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Full text of "Institutions politiques de l'Europe contemporaine"

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University  of  Ottawa 


http://www.archive.org/details/institutionspoli05flan 


INSTITUTIONS  POLITIQUES 


DE 


L'EUROPE  CONTEMPORAINE 


M      MKME    AUTEUIt 


Institutions  politiques  de  lEurope  contemporaine  : 

*  Angleterre  —  Belgique 1  vol. 

**  Allemagne 1  vol. 

***  Suisse  Italie 1  vol. 

****  Les  Pays-Bas,  Danemark,  Suède,  Norvège    .  1  vol. 


Ïsô^: 


ETIENNE  FLAND1N 

8KNATKUH 
ANCIEN  PROCUBKOR  QBNBRaL 


Institutions 

Politiques 

de 

l'Europe  contemporaine 


Constitution  —  Gouvernement 

Assemblées  parlementaires 

Administration  locale  —  Justice 


TOME  V 

ESPAGNE  —  VAL  D'ANDORRE 


W.vv 


PARIS  ^ 

II.    LE  sol  DIER,    LIBR  URE-ÉDITEl  II 

174-176,  BOULBYARO  ST-QBRHAIN,    1  T  »    170 

1914 


N.  B.  —  A  la  fin  de  l'exposé  concernant 
chaque  pays  se  trouve  une  bibliographie 
permettant  de  se  reporter  aux  sources. 


WKHTISSEMENT 


Le  cinquième  volume  des  Institutions  politiques 
de  l'Europe  contemporaine  est  consacré  à  l'Espagne, 
avec  adjonction  de  quelques  pages  sur  le  curieux 
et  archaïque  gouvernement  de  la  Hépublique  d'An- 
dorre. 

Nous  nous  sommes  conformé,  une  fois  de  plus, 
au  plan  d'ensemble  que  nous  avons  tract'.  \ous 
rappelons  qu'il  consiste,  pour  chaque  nation,  à  résu- 
mer l'évolution  politique  accomplie  au  cours  des 
\i\  cl  \x°  siècles  et  à  passer  en  revue  successive- 
ment les  principes  de  la  Constitution,  l'organisation 
du  Gouvernement  et  des  grands  services  publics, 
le  fonctionnement  du  régime  représentatif,  le  déve- 
loppement des  libertés  locales  et  les  règles  qui  prési- 
dent à  l'administration  de  la  justice. 

Pendant  longtemps  on  a  pu  croire  que  l'examen 
du  régime  politique  de  l*Espagn<    devait  être  dé- 


pourvu  de  tout  intérêt  aux  veux  des  théoriciens  cl n 
droit  constitutionnel,  de  ceux  qui  veulent  voir  dans 
la  législation  comparée  l'équivalent,  pour  les 
sciences  politiques  el  sociales,  tle  ce  qu'est  le  labo- 
ratoire pour  les  sciences  physiques. 

Quels  exemples  emprunter  à  la  législation  d'un 
pays,  voué  à  jamais,  semblait-il,  aux  aventures  et 
aux  scandales  des  pronunciamentos,  incapable  de 
tout  effort  suivi,  méthodique,  raisonné,  étranger 
surtout  à  l'idée  du  respect  de  la  légalité? 

Les  événements  de  ces  dernières  années  sont  venus 
apporter  un  heureux  démenti  à  ceux  qui  prophéti- 
saient l'irrémédiable  décadence  de  l'Espagne  et  sa 
définitive  impuissance  à  se  donner  un  gouverne- 
ment stable  et  régulier. 

On  verra  au  cours  de  ce  volume  comment,  au 
lendemain  de  la  restauration  alpbonsiste.  au  lende- 
main surtout  des  désastres  de  la  guerre  Cubaine; 
une  période  de  régénération  s'est  ouverte  pour  l'Est 
pagne  el  comment  les  plus  méritoires  efforts  ont 
été  tentés  à  l'effet  <l<'  dote''  la  Monarchie  constitu- 
tionnelle espagnole  d'une  législation  extrêmement 
étudiée,  pai  lois  trop  compliquée,  mais  remarquable 
.1  beaucoup  d'égards  el  animée  d'un  large  esprit  de 
libéralisme  el  de  progrès  social. 

Il  e^i  permis  do  se  montrer  sceptique  sur  les 
effet!  pratiques  de  cette  législation,  sur  la  sincérité 
surtout  avec  laquelle  on  l'applique  dans  la  l'énin- 


suie,  mais  il  serait  Injuste  de  méconnaître  la  haute 
portée  scientifique  de  l'œuvre  législative  élaborée. 
Sous  avions  le  devoir  de  la  mettre  en  lumière. 
Nous  voudrions  espérer  que  le  lecteur  reconnaîtra 
avec  nous  l'intérêt  de  l'élude  à  laquelle  nous  avons 
jugé  ulilf  de  nous  li\rer. 


INSTITUTIONS  POLITIQUES 

ni 


L'ESIWGNË 


CONSTITUTION 


INSTITUTIONS   POLITIQUES 


L'ESPAGNE 


i 

LA  CONSTITUTION 


Los  origines  du  régime  représentatif  en  Espagne.  L'Es- 
pagne du  Moycn-.Yge.  —  I.cs  Estamientos  de  Castille  et  les 
Cortès  il'  dragon.  —  L'Espagne  des  temps  modernes.  —  L'ab- 
solutisme  de  la  maison  d'Autriche.  —  Le  Saint-Office  et 
l'Inquisition.  L'avènement  des  Bourbons. 
L'évolution  politique  de  ['Espagne  au  \\\°  siècle.  —    Charles 

I  \  ,  Ferdinand  \  Il  et  Napoléon.       L'entro le  Baronne. 

—  Le  règne  de  Joseph  Bonaparte  et  la  Constitution  de 
i  s  >s.  —  La  guerre  de  l'Indépendance.  —  La  Constitution 
de  tMia.  —  Ferdinand  Nil  et  la  restauration  de  l'ancien 
régime  —  L'avènement  d'Isabelle  II.  —  Les  guerres 
carlistes.  —  Les  pronunciamentos.  —  Le  Statut  roval  do 
i834.  —  La  Constitution  de  1837.  —  La  Constitution  de 
[845.  —  La  Constitution  de  i855.  —  L'Acte  additionnel 
de  t856.  —  La  Révolution  de  septembre  1888.  —  Le 
Gouvernement  provisoire,  Serrai 1  Prim.  — -  La  Consti- 
tution de  1869.  —  Le  règne  d'  Vmédée  1".  --  La  République 
espagnole  —  Lo  coup    d'Etal    du    Général    l'a\ia,   —    Le 


|  l  SPAGN] 

pronunciamenlo  de  Martine/  Campos   et  la  restauration  des 
Bourbons, 
l..i  Constitution   du  3<>  juin  1876.  —   Uphonse  \ll.  —    La 
régence  'le  la  Heine  Marie  Christine,  —  Alphonse  Mil. 
I  ;i  Monarchie  constitutionnelle. 


Une  vieille  légende  espagnole  rapporte  qu'à  L'origine 
du  Monde.  L'Espagne  avail  demandé  au  Créateur  de  lui 
donner  un  ciel  enchanté  ;  elle  l'obtinl  ;  de  la  baigner 
de  mers  aux  Ilots  d'azur  et  d'argent  ;  elle  L'obtint 
encore  ;  de  lui  accorder  des  fruits  d'une  exquise  Saveur 

el  des  femmes  d'une  troublante  beauté  ;  le  Créateur 
accéda  à  tous  ces  désirs  ;  mais,  quand  l'Espagne  préten- 
dit réclamer  en  outre  un  bon  gouvernement,  l'Eternel 
perdit  patience.  «  Non  répondit-il.  ce  sérail  trop, 
car  l'Espagne  deviendrait  un  second  paradis  terrestre  1. 
-i  à  la  recherche  de  ce  «  bon  gouvernement  »  que 
L'Espagne  a  employé  tout  le  dernier  siècle. 

A  travers  une  longue  et  douloureuse  série  de  ré\o- 
Lutions  et  de  pronunciamentos ,  elle  a  l'ail  L'épreuve 
de  tous  les  régimes,  royauté  absolue  à  caractère  théo 
cra tique,  dictacture  militaire,  république  démocrati- 
que; elle  a  chassé  et  rappelé  ses  souverains;  elle  le-  a 
empruntés  à  des  dynasties  étrangères  ;  elle  a  connu  la 
centralisation! tranceel   le  fédéralisme  le  plus  dis 

suivant  ;  finalement  (die  a  abouti  a\ec  la  constitution 
du  .">(>  Juin  1876,  restée  jusqu'à  ce  jour  sa  loi  fonda- 
mentale, a  la  monarchie  constitutionnelle.  Si  l'on  s'en 
tenait  aux  textes  législatifs  que  nous   allons   analyser, 

on    s.iail  tenté'  de  roneliire  <pie  l'KspaLiie    68 1     ainxee  a 

établir  sui  de  sérieuses  garanties  «  les  libertés   néces- 


La  constitution  i 

gai r es  >,  Malheureusement  l'édificequi  \a  se  présenter 
à  notre  examen  esl  surtout  en  Façade.  Pour  faire  de 
l'apparence  de  ses  institutions  libérales  une  réalité,  il 
Faudrait  à  l'Espagne  les  mœurs  (l'une  nation  libre. 

Lorsqu'on  remonte  aua  temps  reculés  di 
histoire,  on  constate  cependant  <|iie  la  péninsule 
ibérique  Tut  des  premières  en  Europe  à  connaître  et  à 
pratiquer  le  régime  représentatif  el  que  le  tiers-état  se 
\ii  admis  dans  la  représentation  nationale  en  Espagne 
bien  avanl  qu'il  ne  lui  appelé  à  jouir  de  la  même  pré- 
rogative  en   Vngleterreel  en  France. 

Sous  la  domination  des  (ïoths,  l'autorité  royale 
trouvait  un  sévère  contrôle  dans  des  Assemblées  ou 
Conciles,  qui  se  réunissaient  généralement  à  Tolède  et 
concentraient  dans  leurs  mains  des  pouvoirs  fort  éten- 
dus pour  rappeler  au  souverain  la  maxime  fondamen- 
tale :  Rex  eris  si  recte  fadas  ;  si  non  facias,  rex  non 
eris.  Iloi  tu  seras  si  tu  lais  droit  ;  si  lu  ne  le  lais,  roi  ne 
scias  ».  Après  la  destruction  de  l'Empire  des  Goths  les 
principes  du  gouvernement  représentatiffurenl  adoptes 
par  les  conquérants  arabes  et,  pendant  le  cours  de  six 
siècles,  jusqu'au  règne  d'Alphonse  le  Sage,  la  coutume 
des  assemblées  fut  religieusement  respectée  par  les  rois 
Maures. 

Les  Conciles  des  Visigoths  s'étaient,  d'autre  part, 
maintenus  dans  les    Vs  tu  ries. 

[la  se  composèrent  d'abord  de  chefs,  appelés  à  déli- 
bérer sur  les  expéditions  à  entreprendre  contre  les  In- 
fidèles Plus  tard,  ils  se  régularisèrent  et  devinrent  des 
assemblées  composées  d'évéques,  de  chefs  guerriers,  de 
potestades,  magistrats.  Ces  conciles,   qui    prirent   plus 


()  B8PAQNI 

lard  le  nom  de  Curies,  d'où  l'on  a  fait  celui  île  Cor  tes, 
vutaiont  les  lois  et  élisaient  le  ltoi. 

A  ces  Curies  ou  Cortès  primitives,  les  soldats  et  le 
peuple  de  la  ville,  siège  de  la  réunion,  pouvaient  assis- 
ter en  spectateurs  ;  parfois  même  on  demandai t 
au  peuple  île  ratifier  les  décisions  de  l'Assemblée. 

11  en  fut  ainsi  au  Concile  de  Jaca  en  io03. 

En  Castille,  sous  le  nom  d'Eslamienios,  en  Vxagon 
surtout  sous  le  nom  de  Corlh,  nous  voyons  de  véri- 
tables Etats  généraux  composés  de  quatre  ordres  : 
brazos,  clergé  mitre,  ricos  hombrea,  première  classe  de 
nobles,  hidalgos,  deuxième  classe,  et  proouradores, 
représentants  du  tiers-état,  élus  par  les  magistrats 
municipaux,  lesquels  étaient  eux-mêmes  eboisis  par 
les  chefs  de  Camille  jouissant  du  droit  de  cité. 

Le  Roi  présidait  en  personne  ou  par  délégué,  mais  il 
ne  pouvait  ni  suspendre  ni  dissoudre  les  Cortès.  Les 
propositions  mises  aux  voix  devaient  réunir  l'unani- 
mité pour  être  valables.  La  session  dissoute,  deux 
membres  élus  restaient  chargés  du  pouvoir  souverain 
et  l'on  se  rappelle  la  célèbre  formule  d'investiture  par 
laquelle  le  Grand  Justicier  déclarait  au  Hoi  au  nom 
des  Cortès  d'Aragon  :    «  Sous  qui    valons   autant  que 

\d\\s  cl  qui  pouvons  plus  que  vous,  nous  vous  taisons 
ii. .lie  Roi  à  la  condition  que  VOUS  respecterez  nos 
fiierns  ;  sinon,  non  >•  . 

foutes     les     elasses    qui    fol  niaient     la      société     du 

Moyen  \-*-.  a  ôcril  Mignet,  mi  avaienl  concouru  à 
la  délivrance  de  l'Espagne  :   le  clergé   par   ses  ordres 

'i     Introduction  :>>  l'histoire  'I'1  la  lucoaMion  d'Espagne. 


LA     CONSTII  I    I  ["S 


de  chevalerie  militaire,  la  noblesse  par  tes  armes,  les 

villes  par  leurs  milices  cl  leur  argent.  Elles  avaient 
joui  eu  retour  d'une  indépendance  Bouveraine.  Chaque 
classe  avait  ses  droits,  chaque  partie  de  l'Espagne  ses 
privilèges.  Ceux  de  la  Caslille  différaient  de  ceux  de 
l 'Aragon,  ceux  de  l' Aragon  de  ceux  de  la  Catalogne, 
de  la  Navarre,  des  provinces  hasques,  lesquels  ne  se 
ressemblaient  pas  entre  eux...»  Mais  aussitôt  l'illus- 
tre historien  ajoute  «  C'est  contre  cette  liberté, 
qui  avait  entretenu  le  mouvement  intérieur -de  l'Es- 
pagne h  facilité  la  conquête  de  toute  la  péninsule  sui- 
tes Arahes  que  s'éleva  la  nouvelle  dynastie  autri- 
chienne ». 

Déjà  Ferdinand  le  Catholique  et  Isabelle  n'assem- 
blaient les  Cortès  qu'à  contre-cujur,  cherchant  par 
tous  les  moyens,  abu9  de  pouvoir  ou  corruption,  à 
ruiner  leur  autorité. 

Quand  Charles -Quint  eul  réuni  la  dignité  impériale 
à  la  souveraineté  <le  l'Espagne,  des  Deux-Siciles,  des 
Pays-Bas,  des  immenses  possessions  de  l'Amérique, 
comment  h-  souverain  d'un  empire  «  où  le  soleil  ne  se 
couchait  pas»  eut-il  accepté  de  son  plein  gré  de  laisser 
discuter  ses  projets  de  domination  universelle  par  de 
prétendues  assemblées  nationales  i1 

Un  éclat  de  rire  du  Souverain  répond  à  la  supplique 
des  Cortès  réclamant,  en  i.V><->,  en  échangedes  subsides 
qu'on  leur  demande  de  voter,  o  l'abolition  des  candi- 
datures officielles,  la  périodicité  des  séances,  la  rému- 
nération des  députés  par  les  \illes>>.  Les  Cortès 
dissoutes  cherchent  en  vain  à  protester  et  à  organiser  la 
résistance  dans   le   royaume.    Le  champion   «le  leurs 


droits,  Don  Juan  de  Padilla,  esl  écrasé,  en  i5âi,  a 
Villalar  par  les  troupes  flamandes, 

Philippe  II  poursuit  avec  plus  de  rigueur  encore  la 
politique  absolutiste  de  son  père.  \n\  remontrances  ou 
aux  vœux  des  Cortès,  il  répond  laconiquement  :  «  En 
cela  on  agira  selon  ce  qui  conviendra  le  mieux  à  notre 
service  »,  et  il  fait  avancer  un  corps  de  troupes  étran- 
gères en  Vxagon  pour  dompter  toutes  tentative*  de 
résistance.  Le  grand  justicier,  Don  Juan  de  Lanu/a 
qui.  proclamant  la  liberté  violée,  a  voulu  armer  les 
milices,  esl  brûlé  vif.  C'en  est  fini  du  pouvoir  des 
Corlès,  qui  ne  devront  plus  être  assemblées  que  pour 
reconnaître  le  Roi  à  son  avènement  et  pour  enregistrer 
les  impôts. 

L'Espagne  du  Moyen  Age  avait  eu  l'iionncur  de 
dévaluer  l'Angleterre  dans  la  voie  du  régime  représen- 
tatif et  elle  axait  même  donné  les  premiers  exemples 
de  tolérance  religieuse  aussi  bien  que  de  liberté  cons- 
titutionnelle, c  Dans  les  territoires  émancipés  par  la 
Croix,  constate  un  écrivain  espagnol,  comme  dans  (es 
terres  assujetties  par  le  Coran,  chrétiens,  juifs,  mu- 
sulmans    vivaienl     réunis,    pratiquant    chacun    leur 

culte    i    ...  L'Espagne  des  temps  i lernes  va  devenir 

le  pays  de  la  monarchie  absolue,  du  Saint-Office  de 
l'Inquisition.  L'inquisition  ne  sera  pas  seulement  le 
plus  odieux  instrument  de  l'intolérance  religieuse,  elle 

sera  le  plus  abominable  inslniinenl  de  règne.  Le  tri- 
bunal spirituel  au  service  'lu  trône  ajoutera  à  la  puis- 

i     lureliano  Fernandez-Guera,  discourt  prononcé  devant 

l'A'  .i<  1. 1 1 1 1  ■  espagnole  le  1 3  avril  i  v7;. 


I.A    CONSTITI    rioN 


sancc  royale  l'empire  des  consciences  Sun-  le  prétexte 
d'hérésie,  des  juges  omnipotents  poursuivront  tout  ce 
qui  gênera  L'arbitraire  du  prince  et  le  bras  royal  attein- 
dra d'indéfinissables  délitsdont  aucunejustice  humaine 
n'aurait  pu  connaître. 

Tandis  qu'à  la  suite  de  la  Renaissance,  l'Europe  en- 
tière s'est  vue  secouée  par  un  souffle  d'émancipation, 
la  monarchie  espagnole  va  personnifier,  sur  tous  les 
points  du  globe,  l'absolutisme  poussé  aux  dernières 
limites,  l'intolérance  fanatique,  la  résistance  aveugle  à 
tout  progrès. 

Au  cours  d'un  demi -siècle,  «  quand  l'Espagne 
remue,  le  monde  tremble  »  ;  mais  il  \  avait  une  dis- 
proportion démesurée  entre  l'étendue  des  entreprises 
des  Rois  catholiques  et  les  ressources  de  leur  royaume. 
Dans  les  luttes  sans  merci  de  la  Maison  d'Autriche 
poursuivant  son  rêve  de  domination  mondiale,  la  na- 
tion espagnole  s'épuise  tandis  que,  chez  les  successeurs 
de  Charles-Quint  les  facultés  vont  en  s'amoindrissant 
de  génération  en  génération  pour  arriver  à  la  décré- 
pitude. 

Philippe  11  a  voulu  (pie  l'Espagne  fût  préservée  de 
«  toute  contagion  intellectuelle  »  et  les  ténèbres  se 
sont  épaissies.  L'expulsion  des  Maures  et  des  Juifs 
a  ruiné  dans  la  péninsule  ibérique  toute  industrie 
et  tout  commerce.  Déjà,  la  découverte  de  l'Amérique 
avait  eu  pour  conséquence  d'entraîner  au  delà  de 
l'Atlantique  tous  les  jeunes  gens  d'audace  et  d'énergie 

partis  à  la  conquête  de  l'Eldorado  el  de  priver  la  mère- 
patrie  de  ses  éléments  les  mieux  trempés,  Seuls,  les 
faibles,   les  indolents  étaient    restés,  en  perdant  toute 


1(>  ESPAGNE 

aptitude  au  travail,  L'or  du  monde  affluait,  k.  quoi 
bon  travailler  quand  la  richesse  venail  sans  effort  ? 
L'Espagne  au  lieu  de  produire  achetait  ;  dans  les  \illes. 
jadis  industrielles  comme  Séville  et  Tolède,  les  ateliers 
se  fermaient  par  milliers  et  les  champs  restaient  en 
friches  à  la  porte  même  des  villages.  Quand  des  guerres 
malheureuses  eurent  ruiné  le  trésor  et  que  les  colonies 
eurent  cessé  de  nourrir  la  mère  pairie,  tous  ceux  dont 
l'incurable  indolence  s'était  accoutumée  à  l'oisiveté 
semblaient  incapables  du  moindre  effort  de  relèvement. 
L'Espagne,  comprimée  par  l'inquisition  n'avait  plus 
aucune  part  dans  le  mouvement  de  l'esprit  européen. 
Suivant  la  rude  expression  de  Saint  Simon.  l<  la  science 
était  un  crime,  l'ignorance  et  la  stupidité  la  première 
vertu  i).  La  mort  apparaissait  partout,  dans  la  nation 
par  la  ruine  de  ses  libertés  ;  dans  le  gouvernement  par 
la  destruction  de  ses  finances,  de  ses  armées,  de  sa  ma- 
rine ;  dans  le  peuple  par  l'inaction  et  la  misère  ;  dans 
la  dynastie  par  la  dégénérescence  de  la  race. 

Quand  Charles  11,  «  qui  ne  fût  même  pas  un 
homme  »  (1)  disparut,  l'impression  universelle  était  que 
l'Espagne  agonisait.  Sa  population,  qui  était  de  30  mil- 
lions sous  la  domination  des  Vrabes  était  tombée  à 
(i    million^  et  l'Espagnol   avait  tOUt  perdu,  j u-i pi  .1  s,,,, 

vieux  renom  de  vaillance. 

L'avènement  des  Bourbons  avec  1<<  petit-fils  de 
Louis  JtIV,  apporta  un  espoir  de  régénération  (mue 
saurait  sans  injustice  méconnaître  les  efforts  généreux 
du    lils   de   Philippe  V  ci  d'Elisabeth  Farnèse.  du  roi 

Mignel 


LA    OONfl  un  mon  1  1 

Charlei  111  pour  réparer  les  désastres  de  guerres  mal- 
heureuses, relever  sou  royaume,  restaurer  ses  finances, 
Faire  renaître  les  forces  vives  de  son  pays.  Secondé  par 
un  ministre  habile,  tflorida-Blanca,  il   accomplit,    en 

dépit  d'opiniâtres  résistances,  une  œuvre  hardie  de 
réformes.  «  Les  Espagnols,  répétait-il,  sont  comme  les 
enfants  qui  crient  quand  on  les  lave  ». 

Mais,  avec  le  triste  successeur  de  Charles  III,  la  mo- 
narchie espagnole  allait  retomber  au  dernier  degré 
de  rabaissement.  Dénué  de  toute  intelligence  et 
incapable  «le  tout  effort,  Charles  l\  regarde  comme 
un  bienfait  du  ciel  que  sa  femme,  la  reine  Marie- 
Louise  de  Parme,  veuille  bien  régner  pour  lui.  Dis- 
solue comme  une  princesse  du  Bas-Empire,  la  reine 
est  allée  chercher  dans  les  rangs  d'une  compagnie  des 
.ni ides  du  corps  l'amant  attitré  dont  elle  a  fait  le  maître 
de  l'Espagne.  Depuis  vingt  ans,  Emmanuel  <iodoy  gou- 
rerne.  Il  est  premier  ministre,  duc  d'Alcudia,  prince 
de  la  Paix,  généralissime  des  années  de  terre,  grand 
amiral  ;  la  reine  a  voulu  qu'il  fût  allié  au  sang  royal 
et  elle  lui  a  livré  en  mariage  la  propre  nièce  du  roi, 
l'infante  Maria-Luisa  de  Bourbon,  tandis  qu'elle  reste 
sa  maîtresse  et  que,  pour  garder  ses  faveurs,  elle 
s'abaisse  à  les  partager  avec  les  deux  sœurs  Tudo,  aux- 
quelles elle  lait  conférer  des  titres  de  noblesse.  Soug  ce 
régime  d'abjection,  la  monarchie  espagnole  êtail  rede- 
venue en  1807  ce  qu'elle  était   en   1701.  Thi ers  a  tracé 

un  saisissant   tableau  du   lamenlahle  étal    OU    le     Prime 

de  la  Paix  avait  réduit  le  royaume.  o  Plus  de  finances, 
conclut-il,  plus  de  marine,  j >ï 1 1  s  d'armée,  plus  de  po- 
litique,    plus    d'autorité    sur    des    colonies    prêtes    à    se 


12  BSPAGNl 

révolter  ;  plus  de  respect  de  la  part  d'une  nation  indi- 
gnée, plus  de  relations  avec  l'Europe,  qui  dédaignai! 
une  cour  Lâche,  perfide  el  sans  volonté  »  (i). 

C'esl  alors  que  se  produit  le  coup  de  théâtre  qui  va 
marquer  pour  l'Espagne  le  point  de  départ  de  l'évo- 
lution constitutionnelle  dont  nous  devront  suivre  le 
développement  au  cours  du  m\  et  du  \\"  sied 


Depuis  longtemps,  la  Heine  haïssait  son  fils  aine,  le 
prince  des  Asluries,  dans  lequel  elle  redoutait  de 
trouver  un  juge  sévère  pour  ses  désordres  et  un  enne- 
mi implacable  pour  (iodov.  Ce  n'était  un  mystère 
pour  personne  qu'elle  cherchait  à  faire  écarter  de  la 
succession  au  trône  celui  (jui  devait  être  Ferdinand  VII. 
Averti,  il  avait  voulu  prendre  les  mesures  nécessaires 
pour  parer  au  danger  dont  il  était  menacé  et,  eu  même 
temps,  pour  s'assurer  la  protection  toute  puissante  de 
Napoléon,    il    avait,    par    une  lettre    secrète    sollicité 

la  main  d'une  princesse  de   la  famille  Bonaparte. 

Brusquement,  on  apprend  le  27  octobre  1807  que 
le  prince  «les  \*iiiiies  vient  d'être  arrêté  sur  un  ordre 
du  Roi  nu  plutôt  sur  un  ordre  de  la  Reine  signé  du  Roi. 
Le  prince  est  accusé  de  1  onspiration  contre  la  sûreté  de 
l'Etat;  Son  dessein  était,  prétend-on,  défaire  périr  sa 
mère  et  de  s'emparer  de  La  couronne  en  forçant  le  roi  à 
abdiquer.  Des  juges  lui  étaient  donnés,  à  «pu  la  Reine 
demandait    déjà   la  tête  de  son  fils.  Une  proclamation 

1  )  Histoire  'lu  <  lousulal  el  de  l'Empire, 


I  \    CONSTITUTIOK  13 

envoyée  dana  les  provinces  annonçait  le  crime  du  prince 
des  Asturies  à  toute  L'Espagne  tandis  qu'une  Lettre 
de  Charles  l\  à  Napoléon  portail  : 

«  ...  Mon  Bis  l'héritier  présomptif  < le  mon  trône 
avait  formé  le  complot  horrible  <l<'  me  détrôner;  il 
s'était  porté  jusqu'à  L'excès  d'attenter  ;'i  la  vie  «le  sa 
mère.  I  n  ;ittontal  si  affreux  doit  être  puni  avec  la  ri- 
gueur la  plus  exemplaire  des  lois.  La  loi  qui  l'appelait 
à  la  succession  doit  être  r-évoquée  ;  un  de  ses  frères  sera 
plus  digne  de  le  remplacer  et  dans  mon  cœur  et  sur  le 
Irônc  Je  suis  en  ce  moment;!  la  recherche  de  ses  com- 
plices pour  approfondir  ce  plan  de  la  plus  noire  scélé- 
ratesse <'|  je  ne  veux  pas  perdre  un  seul  moment  pour 
en  instruire  Votre  Majesté  impériale  et  royale  en  la 
priant  de  m'aider  de  ses  Lumières  et  de  ses  conseils.  » 

Pour  obtenir  sou  pardon,  Le  prince  des  Asturies  ré- 
vèle lâchement  les  noms  des  complices  de  ta  prétendue 
conspiration,  qui  n'avait  rien  de  criminel  puisqu'elle 
tendait  simplement,  au  cas  de  décès  de  Charles  l\  .  à 
sauvegarder  les  droits  Légitimes  de  L'héritier  de  la  Cou- 
ronne. Le  procès  des  ci  complices  i>,  du  doc  de  L'Infan- 
lado,  du  comte  de  l'iondi  Blanca,  du  chanoine 
Escoïquiz,  ancien  précepteur  du  prime,  déchaîne  la 
plus  vive  agitation.  On  n'ajoute  pas  foi  à  la  conspira- 
tion; on  accuse  la  reine,  on  accuse  Godoy  d'avoir 
ourdi  nue  machination  infâme  pour  perdre  le  prince 
dans  Lequel  la  nation  plaçait  tous  ses  espons  de  régé- 
nération. Les  juges  nommés  pour  condamner  se  voient 

forcés  par  l'opinion  île  prononcer  l'acquittement   tandis 

que  la   famille  royale  s'en  va  cacher  sa  honte  à  Vran- 
juez.    Devant    la  clameur  d'indignation    furieuse  qui 


Il  B9P  \t.\l 

monte  contre  Godoy,   les  souverains  espagnols  agitent 

le  projet  d'abandonner  l'Kspa^ne    comme    la    dynastie 

de  Bragance  avail  abandonné  Le  Portugal  pour  aller 
régner  sur  l'Amérique,  mais  la  foule  avertie  envahit  le 
Palais.  Godoy,  un  œil  presque  enlevé  de  son  orbite, 
est  arraché  a  grand'peine  aui  fureurs  populaires  el 
Charles  L\  se  voil  forcé  d'abdiquer  en  laveur  du  prince 
des  Aaturies,  proclamé  roi  sous  le  nom  de  Ferdi- 
nand VII. 

La  proclamation  du  nouveau  souverain  esl  accueillie 
avec  des  transports  d'enthousiasme,  mais  la  reine 
a  décidé  (maries  IV  à  en  appeler  à  l'Empereur  «les 
Français. 

«  Je  ne  me  suis  démis  de  la  couronne  en  faveur  de 
mon  fils,  déclare  le  roi  déebu,  que  par  la  force  des 
circonstances,  el  Lorsque  le  bruit  des  armes  et  la  cla- 
meur d'une  garde  insurgée  me  faisaient  assez  connaître 
qu'il  fallait  choisir  entre  La  vie  et  la  mort  qui  aurait 
été  suivie  de  celle  de  la  reine,  J'ai  été  forcé  d'abdiquer, 

mais,    rassuré   aujourd'hui    et     plein  de  confiance  dans 

la  magnanimité  du  grand  homme  qui  s'esl  toujours 
montré  mon  ami,  j'ai  pris  la  résolution  de  m'en  re- 
mettre à  lui  en  tout  ce  qu'il  voudra  bien  diiposeï  de 
nous,  de  mon  sort,  de  celui  de  la  reine  el  du  prinee  de 

la  Paix.  Je  proteste  el  déclare  Bolennellemenl  que 
l'acte  d'abdication  signé  par  moi  estnul  dans  toutes  ses 
partiel 

Nous  n'avons  pas  à  retracer  ici  les  ténébreuses  intri- 
gues qui  amenèrent  à  Bayonne  te  pèreel  le  (ils  pour 
faire  Napoléon  juge  de  Leui  différend,  non  plus  que  la 
scène  i    curante  qui  se  produisit  en  ire  Ferdinand  \  Il 


I.A    CONSTITUTION  15 

et  les  souverains  dépossédés i  se  dénonçant  l'un  L'autre 

à  la  puissance  dont  ils  dépendaient. 

L'Empereur  signifia  d'un  ton  froid  et  impérieux  au 

prince  des  Asturics  que  si,  le  soir  même,  il  n'avait  pas 
résigné  la  couronne  à  son  père,  on  le  traiterait  en  lils 
rebelle,  auteur  ou  complice  d'une  conspiration  qui 
dans  les  journées  des  17,  [8  el  19  mars  1 808  avait 
abouti  à  priver  de  son  trône  le  souverain  légitime. 

Cette  signification  faite,  Napoléon  exigeait  que 
Charles  IV,  reconnaissant  l'impossibilité  où  il  était,  lui 
et  sa  famille,  d'assurer  le  repos  do  l'Espagne,  cédât  la 
couronne  dont  il  se  déclarait  possesseur  légitime  à 
L'Empereur  des  Français,  «  pour  en  disposer  comme  il 
lui  conviendrait  ». 

Les  conditions  de  la  cession  étaient  les  suivantes  : 

L'intégrité  du  royaume  d'Espagne  devait  être  main- 
tenue. 

L'Empereur  recevrait  en  fiance  le  roi  Charles  l\  , 
la  reine  et  le  prince  de  la  Paix.  Ils  conserveraient  le 
rang  qu'ils  avaient  en  Espagne. 

Le  Palais  de  Compiègne  leur  serait  affecté  avec  la 
forêt  et  toutes  ses  dépendances. 

I  ne  somme  de  3o  millions  de  réaux  leur  serait 
allouée  tous  les  ans  à  titre  de  liste  civile.  Le  douaire  de 
la  reine,  si  le  roi  venait  à  mourir  avant  elle,  serait  de 
a  millions  par  an. 

Une  rente  annuelle  de  '100000  francs  serait  consti- 
tuée au  profil  de  chacun  des  infants  d'Espagne. 

Enfin,  L'Empereur  donnait  au  roi  Charles  Le  château 
de  Chambord  avec  ses  dépendances. 

Ce  traité,  négocié  avec  le  prince  de  la  l'aix  pour  !<• 


]  6  I  BP  \'.M 

ici  Charles,  fui  accepté  le  même  jour  par  le  prince  des 
Aaturies. 

Il  devait  se  retirer,  lui  aussi,  en  France,  en  con- 
servant son  titre  d'Altesse  royale.  La  France  lui  attri- 
buerait, en  toute  propriété  à  lui  el  à  ses  descendants, 
les  palais,  parcs  el  fermes  de  la  Navarre  jusqu'à  la 
concurrence  de  5oooo  arpents.  Il  recevrait  en  outre 
sur  le  trésor  de  la  France  '100000  livres  de  rente  apa- 
nagère  garantie.!  ses  descendants  ;  plusdooooo  fr,  par 
an,  sa  vie  durant. 

Tel  était  l'acte  qui  mettait  lin  au  règne  de  la  dy- 
naslie  des  Bourbons. 

La  proclamai  ion  suivante  était  adressée  par  Napoléon 
aux  espagnols. 

a  Espagnols,  après  une  longue  agonie,  votre  nation 
périssait;  j'ai  vu  vos  maux  ;  je  vais  y  porter  remède  ; 
votre  grandeur,  voire  puissance  font  partie  de  la 
mienne. 

-  princes  m'ont  cédé  tous  leurs  droits  à  la  cou- 
ronne des  Espagnes.  Je  ne  veux  point  régner  sur  vos 
provinces,  mais  je  veux  conquérir  des  titres  éternels  à 
la  reconnaissance  de  votre  postérité. 

\  ..ire  monarchie  esl  vieilli'  ;  ma  mission  est  de  la  ra- 
jeunir. J'améliorerai  toutes  vos  institutions,  el  je  nous 

ferai  jouir,  si  vous  secondez,  des   bienfaits  d'une 

réforme  sans  froissements,  sans  désordre  el  sans  con- 
v  ulsions. 

Espagnols,  j'ai  fail  convoquer  une  assemblée  gé- 
nérale des  députations  des  provinces   i-l    di's   villes.    Je 

vem  m'assurci  |> oi-mê me  de  vos  désirs  el  de  vos 

besoins. 


LA    CONSTITUTION  I" 

«  Je  déposerai  alors  toua  mes  droits  el  je  poserai 
votre  glorieuse  couronne  sur  la  tête  d'un  autre  moi- 
même  <-'n  vous  garantissant  une  constitution  qui  con- 
cilie la  sainic  et  salutaire  autorité  du  Souverain  avec 
les  libertés  el  les  privilèges  de  la  Nation. 

«  Espagnols,  souvenez-vous  de  ce  qu'ont  été  vos 
pères  cl  voyez  ce  que  vous  êtes  devenus.  La  faute  n'en 
est  pas  à  vous,  mais  à  la  mauvaise  administration  qui 
vous  a  régis.  Soyez  pleins  d'espérance  et  de  confiance 
d.nis  les  circonstances  actuelles;  car  je  veux  que  vos 
derniers  neveux  consacrent  mon  souvenir  en  disanl  : 
((  Il  est  le  régénérateur  de  notre  Patrie  ». 

Le  7  juillet  1808,  la  Junte  réunie  à  Bayonne  pro- 
clamait r<ii  d'Espagne  Joseph  Bonaparte,  roi  de  Naples, 
et  soumettait  à  son  acceptation  la  constitution 
qu'avaient  rédigée  des  députés  venus  des  diverses 
provinces  du  royaume  el  appartenant  par  leur  nom, 
leur  rang  ou  leur  crédit,  aux  classes  les  plus  élevées 
de  la  Nation. 

Cette  constitution  était  modelée  sur  la  constitution 
delà  France,  sauf  quelques  modifications  appropriées 
aux  mœurs  de  l'Espagne. 

Elle  pouvait  se  résumer  dans  les  dispositions  essen 
tielles  suivantes  : 

Une  royauté  héréditaire  transmissible  de  mâle  en 
mâle,  par  ordre  de  primogéniture,  réversible  de  la 
branche  de  Joseph  à  celles  de  Louis  ou  de  Jérôme  Bo- 
naparte, ne  pouvant  jamais  être  réunie  à  la  couronne 
de  France,  ce  qui  devait  assurer  l'indépendance  de 
l'Esp  i-  ne. 

I  11  Sénat,  composé  de   a  1  membres,  chargé  comme 

2 


18  BSPAGNl 

le  Sénat  de  l'Empire  français  de  veiller  au  respect  de 
la  constitution.  Ce  Sénat  recevait  le  pouvoir  de  ga- 
rantir la  liberté  de  la  presse  et  la  liberté  individuelle  par 
l'intermédiaire  d'une  commission  chargée  de  dénoncer 
les  circonstances  dans  lesquelles  l'une  ou  l'autre  de  ces 
libertés  aurait  été  violée. 

I  ne  assemblée  de  Cortès,  comprenant  sous  le  nom 
de  banc  du  clergé,  "">  évêques  désignés  parle  roi;  BOUS 
le  nom  de  banc  de  la  noblesse,  i5  grands  d'Espagne  dé- 
signés par  le  roi  ;  Oa  députés  des  provinces  d'Espagne 
et  des  Indes,  3a  députés  des  grandes  villes,  10  com- 
merçants notables,  i5  lettrés  ou  savants  représentant 
les  universités  et  les  académies,  tous  élus  par  ceux  qu'ils 
étaient  appelés  à  représenter. 

(  ^eite  assemblée  de  '  lortès  devait  être  réunie  au  moins 
tous  les  trois  ans,  disent.  1  le->  lois  et  arrêter  pour  trois 
ans  les  recettes  et  les  dépenses. 

Une  magistrature  inamovible  recevait  la  mission  de 
rendre  la  justice  d'après  les  formesde  la  législation  mo- 
derne, sous  la  juridiction  d'une  Haute-Cour  qui  n'était 
autre  que  le  Conseil  de  Gastille  conservé  sous  le  titre 
de  Cour  de  '  lassa ti on. 

Enfin  un  Conseil  d'Etat  était,  à  l'exemple  du  Conseil 
d'Etat  de  France,  chargé  du  rôle  de  régulateur  suprême 
de  l'administ  ration. 

La  '  onstitution  ne  contenait  aucunedisposition  rela- 
tive à  l'inquisition  non  plus  qu'au  <  lergéel  à  lanoblet 
mais  des  décrets  postérieurs  dcvaienl   supprime!    l'in 
quisition    comme   attentatoire  a   la    souveraineté   de 
l'autorité   civile,     réduire    !<•    nombre    des    couvents 
en   assurant    une    retraite    bonorable    aux    religieux 


I  \    C0N81  II  i   1 1<  >n  19 

<jiii  m  mil, lient  renoncer  à  la  vie  commune,  Faire  servir 
une  partie  des  biens  des  cloltrei  luppprimés  6  ac- 
croître la  portion  congrue  des  curés  des  campagnes, 
abolir  les  droils  féodaux,  enfin  abattre  les  barrières 
existant  de  province  à  province  et  transporter  les 
di Mianes  aux  Frontières. 

On  sait  par  quelle  explosion  d'indignation  l'Espagne 
accueillit  la  nouvelle  de  la  double  abdication  arrachée  à 
Charles  l\  et  à  Ferdinand  VII.  Partout  l'orgueil  na- 
tional, cruellement  blessé  à  l'idée  de  voir  imposer  à 
l'Espagne  une  dynastie  étrangère,  éclate  en  une  fureur 
patriotique,  partout  c'est  l'insurrection  spontanée,  la 
création  de  juntes  révolutionnaires,  on  les  pins  grands 
seigneurs  siègent  à  côté  des  plus  vils  agitateurs  de  la  rue. 
Les  moines  surtout  ont  pris  la  direction  du  mouve- 
ment. Le  crucifix  à  la  main,  ils  prêchent  la  guerre  à 
outrance  contre  les  Français  dénoncés  comme  les  enne- 
mis de  la  foi  catholique. 

\n\  armes  !  aux  armes  !  si  vous  ne  voulez  pas  (pic 
vos  femmes,  que  vos  filles  soient  violées  par  les  bar- 
bares ;  (pie  vos  champs  soient  ravagés  et  vos  maisons 
brûlées;  si  vous  ne  voulez  pas  être  gouvernés  par  le 
Code  Napoléon,  par  un  Code  sanguinaire,  calculé  sur 
la  guerre  éternelle,  dont  la  conscription  et  la  révolu  lion 
sont  l'essence!...  Armons-nous  1  armons  nous  contre 
un  tyran  exécrable,  contre  celui  qui  n'a  ni  loi  ni  loi  ! 
Quels  droits  a  donc  sur  nous  cet  étranger?  Quels  biens 
avons-nous  à  attendre  de  l'ami,  du  protecteurde  Godo)  ' 
S'il  n'était  pas  son  complice,  aurait-il  arraché  cet  in- 
fâme à  I  l'clialaud  !  Celui  que  vous  combattez  esl  mi 
impie!    Il    a  relevé    le    temple   des    Juifs,    dépouillé   le 


20  l SPAGKE 

pape  «lo  sos  domaines  ;  il  ébranlerai!  l'Église  si  l'Enfer 
pouvait  prévaloir  contre  elle.  Vous  combatte/  pour 
votre  terre  natale,  vos  propriétés,  mis  lois,  voire  re- 
ligion, votre  vie  avenir.  Armez  vos  esprits  de  la  crainte 
de  Dieu.  Implore/  le  secours  de  la  \  ierge  :  la  Sainte 
mère  de  Dieu  ne  vous  abandonnera  pas  dans  une  si 
juste  cause  !  ». 

El  la  guerre  se  poursuit  implacable  entre  Napoléon 
et  la  nation  espagnole  soulevée.  Ce  n'est  plus  la  grande 
guerre  européenne  qui  se  termine  par  une  bataille 
rangée  ou  par  la  prise  d'une  position  stratégique  capi- 
tale, c'est  la  lutte  contre  tout  un  peuple,  contre  une 
insurrection  sans  cesse  renaissante,  contre  des  guérillas 
se  dispersant  devant  les  troupes  envoyées  contre  «Iles 
et  se  réunissant  le  lendemain,  qu'il  faut  poursuivre  de 
montagne  en  montagne,  de  défilé  en  défilé,  de  village  en 
village.  Deux  mois  de  combat  acharné  dans  les  rues  cl 
les  maisons  de  Saragosse  sont  nécessaires  pour  dompter 
sa  résistance.  L'habileté  des  meilleurs  lieutenants  de 
Napoléon,  Masséna,  Ney,  Bessière,  Soult,  Suchet,  Mai- 
mont,  le  courage  de  nos  soldats  échouent  dans  cette 
guerre  funeste  qui,  en  cinq  ans,  coûtera  plus  de 
iioo.ooo  hommes  à  la  France  et  finira  par  amener  les 
Anglais  alliés  des  Espagnols,  du  détroit  de  Gibraltar 
el  de  l'embouchure  du  Tage  jusqu'aux  Pyrénées,  jus- 
qu'à Toulouse  el  a  Boi  de. m  \ 

Mais,  particularité  étrange,  cette  guerre  <pii  se  taisait 

au  nom  de   Ferdinand   >    I  Idolâtré  n   pour  défendre 

ii    régime   contre    les    idées    de    la    Révolution 

ii  ,i\.ui  pu  se  soutenir  qu'en  B'inspirant  des  principes 

démocratiques,     Pour    soulevei     les    masses    contre 


I.\    CONSTITUTION  'J  I 

l'él  r  .1  r i uor,  comme  pour  les  faire  marcher  jadis  à  l'assaul 
de  l'Infidèle,  il  avait  fallu  s'appuyer  sur  les  vieilles 
traditions  de  liberté  qui  avaient  Henri  à  L'ombre  de 
l'arbre  de  '  luernica. 

Les  patriotes  soulevés  contre  la  domination  étran- 
gère avaient  dû  improviser  un  gouvernement  comme 
ils  avaient  improvisé  des  milices  et  des  guérillas.  L'in- 
vasion française  en  détruisant  l'ancien  régime  espa 
gnol  avait  obligé  l'Espagne  révoltée  à  en  concevoir 
un  nouveau.  Bien  que  l'Espagne  n'eût  point  com- 
mencé  sa  révolution  comme  la  France  en  178g  par 
une  explosion  de  libéralisme,  qu'elle  l'eûl  commencé 
au  contraire  par  une  explosion  de  royalisme,  elle  allait 
par  la  force  irrésistible  des  idées,  aboutir  en  fait,  au 
même  point  cjuc  la  France  révolutionnaire.  Vn  parti 
d'hommes  éclairés,  en  effet,  s'était  formé  qui  avait  ap- 
pris des  Français  la  régularité  dans  l'administration  et 
des  Anglais  le  contrôle  parlementaire  et  qui  entendait 
profiter  de  l'absence  du  souverain  interné  en 
France  pour  opérer  les  changements  commandés  par 
l'expérience  des  temps  et  rendre  à  Ferdinand  \ll,  à 
son  retour,  une  Espagne  réformée  et  rajeunie.  Il  esti- 
mait d'autre  part  nécessaire  de  réformer  les  abus 
de  l'ancien  régime  pour  enlever  à  Napoléon  la  -eu le 
excuse  dont  d  pût  colorer  sa  conduite,  l'excuse  de 
n'avoir  envahi  l'Espagne  que  pour  la  régénérer. 

Le-  juntes  révolutionnaires  qui  s'étaient  constituées 
surtous  le- points  lu  territoire  s'étaient  reliées  d'abord 
à  des  juntes  provinciales,  puis  à  une  junte  centrale 
qui  siégeai)  à  Cadix  :  celle-ci  ne  larda  pas  à  recon- 
naître la  nécessité  de  céder  la  place  à  de  véritables  re- 


'2'2  1  MU. M 

présentants  de  la  nation.    Elle  décréta  la  convocation 
des  I  iortès. 

Les  Cortès  qui  furent  appelées  à  se  réunira  Cadix 
n'avaient,  en  réalité,  que  le  nom  de  commun  avec  les 
Cor  tes  traditionnelles  on  siégeaient  des  grands  et  des 
prélats.  Sons  la  pression  populaire,  les  nouvelles  Gortès 
constituaient  une  véritable  assemblée  nationale, 
élue  par  nue  sorte  de  suffrage  à  trois  degrés.  Elles  ollïi 
rent  immédiatement  la  plus  grande  analogie  avec  nos 
I  -t.it-  généraux  de  1789. 

Les  provinces  castillanes  occupées  par  les  armées 
françaises,  n'avaient  pu  désigner  leurs  députés  : 
c'étaient  les  représentants  des  provinces  maritimes  de 
la  Catalogne,  de  Cadix,  de  la  Galice  qui  formaient  la 
majorité.  Or  ce  sont  toujours  ces  provinces  qui, 
moins  fermées  aux  idées  du  dehors,  ont  personnifié  en 
Espagne  les  revendications  démocratiques. 

I.  assemblée  se  divisa  en  deux  partis  :  les  partisans 
de  l'ancien  régime  (servîtes)  et  les  libéraux  (libérales) 
partisans  d'un  ordre  de  choses  nouveau.  Ces  derniers 
furent  bientôl  les  maîtres  de  l'Assemblée.  Ils  avaient 
pour  eux  l'approbation  bruyante  du  peuple  qui 
comme  au  temps  de  la  Révolution  française,  faisail 
la  loi  dans  les  tribunes,  poursuivant  de  Bes  clameurs 
quiconque  ne  s'inclinait  pas  docilement  devanl  mi 
volontés. 

Le  premier  acte  des  libéraux  s'inspirent  de  l'exemple 
de  nos  Constituants  de  1789  fui  de  déclarer  les  Cortès 
souveraines  el  indissolubles  el  de  décréter  l'abolition  de 
l'ancien  régime,  la  suppression  des  droits  seigneuriaux, 
des  juridictions  patrimoniales,  des  privilèges  des  aoblei 


i.a    CONS  1 1 1 1   i  [ON  23 

ri  de  consacrer  la  liberté  de  la  presse,  affranchie  de  la 
censure. 

La  Constitution  que  votèrent  les  Cortès  en  1*12  ne 
contenait  pas  moins  de  384    articles,    répartis   en  dix 

titres,  divisés  en  chapitres.  Elle  était  en  grande  partie 
calquée  sur  la  Constitution  française  de  1 7 < >  r . 

Après  un  préambule  ou  «  discours  préliminaire, discur- 
so  préliminar  »,  se  référant  aux  vieilles  lois  fondamen- 
tales de  la  monarchie,  protestant  contre  l'idée  d'établir 
dans  le  droit  public  espagnol  des  a  nouveautés 
affirmant  la  volonté  de  «  trier  parmi  les  lois  anciennes 
éparses  ou  sans  ordre  celles  qui  pouvaient  s'harmo- 
niser ».  les  Constituants  de  181 2  proclamaient,  en 
fait,  les  principes  mêmes  delà  Révolution  française  : 

.«  La  souveraineté  réside  essentiellement  dans  la 
Nation  ;  par  suite,  c'est  à  elle  exclusivement  que 
revient  le  droit  de  régler  ses  lois  fondamentales... 

La  Nation  espagnole  est  libre  et  indépendante  et  ne 
peut  être  considérée  comme  le  patrimoine  d'aucune 
famille  ou  personne...  ».  (  1) 

Le  pouvoir  exécutif  était  attribué  au  Roi,  qui  devait 
l'exercer  par  L'intermédiaire  de  ministres  eboisis  en 
dehors  des  Cortès. 

Il  .i\ait  la  sanction  des  lois,  mais  ne  pouvait  opposeï 
pins  de  deux  fois  son  veto  aux  décisions  des  Cortès, 
qui  étaient  investies  de  la  plénitude  du  pouvoir  lé- 
gislatif. 

«  Le  Roi,  était-il  déclaré,  (a)   ne    peut    empêcher, 

1    <  îonstitution,  articles  a  el  3, 
( 2)  Article  172. 


-i  .M 

sous  aucun  prétexte,  la  tenue  des  Cortès  aux  époques 
el  dans  les  cas  désignés  par  la  Constitution  ;  il  ne  peut 
non  plus  dissoudre  ni  gêner  en  aucune  manière  leurs 
séances  ou  leurs  délibérations  ». 

Les  Cortès  devaient  former  une  assemblée  unique, 
composée  de  députés  élus,  au  suffrage  universel  à 
plusieurs  degrés,  pour  une  durée  de  deux  ans  seulement 
el  non  rééligibles. 

La  Constitution  consacrait  le  principe  de  la  sépara- 
tion des  pouvoirs,  réglait  l'organisation  de  la  justice, 
de  l'administration  provinciale,  de  l'instruction  pu- 
blique, de  l'armée  el  de  l'impôt.  Elle  garantissait  la 
liberté  individuelle  et  affirmait  l'égalité  de  tous  les 
citoyens  devant  la  loi. 

La  domination  que  les  moines  exerçaient  sur  une 
population  fanatisée  avait  empêché  les  Constituants 
de  1 8 1 •>  de  reconnaître  la  liberté  des  culte-,  mais  ils 
B'étaienl  refusés  à  rétablir  l'inquisition,  supprimée  par 
les  Français. 

I.i  religion   de  la    nation  espagnole,  déclarait   la 
Constitution,  (1)  est  et   sera  toujours  la  religion  ca 
tholique,  apostolique,  romaine,  la  seule  vraie;  la  Nation 
la  protège  pai  des  lois  sages  et  justescl  interdit  l'exer- 
i  i.  e  de  tout  autre  i  ulte 

La  Constitution  de  [8ia  avait  été  élaborée  en 
dehors  de  toute  participation  de  Ferdinand  \ll  que 
Napoléon  retenait  en  France.  Lorsque,  libéré  par 
la  chute  de  l'Empereur,  Ferdinand  a  l'Idolâtré  » 
annonça  son  retour  dans  ses  états,   il  c mença    par 

i     Vrlîclo  i  a. 


I.\    C0NSTITU1  ION  _■> 

('rrirc  aux  membres  de  la  Régence  qui  avaient  ^rou- 
verné  durant  sa  captivité  que  «  rien  n'occupait  autan I 
sou  cœur  que  de  leur  donner  des  preuves  de  sa  satis- 
faction ».  Aux  Cortès  il  déclara  que  "les  faits  accomplis 
méritaient  son  approbation  royale  ».  Mais  il  ne  devait 
pas  tarder  à  jeter  le  masque.  Supplié  respectueusement 
par  les  Cortès  de  prêter  serinent  de  fidélité  à  la  Consti- 
tution, il  répondit  que  «  sa  volonté  royale  était  non 
seulement  de  ne  pas  jurer  la  Constitution,  nuis  de 
la  déclarer  nulle  ».  Dans  un  manifeste  adressé  à  ses 
sujets,  il  leur  signifiait  que  «  victime  de  la  cruelle  per- 
fidie de  Bonaparte  »,  il  avait  été  retenu  pendantsix  ans 
en  prison,  qu'une  Assemblée  de  Cortès,  convoquée 
d'une  manière  tout  à  fait  inusitée  en  Espagne,  avait 
mis  sa  captivité  à  profit  pour  usurper  ses  droits  et 
pour  imposer  à  ses  peuples  les  lois  les  plus  arbitraires 
ainsi  qu'une  Constitution  anarebique  séditieuse,  basée 
sur  les  prineipes  démocratiques  de  la  Révolution  fran- 
çaise ;  que  dès  lors  il  proclamait  les  dites  institutions 
et  constilu lions  nulles  et  de  nul  effet.  Quiconque  oserait 
exciter  qui  que  ce  fût  à  l'observations  des  dites  consti- 
tutions et  institutions  serait  coupable  du  crime  de  lèse 
majesté  et,  comme  tel,  puni  de  mort  ». 

Ordre  était  donné  de  fermer  la  salle  des  Cortès  et  de 
mettre  leurs  papiers  sous  scellés  tandis  que  33  notables 
du  parti  libéral  étaient  arrêtés.  Le  tribunal  chargé  de 
les  juger  n'ayant  pu   relever  aucun  grief  contre  eux, 

ils  n'en    furent     pas    moins    laissés    eu    prison    pendant 

plus  d'un  an  et  demi.  Enfin,  en  décembre  l8i5,  le 
roi  jugeant  en  personne  sans  même  avoir  pris  con- 
naissance des   actes  de  procédure,  condamna  les   ans 


26  i  SP  \i.m 

'i  trois  ans  de  bagne,  les  autres,  soit  à  l'internement 
dans  un  couvent,  soit  à  l'exil,  ajoutant  qu'à  L'expira- 
tion de  leur  peine,  ils  demeureraient  à  la  discrétion  de 
l'autorité  royale.  Les  membres  du  tribunal  de  Valence 
avaient  été  destitués  pour  avoir  osé  l'aire  frapper  une 
médaille  portant  l'inscription  :  «  Le  Roi  et  la  Cons- 
titution ». 

L'ancien  régime  fut  restauré  tel  qu'il  existait  en  1S08 
et  l'inquisition  fut  rétablie.  Ferdinand  VII  ressuscitait 
tous  les  abus  du  passé  en  v  ajoutant,  vis-à-vis  de  ceux 
qui  l'avaient  replace  sur  son  trône,  l'odieux  de  la 
plus  noire  et  de  la  plus  cruelle  ingratitude. 

Pendant  ce  temps,  les  colonies  espagnoles  se  soule- 
vaient réclamant  leur  indépendance;  Bans  argent,  ^.ms 
marine  et  sans  armée,  Ferdinand  était  impuissant  à 
il  mipter  la  révolte.  L'Espagne  qui  avait  équipé  autrefois 
la  Hotte  de  Lépantc  et  k  l'invincible  Armada  »  en  était 
réduite  à  ne  plus  pouvoir  se  défendre  contre  les 
corsaires.  L'humiliation  nationale  ('tait  à    son    comble. 

Le  iw  Janvier  icS'.>o,  le  lieutenant  colonel  Quiroga 
et  le  chef  de  bataillon  Riego  soulèvent  leurs  soldats 
cantonnés  dans  l'île  de  Léon  au  cri  île  :  k  ^  ive  la 
Constitution  de  t8ia  !  ■>.  Avec  i.5oo  hommes,  Riego 
traverse  Vlgésiras,  Malaga,  Gordoue,  tout  le  midi  de 
l'Espagne.  Le  mouvement  insurrectionnel 
bientôt  presque  tout  le  royaume,  Le  26  lévrier,  les 
colonels  Espinoza  et  Ramon  v  Bagnes  soulèvent  la 
Gorogne ;  le  Ferrol  et  Vigo  suivent  cet  exemple;  le 
général  Espoa  \  Mina  insurge  la  Navarre  et  le  peuple 
de  M.kIi  id  prend lei armes,  Epouvanté,  Ferdinand  VII 
doit  consentir  à  rétablir  U  constitution  de  i.Sia.    Les 


I  \    CONSTITL'TIO»  -  < 

prisons  sont  ouvertes;  les  captifs  mis  en  liberté  ;  l'In- 
quisition et  le-  juridictions  e©  lésiastiques  sont  suppri- 
mées ;  la  presse  est  proclamée  libre  et,  le  9  mars,  le  Roi 
prête  serment  à  la  Constitution. 

Des  élections  ont  lieu  sur  tous  les  points  de  l'Espa- 
gne et  les  Cortès  s'assemblent  à  Madrid.  Elles  ont 
tout  à  réformer.  Pour  faire  face  aux  charges  d'une 
inextricable  situation  financière,  elles  suppriment  toutes 
exemptions  d'impôt  et  mettent  à  la  disposition  de  l'Etal 
les  propriétés  de  l'Inquisition,  des  jésuites  et  des 
couvents  où  ne  se  trouve  qu'un  petit  nombre  de  reli- 
gieux, des  pensions  étant  accordées  aux  moines 
dépossédés, 

(  les  mesures  eurent  immédiatement  pour  conséquence 
une  explosion  de  fanatisme  religieux.  Sous  le  nom 
d'armées  de  la  Foi.  conduites  par  des  moines,  les 
bandes  s'organisent  dans  les  campagnes  contre  le  gou- 
vernement constitutionnel.  Elles  ont  le  secret  appui 
du  Roi,  qui  conspire  lui-même  contre  ses  ministres. 
Le  parti  absolutiste  livré  à  ses  seules  forces  eût  été 
impuissant  à  reconquérir  l'Espagne,  mais  il  savait 
pouvoir  compter  sur  le  concours  de  la  Sainte- Alliance, 
Le  Congrès  de  Vérone,  bê  faisan)  son  organe,  donna 
mission  à  la  France  d'aller  combattre  en  Espagne  la 
révolution  qui  était  «  une  maladie  de  l'esprit  humain  ». 
Cent  mille  soldats  français  passèrent  la  Bidassoa,  -ou- 
ïes ordres  du  duc  d'Angoulême,  des  maréchaux  Monce> 
et  Oudinot  el  du  général  Molitor,  cette  fois  pour  aller 
combattre  en  Espagne  les  principes  de  la  Révolution 
que  la  France  j  avait  importés  quelques  années 
auparavant.    I  ne    poignée   de   réfugiés    français,  qui 


28  BSPAONl 

comptait  dans  ses  rangs  Armand  Carrcl,  se  présenta 
devant  l'avant-garde  avec  le  drapeau  tricolore  ;  elle 
1 1 1 1  mitraillée  el  l'Armée  poursuivit  sa  marche  sur 
Madrid.  A  l'approche  des  Français,  les  Cortès  Be 
retirèrent  à  Séville  d'abord,  puis  à  Cadix,  traînant  le 
roi  àleur  suite  ;  mais,  après  la  prise  de  la  presqu'île  du 
Trocadéro  en  face  de  Cadix,  le  3i  Août  1 8 2 3 .  devant 
la  menace  du  bombardement,  les  Cortès  durent  per- 
mettre à  Ferdinand  d'aller  rejoindre  le  duc  d'Angou- 
lème.  En  partant,  il  mail  promis  d'accorder  «  une 
amnistie  générale,  pleine  et  entière  ».  Le  lendemain 
suis  la  protection  des  baïonnettes  françaises,  il  publia 
un  manifeste  annulant  tons  les  actes  du  gouvernement 
«  soi  disant  constitutionnel  1  et  rétablissant  le  pouvoir 
absolu.  Repoussant  les  conseils  de  modération  du  duc 
d'Angouléme,  il  se  livra  aux  plus  cruelles  représailles. 
Riego,  amené  garotté  a  Madrid,  fut  tratnésur  un  âne 
dans  les  rues,  le  dos  retourné,  et  pendu. 

[Vois  membres  de  la  Régence  libérale  furent  con- 
damnés à  la  potence.  Quinze  cents  personnes  furent 
emprisonnées  à  Saragosse.  Le  nom  de  negro  donné  aux 
libéraux  était  pour  eux  un  signe  de  proscription,  que 
bargeail  d'assurer  la  société  de  ci  l'Ange-Extermi- 
naleur  ». 

Jusqu'aux  derniers  jours  de  son  règne,  Ferdinand  \  1 1 
gouverna  sans  tenir  compte  ni  des  idées  nouvelles,  ni 
des  besoins  de  ses  sujets,  ni  même  des  conseils  de  ceux 
auxquels  il  devait  le  rétablissement  de  son  autorité 
qu'il  exerçait  avec  la  plus  impitoyable  rigueur  ;  mais 
des  préoccupations  dynastiques  devaient  entraîner  la 
lin  « 1 1 1  1 .  l'une  absolutiste, 


i  \  coNSTiti  rioN  29 

De  ses  trois  premières  femmes,  Ferdinand  n'avait  eu 
aucun  enfant.  11  s'était  remarié  en  quatrième  noces 
avec  une  princesse  de  \aples.  la  reine  Marie-Christine. 
Aux  termes  de  la  loi  de  succession  au  trône  établie  en 
i  - 1  'i  à  l'avènement  des  Bourbons,  les  femmes  étaient, 
en  Espagne  comme  en  France,  exclues  de  la  Cou- 
ronne. 

Le  pouvoir,  après  Ferdinand  mourant  sans  héritier 
mâle,  devait  revenir  à  son  frère.  Don  Carlos.  En  t83i, 
la  reine  se  trouvant  enceinte,  le  Roi  voulut,  pour  le 
cas  où  il  lui  naîtrait  une  fille,  lui  assurer  sa  succession. 
Il  rétablit    l'ancien    ordre    de  succession   féminine    au 

tri qui  avait  existé  en  Espagne  jusqu'à  l'avènement 

des  Bourbons  et  qu'avait  déjà  prétendu  remettre  en 
\igueur  une  Pragmatique  du  roi  Charles  IV. 

De  ce  moment  jusqu'à  la  morl  de  Ferdinand,  deux 
influences  se  disputent  le  pouvoir,  celle  de  la  Reine 
et  celles  des  partisans  de  Don  Carlos.  Don  Carlos  re- 
présente le  droit  traditionnel,  le  culte  du  passé.  La 
Reine  sera  forcément  obligée  de  compter  avec  les  idées 
modernes.  C'est  ainsi  qu'en  l833  elle  décide  le  Roi  à 
convoquer  les  Cortès  de  Castillc  pour  leur  faire  prêter 
serment  de  reconnaître  Isabelle  II  sous  la  Régence  de 
sa  mère. 

Appelé  à  prêter  serment,  don  Carlos  avait  répondu 
à  son  frère  :  a  Je  suis  convaincu  îles  droits  légitimes 
que  j'ai  à  la  couronne  d'Espagne  au  cas  où  je  survi- 
vrais a  \  .  M.  el  qu'elle  ne  laissai  pas  de  fils;  je  déclare 
que  ni  ma  conscience  ni  mon  honneur  ne  me  per- 
mettent de  jurer  d  auti  es  droits  »». 

Lorsque    Ferdinand   \  Il  meurt   subitement    !<■    ag 


3(»  BSPAGNJ 

Septembre    i833,   Don  ( - . 1 1 U > -^  reruse  de   reconnaître 

[gabelle  comme  souveraine  légitime,  et  la  guerre  civile 
qui,  pendant  de  longues  années  va  ensanglanter 
l'Espagne,  s'engage  entre  les  armées  de  la  Régente 
Christinos)  et  les  insurgés  absolutistes  (carlistes). 
In  Basque,  Zumalacarregui  organise  la  première 
année  carliste,  adoptant  la  tactique  des  guérillas,  et  la 
guerre  devient  féroce. 

Les  carlistes  massacrent  les  prisonniers  qu'ils  ne 
peuvent  garder  et  nourrir  ;  les  troupes  du  gouverne* 
nient  fusillent  les  officiers  et  les  soldats  insurgés.  Des 
deux  côtés  on    fusille  les  notables  du   parti  opposé  et 

l'on  se  saisit  d'otages  (pie  l'on  exécute.  En  Catalogne. 

le  général  carliste  Cabrera  avant  l'ait  exécuter  un  alcade, 
le  généra]  Mina,  commandant  les  troupes  gouverne- 
mentales, ordonne  de  fusiller  la  vieille  mère  de  Cabrera 
((pour  réprimer  par  un  juste  système  de  représailles 
les  excès  d'un  adversaire  sanguinaire».  Les  deux 
partis  recevaient  des  secours  de  l'étranger;  les  gouver- 
nements constitutionnels  prêtaient  à  la  Régente  une 
légion  anglaise  et  une  légion  française;  les  monarchistes 
absolutistes  et  les  légitimistes  français  envoyaient  à 
Don  Carlos  de  l'argent,  des  armes  et  des  volon- 
taires 

La  reine  Christine  eût  voulu  maintenir  le  régime 
absolutiste  s  La  fois  contre  les  carlistes  et  contre  les 
libéraux,  Elle  s'étail  déclarée  o  ennemie  irréconciliable 
de  toute  innovation  religieuse  ou  politique  <■  el  Ferme* 
iikiiI  résolue  ■>  maintenir  i<  ls  forme  el  les  lois  Fonda- 
mentales de  la  monarchie  sans  admettre  d'innovations 
périlleuses  t  ;  mais,   pour  résister  aux  entreprises  de 


LA    CONSTITUTION  -'{1 

Don  Carlos,  loue  lui  lui  de  grouper  tous  les  adver- 
saires de  L'ancien  régime  en  se  résignant  à  prendre 
«  les  couleurs  de  la  liberté  »  (  i   . 

Elle  se  décida  à  appeler  le  parti  libéral  au  pouvoir 
dans  la  personne  d'un  de  ses  plus  illustres  proscrits, 
Martine/  de  la  Rosa,  et  à  promulguer,  au  nom  de  la 
jeune  reine,  un  Statut  royal  annonçant  qu'elle  avait 
«  résolu  de  convoquer  les  Corlès  générales  du 
royaume  ».  Ces  Cor  tes  devaient  tenir  des  séances  pu- 
bliques et  être  investies  du  droit  de  voter  les  impôts 
et  les  lois;  mais  les  ministres  n'étaient  pas  responsables 
devant  elles  et  le  gouvernement  se  réservait  l'initiative 
des  lois,  ainsi  que  le  droit  de  convoquer  cl  de  dissoudre 
les  Corlès.  Celles-ci  étaient  divisées  en  deux  Etats; 
(estamentos).  Les  proceres  formaient  le  premier  Etat  ; 
ils  devaient  être  nommés  à  vie  par  le  Souverain,  qui 
les  choisissait  parmi  les  prélats  cl  les  grands  d'Espagne 
jouissant  d'un  revenu  de  iJooofr.  au  moins.  Les 
procuradores,  qui  formaient  le  deuxième  Etat,  étaient 
des  députés  élus  pour  trois  ans  nu  suffrage  à  deux  de- 
grés par  des  électeurs  censitaires.  Ils  devaient  justifier 
d'un  revenu  de  3  ooo  fr.  et  ne  recevaient  pas  d'indem- 
nité. Les  présidents  des  E&tomentos  étaient  désignés  par 
la  couronne. 

Le  Statut  royal  de  [834  l'Estatutp  real)  rappelai I  à 
peu  près  la  Charte  française  octroyée  de  Louis  W  III 
el  faisait  de  l'Espagne  par  simple  concession  du  pou- 
voir royal,  une  monarchie  constitutionnelle,  mais  ce 
n'était    pas   encore    le   véritable  régime   représentatif 

(i)  Victor  Ghorbuliee,  L'Espagne  politique. 


32  BSPAGNI 

puisque  les  ministres  restaient  indépendants  des  repré- 
sentants de  la  Nation. 

L  h  parti  démocratique  dont  les  adhérents  les  plus 
oombreux  se  recrutaient  en  Andalousie  et  dans  les 
\illes  de  l'ancien  royaume  d'Aragon,  Barcelone,  Sa- 
ragosse,  Valence,  réclamait  une  réforme  plus  pro- 
fonde. Le  La  août  i836,  tandis  que  la  reine  Christine 
villégiaturait  avec  son  favori,  le  garde  du  corps  Munoz 
au  château  de  la  Granja,  la  foule  envahit  le  domaine 
royal  ;  les  soldais  firent  cause  commune  avec  les  in- 
-  et  la  régente  se  vit  forcée  de  proclamer  le  réta- 
blissement de  la  constitution  de  i<Siu,  en  attendant  la 
réunion  des  (  lortèa  chargées  d'élaborer  une  constitution 
nouvelle.  Les  progressistes  maîtres  du  pouvoir  se  déci- 
dèrent à  faire  reviser  la  constitution  de  181a,  sans 
s'astreindre  aux  formes  prescrites  pour  la  révision  et 
les  I  or  tes  adoptèrent  les  constitutions  de  1837.  '''' 
pouvoir  exécutif  devait  appartenir  à  la  reine,  qui  avait 
en  outre  l<-  droit  de  refuser  sa  sanction  aux  lois  votées 
et  de  dissoudre  les  Cortès.  Le  pouvoir  législatif  était 
dévolu  aux  Cortès,  auxquelles  était  reconnu  le  droit 
d'initiative. 

Les  Cortès  se  composaient  de  deux  assemblées,  le 
Sénat  et  le  Congrès  ou  Chambre  des  Députés. 

Les  membres  du  Sénat  devaient  être  nommés  à  vie 
par  le  Souverain  et  choisis  par  lui  sur  une  liste  de 
trois  candidats  présentés  pai  chaque  province. 

Les  membres  du  Congrès  devaient  être  élus  pai  la 
Nation  au  suffrage  direct  à  raison  d'un  député  pour 
5o.ooo  citoyens.  1 1 >  étaient  élus  pour  trois  ans.  \  la 
différence  de  la  Constitution  de  t8n,  qui  avait  interdit 


LA    C0NSTIT1  TION  33 

la  réélection  îles  députés  à  L'expiration  de  leur  mandat, 

la  Constitution  de  1N.I7  consacrait  le  principe  de  la 
rééligibilité.  A  la  différence  encore  de  la  Constitution 
de  1812,  la  Constitution  nouvelle  décidait  que  les  mi- 
nistres pouvaient  être  pris  dans  les  Chambres. 

Tous  les  Espagnols  étaienl  déclarés  égaux  devant  la 
loi  et  admissibles  à  tous  les  emplois  civils  et  militaires. 
L'article  relatif  à  la  religion  était,  à  dessein,  laissé  dans 
une  formule  vague.  Il  étail  <  1 1 1  :  «  la  Nation  s'engagea 
entretenir  le  culte el  les  ministres  de  la  religion  catbo- 
liques  dont  les  Espagnols  font  profession  ».  Ce  n'était 
pins  l'exclusion  des  culies  non  catholiques,  comme 
en  181  a,  ce  n'était  pas  non  plus  l'affirmation  du  prin- 
cipe de  la  liberté  des  cultes.  La  Constitution  enfin  ga 
ran  tissait  le  respect  de  la  liberté  individuelle  et  île  la 
liberté  de  la  presse  et  l'administration  locale  et  pro- 
vinciale était  confiée  à  des  autorités  élues. 

La  Constitution  de  iN.'i-  n'était  plus  comme  le  Statut 
royal  de  [834  "ne  pure  concession  de  la  couronne  se 
dépouillant  volontairement  d'une  partie  de  son  pouvoir 
absolu;  c'était  un  acte  impératif  de  la  souveraineté 
nationale.  Le  préambule  de  la  Constitution  L'indique 
très  nettement  : 

Les  Cortës  générales  ont  décrété  el  sanctionné  ce 
(pi i  suit  :  la  volonté'  de  la  Nation  étant,  en  vertu  de  son 
droit  de  .souveraineté,  de  réviser  la  constitution  pro- 
mulguée à  Cadix  !'•  1 9  mars  181a,  les  Cortès  générales 
réunies  eu  vue  de  la  révision  décrètent  et  sanctionnent 
la  constitution  suivante. ..  0 

Il  semblait  que  l'Espagne  entrai  dans  l'ère  des  gou 
vernements  constitutionnels  ;  elle  ail. ut.  entier  surtout 


34  B8PAON1 

dans  l'ère  des  pronunciamentos,  VprèS  la  guerre  de  l'In- 
dépendance   contre    Napoléon,    lei   guerres    carlistes 

avaient  l'ait  de  l'armée  «  l'outil  universel  do  la  poli- 
tique »  h  et  les  généraux  étaient  les  véritables  sou- 
verains de  l'Espagne.  En  se  (ouvrant  du  nom  d'un 
parti,  ils  vont  lutter  entre  eux  pour  se  disputer  le 
pouvoir. 

Le  généra]  qui  avait  eu  l'honneur  de  mettre  fin  à  la 
guerre  carliste  el  qui  avait  reçu  en  récompense  le  titre 
de  duc  de  la  Victoire,  Kspaiicro,  fui  le  premier  dicta- 
teur militaire.  Mécontent  de  la  reine  Christine,  il  prêta 
l'appui    de    ses   troupes   aux   progresssistes,    insurgés 

contre  la  loi  municipale  de    iNj.i    qui    avait    retiré  aux 

municipalités  le  droil  d'élire  les  alcades.  La  r< mère 

lui  obligée  d'aller  chercher  mi  refuge  en  France  tandis 
qu'Espartero  était  proclamé  régenl  du  roya Pen- 
dant   trois   ans,    de     iNjo    à     iN',o,  il  régna  en  maiUe, 

-mi  les  modérés  à  Pampelune,  bombardant  les  ré- 
publicains à  Barcelone,  prononçant  deux  l'ois  en  cinq 

mois    la    dissolution    des  Corlès  et  se  plaçant  BU-deSSUS 

des  lois,  il  fut  renversé  par  une  coalition  de  tons  les 
partis  el  contraint  à  quitter  l'Espagne. 

La    jeune    reine  Isabelle  lui    proclamée  majeure  el   le 

général  Narvaes  pril  le  pouvoir  au  nom  de  la  nouvelle 
souveraine.  Sauf  de  courtes  interruptions,  il  allait 
gouverner  jusqu'en  i85i.  La  reine  mère  Christine  fui 
rappelée;  sou  nouveau  mari,  le  garde  du  oorps  Mufioa, 
qu'elle  avait  épousé  en  exil,  fui  crée  duc  deRianxarès 
cl    la    constitution    de    1837,   jugée  trop  libérale)  fu( 

1 '  uliee.  L'Espagne  politique, 


IV     CONS  riTI  "TlfiN  35 

remplacée  par  la  constitution  de  i845,  qui  rétablissait, 
ii  peu  de  chose  près,  le  Statut  de  iV>'|.  Le  préambule 
de  la  constitution  de  1837  qui,  emprunté  1  la  consti 
tution  de  181  2,  affirmait  le  principe  de  la  souveraineté 
nationale,  disparaissait.  Il  n\  avail  plus  acte  de  sou- 
veraineté de  la  part  de  la  Nation,  mais  simple  accord 
entre  !;i  Couronne  et  ta  représentation  populaire 
\otrc  volonté,  déclarai!  la  Reine,  étanl  ainsi  que 
celle  des  Cortès  du  royaume,  de  régulariser  el  d'har- 
moniser avec  les  nécessités  actuelles  de  l'Etat  les  an- 
tiques fueroa  et  libertés  de  ce  royaume  et  le  droit 
d'intervention  qu'oui  eu  de  tout  temps  les  Cortès  dans 
les  moments  difficiles  qu'a  traversés  la  monarchie, 
nous  avons,  d'accord  avec  les  Cortès  actuellement 
réunies,  décrété  et  sanctionné  la  constitution  sui- 
vante... ». 

Les  sénateurs  devaient  être  nommés  par  la  Heine, 
.sans  qu'elle  eût  désormais  à  se  préoccuper  du  droil  de 
présentation  reconnu  aux  provinces;  la  durée  du 
mandat  législatif  pour  les  députés  était  portée  de  trois 
à  cinq  ans;  l'augmentation  du  cens  électoral  réduisait 
considérablement  Le  nombre  des  électeurs  el  la  nomi- 
nation «les  autorités  provinciales  et  municipales  était 
réservée  à  la  (  îouronne. 

Hâtons-nous  d'ajouter  que  l'on  se  préoccupera  peu 
dans  la  pratique,  de  ces  dispositions  constitutionnelles, 
votées  sur  le  rapport  de  Donoso  Cortès, 

En  fait,  la  dictature  il<'  Narvaea  ;i  remplacé  la  dic- 
tature d'Espartero.  Avec  l'un  commi  itre, 
les  de.  isions  qui  devraient  être  l'œuvre  exi  lusive  de  la 
loi  seront  prises   par  voie  de  simple  décret;  l'étal  de 


1  -1  \..\l 

suspendra  opportunément   les  garanties  établies 
pai  li  »  onslitution  el  Le  Ministère  dressera  lebudf 
»c  bornant  a  demander  aui  Cortès  l'autorisation  préa- 
lable '!'•  levei  les  taxes  qu'il  établira  a  son  gré 

La  révolution  «le  îSjs  en  France  n'avait  pas  eu  de 
contre-coup  sensible  en  Espagne;  il  n'en  lui  pas  de 
de  même  du  coup  d'Etat  du  a  décembre  i85i.  La 
Camarilla  qui  s'agitait  autour  de  la  Reine-et  delà  Reine- 
mère  •  > 1 1 1 1 1 1 1  plus  de  limites  dans  ses  exigences  de 

réaction.  Narvaez  dût  céder  le  pouvoir  à  des  ministres 
plu*  complaisants.  Déln  rée  de  la  crainte  du  carlisme, 
la  royauté  reprenait  pour  son  compte  les  principes  du 
prétendant  qu'elle  avait  vaincu.  Il  semblait  que 
l'unique  préoccupation  dût  être  d'assurer  à  Isabelle 
I  appui  de  Rome  et  de  rallie)  a  son  trône  les  partisans 
■  lu  régime  absolutiste  que  Don  Carlos  avait  entraînés 
à  -.i  Buite  Sans  •  onsulter  les  Cortès,  le  gouvernement 
ivec  le  pape  le  Concordai  de  mars  i85i,  d'après 
lequel  toutes  les  affaires  ecclésiastiques  devaient  être 
s  suivant  la  forme  canonique.  •  La  religion  catho- 
lique, était-il  stipulé,  est  la  religion  de  l'Etat  ;  toute 
autre  est  interdite.  L'enseignement  dans  les  écoles  doit 

être  d'j rd  av«  la  religion    .  L'épiscopat  était  investi 

«lu  droit  <!<•  sui  veiller  la  pureté  de  la  l"i  el  l'éducation 
religieuse  de  la  jeunesse  Le  gouvernement  s'enj 
a  prètei  son  appui  aux  évoques  pour  s'opp 
toute  entreprise  dénature  à  pervertir  l'esprit  des  fidèles 
<  > 1 1  ompi  <■  leui  -  mœurs  ou  poui  empèN  hei  la 
publication,  l'introduction  el  la  circulation  ne  mauvais 
I  n  mémi  temps,  le  gouvei  nement  mettait  à 
l'étude  la  réfori le  la   Constitution   poui  rendre  le 


I  \    CONSTITUTION  3* 

budget  permanent,  supprimer  la  publicité  des  séances 
des  Cortès,  leur  enlever  le  droit  d'initiative,  abolir  tout 
contrôle  des  Chambres  dans  les  relations  de  la  Cou- 
ronne avec  l'Eglise  et  son  Chef.  Le  Sénat  sérail  devenu 
héréditaire,  le  nombre  des  députés  aurait  été  abaissé 
de  )|7  à  171  et  le  cens  élevé.  I  11  simple  décret  avait 
institué  un  régime  nouveau  pour  la  presse  :  les  délits 
contre  «  l'ordre  public  et  la  société  »  devaient  être 
déférés  à  un  jury  formé  des  plus  imposés  el  le  -"mer 
iieinen!  était  armé  du  droit  de  suspendre  ou  suppri- 
mer par  simple  mesure  administrative  tout  journal 
«  à  tendances  dangereuses  pour  les  principes  fonda- 
mentaux de  la  société  ». 

De  semblables  mesures  de  réaction  aboutirent  a  une 
révolution.  Sous  le  vocable  d'Union  libérale  et  la 
direction  de  Narvaez  une  coalition  se  forma  entre  les 
amis  de  ce  dernier  appartenant  au  parti  modéré  et  les 
progressistes.  Des  scandales  financiers,  auxquels  se 
trouve  mêlé  le  mari  de  la  reine  mère,  Munoz,  duc  de 
Rianzarès,  ont  provoqué  un  vote  hostile  du  Sénat.  Le 
gouvernement,  que  dirige  M.  Sartorius,  répond  en 
suspendant  les  séances  des  Cortès  et  en  proclamant 
l'état  de  siège;  mais  les  journaux  protestant.  M.  Ca- 
novas ciel  Gastillo  rédige  le  manifeste  de  Manzanarès, 
qui  réclame  une  assemblée  constituante  el  les  généraux 
se  mettent  a  la  tête  du  mouvement  insurrectionnel. 
I  n  général  modéré,  O'Donnell,  l'organise  a  Madrid 
d'accord  avec  le  directeur  général  de  la  Cavalerie,  et 
Espartero  redevenu  chef  des  progressistes,  soulève 
l' Aragon.  A  Madrid,  le  peuple  élève  des  barricades, 
massacre  les  agents  de  police,  saccage  les  maisons  des 


38  BSPAGNJ 

ministres  aux  cris  de  :  o  Mort  aux  velours,  mort  à 
Christine  ».  La  Reine-mère  est  obligée  à  nouveau  de 
s'enfuir  en  laissant  sa  lille  Isabelle  au  pouvoir  dos 
insurgés,  Espartero  devient  président  du  Conseil  des 
ministres  et  O'Donnell  ministre  de  la  guerre.  La  révo- 
lution de  juillet  i854  fut  la  victoire  dos  généraux  et 
des  démocrates  des  grandes  \illes  sur  la  Couretle 
Clergé,  mais  ce  fut  L'armée  surtout  qui  tira  profit  du 
mouvement  révolutionnaire;  tous  les  officiers  avaient 
avancé  d'un  grade. 

I  ne  nouvelle  Constitution,  qui  rendait  le  Sénat 
électif,  fut  votée  en  l855,  mais  ello  devait  être  mort- 
née.  En  lutte  avec  O'Donnell,  Espartero  avait  donné 
sa  démission  et  cédé  le  pouvoir  à  sou  rival.  Après 
avoir  réprimé  les  émeutes  qui  suivirent  la  retraite 
du  due  de  la  victoire,  O'Donnell  renvoya  les  Cortès 
constituantes  et  remit  en  vigueur  la  Constitution  <lo 
i845  en  se  bornant  à  \  joindre  l'Acte  additionnel  du 
t5  septembre  i856. 

L'Acte  additionne]  rendait  au  jurj  la  connaissance 
des  délits  de  presse  a  sauf  les  exceptions  déterminées 
par  la  loi  ». 

II  stipulait  que  les  Cortès  seraient  réunies  chaque 
année  pendant  quatre  mois  au  moins  ;  il  soumettait  à 
réélection  tout  député  aux  Cortès  nommé  ou  promu 
à  un  emploi  ;  il  spécifiait  que  0  lorsqu'il  n'\  aurait 
pas  accord  entre  les  deux  Chambres  législatives  sur  la 
loi  annuelle  du  budget,  la  loi  île  finances  de  L'année 
précédente  serait  appliquée  ;  il  réservait  au  Souverain 
la  nomination  des  alcades  dans  les  villes  ayant  une 
population  de  io 000  âmes;  il  prévoyait  une  Loi  élec- 


LA   (.;■>.%>  i  m  riOM  .'{'.) 

toralc  nouvelle  et  un  ensemble  de  lois  organiques  pour 
le  fonctionnement  du  Conseil  d'Etat,  «les  tribunaux  el 
dei  municipalités. 

L'Acte  additionne]  «lu  i5  septembre  i856  fut  la 
dernière  des  six  constitutions  promulguées  sous  le 
règne  d'Isabelle  II. 

La  Heine  n'avait  pas  su  garder  le  respect  du  peuple 
espagnol.  Elle   l'avait   perdu  tout  à  la  lois  par   les  dé- 
sordres de  sa  vie  privée  et  par   la  déplorable   légèreté 
avec  laquelle  elle  sacrifiait  aux  obscures  intrigues  de  la 
Camarilla,  qui  s'agitait   autour  d'elle,  les   ministères 
soucieux  de  fonder  en  Espagne  le   rt'pnc  dr   la  liberté 
légale.  Marron  exerçait  sur  la  Heine  la  même  autorité 
néfaste  (pic  jadis  (îodoy  sur  la  femme  de  Charles  l\  . 
Le  cardinal  Civilo  de  la  Almeda,  archevêque  de  To- 
lède,   le  père   Claret,  la  sœur  Patrocinio,  abbesse  de 
San  Pascal  d'Ananjuez,  condamnée   par  les   tribunaux 
pour  avoir  simulé  les  stigmates  de   la  Passion,  étaient 
les  maîtres  occultes  de   l'Espagne   et   dictaient  à    la 
Heine,  contre  ses  propres  ministres,  une  politique  tout 
à    la  fois  de   fantaisie  et  d'intolérance,   à   laquelle  m1-* 
nerfs  de   femme  avaient  plus  de  part  que   sa  raison 
de  Souveraine.  Ce  fut  la   Camarilla  qui    lii    sacrifier 
O'Donnell  et  qui  jeta  la  reine  dans  la  réaction  à  ou 
trance.  Suppressions  de  journaux,  emprisonnements, 
déportation  de  3 ooo  personnes  aux  Philippines,  aux 
t  maries,  à  Fernando-Po,  arrestation  du  Président  des 
Certes,  Rios  Roses )  dissolution  de  l'Assemblée,  droit 
donné  à   l'autorité  administrative   d'expulser  de  son 
domicile   el    d'interner    tout   citoyen   regardé  comme 
Buspect,  la  Camarilla  ne  reniait  devant  aucune  me- 


in  esp  \<.m 

Mire  de  violence  pour  (justifier  la  politique  de  résis- 
tance résolue  contre  la  Révolution  o  et  maintenir 
«  la  tradition  d'action  en  commun  de  l'Église  et  de 
l'État  ». 

Tie  1\  envoya  à  la  Heine  Isabelle  la  rose  d'or,  mais 
l'Espagne  lui  enleva  sa  couronne. 

Le  titre  de  marquis  de  Loja  conféré  à  Marfori  avait 
porté  au  comble  l'exaspération  publique.  Craignant 
un  soulèvement,  le  Chef  du  ministère,  Gonzalez  Bravo, 
avait  fait  arrêter  les  généraux  Dulce,  Zavala,  Cordcba, 
qui  devaient  être  déportés  aux  Canaries  et  avait 
expulsé  d'Espagne  le  mari  de  la  sœur  de  la  Heine,  le 
duc  de  Montpensier,  suspect  de  devenir,  éventuelle- 
ment, un  candidat  au  trône. 

C'en  était  trop.  Une  coalition  se  forma  entre  l'Union 
libérale,  les  progressistes  et  les  démocrates  pour  ren- 
verser  la  dynastie.  La  révolution  commença  par  le 
.pronunciamento  de  l'amiral  Tope  te,  chef  de  la  Qotte 
de  Cadix,  suivi  du  pronunciamento  des  généraux  de 
l'Opposition  a  la  tète  desquels  étaient  Primel  Serrano. 
La  Révolution  s'accomplissait  au  cri  de  :  C<  A  bas  les 
Bourbons  !   \  ive  la  souveraineté  nationale  '■  n  Isabelle 

tenta  en  vain  de  résister.  I  ne  seule  bataille  au  l'ont 
d'Alcolea,  entreAndujar  et  Cordoue,  décida  du  sort  de 
son  trône.  Serrano  y  triompha  du  marquis  de  Nova- 
lèches,    cbcl    des    troupes    fidèles  à    la    Heine,    qui    lut 

blessé  mortellement.  Aussitôt,  l'insurrection  se  géné- 
ralisa :  Isabelle,  qui  se  trouvait  à  Saint  Sébastien,  fui 
obligée  de  se  réfugier  en  Fi  ance. 

I  n    gouverne ni   provisoire   fut  constitué  à  Ma- 
drid el  reconnu  par  les  juntes  insurrectionnelle!   des 


I.a    CONSTITUTION  il 

48  provinces.  Il  étail  composé  des  chefs  des  partis  coa- 
lisés,  5  progressistes,  'i  unionistes,  i  démocrate.  Les 
véritables  maîtres  de  la  situation  étaient  les  généraux 
Prim  et  Serrano. 

Dans  la  circulaire  qu'il  envoya  aux  puissances  étran- 
gères et  la  proclamation  qu'il  adressa  au  peuple  espa- 
gnol, le  Gouvernement  provisoire  faisait  connaître  que 
le  nouveau  régime  de  l'Espagne  aurait  pour  bases  la 
souveraineté  du  peuple,  la  liberté  de  religion  et  d'en- 
seignement, la  liberté  de  la  presse. 

Sur  ces  principes,  tous  les  artisans  de  la  Révolution 
étaient  d'accord  ;  tous  se  déclaraient  les  ennemis  de 
l'absolutisme  de  la  Cour  et  du  Clergé  «  en  opposition 
avec  l'esprit  du  siècle  »). 

M;iis  qu'elle  serait  la  forme  du  gouvernement  ? 

\  cel  égard,  l'entente  était  loin  d'être  absolue  entre 
les  trois  partis  dont  l'action  commune  avait  abouli  .'i 
la  révolution  de  septembre  1868. 

L'union  libérale  composée  de  monarcbisles,  aurait 
voulu  que  la  révolution  ne  fût  qu'une  demi-révolution. 
Les  uns  tenaient  pour  la  royauté  légitime  représentée 
par  le  lils  de  la  reine  Isabelle,  le  jeune  prince 
Alphonse.  Les  autres  voulaient  que  l'Espagne  de  i8(i8 
prit  modèle  sur  la  France  de  1800  en  substituant  In 
branche  cadette  à  la  branche  aînée.  Le  duc  de  Mont- 
pensier,  mari  de  la  sœur  de  la  reine  déchue,  n'était-il 
pas  indiqué  pom  accomplir  la  même  évolution  que  son 
prie,  le  roi  Louis-Philippe? 

Les  progressistes  réclamaient  une  solution  plus  ra- 
dicale, ne  pouvant  se  traduire  que  par  l'avènement 
d'une  ils nastie  nouvelle, 


i'J  BSPAGNI 

Parmi  les  démocrates,  les  uns  se  déclaraient  résolu- 
menl   républicains,  les    autres  n'étaient    pas    inéconci- 

liablemenl  opposés  à  une  Monarchie  pourvu  qu'elle  fût 
presque  une  République  et  que  le  monarque  ne  fûl 
pas  un  Bourbon. 

Les  républicains  avaient  pour  aux  d'admirables  ora- 
teurs et  Les  BympathieB  de  la  foule,  mais  point  de  gé- 
néraux. 

Les  chefs  militaires  qui  avaienl  l'ail  la  révolution 
de  Septembre  prirent  soin  d'avertir  le  peuple  que,  dans 
leur  pensée,  la  République  offrait  de  graves  et  périlleuses 
difficultés,  que  le  mieux  était  de  se  procurer  un  véri- 
table roi  constitutionnel,  en  s'en  remettant  à  eux  du 
soin  (le  le  découvrir.  Dès  lors,  il  était  facile  de  prévoir 
que  les  Cortès  constituantes, élues  par  leur  inlluencect 
dirigées  par  leurs  avis,  écarteraient  la  République  mais 
pour  instituer  une  monarchie  d'un  genre  nouveau,  à 
la  fois  très  libérale  et  lies  démocratique,  ha  Révolution 
■  le  septembre  1868  devait  aboutir  à  une  monarchie 
quasi-républicaine  où  le  monarque  ne  serait  guère 
qu'un  président  de  République. 

Les  Cortès  de  1869,  élues  au  suffrage  universel  à 
raison  d'un  député  pour  4&-ooo  habitants,  décidèrent 
quels  Forme  du  gouvernement  resterait  la  royauté, 
m  us  que  le  monarque  nouveau  serait  élu  par  les  repré- 
sentants de  l.i  Nation, 

Les  Cortès  devaient  être  Formées  de  deux  Chambres  : 
mi  Congrès  ou  Chambre  des  Députés  élu  pour  trois  ans 
par  le  suffrage  universel  direct,  un  Sénat  élu  pour  douze 
ans  par  des  électeurs  spéciaux,  roua  Les  cultes  étaient 
proclamés   libres  et   les  Espagnols  étaient   investis  de 


f.A    CONSTITI  HOU  13 

tous  les  droits  garantis  à  un  citoyen  des  Etats-1  nis  ou 
de  Genève  :  l'absolue  liberté  de  la  presse,  !<•  droil 
absolu  «le  réunion  en  lieu  clos  ou  en  plein  air,  le  droit 
absolu  d'association,  sous  cette  seule  réserve  que  les 
associations  dangereuses  pour  la  sûreté  de  L'Etat  pou- 
vaient être  dissoutes  par  une  loi.  I, 'article  22  stipulai! 
que  les  autorités  ne  pouvaient  prendre  aucune  mesure 
préventive  concernant  l'exercice  de  ces  droits. 

En  attendant  l'élection  du  nouveau  Souverain.  les 
Cor  tes,  par  ig3  voix  contre  jô,  avaient  confié  la  Kégencc 
au  Maréchal  Serrano,  chef  de  II  nion  libérale.  Le  gé- 
néral l'iim,  chef  du  progressisme  militant,  avait  été 
appelé  à  la  présidence  du  Conseil  des  Ministres. 

On  sait  comment  l'offre  de  la  couronne  d'Espagne 
au  prince  Léopold  de  ilolicnzollcrn  déchaîna  entre  la 
France  et  l'Allemagne  la  terrible  guerre  de  1870.  La 
candidature  du  prince  de  llobenzollern  ayant  été 
retirée,  les  Cortès,  le  10'  novembre  1870,  proclamèrent 
roi  d'Espagne  leducd'Aoste,  Amédée-Ferdinand-Marie 
de  Savoie,  second  iils  du  Hoi  d'Italie  Victor-Emma- 
nuel. II  avait  réuni  sur  son  nom  191  voix  contre  (>■> 
données  à  la  République,  27  au  duc  de  Montpensier,  1 
à  la  dm  liesse.  8  au  duc  de  la  Viclorire,  2  au  prince  Àl- 
phonse  de  Bourbon  el  19  bulletins  blancs. 

«  Une  monarchie  créée  par  le  vote  d'une  assemblée, 
avait  déclaré  aux  Cortès,  le  0  juin  1870,  un  homme 
appelé  à  jouer  un  grand  rôle  dans  L'histoire  de  l'Es- 
pagne contemporaine,  Canovas  del  Castillo.  est  la  plus 
faible,  la  moins  propre  à  s'enraciner,  la  plus  éphémère, 
la  plus  caduque  de  toutes.  » 

El  montrant  les  difficultés   qu'il  v  aurait  à  concilier 


i  i  ESP AG  NI 

l'idée  de  la  monarchie  avec  les  Institutions  faites  pour 
Le  régime  républicain  qu'avait  établies  la  constitution 
nouvelle  désarmant  le  pouvoir  exécutif,  il  ajoutait  : 

«  Wec  un  système  administratif  qui  ne  confère  au 
Ministre  île  l'Intérieur  d'autre  faculté  que  celle  d'expé- 
dier des  télégrammes  énergiques,  avec  des  gouverneurs 
de  province  epui  ne  sont  que  les  délégués  d'une  sorte 
de  société  anonyme  et  dont  les  fonctions  se  réduisent  à 
appeler  ou  à  ne  pas  appeler  l'attention  du  gouverne- 
ment sur  les  abus  qui  se  commettent,  avec  des  maires, 
véritables  dépositaires  du  pouvoir  exécutif,  uniques 
exécuteurs  de  la  loi,  seuls  représentants  du  Gouverne- 
ment dans  la  généralité  des  pueblos,  et  qui  peuvent 
combattre  non  seulement  la  politique  des  ministres, 
mais  le  roi  lui-même  et  la  royauté,  avec  un  régime 
enfin  qui  permel  à  l'autorité  d'être  républicaine,  car- 
liste ou  modérée  selon  les  lieux  où  elle  réside,  quel 
rôle  jouera  la  Monarchie  ? .. ,  De  par  la  Constitution 
elle-même,  le  Roi  doil  servir  de  balancier  dans  le  jeu 
îles  partis  politiques...  Croyez-vous,  en  vérité,  que  le 
prince  qui  viendra  ici,  dépourvu  de  toutes  les  condi- 
tions indispensables  pour  se  faire  respecter,  aura  le 
moyen  d'exercer  un  pouvoir  modérateur  entre  les  fac- 
tions rivales  P  N'est-il  pas  évident  qu'il  ne  sera  que  leur 
triste  jouel 

Lès  événements  n'allaient  que  trop  rapidemenl  jus- 
tifier  ces  prédictions. 

Plein  de  loyauté  el  de  droiture,  ^.médée  I"  arrivai) 
animé  des  meilleures  intentions  ;  mais  il  ignorai!  tout 
de  l'Espagne;  il  ne  connaissait  ni  les  hommes,  ni  le 

ne. ode,   ni  la  politique  el  ce  novice  allait,  à    \in^l-cinq 


la  Constitution  i.'> 

tins,  l'aire  l'apprentissage  de  son  métier  de  roi  au  milieu 
d'inextricables  difficultés.  Il  n'était  ni  personnellement 
préparé  à  les  résoudre,  ni  constitutionnellement  armé 
pour  les  vaincre. 

Lorsqu'il  débarqua  dans  le  port  de  Carthagène,  une 
sinistre  nouvelle  l'attendait.  Le  principal  artisan  de  sa 
candidature,  le  Général  Prim  venait  d'être  assassiné. 
D'autre  part,  les  républicains  répondaient  au  vote  des 
Cortès  consacrant  la  dynastie  de  Savoie  parle  pacte  de 
Tortosa,  réclamant  la  République  fédérale.  Les  carlistes 
se  déclaraient  pour  «  la  royauté  nationale  »  contre  la 
«  monarchie  étrangère  »,  pour  <<  l'unité  de  la  foi  > 
contre  la  liberté  des  cultes.  Don  Carlos  VII,  petit-fils 
du  plus  jeune  frère  de  l'ancien  Don  Carlos  \  ,  relevait 
la  bannière  du  Carlisme.  Enfin  les  Cortès  étaient  pro- 
fondément divisées. 

Après  deux  ans  de  règne,  \médée  eut  le  sentiment 
qu'il  était  resté  un  étranger  pour  ses  sujets.  Impuissant 
à  rallier  une  majorité  homogène  autour  de  son  trône, 
combattu  avec  violence  par  le  clergé,  en  butte  à  l'hos- 
tilité non  déguisée  de  L'aristocratie,  indifférent  à  la 
niasse  du  peuple,  il  ne  pouvait  compter  que  sur  le  dé- 
vouement des  olïiciers  de  l'artillerie,  lesquels  se  fai- 
saient gloire  de  n'avoir  jamais  participé  «à  aucun  pro- 
nu.nciamen.to.  Le  ministère  radical  que  présidait  Zorilla 
jugea  devoir  confier  le  commandement  do  l'artillerie 
au  général  politicien  Hidalgo,  profondément  antipa- 
thique aux   officiers  de   cette   arme.   Immédiatement 

ceux-ci,   p.o    mesure   de    protestation,    doi renl    en 

masse  leur  démission.  Le  ministère,  d'accord  avec  la 
majorité  des  Cortès,  fut  d'avis,  malgré  le  roi,  d'accep 


i('i  BSPAGNE 

1er  ces  *  1  é i n i > s i » n i n  et  de  réorganiser  ['artillerie  ep  con- 
féranl  aux  sergents  Le  grade  d'officier,  l.o  Roi  signe  les 
décrets,  m.ii>.  aussitôt  après,  en  termes  empreints  d'une 
grande  dignité,  il  adressa  aux  Cortès  un  message  d'ab- 
dication. 

La  retraite  d'Amédée  laissait  le  champ  libre'aux  ré- 
publicains. Le  12  février  1878,  les  Cortès  s'érigeanten 
Assemblée  nationale,  proclamèrent  la  République  par 
a50  voix  contre  3a.  Le  1"  juin  1X70,  elles  cédaient  la 
place  à  une  Assemblée  nationale  constituante.  Celle-ci 
voulut  élaborer  une  constitution  fédéraliste.  La  Répu- 
blique fédérale  e  avec  toutes  ses  conséquences  n  pa- 
raissait le  gouvernement  devant  le  mieux  répondre 
aux  traditions  historiques  de  L'Espagne  comme  à  sa 
constitution  géographique. 

Lorsque  l'on  considère,  en  effet  les  si\  Cordillères 
qui  traversent  l'Espagne  de  part  en  part,  formant  un 
enchevêtrement  de  montagnes  et  «le  vallées,  <>n  cons- 
tate que  le  territoire  espagnol  se  trouve  divisé  en  une 
foule  de  régions  isolées  les  unes  des  autres,  différant 
essentiellement  par  le  climat,  par  la  composition  géo- 
logique du  sol,  par  la  l'aune  et  par  la  Hure,  cl  plus  en 
core  peut-être  par  te  caractère  el  les  coutumes  de  ses 
habitant  1 

Mais,  s'il  était  difficile  de  doter  d'institutions  uni- 
formes  des  régions  profondément  dissemblables,  était- 
il,  d'autre  part,  suis  péril  de  développer  encore  par  le 
fédéralisme  cet  instinctif  penchant  à  l'individualisme 
indiscipliné  qui  semble  le  ligne  distinctif  du  caractère 
esp  ignol  ' 

Voua  Mi\r/  qui   nous   sommes,  disait   sus  Cortès 


I   v    C0N8TIT1    riON  l7 

M.  Léon  \  Castillo;  vous  savez  quel  esprit  d'indivi- 
dualisme outré  nous  anime  al  combien  noua  avom  de 
peine  à  étouffai  dans  chaque  commune  les  luttes  de 
famille  à  famille  el  de  parti  à  parti,  dans  chaque  pro- 
vince les  rivalités  de  ville  à  ville,  dans  la  Péninsule 
toul  entière  des  conflits  d'amour-propre  ou  d'intérêts 
entre  provinces,  el  voua  osez  désirer  que  la  Loi  con- 
sacre nos  maux,  légitim »s  erreurs...  Le  fédéralisme 

ne  peut  manquer  de  nous  conduire  à  la  vie  de  tribu. 
L'Espagne  cessera  d'être  une  puissance  européenne 
P"iir  se  transformer  en  une  vaste  Kabylie.  » 

Le  fédéralisme  allait,  en   effet,   conduire   la   Répu- 
blique espagnole  à  l'anarchie, 

Ceux,  d'ailleurs,  <|ui  avaient  proclamé  la  Repu- 
publique  fédérale  étaient  loin  de  B*en tendre  sur  la  por- 
tée qu'il  convenait  d'assigner  au  fédéi  ilisme".  Les  Tins 
n\  voyaient  que  l'application  d'un  trè^  large  pro 
gramme  de  décentralisation  aboutissant  au  régiona- 
lisme. Les  autres,  imbus  des  doctrines  de  Proudhon, 
voulaient  que  la  République  espagnole  lût  constituée 
sur  la  base  d'une  fédération  de  provinces  ou  de  régions 
unis  parle  «  pacte  ».  L'Etat  devenait  une  fédération  de 
nations.  Du  principe  de  l'autonomie  individuelle,  on 
faisait  découler  successivement  l'autonomie  munici- 
pale, l'autonomie  provinciale,  l'autonomie  nationale. 

Adoptant  une  solution  moyenne,  les  Gortès  consti- 
tuantes  avaient  partagé  la  Péninsule  en  treize  Ki.oS, 
Amv  l'adjonction  des  Baléares,  des  C  maries,  de  Cuba 
el  de  Porto. Rico,  le  terri  le  ire  de  la  République  devait 
se  composer  de  dix-sept  provinces  autonomes  el  fédé- 
rées. 


18  bspagn! 

Mais  les  intransigeants  du  fédéralisme  entendaient 
crue  ces  Etats  fussent  libres  de  Be  diviser  comme  ils 
L'entendraient.  La  République  devait  être  une  fédéra- 
tion générale  de  municipalités  souveraines.  Ce  n'était 
plus  la  République  fédérale,  c'était  la  République 
cantonaliste,  liwée  à  la  pire  démagogie. 

Malaga,  Séville,  Cadix,  Grenade  s 'érigèrent  ainsi 
tour  à  tour  en  Républiques  séparatistes  et  Carthagène 
surtout  devint  le  foyer  du  mouvement  révolutionnaire 
qui  opposait  le  Gouvernement  cantonaliste  au  Gou- 
vernement républicain  fédéral.  Le  Général  ('.outreras 
avait  fait  de  la  ville  des  Scipions,  avec  son  arsenal,  ses 
parcs  d'artillerie,  sa  rade  admirable,  la  citadelle  de 
l'insurrection  cantonaliste.  Ouvrant  les  portes  du 
bagne,  il  avait  livre  aux  forçats  les  bâtiments  de  guerre 
qu'ils  avaient  convertis  en  bâti nls  de  pirates, 

Pendant  ce  temps,  l'insurrection  carliste  prenait 
dans  le  nord  de  l'Espagne  des  proportions  formidables. 
Au  cri  de  Dios  y  fueros,  Dieu  et  nos  fueros,  les  Bas* 
ques  marchaient  à  l'assaut  de  la  République,  prétendant 
leur  foi  menacée  et  voyant  dans  le  principe  répu- 
blicain de  l'égalité  drs  citoyens  devant  la  loi  une  me- 
nace pour  leurs  privilèges  tandis  que,  pensaient-ils. 
l'absolutisme  de  l'ancien  régime  saurait  leur  mainte- 
nir l'exemption  du  service  militaire  el  de  la  contribu- 
tion aux  charges  publiques.  Sons  la  direction  du  trop 
fameux  curé  Santa  Cruz,  la  démagogie  blanche  se  li- 
M.iii  aux  pins  excès  et,  de  part  et  d'autre,  la  guerre 
civile  prenait  le  i  aractèi  e  d'une  guerre  d'extermination. 
Si  la  République  avait  pu  Être  sauvée,  elle  l'eût  été 

pai    Ëmilio  '   astel.u  . 


LA    CONSTITUTION 

En  prenant  le  pouvoir  tombé  successivement  des  mains 
imprudentes  ou  débiles  de  Figueras,  de  Pi  s  Margall  et  de 
Salnieron,  Castelar  déclarait  vouloir  arracher  l'Espagne 
à  «  cette  démagogie  qui  répand  dans  l'air  la  terreur  so- 
ciale et  prête  aux  Césars  ses  épaules  pour  les  hisser  au 
pouvoir  ». 

«  ^Nous  tenons  à  prouver,  ajoutait-il,  que  la  vraie 
démocratie  n'est  pas  seulement  la  liberté  et,  qu'elle  est 
aussi  l'ordre  et  la  justice;  qu'elle  n'est  pas  seulement 
le  droit,  qu'elle  est  l'autorité;  nous  aspirons  à  con- 
vertir le  parti  républicain  en  un  parti  de  gouver- 
nement ». 

De  sévères  mais  nécessaires  exemples  ramenèrent  la 
discipline  dans  l'armée;  les  Carlistes,  vigoureusement 
combattus  par  Morionès  durent  reculer  en  désordre 
après  avoir  levé  le  siège  de  Tolosa  ;  Contreras  fut  dé- 
claré rebelle,  les  marins  de  l'escadre  cantonalislc  pi- 
rates ;  le  général  Martine/  Campos  vint  assiéger  Car- 
tbagène  par  terre  tandis  que  l'amiral  Lobo  la  bloquait 
par  mer  ;  l'insurrection  cantonalistc  lut  écrasée. 

En  quelques  mois  l'ordre  fut  rétabli.  Le  «  Lamar- 
tine espagnol  »,  en  même  temps  qu'orateur  incompa- 
rable, s'était  révélé  véritable  homme  d'Etat;  mais  ce 
noble  esprit  dominait  de  trop  haut  les  misérables  in- 
trigues dont  les  Cortès  offraient  le  triste  spectacle. 
A  peine  les  périls  auxquels  il  avait  eu  à  faire  face  étaient- 
ils  conjurés  qu'un  vole  hostile  des  Cortès  renversait 
Castelar. 

Le  général  l\ivia  lui  avait  ollèrl  de  le  maintenir  au 
pouvoir  avec  l'aide  de  ses  troupes,  déclarant  qui'  sa 
retraite  serait  «  la  mèche  qui  ferait  partir  la  mine   de 

4 


50  ESPAGNE 

L'anarchie,  o  Très  noblement,  Castelar  refusa  et  «In- 
clina devant  le  Yote  des  Cortès,  niais  à  peine  le  nom 
de  ses  remplaçants  était-il  sorti  de  l'urne  qu'un  nou- 
veau pronunciamento  venait  changer  nue  fois  de  plus 
les  destinées  de  l'Espagne  .  Dans  la  nuit  du  a  au 
S  janvier  iN-'i,  Pavia  avait  fait  occuper  militairement 
Madrid  et  cerner  le  palais  législatif.  Il  envoya  deux 
Aides  de  camp  prier  les  députés  d'avoir  à  se  disperser. 
Personne  ne  protesta. 

Pavia  aurait  pu  prendre  le  pouvoir  pour  lui-même  ; 
il  préféra  en  faire  investir  le  maréchal  Scrrano. 
L'Espagne  retombait  sous  le  régime  de  la  dictature  mi- 
litaire, mais  c'était  un  «impie  prologue  à  la  restaura- 
tion de  la  monarchie. 

Le  26  décembre  1874.  devant  les  troupes  rassemblées 
sur  la  place  publique  à  Murviedo,  le  général  Martine/ 
Campos  proclamait  Uphonse  \II,  bis  d'Isabelle,  roi 
d'Espagne.  Le  général  Jovellar,  chargé  par  la  gouver- 
nement  de  Madrid,  île  combattre  Martine/.  Campos, 
>e  joignait  à  lui;  le  général  Primo  de  Rivera  suivait 
son  exemple  et  le  chef  du  Cabinet  Sagasta  se  bornait 
à  une  protestation  platonique  tandis  que  le  maréchal 
Serrano  se  relirait  momentanément  à  Bayonne.  En 
cinq  jours,  le  nouveau  Roi  devenait  maître  de  Madrid. 

Il  étail  âgé  de  dix   huit  ans.    Klevé  en  e\il  lui  il  avait 

suivi  sa  mère,  il  iv.iii  reçu  au  lieu  de  la  funeste  éduca* 
tion  des  cours  une  instruction  libérale  dans  les  meilleurs 
établissements  d'enseigncmenlde  France,  d'Autriche,  de 
Suisse  et  d'Angleterre.  Il  apporlail  a  la  monarchie  des 
Bourbons,  restaurée  en  sa  personne,  des  connaissan- 
ces étendues,  une  culture  littéraire  el  scientifique  dé 


I.A    CONSTITUTION  "'I 

veloppée,  une  réelle  intelligence  des  besoins  da  l'Espa- 
gne, du  courage  et  une  Bérieuse  activité.  Malheureu- 
sement, sa  saule  était  débile  et  l'excès  des  plaisir^  dé- 
tail abréger  sa  vie. 

Vlphonse  \ll  eut  le  mérite  «le  choisir  comme  guide 
mu  des  hommes  d'Etat  les  plus  expérimentés  et  les 
plus  habiles  de  l'Espagne  contemporaine»  historien,  lit- 
térateur, orateur  de  grande  envergure,  initié  à  toutes 
les  subtilités  de  la  politique,  Canovas  del  Castillo. 

Libéral  et  même  révolutionnaire  à  ses  débuts,  Ca- 
novas étail  venu  au  parti  conservateur  avec  la  con- 
viction que  la  monarchie  constitutionnelle  serait  la  plus 
Mire  garantie  de  l'ordre  public 

C'est  sous  l'inspiration  de  Canovas  qu'a  été  élaborée 
la  Constitution  du  .3o  juin  187(3  restée  jusqu'à  ce  jour, 
avec  de  légères  relouches,  la  loi  fondamentale  de 
l'Espagne. 


La  Constitution  du  3o  juin  187(1,  qui  va  former 
l'objet  spécial  de  notre  étude,  comprend  8g  articles, 
répartis  en   1  '.)  litres  : 

Titre        1.    -  Des  Espagnols  et  de  leurs  droits. 

Titre      II.  —  Des  Cortès. 

Titre  III.        Du  Sénat. 

Titre  IV.  —  De  la  Chambre  des  Députés. 

Titre      V.-     Des  sessions  et  des  attributions  des 

(  lortès. 
Titre     VI.  —  Du  roi  et  de  ses  ministres. 

Titre  Vil.  —  De  la  succession  à  la  couronne, 


52  i SPAGNG 

Titre  \  111.  —  De  la  minorité  du  roi  etde  La  régence. 
Titre    IV        Do  l'administration  de  la  justice. 
Titre       \.         De«   députationa    provinciales    et    des 

ayuntamientos. 
Titre     \1.  —  Des  contributions. 
Titre    XII.  —  De  la  force  militaire. 
Titre  Mil.  —    Du     gouvernement      des     provinces 
d'outre-mer. 

Si  nous  jetons  un  regard  d'ensemble  sur  cet  orga- 
nisme politique  dont  nous  aurons,  suivant  notre  mé- 
thode habituelle,  à  décomposer  successivement  les 
différents  rouages,  nous  constatons  que  la  forme  du 
gouvernement  est  la  monarchie  constitutionnelle,  avec 
l'inviolabilité  royale,  la  responsabilité  ministérielle  et 
le  contrôle  parlementaire. 

Le  pouvoir  exécutif  appartient  au  roi  et   son  auto- 
rité, déclare   l'article  5o  de    la  Constitution   «   s'étend 
à  tout  ce  qui  se  rapporte  à    la    conservation   de    l'ordre 
public  à  l'intérieur  et  à  la  sécurité  de  l'Etal  à   Texte 
rieur  ■■ . 

Le  roi  n'exerce  le  pouvoir  que  par  l'intermédiaire  de 
ministres  i  esponsables. 

«  Aucun  ordre  du  roi  ne  peu!  être  mis  à  exécution 
s'd  n'est  contresigné  par  un  ministre  |  il  qui,  par  cela 
même,  en  assume  la  i  esponsabililé  ». 

Le  pouvoir  législatil  appartient  aux  Cortès  n  d'ac- 
cord avec  le  Roi    •  Les  Cortèset  le  Souverain  uni  éira 


i     nttitution,  art.   ni- 
.•    «  lonttitution,  art,  i  8. 


La    O  tNSTl  i  i   il'  tfl 


53 


lement  le  droit  d'initiative  et  leur  concours  est    néces 
sa  ire  pour  la  formation  de  la  loi.  Il   ne  suffil    paa  que 
les  Cortès  la  volent;  il  faut   mie  le  I\oi    consente   à    la 
sanctionner  et  à  la  promulguer.  Le  Souverain  a  un  droit 
de  veto. 

Les  Cortès  se  composent  de  deux  assemblées  légis- 
latives, dont  les  pouvoirs  sont  égaux  :  le  Sénat  (sentido) 
et  la  Chambre  des  Députés    Covgreso  île  los dépulados). 

Le  Sénat  comprend  trois  catégories  de  membres: 

des  sénateurs  de  droit  ; 

des  sénateurs  nommés  à  vie  par  la  Couronne; 
des  sénateurs  élus. 

Sont  sénateurs  de  droit  :  les  fils  du  roi  et  de  l'héritier 
présomptif  de  la  couronne,  lorsqu'ils  ont  atteint  leur 
majorité  ;  les  grands  d'Espagne,  qui  ne  sont  sujets  d'au- 
cune puissance  étrangère  et  qui  possèdent  une  fortune 
immobilière  représentant  un  revenu  de  (io.ooo  pesetas 
et  certains  grands  dignitaires  de  l'armée,  de  la  marine, 
du  clergé,  de  la  magistrature. 

Les  sénateurs  à  vie  sont  nommés  par  le  Souverain  et 
choisis  dans  des  catégories  déterminées,  présidents  des 
Cortès,  députés  ayant  siégé  pendant  Irois  législatures 
ministres  de  la  Couronne,  évêques,  grands  d'Espagne, 
ambassadeurs,  liants  fonctionnaires,  membres  des  aca- 
démies, contribuables  les  plus  imposés. 

Les  sénateurs  élus  sont  nommés  :  les  uns  par  les  con- 
seillers provinciaux,  les  délégués  des  municipalités  et 
des  contribuables  les  plus  imposés  des  communes;  les 
autres  par  les  corporations  académiques,  universitaires 
et  ecclésiastiques  el  par  les       sociétés  économiques  i, 


M  BSPAOHS 

Le  nombre  des  sénateurs  de  droit  el  des  siaaUuia  •'> 
vie  ne  doit  pas  excéder  180  membres,  la  totalité  des 

membres  du  Sénat  étant  de  36o. 

Les  sénateurs  élus  se  renouvellent  par  moitié  tous 
les  cinq  ans,  et  en  totalité  quand  le  Souverain  dissout 
la  portion  élective  du  Sénat. 

\n\  termes  de  l'article  27  de  la  Constitution  du 
3o  juin  1876,  la  Chambre  des  députés  devait  se  com- 
poser «  des  députés  élus  par  les  juntes  électorales,  en 
la  forme  déterminée  par  la  loi  »  à  raison  d'un  député 

noins  par  5o.ooo  âmes. 

La  loi  électorale  provisoire  du  20  juillet  1  s- 7   avait 

supprimé  le  suffrage  universel  établi  en  «Espagne  par 

la  Constitution  de  1869.   L'élection   des  députés  était 

mfiée  à  des  électeurs  censitaires  devant  payer  au  moins 

pesetas  d'impôt-foncier  et  à  neuf  catégories  spéciales 
d'électeurs  capacitaires  affranchis  de  l'obligation  du 
cens.  La  loi  électorale  du  26  juin  1800  rétablit  le  suf- 
frage universel,  niais  en  s'efforçanl  d'assurer,  à  côté 
Je  la  représentation  du  nombre,  la  représentation  des 
intérêts.    Le   droit  de  vole  était    reconnu  à  lous  les  Es- 

nolsmâles,  majeurs  de  a5  ans  et  avant    la  pleine 

jouissance  de  leurs  droits  «  i \  i I s.    Kn  même   temps,    une 

partie  de  la  représentation  nationale  était  élue  par  îles 
collèges  spéciaux  composés  des  éléments  qui  concourent 
à  l'élection  des  sénateurs  universités,  corporations  aca- 
démiques, sociétés  économiques  des  .unis  du  pa\  s. 

Cette  catégorie  spéciale  d'électeurs  s  disparu  avec 
In  loi  du  8  août  1907,  qui  a  réservé  exclusivement  au 
suffrage  universel  direct  l'élection  de  la  Chambre  'les 
Député, 


LA    CONSTITUTIOU  55 

Celle-ci  est  élue  pour  cinq  ans. 

Nous  verrons  qu'afin  do  permettre  la  représentation 
des  minorités,  la  loi  électorale  espagnole  a  institué  le 
vote  limité  lorsque  le  collège  électoral   est   appelé   a 

élire  plus  d'un  représentant. 

La  Chambre  des  Députés  se  renouvelle  intégrale- 
ment. 

Les  Cortès  se  réunissent  fous  les  ans. 

Le  Souverain  a  le  droit  de  les  convoquer,  de  les  pro- 
roger, de  clore  leurs  sessions,  de  dissoudre  simultané- 
ment ou  séparément  la  partie  élective  du  Sénat  et 
la  Chambre  des  Députés  avec  l'obligation  de  convoquer 
et  de  réunir  les  nouvelles  assemblées  dans  les  trois 
mois  à  compter  du  jour  de  la  dissolution. 

Les  deux  Chambres  doivent  être  réunies  en  même 
temps. 

Elles  ne  peuvent  délibérer  ensemble  ni  en  présence 
du  Souverain. 

Mlles  ont  le  droit  d'arrêter  leur  règlement  intérieur. 

Mlles  procèdent  à  la  vérification  des  pouvoirs  de 
lems  membres  et  peuvent  ordonner  des  enquêtes  sur 
les  élections  contestées  sous  la  condition  que  l'enquête 
soil  dirigée  par  l'autorité  judiciaire. 

C'esl  là  une  particularité  curieuse  du  droit  public 
espagnol  sur  laquelle  nous  aurons  à   revenir. 

Les  séances  des  Cortès  sont  publiques. 
Les  sénateurs  ei  les  députés  sonl  inviolables  pour  les 
opinions  qu'ils  exprimenl  el  les    votes  qu'ils  émettent 

au  sein  des  .^semblées  législatives. 

Pendant    la    durée    des    sessions,    ils  ne  peuvent  être 

arrêtés   ou    poursuivis   qu'avec   l'autorisation    de    la 


."»(")  i  SPAGN1 

Chambre  a  laquelle  ils  appartiennent,  sauf  au  cas  de 
flagrant  délil  ;  mais,  même  dans  ce  cas,  comme  dans  le 
cas  de  poursuites  exercées  en  dehors  de  la  durée  des 
sessions,  la  Chambre  à  laquelle  appartient  le  membre 
arrêté  ou  poursuivi,  doit  être  immédiatement  informée 
pour  ((qu'elle  prenne  connaissance  de  l'affaire  et  rende 
sa  décision  o  (i). 

Ni  les  sénateurs  ni  les  députés  ne  reçoivent  de  trai- 
tement  ou  d'indemnité. 

En  dehors  de  la  puissance  législative,  que  les  Coi  tés 
exercent  d'accord  avec  le  Roi,  elles  sont,  aux  termes  de 
l'article  'j"»  de  la  constitution,  investies  des  attributions 
suivantes  : 

Recevoir  du  Roi,  du  successeur  immédiat  de  la  cou- 
ronne, delà  Régence  ou  du  Régent  du  royaume  le  ser- 
inent d'observer  la  Constitution  et  les  lois. 

Elire  le  Régenl  oula  Régente  du  royaume  et  nommer 
un  tuteur  au  roi  mineur. 

Rendre  effective  la  responsabilité  des  ministres, 
lesquels  seront  accusés  par  la  Chambre  el  jugés  par  le 
Sénal . 

L'article  s  »  de  la  constitution  spécifie  :  ti  ions  les 
ans,  le  Gouvernement  présentera  aux  Cortès  le  budget 
général  des  dépenses  de  l'Etal  pour  l'année  suivante, 
l'exposé  des  voies  el  moyens  pour  \  faire  face,  ainsi 
que  le  compte  rendu  des  recouvrements  opérés  «les 
deniers  publics  el  de  leur  emploi,  pour  être  soumis  à 
leur  examen  el  à  leur  approbation.  Si  la  lui  de  finances 
ne   peut  être   votée  avant  le  premier  jour  de  l'année 

i)  Constitution,  :•  r I i <  Il    \- . 


I.A    (UNS  II  II   noN  > , 

budgétaire,  ou  se  conformera  à  la  loi  de  finances  an 
térieurè,    pourvu  qu'elle  ail   été  disculée  el  votée  pai 
les  Cortès  cl  sanctionnée  par  le  roi  ». 

De  même,  il  est  déclaré  par  l'article  88  que  les 
Cortès  fixeront  tous  les  ans,  sur  la  proposition  du  Hoi, 
les  Innés  militaires  permanentes  de  terre  el  de  mer  ■>. 

Le  Gouvernement  doit  être  nécessairement  autorisé 
par  nue  loi  pour  disposer  des  propriétés  de  l'Etat,  con- 
tracter  un  emprunt  national  (i)  el  <■  la  dette  publique 
csi  placée  sous  la  sauvegarde  de  la  nation  »  (2), 

En  même  temps  qu'elle  règle  l'organisation  des  pou- 
voirs publics,  la  Constitution  garantit  aux  citoyens 
l'existence  d'une  députation  provinciale  élue  pour 
chaque  province  et  d'une  assemblée  municipale  (ayan- 
tamienlo)  nommée  par  les  habitants  pour  la  gestion  des 
intérêts  des  municipes  (terminos  municipales  ou  pueblos). 

En  renvoyant  à  des  lois  organiques  spéciales  le  soin 
d'assurer  le  fonctionnement  régulier  de  la  justice,  la 
constitution  décide  qu'  «  il  n'v  aura  qu'un  seul  droit 
pour  tous  les  espagnols  en  matière  civile  et  crimi- 
nelle »  (.')).  Klle  prévoit  la  rédaction  de  codes  devant 
régir  toute  la  Monarchie  el  proclame  le  principe  de 
l'inamovibilité  des  juges  i)en  ajoutant  que  »  les  juges 
sont  personnellement  responsables  de  toutes  les  infrac- 
tions à  la  loi  commises  par  eux  »  (5). 

Dans   son   titre   premier   (des  Espagnols   el    de  huis 

(1)  Constitution,  article  86. 

a  Constitution,  article  87. 
(3    1  lonstitution,  article  76. 

1  <  lonstitution,  article  80. 
(5)  Constitution,  article  s  1 . 


58  IM'Ai.M. 

droit*  la  constitution  a  consacré,  en  même  temps  que 
le  devoir  pour  tout  citoyen  e  de  prendre  les  armes  pour 
défendre  sa  pairie,  lorsqu'il  est  appelé  par  la  loi,  et  de 
contribuer  dans  la  proportion  de  ses  revenus  aux  dé- 
penses de  l'Etat,  de  la  province  et  du  municipe  »,  les 
garanties  tutélaires  de  la  liberté  individuelle. 

Nul  Espagnol  ou  nul  étranger  ne  pourra  être  détenu 
que  dans  les  cas  et  suivant  les  formes  prescrites  par  la 
loi. 

Toute  personne  détenue  sera  remise  en  liberté  ou  a 
la  disposition  de  l'autorité  judiciaire  dans  les  vingt- 
quatre  heures  qui  suivront  son  arrestation. 

Toute  détention  devra  cesser  ou  être  régularisée  dans 
les  72  heures  qui  suivront  la  comparution  de  la  per- 
sonne arrêtée  devant  le  juge  compétent.  La  sentence 
provisoire  qui  sera  rendue  devra  être  notifiée  à  l'inté- 
ressé dans  le  même  délai  (il. 

Nul  Espagnol  ne  pourra  être  arrêté  sans  qu'il  j  ait 
un  mandat  du  juge  compétent,  L'acte  contenant  le 
mandat  sera  confirmé  ou  non,  après  l'audition  de  l'in- 
culpé, dans  les  -•>.  heures  qui  suivront  son  arrestation. 
Toute  personne  détenue  en  dehors  des  formalités  indi- 
quées  <>u  des  cas  prévus  par  la  constitution  ou  les  lois 
sera  remise  en  liberté  sur  sa  demande  (2)  ou  sur  la  de- 
mande d'un  Espagnol  quel  qu'il  soit, 

Nid  ne  peut  pénétrer  dans  le  domicile  d'un  Espagnol 
ou  d'un  étranger  résidant  en  Espagne,  sans  son  con 
sentement,  excepté  dans  les  cas  et  suivant  les  forma- 

(  1  )  (  lonstitutîon,  article  \, 

<       r  ■  ~  t  i  1 1 1 1 1  <  •  1 1 ,   BXtil  le     '• 


I.  \    CONS  i  I  li   I  ION  59 

lités  prévues  par  les  lois.  Les  perquisitions  domiciliaires 
se  feront  toujours  en  présence  de  l'intéressé,  ou  d'un 
membre  de  sa  famille,  ou,  à  son  défaut,  de  deux 
témoins  voisins  de  l'intéressé    i    . 

L'autorité  gouvernementale  ne  pourra  ni  saisir  ni 
ouvrir  la  correspondance  confiée  à  la  poste  (a). 

La  peine  de  la  confiscation  des  biens  ne  pourra 
jamais  être  rétablie,  et  nul  ne  pourra  être  privé  de  sa 
propriété  si  ce  n'est  par  l'autorité  compétente,  après 
justification  d'un  motif  d'utilité  publique  et  moyennant 
une  juste  et  préalable  indemnité.  Si  ces  formalités 
n'ont  pas  été  observées,  les  juges  maintiendront  et  au 
besoin  réintégreront  l'exproprié  dans  sa  possession  (3). 

Après  avoir  établi  les  règles  prolectrices  de  la 
liberté  individuelle,  la  Constitution  garantit  la  liberté 
de  conscience,  mais  en  termes  singulièrement  timides 
quoiqu'ils  aient  soulevé  les  protestations  de  Ivome 
voyant  dans  la  tolérance  des  cultes  dissidents  «  une 
atteinte  à  la  vérité  et  aux  droits  de  l'Eglise  ». 

a  La  religion  catholique,  apostolique  et  romaine, 
déclare  l'article  i  i .  est  la  religion  de  l'Etat.  La  Nation 
s'oblige  à  entretenir  le  culte  et  ses  ministres. 

«  Nul  ne  pourra  être  inquiété,  sur  le  territoire  espa- 
gnol pour  ses  opinions  religieuses,  ni  pour  l'exercice 
de  son  culte,  sauf  Le  respect  dû  à  la  morale  chrétienne. 

«  Sont  prohibées  toutefois  les  manifestations  et  céré- 
monies publiques   d'une  religion  autre  que   celle  de 

rr.tat  ». 

i  )  i  ionatitution,  article  6. 

•'.)  Constitution,  article  7. 

(3)  Constitution,  article  10. 


60  ëspagni 

La  Constitution  proclame  le  principe  411c  «  tous  les 
Espagnols  sont  admissibles  aux  charges  et  fonctions 
publiques  suivant  leur  mérite  et  leur  capacité  o  (1). 

Elle  consacre  la  liberté  «lu  commerce  el  de  l'in- 
dustrie, chacun  étant  reconnu  libre  «  de  choisir  sa 
profession  et  de  l'apprendre  comme  il  lui  paraîtra  pré- 
férable »  (2). 

Elle  affirme  le  principe  de  la  liberté  de  l'enseigne- 
ment (3). 

Elle  reconnaît  aux  citoyens  le  droit  de  «  se  réunir 
pacifiquement  »,  de  «  s'associer  dans  un  but  tem- 
porel »,  d'adresser  des  pétitions  individuelles  ou  collec- 
tives au  Roi,  aux  Cortès  et  aux  autorités;  elle  spécifie 
seulement  :  «  Le  droit  de  pétition  ne  pourra  être  exercé 
collectivement  par  aucun  corps  de  la  force  armée.  Ceux 
qui  font  partie  de  la  force  armée  ne  pourront  exercer 
le  droit  individuel  de  pétition  qu'en  se  conformant  aux 
lois  militaires  spéciales  »  (4). 

Elle  déclare  : 

c  Tout  Espagnol  a  le  droit  d'émettre  librement  ses 
idées  el  ses  opinions  parla  parole,  l'écriture,  parla  voie 
de  l'impression  et  par  tout  autre  procédé  analogue 
sans  être  s m*  .1  la  censure  préalable  >i    5), 

«  Les  lois,  ajoute  la  Constitution,  (6)  édicteront  les 

1  (loristiiiiiic.il,  article  i5 
(a)  Constitution ,  Brlicle  1 3 

.'i    <  lonstitution,  article  1  3. 

'1    1  lonstilution,  article  1  '•'>. 

1  onatitution,  article  i3. 

(())  (  îonatitul  ion,  article  1  \ . 


LA    CONS  riTl  TION  61 

dispositions  nécessaires  pour  assurer  l'exercice  de  ces 
droits  sans  porter  atteinte  aux  droits  de  la  Nation  el 
au.v  attributions  essentielles  des  pouvoirs  publics  ». 

La  loi  du  8  janvier  187g  sur  la  presse,  L'imprimerie, 
['affichage  et  le  colportage  a  soumis  la  presse  pério- 
dique (periodicos)  au  régii le  la  déclaration  préalable 

el  a  prévu  un  grand  nombre  de  délits  de  presse,  ne 
laissant  à   la  liberté  de  discussion  qu'un  champ  étroit. 

La  loi  du  8  janvier  1870  (1)  instituait  pour  le  juge- 
ment des  délits  de  presse  un  tribunal  spécial,  composé 
d'un  président  de  chambre  el  de  deux  magistrats  de 
première  instance  du  ressort  dans  lequel  aurait  eu  lieu 
la  publication.  Ces  trois  magistrats  devaient  être  l'objet 
d'une  désignation  spéciale  delà  pari  du  Gouvernement 
el  la  poursuite  était  confiée  à  un  «  procureur  de  presse  » 
choisi  par  le  Ministre  de  l'intérieur,  d'accord  avec  le 
Ministre  de  (îràce  et  justice.  Indépendamment  des 
peines  édictées  par  la  loi,  le  tribunal  de  presse  pouvait 
prononcer  la  suspension  du  journal  pendant  un  temps 
variant  suivant  L'importance  du  délit.  La  suspension 
prononcée  trois  ou  si\  lois,  suivant  la  gravité  des  cir- 
constances, en  deux  ans,  entraînai!  la  suppression  du 
journal.  La  loi  du  20  juillet  1888  (a)  a  substitué  à  la 
juridiction  du  tribunal  de  presse  la  juridiction  du  jury. 
«  Le  tribunal  du  jury,  déclare  la  loi,  connaîtra  des 
délits  commis  par  la  voie  de  L'imprimerie,  de  la  gra  - 
vure  ou  de  tout  autre  moyen  mécanique  de  publication, 
exception    faite  des  dédits  de  lèse  majesté  et  de  ceux 

1)  \  .    \  1  m  1 1  a i re  de  législation  étrangère,  [880. 
•    \  .   annuaire  de  législation  étrangère,  1 


«»•_'  ESPAGN1 

d'injure  et  de  diffamation  contre  les  simples  parti- 
culiers ». 

La  loi  dite  o  des  juridictions  »  est  venue  en  lyon 
apporter  une  grave  atteinte  à  ces  dispositions  libérales 
en  attribuant  aux  juridictions  militaires  la  connais- 
sance des  délits  de  presse  contra  «  l'armée  et  l'intégrité 
de  la  pallie  ». 

I  ne  perpétuelle  menace,  au  surplus,  reste  suspendus 
sur  les  garanties  constitutionnelles  avec  l'article  17  de 
la  Constitution. 

Ce  texte  réserve,  en  effet,  au  Gouvernement  la  faculté 
de  suspendre  les  garanties  constitutionnelles  quand 
«  la  sûreté  de  l'Etat  ou  des  circonstances  extraordi- 
naires l'exigeront  »  si  les  Corlès  ne  sont  pas  réunies. 

M'.v  circonstances  extraordinaires...  I  ne  pareille  for- 
mule, aussi  générale  el  aussi  vague  1  ouvre,  on  en  con- 
viendra, un  large  horizon  à  l'arbitraire  gouvernemental. 
L'article  17.  à  la  -vérité,  spécifie  que  le  Gouvernement 
sera  tenu  de  «  soumettre  sa  décision  aux  (.01  lès  le  plus 
tôt  possible  »,  niais,  outre  qu'il  n'v  a  pas  de  délai 
fixé  pour  informer  les  Cor  tes,  il  esl  permis  de  se 
demander  quelle  résistance  on  pourrait  attendre  de 
Cortès  qui  sciaient  élues  sous  le  régime  de  la  suspen- 
sion des  garanties  constitutionnelles. 

Kl  puis,  le  vice  principal,  qui  pèse  lourdement  sur 
le  régime  politique  de  l'Espagne,  nous  le  recon- 
naîtrons lorsque  nous  examinerons  la  façon  donl  il  esl 
procédé  à  l'élection  des  Curies,  c'est  le  défaut  com- 
plet  i\<-   sincérité   dans  les  opérations  électorales.  Les 

I  Ortcs,  suivant  la  parole  d'un    des    plus   éininenls    pu 

blicisles  de  la  péninsule  espagnole,  M.  Joaquin  Costa, 


LA    CONSTITUTION  63 

«  ne  sont  pas  élues,  mais  nommées,  alors  même  que 
leur  nomination  esl  déguisée  sous  lo  nom  d'élection  >>. 

Nous  verrons  comment  les  néfastes  pratiques  que 
l'on  désigne  de  l'autre  côté  des  Pyrénées  sous  le  nom 
de  cariijuisinc  arrivent  à  fausser  complètement  l'appli- 
cation du  suffrage  universel.  Le  cacique  ou  politicien 
de  village  est  le  maître  du  vote  ;  il  L'assure  au  trouver* 
ncment  au  premier  signal  parti  de  Madrid,  recevant  en 
échange  de  L'administration  toutes  immunités  pour  se 
livrer  aux  opérations  louches  qui  rémunèrent  en  profits 
scandaleux  son  influence,  son  audace  et  son  absence 
de  scrupules.  L'action  du  cacique,  faite  de  séductions  et 
de  sévices,  est  à  ce  point  maîtresse  d'un  corps  électo- 
ral où  dominent  les  illettrés,  que  depuis  l'introduction 
du  régime  parlementaire  eu  L'spagnc,  aucun  ministère 
en  fonction  n'a  jamais  manqué  d'obtenir  aux  élections 
la  majorité  qu'il  s'était  lui-même  fixée, 

II  serait  injuste  cependant  de  méconnaître  l'effort 
ele  régénération  qui  s'est  poursuivi  en  Espagne  depuis 
la  Restauration  de  1N7Ô.  En  fait,  non  seulement  les 
garanties  libérales  résulta  ni  des  lois  constitutionnelles 
ont  été  maintenues,  mais  elles  se  sont  sensiblement 
développées.  Le  jur\  a  été  rétabli  ;  le  mariage  civil  a 
reçu  la  sanction  Légale  ;  la  Liberté  île  conscience  a  été 
respectée  malgré  le  maintien  de  la  religion  d'Etal  ; 
la  liberté  d'association  esl  venue  s'ajouter  à  la  liberté  de 
réunion  el  à  la  liberté  de  la  presse  ;  enfin,  nous  avons 
déjà  constaté  que  le  suffrage  censitaire  avait  (ail  place 
au  suffrage  universel, 

\u  Fur  et  à  mesure  que  la  monarchie  se  dégageai) 
de  pe  que  Castelar  appelai)  ses.      institutions  pharao- 


64  ESl'AGNl 

niques  »  s'éteignaient  les  derniers  échos  des  guerres 
civiles. 

Le  Garlisme  esi  mort;  le  cantonalisme,  qui  risquait 
d'entraîner  la  décomposition  de  l'Espagne,  se  trans- 
forme en  un  régionalisme  qui  peut  exercer  la  plus 
heureuse  influence  sur  le  développement  économique 
de  la  péninsule.  Si  l'on  excepte  les  éléments  révolu- 
tionnaires anarchistes,  dont  les  attentais  criminels 
restent  un  sujet  de  troublante  inquiétude,  les  partis 
anlidynastiques  semblent  réduits  à  l'impuissance,  tandis 
cpie  l'Espagne  «ressaisit  son  âme  de  nation  et  se  réuni  6e 
en  se  modernisant  »(i).  Les  finançasse  sont  relevées  dans 
des  conditions  inespérées  ;  l'année;!  été  refaite,  maté- 
riellement et  moralement,  pliée  au  respect  de  ce  prin- 
cipe fondamental,  si  longtemps  ignoré  ou  méconnu  de 
srs  chefs,  que  «  la  force  armée  doit  être  essentiellement 
obéissante,  qu'elle  ne  délibère  en  aucun  cas,  qu'elle 
n'a  à  faire  ni  les  lois  ni  les  gouvernements.  »  Il  est 
permis  d'espérer  que  l'ère  des  pronunciamentos  est 
close. 

En  même  temps,  le  développement  économique  a 
pus  dans  les  préoccupations  politiques  de  l'Espagne 
une  place  de  plus  ci  pins  prépondérante.  L'agriculture 
s'est  ranimée,  heureusement  secondée  par  la  loi  du  3o 
Août  1907  dite  "  loi  décolonisation  intérieure  »  :  le 
commerce  se  développe  ;  un  programme  de  travaux 
publics  est  à  l'étude  ;  une  législation  nouvelle  prépare 
la  conservation,  la  protection,  la  mise  en  valeur  de 
richesses  trop  longtemps  inexploitées  et  tout   un  Code 

1;  <  Iharlei  Benoist. 


LA    CONSTITUTION  63 

du  travail  esl  en  formation  :  loi  sur  le  repos  dominical 
!  igo  i  i,  Mir  la  protection  de  L'enfance  (igo4)  décret 
réglementant  l'inspection  du  travail   (1906),    lois   sur 

les  Caisses  de  crédit  agricole  1906),  sur  l'arbitrage 
et  la  conciliation  (1Q08  ,  sur  les  tribunaux  indus- 
triels I  [908  .  sur  la  prévoyance  1D08)  sur  les  grèves 
igoo),  sur  la  limitation  de  la  journée  de  travail  dans 
les  mines I  1910),  sur  la  construction  de  maisons  à  bon 
marché  (191  1  I,  sur  le  contrat  d'apprentissage  |  i<)i  1  . 
sur  la  prohibition  du  travail  de  nuit  pour  les  femmes 
dans  l'industriel  1 9 12)  (î),  etc.  Cette  législation,  remar- 
quable à  beaucoup  d'égards, est  surtout  l'oeuvre  del'/ns- 
titut  îles  réformes  sociales  de  Madrid,  institution  officielle 
originale,  qui  tient  à  la  fois  de  notre  Musée  social  et  de 
notre  Office  du  travail,  et  qui  fait  grand  honneur  à 
l'Espagne  contemporaine. 

Les  désastres  qui  ont  fait  perdre  à  la  monarchie 
espagnole  ses  colonies  ont  eu  comme  contre-coup 
heureux  de  lui  ramener  les  éléments  les  plus  indus- 
trieux de  sa  race,  de  lui  faire  secouer  sa  léthargie, 
de  réveiller  son  énergie  et  de  l'appliquer  au  dévelop- 
pement de  ses  ressources  naturelles.  L'Espagne,  si 
Ion-temps  fermée  aux  influences  extérieures,  au  poinl 
de  confondre  la  xénophobie  avec  le  sentiment  de  l'in- 
dépendance, s'est  ouverte  aux  leçons  qui  lui  venaient 
du  dehors,  tandis  que  la  facilité  croissante  des  com- 
munications et  des  échanges  et  la  substitution  graduelle 


1)  V,  viuiimirc  de  Législation  étrangère  et  l'élude  liés 
documentée  et  d'un  haut  intérêt  de  M.  Ingel  Marvaud, 
/.//  question  sociale  en  Espagne,  Paris,  191a. 


66  l.MAt.M 

d'une  même  la ngae  aux   dialectes   provinciaux  resser- 
rait les  lu-us  de  l'unité  nationale. 

Au  lendemain  des  défaites  cubaines,  une  élite  in- 
tellectuelle, Porte  de  l'adhésion  des  Chambres  de  com- 
merce, d'industrie,  d'agriculture,  de  navigation,  des 
Associations  île  production  et  de  consommation,  s'est 
lionne  la  mission  d'élaborer  tout  un  programme  de 
a  régénération  ».  Il  lui  a  semblé  qu'il  n'était  plus 
possible  pour  les  Espagnols  de  répéter  avec  sérénité. 
«  /.u  que  ha  <le  ser  no  puede  faldar,  ce  qui  doit  arri- 
ver ne  peut  manquer  »  :  que,  pour  une  nation,  ne  pas 
savoir  réagir  contre  le  malheur,  c'est  laisser  se  con- 
sommer l'irrémédiable  décadence.  A  l'action  malsaine 
des  politiciens  de  mauvais  aloi,  aux  dilapidations  bud- 
gétaires, à  la  torpeur  et  à  l'ignorance,  causes  premières 
de  l'état  arriéré  de  l'Espagne,  la  Ligue  nationale  des 
producteurs  a  opposé  «  Vulearium  espanol  »,  la  concep- 
tion d'une  Espagne  nouvelle,  se  retrempant  ets'épurant 
au  foyer  de  la  civilisation  européenne,  française  surtout, 
pour  reprendre  sa  place  dans  le  monde,  sans  rien 
abdiquer  de  son  génie  national. 

La  politique  réparatrice  a  été  inaugurée  au  (\i'rî-* 
prématuré  d'Alphonse  \ll,  en  1 885,  par  sa  veuve,  la 
Heine  Marie-Christine.  La  mère  admirable  que  lut  la 
Heine  régente  ne  buI  pas  seulement  disputer  à  la  mort 
le  fi  èle  enfant  qui,  né  si\  mois  après  la  disparition  d'un 
père  phtisique,  semblait  prédestiné  à  le  suivre  dans  la 
tombe;  avec  le  même  bonheur,  elle  -mi  mettre  la 
couronne  d'Alphonse  \lll  à  l'abri  des  entreprises  des 
factieux,   Son   habileté   politique  a    désarmé  les  résia- 


I  \    CONSTITUTION  '"'" 

tances  comme  ses  vertus  ont  rendu  la  respectabilité  au 
trône  d'Espagne. 

H  fallait  rallier  définitivement  les  libéraux  à  la 
Monarchie.  Canovas  s'eflaça  volontairement  et  la  Reine 
régente  appela  aux  ail. lires  le  Chef  du  parti  libéral, 
v  gasta.  I.u're  les  deux  leaders  des  conservateurs  et 
des  libéraux,  Canovas  et  Sagasta*,  se  nouait  le  Pacte 
du  Par  do,  qui  allait,  suivant  les  nécessités  des  événe- 
ments, faire  alterner  au  pouvoir,  à  l'exemple  des 
whigsei  des  tortesen  Angleterre,  les  deux  grands  partis 
dynastiques  de  l'Espagne  pour  assurer  la  marche  régu- 
lière du  Gouvernement. 

Alphonse  Mil,  proclamé  majeur  le  17  Mai  1002,  a 
continué,  en  l'accentuant,  la  politique  libérale  de  sa 
mère. 

Caslelar.  dans  un  de  ses  derniers  discours,  avait 
déclaré  : 

c  Je  viens  dire,  le  Iront  hien  haut  et  la  voix  bien 
claire,  que  j'appuie  ce  gouvernement  parce  (pièce  gou- 
verment  donne  la  liherté  religieuse,  la  liberté  scientifi- 
cjue,  la  liherté  de  la  presse,  la  liherté  d'association,  le 
jury,  le  suffrage  universel.  Je  ne  puis  rien  être  dans 
la  monarchie,  je  neveux  rien  être  dans  la  monarchie. 
Je  suis  un  républicain  historique,  républicain  intransi- 
geant, républicain  de  toute  la  vie,  républicain  par  cons- 
cience. Mais,  île  même  que  j'ai  dit  aux  miens,  et  ils 
ne  m'ont  pasécouté,  —  en  certaine  nuit  célèbre  :  Notre 
République  sera  la  formule  de  cette  génération  m  nous 
réussissez  a  la  faire  conservatrice,  je  viens  vous  dire 
maintenant  :  Notre  Monarchie  sera  la  formule  de  celte 
génération,  si  vous  réussisse/  a  la  faire  démocratique» 


68  ESPAOKl 

Il  Bemble  que  L'esprit  averti  du  jeune  Souverain. 
dont  la  vaillance  et  la  générosité  exercent  une  si 
irrésistible  puissance  d'attraction,  ait  à  cœur  île  réaliser 
la  parole  du  grand  orateur  républicain.  Wec  Alphonse 
\lll,  le  Pade  du  Purdo  s'est  sensiblement  élargi.  Sous 
l'action  réfléchie  de  la  volonté  royale,  on  pressent  la 
Formation  d'un  gouvernement  résolu  à  grouper  autour 
de  lui,  pour  une  œuvre  de  reconstitution  nationale, 
tous  les  éléments  susceptibles  d'y  concourir,  depuis  les 
conservateurs  tolérants  jusqu'aux  républicains. 

«  Je  ne  veux  plus  de  portes  fermées,  a  dit  Alphonse 
Mil.  je  .veux  des  portes  ouvertes  de  part  et  d'autre, 
afin  (pie  l'opinion  des  républicains  ci  des  socialistes 
puisse  arriver  jusqu'à  moi  comme  celle  des  monar- 
chistes ». 

C'est  une  ère  nouvelle  pour  l'Espagne,  cessant  de  se 
replier  sur  elle-même  et  voulant  rassembler  en  un 
faisceau  compact  toutes  ses  forces  afin  de  reconquérir 
sa  place  dans  le  monde. 

Une  s<eur  latine  de  la  péninsule  ibérique,  l'Italie,  a 
connu,  elle  aussi,  de  longs  siècles  de  décadence.  La  M" 
narchie  démocratique  lui  a  apporté  la  formule  du 
Risorgimento. 
Pourquoi  n'en  serait-il  pas  de  même  pour  l'Espagne? 
Laborieuse  sans  contredit  reste  la  tâche  à  accomplir, 
car  les  tares  il  nous  faudra  en  signaler  restent 
nombreuses  a  effacer  ,  mais,  si  l'on  parvient  à  obtenir 
que  les  mœurs  secondenl  les  luis,  si  l'on  apporte  aux 
masses  populaires  le  levier  de  l'instruction  qui  leur 
fait  défaut,  si,  avec  l'éducation,  elles  acquièrent  ce 
qu'elles  ignorent, le  0  sens  de  la  légalité  i>,    s'il  se  dé- 


I.A    CONSTITUTION 

veloppe  chez  elles  un  véritable  espritpublic,  un  avenir  de 
grandeur  devra  s'ouvrir  pour  la  noble  nation  espagnole, 
En  dépit  des  erreurs   et  des   fautes  de   ses  gouver- 
nants, elle  a  gardé  de  puissants  moyens  de  relèvement 

par  sa  fierté  tenace,  son  culte  instinctif  de  la  bravoure 
et  sa  passion  de  l'honneur. 


Il 


GOUVERNEMENT 


II 
lio  gouvernement 


Le  pouvoir  royal  —  La  succession  au  trône.  —  La  Ré- 
gence. —  La  majorité  du  Souverain.  —  Les  prérogatives 
de  la  Couronne.  —  La  constitution  du  pouvoir  exécutif.  — 
Les  départements  ministériels.  —  Le  conseil  d'Etat,  Con- 
sfjo  de  Eslado,  régulateur  de  l'Administration.  —  Le  Tri- 
bunal des  Comptes,  Tribunal  de  las  Cuentas,  régulateur  de 
la  comptabilité  publique. 

Les  grands  services  publics.  —  F, es  finances;  le  régime  fiscal 
de  l'Espagne.  —  La  défense  nationale,  l'armée  et  la  ma- 
rine.  —  L'agriculture,  le  commerce,  les  travaux  publics. 
L'enseignement.  —  La  religion  d'Etat  et  les  cultes  dis- 
sidents. -  Le  Domaine  dUltra  mar.  —  L'action  espa- 
gnole au  Maroc.  -  L'accord  franco- espagnol  du  27  no- 
vembre IQ]  :>, 

Vprès  avoir  proclamé  Alphonse  \II  «  roi  légitimé 
de  l'Espagne  ».  La  Constitution  du  3o  juin  iH;(i  a 
réglé  ainsi  la  succession  au  trône  : 

Article  <>o,  ci  La  succession  au  trône  d'Espagne  aura 
lieu  selon  l'ordre  régulier  de  primogéniture  el  par  re- 
présentation, la  ligne  antérieure  étanl   toujours  pré- 


7  i  BSP  USN1 

Férée  aux  lignes  postérieures  :  dans  la  même  ligne,  le 
degré  le  plus  proche  sera  préféré  au  degré  le  plus  éloi- 
gné; dans  le  même  degré,  I  homme  à  la  femme  rt.  à 
égalité  de  sc\e,  la  personne  la  plus  âgée  à  colle  qui 
l'es!  le  moins  ». 

article  61.  o  Si  les  lignes  des  descendants  légitimes 
de  Don  Alphonse  \U  sonl  éteintes,  ses  sœurs  lui  suc- 
céderont, puis  sa  tante,  sœur  de  sa  mère,  et  ses  des- 
cendants légitimes,  et  enfin  ses  oncles,  frères  île  Ferdi- 
nand VII,  s'ils  ne  sont  pas  exclus  ». 

L'article  G  )  précise  les  conditions  d'exclusion  : 

«  Les  personnes  qui  sont  incapables  de  gouverner,  ou 
qui,  par  leurs  actes,  ont  mérité  de  perdre  le  droit  à  la 
Couronne,  seront  exclues  de  la  succession  par  une  loi  >>. 

La  Constitution  espagnole  admet,  on  le  voit,  les 
femmes  à  régner.  Elle  confirma  l'abolition  de  la  loi 
salique,  ainsi  que  Ferdinand  \ll  l'avait  fait  décider, 
afin  d'assurer  Le  trône  à  sa  fille  Isabelle  II  :  mais  les 
femmes  ne  succèdent  à  la  couronne  qu'en  cas  d'ab- 
sence d'héritier  mâle  du  même  degré. 

L'article  65  spécifie  :  t<  Quand  règne  une  femme,  le 
prince-époux  ne  peut  prétendre  à  aucune  pari  au  gou- 
vernement du  Royaume  ». 

Il  fallait  prévoir  le  cas  "ù  la  dynastie   régnante  se 
trouverait   éteinte.    L'article   6a    réserve,    dans   cette 
éventualité,  aux  Cortès  le  droit  de  procéder  aux  »  nou 
veaux  choix  qui  conviendraient  le  mieux  à  la  Nation  ». 

Le  Souverain  est  proclamé  majeui  lorsqu'il  a  atteint 
le  seixe  ans  accomplis  1 1  1. 

1    I  onttitution,  srtii  le  66, 


!i     GOUVBRNBMEN  r  T.") 

Quand  le  Souverain  est  mineur,  ~>on  père  ou  sa  mère 

ou,  à  leur  défaut,  le  paient  le  plus  proche  pour  succé- 
der  i  la  Couronne  dans  l'ordre  établi  par  la  Consti- 
tution, est  appelé  à  exercer  la  Ké^encc  i  i   . 

Pour  que  le  parent  le  plus  proche  puisse  exercer  la 
Régence,  il  doit  être  espagnol,  âgé  d'au  moins  vingt 
ans  acccomplis  et  n'être  pas  exclu  de  la  succession  à  la 
Couronne.  Le  père  ou  la  mère  du  Souverain  ne  peuvent 
exercer  la  régence  qu'à  la  condition  de  n'être  pas  re- 
mariéi 

S  il  ne  se  trouve  personne  à  qui  revienne  le  droit 
de  régence,  les  Cortèa  désignent  une.  trois  ou  cinq 
personnes  pour  l'exercer.  En  attendant  cette  désigna- 
tion, le  pouvoir  est  exercé  pro\  isoirement  par  le  Conseil 
des  Ministres  (3). 

Ouand  le  Souverain  est  dans  l'impossibilité  d'exercer 
le  pouvoir  et  que  les  Cortès  ont  reconnu  cette  impos- 
silnté.  la  Régence  appartient  au  (ils  aine  du  Souverain 
s'il  est  majeur  de  16  ans,  à  son  défaut  au  conjoint  du 
Souverain,  et,  à  défaut,  aux  personnes  appelées  à  la 
Régence  (4). 

Le  Régent  ou  le  Conseil  de  Régence  exercent  l'auto- 
rité ,|u  Souverain  au  nom  duquel  sont  rendus  et  pu- 
bliés tous  les  actes  gouvernementaux. 

Les  personnes  investies  de  la  Régence  prêtent  ser- 
ment aux  Cortèl  d'être  fidèles  au  Souverain  mineur 
et  de  respecter  la  Constitution  et  les  lois. 

(i  Constitution,  article  67. 

1  I  institution,  article  I 

(3  ( ^institution,  article  -<>. 

'1  Constitution,  article  71 . 


7»>  RSPAQNl 

Au  cas  où  les  Cortès  ne  seraient  pas  réunies  au  mo- 
ment de  la  formation  de  la  Régence,  elles  devraient 
rire  immédiatement  convoquées.  Le  Régent,  en  atten- 
dant, piété  provisoirement  devant  le  Conseil  des  Mi- 
nistres le  serment  qu'il  sera  appelé  à  renouveler  so- 
lennellement devant  les  Cortès. 

A  son  avènement,  le  Souverain  prêle  devant  les  Cor- 
tès le  serment  d'observer  la  Constitution  et  les  lois. 

Sa  personne  est  déclarée  sacrée  et  inviolable. 

C'est  à  lui  qu'appartient  la  charge  d'assurer  le  res- 
pect des  lois,  le  maintien  de  l'ordre  public  et  le  respect 
de  la  dignité  nationale  à  l'extérieur. 

11  a  le  commandement  suprême  de  l'année  et  de  la 
Hotte  ;  il  dispose  des  forces  de  terre  et  de  mer. 

La  Constitution  reconnaît  au  Souverain  le  droit  de 
déclarer  la  guerre  et  de  conclure  la  paix  «  à  charge  de 
fournir  ensuite  aux  Cortès  les  explications  et  docu- 
ments nécessaires  (1)  ». 

Elle  lui  reconnaît  la  direction  des  relations  diplo- 
matiques ci  commerciales  avec  les  puissances  étran- 
gères. 

Mais  [e  Souverain  doit  être  nécessairement  autorisé 

par  une  loi  spéciale  : 

r  pour  aliéner,  céder  ou  échanger  une  portion 
quelconque  «lu  territoire  espagnol  ; 

a  pour  incorporer  un  territoire  étranger  au  terri- 
toire espagnol  ; 

3°  pour  admettre  des  troupes  étrangères  dans  le 
Roj  aume  ; 

i  )  Constitution,  article  5  \. 


Il     \ ERNEM1 NI  / / 

j  pour  ratifier  les  traités  d'alliance  offensive,  les 
traités  spéciaux  de  commerce,  les  traités  qui  stipulent 
des  subsides  (Mi  faveur  d'une  puissance  étrangère  et 
tous  ceux  qui    peuvent  obliger  individuellement  des 

Espagnols. 

Il  est  expressément  stipulé  (pie  «  dans  aucun  cas*  les 
articles  secrets  d'un  traité  ne  peuvent  déroger  aux  ar- 
ticles publics  de  ce  même  traité  (i)  ». 

L'un  des  attributs  de  la  souveraineté  est  le  droit  de 
grâce.  «  Il  appartient  au  Roi  de  gracier  les  coupables, 
en  se  conformant  aux  lois  » 

Le  Souverain  nomme  aux  emplois  civils,  confère  les 
honneurs  et  distinctions  de  toute  classe,  veille  «  à  ce 
que  dans  le  royaume  la  justice  soit  rendue  d'une 
manière  rapide  et  équitable  »,  préside  à  «  la  fabrica- 
tion des  monnaies  qui  portent  son  effigie  et  son  nom, 
ordonne  l'emploi  des  fonds  destinés  à  l'une  des 
brandies  de  l'administration  dans  les  limites  des  pré- 
\ isions  budgétaires  (2). 

Enfin,  il  est  investi   d'un  pouvoir  général   de  régie 
menlation  par  voie  de  décrets,  d'ordonnances,   d'ins- 
Iructions  pour  assurer  l'exécution  des  lois  (3). 

L'article  56  stipule  que  le  Roi,  avant  de  contracter 
mariage,  devra  en  donner  connaissance  aux  Cor  tes. 
Celles-ci  auront  à  approuver  par  une  loi  spéciale  le 
contrai  et  les  conventions  matrimoniales.  Les  mêmes 
formalités  doivent  être  observées  pour  le  mariage  de 

1  )  Constitution!  article  55. 
(u)  Constitution,  article  53. 

(3)  La  peseta  espagnole  équivaut  i  un  franc  'le  m. tir 
monnaie  d'argent, 


T^  ESPAGNE 

L'héritier  présomptif  de  la  couronne.  Ni  le  roi,  ni  l'hé- 
ritier do  trône  oe  peinent  contracter  mariage  «  avec 
une  personnne  que  la  loi  exclut  de  la  succession  à  la 
Couronne  ». 

L'article  57  de  la  Constitution  déclare  «pu;  la  dota- 
tion du  I loi  et  de  sa  famille  sera  lixée  pac  les  Cortès 
au  commencement  de  chaque  règne. 

La  liste  civile  du  Koi,  y  compris  les  dolalions  aux 
membres  de  la  Famille  royale,  est  de  9  5oo 000 pesetas. 

Lee  souverains  Espagnols  habitent  à  Madrid  le  Pa- 
lais Royal,  construit  sur  la  Place  d'Orient  par  l'archi- 
tecte italien  Sacchetli,  sous  le  règne  de  Charles  III. 
C'esl  un  édifice  de  style  grec,  d'un  ensemble  majes- 
tueux,   mais    massif.  Deux    ailes   en    retour   encadrent 

une  vaste  cour  intérieure,  la  place  d'armes,  parallèle 

au  cours  du  Man/anarès.  Du  haut  des  arcades  en  gale- 
rie, un  admirable  panorama  s'ollïe  à  la  Mie  jusqu'aux 
dernières  ondulations  de  la  sierra  de  Guadarrama. 
L'intérieur  est  d'une  somptueuse  richesse,  avec  ses 
merveilleuses  tapisseries,  ses  porcelaines  de  l'ancienne 
manufacture  du  Buen-Retiro,  sa  bibliothèque  remplie 
des  manuscrits  les  plus  précieux  et  son  incomparable 
Musée  des  Vxmurea 

Depuis  longtemps  la  famille  royale  a  délaissé  l'im- 
mense et  austère  Kscnrial  où  vécut  Philippe  II  et 
même  le  célèbre  château  d'Aranjuez,  situé  entre  Ma- 
drid et  Tolède,  ha  résidence  d'été  habituelle  des  sou- 
verains espagnols  esl  aux  environs  de  Madrid  le 
château  de  la  Granja,  construit  par  Philippe  V  sur  le 
modèle  réduit  du  Palais  de  Versailles,  avec  les  élégants 
jardins  que  dessina  Bi  >utelel 


LE    GOUVBRNBM1  N  1  7'.t 

Suivant  la  fiction  constitutionnelle,  «  le  Roi  règne 
il  ne  gouverne  pas  »  ;  il  exerce  le  pouvoir  par  l'inter- 
médiaire de  ministres  responsables;  mais,  si  l'on  veut 
s<*  faire  une  idée  exacte  <Iu  rôle  du  Souverain  dans  la 
Monarchie  constitutionnelle  espagnole,  il  convient 
d'ajouter  que,  pour  la  direction  à  imprimer  au  gou- 
vernement, le  roi  possède,  en  Espagne,  une  liberté 
d'initiative  infiniment  plus  large  que  dans  les  pays  où 
est  sincèrement  pratiqué  le  régime  parlementaire.  La 
règle  fondamentale  du  régime  parlementaire  est  que 
les  ministres  doivent  être  pris  dans  les  rangs  de  la  ma- 
jorité, parmi  les  hommes  politiques  reconnus  par  elle 
comme  ses  guides  et  ses  chefs  ;  mais  si  l'on  suit  atten- 
tivement l'histoire  politique  de  l'Espagne  depuis  les 
lois  constitutionnelles  de  187c»,  on  reconnaîtra  que, 
bien  rarement,  la  chute  d'un  cabinet  est  la  conséquence 
directe  d'un  vote  des  Chambres.  Les  crises  ministé- 
rielles sont  «  affaires  de  coulisses,  de  pasillos  »,  dit-on 
de  l'autre  côté  des  Pyrénées.  Il  semble  dès  lors 
naturel  que  le  Roi  apparaisse  comme  un  conseiller 
autant  qu'un  arbitre  dans  les  conflits  des  chefs  de 
groupes;  mais  il  y  a  une  raison  plus  décisive  pour 
expliquer  l'intervention  royale  dans  la  direction  de  la 
politique  intérieure.  En  Espagne,  en  effet,  —  nous 
l'axons  indiqué  sommairement  au  chapitre  précédent, 
—  tout  ministère  qui  procède  aux  élections  est  certain, 
à  l'avance,  d'obtenir  la  majorité  qu'il  désire  ei  cette 
majorité  est  presque  toujours  constituée  d'une  façon 
suffisamment  compacte  pour  pouvoir  se  maintenir 
normalement  pendant  toute  la  durée  de  la  législature. 
A  moins  de  dissidences  résultant   de  rivalités  person- 


80  Bsi'agni 

Qelles  entre  les  chefs  d'un  inèinc  parti,  le  ministère 
conserve  fidèlement  la    majorité  qui  est  son  œuvre. 

Il  la  retrouverait  infailliblement  à  la  prochaine 
consultation  électorale  s'il  occupait  encore  les  bancs 
du  gouvernement  au  moment  du  renouvellement  légal 
du  mandat  parlementaire  :  mais  alors,  ce  serait  tou- 
jours le  même  parti  se  perpétuant  au  pouvoir.  Les 
critiques  deviendraient  plus  vives,  les  attaques  de 
presse  plus  acerbes,  l'équilibre  entre  les  partis,  jugé 
nécessaire  au  fonctionnement  régulier  des  institutions, 
risquerait  de  se  trouver  rompu  et  la  dynastie  et  le 
pays  pourraient  avoir  gravement  à  souffrir  du  carac- 
tère révolutionnaire  que  prend  rail,  vraisemblablement, 
l'opposition. 

Dans  de  semblables  conditions,  il  appartient  au 
Souverain  de  remplir  le  rôle  de  pondérateur  entre  les 
partis,  de  s'inspirer  de  l'opinion,  de  L'opinion  tout  au 
moins  de  l'élite  du  pays  puisque  les  masses  restent 
indifférentes,  et  d'empêcher,  par  une  évolution  poli- 
tique opportune,  que  la  mainmise  indéfinie  d'un  parti 
sur  les  portefeuilles  ministériels  ne  rejette  le  parti 
adverse  dans  L'opposition  inconstitutionnelle.  Depuis 
surtout  l'application  de  ci-  qu'on  a  appelé  «  le  système 
rotatif  »,  à  la  suite  du  Pacte  du  Pardo  intervenu 
entre  Canovas  et  Sagasta,  on  a  vu  ainsi  plus  d'une 
fois  l'intervention  directe  de  la  Couronne  provoque! 
des  crises  ministérielles  et  les  résoudre  en  les  faisant 
suivre  d'une  consultation  du  corps  électoral  amenant 
au  Parlement  une  majorité  nouvelle, 

De  pareils  procédés  sont,  ils  faut  le  reconnaître! 
ni.  unes  ;,    l'orthodoxie   parlementaire     II   est 


il     1,1  if  \  I  uni  MBNT  M 

manifeste  qu'ils  devraient  disparaître  le  jour  où  l'édu- 
cation intellectuelle  et  morale  du  suffrage  universel 
aurait  libéré  l'Espagne  de  la  plaie  du  caciquisme. 

Les  Ministres  sont  nommés  parle  Souverain. 

On  distingue  les  Ministres  ((  avec  ou  sans  porte- 
feuille »),  suivant  que,  participant  dans  tous  les  cas  à 
L'exercice  du  pouvoir  exécutif,  ils  sont  ou  non  chargés  de 
la  direction  spéciale  d'un  département  ministériel. 

Les  départements  ministériels  sont  actuellement  au 
nombre  de  huit. 

Les  affaires  extérieures  rélèvenl  du  Ministère  d'Etat 
[Ministre-  de  Estarfo). 

Le  Ministre  de  la  Gobernacion  ou  Ministre  du  Gou- 
vernement a  des  attributions  analogues  à  celles  de 
notre  Ministre  de  L'Intérieur.  Il  est  chargé  d'assurer 
l'ordre  public  et  de  diriger  l'administration  civile  des 
provinces  dans  les  conditions  que  nous  aurons  à  expo- 
ser au  chapitre  IV. 

Le  Ministre  de  la  Justice,  qui  porte  le  titre  de  Mi- 
nistre de  Grâce  et  Justice,  a  dans  ses  attributions  les 
services  judiciaires,  qui  seront  l'objet  d'une  étude  spé- 
ciale au  chapitre  Y,  les  sceaux  du  Royaume  et  les 
cultes. 

Les  affaires  financières  dépendent  du  Ministre  des 
Finances  ou  Ministre  de  Hacienda',  les  affaires  mili- 
taires du  Ministre  de  la  Guerre  (  Ministro  de  Guerra)  ; 
la  flotte  du  Ministre  de  la  Marine    Ministro  de  la  Marina). 

Le  Ministère  du  Fomcnio  coin  prenait  autrefois  l'  Vgri 
culture,    le  Commerce,   les  Travaux   publics  el    l'Ins- 
truction publique.  Il  est   aujourd'hui  divisé   en    deux 
départements   ministériels,  celui  de  I  agriculture,  du 

6 


SJ  BSPAGNI 

Commerce  al  de  l'Industrie  et  dei  Travaux  publics  bi 
celui  de  l'Instruction  publique  et  des  heaux-Aris. 

La  perte  dos  Colonies  espagnoles  d'Amérique  a 
entraîné  la  suppression  du  Ministère  d'Outre -Mei , 
d' (Alramar,  prononcée  par  décret  roval  du  la  avril 
iuoi.  Le  régime,  le  gouvernement  et  l'administration 
des  territoires  compris  cuire  le  Cap  liojador  et  le  Cap 
Blanc  et  les  possessions  espagnoles  du  Golfe  de  Guinée 
dépendent  désormais  du  Ministère  des  Allaires  Etran- 
gères ou  Ministère  de  Estado. 

Les  Ministres  peuvent  être  sénateurs  ou  députés  ;  ils 
ont  entrée  dans  les  deux  Chambres,  mail  ne  peuvent 
exercer  leur  droit  de  vote  que  dans  l'Assemblée  à  la- 
quelle ils  appartiennent. 

La  plupart  des  Ministres  sont  assistés  do  Sous-Secré- 
taires   d'Etat    choisis    dans    les     Chambres    ou    parmi 

d'anciens  membres  du  Parlement  (i). 

A  la  tète. de  chaque  branche  spéciale  d  administra- 
tion ressortissant  à  un  Ministère  sont  plaçât  des  direc- 
teurs générant,  qui  ont  sous  leurs  ordres  des  Chefs  do 
section. 

Les     Ministres     réunis    forment    le    Conseil    des    Mi- 

nislres  (Consejo  de  Ministros),  (pie  préside  le  Koi  ou  le 
Ghel  du  <  iabinel . 
Certains  actes  tlo  gouvernement  ne  peuvent  être  de 

CÎdés  qu'en  Conseil  des   Minislres  el  des  decrels  rendus 

eh  I  ionseil  des  Ministres  sont  nécessaires  pour  la  nomi- 
nation de  hauts  fonctionnaires,  tels  que  les  Conseillers 


i    Le!  Ministres  reçoivent  un   Lrailenienl    do  3o !"■ 

s  SeCI   Hirl  s  ,1  I  i..i  m  oiv&ttl  i  S.ÔOO  |" 


lb  i."i  \  i  iim.mi  n  i  88 

d'Etat)  les  ambassadeurs,  les  ministres  plénipoten- 
tiaires, 1rs  gouverneurs  < les  provinces,  |r>  chefs  des 
ressorts  judiciai tes,  etc. 

D'antre  pari,  le  Président  du  Conseil  'les  Ministres 
possède  certaines  attributions  spéciales.  Il  serl  d  inter- 
médiaire entra  les  différents  ministres  el  le  Conseil 
d'Etat,  il  prépare  les  délibérations  du  Conseil  îles  Mi- 
nistre el  assure  l'exécution  de  celles  qui  ne  rentrent 
pas  spécialement  dans  te  ressort  d'un  département 
ministériel  déterminé. 

Un  des  grands  vices  de  l'administration  en  Espagft 
est,  beaucoup  pins  encore  que  chea  nous,  l'excès  de  la 

centralisation.  La  moindre  nomination  de  fonction* 
naires  est  réservée  au  pouvoir  ministériel ■  Tout  se 
règle  et  se  décide  à  Madrid  ;  les  allaites  les  plus  simples 
exigent  d'interminables  formalités  et  dorment  indcli- 
niiuenl  dans  les  carions  des  ministères. 

\  joutez  à  cela  que  l'on  chercherait  vainement  dans 
les  ministères  espagnols  une  tradition  administrative. 
L'Espagne  ne  connaît  pas  L'institution  du  Secrétaire 
général  permanent  qui  rend  de  si  précieux  services  «mi 

Angleterre,    évitant    dans    la    pratique    les    dangers   de 

l'instabilité  gouvernementale! 

En  Espagne,  lorsqu'un  changement  de  politique  m 
produit,  ce  ne  sont  pas  seulement  les  Ministre!  qui  s'en 
vont,  ce  sont  aussi  les  directeurs  généraux,  Au  lieu  de 
confier  l'administration  à  des  professionnels,  indép<  n 
dents  des  vicissitudes  de  la  politique,  connaissant  égale- 
ment le  personnel  et  les  affaires,  les  Ministres  ont  pris 
la  détestable  habitude  de  se  donner  comme  collabo) 
leurs  des  politiciens! 


Si  BSPAGNÎ 

Pendant  de  longues  années  même,  il  fut  de  règle 
que  tous  les  employés,  depuis  les  plus  élevés  en  grade 
jusqu'aux  plus  infimes,  devaient  suivre  le  sort  du 
Cabinet.  On  avait  ainsi  le  lamentable  spectacle  des 
employésen  disponibilité,  desCesantes  promenant  leur 
détresse  à  la  Puerto  <lel  Sol  en  attendant  nue  la  razzia 
de  leurs  successeurs  vint  leur  rendre  leur  situation. 

Ce  n'était  pas  un  personnel  administratif,  c'était 
une  clientèle  pour  les  hommes  politiques,  clientèle 
qu'il  fallait  satisfaire  en  augmentant  le  nombre  des 
places  à  distribuer.  Malgré  les  réductions  qui  turent 
opérées  dans  le  personnel  des  Administrations  publi- 
ques à  la  suite  de  la  réorganisation  administrative  de 
189a,  il  reste  encore  en  Espagne  des  légions  de  fonc- 
tionnaires inutiles  et  oisifs. 

Pour  éclairer  l'Administration  de  ses  a\is,  pour 
empêcher  ses  excès  de  pouvoir  et  pour  faciliter  au  Sou- 
verain l'exercice  des  droits  que  lui  confère  la  Consti- 
tution «.  d'édicter  les  décrets,  règlements  el  instruc- 
tions nécessaires  à  l'effel  d'assurer  l'exécution  îles 
lois  ».  l'Espagne,  à  L'exemple  de  la  France,  s  institué 
un  Conseil  d'Etal  (Consejo  de  Estado). 

Mais  la  composition  de  celte  hante  assemblée  diffère 
sensiblement  de  celle  de  notre  <  ionseil  d'Etat. 

Il  est  à  remarquer  que  tous  les  Ministres  fonl  partie 
du  Conseil  d'Etal  etque  le  présidenl  du  Conseil  des 
Ministres  préside  de  droit  le  Conseil  d'Etat. 

\  côté  des  Ministres  en  exercice,  s,, ut  appelés  à 
loi  H  anciens  ministres  de  la  Coui leel  [con- 
seillers (I  peu  ua  nent  s  »  cl  mi  sis  pan  ni  des  jurisconsultes 

ayant  occupé  de  liantes  loin  lions  publiques 


LE    GOUVERNEMENT  v S 

Les  8  anciens  Ministres  de  la  Couronne  sont  nom- 
més pour  deux  ans  et  sont  inamovibles  pendant  la 
durée  de  leur  mandat.  La  loi  du  5  avril  190/1  prescrit 
de  former,  par  département  ministériel,  *  listes  d'an- 
ciens ministres.  Pour  chaque  département,  on  appelle 
à  siéger  au  Conseil  d'Etat  l'ancien  ministre  venant  le 
premier  dans  l'ordre  d'ancienneté.  Après  deux  ans 
d'exercice  les  «  Conseillers  d  Etal  ministres  >>  cèdent  la 
place  aux  anciens  ministres  qui  viennent  après  eux 
dans  L'ordre  du  tableau.  Le  législateur  espagnol  a 
cherché  dans  ce  mode  de  recrutement  un  moyen  ingé- 
nieux d'assurer  au  Conseil  d'Etal  la  collaboration  de 
parlementaires  ayant  dû  acquérir,  pendant  leur  pas- 
sage au  pouvoir,  une  compétence  spéciale  pour  les  af- 
faires dépendant  du  ministère  qu'ils  avaient  à  diriger; 
il  a  voulu  en  même  temps  faire  entrer  au  Conseil 
d'Etat  des  hommes  de  gouvernement  pouvant  repré- 
senter des  tendances  politiques  différentes  et  assurer 
ainsi  à  la  haute  assemblée  la  triple  garantie  de  l'expé- 
rience, de  l'indépendance  et  de  l'impartialité. 

Tandis  que  les  anciens  ministres  ne  sont  nommés 
que  pour  une  période  de  deux  ans,  les  !\  Conseillers 
d'Etat  dits  permanents  sont  nommés  à  vie. 

Les  uns  et  les  autres  tiennent  leur  désignation  d'un 
décret  royal, 

En  dehors  du  Président  du  Conseil  des  Ministres, 
président  de  droit,  il  y  a  un  président  spécial,  chargé 
en  l'absence  du  Chef  du  Gouvernement,  de  diriger  les 
travaui  du  I ionseil  d'Etat. 

Des  0  officiers  jurisconsultes  »>,  recrutés  par  la  voie 
du  concours,    sont  chargés  d'instruire  les  affaires  et 


S|>  BSPAGNB 

remplissent  un  rôle  analogue  à  celui  de  nos  Maîtres 
île-  Requêtes  et  «le  nos  Auditeurs  (i). 

L  ii  Secrétaire  général  dirige  les  services  administra* 
tifs  et  tient  la  plume  aux  assemblées  générales. 

Le  Conseil  d'Etat,  corps  administratif,  est  divisé  en 
sections,  entre  lesquelles  les  affaires  soûl  réparties  sui- 
vant les  départements  ministériels  auxquelles  elles  se 
rattachent  :  Présidence,  Affaires  Étrangères,  Grâce  el 
Justice,  Finances,  Instruction  Publique,  Agriculture, 
Commerce,  Travaux  Publics.  Intérieur,  Guerre  et 
Marine. 

Les  affaires  les  plus  importantes  sont  traitées  en 
Assemblée  plénière. 

Le  Conseil  d  Etat  doit  nécessairement  délibérer  en 
Assemblée  plénière  : 

Sur  les  ordonnances  et  instructions  concernant 
l'exécution  des  lois  ; 

Sur  la  publication  des  bulles,  brefs  et  rescrits  du 
Pape  ; 

Sur    l'interprétation    et    l'exécution    des  Concordats 

conclus  avec  le  Saint-Siège; 

Sur  les  concessions  de  certains  titres  de     oblesse  ; 
Sur  la   ratification  des  traités  de   commerce  et  de 
navigation  ; 

Sur  la  \;didiié  des  prises  maritimes  : 


i.  Le  président  du  Conseil  d'Etal  reçoit  un  traitement  de 

3o. pesetas  ;  les  conseillers   permanents   reçoivent  i5.ooo 

lc>  conseillers  ministres  ont   'Iruit   ,'i  un  jeton  it«* 
de   ioa  pesetas   par  iéano<      la   secrétaire    général 
i  pesetas, 


il     G0UV1  um  mi  N  I  S"/ 

Sur  les  conflits  entre  les  autoritéi  judiciaires  et 
administratives. 

Sur  les  autorisations  de  poursuites  contre  certains 
Fonctionnaires, 

l  ne  section  spéciale  du  Conseil  d'Etal  forme  Le  Tri- 
bunal du  contentieux  administratif,  <|ui  constitue  la 
plus  haute  juridiction  administrative  du  royaume. 

Le  Tribunal  du  contentieux  administratif  a  pour 
mission  de  maintenir  l'Administration  dans  les  limites 
de  ses  attributions  et  de  statuer  sur  tous  excès  de  pou- 
voir. 

Le  Tribunal  est  composé  d'un  président  et  de  sept 
conseillers  dits  conseillers-ministres  [consejorea  mi- 
nistros)  tous  jurisconsultes  (le t ratios). 

Le  président  doit  être  choisi  parmi  les  anciens  mi- 
nistres de  la  Couronne  ou  parmi  les  Conseillers  d'État 
((implant  au  moins  huit  années  de  services  dans  la 
Haute  Assemblée. 

Enlin,  il  existe  en  Espagne  un  tribunal  des  Comptes 
(Tribunal  tir  lux  (jirnhts)  chargé  d'assurer  la  régularité 
de  la  comptabilité  publique.  D'après  la  Constitution 
de  i8(i(),  les  membres  du  Tribunal  des  Comptes  >U'- 
raient  être  nommés  par  le  Sénat,  mais  choisis  en  de- 
hors du  Parlement.  La  loi  du  3  juillet  1877  s  conféré 
au  Souverain  le  droit  de  nommer  les  membres  du  Tri- 
bunal des  Comptes  par  décret  rendu  en  Conseil  des 
Ministres  et  contresigné  par  le  Président   du  Conseil. 

Le  président  ne  peut  t'irc  choisi  que  parmi  les  anciens 
ministres  ou  parmi  les  membres  du  (  îonseil  d'Etat  OU  du 
Tribunal  suprême  en  charge  depuis  deux  ans.  Les  mem- 
bres du  Tribunal  doivent  être  licenciés  en  droit  et  avoir 


88  i  spagni  ,  ; 

aux  Cortès  pondant  quatre  législatures  ou  avoir 

rempli  les  fonctions  de  chefs  de  grands  services  admi- 
nistratifs pendant  un  temps  déterminé. 

Telle  est,  dans  son  ensemble,  l'organisation  gouver- 
nementale espagnole.  11  nous  reste  à  compléter  ces  no- 
tions générales  par  quelques  éclaircissements  sur  lo 
fonctionnement  des  grands  services  publics. 

Le  régime  des  impôts  en  Espagne  présente  de 
grandes  analogies  avec  notre  propre  régime  fiscal. 

Il  existe  sans  doute  en  Espagne  une  loterie  d'Etat, 
ainsi  que  des  impôts  n'ayant  aucun  équivalent  en 
France,  tels  que  les  taxes  sur  la  grandesse  et  les  litres 
de  Castille,  sur  le  gaz,  l'électricité,  le  carbure  de  cal- 
cium et  la  contribution  du  clergé  et  des  couvents  ;  mais 
l'État  espagnol  tire,  comme  l'Étal  français,  l'ensemble 
de  ses  recettes  de  contributions  directes,  de  contribu- 
tions indirectes  et  de  monopoles. 

Parmi  les  contributions  directes,  nous  relevons  clans 
le  budget  espagnol,  comme  sources  principales  de  re- 
cettes pour  le  trésor  : 

Les  contributions  immobilières  correspondant  à 
notre  impôt  foncier  ; 

L'impôt  des  cédules  personnelles  correspondant  à 
notre  contribution  personnelle  mobilière  ; 

Les  contributions  industrielles  et  commerciales  cor- 
respondant a  notre  impôt  des  patentes; 

L'impôt  sur  les  transmissions  de  biens  ou  droits  de 
mutation,  portant  principalement  sur  les  successions  j 

L'impôt  sur  les  mines  , 

L'impôt  sur  les  revenus  de  la  richesse  mobilière. 


LE    i;i'i'\  BRNBMEN  1  -   I 

Le  recouvreinenl  des  contributions  immobilières, 
considérées  comme  impôl  de  répartition,  a  donné  lieu 
en  Espagne  aux  fraudes  et  aux  injustices  les  plus  scan- 
daleuses. Afin  d'essayer  d'v  remédier,  la  loi  du 
•i-  mars  if)oo,  a  préparé  la  transformation  graduelle 
de  cet  impôl  de  répartition  en  un  impôt  de  quotité. 

La  loi  prévoit  l'établissement  au  chef-lieu  des  provin- 
ces d'un  Bureau  du  registre  fiscal  de  la  propriété,  chargé 
de  l'inscription  des  propriétés  rurales,  des  maisons,  des 
terrains  et  du  bétail  existant  dans  chaque  commune, 
ainsi  que  de  la  conservation  et  de  la  tenue  à  jour 
des  livres  ». 

Le  «  registre  fiscal  »  sera  basé  sur  les  travaux  topo- 
graphiques  et  agronomiques  minutieusement  déter- 
minés par  la  loi  «  ainsi  que  sur  les  déclarations  sans 
serment  faites  par  les  propriétaires  ». 

L'article  7  de  la  loi  déclare  :  «  Au  fur  et  à  mesure 
que  sera  terminé  et  approuvé  le  registre  fiscal  d'un 
territoire  municipal  pour  une  quelconque  de  ses  trois 
classes  de  richesse,  la  contribution  qu'il  représente  de- 
viendra impôt  de  quotité.  »  Le  texte  ajoute  :  «  Jusqu'à 
ce  que  soient  approuvés  tous  les  registres  de  la  ri- 
chesse rurale  et  du  bétail,  l'Etat  continuera  à  per- 
cevoir les  contingents  qui  lui  reviennentannuellement, 
mais  le  montant  en  sera  réparti  proportionnellement 
à  la  richesse  déclarée  et  reconnue  dans  chaque  district 
municipal  ». 

L'article  3  de  la  loi  du  12  juin  igi  1  a  li\é  à  1  \  "  Q 
le  taux  de  l'impôt  foncier  à  percevoir  comme  impôt 
de  quotité  dans  les  provinces  où  les  opérations  cadas- 
trales seront  terminées  et  vérifiées, 


90  BSPAGNB 

Malheureusement,  les  opérations  s'effectuent  avec 
une  grande  lenteur  et  le  contingent  (rupo)  demandé 
aux  territoires  où  elles  n'ont  pas  été  opérées  continue 

à  donner  lieu  aux  pires  abus.  La  contribution  immo- 
bilière rurale,  évaluée  à  ia3  millions  de  pesetas,  la  su- 
perlicie  du  royaume  étant  de  70  millions  dbeetares, 
devait  représenter  un  peu  plus  île  2  pesetas  par  beclare. 
Or,  il  n'est  pas  rare  de  voir  certains  propriétaires  paver 
annuellement  jusqu'à  70et  100  pesetas  parbeetnre,  alors 
que  d'autres,  à  côté  d'eux  «échappent  à  toute  imposition. 
La  quote-part  de  la  contribution  que  ne  paient  pas  les 
terres  non  déclarées  retombe  sur  celles  qui  sont  enre- 
gistrées et  qui  se  trouvent  avoir  ainsi  à  acquitter  des 
taux  d'imposition  démesurément  exagérés.  Le  tléau 
dont  soull'rent  lesconlribuables  scrupuleux  plus  encore 
(pie  le  trésor,  c'est  «  l'occultation  ».  D'après  un  rap- 
port officiel,  «  l'occultation  »  totale  n'était  pas  estimée, 

il  \  .1  quelques  a  nuées  1  à  moins  de  1 5  millions  d'hecta- 
res. Le  Ministre  de  l'agriculture  déclarait  en  [909  au 
Sénat  que  les  travaux  de  révision  du  cadastre  avaient 
révélé  comme  ayant  échappé  à  l'impôt  par  l'occultation 

plus  de  .">oo.ooo  bectares  dans  la   province   d'Albarète, 

plus  de  (oo. 000  dans  celles  de  Cieudad-Réal,  plus  de. 
600.000  ;i  Cordoue  de  700.000  i»  Grenade  etc.  (1  ). 

Min  d'augmenter  les  ressources  du  trésor  et  aussi 
de  permettre  le  dégrèvement  de  la  terre,  la  loi  du 
•)-  mais  looo  a  établi  en  Espagne  l'impôt  sur  les  re- 
venus de  la  richesse  mobilière  ($obr$  l<u  vtilidodes  de 
la  riquezo  mobiliaria), 

\     Torrez  Mufloi    Cato  tn  gênerait   parcelarlo,    Mn- 
drid,  iqo3. 


LE     tiUl   VKKN1MI  \  I  '.M 

Cet  impôt  frappe  . 

i  Les  revenus  obtenus,  sans  le  concours  du  capital, 
en  récompense  de  services  ou  de  travaux  personnels; 

2"  Les  intérêts  dividendes  et  tous  autres  produits  du 
capital  employé  en  vertu  d'un  contrat  civil  ou  com- 
mercial et  compris  dans  les  tarifs  annexés  à  la  loi  ; 

<*>"  Les  revenus  produits  par  le  travail  de  l'homme 
combiné  avec  le  capital  dans  l'exercice  d'industries 
non  soumises  à  d'autres  impôts. 

Tirs  sagement,  la  législation  espagnole  a  appliqué 
le  principe  fondamental  reconnu  aujourd'hui  par  tous 
les  économistes  que  le  taux  de  l'impôt  doit  être  ditlé- 
rent  suivant  qu'il  s'agit  des  revenus  du  travail,  des  re- 
venus du  capital  ou  des  revenus  mixtes  du  capital  et 
du  travail. 

Sont  astreintes  au  paiement  de  l'impôt  sur  les  reve- 
nus de  la  richesse  mobilière  «  toutes  personnes  natu- 
relles ou  juridiques,  indigènes  ou  étrangères,  à  raison 
des  revenus  obtenus  sur  le  territoire  espagnol  ». 

La  contribution  est  perçue,  soit  par  voie  de  retenue 
directe  ou  indirecte,  soit  en  vertu  d'une  liquidation 
établie  d'après  la  déclaration  faite  sous  serment  par  le 
contribuable. 

L'Etat  effectue  directement  la  retenue  de  l'impôt 
sur  les  intérêts  de  la  dette,  le  traitement  des  fonction- 
naires et  les  redevances  ou  droits  pavés  par  lui. 

Les  corporations  ou  compagnies  l'effectuent  directe- 
ment sur  les  dividendes,  intérêts,  prêts  hypothécaires 
ou  appointements  dont  elles  ont  la  charge. 

Les  directeurs  des  sociétés  anonymes  sont  tenus  di 
fournir  le  procès-verbal  des  assemblées   fixant  le   divi- 


0"J  1   SP  M. M 

dende  «les  actions,  une  déclaration  des  bénéfices  nets 
réalisés  el  la  copie  du  bilan. 

"vins  préjudice  des  pénalités  édictées  pour  défaut 
de  déclaration  dans  les  délais  lixés.  l'Administration, 
an  cas  de  refus  des  particuliers  on  des  collecin  ités 
de  fournir  les  déclarations  exigées,  est  autorisée  à  li- 
quider et  recouvrer  l'impôt  «  en  prenant  pour  base  les 
documents  qu'elle  pourra  se  procurer  », 

Les  revenus  du  travail  inférieurs  à  1 ,5oo  pesetas  sont 
exonérés  d'impôt  et  les  cotes  de  la  contribution  sur 
le  revenu  ne  peuvent  être  frappées  d'aucune  surtaxe 
au  protit  des  provinces  ou  des  municipalités. 

Kn  dépit  de  toutes  les  mesures  prescrites  par  le  lé- 
gislateur pour  prévenir  les  dissimulations,  la  perception 
de  l'impôt  sur  les  revenus  de  la  richesse  mobilière  est 
loin  d'apporter  au  Trésor  les  recettes  qu'elle  devait  lui 
assurer.  La  Fraude  règne  partout,  Favorisée  par  les 
caciques.  La  vénalité  et  la  concussion  sévissent  à  tous 
les  échelons  de  l'administration  fiscale. 

Le  produit  total  des  contributions  directes  figure 
au  budget  des  recettes  de  fQi4  pour  un  ensemble  de 
48i,  ii'»."),  /|(i<S  pesetas.  Dansce  chiffre  global,  les  con- 
tributions immobilières  entrent  pour  i88.a5a.4oo  |>e- 
setas  el  I  impôl  sur  les  revenus  de  la  richesse  mo- 
bilière pour  1  [7.300.000  pesetas. 

Le  produit  des  contributions  indirectes  est  évalué 
.1  '1 1  ).  100.000  pesetas, 

Nous  relevons  parmi  les  contributions  indirectes  :  les 

douanesi  1 77.3oo.ooo):l'impot  surlesucre(  j  1 .000.000): 
l'impôt  sur  l'alcool  [6.5oo.ooo  ;  l 'impôl  de  consomma- 
tion et  impôt  sur  le  sel  (45. 5oo. ) ,  l'impôt  sur  le  Iran  s- 


Il:     (,(U    \  I  HMMI  M  9d 

porl  des  voyageurs  et  (1rs  marchandises  (38  200.000)  ; 
l'impôt  du  timbre,  produit  net   90.000.000). 

Les  taxes  de  consommation  [consomos)  ont  subi,  au 
cours  de  ces  dernières  années,  de  sensibles  diminutions, 
Frappant  les  denrées  alimentaires  el  les  objets  de  pre- 
mière nécessité,  ces  impôts  provoquaient  de  vives  pro- 
testations, parmi  les  ouvriers  des  villes  surtout. 

On  remarquera  qu'entre  toutes  les  contributions  in- 
directes, les  douanes  représentent  le  produit  de  beau- 
coup le  plus  élevé  (177.S00.000  pesetas).  Le  régime 
douanier  de  l'Espagne  repose  sur  un  système  exagéré 
de  prohibitions  el  de  surtaxes,  La  perte  des  colonies 
d'Amérique  avait  enlevé  aux  producteurs  et  aux  in- 
dustriels Espagnols  un  marché  pour  eux  privilégié.  A 
la  laveur  de  tarifs,  qui  rendaient  toute  concurrence 
impossible,  les  blés  et  les  farines  de  la  Castille.  les  co- 
tonnades de  la  Catalogne,  les  produits  des  usines  mé- 
tallurgiques Cantabriques  prenaient  le  chemin  des 
Philippines  et  des  Antilles  tandis  que  les  Colonies  en- 
voyaient en  échange  à  la  mère-patrie  leur  sucre  et  leur 
rhum.  Le  traité  de  Paris,  en  1898,  arrêta  brutalement 
les  courants  établis.  Les  Criolos  devenaient  les  clients 
des  États-Unis  au  lieu  de  rester  ceux  de  l'Espagne 

Profondément  atteints  dans  leurs  intérêts  commer- 
ciaux, les  producteurs  espagnols  estimèrent  que  le 
seul  moyen  pour  eux  de  compenser  la  perte  de  leur 
marché  colonial  était  de  se  réserver  exclusivement  leur 
marché  intérieur.  Ce  Fut  le  programme  de  la  puissante 
Association  de  Barcelone,  le  Fomento  del  Trabajo  na- 
cional. 

Les  amis  du  Fomento   inspirèrent    tout    le   travail   de 


'.M  K8PA0NB 

la  commission  des  I  aloracione»  nommée  pour  la  révi- 
sion cl ii  tarif  douanier  t.. l'*««/i. ■<■/).  |  )e  là,  un  régime- 
ullra-protectionnislc  et  spécialisé  à  l'extrême;  mais  le 
résultat  ;i  dépasse''  le  but  \isé.  (Certaines  industries, 
l'industrie  sucrière  notamment,  sont  arrivées  à  un 
excès  de  production  tel  qu'il  leur  est  devenu  extrême- 
ment difficile  d'écouler  leurs  produits.  D'autre  part, 
un  grand  nombre  de  nations  étrangères,  la  fiance, 
l'Allemagne,  l'Angleterre,  la  Suisse  ont  répondu  aux 
tarifs  successifs  de  L'Espagne  en  lui  fermant  leurs  mar- 
chés. Elle  s'est  trouvée,  en  lin  de  compte,  payer  les 
frais  de  son  protectionnisme  outrancier,  La  masse  du 
pays  a  souffert  d'un  renchérissement  considérable  de 
la  vie.  Le  malaise  s'est  produit  surtout  dans  la  classe 
ouvrière,  et  s'est  traduit  par  des  plaintes  \iolenles,  par 
des  grèves  de  plus  eu  plus  nombreuses  compromettant 
la  paix  intérieure  du  royaume  tandis  que  les  prolé- 
taires agricoles  émigraient  et  que  les  campagnes  se 
dépeuplaient . 

Le  dernier  tarif  douanier  de  1906  a  été  qualifié  par 
les  masses  populaires  de  tarif  de  la  faim  |  [ftxnoti  rfs 
hombte  I. 

I. 'bcurcu.se    entente   qui    vient   de    M  produire  entre 

I  1  pagne  'i  la  France  parait  devoir  apporter  un  re- 
mède à  cette  situation  en  exei  çanl  sur  les  1  dations  doua- 
nières des  deua  peye  usa  répercussion  également  pro* 
litablc  à  lems  intérêts  réciproques. 

butin,   les  recettes  provenant  des  monopoles,  ai  m 
vices  <l  I  ^1  ai  figuïent au  budget  de  laid  pour  une  somme 

totale  de   3  l  5.838.000  pesetas 

Citoui  parmi  les  sourcei  productive!  da  ces  recettes; 


LE    (KM  \  BRNBHBNT 

les  monopole!  «les  tabacs  (i."j5.ooo.ooo  de  pesetas),  des 
allumettes  (i3.458.ooo),  des  explosifs  (.'1 700.000);  le» 
bénéfices  produits  par  L'exploitation  des  postes  1  .iJo.000 
pesetas),  des  télégraphes  ci  téléphones  ^1.000.0001,  de 
la  main-d'œuvre  pénitentiaire  (5o.ooo),  de  la  Gacela 
Ou  Journal  officiel  de  Madrid    'i<»<>  000  pesetas). 

\  ces  diverses  recettes,  l'Espagne  ajoute  la  ressource 
peu  morale  pfoTenani  des  loteries  nationales 
(4i.i5o.ooo  pesetas). 

Pbuf  assurer  le  recouvrement  régulier  de  l'impôt,  il 
existe  dans  les  provinces  : 

'/)  I  ne  Délégation  des  finances  avant  à  sa  tête  un 
délégué  [Delegado),  chef  de  l'administration,  avec  des 
avocats  de  l'Etat  [Aoogados  del  Èstado  ,  un  secrétaire 
(Secretario) ,  un  aspirant  (Aspirante). 

b)  Une  administration  des  contributions,  aveo  un 
Administrateur^  idministrador),  un  Chef  de  service  (,/e/e 
de  ne</o<ia<lt>),  des  commis  [Officiûles  de  diverses 
classes,  des  commis  stagiaires  (  ispiranles  à  Officiai), 

<■)  Une  Administration  des  impôts  et  propriétés  ayant 
à  sa  tète  un  Administrateur  et  divisée  en  deux  sections 
distinctes  :  la  section  des  impôts  et  la  section  des  pro- 
priétés. 

d)  \h\  service  du  contrôle  et  des  archivés,  avec  un 
Contrôleur  (Jntervcnlor)  et  des  commis  de  divers  grades. 

e)  Un  service  des  Caisses  et  dépoté)  avec  un  déposi- 
taire caissier  {Depotitaffo  panade?),  des  stagiaires  cl  des 
commis. 

/')  Un  service  des  douanes  BvOT  Un  Administrateur 
(Adminislrador),  un  Contrôleur  (lnltfiWtdof),  un  Cbh* 
trôleur    visiteur    [Intetvendoi'    vistà),    des    visiteurs, 


t)6 


rsi'.VCNK 


île-  auxiliaires,  des  commis,  des  marqueurs,  dos  po- 
seurs, etc. 

Enfin,  il  oxiste,  pour  tout  le  Royaume,  un  corps 
assez  nombreux  de  l'Inspection  dos  finances  (Insi>eccion 
c  investigacion  de  Hacienda). 

A  côté  d'un  ensemble  de  recettes  s'élevant  à 
1 .  133.207.71  1  pesetas,  le  budget  de  tQï3  prévoyait  un 
cbifl'rc  de  dépenses  atteignant  1 . 1  28. 363. .'17 5  pesetas. 
Le  budget  espagnol  est  donc  en  équilibre  sans  artifices 
inquiétants  de  trésorerie.  La  dette  publique  de  l'Es- 
pagne s'élève  à  «(.((.'i'  .918.985  pesetas,  so  décomposant 
ainsi  : 


Dette  extérieure   4  °/o     ■     ■     ■      1  «037.668.200  peseta» 

Dette  intérieure  non  rembour- 
sable !\  "/n 6.526.992.948       » 

Dette    intérieure   remboursable 

1.590.368.000      » 

Dette     intérieure    remboursable 

1  °  i8ô.ooo.5oo      » 


Délie  coloniale?.  1/3  "/„ 
Autres  délies    .      .      .      . 


100.000.000       » 
54i.889.337       » 


Nous  avons  indiqué  dans  notre  premier  chapitre  à 
quelle  détresse  financière  L'Espagne  Be  trouvai!  réduite 
au  moment  de  l'avènement  d'Alphonse  \ll. 

Pendant  ^'  longues  années  encore,  à  la  suite  <\v  la 
restauration  bourbonnienne,  les  budgets  espagnols  se 
son!  soldés  en  déficit.  De  188a  &  1889,  la  moyenne 
annuelle  des  découverts  a  été  de  88  m  il  I  mus  de  pesetas; 
de   1891   a  18941  aile  s  été  de  ig  millions;  de  1896  a 

180,7.  de    1 1>  millions 

Dans   la   période  de   1889  à   1897,   le  total  des  dé» 


LE    G01  \  BRNEM1  ni  '.!/ 

couverts  s'étail  élevé  à  <)j<>  millions.  C'eal  alors  que  la 
désastreuse  guerre  de  Cuba  vint  entraîner  pour  la  mal- 
heureuse Espagne  une  dépense  de  deux  milliards.  En 
v  ajoutant  la  dette  de  Cuba,  laissée  tout  entière  à  la 
charge  de  l'Espagne  par  le  traité  de  Paris,  on  peut 
dire  sans  exagération  que  la  dette  publique  se  voyait 
augmentée  d'un  capital  nominal  de  trois  milliards     i    . 

L'Espagne  a  eu  l'heureuse  fortune  de  rencontrer, 
avec  le  cabinet  Silvela, un  grand  ministredes  Finances 
en  la  personne  de  \  illaverde.  C'est  à  lui  que  reviendra 
dans  l'histoire  l'honneur  d'avoir  réussi  à  liquider  hono- 
rablement  celte  effrayante  situation  financière. 

(iràce  à  la  prudente  gestion  de  \  illaverde,  l'Espagne 
put  faire  lace  à  tous  ses  engagements,  même  à  ceux 
qu'elle  avait  contractés,  à  litre  subsidiaire  seulement, 
sur  les  bons  cubains,  lient  été  logique  et  conforme 
aux  règles  du  droit  international  que  les  Etats-Unis 
fussent  substituésà  l'Espagne  pour  la  garantie  des  bons 
cubains;  mais  le  gouvernement  de  Washington  s') 
était  énergiquement  refusé,  sous  le  prétexte  qu'au  mo- 
ment de  son  intervention,  il  avait  déclaré  vouloir 
coopérer  simplement  à  l'affranchissement  du  peuple 
cubain  et  non  pas  l'incorporer  dans  l'I  nion.  L'Espagne 
dût  se  soumettre  aux  exigences  du  vainqueur  et,  pas 
nu  instant,  elle  ne  songea  à  renier  sa  signature,  qu'elle 
n'avait  donnée  qu'à  titre  de  garantie  au  budget  auto- 
nome de   Cuba.    L'intérêt   attaché  aux    bons  cubaini 

avait    été    stipulé'  au  taux  de  5  et  fi  "      ;    \  illa\erde  pro- 

(i  \.  Viallatte,  La  vie  publique  dans  le$  Deux  minuit*. 
1906. 

7 


i  -i'  w.\i 

posa  de  les  convertir  en  titres  de  la  dette  intérieure 
espagnole  i  ,,.  La  même  mesure  Fui  appliquée  à  la 
dette  des  Philippines,  à  la  dette  extérieure  non  estam- 
pillée et  à  l'amortissable.  Des  ressources  nouvelles 
furent  demandées  à  des  créations  d'impôts  courageu- 
sement acceptées  sur  les  revenus  de  la  richesse  mobi- 
lière, sur  les  transports  et  sur  l'alcool.  Enfin,  Villa— 
verde  opérait  le  maximum  de  eompression  possible 
sur  le  budget  des  dépenses. 

Le  réveil  économique  qui  se  manifesta  en  Espagne 
au  lendemain  de  la  guerre  facilita  cette  politique  finan- 
cière. L'ère  de  pacification,  d'ordre  et  d'activité  maté- 
rielle qui  s'était  ouverte  dans  le  royaume  el  la  pru- 
dence des  ministres  des  finances  qui,  Inus,  s'attachèrent 
à  suivie  le  programme  tracé  par  Vilïaverde  en  main- 
tenant rigoureusement  les  dépenses  au-dessous  des  res- 
sources budgétaires,  eurent  la  conséquence  inespérée 
que  tous  les  exercices  se  traduisaient  par  des  excédents 
de  recettes  :  M>  millions  de  pesetas  en  1901,  47  en 
1002,  22  en  i(|<>3,  î>!\  en  i«)<»'i,  6<i  en  [Qo5,  101  en 
1  906. 

Dans  la  période  précédente,  le  gouvernement  espa- 
gnol .i\.iit  abusé,  pour  se  créer  îles  ressources,  des 
frappes  d'argent  el  des  prêts  consentis  par  la  Banque 
d'Espagne.  Pour  mettre  lin  à  ces  abus,  une  loi  du 
a8  novembre  1901  interdit  de  frapper  de  nouvelles 
d'argent,  11  devenait  ainsi  impossible  pour  l'Etat 
de  masquer  les  déficits  budgétaires  au  moyen  des  lié- 
néfices  réalisés  ^n  la  frappe. 

D'autre  part,  Vilïaverde  avait  posé  le  principe  que 
les  excédents  budgéti 1  seraient  employés  à  réduire, 


LE   i;<n\  i  n\i  mi  \  i  99 

chaque  année,  la  dette  de  l'Etal  vis-à-vis  de  la  Banque^ 
Pendant  son  administration,  il  allégea  cotte  dette  di 
i34  millions. 

La  loi  (lu  i3  mai  190a  obligea  le  gouvernement  à 
persévérer  dans  celte  voie.  Le  portefeuille  des  bons  du 
Trésor,  (jui  était  pour  la  Banque,  en  1898,  de  1.09O 
millions,  représentant  les  neuf  dixièmes  de  son  porte- 
feuille total,  est  tombé  à  355  millions  en  iao6età 
100  millions  au  3i  décembre  1909. 

En  revanche,  les  billets  en  circulation,  qui,  au 
.">  1  décembre  inoi.  étaient  représentés  par  r.638  mil 
lions  de  pesetas,  ont  atteint,  à  la  lin  de  1912,  le  chiffre 
de  1.86a  millions  et  l'encaisse  de  la  Banque,  qui  était 
de  'i'I'i  millions  en  1910,  s'élève  actuellement  à  5^3 
millions  (1). 

Remboursement  des  délies  du  trésor  et  assainisse- 
ment du  portefeuille  de  la  Banque,  tellea  été  la  double 
conséquence  de  la  politique  financière  inaugurée  par 
\  illaverde  et  respectée  par  ses  successeurs. 

La  réfection  de  l'armée,  de  la  flotte,  le  développe- 
ment de  l'enseignement  public,  l'exécution  d'un  vaste 
programme  de  travaux  publics  qui  s'imposent,  enfin 
L'action  espagnole  au  Maroc  devaient,  nécessairement, 
au  cours  des  derniers  exercices,  amener  un  fléchisse- 
ment dans  les  excédents  de  recettes;  mais  ils  sont 
encore     restés    de    /|.'>    millionseu    iuio.  de    LO  million! 

en   iq'ii,   de    aa. 567.61a  pesetas  en  191a,  Malgré  des 
charges  liés  lourdes,  les  budgets  se  soldent  en  équilibre  ; 

1     V,   Rapha5|  Georgaa  Lévj,  Banques  d'émission  et  Crédit 
public, 


KHI  BSPAGN1 

la  déplorable  réputation  de  l'Espagne  sur  les  marchés 

financiers  a  pris  lin  et  la  confiance  du  inonde  dans  la 
bonne  administration  des  linances  espagnoles  s'est  tra- 
duit.' par  l'élévation  progressive  des  cours  de  la  rente 
et  la  baisse  du  change,  dont  le  poids  excessif  paralysai! 
les  transactions  commerciales 

INon  moins  méritoires  ont  été  les  efforts  tentés  pour 
reconstituer  les  forces  militaires  du  Royaume. 

Si  jamais  organisation  militaire  fui  défectueuse  et 
déplorable  à  tous  égards,  ce  fut  l'organisation  mili- 
taire de  l'Espagne  au  cours  du  dernier  siècle.  L'armée 
espagnole,  véritable  armée  prétorienne,  semblait  moins 
destinée  à  assurer  la  défense  nationale  qu'à  jouer  le 
rôle  d'arbitre  dans  les  luttes  politiques.  Le  recrutement 
s'effectuait  à  l'aide  de  la  conscription  par  voie  de  tirage 
nu  sort,  avec  exonération  à  prix  d'argent ,  et  l'un  des  vices 
le>  plus  graves  des  institutions  militaires  de  la  pénin- 
sule était  la  disproportion  ridiculement  exagérée  du 
! duc  des  officiers  par  rapport  au  nombre  des  soldais. 

24.000  officiers  émargeaient  au  budgel  de  la  guerre  j 
leurs  soldes,  gratifications,  pensions  représentaient 
60  °  »  du  budgel  de  la  guerre.  Ce  budget  se  répar- 
tirai! île  la  manière  suivante  :  80  millions  pour  les 
raux,  chefs,  officiera  el  assimilés,  j5  millions  pour 
les  soldats,  [3  millions  pour  le  matériel  de  guerre.  Le 
contingent  appelé  ;i  recevoir  l'instruction  militaire 
était  insignifiant  eu  égard  au  nombre  «les  hommes 
qui  auraient  été  aptes  à  porter  les  armes;  on  voyait 
>\r<  régiments  de  moins  de  'i<|(>  hommes,  mais  avec  un 
luxe  d'officiers  tel  que  la  moitié  d'entr'eux   ne  trouvait 


LE    G0UVERN1  min  I  1<»1 

pas  à  s'occuper.  L'instruction  militaire  ne  pouvait 
acquérir  aucun  caractère  pratique,  faute  'I'1  soldats 
pour  constituer  les  unités,  faute  d'argenl  pour  exécute] 
les  manœuvres  el  même  les  exercices  ordinaires  de  tir; 
!c  matériel  de  guerre  était  d'une  lamentable  insulli- 
sance. 

Un  premier  pas  a  été  fait  dans  la  voie  de  la  réorga- 
nisation des  institutions  militaires  par  les  lois  du 
11  juillet  [885  <-i  i  décembre  iQoiy  qui  proclamaient 
théoriquement  le  principe  du  service  oltligatoire  depuis 
l'âge  de  2  1  ans  pour  une  durée  de  douze  années,  dont 
trois  dans  l'armée  active;  trois  dans  la  première  ré- 
serve el  si\  dans  h  deuxième  réserve;  mais  l'exoné- 
ration par  voie  de  rachat  restait  admise,  en  ce  qui 
concernait  le  service  actif  pour  les  jeunes  gens  versant 
au  trésor  la  somme  de  i.5oo  pesetas. 

D'autre  part,  des  raisons  d'économie  avaient  fait 
décider  que  la  moitié  seulement  du  contingent  serait 
incorporée.  L'armée  permanente  qui,  sur  le  papier,  do- 
sait représenter  un  chiffre  total  de  80.000  hommes,  se 
trouvait,  en  fait,  réduite  à   jo.000  hommes. 

L'œuvre  commencée  par  les  lois  <lrs  11  juillet  iss> 
el  (\  décembre  1901  a  été  complétée  par  la  loi  sur  le 
recrutement  de  l'année  du  S  juin  1911. 

D'après  I  Exposé  des  motifs  présenté  par  le  Ministère 
Canalejas,  le  but  <!*'  la  loi  nouvelle  devait  être  : 

«  i°  d'établir  le  service  personnel  obligatoire,  sans 
distinction  de  .lasses  sociales  ; 

«  a  de  poursuivre,  en  temps  de  paix,  l'instruction 
militaire  aussi  parfaitement  que  possible  et  de  cultivei 
l'habitude  de  la  discipline  ; 


102  oni 

n  .i  de  tenir  compte,  toutefois,  des  difficultés  éco- 
nomiques qui  obligent  a  limiter  l'effectif  des  forces 
permanentes  d. 

La  loi  de  1919  a  porté  la  (huée  du  service  militaire 
de  douze  ans  à  dix  buil  ans. 

Ces  dix-huit  années  se  répartissent  île  la  façon  sui- 
vante  : 

Sen  ice  actif,  trois  ans  ; 

Première  réserve,  cinq  ans; 

Seconde  réserve,  six  ans  ; 

\  rince  territoriale,  quatre  ans. 

Le  continrent  annuel  doit  comprendre  tous  les 
jeunes  ^< tns  reconnus  aptes  au  service  militaire  par 
une  commission  dite  «  junte  mixte  de  recrutement  ». 
Cette  commission,  présidée  par  le  Gouverneur  civil  de 
la  province,  est  composée  avec  lui  du  Colonel  chef  de  la 
zone  militaire  de  recrutement,  do  deux  officiers  supé- 
rieurs <les  burèaui  de  recrutement,  de  deux  membres 
de  la  députation  provinciale  et  de  deux  médecins,  un 
médecin  militaire  désigné  par  le  Capitaine  général  dé 
la  région  et  un  médeein  civil  désigné  par  la  Commis- 
sion provinciale.  Le  Syndic  ou  un  délégué  du  Conseil 
municipal  de  la  ville  où  siège  la  commission  et  le  se- 
crétaire de  la  Commission  provinciale  sont  adjoints;! 
la  junte  avec  simple  vois  consultative. 

Le  contingent  est  divisé  en  deux  groupes,  (agrupa-; 
ciom 

i<  appartiendront  au  premier  groupe,  déclare  la  loi, 
h  s  hommes  devant,  «l'a près  le  numéro  qui  leur  est  attri- 
bué pai  !<•  sort  et  suivant  la  division  (cupo  de  filas)  du 
contingent  faite  chaque  année,  aoeomplir  leur  service 


M     GOUV1  RNBM1  M  I  03 

dans  les  corps  él  unités  de    l'armée  aetive,  à  titre  de 
forces  militaires  permanentes. 

o  appartiendront  au  second  groupe  ceux  qui,  étan! 
on  excédent  dans  colle  division,  sonl  également  tenus, 
lorsque  la  décision  en  esl  prise,  el  pour  une  durée 
fixée  par  la  loi,  d'acquérir  l'instruction  militaire  né- 
cessaire et  de  rejoindre  leur  corps  dos  que  l'ordre  leut 
en  est  donné. 

•  Le  premier  groupe  prendra  le  nom  de  portion 
présente  sous  les  drapeaux  [cupo  en  filai  et  le  second 
celui  de  portion  disponible  (cupo  en  instruction)  (1). 

Los  recrues  de  la  portion  présente  sons  les  drapeaux 
doivent  rester  normalement  trois  ans  dans  les  corps 
auxquels  elles  sont  affectées;  mais  lorsque  les  deux 
premières  années  ^\r  service  se  sont  écoulées  sans  in- 
terruption, la  loi  réserve  au  Gouvernement  le  droit 
«  d'envoyer  en  congé  temporaire  le  nombre  d'hommes 
qu'il  jugera  opportun  ». 

I>a  loi  spécifie  que  o  afin  de  Paire  passer  sons  les 
drapeaux,  le  plus  grand  nombre  possible  de  recrues,  il 
devra  Être  appelé  un  nombre  d'hommes  au  moins 
égal  à  celui  des  envoyés  en  congé  temporaire  », 

En  principe,  les  libérations  anticipées  doivent  être 
accordées  <(  en  suivant  rigoureusement  l'ordre  d'an- 
cienneté parmi  les  soldats  de  la  même  classe  o  ;  mais 
la  loi  réserve  pour  les  libérations  temporaires  un  droit 
de  préférence  : 

o)  aux  jeunes  urn-,  qui,  au   moment   de  leur  incor 
poralion  dans  l'armée  active,  justifient  posséder  entiè  - 

i    Loi  du  8  juin  ign,  titre  premier,  <  • . 


1(1  1  1  SPAGN1 

remenl  l'instruction   primaire  et,  parmi  eux.   à   ceux 
qui  onl  reçu  l'enseignemenl  primaire  supérieur; 

b  aux  jeunes  gens  qui,  au  moment  de  leur  arrivée 
sous  1rs  drapeaux,  possèdent  le  brevel  de  tireur  de 
première  classe,  obtenu  de  la  manière  qui  es!  établie 
par  le  règlement  sur  le  tir  de  l'infanterie  ainsi  qu'aux 
jeunes  gens  axant  remporté  les  premières  récompenses 
dans  les  concours  de  tir  nationaux  «m  provinciaux  ; 

c)  aux  hommes  appartenant  à  la  portion  présente 
sous  les  drapeaux  cl  justifiant  s'être  particulièrement 
distingués  dans  les  ails,  les  industries,  l'agriculture  ou 
toute  autre  profession  ». 

D'autre  part,  la  loi  réduit  la  présence  sous  les  dra- 
peaux à  dix  mois,  répartis  en  trois  périodes  do  quatre 
mois  pour  la  première,  de  trois  mois  pour  les  sui 
vantes,  au  profil  des  jeunes  Liens  qui  h  justifient  con- 
naître l'instruction  théorique  et  pratique  du  soldai, 
ainsi  que  les  obligations  des  caporaux  el  soldats, 
versent  un  cautionnement,  de  i.ooo  pesetas,  four- 
nissent leur  équipement  \  compris,  le  cheval  présen- 
tant les  caractères  requis  pour  le  service  du  corps 
monté  auquel  il  est  destiné  <>. 

La  durée  du  service  peut  même  être  réduite  à  cinq 
mois  pour  les  jeunes  gens  qui  onl  reçu  l'enseigne- 
ineni  supérieur  ci  qui  eu  dehors  des  obligations 
mentionnées  au  précédent  alinéa,  versent  un  caution- 
nement de  a.ooo  pesetas. 

Les     lioi es    de    la    portion    d ispon ilile    de   chaque 

contingent  doivent  être  •■  instruits  avant  la  lin  de  la 
première  année  de  service  durant  le  temps  minimum 
fixé  par  1rs  règlements  de  manœuvres  ». 


LE    G0UVBBNEM1  N  I  105 

Vprès  cette  première  période  d'instruction,  ■  chaque 
homme  continuera  h  être  instruit  aussi  longtemps  (|iic 
cela  lui  sera  nécessaire  pour  acquérir  l'instruction 
voulue,  suivant  sa  préparation  et  son  aptitude;  il  sera 
mis  ensuite  en  congé  illimité  et  restera  dans  cette  si- 
tuation jusqu'à  ce  que  sa  classe  (reemplazo  passe  dans 
la  seconde  situation  du  sen  ice  actif  ». 

Les  réservistes  appartenant  à  la  première  réserve 
doivent  accomplir  une  période  d'exercices  d'un  mois 
par  an,  ceux  de  la  seconde  réserve  une  période  de 
21  jours  ;  ceux  de  la  troisième  réserve  une  période  de 
10  jours. 

La  loi  exempte  du  service  sous  les  drapeaux  lis 
soutiens  indispensable  de  famille. 

* 'n  voit  «pie,  si  la  loi  militaire  espagnole  consacre  le 
principe  du  service  personnel  et  obligatoire,  le  souci 
de  favoriser  les  études  et  surtout  la  préoccupation 
d'alléger  les  charges  budgétaires  ont  fait  apporter 
de  nombreuses  dérogations  à  la  règle  démocratique  du 
service  égal  pour  tous.  Hâtons-nous,  au  surplus, 
d'ajouter  que   ces   dérogations    ne  sont   admises  que 

pour     le    temps    «le     paix.   Kn    ras    de  guerre,    Ions    1rs 

hommes  qui  ont  bénéficié  d'une  libération  anticipée 
sont  immédiatemenl  rappelés  sous  les  drapeaux. 

D'après  les  chiffres  inscrits  au  budget  de  lui  i. 
l'armée  espagnole  comprend  comme  effectif  de  paix 
un  ensemble  de  i  ;>•.?. ooo  hommes  de  troupe. 

\  cet  effectif  de  paix,  la  mobilisation  viendrait 
ajouter  un  contingent  de  i5o.ooo  hommes,  90.000  de 
deuxième  ligne  ei  60.000  de  réserve  territoriale;  les 
dernières  réserves  pourraient  môme  porter  l'effectif  total 


106  i  sp  u.\i 

de  guerre  à  un  million  d'hommes  environ.  Il  importe, 
toutefois,  de  ne  pas  oublier  que,  sur  ce  chiffre  global, 
flSo.ooo  hommes  au  maximum  auraient  reçu  une 
véritable  instruction  militaire.  D'autre  part,  malgré 
d'incontestables  progrès  réalisés  au  cours  de  ces  der- 
nières années,  il  est  peu  probable  que  les  arsenaux  et 
les  services  de  l'intendance  possèdenl  en  habillements, 
armes  et  munitions,  les  ressources  nécessaires  à  l'effet 
de  mobiliser  un  aussi  grand  nombre  d'boinincs. 

Devait-on  assimiler  à  la  guerre  proprement  dite 
tes  opérations  militaires  poursuivies  au  Maroc  ?  On  m> 
rappelle  les  protestations  violentes  des  révolutionnaires 
lorsqu'on  1909  il  fallut  mobiliser  les  réserves  pour  les 
envoyer  en  Afrique.  Afin  de  ne  plus  employer  les 
troupes  métropolitaines  dans  les  longues  et  difficiles 
luttes  qu'il  faut  prévoir  pour  assurer  la  pacification 
définitive  de  la  eone  espagnole  marocaine,  le  gouver- 
nement s'efforce  de  créer  une  armée  coloniale  exclusi- 
vement  recrutée  par  voie  d'engagements  volontaires. 
Les  soldats  rengagés  devront  percevoir  des  primes  de 
V>".  62B  et  900  pesetas,  selon  qu'ils  se  rengageront 
pour  deux,  trois  ou  quatre  ans;  les  volontaires  rece- 
vront des  primes  de  ."»  7 . >  .1  Boo  pesetas  pour  des  engage- 
ments de  trois  ou  quatre  ans  Vprès  quatre  années  de 
service,  le  volontaire  sera  libéréde  toute  obligation  mi- 
litaire au  lieu  d'être  versé  dans  la  réserve.  En  cas  d'in- 
firmité contractée  au  service,  le  volontaire  bénéficiera 
de  la  loi  sui  les  accidents  du  travail  et  du  paiement 
total  des  primes,  Iprès  un  nombre  déterminé  d'années 
de  service,  il  aura  droit  &  une  pension  de  retraite  va- 
riant de  •  j"  .1  [.160  pesetas  et    pouvant   se   cumuler 


il     ..m  \  l  i:\l  \||  vi  I  <l7 

avec  un  emploi  civil.  Enfin,  les  retraités  auronl  droit 
a  une  concession  de  terre  d'une  étendue  suffisante 
pour  l'entretien  d'un  ménage  avec  quatre  enfants. 

Trois  dépôts  d'instruction  spéciale  en  vue  des  cam- 
pagnes africaines  sciaient  institués  à  L'usage  des  volon- 
taires à  Ceuta,  Mclilla  et  Larache.  Le  Gouvernement 
espère  qu'ainsi  organisé  et  rétribué  le  volontariat 
pourra  fournir  les  ressources  en  hommes  nécessaires 
pour  accomplir  l'œuvre  incombant  à  l'Espagne  au 
Maroc.  Il  espère  en  même  temps  apporter  un  dérivatif 
à  l'excès  de  l'émigration  espagnole  en  Amérique. 

L'armée  de  l'Espagne  continentale  est  divisée  en 
sept  (  lapitaineries  générales  ou  régions  de  corps  d'armée 
ayant  comme  chefs-lieux  Madrid,  Sévi I le.  Valence, 
Barcelone,  Saragosse,  Burgos  et  Valladolid. 

Les  îles  Baléares  et  les  Canaries  forment  deux 
(lapitaineries  générales;  Ceuta,  Melilla  et  le  camp 
retranché  San  Roque  Mgésiras  aux  abords  du  détroit 
de  Gibraltar  trois  commandements  militaires. 

Chaque  corps  d'armée  esl  placé  sous  les  ordres  d'un 
( iapitaine  général, (général  en  chef,  i ou  d'un  Lieutenant 
général.  Le  commandant    en   second  du  corps  d'armée 

est,  d'office,  le    plus    ancien    des    gêné rau\  de    division 

pourvu  d'un  commande ni.  Les  divisions  sont  iné- 
galement réparties  entre  les  divers  corps  ;  on  s'esl  moins 
attaché  à  établir  une  règle  uniforme  qu'à  prendre  en 
considération   les   exigences   de  la  défense  et   les  res. 

sources  de  la   région. 

I. es  cadres  des    ollicieis   ont  été  réduits    Je     i'i.ooo  à 

\  chiffre  encore    excessif,    et   l'abus  de  ce  «pie 
l'on  appelait  «  les  grades  honoraires  o  a  disparu.  Outre 


108  BSPAGNl 

leur  grade  réel,  certains  officiers  possédaient  un  et 
même  deux  grades  supérieurs  et  l'armée  espagnole, 
avec  son  faible  effectif ,  se  trouvait  ainsi  compter  plus 
d'officiers  supérieurs  émargeant  au  budgel  que  L'armée 
allemande. 

Les  grades  sont  ainsi  répartis  dans  l'armée  : 

Pour  les  régiments  :  caporal,  sergent,  sous-lieute- 
nant éiè\e,  lieu  tenant  en  second,  lieutenant  en  premier, 
capitaine,   commandant,    lieutenant-colonel,   colonel  ; 

Pour  la  hiérarchie  supérieure  de  commandement: 
général  de  brigade,  général  de  division,  Lieutenant 
général  ou  commandant  de  corps  d'armée,  capitaine 
général  ou  maréchal  (1). 

Une  école  d'élèves-caporaux  a  été  instituée  pour  les 

jeunes    gens    de     l8  à  :>.<>    ans    non    appelés  et   pour  les 
soldats  jugés  aptes  à  conquérir  ce  grade. 
La  durée  des  études  est  d'un  an. 

L'école  préparatoire  de  Trajillo  forme  les  sous- 
officiers.  Elle  reçoit  deux  catégories  d'élèves:  les  soldais 
comptant  deux  ans  de  service  et  moins- de  vingt-cinq  ans 
d'âge  h  les  jeunes  gens  entendant  faire  leur  carrière  du 
métier  des  aunes.    Ces  derniers  préparent  à    Trajillo 

Leur    examen    d'à. I mission      aux      Académies     d'armes. 

Celles-ci  sont  au  nombre  de  trois  :   Tolède  pour   l'in— 

i     Les  soldes  sont  ainsi  Bxées  i r  l'infanterie  :  Capitaine 

r.il   ■  i.ooo  pesetas  ;  Général  de  division  iS.ooo  ;  Général 
de  brigade  m  ooo;  Colonel  -  5oo;  Lieutenant-Colonel,  6.000  ; 

<  '. mandant  ."p. ;  Capitaine  3. :  I  i  eu  tenant  en  premier 

a.aSo;  Lieutenant  en  second  1  g5o,  l  n  \6get   relèvement  île 

■olde  est  rdi   aux    officieri   tulbaternei  <\ ralerie    et 

d'artillerie, 


il     G0UVBRN1  MBNT  109 

fanterie,    Valladolid    pour   la   cavalerie,    Séville  pour 
['administration. 

L'admission  dans  \v*  académies  d'armes,  formant  les 
officiers,  est  le  résultat  d'un   concours. 

Les  cours  (lurent  trois  ans.  aussi  bien  pour  les  SOUSr 
officiers  sortis  de  l'Ecole  de  Trajillo  que  pour  les 
jeunes  gens  se  présentant  directement  dans  ces  écoles 
spéciales  militaires. 

Les  officiers  d'artillerie  reçoivent  une  instruction 
plus  approfondie  à  Ségovie,  ceux  du  génie  à  Guadala- 
jara.  La  durée  des  études  n'est  plus  seulement  de 
trois  ans.  mais  de  cinq  ans.  Le  concours  ouvre  seul 
l'accès  de  ces  écoles. 

Enfin,  l'Ecole  supérieure  de  guerre  prépaie  le  recru- 
tement des  officiers  d'état-major. 

Sont  admis  par  voie  de  concours  à  cette  école  :  les 
lieutenants  en  premier  du  génie  et  de  l'artillerie,  les 
lieutenants  en  premier  et  en  second  de  la  cavalerie  et 
de  l'infanterie  qui  ont  au  moins  un  an  de  service  de 
troupe  el  trois  ans  de  grade.  La  limite  d'âge  pour  l'ad- 
mission à  l'Ecole  supérieure  de  guerre  est  de  vingt-neuf 
;ins;  les  cours  durent  quatre  ans  el  se  terminent,  la 
dernière  année,  par  un  voyage  d'élat-inajor.  Les  offi- 
ciers brevetés,  au  nombre  d'environ  25o,  sont  répartis 
dans  les  corps  suivant  les  exigences  du  commande- 
ment ;  ils  surveillent  les  marches  et  les  cantonne- 
ments, indiquent  les  positionset  peuvent  même,  s'ils  en 
sont  requis,  prendre  un  commandement  de  combat. 

Le  soldat  espagnol  a  toujourseuune  réputation  méritée 

d'endurance  et    de    bravoure.    Il    importail    de    fortifier 
la  discipline  el  de  donner  à  l'année  des   chefs   instruits 


I  l<>  ESPAGN1 

il  dignes  de  ta  commander.  Depuis  quelques  années,  les 
efforts  les  plus  méritoires  ont  été  accomplis  en  oe 
sens, 

Jusqu'au  grade  de  Colonel  inclusivement,  l'avance- 
ment a  lieu  à  l'ancienneté  el  au  choix.  Deux  ans  de 
grade  sonl  indispensables  pour  être  promu  ;  mais  il 
faut  en  ou  Ire  être  porté  au  tableau  d'avancement 
dressé  parties  inspecteurs  généraux.  Les  officiers  ajour- 
nés trois  années  de  suite   sont   placés   hors  cadres   ou 

retraités  d'nlïice. 

Vu-dessus  du  grade  de  Colonel,  l'avancement  a  lieu 
exclusivement  au  chois  . 

I  ii  Colonel,  pour  être  nommé  général,  doit  justifier 
de  vingt  ans  de  services  el  de  deux  années  de  comman 
dément  effectif  à  la  suite  de  son  régiment.  Il  doit,  «le 
plus,  figurer  dans  le  premier  tiers  de  la  liste  d'ancien- 
neté parmi  les  candidats  <]uc  la  ./unie  supérieure  de 
guerre  a  déclarés  aptes  à  l'avancement. 

L'organisation    générale    des    forces    militaires    du 
Royaume,  la  préparation  à  la  guerre,  les   mesures   de 
préservation  et  de  défense  nationales  soûl,  sous  le  con 
trôle  direct  du  Roi,  confiées  à  une  Junte  consultative  de 

Guerre,  dont  les  pouvoirs  sont  lies  étendus.  I.e  rôle 
du   Ministre  de    la    (iueire  est   surtout     un    rùle  d'ad  m  i- 

nislration,  Le  ministre  est  secondé  dans  sa  tâche  par 
un  Sous  Secrétaire  d'Etat,  chel  d'Etal  major  général, 
el  par  is  sections  administratives  dirigées  chacune  par 
un  <  îénéral  de  brigade  ou  assimilé. 

Les  infractions  mettant  en  péril  la  discipline  et  le 
bon  ordre  de  l'armée  sont  jugées  pai  les  tribunaux  mi« 
litaires,  Il  est  a  remarquer  qu'en  principe  ceux-ci  ne 


Il     GO0VBRN1  MEN  l  III 

i  nnaissenl  pas  des  crimes  et  délits  il«'  droil  commun 
commis  par  des  militaires.  En  revanche,  ils  sont, 
d'une  manière  générale,  appelés  à  jugei  les  Miinrs.ni 
délits  contre  la  sûreté  de  l'Etat,  les  accusations  de 
trahison  et  d'espionnage,  les  attaques  contre  l'armée] 
que  les  inculpés  soient  des  militaires  <>u  des  civils. 

Il  existe  en  Espagne  trois  catégories  de  juridictions 
militaires  :  le  Conseil  supérieur  de  guerre  el  marine, 
les  Conseils  de  guerre  d'officiers  généraux,  les  Conseils 
de  guerre  ordinaires.  Mentionnons  l'institution,  à  côté 
des  juges  recrutés  parmi  les  officiers  appartenant  à 
l'armée  active,  d'Auditeurs  judiciaires  militaires  appe- 
lés, à  titre  purement  consultatif,  à  éclairer  les  membres 
du  tribunal  sur  les  points  de  droit  à  résoudre. 

Nous  avons  vu,  au  cours  du  chapitre  précédent,  dans 
quel  état  de  décadence  humiliante  la  marine'  espa- 
gnole était  tombée  sous  le  règne  de  Charles  IV  et  de 
Ferdinand  \  11.  L'Espagne  ne  construisait  plus  de 
navires  et,  pendant  des  années,  les  marins  restèrent 
sans  solde,  réduits  à  mendier.  Vers  le  milieu  du  \IY 
siècle,  un  premier  effort  fut  tenté  pour  reconstituer  la 
puissance  navale  du  royaume.  I  ne  vingtaine  de  navires 
de  combat  lurent  mis  à  la  mer.  Dan-  la  guerre  mal- 
heureuse que  L'Espagne  soutint,  sous  le  ministère 
Narvaez,  contre  le  Pérou  el  le  Chili,  la  marine  espagnole 
joua  un  rôle  honorable. 

En  1888,  les  Cortès  affectèrent  à  la  réorganisation 
de  la  marine  un  crédit  de  ■  <  * <  >  millions,  mais  le  pro- 
gramme naval  mis  à  l'étude  n'avait  pas  été  rempli 
quand  éclata  la  funeste  guerre  avec  les  Etals-1  nis.   Le 


11*2  ESPAGN1 

désastre  de  [898  priva  l'Espagne  des  quatre  croiseurs 
neufs  de  l'amiral  Ccrvera,  les  seuls  qu'elle  possédât 
La  Ilot  le  espagnole  se  trouvait  réduite  à  un  vieux  cui- 
rassé, le  Pelago,  construit  depuis  vingt-cinq  ans,  à 
6  croiseurs  protégés,  aujourd'hui  démodés,  [O  canon- 
nières, 5  contretorpilleurs  et  12  torpilleurs,  au  total 
36  bâtiments,  représentant  un  tonnage  d'environ 
7.000  tonnes. 

Le  7  janvier  1008,  dans  une  véritable  séance  histo- 
rique au  milieu  d'un  enthousiasme  indescriptible,  les 
Cortès  adoptèrent  le  projet  de  loi  déposé  par  M.  Maura 
pour  consacrer  un  crédit  de  '.>oo  millions  à  la  reconsti- 
tution delà  Hotte.  C'était  au  lendemain  du  traité  anglo- 
franco-espagnol  qui  avait  garanti  entre  les  contractants 
le  statu  tjuo  méditerranéen.  Puissance  méditerranéenne 
et  atlantique  tout  à  la  fois,  l'Espagne  réclamait  avec 
énergie  une  armée  navale.  Libéraux  et  républicains, 
Morct,  Canalejas,  don  Gamersindo  de  A/carate  se 
rallièrent  aux  vues  du  gouvernemenl  conservateur  et 
couvrirent  d'applaudissements  et  d'acclamations  le  dis- 
cours du  Président  du  Conseil. 

[2g  millions  devaient  être  employés  à  la  construc- 
tion de  3  cuirassés  de  i5.ooo  tonnes,  ji  millions  à  la 
construction  de  i  canonnières  de  Son  tonnes,  de  3 
destroyers  de  35o  tonnes  et   de    -'i   torpilleurs  de  180. 

I    ne  don/aine    de    millions    était    affectée    à    l'outillage 

senaux  de  Ferrol,  La  Carraca    (le  port  de  guerre 
lia    et  t   trlhagi  ne 
Sans  attendre  l'exécution  du    programme   nasal  de 
un  nouveau  projet  a  été  élaboré  par  le    Gouver- 
nement,   prévoyant    la    construction    'l'une    seconde 


1.1     GOUVERNEMENT  I  1 .'{ 

gscadre  composée  de  :  '.*>  cuirassés  de  21.000  tonnes, 
2  croiseurs  éclaireurs  de  5. 000  tonnes,  g  torpilleurs 
de  haute  mer  de  Ooo  tonnes  cl  3  submersibles  de  ioo 
à  600  tonnes. 

Le  littoral  espagnol  esl  divisé  en  trois  départements 
maritimes,  Le  Ferrol,  Cadix  el  Carthagène. 

Les  côtes  représentent  une  superficie  de  2.12a  kilo- 
mètres,  don!  760  au  Nord,  sur  l'Atlantique  et  i353  au 
sud,  sur  l'Atlantique  et  la  Méditerranée.  La  nature 
même  des  frontières  maritimes  se  prête  à  une  mise  en 
défense  solide;  un  certain  nombre  d'ouvrages  v 
existent,  m. us  la  plupart  d'entre  eux  sont  fort  anciens: 
et  en  très  mauvais  état    Presque  tout  est  à  faire. 

Citons  parmi  les  principaux  (torts  ou  places  fortes 
côtîères  : 

Sur  l'Atlantique,  Santona,  port  de  refuge  pour  les 
escadres  et  siège  d'un  arsenal  maritime,  place  fortifiée 
de  premier  ordre,  el  Sanlander,  qui  ollïeau\  vaisseaux 

de  guerre  un  abri  sur  el  spacieux. 

Sur  la  Méditerranée,  Gérone  ville  forte  de  première 
classe,  sur  une  montagne  baignée  par  le  Ter  ;  Barce- 
lone, dont  le  port  e>i  protégé  par  quelques  batteries 
d'ailleurs  très  insuffisantes;  Uicante,  port  excellent, 
avec  quelques  forts  sur  les  côtes  ;  Carthagène,  avec  sa 
rade  admirable,  ses  chantiers  et  ses  arsenaux;  Cadix, 
défendue  par  une  série  1 1 'ou vraies  bien  armés. 

Les  antiques  fortifications  de  Ceuta,  sur  la  côte  afrl» 
caine,  en  lace  de  Gibraltar,  ont  été  remplacées  par  des 
ou\ rages  neufs. 

Des  hases  navales  supplémentaires  doivent  être 
es  à  (  ieUta  el  à  Mahon, 


I  I  i  gSF  VGN1 

Les  plus  louables  efforts  ont  été  tentés  au  cours  de 
ces  dernières  années  pour  ranimer  l'agriculture,  ai  flo 

pissante  au  t fi n |>s  des  Maures,  si  délaissée  depuis  leur 
expulsion.  Les  statisticiens  ont  constaté  qui  plm  de 
[8      .,  du   territoire  étaient    restés   en    friche    Nous 

i\. mis  l'ail  allusion  déjà  à  la    loi    du    ,'io    août    nu»-    ou 

loi  n  de  colonisation  intérieure  ».  Kilo  a  eu  pom •  objet 

de  créer  toute  une  classe  de  petits  propi  iélaires  en  lo- 
tissant entre  eux  les; immenses  terrains  incultes  des  dw- 
pobladoa,  <|ui  apparaissaient  connue  le  désert  envahis- 
sant, l'autre  part,  le  problème  de  1  eau,  cl  problème 
(tel  (Hjiiti.   a    appelé    toute    la    sollicitude    du    législateur 

pour  corriger   l'insuffisance  du   régime   hydraulique. 

(l'est  Faute  d'eau  ijue  la  terre,  sous  un  soleil  dessé- 
chant, re^le  infertile. 

L'insuffisance  île  l'eau  pendant  la  saison  d'été  est 
due  à  une  double  cause  :  le   déboisement    et    le   défaut 

d'aménagement  des  rivières,  dont  la  nature  rappelle 

celle  des  oueds  africains,  torrents  i|ui  dé\aslenl  au  lieu 

de  fertiliser, 

Après  la  reconquête,  riconqui&tidfl  do  leur  paya  mu 
les  Maures,  1rs  Espagnols  eurent  la  fatale  inspiration 
de  couper  presque  ions  les  arbres.  Daoj  les  feuillages, 
disaient-ils,  s'abritent  les  oiseaux  et  1rs  oiseaux  dépouil< 

lent    les     récolles.   Les    oiseaux    ont     disparu     a\ec    les 

arbres,  mais,  en  môme  temps  aussi,  a  disparu  la 
terre  végétale  entraînée  par  les  torrents.  I  oc  série  de 
lois  et  de  décrets  prescrivent  aujourd'hui  le  reboise" 
ment . 

I  >  autres  mesures  législatives,  dues  principalement  à 
I,.  bienfaisante  initiative  du  \|  in  titre  des  Travaux   pu* 


i  i     GO!  n  BBNBM1  M  I  I  .") 

Itlics  r\afaël  Gasset,  se  sont  appliquées  a  faciliter  le 
régime  «1rs  irrigations. 

Les  travaux  les  plus  importants  ont  été  entrepris  en 
Vragon  el  en  Andalousie.  On  étend  ainsi  dans  les  al- 
lées la  zone  des  cultures;  là  où  s'établissent  les  bar* 
rages-réservoirs  (pantanos),  ce  sont  des  milliers  d'hec- 
tares ijue  l'on  gagne  à  la  eharrue;  7  millions  d'hectares 
sont  aujourd'hui  semés  en  blé  contre  5  millions  il  j  1 
dix  ans,  tandis  que  d  la  promotion  humaine  s'accroît 
de  milliers  de  pa  jr&ans  »  (  1  ). 

Ce  ne  sont  pas  seulement  les  irrigations  que  doit 
favoriser  la  «  politique  hydraulique  ».  c'est  aussi,  dans 
un  pays  où  le  charbon  fait  défaut,  l'accumulation  tou- 
jours renouvelable  de  houille  blanche,  permettant  la 
mise  en  exploitation  des  merveilleuses  richesses  que 
renferme  le  sous-sol  de  l'Espagne. 

On  a  dit  de  la  péninsule  ibérique  que  son  sol  n'était 
que  «  le  plafond  de  mines  ininterrompues  »  (a).  Avec 
ses  sierras  appartenant  à  toutes  les  formations  géolo- 
giques. l'Espagne  recèle  dans  son  sein  les  métaux  les 
plus  divers.  En  l'absence  d'une  mise  en  valeur  métho- 
dique et  raisonnée,  la  plupart  des  richesses  minières 
restaient  inexploitées. 

En  1888,  une  statistique  officielle  établissait  qu'il  j 
avait  en  Espagne  [6.987  mines  connues  el  concédées, 
mais  que,  sur  ce  chiffre,  a. 378  seulement  étaient  en 
exploitation,  de  façon  d'ailleurs  fort  imparfaite, 

(1     Henri    l.orin,    L'Espagne    en    191  I,    Revue   des    Deux 

Momies,    (5  octobre   i8o3. 

(a)  A.  Blum,  L'Espagne,  l';iri^  189g 
3    V.  Angel  Marvaud,  L'Espagne  au  \  V  noele,  Paria  i§  1  '■'■>. 


I  lti  1  SPA.GN1 

l  ne  législation  nouvelle  prépare  la  conservation,  la 
protection,  la  mise  en  valeur  de  richesses  trop  long- 
temps dédaignées,  et  les  usines  commencenl  à  se  mul- 
tiplier, principalement  en  Catalogne,  à  Valence  et 
dans  les  provinces  basques. 

Mais  il  importe  peu  pour  un  pays  de  produire  s'il 
est  dans  l'impossibilité  d'écouler  ses  marchandises. 
L'Espagne  souflre  profondément  de  l'insuffisance  cl  de 
l.i  défectuosité  de  ses  moyens  de  communication  et  île 
transport.  Il  en  coûte  souvent  plus  au  paysan  espagnol 
pour  transporter  ses  denrées  agricoles  au  marché  le 
plus  voisin  que  pour  les  récoller. 

Les  routes  font  défaut  on  sont  impraticables  ;  les 
chemins  de  1er  sont  loin  de  répondre  aux  nécessités  du 
commerce. 

Le  réseau  des  chemins  de  1er  espagnols,  dans  son 
ensemble,  ne  dépasse  pas  1/4.800  kilomètres.  L'Espagne 
ne  peut  offrir  pour  10.000  kilomètres  de  territoire  que 
ab'  kilomètres  de  chemins  de  1er  contre  58û  en  Italie, 
-i')-j>.  en  Autriche,  Sy',  en  France,  1.007  en  Allemagne, 
1.180  dans  la  Grande-Bretagne,  i.(îa3  en  Belgique (1). 

Ajoute/  que  les  lignes  sont  généralement  à  voie 
unique,  «pie  la  lenteur  des  trains  esl  désespérante,  que 
les  tarifs  pour  marchandises  sont  ruineux,  enfin  et 
surtout  que,  dans  la  construction  des  lignes,  fort  peu 
rémunératrices  punr  les  actionnaires  des  compagnies, 
on  n'a  pas  su  prévoir  les  courants  commerciaux,  le* 
besoins  du  trafic,  tenir  le  centre  en  communication 

avec  la  périphérie,  relier   entre  ollos  les    régions    niari- 
(\)  V.   \iij.-<'i  Marvaud,  L'E$pagne polUidue» 


I.R    GOUVERNEMENT 


in 


limes  où  se  concentre  la  vie  industrielle.  Pour  assures 
le  plein  développement  économique  de  l'Espagne,  les 
techniciens  ont  calculé  qu'il  faudrait  construire  au  plus 
tôt  100.000  kilomètres  de  roules,  3o.ooo  kilomètres 
de  chemins  de  fer,  i5.ooo  kilomètres  de  «  voies  secon- 
daires ».  I  n  vaste  programme  a  été  élaboré  en  ce  sens  par 
le  Ministre  des  Travaux  publics  Rafaël  Gasset.  Les  lois 
des  26  mars  1908  et  2/1  lévrier  1912  avaient  cherché  à 
faire  supporter  pour  une  large  part  le  poids  des  dé- 
penses a  engager  aux  communes  et  aux  provinces  :  la 
charge  était  pour  elles  manifestement  trop  lourde. 
L'œuvre  à  poursuivre  ne  pourra  être  réalisée  que  par 
les  fédérations  de  communes  ou  de  provinces,  par 
l'organisme  régionaliste  nouveau  qui  vient  d'être  créé 
avec  l'institution  des  mancomuninades. 

De  tous  les  devoirs  qui  s'imposent  à  l'Espagne  pour- 
suivant  sa  régénération  et  voulant  s'élever  au  rang  des 
nations  libres,  le  plus  impérieux  est  de  développer 
renseignement  public,  l'enseignement  populaire  sur- 
tout. C'est  grande  pitié  que,  dans  la  péninsule,  tant 
d'hommes  ne  se  rendent  pas  compte  des  devoirs  du 
citoyen,  qu'ils  ne  soient  pas  capables  de  servir  la  Cité 
parce  qu'ils  l'ignorent,  que,  soldats,  ils  n'aient  pas  la 
notion  raisonnée  de  la  Patrie  pour  laquelle  ils  sont 
appelés  à  porter  les  armes.  L'une  des  causes  princi- 
pales de  la  décadence  de  l'Espagne  a  été  l'ignorance 
profonde  dans  laquelle,  pendant  «les  siècles,  le  Gouver- 
nement avait  volontairement  laissé  le  peuple  espagnol. 

En  1 857,  sous  la  pression  îles  libéraux,  on  décréta 
l'instruction  obligatoire;  mais  il  en  lui    rapidement  de 


118  I  B  I  '  M  .  M 

oolte  loi  comme  de  presque  toutes  les  lois  en  Espagne; 
ita  -ans  application,  Les  statistiques  établies  a  la 
suite  du  recensement  île  1887  établirent  que  la  pro- 
portion d'illettrés  était  de  ~i,">i  "/0. 

Le  gouvernement  d'Alphonse  Mil  s'csl  donné  la 
noble  tâche  de  faire  de  la  loi  désuète  du  9  septembre 
1867  sur  L'instruction  obligatoire  une  réalité. 

L'article  b  «lu  décret  royal  du  26  octobre  1 90 1  stipule  : 
Les  pères  et  tuteurs  ou  ceux  ayant  charge  d'en- 
fants enverront  aux  écoles  publiques  primaires  et  supé- 
rieures leurs  enfants  OU  pupilles  depuis  l'âge  île  six  ans 
jusqu'à  l'âge  de  douxe  ans.  à  moins  de  justifier  pleine* 
ment  que  l'instruction  leur  est  donnée  chei  eux  ou 
dans  des  établissements  particuliers...  » 

La  loi  du  a3  juin  inoi)  1  sanctionné  cette  obligation 
par  des  pénalités. 

I   ne  amende  de  .">,    10  OU  20  pesetas  frappe  les  pères. 

tuteurs  ou  les  personnes  ayant  charge  d'enfants  qui 
n'auraient  point  fait  inscrire  à  l'école  leurs  entants  ou 
pupilles.  L'absence  non  justifiée  des  entants  à  L'école 
donne  lieu  contre  les  parents  ou  tuteurs  à  une  amende 
de-  (...ni  .1  i  peseta.  La  résistance  systématique  à  la 
loi  peut  être  punie  «le  L'emprisonnement. 

Les  décrets  des  ■•,">  février  et  i  'i  mais  igi3ont  donné 
comme  corollaire  au  principe  de  l'obligation  Le  prin- 
cipe de  la  gratuité  de  l'enseignement  primaire. 

Jusqu'à  ces  dernières  années!  le  ministère  du  Fomenta 

devait  l'oCCUper  a  la  l'ois  de  l'agriculture,  du  com- 
merçai <ie  l'industriel  des  travaux  publics el  de  l'ensei- 
gnement. I  n  ministère  spécial  de  L'instruction  pu- 
blique S  été  institué. 


I I    \  I   HM    \ll   N  I  Lit) 

Les  vastes  proportions  que  l'on  a  donnée*  au  majes- 
tueux, édifice  deatiné  à  abriter  les  services  do   iveau 

département  miaistériel  indiquent  l'importance  * j <  if 
l'on  Bal  décidé  a  lui  attribuer;  mais  tout  ou  presque 
tout  est  à  faire.  Il  etiste  en  Espagne  une  population 
d'âge  scolaire  de  quatre  millions  d'enfants  dea  deux 
sexes •  Pour  assurer  d'une  façon  sérieuse  L'éducation  de 
ces  cul'aiits,  il  faudrait  un  maître  pour  nue  moyenne 
de  5o  élèves,  c'est-à-dire  80.000  maîtres  ou  maîtresses. 
Il  eu  existe;  «n  tout,  a6.ooo,  Quant  aux  écoles,  elles 
n'atteignaient  pas,  au  cours  de  ces  dernières  années,  Le 
chiffre  <le  aô.ooo.  Va  quelles  écoles  el  < p  1  e I  personnel 
enseignant!  Locaux  insuffisants,  mal  aérés,  véritables 
cloaques,  absence  presque  totale  de  matériel  scolaire  ; 
des  maîtres  obliges,  pour  compléter  leur  trop  maigre 
traitement,  de  se  faire  aubergistes,  commissionnaires, 
agents  d'élection.  Nombre  de  maîtres  d'école  ne  lou- 
chaient pas  plus  de  5oû  pesetas,  l'école  étante  la  ebarge 

exeltlsiVe  de  la  commune. 

I  ne  des  mesures  qui  fait  le  plus  d'honneur  au  libé- 
ralisme éclairé    d'Alphonse  Mil    a    été    d'appeler    à    la 

direction  de  l'enseignement  primaire  un  dea  profes- 
seurs les  plus  éminenls  de  II  niversité  d'Oviedo, 
M.  Rafaël  Allamira,  donl  le-,  cohvictions  républi- 
caines n'étaienl  point  ignorées  du  Souverain,  Sous  la 
vigoureuse  impulsion  de  M.  W  la  mira,  un  vaste  pro- 
gramme a  été  mis  en  application  pour  la  diffusion  el 
la  rénovation  de  L'enseignement  primaire  :  augmenta 
Lion  et  unification  des  traitements  des  instituteurs, 
graduation  des  écoles,  organisation  de  colonies  scolaires, 
inspection    des    locaux    scolaires,    refonte    du     plan 


120  BSPAGN1 

d'études  des  écoles  normales  primaires,  mise  a  exécu- 
tion des  dispositions  législatives  antérieures  et  non  ap- 
pliquer* sur  l'institution  dans  les  communes  do  Juntes 
d'enseignement  ou  Commissions  scolaires  chargées  de 
prendre  les  mesures  nécessaires  à  L'effet  d'assurer  la 
fréquentation  de  l'école. 

Enfin,  des  mesures  sagement  conçues  ont  organisé 
un  enseignement  complémentaire  pour  les  jounes  filles 
au-dessus  de  douze  ans. 

•  i  m  orienter;!,  déclare  l'Exposé  des  motifs,  l'ensei- 
gnement de  la  culture  générale  sur  une  conception 
éducative  et  pratique  en  s'inspiranl  du  caractère  de  la 
vie  Féminine  ».  M.  Aitamira  s'approprie  les  idées  de 
\  îctor  l)uru\  :  il  réclame  pour  les  jeunes  lilles  «  le 
droit  ,:i  l.i  raison  o  :  il  entend  leur  donner  a  les  clartés 
de  l'instruction  »  ;  il  s'élève  contre  L'idée  de  les  oppo- 
ser à  L'homme  en  rivales  dans  l'activité  humaine,  mais 
il  veut  (t  relever  la  dignité  de  L'épouse,  accroître  l'au- 
torité de  la  mère  de  famille,  agrandir  la  légitime 
influence  de  L'honnête  femme  ». 

L'organisation  de  l'enseignement  populaire  com- 
prend trois  catégories  d'écoles  primaires  : 

n)  les  écoles  primaires  maternelles  : 

/-   les  écoles  primaires  élémentaires  ; 

c)  les  écoles  primaires  supérieures 

Il  existe  en  outre  des  ((  écoles  nocturnes  el  du  di- 
manche  •<.  pour  adultes  des  deux  sexes,  et  des  écoles 

inixles.    pour    -.lirons    et    lilles,    d;ins    les    districts  ru- 
raux. . 

I ..  programme  des  écoles  maternelles  comprend 
l'élude  de  la  doctrine  chrétienne,  de  L'alphabet,  des 


Il     i,m|\  I  l:\I.MI  vi  121 

premiers  éléments  de  lecture  h  d'écriture,  'les  chif- 
fres avec  des  leçons  de  choses  el  des  travaux  manuels. 

On  \  préconise  la  méthode  frœbelienne  et  l'on 
cherche  à  s'y  inspirer  des  méthodes  appliquées  clans 
les  Kindergarten.de  L'Allemagne. 

Le  but  est  d'imprimer  une  sage  direction  à  l'esprit  de 
l'enfant  dès  son  plus  jeune  âge,  de  développer  ses  fa- 
cultés intellectuelles  en  réglant  ses  amusements. 

Le  professorat  dans  les  écoles  maternelles  doit  être 
exercé  par  des  femmes. 

L'enseignement  des  écoles  primaires  comporte  : 

a)  La  doctrine  chrétienne  étudiée  dans  le  catéchisme 
prescrit  par  les  évêques  dans  leur  diocèse  respectif; 

6)  La  langue  castillane,  lecture,  écriture  et'gram- 
maire,  d'après  les  textes  approuvés  par  l'Académie 
royale  et  les  manuels  approuvés  par  le  Gouvernement, 
le  Conseil  de  l'instruction  publique  ayant  été  préala- 
blement consulté  : 

c)  l'arithmétique  ; 

il)  l'histoire  et  la  géographie; 

e)  des  rudiments  du  droit  ; 

f)  des  notions  de  géométrie; 

g)  des  notions  de  sciences  physiques,  chimiques  el 
naturelles  ; 

//)  des  notions  d'hygiène  et  de  physiologie  humaine  ; 

t)  l'éducation  ei\  ique  ; 

/ 1  Le  dessin  ; 

/,    Le  chant  ; 

/   les  travaux  manuels  ; 

m  i  tes  exercices  corporels. 

Dans  les  écoles  primaires  de  jeunes  filles,   L'ensei- 


I  -~2  m  \i.m 

gnement  de  la  géométrie,  du  dessin  linéaire  et  des 
notions  de  sciences  physiques  et  naturelle!  est  rem- 
placé par  des  travaux  de  couture  et  de  broderie  et  par 
l'étude  de  l'économie  domestique  et  du  dessin  appliqué 
aux  travaux  de  Femme. 

L'enseignement  primaire  supérieur  comporte  l'étude 
des  mêmes  matières  d'une  façon  plus  approfondie  avec 
un  enseignement  technique  industriel,  agricole  el  com- 
mercial. 

Dans  toutes  les  écoles  primaires,  les  élè\es  doivent 
avoir  un  livre  d'immatriculation  et  un  registre  jour- 
nalier sur  lequel  sont  mentionnées  les  abaenoBBf  les 
notes  et  les  observations  auxquelles  peut  donner  lieu 
la  conduite  des  élèves.  En  plu*  d'examens  hebdoma- 
daires, les  écoliers  doivent  subir  tous  les  ans  un  exa- 
men général. 

ajoutons  que  les  règlements  interdisent  d'appliquer 
jamais  aux  enfants  «  un  châtiment  qui  puisse  détruire 
OU  affaiblir  en  eux  le  sentiment  de  1  honneur  ».  Les 
mêmes  règlements  prescrivent  aux  maîtres  de  n  déve- 
lopper chez  lems  élèves  le  louebla  sentiment  de  l'ému- 
lation »). 

Le  personnel  enseignant  est  formé,  autant  que  pos- 
sible, dans  des  écoles  normales  primaires.  Ce  sont  ces 

écoles  qui  délivrent  le  dipl Q  d'eptitude  profession-* 

ii.  Ile  indispensable  pour  l'exercice  des  fonctions  d'ins- 
tituteur ou  d'institutrice. 

Mentionnons  que,  dans  les  écoles  normales  primaires, 
une  très  large  place  esl  faite  aux  arts  techniques  el 
aux  travaux   manuels  parce  que  tout   l'enteignemenl 

dans  les  'i  Olei  du   llovaume,  dél  lare  le  décret  ro\al  du 


i  i     GOIH  IHNBHEN1  1 99 

l\  octobre  1906*  dûil  présenter  n  un  caractère  éducalif( 
pratique  et  utilitaire  ». 

Les  Mattrel  de  L'enseignement  primaire  sont  nom- 
mé» per  les  [lecteur a  lorsque  l'école  esl  dotée  de  moins 
de  i.ooû  pesetas  et,  à  partir  <le  ce  chiffre,  par  le  Mi- 
nistre de  l'Instruction  publique» 

Les  traitements  des  instituteur!  el  institutrices,  long* 
temps  à  la  charge  exclusive  del  communes^  sont  au- 
jourd'hui inscrits  au  budgel  de  l'Etal  el  de  sérieux  ef- 
fortl  lOnl  laits  pour  les  améliorer. 

Des  inspecteurs  primaires,  recevant  un  traitement 
de  3.000  pesetas,  sont  chargés  'le  la  surveillance  des 
écoles  i  Les  Inspecteurs  doivent  posséder  If  titré  île 
«  maître  normal  »  et  compter  au  moins  cinq  années 
d'exercice  dans  une  école  publique.  Progressivement,  le 
personnel  île  l'inspection  a  été  augmenté;  les  59  zones 
d'inspection  créées  eh  1908  comprennent  aujourd'hui 
oa  inspecteurs  el  lo  inspectrices  (1). 

On  a  remarqué  que,  si  les  ('iules  primaires  publiques 
sont  dirigées  par  des  maîtres  laïques,  elles  sont  obligatoi- 
rement tenues  de  donner  l'enseignement  religieux.  Le 
décret  de  1901,  portant  réorganisation  de  l'instruction 
primaire,  portait,  confirmant  les  règlements  anté- 
rieurs :  n  \  1 1 1 1 1 1 1  enfant  ne  pourra  être  dispensé  de 
l'enseignemenl  de  la  morale  et  île  la  doctrine  chré* 
tienne  dans  les  écoles  publiques  u.  En  avril   1913  cc- 

1  Lea  traitements  des  maîtres  el  maîtresses  de  l'ensei- 
gnemenl primaire  s'échelonnent  aujourd'hui  d'un  minimum 
de  1  pesetas  ù  un  maximum  de  Looo,  mail  to  institu- 
teur! Beulemenl  Brrivenl  à  «<■  dernier  chiffre.  Bien  rares 
sont  les  mailles  dont  le  traitement  excéda  a.ooopt  setas. 


r.»  i  ESPAGNE 

pendant,  sous  le  ministère  libéral  du  comte  de  Roma- 
nonès,  on  s'esl  décidée  atténuer  la  rigueur  de  ce  prin- 
cipe en  tlt''ci<l;mi  que  l'enseignement  de  la  religion  el 
de  la  doctrine  chrétienne  ne  sérail  pas  donné  aui  en- 
fants si  les  parents  exprimaient  par  une  demande 
écrite  le  désir  qu'ils  fussent  dispensés  de  suivre  les 
cours  d'instruction  religieuse. 

En  Espagne,  les  écoles  laïques,  dans  le  sens  que 
nous  attachons  à  ce  mot.  ce  sont  les  «  écoles  libres  ». 
La  Circulaire  du  3  lévrier  inoi)  a  formulé  ainsi  le  con- 
cept de  la  laïcité  aux  yeux  de  la  loi  espagnole  :  «  Ce 
vocable  laïque)  ne  peut  être  en  droit  attribué  qu'aux 
établissements  où  n'est  pas  obligatoire  l'enseignemenl 
de  la  religion  catholique  ni  d'aucune  autre.  Dans  ce 
sens,  le  seul  dans  lequel  l'expression  soit  admissible, 
sont  laïques  le  grand  nombre  d'écoles  el  d'autres  éta- 
blissements d'enseignement  parfaitement  légitimes,  di- 
rigés pai  «les  personnes  dignes  du  plus  grand  respect, 
.  dans  lesquels  se  donnent  îles  enseignements  «le  divers 
genres  't  aussi  une  éducation  générale  civique,  sans 
que  rien  ne  se  rencontre  en  eux  qui  soil  contraire  aux 
dogmes  el  à  la  morale  chrétienne  ».  El  la  Circulaire 
rappelle  que,  moyennant  le  respect  des  formes  lé- 
gales, sons  la  réserve  des  interdictions  sanctionnées 
parle  Code  pénal,  il  \  a  place  pour  l'établissement 
d'écoles  laïques,  mais  que  les  attaques  à  la  Patrie,  à  la 
morale  et  aux  lois  exposent  ceui  qui  les  commettent 
;'i  la  fermeture  de  l'école  el  à  des  poursuites  légales  (i). 

i  \  Ikon-/  de  Ibaro  Etude  sur  renseignement  primaire  en 
i  pagne.  Bulletin  de  la  Société  •  i <  législation  comparée, 
juillet,  août,  septembre  i  ai  3. 


il     001  vi  iim  MEN  I  I  25 

L'enseignement  secondaire  se  divise   en   enseigne 
ment  secondaire  général  et  en  enseignemenl  secondaire 
professionnel,    correspondant  à    notre    enseignement 
spécial. 

L'instruction  secondaire  est  donnée  dans  les  Lycées 
de  l'État  (Institutos)  ou  dans  les  Collèges  des  Frères 
et  des  Jésuites. 

Le  nombre  des  lycées  est  manifestement  insuffisanl 
et  les  méthodes  d'enseignement  auraient  besoin  d'être 
perfectionnées. 

Dans  son  livre  si  vivant,  El  Altraso  de  Espana 
M.  (la/alla  montre  le  professeur  faisant  son  cours  sous 
forme  de  discours,  les  leçons  apprises  par  cœur  sans 
aucune  part  donnée  à  la  réflexion,  à  l'activité  intel- 
lectuelle du  disciple,  les  programmes  démesurément 
vastes,  les  livres  de  classe  volumineux  et  indigestes. 

<(  L'élève,  dit-il,  qui  saurait,  en  parvenant  au  grade 
de  bachelier,  le  programme  de  tous  les  cours  serait  un 
puits  de  science;  mais  la  réalité  est  que  les  élèves 
n'ont  qu'une  connaissance  très  superficielle  des  ma- 
tières enseignées.  oEtil  conclut, avec  nue  sévéritédont 
d'autres  nations  aussi  pourraient  reconnaître  le  bien 
fondé  :  «  Le  manque  de  culture  des  classes  dites  «  éclai- 
rées »  doit  nécessairement  se  refléter  sur  la  vie  de 
toute  la  Nation  ». 

L'enseignement  supérieur  est  donné  dans  dix  I  m 
versités  comprenant  un  nombre  de  facultés  variable  : 
Madrid  ei  Santiago  philosophie,  philologie,  sciences 
naturelles,  pharmacie  et  médecine,  droit,  théologie);  Sé- 
ville  et  Saragosse  (philosophie,  droit,  théologie  méde- 
cine,   sciences    naturelles)  ;     Barcelone    (philosophie. 


126  B8PAGNE 

droit,  pharmacie,  médecine,  sciences  naturelles.  ; 
Grenade  philosophie,  droit,  pharmacie,  sciences  natu- 
relles :  Valence  et  Valladolid  (  philosophie,  droit,  mc- 
decine,  sciences  naturelles)  ;  Oviedo  cl  Salamanque 
philosophie,  droit,  théologie), 

Il  existe  en  outre  de  grandes  écoles  spéciales  connue. 
les  Ecoles  des  Mines,  des  Eaux  et  Forêts,  des  l'onls-el- 
Chaua&ées,  du  Notarial,  de  la  Diplomatie,  des  r»au\- 
Arls,  de  la  Musique,  etc. 

Malgré  la  modicité  regrettable  du  traitement  qu'elle 

offre  au*  professeurs  «le  ses  Universités  (an  général 

10  pesetas),  l'Espagne  a  su  trouver  pour  occuper 

les  chaires  de  son  enseignement  supérieur,  des  maîtres 

d'une  liante  culture.  Ce  sont  eus  surtout  qui,  au  cours 

de  ces  dernières  années,  ont  pris  la  direction  du  mou- 
vement intellectuel  préparant  pour  la  péninsule  une 
politique  de  rénovation.  C'est  ainsi  qn'a  été  créée  la 
Juntapara  ampliaeion de  estudioa,  le  Comité  pour  le  dé» 
reloppement  des  études,  dont  l'âme  est  le  savant  docteur 
Kamon  v  Cajal  ;  c'est  ainsi  qu'on  a  eu  L'idée,  d'or- 
ganiser  avec  la  France  ce  qu'on  i  appelé  Vintçroambio 
universitaire.  Des  Maîtres  de  nos  facultés  de  Horde. m\ 
et  de  Toulouse  ■-«■ut  appelés  à  faire  des  conférences  et  des 
eoun  a  Madrid  et  à  Burgos  tandis  qu'a  leur  tour  des 
maîtres  espagnols  viennent  professer  en  France,  Dans 
les  deux  pn\s  la  science  fraternise  et,  suivant  l'heureuse 
expression  de  M.  le  président  Poinearré  «  c'est  la  re- 
présentation  concrète  de  L'intimité  morale  eu  deux 
i  -  latines  ont  désormais  <  one<  ience  de  trouver  l'ee» 
complissement  normal  de  Leurs  destiné 
Chaque  l  nivei  tité  ■  I  sa  tète  un  Recteur,  qui  <,si  «n 


1 1    Goin  mn  meni  l  _7 

même  temps,  le  ohef  de  tous  les  établissements  d'ina- 
truotion  publique  de  son  ressort.  Le  Electeur  es!  nom- 
né  par  le.  Gouvernement  el  choisi  parmi  les  profes 
saura  de  l'I  niversité.  Il  est  assisté  d'un  Conseil  uni- 
versitaire dans  lequel  sont  appelés  à  siéger,  BOUS  Sa 
présidence,  les  doyens  des  Facultés,  les  directeurs  des 
Écoles  supérieurs  el  professionnelles  el  les  directeurs 
des  lycées  de  l'Etat  [inatilutos  .  Celle  Assemblée  déli- 
bère sur  les  questions  intéressant  l'enseignement  pu» 
blic  et  exerce  un  pouvoir  <le  juridiction  mh  les  pro- 
fesseurs  et  les  élèves. 

I  ni-  Junte  provincial  de  instruction  publiée  q&\  chargée 
de  voilier  au  développement  de  renseignement  dans 
chaque  province.  Une  Junte  supérieure,  siégeant  à 
Madrid  et  remplissant  le  rôle  de  noire  Conseil  supérieur 
de  l'Instruction  publique,  a  la  haute  direction  de  ^édu- 
cation dans  lout  le  Royaume.  Cette  Junte  supérieure 
est  composée  de  53  conseillers,  dont  -ÏS  nommés  par 
décret  sur  la  proposition  du  Minisire  de  l'Instruction 
publique,  <>  appelés  de  droit  à  siéger  en  vertu  de  leurs 
Fonctions,  el  ■>.'>  'dus  par  le  personnel  enseignant. 

Les  professeurs  SOnl  des  fonctionnaires  de  l'Etal  re- 
crutés   par    la   voie    du    concours.    Ils  ne  peuvent  être 

destitués  <pfà    la   suite  d'une  procédure  adiuinisl  i  ali\  e 

cl  sur  l'avis  du  Conseil  l  nWersitaire,  après  qu'ils  ont 

élé   entendus   dans    leurs  explications.   L'arrêté  de  des- 
titution  doit  préciser  qui  le  fonctionnaire  frappé  ne 

remplit   pas   les  devoirs  de  sa  charge,  qu'il  enseigne  à 
ses    élèves   des  doctrines  pernicieuses  ou  <pi  à  raison  d  ! 

sa  conduite  il  esi  indigne  du  rôle  d'éducateur. 

L'enseignement  à   loua  ses  degrés  est   libre  es  Es- 


T2S  ESPAGNE 

pagne.  L'instruction  peu!  être  donnée  dans  des  établis* 
sements  publics  ou  privés.  Sont  considérés  comme 
établissements  publics  tous  ceux  qui  sont  entretenus 
par  le  budget  *  I  «  *  l'Etat,  de  la  province  ou  de  la  com- 
mune ou  qui  reçoivent  un  secours  ou  une  subvention 
sur  les  Fonds  publics.  Les  établissements  privés,  c'est- 
à-dire  ceux  qui  sont  entretenus  à  l'aide  de  fonds  appar- 
tenant à  des  particuliers,  sont  soumis  à  la  surveillance 
de  l'Etat,  mais  uniquement  au  point  de  vue  du  respect 
des  règles  de  l'hygiène  et  de  la  morale. 

Nous  avons  vu  que  l'article  1 1  de  la  Constitution  du 
3o  juin  1876  avait  déclaré  «  la  religion  catholique, 
apostolique  et  romaine  religion  de  l'Etal  ». 

Le  texte  ajoute  que  «  nul  ne  pourra  être  inquiété 
sur  le  territoire  espagnol  pour  ses  opinions  religieuses 
ni  pour  l'exercice  de  son  culte,  sauf  le  respect  dû  à  la 
morale  chrétienne  ». 

Ce  n'est  pas  cependant  la  liberté  des  cultes,  car  la 
Constitution  précise  : 

0  Sont,  toutefois,  prohibées  les  manifestations  et 
cérémonies  publiques  d'une  autre  religion  que  celle  de 
l'Etat  ». 

Par  0  manifestations  publiques  u  il  faut  entendre 
tous  les  actes  qui,  au  dehors  des  temples  où  les  cultes 
non  catholiques  sont  tenus  de  se  renfermer  et  presque 
de  se  dissimuler,  manifesteraient  l'existence  de  religions 
dissidentes 

1  l.i  prohibition  des  processions  ou  cérémonies 
rituelles,  'les  bannières,  des  inscriptions,  des  affiches 
même  révélant  l'exercice  d'un  culte  dissident.  A  Tinté- 


LB    GOUVERNEMENT  129 

rieur  seulement  des  temples,  les  cultes  dissidents 
peuvent  se  prévaloir  de  la  liberté  que  leur  garantit  la 
Constitution. 

La  situation  de  e  religion  d'Etat  »  faite  à  la  u  reli- 
gion catholique,  apostolique  et  romaine  »  lui  vaut  des 
privilèges  considérables.  Les  Archevêques  siègent  de 
droit  au  Sénat;  les  évoques  peuvent  y  être  appelés  par 
le  Moi.  L'Etat  salarie  les  ministres  du  culte  catholique 
et  la  dotation  qui  leur  est  attribuée  figure  au  budget 
pour  une  somme  de  plus  de  'i<>  millions.  L'Eglise  ca- 
tholique, d'après  les  accords  intervenus  avec  le  Saint- 
Siège  les  16  mars  1 85 1  et  k  avril  i8l»o,  n'en  conserve 
pas  moins  le  droit  d'acquérir,  sans  restriction,  toutes 
sortes  de  biens,  de  les  conserver  et  d'en  jouir,  sans  que 
ces  biens  puissent  être  imputes  sur  la  dotation  stipulée 
par  le  Concordat  comme  devant  représenter,  en  titres 
incessibles  de  la  rente  sur  l'Etat  consolidée  3  °/0,  les 
anciens  biens  ecclésiastiques. 

L'Espagne  est.  au  point  de  vue  religieuse,  divisée  en 
9  provinces  ecclésiastiques,  ayant  chacune  à  leur  tête 
un  archevêque,  assisté  d'évêques  suflragants. 

Les  y  Archevêques  du  Royaume  sont  ceux  de  Tolède, 
Santiago,  Burgos,  Saragossc,  Tarragone,  Valence, 
Scvillc,  Grenade  et  Valladolid.  L'Archevêque  de  Tolède 
a  le  titre  de  Primat  d'Espagne.  Les  évèques  sont  au 
nombre  de  !VJ  ;  les  prêtres  au  nombre  d'environ 
4o.ooo. 

La  question  qui  a  donné  lieu,  au  cours  de  ces  der- 
nières années,  aux  controverses  les  plus  passionnées 
a  été  celle  des  ordres  monastiques. 

L'Espagne  lut  jadis  Le  pays  de  la  Chrétienté  le  plus 

9 


130  B8PAGN1 

peuple  de  moines  et  de  religieuses.  A  la  lin  du 
Kvui'  siècle,  If  nombre  des  moines  dépassait  71.000  <i 
l'on  comptait  pins  do  35.000  nonnes. 

En  iS.'iô.  les  révolutions,  les  guerres,  les  transfor- 
mations du  milieu  social  avaient  notablement  diminué 
le  nombre  des  religieux,  mais  l'Espagne  comptai! 
encore  plus  de  5o.ooo  réguliers. 

L'ardeur  violente  avee  laquelle  les  moines  se  firent 
les  champions  du  pouvoir  absolu  de  Don  Carlos  avait 
.Miiené  contre  eux  de  redoutables  représailles. 

I  ne  première  mesure  de  suppression  atteignit  en 
1 835  les  établissements  religieux  et  près  de  mille  cou- 
\ents  lurent  l'objet  d'un  décret  de  fermeture.  Dans  les 
années  qui  suivirent,  de  nouvelles  mesures,  plus  rigou- 
reuses, furent  prises  contre  le  mon.n  lusme  et  la  pro- 
priété de  main-morte,  desamorticacion,  si  bien  mien 
186g  il  n'\  avait  plus  un  seul  moine  en  Espagne.  Les 
derniers  religieux,  ceux  de  la  Chartreuse  île  Grenade, 
axaient  dû  chercher  un  refuge  en  Belgique. 

La  Restauration  'le  iN-'|  rouvrit  aux  réguliers  les 
portes  du  Hovaume.  Pour  décider  le  Pape  à  reconnaître 
Alphonse  \||  comme  roi  légitime,  il  avait  été  promis 
que  de  nouveaux  accords  régleraient  les  rapporta  de 
l'Eglise  et  de  l'Etat, 

En  attendant,  Home  invoquai!  comme  restant  en 
vigueur  le  Concordai  de  i85i.  Mais  l'article  99  du 
Concordai  n'avail  prévu  l'existence  sm  le  territoire 
espagnol  «pie  de  trois  congrégations  religieuses 
■  l  hommes  et  il  n'en  avait  môme  nominativementdésigné 
que  deux,   celle  de  St  Vincent  de  Paul   el   «elle  de 

M   Philipnfl  de  Néri.  Devait  -on  étendre  aux  GoQgféga 


I.E    GOUVERN]  Ui  M  I  31 

tions  no  concordadas  la  situation  légale  dont  béné- 
ficiaient les  trois  congrégations  concordadas  ?  Le  débat 
qui  s'est  engage  chez  nous  sur  la  situation  îles  Congré- 
gations non  autorisées  ne  s'est  pas  poursuivi  avec 
moins  d'acuité  en  Espagne.  Effrayé  de  voir  les  congré- 
gations expulsées  de  France  s'établir  en  Kspagne  et 
accroître  prodigieusement  les  biens  de  main-morte,  le 
gouvernement  de  Sagasta  lit  voler  la  loi  du  80  juin 
1887  sur  les  associations.  Cette  loi  imposait  aux  con- 
gréga lions  non  prévues  au  Concordat,  no  concordadas, 
l'obligation  de  présenter  leurs  statuts  aux  gouverneurs 
des  provinces,  de  s'inscrire  sur  un  registre  spécial,  de 
faire  connaître  à  l'avance  par  écrit  le  jour  et  l'heure  de 
leurs  réunions,  de  tenir  à  jour  une  liste  de  leurs  mem- 
bres et  un  livre  de  comptabilité,  enfin  d'ouvrir  leurs 
portes  en  tout  temps  au  (jouverneur  et  à  ses  délégués. 
La  loi  étant  restée  lettre  morte,  un  décret  du  19  sep- 
tembre îuor  impartit  aux  Congrégations  no  concordadas 
un  délai  de  six  mois  pour  s'inscrire  conformément  .1 
la  loi  ou  se  voir  interdire  le  territoire  espagnol.  Il  en 
est  résulté  avec  Home  pendant  plusieurs  années  une 
situation  extrêmement  tendue,  presque  une  rupture 
des  relations  diplomatiques,  tandis  que  manifestations 
religieuses  comme  «  la  levée  des  mantilles  »  et  contre- 
manifestations  violemment  anti-cléricales  se  succé- 
daient à  Madrid  et  dans  les  principales  \illes  du 
royaume.  «  \  <>i<  i  venu,  déclarait  le  c 8  novembre  1008 
à  Saragosse  M.  Moret,  le  moment  de  délimiter  les 
attributions  de  l'Etat  et  de  l'Eglise.  La  naissance,  le 
mariage,  la  mort  ne  peuvent  être  soumis  à  une  autre 
intervention  que  celle  de  l'Etat.  Il  n'esl  nullement  ques- 


132  BSPAGNl 

lion  de  marcher  contre  l'Eglise,  mais  l'Etat  possède  des 
droits  et,  comme  on  les  lui  retire,  il  les  revendique  et 
les  recouvre.  Il  n'attaque  pas,  il  se  défend  ». 

Les  graves  problèmes  que  prétendait  aborder  le 
leader  tlu  parti  libéral  n'ont  point  été  résolus,  l.a  seule 
mesure  adoptée  sous  le  ministère  Canalejas  a  été  «  la 
loi  de  cadenas,  1er  del  candado  ».  Aux  tenues  de  celte 
loi,  il  ne  sera  pas  établi  de  nouvelles  associations  ap- 
partenant à  des  congrégations  ou  à  des  ordres  religieux 
canoniquemenl  reconnus  sans  une  autorisation  du  Mi- 
nistère de  Grâce  ei  Justice,  consignée  dans  un  décret 
royal  publié  par  la  Gaceta  de  Madrid,  jusqu'à  ce  que 
la  condition  juridique  de  ces  associations  ait  été  défi- 
nitivement réglée.    Le  Vatican  a  fini  par  donner  lui- 

inè une  adhésion    provisoire    à    la    loi   de  cadenas, 

sous  la  condition  expresse  que  le  Gouvernement  espa- 
gnol B'engageait  à  ne  prendre  dans  les  matières  concor- 
dataires, connue  la  question  des  congrégations,  aucune 
mesure  unilatérale,  toute  décision  devant  être  subor- 
donnée  à  des  négociations  régulières  et  à  un  accord 

avec  le  Saint  Siège. 

L'Espagne  est  à  la  fois  la  terre  du  mysticisme,  le 
pays  de  Sainte  Thérèse  d'Avila  et  d'Ignace  de  Loyola 
el  le  pays  'les  explosions  d'anti  cléricalisme  sauvage,  se 
traduisant  par  les  horribles  tueries  de  i834  ou  par  les 
journées  sanglantes  de  Barcelone  en  [909. 

La  vieille  monarchie  catholique  arrivera-t-elle,  en 
s'ouvrani  aux  idées  modernes,  à  concilier  le  sentiment 
religieux  et  la  liberté,  la  Ici  sincère  et  vraie  ei  la 
pleine  liberté  <le  conscience  el  de  pensée?  Caslelar  a 
tracé  la  voie  à  suivre  dans  l'admirable  discourt  qu'il  a 


Il     G0UVERNBMEN1  1 33 

prononcé  en  [876  sur  la  liberté  religieuse.  Il  évoquait 
l'Evangile,  montrait  Marie  Magdeleine  et  ses  com- 
pagnes  au  tombeau  du  Christ,  se  lamentant  parce  que 
l'on  avait  volé  les  restes  du  Sauveur,  et  il  s'écriait  : 
«  Les  femmes  aveugles  de  l'Evangile  cherchant  le 
Christ  dans  le  sépulcre  de  pierre  m'ont  rappelé  les 
('•rôles  réactionnaires.  Oui,  celles-ci  cherchent  le  Christ 
où  il  n'est  pas,  dans  le  sépulcre  du  \lo\en  Age,  dans 
les  murailles  des  castels  féodaux,  dans  les  chevalets  de 
la  torture,  dans  les  l'ers  des  esclaves,  dans  le  feu  des 
bûchers,  quand  le  Christ  est  partout  où  se  brise  la 
chaîne  d'un  opprimé  et  s'accomplissent  la  vérité  et  la 
justice  ». 

L'Espagne,  a  perdu  au  cours  du  xi\"  siècle,  son  im- 
mense empire  du  Nouveau-Monde. 

Tous  les  abus  dont  soutirait  l'administration 
métropolitaine  se  retrouvaient,  aggravés,  dans  l'admi- 
nistration coloniale.  L'Espagne  considérait  ses  colonies 
comme  des  fermes  qu'elle  exploitait  jusqu'à  les  ('-puiser. 
Elle  comprimait  chez  elles  tout  essor  économique  afin 
de  se  réserver  le  monopole  du  commerce  et  de  l'in- 
dustrie. Il  fallait  tirer  de  l'Espagne,  au  prix  que  fixait 
la  Métropole,  les  fers,  les  draps,  les  produits  fabri- 
qués, quels  qu'ils  fussent.  La  culture  de  la  vigne,  celle 
île  l'olivier  étaient  prohibées  pour  obliger  les  colons  à 
ne  s'approvisionner  que  îles  \ins  el  des  huiles  de 
l'Espagne. 

Ruinés  par  les  procédés  économiques  de  la  Mère- 
Patrie,  les  colons  étaient  exaspérés  par  l'arrogance, 
les  abus  d'autorité,  les  concussions  des  fonctionnaires 


L34  B8PAGN1 

espagnols.  \  Lee  royauté»  du  continent  Américain  et 
Capitaineries  générales  des  Antilles  ou  île  L'Océanie 
étaient  briguées  par  eux  avec  la  même  ardeur  que  les 
proconsulats  des  provinces  romaines  et  pour  les  mêmes 
motifs  de  lucre  honteux.  Chiliens,  Péruviens,  Colom- 
biens. Mexicains  ont,  tour  à  tour,  secoué  un  joug 
devenu  intolérable,  les  anciennes  vice-rovautés  de 
l'Espagne  s'érigeant  en  Républiques  indépendantes. 
Après  les  défaites  de  Junin  et  d'Ayacucho,  en  182Î, 
1rs  espagnols  ne  possédaient  plus  un  pouce  de  terrain 
sur  le  continent  Américain. 

Les  mêmes  détestables  procédés  d'administration 
devaient,  à  la  lin  du  dernier  siècle,  faire  perdre  à 
l'Espagne  ses  possessions  des  Antilles  et  de  la  Malaisie. 
Vainement,  après  s'être  obstiné  à  refuser  les  mesures 
de  décentralisation  les  plus  indispensables,  le  Gouver- 
nement ><■  résigna-t-il  à  proclamer,  en  1897,  l'aulo- 
tonomie  de  Cuba.  Il  était  trop  tard.  Les  Etats*!  ms 
avaient  depuis  de  longues  années,  savamment  préparé 
leur  mainmise  sur  la  riche  proie  qu  ils  convoitaient. 
<  tu  s. ut  comment(  à  la  suite  d'une  guerre  désastreuse, 
le  traité  de  Paris  du  10  décembre  1898  a  entraîné 
poui  la  Monarchie  catholique  la  perte  de  Cuba  et  des 
Philippines. 

L'Archipel  des  Carolines,  dans  la  Mécronéaie,  à  l'Kst 
des  Philippine*,  a  été'  abandonné  par  l'Espagne  i 
l'Allemagne  moyennant  une  indemnité  pécuniaire, 
après  que  les  droits  «le  la  Monarchie  espagnole  suf  les 
lies  eurent  été  solennellement  consacrés  par  l'arbitrage 
il  h  Pape  Léon  Mil  'la  us  le  retentissant  conflit  hispano* 
allemand , 


Il     GOin  BBNBMENT  I  35 

Le  domaine  d'Outre-mèr  de  l'Espagne  est  actuelle 
niciii  réduit  aux  Baléares,  aux  Canaries,  aux  posses- 
sions espagnoles  dans  le  golfe  de  Guinée  (l'île  de 
Fernando-Pô,  la  Guinée  continentale,  le  cap  Saint- 
Jean,  les  îles  d'Annobon,  de  Corisco,  d'EIobey-Grande 
et  d'Elobey-Chico)  au  Rio  de  Oro,  enfin  aux  présides 
d'Afrique  et  «  à  la  zone  d'influence  espagnole  au 
Maroc  ». 

A  treize  heures  de  Barcelone,  dans  le  bassin  de  la 
Méditerranée,  entre  l'Afrique  et  l'Espagne,  la  France 
et  l'Italie,  les  Baléares  peuvent  être  une  source  pré- 
cieuse de  richesse  avec  l'admirable  rade  de  l'aima, 
avec  la  merveille  naturelle  qu'est  le  port  de  Mahon, 
avec  le  climat  privilégié  qui  favorise  toutes  les  cul- 
tures depuis  les  céréales  et  la  vigne,  jusqu'à  l'olivier, 
à  l'oranger  et  au  palmier.  L'industrie,  particulière- 
ment le  lissage  du  coton,  commence  à  se  développer 
aux  Baléares.  Elles  forment  une  province  administrée 
comme  celles  de  l'Espagne. 

L'Archipel  des  Canaries,  qui  surgit  de  l'Océan  a 
l'ouest  de  la  côte  d'Afrique,  forme  également  une 
province  du  Royaume  espagnol  :  c'est  la  terre  des  vi- 
gnobles renommés  et  des  fruits  les  plus  savoureux. 
Ilumholdt  a  proclamé  la  vallée  de  la  Orotava,  la  perle 
de  Ténérilfe,  «  la  plus  belle  vallée  du  monde  ».  Le 
commerce  des  Canaries  est  surtout  alimenté  par  les 
produits  du  sol,  dont  il  se  lait  une  exportai  ion  consi- 
dérable. La  population  est  de  36o.ooo  habitants, 

\  la  différence  des  Baléares  el  des  Canaries,  admi- 
nistrées comme  provinces  du  royaume,  les  possessions 
espagnoles  du  Golfe  de  Guinée,  soumises  jadis  à  l'an- 


136  bspagnb 

torilé  du  Ministre  d'Ullra-Mar,   relèvent   aujourd'hui 

il u  Ministère  d'Etat  OU  Ministère  des  Affaires  étran- 
gères. 

L'ile  île  Fernando-Pô,  cédée  à  l'Espagne  en  mars 
1778  par  le  roi  île  Portugal,  José  II.  pourra  devenir 
une  excellente  colonie  de  production.  Coton,  sucre, 
café,  cacao,  quinquina,  bois  de  cèdre  et  d'ébène  s'y 
trouvent  en  abondance,  Fernando-Pô,  disait  Stanley, 
est  «  le  joyau  de  l'Océan,  mais  un  joyau  brut  que 
l'Espagne  se  soucie  peu  de  polir  ».  Ce  sont  jusqu'à 
présent  les  étrangers  qui  ont  fait  fortune  dans  cette 
colonie,  trop  négligée  par  les  Espagnols.  La  capitale  de 
l'ile  est  Sànta-Isabel,  sur  une  terrasse,  à  3o  mètres 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  L'ile  de  Fernando-Pô 
a  plus  de  '.i.000  kilomètres  de  superficie  et  compte 
plus  de  5o.ooo  habitants. 

L'ile  d'Annobon,  au  sud  de  Fernando  Pô,  perdue  au 
milieu  de  l'Océan  et  d'un  climat  insalubre,  n'a  aucun 
avenir.  Les  deux  îles  sieurs,  Klobev-Grnnde  et  Elobcv- 
Chico,  sont  sans  importance;  Corisco  est  très  belle  et 
très  fertile,  mais  n'a  que  1  j  kilomètres  de  superficie. 
Un  sous-gouverneur  administre  ces  diverses  possessions. 

La  Guinée  continentale,  non  loin  du  Cameroun 
allemand,  est  placée  sous  l'autorité  d'un  Commandant 
militaire  an  Rio  Benito  ;  un  sous-gouverneur  bsI  ins- 
tallé dans  la  capitale,  à  Mata,  une  ville  de  5oo  habitants 
seulement.  Le  sol  de  la  Guinée  est  fertile  et  de  grands 
neuves  sillonnent  des  territoires  donl  la  faune  el  la 
Qore  sont  admirables,  aucune  institution  politique  ou 
judiciaire  n'existe  dans  ces  colonies,  soumises  à  un 
ri. h  de  siège  permanent. 


Il     GOtN  BRNElll  ni  \A~ 

En  dehors  de  ses  possessions  du  golfe  de  Guinée, 
l'Espagne  occupe  une  autre  portion  de  l'Afrique  occi- 
dentale, la  vaste  région  connue  sous  le  nom  de  Sahara 
occidental  et  de  Hio  de  Oro  cpji  s'étend  sur  la  côte 
africaine  à  partir  du  Cap  Bojador  jusqu'au  Cap  Mlanc 
et  pénètre  dans  la  direction  du  Grand  Désert,  compre- 
nant le  territoire  connu  sous  le  nom  d'Adrar.  La  cote 
a  une  longueur  de  700  kilomètres  et  le  Sahara  espa- 
gnol une  superficie  totale  de  700.000  kilomètres 
carrés;  sa  population  est  de  5oo.ooo  hahitants. 

Il  faut  distinguer  dans  ces  immenses  possessions,  à 
peu  près  inexploitées,  deux  parties.  La  première  partie 
est  formée  par  le  littoral,  d'où  se  détache  la  péninsule 
appelée  Hio  de  Oro  ;  c'est  là  qu'est  la  capitale  de  la 
colonie  espagnole.  La  seconde  partie,  la  plus  étendue, 
qui  comprend  5oo.ooo  kilomètres  de  superficie,  porte 
plus  spécialement  le  nom  d'Adrar.  Ce  territoire  de 
l'Adrar  dillère  sensiblement  de  celui  de  la  péninsule 
voisine  (où  se  trouve  rétablissement  espagnol  de  \  illa- 
Cisneros),  en  ce  sens  qu  il  est  fertile  et  pourvu  d'eau, 
Le  littoral,  aride,  n'offre  d'importance  qu'au  point  de 
vue  des  relations  commerciales  à  établir  avec  le  Sahara 
occidental. 

C'est  surtout  vers  le  Maroc  que  l'Espagne  paraît  de- 
voir tourner,    pour  l'avenir,    son  action  colonisatrice. 

Depuis  des  siècles,  elle  nourrissait  à  l'égard  du 
Mogreh  les  plus  anùbitieuses  espérances.  La  Croisade 
contre  l'Infidèle  ne  devait-elle  pas  se  poursuivre  contre 
les  anciens  maîtres  de  l'Andalousie  au  delà  du  détroil 
de  Gibraltar 


138  B8PAON1 

C'est  ainsi  que  l'Espagne  fut  amenée  à  occuper  les 
c  présides  » . 

Dès  la  fin  du  \\r  siècle,  elle  possédait  le  préaide 
«  majeur  D  de  Geuta  et  les  trois  présides  «  mineurs  » 
de  Melilla,  Penon  de  Vêlez  et  Allmcema. 

Ces  places,  qui  n'avaient  d'autre  valeur  que  celle  de 
positions  stratégiques,  en  face  de  la  côte  d'Espagne, 
lurent,  pendant  tout  le  wii'  siècle  et  la  plus  grande 
partie  du  x\iu*,  le  théâtre  de  luttes  interminables  avec 
le>  Marocains. 

Le  28  mai  17Û7,  fut  conclu  le  premier  traité  de  paix 
et  de  commerce  entre  l'Espagne  et  le  Maroc.  Cet 
accord  reconnaissait  l'existence  des  présides  de  Ccula 
et  de  Melilla,  Penon  de  Yelez  et  Alhucemas  ;  il  garan- 
tissait leur  intégrité,  en  autorisant  l'abornemenl  îles 
limites  étroites  que  leur  Assignait  le  Sultan. 

La  lutte  ne  s'en  poursuivait  pas  moins  entre  EspA- 
pagnols    el    Maures   a\ec    des    alternali\es    de    paix    et 

d'hostilités. 

En  i8/j8,  l'Espagne  s'empara  des  iles  XalVarines,  qui 
dominent  la  position  du  Gap  de  l'Eau,  à  l'emltoui  Inire 
île  la  Mdulouïa.  Ce  lut  le  Cinquième  préside. 

Les  présides  sont,  juridiquement,  des  territoires 
espagnols,  administrés  comme  les  provinces  du 
Royaume. 

\tl  sud    ouest  du   Maro   ,   le    traité    du     :S    mai    17(17 

avait  coin  éd(  bus  Espagnols  el  lus  gens  dos  Cana- 
ries le  droit  exclusif  de  peclie  depuis  Sanla-C.ru/  jus- 
qu'au Nord  ".  La  concession  de  ce  droit  avait  été  re- 

nouM'Iér  pat   les    traités    des    1"     mars    1 -«)i|  et    ali  avril 

1860.    L'article  s  de  celte  dernière   convention  avait 


Il'    G0UVBRNSMEN1  139 

Stipule*  l'abandon  par  le  Mann  au  profit  de  II' s  pagne, 
sur  la  cote  de  l'Océan  Atlantique  et  près  de  Santa- 
Cruz-de-Mar-Pequefia,  d'un  terrain  suffisant  pout  la 
formation  d'un  établissement  de  pèche.  L'emplacement 
affecté  à  cet  usage  devait  être  désigné  el  délimité  par 
les  représentants  des  deux  parties  contractantes 

Les  désignation  et  délimitation  n'eurent  lieu,  après 
de  nombreuses  péripéties,  qu'en  1878.  1-e  territoire 
reconnu  à  l'Espagne  fut  celui  de  la  rade  d'Uni,  repré- 
sentant une  superficie  d'environ  70  kilomètres  carrés, 
avec  une  popidation  de  6000  habitants, 

Tels  étaient  les  droits  de  la  Monarchie  catholique 
au  Marne  lorsque  l'anarchie  croissante  au  Mogreb 
amena  la  France  à  considérer,  avec  l'Angleterre  et 
avec  l'Espagne,  les  mesures  à  prendre  pour  assurer  le 
maintien  de  l'ordre  dans  l'Empire  chérilien. 

\u\  termes  de  l'accord  du  3  octobre  i()o/|,  la 
France  el  l'Espagne  avaient  Qxé  leurs  zones  d'influence 
respect  ive  au  Maroc. 

La  zone  espagnole  devait  comprendre  :  au  nord,  toui 
le  territoire  au-dessus  d'une  ligne  tirée  de  la  Moulouïa 
à  Larache;  au  sud,  une  longue  étendue  de  côtes  el  un 
important  hinterland  dans  la  région  d'Uni  Des  clauses 
secrètes  du  traité  prévoyaient  plusieurs  h\  pothèses  :  celles 
d'abord  où  l'intégrité  de  l'Empire  Cbérifien  étant  main- 
tenue, la  France  et  l'Espagne  pourraient,  à  des  con- 
ditions compliquées  de  date  et  de  forme,  exercer  une 
action  privilégiée,  chacune  dans  sa  /une  ;  celles  ensuite 
où,  la  souveraineté  du  Sultan  venant  à  disparaître,  la 
france  el  l'Espagne  deviendraient,  par  un  partage 
réel,  maîtresses  des  zones  délimitées 


1-iO  BSPAGN1 

(>n  sait  comment  l'Acte  d'Algésiras  et  les  événements 
(jui  suivirent  ont  rendu  ce  traité  caduc.  Lorsque 
l'accord   franco-allemand   du   4    novembre    1911   eut 

reconnu  la  pleine  liberté  d'action  de  la  France  au 
Maroc  pour  y  constituer  son  Protectorat,  il  y  avait  à 
concilier  «  le  contrôle  et  la  protection  de  la  France  » 
étendus  à  tout  le  Maroc  avec  la  convention  Franco- 
espagnole  du  ,'i  octobre  190  j.  Il  fallait  lixcr  les  limites 
de  la  zone  française  et  de  la  zone  espagnole  en  prenant 
pour  base  cette  convention,  niais  en  obtenant  de 
l'Espagne,  sous  forme  de  supplément  de  territoire, 
une  participation  équitable  aux  sacrifices  consentis  par 
la  France  à  l'Allemagne  dans  l'Afrique  Fquatorialc  à 
l'effet  de  consolider  au  Maroc  la  situation  des  deux 
puissances. 

Ce  fut  L'œuvre  du  traité  franco -espagnol  du  27  no- 
vembre 1913.  Le  lecteur  en  trouvera  le  texte  intégral 
aux  Annexes. 

Deux  idées  devaienl  dominer  les  négociations, 

D'une  part,  il  fallait  harmoniser  les  clauses  de  la 
convention  nouvelle  avec  le  traité  franco-anglais  du  8 
avril  1904»  avec  l'Acte  d'Algésiras  el  le  traité  franco- 
allemand  de  ii)ii  afin  d'obtenir  L'adhésion  des  Puis- 
sances, de  leur  faire  reconnaître  la  sphère  d'action  réci- 
proque de  l'Espagne  <'t  de  la  France  cl  de  donner  ainsi 
plein*  valeur  à  L'œuvre  accomplie, 

D'autre  parti  il  fallait  effacer  définitivement    tous 


1    Y.  dans  le  Bulletin  de  l'Afriqm   française  d'octobre  191 3 
I  article  'I''  M.  Robert  '\<-  Caix.  (,'eittente  frûnco-espùùnole  ci  l< 


LE   001  VERNEMENT  I  i  I 

vestiges  d'équivoque  ou  de  malentendu  el,  par  des 
accords  cooelus  s&ns  arrière  pensée,  ouvrir  aux  deux 
nations  latines  une  ère  d'entente  et  de  confiance. 

Très  loyalement,  l'Espagne  a  consenti  le  sacrifice  des 
rêves  d'absorption  qu'avaient  longtemps  entretenus  à 
l'égard  du  Mogrcb  les  Africanistes  de  la  Péninsule,  re- 
vendiquant u  l'ancienne  frontière  naturelle  de  la  Patrie 
espagnole  »;  mais  la  délimitation  précise  des  deux  zones 
prévues  par  le  traité  rend  impossibles  pour  l'avenir 
les  contestations  et  les  conllits.  L'Espagne  et  la  France 
n'ont  plus  à  discuter  leur  mitoyenneté  au  Maroc  :  elles 
n'ont  désormais  qu'à  se  concerter  sur  des  mesures  d'in- 
lérèl  réciproque  pour  la  sécurité  et  la  mise  en  valeur 
de  territoires  conligus,  exposés  aux  mêmes  dangers. 

«  La  France  et  l'Espagne,  déclarait  l'ancien  Ministre 
de  la  Guerre,  le  Général  Luque,  doivent  coordonner 
leurs  efforts  pour  l'œuvre  commune  qu'on  leur  a 
désignée.  Il  faut  que  chacune  regarde  comme  ses 
ennemis  les  ennemis  de  l'autre,  que  les  Maures,  qui 
nous  combattent,  soient  des  adversaires  pour  les 
Français  et  que  ceux  qui  font  la  guerre  aux  Français 
ne  trouvent  jamais  chez  nous  ni  indifférence  ni  neutra- 
lité. Ainsi,  les  obstacles  s'aplaniront,  les  difficultés 
seront  plus  vite  surmontées  et  plus  court  sera  le  temps 
au  bout  duquel  nous  pourrons  nous  présenter  devant 
L'Europe  avec  la  satisfaction  d'avoir  accompli  notre 
devoir  et  d'avoir  gagné  à  la  civilisation  le  vaste  empire 
marocain  ». 

C'est,  bien  entendu,  d'un  concours  <lc  bon  voisinage 
qu'il  doil  s'agir,  non  d'une  collaboration  militaire 
directe,   impraticable  d'ailleurs,  alors  que  l'Espagne  et 


1    i-  1-1    U.M 

la  France  sont  encore  loin  d'occuper  totalement  leurs 
zones  respectives  et  de  se  trouver  en  contact  immédiat 
sur  toute  la  longueur  de  leur  frontière  convenuo  au 
Maroc,  mais  c'est  «  l'entente  et  l'amitié  cordiale  trou- 
vant leur  application  naturelle  dans  les  questions  qui 
>e  rattachent  à  l'œuvre  commune  à  accomplir  au 
Maroc  »  (i). 

Quatre  siècles  d'occupation  îles  présides  n'avaient 
abouti  jusqu'à  présent  à  aucun  résultat  appréciable 
pour  l'expansion  de  l'Espagne  dans  le  Il  il'.  I  ne  ère 
nouvelle  commence  pour  elle,  non  plus  de  Croisade 
contre  les  Infidèles,  non  plus  de  dépossession  brutale, 
niais  de  pénétration  prudente  à  l'aide  de  la  politique 
souple  et  féconde  du  Protectorat,  qui  fait,  au  profil 
du  peuple  prolecteur,  évoluer  L'indigène  dans  sa  propre 
civilisation.  Avec  la  conclusion  de  l'accord  franco- 
espagnol,  coïncidait  l'organisation  des  territoires  espa- 
gnols au  Maroc.  In  Haut-Commissaire,  en  résidence 
à  ietouan,  aura  sous  sa  direction  trois  chefs  de  service 
pour  les  affaires  indigènes,  les  travaux  publics  et  les 
finances,  o  Les  fonctionnaires  espagnols,  stipule  le 
décret  du  Y)  février  IQl3,  se  proposeront  une  poli- 
tique d'attraction,  qui  rende  l'action  espagnole  à  la 
fois  sympathique  et  bienfaisante;  ils  placeront  au 
premier  rang  de  leurs  obligations  une  moralité   irré 

t)  Note  officieuse  publiée  <;>  Carthagène  le  10  Ootobre 
rgiS  b  l'occasion  «In  voyage  de    M.  le  Présidant  Poincaré  et 

■1  la  suite  des  entretiens   ayant   <  - 1 1    lieu    on  Ire    !<■  c le  de 

Romanonès,  Président  <lu  Conseil  <l<  *  Ministres,  M.  Lopoz 
Muftos,  Ministre  d'Etat,  el  M  Stephen  Picbon,  Ministre  ilrs 
Aibiro  étrangères  <le  la  République  Française, 


i  i:    mu  \  iiim  \n  \  i  1  13 

procbable  cl  une  parfaite  tolérance  à  1  égard  des  cou- 
tumes locales  j  l'établissement   de  services   nouveaux, 

la  réforme  des  services  existants  seront  poursuivis  avec 
le  concours  d'éléments  indigènes;  à  côté  de  l'armée 
régulière,  dans  laquelle  plusieurs  corps  seront  maro- 
cains, une  police  locale  sera  instruite  par  des  officiers 
espagnols  et  placée  sous  les  ordres  de  pachas  ou  caïds  ». 
Voilà  des  méthodes  nouvelles,  qui  contrastent  heureu- 
sement avec  les  anciens  et  fâcheux  errements  de  la 
colonisation  espagnole.  Les  hommes  d'Etat  de  la  pénin- 
sule se  rendent  compte  qu'il  faut  réagir,  auprès  des 
Musulmans,  contre  le  souvenir  de  violences  séculaires. 

Assurément,  de  lourds  sacrifices  seront  à  prévoir, 
mais  un  large  champ  est  ouvert  sur  la  terre  <l  Afrique 
à  l'activité  de  l'Espagne. 

La  fierté  Castillane  pourra  trouver  ainsi  une  com- 
pensation à  la  perte  des   Colonies  du  Nouveau-Monde. 

Ilàlons-nous,  au  surplus,  de  constater  que  si  les 
Républiques  de  l'Amérique  latine  se  sont  affranchies 
d'un  joug  rendu  trop  pesanl  par  la  Métropole,  elles 
n'en  on  pas  moins  conservé  un  sentiment  filial  vis-à- 
vis  de  la  Mère-Patrie,  surtout  depuis  ses  derniers 
revers.  Ce  que  le  Gouvernement  espagnol  a  perdu, 
l'Hispanisme,  en  fait,  l'a  conservé.  L'Espagne,  sans 
doute,  ne  saurait  songer  à  rétablir  sa  tutelle  ou  son 
hégémonie  sur  ses  anciennes  colonies  d'Amérique  : 
mais  il  dépend  d'elle  de  les  faire  contribuer  puissam- 
ment à  son  développement  économique. 

Ce  n'e&t  pas  sans   vérité  que  M.  Azcarate    i  ).  célé- 

i     Discours  bu    banquet   hispano-américain   de    Madrid, 
octobre  tg  i  ■ . 


1  i  i  1  SPAGNE 

brant  le  mouvement  panhispanique  qui  emporte 
aujourd'hui  l'Amérique  du  Sud,  a  compare  la  mission 
de  l'Espagne  dans  le  Nouveau-Monde  à  celle  de  la 
Grèce  dans  le  panhellénisme. 


III 


LE    PAKLKMKNT 


10 


III 


LE  PARLEMENT 


l.  ORGANISATION    il     il-     v  I  [  iilld  tions    di:s    cohïks 

L'organisation  tirs  Corlès 

-  n;it.  —  Les  Sénateurs  de  droit.  Los  Sénateurs  nommés 
par  le  Moi.  ■ —  Les  Sénateurs  élus.  —  L'élection  par  les 
Corps  ecclésiastiques,  les  Corps  savants,  les  I  diversités,  les 
Sociétés  économiques  des  \niis  du  pays,  les  provinces.  — 
Le  Collège  électoral  provincial,  composé  des  membres  de  la 
Dépulation  provinciale  cl  desdélégués  élus  par  les  Munici- 
palités avec  adjonction  des  contribuables  les  plus  imposés. 
Les  conditions  d'éligibilité. 
La  Chambre  dos  Députés  —  Le  Code  électoral  du  S  août 
1907.  —  L'électoral.  —  Le  vote  obligatoire  el  ses  sanc- 
tions. —  Les  listes  électorales.  —  Les  .1  miles  municipales 
et  provinciales,  la  Junte  centrale.  —  La  formation  du  bu- 
reau électoral,  assesseurs  cl  contrôleurs.  —  Les  mesures 
législatives  assurant  la  liberté  et  la  sincérité  du  vote.  — 
Les  opérations  électorales.  -  La  Commissi le  recense- 
ment. -  Les  pénalités  pour  fraudes  électorales,  pression 
et  corruption.  Le  tribunal  suprême  et  la  vérification 
■  les  pouvoirs.  —  Les  conditions  d'éligibilité,  les  incompa- 
tibilités. —  L'impuissance  des  loi--  contre  les  mœurs, 


!  L8 


Les  attributions  <les  Cortès 


La  procédure  et  le  travail  parlementaire  des  Cliambrcs,  — 
Les  bureaux  des  assemblées,  —  Le  serment  des  élus.  — 
La  division  eu  Sections.  —  Les  Commissions.  —  La  con- 
vocation dos  Cliambrcs. 

Les  projets  de  loi  du  Gouvernement  et  les  propositions  do 
lois  d'initiative  parlementaire.  La  discussion  publique. — 
l.<  s  votes  —  Les  lois  fiscales  —  Les  Codes.  —  Les  ques- 
tions. —  Les  interpellations.  —  Le  droit  pour  la  Chambre 
des  Députés  de  mettre  en  accusation  les  Ministres  —  La 
discipline  parlementaire.  —  Les  partis 

«  Le  pouvoir  législatif,  déclare  l'article  18  de  la 
Constitution  espagnole,  appartient  aux  Cortès  d'accord 
avec  le  Roi  ». 

El  l'article  1 9  ajoute  : 

«  Les  Cortès  se  composent  de  deux  Assemblées  lé- 
gislatives, dont  les  pouvoirs  sont  égaux  :  le  Sénat  et 
la  Chambre  des  Députés  ». 

\\;uit  d'étudier  les  attributions  «les  deux  Chambres 
et  de  montrer  comment  s'accomplit  en  Espagne  le 
travail  législatif,  nous  devons  examiner  séparément  les 
règles  qui  président  au  recrutemenl  de  chacune  des 
deux  Assemblées. 

oui,  \  \is  \[  'Il  i\    DES    COU  1  1  9 

Sénat 

v.iiv  avons  indiqué  déjà  que  le  Sén;it  se  composai! 
de  trois  catégories  de  sénateurs  : 
I )e->  sénateurs  de  droit  ; 
hes  sénateurs  à  vie  nommés  pat  le  Souverain  ; 


LE    i-vuu.vu.vr 


149 


Des  sénateurs  élus  pour  une  période  d<-  dix  ans  et 
se  renouvelant  par  moitié  tous  les  cinq  ans. 

Les  sénateurs  de  droit  et  les  sénateurs  à  vie  réunis 
ne  doivent  pas  dépasser  le  chiffre  de  180.  chiffre  égal  à 
celui  des  sénateurs  élus.  Ces  derniers  sonl  soumis  à 
réélection  en  même  temps  que  les  membres  de  la 
Chambre  des  Députés. 

Sont  sénateurs  de  droit  : 

Les  (ils  du  Souverain  et  de  l'héritier  présomptif  de 
la  Couronne,  lorsqu'ils  ont  atteint  leur  majorité  : 

Les  grands  d'Espagne  a  qui  ne  sont  sujets  d'aucune 
puissance  étrangère  et  qui  jouissent  d'une  rente  de 
60.000  pesetas  provenant  de  biens  propres  immobiliers 
ou  de  valeurs  assimilées  aux  immeubles  par  la  loi  »  ; 

Les  capitaines  généraux  de  l'année  ; 

L'amiral  de  la  Hotte  ; 

Le  patriarche  des  Indes  : 

Les  archevêques  ; 

Les  présidents  du  Conseil  d'Etat,  du  Tribunal  su- 
prême, du  Tribunal  des  comptes,  du  Tribunal  supérieur 
de  la  guerre  et  du  Tribunal  de  la  llolle,  après  deux  ans 
d'exercice. 

Les  sénateurs  à  vie  sont  nommés  par  le  Souverain. 
11  doit  les  choisir  dans  l'une  des  douze  catégories  limi- 
tativement  énumérées  par  l'article  ■>.■?.  de  la  Consti- 
tution. 

Pourront  seuls  être  nommés  sénateurs  par  le  Hoi, 
déclare  ce  texte  : 

i"  Le  Président  du  Sénat  ou  le  Président  de  la 
(  lhambre  des  I  députés  ; 

a0  Les  députés  qui  ont  (ait  partie  de  trois  législa- 


[50 


l  RPAGNI 


lures  différentes  ou  qui  ont  exercé  pendant  huit  ans 
au  moins  le  mandat  législatif; 

3"  Les  Ministres  <lo  la  Couronne  ; 

l\°  Les  Evéques  ; 

5  Les  (  rrands  d'Espagne  ; 

6  Les  lieutenants  généraux  de  l'année  et  les  vice- 
amiraux  comptant  deux  ans  de  grade  ; 

7°  Los  ambassadeurs,  après  deux  ans  de  service  effec- 
tif, et  les  ministres  plénipotentiaires  après  quatre  ans  ; 

8"  Les  Conseillers  d'Etat,  les  membres  du  Tribunal 
suprême,  du  Tribunal  des  Comptes,  ainsi  «pie  les 
représentants  du  ministère  public  près  ces  juridictions 
(Jiteaux)  et  les  conseillers  du  Tribunal  supérieur  de  la 

guerre  et  du  Tribunal  de  la  flotte  et  le  doyen  du  Tri- 
bunal des  ordres  militaires,  après  deux  ans  d'exercice  : 

g  Les  présidents  ou  directeurs  de  l'Académie  espa- 
gnole, des  académies  d'Histoire,  des  Beaux-Arts,  de 
St-Ferdinand,  des  Sciences  exactes,  physiques  et  na- 
turelles, des  sciences  morales  et  politiques  et  de 
médecine  ; 

m  Les  académiciens  des  corporations  ci-dessus 
mentionnées  qui  occupent  la  première  place  par  rang 
d'ancienneté;  les  inspecteurs  généraux  de  première 
classe  des  corps  des  Ingénieurs  des  chaussées,  mines 
el  montagnes;  les  professeurs  des  i  Diversités  qui 
comptent  quatre  années  d'exercice  ;>  datei  de  leur 
nomination. 

La  Constitution  ne  se  contente  pas  dis  garanties  de 
capacité  professionnelle  qu'impliquent  les  fonctions 
qui  viennent  d'être  énumérées  pour  ouvrir  vocation 
au  choix  du  Souverain  ;  elle  exige  en  outre  (pie  tous 


m.    PARI  B M i : N  i  I  5 1 

les  sénateurs  choisis  dans  L'une  nu  l'autre  de  ces  caté- 
gories justilient  «  d'un  revenu  de  7.500  pesetas  pro- 
venant, soit  de  leurs  luens  propres,  soit  des  traitements 
de  leurs  emplois  qui  ne  peinent  leur  être  enlevés  sens 
décision  judiciaire,  soit  de  pensions  de  vétérance  ou  de 
retraite  ». 

Enfin,  peuvent  encore  être  nommés  sénateurs  par 
le  Souverain  : 

ii°  ((  deux  qui,  depuis  deux  ans,  possèdent  une 
rente  annuelle  de  20. 000  pesetas  ou  payent  au  trésor 
4.000  pesetas  de  contributions  directes,  s'ils  jouissent 
d'un  litre  de  noldesse  (titulos  <lel  Reino),  ou  s'ils  ont 
été  députés  aux  Cor  tes,  députés  provinciaux  ou  alcades 
dans  les  capitales  de  provinces  ou  dans  les  villes  de 
plus  de  vingt  mille  âmes  »  ; 

12°  Ceux  qui  ont  exercé  une  fois  les  fonctions  de 
sénateur,  avant  la  promulgation  de  la  Constitution  de 
187K  et  «  ceux  qui,  pour  être  sénateurs,  auront,  à  un 
moment  donné,  prouvé  qu'ils  possédaient  la  rente 
exigée  pour  être  sénateurs  de  droit  (60.000  pesetas  . 
pourvu  qu'une  attestation  du  Registre  de  la  Propriété 
constate  qu'ils  sont  toujours  propriétaires  des  mêmes 
biens  ». 

La  nomination  des  sénateurs  par   le    Souverain    doit 

toujours  être  laite  par  décret  spécial,  indiquant  expres- 
sémenl  le  titre  auquel  a  lieu  la  désignation  royale. 

La  deuxième  moitié  du  Sénat  (180  membres  se 
compose  de  sénateurs  élus  Tous  doivent  être  égale- 
ment choisis  dans  les  catégories  qui   viennent  d'être 

énuméiées,  mais  ils  sont  recrutés  à  l'aide  de  deux  pro- 
cédés d'élection  différents 


l.VJ 


BSPAGN1 


3o  sénateurs  sont  élus  par  les  Corps  ecclésiastiques, 
Les  Corps  savants,  les  Universités  el  «  les  Sociétés  éco- 
nomiques des  Amis  du  pavs  ». 

i5o  sont  désignés  par  un  collège  électoral  composé 
des  membres  dos  Députa  lions  provinciales  (conseils 
provinciaux)  et  de  délégués  (pic  doivent  nommer  les 
Municipalités  avec  l'assistance  des  plus  forts  imposés 
de  la  commune. 

Ce  n'est  pas  la  Constitution,  mais  la  loi  électorale  du 
8  février  1877  qui  a  fixé  les  règles  suivies  pour  l'élec- 
tion des  sénateurs. 

L'article  premier  de  celte  loi  spécifie  : 

«  Ont  le  droit  d'élire  des  sénateurs,  conformément 
au  n"  3  de  l'article  j.o  de  la  Constitution,  les  corpora- 
tions suivantes  : 

«  Les  Archevêques,  Evoques  el  Chapitres  de  chacune 
des  provinces  qui  forment  les  archevêchés  de  Tolède, 
Séville,  Grenade,  Santiago,  Saragosse,  Tarragone,  Va- 
lence, Burgos  et  Valladolid; 

•  L'Académie  royale  espagnole; 

•  .clic  d'I  lis  toi  re  ; 
Celle  des  Beaux-Arts  ; 

Celle  des  Sciences  exactes,  physiques  et  naturelles; 

Celle  «les  Sciences  morales  el  politiques; 

<  lelle  de  Médecine  de  Madrid  ; 

h  Chacune  des  l  niversités  de  Madrid,  Barcelone, 
Grenade,  Oviedo,  Salamanque,  Santiago,  Séville, 
Valence,  Valladolid  el  Saragosse,  avec  le  concours  des 
recteurs  el  des  professeurs,  des  docteurs  <pii  j  ion! 
immatriculés,  des  directeurs  d'institutions  d'enseigne- 


ii:    r  \ui .]•  \ii:n  i  I  53 

iiirni  secondaire  el  des  chefs  d'écoles  spéciales  situées 
sur  leur  circonscription  respective  ; 

«  Les  Sociétés  économiques  d'amis  du  pays  ». 

Les  «  Sociétés  économiques  n  représentent  en  Es- 
pagne une  institution  dont  les  origines  sont  fort  an- 
ciennes et  vénérables,  mais  qui  se  trouve  actuellement 
quelque  peu  démodée,  Ce  sont  des  sortes  de  clul>>  où 
l'on  doit,  en  principe,  s'occuper  de  la  défense  des  inté- 
rêts généraux  de  la  Patrie.  Les  Sociétés  économiques 
d'amis  du  pavs  auraient  pu  être  avantageusement 
remplacées  [tour  la  désignation  des  sénateurs  élus  par 
des  Chambres  de  commerce  ou  d'agriculture. 

La  loi  a  réparti  ces  Sociétés  économiques  en  cinq 
régions  :  Madrid,  Barcelone,  Léon,  Séville  et  Va- 
lence. 

Les  corps  ecclésiastiques  élisent  9  sénateurs,  un  pour 
chaque  province  ecclésiastique  ;  les  corps  savants  6,  un 
pour  chaque  Académie;  les  l  Diversités  10.  un  poui 
chaque  Université  :  les  Sociétés  économiques  .'>,  un 
pour  chacune  des  c  inq  régions  entre  lesquelles  elles 
sont  réparties. 

La  liste  (les  membres  des  corporations  ayant  le  droit 
de  concourir  à  l'élection  des  sénateurs  sera  dressée 
chaque  année  le  1  "  janvier  par  les  Chefs  de  ces  Corpo- 
rations, archevêques,  recteurs,  directeurs  ou  présidents 
des  académies  ou  des  Sociétés  économiques.  Ions 
membres  de  ces  corporations  qui  se  considèrent  comme 
devant  jouir  du  droit  électoral  ont  jusqu'au  ao  janvier 
la  faculté  de  protester  auprès  de  leurs  Compagnies 
contre  les  inscriptions  ou  exclusions  injustifiées,  Il 
doit  être  statué  sur  les  réclamations  avant  le  r  février, 


1  M  1  HP  M, M 

Les  décisions  rendues  ne  sont  susceptibles  d'aucun 
recoin  s. 

Quinze  jours  avant  L'élection  sénatoriale  les  Chapitres 
ecclésiastiques  se  réunissent  dans  leur  Cathédrale  res- 
pective. Se  conformant  aux  règles  qu'ils  ont  établies 
pour  élire  leurs  membres,  ils  nomment  un  d'entre  eux 
pour  prendre  part  avec  les  archevêques  et  évêques  à 
l'élection  sénatoriale  au  chef-lieu  métropolitain  dans 
la  Chapelle  archiépiscopale. 

«  La  nomination  pourra  porter  sur  un  prébende 
quelconque  des  Chapitres  de  la  province  ecclésias- 
tique ». 

Dans  les  huit  jours  fie  la  publication  du  décret 
ordonnant  de  procéder  à  l'élection  des  sénateurs,  les 
Sociétés  économiques  se  réunissent  an  siège  de  leur 
établissement  et  nomment  des  délégués  (un  délégué 
pour  cinquante  sociétaires),  qui  devront  se  rendre  a 
Madrid,  Barcelone,  Léon,  Séville  ou  Valence  A  l'effet 
de  désigner  le  sénateur  dont  le  siè^e  est  attribué  à  leur 
circonscription.  Seuls,  les  membres  des  Sociétés  écono- 
miques  comptanl    trois   années  de  Sociétariat  peuvent 

prendre  part  au  \otc. 

Le  jour  fixé  pour  l'élection  sénatoriale,  à  dix  heures 

du  matin,  les  Corporations  ou  délégués  de  Corporations 

se  réunissent  dans  le  local  ordinaire  de  leurs  séances 
publiques  sous  la  présidence  île  leur  préaident,  direc- 
teur nu  i  liet    Les  scrutateurs  sont  le  plus  âgé  et  le  plus 

jeune  des  membres  présents  ;   le  secrétaire  est    celui  de 

la  I  iorporation,  s'il  a  le  droit  de  voter  ;  dans  le  cas  Bon 
traire,  le  secrétaire  est  choisi  par  le  bureau. 

tares  lecture  du  décret  de  convocation  et  dei  lois 


M     PARLEMBN1  155 

organiques  se  référant  à  l'élection  des  sénateurs,  il  est 
procédé  au  vote,  chaque  électeur  déposant  son  bulletin 

dans  ruine  par  l'entremise  du  président. 

Si  aucun  candidal  n'a  réuni  la  majorité  absolue,  il 
est  procédé  à  un  second  tour  de  scrutin,  entre  les  deux 
concurrents  avant  obtenu  le  plus  grand  nombre  de 
suffrages. 

\près  charpie  élection,  il  est  dressé  un  procès-verbal 
dont  l'original  reste  déposé  dans  les  archives  de  la  Cor- 
poration. Une  copie  certifiée  par  le  président  et  le  se- 
crétaire est  remise  à  l'élu  pour  lui  tenir  lieu  de  lettre 
de  créance.  Une  deuxième  copie  est  expédiée  au  Mi- 
nistre de  l'intérieur  [Gobernaciofî)  et  une  troisième  est, 
avec  tout  le  dossier,  transmise  au  Sénat  dans  le  délai 
de  huitaine. 

Les  i5o  sénateurs  élus  par  les  provinces  sont  choisis 
par  un  collège  électoral  composé,  à  la  fois  d'électeurs 
directs,  les  membres  des  Dépulalions  provinciales, 
el  d'électeurs  secondaires,  les  délégués  choisis  par  les 
municipalités  et  les  contribuables  les  plus  imposés  des 
communes. 

Chaque  province  a  droit  a  trois  sénateurs. 

Le  rr  janvier  de  chaque  année,  les  municipalités 
dressent  el  publient  les  listes  de  leurs  membres  et  d'un 

nombre  quadruple  d'habitants  de  la  commune  les  plus 
imposés  aux  rôles  des  Contributions  directes,  Ces  listes 
sont  tenues  à  la  disposition  du  publie  jusqu'au  20 jan- 
vier et  les  municipalités  doivent  statuer  avant  le  i"  fé- 
vrier sur  les  réclamations  qui  viendraient  à  se  produire. 
Les  décisions  des  municipalités  peuvent  être  frappées 
d'appel  devant  la  Commission  permanente  delà  Dépu- 


1 56  i  -i  mjni 

talion  provinciale,  laquelle  est  tenue  de  se  prononcer 
dans  la  quinzaine  suivante.  Un  dernier  recours  es1 
ouvert  jusqu'au  ao  février  devant  la  Cour  d'Appel  ordi- 
naire, qui  statue  sans  frais  avant  le  rr  mars.  Le  8  mars, 
au  plus  tard,  les  listes  définitives  doivent  être  publiées 
par  les  municipalités. 

Huit  jours  avant  la  date  fixée  pour  l'élection  sénato- 
riale, les  membres  de  la  municipalité  et  les  contribua- 
bles les  plus  imposés  inscrits  sur  la  liste  se  réunissent 
au  chef-lieu  de  chaque  district  municipal  et  élisent  un 
nombre  de  délégués  égal  au  sixième  des  conseillers  mu- 
nicipaux. Les  districts  où  le  nombre  des  membres  du 
Conseil  est  inférieur  à  six  ('lisent  un  délégué.  Sont  seuls 
éligibles  les  électeurs  présents  à  la  réunion  et  sachant 
lire  et  écrire. 

L'élection  a  lieu  à  dix  heures  du  matin  à  la  Maison 
de  ville,  sur  la  convocation  et  sous  la  présidence  de 
L'Alcade,  assisté  de  deux  assesseurs  et  d'un  secrétaire 
élu  par  le  collège.  Chaque  électeur  remet  son  bulletin 
au  président.  Après  la  proclamation  du  scrutin,  le 
procès-verbal  est  déposé  au\  Arehi\es  de  la  municipa- 
lité. Copie  en  est  remise  aux  délégués  élus,  au  Gouver- 
neur de  la  province  et  au  secrétariat  de  la  Députation 
provinciale. 

Les  délégués  ainsi  nommés  doivent  Be  rendre  dans 
la  i  apitale  de  la  pro\ uni'  deux  jours  avant  la  date  fixée 
pour  l'élection  des  sénateurs.  La  veille  de  l'élection, 
dans  le  local  indiqué  par  le  Gouverneur  de  la  province, 
les  membres  de  la  I  Réputation  provinciale  et  les  délégués 
élus  p, h  les  districts  municipaux  se  réunissent  bous  la 
présidence  du  président  delà  Députation  provinciale. 


LE   PARLEMENT  I  5" 

assisté  de  quatre  scrutateurs  provisoires  choisi  parmi 
les  plus  âgés  et  les  plus  jeunes  délégués  présents. 

Il  est  procédé  :  i"  à  la  vérification  îles  pouvoirs  dos 
délégués;  a0  à  l'élection  des  quatre  secrétaires  scru- 
tateurs «lit  bureau  définitif  à  l'aide  de  bulletins 
ne  devant  porter  que  deux  noms  au  lieu  de  quatre  afin 
d'assurer  la  représentation  des  différents  partis.  Le  dé- 
pouillement terminé,  le  président  proclame  secrétaires- 
scrutateurs  les  candidats  avant  obtenu  le  plus  grand 
nombre  de  suffrages.  Un  procès-verbal  de  celle  opéra- 
tion préparatoire  est  dressé  et  les  opérations  électorales 
sont  renvoyées  au  lendemain. 

Le  second  jour,  le  scrutin  est  ouvert  pour  les  élec- 
tions sénatoriales.  La  majorité  absolue  csl  nécessaire 
au  premier  tour  de  scrutin.  Si  elle  n'est  pas  réunie,  il 
est  procédé  à  un  deuxième  tour  entre  les  candidats  axant 
obtenu  le  plus  grand  nombre  de  voix  jusqu'au  double 
du  nombre  de  sénateurs  à  élire.  Pour  le  second  tour 
de  scrutin,  la  majorité  relative  suffit  et  le  sort  décide 
au  cas  d'égalité  de  voix,  l  ne  copie  du  procès-verbal  est 
transmise  au  Ministre  de  l'Intérieur,  une  autre  est  ex- 
pédiée, avec  le  dossier  de  l'élection  au  Secrétariat  du 
Sénat.  Le  procès-verbal  original  est  déposé  aux  Ar- 
chives de  la  Députation  provinciale. 

(  .'est  le  Sénal  qui  procède  à  la  vérification  des  pou- 
voirs de  ses  membres.  Il  est  seul  juge,  non  seulement 
de  la  validité  des  opérations  électorales,  mais  encore  de 
l'éligibilité  des  candidats  élus. 

Pour  siéger  au  Sénat,  il  faut  être  Espagnol,  avoir 
35  ans  accomplis,  n'avoir  jamais  été  l'objet  d'une  pour- 
suite criminelle,  avoir  la  jouissance  de  ses  droits  poli- 


1.">S  I  SPAGN1 

tiques,  détenir  ses  biens  libres  d'engagement  et  rentrer 
dans  l'une  des  catégories  * j ne  nous  avons  indiquées 
comme  limitativement  prévues  par  l'article  au  delà 
Constitution. 

Ne  peuvent  être  élus  par  les  Députations  provinciales 
1 1  les  délégués  : 

i  deux  (jni  remplissent  ou  auront  rempli  avant 
l'élection  une  charge  OU  un  emploi  à  la  nomination  du 
Gouvernement,  avec  exercice  de  l'autorité  dans  la  pro- 
vince ; 

Les  entrepreneurs  (et  leurs  cautions)  de  travaux 
et  services  publics  rétribués  sur  les  fonds  de  l'Etat,  des 
provinces  ou  des  communes,  et  les  administrateurs  de 
ces  travaux  en  services; 

3°  Les  receveurs  des  contributions  et  leurs  cau- 
tions (i), 

La  loi  prohibe  l'élection  de  tout  candidat  débiteur 
de  l'Etat  pour  une  cause  quelconque. 

Les   fonctions  de  sénateur  sont  incompatibles  avec 

tout   emploi    rétribué   sur   les  fonds  de  l'Etat,  des  pro- 

vinces  ou  des  communes,  autres  que  les  charges  pré- 
vues à  l'article  aa  de  la  Constitution  comme  créant  un 

litre  pour  siéger  au  Sénat. 

Les  fonctions  de  .sénateur  sont  également  incompa- 
tibles ave<  le  mandat  de  députéaux  Cortèsel  de  mem- 
bre de  toute  municipalité  autre  qui  celle  de  Madrid. 

Les  sénateurs  ne  reçoivent  aucune  indemnité  parle 
mentaii  e, 

En  dehors  des  Fonctions  de  ministre  ils  ne  peuvent 

i    Loi  du  8  îi *rier  |,s77,  art"  '■ 


I  I       l'Ail!  1   Ml  \  I  |  .">',» 

accepter  ni  emploi  ni  avancement  de  faveur,  ni  titra 

ni  décoration  pendant  rpic  les  Cortès  sont  en  session. 
Le  Gouvernement  peut  cependant  leur  conlier  «  les 
missions  qu'exige  le  service  public  eu  égard  à  leurs 
emplois  ou  fonctions  respectives  a  (i). 

Tel  est  le  Sénat  espagnol.  Ce  n'est  en  aucune  façon 
une  Assemblée  analogue  à  la  Chambre  des  Lords  en 
Angleterre.  Les  «  grands  d'Espagne  »  n'ont  droit  qu'à 
un  dixième  des  sièges  et  ils  ne  les  détiennent  pas  à 
titre  héréditaire.  Ajoutons  (pie  si  la  «  grandesse  »  fut 
autrefois  en  Espagne  le  plus  haut  titre  d'honneur,  elle 
est  singulièrement  déchue  île  sa  splendeur  passée.  Ké- 
servée  jadis  à  ceux  qui  s'étaient  illustrés  sur  les 
champs  de  bataille,  le  titre  de  «  grand  d'Espagne  »,  a 
trop  souvent  par  la  suite,  récompensé  des  services 
«  peu  dignes  d'être  divulgués  »  (a).  Les  grands  d'Espa- 
gne oui  pu  garderie  privilège  de  rester  couverts  en  pré- 
sence du  Souverain  et  de  l'appeler  «  Mon  Cousin  »  ;  ils 
ont  depuis  longtemps  perdu  toute  influence  politique. 
L'aristocratie  ne  lient  aucune  place  dans  la  vie  pu- 
blique de  la  péninsule  espagnole. 

Le  Sénat  de  l'Espagne*  bien  qu'une  partie  des  séna- 
teurs soit  nommée  par  voie  d'élection,  ne  saurait 
d'avantage  se  comparer  à  notre  «  Grand  Conseil  des 
Communes  de  France  ». 

La  principale  préoccupation  îles  auteurs  de  la  Cons- 
titution espagnole  de  1876,  en  créant  l'institution  du 
Sénat, a  été  île  placer  en  face  d'une  ^semblée  issue  du 

(1)  Constitution,  article  a5. 
(a)  Luis  Kiguerola  Forrolti, 


160  BSPAGN1 

suffrage  populaire  une  Chambre  personnifiant  l'expé- 
rience administrative,  mais  la  part  a  été  faite  beau- 
coup trop  large  aux  fonctionnaires,  mesquinement 
préoccupés  de  leurs  intérêts  corporatifs,  insuffisante  aux 
éléments  qui  auraient  pu  réellement  constituer  la  re- 
présentation professionnelle  et  rire  les  organes  auto- 
risés des  grands  intérêts  nationaux. 

\  maintes  reprises,  des  hommes  politiques  considé- 
rables, des  Chefs  de  gouvernement  même  comme 
MM.  Moret  et  Canalejas,  ont  réclamé  une  réforme  pro- 
fonde de  la  liante  Assemblée, 

Chambre  des  Députés. 

La  Chambre  des  Députés  (Congreso)  est  élue  par  le 
suffrage  universel  direct 

Nous  axons  indiqué  dans  notre  premier  chapitre, 
comment  le  suffrage  universel  avait  été  introduit  en 
Espagne    par    la   Constitution  de    1869,  à  la  suite  de  la 

révolution   qui    avait   renversé   le  trône  d'Isabelle  II, 

puis  remplacé,  après  la  restauration  d'Alphonse  \  1 1 , 
par  le  suffrage  censitaire,  avec  adjonction  de  neuf 
électeui  s  capacitaires. 

La  loi  du  36  juillet  1800  a  rétabli  le  suffrage  uni- 
versel.  Elle    a    élé    refondue  par  la  loi  du  S  août    tQ07, 

loi  en  88  articles,  qui  forme  un  véritable  Code  électoral 
ci  présente  un  sujet  d'étude  des  plus  dignes  d'attention. 
Peu  Je  législations  oui  manifesté  avec  une  plus  pom- 
peuse ostentation  «pie  la  législation  électorale  espagnole 
la  volonté  de  protéger  la  liberté  et  la  sincérité  du  vote, 
d'assurei    la   représentation   exacte  el  fidèle  de  la  vo 


Le  l'.viu  i  mi. vi  I  6  i 

lonté  nationale.  La  Loi  du  8  août  i<)07  en  Espagne  s'esl 
largement  inspirée  des  solutions  préconisées  par  les 
théoriciens  de  l'organisation  du  droit  de  suffrage, 
Nombre  »les  dispositions  qu'elle  édicté  pourraient  être 

données  comme  modèles si  elles  étaient  observées 

et  respectées. 

Le  Code  électoral  de  1907  se  divise  en  huit  titres  : 

Titre         I.  —  Du  droit  électoral  (art.  1  à  9)  ; 

Titre       II.      -  De  la  liste  électorale  (art.   10  à  ig   ; 

Titre     III.  —  Des  districts  et  des  collèges  électoraux 
(art.  20  à  a3)  ; 

Titre      IV.  —  Des    candidats    et    de    leurs    droits 
(art.  24  à  3i)  ; 

Titre        V.  —  De  la  constitution  des  bureaux  élec- 
toraux (art.  3a  à  38)  ; 
Titre      VI.  —  De   la   procédure  électorale    (art.  3g 
à  5o)  ; 

Titre    \  11.  —  De  la  présentation  des  procès- verbaux 
et     des     réclamations     électorales 
(art.  tio  et  61)  ; 
litre  VIII.  —  De    la    sanction    pénale    (art.   tia    et 
suivants). 

\ux  termes  de  l'article  1"  île  la  loi  : 

«  Sont  électeurs  tous  les  Espagnols  mâles,  majeurs 
de  25  ans,  jouissant  de  leurs  droits  civils,  habitants 
d'une  commune  dans  laquelle  ils  comptent  deux  .ms 
au  moins  de  résidence. 

A  ce  principe  général,  la  loi  Formule  trois  restric- 
tions. 

il 


La  première  esl  fondée  Bur  des  considérations  de  dis- 
cipline militaire. 

La    loi    décide   que   U  les  individus  faisant  partie  des 

Armées  de  terre  et  de  mer  ne  peuvent  voter  pendant 
qu'ils  sont  au  service  ». 

Il  en  est  de  même  pour  tous  ceux  qui  appartiennent 
((  à  d'autres  corps  ou  institutions  années  dépendant  de 
l'Etat,  de  la  province  ou  île  la  commune  tant  qu'ils 
sont  assujettis  à  la  discipline  militaire  ». 

La  deuxième  restriction  est  fondée  sur  l'indignité 
résultant  de  condamnations  judiciaires. 

Me  peuvent   être  électeurs  »  déclare  l'article  .'î  de 
la  loi  : 

a  r'  (.cuv  qui,  par  une  sentence  définitive,  ont  été 
condamnés  à  la  disqualification  perpétuelle  quant  aux 
droits  politiques  et  aux  charges  publiques,  tant  qu'ils 
n'onl  pas  été  graciés  OU  qu'ils  n'ont  pis  ôbteUÛ  une 
réhabilitation  personnelle  par  le  moyen  d'une  loi  ; 

«  a"  deux  qui)  par  sentence  définitive,  oui  été  Don- 
damnés  à  une  peine  afQtctive; 

((  3"  Ceux  qui,  avant  été  condamnés  à  d'autres 
peines  par  Bentence  définitive,  ne  prouvent  pas  les 
avoir  accomplies, 

Enfin,  la  troisième  restriction  esl  fondée  sur  la  pré- 
somption  que    l'électeur   ne    possède    pas   nue  indépen- 

danos  suffisante  pour  exercer  librement  son  droit  de 

vnlc. 

Sont,  en  conséquence)  privés  du  droil  électoral  les 
électeurs  rentrant  dans  l'une  des  trois  catégories  soi 
vantes  : 

i       Les  commerçants  Taillis  min  réhabilités  conter- 


LE    PAHLBM1  M  I  <'>.'{ 

mémêîil  à  la  loi  cl  fte  faiMnl  pas  preuve  qu'ils  on1 
rempli  toutes  leurs  obligations  »  ; 

«  2°  Les  débiteurs  de  deniers  publics  responsables  di- 
rectement ou  à  titre  subsidiaire  »  ; 

n  3"  Les  individus  recueillis  dans  des  établissements 
charitables  ou  autorisés  sur  leur  demande,  par  l'Admi- 
nistration, à  implorer  la  chanté  publique  ». 

Après  avoir  reconnu  à  tOUS  les  citoyens,  SHUf  les 
eiceptions  ci-dessus  visées.,  le  droil  électoral,  la  loi 
espagnole  rait  de  ce  droit  un  devoir  civique.  Elle  pro- 
clame le  principe  du  rote  obligatoire. 

«  Tout  ('lecteur,  déclare  l'article  ■>,  a  droit  et  est 
obligé  de  voter  à  toutes  les  élections  pour  lesquelles 
une  convocation  est  faite  dans  le  district  ». 

Sont  seuls  dispensés  de  l'obligation  de  prendre  part 

au  vole  «  les  individus  âgés  de  plus  de  70  ans,  le  curé, 

les  juges  de  première  instance  dans  leur  ressort  res- 
pectif et  les  notaires  publics  dans  la  circonscription 
notariale  où  ils  exercent  leurs  fonctions   >. 

La  dispense  est  fondée,  soit  sur  la  difficulté  pour  les 
Septuagénaires  de  se  déplacer  pour  prendre  part  au 
scrutin,  soit  sur  le  désir  légitime  «lie/  certains  élec- 
teurs dont  le  ministère  doit  être  assuré  à  tous  leurs 
concitoyens,  de  rester  en  dehors  des  luttes  électorales. 
De  sévères  sanctions  consacrent  l'obligation  pour  les 
•  I.  1  leurs  de  prendre  part  au  scrutin. 

«  L'électeur  qui,  sans  cause  légitime,  déclare  l'arti 
de  s  j  de  la  loi  électorale,  renonce  à  émettre  son  suf 
frage  dans  une  élection  quelconque  ayanl  lieu  dan-  le 
district,  sera  puni   : 

1    s  De  la  publication  de  son  nom,  avec  censure  pour 


1  «  >  i  1  SPAGNE 

avoir  négligé  d'accomplir  un  devoir  civique,  et  alin 
que  cette  omission  compte  comme  note  défavorable 
dans  sa  carrière  administrative,  s'il  a  embrassé  celle 
carrière  ; 

d'une  imposition  de   2  "  „  à    la  contribution  de 
l'Etat  ». 

«  Si,  ajoute  la  loi,  l'électeur  perçoit  une  solde  ou 
des  fonds  (haberes)  de  l'Etat,  de  la  province  ou  de  la 
commune,  il  perdra,  dans  la  période  de  temps  qui 
s'écoulera  jusqu'à  la  nouvelle  élection  1  °  0  de  cette 
somme,  qui  sera  attribuée  aux  établissements  de  bien- 
faisance existant  dans  la  circonscriplion  communale  et 
partagée  par  égales  parts  entre  eux  ». 

Les  représentants  et  les  administrateurs  de  ces  éta- 
blissements devront  exiger  celte  attribution. 

En  cas  de  récidive,  «  outre  les  peines  susdites,  l'élec- 
teur encourra  jusqu'à  ce  qu'il  ait  pris  part  à  une  autre 
élection  une  incapacité  d'aspirer  à  toutes  charges 
publiques  électives  ou  d'obtenir  une  nomination  du 
Gouvernement,  de  la  Députation  provinciale  ou  de  la 
Municipalité,  et  d'être  nommé  à  ces  charges  durant  le 
même  laps  de  temps  ». 

Enfin,  l'article  85  spécifie  que,  «  |.our  prendre  pos- 
session de  tout  emploi  public,  il  sera  indispensable 
aux  majeurs  de  aS  ans  d'exhibei  un  certificat  attestant 
qu'ils  ont  exercé  lem  droit  de  suffrage  lors  «le  la  der- 
nière élection  faite  dans  leur  circonscription,  on  bien 
un  certificat  portant  qu'il  ne  sonl  pas  électeurs,  ont 
été  dispensés  de  l'obligation  de  voter  ou  ont  j  1  i^ii) i<'-  de 
leur  abstention  par  devant  la  junte  compétente  ». 
Les  précautions  les  plus  minutieuses  sont  prises  par 


J,Ii     l'AIII  I .Ml   NT  I  65 

la  loi  espagnole  en  ce  qui  concerne  la  confection  et  la 
révision  des  listes  électorales. 

«  Pour  pouvoir  voter  aux  élections  des  députés  aux 
Corlès,  déclare  l'article  10  de  la  loi  du  8  août  1907,  il 
est  indispensable  d'être  inscrit  comme  électeur  sur  la 
liste  électorale,  qui  est  un  registre  public  sur  lequel 
sont  inscrits  les  noms  et  prénoms  de  tous  les  citoyens 
investis  du  droit  de  suffrage,  avec  indication  des  noms 
et  prénoms  de  leurs  père  el  mère  ». 

La  liste  électorale  est  soumise  à  une  révision  an* 
nuelle  et  elle  est  renouvelée  en  totalité  tous  les  dix 
ans. 

Elle  a  c  le  caractère  de  registre  public  ». 
Elle  doit  être  communiquée  et  mise  gratuitement  à 
la  disposition  de  quiconque  désire  en  prendre  connais- 
sance. 

L'article  16  stipule  que  «  l'Institut  géographique  et 
statistique  établira,  gardera  et  révisera  la  liste  électo- 
rale sous  la  surveillance  d'une  junte  centrale  et  à  l'aide 
de  relations  avec  les  juntes  provinciales  et  munici- 
pales qui  seront  dénommées  juntes  de  la  liste  électo- 
rale ». 

La  loi  s'est  appliquée  à  exclure  de  la  composition  des 
Juntes  de  la  liste  électorale  tous  éléments  politiques  ou 
pouvant  ôtre  suspects  d'avoir  dans  la  formation  des 
listes  un  intérêt  électoral. 

Sont  membres  de  la  Junte  municipale  : 
1"  Le  conseiller  qui  a  obtenu  le  plus  grand  nombre 
de    voix    dans    l'élection    populaire    et    lait    partie    de 
VAyuntamiento,  à  l'exclusion  de  l'Alcade  el  de  s<'s  lieu- 
tenants ; 


I  •'•(')  i  gp  v,,m: 

•  l  m  juge  ou  officier  de  l'armée  de  terre  ou  de  nier 
retraité  et,  à  défaut  un  fonctionnaire  luminaire  de 
l'Administration  civile  de  l'Etat  ou  de  la  province  ; 

3  Deus.  îles  contribuables  les  plus  imposés  de  la 
commune  ; 

i  Les  présidents  el  syndics  de  deux  corporations 
(gremios)  industrielles  de  la  communs,  avec  roulement 
tous  Ir-;  deux  ans  entre  les  différentes  corporations 
existantes,  el  conformément  au  plus  ou  moins  prend 
nombre  d'associés  dans  chaque  corporation. 

Sont  membres  des  Juntes  provinciales  : 

i°  Le  Recteur  de  11  niversité  et  s'il  n'\  en  a  pas  dans 
la  capitale  de  la  province,  le  directeur  de  l'Institut 
général  et  technique  : 

•à"  Le  doyen  du  Collège  des  Avocats  ; 

.S"  Le  doyen  du  Collège  des  notaires  et  là  où  il 
n'existe  pas  de  corporation  notariale,  le  notaire  le  plus 
ancien  résidant  dans  la  capitale  de  la  province; 

4°  Un  délégué  élu  par  la  Junte  provinciale  des  ré- 
formes sociales  ; 

5°  Le  chel  provincial  de  la  Statistique  dépendant  de 
rinstitul  géographique  : 

il  Les  présidents  des  Sociétés  économiques  des  Amis 
du  pays,  des  Chambres  de  commerce  el  d'agriculture. 
•  les  Chapitres,  des  Confréries  el  associations  de  pro- 
priétaires, agriculteurs,  éleveurs  (ganaderos),  commer- 
çants, industriels,  marchands  el  pêcheurs,  des  Vthénées, 
\(  niriiiies,  Lycées  el  Autres  sociétés  analogues  eyan' 
jH.in  bul  la  culture  intellectuelle,  des  sociétés  de  pa 
Irons  ei  (.m  i  ni  s 


i.i     r  \ki  i m i  n  i  |67 

Sont  membres  de  la  Junle  centrale  : 
i     I.-    |>i esidenl   île    l'Académie  rovale  des   Sciences 
morales  al  | >< •  1  i t i < j 1 1  es  ; 

■à"  Le  président  de  l'Institut  'les  iVionncs  sociales; 

3    Le  Recteur  de  l'Université  centrale: 

i"  Le  (lo\en  du  Collège  des  avocats,  de  Madrid  ; 

r»  Le  président  de  l'Académie  royale  de  législation 
et  de  jurisprudence  ; 

ti"  Le  directeur  de  l'Institut  de  géographie,  et  de 
statistique. 

La  Junle  municipale  est  présidée  par  uu  élu  de  I.i 
Junte  locale  des  réformes  sociales,  spécialement  dési- 
gnée par  elle. 

La  Junte  provinciale  est  présidée  par  le  président  du 
tribunal  local,  dans  les  villes  où  existent  semblables 
juridictions,  et,  dans  les  autres,  par  le  président  du 
tribunal  de  la  province. 

La  Junte  centrale,  siégeant  à  Madrid,  est  présidée 
par  le  président  du  Tribunal  supérieur. 

L'article  if>  spécifie,  qu'il  appartient  à  la  junte  cen- 
trale   : 

D'inspecter  et  diriger  les  services  qui  se  rattachent 

aux  listes  électorales  ; 

De  résoudre  les  dillicullés  que  peuvent  formuler  les 
juntes  provinciales  et  municipales , 

De  recevoir  et  trancher  (  fallût'),  dans  les  limites  de 
sa  compétence,  les  plaintes  qui  sont  formulées  ■ 

De  communiquer,  par  l'intermédiaire  de  s, ni  présj- 
sidenl,  a\ec  toutes  les  autorités  H  Ions  les  fonction- 
naires publies  ; 

D'eveirer  1 1  ne  juridicl  ion  disciplinaire  sur  toutes  le- 


168  BSPAGN1 

personnes  qui  interviennent  avec  un  caractère  officiel 
dans  les  opérations  d'établissement,  de  rectification,  de 

conservation  et  de  consultation  de  la  liste  électorale, 
avec  pouvoir  d'imposer  des  amendes  jusqu'à  1.000  pe- 
Betas  ; 

De  réprimer  les  infractions  concernant  l'établisse- 
ment, la  rectification,  la  conservation  et  la  consulta- 
tion de  la  liste  électorale  qui  ne  sont  pas  réservées  aux 
tribunaux;  d'infliger  des  amendes  auxquelles  donne 
lieu  le  défaut  d'envoi  utile  de  documents  ou  de  com- 
munications ;  d'imposer,  de  lever  ou  d'augmenter  des 
amendes  dans  la  limite  légale  de  ses  attributions  ; 

De  contrôler  tous  les  travaux  d'enquêtes  et  d'infor- 
mations au  sujet  des  certificats  actas)  présentés  parles 
députés  élus  pour  se  faire  admettre  aux  (lortès; 

Enfin  de  rendre  compte  à  la  Chambre  des  députés 
de  ton-  faits  qu'il  pourrait  y  avoir  intérêt  à  porter  à 
sa  connaissance. 

Les  présidents  et  délégués  des  juntes  de  la  liste  élec- 
toral'' ae  peuvent  être  suspendus  ni  destitués  de  leurs 
charges,  ni  troublés  dans  leurs  fonctions  par  l'immix- 
tion «les  autorités  gouvernementales. 

Ils  ne  pourraient  être  suspendus  ou  destitués  qu'en 
vertu  de  décisions  judiciaires  ou  de  délibérations  d'une 
junte  hiérarchiquement  supérieure. 

Les  présidents  des  juntes  municipales  sont  tenus  de 
faire  afficher  s  la  porte  de  i"iis  les  locaux  de  vote  les 
listes  définitives  des  électeurs  et  de  mettre  à  la  dispo- 
sition des  bureaux  électoraux  [mesat  .  avant  qu'ils 
ie  constituent,  les  listes  originales  et  certifiées  des 
électeurs   décédés,  devenus   incapables  <>u   privés  du 


I.JC    PARLBMEN1 


I6fl 


droit  de  suffrage  postérieurement  à  l'établissement  des 
listes. 

Les  opérations  électorales  ont  lieu  par  district,  cha- 
que district  ayant  droit  à  la  nomination  d'un  député 
par  5o.ooo  habitants  ce  qui  donne  un  total  de  /|o0  dé- 
putés. 

Lorsque  le  district  est  appelé  à  ('lire  plusieurs  députés 
au  scrutin  de  liste,  le  législateur  espagnol  a  voulu,  à 
l'aide  du  vote  limité,  rendre  possible  la  représentation 
des  minorités. 

Aux  termes  de  l'article  21  de  la  loi  électorale  de 
1907.  si  le  district  est  appelé  à  élire  de  2  à  l\  députés, 
l'électeur  a  une  voix  de  moins  qu'il  y  a  de  sièges  à 
pourvoir;  si  le  district  nomme  de  5  à  8  députés,  l'élec- 
teur a  deux  voix  de  moins;  si  le  district  nomme  plus 
de  8  députés,  l'électeur  a  trois  voix  de  moins;  si  le 
district  compte  plus  de  10  députés,  l'électeur  a  quatre 
voix  de  moins  qu'il  n'y  a  de  nominations  à  faire. 

Grâce  à  ce  système,  la  totalité  des  sièges  ne  peut, 
quoi  qu'il  advienne,  appartenir  au  parti  triomphant. 
Le  Gouvernement  se  trouve  ainsi  obligé  d'accepter  l'iné- 
vitable contrôle  de  représentants  de  l'Opposition. 

Ajoutons  qu'au  cours  de  ces  dernières  années,  une 
Ligue  importante  s'est  formée  en  Espagne  pour  récla- 
mer la  substitution  de  la  représentation  proportion- 
nelle à  la  simple  représentation  des  minorités. 

La  Junte  municipale  de  la  liste  électorale  doil  fixer, 
chaque  année,  à  la  date  du  rr  décembre,  le  siè-e  de 
chaque  collège  «  en  donnant  la  préférence  aux  écoles 
et  aux  édifices  publics,  el  en  1  hoisissanl  ceux  qui  »>iii 
situés  dans  la  partie  la  plus  populeuse  de  la  section,  à 


I"(l  IM'W.M 

l'exclusion  de  la  Salle  rapilulaire,  de  /'  1  yunUwiicnlo  et 

des  bureaux  municipaux  (i)  ». 

Les  collèges  électoraux  SOOl  «lis  im-.n  ru  sections,  ('.lia 
(jiic   commune    tonne    une    sec  lion    si  elle  ne  compoi  te 
pas    plus   de   500   électeurs;    deux  si  elle  eu  compte  de 
5oi   à  Î.OOO,  (rois  si  elle  compte  (le    l.OOl    à    I.5ûQ     'I 
ainsi  île  suite. 

Le  scrutin  a  toujours  lieu  un  dimanche,  sinudtané- 
nient  dans  toules  les  sections.  Il  esl  ouxert  de  trois 
heures  du  matin    à  quatre  heures  de  l'après-midi. 

u  Dans  chaque  section  électorale,  porte  l'article  3a 
de  la  loi  du  S  août  1907,  il  \  aura  un  hureau  chargé 
de  présider  au  vote,  de  main  tenir  l'ordre  et  de  xeiller 
a  la  sincérité  du  scrutin.  Le  hureau  électoral  sera 
composé  d'un  président.  île  deu\  assesseurs  et  des  oui 
tiô|em->  nommés  par  des  candidats,  si  ceux  ci  ont  usé 
de  leur  droit  d'en  désigner. 

La  désignation  des  assesseurs  et  des  contrôleui •>  est 
l'un  des  traits  les  plus  caraclérislicpies  de  la  législation 
électorale  espagnole, 

Pour  procéder  à  la  désignation  de  ceux  (|iii,  d  après 
la  loi.  doivent  constituer  les  hureaux  électoraux,  l'ar- 
ticle ]l.'i  de  la  loi  de  1907  prescrit  la  formation  de 
trois  groupes,, 

i.c  premier  groupe  comprend  «  dos  électeurs  de  l;i 
section  syanl  titres  académiques  ou  professionnels, 
exerçant  ou  non  la  profession,  juges  ou  officiers  re 

traités   et    l'ont  I  iounaii  es    ci\ils    honoraires   ; .   Le    texte 
spécilie  tpie  11   là  ou    il  n'\    a    pas    d'électeurs    de    ladite 

1    Loi  électorals  du  Saoul  11,107,  article  ua. 


i  i:    P  uu.kmi  vi  I  ~t  1 

catégorisai]  nombre  de  quatre  au  moins,  le  nombre 
en  M'i.i  complété  pai  Lai  sergents  et  caporam  qui  pot 
obtenu  un  licenciement  absolu,  à  l'exception  de  ceux 

(jiii,  pour  quelques  motifs,  jouissent  d'un  emploi  ou 
d'une  charge  publique,  «l'une  solde  ou  il'uni'  gratilica- 

tion  de  l'Etat,  «le  la  province  ou  de  la  commune  ». 

Le  second  groupe  comprend  «  des  électeurs  de  la 
section  majeurs,  imposés  pour  îles  immeuliles,  des 
cultures  ou  des  élevages,  «les  présidents  et  syndics  des 
associations  el  groupements  de  contribuables  de  la 
commune  et  des  électeurs  les  plus   imposés  pour  les 

mêmes  raisons...  »). 

Le  troisième  groupe  comprend  0  des  électeurs  con- 
tril)uant  à  quelque  impôt  et  des  électeurs  non  contri- 
buables )),  mais  à  la  condition  expresse,  que  tous  sachent 
lire  et  écrire. 

C'est  la  Junte  municipale  de  la  liste  électorale  qui 
doit,  tous  les  quatre  ans,  à  la  date  du  i'  octobre, 
dresser  les  trois  listes  des  cilo\ens  rentrant  dans  l'un 
OU  l'autre  de  ces  trois  groupements. 

I,e>  listes  s,,ot  publiées  et  allichées  et  peuvent  être 
l'objet  de  protestations. 

Les  réclamations  sont  portées  devant  la  Junte  pro- 
vinciale et,  en  dernier  ressort,  devant  la  .lunle  cen- 
trale. Les  électeurs  Ggurant  sur  le-*  trois  listes  son' 
inscrits  dans  l'ordre  alphétique. 

\\ ml  le  it|  décembre,  déclare  l'article  36,  la  Junte 

municipale  de  la  liste  électorale  «  désignera  connue 
président    du     bureau     électoral      de     chaque    section, 

pour  les  élections  à  intervenir  dans  les  deux  années 
suivantes,   l'électeur  le  plus   à-é  des  trois  listes  (  i- 


172  BSPAONB 

dessus  indiquées.  \\ec  la  même  procédure,  elle  élira 
le  suppléant  du  président  et  elle  désignera  le  plus  âgé 
dos  trois  derniers  électeurs  portés  sur  les  dites  listes. 
Dans  les  deux  années  suivantes  la  désignation  du  pré- 
sident se  fera  en  allant  de  la  lettre  M  à  la  lettre  /  et 
celle  du  vice-président,  en  allant  de  Là  A.  S'il  y  avait 
nécessité  de  renouveler  ces  nominations  à  raison  de 
vacances  intervenues  dans  les  deux  ans,  il  y  serait 
procédé  en  suivant  un  ordre  toujours  inverse  de  celui 
observé  la  dernière  lois  ». 

Au  jour  fixé  pour  l'élection,  le  bureau  composé  du 
président  et  des  deux  assesseurs  se  réunit  à  sept  heures 
du  matin  dans  le  local  assigné  pour  le  vote  et  ouvre 
«  les  lettres  de  créance  ordenciaa  talonarias)  des  con- 
trôleurs (interoenlore$) ,  qui  se  présentent  au  nom  des 
candidats. 

Il  est  à  remarquer  que  seuls  les  «  candidats  procla- 
més i)  sont  autorisés  à  désigner  des  «  contrôleurs  » 
pour  les  représenter  au  bureau  électoral. 

Pour  pouvoir  être  proclamé  candidat,  il  faut  en 
avoir  l'ait  la  demande  le  dimanche  avant  celui  lixé  pour 
l'élection  et  réunir  l'une  ou  l'autre  des  conditions  sui- 
vantes : 

-(i  avoir  rempli  la  charge  de  député  aux  Gortès,  à  la 
suite  d'une  élection  de  district  aux  élections  générales 
ou  partielles  ; 

In  avoir  été  proposé  comme  candidat  par  deux  séna- 
teurs ou  anciens  sénateurs,  par  deux  députés  ou  an- 
ciens députés  aux  Gortès  pour  la  même  province,  ou 
par  trois  députés  ou  anciens  députés  d'une  province. 
pourvu  que  loul  ou  partie  du  territoire  dans   lequel 


LE    PAUL i:\iivi  17.'{ 

ils  oui  été  élus   soit  compris  dans   la  circonscription 

électorale  ; 

c)  avoir  été  proposé  comme  candidat  par  la  ving- 
tième partie  du  nombre  total  des  électeurs  dans  la 
commune  avant  que  les  bureaux  n'aient  été  formés  par 
le  président  et  les  deux  assesseurs  (1). 

Le  bureau  constitué,  le  scrutin  est  ouvert  à  partir 
de  buit  beures  du  matin.  Il  est  prolongé  sans  inter- 
ruption jusqu'à  quatre  beures  de  L'après-midi. 

L'article  41  détermine  ainsi  les  conditions  dans  lcs- 
quellcs  il  est  procédé  au  scrutin  : 

«  Le  vote  sera  secret  et  se  fera  en  la  forme  sui- 
vante : 

«  Le  président  annonce  :  «  Le  vote  commence  ». 

«  Les  électeurs  s'approebent  un  à  un  du  bureau  et 
font  connaître  leur  nom.  Après  que  l'examen  a  été 
fait  par  les  assesseurs  et  les  adjoints,  s'il  y  en  a,  des 
listes  électorales  sur  lesquelles  est  inscrit  le  nom  du 
votant,  celui-ci  remet  de  sa  propre  main  au  président 
un  bulletin  blanc  plié  portant  écrit  ou  imprimé  les 
noms  du  ou  des  candidats  auxquels  il  donne  son 
suffrage. 

«  Aussitôt  le  président,  sans  cacber  un  moment  à  la 
vue  du  public  le  bulletin,  dit  à  haute  voix  le  nom  de 
l'électeur  et  ayant  ajouté  «  \.  vole  »  dépose  le  bulle- 
tin dans  une  urne  de  cristal  ou  de  verre  transparent 
préparée  à  celte  lin. 

«  Les  assesseurs,  ou  deux  des  contrôleurs  au  moins, 
émargent   chacun   sur    une  liste   numérotée,  les  élec- 

1     foi  <ln  8  août  190".  article  :<\. 


1"  l  BSPAGN1 

leurs  dans  l'ordre  où  ils  émettent  leur  vote,  en  annon- 
çant le  oùméro  dans  lequel  ils  figurent  sur  la  liste 
électorale. 

I . » 1 1 1  électeur  a  le  droit  d'examiner  -i  son  nom  a 
bien  été  marqué  sur  les  listes  de  votants  que  tient  le 
bureau  ». 

Le  droit  de  voter  appartient  exclusivement  aux 
électeurs  inscrits  sur  la  liste  électorale  dûment  certifiée. 

«  Lorsque,  déclare  l'article  .j->.  ""  doute  surgit  sur 
l'identité  personnelle  d'un  individu  qui  se  présente 
pour  voler,  rémission  de  son  vole  est  suspendue  jus- 
qu'à la  lin  de->  opérations;  à  ce  moment  le  bureau 
statue  sur  la  réclamation  soulevée  ». 

Aucun  électeur  ne  peut  voter  en  une  section  autre 
que  celle  à  laquelle  il  est  appelé  d'après  la  liste  élec- 
torale, a  réserve  faite  des  cas  où  ceux  qui  composent  le 
bureau  électoral    d'une   section  figurent    sur   la  li-ie 

d'une    autre:     auquel    cas    ils    peinent    émettre    leurs 

suffrages  dans  la   section    où    ils  exercent   leurs  Ion 
tions  (i)  ». 

Le  président  du  bureau  a,  dans  le  collège  électoral, 
compétence  exclusive  pour  maintenir  l'ordre,  assurer 
la  liberté  des  élections  et  garantir  l'observation  de  la 

loi.  Les  autorités  publique!  et  leurs  agents  sont  tenus 
de  lui  prêter  main  forte. 

L'entrée    dans     les    collège!    élecloranv    n'appartient 

qu'aux  électeurs  de  la  section,  aux  candidats  proclamés 

par    la     Junte    pi  o\  inciale,  à    leutl  fondés  de   pouvoir, 

Ml  notaires  appelés  a  Elire  quelque  acte  en   rapport 
i     Lui  du  8  soûl   i  m"7.  ;n  ti>  !■■  \>. 


Il       l'\HI  I  Ml  N  I  I  75 

avec  l 'élection  <sl  ne  «'opposant  pas  au  secret  du  vote 
et  aux  personnes  relevant  de  l'autorité  requise  j >.t i  Le 
président. 

Nul  ne  peut  pénétrer  dans  la  salle  du  vote  muni 
dune  aune  quelconque  l  i). 

\  quatre  heures  précises  de  l'après-midi,  le  prési- 
dent annonce  à  haute  voix  que  le  scrutin  va  être  clos 
et  qu'il  ne  laissera  plus  entrer  personne  dans  la  salir 
du  vote. 

Il  demande  si  quelques-uns  des  électeurs  s'\  trou- 
vant auraient  négligé  de  voter,  et  il  admet  leurs  suf- 
frages, qui  doivent  être  immédiatement  déposés.  «  Le 
bureau  statuera  aussitôt  à  la  majorité  au  vu  des  cartes 
personnelles  (oedukts)  et.  d'après  le  témoignage  des 
électeurs  présents  sur  l'admission  au  vote  de  ceux 
contre  l'identité  desquels  une  réclamation  avait  été 
formulée  (a)  ». 

L'article  43  fait  au  bureau  une  obligation  tt  à  peine 
île  faille  »,  de  signaler  à  lin  de  répression  aux  tri- 
bunaux compétents  v  ceux  qui  ont  apparemment 
usurpé  le  nom  d'aulrui  ou  qui  ont  faussement  nie  soi) 
identité  ». 

Les  membres  du  bureau  votent  les  derniers  et 
»ig  uenl  ensemble,  avec  les  assesseurs  et  les  contrôleurs, 
les  listes  des  volants  o  en  marge  de  ebaque  feuille  et 
au-dessous  du  dernier  nom  inscrit  ». 

Ces  opérations  terminées,  le  président  déclare  le 
vote  clos  et  commence  le  dépouillement  du  scrutin. 


(i)    \rlirl.     18. 

l)    \rlirl,>  ',:<,. 


17')  ESPAGNE 

tu  11  se  fait  en  lisant  à  liante  \<>i\  les  bulletins  ex- 
traits de  l'urne  un  à  un,  en  les  dépliant  au  vu  dos 
assesseurs  et  des  contrôleurs  qui  comparent  le  nombre 
-  bulletins  avec  celui  des  votants  marqués  sur  les 
listes.  Los  bulletins  inintelligibles,  ceux  <jui  ne  con- 
tiennent point  de  nom  propre  de  personnes  ou  qui 
portent  plusieurs  noms  entre  lesquels  un  ordre  ne 
peut  être  déterminé,  seront  considérés  comme  bulle- 
tins blancs.  Lorsque  plusieurs  noms  sont  inscrits,  il  est 
tenu  compte  seulement  des  premiers  jusqu'à  ce  que 
soit  atteint  le  nombre  des  candidats  pour  lesquels, 
d'après  l'article  ai,  chaque  électeur  avait  droit  de 
voter;  et  les  derniers  sont  tenus  pour  non  écrits. 

«  Si  quelque  électeur  présent,  notaire,  candidat  pro- 
clamé ou  fondé  de  pouvoirs  conçoit  des  doutes  sur  le 
contenu  d'un  bulletin  lu  par  le  président,  il  pourra 
faire  consigner  au  procès  verbal  une  réclamation  qui 
devra  y  être  accueillie  afin  qu'elle  soit  examinée. 

«...  Si  sur  l'interprétation  d'un  bulletin,  il  n'\  a 
pas  unanimité  du  bureau,  la  décision  est  renvoyée  à  la 
lin  du  dépouillement  et  elle  est  rendue  alors  à  la  ma- 
jorité. 

«  Après  que  les  voles  ont  été  recensés,  tel  que  le  chiffre 
en  résulte  des  opérations  qui  viennent  d'être  indiquées, 
le  président  demandera  m  quelque  protestation  est 
dirigée  contre  le  scrutin  ;  s  il  n'y  en  a  pas,  après  que 
les  résultats  ont  été  arrêtés  par  la  majorité  du  bureau, 
il  annoncera  à  haute  voii  ce  résultat  en  Bpéctfianl 
le  nombre  de  bulletins  dépouillés,  celui  des  votants 
Bl  celui  des  suffrages  obtenus  pai  chaque  candidat. 
Iprèi  quoi,  les   bulletins  extraits  de   l'urne  de- 


LE    PARLEMEN1  1" 

meurent  en  présence  des  candidats,  S  ['exception  de 
ceux  dont  la  validité  a  été  niée,  ou  qui  ont  fail  l'objet 
tle  quelques  réclamations,  lesquels  seront  adjoints  au 

procès-verbal,  marqués  ■  ruhricados)  par  les  assesseurs 
et  les  contrôleurs  et  mis  aux  Archives  pour  être  tenus 
à  la  disposition  du  Congres  ». 

Le  recensement  général  des  voles  a  lieu  le  jeudi  qui 
suit  l'élection. 

II  est  efl'cctué  par  la  Junte  provinciale  de  la  liste 
électorale.  L'opération  a  lieu  publiquement, 

Chacun  des  candidats  proclamés  peul  désigner  par 
un  écril  public,  deux  électeurs  de  la  circonscription 
pour  le  représenter.  Ils  ont  voix  consultative  (vox), 
mais  non  délihérafive    voto  . 

Lorsque  le  recensement  est  terminé  pour  toutes  les 
sections,  un  résumé  général  des  résultats  est  lu  à  haute 
voix  par  le  secrétaire  de  la  Junte  et  le  président  pro- 
clame élus  les  candidats  qui  ont  recueilli  le  plus  grand 
nombre  de  suffrages. 

«  Au  cas  d'égalité  de  suffrages  émis  et  comptés, 
spérilic  le  dernier  paragraphe  de  l'article  5a,  le  prési- 
dent proclamera  comme  présumés  élus  députés  les 
deux  candidats  à  égalité,  la  décision  étant  réservée  au 
Congre 9  o. 

11  esta  remarquer  que    la  loi  espagnole  n'exij 
la  majorité  absolue  ni  même  un  minimum  déterminé 
île  suffrages  pour  la  validité  d'une  élection.  Il  s'ensuit 
qu'il  n'v  a  pas  de  scrutin  de  ballotage.    ajoutons  qu'il 

6St  très  rarement   procédé    en    Espagne    à   des    élections 

partielles,  lesquelles  ne  peuvent  avoir  lieu  qu'en  raison 
d'une  décision  expresse  du  Congrès. 

lï 


I  '  s  BSPAGM 

La  Junte  qui  procède  au  recensement  établi!  an 
procès-verbal  en  double  exemplaire.  De  ces  doux 
exemplaires,  L'un  demeure  déposé  aux  Archives  de  la 

Junte  avec  Le  dossier  électoral  ;   l'autre  est  remis  à  la 
Junte  centrale  de  la  liste  électorale. 

((  Lorsque,  déclare  L'article  53,  dans  un  procès-verbal 
d'élections  aux  Cortès,  se  trouvent  «les  protestations  ou 
réclamations  de  quelque  nature  qu'elles  soient,  la 
Junte  centrale  de  la  liste  électorale,  dès  qu'elle  a  reçu 
les  procès -verbaux  ainsi  chargés  de  réclamations  et  les 
dossiers,  les  fait  remettre  dans  les  a4  heures  au  Tri- 
bunal suprême,  pour  que  celui-ci  avertisse  directement 
Le  Congrès  au  sujet  de  la  validité  et  de  la  Légalité  de 
l'élection  et  aussi  relativement  à  l'aptitude  et  à  la  ca- 
pacité du  candidat  proclamé. 

Les  résolutions  qu'au  sujet  de  ces  dossiers  le  Tri- 
bunal suprême  remettra  au  Congrès,  afin  que  celui-ci 
décide  souverainement  et  définitivement,  seront  néces- 
sairement de  L'un  ou  de  l'autre  des  quatre  types  sui- 
vants  : 

<i  r  Validité  de  l'élection,  aptitude  cl  capacité  du 
candidat  proclamé  : 

«y    Nullité  de  L'élection  intervenue  et  nécessité  d'une 

nouvelle   ((invocation    pour    le    dîstrîcf    OU    la    circons- 

cription 

"  .i"  Nullité  de  la  proclamation  Laite  par  la  Junte  du 
recensement  en  laveur  du  candidal  proclamé  et  de  la 
validité  de  L'élection,  et,  poui  autant,  proclamation 
du  candidat   ou   des  candidats  qui  paraissent  avoir  été 

'i    Nullité  de  l'élection  el  iusp<  osion  temporaire  dl( 


I  i     PARI  i  Ml. vi  I  79 

droit  de  représentation  parlementaire  pour  le  district 
ou  ta  tir  conscription,  quand  le  dossier  <i  L'information 

contiennent  et  révèlent  des  faits  «le  vente  de  votes  en 
forme  e1  en  nombre  d'une  certaine  importance 

L'article  53  ajoute  :  «  Malgré  que  dans  les  | 
verbaux  de  recensement  il  n'y  ait  pas  de  fail  relevé,  de 
protestations  ou  de  réclamations  formulée»,  lOul  can- 
didat écarté  à  une  élection  aux  Cortèa  a  le  droit  de  s'a- 
dresser au  président  du  Tribunal  suprême  en  deman- 
dant (pediendo  la  révision  du  dossier  électoral  pour 
apporter  les  preuves  et  témoignages  établissant  L'illé- 
galité ou  la  nullité  tic  l'élection,  encore  qu'il  n'y  ait 
l>oinl,dans  le  procès-verbal,  de  réclamation  ou  contes- 
tation ». 

La  Chambre  des  Députés  procède  souverainement  à 
la  vérification  des  pouvoirs  de  ses  membre»,  mais,  ainsi 
que  l'établissent  les  textes  précités-,  toutes  les  Ibis 
qu'une  élection  est  contestée,  le  Congrès  ne  peut  sta- 
tuer qu'après  avis  du  Tribunal  suprême.  C'est  la  mé- 
thode que  nous  avons  vue  fonctionner  en  Angleterre 
pour  les  élections  à  la  Chambre  des  Commune» depuis* 
les  lois  de  1868  et  de  1870  combinée». 

L'article  •">,'>  spécifie  que  •<  pour  l'examen  il  la  purge 
[depuracion)  des  procès-verbaux  dénoncé»,  le  Tribunal 
se  composera  du  président  de  chambre  et  de  si.\  ma 
gi»trata  les  plus  anciens  du  Tribunal  suprême  n'étant 
et  n'ayant  été  ni  députés  ;m\  Corte»,  ni  sénateurs 
électifs  ou  candidats  aux  élections  législatives  ou  séna- 
toriales dans   le  cours  de»  quatre  dernière»  ann 

l.e    Tribunal    suprême    ,i     le    droit    de    i.'ilainei.    de 

louiez  le»  Administrations  'le  I  Etat,  îles  Députationa 


1 80  BSPAGNi 

provinciales  el  des  Ayuntamientos  ou  municipalités  tous 
documents  ou  éclaircissements  qu'il  juge  utiles  à  l'ac- 
complissement île  sa  mission.  11  peut  également  faire 
procéder  judiciairement  à  toutes  informations  qu'il' 
estime  nécessaires. 

Pour  siéger  au  Congrès,  il  faut,  aux  termes  de  l'ar- 
ticle 29  de  la  Constitution,  «  être  Espagnol,  laïque,  ma- 
jeur et  jouir  de  tous  les  droits  civils  ». 

11  convient  d'ajouter  :  «  et  ne  se  trouver  dans 
aucun  des  cas  d'incompatibilité  prévus  par  l'article  7 
de  la  loi  électorale  du  8  août  1907.  » 

Ce  texte  déclare  : 

«  Ne  peuvent  être  admis  comme  députés,  bien  qu'ils 
aient  été  valablement  élus  : 

«  Les  entrepreneurs  de  travaux  ou  services  publics 
payés  sur  les  fonds  de  L'Etat,  de  la  province  ou  de  la 
Commune,  el  ceux  qui,  à  raison   (le    tels    contrats,    ont 

des  réclamations  pendantes  contre  l'Administration, 
ainsi  que  leurs  cautions  ou  leurs  associés.  Cette  inca- 
pacité doit  être  entendue  connue  limitée  au  district  ou 
à  la  circonscription  dans  lequel  ou  Laquelle  est  exécuté 
le  travail  ou  service  public. 

«  Ceux  qui  tiennent  on  ont  tenu,  moins  d'un  an 
avant  L'élection,  dans  le  district  ou  la  circonscription 
quelque  emploi,  charge  ou  commission  à  la  nomina- 
tion du  Gouvernement  ou  ont  rempli  une  fonction 
d'ordre  judiciaire  ou  fiscal,  même  à  titre  d'intérim  ou 
de  remplacement,  ou  exercé  nue  autorité  donnée  a 
l'élection,  étant  compris  dans  cette  catégorie  les  pré- 
sidents  des  Députations  provinciales  et  les  délégués 
qui.  depuis  moins  d'un  an,  ont  rempli  la  charge d'é 


I  i     P  Mil  i  MENT  I  SI 

lecteurs  vocales)  pour  les  commissions  provinciales  ou 
encore  les  militaires  faisant  partie  des  commissions 
mi v tes  de  recensement  H  de  remplacement. 

c  Sont  exceptés  tes  ministres  de  la  Couronne  et  les 
fonctionnaires  de  l'Administration  centrale  ». 

Les  incapacités  ci-dessus  spécifiées  sont  limitées 
«  aux  voles  émis  dans  le  district  ou  la  circonscription 
où  le  député  élu  a  été  investi  de  la  fonction  ou  auto- 
rité ». 

Si,  par  l'effet  de  la  déduction  desdits  votes,  ajoute 
la  loi,  l'élu  proclamé  se  trouve  n'avoir  pas  la  majorité, 
l'élection  sera  annulée. 

Enfin,  le  mandat  de  député  est  incompatible  avec 
toutes  fonctions  judiciaires  «  quels  qu'en  soient  le 
grade  et  la  catégorie  ». 

Le  député  qui,  postérieurement  à  son  élection,  so 
trouve  dans  un  des  cas  d'incapacité  ou  d'incompati- 
bilité ci-dessus  visés,  est  obligé  d'abandonner  son 
siège. 

Afin  de  proléger  la  liberté  et  la  sincérité  du  vote, 
la  loi  du  8  avril  [907  contient  toul  un  chapitre  con- 
sacré à  K  la  sanction  pénale  »  des  délits  électoraux. 

L'article  (55  punit  «  des  peines  de  l'arrestation  ma-, 
jeure  »el  d'amendes  de  5ooà  5. 000 pesetas,  (quand  les 

dispositions  générales  du   Code   pénal    n'établiront    pas 

une  sanction  plus  sévère  »,les  fonctionnaires  publics 
qui    contribuent  à  l'une  quelconque  des    actions  ou 

omissions  suivantes  : 

«  i°  A  ce  que  les  listes  d'éleeieiirs.  préparatoires  >>u 
définitives,  ne  soient  pas  formées  avec  exactitude,  ex- 
posées au  public  durant  le  temps  et  dans  les  lieux 


182  1  M  YGNE 

convenables,  montras*  à  qui  le*  réclame  et  tenues 
constamment  à  la  libre  disposition  et  consultation  de 

tous  les  habitants  même  non  électeurs  de  la  commune, 
ou  délivrées  gratuitement  en  extraits  à  eeu\  qui  en 
font  la  demande  : 

u  a"  \  toute  modification,  soit  des  jours,  heures  et 
lieux  où  doit  l'effectuer  quelque  opération  électorale, 
de  caractère  préparatoire  ou  direct,  soit  des  modes, 
Formes  et  termes  de  la  désignation  capable  d'induire 
en  erreur  1rs  électeurs. 

«  3°  A  des  manoeuvres  frauduleuses  dans  les  opérations 
concernant  la  Formation  de  la  liste  électorale,  la  cons- 
titution des  juntes  et  des  collèges  électoraux  de  Nota- 
tion, les  délibérations  ou  les  recensement!  et  la  propo- 
sition des  candidats. 

i  AndéFaul  d'exactitude  des  mentions  dues  et  à  la 
non  tenue   régulière   des   procès  \erliaux  et  documenls 

électoraux  ; 

n  .")  \u  changement  el  à  l'altération  du  bulletin 
de  vote  remis  par  l'électeur  pour  exercer  son  suffrage, 
•  m  i  la  non-<'\|iosilion  à  la  VUfi  du  public  des  bulle- 
tins avant  de  les  déposer  dans  ruine  ; 

\ux  entraves  ou  difficultés  opposées  au*  électeurs, 

candidats  ou  notaires  «pu  doivent  examiner  les  noms 
ivant   le  commencement  du  scrutin  ou  les  bulletins 

pendant   le  dépouillement  ; 

(■  -  \  l'omission  volontaire  ou  à  l'émargement 
inexact  aui    lins   d'obscurcir  ou    d'altérer    le   chiffre 

■  va.  I  des  VOtantl    dans  opjehpie  |  >roeès-\  erhal . 

-c  s  \n  recensement  inexact- dei  votes  sc  rappor- 
tant   a    la    formation   ou    à    la    nolilication    de    la    liste 


I  I       P  Mil  I   Ml  \  1 


18* 


électorale  ou  au\  opérations  électorales  et  à  la  lecture 
pareillement  inexacte  des  bulletin!  ; 

i  «i  A  la  violation  du  secrei  du  vote  et  de  l'élection, 
afin  d'influer  sur  le  résultat  ; 

«  10  A  une  proclamation  indue  de  personne  ; 

«  ii"  A  toute  fausseté  îles  déclarations  à  faire  dans 
un  procès- ver  bal,  ou  encore  à  toute  action  ou  omis- 
sion pour  empêcher  ou  gêner  la  connaissance  exacte 
de  la  vérité  électorale  ; 

a  \ï  A  la  suspension  sans  cause  grave  ou  suffisante 

d'une  opération  électorale  quelconque  ». 

Les  mêmes  délits  sont  punis  du  minimum  de  la  peine 
de  l'arrestation  majeure  quand  ils  ont  été  commis 
par  de  simples  particuliers, 

«  Tous  actes,  »  déclare  l'article  G",  «  toutes  omissions 
ou  manifestations  qui  auront  pour  objet,  soit  d'exercer 
une  pression  sur  les  électeurs  afin  qu'ils  n'usent  pas 
de  leurs  droits,  soit  de  peser  sur  leur  volonté  afin  qu'ils 
volent  ou  ne  votent  pas  pour  des  candidatures  déter- 
minées, constitueront  le  délit  de  pression  électorale, 
et  s'ils  ne  sont  pas  prévus  et  réprimés  plus  sévèrement 
au  (-ode  pénal  seront  punis  d'une  amende  de  ia5  à 
2    ioo  pesetas  ». 

La  loi  vise  expressément  une  série  de  circonstances 
spéciales  dans  lesquelles  elle  relève  le  délit  de  pression 
électorale. 

«  Commettent  le  délit  île  pression  électorale  »  déclare 
l'article  68,  «  bien  qu'il  n'y  ail  point  preuve  et  apparence 
de  leur  intention  de  contraindre  ou  d'influencer  les 
électeurs  et  encourent  les  sanctions  de  l'article  précé- 
dent : 


I  v  I  BSP  m. M 

(i  i°  Les  autorités  civiles,  militaires  ou  ecclésiasti- 
ques qui  prescrivent  ou  recommandent  aux  électeurs 
de  ne  point  donner  leur  vole  à  une  personne  déter- 
minée, et  ceux  qui,  taisant  usage  de  moyens  ou 
d'agents  officiels  ou  se  servant  de  timbres,  cachets  ou 
enveloppes  qui  peuvent  avoir  ce  caractère  officiel,  re- 
commandent ou  réprouvent  des  candidatures  déter- 
minées ; 

«  2°  Les  fonctionnaires  publics  qui  poussent  ou  sui- 
vent des  dossiers  administratifs  de  dénonciations, 
amendes,  relevés  de  compte,  depuis  Le  décret  de  con- 
vocation jusqu'à  L'achèvement  de  l'élection. 

■  Les  fonctionnaires,  y  compris  les  Ministres  de  la 
Couronne,  qui  font  des  nominations,  révocations,  mu- 
tations ou  suspensions  de  fonctionnaires,  employés  ou 
agents  de  quelque  branche  de  l'Administration  ou  du 
ressort  de  l'Etat,  de  la  province  ou  de  la  commune 
dans  la  période  qui  s'écoule  du  décret  de  convocation 
à  l'achèvement  du  recensement  général,  si  de  tels  actes 
n'ont  pas  de  cause  légitime  et  affectent  en  une  ma- 
nière quelconque  la  section,  le  collège,  Le  district,  la 
circonscription  judiciaire,  la  province  où  se  fait  L'é- 
lection. 

I.i  cause  de  La  révocation,  mutation  ou  suspension 
devra  être  imprimée  d'une  manière  précise  dans  L'ar- 
rêté qui  sera  publié  par  la  Gacela  de  Madrid  s'il  émane 
île  l'Administration  centrale  et  par  le  Boletin  oficial 
de  la  prou inee  intéressée  s'il  émane  d'une  autorité  pro 
vinciale  ou  municipale.  V  défaut  de  ces  formalités,  la 
mesure  serait  i  onsidérée  comme  dépourvue  de  eau  si- 

Le  texte  dispense  des  exigences  qui  viennent  d'être 


LE    PARLEMENT  185 

spécifiées  les  décréta  royaux  el  les  ordres  des  Gouvei 
neurs  i  i\ils  des  provinces  ou  des  chefs  militaires,  mais 
il  ajoute  :  «  Les  révocations,  mutations  ou  suspensions 
prononcées  et  non  notifiées  aux  intéressés  avant  la 
période  électorale  ne  pourront  sortir  effet  durant  la 
dite  période  sauf  les  cas  ou  les  formes  exceptionnelles 
indiqués  en  cet  article  ». 

Des  sanctions  sévères  sont  également  édictées  par 
l'article  70  contre  <<  les  fonctionnaires  publics  qui  éloi- 
gneront un  électeur  de  son  domicile  ou  de  sa  résidence 
ou  cpii  le  feront  demeurer  hors  de  l'un  ou  de  l'autre, 
même  pour  un  motif  tiré  d'un  service  public,  le  jour 
de  l'élection  ou  un  jour  auquel  pourra  ou  devra  être 
effectuée  une  opération  électorale  ». 

Après  avoir  réprimé  la  pression  électorale,  la  loi 
édicté  la  même  amende  de  125  à  '.>.  5oo  pesetas  contre 
tous  faits  de  corruption  électorale. 

Encourent  pareillement  les  peines  portées  à  l'ar- 
ticle 07  i),  déclare  l'article  69,  «  à  défaut  d'autres  sanc- 
tions pins  graves  d'après  le  Code  pénal  : 

u  Ceux  qui  au  moyen  de  promesses,  dons  ou  rému- 
nérations sollicitent  directement  ou  indirectement  en 
faveur  de  ou  à  l'cncontre  de  quelque  candidat  les  suf- 
frages d'un  électeur; 

Ceux  qui  poussent  les  électeurs  à  l'ivresse  pour  obte- 
nir el  s'assurer  leurs  voix...  ». 

NOUS    avons    vu    déjà,    à    propos    du    rôle    dévolu  au 

Tribunal  suprême,  en  ce  qui  concerne  l'examen  îles 
dossiers  d'élections,  que  celte  haute  juridiction   peut 

i)  V,  notre  Tome  I,   >'  édition,  p.  7")  et  suiv, 


186  BSPAGNU 

proposer  au  Congrès  <1<'  retirer  temporairement  à  une 
circonscription  le  droit  d'élire  des  représentants  s'il 
résulte  «I»'  l'information  la  preuve  d'un  trafic  patent 
de  suffrages.  .Nous  retrouvons  à  cel  égard  dans  la  légis- 
lation électorale  espagnole  une  disposition  que  nous 
.imiiis  rencontrée  en  Angleterre(i  . 

L'article  ~'\  pose  ce  principe  général  : 

«  Tous  les  délits  électoraux  dont  il  est  question  dans 
la  présente  loi  emportent  comme  peines  communes, 
Qu'elle  les  ;iil  prévuf  OU  qu'ils  aient  été  prévus  par  une 
autre  loi,  une  privation  spéciale  temporaire  ou  perpé- 
tuelle du  droit  de  vote,  si  le  coupable  a  le  caractère  de 
fonctionnaire  public  et,  s'il  est  un  simple  particulier, 

une  suspension  du  même  droit. 

\  h  cas  de  récidive    pour    l'un    des   délits   de   cette 

naturel  L'incapacité  sera  perpétuelle  pour  les  fonction- 
naires  publics  et  absolue,  mais  temporaire,  pour  les 

simples  particuliers,  ensemble  avec  les  autres  peines 
correspondantes.  „ 

L'article  Ko  spécifie  cpi'il  n'y  aura  pas  d'autorisation 
préalable   nécessaire  pour  la  poursuite  des  fonction' 

naires. 

«  Les  causes  dans  lesquelles  une  sentence  définitive 
mei  hors  de  cause  (se  exima)  la  responsabilité  d'un 
fonctionnaire  pour  raison  d'obéissance  obligatoire  se- 
ront renvoyées  sans  délai  au  tribunal  compétent  poui 
qu'il  sotl  procédé  contre  celui  qui  a  donné'  l'ordre 
d'obéir.  \u  lieu  que  la  prescription  établie  par  l'article 
précédent  coure,  elle  sera  suspendue  eu  égard  à  l'aulo- 

i    \ .  Institution  a  politiques  de  l'Europe  oomtemporaine, 
tome  l     i    édition,  \ ngleterre,  \<    ",'•> 


LE    PARLEMJ  M  !  87 

rite  ou  à  la  personne  obéie,  du  jour  où  la  procédure 
aura  commencé  jusqu'à  celui  où  le  tribunal  compétent 
aura  rendu  la  sentence  définitive  exonérant  de  res- 
ponsabilité celui  qui  a  obéi.  Lorsque  l'autorité  qui  a 
donné  l'ordre  sera  un  Ministre  de  la  Couronne,  ou 
bien  lorsque,  d'une  manière  quelconque,  la  responsa- 
bilité de  celui-ci  paraîtra  engageai  le  tribunal  chargé 
de  l'affaire  remettra  celle-ci  sans  délai  au  Congrès  des 

députés,  i) 

Le  législateur  est  entré  dans  les  détails  les  plus 
minutieux  pour  prévoir  toutes  les  circonstances  des- 
quelles pourront  naitre  les  délits  électoraux  parce  que 
nulle  part  la  fraude  électorale  ne  s'est  produite  avec 
plus  de  cynisme  qu'en  Espagne. 

«  En  Espagne,  a  écrit  l'iguerosa  y  Torrès,  certaines 
personnes  croient  bien  aux  miracles,  aux  apparitions 
de  saiiils.  Aucune  ne  croit  à  la  sincérité  des  élec- 
tions  i)  (  i). 

Et  Caslelar  disait  dans  une    heure  d'amer  découra- 

gemenl  : 

«  Chaque  élection  est  un  malheur,  chaque  réunion 
électorale    un    marché,    chaque    électeur     un    esclave, 

chaque  ministre  un  sultan,  chaque  candidat  un  fomen- 

leui  de  l'immoralité  publique,  et  chaque  procès-verbal 
d'élection  un  modèle  d'ignominie.  » 

La  législation  électorale  nouvelle  a  t-elle  mis  fin  à 
des  fraudes  électorales  éhontées?  Il  serait  téméraire  de 
l'affirmer. 

La  candidature  officielle  s'esl   tellement   acclimatée 

i  i  Et  regimen  partamentaria,  Madrid,  (886. 


188  BSPAGNl 

en  Espagne  qu'elle  semble  y  faire  partie  des  institutions 
nationales,  e1  l*achal  des  suffrages,  dont  les  gouverne- 
ments successifs  ont  donne'  l'exemple,  vicie  tous  les 
scrutins.  En  dépit  des  multiples  garanties  édictées  pour 
assurer  la  sincérité  des  opérations  électorales,  c'est 
sans  scrupules  qu'on  fait  voter  les  absents  et  les  morts, 
que  les  paquets  de  bulletins  tombent  dans  l'urne  par 
un  accord  tacite  des  membres  du  bureau,  que  les 
bandes  d'électeurs  ambulants  s'en  vont,  sous  différents 
déguisements,  de  section  en  section  déposer  des  bulle- 
tins reçus  avec  une  impudente  complaisance,  que  les 
procès-verbaux  d'élection  laissent  en  blanc  les  chiffres 
des  suffrages  pour  être  remplis  au  gré  du  Gouverne- 
ment, 

Le  grand  maître  des  élections  en  Espagne,  c'est  tou- 
jours le  caciquisme. 

En  vain,  M.  Moret,  Ministre  de  l'Intérieur,  le  flé- 
trissait dans  une  circulaire  retentissante  comme  «  l'en- 
nemi mortel,  contre  lequel  tous  protestent,  dont  on 
ne  peu!  parler  dans  la  vie  publique  pour  le  combattre 
-ans  provoquer  de  bruyants  applaudissements,  ni  dans 
la  vie  privée  sans  émouvoii  Bes  auditeurs  »  ;  le  cacique 
et  ses  coadjuteurs  du  village,  les  tiranos  chicos  con- 
tinuent à  exercer  frauduleusement  leur  industrie.  An 
cacique  el  b  ses  sous-ordres  tous  les  privilèges,  toutes 
les  faveurs  et,  en  échange,  la  majorité  au  Gouverne- 
ment, quelqu'il  soit.  Le  <■  cacicato  •>  a  écrit  Salillas 
est  notre  véritable  constitution  politique 

Et  c'esl  ainsi  que  tous  les  efforts  de  moralisation 
lative  viennent  se  briser  contre  un  «  véritable  étal 
pathologique  »>, 


Il     PARLBMENl  I8U 

Jamais  ne  se  *'>nt  aussi  complètemenl  vérifiés  qu'en 
Espagne  les  vers  célèbres  : 

«  Qaid  leges  sine  moribus 
l  ana  projiciunl  '.' 


ATTRIBUTIONS    DES    CORTÈS 

Lu  procédure  et  le  travail  parlementaires 

\n\  termes  de  l'article  lia  de  la  Constitution,  les 
Gortès  doivent  se  réunir  tous  les  ans.  Le  Roi  a  le  droit 
de  les  convoquer,  de  les  proroger  et  de  clore  leurs  ses- 
sions.  L'ouverture  et  la  clôture  des  sessions  sont  laites, 
soit  par  le  Souverain  en  personne,  soit  par  les  Ministres 
qu'il  délègue  spécialement  à  cet  effet. 

Les  deux  assemblées  ont  chacune  leur  Palais  dis 
tinct.  Le  Sénat  occupe,  non  loin  du  Palais-Royal,  un 
ancien  couvent  d'Auguslins.  Le  bâtiment  est  de  mé- 
diocre apparence,  mais  l'intérieur  est  riche  et  conl'or- 
tablement  aménagé.  La  salle  des  séances,  ohlongue, 
rappelle  la  disposition  matérielle  des  Chambres  an- 
glaises. 

Le  Congrès  (Chambre  des  Députés  est  installé  dans 
le  quartier  du  Prado,  sur  la  place  des  Cortès.  Extérieu- 
rement, le  Palais  législatif  espagnol  présente  L'aspect 
de  nos  Palais  de  justice.  La  salle  des  séances  est  carrée; 
l'un  des  côtés  est  occupé  par  le  bureau  du  président  el 
des  secrétaires  qui  L'assistenl  ;  en  lai  e,  s'étagent  en 
gradins  les  sièges  des  députés. 

Les    Minisires    -.ont    assis    an       bine    bien   i),  du  côté 

droit  du  fauteuil  présidentiel.  Leurs  partisans  prennent 


190  i  -i  \..m 

place  derrière  cm.  11  n'\   a  pas  de  tribune  pour  Les 
orateurs. 

La  Chambre  des  Députés  siège  tous  les  jours,  sauf 
les  jouis  fériés.  Les  séances  du  Sénat  sont  moins  fré- 
quentes. 

Le  public  esl  admis  à  assister  aux  débats  parlemen- 
taires, qui  sont  généralement  très  suivis. 

Les  joutes  oratoires  brillantes  qui  se  Livrent  dans 
l'enceinte  du  Parlement  passionnent  la  société  madri- 
lène. Quotidiennement,  une  longue  lile  d'auditeurs 
assiège  Les  Cortès  en  attendant  l'ouverture  des  portes. 

Chacune  des  assemblées  est  maîtresse  de  son  règle- 
ment intérieur. 

La  Chambre  des  Députés  élit  son  bureau,  composé 
d'un  président,  de  '\  vice-présidents  et  de  h  secrétaires. 

Au  Sénat,  les  'i  secrétaires  seuls  sont  nommés  par 
la  Haute  assemblée.  Le  président  et  les  2  vice-présidents 
sont  désignés  par  le  Souverain. 

Dans  la  première  session  de  chaque  législature,  les 
sénateurs  et  les  députés  élus  se  réunissent,  la  veille  de 
l'ouverture  des  Cortès,  dans  leurs  Chambras  respec- 
tives. 

L'Assemblée  est  présidée  par  le  doyen  d'âge,  assisté 

de  secrétaires  d'hgB.  C'est  la  séance  préparatoire,  OÙ 
l'on  prend    coinmiinicalion  «le  la    liste   de-   ètUS    et   où 

l'on  désigne  les  Commissaires  qui  auront  mission  de 
recevoir  et  d'accompagner  le  Roi  et  les  membres  de  la 
famille  ravale  dans  le  palais  désigné  pour  la  séance 
solennelle  d'ouverture  des  Cortès,  A  cette  -èanec,  les 
Sénateurs  et  Députés  doivent  assister  en  uniforme  ou 
eu  h.iiiif  noir.  Le  lendemain  de  l'oavertnredeeCort 


m     PABLBMEN1  l'.M 

tes  Chambres  prennent  les  mesures  nécessaire!  pour 
procéder  <•  là  vérification  des  procès  -verbaux  d'élection . 

Le  travail  de  vérification  est  confié  à  'les  Commis- 
sions, composées  chacune  de  i5  membres,  désignés 
parmi  les  élus  dont  les  procès-verbaux  de  nomination 
ne  contiennent  ni  contestation  ni  réclamation  \lin 
d'assurer  la  représentation  des  minorités,  chaque 
membre  de  L'Assemblée  ne  peut  inscrire  sur  son  bulle- 
tin de  vote  que  5  noms. 

La  Commission  répartit  les  procès-\erliaux  d'élec- 
tion dont  elle  est  saisie  en  trois  classes. 

La  première  comprend  ceux  qui  ne  portent  ni  pro- 
testation ni  réclamation;  la  deuxième  ceux  qui  oll'renl 
seulement  quelques  légers  motifs  de  discussion)  et  la 
troisième  ceux  qui  impliquent  îles  difficultés  plus 
graves.  Ces  derniers  sont  réservés,  Il  n'est  procédé  à  la 
validation  ou  à  l'invalidation  des  élus  dont  l'élection 
est  contestée  (pie  sur  l'avis  du  Tribunal  Suprême, 
dans  les  conditions  que  nous  avons  précédemment 
exposées. 

Après  l'examen  des  dossiers  et  procès  verbaux  d'élec- 
tion de  la  première  et  de  la  deuxième  catégorie,  si  la 
moitié  plus  un  des  élus  a  été  admise,  l'Assemble, 
déclare  constituée  et  elle  nomme  son  bureau.  L'élection 
a  lieu  à  la  majorité  absolue  an  premier  tour  de  scru- 
tin, à  la  majorité  relative  au  second  tour. 

Il  esi  à  remarquer  que,  pour  l'élection  des  quatre 
secrétaires)  deux  noms  seulement  doivent  être  inscrits 
sur  les  bulletins  de  vole. 

tassitol  après  la  nomination  du  bureau,  le  président 
provisoire   reçoit   le  sermenl  du  nouveau   président- 


192  m;m: 

après  quoi,  celui-ci,  prenant    place  à  son   siège,  reçoit 
le  sermènl  des  autres  membres  de  l'Assemblée. 

L'un  des  secrétaires  nouvellement  élus  donne  lec- 
ture de  la  formule  du  serment  : 

..  Jurez-vous  ou  Promettez-vous  de  respecter  ei  faire 
respecter  la  constitution  de  la  monarchie  espagnole  '.J 

«  Jurez-vous  ou  Promettez-vous  fidélité  et  obéissance 
au  roi  légitime  des  hspagnes  don  Alphonse  Mil? 

«  Jurez-vous  ou  Promettez-vous  de  vous  conduire  fidè- 
lement dans  la  mission  ijue  la  Nation  vous  a  confiée  et  de 
chercher  en  tout  le  bien  de  la  Nation  ?  » 

l.i ts  sénateurs  ou  députés  approchent  deux  par  deux 
à  la  droite  du  président,  qui  reste  assis. 

Ceux  qui  étendent  la  main  sur  le  livre  des  Evan- 
giles se  mettent  à  genoux  et  répondent  :  «  Oui,  je  le 
jure.  .)  Les  autres  restent  deliout,  la  main  sur  la  poi- 
trine, et  répondent  :  a  Oui,  je  le  promets  sur  mon  hon- 
neur. »  Le  président  déclare  :  >■  Si  vous  agissez  ainsi, 
cpie  Dieu  vous  récompense,  ou  sinon  qu'il  vous  en  de- 
mande compte.  » 

Durant  la  prestation  de  serment,  tous  les  membres 
de  l'Assemblée  restent  debout,  ainsi  (pie  les  assistants 
dans  les  tribunes. 

Ii  procédure  parlementaire  en  Espagne  diffère  peu 
de  celle  qui  est  en  usage  chez  noua 

Comme  les    assemblées  Françaises,  les  Cortès  sont 

réparties  par  la  voie  du  sort,  chai  pic  mois,  en  bureaux 

i  h  mis.  Chaque  section  élit  un  président,  un  rice 

président,  un  secrétaire  et  un   vice-secrétaire.  Ce  s, .ni 

lions  qui  désignent  les  membres  appelés  à  siégei 

dans  les  Commissions  auxquelles  incombe  le  soin  d'exa> 


LE    PARLEMENT  I  93 

miner  les  projets  de  loi  déposés  par  le  Gouvernement 
et  les  propositions  de  loi  émanant  de  l'initiative  par- 
lementaire 

En  dehors  des  Commissions  spéciales  qu'elles  choisis- 
sent en  vue  de  l'étude  de  questions  déterminées,  les 
Cortès  comptent  un  certain  nombre  de  Commissions 
avant  un  caractère  permanent. 

Nous  citerons  notamment  : 

La  Commission  «  des  budgets  généraux  d'Etat  », 
considérée  comme  la  plus  importante  et  formée  au 
début  de  chaque  session.  Elle  est  composée,  au  Sénat, 
de  21  membres,  à  raison  de  trois  par  section,  et  à  la 
Chambre  des  Députés  de  35  membres,  à  raison  de  5 
par  section. 

La  Commission  des  grâces  et  pensions,  composée  de 
7  membres. 

La  Commission  du  règlement,  composée  de  7 
membres. 

La  Commission  du  Gouvernement  intérieur,  com- 
posée d'autant  de  membres  qu'il  y  a  de  sections  et  à 
laquelle  viennent  s'adjoindre,  dans  chaque  Assemblée, 
le  président  et  le  premier  secrétaire. 

La  Commission  de  révision  des  comptes  rendus,  où 
siègent  l'un  des  secrétaires  et  deux  membres  de  l'As- 
semblée nommés  par  les  délégués  des  sections. 

Il  est  nommé  chaque  mois,  au  Sénat  et  à  la  Chambre 
ilc>  députés,  une  Commission  des  pétitions. 

Les  projets  de  loi  déposés  par  le  Gouvernement  sont, 
de  plein  droit,  soumis  à  l'examen  des  Sections  et  ren- 
voyés par  celles-ci  à  l'étude  d'une  Commission. 

Les  propositions  de  loiȎmanant  de  l'initiative  par- 

13 


194  BSPAGN1 

lemen  taire  ne  sont  renvoyées  à  l'étude  d'une  Commis- 
sion qu'après  que  les  Sections  en  ont  autorise  «  la 
lecture  .In  des  auteurs  de  la  proposition  de  loi  en 
expose  oralement  et  sommairement  les  motifs  et  la 
Chambre  statue  sur  la  prise  en  considération;  si  la 
proposition  de  loi  est  prise  en  considération,  elle  est 
ensuite  l'objet  de  la  même  procédure  que  les  projets  de 
lois  déposés  par  le  (  îouvernement  ou  que  les  textes  avant 
déjà  reçu  l'approbation  d'une  des  deux  Assemblées.  Les 
sections  nomment  une  Commission  qui  aura  à  pré- 
senter son  rapport.  Il  est  à  remarquer  que  tous  les 
membres  île  l'Assemblée,  indistinctement,  peuvent 
assister  aux  séances  des  Commissions,  niais  sans  a\oir 
le  droit  de  prendre  part  au  vole. 

Lorsqu'une  Commission  a  terminé  l'étude  dont  elle 
était  chargée,  elle  fait  connaître  le  résultat  de  ses  tra- 
vaux au  président.  Celui-ci  lixc  la  date  à  laquelle  les 
conclusions  de  la  Commission  viendront  en  délibéra- 
tion publique. 

Les  rapports  concernant  les  affaires  importantes 
sont  imprimés  et  distribués.  Pour  les  questions  d'ordre 
secondaire,  le^  rapporteurs  se  contentent  d'exposer 
verbalement  les  conclusions  îles  Commissions.  La  dis- 
cussion s'engage  aussitôt. 

Pour  les  projets  «  de  grande  étendue  et  importance  », 
la  discussion  .1  lieu,  d'abord  sur  l'ensemble,  puis  sur 
\>-  .h  1 K  1rs  ou  paragraphes. 

La  discussion  générale  porte  «  sur  le  principe, 
l'espril  '•!  l'opportunité  du  projet  ». 

La  clôture  d'une  discussion  ne  peut  rire  prononcée 
qu'après  l'audition  de  trois  membres ayanl  parlé  contre 


ii:    V  Mil  B.M1  \  i 


195 


et  de  trois  membres  ayanl   parlé   pour  le  projet  en 

délibération,  a  moins  que  les  orateurs  inscrits  n'aient 
volontairement  renoncé  à  la  parole. 

Aucun  amendement  ne  peut  être  apporté  au  texte 
proposé  par  une  Commission  s'il  n'a  été  présenté  avant 
le  débat  en  séance  publique,  A  la  Chambre  des  députés, 
BUCUO  amendement  ne  peut  être  mis  eu  discussion  -  il 
ti'esl  signé  par  sept  députés  au  moins. 

Après  qu'il  a  été  donné  lecture  des  amendements, 
ils  sont  renvoyés  pour  avis  à  la  Commission  compétente. 
Ils  reviennent  en  délibération  avec  le  texte  auquel  ils 
se  réfèrent  et,  s'ils  sont  pris  en  considération,  ils  sont 
soumis  au  vote  de  l'Assemblée  avant  la  rédaction  de 
la  Commission. 

Les  votes  ont  lieu,  soit  par  assis  et  levé,  soit  par 
appel  nominal,  soit  par  bulletins,  soit  par  boules. 

Le  vote  par  assis  et  levé  est  le  plus  habituel.  Les 
résultats  sont  annoncés  par  un  Secrétaire.  S'il  y  a 
doute  ou  contestation,  le  Président  désigne  deux  des 
membres  de  l'Assemblée  ayant  voté  pour  et  deux  des 
membres   de   l'Assemblée    avant    volé    contre    pour 

Compter  les  VOtes.  Nul  ne  peut  entrer  dans  la  salle  des 
séances  ni  en  sortir  pendant  que  sont  comptés  les 
votants  :  s'il  y  a  encore  doute  ou  contestation,  ou  si  la 
majorité  ne  dépasse  pas  le  chiffre  de  trois  voix,  il  est 
procédé  au  scrutin  par  appel  nominal.  Les  membres 
de  l'Assemblée  sont  appelés  suivant  l'ordre  dans 
lequel  ils  sont  assis  et  ils  doivent  répondre  oui  ou 
non. 

Le  vote  par  bulletins  est  employé  toutes  le*  lois  qu'il 
s'agit  d'élections.  Les  sénateurs  ou  députés  rotent   à 


196  i  sp  igsn 

leur  place  et  les  huissiers  recueillent  leurs  bulletins 
dans  des  urnes, 

Enfin,  le  scrutin  par  boules  ou  scrutin  secret  a  lieu 
lorsqu'il  s'agit  d'ordonner  des  enquêtes  mettant  en 
cause  des  personnes  et  toutes  les  fois  que  ce  mode  de 
votation  est  réclamé  pour  les  deux  tiers  de  l'Assemblée. 
Chaque  membre,  à  l'appel  de  son  nom,  reçoit  du  pré- 
sident une  boule  blanche,  signifiant  oui,  et  une  boule 
noire  signifiant  non.  11  dépose  Tune  des  boules  dans 
l'urne  destinée  à  recueillir  les  voles  et  l'autre  boule 
dans  une  urne  de  contrôle. 

Le  Président  el  les  Secrétaires  font  le  compte  des 
boules  et  l'un  des  Secrétaires  proclame  le  résultat  du  vole. 

Les  résolutions  sont  prises  à  la  pluralité  des  voix  ; 
mais,  pour  que  le  vole  d'une  loi  soit  valable,  il  faut 
qu'elle  ait  été  adoptée  par  la  moitié  plus  un  du  nombre 
total  des  membres  dans  chaque  Assemblée. 

Les  lois  sur  les  contributions  et  le  crédit  public 
doivent  toujours  êlre  soumises  en  premier  lieu  à  la 
Chambre  des  députés. 

L'année  financière   en   Espagne,   commence   le    i0' 

juillet.  Le  budget  doit  être  voté   avant    cette    dale.     Kn 

cas  de  désaccord  entre  les  deux  Assemblées,  l'opinion 
de  la  Chambres  des  Députés  est  prépondérante.  S'il 
arrive  que,  pour  nue  raison  quelconque,  le  budget  ne 
puisse  être  voté  en  temps  utile,  1rs  dépenses  el  recettes 
prévus  pour  le  précédent  exercice  restent  applicables. 
\  l'exception  des  lois  de  finances,  tous  autres  projets 

de  l"i  peuvent  être  indifférei ent portés  devant  l'une 

ou  l'autre  assemblée;    leurs  pouvoirs  sont  égaux.  Les 
projets  adoptés  par  nue  des  Chambres  sont  transmis  à 


LE    PARLEMENT  I'.»" 

l'autre  par  an  message  du  Président,  contresigné  de 
deux  Secrétaires.  Au  cas  de  conllit  d'opinion  entre  les 
deux  Assemblées,  les  Cortès  ont  la  Faculté  de  nommer 
une  commission  interparlementaire,  composée  d'un 
nombre  égal  de  députés  el  île  sénateurs  pour  îccliercher 
la  solution  transactionnelle  dénature  à  rétablir  l'accord 
entre  les  deux  Assemblées. 

Si  l'une  des  Chambres  repousse  un  texte  de  loi, 
comme  dans  le  cas  où  le  Souverain  refuse  sa  sanction 
aux  dispositions  législatives  votées  par  les  deux  Assem- 
blées, ce  texte  ne  peu!  plus  être  mis  en  délibération 
au  cours  de  la  même  session. 

I  ne  procédure  parlementaire  spéciale  a  été  inau- 
gurée par  les  Chambres  espagnoles  en  ce  qui  concerne 
la  confection  des  Codes. 

Les  Cortès  fixent,  par  une  discussion  générale,  les 
principes  essentiels  de  la  loi,  puis  s'en  remettent  au 
Gouvernement  du  soin  de  traduire  leurs  résolutions  en 
textes  législatifs. 

Ces  textes  sont  promulgués  provisoirement,  sous  la 
réserve  que  le  Parlement  aura  le  droit,  dans  un  dé-lai 
déterminé,  de  réclamer  «les  modifications.  Le  délai 
expiré,  la  loi  est  définitive. 

Mais,  tous  les  ans,  les  présidents  du  Tribunal  Su- 
prême el  des  A  udienciaSy  ou  Cours i  d'Appel  adressent  au 
Ministre  de  la  Justice  un  rapport  détaillé  sur  les  diffi- 
cultés que  leur  révèle  la  pratique  judiciaire.  Ce-  rap- 
ports sont  transmis  à  une  Commission  générale  de 
codification  qui,  tous  les  dix  ans,  de  concert  avec  le 
Tribunal  Suprême,  présente  un  projet  de  réformes  i 
introduire  dans  [es  Codes  du  royaume. 


198  l  BPAGNl 

Grâce  à  cette  procédure  ingénieuse,  ceux-ci  sont 
maintenus  en  harmonie  avec  les  transformations 
économiques  ou  sccialcs  qui  se  manifestent  dans  le 
pays.  La  législation  ne  vieillit  pas.  Elle  évolue  et  n'est 
un  obstacle  à  aucun  progrès. 

Sénateurs  et  députés  ont  également  le  droit  de 
questionner  et  d'interpeller  les  ministres  et  de  déposer, 
à  la  suite  des  réponses  laites  par  le  Gouvernement,  des 
ordres  du  jour  motivés. 

Les  Chambres  répondent  par  une  Adresse  au  discum-» 
du  trône  et  peuvent  communiquer  avec  le  Souverain 
au  moyen  de  Messages. 

Les  termes  à  insérer  dans  les  Adresses  et  Messages 
sont  discutés  en  séances  de  Commissions  et  en  séances 
publiques  des  Cortex. 

Enfin,  la  Chambre  des  députés  a  le  droit  de  mettre 
les  Ministres  en  accusation. 

Les  articles  aoo  et  suivants  du  règlement  du  Congrès 
ont  réglé  les  formes  de  la  mise  en  accusation. 

La  proposition  de  mise  en  accusation  est  renvoyée 
aux  Sections,  lesquelles  nomment  une  Commission  pour 
f examiner.  Celle-ci  présente  son  rapport. 

Si  le  Congrès,  au  moyen  du  scrutin  par  boules, 
décide  qu'il  \  a  lieu  de  donner  suite  à  l'accusation,  il 
est  procédé  dans  les  Sections  à  l'élection  d'une  Com- 
mission «le  sept  membres,  chargée  de  soutenir  l'aceu- 
i  ition  devant  le  Sénat. 

Pour  statuei  sur  la  proposition  d'accusation,  le 
même  nombre  de  députés  présents  est    nécessaire  que 

BOUI    le  <JOte  des  lois. 

La  'li^'  lésion  est  publique. 


LE    PARLEMENT  199 

0  Si  les  personnes  dont  la  responsabilité  est  mise  en 
cause,  spécifie  l'article  2i3,  prétendent  présenter  leur 
défense,  elles  le  pourront  et  occuperont  la  place  (pil- 
leur assignera  le  président  à  cotte  fin,  si  elles  ne  sont 
pas  membres  du  Congrès  ».  El  l'article  y<>  ajoute  : 
«  Les  intéressés  sont,  en  tous  cas.  sous  la  sauvegarde 
du  Congrès  ». 

Lorsque  le  Sénat  statue  comme  Haute  Cour  de  Justice 
tous  les  sénateurs  laïques  doivent  être  présents.  Au- 
cun sénateur  ne  peut  prendre  part  au  vote  sur  la 
culpabilité  s'il  n'a  suivi  les  débats  sans  interrup- 
tion. 

Dans  les  deux  Chambres,  le  Président  a  la  police  de 
l'Assemblée  et  de  l'édifice  où  elle  se  tient.  11  donne 
toutes  instructions  nécessaires  à  la  carde  militaire. 

((S'il  arrivaità  l'intérieur  de  l'édifice  de  la  Chambre  ». 
portent  simultanément  les  règlements  du  Sénat  et  du 
Congrès,  «  un  événement  désagréable  (<lesa<jradable),  le 
Président  prendrait  les  mesures  que  sa  prudence  dic- 
terait. Il  serait  respectueusement  obéi  ». 

En  ce  qui  concerne  l'ordre  et  la  discipline,  les  règle- 
ments des  deux  Chambres  distinguent  trois  sortes  d'in- 
cidents :  les  allusions  personnelles  {ahltiones  personalrs), 
les  rappels  a  la  question  et  à  l'ordre  (clamado*  a  la 
cnestion  y  al  nrdene)  et  les  expressions  malsonnantes 
(expresiones  malsonantes  . 

Le  membre  qui,  dans  un  discours  prononcé  OU  dans 
un  documenl  lu  devant  I'  assemblée  aura  été  l'objet 
d'une  c  allusion  personnelle  »,  soit  que  l'on  ;iit  cité 
son  nom,  suit  que  l'on  ail  rappelé  ses  actes,  peut  avoir 
la  parole  à  la  même  séance   ou   à   la   séance   suivante 


200  I  3P  V.GNB 

pour    présenter    toutes   explications,   justifications  ou 
rectifications  qu'il  juge  utiles. 

Si  l'allusion  se  rapporte  à  un  absent  ou  à  un  mort, 
tout  membre  de  l'Assemblée  peut  prendre  sa  défense, 
mais  à  condition  d'y  être  autorisé  par  l'Assemblée. 

L'orateur  est  rappelé  à  la  question  par  le  Président 
chaque  fois  qu'il  s'en  écarte  manifestement  [notoria- 
menté). 

Si  l'orateur  persiste,  malgré  trois  rappels  à  la  ques- 
tion, ,i  s'en  écarter,  le  Président  peut  lui  retirer  la  parole. 

Le  Président  peut  rappeler  à  l'ordre  tout  orateur  qui 
transgresse  avec  persistance  (co/i  insislencia),  les  règles 
établies  pour  le  débat  en  proférant  des  paroles  «  en 
quelque  manière  dangereuses  ou  choquantes  (peligrosa 
et  ofensivas),  au  point  de  vue  de  la  dignité  de  l'Assem 
blée  ou  de  l'un  des  membres  de  l'une  ou  de  l'autre 
( îhambre  ». 

Quand  un  sénateur  ou  un  député  a  été  rappelé  à 
l'ordre  trois  lois  dans  une  même  séance,  le  président 
peut  lui  retirer  la  parole  pour  le  reste  de  la  séance.  Le 
membre  rappelé  à  l'ordre  peut  seulement  obtenir  la 
parole  pour  se  justifier,  à  la  condition  de  s'exprimer 
avec  décence  et  modération. 

S'il  est  prononcé  une  parole  malsonnante  ou  bles- 
sante pour  un  sénateur  ou  un  député)  celui-ci  peut 
exiger  que  l'orateur  cesse  immédiatement  de  parler. 

S'il  ne  reçoit  pas  satisfaction,  il  demande  qu'il  s"it 
pi  la  acte  de  l'incident  par  un  des  Secrétaires  et  I'  assem- 
blée adopte  telle  décision  qu'elle  juge  convenir  à  sa 
propre  dignité  et  à  l'union  qui  doil  régner  entre  ions 
ses  membres  ». 


Il     PABL1  Mi  N  i  201 

Les  Secrétaires  rédigent  les  procès-verbauj  des  dé- 
bats parlementaires;  ils  doivent  rendre  compte  de 
tontes  les  communications  laites  à  L'Assemblée  et  signe] 
les  expéditions  des  résolutions  adoptées. 

Il  est  publié  un  recueil  d'Annales  parlementaires 
comme  pour  les  Chambres  françaises.  La  Commission 
du  règlement  intérieur  dirige  et  contrôle  la  publication 
de  compte-rendu  des  travaux  des  Cor  tes,  reproduisant 
tous  les  discours  qui  y  sont  prononcés.  Les  discours 
d'une  forme  littéraire  remarquable  abondent  dans  les 
Annales  parlementaires  espagnoles.  l'eu  de  pays  <>nt 
compté  autant  de  grands  orateurs  que  l'Espagne  depuis 
la  dernière  moitié  du  xix"  siècle. 

Les  partis  ou,  pour  parler  plus  exactement,  les 
groupes  et  sous-groupes  que  suscitent  les  ambitions 
individuelles,  sont  fort  nombreux  dans  les  Chambres 
espagnoles. 

Nous  avons  indiqué  comment,  au  lendemain  de  la 
mort  d'Alphonse  \ll,  Canovas  del  Caslillo  avait  eu 
l'idée  de  Fonder  la  stabilité  de  la  Monarchie  sur  l'alter- 
nance au  pouvoir  de  deux  partis  dynastiques,  conser- 
vateurs et  libéraux  constitués  à  l'image  des  tories  et 
des  whigs  de  l'Angleterre.  Ce  fut  entre  Canovas  et  Sa- 
gasla  le  Pacte  du  Pardo. 

Tant  qu'ils  vécurent,  ils  se  partagèrent  le  gouverne- 
ment, en  se  succédant  régulièrement  l'un  à  l'autre, 
suivant  les  nécessités  politiques  du  jour.  Ce  fui  le 
triomphe  du  système  rotatif,  avec  une  politique  de 
savantes  transactions  et  de  perpétuels  compromis, 

Canovas  et  Sagasta  se  faisaient  ouvertement  la  guerre, 

niais  en  apportant  une  bonne  grâce  parfaite  a  s'entendre 


202  BSPAGM 

pour  prévenir  toute  scission  entre  leurs  partisans  res- 
pectifs et  barrer  la  route  à  toute  initiative  qui  eut 
prétendu  se  soustraire  à  leur  direction. 

Ainsi  s'écoula  une  période  de  pacification,  mais  qui 
fut,  en  retour,  une  période  d'absorption  facbeuse  delà 
vie  parlementaire,  par  la  soumission  au  «  personna- 
lismc»  des  chefs  et  le  développement  des  «  camarillas  » 
qui  gravitaient  autour  d'eux. 

Lorsque  Canovas  succomba  sous  les  balles  d'un 
anarchiste,  les  compétitions  se  multiplièrent  dans  le 
parti  qu'il  avait  fondé. 

Francisco  Silvela  fut  appelé  à  recueillir  la  succession 
du  leader  du  parti  conservateur. 

('/était  une  belle  intelligence  et  une  haute  droiture. 
Il  entendait  défendre  la  politique  conservatrice,  tout  en 
l'affranchissant  de  certaines  pratiques  d'une  moralité 
douteuse  sur  lesquelles  Canovas  avait  plus  d'une  fois 
fondé  sa  domination  :  mais  Silvela  était  un  caractère 
trop  flottant  pour  pouvoir  imposer  longtemps  l'unité 
à  son  parti. 

Après  sa  retraite,  la  direction,  la  lefalnru  des  con- 
servateurs devait  se  partager  entre  de  nombreux  Caa- 
dilleros  ou  chefs  de  groupes,  Villaverde,  le  restaurateur 
des  finances  espagnoles,  Romero  Hobledo,  l'orateur 
fougueux  elie/  lequel  on  rencontrait  l'extraordinaire 
mélange  des  principes  les  pins  avancés  delà  Révolution 

cl    des   procédés    les   pins   doctrinaires    de   la    politique 

conservatrice,  M.  halo,  l'apôtre  de  l'interventionnisme 
en  matière  sociale  el  l'auteur  de  la  plupart  des  grandes 
li>is  qui  régissent  le  travail  en  Espagne,  M  Marna, 
enfin,  que  son  protectionnisme  intransigeant  avail  fait 


LE    PARI  i:\ii  n  i  203 

passer  des  rangs  du  parti  libéral  dans  ceux  du  parti 
conservateur  et  qui  allait  personnifier  au  pouvoir  «  la 
manière  forte  *>,  impitoyablemenl  appliquée  avec 
l'exécution  de  Francisco  Ferrer  et  la  sanglante  répres- 
sion des  trouilles  de  Barcelone  en  juillet   1909. 

«  Si  le  Gouvernement  ne  se  presse  pas,  déclarait 
M.  Ma ura  dès  iqo5,  une  tempête  formidable  nous 
emportera  tous  ». 

Pour  conjurer  la  révolution  qu'il  voyait  menaçante, 
il  réclamait  «  la  révolution  faite  d'en  haut  ».  ti  J'appelle 
révolution  i),  disait-il,  «  des  réformes  faites  par  le  pou- 
voir, radicalement,  rapidement,  brutalement  ».  Et 
(1  brutalement  w  il  bravait  l'impopularité  au  risque  de 
la  faire  retomber  sur  la  Couronne. 

De  même  que  le  parti  conservateur  de  Canovas,  le 
parti  libéral  de  Sagasta  s'est  montré  fort  divisé  depuis 
la  disparition  de  son  ancien  chef. 

Déjà,  dans  les  dernières  années  de  sa  vie,  Sagasta 
avait  eu  à  compter  avec  de  jeunes  ambitions,  qui  me- 
naçaient de  s'affranchir  de  sa  tutelle. 

M.  Gamazo  et  M.  Maure  avaient  passé  des  rangs 
des  libéraux  dans  ceux  des  conservateurs,  tandis  que 
Martos  et Canalejas  marquaient  l'intention  de  consti- 
tuer un  groupe  dissident,  le  groupe  radical. 

A  la  mort  de  Sagasta,  Morel  fut  accepté  comme 
leader  des  libéraux.  Appelé  au  gouvernement,  il  engagea 
son  parti  dans  la  lutte  anticléricale,  (pie  devait  conti- 
nuer Canalejas.  Après  l'assassinai  de  ce  dernier,  les 
divisions  s'accentuèrent  dans  le  parti  libéral  entre  le 
comte  de  Romanonès,  devenu  Président  du  Conseil,  et 
MM.  Montera  Rios  et  Garcia  l'rieto. 


204  ESPAGNl 

La  question  religieuse,  d'une  part,  les  divergences 
de  vues  entre  protectionnistes  et  libres  échangistes, 
de  l'autre,  n'ont  pas  peu  contribué  à  détruire  l'hoino- 
généité  des  anciens  partis  légaux,  mais  ce  sont  les 
ri\alités  de  personnes,  beaucoup  plus  que  les  luîtes 
entre  les  doctrines  qui  déterminent,  en  Espagne,  les 
crises  ministérielles. 

Devant  l'effritement  des  anciens  partis,  Alphonse 
XIII  a  compris  la  nécessité  d'inaugurer  une  poli- 
tique nouvelle,  indépendante  des  cadres  des  anciens 
groupes. 

La  désunion  des  libéraux  ne  leur  permettant  pas  de 
conserver  le  pouvoir,  il  appela  au  gouvernement  un 
conservateur,  M.  Dato,  mais  un  conservateur  que  ses 
tendances  conciliantes,  que  ses  conceptions  généreuses 
de  progrès  social  devaient  facilement  rapprocher  des 
libéraux  et  très  nettement  séparer  de  la  politique  auto- 
ritaire de  M.  Maura. 

Il  semble  qu'autour  de  M.  Dato  doive  se  former  la 
concentration  de  tous  les  éléments  réformistes  pour 
harmoniser  les  principes  de  conservalion  avec  les  justes 
impatiences  d'améliorations  sociales  nécessaires.  A 
cette  politique  nouvelle  pourraient  même  collaborer 
des  hommes  appartenant  aux  partis  considérés  primi- 
tivement comme  des  partis  anti  il  \  nastiipies. 

Les  partis  anti-dynastiques,  d'ailleurs,  depuis  L'ave* 
iiemeni  d'Alphonse  Mil,  onl  singulièrement  perdu  de 
leur  acth ité  militante. 

Le  Carlisme  ne  compte  pas  dans  le  Parlement  et, 
privé  du  concours  du  clergé  et  de  la  noblesse,  il  n'a 
aucune  influence  réelle  dans  le  pays,  Parmi  ses  anciens 


I .!■;    PARLEMENT  2*1) 

adhérents,  les  uns,  à  la  suite  de  M.  Uejandro  Pidal,  se 
sont  ralliés  à  la  restauration  alphonsiste,  les  autres,  avec 
M.  Hanion  Nocedal,  ont  abandonné  le  prétendant  pour 
le  parti  «  intégriste  ».  Les  «  intégristes  »  ne  réclament 
plus  le  changement  de  dynastie  ;  ils  se  bornent  à  être 
les  champions  des  «  fueros  »,  à  combattre  pour  l'auto- 
nomie locale,  à  revendiquer  surtout,  fanatiquement, 
la  suprématie  de  l'Eglise,  «  la  croix  devant  couvrir 
l'Espagne  de  son  ombre  sacrée  a  Quant  au  prétendant 
Don  Jaime,  il  observe  une  très  scrupuleuse  réserve. 
«  Jamais,  a-t-il  déclaré,  je  n'allumerai  de  ma  volonté 
une  guerre,  surtout  une  guerre  civile.  Jamais  je  ne 
conduirai  à  la  légère  des  Espagnols  contre  des  Espa- 
gnols... Si  jamais  je  devais  rentrer  en  Espagne,  ce  ne 
serait  que  pour  combattre  L'anarchie,  pour  rétablir  la 
paix,  non  pour  la  troubler  ;  par  exemple,  si  le  Roi 
Uphonse  était  obligé  de  fuir  devant  les  révolution- 
naires ou  pour  telle  autre  raison  qu'exigerait  le  salut 
du  pays  »  (i). 

Les  républicains  pourraient  constituer  un  parti  con- 
sidérable aux  Cortès,  mais,  suivant  la  parole  d'un  de 
leurs  plus  distingués  représentants,  M.  A,  Altamiral, 
ci  plus  ils  deviennent  nombreux,  plus  ils  diminuent 
d'importance  ».  «  Us  sont  de  plus  en  plus  divisés, 
écrit-il,  et  ils  ont  perdu  pour  la  plupart  la  foi  en  leur 
cause,  sinon  leur  allacliemeiil  pour  elle. . .    Cela  est    dû 

à  ce  que  le  programme  républicain  esi  aujourd'hui 
épuisé,  parce  que  presque  tous  ses  principes  ont  passé 

(i)  Manifeste  publié  dans  la  Seue  presse  le  ^>  août  [Qog, 


"JOli  I  SP  Vt.M 

dans  les  lois  et  que  le  parti  ne  parvient  pas  à  s'entendre 
sur  son  neuve. m  programme  o  (1). 

Durant  los  premières  années  du  règne  d'Alphonse 
XII,  le  parti  républicain  espagnol  représentait  trois 
tendances  très  distinctes. 

11  y  avait  les  républicains  fédéralistes  pactistes,  restés 
fidèles  aux  idées  que  l'i  j  Margall  avait  empruntées  à 
Proudhon  et  qui  ne  voulaient  voir  dans  l'Etat  qu'un 
groupement  d'agglomérations  locales  pleinement  indé- 
pendantes, unies  seulement  par  un  pacte  fédéral  ;  les 
partisans  du  fédéralisme  organique  suivant  les  inspira- 
de  Figueras,  opposant  «  l'organisation  de  haut  en  has 
à  l'organisation  de  has  en  haut  »,  et  maintenant 
L'unité  nationale,  mais  avec  l'autonomie  complète  des 
municipes  et  des  provinces  au  douhle  point  de  vue  de 
la  gestion  de  leurs  intérêts  économiques  et  politiques; 
enfin,  les  républicains  unitaires  proclamant  avec  <  iastelar 
la  République  une  et  indivisible. 

Divisés  quanl  à  leur  conception  de  l'organisation 
nationale,  les  républicains  ne  l'étaient  pas  moins  sur 
les  moyens  de  rétablir  la  République. 

Les  uns,  comme  Castelar  réclamaient  L'évolution 
pacifique;  les  autres,  avec  Ruiz  Zorrilla,  n'attendaient 
le  triomphe  de  Leurs  idées  que  d'un  coup  de  force. 

lin  1897,  un  effort  lut  tenté  pour  réunir  en  un  seul 

parti  dit  de  a   liision    républicaine    "    tous  ces    groupes 
épars. 
Si  les  républicains  réussirent  à  s'entendre  sur  un 

(1)  Européen,  «lu  3o  août  rooS,  \.    loge   Mtrvaud,    /'/•.'<- 

I„i<inr  nu    \  \ 


I  I       P  Wil.l   Ml  N  I  •_'<  >7 

programme  d'opposition  commua,  la  discorde  n'en 
persista  pas  moins  entre  les  chefs  et  les  révolution- 
naires refusèrent  de  se  soumettre  à  l'autorité  du  «  Di- 
rectoire i),  qui  devait  assurer  l'unité  du  parti. 

Un  nouvel  effort  vers  l'unité  fut  tenté  dans  une 
grande  réunion  tenue  le  29  septembre  1899  au  Circo 
de  Colon. 

On  y  proclama  «  la  fraternité  républicaine  pour 
établir  un  gouvernement  du  peuple  qui  relèverait  la 
Patrie  »,  mais  modérés  et  révolutionnaires  ne  par- 
vinrent pas  à  s'entendre  sur  les  moyen  d'exécuter 
l'accord  intervenu. 

Le  même  échec  était  réservé  à  l'Union  républicaine 
constituée  à  Madrid  le  21  mars  1903  sous  la  présidence 
de  Sahneron. 

A  l'heure  actuelle,  le  parti  républicain  se  divise  en 
trois  groupements,  les  réformistes,  les  républicains 
radicaux  ou  républicains  d'extrême  gauche,  les  répu- 
blicains socialistes. 

Les  réformistes,  sous  la  direction  des  leaders  élo- 
quents que  sont  MM.  Melquiades  Alvarez,  Azcarate, 
Perez  <ialdos,  accentuent  l'évolution  qu'avait  esquissée 
Castelar  et  ne  sont  pas  éloignés  d'apporter  à  Alphonse 
Mil  un  concours  aussi  loyal  (pie  désintéressé  sous  la 
condition  de  voir  la  monarchie  s'inspirer  de  plus  en 
plus  des  idées  libérales  et  îles  principes  démocratiques, 

Les  républicains  d'extrême  gauche  avec  M.  Ahjan- 
dro  Lcrrou.x,  continuent  seuls  dans  le  Parlement  à 
garder  vis-à-vis  de  la  Royauté  une  altitude  d'opposition 
intransigeante. 

La  «  conjonction  républicaine  socialiste  »  formée  par 


208  RSPAGNl 

M.  Sol   \   Ortega  poursuit  un  programme   hardi  de 
réformes  boj  iales. 

Le  parti  socialiste  espagnol  a  sensiblement  accru  ses 
forces  au  cours  de  ces  dernières  années.  Au  Congrès 
qu'il  a  tenu  en  1912,  il  constatait  avec  orgueil  L'exis- 
tence de  316  groupes  au  lieu  de  16  en  1888  et  de  1 1 5 
en  ioo3  et  il  déclarait  disposer  de  1 5  journaux  pour 
détendre  sa  politique. 

Mais  les  socialistes  se  voient  distancés  par  les  syndi- 
calistes révolutionnaires  et  les  anarchistes.  Ceux-là  ne 
sont  pas  représentés  dans  le  Parlement  ;  ils  n'en  cons- 
tituent pas  moins  un  redoutable  sujet  d'inquiétude. 
L'Espagne,  en  effet,  est  peut-être,  à  l'heure  actuelle, 
le  pays  où  le  parti  anarchiste  présente  le  plus  de  cohé- 
sion et  d'audace.  Il  ne  propage  pas  seulement  ses  doc- 
trines dans  les  centres  industriels;  il  compte  de  nom- 
breux adhérents  parmi  les  travailleurs  des  champs, 
dans  le  prolétariat  agricole.  En  i883,  les  anarchistes 
terrorisèrent  toute  l'Andalousie,  Cadix,  \éiès.  \rcos. 
Constitués  en  une  société  secrète  appelée  la  Main  Noire, 
ils  recrutaient  leurs  affiliés  parmi  les  déshérités  de  ce 
monde  que  fascinaient  leurs  théories  et  parmi  les  mal- 
faiteurs toujours  prêts  au  crime.  I  ne  lutte  sans  merci 
était  engagée  contre  les  capitalistes,  bourgeois  ou  pro- 
priétaires  ruraux,  hes  tribunaux  secrets  prononçaient 
les  sentences  en  vertu  desquelles  se  succédaient  les  dé- 
vastations, les  pillages,  les  incendies,  les  assassinats, 
Des  menaces,  invariablement  1  Balisées,  étaient  adresj 
aux  juges,  aux  fonctionnaires,  aux  propriétaires.  Les 
membres  les  plus  audacieux  de  la  terrible  association 
finirent  pai    tomber  entre  les  mains  de  la  Justice.  IK 


Il'    P  VU!  I  Ml  NT  209 

furent  condamnés  à  morl  el  exécutés;  mais  aui  atten- 
tats concertés  de  la  Main-noire  "nt  succédé  les  crimes 

isolés.  A  Barcelone,  ;'i  Oviedo,  à  \  nleuc  <■.  à  Madrid, 
des  bombes  ont  été  jetées  dans  les  tbéàtres,  dans  les 
lieux  publics,  jusque  dans  le  Palais  des  Cortès.  Des 
groupes  disséminés,  les  uns  collectivistes,  les  autres 
communistes,  ;'»  Barcelone,  Sabadell,  Xérès,  Tarrasa, 
Bilbao  et  Valence  préparent  les  attentats  criminels. 
Canovas  et  Canalejas  sont  tour  à  tour  tombés  sous  les 
coups  des  anarcbistes  et  lc>  tentatives  d'assassinat  se 
sont  répétées  contre  Uphonse  Mil. 

C'est  dans  la  sauvage  énergie  des  anarcbistes  que 
parait  être  aujourd'hui  l'unique  péril  pour  la  dvnastie 
royale  d'Espagne.  Elle  n'a  rien  à  craindre  des  partis 
parlementaires,  qui  se  serrent  ou  se  rallient  de  plus  en 
plus  autour  d'elle,  parce  qu'ils  voient  dans  une  Royauté 
populaire  une  grande  force  nationale  (1  ). 

i)  Les  élections  législatives  générales  qui  viennent  d'avoir 
lieu  en  Espagne  ont  consacre  la  victoire  de  la  politique  libé- 
rale du  Hoi  sur  les  partis  extrêmes,  conservateurs  réaction- 
naires et  républicains  socialistes. 

Si  l'on  totalise,  en  effet,  les  élus  des  divers  groupes,  on 
trouve  : 

i  Pour  les  éléments  libéraux  :  conservateurs  libéraux  sui- 
vant la  direction  de  M.  I>.it<>.  Président  du  Conseil  des 
Ministres,  235  élus;  libéraux  suivant  la  direction  du  Comte 
de  Etomanonès,  80;  libéraux  démocrates  a^ant  pour  leader 
M.  (iarcia  Prieto,  marquis  d'Alhucémas,  .°>o  ;  républicains 
réformistes  ralliés  à  la  monarebie  libérale  sous  l'inspiration 
de  M.  Malquiadès  Alvarez,  Total  356; 

a0  Pour  les  éléments  réactionnaires  :  conservateurs  recon- 
naissant pour  chef,  M.  Maura,  10  élus;  jaimîstes  et  inté- 
gristes ou  ultremontains,  t4.  Total  j\; 

14 


210 


ESPAGNE 


l\°  Pour  los  élément!  révolution nairoa  :  coalition  républi- 
caine socialiste,  ai  élus;  radicaux,  3.  Total  a4- 

,'i  révolution  du  parti  conservateur  avec  M.  Dato  vors 
le  libéralisme  dynastique,  conformément  à  l'orientation  per- 
sonnelle donnée  à  l'Espagne  monarchique  par  Alphonse  Mil, 
la  Chambre  des  députés  comptera  une  écrasante  majorité 
libérale. 

L'opinion  républicaine  a  subi  un  recul  très  sensible,  ma- 
nifesté par  l'éoheo  du  leader  radical  Lcrroux,  a  Barcelone  et 
par  une  diminution  considérable  des  suffrages  attribués  au\ 
candidat-  républicains. 


IV 


L'ADMINISTRATION  LOCALE. 
LK    RÉGIME    PROVINCIAL    ET 

MUNICIPAL 


IV 


L'ADMINISTRATION  LOCALE 
LE  RÉGIME  PROVINCIAL  ET  Ml  NIC1PAL 


L  ADMINISTRATION    PROVINCIALE 

La  di\ision  du  territoire  espagnol  en  '|0  provinces.  —  L'au- 
torité du  Gouverneur  [Gobernador) .  —  Le  contrôle  de  la 
Dc'putation  provinciale  (Dcpulacion  provincial)  et  de  la  Com- 
mission provinciale  (Comision  provincial). —  Organisation, 
fonctionnement  et  attributions  des  Assemblées  provinciales. 

l'administration  municipale 

La  division  du  territoire  provincial  en  Terminas, —  Le  Termina 
municipal. —  L'Ayuntamientoel  la  J tinta  municipal, —  L'Al- 
cade, Les  Tenientès,  les  Alcades  de  barrio,  les  Regidorès, 
les  Procuradores  sindicos.  —  Le  régime  municipal  des 
Pueblos,  —  Le  mouvement  régionalistc  :  les  Mancomu- 
nidades. 


L'article  premier  de  la  loi  organique  provinciale  du 
ao  août  1882  déclare  : 

«  Le  territoire  de  la  Nation  espagnole  dans  la  pénin- 
sule el  les  des  adjacentes,  considéré  au  poinl  de  vue 
administratif)  se  divise  en  provinces  i>, 


2 1  i  ESP VGNJ 

El  ['article  a  ajoute  : 

•  Le  nombre  des  provinces,  leurs  limites,  leurs  ca 
pilales  sonl  déterminés  par  les  lois  existantes  ». 

C'est  le  décret  du  .So  novembre  i833  qui,  dans  la 
pensée  de  briser  l'esprit  particulariste  au  profil  de 
l'unité  nationale,  a  consacré  la  division  du  territoire 
espagnol  en  provinces  uniformément  administrées  et 
devant  correspondre  à  peu  près  à  nos  déparlements. 

Les  vieilles  divisions  traditionnelles  de  la  péninsule 
ont  Formé  jj)  provinces  dans  les  conditions  sui- 
vantes  : 

La  principauté  des  Asturies,  la  province  de  ce  nom  ; 

La  Galice,  \  provinces,  Coruna,  Lugo,  Ponlcvedra, 
(  hense  ; 

La  vieille  Castille,  m  provinces,  dont  3  pour  le 
royaume  de  Léon,  savoir  :  Léon,  Zamora,  Salaman- 
<pic  ;  8  pour  la  Castille  proprement  dite  :  Burgos, 
Santander,  Logrono,  Soria,  Ségovia,  Avila,  Valladoiid, 
Palencia  ; 

La  nouvelle  Castille,  \  provinces  :  Madrid,  Tolède, 
Ciudad-Real,  Guadalajara,  Cuenca; 

L'Lstrainadure,  2  provinces  frontières  du  Portugal  : 
Radajoz  el  Cacerea  ; 

L'Andalousie,  avec  les  \  anciens  Etats  de  Cordoue, 
Séville,  Jaen,  Grenade,  a  formé  les  s  provinces  de  Sé- 
ville,  Cadix,  Huelva,  Grenade,  Malaga,  Umeria,  Jaen, 
t  iordoue  . 

Le   royaume  de  Murcie  a  formé  les  a  provinces  de 

Miik  îe  et   d'  \lb.U  e|e  ; 

Le  Royaume  da  \  ilence,  les  3  provinces  d'  Uicante, 
\  alem  e,  I  lastellon  de  la  Plana  ; 


l'aDMINISTH  \ TT0N    LOCALE,    ETC.  21   » 

La  principauté  de  (Catalogne,  les 4  provinces  de  lar- 
ragone,  Barcelone,  (  lerone,  Lerida  ; 

Le  Royaume  d'Aragon,  les  3  provinces  de  Teruel, 
Saragosse  et  Huesca  : 

Le  Royaume  de  Navarre,  la  province  de  ce  nom  ; 

La  Seigneurie  Je  Biscaye  en  Paya  Basque,  les  .5  pro- 
vinces  d'Alava,  Biscaye  et  Guipuzcoa. 

A  ce  territoire  continental,  il  faut  ajouter  les  deux 
provinces  des  Baléares  el  des  Canaries,  au  total 
5 1  provinces. 

Chaque  province  est  divisée  en  municipes,  Le  muni- 
cipe  qui  représente  une  population  de  :>.ooo  âmes 
(termina  municipal)  peut  être  Fractionné  en  sections 
rurales  jouissant  d'une  autonomie  communale  relative 
[pueblot). 

Hendons-nous  compte  de  la  Façon  dont  sont  admi- 
nistrés ces  divers  organisme. 

l'administration  provinciale 

(i  Le  gouvernement  et  l'administration  des  pro- 
vinces, porte  l'article  5  de  la  loi  du  :>.o  août  1882, 
appartiennent  : 

i°  Au  Gouverneur  ; 

2°   \  la  Députa  lion  provinciale; 

'.\°  A  la  Commission  provinciale)). 

Los  Gouverneurs  (Gobernadores)  ont  remplacé  les 
Corregidores  des  anciens  rois  catholiques,  les  intendants 
généraux  de  Philippe  \  .  Us  onl  une  double  mission  ; 
ils  sont  à  la  fois  les  représentants  ou  délégués  du  pou- 
voir central  dans  la  province  et  les  chefs  de  l 'Adminis- 
tration provinciale. 


216  ESPAGNE 

La  nomination  et  la  révocation  dos  Gouverneurs  se 
l'ont  par  décrets  royaux  rendus  en  Conseil  des  Ministres 
et  contresignés  par  le  Président  du  Conseil. 

L'âge  de  3o  ans  est  exigé  des  candidats  aux  fonctions 
de  Gouverneur  d'une  province.  Ils  doivent  en  outre 
remplir  l'une  des  conditions  suivantes,  énumérées 
dans  l'article  i5  île  la  loi  du  20  août  1882  : 

1  Woir  exercé  les  fonctions  de  chef  d'administration 
pendant  un  intervalle  d'un  an  à  deux  ans  suivant  la 
classe  de  l'emploi  ; 

2°  Compter  à  leur  actif  dans  des  grades  moins  élevés 
quinze  ans  de  services  administratifs; 

3  \\oir  rempli  pendant  une  législature  entière  les 
fonctions  de  député  aux  Corlès  ou  de  sénateur  élu  ; 

t\"  Avoir  rempli  deux  fois  au  moins  les  fonctions  de 
député  provincial  ; 

5"  Avoir  rempli  pendant  deux  ans  des  fonctions  ju- 
diciaires; 

6°  Avoir  appartenu  pendant  plus  de  deux  ans  à  des 
Commissions  provinciales  ou  avoir  rempli  pendant  le 
même  laps  de  temps  les  fonctions  d'Alcade  dans  les 
capitales  de  province  ; 

7  \\nir  rempli  les  fonctions  de  Secrétaire  de  Gou- 
vernement pendant  pins  de  deux  ans; 

s  Remplir  ou  avoir  rempli  les  fonctions  de  Secré- 
taire de  Députation  provinciale  pendant  quatre  ans. 

La  loi  admet  également  aux  lom  lions  de  Gouverneur 
les  militaires  «  qui  comptent  a  5  ans  de  services  avec 
L'emploi  officiel  de  chef  ». 

Bien  qu'investis  de  pouvoirs  considérables,  les  Gou- 
verneurs des  provinces  espagnoles  touchent  des  émo 


l'administration   LOCALE,   etc.  217 

lamenta  peu  élevés;  leur  traitement  ne  dépasse  guère 
i  2.000  pesetas. 

Leurs  attributions  sont  multiples  et  les  rendent 
à  peu  près  omnipotents  dans  leur  province. 

Ils  sont  «  les  représentants  supérieurs  du  Gouverne- 
ment dans  l'ordre  politique  et  administratif  (i)  »,  et, 
à  ce  titre,  assurent  l'exécution  des  lois,  décrets  et 
ordonnances,  le  maintien  de  l'ordre  public,  la  pro- 
tection des  personnes  et  des  propriétés.  L'Autorité  mi- 
litaire est  tenue  de  déférer  à  leurs  réquisitions  et  ils 
sont  investis  de  certaines  prérogatives  judiciaires. 

Le  (îouverneur,  est-il  dit  dans  l'article  :>'\  de  la  loi 
organique  provinciale  du  20  août  1882,  «  fera  par 
lui-même  ou  par  ses  délégués  la  première  instruction 
des  délits  dont  la  découverte  est  due  à  ses  soins  ou  à 
ceux  de  ses  agents  ;  il  livrera  les  détenus  au  tribunal 
compétent  avec  la  procédure  qu'il  aura  préparée  dans 
les  vingt-quatre  heures  qui  suivront  l'arrestation  ». 

Comme  «  Chefs  de  l'administration  provinciale  » 
les  Gouverneurs  dirigent  les  services  de  la  province 
et  la  loi  leur  reconnaît  en  outre  le  droit  de  présider  les 
assemblées  auxquelles  est  confiée  la  gestion  des  inté- 
rêts provinciaux  et  de  subordonner  à  leur  approbation 
l'exécution  de  certaines  décisions  des  assemblées  élec- 
tives de  la  province. 

Ces  Assemblées  sont  au  nombre  de  deux,  la  Députa- 
tion  provinciale  ou  Conseil  de  la  province  Dépulacion 
provincial),  et  la  Commission  provinciale  Comision  prù- 
ruiridl).   laquelle  n'est   qu'une  émanation  du  Conseil 

(i)  Loi  du  20  soûl  1882,  article  to. 


218  BSPAGNl 

provincial,  une  délégation  permanente  chargée  de  le 
représenter  pendant  l'intervalle  îles  sessions. 

Depuis  la  loi  du  u6  juin  181)0,  les  membres  de  la 
Députation  provinciale  sont,  comme  les  députée  aux 
Cortès,  élus  par  le  suffrage  universel  direct.  Les  con- 
ditions d'éligibilité  à  la  Députation  provinciale  sont  les 
mêmes  que  pour  l'élection  aux  Cortès,  sous  la  réserve 
que  le  député  provincial  doit  être  originaire  de  la  pro- 
vince OU  \  résider  depuis  quatre  ans.  Les  députés 
provinciaux  sont  élus  pour  quatre  ans;  il  sont  renou- 
velables par  moitié  tous  les  deux  ans. 

Le  nombre  des  députés  provinciaux  varie  suivant  le 
nombre  des  arrondissements  judiciaires  parlidoi),  qui 
composent  la  province. 

Kn  principe,  on  réunit  deux  de  ces  arrondissements 
limitrophes  pour  former  un  district  électoral  qui  est 
appelé  à  élire  j  députés  provinciaux. 

Si  le  nombre  des  i>mlitl<j*  est  impair,  le  [dus  peuplé 
forme  district  à  lui  seul  et  élit  'i  députés. 

Dans  les  provinces  comptant  (i,  7  ou  8  partidos,  il 
est  formé  5  circonscriptions  électorales. 

I). mis  les   provinces  se   composant    île    5  partid?»   ou 

d'un  nombre  moindre,  chacun  forme  par  lui-même  un 
disti  ici . 

Min  de  permettre  la  représentation  des  minorités, 
la  lui  interdit  à  l'électeur  de  voter  pour  plus  de  trois 
candidats.  Si  le  bulletin  de  vote  contient  plus  de  trois 
noms,  le  suffrage  n'est  valable  que  pour  les  trois  pre- 
noiei -  noms  insi  rits. 

11    Loi  d août  188a,  artii  li   '1  i 


i  '  \n\ii\ivi  il  \ tiun    LOC  m  B,    ETC.  'J  19 

L'élection  dea  députés  provinciaux  doit  avoir  lieu 
«  dans  la  première  quinzaine  du  troisième  mois  de 
l'année  budgétaire  ». 

Il  est  procédé  aux  opérations  électorales  dans  les 
mêmes  conditions  que  pour  l'élection  des  députés  aux 
(  lortès. 

i'  La  fonction  de  député  provincial,  spécifie  l'ar- 
ticle 57  de  la  loi  organique  du  no  août  i88ai  est  gra- 
tuite,* honorifique,  sujette  à  responsabilité  et,  une  fois 
qu'on  l'a  acceptée,  on  ne  peut  y  renoncer  sans  cause 
légitime  ». 

La  Députation  provinciale  vérifie  les  pouvoirs  de  ses 
membres,  admet  ou  rejette  les  renonciations  et  les 
excuses  et  déclare  les  vacances. 

Pour  procéder  à  la  vérification  des  pouvoirs,  le 
Conseil  se  constitue  provisoirement  sous  la  présidence 
du  doven  d'âge,  les  deux  plus  jeunes  membres  de  L'As- 
semblée faisant  fonction  de  secrétaires.  Il  nomme  deux 
commissions,  dites  de  [ctas.  chargées  d'examiner  les 
titres  (aclas)  des  élus  ;  l'une,  permanente,  composée  de 
Cinq  membres,  vérifie  les  pouvoirs  des  autres  députés 
provinciaux;  l'autre,  composée  île  trois  membres,  vé- 
rifie les  pouvoirs  des  députés  faisant  partie  de  la  Com- 
mission permanente.  Ni  l'une  ni  l'autre  des  deux 
commissions  ne  peuvent  compter  dans  leur  sein  deux 
députés  provinciaux  élus  par  le  même  district. 

Les    rapports    sont    soumis   au    Conseil.    <pii    statue 

d'abord  sur  la  validité  des  pouvoirs  des  membres  de  la 
Commission  permanente,  puis  sur  la  validité  des  pou- 
voirs de-  autres  conseillers,  mais  sans  résoudre  les  dif- 
ficultés réputées  i<  graves  ».  Après  vérification  des  titres 


220  i  sp  \>.\i 

non  contestés  ou  ne  donnant  pas  lieu  à  Q  graves  dilli- 
cultés  ».  la  députation  provinciale  se  constitue  et  élit 
un  président,  un  vice-président  et  deux  secrétaires, 
qui  tous  doivent  rester  en  fonction  jusqu'au  renou- 
vellement. Le  Conseil  procède  ensuite  à  la  vérification 
des  élections  donnant  lieu  à  o  difficultés  graves  ».  Ses 
décisions  peuvent  être  l'objet  d'un  recours  devant 
VAudiencia  ou  Cour  d'Appel  du  ressort. 

La  Députation  provinciale,  tient,  chacpie  année, 
deux  sessions  ordinaires  «  le  premier  jour  non  férié  du 
cinquième  et  du  dixième  mois  de  l'année  budgétaire  ». 
Il  peut  v  avoir  îles  sessions  extraordinaires,  sur  la  con- 
vocation du  Gouvernement,  à  la  demande  du  Gouver- 
neur ou  de  la  Commission  provinciale. 

Lorsque  le  Gouverneur  est  présent,  il  est,  de  droit, 
le  président  de  I"  assemblée. 

L'assistance  aux  séances  est  obligatoire. 

«  Le  député,  est-il  dit  dans  l'article  bG  de  la  loi  du 
?.o  août  1 88:> ,  qui,  sans  cause  dûment  justifiée,  aura 
manqué  de  remplir  le  devoir  (pie  lui  impose  la  loi 
d'assister  aux  séances,  sera  passible,  pour  chaque  ab- 
sence, d'une  amende  de  :>.?)  pesetas.  Cette  amende  lui 
sera  infligée  à  titre  de  punition  disciplinaire  par  le 
président  de  la  séance  à  laquelle  il  aura  manqué;  le 
préjudice  que  son  absence  aura  pu  entraîner  lui  sera 
en  outre  imputable 

Le  texte  ajoute  que  «  la  récidive  après  une  première 
amende  scia  considérée  comme  désobéissance  grave  o 
el  pourra  entraîner  la  suspension  du  mandat. 

Nous  avons  mi  que  l'article  5^  déclarait  la  fonction 

de    député     provincial     (f    sujette    à    responsabilité    ». 


l'administration  locale,  etc.  221 

L'article  1 3 1  spécifie  que  la  responsabilité  des  Députa- 

talions  provinciales  est  engagée  : 

i°  «  Pour  violation  de  la  loi,  soit  dans  leurs  actes, 
soit  dans  leurs  délibérations,  quand  elles  s'arrogent  des 
droits  qu'elles  n'ont  pas,  ou  qu'elles  outrepassent  ceux 
qui  leur  appartiennent  ; 

■>.  Pour  désobéissance  au  Gouvernement  dans  les 
affaires  où  elles  procèdent  par  délégation  et  sous  sa 
dépendance  ; 

3°  Pour  manque  de  respect,  à  l'égard  de  leurs  supé- 
rieurs hiérarchiques  ; 

.1  Pour  négligence  ou  omission  entraînant  préju- 
dice pour  les  intérêts  ou  services  qui  leur  sont  confiés, 
abus  OU  malversations  dans  l'administration  de  leurs 
fonds. 

L'article  i3a  ajoute  que  l'action  en  responsabilité 
pourra  être  intentée  contre  les  Députalions  et  les  dé- 
putés provinciaux  devant  L'Administration  ou  devant 
les  tribunaux  de  justice. 

«  Elle  aura  lieu  devant  l'administration  pour  faits 
ou  omissions  coupables  dans  l'exercice  de  leurs  fonc- 
tions, quand  il  n'y  a  pas  de  délit,  et  devant  les  tribu- 
naux de  justice  quand  ces  faits  ou  omissions  consti- 
tuent délit  selon  le  <  !ode. 

«  Seront  seuls  soumis  à  la  responsabilité,  le^  dé- 
putés qui  seront  coupables  < le  l'omission  ou  qui  auront 
pris  part  à  l'acte  ou   à   la   délibération  repréhensible  9, 

La  responsabilité  administrative,  que  le  Gouverne- 
ment a  seul  le  droit  de  l'aire  prononcer,  entraîne 
l'avertissement,  l'amende  et  la  suspension,  cette  dernière 
peine  ne  devanl  pas  excéder  soixante  jours.  La  peine 


222  BSPAGNI 

esl  prononcée  par  ordonnance  royale,  après  instruc- 
tion administrative  el  avis  du  Conseil  d'Etat. 

Les  Députa  lions  provinciales  ne  peuvent  être  dis- 
soutes et  Leurs  membres  ne  peuvent  être  destitués  que 
o  par  une  sentence  exécutoire  îles  tribunaux  (i)  ». 

Les  séances  de  la  Députation  provinciale  sont  pu- 
bliques el  il  doil  être  inséré  chaque  jour  un  extrait  de 
leurs  délibérations  dans  le  Bulletin  officiel. 

Toutefois,  l'Assemblée  peut  se  former  en  comité 
secret  sur  la  demande  du  président  ou  de  cinq 
membres  «  quand  la  nature  de  L'affaire  l'exige  ».  La 
loi  spécifie  que  «  en  aucun  cas  ne  pourront  [cesser 
d'être  publiques  les  séances  dans  lesquelles  il  s'agira 
de  comptes,   budgets  et  affaires  s'j   référant,  connue 

aussi  de  la  vérification  des  élections  provinciales  (:>)  ». 

La  présence  de  la  majorité  absolue  des  députés  de 
la  province  est  nécessaire  à  la  validité  des  délibéra* 
tions. 

Les  décisions  sont  prises  à  la  majorité  des  membres 
présents  ;  en  cas  d'égalité  de  voix,  le  vole  est  remis  au 
jour  suivant.  Il  a  lieu  dans  la  même  séance  a  si  l'af- 
faire présente  un  caractère  d'urgence  de  L'avis  des 
membres  présents»  (3).  Vu  cas  de  partage  des  voix 
après  une  nouvelle  épreuve,  Le  président  a  voix  pré- 
pondérante. 

Le  Conseil  esl  maître  de  son  règlement  intérieur.  Il 
détermine  le  nombre  el  la  nature  des  commissions 
permanentes  entre   lesquelles  il   entend    répartir   les 

(i)  Loi  «lu  ao  soûl  i88a,  article  i4o. 
Loi  du  ao  ii'iùi  1 88a,  article  64< 
I  ,i  du  ao  .'"'ùt  (88a,  article  (}8, 


l'administration    LOCALE,    ETC.  223 

a  flaires  sur  lesquelles  il  esl  appelé  à  statuer  et  il  peut 
également  décider  la  création  de  commissions  spé- 
ciales. 

La  Députation  provinciale  tient  de  la  loi  une  double 
mission  : 

Klle  est  chargée  de  la  gestion  des  intérêts  spéciaux 
de  la  province  ; 

Elle  est  investie  de  la  tutelle  administrative  des 
municipalités. 

Comme  chargée  de  représenter  la  province  en  tant 
que  corps  délibérant,  la  Députation  provinciale  a  no- 
tamment dans  ses  attributions,  aux  termes  de  l'ar- 
ticle 7-i  delà  loi  du  :j<>  aoûl  1882  : 

La  créai  ion  et  la  conservation  des  services  qui  ont 
pour  objet  «  la  commodité  des  habitants  de  la  province 
et  le  développement  de  leurs  intérêts  moraux  et  maté- 
riels »,  tels  que  «  les  établissements  de  bienfaisance  ou 
d'instruction,  les  chemins,  les  canaux  de  navigation  et 
d'irrigation  et  toute  espèce  de  travaux  publics  d'inté- 
rêt provincial,  de  même  encore  (pic  les  concours,  expo- 
sitions et  autres  institutions  d'encouragement  »  ; 

«  L'administration  des  fonds  de  la  province  et  leur 
emploi  conforme  au  budget  approuvé  ; 

«  La  garde  el  la  conservation  des  biens,  actions  et 
droits  appartenant  à  la  province  ou  aux  établissements 
qui  en  dépendent  ;  la  répartition  et  l'emploi  des  reve- 
nus de  la  province  à  l'effel  d'assurerle  fonctionnement 
régulier  des  services  dont  la  direction  incombe  à  la 
Députation  provinciale  n . 

La  principale  attribution  de  la  Députation  provin- 
ciale est,  incontestablement,  d'établir  le  budget  etdfi 


•J"2i  BSPAGNl 

faire  face  aux  dépenses  de  la  province  à  L'aide  de 
taxes  spéciales,  indépendantes  des  impôts  d'Etat, 

Gomme  investie  de  la  tutelle  administrative  des  mu- 
nicipalités, la  Députation  provinciale  est  appelée  : 

A  réviser  les  délibérations  des  administrations 
municipales  et  à  les  soumettre  aux  dispositions  de  la 
loi  ; 

A  charger  quelqu'un  de  ses  membres  de  faire  des 
visites  d'inspection  dans  les  communes  pour  s'assurer 
de  l'état  de  leurs  services,  comptes  et  archives. 

«  La  Députation,  spécifie  l'article  70  de  la  loi  orga- 
nique provinciale,  prendra,  à  la  suite  de  ses  visites, 
les  dispositions  qu'elle  jugera  convenables,  dans  la 
limite  de  ses  pouvoirs  pour  améliorer  l'administration 
municipale  ». 

11  est  à  remarquer  (pie  la  Députation  provinciale  a 
le  droit  de  nommer  et  de  révoquer  les  cmplo\és  rétri- 
bués sur  les  fonds  de  la  province.  A  cet  égard,  ses 
attributions  sont  plus  étendues  que  celles  de  nos  Con- 
seils généraux,  le  préfet  seul  avant  en  France  le  droit 
de  nommer,  de  rétrograder  ou  de  destituer  les  fonc- 
tionnaires. 

Les  décisions  prises  par  les  DéputationS  provinciales 
ont  force  exécutoire  en  principe;  mais  le  Gouverneur, 
à  (pii  elles  doivent  être  communiquées  dans  les  trois 

jours,  peut  les  suspendre,  soit  il'olllce,  soit  à  la  de- 
mande d'une  partie, 

<  omme  «'appliquant  à  des  affaires  «pu  ne  sont 
pas  île  1,1  compétence  de  la  Députation; 

l>  Pour  irrégularité  commise  par  L'Assemblée  pro- 
vinciale ; 


L  ADMINISTBATION    LOCALB,    BTC.  225 

c)  Pour  infraction  manifeste  aux  lois,  lorsqu'il  en 
résulte  directement  un  préjudice  aux  intérêts  géné- 
raux de  l'Etat  ou  à  ceux  d'une  autre  province  (1). 

Le  Gouvernement  peut  également  suspendre  les  dé- 
cisions de  la  Dépulation  provinciale  pour  préjudice 
de  réparation  difficile  causé  aux  intérêts  ou  aux  droits 
des  particuliers  ou  des  corporations,  si  les  intéressés  la 
réclament  dans  les  dix  jours  »  (2). 

Contre  les  décisions  du  Gouverneur  accordant  ou 
refusant  la  suspension  d'une  délibération  du  Conseil 
de  la  province,  il  est  accordé  aux  particuliers,  corpo- 
rations, ainsi  (pi  à  la  dépulation  provinciale  elle-même, 
un  recours  devant  le  Gouvernement  (3). 

Le  Gouvernement  doit  statuer  dans  un  délai  de 
soixante  jours  à  compter  de  la  remise  du  dossier,  après 
a\is  du  Conseil  d'Etat. 

En  dehors  de  la  suspension  laissée  à  l'appréciation 
du  Gouverneur,  les  délibérations  des  Députalions  pro- 
vinciales peuvenl  être  l'objet  d'un  double  recours,  soit 
par  la  voie  administrative,  soit  par  la  voie  judiciaire. 
Les  Gouverneurs  et  députés  provinciaux  sont  personnel- 
lement responsables,  conformément  aux  lois,  des  dom- 
mages ou  préjudices  causés  par  l'exécution  ou  la  sus- 
pension des  délibérations  des  Députations  provin- 
ciales  (4). 

Mentionnons  enfin  cjuc,  parmi  les  délibérations  de 
la  Dépulation  provinciale,  celles  qui  concernent  l'éta 

(  i     Loi  du  y<>  août  1 881 .  artii  le  79. 
a    Loi  du  ao  .i\  ril  1 88a,  article  Ko  ; 
[)  Loi  du  ao  ...Mit  188  i,  artii 
'1     Loi  du    >>>  aoi'il   i88at  art i<  I 

15 


$26  BSPAGN1 

blissement  du  budget  de  Is  province  doivent  être  sou- 
mises à  l'approbation  du  Ministre  de  l'Intérieur.  Si 
le  Ministre  n'a  pas  retourné  le  budget  ordinaire  axant 
l'expiration  d'un  délai  de  deux  mois  et  le  budget  ad- 
ditionnel axant  I  r.xpi ratitin  d'un  délai  de  six  semaines, 
le  budget  cal  considéré  comme  approuvé  et  exécutoire. 

Lorsque  la  Dépulation  provinciale  n'est  pas  en  ses- 
sion, elle  est  représentée  par  la  Commission  provinciale. 

La  Commission  provinciale  est  composée  d'Autant 
de  membres  qu'il  v  a  de  districts  dans  la  province, 

Pour  former  la  Commission  provinciatei  le  Conseil 
répartit  ses  membres  en  nombre  égal  entre  quatre 
sections,  en  axant  soin  de  ne  pas  faire  entrer  dans  la 
même  section  deux  députés  du  même  district. 

\  tour  île  rôle,  chacune  de  ces  sections  constitue 
pendant  un  an  la  Commission  provinciale. 

La  Députation  détermine  l'ordre  dans  lequel  les 
sections  devront  se  succéder 

\u  cas  de  suspension  administrative  ou  judiciaire, 
de  G  iladie  ou  de  congé,  leme.mbrcde  la  Commission 
empêché  de  siéger  est  remplacé  par  le  représentant  du 
même  district  qui  faisait  partie  de  la  Commission  l'an- 
née précédente» 

Grâce  à  cette  combinaison  ingénieuse,  tous  les  dis- 
tricts son!  représentés  à  la  Commission  provinciale  et 
tous  les  membres  de  la  Dépulation  sont  successivement 
appelés  à  siéger  à  la  commission. 

La  (  "i ission  provinciale  est  présidée  par  le  Gou- 
verneur. Clle  élit  un  vice-président. 

Elle  siège  en  permanence  dans  la  capitale  de  la  pro- 
vince. L'andis  que  le  mandai  de  député  provincial  est 


i  '  ADMINISTRA  riOW    i .<»<:  \i  i  ,    ETC.  11' 

gratuit,  celui  du  membre  de  la  Commission  provin-. 
ciale donne  droil  à  une  indemnité  qui  varie,  suivanl  la 
classe  de  la  province,  «le  1  •">  à  ■>.<>  pesetas  pour  chaque 
séance, 

La  Commission  peut  siéger  en  comité  secrel  poui 
certaines  affaires  déterminées  ;   mais  en  principe,  ses 

séances  sont  publiques, 

Pour  délibérer,  la  présence  de  la  moitié  au  moins 
des  membres  de  la  Commission  est  nécessaire  et  toute 
décision  adoptée  doit  réunir  la  moitié  plus  un  des 
votants. 

A.u  cas  de  partage  des  voix,  le  vote  est  ajourné  à  la 
séance  suivante.  Si  à  eel  le  seconde  séance,  aucune  m; tjo- 

rité  ne  s'affirme,  la  voix  du  président  est  prépondé- 
rante. 

La  présence  au*   séances  est  obligatoire  el  tous  les 
membres  doivent  signe)  les  procès-verbaux  des  délibé 
rai  ions. 

De  même  que  la  Députation  provinciale  dont  elle 
est  l'émanation,  la  Commission  provinciale  a  deua 
ordres  d'attributions  en  ce  qui  concerne  la  gestion  des 
intérêts  provinciaux  el  la  tutelle  administrative  des 
communes, 

En  qualité  de  corps  administratif,  la  Commission 
provinciale,  aux  termes  de  l'article  oj8  de  la  loi  du 
ao  août  1 88a  doit  : 

assurer  l'exécution  des  décisions  de  la  Députation 
provinciale  ; 

Préparer  toutes  les  affaires  dont  la  Députation  sera 
appelée  à  s'occuper  dans  chaque  réunion  semestrielle  . 

Statuer  provisoirement,  au  cas  d'urgence,  sui  les  ai 


228  BSPAONl 

t. tires  de  la  compétence  du  Conseil  si  leur  importance 
ne  justifie  pas  la  tenue  d'une  session  extraordinaire  de 
celui-ci.  à  charge  de  rendre  compte  à  la  Députation 
provinciale,  laquelle  pourra  annuler  ou  modifier  la 
décision  de  sa  Commission  permanente; 

Suspendre   pour     justes    motifs    les   employés    et 
its  dépendant  de  la  Députation  provinciale,  à  charge 
de  lui  rendre  compte,  à  sa  première  séance,  des  déci- 
sions prises. 

Surveiller  les  affaires  contentieuses  intentées  au  nom 
de  la  province  ; 

Intenter  les  actions  contenlieuses  ordinaires  ou  ad- 
ministratives, après  avis  de  la  Députation,  le  vice- 
président  de  la  Commission  représentant  la  province 
dans  toutes  les  affaires  judiciaires. 

En  vertu  de  la  tutelle  administrative  dont  elle  est 
investie  en  ce  qui  concerne  les  municipalités,  la  Com- 
mission provinciale  est  chargée  de  : 

Statuer  sur  les  incidents  auxquels  donnent  lieu 
les  opérations  du  recrutement  militaire  dans  les  com- 
munes ; 

Statuer  sur  les  réclamations  et  protestations  dans  les 
élections  municipales,  de  même  que  sur  les  incapacités, 
incomptabilités  el  excuses  des  élus. 

Enfin,  la  Commission  provinciale,  <'n  qualité  de 
corps  consultatif,  donne  son  avis  quand  les  lois  et  ré- 
glementa le  prescrivent  et  toutes  les  fois  (pic  le  Gou- 
verneur,  de  son  initiative  et  sur  l'invitation  du  Gou- 
vernement, l'appelle  a  exprime!  son  opinion. 


l'administration  COMMUNAL]  229 


I,  ADMINISTRATION    <:OM\ii 

Chaque  province  est  divisée  en  territoires  désignés 
sous  la  dénomination  de  terminos. 

L'association  légale  des  habitants  du  termino  forme 
le  municipe  (/mmz'c(/)io).  Lemunicîpio  fut,  au  Moyen  âge, 
le  berceau  de  la  liberté  espagnole. 

Pour  constituer  un  termino  municipal,  un  territoire 
doit  présenter  les  conditions  suivantes  : 

1  réunir  une  population  lixc  de  2.000  habitants  au 
moins,  domiciliés  [résidentes)  ; 

2°  avoir  une  superficie  en  rapport  avec  le  chiffre  de 
la  population  ; 

3°  justifier  de  la  possibilité  de  trouver  des  ressources 
suffisantes  pour  faire  face  aux  dépenses  qu'entraîne  la 
vie  municipale. 

Les  terminos  sont  créés,  modifiés  ou  supprimés  par 
la  Députation  provinciale  après  avis  des  autorités  et  de 
la  population  du  municipe. 

Dans  chaque  termino  municipal,  L'administration  ap- 
partient à  un  corps  élu,  l'Ayuntamiento,  composé  de  VAl- 
i'0(/«  ou  maire,  des  tenienles  ou  adjoints  et  des  regidores 
simples  membres  du  Conseil,  tous  réunis  sous  la  déno- 
mination générique  tic  concejales. 

A  côté  de  VA  yuntamu  nlo  dont  l'organisation  est  à  peu 
près  identique  à  celle  de  notre  Conseil  municipal, 
siège  une  autre  assemblée,  dont  les  pouvoirs  rappellent 
ceux  de  nos  anciennes  réunions  des  plu-,  imposés;  c'est 
la  Junte,  Junta  municipal.  La  Junte  examine  et  ap- 
prouve le  budgel  du  municipe,  dressé  par  VAyuntamiento 


230  1  SPAGFfl 

et  délibère  sur  toutes  les  questions  financières  intéres- 
sant le  termino. 

Lorsqu'un  termino  est  suffisamment  important  pour 
que  le  Maire  doive  être  assisté  d'adjoints,  [tenientM  ,  le 
termina  est  partagé  en  districts  et  chaque  district  est 
administré  par  un  teniehle< 

Le  district  lui-même  peut  être  subdivisé  en  barrios 
ou  quartiers,  administrés  chacun  par  un  Alcade  de 
barrit). 

Le  chiffre  de  la  population  détermine  le  nombre  des 
Concejales  allèrent  à  chaque  fnunicipe.  Ce  notnbrevarie 
d'un  minimum  de  6  à  un  maximum  de  5o.  Le  nom- 
bre des  lenientes  ou  adjoints  ne  peut  dépasser  10. 

L'élection  îles  membres  de  VAyuntamiento  a  lieu  au 
suffrage  universel  direct  dans  les  mêmes  conditions 
que  pour  la  désignation  des  députés  aux  Cortès.  La 
loi  électorale  du  8  août  ".i";,  dont  nous  avons  analysé 
les  principales  dispositions  au  chapitre  précédent,  a  été 
déclarée  expressément  applicable  aux  élections  pour  les 
assemblées  municipales. 

Les  membres  de  1'  lyuntamiento  sont  élus  pour  quatre 
ans,  Ils  sont  renouvelables  pat  moitié  tous  les  deux 
ans  el  rééllgibles. 

Les  élections  générales  <»ni  lieu  tous  les  deux  ans 
dans  la  première  quinzaine  de  mai.  Le  territoire  du 
termino  est,  suivant  s,, n  importance,  fractionné  en  sec- 
tions! Min  d'assurer  la  représentation  dis  minorités, 
l.i  loi  spécifie  que  les  électeurs  doivent  voter  seulement 
pour  a  concejalei  s'il  Tant  en  élire  8,  pour  S  s'il  Tant 
en  élire  j,  pour  'i  s'il  faut  en  élire  6  h  pour  .*>  s'il  faut 
en  élire  7. 


L'ADMINISTRATION    COMMUNAFJ  '_'.'{ I 

Il  rsi  procédé  à  des  élections  partielles  quand  une 
demi-année  au  moins  avant  les  élections  normales,  le 
nombre  des  vacances  s'élève  au  tiers  du  nombre  total 

des  conseillers. 

Lorsque  les  élections  ordinaires  doivent  avoir  lieu 
à  une  date  pins  rapprochée,  les  sièges  vacants  sont 
provisoirement  OCCUpés  par  d'anciens  membres  élus  de 
I'  [yunlamiento,  que  désigne  le  Gouverneur. 

Ne  peuvent  être  élus  membres  de  YAyuntamienlo  : 

Les  sénateurs  et  les  députés  aux  Corlès  sauf  pour 
l'Assemblée  municipale  de  Madrid  ; 

Les  députés  provinciaux  ; 

Les  juges  municipaux,  les  notaires  et  toutes  person- 
nes remplissant  des  charges  déclarées  incompatibles 
par  des  lois  spéciales  avec  le  mandat  de  membre 
d'une  Assemblée  municipale  ; 

Les  titulaires  de  fonctions  publiques  rétribuées,  à 
l'exception  seulement  des  professeurs  d'Universités  ou 
d'Instituts,  qui  peuvent  siéger  à  V Ayuntamiento  de  la 
ville  où  ils  pi  "lissent  ; 

Toutes  personnes  directement  ou  indirectement  in- 
téressées dans  des  contrats  ou  marchés  exécutés  dans  le 
termino  pour  le  compte  du  municipe  ; 

Toutes  personnes  en  retard  pour  le  payement  fie 
leurs  contributions  ; 

Toutes  pers tes  ayant  un  procès  avec  VA  yuntamiento 

ou  les  établissements  sous  sa  dépendance. 
*Les  contestations  auxquelles  donne  lieu  l'élection  sont 
>,i  par  la  Commission  provinciale. 

Les  fonctions  de  membre  de  l'Assemblée  municipale 
sont  gratuites. 


232  i SPAGNl 

1/  lyuntamiento  a  pour  président  V Alcade. 

Celui-ci  est,  en  principe,  élu  par  les  concejales.  Tou- 
tefois, le  Souverain  a  le  droit  de  le  choisir  parmi  les 
membres  de  l'Assemblée  municipale  dans  les  capitales 
île  province,  chefs-lieux  de  parlidos  judiciaires  et  dans 
les  communes  comptant  une  population  supérieure  ou 
égale  à  celle  des  chef-lieux  de  partidos  pourvu  qu'elle 
ne  soit  pas  inférieure  à  (i.ooo  habitants. 

L'Alcade  de  Madrid  peut  être  choisi  par  le  Hoi  même 
en  dehors  de  l'Assemblée  municipale. 

Sauf  à  Madrid,  OÙ  ils  sont  nommés  par  le  Souverain 
parmi  les  concejales,  les  tenientes  ou  adjoints  sont  tou- 
jours élus  par  l'Assemblée  municipale. 

A  défaut  de  l'Alcade,  le  premier  adjoint  élu  et,  à 
défaut  d'adjoint,  le  doyen  des  conseillers,  (regidores), 
préside  le  Conseil. 

Les  Alcades,  tenientes  et  regidores  sont  tenus  d'as- 
sister à  toutes  les  séances  sauf  le  cas  d'empêchement 
justifié,  sous  peine  d'amendes  qui  varient  de  i  à  5  pe- 
setas, suivant  la  population  du  Municipc. 

Il  est  interdit  .nix  membres  du  Conseil  de  s'abstenir 

dans  l«.«  voles. 

Les  séances  sont  publiques,  sauf  la  faculté  pour  le 
Conseil  de  Be  loin  ici-  m  Comité  secret  dans  des  circons- 
tances exceptionnelles,  m  la  majorité  des  membres  le 
ré<  lame. 

Les  délibérations  pour  être  valables,  doivent  réunir 
la  majorité  des  membres  du  Conseil  figurant  au  ta- 
bleau; si  cette  majorité  n'a  pu  être  obtenue  bI  que 
l'affaire  ail  été  renvoyée  à  une  séance  ultérieure,  après 
convocation  spéciale,  la  majorité  des  membres  présenta 


I  '  VDMINIS  l  K  \  I  [ON    COMMUN'AI  l  233 

devient  suffisante.  \u  cas  de  partage  des  voix  à  la  suite 
d'un  second  vote,  la  voix  du  président  est  prépondé- 
rante. Le  vote  a  lien  par  appel  nominal. 

Il  est  à  remarquer  que  le  Gouverneur  est  investi 
par  la  loi  du  droit  de  présider,  s'il  le  juge  convenable, 
tous  les  Ayantamientos  de  sa  province. 

L'Ayuniamienlo  est  chargé  de  la  gestion  'le  tous  les 
intérêts  du  termino. 

La  loi  organique  municipale  met  spécialement  à  sa 
charge  l'organisation  de  tous  les  services  qui  ont  pour 
ohjet  la  voie  publique,  la  police  urbaine  et  rurale,  la 
police  de  BÙreté,  l'instruction  primaire,  l'administra- 
tion des  biens  du  municipe,  les  institutions  de  bien- 
faisance. 

Pour  lui  permettre  de  remplir  ses  attributions,  la 
loi  organique  municipale  reconnaît  à  VAyuntamiento  : 

Le  droit  de  prendre  tous  arrêtés  et  ordonnances  de 
police  urbaine  et  rurale,  sous  la  sanction  d'amendes 
pouvant  s'élever,  suivant  la  population  du  termino,  de 
ij  à  5o  pesetas,  mais  sous  la  réserve  de  l'approbation 
du  Gouverneur  et  de  la  Dépulation  provinciale  ; 

Le  droit  de  nommer  el  révoquer  les  emplov<>  ri 
agents  des  services  municipaux  ; 

Le  droit  d'imposer  des  prestations  en  nature  à  tous 
1rs  habitants  de  Hi  à  5o  ans  ; 

Le  droit  de  s'associer  avec  d'autres  iyuntamientos 
pour  L'établissement  el  l'entretien  des  chemins,  des 
gardes  rurales,  pour  la  gérance  des  revenus  comrau 
naux  H  des  intérêts  communs  à  plusieurs  terminos.  A 
cel  effet,  les  [yaniamientos  forment  des  juntes,  compo- 
sées îles  délégués  de  chaque  municipalité.  Les  comptes 


•_\-n  BSP  KG  m 

établit  par  les  juntes  doivent  ôtre  soumis  à  chacune 
des  municipalités  intéressées  et,  à  défaut  d'accord  una- 
nime, au  Gouverneur  qui  statue  après  avis  de  la  Com- 
mission provinciale. 

En  principe,  les  délibérations  de  VAyuntamiento  sont 
immédiatement  exécutoires,  mais  la  loi  énumère  une 
foule  d<-  délibérations  qui  doivent  être  soumises  à 
l'approbation  du  Gouverneur  après  avis  de  la  Commis- 
sion provinciale. 

Ajoutons  que  l'Alcade  est  tenu  de  suspendre  l'exé- 
cution des  délibérations  de  VAyuntamiento,  soit  d'office, 
soit  à  la  requête  de  tout  habitant,  au  cas  de  violation 
de  la  loi  ou  d'excès  de  pouvoir.  Il  peut  suspendre 
encore  l'exécution  des  délibérations  au  cas  de  péril  pu- 
blic ou  de  préjudice  a  l'intérêt  général,  ;i  charge  d'en 
référer  au  Gouverneur.  Enfin,  dans  tons  les  cas  où  les 
délibérations  sont  exécutoires,  les  tiers  dont  elles 
lèsent  les  intérêts  peinent  se  pourvoir  contre  elles,  soit 

devant  le  Gouverneur,  mùi  devant  les  tribunaux. 

Les   Gouverneurs,    les    Alcades    et    les   membres   de 

V Ayunlamiento  sont  personnellement  responsables  des 
dommages  pouvant  résulter,  soit  d'une  suspension,  soit 
d'une  exécution  illégale  des  délibérations, 

Les    [yunlamientOB,   déclare  l'article   180  de   fi   loi 
nnique  municipale  du  16  décembre   1876,  encou- 
rent responsabilité  :  1    pour  Infraction  manifestée  la 
loi  dans  leurs  actes  et  décisions,  par  abus  ou  excès  de 
pouvoir;  a°  pour  désobéissance  ou  manque  de  respect 

;i  leurs  supérieurs  biéi  ai -chiques  ;  .">'  pour    omission  ou 

négligence  pouvant  préjudicier  aux  services  qui  leur 
sont  confiés. 


l'aumimm  i;  \ïlM\    COMMUNALE  '_'.'!."> 

Cette  responsabilité  est  déterminée,  soit  par  I'  admi- 
nistration, soi!  par  les  tribunaux,  suivant  la  nature  de 
l'acte  ou  de  l'omission  qui  la  rtiOtÎTé. 

Les  peines  qui  peuvent  rire  prononcées  par  l'Auto- 
rité administrative  sont  l'admonestation,  la  réprimande 
et  l'amende.  Cette  dernière  peine  est  proportionnée  au 
nombre  des  Coneejales  et  varie  de  7  pesetas  5o  à  126 
pesetas.  La  loi  spécifié  (pic  l'amende  doit  être  clïecli- 
vement  payée  par  celui  qui  en  est  frappé  et  de  ses  pro- 
pres deniers. 

La  suspension  cl  la  destitution  peuvent  être  proi - 

cées  par  le  Juge  de  Partido,  nu  Tribunal  de  première 
instance.  Les  membres  des  Assemblées  municipales 
destitués  sont  frappés  d'inéligibîlité  pendant  six  ans. 

Nous  avons  dit  que,  pour  toutes  les  questions  enga- 
geant les  finances  du  termifto,  les  délibérations  devaient 
être  prises  avec  l'adjonction  aux Coneejales  de  VAyunla- 
mienlo  de  membres  associés,  Vocales  asociadûSj  choisis 
en  nombre  égal  à  celui  des  membres  de  V Ayuntamiento 
parmi  les  contribuables  les  plus  imposés. 

La  réunion  de  ces  deux  éléments  constitue  la  Junte 
municipale,  Junla  municipal. 

La  désignation  des  Vocales  asociados  es!  faite  parla 
voie  du  sort  après  répartition  de  tous  les  contribuables 
eu  sériions  dont  le  nombre  est  fixé  par  ['Ayuntamiento 
sans  pouvoir  être  inférieur  au  tiers  du  nombre  îles 
Coneejales.  On  incorpore  dans  une  même  section  les 
contribuables  dont  la  profession  ou  l'industrie  offre  le 
plus  d'analogie  suivant  les  classifications  établies  pour 
l'assiette  des  contributions,  Si  la  répartition  ne  peut  et  re 

ainsi  elfectuée.  elle   s'opère  par   rues,    quartiers  et  pa- 


236  i  SPAGNl 

roisses.  Chaque  section  désigne  ensuite  le  nombre  des 
Vocales  correspondant  au  total  des  contributions  payées 
par  L'ensemble  de  la  section.  Tout  intéressé  est  admis 
à  exercer  devant  la  Députation  provinciale  un  recours 
contre  la  répartition  ainsi  faite. 

L'Ayuntamiento  procède,  en  séance  publique,  au  ti- 
rage au  sort,  pour  chaque  section,  des  Vocales  asociados 
qui  resteront  en  charge  pendant  tout  le  courant  de 
l'année  budgétaire. 

C'est  la  Junta  municipal  qui  vote  le  budget  du  ter- 
mino. 

Le  projet  du  budget  est  préparé  par  VAyantamiento, 
qui  doit  faire  face  à  toutes  les  dépenses  que  les  lois 
générales  imposent  et  assurer  la  marche  régulière  des 
services  municipaux. 

Les  dépenses  sont  couvertes  par  les  ressources  que  le 
municipe  se  procure  à  l'aide  : 

i  des  revenus  de  ses  biens  ou  des  revenus  des  éta- 
blissements placés  sous  sa  dépendance; 

i"  des  taxes  municipales  établies  sur  certains  ser- 
vices, sur  les  travaux  ou  industries,  comme  aussi  du 
produit  des  amendes  pour  infraefions  aux  arrêtés  mu- 
ni' î  1 1 . 1 1 1  x  et  de  police  : 

3°  de  la  taxe  générale  répartie  entre  les  contri- 
buables, proportionnellement  à  leurs  ressources,  pour 
parfaire  la  somme  nécessaire  à  l'équilibre  du  budget  ; 

V  des  impôts  sur  les  objets  de  consommation  <>u  de 
chauffage 

Tout  projet  de  budget  est  tenu  a  la  disposition  du 
public  .m  secrétariat  du  municipe  pendant  quinze 
jours,  avec  L'avis  motivé  d'un  procureur  syndic,  procu- 


L  ADMINISTRATION    COMMUNALE  237 

rador  sindico,  élu  par  VAyuntamiento  pour  remplir  ta 
double  mission  de  représenter  le  munîcipe  en  justice 
el  de  réviser  tous  les  comptes  communaux. 

Le  projet  de  budget  est  ensuite  soumis  à  la  Junte, 
qui  ne  peut  l'approuver  en  première  délibération  qu'à 
la  majorité  absolue  de  tous  ses  membres.  Si  cette  ma- 
jorité n'est  pas  obtenue,  la  délibération  est  renvoyée  à 
huitaine,  et  alors  la  majorité  des  membres  présents  est 
reconnue  suffisante. 

Le  i5  mars  de  chaque  année,  le  budget  est  commu- 
niqué au  Gouverneur,  qui  a  le  droit  de  modilicr  toutes 
dispositions  qu'il  juge  illégales,  sauf  recours  au  Gou- 
vernement en  Conseil  d'Etat. 

Lorsque  le  Gouvernement  n'a  pas  statué  dans  le 
délai  de  deux  mois,  le  budget,  tel  qu'il  a  été  voté  par 
la  Junte,  devient  exécutoire. 

La  Junte  est  également  compétente  pour  la  vérifica- 
tion des  complcs  du  Municipe,  après  examen  d'une 
commission  spéciale  élue  par  elle  et  enquête,  s'il  y  a 
lieu. 

L'exécution  des  délibérations  des  Assemblées  muni- 
cipales est  assurée  par  l'Alcade,  dont  les  pouvoirs  cor- 
respondent à  ceux  qui  sont  dévolus  chez  nous  au  Maire. 

L'Alcade  est,  suivant  les  cas,  désigné  par  le  Gouver- 
nement ou  élu  par  les  Concejales  pour  une  durée  de 
deux  ans,  lors  de  chaque  renouvellement  de  VAyunta- 
miento. 

La  loi  exige  qu'il  sache  lire  et  écrire.  Ses  loin  lions 
sont  gratuites.  Toutefois,  dans  les  capitales  de  province 
de  i"  liasse,  le>  [yanlamientot  peuvent  allouer  a  l'.ll- 
cade  certains  frais  de  représentation. 


238  i  sp  m. m 

I.  \l,  adc  esl  à  ta  fois  le  représentant  du  municipe  et 
li'  représentant  «lu  Gouvernement  dans  les  (ermino$,  A 
ce  dernier  titre,  il  agil  m'u-.  la  direction  «lu  Gouverneur 
et  veille  à  l'exécution  des  lois  et  tics  prescriptions  gé- 
nérales il  u  Gouvernement* 

Si  l'Alcade  ne  remplit  pas  le-  devoirs  <pie  la  loi  lui 
impose.  Le  Gouverneur  peut  déléguer,  mais  seulement 
pour  des  cas  spéciaux,  le  Juge  municipal  ou  1  un  de  ses 
suppléants  à  l'effet  de  remplir  les  devoirs  incombant 
au  (  ln't  de  la  municipalité, 

La  loi  reconnaît  à  l'Alcade  le  droit  de  désigner  dans 
les  agglomérations  importantes  les  Alcades  de  bçrrio  ou 
administrateurs  de  quartier. 

Les  tenienles  ou  adjoints  élus  sont,  dans  les  terminos 
divisés  «'u  districts,  placés  à  la  tôte  de  ces  différents 
districts. 

Par  son  étendue,  le  termina  municipal  ne  répond  pas 
à  nos  communes  Françaises  actuelles  :  il  rappellerai I 
plutôt  le  township  américain  ou  nos  municipalités  can- 
tonales de  la  <  lonstitution  de  l'an  III. 

Le  termina  municipal  peut  comprendre  un  certain 
nbre  de  centres  ruraux  ou  pueblos, 

Les  i>uclilos,  tout  en  faisant  partie  du  termina,  ont 
un  territoire  propre  et  uni'  administration  spéciale, 
mais  quelque  peu  rudimentaire. 

I  ne  Junte  composée  d'un   président  et  de  s  ou    \ 
membres   esl  élue   directement   par  les  habitants  du 
pueblo.  Le  premier  élu  remplit  les  fonctions  de  prési 
dent.  Les  élections  ont  lieu  dans  les  mêmes  conditions 
< 1 1 1 c-  1rs  i'Ici  lions  municipales  du  termine- . 

I.   1  yuntamiento  a  la  ^n  veillancc  de  l'administration 


I  'ADMINIS  in  \  I  l"N    COMMUN  U  I  239 

particulière  de  lu  Junte  et  cette  dernière,  pour  la  tenue 
de  mm  séances,   les  devoirs  et  les  obligations  de 
membres,  doit  se  conformer  aux  prescriptions  établies 
pur  lu  loi  pour  le  fonctionnement  de   l'administration 
municipale  du  Icrmino. 

Telle  est,  dans  ses  lignes  essentielles,  l'organisation 

administrative  de  l'Espagne  en  provinces  et  en  mu- 
nicipes.  Il  est  à  remarquer  toutefois,  que  les  Pays- 
Masques,  au  lieu  d'avoir  autant  d'assemblées,  provin- 
ciales que  de  provinces,  ont  une  Assemblée  commune 
pour  l'Alava,  lu  Biscaye  et  le  Gruipuzcoa,  qu'ils  jouis- 
sent d'une  plus  large  autonomie  économique  et  admi- 
nistrative que  les  autres  provinces  du  Royaume,  enfin 
qu'ils  ont  conservé,  transitoiremen t,  le  droit  de  dis- 
cuter, chaque  année»  à  Madrid,  le  chiffre  du  tribut  à 
payer  à  l'Etat  en  guise  de  contributions. 

C'est  un  dernier  vestige  des  antiques  fueros,  aux 
termes  desquels  les  Basques  devaient  être  affranchis  de 
l'impôt  personnel,  du  service  militaire  tel  que  l'établis 
sait  la  loi  sur  le  recrutement,  du  monopole  des  tabacs 
et  des  droits  de  douane,  remplacés  par  une  redevance 
annuelle. 

Pour  ne  pas  voir  s'éterniser  la  guerre  civile,  l'Espa 
gne  centralisatrice  s'est  vue  obligée  dans  les  provinces 
basques,  de  faire  sapait  au  vieux  principe  traditionnel 
qu'avait  proclamé  le  Code  d'Alphonse  le  Sage  :  o  l>u 
temps  naît  l'usage,  de  l'usage  la  coutume  el  de  la  cou- 
tume le  faero,  Wasce  del  tiempo  uso  et  viol  uso  cosl 
el  de  la  costume  fuero  »  (i), 

i      Exoi'li;  ilu  '  '"If  des  Srj.i-I'm  (i,s. 


240  BSP  AGNl 

La  division  administrative  à  laquelle  il  a  été  procédé 
en  [833  a,  d'ailleurs,  donné  lien,  pour  tout  le 
Royaume,  à  de  Légitimes  critiques.  Certaines  provinces 

sont  beaucoup  trop  réduites,  d'autres  désertes,  d'autres 
démesurément  étendues.  La  division  en  provinces  a 
été  faite  de  la  façon  la  plus  arbitraire  et  souvent  la 
plus  illogique,  sans  tenir  compte  des  traditions  et  des 
affinités  nationales.  Ajoutons  que,  contrairement  à  ce 
qu'avait  stipulé  l'article  /j  du  décret  royal  du  3o  no- 
vembre 1 833,  la  division  en  provinces  se  trouve  limitée 
à  l'organisation  administrative  proprement  dite. 

L'organisation  judiciaire  correspond  toujours  aux 
anciennes  divisions  régionales. 

L'Aadiencia  ou  Cour  d'Appel  de  Barcelone  étend  sa 
juridiction  sur  toute  la  Catalogne  ;  l'A udieneia de Sara- 
gosse  sur  tout  l' Aragon  ;  l'Atidiencia  de  la  Gorogne  sur 
toute  la  Calice.  De  même,  au  point  de  vue  militaire, 
les  quatorze  Capitaineries  générales  se  dénomment  les 
Capitaineries  générales  de  la  Nouvelle  Castillc,  de 
\  i h  née,  d'Aragon,  etc  ;  et  il  en  est  de  môme  pour  les 
I  niversités  et  les  diocèses  métropolitains  ou  Arche- 
vêchés. 

\uvsi  nu  mouvement  d'opinion  très  marqué  s'est-il 
affirmé  en  Espagne  pour  réclamer,  avec  de  nouvelles 
cl    larges   franchises    régionales,    nue    répartition    plus 

judicieuse  du  territoire  national. 

Dès   [8qI,  M.  Silvela.  en  déposant     comme  elicl     du 

Gouvernement,  un  vaste  projel    de    réforme  des  lois 

municipales  cl   | ,  i . .  \ aies,  s'eipi  imot  ainsi  : 

i  La  centralisation  a  été  si  désastreuse  que.  si  elle 
ne  reçoit  pas  un  allègemenl   immédiat,   elle   produira 


L  ADMINISTRATION    COMMUNAL!  -il 

un  ébranlement  général.  Il  faut  chercher  le  remède 
dans  la  restauration  de  cet  esprit  de  liberté  que  les 
institutions  historiques  ont  engendré  dans  notre  pairie, 
et  il  est  indispensable  en  premier  lieu  de  restaurer  les 
nulles  naturels  des  libertés  administratives,  de  faire 
revivre  les  organismes  qui  répondent  avant  tout  auî 
grandes  unités  provinciales  créées  non  seulement  par 
décret  ou  par  des  fictions  juridiques  plus  ou  moins 
heureusement  combinées,  niais  encore  nées  des  liens 
spontanés  entre  la  géographie,  les  traditions  et  les 
intérêts.  La  région  est  pour  nous  l'unique  élément 
dans  lequel  puisse  s'opérer  cette  fécondation,  l'unique 
élément  qui  puisse  servir  de  base  au  groupement  na- 
turel des  provinces,  l'unique  élément  aussi  qui  puisse 
autoriser  la  coordination  de  l'unité  politique  et  de  l'in- 
dépendance administrative,  objet  primordial  de  toute 
décentralisation  » . 

("/est  principalement  en  Catalogne  que  s'est  déve- 
loppé le  mouvement  régionaliste. 

Il  devait  en  être  ainsi,  car  la  Catalogue  a,  dans  la 
péninsule  espagnole,  une  physionomie  toute    spéciale. 

Elle  n'a  pas  seulement  son  histoire  à  elle,  comme 
l'Andalousie  ou  la  Galice.  Elle  est  peuplée  d'une  autre 
race  dont  les  caractères  sont  restés  très  tranchés,  pro- 
fondément imprégnés  de  l'empreinte  romaine,  alors 
que,  dans  les  autres  provinces  de  l'Espagne,  la  vieille 
influence  de  Home  s'est  perdue  dans  la  multitude  des 
invasions  germaniques  ou  sarrasines. 

I.n  outre,  dans  l'Espagne,  adonnée  avant  tout  à 
l'agriculture,  la  Catalogne  est  essentiellement  indus- 
trielle. 

16 


_  i  J  BS  PAO  if  1 

L'idée  régienaliste  se  développa  d'abord  on  (lalalo- 
ti n < •  sous  la  forme  d'Un  mouvement  littéraire,  a\oc  la 
i  i'-|.iuraliiMi  de  la  tète  dei  jeux  Moraux,  dont  le  pro- 
gramme était  de  mettre  en  honneur  ta  cullnre  do  la 
Langue  et  de  la  poésie  régionàlei 

Le  peuple  ([ui  retrouve  sa  langue  se  retrouve  Lui-* 
mêmej  disaient  Lea  premiers  initiateurs  du  régionalisme 
Gatalani  Pobkqueeatllenguacèbfti,  reeo&radfî  metViiti 

Le  mouvement  régionaliste  s'accentua  lorsque  lui 
promulgé  en  Catalogne,  en  1881,  le  nouveau  Gode 
ei\il  ospnyiiol .  La  Catalogne  avait  son  droit  couluniier 
d'autrefois,  sod  droit  ci\il  demeuré  presque  intact, 
ce  Code  catalan  que  Leplax  avait  présenté  au*  écono- 
mistes et  aus  juristes  comme  un  sujet  d'études  parti' 
culièrement  fécondes* 

I. 'amour-propre  de  la  Catalogne  s'exaspère  lors- 
qu'elle  se  vil  enlever  ses  lois  traditionnelle!)  que  les 
Souverains  les  plus  a  unitaires  *  avaient  respectées  et 
l'on  \ii  s'élever  à  côté  du  régionalisme  littéraire  le 
i  égionàlisme  juridique  i 

Mais  ce  tiiieul  surtout  les  traités  de  eonuncrce  qui, 
en  menaçahl  de  léser  les  intérêts  de»  Catalans,  généra- 
lisèrent elle/  eu\  le  mouvement  ré^ionalisle.  qui  fut 
liiin  pus  de  prendre  l'allure  d'un  mouvement  sépara- 
tiste. Lorsque  le  traité  île  commerce  avec  l'Angleterre 
tut  promulguée  un  immense  meetinâ  de  commerçants 

(sembla  à  Baroelone  et  délégua  des  eommiseaires  qui 
se  rendirent  à  Madrid  pour  porter  à  Alphonse  XII  le 
Mémorial  «les  chargée  delà  Catalogne,  \iemoria d'à* 
'/fvows,  oeuvre  de  l'éminent   éerivain  repuhlicain,  N  a- 

lenlin    Mmirall. 


l'aDMINISI  M  \  I  HA    COMMUNAL]  343 

i  (le  que  nous  désirons,  eoin  lunient-ils,  c'est  qu'on 
implante  en  Espagne  un  lystèniQ  régional  adéquat  aux 
conditions  actuelle!  de  chaque  région,  comme  dans  les 
différents  K  ta  ta  de  l'Àutriche-Hongrie,  ds  L'Alterna 
cl  do  la  Grande-Bretagne.  (  e  système  fui  d'ailleurs 
déjà  appliqué  à  l'Espagne  au  temps  de  notre  gran- 
deur ». 

Les  quatre  provinces  d«  lu  Catalogne,  les  plus  labo- 
rieuses et  partant  les  plus  riches  de  l'Espagne  pavaient 
à  l'Etat  lu  contribution  de  beaucoup  la  plue  fofte  et 
voyaient  s'engloutir  dans  le  gouffre  général  du  budget 
Ida  sommes  qu'elles  auraient  voulu  pouvoir  consacrer, 
un  moins  partiolleinenti  au  développement  de  leÛJ  ou- 
tillage économique,  à  li  multiplication  des  moyens  de 
communications,  à  la  réfection  de  ces  vieille-  rOUles 
impraticables  qualifiées  dédaigneusement  do  routes 
(i  africaines  >  et  qui  devraient  ôtre  ci  européanisées  », 
à  la  construction  d'un  vaste  réseau  de  chemins  de  fer 
d'intérêt  local,  à  une  dotation  plus  large  des  oeuvres 
d'enseignement  ou  des  œuvres  d'assistance)  des  éta- 
blissements universitaires  ou  des  établissements  hos- 
pitaliers. 

Les  désastres  coloniaux,  fermant  à  l'industrie  de  la 
Catalogne  les  précieux  débouchés  commerciaux 
des  Colonies,  achevèrent  de  surexciter  les  esprits, 
mais  les  Catalans  ne  tardèrent  pas  à  se  rendre 
compte  que,  pour  faire  aboutir  leurs  revendications,  il 
ni-  fallait  pas  se  confinât  dans  un  esprit  parlicula- 
liste,  qu'il  convenait  au  contraire  de  généraliser 
l'œuvre  de  réfor réclamée, 

Ce  fut  la  tâche  que  s'assigna  la  Solidarité  catalane, 


•J  i  i  BSf  \o\i 

Mlle  réclamait,  comme  le  plus  sur  moyen  pour 
l'Espagne  de  se  relever  et  de  se  ressaisir  : 

La  création  d'organismes  régionaux  ayant  leur  per- 
sonnalité financière  el  des  attributions  importantes  en 
matière  d'enseignement,  de  bienfaisance,  de  travaux 
publics  ; 

L'autonomie  des  municipalités  (muïlicipios)  ; 

La  création  d'organismes  régionaux  pour  l'étude 
des  changements  nécessités  dans  le  droit  civil  par  l'é- 
volution des  mœurs  et  du  progrès  économiques. 

De  ce  mouvement  sont  nés  les  projets  de  loi  qui, 
au  cours  de  ces  dernières  années,  ont  passionné  les 
Cortès,  les  projets  sur  les  communautés  provinciales 
ou  municipales  (Hancomunidades 

Il  s'agit  d'autoriser  la  Fédération  de  municipalités 
ou  de  Députations  provinciales  «  se  donnant  la  main  » 
—  c'est  la  signification  du  mot  espagnol  \fancomanida- 
des  —  en  vue  de  l'administration  d'intérêts  communs. 

Un  des  premiers  actes  du  Ministère  Dato  a  été  de 
soumettre  à  la  signature  du  Hoi  un  décret  consacrant 
le  principe  de  la  réforme  qu'avait  élaborée  le  Cabinet 
présidé  par  le  comte  de  Komanonès. 

Le  décret  roval  proclame  le  droit  à  l'union  des  mu- 
nicipes  et  des  provinces  comme  étant  une  conséquence 
directe  du  droit  d'association  el  il  spécifie  : 

L'Administration  en  commun  une  lois  constituée 
pourra  solliciter  de  l'Administration  centrale  la  délé- 
gation de  services  déterminés.  Cette  proposition  sera 
transmise  ensuite  au  Gouvernement.  E)n  aucun  cas,  la 
concession  ne  pourra  être  accordée  sans  une  loi  spé- 
ciale votée  par  les  (  lortès  ». 


l'admjnisthation  communale  245 

Le  Mancomunidad  aurait  une  assemblée  régionale 
pour  la  gestion  d'intérêts  régionaux.  Celle  ci-serail 
appelée,  notamment,  à  s'occuper  de  la  construction  et 

de  la  conservation  des  routes  figurant  sur  le  plan  géné- 
ral de  l'Etat  pour  la  région,  île  la  construction  de 
chemins  de  fer  et  de  ports,  d'oeuvres  d'assainissement, 
travaux  d'irrigation,  canaux  et  réservoirs  (pantanas)  ; 
de  l'établissement  de  lignes  télégraphiques  ou  télépho- 
niques inter  urbaines,  de  la  création,  du  développe- 
ment et  de  l'entretien  des  institutions  d'assistance  et 
de  bienfaisance  etc. 

On  aboutirait  ainsi  à  une  circonscription  adminis- 
trative englobant  plusieurs  provinces  et  groupant  les 
villes  et  les  territoires  dont  les  intérêts  économiques 
sont  communs.  L'Etal  centralisé  ne  peut  suffire  à  toutes 
les  tâches  qu'il  prétend  assumer  ;  son  budget  est  in- 
suffisant pour  pourvoir  aux  dépenses  indispensables  à 
la  mise  en  valeur  du  Royaume.  Les  grands  travaux 
publics  les  plus  urgents  sont  négligés  ou  ajournés 
dans  des  conditions  désastreuses;  la  création  de  régions 
organisées  permettrait  de  trouver  des  ressources  pour 
ces  grands  travaux. 

Et  l'on  aurait  un  remède  à  opposer  à  la  détresse  la- 
mentable  dans  laquelle  végètent  la  plupart  des  services, 
au  défaut  de  moyens  de  communication,  à  la  navrante 
misère  des  établissements  hospitaliers. 

Ce  serait  la  défense  des  intérêts  économiques  régio- 
naux contre  la  tyrannie  de  la  bureaucratie  centralisée 
et  aussi  contre  la  trop  fréquente  incompétence  parle- 
mentaire. 

Les  Assemblées  régionales  enfin  pourraîeni  former  à 


•_'  il)  1  SP  \t.M 

la  vie  publique  un  personnel  nouveau,  mieux  initié  a 
sa  mission,  tandis  que  le  contrôle  de  l'opinion  *o  ferait 
plus  vigilant  pour  la  gestion  d'intérêts  dont  les  ci- 
toyens percevraient  mieux  l'importance. 

On  ne  saurait,  dang  ces  conditions,  s'étonner  de  la 
faveur  avec  laquelle  le  mouvement  régionalitte  a  été 
accueilli  par  l'élite  intellectuelle  de  l'Espagne, 

Ani\era-i-ellc  ainsi,  à  moraliser  l'administration, 
"i  la  dégager  de  la  cynique  exploitation  des  C'eciguei? 

L'expérience,  en  *  *  >  »  1 1  cas,  méritera   d'être  attentive* 

ment  survie  en  France,  car,  pour  nous  aussi,  elle 
pourra  apporter  d'utiles  leçons  <!<•  choses.  A  la  condi- 
tion de   se    garder    d'affaiblir    l'unité    nationale    et    la 

souveraineté  de  l'Etat,  le  régionalisme,  sagement 
dirigé,  doit  être  un  instrument  fécond  de  développe* 
ment  économique  et  de  progrès  social. 


LA   JUSTICE 


V 
LA  JUSTICE 


L  ORGANISATION    JUDICIAIRE    DE    I.  ESPAGNE 

\.a  justice  civile.  —  Le  Juge  municipal,  Juez  municipal.  — 
Le  Juge  d'arrondissement  ou  de  partido,  juge  de  première 
instance,  Juez  de  primera  instancia.  —  La  Cour  d'Appel, 
Audiençia  territorial. 
La  justice  criminelle.  —  Les  menues  infractions  (J'altas)  et  le 
Juge  municipal.  —  L'appel  devant  le  Juge  de  première 
instance. —  Les  délits  et  la  Chambre  criminelle  de  l'.\u- 
diencia  territoriale.  L'Audiencia  provincial  de  lo  criminal. 
—  Les  crimes.  —  La  Cour  d'assises  ou  Tribunal  du  jury, 
.Inrailn. 
Le  Tribunal  suprême  [Tribunal  supremo). 

Le  recrutement  des  magistrats.  —  Le  concours.  —  La 
Jmiia  de  examen  y  de  qualijicacion.  —  Les  aspirants  à  la  ju- 
dicature  (Aspirantes  a  la  jadicatura  .  - — ■  L'avancement.  — 
Les  traitements  de  début  de  entrada,  d'avancement  de 
ascenso,  de  fin  de  carrière,  de  termina.  —  La  hiérarchie 
judiciaire.  —  Les  parités  d'office.  —  Les  parquets.  — 
Les  inspections.  —  Les  auxiliaires  de  la  justice.  — Collège 
d'avocats  et  d'avoués.  —  .Notarial.  —  Conclusions. 

L'organisation  judiciaire  de  l'Espagne  comporte  : 
Pour  la  juridiction  civile,       Le  Juge  municipal,  Juez 
municipal  : 


■J.)U  ES!  AGN] 

Le  Julio  ilo  partido  ou  Juge  d'arrondissement,  appelé 
aussi  .luge  tic  première  instance,  Juez  de  primera  ins- 
tancia  ; 

La  Cour  d'appel,  Audiencia  territorial; 

P<>iir  la  juridiction  criminelle,  —  Le  Juge  munici- 
pal statuant  sur  les  menues  infractions  (fallas); 

Le  Juge  de  partido,  statuant.  <'n  appel,  sur  les  in- 
fractions delà  compétence  du  Juge  municipal,  mais  ne 
pouvant  connaître  de  délits  plus  graves  ; 

La  Chambre  criminelle  de  /'  ludiencia  territorial  et 
V Audiencia  provincial,  spécialement  créées  pour  juger 
les  délits,  delitos,  excédant  la  compétence  du  Juge 
municipal  el  ne  rentrant  pas  dans  la  catégorie  des  faits 
criminels  relevant  des  Cours  d'assises; 

La  Cour  d'assises  ou  Tribunal  du  jury,  jnrado,  sta- 
tuant en  premier  et  dernier  ressort  sur  les  crimes. 

Toutes  ces  diverses  juridictions,  civiles  ou  crimi- 
nelles, sont  placées  sous  le  contrôle  du  tribunal  su- 
prême, Tribunal  supremo  dont  le  pouvoir  régulateur 
doit  assurer  dans  tout  le  Royaume  la  fidèle  observation 
des  lois.  Le  Tribunal  suprême  est  investi,  en  Espagne, 
des  attributions  qui  incombent,  en  Fiance,  à  la  Cour 
de  Cassation, 

Noua  étudieront  toul  d'abord  la  constitution  de 
toutes  ces   juridictions   et    nous   rechercherons   dans 

quelles  conditions  fonctionne  auprès  d'elles  l'institution 
du  Ministère  public. 

Vins  étudierons  ensuite  les  règles  qui  président  au 
M-,  i  ulemenl  de  la  magistrature  el  qui  protègent  son  in- 
dépendance 

Enfin,   nous  compléterons  cel  exposé  par  quelques 


I.A     .ll'STIia  •_'.")  I 

notions  sommaires   concernent   les   auxiliaires  de  la 

justice. 

m  BTIi  r    «  ivii.i 

Nous  avons  vu,  an  chapitre  précédent,  que  le  lerri- 
loire  îles  provinces  était  divisé  en  munieipes  mi  Icnni- 
ROfi,  devant  représenter  une  population  d'an  moins 
deux  mille  lialiitants. 

Dans  chaque  municipe  existe  un  Tribunal  municipal. 
Certains  nmnicipes,  d'une  importance  exceptionnelle, 
peuvent  avoir  plusieurs  juges  municipaux, 

En  principe,  le  Tribunal  municipal  est  composé  d'un 
seul  juge  titulaire,  (jne:  municipal)  assisté  d'un  sup- 
pléant. 

Le  Juge  municipal  est  compétent,  en  matière  civile  : 

i"  Pour  dresser  les  procès-verbaux  de  conciliation  ; 

•>  l'uni  exercer  la  juridiction  volontaire  dans  les  cas 
prévus  par  la  loi  ; 

.'»  l'our  connaître,  en  première  instance  et  sur  dé- 
bat oral,  des  demandes  qui  n'excèdent  pas  a5û  pesetas; 

/l°  Pour  décider  toutes  mesures  conservatoires  ou 
urgentes  en  matière  de  succession  testamentaire  ou  til> 
intestat  dans  les  localités  où  ne  siège  pas.  un  Juge  de 
première  instance,  mais  à  charge  d'aviser  immédiate- 
ment ce  damier  des  mesures  ordonnées; 

fv  Pour  décider,  d'une  manière  générais,  tontes  me- 
sures   présentant   un    caractère  d'in-ence  à  charge  d'en 

rendra  compte  au  Juge,  de  première  instance  ; 
6°  Pour  connaître  de  toutes  autres  constatations  spé*1 

QielemenI  placées  l'ai    la    loi  dans  ses  attribution- 


.'•)■-!  ESPAGNE 

Ajoutons  que  le  juge  municipal  est  aussi  chargé  de 
célébrer  en  Espagne  les  mariages  civils. 

Le  Juge  municipal  n'est  pas  un  magistrat  de  carrière. 
La  loi  n'exige  de  lui  aucunes  connaissances  juridiques. 
Elle  lui  demande  seulement  d'être  citoyen  espagnol, 
âgé  d'au  moins  •>..">  ans,  de  savoir  lire  et  écrire  et  d'être 
domicilié   dans  le   territoire  soumis  à   sa  juridiction. 

C'est  le  «  vieillard  vertueux  »,  auquel  nos  Consti- 
tuants de  1789  voulaient  voir  confier  les  fonctions  de 
Juge  de  paix . 

Le  Juge  municipal  est  nommé  pour  deux  ans  par  le 
Premier  président  de  VAudiencia  territorial  ou  Cour 
d'appel  du  ressort  sur  une  liste  de  trois  candidats  pré- 
sentés par  le  Juge  de  première  instance. 

Les  fonctions  de  Juge  municipal  sont  obligatoires, 
sauf  pour  les  députés  cl  sénateurs  et  pour  les  sexagé- 
naires, mais  le  juge  peut,  pendant  quatre  ans  après  sa 
sortie  de  charge,  refuser  une  nouvelle  désignation.  Il 
ne  reçoit  pas  de  traitement  fixe  ;  il  est  rémunéré  au 
inoNcn  d'honoraires  prévus  par  les  tarifs  judiciaires 
pour  chaque  affaire, 

Le  juge  suppléant  est  nommé,  comme  le  juge  titu- 
laire, par  le  Premier  président,  mais  les  trois  candidats 
parmi  lesquels  il  doit  être  choisi  --ont  proposés  par  le 
Juge  municipal,  non  par  le  Juge  de  première  instance. 

I.e  juge  suppléant  s  les  mêmes  droits  et  les  mêmes 
obligations  que  le  juge  titulaire. 

Les  fonctions  du  Ministère  public  auprès  du  Tribunal 
municipal  Boni  remplies  par  nu  délégué  dn  Procureur 

léral    fiscal)  «le  I'  iudiencia  territorial. 

Vu   dessus  du   Tribunal  municipal  est  placé  dans  la 


la  ji  -ru  i.  253 

hiérarchie  judiciaire  espagnole;  le  Tribunal  de  district 
ou  Tribunal  de  partido,  qualifié  de  Tribunal  de  pre- 
mière instance  (déprimera  instancia). 

D'après  la  loi  organique  du  i5  septembre  1^70  sur 
l'organisation  judiciaire  [Ley  provincial  sobre  organiza- 
eion  del  poder  judicial),  les  tribunaux  de  partido  ou  de 
première  instance  devaient  être  composés  de  plusieurs 
juges  (colegiados).  Des  raisons  surtout  d'ordre  budgé- 
taire ont  fait  abandonner  celle  conception  pour  revenir 
à  l'institution,  d'ailleurs  traditionnelle  en  Espagne,  du 
juge  unique. 

Le  .luge  de  partido  ou  juge  de  première  instance  est 
ebargé  par  la  loi  ; 

i"  De  procéder  à  tous  l'églements  de  compétence  en- 
tre les  juges  municipaux  de  son  ressort  ; 

2U  D'exercer  la  juridiction  volontaire  dans  tous  les 
cas  où  elle  n'appartient  pas  au  Juge  municipal,  notam- 
ment en  ce  qui  concerne  les  demandes  alimentaires,  la 
désignation  des  tuteurs  et  curateurs,  l'assignation  d'un 
domicile  provisoire  aux  femmes  en  instance  de  sépa- 
ration de  corps  ou  aux  enfants  OU  pupilles  maltraités 
par  leurs  parents  ou  tuteurs,  les  autorisations  de  plai- 
der, les  autorisations  de  mariage  au  cas  de  décès,  d'ab- 
sence, d'interdiction  des  parents  ou  curateurs;  l'ou- 
verture tles  testaments,  la  vente  îles  biens  des  mineurs 
et  incapables,  etc.,  etc. 

>  De  statuer  en  première  instance  sur  toutes  les 
affaires  autres  que  les  litiges  de  minime  importance 
(liuii  connaît  le  Juge  municipal  ;  sur  certaines  récusa- 
tions de  juge  cl  sur  les  demandes  en  responsabilité  ci- 
vile contre  les  juges  municipaux  ; 


25  i  l  SPAGNl 

V  De  connaître,  en  appel,  des  jugements  rendu*  pat 
K's  jugel  municipaux. 

Les  fonctions  du  Ministère  public  sont  remplies  au- 
près du  Tribunal  de  première  instance)  *oii  par  le  Pro- 
cureur général  da  VAudienoia  ou  ses  délégués)  s(»ii  par 
les  fiscales  municipaux.  Le  Procureur  général  près 
r.lm/tV/icid  ou  Gour  d'appel  est  spécialement  chargé  de 
défendrai  soit  6n  personnel  soil  par  ses  délégués,  de- 
vant le  Tribunal  do  première  instance,  les  intérêts  de 
l'Etat,  do  l'Administration  et  des  Etablissements  d'en- 
seignement ou  de  bienfaisance.  Les  fiscales  municipaux, 
à  la  condition  d'être  pourvus  du  titra  de  lelradot^  oc- 
cupent le  siège  du  Ministère  public  dans  toutes  les 
affairas  où  le  Ministère  publia  doit  être  entendu  con- 
formément au  Code  de  procédure  civile  ou  à  certaines 
Lois  spéciales.  Il  est  à  remarquer  que  le  Procureur  gé- 
néral peut  confier  à  des  avocats  le  soin  de  le  représen- 
ter! Pour  faciliter  l'action  du  Ministère  public,  la  loi 
spécifie  que  les  causes  dana  lesquelles  son  intervention 
est  exigée  devront  être  portées  devant  le  Juge  de  prf> 
mière  instance  île  la  ville  où  Biège  une  ladisnoia.  Le 
Loi  organique  judiciaire  avait  prévu  l'institution  auprès 
des  tribunaux  de  première  instance  d'Officiers  du  Mi- 
nistère public,  spécialement  attachés  à  cette  juridiction, 
[promotorei  f.eoal&s)\  mais  cette  institution  l  disparu 
pour  être  remplacée,  <'u  1882,  par  l'organisation  «pic 
nous  venons  d'exposer. 

I. 'appel  de*  jugements  rendus  pa r  le  Iriliunal  de  pre- 

mière   instance  est   porté  devant  la  Gour  d'Appel  de 
1  essort    l  ii'lirn,  m  territorial. 

!.•  -   l  udienciai  territoriale*  sont  au  nombre  de  quiniei 


LA   .11  BTICl 

Irei/o  pour  la  péninsule,  delll  poui  le^  îles  lialéarcs  et 
les  Canaries.  Loi  troi/.e  Cours  d'Appel  do  la  péninsule 
li&gefil  a   Madrid,   la   Corogne,  Ovicdo,  Murgos.  Sara 
imssu,    l'anipoluiie,    lUi iiflonc,    \  aleneo.  Albacelc,  Sé- 
ville,  Grenade,  (lacères  ri  \  alludolid. 

Chaque  AnJiciiria  territorial  comprend  un  président 
(le  Premier  président  de  nos  Cours  d'\ppel  Françaises), 
des  présidents  de  chambre  Cl  un  nombre  déterminé  de 
conseillers  [tftatjiistfilddi).  L'ÀVidieMia,  à  la  différence 
du  Tribunal  municipal  cl  du  Tribunal  de  pi -ornière  ins- 
tance,   implique   non   plus    le    juge   unique,    mais    la 

pluralité  des  luges. 

En  principe,  les  A udiencias  se  composent  d'au  moins 
trois  Chambres  (salas)',  d'une  Chambre  de  gouverne- 
ment ou  de  discipline  (de  tjnbimw  cl  de  deux  Cham- 
bres de  justice  de  jusfi'Ki),  l'une  pour  les  affaires 
civiles»  l'autre  pour  les  affairés  correctionnelles. 

Les  Chambres  civiles  doivent  compter  quatre  con- 
seillers, outre  le  président. 

I.u  dehors  de  leur  rôle  de  juridiction  d'appel  pour 
les  jugements  rendus  par  le  .luge  de  première  instance, 
les  AudièMlàs  territoriales  ont  pour  mission  : 

De  régler  la  compétence  entre  juges  municipaux 
appartenant  à  des  pnrtidus  différents  de  même  ressort  et 
entre  juges  de  première  instance  du  ressort; 

l)e  statuer,  en  première  instance,  sur  la  récusation 
de  leurs  propres  membres  ou  déjuges  de  partido  ; 

De  statuer  sur  la  responsabilité  civile  de-»  jugea  de 
partido  et  des  juges  municipaux; 

De  statuer  sur  les  recours  {rtcvwot  de  fnerza)  formés 


256  fcSPAGNl 

contre  les  décisions  des  juges  ecclésiastiques,  suffraganls 
ou  métropolitains,  en  matière  ecclésiastique. 

Les  fonctions  du  Ministère  public  auprès  des  Au- 
diencias  territoriales  sont  remplies  par  un  Procureur 
général  i  fiscal),  un  substitut  du  Procureur  général, 
(teniente  fiscal)  et  un  certain  nombre  de  collaborateurs 
du  Procureur  général  designés  sous  la  qualification 
d'Avocats  fiscaux  [Abogados  fiscales). 

Enfin,  on  trouve  auprès  des  Cours  d'appel  divers 
auxiliaires  qui  font  partie  du  corps  judiciaire,  avec  le 
titre  de  secrétaires  (secrétariat;),  vice  -secrétaires,  (vice- 
secretarios),  officiers  de   la  Chambre  (ojiciales  île  sala). 

JUSTICE    CRIMINELLE 

Le  Juge  municipal  connaît,  en  matière  pénale  et  en 
première  instance,  des  menues  infractions  que  le  droit 
espagnol  englobe  sous  la  dénomination  générique  de 
faltas,  simples  fautes,  contraventions  ou  délits  contra- 
ventionnels.  Les  condamnations  qu'il  prononce  peuvent 
être  frappées  d'appel  devant  le  Juge  de  première 
instance  ou  Juge  de  partido. 

Le  Juge  municipal  est  chargé,  d'autre  part,  de  pro- 
céder aux  premières  mesures  d'instruction  criminelle  et 
d'exécuter  toute  mission  que  lui  confie  le  Juge  de 
partido. 

Le  Juge  de  partido  n'est  pas,  comme  les  magistrats 
de  nos  tribunaux  de  première  instance,  chargé  déjuger 
les  délits  correctionnels,  En  ta  ni  que  juge,  il  n'a  qu'à 
statuer  en  appel  sur  les  décisions  rendues  par  le  Juge 
municipal,  à  régler  la  compétence  entre  juges  muni- 
i  ipaux  de  son  ressorl  el  à  statuer  sur  les  récusations, 


LA    -H  STK  i  25Ï 

Mais  le  Juge  de  partido  remplit  lea  fondions  de  juge 
d'instruction.  C'est  à  ce  titre  seulemenl  qu'il  (.--4  appelé 
à  connaître  des  délits  H  des  crimes,  pour  réunir  les 
éléments  d'une  information,  non  pour  prononcer  contre 
les  coupables  des  mesures  de  répression. 

L'instruction  à  laquelle  procède  le  Juge  de  partido 
est  secrète.  L'avocat  qui  révèle  le  secrel  de  l'instruc- 
tion est  passible  d'une  amende  de  5o  à  5oo  pesetas.  Le 
prévenu  a  le  droit  d'assister,  soit  seul,  soit  avec  son 
défenseur,  à  toutes  perquisitions  et  visites  de  lieux  et 
d'adjoindre,  s'il  le  juge  utile,  un  expert  de  son  choix  à 
celui  qu'a  désigné  le  magistrat  instructeur. 

Lorsque  l'information  est  close  par  le  -luge  d'ins- 
truction, le  Ministère  public,  s'il  y  a  lieu  de  suivre, 
requiert  que  l'affaire  soit  renvoyée  au  tribunal  compé- 
tent. C'est  au  Ministère  public,  ou  si  le  droit  de  pour- 
suivre est  réservé  à  la  partie  lésée,  au  plaignant  qu'il 
appartient  de  qualifier  les  faits. 

Les  ordonnances  (résoluciones)  du  juge  instructeur 
peuvent  donner  lieu  à  divers  recours  :  recours  de 
reforma  devant  le  juge  lui-même;  recours  de  apelacion 
devant  le  tribunal  compétent  pour  statuer  sur  le  débat 
oral,  recours  de  queja  devant  la  juridiction  supérieure 
contre  les  actes  et  résolutions  qui  ne  comportent  pas  de 
apelacion, 

La  répression  des  délits  appartient,  en  principe,  à  la 
Chambre  criminelle  de  I'  [udiencia  territorial. 

Celle-ci  connail  du  délit  au  premier  et  dernier  res- 
sort, avec  débat  oral  et  public  (enjuicio  oral  y  publico). 

Mais,  afin  de  décharger  VAudiencia  territorial  d'un 
fardeau  qui  eût  été  trop  lourd  et  de  diminuer  les  frais 

17 


258  I  SPAGN] 

de  justice  en  rapprocha  ni  Le  juge  tin  justiciable,  le 
législateur  espagnol  a  créé  des  ('mus  provinciales  cri- 
minelles, Audiencias  de  lo  oriminal.  Leur  nombre,  ixéà 
q5  en  [88a,  a  été  réduit  à  >.'i  en  189a. 

Elles  ont  leur  Biège  dans  chacun  tics  chefs-lieux  de 
province  où  il  n'existe  pas  à'Audiencia  terrUoriah  Ces 
nouvelles  Cours  provinciales  demeurent,  au  surplus, 
hiérarchiquement  subordonnées  à  VAudiencia  territorial. 

Biles  peuvent  être  considérées  connue  des  délégations 
permanentes  de  cette  dernière,  établies  dans  des  villes 
importantes  du  ressort,  pour  faciliter  l'exercice  de  la 
justice  répressive. 

Les  juridictions  criminelles  ne  peuvent  juger  que  si 
trois  magistrats  au  inoins  prennent  part  à  la  décision. 
Ghacune  des  [udiencias  compte,  outre  le  président,  un 
nombre  de  deux  à  cinq  conseillers,  sans  parler  des 
suppléants.  Ellles  Be  divisent)  si  leur  personnel  est  suf- 
fisant, en  deux  sections  en  vue  de  La  prompte  expédition 
des  affaires.  Elles  siègent,  habituellement,  au  chef-lieu 

de  leur  circonscription  respective,  mais  peinent  aussi, 
sur  décision  de  leur  président,  se  transporter  dans  une 
autre  ville. 

Les  arrêts  rendus  en  premier    et    dernier  ressort  par 

leux  catégories  de  juridictions,  Lurfianctai  terrUo- 
riales  ou  [udiencias  de  lo  criminal  peuvent  être  L'objet 
•  le  trois  soi  les  de  recours  : 

Recours  da  suplioa  devant  la  juridiction  même  qui 

,1   jugé,  alori  qu'il   n'existe  pas  d'autre  voie  de  recoin  s  ; 

l; 1rs  en  casacion  devant  le  Tribunal  suprême  pour 

\  ii il .1 1 11  h  1  île  la  loi  on  \  11  e  île  Im  me  ; 

Recours  en  révision  devant   le  même  tribunal  dans 


LA    .11  si  i<  B  250 

certains  cas  d'erreur  judiciaire  manifeste  limitativemeM 

[)K'\ us  par  la  loi. 

Les  crimes  soul  déférés  aux  Cours  d'assises  OU 
u  Tribunaux  de  jurés  ». 

Le  jury,  introduit  en  Espagne  par  la  I  lonstitutiôri  de 
i8(ii),  avait  été  supprimé  en  1875.  Il  a  été  rétabli  par 
la  loi  du  ao  avril  1888. 

Le  Tribunal  de  jurés,  organisé  par  cette  loi,  présente 
une  composition  analogue  à  celle  de  nos  Cours  d'Assis- 
ses  Iran  rai  ses. 

Des  jurés,  au  nombre  de  la,  avec  adjonction  éven- 
tuelle de  a  jurés  supplémentaires,  statuent  sur  le  lait. 
La  Cour,  qui  qualifie  en  droit  les  laits  déclarés  cons- 
tants par  le  jury,  prononce  la  peine  et  statue,  s'il  J  a 
lieu,  sur  les  réparations  civiles.  Trois  magistrats  for- 
ment la  Cour. 

La  compétence  des  Cours  d'Assises  est  limitée  : 

Aux  infractions  graves  énumérées  dans  l'article  4  de 
la  loi  et  qui  correspondent  aux  infractions  que  notre 
Code  pénal  qualifie  crimes  ; 

Aux  délits  de  presse,  à  l'exception  des  délits  de 
lèsemajesté  et  des  délits  de  diffamation  ou  d'injures 
envers  des  particuliers,  lesquels  restent  soumis  à  la 
juridiction  îles  Audiencias. 

Ajoutons  que  la  loi  du  ao  avril  1888  a  soustrait  à  la 
juridiction  du  jury  pour  les  réserver  à  celle  du  Tribu- 
nal suprême  un  certain  nombre  d'infractions  spéciales 
sur  lesquelles  nous  aurons  à  nous  expliquer  lorsque  nous 
étudierons  la  constitution  de  cette  liante  juridiction. 

Les  fonctions  de  juré  sont  obligatoires  pour  tout 
Espagnol  laïque,  âgé  de  3o  ans,  ayanl  la  jouissance  de 


260  ESPAGNE 

ses  droits  civils  et  politiques,  sachant  lire  clôt-rire, 
chef  de  Famille  domicilié  depuis  quatre  ans  dans  sa 
commune.  Les  causes  d'incapacité,  d'exclusion,  d'in- 
compatibilité et  de  dispense  sont  celles  qui  Egarent 
dans  la  plupart  des  lois  similaires. 

I  ne  première  liste  préparatoire  des  jurés  est  dressée 
dans  chaque  termine»  municipal  par  une  commission 
composée  du  juge  et  du  fiscal  municipal,  de  l'Alcade  ou 
de  son  adjoint,  de  trois  propriétaires  et  du  commerçant 
le  plus  imposé  du  municipe.  Les  réclamations  auxquelles 
cette  première  liste  préparatoire  donne  lieu  sont  jugées 
par  la  Chambre  de  discipline  de  VAudiencia  territorial 
ou  par  la  Cour  provinciale.  Une  deuxième  liste  et 
dressée  par  une  nouvelle  commission  dite  de  partido, 
présidée  par  le  .luge  de  première  instance  et  composée 
avec  lui  du  plus  ancien  curé  et  du  plus  ancien  institu- 
teur du  district  et  de  six  contribuables  tirés  au  sort, 
[\  parmi  les  ia  propriétaires  les  plus  imposés,  9  parmi 
les  6  commerçants  les  plus  imposés.  Cette  commission 
choisit  sur  la  première  liste  les  citoyens  qu'elle  consi- 
dère comme  les  plus  aptes  à  remplir  les  fonctions  de 
juré  jusqu'à  concurrence  du  dixième  du  total  des  noms 
portés  sur  la  dite  liste.  Si  ce  dixième  n'atteint  pas 
2O0  noms,  on  complète  ce  chiffre  minimum,  saut  à 
s'.ii  rèter  à  i5o,  si  la  liste  municipale  ne  comprend  pas 

500  noms. 

Les  listes  municipales  on  des  ..  chefs  de  famille  Q  et 
lei  listes  de  (i  rapacités  >>,  dressées  par  la  seconde  com- 
mission sonl  Iransmises  à  la  Cour.   Celle  ci  dresse  la 

lisle  définitive  du  district,  611  prenant  BOO  noms  sur  la 

première  liste  et  ioo  sur  la  seconde. 


LA    JUSTICI 


Les  Cours  d'Assises  tiennent  trois  sessions  par  an. 
Pour  chaque  session,  il  est  tiré  au  sort,  en  séance  de 
YAudiencia,  20 jurés  de  la  liste  des  «  chefs  de  famille  » 
et  iG  de  celle  des  «  capacités  »,  plus  6  jurés  supplé- 
mentaires résidant  dans  la  ville  où  doivent  avoir  lieu 
les  Assises  Au  moment  du  tirage  au  sort  de  la  liste  de 
session,  des  récusations  peuvent  être  proposées  pour 
cause  déterminée.  Indépendamment  de  ces  récusations, 
le  Ministère  public  et  l'accusé  conservent  le  droit,  lors 
du  tirage  au  sort  du  jurv  de  jugement,  de  récuser 
concurremment  sans  donner  de  motif,  douze  jurés. 

La  procédure  suivie  devant  la  Cour  d'Assise  offre  la 
plus  grande  analogie  avec  celle  qu'a  tracée  notre 
Code  d'instruction  criminelle.  Mentionnons  cjuc  l'Es- 
pagne  a  conservé  l'obligation  pour  le  président  de  pré- 
senter un  résumé  des  débats  avant  leur  clôture.  Les 
délibérations  du  jury  ont  lieu  dans  un  local  où  nul 
n'est  admis  à  pénétrer.  Le  vole  est  nominal.  Chaque 
juré  vole  à  haute  voix,  après  avoir  prèle  serment. 

Le  verdict  est  rendu  à  la  majorité  absolue.  Le  par- 
tage îles  voix  sur  la  question  de  culpabilité  entraine 
l'acquittement  ;  sur  la  question  des  circonstances  aggra- 
vantes, le  rejet  des  circonstances  aggravantes. 

Des  circonstances  atténuantes  emportant  abaisse- 
ment de  l'échelle  des  peines  peuvent  être  admises  en 
faveur  de  l'accusé. 

Lorsque  la  Cour  est  unanime  à  penser  que  le  jurv 
s'eal  lourdement  trompé  dans  L'application  de  la  cul- 
pabilité de  L'accusé,  elle  esl  autorisée  par  la  loi  à  ren- 
voyer L'affaire  à  une  autre  session. 

Les  arrêts  des  Cours  d'Assises  peuvent  être   attaqués 


"JtrJ  BSPAGNJ 

pat  la  voie  du  pourvoi  en  révision  dana  l rois  cas  limi- 
tativement  prévus  par  l'article  <i.Y'i  du  Code  do  procé- 
dure criminelle  : 

a)  Lorsque  plusieurs  personnes  ont  été  successive- 
nu'il  condamnées  pour  une  même  infraction  imputable 
à  un  seul  coupable  ; 

h)  Lorsqu'un  accusé  a  été  condamné  pour  homicide, 
alors  que  la  prétendue  victime  est  reconnue  vivante; 

c)  Lorsque  la  condamnation  a  été  prononcée  sur  la 
production  de  documents  ultérieurement  reconnus 
faux. 

Dans  tous  les  cas,  les  arrêts  de  condamnation  pro- 
noncés par  les  Cours  d'Assises  ou  Tribunaux  de  juiés 
peuvent  être  l'objet  d'un  pourvoi  en  cassation  devant 
le  Tribunal  suprême  pour  vice  de  forme  ou  violation 
de  la  loi. 

Le  législateur  de  1888  ne  s'élaii  pas  décidé  sans 
hésitation  à  rétablir  en  Espagne  l'institution  du  jury. 
Sous  le  titre  «  Dispositions  spéciales  »,  la  loi  prévoit 
pour  le  Gouvernement  la  faculté  de  suspendre  le  juge 

meut  par  jurés  «  s'il  se  produit  des  laits  commandant 
cette  mesure  en  vue  d'assurer  la  bonne  et  libre  admi- 
iii-i ration  de  la  justice  ». 

La  suspension  peui  être,  soit  absolue,  soit  limitée  à 
certaines  catégories  d'infractions,  soit  appliquée  seule* 
ment  au  territoire  d'une  ou  deui  provinces.  Lorsqu'il 
ii  d'une  suspension  limitée,  soii  à  un  certain 
m  01  h  bre  d'infractions,  soit  à  un  territoire  d'une  ou  deux 
provinces  seulement,  elle  <■*!  prononcée  par  décret 
royal  rendu  en  Conseil  des  Ministres,  après  avis  :  r  des 
Attdienriai  du  territoire  où  la  suspension  doit  être  sp- 


LA    JUSTICE  263 

pliquée  ;  a"  du  Conseil  d'Etal  réunion   Assemblée 
nérale.    La    suspension    doit    être   soumise  «   le   plus 
promptemenl  possible  »  à  la  ratification  des  Corl 
ne  peut  avoir  effet,  en  l'absence  crime  loi  spéciale,  que 
pour  une  durée  maasima  d'un  an. 

Lorsque  la  suspension  doit  s'étendre  a  plus  de  deux 
provinces  ou  lorsqu'elle  est  applicable  à  toutes  les  in- 
fractions  relevant  de  la  compétence  du  jury, la  suspension 
ne  peut  rire  prononcée  que  dans  les  cas  où  l'article  17 
de  la  Constitution  autorise  la  suspension  des  garanties 
constitutionnelles,  et  dans  la  même  forme.  Dès  que  les 
garanties  constitutionnelles  rentrent  en  vigueur,  les 
Cours  d'Assises  retrouvent  ipso  jure  leur  compétence. 
En  dépil  des  formalités  prescrites  pour  limiter  l'arbi- 
traire royal,  il  est  permis  de  trouver  dans  les  «  dispo- 
sitions spéciales  »  de  la  loi  de  1 888  une  grave  atteinte 
aux  garanties  fondamentales  qui  doivent  assurer  aux 
citoyens  le  fonctionnement  régulier  des  juridictions. 

Mous  avons  dil  que  toutes  les  juridictions,  tant  au 
civil  qu'au  criminel,  étaient,  en  Espagne,  placée:  sous 
le  contrôle  du  Tribunal  suprême,  exerçant  des  attri- 
butions analogues  à  celles  de  notre  (lour  de  Cassation. 

Le  rôle  du  Tribunal  suprême  devait  même,  aux  termes 
de  la  loi  organique  de  1N70,  être  plus  étendu  que 
celui  de  notre  Cour  régulatrice,  puisque  le  Tribunal 
suprême  espagnol  était  investi  de  la   juridiction   con- 

lenlieiise  ail  mi  nisl  rat  i  \  e.  Cette  dernière  prérogative  lui 

a  été  retirée  en  i  S  -  f>  pour  être  rendue  au  Conseil  d'Etat. 
La   Chambre,    appelée   à    connaître   des  ..    recours 
contre  L'Administration  »,  a  été  supprimée, 


264  ISl'U.M 

Actuellement,  le  Tribunal  suprême  Tribunal  supre- 
//((<)  est  composé  d'une  Chambre  de  cl i --*.  i | >1  i  1 1 1 '  (de 
gobierno)  et  de  deux  Chambres  de  justice  (</<■  justifia). 

Les  Chambres  siègent  d'ordinaire  avec  sept  membres; 
dans  certains  cas  avec  cinq  seulement. 

Au  civil,  le  Tribunal  suprême  règle  la  compétence 
entre  juridictions  du  même  degré  ne  relevant  pas 
d'une  juridiction  supérieure  commune  et  il  connaît 
des  recours  en  cassation  (de  casaciori). 

La  loi  du  32  avril  1878  ley  de  casacion  civil)  spécifie 
que  le  recours  en  cassation  peut  être  exercé  contre  les 
décisions  définitives  rendues  par  les  Aitdiencias,  contre 
ni  tains  jugements  en  dernier  ressort  prononcés  par 
les  Juges  de  première  instance  et  contre  certaines  sen- 
tences  d'amiables  compositeurs. 

Le  recoins  en  cassation  doit  être  fondé  sur  l'un  des 
moyens  suivants  :  \  iolation  de  la  loi  ou  de  la  doctrine  lé- 
gale, vice  de  forme,  sentence  rendue  par  des  amiables 
compositeurs  en  dehors  du  délai  lixé  ou  sur  des  points 
non  soumis  à  leur  appréciation. 

Le  recours  en  cassation  pour  violation  de  la  loi  ou 
de  la  doctrine  légale  n'est  pas  ouvert  dans  les  litiges 
dont  la  valeur  ne  dépasse  pas  2.000  réaux,  litiges  que 
la  l<n  qualifie  de  menor  cuantia. 

La  procédure  du  pourvoi  esl  ainsi  réglée  : 

La   partie  qui  entend   se  pourvoir  doit,  dans  un  délai 

déterminé,  demander  à  la  juridiction  qui  a  rendu  la 
décision  attaquée  une  «  certification  littérale  de  la 
sentence»,  Celle-ci  peut   refuseï   de  la  délivrer,  soil 

pane  que  le  délai  légal  sciait   expiré,   soil    pane  que  le 

pourvoi  ne  rentrerait  pas  dans  les  termes  de  la  loi.  Le 


la   il  si  m  i  26a 

refus  de  délivrance  de  la  certification  demandée  peul 
donner  lieu  à  un  recours,  recurso  île  queja,  devant  la 
Chambre  d'admission  du  Tribunal  suprême. 

Si  la  certification  a  été  délivrée  ou  si  le  Tribunal 
suprême  a  cassé  la  décision  de  reins,  le  pourvoi  est 
porté  devant  la  Chambre  d'admission  dont  le  rôle 
correspond  à  celui  de  notre  Chambre  des  Requêtes.  Au 
cas  d'admission,  l'affaire  <-st  soumise  à  la  Chambre  de 
Cassation.  Lorsque  celle-ci  reconnaît  le  pourvoi  fondé. 
elle  casse  la  sentence  qui  l'a  provoqué  et  elle  peut,  soit 
statuer  immédiatement,  mais  par  arrêt  séparé  sur  le 
fond,  soit  surseoir  à  statuer  quant  au  fond. 

Au  cas  de  cassation  pour  vice  de  forme,  le  Tribunal 
suprême,  en  prononçant  la  cassation,  renvoie  l'affaire 
devant  la  juridiction  qui  a  rendu  la  sentence  annulée 
pour  que  la  procédure  soit  reprise  en  l'état  où  elle  se 
trouvait  avant  le  vice  de  forme  ayant  entraîné  la  cassa- 
tion. 

Le  demandeur  en  cassation  doit  déposer  une  consi- 
gnation dont  l'importance  varie  suivant  la  cause  du 
pourvoi,  la  nature  de  la  décision  indiquée  et  la  valeur 
du  litige. 

On  voit  que  la  procédure  du  pourvoi  en  cassation 
(mi  Espagne  diffère  sur  deux  points  importants  de  la 
procédure  suivie  en  France. 

Les  juridictions  françaises  dont  les  décisions  sont 
l'objet  d'un  pourvoi  n'ont  jamais  à  délivrer  au  deman- 
deur en  cassation  des  autorisations  ou  certifications 

préliminaires. 

Noire  Cour  de  Cassation,  après  avoir  prononcé  la 
cassation  pour  des  motifs  de  droit,   ne  juge  jamais  le 


ïfifi 


1  SPAGM 


foml  ;  elle  renvoie  l'affaire  à  une  Cour  ou  à  un  tribunal 
autre  que  la  Cour  ou  le  tribunal  ayant  rendu  l'arrèl 
ou  le  jugement  annulé. 

En  matière  oriminelle,  comme  en  matière  civile,  I*1 
Tribunal  suprême  règle  la  compétence  entre  juridictions 
du  même  degré  ne  ressortissant  pas  à  une  juridiction 
supérieure  commune  et  connaît  de  tous  les  pourvois 
en  cassation  fondés  sur  la  violation  des  principes  du 
droit  ou  l'inobservation  des  formes  de  procédure  pres- 
crites par  la  loi  à  peine  de  nullité. 

Il  connaît  également  des  pourvois  en  révision  pour 
cause  d'erreur  judiciaire  dans  le-  circonstances  que 
nous  avons  indiquées  plus  liant. 

Enfin,  en    d<  hors    de    sa     mission    générale,  uni    est 

d'assurer  le  respect  de  la  loi  et  l'unité  de  jurispru- 
dence dans  le  Royaume,  le  Tribunal  suprême  est  investi 
de  certaines  attributions  spéciales. 

S  i  bambre  <\^  discipline  i  Sala  de gobierno)  exerce  la 
juridiction  disciplinaire  sur  les  magistrats  de  toutes  les 
.  1  udiencia8. 

Le  Tribunal  suprême  connaît  par  débal  oral  et  pu» 
blic    en  juicio  oral  y  publico)  et    en   unique  instance 

les    Causes   contre    les    (  '..udin.ni  \  .     \rrhevè.pies. 

Ëvèques  et  auditeurs  de  la  Rota  ;  des  causes  contre  les 
(  onseillers  d'Etat,  les  membres  du  Tribunal  des 
Comptes,  les  Sous  secrétaires,  directeurs,  chefs  des  bu 
reaux  généraux  de  l'Etat,  les  Gouverneurs  des  pro- 
vinces, ambassadeurs,  Ministres  plénipotentiaires  et 
Chai  gés  d'affaires,  s'il  s'agit  de  délits  commis  en  service 
aclil  ; 

les  délits  i  ommis  par  les  magistrats  ; 


LA    JUSTICE  26" 

s)  des  délits  commit  dans  l'exercice  de  leurs  fonc- 
tions par  des  auxiliaires  du  Tribunal  suprême. 

Le  Tribunal  suprême,  (ouïes  Chambrée  réunies,  con- 
naît en  unique  instance  el  par  débat  oral  et  public  des 

causes  : 

a)  contre  les  Princes  de  la  famille  royale  ; 

h  contre  les  Ministres  de  la  Couronne  pour  délits 
commis  en  service  actif,  quand  ils  ne  doivent  pas  être 
jugés  par  le  Sénat  ; 

c)  contre  les  présidents  du  Sénat  et  de  la  Chambre 
des  Députés  ; 

il i  contre  les  magistrats  du  Trihunal  suprême; 

é)  contre  les  A udiencias  territoriales  ou  criminelles 
lorsque  la  poursuite  s'applique  à  tous  les  membres  ou 
à  la  majorité  des  membres  d'une  Chambre  de  justice 
pour  actes  judiciaires  auxquels  ils  ont  participé. 

Les  fonctions  du  Ministère  public  auprès  du  Tribu- 
nal suprême  sont  remplies  par  un  Procureur  général 
(fiscal)  par  un  Substitut  du  Procureur  général  ou  Sub- 
stitut fiscal  et  par  des  Avocats  généraux  ou  Wocats  lis- 
eaux  chargés  de  porter  la  parole  aux  audiences  an  nom 
de  l'Etat. 

La  législation  espagnole  a  édicté,  pour  assurer  aux 
justiciables  la  double  garantie  de  la  capacité  profession- 
nelle el  de  l'indépendance  du  juge,  un  ensemble  de 
dispositions  qui  sont  des  [dus  dignes    de    retenir    notre 

attention. 

La  hiérarchie  judiciaire  repose  sur  deux    principes  : 
Le  recrutement  au  concours  ; 
L'avancement  à  l'ancienneté. 


268  BSPAGN1 

Il  n'est  dérogé  au  premier  de  ces  principes  que  pour 
les  grades  supérieurs  afin  de  réserver  au  Gouvernemenl 
la  possibilité  d'>  appeler  des  jurisconsultes  jouissant 
d'une  haute  autorité  dans  le  barreau  ou  clans  l'ensei- 
gnement. 

Il  n'est  dérogé  à  la  seconde  règle  que  dans  des  cas 
déterminés,  strictement  précisés  par  la  loi  pour  récom- 
penser une  valeur  exceptionnelle. 

Remarquons  enfin  que  le  recrutement  au  concours 
cl  l'avancement  à  L'ancienneté  s'appliquent  également 
aux  magistrats  du  siège  et  aux  magistrats  du  Parquet. 

Le  pivot  de  l'organisation  judiciaire  espagnole,  c'est 
la  création  des  Collegios  de  aspirantes  à  la  judicatura. 

Les  0  Aspirantes  à  la  judicatura  »  sont  recrutés  par 
la  voie  du  concours.  Leur  nombre  est  déterminé  chaque 
année,  suivant  les  besoins  présumés  du  service,  par  un 
arrêté  du  Ministre  de  la  Justice. 

Nul  n'est  admis  à  concourir  s'il  n'est  Espagnol,  li- 
cencié in  droit  civil  de  l'une  des  Universités  subven- 
tionnées par  l'Etat  et  s'il  n'a  atteint  l'âge  de  i'i  ans. 

Tout  candidat  doit  adresser  sa  demande  d'admission 
au  président  de  VAndiencia  territorial  ou  de  lo  criminel 
dans  le  ressort  de  laquelle  il  est  domicilié. 

Ce  magistral  procède  a  une  enquête  sur  la  conduite, 

l.i    moralité,    les    aptitudes,  les    relations   du    candidat. 

S'il  lui  paraît  remplir  les  conditions  voulues  poux 
exercer  honorablement  des  fonctions  judiciaires,  le 
Président  délivre  à  l'impétrant  un  certificat  d'admis^ 
jion  ii  concourir.  Le  certificat  est.  avec  un  rapport  du 
Président,  transmis  au  Ministre  «le  la  Justice. 
Si  le  Président,  au  contraire,  estime  que  le  postulant 


i  \  justice  269 

n'est  pas  digne  d'entrer  dans  h   magistrature,  il   rend 

une  ordonnance  d'exclusion. 

Cette  ordonnance  est,  par  L'intermédiaire  <ln  Juge  de 
parlido,  notifiée  à  l'intéressé.  Celui-ci  a  cinq  jours  pour 
se  pourvoir  de  va  ni  le  Ministre  de  la  Justice. 

Miis  le  Ministre  n'est  point  juge  de  l'admissibilité  au 
concours.  Il  se  borne  à  procéder  à  la  constitution  des 
dossiers  et  à  les  transmettre  à  une  Commission  dite 
Junta  de  examen  y  de  qualijîcacion. 

l'Ile  est  composée  de  onze  membres  : 

Le  Président  du  Tribunal  suprême,  ou,  en  cas  d'em- 
pêchement, un  président  de  Chambre  désigné  par  le 
(  rouvernement  ; 

Le  Chef  du  Ministère  public  (fiscal)  du  Tribunal 
suprême  ;  en  cas  d'empêchement,  un  substitut,  ou,  à 
défaut  de  ce  dernier,  un  des  avocats  fiscaux,  choisi  par 
le  Gouvernement  ; 

Deux  membres  du  Tribunal  suprême  OU  de  YAudieit- 
cia  de  Madrid,  choisis  par  le  Gouvernement; 

Le  Bâtonnier (Decano)  de  l'Ordre  des  avocats  de  Ma- 
drid ou,  en  cas  d'empêchement,  un  membre  du  Conseil 
de  1  '(  irdre,  désigné  par  ce  Conseil  ; 

Trois  avocats  choisis  par  le  Gouvernement  sur  une 
liste  de  neuf  candidats  présentés  par  le  Conseil  de  leur 
Ordre  parmi  les  membres  du  barreau  qui  pavent  l'une 
des  trois  premières  cotes  de  patentes; 

Deux  professeurs  titulaires  de  droit  de  IT  niversité 
de  Madrid,  au  choix  du  Gouvernement; 

l  n  secrétaire,  avec  \<>ix  délibérative,  nommé  par  le 
Gouvernement  sur  une  liste  de  trois  candidats  proposés 
par  la  Commission. 


270 


) SPAUNH 


Le  législateur  s'est  efforcé  de  constituer  une  Coin- 
mission  d'examen  <'i  de  classement  présentant  toutes 
garanties  de  compétence  et  d'impartialité.  Pour  éli- 
miner L'esprit  de  corps,  pour  éviter  le  danger  des 
influences  de  famille,  il  a  tenu  à  faire  entier  dans  la 
Commission,  à  côté  de  magistrats  de  carrière  repré- 
sentant l'élément  judiciaire  professionnel,  des  profes- 
seurs de  droit  et  des  maîtres  du  barreau,  personnifiant. 
soit  la  haute  culture  juridique,  soit  l'expérience  des 
a  lia  ires. 

La  Junhi  de  examen  y  </<■  calijîcation,  après  avoir  pris 
connaissance  des  dossiers  des  candidats,  dresse  la  liste 
de  ceux  d'entre  eux  qui  seront  admis  à  prendre  part 
au  concours. 

Le  concours  comporte  des  épreuves  écrites  et  des 
épreuves  orales  devant  attester  ches  les  concurrents  la 
connaissance  du  droit  civil  et  du  droit  commercial,  du 
droit  pénal,  de  la  procédure,  de  l'organisation  judi- 
ciaire, du  droit  administratif,  du  droit  public  et  même 
du  droit  canon. 

Il  esl  à  remarquer  que  ces  épreuves  doivent  pré- 
senter un  caractère  tout  à  la  fois  théorique  et  pratiquai 
C'est  ainsi  que  l'on  remet  des  dossiers  auv  candidats 
en  les  invitant  à  rédiger  un  jugement,  à  présenter  des 
conclusions  orales,  à  formuler  des  actes  dé  procédure. 

La  Commission  dresse,  par  ordre  de  mérite,  la  liais 
des  concurrents  déclarés,  à  la  majorité  des  deux  cin- 
quièmes des  votants,  aptes  à  remplir  des  fonctions  judi* 
ciairet  el  transmet  cette  liste,  avec  les  dossiers i  au 
Ministre  de  la  Justice.  Celui-ci  confère  alors  bus  cari 
didats,  en  se  conformant  rigoureusement  ■  l'ordre  de 


LA     M  BTIC1  -!7  1 

classement,  Le  titre  d'Aspirants  à  la  judicature  I  Ispî- 
ranles  à  la  judicalurà). 

Les  Vspiranls  sont  répartis  entre  les  différentes 
Audiencias  du   Royaume  et  placés  sous  L'autorité  des 

Cliefs  de  ces  Cours. 

La  loi  a   minutieusement    précisé   les  devoirs   des 

Aspirants. 

Lis  sont  tenus  d'assister  assidûment  aux  audiences 
des  tribunaux  auxquels  ils  sont  attachés.  Leur  assiduité 

est  constatée  par  Leur  signature  sur  un  registre  spécial. 
Lis  prennent  séance  aubanc  îles  avocats,  dont  ils  portent 
le  costume.  Le  temps  qui  s'écoule  entre  Le  moment 
où  les  Aspirants  entrent  dans  les  Collegios  de  Ispirantes 
et  celui  où  ils  seront  appelés  à  l'aire  partie  de  la  magis- 
trature proprement  dite  devra  être  pour  eux  un  temps 
de  stage,  de  noviciat,  être  employé  à  acquérir  les  con- 
naissances pratiques  nécessaires  à  l'exercice  éclairé  des 
fonctions  de  judicature.  Ils  peuvent  être  appelés  par 
les  présidents  tit' Audiencias  à  remplir  intériinairement 
les  fonctions  de  juges,  à  remplacer  les  substituts  et  les 
greffiers  et,  après  un  an  d'exercice,  à  suppléer  les  juges 
de  première  instaure. 

Les  Chefs  des  ludiencias  adressent ,  chai  pie  année,  un 
rapport  au  Ministre  de  la  Justice,  pour  rendre  compte 
de  la  conduite,  des  aptitudes,  des  travaux  des  Aspirants 
de  leur  ressort.  Ces  rapports  sont  transmis  par  le 
Ministre  à  la  Junla  »/<•  examen  y  de calijicacion.  Celle-ci, 
en  effet,  est  chargée  de  suivre  les  candidats  qu'elle  a 
reconnus  admissibles  aux  fonctions  judiciaires.  Sa 
mission  vis-à-vis  d'eu  \  n'est  pas  épuisée  par  le  COnCOUrS 
qu'elle  leur  a  lait  subir. 


Tant  (|n'ils  ne  sonl  pas  définitivement  incorporés 
dans  les  rangs  de  la  magistrature,  elle  est  appelée  à 
exercer  sur  eux  un  pouvoir  de  tutelle  et  une  véritable 
juridiction  disciplinaire.  Elle  peut  prononcer  l'exclu- 
sion des  incapables  ou  leur  suspension  pendant  un  an 
ou  pendant  un  trimestre  ;  elle  peut  également  pro- 
poser en  faveur  des  aspirants  qui  ont  l'ail  preuve  d'un 
mérite  exceptionnel  le  bénéfice  d'une  nomination  anli- 
cipée  dans  la  Magistrature. 

En  principe!  c'est  le  rang  occupé  par  l'Aspirant  sur 
la  liste  générale  des  candidats  admis  au  concours  qui 
doit  lixer  son  tour  de  nomination  ;  mais  il  était  juste 
de  faire  la  part  des  titres  qui  ont  pu  se  révéler  depuis 
l'examen.  Il  pourrait  n'être  pas  sans  inconvénient  de 
l'aire  dépendre  exclusivement  l'avenir  d'un  candidat 
des  résultais  d'un  premier  concours.  Le  législateur, 
avec  juste  raison,  a  voulu,  à  côté  de  l'ordre  primitif 
réglé  par  le  concours,  faire  une  place  au  clioiv.  Sut 
cinq  postes  île  début,  les  deux  premiers  sonl  attribués 
aux  deux  aspirants  les  premiers  inscrits  au  tableau,  lé 
troisième  et  le  quatrième  à  ceux  que  le  Gouvernement 
juge  les  plus  dignes  parmi  les  aspirants  inscrits  dans 
le  premier  tiers  du  tableau  général  ;  le  quatrième 
peut  être,  au  choix  du  Gouvernement,  attribué  à 
l'Aspirant  axant  un  an  d'excercice  et  s'étant  signalé  par 
un  mérite  exceptionnel. 

Les  aspirants  à  la  judicature  ont  un  droit  exclusil 
au!  postes  de  début,  Le  corps  des  aspirants  nommés  au 

COI o  -  Sert   dune  de  l>ase  au  recrutement  de  la  nia  lis 

trature  espagnole.    «    Les  Aspirants,  écrivait  en  1873 


LA    .m  8TIC1  2~'-i 

M.  Debacq(i),  doivent  fournir  aux  tribunaux  de  la 
péninsule  une  pépinière  d'hommes  distingués  ayant 
l'ait,  d'abord  par  les  épreuves  sérieuses  d'un  concours 
public,  ensuite  par  un  stage  relativement  assez  long 
auprès  des  tribunaux  des  différents  ordres,  preuve  de 
connaissances  théoriques  et  pratiques  ».  Le  législateur, 
toutefois,  s'est  rendu  compte  que,  sans  porter  sérieuse- 
ment atteinte  au  recrutement  du  corps  judiciaire  par 
la  voie  du  concours,  il  ne  serait  pas  sans  intérêt,  pour 
la  bonne  administration  de  la  justice,  d'ouvrir  les 
rangs  de  la  magistrature  à  des  jurisconsultes  en 
mesure  d'apporter  aux  justiciables,  soit  les  lumières 
de  longues  études  théoriques,  soit  le  fruit  d'une 
expérience  acquise  dans  la  pratique  des  affaires. 
Aussi  le  droit  exclusif  des  aspirants  aux  fonctions  de 
judicalure  est-il  limité  aux  tribunaux  de  première 
instance.  Un  certain  nombre  de  sièges  pour  les 
Audiencias  et  le  Tribunal  suprême  sont  réservés  aux 
professeurs  de  droit  et  aux  membres  du  barreau,  ainsi 
qu'aux  jurisconsultes  ayant  occupé  de  hauts  postes 
politiques  ;  mais  des  garanties  très  sérieuses  doivent 
présider  à  ces  choix. 

l'our  être  appelé  à  un  siège  de  magistrat  dans  une 
AuJiencia  de  province,  un  avocat  doit  avoir  effective- 
ment plaidé  pendant  dix  ans  dans  un  chef-lieu  de 
Cour  d'Appel,  en  payant  la  première  cote  de  contribu- 
tion ou,  s'il  est  inscrit  à  Madrid,  l'une  des  premières 
cotes,  ce  qui  implique  un  cabinet  fort  occupé,  et 
n'avoir  jamais  subi  une  peine  disciplinaire  de  n.iture  à 

i    Bulletin  de  l-i  Société  </<•  législation  comparée. 

18 


2  "   i  I  -  1  '  \  I  ,  M 

diminuer  sa  considération  personnelle  ou  profession* 
nelle,  Le  professeur  doit  avoir  occupé  sa  chaire  en 
qualité  de  titulaire  pendant  six  années. 

I  n  siège  vacant  sur  quatre  à  I'  iudienoia  de  Madrid 
peut  être  dévolu  à  un  avocat  ayant  exercé  son  minis- 
tère dans  un  chef-lieu  de  Cour  pendant  quinze  ans  et 
ayant  payé  pendant  cinq  ans  au  moins  la  première 
cote  de  contribution,  ou,  s'il  appartient  au  Collège  des 
avocats  île  Madrid,  l'une  des  premières  cotes.  Le  Gou- 
vernement peut  également  investir  d'une  présidence  de 
Chambre  l'avocat  remplissant  les  conditions  que  nous 
venons  d'indiquer. 

I  n  siège,  sur  cinq  vacants  au  Tribunal  suprême, 
peut  être  attribué  à  un  avocat  ayant  exercé  vingt  ans 
auprès  d'un  Audiencia  de  province  ou  quinze  ans  à 
Madrid,  et  ayant  payé  pendant  les  huit  dernières 
années  de  sa  profession  la  première  cote  de  contri- 
bution. 

Peuvent  être  nommés  présidents  de  (  îhambre  au  Tri- 
bunal suprême,  les  anciens  Ministres  de  la  Justice  sans 
condition  et  les  anciens  titulaires  d'autres  départements 
ministériels  lorsqu'ils  onl  exercé  la  profession  d'avocat 
pendant  quinze  années  à  Madrid. 

Mentionnons  enfin  que  la  charge  de  Premier  prési- 
dent du  Tribunal  suprême  peut  être  confiée  à  un 
membre  du  barreau  comptant  dix  années  d'exercice  de 
la  profession  d'avocat,  s'il  a  rempli  les  fonctions  de 
Président  du  Conseil  des  Ministres,  de  Ministre  de  la 
Justice  "u  de  Président  du  Sénat,  de  la  Chambre  des 
I députés  ou  du  (  lonseil  d'Etal . 

C'est    Seulement    dans    les    ranvs    les  plus  élevés  de  la 


LA    JUSTIC1  _  /.) 

hiérarchie  judiciaire  el  pour  un  nombre  de  lièges  très 
limité,  ne  devant  jamais  dépasser  le  quart  dea  vacances, 
que  les  professeurs  de  droit,  les  membres  du  barreau 
et  les  hommes  politiques  peuvent  avoir  accès  aux  em- 
plois de  la  magistrature. 

I.  avancement  dans  la  magistrature  espagnole  a  lieu 
surtout  à  l'ancienneté. 

Il  est  dressé,  chaque  année,  un  tableau  général  du 
personnel  judiciaire,  sur  lequel,  pour  chaque  grade,  les 
magistrats  figurent  à  compter  du  jour  de  leur  installa- 
tion. 

La  liste,  ainsi  formée,  détermine  l'ancienneté  de 
chacun  ;  l'avancement  à  L'ancienneté  est,  pour  le  ma- 
gistrat, un  droit  absolu.  Toute  nomination  faite  au 
mépris  de  ce  droit,  en  dehors  de  certains  postes  limila- 
tivement  déterminés,  peut  être  déférée  au  Tribunal 
suprême  par  le  magistrat  lésé  et  annulée. 

«  L'application  constante  du  principe  de  l'ancien- 
neté, déclare  L'Exposé  des  motifs  du  décret  du  22  dé- 
cembre KjO'->,  est  le  moven  If  plu--  propre  à  rétablir  la 
régularité  dans  les  promotions  et  à  créer  de  nouvelles 
habitudes  qui  excluent  la  faveur  (1)  ».  Ajoutons  que, 
dans  les  rares  circonstances  où,  pour  certains  postes 
déterminés  comme  les  présidences  d'Audiencias ,  L'avan- 
cement peut  avoir  lieu  au  choix,  le  Gouvernement  est 
loin  d'avoir  l'absolue  disposition  de  la  vacance  à  pour- 
voir. Le  Conseil  d'Etat  dresse,  en  eflet,  une  liste  do 
dix  candidats  et  il  ne  peut,  en  principe,  présenter  que 

(1)  Ht-nl  décréta  regulundo  -■/  ingreso  y  el  ascenso  m  déter- 
mina dus  catagorias  <lr  ht  carrera  judicial,    i-j  décembre  1 


276  i  -i  \cm 

des  magistrats  du  siège  ou  du  parquet  ayant  occupé 
pendant  un  ttMii j>s  déterminé  des  fonctions  immédia- 
tement inférieures.  Le  Gouvernement  est  obligatoire- 
menl  tenu  de  porter  son  choix  sur  l'un  des  candidats 
qui  lui  sont  ainsi  propos 

Afin  d'assurer  le  Fonctionnement  régulier  de  l'avan- 
cement ii  l'ancienneté,  le  législateur  espagnol  a  pris  le 
soin  d'établir  avec  beaucoup  de  précision  la  hiérarchie 
judiciaire.  Elle  est  fondre  sur  un  double  principe. 
En  premier  lieu,  à  chaque  nature  d'emplois,  autres 
que  ceu\  du  Tribunal  suprême,  correspondent  trois 
ordres  de  traitements  différents  dits  de  début,  de 
entrada,  d'avancement,  de  ascenso,  et  de  lin  de  carrière, 
il.'  termine  En  second  lieu,  une  assimilation,  une 
parité  d'office  est  établie  entre  certains  emplois  diffé- 
rents, mais  considérés  comme  étant  de  même  impor- 
tance. La  hiérarchie  se  trouve  ainsi  fixée  cl  une  très 
grande  simplification  est  réalisée,  soit  pour  la  déter- 
mination des  règles  d'ancienneté  ancienneté  obliga- 
toire pour  ouvrir  le  droit  à  l'avancement  cl  ancienneté 
donnant  droit  à  une  promotion  de  classe),  soil  pour 
la  détermination  des  catégories  du  tableau  d'avan- 
cement (  1  ). 

a)  La  loi  a  réglé  dans  les  conditions  ci-après  1rs  traite- 
tomenta  des  gistrats. 

de  première  instance  (de  partido  trois  classes  de 
entrada,  de  ascenso,  de  termina,  i.ooo,  i.5  io,  5.000  |" 

de  promière  instance  a  Madrid,  8. pesetas 

(      h-  d'appel  (fludieneiat  territoriales) 

Pesetas 

Conseillers  (magislradoi  .  3  olasses,      7.0011     8.5oo     10, 

Présidents  de  Chambre  ....      8.5oo    10.000     n.5oo 


I.A    JUSTICE 


271 


Nous  avons  vu  que  l'article  8i  de  la  Constitution, 
pour  assurer  l'indépendance  du  juge,  avait  proclamé 
l'inamovibilité  de  la  Magistrature;  mais  il  ne  fau- 
drait pas  donner  en  Espagne  à  l'inamovibilité  tic  la 
Magistrature  le  sens  absolu  que  ce  terme  comporte  eu 
France,  (liiez  nous,  l'inamovibilité  implique  l'i  m  possi- 
bilité pour  le  Gouvernement  de  destituer  ou  de  dépla- 
cer un  magistral  de  son  siège  tant  qu'il  n'a  pas  été 
atteint  par  la  limite  d'âge  ou  qu'il  n'a  pas  encouru 
une  mesure  disciplinaire  prononcée  par  les  Chambres 
réunies  de  la  Cour  de  Cassation  à   l'effet  de  le  priver 

Présidents  (premiers  présidents  9.000  i2.5oo  1^.000 

Avocats  fiscaux .'i.joo  5. 000  7.000 

Substituts  fiscaux 5.ooo  7.000  10.000 

Procureurs  généraux  (fiscales  .     .  8.000  10.000  n.ôoo 

Tribunal  suprême 
Conseillers  (magistrados)    .     .     .       1 '1.000  pesetas 
Présidents  de  Chambre.     .     .     .       10.000       » 

Président  (premier  président).     .       3o.ooo       » 

plus  5  000  pesetas  pont 
frais  de  représentation  . 

\\ocals  fiscaux 10.000  pesetas 

Substituts  fiscaux ii.Soo       » 

Procureur  général  (fiscal) .     .     .       i5.ooo       » 

Les  suppléants  des  juges  de  parlido  ou  des  magistrats  des 
[udiencias  touchent  pendant  toute  la  durée  de  la  suppléance, 
la  moitié  du  traitement  du  titulaire. 

Les  magistrats  des  cours  provinciales  ont  un  rang  et  un 
traitement  intermédiaire  entre  ceux  des  juges  de  première 
classe  el  1rs  conseillers  des  Aadiencias  territoriales.  Leur  trai- 
tement est  de  7.0110  pesetas,  comme  relui  des  conseillera  de 

Iroisièi liasse    Les  président*  de  ci  -  Cours  ont  le   rang  et 

le  traitement    des  Conseillers  de  seconde    classe  des   Audien* 


278  BSPAGNI 

des  Immunités  qui  lui  sont  assurées  par  la  Loi.  En 
ne,  l'inamovibilité  donne  au  magistrat  la  certi- 
tude tic  ne  pouvoir,  à  moins  de  Forfaiture,  être  dé- 
pouillé de  son  grade,  mais  les  magistrats,  ceux  de 
Madrid  exceptés,  ne  peuvent  siéger  plus  de  huit  années 
consécutives  dans  la  même  ville.  Passé  ce  délai,  ils 
sont  appelés  à  exercer  leurs  fonctions,  à  grade  égal, 
dans  une  autre  résidence.  Ajoutons  que  les  magistrats 
espagnols  ne  peuvent  continuer  à  exercer  leurs  fonc- 
tions dans  un  ressort  où  ils  ont  contracté  mariage,  OÙ 
ils  ont  acheté,  eux,  leurs  femmes  ou  leurs   parents  en 


cias  territoriales,  suit  8.500  pesetas,  plus  5oo  pesetas  pour 
frais  de  représenta  lion, 

I  ixanl  lea  «  parités  d'office  »,  la  loi   <lc   1882  spécifie  que 

les  juges   de    •    classe   ou   ci   juges  d'avancement    a   el    les 

substituts  des    iudiencias  <lr  /«>  criminal  ou  Cours  provinciales 

nt  le   môme    traitement  et  constituent    ensemble   un 

grade  de  la  biérai  obie. 

De  même  les  juges  de  1 IO  classa  ou  «  jin  (lr  carrière  » 
et  les  substituts  des  Audiencias  sont  placés  sur  la  môme 
ligne. 

Puis,  lea  présidents  et  procureurs  généraux  des  Audisncias 
de  lo  criminal,  1rs  conseillers  < i*s  Audienciat  territoriales,  el 
les  juges  de  première  instance  de  Madrid 

Les  Présidents  de  Chambre  et  Procureurs  généraus  des 
[adiencias  territoriales,  les  conseillers  delà  (loin- île  Madrid 
et  les  substituts  du  Procureur  général  près  la  Cour  su- 
prême, 

Enfin,  la  loi  établit  même  identité  de  grade  encore  entre 
les  Premiors  présidents  des  ladiencku  territoriales  elles  prési- 
dents de  Chambre  de  la  I  oui  de  Madrid  al  antre  le  Procu- 
ra près  la  (  "m  di  M  tdi  id  1 1  las  \  I  net  sus 
un  s  la  <  «oui  suprême. 


LA    IU9TK  i  279 

ligne  directe,  des  propriétés  rurales  ou  urbaines. 
Enfin,  aucun  magistrat  ne  peu!  être  appelé  à  exer- 
cer des  fonctions  de  judicature  dans  le  pays  où  il 
est  né. 

Si  l'Inamovibilité  protège  moins  complètement  le 
magistral  du  siège  en  Espagne  qu'en  France,  il  est  à 
remarquer,  en  revanche,  qu'elle  s'étend  dans  la  pénin- 
sule a  la  plupart  des  magistrats  du  Ministère  public. 
La  loi  espagnole  n'établit  pas  la  distinction  fondamen- 
tale qui  existe  chez  nous  entre  le  magistrat  qui  re- 
quiert et  le  magistrat  qui  jnge,  le  premier  n'étant 
qu'un  représentant  du  gouvernement,  révocable  ad 
nutum,  le  second  étant  soustrait,  en  principe,  à  toute 
action  du  pouvoir. 

A  l'exception  du  Procureur  général  près  le  Tribunal 
suprême  el  des  fiscales  ou  procureurs  généraux  près 
\e&  Audiencias  territoriales  qui,  en  raison  de  l'impor- 
tance politique  des  postes  qu'ils  occupent,  sont  révo- 
cables, tous  lés  autres  magistrats  des  parquets  jouis- 
senl  de  l'inamovibilité  au  p  >inl  de  vue  de  leur 
dans  |,i  hiérarchie  judiciaire.  Ils  ne  peuvent  être  dé- 
placés que  pour  occuper  un  poste  supérieur  ou  tout  au 
moins  un  poste  égal  ;  ils  ne  peuvent  être  suspendus, 
mis  à  la  retraite  d'office  ou  destitués  que  dans  les  cas 
prévus  et  selon  les  formes  édictées  par  les  lois.  Les 
Procureurs  généraux  même  ne  peuvent  se  voir  retirer 
leurs  fonctions  pour  des  motifs  politiques  qu'à  la  con- 
dition d'être  appelés  a  prendre  plaie  avec  une  situa- 
tion équivalente  dans  le^  rangs  de  la  magistrature 
assise.  Le  Gouvernement  ne  peut  sans  cause  légitime 
briser  leur  carrière  ;  il  doil  respecter  les  droits  acquis, 


280  ESPAGNE 

Le  législateur  a  voulu  mettre  les  parquets  espagnols  h 
l'abri  de  tes  destitutions  arbitraires  qui,  pendant  de 
trop  longues  années,  à  l'époque  troublée  des  nronnn- 
ciamentoa,  à  chaque  changement  de  Couvernemcnt  ou 
même  de  Ministère,  jetaient  sur  le  pavé  des  hommes 
d'intelligence  et  de  cœur  et,  pour  le  discrédit  de  la 
justice,  donnaient  le  pas  aux  services  politiques  sur  la 
science  juridique  et  l'accomplissement  loyal  du  devoir 
professionnel. 

Comme  les  magistrats  du  siège,  les  magistrats  du 
parquet  sont  recrutés  par  la  voie  du  concours  et  avan- 
cent à  l'ancienneté. 

Leur  mission  est  la  même  qu'en  France. 

Les  Fiscales  ou  Procureurs  généraux  des  Audiencias 
territoriales  exercent  un  contrôle  général  sur  tous  les 
parquets  de  leur  ressort  et  ont  un  droit  spécial  de  sur- 
veillance sur  les  Procureurs  généraux  des  Cours  pro- 
vinciales de  leur  circonscription.  Ceux-ci  sont  tenus  de 
leur  adresser,  chaque  année,  un  rapport  sur  l'admi- 
nistration de  la  justice  dans  leur  province.  Les  Procu- 
reurs généraux  près  les  Aiidienrias  territoriales  présen- 
tent, à  leur  tour,  un  rapport  annuel  au  Procureur 
général  près  le  Tribunal  suprême.  Celui-ci  résume 
en  un  mémoire  d'ensemble  les  documents  qui  lui  ont 
été  transmis  et  expose  au  Gouvernement  l'état  de  la 
justice  dans  le  n>\auine,  les  instructions  qu'il  a  jugé 
devoir  donner  à  ses  subordonnés  el  les  améliorations 
«m  réformes  qu'il  lui  paraîtrait  utile  d'introduire  dans 

la   législation  et  dans  le  service  judiciaire. 

Le  Procureur  généra]  près  le  Tribunal  suprême  est 
sous  la  dépendance  immédiate  du  ministre  de  la  Jua- 


LA    JUSTICE  281 

tice  cl  il  est  le  chef  direct  de  tous  les  officiers  du  Mi- 
nistère public  dans  le  Royaume.  Il  exerce  sur  eux  le 
pouvoir  disciplinaire. 

Mentionnons  enfin  une  particularité  curieuse  de  la 
législation  espagnole  en  ce  qui  concerne  la  surveillance 
des  services  judiciaires.  Périodiquement  des  magistrats 
des  Audiencias  territoriales,  désignés  par  le  Premier 
président,  doivent  effectuer  des  tournées  dans  le  ressort 
de  la  Cour.  Ils  prennent,  pendant  au  moins  six  jours 
consécutifs,  la  présidence  de  chacun  des  tribunaux  de 
première  instance  qu'ils  visitent  en  ayant  les  juges 
comme  assesseurs.  En  les  faisant  délibérer,  ils  se  ren- 
dent compte  de  leur  valeur  professionnelle.  Ce  système 
de  contrôle  est  ingénieux,  mais  il  y  a  toujours  à 
craindre  que,  pour  des  considérations  politiques,  on 
n'arrive,  sous  couleur  d'inspection,  à  déposséder,  en 
fait,  les  justiciables  de  leurs  juges  naturels. 

Les  parties,  dans  les  procès  civils  ou  dans  les  causes 
criminelles,  sont  représentées  par  des  avoués  (proenra- 
dores)  et  dirigées  par  des  jurisconsultes  (Utrados),  qui 
sont,  les  uns  el  les  autres,  légalement  habilités  pour 
l'exercice  de  leur  profession  auprès  des  juridictions 
auxquelles  ils  sont  spécialement  attachés. 

Dans  toutes  les  villes,  sièges d'Audiencias  territoriales, 
il  doit  y  avoir  un  Collège  d'avocats  Abogados)  et  un 
Collège  d'Avoués,  ayant  pour  principale  mission  de 
répartir  éqnitablement  les  charges  entre  leurs  mem- 
bres el  de  maintenir  dans  la  corporation  «  le  bon 
ordre,  le  respect  mutuel,  la  fraternité  el  la  discipline», 

hes  Collèges  d'avocats  el  d'avoués  peuvent  êtr< 


282  BSPAGNJ 

lemenl  institués  auprès  des  Cours  pro>  inciales  (  I  udien- 
ckis  </<•  lo  criminat)  et  dans  toutes  les  localités  où  l'on 
compte  ao  avocats  ou  20  avoués  en  exercice. 

Le  nombre  des  avocats  et  des  avoués  n'est  pas  limité. 

Les  règles  de  la  profession  d'avocat  sont  Formulées 

dans  la  loi  organique  judiciaire  Ai-   1870,  dans  la  loi 

organique  additionnelle  de   1882   et   dans  un  Ordre 

•roxal    forl   complet   portant   la  date  du   1  5   mars  [8g5, 

Nuevos  estatutos  de  los  Colegios  île  abogados. 

11  faut,  pour  exercer  la  profession  d'avocat,  être  âgé 
de  ai  ans  accomplis,  être  licencié  en  droit  civil,  jouir 
de  la  plénitude  de  ses  droits  civiques  et  politiques  cl 
avoir  prêté  le  serment  d'observer  la  Constitution,  d'être 
fidèle  au  Roi  et  de  remplir  loyalement  les  devoirs  pro- 
fessii  mnels. 

Les  avocats  portent  la  même  toge  et  la  même  bar- 
rette que  les  magistrats,  mais  sans  aucun  insigne  spé 
cial.  Ils  siègent  sur  la  même  estrade  et  au   même  ni- 
veau <pic  les  juges.   Leur  table  doit  être  placée  à  l'un 
des  côtés  de  celle  où   prennent   place  les  magistrats, 

IU  public. 

Les  avocats  ont  le  droit  de  plaider  couverts.  Ils  sont 
tenus  seulement  de  se  découvrir  lorsqu'ils  commen- 
cent leur  plaidoii  ie. 

Leurs  honoraires  ne  Bont  point  tarifés,  mais  si  |a 
partie  à  laquelle  ils  ont  prêté  leur  ministère  les 
trouve  excessifs,  elle  peut  exercer  un  recours  devant 
la  juridiction  qui  a  connu  du  procès  ('elle  ci  approuve 
ou  réduit  le  chiffre,  après  avoir  pris  l'avis  du  Collège 
des  avocats  et,  s'il  n'en  existe  pas,  l'avis  de  deux  juris- 
consultes non  intéressés  dans  la  même  affaire. 


LA    JUS!  tl  i 

Les  avocats  ont  le  droit  de  réclamer  1"  paiemenl  des 
honoraires  qui  leur  sont  dûs,  soit  île  l'avoué,  si  mi 
avoué  es!  intervenu  dans  l'instance,  soit  directement 
de  la  partie  intéressée.  Ils  présentent  à  cet  effet  un 
mémoire  détaillé  et  prêtent  serment  qu'ils  n'ont  pas 
encore  reçu  satisfaction.  Leur  action  se  prescrit,  en 
principe,  par  trois  ans. 

Le  Collège  des  avocats  assure  la  discipline  de  l'(  hrdre. 
Il  a  à  sa  tète  un  Doyen  (Decano),  dont  les  attributions 
correspondent  à  celles  du  Bâtonnier  en  France.  Le 
Doyen  est  assisté  d'un  trésorier,  d'un  secrétaire  et  de 
six  membres  du  Conseil  de  l'Ordre  (depulados). 

Tous  sont  élus.  Pour  faire  partie  du  Conseil,  il  faut 
avoir  exercé  la  profession  d'avocat  pendant  une  pé- 
riode de  six  à  seize  ans,  suivant  l'importance  des  col- 
lèges, et  avoir  acquitté,  pendant  les  quatre  dernières 
années,  une  patente  d'une  quotité  déterminée.  Les 
Conseils  de  discipline  se  renouveJlent  par  tiers  annuel- 
lement à  Madrid;  par  moitié  fous  les  deux  ans  en 
province. 

Les  fonctions  de  procureur  ou  d'avoué  procurador) 
sont  régies  par  la  loi  organique  judiciaire  de  1870  et 
par  une  série  d'ordres  royaux. 

Il  y  a  des  procureurs  près  le  Tribunal  suprême,  près 
les   [adiencia$  et  près  les  Tribunaux  de  parlido. 

Le  rôle  des  avoués  est,  en  Espagne  comme  chea 
nous,  de  représenter  les  parties  en  justice  sous  la  di- 
rection de  l'avocat  ;  mais  la  profession  est  libre.  Le 
procurador  n'a  pas  à  demander  sa  nomination  au  Gou- 
vernement ;  il  Suffit  qu'il  justifie  de  sa  capacité  | 
fessionnelle  en    la   forme  fixée  par  les  réglementa  et 


284  BSPAGNl 

qu'il  verse  un  cautionnement  à  l'effet  de  pouvoir 
répondre,  le  cas  échéant,  et  des  avances  effectuées  par 
le  client  et  do  tous  Faits  de  charge. 

A  l'audience,  les  procuradores  portent  une  robe 
noire,  Le  Collège  des  avoués  assure  la  discipline  de  la 
corporation. 

Les  letrados  sont  des  licenciés  en  droit,  non  inscrits 
au  tableau  de  l'Ordre  des  avocats  et  D'ayant  point  de 
cabinet  pour  l'exercice  normal  de  la  plaidoirie,  mais 
admis  à  délivrer  des  consultations  écrites. 

L'attribution  essentielle  des  notaires  est  de  donner 
le  caractère  authentique  aux  contrats  cl  aux  autres 
actes  extrajudiciaires. 

Chaque  partido  forme  un  district  notarial  dans  le- 
quel il  est  institué  autant  de  notaires  que  l'exige  l'in- 
térêt du  service  eu  égard  au  chiffre  de  la  population  et 
au  nombre  des  transactions. 

Le  Gouvernement  fixe  la  résidence  des  notaires,  sur 
l'avis  de  VAudiencia  el  des  autorités  provinciales. 

Les  notaires  sont  à  la  nomination  du  Souverain,  sur 
la  présentation  de  trois  candidats  faite  par  VAudiencia 
territorial. 

Les  notaires  sont  tenus  de  fournir  un  cautionne- 
ment, soit  en  titres  de  rente,  soit  sous  la  forme  d'une 

constitution  d'li\  potlièipies.   Ils  doivent  prêter  serment 

des. ml  VAudiencia, 

Lefl  minutes    protocoïo»     des    notaires    ;ippai  tiennent 

■i  l'Etat.  Les  notaires  n'en  sont  que  les  gardiens,  s"is 
leur  responsabilité. 

Il  \  a  dans  chaque  [udiencia,  sous  son  contrôle  et 
son  inspection,  des  Archives  générales  o  des  écritures 


i.a  justice  285 

pul>li(|iips  ».  Ces  archives  sont  formées  des  minutes 
qui  remonlenl  à  plus  de  vingt  cinq  ans.  Les  minutes 
plus  récentes  demeurent  en  l'étude  où  elles  ont  été 
dressées.  Chaque  année,  à  la  fin  de  décembre,  le  no- 
taire transmet  au  chef  de  l\  [udiencia  les  minutes  de  va  ni 
être  déposées  aux  archives. 

Il  \  a  des  Collèges  de  notaires  (colegios)  dans  les 
localités  désignées  par  le  Gouvernement.  Tous  les 
notaires  de  la  circonscription  composent  un  collège. 
Les  intérêts  de  la  corporation  sont  confiés  à  une  Cham- 
bre (Junln)  qui  est  elle-même  placée  sons  le  contrôle 
de  l'autorité  judiciaire  et  du  Ministère  public.  Elle  a 
l'exercice  de  l'action  disciplinaire  et  peut  prononcer 
contre  les  notaires  en  faute  une  admonestation,  une 
réprimande  ou  une  amende. 

Des  explications  qui  viennent  d'être  données  en  ce 
qui  concerne  les  auxiliaires  de  la  justice,  il  résulte  que 
L'Espagne  n'admet  pas  la  vénalité  des  charges. 

Lorsqu'on  étudie  L'ensemble  de  l'organisation  judi- 
ciaire espagnole,  il  est  impossible  de  ne  pas  recon- 
naître l'elForl  méritoire  qu'a  tcnlé  le  législateur  pour 
assurer  aux  justiciables  une  magistrature  préparée  à 
sa  mission,  éclairée  et  impartiale,  qui  devrait  échapper 
de  par  les  garanties  de  son  recrutement,  à  toute  pres- 
sion de  la  part  du  pouvoir.  S'ensuit-il  (pic  le  législa- 
teur ail  atteint  son  luit  ?  Il  serait  téméraire  tic  l'a f— 

lii r.     Les    précautions    minutieuses    qu'il    a    [irises 

pour  barrer  la  route  au   favoritisi t  a  l'arbitraire 

indiquent  assez  contre  quels  abus  invétérés  il  avait  à 
lutter.    Dans    le    domaine    de    la    justice    comme    dans 

toutes  les  branches   de   l'administration,    les   mœurs 


28fi  BSPAGNl 

restent  plus  Portes  que  les  lois.  Nous  voulons  croire 
que  des  progrès  ont  été  réalisés  depuis  le  temps  où 
Casalla  écrivait  que  a  sous  le  rapport  de  la  justice,  le 
Maroc  n'avait  rien  à  envier  à  l'Espagne  i)  ;  niais  il  faut 
reconnaître  que  le  sentiment  populaire  manifeste  une 
instinctive  el  invincible  défiance  à  l'égard  de  Ta  justice. 
Il  garde  la  conviction  (pie,  pour  obtenir  réparation 
d'un  préjudice,  il  faut  avant  tout  être  en  lions  termes 
avec  le  Cacique,  ('.'est  lui,  affirme-t-on,  qui  dicte  les 
arrêts  de  justice  comme  il  distribue  les  laveurs  admi- 
nistratives. 

La  conclusion  qui  se  dégage  de  ce  dernier  chapitre 
comme  de  tous  les  précédents,  c'est  qu'incontestable- 
ment l'Espagne  a  été  dotée  depuis  vingt  ans  d'une 
législation  savante,  s'inspirent  de  considérations  fofl 
élevées  el  méritant,  à  beaucoup  d'égards,  d'être  théo- 
riquement proposée  comme  modèle  aux  esprits  à  la 
recherche  des  suintions  de  progrès.  Malheureusement, 
si  l'Espagne  a  réussi  à  élaborer  une  législation  souvent 
remarquable,  il  lui  reste,  nous  ne  saurions  trop  le 
redire,  à  apprendre  le  respect  des  lois.  Le  peuple  espa- 
gnol pratique,  de  trop  longue  date,  l'art  ingénieux  de 
les  éluder  C'est  en  vain  que  le  législateur  s'efforce  de 
tout  prévoir  pour  réprimer  avec  nue  inflexible  sévérité 
les  moindres  dérogations  aux  règles  qu'elle  édicté, 
l'illégalité  demeure  péché  véniel  au  delà  des  Pyrénées. 
Il  est  à  craindre  que,  longtemps  encore,  elle  ne  fasse 
partie  de  »  l'arl  de  vivre      Cosas  de  Espaiïa. 


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ricain. Paris,   t8g6. 

Mi  iN'umu  fltoliorli.        I  es  étapes  de  la  royauté  <!' \l[>lionsc 
XIII.  Paris,  k.,.',. 

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Économiste  /.'  européen  (3  octobre  iui3).  —  La  situation 
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Grande  encyclopédie.  —  v.  Espagne. 

Nouvelle  Revue  internationale.  —  L'Espagne,   igio. 

Pandectes.  —  v.  Espagne. 

Questions  diplomatiques  et  coloniales.        Passim. 

Répertoire  général  du  Droit  français.      ■  \.  Espagm  . 

Revue  générale  d'administration  Bept,  igi3),  La  colonisa-' 
lion  intérieure  en  Espagne. 

Revue  internationale.        L'Espagne  en  1900. 
Revue  politique  et  parlementaire.        Passim, 


INSTITUTIONS   POLITIQUES 


VAL  D'ANDORRE 


INSTITUTIONS  POLITIQUES 

VAL   D'ANDORRE 


\  \L  D'ANDORRl 


Les  origines  de  la   République  d'Andorre.  —  Les  Pariatges. 

—  L'Élat  Andorran  et  la  souveraineté  des  Co-princes 
on  Co-seigneurs.  —  La  Paroisse  el  la  Nation.  -  Les 
Consuls  et  le  Conseil  de  Paroisse.  —  L'Illustre  Conseil 
général  de  la  Terre.  —  Le  Procureur  Général  Syndic.  — 
Les   Services   publies.  — ■  La  Justice  civile.  —  Les  Baylcs. 

—  Lo  Juge  des  Appclalions.  —  Le  recours  au\  Co-princes 
ou  (Jo-scigneurs.  —  La  Justioe  Criminelle.  —  Les  \i- 
guiers  et  le  Tribunal  des  (lorts. 


Sur  le  versant  méridional  des  Pyrénées,  entre  le 
département  français  de  l'Ariège  et  la  province  espa- 
gnole de  Lérida,  au  milieu  d'une  enceinte  de  crêtes 
inaccessibles  ,\  il  paisible  et  heureuse)  depuis  des  siècles, 
la  minuscule  République  d'Andorre. 

Au  point  de  vue  du  droil  constitutionnel,  I'  Andorre 
te  trouve,  à  l'heure  actuelle,  dans  une  situation  unique 
au  monde. 


296  \  U     h    Wl'uitiii 

-t.  en  réalité,  une  seigneurie  du  Moyen  ^ge, 
dotée  îles  plus  larges  franchises,  qui  ne  s'est  point 
absorbée  dans  un  groupement  national  et  qui  a  échappé 
à  la  centralisation  réalisée  des  deux  côtés  dos  Pyrénées 
parce  que  sans  doute  elle  présentait  cette  curieuse  pai  - 
cularitc  de  relever  île  deui  seigneurs  de  nationalité 
différente. 

Les  Andorrans,  prétendent  fièrement  faire  remonter 
l'origine  de  leur  indépendance  à  Charlemagne. 

Vers  790,  quand  le  grand  Empereur  d'Occident 
marchait  contre  les  Sarrazins,  les  habitants  de  l'An- 
dorre avaient  dirigé  fidèlement  son  année  vers  les 
défilés  de  la  Catalogne.  Lu  récompense  de  leur  dé- 
vouement loyal,  Charlemagne  avait  affranchi  les 
Vallées  de  l'autorité  des  princes  voisins  et  laissé  l'An- 
dorre se  gouverner  suivant  ses  propres  I<>iv 

Exécutant  les  volontés  de  son  père,  Louis  le  Débon- 
naire, eu  l'an  806,  consacra  solennellement  cette  indé- 
pendance par  une  Charte  toujours  respectée  et,  s'inspi- 
rant  d'un  verset  du  Livre  des  Unis,  il  baptisa  Andorre 
le  pavs  que  ses  |dcuv  souvenirs  comparaient  à  l'Endor 
de  la  Palestine. 

Api .-  avoir  affirmé  l'indépendance  du  \  al  d'Andorre 
il  fixé  l«s  limites  de  Bon  territoire,  lequel  représente 
une  superficie  d'environ  600  kilomètres  carrés,  Louis 
le  Débonnaire  affranchit  la  population  de  tout  tribut 
ou    impôt.    Les    Vallées   étaient    simplement   placées 

sous  1,1  suzeraineté  d'un  des   valeureui  compagi s 

d'armes  de  l'Empereur,  Siefrid,  comte  d'1  rgel,  et  le 
(ils  de  Charlemagne  affirmai)  sa  suzeraineté  suprême 
en   demandanj  aux    habitants  de  lui  faire  parvenir  ré 


val  d'andorre  297 

guiièrément  chaque  année  deux  truites  de  l'Embalira, 
leur  belle  et  large  rivière,  aux  remous  de  cristal. 

Ces  légendes  sont  forl  discutables  et  île  graves  liis- 
toriens  paraissent  avoir  démontré  qu'il  faut  considérer 
comme  apocrvplic  la  prétendue  Charte  de  Louis  le  Dé- 
bonnaire. 

Au  cours  du  Moyen  Vge,  une  longue  lutte  s'enga- 
gea entre  les  Evèques  et  les  Comtes  d'Urgel,  se  dispu- 
tant la  su/eraineté  du  Val  d'Andorre. 

En  injn,  l'Evèque  d'Urgel,  se  reconnaissant  inca- 
pable de  soutenir  seul  ses  droits,  lit  appel  à  l'interven- 
tion du  comte  de  r'oix.  lui  promettant  île  partager 
avec  lui  sa  souveraineté. 

Ce  partage  de  souveraineté  devait  donner  lieu  à  de 
longues  dillicultés. 

En  1772,  après  des  rivalités  sanglantes,  six  arbitres 
lurent  chargés  de  régler  les  droits  respectifs  du  Comte 
de  lroix  et  de  l'Evèque  dl  rgel. 

Ils  le  firent  au  moyen  d'un  acte  solennel,  le  Pa- 
riniijc,  qui  fut  signé  le  7  septembre  1778  et  qui  est  de- 
venu la  constitution  de  la  République  d'Andorre. 

Aux  termes  des  PariatqeS,  la  souveraineté  indivise 
de  l'Andorre  devait,  appartenir  collectivement  à 
l'Evèque  d'U  rgel  et  au  I  îomte  de  Koix. 

Un  tribut  [quistia),  d'ailleurs  insignifiant,  devait 
être  versé  annuellement  aux  deux  suzerains  ou  co- 
princes.  La  part  du  Comte  du  Foix  était  de  trois 
quarts  (960  IV.  1  celle  de  l'Evèque  d'I  rgel  d'un  quart 
(45o  fr.). 

Les  droits  de  la  Maison  de  Foix  <>ni  passé  successi- 
vement à    celle  (le  Im'miii,   puis  a  celle  des  Bourbons,     I 


\  ai.  d'andorre 

l.i  France  les  .1  recueillis  dans  l'héritage  «.le  ses  anciens 
rois.  C'est  ainsi  cj ne  par  application  dos  Pariatf 
la  souveraineté  du  Val  d'Andorre  est  aujourd'hui  par- 
entre  le  Président  de  la  République  française  et 
L'Evêque  d'I  rgel  (Espagne),  tjui  ont  le  titre  de  co- 
princes  des  Vallées  neutres  d'Andorre. 

Au  temps  de  la  Révolution,  les  autorités  du  Paya  de 
l\>i\  refusèrent  le  tribut,  comme  contraire  aux  prin- 
cipes de  1789.  M. us,  quelques  années  plus  lard.  Napo- 
léon, par  un  décret  du  27  mars  icîo(>  rendu  sur  la 
demande  instante  des  délégués  andorrans,  reprit  so- 
lennellement possession,  au  nom  de  la  France,  des 
prérogatives  qu'avaient  consacrées  les  Pariatges, 

Bâtons-nous  d'ajouter  que  les  pouvoirs  des  deux 
co-princes  sont  surtout  honorifiques.  Leur  souverai- 
neté nominale  consiste  à  protéger  le  pays  qui  s'est 
placé  sous  leur  garde  et  à  veiller  au  respect  < 1 0  son 
indépendance  et  de  ses  institutions.  Ils  sont  représen- 
tés   chacun    par    un   délégué    personnel   :  le  préfet  des 

Pyrénées-Orientales  pour  la  France,  et  un  vicaire  géné- 
ral pour  l'Evêque  d'I  rgel,  Ces  délégués  confient  eux- 
int'nios  l'exercice  de  leurs  droits  à  deux  Viguien,  l'un 
français,  l'autre  espagnol.  Les  Viguiers  exercont,  au 
nom  des  co  princes,  la  souveraineté  dans  chacune  de 
ses  prérogatives.  Ils  oui  mission  de  surveiller  l'admi- 
nistration des  Vallées,  de  s'assurer  de  la  légalité  des 
décisions  prises  par  les  autorités  locales  et   de  rendre 

la    justice     au     criminel,      heurs     attributions,    qu'ils 

tiennent  '1rs  Pariatge  .  ne  Boni  nullement  celles  de 
simples  agents  diplomatiques  .  ill  sont,  en  fait  et  en 
droit,  les  plus  hauts  dignitaires  de  Y  Andorre. 


VAL    d'aNDORRJ  '-'■|,.l 

A  leur  entrés  en  charge,  les  Viguiers  prêtent,  la 
main  sur  l'Evangile. le  serment  solennel  de*  respecter 
et  faire  respecter  les  lois,  us,  coutumes  et  privilèges  de 
la  Vallée  ».  Ils  revêtent,  pour  cette  circonstance,  un 
costume  d'apparat,  avec  l'épée.  L'épée  qu'ils  ont  seuls 
le  droit  de  porter  est  l'insigne  de  la  justice  el  du  com- 
mandement de  la  force  armée. 

Le  Val  d'Andorre  est  divisé  en  six  paroisses  :  An- 
dorre la  \  ieille,  au  pied  du  Mont-Auclar,  Encamp, 
Camillo,  San-Julia,  La  Massana  et  Ordino. 

Chaque  paroisse  est  composée  d'un  bourg  central  et 
d'un  ensemble  de  hameaux  et  de  métairies. 

La  paroisse  est  administrée  par  deux  Consuls  :  le 
Consul  majeur  et  le  Consul  mineur,  et  par  un  Conseil 
de  paroisse  ou  Cornu. 

Tout  chef  de  famille  andorran,  domicilié  dans  la 
paroisse,  majeur  de  2.")  ans,  exempt  de  condamnations, 
est  électeur  dans  cette  paroisse.  Sont  exclus  du  droit  de 
vote  les  domestiques,  ceux  «  qui  ont  contracté  une 
dette  envers  la  chose  publique  »  elles  ivrognes.  L'élec- 
tion se  fait  au  bourg  principal,  au  jour  fixé  parles 
principaux  chefs  de  famille,  les  «  anciens  ».  Le  scru- 
tin est  ouvert  à  10  h.  1  a  du  malin,  et  fermé  à 
li  heures.  Il  a  lieu  sous  la  présidence  d'un  des  Consuls, 
assisté  de  deux  assesseurs  et  d'un  secrétaire,  choisis 
parmi  les  membres  en  exercice  du  Conseil  de  pa- 
roisse. 

Le  vote  est  écrit  ou  oral,  suivant  les  préférences  de 
l'électeur.  Les  citoyens  investis  d'un  mandai  votent  les 
derniers  <•(  ce  sont  eux  qui  dépouillent  le  scrutin  ri 
qui  proclament  les  élus.  La  majorité  absolue  est  néces- 


300  VA]     d' ANDORRE 

taire  au  premier  tour  de  scrutin.  Il  est,  d'ailleurs. 
extrêmement  rare  qu'il  soit  nécessaire  de  procéder  à  un 
second  tour,  1  es  élections  s'effectuent  dans  le  calme  le 
plus  complet  et  ne  donnent  presque  jamais  lieu  à  des 
compétitions  ardentes. 

Les  Consuls  sont  élus  par  le  Cornu.  Ils  sont  toujours 
choisis  parmi  les  notables  les  plus  riches.  Leur  man- 
dat dure  deux  années.  Antérieurement  à  ta  réforme 
opérée  en  i8uC,  le  mandat  des  Consuls  était  d'une 
année  seulement . 

A  l'expiration  de  leurs  pouvoirs,  les  anciens  Consuls 
sont  appelés  à  remplir  de  droit  les  fonctions  de  con- 
seillers pendant  deux  années.  Ils  peuvent  ainsi  éclairer 
de  leurs  avis  leurs  successeurs.  I  ne  pensée  de  déférence 
et  de  sagesse  a  lait  maintenir  obligatoirement  dans  le 
Conseil  les  Consuls  sortant  de  charge. 

Ajoutons  que  le  Conseil  de  paroisse  se  divise  en  deux 
sections  :  La  première,  composée  de  six  membres, 
comprend  les  deux  Consuls  en  exercice,  les  deux  Con- 
suls sortis  de  fondions,  les  deux  prous  on  prudhnnnnes 
(Cap*  grossos  ,  qui  ont  rempli  antérieurement  la  charge 

de  consuls.  La    seconde  section     comprend     les    autres 

conseillers.  La  première  section  forme  le  conseil  per- 
manent des  consuls.  Les  deux  sériions  ne  sont  réu- 
nies (pie  |iiiiu  statuei  sur  les  affaires  les  plus  impor- 
tantes. Les  Caps  i/rnssns  remplacent  de  plein  droit  les 
consuls  empêchés  de  remplir  leurs  fonctions. 

Les  I  onsuli  doivent  être  âgés  de  3o  ans,  être  mariés 
et  justifier  d'une  fortune  en  biens-fonds  suffisante 
poui  i  épondre  de  leur  gestion, 

I.'    Consul  majeur  remplit   les  fonctions  du   maire 


I  M.    D   tNDORRi  .'{<)| 

dans  nos  communes  françaises,   le  Consul  mineur  les 
fondions  de  l'adjoint. 

Le  Cornu  a  des  attributions  analogues  à  celles  de 
noire  Conseil  municipal.  Il  gère  les  affaires  commu- 
nales et  administre  les  biens  paroissiaux.  Les  revenus 
des  paroisses  se  composent  du  produit  des  pacages  et 
des  bois.  Les  bois,  restés  dans  l'indivision,  sont  tous 
communaux.  Nul  ne  possède,  en  Andorre,  des  forêts  à 
titre  privatif.  Les  coupes  étant  plus  que  suffisantes 
pour  les  besoins  des  habitants  considérés  comme  alïbua- 
gistes,  l'excédenl  des  produits  est  mis  en  vente  pour 
couvrir  les  dépenses  communales.  La  comptabilité  est 
placée  sous  la  surveillance  de  deux  délégués  aux 
comptes  élus  pour  deux  ans  par  l'ensemble  des  élec- 
teurs et  rééligibles. 

En  dehors  du  Coma,  les  chefs  de  famille  des  agglo- 
mérations secondaires  forment  des  Conseils  de  quartier 
ou  de  hameau. 

L'Andorre  possède  un  gouvernement  parlementaire. 
représenté  par  une  assemblée  élue  et  souveraine  et  par 
un  Chef  de  L'Etat  que  choisit  l'Assemblée. 

Le  parlement  est  le  Conseil  général,  «  L'Illustre  Con- 
seil général  de  la  terre  >> 

Jusqu'en  i8(>o\  la  représentation  nationale  se  con- 
fondait avec  la  représentation  municipale.  Chaque 
paroisse  déléguait  à  «  l'Illustre  Conseil  général  »  ses 
deux  Consuls  en  exercice  et  ses  deux  Consuls  sortants. 
L'Assemblée  *e  composai!  ainsi  de  six  Consuls  ma- 
jeurs,  el  «le  douze  conseillers,  C'était  la  réunion  des 
municipalités.  Depuis  la  révision  de  la  Constitution 
Andorrane  «-n    [866,   c'est  le   suffrage  universel  qui 


302  val  d'andorri 

élit  directement  les  membres  de  «  l'Illustre  Conseil 
général  ». 

Sont  électeurs  les  chefs  de  famille  [Caps  de  Casa), 

majeurs  de  '">  ans,  et  \ndorrans  ou  mariés  à  une  hé- 
ritière andorrane  et  domiciliés  depuis  trois  ans  dans 
la  paroisse  ;  sont  éligibles  les  électeurs  âgés  de  'M)  ans, 
et  propriétaires  de  lticns  fonds. 

«  L'Illustre  Conseil  général  t  esl  composé  de 
a  i  membres,  h  raison  de  !\  par  paroisse,  élus  pour 
quatre  ans  et  renouvelables  par  moitié  ions  les  deux 
ans.  Ils  doivent  être  choisis  en  dehors  des  Consuls  el 
des  douze  Conseillers  de  paroisse. 

Ce  parlement  andorran  tient,  chaque  année,  cinq 
sessions  ordinaires,  à  l'époque  des  grandes  fêtes  calho- 
liques,  à  Pâques,  à  la  Pentecôte,  à  la  Toussaint,  à  la 
Saini  André  el  à  Noël. 

11  peut  en  onlre  se  réunir  en  session  extraordi- 
naire, soil  spontanément,  soit  sur  la  convocation  du 
Procureur  général  syndic,  soil  même  à  la  requête  de 
tout  citoyen. 

'  •  -l  a  \ndorre-la-Yicille,  au  pied  du  pic  d'An- 
clar,  que  se  réunit  l'assemblée  dans  la  Casa  de  la  l  ail, 

Maison  des   Vallées  i),  construite  sur  un  terre- plain 

qui  domine  le  (Vais  bassin  <lu  Yalira.  I.e  Palais  lé- 
gislatif est  un     édifice  de  l'orme    (|u  idram;iilaii  e    et    de 

simplicité  antique.  L'angle  de  gauche  porte  une  fcou 
relie  percée  de  meurtrières  el  surmontée  d'une  croix, 
I.e  portail  esi  couronné  d  nu  écusson  de  marbre.  Cet 
écusson  esl  divisé  en  quatre  quartiers,  en  forme  de 
croii  :  à  droite  figurent  la  mitre  el  la  crosse  de 
l'Evèque  d*l  rgol  el  au  dessous  !,•■,  trois  pals  vermeils 


VAL    !>'\\!>"Hl;l  .{<>.'{ 

de  Catalogue  ;  à  gauche,  quatre  pals  vermeils  el  deux 
vaches  au-dessous  :  ce  sont  les  pals  des  comtes  de  Foix 
et  les  vaches  de  Béera.   Au-dessus  du  blason  on  lit  en 

lettres  d'or  :  «  humus  COnsllU,  tedea  juslitix  (i  )  et  «  1 1 1  — 
dessous  ces  quatre  vers  latins  ». 

«  Suipice  :  Sunl   rallia  iinilris  hac  slcnuauta  .-.unique 

Régna,  quibus  gaudent  nohiliora  tegi  : 
Singula  si  populos  ;ilius,   Vmlorra,  bcalmnl 

Quidni  juncta  ferent  aurea  Becla  tilii  »    a  . 

Au  rez-de-chaussée  une  (-curie,  où  Lee  membres  de 
l'Illustre  Conseil  laissent  leurs  montures  ;  au  premier 
éta^re  une  grande  salle  de  réunion,  avec  une  armoire 
de  fer  à  six  fermetures,  dont  chaque  paroisse  conserva 
une  clef.  C'est  le  dépôt  des  archives  de  l'Etal.  L'ar- 
moire ne  peut  être  ouverte  qu'en  la  présence  simul- 
tanée des  siv  représentants  des  paroisses  dépositaires 
des  clefs. 

\  côté,  une  chapelle,  une  cuisine  à  l'antique,  avec 
des  bancs  massifs  le  loin;  des  murs,  un  lover  central, 
des  landiers  pour  suspendre  les  chaudrons  ;  la  fumée 
s'échappe  par  une  ouverture  pratiquée   dans  la   VOÙte. 

(<>uand  le  Conseil  délibère,  la  République  pourvoit 
à  sa  nourriture.  Chaque  conseiller  reçoit,  pendant  la 
durée  de  la  session,  d'ailleurs  fort  courte,  une    indeiu- 

(i)  Demourc  du  (lonscil,  Demeure  de  la  Justice. 

(2)  Regardez  :  ce  sont  là  les  insignes  d'une  vallée  nautre  ; 
des  nations  plus  illustres  se  louent  d'ôtre  bornées  par  elle. 
Andorre,  m  i  hacun  des  deux  Etats  rend  sou  peuple  heureux, 
comment  leur  union  ne  te  donnerait-elle  \>.^  dea  siècles 
d'01    ' 


304  VU.     D  AMinlIlll 

nilé  (k-  u>  francs  par  jour  et  est  logé  dans  l'Illustre 
Palais. 

Au  cas  de  réunion  extraordinaire,  les  frais  d'entre- 
tien des  membres  de  L'Assemblée  sont  à  la  charge  du 
particulier  qui  a  provoqué  la  réunion  et  qui  est  tenu 
de  verser,  au  préalable,  provision  suffisante. 

Les  membres  de  l'Illustre  Conseil  portent  l'ancien 
costume  :  culotte  courte  avec  ceinture  et  gilet  de  laine 
rouge,  cravate  noir,  souliers  à  boucle,  long  manteau 
ou  balandran  de  drap  noir  doublé  de  cramoisi,  bonnet 
rouge  sur  lequel  se  pose  le  tricorne  d'apparat. 

Avant  d'ouvrir  leurs  séances,  ils  entendent  la  messe, 
puis  ils  prennent  place  autour  d'une  grande  table. 
Chacun  donne  son  avis  de  sa  place  ;  il  n'\  a  pas  de 
tribune.  Les  décisions  sont  prises  à  la  majorité  :  elles 
sont  immédiatement  enregistrées  el  deviennent  défi- 
nitives, sauf  approbation  des  coseigneurs  qui  peuvent 
toujours,  soit  sur  recours  à  leur  autorité,  soit  d'office, 
réf 1er  les  décisions  de  l'Assemblée. 

Les  ci  \  iguiers  a  des  coprinces  ont  le  droit  d'assistei 
aux  séances  du  Conseil  avec  voix  consultative. 

0  L'Illustre  Conseil  »  est  le  pouvoir  législatif  de 
L'Andorre,  mais  il  n'a  pas  seulement  mission  de  voter 
1rs  lois  el  règlements  el  de  contrôler  l'administration 
générale  !  il  nomme  directement  les  fonctionnaires  de 
la  République 

L'une  de  ses  principales  attributions  bs!  de  gérer  les 
finances  publiques. 

Les  dépenses  auxquelles  l'Illustre  Conseil  a  à  faire 
fat  •■  ion!  : 

1  •  h  h  .us  du  i  ulte  i  atholique  : 


vu   d'andobri  305 

Ceu\  du  service  médical,  assuré  [><i t  an  médecin 
qui  reçoit  une  indemnité  annuelle  de  i.5oo  francs  ; 

Ceux  qu'occasionnent  les  réunions  du  Conseil  des 
Corts,  les  réceptions  des  Viguiers  t),  les  revues  des 
troupes  ; 

Les  frais  de  réparations  aux  édifices  publics  ;  enfin, 
le  tribut  (la  quistia  . 

C'est  la  dépense  qui  a  son  origine  vénérable  dans 
les  Pariatges  de  1278.  Le  chiffre  de  la  quistia  est  resté 
fixé  à  j.")o  francs  pour  l'Evêque  d'Urgel,  à  9G0  francs 
pour  le  gouvernement  fiançais.  Afin  d'éviter  un  dé- 
placement annuel  aux  trois  délégués  Andorrans  qui 
viennent  apporter  le  tribut  au  préfet  des  Pyrénées 
Orientales,  délégué  permanent  de  la  République,  la 
(juislia  n'est  versée  à  la  France  (pie  tous  les  deux  ans 
et  se  monte  ainsi  à  1.920  francs. 

Les  recettes  du  budget  sont  assurées  par  la  vente 
des  bois  et  des  ebarbons  des  paroisses,  la  location  des 
pâturages  et  celle  des  auberges. 

Nous  trouvons,  en  effet,  en  Andorre  cette  particula- 
rité curieuse  que  l'Etat  s'est  réservé  le  monopole  des 
auberges. 

Un  a  souvent  écrit  que  les  habitants  de  l'Andorre  ne 
payaient  pas  d'impôt.  C'est  une  erreur.  11  y  a  un 
impôt,  mais  à  la  vérité  un  impôt  très  léger.  C'est  un 
impôt  sur  le  revenu.  Il  est  d'environ    1  <Jo   du  revenu. 


m    Les    Viguiers  sont    reçus    avec  de    grands  bonneurs. 
Signalons  le  vieil   usage    suivant    lequel  la  République  doit 
olTrir  un  grand  repas  de    gala  an    Viguier,  à    son    arn 
dernier  ayant,  en  retour,  l'obligation  d'apporter  le  dessert. 

20 


306  vu   d'andorhb 

Des  Conladors,  nommés  par  ci  l'Illustre  Conseil  »  à 
raison  de  un  par  paroisse,  sont  chargea  de  recueillir 
sur  place  îles  renseignements  a  l'effet  d'établir el  de  ré- 
partir L'impôt  proportionnellement  aux  revenus  de 
chacun.  Cet  impôt  prend  Lui-même  le  nom  de  quislia, 
car  c'est  pour  solder  la  quistia,  le  tribut  aux  cosei- 
gneurs  qu'il  esl  perçu.  Après  défalcation  de  la  somme 
annuellement  nécessaire  pour  ce  paiement,  l'excédent 
des  recettes  est  versé  dans  la  caisse  de  l'Etat. 

L'ensemble  des  ressources  du  budget  Andoran 
s'élève  à  une  somme  totale  d'environ  3.ooo  francs. 

«  L'Illustre  Conseil  »  élit  son  président,  le  Procu- 
reur Général  Syndic.  11  est  nommé  pour  un  temps  in- 
déterminé et  choisi  en  dehors  du  Conseil.  11  est  assisté 
d'un  Syndic  second  ou  Vice-Syndic,  élu  dans  les 
mêmes  conditions,  et  chargé  de  le  remplacer  au  cas 
OÙ  il  se  trouverait  empêché  de  remplir  ses  fonc- 
tions. 

L'Illustre  Conseil  peut  toujours  déposer  ces  deux 
fonctionnaires. 

En  même  temps  qu'il  est  Le  président  do  l'Assemblée, 
le  Procureur  général  Syndic  est  le  Chef  du  Pouvoir 
exécutif. 

Il  est  Le  [ilus  haut  dignitaire  de  la  République  après 
les  \  iguiei  s 

Le  Procureur  général  syndic  convoque  le  Conseil 
dans  les  occasions  extraordinaires,  administre  sous  son 
contrôle  et  a  le  droit  d'initiative  pour  toutes  les  propo- 
sitions qu'il  juge  utiles.  Des  que  le  Conseil  s'est  pro- 
non<  é,  il  assure  L'exécution  de  ses  décisions, 

Il  centralise  les   deniers    publics   Ct  est    chargé    delà 


\  ai.  d'andorbe  .'5<»7 

gestion  financière  dont  il  rond  compte  annuellement 
par  un  rapport  à  L'Assemblée  dont  il  lient  tous  ses 
pouvoirs. 

Il  est  le  chef  des  fonctionnaires,  d'ailleurs  très  peu 
nombreux.  Nous  citerons  parmi  ceux-ci  :  les  Contadors, 
répartiteurs  de  l'impôt,  les  Commissaires  inspecteurs 
des  poids  et  mesures,  le  \  eedor,  arbitre  dans  les  ques- 
tions de  bornage  et  d'arpentage,  lo  Porlero,  qui  signilie 
les  actes  de  l'autorité  publique  et  le  notaire,  qui  est 
secrétaire  île  1'lthlktre  Conseil. 

Tous  les  mandats  et  toutes  les  fonctions  sont  obli- 
gatoires et  ne  donnent  lieu  à  d'autres  émoluments  que 
le  remboursement  de  certains  Irais,  comme  les  frais  de 
correspondance  pour  le  Syndic  général  et  le  Syndic 
second. 

Les  emplois  publics  n'en  sont  pas  moins  très  re- 
cherchés pour  l'honneur  qui  s'attache  au  moindre 
d'entre  eux.  Ils  sont  confiés  aux  notables  les  plus  riches 
et  souvent  transmis  de  père  en  fils.  Il  s'est  constitué 
en  Andorre  une  sorte  d'aristocratie,  formée  d'un  petit 
nombre  de  familles  qui  détiennent  les  fonctions  pu- 
bliques de  génération  en  génération.  Les  mêmes 
personnes  monopolisent  entre  leurs  mains  la  terre  et 
la  puissance  publique.  C'est  la  vieille  tradition  féo- 
dale, qui  faisait  émaner  le  pouvoir  de  la  propriété  ter- 
rienne. Cette  antique  tradition  répond  d'ailleurs  au 
sentiment  public  en  Andorre  parce  (pie  la  devise  na- 
tionale :  «  Tout  pour  le  peuple,  mais  sans  le  peuple  » 
s'est  traduite  à  l'égard  des  prolétaires  par  îles  avan- 
tages matériels  qu'ils  ne  trouvent  au  mémo  degré 
dans  aucune  démocratie. 


308 


\    \l      I'    \MiullHr 


Moyennant  an  impôt  annuel  de  quelques  sols  cata- 
lans, sans  conscription,  sans  droits  d'enregistrement, 
sans  contributions  indirectes,  sans  douanes,  sans  dettes 
fiscales  d'aucune  sorte,  la  famille,  représentée  par  son 
chef,  est  assistée  de  toutes  manières,  obtient  gratuite- 
ment le  bois  nécessaire  à  son  chauffage,  l'ait  donner 
gratuitement  L'instruction  à  ses  enfants,  reçoit  gratui- 
tement tous  les  soins  en  cas  de  maladie.  Le  peuple,  s'il 
ne  participe  pas  aux  honneurs  et  aux  soucis  du  pou- 
voir, n'est  exclu  d'aucun  avantage.  L'égalité  absolue, 
devant  les  lois  protectrices  ou  répressives,  devant  la 
justice,  devant  les  charges  et  les  droits  existe  pour 
tous  les  citoyens.  Le  contrepoids  de  l'honneur  des 
fonctions  publiques  se  trouve  dans  la  responsabilité 
effective  qu'elles  entraînent.  Ceux  qui    ne   prennent 

aucune  paît  au  pouvoir  sont  armés  d'un  contrôle  re- 
doutable. Tout  Andorran  a  le  droit  de  poursuivre  n'im- 
porte quelle  autorité  communale  ou  générale  devant 
les  tribunaux  (i). 

L'armée  de  la  République  est  formée  de  tous  les  ci- 
toyens en  étal  de  porter  les  armes.  Elle  n'a,  d'ailleurs, 

d'autre  service  qu'un  service  de  police. 

Tous  les    ans,  un    certain     nombre    d'bomines    sont 

désignés  dans  chaque  paroisse  pour  constituer  la  milice 
veillant  à  la  sécurité  publique.  Ils  sont  placés  bous  le 
commandement  d'un  capitaine  et  de  deux  lieutenants 
deteners),  nommés  annuellemenl  par  L'Illustre  Conseil 
ii  confirmés  dans  Leurs  fonctions  par  Les  Viguiers,  re- 

i     \miih.  Vu  mi,  L' Andorre t  Etude  da  droit  publio  si  in- 
ternational, 


VAL    D  AND0RR1 


309 


présentant  les  coprinces,  le  Chef  «le  l'Etat  français  et 
l'Evêque  d'1  rgel. 

Tout  militaire  doit  avoir  un  fusil  de  calibre  en  bon 
état  et  des  munitions.  Les  hommes  ne  touchent  ni 
solde  ni  indemnité  ;  on  les  loge  et  on  les  nourrit  pen- 
dant les  déplacements  de  très  courte  durée,  auxquels 
ils  sont  assujettis. 

L'instruction  publique  est  encore  peu  développée. 
Pendant  longtemps  elle  fut  considérée  dans  les  \  allées 
comme  objet  de  luxe.  Les  vicaires  étàienl  les  seuls 
maîtres,  enseignant  à  leurs  jeunes  paroissiens  la  lec- 
ture et  le  catéchisme. 

\u  tours  de  ces  dernières  années,  quelques  postes 
d'instituteurs  ont  été  créés.  D'autre  part,  certains  fils 
de  Caps  grossos  suivent  les  cours  des  lycées  de  France 
et  des  établissements  espagnols  d'enseignement  secon- 
daire. 

La  seule  religion  pratiquée  dans  l'Andorre  est  la 
religion  catholique.  Les  ministres  du  culte  exercent 
une  inlluence  considérable.  Ils  sont  nommés  directe- 
ment par  l'Evêque  d'Lrgel,  qui  leur  alloue  une  rétri- 
bution modeste.  Elle  serait  insuffisante  si  les  parois- 
siens très  fervents  ne  venaient  en  aide  à  leurs  pasteurs 
en  leur  attribuant  le  produit  de  fondations  pieuses. 
C'est  la  République  qui  paie  les  vicaires.  Ajoutons 
qu'une  délibération  de  l'Illustre  Conseil  a  officielle- 
ment consacré  l'Andorre  à  Notre-Dame  de  Moritxell. 
Nostra  senyora  de  Moritxell  es  considerada  per  las  I  cdlé 
de  indorra  corn  a  patrona  v  especialprotectora  saa  desde 
temps  immémorial.  I.e  jxi il  sanctuaire  de  Moritxell 
renferme  une  statue  miraculeuse  de  la   \  ierge  décou 


310  vu    d'andorrb 

verte,  rapporte  la  légende,  dans  une  ronce  miracu- 
leusement fleurie  au  cœur  de  l'hiver. 

La  justice  civile  est  rendue  aux  citoyens  de  l'Andorre 
par  trois  ordres  de  juridictions  :  le  Bayle,  le  Juge  des 
Appelations,  les  Coprinccs  ou  Goseigneurs. 

Le  Bayle,  par  le  tribunal  duquel  débute  forcément 
toute  instance,  quelle  qu'en  soit  l'importance,  juge 
seul,  comme  notre  juge  de  paix  français.  Il  est,  comme 
lui,  à  la  fois  un  conciliateur  et  un  juge  mais,  en  dehors 
de  ses  attributions  judiciaires,  il  est  en  même  temps  un 
officier  de  police  et  un  cbef  militaire,  chargé  de  passer 
en  revue  la  milice.  Avec  son  gambetto  ou  grand  man- 
teau noir  et  son  tricorne,  le  Bayle  apparaît  à  ses  justi- 
ciables comme  un  magistrat  fort  imposant. 

Deux  bayles  sont  chargea  de  rendre  la  justice  aux 
Andorrans. 

L'un  est  nommé  par  le  \  iguier  de  France  ;  l'autre 
par  le  \  iguier  de  l'Evèque  d'I  rgel. 

Chaque  Viguier  choisit  le  bayle  qu'il  doit  nommer 
sur  une  liste  de  six  candidats  citoyens  Andorrans, 
présentés  par  l'Illustre  Conseil.  La  liste  est  contresi- 
gnée par  le  Procureur  Général  Syndic.  Les  Viguicrs.  si 
aucune  des  candidatures  proposées  ne  leur  parait  de- 
voir être  retenue,  peuvent  réclamer  de  nouvelles  pré- 
sentations,  mais  ils  sont  alors  obligatoirement  tenus  de 
choisir  parmi  les  noms  qui  leur  sont  donnés. 

Les  bayles  sont  généralement  choisis  parmi  les  ( hp» 
grossot. 

Les  justiciables  ont  le  choix  entre  le  bayle  nommé 
par  le  Viguier  français  ou  le  bayle  nommé  par  le  \  i- 
juier   de  l'Evoque   d'I  rgel,  L'un  cl  l'autre  ont  les 


VAL    d'aNDOHBB  -il  1 

mêmes  pouvoirs  et  les  mêmes  attributions  et  aucune 
limite  de  compétence  n'est  fixée  à  leur  juridiction  pa- 
triarcale. Il  esta  remarquer  seulement  que  certaines 
opérations  comme  la  vUura  <>u  descente  de  justice  avant 
pour  objet  l'attribution  d'une  propriété  immobilière! 
par  jugement  prononcé  sur  les  lieux  mêmes,  sont  ré- 
servées à  l'Illustre  Conseil. 

Le  bayle  est  assisté  d'un  notaire  ou  greffier  et  d'un 
huissier  (portero). 

Les  sentences  rendues  par  le  bayle  peuvent  être 
frappées  d'appel. 

Le  second  degré  de  juridiction  est  constitué  par  le 
J ' iirje  des    [ppelations. 

Celui-ci  est  alternativement  nommé  à  vie  par  le 
Chef  de  l'Etat  français  et  par  l'Evèque  d'Urgel. 

Le  Juge  des  A  ppelations  n'est  pas  tenu  de  résider 
en  Andorre,  mais  il  doit  s'y  transporter  pour  rendre 
ses  jugements.  En  entrant  on  fonctions,  il  prête  ser- 
menl  sur  l'Evangile  ci  de  respecter  les  coutumes  écrites 
ou  non  édites  des  Vallées.  »  11  prononce  seul,  comme 
le  bayle,  et,  pas  plus  que  lui,  il  n'est  lié  par  des 
loi  mes  de  procédure  à  des  textes  de  loi.  Il  juge  en 
équité,  s'inspiranl  de  la  coutume  et  de  sa  conscience. 
Le  recours  au  Juge  des  Appelalions  est,  du  reste, 
peu  fréquent,  car  il  entraîne  des  frais  assc/  onéreux 
Le  juge  qui  se  transporte  sur  le  lieu  du  litige  esl  au- 
torisé à  percevoir  à  litre  d'émolument  i5  o  o  delà 
valeur  «le  L'objet  'lu  procès, 

Enfin,  une  dernière  voie  de  recours  est  ouverte  de- 
vanl  les  Coprinces  et  les Coseigneurs,  Il  esta  remarquer 
que  les  parties  mil  le  choix  de   s'adresser,  au  gré   de 


A\'2  \  Al     n'\M>Miti;i 

leurs  préférences,  à  la  France  ou  à  la  Mitre  il'l  rgel. 
Le  lait  même  que  les  plaideurs  se  sont  adressés  au 
Bayle  nommé  par  un  des  Coseigneurs  ne  les  oblige 
aucunement  à  demander  justice  au  seigneur  dont  ce 
I vin  le  dépend. 

I  ne  instance  engagée  devant  le  bayle  français  peut 
se  terminer  devant  l'Evêque  d'I  rgel  et  réciproque- 
ment. 

Les  Coseigneurs  ne  jugent  pas  eux-mêmes. 

Ils  délèguent  leur  droit  (le  justice  à  des  juridictions 
qui  sont  le  Tribunal  ecclésiastique  pour  L'Evèque 
d'I  rgel  et  le  Tribunal  supérieur  de  Perpignan  pour  le 
Chef  de  l'Etat  français. 

Le  Tribunal  supérieur  de  Perpignan  a  hérité  des 
attributions  qui  avaient  été  conférées  autrefois  au  Con- 
seil souverain  du  Roussillon,  puis  au  Parlement  de 
Toulouse. 

Aux  termes  du  décret  du  i3  juillet  1888,  il  a  été 
institué  à  Perpignan  un  tribunal  ti  chargé,  par  déléga- 
tion du  Président  de  la  République  française,  de  con- 
naître déGnilivemenl  en  dernier  ressort  de  celles  des  dé 

cisions  rendues  <'n  matière  civile  par    le  Juge  «les    \p- 

pelations  qui  seront  déférées  à  l'examen  du  Chef  de 
l'Etal  français  ». 

Le  rribunal  est  composé  de  cinq  membres,  un  pré 
sidenl  et  quatre  juges.    La    présidence   appartient   au 
président  du  Tribunal  ei\il  de  Perpignan  ;  il  a  comme 

esseura  le  Viguier  de  France  en  \ndorre,  levice- 
président  du  Conseil  de  Préfecture  des  Pyrénées  Orien- 
tales,  un  .1  \  •  •<  ;■  1  du  barreau  de  Perpignan  et  un  qua- 
trième juge  u  choisi  de  préférence  parmi  les  personnes 


val  d'andohre  A\'A 

au  coin  an I  de  la  langue  el  des  usages  Andorrans.  » 
<li-s  deux  derniers  membres  du  Tribunal  supérieur 
sont  nominativement  désignés  par  décret. 

Le  Tribunal  juge  «  publiquement,  souverainement 
el  en  dernier  ressort  ».  Ses  jugements  sont  rendus, 
non  au  nom  du  Peuple  français,  mais  au  nom  du  Gou- 
vernement français. 

Ils  sont  rédigés  en  français  el  en  catalan. 

La  juridiction  criminelle  est  rendue  au  nom  des  sei- 
gneurs, soit  par  le  \  iguier,  soit  par  le  Tribunaldea  Corts. 

La  sentence  est  toujours  en  dernier  ressort,  sans 
appel  ni  cassation  possible. 

Les  infractions  qui  ne  présentent  pas  une  gravité 
exceptionnelle  sont  jugées  par  le  Y  iguier  le  plus  rap- 
proché du  lieu  du  délit,  après  que  le  Bayle  a  procédé  à 
une  information  sommaire. 

Si,  d'après  les  rapports  des  Bayles,  les  deux  \  iguiers 
réunis  estiment  que  l'infraction  présente  un  caractère 
de  gravité  réclamant  une  sévérité  exemplaire,  les  ^  i- 
guiers  décident  qu'il  v  a  lieu  d'assembler  le  Tribunal 
des  Corts. 

Ses  audiences  sont  annoncées  plusieurs  jours  à 
l'avance  et  entourées  de  solennité. 

Les  deux  \  iguiers  el  le  Juge  des  Appehitions  forment 
le  Tribunal  des  Corts.  Ils  sont  reçus  à  la  frontière  par 
les  Bayles  qui  les  conduisent  en  cortège  au  Palais  tics 
Vallées.  Tous  les  membres  de  l'Illustre  Conseil  sont 
présents,  en  grand  costume,  manteau  et  tricorne  de 
cérémonie.  A   leur  tête,  le   Procureur  Général  Syndic 

harangue    les  menihi  es  de    la   plus  haute  juridiction  de 

la  République.  I  ne  messe  es!  célébrée  dans  la  chapelle 


;{|  i  \  ai    d'andorbj 

du  Palais,  puis  les  membres  de  l'Illustre  Conseil  choi- 
sissent deux  de  huis  collègues  pour  remplir  auprès 
ris  les  fonctions  de  Rahonadora  (littéralement 
raisonneurs  i.  g  Les  Bahonodors,  spécifient  les  traditions, 
entrent  au  Prétoire  comme  de  simples  procureurs  ho- 
norables du  public.  Leur  fonction  consiste  à  exposer, 
i  postuler  ce  qui  leur  parait  le  plus  convenable,  tou- 
chant les  peines  ou  le  pardon  des  accusés,  selon  la  na- 
ture de  leurs  délits  et  suivant  que  les  circonstances  les 
rendent  plus  ou  moins  nécessaires,  utiles  ou  préjudi- 
ciables ou  nuisibles  à  la  République  ;  car  d'après  leurs 
expositions  et  leurs  propositions,  les  Viguiers  jugent 
les  causes  avec  justice  et  équité.  » 

Il  est  à  remarquer  que  le  Juge  des  Appelalions  ne 
prend  part  à  la  délibération  que  si  les  deuv  Viguiers 
ne  - >  -rit  pas  d'accord.  Il  ne  doit  intervenir  que  pour  les 
départager  el  ne  peut  faire  prévaloir  que  l'une  des 
deux  solutions  auxquelles  ils  se  sont  attachés. 

Lorsqu'une  peine  grave  est  prononcée,  la  lecture  de 
l'arrêt  est  faite  en  grande  solennité  par  le  Greffier-No- 
taire sur  la  place  publique  en  présence  des  magistrats 
du  Tribunal  des  Corta  et  des  membres  de  l'Illustre 
<  ionseil  en  costume  d'apparat 

Les  peines  sont  subies  en  France.  Le  patriarcal  pays 
d'Andorre,  où  la  criminalité  est  rare,  ne  possède  pas 
d'établissements  pénitenl  iaires, 

Le  droit  andorran  eal  essentiellement  traditionnel 
el  i  outumier. 

Il  est  résumé  en  deux  documents  rédigés  en  Catalan 
el  conservés  en  un  exemplaire  unique  à  Andorre-la- 
Vieille. 


VAL    d'aNDORBE  !l") 

Le  premier  de  ces  documents  est  le  Manual  Digesi 
de  his  I  ailes  iieulros  de  Andorva  en  lo  mal  se  trot  ta  de 
sa  anliijuitat  govern  y  religio,  de  sot  privilégiait  usos, 
preheminencia»  y  prérogatives. 

Ce  «  Manual  n  est  un  recueil  de  jurisprudence,  dans 
lequel  sont  inscrite»  depuis  pris  de  deux  siècles,  les 
sentences  les  plus  importantes. 

Le  second  document  est  le  Polilor  Andorran,  analyse 
des  archives  de  l'Andorre,  où  l'on  trouve  confondus 
des  traditions,  des  conseils  et  des  considérations  poli- 
tiques. 

Le  territoire  de  l'Andttrc  est  la  propriété  à  peu  près 
exclusive  d'un  petit  nombre,  de  familles.  Le  droit 
d'aînesse  est  appliqué  avec  une  grande  rigueur  afin  de 
maintenir  intact  le  patrimoine  ancestral.  Les  frères 
puinés  sont  vis-à-vis  de  leurs  aînés  presque  des  servi- 
teurs, travaillant  pour  le  chef  de  famille  afin  d'être,  en 
retour,  hospitalisés  par  lui.  Les  femmes  ne  peuvent 
prétendre  qu'à  une  indemnité  pécuniaire  dans  la 
succession  paternelle. 

C< ne  tous  les  pays  de  montagnes,  l'Andorre  com- 
prend deux  régions  dès  distinctes,  auxquelles  corres- 
pondent deux  régimes  de  travail  différents.  La  vallée 
s'adonne  à  la  culture  el  l'on  j  trouve  la  propriété  fa- 
miliale. La  montagne  est  livrée  à  l'arl  pastoral  et  à  la 
propriété  commune. 

De  grandes  richesses  naturelles  restent  inexploitées. 
Du  seigle,  du  tabac,  quelques  vignes,  mais  surtout  des 
p&turages  pour  l'élevage  des  bestiaux,  voilà  les  seules 
ressources  du  pays.  Il  s'en  contente,  mais  en  \  ajou- 
tant les  profits  liés  rémunérateurs  de  la  contrebande. 


316  VAL    D1  ANDORRE 

La  République  d'Andorre  n'a  pas  de  douanes.  Elle 
offre  donc  o  un  libre  réceptacle  entre  les  deux  cordons 
douaniers  de  France  el  d'Espagne  aux  produits  de  ces 
deux  nations  i)(i).  Les  marchandises  des  deux  pays  voi- 
sins s'accumulent  dans  les  Vallées  en  attendant  l'occa- 
sion favorable  de  franchir  la  frontière  en  fraude.  (îràce 
à  des  certificats  de  complaisance,  on  élude  les  règle- 
ments qui  exigent  pour  les  produits  de  l'Andorre  des 
certificats  d'origine. 

Si  l'on  excepte  ce  penchant  à  la  fraude,  si  facile- 
ment absous  de  l'autre  côté  des  Pyrénées,  le  peuple 
andorran  mérite  le  respect  et  la  sympathie  par  ses  ha- 
bitudes laborieuses,  la  simplicité  et  la  pureté  de  ses 
mœurs,  son  attachement  indéracinable  à  ses  vieilles 
traditions  d'indépendance  et  son  culte  presque  fa- 
rouche de  l'honneur  familial. 

(1)  André  \  ilar. 


BIBLIOGRAPHIE 


15  w  don  de  Mont.  — ■  Les  origines  historiques  de  la  question 
d'Andorre.  Nogent-le-Rotrou,  i885. 

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lier,   i8S4- 

Chevalier  (Michel).  —  L'Andorre.  Ilevue  des  Deux-Mondes, 
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dorre . 

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J01  BSET  (P.).  —  L'Espagne  cl  le  Portugal. 

Larousse    Pierre).  —  Grand  Dictionnaire  (v.  Andorre  . 

Marte  us  (de).  —  Traité  de  Droit  international. 

Moras.  —  Le  Val  d'Andorre.  Discours  de  rentrée  à  la  Cour 
d'Appel  de  Toulouse,  1 88  1 . 

Reclus  [Elisée).  Nouvelle  Géographie  universelle.  Europe 
méridionale. 

Roi  bsillob  (de).  —  Histoire  de  l'Andorn     i8aa, 

Sans.  —  Histoire  d'Andorre,  1822. 

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.'}1S  BIBLIOGRAPHIE 

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Vidal  (Victorin  . — -L'Andorre    Paris,   (866. 

Vn.vu     Indre).  —  L'Andorre.  Etude  o!o  Droit  public  et  in 

tel  national.  Paris,   190/1. 
—  I  11  État  ignoré,  l'Andorre.  Paris,  1908. 


ANNKXKS 


ANNEXE   A 

CONSTITUTION 
)i;  LA  MONARCHIE  RSPAGNOLE 
DU  30  JUIN  1876 


21 


ANNEXE   A 


CONSTITUTION  DE  LA   MONARCHIE 
ESPAGNOLE  DU  3o  JUIN    1876 


TlTRB  I.  —   De*  Espagnols  el  de  (cars   droits. 

I.  — Sont  Espagnol!  :  T  ceux  qui  sont  nés  sur  le 
territoire  espagnol  ;  20  ceux  <|ui  sont  nés  de  père 
mi  de  mère  espagnol  sur  un  territoire  étranger;  3°  les 
étrangers  qui  ont  obtenu  des  lettres  île  naturalisation  ; 
4"  ceux  qui  ont  acquis  la  bourgeoisie  (vêcindad)  dans 
une  localité  quelconque  de  la  .Monarchie.  La.  qualité 
d'Espagnol  si-  perd  par  l'acquisition  de  la  naturalisation 

en  pays  étranger  et  par  l'acceptation  sans  l'autorisation 

du  Roi  d'un  emploi  conféré  par  un  (iouverneinent 
étranger. 

■1.  — Lesétrangers  peuvent  s'établir  librement  sur  le 
territoire  espagnol,  e\ener  leur  industrie,   s'adonner  à 

n'importe  quelle  profession,  pourvu  que  l'exercice  n'eiq 
voit  pas  subordonné  par  la  l<»i  à  des  titres  d'aptitude 
délivrés  par  l'Autorité  espagnole.  Les  étrangers  qui  ne 
sont  pas  naturalisés  ne  peinent  exercer  en  Espagne 


o'J'l  BSPA.GNË 

aucune   fonction  qui  implique  avec  elle  autorité   ou 
juridiction. 

3.  —  Tout  Espagnol  est  obligé  de  prendre  les  armes 
pour  défendre  sa  patrie,  lorsqu'il  est  appelé  par  la  loi, 
et  de  contribuer  dans  la  proportion  de  ses  revenus  aux 
dépenses  de  l'Etat,  de  la  province  et  du  municipe.  Nul 
n'es!  tenu  de  payer  les  contributions  qui  n'ont  pas  été 
volées  par  les  Gortès  ou  les  Assemblées  autorisées  léga- 
lement à  les  imposer. 

4-  — Nul  Espagnol  ou  nul  étranger  ne  pourra  être 
détenu  que  dans  les  cas  et  suivant  les  formes  prescrites 
par  la  loi.  Toute  personne  détenue  sera  remise  en 
liberté  ou  à  la  disposition  de  l'autorité  judiciaire  dans 
les  vingt-quatre  beures  qui  suivront  son  arrestation. 
Toute  détention  devra  cesser  ou  être  régularisée  dans 
les  soixante-douze  beures  qui  suivront  la  comparution 
de  la  personne  arrêtée  devant  le  juge  compétent.  La 
sentence  provisoire  qui  sera  rendue  devra  ôlre  notifiée 
à  l'intéressé  dans  le  même  délai. 

5.  —  Nul  Espagnol  ne  pourra  être  arrêté  sans  qu'il  y 
ait  un  mandat  du  juge  compétent.  L'acte  contenant  ce 
mandat  sera  confirmé  ou  non,  après  l'audition  de  l'in- 
culpé, dans  les  soixante-douze  beures  qui  suivront  son 
,h  1  estation. 

Toute  personne  détenue  en  dehors  des  formalité 
indiquées  ou  des  cas  prévus  par  la  Constitution  ou  les 
lois  sera  remise  en  liberté  sur  sa  demande,  ou  sur  la 
demande  d'un  Espagnol  quel  qu'il  soit.  La  loi  déter* 
minera  les  formalités  sommaires  à  employei  en  pareil 
1  as 

Nul  ne  peu!  entrer  dam  le  domicile  d'un  Espa  - 


gnol  ou  d'un  étranger  résidant  en  Espagne,  sans  son 
consentement,  exceptédana  les  cas  et  suivant  les  forma- 
lités prévues  par  les  lois.  Les  perquisitions  domiciliaires 
se  feront  toujours  en  présence  de  l'intéressé,  ou  d'un 
membre  de  sa  famille,  ou,  à  son  défaut,  de  deux 
témoins  de  l'intéressé. 

7.  —  L'autorité  gouvernementale  ne  pourra  ni  saisir 
ni  ouvrir  la  correspondance  confiée  à  la  poste. 

8.  —  Tout  acte  ordonnant  une  arrestation,  une  per- 
quisition domiciliaire  ou  une  saisie  do  lettre,  devra 
être  notifié. 

(). —  Nul  Espagnol  ne  pourra  être  forci- de  changer 
de  domicile  ou  de  résidence,  si  ce  n'est  en  vertu  d'un 
ordre  émanant  de  l'autorité  compétente  et  dans  les 
cas  prévus  par  la  loi. 

10.  —  La  peine  de  confiscation  des  biens  ne  pourra 
jamais  être  rétablie,  et  nul  ne  pourra  être  privé  de  sa 
propriété  si  ce  n'est  par  l'autorité  compétente,  après 
justification  d'un  motif  d'utilité  publique  et  moyen- 
nant une  juste  et  préalable  indemnité.  Si  ces  forma- 
lités n'ont  été  observées,  les  juges  maintiendront  et  au 
besoin  réintégreront  l'exproprié  dans  sa  possession. 

11.  —  La  religion  catholique,  apostolique  et  romaine 
est  la  religion  de  L'Etat.  La  Nation  s'oblige  à  entretenir 
le  culte  et  ses  ministres.  Nul  ne  pourra  être  inquiété 
sur  le  territoire  espagnol  pour  ses  opinions  religieuses 
ni  pour  l'exercice  de  son  culte,  sauf  le  respect  dû  à  la 
morale  chrétienne.  Sont  prohibées  toutefois  les  mani- 
festations et  cérémonies  publiques  d'une  religion  autre 
que  celle  de  l'Etat. 


A2Ù  BSPAONl 

la.  —  Cbacunest  llbra dci  choisir  Ba  profession  8|da 
l'apprendre  comme  il  lui  paraîtra  préférable  Tout 
Espagnol  peut  fonder  et  entretenir  des  établissements 
d'instruction  et  d'éducation  en  se  conformant  aux  lois. 
A  l'Etal  appartient  le  droit  de  conférer  les  grades  pro- 
fessionnels, et  de  déterminer  les  conditions  d'admis- 
sion ainsi  que  la  forme  dans  laquelle  devra  être,  faite 
la  preuve  d'aptitude.  Une  loi  spéciale  déterminera 
les  devoirs  des  professeurs  et  les  règles  auxquelles  sera 
soumis  l'enseignement  dans  les  établissements  d'ins- 
truction publique  entretenus  par  l'Etat,  les  provinces 
et  les  villes. 

i3. —  Tout  espagnol  a  le  droit:  d'émettre  librement 
ses  idées  et  ses  opinions  par  la  parole,  l'écriture,  par 
la  voie  de  l'impression  ou  par  tout  autre  procéda 
analogue,  sans  être  soumis  à  la  censure  préalable;  'le 
se  réunir  pacifiquement  ;  de  s'associer  dans  un  Iml 
temporel  ;  d'adresser  îles  pétitions  individuelles  ou 
collectives  au  Roi,  aux  Cortès  et  aux  autorités.  Le 
droit  'le  pétition  ne  pourra  être  exercé  collectivement 
par  aucun  corps  de  la  force  armée.  Ceux  qui  font  partie 
de  l,i  Force  armée  ne  pourront  exercer  le  droit  indivi- 
duel de  pétition  qu'en  se  conformant  aux  lois  mili- 
taire-, spéciales. 

i  j.       Les  lois  édiclefonl  (es dispositions  nécessaires 

poui   assurer  aux  Espagnols    l'exercice    des    droits    que 

leur  confère  le  présent  titre,   sans   porter  atteinte   aux 

droits  de  la  nation,  ni  aux  attributions    essentielles  des 

pouvoirs  publics.  Elles  détermineront  également  la 
responsabilité  civile  et  pénale  à  laquelle  seront  soumis, 
suivant  les  cas,  les  juges,   autorités   et    fonctionnaires 


\nm  \i:    A  3'27 

de  toutos  classes,    qui    porteront   atteinte    aux   droits 
énuméréa  dans  le  présent  titre. 

5.  —  Tous  les  Espagnols  sont  admissibles  aux 
charges  et  fonctions  publiques,  suivant  leur  mérite 
et  leur  capacité. 

iG.  —  Pful  Espagnol  ne  peul  être  poursuivi,  ni  con- 
damné, si  ce  n'est  par  le  juge  compétent,  en  vertu  de 
lois  antérieures  au  délit  et  en  la  forme  prescrite  par 
ces  lois. 

17.  —  Les  garanties  indiquées  dans  les  art.  4,  5,  G,  et 
9  et  les  paragraphes  1,  2  et  3  de  l'art.  i3  ne  pourront 
être  suspendues  dans  toute  l'étendue  de  la  Monarchie, 
ou  dans  une  partie  du  territoire,  que  temporairement 
et  en  vertu  d'une  loi,  quand  la  sûreté  de  l'Etat  et  des 
circonstances  extraordinaires  l'exigeront.  Si  les  Cortès 
ne  sont  pas  réunies,  et  si  le  cas  est  grave  et  urgent, 
le  Gouvernement  pourra,  sous  sa  responsabilité,  décré- 
ter la  suspension  des  garanties  dont  il  est  question  au 
paragraphe  précédent,  à  charge  de  soumettre  sa  déci- 
sion aux  Cortès  le  plus  tôt  possible.  En  aucun  cas,  on 
ne  pourra  suspendre  d'autres  garanties  que  celles  qui 
sont  indiquées  dans  le  premier  paragraphe  de  cet 
article.  Les  fonctionnaires  de  l'ordre  civil  ou  militaire 
ne  pourront  édicter  des  pénalités  antres  que  celles  qui 
sont  écrites  dans  les  lois. 

TrrB.fi  11.  —    Des  Cortès 

18.  —   Le  pouvoir  législatif  appartient    aux    Cortès 
d'accord  avec  le  Moi. 

19.  —  Les  Cortès  se  composent   de  deux  Assemblées 


328  B8PAGN1 

Législatives,  dont  les  pouvoirs  sont  égaux  :   le  Sénat  et 
la  Chambre  (Congreso)  clc-.s  Députés; 


Titre  III.  —  Du  Sénat 

20.  —  Le  Sénat  se  compose  :  i°  de  sénateurs  de 
droit  ;  ■>"  de  sénateurs  nommés  à  vie  par  la  Couronne  ; 
3°  de  sénateurs  élus  par  les  Corporations  de  l'Etal  et  les 
plus  forts  imposés  dans  la  forme  que  déterminera  la 
loi.  Le  total  des  sénateurs  de  droit  el  des  Bénateurs 
nommés  à  vie  ne  pourra  excéder  180.  Ce  chiffre  sera 
celui  des  sénateurs  élus. 

21.  —  Sont  sénateurs  de  droit  :  les  lils  du  roi  et  de 
l'héritier  présomptif  de  la  Couronne,  lorsqu'ils  ont 
atteint  leur  majorité  ;  les  grands  d'Espagne,  qui  ne 
sont  sujets  d'aucune  puissance  étrangère  et  qui  jouis- 
sent d'une  rente  annuelle  de  60.000  pesetas  provenant 
de  hiens  propres  immobiliers  ou  de  valeurs  assimilées 
aux  immeubles  par  la  loi  ;  les  Capitaines  généraux  de 
l'armée  et  1'  amiral  de  la  Hotte  ;  le  patriarche  des  Indes 
et  les  archevêques;  les  présidents  du  Conseil  d'Etat, 
du  Tribunal  suprême,  du  Tribunal  des  comptes,  du 
Tribunal  supérieur  de  la  guerre  el  du  Tribunal  de  la 
Moite,  après  deux  ans  d'exercice. 

•ii.  Pourront  seuls  être  nommés  Bénateurs  par  le 
roi,  "H  élus  par  les  corporations  de  l'Etat  et  les  plus 
forts  imposés,  les  Espagnols  qui  appartiennent  à  l'une 
itégories  suivantes:  r  Le  président  du  Sénat  ou 
le  président  de  la  Chambre  des  députés  ;  a"  les  députés 
qui  ont  fait  partie  de  trois  Chambres  différentes  ou  qui 
nui  exercé  pendant  huit  ans  leurs  fonctions  législatives; 


VNM   M        \  329 

3°  les  ministres  de  la  Couronne;  les  évêques;  ô  les 
grands  d'Espagne;  G"  les  lieutenants  généraux  de  l'ar- 
mée et  les  vice-amiraux  de  la  Hotte,  ayant  deux  ans  de 
grade;  70  les  ambassadeurs  après  deux  ans  de  service 
effectif  et  les  ministres  plénipotentiaires  après  quatre 
ans;  8°  les  Conseillers  d'Etat,  le  fiscal  du  conseil  d'Etat, 
lus  ministres  el  les  fiscaux  du  Tribunal  suprême,  ainsi 
que  du  Tribunal  des  comptes,  les  conseillers  du  Tribu- 
nal supérieur  de  la  guerre  el  du  Tribunal  de  la  Hotte,  le 
doyen  du  Tribunal  des  ordres  militaires  après  deux  ans 
de  service  ;  g0  les  présidents  ou  directeurs  de  l'Aca- 
démie espagnole,  des  Académies  d'histoire,  des  beaux- 
arts  de  St-Ferdinand,  des  Sciences  exactes,  physiques 
et  naturelles,  des  sciences  morales  et  politiques,  et  de 
médecine;  io°  les  Académiciens  des  corporations  ci- 
dessus  mentionnées  qui  occupent  la  première  place  par 
rang  d'ancienneté;  les  inspecteurs  généraux  de  pre- 
mière classe  des  corps  des  ingénieurs  des  chaussées, 
mines  et  montagne  ;  les  professeurs  des  universités  qui 
comptent  quatre  années  d'exercice  à  dater  de  leur  no- 
mination. Les  personnes  indiquées  dans  les  catégories 
précédentes  devront  jouir  d'un  revenu  de  ~.5oo  pesetas 
provenant  soit  de  leurs  biens  propres,  soit  des  traite- 
ments de  leurs  emplois  qui  ne  peuvent  leur  être  en- 
levés Bans  décision  judiciaire,  soit  de  pensions  de  vélé- 
rance  <>u  de  retraite;  ii°  ceux  qui,  depuis  deux  ans, 
possèdent  une  rente  annuelle  de  uo.000  pesetas  ou 
pavent  ;iu  Trésor  /|.ooo  pesetas  de  contributions  .li- 
rec  les.  s'ils  jouissent  d'un   titre  de  noblesse  (Tilulos  </<•/ 

Reino  .  ou  s'ils  ont  (''lé'  députés  aux  '.Mîtes,  députés 
provinciaux  ou  Alcades  dans  les  capitales  de  provinces 


;<.'{<!  BSPAON] 

ou  dans  les  \illes  de  plus  île  viii-t-millo  âmes  ;  la  ceux 
qui  ont  exercé  u no  lois  les  fonctions  de  sénateur,  avant 
la  promulgation  de  la  présente  Constitution  ;  ceux  qui, 
pour  être  sénateurs,  auront  à  un  moment  donné  prouvé 
qu'ils  possédaient  la  rente  exigée  pour  être  sénateurs 
de  droit,  pourvu  qu'une  attestation  du  registre  de  la 
propriété  constate  qu'ils  sont  toujours  propriétaires  des 
mêmes  biens.  La  nomination  des  sénateurs  par  le  roi 
•e  fera  toujours  par  décrets  spéciaux,  cl  ces  décrets  in- 
diqueront toujours  expressément  le  litre  auquel  aura 
lieu  la  nomination,  conformément  aux  dispositions  du 
présent  article. 

a3.  —  Les  conditions  exigées  pour  être  nommé  ou 
élu  sénateur  peuvent  être  modifiées  par  une  loi, 

i'.\.  —  Les  sénateurs  élus  se  renouvellent  par  moitié 
tous  les  cinq  ans.  et  en  totalité  quand  le  roi  dissout  !a 
portion  élective  du  Sénat. 

a5.  —  Les  sénateurs  ne  peuvent  accepter  ni  emploi, 
ni  avancement  de  faveur,  ni  titres  ou  décorations  pen- 
dant que  les  Cortèi  sont  en  session.  Néanmoins  le  Gou- 
vernement peut  leur  confier  les  missions  qu'exige  le 
service   public,    nu  égard  à    leurs  emplois  ou  fonctions 

respei  tives.  Le  paragraphe  premier  du  présent  article 
n'est  pas  applicable  aui  Ministres  de  la  Couronne. 
ï6.  —  Pour  siéger  au  Sénat,  il  Paul  être  espagnol, 

avoir  trente-cinq    ans    accomplis,     n'avoir    jamais    été 

l'objet   d'une  poursuite  criminelle  ou  déclaré  inhabile 
.1  exercer  ses  droits  politiques,  ei  avoir  ses  biens  libres 
ements, 


\NM.\I  \ 


:<:<  1 


Titre  I\  .  —  hr  la  Chambre  des  Députés. 

■>-.  —   La  Chambre  [Congrese)  des  députés  se  corn 

pose  <lrs  députés  élus  par  les  juntes  électorales,  en  la 
forme,  déterminée  par  la  loi.  Il  y  a  un  député  au  moins 
par  cinquante  mille  âmes. 

28.  —  Les  députés  sont  élus  et  peuvent  être  réélus 
indéfiniment,  suivant  le  mode  déterminé  par  la  loi. 

2g.  —  Pour  être  élu  député,  il  faut  être  espagnol, 
laïque,  majeur  et  jouir  de  tous  les  droits  civils.  La  loi 
déterminera  quelles  catégories  de  fonctions  sont  incom- 
patibles avec  celles  de  député,  et  les  cas  de  réélection. 

3o.  —  Les  députés  sont  élus  pour  cinq  ans. 

3i.  —  Les  députés  à  qui  le  Gouvernement  confère 
des  pensions,  emplois,  avancements  de  faveur,  missions 
avec  traitement,  dignités  ou  honneurs,  cessent  leurs 
fonctions  sans  qu'il  soit  nécessaire  d'en  faire  la  décla- 
ration, si,  dans  les  quinze  jours  qui  suivent  leur  nomi- 
nation, ils  ne  font  pas  connaître  à  la  Chambre  qu'ils 
renoncenl  à  la  faveur  que  leur  oll're  le  Gouvernement. 
La  disposition  qui  précède  ne  s'applique  pas  aux  dé- 
putés qui  sont  nommés  Ministres  de  la  Couronne. 

Titre  V.  —  Des  sessions  el  des  attributions  des  Cortès, 

3a.  —  Les  Cortès  se  réunissent  tous  les  ans.  Le  Roi 
a  le  droit  de  les  convoquer,  de  les  proroger,  de  clore 
leurs  sessions,  de  dissoudre  simultanément  ou  séparé- 
ment la  partie  élective  du  Sénat,  et  lu  Chambre  dés 
députés,  avec  l'obligation  d'en  convoquer  et  d'en  réunir 
d'autres,  dans  les  trois  mois  ù  compter  du  joui  de  la 
dissolution. 


332  ESPAGNl 

33.  —  Les  Cortès  seront  extraordinairemenl  convo- 
quées quand  la  Couronne  sera  vacante,  ou  quand  le  Roi 
sera  dans  l'impossibilité  de  gouverner. 

34-  Chacune  des  deux  assemblées  législatives  l'ait  son 
règlement  pour  son  régime  intérieur,  et  examine  les 
qualités  des  membres  qui  la  composent,  ainsi  que  la 
régularité  de  leur  élection. 

35.  —  La  Chambre  des  députés  nomme  son  prési- 
dent, ses  vice-présidents  et  ses  secrétaires. 

36.  —  Le  Hoi  nomme  pour  chaque  législature  le  pré- 
sident et  les  vice-présidents  du  Sénat,  qu'il  choisit 
parmi  les  sénateurs.  Le  Sénat  nomme  ses  secrétaires. 

37.  —  Le  Roi  ouvre  et  ferme  lesCortès,  en  personne 
ou  par  l'intermédiaire  des  ministres. 

38.  —  Une  des  deux  assemblées  législatives  ne  peu! 
être  réunie  sans  l'autre,  sauf  le  cas  où  le  Sénat  exerce 
ses  attributions  judiciaires. 

3q.  —  Les  deux  Assemblées  législatives  ne  peuvent 
délibérer  réunies,  ni  en  présence  du  Hoi. 

'i<>.  -  Les  séances  du  Sénat  el  de  la  Chambre  sont 
publiques,  sauf  le  cas  où  il  est  nécessaire  de  tenir  les 
séances  secrètes. 

l\  1 .  —  L'initiative  des  lois  appartient  au  Hoi  et  à 
chacune  de-,  deux  assemblées  législatives, 

1  ••.  Les  lois  sur  les  contributions  el  le  crédit  pu- 
blic sont  d'abord  présentées  à  la  Chambre  des  députés. 

'1  ;  \.v\  résolutions  dans  chacune  des  deux  assem- 
blées législatives  sont  prises  a  la  majorité  des  vois  ; 
mais,   pour  le  vote  des  luis,  on  exige  la  majorité  plus 

un  de  la    totalité  des  inniilii  es  de  I* Assemblée 

'i'i.       Si  une  des  assemblées  législatives  repousse  un 


AWI  \l       \  333 

projet  de  loi,  ou  si  le  Roi  refuse  sa  sanction,  aucune 
proposition  nouvelle  ayant  le  même  objet  ne  pourra 
être  présentée  dans  la  même  session 

45.  —  En  dehors  de  la  puissance  législative  que  les 
Corlès  exercent  d'accord  avec  le  Roi,  les  Cortès  exer- 
cent les  attributions  suivantes  :  r  Recevoir  du  Roi,  du 
successeur  immédiat  de  la  Couronne,  delà  Régence  ou 
du  Kégent  du  royaume  le  serment  d'observer  la  Cons- 
titution et  les  lois,  t."  Elire  le  Régent  ou  la  Régence  du 
royaume  et  nommer  un  tuteur  au  roi  mineur  dans  les 
Cas  prévus  par  la  Constitution.  3°  Rendre  effective  la 
responsabilité  des  ministres,  lesquels  seront  accusés  par 
la  Chambre  et  jugés  par  le  Sénat. 

l\i\.  —  Les  sénateurs  et  les  députés  sont  inviolables 
pour  les  opinions  et  les  votes  qu'ils  émettent  dans 
l'exercice  de  leurs  fonctions. 

k~.  —  Les  sénateurs  ne  pourront  pas  être  poursuivis 
ou  arrêtés  sans  l'avis  du  Sénat,  à  moins  qu'il  n'y  ait 
flagrant  délit,  ou  que  le  Sénat  ne  soit  pas  réuni.  Dans 
ce  dernier  cas,  la  poursuite  doit  être  portée  le  plus  lui 
possible  à  la  connaissance  du  Sénat,  pour  être  statué 
par  lui  ce  qu'il  appartiendra.  Les  députés  ne  peuvent 
pas  non  plus  être  poursuivis  ou  arrêtés  durant  les  ses- 
sions sans  autorisation  de  la  Chambre,  à  moins  de  fla- 
grant délit.  Mais  dans  ce  cas.  et  dans  le  cas  où  ils 
seraient  arrêtés  et  poursuivis  en  dehors  des  sessions,  il 
etl  sera  rendu  compte  le  plus  tôt  possible  à  la  Chambre 
pour  qu'elle  prenne  connaissance  île  l'affaire  et  rende 
sa  décision.  Le  Tribunal  suprême  connaîtra  des  crimes 
imputés  aux  sénateurs  el  députés,  dans  les  cas  et  les 
formes  détermines  par  la  loi. 


334  isiAiiMi 


TlTRI    VI.  —  Du  Jîui  et  de  ses  Ministres. 

48.  —  La  personne  du  Koi  est  sacrée  et  inviolable. 
/|i).  —  Les  Ministres  sonl  responsables.  Aucun  ordre 

du  Koi  ne  peut  être  uiis  à  exécution  s'il  n'est  contresigné 

par  un  Ministre  qui,  par  cela  même,  en  assume  la 
responsabilité. 

5o.  -  Le  pouvoir  de  taire  exécuter  les  lois  réside 
dans  la  personne  du  Koi,  et  son  autorité  s'étend  à  tout 
ce  qui  se  rapporte  à  la  conservation  de  l'ordre  public 
à  l'intérieur  et  la  sécurité  de  l'Etat  à  l'extérieur,  con- 
formément à  la  Constitution  et  aux  lois. 

■  >\ .  —  Le  Koi  sanctionne  et  promulgue  les  lois. 

5a.  —  11  a  le  commandement  suprême  de  fermée 
et  de  la  Ilot  te  ;  il  dispose  des  forces  de  terre  et  de 
mer. 

53.  -  Il  confère  les  grades,  avancements  et  récom- 
penses militaires,  conformément  aux  '°'s- 

54-  Il  appartient  aq  Koi  :  i°  d'édiclcr  les  décrets, 
règlement!  et  instructions  née. -maires  pour  l'exéculion 
des  luis  ;  j"  de  \ ciller  à  ce  «pic  dans    luul    le    royaume 

la  justice  snii  rendue  d'une  manière  rapide  el  équita- 
ble ;  3°  de  gracier  les  coupables  en  se  conformant  aux 
lois;    '|    de  déclarer  la  guerre  et   faire  la  paix,  à    ebarge 

de   fournil   ei|>nile   .11]  \    (.elles   les   e  X  |)lica  tioilS  el    d.M'U- 

nienls  imm  l'ss.iii  is  ,  5    de  diriger  les  relations  diploma- 
tiques ri  commerciales  evec   les   nations  étrangères i 
i.  i\c  présider  à  le  fabrication  des  monnaies  qui  poi 
i < •  r 1 1  -un  ciii-ie  ri  son  Hum  ;  -"  d'ordonner  l'emploi 

des  fonds  destinés  à  l'une  des  branches  de  rvdminis 


WMXE     A  'i'.lî) 

tratiou  dans  les  limites  des  provisions  budgétain ||  . 
8"  de  nommer  aux  emplois  civils,  de  conférer  les  hon- 
neurs et  distinctions  de  toute  classe,  en  se  conformant 
aux  lois  ;  ()  de  nommer  et  révoquer  librement  les  mi- 
nistres. 

55.  —  Le  Roi  doit  être  nécessairement  autorisé  par 
une  loi  .spéciale  :  i  '  |>our  aliéner,  céder  ou  échanger 
une  portion  quelconque  du  terrritoire  espagnol  ;  a"  pour 
incorporer  un  territoire  étranger  au  territoire  espa- 
gnol ;  3"  pour  admettre  des  troupes  étrangères  dans  le 
royaume;  4  pour  ratilier  [ef  traités  d'alliance  offen- 
sive, les  traités  spéciaux  de  commerce,  les  traités  <jui 
stipulent  des  subsides  en  laveur  d'une  puissance  étran- 
gère, et  tous  ceux  qui  peuvent  obliger  individuelle- 
ment des  Espagnols.  Dans  aucun  cas,  les  articles  secrets 
d'un  traité  ne  pourront  déroger  aux  articles  publics 
de  ce  même  traité  ;  5  pour  abdiquer  la  couronne  en 
faveur  de  son  successeur. 

.Mi.  ■*  Le  lloi,  avant  de  contracter  mariage,  devra 
en  donner  connaissance  aux  Cortès,  qui  donneront, 
par  une  loi  spéciale,  leur  approbation  au  contrat  et 
aux  conventions  matrimoniales.  Les  mêmes  formalités 
seront  observées  lorsqu'il  s'agira  du  successeur  immé- 
diat de  la  Couronne.  Ni  le  lloi,  ni  le  successeur  im- 
médiat de  la  Couronne  ne  pourront  contracter  maria-e 
avec  une  personne  que  la  loi  exclut  de  la  succession  à 
la  Couronne 

57.  —  La  dotation  du  Hoi  et  de  sa  famille  sera  lixée 
par  les  Curies  au  roinineix eineril  de  1  -banne  règne, 

58.  Lis  ministres  peuvent  être  sénateurs  ou  dé- 
putes et  prendre  part  aux  discussions  des  deux  |  h. nu- 


:wt;  bspagni 

bres,  mais  i I ^  ne  peuvent  voter  que   dans    la    Chambre 
dont  ils  font  partie. 

Titre  \  11.  —  De  la  succession  à  la  Couronne. 

5g.  —  Le  Hoi  légitime  de  l'Espagne  est  don  Al- 
phonse XII  de  Bourbon. 

60.  —  La  succession  au  trône  d'Espagne  aura  lieu 
selon  l'ordre  régulier  de  primogéniture  et  par  repré- 
sentation, la  ligne  antérieure  étant  toujours  préférée 
aux  lignes  postérieures  :  dans  la  même  ligne,  le  degré 
le  plus  proche  sera  préféré  au  degré  le  plus  éloigné  ; 
dans  le  même  degré  l'homme  à  la  femme,  et,  à  égalité 
de  sexe,  la  personne  la  plus  âgée  à  celle  qui  l'est  le  moins. 

61.  —  Si  les  lignes  des  descendants  légitimes  de 
Don  Alphonse  \II  sont  éteintes,  ses  sœurs  lui  succé- 
deront, puis  sa  tante,  sœur  de  sa  mère,  et  ses  descen- 
dants légitimes,  et  enfin  ses  oncles,  frères  de  Don  Fer- 
dinand \  II,  s'ils  ne  sont  pas  exclus. 

62.  —  Si  toutes  ces  lignes  sont  éteintes,  les  Cortès 
feront  les  nouveaux  choix  qui  conviendront  le  mieux 
à  la  Nation. 

63.  —  S'il  s'élève,  en  fait  ou  en  droit,  quelque  dif- 
ficulté au  sujet  de  l'ordre  de  succession  à  la  Couronne, 
l'intervention  d'une  loi  sera  nécessaire. 

lij.  —  Les  personnes  qui  sont  incapables  de  gou- 
verner, ou  qui  par  leurs  actes  ont  mérité  de  perdre  le 
droit  à  la  couronne,  seronl  exclues  de  la  succession  par 

une  loi. 

•i."».  Quand  règne  une  femme  le  prince-époux  ne 
peut  prétendre  aucune  part  au  gouvernement  du 
royaume. 


ANNEXE    A  337 


l'uni:   VIII.  —  De  la  minorité  du  Roi  et  de  la  W>()ence. 

G6.  —  Le  Roi  est  mineur  tant  qu'il  n'a  pas  accom- 
pli sa  seizième  année. 

■  )-].  —  Quand  le  Roi  est  mineur,  le  père  ou  la  mère 
du  Hoi,  ou  à  leur  défaut  le  parent  le  plus  proche  pour 
succéder  à  la  couronne  dans  l'ordre  établi  par  la  Cons- 
titution, sera  appelé  à  exercer  la  régence  et  l'exercera 
tout  le  temps  de  la  minorité  du  Hoi. 

68.  —  Pour  que  le  parent  le  plus  proche  puisse 
exercer  la  régence,  il  doit  être  Espagnol,  avoir  vingt 
ans  accomplis,  et  n'être  pas  exclu  de  la  succession  à  la 
couronne.  Le  père  ou  la  mère  du  Hoi  ne  pourront  exer- 
cer la  régence  que  s'ils  ne  sont  pas  remariés. 

(ii).  —  Le  Régent  prêtera  serment  aux  Cortès  d'être 
fidèle  au  Hoi  mineur  et  de  respecter  la  Constitution  et 
les  lois.  Si  les  Cortès  ne  sont  pas  réunies,  le  Régent  les 
convoquera  immédiatement,  et,  provisoirement  il 
prêtera  le  serment  légal  devant  le  Conseil  des  minis- 
tres en  promettant  de  le  renouveler  devant  les  Cortès 
aussitôt  qu'elles  seront  assemblées. 

70.  —  S'il  ne  so  trouve  personne  à  qui  appartienne 
le  droit  à  la  régence,  les  Cortès  désigneront  une,  trois 
ou  cinq  personnes  pour  l'exercer.  En  attendant  cette 
désignation,  le  (îouvernement  sera  exercé  provisoire- 
ment par  le  Conseil  des  ministres. 

71.  —  Quand  le  Hoi  est  dans  l'impossibilité  d'exer- 
cer le  pouvoir,  et  que  les  Cortès  ont  reconnu  cette  im- 
possibilité, la  régence  appartiendra  tant  (pie  durera 
l'empêchement,  au  fils  aine  du  Hoi,  s'il  est  majeur  île 

22 


338  ESPAGNE 

seîre  ans.  à  son  défaut  au  conjoint  du  Roi,  et,  à  défaut 
de  celui-ci,  aux  personnes  appelées  à  la  régence. 

~ï.  —  Le  llégent,  et.  le  cas  échéant,  le  Conseil  de 
régence,   exerceront  toute  l'autorité  du  Roi,  au  nom 

duquel  se  publieront  les  actes  gouvernementaux. 

-'.'■>.  —  Le  tuteur  du  roi  mineur  sera  la  personne 
(|ue  le  Roi  défunt  aura  désignée  dans  son  testament, 
pourvu  (m'clle  soit  espagnole  de  naissance.  S'il  u'\  a 
pas  eu  de  tuteur  désigné,  le  tuteur  sera  le  père  ou  la 
mère  tant  que  durera  leur  veuvage.  V  leur  défaut,  la 
nomination  appartiendra  aux  Cortès  ;  toutefois  les 
fonctions  de  Uégenl  et  de  tuteur  du  Roi  ne  pourront 
être  réunies  si  ce  n'est  en  la  personne  du  père  ou  de 
la  mère  du  Roi. 

Titbb  IX.  -*■  De  l'administration  de  lu  justice, 

;'i.  —  La  justice  est  rendue  au  nom  du  Hoi. 

jô.  —  Les  mêmes  Codes  régiront  toute  la  monar- 
chie, sauf  les  variations  que  nécessiteront  les  circons- 
tances et  que  les  lois  détermineront.  Il  n'\  aura  qu'un 
seul  droit  pour  tous  1rs  Espagnols  en  matière  civile  et 
criminelle. 

— « i .  —  Aux  tribunaux  et  aux  juges  appartient  ex- 
çtuûvemenl  le  pouvoir  d'appliquer  les  lois  en  matière 
civile  et  criminelle,  sans  qu'ils  puissent  exercer  >l  au- 
tres fonctions  que  les  fonctions  de  juger  et  de  faire 
exécuter  les  jugements, 

--.  Lue  loi  spéciale  déterminera  les  cas  où,  pour 
p  lursuivre  devant  les  tribunaux  ordinaires  les  autori- 
tés el  leurs  agents*  ttnfl  autorisation  particulière  sera 
nci  cssaii  '-. 


\n\k\i:   a  SM 

78.  —  Les  lois  détermineront  le  nombre  des  Goura 
et  tribunaux,  leur  organisation,  leurs  pouvoirs,  le 
mode  suivant  lequel  ils  l'exerceront,  el  les  qualités  re- 
quises pour  remplir  les  fonctions  de  magistrat. 

79.  —  Les  jugements  en  matière  criminelle  seront 
publics,  suivant  la  forme  déterminée  par  les  lois. 

80.  —  Les  magistrats  et  juges  seront  innamovibles 
et  ne  pourront  être  destitués,  suspendus  ou  déplacés 
que  dans  les  cas  et  suivant  les  formes  déterminés  par 
la  loi  organique  des  tribunaux. 

81.  —  Les  juges  sont  personnellement  responsables 
de  toutes  les  infractions  à  la  loi  commises  par  eux. 

Titre  X.  —  Des  Députalions  provinciales 

et  des  Ayantainientos. 

82.  —  Dans  cliaque  province,  il  y  aura  une  députa- 
tion  provinciale,  élue  suivant  la  forme  déterminée  par 
la  loi,  et  comprenant  le  nombre  de  membres  indiqués 
par  la  loi. 

83.  —  Dans  les  municipes  (pueblos  .  il  y  aura  des 
alcades  et  des  ayuntamientos.  Les  ayunlamientos  se- 
ront nommés  par  les  habitants  à  qui  la  loi  aura  con- 
féré ce  droit. 

84-  —  L'organisation  et  les  attributions  provinciales 
et  des  ayuntamientos  seront  régies  par  des  lois  spé- 
ciales. Os  lois  reposeront  sur  les  bases  suivantes  : 
1  Gouvernement  et  direction  des  intérêts  particuliers 
de  la  province  el  du  municipe  par  les  assemblées  pro- 
vinciale et  municipale;  a"  Publication  des  budgets, 
comptes,  cl  résolutions  de  ces  assemblées  ;  3°  Interven- 
tion du  Roi,  ci  des  Cortès  s'il  y  a  lieu,  pour  empêcher 


•'>!<>  IGNÉ 

ijiie  les  députations  provinciales  et  les  ayuntamientos 
ne  sortent  de  leurs  attributions  au  préjudice  des  inté- 
rêts généraux  et  permanents  ;  V  Détermination  des 
droits  de  ces  différentes  assemblées  en  matière  de 
finance,  afin  que  les  provinces  et  les  municipes  ne  se 
mettent  pas  en  opposition  avec  le  système  fiscal  de 
L'Etat. 

Titre  XI.  —  Des  contributions. 

85.  —  Tous  les  ans,  le  gouvernement  présentera 
aux  Cortès  le  budget  général  des  dépenses  de  l'Etat 
pour  l'année  suivante,  l'exposé  des  voies  et  moyens 
pour  y  faire  face,  ainsi  que  le  compte  rendu  des  re- 
couvrements opérés  des  deniers  publics  et  de  leur  em- 
ploi pour  être  soumis  à  leur  examen  el  à  leur  appro- 
bation. Si  la  loi  de  finances  ne  peut  être  votée  axant  le 
premier  jour  de  l'année  budgétaire*  on  se  conformera 
à  la  loi  de  finances  antérieure,  pourvu  qu'elle  ait  été 
discutée  el  votée  par  les  Cortès  et  sanctionnée  par  le 
Roi. 

86.  —  Le  gouvernement  devra  être  nécessairement 
autorisé  par  une  loi  pour  disposer  des  propriétés  de 
l'Etat,  et  taire  un  emprunt  national. 

87.  La  dette  publique  est  placée  sous  la  sauve- 
gai  de  spéi  îalc  «le  la  Nation. 

Ti nu.  \ll.       De  /<<  forée  militairêi 

KS.  -  Les  Cortès  fixeront  tous  les  ,ms,  mu  la  pro- 
posiiion  du  Roi,  les  loues  militaires  permanentes  de 
terre  et  de  mi  i . 


ANN1-XE    A  34  I 

Titre  XIII.  —  Du  gouvernement  des  provinces 
d'outre-mer. 

89.  —  Les  provinces  d'outre-mer  seront  régies  par 
des  lois  spéciales.  Mais  le  gouvernement  est  autorisé  à 
leur  appliquer  les  lois  promulguées  ou  qu'il  promulgue 
pour  la  péninsule,  avec  les  modifications  qu'il  juge 
nécessaire  à  charge  d'en  rendre  compte  aux  Cortès. 
Cuba  et  Porto-Hico  seront  représentées  aux  Cor  lès  du 
royaume  dans  la  forme  déterminée  par  une  loi  spé- 
ciale, qui  pourra  èlre  différente  pour  chacune  de  ces 
deux  provinces. 

Article  transitoire. —  Le  (gouvernement  détermi- 
nera l'époque  et  le  mode  suivant  lequel  l'Ile  de  Cuba 
enverra  des  représentants  aux  Cortès. 


ANNEXE  15 

CONVENTION    FRANCO-ESPAGNOLE 
DU  27  NOVEMBRE  1912 


ANNEXE   B 


CONVENTION  \'\\ ANCO-ESPAGNOLE 

DU  27  NOVEMBRE  1913 

AU    SUJET    DE    LA    SITUATION    RESPECTIVE 

DE  LA  FRANCE  ET  DE  L'ESPAGNE 

a  uEgard  de  l'empire  chérifien 


Le  Président  de  la  République  française  et  Sa  Ma- 
jesté le  Roi  d'Espagne, 

Désireux  de  préciser  la  situation  respective  de  la 
France  et  de  l'Espagne  à  l'égard  de  l'Empire  cliéri- 
fien, 

Considérant,  d'autre  part,  que  la  présente  convention 
leur  offre  une  occasion  propice  d'affirmer  leurs  senti- 
ments d'amitié  réciproque  et  leur  volonté  de  mettre  en 
harmonie  leurs  intérêts  au  Maroc  ; 

Ont  nommé,  à  cet  effet,  pour  leurs  plénipoten- 
tiaires, savoir  : 

Le  Président  de  la  République  française, 

Son  Excellence  Monsieur  Geoffrav  Léon-Marcel-Isi- 
dore, ambassadeur  extraordinaire  et  plénipotentiaire 


A  16  i  SPAGNI 

près  de  Sa  Majesté  le  Roi  d'Espagne,  Commandeur  de 

L'Ordre  national  de  la  Légion  d'honneur,  etc.,  etc.,  et 

Sa  Majesté  le  Roi  d'Espagne, 

Son  Excellence  Don  Manuel  Garcia  Prieto,  Marquis 
de  Alhuccmas,  sénateur  à  vie,  Ministre  d'Etat,  cheva- 
lier grand-croix  de  l'Ordre  civil  d'Mphonse  XII,  dé- 
coré de  la  médaille  d'or  d'Alphonse  XIII,  etc.,  etc. 

Lesquels,  après  s'être  communiqué  leurs  pleins  pou- 
voirs respectifs,  trouvés  en  bonne  et  due  forme,  ont 
arrêté  et  signé  les  articles  suivants  : 

Article  premier.  —  Le  Gouvernement  de  la  Répu- 
blique française  reconnaît  que,  dans  lazoned'inlluence 
espagnole,  il  appartient  à  l'Espagne  de  veiller  à  la 
tranquillité  de  ladite  zone  el  de  prêter  son  assistance 
au  Gouvernement  marocain  pour  l'introduction  de 
toutes  les  réformes  administratives,  économiques; 
financières,  judiciaires  el  militaires  dont  il  a  besoin, 
comme  aussi  pour  tous  les  règlements  nouveaux  et  les 
modifications  aux  règlements  existants  que  ces  réfor- 
mes comportent,  conformément  à  la  déclaration  franco- 
anglaise  du  8  avril  ioo^ctà  l'accord  Franco -allemand 
du  'i  novembre  191 1 . 

Les  régions  comprises  dans  la  zone  d'influence  dé- 
terminée à  l'article  :>  resteront    placées   sous  l'autorité 

civile  el  religieuse  du  Sultan,  suivant  les  conditions  du 
présent  accord 

1  et  réglons  seront  administrées,  sous  le  contrôle 
d'un  Haut  Commissaire  espagnol,  par  un  Khalife 
choisi  par  le  Sultan  sur  une  liste  de  deux  candidats 
présentés  par  le  Gouvernement  espagnol.  Les  Ponctions 

du     Khalife     ne     seront    maintenues    ou    retirées    au 


\NM.\i   i  3i7 

titulaire  qu'avec  le  consentement  du  Gouvernement 

espagnol. 

Le  Khalifa  résidera  dans  la  zone  d'inlluence  espa- 
gnole et  habituellement  à  Tétouan  ;  il  sera  pourvu 
d'une  délégation  générale  du  Sultan,  en  vertu  de  la- 
quelle il  exercera  les  droits  appartenant  ù  celui-ci. 

Cette  délégation  aura  un  caractère  permanent.  Kn 
cas  de  vacance,  les  fonctions  de  khalifa  seront,  provi- 
soirement, et  d'office,  remplies  par  le  pacha  de  Té- 
touan. 

Les  actes  de  l'autorité  marocaine  dans  la  zone  d'in- 
fluence espagnole  seront  contrôlés  par  le  Haut  Commis* 
saire  espagnol  et  ses  agents.  Le  Haut  Commissaire  sera 
le  seul  intermédiaire  dans  les  rapports  que  le  Khalifa, 
en  qualité  de  délégué  de  l'autorité  impériale  dans  la 
zone  espagnole,  aura  à  entretenir  avec  les  agents  offi- 
ciels étrangers,  étant  donné  d'ailleurs  qu'il  ne  sera  pas 
dérogé  à  l'article  5  du  traité  franco -chéri  lien  du 
So  mars  1912. 

Le  Gouvernement  de  Sa  Majesté  le  Hoi  d'Espagne 
veillera  à  l'observation  des  traités  et  spécialement  des 
clauses  économiques  et  commerciales  insérées  dans 
l'accord  franco-allemand  du  l\  novembre  19Î1, 

Aucune  responsabilité  ne  pourra  être  imputée  au 
Gouvernement  chérilien  du  chef  dfl  réclamations  mo- 
tivées par  des  faits  qui  se  seraient  produits  sous  l'ad- 
ministration du  khalifa  dans  la  zone  d'influence  espa- 
gnole. 

\m.  a.  —  Au  nord  du  Maroc,  la  frontière  sépara* 
tive  des  zones  d'influence  française  et  espagnole  partira 
de   l'embouchure    de    la    Mouloma    et    remontera    le 


348  ESPAGNl 


thalweg  de  ce  ileuve  jusqu'à  un  kilomètre  en  aval  du 
Mechra-Klila.  De  ce  point,  la  ligne  de  démarcation 
suivra  jusqu'au  djebel  Heni-Ilasscn  le  tracé  lixé  par 
l'article  2  de  la  convention  du  3  octobre  1904. 

Dans  le  cas  où  la  Commission  mixte  de  délimitation 
visée  au  paragraphe  premier  de  l'article  A  ci-dessous 
constaterait  que  le  maraboutde  Sidi-Maarouf  se  trouve 
dépendre  de  la  fraction  sud  des  Beni-Bou- Yahi,  ce 
point  serait  attribué  à  la  zone  française.  Toutefois.  la 
ligne  de  démarcation  des  deux  zones,  après  avoir  en- 
globé ledit  marabout,  n'en  passerait  pas  à  pins  d'un 
kilomètre  au  nord  et  à  plus  de  deux  kilomètres  à 
l'ouest  pour  rejoindre  la  ligne  de  démarcation  telle 
qu'elle  est  déterminée  au  paragraphe  précédent. 

Du  djebel  Beni-llassen,  la  frontière  rejoindra  l'oued 
Ouergha  au  nord  de  la  djemaa  des  Cheurfa-Tafraout. 
en  amont  du  coude  formé  par  la  rivière.  De  là,  se  di- 
rigeant vers  l'ouest,  elle  suivra  la  ligne  des  hauteurs 
dominant  la  rive  droite  de  l'oued  Ouergha  jusqu'à 
son  intersection  avec  la  ligne  nord-sud  définie  par  l'ar- 
ticle 2  de  la  convention  de  1904.  Dans  ce  parcours,  la 
frontière  contournera  le  plus  étroitement  possible  la 
limite  nord  dea  tribus   riveraines  de  l'Ouergha  ci  la 

limite  sud  de  celles  qui  ne  sont  pas  riveraines,  en  as- 
surant une  communication  militaire  non  interrompue 
entre  les  différentes  régions  de  la  zone  espagnole. 

Bile  remontera  ensuite  vers  le  nord  en  se  tenant  à 
une  distance  d'au  moins  ■>.'.•>  kilomètres  à  l'est  de  la 
route  de  Fe*à  El-Ksar— el-Kebir  par  Oùezzan,  jusqu'à 
la  rencontre  de  l'oued  Loukkos,  dont  elle  descendra  lé 
thalweg  jusqu'à  la  [imite  entre  les  tribus  Sarsar  et 


ANNEXi:    B  349 

Tlig.  Do  ce  point,  elle  contournera  le  djebel  (ihani, 
laissant  celle  montagne  dans  la  zone  espagnole,  sous 
réserve  qu'il  n'y  sera  pas  construit  de  fortifications 
permanentes.  Enfin,  la  frontière  rejoindra  le  parallèle 
35°  de  latitude  nord  entre  le  douar  Mgar\a  et  la  Marya 
de  Sidi-Slama,  et  suivra  ce  parallèle  jusqu'à  la  mer. 

Au  sud  du  Maroc,  la  frontière  des  zones  française  et 
espagnole  sera  définie  par  le  thalweg  de  l'oued  Draa, 
qu'elle  remontera  depuis  la  mer  jusqu'à  sa  rencontre 
avec  le  méridien  1  1°  ouest  de  Paris;  elle  suivra  ce  mé- 
ridien vers  le  sud  jusqu'à  sa  rencontre  avec  le  paral- 
lèle 27"4o  de  latitude  nord.  Au  sud  de  ce  parallèle,  les 
articles  5  et  <>  de  la  convention  du  3  octobre  ioo/j  res- 
teront applicables.  Les  régions  marocaines  situées  au 
nord  et  à  l'est  de  la  délimitation  visée  dans  le  présent 
paragraphe  appartiendront  à  la  zone  française. 

Ain.  '.'>.  ■-  Le  (jouvernement  marocain  ayant,  par 
l'article  8  du  traité  du  y'j  avril  1860,  concédé  à  l'Es- 
pagne nu  établissement  à  Santa-Cruz-de-Mar-Pequena 
(Ifni),  il  est  entendu  que  le  territoire  de  cet  établisse- 
ment aura  les  limites  suivantes  :  au  nord,  l'oued  Bou- 
Sedra,  depuis  son  embouchure;  au  sud,  l'oued  Noun, 
depuis  son  embouchure;  à  l'est,  une  ligne  distante 
approximativement  de  a5  kilomètres  de  la  côte. 

\iu.  [\.  —  Une  Commission  technique,  dont  les 
membres  seront  désignés  en  nombre  égal  par  les  Gou- 
vernements français  et  espagnol,  fixera  le  tracé  exact 
des  délimitations  spécifiées  aux  articles  précédents. 
Dans  son  travail,  la  Commission  pourra  tenir  compte 
non  seulement  de-  accidents  topographiques,  mais  en- 
core des  contingences  locales. 


350  KSPAGNB 

Les  procès-verbaux  «.le  la  Commission  n'auront  va- 
leur executive  qu'après  ratification  des  deux  Gouver- 
nements. 

Toutefois,  les  travaux  de  la  Commission  ci-dessus 
prévue  ne  seront  pas  un  obstacle  à  la  prise  de  possession 
immédiate  par  L'Espagne  de  son  établissement  d'Uni. 

An r.  5.  —  L'Espagne  s'engage  à  n'aliéner  ni  céder 
sous  aucune  forme,  même  à  titre  temporaire,  ses  droits 
dans  toutou  partie  du  territoire  composant  sa  zone 
d'intluence. 

Art.  6.  —  Afin  d'assurer  le  libre  passage  du  détroit 
de  Gibraltar,  les  deux  (iouvcrnemenls  conviennent  de 
ne  pas  laisser  élever  de  fortifications  ou  d'ouvrages 
stratégiques  quelconques  sur  la  partie  de  la  côte  maro- 
caine visée  par  l'article  ;  de  la  déclaration  franco-an- 
glaise du  8  avril  mjo/j.  el  par  l'article  1  \  de  11  conven- 
tion franco-espagnole  du  3  octobre  de  la  même  année. 
et  comprise  dans  les  sphères  d'influence  respectives. 

\hi.  -.  La  ville  de  Tanger  et  sa  banlieue  seront 
dotées  d'un  régime  spécial  qui  sera  déterminé  ulté- 
rieurement; elles  formeront  une  zone  comprise  dans 
les  limites  décrites  ci-après  : 

Partant  de  l'unta-  Utarcs  sur  la  côte  sud  du   détroit 

de  Gibraltar,  la  frontière  se  dirigera  en  ligne  droite  sur 
la  crête  du  djebel  Beni-Meyimel,  laissant  \  l'ouest  le 

village  appelé  Dxar-e/-Xeitun,  et  suivra  ensuite  la 
ligne  des  limites  entre  le  l'alis  d'un   QÔté  61   les   tribus 

de  l'Anjera  el  de  Oued«Ras  de  l'autre  côté  jusqu'à  la 
rencontre  de  l'oued  Es-Seghir.  De  là,  la  frontière  mi* 
ni  le  thalweg  'le  l'oued  fo-Seghir,  puis  ceux  des 
ouedf  M  li. u  h. n  et  Txahadarti  jusqu'à  la  mer. 


vnni:.\k   i!  151 

Le  tout  conformément  au  tracé  indiqué  sur  la  carte 

de  lY'lat-inajor  espagnol,  qui  a  pour  titre  :  «  Croquis 
del  lmperio  de  Marruecos  »  à  l'échelle  de  1  îoo.ooo", 
édition  de  igofi. 

Art.  8.  —  Les  consulats,  les  écoles  et  tous  les  éta- 
blissements français  el  espagnols  actuellement  existants 
au  Maroc  seront  maintenus. 

Les  deux  Gouvernements  s'engagent  à  (aire  respecter 
la  liberté  et  la  pratique  extérieure  de  tout  culte  exis- 
tant au  Maroc. 

Le  Gouvernement  de  .S.  M.  le  Roi  d'Espagne,  en  ce 

qui  le  concerne,  fera  en  sorte  que  les  privilèges  reli- 
gieux exercés  actuellement  par  le  clergé  régulier  et  sé- 
culier espagnol  ne  subsistent  plus  dans  la  zone  fran- 
çaise. Toutefois,  dans  cette  zone,  les  missions  espagno- 
les conserveront  leurs  établissements  et  propriétés  ac- 
tuels, mais  le  Gouvernement  de  S.  M.  le  Hoi  d'Es- 
pagne ne  s'opposera  pas  à  ce  que  des  religieux  de  na- 
tionalité française  y  soient  affectés.  Les  nouveaux  éta- 
blissements que  ces  missions  fonderont  seront  confiés 
à  des  religieux  français. 

\nr.  y.  —  Aussi  longtemps  que  le  chemin  de  1er 
Tanger-Fez  ne  sera  pas  construit,  il  ne  sera  apporté 
aucune  entrave  au  passage  des  convois  de  ravitaille- 
ment destinés  au  Magbzcn,  ni  aux  voyagea  des  fonc- 
tionnaires clu'iiliens  ou  étrangers  entre  Le/  et  langer 
et  inversement,  non  plus  qu'au  passage  de  leur  escorte, 
de  leurs  armes  et  bagages,  étant  entendu  que  les  auto- 
rités ^\^  la  zone  traversée  auront  été  préalablement 
avisées.  Vucune  taxe  où  aucun  droit  spécial  de  transit 
ne  pourra  être  perçu  pour  (  c  passage. 


352  KS  PAGNE 

Après  la  construction  du  chemin  de  fer  Tanger-Fez, 
celui-ci  pourra  être  utilisé  pour  ces  transports. 

Art.  10.  —  Les  impôts  et  ressources  de  toutes  sortes 
dans  la  zone  espagnole  seront  affectés  aux  dépenses  de 
ladite  zone. 

\hi.  ii.  — Le  Gouvernemenl  chérifien  ne  pourra 
être  appelé  à  participer  à  aucun  titre  aux  dépenses  de 
la  zone  espagnole. 

Aut.  12.  —  Le  Gouvernement  de  S.  M.  le  roi  d'Es- 
pagne ne  portera  pas  atteinte  aux  droits,  prérogatives 
et  privilèges  des  porteurs  de  titres  des  emprunts  190/1 
et  ii)  10  dans  sa  zone  d'inlluence. 

En  vue  de  mettre  l'exercice  de  ces  droits  en  har- 
monie avec  la  nouvelle  situation,  le  Gouvernement  de 
la  République  usera  de  son  inlluence  sur  le  représen- 
tant des  porteurs  pour  que  le  fonctionnement  des 
garanties  dans  ladite  zone  s'accorde  avec  les  disposi- 
tions suivantes  : 

La  zone  d'influence  espagnole  contribuera  aux 
charges  des  emprunts  iyo/i  et  1010  suivant  la  propor- 
tion que  les  ports  de  ladite  zone,  déduction  faite  des 
Ôoo.ooo  p.  h.  dont  il  sera  parlé  plus  loin,  fournissent 
à  l'ensemble  des  recettes  douanières  des  ports  ouverts 
.m  m  immerce. 

Cette  contribution  esl  fixée  provisoirement  à  7.96  °/0, 
chiffre  basé  sur  les  résultats  de  l'année  191  1.  Elle  sera 
révisable  tous  les  ans  à  la  demande  de  l'une  ou  de 

l'autre  des  parties. 

Lu  révision  prévue  devra  intervenir  avant  le  i5  mai 

suivant  l'exercice  qui  lui   servira   de  hase.    Il  scia  tenu 

compte  'le  ses  résultats  dans  le  versemenl  à  effectuez 


\n\i  m   i.  X)i\ 

par  le  (iouvernement  espagnol  le  premier  juin,  ainsi 
qu'il  est  dit  ci-après. 

I>r  (iouvernement  de  S.  M.  le  Hoi  d'Espagne  consti- 
tuera chaque  année,  à  la  date  du  premier  mars,  pour 
le  service  de  l'emprunt  1910  et,  à  la  date  du  premier 
juin,  pour  le  service  de  l'emprunt  igo4i  entre  les 
mains  du  représentant  des  porteurs  des  titres  de  ces 
deux  emprunts,  le  montant  des  annuités  fixées  au  para- 
graphe précédent.  En  conséquence,  l'encaissement 
au  titre  des  emprunts  sera  suspendu  dans  la  zone 
espagnole  par  application  des  articles  20  du  contrat 
du  12  juin  i()o4  et  indu  contrat  du  17  mai  1910. 

Le  contrôle  des  porteurs  et  les  droits  s'y  rapportant, 
dont  l'exercice  aura  été  suspendu  en  raison  des  verse- 
ments du  Gouvernement  espagnol,  seront  rétablis  tels 
qu'ils  existent  actuellement  dans  le  cas  où  le  représen- 
tant des  porteurs  aurait  à  reprendre  l'encaissement 
direct  conformément  aux  contrats. 

Aut.  i3.  —  D'autre  part,  il  y  a  lieu  d'assurer  à  la 
zone  française  et  à  la  zone  espagnole  le  produit  reve- 
nant à  chacune  d'elles  sur  les  droits  de  douane  perçus 
à  l'importation. 

Les  deux  Gouvernements  conviennent  : 

r  Que,  balance  faite  des  recettes  douanières  que 
chacune  des  deux  administrations  zonières  encaissera 
sur  les  produits  introduits  par  ses  douanes  à  destina- 
tion de  l'autre  zone,  il  reviendra  à  la  zone  française 
une  somme  totale  de  cinq  cent  mille  pesetas  hassani  se 
décomposant  ainsi  : 

0)  Une  somme  forfaitaire  de  trois  cent  mille  pesetas 
hassani  applicable  aux  recettes  des  porta  de  l'Ouesl  : 

23 


.'{.")  i  î-i-uiNi; 

h)  l  ne  somme  de  deux  cent  mille  pesetas  hassani, 
applicable  aux   recettes  de  la  côte  méditerranéenne, 

sujette  à  révision  lorsque  le  fonctionnement  dos  che- 
mins de  1er  fournira  de*  éléments  exacts  de  calcul. 
Celle  revision  éventuelle  pourrait  l'appliquer  aux  Y8T- 
M'inenls  antérieurement  effectués,  si  le  montant  de 
ceux-ci  était  supérieure  celui  des  versements  à  réaliser 
dans  l'avenir  ;  toutefois  les  reversements  dont  il  s'agit 
ne  porteraient  que  sur  le  capital  et  ne  donneraient  pas 

lieu  à  un  calcul  d'intérêts. 

Si  la  révision  ainsi  opérée  donne  lieu  à  une  réduction 
des  recettes  françaises  relatives  aux  produits  douaniers 
des  ports  de  la  Méditerranée,  elle  entraînera  ip$o  facto 
le  relèvement  de  la  contribution  aux  charges  des  em- 
prunts susmentionnés. 

•2    (hic  les  recettes  douanières  encaissées  par  le  bureau 

de  Tanger  devront  être  réparties  entre  la  voue  Inter- 
nationalisée et  les  deux  autres  zones,  au  prorata  de  la 
destination  finale  des  marchandises.  En   attendant  que 

le  fonctionnement  des  chemina  de  fer  permette  une 

exacte  répartition  des  sommes  dues  à  la  zone  française 
et  à  la  zone  espagnole,  le  service  des  douanes  \ei>era  en 
dépôt  à    la    Banque   d'État   l'excédent    de   Bel   recettes, 

payement  fait  de  la  part  de  Tanger- 

Les  administrations  douanière?  des  deux  sones.  l'en* 
tendront  par  l'entremise  de  représentants,  qui  se  réu- 
niront périodiquement  à  Tanger,  sur   les  mesures  pro 

près  à  assurer  l'unité  d'application  des  tarifs,  Ces 
délégués  se  communiqueront  à  toutes  lins  utiles  les 
information!    qu  ils   auront    pu    recueillir   tant  sur    la 

contrebande  que  M"  Iw  op4ratiooi  irrégulièrej  éven- 


\\M  \i     il  355 

iiicllcnicnt  elfcctuées  dans  les  bureaux  des  douanes. 
Les  deux  Gouvernement!  s'efforceront  de  mettre  en 
vigueur  à  la  date  du  i"r  mars    lQl3  les  mesures  visées 
BOUS  le  | ni' sent  article. 

Am.  i  '|.  —  Les  gages  affectés  en  sone  espagnole  à  la 
créance  française,  en  vertu  de  l'accord  franco-maro- 
cain du  ai  mars  1910,  seront  transférés  au  profit  de  la 
créance  espagnole,  et  réciproquement  les  gages  allectés 
en  zone  française  à  la  errance  espagnole,  en  vertu  du 
traité  hispano-marocain  du  i(>  novembre  îqio,  seront 
transférés  au  profit  de  la  créance  française.  En  vue  de 
réserver  «'»  chaque  zone  le  produit  des  redevances  mi- 
nières qui  doivent  naturellement  lui  revenir,  il  est 
entendu  q'ie  les  redevances  proportionnelles  d'extrao- 
tion  appartiendront  à  la  zone  où  la  mine  est  située,  lors 
même  qu'elles  seraient  recouvrées  à  la  sortie  par  une 
douane  de  l'autre  zone. 

Aut.  iô.  —  En  ce  qui  concerne  les  avances  faites 
par  la  Banque  d'Etat  sur  le  .">  °  ,  des  douanes,  il  a  paru 
équitable  de  faire  supporter  par  les  deux  zones  non 
seulement  le  remboursement  desdites  avances  mais 
d'une  manière  générale  les  charges  de  la  liquidation 
du  passif  actuel  du  Maghxen 

Dans  le  cas  où  celte  liquidation  se  ferait  au  moyen 
d'un  emprunt  à  court  ou  à  long  tenue,  chai  une  des 
deux  /unes  contrihuerail  au    payement  des  annuités  de 

cet  emprunt  intérêts  et  amortissement)  dans  une  pro- 
portion égale  à  celle  qui  a  été  fixée  pour  ta  répartition 
entre  chaque  zone  des  charges  des  emprunts  de  1904 

et    M|io. 

Le  taux  de  l'intérêt,   les  délais  d'amortissement   el 


1  SPAGN1 

do  conversion,  les  conditions  de  rémission  et,  s'il  y 
a  lieu,  les  garanties  de  l'emprunt  seront  arrêtés  après 
entente  entre  les  deux  Gouvernements. 

Les  dettes  contractées  après  la  signature  du  présent 

accord  seront  exclues  de  celte  liquidation. 

Le  montant  total  du  passif  à  liquider  comprend  no- 
tamment :  i"  les  avances  de  la  Banque  d'Etat  gagées 
sur  le  5  %  du  produit  des  douanes  :  2°  les  dettes 
liquidées  par  la  commission  instituée  en  vertu  du  rè- 
glement du  corps  diplomatique  de  Tanger  en  date  du 
29  mai  1910.  Les  deux  Gouvernements  se  réservent 
d'examiner  conjointement  les  créances  autres  que  celles 
visées  ci-dessus  sous  les  numéros  1  et  a,  de  vérifier 
leur  légitimité,  et,  au  cas  où  le  total  du  passif  dépas- 
serait sensiblement  la  somme  de  26  millions  de  francs, 
de  les  comprendre  ou   non   dans   la   liquidation  envi- 

Ain.  ili.  —  L'autonomie  administrative  des  zones 
d'influence  française  et  espagnole  dans  l'empire  chéri  lien 
ne  pouvant  porter  atteinte  aux  droits,  prérogatives  et 
privilèges  concédés,  conformément  à  l'Acte d'Âlgésiras, 
à  l.i  Banque  d'Etat  <ln  Maroc  pour  tout  le  territoire  de 
l'Empire  par  le  Gouvernement  marocain,  la  Banque 
d'Etal  du  Maroc  continuera  de  jouir  dans  chacune  des 
deux  /mies  de  liins  les  droits  qu'elle  lient  des  actes  qui 

la  régissent,  -ans  diminution  ni   réserve.  L'autonomie 

des  ilenx  /.mes  ne  pi  m  11 .1  pas  fine  obstacle  à  son  art 'nui 
cl    le>    deux    -.minci  nemenls    f.iri  lilei  .Mil    B    la    Banque 

d'Étal  le  libre  el  complet  exercice  de  ses  droits. 

La  Banque  d'Etat  dn  Maroc  pourra,  d'accord  avec 
les  deux  puissances  intéressées,  modifier  les  conditions 


ANNEXE    ii  :t.")7 

de  son  fonctionnement  m  vue  de  les  mollrc  on  har- 
monie avec  L'organisation  territoriale  <lc  chaque  zone. 

Lès  deux  Gouvernements  recommanderont  à  la 
Banque  d'État  L'étude  d'une  modification  de  ses  statuts 
permettant  : 

i°  De  créer  un  second  Haut-Commissaire  marocain 
qui  serait  nommé  par  l'Administration  de  la  zone  d'in- 
fluence espagnole  après  entente  avec  le  Conseil  d'Ad- 
ministration de  la  Banque  ; 

2°  De  courrier  à  ce  second  Haut-Commissaire,  pour 
sauvegarder  Les  intérêts  légitimes  de  l'administration 
de  la  zone  espagnole,  sans  porter  atteinte  au  fonc- 
tionnement normal  de  la  Banque,  des  attributions 
autant  que  possible  identiques  à  celles  qu'exerce  le 
Haut-Commissaire  actuel. 

'l'ouïes  démarches  utiles  seront  faites  par  les  deux 
Gouvernements  pour  parvenir  à  la  révision  régulière, 
clans  le  sens  indiqué  ci-dessus,  des  statuts  delà  Banque 
d'Etat  et  du  règlement  de  ses  rapports  avec  le  Gou- 
vernement marocain. 

Afin  de  préciser  et  de  compléter  l'entente  intervenue 
entre  les  deux  Gouvernements  et  constatée  par  la  lettre 
adressée  le  ?.3  février  1907  par  le  Ministre  des 
Affaires  étrangères  de  la  République  à  l'ambassadeur 
de  Sa  Majesté  le  Roi  d'Espagne  à  Paris,  le  Gouverne- 
ment français  s'engage,  en  ce  qui  concerne  la  zone 
espagnole,  sous  réserve  des  droits  de  la  Banque  :  1  \ 
n'appuyer  aucune  candidature  auprès  de  la  Banque 
d'Etal  ;  •>."  \  faire  connaître  a  la  Banque  son  désir  de 
voir  prendre  en  considération  pour  les  emplois  de  la- 
dite zone,  les  candidatures  de  nationalité  espagnole. 


358  BSPAGNl 

Réciproquement,  le  Gouvernement  espagnol  s  Vu 
en  ce  qui  concerne  la  zone  Française,  sous  réserve  des 
droits  cl . ■  la  Banque  :  i°  A  n'appuyer  aucune  candida- 
ture auprès  de  la  Banque  d'Etat  ;  2"  à  faire  connaître 
à  la  Banque  son  désir  de  voir  prendre  en  considération, 
pour  les  emplois  de  ladite  zone,  les  candidatures  de 
nationalité  française. 

En  ce  qui  concerne  : 

i  Les  actions  de  la  Banque  qui  pourrait  appartenir 
au  Maghzen;  20  les  bénéfices  revenant  au  Maghzen  sur 
les  opérations  de  frappe  et  de  refonte  de  monnaies, 
ainsi  (juc  sur  toutes  les  autres  opérations  monétaires 
(art.  37  de  l'Acte  d'Algésiraa),  il  est  entendu  qu'il  sera 
attribué  à  L'administration  de  la  zone  espagnole  une 
part  calculée  d'après  le  même  pourcentage  que  pour 
la  redevance  et  les  bénéfices  du    monopole   des   tabacs. 

Art.  17.  —  L'autonomie  administrative  dea  zones 
d'influence  française  et  espagnole  dans  l'Empire  Cbé- 
lilii'ii  ne  pouvant  porter  atteinte  aux  droits,  préroga- 
tives et  privilèges  concédés,  conformément  à  l'Acte 
général  d'Algésiras,  pour  tout  le  territoire  de  l'Empire, 
par  le  Gouvernement  marocain,  à  la  Société  interna- 
tionale de  régie  co-intéressée  des  tabacs  au  Maroc,  la- 
dite Société  continuera  de  jouir,  dans  ebacune  des  deux 
zones,  de  tous  les  droits  qu'elle  tient  des  actes  qui  la 
ni  sans  diminution  ni  réserve.  L'autonomie  des 
i\r[\\  zones  ne  pourra  pas  laire  obstacle  à  son  action  el 
les  deux  Gouvernements  lui  faciliteront  le  libre  el  com- 
plet exercice  de  ses  droits, 

Les  conditions  actuelles  de   l'exploitation  du   mono- 


INNEXB    H  359 

pôle,  et  en  particulier  le  tarif  des  prix  de  vente,  ne 
pourront  rire  modifiés  (pie  d'accord  entre  les  deux 
Gouvernements. 

Le  Gouvernement  français  ne  fera  pas  obstacle  à  ce 
que  le  Gouvernement  roval  se  concerto  avec  la  régie 
soit  en  vue  d'obtenir  de  cette  Société  la  rétrocession  à 
dis  tiers  de  l'intégralité  de  ses  droits  et  privilèges,  soit 
en  vue  de  lui  racheter  à  l'amiable,  par  anticipation, 
lesdils  droits  et  privilèges.  Dans  le  cas  où,  comme 
conséquence  du  rachat  anticipé,  le  Gouvernement  espa- 
gnol désirerait  modifier  dans  sa  zone  les  conditions  gé- 
nérales de  l'exploitation  du  monopole,  et,  par  exemple, 
s'il  voulait  réduire  les  prix  de  vente,  un  accord  devra 
intervenir  entre  les  deux  Gouvernements  dans  le  but 
exclusif  de  sauvegarder  les  intérêts  delà  zone  d'influence 
française. 

Les  stipulations  qui  précèdent  s'appliqueront  réci- 
proquement dans  le  cas  où  le  Gouvernement  français 
désirerait  taire  usage  des  facultés  reconnues  ci-dessus 
au  Gouvernement  espagnol. 

La  régie  pouvant  faire  objection  à  un  rachat  partiel, 
les  deux  Gouvernements  s'engagent  dès  maintenant  à 
faire  exercer  dans  l'une  et  l'autre  zone,  aussitôt  que 
possible,  (c'est-à-dire  le  Ier  janvier  i<)33,  en  prévenant 
la  régie  avant  le  i "  janvier  iq3i),  le  droit  de  racbat 
prévu  à  l'article  a  j  du  cahier  des  charges.  A  partir  du 
r  janvier  ig33j  chacune  des  deux  zones  deviendra 
libre  d'établir,  selon  ses  convenances,  les  impôts  qui 
font  l'objet  du  monopole. 

Les  deux  Gouvernements  se  mettront  d'accord  pour 
obtenir,  en  respectant  le  cahier  des  charges  : 


3Ô0  BSPAGN] 

I  i  création  d'un  second  Commissaire  nommé  par 
L'administration  de  la  /one  d'influence  espagnole  ; 

b  La  définition  dos  attributions  qui  seraient  néces- 
Bairea  à  ce  second  Commissaire  pour  sauvegarder  les 
intérêts  légitimes  de  l'administration  de  la  zone  espa- 
gnole, sans  porter  atteinte  au  fonctionnera  en!  normal 
de  la  régie  ; 

c)  La  répartition  par  moitié,  entre  les  deux  Commis- 
saires de  la  somme,  de  5.ooo  riais  makh/ani  argent 
versés  annuellement  par  la  régie  pour  le  traitement  du 
Commissaire. 

Afin  de  maintenir  pendant  la  durée  du  monopole 
l'identité  du  tarif  des  prix  de  vente  dans  les  deux  zones, 
les  deux  Gouvernements  prennent  l'engagement  de  ne 
[tas  assujettir  la  régie  ou  ses  avants  droits  à  des  impôts 
nouveaux  sans  s'être  préalablement  entendus. 

Le  produit  des  amendes  prononcées  contre  la  régie 
pour  inexécution  du  cahier  des  charges  ou  abus  (arti- 
cle !ii  du  cahier  des  charges)  sera  attribué  au  Trésor 
de  la  zone  dans  laquelle  les  infractions  ou  alms  auront 
été  commis. 

Pour  le  partage  de  la  redevance  fixe  annuelle  et  des 
bénéfices  (articles  20  à  2^  du  cahier  des  charges),  on 
appliquera  un  pourcentage  <pii  sera  déterminé  par  la 
puissance  de  consommation  de  la  /one  espagnole,  com- 
parativement à  la  puissance  de  consommation  totale  de 
l'Empire.  Celte  puissant  e  de  consommation  sera,  évaluée 

d'après  les  perceptions  douanières  testant  ell'e<  tnemenl 
entre  les  mains  de  l'administration  de  la  /one espagnole , 

compte  tenu  du   reversement  prévu  à  l'article  i3  ci- 
desiui. 


INNBXJ     B  M\\ 

A  ici .  18.  —  En  ce  qui  concerne  le  comité  de  valeurs 
douanières,  le  comité  spécial  des  travaux  | m l>lics  et  la 
commission  générale  dos  adjudications,  durant  la  pé- 
riode où  ces  comités  resteront  en  vigueur,  il  sera 
réservé  à  la  désignation  du  khalifa  de  la  zone  espagnole 
un  des  sièges  de  délégué  cliérifien  dans  chacun  de  ces 
*rois  comités. 

Les  deux  Gouvernements  sont  d'accord  pour  réserver 
à  chaque  zone  et  affecter  à  ses  travaux  puhlics  le  pro- 
duit de  la  taxe  spéciale  perçue  clans  ses  ports  en  vertu 
de  l'article  (i(>  de  l'Acte  d'Algésiras. 

Les  services  respectifs  seront  autonomes. 

Sous  condition  de  réciprocité,  les  délégués  de  l'admi- 
nistration de  la  zone  française  voteront  avec  les  délégués 
du  khalifa  dans  les  questions  intéressant  la  zone  espa- 
gnole et  notamment  pour  tout  ce  qui  concerne  la 
détermination  des  travaux  à  exécuter  sur  les  fonds  de 
la  taxe  spéciale,  leur  exécution  et  la  désignation  du 
personnel  que  celte  exécution  comporte. 

Aicr.  19.  —  Le  Gouvernement  de  la  République 
française  et  le  Gouvernement  de  Sa  Majesté  Catholique 
se  concerteront  en  vue  de  : 

1"  Toutes  les  modifications  qui  devraient  être  appor- 
tées dans  l'avenir  aux  droits  tic  douane  ; 

2°  L'unification  des  tarifs  postaux  et  télégraphiques 
dans  l'intérieur  de  l'Empire. 

Art.  20.  —  La  ligne  de  chemin  de  fer  Tanger-Fez 
sera  construite  et  exploitée  dans  les  conditions  déter- 
minées par  le  protocole  annexé  à  la  présente  conven- 
tion. 

Aur,    21.    —   Le  Gouvernement  de   la    République 


362  BSPAGNB 

française  et  le  Gouvernement  de  Sa  Majesté  Catholique 
s'engagent  à  provoquer  la  revision,  d'accord  avec  les 

autres  puissances  et  sur  la  base  de  la  convention  de 
Madrid,  des  listes  et  de  la  situation  des  protégés  étran- 
gers et  des  associés  agricoles  visés  par  les  articles  8  et  10' 
de  cette  convention. 

Ils  conviennent  également  de  poursuivie  auprès  des 
autres  puissances  signataires  toute  modification  de  la 
convention  de  Madrid  que  comporteraient,  le  moment 
venu,  le  changement  du  régime  des  protégés  et  asso- 
ciés agricoles  et,  éventuellement,  l'abrogation  de  la 
partie  de  ladite  convention  concernant  les  protégés  et 
associés  agricoles. 

\in.  :*:<..  —  Les  sujets  marocains  originaires  de  la 
zone  d'inlluenee  espagnole  seront  placés  à  l'étranger 
sous  la  protection  des  agents  diplomatiques  et  consu- 
laires de  l'Espagne. 

\m.  a3.  —  Pour  éviter  autant  que  possible  les 
réclamations  diplomatiques,  les  Gouvernements  fran- 
çais et  espagnol  s'emploieront  respectivement  auprès  du 
Sultan  et  de  son  K liai î l'a  pour  que  les  plaintes  portées 
par  des  ressortissants  étrangers  contre  les  autorités 
marocaines  ou  les  personnes  agissant  en  tant  qu'auto- 
rités marocaines,  et  qui  n'auraient  pu  èlre  réidées  par 
l'entremise  du  <  lonsul  Français  OU  espagnol  et  du  Consul 
du  Gouvernement  intéressé,  soient  déférées  à  un  arbitre 
ad  koe  pour  chaque  affaire,  désigné  d'un  commun 
accord  par  le  Consul  de  France  ou  de  relui  d'Espagne 
et  par  celui  de  la  puissance  intéressée  ou,  à  leur  défaut, 
par  1rs  deux  Gouvernements  de  ces  Consuls. 

Ain.    'i  Le  Gouvernement  de  la    République 


WM'XI.     B  .'{•'>.'{ 

française  et  le  Gouvernement  de  Sa  Majesté  Catholique 
se  réservent  la  Faculté  de  procéder  à  rétablissement 
dans  leurs  zones  respectives,  d'organisationsjudiciaires 
inspirées  de  leurs  législations.  I  no  Ibis  ces  organisa- 
tions établies  et  les  nationaux  et  protégés  de  chaque 
pays  soumis,  dans  la  zone  de  celui-ci,  à  la  juridiction 
de  ces  tribunaux,  le  Gouvernement  de  la  République 
française,  dans  la  ionc  d'influence  espagnole,  et  le 
Gouvernement  de  Sa  Majesté  le  Roi  d'Espagne,  dans 
la  zone  d'influence  française,  soumettront  également  à 
cette  juridiction  locale  leurs  nationaux  et  protégés  res- 
pectifs. 

Tant  que  le  paragraphe  3  de  l'article  1 1  de  la  con- 
vention de  Madrid  du  3  juin  1880  sera  en  vigueur,  la 
faculté  qui  appartient  au  Ministre  des  Affaires  étran- 
gères de  Sa  Majesté  chérifienne  de  connaître  en  appel 
des  questions  de  propriété  immobilière  des  étrangers 
fera  partie,  pour  ce  qni  concerne  la  zone  espagnole,  de 
l'ensemble  des  pouvoirs  délégués  au  khalifa. 

Aht.  30.  —  Les  puissances  signataires  s'engagent  à 
prêter,  dès  maintenant,dans  leurs  possessions  d'Afrique, 
leur  entier  concours  aux  autorités  marocaines  pour  la 
surveillance  et  la  répression  de  la  contrebande  îles 
armes  et  des  munitions  de  guerre. 

La  surveillance  dans  les  eaux  territoriales  des  zones 
respectives  française  et  espagnole  sera  exercée  par  les 
forces  organisées  par  l'autorité  locale  ou  celles  du  Gou- 
vernement protecteur  de  ladite  zone. 

Les  deux  Gouvernements  se  concerteront  pour  uni 
fier  la  réglementation  du  droit  de  \isite. 

Aut.   2(i.    —   Les  accords   internationaux   conclus  à 


3t>4  ESPAGNE 

l'avenir  par  Sa  Majesté  Chérifiennc  ne  s'étendront  à  la 
Èone  d'influence  espagnole  qu'avec  le  consentement 
préalable  du  Gouvernement  de  Sa  Majesté  le  Koi  d'Es- 
pagne. 

Aht.  27.  -  La  convention  du  a(>  février  190J, 
renouvelée  le  3  lévrier  1909,  ainsi  que  la  convention 
générale  de  la  Haye  du  18  octobre  1907,  s'applique- 
ront aux  différends  <pii  viendraient  à  s'élever  entre  les 
parties  contractantes  au  sujet  de  l'interprétation  et  de 
l'application  des  dispositions  de  la  présente  convention 
et  qui  n'auraient  pas  été  réglées  par  la  voie  diploma- 
tique; un  compromis  devra  être  dressé  et  il  sera  pro- 
cédé suivant  les  règles  des  mêmes  conventions  en  tant 
qu'il  n'y  serait  pas  dérogé  par  un  accord  exprès  au 
moment  du  litige. 

Aht.  28.  —  Toutes  clauses  des  traités,  conventions 
et  accords  antérieurs,  qui  seraient  contraires  aux  stipu- 
lations qui  précèdent  sont  abrogées. 

AnT.  29.  —  La  présente  convention  sera  notifiée  aux 
Gouvernements  signataires  de  l'Acte  de  la  Conférence 
internationale  d'A  Igésiras. 

Aiit.  '.\o.  —  La  présente  convention  sera  ratifiée  et 
les  ratifications  en  seront  échangées,  à  Madrid,  dans 
le  plus  bref  délai. 

ESn  foi  «le  quoi,  les  plénipotentiaires  respectifs  ont 
signé  le  présent  traité  et  y  ont  apposé  leurs  cachets. 

Fait  en  double  expédition  à  Madrid,  le  37  novem- 
bre 191  ■ 

L.  s.)  Signé  :  GEOF1  RAY. 
(L.  S  ,  Signé  ■  MA  M  EL  GARCIA  PR1ET0 


table  des  m\tiî:i;i:s 


ESPAGNI 

AvERTISSEMFNT.        .  

I.  —   La  Constitution    .     .     . 


Les  origines  du  régime  représentatif  en  Espagne.  —  L'Es- 
pagne 'lu  Moyen  ^ge  Les  Estam  enlot  de  Cistille  et  les 
Corlcs  d'Aragon.  —  L'Espagne  des  temps  modernes.  — 
L'absolutisme  de  la  maison  d'Autriche.  —  Le  Saint-Office 
et  l'Inquisition.  —  L'avènement  des  Bourbons. 

L'évolution  politique  de  l'Espagne  au  m*-'  siècle — Charles  I\  . 
Ferdinand  VII  et  Napoléon.   —    L'entrevuo   de    Bavonne. 

—  Le  règne  de  Joseph  13onaparte  et  la  constitution  de  r8o8. 

—  La  guerre  de  l'Indépendance.  —  La  constitution  de 
181a.  —  Ferdinand  VII  et  la  restauration  de  l'ancien 
régime.  —  L'avènement  d'Isabelle  II.  —  Les  guerres  car- 
listes. —  Los  proniinciamenlos.  —  Le  Statut  royal  de  i834. 

—  La  constitution    de    '     '7-    —    La   constitution  île  i865. 

—  La  constitution  de  1 855.  —  L'Acte  additionnel  de 
i856,  —  La  Révolution  de  septembre  1868.  —  Le  (Gou- 
vernement provisoire,  Serrano  et  Prina.  —  La  constitu- 
tion de  i86u.  —  Le  règne  d'Amédée  Ier.  —  La  Répu« 
blique  espagnole.  —  Le  Coup  d'État  du  général  Pavia,  — 
Lo  pronunciamenlo  de  M  ulinez  Campos  et  la  restauration 
des  Bourbons. 

La  Constitution  du    3>>  juin    1876.  —  Alphonse    \1I.  —  La 

régence  de  la  reine  Marie-Christine.  —  Alphonse  \I1I.  — 

La  monarchie  constitutionnelle 3 

* 

II         Le  Gouvernement ;3 

Le  pouvoir  royal.  —  La  succession  au  troue.  —  La  Régence. 

—  Ii  majorité  do  Souverain.  —  Les  prérogatives  de  li 
Couronne.  —  !-a  constatation  du  Pouvoir  exécutif.  —  Les 
départements  ministériels.   —    Lo   Consoil    d'Etat,    <ïonsejo 


Aù(\  I  M.l  I     DBS    MAI  li  Kl  - 

de  Bstado,  régulateur  de  l'Administration.  —  Lo  Tribunal 
des  Coni|ites,  Tribunal  <le  lus  Cuentas,  régulateur  de  la 
.  omptabilité  publique. 
Les  grands  services  publics.  —  Les  finances;  le  régime 
fiscal  de  l'Espagne.  —  La  défense  nationale,  l'armée  et  la 
marine.  —  L'agriculture,  le  commerce,  les  travaux  pu- 
blics,  —  L'enseignement.  —  La  religion  d'Etat  et  les 
cultes  dissidents.  —  Le  domaine  d'Ultra  mar.  —  L'action 
espagnole  au  Maroc.  —  L'accord  rranco-eapagnol  du  i- 
novembre  IQ13 


III.  —  Le  Parlement. 


L'Organisation  des  Caries 

Le  Sénat.  —  Les  sénateurs  de  droit. — ■  Les  sénateurs  nommés 
par  le  ltoi.  —  Les  sénateurs  élus.  —  L'élection  par  les 
Corps  ecclésiastiques,  les  Corps  savants,  les  Universités, 
les  Sociétés  économiques  des  Amis  du  pays,  les  Provinces. 
—  Le  Collège  électoral  provincial,  cqmposé  des  membres 
de  la  députation  provinciale  et  des  délégués  élus  par  les 
municipalités  avec  adjonction  des  contribuables  les  plus 
imposés,  —  Les  conditions  d'éligibilité. 

La  Chambre  des  députés.  —  Le  Code  électoral  du  E  août 
1907.  —  L'électoral.  —  Le  vote  obligatoire  et  ses  sanc- 
tions. —  Les  listes  électorales.  —  Les  juntes  muni  iipales 
il  provinciales,  la  junte  centrale.  —  La  formation  du 
bureau  électoral,  assesseurs  et  contrôleurs.  —  Les  mesures 
législatives  assurant  la  liberté  et  la  sincérité  du  vole.  — 
Les  opérations  électorales.  —  La  Commission  do  recense- 
iiicni.  —  Les  pénalités  pour  fraudes  électorales,  pression 
et  corruption.  — -  Le  Tribunal  suprême  et  la  vérification 
des  pouvoirs.  —  Les  conditions  d'éligibilité,  les  incompa- 
tibilités. —  L'impuissance  des  lois  contre  les  masure. 

Les   attributions  des  Corlès, 

La  procédure  et  le  travail  parlementaires  des  Chambrée,  — 
Les    bureaui   .1  •    assemblées,        Le  sermon I  des  élus,  — 

La  division  on  sections    —   Les  Commissions,  —    La  

vocalioii  des  Chambres, 

Les  1  ir. >jcis  de  loi  du  Gouvernement  et  les  propositions  de 
lois  d'initiative  parlementaire  -  La  discussion  publique. 
—   Les   rotes  Les  1  < >ï -s  lis,  des.    -  Les  Codée,  —  Les 

questions  Les   interpellations,      -    Le   droit    pour    la 

Chambre   d  1    Députés  de  mettre  en  acensation  les  minis 
Ipllni   p H  l< inventaire,        Les  pai  lis  . 


i  mu  i     m  s    m  v  ni  m  - 


t»,7 


IV.  —   L'Administration   locale.    Le    Régime 
provincial  et  municipal a  «  3 

L'Administration  provinciale 

La  division  do  territoire  espagnol  en  '\>j  provinces,  —  L'au- 
lorité  du   Gouvernes?,   Gober'wdor,    — ■   La  contrôle  de  la 

Députation  provinciale,  Deputacion  provincial  et  île  la  Com- 
mission provinciale,  ÇomisiQn  provincial.  —  Organisation, 
fonctionnement  et  attribution  des   assemblées    provinciales, 

L'Administration   municipale 

La  division  du  territoire  provincial  en  lérminos,  —  Le  ter- 
mino  municipal.  —  W Ayunlamiento  et  la  Janta  municipal.  — 
W alcade,  les  tenientês,  les  alcades  de  barria,  les  regidoris, 
les  procuradores  lindicos.  —  Le  régime  municipal  des  pue< 
lilos. —  Le  mouvement  régionaliste  :  les  Mancommunidades.       ai3 


V.  —  La  Justice *l><j 

L'organisation  judiciaire   de   l'Espagne.  —  La  Justice  civile. 

—  Lo  juge  municipal,  jue2  municipal.  —  Le  juge  (l'arron- 
dissement ou  de  partido,  juge  de  première  instance,  juez 
déprimera  instancia.  —  Li  Cour  d'Appel,  Audiencia  terri- 
torial. 

La  Justice  criminelle.  —  Les  menues  infractions  fallas  et 
le  jnge  municipal,  —  L'appel  devant  le  juge  de  première 
instance.  —  Les  délits  et  la  Chambre  criminelle  de  I'  la- 
diencia  territorial  et  {'Audiencia  provincial  de  lo  criminal.  — 
Les  crimes.  —  La  Cour  d'Assises  ou  Tribunal  du  jury, 
jurado. 

Le  Tribunal  suprême  [Tribunal  supremo  . 

Le  recrutement  des  magistrats.  —  Le  concours.  —  La  Janla 
île   examen   v   'le  quali/icacioh,  —  Les  aspirants  à  la  judii  1 
turc    aspirantes  a  la  judicatara).   — ■  L'avancement,    —   Les 
traitements  de  début  de  enlradat   d'avancement    de  ascenso, 
de  lin  de  carrière  de  termina.  —  La  hiérarchie  judiciaire. 

—  Les  parités  d'office.  —  Les  parquets.  —  Les  inspec- 
tions.   —  Les    auxiliaires   de   la  justice.   —  Collèges  duo 

CatS  et   d'avoués.    —    Notariat.   —  Conclusions.       ...  jo 

BlBMOGRAPHIS J87 


368  TABLE    DBS    MATIÈRES 


VAL    D'ANDORRE 

Les  origines  de  la  République  d'Andorre.  —  Les  Parialgef, 
—  L'Etal  Andorran  et  la  souveraineté  des  Co-Prinees  ou 
Co-Seigneurs. —  La  Paroisse  et  la  Nation.  —  Les  Consuls 
et  le  Conseil  de  Paroisse.  —  L'illustre  Conseil  général  de 
la  Terre.  —  Le  Procureur  général  syndic.  —  Les  Ser- 
vices publics.  —  La  Justice  civile.  —  Les  Bavlea.  —  Le 
Juge  des  Appelations.  —  Le  recours  aux  Co-Princes  ou 
Co-Seigneurs.  —  La  Justice  criminelle.  —  Les  Yiguiers 
et  le  Tribunal  dos  Corts jç)5 

BlBLIOO&APHII 3l~ 


Arhrxi  A 

Constitution  de  la  Monarchie  espagnole  du  3o  juin   187C.      .       3a  1 

\nmve  B 

Convention  franco-espagnole  du  :>-  novembre  191a  au  sujet 
de  la  situation  respective  de  la  France  el  de  l'Espagne  ■< 
l'égard  de  l'Empire  chérifien /i',3 


IMPBIMI  RU     m  981!  111  .  BAIN!    \m  \n Il  B 


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