  3t).  n.  Avec  qnvllit 
su{)orstition  ils  en  eucilloient  le  gui,  p. 
39.  n. 

Les  Cbiuiiis,  leur  nianicro  d'écrire,  p. 
l'J.  24.  u. 

Les  Chrcliens,  leurs  principaux  devoirs, 
p.  369.  372.  b.  Les  premiers  CUré- 
tiens  écrivoient  peu,  p.  224.  30U,  u. 
Pourquoi'/  ibid. 

Lu  Chritlianisme;  voiez  Religion  Chré- 
tienne. 

Chrysanle,  lu  plus  fameux  sophiste  de 
•son  li.nis,  p.  301,  b.  Ha;,'icien  outré, 
p.  202.  6. 

Ciceron  l'Orateur ,  critiqué  par  lis 
Anciens,  p.  218.  *  L'empereur  Claude  fait 
son  apologie  contre  Asinius  Ualtus,  p. 
173.  a. 

Cinéas,  Ambassadeur  ilu  roi  des  Epi- 
rotes;  trait  remarquable  de  sa.  mémoire, 
p.  218,  b. 

La  Cire  auciuuuemeul  fort  eu  usage  pour 
écrire,  p,  S3.  a. 

CiTARiiij,  Grammairien  grec,  enseigne 
à  Bourdeau.x,  p,  127.  128.  6.  Se  dis- 
lingue  par  ses  poésies,  p.  128.  b.  vou: 
sou  éloge,  p.  127.  129.  b. 

La  Ctze(ur«  fort  cultivée  dans  les  Gaules, 
p.  138.  o. 

CuiiDE,  Empereur,  né  à  Lyon,  re- 
çoit sa  première  éducation  dans  les  Gau- 
les, p.  132.  133.  166.  3.  Le  plu»  sa- 
vant Empereur  qu'eût  Itume  on  son  siècle, 
p.  132.  a.  Sa  vie  privée,  son  gou- 
vernement; voie:;  son  éloge,  p.  166. 
171.  t(.  Seneque  fait  son  aputliéosc  par 
dérision,  p,  17U.  ».  Son  savoir,  p. 
167.  171.  172.  a.  Ses  écrits,  p.  171. 
175.  a. 

Clauditu,  Traducteur  ilea  annales  de 
C.  Acillius  de  grec  en  laliu,  p.  132.  u. 

Clermont  un  Auvergne  ;  le  premier 
Evêque  de  celle  Eglise,  ii.  304.  a.  Pour- 
quoi elle  n'est  pas  érigée  en  métropole,  p. 
309.  a.  De-là  la  foi  se  répand  ailleurs, 
p.  308.  a. 

Les  ColUiget,  pépinières  ))oar  le  barreau, 
p.  11.  b.  voïez  Ecoles. 

Cologne,   fondation  de  l'Eglise  de  cette 


ville,  p.   308.   a.  On   y  tient,   dit-on,  un 
Concile  en  346,  p.  108.  109.  6. 

Côme,  ville  d'Italie,  bâtie  par  les  Gau- 
lois, p.  54.  u. 

Conciles,  leur  utilité,  p.  240.  a.  Ma- 
nière d'y  procéder,  ibid.  Divers  Conci- 
les tenus  à  Ancyro  en  358,  p.  29.  b. 
A  Aqfiilée  en  381,  p.  34.  237.  329. 
3.30.  378,  b.  A  Arles,  en  314,  p.  «83, 
o2,  b.  En  353,  p,  25,  115.  117.  b. 
A  Beziers  en  ■.i'M,  p.  26.  117.  119.  b. 
A  ISuurdeaux  en  384,  p.  36.  240.  242. 
b.  A  Cologne  en  346 ,  p.  108.  6.  A 
CousUntiuople  en  360,  p.  130.  136. 
143.  165.  b.  Dans  les  Gaules  vers  196, 
p.  240.  241.  o.  en  358,  p.  27.  b.  A 
Lyon  en  198,  p.  296.  298.  a.  A  Mi- 
lan en  355,  p.  26.  116.  119.  6.  En 
390,  p.  34.  38.  382.  b.  A  Nicéc  en 
325,  oi'i  il  no  se  trouve  qu'un  seul  Evê- 
que Gaulois,  p.  21.  /(.  A  Nisme,  p.  264. 
265.  b.  A  l'aris  en  361,  p.  33.  129. 
131.  b.  A  Uimini  en  359,  p.  30.  32. 
151.  267.  6.  A  Rome  en  313,  oA  se 
trouvent  plusieurs  Kvêquos  Gaulois,  p. 
23.  b.  A  Saragoce  en  380,  p.  25.  b.  A 
Sardiquo  en  347,  p.  85.  111.  6.  Sui- 
tes de  ce  Concile,  p.  111.  b.  A  Seleu- 
cie  en  359,  p.  33.  142.  143.  b.  A  Trê- 
ves contre  les  Priscilliiuiistes,  p.  37.  38. 
b.  A  Turin,  p.  426.  428.  b.  A  Valen- 
ce dans  la  Viennoise,  p.  209.  211.  b. 
A  l'occasion  du  jour  de  la  Pàque,  p. 
241.  296.  a.  Histoire  des  Conciles  d'O- 
rient et  d'Occident  au  sujet  de  l'Aria- 
nisme,  p.  150.    153.   171.    b. 

Coiicordius.  Evéquu  d'Arles,  assiste  au 
1  ConcUe  du  Valence,  p,  209,  211.   b. 

Co.^coBDius,  Grammairien,  ensuignu  à 
Bourdeaux,  p.  64.  6. 

Confession  de  ses  péchés  établie  comme 
nécessaire,  p.  337.  352.  b.  Des  péchés 
même  secrets,  en  usage  au  II  siècle  de  l'E- 
glise, p.  343.  o. 

Constance,  Evèqac  d'Orauge,  assiste  en 
374  au  Concile  de  Valence,  p.  209.  b;  on 
.381  à  celui  d'Aquilée,  p.  34.  b;  en  389  on 
390,  ù  celui  de  Milan,  ibid. 

Coutlanee  Chlore,  Empereur,  vient  rési- 
der dans  les  Gaules,  p.  315.  a.  Choisit  la 
ville  de  Trêves  iM)nr  sou  séjour,  p.  3.  6. 
Etablit  le  bon  ordre  dans  ses  Etats,  ibid. 
Sou  gouvernement  pacifique,  p.  316.  a. 
Ranime  l'ardeur  pour  les  lettres,  p.  3.  44. 
46.  b.  Favorise  ceux  qui  les  cultivent,  p. 
316.  318.  a.  Loué  par  Lactance,  p,  71.  6. 
par  l'orateur  Eumene,  p.  46.  47.  6. 

CoHSlanee,    Empereur,   fils    du    grand 


i80 


TABLE  DES  MATIERES. 


Constantin,  Tient  goorerner  les  Gaales, 
V.  5.  6.  Y  envoie  ensuite  Julien  les  gouver- 
ner à  sa  place,  p.  7.  6.  Condamne  toutes 
sortes  de  divinations,  p.  5.  6.  Tout  dévoue 
à  TArianisme,  p.  115.  118.  6.  Trouble  l'E- 
glise par  ses  vexations,  p.  5.  6.  115.  119. 
123.  172.  6.  Se  porle  pour  accusateur 
contre  S.  Atbanase,  p.  132.  6.  Se  trouve  i. 
Arles  en  353,  et  y  assemble  un  Concile,  p. 
115.  6.  En  convoque  deux  autres, 
p.  359.  a.  A  Riminiet  à  Seleucie,  p.  30. 
6.  S.  Hilaire  de  Poitiers  lui  présente  deux 
requêtes,  p.  149.  164.  165.  b.  Ecrit  une 
invective  contre  lui.  p.  166.  167.  6. 

Conttancie,  fille  de  l'Empereur  Constan- 
tin, première  femme  de  l'Empereur  Gratien, 
p.  235.  b. 

Conttant,  Empereur,  vient  gouverner  les 
Gaules,  p.  6.  6.  Son  canctere,  ibid.  Pro- 
tège l'Eglise  et  les  Savons,  p.  6.  111.  b. 
Ennemi  des  Ariens,  ibid.  Combat  contre 
Constantin  son  frère,  et  lui  dte  la  vie,  p. 
101.  b. 

Cotutantin  le  Grand,  Empereur  ;  son 
éloge,  p.  93.  94.  6.  Affermit  la  religion 
dans  les  Gaules,  p.  3.  b.  Y  établit  la  tran- 
quillité et  le  bon  ordre,  ibid.  Y  fait  fleurir 
les  sciences,  p.  4.  b.  Embellit  Trêves, 
Atttun,  etc.  p.  3.  14.  48.  b.  Condamne 
les  Amspices ,  p.  S.  6.  Assemble  un 
Concile  à  Rome  pour  juger  les  Donatistes, 
p.  23.  6.  Un  autre  à  Arles,  p.  23.  52.  53. 
II.  Loué  par  Lactance  qu'il  appelle  dans  les 
Gaules,  p.  67.  73.  6.  Par  l'Orateur  Eu- 
mene,  p.  47.  48.  6.  Par  un  autre  Orateur 
anonyme,  p.  51.  52.  b.  Exile  S.  Athanase 
à  Trêves,  p.  100.  6. 

Co:tgTANTm  le  Jeune,  Empereur;  sa  nais- 
sance, p.  99.  b.  Ses  heureuses  qualités,  ibid. 
Son  courage,  p.  99.  100.  b.  Déclaré  César 
p.  99.  b.  Son  appanage,  p.  5.  b.  Vient 
gouverner  les  Gaules,  p.  100.  6.  Fixe  son 
séjour  à  Trêves,  p.  5.  100.  b.  Y  traite 
avec  honneur  S.  Athanase  exilé,  p.  100.6. 
Protège  ce  Saint  et  la  foi  catholique,  p.  6. 
6.  Son  genre  de  mort,  p.  101,  103.  6. 
toïez  son  éloge,  p.  99.  102.  b.  Ses  écrits, 
p.  101.  102.  6.  Son  oraison  funèbre,  p. 
lOS.  104.  b. 

CotiêtantinopU  tire  des  Ecoles  Gauloises 
des  Professeurs  pour  les  belles  letres,  p. 
98.  126.  6. 

Contubêlantiel  défendu  contre  les  Ariens, 
p.  398.  a.  270.  276.  277.  6. 

Le  Contvlat  comble  de  l'honneur  pour 
un  parlicuUer,  p.  129  a.  284.  b.  Deman- 
doit  du  savoir  et  du  mérite  pour  l'exercer, 
p.  129.  a.  Quelle  étoit  la  robe  qu'on  por- 
toit  en  y  entrant,  p.  284.  b. 


Cl.  Contentui,  frère  d'Ansone  Médecin  et 
oncle  du  Poêle  Ausone,  p.  215.  216.  b. 

Corbilon,  ancienne  ville  fort  célèbre 
dans  les  Gaules,  aujourd'hui  inconnue, 
p.  49.  o. 

CoBiNTHE,  Grammairien  grec,  enseigne 
dans  les  Ecoles  de  Bourdeaux,  p.  65.  6. 

Cl.  CoMM,  célèbre  Orateur  des  Helvé- 
tiens,  p.  131.  132.  a. 

La  Crainte  seule  ne  suftit  pas  pour  ob- 
server la  loi,  p.  176.  6. 

Crémone  brûlée  200  ans  après  sa  fonda- 
tion, p.  216.  '  a. 

Crikas,  Médecin  de  Marseille,  passe  à 
Rome  et  s'y  distingue  par  son  habileté,  p. 
133.  210.  a.  Auteur  d'une  nouvelle  secte  de 
Médecins,  p.  110.  Votez  son  éloge,  p.  210. 
211.  a. 

Crispos,  Grammairien  grec  et  latin,  en- 
seigne dans  les  Ecoles  de  Bourdeaux,  p.  119. 
120.  a. 

Cydimaque,  fille  de  Menecrate  et  femme 
de  Zenothemis ,  son  aventure  curieuse; 
p.  287.  288.  a. 

Cynthie,  maîtresse  du  poëte  Properce, 
p.  111.  a. 

S.  Cyprien,  Evéqne  de  Carthage,  se  joint 
aux  Evèques  Gaulois  pour  extirper  l'hérésie 
des  Novatiens,  p.  310.  a.  Ecrit  i  ce  sujet  i 
S.  Faustin  de  Lyon,  p.  405.  o.  Sa  lettre  67 
n'est  point  suposée,  ibid.  not. 

Cytherit,  une  des  maltresses  du  poëte 
Cor.  GaUus,  p.  102.  104.  o. 


D 


Dalmace,  frère  de  Constantin  le  Grand, 
exilé  i  Toulouse,  p.  97.  6. 

ûalmace,  fils  du  précèdent,  étudie  i 
Toulouse,  p.  127.  6. 

Daphmu,  Evéque  de  Vaison,  assiste  au 
Concile  d'Arles  en  314,  p.  53.  6. 

Dom.  Z)eci(iiana,  femme  du  célèbre  Agri- 
cole, p.  221.  •  o. 

La  Déclamation,  exercice  autrefois  ordi- 
naire à  tons  les  gens  de  letres,  p.    69.  a. 

At.  Tiro  DcLtHiDios,  Rhéteur,  Orateur  et 


TABLE  DES  MATIERES. 


Ml 


Poëte,  p.  304.  b.  Ses  f^ands  talens,  16. 
Hante  le  barreaa,  ib.  Son  inconstance,  p. 
205.  b.  Votez  son  éloge,  p.  204-06.  6. 
Ses  écrits,  p.  206.  6. 

S.  Delphin  ,  Evêqne  do  Bonrdeanx,  en 
liaison  avec  S.  Ambroise,  p.  35.  b.  As- 
liste  en  380  an  Concile  de  Saragoce,  ib. 
Rejette  les  Priscillianistes,  p.  36.  6.  Pré- 
side an  Concile  de  Bounleaux  où  ils  sont 
condamnés,  p.  241.  6. 

Demeire  d'Alexandrie,  disciple  dn  So- 
phiste Farorin,  p.  269.  a. 

Demetrien,  disciple  de  l'Orateur  Lactance, 
p.  67.  69.  80.  6. 

DEHOSTHr?(E,  Médecin  de  Marseille,  snr- 
nommé  Philalethe,  p.  208.  a.  Célèbre  chez 
les  Grecs  et  les  Romains,  pag.  133.  a.  En 
quel  tems  il  a  vécu,  p.  208.  a.  Voïfz  son 
Hoge,  p.  208-210.  a.  Ses  écrits,  p.  209.  a. 

S.  Denys,  Evéqne  d'Alexandrie ,  réfute 
le^  Millénaires,  p.  346.  a. 

S.  Denys,  Evéque  de  Milan,  exilé  pour 
la  foi  par  les  Ariens,  p.  119.  135.  6. 

S.  Denys,  premier  Evèqne  de  Paris,  p. 
30t.  a.  Tems  de  sa  mis.sion  dans  les  Gaules, 
p.  305.  306.  a.  Ses  disciples,  p.  308.  a. 
Ses  actes,  p.  49.  SO.  b. 

Devint,  leur  profession  fort  relevée,  p. 
99.  a.  Condamnée  par  les  Empereurs 
Chrétiens,  p.  5.  b. 

DiE0,  sa  natare,  p.  332.  a.  Idée  de  sa 
grandeur,  p.  278.  6.  Il  faut  s'en  rapporter 
d  lui-même,  lorsqu'il  s'agit  de  .sa  connois- 
sance,  p.  156-l.''i9.  6.  Comment  on  en  doit 
parler,  p.  278.  b.  La  première  lueur  de 
salut  et  tout  autre  bien  nous  viennent  de 
lui,  p.  189.  b.  La  eonnoissance  du  vrai 
Dieu  est  une  grâce  qui  dépend  de  sa  pure 
miséricorde,  p,  224.  a.  En  quoi  consiste  le 
culte  qu'on  lui  doit,  p.  75.  76.  6.  Manière 
do  lire  sa  parole,  p.  157.  337.  6. 

Didyme,  célèbre  Ecrivain  d'Alexandrie, 
S.  Ambroise  a  beaucoup  profité  de  ses 
écrits,  p.  406.  6. 

Digne,  fondation  de  cette  Eglise  et  ses 
Iiremiers  Evêques,  p.  23.  6. 

Dioieore,  Médecin,  Vicaire  d'an  Préfet 
des  Gaules,  p.  179.  6.  S.  Hilaire  de  Poi- 
tiers écrit  contre  lui,  ibid. 

Diptyques,  ce  que  c'est,  p.  406.  a. 

DivrriAC ,  Philosophe  d'Autnn,  un  des 
plussavans  entre  les  Druides,  p.  96.  a.  Va 
&  Rome  implorer  dn  secours  pour  défendre 

Tom.  1.  Part.  II. 


son  païs,   i5i(/.    Foies   son 
97.  a. 


ge,  p.  96. 


Domnin,  Evéque  de  Grenoble,  assiste  en 
381.  au  Concile  d'Aquilée,  p.  34.  6. 

Domnorix,  frère  du  Philosophe  Diviliac, 
esprit  inquiet  et  remuant,  p.  97.  a. 

Les  Donatistet,  quelquefois  nommés  Par- 
menianistes,  p.  250.  6.  Leur  conduite^  t6. 
Demandent  des  Evêques  Gaulois  pour  leurs 
juges,  p.  23.  b.  Sont  jugés  à  Rome  et  à 
Arles,  p.  23.  .'52-54.  6.  En  appellent  à  l'Em- 
pereur, p.  57.  b.  S.  Optât  de  Mileve  écrit 
contre  eux,  p.  251-253.  b.  S.  Augustin  en 
fait  de  même,  p.  254.  6.  Tienne  Donatisto 
le  fait  aussi,  p.  253.  6. 

Lat.  Pac.  Drepranius,  Orateur  et  Poëte, 
p.  419.  6.  Son  païs,  419.  420.  h.  Son  talent 
pour  la  Poésie,  p.  291.  420.  6.  Pour  l'élo- 
quence, p.  42t.  6.  Prononce  le  panégy- 
rique de  l'Emp.  Theodose,  ib.  Est  élevé  il 
la  dignité  de  Proconsul,  p.  297.  421.  6. 
Votez  son  éloge,  p.  419-421.  b.  Ses 
écrits,  p.  421-424.  b.  Ausone  lui  adressa 
quelques-uns  des  siens,  p.  291.  297.  302.  6. 

Les  Druides,  étymologie  de  leur  nijm,  p. 
30.  a.  Fable  à  leur  sujet,  p.  2.  a.  Les  pre- 
miers Philosophes  des  Gaulois,  p.  10.  a. 
Les  seuls  savans  de  la  nation,  p.  31.  a. 
En  quel  temps  ils  ont  commencé  à  philo- 
sopher, p.  10.  30.  a.  N'écrivoient  ni  ne 
faisoient  rien  écrire  à  leurs  disciples,  p. 
20.  40.  41.  a.  Republique  qu'ils  formoient, 
29-35.  a.  En  quelle  estime  et  quel  crédit 
ils  étoient,  p.  31.  32.  34.  a.  Leurs  privi- 
lèges, p.  32.  a.  Leurs  fonctions,  p.  32. 
33.  .38.  40.  41.  a.  Leur  culte  barbare  en 
fait  de  religion,  p.  33.  42.  a.  Aboli  par 
l'Empereur  Claude,  175.  a.  Leurs  assem- 
blées générales ,  p.  34.  .39.  SO.  a. 
Leur  police,  p.  .34.  n.  Leur  politique, 
p.  33.  36.  37.  o.  Leur  théologie, 
p.  34-37.  a.  Leur  morale,  p.  37.  a. 
Leur  médecine,  p.  38-40.  o.  Enseignoient 
toutes  les  sciences,  p.  38.  a.  Leurs  écoles, 
p.  40.  41.  o.  Leur  maniera  d'enseigner, 
ib.  Leurs  femmes  se  mêlent  de  science, 
p.  41.  42.  o.  Caractères  de  celles-ci,  p.  323. 
o.  Se  méloient  encore  de  divination  au 
Ill«  siècle,  «6.  La  secte  des  -Druides  dura 
jusqu'au  IV  siècle,  p.  42.  a.  Les  Druides 
Bretons  inhumains  à  l'excès,  p.  11.  a.  Ce 
ne  sont  point  eux  qui  ont  instruit  des  belles 
connoissances  les  Druides  Gaulois,  ib. 

Drusus  élevé  &  Lyon  un  temple  fameux 
en  l'honneur  d'Auguste,  p.  137.  a. 

Les  Dryades,  quelles  elles  étoient,  p. 
323.  a. 

Mm.  Dryadia,  tante  dn  poëte  Ausona, 
p.   58.  283.    b.    Jul.   Dryadia,    sœur  dn 

P    PP 


482 


TABLK  DES  MATIERES. 


poêle   AnsonA,    fomnie  savante,    p.    213. 
289.  b. 

Dryus,  quatrième  roi  dos  Gaulois,  p. 
2.  a. 

Buumvirat,  charge  de  magistrature;  pour- 
quoi ainsi  nommée,  p.  ■ii\).  2.10.  a. 

Dyctis  de  Crète;  l'Empereur  CUude  fait 
multiplier  les  exemplaires  do  son  ouvrage, 
p.  174.  a. 

Dtnamivs,  Rhéteur,  p.  iM.  h.  Hante 
d'abord  le  barreau  k  Bourdeaux,  p.  2.32.  b. 
Puis  se  retire  à  Lerida,  où  il  cnsei^'ne,  ib. 
Votez  son  éloge,  p.  131.  232.  h.  Ce  qui 
nous  reste  de   ses    écrits,  p.    232.  233.  b. 

Dyname,  Patrice,  Auteur  de  la  vie  dn 
S.  Maxime  de  Ries,  p.  2.33.  h.  Cniifumlu 
mal-à-prop'is  avec  le  Grammairien  ou  le 
Rhéteur  précèdent,  ib. 

Dyname,  Gouverneur  de  Toscane,  fa- 
meux par  ses  fourberies,  p.  232.  6. 


E 


Eaute,  ancienne  Métropole,  sa  foiidalion, 
p.  307.   a.  Le  siège  transféré  ;\  Auch,  ib. 

Les  Eccletiasliquea,  leurs  devoirs  essen- 
tiels, p.  369.  372.  6.  Quel  doit  élre  leur 
style,  404.  b.  Ecclésiastiques  usuriers,  ex- 
communiés, p.  56.  b.  Doivent  demeurer 
dans  le  lieu  où  ils  sont  onlonnés,  p.  .'i4. 
ne.  b. 

Ecules  dans  les  Gaules  >  à  Angoulènie, 
p.  244.  a.  17.  418.    419.    b.  A   Arles,  p. 

243.  a.  A  Auch,  p.  244.  a.  A  Autun,  p. 
50.  1.3r>.  243.  a.  A  Besanvon,  p.  24t.  319. 
a.  A  Bourdeaux,  p.  îti.  24 i.  320.  a.  13. 
63.  65.  106.  107.  113.  114.  120.  121. 
124-128.  137.  218.  231.  6.  Des  Druides,  p. 
40.  41.  a.  A  Lyon,  p.  136.  1.37.  a.  177. 
216.  243.  319.  h.  A  Marseille,  p.  42.  44- 
47.  52.  134.  178.  243.  o.  A  Narboniie,  p. 
49.  o.  98.  127.  139.  217.  6.  A  Orléans, 
p.  244.  a.  Du  Palais,  p.  10.  6.  A  Poitiers, 

244.  rt.  206.  207.  6.  A  Toulouse,  p.  134. 
136.  180.  243.  a.  14.  98.  127.  139.  h.  A 
Trêves,  136.  244.  316.  317.  a.  10-12. 
207.  208.  b.  Dans  d'autres  villes,  p.  126. 
130.  131.  134-136.  ai3.  0.9.  12.  13.  15. 
6. 


Eciilf*  Clirêlienncs  dans  les  Gaules, 
p.  232.  233.  240.  307.  a. 

Eerilure,  voïez  :  Caraettrex  A  écrire.  Si 
elle  est  nécessaire  pour  cultiver  les  sciences, 
p.  17.  20.  a. 

l.'Ecriliirr  Sainte;  on  y  distingue  trois 
sortes  de  sens,  p.  405,  406.  6.  Règle  in- 
dispensable pour  en  prendre  le  vrai  sens, 
p.  161.  16i.  6.  Ce  qui  s'y  trouve  de  diffi- 
cile à  entendre,  ne  doit  point  être  critiqué, 
3.37.  h.  Autres  règles  pour  la  lire,  ib.  L'E- 
criture et  la  Traililion,  seules  sources  oii 
les  Anciens  puisoient  leur  théologie,  p. 
233.  234.  a.  Règles  dans  les  Conciles,  p. 
240.  a. 

Les  Eduent,  Autun  leur  capitale,  p.  50. 
a.  Leur  union  avec  les  Romains,  ib. 

Les  Egyptien»,  leur  manière  d'écrire,  p. 
19.  2i.  a. 

VEglixf,  m.arques  de  la  vraie  Eglise,  p. 
74.  75.  b.  Ses  propriétés,  p.  160.  6.  Elle 
est  le  domicile  de  la  foi,  p.  74.  6.  Hors 
d'elle  point  de  salut,  177,  b.  C'est  chez  elle 
que  se  trouve  la  Tradition  pure,  .3.32.  343. 
a.  Et  le  vrai  bonheur,  p.  160.  b.  Elle  tire 
son  triomphe  de  la  contrariété  des  héré- 
sies, i'6.  N'a  pas  besoin  de  secours  hu- 
main, p.  173.  6.  S'est  accrue  dans  la 
persécution,  ib.  A  le  pouvoir  de  remettre 
toutes  sortes  de  p(':chés,  p.  352.  6.  Divisée 
au  sujet  du  jour  île  laPàque,  p.  241.  296. 
297.  a.  Obscul-cie  par  l'Arianisme,  p.  30. 
33.  lKi-119.  123.  142.  143.  267.  268.  6. 
Ne  laisse  pas  de  briller,  p.  33.  b. 

VEglite  Gallicane,  son  établi.ssement. 
p.  125.  126.  223-226.  «.  Comment  elle 
s'est  formée,  p.  301-310.  a.  L'Eglise  Gréque 
et  la  Latine  concourent  à  sa  formation,  p. 
;t04.  o.  Suit  d'abord  le  rit  grec  et  emploie 
la  langue  gréque,  puis  le  rit  latin  et  la 
langue  latine,  p.  .305.  a.  Ses  premiers 
Evéques,  p.  225.  280.  301.  304-310.  a. 
Ses  premiers  Elevés,  p.  225.  226.  a.  Ca- 
ractère de  ses  Ecrivains,  p.  239.  240.  a. 
Devient  dès  son  établissement  une  pepi- 
nirre  d'ouvriers  Evangeliqnes,  p.  226.  307. 
a.  Son  état  brillant.  301.  302.  a.  22-25.  27- 
29.  b.  Intégrité  et  pureté  de  sa  foi,  p.  305. 
a.  23.  24.  28.  6.  Etat  de  sa  doctrine  au- 
III  siècle,  p.  304.  305.  310.  311.  a.  Se 
si(;nalc  contre  l'Arianisme,  p.  25-29.  129- 
!  131.  114.  b:  Troublée  au  sujet  des  Ilha- 
ciens,  p.  38.  427.  428.  6.  Voïei  :  Les 
Evéques  Gaulois. 

L'Efilise  Orientale,  triste  description  de 
son  état,  p.  29.  6.  Ses  différentes  formule» 
de  foi  touchant  l'Arianisme,  p.  152.  6. 

L'fluculion  n'est  que  l'écorcc  de  l'élo- 
quence, p.  239.  a. 


TABLE  DES  MATIERES. 


483 


L'Eloquence,  en  quoi  consiste  la  vérita- 
ble cloqucnce,  p.  239.  o.  Nécessaire  |x)ui' 
le  bien  public,  p.  144.  218.  a.  Pour  parvc- 
nii-  aux  charges  et  dignités,  p.  06-70.  «. 
Utile  pour  la  défense  do  la  vérité,  p.  66.  h. 
Maniero  de  l'enseigner  anciennement.  141. 
1 13.  a.  Maxime  pernicieuse  à  l'éloquence, 
p.  183.  a.  Sa  décadence,  p.  139.  243.  322. 
a.  Cause  de  colle  ilécadence,  p.  139-143.  a. 
Elle  se  soùlieul  dans  les  Gaules  en  même 
lems  qu'elle  tombe  ailleurs,  p.  243.  322. 
417.  a.  Ancienneiiienl  fort  cultivée  par  les 
Gaulois,  p.  68-70.  126.  127.  132.  133.  'i. 
6.  8.  10-17.  21.  b.  Symbole  sous  lequel  ils 

rcpréseutoient,  p.  7.  «. 

Embrun,  fondation  de  celle  K^'lis'.  p. 
23.  b. 

Emere,  ou  Eremere,  va  l)ien  Eumcre, 
Kvèque  de  Nantes,  assisti^  an  I  Concile  de 
Valence,  p.  209.  b. 

EmilieH,  Evèquc  de  Valence  et  de  Uie, 
se  trouve  au  I  Concile  de  Valeiict',  p.  2icj.  b. 

Eodal ,  homme  éloquent,  p.  309.  a. 

Velt.  Epagathui,  célèbre  Martyr  de  Lyou, 
p.  289.  a.  Surnommé  l'.^vocal  des  Ciiié- 
tiens,  ib.  Pourquoi?  ibid.  Son  mérite,  p. 
289.  291.  a. 

S.  Epieedion,  ce  que  lesAnciemt  enleii- 
doient  par-là,  p.  208.  b.  Oifi'urencc  entre 
Epicédion  et  epitapUion,  t6. 

Epictete;  Favorin  écrit  contre  lui,  p.  273. 
a.  Galien  en  prend  la  défense,  ib. 

Epipode,  disciple  du  S.  Pothiii,  p.  232.  a. 

Erasme  a  fait  l'éloge  de  la  folie,  p. 
275.  a. 

Eratostuene,  pliitosopUe  et  historien, 
mal-à-propos  confondu  avec  Eralostliene  de 
Cyrcne,  p.  80.  81.  u.  Ses  écrits,  p.  Hl-83. 
«.  Voiez  son  éloge,  p.  80-83.  a. 

Esope  traduit  de  vers  grecs  en  prose  latine 
par  Titien,  p.  4fti.  a.  305.  6. 

Le  S.  Etprit,  sa  divinité  établie,  p.  348.  b. 

Eludet,  ordre  qu'on  y  observoit  ancien- 
nement, p.  67.  68.  a.  VoUz  :  Les  Lelrts. 
Loix  en  faveur  des  Etudes,  p.  8.  9.  11.  12. 
h.  Loix.  contre  les  Etudes,  p.  8.  6. 

L'Evangile  favorise  le  progrés  des  scien- 
r^iS,  et  les  sciences  fraient  le  chemin  à  l'E- 
vangile, p.  227.  228.  a. 

Les  4.  Evauijelistes,  leurs  caractères, 
p.  306.  b. 

Les  Eubages,  ou  Euhages,  les  mêmes  que 
les  Vates,  p.  29.  a. 

L'Eucharistie  contient  réellement  le  corps 


et  le  sang  de  J.  C,  p.  344.  3%!.  352.  a. 
161.  365.  366.  371.  390.  /-.  Exij,'»  de  ceux 
qui  la  reçoivent,  une  vie  innocente,  p.  366. 
b.  Ses  effets,  p.  340.  6.  Les  Clirétiens  la 
portoieut  avec  eux  en  voïage,  p.  347.  6. 

Eiici'iicie,  femme  de  l'Orateur  Delpbidc, 
Su  laissa  séduhe  par  Priscillien,  p.  36.  205. 
b.  Son  supplice,  p.  205.  6.  Desaprouvé  des 
Chrétiens  et  des  païens,  ibid. 

Euducia,  célèbre  Poétesse  Chrétienne, 
p.  303.  b. 

Les  Eoêques,  qualités  (lu'ils  doivent  avoir, 
p.  382.  b.  La  sainteté  de  vie  et  la  science 
leur  sont  inilisix'nsubles,  p.  161.  6.  Leurs 
devoirs,  p.  328.  369.  372.  *.  Caractère  des 
bons  Evéques,  p.  235.  236.  a.  Ancienne- 
ment ou  n'cxigeoit  pas  d'eux  qu'ils  sussent 
les  lelrcs  humaines  ni  les  langues,  p.  238. 
(I.  Les  seuls  Mailtes  qui  enseignoient  les 
Chrétiens,  p.  23.5.  a.  Leur  manière  d'en- 
seigner, p.  235.  236.  a.  Ne  doivent  être 
jugés  que  par  d'autres  Evéques,  p.  381.  b. 

Les  Lrc.iuen  Gaulois.  Leur  attachement 
à  l'ancienne  doctrine,  p.  34.  b.  Se  déclarent 
en  toute  ocasion  contre  l'erreur,  p.  310.  a. 
M.  35.  6.  Ont  soin  de  faire  avancer  leurs 
disciples  dans  les  letres  comme  dans  la 
vertu,  p.  232.  306.  307.  a.  Leur  manière 
deiLseigner,  p.  233-240.  301.  a.  Leur  ma- 
nière d'écrire,  p.  312.  313.  a.  En  garde 
conU'o  le  Novatianisme,  p.  310.  a.  Leur  léle 
conlre  cette  hérésie,  p.  310.  311.  a.  En 
garde  contre  l'.Vriauisme,  p.  24.  27.  34.  b. 
Attachés  à  S.  Athanase,  p.  24.  25.  6.  Sonp- 
Vonnés  de  Sabellianisme,  p.  130.  b.  S'en 
juslilienl,  p.  130.  131.  b.  Ilejettent  la  se- 
conde foi  Uiule  de  Sirinich,  p.  27.  28.  29.  6. 
Excommunient  Saturnin  cl'.^rles,  p.  27.  29. 
130.  135.  b.  Se  trouvent  au  Concile  de  Ri- 
mini,  p.  38.  b.  S'y  signalent,  p.  31.  6.  Puis 
tombenl,  p.  32.  130.  b.  Se  relèvent  de  leur 
chute,  p.  33.  34.  130.  131.  268.  b.  L'éclat 
de  leur  foi  reveille  celle  des  Orientaux,  p. 
28.  29.  130.  131.  b.  .\ssistent  eu  381  au 
Concile'  d'Aquilée,  p.  34.  6.  Et  en  390  à 
celui  de  Milan,  t6.  Consultés  par  S.  Am- 
bioise,  p.  X>.  b.  En  liaison  avec  le  laème 
et  aveu  S.  Jérôme,  S.  Augustin,  p.  39.  b. 
Divisés  au  sujet  dos  Ithaciens,  p.  38.  265. 
b.  Eu  grande  réputation  pour  la  science  et 
l'intégrité  de  la  loi,  p.  23.  2i.  151.  152.  6. 
Uel  éloge  de  leur  foi,  p.  29.  b.  Vuez  : 
L'Eglise  Gallicane. 

S.  EuGENK,  Martyr  prés  de  Paris,  voiez 
son  article,  p.  415.  416.  a.  Poésies  qu'on 
Ini  attril>ue,  p.  416.  a. 

Eugène  déthrone  Valentinien  le  Jeune 
p.  333.  6.  Condoile  de  S.  Ambroise  envers 
loi.  ibid. 

Pppij 


484 


TABLE  DES  MATIERES 


Eoheue,  Oratenr  et  Panétryrista  de  l'Em- 
pire, p.  316.  317.  a.  44.  6.  Né  à  Autun,  p. 

44.  6.  Elevé  i  la  charge  de  Secrétaire  d'E- 
tat, p.  318.  a.  44.  b.  Enseigne  la  rhétori- 
que â.  Autnn,  p.  318.  a.  44.  4S.  b.  Y  rétablit 
les  Ecoles  dans  leur  splendeur,  p.  14.   44. 

45.  6.  Sa  générosité  envers  ce  collège,  p.  319. 
a.  Votez  son  éloge,  p.  4i.  45.  b.  Son  rai- 
sonnement sur  l'union  d'Hercule  avec  les 
Muses,  p.  7.  o.  Ses  écrits,  p.  45-48.  6. 
Editions  de  ses  ouvrages,  p.  48.  49.  6. 

Eunape,  Sophiste  grec,  traite  injustement 
les  Gaulois,  p.  6.  6.  Se  mêle  de  médecine, 
p.  201.  6. 

EuHomie,  fille  de  l'Orateur  Nazuirc,  se 
distingue  par  son  éloquence,  p.  93.  b. 

Eunomiuê,  disciple  d'Aëtius.  S.  Servais 
de  Tongres  écrit  contre  lui,  p.  S45.  b.  Ses 
erreurs,  ibid. 

Euphrase,  Maître  des  Offices,  loué  pour 
son  savoir,  p.  19.  6.  Sa  disgrâce,  p.  19. 
80.  6. 

Val.  Lat.  Euroniut,  gendre  du  poëte  Au- 
sone,    382.  6. 

S.  Eu$ebe,Eyèqne  deVerceil,  exilé  pour 
la  foi  par  les  Ariens,  p.  25,  119,  135.  b. 
Travaille  à  rétablir  la  foi  de  Nicée,  p. 
144.  6. 

Eutebe,  Professeur  de  belles  letres  à  Bour- 
deaux,  p.  320.  a. 

EuTHTHENE,  Géographe  et  Historien,  dif- 
féremment nommé,  p.  78.  a.  Son  p^'s,  t6jd. 
Ses  écrits,  p.  79.  80.  o.  Voiez  son  éloge, 
p.  78-80.  a. 

Eutrope,  Prêtre,  qu'on  fait  disciple  de  S. 
Augustin,  p.  223.  b. 

Eutrope,  Historien,  son  pals.  p.  220.  b. 
N'est  point  Grec  de  nation,  p.  222.  6.  Ni 
un  Sophiste  Italien,  ib.  Mais  Gaulois  de 
nation,  p.  220.  222.  6.  Suit  la  profession 
des  armes,  p.  223.  6.  Est  élevé  à  de  grands 
honneurs,  p.  221.  b.  Ecrit  un  abrégé  de 
l'histoire  romaine,  p.  223.  224.  b.  Mal  con- 
fondu avec  d'autres  de  même  nom,  t6td. 
Voiez  son  éloge,  p.  220-224.  6.  Ses  écrits, 
p.  224-227.  6.  Editions  de  son  histoire  Ro- 
maine, p.  227-230.  6.  Traductions  gréqnes, 
p.  230.  231.  6.  Traductions  francoises  et 
italiennes,  p.  231.  6.  Sa  manière  d'écrire, 
p.  225.  6.  Son  ouvrage  retouché  et  aug- 
menté par  Paul  Diacre,  p.  225.  226.  6.  Et 
par  Landolphe  Sagax,  p.  226.  6. 

Eutrope,  Grammairien,  cité  par  Priscien, 
p.  224.  6. 

Eutrope,  Proconsul  d'Asie,  Préfet  du  Pré- 
toire, p.  221.  223.  b. 


S.  Euvert,  Evéque  d'Orléans,  assista  au 
I  Concile  de  Valence,  p.  209.  b. 

Exupere,  Evéque  de  Cahors,  p.  128.  b. 

Exupere,  Evéque  de  Toulouse,  p.  128.  b. 

Exupere,  Prêtre  de  l'Eglisede  Bourdeaax, 
p.  128.  b. 

ExtiPERE,  Professeur  d'éloquence,  p.  127. 
b.  Enseigne  à  Toulouse,  puis  à  Narbone, 
t6i(j.  Sa  mort,  p.  128.  6.  N'a  point  été 
Evéque,  ib.  Voiez  son  éloge,  127-128.  b. 


ARria  Fadilla,  mère  do  l'empereur  Tile 
Antonin,  son  extraction,  p.  227.  a. 

Proba  Faleonia,  célèbre  poétesse  chré- 
tienne, p.  303.  b. 

Favorin,  le  plus  célèbre  Sophiste  de  son 
tems,  p.  244.  266.  a.  Sa  naissance,  p.  265. 
a.  Ses  grands  talens,  p.  266.  a.  Ses  vola- 
ges, >&.  Ses  liaisons,  p.  267.  a.  Votez  .son 
éloge,  p.  265-270.  a.  Ses  disciples,  p.  269. 
a.  Ses  écrits,  p.  270-276.  a.  Ses  bons  mots, 
p.  268.  269.  274.  a. 

Fadste,  Auteur  des  actes  de  S.  Andoche, 
p.  294.  a. 

Faunfe,  femme  de  Constantin  le  Grand  et 
mère  de  Constantin  le  Jeune,  p.  99.  104. 
6.  Son  caractère,  p.  104.  b. 

S.  Fadstin,  Evéque  de  Lyon,  son  télé 
pour  la  pureté  de  la  foi  et  contre  l'hérésie, 
p.  310.  405.  a.  Ecrit  au  Pape  Etienne  et  & 
S.  Cyprien  contre  l'hérésie  de  Novatien,  ib. 
Voiez  son  éloge,  p.  405-406.  a. 

An.  Gai.  Fauitina,  femme  de  l'Empereur 
Tile  Antonin,  p.  278.  a. 

An.  Fauttina,  fille  de  la  précédente,  et 
femme  de  M.  Aurele,  p.  278.  a. 

S.  Félix,  Prêtre,  disciple  de  S.  Irené«, 
travaille  à  étendre  la  foi  dans  les  Gaules, 
p.  226.  a. 

S.  Félix  de  Sanlieu,  prêche  l'Evangile 
dans  les  Gaules,  p.  225.  a. 

Félix,  disciple  de  S.  Ambroite,  depuis 
évèque  de  Boulogne,  p.  336.  6. 


TABLE  DES  MATIERES. 


485 


S.  Ferreol,  Prêtre,  disciple  de  S.  Irenée, 
prêche  la  foi  dans  les  Gaules,  p.  336.  a. 

S.  Ferrutien,  Diacre,  disciple  de  S.  Ire- 
née, continue  à  répandre  la  foi  dans  les 
Gaules,  p.  336.  a. 

Les  Figuret  de  l'Ecriture  Sainte  établies 
par  les  Pères,  p.  313.  34*.  368.  369.  398. 
a.  148.  378.  337.  338.  6. 

S.  Firmin,  premier  Evêque  d'Amiens, 
p.  307.  a.  Ses  travaux  apostoliques,  t&.  Son 
martyre,  ibid. 

Les  Flamand!,  I^ur  langue,  p.  64.  a. 

S.  Florent,  Evèque  de  Vienne,  assiste, 
ou  préside  même  an  I  Concile  de  Valence, 
p.  309.  6. 

Flori»,  disciple  de  S.  Polycarpe,  Prêtre 
de  Rome,  p.  338.  a.  Ses  erreurs,  p.  385. 
a.  Déposé  du  Sacerdoce,  p.  338.  a.  S.  Ire- 
née écrit  contre  loi,  p.  3;*7-.339.  o.  S.  Hip- 
polyte  ne  l'a  point  fait,  p.  385.  a. 

Jul.  FJortj»  de  Trêves,  différent  de  l'O- 
rateur de  même  nom  qui  suit,  p.  176.  a. 

Jul.  Florus,  Orateur,  brille  à  Rome  par 
non  éloquence,  p.  133.  o.  Passe  pour  le 
Prince  de  l'éloquence  des  Gaules,  p.  175. 
Nal-Â-propos  confondu  avec  Florus  l'Histo- 
rien, p.  78.  a.  Vuies  son  éloge,  p.  175- 
178.  a. 

L.  An.  Jul.  Florcs,  Historien,  étoit  Gau- 
lois, p.  344,  255-357.  o.  Les  Espagnols  ne 
laissent  pas  de  le  mettre  au  rang  de  leurs 
écrivains,  ib.  Son  talent  pour  l'histoire,  p. 
337.  358.  a.  Pour  la  poésie,  p.  337.  o. 
Confondu  mal-à-propos  avec  Florus  l'Ora- 
teur, p.  178.  a.  Votez  son  éloge,  355-357. 
a.  Son  histoire  Romaine,  p.  358.  359.  a. 
Kn  quel  tems  il  l'a  écrite,  ib.  Editions  de 
cette  histoire,  p  360-365.  a.  Traductions, 
p.  364.  365.  a.  Ses  autres  écrits,  p.  259. 
260.  a. 

La  Foi,  sans  elle  point  d'actions  saintes, 
p.  177.  6.  Ne  se  persuade  point  par  la 
violence,  p.  150.  6.  Formule  de  Foi,  voïei  : 
Formulée.  La  Foi  prise  comme  religion, 
voïez  :  Religion  Chrétienne. 

Formules  de  foi,  leur  inutilité,  p.  34. 
166.  6.  Préjudiciables  à  la  foi  même,  p. 
163.  166.  b.  Celle  des  Orientaux  au  sujet 
de  l'Arianisme,  p.  153.  b.  La  seconde  de 
Sirmich,  p.  27.  266.  6.  Rejettée  par  l'Eglise 
Gallicane,  p.  28.  29.  6.  Réfutée  par  S.  Phe- 
bade  d'Agen,  p.  28.  366.  269.  373.  273.  6. 
Supprimée  dans  le  Concile  d'Ancyre,  p.  29. 
6.  Celles  qui  furent  présentées  à  Rimini, 
p.  30.  31.  32.  b.  Dont  l'une  y  fut  signée, 
p.  32.  6. 

S.  Fortunat,  Diacre,  disciple  de  S.  Irenée, 
travailla  à  répandre  la  foi  dans  les  Gaules, 
p.  226.  a. 


Les  François  se  jettent  dans  les  Gaules, 
p.  314.  315.  a. 

Frejut,  Colonie  Romaine,  p.  10t.  a. 
Grands  Hommes  qui  en  sont  sortis,  p.  101. 
129.  163.  219.  343.  a. 

Frigitil,  Reine  dos  Marcomans,  convertis 
à  la  foi  par  S.  Ambroise,  p.  334.  6.  L» 
Saint  lui  adresse  un  écrit,  p.  393.  6. 

Fronto  Catins,  célèbre  Avocat  sous  Tra- 
jan,  ne  doit  pas  être  confondu  avec  celui 
qui  suit,  p.  384.  a. 

M.  Cor.  Fronto,  Orateur,  le  second  Maî- 
tre de  l'éloquence  Romaine  après  Ciceron, 
p.  344,  282.  a.  Son  pais,  p.  283.  a.  Est 
choisi  pour  enseigner  M.  AnreleetL.  Verus, 
t6.  Voiez  son  éloge,  p.  383-384.  a.  Ses 
écrits,  p.  384-386.  a.  Son  style,  p.  384.  a. 

M.  Aus.  Fronto,  petit-flls  de  l'Orateur  M. 
Cor.  Fronto,  p.  284.  a. 

Fronton,  fils  de  l'Orateur  M.  Cor.  Fronto, 
p.  284.  a. 

Fronton  de  Cirte,  fameur  orateur,  ca- 
lomnie les  Chrétiens,  p.  286.  a. 

T.  Aur.  Fulvius,  ou  Fulvus,  aïeul  da 
l'Empereur  Tita  Antotiin,  p.  130.  a.  Sa 
patrie,  ses  dignités,  ib.  Est  le  premier  des 
Gaulois  qui  soit  allé  s'établir  en  Italie,  ibid. 

Aur.  Fulvius,  Qls  du  précèdent,  loué  pour 
l'intégrité  de  ses  mceurs,  p.  130.  a. 


G 


GAbales,  aujourd'hui  Mande,  fondation  de 
l'Eglise  de  cette  ville,  p.  308.  a. 

Sex.  Jul.  GABmunus,  Rhéteur,  p.  133. 
214.  a.  Regardé  comme  le  Prince  de  l'élo- 
quence, de  son  tems,  p.  215.  a.  Voiez  son 
éloge,  p.  314.  315.  o. 

Les  Galates  sortis  des  Anciens  Gaulois, 
p.  4.  a.  Esprits  pesans  et  grossiers,  p.  3. 
4.  a.  Pourquoi?  ibid. 

La  Galatie,  la  même  que  la  Gallogréce, 
p.  55.  a.  Les  Gaulois  s'y  habituent  et  lui 
donnent  leur  nom,  p.  56.  83.  a.  Savans 
qu'elle  a  produits  anciennement,  p.  56.  a. 

Catien,  ses  écrits  contre  Favorin,  p.  373. 


3  2 


m 


TABLE  DES  MATIERES. 


a.  En  faveur  de  Soerate  et d'Epietete,  ibid. 

Galla,  Soeur  de  Valentinien  II,  et  seconde 
femme  du  Theodose  le  Grand,  p.  361.  6. 

La  Gallogivce,  voïeï  :  Galatie. 
C.  .-Elius  Ca<(u«,  confondu  mal-à-propos 
avec  Cor.  Gallus,  qui  suit,  p.  103.  a. 

Cor.  Galliis,  céli>bre  Poète,  p.  101.  a. 
Natif  de  Frcjus,  non  du  Friouî,  ib.  nol. 
Grand  ami  de  Virgile,  p.  lOï.  a.  Est  fait 
Gouverneur  d'Egypte,  ihid.  Sa  mort,  p.  103. 

a.  Vuiez  son  éloge,  p.  iai-103.  a.  Ses 
écrit»,  p.  101-108.  o. 

Vib.  Gallus,  Orateur,  fait  ladmiration 
de  Roffle,  p.  132.  a.  Brille  dans  le  barreau, 
p.  145.  a.  Votez  son  éloge,  p.  135. 146.  a. 

S.  Catien,  premier  Evoque  de  Tours,  p. 
304.  a.  Tems  de  sa  mission  ilaiis  les  Gau- 
les, p.  303.  306.  o.  Ses  disciples,  p.  309.  a. 

Gavidiu,i,  Evéque  en  Aquitiiiiie,  assiste 
au  Concile  de  lUmini,  p.  30.  b. 

La  Gaule  Cisalpine,  ainsi  nomiuée  d(!s 
Gaulois  qui  la  conquirent,  p.  54.  u.  Sun 
élimduc,  ibid.  Se  signale  dans  les  lutres,  p. 
53.  54.  a.  Grands  liommes  de  lutres  qu'ullu 
a  produits,  54.  53.  a. 

La  Gaule  Naibonoisc,  voioi  :  Narba- 
noise. 

Les  Gaules,  leur  situation  ut  luur  étun- 
due,  p.  10.  o.  Leur  division,  p.  13.  a.  On 
y  suit  des  coutumes  'lifférenles,  ih.  Mer- 
cure y  règne  et  y  élablit  une  louable  i)olice, 
p.  5.  C.  o.  Los  l'Iiocéons  s'y  (lablissunl  et 
on  renouvellunt  la  faci;,  p.  10.  ii.  46.  47. 
i«.  Y  porluut  lus  maxiiuus  des  Grecs,  p.  42. 
43.  a.  Les  Gaules  duivuni  à  la  Grèce  une 
partie  de  luur  politesse  et  du  savoir  qu'on 
y  a  admiré,  p.  3.  u.  Lu  contraire  est  une 
fable,  p.  2.  3.  a.  l'rogrùsdes  sciomos  dans 
les  Gaules,  p.  52.  53.  m.  126.  127.  130. 
131.  a.  2.  b.  Elles  sont  conquises  (lar  les 
itomains,  p.  57^  a.  Kpousuut  les  niaxiinos 
Romaines,  p.  56-.>8.  a.  Rome  en  lire  do 
grands  liommes,  p.  69.  83.  86-88.  92.  101. 
109.  127.  132-134.  a.  13.  16.  b.  Elles  foiir- 
nissenl  i  l'Empire  presque  Idus  les  l'ané- 
gyrislus  du  111,  IV  et  V  siucle,  p.  317.  n. 
Forment  les  premiers  avocats  de  la  Grande 
Brutugne,  p.  C9.  134.  ».  La  Religion  Ghré- 
lionno  n'y  fut  {loint  établie  an  1  sioil.s  de 
l'Eglise,  p.  125.  126.  a.  Les  sciences  y  sont 
encore  tros-florissanles  au  IV  sied'',  p.  1. 
2.  4.  ».  15-17.  18.  6.  Les  Gaules  troublées 
par  lus  incursions  des  barbares  et  les  per- 
sécutions des  païens,  p.  30!l.  311.  u.  2.  7. 

b.  l'aciTiéus  et  policées  |iur  les  Empereurs, 
p.  3.  7.  6.  Qui  y  établissent  leur  cour  iu- 
l)érialo,  p.  313.  316.  a.  3.  5.  9.  b.  Elles 
tombenl  un   partage  à  Constance  Chlore, 


Constantin  le  Jeune,  Consianl  son  trere  et 
à  Gralien,  p.  5.  6.  100.  6.  Etendue  de  la 
Préfecture  des  Gaules,  p.  326.  6.  Il  s'y 
retire  de  Rome  quelques  Philosophes,  p.  138. 
a.  L'Eglise  des  Gaules,  votez  :  VEglisf 
Galticane.  Ecoles  dvius  les  Gaules  :  volez 
Ecoles.  Ecoles  Chrélieuocs  dans  les  Gaules, 
p.  232-240.  o. 

Les  Gaiiloii  lapporteut  luur  origine  i 
Mutoo,  p.  37.  a.  La  première  origine  des 
sciences  parmi  eux  est  incorlaino,  p.  1.  2. 
5.  a.  Scnlimens  fabuluuv  â  ce  sujet,  p.  2. 
3.  a.  Inventés  par  un  Italien,  p.  3.  a.  Ont 
néanmoins  cultivé  lus  sci.-nces  de  temps 
immémorial,  p.  9.  a.  Peu|de  civilisé  qui 
avoit  do  grandes  dispositions  |iour  les 
sciences,  p.  4.  3.  a.  Peuple  barbare  en  quel 
sens,  p.  4.  a.  Uulliqueux,  p.  7.  8.  28.  «. 
Ingénieux,  qui  avoit  de  l'industrie,  de 
crédulité  et  de  la  curiosité,  p.  4.  5.  a.  Né 
pour  I .^s  beaux  arts,  p.  3.  a.  Esprits  indo- 
ciles en  quel  sens,  ib.  Su  |)erfectionaent 
sous  lu  rogne  de  Mercure,  p.  6.  a.  Portent 
nue  vénération  parliculiore  à  ce  faux  Dieu, 
ibid.  A  Hercule,  p.  7.  a.  A  Apollon,  Mi- 
nei-vis  Mars,  Jupiter,  Pluton  ct.i  toutes  les 
autres  divinités,  p.  8.  28.  29.  a.  Savans 
dans  la  mythologie,  ibid.  Luur  thuologie 
plus  subiimu  ot  plus  raisonnable  que  collo 
dos  autres  païens,  p.  8.  9.  u.  Tonuieiil 
l'immortalité  de  l'àiuo,  p.  9.  34-37.  a. 
Avuiuiit  puisé  ce  soiitimoiil  dans  la  doctrine 
dus  Palriarclies,  p.  9.  a.  Ont  procédé  les 
Grecs  dans  la  profession  do  la  pliilosupbio, 
p.  4.  10.  a.  Leurs  Philosophes,  p.  29-33. 
(t.  Leurs  Poiites,  p.  25-28.  «.  Leurs  Vates 
ou  Devins,  p.  28.  a.  Leur  republique,  p.  31. 
34.  (i.  Leur  première  Langue,  62-63.  a.  Ils 
on  avoieiit  trois  i  leur  usage,  p.  58.  a.  La 
Latine  luur  devient  naturelle,  p.  38.  61.  62. 
».  Se  seiTuient  de  la  Gréquu,  p.  47.  58. 
61.  a.  S'apliqnoiunt  parliculiuremont  à  l'é- 
loquence, p.  68-70.  126.  a.  Avoicnt  le 
talent  de  parler  avec  grâce  et  avec  esprit, 
p.  7.  8.  a.  Ne  parloieiit  que  par  sentences, 
en  énigme,  par  synecdoche,  p.  40.  ».  Don- 
iioreiil  aux  Romains  le  premier  goi'it  pour 
les  boites  loties,  p.  33.  a.  Excelloient  dans 
la  médecine,  p.  133.  ».  Fort  adonnés  aux 
divinations,  p.  S.  6.  Uans  lesquelles  ils 
e\cclloient,  p.  28.  o.  N'aimoienl  que  les 
occupations  sérieuses,  p.  7.  b.  Avoiont  le 
secret  de  l'art  de  l'écriture,  p.  12.  a.  D'où 
ils  l'avoient  reçu,  p.  16.  17.  ».  Deux  dif- 
férentes opinions  à  eu  sujet,  p.  16.  20.  a. 
U  est  plus  probable  qu'ils  l'ont  reçu  des 
Phocéens,  t6.  Leur  première  manière  d'é- 
crire, p.  12.  a.  S'ils  ont  écrit  autrefois  de 
la  droite  à  la  ifaucbe,  p.  SI.  S2.  a.  Se 
servoient  d  abord  do  caractères  Grecs,  p. 
12.  16.  20.  a.  Puis  du  caractères  Romains, 


TABLE  DES  MATIERES. 


487 


p.  H.  15.  o.  Forme  des  anciens  caractères 
à  liMir  usage,  p.  16.  a.  N'ont  rien  laissô 
par  écrit,  p.  3.  12.  a.  Leurs  Ecoles,  p. 
40-42.  4».  47.  49.  50.  52.  126.  130.  132. 
134.  136.  243.  244.* «.  9.  12.  13.  15.  b. 
Voïez  :  Ecoles.  Eux  et  les  Bretons  ne  fai- 
snicnt  oripinairemcnt  qu'une  même  nation, 
p.  11.  a.  S'emparent  d'une  partie  do  l'Itîl- 
lie.  s'y  habituent  et  y  bâtissent  plusieurs 
villes,  p.  .54.  a.  Savans  qu'ils  pourroient 
compter  en  ce  païs-là,  p.  54.  5."'>.  a.  Comme 
aussi' dans  la  ('eltiberie  et  la  Galalio,  p. 
.55.  50.  n.  Tous  leur»  savans  ne  sont  pas 
connu»,  p.  70.  a.  Ils  obtiennent  le  droit  de 
bourgeoisie  Romain?,  et  entrée  dans  Is  Sé- 
nat de  Rome,  p.  57.  174.  a.  Moins  éloi- 
gnés que  les  autres  peuples  iilul;Ures  de 
recevoir  l'Evangile,  p.  229.  a.  Pourquoi 'i* 
ihid.  Ils  doivent  aux  Grecs  la  première 
connoissance  de  la  foi,  p.  227.  ".  No  de- 
vienrnt  Chrétiens  que  peu  à  pi-n,  p.  300. 
a.  Cultivent  les  .sciences  au  IV  siecio  avec 
un  nouvel  éclat,  p.  2.  4.  6.  h.  Surtout 
l'éloqui-nco  et  la  poésie,  p.  6.  8.  10-17.  b. 
Donnent  à  l'Empin;  beaucoup  ))lus  de  pa- 
négyristes qu'aucune  autre  nation,  p.  417. 
a.  En  relation  avec  les  savans  des  paîs 
étrangers,  p.  39.  h.  Insultés  p;ir  Eun.ipe, 
p.  6.  /'.  Loués  par  Julien  l'Apostat,  p. 
7.  6. 

Aula  CflU,  disciple  du  Sophiste  Favorin, 
p.  269.  a.  Et  de  l'Orateur  Cor.  Fronlo, 
p.  283.  a. 

Gehimos,  homme  de  letres;  son  pats,  p. 
247.  a.  En  commerce  de  letres  aven  Pline 
le  Jeune,  p.  231 .  247.  a.  Peut-être  le  même 
que  Varius  Ueminius,  p.  248.  a.  l'nïez  son 
«loge,  p.  247.  2tX.  a. 

S.  Gênés,  Martyr  i  Arles,  p.  421 .  422. 
a.  Son  talent  particulier  d'écrire  en  notes. 
Voies  son  éloge,  ibid. 

Gexnade,  Orateur,  brille  &  Rome  dans  h- 
barreau,  p.  119.  120.  h.  Son  pats,  p.  120. 
6.  Votez  son  éloge,  p.  119.  12(J.  b. 

S.  Genoul,  ou  Geitulfe,  premier  Evèque 
lie  Cahors,  p.  309.  a. 

Gevijraphet  que  les  Gaulois  ont  produits 
anciennement,  p.  71.78.401.  a. 

Gerbert,  depuis  Pape  Silvestre  II,  Auteur 
du  traité  de  la  dignité  sacerdotale,  p.  398. 
.399.  b. 

Les  Germains,  frères  des  Gaulois,  p.  20. 
a.  N'ont  eu  que  tard  le  secret  d«  l'écriture 
ihid. 

Germahicus,  César,  sa  famille,  p.  152. 
:>,i  iiuissance,  ibid.    Ses  grandes  actions. 


Voïez  son  éloge,  p.  152-1.55.  a.  Ses  écrits 
et'leurs  éditions,  p.  i55-l.'i8.  a. 

Ace.  Glvhmo  ,  Grammairien  ,  enseigne 
dans  les  Ecoles  de  Bourdeaux,  p.  107.  6. 

Glaucut,  Professeur  d'éloquence  au  Col- 
lège d'Autun,  p.  318.  •. 

La  Glu,  remède  le  plus  sacré  des  Drui- 
des, p.  .38.  a.  De  quoi  ils  la  faisoient.  p. 
39.  a. 

Gnomon,  qui  en  est  le  premier  inven- 
teur, p.  271.  a. 

Gnoftiquet,  hérétiques.  Yo'i'ex  :  Mareo- 
tiem. 

I      M.  Ant.  G^iTPRon,  célèbre  Grammairien, 
son  pals,  p.  83.   a.  Enseigne  à  Rome  avec 
I   réputation,     p.    53.    86.   a.      Votez    son 
'   éloge,  p.  R5-87.  a.  Ses  écrits,  p.  87.  a. 

Gordien,  Auteur  de  l'Antoniade,  p.  281. 
I  a.  Prend  la  pourpre  et  le  nom  d'Augnttc, 
\   ihid. 

La  Grate,  sa  nécessité,  p.  189.  190.  6. 
Pomp.   Gnvciiin,  Dame  Romaine,  peut- 
être   soeur    de  Jul.    Gnrcinus  qui  suit,   p. 
i   1«>.  o. 

Jul.  Gn.eciMis,  Philosophe,  p.  163.  a. 
Fait  beaucoup  d'honneur  au  Sénat  de 
Rome  où  il  est  admis,  p.  132.  a.  l'oïez  son 
éloge,  p.  163-l(i5.  o.  Ses  écrits,  p.  IKi. 
lliO.  a. 

I  GraMiiiairirH.  idéequ'attachoient  les  An- 
ciens \  celte  profession,  p.  86.  a.  13.  63. 

I   b.  Jani.-iis  <Manim:iirien  ne  lit  fortune,  p. 

{   206.  b.  Granmiairions  qu'ont  produits  lits 

I  Gaules,  p.  «5.  8«.  o.  63-<i5.  106.  107.  119. 
127.    128.   203.   206.  207.  217.  218.  231. 

j  2.32.  h. 

I      6't'a(a, Sieur  de  l'Empereur  Valentinien  II, 

i   p.  2il.  h. 

GlATiETi,  Empereur,  sa  famille  et  sa  nais- 
sance, p.  23.'!.  h.  Ses  grandes  qualités,  p. 
233.  2.38.  b.  Son  talent  pour  les  letres,  p. 
233.  6.  Devient  Poiile  et  Orateur,  ib.  Est 
déclaré  Auguste,  p.  234.  b.  Gouverne  seul 
l'Empire  d'Occident,  ih.  De  tous  les  Empcv 
reurs  le  plus  favorable  aux  lelrm,  p.  9.  11 . 
12.  235.  6.  Son  zélé  pour  l'EglLsu,  p.  23:,- 
2.37.  6.  Assemble  un  Concile  à  Aquilée,  p. 
'.H.  237.  6.  Engages.  Ambroise  à  lui  com- 
poser divers  écrits  sur  la  foi,  p.  236.  237. 
2.39.  b.  Ausoiie  prononce  son  panégyrique, 
p.  .306.  3U7.  b.  Vvie»  Son  ci>ige,  p.  233- 
239.  b.  Sa  mort,  p.  238.  6.  S.  Ambroise 
fait  son  oraison  funèbre  avec  celle  de  son 
frère  Yalentinien,  p.  375.  6.  Ses  ordouiun- 
ces  et  ses  loix,  p.  2.35.  239.  6. 


488 


TABLE  DES  MATIERES. 


I.CS  Greet  viennent  s'établir  dans  les  Gau- 
les, volez  :  Les  Phocéent.  Ont  appris  di- 
verses choses  anx  Gaalois,  p.  3.  47.  a.  Et 
leur  sont  redevables  do  quelques  antres,  p. 
10.  a.  Leurs  caractères  à  l'usage  des  Gau- 
lois, p.  12.  16.  20.  a.  d'oli  ils  leur  étoient 
venus,  p.  19.  a.  Leur  ancienne  manière 
d'écrire,  p.  21.  a.  Ils  furent  des  premiers 
qui  se  servirent  de  la  cire  pour  cet  usage, 
p.  23.  a.  Leur  langue  passe  à  l'usage  des 
Gaulois,  voïez:  Langue  Gréque.  Ils  sont 
les  premiers  qui  portent  la  lumière  de  l'E- 
vangile dans  les  Gaules,  p.  225.  a. 

S.  Grégoire,  premier  Evèqus  du  Poy  en 
Vêlai,  p.  308.  a. 

Grégoire,  Préfet  des  Gaules,  Questeur  en 
376,  p.  220.  b.  Son  talent  pour  bien 
écrire,  »6.  Pour  l'éloquence,  p.  321.  6. 
Zélé  pour  la  justice,  t6.  Votez  son  éloge, 
p.  320.  321.  6.  Ansone  lui  adresse  quel- 
que écrit,  p.  .300.  h. 

Guillaume,  abbé  de  S.  Thierri,  Auteur 
d'un  Commentaire  sur  le  Cantique  des  Can- 
tiques, tiré  des  écrits  de  S.  Ambroise,  p. 
358.  391.  6. 

Gtarïe,  Astronome  et  Mathématicien,  p. 
99.  a.  Grand  homme  de  mer,  p.  100.  a. 
Voïez  son  éloge,  p.  99.  100.  a. 


TT 


HARMOîilts,  Grammairien  savant  en  grec 
et  en  latin,  enseigne  à  Trêves,  p.  207. 
208-  6.  Fait  nn  recueil  des  poésies  d'Ho- 
roere,  p.  208.  6.  Votez  son  éloge,  p.  207. 
208.  6. 

Hedibie,  Dame  de  pieté  et  de  mérite,  in- 
struite des belles-letres,  p.  125.205.  20C.  b. 

S.  Hélène,  mère  de  Constantin  le  Grand, 
recouvre  la  croix  du  Sauveur,  p.  376.  6. 

Helicon,  ou  Hélix,  ses  erreurs,  p.  381. 
383.  a. 

Helie,  Evêqne  de  Lyon,  préilecessenr  de 
S.  Faustin,  p.  405.  a. 

Ueliodore,  Evêqne  d'Allino,  confondu 
mal-à-propos  avec  le  suivant,  p.  193. 
196.  b. 

Heliodorg,  PrStra  &  Poitiers,  compagnon 


d'étude  de  S.  Ililaire,  p.  194.  195.  b.  S'il 
l'accompagne  dans  son  exil,  p.  195.  b.  Mal 
confondu  avec  d'autres  de  même  nom,  p. 
195.  196.  6.  Votez  son  éloge,  p.  194-196. 
b.  Ses  écrits,  p.  195.  186.  b. 

Heliodore,  Prêtre  d'Antioche,  mal  con- 
fondu avec  le  précèdent,  p.  196.  b. 

Hellesponce,  Orateur  et  Philosophe,  p. 
201.  b.  Le  second  Sophiste  de  son  tems, 
ib.  Ses  divers  voïages.Koïe^  son  éloge,  p. 
201.  202.  6. 

Les  Helvelieni  faisoient  partie  des  Gau- 
les, p.  12.  131.  a.  Se  servoient  de  caractè- 
res Grecs,  p.  12.  a.  Quelques  hommes  de 
letres  qu'ils  ont  produits,  p.  131.  131.  a. 

Pom.  Max.  HERCCLAitics,  Grammairien, 
enseigne  dans  les  Ecoles  de  Bourdeaux,  p. 
119.  121.  6. 

Hercule,  honoré  des  Gaulois,  qui  le  con- 
fondoient  avec  Mercure,  p.  6.  7.  a.  Figure 
mystérieuse  sous  laquelle  ils  le  représen- 
toient,  ib.  Son  union  avec  les  Muses,  p.  7 
a. 

Les  Héreties,  source  de  toutes  les  Héré- 
sies, p.  157.  6.  Leur  contrariété  avanta- 
geuse pour  l'Eglise,  p.  160.  b.  Contribuent 
à  soutenir  les  letres  et  les  sciences,  p.  212. 
a.  3.  b.  Diverses  hérésies  :  celles  des 
Apollinaristes,  p.  394.  395.6.  Refutées  par 

5.  Ambroise,  ib.  D'Arius,  p.  24.  6.  Com- 
mence à  Alexandrie,  ibid.  S'efforce  de  ré- 
pandre son  venin  dans  les  Gaules,  p.  24-29. 

6.  Voïez  :  Arianisme.  Celles  des  Gnosti- 
ques,  p.  242.  327.  a.  Des  Ithaciens,  p.  37- 
39.  422.  b.  Des  Marcionites,  p.  .345.6.  Des 
Marcosiens,  p.  242.  327.  a.  Des  Millénai- 
res, p.  304.  333.  346.  358.  a.  85.  388.  389. 
6.  Des  MonUnistes,  p.  289.  290.292.  295. 
303.358.  o.  Des  Noëtiens,  p.  383.  .384.  a. 
Des  Novatiens,  p.  310.  311.  406.  a.  61. 
,351.  ,352.  387.  6.  Des  Priscilli,aniste.s,  p. 
35-37.  321.  422.  6.  Des  Valentiniens,  p. 
242.  327.  a.  De  Vigilance,  p.  41.  42.  b. 
Divers  Auteurs  qui  ont  écrit  contre  toutes 
les  Hérésies,  p.  304.  329.  383.  a.  1,55. 
185.  6. 

Hermat,  si  son  livre  est  Ecriture  sainte? 
p.  345.  1. 

Herodet  Atticas,  Maître  de  Favorin,  p. 
267.  o. 

Herodei,  fils  du  précèdent,  disciple  et 
héritier  de  Favorin,  p.  269.  270.  a. 

Herophile,  chef  d'une  secte  de  Médecins, 
qui  portent  son  nom,  p.  208.  209.  a.  En 
quel  tems  il  l'établit,  p.  208.  a. 

Hetpere,  fils  du  Ponte  Ansone,  p.  $82. 
299.30.5.  307.  308.  b. 


TABLE  DES  MATIERES. 


489 


Hexameron,  on  les  six  jours  de  la  créa- 
tion; qui  sont  ceux  qui  ont  écrit  sur  ce  su- 
jet, p.  372.  a. 366.  367.  b. 

Hieriut,  Toïez  :  Icaire. 

S.  HiLAiRE,  Evéque  de  Poitiers,  Docteur 
de  l'Eglise  et  Confesseur,  p.  139.  6.  Sa 
naissance,  ibid.  Son  éducation,  p.  139. 
140.  b.  Car.icterede  son  esprit,  p.  146.  6. 
Sa  conversion  à  la  foi,  p.  140.  6.  Son  ordi- 
nation, ibid.  Son  lele  pour  la  foi  Ortho- 
doxe, p.  140.  14t.  6.  Le  fléau  des  Ariens, 
p.  26.  6.  Assiste  ;(■  Concile  de  Besiers  et 
s'y  signale,  p.  26.  118.  135.  141.  6.  Exilé 
en  Phrygie,  p.  26.  119.141.  6.  Y  écrit  son 
livre  des  Synodes,  p.  29.  6.  Assiste  au  Con- 
cile de  Seleucie,  p.  33.  142.  6.  Se  trouve 
&  celai  de  Constantinople  en  360,  p.  143. 
b.  Est  renvoie  à  son  Eglise,  p.  33. 143. 144. 
b.  Rapelle  tout  le  monde  à  la  pénitence,  p. 
33.  129.  144.  b.  Assemble  divers  Conciles, 
p.  144.  6.  Nommément  celui  de  Paris  et  y 
assiste,  p.  130.  144.  6.  Passe  en  Italie  et  y 
travaille  i  rétablir  la  foi  de  Nicée,  p.  144. 
145.  b.  Combat  Auxence,  Evéque  Arieo  de 
Milan,  ibid.  Lucifer  de  Cagliari  blâme  sa 
condescendance,  p.  133.  b.  Sa  mort,  p. 
145.  146.  6.  Voiez  son  éloge,  p.  139-147. 
b.  Ecrits  qui  nous  restent  de  lui,  p.  147- 
179.  b.  Ses  écrits  perdus,  p.  179-185.  b. 
Ses  écrits  supposés,  p.  185.  186.  6.  Sa  ma- 
nière d'écrire,  p.  187.  6.  Son  érudition,  p. 
188.  189.  Sa  doctrine,  p.  189-191.  6.  Er- 
reurs qu'on  lui  a  imputées,  et  sa  justiflca- 
tion,  p.  191.  192.  6.  Editions  de  ses  œu- 
vres, p.  191-194.  6. 

UUaire,  Diacre  de  Rome,  Auteur  de 
X'Avubrotiaiter,  p.  398.  b. 

Uilaire,  fameux  Magicien,  p.  312.  b. 

Mm.  Hilaria,  sœur  du  médecin  An- 
toine, savante  dans  la  médecine,  p.  58. 
S89.  6. 

S.  HiPPOiTTË,  Evéque  et  Martyr,  Doc- 
teur de  l'Eglise,  p.  361.  a.  Disciple  de  S. 
Irenée  et  Elevé  de  l'Eglise  de  Lyon,  p. 
303.  368.  a.  Né  probablement  dans  les 
Gaules,  p.  361.  a.  Son  éducation,  p.  36t. 
362.  a.  Se  rend  habile  dans  toutes  les 
sciences,  p.  362.  a.  Elevé  à l'épiscopat,  t6. 
Son  siège  incertain,  p.  362.  363.  a.  Porte 
la  Foi  en  divers  pais,  p  226. 233.  a.  Tra- 
vaille sur  presque  tous  les  livres  de  l'Ecri- 
ture, p.  304.  364.  371-379.  o.  A  servi  de 
modèle  à  Origene,  p.  304.  364.  a.  Donne 
beaucoup  dans  la  figure,  p.  313.  368.  369. 
a.  Finit  sa  vie  par  le  martyre,  p.  364.  a. 
L'époque  de  sa  mort  incertaine,  ibid  Voiez 
son  éloge,  p.  361-365.  a.  Ecrits  qui  res- 
tent de  lui,  p.  365-371.  o.  Ses  écrits  per- 
du», p.  371-393.  o.   Ses  écrits  supposé», 

Tome  I.  Part.  IL 
3  2* 


p.  393-397.  a.  Son  érudition,  sa  doctrine, 
sa  manière  d'écrire,  p.  397-399.  o.  Edi- 
tions de  ses  ouvrages,  p.  399.  400.  a.  S. 
Ambroise  a  beaucoup  puisé  dans  ses  ou- 
vrages, p.  406.  6. 

Hippolyte  de  Thebes,  Auteur  d'une 
Chronique,  p.  395.  396.  a.  Mal  confondu 
avec  S.  Hippolyte  Martyr,  ibid. 

VHittoire,  commencement  de  sa  déca* 
dence,  p.  245.  a.  Se  soutient  encore  dans 
les  Gaules  au  II  et  au  IV  siècle,  p.  245.  a. 
21.  b. 

Historien»  qu'ont  produits  les  Gaules, 
p.  71.  78.  80.  108.  114.  166.  255.  265.  o. 
18.  136.  137.  220.  6. 

Homère,  en  quel  tems  il  a  vécu,  p.  80. 
o.  Ses  écrits  revus  et  corrigés  par  Harmo- 
nius  au  IV  siècle,  p.  208.  b. 

S.  Honette,  Prêtre  de  Nismes,  Apâtre  de 
la  Navarre,  p.  307.  a. 

Les  donneur»,  puissant  motif  pour  culti- 
ver les  sciences,  p.  66.  67.  a. 

S.  Honorât,  second  Evéque  de  Tou- 
louse, p.  307.  o. 

VHumilitë  est  la  tête  de  toutes  les  ver- 
tus, p.  334.  b. 

Hymnet,  S.  Uilaire  de  Poitiers  est  le 
premier  entre  les  Latins  qui  en  ait  com- 
posé, p.  180.  b. 


Siscen.'  lacehtu  enseigne  les  belles  letre» 
dans  la  Gaule  Cisalpine,  p.  53.  a. 

latromathematiciem,  nouvelle  secte  de 
Médecin»,  p.  210.  a. 

Icaire,  Comte  d'Orient,  un  des  plus  élo- 
qnens  de  son  siècle,  et  des  plus  savans 
Philosophes,  p.  257.  258.  6.  Professe  d'a- 
bord la' rhétorique  à  Rome,  ibid.  Est  élevé 
aux  premières  charges  de  l'Empire,  p.  258. 
6.  Ses  liaisons  avec  les  Savans  de  son  siè- 
cle, ibid.  voïez  son  éloge,  p.  257-259.  6. 

Icheriue,  voie»  :  Icaire  qui  précède. 

Idace,  un  des  principaux  accusateurs  de» 
Priscillianistes,  p.  37.  341.  b. 

S.  Jean  l'Évangeliste,  son  caractère,  p. 
356.  b.  opinion  assez  extraordinaire  à  son 
sujet,  p.  394.  a, 

Qqq 


«M 


TABLE  Di:S  MATIERES. 


S.  Jttimt  vient  i  Trêves,  p.  \t.  b.  V 
commence  à  se  convertir,  ibid.  Y  popie 
ileuK  ouvrages  de  S.  Hilairo  de  Poitiers, 
ibid.  Critique  les  écrits  de  S.  Raie»,  p. 
63.  6. 

Jesus-Christ,  sou  il^'e,  p.  343,  a.  Ses 
mystères,  p.  332.  333.  u.  Ses  deux  nat  i- 
res,  p.  38t.  383.  a.  Ses  deux  aveiiemens, 
p.  362.  a.  189.  6. 

Jeune  du  carême,  son  excellunue,  ses  ef- 
fets, son  ancieiiiiitc,  p.  368.  b.  Ce.  qu'un  dit 
S.lrenée,  p.  3S2.  a.  La  diversité  qu'un  y 
observoit  anciennement,  p.  297.  u. 

La  Jeunesse,  manière  de  l'éluver,  p.  139. 
140.  a.  Défauts  à  y  éviter,  tb. 

Jmbetause,  Evèque  de  Reims,  assiste  au  i 
I  Concile  d'Arles,  p.  53.  6. 

L'Ingratitude  envers  Dieu,  ses  caractères,   ' 
p.  338.  6.  ! 

Jiistanee,  Evêqae   Priscillianistu,  déposé   ; 
dans  le  Concile  de  Bunrdeaux,  p.   241.   6.^ 

Job,  S.  Hilaire  de  Poitiers  avoit  écrit  sur 
ce  livre,  p.  181-183.  b.  , 

Jovinini,  .son  erreur,   p.   332.  6.   Con-   \ 
damné  dans  un  Concile,  p.  34.  332.  ;t82.  b. 

S.  iRzyÈE,  Evéquo  de  Lyon,  Docteur  du  | 
l'Eglise  et  Martyr,  p.   324.   u.  Tonis  de  sa   i 
naissance,   ibid.  Son  éducatiua,   ibid.    Sa   I 
mission  dans  les  Gaules,  p.  32.'>-32ti.  u.  Sa 
dé|jutation  à  Rome,   p.  2;K).   32(i.   u.    V.n   i 
Asie,  et  n'y  va  pas,  ibid.    Fait  Evèque  de 
Lyon,  p.  225.  289.  u.  Rend  presque  toute 
la   ville   Clirotieuiie,   ibid.  S.;M  zelo   et  ses   ■ 
traviiux  apostoliques,  p.  301.302.  ,{27.  «.    I 
Est  le  premier  dos  Pères  qui  ait   travaillé    I 
sur  l'Ecriture,  p.  304.  u.  Ecrit  contre  KIo-   j 
rin,  p.  .337-3,39.  a.  Contre  lî|a~te,  p.  241. 

301.  a.  Contre  toutes  les  liéresies,  p.  242. 
Ï43.  301.  o.  Au  l'ape  S.  Victor  piiurnudc- 
rer  son  zélé  contre  les  Quarludccinians,  p. 
Î41.  297.  a.  Calme  cette  disputr,  p.  2il. 
S42.  <i.  Sa  mort,  p.  328.  «.  Voiez  sou 
cloge,  p.  324-329.  a.  Ses  disciples,  p.  220. 

302.  303.  a.  Ses  écrits  subsislans,  p.  329- 
337.  o.  Ses  écrits  perdus,  p.  337.  3t3.  a. 
Idée  de  ses  écrits,  p.  301.  302.  33(i.  ;J37. 
a.  Son  savoir,  p.  325.  328.  o.  Eu  quelle 
langue  il  a  écrit,  p.  33i.a.  Divers  points 
du  sa  doctrine,  p.  343-340.  a.  Erreurs 
qu'on  lui  a  imputées,  p  345.  3i0.  a.  Donne 
dans  les  sentimens  des  Millenaijes,  p.  ,°!25. 
a.  Son  attention  pour  conserver  jiuie  la 
TradiUon,  p.  302.  303.  o.  Son  style,  p. 
337.  a.  Donne  dans  la  figure,  p.  34t.  a. 
Version  latine  de  ses  livres  contre  les  liérc- 
sies,  p.  335.  336.  a.  Editions  de  ses  ou- 
vrages, p.  347.  350.  a.  fragmens  de  s«3ou- 


vrages,  p.  350-352.  a.  La  ventaUe  causH 
de  la  perte  de  ses  écrits,  p.  305.  o. 

Les  Italient,  d'où  leur  est  venu  l'art  île 
l'écriture,  p.  19.  o.  Leur  manière  d'écnru, 
p.  24.  a. 

Illiace,  Evèque  en  Espagne,  principal  ac- 
cusateur des  Priscillianistes,  obligé  de  so 
retirer  dans  les  Gaules,  p.  36.  240.  321.  6. 
Les  jiousse  avec  trop  de  chaleur,  p.  37. 
241.  6.  Devient  chef  des  Itbaciens,  p.  37. 
38.  241.  6.  Sou  portrait,  p.  39.  b. 

Les  Hh.iricns,  comment  se  forme  leur 
parti,  p.  37.  6.  Causent  d'étranges  divi- 
sions dans  l'Eglise  des  Gaules,  p.  37.  39. 
b.  Privés  de  la  communion,  p.  38.  6.  Dé- 
clarés innocens  par  d'autres,  ih.  Plusieurs 
Conciles  à  ce  sujet,  p.  2ta.  366.  427.  b. 
Leurs  cruautés  blâmées  même  par  les 
païens,  p.  422.  423.  6. 

Jtci.'j(iirs,  Grammairien  à  Buurdeaiu,  p. 
100.  6. 

Jule  l'Africain,  Auteur  d'une  Clironiquo 
attribuée  à  S.  Hippolytc,  p.  39(i.  400.  a. 

Julie,  mère  de  Caracalla,  son  caractère, 
p.  .■I."i3.  ;iHj.  o. 

S.  Julien,  ApOtredu  Maine,  p.  309.  «. 

Julien  r.\postat  viewt  gouverner  les  Gau- 
les, p.  7.  6.  Y  établit  la  paix  et  la  justice, 
ibid.  Choisit  Paris  pour  le  lieu  de  son  sé- 
jour, ibid.  S'y  applique  il  la  philosophie, 
ibid.  Y  appelle  beaucoup  do  Savans,  ibid. 
Y  mené  une  vie  dure,  ibid.  Y  est  déclaré 
Auguste  eu  ,'iGO,  p.  7.  8.  b.  Change  de 
cundiiit(!,  p.  8.  b.  Fait  défcn.se  d'étudier  en 
quelque  manière  que  ce  soit,  ibid.  Adresse 
quel(|iies  écrits  à  Saluste  Préfet  des  Gaules, 
p.  1J7.  /(.  En  fait  son  Confident,  p.  197. 
19S.  b.  Ch'.uile  Mamertin  prononce  son 
éh'go,  p.  2(X).  b.  Est  loué  par  .VIcinic,  p. 
1.17.  6.  Tue  de  ses  belles  réponses,  [i.  201. 
b.  Sa  mort,  p.  198.  6. 

JujiiUr  III  vénération  chez  les  Gauloi.-t , 
p.  8.  rt. 

JurisconsuUe»  qu'ont  produits  lus  Gaules, 
p.  219.  206.  287.  a. 

S.  Just ,  Evèque  de  Lyon  .  auparavant 
Diacre  de  l'Eglise  de  Vienne,  p.  254.  b. 
Son  ordination,  ibid.  Assiste  au  I  Concile  da 
Valence,  p.  209.  2:i5.  b.  Et  en  381  à  eelai 
d'.Vquilée,  p.  31.  255.  6.  En  relation  avec 
S.   Ambi'oise.    Vuiez  son    éloge,    p.    25J. 

'2r,i.  b. 

Just,  Evèque  d'I'igel,  écrit  sur  U>  Can- 
tique des  Cantiques,  p.  257.  6. 

.S.  Just ,  disciple  du  S.  Hilaire  de  Poitiers; 
on  no  sait  rien  d'assuré  de  son  histoire. 


TABLE  DES  MATIERES. 


491 


p.  219.  6.  Savoir  s'il  a  écrit  la  vie  de  S.  Hi-   i 
birn,  p.  2in.  220.  /).  \ 

Justn,  sœur  de  l'Empereur  Valenlinien  II.    i 
p.  261.  h. 

Justin,  E\èqiic  \rifln,  excommunié  par 
le  I  Concile  de  Paris,  p.  131.  b. 

Justin,  Al)revi.iii'Hr  de  Trojjue  Pompé*, 
p.  IIG.  117.  a.  Mal-à-propos  confondu  avec 
S.  Juslin  Marlyr,  p.  117.  o. 

Justine,  seconde  femme  de  Valenlinien  I, 
p.  23t.  b.  Dévouée  A  l'Arianismo,  p.  262.  6. 
Rogne  sous  le  nom  de  son  fds  ,  p. 261.  6. 
Persécute  S.  Ambroise,  p.  329.  330.  ."Wl.  5. 
Sa  mon,  p.  262.  b. 


I 


L.f.'<a,  seconde  femme  de  l'EmixTeur  (îni-   I 
lien,  p.  iXi.  b.  j 

L.VCT.45CE,   Oraleur  Clirélicn  rt  défenseur   | 
de  l'Kglisc.  ,  p.  6."».   b.  Son  pan,  ibid.  S"s   i 
éludes,  ibid.  Sa  conversion,  p.  (i(>.  b.  Vii'Ut   i 
dans  les  (iaules,  p.  67.  b.  Y  dirige  les  é'ai-    ; 
des  do  Crisiii! ,  fds   atné   de   Conslautio  le    ! 
lirand,  ibid.  y'oï',:  son  élojçe,  p.  «.I-CK.  b. 
Ses  écrits  suhsistans,  p.  (W-79.  ft.  ;  scsécrits   | 
perdus,  |i.  7il-H2.  h.;  SM  écrils  supiMisés, 
p.  82.  83.  6.:  son  style,  divers  traits  de  sa 
doctrine,  p.  83-86.  6.  Editions  de  ses  au-   i 
vr-ss,  p.  86-92.  b. 

Les  Langues;  leur  coimoissance  n'étoit 
point  néci'ssaire  auv  Minisires  de  l'Evauffile, 
p.  2;18.  u.  Ou  faiioit  anci<^nnemeiil  les  lec- 
tures, les  prières  publii|ues  cl  les  instruc- 
tions en  la  langue  lu  plusuomuiuiiedupnis, 
p.  238.  (I.  l,an).'ucs  à  l'usage  dus  Gaulois, 
p..'>8.  <i.  La  Celtique  ou  Gauloise,  p.  62.  c. 
Son  origine  et  son  antiquité,  p.  62-63.  a. 
Fort  répandue,  p.  65.  a.  Regtnlée  comme 
langue  matrice,  ibid.  La  Françoise,  p. 66.  n. 
La  Gréque  fort  cultivée  dans  l''S  Gaules , 
p.  47.  .'*-6l.  I.'t7.  138.  u.  Tonle  commune 
a  Arles  et  à  Lyon,  p.  228-230.  a.  Passe  des 
Marseillois  aux  Uonuiins,  p.  ,"18.  59.  a.  A 
l'usage  de  l'Eglise  Gallicane,  p.  30.">.  a. 
Comment  elle  j  est  lomb<!-e  ,  ibid.  Ensei- 
gnée puhliquenient  dans  les  Gaules  au  IV 
siècle,  p.  9.  12.  13.  21.  22.  6.  La  Latine 
vulgaire  dans  les  Gaules,  p.  .S8.  61.  62. 
i:«.231.  2.'^2  rt     22.  6. 


I.atro,  sarnommé  pour  son  adresse  le 
prodige  des  jeux,  p.  I^.  a. 

Porc.  Lniro,  sa  manière  bizarre  d'ensei- 
gner, p. 176.  a.  Ses  disciples  nommés  Audi- 
teurs par  dérision,  p. 177.  a. 

Lecteur,  règle  indispensable  poor  teat 
Lecteur,  p.  157.  6. 

Leonille,  Dame  de  Langres,  savante  dans 
la  médecine,  p.  294.  a. 

Ledmius,  Grammairien,  enseigne  dansles 
écoles  de  Bourdeaux,  p.  106.  b. 

Lerida  en  Espagne  tire  des  Gaules  des 
Professeurs  pour  les  belles  letres,  p.  232.  b. 

Lcsbie ,  Maîtresse  du  Poéto  Catulle, 
p. 111.  a. 

Li's  ladres  nécessaires  pour  parvenir  aux 
cli.argos  et  dignités,  p.66.  a.  Mofifs  pour  les 
rnltiver,  p.  66.  67.  a.  Contribuent  au  pro- 
grés de  la  Keligion,  p.  22.  b.  voi>z  :  Scien- 
ces. 

Lnicndie ,  Maîtresse  du  Poète  Varron, 
p.  109.110.  a. 

Libanins ,  célclire  Sophiste  grec,  en  liai- 
son avec  Siburo  et  Icairo,  p.  246.  b. 
Adresse  quelques  écrits  à  celui-ci,  dont  il  fait 
l'éloge,  p.  2.-W.  b. 

F.butius  Lii:eralis,  Philosophe;  sa  nais- 
.sanie,  p.  12!).  213.  o.  Ses  dignités ,  ibid. 
Fait  honneur  aux  letres  et  aux  armes , 
p.  1.30.  a.  Grand  ami  de  Seneque  le  fils  , 
p.  213.  a.  Celui-ci  le  choisit  pour  son  Me- 
CHiic.  ibii.  Voïez  son  élog!,  p.  213.  214.  a. 
Se  trouve  à  la  destruction  de  Jérusalem , 
p.  214.  fl. 

Salvius  LiBEiuLis ,  Orateur,  plaide  lon^- 
lems  à  Rome,  p.  251.  a.  Députe  de  l'Aqui- 
taine, ibid.  Voïez  son  éloge,  p.  251.  252. a. 

La  IJbèralitd ,  son  éloge  et  ses  règles  , 
p   213.  248.  n. 

Largus  Licinius  introduit  dans  le  barreau 
une  maxime  iieniicieusc  à  l'éloquence , 
p.  183.  o. 

Ligugé  prés  île  Poitiers,  premier  Monas- 
tère qu'on  vit  dans  les  Gaules,  p.  42.414.  b. 
Est  passé  aux  Jésuites  ,  p.  42.  fc. 

Limoges,  son  premier  l'-vèque,  p.  304.  n. 
Pourquoi  celte  Eglise  n'a  p.is  été  érigée  en 
Métropole,  p.  309.  a.  De  là  la  fui  se  répand 
ailleurs,  p.  308.  a. 

La  Literahire.  Voïez  :  Sciences. 

Livre,  origine  de  ce  mot,  p.  24.  a.  Soin 
qu'on  avoil  anciennement  d'en  avoir  de  ri- 
chement conditionnés,  p.  24.25.  a. 

La  Loi  ancienne,  son  impuissance,  p. 177 
Q  <I  M   ij 


m 


TABLE  DES  MATIERES. 


b.  Son  insuffisanco  «ans  la  grâce  du  fte- 
demteur,  p,  363.  b. 

S.  Lue,  Evangeliste,  commenté  par  S.  Am- 
broise,  p.  355.  .356.  6.  Premier  Commen- 
taire sur  cet  Evangeliste,  p.  356.  6.  Ca- 
ractère de  son  Evangile,  ibid. 

Lueain  critiqué  par  Pétrone ,  qui  tombe 
dans  les  mêmes  défauts,  p.  194.  195.  a. 

Lucifer ,  Evèqae  de  Cagllari,  exilé  aux 
extrémités  de  I  Empire  par  les  Ariens,  p.  â5. 
119.  135.  6.  Ses  maximes  outrées  et  leurs 
suites,  p.  34.  133.  6.  BUme  la  condescen- 
dance de  S.  Hilaire  de  Poitiers,  qui  répond 
à  ses  reproches,  p.  133.  l.'U.  6.  Se  sépare 
de  communion  des  Evèqnes  tombés  à  Ri- 
^^Di,  p.  133-  b. 

Ldciolus,  Professeur  d'éloquence  à  Bonr- 
deaux,  p.  113.  b. 

Luerne,  Roi  des  Auvergnats,  p.  27.  a. 

Lyeorit,  la  même  que  Cytherù,  p.  104. 
111.  a. 

Lydan,  confondu  avec  Lygdame,  soldat 
Marseillois,  p.  100.  a. 

Lydia,  Maîtresse  du  Poète  Valent  Caton , 
p.  90.  a. 

Lyon,  sa  fondation,  p.  51.  314.  a.  Son 
éloge,  p.  51 .  a.  Ses  Citoïens  admis  dans  le 
Sénat  de  Rome,  p.  137.  a.  On  y  établit  des 
jeux  literaires  en  grec  et  en  latin ,  p.  136. 
137.  a.  Ses  foires  solemnelles,  p.  293.  o. 
Son  embra.<;ement ,  p.  214.  a.  La  langue 
gréqae  y  est  commune,  p.  238-230.  o.  On 
y  voit  des  Libraires  an  II  siècle  de  l'Eglise, 
p.  231.  a.  La  première  ville  des  Gaules  qui 
devient  Chrétienne,  p.  33S.  a.  Cette  Eglise 
tire  son  origine  de  celles  d'Asie  et  de  Phrygie, 
p.  390.  a.  De-là  la  foi  se  répand  en  plusieurs 
lieux,  p.  235.  236.  a.  Ses  premiers  Martyrs, 
p.  288.  289.  o.  Ils  écrivent  de  leur  pri.son  à 
Rome  et  aux  Eglises  d'Asie  et  de  Phrygie, 
p.  29U.  a.  Leur  humilité  et  leur  charité, 
p.  292.  a.  En  quel  tems  ils  ont  souffert, 
p.  289.  a.  Les  Fidèles  de  Lyon  et  de  Vienne 
écrivent  l'Iiistoire  de  leur  martyre,  p.  289. 
290.  a.  Eloge  de  cette  hist.  p.  324.  388.  290- 
293.  a.  Conciles  tenus  à  Lyon,  p.  241.  295- 
298.  a.  Ses  écoles,  p. 177.  216.  243.  319./1. 
Grands  hommes  qui  en  sont  sortis,  p.  139. 
153.  166.  213.  231.  245.  250.  303.  326.  n. 
359.  6. 


M 


-mAcRiMJs ,   Grammairien ,  enseigne  d.ins 
|U  les  Ecoles  de  Bourdeanx,  p,  64.  6. 


La  Magie  tire  son  origine  de  la  médecine, 
p.  38.  a.  Condamnée  par  les  Empereurs 
Chrétiens,  p.  5.  6. 

Magut,  second  Roi  des  Gatiles;  ce  qu'on 
en  dit  est  fabuleux,  p.  2.  a. 

Mamertin,  Evéque  d'Eause ,  ou  de  Tou- 
louse, assiste  au  I  Concile  d'Arles,  p.  53.  6. 

Cl.  Mamertin  I,  Orateur,  Panégyriste  de 
Maximilien  Hercule,  p.  315.  317.  417.  a. 
Prend  soin  des  Ecoles  de  Trêves,  p.  417.  a. 
Ne  doit  pas  être  confondu  avec  le  suivant, 
p.  417.  418.  o.  Votez  son  éloge,  p. 
417.  418.  o.  Ecrits  qui  nous  restent  de 
lui,  p.  418.  419.  a.  Ses  écrits  perdus, 
p.  419.  a.  Editions  de  ses  écrits ,  p.  420. 
421.0. 

Cl.  Mahertin  II,  Orateur,  Panégyriste  de 
Julien  l'Apostat ,  p.  198.  b.  Fils  du  précè- 
dent, p.  199.  6.  Elevé  à  de  grands  honneurs, 
p.  199.  200.  6.  Votez  son  éloge,  p.  198. 
200.  6.  Ses  écrits ,  p.  200.  6. 

Le  Mant,  fondation  de  l'Eglise  de  cette 
ville,  p.  309.  a. 

Marc ,  Egyptien ,  hérétique  Valentinien . 
chef  de  la  secte  des  Marcosiens  ou  Gnosti- 
qnes,  p.  242.  a.  Répand  son  hérésie  le  long 
du  Rhône,  ibid.  Son  caractère,  p.  330.  a. 

Marc,  Egyptien,  hérétique  Priscillianiste, 
travaille  à  étendre  cette  hérésie,  p.  35.  b. 

S.  Marcel,  disciple  de  S.  Pothin,  Evé- 
que de  Lyon ,  porte  la  foi  dans  la  Sequa- 
noise,  p.  225.  a, 

Marcel  d'Ancyre  condamné  dans  le  con- 
ciliabule d'Arles,  p.  117  6. 

Marcel  de  Campanie ,  Légat  du  Pape,  as- 
siste au  conciliabule  d'Arles ,  p.  115.  b.  Y 
cède  aux  violences  des  Ariens,  p.  116.  6. 

Harcel,  Grammairien;  sa  naissance,  p.  217. 
6.  Ses  aventures,  ibid.  Enseigne  i  Nar> 
bone,  i&t'ci.  Votez  son  éloge,  p.  317.  b. 

Marcel,  qualifié  Médecin,  Officier  de  Then- 
dose  le  Grand,  p.  217.  b. 

Nonius  Mareellut,  Grammairien ,  différent 
du  Grammairien  précèdent,  p.  217.  b. 

S.  Mareellin,  premier  Evéque  d'Embrun, 
p.  23.  6.  Ses  disciples  fondent  l'Eglise  de 
Digne,  ibid. 

Sainte  Marcelline,  sœur  de  S.  Ambroiso, 
prend  soin  de  son  éducation,  p.  326.  6. 
Son  éloge,  p.  335.  381.  b.  Le  Saint  lui 
adresse  quelques  écrits  ,  p.  335.  b. 

Marcien  ,  Evéque  d'Arles,  engagé  dans 
l'hérésie  de  Novatien,  p.  310.  405.  a.  Jufé 
et  déposé  pour  cet  effet,  p.  311.  406.  o. 


TABLE  DES  MATIERES. 


493 


Uareien,  à  qni  S.  Ircnée  adresse  un  de 
ses  écrits,  p.  340.  a. 

Marcion,  hérésiarque,  ses  erreurs,  p.  245. 
S,  Irenéea  écrit  contre  lui,  p.  ."Ul.  o.  S. 
Pippolyte  l'a  fait  aussi  ,  p.  385.  a.  S.  Ser- 
vais de  Tongresenafaildemtime,p.245.  6. 

Les  Marcionilet;  S.  Ambroise  de  Milan 
réfute  quelques-unes  de  leur  erreurs,  p.  345. 
MU.  b. 

Les  Mareotiem,  ou  Gnostiques,  sortis 
des  ValenUniens,  p.  212.  a.  Quel  étoit  leur 
chef,  p.  242.  330.  o.  S.  Irenée  les  réfute, 
p.  242.  327.  330.  a. 

S.  Marin,  Evéque  d'Arles,  assiste  en  313 
ao  Concile  de  Rome,  p.  23.  6.  Pré.side  en 
314  à  celui  d'Arles,  p.  53.  6. 

Marmoutier,  célèbre  Abbaïe  ,  chef  d'or- 
dre, p.  43.  6.  Doit  son  oripae  à  S.  Martin 
de  Tours,  p.  42.  43.  414.  6.  Les  occupa- 
tions de  ses  premiers  Moines,  p.  43.  6.  Pé- 
pinière d'Evêques ,  p.  43.  415.  6.  Grands 
hommes  qui  s'y  sont  formés,  p.  43.  6. 

Mari  en  vénération  chez  les  Ganlois, 
p.  8.  a. 

Marteille,  l'année  de  sa  fondation,  p.  43. 
a.  Son  gouvernement,  ses  loix,  sa  discipline, 
p.  43-46.  1.34.  a.  La  rigueur  de  ses  loix, 
p.  2T6.  a.  Ses  Colonies ,  p.  46.  47.  a. 
Voïez  :  Marieillois.  Ses  Ecoles,  p.  42.  44. 
47.  52.  134.  178.  243.  a.  Les  Grecs  et  les 
Romains  y  viennent  étudier,  p.  45.  a.  Grands 
hommes  qui  en  sont  sortis,  p.  71.  78. 81.  86. 
99.  187.  208.210.  211.  276.  287.  o. 

Les  Marseilloii,  leur  origine,  p.  42.  43.  a. 
Leurs  mœurs,  leur  doctrine,  p.  36.  43-46. 
134.  a.  Lear  joie  aux  funérailles  de  leurs 
parensetamis.p.  36.  a.  Excelloient  dans  la 
marine ,  p.  463  a.  Ecrivoient  beaucoup , 
p.  17.  a.  Ont  donné  des  Auteurs  long-tems 
avant  J.-C.  ibid.  Lear  union  et  commerce 
avec  les  Romains,  p.  46.  58.  a.  Ceux-ci  en 
prennent  l'usage  de  la  langue  gréque ,  p.  58. 
58.  a. 

S.  Martial,  premier  Evèque  de  Limoges, 
p.  304.  406.  a.  Tems  de  sa  mission  dans 
les  Ganles,  p.  305.  306.  407.  a.  Voïez  son 
éloge,  p.  406.  409.  a.  Ses  disciples,  p.  308. 
a.  Deux  letres  qu'on  lui  suppose,  p.  407.  a. 
Preuves  de  leur  supposition,  p.  408-409.  a. 
Leurs  différentes  éditions,  p.  407. 408.  a. 

Martia  ,  ses  poésies  entre  les  mains  des 
Ganlois,  p.  136.  a.  Ce  qui  le  llale  extrê- 
mement ,  ibid. 

S.  Martiii,  Evéqoe  de  Tours  et  Confes- 
seur, p.  413  6.  Sa  naissance,  sa  famille, 
son  édacalion,  ibid.  Porte  les  armes ,  puis 
quitte  le  service,  ibid.  Se  relire  à  Poitiers 
pour  la  première  fois,  p.  140.  413.  b.  Re- 


tourne en  son  païs  où  il  souffre  pour  la  foi, 
p.  414.  6.  Revient  à  Poitiers,  ibid.  Pre- 
mier Instituteur  de  l'ordre  monastique  dans 
les  Gaules,  p.  42.  140.  6.  Elu  Evéque  de 
Tours,  p.  414.  6.  Sa  conduite  dans  l'épis- 
copat,  ibid.  Grand  destructeur  des  idi)les, 
p.  41.5.  6.  Condamne  les  Priscillianistes, 
p.  37.  6.  Sollicite  néanmoins  pour  leur  sau- 
ver la  vie,  p.  241 .  6.  Assiste  au  Concile  de 
Bourdeaux  contre  eiu,  t6.  Grand  adversaire 
des  Ithaciens,  p.  37.  415.  6.  Refuse  de  se 
trouver  an  Concile  de  Nismes,  p.  264.  b. 
Apprend  par  un  Ange  ce  qui  s'y  fait,  p.  264. 
265.  6.  Sa  mort,  p.  415.  6.  Foïez  son  éloge, 
p.  413-417.  b.  Son  éloquence ,  p.  415, 
416.  b.  Quelques-unes  de  ses  sentences, 
p.  416.  417.  b.  Sa  profession  de  foi, 
p.  417.  b. 

Les  Martyrs,  bonnenr  qn'on  lenr  doit, 
p.  42.  6.  Combattus  par  Vigilance,  p.  41. 
42.  6.   Votez  :  les  Sainti, 

Massds,  Evèque  de  Paris;  en  quel  tems  il 
a  vécu,  p.  49.  6.  S'il  a  écrit  des  actes  de 
S.  Denys  Martyr,  p.  50.  6. 

S.  Materne,  EvAque  de  Cologne,  se  trouva 
en  313  au  Concile  de  Rome,  p.  23.  b.  El  en 
314  à  celui  d'Arles,  p.  23.  S3.  b. 

Materne,  célèbre  Avocat  i  Rome,  Auteur 
de  quelques  tragédies,  p.  221.  a. 

S.  Matthieu,  son  caractère,  p.  356.  6. 
A  prêché  en  Perse,  p.  387.  6.  Son  Evan- 
gile commenté  par  S.  Hilaire  de  Poitiers, 
p.  148.  b.  C'est  le  plus  ancien  commentaire 
qu'on  ait  sur  cet  Evangile,  ibid. 

S.  Mature,  l'un  des  premiers  Martyrs  de 
Lyon,  p.  291.  a. 

Maxime  usurpe  l'Empire,  p.  237.  240.  6. 
Dethrdne  Gratien  et  lui  fait  Ater  la  vie, 
p.  237.  238.  b.  Convoque  un  Concile  i 
Bourdeaux,  p.  240.  b.  Veut  dethrâner  Va- 
lentinien  H,  p.  262.  6.  S.  Ambroise  lui  re- 
fuse sa  communion,  p.  330.  b.  Sa  mort, 
p.  332.  b. 

Maximien  Hercule  établit  sa  résidence 
ordinaire  dans  les  Gaules  ,  p.  315.  a.  Cl. 
Mamertin  prononce  deux  Panégyriques  à  sa 
louange,  p.  418-420.  a. 

S.  Maxi«in  ,  Evèque  de  Trêves,  sa  nais- 
sance, p.  110.  6. Son  ordination,  ibid.  Le 
premier  Evèque  de  son  tems  dans  les  Gau- 
les, ibid.  Son  zèle  pour  la  foi  et  ses  Défen- 
seurs, p.  110.  111.  b.  Consoles.  Athanase 
dans  son  exil ,  p.  24^  110.  b.  Prend  sa  dé- 
fense, p. 25.  111.  6.  Travaille  à  la  convoca- 
tion du  Concile  deSardique,  p.  111.  b.  Est 
excommunié  par  les  Eusebiens,  p.  25.  b. 
Sa  mort,  p.  112.  6.  Votez  son  éloge,  p.  110, 
tl2.  b.  Ses  écrits,  p.  112.  b. 


i9i 


TAni-E  DES  MATIERES. 


l'onip.  Al<uin;u>,  l)ean-fri";rc  <lii  Pofile 
Ausuue,  p.  389.  b. 

Meaux,  fondation  do  l'Ef^lise  du  cetlc  villii, 
p.  308.  a. 

La  Médecine,  forl  cultivée  par  les  (îaii- 
lois,  p.  1.13.  a.  Quelle  étoitcellis  des  Druides, 
p.  38-W.  a. 

Les  Medetinx  élevés  anciennement  aux 
premières  dijinili!?  de  l'Empire,  p.  i.  21  i. 
21").  6.  Ceux  que  les  Gaules  ont  produits, 
p.  133.  13i.  t»()8.  210.  211.  2.Ï0.  o.  18.  212. 
213.  b. 

Jircf/o.?c,  Evêqiie  Arien,  excommunié  dans 
le  I  Concile  do  Paris,  p.  131.  b. 

Mknf.c.rate,  Jurisconsulte  do  Marseille, 
passoit  pour  un  autni  Scievola,  p.  276.  2H7. 
a.  Sa  disgrâce,  son  rclaldisscment ,  p.  277. 
rt.  Vuïez  son  éloge,  p.  27G.  277.  a. 

Menestuék  ,  Grammairien  grec,  enseigne 
dans  les  Kculirs  du  Ituunluaux,  p.  (>5.  b. 

Menienet ,  nom  que'  portoient  anciuone- 
mcnt  les  Kcolcs  d'Anlun,  p.  IS."».  (i. 

Satyres  Uruiiipéti,  leur  origine,  explica- 
tion de  ce  tenu»,  p.  192.  o. 

Mercure  règne  dans  los  (Jaiil's,  p.  .*>.</. 
En  quel  tems,  p.  G.  a.  Il  civilise  les  pouplus  > 
de*  son  empire,  p.  (i.  9.  a.  Idée  qu'avoient 
de  lui  les  diversi's  nalions,  p.  G.  a.  Particu- 
lièrement h'inorû  du'  liaulcis ,  iliiA.  Ils  lui 
élèvent  une  statue  faincuse,   p.  133.  a. 

Les  Mères  obligées  de  droit  naturel  à 
n  lurrir  olles-mcmcs  leurs  enfans,  p.  13!). 
liO.  a.  lieaux  e.xumides  de  l'anliquilé  à  ce 
sujet,  p.  liO.  o. 

La  Melemiisiiiiise,  par  ipii  inv:  nice  et  où 
puisée,  p.  10.  37.  ». 

Métropole,  ce  droit  n'a  point  été  accordé 
A  l'ancienneté,  p.  309.  a.  Mais  au  rang  que 
tcnoient  les  villes  dans  le  civil,  ibid. 

Milan  bâti  par  les  Gaulitis  ,  p.  r>i.  n.  Il 
s'y  lient  un  Concile  en  3."k>,  où  la  vérité  est 
op|iriméu,  p.  2<).  lUi.  119.  b.  Unaulie  vers 
:t90.  contre  Jovinien,  p.  31.  b.  Un  lioisiénie 
coniro  les  Ithaciens ,  p.  38.  b.  Il  s'y  trouve 
quelques  Evoques  des  Gaules,  p.  31.  3j.  b. 

Les  Millénaires  ,  leurs  erreurs  ,  p.  ;il)l. 
3.33.  3ki.  .389.  «.  8.'>.  6.  Réfutées  p.ir  les 
IVre«,  p.  301.  31(i.  .355.  358.  o.  389.  6. 
S.  Ambroise  ne  les  a  point  embrassées, 
p.  360.  .371.  .375.  387-389.  />. 

Minerve  en  vénération  cbez  les  Gaulois, 
p.  8.  a.  Pour  quel  sujet ,   ibitl. 

Vlelh.  MiNERVius,  Professeur  d'éloquence 
:'i  !!c)urd«aux,  p.  11.3.  127.6. 

Tib.  "Vie.  MiNEKVii  s.  Orateur  et  Rliétcur 
|ir..fi.N>io  l'éloquence  à  Hourdeaux,  p.  126.  b. 


Puis  h  Conslanlinopic ,  ibid.  De-14  à  Rome. 

//<i(/.  r».;-;  son  éloge,   p.   12(i.    127.    b.  S- 
écrits,  p.  127.  b. 

L.i  Mtxericorde  de  Dieu  toujours  néces- 
saire, p.  177.  b.  Le  plus  grand  mérite  Je 
riiomnie,  ihUI. 

Les  J/o/ncs,  leurs  occupations  ordinaires, 
p.  13.  il.  b.  Cultivoii^nt  les  letros,  ibid.  On 
leur  esl  nili'vahle  des  bons  livres  de  l'anli- 
quilé,  p.  41.  6.  Voïez  :  (hdre  monastique. 

Manasleret,  Ecoles  pour  la  pielé  et  les 
lelres  ,  p.  12.  b.  Pépioienw  d'IIvèqui's  . 
p.  l.i.  /;. 

Le  Monde  ,  sa  durée  selon  le»  Ancieus, 
p.  7(i.  6.  Erreurs  de  Platou  &  ce  sujet 
réfutées,  p.  3.-i9.  ,360.  388.  a. 

Les  MuHianistex,  leurs  erreurs  réfutées 
par  (laius,  p.  .358.  a. 

Jul.  MoNT.VNus,  l'oëte,  se  distingue  à 
Ilowi!  par  SCS  poésies,  p.  132.  a.  l'oie;  sou 
éloge,  p.   161-163.  o. 

Vût.  MoNTAXi's,  Orateur,  paroit  à  Rome 
avec  éclat,  p.  132.  n.  Défauts  de  son  élo- 
quence, p.  139.  a.yiiïez  son  éloge,  p.  I"i8. 
I(».  II. 

La  Miirl  inévilablu  A.  tous  les  hommes, 
p.  106.  107.  n.  Est  un  bien  pour  les  Juslt'.s, 
p.  .3.58.  3.'>9.  b.  Crainte  de  la  mort  et  cause 
de  cette  crainte,  p.  :l.">9.  b.  Trois  .sortes  de 
mort,  p.  358.  .T19.  b. 

Les  Moris,  priere.s  pour  le  repos  de 
leurs  auies  d'ancien  usage,  p.  317.  .375. 
376.  b. 

La  Motelle,  rivière,  sa  description  et  son 
éloge,  p.  ,300.  301.  h. 

Ant.  Musa,  Médecin,  ordonnoit  les  bains 
d'eau  froide  en  hiver,  p.  212.  a. 

Mmee  A,  Alexandrie,  ce  que  c'étoit,  p. 
174.  n.  L'Empereur  Claude  y  en  établit  un 
noii\cau,  ibid. 

Les  Mttsex,  leur  uniou  avec  Hercule,  p. 
7.  n.  Voïez .Science». 

l^is  MysUrex,  S.  Hilaire  de  Poitiers  a 
écrit  un  traité  sur  les  Mystères,  p.  181.  h. 
S.  Ambroise  eu  a  fait  autant,  p.  361., 
:n*>.  b. 


N 


Anrbone,    la    plus    ancienne    ville    des 
Gaules,  p.  48.  <(.  Son  éloge,  tbid.  Colonie, 


TABLE  DES  MATlERE.S. 


m 


des  Komains,  ibid.  Son  premier  KvèqOe, 
p.  30i.  u.  Dc-là  la  foi  so  ré;jand  ailleurs, 
p.  309.  a.  Ses  Ecoles,  p.  243.  o.  U.  49. 
8.  127.  139.  217.  6.  Grands  hommes  qui 
en  su:it  sortis,  p.  49.  319.  '  411.  413.  u. 
La  Marbonoisc,  Province  la  mieux  dvili- 
sée  des  Gaules,  p.  47.  48.  a.  Passe  auK  Ko- 
mains, p.  48.  a.  De -là  les  sciences  se  répan- 
dent dans  le  reste  des  Gaules  et  ailleurs,  p. 
52-54.  a.  A  donné  du  grands  hommes  à  la 
republique  Romaine,  p.  48.  81.  84.  88. 
93.  97.  101.  108.  137.  a. 

Nazaire,  Orateur  et  Rhéteur,  p.  93.  b. 
Son  pais,  p.  93.  b.  Panégyriste  du  l'Em- 
pire, «6i<J.  Votez  son  éloge,  p.  92.  93.  b. 
Ses  écrits,  p.  93-95.  6. 

Nepotie.x,  Grammairien  et  Rhcicnr,  lU- 
si-i;,'ne  avec  éclat  à  Bounlcaux,  p.  217.  2IS. 
b.  Avoit  une  niem>'ire  prodigieuse,  p.  218. 
6.  Vuiez  son  éloge,  ib. 

fficaiie,  Evoque  do  Die,  le  seul  Prélil 
Gaulois  qui  assiste  au  Gomile  de  Nicée,  p. 
•H.  b.  En  porte  la  définition  dans  les 
Gaules,  ibid. 

Sice,  Colonie  des  Marscillois,  p.  4l>.  a. 

fiicrt,  Evè(|ue  de  Man-ncu,  assistu  au 
I  Concile  do  Valence,  p.  209.  6. 

Sitmt»,  capitale  des  Arecoiuiciens,  p. 
51.  a.  Etat  de  sa  Republique,  p.  51.52.  u. 
Grands  hommes  qu'elle  a  produits,  p.  130. 
181.  377.  II.  Ou  y  tient  un  Concile,  p.  SBi. 
365.  6. 

Noël,  hérésiarque,  ses  erreurs,  en  qael 
lems  il  vivoit,  p.  383.  381.  a. 

Les  Miw.Hicns,  leur  liéresie  et  ses  suite.s, 
p.  405.  406.  a.  G2.  6.  Pénétre  dans  les 
Gaules,  p.  310.  311.  a.  (il.  6.  Y  est  com- 
attué,  ibid.  Trouble  l'Eglise  d'Arles  en 
particulier,  p.  405.  MKi.  a.  Réfutée  par  S. 
Reticc  d'Anlun,  p.  Cl.  02.  6.  El  par  S. 
Ambroise,  p.  351.  353.  387.  b. 

M.  Aur.  NuMERUriis,  Empereur;  sou 
païs,  p.  413.  o.  Ses  grandes  qualités,  321. 
413.  a.  Sou  talent  pour  la  poeie  et  |M>ur 
l'éloquence,  p.  414.  415.  o.  Voïtz  son 
éloge,  p.  413.  415.  «.  Ses  écrits,  p.  41 1.' 
415.  a. 

Olymp.  Numerianm,  célèbre  Puete  .\fri- 
cairi,  p.  115.   u. 


0 


Ogmitu,  nom  que  les  Gaulois  doonoient 
à  leur  Uercuie,  p.  7.  a. 


I  (Mbie,  Colonie  des  Marseillois,  p.  46.  a. 
S.  Optai,  Evèque   do   Mileve.   réfute  les 

!    écrits  de  Parmenieu,  p.  351.  353.  b. 

I  Oiulcui,  sa  définition,  p.  235.  a.  Qua- 
lités  requises  pour  un  Orateur,  p.  184. 
235.  o.  Manière  d«  lo  former,  p.  141.  143. 

I  18'i.  u.  Ses  avantages,  p.  144.  a.  Fait  plus 
]iaroitre  son  esprit  en  traitant  de  petits  su- 
Jets,  <&.  Orateurs  qu'ont  produits  les  Gau- 

i    les,  p.  92.   131.  145.  147.  149.   158.  175. 

I    181.  214.  21ti.  218.  317.  "  343.  349.  251. 

1    2&5.  282.  414.  «17.  o.  17.  19.  44.  50.  92. 

!    97.  102.    104.    119.  130.    137.    130.  198. 

I  200.  333.  2.57.  2.58.  306.  307-319.  321. 
321.  335.  419.  421.   6. 

L'Ordre  monastique,  son  origine  dans  les 
Gaules,  p.    42.    6.    Ses   progrès,   p.    43. 
.Vvantageux  pour    les   letres,    p.   43.    44. 
i   b.  Blùmépar  Vigilance,  p.  41.  b. 

I  ORiB.tsc,  célèbre  Médecin,  vient  à  Paris, 
)>.  7.  6.  V  publie  un  abrégé  de  Galieu, 
ibid. 

Oriental,  Evèque  de  Boardeaux,  assiste 
j    en  314  au  Concile  d'.Vrles,  p.  53.  b. 

Oriijrne  s'est  formé  sur  S.  Uippolytu 
pour  i-xpliquer  l'Ecriture,  p.  304.  364.  a. 
S.  Hilaire  de  Poitiers  s'est  beaucoup  servi 
de  ses  ouvrages  pour  composer  les  siens, 
p.  178.  179.  181.  183.  b.  S.  Ambroise 
en  a  fait  de  même,  p.  367.  387.  406.  6. 

Orléans,  ses  Ecoles,  p.  244.  a. 

Oroie,  Evèqne  de  Marseille,  assiste  un 
314  au  Concile  d'Arles,  p.  53.  b. 

Oscits,  ou  OscDS,  Orateur;  son  éloquence 
hérissée  de  pointes  malignes,  p.  132.  a. 
Votez  son  éloge,  p.  147.  148.  a. 

Ositt»,  u\ilé  pour  la  foi,  p.  35.  6.  Préside 
au  Concile  de  Sardique,  p.  2(;9.  b.  Sa 
chiite,  et  ce  que  les  Evèques  Gaulois  eo 
pensoient,  p.  38.  6. 

Ociili-,  défauts  qu'on  hd  reprocboil,  p. 
159.  a. 


P.\CATUS,  Rhétenr,  enseigne  &  Marseille, 
p.  119.  o.  Voiez  son  éloge,  p.  149.  150., 
u. 

Min.  Pacalut,  Grammairien  d'Alexan- 
drie, p.  150.  a. 


km 


TABLE  DES  MATIERES. 


Pœaniut  tradait  en  grec  l'histoire  d'Eu- 
trope,  p.  230.  331.  6. 

Paix,  en  quoi  consiste  one  paix  véritable, 
p.  173.  174.  6. 

Pallade,  Evéque  Arien  en  Illyrie,  S. 
Ambroise  écrit  contre  lai,  p.  346.  378.  b. 

Pallade,  Rhéteur,  sa  famille,  p.  424.  6. 
Va  étudier  à  Rome,  ibid.  Y  brille  par  son 
éloquence,  ibid.  Y  enseigne  la  rhétorique, 
p.  425.  b.  Elevé  à  de  grands  honneurs, 
ibid.  Votez  son  éloge,  p.  424.  425.  b. 
Ses  pièces  d'éloquence,  p.  425.  b. 

Panegyriitei  de  l'empire,  les  Gaules  en 
fournissent  plus  que  nul  autre  païs,  p.  417. 
a.  Ceux  qu'elles  ont  donnés,  p.  417.  a. 
44.  50.    93.  103.   137.  198.  306.  419.  6. 

Papiat,  disciple  des  Apdtres,  Maître  de 
S.  Irenée,  p.  334.  325.  a. 

Le  Papier,  son  origine  et  son  usage,  p. 
24.  a. 

Papinien,  le  pins  célèbre  Jurisconsulte 
de  son  tems,  mis  à  mort  par  Caracalla,  p. 
354.  a. 

S.  Papoul,  premier  Evéque  de  la  ville 
de  même  nom,  p.  307.  a. 

La  Pâque  doit  se  célébrer  par-tont  le 
même  jour,  p.  54.  6.  Diversités  de  prati- 
ques à  ce  sujet,  p.  340.  341.  296-298.  a: 
Troubles  qu'elle  causa  dans  les  Eglises, 
>6><1. 

Le  Paradis  terrestre,  S.  Ambreise  a 
écrit  sur  ce  sujet,  p.  336.  337.  6. 

Le  Parchemin,  son  origine  et  son  usage, 
p.  33.  34.  a. 

Parie,  son  premier  évêque,  p.  304.  a. 
Pourquoi  ne  fut  pas  érigé  dès  lors  en  Métro- 
pole? p.  309.  a.  De-U  la  foi  se  répand 
ailleurs,  p.  308.  a.  Julien  fait  de  Paris  an 
théâtre  de  Sa  vans,  p.  7.  ft.  Y  est  procla- 
mé Empereur,  p.  7.  8.  6.  Cette  ville  com- 
mence alors  à  devenir  célèbre,  p.  7.  b.  Il  s'y 
tient  un  Concile  en  361,  p.  33.  129-131.  b. 
Les  Evéques  Gaulois  tombés  à  Rimini  y 
reconnoissent  la  vérité,  »6.  On  y  répond 
aux  letres  des  Evéques  OrienUax,  p.  130. 
131.  6.  On  y  excommunie  divers  Ëvéqaes 
Ariens,  ibid. 

PARHEifiEN,  Evéque  Donatiste  de  Car- 
tbage,  p.  350.  b.  Gaulois  de  nation,  ibid. 
Son  ordination,  ibid.  Avoit  da  savoir  et  de 
l'éloquence,  ibid.  Sa  mort,  p.  251.  b. 
Voiez  son  éloge,  p.  250.  351.  6.  Ses 
écrits,  p.  231-354.  6.  Réfutés  par  S.  Op- 
tât et  S.  Augustin,  ibid. 

Pauerat  a  fait  l'éloge  de  l'avenglement, 
p.  375.  a. 


Patteurt  avares  et  intéressés,  leur  por- 
trait, p.  178.  b. 

At.  Patera,  Professeur  d'éloquence  à 
Bourdeaux,  p.  124.  Son  origine,  ibid. 
Passe  ik  Rome,  où  il  enseigne,  p.  135.  6. 
Foi'ez  son  éloge,  p.  124.  126.  b. 

Paterne,  Evéque  de  Perigueux,  fameux 
Arien,  p.  38.  6.  Excommunié  dans  le 
I  Concile  de  Paris,  p.  130.  b. 

Patrice,  fameux  Magicien,  p.  313.  6. 

S.  Paul  de  Constantinople,  exilé  à  Trê- 
ves, p.  111.  6.  Y  est  traité  avec  honneur 
par  S.  Maximin,  ibid. 

S.  Paul,  premier  Evéqae  de  Narbone, 
p.  304.  a.  Tems  de  sa  mission  dans  les 
Gaules,  p.  305.  306.  a. 

Paul,  Evêque  de  Paris,  se  trouve  au 
I  Concile  tenu  en  cetteville,  p.  133.  6.  Le 
même  que  l'Evêque  Paul  dont  parle  Gen- 
nade.  Votez  son  éloge,  p.  132.134.  6.  Re- 
médie au  scandale  que  causoit  Lucifer  de 
Cagliari,  p.  34.  b.  Ecrit  un  traité  de  la 
pénitence,  p.  133-134.  b. 

S.  Paul,  Evêque  de  Trois-Ch&teanx,  asi» 
siste  an  I  Concile  de  Valence,  p.  209.  6. 

Paul,  Diacre  d'Aqnilée,  retouche  et  re- 
fond l'histoire  d'Eulrope,  p.  235.  326.  b. 

S.  Paulin,  depuis  Evéque  de  Noie,  disci- 
ple da  Poëte  Ausone,  p.  383.  289.  b. 
Poussé  par  son  m^tre  aux  premiers  hon- 
neurs, p.  283.  b.  Leur  liaison,  p.  286.  287. 
306..  6.  Sa  retraite,  p.  286.  287.  302.  b. 
Instruit  par  S.  Ambroise,  p.  336.  b.  Son 
éloge  et  son  apologie,  p.  383.  6. 

S.  Paclw,  Evéque  de  Trêves,  sa  nais- 
sance, p.  131.  6.  Son  ordination,  ib.  Se 
trouve  au   faux  Concile  d'Arles,  p.  117. 

122.  b.  Y  fait  tête  à  l'Empereur,  ib.  Prend 
la  défense  de  S.  Athanase,  p.  23.  117.  123. 
b.  Son  courage  et  sa  fermeté,  p.  25.  117. 

123.  133.  6.  Donne  à  l'Occident  l'exemple 
d'une  générosité  épiscopale,  ibid.  Relégué 
en  Phrygie,  p.  117.  123.  b.  Où  il  meurt, 
p.  123.  6.  Votez  son  éloge,  p.  131. 133.  b. 
Ses  écriu,  p.  124.  6. 

Paulin,  Secrétaire  de  S.  Ambroise,  Au» 
teur  de  sa  vie,  p.  336.  b.  , 

Paulin,  Gouverneur  de  la  Tarragonoise, 
p.  121.  389.  b. 

Val.  Padlincs,  Sénateur,  Intendant  de  la 
Narbonoise,  p.  245.  a.  Sa  naissance,  p. 
129.  a.  Ses  talens,  ibid.  Fait  honneur  aux 
letres  et  aux  armes,  p.  130.  a.  Son  amour 
pour  la  justice,  p.  345.  a.  Se  lie  avec  le 
Poëte  Martial  et  Pline  le  Jeune,  p.  246.  a. 
Fait  Consul  en  101,  ib.  Voiez  son  éloge, 
p.  245-247.  a. 


TABLE  DES  MATIERES. 


497 


Axias  Pauli's,  Poêle  el  Hliéleur,  son 
païs,  p.  318.  6.  Hante  le  barreau,  ib.  Puis 
enseigne  la  rhétorique,  ib.  Excelle  ilans 
l'éloquence  et  la  poi'sie,  p.  319.  b.  S'ap- 
plique sur  tout  au  genre  dramatique,  ibid. 
Votez  son  él  -.ge,  p.  318-320.  6.  Ses  éi-rils 
perdus,  p.  319.  .320.  6. 

Cl.  T'a  II /il»,  Historien  peu  connu,  peut- 
être  Gaulois,  p.  132.  a. 

Le  Prehé  originel  prouvé  par  S.  Irent'-e, 
p.  .3M.  a.  Par  S.  Relice  d'Aulun,  p.  61 .  b. 
Ses  suites,  p.  182.   189.  196.  6. 

Ijî  Pfché  actuel,  sa  cause,  p.  379.  b.  Ses 
suites  radieuses,  p.  351.  6.  Pouvoir  de  re- 
mettre les  pecliés  accordé  à  l'Eglise,  p.  61. 

352.  6.  Confession  de  ses  pechi^s  établie 
comme  nécessaire,  p.  .337.  352.  n.  Des  pé- 
chés secrets  on  usage  au  II  siècle  de  l'E- 
glise, p.  343.  a. 

La  Pénitence,  où  elle  se  trouve,  p.  7.'). 
6.  Sans  nécessité,  p.  77.  352.  386.  6.  Son 
éloge,  p.  77.  a.  Ses  conditions,  p.  3.'>3.  b. 
Suppose  la  douleur  de  ses  péchés,  mnis  ex- 
clud  le  désespoir,  p.  132.  6.  Beaux  exem- 
ples, p.  3.'>2.  3)3.  6.  Défauts  à  y  éviter,  p. 

353.  354.  6.  La  vraie  pénitence  estlrès-raro, 
p.  .3'>4.  b.  Deuxsortes  de  pénitence,  p.  353.  ''. 
La  fcnitencc  quelquefois  prolongée  jusqu'à 
la  mort,  343.  a.  Pseaumes  sur  la  pénitence, 
.si  ce  titre  est  ancien,  p.  375.  a.  Traités  sur 
Ja  Pénitence,  p.  132.  351-r.4.  ,386.  6. 

Le  PenlaUuque,  Divers  Auteurs  ont  fait 

des  questions  sur  ces  livres,  p.  18i.  6. 

S.  Peregrin,  premier  Evêque  d'Auxerre, 
p.  309.  a. 

Les  Perrt  et  les  mères,  leurs  devoirs  en- 
vers leurs  enfans,  p.  363.  6.  Prérogative 
de  leur  bénédiction  pour  ces  mêmes  en- 
fans,  ibid. 

La  Perfection  Chrétienne,  en  quoi  elle 
consiste,  p.  358.  360.  6. 

Perigueux,  fondation  de  l'Eglise  de  cette 
ville,  p.  308.  a. 

Perticut,  favori  de  l'Empereur  Claude, 
p.  128.  a. 

Petosirit,  fameux  Mathématicien,  qui  se 
regloit  sur  le  cours  des  astres  pour  le  boire 
et  le  manger,  p.  211  .a. 

PetricM,  qui  a  écrit  sur  la  médecine, 
mal  confondu  avec  Pétrone,  p.  196.  a. 

Pétrone,  Poêle,  sa  naissance,  sa  famille, 
son  éducation,  p.  187.  a.  Fait  les  délices 
de  la  Conr  de  Néron,  p.  133.  188.  a.  Votez 
son  éloge,  p.  186-191.  a.  Ses  écrits  perdus, 
p.  191.  192.  a.  Sa  satyre,  p.  192-195.  a. 
Sa  manière  d'écrire,  p.  196-199.  o.  Ses 
fragmens,  p.  199-202.  a.  Editions  de  sa 
satyre,  p.  203-208.  a.  Traductions  fran- 
(oises,  p  .206.  208.  a. 

Tome  I.  Part.  II. 


Dom  Pezron,  son  opinion  snr  la  langue 
des  anciens  Celtes,  p.  64.  65.  a. 

S.  Phebade,  Evêque  d'Agen,  un  des  plus 
illustres  Prélats  de  l'Eglise  Gallicane,  p. 
266.  b.  Le  père  des  Conciles,  p.  2  8.  269. 
b.  Réfute  la  seconde  formule  de  Sirmich, 
p.  26.  266.  269-272.  6.  Assiste  au  Concile 
de  Himini,  p.  .30.  266  b.  S'y  signale  p.  31. 
.32.  967.  b.  Pnis  tombe,  p.  32.  367.  6.  Se 
trouve  au  I  Concile  de  Paris,  et  s'y  re- 
levé de  sa  chdie,  p.  130.  268.  b.  Ecrit 
contre  le  Concile  de  Rimini,  p.  268.  276. 
277.  o.  Et  en  faveur  du  Concile  de  Nicée, 
i6.  Préside  au  I  Concile  de  Valence,  pag. 
209.  268.  6.  Assiste  ou  même  préside  :l 
celui  de  Saragoce,  p.  .35.  268.  269.  6.  En 
liaison  avec  S.  Ambroise,  p.  37.  269.  6.  Sa 
mort,  p.  269.  6.  Votez  son  éloge,  p.  266- 
269.  b.  Ses  écrits,  p.  969  281.  b.  Leurs 
éditions,  p.  272.  973.  279.  fc. 

Philon,  Juif,  grand  homme  d'érudition. 
S.  Ambroise  a  beaucoup  puisé  dans  ses 
écrits,  p.  406.  b. 

Philoiophes  qu'ont  produits  les  Gaules, 
p.  27-35.  71.  80.  96.  99.  163.  213.  265.  a. 
58.  201.  2.58.  6. 

Les  Phocéeni,  sortis  de  Grèce,  s'établis- 
sent dans  les  Gaules,  et  eu  renouvellent  la 
face,  p.  16.  42.  &.  47.  a.  Y  b&tissent 
Marseille,  p.  43.  a.  Voïez  :  Grecs. 

Phoeiitiiis,  Grammairien,  enseigne  dans 
les  Ecoles  de  Bonrdeaux,  p.  6t.  b. 

Phronéme,  Préfet  de  Constantinople, 
loué  pour  sa  science,  p.  19.  b.  Sa  disgrâce, 
p.  19.  20.  b. 

S.  Pierre  va  prêcher  k  Rome,  en  quel 
tems,  p.  169.  a.  71.  b.  Son  genre  da 
mort,  p.  71.  b. 

Platon  est  le  premier  qui  a  écrit  par  dia- 
logue, p.  271.  a.  Le  traité  d'Alcyon  n'est 
point  de  lui,  ib.  Tems  de  sa  mort.  ib.  En 
quoi  consistoit  sa  succession,  p.  105.  b. 
Favorin  écrit  en  sa  faveur,  p.  272.  274.  o. 
Ses  erreurs  sur  le  monde  refutées,  p.  3.59. 
360.  388.  a. 

Plautille,  femme  de  Caracàlla,  sa  riche 
dot,  p.  25*.  a. 

Pline  le  Jenne,  ses  écrits  entre  les  mains 
des  Gaulois,  p.  232.  a.  S'applaudit  de 
l'estime  qu'ils  en  font,  ibid. 

L.  Plotius,  Rhéteur,  le  premier  qui  en- 
seigne la  rhétorique  à  Rome,  p.  53.  83. 
84.  a.  Ses  écrits,  p.  85.  a.  Votez  .son 
éloge,  p.  83.  85.  a. 

Plntarque  adresse  quelques-uns  de  ses 

R  r  r 


(M 


TABLE  DES  MATIERES. 


ouvrages  à  FaTorin,  p.  2C7.  n.  Dispui<' 
avnc  Ini  A  qni  en  composcroil  <lavaiilaji«, 
p.  270.  a.  Favorinécril  conirn  lui,  p.  273. 
273.  a. 

Pluton,  honoré  des  Gaaiois,  p.  8.  n. 
Qni  croient  en  tirer  lenr  origine,  p.  .17.  /i. 

La  Poâfie.  c.sl  la  prcmicre  srionre  qn'on 
a  rnllivi'e,  p.  25.  a.  Quelle  ('lolt  relie  (les 
Banics,  p.  26.  a.  Cullivén  parlirullere- 
menl  des  Gaulois  au  IV  siècle,  p.  2t.  h. 
Avoil  alors  perdu  ses  premières  beanlrs, 
ihid. 

Les  Poêles  sont  les  premiers  saT.in.<! 
qu'aient  eu  les  Gaulois,  p.  2.1.  «.  Quelque- 
fois adulateurs  à  {,'»«?.  P-  27.  a.  Poètes 
qu'ont  produits  les  Gaules,  p.  2.'. -28.  88. 
101.  108.  152.  160.  22.'i.  2j2.  411.  n.  17. 
18.  9.1.  103.  l.TC.  204.  23.'?.  2*7.  2*9. 
259.  281.  318.  323.  418.  419.  I>. 

l'ollierx,  fondation  île  retio  Eglise,  p. 
.•JOS.  o.  Ses  Ecoles,  p.  244.  a.  17.  206. 
207.  b.  Grand.s  hommes  qui  en  sont  sortis. 
(1.  iV3.  II. 

l'oleme,  disciple  de  S.  Ambroise,  p. 
.13(>.  h. 

Polenion,  fameux  Sopliisle,  grand  .ad- 
versaire de  Favorin,  p.  2t>7.  n. 

S.  Pohjcarpe,  disciple  des  A|)<ilres,  Mai- 
Ire  de  S.  Irenéo,  p.  ,{24.  338.  a.  S'il  l'a 
envolé  dans  les  Gaules,  p.  326.  a.  Son 
7.élo  contre  l'erreur,  p.  .3.'J8.  n.  Fait  un 
voïage  .1  Rome  au  sujet  du  jour  de  la  P;i- 
que,  p.  241.  2'n.  298.  n. 

Trogue  Pompke,  Historien,  sa  iwtrie,  p. 
114.  a.  Sa  famille,  ili.  Ses  talen»,  p.  115. 
II.  Bn  quel  tems  il  a  vécu,  i7).  ('me:  son 
éloge,  p.  114-116.  a.  Editions  do  son  his- 
toire p.  11912*.  n.  Traductions  p.  J24. 
o. 

Pulame,  Evéque  do  Lisbonc,  Autour  de 
la  .seconde  formule  de  Sirmich,  p.  27. 
2(16.  6.  Une  de  ses  lettres  pleines  d'erreurs 
court  l'Orient  et  l'Occident,  p.  270.  6.  Ses 
niscs,  iUid. 

S.  Pothin,  disciple  des  Apôtres,  p.  22."î. 
23*.  289.  «.  Premier  Evèqno  de  Lyon, 
p;i(,'.  22:;.  289.  a.  Son  martyre,  p.  2«!l. 
II.  Ses  disciples,  p.  225.    a. 

La  Princ,  qualité  qu'elle  doit  avoir,  p. 
,338.  h.  Prières  pour  les  Morts,  voir/ 
Morh. 

.H.  Ant.  PRmts,  surnommé  Bec  ilo  coq. 
Poi'le,  fjùl  himneur  aux  lettres  et  aux  ar- 
mes, p.  1,39.  223.  22*.  a.  Se»  bonnes  et 
mauvaises  qualités,  vuiez  son  élojrc,  p. 
216".  217'.  22.3.   rt. 

l-es  Prhcillinni'lf,   qttelques   Iraiti   de 


lenr  portrait,  p.  422.  /).  Leur  secte  com- 
mence en  Espagne,  p.  2iO.  b.  Ses  pro- 
grès, p.  .35.  36.  b.  En  quoi  elle  lon- 
siïtoit,  p.  36.  b.  Leurs  menées,  p.  .321. 
6.  Jugés  dans  le  Concile  do  Bourdcanx, 
dont  ils  ap|)ellent  i  Maxime,  p.  3(i.  2*1 . 
b.  Condamnés  ;V  Trêves  à  perdre  la  vio,  p. 
.Ki.  .37.  241.  b. 

Priicillien,  chef  des  Prlscillianistes,  p. 
.35.  6.  Condamné  A  Sarajroce,  ib.  Se  réfu- 
gie dans  les  Gaules,  ibiil.  Cliassé  de  Bour- 
<le.aHX  et  d'Italie,  p.  36.  6.  Condamné 
dans  le  Concile  do  Bourdcaux,  p.  241.  b. 
Apiielle  \  Mixime,  p.  36.  241.  6.  Y  trouve 
sa  perte,  p.  3(>.  ,37.  241.  6. 

Pritane,  Evèqno  ilo  Trêves,  volez  :  Brit- 
ton. 

S.  Prient,  premier  Évêqno  de  Galialcs, 
aujourd'hui  Mande,  p.  .308,  a. 

Probe,  Préfet  de  Prétoire,  p,  305,  .321,  b. 
Le  plus  illustre  Officier  de  l'Empire  en  son 
tems,  p.  3Î7,  b.  Ausone  avoit  promis  d'é- 
crire sa  vie,  p.  .308.  /). 

C.  Val.  PftociLLDS,  favori  et  Ambassadeur 
de  Cés.ar,  p.  97.  a.  l'oïci  son  éloge,  p.  97- 
98.  n.  Peut-être  le  même  que  lo  suivant. 

Procillii»,  le  plus  excellent  Grammairien 
do  son  siwlo,  p.  98.  n. 

Procle,  ou  Prociile,  .avec  qui  le  Prêtre 
Caïus  eut  une  célèbre  conférence,  p.  .357- 
358.», 

S.  Priifiili',  Evèque  île  Marseille,  assiste 
en  .381  au  Concile  d'Aquilée,  p.  3*.  6.  Son 
affaire  agitée  an  Concile  île  Turin,  p.  42t>. 
*27  ').  Y  est  déclaré  Primat,  ibiil. 

Pno<;ii.K,  Poète,  écrivoit  avec  grâce  et  po- 
litesse, p.  2*9.  b.  Voies  .son  éloge,  ibiri. 

ProciUe,  Gouvcmcnr  de  la  Scqaanoisc 
en  29.5,  p.  2*9.  b. 

Prncnle,  Proconsul  d'Afrique  en  340, 
p.  2*9.  A. 


Proenle,  Comte  d'Orient  vers  384,  p.  2,58. 
Proeiih,  Préfet  de  Rome  en  531,  p.  249.. 


h. 


Procuh,  rdlo  de  l'Ordenr  ILIpliide,  se 
duile  par  Priscillien,  p.  .Ki,  4.  Sun  sort, 
p.  205.  h. 

Proërett,  Sophiste  d'.Vlhencs,  vient  dans 
les  G.aules,  p.  (i.  b. 

Prnfesseursdcfi  belles  Letres,  .science  <-l  an- 
tres qualités  qu'ils  dévoient  avoir,  p.  4.  8. 
12.13.  A.  Leurs  ap[H)inlemcnsas.signo.s  surl'é- 


TABLE  DES  MATIERES. 


«M 


I>ar(;iie  du  Prince,  p.  9.  14.  b.  Leurs  privi- 
.cgus,  p.  4.  h. 

S.  /'(«IHH,  ilisciplc  fie  S.  Ambroiso,  de- 
puis Evùque  (le  Cùmc,  p.  33G.  b. 

Les /'scHH/Hcj,  leur  rUtge,  p.  3tt().  6.  Ne 
soiil  pas  lous  de  David,  p.  175,  176.  b. 
Tout  l'i!  i|u'ils  coulienneiil  regarde  la  nou- 
vclli'  alliance,  p.  176.  6.  Coniiiieiilés  pnr 
S.  llilaire  de  l'oiliers,  p.  174-178.  b.  Et  par 
S.  Ambroise,  p.  385-387.  b. 

Num.  l'udf.HliUa,  tncnr  do  la  femme  du 
Poêle  Ausone,  p.  iS).  b. 

Lo  Puij  en  Vêlai,  fuiidalion  de  c.;lle 
Eplise,  p.  308.  a. 

/'i/rronieiis,  leur  secle,  p.  27i-273.  «. 

l'illhayore,  instruit  par  les  Gauluis,  p.  1(1. 
II.  U'uù  d  ferme  sun  s>sluuie  sur  la  uié- 
einpsycosi',  p.  10-37.  u. 

l'vTiiEAS,  Pliilosophe,  Astronome  et  Oéo- 
^lapli",  .son  pays,  p.  71.  a.  En  quel  lems  il 
a  IleHii,  l'AiiJ.  Ses  j(rands  voiaîi'i's,  foïes  son 
éloge,  p.  71-74.  «.  Ses  écrits  surs  l'astrono- 
mie, p.  38-78.  (I. 

l'ijUieai,  Urateui'  d  AlLeues,  p.  78.  « 


U 

LA  Questure,  prérogatives  de  cette  charge, 
p.  484.  6. 

QuinliUif,  Maîtresse  du  Poète  Calvus, 
p.  111.  a. 

Clud.  Ul'iRiXALis,  Rhéteur,  enseigne  à 
Hume  l'éloqueuee  avec  suicès,  p.  133.  a. 
Votez  son  éloge,  p.  178. 179.  a. 


»  A  Itebaplizatiun  des  hérétiques  con- 
Lidamnée  par  le  Concile  d'Arles,  p.  53.  6. 

S.  Hcgule,  Evèque  d'Arles  et  de  Seulis, 
p,  306.  308.  a. 

Reimt,  assemblée  des  Gaules  qui  s'>  tint 
eu  70,  p.  131.  o.  On  y  cultive  les  belles 
lettres,  p.  136.  a. 

La  ndiijiuu  Chrétienne,  c'est  cUvi  elle 
que  su  trouve  la  véritable  justice,  p.  75.  h. 
Et  la  vraie  Sitgessc,  p.  74.  6.  Ce  qu'elle 
exige  de  l'homme,  p.  75-76.  b.  Tire  de  grands 
avantages  de  la  connoissanco  des  lettres, 
p.  437-238.  M.   44  6.  En  quel  lems  établie 


dans  les  Gaules,  p.  143.  146.  444.  225.  a. 
D'où  elle  y  passa,  p.  445.  o.  Elle  s'y  étend 
et  s'y  affermit,  p.  24,j.  447.  300-310.  «.  3. 
44-24.  h.  Manière  dont  elle  s'est  répandue 
et  affermie,  p.  426.  300-310.  u. 

FI.  Veg.  //«nutui,  fait  un  traité  sur  la 
guerre,  p.  263.  6.  Le  dédie  à  Valcnlinien  U, 
ibiil. 

La  Jtcxurirction  dos  corps  établie,  {i. 
381.  o.  Deux  sortes  de  Résurrection,  p. 
387-389.  b.  Traité  sur  ce  sujet,  p.  347.  6. 

S.  ItETiCE,  Evèque  d'Aulun,  en  quel  tcms 
il  lleurissuil,  p.  59.  b.  Prélat  de  très-grande 
autorité,  (6.  Assiste  au  Concile  de  Rome 
contrôles  Dunatistes,  p.  23.  59.  60.  6.  Au 
1.  d'Arles,  p.  63.  59.  b.  Ecrit  contre  les 
Novatiens,  p.  .'ill.  n.  61.  b.  Sur  le  Can- 
tique des  Cantiques,  p.  311.  u.  62.  b. 
l'iiiV:  son  éloge,  p.  59.  60.  b.  Ses  écrits, 
p.  61-63.  0.  Jugement  qnu  les  anciens  en 
ont  porté,  p.  311.  u.  61.  62.  b.  Divers  traits 
de  son  histoire,  p.  9."j.  96.  b, 

Ithi'liurs,  défauts  qu'ils  apportoienl  à 
fiirmer  eurs  Elevés,  p.  142.  113.  u.  Illié 
leurs  qu'ont  produits  les  Gaules,  p.  83.  S:>. 
133.  134.  119.  150.  178.  179.  414.  411.  ,(. 
97.  113.  144-147.  136-139.  402-406.  417. 
418.  4;il.  232.  481.  318.  44t.  6. 

Hiiiiini,  Constance  en  339  y  assemble  un 
Concile,  p.  30.  ft.  Ce  qui  s'y  passe,  p.  30- 
34.  6.  Ses  suites,  p.  32.  33.  b.  S.  Hilaire 
de  Poitiers  en  a  écrit  l'histoire,  p.  169-171. 
b.  S.  Pliébode  d'Agen  écrit  contre  le  Con- 
cile, p.  273.  474.  476.  b. 

Kodaue,  Evèque  de  Toulouse,  se  signale 
dans  le  faux  Concile  de  Bcziers,  p.  46. 
118.119.  135.  141.6.  Exilé  en  Phrygie, 
meurt  dans  son  exil,  p.  26.  118.  133.  b. 

Les  Rumaiiii:  envoient  une  colonie  A, 
Narbone  et  se  rendent  les  maîtres  de  tout 
son  territoire,  p.  48.  u.  Unis  et  en  com- 
merce avec  les  Marseillois,  p.  46.  53.  56. 
a.  En  preinient  l'usage  de  la  langue  gréque, 
p.  58-59.  il.  En  union  avec  les  Éduens,  p. 
50.  a.  Deviennent  maîtres  de  toutes  les 
Gaules,  et  y  établissent  leur  gouvernement 
et  leurs  coutumes,  p.  56-58.  a. 

Home  inend  des  Gaulois  le  premier  goût 
l)onr  les  belles  Ictres,  p.  53.  a.  On  y  voloil 
autrefois  plus  de  vingt  Ecoles,' îfc.  Tire  des 
Gaules  de  très-grands  hommes,  p.  69.  83. 
86.  88.  92.  101.  109.  147.  134.  133.  134. 
u.  15.  16.  b.  En  particulier  plusieurs  Pro- 
fesseurs d'éloquence,  p.  83.  86.  109.  180. 
218*.  a.  123.  146.  139.  444.  6. 

(j.  Rosoivs,,  le  plus  célèbre  Comédien  de 
l'antiquité,  p.  92.  a.  Sa  naissance,  ibid. 
Ses  grands  talens,  p.  93.  94.  a.  Sa  mort, 
p.  95.  tt.  Voiez  son  éloge,  p.  92-96.  o.  Ses 
écrits,  p.  95.  o. 

R  t  r  ij 


500 


TABLE  DES  MATIERES. 


RuFiiii,  Ministre  U'Ktal,  sua  pais,  p.  3i\. 
3S2.  6.  Va  à  la  Cour  du  Constantinopic, 
323.  b.  Y  est  élevé  aux  premiers  lion- 
nears,  ib.  Son  baptême  célébré,  ib.  Sun 
ambition  et  son  avarice,  p.  332.  323.  b. 
Sa  tin  malheureuse,  p.  323.  b.  Voiez 
son  histoire,  p.  321-323.  b.  Auteur  de  la 
fable  de  Pasiphaé,  p.  323.  6. 

Treb.  RuriRi's,  Orateur,  en  commerce 
avec  Pline  le  Jeune,  p.  249.  a.  Abolit  à 
Vienne  sa  patrie  des  jeux  de  lutte,  ibid. 
Voiez  son  éloge,  p.  249.  230.  a.         . 

Satr.  RvFUS,  Orateur,  enseigne  à  Romo, 
p.  218*.  a.  Critique  l'éloquence  de  Cicoron, 
p.  133.  218"  o.  Voïez  son  éloge,  p.  217'. 
218".  o. 

Rurus,  Rhéteur,  enseigne  à  Poitiers  sans 
succès,  p.  206.  207.  6.  Voiez  son  histoire, 
t6td. 

Sex.  Rufus,  Aateur  d'un  abrégé  de  l'his- 
toire Romaine,  diflérent  du  précédent,  p. 
207.  6. 


Sabbaliut,  Evèque  Gaulois,  le  même  que 
S.  Servais  de  Tongres,  p.  242.  b. 

Sabbatius,  hérétique  dont  les  écrits  fu- 
rent condamnés  par  le  Pape  Gelase,  p.  242. 
b.  DOt. 

Sabin,  Evèque  de  Plaisance,  Censeur 
ordinaire  des  ouvrages  de  S.  Ambroise,  p. 
406.  407.  b. 

Luc.  Sabina,  femme  du  Puëte  Ausone, 
p.  282.  6. 

Landul.  Sagax  continue  l'histoire  d'Eu- 
trope,  refondue  par  Paul  Diacre,  p.  226.  b. 

Saintes,  fondation  de  cette  Eglise,  p. 
308.  a. 

Les  Saints,  leur  culte,  p.  42.  b.  Com- 
battu par  Vigilance,  p.  41 .  42.  b.  Leur  in- 
vocation et  leur  culte  établi,  p.  343.  b. 

Salvste,  Préfet  des  Gaules,  p.  196.  b. 
Confident  de  Julien  l'Apostat,  p.  199.  b. 
Travaille  à  calmer  la  pei'sécution  contre 
les  Chrétiens,  p.  179.  197.  6.  S.  Hilaire  de 
Poitiers  lui  adresse  un  écrit  A.  ce  sujet,  p. 
179.  b.  Est  élu  Empereur  et  le  refuse,  p. 
198.  b.  Loué  par  Alcimo,  p.  137.  b.  Voiez 
son  éloge,  p.  196-198.  b. 

Salutte  Second,  Préfet  du  Prétoire  d'O- 
rient, p.  198.  199.  6.  Ne  doit  pas  être 
confondu  avec  le  précédent,  pag.  198.  b. 

Samothèt.  premier  Roi  des  Gaules,  p. 
2.  o. 

Sancte,  Diacre  de  l'Eglise  de  Vienne,  p. 
33.  331.  391.  a. 


FI.  Sanclus,  beau-frere  du  Poète  Ausone, 
p.  289.  b. 

Saragoce,  il  s'y  tient  un  Concile  contre 
Priscillien  et  ses  sectateurs,  p.  35.  240. 
6.  11  s'y  trouve  plusieurs  Evéques  des  Gau- 
l.-s,  p.  33.  6. 

Sarron,  troisième  Roi  des  Gaules,  fable 
qu'on  en  débile,  p.  2.  a. 

Sarronides,  Théologiens  Gaulois,  p.  2.3. 
a.  N'ont  point  pris  leur  nom  de  Sarron,  ib. 

S.  Saturnin,  premier  évéque  de  Tou- 
louse, p.  304.  a.  Tems  de  sa  mission  dans 
les  Gaules,  p.  305-30).  o.  Fonde  des  Egli- 
ses en  Espagne,  p.  307.  a.  Ses  Disciples, 
ib. 

Saturki.'v,  Evéque  d'Arles,  suu  ordina- 
tion, p.  135.  b.  Zélé  partisan  de  l'Aria- 
nisme,  p.  26.  117-119.  134.  6.  Condamne 
S.  Athanase,  p.  26.  (i.  Préside  au  Concile 
de  Bcziers,  p.  135.  b.  Sa  conduite  scanda- 
leuse et  tyran..iquc,  ib.  Comment  traité  par 
les  Evéques  Gaulois,  p.  26.  27.  130.  131. 
136.  b.  Voiez  son  histoire,  p.  134.-136.  6. 
Ses  écrits,  p.  136.  6. 

Pub.  Semp.  5a(urntnu<,  Tyran  sous  Gai- 
lien,  p.  409.  a. 

Fir.  Saturninus  Proculus,  Tyran  sous 
Aurelien,  ibid. 

Sex.  Jul.  Satu«>inis,  Tyran  sous  Probe, 
p.  409.  a.  Forcé  de  prendre  la  pourpre,  p. 
321.  410.  o.  Fort  versé  dans  les  belles  le- 
Ires,  p.  409.  411.  a.  Voïez  son  éloge,  p. 
.409-411.  a.  Fragment  d'un  de  ses  discours, 
p.  411.  a. 

S.  Satyre,  frère  de  S.  Ambroise,  son 
éloge  abrégé,  p.  335.  b.  Son  Oraison  funè- 
bre, p.  347.  6. 

S.  Savinien,  premier  Evéqne  de  Sens, 
p.  309.  o. 

Les  Sciences,,  peut-on  les  cultiver  sans 
l'artde  l'écriture'/  p.  17  .20  a.  Eniiemiesdu 
tumulte,  p.  2.  b.  Utiles  à  la  Religion,  p. 
237.  238.  314.  «.  22.  6.  Ont  servi  de  Con- 
ducteur aux'Gentils  pour  les  amener  à  J.  C. 
p.  227.  a.  L'Evangile  a  favorisé  leur  pro- 
grès, comme  elles  ont  fraie  le  chemin  à 
l'Évangile,  p.  227.  307.  a.  Tirent  de  l'a- 
vantage des  hérésies,  p.  242.  a.  N'étoient 
point  nécessaires  pour  l'èpiscopat  et  la  prê- 
trise, p.  238.  a.  Leur  progrés  lié  avec  le 
gouvernement  de  l'Etat,  p.  126.  a.  Oitt 
été  cultivées  de  tems  immémorial  par  les 
Gaulois,  p.  9.  o.  Leur  progrès  dans  les 
Gaules,  p.  52.  53.  o.  S'y  étendent  à  me- 
sure que  la  foi  s'y  répand,  p.  300.  307.  a. 
Lc'ir  progrès  à  Rome  et  ailleurs,  p.  53.  54. 
n.  Voïez  :  £co/ej  et  Letres.  Souffrent  de 
l'altération  sous  les  règnes  de  Calignla,  de 
Claude,  de  Néron,  de  Caracalla,  p.  126.  313. 
a.  Se  soutiennent  néanmoins  dans  les 
Gaules,  p.  130.  131.  313.  «.  Y  sont  encore 


TABLE  DES  MATIERES. 


50  i 


florissantes  aux  III  et  IV  siècles,  p.  3I(). 
317.  a.  1.  2.4.  2i.  6.  Leur  décadence  et  ses 
caases,  p.  313.  314.  a.  En  quoi  consiste 
la  véritable  science,  p.  238.  239.  351.  a. 
Scribonius  Largus,  mal  confondu  avec 
Siburius,  p.  247.  6.  En  quel  tems  il  a 
vécu,  (6.  Son  traité  sur  la  îfédecine,  ibid. 

La  Sculpture  cultivée  dans  les  Gaules,  p. 

138.  a. 

Secondien  ,  Evéqne  Arien  en  Illyrie, 
contre  qui  S.  Ambroise  écrit,  p.  246.  376. 
6. 

Jul.  Seccndcs,  Orateur  célèbre,  grand 
ami  de  Quintillien,  p.  216.  b.  Passe  des 
Gaules  &  Rome,  ibid.  Y  brille  par  son  élo- 
quence, p.  133.  a.  Avoit  d'abord  de  la 
peine  à  réussir  dans  l'éloquence,  p.  177.  a. 
Votez  son  éloge,  p.  216.  217.  a.  Ses  écriu, 
p.  217.  a. 

Sedatvs,  Rhéteur,  sa  naissance,  p.  138. 
6.  Enseigne  en  divers  endroits,  ib.  Se  fixe 
à  Toulouse,  ib.   Votez  son  éloge,  p.  138. 

139.  b.  Ses  enfans  lui  succèdent,  et  en- 
seignent à  Rome  et  à  Narbone,  p.  139.  6. 

Seleucie,  il  s'y  tient  en  359  un  fameux 
Concile,  p.  30.  33.  142.  143.  b.  Son  issue 
et  ses  suites,  p.  32.  33.  6.  S.  Hilaire  en 
a  écrit  l'histoire,  p.  169-171.   6. 

Senlit,  fondation  de  cette  Eglise,  p.  303. 
a. 

Sent,  son  premier  Evéque,  p.  309.  a. 

Cd.  Sentius,  père  du  Poète  Sentius  Augnri- 
nus.  Préteur,  p.  253.  a.  Se  distingue  dans  ia 
guerre  contre  les  Juifs  et  lei  Bretons,  ibid. 

Sept,  nombre  sacré,  p.  184.  6.  Divers 
Auteurs  ont  écrit  sur  ce  nombre,  p.  183. 
184.  6. 

Les  Septantet,  leur  éloge,  p.  176.  b. 
L«ar  version  authentique,  ib. 

S.  Servais,  Evêque  de  Tongres  ses  di- 
vers noms  I..atin8,  p.  242.  b.  Le  même 
que  Sabbatius,  dont  parle  Gennade,  p.  242. 

243.  b.  Son  ordination,  p.  243.  6.  Assisie 
au  Concile  de  Sardique,  ibid.  Député  vers 
l'Empereur  Constance,  (6.  Se  trouve  au 
Concile  de  Rlmini,  p.  30.  244.  6.  S'y  si- 
gnale, p.  31.  244.  b.  Puis  tombe,  p.  32. 

244.  b.  Assiste  au  1  Concile  de  Paris,  p. 
30.  6.  S'y  relevé  de  sa  chiite,  p.  30.  244. 
Sa  mort,  p.  245.  6.  Votez  son  éloge,  p. 
242-245.  b.  Ses  écrits,  p.  245.   b. 

Val.  Severa,  mère  de  l'Empereur  Gratien, 
p.  233.  234.  6. 

Severe,  Gouverneur  de  la  Lyonoise,  de- 
puis empereur,  père  de  Caraealla,  p.  353. 
354.  356.  a. 

3  3 


Severe,  femme  de  l'Empereur  Philippe, 
p.  389.  a. 

SiBVHE,  Préfet  du  Prétoire,  son  pais, 
p.  246.  b.  Elevé  à  de  grands  honneurs,  tt. 
Voiez  son  éloge,  p.  246.  247.  6.  Ses 
écrits,  p.  247.  6. 

Le  Silence,  ses  avantages,  p.  369.  b. 
Manière  de  le  garder,  p.  370.  b.  Quand  il 
est  utile  de  le  rompre,  t6. 

Simon  le  Magicien  la  tige  de  tous  les 
autres  hérétiques,  p.  331.  a. 

Sintplice,  Evéque  d'Autun,  assiste  au  I 
Concile  de  Valence,  p.  209.  b. 

Sirmich,  la  seconde  formule  de  Sirmich 
envolée  dans  les  Ganles,  p.  27.  6.  Com- 
ment reçue,  p.  27-28.  6.  Refutée  par  S. 
Phébade,  p.  28.  269-272.  b.  Rejetée  dans 
le  Concile  d'Ancyre,  p.  29.  b. 

Sacrale,  ouvrit  le  premier  une  Ecole 
pour  former  des  Orateurs,  p.  271.  o.  Fa- 
vorin  écrit  contre  lui,  et  Galien  en  prend  la 
défense,  p.  273.  274.  a. 

Soldures,  qui  ils  étoient,  p.  36.  a.  Leur 
attachement  inviolable  pour  leur  Seigneur, 
ib. 

Sophiste,  quelle  étoit  sa  profession  et  ce 
qu'entendoient  par-là  les  Anciens,  p.  266. 
tt.  8.  6. 

Ste  Solere,  Vierge  et  Martyre  de  la  fa- 
mille de  S.  Ambroise,  p.  326.  b. 

SpERCHÉE,  Grammairien  Grec,  enseigne 
dans  les  Ecoles  deBourdeaux,  p.  6S.  b. 

Staphilids  ,  Professeur  d'éloquence  à 
Bourdeaux,  p.  113.  b.  Sa  naissance,  p. 
114.  <i.  Ses  grandes  qualités.  Voiez  son 
éloge,  p.  113.  114.  b. 

Cxcil.  Slatitu,  a  beaucoup  enrichi  la 
Langue  Latine,  p.  54.  55.  a. 

Pub.  Pap.  Statiut,  Auteur  de  la  Thé- 
haïde,  mal  à  propos  confondu  avec  Statius 
Ursulus,  p.   180.  a. 

L'art  Statuaire  cultivé  dans  les  Gaules, 
p.  133.  a. 

Style,  ou  manière  d'écrire,  les  quatre 
différentes  sortes  en  usage  chez  les  An- 
ciens, p.  284.  a. 

SucuRO ,  Grammairien,  enseigne  dans  les 
Ecoles  de  Bourdeaux,  p.  64.  b. 

Les  Supentitioni,,  ennemies  de  la  véri- 
té, p.  323.  a.  Fort  communes  dans  les 
Gaules,  «6. 

Surculus,  Voïez  :  L.  Stat.  Ursulut. 

Suianne,  son  histoire  expliquée  par  S. 
Hlppolyte,  p.  369.  a. 


ooa 


TABLE  DES  MATIERES. 


Ml.   SvAGHius,  Poëte,  sa  nais^uiicc,   p. 

259.  b.  Elevé  aux  premiers  liunncuis  île  la 
République,  (6.  Consul  en  38a.  ib.  Ses 
liaisons  avec  lus  Savans   de  son   leiiis,  p. 

260.  6.  Koi>z  son  éloge,  p.  259.  360.  b. 
Ses  poésies,  p.  260.  6. 

FI.  Syaijiiux,  Consul  cm  381,  nu  titili 
pas  être  confondu  avec  le  précédoni,  |i. 
239.  6. 

Symnia(jue,  l'Oralciur,  élevé  des  Ecoliw 
Gauloises,  p.  325.  b.  En  liaison  ])nrlicu- 
liere  avec  nos  Savant  Gaulois,  p.  220.  2.'>9. 
305.  320.  321.  321.  424.  b.  Présente  au 
Sénat  une  requête  en  faveur  de  l'idolâtrie, 
p.  379.  b.  que  S.  Ambroiso  réfute,  379. 
380.  6. 

S.  Sijmphoricii,  illiulre  Martyr  «l'Aulun, 
p.  294.  a. 

Spiese,  a  fait  l'ilogo  d'une  tétc  cbauvt.'. 
p.  275.  a. 


ï 


Tablettct,  leur  invention  et  leur  usa^'c, 
p.  22.  a. 

Taureuce,  Colonie  dos  Marseillois,  p. 
16.  a. 

Tauius,  Modérateur  du  Concile  de Uimi- 
ni,  p.  31.  b.  Conduite  qu'il  y  tient,  p.  31. 
32.  214.  207.  b. 

Tklon,  Astronome  et  Matlieniatieien,  p. 
!I9.  (1.  Grand  homme  de  mer,  p.  100.  ii. 
t'uiez  sou  éloge,  p.  99.  100.  u. 

La  Tcntaliun,  son  utilité,  p.  337.  b. 

Teiiuue  l'ui'le  sil>rique,  sa  famille,  p. 
lis.  b.  Sun  éiliUMliiiii,  ibiil.  Ensoignu  à 
Ali^uulèiue,  ib.  Ses  poésies.  Vuicz  son 
éloge,  p.   118.  419.  b. 

Ti'liuiU-,  Granil  liomme  de  letres  ,  dilVc- 
lentdu   l'oétu  du  même  nom,  p.  118.  b. 

l'elavins  Ti'ucvr  enseigne  dans  la  Gaule 
Cisalpine,  p.  53.  «. 

Thalasse,  Grammaiiion,  enseigne  dans 
les  Ecoles  de  Itourdeaux,  p.  63.  b. 

Thalatte,  l'roconsul  d'Afrique,  gendre  du 
l'oéte  Ausouu,  p.  63.  282.  b. 

Iai  Théâtre  défendu  sou.s  peine  d'excom- 


munication, p.  S5.    6.  Dangereux  pour  la 
jeunesse,  p.  67.  140.  a. 

Thcmistins,  célèbre  Sophiste,  député  a 
Gr.aiun  dans  lus  Gaules,  p.  235.  b. 

Théodore.  Evèr/ue  d'Octodnrc,  assiste  en 
3S1  au  Concile  d'.Vquilée,  p.  31.  6.  El  en 
390  à  celui  de  MiUh,  »6. 

TuEnDORK,  Secrelairu  d'Etat,  ses  grandes 
qualités,  p.  211.  212.  6.  Misa  mort  en 
394,  p.  212.  b.  l'uiez  son  uloge,  p.  211. 
il2.  b. 

Théodore,  Consul  en  399,  différent  du 
précédent,  p.  211.  6. 

Mallius  Theodurtis,  Préfet  des  Gaules,  > 
fait  fleurir  les  Sciences,  p.  9.  b. 

Ihnodosv  le  Grand,  associé  à  l'empire  \>av 
Gralien,  p.  2,16.  ((.  EiKiuse  Galla  en  secon- 
des noi-es,  p.  2(>l .  b.  De  graml  .secours  à 
Valenlinien  11,  p.  2li2.  u.  Soumis  à  la  [lé- 
nilence  après  le  meurtre  de  'riiessalonii|Ui', 
p.  3.'t2.  b.  Sa  foi,  sa  piélé,  sa  clémence,  etc. 
p.  376.  b.  Uréiianu  prononce  son  panégy- 
rique, p.  122.123.  b.  Mort  à  Milan  ri  en- 
terré ù  Cl',  p.  37.'). 376.  6.  S.  Amlnoisn 
fait  son  Oraison  funèbre,  ib.  Sa  lettre  au 
Poêle  Ausonc!  n'est  (winl  une  pièce  suppo- 
sée, p.  290.291.  b. 

ThcuiUile,  disciple  do  S.  Ambroiso,  de- 
puis évéqiie  do  Modene,  p.  3;i6.  b. 

La  Théoluijie  des  Anciens  en  i|Uoi  elle 
consistoit,  p.  2:t3.23i.  <i.  iUaiiiere  de  l'en- 
seigner, p.  235-239.  u.  Se  |>erfectiounc 
chez  les  Gaulois,  p.  4.  b. 

Theo>,  Poète,  .son  pais,  p.  247.  b.  En 
grande  liaison  avec  le  Poëtc  Ausone,  p. 
2ts.  b.  Son  génie,  voirz  son  éloge,  p.  217- 
219.  6. 

Tli-uii,  Sophiste  Grec,  mal  confondu  avec 
.  lu  précédent,  p.  219.  b.  Son  Traité  sur  la 
llliélorique,  ib. 

fheiuutc,  fameu\  Médecin  à  Home,  p. 
110.  u. 

S.  Th>iis>>,  biacie,  disciple  de  S.  Poly- 
carpe.  travaille  à  réiMudre  la  foi  dans  les 
Guules,  p.  225.  291.  «. 

An.  Tiberi<xuat,  Comte  d'Afrique,  p. 
105.  b. 

Jun.  TiberiuMM,  Consul, Préfet  de  Uome, 
p.  104.  b. 

TiiiERiEN,  Préfet  des  Gaule»,  p.  104.  b. 
Sou  pais,  j>.  lU'i.  b.  Vuïiz  .son  éloge,  p. 
101.  105.  b.  Ses  écrits,  p.  105.  b. 

TitoHf,  Donatiste,  écrit  contre  les  prin- 
cipes de  sa  Secte,  p.  253.    b     Kefuté  pal 


TATILE  DES  MATIERES. 


503 


Parmcnicn,  ih.  No  se  rond  point  A  la  lii- 
mieredela  voiité,  p.  953.  â">i.  h. 

Jiil.  Titianns,  le  père,  Oratnur,  confondu 
avor  le  snivani,  p.  .330.  101.  .403.  a. 

Jul .  TiTiANDS,  Gcoprapho,  Orateur  cl  Rln- 
tcur,  filsdu  précralcnl,  p.  401.  n.  Surnom- 
mé li'  Sin;;e  do  son  Tems.  p.  iOi.  a.  Ou'lf 
Siniic  des  Orateurs,  p.  40i.  a.  Choisi  poui 
précepteur  du  César  Maximin,  p.  iOl.  n. 
Préside  allirn.alivement  aux  Kcoles  de  Lyon 
et  de  itesanvon,  p.  319.  ».  A  Ijcaucuup  Ir.i- 
vaillé  à  soutenir  l'éloquence,  p.  332.  *03. 
VU.  a.  i'oïrz  son  éloge,  p.  401.  40i.  ». 
Ses  écrits  sur  divers  sujels,  p.  t03-tOt.  ii. 

Til).  Fab.  Tilianut,  Consul  en  3(5,  p. 
401.  a. 

Tib.  Fab.  Titianut,  Consul  en  391,  p. 
401.  n. 

Titien,  Préfet  des  Gantes  en  3^«5,  p.  401 . 

Tongres,  ses  premiers  Evèquos,  p.  243. 
').  Son  siège  Iransferé  à  Masiricli,  puis  à 
Liège,  p.  94S.  h. 

Proc.  Ti'rpacidu,  Médecin  Chrétien,  pn"-* 
de  Severe  depuis  Empereur,  ]i.  .Ti3.  «. 

Les  Totcnns,  et  les  Grecs  eroploïercnl  les 
premiers  la  cire  pour  écrire,  p.  23.  «. 

Timlimxe,  surnommée  Pnllailia,  p.  50.  a. 
Son  éloge,  i6.  Fondation  de  celte  Eglise, 
p.  304-3OT.  a.  Ses  écoles,  p.  1,34.  l.T(i. 
180.  243.  a.  14.  08.  137.  139.  6.  Grands 
liommus  qui  en  sont  sortis,  p.  179,  180. 
333.  a. 

Tour*,  'son  premier  Eréqne,  p.  .304.  a. 
Uc-lil  la  foi  se  répand  dans  le  Maine,  l'An- 
jou, etc.,  p.  309.  (I. 

La  Tradition^  et  l'Ecritnre,  les  seules 
sources  oii  les  Anciens  puisoienl  leur  théo- 
logie, et  les  seules  règles  dans  les  Conci.es, 
p.  333.  334.  240.  a.  C'est  dans  l'Egli-e 
qu'elle  se  trouve  .sans  mélange,  p.  333.  a. 
Attention  des  anciens  Pères  à  la  conserver 
pure,  p.  234.  303.  339.  a. 

Trente,  bâtie  par  les  Gaulois,  p.  54.  a. 

Trêve»,  une  antre  Rome,  p.  316.  a.  Son 
éloge,  p.  10.  6.  Devient  le  séjour  ordinaire 
dos  Empereurs  aides  Préfets,  p,  315.  ».  3. 
6.  8.  9.  100.  110.  261.  320.  b.  Envoie  en 
70.  un  Orateur  à  l'assemblée  générale  des 
Gaules,  p.  131.  a,  Con.slantin  le  Grand 
l'embellit,  p.  3.  6.  Lieu  de  l'exil  de  S. 
Atbanase,  p.  6.  100.  b.  Ses  Ecoles,  136. 
244.  316.  317.  417.  a.  10.  12.  ,50.  207. 
308.  335.  417.  b.  Grands  hommes  qui  on 
sont  sortis,  p.  417.  a.  50.  907.  308.  361. 
33»>.  418.  6.  On  y  tient  quelques  Conciles, 
p.  37.  38.  365.  266.  6. 

La    Trinité,   Ecrits   qui    traitent  de  ce 


mystère,  p.    156-163.  945.    270-280.  ,345. 
346.  348.  417.  b. 

S.  Trnphime,  premier  Evéqne  d'Arles, 
p.  304.  ».  Tems  de  sa  mission  dans  les 
Gaules,  p.  .305.  ,30(i.  a. 

Turin,  on  y  lient  un  Concile  en  398,  ou 
.399,  pour  rétablir  la  paix  dans  l'Eglise  des 
Gaules,  p.  426-438.  6. 


Vnlenee,  dans  la  Viennoise,  on  y  tient  nn 
Concile  en  .374,  p.  J09-311.  h.  Ses  Ca- 
nons, p.  210.  b, 

r«/cn»,  fameux  Evéquo  Arien,  voïeï  ; 
lJr.incc,  son  compagnon  inséparable. 

f'alens,  Empereur  d'Orient,  p.  234.  b. 
Eng.age  Eatrope  à  écrire  un  abrégé  de  l'his- 
toire Romaine,  p.  324.  b.  Pérltàla jonrnco 
d'Andrinoplo,  p.  235.  b.  Ses  vexations  con- 
tre les  Catholiques,  p.  3.36.  6. 

Valeiitin,  Evèque  d'Arles,  souscrit  au 
Concilede  Sardique,  p.  134.  6.  Saturnin  lui 
suecede,  ibid. 

Valenlin,  Auteur  de  la  secte  des  Valen- 
tiniens,  p.  342.  ».  En  quel  tems  il  dogma- 
tisoit,  i6«l.  Ses  erreurs,  p. 845.  6.  S.  Ser- 
vais do  Tongrcs  a  écrit  contre,  ibid. 

Valrntiiiien  I,  Empereur,  pero  de  Gra- 
licn,  p.  2.33.  6.  Et  de  Valentinien  II,  p. 
361.  b.  Son  caractère,  p.  8.  6.  Sa  con- 
stance Chrétienne  el  héroïque  sons  Julien 
l'Apostat,  p.  289.  375.  6.  En  quel  temps 
élevé  à  l'Empire,  p.  144.  933.  b.  Fait  son 
.séjourdans  les  Gaules,  p.  8.  b.  Condamne 
toute  sorte  de  Magiciens,  p.  S.  6.  Publie 
des  loix  en  faveur  des  letres,  p.  8.  9.  b. 
Donne  un  cdil  fâcheux,  p.  173.  6.  Sa  con- 
duite envers  S.  Hilaire  de  Poitiers  et 
Auxence,  Evéquo  Ariea  de  Milan,  p.  144. 
14.5.  h.  Sa  mort,  p.  3.34.  b. 

Vai.extwiex  II,  Empereur,  sa  naissance, 
p  361 .  6.  Ses  grandes  qualités,  ib.  Dé- 
claré Auguste  à  l'âge  de  quatre  ans,  p.  261 
b.  Associé  à  l'Empire  par  Gralicn,  p.  334. 
b.  Son  zélé  pour  la  foi,  p.  361.  6.  Son  res- 
pect pour  S.  Ambroise  et  Theodose  le 
Grand,  ib.  Son  gouvernement,  p.  263.  963. 
ib.  Sa  mort.  Votez  son  éloge,  p.  361-964, 


Mi 


TABLE  DES  MATIERES. 


6.  S.  Ambroise  fait  son  oraison  fanebrc, 
p.  374.  375.  b.  Son  talent  pour  l'élo- 
quence et  son  amour  pour  les  Lelres,  p. 
S63.  b.  Ses  loix  et  ses  ordonnances,  p. 
363.  264.  b. 

Les  Valentinient,  hérétiques  disciples  de 
Valentin,  p.  331.  a.  Refutés  par  S.  Irenée, 
p.  24S.  â43.  330-333.  a.  Volez  Valentiti 
leur  chef. 

Tnl.  VaUntiniu,  Orateur  de  la  ville  de 
Trêves,  p.  131.  o. 

S.  Valerien,  disciple  de  S.  Pothin,  tra- 
vaille à  étendre  la  foi  dans  les  Gaules,  p. 
33S.  b. 

P.   Ter.    Varro,  Poëte  et  Historien,  p. 

108.  a.  Confondu  roal-à-propos  avec  M. 
Ter.  Varro,  p.  108.  112.  a.  Ses  grands 
Miens,  p.  108.  109.  a.  Va  s'établir  à 
Rome,  p.  109.  a.  Totez  son  éloge,  p.  108. 

109.  a.  Ses  écrits,  p.  110-114.  a.  Imités 
par  Yirgife,  p.  112.  a. 

Les  Voies  des  Gaulois,  p.  24.  o.  Con- 
fondus avec  les  Druides,  p.  28.  29.  a. 
Leurs  fonctions,  ibid. 

Venere,  disciple  de  S.  Ambroise,  fut  de- 
puis Evèque  de  Milan,  p.  336.  6.  • 

Le  Verbe,  sa  génération  éternelle  éta- 
blie, p.  158.293.  298.  6.  Sa  divinité  prou- 
vée par  S.  Irenée,  p.  344.  a.  Par  S.  Hip- 
polyte,  p.  398.  a.  ParLactance,  p.  85.  b. 
Par  S.  Hilaire  de  Poitiers,  p.  159.  163.  b. 
Par  S.  Ambroise,  p.  345.  346.  349.  h. 
Comment  il  s'est  rendu  visible,  p.  277. 
2'i8.  b.  Son  Incarnation,  p.  349.  b. 

La  Vérité  ne  se  trouve  que  dans  l'Eglise 
Catholique,  p.  332.  343.  a.  74.  a.  Sa 
force,  p.  160.  b.  Elle  ne  peut  être  détruite, 
p.  271.  6.  Devient  plus  brillante,  lorsqu'on 
lui  résiste,  p.  160.  163.  b.  Comment  on 
en  acquiert  la  connoissance,  p.  72.  78.  6. 
Motifs  pour  l'acquérir,  p.  74.  6.  Ne  se 
persuade  point  par  la  violence,  p.  116. 
150.  b.  Motifs  qui  peuvent  engager  à  par- 
ler pour  elle,  p.  168.  b.  Tire  de  l'avantage 
de  l'Eloquence,  p.  66.  6.  Peut  aussi  se 
passer  des  appuis  étrangers,  p.  66.  73.  b. 

Vérone  en  Italie,  bâtie  par  les  Gaulois, 
p.  54.  a. 

La  Vertu,  sa  force,  p.  78.  6. 

Verut,  Evéque  de  Vienne,  assiste  en  314 
an  Concile  d'Arles,  p.  53.  b. 

L.  Vestinui,  favori  de  l'Empereur  Claude, 
p.  127.  a.  I 

Vieenee  on  Italie,  bâtie  par  les  Gaulois,   | 
p.  54.  o.  ...  .; 


S.  I'«c<oi-,  Pape,  menace  d'excommunier, 
ou  excommunie  mémo  les  Asiatiques,  p. 
241.  297.  298.  340.  a.  S.  Irenée  lui  écrit 
plusieuri;  letrcs  à  ce  sujet,  p.  241.  297. 
298.  339.  340.  a. 

Victor,  Evéque.  de  Tunes,  Auteur  d'un 
traité  sur  la  pénitence,  p.  400.  a. 

ViCTORius  ,  Grammairien  ,  enseigne  à 
Bourdeaux,  p.  231.  6.  Voïez  son  éloge,  p. 
231.  232.  6. 

La  Viduité,  ses  avantages  au-dessus  du 
mariage,  p.  344.  b. 

La  Vieillette  représentée  avec  .ses  carac- 
tères, p.  106.  a. 

Vienne,  la  plus  illustre  Métropole  des 
Gaules,  p.  49.  50.  a.  Son  éloge,  ibid.  Ses 
foires  solennelles,  p.  292.  a.  On  y  cultive 
les  belles  letrcs,  p.  136.  o.  Grands  hom- 
mes qui  en  sont  sortis,  p.  128.  129.  219. 
a.  Il  y  avoit  une  Eglise  tonte  formée  avant 
l'épiscopat  de  S.  Irenée,  p.  225.  a.  Elle 
écrit  conjointement  avec  celle  de  Lyon 
l'histoire  de  sas  premiers  Martyrs,  p.  289. 
290-292.  a.  Voïez  :  Lyon. 

La  Viennoise,  ainsi  nommée  de  Vienne 
sa  capitale,  p.  49.  a.  Grands  hommes 
qu'elle  a  produits,  p.  128.  129.  a. 

Les  Vierges  consacrées  à  Dieu,  excellence 
de  leur  état,  p.  339.  342.  b.  Elles  s'y  con- 
sacroient  ordinairement  à  quelque  grand 
jour  de  fête,  p.  340.  343.  b. 

Vigilance,  le  premier  monstre  qu'aient 
produit  les  Gaules,  p.  41.  6.  Ses  erreurs, 
p.  41.  42.  b.  Comment  étouffées,  ibid. 

Vigilius,  qu'on  met  an  II  siècle  à  la  télé 
d'une  Académie  à  Orléans,  inconnu  aux  An- 
ciens, p.  244.  a. 

Vincent  de  Capone,  Légat  du  Pape,  se 
trouve  au  Conciliabule  d'Arles,  p.  115. 'ft. 
V  cède  aux  violences  des  Orientaux,  p. 
116.  6. 

C.  Jul.  Vindex,  Gouverneur  de  la  Gaule 
Celtique,  grand  homme  de  -guerre,  p.  129. 
o.  Se  déclare  le  premiercontre  Néron,  >6td. 

La  Violente  en  matière  de  foi  est  contre 
l'esprit  de  Dieu  et  la  pratique  de  l'Eglise, 
p.  150.  6.  Voïez  :   Vérité. 

La  Virginité,  ses  avantages  an-dessns  da 
mariage,  p.  339-342.  6.  Traité  sur  cesujet, 
p.  339-344.  383.  6. 

Universités,  établissement  fabuleux  qu'on 
leur  prête,  p.  2.  a. 

Votius,  Ëvèque  de  Lyon,  assiste  en  314 
au  Concile  d'Arles,  p.  53.  6. 

Popp.  Vopise^is,  natif  de  Vienne,  Consul, 
p.  129.  a. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


505 


Urdicus,  Grammairien  grec  el  latin,  en- 
seigne dans  les  Ki-oles  de  BourJeaux,  p. 
119.  120.  b.  Son  genre  d'éloquence,  votez 
son  éloge,  ibiil. 

Ifrbicus,  connu  par  Symmaque,  différent 
dn  Grammairien,  p.  lit.  6. 

Vrtncr  et  Valens,  deux  chefs  insépara- 
ble.s  de  l'Arianisme,  p.  26.  27.  122.  b. 
Leurs  ruse.*,  p.  270.  6.  Leurs  fonctions  in- 
dignes do  leur  caractère,  p.  115.  b.  Se 
trouvent  au  Conciliabule  d'Arles,  p.  115. 
116.  b.  Leur  retracUtion,  p.  122.  6.  Assis- 
tent au  Concile  dcRitnini,  p.  32.  244.  267. 
h.  Conduite  qu'ils  y  tiennent,  ibid.  Y  sont 
déposés,  p.  267.  b.  Excommuniés  dans  ce- 
lui de  Paris,  p.  131.  b.  S.  Hilairede  Poi- 
tiers écrit  coutreenx,  p.  169. 171.  <>. 

Ursuli's,  Grammairien,  enseigne  dans  les 
Ecoli's  de  Trêves,  vuiez  son  éloge,  p.  207. 
208.  b. 

L.  Statius  L'rsulus,  Rhéteur,  enseigne 
l'éloquence  dans  les  Gaules,  puis  à  Rome, 
coïe:  son  éloge,  p.  179.  180.  o. 


VUture  indigiie  d'un  Chrétien,  p.  91. 
177.  6.  Crime  comparable  à  l'idolâtrie  et  à 
l'homicide,  p.  339.  6. 

Paul  Winfroi,  voïeï  :  PmU  Diacre  d'A- 
quilée. 


Zenubie,  Reine  de  Palmire,  en  quel  tems 
elle  a  commencé  à  régner,  p.  390.  a. 

2eno(io)'f,  excellent  Sculpteur,  p.  138.  a. 
Est  appplé  des  Gaules  à  Rome,  ibii. 

S.  Zenon,  Evcque  de  Vérone,  tous  les 
sermons  qui  portent  son  nom,  ne  sont  pas 
de  lui,  p.  179.  6. 

Zenothehis,  Jurisconsulte,  sa  générosité 
héroïque,  t)ot«z  son  éloge,  p.  287.  288.  a. 


FIN    DE  LA   TABLE   DES   MATIÈRES   DU    PREMIER   VOLUME. 


Tome  I.  Part.  IL 


S  s  s 


1)07 


APPnOBATION 

t'ai  li'i  par  ur.lii'  di-  iH<>i)srif,'neiir  le  riiinli!  dos  Sceaux  un  Mniinsciil  intitula  :  Jlialoire 
"  Lileraire  dr  In  Fraiire,  etc.  ïom.  I.  l'ne  pnlrepiise  aussi  l'-tciKliii!  ilemaïKlu  uiiclcclurp 
iiiGnic,  beaucoup  d'cxai-liluilp  ot  de  critique.  L'Aiilcur  me  paroit  réunir  toutes  ces  qualités, 
et  je  croi  que  son  Ouvrage, qui  devient  tous  les  jours  plus  nécessaire,  sera  reçu  avec  plai- 
sir. A  Paris  ce  deuxième  Mars  mil  siqil  cens  lreiilc-deu\. 

I.ANr.F.LOT. 


rnniLKi.i:  nu  roy 

TÊ  OtIS  PAR  Lk  (;RAcr  DE  DiF.c  ItoY  DF.  FitAUcK  FT  DK  N  vTAiiiiF,  :  A  1101  amcz  cl  Teaux  (Innscillers  les 
*-'  Cens  Icnans  nos  Cours  de  Parleniens,  M.iîlres  des  lleqiiêlcs  ordinaires  de  notre  Hôtel,  (Jrand  ConsFil, 
Prcrol  de  l'aris,  Baillifs,  Sëncchaux,  leurs  Licnicnuns  Civils,  et  antres  nos  Justiciers  iju'il  a|i|iHrlieudra, 
Salit.  Notre  bien-amé  Pikkrk-.Micufi.  Hiart  l'aiiié,  l.ihrairc  à  l'aris,  Xous  ayant  fait  remontrer  qu'il 
lui  luroit  été  mis  en  main  deux OnrraRcs  qui  ont  imur  litre  :  i'Histuirk  Litkrairf  de  i.a  Fk (m:i: :  Les 
.XTriQiiTEs  KcixEsiASTiuiEs,  TRADi  iTKN  OS  l'A:«.i,iiis  DR  JosEFii  BiNiniAM,  qu'il  .>-onliaiti'riiit  faire 
imprimer  cl  donner  au  Public,  s'il  Nous  plaisait  lui  accorder  nos  Lettres  de  Privilège  sur  ce  nécessaires; 
olfrant  pour  cet  effet  de  les  faire  imprimer  en  bon  papier  et  beaux  caractères,  suivant  la  feuille  im- 
primée et  attachée  pour  modèle,  sous  le  l'.ontrocel  des  Présentes  :  A  ces  caises,  toulant  traiter  favn- 
rublement  ledit  Kxposant,  Nous  lui  a\oiis  permis  et  pernietions  par  ces  Présentes  de  faire  imprfmcr 
li'sdils  Livres  ci-dcssns  s|>eciriés,  en  un  ou  plusicnr>  voluincs,  conjointement  ou  séparément,  et  autant 
d  '  fois  que  bon  Ini  semblera,  sur  papiiT  et  caractères  loiifornies  a  ladite  I'cbIIIc  inipriniéc  et  attacljée  sou< 
U)trc  dil  ContrcsrcI,  et  de  les  vendre,  faire  vendre  et  débiter  par  Innl  notre  Itoyauni.",  pcmiani  le  lem- 
dehuil  années  riins.'cutiïes,  a  compter  du  jour  delà  date  desdites  l'réscnles;  Taisons  défenses  a  touti s 
sorles  de  iicrsonnes  de  queli|uc  qualité  et  condition  qu'elles  soient,  d'en  introduire  d'ijiipression  élraii- 
Kere  dans  aucun  lieu  de  notre  obéissance;  rnmnie  aussi  ii  tous  Imprimeurs,  Libraires  et  autres,  d'il:)- 
primer,  faire  inijirimi'r,  vendre,  faire  tendre,  débiter  ni  contrefaire  Icsdits  Litres  ci-dessns  exposés,  e.i 
tout  ni  en  partie,  ni  d'en  faire  aucuns  extraits  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit,  d'ancmcntalion,  cor- 
rection, cbangenient  de  titre  on  autrement,  sans  la  permission  expresse  1 1  par  écrit  duilit  Kx|iosant,  uu 
de  ceux  qui  auront  droit  de  lui;  ii  peine  de  ronOscaîion  des  exemplaires  contrefaits  et  de  quiuzc  ce.is 
livres  d'aniende  contre  chacun  des  coutrevenans,  dont  un  tiers  à  Nuns,  un  tiers  à  l'IliVel  Dieu  de  Paris, 
l'antre  tiers  andit  Ex|)osant,  et  de  tous  déiiens,  dommages  cl  inti^rcts;  a  la  charge  que  ces  rrcsi'utes 
seront  enregistrées  tout  au  long  sur  le  Itegistrc  de  la  i;ommunautc  des  Imprimeurs  cl  Libraires  de  Paris, 
dans  trois  mois  de  la  date  d'icelles,  que  l'impression  desdits  Livres  sera  faite  dans  notre  lloyanmc  et  non 
ailleurs,  et  que  l'Impétrant  se  conformera  en  tout  aux  Uct:leiuens  de  lu  Librairie,  et  notamment  a  celai 
d!i  dix  Avril  mil  s<'pt  cens  vingt -cinq;  et  i|u'avant  que  de  rexpo;cr  en  vente,  le  Manuscrit  ou  Imprime 
qui  aura  servi  de  copie  .i  l'imiiression  desdils  Livres,  sera  remis  dnis  le  même  état  où  l*.\ppr(>bation  jr 
aura  été  donnée,  es  mains  de  notre  Ircscbir  ci  fe.d  Chevalier  (larde  des  Sceaux  de  France  le  sieur 
Chauvelin  ;  et  qu'il  en  sera  ensuite  rcais  deux  Kxi  iiipLiires  dans  nuire  Itibliolheqne  publique,  un  dans 
relie  de  nuire  Château  du  Louvre,  cl  un  dans  cille  de  notre  trés-clicr  et  féal  Chevalier  Garde  des  Sceaux 
de  France  le  sieur  Chauvelin;  lu  tout  il  peine  de  unllité  des  Présentes;  Du  contenu  desquelles  vous 
mandons  et  enjoignons  de  faire  jouir  rex|H>sanl  uu  si's  ayans  cause,  pleinement  et  paisiblement,  sans 
>ouffrir  qu'il  leur  soit  fait  aucun  troubli'  on  enipèi  heiueiil  ;  Voulons  que  la  copie  desdites  Présentes  qui 
sera  imprimée  tout  an  long  auconimencenicnl  ouii  la  On dcsdiLs  Livres,  soit  tenue  |Miur  dûcmenl  signifiée, 
et  qu'aux  copies  rollaiiouuees  par  l'un  ile  nos  amez  et  f^aux  (jinseillers  et  S.:cretaires  foi  soit  ajoutée 
e^Mnuic  à  l'original  :  Commandons  an  premier  noire  Huissier  ou  Sergent  de  faire  peur  l'exerution  d'ieelln: 

S  S  S  ij 


508 

tous  Actes  rvqnis  et  lecesHires,  sans  demander  autre  permission,  et  nonbbslant  clameur  de  Haro,  Charte 
Normande  et  Lettres  à  ce  contraires  ;  Car  tel  est  notre  tlais:»  :  DomiÉ  à  Paris  le  trentième  jour  du 
mois  de  Najr,  l'an  de  Rrace  mil  sept  cens  trcnte-deui,  et  de  notre  Règne  le  dix-septiéme.  Parle  Roy  et 
son  Conseil.  SAINSON 

J'ai  associé  au  préaeni  Privilège  les  sieurs  Charles  Osmont,  Gissey,  Guillaume  Darirt,  Cbauhert  et 
('busiiT,  cl.aruu  pour  un  siticmc.  l'.c  vingt  Juin  mil  sept  cens  Irenle-deux. 

Sifué,  HuART,  fdiné. 


Itegistrr,  entembU  la  Cettion,  lur  le  Registre  viii«  de  la  Chambre  Hoyale  dei  Libraires 
et  Imprimeurs  de  Paris,  N"  393.  fol.  378.  conformément  aux  anciens  Reglemens,  cmifir- 
méi  jiar  lelui  du  28«  Février  1723.  A  Paris  le  ^Juillet  «732. 

Signé,  G.  Martin,  Syndic. 


Paris.  —  Impr.  Ptiul  Uupont,  rae  do  Gront'Ile-SaiDt-Hjnuré,  4'i. 


Date 

Due 

FORM   lOS 

/ 


110821