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Full text of "Journal de la Section de Medecine de la Societe Academique du Departement de Loire-Inferieure 31 ..."

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^ 


inniGTIÈlIE  ANNÉE 
DE   LA  NOUVELLE   SÉRIE. 


LISTE  DES  KIBRES  RÉSIDIMS 


SSdIVKD»  3)2  ilt33>3<Basr3« 


MM. 

LafoBd,  doctcv  en  dnnirgîe. 
Le  Baj,  docteor^Dédecui. 
Marchaadfdodesr  en  diinirgie. 


MM. 

Gavtron, 
Thibeand, 


MM. 

ABard  (Emile) ,  doct'-médecip. 

AsizoD^  docteur-médecin. 

Aubioais ,  docteur-médecin. 

Baré,  docteor-médecin. 

Blanchet  fils,  docteor-médedB^ 

Bonamy  (Eogène)  ^ ,  docteur- 
médecin. 

Boaanchavd,  doctear-médedn. 

Champenois,  docteur-médecin. 

Chenantais,  doctenr-médecin. 

Citerne,  docteur-médecin. 

Delamarc ,  doctenr-médecin. 

Delnen,  doctenr-médecin. 

De  Bostaing  de  Bivas,  doctenr- 
médecin. 

Fonlon ,  doctenr-médecin. 

Fonré  ^ ,  doctenr-médecin. 

Galicier,  doctenr-médecin. 

G  atterre ,  doctenr-médecin. 

Gély,  doctenr-médecin. 

Hélie,  doctenr-médecin. 

Hienard ,  doctenr-médecin. 

Leoorgne,  doctenr-médecin. 

Lefenrre ,  doctenr-médecin. 


Il      MM. 

Le  Bon ,  doetear-médMB. 

Leiennenr,  doctenr-médecin. 

Leqnnré,  doctenr-médecin,  an- 
cien chirurgien  de  maiine. 

Mabit,  doctenr-médecin. 

Magnéro  ,  pharmacien. 

Mahot,  doctenr-médecin. 

Maisonnenre  (Th.),  doctenr- 
médecin. 

Malherhe,  doctenr-médecin. 

Marcé ,  docteur-médecin. 

Mandnit,  docteur-médedn. 

Hénard,  docteur-médecin. 

Moisan,  pharmacien. 

Horicean  fils,  docteur-médecin. 

Padiolean ,  doctenr-médecin. 

Papin-Glergerie,  doct'-médecin. 

Petit,  doctenr-médecin. 

Pihan-Dnfeillay,  doct.-médecin. 

Pincet,  pharmacien. 

Bonxcan ,  docteur-médecin. 

Trastonr,  doctenr-médecin. 

Tnrpin,  doctenr-médecin. 

Villeneuve,  docteur-médecin. 


JOURNAL 


DB   LA 


SECTIOn  DE  HËDECIHE 

DE  u  Mit  mâwm 

DU 

DÉPARTEMENT  DE  LA  LOIRE-INFÉRIEURE. 


31*  YOLUniE. 


20*  ÂimÉE  DE  LA  NOUVELLE  SÉRIE. 


NANTES, 
IMPRIMERIE  DE  M"'  V«  CAMILLE  MELLINET. 

1855. 


JOURNAL 


DE  LA 


SECTION  DE  MEDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


BULLETIJV  DES  SÉANCES. 


Séance  du  15  décembre  1854. 

PBÉSHUBIICB   DE  M.   LEQUBRBÉ  ,  PBÉSIDBNT. 

Cette  séance  est   consacrée  aux  élections.   En  voici  le 
résultat  : 

BVHEAC. 

MM.  Lbtbnneur,  président; 
Mahot,  vicê'président  ; 
Champbnois  ,  secrétaire,- 
Lb  Houx  ,  secrétaire^adjoint; 
Dblahabb,  bibliothécaire; 
Méhabd,  trésorier. 


6  JOURNAL  DE  MÉDBCINE. 

COMITÉ  DE  RÉDACnOlf • 

MM.  RouxsAu,  Màlhebbe,  Hélie,  tUtUaires; 
MM.  Leboegne  et  Blanobbt,  membres  suppliants. 

CSOMITÉ  DE  VACSGUf  E. 

MM.  ÂuBiNÀis,  Màbit  et  Maudvit. 

COMITÉ  DE  TOPOGRAPHIE. 

MM.  BoNÂMT ,  Foulon  et  Allard. 

COMITÉ  D'ADMINISTRATION. 

MM.  Saillant,  Mabit,  Morigeau,  Leborgne  et  Marchand. 
Séance  du  12  janvier  1855. 

PRÉSiDBNGII  DB  M.   LBTENN^R,  «RÉSIDENT. 

M.  Lequerré ,  avant  de  quitter  le  fauteuil  de  la  prési- 
dence ,  remercie  la  Section  de  la  bienveillance  qu'elle  lui  a 
témoignée  pendant  tout  le  temps  qu'il  a  eu  Thonneur  de 
présider  ses  séances. 

Après  Vinstallation  des  membres  élus  pour  composer  le 
bureau  pendant  l'année  1855,  M.  Leteniwur,  président, 
prononce  le  discours  suivant  : 

Messieurs  et  cffsns  Collègui^s  , 

En  venant  occuper  ce  fauteuil,  je  ne  pu»  me  défendre 
d'une  vive  et  profonde  émotion.  Je  oompreods  toutes  les 
difficultés  attachées  aux  devoirs  qui  me  sont  imposés  ; 
aussi,  pour  les  accomplir,  je  compte  biea  œftÎDB  sur  mes 
propres  forces  que  sur  votre  bienveillao*  appui.  Je  suis 


sMIenu  par  le  sonveDHr  de  tous  ks  (émoiignages  de  sym- 
pathie que  vous  m'avez  donnés  et  qui  sont  trop  honorables 
pour  tlioi ,  pour  que  je  puisse  les  oublier  jamais.  J'étais 
devenu  votre  collègue  depuis  quelques  mois  à  peine,  que 
déjà  vous  me  donniez  le  titre  de  secrétaires-adjoint,  et, 
depuis  ce  temps ,  vos  suffrages  m'ont  élevé  successivement, 
d'année  en  année,  a'U  secrétariat,  à  la  vice- présidence , 
et,  enfin,  à  Tbonneur  de  présider  et  de  diriger  tos 
séances. 

Recevez  ici,  Messieurs,  l'expression  bien  sentie  de  ma 
reconnaissance  pour  cette  succession  non  interrompue 
de  faveurs,  dont  je  sais  apprécier  tout  le  prix.  Puissé-je , 
dans  le  courant  de  cette  année,  me  montrer  digne  de  la 
confiance  que  vous  m'avez  accordée ,  en  apportant,  danis 
l'exercice  de  mes  nouvellles  fonctions,  l'exactitude,  le 
zèle ,  la  prudence  et  l'esprit  de  justice  auxquels  votis  Ont 
accoutumés  mes  honorables  prédécesseurs. 

Pendant  les  mois  qui  viennent  de  s'écouler,  des  devoirs 
impérieux,  auxquels  vous  avez  consacré,  sans  relâche, 
vos  jours  et  bien  souvent  vos  nuits ,  vous  ont  empêchés 
d'apporter  dans  les  travaux  de  notre  Société  une  activité 
aussi  grande  peut-être  que  celle  que  nous  y  avons  vue 
régner  quelquefois.  Cependant ,  en  reportant  notre  pensée 
vers  fan Aée  1854,  nous  pouvons  dire  avec  franchise  et 
avec  orgueil  que,  par  l'importance  de  ses  travaux,  la  Sectioh 
de  Médecine  de  la  Société  Académique  de  la  Loire-Infé- 
rieure s'est  maintenue  au  premier  rang  parmi  les  Sociétés 
médicales  de  province;  et,  en  exprimant  cette  pensée, 
nous  n'olyéissom  pas  à  un  vain  sentiment  d'amour- 
ph)^re ,  niMis  rious  ne  faisons  que  reproduire  le  jugement 
porté,  sur  nos  ptibliciftiohs,  par  la  presse  médicale  de 
Paris,  qtfi  hri  flrh  de  fréquents  emprunts,  dont  èiHe  eh- 
riicbft  ses  colonnes. 

Aujourd'iMlt ,  Messieurs,  que  le  choléra  en  s'éloilgnant 
de  nous  a  latesé  à  ctyacnn  le  lôfsir  de  repretidre  le  cotirs 
de  9B»  ét^rfés  et  àè  ses  traVafux ,  vous  reviendrez ,  ateû  ùù 
zèle  noùveàfti ,  apporter  ail  fdyet  commun  le  fruit  de  votre 
expérience  et  de  vos  tfiééHatioAs.  Voua  reviendrez  prendre 


8  JOUBNAL  DE  UÊDECSNIL 

part  à  ces  discussions  scientifiques  dans  lesquelles  rimpor^ 
tance  des  questions  soulevées,  l'ardeur  de  la  lutte ,  lechocr 
des  opinions,  ont  donné  quelquefois. tant  de  charme  et 
d'intérêt  à  nos  séances. 

Nous  vivons  à  une  époque  où  les  intelligences  déploient 
une  prodigieuse  activité.  Jamais  les  sciences,  jamais  sur- 
tout la  science  médicale  n*a  compté  tant  d'ouvriers  in&ti- 
gables.  Les  barrières  qui,  il  y  a  un  demi-siècle  à  peine, 
séparaient  encore  les  peuples,  se  sont  abattues,  et  la  presse 
médicale,  prenant  un  immense  développement,  va  recueil- 
lir chez  toutes  les  nations  le  riche  butin  qu'elle  nous 
apporte  chaque  jour.  Aussi  ftut-il  un  travail  opiniâtre  et 
persévérant  à  l'homme  qui  ne  veut  pas  rester  en  arrière 
du  mouvement  général,  et  surtout  à  celui  qui  veut  contri- 
buer à  ce  mouvement.  Ce  double  but  est  souvent  bien 
difficile,  quelquefois  même  impossible  à  atteindre  pour 
l'homme  isolé,  et  c'est  là  ce  qui  rend  si  profitables  le^ 
réunions  comme  les  nôtres. 

Ce  riche  butin  dont  je  parlais  tout-à-l'heure ,  cette  pro- 
duction ,  cette  accumulation  sans  cesse  croissante  de  ma- 
tériaux divers  entre  lesquels  on  ne  découvre ,  au  premier 
abord,  aucune  corrélation,  aucun  rapport  possible, 
effraient  certaiifs  esprits  qui,  ne.  comprenant  pas  dans 
quelle  direction  ils  sont  entraînés,  cherchent  eix  vain  pour 
se  guider,  un  nom,  un  drapeau  qui  dominent  lâ  foule, 
croient  que  la  science  marche  au  hasard ,  et  sont  tentés 
de  nier  le  progrès. 

Cependant,  ce  désordre  n'est  qu'apparent  ou  n'existe 
qu'à  la  surface.  Il  est  facile,  en  se  plaçant  à  un  point  de 
vue  général  et  en  pénétrant  au  fond  des  choses,  de  s'as- 
surer que  nous  avançons  dans  la  voie  du-  progrès,  d'une 
manière  lente  peut-être ,  mais  d'une  manière  sûre ,  régix- 
lière,  et,  en  quelque  sorte,  méthodique.  L'édifice  grandit  et 
s'élève  sans,  qu'il  soit  toujours  possible  d'apprécier  et  de 
mesurer  ce  que  produit  le  travail  de  chaque  jour,  erescH 
occulto  velut  arbor  obvo  (Horace)  ;  >tandis  qu'en  embras- 
sant d'un  coup  d'œil  une  certaine  période  d'années,  on  est 


JOOBlUIi  OB  VÉDBGDIS.  9 

frappé  de  rimportanee  des  résultats  qui  ont  été  obtenus 
et  de  ceux  que  promet  l'avenir. 

On  a  dit  avec  raison  que  les  hommes  d'une  génération 
ne  sont  que  les  éclaireurs  de  la  génération  qui  les  suit. 
Tout  s*encbaine  dans  la  marche  de  IVsprit  humain  «  et 
pour  bien  comprendre  l'idée  philosppbique  autour  de 
laquelle  doivent  être  rangés  les  faits  qui  se  produisent  à 
notre  époque ,  il  faut  ne  pas  perdre  de  vue  Tidée  domi- 
nante qui  a  imprimé  son  cachet  à  Tépoque  qui  nous  a 
précédés. 

La  médecine,  pendant  la  première  moitié  du  XIX* 
siècle,  a  créé  la  science  dont  Horgani  avait  été  le  précur- 
seur, Tanatomiy  jMilAofogifue^  en  même  temps,  elle  a 
perfectionné  les  méthodes  d*observatiop ,  et  a  réussi  à 
porter  à  un  haut  degré  de  précision  la  connaissance  ou 
plutôt  hi  eonstation  du  fait. 

Aiais  ee  n'e$t  pas  tout  de  voir,  a  dit  Albinus  (Annota- 
tio  anatom.),  t(  faut  encore  savoir  ce  qu'on  a  vu.  Et,  en 
effet,  ce  n^est  pas  toi]it  d'ol^server  les  symptômes  des 
maladies^  de  connaître  les  lésions  organiques  qui  leur 
correspondent,  de  découvrir  la  cause,  qui  a  produit  ces 
troubles  et  ces  désordres,  il  faut  pouvoir  omir,  coor- 
donner ces  divers  éléments,^  en  former  un  tout  harmo- 
nique ;  il  faut ,  en  un  mot ,  non  plus  seulement  constater , 
mais  encore  interpréter  et  expliquer  te  rapport  quil  y  a 
entre  les  causes,  les.  lésions  et  les  sympt&mes;  c-est  là  ce 
qui  constitue  la  physiologie  pathologique  qui  fut  le  rêve 
lies  médecins  de  tous  les  temps»,  mais  qui  ne  pouvait 
naître-  qu'après  Tanatomie  pathologique  dont  elle  dérive 
naturellement.  • 

.  La  seconde  moitié  du  XIX'  siècle  tend  à  se  caractériser, 
nous  pouvons  raiSrmer  déjà ,  par  la  création ,  comme 
science ,  de^  la  physiologie  pathologique,    - 

Les  anciens,  pour  expliquer  ce  qu'ils  observaient,  avaient 
été  obligés  d'inventer  des  systèmes  qu'ils  décoraient  quel- 
quefois du  nom  de >  doctrines.  Aujourd'hui,  la  science, 
abandonnant  ces  théories  aventureuses  qui,  en  jetant  par- 
fois tant  d*éclat,   l'ont  cependant  trop  souvent  égarée. 


10  JOViillAL  DB  llâMCREMt» 

roTient  avee  plus  de  confianoe  que  jamais  à  •  la  véritable 
source  de  tout  progrès,  l'observation  et  rexpériefioe. 

En  restant  dans  cette  voie  qu'elle  n'a  jamais  quiHée 
sans  danger,  la  médecine  éblouira  peut-être  moins  les 
esprits ,  mais  elle  réussira  à  mcfttre.  la  réalité  à  la  |!rface 
de  nilusion,  des  vérités  démontrées  à  la  place  dès  liypo*- 
thèses ,  et  à  substituer  à  la  routine  aveugle ,  l'induction 
sévère  et  rationnelle.  C'est  ain^  qa'ont  été  élevés  tant  de 
beaux  travaux  dont  notre  époque  peut  s'enorgueillir ,  et 
qui  constituent  déjà  comme  autant  de  chapitres  épars  de 
la  physiologie  pathologique  dont  ils  révèlent  l'avènement 
prochain. 

Cette  science  ,  appuyée  sur  l'anatofmie  pathologique  , 
éclairée  par  la  physiologie  normale ,  prenant  po»r  auxt'- 
liaires  et  non  pour  guides  les  sciences  physiques  qui  lui 
prêtent  un  si  utile  concours,  sachant  enfin  franchir  à 
propos  les  bornes  souvent  trop  étroites  de  l'organtcisme , 
nous  permettra  d'approfondir  de  plus  en  plus  les  secrets 
de  la  maladie,  et  nous  aidera  puissamment  à  atteindre 
le  but  suprême  auquel  nbus  aspirons,  c'est-à^ire,  une 
bonne  thérapeutique. 

Voilà  quel  est  à  mes  yeux  l'avenir  qui  s'ouvre  devant 
nous.  Déjà,  j'aime  à  le  constater,  plusieurs  des  travaux 
qui  ont  été  lus  à  votre  tribune,  pendant  l'année  qui  s'a- 
chève, ont  montré,  de  la  part  de  leurs  auteurs,  des  études 
sérieuses  de  physiologie  pathologique.  Nous  devons  nous  en 
féliciter ,  car  c'est  une  preuve  que  nous  ne  restons  pas  en 
dehors  des  tendances  scientifiques  de  notre  époque. 

En  signalant  ces  heureuses  tendances,  je  n'ai  point  la 
prétention ,  Messieurs ,  d'indiqilier  une  direction  spéGiàfle 
à  vos  travaux  et  de  chercher  à  reinfe^pmer  votre  sphère  d'ac- 
tivité dfins  les  termes  d'un  programme  arrêté  d'avance: 
loin  de  moi  cette  pensée.  Je  me  plais,  au  contraire,  à 
rappeler  ici  que,  pôar  nous,- le  champ  du  travail  n'a  point 
die  limites  :  depuis  la  relation  d'tin  simple  fait,  depuis  h9 
détails  les  plus  élémentaires  de-ia  pratique  jusqu'aux  aspi- 
rations les  plus  ëtevéesde  la  philosophie  médioate,  chacun 
est  libre  de  choisir  ce  qui  lui  parait  le  plàs  utile  ^  ce  tpai 


JOVUIAL  BB  uÈMcam.  11 

séduit  leplu»  son  esprit,  ce  qui,  enfiii,  est  le  plus  err  rap- 
port avec  ses  goàts  et  ses  aptitudes. 
.  Chaque  genre  de  travail  a  son  utilité  ;  tantôt  en  ouvrant 
à  la  science  des  horizons  nouveaux ,  tantôt  en  confirmant 
des  vérités  qui  peuvent  être  attaquées  ou  oubliées,  souvent 
en  dévoilant  des  ^erreurs  qui  tendent  à  s'implanter  dans 
la  science  ou  qui  y  régnent  déjà  depuis  longtemps,  car 
lorsqu'on  travaille  sur  les  connaissances  humaines,  a  dit 
avec  ration  Condillac,  on  trouve  plus  d'erreurs  à  détruire 
que  de  vérités  à  établir.  Cette  variété  dans  les  travaux 
offre  les  pl\is  grands  avantages  ;  au  sein  des  Sociétés 
conime  la  nôtre,  chacun,  bénéficiant  du  travail  des  autres, 
augmente  ainsi  sans  efforts  et  comme  à  son  insu,  la  somme 
de  ses  connaissances,,  et  se  livre  à  l'étude  avec  d'au* 
tant  plus  d'ardeur  qu'il  est  sans  cesse  stimulé  par 
l'exemple. 

L'intérêt  et  l'utilité  de  nos  réunions  sera  donc  toujours 
en  raison  du  nombre  des  travailleurs  ;  c'est  pourquoi  nous  ne 
devons  jamais  nous  lasser  de  faire  un  appel  à  ceux  de  nos  ho- 
norables confrères  qui  setiennent  encore  éloignésde  nous  et 
auxquels  nous  serions  siheureux  d'ouvrir  ceftte enceinte.  Nous 
leur  dirions  :  ^soyez  left'bienvenus,<;ommenous  le  disions 
naguère  à  tous  ces  jeunes  collègues  qui  sont  venus  grossir 
nos  rangs  et  dont  l'active  collaboration  soutiendra  la 
vieille  réputation  de  notre  Société  et  lui  assurera  on  bril- 
lant avonir^ 

Pourquoi  faut' ii ,  Messieurs,,  que  nous  ne  pmsisiôns 
élever  un  regard  3'espéraiace  vers  l'avenir,  sans  être  forcés 
de  ferre  en  même  temps  un  pénible  retour  vers  le  passé 
en  nous  rappelant  que ,  cette  année  encore,  Ifl  mort  ne 
nous  a  pas  épargnés?      ' 

M.  Danet,  pharmacien  de  l'Hospice  général,  a  suc- 
combé le^20  octobre  1854 ,  â:gé  de  43  ans,  à  une  cruelfe 
maladie quiy  depuië  longtem})5  déjà,  menaçait  son  exis- 
tence ,  et  le  condânainait  à  un  repos  d'autant  plus  pénihie 
qu'il  était  entièrement  incompatible  avec  l'ardeur  et  Tacti- 
vité  peu  communes  de  son  intelligence. 

M.  Danet avait. fait  partie,  autrefois,  de  notre  Société 


12  jomnÂh  j>E  HÉDiBcms. 

doDt  i*état  fâcheux  de  sa  santé  Tavait  obligé  de  s'éloigner 
temporairement;  mais,  en  1853^  sentant  ses  forces 
renaître,  et  croyant  peut-être  à  sa  proobaine  guérison,  il 
était  revenu  prendre  part  à  nos  travaux..  Pur  malheur , 
la  trêve  ne  fut  que  de  courte  durée,  et  nous  dûmes  bien- 
tôt  perdre  Fespoir  de  revoir  notre  collègue  parmi  nous. . 

Vous  n'avez  point*  oublié  comment  ^  à  l'occasion  d'une 
discussion  sur  les  applications  du  tabac  en  thérapeutique , 
M.  Danet  s'empressa ,  à  la  demande  de  quelques-uns  d'en- 
tre nous,  de  nous  apporter,  sur  ce  sujet,  un  travail  plein 
d'intérêt.  Un  procès  célèbre  venait  d'attirer  l'attention  sur 
la  nicojtine  et  de  soulever  des  questions  de  la  plus  haute 
gravité,  (je  moment  était  donc  bien  choisi;  et  nous  de- 
vons regretter  que  le  travail  de  M.  Danet  soit  resté  inachevé^ 
car  nuL cloute  que  son  esprit  ingénieux  n'eùl^  réussi  à 
jeter  une  vive  lumière  sur  un  sujet  qui  est  loin  d'être. encore 
complètement  élucidé.         ..  .      •  . 

H.  Danet  a  professé  la  chimie  avec  distinction ,  soit  dans 
des  établissements  d'instruction  publique,  soit  au, Jardin 
des  Pharmaciens,  où  il  avait  institué  un  cours  gratuit  qui 
attirait  un  nombreux  auditoire. 

En  1847,  des  fraudes  signalées  dans  le  comnierçe.dela 
boulangerie  nécessitèrent  une  série,  d'expertises  dans  les* 
quelles  M.  Danet  réussit  à  éclairer  l'Autorisé  sur  desques^ 
tions  fort  difficiles  et  la  mit  à  même  de  réprimer  bien  des 
abus.  . . 

C'est  probablement  à  partir  de  cette  époque  et  par 
suite  des  recherches  qu'il  ..fut  obligé  de  faire,  qu'il  conçut 
la  pensée  de  découvrir  un  système  économique  de  panifi- 
cation*     • 

La  cherté  .des  subsistances  vint ,  il  y  a  un  an,  raviver 
cette  pensée,  chez  M.  Danet.  On  sait  qu'il  était  parvenue 
des  résultats  qu'on,  xlit  devoir  être  très-sati.sfaisants,  et 
que  c'est  au  moment  où  il  espérait  recueillir  le  fruit  de  sa 
découverte  que  la  mort  est  venue  le  surprendre. 

On  doit  à  M.  Danet  la  fondation  d'un  journal  scienti- 
fique :  y  Abeille  Pharmaceutique,  doot  il  était  le  principal 
rédacteur  et  le  gérant. 


JOtmitAI.  DB  HÉBËGHfB.  i3 

II  était  membre  du  jury  médical  du  département  de  la 
Loire-Inférieure,  et  était,  depuis  plusieurs  années, 
essayeur  pour  les  matières  d'or  et  d'argent. 

Pendant  le  temps  qu'il  a  rempli  les  fonctions  de  phar- 
macien à  l'hospice  Saint* Jacques ,  il  a  cherché  à  faire 
bien  dea  réformes,  et  a  tenté  plusieurs  innovations  qui 
n'ont  peut-être  pas  toujours  eu  les  résultats  heureux  qu'il 
avait  espérés,  mais  qui  ont  mis  en  relief  son  amour  du 
bien  et  son  désir  ardent  de  répondre  à  la  confiance  que 
l'Administration  des  hospices  avait  mise  en  lui. 

Sf  j'avais  eu  la  pensée  de  faire  la  bio^aphie  de  M* 
Danet ,  je  vous  aurais  parlé  de  son  existence  si  accidentée, 
de  ses  luttes,  de  ses  efforts*  contre  les  difficultés  qu'il  a 
rencontrées  sUr  sa  foute  et  qu'il  a  souvent  réussi  à'vaincre, 
grâceàson  énergique  ténacité.  Mais  j'ai  voulu  me  borner 
à  retracer  quelques-^uns  •  des  traits  principaux  de  la  vie 
scientifique  du  collègue  que  nous  avons  perdu,  et  mon* 
trer  combien  est  grand  le  vide  qu'il  a  laissé  parmi  nous, 
et  combien  sont  légitimes  les  regrets  qu'a  inspirés  sa  mort 
prématurée. 

Je  n'aurais  pas  accompli  ma  tftche,  Messieurs,  si  je  ne 
rappelais  ici  le  nom  d'un , homme  qui  fut  longtemps  un 
des  membres  les  plus  actifs  de  notre  Société ,  après  avoir 
été  un  de  ses  fondateurs^  et  que  nous  avons  toujours  ainié 
à  considérer  conune  nôtre  collègue, *  bien  que,  cédant  aux 
exigences  d*une  santé  un  instant  vivement  éJiranlée ,  il  se 
fût  retiré  depuis  plusieurs  années  de  nos  reniflions. 

M.  Marion  tle  Procé  nous  a  été  enlevé  le  21  février 
1854. 

Vous  avez  encore  présents  à  la  mémoire  les  discours 
touchants  qui  furent  prononcés  au  jour  de  ses  funérailles , 
et4'émotion  qui  s^empara  de  la  foule  attentive  au  récit  de 
cette  existence  SI  noblement  et  si  utilement  remplie.  Je 
ne  v^x  puint  affaiblir,  en  les  reproduisant,  les  paroles 
éloquentes  que  des  voix,  plus  autorisées  que  la  mienne 
firent  entendre  alors;  permettez-mot.  Messieurs,  de  dire 
seulement,  en  quelques  mots,  ce  que  fut  M.  Marion  de 
Procé  au  sein  de  la  Section  de  Médecine. 


14  JOUBllAt  BK  iDSiocaiiB. 

Après  avoir  terminé  ses  ébides  médicales  el  reçu  le 
diplôme  de  docteur,  M.  Marion  fit  un  voyage  en  Italie, 
où  rentrafnait  Tamour  des  arts;  peu  après,  il  se  rendait 
aux  Itides,  où  Thistoire  naturelle  et  la  médecine  fiotomirent 
à  son  esprit  investigateur  un  riche  et  vaste  champ  d'étu- 
des. De  retour  en  France,  il  Voulut  aller  se  retremper 
au  foyer  si  brillant  alors  de  l'École  de  Paris ,  et  recevoir, 
pour  ainsi  dire,  un  second  baptême  médical  avant  de 
revenir  d«ns  sa  ville  natole,  où  son  mérite  ne  tarda  pas 
à  être  apprécié,  et  où  il  obtint  bientôt  de  si  légitimes 


C'est  alors,  en  1824,  qu'il  s^assbcia  à  quelques  autres 
médecins ,  pour  fonder,  au  sein  de  la  Société  Académique, 
la  Section  de  Médecine,  qui  compte  déjà ,  vous  le  voyez, 
tinente  années  d'existence. 

Mk  Marion  fut  le  premier  secrétaire  de  notre  Société  et 
fut  maintenu  dans  ces  fonctloi^s  pendant  trois  ans.  Les 
première  volumes  de  nos  collections  publiés  par  ses  soins, 
montrent  combien  il  apporta,  à  cette  œuvre^  de  zèle  et  de 
dévouement.  Sous  son  utile  direction,  le  journal  compta 
bientôt  un  nombre  d'aboimés  qui  n'a  pas  été  atteint  depuis. 
Qn  peut  trouver  re;Kpiication  de  ce  fait  dans  l'intérêt  que 
devaient  trouver  les  médecins  de  la  ville  et  du  département 
à  la  lecture  de  la  revue  cUuique  des  hôpitaux ,  publiée  alors 
avec  une  grande  régularité,  et  dans  la  relation  de  tout  ce 
qui:  concernait  la  médecine  locale  et  les  intérêts  proies* 
sionnels.  ,' 

Dans  le»  premiers  volumes  de  notre  journal,  nous 
retrouvons  M.  Marion  faisant  partie  d'un  grand  nombre  de 
eommissiQf)S, oùétaient  élaborées^des questions d'organlsa^ 
tion  intérieure,  où  étaietit  étudiés  des  problèmes  d'hygiène 
publique,  et  dé  topographie  médicale;  enfin,  Messieurs^ 
H.  M^ion  a  enrichi  nos  publications  de  travaux  originaux 
dans  lesquels  se  révèlent  le  remarquable  talent  d'oteerva** 
tion  et  la  rectitude  de  jugement  que  nous  avons  toujours 
admirés  en  lui.  ' 

.  U  fut  élevé  i  en  1.833,  aux  honneurs  de  la  présidence  ;  et 
cette  dignité  lui  fiit  conférée  de  nouveau  en:  1889. 


Au  seio  de  la  Seciion.de  Médecine,  M.  Marion  s'est 
montré. .ce  qu'il  a  été  partout  et  toujours:  nul  n'a  porté  plus 
loin  q^e  lui  cette  bieoYeiUance ,  cette  aménité ,  ces  formes 
giraves  et  poÛes ,  qui ,  jointes  à  uiie  exactitude  en  quelque 
sorte  mathématique  dans  raccoBipiissement  de  tous  les 
devoirs  de  notre  profession ,  faisaient  de  notre  tant  regretté 
collègue ,  un  parfait  modèle  de  déontologie  médicale. 

Nous  conserverons  religieusement  sa  mémoire ,  car  c'est 
un  titre  de  noblesse  pour  les  Sociétés  savantes  de  compter 
sur  la  liste  de  leurs  fondateurs  des  noms  tels  que  celui  de 
H.  lUarion  de  Procé. 

Nous  aimerons  toujours  à  nous  rappeler  que  ,  par  les 
belles  qualités  de  soq  cœur  et  de  son  esprit ,  il  a  honoré  le 
corps  n^ical  de  notre  ville,  et  qu'il  était  entgytiré  de 
l'estime ,  de  l'affection  et  du  respect  de  tous  ceux  qui  ont 
eu  le  bonheur  de  le  connaître. 

Je. crois  être  l'interprète  des  sentiments  de  I9  Section 
tout  entière  en  offrant  des  remerciements  à  H.  Lequerré  et 
à  M.  Blan^het^pour  la  manière  dont  ils  ont  ren»pli  leurs 
fonctions  de  président  et  de  secrétaire ,  pendant  l'année 
1854.  ' 


AprèscediaoourSt  H.  le  Pré»dent  appelle  à  la  tribune 
M.  Papin-Clergerie,  inscrit  à  Tordre  du  jour  pour  la  lecture 
d-uQ.  traviail  intitulé  :  De  la  Nature  d&  Uju  Maladie' de 
Brighl  (1). 

Vv  Aubinaisi  rapp<»te,  à  cette  occasion ,  une  observation 
intéressante  d'albuminurie»  Il  a  donné  des  soins*  à  na 
enfant  de  9  ans,  att^eint,  à  deux  reprises  difféî^entes  ,  de 
néphriliO  albumineuse.  La  premièrcvfois,  iL  employa  d'a- 


(f)  Voir  plus  loin,  pag..20. 


16  JOUBIUL  BB 

bord,  pendant  une  quinzaine  de  jours ^  les  boissons  dé- 
hyanteset  alcalines;  mais,  n obtenant  aucun  résultat,  il 
se  décida,  sur  t'in«stanoe  d*un  médecin  consultant,  à  re- 
courir aux  émissions  sanguines,  malgré  l'apparence  lym- 
phatique du  malade*  Il  lui  pratiqua,  successivement,  trois 
saignées  de>bras;  ce  traitement  eut  un  succès  complet  Une 
ascite  considérable,  qui  avait  fait  songer  déjà  à  la  para- 
centèse, se  dissipa  en  peu  de  temps,  et  le  malade  guérit. 

Deux  ans  après,  le  même  enfant,  àla  suite  d'un  refiroi- 
dissement ,  fut  de  nouveau  atteint  de  la  même  affection. 
Les  saignées  procurèrent  encore  une  guérison  rapide. 

M.  Aubinais  pense  que  ce  malade  n'a  paseuune  vérita- 
ble maladie  de  Bright,  affection  dont  la  guérison  est  si 
rare,  mais  seulement  une  simple  néphrite  aiguë  que  les 
saignées  ont  pu  juguler. 

Séance  du.  i6  février  i855. 

PBiSIDBnCE  DE  H.   LBTEIlIŒtJB,  PBÉSn>ElfT. 

Lecture  et  adoption  du  procès-verbal.       *    - 

Ouvrages  reçus  : 

l^*  Mémoire  sur  les  polypes  de  l'oreille,  par  M.  Boqna- 
font,  médecin  principal  de  THôpital  militaire  du  Roule.  . 

2^  Discours  sur  les  moyens  à  opposer  à  l'invasion  du 
choléra  asiatique ,  par  le  même.. 

3^  Discours  à  l'Académie  de  Médecine ,  sur  les  déplace- 
ments de  la  matrice,  par  le  même. 

4^  Ou  Cathétérisme  de  la  trompe  d'Eustache,  par  le 
même. 

5^  Observation  de  bec-de-lièvre  double,  trës-compKqué, 
opéré  avec  succès  par  un  nouveau  mode  opératoire,  par  le 
Blême; 

fi""  L'Homœopathie  et  Je  choléra  de  1854  à  Marseille, 
par  M.  le  docteur  Crochet,  de  Marseille.^     ^ 

7^  Cobsiderations  pratiques  sur  la  propagation  du 
Chpléra-mof bus  ^  par  M.  le  docteur  Pascal,  médecin  de 
l'Hôpital  militaire  de  Bayonne. 


jotmtnt  BB  vttfiGiNS.  17 

L'ordre  du  jour  appelle  une  lecture  de  M.  Pmcet,  sur  un 
cas  d'empoisonnement  par  l'acide  arsenieux  (1). 
Cette  observation  donne  lieu  h  plusieurs  réflexions:* 
M.  Aubinaîs  s'étonne  de^  voir  rarsenic,  ce  poison  si  actif, 

Srh  parfois  à  doses  énormes  sans  déterminer  la  mort.  Il 
it  appelé,  un  jour,  près  d'une  jeune  (ille,  qui  venait 
d'avaler,  dans  le  but  de  s'empoisonner,  une  grande  quan- 
tité dé  nrort-aUx-rats ,  et ,  ensuite ,  60  centigrammes 
d^extrjiit  thébaïque.'Elle  eut  des  vomissements  répétés  et 
des  symptômes  de  narcotîsme  très-prononcés.  A  défaut 
d'hydrate  de  peroxyde  de  fer,  H  lui  fit  prendre  de  l'oxyde 
de  fer  ordinaire.  Elle  à  fini  par  guérir,  après  avoir  éproUvé 
une  violente  gastro-entérite.  Vers  le  quinzième  jour,  elle 
eut  une  opbthalmie  profonde,  qui  lui  fit  perdre  un  œil. 

M.  Aubinats  a  vu  administrer  à  des  moutdns  des  quan- 
tités énormes  d'acide  arsenieux ,  ?ans  qu'il  se  soit  produit 
de-symptômes  d'empoisonnement.  Ces  faits  extraordinaires 
le  conduisent  à  supposer  que  l'acide  arsenieux,  pris  à  très- 
haute  dose,  n'agit  pas  dé  Fa  même  manière  que  lorsqu'il 
est  administré  en  mofndre  quantité  à  la  fois. 

M.  -Rouxeau  fut  appelé ,  un  jour ,  près  d'un  jeune 
hpmme ,  qui  lui  parut  atteint  d'une  maladie  bizarre.  î\ 
était  dans  un  état  de  somnolence  et  d'abattement  dont  rien 
ne  pouvait  l'arracher.  Lé  malade  finit  par  lui  avouer  qu'il 
avait  avalé  un  gramme  d'acide  arsenieux,  mÔlé  à  deux 
grammes  de  sulfate  de  morphine.  Il  ne  survint  ni  vomisse- 
ments ni  selles.  Les  symptômes  d'engourdissement  et  de 
torpeur  persistèrent  pendant  huit  jours,  ainsi  qu'une  très- 
forte  céphalalgie;  cependant,  la  guérison  eut  lieu.  M. 
Rouxeau  se  demande,  en  présence  de  ces  faits,  si  i  opium 
et  Parsenic^n'éxerceràient  pas  sur  l'économie  une  action 
opposée,  l'un  devenant  par  là  Te  contre-poison  dé  l'autre. 

JU.  Pincet  dit  que  M.  Forget  a  rapporté  l'histoire  d'un 
homfne  de  63  ans,  qui  prit  un  jour  60  grammes  d'acide 
arsenrèux.    Huit  jours  après,  survint  une  gangrène  de  la 


(1)  Voir pltis  loin,  ^age  ITo. 


18  JOinpiAL  DB  vÉBBcna. 

jambe,  qui  nécessita  l'amputation,  laquelle  fut  suivie  de 
mort. 

M,  Malherbe  ne  trouve  pas  surprenant  qu'oo ,  ait  ob- 
servé des  cas  de  gangrène  après  Tingestiou  de  Tacide 
arsenieux,  puisque  ce  poison  détermine,  des  troubles  ner- 
veux et  circulatoires  si  considérables,  il  croit  qu'on  peut 
rapprocher  ces  fails  de  ceux  qu'on i)bserve  dans  l'ergotisme 
gangreneux,  ainsi  que  des  cas  de  gangrène  qu'on  voit  se 
produire  dans  les  affections  graves  des  centres,  nerveux. 
La  fonte  de  l'œil,  survenue  chez  la  malade.de  M.  Aubinais, 
peut  encore  être  rapprochée  des  cas  de  perforation  de  la 
cornée,  qui  se  produisaient,  dans  les  (expériences  de 
M.  Magendie,  chez  les  animaux  soumis  à  l'infiuence  des 
saignées  répétées. 

Dans  les  cas  d'ingestion  de  grandes  doses  d'acide  arse- 
nieux, une  grande  partie  du  poison  reste  non  dissoute,  car 
l'acide  arsenieux  n'est  pas  très-soluble. 

Quant  à  ce  qui  se  passe  chez  les  moutons^  il  peut  fort 
bien  y  avoir  décomposition  de  lacide  arsenieux  et  forma- 
tion d'arsenic  métallique,  au  contact  d'une  grande  quantité 
de  matières  alimentaires  presqu&entièrement  composées  de 
carbone  et  d'hydrogèr\e.  U  se  passerait  là  une  action  chi- 
mique analogue  à  celle  qui  a  lieu  dans  la  formation  d^s 
eaux  minérales  sulfureuses.  On  sait,  en  effet  maintenant, 
que  toutes  les  eaux  sulfureuses  naturelles  sont  produites 
par  la  décomposition  de  divers  sulfates  au  contact  de. débris 
végétaux  ou  animaux. 

il/.  Ménard  croit  qu'on  n'emploie, pas  autant  de  savon 
arsenical  pour  préparer  la  peau  d'un  animal,  qu'on  L'a  dit 
dans  l'observation  lue  par  M.  Pincet.  Il  pense  d'ailleurs 
que  le  poison,  placé  ainsi  à  )a  suriace  internée  d'une  peau 
recouverte  de  plumes,  n'a  été  que  fort  peu  en  contact  avec 
les  parois  du  tube  digestif.  M.  Ménard  ajoute  qu'il  a  vu 
survenir  Ja  gangr^ène  de  l'œil  à  la  suite  de  l'administration 
du  mercure. 

M.  Monceau  fait  observer  que ,  chez  les  chiens  et  les 
chats  nourris  uniquement  ^vec  du  pain ,  on  voit  survenir 
la  perforation  de  la  cornée ,  et  que  M.  Claude  Bernard  a 


joinoiAii  DB  KÉoicna*  19 

vu  aassi  se  produire  la  fonte  de  l'œil  chez  des  animaux ,  k 
la  suke  de  l'enlèveoient  des  ganglions  cervicaux.  Quant  à 
l'action  antagoniste  de  Tarsenic  et  de  Topium  «  elle  a  été 
admise  par  l'école  italienhe,  qui,  dans  sa  division  des 
mé<Jicaments  en  deux  classes,  Tune  des  hyperstbénisants 
et  l'autre  des  hyposthénisants,  a  placé  l*ppium  dans  la 
première,  et  l'arsenic  dans  la  seconde. 

JH.  Bélùi  dit  que,  depuis  longtemps,  on  a  vu  des  exemples 
d'ingestion  de  grandes  doses  d'acide  arsenreux  non  suivis 
de  mort.;  mais  q^u'jl  faut  remarquer  que,  dans  tous  ces 
ca$,  l'acide  arseuieux  a  été  pris  à  l'état  solide,  et  que.  le 
vomissement  a  eu  lieu  rapidement  et  avant  que  le  poison 
ait  eu  le  temps  de  se  dissoudre  dans  l'estomac.  La  disso- 
lution de  Tacide  arsenieux  dans  les  liquides  contenus  dans 
le  tube  digestif  ne  s'opère,  en  effet,  que  très-lentement. 
H«  Hélie  se  fonde ,  pour  énoncer  cette  proposition,  sur  la 
fréquence  avec. laquelle  oïl  trouve,  dans  les  autopsies,  des 
gr<|ins  d'acide  arsenieux  solide  sur  la  membrane  muqueuse 
de  l'intestin.  Il  pettse^  d'après  cela,  quil  est  inutile  de 
recourir  â(  des  hypothèses  ingénieuses  pour  expliquer  l'ab- 
sence d'accidents  mortels  dans  les  cas  doiit  il  s'agit.  Malgré 
la  grande  quantité  de  poison  ingérée,  une  très^-âtible  partie 
seulemeni  a  pu  être  absorbée,  et  elle  a  été  ensuite  étif 
minée  peu  à -peu  de  l'économie.  '     ' 

M.  Âiericeau  hit  remarquer  qu'il  existé  cependant  de 
nombreux  exemples,  d'empoisonnement  par  l'acide  arse- 
nieux solide.  La  mort»  dans  ces  circonstances,  peù(  avoir 
lien  de  deux  cnanières  différentes':  elle  peut  être  produite 
tout  d'abord  par  Faction  dé  l'agent  toxique  sur' le  système 
nerveux,  oa  bien  n'avoir  lieu  que  pli»  tard  par  suite  de  la 
gastro-entérite  violente  que  détermine  Tarsenic. 

L'ordre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  Papin,  pour 
lirç  une  observation  de  carcinome  du  pylore  (i). 

Après  cette  lecture,  M.  MoriCeau  demande  la  parole.  Il 
ne  trouve  pas,  dans  la  description  anatomique  de  cette 


(Yoir  plitt  loin  9  page  53). 


20  tét^A  tÈ  «MicMt. 

lésidf),  des  raisons  sufltsarites  pour  àdmeUfe  fétistietice 
d\in  caneer.  11  a  eu  occasion  d'exatniner  Hu  inicroscopè 
plusieurs  estomacs  provenant  de  sujets  morts  avec  tous 
les  symptAmes  du  cancer  stomacal  ;  dans  (]nelqués  cas  \  il 
n*a  pu  constater  qu'une  simple  hypertrophie  dés  tissus. 
Cette  hypertrophie  lui  paratl  d'ailleurs  suffisante  pour  pro- 
duire la  plupart  des  symptôntes  attribués  au  cancer  du 
pylore. 

M.  Minûrd  ne  pense  pas  qu'ori  puisse  mettre  en  douté 
l'existence  du  cancer  dtos  l'observation  qtii  Vient  'A^éïte 
hie. 

•ilf.  if^{fe  iTôtive  qtiè  lll.  Papih  a  eu  raisbn  d^ittt'îbttèr  lé 
vomissement  à  l'élrôitësse  de  l'ouverture  pyloriqtie.  H  '^iént 
d\)b8Cfver  un  cas  êe.  cancer  du  pylore,  dans  lequel  H  h'y 
a  pas  eu  de  vonirissëmenls ;  mais,  dans  ceca^,  il  n*y 
avait  point  de  rétrécissement  de  Panneau  jf>yforfque  ;  tetle 
ouverture  était,  au  contraire,  large  et  ntaintenué  béante 
par  stiite  de  l'induration  des  (issus,  aussi  le  vomisseitieht 
n'était  pas  possible. 

La  séance  est  levée  à  7  hiîures  l/î. 

Le  Secrétaire,         ' 
L.-T.  CnAaffiBftOtt. 


De  la  ncUvre  de  la  maladif  de  Bright,par  M, 
Papin-GlbMbub  9  Médecin^mppUatit  de$  Hùs- 
pices. 


Avant  de  rechercher  la  nature  mystérieuse  de  la  mala- 
dte  dé  Bright,  iioui  indiquerons  rapidement,  au  point  de 
vue  du  diagnostic  différentiel ,  lé  de^  "de  Vélteur  in- 


Urin%^oe  âe$  ^ymj^mes  de  catt^  maladie^  at  las  pmcipçiux 
tré^MU^ts  qu*^e  a  (durçia-  ^  l'analyse  cbiuMiCiQe  e|(  aii  dû- 
eroscope. 

L'afieciron  de  Bright,c;|^i  attend  toujours  uqe  dénonai- 
natioQ  scientifique  et  rationnelle,  figure  dans  le  cadre 
nosologique  depuis  sa  pren)iél*e  description  par  le  docteur 
Bright.  C'est  là  le  privtb^ge  des  découvertes  vraiment  utifes. 
La  science  les  accepte  en  principe  dès  leur  apparition  ;  elle 
les  dégage,  avec  le  temps,  des  erreurs  inséparables  de  toute 
yérilé  oaîaaanle.  L'eiistence  de  oelte  affection ,  aoufujçoaoée 
et  «ntrevue  au]^  différantes  époques  de  ThisAotra  médicalaf 
a  été  parfiiitement  démontrée  par  le  aélèbre  n^édeçip  jon- 
glais qqi  a  eu  l'honneur  d'y  i^ttachçr  ^pn  ^on\^  dlans  ^J^ 
mémoire  plein  d'originalité,  d'exactitude  et  de  çn^tbod^^ 
qu'il  publia  sur  ce  sujet  en  1827  (i).  MM.  Bostock,  Chrîs- 
tîspn  ;  Gregory,  Grav'»s,  Hamilto.i  çt  Efiotson,  en  Angle- 
terre; Rayçr,  Marlin-Solon  et  Forget,  en.  Prancç,  confir- 
mant la  découverte  du  docteur  Brigh^  par  de  nombreux 
travaux^Teconnaissent  à  cette  maladie  une  individualité 
propre,  fondée  sur  Tensémble  des  caractères  suivants  : 

jL'hypérémie,  ThypertropHie  ^  l'induration  simple  e^  la 
décoloration  successfve:^  du  tissu  rénal,  qui  correspondfent 
à  la  ^pjremière  période  QiJ^fQrmç  $^gi|ë  de  l*afifectioi(i  ; 

Une  lésiop  organique  du  mètpe^ssu,  spécifique  i  consé- 
cutive aux  formes»  précéde^nteè ,  et,  qui  tend  futalemeni  à 
parepunr  ioji^i^  ses  dègc^s,  à  savoir:  Is^  dégénéiraçcence 
jaunâtre,  l'état  granulé,  l'induration  cartilagineuse  et  la 
surface  bosselée; 

La  sécrétion  d'une  urine  albumineuse,  congulable  par 
la  cbaleur  et  l'acide  nitrique,. moins  riche  en  urée  et  en 
urate,  trouble,  rare,  sanguinolente  au  .  début ,  souvent 
akxrtine  el  moqdseuse,  et  d'une  fiiible  pesanteur  spéci- 


(t)  B^gbt.  —  ftea^l   4i(^a||«s  acçowaglii^^  m^  se^Pretioii 
albtiiDiiia9#  ijirÂaf  t  i^V- 


22  JOUnfAL  DE  HÉDECmS. 

La  diminution  des  globules ,  de  Faibumine  et  de  la 
pesanteur  spécifique  du  sang ,  et  la  présence  de  l'urée  dans 
ce  liquide; 

Un  mouvement  fébrile  initial  peu  marqué  et  assez 
rare  ; 

Une  douleur  sourde  dés  reins  sans  retentissement  habi- 
tuel dans  les  uretères  et  les  cuisses,  chez  les  hommes,  du 
moins; 

L'apparition  d'un  cedème  au  visage  et. aux  extrémités, 
suivi  d'un  épancbement  dans  les  cavités  séreuses  ;  • 

Enfin ,  des  complicatio^is  presque  toujours  inflamma- 
toires éclatant  avec  une  fréquence  inégale  sur  certains 
points  de  l'économie. 

La  maladie  deBright,  comme  il  est  facile  de  le  remar- 
quer ,  ne  possèdie  exclusivement  que  les  caractères  anato- 
miques  de  la  deuxième  période,  c'est-à-dire  la  clégéué- 
rescence  jaunâtre,  les  granulation^,  l'induratioa  cartilagi- 
neuse, et  l'aspect  chagriné  da  la  surface  des  reins.  . 

L'albuminurie  a  été  observée ,  en  effet  : 

1^  Dans  la  congestion  et  l'hypertrophie  essentielles  dû 
rein,  dans  le  scorbut,  le  purpura,  les  fièvres  érùplîves, 
les  fièvres  typhoïde  et  pernicieuse  hémorrbagiques ,  le 
diabète,  l'ascîte  (1),  la  grossesse,  ies" affections  du  cœur, 
des  poumons   et  du  foie ,  compliquées,  alors  d'bypéré- 


(t).  L^asoite  ne  doit  figarer  ici  que  comme  ud  agent  méca- 
nique qui  entrave  le  cohfs  do  la  circulation  dans. le  rein,  et  j 
détermine  une  congestion  suivie  d'albuminurie ,  ainsi  qu'on  Fob- 
serve  dans  la  grossesse  et  les  affections  du  cœur,  des  poumons 
et  du  foie.  Considérée  autrement,  l'àscite  ii'a  pas  de  valeur  étio- 
logique  qui  lui  soit  propre  dans  l'espëce.  Eue  n'est  plus  qu'un 
des  traits  nombreux  de  la  physionomie  du  groupe  hémétopatho- 
iogiqué,  cpii  a  été  sienaldd^k  au  nombre  d08  causés  ocdinatres 
de  l'albuminurie,  sous  le  nom  de  scorbut,  dé  purpura,  etc. 


JOUBNiL  BE  MÉBECIMB.  23 

mie,  et  quelquefois  même  d'hypertrophie  rénales  consé- 
cutives (1-)* 

2®  Avec  les^  lésions  précédentes,  et,  à  un  degré  plus 
avancé  de  la  maladie,  avec  induration  simple  et  décolora- 
tion du  même  organe,  dans  la  néphrite  en  général  ; 

3^  Avec  dégénérescence  dans  la  tuberculisation  et  le 
cancer  du  rein ,  et  avec  simple  production  anormale  dans 
le  kyste  rénal; 

4**^  Sans  sécrétion  d'albumine,  mais  avec  mélange,  dans 
tous  les  cas  où  Turtne  Contient  dû  pus  ou  du  sang:  la  né- 
phrite et  la  cystite  suppuratives ,  la  blennorrhagië  et  Thé- 
maturis  (2)  ;  . 


(1)  Le  petit  nombre  d'observation^  d'albuminurie  sans  trace 
de  lésion  bu  dé  modification  dn  tisstt  rénal ,  en  présence  de  la 
msisse  de  faits  contraires,  et  dans  lesquels  des  modifications  orga- 
niques mèm%  très-superfiçieUes  ont  été  xévélées  plus  d'une  ibis 
par  l'autopsie,  n'infirme  pas  notre  opinion  relativement  k  la 
coïncidence  absolue  de  l'albuminurie  et  d'un  état  particulier  de 
la  substapce  rénale.  19 ous^^  sommes  disposé  k  admettre  chez  les 
quelques  albuminuriques  dont  il  s'agit ,  l'eiistence  d'aune  conges- 
tion du  rein  au  premier,  degré,  dont  l'expression  anatomi que  aura 
disparu  avec  les  phénomènes  \itaux.  L'analogie ,  du  moins,  nous 
autorise  à  dobuer  cette  explication. 

Du  resté  ^  considérant  ralbuminurié  comme  le  résultat  d'un 
désordre  fonctionnel. du  rein,  nous  reconnaissons  que  celui-ci 
est  susceptible  de  sécréter  momentanénieut  une  urine  albumi- 
neuse  aous  l'influenee  d'un  ébranlement  nerveux  général  ou 
local,. 4el  qu'une  syncope,  une  forte  émotion,  une  attaque  d'hys- 
térie ou  d^épilepsie ,  une  douleur  ^ioleùte ,  et  principalement  la 
.  colique  néphrétique  ;  et  encore  ,  dans  ce  dernier  cas ,  la  douleur 
s'accoinpagne-t-elle  d'une  fluxion  rénale  \  mais  ce  troubla  de  la 
sécrétion  uiinairé  accidentel  et  instantané  ne  constitue  pas  Val- 
àuminurie  proprement  dite, 

(2)  L'urine  mélangée  avec  du  muco-pus  ou.  du  sang  présente 
nalupellèmentdes  traces  d'albumine  ;  mais  elle  dépose  un  sédi- 
ment .  muca^epurulent  ou  sanguin  reconnaissable  à  la  simple  ins- 

Ïtectiou,  et  le  microscope  y  découvre,  au  besoin,  des  globules^  si 
'urine  est  acide. 


24  joaauL  u  wÈmcam* 

i"*  Dftns  la  cystite  cantbaridique  (1);  ^ 
6*  Enfin,  dans  les  conditions  pathologiques,  encore 
loal  déterminées,  on  l'urine  est  généralement  considérée 
comoie  chyleuse  ou  laiteuse.  HH.  Deville  et  Personne , 
Mayer  et  Pearse  (2)  ont  prouvé  que  les  urines  prétendues 
cbyleusesou  laiteuses  ne  contenaient  ni  caséine  «  ni  pus, 
ni  phosphate,  mais  de  l'albumine,  et,  surtout,  une  ma- 
tière grasse ,  qui  donne  à  ces  urines  leur  apparence  laiteuse. 
Toutefois  «  dans  les  divers  états  que  nous  venons  de  citer, 
Turine  renferme  moins  d'albumine ,  et  celle-ci  n'y  existe 


(1)  Nous  ferons  remarquer ,  d'abord ,  qne  cette  dénonûnation 
est  iocomplète  et  même  vicieuse,  car,  d'après  les  observations  de 
MM.  BooiUaad  (1)  et  Morel-Lavallée ,  raction  irritante  de  4a  caiir  j 

tharide   se   manifeste   primitivement  et  principalement  sur  les  *. 

maqa^oses  rénale  et  nrétérale  ^plus  encore  do  côté  de  la  ma-  1 

qoense rénale) ,  sons  l'aspect  d'une  injection  yive ,  de  plaques^ 
Yiolacées,  et  de  pseudo -membranes^  tandis  que  la  muqueuse 
vésicaie  n'offire  les  mêmes  lésions  qu'àl'embouchure  des  uretères,  ' 

et«  smr  ce  point,  la  rougeur  est  habituellement  moins  pronoiMîée 
et  la  formation  de  fausses  membranes  relativement  rare. 

Disons  maintenant  que  la  cvstite  cantharidique  apAaraft  et  dis- 
paraît trop  rapidement,  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas,  pour" 
donuer  lieu  à  de  la  suppuration,  et  que  l'albuminori»  peut  être 
ici  le  résultat  simultané  i"  de  la  disposition  des  muqueuses  uri- 
naires»  qui  ne  se  rencontre  que  dans  l'intoxication  cantharidique, 
de  laisser  transsuder  de  l'albumine  ^  2"  de  l'hypérémie  rénale  par 
extension  de  Tinjection  de  la  muqueuse  ^  et  3«  ae  la  cystorrhagie 
qui  accompagne  très- souvent  la  cystite  canthandiqùe.  Ifous 
avons  rangé  déjà  la  congestion  rénale  et  rhématurie  au  nonibre 
des  causes  les  plus  habituelles  de  l'albuminurie.  11  y  adraiC 
donc  ici,  à  la  fois,  sécrétion  rénale  albumineuse  et  simple 
mélange  d'albumine  transsudée  avec  l'urine. 

(I)  M.  BMnttaiia,  —  Sur  l' Aibiuun«rie  caMliaridique  (Rev^e  .védico- 
durorgicaie,  IS4S).  ,     .  ,    ^     . 

M.   Morel-LaYallée ,  —   Mémoire  sar.U  Gj^stale  CanlbvidiqQe ,  1847. 

a  MM.  Deville  et  Personne ,  —  Journal  d«  Pharnacie     tMi 
.  Mayer  et  Pearse,  —  Expériences  sur  las  Urines  chvleM^ 
t)u  divlo-séreoses  on  laiteuses   (Trantactioas  m4dico-cUm>^ 
cales,  terne  XVI,  1851).  ''—««i^ 


que  passagëreoient.  L'urine  n«  s*écarte  pas  autaoi  àe  sa 
densité  normale,  et  la  proportion  de  Turée  et  des  urates 
ol&e  peu  de  changement;  enfin,  le  sang,  presque  tou- 
jours coagulé  dans  Thématurie,  s'écoule  plus  abondam- 
ment, et  donne  à  l'urine  une  teinte  plus  rougeâlre. 

Ainsi  donc ,  l'albuminurie  et  les  premières  formes  de 
ranatomie  pathologique  des  reins,  dans  la  maladie  de 
Bright,  n'appartiennent  pas  uniquement  à  cette  affection. 
Ce  n'est  pas  tout. 

I4,'usage  interne  des  médicaments  alcalins,  et  une  nour- 
riture composée  d'aliments  de  même  nature,  fournissent 
une  urine  alcaline. 

La  diminution  des  globules  du  sang  se  rencontre  dans 
les  cachexies  et  la  chlorose,  mais  il  est  vrai,  sans  diminu- 
tion appréciable  d'albumine. 

L'urée  se  trouve  dans  le  ^ng  après  l'extirpation  des 
reins,  et  à  la  suite  d'accidents  néphrétiques  prolongés  ou 
répétés,  / 

La  fièvrequ'on  Observe  quelquefois  au  début  de  la  ma- 
ladie de  Bright,  accompagne  aussi  la  néphrite.  Cependant, 
elle  est  régulière,  plus  intense  et  précédée  de  frissons  daps 
cette  dernière  maladie. 

La  douleur  rénale  est  Un  symptôme  constant  dans  toutes 
les  affections  des  reins;  néanmoins  son  obscurité  .habituelle 
dans  la  maladie  de  Bright  est  caractéristique. 

L'œdème  de  cette  affection  ne  peut  pas  être  distingué 
de  celui  de  la  scarlatine,  qui  affecte  le  même  siège,  suit 
la  méniQ  marche  et  précède  également  les  épancbements 
dans  les  cavités  séreuses.  Aussi  MM. ..Bright  et  Rayer , 
frappés  des  ressemblances  nombreuses  des  deux  maladies, 
n'hésitent  pas  à  rattacher  la  scarlatine  albumino-œdéma- 
teuseà  la  forufie  aiguë  de  la  maladie  de  Bright.  11  faut 
ajouter  que,  dans  certaines  néphrites  et  congestions 
rénales*  albumineuses,  l'oedème  se  nianifeste  encore  avec 
les  mêmes  caractères. 

Mais  cependant  l'œdème  de  l'affection  de  Qright  est 
plus  constant ,  plus  durable  el  moins  circonscrit. 

L'hy()r6pisié  apparaît  d'ans  presque  tous  les  cas^  où  l'on 


26  JOUBNÀL  BB  HÉIttCDIB* 

observe  un  appauvrissement  du  siEing  très-prononcé  ou  un 
arrêt  de  la  circulation.  Elle  suit  alors,  qu'elle  progresse 
ou  qu'elle  rétrograde ,  une  marche  régulière  qui  contraste 
avec  ses  évolutions  brusques  et  capricieuses  dans  la  maladie 
de  Bright. 

Quant  aux  complications  aiguës  de  cette  maladie,  on 
doit  r*>connattre  qu'elles  surviennent  plus  rarement  dans  lé 
^ours  des  autres  affections. 

La  maladie  de  Bright,  si  Ton  fait  abstraction  de  Tét^t 
caractéristique  des  reins,  se  révèle  donc  seulement  par  un 
ensemble  de  signes  qui,  pris  isolément,  n'ont  pas  une 
valeur  suffisante  pour  la  caractériser ,  mais  ^ont  la  coïn- 
cidence et  l'enchaînement  conduisent  en  général  à  affirmer 
son  existence.  r 

Du  reste^  rhistpiré  dé  cette  affection  n'est  pas  achevée. 
On  devra  faire  des  expériences  comparatives  plus  étendues 
et  plus  précises  sur  la  densité  et  la  proportion  respec- 
tives des  éléments  de  Turine  et  du  sang  dans  les  états  du 
rein  qui^donnent  lieu  ordinairement,  et  accidentellement 
à  Talbuminurie.  Ces  recherches  seront  sinlgulièrement 
facilitées  par  les  progrès  de  la  chimie  organique  "et  une 
plus  grande  hal^itude  du  microscope ,  qui  permettent  d'éta- 
blir, dès  aujourd'hui,  un  diagnostic  plus  rigoureux  dans 
la  classe  des  affections  albumineuses  des  reins. 

Déjà,  le  docteur  Grégory  (1),  dirigé  par  un  remar- 
quable talent  d'obsej'vation  et  d'analyse  vers  les  opérations 
expérimentales  sur  les.  liquides  de  l'économie,  a  eu  le 
mérite  de  dresser  eji  ^cegard  des  tableaux  très-curieux  qui 
retracent ,  d'une  part ,  les  variations  de  la  densité  -spéci- 
fique des  urines  et  du  sérum  du  sang ,  et  «elles  du  degré 
Je   coagukbilité  îles    urines   chez  des    albuminuriquei 


(1)  Grégory.  —  Edinburgh  jnédical  and  sargicaljournal',  tomes 
XîavietVII. 


joranAL  BB  wÈsMam.  27 

atleÎDts  d*bydropisid,  et,  d'autre  part,  les  variations  de 
la  pesanteur  spécifique  de  l'urine  et  du  sérum  du  sang 
dans  Fétat  de  santé.  Mais,  comme  le  remarque  M.  Rayer, 
le  savant  Anglais,  privé  des  lumières  actuelles  de  Tana- 
tomie  pathologique,  a  compris,  dans  le  groupe  de  ses 
observations  d'albuminurie  compliquée  d'hydropisie,  des 
affections  qui  n'ont  de  commun  avec  la  maladie  de  Bright 
que  rbydropisie  avec  urine  coagulable.  Il  n'a  pu  fournir, 
en  conséquence,  aucune  donnée  exacte  qui  puisse  servir 
de  terme  comparatif  entre  Turine  et  le  sang  dans  la  ma- 
ladie de  Bright,  et  lés  mêmes  liquides  dans  les  autres  états 
albufïiîneux.des  reins.  C'est  encore  là  le  problême  à  ré- 
soudre. -  . 

M.  Rayer  (1),  dont  lès  travaux  plus  récents  attestent 
une  eonnaissancé  pluç  nette  de  cette  affection  ,  a  reconnu 
la  diminution  de  la  pesanteur  spécifique  de  Farine  dan^ 
la  néphrite  chronique  primitive  ou  consécutive  à  la  cys- 
tite :  f urine  est  albumîneuse.  , 

Enfin,  M:  Becquerel  (2),  fécondant  là  découverte  de 
M.  Biot,  relative  à  la  déviation  à  gauche  du  rayon  de 
lumière  polarisé  par  l'albumine,  a  précisé  les  données 
générales  sur  les  proportions  de  c^et  élément  d^ans  le  sang 
et  l'urine^.  Il  est  parvenu  t  mesurer  exactement  la  quan- 
tité d'albumine  contenu  dans  le  sang  et  l'urine  d'individus^ 
bien  portant»  et  nuttades.  L'application  de  son  ingénieux 
procédé  au  diagnostic  différentiel  dé  ia  maladie  de 
Bright  et  des  ^autres  lésbns  et  modifications  rénales  pou- 
vant entraîner  la  production  de  l'urine  coagulable  él  des 


(1)  M.  Rayer.  —  Traité  des  maladies  du  rein.  (Historique  de  la 
néphrite  albumiaense.) 

(2)  M.  Becquerel.  —Recherches  microscopiques  et  patholor»- 
eiqaes  sûr  ralBuuiine  du  sang  et  dés  divers  hqnides  organiques. 
(Archives  générales,  1850.)  .'  - 


26  lonana.  » 

épancbements  séreux,  procurera  peul^tra  des  résulkils 
positifs  (t). 

M.  Becquerel  coocluf,  de  plusieurs  expéneoces,  que  1  ap- 
pauvrissement du  sérum,  dans  la  maladie  de  Brigbi,  est 
la  conséquence  de  l'hydropisie,  et  non  pas  le  résultai  du 
passage  de  Talbumine  dans  les  urines.  Ahisi ,  dans  les  cas 
d'hydropisie  avec  urine  coagulable,  le  aérum  lui  a  offert 
les  déviations  suivantes:  6  degrés  17  minutes,  qui  corres- 


(f )  L'albaminimètre  (cVst  le  nom  de  Tappareil  de  M.  Becquée 
rel)  se  compose  i«  d'uo  prisme  bi-refiriogeiit  appelé  polarisenr; 
2»  d'an  tube  de  30  k  20  centimètres  de  longueur,  selon  la  Boance 
plus  on  moins  foDoée  èa  sérum  du  sang,  qui  doit  être  traité  préa- 
lablement par  une  petite  quantité  de  salfale  de  soude,  i  partie 
sar  fOC,  et  €ltré  (raddition  du  seléclaircit  le  sérum  et  fixe  les 
eloboles  sur  le  filtre  sans  altérer  les  propriétés  physiques  du 
fiquide)  ;  S»  d'un  second  prisme  bi-refringent  nommé  analyseur, 
placé  au  centre  d'un  cercle  divisé  en  degr&  et  minâtes.  Due  cage 
en  fer-blanc^  peint  en  noir,  contient  nne  lomiftre  très-vive  qu'pn 
dinge  vers  le  polariseur. 

Les  déviations  que  subit  le  rayon  de  lumiire  polarisé  k  travers 
la  colonne  de  sérum,  misées  k  l'aide  de  Tanalysenr,  sont  marquées 
sur  le  cerde  gradué.  Elles  ne  peuveot  être  attribaées  à  «n  autre 
élément  que  l'aUmmine  en  dissolution  dans  le  sérum,  car  on  n'y 
découvre  pas  de  glucose ,  et  les  sels  alcalins ,  ainsi  que  las  ma- 
tières cxtractives  de  ce  figuide,  n'ont  aucune  action  sur  le  rayon 
de  lumière.  Enfin,  Ptntensité  de  la  déviation  du  rayon  kunineux 
eat  proportionnette  k  la  richesse  du  sérum  en  albumine ,  et  l'on 
obtient  les  mêmes  effets  en  substituant  k  ce  liquide  une  solution 
aqueuse  d'albumine  purifiée. 

Les  résultats  de  l'application  de  Falbuminimètre  k  Texamen 
de  30  sérum  recueillis  dans  diverses  affections,  ont  été  vérifiés 
par  Panalyse  chimique  et  la  séparation  de  l'albumine.  Les  dévia- 
tions ont  oscillé  entre  4  degrés  HO  minutes  et  9  degrés,  et  les 
roportions  d'albumine  ont  varié  de  48  grammes  60  centigrammes 
94  grammes  41  centigrammes.  Dans  l'état  de  santé,  les  dévia- 
tions oscillent  entre  7  a  s  degrés,  et  les  proportions  d'albumine 
varient  de  75  k  85  grammes.  La  moyenne  de  20  observations  de 
cette  catégorie ,  pour  chaque  analyse,  a  donné  0,180  milli^ammes 
pour  chaque  minute.  Il  sumt  donc,  pour  obtenir  la  quantité  d^al- 
bumine  dissoute  dans  un  liquide  dêoaé,  de  multiplier  par  0,180 
milligrammes  le  nombre  de  degrés  (.cewrertis  ea  miuules)  qui  ùi- 
diquent  la  mesure  de  la  déviaifion. 


NfeWÈié  DB  MÉ(>SCItffi.  i9 

pondant  à  67  gramines  3fi  centigrammes,  —  5  degrés  48 
minâtes  ou  ê2  grammes  64  centigraitimes,  et  chez  une 
femme  ailèi^te  de.  la  maladie  de  Brigfat ,  %vec  un  peu 
d'oedème  aux  malléoles  et  beaucoup  d*aibumine  dans  les 
urines ,  ralbuminfm&tre  marquait  7  degrés  50  minutes  ou 
78  grammes  60  cîentî'^rammes. 

Ces  différences,  si  elles  sont  réelles,  nous  ne  les  compre- 
ilom  pas ,  car  le  liquidé  épanché  dans  les  cavités  séreuses 
tvè  i^nf\erme  qu'une  quantité  insignifiante  d'albumine.  Où 
se  porte  donc  l'albumine  en  moins,  dans  l'hydropisie avec 
une  urine -peu  coagulable? 

M.  Becquerel  recommande  également  de  filtrer  les 
urines ,  avant  de  les  soumettre  à  l'épreuve  de  ralbùmlni- 
mètre.  Selon  lui ,  des  urines  très-albumineuses  en  appa- 
rence, ne  contiennent  qu'une  faible  quantité  d'albumine,  lia 
vu  ralbumirtîtnètre  marquer  5  grammes  76  centigrammes  , 
4  grammes  50  centigrammes ,  et  3  grammes  60  cfenli- 
gfantmes  rfans  des  urines  qui  fournrssaient  un  précipité 
très-abolidant  par  la  chaleur  ôu  YacMe  nitrique. 

En  présence  de  pareils  résultats ,  on  se  demande  d'abord 
si  le  précipité ,  obtenu  par  l'action  du  calorique-,  a  été  traité 
par4'aeideDrtrique.  Ge  précipité  n'est  peut-être  qu'un  dépôt 
Complexe  d'albumine, -de  carbonate  d'ammoniaque  prove- 
naut  dé  la  décomposition  de  l'urée  et  du  mucus  par  la 
chaleur,  de  phosphate  de  ^haux  et  d'^amrnoniaque,  et  d'urate 
d'àfmmotiiaqu^ ,  précipités  ^  la  suite  de  la  transformation 
des  acides  libres  en  sels  ammoniacaux,  aux  dépens  du 
carbonate  d'ammoniaque.  Ce  dépOl  est  aipalogue  au 
coagulum  albumineux;  mais  il  se  dissout ,  moins  l'albu- 
mihe,  dans  l'âclde  nitrique'.  Le  même  précipité  peut  se 
former  sans  albumine  dans  une  urine  alcaline,  sous 
llnfluencc  rie  la  chaleur:  l'albumine,  dissoute  dans  les 
alcalis ,  rie  su  dépose  pas. 

Quant  au  précipité  obtenu  par  l'acide  nitrique,  il  n'a 
peut-être  pas  été  traité  par  un  excès  d'acide.  Il  est  donc 
'possible  qu'il  soit  composé  d'albumine,  d'acide  ufi<|iie  et 
d'uriBte  d'ammoniaque, {itéeiptiés  par  l'acide  nitrique.  tJn 
excès  d'acide  le  dissoftt,  à f exception  del'albuùiine. 


30  loimsÀi^  Bs  MÉMcniB. 

M.  Becquerel  (1)  a  rendu  un  autre  service  à  l'histoire  de 
la  maladie  de  Bright,  eu  contribuant,  par  ses  étudtô 
microscopiques,  à  déterminer  le  point  de  départ  de  la 
dégénérescenc^e  rénale.  H  H.  Valentin  et  Gloge  (2)  Pavaient 
déjà  établi ,  mais  avec  moins  de  précision  et  de  clarté^ 
peut-être.  MM.  Valeutin,  Gluge  et  Becquerel  ont  reconnu, 
à  Taide  du  microscope,  que  les  glandes  de  Malpighi,  c'est-à- 
dire  la  substance  corticale ,  étaient  le  siège  primitif  de  la 
lésion  du  rein;  ce  qui  explique  fort  bien  le  trouble  immé- 
diat de  la  sécrétion  urinaire. 

H.  Becquerel  admet  3  degrés  de  lésions  organiques, 
qu'il  divise  et  décrit  en  ces  termes  : 

1<>  c¥  Développement  des  glandes  de  Halpighi,  par  suite 
d'une  congestion  sanguine,  et  probablemeiit  compression 
et  peut-ôtre  oblitération  des  vaisseaux  qui  les  enitourent; 

2^  n  Hypertrophie  des  glandes  dUe  à  leur  infiltration 

par  une  matière  albumineuse  encore  peu  consislanjLe,  jaune 

et  provenant  d'une  première  transforniation  du  si^ng ,  qui 

les  congestionnait  au  premier  diegré,  et  qui  a  perdu  sa 

.  matière  colorante  ;      . 

3°  n  Hypertrophie  des  mêmes  organes  avec  dégénéres- 
cence jaunâtre  ou  blanchâtre ,  qui  tranche  surtout ,  parce 
que  toutes  les  glandes  ne  sont  pas  altérées  au  même 
degré.  Lorsque  la  lésion  devient  générale  \  elle  donne  un 
aspect  uniforme  à  la  substance  altérée.,  d  . 

La  première  forme  d'altération  appartient  également  à 
la  congestion  du  rein,  en  général,  et  la  seconde  forme  à 
la  néphrite,  tancjis  que  la  dernière  imprime  à  la  maladie 
de  Brigbt  un  cachet  tout  particulier. 

Coïkiplétant.  les  recherches,  microscopiques  de  MM..  Va- 


(1)  M.  Becquerel.  —  Séméiotique  des  urines,  1841,  \ 

(2)  M.  Valentin.  —' Eepertorium  fur  Anatomie  und  Physiologie, 
2«  volume,  1837.  .        ,   .  ' 

M.  Gluge.   —  ÀBatQmisch-Mikroscopisch  Uatersuchàng  zftr 
allgmeinen  uxid  speciellen  pathologie,  1839. 


H 


JOIUUUL^  BB  UÉiaCIIf^.  31 

lentin,  Gluge  et  Becquerel,  un  micographe  anglais,  M.  Fré- 
richs  (1) ,  a  constaté^  dans  la  première  phase  de  la  maladie 
de  Brigbt,  avec  rhypérémie  plus  fortement  accusée  des 
glandes  de  Halpighi ,  rinjection  du  tissu  jnter-glandulaire, 
de  la  subslance  tubuleuse,  et  de  la  muqueuse  des  calices  et 
du  bassinet  ;  les  plexus  veineux  de  la  substance  corticale , 
sont  gorgés  d*pn  sang  noirâtre.  Â  la  deuxième  période,  et 
quelquefois,  dès  la  première,  les  canaux  urinifères  de  la 
subslHDce  corticale  d'abord,  et  ceux  des.  pyramides, 
contiennent  des  débris  de  leui*  paroi  épilhéliale,  de  la 
fibrine  coagulée,  et  des^ globules  sau^^uins  plus  ou  moins 
modifiés.  Le  coagulum  emprisonne  ordinairement  dans  ses 
mailles  fibrineuses  des  lamelles  d'épitbélium,  et  des  glo* 
bu[es  désagrégés.  L'hyperémie  diminue  alors.  A  la  troi- 
sième période,  les  portions  d'^pilhélium  détachées,  et  la 
fibrine  coagulée ,  se  transforment  en  granulations  grais- 
seuses»  qui  remplissent  les  vaisseaux  uriuifères.  Enfin ,  à 
une  époque  plus  avancée  de  ce^ie  période,  les  mémeç 
lésions,  se  .généralisent  et^  s'aggravent:  le  tissu  interstitiel 
participe,  a  son  tour,  au  travail  d'exsudation  épitéli.ale  ,  et 
î'hypérémiç  disparaît. 

Dans  cette  description  très-abrégée  des  lésions  rénales 
observées  par  M.  Frérichs  dans  la  maladie  de  Bright ,  ri.en 
ne  distingue  encore  la.  première  forme  pathologique  de 
cette,  maladie  de  l'hypérémie  simple  du  rein ,  à  moins , 
circonstance  rare .,jc|u'on  ne  trouve,  dés  la  première  phase, 
dans  les  vaisseaujç  urinifères  ou  dans  l'urine,  les-cylindres 
fibrineux  (c'est  le  nom  donné  par  le  médecin  anglais  au 
coagulum  fibrineux,  qui  se  moule  dans  les  canaux).  Et  ce 
signe,  lui  même,  ii'est-il  pas  rigoureusement  caraetéris* 
tique  dé  la  maladie  de  Bright,  .à  la  première  période,, 
puisque,  d'après  le  témoignage  de  M.  Frérichs,  on  l'observe 
aussi  dans  Talbuniinurie  des  formes  aiguës  tumuUmuses,  qni 


(\)  M..  Fréricl^s,  t-  Die  Brightische  nierenk.ankheit  und  deren 
BehandluDg^  185?.  —  M.  Lasègue  (ArchÎTes  Générales,  1854). 


82  joumiâL  DB  UbBctiifi. 

suécèdent  à  la  scarlatine ,  aux  refroidissements  violents,  etc. 

Maintenant,  le  siège  anatomiqoe  delà  désorganisation 
rénale  est-il  bien  le  siège  réel  de  la  maladie  de  Brighi'î 
Au-delà  du  siège  démontrable,  n'existet«il  pas  un  autre 
siège  indéterminé,  et  que  nos  moyens  d'investigation  ne 
notjs  permettent  pas  encore  de  fixer?  Nous  arrivons  ainsi 
à  Fexamen  d'une  question  très-obscure ,  et  cependant  très- 
intèressainte. 

La  plupart  des  auteurs  qui  se  sont  occupés  de  la  maladie 
de  Bright ,  ont  émis  tour  à  tour  une  opinion  théorique  sur 
sa  nature.  Est-ce  une  variété  de  néphrite,  la  néphrite 
albumineuse  de  M.  Rayer?  Est-ce  une  lésion  rénale  sut 
generisPLerein  est -il  altéré  primitivement  ou  consécuti- 
vement à  l'altération  des  liquides?  où  et  comment  s'accom- 
plit l'altération  des  liquides? 

M.  Rayer  (1)  se  basant,  d'une  part,  sur  la  fièvre,  la 
douleur,  la  congestion ,  Thyperlrophie ,  la  décoloration  et 
l'induration  simple  rénales;  d'autre  part,  sur  Pétai  couen- 
neux  du  sang,  la  disposition  manifesté  de  divers  organes  à 
la  phlogôse,  et  Tefficacité  du  traitement  antiphlogistique , 
prétend  que  TafiV^ction  de  Bright  est  d'origine  inflamma- 
toire. Il  considère  la  dégénérescence  jaunâtre ,  les  granula- 
tions, l'induration  cartilagineuse  et  les  aspérités  extérieures 
du  rein,  comme  de  simples  transformations  successives 
d'un  état  pHegraatique.  , 

Mais  rhypèrémie,  l'hypertrophie  et  la  décoloration,  ne 
se  rattachent  pas  nécessairement  à  un  état  inflammatoire. 
On  les  rencontre  aussi  dans  un  grand  nombre  d'altéra- 
tions organiques  étrangères  à  l'inflammation  :  le  ramol- 
lissement qui ,  du  moins ,  n'est  pas  toujours  le^  produit 
d'un  travail  phlegmasique,  les  liibércules,  la  cirrhose,  le 
ciincer,  la  mélandîse  et  les  kystes,  qui  n'ont  rien  de  com- 
mun avec  les  phlegmasies.  Pourquoi ,  dans  la  maladie  de 


^i)  M.  Rayer.  —Traité  dès tnaladiçs du jrein.  (Historique  d^la 
népmitè  «Sbmniiieiise.) 


JOimNAL  DB  MÉBBCIIfB.  33 

Bright,  rbypérémie  ^D6  se  formerait-elle  pas  autour  des 
points  envahis  successivement  par  le  principe  et  la  lésion 
morbides,  comme -elle  se  développe  autour  d'un  corps 
étranger  on  d'une  production  anormale;  et,  dans  cette 
hypothèse,  Ffaypertrophie  serait  la  conséquence  du  mou- 
vement (bongestionnel  qui  ouvre  la  scène ,  et  activé  peut- 
être  par  un  redoublement  fonctionnel  rdes  reins  analogue 
h  celui  qui  détermine  l'hypertrophie  active  du  cœur ,  lors- 
qu'il existe  un  obstacle  centrale  à  la  circulation.  On  sait 
qu'en  pareil  cas ,  le  cceor  réagit  avec  force  contre  ses 
entraves,  et  que  Fanévrysme  est  presque  toujours  le 
résultat  de  la  surexcitation  prolongée  de  cet  organe. 
Il  en  est  de  même  encore  de  l'hypertrophie  musculaire 
de  l'estomac  et  de-  la  vessie  avec  rétrécissement  de  leur 
orifice  inférieur.  C'est  toujours  le  même  mécanisme. 
Enfin, .  à  ^une  période  plus  avancée  de  raffectiôn  de 
Bright ,  ja  congestion  disparàitrait  progressivement , 
rqpoussée  ou  assimilée  par  la  matière  morbide  déposée  on 
développée  dans  Je  tissu  rénal ,  et  passant  successivement  à 
l'état  jaunàtre,^  granulé,  cartilagineux  et  chagriné. 
.  Quant  à  l'induration  simple  des  reins,  observée  beau- 
coup moins  souvent,  la  présence  de  l'élément  pathognomo- 
niquodans  la  substance  de  l'organe,  peiU  bi^en  y  développer 
accidentellement  une  inflammation  secondaire,  exagération 
dé  l'hypérémie,  qui  se  révèle  à  t'autopsie  sous  l'apparence 
de  plaques  indurées  rouges  ou  pâles^.  Le  rôle  de  l'inflam- 
mation dans  la  maladie  de  Bright  se  bornerait  là. 

Cette  manière  d'envisager  la  nature  et  les  difl'érentes 
phases  des  lésions  constitutives  de  la  maladie  de  Bright, 
nou6  parait  plus  conforme  à  l'observation  générale  des 
bits,  et  aux  lois  qui  les  formulent.  En  effet,  quelles  sont 
les  modes  de  terminaison  de  la  phlégmasie?  La  réso- 
hit  ion  >  l'hypertrophie  V  l'induration  simple  ou  la  suppu- 
ration. Mais  l'inflammation  n'a  pas  la  puissance  de  fabriquer 
de  toutes  pièces  d^s  tissus  sans  analogue,  tels  que  fa 
dégénérescence  jaunfttre ,  les  granulations  et  l'induration 
cartilagineuse.  Les  reins  auraient  donc  seuls  le  privilège 
de  faire  produire,  à  l'inflammation  ces  sortes  de  tissus.  De 

3 


34  JOiAHAi*  m  mknçsn. 

plus^  00  n'a  jamais  constaté  de  trac(9S  de  suppuration 
rénale  dans  la  maladie  de  Brigbl,  à  moins  de  complications 
du  côté  des  moquçuses.des  voies  urioaires.  . 

La  douleur  locale,  commune  à  toutes  Jes  affectioos  des 
rein^,  n'est  point  Tindiced'une  pblegmasie.  L'analogie,  le 
prouve  suffisamment.  La  rate  et  le  foie ,  plus  ou  moins 
congestionnés  mais  non  phlogoséis,  celui-ci  dans  l'ein- 
barras  gastrique ,  celle-là  dans  la  fièvre  intermittente , 
deviennent  le  siège  de  douleurs  locale^,  spontanées  ou 
provoquées  par  la  pression.  Or,  la  douleur  splénique 
tombe  le  plus  souvent  avec  le  mouvement  fébrile  ;  et  un 
vomitif  ou  une  application  de ,  quelques ,  sangsues  awr.la 
région  du  foie,  détend  cet  organe  et  apaise  ses  souf- 
frances. 

La  fièvre  n'a  pas  de  valeur  inflammatoire  par  «Ue- 
méme»  car. elle  accompagne  les  fièvres  éruptives,  par 
exemple,  qi|t  ne  sont  pas  rangées  parmi  1^  phlegmasies, 
et  s'observe  même  dans  certaines  formes  de  chlorose , 
.qui  paraissent  exemptes  de  complication  inflammatoire. 
De  plus,  elle  n'es|  pas  constante,  dans  U  maladie  de 
Brigfit. 

H;. Rayer  invoque  encore,  à  l'appui  de  son  qpinion, 
la  disposition  de  plMsieurs  organes  à  rinffl4mmation  dans 
le  <;ours  de  cette  maladie.  La  diathèse  inflammatoii^  y 
existe  réell^mfuot  et  ne  peut  être  contestée  ;  mais  d'abord 
les  phlegmasies  intercurrentes  qu  ellQ  produit^  n'ont,  pas 
une  physionoii^ie  franchement  aiguè.  On  dirait  qu'elles 
sont  dominées  par  le  génie  de  Taffection  principale ,  et 
ce  n'est  pas  sans  riison  qu'on  leur  a  trouvé  une  grande 
ressemblance  avec  celles  qui  se  manifestent  sous  l'in-^ 
flueoce  des  infections  putrides  ou  purulentes.  Leurs  allu- 
res brusques  et  irrégulières  «  leur  développement  habituel 
en  dehors  des  conditions  étiologiques  ordinairea,  la  rapi-< 
dite  effrayante  ou  l'extrême  leuteur  de  leur  marche  vers 
une  terminaison  pi^esque  toujours  funesle ,  contraatentsip- 
gulièrément  avec  les  phlegmasies  entées  sur  des  sujets 
sains,  et  contractées  seulement  au  mUieu  des  variations 
de  température.  Ensuite ,   le)  caractère  phleglna^ique  de 


^QUBHAL  9B  «tiDBCmBk  35 

certaines  complications  de  la  maladie  de  Bright,  ne 
prouve  pas  sa  nature  inflammatoire,  car  les  mêmes  acci- 
dents s'observent  dans  les  pyrexies  éruptives  qui  présentent 
aussi  une  altération  du-  sang. 

MM.  Andral  et  Gavarret  (1)  ont^  du  reste,  établi  sans 
réplique  le  caractère  non  inflammatoire  de  l'affection  de 
Brigbt.  Après  avoir  posé  en  principe  que^  dans  les  phleg- 
masies,  le  chiffre  de  la  fibrine  s'élevait  constamment, 
sans  changement  dans  le  nombre  des  globules ,  tandis  que 
la  proportion  des  globules  diminuait  de  même,  sans 
variation  de  iibirine ,  dans  la  chloro-anémie,  ils  ont  tou- 
jours coni^taté,  dans  la  maladie  de  Bright,  une  diminution 
sensible  des  globules  coïncidant  avec  le  maintien  de  la 
fibrine  normale.  Ces  résultats  rendent  compte  de  la 
couche  fibrineuse  qui  se  forme  à  la  surface  du  caillot 
sanguin  dans  cette  affection.  C'est  la  couenne  molle,  mince 
et  large  des  cbloro-anémiques.  Quant  .à  la  couche  fibri- 
neuse, ferme,  épaisse  et  d'un  petit  diamètre,  observée 
accidentellement  dans  le  cours  de  la  maladie  de  Bright, 
elle  doit  èire  liée  à  l'existence  d'un  élénoent  phlegmasique 
qui  est  venu  traverser  l'affection  principale. 

Nous  avons{dit  quelles  complications  aiguës  de  la  maladie 
de  Bright  semblent  se  produire  en  dehors  des  conditions 
étiologiquès  extrinsèques;  mais  il  n'en  faut  pas  moins 
rec<H)Daître  ici  l'intervention  assez  fréquente  de  causes 
extérieures  qui  concourent  ttës-activemejat  au  développe- 
ment des  accidents  phlegmasiques.  C'est  ainsi  que  la  plu- 
part des  nialades,  rarement  alités  avant  la  dernière  pé- 
riode de  la  maladie,  s'exposent,  dans  les  conditions  les 
plus  fâcheuses,  aux  conséquences  d'un  changeaient  "de 
tempéraiture  ;  et  on  s'explique  aisénient  la  puissance  de 
ses  effets  sur  des  organes  qui ,  doués  d'une  grande  activité 
fonctionnelle  et  interstitielle ,  ne  reçoivent  plus  qu'un 
sang  a{^uvri  et  altéré.  Atteints  profondément  dans  leur 


(1)  MM.  Andral  et  Gavaret.  —  Essai  d'hématologie  patho- 
^Ji^ue,  t843i 


36  JOUBIIÂL  DE  ■ÉOfiCllfB. 

vitalité,  ils  résistent  difficilement  aux  agents  morbides 
qui  les  entourent. 

I!  importe  maintenant,  pour  bien  fixer  la  valeur  séméïo- 
tique  du  traitement  antiphlogistique,  dans  la  maladie  de 
Bright,  d'établir  une  distinction  préalable.  Ao  début  de 
Taffection ,  le  rein  offre  deux  éléments  nettement  tranchés: 
la  lïiatière  morbide,  infiltrée  et  disséminée  dans  la  subs- 
tance de  cet  organe,  et  une  hypérémie  primitive  et  sym- 
ptomatique  à  la  fois ,  plus  ou  moins  étendue.  Que ,  dans 
de  pareilles  conditions,  les  évacuations  sanguines  opè- 
rent une  amélioration  notable;  rien  de  plus  naturel  et 
de  plus  physiologique.  On  dégorge  ainsi  le  tissu  rénal 
qui  recouvre  momentanément  ses  fonctions.  L'oedème 
s*efface,  et  l'albumine  ne  se  retrouve  plus  dans  les  urines. 
Mais  l'élément  spécifique,  réfractaire  aux  émissions  san- 
guines, n'en  continue  pas  moins  sa  imarche,  dans  le  plus 
grand  nombre  des  cas ,  et  la  congestion  du  rein  se  repro- 
duit en  vertu  de  la  même  cause.  La  médication  antiphlo- 
gistique  fera  cesser  encore  pendant  quelque  temps  l'afflux 
sanguin,  la  néphrite  secondaire  et  les  complications  aiguës, 
ou  du  moins  les  symptômes  les  plus  sensibles  de  ces  ma- 
nifestations fnorbides;  on  pourra  obtenir  de  la  sorte  une 
guérison  apparente  et  répétée,  ou  plutôt  un  amendement 
appréciable  jusqu'à  l'entière  destruction  du  tissu  rénal  par 
les  progrès  de  la  lésion  caractéristique.  A  cette  dernière 
période  de  la  maladie ,  les  accidents  sont  nécessairement 
complets  et  permanents. 

La  nature  de  la  maladie  de  Bright  n'est  donc  pas 
inflammatoire.  Supposerons-nous  maintenant,  en  nous 
fondant  sur  des  lésions  organiques  sans  analogue,  et  un 
travail  de  dégénérescence  sans  rémission ,  que  sa  nature 
doit  participer  de  celle  du  cancer  ou  du  tubercule?  Mais, 
si  le  cancer,  le  tubercule  et  la  dégénérescence  rénale  de 
l'affection  de  Bright,  forment  au  point  de  vue  de  l'ana- 
tomie  pathologique,  des  individualités  morbides  distinctes 
de  toute  autre ,  elles-mêmes  sont  loin  d'offrir  entre  elles, 
sous  ce  rapport,  une  similitude  complète.  De  plus,  le 
cancer  et  le  tubercule  sont    susceptibles  d'attaquer   tous 


JOIII0A&  DB  MÉP&CBIIB.  37 

les  tissus,  et  ils  sont  presque  toujours  Texpression  sym- 
ptomatique  d'uue  altération  des  liquides.  Ënfia  ^  si  cette 
altératioa  est  suSUamment  Remontrée  par  l'extrême  fa- 
cilité .avec  laquelle  l'une  et  Tautre  lésions  organiques,  le 
cancer  surtout,  se  reproduisent  sur  place  ou  ailleurs i 
après  l'opération,  elle  est  peu  appréciable.  Dans  la  maladie 
de  Brigbt  au  contraire,  la  lésion. or^^anique  a  son  siège 
imnmable  dans  le  rein ,  et  l'analyse  cbimiqpe  a  révélé 
une  altération  matérielle  des  liquides.  £tsi  nous  ajoutons 
que  la  môme  altération  des  liquides  s^observe  dans  Taibu- 
minurie  eu  général,  c'est-^à-dire ,  avec  des  modifications 
du  tissu  rénal,  d'une  part,. très-variabies  sous  le  rapport  de 
la  physionomie,  de  l'espèce,  et  du  degré  de  gravité,  mais 
constantes,  d'autre  part;  nous  sommes  en  droit  de  con- 
clure, dès  à  présent,  dans  la  maladie  de  firight:  1®  à 
une  nature  différente  de  celle  du  cancer  et  du  tu- 
bercule ;  2°  à  une  prédisposition  congéaiale  ou  ac- 
quise, condition  préalable  d'invasion  morbide,  qui  est 
commune,  du  reste,  à  toutes  les  maladies  offrant  un  type 
spécial;  3^  à.une  ^Itération  primitive  du  rein,  du  moiris 
dans  sa  première  expression  pathologique  ou  période 
bypéi*émique;  4'^  enfin,  à  un  rôle  à  part  secondaire  de  la 
dégéhéresiceDce  rénale,  comme  cause  spécifique,  dans 
l'apparition,  mais  non  pas  dans  le  développement  ulté- 
rieur des  sympiônies  caractéristiques. 
.  Ce&  quatre  points  acquis  à  la  question  qui  nous  occupe 
en  ce  nK>ment ,  poursuivons  son  examen. 

L'altération  des  reins  étant  primitive  à  celle  des  liqui- 
des, il  est  vraisemblable,  quoique  cette  double  altération 
se  manifeste  d'emblée,  et  sans^  ordre  apparent  de  succes- 
sion., qu'il  existe  entre  elles  une  relation  de  cause  à 
effet.  Pour  l'établir  y-^recherchons  d*âbord  ^vec  soin  Fo- 
rigine  individuelle  et  l'évolution  successive  des  phéno- 
mènes de  l'albuminurie  en  général.  Nous  essaierons 
ensuite  de  &ire  la  part,  de  la  dégénérescence  rénale  de 
la  maladie  de  Brigbt  dans  la  physionomie  propre  à  cette 
dernier^  affection. 

Deux    faits  nous  frappent  surtout  dans  l'albuminurie 


3g  lOOlKA]»  SB 

avec  OU  sans  hydfopisîe:  f  un  état  particulier  do  rein, 
très-différent  selon  Toccurence,  mais  consUot,  et  «opi- 
nant un  désordre  fonctionnel  de  Torgane,  comma  lat- 
teste  la  composition  anormale  de  TuriDe;  2*  une  altération 
toujours  identique  des  liquides.  Si  la  lésion  du  tissu  rénal , 
dans  ralbominurie,  éuit  eUe  même  toujours  poifonue  et 
homogène,  on  pourrait  n'y  voir  qu'une  simple  maoïtes- 
tation  locale  de  cette  altération  des  liquides  toujours  la 
même  ;  mais  il  n'en  est  pas  ainsi.  Le  rein  est  constamment 
modiOé  ou  altéré,  et  il  Test  très-diversement.  Comment, 
dirons-nous  encore,  attribuer  ces  éuts  si  différents  à  une 
seule  et  même  cause?  L'alléraiion  des  reins,  encore  une 
fois,  est  donc  primitive   à  celle  des    liquides   (i). 

Efforçons-nous  naaintenant  de  démontrer  que,  dans 
ralbuminurie,  l'altération  des  liquides  est  la  conséquence 
immédiate  d'une  lésion  quelconque  des  reins  ,  au 
lieu  de  n'être  qu'un  fcit  indépendant,  quoique  sub- 
séquent. 

Et  d'abord,  comment  une  modification  légère  du  rem 
peut-'elle  entraver  ses  fonctions? 

Nous  avons  déjà  dit  que  l'albuminurie  pouvait  se  pro- 
duire ,  dans  les  conditions  les  plus  élémentaires  de  l'ana- 
tomie  pathologique  des  reins,  et  il  est  fiicile  de  le  c<wn- 
prendre.  La  congestion  rénale,  par  exemple,  a  son  prin- 
cipal siège  dans  l'ogane  sécréteur  lui-même,  les  glandes 
de  malpigbi.  Elle  donne    Heu  au  développement   de  ces 


(!)  MouB  ne  voulons  pas  par  Ik  contester  l'actiou  des  liquides 
et  du  sang,  en  particiuier,  sor  les  reins,  dana  la  maladie  de 
Bright.  Le  sang,  profondément  altéré,  imprime,  sans  doute,  un 
monvement  accéléré  an  travail  de  la  désorganisation  pénale, 
d'une  part,  en  lui  fonmissant  incessamment  l'élément  attraniitteax 
qui  subit  tontes  les  transformations  de  la  dégénévescence  4Sarac- 
téristiqne,  et,  d'autre  part,  en  agissant  sur  le  reii»  commo  il 
agit  en  même  temps  sur  certains  organes ,  de  la  manière  la  pins 
manifeste:  nous  voulons  parler  des  complications  de  cette 
maladie. 


glandes,  à  leur  refoûteroent  réciproque,  ainsi  qu'à  la 
compression  de  leurs  vaisseaux.  De  là,  un  trouble  dans  ta 
fonction ,  une  sécrétion  viciée ,  et  Ton  doit  même  être 
surpris  que,  dans  les  observations  de  désorganisation  com- 
plète des  glandes,  de  leurs  vaisseaux  et  du  tissu  ambiant, 
les  fonctions  du  rein  .n'aient  pas  été  totalement  sus- 
pendues. Nous  croyons  qu'alors  rémission  d^es  urines 
doit  être  attrtbuéo  à  un  mécanisme  particulier  de  Torgane. 

Cependant,  la  modification  légère  du  rein  paraîtrait- 
elie  insuffisante  pour  l'intelligence  de  <;e  désordre  fonc- 
tionnel, et  faut- il  donc  faire  intervenir  dans  cette  opération 
irrégulièfe  les  effets  directs  et  nécessaires  d*un  principe 
morbide? 

Nous  pei^sons  que,  dans  Talbuihinurie  qui  tra- 
verse les  maladies  constituées  par  une  altération  pri* 
Dnitiveet  peu  appréciable  du  sang,  qu'il  ne  faut  pas  con- 
fondre avec  Taltération  propre  à  Talbuminurie,  le  sang 
détermine  une  èoiSgestion  rénale,  active  ou  passive ,  ana- 
logue à  Tèngorgement  de  la  rate  dans  la  fièvre  typboHe. 
Il  va  donc  ici,  comme  fait. antérieur  à  Talbuminurie  ,  une 
modification  sensible  du  tissu  rénal  et  rien  de  plus.  A 
plus  forte  raison,  en  est-il  de  même  dans  Talbuminurié, 
placée  sous  la  dépendance  médiate  ou  immédiate  de  la 
grossesse,  des  maladies  du  cœur ,  des  poumons ,  du  foie 
et  de  la  néphrite;  où  Tintervéntion  d'un  autre  agent 
qu'une  congestion  ou  une  induration  simple  rénale ,  n'est 
pas  admissible  un  seul  instant  (1). 

Du  reste ,  les  expériences  de  M.  Robinson  (2)  confir- 
ment cette  explication.  Il  a  toujours  obtenu  une  urioe 
coaguiable,  après  la  ligature  des  veines  émulgentes.   Or, 


(1)  De  plus ,  dans  ranémie  comptiquaiit  les  affections  chroni- 
quel  du  cœur,  despouiuoDs  et  du  foie,  avec  urine  coagulable , 
le  sang  très-appauvn  aj^t  peut-être  sur  le  rein  de  la  même 
matnètré  que  dans  la  lièvre  typhoïde,  et  il  y  aurait  lieu,  dans 
Fespëce ,  île  tenir  compte  de  ce^  nouvel  élément  de  producfioiï 
albamimiriqub. 

(2)  M.  RobinsoB.  —  The  lance  t,  1849. 


40  lOimiil.  DB  «ÉBBCniE. 

cette  ligature,  produisait  une  congestion  du  rein  par  cause 
mécanique,  comme  la  groesesse. 

Noua  citerons  encore,  6  l'appui  de  notre  opinion,  une 
observation  très-curieuse  d'albuminurie,  publiée  par  M. 
Delaruelle  (i).  Il  s'agit  d'une  femiiie  atteinte,  dans  le  cours 
d'une  pleurésie,  d'une  phlébite  des  veines  rénales  ayant  son 
point  de  départ  dans  les  veines  iliaques  dont  -la  réunion 
avait  lieu  au  niveau  des  veines  émulgentes.  Cette  phlébite 
était  caractérisée  par  un  caillot  fibriqeux  qui  oblitérait 
les  veines  émulgentes.  Les  urines  étaient  fortement  coa- 
gulables. 

Est-il  besoin  d'ajouter  que,  si  l'bypérémie  rénale  peut 

[>rovoquer  un  désordre  fonctionnel  du  rein,  qui  donne 
ieu  à  urine  coagulable,  la  dégénérescence  rénale  de  la 
maladie  de  Bright  est  susceptible  à  fortiori  de  produire 
le  même  résultat.  Comment  le  rein  laisse*t-il  s'échapper 
une  partie  de  l'albumine  et  retient-il  l'autre  qu'il 
s'assimile ,  taudis  qu'il  repousse  l'urée  7  II  y  a  là  une  in- 
connue ,  un  phénomène  vital  qui  nous  échappe. 

Enfin  ,  comment  une  simple  nidification  ou  une  lésion 
organique  du  rein,  détermine-t-eUe  réitération,  des  li-^ 
quides  observés  en  pareil  cas?  Nous,  savons  -que,   dans 

I  albuminurie  ,   le  sang  contient  de  l'urée  et  moins  de 

S  lobules,   que   l'urine  renftîrme   une  proportion  notable 
'albumine ,  et  que  l'hydropisie  est  à  peu  près  constante. 
M.  Dumas  (2)  a  constaté  chez  des  animaux   la  pré- 
sence de  l'urée  dans  le  sang ,  après  l'extirpation  des  reins. 

II  résulte  de  ce  fait,  que  l'urée  existe  primitivement  dans 
le  sang,  et  que  le  râle  du  rein.,  en  ce  qui  concerne  cet 
élément,  est  dé  l'éliminer  de  l'économie.  L'illustre  chi- 
miste ne  s'est  pas  borné  à  démontrer  ce  fait,  et,  remontant 


(1^  M.  Delaruelle.  —  Ob&ervation  d'albuminiirie  dans  un  cas 
de  phlébite  des  veines  énmlgentes.  (Bulletin  de  la  Société  anato- 
mique,  1846.)    •  ^ 

(2)  M.  Dumas.  —  Traité  de  chimie  appliquée  aux  arts,  tome  8« 
1846. 


à  1  origine  de  l'urée ,  il  nous  fait  assister  à  sa  mystérieuse 
formation.  Voici  en  quelques  mots  sa  théorie  :  Une  opéra- 
tion analogue  à  la  combustion  s  accomplit  sans  relâche 
dans  les  capillaires.  L'oxygène  du  sang  artériel  consume 
dans  cet  ordre  de  vaisse^iux  les  tissus  usés  par  le  jeu  des 
organes,  et  désormais  sans  utilité  pour  la  vie»  Le  car- 
bone et  r.bydrogène  se  combinent:  i""  avec  de  loxygène 
pour  composer  de  Tacidé  carbonique  et  de  Feau,  qui 
s'exhalent  par  les  poumons  ;  2"^  avec  Tazote  pour  coniposer 
du  cyanogène  et  de  Tammoni^ue.  Le  cyanogène  s'unit  à 
de  To^igène ,  et  se  transforme  en  acide  cyanique,  qui  se 
combine  avec  Tamnaoniaque  ,  en  donnant  lieu  à  un 
cyanate  d'anlmoniaque  ou  urée,  que  les  reins  séparent 
aussitôt  de  la  masse  du  sang,  et  expulsent  au  dehors. 
(Nous  compléterons  cette  théorie,  en  disant  que  les  pou- 
mons rejettent  de   l'azote.) 

Supposons^  m.aintenant ,  une  certaioe  manière  d'être  de 
la  substance  réputé;  il  est  possible,  alors,  que  le  rein  se 
laisse  traverser,  en  quelque  sorte  comme  un  filtre,  par 
l'élément  le  plus  simpleet  le  plus  abondant  du  fluide  san- 
guin, l'eau,  -chargée,  dans  Tespèce,  d'albumine  réduite 
à  un  état  particulier  de  dissolution ,  et  s'oppose ,  en  partie 
du  moins,  à  l'élimination  de  l'urée  et  des  urates^  dont  la 
séparation  préalable  du  sang  est  l'effet  d'une  action  spé- 
ciale de  l'organe  sécréteur  de  l'urinjq.  Nous  venons  de 
parler  d'albumine  modifiée,  nous  y  reviendrons  lout-à- 
rbeure.  Les  reins  altérés  ou  modifiés  seulement  dans 
leur  texture.»  interceptent  le  cours  prdinaire  de  l!urée.  Mais 
que  devient  cet.élément  destiné  à  être  rejeté  de  l'écono- 
mie, et  retenu  d^ns  la  circulation  malgré  les  tendances  de 
l'organisme? 

Appliquerons-nous,  ici  la  théorie  de,  MM.  Bernard  et 
Barres wji  (1)  sur  les  voies  d'élimination  de  l'urée,  après 
l'extirpation  des  reins  ?  Dirons-nous  que  le  sang  des  albu- 


(1)  MM.  Bernard  et  Barreswil.  -r^  Sur  les  voies  d'éliminatioa  de 
l'€rée  après  rextirpation  des  reins.  (Arcbiv^s  géaérales.,  1847.) 


42  JOtfBllAL  DS  HÉDkcniK. 

minuriques  ne  contient  de  Turée  qu'à  la  période  ultime  de 
l'albuminurie ,  lorsque  le  malade ,  tombé  dans  un  épuise- 
ment extrême,  ne  conserve  plus  assez  de  vitalité  pour 
l'exercice  de  l'élimination  de  cet  agent  à  travers  les  organes 
gastro-intestinaux  ,  qui  sont  considérés  par  lés  savants 
physiologistes  comme  solidaires  des  organes  urinaires?  Evi- 
demment non ,  car  on  constate  la  présence  de  Tarée  dans 
le  sang  des  albuminuriques  dès  le  -début  de  la  maladie. 
Ensuite,  l'opération  de  la  népbrotomie  et  ses  conséquences 
physiologiques  immédiates,  doivent  apporter  une  pertur- 
bation profonde  dans  l'économie ,  dont  le  résultat  définitif 
est  de  refouler  vers  leur  source ,  pour  me  servir  de  l'ex- 
pression pittoresque  de  MM.  Bernard  et  Berreswil,  les  pro- 
duits non  assimilés  introduits  dans  le  sang  par  les  organes 
gastro-intestinaux.  La  réaction  organique  qui  préside  à  ce 
mode  d'expulsion  de  l'urée  ne  peut  donc  être  comparée 
qu'à  une  crise  violente,  tandis  que,  dans  l'albuminurie, 
la  sécrétion  urinatre  et  l'élimination  dé  l'urée  n'offrant 
qu'une  diminution  graduelle,  l'économie  s'habitue  en 
quelque  sorte,  mais  non  sans  préjudice,  a  la  présience 
de  l'urée  dans  le  fluide  sanguin ,  et  elle  n'éprouve 
pas  le  besoin  de  réagir  contre  cet  agent,  avec  la  même 
énergie  que  dans  la  népbrotomie.  JMais  il  est  possible, 
par  exemple ,  que  ,  dans  le  degré  le  plus  avancé  de 
l'albuminurie,  une  portion  de  l'urée  accumulée  dans  le 
sang  trouve  une  émanation  supplémentaire  dans  lés  or- 
ganes gastro-intestinaux.  Ce  fait  toùtefoiis  n'a  pas  encore 
été  démontré,  et  les  expériences  de  MM.  Bernard  et  Bar- 
reswil  ne  sont  même  pas  favorables  à  cette  hypothèse^ 
puisqu'ils  ont  constaté,  avec  les  progrès  de  raSaibiisse- 
mentdes  animaux  néphrotomisés ,  la  diminution  etv  enfin, 
la  suspension  de  l'élimination  de  l'Urée ,  du  côté  du  tube 
digestif. 

Quoi  qu'il  en  sOit ,  l'urée  existé  dans  le  sang  dès  Tappa*- 
rition  de  l'albumine  dans  les  urines.  Ces  deux  faits  sont  en 
quelque  sorte  simultanés ,  et  rien  ne  prouve  jusqu'ici  que 
l'urée  s'échappe,  à  un  moment  donné,  par  la  surface  in- 
testinale. 


JOVBNAL  Bfi  HÉMCOtt.  43 

Quel  rôle  joue  cet  élément  insoliU  dans  la  circulation? 
fiûnefeld  (1)  prétend  quefurée  attaque  les  globules  san- 

Î;uins.  SansTeconnaître  avec  le  savant  chrmiste  allemand  que 
'urée  en  nature  soit  douée  de  cette  propriété ,  ne  peut-on 
pas  admettre,  comme  une  hypothèse  vraisemblable,  que , 
dans  le  sang  saturé  d'urée  des  albuminuriques,  une  por- 
tion de  cet  élément  se  décompose,  par  l'effet  d'une  réac* 
tion  chimique,  soit  dans  le  système  capillaire,  c'est-à-dire , 
dans  l'acte  de  combustion  organique,  soit  dans  TensemUe 
du  système  circulatoire  ,  et  dégage  ainsi  'de  l'ammoniaque, 
qui  a  bien  la  propriété  de  dissoudre  les  globules  du  sang. 

D'après  les  expériences  récentes  de  MM.  Viale  et 
Latini  (2),  les  poumons  n'exhaleraient  pas  d'azote  ni  d'acide 
carbonique  purs,  mais  de  l'ammoniaque  combiné  avec 
l'acide  carbonique,  à  l'état  de  sous-carbonate  d'ammo- 
niaque. Cette  nouvelle  loi  de  chimie  organique  viendrait 
à  l'appui  de  notre  hypothèse.  Dans  les  conditions  ordinaires 
de  la  vie,  l'amnioiiiaque  physiologique  et  l'acide  carbo- 
nique, en .  circulation  avec  le  sang,  s'y  trouveraient  en 
proportions  exactes  pour  donner  lieu  à  un  sous-carbonate 
d'ammoniaque,  qui  est  considéré  Iui*môme ,  il  'est  vrai , 
comme  un  dissolvant  des  globules  sanguins,  mais  d'un 
ordre  très-inférieur  à  l'ammoniaque.  Dans  lalbuminurie , 
la  décomposition  de  l'urée  fournirait  naturellement  un 
excès  d'ammoniaque  libre,  qui  attaquerait  les  globules 
sanguins. 

M.  Aees  (B) ,  médecin  anglais ,  attribueà  une  autre  cause 
la  diminution  des  globules  sanguins.  «  Les  globules  san- 
guins, dit<-il,  empruntent  leurs. éléments  au  chyle,  dont  la 
deiisité  est  moindre  que  celle  du  sérum  et  du  liquide 
contenu  dans  les  globules.  Par  conséquent,  d'après  les 
lois  de  l'endosmose ,  le  chyle ,  à  son  entrée  dans  je  système 


(4)  M.  Hiinefeld,  —  De  Ghemismusia  derThierischeo  organi- 
sation. 

MMi  Viale -et  Latmi.  —  (Gazette  médicale,  1S54.> 

M.  Rees,  —  (Ediabnrgh  médical  an  Surgical.  (Journal.) 


(2) 
13) 


44  JOUBIlAIi  D£  HÉDSCilŒ. 

veioeux ,  fournit  plus  au  sang  qu*il  n'ea  reçoit.  Le  contraire 
arrive  quand,  par  suite  de  la  diminution  du  sérum,  la  pe- 
santeur spécifique  des  deux  liquides  se  rapproche.-  » 

Mats,  objecterons-nous  à  M.  Rees^  Tune  des  causes, 
sinon  la  seule,  de  la  diminution  de  la  pesenieur  spécifique  du 
sérum,  doit  être  le  passage  de  Talbumine,  partie  intégrante 
du  sérum,  dans  les  urines.  Or,  la  dissolution  intime  de 
Talbumine,  qui  est  la  condition  indispensable  de  son  écou- 
lement extrà-vasculaire ,  parait  être,  subordonnée  direc* 
tement,  comme  nous  le  verrons  plus  loin ,  .à  la  diminution 
des. globules  sanguins,  ,       v 

L'opinion  du  médecin  anglais  repose  donc  sur  une 
sqccession  de  faits .  qui  n'existe  pas,  à  savoir  :  1^  Ja 
diminution  de  la  pesanteur  spécifique  du.  sérum;  2<^ 
la  diminution  des  glpbiiles  sanguins.  Tout  au  pbs, 
cette  opinion  çst-elje  vraie,  d'une  nianière .  relative , 
dans  ce  seu^  que  la  diminution  de  la  densité  spécifique 
du  sérum  contribue  secondairement,  et  dans  une  cer- 
taine mesure,  à  la  diminulion  des  globules  sanguins. 
En  ^flfet ,  dans  les  conditions  .que  nou^  venons  de  déter-» 
miner,  l'endosmose  des  globules,  phénomène  normal 
et  explicable,  qu^  l'on  considère  le  globule  comme  une 
vésicule  composée  d'une  enveloppe  albumineuse  colorée 
et  remplie  d'une  matière  semi-^Iiquide,  ou  comme  une 
petite  masse  de  matière  organique  spongieuse  et,  par 
conséquent ,  susceptible  de  se  gonfler,  l'endosmose  serait 
suspendue  par  suite  de  l'équilibre  qui  s'établirait  entre'  tes 
globules  sanguiitô  et  leur  fluide  nourricier,  et  d'où  résul- 
teraient l'atrophie  et  finalement  la  diminution  namérique 
des  globules.  \ 

Helativement  au  passage  de  l'albumine  dans  l'urine  des 
albuminuriques,  M.  Robin  (1  )  a  proposé  Texplication  suivan- 
te: c(  Les  matières albumineuses  sont  brûlées  dans |e sang, 
et  l'urée,  résidu  azoté  de  la  combustion,  est  éliminé  par 


l'A^li 


M.  Robin.  —  (Mémoire  sar  Us  Ganses  da  passage  iie 
lùmiae  dans  lesUriiies,  1851.) 


JOUBNÀL  1m  IIÉBECIIIE.  45 

les  urines.  Or,  si  les  matières  albumineuses  viennent  à 
subir  une  quantité  de  combustion  notablement  moindre 
qu'à  Tétat  normal ,  Talbumine  doit  passer  en  nature  par 
les  urines  au  lieu  d*étrë  éliminé  à  l'état  d'urée.  Aussi  cons- 
tate-t'on  l'albuminurie  dans  certains  états  pathologiques 
et  même  physiologiques  qui  entravent  directement  ou 
indirectement  la  respiration,  et  diminuent  l'hématose, 
source  de  combtistion ,  —  les  maladies  du  cœur  et  des 
pouhipns,  rhydropisie,  la  grossesse.  —  Oh  observe  encore 
l'albuminurie  dans  la  classe  des  lésions  nerveuses  qui  dé- 
terminent un  abaissement  de  la  température,  et  parla,  une 
diminution  notable  de  -la  combustion,  ainsi  que  dans 
les  refroidissements  extérieurs ,  qui  agissent  de  la  même 
manière/  » 

Mais  cette  théorie ,  qui  rendrait  bien  compte  de  Talbu- 
minurie  se  produisant  dans  les  conditions  énoncées  par 
l'adteùr,  n'est  pas  applicable  à  l'albuminurie  la  plus  fré- 
quenté ,  celle  qui  dépend  de  lésions  rénales  sans  hydropisie 
et  sans  grossesse  préalables,  et  e7([emptes  de  complications 
antérieures  du  côté  du  cœur  et  des  poumons.  Enfin,  la 
théorie  de  M.  Robin  fût-elle  complète,  n'aurait  encore 
qu'une  valeur  limitée  au  seul  fait  du  passage  de  l'albumine 
dans  les  urines,  puisque  cette  explication  du  phénomène 
dont  il  s'agit,  ne  jette  aucune  lumière,  au  point  de  vue 
de  l'enchaînement  des  causes  et  des  effets,  sur  les  phéno- 
mènes concomitants,  à  savoir ,  la  présence  de  l'urée  dans 
le  sang,  la  diminution  des  globules  sanguins,  et  Thydro- 
pîsîe.  Aussi,  luj  préférons -nous  l'explication  de  M, 
Mialhe  (1)  qui  du  moins  a  le  mérite  de  pouvoir  s'appli- 
quer au  passage  de  l'albunime  dans  les  urines,  (}àns  tous 
les  cas  d'albuminurie,  et  de  rattacher  ce  fait  aux  -phéno- 
mènes co-èxistantô. 

Suivant  M.  Mialhe,  dans  l'albuminurie,  Falbumine  n'a 
pas  seulenùnt  diminué  comme  élément  du  sang,   mais 


(1)  M.  Mialhe.  —  Miémoire  inédit.   (Cours  de  physiologie  de 
M.  Béraud,  tome  3.) 


î 


46  JOUBRAi  BB  KÉpBcaiau 

elle  est  encore  transformée,  et  son  passage  dans  les  urines 
est  le  résultat  de  cette  modiGeation.  L'albumine  physio- 
logique, composée  de  globules  invisibles,  est  insoluble 
dans  ce  sens  qu'elle  circule  dans  le  système  vasculaire  en 
contact  avec  des  membranes  imperméables  à  ses  globules. 
Elle  doit  ce  caractère  à  un  certain  degré  de  concentration. 
Mais,  si  cet  équilibre  est  rompu  par  la  diminution  des  . 
globules  sanguins ,  ce  qui  arrive  dans  ralbu.mijnurie,  l'ai- 
bumine  globulaire,  désagrégée  par  l'eau  du  plasma  ou 
sérum  du  sang  en  circulation,  relativenient  en  excès, 
traverse  ses  vaisseaux  conducteurs  et  s'échappe  avec  les 
urines.  C'est  peut-être  aussi  l'origine  des  globules  san- 
guins suspendus  dans  l'urine  des  albuminuriques ,  car  ces 
globules  sanguins  sont  également  attaqués  par  l'eau.  Ce 
jui  prouve  enfm  que  l'Hlbumine,  en  pareil  cas,  n'est  pas 
le  l'albumine  normale,  c'est  qu'au  bout  de  3  heures  de 
digestion  dans  de  l'eau  acidulée,  l'albumine  du  sang  d'un 
homme  sain  et  l'albumine  extraite  de  l'urine  ne  se  com- 
portent pas  de  la  mêmetnanière  :  l'albumine  de  l'urine  est 
seule  dissoute. 

Cette  théorie  est  très-ingénieuse  et  très-séduisante;  elle 
soulève  toutefois  deux  observations  critiques. 

1<*  Si  l'émission  d'une  urine  coagulabie  est  la  consé- 
quence naturelle  et  immédiate  de  la  dissolution  de  l'albu- 
mine qui»  dans  cet  état,  aurait  la  propriété  de  s'échap- 
per à  travers  les  parois  des  vaisseaux  sanguins ,  la  pré- 
sence simultanée  de  l'albumine  dans  les  épanchementa 
séreux,  reconnaissant  la  même  cause ,  cet  élément  devrait 
se  rencontrer,  en  proportion  égale ,  dans  le  liquide  uri- 
naire  et  .^ dans  Içs  collections  séreuses,  ce  qui  n*a  pas 
lieu. 

Il  faut  peut-être  tenir  compte  ici  des  communications 
particulièrement  faciles  et  nombreuses  qui  existent  entre 
les  appareils  circulatoire  et  sécréteur  du  rein.  On  sait ,  en 
effet ,  que  l'injection  la  plus  grossière  poussée  par  l'artère 
ou  la  veine  rénale  revient  par  l'uretère.  H  serait  -donc  pos- 
sible que ,  tandis  qu'il  s'opère  dans  Thydropisie  allmmi- 
nurique,  une  simple  transsudation  albumineùse  extrà-vàs- 


JOVWkh  BS  HÉBSGIZQt.  47 

culaire,  il  y  eût,  dans  Turine  coagulable,  passage  en 
quelque  sorte  direct  de  Talbumine  des  capillaires  libres  du 
rein  dans  les  vaisseaux  urinifères. 

2^  Si ,  par  le  simple  fait  de  la  diminution  des  globules 
sanguins,  Talbumine,  modifiée  par  Teau,  transsude  à 
travers  ses  meiphranes  naturelles  et  les  reins,  les  réactifs 
devraient  constater  son  existence  dans  l'urine  des  cbloro- 
anémiques  dont  le  sang  se  rapproche ,  sous  le  rapport  de 
la  diminution  absolue  des  globules,  de  celui  des  albumi- 
nuriques,  et  cependant  l'albuminurie  est  un  fait  rare  dans 
la  chlorose.  II  y  aurait  donc  autre  chose  dans  ralbuminurie 
qu'une  différence  en  moins  de  globules  sanguins  détermi- 
née par  une  cause  appréciable  ou  hypothétique,  et  une 
différence  en  plus  du  plasma  qui  produirait  la  dissolution 
de  l'albumine? 

Une  dernière  question  se  présente.  Comment  Tbydropisie 
se  jformert^elle  dans  Talbuminurie? 

L'albuminurie  complic[uéè  d'hydropisie  est  un  fait  à  peu 
près  constant-  Elle  précédé  toujours,  la  suffusion  séreuse, 
et  si ,  dans  quelques  cas  exceptionnels ,  l'ordre  normal  de 
succession  est  interverti ,  la  priorilé^  de  l'épanchemenl  se 
rattache  à  une  cause  particulière ,  antérieure  à  la  lésion 
rénale  et&cile  à  dégager  le  plus  souvent  :  une  maladie  du 
cœur,  des  poumons  ou  du  foie,  une  tumeur  quelconque 
qui  comprime  les  vaisseaux  ou  un  état  de  cachexie  syphi- 
litique ou  scorbutique.  Enfin ,  Fhydropisie  coïncidante 
diminue,  si  Turine  contient  moins  d'albumine  ;  elle  aug- 
mente lorsque  l'urine  fournit  une  plus  grande  proportion 
d'albumine,  et  elle  disparaît  quand  l'urine  cesse  d'être 
coagulable.,0'un  autre  côté,  le  sang  des  albuminuriques 
est  très-appauvriv  Concluons  donc  que  les  épanchçments 
séreux  qui  surviennent  dans  le  cours  de  la  maladie  de 
Brigbt  résultent  de  l'altération  du  sang  qui  suit  immé-- 
diatenienl  la  suspension  de  la  sécrétion  physiologique  de 
l'urine ,  et  doivent  rentrer,  par  conséquent ,  dans  la  elasse 
des  hydropisies  par  anémie. 

.  Toutefois,  l'ascite,  qui  reconnaît;  une  cause    indépen- 
dante de,  l'albuminurie,,  peut  contribuer  mécaniquement 


48  JOimilAL  DB  llfo^CINB. 

(nous  l'avons  déjà  dit)  au  développement  ou  seulement  à 
l'entretien  de  l'albuminurie ,  selon  qu'elle  lui  est  antérieure 
ou  postérieure.  ^ 

En  résumé,  l'albuminurie  proprement  dite,  que  i^ous 
distinguons  ainsi  de  l'albuminurie  fugitive  qui  se  produit 
Kous  l'influence  d'une  cause  instantanée,  co-existe  avec^n 
état  particulier  de  la  substance  rénale.  Les  résultats  géné- 
raux de  l'observation  cadavérique  établissent  cette  coïn- 
cidence, et  l'analogie  nous  permet  de  rattacher  les  excep- 
tions à  la  règle ,  en  nous  conduisant  à  admettre  ici  l'exis- 
tence d'une  congestion  rénale  au  premier  degré ,  qui  s'est 
effacée  avec  la  vie. 

Toute  altération  ou  même  toute  modification  matérielle 
du  rein,  permanente  ou  fugace,  est  susceptible  d'occa- 
sionner, si  elle  ne  le  produit  pas  nécessairement  (1)  ;  un 
trouble  fonctionnel  de  cet  organe,  durable  ou  passager, 
qui  se  traduit  d'abord  par  la  présence  de  l'urée  dans  le 
sang ,  la  diminution  des  globules  sanguin*^  et  leur  uirine 
coagulable.  Le  rein  ,  .comme  paralysé  dans  cette  conditiop 


(l)JNoii8  sommes  disposé  k  croire  aue,  de  même  que  Fal- 
bttminarie  se  rattache  nécessairement  a  une  cause  matérielle, 
fixe  ou  temporaire,  ayant  son  siège  dans  le  rein,  toute  lésion  ou 
modification  du  tissu  rénal,  doit  engendrer  nécessairement  l*état 
albuminurique.  La  liaison  étroite  qui  existe  entre  lés  deuf  phéno- 
mènes, pourrait  être  invoquée  en  faveur  de  cette  ^action  réci- 
proquoi  Toutefois,  Texpérimontation  sur  uno  iaree  échelle  pou- 
vant seule  trancher  la  gestion  ^  nous  citerons,  à  l'appui  de  notre 
opinion,  les  recherches  statistiques  de  fH,  Finger  (t) ,  entreprises 
à  un  autre  point  de  vue.  Sur  600  malades  dont  le  professeur  alle- 
mand a  examiné  les  urines  sans  distinction  de  maladies,  155 
avaient  des  urines  coagtttables.  Il  est  kregretter  que  l'essai  des  urines 
ne  se  fasse  généralement  que  dans  des  conditions  exceptionnelles 

Ïiii  fixent  l'attention  du  praticien,  i'anasarque  par  exemple, 
es  cas  nombreux  d'albuminurie  liée  k  une  simple  modifica- 
tion du  tissu  rénal,  et  dont  la  durée  est  limitée  k  quelques  jours 
seulement,  doivent  échapper  presque  tous  k  l'observation.  . 


(i)  H.  Finger.  —  Recherches   statistiqueB  sur  rslbaminurie  qui  n'eft 
pai  liée  à  une  maladie  du  rein.  (Prager  Vierieljahrschrilit,  1847.) 


an«lomk{cie,  sécarètê  bi«iii  encore  ou  pivtôl  iMwnte^  «n« 
faible  quantité  d'of ines  tronibles  «I  légères  ;  mms  son  aelidn 
élimiflatrice  sar  Turée  émiem  insensible  «  et  cet  étément, 
réfïUMe  réskli»  de  l'oxydbtionf  des  matières  azotées  dont 
la  nature  se  débarrasse  sorua  ceUtë  forme  par  la  voie  des 
urines,  eoimen^é  darts  la  musse  Aq  sang,  se  déooinilose 
peut'-éire ,  en  partie ,  par  i-effet  d'une  réaction  diinMi^^ 
soit;  dans  le  s]fstèine  eapidaire,  B'eîst^à«dire  dans  l^aote  de 
eombuslfqn  orgsu^tque ,  soit  dans  l^efisembie  ém  ^ttoie 
oircalaioire .,  en  donnant:  itiçu  à  un  dégagement  d'ammb*- 
niaqafa^qut  déëagrégerait  une  ponion>  def  gtobnies  sangcrins. 
L'albun^iiHe ,  pent^^tre  aussi ,  esd  îAtaquée  à  son  tonr  pbr 
l'au^entution  refaire  du  sérum ,  récitant)  de  la  dimi*- 
ffutfôn^  des  globule».  L'albumine  et  les  gldbulel^  attaqués 
par  reau,  devenus  solubtes,  sécoiuleni  a¥ee  tes  Urines^. 
Wm  autre"  côté,  la  partie  lu  plus  fluide  du*  sang ,  qui 
esâ  profondément^attéré  dkez  leà  ulbimninuriqiiic^ ,  tymssmè 
à  travers  les  parois  (tes  vaisseaux^  et  se  dép^ ,  sons^forilft 
de  coHeotiona  sérèuaes,  im&  le  tissu  cellulatro  et  lea  cav4têi 
oloses. 

dans  rhypérémie  et  Minflaniniation  fri^nch^  du  rein;  hû 
medifieationa  mmériella»  qu'il*  subit,  liifrttéi^  striïv^t  à^unë 
portion  de  Torgane,  et  se  terminant  presque  toiifèvlr^  ptef 
résolution;  d*autre  part,  Tinduration,  quand  elle  est  le 
mode  de  terminaison  4e  la  néphrite,  consistant  en  une 
ou  plusieurs  petites  plaques  disséminées;  les  accidents, 
dans  lé  premier  cas,  disparaissent  sans  bisser  de  IraeeSi 
ei,  dans  le  second  cas,  passent  presque  inaperçus,  parce 
qu'ils  goril  très-încotiiplèlé. 

ies  éltératlèfm  rénales^  eonstHlitl\/iftfe^  dè^  là^iïtaladW^  de 
Brighl,  essentiellement  envahissantes  et  dés^gél^iàillt^ées , 
déterminent,  au  contraire,  des  désordres  fonctionnels  qui 
suivent  une  marche  paraMète  aux  progrès  des  lésions. 
Enfin,  dans  l'état  pathologique  du  rein  le  plus  avancé,  les 
phénomènes  morbides ,  plus  fortement  accusés  ,  engen- 
dfani'  éuic'-ilfiMi^  d^atilt^esi  iftieidëms  q«ri  c<^|iîplètettt'  le 
ttblieairdi)^ ift  maladie.  L-àllératî^n «  du  sâittg,  de  [flub  ew 
pfesprofemie',  coneoirttatofs  a«  dételop^éttaéiyt  dès  phfteg^ 


50 


\  imereorreotas  ea  afidbUsant  les  tissus  orgao^aes , 
ci  eo  aecromaot  aiosi  levr  sosoeptibililé. 

Nms  termineroiis  en  forîDokot  les  proposîtioos  soi- 
vantes,  qui  décooleot  oaturellenient  des  considérations 
qoe  noos  avons  présenlées  dans  le  cours  de  ce  travail. 

Les  caractères  essentiels  de  la  maladie  de  Brigbt,  sont: 
1*  une  altération  da  rein  sni  generis ,  qnî  ODarche  progrès* 
sivement  jasqu'à  la  deâtniction  complète  de  forgaiie  ;  2<^ 
une  altération  continue  et  toujours  croissante  du  oiode 
physiologique  des  mutations  organiques ,  se  révébot  par  le 
pbénoBBèoe  compleie,  d'une  part,  delà  diminotioB  des 
globules  sanguins,  de  l'albumine  dans  le  sang  et  de  l'urée 
dans  les  urines;  d'autre  part ,  de  la  présence  d'an  certain 
nombre  de  globules  désagrégés  et  d'albomioe  modifiée 
dans  les  urines,  et  de  l'urée  dans  le  sang. 

Enfin ,  la  maladie  de  Brigbt  ne  semble  pas  ao-^tessas 
des  reseources  de  l'art,  aussi  longtemps  qu'elle  n'a  p& 
firancbi  la  période  congestive,  précédant  l'évolution  de  l'èié- 
meot  spécifique,  et  pouvant  être  considérée  comaae  an 
effet  de  la  réaction  du  rein  contre  le  principe  morbide  qai 
l'imprègne  d^.  Au-delà  de  ce  terme ,  la  maladie  s'avance, 
d'un  pas  plusoaoK^ins  rapide,  vws  un  dénouement  tour 
jours  fiUaL 


OBSEnVATION  d'empoisonnement  par  U 
savon,  arsenical  de  Bécœur;  traitement  par 
MJJ^^^  ;  par  m.  PiKCiT, 

Bien  des  méthodes  ont  été  nronosJ^Pc  ■wk»»  v      l 
nestpoiDt  m  le  heu  de  les  expoeer  et  d'w^IpjSfcik 


wsMKÈt  ro  Ktnenv.  Si 

valeur ,  noo»  avoçs  seolemeni  pour  but  de  CEiire  «onuAttre 
UQ  bit  d'eoipoiiomieAe&t  par  la  substance  toxi<|ud ,  qui 
fait  ia  bpse  du  soyofi  de  Béeœur.  Voici  la  composition  die 
cette  préparation,  employée  par  les  natuvalistes  pour  la 
coaservatîoa  de»  aniiuau!!  empailléa  : 

Acide  arsenieux 500  gramoies. 

^  Camphre. 60       — 

Chaux  vive 10      — 

Savon  blanc 625      — 

Eau.... 625      — 

Un  chien  dévora^  à  Finsu  dé  son  nbaftre,  un  oitoau 
qu'on  venài(  de  préparer  avec  ce  savon  arsenical  ;  on  avait 
employé  30  gramme^  de  savon ,  ce  qui  représente  environ 
8  grammes  d*acide  arsenieux^  Depuis  deux  heures,  rani- 
mai était  S0U3  rinfluénce  du  poison ,  et  paraissait  souffrir 
beaucoup;  ôo  vint  à  la  pharmacie  nous  demander  un 
contre-poison.  Manquant  d*hydrale  de  pénokyde  de  fer,  il 
nous  parut  à  propos  de  donner  de  Thydrate  de  magnésie^, 
suivant  le  conseil  dé  M.  Bussy. 

Il  n'y  avait  point  eu  encore  de  vomissements,  lorqu^on 
commença  Tadministration  de  25D  grammes  d-bydrate  de 
magnésie  délayée  dans  de  l'eau.  Après  l'es  premières  doses , 
il  y  eut  quelques  vomituritions,  qui  cessèrent  prompte- 
nient.  On  continua  l'administration  du  contre-^poison ,  et , 
une  heure  après,  survinrent  de  nombreuses  évacuations 
alvines.  Le  chien,  couché  sur  le  côté,  poussa  des  cris 
plaintifs  pendant  environ  deux  heures  ;  les  troiè  jours  qui 
suivirent;,  il  ftit  triste  et  sans  appétit,  puis  il  finit  par 
reprendre  sa  vivacité  habituelle. 

Pour  nous  procurer  Thydratede  magnésie,  nous  avons 
procède  d'aprfe  la  fbrmule  suivante  : 

N""  1.  Sttl&le  de  Baagnésie». . .     10  g|rdmme§. 

Eau... 250      — 

N*^  2.1  Potasse  à  TalcooK .....       5  gèammes. 

Eau... 100      — 

F.  S.  Âx  Un  précipité ,  filtre»  ei  délayez. 


52  IMMUL  DB  MÉMCaDIB. 

L'efficacité  de  la  magnétiè,  comme  eooire-^isoii  de 
l'apide  arsenieux,  ii*a  point  été  admiie  d'vne  ipanière  posi- 
tive par  Orfila.  Voici  comment  il  s'exprime  dans  ses  éié- 
menu  de  chimie  : 

«  La  magnésie  absorbe,  en  effet,  Tacide  arsenieox  et 
»  forme  avec  lui  un  $el  insoluble  dans  Teau  ;  mais ,  comme 
u  cet  effet  est  lent,  et  que,  d'ailleurs,  Tarsénite  de  ma* 
i>  gnésie  finit  par  être  vénéneux  à  mesure  quil  se  dissout 
»  dans  les  acides  de  Testomac  ,  il  est  préférable  de  favo- 
»  riser,  par  le  vomissement,  l'expulsion  du  toxique;  cela 
o  étant,  on  pourrait  tirer  parti  de  la  magnésie  comme 
tt  conire-poisoD ,  pourvu  qu'elle  fût  administrée  dans  une 
«  grande  quantité  d  eau  tiède  » 

Dan$  $on  J"  volume  de  toxicologie,  Orfila  s'exprime 
d'une  manière  cucore  plus  restrictive  : 

«  Sf ,  Bu^y  a  préconisé  la  magnésie  «  mais  les  observa- 
4  tioQ3  qu'il  a  recueillies  che^  l'homme  ne  sont  pas  pro- 
9  bontés,  pui^iue,  dans  toutes,  les  individus  ont  vomi. 
D  Or,  qui  oserait  assurer  que  la.guérisoa  a  été  plut^it  due 
»  à  faction  chimique  de  la  magnésie  qu*aux  évacuations? 
D  Çe^t  qu'an  effet,  l'arsénitede  magnésie, <|uoiqua  moins 
a.  véuéneux  qua  Tacide  arsenieux.  Test  encore  as&ez  ppur 
o  tu^  au  bout  d'un  certain  temps,  a 

On  va^t ,  par  ces  citations  ^  que  Topinion  du  grand  toxir 
c^ogisite  ^t  peu  favorable  à  l'emploi  de  la  magnésie 
comme  contre-poisou  de  Tacide  arsenieux.  M.  Bussy^  a 
établi,  toutefois,  que  la  magnésie  pure, mais  faiblement 
calciué^,  peut  absorber  facilement  l'acide  arsenieux  en 
diçsolutiou,  et  formeir  avec  lui  uo  composé  insoluble 
même  dans  l'eau  bouillaule.  Une  observation  recueillie 
pftr  JJ|.  Levage  est  ic^uue  depuia  démontrer  la  vérité  de 
ce  fait  et  Futilité  du  cQutrc^-poison  ovignésien. 

M.  le  docteur  dArdiége  et  M.  Lepage  furent  requis 
pour  doBDer  des  soins  à  un  noÎEnmé  DehuMtte^qm  avait 
pris  i  5  grammes  de  roorl^aux-rats  (acide  aisenieux)  dé- 
layée dans  ime  certaine  quantité  d'eau.  Ik  lui  ad«iinis- 
trèrent  de  la  magnésie,  et  ftipent  assez  heureux  pour  le 
voir  se  rétablir  promptement.  Sous  rkifluflmse  du  kit  de 


vmgnéfàe^  k  aial«<]«  avilit  voitii  ;  ot)  re6H«UIU  {%$  Oléifères 
des  vomissenaents  ^ur  les  ôxamioer.  «  On  mit  d'abord 
»  sur  un  filtra  toutes  les  œatièr€s  vomies,  qui  cènsis*- 
»  talent  eo  magnéfiie  délacée  dans  w  liituida  à  p^ine 
»  odorant*  Il  passa  un  liquide  transparent  et  de  couleur 
»  anribrée.  Oii  Tintroduisit  dans  un  appareil  de  Marsh 
i>  donnant  du  gaa  hydrogène  pur;  il  fût  impossible  d'ob- 
u  tenir  la  plu$  petite  tache  d*arseniç  sur  ues  soucoupes 
JD  de  porcelaine  que  nous  présentâmes  à  la  flamme  da 
i>  Tappareil.  Aussitôt  que  nous  eûmes  mis»  dans  ce  même 
»  appareil,  quelques  parcelles  du  magna  magnésien  resté 
»  sur  le  filtre,  nous  pûmes  recueillir  sur  les  soucoupes 
»  de  larges  taclies  d'arsenic  métallique.  » 

Ces  faits  et  l'observation  que  hous  avons  rapportée  nous 
conduisent  à  conclure  que  la  magnésie  pure,  faibleftienl 
calcinée,  peut  absorber  facilement  Tacide  arsenieux  et 
former  avec  lui  un  composé  insoluble  même  dans  l'eau 
bouillante  ;  qu'à  Tétat  gélatineux ,  elle  Tabsorbe  plus 
promptement  encore;  et  qu'enfin ,  on  ne  peut  mettt*e  èû 
doute  rèfflcacité  de  fa  magnésie  nouvellement  précipitée, 
conmie  contrepoison  de  Tacide  arsenreox. 


OBSERFJTION  d'un  cas  de  carcinome  du 
pylQre;  far  M.  PÀPici-CLEttGiSBW ,  Médecin^ 
$ntp(piUtmi  dM  Bm^c^s., 


Pierre  Rarré,  marbrier,  âgé  de  56  ans  y  est  entré  à 
l'Hèlei-Dteo,  salte  16,  n^  A ,  le  5  septcs^br^  |gSâ.  AiHai- 
gnssejanenl  très-prononcé,  teint  j^âte  et  plombé  par  pfci- 
qoes,  peau  sècliie;  langue  salles  kHl^uche  maityaise,  i^oete 
mîsérabte^  et.  ftiéqueiit;  perte  d'appétit ,  soif  àiadérée.  Ce 
malade  est  sujet,  de{^  $  mois  em^iron,  à  cbs  rappiofte 
nidoreoa  aâm%  qu'àîea  na^àsée^el  à  des  vonùésemems  qui 
sosviieiiiieci^  ima^édiateaiefiÉ  après,  ses  .ropaai  II  épro«ve,. 


S4  jomoiAi.  Bfi  MÉmomu 

depuis  cette  époque,  des  élancemenU  au  niveau  de  l'ap- 
pendice xyphoïde.  La  percussion  donne  dans  ce  point  une 
matilé  relative.  Le  foie  et  la  rate  ne  paraisséfit  pas  s  écarter 
sensiblement  de  leurs  dimensions  et  de  leur  position  nor- 
males. Il  n'existe  pas  de  tumeur,  nî  de  gargouillement  à 
Tépigastre,  ni  de  tyippanile  stomacale. 

Des  vomissements  ont  eu  lieu  avant  la  visite  :  les  ma- 
tières sont  d*un  brun-clair,  et  offrent  la  consistance  d'une 
bouillie  mal  liée;  leur  quantité  ne  doit  pas  dépasser  celle 
des  aliments  qui  composaient  le  dernier  repas.  Cons- 
tipation depuis  15  jours. 

Nous  diagnostiquons  un  carcinome  du  cardia.  Le  carac- 
tère, Tancienneté  et  le  siège  de  la  douleur,  Tobscuri té 
du  son  épigastrique,  la  coloration  des  inalières  vomies^  le§ 
vomissements  apparaissant  avec  régularité  après  cbaique 
repas,  la  maigreur  excessive  du  sujet,  son  teint  pâle  et 
livide  par  endroits ,  leâ  rajpports  fétides  et  la  constipation 
opiniâtre,  accusaient  uo^  affection  cancéreuse  du  ventri- 
cule. 11  manquait  bien  à  Texpression  symplomatique  de 
cette  maladie  le  signalement  de  la  tumeur  caractéristique  ; 
mais  la  matité  relative  en  avait^  presque  la  valeur  dans 
l'espèce.  Quaht  à  là  précision  du  siège  de  la  lésion  ; 
l'absence  de  gargouillement  et  de  tympanite  stomacals, 
les  vomissements  si  rapprochés  des  repas,  le  point  dou- 
loureux et  mal,  indiquaient  plus  particulièrement  uri  car- 
cinome du  cardia.  On  sait  du  i»çste  que  les  tumeurs  cancé- 
reuses du  cardia  sont  moins  accessibles  au  toucher  que 
celles  du  pylore,  qui  occupent  un  plan  moins  élevé  et  plus 
antérieur,  et.se  rencontrent  généralement  au-dessus  de 
1  ombilic  ou  prèiS  de  la  vésicule  biliaire. 

Le  m^àde  est  soumis  à  une  alimentation  suhstantielto 
soua  la.  forme  la  plus  légère,  BouiUon  de  poulet,  awiau' 

Poudre  lax^ve,absort^^^     et  calmante,  et  lavemenisX 
miel  naercuriale.  Sinapismes  appliqués  sur  Tépigastre 

Les   vomissements  deviennent    moins    fpÀ/moofl        i 
cessent  „jéa.e  ,e  18;  ies   nausées  «r^^'^pX 'pèi: 


jOOKIUài  DB  HÉDBGHIB.  S5 

sistent.  Le  malade  ne  tarde  pas  à  tomber  dans  un  élat 
de  siibdélirium  et  s'éteint  le  2B. 

L'autopsie  est  fiiite  le  sarlendemain.  Dans  TintervaUê ,  la 
poitrine  a  été  ouverte  avec  précaution,  par  un  élève,  qui  a 
pratiqué  l'injection  de  i'aorte    pour  un  concours.  Nous 
remarquons  d'abord  que  le  diaphragme ,  an  lieu  de  bomber 
dans  la    cavité  thoracique;  décrit   une  courbe   en   sens 
inverse.  LVstomac  rempKt  plus  du  tiers  de  TabdoRfien  ;  il  se 
dirige  comme  une  large  baridede  l'épigastre  à  l'ypogastre , 
en  suivant  une  ligne  légèrement  objique  de  gaucbe  adroite. 
La  fNremîèré  partie  du  duodénum ,  le  pancréas ,  le  foie  et  la 
rate,  ont  suivi  le  ventricule  dans  son  déplacement  :  ils  sont 
abaissés.   Nous  n'avons  pas  besoin  <ie  rappeler  ici ,  pour 
TexpUcation  de  ce.  fait,  les  rapports  étroits  qui  existent, 
d'uoe  part ,.  entre  le  foie  et  la  rate  ^  et  réstomac ,  et  d'autre 
part,  «ntre  le  pancréas  et  le  daodé^num.  Le  pylore,  qui 
occupe  l'extrémité  de  la  ligne  représentée  par  le  ventricule, 
et.  le  duodénum  sur  une    longueur  de  5   centimètres, 
forment   lin  boyau    plein   de. 2  centimètres  de  diamè- 
tre, Lfœsopbftge  est.  tiraillé  par  le   poids   de  l'estomac. 
Des  fécès  rares,  et  de  la.  grosseur  d'une  noisette^  sont 
disséminés  dans  les  circonvolutions  de  l'intestin.  Le  péri- 
toine n'est  point  altéré ,  et  là  coloration  des  organes  diges* 
tife  t^  présente  rien  de  particulier.   Le  foie,  coupé  par 
trancfaés V  n'a  pas  conservé  l'aspect  granuleux  qui  lui  est 
ppof^e.  Sa  substance  est  plus  unie  et  plus  ferme  qu'à 
rordiiiaire^  et  sa  coo^ur  se  rapproche  de  la  nuance  rouge- 
feu.  L'injection  ne  l'a  pénétré' qu'imparfaitement^,  ainsi 
c|ue  le  tissu  de  la  rate  et  du  pancréas,  qui  est  sain ,  et  dont 
la  couleur  est  naturjelle.  L'estomac  est  Incisé  dans  sa  lon-r 
gueur;  ses  parois  ne  sont  pas  hypertrophiées.  11  contient 
une  énorme  quantité  de  matières  semblables  à  celles  des 
vomissemmis.  Lé  cardia  est  intact  ;  mais  le  doigt  introduit 
dans  rortiicet  «st  comme  étranglé.  Cette  disposition  est 
aceidéntelie  ;  elle  résuhe  évidemment  dé  la  tension  que  fait 
subir,  à  la  partie  supérieure'  du  tube  digestif  le  poids  du 
ventridilé  siffcbargé.  La  muqueuse ,  sur  le  trajet  de  la 
grande  courbure,  est  d'un  blanc  bcté ,  et  souleTée  inégaie- 


ntent  pas  dé»  pelite»  bulles  é'air  emprifionnées^pair  groupes, 
et  enchâssées  dans  une  substaace.  k  deml-concFète  et 
cKapioieceAce  albuiukieusiri  Le  pylore  et  le  duodénum  sont 
fendus  bftgitudiiRale»eni.  Le  pylove  et  la  portion  da 
dnodéiHiBii ,  qui  y  &ii  suite,  sont  conveirtis  en.  un  eoedan 
9qiltiirheii& ^peroé  d'ua.canfil;(fonl  le  cafibre permet  àpeûie 
(e  paseage  d'une  sonde  n»o3):en0e. 

Cette  obtofvatfon  nou»  a  offert  quel^pie  inlépèt  au  point 
de  vue  de  l-anatemie  pathologrque,  de  la  difficulté  du 
diagnostic  appliqué  au  siège  «précis  des  lésions  caFf^o- 
mateustô  die  Testomac,  etdeta.physiplogie  du.  vomiaBâanentt. 

Nous  ne- reviendrons  pas  sur  la  descivipUon  anaaoink}ue 
des  organe»  abdomiuaua ,  et  il  nous  suffir-a.  dé  rappeler 
que  le&  oaraàtères  généroriement  atlrilmés  par  l'observation 
dniique  au  ^carcinôine  du  cardia ,  se  trouvaient  rénnia  ici 
sauè  inèlaage,  c'eet-è-dire  -  saits  m«nifesta;tioa-  dlun  des 
symptômes  également  aç^ignés  à  la<  dégénérescem^js  du 
(^tere)  tels  que  la  tumeur  sous-ombiHçale  ou  juxiàr-véëica- 
laire,  le  gargouillement  épigastrique,  Texagération.  du  son 
stomacal ,  et  Tapparition  de  vonrissements  aa^z  éloignés 
de»  repas,  et,  cependat^t,  le  pjllore  était  le  sié|§^  de  la 
lé^OQ  organique.  Le  déplaeement  iiemai^uid>ie  de  Jf^sto- 
men  expliijuait  bien>  1»  mutité  relative  et  ta.  sensation 
doulotvreuse  au  niveau  de  Tappencfiice  xyphoïde ,  Fabsenoe 
de  k  tumeur  caraciétisttcfue ,  du  gargouillement  épi^a^ 
trique^  de  i ■exagération  duison  stomacal;  mais  la.skqpu^- 
larité  des  vomis^mentâ,  et  leur  cessation  dans  les  di^mteris 
jours  de  la. maladie,  devaient  reconnaître  imev autre  èausei 

Nous  avf^s  communiqué ,  Tannée  dereiÀre-v'à  la  Seetkm 
de  Hédeeine ,  une  observation .  de  rupture  dep  restomao , 
suivie  d'tunè  péritonite  stir'aiguë ,  sans^nausées!,  ni  vomis- 
sements. En  nous  a|:qfrayatit  sur  la  physiologie  moderne,^ 
nous  a^ieas  rattaicbé  l'absence  de  ces' accidents  à  une^paara- 
lysie:  tmumaâiqueduventricuiei  Le^phraf^me  et  les  nuis- 
desabdominauxs  disLone-^riô^s,  Sont  reconnus  ai^ourd'hoi 
eommeles  seuls  agents  actifii  du  vomtssmnent.  Leurcontrae- 
tion  s>mu(kanée  a^  pour- effets  de  eompHrimer  brusquement 
t'eetjQ^aAac ,  taudis  que  celle  des  ittires  lomg^diiialéâT  de 


rce^pp^gfi  {^cjlUe  l'expulsion  (}e$  ips^iières  (^  élargisMOI 
VorÎHç^  çardi^qpe;  pais  ce$  (jiffér^nts  nçiu^cles  se  mett^iit 
ep  ^e^  sQus  ripjIueDc^  dq  ipoMv^meQt  venDjculi^re  du 
yeniricule ,  qui  accompagne  la  nau^e.  Or,  i|  e^i  admis 
sénér^jetn^nt  que,  Ic^i^uq  le  vomissieineot a  sop  point  de 
départ  jiors  du  yeqtricule,  dao^  le  péri|oîne,  par  ei^eiipfle, 
rjmpf^?^ipQ  es^  traosnais^  d'a|)ord  au  çei^Mre  nerv§ui(,  piiis 
à  1  ^stof]i|ac  par  r^^Cle^iop ,  eu  y  faisant  naître  la  n^us^e  et  la 
coiitf^plïftP  pb§purp  qiji  prépare  et  provoque  w  vomisae- 
bfnt.   \       * 

Cette  théorie ,  tPHtéfois,  ne  p$ira{t  pas  applicable  aiii^ 
yofàiss>içfnents  ocpaslonnés  par  |'injec|iop  de  l'épietique  dans 
(es  y^ipeç.  . 

'^q^s  s^pposions  dope  que  l'es^onific ,  par^l^sé  par  une 
lésion  Qiortelle,  n'était  plus  susceptible  do  i^ecevoir  L'iip-r 
pression  particulière  qui  y  déierniiop  la  pai^sée  et  le  i»Ou- 
Yejnept  ye^miculaire.  Me  1$,  l'absence  4^s  nauséj^s  §t  des 
voinisspipents  af3  dél>ut  ^t  4^^^  ^  coixi^  dé  la  péritonite^  Ce 
phénomène  particulier,  ajoutions-nous ,  pouvait  dépendre 
encore,  dans  une  certaine  mesure,  de  Tineriie  du  dia- 
phragme et  des  muscles  abdominaux  repoussés  avec  force 
par  une  accumulation  rapide  et  prodigieuse  de  liquides 
dans  le  péritoine. 

L'observation  actuelle  confirmerait,  maintenant,  Texpli- 
cation  théorique  du  vomissement,  dont  le  point  de  départ 
est  dans  le  ventricule.  Ici ,  Timpression  se  développait 
primitivement  dans  l'estoniac ,  et  y  faisait  naître  la  nauséa 
et  le  mouvement  vermiculaire ,  dont  nous  avons  parlé  déjà. 
Nous  sommes  disposée  à  «admettre  seulement  qu'au  début  de 
la  maladie,  il  s'écoulait  entre  les  repas  et  les  vomissements, 
un  temps  plus  ou  moins  long,  qui  n'a  pas  été  suffisamment 
apprécié  par  le  malade,  ou  dont  il  n'a  pas  gardé  le  souvenir. 
A  une  époque  ultérieure,  l'estomac,  d'une  part,  agrandi 
par  le  séjour  permanent  d'aliments  et  de  gaz  retenus  dans 
sa  cavité  par  le  rétrécissement  du  pylore ,  mais  non  pas  au 
point  d'être  dépourvu  entièrement  de  sensibilité  et  d'élas- 
ticité fonctionnelles;  d'autre  part,  le  diaphragme  et  l'oeso- 
"''"Re  ^çserya^jt   f(Pî^re    ^ne   pw^ie    de  kmjt  action 

5 


58  JOUBIfÂL  DB  KÉDSCIRB. 

musculaire ,  malgré  le  tiraillement  que  leur  faisait  éprouver 
le  poids  de  l'estomac,  toute  addition  d'aliments,  en  comblant 
la  mesure  physiologfque  de  Cet  organe,  devait  avoir  pour 
résultat  immédiat  de  provoquer  la  nausée  et  le  vomissement 
ou  plutôt  la  régurgitation,  car  le  ventricule  ne  se  débarras- 
sait que  de  la  couche  du  bol  alimentaire  qui  dépassait  le 
niveau  de  sa  capacité  fonctionnelle.  Hais  la  contractilité 
musculaire ,  condition  essentielle  du  mouvement  initial  et 
précurseur  du  vomissement,  devait  s'éteindre,  à  un  moment 
donné,  dans  un  organe  énormément  distendu  par  les 
matières  qui  s'y  accumulaient  sans  issue ,  et  flottant ,  en 
quelque  sorte,  dans  la  cavité  péritonéale.  Dès  lors,  les 
vomissements  ont  dû  cesser  de  se  produire,  et  les  nausées 
seules  ont  persisté.  D'un  autre  côté ,  l'œsophage  et  le  dia- 
phragme ,  qui  coopèrent  au  vomissement ,  allongés  par  une 
traction  continue  et  progressive ,  ne  pouvaient  pas  conserver 
eux-mêmes  la  propriété  de  se  contracter  avec  le  degré 
d'énergie  nécessaire  pour  l'accomplissement  de  ce  phéno- 
mène. 


Nantes,  Imp.  de  B|««  v«  G.  Mellinet.  —  2792. 


Des  Obstrvatians  AiO  mètres ^  à  peu  près,  au-dessus  des 


MOIS. 


FÉTRIER.   .  . 


BIARS. 


« 
JUIPT. 


Bi  PLUIE  TOMBÉE 

7    H.    V  SI;R  la  PI.ÀTK-Ft>RMF.. 


t4 

Moyen! 
Rloycni 
Plus  er 
)loindr( 
Variaiit 


Mo  y  OUI 
Bloyeui 
Plus  gr 
tkloinUn 
Varia  tM 


enl 


Moyeni 
Moveu-^ 
Plus  g»^ 
Moindr 
Variall 


Moyoni 
Moyen 
Plus  gi 
MoiuJT 
Variatii 


Moyend 
Bfojcnl 
*lu«  gri 
Moiadr« 
Variât 


Moyeni 
Hoyeni 
Plusgt 
Moiniir 
Variât! 


t 


0  ln^l.  06*J  inill. 


0  iiiM.  015  iniH. 


•  laèt.  OOS  mill. 


0  met.  030  inill. 


0  mhi.  0'i5  mi II. 


PHASES 

DE  I  K   LL'NE. 


I».  O/  le    B,  *  5  h.  57*111 

P.  L.  le  14^  à  »  II.  L'O' m 

D.  O.  Ife  S?»  À  1  h.  32'  m 

TV.  L.  le  28,  A  n  h.  ïTs. 


P.  Q.  |p  'i,  *  iO  h.  46'  s. 
P.  L.  le  13,  ik  3  h.  fi'iu. 
D.  Q.  Je  UO,  à  10  h.  .15' m. 
N.  L.  le  27,  A  4  h.  4fc' ;m. 


P.  Q.  le    ft,  A     7  h.  I!l'  s. 
P.  L.  le  14,  à    6  h.  r  s. 
D.Q.  le  21,  k    G  h.  H' s, 
TV.  L.  le  28,  à    5  h    T  s. 


P.  Q.  le  5,  *  3  h.  ri2'  s. 
P.  !..  le  13,  à  6  b.  6*  m.- 
D.  Q.  le  20,  à  0  h.  2{'  m. 
N.  L.  !e27,à    6  h.  23' in 


9  h.  39' m. 


P.  Q.  le    S,  k  9  h.  39' 
P.  h.  le  12,  à  3  h.  46' 
I>.  Q.  lo  19,  à' 6  î».  42*m 
rr.  L.  Io26,  à  8h.  5(»'  s. 


0  met.  058  mill. 


P.  Q.  le    4,  à  0  h.  50'  m, 
P.  L.  le  10,  à  11  h.  40' s. 

D.  Q.  le  i7,  ■  a  h.  sr  s. 

W.  L.  le  25,   à    Oh.  H' s 


e  au-dessus  du  sol,  et  40  mètres,  à  peu  près,  au-dessus  des 
£TTB  ÀiRÉy  à  Nantes. 

B  185^. 


JECTIOW 

ÉTAT 

PLUIE  TOMBEE 

PHASES 

s  VENTS. 

DUGIEf 

• 

SUR  I.A  PLATE-FORME. 

DE  Vk   LUNE 

«. 

4 

Bcniix  jours 

27 

.  E. 

S 

Couvi-rt 

4 

•isl 

S 

Pluio 

fl 

.  E. 

1 

Gelée 

0 

P.  O.  lo    3,»    1  h.  IN. 

ïiid 

4 

BrouniarJ 

5 

0  inM.  009  luill. 

P.  L.  lo  1«,  à    6  1..  3Viu. 

.  o. 

3 

Vctu 

Vi 

1>.  Q.  le  17,  A    0  h.  i'i'in 

O. 

u 

Gr6iu 

0 

N.  L.  Ie25,  A    3  h.  2rAa. 

.  il. 

k 

Weige 

0 

Tonueire 

0 

30 

N. 

5 

Beaux  jtiurs 

;.  E. 

4 

Couvert 

J 

Est 

4 

IMuio 

5 

P.  Q.  Ir    1,  à  10  II.  37*  s. 

.  E. 

S 

GcU-e 

II 

P.  L.  le    8,  à    1  h.  *iV%, 

•»U(l 

1 

Broiiillaid 

in 

OmM.  iliLmill. 

I).  W  le   15,  k  k   \%.  S»'  s. 

.  O. 

y 

Vent 

•-1 

N.  '     It  23,  il  6  II.  10'  s. 

O. 

7 

r,r659 

0- 

U.  Q.  lo  31  ,  i  6  h.  16'  m. 

.  o. 

5 

Ncigo 
Toauurro 

0 
2 

^. 

3 

B«*aux  jours 

23 

f.  E. 

5 

Couvert 

i 

B»t 

JU 

Pluie 

3 

.  E. 

« 

Gcléc 

0 

P.  L.  le    6,  il    9  h.  ^V  s. 

Sud 

3 

Bro.illar.1 

<J 

0  inM.  004  inill. 

1).  Q.  le  14,  k  G  h.  40*  m 

.  O. 

s; 

Vent 

24 

TV.  L.  I«22,  ik  8  h    12'  m. 

0. 

4 

Giélo 

U 

P.  <^Klo29,  ik     Oh.  47' s. 

'.  0. 

1 

^cige 

« 

Touucrre 

0 

N. 

3 

Beaux  jours 

23 

.  K. 

2 

Couvert 

K 

Est 

3 

PJuio 

13 

[.  E. 

1 

Gelée 

0 

P.  L.  lo    6,ik7  1..  46'  m. 

Siul 

8 

Brouillard 

23 

0  ma.   106  luill. 

1).  Q.  lo  ii.iklh   50*ro. 

..  0. 

3 

Vent 

1«" 

N.  L.  If  21,  à    9  h.  3V8. 

0. 

tt 

Grdie 

1 

P.  Q.  le  28.*  î  h.  12- s. 

\,  0. 

8 

déifie 
Touueire 

II 
2 

N. 

7 

Beaux  jours 

J5 

r.  E. 

4 

Co-.ivert 

1.5 

Est 

4 

IMuio 

16 

..  E. 

2 

Gelée 

r> 

P.  L.  le    4,  à  9  h.  H*  s. 

SikI 

2 

BrouMIarJ 

2^ 

0  met.  083  mill. 

n.  O.  Ii5  12,  k  10  h.  IK's. 

.   O. 

2 

Vent 

13 

^.   L.  IcïO,  à  10  h.  Wm. 

o. 

7 

Grôle 

1 

P.  Q.  te  27,  à  2  h  49' m. 

.  o. 

2 

Neige 
Tonnerre 

0 
0 

,    ■ 

IV. 

5 

Beaux  jours 

18 

r.  E. 

2 

Couvert 

13 

Est 

2 

Pluie 

16 

P.  L.  ip    4,  il  1   h.  44*  s. 

1.   E. 

\ 

Gelée 

H 

D.  O.  Itol2,  à  6  h.  20'  s. 

Sud 

I 

Brouillard 

27 

0  met.  031  inill. 

N.  L.  te  19,   k    9  h.  56'  s. 

i.  0. 

« 

Vent 

18 

P.  Q.  le  2fi,  à  0  h.  47'  s. 

O. 

i'» 

Grêle 

0 

N.  O. 

4 

Nc-ge 
Tonnerre 

A 

1 

JOURNAL 


DB  LA 


SECTION  DE  MEDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


BULLETIN  DES  SÉANCES. 


Séance  dû  16  mars  1S55. 

PRllSIDEMCB   DE   M.    MAHOT ,   VICE-PRéSlDENT. 

Le  |»Qcè8rverbal  de  la  dernière  séaDce  est  lu  ei  ado|Hé. 

Après  rappel  nominal,  la  Section  procède  à  Télection 
d'ua  Trésorier  ^  en  jreiop)acen^en(  de  M.  Ménard ,  qui 
remplissait  ces  fonctions,  depuis  plusieurs  années,  avec 


60  JOUEflAL  BS  MÉDBCHIE. 

un  zèle  remarquable,  et  qui  a  succombé,  encore  plein  de 
vigueur,  à  la  suite  d'une  courte  maladie. 

M.  Moriceau  obtient  la  majorité  absolue  des  voix;  il 
est  en  conséquence  proclamé ,  par  M.  le  Président ,  Tré- 
sorier de  la  Section  de  Médecine. 

M.  Moriceau  faisant  partie  précédemment  du  comité 
d'administration ,  il  y  a  lieu  de  pOQr\K>ir  à  son  remplace- 
ment dans  ce  comité;  une  autre  place-  étant  devenue 
vacante  dans  le  même  comité,  par  la  retraite  de  M.  Saillant, 
la  Section  procède  de  suite  à  cette  double  élection. 

MM.  Maguéro  et  Lequerré  obtiennent  la  majorité  des 
sufirages,  et  sont  en  conséquence  proclamés,  par  M.  le 
Président,  membres  du  comité  d'adminisiralion  de  la 
Section  de  Médecine. 

Le  reste  de  la  séance  est  consacré  à  la  démonstration 
de  pièces  d'anatomie  clastique  ,  par  M.  le  docteur  Le- 
ipercier. 

A  8  heures  moins  un  quart,  la  séance  est  levée. 


Séance  du  13  avril  1855. 

PRÉSIDENCE  DE  HT.  M  ABIT. 

En  l'absence  du  Président  et  du  Vice-Président ,  M. 
Mabit,  le  plus  ancien  des  membres  présents,  dans  Tordre 
de  date  du  diplôme,  est  appelé  à  présider  la  séance,  en 
vertu  de  l'article  45  du  règlement. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  le  Secrétaire  a  reçu  une  lettre  de  M.  Beaupoil ,  mé- 
decin à  Ingrandes  (Indre-et-Loire) ,  qui  demande  à  la 
Section  le  titre  de  membre  correspondant,  et  lui  envoie, 
à  l'appui  de  sa  candidature ,  deux  brochures  hititulées  : 
Tune,  de  Ventéropathie  métallique;  l'autre,  de  l'intermH' 
tente  composée. 

Cette  demande  sera  transmise  au  Président  de  la  Société 
Académique. 


JOUBRAt  DE  HÉUBCOOK,  61 

La  Section  a  reçu ,  en  outre ,  les  ouvrages  suivants  : 

i"  Du  Goitre  endémique  dans  le  département  de  ta 
Serne- Inférieure ,  et  de  Tétiologie  de  cette  maladie,  par 
le  docteur  Yingtrinier  ; 

2<'  Bulletin  de  la  Société  de  ^  Médecine  de  Besançon , 
année  1853; 

S*"  Notice  sur  les  eoux  thermales  de  Néris,  par  le  doc- 
teur Riçbond  des  Brus; 

4''  Études  de  Psychologie  médicale^  par  le  docteur 
Dumontt  médecin  delà  maison  centrale  du  Hont-Saint- 
Michel; 

5»  Lettres  a  M.  le  professeur  Rostan,  sur  VBypochondrie, 
par  le  même. 

L'ordre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  le  docteur 
Aubinais,  pour  la  lecture  d'un  travail  intitulé  :  Quelques 
réflexions  sur  les  fièvres  périodiques  pernicieuses  ,  à  Voc- 
ceaum  d'un  accès  de  fièvre  pernicieuse  cholérique,  lequel 
accès  fut  d^abord  pris  pour  un  cas  grave  de  choléra  (1). 

Après  cette  lecture ,  JU.  Rouœeau  fait  à  la  Section  le 
récit  d'un  &it  analogue.  Il  donnait  des  soins ,  avec  un 
antre  médecin ,  à  une  boulangère  de  la  Grenouillère,  qui 
leurparaissait  affectée  d'bépatite  subaiguë.  Us  avaient  em- 
ployé les  émissions  sanguines,  les  purgatifs  et  les  révulsifs, 
sans  obtenir  la  moindre  amélioration  ;  la  malade  manifesta 
alors  le  désir  de  se  fair«  traiter  par  un  homœopatbe.  Ses 
premiers  médecins  durent  en  conséquence  se  retirer;  mais, 
quelques  jours  après,  survint  une  nouvelle  maladie,  beau- 
coup plus  grave  que  la  première  ;  cette  femme  fut  prise 
d'une  iittaque  très^^grave  de  choléra  épidémique,  et  M. 
Rouxeau  fut  rappelé.  Il  trouva  la  malade  dans  l'état  le  plus 
alarmant:  cyanose,  crampes,  vomissements  incessants, 
pouls  à  peine  perceptible ,  absence  d'urine,  etc.  Le  soir, 
le  mal  a  fait  de  nouveaux  progrès ,  le  pouls  ne  se  fait  plus 
sentir.  Le  lendemain,  un  peu  d'amélioration ,  le  pouls 
peut  être  compté,   la  peau  est  recouverte  d'une  légère 


(1)  Voir  pluà  loin,  page  64. 


6^  JûiUJ»]^  DE  MÈWfSSif^ 

moiteur  ;  la  garde  dit  qu'elle  a  observé  «  la  vqIU^,  une 
moiteur  sepabkable.  On  commence  alors  Tadministration 
de  deux  grammes  de  sulfate  de  quinine  en  lavements ,  à 
la  dose  de  50  centigrammes^  d'heure  eo .  heure.  Le  soir« 
rétat  si  grave  de  la.  veille  se  reproduisit  :  le  pouls  devint 
de  nouveau  imperceptible,  les  battements  du  cœur  ne 
présentaient  à  Tauscultatipu  qu'une  sorte  de  tressaillement 
irrégulier.  On  prescrivit  l'administration  de  deux  autres 
grammes  de.  sulfate  de  quinine  en  lavements.  Le 
lendemain,  il  y  eut  enfin. ui)e  amélioration  n^arquae  ;  on 
continua  le  sulfate  de  quinine  plusieurs  jours  encore ,  à 
dosé  d^eroissaiite*  La  nialade  s'esl  cQmpléiement  rétablie. 

Une  circonstance  remarquable  et  qu  il  est  bon  de  nçtçr, 
c'est  que  Te  cathétérisme  pratiqué,  cli^que  jour,  suv  cette 
femme,  donna  isspe,  chaque  fois,  à  une.ceirtaine.quaptité 
d'urine^év^luce  a  50Qgrami]nes;  il  n'y  euiAoïiCjfiQint^.ci^e'A 
elle,  suppression  complète  de  la  sécrétion  urin^ire.  Q^^el- 
ques.  jours  après  la  cessation  des  accidents  ct)o|érique§f«  la 
malade  rendit  une  masse  d^  maiière§  fécales  eMrémèment 
considérable..  Cette,  circonstance,  dit. M,  Rouxe^u,  me 
porte  à  croire  que  nous  nous  étions  trompés  sur  le  dia- 
gnostic de  Taifection  primitive,  et  que  nçùs  n'avions  pç^im 
eu  affaire  à  une  hépatite  subaiguë,  mais  simplement. à  un 
amas  de  matières  sterçorale^. 

Quant  à  l'affection  cholériforme ,  qui  est  survenue  en- 
suite,  M..  Rpuxeau  la  considère  comme  une  attaque  de  fièvre 
pernicieuse,  <lans  laquelle  l'administation  du  sulfate  de 
quinine  a  eu  les  plus  heureux  résultats.  Il  foit  remarquer, 
en  outre,  que  si  le  médicament  a  eu  cette  action,  efficace., 
c'est  qu'il  a  été  absorbé,  et  que,  par  conséquent,  on  a 
émis  une  erreur  .quand  on  a  dit  que,  da^is  le.  choléra  „  le 
tube  digestif  devenait  un  vase  inerte,  dépourvu  de  la  faculté 
d'absorption. 

M.  Thibeauii  a  observé,  avec  M.  Marchand,,  up  cas  de 
fièvre  pernicieuse,  analogie  à  celui  de  M.. Âubinais.  C'était 
pendant  l'épidémie  de  choléra  de  1832:  l'intermittence 
fut  bien  évidente  ,  car  elle  se  manifesta  en  tierce;  le  sul- 
fate de  quinine  fui  administré,  et  le  m^la^e  gyérjt.  Ces  cas 


imJUlfÂL  bB  IlÉDfiCiNE.  63 

de  fièvre  pernicieuse  ne  sont  point  conâidérés,  par  M. 
Tbiheaud ,  colwme  des  cas  de  choléra  ,  quoiqu'bh  les  âtt 
observés  pendant  le  rè^he  de  celte  maladie  épidémique.  Le 
lîholéra,  dit-il,  ne  guérit  point,  malheureusement,  sous 
rinfluencedu  sulfate  de  quinine. 

M.  Hélie  demande  la  parole^  Il  a  entendu  M.  Aubinai$ 
prononcer  son  nom  tôut-à-l'heure  ;  il  fut  appelé,  en  effet, 
à  donner  des  soins  à  Ja  malade  en  question.  Il  la  trouva 
assise  dans  Un  fautedil.  Les  symptômes  qu'elle  présentait 
étaient  ceux  d'une  cholérine  très-légère;  il  prescrivit  quelques 
moyens  dç  traitement  peu  actifs.  Le  lendemain  ,  il  apprit 
que  des  accidents  plus  graves  étaient  survenus  et  que  d*au- 
trçs  médecins  l'avaient  remplacé. 

M.  Hélie  ajouta  qu'il  ne  partage  pas  les  idées  émises 
par  M.  Aubinaili  sur  TappiioatloD  du  principe  :  NâiUPam 
morborum  o^tendunt  cur aliènes.  M.  Aubinais  a  eu  tort, 
suivant  lui ,  de  dire  d'une  manière  générale  ,  que  toute 
affection  grave  ,  cbolériforme ,  guérie  par  le  sulfate  de 
qtiinine,  était  une  fièvre  pernicieuse.  Nous  avoins  tous,  dit 
*M.  Hélie,  âditilnistré  le  sulfate  de  quinihe  dans  certains  cas 
de  choléra,  et  nous  javons  ^u  voir  les  nfiaiadës  guérir  ;  mais, 
est-on  fondé  à  dire  pour  cela  quiB  ces  malades  ont  guéri 
parce  qu'ils  avaient  pris  du  sulfate  de  quinine  ?  Tout  ce 
qu'on  peut  affirmer  ,^  c'est  que  la  guérison  a  eu  lieu  pen- 
dant qu'on  administrait  ce  médicament.  On  aurait  tort 
évidemment  d'attribuer ,  dans  tous  ces  cas,  au  sel  fébri- 
fuge* les  honneurs  de  la  guérison  ;  et  tort  aussi,  par  consé^ 
quent ,  de  conclure  que  tous  ces  malades  étaient  atteints  de 
lièvre  pernicieuse- 

M.  Hélie  dit,  en. teinninant,  qu'ils'élève  seulement  ici, 
d'une  manière  générale,  contre  l'extension  trop  grande 
donnée  par  M.  Aubinais  à  un  principe  de  thérapeutique  , 
qui  n'est  vrai  que  dans  certaines  litnites;  que,  d'ailleurs,  il 
ne  prétend  faire  aucune  application  de  ce  qu'il  vient  de  dire 
au  fait  particulier  contenu  dans  lé  mémoire  de  M.  Aubinais^ 

L'ordre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  ^lartïei^e,  pour 
la  lecture  d'un  travail  intitulé  :  ObHîération  àes  commis 


64  joubuâl  DE  iiédbc^ie. 

biliaires ,  atrophie  du  foie ,  réflexions  sur  Vairophie  simple 
et  sur  Vairophie  symptomatique  de  ce  viscère  (1). 

H.  Malherbe  lit  ensuke  une  observation  de  pneumo- 
thorax,  recueillie  dans  son  service  de  l'HôteUDieu ,  par  M. 
Vallin,  interne  dç  cet  hôpital  (2)r 

Lé  Secrétaire  ^ 

L.-F.  Champenois. 


QUELQUES  RÉFLEXIONS  «flr  les  fièores 
périodiqms  pernicieuses,  à  l'occasion  d'un  accès 
de  fièvre  pernicieuse  cholérique,  lequel  dccès  fut 
d'abord  pris  pour  un  cas  grave  de  choléra, 
par  le  docteur  Pitbb  âubuvais  ,  président  dit 
jury  de  médecine  de  la  Loire-Inférieure, 


On  lie  peut  écrire  sur  la  fièvre  interniittente  perni- 
cieuse ,  saris  se  laisser  guider  par  le  savant  ouvrage  de 
Torti  (Therapêulicespecialis  ad  febres  quasdam  pernîciosas, 
in-4**.  Mutin.  1712).  On  ne  peuf*^,  en  effet,  suivre  un 
meilleur  guide.  C'est  là  îju'on  rencontre  les  grandes  et 
belles  distinctions  établies   entre  les  fièvres  (continues, 


(1)  Voir  plus  loin,  page  82. 
C2)  Voir  plus  loin,  page  98. 


lÙUKSkt  BB  KÉBECINB.  65 

réfniitentes ,  intermittentes).  Pour  justifier  cet  éloge,  it 
suffira  de  citer  leà  paroles  empruntées  au  Compendium  de 
médf^eine  pratique,  a  Torti  a  fait  sortir  de  l'obscurité 
l'histoire  des  fiëyrep  perniûieuses ,  et.  formulé  leur  traite^ 
ment  avec  une  telle  netteté  et  une  t^lle  certitude,  qu'il  n'a 
rien  laissé  à  faire  sur  ce  point  à  ses  successeurs.  Il  a  écrit, 
en  outre,  Tliistoire  du  quinquina,  d'une  maniéré  si  com- 
plète et  si  médicale,  qu'on  peut  encore  le  proposer  pour 
modèl$  dans  ce  genre.  »  >  : 

Torti  désigne  chaque  fièvre  pernicieuse  par  son  symptôme 
culminant.  Il  en  distingue  dix-huit  variétés,  ou  formes 
différe^ntés ,  et  sa  description  de  chacune  de  ces  formes 
est  ^l'uoe  telle  eicactitude  et  représente  si  fidjèlement  la 
nature ,  que  dans  les  meilleurs  ouvrages  qui  ont  été  écrits 
depuiSf  on  ne  peut  en  trouver  de  plus  complète. 

Au  nombre  de  ces  dix-huit  formes  ou  variétés  de  la 
fièvre  périodique  pernioieuse ,  l'on  trouve  la  forme  algide 
(febrisalgida),  la  forme  chptérique  (febris  cholerica).  Ces 
deux  formes  peuvent  se  montrer  réunies ,  et  alors  sj  Ton 
n'y  porte  atteation,  l'accès  simule  une  violente  attaque  de 
choléra  ^et  entraîne  un  vtiriiable  danger. 

Ceux  qui  désirent  bien  connaîtra  cette  forme  de  la  fièvre 
à  accès  pernicieux,  doivent  l'étudier  dans,  les  ouvrages 
des  médecins  élevés  à  l'école  de  François  Torti,  qui  ont 
exercé  leur  art  tlans  les  contrées  méridionales ,  et,  à  ce 
sujet,  je  citerai  {es  études  sur  la  fièvre  perniçième^  publiées 
à  Avignon  ,  en  1 842  ^  par  la  docteur  Gouraud  (pèret) , 
médecin  de  la^suçcursale  de  THôtel  des  Invalides,  études 
qui  sont  le  fruit  de  sa  propre  expérience,  tant  en  Corse 
qu'en  Algérie ,  et  qui  résument  la  pratique  de  plusieurs 
médecins  qui  ont  habité  les  pays  chauds  ;  de  M.  Antonini, 
médecin  de  Ihôpital  du  dey  d'Alger;  dt^  baron  Michel, 
médecin  principal  de  l'hôpital  français  «  à  Rome;  du  doc- 
teur Roux,  médecin  en  chef  de  Tarnlée  française,  en 
Morée  (1829),  etc.,  etc. 

Plus  on  creuse;  les  études  cliniques  des  pyrétologistes , 
plus  on  se  pénètre  de  l'opinion  exprimée .  par  Richard 
Norton  (Ricbardi  Morton,  oper.  med.,  t.  t.  Pyreiologi», 


66  JOtm^Ai  DE  HiMcnvs. 

eap.  6-8,  pag.  S6-40S,  io-i^"  ;  Lugii.  1737),  fet  par 
Weribof  (observaiiones  de  febribos,  pmcipiie  rrriermît- 
tefitibus,  in-4^;  Hanov.  1732-17^5),  il  y  a  déjà  plus  d'oii 
sîëcle  V  à  savoir  que  la  fièvre  intermittente  constitue  un 
véritable  empoisonnement,  dont  ta  nature  du  poison  est 
encore  inconnu-,  et  dont  Tafitidote  est-  le  qui^uina. 

Oans  Tétude  de  cette  fièvre  et  surtout  dans  le  choix  du 
.  traitement  ^  lorsque  le  caractère  insidieux  de  la' -fièvre  est 
révcJQ  par  un  symptôme  dominant,  on  ne  doit  pas  se  laisser 
diriger  par  Te^rit  de  doctrine  qui  peut  conduire  à  une 
nuisible  hésitation.  On  doit  ne  pas  perdre  un  instant  de 
vue  le  précepte  posé  paf  8enac  (de  reconditft  Tebriumi 
naturft) ,  que  le  plus  grand  danger  consisté  dans  le  retard 
que  Ton  apporte  dans  remploi  du  quinquina  (ma/ué  est 
in  morâ  péTiculum  quàm  in  cortice  peruvtano  adhibendô), 
théorème  qui  a  été  mis  de  nouveau  en  lumière  par  Fodéré , 
lorsqu'il  b  écrijidans  ses  leçons  sur  tes  épidémies  j  U)iù.  2, 
pag.  2^1,  les  lignes  suivantes:* 

(t  Lorsqu'il  s'agit  d'un  accès  de  fièvre  périodique  perni- 
cieuse, le  praticien  ne  doit  pas  perdre  un  temps  précieux 
à  combattre  ^Jes  accidents -qui  ne  soKit  que  l'ombre  de  la 
maladie  :  ici,  le  principal  emporte  l'acçessoirev  Le  quin- 
quina doit  être  donné  à  forte  dose  et  sans  aucun  retard.  » 
Cette  pratique,  qui  était  celle  de  Torti ,  a  été  sanctionnée 
depuis  par  H.  Bailly,  deBlois,  dans  sonlroîté  ématotnico- 
patkùlogique  des  fièm^es  intermiUentes  fm-S®,  Paris,  1 825)  î 
par  M.  Nepple,  dans  son  essai  sur  ks  piètres  rémittentes 
et  intermittentes  (in-8'',  Paris,  1828)  ;  par  M.  MaiHot ,  dans 
son  traité  des  fièvres  ou  irritet^ions  cérébro-spinales  inter- 
mittentes (m-S^^  Paris,  1836).  Tous  rces  auteurs, par  one 
rigide  observation  de  faits  cliniques ,.  ont  éclairé  certains 
points  de  l'bistoire  des  fièvres  périodiques,  sans  beaucoup 
s'éloigner  de  la  pratique  de  Torti. 

Aujourd'hui,  tous  tés  médecins  doués  d'un  véritable 
talent  d'observation  imitent  la  conduite  des  praticiens  qui 
se  sont  souvent  trouvés  aux  prises,  dans  les  pays  chauds  , 
avec  le  génie. des  fièvres  périodiques  dé  mauvais  carac- 
tères; ils  donnent  le  quinquina  d'efàbUe  et  sems  RisiktHèn; 


que  ie  malade  êoit  au  début,  au  font  ou  au  dHMn  de 
l^accès ,  du  moment  qu'ils  ont  la  crainte  fondée  que  raccès 
ne  devienne  mortel.  Ainsi  agissait  Sandifori  aux  ties  Bar- 
badés,  SarcDne,  à  Naplès. 

Déjà  Cléghorn  (Observationes  on  the  epidemical  discases 
of  Minorqua) ,  aprèâ  avoir  fait  la  médecine  à  Minorque 
pendant  treize  aîis,  avait  senti  la  nécessité  tl'administref  le 
quinquina  plus  abondamment  et  plus  promptement  aux 
fd^bricitants  de  Ttle  espagnole  qu'à  ceux  de'  l'Angleterre  et 
des  autres  contrées  septentrionales.  Dans  {es  cas  où  la 
fièvre  paraissait  menacer  la  vie,  il  n'était  nullement  retenu* 
par  le  paro^s^ysme;  il  donnait  le  quinquina  sitôt  son -arrivée 
auprès  du  malaiie,  dominé  qu'il  était  par  la  pensée  de 
W«rlbof ,  que  la  fiétre  pemkieuêe  est  un  monstre  qu'il 
faut  étouffkr  dès  sa  naissance,  ^  ' 

C('  serait  s'exposer  à  de  cruels  mécomptes  si ,  ayant  à 
combattre  une  fièvre  dont  Taccès  peut  tuer  ,  on  suivait 
à  la  lettre  ce  précepte  posé  par  Richard  Norton  :  «  Denique 
ne  Gorte$  peruviamns  nec  aliud  quodcumqùé*  febrifugium 
tempore  plKroxismi  propinandum'est,  sed  in  intervallis.  » 
Mais  ,  si  Ton  se  pénètre  de  la  pensée  de  Norton  ,  on  voit 
qu'il  n'entend  point  appliquer  ce*  précepte  à  la  fièvre  qui , 
dès  le  premier  ou  le  second  «ccès,  menace  de  lainr  les , 
sources  de  la  vie. 

On  a  reproché  à  Broûssais  d'avoir  exposé  ses  élèves  à 
une  temporisation  nuisible,^  en  écrivant  :  c  Qu'avant  d'éta- 
blir le  traitement,  il  est  nécessaire  de  connaître  au  juste 
la  gravité  de  l'accès  et  l'état  des  organes  dans  la  pyrexie. 
^-  Toutes  tes  fois  que,  dans  un  accèsi  pernicieux  ,  dit^il , 
la  réaction  s'est  bien  opérée ,  il  faut  combattre  immédiate- 
ment 4es  accidents  qui  existent  actuellement  :' ainsi  i  les 
symptômes  de  gastrite  ,  d'aracbnitis  ,  etc.  ,  seront ,  sans 
aucu^i  retard  ,  attaqués,  soit  par  la  saignée,  soit  par  les 
sangsties.  » 

Il  est  évident  qbe  Br-oussais  n'a  pas  voulu,  dans  «e 
passage,  poser  un  prineipe  absolu,  principe  auquel  il  ne 
serait ,  en  aucune  oirconstanee  ,  permis  de  déroger.  Il 
laisse  à  la  sttgactté^  du  médecin  qui ,  en  toute  occasion  , 


68  JOIIUIÂL  DB  MÉIlBCOIfiw 

ne  relève  que  de  la  scieDce  et  de  sa  conscience ,  le  soin 
de  prendre  le  parti  qui  lui  semble  le  noeilleur  ,  et  je  nie 
rappellerai  toujours  d'avoir  vu  ce  profond  observateur 
donner,  pendant  le  paroxysme  d'un  second  accès  de  .fièvre 
pernicieuse  (sous  le  type  tierce) ,  un  gramme  de  sulfate 
de  quinine,  en  exprimant  la  crainte  que  le  n^ilade  ne  sur* 
vécut  à  cet  accès. 

Le  reproche  adressé,  à  Broussais  a  égaienieat  été  adressé 
à  Alibert  qui ,  dans  sa  dissertation  sur  les  fièvres  perni- 
cieuses ou  ataiiques  intermittentes,  préseptée  et  soutenue 
•à  l'École  de  Médecine  de  Paris ,  le  28  brumaire  an  Vill 
de  la  république  française  ,  a  conseillé  de  faire  une  étude 
'  profonde  des  divei*ses  pblegmasîes  qui  accompagnent  les 
fièvres  dé  mauvais  caractères^,  afin  de  combattre  ces  pMeg- 
masies,  qui  souvent  constituent  la. gravité  de  Ces.  fièvres. 
Oxï  a  dit  qu'il  avait  trop  perdu  de  vue  le  génie  de  la  fièvre, 
qu'il  en  avait  plutôt  poursuivi  l'ombre  qiie  le  génie  fui- 
même.  Assurément,  ce  reproche  n'est  pas  encore  fondée  A 
la  lecture  de  cette  remarquable  dissertation ,  et  surtout 
d.es  travaux  que  le  médecin- de  Thôpital  Saint-Louisa  pu* 
bliés  depuis  sur  les  fièvres  intermittentes  pernicieuses  ,  on 
voit  qu'il  est  continuellement  préoccupé  d'arrêter  la'  fièvre. 

c«  Dans  le  traitement  des  fièvres  ataxiquës  intermittentes, 
dit-il  ,  à  la  page  199  de  sa  thèse ,  les  indications  sont  de 
la  plus  grande  évidence  ,  et  l'art  y  procède  avec  une  cer- 
titude presque  géométrique.  La  gravité  des  synàptômes 
qui  se  manifestant  repousse  te  méthode  d'expectation ,  et 
le  soin  le  plus  pressant  du  médecin  doit  être  de  s'opposer 
au  retour  de  l'accès.  Aussi,  {tfercatus  avait-il  déjà  entrevu 
la  nécessité  de  se  hàler<lans  leur  traitement.  «  Celui ,  dit 
Leroy  (du  pronostic  dans  les  maladies  aiguës,  page  81)  , 
qui ,  dans  une.  fièvre  intermUtente  maligne  -,  négligeant 
l'usage  du  quinquina ,  s'attendrait  à  .la  voir  se  terminer  par 
une  crise  ,  soit  proprement  dite  ,  soit  par  voie  de  solution, 
i^elui-là  serait  évidemment  téméraire  et  dépouiv,u  de  toute 
connaissance  de  cette  ^maladie.  )>.Les  vues. sages  émises 
par  Broussais  el  par  Alibert  ne  sauraient,  du  reste,  s'ap 
pjiquer  aux  fièvres  pernicieuses  observées  dans  les'  pays 


JOUBNÀL  DE   MÉDSdNS.  69 

chauds,  et  s  il  restait  encore  dans  Tesprit  des  médecins 
nourris  à  Técoie  de  ces  illustres  mattres  quelque  tendance 
à  la  temporisrition  ,  ils  font  vite  table  rase  des  opinions 
qu'ils  se  sont  formées  lorsqu'ils  étaient  sur  les  bancs^  pour 
suivre  ,  en^  tous  points  ,  la  pratique  des  hommes  expéri- 
mentés. Pour  se  fortifier  dans  cette  opinion  ,  il  leur  suâU 
de  méditer  l'ouVrage  de  Lind,  sur  les  maladies  des  Euro* 
péens  dans  les  pays  chauds.  Un  médecin,  qui  a  longtemps 
dirigé  rhôpital  militaire  d' Ajaccio ,  le  docteur  Tliioude  la 
Chaume  ,  a  écrit  : 

<i  Si  Ton  ne  brusque  pas  toutes  les  fièvres  intermit- 
tenles  pernicieuses  par  de  fortes  doses  de  quinquina  ,  les 
malades  penvent  périr  avant  le  troisième  accès ,  comme 
nous  ïayons  vu  pendant  noire  séjour  en  Corse.  »  Ces  ci^ 
tations,  que  je  ne  multiplierai  pas,  me  conduisent  natu* 
Tellement  à  rechercher  si  ,  dans  1»  département  de  la 
Loire-Inférieure,  il  n'est  pas  commun  d'observer  les  fièvres 
à  accès  pernicieux  ,  et  si  ces  fièvres  n«  présentent  pas , 
dans^certaines  pirconstances,  toute  la  gravité  des  fièvres 
des  pays  chauds.  Ces  recherches  seraient  assurément  de  ta 
plus  haute  utilité  ,  et  notre  Section  de  Médecine  l'a  com- 
pris ,  lorsque-,  dans  son  sein  ,  il  fut  proposé  de  faire  de 
cette  question  une  question  de  concours  pour  le  prix 
annuel  que  décerne  notre  Société  Académique. 

Les  départements  sont  loin  de  posséder  dés  travaux 
d  ensemble  de  géographie  et.de  topographie  qui  établissent 
leur  constitution  médicale  et  fassent  connaître  les  épidé- 
mies qui  prennent  leurs  sources  dans  la  nature  du  climat, 
du  sol,  etc.,  etc.  Cependant ,  ces  topographies,  dressées 
par  k's  praticiens  des  localités,  seraient  le  document  le  plus 
propre  à  appeler  TaUention  du  chef  de  FÉtat  sur  l'assai- 
nissement de  ces  localités  maisames.  Il  paraîtrait  que  des 
réclamations ,  basées  sur  des  rapports  médicaux  qui  éta- 
blissaient combien  la  Sologne  était  décimée  par  des  mala- 
dies endémiques,  n'auraie^U  pas  peu  contribué  à  décider 
le  Gouvernement  de  f  Empereur  à  ordonner  les  grands 
travaux  d'jassaihissement  de  cette,  contrée,  jusque-là  si  dé- 
laissée. Qui  ne  connaît  les  études  pyrétologiques  de  MM. 


70  JOtRNÂL  DE   MÉtedftlS. 

Nepple,  Bailiy,  de  6lots ,  Bretonneau ,  de  Tours ,  Fopget 
et  Toardes,  de  Strasbourg,  et  les  recherchas  qui  ont  feit 
apprécier  les  fièvres  intermittentes  dans  leurs  rapports 
avec  d'autres  maladies.  Les  noms  de  MM.  Andoùard  ,  Bou- 
din, Maillot ,  rappellent  ces  belles  recherches  faites  en 
France ,  comme  en  Algérie  ;  et  avec  quel  intérêt  l'Aca- 
démie de  Médecine  n*a-t-elle  pus  écouté  ,  il  n*y  a  que 
quelques  années,  le  remarquable  rapport  qui  lui  fut  lu  sur 
les  travaux  de  M.Chaçsinat,  travaux  qui  avaient  pour  but. 
la  comparaison  entre  eux  des  cas  de  phthisie  ,  de  fièvre 
iyphofde  et  de  fièvre  intermittei'ite  daiis  les  ports  de  Brest, 
Toulon ,  Roohcfort. 

Aucuns  travaux,  que  je  sache,  de  géographie  médicale 
tendant  à  établir  les  constitutions  épidémiques  de  notre 
département,  et  ici  je  veux  parler  dé  travaux  d'ensemble, 
n'ont  été  tentés  jusqu'à  ce  jour.  C'est  un*  fait  regrettable, 
car,  pour  ne  parler  que  dtes  travaux  relatifs  à  l'étude  de  la 
fièvre  intermittente  ,  confibien  cette  fièvre  ne  trouve-t-elle 
pas  dé  foyers  qui  la  développent  dans  les  dix  sept  mille  hec- 
tares de  marais  dVau  ^douce ,  les  deux  mille  hectares  de 
marais  salants  ,  et  Jes  bent  mille  hectares  de  landes  que 
contient  environ'  le  déparlement  de  la  Loire-Inférieure. 
J'ai,  compris  les  landes  comme  terrains  qui  dégagent  le 
miasme  des  fièvres  périodiques  ,  en  tant  seulement  que  ces 
landes  sont  en  voie  de  défrîcheîment;,  car  tout  remuement 
de  lérreô  incultes  est  toujours  accompagné  du  dégage- 
ment de  ce  miasme ,  qui  n'est  pas  seulement  le  propre  des 
eftluves  marécageuses.  ~ 

Tous  les  nvédecinsqui  iBxercent  leur^irt  parmi  les  po- 
pulations qui  avoisinent  le  lac  de  Grand-Lieu  ,  le  plus 
grand  lac  de  France,  les  étangs  de  rarroridissement  de 
Châteaubriant ,  les  marais  d'eau  douce  et  salée  des  arron- 
dissements de  Savenay  et  de  Paimboêùf,  ont  pu  observer 
avec  stfin  toutes  les  formes  que  le  ç^énie  des  fièvres  inter- 
mittentes sait  revêtir  V formes/ aussi  variées  que  bizarres, 
et  qui  n^onl  pas  toutes  été  signalées  par  Tortî.  Si  Difeu 
m'en  donne  le  temps ,  j'achèverai ,  je  respère ,  l'essai  de 
topographie  et  de  géologie  médicale  de  rârrémdissement 


foi^ii.  DE  uÈVBcam*  71 

de  Paiiir^hœuft  J>i  beaucoup  de  noies  élaborées  qu^  je  n'ai 
plus  qu'à  coordonner.  Je  connais  cet  arcondissement  pour 
l'avoir  parcouru  jours  et  iVuils  dans  toutes  &es  directioas 
pendant  quinze  années  \  et  je  donnerai  le  tableau  abrégé 
de  toutesi  les  fièvres  qui  m'ont. paru  offrir  des  ikccès  ,  des 
accidents  pernicieux.;  Je  comparerai  les  fièvres ,  quant  à 
leur  degré  d^  gravité ,  qui  se  montrent  le  long  de  cette 
long,ue  zone  circulaire  de  marais  d'eau  douce  et  salants 
qui  s'étendent  depuis  la  Loire  au,  lac  de  Grand*-Lieu ,  et 
de  là  à.  Machèçou).,  et  de  cette  dernière  ville  jusqu'à  la 
Bernerie  ,  entre  Bourgneuf-en-Retz  et  Pornic.  Je  parlerai 
aussi  des  fièvres  des  marais  de  Haute- Perche  et  de  la  Gi- 
guenais.,  et  jç  comparerai ,  dis-je  ,  toutes  pes  fièvres  par 
miasme  paludéen .  avec,  celles  quj  se  développant  dans 
l'intérieur  des  terres  et  sur  des  plateaux  éloignés  des 
effluves  marécageuses  ;  et ,  de  celte  comparaison  ,.  il  ré- 
sultera,que  remj[)oisQnnement  (|ui  constitue  la  fièvre  est 
d'autant  plus  redoutable ,  que  les  habitations  sont  plus 
rapprocliées  des  marais.  Il  resté  de  belles  études  à  faire  sur 
cet  empoisonnement  paludéen.  Ainsi,  on  a  beaucoup  écrit 
sur  les  accès  de  fièvre  qui  sont  la  manifestation  de  cet  em- 
poisonnement; mais  il  est  un  empoisonnement  lent,  qui  ne 
se  manifeste  quç  tardiyeiïient  par  des  act  es  à  stades  régu^ 
liers  ;  c'est  une  soi^te  de  période  d'incubation  du  miasme, 
pei^dant  laquelle  lesorgaues  vitaux  éprouvent  une  commo- 
tion gradueue  et  générale,  qui  va  bientôt  déplacer  suc- 
cessivement les  forces  motrices  de  la  périphérie  au  centre, 
(lu  centre  à  la  périphérie  du  corps,  et  produire  cette 
irritatiqu  nerveuse  qui  va  agiter  ,.  avec  un  grand  tumulte, 
ainsi  que  le  disait  Âlibért,  Te  système  circu{atoire>  «t  con- 
gestionner la  rate.  £h  bien  !  cette  période  d'incubation  du 
miasme  puituléen  n'a  pas  été  étudiée  avec  assez  de  soin , 
et  cependant  cette  étude  est  de.  la  plus  haut^^ importance  ; 
car,  avant  que  la  fièvre  éclate ,  si  le  malade  9  dont  l'écono- 
mie est  ^ux  prises  avec  le  miasme  marécageux ,  vient  à  fuir 
vers  un  lieu  élevé,  loin  du  foyer  de  l'infection  ,  quelques 
jours  passés  dans  ce  lieu  salubre  ont  suffi  souvent ,  avec  le 
secours  d'une  tisane  amère,  telles  que  celte  de  petite  oen- 


72  joubuai.  de  «ëmcirb. 

tauréfi  ,  pour  faire  jivorter  le  miasme  et  en  faire  cesser  la  , 
période  d'imprégnaiion.  Beaucoup  de  domestiques  d'habita-^ 
tions  situées  au  milieu  des  marais  venaient  me  consulter 
pour  épargner  le  prix  d'une  visite.  Je  leur  épargnais ,  moi , 
la  fièvre  ,  alors  qu'ils  n'étaient  que  dans  la  période  d'incu- 
bation ,  en  leur  conseillant  de  prendre  une  tisane  amère , 
quelquefois  un  vomitif  ou  un  purgatif,  suivant  l'indication  , 
mais  en  leur  enjoignant ,  et  c'était  là  l'ancre^ile  salut ,  de 
séjourner  pendant  un  temps  convenable  à  leur  guérison , 
chez  leui^  jparents ,  lorsque  ceux-ci  demeuraient  loin  des 
marais.  Si  c'en  était  ici  le  lieu  ,  je  blâmerais  les  hautes 
doses  de  sulfate  de  quinine  que  certains  malades  avaient  le 
soin  de  prendre  avep  persévérance  dans  le  but  de  se  dé- 
barrasser de  la  fièvre,  sans  pouvoir  Souvent  y  réussir,  au 
heu  de  suivre  le  conseil  qu€|  je  leur  donnais  de  fuir  la 
localité  où  ils  avaient  gagné  la  fièvre.  Chacun  sait  que  c'est 
là  le  meilleur  moyen  de  faire  cesser  les  fièvres  invétérées. 

En  disant  qu'aucuns,  travaux  importants  n'ont  été 
publiés  dans  ce  département,  à  ma  connaissance,  sur  les. 
fièvres  périodiques  causées  par  les  miasmes  marécageux,  il 
est  bfen  entendu  que  j'ai  voulu  dire  qu'aucuns  travaux  sé- 
rieux dé  géographie  médicale  n'avaient  été  livrés  à  l'im- 
pi*ession ,  car  les  fièvres  périodiques  ont  été  étudiées  par  de 
bons  observateurs  qui  nous  ont  fait  connattre  le  fruit  de 
leurs  études,  et,  à  ce  sujet,  j'éprouve  un  vrai  plaisir  à  citer 
le  nom  de  mon  honorable  ami,  le  docteur  Marcé ,  médecin 
de  f Hôtel-Dieu  de  Nantes.  Il  y  a  même  à  dire,  pour  être 
juste ,  qu'une  conquête  a  été  faite  par  les  habiles  médecins 
de  cet  hôpital.  Ce  sont  eux  qui  paraissent  avoir  été  les 
premiers  à  fixer  l'attention  de  la  science  sur  un  signe  qui 
semble  appelé  à  dévoiler  le  caractère  pernicieux  de  la 
fi^vré  intermittente,  ou  rémiltente.  Je  veux  parler  de  la 
pâleur  extrême  de  la  langue,  jointe  à  la  laxité  et  au  défaut 
de  caloricité  des  tissus  de  cet  organe.  Il  arrivé  que  la 
langue  se  montre  d'une  pâleur  telle  qu'elle  semble  exsangue 
et  dune  flaccidité  de  tissus  qu'elle  semble  avoir  macéré 
dans  de  l'eau,  quand  on  a -affaire  à  une  fièvre  qui  va 
prendre  le  caractère  pernicieux  ;   mais  j'observerai  que 


JOimNâL  DE  HÉDBCINE.  73 

Texamen  attentif  de  nombreux  malades  m*a  appris  qu'il  rry 
a  pas  que  la  langue  qui  soit  décplorée  d'une  manière  si 
caractéristique,  tQutes  les  muqueuses  visibles  à  Tgeil  le 
sont:  ainsi,  kumaqueuSie  labiale,  la  buccale,  la  conjonctive 
palpébrtile  ct.mème  le  petit  corps,  cliarnu,  qui,  placé  daas 
l'angle  interne  de  Tœil,  porte  le  nom  de  caroncule  lacrymale. 
Cette  pâleur  de  la  langue,  sa  largeur,  la  température  basse  et  la 
flaccidité  de  cet  organe,  a  tel  point  qu'il  semble  avoir  séjourné 
dans  Teau  pendant  plusieurs  heures,  restent  évidentes  pen- 
dant tOQt  le  temps  que  dure  la  période  pernicieuse  ;  mais 
sitôt  que,  sous  l'action  du  sulfate  de  quinine  ou  de  quin^ 
quina,  le  caractère  insidieux  de  la  fièvre  ton>be4  la  langue 
paraît  moins  décolorée ,  moins  fanée,  moiùs  flétrie,  elle 
devient  aussi  moins  molasse  et  moins  froide,  et  de  jour  en 
jour,  à  mesure  que  l^e  danger  s'éloigne,  elle  prend  de  rank- 
mation.  On  o  donné  à  cette  décoloration  toute  remarquable 
deJa  langue,  le  nom  dé  couleur  feuille  tnorle.  Je  ne  suis  pas 
assez  versé  dans  la  connaissance  et  l'appréciation  des  cou- 
leurs pour  savoir  si  la  couleur  feuUle  morte,  bien  connue 
des  ouvriers  des ^Aobêlins,  doniie  bien  l'idée  de  la  décolo- 
.ration  delà  langue  jdans.  la  fièvre  périodique  pernicieuse , 
et  rend  bien  la  vérjté.  C'est  une  décoloration  suigeneris, 
qu'il  faut  avoir  ;vue^  pour ^en.  avoir  une  idée  bien  netter. 
(Lixigua  prppria.) 

4^  me  hâte  (('arriver  à  l'observation  de  fièvre  pernicieuse 
cholérique  -qui  a  donné  lieu  à  ce  petit  travail,  et  qui  en 
constituera  tout  Tintérfet,  si  jamais  il  mérite  quelque  intérêt. 

.     "        OBSERVA  tlON. 

M "^^  Albert,  âgée  de  60  ans,  d'une  cotistilution  ner- 
veuse, joui  1  d'une  lH>nne  santé.  Elle  ne  se  souvient  pa^ 
d'avoir  jamais  ^té  gravement  malade.  Ë^le  éprouve  brus- 
quement de  vifs  chagrins,  à  Gand,  par  suite  de  la  ferme- 
ture ^  inattendue  du  théâtre,  où  sa  demoiselle,  vient  de  dé- 
buter en  qualité  de  première  chanteuse.  Elle  a  été  aussi 
en  proie,  dans  cette  vill^,  à  de  cruelles  émotions,  à  une 
frayeur .  cbniitiue  causée  par  lea  ravages  du  choléra.  Elle 


74  JOUBM^t  «B  KÉIIBGniB* 

n'a  portant  pas  éprouvé  de.  derangemenU  des  voiesiiiges- 
tives ,  à  r«jLception  du  jour  dé  son  départ  pour  Paris,  où, 
pendant  tout  le  voyage  par  le  chemin  de-fer,  elle  a  eu-des 
coliques  fort  douloureuses.  Pendant  son  séjour  à  Paris,  qui 
e^  d'une  semaine,  les  coliques  ne  cessent  pas,  quoique  plus 
supportables  ;  eKes  sûnt  accompagnées-  de  diarrhée., ,  ce 
que  la  malade  attribue  à  Teau  de  la  Seine;  elle  ne  coi>Si|ite 
point  de  méde^n,  eUe  ne  fait  emploi  d'aucun  «aimant 

Elle  arrive  à  Nantes ,  et  après  avoir  pris  l'air  du  théâtre, 
elle  sia  préoccupe  du  sort  qui  attend  les  débuts  de  sa  lUIé, 
préoccupation  d'autant  plus  vive  à  mesure  que  le=  jour,  des 
débuts  approche,  quelle  connaît  la  cbute...devant  ri>pfaiou 
publique  du  plus  grand  nombre  des  débutants.  Devant  cette 
contention  d'esprit,  elle  sent  ses  aer&s'agacer«  elle  cherche 
à  les  calmer  ainsi  que  les  coliques  et  la  diarrhée  qui  con- 
tinuent à  la  tourmenter^  par  des  infusions  de  tilleul  avec 
addition  d'eau  de  fleurs  d'oranger.  Elle  a  remarquéi  depuis 
deux  jours,  que  vers  les  trois  heuresilu  soir,  elle  est  prisé  de 
froid  aux  pieds  et  aux  mains,  puis  d'un  élatdé  malaise  gé- 
néral, ensuite  de  chaleur  à  la  p^u,  de  douièùr» de  tète:  elle 
éprouve  alors  l'envie  de. boire  des  boissons  froides*  (elle 
croit  bien  avoir  eu.  un  peu  de  fièvre),  et  elle  ^décides 
faire  appeler  un  raédecifr,  surtout  pçur  calmer  les  coliques 
qui,  loin  de  cesser,  paraissent  augmenter;  il  en  est  de  même 
de  la  diarrhée.  Notre  honorable  collègcle,  M.  HéUe,  voit  la 
malade.  Son  état  ne  paraît  offrir  rien  d'ihquiétànt;  il  se 
borne  à  lui  donner  quelques  sages  conseils,  à  lui  .prescrire  un 
régime  convenable  el  l'usage  de  calmants. 

La  malade  ne  passe  pas  Aial  la  première  moitié  Je  la 
Journée  du  10  décembre ;^  mais,  vers  tt'ois  heures  après 
midi,  elle  est  prise  du  frisson  de -la  veille^  accompagné. d'un 
intiment  tel  de  courbature  générale ,  de  sidératipn  das 
forces,  qu'elle  a  à  peine  le  courage  dé  se  déshabiliéur.  EUe 
n'est  pas  montée  au  lit,  qu'elle  éprouve  uu  froid  glacial 
aux  extrémités  pelviennes  et  thoraciques  d'abord ,  ^  puis 
dms  la  région  des  reins  :  Jes .  dents  claquient  d'One  n^ai- 
nière  fatiguante  et  le  besoin  de  vomir  se  fait  vîte  si^ntic. 
Au  bout  de  quelques  mimites,  les  vomissemeois  sont  Jur 


KKIBHAI.  DS  vAuLiamk  75 

ceasants,  1«9  oolîcpies  prennent  une  grande  intensilé;  elles 
s'accompagnent  de  cranapea  dans  les  cuUses  et  surtout 
dans  les  mollets.  Des  évacuations  divines,  d'une  od^r  fé- 
tide ,  se  répètent  tellement,  qu'en  moins  de  trois  heures  elle 
compte  avoir  été  plus  de  vingt  fois  à  la  selle ,  el  chaque 
garde-robe  est  précédée  ou  suivie  de  vomissements  peu 
abondants  de  matières  liquides  d*une  couleur  porracée  et 
d'une  amertume  prononcée.  Cet  état  s'aggrave  encore  de 
crampes  tellement  douloureuses  et  tellement  rapprochées , 
quelles  arrachent  à  la  patiente  des*  cris  perçants.  £n  ma 
qualité  de  médecin  du  Théâtre^  le  Directeur  me  prie 
d!aller  de  suite  voir  la  malade  :  il  était  alors  8  heures  du 
soir;  . 

Voici  Tétat.de  la  malade: 

La  peau  est  froide  comme  du  marbre /les  mains  sont 
légèrement  cyanosées;  il  en  est  de  même  des  pieds  :  les 
jambes  sont  rapinrochées  des  cuisses  et  celles-ci  dû  siège, 
par  des  crampes  qui  paraissent  occasionner  les  plus  horri- 
bles souffrances.  La  voix  est  cassée,  presque  éteinte;  la 
langue  est  très-large,  mdiiàsse  et  iremblottante ,  elle  est 
froide  et  recouverte  d'un  endpit  verdâtre  :  j'ai  le'  soin  de 
la  laver  avec  de  l'eau  froide,  et  elle  me  paraît  de  suite 
avoir  la  coToration  terne  et  d'une  pûleur  remarquable,  qui 
caractérise,  sous  le  nom  de  couleur  de  feuille  morte /la 
fièvre  périodique  pernicieuse.  Je  m'arrêtais  à  cette  pensée 
que  la  mabide,  qui  avait  éprouvé  les  jours  précédents, 
toujours  à  la  même  heure,  un  léger  paroxysme  fébrile ,^ 
était  cette  fois  sous  le  ooup  d'un  accès  de  fièvre  perni- 
cieuse cholérique;  cependaat,  j'avoue  qué^  sans  cette 
circ(H)staBce  de  petits  accès  de  fièvre  à  heure  fixe,  les  jours 
précédents ,  et  sans  aussi  l'examen  des  matières ,  des  vor 
missements  et  des  évacuations  alvines  qui  n^étaient  pas  de 
la  nature  si  caractéristique  àaes'  selles  du.  choléra- mor bus, 
j'eusse  é(é  disposé  à  admettre  un  cas  grave  de  choléra ,  bien 
que;  depuis  une  quinseainede  jours,  le  choléra  eût  à  peu 
près  disparu  de  notre  ville.  Je  fis  entourer  la  malade  de 
boQteiliiBs  d'eau  booitlante;  je  lui  repassai  ia  colonne  ver- 
tébrale avee^uii  fer  que  je.  promenais  sur  un  long  morceau 

7 


76  JOUBNAL  BB  mÉDECIllE. 

de  flanelle,  sur  lequel  j'avais  jeté^  de  Feau  de-  Cologne  , 
pendant  que  l'on  courait  chercher  un  x^îtron  ei  de  la  glace, 
ainsi  que  de  la  &rine  de  moutarde.  Bientôt  des  cataplas- 
mes de  moutarde  pure  furentappliqués  autour  des  pieds  et 
dès  poignets  et  sur  la  région  épigastrjque.  Pour  toute  mé*- 
dication  interne.,  on  se  bornait  à  engager  la  malade  à  sucer 
un  peu  de  glace  pilée ,  qui  était  arrosée  par  quelques 
gouttes  de  jus  de  citron  et  par  quelques  gouttes  d'éther.  sui- 
furique. 

Cette  médication  fut  soutenue  jusque  vers  l'heure  ^e 
minuit,  sans  avoir  réussi  à  produire  la  moindre  iréac- 
tion  :  tes  crampes  avaient  pourtant  perdu  de  leur  inten- 
sité, le$  vomissementâ  étaient  moins  incessants;  «t  les 
selles,  qui  étaient  involontaires,  avaient  toujours  l'odeur 
d'une  grande  fétidité.  Quant  au  pouls ,  il  était  filiforme  ; 
on  avait  même  quelquefois  de  la  peine  à  le  saisir.  Cet  état, 
do  la  plus  haute  gravité,  avait:  nécessité  Tasâistançe  d*un 
prêtre,  et  la  malade  venait  de  recevoir  rÈxtrème-Onction 
avec  toute  la  liberté  de  ses  facultés  intedectueiles  ^  lors- 
qu'elle fut  prise  d'un  état  de  syncope  qui  exigeait  continuel- 
lement finspiration  des  vapeurs  d'éther  et  d*acide  acétique 
et  aussi  le  lancement  au  .visage  d'eau  froide.  Je  confesse 
que  je  m'attendais  à  voir  la  vie  cesser  promptement ,  et  que 
ce  ne  fut  que  pour  sauvegarder  ma  refsponsabilité  que  je 
fis  chercher  un  de  mes  collègues. 

Il  était  environ  une  heure  après  minuit,  lorsque  H.  le 
docteur  Charryau  fils  arriva.  La  malade  était  alors  un  peu 
moins  mal  :  il  y  avait  un  semblant  de  réaction,  et  bien  que 
mon  confrère  crût,  comme  moi ,  à  une  mort  très- rappro- 
chée, nous  arrêtâmes  d'essayer  le  sul&te  de  quinine -à 
doses  élevées.  Sur  les  deux  heures  après  minuit,  la  réac- 
tion était  plus  Apparente.  Le  pouls  était  plns-saisissable, 
et ,  bien  que  la  déglutition  parût  .encore  difficile ,  la  ma- 
lade put  cependant  avaler  20  centigrammes  de  sulfate  de 
quinine  dissous  iflans  une  cuillerée  d'eau  à  la  glace,  avec 
addition  dé  quelques  gouttes  de  jos  de  citron  et  deux 
gouttes  d'éther  sulfurique.  Très-exactement  de  demi<-heure 
en  demi-heure ,  on  fit  avaler  ,  de  la  même  imanière ,  20 


lovKPtkh  BB  MÉinGirai,  77 

centigrammes  de  siel  de  cpiinine,  et  la  malade  en  ingéra 
quatre  grammes  -  dans  les  24  heures.  Le  fébrifuge  fut 
nriieux  supporté  par  Testomac  qu'on  aurait  pu  le  supposer 
tout  d'abord  ;  il  y  eut  cependant^  dans  les  trois  premières 
heures,  deux,  vomissements  qui  durent  rejeter  une  partie 
du  médicament  ;  mats  les  vomissements  cessèrent  et  les 
évacuations  divines  diminuèrent  également  à  mesure  que 
la  réaction  s'accomplissait.  Vers  les  huit  heures  du  lende- 
main ,  la  réaction  était  assez  prononcée  pour  qu'on  dût 
renoncer^  continuer  les  sinapismes. 

Je.  coupe' court  fi  celte  observation  qui,  délayée  désor- 
mais dans  trop  de  détaiJs ,  ferait  perdre  de  vue  l'intérêt 
qui  s'attache  aux  symptômes  culminants.  Qu'il  suffise  de 
savoir  que,  bien  que  quatre  grammes  de  sulfate  de  quinine 
eussent  été  ingérés  dansjes  premières  24  heures,  l'accès 
se  fit  néanmoins  sentir  le  lendemain  deux  heures  plus  tard 
que  la  veillô  :  mais  le  paroxysme  ne  fut  pas  intense,  et.  tout 
laissa  espérer  qu'en  continuant  le  sulfate  de  quinine,  on  ar- 
rêterait les  accès  subséquents.  M"*  Albert  continua  de 
prendre,  pendant  six  jours  consécutifs,  quatre  grammes  de 
sel  fébrifuge  par  24  heures,  et,  comme  ce  médicanient 
héroïque  avait  réussi  au-delà  de  nos  espérances,  on  en 
diminua  la  quantité.  Celle-ci  fut  réduite  à  deux  grannmes 
par  jour,  puis  à  un  gramme,  enfin  à  cinquante  centigram- 
mes; cependant,  Kemploi  de  ce  moyen  ne  cessa  entiè- 
rement que  le  30  décembre,  époque  à  laquelle  la  guérison 
parut  radicale. 

J'avais  oublié  de  dire  qu'à  dater  du^ jour  de  l'invasion  du 
terrible  accès  de  fièvre,  il  y  avait  eu  suippression  entière  des 
urines  jusqu'au  septième  jour.  La  palpation  de  la  région 
sus-pubienne  ayant  laissé  croire, à  rabsènce  d'urine  dans 
la^  vessie ,  on  avait  ajourné  l'application  d'une  algaiie.  Il 
ne  devint  pas  néeessaîrèsde  recourir  aU  cathétérisme;  lu- 
rine  prit  son  libre  cours,  ainsi  qu'il  a  été  dit,  le  septième 
jour  ;  et ,  à  :  dater  de  ce  moment,  chaque  journée  annonçait 
un  prompt  retour  a  la  santé.  Aujourd'hui,  20  février  ^  la 
guérison  ne  s'est  pas  démentie. 


78  lOUUIAL  DB  HteSOlHB. 

RÉFLEXIONS. 

Torti  empruntail  au  symptôme  le  plus  cafaninant  la  dé- 
nomination qu'il  imposait  à  chaque  fièvre  pernicieuse  ;  mais 
il  existe  des  fièvï*eà  qui  offrent  en  même  temps  plusieurs 
symptômes  dominants ,  et  dont  aucun  n'est  précisément 
culminant j  d'après  la  rigoureuse  acception  ou  àignification 
du  mol  ctilmtfumi. 

Cette  difficulté  dans  le  choix  de  la  dénomination  à  im- 
poser aux  maladies,  justifierait  en  partie  la  bfsuirre  nomen- 
clature admise  par  M.  le  professeur  Piorry,  si  dette 
nomenclature  ne  supposait  une  profonde  connaissance  des 
racines  des  langues,  surtout  de  la  langue  grecque ,  connais- 
sances en  linguistique  que  les  médecins  les  plus  savants 
ne  possèdent  pas  toujours.  Ainsi ,.  dans  robservation  qui 
précède ,  trois  synnptômes  se  distinguent  parmi  tes  autres  : 
le  froid  de  la  peau ,  la  fréquence  des  vomissements ,  Tégale 
fréquence  des  déjection?  alvines.  Laquelle  des  trois  déno- 
minations suivantes,  puisqu'elles  sont  toutes  les  trois  admises 
par  les  auteurs,  fièvre  cUgide ,  fièvre  vomitive,  fièvre  cfto- 
Wn'çu^,  choisirez- vous?  Cette  réflexion  fait  voir  combien 
il  est  difficile  de.  trouver  une  dénomination  nette,  claire, 
précise ,  ponr  une  maladie ,  et  c'est  ce  qui  explique  pour- 
quoi certains  noms  bizarres,  tel  que  celui  de  Croup ,  par 
exemple ,  mot  d'origine  écossaise,  resteront,  longtemps  dans 
la  science.  Ceci  dit,  il  est  facile  de  déduire  les  raisons  qui 
empêchèrent  vite  de  persister  à  croire  que  M"**  Albert  était 
prise  du  choléra  ;  et  cependant ,  celte  pensée  devait  venir 
tout  d*abord,  d'autant  plus  naturellement,  qu'à  l'époque  du 
iO  déceit)bre,  jour  de  l'apparition  de  l'accès  pernicieux, 
l'épidémie  cholérique  qui  a  ravagé  Nantes  avait  à  peine 
disparu.  Les  raisons  qui  ont  fait  diagnostiquer  une  lièvre 
intermittente  pernicieuse  cholérique ,  se  tiraient  surtout  de 
la  connaissance  apprise  par  la  malade  qiie  les  jours  pirécé- 
dents,  à  pareille  heure,  elle  avait  éprouvé  un  léger  paroxys- 
nié  fébrile.  En  outre,  les  vomissements,  les  déjections  al- 
vinés ,  étaient  de  nature  bilieuse  et  d'une  entrôme  fétidité. 
Or,  on  sait  que  les  vomissements  et  les  évacuations alvines 


jManOi  BB  ,iiÉ0«aM.  79 

sont  d'upe  nature  sut  gêneris ,  nature  qui  jette  un  grand 
jour  «ur  le  diagnostic. 

Dans  la  fièvre  ciiolérique,  la  eonceRtràtion  des  mou- 
veoients  organiques  de  la  périphérie  au  centre  du  corfts 
détermine- le  froid  de  la  peau^  car  la  caloricitéf  cette 
propriété  du  corps  humain  de  conserver  sa  température 
dé  30  à  32  degrés,  diniiniie  par  Taffaiblissement  de 
l'exercice  de,  la  sensibilité  à  fur  et  à  mesure  que  les  dé- 
jections alvines  brisent  les  forces  par  leur  fréquence.  On 
peut  même  dire  qu'il  n'y  a  pas  de  fièvre  pernicieuse  cfao- 
léricpiesans  le  refroidissement  des  extrémités;  mais,  dans 
cette  fièvre  toujours  grave,  l'estomac  devient  surtout  le 
siège  d*une  ardeur,  d'une  anxiété  extrêmes .:  delà,  le  be- 
soin instinctif  des  boisâons  froides;  de  là,  le  l)ien&it  de 
ces  boissons,  que  Ton  ne  doit  donner  que  par  très-petite 
quantité  à  la  fois;  car,  il  paraît  prouvé  que,  danslecho^- 
léra  ,  la,  fonction  dVhsorption  de  la  part  de  l'estomac  est  à 
peu  près  entièrefnent  paralysée,  et  la  paralysie  de  cette 
inopor tante  fonction  doit  être  prise  en  grande  considération  : 
elle  doit  faire  repousser  du  .traitement  du  choléra  toutes 
ces  boissons  chaudes  que  ronangèré  avec. une  déplorable 
profusion,  dans  le  but  d'amener  la  réaction.  L'estomac 
dont  la.  faculté  d'absorption  est  presque  anéantie ,  se  rem- 
plit de  ces  boissons  comme  un  vase  inerte,  et  sile  vomis- 
sement ne  vient  à  le  vider,  le  refoulement  du  diaphragme 
ne  contribue  pas  pour  peu  à  rendre  la  respiration  anhé- 
ieuse  et  pénible. 

Dans  ht  recherche  des  causes  des  maladies ,  l'homme  qui 
est  doué  du  sentiment  philosophique  ne  se  laisse  pas  dé- 
courager; car,  il  sait  que  la  science  progresse,  et  ce  qui  n'a 
pu  êtr<e  découvert  hier  ^  Je  sera  aujourd'hui  ou  demain.  Il 
est  de  toute  probabinté' scientifique  que  Ton  finira  par 
connaître,' par  saisir  la  véritable^ cause  du  choléra  :  déjà, 
cette  cause  est  entrevue.  Il  est  vraisemblable  que  le  miasme 
du  ciioléra  enlève,  au  sang  l'impi^ession  {Simulante  par 
laquelle,  à  l'état  normal,  ce  liquide  provoque  l'action  vie 
rhythmcdu  cœuc>;  car,  le  sang  du  ohotérique  paraît  être 
vicié,  il  ne  senble  pas  oxigéné  ,  et  la  vie,  a  dit  Aicheraiid, 


80  lomuiiL  BB  KÉMcnns. 

est  subordonnée  à  l'oxidation  da  sang  diuis  le  poumon;  et 
à  la  distribution  de  ce  sang  vivifié  dans  les  orgatieé.  Le 
choléra  constituerait  donc  un  empoisonnement  miasmatique, 
dont  la  nature ,  l'essence  du  miasme ,  seraient  encore  in- 
connues. 

Que  certains  praticiens,  de  bons  esprits,  du  reste,  qui 
ont  obtenu  par  l'emploi  du  quinquina  à  hautes  doses  des 
succès  dans  les  cas  les  plus  désespérés,  viennent  soutenir  que 
le  choléra  n'est  autre  chose  qu'une  fièvre  pernicieuse  dont 
l'écorce  du  Pérou  fait  justice ,  rien  ne  paraît  moins  prouvé, 
ou  plutôt  rien  n'est  moins  vrai.  Tout  ce  qu'il  y  a  de  sensé 
dans  cette  opinion ,  c'est  que ,  lorsque  le  quinquina  donné 
à  doses  élevées^  a  jugulé  une  attaque  de  choléra,  ce  succès 
démontre  que  Yàn  avait  affaire  à  une  fièvre  pernicieuse 
cholérique.  L'élément ,  le  génie  de  la  périodicité  n'avaient 
pas  été  découverts.  Voilà  tout ,  et  c'est  en  cela  qu'a  consisté 
l'erreur  du  diagnostic,  erreur  que  le  Quinquina  est  venu 
rectifier.  (Naturam  morborum  osteudunt  cqnîtiones.) 

cr  Dans  la  fièvre  pernicieuse  cholérique,'  a  écrit  Torti , 
l'élément  de  la  périodicité  de  la  fièvre  ost  -voilé  par  le 
masque  du  choléra,  mais  1&  symptôme  culminant  suit  le 
mouvement  et  la  période  de  la  fièvre,;  comme  l'ombre 
suit  le  corps.  »  Cette  ingénieuse  comparaison  est  de  toute 
vérité,  et  elle  révèle  un  ^profond  observateur  dans  le  mé- 
decin de  Modène.  . 

Chaque  fois  que,  dans  te  travail,  j'ai  écrit  le  mot  çtitti- 
quina^  j'ai  entendu  par  ce  mot  générique,  ta  quinine  et 
les  sels  de  quinine,  et  je  reconnais  toute  la  îùslesse  des 
considérations  cofitenues  dans  le  passage  suivant,  que  je 
copie  littéralement  dans  l'excellent  ouvrage  du  docteur 
Bailly,  de  Blois<: 

(f  Avant  l'analyse  do  quinquina,  avant  la  découverte  de 
la  quinine,  il  était  nécessaire ,  dans  un  traité  de  fièvres 
intermittentes,  d'entrer  dans  tous^  les  détails  propres  à  faire 
connaître  les  différentes  espèces  de  quinquina  et  leurs  pro- 
priétés relatives  ;  mais  aujoUrd'Jiui  qu'une  substance  iden- 
tique remplace  toutes  ces  variétés,  nous  renvoyons  l'histo- 
rique concernant  cet  arbre  à  lia  matière  médicale.  Quelle 


JOUMiX  DE  HÉDBqmS.  81 

que  soit  son  origine ,  la  quinine  sera  considérée  en  elle- 
même  comoie  le  sont  tous  les  autres  médicaments  simples, 
tels  que  le  mercure,  la  morphine,  l'étherf  etc. 

»  Ce  4ébut  ne  parait  guère  aononcer  que  nous  hésitions 
entre  le  quinquina  et  la  quinine  :  telle  est, -en  effet,  Qotre 
manière  de  voir,  fondée  sur  plusieurs  centaines  d'observations 
de  succès  en  Italie..  La.  quinine  convient  toujours  là  où  le 
quinquina  eist  indiqué;  alors  encore  elle  convient  mieux  que 
lui  ;  elle  peut  opérer  des  guérisons  qu'il  serai!  incapable 
d'aniener:  elle  est  exempte.de  la  plupart  des  inconvénients 
auxquels  il  donne  si. souvent  lieu.  En. un  mot,  c'est  une 
des  plus  belles:  acquisitions  que  Ja  médecine  ait  faites.  Il 
arrive  souvent  que  le  quinqnina  est  vomi,  et  alors  on  a 
fatigué  le. malade  sans  âueun  résultat  avantageux»' Combien 
de  fois  à  Thôpital  du  SaintrEsprit  n*ai-je  pas  vu  les  draps 
ou  le  plancher  couverts  de  quinquina  rejeté.  Sur  cent  lits, 
il  eût  été  difficile  d'en  trouver  dix  dont  les  draps  n'en 
eussent  pas  été  plus  pu.  moins  salis.  Comment J'jestômac  ne' 
rejetterait-il  pas  une  dose  aussi  considérable  de  bois  amer 
et  nauséeux,  lui  qui,  à  l'époque  où  régnent  les  fièvres  inter- 
mittentes, appeAe  si  avidement  les  boissons  fraîches  et 
acidulés?  »  (Bailly,  de  Blpis:  page  406). 

L'autorité  de  Norton ,  toujours  invoquée  avec  respect 
par.  Torli,  sonouvrage  toujours  .cité  par  lui  avec  éloge, 
avaient  fait  que  le  précepte  de  ne  pas  donner  le  quinquina 
pendant  lé  paroxysme  fébrile,  était  rigoureusement  et  gé- 
néralement suivi.  Cependant,  dans  certaines  fièvres  ré- 
mittentes, surtout  dans  celles  où  la  rémission  esta  peine 
sensible,  et  qui,  par  le  peu  de  durée  de  ce  temps  de  rémis- 
sion et  par  l'avancement  et  la  violence  de  l'accès,  suivant , 
portent  la  dénonriination  de  sub-intrantes,  on  fut.  tenté, 
en  présence  d'un  accès  qui  menaç(iit  la  vie,  d'enfreindre 
la  conduite  de  Morton  et .  seà  sectateurs.  Ce  fut  surtoht 
dans  certains  paysxhauds  où  la  fièvre  se  montre  si  prompte- 
ment  mortelle,  qu'on  sut  s'affranchir  de  l'autorité  de  ces 
médecins  justement  recommandables.  Des  faits  d'une 
consciencieuse  observation  apprirent,  à  connaître  que  le 
médicament  làbrifuge  pouvait  être  donné  avec  profit  pen- 


S2  joniiiàt  m 

dani  le  paroxysne.  Quelques  pnilicieiis  éekirés  sur  ce 
point  de  dodrioe,  cberchèreoi  même  à  génénKet^  l'emploi 
du  sulfate  de  quiiûne  pendant  Taecès  fébrile,  et  un  de  nos 
regrettables  collègues,  le  docteur  Harion  de  Procé,  entrant 
dans  cette  voie  d'expérimentation ,  a  cru  remarquer  que  le 
sel  de  quinine  avait  une  puissance  febrifuge  plus  grande  et 
plus  ràre  lorsqu'il  était  administré  pendant  le  paroxysme 
que  lors  de  l'apyrexie.  Les  grands  noms  de  Merton  et  de 
Torti  se  dresseront  longtemps  encore  devant  tout  praticien 
qui  poursuivra  la  voie  dans  laquelle  le  médecin  en  chef 
de  notre  H6tel-Dieu  était  entré ,  et  bien  que  le  respect 
environne  ces  noms,  ils  s'inclineront,  j'en  ai  la  oon6ance, 
devant  la  rigide  observation  de  faits  cliniques.  Je  me  suis, 
dans  plusieurs  circonstances,  trouvé  assez  alarmé  par  la  vio- 
lence d'un  accès  de  fièvre,  pour  ne  pas  différer  d'un  seul 
instant  l'emploi  du  sulbte  de  quinine.  Je  n'ai  pas  eu  à  le 
regretter,  je  crois  même  avoir  eu  à  m'en  applaudir. 


OJBSER  VA  TIONS  cliniques^parnMkiaBMR, 
médecin  de  L'Hôtel-Dieu  de  Nantes^  Secrétaire 
du  CanscU  central  de  salubrité  du  département 
de  la  Loire-Inférieure. 


Oblitération  du  canal  hépaiiqae  par  un  ealcal  / 
atrophie  du  foie. . 

La    veme    Pageot,  âgée  de   76  ans,  est  entrée   à 
rhôpilal.  le  19  juillet  1854. 

Ello  présente  un  ictère  général  et  bien  prononoé  qui 


JOOBlUli  DE  KÉBBGIIIB*  8S 

r^iionte  à  plqgieurs  mois  ;  de  temps  en  temps,  elle  éprouve 
des  accès  en  tout  seroblaUes  à  ceux  des  fièvres  in- 
lennitientes,  m^isdoiii  les  fébrifuges  n'empêchent  point 
le  retour.  Elle  n  a  point  de  vomissements  et  l'appétit  est 
eu  partie  conservé  ;  elle  n'a  de  soif  prononcée  que  pendant 
les  accès  de  fièvre,  tes  gardes-robes  sont  plutôt  rares 
que  fréquentes ,  les  matières  fécales  ne  sont  pas  complète- 
ment décolorées,  lés  urines  sont  safranées.  La  région 
de  riiypochondre  droit  est  le  siège  de  douleurs  constantes, 
ipais  peu  vives,  que  la  pression  et  Ik  percussion  n'exas- 
pèrent pas;  par  ce  dernier  mode  d'exploration,  on- déter- 
mine une  diminution  notable  du  bbtunp  de  la  matité 
hépatique,  et  on  diagnostique  une  atrophie  simple  du  foie. 
Ce  diagnostic  semblait  d'autant  plus  fondé,  que  les  divers 
appareils  d'organes  interrogés  avec  soin  ne  donnaient 
aucun  signe  d'altération  organique,  telle  que  tubercules, 
cancer,  etc. 

La  marche  de  fa  maladie  devait'  pourtant  infirmer  ce 
diagnostic ,  et  faire  croire  à  une^  lésion  grave  mettant 
obstacie.au  cours -ou  à  la  sécrétion  de  la  bile.  En  effet; 
les  accès  de  fièvre  se  rapprochèrent,  l'appétit  diminua, 
et  des  vomissements  rares  d'abord ,  plus  fréquents,  vers  la 
fin  de  la  vie,  ne  tardèrent  pas  à  se  manifester.  La  teinte 
ictérique  devint  plus  foncée  et  verdâtre;  les  douleurs  de 
rhypochondre  furent  beaucoup  plus  intenses,  l'amaigrisse- 
fiient  fH  des  progrès,  et  ta  malade  succomba  le  22  dé- 
cembre 1854,  dans  l'état  de  marasme  le  plus  complet. 

Le  traitement  avait  consisté  dans  un  réghne  sévère, 
quelques  remèdes  alcalins  et  calmants,  de  légers  purgatifs  ; 
dans  les  dernières  semaines,  les  calmants  seuls  avaient  été 
employés»  A  l'autopsie,  nous  trouvâmes  le  foie  fiasque  et 
peut-être  un  peu  moins  voluniineux  qu'à  l'état  normal; 
mais  la  diminution  der  volume  était  moindre  que,  d'après 
les  résultats  de  la  percussion  pratiquée  pendant  la  vie,  nous 
n'avions  supposé. 

Le  canal  hépatique  était  oblitéré  vers  le  milieu  de  sa 
longueur  par  un  '.calcul  ovoïde  de  la  grosseur  du  pouœ. 
Derrière  cet  obstacle ,  le  canal  hépatique  dilaté  formait 


84  jomiiAL  DE  tfÉwcmfi.' 

une-  poche,  capable  de  loger  un  gros  œof  de  poule ,  tous 
les  canaux  biliaires  étaient  énormément  dilatés,  et  on 
pouvait  facilement  introduire  le  pouce  ou  au  moins  le  doigt 
indicateur  jusque  dans  les  ramifications  de  3*  et  de  4*" 
ordre.  Toutes  ces  cavités  étaient  pleines  d'une  bile  verte , 
filaiite ,  assez  visqueuse ,  contenant  une  grande  quantité 
de  graviers  ;  dans  qgelques-uns  des  conduits  se  trouvent 
des  calculs  mal  agrégés ,  et  affectant  la  forme  des  cavités 
qui  les  contiennent. 

La  vésicule  forme' une  tumeur  de  la  grosiseur  d'un  œuf, 
ses  parois  sont  épaissies,  d'un  blanc  opaque:  eHe est  remplie 
d'une  pâte  vert  foncé,  très-homogène,  sèche  et  rappelant 
la  consistance  de  la  craie.  Le  canal  cystique  aboutit  au 
canal  hépatique  en  avant  du  lieu  oblitéré. 

La  substance  du  foie  présente  ^ne  couleur  gris-verdâtre 
foncé;  les  vaisseaux  sanguins  qui  la  parcourent  sont  moins 
volumineux  qu'à  l'état  normal  et  ne  laissetU  écouler  que 
peu  de  sang.  Le  tissu  parait  évidemment  ainoindri  par  la 
compression. 

Les  deux  poumons  sont  un  peu  emphysénoateux ,  pserti- 
culièrement  en  avant  et  à  Ja  base. 

Les  autres  or^janes  n'offrent  rien  d'anormal. 
.  Ce  fait  nous  a  semblé  intéressant  à  plusieurs  égards: 
1*^  Nous  n'avons  trouvé  mentionné  dans  les  auteurs,  aucune 
observation  où  la  dilatation  des  vaisseaux  biliaires  oblitérés 
par  un  calcul,  eût  atteint  les  mêmes  proportions  qii.e  chez 
notre  malade.  '  ' 

2®  Quoique  le  volume  du  foie  ne  fut  pas  notablement 
moindre  qu'à  l'état  normal,  son  tissu  était  pourtant  atrophié 
par  la  compression  excentrique  qu'exerçait  la  bile  accu- 
mulée derrière  le  point  oblitéré. 

B""  Tandis  que  les  vaisseaux  biliaires  étaient  dilatés,  les 
vaisseaux  sanguins  étaient  diminués  de  volume,  et  certes, 
pendant  la  vie,  la  circulation  y  devait  éprouver  de  grandes 
difficultés  :  néanmoins,' nous  n'avonspas  observé  d'hydro- 
pisie,  probablement  parce  que  la  masse  totale  .du  sang 
avait  été  progressivement  diminuée  par  le  dé&ut  d'assi- 
milation. 


JôduriL  DE  kàdbcuie;  8S 

4^'  L'émphysème.dé  la  base  du  poumon  droit,  eii  don - 
liant  un  son  exagéré  \  nous  avait  induit  en  erreur  sur  le 
volume  réel  du  foie*. 

X  Voici  maintenant  un  caVd'iclère  clans  lequel  des  symp- 
tômes de  dyspepsie  y^ggravant  progressivement ,  mais 
assez  intenses  dès  le  début ,  avaient  fait  immédiatenieni 
songer  à  une  affection  organique  plutôt  qu'à  une  atrophie 
simple,  tin  sqùirrhe  do  pylore  avait  déterminé  l'oblitéra- 
tion du  canal  cholédoque. 


Sqùirrhe  du  pylore,  obliléralion  du  canal  cholédoque. 

Lé  nommé  Cloarec ,  Claude ,  âgé  de  50  ans,  cotonnier, 
enlrç^  ThôpilaJ  ie  26  décembre  1854.     .         ,  . 

Ictère  remontant  à  quatre  ou  cinq  mois  ;  constipation 
liabituelle  ;  anorexie  ;  douleur  à  la  région  épigastrique  ; 
rapports  acides  \  vomituritipns  fréquentes  :  quelques  ali- 
ments liquides  sont  seuls  supportés. 

Le  traitement  consiètedans  la.diète  et  quelques  laxatifs, 
des  applications  calmantes  surj'àbdomen. 

H  sort  de.rhôpital  le  22  janvier  1855,  sans  changement 
notable  dans  son  état:  il  y  rentre  le  1.3  février  suivant. 

La  coloration  de  la  peau  est  la  même  que  la  première 
fois ,  peut-être  un  peu  plus  foncée  ;  lamaigrissement  est 
considérable  ,,  la  faiblesse  très-^grandè  ^  l'épigastre  est  le 
siège  de  vives  douleurs ,  dont  le  malade  se  plaint  beau- 
coup,, et  qu'exaspère  la  moindre  quantité  d'aliuienis;^  la 
pression  et  la  percussion  sont  également  très-douloureuses, 
la  matité  hépatique  semble  plutôt  augmentée  que  dimi-^ 
nuér  ;  des  vomissements  de .  matières  alimentaires  non 
digérées  ont  lieu  fréquemment  \  Aucun  épanchement  de 
sérosité.        \  - 

Les  matières  fécales  ont  eté^  constamment  colorées ,  et 
les  urinesisafranées  se  coloraient  en  verX  intense  par  Facide 
azotique. 


86  JMIIIÂK  »B 

Oo  diagnostique  une  affection  organique  do  foie  ou  de 
resiomac. 

Le  traitement  a  consisté  cette  fois  en  laxatifs*  et  calmants 
intus  et  extus;  un  vésicatoire  volant  a  été  appliqué  sur 
I  epigastre  pour  essayer  de  calmer  la  douleur. 

La  mort  arrive  le  8  mars  18S5  et  semble  due  aux  pro- 
grès de  rinanition. 

Autopsie.  —  Le  cadavre  est  très-amaigri  ;  tous  les  tissus 
sont  fortement  colorés  en  jaune.  Aucune  des  cavités  viscé- 
rales ne  contient  de  sérosité.  Une  tumeur  volumineuse 
occupe  la  pc)rtioii  pylorique  de  Festomac  et  la  première 
courbure  du  duodénum;  elle  est  dure,  adhéreivte  au  pan- 
créas ,  qui  participe  à  Finduration  dans  une  partie  de  son 
étendue  ;  le  tissu  cellularre  ,  intermédiaire  a  ces  différents 
or;^nes^  est  condensé,  et  une  dissection  assez  attentive 
est  nécessaire  pour  les  isoler.  Dans  toute  la  partie  malade 
de  l'estomac,  les  membranes  sont  épaissies  ;  nulle  part, 
la  muqueuse  ne  présente  dé  solution  de  continuité  ;  elle 
conserve  son  poli  et  son  aspect  villeux.  La  membrane  nius- 
culaire  et  Ja  séreuse  sont  écartées  par  une  couche  mince 
d'abord  ,  ei  s  épaississant  de  pluà  en  plus,  à  mesure  que 
Ion  se  rapproche  dîi  pylore^  de  substance  blanche,  de 
consistance  squirrbeuse  ;  au  niveau  de  f  anneau  pylorique, 
ce  dépôt  est  très-abondant  et  forme  un  bourrelet  qui  ferme 
presque  complètement  cet  orifice ,  c'est  à  peine  si  l'on 
y  pourrait  faire  passer  une  plume  d'oie.  La  production 
accidentelleV  moins  épaisse  dans  le  duodèniim,  existe  dans 
toute  la  première  portion  de  cet.  intestin.  De  nombreuses 
granulations  de  même  nature  que  la  tumeur  principale 
existent  dans  le  péritoine  qui  recouvre  l'estomac  et  le  foie  ; 
sur  l'estomac,  elles  sont  d'autant  plus  grosses  et  plus  nom- 
breuses, qu'on  se  rapproche  davantage  du  pylore. 

Le  foie,  un 'peu  diminué  de  volume  et  de  consistance 
normale,  contient  assez  de  sang;  sa  substat^oe  est  d'un 
vert  grisâtre  foncé.  Il  contient  un  grand  nombre  de  tu* 
meurs  sq\iirrheuses  de  voimne  variable  et  qui  semblent 
formées  de  grains  réunis  ;  au  centre  de  ch&eujoe  de  ces 
tumeurs  on  ne  trouvé  que  la  production  accidentelle ,  niais 


JOinUlàl.  DB  HÉMCIRB.  87 

eiies  envoient  de  toute  leur  périphérie  des  prolongements 
rayonnes  £ntre  lesquels  se  retrouve  la  substance  du  foie; 
celles  de  ces  tumeurs  qui  s^aperçoivent  à  travers  le  péri- 
toine hépatique  forment^  à  la  surface  de  Torgane ,  des 
tachos  bidncbes  étpilées. 

Tous  les  canaux  biliaires  sont  dilatés ,  remplis  d  une 
bile  épaisse,  decouleùr  vert  foncé  ;  la  plupart,  pourraient 
admettre  dans  leur  cavité  un  tuyau  de  plume  d*oie  ;  le 
conduit  cholédoque  a  le  volume  du  doigt  indicoîteur;  son  ori- 
fice, dans  le  duodénum,  ainsi  que  toute  la  partie  qui  che- 
mine dans  4'épaisseur  de  la  paroi  de  Tintestin  ,  sont  com- 
plèlemcnt  oblitéi'ées.  Le  canal  cystique  est  revenii  sur 
lui-même,  ainsi  que  la  vésicule,  «dont  le  volume  ne  dépasse 
pas  celui  du  doigt,  et  qui  ne  contient  qu'un  peu  de  mucus 
à  peine  coloré. 

^  La  rate  préseûtait  un  peu  de  ramollissement  ;  son  enve- 
loppe ^propre ,  épaissie ,  semblait  envahie  par  la  matière 
squirrheuse.  Les  reins  étaient  très-hypérémiés. 

Nous  ferons  remarquer  qu'ici  comme  dans  4'observatron 
précédente,  il  n'y  a  pas  eu  d'hydropisiè ;  mais  nous  rap- 
pellerons, en  nnitgme  temps, ..que  la  cipculation  sanguine 
dans  le  foie  ne  devait  pas  trouver  d'obstacle ,  et,  d'un  autre 
coté,  là  dyspepsie  qui  existait  depuis  longtemps  avait  en 
pour  conséquence  nécessaire  la  diminution  progressive  des 
liquidés  apportés  au  foie  par  la  veine-pqrle. 

Le  principal  trait  de  ressemblance- entre  les  deux  mala- 
des dont  nous  venons  de  donner  Thistoire,  c'est  l'existence 
d'oin  ictère  dû  à  Toblitération  des  voies  biliaires.  Une 
atrophie  du  foie  commençante  dans  le  second  cas,  très- 
marquée,  an  contraire,  dans  le  premier,  avait  été  la  con- 
séquence de,  la  compression  exercée  par  la  bile  accumulée, 
derrière  rubstacle;  mais  cette  atrophie  n'était  que  sympto- 
matique,  c)  autres  lésions  plus  gVîives  lui  ôtaient  toute  valeur 
au  point  de  vue  du  pronostic.  Il  n'en  est  pas  ainsi  de 
i'atrophte  idiopatique,  à  laquelle  il  convient  d'attribuer 
un  certain  nombre  d'ictères  graves  par  défaut  de' sécrétion. 
Plusieurs  cas  de  cette  dernière  espèce  que  j'ai  rencontrés 
dans  la  pratique  civile,  ont  été  accompagnés  de  symptômes 


88  JOUI^L  DE 

assez  graves  pour  me  faire  croire  à  rexisfènce  de  lésions 
organiques  devant  déterminer  la  mort  dans  un  temps  limité. 
L*issue  ayant  été  autre  que  celle  à  laquelle  je  m'attendais^ 
j'ai  cru  utile  de  comparer  la  marche  qu'ils  m'ont  présentée 
avec  ceHe  de  la  mairie  de  la  veuve  Pageot. 

f/atrpphie  simple  du  foie  conduit  ausstsûrement  à  une 
terminaison  funeste  que  les  oblitérations  des  canaux  biliai- 
res par  des  causes  intrinsèques  ou  extrinsèques ,  telles 
que  les  hétérosarcoses  (cancers ,  .tubercules)  :  comme  ces 
dernières  maladies,  elle  peut  donner  lieu  à.  tous  les  phéno- 
mènes de  la  consomption  et  à  rhydropisie^  dont  la  produc* 
tion  dépend  évidemment. alors  de  la.  difficulté  que  le  sang 
des  affluents  de  la  veine-porte  éprouve  à  traverser  le  foie. 
Cependant,  Fhydropisie  ne  s'obserye  pas  toujouirs  dans  la 
maladie  qui  nous  occupe ,  et  nous  pensons  qu'on  peut  aisé- 
ment alors  expliquer  son  absence,  comme  nous  ayons 
cherché  à  le  faire  dans  les  deux  observations  précédeikes, 
par  la  diminution  du  volume  -  total  du  sang.^Çn  effet,  à 
mesure  que  l'altération  fait  des^progrès,  l'appétence  pour  les 
aliments,  et  surtout  pour  les  sabs^ances  animales.,  diminue  ; 
elle  est  souvent  remplacée  par  une  répugnance  invincible. 

Dans  d'autres  circonstances,  la  marche  de  la  maladie  est 
excessivement  lente, et,  sous  l'infiuence  durepos,d éva- 
cuations plus  ou  moins  abondantes,  d'une  diète^^vère,  on 
Voit  l'ictère  diminuer,  la  fièvre  ciBsser ,  l'appétit  revenir  et 
se  prononcer  même  avec  assez  d'activité.  Si  alors  le  malade 
cède,  sans  précaution ,  au  désir  des  aliments,  les  accidents 
ne  tardent  pas  à  se  reproduire,  tandis  qu'un  régime  bien 
entendu  peut  écarter,  pour  assez  longtemps ,  leur  retour. 

Nous  n'avons  pas  besoin  de  dire  que  l'attention  du  mé- 
decin doit  se  porter  ici  ^  la  fois  sur  la  quantité  et  sur  la 
nature  des  aliments.  En  général ,  leur  quantité  sera  faible: 
ils  devront  être  de  facile  digestion  et  dépourvus  de. toute 
qualité  excitante;  on  ne  saurait,  du  reste,  poser  de  règle 
absolue ,  c'est  une  itude  spéciale  à  faire  pour  4baqu£  cas 
particulier. 

Les  travaux  modernes  sur.  la  digestion  permettent  de 
traduire  en    formules  scientifiques  les  considérations  qui 


JOimNAL  BB   H^pBCniB.  89 

précèdent  :  si  vous  fournissez  au  foie,  diminué  de  volume, 
des  matériaux  de  nutrition  aussi  abondants  qu'à  Télat  nor- 
mal, vous  produisez  un  engouement  de  son  tissu  et  une 
compression  qui  s'opposent  à  l'exercice  libre  de  ses  fonc- 
tions dVgîirie  sécréteur,  tandis  quil  aurait  pu  suffire  en- 
core à  rélajboration  d'une  moindre  quantité  de  ces  matériaux. 
L'ingestion  de  substances  irritantes,  en  augmentant  l'afflux 
du  sang  artériel,  peut  produire  un  eifet  analoguç  ou  même 
(les  complications  iodàmmatoires. 

Le  médecin  ne  doit  donc  point  céder  aux  désirs  du  ma- 
lade^  chez  lequel,  malgré  le  retour  de  l'appétit,  chaque  écart 
de  régime  est  signalé  par  pnè  rechute.  La  maigreur  et 
même  la  faiblesse  persistante,  sont  ici  des  nécessités  qu'il 
faut  subir^  car  on  ne  peut  jamais  se  flatter  de  ramener  la 
digestion  à  son  type  normal. 

On  ne  fait,  en  délinitive,  qu'un  traitement  palliatif;  mais 
^n  n'a  pas  même  cette  ressource  quand  l'atrophie  hépatique 
est  la  conséquence  d'une  autre  lésion  ;  alors  on  ne  voit  point 
survenir  ces  intervalles  d'amélioration  dont  nous  avons 
parlé,  et  le  mal  marche  incessamment  vers  sa  fatale  termir 
naison.. 

£n  résuipé,  le.  diagnostic  précis  de  la  causa  de  Tict^re 
étant  souvent  impoa^ible.v  il  convient,  dans  touà  les  cas 
d'ictère  chronique,  de  chercher  à  obtenir  y  par  le  régime, 
l'umélioration  possible  dans  l'atrophie  simple ,  impossi- 
ble dan$  les  autres  cas.  ^        ^ 


Chlorose^  fièvre,  intermittente  rebelle  ^  hématémèse  y  pieu-- 
,       résiepurulentej  alHiès  de  la  rate. 

BoëdroUr  Véronique ,  âgée  de  28  ans,  domestique, 
entre,  le  ("février  1855, à rHôpilal. 

Depuis  deux  ans ,.  symptômes  de  chlorose  avec  aménor- 
rhée/ Vers  le  15  décembre  18£4  9  ^ns  fatigue  plus  grande 
que  d'habitude  ,  indisposition  caractérisée  par  un^  douleur 


90  JOrailAL  DB  HÉDBGmi. 

gravative  ft  l'estomac ,  inappétence ,  accès  de  fièvre  inter- 
mittente, sans  type  régulier.  Le  30  décembre  1854,  la 
maiiide ,  qui  a  Thabitude  de  prendre  ses  aliments  très- 
cbauds,  vomit  du  sang  noir  caillé  en  Quantité  médiocre  ; 
le  vomissement  ne  dure  que  quelques  instants  «  et  ne  se 
répète  pas  dans  la  journée.  On  se  borne  à'  prescrire  le 
repos ,  la  diète  et  les  boissons  (ralcbes. 

Le  I*'  janvier,  la  malade  étant  à  jeun,  est  reprise 
d'hématémèse  en  allant  à  la  garde-robe;  l' hémofrhagie , 
très-abondante,  est  suivie  d'une  syncope  qui  cesse  au  bout 
de  quelques  minutes  de  décubitus  dorsal.  Je  la  vois  quel- 
ques instants  après  et  je  trouve  le  pouls  fréquent,  mou, 
mais  assez  large  ;  la  peau  est  froide  et  décolorée  ,•  la 
connaissance  parfaite.  Je  prescris  de  réchauffer  les  mem- 
bres inférieurs  ,  d'y  promener  ^des  sinapismes  ,  et  je  fais 
administrer  toutes  les  heures  une  pilule  contenant  un  cen- 
tigramme environ  d'azotate  d'argent. 

Le  lendemain  ,2  janvier  ,  l'hémorrhagie  ne  s'est  pas 
renouvelée  ;  la  pâleur  de  la  peau  est  la  mênae ,  le  pouls 
s'est  relevé,  il  n'est  pas  fébrile.  Ce  retour  de  l'hémorrha- 
gie,  à  48  heures  d'intervalle,  et  Ja  préexistence  d'accès 
intermittents  me  faisant  craindre  une  fièvre  pernicieuse, 
je  prescris  deux  grammes  de  sulfate  de  quitiine  et  la  conti- 
nuation des  pilules  d'azotate  d'argent.  -     * 

Le  3  janvier,  accès  de  fièvre  caractérisé  par  frissons, 
chaleur  et  sueur,  mais  sans  hémorrhagie.  (2  grammes  de 
sulfate  de  quinine  ;  les  pilules  d'azotate  d'argent  ne  sont  plus 
données  que  toutes  les  <leux  heures.) 

Les  4  et  5  janvier  ,\on  administre^  un  gramme  de 
sulfate  de  quinine  et  on  continue  l'azotate  d'argent.  Ce 
dernier  jour,  une  augmentation  légère  de  la  chaleur,  dans 
l'après-midi,  est  considérée  comme  un  souvenir  de  Tarées. 

Le  6,  on  commence  l'usage  de  l'eau  de.  Pagliari  (15 
grammes  dans  une  potion).  Cette  dose  est  continuée  cha- 
que jour,  jusqu'à  la  terminaison.    - 

La  maladjB  reste  faible  ;  cependant  le  pouls  se  relève  et 
la  pâleur  diminue  ;  sardes-robes  noires  provoquées  par 
une  petite  dose  dliuile  de  ricin: 


JÔUBNAI.  DB   MÉDECINE.  91 

^  Le  8,  à  la  suite  d*un  écart  de  régin^e  (la  malade  a  mangé 
de  la  pâtis^rie)  ,  nouvelle  hémorjrbagie  considérable  , 
suivie. d'une  syncope  prolongée,  après  laquelle  le  pouls 
reste  petit,  misérable,  la  peau  et  les  origines  des  mu- 
queuses complètement  décolorées ,  la  faiblesse  excessive. 
Douleur  constante  à  Thypocbondre  gaucbe,  matité  étendue 
à  la  région  splénique.  Les  pilules  d'azotate  d'argept  sont 
prescrites  de  nouveau  pendant  48  beures;  les  jours  sui- 
vants, les  accès  en  tierce  continuent;  on  donne  encore 
quelques  doses  de  sulfate  dé  quinine.  Vers  la  fin  de  janvier, 
Tétat  général  semble  un  peu  s'améliorer,  Tappétit  se  pro- 
nonce; quelques  cuillerées  de  bouillon  glacé  et  même  un 
peu  de  panade  froide  sont  bien  supportés ,  mais  les  forces 
ne  reviennent  pas.  Le  l*"^- février,  elle  entre  à  THôpital: 
son  état  est  le  même  que  précédemment;  elle  rend  de 
temps  en  temps  des  selles  noires  ,  demi-liquides  et  très- 
fétides.  On  lui  fait  le  même  traitement;  le;  6  février,  on 
y  joint  le  fer  réduit  par  l'hydrogène,  à  la  dose  de  10 
centigrammes  par  jour.   . 

Le  IQ  février,  la  malade  ,  qui  s'était  trouvée  mieux 
pendant  la  journée  et  disait,  à  6  beures  1/2  du  soir,  sentir 
un  bien-être  général,  vomit  toul-à-coup,  à  7  lieures,  envi- 
ron 300. grammes  _de  sang.  Aucune  imprudence  n'avait 
été  commise;  elle. avait  maipgé,  à  4  beures  1/2,  la  faible 
ration  i^'aHments  qu'on  Jui  permettait  :  aussitôt,  tipotbymie 
complète,  qui  se  prolonge  pendant  près  d'une  d<*mi-heure, 
puis  le  pouls  commence  à  se  faire  sentir,  et  prend  même 
une  certaine  ampleur.  (Position  horizontale ,  application  , 
sur  répigastré ,  d'une  vessie  pleine  de  glace  ^  sinapismes 
sur  les  membres  inférieurs;  à  l'intérieur,  glace  en  petits 
morceaux.)  <  ' 

Vers  une  heure  du  matin ,  trois  nouveaux  vomissements, 
à  peu  d'intervalle,  amenant  chaque  fois,  au  deltors,  un  caillot 
gros  comme  une  noix  :  mais  la  faiblesse  extrême  dé  la 
malade\  et  le  peu  d'efforts  qui  accompagnent  ces  vomisse- 
ments, donnent  lieii  de  penser  qu'une  plus  grande  quantité 
de  sang  s'est  épanchée  dans  Testomac.  Le  pouls;  à  1 10  pul- 
sations, est  assez  développé,  mais  dépressible.  L'irrégularité 

B 


92  ^OVfmÂL  PB  piÉ^UM^. 

dans  4a  sijiccession  dés  accè»  précédents,  ne  permet  pas  aie 
savoir  si  ce  jour  était  paroxystique  o.u  intercalaire.  On  ad- 
ministre 1  gramme  50  centigrammes  4e  sulfate  de  quinine. 

Lés  vomissements  ne  se  reproduisent  pas  jusqu'au  len- 
demain matin,  1  ^  février  ;  un  peu  de  sommeil.  Le  Doatin  , 
abatten^ent  extrême,  peau  moite,  fraîche,  pouls  à  110.  Ouie 
trèsrobtuse,  intelligence  nette.  Pas  de  selles  depuis  hier, 
malgré  U  sensation  du  besoin  d'évac.uer.  (Vési(»toire  sur 
le  sternum  et  Tépigastre,  75  centigrammes  de  sulfate  de 
quiniHe,siaapismes  aux  membres  inférieurs.)     ; 

Les  jours  suivants ,  la  faiblesse  diminue  progressivement, 
mais  ta  décoloration  générale  reste  la  môme.  Pe  $  février, 
le  pouls  a  repris  de  la  force ,  et  ne  bat  plus  que  %  fois 
par  minute.  Constipation  qui  résiste  aux  lavements  Ijaxatifs, 
émission  abondante  d'urine.  (Diète  sévère,  ip^lgré  les  ré- 
clamations de  la  malade.).  ^ 

19  février.  Expulsion  de  ,  quelques  boules  stercorales 
dures,  qui  ne  présentent  plus  la  cou|eur  noire.  La  doti- 
teur  de  rhypochondre  gauche  se  fait  sentir  plus  vivement. 
Les  frissons,  qui  avaient  cessé  depù^  Thématémèse ',  ont 
reparu,  irrégulièrement,  depuis  le  17-  (Potion  fébrifugie 
opiacée,  mêjpe  prescpiplîpn  du  reste.) 

21  février.  Qppression  très-grande,,  toux,  douleur  p)us 
étendue  et  plus  vive  ai^  côté  gauche ,  pouls  fréqiiept ,  dur, 
serré  ;  on  constate  Texistepcè  d'un  épancbement  considéra- 
ble dans  la  cavité  d^^  la  plèvre  gauche.  IJaùspultation,  prati- 
quée pliJ^ieurs  fois,  à  une.époque  antérieure  de  la  maladie,  n!â- 
vait  donné  que  des  résultats  négatifs.  (Vésic>atbire  sur  le  côté.) 
.  I)ans  là  soirée,  l'oppression  est  la  même.,  Taifaisseme^t 
est  très-grand,  la.  douleur  nviHe,  je  pouls  donne  environ 
1 30.  Mort  à  9  beures. 

Autopsie  30  heures  agrès  la  mort. 

Décoloration  complète  (jes  tégujnents,  pâleur  de  cire, 
membres  en  résolution  complète  :  dilatation,  notable  du 
côté  gauche  du. thorax.  - 

La  cavHé  pectorale  gauche  contient  4  à  $  litres  d'un 


sér«Qsité  a$s6z  limpide  et  citrine  dans  les  coucbes  supé-  . 
rieures,  puis  trouble  et  floconneuse,  eofin  purulente  dans 
le  tiers  iofériéur.  Les  feuillets,  de  la  plèvre,  sont  tapissas 
d'une  fausse  membrane  jaune,  molle,  s'enlevant  avec  le 
dos  du  scalpel*  Le  poumon,  refoulé,  te  long  de  la  colonne 
vertébrale,  présente dfns  son  plus  grand  diamètre  trans- 
versal, une  épaisseur  qui  né  dépasse  pas  7  centimètres. 
Sop  parenchyme  pur  de  toute  altération  est  exsangue, 
sèc ,  rés^istant'  à  lasectipn,  et  ne  crépite  dans  aucun  point  j 
sa  couleur  est  grisâtre.  De  ce  côté,  le  diaphragme  a  été 
coDsidérablement  refoulé  ;  en  bas  et  au  lieu  de  sa  convexité 
habituelle;  il  offre  une  profonde  dépression  remplie  de 
pus  ;  la  fausse  membrane  qui  recouvre  la  plèvre  diar 
phragma(ique  a  une.  grande  épaisseur. 

Du  côté  droflUde  la  poitrine.il  s'écoule  environ  t  litre  i/2 
de  sérosité  citrine  très-limpide.  Le  poumon  est  légèrement 
refoulé  vers  la  colonne  vertébrale  :  son  tissu  est  sain,  les 
vésicules  ne  sont  pas  affaissées.  Le  diaphragme  offre  ici  la 
convexité  normale.  L^  péricarde  est  distendu  par  de  la 
sérosité  limpide.  Le  cœur,  de  volume  normal,  est  décoloré , 
ses  fibres  musculaires  sont  jaunâtres;  il  ne  contient  pas  de 
caillots.  , 

Le  foie,  notablement  augmenté  de  volume,  offre  une  co- 
loration jautie,  son  lobe  gauche  va  toucher  la  rate. 

La  rate,  d'un  ^volume  médiocre4  est  enveloppée  d'un 
épiploon  épais,  induré,  qui  la  fait  adhérer  au  diaphragme 
et  à  Testomac.  .£à  cherchant  à  la  séparer  de  ce  dernier 
organe,  on  tomj>e  sur  un  abcès  du  volume  d'un  gros  œuf 
de  poule,  qui  occupe  son  tiers  supérieur,  et  qui  coouQu-* 
nique  avec  un  autre  foyer  un  peu  moins  volumineux  placé 
plus  bas,  vers  ïe  milieu  du  diamètre  transversal.  Ces  deux 
cavités  remplies  d'un  pus  épais ,  jaune  et  bien  lié,  sont 
tapissées  partout  par  une  membrane  tomenteuse.  Le  pa- 
renchyme splénique,  de  couleur  rouge  lie  de  vin,  est  friable 
et  ^  .laisse  facilement  réduire  en  bouillie:  il  offre  assez 
bien  l'aspi^ct  d'uQ  poumon  passant  de  l'hépatisation  rouge 
à  riiépatisatiou  '  grise..  La  coque  qui  enveloppe  Tithcès 
s^périeMr  adhère  à  la  foliole  gauqhe  du  oeatre  phrénique  ; 


94  JOUBIIÀL  DE  KÉDBCITŒ. 

en  ce  point ,   Taponévrose   paraît  tendue  et  tirée   vers 
Tabdomen. 

L'estomac  ne.  présente  aucune  lésion  :  sa  menabrane  mu- 
queuse, compiélenient  décolorée ,  présenté  seulement  deux 
ou  trois  plaques  rouges  vers  le  grand  cul-de-sac. 

La  .membrane  muqueuse  intestinale,  également  déco- 
lorée, n'offre  aucvine  altération. 

L'ensemble  des  symptômes  observés;  chez  notre  malade 
et  des  lésion»  constatées  «près  la  mort,  nous  suggère  les 
réflexions  suivantes:  1<*  la  maladie  primitive  a  été  une 
splénite  qui  s'est  plus  tard  tei'minée  pe^r  abcès  ;  2^  l'hé- 
màtémèse  a  été  symptomatique  de  la  mirladie  de  la  rate  ; 
3^  une  pleurésie  purulente  à  marche  subaiguë  s'est  déve- 
loppée  par  contiguité,  plusieurs  semaities  avant  la  mort ,  et 
c'est  à  cette  citconMance  qu'était  due  l'aé%mentation  du 
champ  de  la  mutité  splénique  ;  4^  les  frissons  irréguliers 
observés  les  derniers  jours  ont  coïncidé  avec  l'extension 
de  la  pleurésie  purulente ,  à  laquelle  est  venu  s'ajouter  à 
la  fin  un  épanchement  considérable  de  sérosité,  dans  les 
-deux  plèvres  v  et  dans  le  péricarde  ;  5^  l'augmentation  de 
volume  du  foie  et  sa  coloration ,  étiolent  sans  doute  en 
rappor:t  avec  le  trouble  des  fonctions  de  la  rate  et  fa  dimi- 
nution du  champ  de  lé  respiration. 

La  maladie  primitive  a  été  une  splénite  et  une  splénite 
méconnue,  ce  dont  on  n'a.  pas  lieu  de  s'étonner,  quand  on 
songe  à  la  rareté  relative  de  cette  maladie,  eu  égard  à  la 
fréquence  de  Thypertrophie.  Toute  fièvre  intermittente  un 
peu  prolongée  donne  lieu  k  un  développement  anormal  de 
la  rate,  et  dans  les  contrées  éminemmenî  marécageuses , 
comme  la  Sologne  par  exemple,  l'engorgement  de  ce 
viscère  est  un  fait  générai.  ^ 

Selon  M.  Nepple,  rintumescencé  splénique  ne  tient  pas 
toujours  à  la  fièvre ,  elle  dépend  souvent  de  la  seule  cons- 
titution des  habitants  des  marais  ,  chez  lesquels ,  dit^il , 
on  observe  une  grande  ampliation  passive  du  système  vei- 
neux ascendant ,  surtout  des  vaisseaux  de  l'abdpmen. 

Tous  les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  les  fièvres  intermit- 
tentes sont  d'accord  sur   la  fréquence  de  l'hypertrophie 


JOUBIfÛ.  DB  KÉDBCIMB.  95 

spléaique  ,.  et  'chacun  sait  ce  que  H.  Piorry  a  ^crit  sur 
ce  sujet.  Dans  les  fièvres  pernicieuses  et  dans  les  fièvres 
continues  graves,  on  signale  bien  le  ramollisçeroent  de  la 
rate  ,  mais  oh  parle  rareineiU  nie  splénitç  suppurée. 

De  tous  les  auteurs  modernes,  Maumann,  d0  Berlin  (1), 
est  celui  qui  a' donné  la  meilleure  description  de  la 
splénite  ;  il  indique  les  symptômes  suivants  :  douleurs  fré- 
quentés à  Testomac  ,  nausées ,  vomissemetits  de'  matières 
muqueuses,  bilieuses,  sanguinolentes ,  renvois  acides; 
ces  accidents  augmentent  par  la  station  verticale. 

Plusieurs  autres  auteurs  signalent  également  rhématé- 
mèse  comme  ^mptôme  de  la  splénite;  Marcus.et  Heu- 
singer  la  regardent  mênfke  comme  un  signe  pathognomo- 
nique  de  cette  affection. 

Ce  symptôme  n'a  pas  manqué  chez  notre  malade;  mais, 
indépendamment  de  ce  que  nous  pouvions  croire  à  une 
hématémèse  idiopathique  ,  le  retour  périodique  de  Thé- 
morrhagie,  chez  un  sujet  primitivement  atteint  de  fièvre 
intermittente  ,  .devait  nous  faire  penser  à^une  fièvre  per- 
nicieuse gastrorrhagique  ,  maladie  dont  Tortl  et  plufTieurs 
autres  ont  rapporté  des  exemples  ,  et  que  j'ai  eu  moi- 
même  oc(^asion  d  observer  che2,un  jeune  homme  de  18 
ans,  adonné  à  Tusage  des  liqueurs  alcooliques.  Le  sulfate 
de  quinine  avait  eu  ici  un  plein  succès. 

Une  autre  circonstance,  qui  a  rendu  le  diagnostic  en- 
core plus  difficile ,  c'est  que  nous  avions  affajre  à  une 
splénite  chronique ,  comme. le  démontre  l'existence  d'un 
kyste  parfaitement  organisé  autour  de  la '  collection  pu-* 
ruiente..  . 

L'hématémèse ,  ainsi  que  plusieurs  autres  hémorrha- 
gies,  a  ,  du  re^te ,  été  observée  dans  les  autres  maladies 
de  la  rate  ,  et  même  dans  les  simples  engorgements.  ^^ 
On  Kt  à  la  page  487  du  tome  IV  du  Compendium  de 
Médecine  : 

«  L'hypertrophie  de  la  rate,  qui  est  souvent  considérable 


(1)  Handbuch^  der  medieuiisches  KUnik. 


96  jorànAÉ  DE  «Éiacnlc. 

et  persiste  encore  après  la  disparition  de  la  fièvre .  inter- 
mittente ,  peut  expliquer  certaines  hénflorrhagies  intesti- 
nales. On  conçoit,  en  effet,  qu'un  organe  aussi  éminem- 
ment vasculaire  que  la  rate,  dont  )es  fdhctioi;is  paraissent 
liées  plus  ou  moins  directement  à  celles  de  la  circulation  , 
doit  prendre  quelque  part  à  la  production  des  hémor- 
rhagiesi  » 

Galien  ,  en  parlant  des  maladies  de  la  rate ,  a  noté  -la 
fréquence  des  hémorrhoïdes  chez  les  sujets  qui  en  sont 
atteints;  il  prétend  que  ce  flux  est  salutaire  ,  et  que, 
lorsqu'il  vient  à  cesser ,  il  est  remplacé  par  des  vomisse- 
ments de  sang  et  des.  hémorrhagtes  par  Tint^tin  .ou  les 
narines.  \ 

M.  Gendrin  (1)  range  les  maladies  du  foie  et  de  la  rate, 
en  général ,  parmi  les  causes  des  gastrorrhagies. 

Frédéric  Hoffmann  note .  les  vomissements  de  sang 
comme  un  des  signes  de  Thypertrophie  splénique,  et 
regardé  comme  hors  de  douté  que  le  sang  provient  dés 
vaisseaux  courts,  de  l'artère  et  de  la  veine  splénique. 
(F|*édéricHoflmann,  de'Morbis  Lienis.)  Les  anciens,  disent 
les  auteurs  dd  Compéndium  ,  avaient  imaginé  certaines 
communications  qui  n'existent  pas  entre  lés  vaisseaux  de 
la  rate  et  de  l'estomac  ,  et  ilis  croyaient  que  robstructibn 
de  ces  vaisseaux  occasionnait  rbématémèsé.  (Riolan,  Co- 
lumbus  ,  Wedel ,  Marcellus  Donatus  ,  Scbénk,,  Théaph. 
Bonet^  ont  soutenu  celte  opinion.)  Cetleliémorrhagie  n*a 
rien  de  spécial,,  et  se  fait  comme  les  autre^  hématèmèses , 
par  exhalation  sanglante  dans  la  cavité  de  l'estomac.  IHa 
reste  j  elle  est  rare,  et  an  ne  lobserù  que  dans  le  cas  oti 
là  constitution  est  altérée  et  l'hypertrophié  splénique  déjà, 
très-ancienne.  Celle-ci  ne  parait  exercer  aucune  infltience 
mécanique  sur  ta  production  de  Vhémâtémése.  , 

Il  jious  semble  cependant  que  quand  l'aUératîon  de  la 
rate  est  assez  prononcée  pour  gêner  le  cours  du  sang  dans 
Fartère  splénique',  les  autres  branches  du*  tronc  cœfiaque 


(l)  Traité  Philosophique  dé  Médecine  Prâtiqtie,  t.  f ,  p.  1^. 


.     SO^Wld  DE   HÉBSGI«£.  97 

doiveiit  recevoir  en  p(us  ce  que  celle-^ci  reçoit  eÀ  mbins^ 
ce  qui  devient  une  câXiSe  d'hypérémie  pour  les  organes 
auxquels  elles  se  distribuent  ;  or  ,  <te  Phypérémîe  à  Thé- 
moprh'agiô  ,  il  h*y  a  qu'une,  différence  du  plus  au 
moins  (1);  ,'         ■    \ 

L'afFaibliissement   progressif  de   r^coriqmie  sous -Fin- . 
fluence  de  la  chlorose ,  de  l'aménorrhée  et  de  la  fiëvi'e 
intermittente  ,  mérite  d'être  pris  en  sérieuse  considération 
dans  lé  cas  qui  nous  occupe.  MM.  Môttttéfet  et  .Fleury 
disaient  etn  1846: 

Ce  n*est'pa$unedes  particularités  les  moibs  importaintes 
dé  l'histoire  deà  maladies  de  ia^  rate,  que  de  voir  cet 
organe  ,  dont  les  fonctions  sont  inconnues  ^  et  qui  ne  pu- 
ratt  guère  entretenir  de  syijnpathie»  qu'avec  le  foje.etresio- 
mae  ,  s  altérer  proinpitement  et  d'une  manière  coilstanie, 
chaque  fois  que  le. sang  a  subi  qbelqUe  altération,  que 
celle-ci  soit  primitive  ou  seulement  consécutive.       ' 

Poiir  ce  qui  est  de  la  pleurésie  purulente ,- on  se  l'end 
aiséntent  compte  de  sa  production  aa  voisinage  de  l'abcès 
splénique,  dont  les  parais  adhièraient  au  diaphragme  ,  et 
Ton  sait  d'ailleurs  avec  quelle  facilité-  les  phlegmasies  pu- 
rulentes, envahissent  les  tissus  similaires^  ceux  qui  ont 
été  primitivement  alfectés,  quand  les  forces  de  lëconomie 
ont  subi  une  atteinte  profoncle.. Cette  nouvelle  pbl^gmasie, 
beaucoup^lus  étepdue  que  la  première, est  venue  ajouter 
à  [a  gravité*  du  pronostic  et  hâter  la«iort,:qui  ne  semble 
pas  avoir  été ,  di^ns  tous  les  cas ,  la  con.séquetice  néôes- 
saire  des  àb(}ès  de  la  r^te.  G'est  elle;  enfin  ,  qui  a* donné 
lieu  il  l'énorme  épànchement  séreux  des  plèvres  et  dû  péri- 


(t)  9i  on  admet,  avec  M.  Beaii^  que  la  rate  est  un  organe 
d'impulsion ,  et  que  ~,  par  son  élasticité.,  elle  contribue  k  faire 
progresser  le  sang  dans  la  veine  jBplénique ,  et ,  par  suite  ,  dans,  la 
?eine-porte,  on  concevra  que  (j^and  elle  aura  perdu  cette  pro- 
priété, par  suite  d'une  dilatation  passive ,  ou  d[uiko  hypertrophie 
permanente  r  elle  se  dét)arrassera  difficilement'  du  sang  que  lui 
apporte  l'pttère  splénique:  ' 


98  JOUBIfÂL  DE  «ÉBECiraS. 

carde ,  dont  le  développement  rapide  a  du  suspendre  si- 
multanément les  fonctions  des  pOumons  et  du  cœur. 

L'hypertrophie  et  Taltération  de  couleur  du  foie  ont  été 
signalées  généralement  dans  les  maladies  de  la  rate.  M. 
Beau  ,  dans  son  mémoire  sur  l'appareil  spléno^hépatique  , 
qne  nous  avons  cité  plus  haut,  insiste  avec  raiso"  sur  la 
solidarité  qui  existe  entre  ces  deux  organes.  Il  rappelle 
que ,  chez  les  animaux  auxquels  on  a  enlevé  la  rate,  '^  foie 
se  trouve  constamment  hypertrophié,  et  il  cite  de!i*;^^s 
observés  chez  Thomme,  dans  lesquels  l'ablation  de  la  rate, 
nécessitée  par  une  blessure  «  n'empêcha  pas  la  vie  de  con- 
tinuer pendant  plusieurs  années ,  et  même  l'un  des  àeux 
sujets  ,  qui  était  une  femme ,  put  concevoir  et  accoucher  à 
terme.  Elle  mourut  cinq  ans  après,  et  présenta  à  l'au- 
topsie un  foie  d'un  volume  extraordinaire. 

L'influence  de  la  gêne  respiratoire  sur  le  foie  n'a  pu 
être  ici  que  secondaire  ;  cependant ,  l'état  de  compression 
du  poumon  gauche  était  tel ,  que,  depuis  assez  longtemps 
déjà  ,  il  ne  servait  plus  à  l'hématose,  dont  4e  champ  se 
trouvait  considérablement  rétréci  ,  circonstance  qui  con- 
tribuait sans  doute  à  augmenter  l'embarras  de  la  circulation 
abdominale. 


OBSEB.  VA TI ON  de  pneumo-thorax ,  conÈé- 
cuftf  à  une  pneumonie  lobulaire ,  termirtée  par 
abcès  ouvert  dans  la  plèvre,  par  M/Vallin, 
élève  interne  à  l'Hôtel-Vieu  {Service  de  M. 
Malherbe). 


La  femme  Coiquaud,  Jean,  jouniarière,  âgée  de  42  ans, 
présenta,  en  entrant  à  l'hôpital,  le  6  janvier  1855,  lés 


JOURNAL  DE  MÉDÈCINB.  99 

symptômes  d'un  épuisement  excessif,  (l*un  état  de  débilité 
général,  sans  lésions  d'organes  apparentes.  Interrogée  sur 
les  circonstances  qui  ont  précédé  sa  maladie,  elle  donna  les 
renseignements  suivants:  elle  a  quitté  la  campagne,  il  y 
a  quelques  mois  seulement  pour  venir  h  Nantes,  où  ejle 
espérait  trouver  plus  de  ressources  et  moins  de  misère: 
habitation  dans  un  quartier  malsain  de  la  ville  (je  ftlarchix), 
dans  un  logement  bas,  humide,  peu  éclairé  ;  alimentation 
de  mauvaise  nature  et  insuffisante,  misère  profonde  à  la- 
quelle viennent  se  joindre  Ie6  fatigues  d'un  accouchement 
facile  ;  il  est  \frai ,  mais  après  lequel  la  malade  se  hâte  beau- 
coup trop  de  reprendre  des  occupations  fatiguantes  :  essais 
pénibles  d'aHaitement,  cessés  forcément  au  bout  de  deux 
mois  ;  aflFaiblissement  tel  enfin  que  Jà  femme  Coiquaud  se 
décide  à  entrer  à  Thôpital.  À  cette  époque,  l'abattement 
est  considérable,  les  tîssus  sont  décolorés,  mais  non  in- 
filtrés de  sérosité  ;  le  pouls  est  faible ,  médiocrement 
accéléré;  Tauscultation  de  la  poitrine  fait  entendre  quel- 
ques râles  à  grosses  bulbes  disséminés  dans  les  deux  pou- 
mons. La  re$piratit)n  n'est  pas  gênée,  ses  mouvements 
n'éveillent  aucune  douleur  ;  les  fonctions  digestives  s'exé- 
cutent assez  régulièrement.  Malgré  une  nourriture  substan- 
tielle, l'usage  du  vin  de  quinquina,  Tétat  ne  change  pas  ; 
il  s'y  joint  même  des  symptômes  de  nostalgie.  Le  18  jan-> 
vier,  son  jeune  enfant  meurt  dans  une  des  salles  de  l'Hôtel- 
Dieu  ;  <}uelques  jours  après,  on  lui  apprend  que  .sa  fille, 
âgée  de  IQ  ans,  a  disparu,  et  qu'elle  n'a  pu  être  re- 
trouvée, malgré  les  rech^erches  actives  de  la  police.  Dès 
lors,  l'adynamie  est  plus  profonde  encore^  l'appétit  est  nul; 
il  survient  un  peu  de  diarrhée. 

Le  26  janvier,  la  malade  se  plaint  d'une  douleur  sourde, 
n^ais  peu  vive  dans  toute  la  .poitrine:  l'oppression  est 
marquée,  la  tou3^  fréquente,  le  pouls  faible  à  liO. 

L'auscultation  révèle  des  ronclius.  sonores  et  sibilants 
dans  les  deux  poumons,  .mêlés  à  des  buUes  de.  râles  mu- 
queux.  Looch,  buîl.  calm.  2  past.  Ipéca.  Vésicatoire  à,  la 
partie  postérieure  du  tiiorax. 

Le  29  et  le  30 ,  légers  frissons  le  jour,  suivis  de  chaleur 


100  joîjuvai.  m  «ÉMcmB. 

et  de  sueur ,  venant  à  ihtervaltes  irréguUers.  J^x>t  fébrifuge 
opiacée.  Même  état  de  b  poitrine.  Pot.  avec  acétate  am* 
moniaq.  et  $p.  opium. 

Le  31  au  soir,  douleur  plus  vive  au  côté  droit;  respi- 
ration courte  et  gênée  ;  pouls  à  112 ,  faible,  dépressibie  ; 
rftie  sous-crépitant  dans  le  tiers  inférieur  et  postérieur  du 
poumon  droit  :  résonnadce  vocale  marquée  :  pas  de  souffle 
bronchique,  d^égophonie^  ni  de  matité  relative  en  ce 
point.  Râles  muqùeux  dans  le  poumon  gauche ,  expectora- 
tion peu  abondante  de  crachats  visqueux,  blancb&tres,  mêlés 
de  stries  sanguines»  Un  vésicatoire  est  appliqué  sur  le  côté 
affecté. 

1*^  février.  La  douleur  et  f  oppression  n'ont  pas  augmenté 
pendant  la  nuit;  râle  sous-crépitant,  souffle  tobaire , 
bronchophonie  dans  le  tiers  inférieur  du  poumon  droit: 
dans  les  points  où  s'entend  le  souffle  bronchique^  on  perçoit 
une  respiration  amphorique  douteuse,  existant  seulement 
dans  les  fortes  respirations.  La  voix  présenté  aussi  à  un 
faible  degré  le  timbre  amphorique.  La  sonorité  n'est  pas 
dimiiiuée  dans  tout  le  côté,  la  vibration  est  la  même  qu'à 
Tétat  normal. 

2  février.  Même  état  général  ;  le  pouls  est  à  i  12  ,  faible, 
dépressibie,  Toppression  est  médiocre,  la  douleur  presque 
nglle:  le  bruit  vésiculaire  ne  s'entend  nulle  part ,  niiais  la 
respiration  et  la  voix  amphoriques  sont  parfaitemenl:  dis- 
tinctes dans  toute  la  partie  droite  de  la  poitrine  en  arrière; 
il  n'ya  pas  de  tintement  métallique  :  lasuccussion  hippo- 
cratique  ne  produit  point  le  bruit  de  flot.  La  "sonorité  est 
tympanique  dans  tout  le  côté  malade  qui  est  sensiblement 
désveloppé  ;  les  espaces  intercostaux  sont  bombés  et  élargis. 
Le  poumon  gauche,  ausculté  avec  le  plus  grand  soin ,  ne 
présente  aucun  signe  de  tuberculisation.  --  . 

3  février.  La  sonorité  s-est  étendue  à  la  |)nrtie  latérale 
et  atltérieure  ;  mais  aU  niveau  du  quart  inférieur  du  poumon 
droit,  on  trouve  une  matité  relative  très-prononcée  :  on 
n'entend  pas  d  egophonie  en  ce  point.  La  nialado  est  de 
plus  en  plus  affiftissiée,  les  mouvements  inspiratoires  sont 


L 


JOfJRlfAI.  DE  UÉXKCOŒ.  101 

feibies  et  courts,  sans  angoisse  ;  la  douleur  est  nulle ,  l'ex- 
pectoration très-peu  abondante,  et  seulement  muqueuse. 

I^e  4  et  le  5.  Matité  plus  étendue  en  arrière  :.  absence 
die  tintement  métallique,  ei  de  bruit  de  flot:  diarrhée 
abondante,  fièvre  hectique.  Les  symptômes  précédents 
persistent  jusqu'^à  la  veille  de  la  mort;  la  faiblesse  augmente 
chaque  jour,  la  malade  est  très*souvent  assoupjç  :  elle 
n'uccuse  pas  de  dopleur,  à  peine  de  Toppression. 

Le-^IÔ,  la  respiration. est  plus  gênée^  fréauente,  anxieuse: 
les  extrémités,  les  lèvres,  la  face  sont  violettes  ;  la  malade 
succombe  enfin  le.  1 1  février ,  avec  tous  les  symptômes 
d'une  asphyxie  lente. 

Autopsie  40   heures  après  la  mort,  le  eadacre  ne   ^ 
présenlatU  aucun  signe  de  putréfaction. 

L»  thQracenthèse  pratiquée  à  la  partie  supérieure  et  laté- 
rale de  la  poitrine  permet  de  recueillir  dans  une  vessie 
adaptée  à  la  canule,  du  trocart,  une  qnantilé  de  gaz  qu'on 
peut  évaluer  à  un  Htre  et  dômi.  Ce  gaz  dégage  une 
odeur  d'hydrogène  sulfuré  très-prononcée  ;  dirigé  dans  une 
dissolution  d'acétate  de  plomb,  il  donne  un  précipité  noir; 
il  colore  également  en  noir  la  canule  en  argent  de  Tinstru- 
ment  :  il  (rouble  Teau  de  chaux ,  mais  pas  assez  prompte- 
ment  pour  faire  croire  que  le  gaz  soit  presque  entièrement 
formé  d'acide  carbonique.  A  l'ouverture  du  thorax  ,  il 
s'écoule  environ  deux  litres  d'un  liquide  constitué  par  une 
faible  quantité  de  sérosité  ci^rine,  tenant  en  suspension 
une  matière  mucoso-purulente  en  masses  numinulaires, qui 
représente  assez  bien  l'expectoration  des  phthisiques,  et 
qui  fornae  les  deux  tiers  de  tépanchement  :  ces  masses 
arrondies  sont  en  partie  blanchâtres ,  en  partie  Jaunes  et 
rouillées,  nulle  part  brunes  ou  sanieuses.  Ce  liquide  est 
enf(*rmc  entre  les  deux  plèvres  parfaitement  libres  de  toute 
adlh^rence,  et  recouverties  d^une  pseudo-membrane  jaune- 
clair,  épaisse,  surtout  dans  le  cul-de^sac  inférieur,  où  du 
pus  parfaitement  homogène  constitue  seuirépaûchement.: 
cet  enduit  se   détaehe   en    grattant  légèrement   avec  le 


102  JOUBNAL  D£   MÎÉBBCIIVS. 

scalpel,  et  présente  dans  une  grande  étendue,  principale- 
ment sur  la  plèvre  costale,  une  teinte  légèrement  brune , 
due  peut-être  à  laclion  du  gaz  hydrogène  sulfuré. 

En  quelques  points,  Ton  trouve  de  petites  plaques  noir 
res,  arrondies, de  la  grandeur  d'une  lentHIe,  enchâssées 
dans  la  séreuse ,  de  consistance  fibreuse  ;  elles  sont  au 
nombre  de  trois  :  deux  à  là  partie  moyenne  et  latérale  de 
la  plèvre  costale,  une  autre  à  la  partie  supéneure  et  in- 
terne de  la  plèvre. pulmonaire  :  elles  sont  très*adhérentes 
et  paraissent  n*avpîr  excité  autour  d'elles  aucun  travail 
d'élimination;;  elles,  n'ont  pas  non  plus  l'apparence  sèche 
d'une  esc^arre  gangreneuse.  Le  poumon,  réduit  à  une 
lame  très-mince,  si  ce  n'est  dans  l'espace  correspondant 
à  l'angle  costo-vertébral  «  est  appliqué  contre  le  rachis.  On 
y  voit,  à  la  partie  postérieure,  devenue  externe,  deux  ou- 
vertures circulaires,  pouvant  admettr^  une  sonde  de  femme, 
à  bords  minces  et  lisses,  situées  fune  au-dessus  de  l'autre, 
h  la  partie  supérieure  du  lobé  inférieur.  Un  trajet  très- 
coqrt,  oblique  de  bas  en  haut  et  d'arrière  en  avant,  conduit 
à  une  cavité  qui  pourrait  loger  un  œuf  de  poule  ,  et  dont 
la  paroi,  lisse  et  régulière ,  est  formée  par  du  tissu  hépatisé 
au  second  degré,  nullement  infiltré  de  pus,,  ni  recouvert 
d'une  fausse  membrane.  Cette  cavité  ne  contient  aucun 
liquide  :  elle  présente  l'orifice  de  trois  rameaux  bronchi- 
ques ,  à  section  très-nette  et  dont  la  muqueuse  est  à  peine 
injectée  ;  on  amène ,  en  raclant  les  parois ,  un  liquide  clair, 
légèrement  rougeâtre,  d'une  odeur  d'hydrogène  sulfuré, 
mais  qui  ne  rappelle  nullement  l'odeur  caractéristique  de  la 
gangrène. 

Uhe  couche  de  tissu  Tiépatisé,  d'un  centimètre  d'épais- 
seur, violacé,  à  déchirure  grenue,  entoure  cette  cavké,  et 
forme  comme  un  noyau  parfaitement  distinct  par  sa  consis- 
tance, du  tissu  voisin.  Au-delà,  de  celte  zone,  et  dans  tout 
le  reste  du  poumon,  le  parenchyme  comprinié>st  verdâ- 
tre  ,  dense,  mais  surnage  à  l'eau.  Nulle  part,  on  ne  trouve 
la  moindre  trace  de  tuberculeé  :  la  plèvre  gauche  contient 
une  sérosité  limpide,  très-abondante;  elle  est  injectée, 
mais  non  recouverte  de  fausses  membranes  ;  le  poumon 


JOtmilAL  Iffi  «lÉDEClIfE;  103 

gauche,  un  peu  affaissé,  est  engoué  à  la  base,  il  est 
complètement  efxempt  de  matières  tuberculeuses.  Tous  les 
organes  voisins ,  thoraciques  et  abdominaux ,  sont  écartés 
de  leur  position  normale  :  le.  cœur ,  surtout ,  se  trouve 
placé  dans ia  partie  la  plus  externe  du  côté  gauche,  et  est 
refoulé  d'arrière  en  avant,  contre  le  thorax,  par  Tépanche- 
ment  de  ce  côté.  Le  diaphragme,  revêtu  de  la  plèvre,  forme, 
à  droite ,  une  poche,  remplie  du  liquide  de  Tépanchement, 
qui  descend  fort  bas  derrière  le  foie  ,  et  le  déforme  com- 
plètement. Le  foie,  très-volumineux,  est  pftie ,  de  couleur 
fauve,  piqueté  de  points  rouges;  sa  consistance  est  dimi- 
nuée ,  les  doigts  pénètrent  facilement  dans  son  tissu  ;  sa 
pesanteur  spécifique  n'a  pas  sensiblement  changée  :  cette 
dégénération  affecte  toute  Tétendué  du  parenchyme  ;  de 
plus,  il  présente  l'état  graisseux  à  un  degré  tel,  qu'en  le 
coupant,  la  lame  du  scalpel  se  recouvre  d'une  couche  de 
matière  suiffeuse,  d'une  ligne  au  moins  d'épaisseur. 
.  Les  autres  organes  n'ont  pas  été  examinés. 


QueHe  est  la  nature  de  la  lésion  qui  a  donné  lieu  à  l'exca- 
vation, et,  plus  lard,  à  la  perforation  du  parenchyme 
pulmonaire  ?  Les  circonstances  qui  ont  précédé  le  début 
de  la  maladie  ,  l'état  cachectique  du  sujet ,  s'accorderaient 
très-bien  avec  la  présomption  d'une  gangrène  circonscrite 
du  poumon ,  à  l'état  d'excavation  formée  par  le  ramollisse- 
ment complet ,  et  l'évacuation  de  la  matière  gangrenée. 
Mais,  dans  les  foyers  gangreneux  ,  la  cavité  est  habituel- 
lement anfractueuse  ,  irrégulière  ;  les  parois ,  noirâtres 
ou  verdâtres ,  sont  tapissées  de  débris  putrilagineux,  pro- 
venant de  l'élimination  de  l'escharre.  Dès  débris  dii  bour- 
billon, des  lambeaux  gangrenés,  unesanie  noirâtre,  d'une 
horrible  fétidité,  se  retrouvent  dans  le  liquide  épanché; 
la  lésion  est  ordinairement  multiple  ou  plus  étendue.  Or  , 
ces  caractères ,  Todeur  spéciale  de  la  gangrène  surtout , 
ont  fait  complètement  défaut,  et  leur  absence  doit  faire 
naître  des  doutes  sur  la  nature  gangreneuse  du  foyer. 

D'une  autre  part ,  l'existence  de  celte  excavation  dans 


104  JOUBICA&  M  KÉBBGBIB. 

le  lobe  inférieur,  alors  que  les  sommets  et  les  parties  restées 
saines  ne  présentent  aucune  trace  de  tubercules ,  la  na- 
ture du  noyau  d'hépatisation,  dans  lequel  $*est  développée  ta 
cavité,  excluent  Tidée  d'un  /amollissement  tuberculeux. 

La  supposition  d'une  hémorrhagie  pulmonaire  en  foyer, 
n'est  guère  plus  probable. 

Nous  trouvons  décrite,  dans  l'ouvrage  de  MM.  Rillietet 
Bartfaez  surtout ,  une  forme  de  la  broncho-pneumonie  des 
enfants ,  la  pneumonie  lobulaire  ou  mamelonnée ,  dont 
les  caractères  anatomiques  présentent,  avec  ceux  que  nous 
avons  sous  les  yeux ,  une  analogie  remarquable. 

(r  Les  abcès  du  poumon,  disent-ils,  appartiennent,  pres- 
que exclusivement, à  la  pneumonie  lobulaire.' Ces 

abcès  se  forment  au  centre  d'un  noyau  d'hépatisatioQ 
mamelonné,  entouré  d'un  tissu  par&itement  sain.  ^.. .  Ils 
ont,  en  général,  une  assez  grande  tendance  à  s'apprœher 

de  la  sgrface  de  l'organe  , et  si  une  inflammation 

adhésive  ne  vient  pas  unir  les  plèvres ,  il  y  a  pneumo- 
thorax. Dans  ce  cas,  la  poche  est  entièrement  vide.  Cette 
terminaison  de  la  pneumonie,  ajoutent-ils,  est  loin  d'être 
rare  ;  et ,  chez  deux  de  leurs  malades^  il  y  a  eu  complica- 
tion de  pneumo-thorax.  i> 

La  forme  symptomatologique  permet  aussi  de  faire  les 
mêmes  rapprochements  :  la  douleur  manque  presque  cons- 
tamment ,  ou  bien  elle  est  diffuse  et  peu  intense  ;  l'expec- 
toration est  nulle  ou  catharrale.  «  Le  mouvement  fébrile, 
disent  les  mêmes  auteurs,  n'est  presque  jamais  réactionnel , 
il  prend  quelquefois  le  cachet  hectique ....  Le  type  de  la 
fièvre  se  rapproche  souvent  du  type  rémittent  et  «léme 
intermittent.  »  Ils  insistent  particulièrement  sur  ce  point , 
et,  chez  notre  malade,  cette  rémittence  a  été  assez  sensible, 
pour  qu'on  ait  cru  devoir  donner ^  à  deux  reprises,  le 
sulfate  de  quinine. 

Une  objection  sérieuse  pourrait  être  élevée  au  sujet  de 
la  rareté  de  cette  forme  de  la  pneumonie,  dans  l'âge 
adulte  :  très-fréquente  chez  les  enfants  d'un  à  cinq  ans,  cette 
affection  est ,  en  effet,  d'autant  plus  rare,  que  les  individus 
avancent  davantage  dans  la  vie. 


JOUTAI   DE   M^p^.I1|l)2.  10$ 

Cependant,  a  dans  les  pneumonies  secondaires,  dit  M. 
Chomel,  c'est  principalement  la  forme,  lobulaire  que  Ton 
rencontre  surtout  chez  ladulte.  »  Or,  dans  le  caç  actuel,  la 
faiblesse  excessive  du  sujet ,  la  préexistence  d'un  catarrjie 
bronchique  général,  le  décubitus  prolongé,  étaient  autant 
de  prédispositions^  à  ce  qu'une  inflammation  secondaire  du 
poumon  se  développât,  sous  l'influence  d'une  cause  en  appa- 
rence insignifiante.  Et,  telle  était  la  faiblesse  de. la  réaction, 
que  Fintrôduction  des  liquides  du  foyer  dans  la  plèvre,  que  la 
pleurésie  suraiguë  consécutive^  n*ont  excité  ni  douleur  très* 
vive  ,  ni  anxiété,  ni  gêne  extrême  de  la  respiration,  symp* 
tomes  presque  constants  de  l'invasion  du  pneumo-thorax. 
Nous  venons  de  dire  pleurésie  suraiguë  consécutive ,  car 
nous  ne  croyons  pas  quil  y  ait  lieu  d'invoquer  ici  la  pré^ 
existence  d'une  inflammation  de  la  plèvre,  qui,  par  un  tra> 
vail  ulcératrf  de  celle-ci  vers  le  poumon ,  aurait  produit  ou 
contribué  à  produire  la  perforation  de  la  paroi  pulmonaire  : 
l'auscultation ,  pratiquée  presque  tous  les  jours ,  n'eut  pas 
manqué  de  donuer  les  signes  d'un  épanchement  pleuré- 
tique,  s'il  eût  existé.  Un  fait  qui  concorde  avec  l'absence 
d'une  gêne^  très-grande  de  la  respiration  ,  cVst  qu'on  a 
observé,  au  début,  un  souffle  et  une  voix  amphpriques  très- 
obscurs  ,  tenant  sans  doute  à  l'étroit/esse  de  la  fi§tule  et  à  la 
petite  Quantité  de  gaz  épanché  :  plus  tard,  cette  fistule  s'est 
agrandie;  mais,  déjà,  le  poumon  avait  été  lentement  com- 
primé, et  la  malade  s  était  peu  à  peu  habituée  àrinsuffi-- 
sance  de  la  respiration. 

pin  dehors  de  l'appareil  respiratoire  ,  l'aulopsie  a  révélé 
un  fait  intéressant  qui  porte  sur  un  organe  dont  la  patho- 
logie n*est  pas,  à  beaucoup  près,,  aussi  avancée  que  le  mé- 
riterait son  importance  :  le  foje  ^  présenté  au  plus  haut 
degré  les  caractères  assignés  à  Tétat  adipeux.  Cette  lésion, 
que  l'on  pourrait  dire  spéciale  à  la  phthisie,  affecte  cepen- 
dant une  femme  oui  n'a  présenté,  nous  le  répétons,  aucune 
trace  de  tubercules.  Mais  il  est  permis  de  faire  entre  la 
phthisie  et  le  pneumo-thorax  envisagés  :^  un  certain  point 
de  vue ,  des  rapprochements  qui  semblent  assez  naturels  : 
(ï\x^  côté,  des  masses  tuberculeuses  compriment,  si  elles  ne 
détruisent  pas,  le  parenchyme  pulmonaire,  et  diminuent 


106  JOUBIIAL  DF  KÉDBCIRB. 

d*autant  le  champ  de  la  respiration  ;  de  l'autre,  la  présence 
d*un  fluide  liquide  et  aériforme  dans  les  plèvres,  affaisse 
les  vésicules  par  une  pression  lente  et  énergique  qui  peut, 
comme  dans  le  fait  actuel ,  rendre  le  poumon  tout  entier 
imperméable  à  Tair.  Or,  dans  les  deux  cas,  le  sang  ne 
subit  plus  dans  les  poumons  les  modifications  ordinaires; 
moins  oxygéné,  il  ne  suffit  plus  pour  comburer  les  prin- 
cipes  hydro- carbonés  de  la  graisse  amenés  dans  le  foie  par 
le  système  de  la  veine-porte ,  et  cette  cause  étant  cons- 
tante, Taccumulation  de  la  graisse  deviendra  bientôt  con- 
sidérable. Mais,  chez  les  phthisiques,  ce  n'est  qu'au  bout 
de  plusieurs  mois  que  cette  altération  a  lieu,  tandis  que 
notre  malade  a  été  exposée  pendant  12  jours  seulement  à 
ces  conditions  physiologiques.  Faudrait-il  admettre  avec 
M.  Louis,  une  forme  aiguë  de  cette  transformation  du  foie, 
en  rapport  d'ailleurs  avec  Tasphyxie  lente  produite  par  la 
compression  d'un  des  poumons  par  le  pneumo-thorax ,  de 
l'autre  par  Tépanchement  pleurétiqlie  ,  du  cœur  enfin  par 
ces  deux  causes  à  la  fois?  ou  bien,  faut-il  prétendre, 
comme  M.  Bonnet,  que  l'inflammation  suraiguë  de  la 
plèvre  diaphragmatique  s'est  propagée  au  foie,  et  que  la 
dégénération  graisseuse  n'est  qu'une  terminaison  de  l'hé- 
patite? Nous  n'invoquerons  pas  davantage  les  autres  hypo- 
thèses imaginées  pour  expliquer  les  corrélations  qui  existent 
etitre  les  maladies  chroniques  du  poumon  et  la  production 
de  l'état  gras  du  foie,  cet  organe  appelé  par  certains 
physiologistes,  le  poumon  de  l'abdomen.  Remarquons  seu- 
lement que  le  sujet  de  l'observation  est  une  femme  ;_or, 
dit  M.  Louis,  les  femmes  sont  plus  exposées  que  les  hommes 
h  cette  transformation  graisseuse,  dans  le  rapport  de  4  à  1. 
Terminons  cette  note  trop  longue  déjà ,  en  rappelant 
que  le  bruit  de  flot  et  le  tintement  métallique  ont  manqué, 
alors  que  se  trouvaient  réunies  toutes  les  circonstances 
propres  à  favoriser  leur  développement.  A  l'égard  du  bruit 
de  flot,  cependant,  il  eonvient  de  dire  que  l'on  n'a  im- 
primé à  la  malade  que  de  légères  secousses,  l'état  de  faiblesse 
du  sujet  s'opposant  à  ce  qu'on  usât  plus  vivement  d'un 
moyen  qui,  dans  certaines  circonstances,  a  quelque  chose  de 
brutal  et  de  répugnant. 


JOURNAL 


DB  LA 


SECTION  DE  MÉDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


BULLEim  DES  S.ÉANCES. 


Séftnee  duH  mai  i855. 

PR&SIDBnCB  DB   »  IB-CinHBDB. 

Le  procès>verfoal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

lia  Section  de  Médecine  a  reçu  une  lettre  de  M.  9èrtn- 

lus ,  de  Marseille ,  en  réponse  au  rapport  dé. M.  Haiherbe, 

9 


i08  JOUIRAL  DE   MÉBBCnŒ. 

sur  son  mémoire  intitulé  :  De  Vinfluence  de  Védairage  au 
,gaz  sur  la  santé  publique. 

Dans  cette  lettre,  M.  Bertulus  s'applique  à  faire  ressor- 
tir les  différences  que  présentent ,  dans  leur  action  sur  l'or- 
ganisme ,  les  gaz  acide  sulfhydrique  et  oxyde  de  carbone. 
Il  paraît  mettre  en  doute  TactioD  véritablement  délétère  de 
ce  dernier  et  reproche  à  la  Coromiss^oo  de  lui  avoir  at- 
tribué des  effets  aussi  nuisibles  qu'à  Tacide  sulfhydrique. 

Après  cette  lecture ,  M.  Malherbe  demande  la  parole  et 
s'exprime  ainsi  : 

«  M.  Bertulus  attaque  une  des  conclusions  de  la  Com- 
mission ,  ainsi  conçue  : 

ir  Les  qualités  nuisibles  du  gaz  oxyde  de  carbone  sont , 
pour  le  moins ,  aussi  prononcées  que  celles  de  l'acide  suU 
fhydrique ,  et  nous  regrettons  que  H.  Bertulus  n'ait  pas 
recherché  la  part  qu'il  a  pu  avoir  dans  la  production  des 
accidents  observés  à* Marseille.  » 

j»  L'expression  pour  le  moins  est  assurément  la  seule  , 
dans  cette  phrase ,  dont  la  justesse  puisse  être  légitimemeut 
contestée,  et ,  en  la  remplaçani  pa»  celle-ci  :  presque  aussi 
prononcées ,  etc.  ,  nous  ne  voyons  pas  quelle  objection  on 
pourrait  nous  faire.  C'est  à  tort  que  H.  Bertulus  accuse  la 
Commission  d'avoir  attribué  à  l'oxyde  de  carbone  les  mê- 
mes propriétés  qu'à  lacide  sulfhydrique,  aucun   de  ses 
membres  n'a  jamais^  eu  cette  pensée  ;  mais  elle  a  établi 
et  croit  devoir  maintenir  que  le  gaz  oxyde  de  carbone  pos- 
sède une  action  délétère  indépendante  de  son  action  mé- 
canique ;  sans  quoi  ,  il  ne  serait  pas  plus  nuisible  que 
l'acide  carbonique,   que  Thydrogène  pur,  que   l'azote, 
qu'on  a  pu  introduire  à  très-forte  dose  dans  des  atmosphè- 
res artificielles  sans  troubler  notablement  la  respiration  des 
animaux  sur  lesquels  on  expérimentait,  tandis  qu'un  cen- 
tième ou  un  demi-centième  de  gaz  oxyde  de  carbone 
suffisait  pour  donner  la  mort. 

»  L'espèce  d'innocuité  que  M.  Bertulus  attribue  à  Toxyde 
de  carbone  n'est  point  démontrée  par  le  passage  sur  lequel 
il  s'appuie  ,  puisque  l'auteur  cité  reconnaît  à  ce  gaz  une 
influence  sur  le  système  nerveux. 


JOimrVÂL  DB  MÉDECINE.  109 

»  Remarquons ,  en  passant ,  que  les  recherches  attri- 
buées ici  à  Orfila  sont  dues  à  Nysten. 

D  L'observation  suivante,  citée  dans  notre  rapport, 
prouve  assez  bien  que  les  effets  de  ce  gaz  ne  se  dissipent 
pas  toujours  avec  rapidité  :  Un  ouvrier  robuste  et  intel- 
ligent respira  du  gaz  sortant  par  la  soupape  d'un  gazomè- 
tre ;  il  fut  renversé.  Malgré  les  soins  qu'on  lui  donna ,  il 
éprouva  un  malaise  continuel ,  avec  extrême  agitation  et 
besoin  incessant  de  se  mouvoir.  Au  bout  de  quelques  mois, 
il  devint  fou  et  mourut  dans  cet  état  deux  ans  après. 

»  Nous  ajouterons  qu'on  ne  connaît  pas  les  effets  de  la 
respiration,  longtemps  continuée,  de  très-faibles  doses 
d'oxyde  de  carbone  ;  mais ,  ce  qu'on  sait  très-bien  ,  c'est 
que  le  gaz  de  houille  en  contient  une  proportion  moyenne 
de  7  Vo  «  6^  que  les  moyens  d'épuration  n'ont  aucune  prise 
sur  lui , tandis  qu'ils  peuvent,. quand  ils  sont  bien  appli- 
qués ,  faire  disparaître  à  peu  près  complètement  les  com* 
posés  sulfureux. 

0  La  Commission  avait  donc  raison  de  se  préoccuper 
de  l'existence  de  l'oxyde  de  carbone,  dans  le  gaz  pour 
l'éclairage  ,  et  d'exprimer  le  désir  qu'on  étudiât  son  action 
sur  la  santé  de  ceux  qui  le  respirent  accidentellement. 

»  Pour  ce  qui  est  de  l'hydrogène  sulfuré  ,  nous  n'avons 
nullement  cherché  à  infirmer  ce  que  M.  Bertulus  dit  de  ses 
effets  fâcheux  ^  seulement ,  nous  persistons  à  penser  que 
c'est  conclure  prématurément  que  de  prétendre  que  ce  gaz 
est  la  seule  cause  de  la  nocuité  des  miasmes ,  et  qu'à  lui 
seul  doit  être  attribué  le  développement  de  tous  les  typhus. 
Nous  gardons  cette  manière  de  penser ,  même  après  la 
lecture  de  l'intéressante  observation  rapportée  dans  la. 
lettre  de  H..  Bertulus.  » 

L'ordre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  Mahot ,  pour  la 
lecture  d'observations  cliniques.  (1) 

M.  Malherbe  lit  ensuite  une  observation  d'abcès  de  la 
rate.  (2) 


(1)  Voir  page  117. 

(2)  Voir  le  noméro  précédent. 


110  J0UBRAJ4  BB  l^ÉDBCnaU 

Séance  du  15  jum  1855. 

PBÉSmBNCB   DB    M.   LBTBRTIEUB. 

Après  la  lecture^u  procès-verbal  de  la  dernière  séance , 
M.  Harcé  lit  la  dernière  partie  de  son  travail  sur  la  Sémiio- 
logiê  de$  flivreê  intermittentes.  (I) 

(lette  lecture  donne  lieu  aux  réflexions  suivantes  : 
M,  iluôfnata  trouve  le  travail  de  M.  Marcé  entièrement 
neuf  et  original  ;  il  est  disposé  à  lui  donner  pour  cela  de 
grands  éloges.  Il  craint,  toutefois,  que  ces  détails  minu- 
tieux d'anatomie  pathologique  ne  fassent  perdre  de  vue  le 
génie  de  la  maladie ,  Tintoxication  paludéenne.  Il  craint 
aussi  qu'en  fixant  trop  son  attention  sur  les  lésions  locales, 
on  ne  soit  conduit  à  leur  opposer  une  médication  trop  ac- 
tive et  à  négliger  l'administration  du  quinquina,  qui  doit 
toujours  constituer  la  partie  principale  du  traitement.  Pour 
lui ,  dans  les  cas  très-nombreux  de  fièvres  intermittentes 

3u'il  a  eu  occasion  de  traiter,  il  ne  s'est  janiais  préoccupé 
es  complications  ;  le  sulfate  de  quinine  a  toujours  fait 
justice  de  tous  les  symptômes.  Il  constate  à  regret ,  dans 
ces  recherches  minutieuses  d'anatomie  pathologique ,  le 
défaut  de  grandes  vues  philosophiques.  II  est  peu  partisan, 
en  général,  des  recherches  nécroscopiques  ;  il  craint  que, 
dans  ces  recherches ,  on  ne  prenne  quelquefois  pour  des 
lésions  morbides ,  des  altérations  purement  cadavériques. 
JV.  Marcé  répond  qu'il  n*est  pas  de  l'avis  de  M.  Âubi- 
nais  et  que  les  recherches  anatomiques  peuvent  être  très- 
fécondes  en  pensées  philosophiques.  Ainsi ,  M.  Cruveil- 
hier ,  comme  il  vient  de  le  dire ,  ayant  eu  l'occasion  de 
faire  l'autopsie  d'un  individu  qui  était  resté  pâle  et  op- 
pressé, à  la  suite  de  fièvres  paludéennes ,  découvrit  des 
traces  d'inflammation  rayonnant  de  la  partie  supérieure  de 
la  rate,  à  travers  le  diaphragme  ,  aux  organes  de  la  poi- 


(1)  Voir  page  125. 


ioÎTÈNJkL  DS  MÉDECINE.  Ifl 

trine  situés  immédiatement  au-dessus.  H.  Marcé  pense  que 
celte  voie  ouverte  par  M.  Cruveilhier  peut  être  féconde 
en  indications  thérapeutiques.  Pour  lui ,  ayant  eu  à  traiter 
des  sujets  affectés  de  cachei^ie  paludéenne  ,  combattue 
inutilement  par  le  sulfate  de  quinine ,  il  fut  conduit ,  par 
la  circonstance  de  l'oppression  et  du  sentiment  de  gène 
accusé  dans  la  région.cardio-splénique  \  à  attaquer  loca- 
lement la  maladie  locale  par  des  vésicatoires  et  des  appli- 
cations stibiées  ,  et  il  fut  assez  heureux  pour  obtenir  une 
guérison  demandée  en  vain  jusque-là  aui^  préparations  de 
quinquina. 

M.  Bélie  a  soigné  pendant  plusieurs  mois ,  à  rhôpital , 
le  malade  Gruèard ,  dont  M.  Marcé  nous  a  parlé  daps  son 
mémoire.  Il  constata,  en  effets  chez  ce  malade,  une  hy- 
pertrophie de  la  rate  vraiment  énorme  ;  le  cœur  était  sou- 
levé et  le  battement  de  là  pointe  avait  lieu  très-haut.  Les 
bruits  du  cœur  étaient  éclalants  comme  cliez  les  chloroti- 
ques.  Le  sujet  paraissait  profondément  anémique.  Il  disait 
avoir  eu  une  dysenterie  longtemps  prolongée,  mais  point 
d'accès  de  fièvre  intermittente,  il  eut  des  hémonhagies  par 
diverses  voies  :  des  épistaxis',  des  hématémèses  et  des  hé- 
morrhagies  intestinales  (ce  qu  il  prenait  sans  doute  pour 
une  dysenterie).  Le  sang  était  évidemment  altéré. 

Dans  lautopsie,  on  constata , comme  Ta  dit  M.  Marcé, 
que  ta  rate ,  appuyée  en  bas  sur  la  fosse  iliaque ,  avait  forcé 
la  pointe  du  cœur  à  remonter.  Chez  ce  malade,  le  dépla- 
cement du  cœur  était  bien  dû  évidemment  à  celte  énorme 
hypertrophie  de  la  rate. 

Sbis,  en  est-îl  ainsi  dans  tous  les  cas  où  la  rate  s^e 
gonfle? 

M.  Hélie  rie  le  pense  pas  ;  il  est  extrêmement  rare  ,  dit- 
'I»  que  la  rate  vienne  ainsi  prendre  un  point  d'appui  solide 
à  la  partie  inférieure  de  Fabdomen  ,  et ,  dépourvue  de  ce 
point  d'appui ,  il  hai  est  impossible  de  faire  remonter  le 
cœup. 

Le  silence  des  auteurs,  à  cet  égard  ,  doit  faire  voir  à 
M»  Barcé  qu€  cet  effet  doit  être  bien  rare,  puisqu'il  n'a 
jamais  été  constaté  dans  les  autopsies. 


112  joirnnu.  db  MÉmcuis. 

Chez  beaucoup  de  malades  affectés  de  cachexie  palu- 
déenoe ,  les  bruits  du  cœur  peuvent  être  entendus  plus 
haut  qu*à  Tétat  normal;  c'est  que  ces  bruits  sont  devenus 
très-éclatants ,  ils  peuvent  souvent  «  comme  chez  certaines 
chlorotiques  «  être  entendus  à  distance.  En  raison  de  cette 
circonstance,  H.  Marcé  aura  confondu  peut-être  les  bruits 
avec  le  choc  qui ,  lui ,  n'est  pas  fort.  Comme  les  bruits  du 
cœur  s^entendent  dans  une  étendue  considérable ,  il  est 
fisicile  de  se  figurer  leur  maximum  d'intensité  plus  haut 
qu'il  ne  l'est  réellement. 

H.  Hélie  a  vu  ,  dernièrement ,  plusieurs  enfants  affectés 
de  cachexie  paludéenne  :  chez  un  seul,  la  rate  était  dé- 
veloppée ;chez  tous,  cependant,  les  bruits  du  cœur  s'en- 
tendaient dans  une  très-grande  étendue. 

La  rate ,  à  l'état  normal ,  n'est  pas  située  sur  un  plan 
antérieur  à  celui  du  cœur ,  mais  bien  sur  un  plan  posté- 
rieur ;  il  paraît ,  d'après  cela,  fort  difficile  de  comprendre 
comment ,  en  se  tuméfiant,  elle  pourrait  rejeter  la  pointe 
du  cœur  en  arrière.  La  rate  est  également  située  plus  à 
gauche  que  le  cœur ,  elle  devrait  donc  ,  par  son  gonfle- 
ment ,  repousser  la  pointe  du  cœur  du  côté  droit  plutôt 
que  du  côté  gauche. 

M.  Malherbe  a  trouvé  le  travail  de  M.  Marcè  très-inté- 
ressant ,  sous  plus  d'un  rapport.  Contrairement  à  ce  qu'a 
dit  M.  Aubinais ,  ce  travail  lui  parait  offrir  de  l'intérêt, 
même  au  point  de  vue  philosophique.  Quand  on  étudie  les 
diathèses ,  Jl  &ut  tenir  compte  de  toutes  les  lésions  locales 
qui  peuvent  se  produire  sous  leur  influence.  Dans  Jes  fié- 
vres  intermittentes  simples ,  de  date  récente ,  on  n'a  pas  à 
s'occuper  ,  il  est  vrai ,  des  lésions  locales  ;  elles  ne  sont 
que  passagères  et  disparaissent  avec  la  fièvre.  Hais  ,  dans 
les  cas  chroniques ,  c'est  tout  différent.  On  aura  alors  à 
traiter  les  lésions  développées  soqs  l'influence  de  la  dia- 
thèse  paludéenne ,  lésions  qui  sont  devenues  permanentes 
et  qui ,  souvent ,  à  leur  tour ,  entretiennent  la  fièvre.  C'est 
Jà  de  bonne  philosophie  médicale. 

Quant  aux  déplacements  mécaniques  du  cœur,  ils  se 
développent  sous  des  influences  diverses  et  la  rate ,  sans 


JOtrSNAL  D£  MÉIkEGIN£.  113 

aller  s'^arcbouter  sur  la  fosse  iliaque  ,  peut,  elle  aussi ,  les 
produire  par  sa  tuméfaction  considérable.  La  rate,  il  est 
\Yai ,  H^est  pas  la  cause,  la  plus  ordinaire  des  déplacements 
du  cœur,  qu'on  observe  dans  la  cachexie  paludéenne*  L'é- 
tat d*atonie  dans  lequel  sont  tombés  les  organes  digestifs 
détermine  raccùmulation  des  gaz  dans  l'estomac  ;  cet  or- 
gane ,  ainsi  distendu ,  pre^e ,  à  travers  le  diaphragme,  sur 
la  pointe  du  cœur  et  la  rejette  souvent  à  plusieurs  centi- 
mètres en  dehors  du  mamelon. 

m,  Thibeàud  fait  quelques  réflexions  sur  l'étiologie  des 
hydropisies ,  oui  survieruient  à  la  suite  de  l'intoxication 
paludéenne.  11*  a  vu  des  enfants  qui  présentaient  un  gonfle- 
ment vraiment  énorme  de  la  rate,  et  qui  \  cependant , 
iVétaient  ppint  affectés  d'jjydropisie.  Il  a  observé ,  d'un 
autre  côté,  des  hydropisies  consécutives  aux  fièvres  inter- 
mittentes ,  sans  tuméfaction  (le  la  rate.  Ce  ne  pouvait  donc 
pas  être  le  déplacement  du  cœur  par  la  raté  qui  avait  causé 
ces  hydropisies. 

M., Thibeàud  trouve  très-utiles  les  recherches  d'anatemie 
pathologique ,  mais  il  veut  que  l'anatomie.  reste  a  sa 
place.  Les  faits  de  déplacements  du  cœur,  par  la  tuméfac- 
tion de  la  rate,  sont-ils  positifs?  Pour  lui  ,  U  n'est  pas 
disposé  à  le  croire.  Il  pense  que  les  hydropisies  consécu- 
tives aux  fièvres  intermittentes  sont  dues  à  l'iiltération  du 
sang ,  survenue  par  suite  de  Tinfluence  prolongée  des 
miasmes  paludéensi  sur  la  nutrition.  ^ 

M*  Marcé  ne  pense  pas  et  n'a  pas  pu  dire  que  ce  soit 
toujours  l'état  du  cœur  qui  produise ,  dans  ce  cas  ,^  Thy- 
dropisie.  Il  a  dit  seulement  que  lorsque  cet  état  morbide  du 
cœur  existe,  il  y  a  là  un  élément  de  plus,  qui  peut  avoir 
sa  part  dftns  la  production  de  Thydropisie. 

Comme  M.  Afalherbe,  il  pense  ,  contrairement  à  M.  Hé- 
lie ,  que  la  rate  peut'  soulever  la  pointe  du  cœur  sans  s'arc- 
bouter  au  bas  de  l'abdomen.  Il  a  constaté  ce  refoulement 
du  cœur  chez  presque  tous  les  malades  de  répidfémie  de  La 
Divate,  dont  il  a  parlé.  D'ailleurs  ,  il  n'a  poiot  confondu  , 
conime  l'a  supposé  H.  Hélie ,  les  bruits  et  le  choc  du 


114  JOVnilI.  Bl  BÉIIICIRI. 

cœar;  le  choc,  comme  les  bruits,  loat  dtatt  situé  plus 
haut  qoe  dans  l'état  normal. 

M.  Marcé  a  fiiit ,  sur  le  vivant ,  nne  expérience  qui  lui 
paratt  concluante;  il  a,  chez  des  enfants,  refoulé  la  rate 
avec  la  main  vers  la  poitrine ,  et ,  de  suite,  il  a  constaté , 
en  présence  d'élèves  qui  Font  vu  comme  lui ,  que  la  pointe 
du  cœur  était  aussitôt  remontée  et  venait  battre  dans  l'es- 
pace intercostal  situé  au-dessus  de  celui  où  ses  battements 
se  faisaient  sentir  avant  Texpérience. 

M.  Marcé  ajoute^  pour  répondre  à  ce  qu'a  dit  H.  Thi- 
beaud ,  qu'il  croit  avoir  observé  que  ,  chez  les  enfants,  les 
hydropisies  surviennent' moins  souvent  que  chez  les  adul- 
tes ,  à  la  suite  des  engorgements  spléniques.  Chez  eux ,  la 
rate ,  en  se  tuméfiant,  paraît. se  porter  beaucoup  plus  en 
bas  qu'en  haut ,  ce  qui  peut  tenir  à  une  résist&nce  moins 
grande  des  parois  abdominales. 

Il  pense,  du  reste  ,  que  lorsque  Tengorgement  dé  la  rate 
est  rapide,  cet  organe  remonte  davantage  vers  la  poitrine; 
quand  ,  au  contraire ,  Thypertrophie  de  l'orgune  est  lente 
et  progressive^  les  ligaments  tiraillés  cèdent  peu  à  peu  et 
la  rate  se  porté  principalement  en  bas. 

M.  MfjHherhe  dit  que  bien  certainement  les  altérations 
du  sang  peuvent  produire  des  hydropisies,  mais  que,  dans 
ces  circonstances ,  il  faut  reconnaître ,  en  outre ,  Inexis- 
tence de  troubles  fonctionnels  du  cœur.  Dans  les  cachexies, 
en  effet ,  tous  les  organes  sont  dans  un  état  d*atonie  et  de 
reiftchemént;  le  cœur  participe  à  ce  défaut  de  tonicité, 
qui  amène  une  dilatation  passagère  de  ses  cavités ,  dilata- 
tion qui  pourra  devenir  plus  tard  permanente.  Il  sa  produit 
par  là  une  sorte  d'insuffisance  valvufoire  ,  qui  pourra  bien 
être  pour  quelque  chose  dans  la  prodoctioi^  de  l'hydropt- 
sfe.  Le  développement  de  Thydropisie ,  dana  les  maladies 
du  coeur ,  est  souvent  peu  en  rapport  avec  k  gravité  des 
lésions  cardiaques.  H.  Beau  a  dit  que  pour  qu'etie  %e  pro- 
duise ,  il  est  nécessaire  qu'il  y  ait  un  dé&ut  de  proportion 
entre  Tobstaclè  et  la  force  qui  doit  le  vaincre.  Quand  les 
cavités  du  cœur  ont  perdu  leur  force  contractile ,.  une  alté* 


loeiHài.  Bs  utamcBOi.  iftS 

ration  trës-iégère  peut  alors  être  suffisante  pour  faire  nattre 
Thydropisie. 

Jf .  Trastour  pense  que  tous  les  faits  d'observation  sont 
importants  à  considérer,  mais  qu'il  faut  tâcher  de  les  in^ 
terpréter  d'une  manière  convenable.  Dans  Tintoxication 
paludéenne,  on  Constate,  d'une  part,  une  altéralion  du 
sang  consistant  en  une  diminution  des  globules,  de  l'al- 
bumine ,  etc.  ;  et,  d'une  autre  part ,  une  tuméfaction  dé  la 
rate.  Le&troubles  cardiaqoe^i  sur  lesquels  M.  Marcé  viejit 
d'attirer  notre  attention ,  sont  un  troisième  fait  qu'il  ikut 
admettre  ,  mais  t]oelle  signification  lui  donner?  Devra-t- 
on attribuer  les  troubles^observésdans  lés  fonctions  du  cœur 
à  riotoxicalion  du  sang  ou  bien  à  Tengopgf'mént  de  la 
rate?  Peat-êlre  à  l'un  et  -à  l'autre.  Nous  croyons  cepen- 
dant ,  dit  M.  Trastour,  que  l'altération  du  sang  doit  avoir 
la  plus  grande  part  dans  la  production  d^s  bruits  anor- 
maux du  cœur. 

M.  Hélie  a  cru  trouver,  dans  la  position  normale  de  la 
rate,  une  impossibilité  pour  ce  viscère  de  repousser  la 
pointe  du  cœur  en  arrière;  mars  il  faut  remarquer  que  la 
rate,  en  se  tuméfiant,  ne  garde  pas  sa  situation  normale, 
elle  se  porte  en  avant  dans  l'abdomen  et  quelquefois  jusqu'à 
l'ombitie,  EUe  ne  se  trouve  plus  alors  sur  un  plan  posté- 
rieur à  celui  du  cœur.  - 

Il  ne  faut  pas  croire  non  plus  que,  Sans  point  d'appui 
solide  à  sa  partie  inférieure  ,  la  rate  ne  puisse  -pas  dévjer 
le  cœur  en  baul  et  à  gauche.  Il  a  été  démontré  dernière- 
n^ent  que  le  diaphragme  pouvait,  dans  certaines  circons- 
tances, trouver,  daMs  les  viscères  abdominaux,  un  point 
d'appui  suffisant  pour  abaisser  les  côtes.  La  rate  peut  s'ap- 
puyer ainsi  sur  les^utres  viscères  de  l'abdomen  et  soulever 
la  pointe  du  cœur.  Get  effet  a  lieu^  sans  doute,  dans  ces 
cas  où  l'on  constante  une  tuméfaction,  considérable  de  la  ré- 
gion gauche  de  l'abdomen^  sans  que  cependant  la  rate 
soit  beaucoup  descendue  au-dessous  des  cotes. 

M.  Marcé  a  parle  d'inflammations  subaiguês  delà  portion 
du  péricarde  la  plus  voisine  dé  la  rate  ;  j'ai  observé  ,  dit 
K*  Trastour  ,  dans  l'autopsie  d'un  militaire ,  qui  avait  con- 


116  JOUANiL  BB  KtoECpiB. 

tracté  en  Afrique  la  cachexie  paludéenne  ,  des  traces  d'in- 
flammation à  la  partie  supérieure  de  la  rate.  Cette  inflam- 
mation pourrait  fort  bien,  dans  certains  cas ,  se  communi- 
quer, môme  à  travers  le  diaphragme ,  à  la  portion  voisine 
du  péricarde.  Voilà  pour  les  faits;  mais  la  péricardite  est- 
elle  à  redouter  dans  les  fièvres  intermittentes?  M.  Trastour 
ne  le  pense  pas.  Il  faut  se  garder  d'être  exclusif,  dit^il  en 
terminant.  Le  quinquina  a  été  trop  considéré  comme  le 
seul  médicament  fébrifuge.  On  voit  cependant  très-souvent 
des  individus ,  traités  longtemps  sans  succès  par  les  pré- 
parations kiniques,  débarrassés  tout- à-coup  de  leur  fièvre 
par  un  traitement  çn  apparence  insignifiant ,  quelquefois 
môme  -sans  qu'aucune  médication  ait  été  mise  en  usage. 
M.  Fleury  a  réussi  à  prouver  qu'on  peut  aussi  guérir  la 
fièvre  par  les  douches  d'eau  froide  sur  la  région  spléntque. 
La  guérison  n'a  pas  lieu ,  sans  doute ,  parce  que  ce  traite- 
ment détermine  la  réduction  du  volume  de  la  rate  ,  mais 
bien  plutôt  parce  qu'il  exerce  sur  l'organisme  une  action 
tonique  et  reconstitutive. 

M.  Leborgne veut  ^  avant  tout,  que;  dans  cette  ques- 
tion, les  détails  ne  fassent  pas  perdre  de  vue  l'ensemble. 
Dans  une  fièvre  d'accès,  on  peut  observer  ,  il  est  vrai, 
des  syniptômes  nombreux  du  côté  du  cerveau,  des  poumons, 
de  la  rate ,  etc.  Mais  à  quoi  bon  se  préoccuper  de  toutes 
ces  lésions  passagères?  Le  quinquina,  administré  conve- 
nablement, saura  faire  justice  de  tout»  M..Marcé  a  bien  ob- 
servé, sans  doute ,  et~  bien  conataté  les  faits  qu'il  nous  a 
exposés ,  mais  ,  dit  ^n  terminant  H.  Leborgne ,  il  me  pa- 
raît avoir  attaché  trop  d'importance  à  ces  détails. 

Le  Secrétaire, 

L.-F.  Champenois. 


lOimiCAt  DE  MÉBECINB.  117 


OB  SERf^J  TI  ON  S  cliniques  ,parMMxmT , 
docteur-médecin. 


Observation  I".  —  Rétention  d* urine.  —  Tumeur  de  la 
prostate. 

Lorsque  ,  dans  le  mots  d'août  1854  ,  je  fus  cbavgé,  par 
rÂdfuinistration  des  hôpitaui^ ,  du  service  des  hommes 
dans  rbospice  Saint-Jacques  ,  je  trouvai,  au  n^'  21  de  la 
salle  Saint-Ctair ,  un  vieillard  nommé  Mabit ,  âgé  de  70  à 
75  ans  ,  atteint  d'une  bronchite  chronique. 

Ce  malade  était  à  Tinfirmerie  depuis  longtemps;  de  temps 
à  autre,  la  toux  et  surtout  l'oppression  devenaient  plus 
prononcées.  Il  n'était  soumis  à  aucun  traitement  actif. 

Pendant  les  mois  de  septembre  et  d'octobre  ,  Tétat  du 
malade  resta  à  peu  près  le  même  ;  vers  la  fin  d'octobre  , 
Mabit  éprouva  une  augmentation  de  bronchite  et  d'oppres- 
sion ,  semblables  à  celles  auxquelles  il  était  sujet. 

On  trouvait ,  à  rauscuhation,  des  r&les  sibilants  dans  la 
partie  supérieure  du  thorax  ,  et  des  râles  muqueux  en 
bas. 

Vers  le  milieu  du  mois  »  le  malade  fut  pris  de  rétention 
d'urine;  il  n  avait  jamais,  jusque-là,  accusé  la  moindre  dif- 
iiculté  d'uriner.  : 

Pas  de  douleurs  ni  dans  l'bypogastre  ni  dans  le  canal 
de  l'urètre. 

Nous  trouvons,  le  matin,  un  globe  très-dur  et  très  volu- 
mineux dans  la  région  de  la  vessie. 

Une  très-grosse  sonde  de  Mayor ,  courbure  Gély  ,  y 
pénètre  presque  seule  très-facilement. 

L'urine,  alors,  est  lancée  par  un  jet  assez  fort. 

Ne  connaissant  pas  cette  circonstance  ,  parce  que  le 
cathétédsine.  n'eut  pas  lieu  en  ma  présence ,  je  considérai 
le  malade  comme  atteint  d'une  rétention  d'urine  par  pa- 


il8  lOVlHAl  DB^  KÉtttCnte. 

ralyste  de  la  vessie ,  et  je  Je  soumis  à  Taction  de  la  nois 
vomique  ,  du  18  novembre  au  26.  Aucun  résultat  ne  Ait 
obtenu. 

Les  urines,  d'abord  limpides,  devinrent  plus  tard  trou- 
bles et  rouges. 

Les  symptômes  de  bronchite  persistèrent  et  s'aggravè- 
rent. 

Le  faciea  du  malade  s'altéra. 

Le  5  décembre  au  soir ,  frisson  prolongé ,  nuit  fort 
agitée. 

Le  6  décembre ,  pouls  très-accéléré. 

Le  7  ,  léger  frisson  le  matin  ,  raccélération  du  pouls  est 
toujours  très-grande  ;  urines  troubles  et  très-chai'gérs. 

Ju<%qu'à  la  mort  de  Mabit ,  qui  .eut  lieu  le  8  ou  le  9  dé- 
cembre ,  la  rétention  d'urine  persiste.  On  sonde  le  malade 
matin  et  soir ,  et  toujours  l*instrumon(  étant  introduit  avec 
la  plus  grande  facilité  ,  l'urine  est  lancée  par  un  jet  puis- 
sant. 

Depuis  ies  derniers  jours  de  novembre  ,  le  malade  s'é- 
tait plaint  d'une  douleur  vive  dans  Tarticulation  de  la 
mftchoire  inférieure. 

Cerveau  un  peu  diminué  de  volume ,  ne  remplissant  pas 
la  dure-mère  ,  membranes  infiltrées^  opaques  et  non  ad- 
hérentes sur  la  convexité  des  hémisphères. 

Substanoe  cérébrale ,  bonne  consistance ,  pas  d'injec- 
tion. 

Le  lobe  supérieur  du  poumon  gauche  est  sain  ,  un  peu 
emphysémateux  dans  sa  partie  antérieure. 

EngouemeiH ,  et  môme  ,  par  endroits  ,  hépatisation  au 
deuxième  degré  de  la  partie  postérieure  du  lobe  infé- 
rieur. 

A  droite  ,  œdème  du  lobe  supérieur  qui  laisse  écouler, 
à  l'incision,  uaé  sérosité  spumeuse,  blanchâtre,  abon- 
dante. 

Le  lobe  inférieur,  bien  volumineux ,  est  engoué  et  hé- 
patisé  dans  sa  partie  postérieure. 


JOUKRAdU  AB  HtitaCniB.  1 19 

Le  coeaie  est  augipepté  de  volume  gros  comme  deux  fois 
le  poiug  du  sujet. 

Quelques  plaques  blanches  sur  le  péricarde.  Adhéren- 
ces aociennes ,  filamenteuses,  de  la  pointe  du  cœur  au  pé- 
ricarde pariétal. 

Le  ventricule  droit  et  Foreillette  sont  distendus  par  du 
sang  cruorique  et  des  caillots  fibrinéux. 

La  capacité  du  ventricule  gauche  est  augmentée ,  ses 
parois  nç  paraissent  pas  avoir  plus  d'épaisseur  qu'à  TéUit 
normal. 

Les  valvules  du  cœui^  droit  sont  saines. 

La  valvule  milrale  est  un  peu  épaisse. 

Le  bor<;l  adhérent  des  valvules  aortiques  est  ossifié. 

Le  foie  est  sajn.  La  vésicule  biliaire  renferme  une  grande 
quantité  de  bile  épaisse  comme  du  sirop* 

La  rate  a  son  volume  normal ,  sa  consistance  est  dimi- 
nuée^  . 

Le  rein  droit  est  un  peu  plus  volumineux  et  plus  ar- 
rondi que  le  gauche. 

On  trouve ,  en  le  cot^pant ,  dans  son  parenchyme ,  un 
grand  nombre  de^elits  abcès  contenant  un  pus  Jaune  et 
bien  lié.         1  . 

Ces.  a^ès  sont,  en  générât ,  gros  comme   des  pois 
rond&  La  plu;^  grande  partie  a  son  siège  dans  la  substance . 
tubuieuse. 

Le  tissu  durrein ,  en  général ,  me  parait  plus  mou  qu'à 
rordinaire. 

Dans  le  rein  gauche ,  on  ne  trouve  qu'un  ou  deux  pe- 
tits abcès. 

Il  existe ,  en  ou(,re  ,  à  la  surface  des  reins ,  de  nombreux 
kystes  d'un  volume  très-variable ,  depuis  celui  d  un  grain 
de  chenavis  jusqu'à  cetbi  d'u,ne  noisette.  Ces  kystes  con- 
tiennent un  liquide  transparent  de  la  consistance  d'une 
solution  dé  gomitie  un  peu  épaisse. 

La  vessie  offre  le  volynie  du  ppîQg.  Ses  pairois^  sont 
épaissies. 

La  muqueuse  qui  la  tapisse  présente  une  coloration 
noirfttf  e. 


120  JOQBNAI..  DB   HÉDBCniB. 

Elle  contient  une  petite  quantité  d'urines  troubles  d'une 
odeur  ammoniacale. 

La  prostate  est  hypertrophiée  ;  elle  entoure  tout  le  col 
de  la  vessie  et  présente  même  en  avant  une  épaisseur 
considérable. 

Son  lobe  moyen  ,  constituant  ce  que  Ton  a  appelé  la 
luette  vésicale ,  a  acquis  un  volume  remarquable  ;  il  forme 
une  tumeur  allongée  et  conique  que  ,  pour  la  forme ,  on 
peut  comparer  à  une  |)oire  allongée  ou  à  un  battant  de 
sonnette. 

L'extrémité  pointue  du  lobe  est  tournée  vers  le  canal  de 
l'urètre. 

La  tumeur  offre  une  certaine  mobilité. 

L'articulation  gauche  de  la  mâchoire  contient  du  pus 
en  quantité  notable. 

On  conçoit  facilement  comment  la  tumeur  qui  vient  d*être 
décrite  mettait  obstacle  à  la  sortie  des  urines.  Lorsque  la 
vessie  se  contractait,  la  tumeur  s'enfonçait  par  son  extré- 
mité pointue  dans  loritice  vésical  du  canal  de  l'urètre  et 
l'obstruait  d'autant  plus  complètement  que  le  malade  fai- 
sait plus  d'efforts  pour  uriner. 

Une  circonstance  remarquable  de  cette  observation,  c'est 
la  facilité  du  cathétérisme.  Les  plus  grosses  sondes  péné- 
traient pour. ainsi  dire  d'elles-mêmes  dansla  vessie. 

Il  n'en  est  pas  ainsi  généralement  dans  l'hypertrophie 
de  la  prostate  ,.les  tuméfactions  de  cette  glande  ont  pres- 
que toujours  pour  effet  de  dévier  ou  de  rétrécir  le  canal  de 
Turètre,  de  manière  à  rendre  l'introduction  des  sondes  dans 
la  vessie  très-difficile. 

)\  résultait  de  cette  facilité  de  cathétérisme  et  de  la  ma- 
nière, soudaine  dont  s'étaient  développés  les  accidents, 
qu'il  était  fort  difficile  de  diagnostiquer  chez  Mabit  qne 
maladie  de  la  prostate  comme  cause  de  la  rétention  d'u- 
rine. - 

On  était  tout  naturellement  porté  à  voir,  dans  ce  cas, 
une  rétention  d'urine  par  paralysie  de  la  vessie;  cepen- 
dant, une  circonstance  qui  devait  éloigner  de  ce  diagnos- 
tic ,  c'était  la  force  avec  laquelle  la  vessie  se  vidait  lorsque 


JOOUIAL  DB  MÉDKCIIfE.  121 

la  sonde  ^  étoDi  iotroduile,  faisait  disparatire  Tobsiacle 
qui  s'opposait  à  la  sortie  des  urines. 

Le  calhétéri$me  étaat  pratiqué  après  la  visite  par  l*élève 
interne  du  service,  qui  ne  me  fit  que  plus  tard  cette  re- 
marque ,  je  crus  pendant  quelque  temps  avoir  à  combattre 
une  paralysie  de  la  vessie ,  et  j'eus  recours  à  des  moyens 
thérapeutiques  qui  ne  pouvaient  nécessairement  avoir  au- 
cun rftsultat  avantagent 

L'observation  de  Mabit  est  un  exemple  de  ces  cas  si  nom- 
breux dans  lesquels  une  lésion  peut  se  développer  lente- 
ment et  acquérir  des  proportions  considérables ,  sans 
donner  signe  de  s(jn  existence. 

Mabit  ne  s'était  jamais  plaint  d'éprouver  aucune  diffieulté 
d'uriner  ni  de  sentir  aucune  douleur  dans  la  région  de  la 
vessie. 

Tout  à  coup  ,  sans  cause  connue ,  survient  cette  réten- 
tion d'urine  complète  qui  persiste  alors  jusqu'à  la  mort  du 
malade. 

L'.urineiut  d'abord  parfaitement  claire  et  limpide  chez 
notre  malade,  puis,  elfe  s'altéra  et  devint  trouble:  et 
boueuse  ;  ce.  résultat  morbide  dépendit  évidemment  des 
troubles  que  le  séjour' prolongé  de  l'urine  dans.la  vessie 
amena  et  dans  cet  organe,  et  dans  les  organes  secréteurjs, 
les  reins. 

Il  me  parait  évident  qu'il  y  eut  chez  Mabit ,  dans  les 
derniers  jours  de  sa  vie ,  une  résorption  purulente  à  la- 
quelle on  attribuera ,  je  pense,  et  les  frissons  très-carac- 
téristiques qui  eurent  lieu  et  les  abcès  que  nous  rencontrâ- 
mes à  l'autopsie  dans  les  reins  et  dans  Tarticalation  gauche 
de  la  mâchoire  inférieure. 

Enfin ,  Habit  mourut  d'une  pneumonie , qui  se  développa 
et  marcha  d'une  manière  tout-à-fait  latente ,  comme  le 
faisaient  la  plupart  des  ai&çtions  de  ce  genre  qui  ont  été  , 
cet  hiver  ,  très-fréquentès  à  l'hospice  de  Saint-Jacques  et 
funestes  à  un  si  grand  nombre  de  vieillards  de  l'établisse- 
ment. 


122  jountAL  Bi 

ObiêrvaUùn  11^.  -r-  Cancer  du  Larynx. 

Brelet ,  Pierre ,  Agé  de  59  ans ,  «ntra  le  &  décembre 
1854  dans  la  salle  Saint-Clair. 

Brelet  avait  été  reçu  comme  infirme  à  l'hospiee  «  il  y  a 
4  ans,  en  1850,  après  avoir  séjourné  pendant  plusieurs 
mois  daqs  la  succursale. 

Il  était  alors  atteint  d*un  gonflement  énorme  de  toute 
l'extrémité  inCèrieure  droite.  Le  membre  avait  pris  peu  à 
peu  des  dimensions  extraordinaires,  comme  s'il  eût  été 
atteint  d'élépliantiasis.  Il  était  indoré  comme  dans  le  sclé- 
rème. 

La  peau  n'avait  pas  changé  de  couleur.  Il  n'y  avait  pas 
eu  de  signes  d'inflammation  du  derme  ;  pas  de  tumeurs 
circonscrites.  La  peau  était  sèche.  Le  malade  éprouvait , 
parfois,  dans  le  membre.,  des  douleurs  assez  vives.  Pas^  de 
sensibilité  notal^le  à  la  cession.  L*état  général  de  usante 
était  bon. 

On  employa  difl^érents  moyens  pour  combattre  la  mata- 
()ie  ;  iis  ne  parurent  pas  avoir  d'effets  bien  sensibles.  Peu 
à  peu,  avec,  le  temps,  1^  gonflement  dimmua  et  il  finit  par 
disparaître  presque  entièrement.  ,  ' 

Le  malade  sortit  des  infirmeries;  il  allait  et.venait  daes 
rhospioe  ,  et  je  le  perdis  de  vue. 

Des  renseignements  que  j'ai  pris  sur. son  compte  m'ont 
appris  que  bien  qu'il  ne  se  irouvftt  pas  assez  malade  pour 
entrer  à  l'infirmerie ,  il  avait  souvent  la  voix  éteinte  et  en- 
rouée. Il  était  facilement  oppressé  ;  il  avait  maigri  peu-à  peu. 

Enfin  ,  ce  fut  seulement  le  6  décembre  qu'il  entra  à  Tin- 
firmerié  et  qii'iKfat  soumis  à  notre  observation. 

La  première  nuit,  il  ne  se  passa  rien  d'extraordinaire, 
et  te  7  au  matin  ,  je  trouvai  le  malade  dans  l'état  suivant  : 

Figure  amaigrie  et  pâle,  altérée,  respiration  gênée, 
laryngienne.  L'inspiration  et  l'expiration  ,  surtout  quand 
le  'malade  parle,  sont  sifflantes,  et  ce  sifflement  oflre  les 
caractères  de  celui  qu'on  observe  dans  l'œdème  de  la 
glotie. 

Lorsque  le  malade  est  tranquille ,  l'opjpression  n'est  pas 


JOVMJLl  DE  MÉSECmC.  123 

très-prononcée.  Il  peut  rester  couché  dans  son  Ht.  Il  ne 
tousse  pas  beaucoup. 

A  l'auéculiation ,  rien  de  bien  notable;  quelques  râles 
moqueux. 

Pas  de  matité. 

Brelet  ne  se  plaint  pas  dé  mal  de  gorge. 

On  trouve,  sur  le  côté  gauche  du  col  et  au  niveau  de 
Tangledela  mâchoire,  une  tumeur  dure,  grosse  comme 
une  pomme,  adhérente  au  larynx,  et  distincte  de  la  glande 
parotide^  et  de  la  glande  sous-maxillaire. 

Nous  nous  réservions  d'examiner  plus  attentivement  en- 
core le  malade;  mais  il  mourut  dans  la  soirée,  à  huit  heu- 
res, presque  tout  à  coup. 


Autoprie.  • 

La  jambe  droite  n'est  pas  beaucoup  plus. volumineuse 
que  la  gauche.  L'épiderme  est  un  peu  épaissi  et  écail- 
leux.  -'      .  . 

Le  tissu  cellulaire  sous-cutané  est  plus  dense,  plus  dur 
à  couper  et  grenu. 

La  tumeur  du  col  est  disséquée  avec  soin  ;  elle  est  in- 
dépendante de  la  parotide  et  de  la  glande  sousr-maxil- 
laire. 

Elle  est  située  au  niveau  de  Tangle  de  la  mâchoire.  La 
carotide  et  le  nerf  pneumogastrique  traversent  la  tumeur. 
Le  nerf  est  isolé  avec  attention ,  de  même  que  la  branchç 
du  laryngé  supérieur.  Ces  nerfs  pai^aissent  sains  et  leur  vo- 
lume n'a  pas  diminué  dans  la  tumeur. 

il  en  est  de  même  du  dalibre  de  l'artère. 

Le  tissu  de  la  tumeur  est  blanc,  d'une  consistance  squiN 
rheUse.  Lorsqu'on  le  comprime,  il  en  suinte  un  liquide 
blanc  purulent. 

La  tumeur ,  grosse  comme  une  petite  pomme ,  arron- 
die, est  adhérente  à  la  partie  latérale  du  larynx,  dans  la 
portion  placée  entre  le  thyroïde  et  l'os  hyoïde. 

Le  larynx  est  enlevé  avec  la  base  de  la  langue. 

10 


124  ^^^^f*  P^  ¥^9^f- 

Daps  toute  sa  partie  supérieure ,  la  muqueuse  est  tumé- 
fiée, végétante  et  tapissée  par  une  sanie  blanchâtre. 

L'épiglotte  est  ramollie;  lorsqu'on  y  touche»  elle  tombe 
en  putruage.  Elle  est  relevée,  adhérente,  ne  peut  plus 
s'abaisser  sur  lé  larynx. 

Les  ligaments  aryténo-épig|ottiques  ne  soDt  plu$  recon- 
naissables. 

Du  côté  droit  du  larynx ,  on  voit  encore  le  ventricule  et 
là  corde  vocale  inférieure. 

Mais  la  corde  vocale  supérieure  ne  se  voit  plv|s  ;  .elle  se 
perd  dans  l^  boursoufleipent  de  la  muqueqse. 

Ou  c^té.  gauche,  tout  est  confondu*  On  trouve  ,  à  la 
place  du  ventricule  et  des  cordes  vocales,  un^  tmipeur 
évidemment  cancéreuse  ,  analogue  à  ces  végétations  qu'on 
rencontre  dans  Testomac  cancéreux. 

Avant  que  le  larynx  n'éùl  été  moisé,  on  ne  voit  aucune 
ouverture  en  le  regardant  par  la  partie  supérieure.  L'orifice 
de  la  glotte  parait  large  comme  un  tuyau  dei  plume  à  ppu 
près  /et  encore  est-'il  obstrué  par  des  mucosités  sanieuses. 

Les  poumons  sont  volumineux ,  surtout  le  droit. 

Ils  ne  contiennent  pas  dé  tubercules. 

bans  le  lobe  supérieur  du  poumon  gauche  »  nous  trou- 
vons une  b^fonçhe  dilatée.  ^ 

Les  poumons  sont  engoués  dan^.  leur  partie  poj^térieure. 

Le  cœur  est  d*un  volume  moyen. 

Rien  dans  \es  cavit<!s  droites. 

Les  valvules  gauches  sont  saines. 
.  On  trouve ,  sur  l'aorte  ,  immédiatem^t  a^-dessu$  des 
valvules  sygmqïdes,  des  espèces  de  végétations  osseuses 
ou  plutôt  crétacées.  ,         ; 

Le  foie  est  sain. 

La  rate  égalemept.  > 


JQDMfAt  M  «â»B€IlfB«  12S 


SÈMÉfOLOGlE  des  fiè^es  intermittentes  {Suite), 
par  M»  BIargé,  Midedn  de  l'Hôtelr-Dim  dé 
Nantes^ 


ll«  MÉMOIRE  (1). 

'Après  avoir  démontré,  dans  un  précédent  mémoire, 
que  dans  tous  les  cas  d'engorgement  un  peu  considérable 
de  la  rate,  le  cœur  est  porté  en  haut  et  à  gauche,  nous 
avons  pensé  qu^il  pouvait  y  avoir  quelque  intérêt  histori- 
que à  nous  edquérir  de  l'état  actuel  de  la  science  sur  ce 
point  inôportant  de  séméiologie. 

Les  auteurs  que  nous  avons  interrogés  tout  d'abord , 
ont  été  naturellement  ceux  qui ,  dans  ces  derniers  temps, 
ont  montré  la  part  que  les  engorgements  de  la  rate  pren- 
nent habituellement  à  révolution  des  fièvres  intermittentes. 

Les  ouvrages  des  Bailly^  des  CruVéilhier,  des  Piorry,  se 
sont  naturellementtrouvés  les  premiers  sous  notre  main  ; 
nous  les  avons  tous  scrupuleusement  compulsés  ,.  désireux 
que  nous  étions  desavoir  si  les  fiaits  de  séméiologie  qui 
nous  préoccupaient  avalent  été ,  par  eux ,  remarqués  et 
signalés  comme  des  données  propres  à  guider  les  obser- 
vateurs dans  rappréciationséméiologique  des  fièvres  d'accès. 

Devons^nous  ici  le  déclarer ,  nos  recherches  ne  nous  ont 
conduit  'k  aucun  résultat.  Tout  en  tenant  compte  de  la 
coïncidence  habituelle  des  engorgements  spléniques  et  des 
accès  fébriles ,  ces  auteurs  sont  muets  ou  à  peu  près  sur 
les  conséquences  séméioîogiques  que  ces  engorgements 
(pour  peu  qu'ils  atteignent  certaines  limites),  ne  manquent 
jamais  d'exercersur  l'état  local  et  fonctionnel  du  cœur. 

Que  dit,  à  cet  égard,  Bailly,  dans  son  Traité  des  fièvres  ? 
Dans  les  nombreuses  autopsies   qu'it  rapporte,  presque 


(1)  Voir  $6»  vol.,  page  83, 1854. 


126  JoraHAL  DE  aÉiMMaraE. 

totqours  la  rate  est  engorgée;  parfois,  son  volume  est  tel 
que  rhypochondre  en  est  distendu.  Il  y  a  là  toutes  les 
conditions  propres  à  faire  nattre  les  faits  séaiéiol<^i- 
qiies  dont  nous  nous  occupons,  et  cependant,  ces 
bits  ne  sont  point  par  lui  remarqués  :  rien  au  point  de 
vue  symptomatique ,  rien  au  point  de  vue  anatonio-patbo- 
logique  ne  dénote  que  Fauteur  ait  eu ,  sur  ces  &its ,  la 
moindre  préoccupation.  Un  instapt ,  iM)us  crûmes  qu'il  ai- 
lait  être  mis  sur  la  voie  des  rapports  insolites  que  la  rate 
engorgée  crée  constamment  pour  le  cour  :  il  cite  une  ob^ 
servation  dans  laquelle,  il  montre  la  rate  tunaéfiée  et  ra- 
mollie, adhérant  au  diaphragme  ,  et  ce  muscle  participant 
lui-même  à  ^inflammation  dont  le  viscère  spléaique  ^  à 
son  extrémité  supérieure ,  paraissait  être  le  foyer.  Puis, 
au  moment  où  Ton  croit  qu'il  va  bire  mention  du  cœur , 
il  se  tait  absolument  sur  Tétat  et  les^rapports  de  l'organe 
de  la  circulation  centrale 

M.  Cruveilhier  n'est  guère  plus  explicité  que  M.  Bailly 
sur  cette  question.  Toutefois ,  l'illustre  anatomo-patholo- 
giste  inscrit  les  bits  suivants  ; 

a  J'ai  connu,  dit-il,  des  individus  qui,  à  la  suite  de 
»  lièvres  intermittentes,  avaient  conservé  une  gêne  dans  la 
»  respiration,  qui  les  empêchait  d^  bire  une  longue  course. 
»  Un  de  ces  individus  ét^nt  mort,  il  fut  trouvé  sur  son 
»  cadavre  des  adhérences,  traces  d'inflammation  qui^  par- 
»  tant  deja-rate  connne  d'un  foyer ,  traversaient  le  dia- 
i>  .phragme  pour  se  répandre  aux  organes  qui  Jni  sont  su- 
»  perposés,  à  la  plèvre  qui  tapisse,  à  la.  fois,  le  diaphragme, 
i>  la  base  du  poumon  et  les  côtes.  » 

Au  point  de  vue  qui  nous  occupe,  cette  déclaration 
semble  tout  d'abord  bien  féconde  en  inductions  sôméiolo- 
giques  et  thérapeutiques  ;  on  croit  que  l'auteur  va  les  abor- 
der, mais  il  s'arrête  immédiatement,  e^  lui ,  qui  mieux 
que  personne  connaît  les  rapports  anatomiques  de  la  rate  et 
du  cœiir  dans,  l'état  normal,  il  ne  voit  pas  ceux  qu'anorma- 
lement peut  développer ,  au-dessus  du  diaphragme  ,  l'en- 
gorgement splénique  propre  aux  fièvres  intermittentes. 

Nous  devons  dire  que  ,  sur  cette  question  ,  M.  Piorry  a 


lOUBHAI.  DE  MÉDECINE.  127 

pressenti  la  vérité  clinique,  Mais  cette  vérité  n*6st  demeu- 
rée pour  lui  qu*à  f  état  d'aperçu.  Il  ne  Ta  point  consacrée 
par  des  faits. 

Il  dit  bien  que,  sous  l'influence  des  engorgements  splé- 
niques,  le  cœur  doit  éprouver  un  soulèvement  comparable 
à  celui  que  produisent  les  épanchements  liquides  ou  gazeux 
de  l'abdomen.  Mais,  lorsqu'à  l'appui  d'une  semblable  as* 
ser4ion«  on  recherche  quelques  preuves  justificatives,  on 
n'en  trouve  nulle  part ,  et  sar  les  170  cas  d'engorgements 
spléniques  rapportés  par  M*  Piorry ,  il  n'est  pas  dit  un 
mot  (chose  étranger}  sur  l'état  local  et  fonctionnel  du 
cœur. 

Nous  croyons  que,  sous  ces  divers  rapports,  iKpeuiy 
avoir  d*iinportantes  iacuïies  k  combler. 

Serait-ce  trop  préjuger  des  observations  contenues  dans 
la  première  partie  de  ce  travail  que  de  dire ,  qu'à  nos. 
yeux ,  elles  auraient  pour  résultat  de  signaler  et  de  décrire 
des  faits  de  seniéiologie  qui ,  jusqu'à  présent ,  n'auraient 
pas  attiré  l'attention  des  observateurs  ? 

Du  reste ,  il  ne  saurait  nous  suffire  de  démontrer  la 
réalité  clinique  de  ces&its,  il  faut  encore  démontrer  les. 
conditions  anatomiques ,  soit  normales ,  soit  pathologiques, 
au  nom  desquelles  ces  faits  doivent  nécessairement  se  dé- 
velopper. 

Ce  sont  ces  conditions  anatoiniqués  qu'il  nous  faut  main- 
tenait déterminer. 

La  rate  et  le^  cœur,  bien  que  séparés  par  le  diaphragme, 
sont  si' près  l'un  de  l'autre  que  ,  sans  cet  intermédiaire  ,  ils 
se  toucheraient. 

L!extrémité  supérieure  de  la  rate,  la  pointe  du  cœur, 
placés  vis-à-vis  l'un  de  l'autre,  se  regardent,  s'àvoisiuent , 
mais  dans  un  sens  absolument  inverse.  La  rate  est  tournée 
en  haut,  à  droite  ef  en  dedans;  le  cœur  se  dirige  en  bas, 
à  gauche  en  dehors. 

La  rate ,  le  diaphragme,  la  partie  mobile  du  cœur  cons- 
tituent ainsi  trois  zones  ou  points  anatomiques  qui  se  sui- 
vent f  qui  se  superposent ,  qu'aucun  intervalle  ne  ^pare. 

Tout  mouvement  qui ,  de  bas  en  haut ,  parcourt  cette 


i28  JOVBNÀX  DE  «ÉmaNB. 

ligne  anatomique ,  aboutit  au  ccÈor  et  a  pour  résultat  dé- 
finitif son  soulèvement  et  sa  déviation  ,  en  dehors  et  à 
gauche. 

La  rate  étant  également  en  rapport  médiat  avec  la  base 
du  poumon  gauche ,  au  niveau  ae  la  gouttière  costo-dia- 
phragmatique,  tout  mouvement,  tout  gonflement  de  rorgàne 
splénique  a  pour  double  résultat  l'effacement  du  sillon 
costo-diaphragmatique  et  la  propulsion  proportiontielle  in 
bord  inférieur  du  poumon  gauche. 

Dans  le  soulèvement  que  ,  sous  cette  influence  ,  le  cœur 
et  le  poumon  gauche  éprouvent  à  la  fois  ,  que  deviennent 
les  rapports  respectifs  de  ces  deux  organes  ?  "^ 

Voici  le  fait  qui  se  produit  :  la  poime  du  cœur  cesse 
immédiatement  de  correspondre  à  Téchancrure  pulmonaire 
qui  la  loge  ,  le  ventricule  gauche  cesse  d'ôtre  abrité  par  la 
zone  pulmonaire  qui  le  recouvre  habituellement  ;  il  s'ap- 
plique ainsi  sans  intermédiaire  et  dans  un  espace  double 
de  l'état  normal  à  la  face  postérieure  des  côtes. 

Le  cœur  subit  dans  cette  attitude  une  véritable  antéversion. 

Voici  ce  qui  existe  encore  r  le  cœur,  placé  entre  la  résis- 
tance qu'il  trouve  en  harut  et  le  mouvement  qui  soulève  sa 
pointé,  s'infléchit  sur  lui-même.  Cette  inflexion  a  lieu  au 
niveau  du  sillon  qui ,  antérieurement,  sépare  les  oreillettes 
des  ventricules ,  au  niveau  de  la  double  émergence  de 
l'aorte  et  de  Tartèrë  pulmonarre. 

Toutes  les  fois  que  le  cœur  est  violemment  '  repoussé 
en  haut  par  un  engorgement  splénique  ,  c'est  sur  (a  ligne 
que  nous  venons  de  décrire  qu'a  lieu  l'espèce  d'aniéflexioD 
dont  il  s'agit.  Cette  antéflexiôti  porte,  pon-seulenient  sur  le 
sillon  anriculo-ventricutaire ,  mais  sur  l'artère  pulmonaire 
et  particulièrement  sur  l'aorte^  Il  eh  résulté  pour  ta  crosse 
de  l'aortô  une  exagération  de  courbure  et  un  véritable 
coude  il  son  point  d'émergence. 

Les  valvules>  sygnioïdes  aortiques  ressentent  immédiate- 
ment le  contre-coup' d'iin  semblable  état  de  choses;  leurs 
rapports  naturels  sont  changés. 

La  valvule  sygmoïde  antérieure  s'abaisse  et  se  relâche 
pendant  que  les  valvules  postérieures  se  relèvent  et  se  ten- 


jouÀNÂt  i>£  Miracnsfi.  129 

dent:  Il  y  à  la  création  accidentelle  d'une  véritable  insuffisance. 

Dire  que. la  propulsion  de  la  rate  engorgée  peut  agir 
ainsi  sur  le  cœur  et  sur  Taorte ,  c'est  laisser  pressentir 
que  le  mouvement  qui  entraîne  la  moitié  gauche  du  cœur 
en  haut  et  en  dehors  ,  doit  se  produire  avec  des  résultats 
inverses  sur  ifes  cavités  droites  qui  sont  tfraillée^,  précisé- 
ment parce  que  celles  du  côtq  opposé  se  trouvent  dans  uû 
état  de  relâchement  relatif. 

Le  .tableau  anatomo-^palhologique  qui  précède  n'est 
point  imaginaire  ;  il  est  la  reproduction  fidèle  de  faits  que 
bien  des  foid  nous  avons  constatés ,  soit  directement ,  soit 
expérimentalement  sur  le  cadavre. 

Une  observation,  que  nous  devons  à  M.  Ateslier ,  in- 
terne des  hospices ,  attache  au  service  de  Ht*  Mahot ,  à 
Saint-Jacques,  va  nous  fournir  un  exemple  frappant  des 
faits  ci  dessus  mentionnés. 

Observation  7^^      , 

Julien  Guéard  ,  journalier  ,  âgé  de  34  ans  ,  entra  le  8 
avril  ISfSi  à  ThôpUal  succnrsal ,  poùi»  un  état  morbide 
dont  lé  diagnostic  fut:  dysenteriej  chlorù-ànémie,  énorme 
engorgement  de  la  rate. 

Dix  ans  auparavant ,  Ôuéard  avait .  eu,  des  fièvres 
inteniàittentes.  Depuis  un  an,  il  présentait  tous  les  signes 
d'un  engorgement  spléniquë.  On  constata  que  cet  engorr 
gemen^  était  énorme ,  qu'il  reihpHssait,  distendait  Thypô- 
chondre  gauche  ,  qii'rl  s'avançait  assez  vers  le  thorax  pour 
diminuer  à  gauche  l^étëndue  du  champ  respiratoire  et  qu'il 
s'accompagnaît  d'iibfe  irès-vive  douleur.  Le  teint  était  dé- 
coloré et  une  é^tstaxis ,  qui  survint ,  montra  que  le  sang 
l'était  aussi. 

On  prescrivHdii  fer  réduit  pat^  l'hydrogène  ,  et  des  pi- 
lules fondantes  composées  d'extrait' de  ciguë  ,  et  de  savoh 
médicinal.  ' 

Vers  la  fin  dé  novembre ,  la*  diarrhée  ,  que  le  malade 
avait  avant  d'eutrer  à  l'hôpital ,  reparut  et  coptinua  mal- 
gré des  potions  laùdahisées  ;  les  extrémités  devinrent 
oedémateuses  ;  il  y  eut  des  épistaxis  et  de  la  toux.  A  ces 
dîvérs  accidènti ,  furent' en  vain  o|f)]()osées  dés  poudres  hé- 


130  JOUBIUI.  BB  KÉDECIMB. 

mostatiques»  des  pilules  astringentes,  desloocbs  haileux, 
des  pilules  de  cynoglosse. 

Vers  la  Gn  de  février  1855,  l'œdème  avec  teinte 
jaune  paille  de  Fa  face,  Toppression  avec.soufSe  très-mar- 
qué au  cœur  et  aux  carotides  ,  la  tçux  avec  quintes ,  la 
diarrhée ,  les  épistaxis  allaient  se  prononçant  de  plus  en 
plus.  Le  bord  gauche  du  foie  proéminait  vers  les  régions 
épigastrique  et  ombilicale ,  qui  étaient  douloureuses 
à  la  pression. 

Le  28  février,  essoufflement  très -marqué,  pâleur  très- 
grande  ,  toux  incessante  ;  le  soir ,  altération  profonde  des 
traits,  accélération  progressive  du  pouls. 

Le  1"  mars ,  mort  a  2  heures  du  matin. 

A  Tautopsie,  &ite  30  heures  après  la  mort.,  on  cons- 
tata que  la  rate  et  le  foie  remplissaient  tout  le  haut  de 
labdomen  et  adhéraient  au  diaphragme*  La  rate  était 
tellement  volumineuse  que  s'arc-bbutant  en  bas  sur  la 
fosse  iliaque  gauche,  elle  refoulait  en  haut  le  diaphragme, 
de  manière  à  réduire  sensiblement ,  de  bas  en  haut ,  le 
champ  de  la  cavjté  thoracîque.  Le  cœur  était  refoulé;  sa 
pointe,  repoussée  en  haut,  correspondait  à  un  niveau  situé 
à  un  pouce  au-dessus  du  mamelon. 

Par  suite  de  Téiévation  et  de  la  déviation  de  la  poiute 
du  cœur,  en  haut  et  à  gauche,  Taorte  présentait,  dans 
sa  crosse,  une  exagération  de  courbure;  les  parois  du 
cœur  étaient  décolorées;  dans  les  cavités  .existaient  deux 
caillots  iibt'ineux  ;  il  n'y  avait  rien  aux  valvules.  Le  péri- 
carde contenait  une  abondante  sérosité  fies  poumons  étaienl 
exsangues  en  avant,  œdémateux  en  arrière. 

Le  foie  s'étendait  jusque  sur  la  rate ,  l'estomac  était  pris 
entre  ces  deux  organes  au  point  d'être  rétréci  dans  son 
calibre ,  surtout  à  son  milieu  où  ses  parois  étaient  épais- 
sies. '  . 

Le  foie  était  plus  volumineux  encore  que  la  rate  elle- 
même  ,  son  tissu  n'avait  pas  changé  de  nature  ;  la  vésicule 
ne  contenait  qu'une  très-petite  quantité  de  bile  presque 
incolore. 

Le  tissu  de  la  rate  était  ferme  ,  violacé,  plus  dense  qu'à 


JODBllàl.  DB  VÉDBCHiS.  1^1 

l'éiat  norimli  mais,  non  changé  aussi  dans  sa  nature  ;  sa 
coque  fibreuse  était  épaissie  et  comme  cartilagineuse ,  les 
vaisseaux  spléniques  n'avaient  pas  beaucoup  augmenté  de 
voiiime. 

Voici  ^  comparativement ,  le  poids  ,  l'épaisseur  ,  te  dia- 
mètre ,  ^nt  vertical  que  transversal ,  de  la  rate  et  du 
foie  : 

Poids.  ...<..  ^  .  .     3  kilog.  environ* 
|.  .        1  Diamètre  vertical.  .  .  .  30  centim. 
^^•* '^.Diamètre  transversal.  .  18  centim. 
Épaisseur •  .  12  centim» 

Poids.  .........     3  kilbg.  environ. 

p,  .        I  Diamètre  vertical.  .  .  .  ^25  centim. 

oie...<.  ^ijijnèji^g  transversal.  .  27  centim. 

Épaisseur 14  centim. 

te  cerveau  était  pâle ,  exsangue,  sans  infiltration  sé- 
reuse, anormale;     .      *  . 

Nous  citerons  une  seconde  autopsie  qui,  non  moins  évi- 
demment que  celle-ci ,  nous  montre  le  refoulement  que 
l'engorgement  splénique  exerce  sur.  la  cavité  thoracique  et 
notamment  sur  le  cœur  et  les  gros  vaisseaux. 

Observation  /7«. 

Ler  7  décembre  1854  ,  nous  perdîmes  dans  notre  salle, 
litn*>  12,  des  cuites  d'une  diarrhée,  et  d'une  fièvre  inter- 
mittente ,  Je  nommé  Gatin ,  âgé  de  3  ans. 

Cei  enfant,  atteint  depuis  longtemps  sans  doute  de  ces 
deux  maladies  ,  était , très-faible  ,  très-àmaigri  au  moment 
de  son  entrécà  l'Hôtel-Dieu,  le  9  octobre  1854. 
^  La  rate  était  chez  lui  considérablement  tuméfiée^  dépas- 
sait le>  rebord  costal  et  s  étendait  tellement  vers  Je  cœur 
que  la  pointe  de  cet  organe  était  refoulée  en  dehors  et  en 
haut  ;  un  sou|Qe  accompagnait  ses  battements. 

La  diiirrhée  et  la  fièvre  intermittente  furent,  à  plusieurs 
reprises,  momentanément  suspendues,  la  piremière,  par 
l'azotate  d'argent  à  Tintérieur  et  en  lavement ,  la  seconde , 
par  le  sulfate  de  quinine.  La  rate  elle-même  suivit ,  dans 
ses  alternatives  de  Congestion  et^  de  réduction  sur  elle- 
même,  les  péripéties  des-  accès  fébriles. 


132  JOtVfVAL  DB  VÉflltèim. 

Enfin  ,  la  coqueluche  ,  qui  régnait  dans  la  sallè^,  attei- 
gnit ce  malheureux  enfiint  déjà  épuisé  par  la  diarrhée  et  par 
la  fièvre  intermittente. 

Il  mourut  le  7  décembre  18^4. 

A  l'autopsie  ,  la  rate  disteudait  et  soulevait  tellement 
fbypochondre  gauche  que,  considérée  relativement  au  cœur, 
elle  semblait  a\^ec  lui  dans  un  contact  immédiat.  La  pointe 
cardiaque  était  sensiblement  refoulée  en  dehors  et  à  gau- 
che. Le  péricarde  contenait  un  peu  de  sérosité  et  en  divers 
points  était  uni  au  cœur  par  quelques  fausses  membranes. 
Il  y  avait ,  en  un  mot ,  des  traces  évidentes  de  péricardite. 
Les  cavités  gauches  du  cœur  étaient  vides^  les  cavités  droi- 
tes et  Tartère  pulmonaire  étaient  plus  on  moins  distendues 
par  des  caillots  fibrineux.  -, 

Dans  les  intestins  furent  notées  toutes  les  lésions  ca- 
ractéristiques de  renléro-èolile  chronique  (ulcérations  çà 
et  là  dans  le  gjros  intestin  ,  etc.).  . 

Ces  deux  observations  ,.  de  niéme  que  plusieurs  autres 
que  nous  pourrions  citer,  montrent  quel  est ,  yis-à-vis  des 
engorgements  spléniques  ,  l'état  anatomique  du  cœur,  de 
l'aorte  et  de  tous  les  organes  qui  se  trouvent  en  rapport  de 
voisinage  et  de  contiguïté  avec  la  rate  frappée  d'intumes- 
cence. '  '   - 

Il  devient  évident  que  cet  état  anatomique  se  traduit  par 
les  traits  suivants:  soulèvement  et  déviation  à  gauche 
delà  pointe  cardiaque,  exagération  de  la  courbure  que 
présente  la  crosse  aprtique  ,  refoulement  du  poumon 
gauche,  dont  le  bord  inférieur  est  chassé  de  la  goMttière 
çosto*diaphràgmatique. 

Pour  ne  point  sortir  de  notre  sujet,  nous  nous  conten- 
terons de  mentionner  ici  la  déformation  et  -le  ré^trécîsse- 
ment  remarquables  que  ,^dans  notre  première  observation , 
subit  Testomac,  comprimé  qu'il  était  par  la  rate  énor- 
mément engorgée. 

Maintenant;  jl  est  d'autres  lésions  anatômiques,  propres 
aussi  aux  fièvres  intermittentes,  sur  lesquelles  nous  croyons 
devoir  appeler  Tatlention. 

11  nous  est  arrivé  quelquefois  de  faire  l'autopsie  de 
sujets   qui    avaient  succombé   au  milieu   des  atôidents 


Sôt&Hâl  DE  BÉteCIN£.  lâS 

cârdctéristtqued  de 4a -cachexie  febriie  paludéenne.  Ces  su- 
jets avaient  eu  dé  Nombreuses  rechutes  de  fièvre  ;  c'était  en 
vain  que,  chez  eux  ,  on  avait  employé  la  médioation  fébri- 
fiige  la  plus  énergique  et  la  plus  variée.  Maigre  tous  ces 
moyens  ,  malgré  les  ferrugineux  \  ils  étaient  demeurés  pâ- 
les, faibles^  languissants;  ils  avaient  un  sentiment  d'op- 
pression habituelie ,  des  palpitations  ,  Un  peu  d*endoloris^ 
serpent  vers  la  région  précordiale. 

Lorsqu'au  milieu  de  cet  éttft  morbide,  la  mort  venait 
inëidentellement  les  frapper,  voici  ce  que,  chez  eux,  l'au- 
topsie nous  a  révélé: 

Toujours ,  dans  ces  cas  ,  "Doxts  avons  trouvé  d  es  indices 
non  équivoques  d'endocardite,  d'aortite  et  surtout  de  pé- 
ricardit^.  Dans  Taortè  ,  existaient  quelques  ptaques  jaunes  ; 
sûr  le  feuillet  tant  pariétal  que  viscéral  du  péricarde,  se 
remarquiaient  habîtueltemerit  des  adhérences  celluleuses  qui 
devaient  nécessairement  gêner  le  cœur  dans  ses  mouve- 
ments. Ces  adhérences  se  remarquaient  particulièrement  à 
la  partie  postéî^ieoredu  cœur ,  aux  envirofis  de  roreîllêtie 
gauche.  ^ 

Dans  plusieurs  cas,  ces  adhérences  entouraient,  d'un 
lacis  filamenteux ,  les  veines  pulmonaires  aboutissant  dans 
la  cavité  ventriculairè  gauche.  J'ai  vu  ce  lacis  tellement 
serré  que  ces  veinés  étaient  rétrécies  et  que  l'abord  du 
sang ,  renouvelé  par  le  poumon  ,  devait  en  être  notable- 
ment gêné. 

Dans  ces  cas,  Toreillelte  était  anioindfie  dans  ses  di- 
vers diamètres.  L'amoindrissement  de  la  cavité' auriculaire 
avait  pour  accompagnement  corréfalif  l'amoindrissement 
de  la  cavité  ventriculairè,  disposition  anatomiquequi  con- 
trastait avec  la  dilatation  relative  des  éavités  droites  du 
coèuret  delà  veine  cave  inférieure.  * 

D^nrs  ces  mêmes  drcoiislances  ,  et  comme  conséquence 
de  râmomdrissemént  des  cavités  gauches  ,  Paorte  était  ré- 
duite dans  soh  calibre,  non^^euiement  au  niveau  dé  sa 
grande  courbure ,  mais  aussi  dans  ses  partions  thoràciqûe 
et  abdominale.  Les  prrncrpales  divisions  du  système  arté- 
riel participaient  à  cette  atrophie  dés  artères,  dont  lé  point 


134  JOVBIIAL  DE  MÉmORB. 

de  départ  et  la  caose  étaient  sans  doute  ces  lésions  péri- 
cardiaques  ,  ces  lacis  filamenteux  qui ,  gênant  4e  dégorge- 
ment des  veines  pulmonaires,  au  sein  des  cavités  gauches 
du  cœur  ,  entravaient ,  à  sa  source  même  ,  le  cours  du  I 

sang,  qui  doit  servir  à  la  revification  des  organes.  i 

Ces  états  anatomiques  sont  beaucoup  plus  communs 
qu'on  ne  l'imagine  chez  les  sujets  qui ,  depufs  longtemps , 
souffrent  des  suites  de  fièvres  intermittentes  et  qui  se  pré^ 
sentent  avec  Tétat  cachectique  que.  chacun  de  tfous connaît.  < 

Les  lésions  anatomiques  que  nous  venons  de  décrire  se  i 

rapprochent  beaucoup  de  celles  que  nous  ont  présentées  i 

certaines  chloroses    rebelles  au   traitement  ferrugineux.  i 

Combien  de  ces  prétendues  chloro-anémies,  avec  bruits  de  i 

soufQe  au  cœur  et  dans  les  artères.,  et  qui  ne  sont  que  des 
péricardites?  Cette  conviction  résulte  /pour  nous ,  de  plu- 
sieurs autopsies  nous  ayant  démontré  que  ces  états  d'apptH 
rence  chlorotiqMe  ne  sont ,.bien  fréquemment,  que  la  ma- 
nifestation fonctionnelle  de  lésions  anatomiques  siégeant 
soit  au  cœur ,  soit  dans  l'aorte ,  soit  au  péricarde.  Toute-  \ 

fois  ,  dans  ces  cas ,  comme  dans  la  ^^achexie  fébrile  intér-  i 

mittente,  c'est  la  péricardite  quf  prédomine,  et  lapériear- 
dite ,  avec  adhérences. 

fjivisageons  maintenant  notre  travail,  au  point  de  vue 
de  sa  valeur  séméiologique  : 

La  séméiologie  des  fièvres  intermittentes  ne  s'est  pas 
constituée  tout  d'un  coup  ;  elle  est  le  résultat  d^observa- 
lions  successives.  •     - 

Ce  fut  d'abord  la  considération  du  type,  des  péripéties 
symptômatiques  de  l'accès,  Télément  paroxystique ,  en  un 
mot,  qui  frappa J'attentipn  des  observateurs.  '  .  .  [ 

A  une  époque  peu  éloignée  de  nous  intervint ,  dans  la  j 

séméiologie  des  fièvres  intermittentes,  un  second  élément  ( 

représenté  par  l'engorgement  splénique  ;  état  viscéral  en  , 

ccûncidence  à  peu  près  constante  avec  les  accès  et  que  M.  |     ^ 

Piorry  aura,  rhonneur  d'avoir,  signalé  aux  préoccupations  . 

dés  praticiens.     '  ^ 

Quel  que  soit  le  rang^iu'on  lui  attribue  dans  la  patho-  , 

génie  fébrile,  que,  relativenoent  aux  accès ^   H  paraisse 


3<fCmkt .  BB  BtÉDBCmE.  135 

avant,  pendant  ou  après  eux ,  I-engorg^ment  de  ia  raie, 
grâces  aux.  conquêtes  récentes  delà  séméiologie,  dloitètre, 
à  bon  droit ,  inscrit  à  côté  de  l'élément  paroxystique  ,  au 
double  titre  des.  déterminations  symptômatiques  et  de^  in- 
dications curati^es  dont  il  est  le  point  de  départ. 

Tels  qu'ils  se  présentent ,  ces  deux  éléments  de  l'accès 
fébrile»  le  paroi^ysme  et  l'engorgement  spléniqué,  ne  don- 
neraient qu'une  analyse  inct>mplète  de  la  fièvre  d'accès.  A 
côté  d'eux,  doit  venir  prendre  rang  uu  troisième  élément 
non  moins  important,  suivant  nous ,  que  les  deux  pire- 
miers,  etqiii,  émanant  de  l'état  tout  spécial  des  fonctions 
cardiaques  dans^  les  fièvres  intermittentes,  peut  devenir 
le  gage  d'un  nouveau  progrès  dans  l'analyse  séméiôlogique 
de  ces  affections  si  complexés  et  si-  obscures. 

Au  nom  des  &its  par  nous  invoqués ,  tant  au  point  de 
vue  séméiôlogique  qu'au  point  de  vue  anatomo-patholo- 
giqùe,  pouvons-nous;  penser  et  dire  que  le  cœur  peut  et  doit, 
dans  h  nosologie. des  fièvres  d'accès ,  revendiquer  le  privi- 
lège que  rélémént  paroxystique  et  ia  rate  plus  tard  ont 
jusqu'à  ce  jour  exclusivement  possédé  ? 

Pouvons-nous  avancer  que  le  cœur  et  les  gros  vaisseaux 
doivent  compter  parmi  tés  organes  tributaires  de  la  séméio- 
logie des  fièvres  intermittentes ,  et,  qui  plus  est,  de  la 
thérapeutique  de  ces-maladies  ,  comme  nous  espérons ,  du 
rester  pouvoir  plus  tard  le- démontrer. 

Nous  est-il  enfin  peifmis  de  penser  qu'une  significatioti 
rationnelle  et  scientifique  peut  être  donnée  à  des  phéno- 
mèaeis  qui ,  dans  lès  fièvres  d'accès,  setnblaient  se  sous- 
traire, à  toute  systématisation  de  ce  genre,  et  qu'en  mon- 
trant le  rapport  qui  existe  entre  l'intumescence  de  la  rate 
et  divers  troubles  cardiaques,  il  serait  possible  d'entrevoir 
la  filiation  de  &its  jusqu'àprésent  incomplètement  observés 
et.  analysés  ? 

Maintenant,  il  est  un  fait  préalable  sur  lequel  nous 
éprouvons^  le  besoin  d'une  explication  catégorique.     .^ 

Au  milieu  des  préoccupations  anatomo-pathologiques 
spéciales ,  que  nous  venons  d'invoquer  à  propos  des  fièvres 
intermittentes, ^quelle  part  ferons^noqs  à  Hntoxication  pa- 
ludéenne? 


fâ6  JQÇBIUt  K  IIÉ9^jçgiS> 

Loin  de  noua. la  pensée  de  vouloir  reveodiqùer ,  au  pro- 
lit  exclusif  du  déplacement  du  cœur  par  là  raté  engorgée, 
toute  révolution  des  symptômes  djûiot  ie  oœur  et  Tappareil 
circulatoire  se  trouvent  être ,  dans  ce  cas ,  le  foyer  per- 
manent. ' 

Les  fièvres  intermittentes  ;soat  le  produit  d'uqe  intoxi- 
cation paludéenne;  le  sang  est  profondément  altéré  datis 
ces  maladies;  il  est  modifié  dans  les  proportions  relatives 
de  ses  éléments  essentiels^  ;  il  contient  mains  d*albaniine  et 
plus  de  sérum-  L'hématose  est  universellement  troublée  ; 
ce  n'est  pas  seulement  en  raison  de  son  intumescence  que 
la  rata  intervient  «ymptômatiqueipent  dans  la  pathogéoie 
fébrile,  m.ais  en  raison^  aussi  des. troublesr  fonctionnels 
qu'intimement  éprouve  cet  prgane  desanguification.  L'exis- 
tence de:  l'élément  paludéen  o'eielue  point  Ja  réalité  des 
faits  ()'ordr6  difiereht.  que  tious  avons  cru  devoir  si- 
gnaler. "  . 

La  coexistence  de  ces  faits  hétérogènes  n'a ,  du  reste , 
rien. de  .contradictoire.  Cette  coexiatence  vient  seulement 
démontrer  ,  d^une  part ,  la  nùiltiplicité ,  l'hétérogénéité  des 
conditions  constitutives  de  la  fièvre  intermittente;  d'autre 
par(,  la  nécessité  de  soumettre  ces  éléments  de&  fièvres 
d'accès  à  une  analyse  séméiologique  do  plus  en  plus  ri- 
goureuse. 

Ces  réserves  faites  ,  à  l'égard  de  la  part  eoniributive  que 
rintoxication 'paludéenne  peut  avoir  dans  les  manifesta- 
lions  des  fièvres  intermitten^tes,  voyons  quel  parti  nous 
pourrons  tirer  d.e  la  situf^tion  anatomorpathologique  qiie 
faft  au  coçur  rin).ua]iesypence  de  la  rate»  au  sujel  de, certains 
incidents ,  de  certaines  complications  propres  aux  fièvres 
d'accès. 

Ces  incidents,  ces coipplicatiQns  qae  bous  voulons  in* 
terpréter,  au. moyen  des  données  !anatomo-pathologi(]ues 
ci-jdessus  stipulées ,  sont  :  . 

1^  Les  hydrofrisies,* 

2<>  Les  cachexies  ; 

3*»  Les  fièvre9  permckme». 


Parlons  4'^bQrd  ^es  hydropi$ie8  coDsécuiives  aux  fièvres 
înterDiittentes; 

Pour  donner  une  idée  d€$  lacunes  que  la  science  pré- 
sente à  cet  égard  ,  nous  cjterpns  textuellement  lepassaige. 
suivant ,  extrait  du  Çomp^fidium  de  Médecine^  t.  V  «page 
150: 

¥  Les.épàriciieinents  de  sérosité  dans  le  tissu  cellulaire 
et  dans  diverses  cavités. splanchniques,  Tabdomen  spécia- 
lement ,  ont  été  constatés  par  tous  les  observateurs  anciens 
et  modems  (consécutivement  aux  fièvres  d  accès) ,  et  ce-* 
pendant  on  n'en  connaît  pi|s  encore  la  .cause  dans  Iç  plus 
grand  nombre  des  cas»  On  peut  même  dire-  que  Tobscurité 
la  plus  complète  règne  sur  ce  point,  et  nous  n'avons  trouvé 
dans  les  pqvrages  les  plus  récents  qu'un  très-petit  nombre 
d'ouvertures  cadï^ypriques  capables  de  mettre  sur  la  voie  de 
la  lésion  qui/cause  ces .  hydropisies.  Elles  difi*èrent  entre 
elles  sous  le  rapport  de  lepr^iége  et  de  l'époque  de  leur 
apparition. 

•  |jes  congestions  séreuses  peuvent  se  faire  dans  le  tissu 
cellulaire  des  membres  :  d^  là ,  l'œdème  ,  borné  tantôt  aux 
malléul^,  tantôt  aux  extrémités  inférieures  ,  aux  niembrès 
supérieurs  ou  à  la  face  ;  quelquefois ,  enfin  ^  Tanasarque. 

9  ItÇ^  ai^(res  iiydropjsies  occupent  la  cavité  du  péritoi^. 
ne  ,  plus  rarement  celles  de  la  poitrine  ou  de  la  tête. 

»  L'bydropisie  se  montre  à  des  époques  assez  différen- 
tes tie  la  fièvre 4  tantôt  durant  son  cours;  tantôt  au  moment 
où  elle  guérit,. tantôt,  enfin ^  lorsqu'elle  est  entièrement 
dissipé^.  On^  comprend  qu'en  bonne  pathologie  ,  il  est  im> 
possible  40  ranger  3Ûr  la  même  ligne  des  hydropisies  qui 
se  naanifestentdciiiç des. conditions  si  diverses...  L'étiide 
attentive  de  tous  {^$  symptômes.,  l'exploration  des  lésions 
viscérales  et  de  celles  des  reins  et  du  foie^  en  particulieri 
pourraient  xseul^s  dissiper,  les  ténèbres  qui  couvrent  cette 
partie  de  l'histoire  des  fièvreis.  ^ 

»  L^hydropisie  ascite  ,  qui  se  forme  au  moment  où  la 
fièvre  dure  encore,  a  été  rapportée  par  H.  Sfaillot  à  un 
travail  irritatif,  à  une  congestion  dont  le  péritoine  devient 
le  siég^^;  elle  augmente  à  mesure  que  les  ac<^ès,se  répètent. 


138  lonivAt  DE  «ÉMGim. 

Une  autre  cause  d'ascite,  pour  le  même  auteur,  est  r«n* 
gorgement  des  viscères  abdominaux  ,  sur  la  nature  duquel 
il  ne  donne  aucune  espèce  d'explication  et  qu'il  croit  pro- 
duire rhydropisie ,  suivant  le  mécanisme  développé  par 
Lower  et  H.  Bouillaud. 

«  M.  Nepple  attribue  Tanasarque  ,  l'ascite  ,  Thydrotbo- 
rax,  qui  surviennent  dans  le  cours  de  la  (ièvre  intermit* 
tente ,  à  la  diminution  de  Fécoulement  sudoral  chez  les 
individus  obligés  de  rester  dans  les  champs  pendant  le  pa- 
roxysme fébrile...  L*bypérémie  splénique  et  le  ralen^ 
lissement  de  la  circulation  veineuse  abdominale  ont  été 
considérés  par- le  même  4iufeur  comme  la  cause  de  rhy- 
dropisie. »  •  ' 

Voici  maintenant  les  questions  que  se  posent  les  auteurs 
du  CompentHum,  relativemem  à  Tétiologre  des  hydropjsies 
chez  les  fiévreux  ; 

«r  Est-ce  en  vertu  d'une  hypérémie  ou  de  toute  autre 
altération  du  foie  <,  ou  de  quelque  conoplication  dont  le 
cœur  et  ses  membranes  deviennent  le  siège?  Est-^ce  parce 
qu'il  existe  une  de  ces  altérations  des  reins  încooHues  de 
ceux  qui  ont  écrit  sur  les  fièvres  intermittentes  ?  Il  est 
permis  de  croire  qu'une  ou  plusieurs  de  ces  lésions  ont 
échappé  aux  observateurs,  même  les  plus  modernes.  D'ail- 
leurs ,  ils  ne  disent  pas  s'ils  les  ont  cherchées ,  et  quand 
ils  parlent  d'ouvertures  cadavériques ,  Içurs  assertions  sont 
trop  vagues  pour  que  l'on^  puisse  même  hasarder  une  opi- 
nion . .  ;  ' 

»...  Disons  donc  que  ces  hydrepisies  ont  probable^ 
ment  leur  cause  dans  une  de  ces  lésions  viscérales  dont 
l'influence,  sur  la  production  des  hydropisies,  n'est  mise 
en  doufe  aujourd'hui  par  personne,  et  qi^e  si  la  fièvre  in- 
terroitttnte  ce^e  au  moment  où  Thydropisie  se  manifeste, 
c'est  parce  que  les  lésions  organiques  interrompent  pî*es- 
que  toujours  la  marohe  des  affections  intermittentes  en  se 
substituant  à  elles...  .  * 

»  L'hydropisie  peut  encore  se  montrer  chez  les  sujets 
qui  ont  contracté  plusieurs  foii^  la  fièvre  intermittente  et 
dont  la  constiiutioa  est  profondément  détériorée.  Ù  n'est 


9&cmk%  M  AÉô^ciNir.  139 

pfis  fiieUe  de  dire  à  quelle  cause  tiennent  les  collections 
séreuses  dans  ce  cas;  il  est  seulement  permis  dé  croire 
qu'elles  dépendent  de  quelque  maladie  du  foie,  de  la  rate, 
du  tube  digestif,-  des  organes  thoraciques  et  de  toutes  les 
causes  que  rtous  avoua  signalées.  Nous  rappellerons  aussi 
que  dans  notre  description  de  l'fcydropisie,nous  avons  fait 
jouer^un  certaiir  rôle  dans  la  production  de  ces  bydropi- 
sieâ  à  réitération  du  sang  ))dr  les  miasmes  paludéens  ; 
mais,  tout  en  reconnaissant  ce  qu'a  de  probable  une  telle 
opinion,  on  ne.  peut  que  là  mettre  au  rang  des  hypo- 
thèses. i>      ' 

On  le  voit ,  l'altération  •  du*  sang  par  les  miasmes  pa- 
ludéens, l'engorgement  de  la'  rate  et  des  viscères  abdomi- 
naux ,  ne  suffisent  pas  aux  auteurs  du  Compeiidiùm  pour 
expliquer  les  hydropisies ,  les  anasarques  .qui  se  dévelop- 
pent consécutivement  aux  fièvres  intermittentes.   '■  '   . 

Eki  présence  de  ces  desiderata  de  la  science,  nous  nous 
ferons  lei questions  suivantes: 

Sommes*BOus 'autorisés  à  penser  que,  dans  la  pro- 
duction de  ces  hydropisies,  la  situation  et  les  conditions 
spéciales  que  font  au  cœur  et  aux  gros  vaisseaux  les  engor- 
gements de  la  rate  ,  doivent',  ici  jouer  un  rôte  ;  dont  on 
aurait  tort ,  selon  nous ,  de*  mécôrtnaître  rinhportance. 

Est-ce  impunément^  pour  la  liberté  de  la  circulation 
ceotrale ,  que  ie  cœur  est  violemment  poussé  en  haut  et  à 
gauche,  que,  dans  cette  attitude,  nouvelles  les  vaisseaux 
afférents,  et  notamment  la  veine  cave  inférieure  et  le  ven- 
tricule droit ,  subissent  un  tassement /lôtable  dans  leur 
calibre,  dans  leur'cavité ? 

,  Est-ce  impunément  aussi,  pour  la  liberté  de  là-  circu- 
lation centrale,  qu'existent  et  cette  antéflexiôn  cardiaque 
dontnoiis  avons,  parlé,  et  cène  incurvation  que  présente 
l'aorte  à  son  émergence  et  dans  sa  crosse ,  incurvation 
qui- dérange  le  niveau  desës  valvules  et  les  rend  désormais 
insuffisantes.       / 

EstH^  impunément ,  enfin  ,  que ,  dans  sa  ihasse  to- 
tale,  Jé cœur  scibiiune-  étreinte^  laquelle  devient  le  point 
de  dépari  d^im  trouUeplus  où  tnoins  profond  dans  le  mé^ 

11 


140  JODllIAi  ra  «ÉIKBGOIS. 

canisme  de  la  circulation  »  tant  artérielie  que  veineuse* 
Il  est  évident  pour  nous  que  ëe  semblables  condi- 
tions anatomo-pathotogîques  qui,  par  elte-mèaies,  sont 
si  fécondes  en  troubles  locaux  et  fonctionnels  ,  >  doivent 
avoir  le  retentissement  le  plus  filchéux  sur  les  autres  sections 
de  l'appareil  circulatoire ,  et  que  là,  probablement  se  trouve 
la  cause  principale  des  bydropisies  propret  aux  fièvres  in- 
termittentes. 

Nous  croyons,  qu'en. dehors,  de  toute  altérattoti  san- 
guine ,  ces  troubles  mécaniques  de  l'appareil  de  la  circu- 
lation centrale  suffiraient,  à  la  lutTgue^pottr  'détenpiner 
des  épanchements  séreux  et  que  ,  coexistant  avec  l'altéra- 
tion paludéenne  du  sang ,  il  y  a  là  double  raison  pour  que 
les  bydropisies  .doi>t  il  s'/igit  se  produisent. 

*  Concilions  que\  dans.  *  réxplfcation^  des  bydropisies 
consécutives  ^ux  fièvres  intermittentes ,  11  y:  a,'  comme 
données  étiologiqoes  ,  non-seulèment  l'aKéraèioQ  spéciale 
du  sang,  non-seulement  les  obstructions  viscérales,  mais 
encore  l'intêryentioB  du  fait  essçntiel^  qui  résulte  de  l'état 
anatomo -pathologique  que  créent,  pour  1è  *coeur  et  les 
gros  vaisseaux ,  les  engorgements  spiéniques  propres  aux 
fièvres  d'accès,  - 

Nous  livrons  ces' considérations  à  l'appréciation  des  ob* 
servateurs,  ayant  lieu  dé  croire,  d'après  nos  obseryatioos, 

Sue  l'examen  attentif  et  désintéressé  des  faits  pourra  justi- 
er  les  interprétations  que  nous  invoquons  dans  ce  mo- 
mônt, 

Les  cdcA^W  des  fièvres  se  prêtent-elles,  comidie  les 
kydropisiés,  à  l'application  de  quelques-unes  des  données 
analômiquês  que  nous  avons  signalées?   . 

Coinmé  les  auteurs  du  Gômpendiuni ,  nous-  croyons  que 
la  cacbexie  dpnt  il  e^t  ici  question  peut  se  rattacher^  plu- 
sieurs lésions  viscérales  ;  mais^celle  qûi^,  d'après  noç  ob- 
servati.ons ,  lui  appartiendrait  spécialement ,  serait^  sans 
contredit,  la  pérroarSîte  ;  et  cette  péricardite,  qui  s^ob- 
serve  particulièrement  au  niveau  des  oreillettes  ,  et  prin- 
cipalèm^t  àé  la.  gauche ,  serait,  d'après  nos  observations, 
la  conséquence  4iltime  -et  tiien  souvent  irrémé<iiable  de 


JOUBMAX  BB   MÉDSCIMB.  141 

l'espèce  de.  traiimatisme  qu^  pu  reproduire ,  sur  l'appa- 
reit  de  la  circulation  centrale ,  la  propulsion  longtemps 
continuée  des  engorgement^  spléniquès. 

.  Gommt  pour  les  hydropisies., .  faisons  encore  ici  la  part 
de  raltération  paludéenne  du  sang  et  de  Tinfluence  que 
ces  troubles  de  l'hématose  peuvent  avoir  sur  l'économie 
tout  entière,  influence  qui,  du  reste  ,  n'a  rien  d'incom- 
patible avec  la  cardiopathie^  soit  fonctionnelle ,  soit  ana* 
tomique,  que. nous  avons  constatée  , dans  tous  les  cas  de 
cachexieconsécutive  aux  fièvres  d'accès. 

L'intervention  pathogénique  des  fonctions  cardiaques,., 
dans  la  nosologie  des  fièvres,  intermittentes ,  nous  semble 
ouvrir  des  aperçus  nouveaux  ,  hbhseulèihent  au  sujet  de 
l'étiologie  des  hydropisies  et  de3  cachexies  qui  leiir  sont 
propres,  mais  encore  au  sujet  de  l'étiologie  d^s  fièvres 
perniciemes  eUes-mêmes*    '     ■•^' 

Combien  de  fois  la  préexistence  de  quelque  état  morbide 
duccêurou  des  gros  vaisseaux  ne  nous  art-elle  pas  mis  en 

Sarde  contre  les  éventualités  de  certains  états  fébriles  qui, 
'abord  simples  et  bénins,  devenaient  bientôt  pernicieux, 
sous  4a  double  influencé  d'un  développement  çonsiflérable 
dé  la  raté  et  du  contre-coup  fatal  qui  en  résultait  pour  les 
or^nés  circulatoires  primordialement  affectés.,   -> 

Jïous  croyons  que  ,  dans  les  fièvres  intermittentes,  la 
tbrme  pernicieuse,  est  à^çraindre  ,  du  moins  sous  certaines 
formes  symptôniatiques,  toutes  les,foist]u  un  engorgemen  t 
splénique  étant  donné,  lé  cœur,  les  gros  vaisseaux  et  |es  . 
viscières  qui^^  comipe'les  poumons  et  le  cerveau,  sont  avec 
eux  en  communication  vasculaire  très^dirçcte ,  se  trou^ 
vent  être  le  siège  de  quelque  altération  plus  où  itioinrs . 
chroniijue.  ■    • .  ]  ■  ■.  ■ 

Voil^  pourquoi  la  propàrtion  des  fièvres  pernicieuses 
croit  habituellement  avec .  les  chances  d'affections  organir 
ques,.  et  qu'elles  s'observe.nt  bieo  plus  fréquemment  chez 
les  vieillards  que  chez  les  enfants  :  voilà  pourquoi,  sans 
crainte  d'être  démenti  ;  on  pQUt  dire  qu'en  dehors  de 
certaines  conditions  épidémfques,.le  nombre  des  fièvres 
pernicieuses  est  précisément  en  raison  directe  de  l'âge  et 


142  JotiBifAi  BB  KtoBcnm. . 

conséquetnment  des  chances  de  mahdie  empreintes  de 
chronicité. 

Nous  croyoDs  enfin  que ,  si  notre  travail  peut  dojiner 
lieu  à  des  déductions  séméiologiques ,  il  peut  encore 
conduire  à  certains  corollaires  thérapeutiques. 

Alors  que  le  pathologiste  n*eut  en  vue,  dans  les  fièvres 
intermittentes,  que  l'élément  paroxystique.,  Texistence  des 
accès  dut  être  le  mobile  exclusif  et  suprénoe  des  efforts  et 
des  déterminations  du  médecin. 

Lorsque  ,  plus  tard,  il  fut  reconnu  que,  parallèlement  ou 
consécutivement  aux  accès ,  il  y  avait  un  engorgement, 
splénique  ,  les  fébrifuges  furent  adressés  ,  non  plus  seule- 
ment aux  accès  eux-mêmes ,  mais  aussi ,  mais  en  même 
temps,  à  Tobstruction  viscérale.  - 

S*il  est  vrai  qu'à  ces  deux  motife  de  détermination,  cura- 
tive,  doive  s'en  ajouter  un  troisième  puisé  dans  l'intervention 
nosologique  des  appareils  de  la  cifculatioA  centrale ,  Je 
médecin  ne  s'appuiera  plus  seulement  sur  deux  .raisons, 
mais  bien  sur  trois,  pour  «n.  finir  au  plus- vite  possible 
avec  les  conséquences  si  multiples  de  t'intooLication  palu- 
déenne. .    .  '  -  . 

Administrer  le  sulfate  'de  quinine  ou  le  quinquina  à  do- 
ses fébrifuges,  c'est  à  la  fois  agir  sur  des  accès  dé  fièvre, 
sur  l'engorgement  splénique  qui  les  accompagne  habituel- 
lemient  et  sur  toutes  les  perturbations  cardiaques  et  vas- 
çulaires  dont  nous  ayons  indiqué  la  source  et  les  fatales 
conséquences. 

Ce  qujB  nous  venons  de  dire  surla  nécessité  de  suppri- 
mer aussitôt  que  possible  les  accès. dé  fièvre ,  ce  que  nous 
venons  de  dire^ùssi  sur  lé  critérium  à  la  fois  séméiologji- 
que  et  thérapeutique  que  peuvent  offrir  leâ  engorgements 
de  la  rate,  indique  suffisamment  que  l'activité  du  traitement 
fébrifuge  sera  aussi  toujours  en  raison  directe  des  dangers 
et  des  complications  viscérales  qu^on  pourrait  prévoir,  dan- 
gers et  complications  viscérales  que  nous  avons  vti  se  tra- 


JÔUBIflL  DB   MÉDBCHa.  <^^ 

duire  soit  par  Faccès  pernicieux ,  soit  par  la  diathèsq  sé- 
reuse ,  soit  par  l'état  cachectique. 

N'oublions  pas  de  dire  en  terminant  que  les  inflamma- 
tions chroniques  qui ,  dans  lés  fièvres  intermittentes  d'anr 
cienne  date  ,  atteignent  trop  fréquemment  les  organes  de 
la  circulation  ^centrate  ,  et  que  l'anatomie  pathologique 
nous  a  montrés  sous  forme  d'aortite  et  de  péricardite , 
sont. heureusement  modifiés  par  des  topiques  révulsifs,  ap- 
pliqués sur  la  région  précdrdiale,  lorsque  dans  ces  états  si 
graves  et  ti  tenaces  c'était  en  vain  que  la  moindre  amé- 
lioration était  demandée  à  l'emploi  niéthodique.  et  persévé- 
rant des  fébrifuges  et  des  ferrugineux. 

Ces  considérations  résument  en  principe  et  en  appli- 
cation les  principales  conclusions  que  nous  pouvons  tirer 
de  notre  travail. 


QUELQUES  CAS  D'JUTOPL^STIE  faciale, 
par  le  D'-  JLBTbUvneifa ,  Professeur-adjoint  de 
tlmiqae  exlerne.à  VÉcole^  Médecine  dé  Nantes, 
Membre  correspondant  de  la  Société  de  Chirurgie 
de  Paris,  etc. 


Parmi  toutes  les. conquêtes  récentes  de  la  chirurgie,  il 
n'en  est  pas  qui  ait  pris  une  extension  aussi  grande  que  celle 
qui  comprend  €e  qu'on  à  dé^gné  sous  le  nom  de  chirurgie 
restauratrice.  Oïl  pourrait  dire  que  c'est  tout  un  art  nou- 
veau, qui  permet,  par  une  foule  de  procédés  ingénieux, 
de  réparer  des  difformités  natives  ou  accidentelles,  de  re- 
constituer des  organes  qui  manquent  en  partie  ou  en  tota- 
lité, de  remédier  à  'des  infirmités  considérées  autrefois 
comiïie  incurables.  Aussi,  en  énumérantles  progrès  rapides 
obt0nus-dans  cetfe  voie  qu'il  a  tant  contribué  à  féconder  , 
l'illustre  chirurgien  qui  fut  mon  maître.  M.. Roux,  dit  avec 

12 


144  JOUUfÀL  DE  1[ÉBB<aiŒ. 

raison  :  «  Par  ce  que  nous  faisons  aujourd'hui,  à  quelle  dis- 
tancé ne  sommes-nous  pas  de  ce  qu'on  faisait  il  y  a, seule- 
ment trente  ou  quarante  9ns?...  Nos  devanciers  en  géraient 
étonnés,  slls  pouvaieiit  en  ^Ire  témoins.  »  (Quarante  années 
de  pratique  chirurgicale.  Ph.-J:  Roux.) 

Pendmit  que  la  chirurgie  à  réussi  à  agrandir  ainsi  son 
domaine,  elle  est  parvenue  ;  par  Tétude  plus  approfondie 
des  maladies,  par  la  découverte  de  nouvelles  ressources 
thérapeutiques  çt  par  l'emploi  mieux  raisonné  des  moyens 
connus  depuis  longtemps,  à  diminuer,  d'une  manière 
chaque  jouf  plus  sensible,  le  nombre  des  cas  où  des  muti- 
lations cruelles  sont  le  seul  remède  cjue'nous  ayons  à  offrir 
au^  malheureux  dont  la  vie  ne  peut  être  rachetée  qu*à  ce 
prix.  Ainsi ,  <l'un  côté ,  progrès  pour  la  création  de  Ùl  chi- 
rurgie restâui'atrice  ;  de  l'autre  côté ,  perfectionnement ,  et 
par  conséquent,  progrès  encore,  par  cette  direction  ^lu- 
tajre  imprimée  au  traitement  d*uh  grand  nombre  de  mala- 
dies, ce  qui  permet  de  caractériser  la  chirurgie  dç  notre 
époque,  en  disant  qu'elle  est  essentiellement  conservatrice. 

La  chirurgie  restauratrice,  à' laquelle  se  râppo^rtént  îes 
cas  qui  font  la  base  (|e  c.e.  travail,  emprunt^  ses.  moyens 
d'action  Jes  plus  puissants  et  le^  plus  précieux  ^  VautqplqS' 
tiéj  cet  art  curieux  qui ,  éclairé  par  les  lumières  dé  la  phy- 
siologie ,  à  été"  élevé  h  la'  hauteur  d'une  science. 

L'auto|>lastie,  si  riche  et  si  ^féconde  aujourd'hui ,  a,  dans 
le  passé,  deux  origines  distinctes  qu'on  peut  suivre,  a  tra- 
vers les  siècles,  dans  leur  lente  évolution. 

La  première  est  représentée  par  le  chapitre  que  Celse 
a  écrit  sur'  les  réparations  des  pertes  de  substance  des 
oreilles,. des  lèvres  et  des  narines.  (Liv.  vu;  cap.  ix.)  Ces 
préceptes  utiles  tracés  par  l'auteur  latin  coutenaienj,  en 
germe,  une  partie  de  cette  branche  importante  de  l'art  opé- 
ratoire qui  a  pris  tant  dp  développement  depuis  quelques 
anneqs.  Cependant,  ces  préceptes  étaient,  pour  ainsi  dire  ^ 
resjés  stériles ,  les  auteurs  s'ètant  bornés ,  le  plus  souvent, 
aies  reproduire  ,'^sans  même  être  d'accord  sur  rinterpréjp- 
tiôn  du' texte  qu'ils  avaient  sous  lepyeiix.  A  peine',  à  de 
lon^s  intervalles^  peut-on  citer  quelques  essais  qui  sor)t  loin 


d*offir1r  (ÔQjoiifs  un  rérltable  carftctèra  d  utitité ,  et  de  cons- 
tit4ier  un'4)rogrès. 

Les  pôrfecUènnetnents  apportés  successivement  à  l'opi^- 
raticMfi  du  bec-de-lièvre  et  le  procédé  employé  par  Chopart 
pour  4a  cheiloplastie  eonstituent  i^s  points  les  plus  saiRânts 
de  Fhîçtoire  des  restaurititions  faciales,, dans  Tordre ^es  faits 
qui  ont  été  adtQÎs  et  qoi  sont  restés  dans  le  domaine  scien- 
tifique,  depuis  Celse  jusqu'au  XiX*  siècle. 

JLa  seconde  origine  de  ia  chirurgie  plastique  est  consti- 
tuée par  la  rhim^lastiè,  qui  n'était  jamais  entrée  pleine- 
ment dans  le. courant  scientifique  général,  môtné  à  la  secofide 
phase  de  son  histoire.  -  \      • 

Chacun  sait  aujo.urd'hui  que  cette  opération  se  pratiquait 
fréquemment,  dans  rindé,  où  elle  était  autrefois  le  privi- 
lège de  la  secte  des  Koomàs;  mais  le  mystère  dont  on  avait 
soin  de  l'entourer,  rempécha< longtemps  d'être  connue  en 
Occident.  ^  .  ' 

Les  auteurs  du  moyen*âge  n'en  parlent  que  pour  en  nier 
la  possibilité,  ou,  tout  au.  moins,  pour  la  mettre  endoUte. 

C'est  en  1442 ,  qu'un  SiciHen  du  nom  de  Branca  réussit 
à  pratiquer  la  rhinoplastie  et  employa.,  pour  «cette  opéra- 
tion ,  un  procédé  nouveau  qui ,  adopté  et  perfectionné  à  la 
fin  du  XVl'  siècle  par  TagUacozz'r,  porta  aussi  haut  que 
possible  la  réputation  de  ce  chiî^urgien.  Le  bruit  que  firent 
les  succès  de  Tagliacozzj  fut  tei,«(]ue  les  poètes  chantèrent 
sa  gloire, et,  qu^après  sa  ixiort,on  lui  éleva  une  statue  dans 
l'amphithéâtre  (fanatomie  de  Bologne.  Qn  en  fit  presque  un 
Dieu  ;  \      ^ 

^Ôn  mocb  ta  priticeps ,  sed  D^us  arti^  eris^        ^      - 

Cependant,  si  les  contemporains  de  Tagiracozzi  portèrent 
trop  loin  Fehthousiasme,  les  générations  suivantes  eurent- 
le  tort  plus  girand  d'oublier  les  services  qu'il  avait  rendus. 
L'auréole  du  Dfeu  s'effara  bientôt,  et  même  avec  une  telle 
rapidité ,  qu'ion  a  peine  à  comprendre  comment,  un  siècle 
plus  tard  9  Dîonis  ait  pu  traiter  eie  qu'on  disait  de  la  restau- 
ration du  nez ,  d'Mst&ires  cipacryphés  et  -de  contefs  faits  à 
pl€Èisir.  ;       *    w 


146  JOUBi^Aii  itt  jukmaaxfi. 

Ce  n'est  qu*en  1814,  que  Carpue  iità  la,  rbinoplastie  de 
ToQbli  où  elle  était  tombée ,  et  réussit  à  la  foiré»  accepter 
par  les  chirurgiens  qui  n'étaient  pas  trop  esclaves  de  la  rou- 
tine et  des  préjugés. 

On  comprit  bientôt  qu'en  réunissant ,  dans  un  foisceau 
commun ,  les  deux  ordres  de  foits  que  je  viens  de  passer  ra- 
pidement en  revue,  les  traditions  de  Celse  et  la  rbinoplastie 
indienne  et  italienne;  on  pouvait  en  déduire  des  principes 
généraux  dont  les  applications  jfiombreuses  ne  tardèrent  pas 
à  jeter  un  vif  éclat,  et  adonner  une  impulsion  toute  nou* 
velle  aux  travaux  dés  chirurgiens. 

Les  difformités  ou  les  pertes  de  substance  que  l'art  est 
appelé  à  faire  disparaître  ^  et  dont  le  visage  est  si  souvent  le 
siège,  affectent  les  dispositions  les  plus  variées  et  souvent 
les  plus  imprévueii  ;  aussi,  faut-il  que  le  chirurgien,  lorsqu'il 
a  recours  à  Tautoplastie ,  soit  presque  toujours  plus  ou 
moins  créateur,  et  qu'il  sache,  selon  les  circonstances,  mo- 
difier à  propos  les  procédés  opératoires.  On;peut  dire  que 
chaq\Jie  cas  particulier  exige  quelque  combinaison  spéciale  ; 
de  là ,  des  difficultés  toujours  nouvelles^  mais  aussi,  et  pré- 
cisément à  cause  de  ces  difficultés  ^  qui.  rehaussent  le  mérite 
du  succès,  un  charme  et  un  attrait  que  le  chir^irgien  ne 
peut  pas  trouver ,  à  un  semblable  degré ,  lorsqu'il  suit  for- 
cément les  sentiers,  battus. 

Il  est  souvent  impossible  de  donner  une  idée  bien  nette 
d*une  opération,  en  disant  seulement  qu'elle  a  été  pratiquée 
d'après  telle  méthode  ou  tel  procédé  connu .;  les  quelques 
mots  qui  précèdent  justifient  pleinement  cette  proposition , 
que  viennent  encore  corroborer  le  vague  et  les  dis9idences 
qui  existent  a  ce  sujet  dans  les  auteurs.    , 

C'est  pourquoi  il  est  utile  de  rapporter  avec  quelque  dé- 
tail les  observationts  de  cette  nature,  lorsqu'elles  présentent 
.  des  particularités  qu'on  peut  mettre  h  profit  dans  de^  cas 
analogues.  ,       - 

Les  quatre  observations  qui  suivant,  et  qui  ont  pour  objet 
deu.x  rhinpplasties ^  une  génoplastie et  uneblépharophistie, 
ont  entre  elles  un  lien  de  parenté,  qui  ressortira  à  tous  les 


JOCBIIAL  0B  MÉDSCniK.  147 

yçux ,  bien  qu'elles  diffèrent  cependant  sous  plus  d'uni  rap* 
port  : 

Faciès  non  omnibus  uoa 

Hec  divers^  tamen,  qualem  deeet'csse  sororum. 

^  (Ovid9,  Métamorpl^*) 

Lorsqu'il  s'agit  d'auloplastie ,  c'est-à-dirè  de  Iransfoma- 
tion ,  ce  n'e^t  pas  trop  in'élorgner  de  mon  sujet  que  d'em* 
prlinter*  en  passant,  une  citation  au  chantre  des  méta- 
morphoses.  :  '  "  ■ 

Chez  les  malades  dont  j'ai  à  rapporter  l'histoire,  il  m'a 
été  possi^^le  d'appliquer  la  méthode  indienne  telle  qu'elle 
ajBté  perfectionnée  par  les  modernes,  et  non  en  suivant 
l'exemple  des  Brames,  qui  allaient  chercher  un  lambeau  à 
une  distance  assez  grande  de  la  perte  de  substance;  qui  tpr- 
daietit  sur  lui-même  le  pédicule  du  lambeau ,  et  laissaient' 
suppurer  la  plaie  résultant  de  l'emprunt  qu'ils  avaient  fait 
aux'  téguments.  Le  procédé  d^s  Brames  est,  du  reste,  celui 
qui^est  encore  en  usage,  lorsqu'il  s'agit  de  spratiquer  la 
rhinoplastte  dans  les  cas  où  le  nez  manque  en  totalité. 

Dans  le  procédé  que  j'ai  suivi,  le  lambeau  est  taillé  de 
telle  sorte  qu'un  des  côtés  de  sa  rucine  est  tangent  à  un 
des  points  de  la  circonférence  de  la  solution  de  continuité,, 
et  qu'une  des  incisions,  destinées  à  circonscrire  le  lam* 
beau  ,  parte  de  ce  point  et  se  confonde  autant  que  pos- 
sible, djans  une  partie  de  son  étendue  ^  avec  lé  bord  môme 
de  cette  solution  de  continuité,  l'autre  incision  eildemèu-' 
raal  éloignée  de  toute  la  largeur  du  lambeau  ;  en.  outre ,  le 
pédicule,  au  lieu  d'être  tordu  sur  lui-même ,  tourne  sim- 
plenient  à  plat  autour  d'un  axe  qui  le  traverserait  suivant 
son  épaisseur  ;  enfin,  un  dos  avantagés  les  plus  grands  de 
ce  procédé ,  ç  est  là  réunion  imipédiate  des  bords  de  la 
perte  de  substance  résultant  de  la  formation  du  lambeau. 

Dans  certains  cas,  la  rotation,  où  plutôt  rinclinaison  du 
lambeau  ,  né  dépasse  pas  30  ou  40  degrés  ,  et  peut  être 
considérée  comme  un  simple  glissement  ;  d'un  autre  côté  , 
le  larbbeau  est  pris  aussi  prés  que  possible  de. la  perte  de 
substance  :  ex  vicino  (^dducitur  (Celse).  Ces  deux  caractè- 


148  JOUBNAL   DE  MÉBÎBCIHE. 

res  établissent  une  sorfe  de  trait-^*union  entre  la  méthode 
française  et  la  méthode  indienne,  à  laquelle  appartient  ce- 
pendant plus  spécialement  le,  procédé  auquel  j'ai  eu  re- 
cours. 

Observation  première* 

fieslauration  de  la  moitié  droite  du  nez,  au  moyen  d!un 
lambeau  emprunté  à  lu  joue  ;  reconsHintion  de  VaOe  du 
neZj  à  l'aide  d'un  ourlet  cutané. 

En  1840,  un  vieillard  presque  octogénaire ,  lé  nommé 
Penard,  de  Notre-Dame-de-Riez  (Vendée),  se  présenta  chez 
rnoi  et  me  demanda  si  je  ne  pourrais  pas  faire  disparattre, 
par  une  opération  ,  ou  dissiniuler,  par  tout  autr.é  moyen, 
une  perte  de  substance  qu'il,  avait  au  néz  et  qui  donnait  à 
sa  physionomie  quelque  chose' de  bizarre  et  de  repous- 
sant. 

Le  mal  avait  commencé  ,  depuis  un  assez  grand  nombre 
d'années  ,  par  une  petite  croutë  sèche  ayant  son  siège  sur 
Taiie  du  nez  ;  cette  Croûte  tombait  souvent  et  se  reprodui- 
sait inimédiatement  en  gagnant  peu  à  peu  du  terrain, 
mais,  en  même  temps,  les  tissuâ  étaient  détruits  et  rongés 
par  une  sorte  d'usure  progressive.  Cette  ulcération ,  évi- 
demment de  nature  caneroïde,  était  sèche  ,  et  le  malade 
remarquait  à  peine  ua  suintement  sanieux  ôU  sanguino- 
lent lorsqu'il  avait  arraché  prématurénient  une  portibn  de 
la  croûte.  Lès  tissus  voisins  n'étaient  ni  rouges,  ni  gon- 
flés. 

Penard  jouissait  d'une  très-bonne  santé  et  avait  conser- 
vé une  certaine  verdeur  juvénile.- On  disait  même  que  des 
projets  de  mariage  l'avaient  seuls  déterminé  à  chercher  un 
remède  àî  sa  difformité; 

Quand  il  vint  me  consulter,  sa  maladie  avait  déjà  fait 
des  ravages  Considéf ables ,  car,  dd  côté  droit  dû  nez, 
peau  ,•  cartilages  et  membrane  muqueuse  avaient  été  en- 
tièrement détruits;  Les  limites  du.  mat  suivaient  assez 
exactement  en  avant  le  bord  àe  la  ctofsbn ,  qui  était  restée 


jbtANxi  dS  MlSSBcnd. 


l'49 


^ine;  en  Mut  et  en  dehorsv  elle  correspondait  au  bord 
osseux:  formé  par  Vos  propre  du  nez  et  par  lapophyse  mon- 
tante du  maxillaire  supérieur.  Âutouf  de  In  perte  -de  subs- 
tance ,  Tuleération  n'était  caractérisée  que  pal*  une  ligne 
dé  trois  à  cin(}  millimèti*es  de  largeur  ,  formée  par  des 
croûtes  sèchcis  d'apparence  épidermique.  Toute  la  oiu- 
queusedela  cloison  était  rouge  et  recouverte  de.  mucus 
desséché  ;  les  replis  înuqueux,  qu'on  apercevait  dans  Tin- 
térieuf  de  la  fosse  nasale,  paraissaient  aussi  légèrement  en-  < 
flammée ,  ce  qui  tenait  évidemment  à  ce  que  Tair  extérieur 
y  pénétrait  largement ,  transportant  avec  lui  la  poussière 
et  les  corps  étrangers  qui  n'étaient  point  arrêtés  ou  tamisés 
au  passage  par  les  poils  protecteurs  désignée  sous  le  nom 
de  vftrisses.  Pas  de  ganglions  lymphatiques  engorgés,  pas 
d'autres  traces  d'affection  xiancroïde  bu  cancéreuse  que 
celles  que  fai  indiquées  plus  haut  et  qur  étaient  bornées 
aux  bords  de4a  perle  de  substance. 

D'après  Tétut  de  maigreur  du  malade,  d'après  la  flacci- 
dité^ eft  les  rides  rionibreuses  que  présentait  la  peau  du 
visage^  je  compris  la  possibilité  de  restaurer  le  nez  avec  là 
pcaû  voisine  ,  et  mon  plan  d'opération  fut  arrêté  immédia- 
tement :  je  le  rilis/à  exécution  quelques  jours  plus  tard. 


Xe  comnicnçài  par  aviver  les  bords  de  la  perte  d^  subs- 
tance en  enlevant  toiitçs  les  parties  qui  paraissaient  mala- 
des. L'eépâèe  a  combler  eut  alors  la  forme  d'un  triangle, 


150  JOUBHIL  DR  )|ÉDBCOfB. 

dontlecâté  inférieur  était  le  plus  courte  les  deux  autres 
ayant  à  peu  près  une  longueur  égalé.    - 

Je  taillai  mon  lambeau  de  la  manière  suivante  : 

Le  côté  externe  de  la  solution  de  continuité  fut  prolongé 
par  une  incision  qui  passa  à  un  centimètre  de  la  commis- 
sure labiale  et  descendit  à  un  centinoètre  et  demi  au-des- 
sous de  cette  commissure.,  en  s'inclinant  en  dehors.  A 
trois  centimètres  et  demi  de  Tangle  supérieur  de  la  plaie , 
et  à  partir  du^  niveau  du  hovd  inférieur  de  Torbite,  une 
seconde  incision  fut  pratiquée  pârallèièmeut  à  là  première, 
dans  ses  deux  tiers  supérieurs ,  et  s'inclînant  en  dedans, 
dans  son  tiers  inférieur,  de  manière  à  venir  rejoindre  la 
première  sous  un  angle  aigu.    .  ,     • 

Le  lambeau  fut  détaché  de  bas  en  haut  aveoune  couche 
>  suffisante  du  tissu  cellulaire  sous-cutané.  J'etus  soin  de  le 
disséquer  complètement  vers  sa. base,  ce  qui  demanda  de 
grancles  précautions  au  niveau  du  sac  facrymal. 

Je  fis  alors  tenir  le  lambeau  par  un  aide  et  je  m*em- 

Eressai'de  réunir,  par  des  épingles^  la  partie  inférieure  de 
i  plafe  de  la  joue ,  ce  qui  put  s'opérer  avec  la  plujs  grande 
facilité.  Les  téguments  de  la  face,  entraînés  ainsi  vers  la 
ligne  médiane,  facilitèrent  le  déplacement  que  je  voulais 
imprimer  au  lambeau.  Celui-ci  vint  s'appliquer  sans  ti- 
raillement sur  la  perte  de  substance.,  en  formant  cepenr 
Jant  en  haut  et  en  avant  qn  léger  godet  qui  s!effaça  plus 
tard.  Jo  fixai  son  bord  antérieur  à  la  peau  du  nez ,  au 
moyen  d'épingles  à  insectes  très-flnes  et  de  la  suture  en- 
tortillée; 

Le  lambeau  ,  ainsi  qu'on  a  pu  en  faire  la  remarque , 
était  plus  long  que  le  vide  qu'il  était  destiné  à  combler. 
En  le  taillant  ainsi,  j'avais  un  double  motif:  le  premier, 
de  donner  à  la  plaie  de  la  joue  une  forme  qui  me  permit 
d'en  affronter  les  bords;  c'est  ce  quf  eut  lieu,  en  effet, 
ainsi  que  nous  venons  de  le  voir;  le  second  motif  était 
de  façonner  l'aile  du  nez  au  moyen  d'un  ourlet  qui  lui 
donnât  une  solidité  suffisante'  et  une  forme  se  rapprochant 
autant  que  possible  de  la  forme  normale ,  et  qui ,  enfin , 


iwm»kh  râ  iiËa>BcniB.  iSl 

reportât,  à  l'intérieur  de  la  nouveUe  narme,  le  bord  cica- 
triciel, inférieur  du  lambeau. 

Pour  cela  ;i  je  retranchai,  avec  des  ciseaux  «  la  partie  du 
lambeau  qui  devenait  inutile ,  en  ayant  soia  de  lui  laisser 
une  longueur  suffisante  pour  remplir  Tobjet  que  je  viens 
d'indiquer.  Je  renversai  ensuite  Ja  partie  inférieure  dû  lam* 
beau  ,  de  manière  à  mettre  les  surfaces  saignantes  en  ^oti- 
tact ,  en  formant,  .ainsi  que  je  Tai  déjà  dit ,  un  véritable 
ourliet  t  qi^l  fut  maintenu  au  moyeu  d^un  double  point  de 
suture.  J'ajouterai  que  cette  partie  renversée  du  lambeau 
avait  été  taillée,  de  manière  à  x^e  que  sa  forme  représentât 
assez  bien  celle  de  l'aile  du  nez. 

Reétaît  encore  à  fixer  le  bord  exterae.du  lambeau'  aux 
parles  voisines.  , 

L'aile  du  nez  nouvelle  fut  maintenue  au'  ctioyen  d'iin 
point  de  suture  simple  ,  au  sommet  de  l'angle  qui,; déjà  , 
avail  servi  en  dehors  de  point  d'attache  pour  la  suture  de 
la  plaie  de  la  JQue. ,    .  ^       :     . 

Le  bord  externe  de  la  partie,  supérieure  de  la  plaie  de 
la  jouQr  grâce  a, une  dissection  peu  étendue,  peut  être 
amené,  sans  trop  d'efforts,  jusqu'au  contact  du  lambeau 
auqu<U  il  fut  fixé  par  desépingles.      / 

Cette  opération,  qui  dura  trois  quarts  d'heure,  fut  bien 
supportée  par  le  malade.- Les  suites  en  furent  assez  sim- 
ples; les  premiers  jours,  pendant  lesquels,. d'ailleurs,  je  ne 
vis  pas  le  inalade,  se  passèrent  sans  accident  qui  mérite 
d'être  noté. 

Le  quatrième  jour,  jç  mè  rendis chez^naou  opéré:  il  y 
avait  déjà  .un  gonflement  considérable  dé  tout  le  coté 
droit  de  la  face  ;  je  me  hâtai  d'enlever  quelques  épingks  ; 
sur  d'autres  points  i  je  me  bornai  à  enlever  les  fils  et  à  les 
remplacer  par  d'autres  fils  moins  serrés. 

Le  lendemain  ,  de  nouvelles  épingles  furent  retirées ,  et, 
le  sixième  jour,  j'enlevai  les  dernières. 

La  réunion  immédiate  avait  eu  lieu  dans  la  phis  grande 
partie,  et,  bien  qu'un  pBu  d||  suppuration  ce  montrât  sur 
quelques  points ,  il  était  facile  de  voir  que,  1^  succès  de  l'o- 
pération n'était  pas  douteux.  ./ 


15%  iùûtàniit  DE  lËÉMicrnW. 

Des  bandelettes  de  sparadrap  furent  ajppli^tiéës  pour 
prévenir  récartement  des  plaies  et  pour  soutenir  les  par- 
ties. 

^  Les  jourâ  suivants,  le  gonflement  diminua  ;  ce  n'est  qu*un 
mois  après  l'opération  que  toute  trabe  de  suppuration  avait 
disparu.  Alors,  on  pouvait  juger  du  résultat,  qui  était  des 
plus,  satisfaisants.  C  aile  du  nez  se  dessinait  assez  bien  à 
l'extérieur,  et  elle  présentait  tiiie  soliditlâ  suffisante  pour 
maintenir  la  narine  ouverte  et  pour  de  pas  éprouver  de 
ballotement  dans  les  mouvements  de  ta  respiration.  Mais, 
dans  ces  premiers  teinps,  elle  avaif  urie  épaisseur  trop 
considérable  qui ,  du  reste,  a  diminué  dans  la  suite. 

La  cicatrice  de  lajoue  n'était  pas  extrêmenjent  tendue 
et  allait  bientôt  être  cachée  en  partie  par  les  rides.  La  pau- 
pièrequif  après  Popération,  paraissait  assez  fortement  ti^ 
raillée  en  dedans,  avait  repris  sa  forme  normale.  Je  dois 
«jouter  que  le  nez  s'était  incliné  uiipeu  du  côté  droit,  mais 
sans  qu'il  y  eut  là  rien  de  choquant. 

Mon  malade  a  vécu  plusieurs  années  après  cette  opéra- 
tion  ;  je  ne  l'ai  pas  revu  dans  tés  derniers  temps  de  sa  vie  ; 
cependant,  j'ai  su  que  l'ulcère  rongeant  avait  reparu  sur 
la  cloison  qui  s'était  perforée';  mais  cçtte  récidive  ne  se 
manifesta  point  à  l'extérieur  et  ne  toucha  en  rien  à  la 
partie  nouvelle  du  nez. 

Je  n'ajouterai  que  deux  courtes  réfte^ions  à  cette  ob- 
servation :  la  première,  pour  établir  que  je  crois  avoih  fait 
une  chose  nouvelle  en  utilisant  l'excédant  de  mon  lambeau, . 
afin  de  reconstituer  Taile  du  nez  par  un  ourlet  où  repli 
cutané.  Du  moins  ,  je  n'avais  ,  à  Tépoque  où  j'ai  pratiqué 
cette  opération  (IS'iO),  rien  vu  qui  pût. m'en'dônner  l'idée  ; 
depuis  ce  tenfips,  la  première  observation  qui  ait  une  cer- 
taine analogie  avec  la  mienne,  appartient  à  M.  Serre  (1B42). 
Quoi  qu'il  qn  soit ,  c'est  là  ,  je  crois,  une  dés  applications 
les  plus  heureuses  qu'on  puisse  faire  de"  ce  qu'on  a  nommé 
aùtoplastie  par  doublement  du  lambeaui- 

La  seconde  réflexion  est  relative  à  là  difficulté  ou  à  ia' 
facilité  que  présente  l'exécution  db  certaines  ppéràlrons , 
dans  des  cas  semblables,  en  apparence,  et^oùc'epèïîdant 


JOmUAft  BE  MÉAKCOm.  f'53 

certaines  circonstances,  qu  il  importe  d'apprécier  d'avance, 
viennent  aider  ou  gêner  le  chirurgien. 

Ainsi ,  l'opération  que  je  viens  de  décrire,  n'a  été  possi- 
ble que  grâce  à  la  maigreur  de  mon  malade ,  à  la  souplesse 
et  à  l'extensibilité  dé  Ta  peau.  Changez  ces  conditions  et 
les  diflficultés  pcfuvent  devenir  insurmontables. 

Ce  >que]'ai  fait  chez  Penard  eût  été  impossiMe  chez  la 
femme  qui  lait  le  sujet  de  Tobservation  suivante.  Chez  elle, 
en  eftel,4e  peu  de  laxité  du  tissu  cellulaire  sous* cutané 
et  he  peu  d'extensibilité  de  la  peau ,  m'auraient  présenté 
des  obstacles  très-iérieut ,  si  j'avais  eu  à  faire  «ubir  à  cette' 
membrane  de  grands  déplacements,  et  si  la  perte  de  subs- 
tance eût  été  iSeJâtivemént  très-considérable.  Dans  le  cas 
dont  j'e  vaift  parlef,  la  perte  de  substajice  existant  sur  la 
ligné  médiane ,  et  l'état  de  la.  peau  ne  me  permettant  pas 
de  trouver  dans  une  seule  joue  un  lambeau- d'uhe  étendue 
suffisante ,  j'ai  dû  emprunter  à  chaque  joue  un  lambeau 
semblable,  et  j'ai  établi  ainsi  une  symétrie  parfaite  entre 
les  deux  côtés  du  visage  ,  ce  qui,  en  somme  ,  devait  don- 
ner. 0t'a  donné/,  en  enet,  un  résultat  plus  satisfaisant  que 
celui  que  j'aurais  pu  obtenir  avec  un  seul  lambeau. 


Observatloo  11% 

nicère  cancroïde  du  riez  ;  ablation  avec  nnétrumenl  Iran- 
chaixt;  rhinoplàsiie  au  moyen  d'un  lambeau  emprunté 
à  chaque  joue  (i). 

Au  mois  de  novembre  1854,  est  entrée  à  l'Hôtel-Dieu 
de  Nantes,  salle  8,  la  femme  Martin,  journalière,  âgée  de 
60  àiis. 


(1)  La  deuxième  otmervation  et  la  qualriàme  ont  été  rédigées 
d'aràès  des  notes  recaeiUiesf  chaque  jouiry  au  lit  des  malades,  par 
M.  Noblet,  élève  du  service. 


154  JOUÙIAL  M  MtoBCBIB. 

Celle  femme  nous  raconte  que  le  début  de  sa  matadre 
remonte  à  sii  ans.  Ce  n'était  alors  qu*an  petit  bouton  ver*- 
ruqueux  ;  mais  ce  bouton  ne  tarda  pas  à  grossir ,  et ,  plus 
tard,  il  s'ulcéra.  Un  médecin  fut  consulté  et  se  borna  à  teire 
de  lojn  en  loin ,  quelques  cautérisations  avec  le  nitrfite 
d'argent.  Pendant  ee  traitement,  l'ulcère  s'étendit  et  devint 
douloureux  ;ufï  suintement  séro-purulent  formait,  a  sa  sur- 
face, en  se-concrélant ,  une  croûte  noirâtre,  que  la  malade 
faisait  tomber  de  temps  en  temps,  ndais  qui  se  reproduisait 
immédiatement.         _     .  _      . 

Malgré  l'insuffisance  des  cautérisations  avec  le  nitrate 
d'argent ,  la  malade  resta  einq  ans  sans  consulter  d'autre 
médecin.  A  cette  époque,  elle  s'adressa  au  docteur  Mar- 
chand ,  qui  conseilla  des  applications  d'onguent  napoli* 
tain.  Sous  l'influence  de  ce  topique,  I  ulcère  se  modifia  et 
se  cicatrisa;  mais  cette  guèrison  ne  fut  que  de. très-courte 
durée,  efle  mal  reparut  bientôt  plusr  grave  que  jamais. 

La  femme  Martin  affirme  n^avoir  Jamais  eu  de  maladie 
syphilitique;  après  l'avoir  interrogée  à  plusieurs  reprises 
dans'  ce  but,  nous  sommes  resté  convaincu  qu'elle  n'aivàit 
janàais  présenté  de  symptômes  qu'on  pût  considérer  comme 
des  accidents  secondaires  ou  tertiaires  de  la  syphilis.  L'ul- 
cération du  nez  offrait,  d'ailleurs,  au  moment  Où  j'ai  pu 
l'observer,  les  caractères  les  plus  tranchés  du  caiicroïde 
de  la. peau. 

Ulcération  végétante  faisant  saillie  au-dessus  du  niveau 
de  la  peau  ,  assez  exactement  arrondie ,  d'un  diamètre  de 
trois  centimètres  et  demi  ;  ayant  laissé  iatactes  les^ailes  du 
nez  et  la  sous-cloison ,  mais  .ayant  détruit  toute  la  peau 
du  lobe  moyen;  en  haut,  elle  recouvrait  le  tiers  des  os 
propres  du  nez,  et  sur  les  côtés,  elle  venait  se  terminer 
dans  le  sillon  nasorgénfen.  • 

La  sur&ce  d&  cet  Ujcère  ,  noirâtre  et  recouverte  d'une 
croûte  peu  épaisse  et  fepdillée,  était  le>  sié^.  de  fréquen- 
tes hémorrhagies  et  donnait  lieu  habituellement  à  un  écou- 
lement de  pus  -sanieuxi  La  malade  y  ressentait  des  dou- 
leurs lancinantes.  -  / 

Le  doigt,  introduit  dans  les  narines,  permettait  de  cons»- 


JOUIRAI.  PB  NÉDBCINB. 


155 


talerrintégrité  de  la  membrane  muqueuse;  les  cartilages 
ne  paraissaient  pas  déformés  et  on  pouvait  espérer  qu'ils 
n'avaient  pas  été  atteints  par  la  maladie. 

Pas  de  ganglions  engorgés;  cette  observation ,  comme 
celle  qui  précède  et  comme  celle  qui  suit ,  vient  donc  con- 
tirmer  les  idées  exprimées, à  cesujet,  par  M. i»ebert,  dans 
les  Mémoires  de  la  Société  dé  Chirurgie.  {Du  cancer  et  du 
cahcroïde  de  la  peau,  t.  II ,  p.  568.) 

L'étendue  du  mal  né  permettait  pas  de  songer  à  la  cau- 
térisation avec  les  préparations  arsenicales  ,  et,  d'ailleurs , 
quer  que  fût  le  caustique  dont  on  aurait  foit  choix,  on  ne 
pouvait  espérer  la  formation  d'une  cicatrice  sur  toute 
cette  surface  ;  enfin,  on  se  serait  exposé  ,  par  l'emploi  des 
caustiques,  à  perforer  largement  le  nez. 

Je  songeai  donc  de  suite  à  l'ablation  du  mal  avec  l'ins- 
trument tranchant  et  à  la  reconstit4ition  dé  l'organe  au 
nooyen  de  Tautoplastie,  et  c'est  aux  joues  que  je  me  déci- 
dai à  emprunter  les  lambeaux. 

L'opération  fut  pratiquée  le  là  novembre. 


Deux  incisions,  parlant  des  côtés  de  la  racine  du  nez  et 
séparées  ii  leur  point  de  départ  par  un  espace  d'un  demi- 
ccntimèire  environ,  furent  abaissées  dans  la  direction  du 
sillon  naso-génien  ,  jusqu'à  la  hauteur^  des  commissures 
labiales.  Une  incision  transversale  ,  rsola'nt  entièrement  les 
ailes  du  nez  et  la  sous-cloison  des  parties  malades ,  vint 


rejoindrai  à  droite  et  à  gauche ,  les  deux  premières  iaci- 
sious  ;  en  haut ,  sur  ie  dos  du  nez,  une  petite  incision  ho- 
rizontale rejoignit  également  les  deilx  premières  «  de  sorte 
(|tte  l'ulcère  se  trouva  circonscrit  àp  toutes  parts.  L'abla- 
tion de  cette  surface  fougueuse  fut  assez  longue  et  diffi* 
cile,  les  tissas  n'offrant  aucune  résistance  à  l^iction  des 
pinces  :  il  fitllut  gratter  ,  et ,  pour  ainsi  dire  «  ruginer  les 
cartilages  qui  étaient  entièrement  sains. 

J'achevai  ensuite  de  tailler  mes  lambeaux,  par  une  in- 
cision pratiquée  de  cliaque  côté,  à  partir  d'un  centimètre 
environ  au*de$saus  du  bord  inférieur -de  l'orbite  jusqu'à 
rextrcmilé  inférieure  de  la  première  inc^ion  ,  de  manière 
à  terminer  mes  lambeaux  par  un  angle  aigu  et  à  donner  à 
chacun  d'eux  une  largeur  égale  à  la  Qioitié  de  la  perte  de 
substance. 

Les  lambeaux  furent  disséqués  jusqu'à. leur  base,  apjrès 
quoi  je  réunis  ,  au  moyen  de  la  suture  ^tortillée ,  les 
plaies  des  joues,  ce  qui  contribua  à  faire  cheminer  les  lam- 
beaux à  la  rencontre  l'un  de  l'autre. 

Avant  de  les  réunir,  j'abattis  les  angles  de  la  portion  de 
peau  que  j'avais  laissée  sur  le  dos  du  nez  :  de  sorte  que  sur 
la  ligne  médiane  la  plaie  représenta  un  Y  allongé. 

La  réunion  des  lambeaux  entre  eux  fut  assez  facile,  mais 
j'éprouvai  plus  de  difficulté  à  les  adapter  au  bord  supérieur 
des  ailes  du  nez.  Par  leurs  extrémités,  dont  j'excisai  une 
petite  portion,  ils  conslituèrent  le  lobe  moyen;  Pour  flxer 
les  lambeaux,  je  me  servis  de  la  suture  entortillée,  au  iiK>yen 
d'épingles  très -fines. 

Je  dois  noter  ,  en  passant ,  que  les  tissus  étaient  moins 
extensibles  à  gauche  qu'à  droite  ,  ce.  qui  fit  éprouver  au 
lambeau  gauche  une  assez  grande  tension.. 

Le  lendemain  de  l'opération  (14  novembre),  gonfle- 
ment des  lambeaux  et  des  paupières  ii^fiàrieui^s^.  L'extré- 
mité inférieure  du  lambeau  gauche  est  violacée  et  menace 
de  se  gangrener. 

Deux  sangsues  sont  appliquées  en  avant  de  chaque 
oreille.  V  .. 

Dans  la  journée ,  j'enlève  plusieurs  fils  qui  comprimaient 


trqp  fqrternent  les  tissus  ^  mais  je  laissai  les  éipingle^  en 
plabe.^  '  , 

La  15  ,  état  sàtisfaiss^nt  ;  ablation  d'une  épiogle  $ur  la 
ligne  médrane. 

Le  16,  ablation  de  plusieurs  épingles  ;  lesillsçout  p^r- 
Jout  remplacés  par  d'autres  Als  moins  serrés. 

.  Le  17,  les  dernières  épingles  sont  enl,evée$  ,  et  les  par- 
ties sont  souteoues  avec  des  bandelettes  de  sparadrap. 

Le  20  ,  le  gonflement  a  bjendiminué ,  mais  TextrémUé 
inférieure  uu  lambeau  gauche,  ga^igr^née  ,  s'est  détachée 
et  a  laissé  un  vide  dans  le  point  coiTespondant ,  vide  qu'on 
faisait  disparaître  en  relevant  le  sommet  et' l'^iie  du  nez.  Du. 
côté  droit /la  réunion  paraît  solide. 

Je  fixai,  avec  du  collodion,  deux  petites  bandelette^  de 
linge  dans  les  narines  ;  ces  bandelettes  furent  ramenées  sur 
le  nez,  où  elles  ç'enlreçroisèrent ,  et  furent  fixées^  avec 
du  collodion  ,  à  chaque  paupière  inférieure.  Une  troisième 
bandelette ,  fixée  à  la  sous-cloison  d'une  part,  et  d'autre 
part  entre  les  deux  sourcils  ,  contribua  aussi  à  maintenir 
le  néz  relevé.  La  période  substance,  produite  par  la  gan- 
grène ,  était  désprnjais  insignifiante  ^  la  cica^trisation  mar^ 
cha  régulièrement,  grâce  à  la  préc^iution  q,M.e  j'eus  de 
réappliquer  de  nouvelles  bandelettes  quand  lés  premières 
parurent  se  relâcher; 

Je  dois  ajouter  que  lé  lambeau  drpit  glissa  peu  à  peu  au- 
delà  de  la  li^ne  médiane ,  de  manière  à  combler  en  partie 
le  vide,  qui  avait  été.  produit  par  I^  gangrène  cje  Tejitrjéniité 
du  lambeâU  gauche. 

Le  27 ,  la  guérison  était  complète ,  mais  je  ref^ps  la 
malade  à  l'Hôtel-Diéu  jusqu'au  J6  décembre. 

Depuis  ce  temps  ,  j'ai  eu  occaspn  dç  la  revojp  plusieurs 
fois;. le  liez,  autrefois  aqùilin  ,  est  légèrement  retroijssé  , 
l'aile  gauche  un  peu  plus  élevée  que  l'afle  droite  ;  njais , 
à  part.ces  petites  irrégulpités  qui  tendent,  du  reste,  à 
s'effacer  de  plus  en  plus ,  on  ne  peut  guère  se  douter  au- 
jourd'hui de  l'étendue  et  de  la  gravité  dé  la  maladie  pour 
lâqîielle  j'ai  pratiqué  cette  opération. 

Disons  enfin,  pour  nerien  omettre  ,  que  de  petites  ex- 


iS8^  JOVBIUt  DB  MftOBCIRB. 

coriations  se  sont  manifestées  à  diverses  reprises  siir  les 
cicatrices,  mai»qa*il  a  suffi,  pour  les  faire  disparaître,  de 
quelques  lotions  avec  Teau  de  Pagliari. 

L'eau  hémostatique  de  Pagliari  avait  déjà  été  employée 
plusieurs  fois  chez  cette  malade  depuis  lemoipent  de  l'o- 
pération ,  dans  le  but  de  réprimer  les  bourgeons  charnus  * 
et.  de  hâter  la  cicatrisation  ,  et  son  efficacité  m'a  paru  de 
la  dernière  évidence.  J'avais  été  conduit  à  avoir  recours  à 
ce  moyen  par  un  fait  qui  s'était  passé  ,  quelque  temps  au- 
paravant ,  dans  mon  service.  '  •     . 

Une  femme  de  soixante-dix  ans  portait,  depuis  quinze 
ans,  sur  le  front ,  un  large  ulcère  saillant ,  dont  les  bords 
renversés  formaient  un  chamfNgnon.  Cet  ulcère  occupait 
tout  le  côté  gauche  du  front  et  avait  même  détruit  une 
portion  de  peau  couverte  de  cheveux.  Il  était  le  srége  de 
douleurs  extrêmement  vives  et  donnait  lieu  à  des  pertes 
de  sang  très-abondantes,  qui  se  renouvelaient  souvent  plu- 
sieurs (ois  par  jour. 

peux  aiilres  ulcères,  moins  étendus  et  déprimés  ,  exis- 
taient de  l'autre  c6té  du: front. 

Depuis  quinze  ans,  bien  des  traitements  internes  avaient 
été  suivis ,  bien  des  topiques  avaient  été  appliqués  sur  ces 
ulcères,  sans  aucun  résultat  favorable. 

On  avait  eu  recours  à  divers  caustiques  ,  et  moi-même, 
en  dernier  lieu  ,  j^avais  essayé  la  pâte  sulfo-safranée  ;  mais, 
à  chaque  application  ,  les  douleurs  devenaient  intoléra- 
bles, et,  à  la  chute  des  croûtes,  les  hémorrbagies  reparais- 
saient. Pour  combattre  ce  dernier  accident,  }e  prescrivis 
des  lotions  avec  de  reaù  de  Pagliariv,  répétées  deux  fois 
par  jour. 

Sous  riiiftuence  de  ce  moyen  ,  Taspèçt  des  ulcères  se 
modifia  promptement,  le  champignon  s'affaissa,  les  hé- 
mprrhagies  cessèrent  et  les  douleurs  liisparurent  complè- 
tement. Enfin  ,  une  cicatrice  de  bonne  apparence  recou- 
vrit peu  à  peu  les  surfaces  malades.  Cette  femme  quitta 
l'Hôpital  après  quinze  jours  de  l'usage  de  ce  oioyen  qui , 
seul  N,  depuis  quinze  ans ,  avait  donné  un  résultat  favo- 
rable. 


Cette  guérison  -s^ra-t^elle  durable  7  11  est  permis  de 
conserver  quelques  doutes  à  cet  égard.  Quoi  qu'il  en  soit , 
ce  foit  m'a . vivement  fca^ppé ,  et,  depuis  eette  époque  .,  j'ai 
employé  UR. grand  nombre  de  fois,  avec  succès,  Teaade 
Pagliari,  dans  le  .traitement  .d'ulcères  de  mauvaise  na^ 
ture. 


Observât  ion  111% 

Vaste  cancroï'de  àe  la  joue  ;  guérison  par  la  génoplastie. 

Chéneau  (Pie^rre)  ,  âgé  de  63  anss».  demeurant  à  Froid* 
fond  (Vendée).,  est  entré  à  rHôtel-Dieu de  Nantes  te  5  mai 
1855  ,  pour  y  être  traité. d'un  large  ulcère  canoroïde  ayant 
détruit  une  grande  partie  de  la  joue  dreite.  Cette  affeç-r 
tion  avait  débuté ,  il  y.  a  plqs  de  dix  ans  ,  çtt  avait  été  atta-^ 
quée,  avec  un  succès  tempprairf,  une  première  fois  par  les 
caustiques^  une  secondée  fois  par  l'instrument  tfancliaat» 

C'est  en  1846  que  Chéneau,  se  préoccupant  d'un  bou- 
ton qu'il  portait  sur  la  partie  interne  et  ^supérieure  dé  là 
joue,  et  qui,  depuis  quelque  temps,  s  était  ulcéré ,  alla 
tisouver  d^^^çmpiriquea  qui  appliquèrent ,  sur  le  mal ,  un 
caustique  <^nt  l'action  axtrènckement  douiourease  dusa  plus 
de  yiogt*quatre  h,eures.  La  guérison  fut  obtenue,  mais  il 
resta  une  cicatrice  plissée  et.adbérènte,  s  étendant  jusque 
sur  le  côté  (iji  nez.  Peu  de  temps  aprèi»,  l'ulcération  repa- 
rut à  la  partie  externe  de  la  cicatrice.  Cbéneau ,  effrayé 
des  douleurs  qu'il  avait  soufferte&  une  première  fois ,  at- 
tendit longtemps,  et  ce  n'est  qu'en  1^48  ,  deux  ans  après 
lapplicatipi^ du  caustique ,  qu'il  se  décida  à  venir  me  con- 
sulter.  Le  mal  alors  avait  l'étendue  d'une.,  pièce  de  deux 
francs  ;  il  n^e  fut  feicile  de  l'enlever  au. moyen  de  dûux  in- 
cisions semi-lunaires  «  qui  permirent  de  rappirocher .  lee 
bords  de  la,  division  et  d'pbtenir^  par  la  suture  entortillfie, 
une.réuniou  immédiate^  la  cicatrice  fut  linéaire  et  dirigée 
de  haut  en  bas.,       \        .    ^  -^    .  ^ 

13 


160  JÙVmkL  BB  MÉDSCINE. 

f^a  guérison  parut  définitive ,  et ,  pendant  plusieurs  An- 
nées, rien  n'annonçait  une  seconde  récidive.  Cependant,  il 
y  a  trois  ans  environ,  le  mal  reparut  avec  des  caractères 
qui  ne  permettaient  pas  de  se  foire  illusion.  Gfaéneau  a , 
sans  aucun  doute,  eu  recours  à  des  remèdes  nombreux , 
dans  l'espérance  de^se  soustraire  k  une  nouvelle  opération  ; 
mais  il  a  refusé  de  faire  des  aveux  à  ce  sujet  ;  quot^  qu'il 
en  soit,  lorsqu'il  est  revenu  me  voir  afin  d*obtenir,  comme 
pensionnaire,  une  place  à  FHôtel-Dieu  ^  l'ulcère  avait  ac- 
quis <fes  proportions  considérables.  Il  s'étendait  en  haut ,  à 
la  paupière  inférieure  qui  était,  elle-même,  atteinte  en 
partie  :  en  bas  ,  la  moitié  de  la  lèvre  supérieure  était  dé- 
truite; en  dedans,  le  mal  s'était  arrêté  ^  l'aile  du  nez, 
mais  au-dessus  de  ce  point,  il  s'avan^it  un  peu  sur  les 
côtés  du  nez  ;  là,  on  apercevait  encore,  au-delà  des  limites 
du  mal ,  une  partie  de  la  cicatrice  plissée ,  produite  par 
Tapplication  du  caustique  en  184f>  ;  on  voyaii  également, 
à  une  petite  distance  de  la  commissure  des  lèvres,  la  por- 
tion inférieure  de  la  cicatrice  résultant  de  l'opération  pra- 
tiquée par  moi  en  1 848.  En  dehors  ,  Tulcération  dépassait 
le  niveau  d'une  ligne  verticale  abaissée  de  Fangle  externe 
des  paupières.  s    ' 

Cet  ulcère  ,  dont  les  bords  étaient  saitiants^  comme  fran- 
gés en  certains  points ,  donnait  lieu  à  un  écoulement  de 
sang  qui  se  produisait  au  moindre  contact  et  qui. souvent 
avait  lieu  spontanément.  Les  tissus  profonds  étaient  indu- 
rés au-delà  de  la  solution  de  continuité  de  la  peau  ;  c'est 
-  ainsi  qu'on  sentait  un  bourrelet  très-dûr  -adhérent  au  bord 
de  l'orbite  et  s'avançant  sous  la  paupière.  Le  mal  parais- 
sait, du  reste,  ne  pas  avoir  envahi  le  tissu  osseux  ,  mais  il 
était  évident  que  toutes  le$  parties  molles  avaient  été  dé- 
truites ou  étaient  infiltrées  de  matière  épidermique. 

Pas  de  ganglions  lymphatiques  engorgés. 

Enlever  toutes  les  parties  malades  avec  l'instrun^ent 
tranchant ,  réparer  la  perte  de  substance  avec  un  lambeau 
autoplastique,  emprunté  à  la  partie  inférieure  de  la  joué , 
tel  est  le  seul  mayen  qui  me  parut  applicable  dan^'  un  cas 
aussi  grave.  -  ' 


JOTONAL  BÈ  StiraCINB* 

L'opération  fut  pratiquée  le  9  irïai. 


161 


Toutes  les  parties  malades  furent  circonscrHes  par  une 
inoîsîon  profonde  ,  excepté  ,  toutefois, en  haut;  oïli  je  me 
proposais  de  fiiire,  dans^  un  autre  moment^  la  section  de  la 
paupière  inférieure  avec  dçs  ciseaux. 

La  dËssection  fut  assez  difficile  ,  à  cause  de  la  friabilité 
des  tissus,  c^  qui  me  fbrça  à  reporter  plusieurs  fois  Tins- 
trûment  sur  quelqaes  points ,  afin  d'enlever  tout  le  mal. 
'  L'écoulement  de  sang  fiit  abondant  et  un  grand  nom^ 
bre  d'artères  furent  liées;,  tout  le  système  vasculaire  de 
cette  région  paraissait  développé  d'une  manière  insolite. 

Le  bourrelet  adhérent  au  bord  de  Forbite  ,  et  dont  j-ai 
parlé  plus  haut ,- fut  détaché  de  bas  en  haut^  sans  avoir  été 
préalablement  séparé  de  la  paupière;  celle-ci  fut  ensuite 
découpée  avec  des  ciseaux,  immédiatement  au-dessus  des 
limites^du  mal. 

La  perte  de  substance  paraissait  alors  énèrme  pui^ue  , 
d'un  côté,  elle  communiquait  largement  avec  l-orbite,  que, 
d'an  autrecôté,  elle  comprenait  la  moitié  de  là  lèVre  su-  . 
périeure  ;  et  que,  tranversalement,  elle  avait  plus  d'étendue 
encore  que^de  baât  en  bas.      / 

Malgré  les  deux  opérations  précédentes,  qui  avaient  né- 
cessairement iHnoinuéCexiensibilité  de  la  peau  du  visage, 
je  pus  tailler,  en -dessous  et  en  dehors  de  la  perte  de 
substance,  un  ^rge  lambeau  dont  la  forme  se  rapportait, 
sinon  géométriquement,  du  moins  assez  exactement ,  à  la 
forme  de  l'espace  qu'il  devait  recouvrir. 


161  JODUIàL  M 

Pour  cela ,  ufie  inckbn  presque  veriicale,  ptri^nt  du 
bord  inférieur  de  la  plai)e,  fut  abaissée  jusqu'au-dessous 
du  bord  de  la  mâchoire  ,  en  passant  à  un  demî^^centimètre 
de  la  commissure  des  lèvres. 

De  la  partie  inférieure  de  la  région  malaire,  une  seconde 
incision  vint ,  en  formant  un  démi-cercle,  rejoindre  la 
première  sous  le  bord  du  maxillaire. 

Le  pédicule  du  lambeau  était  donc  situé  en  tiaut  «t  cor- 
respondait, par  un  des  cÀtés  de  sa  racine ,  au  côté  externe 
dé  la  perte  de  substance.  Ce  pédicule  avait  deux  centimètres 
au  moins  de  largeuh 

Le  lambeau  fut  détaché  de  bas  en  haut ,  et,  par  une 
dissection  portée  en  avant  et  en  dehors,  sôus  les  bords  de 
la  plaie,  je  véusais  à  faire  gUsse»  les  partiea  et  àl  les  téunir 
par  la  suture  entortillée,  après  lavoir  fait  soidevei;  le  buiH 
beao.  Ce  premier  résuléat  était  imnaense ,  car  il  fiieilîtaîi 
singulièrement  le  reste  de  l'opératioa.  iCt,  en;  effel,  le^lfs»- 
beau  fut  très-aisément  amener  sur  la  perte  de  subetance, 
eu  parcourant  un  angle  d'envioon  90degiréfi.  Pluaieucs  fils 
des  ligatures  furent  dirigés  vers  le'poînt  le  plus-  voisin  des 
bords  de  la  plaie  ;  mais  la  plupart  de  ces  fils,  étant  fixés 
vers  le  centre  même  de  la  plaie,  furent  cûnduît&  dans  b 
cavité  buocale  par.  une  ouverture  que  je  pratiquai ,  à  cet 
effet,  à  travers  la  muqoeuse  de  la  lèvre.  Die  eettenànière, 
ils  ne  pouvaient  plus  nuire  à  la  réunion  du  lambeau  avec 
les  téguments  V4^în$. 

Pour  fix^  le  lambeau,  j'eus  t^ecoûrs  à  la  siiUire  entor- 
tillée ,  excepté  vers  là  paupière  inférieure ,  où  j'appbquai 
quatre  points  «le  suture  simple.  - 

Quand  l'opération  fat  terminée,  on  vit  que  le  lambeau 
n'était  tiraillée  dans  aucun  sens.  La  partie  du  visage  qui 
était  soumise  et  la  plus  forte  traction  était  la  lèvre  supé- 
rieure ,  de  sorte  que  la  commissure  labiale  était  eiatfalnée 
en  haut  et  en  dehors,  disposition  qui  n'était  (fiie  l'exagéra- 
tion de  ce  qui  existait  précédemment,  car,  par  suite  des 
deux  premières  opérations,  la  lèvre  supérieure  avieiit  siAi  un 
mouvement  ascensionnel,  et  le  nez  s'était  noUd>le8ieot  in- 
cliné à  droite. 

Une  simple  compresse  sèche ,  attacl^  au  bonnet  du 


malade,  recoiivrit  le  côté  droit  du  visagie  pour  |[>rptéger 
les  parties.. 

Le  soir.de  l'opération,  il  y  eut  de  la  fièvre  qui  continua 
pendant  trois  jours ,  mais,  sans  avoir  un  caractère  inquié* 
tant. 

Le  10  mai ,  lendematti  de  Topération  ^  gonflement  du 
lambeau  etdèspiirties  voisines  ;  le  lambeau  a  une  colora^ 
tien  un  peu  foncée  ;  huit  sangsues  en  avant  de  l'oreille. 

Le  il  i  le  gonflement  â  augmenté,  mais  le  lambeau  a 
une  eouteur  moins  foncée  ;  l'œil  est  fermé  par  suite  de  là 
tnméfiiction  des  paupières  ;  la  conjonctive  secrète  une  no- 
table quantité  de  rouco-pus; 

En  presfMint  sur  lé  lambeau^  je  fiiis sortir  du  pus  ,  qui 
s'échappe  surtout  par  en  baut^  entré  les  points.de  su* 
ture. 

J'enfèyé  tous  lef  fils  fixés  aux  épingles  et  je  les  remplace 
par-  des  fils  moins  serrés. 

Lé  i2i  je  réussis ,  par  uée  tradlion  un  peu  forte  ,  à  ar- 
racher une  gt-ande  partie  dé  ligatures ,  soit  du  c6té.  de .  la 
peau  V  soit  dtt  côté  de  la  bouche,  ou  j'avais  amené  la  plu- 
part des  fife  à  travers  une  ouverture  pratiquée  à  cet  effet 
dans  le  coMe-sac  gengivo»labial  ^  ainsi  <}ue  je  Tai  exposé 
plus  haut.  :^ 

Le  13;  l'écoulemekU  da  pus  esl  moins  abondant  ^  les 
dernières  ligatures  sont  arrachées  saios  qu'il  sécoulé  de 
sahg.  Le  lambeau  est  adhérent  dans  la  plus  grande  partie 
dé  sa  circonférence  I  j'enlève  tous  les. points  ^le  suture  et 
toutes  les  épingles  qui  Je  maintenaient  ;  mais,  pour  ne 
pas  rabândonner  à  lut-mèlne ,  j'ai  recours  à  trois  petites 
bandelettes  de  linge  que  je  fixe  avec  du  collddion ,  par 
une  de  leurs  extrémités,  au  lambeau  lui-inèjme ,  et  par  leur 
autre  extrémité  à  ia  partie  externe  de  l'orbite ,  à  la  partie 
supérieurs  du  nez  et  enfin  à  la  lèvre  supérieure. 

Les  épingles  de  la  plaie  inférieure  ike  forent  enlevées 
que  le  i6  ;  la  réunion,  était  complète.  - 

/Chaque  jourv  iq>rës  avoir  enlevé  tes  croûtes  qui  se  for- 
matant autour  du  lanifaean,  dans  les  points  où  la  réunion 
n'était  pas  adfaevéé,  je  bisais  des  lotions  avec  Teau  de  Pa- 
gliari.     ' 


164  JOOUI^K  DB  HÉIlBCaNS. 

Le  17  et  le  18,  pour  faciliter  l'adhérence  de  la  fiice 
profonde  du  lambeau  ,  je  le  soumis  à  une  légère  compres- 
sion ,  au  moyen  d^une  boulette  de  charpie  et  d'une  ban- 
delette de  sparadrap  ;  ce  moyen  eut  un  plein  succès. 

Les  jours  suivants ,  le  gonflement  disparut  complète- 
ment, la  suppuration  devint  pres(pie  nulle,  les-^tîssus  re- 
prirent leur  aspect  normal  et  la  guérisonput  être  considé- 
rée comme  assurée.  La  paupière  inférieure,  bien  que  ten- 
due, conserve  une  longueur  suffisante  et  n'a  pas  de  ten- 
dance à  se  renverser  en  formant  un  ectropion.  Grâce  à 
l'extensibilité  du  lambeau  ,  l'angle  de  la  bouche  a  pu 
s'abaisser  et  se  rapprocher  de  la  ligne  médiane ,  de  sorte 
que,  sous  ce  rapport,  les  traits  sont  plus  réguliers  qu'avant 
l'opération;  le  nez,  lui-même,  est  moins  incliné  à  droite 
qu'il  ne  Tétait  autrefois.  ^     > 

Cet  abaissement  de  la  commissure  la.Male ,  fevorisé  par 
la  contraction  musculaire ,  l'a  été  également  par  la  rétrac- 
tion de  la  cicatrice  inférieure  de  la  joue.  Cette  cicatrice , 
qui  correspond  au  point  où  a  été  emprunté  le  lambeau , 
est  linéaire  et  présente  une  longueur  bien  moindre  qu'on 
aurait  pu  le  supposer  :  elle  n'a  que  quatre  centimètrîBs  et 
demi ,  tandis  que  la  plaie  avait  primitivement  six  centimè- 
tres au  moins. 

Chéneau  a  quitté  l'Hêtel-Dieu  le  23  mai ,  c'est-à  dire  le 
quatorzième  jour  après  l'opération. 

Il  est  peut-être  difficile  de  se  défendre  de  la  craiiHe*  de 
voir  ^emal  reparaître  encore  chez  cet  homme.  Cependant, 
on  (ioit  espérer  que  la  transplantation  du  lambeau  autoplas- 
tique va  modifier  d'une  manière  avantageuse  la  vitalité  des 
tissus  et  prévenir  une  troisième  récidive. 

Si  cette  espérance  était  déçue ,  si ,  vers  la  circonférence 
du  lambeau ,  quelques  tuBercules  venaient  à  surgir  et  à 
s'ulcérer  et  que  les  lotions  d'eau  de 4^agltari  fussent  insuffi- 
santes, il  ne  faudrait  pas  en  conclure  que  l'art  est  im- 
puissant et  regarder  une  guérisoil  définitive  comme  impos- 
sible. L'absence  de  ganglions  lymphatiques  engorgés , 
l'absence  <le  toute  autre  manifestation  plus  ou  moins  éloi- 
gnée d'affection  cancéreuse ,  démontre  d'une  manière  évi- 
dente que  le  mal  est  tout  local  et  qu'il  sera  toujours  possi- 


JOUiUlAli    DB  MÉDECINS.  1^5 

ble  de  le  détruire,  comme  toutes  les  affections  épitfaéliales 
ou  épîdermiques  «  si  on  réussit  à  enlever  tous  les  tissus 
circonvoisins  qui  ont  éprouvé  déjà  un  commencement  d  al- 
iération. 

Pour  obtenir  un  succès  complet  et  radical ,  il  ne  s'agit 
donc  que  de  se  tenir  en  garde  et  d  avoir  de  la  persévé* 
rance. 

On  a  cité  ,  à  ce  sujet,  bien  des  faits  qui  peuvent  servir 
d*eiLeinple  et  d'encouragement,  et,  parmi  ceux  qu^  j.ai 
observés  moi-même ,  il  en  est  un  -qui  me  paraît  digne 
d*être  rapporté  ici. 

C'était  en  1839 ,  au  début  xle  ma  carrière  médicale  :  On 
me  présenta  un  homme  de  Saint-Étienne-du-Bois  (Ven- 
dée) ,  ieune  encore  ,  mais  ayant  déjà  subi  sept  opérations 
pour  un  cancer  de  la  lèvre  inférieure.  Trois  fois,  il  avait  été 
opéréà  THôteUDieu  de  Nantes,  au  moyen  de  Tinsirument 
tranebant,  par  Al.  Cocl^ard,  oncle  ,  alors  chirurgien  en 
chef  de  cet  hôpital  ;  quatre  fois,  il  s'était  soumis  à  Tappli- 
cation  des  caustiques , .  eu  se  mettant  entre  les  mains  de 
femmes  de  campagne  qui ,  grâce  à  une  tolérance  regret- 
table de  l'autorité,  exploitent  de  ia  manière  la  plus  déplo- 
rable et  souvent,  la  plus  désastreuse  i  la  crédulité  des  niai- 
heureux  qui  ont  ou  qui  croient  avoir  des  maladies  can- 
céreuses, , 

Chez  le  malade  dont  je  parle  en  ce  moment^  le  mal  avait 
donc  récidivé  sept  fois,  et  cependant  ce  malheureux  n'était 
pas  découragé  et  était  encore  disposé  à  supporter  une  hui- 
tième opération. 

La-lèvre  inférieure  et  le  menton  étaient  en  partie  dé- 
truits ,  et,  à  leur  place,  existait^  une  large  échancrure  ,  au 
fond  et  aux  bords  ulcérés.,  par  où  la  salive  s  écoulait  sans 
cesse  ;  mais  il  n'y  avait  pas  de  ganglious  lymphatiques  en- 
gorgés.      .  . 

Deux  incisions,  partant  à  un  demi-centimètre  en  dedans 
de  chaque  commissure  labiale,  vinrent  se  réunir  sur  la 
ligne  médiane,  vers  le  milieu  dq  la  région  sus-hyodieane, 
en  comprenant  enire  elles ,  non-seulement  les  parties  ma- 
lades ,  mais  encore  une  certaine  étendue  de  parties  qui  pa- 
raissaient complètement  intactes. 


166  JWMâL  DB  HÉMCBIB. 

En  détachant  les  joues  de  la  mftchoire  infi§rieure  ,  jus- 
qu'au point  on  passe  l'artère  feciale  ,  je  pus  ramener  les 
bords  de  la  plaie  sur  la  ligne  médiane  et  les  réunir  par  la 
suture  entortillée.  J'obtins  une  réunion  immédiate  ,  et  la 
lèvre  inférieure ,  qui  n'avait  alors  qu'un  centimètre  de  lon- 
gueur, s'est  allongée  peu  à  peu  et  a  acquis,  au  bout  de  quel- 
ques mois,  des  dimensions  suflSsantes. 

Mai»  ce  que  je  tenais  surtout  à  établir  ici ,  c'est  que 
la  guérison  a  été  définitive,  ainsi  que  j'ai  pu  le  constater  un 
grand  nombre  de  fois. 


Érysipèle  delà  face;  gangrène  des  paupières  ;  destruction 
de  la  paupière  inférieure  ;  guérison  4  Vaide  de  la  blé- 
pharoplastie. 

La  destruction  partielle  ou  totale  des  paupières  altère  si 
profondément  la  physionomie ,  l'espression  du  visage  ,  la 
régularité  des  traits,  compromet  d'une  manières!  grave  le 
globe  de  l'œil  et  dans  sa  structure  et  dans  ses  fonctions , 
qu'il  n'est  pas  étonnant  que,  dès  hi  plus  haute  antiquité,  on 
ait  cherché  à  y  remédier. 

Cependant,  il  &ut  bien  avouer  que  les  efforts  qu'on  avait 
faits,  dans  ce  but ,  sont  restés  à  peu  près  stériles  jusqu'à 
la  création  de  la  blépharoplastre ,  opération  toute  mo- 
derne. 

Ce  fait  est  d'autant  plus  remarquable  que  l'origine  de  la 
rhinoplastie  se  perd  dans  la  nuit  des  temps ,  et  que  cette 
dernière  opération  aurait  dû  conduire  à  la  première,  puis- 
qu'elles reposent  toutes  deux  sur  les  mêmes  principes.  La 
perte  des  paupières,  entraînant  plus  de  gène  et  plus  de 
dangers  et  constituant  une  difformité  au  moins  ausi^l  cho- 
quante que  la  perte  du  nez,  on  est  porté  à  se  demander 
pourquoi  l'art  ne  s'est  pas  ingénié  plus  tôt  à  y  remédier 
d'une  manière  efficace  ? 

C'est  qu'il  y  a  chez  l'homme  un  sentiment  qui  domine 
et  la  crainte  du  danger  et  l'aiguillon,  pourtant  si  puissant, 
de  l'amour-propre ,  je  veux  parler  du  désir  dese  sous<- 


traire  au  déshonneur.  Or ,  on  sait  que  chez  les  Indiens  la 
perte  du  nez  était  un  supplice  infligé  légalement  à  certains 
criminels ,  et  que  ceux  qui  l'avaient  subi  étaient  ainsi  mar- 
qués du  sceau  de  Tinfamie. 

Ges  mots  suffisent  pour  expliquer  comment  la  rhîno- 
plastie  est  de  date  si  ancienne,  et  comment  la  blépharo* 
plastic  n*a  été  créée  que  lorsc^e  les  travaux  et  les  expé- 
riences de  nos  contemporains  eurent  généralisé  l'auto- 
piastie.         - 

Jusque-là ,  nous  n'étions  guère  plus  avancés  qu'on  ne 
rétait  du  temps  de  Celse,  qui  résume  ainsi  ce  qu*il  savait 
sur  la  restauration  des  paupières  :  si  nimium  ptUpebrœ 
deest  j  nuUa  id  resliiuere  curaiio  potest  y  si  eœigmm  >  me- 
deri  Ucet. 

le  sortirais  de  mon  sujet  ;  si  je  rappelais  'et  (e  traite- 
ment conseillé  par  Celse  pour  guérir  Vectropion  »  et  les 
autres  opérations  instituées  depuis  dans  le  même  but  ;  j'ai 
à  raconter  un  cas  de  blépharoplastie ,  c'est-à-dire  de  res- 
tauration de  toute  une  paupière,  opération  dont  les  pre- 
lîii^s  essais  datent ,  en  France  du  moins ,  de  vingt  ans 
seulement. 

Disons,  cependant,  que  des  opérations  de  blépharoplas- 
tie, peu  connues  dans  notre  pays,  avaient  été  faites  aupa- 
ravant,  avec  des  succès  variables,  par  Grœfe,  Dzondi , 
Fricke  et  Jungken.  C'est  le  procédé  de  Fricke,  modifié  par 
Van  Ammon,  qui  est  suivi  généralement  aujourd'hui.  Par 
ce  procédé,  on  évite  ta  torsion^  du  pédicule  du  lambeau,  et, 
par  conséquent,  la  section  ultérieure  de  ce  pédicule. 

Malgré  ce  perfectionnement  important,  Tautopiastie  pul- 
pébrale  est  loin  de  constituer  une  ^opération  uniforme  et 
soumise  à  deà  règles,  fixes ,  Unn  de  là;  cest  peul-être ,  de 
toutes  ks  opérations  du  même  genre  j  la  moins  semblable 
à  eUe-méme  dans  tes  dixierses  drconstantes  qui  la  nécessi- 
tentj  celle  quixomporte  le  plus  de  variétés  dans  la  inanière 
iy  procéder i  Peut-être  n'afit-eUe  jamais  été  pratiquée  deux 
fois  de  la- même  façon  ?  (ftoux.  loco  citât.) 

Cette  citation^  empruntée  à  un  maître  dont  j'aime  à  in- 
voquer le  souvenir  et  l'autorité,  me  fait  espérer  qu'on  trou- 
vera quelque  intérêt  à  la  lecture  de  l'observation  suivante  , 


168  JiMllRAL  m  KÉBSCm. 

que  je  considère  connue  un  très-bel  exemple  de  blépbaro- 
plastie. 

La  nommée  Jamin  (Ëliza) ,  journalière,  Agée  de  1 9  ans  , 
me  fui  adressée,  le  25  octobre  1854  ,  par  le  docteur  Mé- 
chineau,  de  Clisson,  pour  une  lagopbtalmie  du  côté  droit  , 
portée  au  plus  haut  degré  et  donnant  un  aspect  repoussant 
à  un  visage,  d*ailleurs  régulier,  et  même' assez  agréable 
quand  on  le  regardait  de  profil  du  côté  gauche. 

Cette  jeune  fille  avait  eu ,  six  mois  auparavant ,  dan$  le 
courant  d'avril,  un  érysipèle  de  la  face,  qui  se  termina  par 
des  abcès  dans  les  paupières  et  par  la  gangrène  de  ces 
voiles  membraneux ,  et  même  d'une  partie  de  la  peau  de 
la  régioH  temporale. 

Après  la  chute  des  escarres ,  la  cicatrisation  marcha  ra- 
pidement, et,  dès  le  mois  de  juin ,  les  choses  étaient  dans 
rétat  où  il  m'a  été  donné  de  les  ol^server. 

Des  cicatrices  irrégulières  et  adhérentes  existent  en  de- 
hors de  Torbite  ,  vers  la  région  temporale.  La  paupière  su- 
périeure ,  bornée  à  peu  près  à  sa  portion  tarsienne ,  n*a 
plus quun  centimètre  à  peine  de  hauteur.  Le  nouscle  orbi- 
culaire  ayant  été  presque  entièrement  détruit ,  ce  reste  de 
paupière  ne  jouit  que  de  mouvements  extrêmement  bor- 
nés. Cependant ,  les  cils  ont  conservé  leur  régularité ,  le 
point  lacrymal,  est  intact,  et  bieo  que  très-incomplète, 
cette  paupière  n  a  rien  de  trop  choquant  etprotége  encore 
la  partie  supérieure  du  globe  de  Toeil. 

Hais  il  en  est  autrement  de  la  paupière  inférieure;  ici 
la  gangrène  a  produit  des  accidents  bien  autrement  graves. 

Le  bord  libre  de  la  paupière  nest  plus  indiqué  que  par 
des  cils  disposés  irrégulièrement  sur  un  tissu  de  cicatrice 
adhérent  à  ^  partie  antérieure  du  maxillaire  supérieur  et 
de  Tos  malaire;  la  conjonctive  rouge  ,  enflammée,  forte* 
ment  tiraillée  en  bas ,  laisse  le  globe  de  Tœil  à  découvert. 
Sous  cette  membrane  muqueuse,  on  sent  le  cartilage  tarse 
renversé  complètement  ^  de  telle  sorte  que.  son  bord  infé- 
rieur est  devenu  supérieur.  On  ne  retrouve  aucune  trace 
du  point  lacrymal,  et  des  larmes  coulent  continuelleinent 
sur  la  joue. 

L'écartement  des  deux  paupières  est  tel,  que  leur  com- 


lOUBNàt  DB  HÉBBCniB* 


169 


missure  externe,  tendue  jusqu'au-dda  des  limites  de  son 
extensibilité  naturelle  «  est  déchirée  et  ulcérée. 

La  conjonctive  oculaire  est  enflammée,  surtout  en  bas, 
ei  une  injection  radiée  et  profonde  indique  que  la  cornée 
transparente  est  menacée  aussi  d'être  envahie  par  Tin- 
flammation.  Par  suite  du  déplacement  de  la  conjonctive 
palpébrale,  le  globe  de  l'œil  n'a  que  des  mouvements  très* 
peu  étendus. 

Pour  remédier  à  cette  difformité,  il  n'y  avait  qu'un  seul 
moyen  i  faire  une  paupière  inférieure  nouvelle,  au  moyen 
d*un  lambeau.de  peau  emprunté  aux  parties  voisines. 

L'opération  fut  pratiquée  le  28  octobre ,  à  l'Hôtel-Dieu 
de  Nantes,  salie  8,  où  j'avais  fait  placer  la  malade. 


:  Une  incision  demi-circulaire ,  commençant  un  peu  au- 
dessous  de  la  commissure  externe,  et  éloignée  du- bord 
ciliaire  de  3  millimètres  environ ,  fut  pratiquée ,  pa- 
rallèlement à  ce  bord ,  sur  la  limite  du  tissu  cicatriciel  et 
de  la  peau  de  la  joue.  Par  une  dissection  rapide,  je  détachai 
les  tissus,  d'abord  des  os  auxquels  ils  adhéraient,  puis  du 
tissu  cellulaire  de  l'orbite. 

Ce  preiBièr  temps  de  l'opération  achevé,  je  saisis,  entre 
le  pouce  et  l'indicateur  de  la  main  gauche,  le  cartilage 
tarse  que  je  fis  basculer,  de  manière  à  ramener  en  bas  son 
bord  inférieur ,  qui ,  je  l'ai  déjà  dit ,  était  devenu  supérieur. 
Une  aiguille  courbe  fut  portée  au  fond  de  la  plaie  et  me 
permit  de  passer  un  fil  à  travers  le  cartilage  tarse  que  je 
pus  ainsi  foire  maintenir  par  un  aide  dans  la  position  que 


I7A  idittHAL  m  ÈÉbÉcm. 

je  lui  avais  donnée.  Mais  j*acqtiis  bientôt  la  certitude  que 
ce  moyen  était  insuffisant,  à  moins  d'une  traction  très-forte, 
et  je  crus  prudent  d*y  renoncer  avant  la  fin  de  Topératton. 

En  écartant  les  bords  de  la  plaie,  je  pus  juger  de  retendue 
du  vide  qu'il  y  avait  h  combler,  et,  par  conséquent ,  des 
dimensions  que  je  devais  donner  an  lambeau. 

Je  taillai  le  lambeau  en  faisant  sur  la  joue  une  incision 
verticale  de  quatre  centimètres  et  demi  de  longueur ,  par- 
tant de  Tangle  externe  de  l'incision  horizontale,  ou  plutôt 
se  confondant  avec  elle ,  dans  l'étendue  d'un  centimètre 
environ,  et  une  seconde  incision  verticale ,  à  trois  centi- 
mètres en  dehors  de  la  précédente  ^  qu'elle  vint  rejoindre 
en  bas  en  s'incurvant  un  peu. 

Ce  lambeau ,  avant  d'être  séparé  des  parties  sous-jacentes, 
était  donc  circonscrit  en  avant ,  par  uoe  ligne  droite  verti- 
cale dans  toute  son  étendue  ;  en  dehors ,  par  une  ligne  , 
parallèle  à  la  première  dans  les  3/5  supérieurs ,  et  courbe 
dans  les  2/5  inférieurs  :  le  point  de  jonction  de  ces  deux 
lignes  formait  un  angle  aigu.  L'incision  externe ,  commen- 
çant un  peu  plus  bas  que  l'interne ,  la  base  du  lambeau 
était  oblique  de  haut  en  bas  et  de  dedans  en  dehors.  La 
dissection  du  lambeau  fut  portée ,  en  haut ,  au-delà  de  sa 
base,  pour  faciliter  son  inclinaison  ainsi  que  l'élévation  du 
bord  de  la  paupière. 

Le  lambeau  étant  soulevé  par  un  aide ,  je  rapprochai , 
par  la  suture  entortillée ,  la  plaie  verticale  qui  se  trouvait 
dans  le  point  où  il  avait  été  pris.  Cette  suture  se  fit  sans 
tiraillement,  grâce  aux  décollements  'que  j'avais  eu  soin 
d'errer. 

En  soulevant  ensuite  le  bord  de. la  paupière,  j'entrahiai, 
dans  le  même  mouvement,  la  partie  antérieui*e  de  la  base 
du  lambeau ,  qui  exécuta,  pour  ainsi  dire  dé  lui-même,  un 
quart  de  cercle,  de  ihanière  à  venir  combler,  sans  torsion 
appréciable,  le  vide  qui  se  trouvait  formé  par  Técartement 
des  lévites  de  la  plaie  horizontale.  Le  lambeau  s'adapta  à  la 
perte  de  substance  avec  tine  telle  régularité,  les  angles 
rentrants  et  les  angles  saillants  s'ajustèrent  si  bien  ,  qu'un 
confi^re  ^  témoin  des  résultats  de  cette  opération,  la  com- 
parait à  un  ouvrage  de  marqueterie. 


Le  lambeau  (Mt  f\%é  w  place  par  seize  poiots  ^e  sutura 
eati^çQ^p^Q ,  huit  po^r  son  bord  sMpéJrieur ,  huit  pour  son 
bord  inférieur,  l^fifm  •  pour  reipédier,  lyuiant  quie  possible, 
à  r^longation  qu'avait  subie  t^  bord  palpébral,  ei  à  l'ulcéra- 
tion de  la  coqunis9Are  eUeçne  «  je  mis  les  parties  ulcérées 
à  l'état,  dei  cruent^tio^  au  a¥>yea  de  d^ux  coups  de  ciseaus^ 
puis  une  4pii)gle  à  insecte,  pasfifée  de  bas  en  haut,  me 
p«riiût  de  rapprocher  tes  paupières  par  la  suture  entor- 
tillée ei  i^  rétrécir  la  co9Wissujre  de  trois  miilio^ètres. 

Cette  petite  opération  accessoire  eut  une  action  tr^* 
faYorahl^  sur  la  position  du  cartilage  tarse. 

Des  compresses  d'eau  froide  furent  appliquées  sur  la 
joue  et  sur  l'ceil ,  pendant  les  quatre  premiers  jours  qui 
suivirent  Topération.  I^a  fièvre  fujt  modérée  ;  mais  le  gon- 
flement du  konbeau  et  des  parties  voisines  lut  assez  consi- 
dérable* Lé  troisième  jour,  le  huitiheau  étant  soulevé  par 
du  pus,  je  dpnnai  un  libre,  écoulement  à  ce  liquide  en 
enlevant  deux  points  de  suture. 

Le  quatf  ièçne  jour ,  je  retirai  les  épingles  de  la  joue  ; 
dans;  ce  point  9  la  réunion  était  parfaite;  le  même  jour, 
j*ep^vai  h  plupart  <Jes  points  de  suture ,  n'en  laissant  que 
deux  en  haut  et  deux  en  bas,  par  précaution* 

La  rémion  av^c  le  bord  pa^ébral  se  fit  trèsrbien  ;  la 
réunion  avec  la  jou^  se  fit  également ,  excepté  dans  le  point 
par  où  découlait  le  pus,  dont  k  quantité  diminuait  chaque 
jour  d*une  onanière  sensible, 

L'épipgle  de  la  commssure  externe  des  pnupièces.  fut 
retirée  le.  cinquième  jour  ;  la  réunion  s'était  fiiite  et  parais- 
sait solide*   .  ^ 

Le  huitième  jour ,  il  n*y  avait  presque  plus  de.  supputa- 
tion, sous  le  laml^eau,  mais  il  survint  un  goofiement  dou- 
loureux, de  toute  1a  région  parotidienne  et  de^  la  joue,  au 
niveau  de  la.  cicatrice.  CeÙe-ci  s*entr'ouvrit  bientôt  et 
donna  passage  à  du  pus  qui  semblait  venir  d'en  haut. 

Dans  la  crainte  que ,  pac  T.effet  de  ce  gonflement ,  le 
lambeau  ne  fiûi  entraîné  en  deboirs,  je  le  soutins  du  côté 
du  nez  au  moyen  d'une  bandelette  dé  Ijnge,  fi&^eavec  du 
cpilodiour 

Deux  autres  bandelettes ,  fij^ées,  l'une ,  près  d^  la  pointe,^ 


172  lOVUlàl.  DB  «ÉBBCINB. 

l'autre,  près  de  la  base  du  lambeau,  prirent,  en  haut, 
leur  point  d'appui  sur  le  front,  en  laissant  entre  elles  un 
intervalle  suffisant  pour  ne  pas  gfiner  Tceil. 

Quatre  sangsues  furent  appliquées  derrière  l'oreille. 
Les  accidents  se  calmèrent  les  jours  suivants,  mais  je  gar- 
dai quelque  temps  encore  la  malade  à  l'hôpital ,  et  elle 
ne  retourna  dans  sa  famille  que  le  1*'  décembre.   ' 

Alors,  son  état  était  aussi  satisfaisant  que  possible.  La 
nouvelle  paupière  avait  une  hauteur  suffisante  pour  recou- 
vrir la  partie  inférieure  du  globe  de  l'œil  et  pour  retenir 
les  larmes,  qui  ne  coulaient  plus  sur  la  joue  comme  avant 
l'opération. 

Mais  il  restait  encore  un  ectropion ,  avec  renversement 
incompkt  du  cartilage  tarse.  Pour  faire  disparaître  cet 
ectropion ,  j  avais  Tintention  de  faire  une  nouvelle  opéra- 
tion ,  en  suivant  le  procédé  de  W.  Adams ,  qui  a  réussi  si 
souvent  entre  les  mains  de  M.  Roux ,  et  qui  seul  pouvait 
remédier  à  lexcès  de  longueur  du  bord  ciliaire. 

Malgré  mes  recommandations,  la  malade  n'est  pas  reve^ 
nue  me  voir ,  comme  je  l'espérais.  Peut-être  redoute-t-elle 
de  nouvelles  souffrances,  ou  bien  se  trouve-t-elfe  satisfaite 
du  résultat  qu'elle  a  déjà  obtenu. 

Quoi  qu'il  en  sôitje  regretterais  de  ne  pas  pouvoir  ache- 
ver mon  œuvre,  en  faisant  disparaître  les  dernières  traces 
d'une  difformité  qui  nuit  encore ,  à  un  certain  degré ,  à 
l'harmonie  du  visage. 

Il  me  semble  que  toutes  les  fois  que  la  paupière  a  été 
détruite  par  une  cause  quelconque  et  que  le  bord  ciliaire 
a  été  entraîné  au  loin  par  la  formation  d'une  cicatrice  irré- 
gulière, ce  bord  doit  toujours  subir  une  telle  élongation, 
que ,  lors  même  qu'il  est  ramené  à  sa  position  normale 
par  une  opération  convenable  ,  la  fétractilité  natureitè  des 
tissus  reste  insuffisante  pour  lui  rendre  sa  longueur  pri- 
mitive^ 

11  faut  donc,  dansce  cas,  diminuer  ta  longueur  du  bord 
palpébral  par  une  incision  qu'on  doit  pratiquer,  soit  en 
même  temps  qu'on  pratique  la  blépharoplastie,  soit  (ce  qui 
est  bien  préférable  à  mon  avis) ,  lorsque  le  succès  de  la 
première  opératipn  est  asssuré. 


SOVmÂh  DB  MÉDECINE.  173 

On  a  pu  remarquer  que ,  dans  Topération  que  je  viens 
de  décrire,  j'ai  suivi  le  précepte,  bien  formulé,  pour  la 
première  fois,  par  Van  Ammon,  de  tailler  le  lambeau  de 
telle  manière  qu'il  forme  un  angle  droit  avec  la  perte  de 
substance  qu'il  doit  combler. 

En  agissant  ainsi ,  on  évite  la  torsion  du  pédicule ,  et 
la  cicatrice  irrégulière  qui  en  résulte.  Sans  doute,  au  lieu 
d'avoir  une  cicatrice  placée  sur  la  tempe,  où  elle  peut  être 
dissimulée  par  les  cheveux,  on  a  une  cicatrice  à  la  joue; 
iTiaîs  cette  cicatrice  est  linéaire  et  peu  apparente.  Di* 
sons  encore  que,  lorsque  le  lambeau  n'a  pas  besoin  de 
subir  de  torsion ,  il  n'est  pas  nécessaire  de  lui  donner 
autant  de  longileur,  et,  par  conséquent,  on  cause  moins 
de  dégâts  dans  les  parties  voisines. 

En  laissant,  ce  qui  est  impossible  dans  les  autres  pro- 
cédés ,  une  large  base  au  lambeau,  on  ne  modilie  pas  sen- 
siblement sa  vitalité,  et  on  évite  ainsi,  soit  la  gangrène, 
soit,  au  contraire,  cette  hypertrophie  choquante  dont  on  a 
rapporté  plus  d'un  exemple,  à  la  suite  de  la  blépharoplastie. 
Enfin,  en  taillant  le  lambeau  de  manière  à  ce  que  sa  base 
fût  oblique,  et  que  son  bord  interne  se  confondît  en  haut, 
dans  une  petite  étendue,  avec  le  bord  même  de  la  perte  de 
substance ,  j'ai  rendu  le  glissement  du  lambeau  extrême- 
ment fecilé  ;  et,  de  vertical  qu'il  était  d'abord,  il  a  pu  de- 
venir horizontal,  sans  que,  vers  sa  racine,  il  se  formât  de 
plis  ou  de' godet  bien  appréciables. 

âe  noterai ,  comme  une  chose  très-avantageuse ,  It^  su- 
ture pratiquée  à  la  commissure  externe  des  paupières  :  par 
ce  moyen,  j'ai  rapproché  cette  commissure  de  la  ligne  mé- 
diane dont  elle  se  trouvait  trop  éloignée;  j'ai  combattu  le 
renversement  du  cartilage  tarse;  enfin  ,  j'ai  soulevé  le  bord . 
paipébral  inférieur,  et,  par  suite,  le  bord  supérieur  du 
lambeau. 

Je  crois,  en  terminant,  devoir  attirer  l'attention  sur  la 
forme  que  j*ai  donnée  au  lambeau.  Les  auteurs  disent ,  en 
effet;  qu'il  doit  figurer  une  ellipse,  un  triangle,  un  carré, 
selon  les  indications  qui  ressortent  de  la  forme  même  de 
la  perte  de  substance.  Dans  les  cas  analogues  à  celui  que 
j'avais  à  traiter ,  on  conseille  généralement  un  lambeau 


174  f^WUL  DB  WttOMKL 

elliptique.  Or,  on  se  souvient  que,  chez  vas,  malade,  il 
était  dessiné,  en  dedans,  par  une  ligne  droite,  dans  toute 
son  étendue,  et,  en  dehors,  par  une  ligne  courbe ,  à  sa 
partie  inférieure. 

Le  bord  convexe  s'est  adapté  par&itemenl  au  bord 
concave  que  présentait,  en  bas,  la  perte  de  substaoce  ;  d'un 
autre  côté ,  lorsque  le  lambeau  fut  placé  dans  le  lieu  qui 
lui  était  destiné ,  il  fut  facile  de  se  convaincre  que,  si  son 
bord  supérieur  eût  été  convexe,  le  milieu  de  la  paupière 
eût. été  trop  saillant.  Tandis  que,  ce  bord  étant  droit,  re- 
présentait aussi  exactement  que  possible,  la  formie  natu- 
relle de  la  paupière. 


En  rapportant  les  faits  qui  précèdent,  etquej*ai  choi- 
sis, entre  plusieurs  autres,  cooune  fermant,  en  quelque 
sorte,  un  groupe  naturel,  j'ai  cherché  à  faire  ressortir  ie& 
détails  qui  m*ont  paru  offrir  le  plus  d'intérêt,  surtout  au 
point  de  vue  du  manuel  opératoire.  Ces  détails  sont  comoie 
la  preuve  de  ce  que  je  disais  en  commençant ,  que  «  dans 
.  I^s  cas  d  autoplastie ,  les  indications  sont  variées  à  Tinfini, 
et  que  le  chirurgien ,  tout  en  profitant  de  lexpérience  des 
autres,  doit  toujours  savoir  trouver  en  lui-même  des  res- 
sources nouvelles..  Il  importe  de  savoir  que  la  {>eau  se 
prête,  avec  une  merveilleuse  facilité,  à  des  glissements, 
à  des  déplacements  et  même  à  des  migrations  successives 
qui  permettent,  lorsqu'on  sait  tirer  parti  de  ces  avantages, 
d'arriver  à  des  résultats  véritablement  inespérés.  Aussi , 
quelle  que  soit  la  gravité  des  cfis  qui  se  présentent,  quelles 
que  soient  l'étendue  et  la  forme  des  pertes  de  substance 
qu'il  s'agit  de  réparer,  il  faut  ne  pas  perdre  courage  et 
lutter  c(Hitre  les  diSjcultés,  en  se  souven^fit  qne,  selon 
1  expression  inspirée  à  M.  Roux,  par  ses  propres,  succès, 
^  **.  y  apeul^Hre  rieud'impas$ible  en  fait  de  reHowral^m 
«^.  la  face. 


JOURNAL 


DS  LA 


SECTION  DE  MÉDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


BULLETIN  DES  SÉANCES. 


«éanee  4o  19  laillel  tHSik. 

PRtiSlBENCE  DB  M.  LBTËNNEtR. 

L'ûrdre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  "Leteaaeur,  pour 
la  tectare  de  plusieurs  faits  d'autoplastie  faciale  (1). 

Pendant  cette  lecture,  M.  Mahot,  vice<^président^  pré- 
side la  séance. 


(1)  Voir  le  numéro  précédent^  p.  143. 

14 


176  jourhal  de  sédbcins. 

Le  travail  de  H.  Leienneur  donne  lieu  à  quelques  ré- 
flexions. 

M.  Lebargne  pense  que  l'afl^ecUon  qui  avait  détruit  une 
partie  considérable  du  nez,  chez  la  malade  dont  a  parlé 
H.  Letenneur,  était  une  affection  syphilitique.  Tous  les 
cas  de  ce  genre,  qu'il  a  été  à  même  d'observer,  étaient 
dus  à  la  syphilis.  li  pense  que  le  cancer  n'attaque  pres- 
que jamais  cette  région ,  et  que  la  syphilis  est  peut*être 
la  seule  cause  des  déperditions  de  substance  du  nez. 

M.  Leienneur  répond  qu'il  a  interrogé  la  malade  sur 
l'existence  d'antécédents  syphilitiques  et  qu'il  n'a  obtenu 
que  des  réponses  négatives.  Il  n'attache  pas,  toutefois^  à 
ces  renseignements  une  grande  importance;  il  a  pu,  en 
effet,  être  trompé  par  la  malade,  mais  l'aspect  de  l'ulcère 
était  bien  celui  des  cancroïdes  du  nez. 

M.  Leborgne  ajoute  que  ce  qui  le  confirme  dans  sa 
manière  de  voir ,  c'est  que  le  véritable  cancer  ne  guérit 
pas  radicalement,  et  qu'il  est  toujours  suivi  de  récidive. 
C'était  l'opinion  de  Boyer ,  qui  disait  que  les  cas  de  gûé- 
rison  qu'on  pouvait  citer  n'étaient  pas  des  cas  de  cancer. 
Dupuytren ,  à  l'aide  d'un  traitement  antisyphifitique,  obte- 
nait la  résolution  de  tumeurs  du  testicule  que  d'autres 
chirurgiens  lui  adressaient  comme  des  tumeurs  cancéreu- 
ses. Cela  fait  voir  combien  ces  erreurs  de  diagnostic  sont 
faciles. 

/m.  Lequerré  partage  l'opinion  de  M.  Letenneur  sur  la 
nature  de  l'affection  de  cette  malade.  Il  fait  observer 
que  les  affections  syphilitiques  attaquent  presque  toujours 
les  os  du  nez,  quand  elles  ont  leur  siège  dans  cette  région, 
et  qu'elles  ne  se  bornent  pas  à  la  peau  comme  les  can- 
croïdes. 

M.  Malherbe  lit  une  note  sur  le  chongetnenl  que  cer- 
taines pérkardiies  apportent  dans  les  rapports  de  fréquence 
de  la  respiration  et  du  pouls  (t). 

M.  Aubinais  trouve  très-intéressants  les  aperçus  nou- 


(1)  Voir  plus  loin,  p.  180. 


lOraN'iL  DB  HÉDBCHIB.  177 

veaux  présentés  par  M.  Malherbe ,  sur  la  relation  qu*ont 
entre  elles  les  fonctions  respiratoire  et  circulatoire.  S'il  a 
bien  saisi,  toutefois,  le  sens  d'une  citation  faite  par  M. 
Malherbe,  il  croit  devoir  foire  observer  que  le  pouls,  à 
la  suite  des  pertes  de  sang  abondantes  et  rapides  «  loin 
d'être  ralenti  comme  il  a  cru  l'entendre  dire,  est  au 
contraire  très-accéléré. 

M.  Malherbe  répond  qu'il  n'est  pas  dit,  dans  le  passage 
cité  par  lui ,  que  le  pouls  se  ralentit  à  la  suite  des  hémor- 
rhagies  abondantes;  c'est  la  respiration  qui  se  ralentit, 
tandis  que  le  pouls  s'accélère. 

M.  Marci  lit  ensuite  une  observation  de  morve  aiguë  (1). 

Séance  du  11  aoAt  1855» 

PBÉSmEI^CE  DB  M.  L£TENNEI}R. 

La  Section  a  reçu  : 

i»  Une  lettre  de  M.  Marjolin ,  secrétaire  de  la  Société 
de  Chirurgie  de  Paris,  par  laquelle  il  lui  fait  connaître  les 
prix  mis  au  concours  par  cette  Société,  et  là  prie  de 
vouloir  bien  insérer  ce  programme  dans  son  journal; 

2^  Essai  sûr  la  névralgie  intercostale,  par  le  D'  Lecadre  ; 

B""  Notice  biographique  sur  Frissard,  par  le  D'  Lecadre; 

4°  Bulletin  des  maladies  chroniques  et  de  l'établissement 
hydrothérapique  d'Auvergne ,  à  Brioude,  par  le  D'  An- 
driettx. 

L'ordre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  Malherbe  ,  pour 
la  lecture  d'une  observation  d'acéphalie  (2). 

Après ^ette  lecture,  JU.  Bélie  prend  la  parole  :  il  re- 
mercie l'auteur  de  son  intéressante  communication.  Cet 
acéphale ,  dont  la  dissection  a  été  bien  faite ,  lui  paraît 
différer  de  ceux  que  l'on  rencontre  habituellement  ;  car , 


U)  Voir  plus  loin,  p.  183. 
(2)  Voir  phis  loin,  p.  1^5. 


(?8  iOVUiHi'  ra  vÉiiBqiiE. 

si  t'absence  du  cœur  a  été  constatée  ici  comme  dan^  tous 
l^s  cas  de  ce  genre  t  on  ^  rencontré ,  ce  quj  est  un^  excep- 
tion ,  ^n  poumon  entier  et  ies  rudiments  de  l'autre ,  ainsi 
que  le  fpie.  M*  fl^He  aun^it  désiré  savoir  quel  était  au 
juste  le  développement  de  la  moelle  épinière.  Allait-eile 
jusqu'à  la  fin  du  canal  sacré  ?  Comment  se  terminait^elte 
à  son  extrémité  inférieure  ? 

Af.  Malherbe  répond  qu'elle  présentait  sa  IpQgueur  et  sa 
disposition  normales. 

M.  HéUe  bit  observer  alors  que  les  os  du  ba^jn  étaient 
très-développés  ;  on  peut  donc  concevoir  le  développement 
d'un  fœtus ,  dépourvu  de  cerveau ,  s'effectuant  par  le  seul 
moyen  de  la  moelle.  Ce  que,  d'après  lui,  ce  monstre  pré- 
sente de  plus  étrange ,  c'est  l'absence  complète  du  cœur 
et  l'existence  d'un  fluide  se  mouvant  dans  les  vaisseaux 
sanguins,  lorsque^  surtout,  Ton  n'a  pas  trouvé  de  veines 
accompagnant  les  artères  drs  membi^  inférieurs  ;  car , 
comment  se  rendre  compte  du  cours  du  sang  avec  une 
pareille  disposition  anatomique?  Gela  paraît  presque  im- 
possible. Cet  acéphale  diffère  encore,  par  l'absence  d'es- 
tomac» {'existence  du  foie  et  ^'organes  sexuels  assez 
bien  caractérisés ,  d'un  monstre  du  même  genre ,  chez 
lequel  M.  Uéiie  avait  rencontré  des  reins  énormes ,  un 
squelette  plus  développé  et  le  rudiment  de  l'un,  des  mem- 
bres supérieurs» 

Af.  A^lf^erie  dit  que  Breschet  a  constaté  ces  variations 
ch^iez  (es  acéphales  ;^  ainsi,  il  en  est  un  certain  non^bre  qui 
ont  un  foie ,  mais  l'estoniac  n'existe  que  chez  ceux  don^  la 
poitrine  présente  uri  haut  degré  de  développemei^t.  Qaant 
à  la  manière  dont  s'effectue  la  crrculàtion,  il  ne  se  charge 
pfis  de  l'expliquer;  m^is  ceh|  n'empêche  pa$  qu'il  soit  très- 
connmun  de  ne  pa&  rencontrer  de  vaisseaii^x  veineux  chez 
les  acéphales,  et  ce  fait  à  encore  été  relaté  par  Breschet , 
quia  noté,  en  Qutre,  Téxi^teuce  fréquente  d'un  cœur  en 
général  mal  conformé. 

À#.  Hélie  répond  que  Breschet  a  cependant  représenté 
les  deux  ordres  de  vaisseaux  artériels  et  veineux  che^  les 
ucéphales.   Il  ne  peut  s'empêcher  de  trouver  singalière 


l'opinion  qiii  veutque  le  sang  arrive  au  fœtus  par  Tarière 
ombilicale;  il  lui  semble  beaucoup  plus  naturel  d'admettre 
que  le  sang  suit  un  ordre  inverse. 

M.  Aiêbinàis  diffM'è  d'o^ifiioh  avèe  !t).  Matherhe   et  là 
plupart  des  aoieiirs  ieniehunt  finfluenoe  dès  grossesses  gé- 
n^ellaires  sur   la  production  des  acéphales.  Suifrant  kii , 
cette  influence  serait  plus  marcju.ée  sut  la  production  de 
Tanencéphalie.  II  croirait  beaucoup  plus  volontiers  à  Tin- 
liuehce  dêS  coups ,»  chûtes ,  exercices  violents  dtfrfini  la 
gestation.  Ace  sujet,  il  pense  que  l'on  pourrait  consulter 
avec  fruit  un  ouvrage  dont  il  a  eu  déjà  occasion  d'entretenir 
ses  collègues  ,  et^  qui  est  intitulé  :  Fêles  el  courtisanes^  de 
la  Grèce j  suite  du  voyage  d'Anténor.  On  y  cite,  en  «ffet , 
des  aberrations  trèsfréqueiUes  et  monstrueuses  de  la  na- 
ture ,  et  cela  en  dehors  de  tout  esprit  de  système  physio- 
logique préconçu,  Fauteur  étant  tout-à-ftit  étranger  aux 
préooeupfttions  de  cet^  sortes  En  somtne,  l'étiologie  de  ces 
RHMiéfrao^ités  est  eneore  |^  connue,  et  Ton  toit  les 
femmes  le»  plus  sédentaires  mettte  au  monde  de  pareils 
feelOB. 

.  M.  Gèuiran  pire  est  appelé  à  faire  une  communication . 
H  fait  passer  sous  les  yeu»  des  meraibre^  de  la'Sectton  , 
plusieurs  oâleuls  provenant  de  la  tessie  et  des  intestins, 
et  dontie  lecture  de  l'analyse  de  ces  divers  calciils,  atiulyse 
faite  par  M.  Moride  el  extraite  d'un  trarvail  inédit  bien  plus 
étendu,  que  prépare  ce  dernier ,  sur  l'histoire  des  mala- 
dies ôalctfteuses  et  sur  la  nature  des  ealeuls  chez  riidmmc 
et  les  animaux  de  l'Ouest  delà  Prahce  ^1  ). 
Après  eette  lecture,  la  séance  est  levée. 

Le  secrétaire , 

L.-F.  CaiMPÉNois. 


(1)  Voir  plus  loin  ^  p.  200. 


180  JOiailAI<  DE  MÉDBCUIB. 


DU  CHANGEMENT  que  certaines  piricardites 
apportent  dans  les  rapports  de  fréquente  de  la 
respiration  et  du  pouls,  par  M.  Malherbe,  d.-si., 
médecin  de  l'Hôtel-Dieu  de  Nantes,  secrétaire 
du  Conseil  central  d'hygiène  pj/hlique  et  de  salu- 
brité. 


M.  Marcé,  interne  des  hôpitaux  de  Paris,  vient  de  pu- 
blier un  intéressant  travail  sur  les  rapports  numériques  qui 
existent  chez  l'adulte ,  à  l'état  normal  et  à  Tétat  patbolo* 
gique,  entre  le  pouls  et  la  respirât ioti.  Ce  travail,  fondé 
sur  des  recherches  d'érudition  et  sur  de  nombreuses  obser- 
vations personnelles ,  a  conduit  l'auteur  à  formuler  eâtre 
autres  les  propositions  suivantes  :  «  En  général,  à  l'état 
i>  physiologique  ou  à  l'état  pathologique,  it  y  a  harmonie 
»  entre  lés  mouvements  de  la  respiration  et  de  la  circula- 
»  tion,  qui  s'accélèrent  ou  se  ralentissent  simultanément. 

»  te  chiffre  qui,  à  Tétat  normal,  exprime  le  rapport 
»  entre  le  nombre  des  pulsations  et  celui  des  respirations, 
»  est,  en  moyenne^  de  3  1/2. 

n  Ce  rapport  n'est  pas  constant.  Quc^nd  le  nombre  des 
»  pulsations  tombe  au-dessous  de  la  moyenne  normale ,  le 
»  nombre  des  respirations  reste  proportionnellement  supé- 
»  rieiir  ;  quand  le  nombre  des  pulsations  s'élève  de  beau- 
n  coup  au-dessus  de  l'état  normal,  le  nombre  des  respira- 
»  tions,  tout  en  augmentant  d'une  manière  absolue  /  reste 
)>  proportionnellement  inférieur;  en  un  mot ,  le  chiffre  du 
n  rapport  augmente  avec  le  nombre  des  pulsations. 

n  Le  chiffre  qui  exprime  ce  rapport  varie  entre  2,69  ei 
»  3,40.  D 


lOtBItAI  BS  IIÉ1IBC31IB.  18i 

Dans  certains  cas ,  i'harmonie  entre  les  deux'  fonctions 
est  troublée,  et  la  respiration  se  trouve  tantôt  accélérée, 
tantôt  ralentie ,  relativement  au  pouls. 

Pour  ce  qui  est  de  Taccélération ,  M.  Marcé  a  établi  que 
les  maladies  des  pounoous  et  du  cœur  n'avaient  aucune  part 
dans  la  production  de  ce  phénomène ,  qui  dépend  unique-* 
ment  de  l'existence  du  point  de  côté  et  qui  disparait  avec 
lui- 

Les  affections  cérébrales  comateuses  et  les  pertes  de 
sang  subites  et  considérables  sont  les  seules  causes  qui 
amènent  le  ralentissement  proportionnel  des  mouvements 
respiratoires  (1). 

Les  feits  que  nous  allons  vous  rapporter,  tout  en  restant 
d'accord  avec  les  principes' posés  par  M.  Harcé,  différent 
cependant  assez  de  ceux  qui  font  la  base  de  son  travail,  et 
nous  croyons  .pouvoir  affirmer  qu'il  n'en  a  rencontré  de 
semblables  ni  dans  les  auteurs ,  ni  chez  les  malades  soumis 
à  son  observation ,  car  il  n'aurait  pu  manquer  de  les.  si- 
gufler.; 

Nous  avons  observé  trois  cas  de  péricardlte  aiguë  avec 
épancbenfient  considérable  et  rapide  de  sérosité,  dans  l$;s* 
quels  les  mouvements  respiratoires  étaient,  absolument  par- 
lant ,  plus  fréquents  que  les  battemt^nts  du  pouls.  Le  pre- 
mier de  ces  cas  nous  a  été  montré  par  M.  Harion  de  Procé: 
il  y  avait  cinquante-six  respirations  par  minute,  et  seule- 
ment quarante-huit  pulsations;  le  rapport  était  représenté 
par  la  fraction  e/?*".  Le  deuxième  cas  nous  a  laissé  des 
souvenirs  moins  précis,  mais  les  mouvements  respiratoires 
étaient  également  plus  fréquents  que  les  pulsations. 

Le  troisième  cas  nous  a  élé  présenté  à  THôpital  général, 
par  un  frère  de  l'école  des  sourds-muets,  âgé  de  20  à  21 
ans,  d'une  constitution  faible,  peut-être,  strumeuse.  Le 


(1)  Il  y  faut  ioiadre  la  section  des  perfs  pneumogastriques,  à  la 
suite  de  laquelle  on  voit  le  pouls  s'accélérer  et  la  respiration  se 
ralentir  progressivement  jnsqu'au  moment  de  la  mort,  et  ce  trouble 
est  plus  senuble  alors  que  dans  aucune  autre  circonstance. 


têi  jbiwKAL  UB  «Émiera. 

débul  de  la  maladie  fait  caraelérisé  par  quelques  jours  de 
malaise  .et  des  douleurs  sourdes  à  la  région  préeordkile  ; 
puis ,  tout-à-coup ,  douleur  vive  à  la  iBÔme  r^îou ,  anxîélé 
extrôofie,  dyspnée,  respiration  à  64  par  minute;  peau  un 
peu  chai^de,  pouis  bible,  déprimé ,  serré ,  à  52.  (Rapport 
entre  le  pouls  et  la  respiration,  13/16.)  La  main,  appliquée 
sur  la  région  du  cœur,  ne  perçoit  aucun  choc;  la  région 
précordiale  est  le  siège  d'une  voussure  notable  et  d'une  ma- 
tité  étendue.  A  l'auscultation ,  les  bruits  du  cœur  s'entèn- 
deatr  faiblement  et  dans  Téloignement;  ils  deviennent  un 
peu  plus  forts,  quand  on  fait  asseoir  le  malade  ;  mais  il  n'y 
a  pas  plus  de  choc  appréciable  dans  la  position  verticale 
que  dans  la  position. boriiontale.  (Remarquons  en  passant, 
que  ce  jeune  frère,  qui  n'a  jamais  eu  de  rhumatisme ,  est 
chargé  de  &ire  la  euisine,  et  qu'il  reste  presque  toute,  la 
journée  dans  une  position  telle  que  la^égion  dueg&ùr  reçoit 
la  chaleur  du  fourneau.)  Le  trailement  s'est  conipûsé 
d'applications  de  sangsues,  <le  larges  vésicatoives  volants, 
loco  dolenlù  et  de  quelques  purgatifs;  la  doHuleur  a  dîsj^u 
rapidement  ;  la  ré6orj>tion  de  l'épancbement  a  été  assez 

C)mpte,  et  la  respiration  et  la  cii'çulation  (Hii  repris 
rs  rapports  normaux  au  bout  de  troia  jours. 

Néanmoins,  la  convalescence  a  été  longue  «  et  la  persis- 
tance de  quelques  douleurs  sourdes  à  la  régira  précor- 
diale,  une  grande  tendance  à  l'essoufflement,  ont  obligé  le 
malade  à  un  long  rq>os  et  à  rabandbn  ^s  fonetioos  de 
cuisinier.  Nous  avons  su,  plus  tard  ,  qii'il  s'était  complète- 
ment rétabli. 

Nou$  voyons ,  dans  ces  trois  pas  de  périoatdiie ,  iii>e  in- 
tio'versidn  complète  des  r^ipports  de  la  circulation  et  de  la 
respiration  que  nous  n'avons  trouvée  indiquée  nulle  part. 
Le  râpfMMrt  ntmiéffique  entre  les  deux  fonctions  était  espri* 
mé  par  une  fraction ,  tandis  que  te  chiffre  le  plus  bas  trouvé 
par  M.  Marcé  est  2,69.  Nous  pensons  qu'ici,  comme  dans 
les  observations  de  M.  Marcé,  c'est  au  poiht  douloureux 
qu'il  faut  attribuer  Taccélération  de  la  respiration  ;  (es  dou- 
leurs de  la  périçardite  causent ,  comnie  chacun  le  sait^  bien 
plus  d'ansiété,  toutes  cboses  égales  d'ailteurs,  que  celles 


de  la  pleuréùe:-  le.raiedtiiweineBt  de  la  circulation  dépend, 
au  contraire ,  selon  nous ,  de  Tobatacle  qu'oppose  aux  mou- 
veinei^ts  du  cœur  ie  développement  subit  d'un  épanche* 
ment  considérable.  Nous  avons ,  depuis  plusieurs  années , 
el  chez  des  malades  dans  toutes  les  conditions  possibles , 
recherché  sf  d'autres  cauàes  pouvaient  aussi  troubler  riiar- 
monie  des  mouvements  du  pouls  et  de  la  fespiratioo,  et  les 
résultats  négatifs  de  cette  recherche  nous  ont- conduit  à 
considérer  Tinterversion  du  rapport  de  ces  deux  fonctions 
comme  le  signe  pathognomonique  des  èpânchements  aigus 
et  abondants  de  sérosité  dans  la  cavité  du  péricarde.  Nous 
terons  remarquer,  en^  finissant,  que  lé  sujet.de  notre  ob- 
servation était  faible  et  strumeux  ;  s'il  n'en  était  pas  ainsi 
des  deux  autres  malades  que  nous  avons  seulement  cités , 
,  nous  nous  souvenons  parfaitement  qu'ils  avaient  été  soumis 
d'avance  à  l'action  de  causes  débilitantes  :  circonstances 
qu}«  dans  les  phlegmasies  des  memëranes  séreuses,  fevo* 
risent  la  formation  des  épanehements  considérables  de  li- 
quide, tandis  que  les  proidnits  plastiques  sont  nuls  ou  peu 
abondants.  '  ^  ^ 


OÉSER  VA  TÏON  de  Fàrcin  chronique  suivi 
de  Morve  aiguë ,  par  M.  Çoiubeau  ,  interne  à 
l'Hétetr-Dieude  Nan^s  (sermce  de  M.  MÂacË). 


Le  nommé  Gouardô,  François,  manœuvl^e,  âgé  de  32  a»s, 
entra  à  l'HÔteUDièu  Iel2  mars  1855.  Cet  homme  paraissait 
d!uDe  constitiilmi  assez  forte.  Au  mois  de  Sérrier  derniery  il 
bafaifait  eoeore  les  environ»  de  Saiul^Bpieic  ;  mais,  dams 


184  JOCftlIAL  DB  «ÉHEGOIB. 

le  même  mois,  il  émîgra  avec  sa  femme  et  ses  deux  en- 
fants. Pei)(lani  les  quinze  jours  qui  précédèrent  son  dépari, 
il  logea  chez  un  voiturier-commissionnaire,  possesseur 
d*un  cheval  morveux.  Il  y  couchait  avec  sa  feniille ,  à  trois 
pas  du  lieu  où  reposait  lanimal  ;  nulle  cloison  ne  les 
séparait.  Quand  il  partit  pour  Nantes,  ce  fut  avec  le  même 
cheval;  aussi,  pendant  le  voyage,  qui  dura  8  jours',  le 
nommé  Gouardo  dut- il  encore  avoir  des  rapports  fréquents 
avec  l'animal  malade.  Dès  le  lendemain  de  son  arrivée  à 
Nantes,  c'est-à-dire  dans  les  premiers  jours  de  mars,  il  fut 
pris  d'une  angine  intense ,  à  laquelle  s'ajoutèrent  bientôt 
des  symptômes  de  bronchite. 

Douze  jours  plus  tard ,  sa  petite  tille ,  âgée  d'un  an  , 
tombait  aussi  malade.  Des  vomissements,  la  diarrhée  ,  le 
gonflement  des  jambes  et  du  ventre,  des  excoriations 
noirâtres,  avec  suintement  purulent  aux  oreilles,  tels  sont 
les  symptômes  qu'elle  présenta,  si  Ton  en  croit  sa  mère. 
Elle  mourut  après  20-  jours  de  maladie. 

Quoi  qu'il  en  soit ,  l'angine  et  la  bronchite  du  père  ne 
disparaissaient  pas  :  il  se  plaignait  aussi  de  douleurs  va- 
gues dans  tout  le  corps.  Il  entra  à  l'Hôtel-Dieu  le  12 
mars.  Des  préparations  calmantes,  des  sangsues  appliquées 
à  la  gorge,  un  vomitif,  tels  furent  les  moyens  successi- 
vement employés  et  qui  parurent  amener  un  peu  d'amé- 
lioration. Mais,  vers  le  25  mars,  la  diarrhée  se  montra 
pendant  quelques  jours.  Le  malade  semblait  abattu.  Tout 
cela,  joint  aux  signes  de  bronchite,  pouvait  faire  penser 
à  une  -fièvre  typhofcie  mal  dessinée ,  surtout  quand ,  dans 
les  premiers  jours  d'avril ,  on  vit  des  abcès  se  manifester 
sur  différents  points  du  corps.  • 

A  la  partie  interne  du  pied  gauche ,  était  un  gonfle- 
ment rouge,  œdémateux,  où  parfois  des  élancements  dou- 
loureux se  faisaient  sentir  :  une  incision  fut  faite;  il  s'en 
écoula  un  pus  épais ,  verd&tre ,  mêlé  de  grumeaux  san- 
guins noirâtres.  —  A  la  partie  moyenne  et  externe  de 
1  avant-bras  droit ,  s'étaient  développés  deux  autres  petits 
abcès,  mais  sans  aucun  symptôme  inflammatoire.  A  leur 
ouverture,  ils  rendirent  un  pus  à  peu  près  semblable  à 


iOVBNAi  DE  MÉfiBCINE.  t85 

celui  de  Tabeès  précédent.  —  L'engorgement  nfiomentané 
de  la  glande  thyroïde  avait  un  instant  fait  craindre  le  dé- 
veloppement d'une  autre  collection^  purulente,  mais  cet 
engorgement  se  dissipa. 

Tout  cet  ensemble  de  symptômes  et  l'abattement  pro* 
giressif  du  malade,  nécessitèrent  remploi  des  toniques.  Le 
quinquina  fut  donné  (4  avril).  On  put  croire,  pendant 
quelques  jours ,  à  une  amélioration  durable. 

Mais/vers  le  13  avril,  des  frissons  irréguliers  survin- 
rent :  le  soir,  i|  y  avait  des  exacerbations  fébriles  assez 
intenses  ,  accompagnées  de  sueurs  abondantes,,  et,  parfois, 
d'un  peu  de  subdelirium.  L'appétit  était  presque  nul  ,^  le 
dévoiement  n'existait  pas,  mais  la  prostration  était  grande  : 
il  y  avait  somnolence  et  rêvasseries  fréquentes;  les  abcès 
restaient  sans  cicatrisation.  Le  malade  conservait  toujours 
un  peu  de  toux  sèche,  quelques  râles  sous-crépitants  dans 
la  poitrine,  et  quelque  peu  d'enrouement  dans  la  voix; 
l'angine  avait  pourtant  disparu. 

16. avril. —  Tout  en  était  là,  quand  lé  malade  se  plai- 
gnit d'éprouver,  à  la  partie  supérieure  de  l'épaule  droite , 
une  douleur  vive,  augmentée  par  là  pression  :  il  n*y  avait 
point  encore  de  changement  de  couleur  à  la  peau;  l'épaule 
ne  présentait  qu'un  empâtement  œdémateux.  Mais,  le  20 
avril,  à  l'endroit  douloureux,  parut  une  surface  rosée, 
large  comme  la  paume  de  la  main  et  ayant  un  contour 
irréguliér.  Quelques  jours  plus  tard,  se  développaient,  sur 
cette  surface j  des  phlyctènes  nombreuses^  et  entourées 
d'un  cercle  violacé.  Le  25  avril,  le  fond  des  phlyctènes 
rompues  était  noirâtre.  Leur  grand  nombre  transformait 
donc  la  surface  rosée  en  une  plaque  noire  ,  sèche  ,  dure  , 
déprimée  ,^  sûr  laquelle  une'  foule  de  petites  dépressions 
secondaires  indiquaient  la  place  primitivement  occupée  par 
les  phlyctènes  disparues.  Une  seconde  plaque,  entièrement 
semblable  à  la  première,  mais  de  moindre  dimension, 
s'était  formée  en  arrière  de  la  précédente.  Tout  près,  sur 
la  même  épaule,  un  groupe  de  pustules  s'était  développé  : 
ces  pustules,  un  peu  résistantes,  avaient  un  sommet 
bleuâtre,  non  ombiliqué;   elles  étaient  entourées  d'une 


aorêole  vioboée.  L'épaule  avait  considérableilimt  augmenté 
de  volome. 

20,  28  avril. —  Pendant  Tapparition  d€  toas  ces  sym|>- 
tomes  locaux,  Tétat  général  s'aggravait  d'one  maiMère  nota- 
ble. L appétit  avait  complètement  disparu;  la  diarrhée 
revint;  la  partie  antérieure  des  fosses  nasales  était  sèche  ; 
mais,  dans  le  pharynx,  étaient  des  mucosités  filantes, 
troubles,  visqueuses,  qui  semblaient  évidemment  des- 
cendre de  la  partie  supérieure  du  voile  palatin  ^  et  qui , 
parfois,  restaient  suspendues  à  la  luette.  -^  Le  pouls 
devenait  de  plus  en  plus  fiiible  en  augmentant  de  fré- 
quence. Un  cercle  ecchymotique  violacé  entourait  Tou- 
verture  béante  siégeant  à  Taboès  du  pied.  Une  cicatrice 
semblait  avoir  fermé  les  abeès  du  bras.  41è  et  là ,  sur  les 
membres ,  paraissaient  quelques  ecchymoses  bleuâtres.  — 
La  pit>stration  du  malade  augmentait,  sa  figure  était 
pâle  et  amaigrie,  ses  mouvements  devenaient  lents  et  in- 
décis; il  n'accusait  plus  guère  que  les  douleurs  de  son 
épaule.  A  la  fin ,  la  somnolence  et  le  subdelirium  étaient 
presque  continuels.  Cependant,  toutes  les  fois  qu'on  inter- 
rogeait le  malade ,  il  sortait  encore  de  cet  état  pour  faire 
une  réponse  lente,  mais  bien  comprise.  Il  succomba  le  28 
avril. 

AUTOPSIE. 

Membre  supérieur  droit.  —  L'épaule  droite  était  consi- 
dérablement augmentée  de  .  volome  ;  la  pression  exercée 
sur  la  peau  de  cette  région,  faisait  sentir  unfe  induration 
notable  dans  les  parties  sousjaoentes.  C'est  à  peu  près  àti 
centré  de  cette  surfiice  indurée,  que  se  trouvait  la  plaque 
noire ,  sèche ,  déprimée,  dont  j'ai  parlé  plus  haut.  RUe  n^a- 
vait  pas  changé  de  caractère,  pas  plus  qiie  les  pustules 
qui  se  trouvaient  dans  son  voisinage.  Elle  offrit,  au  sealjpel 
qui  la  divisa,  la  dureté  du  pavchemin  ;  elle  n'ei»  avait  guère 
aussi  que  l'épaisseur.  Ao-dessous^^ d'elle,  était  un  tissu  cellu- 
laire, épais,  marbré,  ferme  et  comme  lardacé ,  au  milieu 
duquel  se  trouvaient  des  infiltrations  sanguines  et  une 
multitude  de  petits  noyaux  purulents,  très-distincts,  dont 


JOVIBAI.  n  SÉ]>B€IBn«  I4T 

la  plupart  n'avaient  guère  que  le  volume  d'un  ^rain  de 
millet.  Cependant,  on  y  re.n€ont^a  deux  collections  puru- 
lentes plus  considérables;  ayant  à  peu  près  le  volume  d'une 
amande.  Le  pus  eti  était  homogène,  épais,  visqueux  et 
brunâtre. 

Des  iiix^isions  profondes  furent  pratiquées  sur  le  sommet 
des  pustules,  perpendiculairement  au  plan  de  la  peau  : 
sur  le  plan  de  section,  on  aperçut  alors  des  lignes  gri* 
sâtres  de  tissiisrplus  ou  moins  ramollis ,  partant  du  som- 
met des  pustules  et  venant  aboutir  à  des  foyers  profonds. 
Ainsi,  ces  pustules  ne  semblaient  être  qu'une  efforescence 
révélant  aix  dehors  Texistencc  et  le  siège  d^altérations 
profondément  cachées.^ 

Au-dessous  du  tissu  cellulaire ,  le  musclé,  deltoïde  et 
la  portion  su^scàpulaire  do  trapèze  avaient  entièrement 
changé  d'aspect  :  on  pouvait  à  peine  y  distinguer  la  di- 
rection de  leurs  fibres.  Ces  muscles  étaient  partout  infil- 
.  très  de  sang ,  et  semés  d'une  multitude  de  tout  petits 
foyers,  contenant  un  pus  plus  ou  moinft  élaboré.  Ces 
tissus  avaient  un  peu  ta  forme  d'une  ^onge  durcie  et  un 
aspect  granité.  —  Malgré  tant  de  désordres  d^ns  son 
voisinage^  l'articulation  scapulp-hqitiérale  se  trouvait  par- 
faitement enveloppée  d'une  très^légère  couche  de  tissu  sain. 
La  capsule  ouverte  ne  laissa  voir  due  quelques  suffiisions 
sanguines  danrs  le  tissu  cellulaire  sous -synovial.  Sur  la 
tête  de  l'faumerus  était  étendue  une  petite  menibrane 
tr^rmince,  jaunâtre,  légèrement  friable ,  représentant  assec 
le  pus  par  sa. couleur,  mais  étant  entièrement  libre^  au 
sein  de  l'articulation  parfaitement  saine. 

Les-  vaisseaux  et  nerfe  lixillaires  n'étaient  pas  directe- 
ment en  rapport  avec  le  ifoyer.  Cependant,  on  vit  d^ns 
les  veines  a^illaires  et  sous-clavières  quelques  petits  gru- 
meaux de  pus.  Dans  le  sang  liquide  que  contenait  ces 
vaisseaux,  se  trouvaient  mêlée» des  stries  blanchâtres,  évi- 
demment purulentes.  Leurs  rameaux  afférents,  qui  pion- 
gement  au  milieu  des  tissus  malades ,  pressentaient  les 
mêmes  phénomènes  ;  les  ganglions  axillaires  avaient  aussi 
élé  préservés  :  ils  n'offraient  qu'urne  teinte  légèrement  rosée. 


fgg  JOVUIÀI  DE  IIÉIIBGIIIE* 

Au-dessous  de  la  région  deitoîdienne ,  le  bras  et  l'avant- 
bras  droit  ne  présentaient  guère  qu'un  œdème  énorme  du 
tissu  cellulaire.  Les  veines  et  les  muscles  étaient  intacts.. 
Toutefois,  en  examinant  les  deux  abcSs  situés  à  la  partie 
moyenne  et  externe  de  Favant- bras ,  et  que  Ion  avait  ou- 
verts pendant  la  vie  du  malade ,  on  en  trouva  la  cicatrice 
d'une  friabilité  extrême  :  die  était  entourée  d'un  cercle 
ecchymotique  qui  l'accompagnait  dans  toute  sa  profondeur. 
Au  fond  de  cette  cicatrice,  déchirée  plutôt  qu'incisée, 
étaient  des  fibres  musculaires  sèches,  Jaunfttres  et  très* 
friables. 

Membre  supérieur  gauche.  —  Au  membre  supérieur 
gauche,  il  n'y  avait  rien  à  noter  que  quelques  légères  ec* 
chymoses  sous-cutanées. 

Membre  inférieur  gauche.  —  A  la  partie  interne  du 
pied  gauche,  était  cet  autre  abcès  que  l'on  avait  aussi  ou- 
vert pendant  la  vie  du  malade.  Quand  il  lut  largement 
incisé,  on  y  vit  un  vaste  décollement  se  propageant  sous. 
l'aponévrose  plantaire  ;  une  sanie  purulente  s'en  écoula 
abondamment.  Le  premier  métatarsien  était  dépouillé  de 
son  périoste  dans  une  partie  de  son  étendue.  Les  parois 
de  ce  foyer  étaient  anfractueuses  et  semblaient  formées  de 
caillots  moitié  fibrineux  ,  moitié  cruoriques.  Toutes  les  ar- 
ticulations du  pied  étaient  saines.  Cependant,  il  y  avait 
quelques  gouttelettes  d'une  synovie  trouble  dans  l'articula- 
tion métatarso-phalangienne  du  gros  orteil,  c'est-à-dire 
daps  Tune  des  articulations  les  plus  rapprochées  du  foyer. 

A  la  partie  antérieure  et  moyenne  4e  la  jambe ,  était  un 
abcès  assez  volumineux ,  s'étendant  presque  jusqu^au  liga- 
ment interosseux  ;  i)  semblait  creusé  dans  le  tissu  muscu- 
laire détruit  ;  il  était  rempli  d'un  putrilage  épais,  visqueux, 
couleur  de  chocolat  et  mêlé  de  grumeaux  noirs.  Ses 
parois  anfractueuses  étaient  formée  par  du  tissu  muscu- 
laire infiltré  de  sang  et  ramolli. 

Trois  autres  abcès  se  présentaient  sur  le  trajet  du  même 
membre  et  avec  les  mêmes  caractères  :  l'un  d'eux  alvait  dé- 
truit la  partie  supérieure  des  muscles  jumeaux  ;  un  autre 
s'était  logé  dans  l'épaisseur  du  vaste  externe  delà  cuisse, 


JOVBIIAL  DE  MÉDBCCfB.  189 

mais  sans  être  encore  en  rapport  direct  avec  le  féniur  ; 
l6  troisième  enfin ,  commençait  à  naître  au  niilieu  d  un 
noyau  volumineux,  formé  par  une  infiltration  sanguine  dans 
le  tissu  cellulaire  du  creux  poplité. 

Çà  et  là,  sur  le  même  membre,  apparaissaient  quelques 
ecchymoses  sôus-cutanées  ;  quelques*unes  signalaient  la 
position  des  abcès  précédemment  indiqués. 

Malgré  le  voisinage  de  tous  ces  désordres,  les  vaisseaux 
et  les  gaiiglions  tyrophatiques  du  membre  inférieur  gauche 
étaient  intacts  ;  il  n*y  avait,  dans  les  veines,  nulle  trace 
de  phlébite.  L'articulation  tibiofémorale  gauche  contenait 
environ  deux  ♦•uillerées  d'une  synovie  claire ,  épaisse  et 
visqueuse,  mais  nulle  altération.  Il  n'y  avait  rien  à  l'ar- 
ticulation co^o-fémorale.  Partout ,  sur  le  trajet  du  membre, 
le  tissu  cellulaire  était  infiltré  d'une  sérosité  claire  et  ver- 
dâtre,  surtout  aux  environs  des  abcès. 

Membre  inférieur  droit.  —  A  la  région  plantaire  du 
pied  droit,  le  4issu  cellulaire  abondant  qui  entoure  les 
muscles  gavait  été  remplacé  par  un  |mis  séro-sanguinolent. 
Rien  au  dehors  n'en  pouvait  révéler  l'existence. 

En  avaiit  du  tendon  d'Achille,  dans  les  muscles  posté- 
rieurs de  la  jambe ,  était  creusée ,  comme  avec  un  emporte- 
pièce  ,  une  excavation  profonde,  aux  deux  bords  de  laquelle 
passaient  les  vaisseaux  péroniers  et  tibiaux.  Du  reste ,  cet 
abcès  ne  présentait  rien  qui  n'ait  déjà  été  signalé. 

Sur  la  continuité  du  même  membre,  on  trouva  encore 
plusieurs  autres  lésions,  semblables  à  celles  que  naus  avons 
déjà  décrites  :  une  partie  du  muscle  soléaire  avait  été  dé- 
truit par  un  abcès;  au  creu  poplité,  un  énorme  noyau 
d'infiltration  sanguine  logeait  une  petite  collection  puru- 
lente :  les  fibres  des  muscles  jumeaux  étaient  profondément 
et  largement  ecchyniiosés,  mais,  ne  contenaient  encore  au- 
cun foyer  central. 

Tout  le  membre  inférieur  droit  ne  présentait  rien  de 
notable^dans  ses  vaisseaux,  ni  dans  ses  articulations.  Comme 
à 'gauche,  le  tissu  cellulaire  était  fortement  infiltré. 

Cœur.  —  Une  grande  quantité  de  sérosité  citrine  dis- 
tendait  le    péricarde  :  toutefois ,   la    membrane    séreuse 


190  jouBiuii  ra  mimÊan. 

n'avait  rien  d*anomiaL  L'oreiUette  droite  contenait  quelques 
caillots  fibrlneux  et  cruoriques. 

Appareil  reêpiraiwre.  —  Le  ventricule  gauebe  du  laryui 
était  presque  effacé  :  au  fond  suintaient  quelques  goutte- 
lettes d'un  pus  grisâtre,  venant  d*un  abcès  placé  dans  la 
gouttière  latérale  gauche.  La  perforation  de  la  muqueuse 
et  de  la  membrane  arytheno-épigloUique  faisait  commu- 
niquer le  ventricule  avec  le  foyer. 

Au  sein  de  la  glandé  thyroïde  existaient  deux  ou  trois  pe- 
tites cavités  i^régulières,  assez  grandes  pour  loger  une 
aveline.  Ces  cavités  étaient  vides,  béantes,  et  tapissées  sur 
leurs  parois  d'une  fausse  membrane  sèche ,  épaisse ,  blan- 
châtre et  comme  caséeuse. 

D'anciennes  et  nombreuses  adhérences  fixaient  intime- 
ment les  poumons  aux  parois  thoraciques.  La  main,  en 
pressant  ces  organes,  senlait  une  foule  de  noyaux  indurés,  ré- 
pandus partout  dan^  le  parenchyme  pulmonaire.  C^  noyaux 
étaient  formés  par  une  matière  concrétée  jaunâtre,  repr^é- 
sentanl  du  pus  par  sa  couleur,  mais  ayant  la  consistance 
d'une  pâte  assez  ferme.  Du  reste,  on  ne  remarq;ua  nul 
signe  d'Inflammation  dans  les  parties  eptoiirant  ces  dépôts 
insolites. 

Dans  les  gouttières  postérieures  de  la  cavité  thoracique, 
le  tissu  cellulaire  sous-pleural  était  le  siège  de  plusieurs 
ecchymoses.  À  droite,  l'une  de  ces  ecchymoses  occupait 
une  assez  vaste  étendue  :  elle  paraissait  se  propager  dans 
les.  fibres  des  muscles  intercostaux  ;  cette  infiltration  san- 
guine se  continuait  jusque  dans  Tabdomen ,  où  elle  en- 
vahissait le  tissu  çfllulairé  sous-péritonéal  d'une  grande 
partie  de  Ihypochondre, droit.  .      . 

Çatnié  aAdofRitia/^.  —  A  la  partie  supérieure  du  foie 
était  un  endroit  ramolli,  rougeâtre,  grunieleux,  mais  non 
pas  encore  entièrement  désorganisé.  Cette  altération  tra- 
versait tout  le  lobe  droite  en  conservant  partout  le  diamètre 
d'une  pièce  de  cinq  francs.  ^  Dans  le  même  lobe  était  un 
autre  point  semblablement  altéré,  mais  beaucoup  plus  li- 
mité.-^  Du  reste,  dans  tout  Torgane,  il  n'y  avait  nulle 
trace  de  pus. 


iomnàt  VB  mÉMEcmm*  191 

La  raie,  hypertrophiée ,  était  d'une  flaccidité  remarqua^ 
bl«  et  trte*friable«  Le  couteau,  passé  légèrement  sur  les 
tranches  qu'on  y  fit,  y  recueillait  un  putrilage  rouge. 

Tous  les  autres  organes  contenus  dans  Tabdomen  ne 
préeentaient  rien  à  notera  La  muqueuse  intestinale  était 
semée,  çà  et  Ut,  d'uft  piqueté  légèrement  rosé. 

Cervêùu*  •—  Beaucoup  de  sérosité  à  la  base  de  la  grande 
caTÎIé  de  l'arachnoïde,  légère  infiltration  séreuse  du  réseau 
de  là  pté-mère,  telles  furem  les  seules  choses  que  Ton  put 
c(mstater  au  cer?eau.  Les  ventricules  latéraux  étaient  li- 
bres de  sérosité.     -  ^      ' 

FoMês  nasàks.  —  La  partie  supérieure  do  voile  palatin 
était  couverte  de  mucosités  troubles,  qui  descendaient  sur 
la  paroi  postérieure  du  pharynx.-^  La  muqueuse  recou- 
vrant l'apophyse  basiiaire,  présentait  deux  ulcérations , 
au^de^iHis  de  l'entrée  postérieure  des  fosses  nasales.  Ces 
ulcérations,  à  bords  relevés,  étaient  remplies  de  mucosi- 
tés purulentes.  *-^  Dans  la  fosse  nasale'gauche  étaient  deux 
autres  ulcérations  légères ,  se  deissinaut  sur  un  fond  rosé  : 
Tune  ,  était  à  ta  partie  postérieure  du  cornet  supérieur, 
l'autre ,  à  la  partie  antérieure  du-cernet  moyen  ;  elles  étaîenl 
couvertes  de  mucosités  troubles  et  grisâtres.  —  Au  fond 
du- sinus  spfaénoîdal  était  une  petite  surface  rouge,  coo-^ 
verte  aussi  d'un  mucus  suspect,  mais  sans  qu'il  y  eut  éro- 
sîoiï  bien  éi^idente  de  la  muqueuse. 

En  jetant  uû  coup  d'oeil  d'ensemble  sur  les  feits  dont 
on  vient  de  raconter  l'histoire ,  l'esprit  s'arrête  tout  d'abord 
aux  circonstances  qui  les  ont  précédés,  et  à  la  cause  qui. 
leur  a  domné  «aissanee. 

On  voit,  pen>dant  trofe  semaines,  la  famille  Gouurdo 
en  rapports  îfréquents  avec  un  cheval  morvc^ux;  pendant 
1  Séjours,  elle  s'abrita  sous  le  même  toit;  couche  à  trc^s  pas 
d»  lieu  oft  repose  ranimai  malade,  sans  que  nulle  cloisotn 
ne  les  sépare;  pendant  S  jours,  elle  voyage  avec  l^i  ;  purs 
des  accidents  éelateut. 

E}n  présence  de  faits  semblables,  il  est  difficile  desavoir 
si  c'est  par  inoculation  ou  par  simple  inféctiôii  que  l'éié^ 
meiM  mulent  a  péfiéUrÀ  dans  l'économie^  On  asâure  bien 

15 


192  JOOBRAL  BE   ftÉDBCOŒ. 

que  Gouardo  iravait  alors  à  la  peau  d-érosion  nulle  part  ; 
mais  quand  on  a  le  droit,  comme  ici,  de  supposer,  chez 
la  victiilie,  l'imprévoyance,  la  malpropreté  ef  l'usage  pro- 
bable, d'objets  contaminés,  on  peut  bien  croire  à  résorp- 
tion du  virus  porté  sur  quelquest  muqueuses,  sans  avoir 
besoin  d'invoquer  la  possibilité  de  l'infection. 

Quoi  qu*il  en  soit,  la  maladie  dont  il  fut  atteint  se  divise 
nettement  en  deux  périodes.  La  première  période  fut  lente, 
et,  dans  une  durée  de  sept  semaines,  se  dessina  avec  tous 
les  caractères  du  farcin  chVonique.  La  série  des  accidents 
commença  par.  une  angine,  tenace  il  est  vrai,  mais,  du 
reste,  sans  aucun  caractère  spécial.  Puis ,  on  vit  succes- 
sivement $e  manifester  des  douleurs  vagues  dans  les  nnem- 
bres ,  de  la  tristesse,  de  la  prostration,  un  pe^  de  diarrhée, 
une  toux  sèche,  de  renrouement,-parfois  un  léger  mouve- 
ment fébrile,  et,. enfm,  des  abcès  multiples,  mais  rien  de 
sensible  du  côté  des  fosses  nasales. 

Tout  cet  ensemble  symptomatique ,  légèrement  modifié 
par  des  rémissions  ou  des  recrudescences  irrégulières, 
constitua  la  première  période^  Il  y  avait  bien  là  tous  les 
signes  d'une  infection  purulente  :  mais  c'était  une  infec- 
tion purulente  survenue  d'eml)lée  ,  et  dont  on  nepouvait 
trouver  la  raison  d'être  que  dans  une  intoxication  spéciale. 
Dans  la  seconde  période,  l'affection ^ sans  changer  de 
nature,  changea  de  forme.  Elle  prit  les  caractères  delà 
morVe  aiguë.  L'aggravation  subite  des  symptômes  précé- 
demment indiqués,  la  persistance  du  mouvement  fébrile  et 
l'apparition  d'une  douleur  vive  à  l'épaule  droite,  signala 
le  début  de  ce  changement.  Mais,  en  même  temps,  parais- 
saient des  signes  nouveaux   et  pathognomooiques ,   qui 
donnèrent  à  cette  période  son  caractère  propre  :   ce  fût 
l'érysipèle  de  l'épaule,  les  phlyctènes  gangreneuses,  les 
pustules  violacées  et  surtout  l'écoulement  mucoso-puruient, 
qui,  de  là  partie  postérieure  des  fosses  nasales,  tombaient 
dans  le  pharynx.  Cette  période  eut  une  marche  plus  ra- 
pide et  plus  tranchée  :  elle  ne  dura  que  8  jours  et  se  ter- 
mina par  la  mort. 

L'autopsie  révéla  des  lésions  anatomiques  nombreuses. 


JOmolAL  BB  HÉIKBCIRB.  193 

qu'on  petit,  d'après  la  similitude  de  leur  caractère^  ranger 
en  un  petit  nombre  de  groupes,  distincts. 

Tout  d'abord  se  présentent  les  infiltrations  sanguines , 
dont  le  siège  de  prédilection  parut  être  dans  le  tissu  cel-* 
lulaire  libre  et  dans  les  muscles.  Leur  forme  ne  fut  pas 
toujours  là  nième.  Ce  n'étaient,  parfois,  que  dé  .légères 
couches  eccbymotiques  dans  des  lames  celluleuses  minces  ; 
d'autres  fois,  au  contraire,  c'étaient  des  noyaux  durset  plus 
ou  moins  volumineux ,  formés  par  du  sang  épanché  dans 
des  tissus  serrés ,  dont.souvent  on  ne  reconnaissait  plus 
aucun  des  caractères  primitifs. 

Après  les  infiltrations  sanguines  viennent  les  collections^ 
purulentes,  qui,  comme  les  lésions  précédentes,  semblè- 
rent siéger  surtout  dans  le  tissu  cellulaire  et  dans  lés 
muscles;  pourtant,,  les  poumons  en  étaient  aussi  tout  rem- 
plis. Le  foie ,  le  cerveau ,  les  articulations,  si  tristement 
privilégiées  dans  l'infection  purulente ,  ne  présentaient  ici 
que  quelques  altérations  tardives  ou  de  nulle  valeur,  mais  nulle 
trace  de  pus.  Les  veines  axillaires  et  sous-clavières  droites 
furent  les  seules  qui  laissèrent -voir,'  dans  leur  cavité, 
quelques  grumeaux  jaunâtres  ou  quelques  traînées  puru- 
lentes mêlées  à  du  sang  liquide  :  c'était  là,  il  est  vrai  ,  la 
région  le  plus  altérée. 

Les  abcès  n'avaient ,  dans  leurs  caractères ,  que  peu  de 
différences.  Pourtant ,  ceux  des  muscles  s'étaient  formés 
d'une , manière  toute  latente;  et,  comme  ils  étaietit  placés 
profondéndent^ ,  ils  restèrent  ignorés  jusqu  à  la  fin.  Ceux  du 
tissu  cellulaire,  au  contraire,  se  révélèrent  presque  dès 
leur  début 4.  par  un  état  inflammatoire  plus  ou  moins  pro- 
noncé.' Hais,  du  reste,  c'était  presque  partout  des  foyers  an- 
fraciaeux  creusés,  soit  dans  des  musclés  ecchymoses,  ramollis 
et  érodés,  soit  dans  du  tissu  cellulaire  infiltré  de  sang.  Pres- 
que toujours,  ces  cavités  étaient  remplies  d'un  putrilage 
rouge ,  ressemblant  à  un  détritus  musculaire  mêlé  de  pus. 
Toutefois,  les  dépôts  insolites  qui  furent  trouvés  au  sein 
des  poumons,  présentèrent  des  caractères  particuliers.  Leur 
cûkMration  légèrement  jaunâtre,  leur  consistance  assez 
ferme ,  l'absente  de  tout  état  inflammatoire  et  dé  toute  in- 


194  JovBM»  w  wtvmm* 

filuntion  «uguio^  à  leurp^i^iphério,  leiirvoluiMatleur 
forme  arrondie,  loa  fa4»|ieiH  as^i  r689Wibler  k  des 
mas«fis  tub«rculQU9«$«  ^  ia  pa^udcKineipbfmM  épaisae, 
qui  tapis^it  les  eavitéa  béantes  trouvées  dans  la  glaode  tfay- 
roïde ,  semblfiU  élre  de  même  nature* 

JUaist  ftu  milieu  de  tout  cela,  ce  qu'il  y  eiil  do  pbia  re- 
marqufdUe,  c^tMt  Ifi  luapi^re  dbui  les  iafiUraMoos^aMgiHiitt 
et  les  coU^tiooa  pavitmiy^  parurent  se  forioer  «t  a'eoahai- 
\W*  Daos  les  unes  semblait  Alr^  Torigiae.  4b9  aulcea;  les 
iDiiUr<itiop$  de  «ang  ne  parai^aaie»!  que  le  principe  ai 
comme  le  premier  degré  de  iQua  lea  imaK4Ua«attiMta|Mir 
tf ilflgili^uy,  Ainai ,  of)  fut  toujours  au  oenU^  4e  eea  myaux 
dHu^Uration  que»  furent  trouvés  les  noytuK  puruleoia  :  par- 
foi^,  ce  n'était  que  quelques  gouttelettes  de  pua,  jetées  au 
milieu  d'un  caillot  ;  en  d>utrea  endroits,  \^  fonte pumleMi 
avait  pi^esque  entièrement  envahi  les  tissus  inmurés ,  tandis 
qu'ailleurs,  de>  noyaux  ecohyoïiQsés  ne  préaenlaieut  eiMXMra 
aucun  foyer  central. 

S^  dehors  de  toutes  ces  alt^r^ions^  on  eu  rettoontrait 
une  autre,  qui  parut  être  seuk  de  sa  nalture:  je  veux,  pukrlor 
de  ce^  fibres  piusQulfires  jauu^treai  sèoh^,  irutbliea,  qui 
furent  trouvées  au  foini  d'un  foyer  effi»cé  pac  une  ^calri- 
sation  friable  elle-même,  et  tout  entourée,  sur  ses  bords, 
d'un  cercle  eccbyimltH|U^* 

i4eafuisudes;  que  Vqu  aur<^U  piu  cousidôpev  t^ul^'ahocd 
cûtnn^  4es  allératioua  distinctes  4^  temlfs  lea  wtrea, 
av^ept  çepeuidant  un  po^nt  die  cputacl  tivec  leacoUections 
puruleuiea:  peut-4tre  inê«fie  y  avait-il^  enM^  ettaa,  un 
lieu  duuiw  plus.  iuAimek  Pendant  la  vie,  oi^«vail  dkéî*  pu 
remarquer  quie  l'apparitiw  des  pustulea  n'avait  é*é  qu'un 
pliét^w^ne  seoendaire  et  couséeutif  à  une  altéra^ioA  gmve 
des  p^rtiei^  sousr^Qei^te&  Après  la  mort,  xm  ^vait  tr«wvé 
que  la  peau  n'était  pa^  le  siège  aiMon^ique.  eiiQlusîf  de 
i'éf  uption  (M^uleuae»  car^  w  sommot  des  pufttutea,  venaient 
aboijuir  des  lÂgiue^  grisAtreade  lîAsuapli&fMi  naaina  nunoUis, 
pa^teut  de  foyers  profonds  et  travei'aanti  u«k  lissiiiceUuliÛN 
é^ssi  et»  lardacé.  teiut  cela  9eo^a|t  asaes  im  ^ua  ces 
lignes.  g^ises^n'éiaÂ^nlqm  In  dioecitiqu  suiiûepar  l'^xtensÎM 


jmuNLt  Di  HAMomfi»  195 

progressive  des  abdte^  et  i)ue  téft  pustules  b*àuraiMt  ^té 
bientAi  que  l'extrémité  de  trajets  fistvrIeUx ,  psf  où  des 
foyers  profonds  se  seraient  traduits  no  débets  Après  (a 
rupture  dé  l'épiderme  soulevé. 

Dans  le^  dernier  groupe  des  lésions  anaton^i<)aés ,  VreA* 
aent  eoltn  dmiieêratioUs  dont  là  raletir  était  slgâifiéatire. 
L^aur  position,  à  l'entrée  postérieure  des  ft^sses  nasales, 
explique  assez  bien^  le  jetage  qui  se  fit  dans  lé  ptiarynx 
plutôt  qu'an  dehors.  Hah ,  si  leur  existence  Oârat^tétisait 
la  fiionreâigué,leur  peode  profondeur  et  d*étendaé,  en 
dénotant  leur  formation  réeente,  attestait  aussi  que  la  ma- 
tadieftie  fat,  dans  sa  première  période,  qu'un  farcin  chro> 
nique. 


OBSETL  VA  JJOlV^^ct'ao^Aa^.f^arM.lttiiiHnM, 
Médeâin  de  l'HMel-Diéu  de  JfàntèÉj  secritaire 
du  Consôit  central  d'hyùihie  piitUque  et^de 
salubrité  du  département  de  la  Loire-Infériefure. 


Lé  sujet  de  cette  obeervatton  est  venu  à  6  mo«s\de 
terme ,  avec  xm  enfant  biM  conformé. 

Afipect  extérieur  :  maese  ô^oide,  terminée ,  dtf  cdté  de 
sa.  pçtiie  extrémité  «  par  des  membres  abdominattft  notma- 
fement  eônfàtmés  ;.l^aulre  extrémité ,  arrondie ,  recouverte 
d'une  peau  lisae  et  uniforme,  n'oflfire  rien  qui  indiqué  liés 
pdiita  que  la  tète  et  les  membres  thoraciques  devaient 
oocuiper. 

Le  iSordM  ombilical)  qnri  a  été  conservé  ate<i  ûneptifrtiie 
dofiaioeiit»'^  n'a  pas  plue  Ae  15  milHmètves  <to  foo^uéW. 


196  JOVUUL  BB 

U  misse  toUle  a  de  26  à  37  ceotimètees  de  loog;  sa 
circonftreDGe  inesore,  dans  Tendroit  le  pk»  volumineux , 
24  cenUmètres  eoviroD. 

En  incisant  les  tégumenU,  on  trouve,  au-dessous,  un 
tissu  cellnlaire  hrdacéet  infiltré;  de  la  sérosité  s'en  écoule 
en  abondance.  A  droite  et  en  haut,  sur  te  partie  antérieure 
du  tronc,  existe,  immédiatement  sons  la  peau,  un  kyste 
séreux  capdrie  de  contenir  une  petite  noix-  Nulle  part  m 
ne  remarque  de  graisse.  U  couche  sous-cutanée  de  la 
parUe  po^eure  du  tronc,  épaisse  de  12  à  13  milliine- 
très,  offre,  comme  à  l'état  normal,  une  or^nisation  «»«^- 
rente  de  celle  de  h  partie  antérieure,  qui  a  de  25  à  30 
millimètres  d'épaisseur. 

Cette  couche  ceUulaire  est  parcourue  par  quelques  vais- 
seaux déliés  plus  nombreux  en  arrière  qu'en  avant. 

Les  membres  abdominaux  sont  également  recouverts 
d'une  couche  épaisse  de  tissu  cellulaire.'  Celui-ci  contient 
un  peu  de  graisse,  mais  toujours  beaucoup  de  sérosité  :  il 
a  l'aspect  moins  laidacé  que  celui  du  tronc. 

Au-dessous  de  la  couche  sous -cutanée,  sont  les  cavités 
thotacique  et  abdominale;  moins  développées  que  ue  le 
fiiisait  présumer  le  volume  total  du  tronc. 

Aucune  trace  des  membres  thoraciques  ni  des  muscles 
qui  meuvent  l'épaule. 

Sysiéme  nerveux.  —  La  moelle  épiniëre  se  terminé  eu 
haut  tout  à  coup,  sans  aucun  renflement  ni  amincisse- 
ment; en  bas,  elle  offire  la  disposition  normale.  On  en 
voit  naître  les  nerfe  intercostaux ,  au  nombre  de  9  de 
chaque  côté,  les  plexus  lombaire  et  sacré.  Lés  nerfe  fé- 
moral et  sciatique  ont  la  disposition  ordinaire. 

Le  long  de  la  colonne  vertébrale,  on  trouve  les  gan- 
glions thoraciques  de  chaque  côté ,  puis  les  nerfs  grand  et 
peut  spianchniques,  et,  enfin ,  les  ganglions  semi-lunaires, 
ires-peu  développés,  dans  la  situation  normale. 
^  -^^  locomoteur,  squeUOe.  —  La  colonne  vertébrale 
^rT^^  ."^  .'^"'"^  vertèbres,  cinq  lombaires  et  dix 
déSwToéi^^f''  de  chaque  côté,  que  neuf  côtes  bien 
développées;  en  haut,  il  ^mble  en  exister  uoe  dixième, 


JOTTEffAl  M.  MÉÔBCUm.  1 07 

mais  elle  n'atteint  pas  le  sternum.  Ce  dernier  os  ne  s'éloigne 
de  l'état  normal  que  par  sa  brièveté. 

En  haut ,  dans  la  masse  homogène  de  tissu  lardacé ,  à 
peu  de  distance  de  l'extrémité  de  la  colonie  vertébrale , 
on  rencontre  trois  ou  quatre  pièces  osseuses  de  forme  irré- 
gulière :  ce  sont  probablement  des  rudiments  de  vertèbres 
cervicales. 

Les  os  du  bassin  et  des  membres  abdominaux  sont  bien 
conformés. 

Muscles,  -r-  Tous  ceu'x  de  la  colonne  vertébrale,  les  in- 
tercostaux, ceux  du  bassin  et  des  membres  abdominaux , 
sont  parfaitement  reconnaissables  :  ils  sont  pâles,  minces, 
membraneux. 

Appareil  circulatoire.  —  Absence  de  cœur:  un  grand 
vaisseau,  qui  règne  tout  le  long  de  la  colonne  vertébrale , 
se  divise  en  bas ,  pour  les  membres  abdominaux ,  comme 
le  fait  ordinairement  l'artère  aorte.  Plus  dilaté  à  sa  partie 
moyenne ,  ce  vaisseau  diminue  insensiblement  vers  ses  deux 
extrémités.  Il  se  divise  en  haut  en  deux  branches,  jiont  la 
supérieure  va  se  perdre  dans  le  tissu  cellulaire  sousrcutané  ; 
la  seconde,  eontournée  comme  la  crosse  de  l'aorte,  vient 
'  se  subdivisier  en  deux  rameaux  d'inégale  grosseur ,  se  ren- 
dant à  deux  masses  spongieuses  qui ,  par  leur  position 
et 'leur  apparence ,  rappellent  les  poumons. 

La  veine  ombilicale,  suivie  depuis  le  cordon,  passe  à  la 
face  supérieure  du  foie  dans. une  gouttière  superficielle, 
et  va  se  rendre  directement  dans  les  poumons,  après  avoir 
reçu,  auprès  du  foie^  une  très-petite  veine  venant  du  mé« 
senlère;  il  a  été  impossible  de  découvrir  aucun  vaisseau 
veineux  dans  les  membres  abdominaux. 

Les  artères  ombilicales,  nées  des  iliaques  primitives,  re- 
montent lé  long  de  ia  vessie  pour  venir  à  l'ombilic. 

Appareil  respiratoire- '—  Les  deux  poumons  présentent 
une  organisation  vasculaire  assez  marquée  ;  le  gauche,  assez 
développé.,  occupe  tout  le  côté  correspondant  de  la  cavité 
thoracique;  le  droit,  très-petit,  est  refoulé  par  le  foie 
jusqu'au  sommet  de  cette  cavité  ;  il  reçoit  une  branche  ar- 
téHelle  plus  petite  que  celui  du  côté  opposé.  Aucune  trace 


ttt  JO^«M  w 

des  broocbes  ni  de  la  Iraohée.  Un  diapbr^goie  »inoe  sépare 
la  poitrine  de  Fabdooien. 

J^tpareil  digestif.  —  Canal  digestif  terminé  en  bas  par 
un  anua  bien  conformé,  remontant  de  là  directement,  jus- 
que derrière  le  foie,  sans  aucune  courbure  »  puis ,  formimt 
quelques  flexuosités  au-dessous  du  bord  inférieur  de  ce 
viscère,  il  redescend  pour  aller  se  terminer  à  Tombilic  dans 
une  espèce  de  cul-de-sac.  C'est  là  l'intestin  anal  d'Oken; 
nulle  trace  de  la  portion  supérieure  du  canal  digestif,  in- 
testin stom^ical  du  même  auteur.  L'intestin  anal  présente  , 
dans  toute  son  étendue,  un  tube  uniformément  développé 
et  parfiiitemeat  blanc  Foie  volumineux^  normal;  point  de 
rate. 

Appareil  genikhuriuaire.  <—  Organes  urinaires  bien  dé- 
veloppés ;  ouraque  formant  avec  la  vessie  un  conduit  coni- 
que, dont  la  petite  extrémité  répond  à  l'ombilic. 

Parties  sexuelles  mâles,  extérieures,  trèa-^léveloppées  et 
bien  conformées^ 


R&FLXXIOIIS. 

L'acéphale  dont  nous  venons  de  vous  donnur  la  des- 
cription, provenait  d'une  grossesse  double,  comme  oelit  a 
élé  observé  dans  presque  tous  les  cas.  Noua  ignorons  si 
les  vaisseaux  ombilicaux  communiquaient  avec  ceux  de 
l'autre  enfiint,  n'ayant  eu  à  notre  disposition  que  le  sujet 
monstrueux,  avec  une  très-petite  portion  du  placenU. 
Cette  communication  peut  être  regardée  comme  probable, 
car  on  a  pu  la  constater  dans  la  plupart  des  grossesses 
doubles.  Tout  le  monde  sait ,  et  nous  avops^été  plutOeurs 
fois  temom  du  fiiit  qu'après  la  sortie  du  premier  enfant, 
m  poruoo  du  cordon  adhérente  au  placenU  peut  devenir 
te  source  duno  bémorrhagie  qu'il  &ut  arrêter  par  uueU- 
g^ure ,  sous  peine  d'exposer  le  second  enfiint  à  mourir 

Nous  ferons  r«0Mn(uer  la  préswce  e»  le  déveloDueuieat 
normal  du  to.e .  ™Ugré  lahsiîoede  rïto^tS^ 


iWKUJU  DE  M^MCmi*  199 

sécréteur  n'existe  que  chez  w  petit  nombre  d'aeéphaies , 
et,  la  plupart  du  temps,  il  est  mal  développé. 

Il  n'existait,  chez  notre  sujet ,  que  la  partie  inférieure 
du  tube  digestif  et  aucune  trace  de  la  portion  supéirieure, 
malgré  le  développement  déjà  assez  par&it  de  la  poitrine. 
L'absence  de  la  raté  doit  se  Her  nécessairement  à  celle 
de  Testomac. 

Les  poumons,  qui  manquent  souvent  chez  tes  acéphales, 
existaient  chez  le  nôtre ,  et  Tun  d'eux  était  trèst-déyeloppé. 
L'absence  de  toute  autre  veine  que  la  veine  ombilicale 
a  été  souvent  observée  ;  ici ,  nous  ne  voyons  qu'une  très* 
petite  veine  venant  du  mésentère  et  &é  déchargeant  dans 
Va  veine  ombilicale. 

L'arrêt  du  développement  a  dû  avoir  lieu  à  une  époque 
trè^rapprodiée' du  moment  de  la  conception,  puisqu'on 
ne  trouve  aucune  trac^de  la  tête,  à  moins  qu'on  ne  qou* 
sidère  comme  des  rudiments  de  ^on  squelette  les  pièces 
osseuses  irrégulières  dont  nous  avons  parlé ,  et  que  nous 
avons  considérées  comme  des  vertèbres  cervicales  non  dé- 
veloppées. Le  kyste  séreux  trouvé  près  de  l'extrémité  su* 
périeare,  semble  indiquer  que  l'arrêt  de  développement  a 
èlè  très-précoce,  car  la  forme  globuleuse  ou  vésiculaire  est 
le  premic^r  état  des  organes. 

Le  développement  des  organes  génitaux  et  surtout  la 
préseuee  des  testicules  dans  le  scrotum^  pouvait  faire  sup* 
poser  que  l'accouchement  a  eu  lieu  à  s4>t  mois  de^  terme 
et  M»  à  skx  01^,  comme  on  nous  l'a  dit,  car  à  cette  époque 
les  boufses  sent  encore  vides* 


200  JOUIRAI  DB  MÉBBGIiai* 


NOTE  sur  pliuieurs  calculs ,  par  M.  Gactron  , 


MsSSIfiL'RS  , 


Eu  extrayant  ces  divei-ses  notes  d'un  travail  inédit  bien 
plus  étendu  de  M.  Ed.  Moride ,  sur  Tbistoire  des  maladies 
ealculeuses  et  sur  la  nature  des  calculs  chez  rhomroe  et  les 
animaux  dans  l'Ouest  de  la  France ,  études  faites  au  point 
de  vue  de  la  chimie  et  de  la  physiologie ,  je  n'ai  d'autre 
but  que  de  joindre  aux  calculs  curieux  que  je  vais  fiiire 
passer  sous  vos  yeux ,  leur  composition  chimique  et  leur 
histoire  abrégée. 

Le  n»  i  est  un  calcul  intestinal,  rendu  le  27  mai  1854, 
par  une  femme  de  60  ans,  d'une  parfaite  santé ,  et  qui 
jamais  ,  dans  le  cours  de  sa  vie ,  n'avait  été  atteinte  de 
maladies  ealculeuses. 

Dans  la  soirée  du  27  mai ,  prise  subitement  de  ferles 
coliques ,  qui  avaient  leur  siège  surtout  à  l'épigaslre  et 
dans  Imiestin  grêle,  on  me  fit  appeler  près  de  la  malade. 
4  ordonnai  des  bains,  des  tisanes  émollientes  et  des  cata- 
plasmes. • 

m  Jp"^"^«**'' j  ^^^"^^  •P'*^^  '  ^'^y^"*  '®s  coliques  conti- 
fl«AnoJ!i  ^  ^^"^'""^*''^"'  "»e  P<>t»on  huileuse.  Sous  Fin- 
Sunt  L^^  médicament ,  les  douleurs  se  déplacèrent 
?n  moïs  v^vl?  *'  ''?^'  '°^"^**°«^'  ^  «*  devinrent  de  moins 
iTpbsTS^^^^^^^  --"-  ^«'^"^  «PP-»»aient 

On  besoin  d'aller  à  la  garfe^robe  se  manifeste  :  la  ma- 


JOUBUàL  DB  BlÉinGOlB.  201 

lade  crbii  foire  une  selle  abondante  ,  un  corps  dur  tombe 
au  fond  du  vase;  étonnée  du  bruit,  elle  regarde  et 
trouve  ce  calcul  isolé ,  qu'elle  voqlut  bien  me  remettre. 
Depuis ,  elle  n*a  plus  rendu  un  seul  calcul  et  n*a  jamais 
éprouvé  de  coliques. 

Comme  vous  pouvest  le  vérifier  ,  Messieurs ,  ee  calcul , 
long  de  4  centimètres,  large  de  2  centimètres  50  millim., 
et  d'un  pourtour  de  8  centimètres  3  millim. ,  pjèse  14 
grammes  50  centigr.  ;  sa  forme  est  ovoïde  régulière ,  sa 
surface  est  rugueuse,  mamelonnée,  parsemée  d'une  multi- 
tude de  petits  cristaux  brillants  micacés  jaunes ,  et  quel- 
quefois brillants. 

En  enlevant  du  calcul  la  couche  extérieure  épaisse  et 
colorée  ,  on  trouve  au-dessous  de  gros  cristaux  blancs  et 
brillants  ;  les  deux  tiers  du  calcul  sont  d'un  brun  rouge  , 
les  deux  extrémités  d'un  blanc  jaunâtre;  la  cassure  est  mica- 
cée et  a  beaucoup  d'analogie  avec  le  blanc  de  baleine  non 
raffiné. 

Au  milieu  dû  calcul ,  se  trouve  un  espace. 

Le  frottement-  de  la  scie  détermine  sur  les. deux  faces 
du  calcul  séparées  une  coloration  jaune,  luisante,  sous 
laquelle  on  distingue  des  jcristaux  gris&tres  disposés  par 
couches  concentriques,  de  formation  progressive.  La  den- 
sité du  calcul  est  peu  considérable.^ 

Sous  l'influence  d'une  chaleur  modérée,  il  entre  prompte- 
ment  en  fusion  ;  élève-t-on  la  température ,  il  s'enflame 
sans  dégager  d'odeur  désagréable;  les  cendres  sont  presque 
imperceptibles. 

Fondu  à  une  douce  chaleur  ,  dans  une  capsule  en  por- 
celaine ,  la  substance  liquéfiée  se  colore  eu  jaune  foncé  et 
cristallise  par  le  refroidissement.  . 

L'eau  distillée  froide  ou  bouillante  ne  dissout  rien  du 
calcul ,  elle  reste  incolore  après  le  contact  ;  le  calcul  ne 
s'y  fond  ,  ni  ne  s'y  ramollit. 

L'alcool  rectifié  bouillant  dissout  presque  la  totalité  du 
calcul ,  sauf  une  petite  quantité  de  poudre  jaune  ,  qui  doit 
être  probablement  la  matière  colorante  de  la  bile.    : 


ao2 

Le  papier  el  le  teintiire  de  touraesoi  ne  varient  pasée 
teinte  «  lorsqu'on  les  plonge  dans  b  sohilioo  aicoôliqee. 

L'anal)  se  qualitative  et  quantitative  indique  les  résultais 
suivants  p.  V©  : 

Cbolestérine (C^*H"0-)      76 

Matière  colorante  jaune 13 

Cendres i 

HomidHé >  fi 

Perte \ 


Total 100 


N""  2.  —  Dans  la  boite  n""  2 ,  vous  trouverez  des  calculs 
de  la  vessie ,  rendus  par  un  homme ,  dans  l'espace  de  deux 
jours  «  au  nombre  de  plus  de  500  ;  ils  oni  tojis  une  forme 
pilulairt,  et  sont  tantôt  gros  comme  des  pois  ronds, 
tantôt  comme  du  plomb  à  lièvre ,  tantôt  comme  de  la 
cendrée;  leur  forme  est  régulière  et  le  poida  des  plus 
gros  atteint  jusqu'à  3  décig.  5  ceotîg. 

Leur  couleur  extérieure  est  d'un  gris-blanc  ;  la  cassure 
en  est  jaunâtre  et  présente  une  cristallisation  à  rayons  qui 
partent  du  centre  de  chaque  calcul. 

La  première  couche  du  calcul ,  limitée  par  un  cercle , 
est  environ  d'une  épaisseur  de  i  centimètre  ;  la  poussière 
qui  blanchit  les  doigts  étant  enlevée  de  la  surface  au  calcul, 
laisse  apercevoir  une  surface  d'un  beau  jaune  orangé  d'une 
égalité  parfaite  et  d'un  grand  poti. 

La  densité  de  ces  calculs  est  considérable. 

Au  feu,  ils  sedurimomiit,  se  fBBdilloit  eu  dégageant 


20» 

uoe. odeur  de  HMlièves  animales  brûlées;  ta  combuaticm 
en  est  parfaite  et  sans  résidus. 

lia  sont  insolubles  dans  l'eau  ,  insolubles  dans  TalGOol , 
soit  à  chaud ,  soit  à  froid. 

Solubles  dans  Tacide  nitrique  ,  ils  laissent  après  éva'po- 
ration  de  eeluh-ci  une  abondante  quantité  d'acide  rosa- 
cique  ;  ils  ne  contiennent  qu'une  matière  colorante  jaune 
et  de  Tacide  urique. 


N<»  3.  —  Le  n°  3  est  un  calcul  dont  la  cortiposilion  est 
la  même  que  celle  du  n°  i  ;  il  appartient  à  la  classe  des 
calculs  intestinaux  et  se  comporte  comme  eux  sous  l'ac- 
tion des  réactifs. 

Sa  forme  est  très-remarquable  ;  il  affecte ,  en  effi^ ,  la 
forme  d'une  masse  ronde  applatie  des  deux  bouts ,  dont 
le  pourtour  imite  la  cupule  rugueuse  d'un  gland;  une  fois 
la  couche  brune  enlevée ,  le  calcul  est  blanc. 

Son  poids  est  de  7  grammes  852  millig. ,  sa  densité  est 
peu  considérable. 

La  longueur  est  de  2  contimètres"  4  millim.  ;  sa  lar- 
geur ,  de  2  centimètres  3  millim.  ;  et ,  le  pourtour  ,  de  7 
centimètres  3  millim.  ;  le  pourtour  pour  Tes  deux  extré- 
mités égale  8  centimètres. 

Son  applatissement  doit  venir  de  ce  qu'il  était  accom* 
pagné  d'autres  calculs  semblables ,  qu'on  n'a  pu  apporter. 


N<^  4.  —  Les  12  ou  14  calculs  qu'on  voit  affecter  des 
formes  triangulaires ,   sont  des  calculs  biliaires  à  angles 


204  jouuut  w 

oblus ,  formés  de  cholestérioe  et  de  nwlîère  eolonote  de 
la  bile. 

Us  sont  creux  au  milieu,  et,  dans  leur  cassure,  laissent 
apercevoir  une  cristallisation  en  aiguilles  disposées  hori- 
zontalement autour  d'un  axe ,  à  la  manière  dont  les  cou- 
ches ligneuses  dans  le  chêne  sont  disposées  autour  de  la 
moelle. 

Sous  la  substance  très-brune  et  des  luisants  des  calculs, 
on  distinguerait  des  stries  couleur  chocolat  irrégulière , 
et  d'une  densité  très-minime. 

Le  plus  gros  calcul  pèse  0(  61. 

Après  la  combustion ,  on  trouve  une  grande  quantité 
de  cendres. 


jpiiBNix  DE  hédeghib.  205: 


PRIX 
DE  LA  SOCIÉTÉ  DE  CHIRURGIE  DE  PARIS. 


Prix  de  la  Société  pour  1S58. 

La  Société  rappelle  qu'elle  a  mis  au  concours,  pour 
l'année  18  56,  la  question  suivante  : 

Des  résultais  définitifs  des  amputations  des  membres 
inférieurs.  —  Le  prix  est  de  400  fr.  —  Les  mémoires  de- 
vront être  rédigés  en  français  ou  en  latin ,  et  adressés , 
suivant  les  formes  académiques,  au  secrétariat  de  la  Société, 
rue  de  l'Abbaye,  3,  avant  le  15  mai  1856. 

Prix  de  la  Société  pour  tM'9. 

Des  plaies  des  os.  —  Les  candidats  n'auront  pas  à  parler 
des  fractures.  Us  sont  invités  à  s'occuper  principalement 
des  solutions  de  continuité  produites  sur  le  squelette  par 
laction  de  la  scie  ;  néanmoins,  la  Société  accueillera  avec 
intérêt  les  recherches  qu'ils  pourront  faire  sur  les  lésions 
des  os  par  des  instruments  piquants  ou  tranchants.  —  Ce 
prix  est  de  400  fr.  —  Les  mémoires  devront  parvenir  au 
secrétariat  avant  le  15  janvier  1857. 

Prix  de  la  Société  pour  1S5S« 

Des  paralysies  traumatiques.  —  Ce  prix  est  de  400  fr.  — 
l^es  mémoires  devront  parvenir  au  secrétariat  avant  le  1 5 
janvier  1858. 


Prix  HvTiik 

La  Société  de  chirargie,  après  une  donation  de  M.  Duval, 
fonde,  à  titre  d'encouragement,  un  prix  annuel  de  la  va- 
leur de  100  fr.,  en  livres,  pour  Tauteur  de  la  meilleure 
thèse  en  chirurgie  publiée  en  France  dans  le  courant  de 
Tannée. 

Autant  que  possible,  les  recherches  doivent  porter  sur 
un  seul  sujet  et  s*appuyer  sur  des  observations  recueillies 
par  l'auteur  lui-même  dans  un  service  d'hôpital. 

Tous  les  auteurs  anciens  ou  modernes  qui  ont  traité  le 
même  sujet  devront  être  indiqués,-  ainsi  que  la  source 
précise  des  dlations. 

Seront  admis  seuls  à  concourir  les  docteurs  ayant  rempli 
les  fonctions  d'internes  définitifs  dans  les  hôpitaux  civils , 
ou  ayant  un  grade  analogue  dans  les  hôpitaux  militaires 
ou  de  la  marine. 

Les  thèaes  aottlenues  depuis  le  i*' janvier  1855  jusqu'au 
31  décembre  de  la  même  année  seront  seules  admises  au 
ccmcours  pour  le  prix  de  1856. 

Les  candidats  devront  adresser  franco  deux  exemplaires 
de  leur  thèse  au  secrétariat  de  la  Société,  rue  de  F  Abbaye, 
3,  avant  le  1 S  janvier  1856,  et  indiqiier  dans  la  lettre  d'en- 
voi les  hôpitaux  où  ils  ont  fait  leurs  études. 


JOURNAL 


DB  LA 


SECTION  DE  MEDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


BUI^LEim  DES  SÉANCES. 


Séance  du  14  septembre  1855. 

PBÉSmENCE   DE  M.  MAHOT ,  TICE-PBÉSiDENT. 

Ouvrages  reçus  par  la  Section  : 

l"  Recueil  des  procès- verbaux  des  séances  de  la  Société 
de  Médecine  pratique  fondée  en  1808;  années  1853  et 
1854. 

16 


208  JOUBIIAL  Dfi  MÉOBCim. 

2""  Recueil  des  travaux  de  la  Société  médicale  du  dé- 
partement d'Indre-et-Loire;  2*  trimestre  de  1854. 

3"*  Mémoire  et  Observations  cliniques  de  médecine  et 
de  chirurgie,  par  le  docteur  Morand,  de  Tours. 

4''  Hémoires  de  la  Société  royale  des  sciences,  lettres 
et  arts  de  Nancy;  1843, 

S*"  Compte-rendu  des  travaux  de  la  Société  impériale 
de  Médecine ,  Chirurgie  et  Pharmacie  de  Toulouse;  1855. 

6*»  Mémoires  de  l'Académie  de  Médecine;.  1854. 

L'ordre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  Rouxeau ,  qui  lit 
un  travail  sur  la  méningite  des  enfants  (1). 

Cette  lecture  donne  lieu  aux  réflexions  suivantes  : 

M.  Petit  trouve  le  travail  de  M.  Rouxeau  très-intéres- 
sant; mais  il  pense  que  la  dernière  objection  que  Fauteur 
s  est  posée  a  peutétre  une  portée  plus  grande  que  cdle 
qu'il  paraît  lui  accorder.  Il  n'existe  pas,  en  effet,  de  signes 
distinctifs  suffisants  pour  établir  d'Une  manière  positive  le 
diagnostic  différentiel  des  deux  espèces  de  méningite.  En 
1848,  à  la  colonie  de  Petit-Boyrg,M.  Petit  observa  une 
épidémie  de  méningite  cérébro  spinale  dans  laquelle,  chez 
les  malades  qui  succombèrent ,  les  autopsies  lui  montrè- 
rent du  pus,  des  fausses-membranes ,  etc.  Certains  malades 
qui  avaient  offert  un  appareil  symptomatique  aussi  carac- 
térise et  au  moins  aussi  grave,  en  apparence,  que  ceux 
qui  moururent,  guérirent  cependant  à  son  grand  étonne- 
T"\-  7"si,  on  aurait  eu  tort  de  supposer  chez  ceux-là, 
IpE^  swilitude  des  symptômes,  l'existence  des  mêmes 
Darn,!^"®  ^^^^  ^®"^  ^"'  succombèrent.  Il  ne  faut  donc 
Sent  T^ '''''' ^y'^P^^^  d«  valeur  qu'ils  n'en  mé- 

sidfcle  d'.?\1^'\  P'i  ^^«"^  étonné,  d'après  cela,  s'il  est 
giie  lubLnî  ''^''if  ^^««nostic  différentiel  de  la  ménin- 
grande  oré^^^^r  ""®  ^S"'^  circonstance  peut  fournir  une 
d'une  mïS*^".  ^"  f^^^""*  ^e  la  natJre  tuberculeuse 
méningite:  cest  celle  d^une  diathèse  tuberculeuse 

Ci)Voirphi8loi„,p.2,9, 


JOUBNAL   DE  WÊDSCINE.  209 

bien  caractérisée  chez  les  malades  ou  chez   leurs  ascen- 
dants. 

M.  Rouùceau  pense  que  la  guérison  des  malades  n'est  pas 
une   raison  suffisante  pour   faire  douter  de  la  bonté  du 
diagnostic  porté  d'après  l'ensemble  des  symptômes.  Il  y  a 
dans  toutes  les  maladies ,  dans  la  pneumonie  par  exemple, 
un  appareil  symplomatique  qui,  lorsqu'il  est  complet,  per- 
met d'établir  le  diagnostic  avec  autant  de  certitude  que  Tau- 
topsie  elle-même.  Il  en  est  de  même  dans  la  méningite. 
Les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  cette   maladie  ont  vérifié, 
par  des  centaines  d'autopsies,  que  certains  symptômes 
révèlent  toujours  l'existence  de  lésions  bien  déterminées. 
On  peut  donc,  d'après  les  symptômes  seulement ,  établir  le 
diagnostic  exact  de   la  maladie  avec  une  certitude  aussi 
graiVde  qu'à  l'aide  de  l'autopsie  elle-même.  D'un  autre  côté , 
si  la  découverte  de  H.Robin  se  vérifie,  si  la  granulation 
des  méninges  n'est  pas  de  nature  tuberculeuse ,  la.  coristi- 
tution  tuberculeuse  des  enfants   fie  doit  plus  entrer  eu 
ligne  de  compte  dans  le  diagnostic  différentiel  des  deux 
méningites. 

M.  Malherbe  croit  que,  malgré  les  nombreux  travaux 
des  auteurs  sur  ce  sujet,  le  diagnostic  différentiel  dont  il 
estquestion  ne  peut  pas  encore  être  établi  d'une  manière 
certaine.  Il  ne  pense  pas,  avec  M.  Rouxeau,  qu'on  puisse 
comparer,  sous  ce  rapport ,  les  affections  thoraciques,  que 
les  moyens  spéciaux    d'exploration  dont  nous  disposons 
nous  permettewt  de  reconnaître    avec  tant   d'exactitude, 
aux    maladies  des   organes  encéphaliques    que  la  boîte 
osseuse  du  crâne  dérobe  si  complètement  à  notre  examen. 
Toutes  les  formes  de  méningite ,  d'ailleurs ,  ne  sont  pas 
représentées  par  la  méningite  inflammatoire  et  la  ménin- 
gite granuleuse.  Indépendamnaent  d^  celles  précédemment 
admises  par  les  auteurs ,  M.  Rilliet  vient  d'en  décrire  une 
nouvelle  espèce  sous  le  nom  d'encéphalopathie  cUbuminu- 
riqtie.  Si,    dans   cette  mahdie,  qui  ressemble  beaucoup 
aux  autres  espèces  de  méningites  par  ses  symptômes ,  les 
urines  sont  supprimées,  comme  cela  arrive  quelquefois, 
il  ne  sera  pas  possible  d'établir   le  diagnostic  différentiel. 


Dans  certaios  c^s,  cependant ,  on  peut  reconnaît^  d'une 
manière  à  peu  près  certaine  Texistence  d'une  méningite 
granuleuse ,  c'est  lorsque  la  maladie  procède  avec  beau- 
coup de  lenteur  dans  son  développement  ;  mais ,  dans  les 
cas  aigus,  un  diagnostic  positif  n'est  pass  possible.  L'exis- 
tence de  tubercules  dans  les  autres  organes  et  la  circons- 
tance de  parents  tuberculeux  seront  alors  les  seuls  motifs 
de  présomption  en  faveur  de  l'existence  d'une  méningite 
granuleuse. 

M.  S/oriceau  trouve  que  M.  Rouxeau  a  eu  tort  de  nier 
l'utilité  de  la  découverte  de  M.  Rohin.  Si  cette  découverte 
n'a  point,  en  effet,  de  conséquences  immédiateis  au,  point 
de  vue  thérapeutique,  elle  n'en  conservera  pasmoin^une 
grande  importance,  comme  toute  vérité  scientifique  bien 
établie,  si  surtout  de  nouveaux  travaux  viennent  confirmer 
ceux  de  M.  Robin  sur  ce  sujet.  M.  Rouxeau  a  lui-même 
fait  connaître  un  des  résultats  immédiats  de  cette  décou- 
verte. Il  est  parti  de  là,  en  effet,  pour  ruiner  l'argumen- 
tation de  ce^x  qui  considèrent  l'existence  de  la  diathèse 
tuberculeuse  comme  une  présomption  en  fayçur  de  la 
forme  granuleuse  d'une  méningite. 

Af.  RotueoM  répond  qu'il  a  dit  seulement  que  la  distinc- 
tion établie  par  M.  Rphin ,  entre  la  granulation  des  n^é- 
ninges  e(  les  tuberci^les ,  ne  nous  avait  rien  fait  gagner  au 
point  de  vue  thérapeutique. 

Af.  Bonamy  lit  une  note  sur  les  débuts  de  j'épidémie 
cholérique  qui.  com(nonce  à  se  luanifester  à  I^antçs  depuis 
le  24  août  Déjà,  depuis  celle  époque  jusq^u'au  1,4  sep- 
tembre, c'est-à-dire  dans  un  espace  de  trois  senpaines,  9 
cholériques  ont  été  traités  à  rHôtel-Dieu.  Sur  ce  npmbre, 
3  ont  succombé.  En  ville,  il  y  a  çu  2  décès.  Pe  ces  pre- 
mières manifeslaliotis  de  notre  cinquième  épidémie  cho- 
lérique ,  M.  Bonamy  tire  les  conclusions  suivantes  : 

1°  Comme i  dansiez  épidémies  précédentes,  le  choléra 
affecte  une  préférence  marquée  pour  les  quartiers  rive- 
rains de  la  Loire  et  de  l'Erdre  ;  le&  V3  au  mo.içs ,  presque 
les  3/4  des  individus  atteints  demeuraient  dans  le  voisi- 
nage (Je  la  Lo.ire  ou  sur  la  Loire  ip^me,  ou  si^r  les  rives 
(le  l'Erdre 


lOtRÎfAt  i)E   teÉtoCÏNk.  2li 

2^  Comme  d*fiabilude  la  classe  pauvre  fournil  Te  prin- 
cipal tribut.  Elle  est,  au  début,  presque  exclusivement 
Atteinte. 

M.  fconamy  indique ,  en  terminant ,  les  précautions  hy- 
giéniques et  ie  traitement  qui  lui  paraissent  le  plus  conve- 
nables. * 

Jf .  Aubinais  demande  la  parole  à  ce  sujet.  Pendant  la 
dernière  épidémie  de  choléra  #  dit-il,  dans  le  départetnent 
fie  là  Meuse,  on  isola  les  malades  cholériques,  et  cette 
séquestration  parut  avoir  de  bons  résultats  pour  prévenir 
la  contagion.  Si  le  choléra  prend  beaucoup  d'extension  à 
Nantes,  il  sera  peut-être  à-propos  de  réserver,  dans  nos 
hôpitaux ,  des  salles  spéciales  pour  l(^s  cholériques. 

M.  Malhèrie  répond  que  Tadministration  des  hôpitaux 
consulta,  en  1849,  le  Conseil  dé  Santé  sur  la  question  de 
Tisolemenl  des  cholériques,  et  que  ce  Conseil  fut  d'a\is  de 
ne  pas  isoler  les  malades.  La  transmission  du  choléra  par 
contagion  ou  infection  paraît  possible  ;  niais  les  exemples 
de  transmission  pris  dans  les  hôpitaux  n'ont  pas  toute  la 
valeur  qu'on  leur  attribue,  ta  population  des  salles  d'hô- 
pital n'^est  pas  une  population  saine  et  valide;  elle  fest  for- 
mée, au  contraire,  de  sujets  plus  où  moins  affaiblis  et 
peu  capables  de  résister  aux  influences  épidérntqués. 

On  à  signalé  déjà  l'inconvénient  de  réunir  dans  un  mêitie 
lieu  un  grand  nombre  dé  cholériques  et  de  former  ainsi 
un  vaste  foyer  dlntectioh.  Les  intîrmiers,  d'ailleurs,  en 
voyant  les  précautions  prises  pour  éviter  la  contagion, 
consentiront-ils  à  rester  dans  un  poste  aussi  périlleux? 

M.  Malheïrbe  ajoute  qu'il  vient  d'observer,  pour  la  pre- 
mière fois,  en  examinant  tes  urines  d'une  cholérique ,  un 
phénbbiène  qu'hl  n'avait  point  encore  vu  se  produire.  Chez 
la  plupart  des  cholériques,  dit-il ,  les  premières  urines 
rendues  éont  alcalines  et  effervefscentes  par  l'addition  de 
l'âlrfde  azotique.  Chez  une  tnàlade ,  l'additiot)  de  Tacide 
azotique  a  donné  lieu  à  une  coloration  rose,  puis  vîûfctte 
et  pourpre  foncée  ;  èhlin ,  en  cotitinuant  l'addition  d'acfde, 
la  couleur  est  déventie  acajou ,  puis  l'eflfërvescehce  s'est 
prôtïôrtcée. 


212  JOmUUL  DB  ■ÉDBGINB. 

M.  Hignard  rappelle  qu'il  faisait  p^ie  du  Conseil  de 
Santé  qui«  en  1849,  pensa  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  d'isoler 
les  cholériques.  C'était  bien  là  son  opinion  à  cette  époque; 
mais  les  bits  qu'il  a  été  à  même  d'observer  depuis  ont 
modifié  ses  idées  sur  la  contagion  du  choléra.  Dans  l'épi- 
démie de  1834,  il  n'avait  vu  se  développer  aucun  cas  de 
choléra  dans  les  salles  où  étaient  traités  des  cholériques. 
Aucun  fait  de  contagion  ne  setait  donc  produit  sous  ses 
yeux,  et  il  ne  pouvait  admettre  que  la  maladie  fut  conta- 
gieuse. En  1849,  quelques  faits  vinrent  ébranler  son  opi- 
nion. Enfin,  en  1854,  des  bits  nombreux  observés  dans 
son  service  l'ont  convaincu  que  le  choléra  peut  se  trans- 
mettre aux  individus  qui  séjournent  d'une  manière  per- 
manente dans  les  salles  où  il  y  a  des  cholériques.  L'état 
valétudinaire  des  individus  qui  peuplent  les  hôpitaux  ne 
suffit  pas  pour  rendre  compte  des  coups  nombreux  frappés 
par  l'épidémie  dans  les  salles  d'hôpital.  On  voit  les  sujets 
les  plus  vigoureux  frappés  les  premiers  dans  les  lits  voisins 
de  ceux  occupés  par  les  cholériques.  Ce  qu'il  y  eut  de 
plus  remarquable  dans  la  salle»!  5,  c'est  que  ce  Tut  dans  la 
partie  la  plus  saine  et  la  plus  aérée  que  les  cas  de  choléra 
prirent  naissance,  au  voisinage,  toutefois,  des  cholériques 
apportés  du  dehors.  Plusieurs  médecins  de  l'expédition 
d'Orient,  dit  en  terminant  M.  Hignard,  antjcontagionistes 
avant  leur  départ,  ont  observé,  dans  cette  campagne,  des 
faits  tellement  concluants  qu'Us  se  sont  convertis,  comme 
lui ,  à  l'opinion  opposée. 

M.  Bonamy  confirme  les  faits  dont  vient  de  parler  M. 
Hignard  et  qui  se  sont  passés  dans  la  salle  15.  Dès  1849, 
il  était  disposé  à  isoter  les  cholériques ,  quoique  ce  sys- 
tème ne  soii  pas  exempt  d'inconvénients  ;  mais ,  comment 
laisser  des  individus,  atteints  quelquefois  d'ipie  indisposi- 
tion légère,  exposés  ainsi  dans  les  salles  à  contracter  un 
choléra  mortel  ?  M.  Bonamy  rappelle  que  ,  dans  son  mé- 
moire sur  le  choléra  de  1849,  il  a  rapporté  plusieurs 
exemples  frappants  de  la  transmission  de  la  maladie.  Des 
faits  aussi  positifs  l'ont  conduit  à  admettre  que  le  choléra 
peut  se  transmettre  comme  les  autres  maladies  contagieu- 


JOUBMAL  DE  HÉOECINE.  213 

ses,  la  variole,  la  rougeole ,  la  scarlatine,  eic,  mais  avec 
moins  dé  facilité  toutefois  que  ces  dernières. 

^M.  Lequerré  pense  que  la  transmission  dq  la  maladie  est, 
en  effet, bien  peu  active,  puisqu*à  Nantes,  ou  les  méde- 
cins se  sont  prodigués  sans  réserve  pendant  la  dernière 
épidémie,  aucun  d'eux  n'a  été  atteint. 

M.  Mauduit  trouve  la  question  du  trailement  plus 
importante  que  celle  qui  vient^  d'être  agitée.  Il  a  cru  re- 
marquer que,  da.ns  l'épidémie  de  1832;  les  succès  furent 
plus  nombreux  à  partir  de  Tépoque  où  les  médecins  eu- 
rent recours  au  traitement  par  la  glace- Il  pense  que  l'usage 
de  la  glace  est  encore  un  des  meilleurs  moyens  de  traite- 
ment. Il  ajoute  qu'il  ne  lui  paraît  pas  prudent  d'adminis- 
trer à  très-haute,  dose  des  médicaments  énergiques.  Il 
craint ,  en  effet,  q^ue  la  période  de  cyanose  unç  fois 
4>assée,  Tabsorption  ne  se  fasçe  d'une  .manière  très-ac- 
tive  ,  lorsqu'à  lieu  la  réaction.,  et  qu'il  ne,  survienne  des 
accidents.     . 

M.  Bonamy  dit  que  le  meilleur  traitement  du  choléra 
n'est  pas  encore  formulé  ;  que  certains  cas  graves  résistent 
à  tous  les  moyens.  Si,  en  1832,  le  traitement  par  la  glace 
parut  avoir  plus  de  succès  que  les  autres,  c'est  que  peut- 
être  déjà,  à  l'époque  où  on  commença  à  le  mettre  en  vi- 
gueur, ^épidémie  était  entrée  dans  sa  période  dç  déclin. 
La  glace  et  les  stimulants  externes  lui  paraissent  être  ce- 
pendant les  meilleurs  moyens  à  employer. 

H.  Thibeaud  rappelle  les  faits  qui  se  sont  passés  à  Tîle 
Maurice^  en  1854.  Cette  lie,  qui  n'avait  jamais  eu  d'épidé- 
mie, vit  le  choléra  se  développer,  après  l'arrivée  d'un  navire 
chargé  d'Indiens  sur  lesquels  cette  maladie  sévissait.  L'épidé- 
mie futtrès- violente  et  enleva  un  dixième  de  la  population  de 
Maurice.  D'autres  faits,  également  propres  à  faire  admettre 
le  caractère  contagieux  du  choléra,  se  sont  produits  à 
Lyon.  Tous  ces  faits  positifs  ne  sont  en  rien  infirmés  par 
les  feits  négatifs.  N'en  est^l  pas  de  même  pour  les  autres 
maladies  contagieuses  ?  Qui  peut ,  dans  certains  cas ,  en 
présence  d'une  variole  par.  exemple,  découvrir  les  traces 
de  la  contagion  ?  . 


214  JOUSIVàL  de  MÉOECaNE. 

Séance  du  i2  octobre  1855. 

PRÉSIDERCB  D»  M%    LETENNEim. 

L'ordre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  Rouxeau^pour 
la  lecture  de  la  fin  de  son  travail  sur  la  méningite. 

Cette  lecture  terminée,  M.  Moriceau  demande  la  parole  : 
M.  Rouxeau  ,  dit-il ,  a  recommandé  l'ufuge  des  émissions 
sànguiues,  mais  il  n'a  pas  parlé  d'un  procédé  qui  consiste 
à  faire  les  applications  de  sangsues  à  l'intérieur  même  des 
narines.  Ces  applications  sont,  il  est  vrai,  assez  difficiles 
à  faire  chez  les  enfants;  on  éprouve  de  la  résistance  de  leur 
part,  mais  il  est  bon  d*insister,  car  on  obtient  ainsi  de  bons 
effets  des  émissions  sanguines. 

M.  Malherbe  rappelle  que ,  dans  la  dernière  séance  ,  il 
a  été  question  de  la  difficulté  du  diagnostic  ;  il  &ut  ajouter, 
dit-il^  que,  même  après  la  guérison,  oh  ne  peut  préciser  da- 
vantage le  degré  de  TafFection  qu'on  a  eu  à  combattre.  Il  est 
impossible  de  dire  s'il  y  a  eu  seulement  hypérémi'e,  ou  bien 
s'il  s'était  produit  un  épianchement  séreux  ou  des  fausses-  \ 

membranes  et  du  pus.  ! 

Parmi  ces  maladies  des  enfants  désignées  sous  le  nom 
de  méningites,  il  en  est  qui  ne  dépassent  pas  la  période  '  j 
d'hypérémie;  celles-là  guérissent  rapidement  sous  l'in- 
fluence des  émissions  sanguines.  Dans  les  autres  cas,  lors*-  | 
que  la  maladie  parvient  à  une  période  plus  avancée,  les 
émissions  sanguines  sont  suivies  d'une  prostration  rapide  | 
des  forces,  qui  doit  rendre  très-réservé  dans  l'emploi  de  ce 
moyen  thérapeutique.  L'application  de  sangsues  dan^  les 
fosses  nasales  est  souvent  suivie  de  bons  résultats.  Quant 
aux  révulsifs^  les  frictions  stibiées  sur  le  cuir  chevelu  ne 
sont  pas  toujours  exemptes  de  dangers ,  et  il  ne  faut  les 
employer  qu'avec  prudence.  Il  n'en  est  pas  de  même  du 
vésicatoire  appliqué  sur  la  tête  ;  l'excitation  qu^l  détermine, 
quand  on  y  a  recours  dans  la  période  d'épanchement ,  est 
bien  plus  avantageuse  que  nuisible.  Elle  est,  dti  reste,  peu 
prononcée,  car  les  malades  sont  plongés  dans  un  coma  qui 


JOUàNÂL  DE  MDteCINË.  215 

les  rend  presque  insensibles.  Le  bichlorure  de  nfiercure  en 
potion,  conseillé  par  les  médecins  allemands  et  anglais  dans 
plusieurs  phlegmasies,  et  que  M.  Malherbe  a  employé  lui- 
même  avec  avantage  dans  les  broncho-pneumonies  des 
enfants,  lui  paraît  devoir  trouver  place  dans  le  traitement 
des  méningites.  Il  n'a  pas,  au  même  degré  que  le  calbmef, 
l'inconvénient  de  déterminer  la  salivatron,  accident  souvent 
très-fâcheux. 

M.  Rouxeau  répond  qu'il  existe  des  faits  de  guérison 
survenue  dans  une  période  plus  avancée  que  celle  de  l'hy- 
pérémie.  Ainsi,  il  a  vu  la  guérison  s'opérer  chez  des  en- 
fants qui  avaient  présenté  une  paralysie  incomplète,  Tabo- 
lition  de  l'ouïe  et  de  la  vue,  des  accidents  tétànrques  et 
quelques  autres  symptômes  qu'il  croit  devoir  rapporter  à  la 
période  de  la  formation  du  pus  et  des  Fausses-memirranes. 
Il  ajoute  que  le  calomel  n'a  jamais  déterminé  la  salivation 
chez  les  enfants  qu'il  a  traités. 

M.  Malherbe  a  vu  le  calomel  produire  la  salivation  chez 
plusieurs  enfants;  chez  l'un  d'eux,  cet  accident  fut  suivi  de 
la  nécrose  de  l'os  maxillaire.  Il  n'a  pas  nié  ,  d'une  maiiiere 
absolue,  la  possibilité  de  la  guérison  dans  les  cas  où  il  y  a 
eu  formation  de  pus  et  de  fausses-membranes,  mais  les 
symptômes  préseniés  par  Af.  Rouxeau,  comme  dénotant 
lexistence  de  ces  produits  derinflammat1on,se  rencontrent 
bien  souvent  avec  une  simple  hypéréniie.  Bien  des  fois  , 
dans  des^  cas  de  ce  genre,  l'autopsie  n'a  révélé  rien  autre 
chose  que  l'existence  d'une  hypérémie  plus  ou  moins 
considérable.  Dans  la  fièvre  typhoifde  ,  on  voit  de  même 
se  produire  des  symptômes  semblables  à  ceux  de  la  mé- 
ningite, et  l'alitopsie,  cependant,  ne  motitre  qu'une  hypéré- 
mie légère. 

Âf.  Thibeaud  a  vu  mourir  bien  dès  enfants  de  méningite 
granuleuse  ;  il  ne  pourrait  cfter  qu'à  grand'peine  Quelques 
cas  de  guérison. 

De  sa  longue  "pratique ,  il  a  acquis  la  conviction  que 
cette  maladie  est  presque  toujours  mortelle.  M.  Trousseau, 
ayiant  constaté  de  même  la  terfninàison  presque  nécessai- 
i*emeht  funeste  de  èetté  maladie  ,  en  est  arrivé  à  s'abstenir 


216  JOUHRAL  DE  MÉBfiCUIB. 

de  tout  trailemeiU.  Ces  résultats  de  robservation  doivent 
nous  rendre  bien  défiants  sur  les  cas  de  guérison  qu'on 
nous  cite ,  et  si  nous-mêmes  «  dans  une  affection  de  ce 
genre ,  nous  voyons  le  malade  guérir ,  au  lieu  de  nous 
glorifier  de  ce  succès  inaltemiu ,  nous  devons  supposer 
plutôt  qu'il  y  a  eu  de  notre  part  une  erreur  de  diagnostic. 

Cette  maladie  est,  du  reste,  encore  mal  connue.  Ce 
nom  de  méningite  qu'elle  porte  lui  convient-il  bien  ?  M. 
Trousseau  l'appelle  simplement  affection  cérébrale.  Est-ce 
bien  ,  en  effet ,  une  inflammation  ?  Souvent  l'autopsie  ne 
révèle  méme^pas  l'existence  de  l'hypérémie.  Les  enfknls 
des  campagnes ,  exposés  plusi|ue  ceux  des  villes  au  soleil 
et  aux  causes  excitantes,  sont  beaucoup  plus  rarement  qiie 
ces  derniers  victimes  de  cette  maladie.  Ce  n'est  donc  pas 
ui^e  méningite,  ou  c'.est  du  moins  une  méningite  d'une  oa- 
ture  toute  particulière,  qui  réclame  un 'emploi  très-modéré 
des  émissions  sanguines#Oii  pourra  aussi  mettre  en  usage  les 
autres  moyens  de  traitement  :  les  révulsifs ,  les  frictions 
mercuriclles  ,  les  purgatifs ,  ^es  vésicatoires  sur  la  tête  ; 
mais  il  faut  se  rappeler  que  cette  maladie  est  presque  tou- 
jours audessus^des  ressources  de  l'art. 

M.  Deluen  se  rappelle,  avoir  soigné ,  avec  M.  Thibeaud , 
un  enfant  atteint,  depuis  4  ou  5  jours,  de  convulsions  in- 
cessantes, l^s  émissions  sanguines  avaient  été  employées 
^ns  succès  ;  5  où  6.  gramunes  de  calomel  furent  adminis- 
trés en  3  ou  4  jours ,  et  un  séton  fut  place  à  la  nuque.  11 
survint  enfin  une  amélioration ,  qui  fut  bientôt  suivie  de 
la  guérison. 

M,  Moriceau  fait  observer  que  les  enfants  sont  souvent 
atteinte  d'affëctioos  diverses  de  la  poitrine  et  du  ventre , 
dont  le  retentissement  sympathique  sur  le  cerveau  donne 
lieu  à  des  symptômes. qu'on  est  souvent  tenté  de  rapporter 
à  une  maladie  cérébrale.  Il  faut  donc  apporter  le  plus 
grand  soin  dans  l'examen  des  petits  malades  ,  et,  mèœe 
dans  les  cas  qui  paraissent  les  plus  graves  ,  ne  jamais 
cesser  d'agir.       .  . 

M.  Pihan'DufeiUay  a  vu  ,  avec  H.  Marion  ,  une  petite 
fille  ,  qui  leur  parut  atteinte  d'une  méningite    tubercu- 


JOOBNAl  DB  MÉDBCUIE.  217 

leuse.  D'après  la  gravité  des  symptômes  ,  la  maladie  leur 
paraissait  parvenue  à  sa  dernière  période.  Le  9'  jour,  Feu- 
tant  rendit  un  cysticerque  avec  les  urines.  A  partir  de  ce 
moment ,  tous  les  accidents  disparurent ,  et  il  y  eut  une 
guérison  rapide.  Cette  malade,  fait  observer  avec  raison  M. 
Piban-Dufeillay ,  n'était  donc  point  atteinte  de  méningite. 
Il  n'a  ,  du  reste  ,  jamais  vu  guérir  de  méningite  tuber- 
culeuse. 

M.  Hignard  partage  l'opinion  de  M.  Thibeaud  sur  la 
gravité  de  la  méningite  granuleuse.  Dans  sa  longue  car- 
rière médicale  ,    il  n'a  pu  observer  qu'un  seul    cas  de 
guérison.  L'en&nt  ,  parvenu  au  15'  jour  de  la  maladie, 
présentait  les  symptômes  les  plus  graves  et  paraissait  devoir 
bientôt  succoniber.   Â  la  suite  d'évacuations  déterminées 
par  le  calomel,  il  survint  une  amélioration  bientôt  suivie 
de  la  guérison.  Dernièrement ,  un  enfant  de.  1 1    ans  fut 
amené  sans  connaissance  à  l'hôpital.  Les  yeux  convulsés 
en  haut,  une  hémiplégie  complète  à  gauche,  font  supposer 
rrxistence  d  une  grave  lésion  encéphalique.  Cependant  , 
soupçonnant  la  présence   de  vers  dans  le  tube  digestif , 
M.  Hignard  fait   adnrHnistrer  du    calomel ,  qui  détermine 
l'expulsion  de  plusieurs  ascarides  vermiculaires.il  y  eut 
de  suite  une  amélioration  sensible.  Cet  enfant  n'était  nulle- 
ment atteint  de  méningite.  Les  vers  produisent  souvent 
ainsi  des  symptômes  cérébraux  très-graves. 

Le  traitement ,  presque  toujours  impuissant  pour  guérir 
la  méningite  confirmée,  peut  être  plus  utile  pour  en  pré- 
venir l'explosion  chez  les  enfants  menacés  de  cette  mala- 
die^ Lorqu'èn  observe,  cliez  ces  enfants,  des  vomisse- 
ments ,  êtes  soubresauts  .  des  tendons  ,  des  mouvements 
convulsffs  des  yeux,  etc. ,  on  peut ,  à  l'aide  des  énriissions 
sanguines  et  des  révulsifs ,  prévenir  le  développement  de 
la   maladie. 

L'ordre  du  jour  appelle  une  lecture  de  M.  Aubinàis , 
sur  une  forme  particulière  d'hémorrhagie  puerpérale  (1). 


(1)  Voir  page  246. 


218  JouB^ii  tE  MÉbiciiik. 

Séance  du  i6  notemtre  1855. 

PBÉSIDENCE   DE  M.   LETENHEUB. 

M.  Trastour  lit  uo  travail  intitulé  :  Note  sur  l'élidogie 
des  parotides  symptomaliques  (i)-       . 

Cette  lecture  donne  lieu  aux  réflexions  suivantes  : 

M.  Aubinais  partage  volontiers  Topinion  de  l'auteur. 
Il  a  observé,  à  la  campagne,  des  parotides  chez  des 
scarlatineux  dont  la  muqueuse  buccale  était  enflammée 
et  recouverte  d'un  enduit  pultacé.  1]  pense  que  si  Ton 
examinait  plus  souvent  l'intérieur  de  la  bouche,  on  trou- 
verait bien  des  fois  la  stomatite  pour  expliquer  l'inflamma- 
tion parotidienne.  Cependant ,  dans  certains  états  graves 
de  l'économie ,  il  survient  quelquefois  des  parotides ,  qui 
lui  paraissent  indépendantes  de  toute  inflammation  de  la 
muqueuse  buccale.  Ainsi  ,  dans  la  fièvre  puerpérale ,  il  a 
vu  survenir  des  parotides ,  quoique  la  bouche  ne  fut  pas 
malade.  Il  se  rappelle  aussi  avoir,  vu  des  parotides  se 
produire  à  la  suite  d'une  application  de  sangsue^  à  la  ré- 
gion^parotidienne  pour  une  violente  amygdalite  ,  mais  il 
apprit  ensuite  que  les  sangsues  dont  on  s'était  servi 
avaient  été  recueillies  sur  un  animal  mort  du  charbon. 

i^.  Malherbe  dit  que  l'éliologie  des  parotides  présentée 
par  M.  Trastour ,  dans  ce  travail,  a  déjà  été  indiquée  par 
M.  Piorry ,  qui  attribue  les  parotides  à  l'inflammation  de 
la  muqueuse  buccale  ,  aux  ulcérations  de  la  muqueuse 
qui  tapisse  l'onverture  du  conduit  de  sténon  et  à  l'oblité- 
ration (je  ce  conduit. 

M.  Thibeau4  reconnaît  que  souvent  les  parotides  peu- 
vent dépendre  de  la  stomatite  ,'  mais  cest  toujours  en 
vertu  d'une  stomatite  de  nature  spéciale ,  que  hnflamma- 
tion  se  propage  aux  glandes  salivaires  ;  xela  a  lieu  ainsi 
dans  la  scarlatine  et  dans  les  fièvres  graves.  On   ne  voit 


(1)  Voir  page  261. 


guère  ,  au  coçCraire ,  les  parolidea  s'^nÇammer  dans  la 
stomatite  mercuiiielle. 

M.  i/aU^erbe  a  remarqué  que  les  parotides  ne  sout  pas 
égaiem<Bnt  fréquentes  dans  toutes  les  épid^ipies  de  fièvre 
typhoïde ,  et  qu1l  n'y  a  pas  toujours  ua  rapport  exact 
entre  la  fréquence  des  parotides  et  l'intensité  delà  maladie 
principale.  Cette  inflamnoi^tion  surviendrait-elle  surtout 
dans  les  cas  où  il  y  a  des  aphthes? 

ilf .  JtfaïuiiUit  a  soi^vent  vu  les  applic^tiop^  de  sangsues 
sur  les  parotiides  déterminer  la  suppuration  ;  il  peuse  qu'il 
faut  rejeter  ce  moyen  de  traitement ,  qui  lui  paraît,  plus 
nuisible  qu'utile. 

Le  Seùritaire» 

L.»F.  CHAVPBiiora. 


QUELQUES    MOTS    swr    ta     mningite    des 
enfq,nts^  par  M.  Ch.  Roux^âU,  D.-M.-P. 


Une  opinion  partàjgée  pjar  un  certain  nombre  de  méde- 
cins, o'esi  que  la  méningite  des  enfents  est  toujours  grj\- 
nuleuseou  tul)er.cijdeu?e,  par  conséquent  touJ9urs  mortçlljB. 
Les  guérisons  n,^  seraient  que  dç,  fort  rares  exceptions  ; 
encore  i^udrait-il  accueillir  avec  p^u.  de  cQnfiance  cçs 
cures  exceptionnelles ,  où  le  diagqpstic  n'apurait  ^a,s,d,'ai|- 
l^urs  un  4ègré  de  prépi?ipr>  suffisanjt.  On  q^aiirait  gi^éri , 
en  çfl^st,  que  des  congestions  cqrébrales  plus,  ou  moiiis 
intenses,  des  trovibles  syoïipâthiquçs  divers  éveillés  dar^s 


220  JOTIBIIÀL  DE  MÉraCÏIfE. 

les  centres  nerveux  par  la  dentition ,  les  vers ,  les  affec- 
tions aiguës  du  tube  digestif,  etc.  Le  pronostic,  au  chevet 
de  Tenfant  atteint  de  méningite;  ne  serait  donc  qu'une  sen- 
tence de  mort  sans  appel,  le  traitement,  une  routine,  Tbabi- 
lude  de  faire  quelque  chose  quand  même  ;  le  résultat,  un 
nécrologe  immuable.  -^  C'est  l'exagération  de  l'axiome 
de  Senn  ,  qu'au  3'  degré  la  méningite  est  au-dessus  de 
toute  ressource. 

Cette  manière  de  voir  était  acceptée  hautement  par  M. 
Trousseau  dans  ses  leçons  cliniques  à  THôpUal  des  Enfants: 
(T  On  ne  doit  pas  traiter  les  méningites,  disait-il  en 
n  1850  ;  je  n'en  ai  jamais  vu  guérir  une  seule  ,  quoiqu'on 
n  ait  fait.  Si  aucun  des  moyens  employés  par  vous  ne  doit 
»  sauver  vos  malades,  pourquoi  voulez-vous  les  faire  nager 
»  au  milieu  des  matières  fécales,  en  leur  donnant  le  ca- 
»  lomel  ?  les  faire  souiFrir  inutilement  avec  vos  vésica- 
n  toires  et  vos  sétons.  En  les  tourmentant  ninsi,  vous  préci- 
«  pitez  leur  chute.  Votre  premier  devoir,  c'est  de  ne  pas 
M  nuire.  Laissez-les  donc  tranquilles, -et  vous  les  conser- 
»  verez  ainsi  quelques  jours  de  plus.  (Léon  Liégard,  sur 
0  la  nature  et  le  traitement  de  la  fièvre  cérébrale, 
»  Bévue  Midieo  chirurgicale  de  Paris,  janv.  1855.)  » 

Il  fallait  en  eiFet  une  bien  longue  série  de  cruels  mé- 
comptes pour  arracher  ces  désolantes  paroles  à  rillustre 
ihérapeqtiste ,  et  lannener  à  se  contenter  du  triste  rôle  de 
simple  spectateur  devant  un  pauvre  enfant  se  débattant  contre 
une  implacable  fatalité  ;  car  c'était  lui  qui  avait  dit  peu  de 
temps  auparavant  :  cr  Ne  vous  refusez  ni  au  diagnostic, 
»  ni  au  pronostic ,  mais  soyez  en  même  temps  thérapeu- 
M  tistes  entêtés.  Si  votre  science  vous  dit  :  Affection  mor- 
»  telle,ne  fais  rien;  que  votre  humanité  vous  dise  :  T<i  peux 
»  te  tromper,  agis,  et  vous  agirez,  et  si  vous  réussissez  à 
)>  guérir  un  seul  de  ces  malades  que  votre  science  avait 
»  condamnés,  votre  conscience  vous  en  remerciera.  (L. 
»  Liégard,  loc.  cit.)  a 

Bien  que  dictée  par  un  profond  découragement ,  une 
opinion  aussi  absolue,  tombée  de  la  bouche  d'un  homme  si 
haut  placé ,   dont  les   observations  cliniques  ont  une  si 


H>VVNÂt  DB  MÉDECINB.  221 

grande  portée  ,- devait  à  coup  sûr  produire  une  immense 
sensation  parmi  les  médecins,  et  surtout,  au  sein  de  toute 
une  génération  de  jeunes  gens  séduits  par  la  parole  entrat- 
nante  du  maître  !  Mais  aussi  quel  immense  danger  si  cette 
parole  si  séduisante  ne  devait   consacrer  qu'une  erreur  ! 
Dans    quelle  décourageante    pauvreté   elle  devait  laisser 
tomber  la,  thérapeutique  des  affections  cérébrales ,  théra- 
peutique encore  si  incomplète  comme  celle  dé  tant  d'autres 
maladies  !  Comme  elle  devait  paralyser  les  efforts  de  tant 
d'intelligences  qui  appellent  la  lutte  et  qui  s'y  préparent 
avec  toute  l'énergie'  dont  elles  sont  capables  !  Quel  triste 
rôle  elle  laissait  au-  médecin  convaincu,  restant  sans  armes 
au  chevet  de  pauvres  créatures  dont  quelques-unes  peut- 
être  auraient  échappé  à  la  mort,  comme  le  dit  H.  Trousseau 
lui*niême  ! 

I. 

Heureusement,  la  théorie  qui  accorde  à  la  méningite 
des  enfants  une  {orme  constamment  granuleuse ,  est  vic- 
torieusement combattue  par  la  grande  majorité  des  auteurs 
qui  se  sont  occupés  de  pathologie  infantile,  Presque  tous, 
en  effet,  ont  séparé  avec  soin  la  méningite  simple  de  la 
méningite  granuleuse.  HM.  A.  Liégard,  Barrier,  Grisolle , 
Rilliet  et  Barthcz,  Fabre  et  Constant;  Guersant,  Goltin, 
Mazade  ,  etc. ,  en  donnant  de  nombreuses  observations  de 
guérisons  de  la  première  de  ces  maladîes ,  se  sont  attachés 
avec  un  soin  tout  particulier  à  Fétude  du  diagnostic  diffé- 
rentiel des  granulations.  Quelques  autopsies  faites  avec  toute 
Tattention  possible,  ont  d'ailleurs  surabondamment  dé- 
montré que  ce  produit  morbide  n'était. pas  un  élément 
constant  de  la  méningite  ,  lors  même  que  les  symptômes 
semblaient  accuser  sa  présence. 

L'observation  suivante  nous  paraît  un  cas  de  méningite 
simple. 

Observation  I". 
Joséphine  Qhattier  ,  2  ans ,  blonde  ,  fraîche  ,  mais  peu 


322  J01}«9AL  w  vbw^B»» 

forte ,  née  de  parents  bien  portants ,  a  le  ventre  très^gros 
ordinairement  et  un  peu  sensible.  Depuis  quelques  jours, 
cette  enfant  est  changée  «  et  sa  figure  est  devenue 
livide  et  bouffie.  Elle  est  triste ,  grognon  ,  dort  mal,  se 
réveille  en  sursaut;  Thaleine  est  aigrelette,  l'appétit  se 
perd  ;  le  moindre  aliment  lui  donne  des  nausées  et  même 
des  vomissements,  sa  langue  est  sale  ;  le  ventre  est  devenu 
plus  gros ,  plus  tendu ,  plus  douloureux  ;  il  y  a  des  alter- 
natives de  constipation  et  de  dévoiement.  La. peau  est 
chaude,  le  pouls  fébrile  ,  la  tête  brûlante  et  lourde. 

f^  jour.  La  mère,  convaincue  que^on  enfant  a  des  vers, 
me  supplie  de  lui  donner  un  vermifuge  ;  je  m'y  résous 
plutôt  pour  lui  faire  plaisir  que  par  conviction. 

Semen  contra,  2  gram.  ;  eau,  60  gram. 

2' jour.  Le  lendemain,  ricin,  4  gram.  Quelques  selles 
et  pas  de  vers. 

3'  jour.  Aggravation  notable  de  tous  les  symptômes. 
Tête  brûlante  ,  inondée  de  sueur ,  face  ordinairement  pâle 
et  défaîte,  parfois  plaquée  de  rougê  sur  les  pommettes; 
engourdissement  comateux ,  yeux  caves ,  à  demi  fermés , 
laissant  voir  le  segment  inférieur  des  cornées  ;  pupilles 
contractées  ;  sensibilité  de  la  peau  diminuée  ;  toutefois 
Fenfant  fronce  le  sourcil  et  crie  quand  on  la  pince.  Cette 
somnolence  est  interrompue  par  de  rares  mohfients  d'agita- 
tion ;  quelques  vomissements,  constipation,  langue  chargée, 
haleine  fétide  ;  peau  chaude  ,  sèche ,  pouls  petit , 
fréquent. 

2  sangs,  aux  malléoles  ;  2  vésic.  aux  jambes  ;  calomel, 
I5centig.  (pas  de  selles). 

4'  jour.  Les  sangsues  saignent  abondamment ,  les  vési- 
catoires  prennent  bien;  le  tout  sans  résultat.  L'enfent  est 
sans  connaissance ,  immobile  ,'  plongée  dans  le  coma  ;  la 
face  toujours  alternativement  pâle  ou  plaquée  de  rouge  ; 
l'ouïe  et  la  vue  semblent  abolies  ;  les  pupilles  se  sont  di- 
latées ,  poipt  de  strabisme  ;  les  paupières  toujours  demi- 
closes,  laissent  voir  le  segment  inf^eur  des  cornées,  douées 
d'un  mouvement  lent  de  va  et  vient. 

Calomel ,  2Q  centigr.  ;  2  vésic.  aux  cuisses,   (i  selle). 


lûmHAL  AB  «ÉDBCIRB.  223 

5^  et  6«  jours.  Poinl  d'amélioration. 
1  vésic.  à  la  naque  ;  calomel,  20  ceniig.  Le  6*  jour,  une 
sangsue  derrière  une  oreille. 

Celte  sangsue  saigne  beaucoup;  Tenfent  est  soulagée, 
car  elle  ouvre  les  yeux  et  semble  renaître  à  la  vie  ;  elle 
fixe  sa  mère  avec  attention ,  mais  sans  prononcer  une 
parole.  L'assoupissement  est  moins  profond,  la  peau  moins 
chaude,  le  pouls  plus  calme,  quoique  très-fiiible.  Trois 
selles. 

Sécher  les.  vésic.  ;  quelques  cuiUerées  de  bouillon.  Calo- 
mel,  10  ceatig. 

7'  jour;  Quelques  heures  d'un  bon  sommeil;  face  amai- 
grie ,  mais  bonne  ;  regard  presque  naturel  ;  retour  du 
sens  de  Touïe;  abaissement  du  pouls  et  de  la  température 
à%  la  peau. 

A  partir  de  ee  jour,  la  guérison  se  dessine  de  plus  en 
I^us  et  TeDÊint  entre  bientôt  en  convalescence. 

Aujourd'hui ,  Joséphine  Chartier  est  une  jeune  fille  de 
13  ans,  frêle,  mais  d'une  santé  passable.  * 

Voilà  un  ensemble  de  phénomènes  assez  caractéristique  : 
cependant,  je  ne  me  dissimule  point  qu'il  y  manque  quel- . 
ques  traHs  saillants,  les  cris  hydrencéphaliques,  les  grince- 
ments de  dents,  le  mâchonnemifîiit ,  les  soubresauts  dans 
les  tendoos ,  la  raideur  du  tronc.  S'ils  ont  existé ,  ils  ont 
été  omis  dans  le  tableau  sommaire  que  je  viens  d'esquisser, 
et  ma  ménK)ire  ne  vient  pas  au.  secours  de  mes  notes.  D'un 
autre  côté.  Ton  ne  doit  pas  perdre  de  vue  que  cet  appa- 
reil si  menaçant  de  symptômes    s'est  déclaré  au  milieu 
dune  affection  abdominale  ;  cpi'il  est  très-naturel  de  sup« 
poser  qu'il  n'est  peut*étre  qu'un  retentissement  sympathi- 
que de  cette  dernière.  J'^is  moi-même,  dès  le  premier 
)our,  très-disposé  à  partager  cette  qpinion  ;  mais ,  s'il  y  a 
eu  retentissement  sympathique,  ce  que  je  suis  loin  de  con- 
tester, il  paraît  certain  que  l'encéphale,  dont  les  sympathies 
om  été  si  vivement  éveillées ,  est  devenu  le  siège  d'une 
lésion  anatomique  qui  a  dominé  toute  la   maladie.  Il  est 
difficile,  d'ailleurs, de  concilier  une  simple  souffrance  sym- 
pathique des  centres  nerveux  avec  un  coma  continuel ,  à 

17 


224  JOUANAL  DE  ■ÉBSCQŒ. 

peine  interrompu  par  de  rares  moments  d'agitation ,  dfes 
yeux  caves,  cernés,  entr*ouverts  ,  laissant  voir  le  segment 
inférieur  des  cornées  nageant  en  quelque  sorte  dans  l'or- 
bite; Fabolition  de  la  vue  et  de  Touîe,  la  diminution  de 
la  sensibilité  cutanée,  des  vomissements  verdâtres  et  ré- 
pétés, une  constipation  rebelle,  etc.  Ces  symptômes  me 
semblent  bien  plutôt  caractériser  une  méningite,  bien  qu'elle 
n*ait  pi*ésenté  ni  la  gravité  ^  ni  la  durée  habituelle  de  la 
méningite  granuleuse. 

Une  comparaison  fera  peut-être  mieux  ressortir  encore 
la  différence  qui  existe  entre  la  véritable  méningite  et  les 
affections  sympathiques  du  cerveau. 

Obsbbvation  II'. 

Olivier  Samson,  13  mois  ,  gras-,  bouffi  et  pâle,  est  de- 
venu grognon  et  maussade  depuis  une  quinzaine  ;  il  dort 
mal  et  se  réveille  en  sursaut  ;  il  a  peu  d'appélit ,  ma-' 
chonne  et  bave  sans  cesse;  un  peu  de  soif  et  de  diarrhée. 

6  octobre  1850.  A  ces  symptômes  vient  se  joindre  une 
(lèvre  violente,  avec  un  peu  d'assoupissement,  mais  sans 
perte  de  connaissance;  la  diarrhée  continue. 

H  sangs,  au  siège,  3  lavem.  amid.,  cat.  émoll.  sur  Tabdo- 
men  ;  sinap.  3  fois  aux  extrém.  inf. 

7  oct.  Agitation  continuelle,  fièvre  ardente,  pouls  à  140; 
mâchonnement;  Tincisive  latérale  gauche  se  dessine  à  tra- 
vers la  gencive  rouge  et  tuméfiée. 

3  sangs,  sur  l'abd.  Le  reste,  ut  suprà. 

8  oct.  Bien  que  la  connaissance  semble  conservée,  Tagi* 
tation  commence  à  alterner  avec  un  assoupissement  assez 
profond  ;  il  y  a  quelques  soubresauts  dans  les  tendons  ;  la 
joue  gauche  rougit  et  pâlit  alternativement  plusieurs  fois 
par  jour.  La  diarrhée  a  cessé  ;  des  frissons  irréguliers  sont 
remplacés ,  à  diverses  reprises  dans  la  journée  ,  par  une 
chaleur  violente;  le  pouls  est  actuellement  à  120. 

10  centig.  de  suif,  de  quinine;  2  sangs,  à  un  genou  ;  un 
vésic.  à  une  jambe. 

Le  lendemain,  un  vésic.  à  l'autre  jambe  ;  20  centig.  de 
calomel.  (Deux  selles  jaunes.) 


JOURNAL  DB  MÉDECINS.  225 

10  oct.  L'enfant  a  dormi  d*un  bon  sommeil  ;  il  est  plus 
éveillé  ce  matin;  la  peau  est  fraîche,  le  pouls  à  120. 

Continuer  le  calomel. 

11  oct.  Même  état  ;  mais,  le  12,  l'enfant  est  fort  abattu  ; 
la  face  et  le  front  sont  brûlants  ;  nausées,  vomituritions  ; 
peau  chaude,  pouls  à  1 50.  La  dent  ne  sort  point  encore. 

Incision  de  la  gencive  ;  cat.  sinap.;  vésic.  à  une  cuisse. 
13 -oct.  Même  état.  Ipécacuanha,  25  centig.  qui  ne  font 
pas  vomir,  mais  déterminent  3  selles  abondantes  ;  frictions 
mercurieiles  autour  du  cou  et  sous  les  aisselles. 

14  oct.  L^enfiant  a  dormi  toute  la  nuit  ;  ce  matin,  il  joue 
sur  son  lit  :  la  face  est  calme  et  naturelle,  la  peau  fraîche, 
le  pouls  à  1  iO.  Les  vomituritions  ont  cessé,  il  reste  un  peu 
de  diarrhée. 

A  partir  de  ce  moment,  la  convalescence  n'est  entravée 
par  aucun  accident  nouveau;  la  diarrhée  seule  persiste 
pendant  quelques  jours  et  finit  par  céder  h  une  potion  lé- 
gèrement laudanisée. 

Chez  l'enfant  qui  fait  le  sujet  de  cette  observation ,  le 
travail  de  la  dentition  est  évidemment  le  point  de  départ 
de  tous  les  accidents.  Soit  que  les  sympathies  de  l'appareil 
àïgestif  aient  été  éveillées  les  premières  et  qu'elles  aient 
réagi  sur  celles  de  Tencéphale,  soit  que  le  retentissement 
ait  été  simultané  sur  toutes  les  grandes  fonctions,  toujours 
est-il  que  le  cerveau  s'est  trouvé  lésé  à  un  degré  capable 
d'inspirer  d'assez  vives  inquiétudes.  Hais  quelle  différence 
entre  cette  congestion  qui  détermine  quelques  rougeurs  fu- 
gaces des  pommettes,  quelques  soubresauts,  un  peu  de  som- 
nolence, sans  perte  de  connaissance,  sans  altération  appré- 
ciable de  l'ouïe  ni  de  la  vue,  qui  s'accompagne  de  diarrhée, 
etc.,    et   les  lésions   anatomiques  sans  lesquelles  on   ne 
saurait  expliquer  l'ensemble  des  symptômes  offerts  par 
J.  Chartier,  tels  que  le  coma,  l'abolition  progressive  de  la 
vue  et  de  l'ouïe,  la  dilatation  des  pupilles,  l'affaiblissement 
de  la  sensibilité  des  téguments,  les  vomissements,  la  cons- 
tipation, etc.!  Dire  que  d'un  côté  il  y  a  eu  simple  hypéré- 
mie,  de  l'autre,  pblegmasie  confirmée,  c'est  établir,  en  deux 
mots,  toute  la  distance  qui  les  sépare. 


2M  io&^Ai  DB  nÉvpcim. 

IL 

Noas  avons  donc  un  fait  acquis,  c*est  qm  h  oaépingite 
des  enfiii^  peu^  être  simple  et  céder  ^  uj^  inédici|tîon 
appropriée. 

Mais,  lprsqu'e|le  est  de  nature  granuleuse,  les  s}^ 
qu'elle  attaque  soat-ils  voués  à  une  mort  inévitable?  Ovii, 
répoodr^-t^on  de  toutes  parts,  car  elle  est  tub^rçuleiise. 
ImmedicabUe  vitium,  s'écrie  Camper.  —  I^es  U^erc^lçs  ne 
pardonnent  jamais ,  surtout  dans  Tencéph^le,  où  Vm  ne 
pçHit  mèipe  pas,  comme  dans  le  poui^on,  eoiraver  pour  un 
temps  le  trftvaîl  pbleginasique  qu'ils  développent  autour 
d'eux.  Voilà,  en  abrégé,  l'opinion  de  tous  les  auteurs,  de 
Robert  Whigtt,  de  Senn,  de  Rufz,  de  Gerhard ,  4^  FieU, 
de  Green,  de  Billiet  et  Barthez ,  de  Fabre  et  ÎC(M)$ta,nt  de 
Guersant,  etc.,  auxquels  je  n'ai  point  l'intention  d'emproi)- 
ter  une  série  fatigante  de  citations. 

Pourtant,  quelques  tentatives  de  réaction  contre  t^ie 
idée  aussi  absolue,  avaient  été  déjà  ÊMtes.  Jahn ,  Meissner , 
Nasse,  Tourtual,  RieckeetM.  Charpentier,  avaiept  pul^(ié 
des  ei^en^ples  de  guérisou.  Malheureusement,  leurs  obser- 
vations étaient  au  trop  incomplètes,  ou  entachées  d'erreurs 
^natçmiques  ou  physiologiques  incroyables.  Leurs  efforts 
laissèrept  dans  toute  son  intégrité  la  tbé«orie  de  l'incurahi- 
Uu^  absohjie  de  la  méningite  granuleuse. 

Chose  étrange  et  qui  prouve  toute  la  vanité  des  idées 
exclusives  !  Les  coups  destinés  à  ruiner  cette  théorie  de- 
vaient partir  de  ce  groupe  d'élèves  qui  recueillaient  avec 
tant  d'avidité  la  parole  du  maître.  De  nombreuses  obser- 
vations prises  dans  le  service  de  M.  Trousseau  et  ^qalysées 
avec  soin  par  MM.  Moynier  et  Sayouret  fii^renjt  les  pre- 
mières armes  av^c  lesquelles  ce  dernier  battit  en  brèche  la 
doctrine  de  la  méningite  tuberculeuse.  Les  recbercb^  de  H. 
Ch.  Robin  venaient  de  démontrer  que  hs  granulations 
des  méninge^  ne  copten^ent  pas  un  atome  de  matière  tu- 
berculeuse ,  qu'elles  avaijBnt  une  nature  à  part  et  fort  dis- 
tincte. La  lumière  se  faisait  et  l'espénainpe  renaissait  au 
cœur  de  toute  cette  pléïade  de  ji^uaes  gens  qup  désespé- 


JOVJBIVjll.   DÉ  MÉÏ>ÊCI^È. 


227 


rait  le  désespoir  de  DNustre  professeur.  Lui-mêine  voyait 
ses  idées  en  subir  une  profonde  modilicafiort.  Bietrtôi,  urie 
notrrelie  thèse  parut  sur  cet  important  scO^et  ;  M.  Lédh 
Liégard  ,  de  Caen,  vint  (1*54)  s'associer  au  rticfuveriiefit 
réactionnel  et  faire  faire  à  la  vérité  utt  pas  dé  plus  ,  grâce 
eiieofe  aux  recherches  microscopiques  de  M.  Ch.  Robrfr. 
En  effet ,  cette  thèse*,  à  lafqoellé  nous  rc^nvo  jôns  pour  les 
détails ,  démontre  que  non-seulemént  les  granulations  des 
méninges  ,  mais  encore  celles  que  l'on  rencontre  dans  les 
AMTérents  organes  des  enfants  morts  dé  méningite  granu- 
Ictise ,  n'ont  sTvec  fe  tubercule  aucun  ràfpport  de  nature. 
L^aftiteitr  cite  quelques  exemples  dé  guérisdn  à  l'appui 
de  sa  démonstration  fournie  par  \e  mici'oscope. 

III. 

Voici  d'abord  l'analyse  sommaire  des  observations  com- 
paratives faites  sur  le  tubercule  et  la  matière  des  granu- 
lations : 


Les  granulations  renfer- 
ment des  Cytoblastions  ovoï- 
des ,  sphériques ,  de  4  à  6 
millièmes  de  railHmètfe  de 
diamètre. 

L'acide  aoétique  fonce  le 
eOff»tour  des  cytobla»liM>n& 
et  ne  modifie  point  les  gra- 
nules qu'ils  cotitiennent. 

I^es  granules  du  cytoblas- 
tien  sont  plus  rapprochés 
du  eeiHre  que  de  la  circon- 
férence. 

Les  cytobiastlons  appar- 
tiennent au  groupe  de  cel*- 
lules  renfermant  des  noyaux 
libres. 


Les  tubercules  contien- 
nent des  Corpuscules  polyé- 
driques, à  bords  irrégulière- 
ment dentés,  de  7  à  10 
millièmes  de  millinïètre  de 
diamètre. 

L'aèide  acétique  pâlit  les 
corpuscules  tuberculeux  et 
leurs  granules. 

Les  granules  sont  mifor- 
mément  répandus  dans  tofât 
he  champ  du.  èorpiisedlè 
tuberculeux. 

Les  corpuscules  ttfbérea- 
leox  n'a|)partiënnént  pas  à 
la  clasi&e  des  celhftefs  à 
noyaux  K bres  dont  ifs  n'ont 
pas  l'aspect. 


} 


ï 


228  JOUEN/IL  DE  MÉDECINE. 

Une  idée  de  H.  Trousseau  viendrait  encore  ,  si  elle  se 
justifiait ,  établir  une  grande  différence  entre  la  granula- 
tion méningitique  et  le  tubercule.  Selon  l'illustre  profes- 
seur, ces  granulations  se  formeraient  pendant  les  accidents 
aigus  qui  terminent  Tcxistence  :  elles  seraient  le  résultat 
de  ces  accidents.  Or,  nous  savons  que  si  le  tubercule  peut 
grandir  et  se  développer  sous  l'influence  de  Finflamma- 
tion  ,  il  la  précède  et  la  détermine  dans  l'immense  majo- 
rité des  cas. 

On  conçoit  facilement  la  révolution  que  cette  décou- 
verte devait  opérer  dans  les  idées.  Ne  plus  être  en  présence 
de  l'élément  tuberculeux,  dont  le  nom  seul  a  quelque 
chose  de  si  effrayant ,  c'était  avoir  gagné ,  ce  semble  , 
immensément  de  terrain.  Mais  si  l'élément  granuleux, 
tout  en  différant  singulièrement  du  tubercule,  quant  à  sa 
nature,  n'offrait  pas  plus  de  chances  de  guérison  que 
lui,  s'il  tuait  aussi  infailliblement,  la  découverte  prenait  alors 
des  proportions  bien  mesquines  et  se  réduisait  à  une  ques- 
tion de  stériles  distinctions  :  nugœ  difficiles. 


IV. 

Mais  des  recherches  consciencieuses  et  patientes  ont 
démontré  (autant  qu'il  était  possible  de  le  démontrer),  que 
la  méningite  granuleuse  n'est  pas  toujours  au-dessus  des 
ressources  de  l'art.  Dans  un  travail  cité  par  M.  Léon  Lié- 
gard  ,  et  consigné  dans  les  Archives  générales  de  méde- 
cine (août  1853)  ,  M.  Rilliet  modifiant  ses  opinions  au 
sujet  de  la  gravité  de  cette  sorte  de  méningite  ,  oite  8  cas  . 
de  guérison  recueillis  par  divers  auteurs ,  et  dont  l'authen-  1 
ticité  ne  laisse  rien  à  désirer.  11  en  ajoute  3  qui  lui  sont  \ 
propres.  Un  12'  est  cité  dans  la  thèse  de  M.*  Savouret ,  | 
comme  ayant  existé  dans  le  service  de  M.  Trousseau  ,  qui  ! 
avait  reconnu  lui-même  la  nature  granuleuse  de  la  ma- 
ladie ;  un  13',  cité  par  M.  Léon  Liégard ,  est  tiré  de 
la  pratique  de  H.  Liégard  père,  médecin  à  Caen.  ' 

Voilà  donc  un  total  de  13  cas  de  méningite  granuleuse 


JOUBUAi  DE  MÉDfiONS.  229 

terminée  par  la  guérisoii.  Ce  chiffre ,  cfuoique  ayant  déjà 
une  cerlaine  valeur,  ne  constitue  encore  que  de  rares  ex- 
ceptions. Mais  ces  exceptions ,  grâce  à  un  traitement  plus 
rationnel,  mieux  suivi ,  modifié  avec  le  courage  et  la  per* 
sévérance  que  donne  Tespoir,  devront  nécessairement  se 
multiplier.  N'atteindraient-elles  pas  un  chiffre  fort  impo- 
sant, si  tous  nos  confrères,  répondant  à  la  généreuse 
initiative  des  élèves  de  M.  Trousseau,  apportaient  le  résultat 
de  leurs  observations  ? 

La  lecture  du  travail  de  M.  Léon  Liégard  m'a  singuliè- 
rement ému  et  entraîné.  C'est  une  si  séduisante  bonne 
fortune  pour  le  médecin  que  de  voir  une  maladie ,  réputée 
jusque-là  incurable ,  enfin  dépossédée  de  cette  fatale  répu- 
tation ,  que  je  n'ai  pu  résister  à  cette  sorte  d'appel.  Je  me 
suis  mis  avec  ardeur  à  compulser  toutes  les  notes  que  j'ai 
recueillies  à  la  campagne  et  à  Nantes,  depuis  onze  ans,  sur 
les  affections  du  cerveau  chez  les  en&nts  (1).  Cette  re- 


(1)  Ces  notes  se  composent  :  l**  d'une  multitude  d'enfants  at- 
teints, k  l'occasion  d'affections  abdominales,  da  travail  de  la 
dentition,  etc. ,  d'accidents  cérébraux  plus  ou  moins  inquiétants, 
plus  ou  moins  prolongés,  qui,  chez  quelques-uns  même  ont 
mis  un  instant  la  vie  en  danger  ;  2<^  de  3  cas  de  cbolérine  ou  diar- 
rhée séreuse  chez  lesquels  des  phénomènes  cérébraux  sont  venus 
figurer  pendant  les  demiàres  heures  de  la  vie  ;  3»  de  huit  enfants 
de  16  mois  k  12  ans  pris  de  scarlatine  maligne  avec  symptômes 
cérébraux  simulant  une  méningite  foudroyante  (4  décès)  \  4°  d'une 
pneumonie  double  chez  une  petite  fille  succédant  k  la  rougeole  et 
8e  compliquant,  les  deux  derniers  jours,  de  phénomènes  ataxi- 
ques  an  muieu  desquels  la  vie  s'éteignit;  5»  de  deux  enfants  hy- 
drocéphales qui  succombèrent  lentemejot  k  cette  maladie  \  6°  de 
quatre  cas  de  méningite  traités  de  nov.  1844  k  décembre  1845 ,  et 
signalés  dans  une  statistique  faite  sur  la  demande  de  la  Préfecture, 
au  commencement  de  1846.  De  ces  quatre  cas,  je  n'ai  pu  re- 
trouver qu'un  seul  tn  extenso  :  c'est  celui  qui  fait  le  sujet  de  ma 
première  observation  (2  décès)  ;  7^  de  neui  observations  de  mé- 
ningite dont  une  tellement  foudroyante  qu'elle  m'a  laissé  des 
doutes.  Quant  aux  huit  autres,  elles  me  semblent  réunir  toutes  les 
conditions  susceptibles  de  satisfaire  l'esprit  le  plus  difficile  (5  dé- 
cès). En  tout,  13  cas  de  ménin^te  ,  8  décès.  Je  possède  enfin  un 
dernier  cas  de  méningite  terminée  par   guérison  \  mais  il  n'est 

3 n'indiqué ,  et  ma  mémoire  ne  me  fournit ,  k  cet  égard ,  que  des 
onnée^  trop  incomplètes  pour  en  faire  l'objet  d'une  démons- 
traUon. 


230  jonmiiAL  DE  mÈùBcam. 

cherche  me  pormet  d'ajouter  trois  nouveaux  cas  de  gué- 
rison  à  ceux  qui  sont  mentionnés  dans  h  thèse  de  M.  Léon 
Liégard.  Avant  la  lecture  de  cette  thèse,  je  m'étais  sou- 
vent demandé  si  la  méningite  granulée  n*étoit  pas  susoep* 
tible  de  pardonner  dans  quelques  cas.  La  guérison  ines- 
pérée de  plusieurs  enfiints  qui  présentaient  tous  les 
symptômes  de  cette  affection  m'avait  finit  concevoir  une 
espérance  que  je  n'osais  émettre  encore.  Aujourd'hui  que 
la  curabilité  de  cette  redoutable  maladie  semble  n'être  plus 
impossible,  ees  observations  peuvent  être  présentées  avec 
le  titre  de  méningites  granuleuses. 

Observation  III*  (1). 

Marie  Mercier,  de  Couëron,  7  ans,  blonde ,  lympbati({ue, 
d'une  constitution  assez  forte ,  éprouve ,  à  chaque  indis- 
position ,  une  réaction  sympathique  plus  où  moins  vive  du 
côté  des  centres  nerveux. 

Le  12  octobre  1847,  après  quelques  jours  de  malaise, 
un  frisson  violent ,  suivi  de  vomissen^nts  bilieux  répétés; 
céphalalgie  intense;  douleur  fixe  et  insupportable  dans 
l'abdomen.  —  A  ma  première  visite,  je  trouve  cette  enfant 
couchée  sur  le  dos,  la  face  rouge,  grippée  et  souffrante, 
la tôte douloureuse,  les  yeux  sensibles  à  la  lumière,  l'in- 
telligence nette,  répondant  avec  clarté,  mais  avec  brusquerie 
et  mauvaise  humeur.  Point  de  somnolence  ni  de  convul- 
sions. La  langue  est  sale,  la  bouche  mauvaise,  la  soif 
vive,  l'anorexie  complète  aveo  des  vomissements  fréquents 
de  matières  bilieuses.  Le  ventre  est  le  siège  d'une  douleur 
déchirante  qui  s'exaspère  à  la  moindre  pression  ;  les  selles 
sont  naturelles  pour  la  fréquence  et  la  consistance,  les 
urines  rouges  et  chargées.  Rien  d'anormal  du  côté  da 


(1)  Cette  observation  a  été  publiée  in  extenso  dans  U  Journal 
de  Iffédecine  àe  "S^dnies  {ÏH'^  liv»,  lâ^l).  Gomme  elle  est  fort 
longue  Y  je  me  contenterai  de  la  présenter  sons  forme  d^extrait, 
en  m  cooservanttoutefois  les  traits  qui  la  oaracténsent. 


JOnOIAL  BE  MÉDBCnO».  23t 

cœur  et  de  l'appareil  respiratoire  ;  la  peau  est  brûlante ,  le 
pouls  petit,  serré,  à  120. 

J'ai  aous  les  yeux  une  péritonite  à  son  début  et  qui  déjà 
s'accompagne  de  symptômes  cérébraux  inquiétants. 

Diète;  orge  ;  potion  légèr^  éihérée;  8  sangs,  sur  l'abdom. 
—  2  vésic.  aux  jambes.  « 

13  oot.  Malgré  cette  double  attaque  dirigée  contre 
l'affection  abdominale  et  les  phénomènes  sympathiques 
qu'elle  met  en  jeu,  les . accidents  suivent  une  marche 
croissante;  le  ventre  est  plus  douloureux,  plus  tendu t  les 
vomissements  plus  fréquents,  les  seltes  nulles,  le  pouls 
plus  petit,  à  130.  En  même  temps,  la  céphalalgie  aug- 
mente avec  l'impatience  ;  les  yeux  se  cavent  et  ne  peuvent 
supporter  l'éclat  du  jour  ;  la  face  rougit  et  pâlit  alternati- 
vement; quelques  cris  aigus  qui  ressemblent  aux  cris  hy- 
drencéphaliques. 

Cat.  sur  l'abd.  — .  8  sangs,  aux  cuisses  ;  eau  froide  sur 
le  front;  le  soir,  20  gram.  d'huile  de  ricin  qui  donnent  2 
selles. 

14.  Quelques  mouvements  convuisifs  alternant  avec  de 
la  somnolence;  les  autres  symptômes  angasentent  d'in* 
tenisité. 

8  sangsues  aux  apophyses  raastoïdes. 

15.  Nuit  mauvaise  :  délire ,  agitation,  convulsions, 
^cris  aigus  succédant  à  une  période  de  résolution  complète. 

A  minuit ,  coma ,  face  pâle,  immobile ,  yeux  caves  et 
cernés,  entr'ou verts, pufNlIes  dilatées;  quand  on  lappelle, 
l'enfant  se  réveille  en  sursaut  et  retombe  immédiatement 
dan&  sa  somnolence.  Tète  brûlante ,  couverte  de  sueur  a  sa 
partie  postérieure;  respirsition  à  40 ,  thoracique ,  pouls  à 
180 ,  presque  insensible.  Ventre  très^allonné,  urines  rares, 
ventre  serré. 

1  vésic.  sur  le  ventre  $  2  vésic.  aux  cuisses;  lavem^ 
purg. 

Le  matin ,  délire,  carphologie,  convulsions  ,<  contrac- 
tures, cris  bydrenoéphaliques,  grincements  de  dents, 
mâetionnement  continuel;  foce  rouge ,  animée  ;  yeux 
éthiceiants,  pupilles  resserrées  y  contractiles.  Il  est  difficile 


232  joubual  be  HÉraGua. 

de  savoir  s'il  existe  un  strabisme  morbide,  la  malade  lou- 
chant habituellement.  Céphalalgie  déchirante  qui  s'exas- 
père au  moindre  attouchement  exercé  sur  la  tête;  sensi- 
bilité telle  des  téguments  qu*il  suflSt  de  toucher  le  lit  de 
Marie  Mercier  pour  lui  arracher  des  cris.  Peau  chaude,  pouls 
irrégulief,  s'effaçant  sous  le  doigt,  à  1 50.  Bientôt  tout  cet 
appareil  d'excitation  dit  de  nouveau  place  au  coma  le  plus 
profond.  Respiration  fréquente ,  ventre  énorme,  doulou- 
reux, quoique  à  un  moindre  degré ,  mat  dans  les  parties 
déclives.  Les  vomissements  ont  cessé. 

4  gram.  d*ong^  napol.  en  frictions  toutes  les  4  heures  ; 
25  centig.  de  calomel  toutes  les  6  heures. 

Le  calomel  donne  des  selles  nombreuses;  mais  si,  les 
les  jours  suivants,  Taffection  du  ventre  marche  vers  la 
résolution  ;  si  un  nouvel  épanchement  qui  s'est  opéré  dans 
les  deux  plèvres  se  résorbe  graduellement ,  les  symptômes 
cérébraux  sont  loin  d'avoir  fléchi.  Le  21 ,  le  coma  est  pro- 
fond ,  la  face  immobile^  pâle  ou  plaquée  de  rouge  alterna- 
tivement, la  tête  inondée  de  sueur,  les  pupilles  dilatées, 
presque  insensibles,  la  peau  peu  excitable.  Connaissance 
perdue ,  marmottement  inintelligible  ;  les  coiivulsions  et 
les  contractures  s'éloignent  de  plus  en  plus.  La  circulation 
devient  irrégulière,  sans  rhythme ,  le  pouls  varie  de  130  à 
180,  quelquefois  on  ne  peut  le  compter.  La  respiration  est 
anxieuse ,  précipitée,  inégale  ;  les  selles  et  les  urines  invo-' 
lontaires. 

Conlinuer  les  frictions  et  le  calomel  dont  l'action  pur- 
gative se  maintient. 

L'enfant  reste  7  jours  encore  dans  cette  cruelle  situation , 
entre  la  vie  et  la  mort. 

Le  22  (onzième  jour).  La  nuit  a  été  un  peu  meilleure  : 
il  y  a  eu  une  couple  d'heures  d'un  vrai  sommeil;  les  cris 
de  tête  ont  été  rares;  la  connaissance  est  revenue  par 
instants.  —  Le  matin ,  la  malade  répond  lentement  par 
monosyllabes,  mais  avec  justesse,  à  quelques  questions; 
la  tête  est  toujours  douloureuse  et  brûlante ,  la  face  tou- 
jours alternativement  pâle  ou  plaquée  de  rouge;  mais  il  y 
a  du  calme;  le  coma  disparaît;  le  pouls  est  à  125,  ^us 


JOUBRÂL  DB  MÉDBCUIE.  233 

régulier;  Tabdomen  indolore;  point  de  toux;  plèvres 
vides. 

Même  prescription. 

A  partir  de  cette  époque,  le  mai  est  vaincu;  les  symp- 
tômes s'amendent  graduellement ,  la  petite  malade  se 
rétablit  lentement  à  la  vérité,  mais  rien  ne  vient  entraver 
sa  convalescence.  Aujourd'hui, Marie  M. a  15  ans,  et,  depuis 
8  aps ,  sa  santé  ne  s'est  pas  démentie. 

Lorsque  je  présentai,  pour  la  première  fois,  la  relation 
de  ce  fait  intéressant  à  la  Section  de  Médecine,  je  n'osai 
prononcer  le  mot  de  méningite  granuleuse.  Bien  plus ,  le 
mot  de  granuleuse  étant ,  à  cette  époque ,  synonyme  de 
tuberculeuse  dans  l'esprit  de  tout  le  monde ,  il  eut  semblé 
singulièrement  téméraire  d'inscrire  ce  diagnostic  en  tète 
d'un  cas  de  guérison. 

Cependant,  lorsque  Ton  considère  la  gravité  des  symp- 
tonnes,  leur  forme,  leur  enchaînement,  la  durée  du  mal, 
il  est  difficile  de  ne  pas  admettre  une  immense  ressem- 
blance entre  ce  cas  et  les  descriptions  que  les  auteurs  nous 
ont  données  de  la  méningite  granuleuse ,  d'autant  plus  que 
la  disposition  du  cerveau,  chnez  cet  en£eint,  à  ressentir 
douloureusement  la  moindre  souffrance  d'un  autre  organe , 
doit  nécessairement  faire  soupçonner  un  travail  spécial , 
une  manière  d'être  particulière  de  l'encéphale. 

Observation  IV«  (1). 

Stanislas  Maugat,  de  Couëron,  22  mois,  enfant  fort,  né 
d'une  mère  sujette  à  d'horribles  maux  de  tête  qui  la  tien- 
nent au  lit  pendant  des  semaines  entières,  a  présenté 
jusqu'ici  une  bonne  santé,  qui  n'a  été  interrompue  que  par 
quelques  dérangements  de  corps  si  fréquents  chez  les  en- 
fants. Dans  les  derniers  jours  de  décembre  18i6  ,  il  est 


{i)  Bien  que  tracée  a  grands  traits  et  même  incomplète  sous 
beaucoup  de  rapports ,  cette  observation  me  paraît  des  plus 
concluantes. 


234  wvamàh  bb  «ÉnemB. 

trisie ,  reebigoé ,  perd  l'appétit  «  crie  qaand  on  veut  le  htre 
maoger,  et  rejette  une  partie  des  aliments  qu'on  lui  domve. 
Il  dort  mal,  crie  la  nuit«  se  réveille  en  sursaut,  a  des 
soubresauts  dans  les  fendons  ;  la  &ee  est  pâle  et  altérée. 
Point  de  traitement. 

Le2  janv.  1847.  Depuis  hier,  Stanislas  est  beaucoup  phis 
mal,  une  fièvre  violente  s'est  déclarée;  il  existe  une  vive 
céphalalgie  qu'accusent  le  plissement  du  front  et  Tobstina- 
tion  avec  laquelle  l'enCHit  ferme  les  yeux  ;  les  pupilles  sont 
contractées  et  contractiles;  la  face  est  rou^,  une  agita- 
tion inquiète  alterne  avec  une  somnolence  profonde  entre- 
coupée de  temps  en  temps  par  un  réveil  en  sursaut  et  des 
cris  aigus  ;  quelques  soubresauts  et  un  peu  de  mâchonne- 
ment. La  langue  est  uu  peu  blanche  ;  deux  vomissements 
bilieux  depuis  hier;  soif,  ventre  souple,  un  peu  sensible 
à  la  pression,  constipation.  Peau  chaude,  pouls  à  ItO- 
120. 

4  sangsues  aux  malléoles;  eau  froide  sur  le  front;  ca- 
lomel,  20  centig. 

Le  3.  Le  calomel  détermine  2  selles  ;  les  sangsues  sai- 
gnent abondamment.  L'enfiint  parait  notablement  sou- 
lagé, presque  en  convalescence  :  il  s'assied  et  joue  un 
instant  sur  son  lit. 

Calomel,  20  centig. 

Le  4.  Les  accidents  se  sont  aggravés  depuis  cette  nuit  ; 
la  connaissance  s'est  perdue;  les  yeux  se  sont  fermés;  les 
pupilles  resserréfs  sont  encore  contractiles,  la  face  crispée 
pâlit  et  rougit  alternativement.  L'enfimt  s'agite  viol^foment, 
grince  des  dents,  mâchonne,  jette  des  cris  hydreocépha- 
Hques,  tressaille  et  se  renverse  en  arrière,  puis  tombe, 
au  bout  de  quelque  temps ,  dans  une  somnolence  profonde 
avec  la  pâleur  et  rimmoinlité  de  la  mort.  Le  pouls  est 
petit,  serré,  à  iSO. 

4  sangs,  aux  cuisses  ;  2  vésic.  aux  mollets;  1  vésic.  sur 
le  cou;  calomel,  30  centig. 

Les  sangsues  saignent  passablement,  les  3  vésicatoires 
prennent  bien  ;  plusieurs  .selles  vertes. 

5,  6  et  7  janvier.  Coma  presque  continuel  dont  Stanislas 


n€i  sort  que  pour  ybLsr  des  cris  aigus.  Parfois  il  ouvre  la 
bouche  toiHe  grande  comme  pour  crier  ;  mais  la  voix  ne 
sort  point ,  ou  bim  c*0st  une  sorte  de  en  à  voix  basse ,  si 
je  puis  ainsi  dire  ,  une  expiration  sourde.  Le  mâchonne- 
ment, les  grincements  fie  4ent$,  las  soubresauts  devien- 
nent plus  rares.  Yeux  fermés ,  convulsés  en  haut ,  roulant 
lentement  dans  leurs  orbites ,  qvand  on  ouvra  les  pau- 
pières; strabisme  léger,  pupilles  dilatées,  peu  contractiles; 
abolition  de  la  vue ,  de  l'ouïe  et  de  la  sensibilité  cutanée. 
Une  pâleur  cadavérique  de  la  foce  est  remplacée  de  temps 
en  ten^ps  encore  par  des  plaques  d'un  rouge  ardent  sur 
l^s  pommettes.  La  raideur  du  cou  et  de  tout  le  rachis  est 
considérable ,  Tamaigrissement  marqué ,  la  peau  chaude  et 
sèche,  le  pouls  irré^ier,  petit,  ioc<^rlaio,  variant  de  120 
à  180.  Les  vomissements  ont  cessé,  mais  tes  selles  sont 
fréquentes,  le  veutre  souple. 

2  vésic.  aux  cuisines  ;  calamel ,  30  centig.  ;  ong^  napolit. , 
1 5  grana-  en  frictions. 

8  et  9.  Malgré  Ténergie  du  traitement,  la  maladie s'ag- 
^ave  a,veç  uo^  persistance  désespérante.  Le  9  surtout ,  le 
cooia  est  sans  io,terruptu)n.  Plus  de  cris,  de  mftchonae- 
menl,  de  soubresauts;  Tenfant  ressemble  à  un  petit  ca- 
davre ;  les  paupières  eatr'ouvertes  laissent  apercevoir  les 
giobes  oculaires  se  mouvant  avec  lenteur,  les  pupilles  pres- 
que de  la  largeur  de  l'iris,  insensibles.  On  peut  tou<^her 
les  conjoi)ctives  avec  les  barbes  d'une  plume,  sans  que 
Tenfant  ait  Tair  d'^ avoir  conscience.  Peau  chaude;  la 
pl^ce  occupée  sur  Torpiller  par  la  tête  est  inondée  de 
su«ur.  Poiuls  impossible  à  compter,  irrégulier,  inégai, 
CUforme, 

Continuer  les  merqufiaux. 

10  Ja^v.  Coma  un  peu  mioins  profond  ;  pouls  plus  per- 
ceptible ;  les  jours  suivants  la  comiaisaa^ce  semble  reve- 
nir un  peu  ;  les  yeux  s'ouvrent  et  deviennent  plus  nets.  Le 
13,  il  y  a  de  l'espérance;  (e  16  ,  la  maladie  semble  défi- 
nitivement jugée ,  et  (a  cQovislesa^nce  se  dessine  fraucber 
ment. 

Aujourd'hui  (septembre  18;55),  Stanislas  Najjigat  a  10 


236  JOdHAL  n  ■ÉnBCRB. 

ans,  il  est  d'oDe  santé  assez  frêle  et  sujet  à  des  céphalal- 
gies fréquentes  qui  le  prennent  brusquement  et  le  quit- 
tent de  même ,  après  l'avoir  cruellement  torturé. 

OBSElYATtOlf  V«. 

Marie  Martin ,  belle  et  forte  enfant  de  4  ans,  a  toujours 
joui  d'une  bonne  santé:  ses  parents  sont  forts,  sanguins 
et  bien  portants.  Elle  est  lente,  assez  peu  intelligente.  De- 
puis les  premiers  jours  d'avri4  1855,  on  remarque  qu'elle 
est  seule,  triste ,  grognon ,  qu'elle  aime  peu  à  se  déplacer ,- 
elle  n'accuse ,  du  reste ,  aucune  souffrance  ;  seulement  elle 
vomit  fr^uemment ,  l'appétit  s'est  perdu  ;  elle  est  brûlante 
par  instant  :  toutefois ,  elle  n'est  pas  obligée  de  s'aliter. 

Dans  la  nuit  du  18  au  19,  frisson  suivi  d'une  fièvre 
violente  avec  rougeur  vive ,  céphalalgie  intense  qu'accusent 
plutôt  les  gestes  que  les  paroles  de  l'enfant.  Jactitation, 
insomnie;  quelques  vomissements  bilieux;  constipation 
depuis  deux  jours. 

19.  Décubitus  dorsal  ;  tête  douloureuse,  brûlante,  fiice 
rouge,  crispée;  yeux  chassieux;  pupilles  un  peu  contrac- 
tées, connaissance  complète,  humeur  très-irritable,  cris 
d'impatience  au  moindre  attouchement,  pas  de  convul- 
sions: peau  chaude ,  pouls  fréquent,  ferme,  à  130  ;  langue 
légèrement  blanche ,  soif  ardente. 

4  sangs,  aux  malléoles;  elles  saignent  abondamment; 
calomel ,  25  centig.  (une  selle  insignifiante). 

20.  La  peau  est  un  peu  moins  chaude,  le  pouls  moins  fort, 
moins  fréquent ,  la  fiice  rouge  ou  pâle  alternativement , 
mais  toujours  crispée ,  les  yeux  toujours  chassieux ,  les 
pupilles  contractées,  l'impatience  extrême  ;  le  sommeil  est 
agité ,  interrompu  souvent  par  un  réveil  brusque  que 
signale  un  soubresaut  et  un  cri  aigu  ;  quelques  vomitu- 
ritions. 

4  sangs,  aux  genoux  (écoulement  de  sang  considérable); 
lavement  avec  sel  commun;  sinapismes  aux  pieds;  calo- 
mel, 30  centig.  (une  selle). 

21.  Peu  de  résultats;  la  peau  est  un  peu  moins  chaude 


JOUUIAL  DE  VÉDECHfB.  237 

toutefois ,  le  pouls  moins  fréquent,  oscillant  entre  90  et 
110.  Mais  la  face  est  par  moment   immobile,  violacée, 
livide ,  pour  grimacer  ensuite  et  se  plaquer  de  rouge   sur 
les  pommettes  ;  le  front  se  plisse  à  la  racine  du  nez ,  les 
yeux  mornes ,  stupides  pendant  Tatonie ,  deviennent  bril* 
îantsdans  la  période  d'excitation,  les  pupilles  resserrées, 
contractiles,  non  oscillantes.   Marie  est  d*une  impatience 
extrême ,  jette  des  cris  aigus  quand  on   lui  parle ,  qu'on 
la  touche ,  qu'on  remue  son  berceau ,  ou  même  quand  on 
s'approche  d'elle  :  il  semble  que  la  sensibilité  tactile  soit 
lellement  exaltée  que  l'agitation  de  l'air  lui  cause  une  im- 
pression désagréable.  Pas  de  délire;  sommeil  agité,  fati- 
gant, entrecoupé;  déjà  la  tête  a  un  peu  de  tendance  à 
se  renverser  en  arrière.  Langue  blanche ,  soif,  pas  de  vo- 
missements, constipation   rebelle:  nn  peu  de  toux  que 
n'explique  aucun  phénomène  stétboscopique  ou  plessimé- 
trique. 

Les  frissons  signalés  par  les  parents,  la  différence  éx* 
tréme  présentée  par  le  pouls  à  diverses  époques,  m'engagent 
à  donner  du  sulfate  de  quinine,  au  moins  à  titre  de  pré* 
caution  contre  la  possibilité  d'accès  pernicieux^ 

Sul&te  de  quinine,  25  centig.  ;  2  vésic.  aux  jambes; 
lav^  purgat. 

22.  Un  changement  inattendu  me  fait  supposer  qu'en 
définitive  je  n'ai  à  combattre  qu'une  fièvre  rémittente  à 
symptômes  cérébraux.  Ce  matin,  la  face  est  naturelle, 
épanouie,  les  yeux  nets  et  vifs,  la  peau  fraîche,  le  pouls  à 
86.  Quoique  d'assez  mauvaise  humeur  encore,  l'enfant 
s'occupe  de  ce  qui  l'entoure  et  demande  à  manger  :  les 
vomissements  ont  disparu ,  mais  le  ventre  est  toujours 
serré. 

Sulfate  de  quinine ,  30  centig.  ;  2  cuillerées  de  panade. 

23.  Cette  amélioration  n'est  que  de  courte  durée.  Dans 
la  soirée ,  Marie  retombe  dans  une  grande  agitation  ;  le 
rachis  se  raidit  et  se  renverse  en  arrière  ;  des  soubresauts 
se  font  sentir  dans  les  tendons;  la  tête  douloureuse  se 
couvre  de  sueur;  la  face  crispée  rougit  et  pâlit  tour  à  tour  ; 
la  petite  malade  mâchonne ,  grince  des  dents ,  tire  sa  lèvre 


288  joimMAL  BB  MÉsmaasE* 

inférieure  avec  acbaraenieiU  et  s'arrache  les  cheveux  ;  elle 
jeCle  à  chaque  ioslant  un  cri  aigu,  unique,  en  ouvrant  une 
bouche  énorme  ;  le  moindre  attouchement  Tirrite  ou  lui 
arrache  de  ces  cris;  rintelligence  commence  à  se  perdre; 
pourtant  elle  semble  encore  parfois  entendre  et  compren- 
dre sa  mère,  quand  celle-ci  lui  parle  à  haute  voix.  La 
vision  est  altérée ,  les  pupilles  contractées ,  la  soif  vive  ; 
poini  de  vomissements  ni  de  selles;  peu  de  toux;  peau 
chaude;  pouls  petit ,  irrégulier,  variant  de  120  à  160. 

2  vésic.  aux  cuisses;  glace  sur  le  front;  calomel,  40 
centig.;  ong^  napolit. ,  f  5  gram.  en  frictions. 

24.  Décubitus  sur  le  côté,  en  chien  de  fusil;  tète  ren- 
versée en  arrière  et  raide;  cris  aigus,  incessants  depuis 
celle  nuit;  pâleur  morteUe  alternant  avec  une  rougeur 
plaquée  des  joues,  amaigrissement  notable,  traits  efMés, 
front  crispé;  yeux  fermés,  globes  oculaires  légèrement 
convulsés  en  haut;  pupilles  dilatées,  égales,  légèrement 
contractiles.  La  vue  est  abolie  complètement,  les  cornées 
chassieuses  sont  comme  granulées;  pas  de  strabisme.  Abo- 
lition de  l'ouïe;  màclionnement  et  grincem^ats  de  dents 
répétés ,  surtout  cette  nuit.  La  sensibilité  delà  peau  semble 
fortement  diminuée  à  gauche;  mouvements  autonnatiques 
(le  la  main  droite  qui  se  porte  au  front ,  fourrage  ses  che- 
veux ou  cherche  quelque  chose  en  l'air  et  sur  son  lit. 
Immobilité  très-prononcée  du  bras  gauche;  soubresauts 
dans  les  tendons.  Déglutition  diflScile,  point  de  vomisse- 
ments, langue  blanche,  point  de  salivation,  ventre  sen- 
sible à  la  pression,  selles  rares.  Peau  chaude,  aride, 
flétrie  ;  pouls  variable^  fréquent,  irrégulier,  dépressible,  de 
110  à  150  ou  môme  180. 

Depuis  24  heures  ,  cette  agitation  a  fait  place,  plusieurs 
fois,  à  un  état  comateux  des  plus  alarmants. 

Sécher  les  vésic.;  1  selon  sur  le  cou  (il  saigne  sriion- 
damment);  calomel,  40  eentig. ;  onguent  napolit.,  15 
gram. 

25.  M.  Thibeaud  est  appelé  en  consultation.  Marie  est 
exactement  dans  le  même  état  qu'hier;  seulement,  il  y  a 
eu  4  ou  5  selles  vertes  abondantes. 


Oiagno^ic  :  méniogilie  probableoieot  granuleuse.  Pro- 
nostic :  mort   presque  certaine.    Traitement  :  le  même, 
absolument,  seulement,  dans  les   deux  jours  suivants, 
après  av<>ir  essayé^  sans  succès ,  le  calomel  à  doses  frac- 
tionnées, selon  la  méthode  de  M.  Trousseau,  nous  por- 
tons successivement  la  dose  de  ce  médicament  à  60 ,  75 
centigM  1  gram.  mépae  dans  les  24  heures,  et  l'onguent 
napoli^iin  à  30  grammes  dans  ie  même  espace  de  temps. 
Sous  Tinfluencede  cetraitemeot,  renCeint  reste  dans  le 
même  état  pendant  4  ou  5  jours.  Elle  jette  des  cris  aigus 
pendant  de^  heures  entières,  puis  retombe  dans  le  coma. 
Le  racliis  est  raide ,  tout  d'une  pièce  ;  la  vue  et  Touïe 
toujpurs  abolies,  la  sensibilité  des  téguments  toujours 
amoindrie ,  le  côté  gaucbe.presque  paralysé  du  mouvement 
et  du  sentijsient.  La  nuit  surtout,  il  y  a  plus  d'agitation, 
de  cris,  d'alternatives  de  rougeur  et  de  pftieur  de  la  face; 
les  selles  sont  abondantes  et  répétées,  6  ou  7  fois  dans  les 
24  heures. 

Môme  traitement. 

l^"'  mai.  Li^  connaissance  semble  revenir,  là  vue  saisir 
quelques  objets.  La  mère  a  cru  remarquer  un  peu  d'atten- 
tion chez  sa ,  fille ,  qn^nd  elle  l'appelle.  Les  yeux  sont 
ouverts,  un  peiu  fixes  et  étonnés,  mais  nets;  les  pupilles 
moyenneiQen^  dilatées  ;  le  visage  est  assez  bon ,  quoique 
trèsrpàle  ;  mc|ia  il  y  a  encqre  un  peu  de  raideur  du  cou , 
encore  quQlq^^S!  cris  la  nuit,  quelques  alternatives  de 
rougeur  et  de  pâleur  ;  li^  soif  rest^  viv^,  le  ventre  toujours 
très-libre;  la  déglutitiofli  est  plus  facile,  la  peau  fraîche, 
le  pouls  à  90-95. 

Continuer  les  mercuriaux. 

Cet  état  s'aipéliore  graduellement  :  peu  à  peu  la  vue  et 
Touïe  reviennent  à  leur  état  normal; la  tête  est  libre,  la 
conaajsSfinc.9  parfaite,  le  cou  flexible,  ie  sommeil  répara* 
teur;  l'appétit  se  dessine,  le  ventre  reste  longtemps  libre. 
Le  12,  l'enfant  est  complètement  guérie  ;  son  intelligence 
est  la  même  qu'avant  cette  crueUe  maladie. 

Malgré  10  à  11  gr^ammes  de  calomel  et  300  gram.  au 
moins  d'oi^ueal  napolitain  en  frictions,  iMbrie  n'a  pas  eu 

18 


240  JOUBNÂL  DE  KÉBECIIVB. 

de  salivation  ;  seulement  elle  a  fait  peau  neuve  de  la  tëie 
aux  pieds. 

Il  me  semble  difficile  de  trouver  deux  observations  plus 
concluantes.  Le  tableau'  est  aussi  complet  que  pourrait  le 
désirer  le  pathologiste  le  plus  diflicile,  et  cadre  parfiiite- 
ment  avec  la  description  que  les  auteurs  récents  nous  ont 
laissée  de  la  méningite  granuleuse.  D'abord,  quelques 
prodromes  insidieux,  à  forme  mal  dessinée,  peu  inquié- 
tante; un  peu  d'abattement ,  de  tristesse,  d'altération  des 
traits,  de  céphalalgie,  de  perte  d'appétit,  de  constipation 
avec  quelques  nausées,  quelques  vomissements;  puis  un 
cortège  de  symplômes*des  p(us  significatifs  par  leur  forme 
et  leur  marche  :  la  céphalalgie ,  l'agitation ,  les  soubre- 
sauts dans  les  tendons ,  l'impatience ,  la  perte  de  connais- 
sance, les  cris  hydrencépbaliques,  la  raideur  du  cou,  la 
constriction  des  pupilles,  etc.,  auxquels  succèdent,  au  bout 
d'un  temps  variable,  le  coma,  le  renversement  de  la  tète 
en  arrière,  la  dilatation  des  pupilles,  labolition  de  la  vue 
et  de  l'ouïe ,  la  difficulté  de  la  déglutition ,  la  rougeur  et 
la  pâleur  alternative  de  la  (ace,  l'altération  de  la  sensibilité 
et  de  la  motilité ,  etc. 

Les  pathologistes  ont  regardé  comme  un  trait  spécial  à 
la  méningite  granuleuse,  comme  une  sorte  de  phénomène 
pathognomonique,  sa  durée  considérable,  sa  marche  lente, 
irréguliére,  entrecoupée  de  périodes  d'amélioration  plus 
ou  moins  accusée  qui  peuvent,  au  premier  abord,  induire 
en  erreur  le  médecin  même  expérimenté  et  lui  donner 
ridée  d'une  sorte  de  résurrection  ou  de  la  présence  de 
l'élément  intermittent  (1). 

(1)  En  février  1844j  mourut,  li  l'hôpital  de  la  Charité,  une 
jeune  fille  de  18  ans,  affectée  de  méningite  granuleuse.  Après  cinq 
jours  de  délire,  de  coma,  d'agitation ,  de  grineements  de 
dents,  etc.,  elle  sembla  tout  d'un  coup  renaître  à  la  vie.  La 
connaissance  revint  complète,  la  céphalalgie  disparut  presque 
entièrement,  ainsi  que  tous  les  troubles  nerveux.  La  malade 
était  sauvée  aux  yeux  de  tous  ceux  qui  suivaient  la  clinique  de 
M.  Gouraud  ,  aux  jeux  de  M.  Gouraud  lui-même.  Le  lendemain, 
les  accidents  s'étaient  reproduits  avec  un  redoublement  d'inten- 
sité ,  et  cette  jeune  fiUe  expira  le  dixième  jour.  La  pie-mère  était 
littéralement  criblée  de  granulations. 


JOUANAL  DE  HÉbSCUfE.  241 

Ces  deux-  observations  présentent  ce  phénomène  aussi 
complet  que  possible.  Dans  Its  deux  cas ,  dans  le  dernier 
surtout ,  je  me  suis  laissé  prendre  à  cette  apparence  trom- 
peuse. A  la  vue  du  changement  opéré  dans  Tétat  de  Marie 
M.,  à  la  suite  de  la  première  dose  de  sulfate  de  quinine, 
je  crus  à  une  fièvre  intermittente  grave  :  on  se  rappelle 
combien  cette  opinion  fut  justifiée. 

Je  ne   me  dissimule  pas  qu'une  objection  grave    peut 
m'arrèter  au  milieu  de  cette  discussion ,  et  cette  objection 
peut  être  faite  également  à  tous  les  cas  de  guérison  de 
méningite  granuteuse  rassemblés   par  M.  Léon  Liégard. 
Les  enfants  dont  je   vous   ai  donné  la  pénible  histoire 
étaient    bien   atteints  de  méningite  :  cela  ne  paraît  pas 
contestable.    Mais  cette    méningite    était-elle    granulée? 
Comment  se  prononcer  pour  TafiRrmative,  quand  l'autopsie 
n'est  pas  venue  justifier  le  diagnostic  porté  pendant  la  vie? 
Il  est  vrai    que  je  n'ai  pas  eu  la  triste  bonne  fortune  de 
joindre  au  tableau  de  la  maladie  celui  des  lésions  nécros- 
copiques.  Cet  avantage,  dont  le  médecin  est  fort  peu  ja- 
loux ,  aurait  sans  doute  apporté  le  critérium  infaillible  de 
la  méningite,  et  son  absence  doit  laisser  planer,  sur  ces 
observations,  un  doute  qu'il  est  fâcheux  de  ne  pouvoir 
dissiper  autrement.  Mais  alors  que  penser  du  diagnostic  si 
laborieusement   étudié  et  formulé  par  tous  les  hommes 
spécialement  occupés  de  pathologie  infantile,  diagnostic 
si  complètement  en  harmonie  avec  la  symptomatologie  de 
nos  deux   observations.    De  deux   choses   Tune  :  ou  ces 
affections  sont  bien  véritablement  des  méningites  graim- 
leuses,  et  la  carabilité  de  cette  redoutable  affection  est 
désormais  un  fait  acquis  à  la  science  ;  ou  bien  ce  sont  des 
méningites  simples,  et  ce  diagnostic  différentiel  est  tout  à 
refaire  :  il  faut  déblayer  le  champ  de  la  pathologie  de  toutes 
les  erreurs  qui  y  ont  trait  et  convenir  avec  MM.  Grisolle 
et  Léon  Liégard ,  qu'il  n'existe  aucun  élément  certain  sur 
lequel  on  puisse  établir  une  distinction  positive.  Il  découle 
encore  de  cette  seconde  alternative  une  conclusion  bien 
consolante  ^  même- pour  celui   qui  reste  convaincu  de  la 
nature  tuberculeuse  des  granulations  ;  c'e3t  que  la  ménin- 


242  JOOBlfAJ.  DE  WtoBCOlB. 

gîte  des  enfants  n*e$t  pas  toujours  gramilews^,  qqe  lois- 
qu'elle  se  présente  avec  la  Corme  en  apfiarefice  ia  moins 
récusable ,  il  >  a  encore  à  espérer  qij^  le  malade  n^a  qii'one 
niéningite  simple  et  peut  guérir;  c'est  qu'avec  cette  pré- 
vision 9  le  médecin  ne  se  condamnera  pas  à  une  Lpaction 
déplorable ,  et  qu'il  luttera  avec  toute  l'éi^ygie  que  4onne 
l'espérance  du  succès. 

V. 

Quel  sera  donc  le  traitement  que  l'on  pourra  opposer 
avec  le  plus  d avantages  à  la  méningite? 

Nous  passerons  rapidement  sur  cette  question  que  tant 
de  monographies  ont  déjà  plus  ou  moins  élucidée  et  ^|ue 
la  thèse  de  M.  Léon  Li4^d  traite  avec  beaucoup  de 
détails. 

1°  L'e&périence  de  tous  les  temps  a  prononcé  à  l'ogard 
des  antiphlogistiques.  Ils  sont  presque  toujours  indiq^n- 
sables  ;  maniés  avec  énergie  et  intelligence,  ils  produisent 
souvent  de  remarquables  elFets.,  quelquefois  mtoe  ils 
peuvent  avoir  tous  les  honneurs  de  Ig  guérison,  comme  op 
peut  en  juger  par  ma  première  observation,  où  une  der- 
ûi  ère  sangsue,  appliquée  derrière  l'oreiMe,  porta  le  (ter- 
nier  coup  à  une  malAdie  que  les  révuisife,  les  vésiciaiQÎr^s, 
le  calomel  n'avaient  point  eotJrayée* 

Je  n'entrerai  pas  dims  de  kûigs  détails,  m  Stuji^t  de  la 
question  diversement  controversée  d<a  ia  purtie  où  lés  sang- 
sues doivent  être  appUquéea ,  s'il  &ui  leur  p«;éCàrer  la  sai- 
gnée, etc.  Cette.question  est  sounoise  à  mille  considérations 
quant  à  Tàge,  le  tempérament,  rintensité  réactiopMl^i 
l'époque  de  la  maladie ,  le  traitement  déjà,  suivi ,  etc.  Dire 
qu'au  début  la  saisn^e  semble  préfér^bW  Ipr^qM'eUp  est 
possible,  lorsque  lés  préjugés  des  parents  n'y  m^Uent 
point  un  obstacle  invincible  ;  sinon  qu'il  faut  la  rempifucer 
par  une  vigoureuse  application  de  sangsues  aux  eiArémîtés 
inférieures  ;  que  de  nouvelles  sangsues  appliquées  supces- 
sivement  et  en  petite  quantité  à  la. fois,  davr^Qnt  entretenir 
Técoulemeot  dp  sang  pendant  le  plus  longtemps  possible  ; 


JOURNAL  DÉ  ldl>£<:iNÈ.  243 

que  ,  plùâ  iaM ,  une  application  sembhible  aux  mastoîdes 
produit  alors  une  déplétion  plus  directe,  plus  énergique, 
plus  efficace;  c'est  répéter  ce  que  tout  le  monde  a  appris, 
vu ,  expérimenté. 

I^ous  en  dirons  aiitant  des  applications  froides  sur  ta 
tête  ,  de  la  glace,  etc.  La  perturbation  qu'elles  jettent  dans 
les  fonctions  nerveuses,  la  modification  qu'elles  impriment 
par  contre-coup  â  la  circulation  capillaire,  lâf  sédation 
puissante  qui  en  résulte ,  sont  des  faits  bien  connus  de  tout 
le   monde. 

2^  Les  révulsife  extérieiirs  ne  justifient  pas  tous  égale- 
ment l'usage  et  Tàbus  qu'on  en  fait.  Les  vésicatoires  appli- 
qués aux  cuisses,  âu?t  jambes,  au  cou,  nous  ont  semblé 
d'une  nullité  absolue  d'action  :  cet^e  aiction  n'est  ni  assez 
profonde,  ni  assez  énergique  pour  entraver  une  maladie 
aussi  grave;  ils  ne  font  qu'ajoutera  la  souffrance,  k  l'agi- 
tation, à  là  fièvre  des  petits  malades.  Jamais  je  n'ai  pu 
en  constater  le  moindre  bon  effet.  Nombre  d'auteurs  dont 
Topinion  mérite  d'être  acfceptée  préfèrent  de  beaucoup  les 
sinâpîsmés  dont  l'action  plus  vive,  plus  rapide,  ptus  sus- 
ceptible d'être  réitérée,  peut  devenir  tin  utile  adjuvant, 
sans  causer  des  plaies  douloureuses,  qfui  ne  sont  qu'un 
embarras  de  pTùis. 

Cependant,  la  niéthode  révulsive  comj^fe  des  agents  d'urte 
puissance  extrême  constatée  par  une  longue  expérience.  Td 
est  le  séton  sur  lé  coà ,  moyéti  héroïque  dont  Taôtion  peut 
être  regardée  ébhnyie  com*()lexe.  D'abord,  la  plaie  dbnné 
qtrelq'uefois  une  assîez  notable  quantité  de  sang ,  circons- 
tance qui  est  loin  d'être  indifférente,  qui  est  soiivetlt d'ùt^é 
grande  utilité.  Ensuite,  cette  révulsion  si  énergique,  si 
proforWfe,  si  rapprochée  eu  siège  du  mal,  tend  nécessai- 
rement à  entraver,  à  rompk-e  la  flnxiort  pWégitiasiqùé  qui 
se  fiiit  sur  Tencéphale ,  à  accéférer  le  mouvement  de  dë- 
compôsrtion  de  ses  élélnents.  Je  l'ai  employée  chez  Ile  sujet 
de  m«  cinquième  observation;  Mais  sî  l'amélioration  «'est 
dessinée  peu  de  iours  après  rapplicàtibn  du^  sétôn  ^  il*  né 
fiàût  ^s  oublier  non  plue  que  h  petite  malade  était  sou- 
mise  à   une  aijitre    médication  non  moins  béroïqdi^,  la 


244  jouihàl  db  hébeghib. 

roercurialisatioD ,  et  que,  dans  ce  cas,  il  est  fort  difficile 
de  déterminer  la  part  de  chacun  des  agents  thérapeu- 
tiques. 

Un  autre  moyen  révulsif  auquel  M.    Léon   Lriégard  ac- 
corde une  efficacité  supérieure  peut-être  à  ceJie  de  tous 
les  autres  modes  de  traitement  connus,  c'est  Tusage  de  la 
pommade  stibiée  en  frictions  sur  le  cuir  chevelu   préala- 
blement rasé.  Il  Ta  vu  opérer  de  véritables   merveilles. 
Mais  il  insiste  sur  les  précautions  à  prendre  pour  mainte- 
nir Téruption  dans  de  justes  limites  et  éviter  ces  désordres 
graves,  suites  malheureusement  trop  fréquentes  d'un  usage 
indiscret  :  tels  que  la  destruction  des  cheveux ,  les   larges 
ulcérations  de  toute  l'épaisseur  du  derme ,  et  même  des 
surfaces  osseuses.  Quelle  est  la  valeur  réelle  de  cette  médi- 
cation à  laquelle  M.  Léon  Liégard  lui-même ,  malgré  su 
prédilection ,  ne  peut  refuser  le  titre  de  barbare?  Je  l'ignore 
absolument.  Je  l'ai  vu  employer  une  fois  chez  un  pauvre 
enfant  auquel  je  donnais  des  soins  en  commun  avec  MM. 
Piban-Dufeillay   et  Thibeaud.  Les  frictions  stibiées,  bien 
que  secondées  par  la  mercurialisation  et  un  séton  sur  le 
cou  ,  ne  purent  sauver  notre  malade,  qui  nous  échappa  le 
dix-septième  jour.   Théoriquement,   il  est  facile    de  se 
rendre  compte  des  résultats  heureux  d'une  révulsion  si 
large ,  si  violente  ;  et  je  ne  doute  pas  que  la  pratique  ne 
puisse  parfois  justifier  les  prévisions  de  la  théorie.  Toute- 
fois, n'est-il  pas  à  craindre  que  la  douleur  cruelle ,  éveillée 
par  une  éruption  plus  ou  moins  confiuente  de  pustules, 
ne  détermine  un  surcroît  d'agitation ,  de  fièvre ,  de  fluxio'^ 
phlegmasique  vers  la  tête,  et,  partant,  n'agisse  au  profit 
de  la  pbiegmasie  qu'elle  est  destinée  à  combattre  ?  Ctette 
crainte  ne  peut-elle  également  être  formulée  à  l'endroit  du 
vésicatoire  recouvrant  tout  le  cuir  chevelu  et  dont  quel- 
ques praticiens,  recommandables  à  tous  égards,   disent 
avoir  obtenu  des  effets   surprenants.  Cette  question ,  je 
n'ose  la  résoudre*,  et  pourtant  elle  mérite  d'être  prise  en 
sérieuse  considération. 

S""  Nous  arrivons  enfin  à  un  mode  de  traitement  qui 
compte,  peut-être  les  succès  les  plus  nombreux,  les  plus 


JOCâNÀt  DE  MÉDfiGINE.  245 

éclatants  :  l'administration  du  mercure  intùs  et  extra.  Pré- 
oonisée  d abord  par  M.  A.  Liégard  père  (Revue  Médicale, 
1 834),  puis  bientôt  accueillie  avec  faveur  par  la  plupart  des 
praticiens,  cette  médication  a  besoin,  comme  on  le  sait, 
ci*être  envisagée  sous  un  double  point  de  vue  pour  être 
parfaitement  comprise.- 

Elle  se  compose  de  calomel  donné  sous  diverses  formes 
et  de  frictions  mercurielles  ,  à  doses  plus  ou  moins  larges. 
Quelques  mots  d'explication  sur  ces  deux  éléments  du  trai* 
temeot  mercuriel. 

A.  Le  calomel  peut  être  donné  à  doses  franchement 
purgatives  et  susceptibles  de  déterminer  des  selles  abon- 
dantes, 15,  ^5,  50,  75  centigr. ,  1  gramme  même  dans 
les  24  heures.  Sous  cette  forme ,  il  rentre  dans  la  classe 
des  révulsifs,  à  la  tête  desquels  il  peut  être  placé  à  cause 
des  larges  sur&ces  qu*il  intéresse ,  de  l'abondante  sécrétion 
qu'il  détermine. 

B.  A  doses  fractionnées  (5  à  10  centig.  divisés  en  10 
ou  12  paquets),  le  calomel  peut  encore  produire  des  éva- 
cuations alvines  ;  mais  il  jouit  surtout  alors  d'un  mode 
d'action  particulier,  il  devient  un  altérant  d'une  énergie 
incomparable,  un  antiphlogistique  puissant  que  tout  le 
monde  connaît.  Cette  action  est  exactement  la  même  que 
celle  des  frictions  mercurielles,  sur  lesquelles  l'opinion 
est  également  édifiée. 

En  résumé,  le  traitement  qui  semble  le  plus  rationnel 
contre  la  méningite,  consiste  dans  l'emploi,  presque  si- 
multané, des  émissions  sanguines  et  des  préparations 
mercurielles.  Ces  deux  indications  convergent  vers  le 
même  but,  se  prêtent  un  mutuel  appui  :  attaquer  l'inflam- 
mation dans  sa  source,  en  diminuant  la  masse,  la  richesse 
et  la  plasticité  anormale  du  sang ,  rompre  la  fluxion  qui 
se  fait  vers  l'encéphale  par  une  énergique  et  large  révul- 
sion sur  le  tube  digestif,  par  une  abondante  sécrétion  de 
liquides;  activer  ainsi  l'absorption  interstitielle,  hâter  la 
décomposition ,  la  dissolution  des  éléments  phlogistiques  ; 
tel  est  le  triple  but  que  le  médecin  se  propose ,  que  cette 
association  de  moyens  thér^ipeu tiques  parait,  eu   théorie. 


246  SMBBàt  HE  «ÉMBGMB. 

parfaitement  propre  à  conquérir,  qu'elle  a  surtout  conquis 
plus  d'une  fois.  -—Si,  au  bout  de  quelques  jours,  la  ma- 
ladie semble  résister,  il  est  utile  de  recourir  an  séton  sur 
le  cou ,  mais  il  ne  faut  pas  attendre  trop  longtemps.  Il  faut 
se  rappeler  que ,  dans  cette  cruelle  maladie ,  la  question  se 
juge  toujours  avec  promptitude ,  souvent  avec  une  rapi- 
dité foudroyante.  Ce  révulsif  demande  quelque  temps  pour 
que  son  action  se  lasse  sentir.  C'est  une  réserve  puissante, 
quelquefois  décisive  :  l'engager  trop  tard ,  c'est  s'exposer 
à  perdre  une  cause  qui  eût  triomphé  avec  plus  d'à- 
propos. 

8  octobre  1855. 


OBSERFJTIONS  pour  servir  à  l'histoire  dune 
variété  d'hémorrhagie  utérine  post-puerpérale 
excessivement  rare  et  par  conséquent  encore  peu 
connue ,  par  le  docteur  ÂtiBiNAis ,  Président  du 
Jury  de  médecine  de  la  Loire-Infêrieure. 


J'ai  fait  des  recherches  dans  les  Traités  ex^professo  les 
plus  complets  sur  les  bémorrhagîes  utérines  tels  que  ceux 
de  Rigby  et  de  M"*'  Lachapelle  ;  dans  les  ouvrages  sur  les 
accouchements  les  ptus  moderhes,  entre  autres  ceux  de 
MM.  les  professeurs  Moreau  et  Velpeau  :  j'ai  cherché  dans 
les  collections  de  journaux  de  médecine  de  nos  jours  si  je 
pourrais  m'éclairer  sur  la  variété  d'hémorrhagie  post-puer- 
pérale qui  parait  étroitement  liée  au  tmvailde  la  dotation, 
et  dont  M.  le  professeur  Négrier  cite  deux  exemples,  «t 
j'avoue  que  je  n'ai  à  peu  près  rien  trouvé;  cependant,  cette 


J0liR!IAL  DB  vrilVBC^Ë*  247 

forme  d'hémorrhagie,  que  Ion  a  vue  assez  grave  podr 
mettre  la  vie  de  la  femme  en  danger,  mér?(ë  d'être  soi- 
gneusement étudiée  :  aussi ,  comme  le  devoir  du  médecin 
qui  écrit  est  d'ajouter  le  plus  qu'il  peut  a  ce  qui  a  été 
regardé  comme  boo  avant  lui ,  je  mettrai  sous  les  veut  du 
lecteur  les  deux  observations  que  M.  Négrier  a  msérées 
dans  ses  Curieuses  recherches  et  considérations  sur  la 
constitution  et  tes  fonctions  du  col  de  l'utérus,  et  je  ferai 
suivre  ces  observations  de  deux  faits  extraits  de  ma  pra- 
tique, dans  le  but  de  laisser  croire ,  ainsi  que  le  pense  le 
professeur  de  l'Ecole  préparatoire  de  Médecine  d'Angers, 
que  l'on  doit  attribuer  ces  hémorrbagies  sui  generis  aux 
étroites  corrélations  qui  existent  entre  les  organes  mam- 
maires, l'utérus  et  les  ovaires. 

OUtterrAtlonii  extraites  texiaelleinent  die  Ton- 
vrage  de  M.  Négrier* 

I"  Obsbrvàtioii. 

Insertion  normale  du  placenta.  —  Accouchement  spontané, 

—  Hémorrhagie  latente  grave  après  la  délivrance.  — 

—  Deuxième  hémorrhagie  provoquée  par  la  su4:cion  du 
mamelon  onze  jours  après  la  parturition. 

M"*«  G..... ,24  ans,  de  très-grande  taille,  ayant  peu 
d'énergie  morale  et  physique,  dévint  grosse  en  1833. 
Cette  dame ,  pendant  les  trois  premiers  mois  de  la  gesta- 
tion,  ressérttlt  uîïe  iettdioh  fort  incommode  qu'elle  rap- 
portait nù  centre  du  bassin.  Au  cinquième  mois,  celte 
sensation  devint  douloureuse  et  fit  haître  de  Finquiétude. 
La  malade  ne  pèi^iHit  jpas  fe  tbucfaef.  Une  soignée  donna 
quelque  soulagement  et  fit  cesser  un  asdôUjii^emelit  jour- 
uatrer. 

Je  vis  b  malade ,  pour  la  première  ft>is ,  éù  WrCième 
mois  dé  là  grossesse.  A  ce  moment,  te  sensértion  dbu- 
loufeuse  dans  le  basslt)  élant  revenue  plus  forte  que  jamais, 
je  crus  devdr  eo  i^pfiK^ter  te  sié^e  vers  les  ligaïUehtâ 
larges  tiraillés.  La  constipation  était  habituelle.  Je  ne  pus 


248  JOimilAL  1>B  ■É9BCI1IB. 

obtenir  le  toucher  vaginal,  pas  même  le  palper  de  l'ab- 
domen. Je  pratiquai  une  saignée,  prescrivis  la  siUialiou 
horizontale.  Ces  moyens  rendirent  la  situation  meilleure. 
L'accouchement  eut  lieu  le  7  mars  ;  il  fut  prompt  et 
exempt  d'accidents.  Le  placenta  fut  eaj^iib^  jusque  dans  le 
vagin  et  extrait  sans  peine.  ; 

De  gros  caillots  de  sang  suivirent  la  sortie  de  l'arrière- 
faix  ;  Tutérus  se  contracta  bien.  Quelque  temps  après  (20 
minutes)  «  la  malade  se  plaignit  de  faiblesses ,  de  tinte- 
ments d'oreilles.  L'utérus  s'était  laissé  distendre  par  du 
sang.  J'introduisis  la  main  dans  l'organe  et  remarquai  le 
resserrement  de  l'oriiice  supérieur.  Les  caillots  furent  ex- 
traits et  la  main  laissée  dans  le  col  et  au-delà ,  jusqu'à  la 
contraction  suffisante  du  fond  de  l'organe. 

La  malade,  bien  qu'affaiblie,  voulut  allaiter,  ce  quelle 
fit  dès  le  lendemain  de  son  accouchement.  Le  quatrième 
jour,  les  seins  se  gonflèrent,  l'enfant  put  obtenir  du  \ait 
trois  fois  dans  ce  jour.  La  stACcion  des  mamelons  développa 
à  chaque  fois  de  véritables  douleurs  à  l'hypogastre;  tes 
lochies  étaient  sensiblement  augmentées  pendant  la  lacta- 
tion. 

L'allaitement,  pendant  les  jours  suivants,  ne  fut  permis 
que  deux  fois  par  24  heures,  tant  à  cause  des  douleurs 
utérines,  que  pour  fétat  de  faiblesse  générale.  A  chaque 
succion ,  les  douleurs  se  renouvelèrent  avec  une  sensation 
de  gontlenienl  dans  tout  le  bassin. 

Le  onzième  jour,  pendant  que  l^enfant  tétait  ^  il  se  ma- 
nifesta tout  a  coup  une  hémorrhagie  utérine  considérable, 
vu  l'état  de  faiblesse  de  la  malade  :  la  perte  de  sang  fut 
estimée  à  560  grammes.  Un  long  évanouissement  suivit 
cet  accident  qui  ne  fut  combattu  que  par  des'  aspersioos 
froides  sur  l'hypogastre. 

La  convalescence  fut  longue  et  difficile.  La  malade  souf- 
frit longtemps  d'une  céphalalgie  rebelle  qui  la  privait  de 
tout  sommeil  :  elle  qraignait  même  cet  état  de  repos  ,  car 
il  était  accompagné  de  rêves  affreux  et  bientôt  d'ua 
réveil  en  sursaut  :  le  pouls  resta  longtemps  d'une  grande 
rapidité. 


JOUBllAi  DE  HÉDBCIIIB.  249 

BÉFLEXIONS. 

€e  fait,  en  outre  de  Thémorrhagie  puerpérale,  pour 
lequel  je  l'ai  rapporté,  offre  deux  circonstances  remar- 
quables. La  première  est  la  douleur  utérine  affectant  le 
segment  inférieur  de  l'organe,  douleur  que  j'attribue  à  la 
compression  des  parois  de  la  matrice  dans  Fexcavation. 
Je  m'attachai  à  cette  idée,  après  avoir  constaté  les  trois 
grandes  dimensions  du  bassin  :  cette  largeur  influa,  plus 
tard,  sur  la  promptitude  du  travail  et  sur  Thémorrhagie. 
La  seconde  circonstance  est  le  fait  d'irritation  sympa- 
thique simultanée  de  Vutérus  et  sans  doute  des  ovaires  à 
l'occasion  de  la  succion  des  mamelons.  On  a  signalé  bien 
des  fois  de  ces  corrélations  génitales  dans  de  telles  cir- 
constances ,  mais  pas ,  que  je  sache ,  d*une  manière  aussi 
patente. 

Je  supposai  que  la  perte  sanguine  était  devenue  une 
véritable  hémorrhagie  sous  t'influence  d'un  retour  de  la 
fonction  ovarique  bâtée  par  l'agacement  du  mamelon.  Jus- 
qu'à la  rupture  d'une  vésicule  ovarienne  les  titillations  des 
seins  n'avaient  produit  que  des  contractions  utérines  et  le 
dégorgement  plus  marqué  des  parois;  mais  ce  fut  une  vé- 
ritable hémorrhagie  quand  la  fonction  de  l'ovaire  vint 
congestionner  un  organe  mou  dont  les  vaisseaux  étaient 
presque  béants  encore.  Il  serait  difficile  d'expliquer  autre- 
ment un  accident  semblable  onze  jours  après  la  parturi- 
tion,  quand,  à  cette  époque,  le  sang  locbial  est  presque 
complètement  expulsé  du  tissu  de  l'utérus. 

Le  fait  qui  va  suivre  corroborrera  les  explications  hypo- 
thétiqtAes  sans  doute  que  je  viens  d'émettre,  mais  qui  sont 
d'une  grande  vraisemblance. 

Il*  Observation. 

tiémorrkagie  utérine  causée  par  Vallaitefnent  un  mois 
après  l'accouchement. 

La  femme  B...,  32  ans,  chairs  molles  et  étiolées,  était 
accouchée  heureusement ,   pour  la  quatrième  fois,  le  20 


250  JOUBIfAL  BË  MlbÉCtkÈ. 

février  1841;  son  accouchement  n'avait  offert  de  reinar- 

Juable  qu'une  perte  de  sang  assez  forte  au  moment  de  la 
élivranc<». 

Un  mûis  aprè$\  pendant  qu'Me  donnait  à  téter,  fonc- 
tion  i\\x\Vaqaçait  toujours  beaucoup,  dit-elle,  la  malade 
fut  prise  d'une  héroorrhagie  violente,  pour  laquelle  je  fus 
obligé  de  tamponner  exactement  le  vagin. 

Le  môme  accident  se  renouvela,  en  apparence  ,  sous 
l'influence  de  la  même  cause ,  douze  jours  plus  tard.  La 
pauvre  femme  fut  tellement  affaiblie  de  ces  pertes  de  sang 
que,  non-seulement  elle  ne  put  continuer  son  allaitement, 
mais  encore  qu'elle  ne  reprit  ses  forces  que  plusieurs  mois 


BÉVLEXIO!iS. 

Je  crois  encore  reconnaître,  dans  ce  fait,  une  influence 
immédiate  de  la  fonction  ovarique  sur  la  première  des 
Iiémorrhagies  utérines  ;  aucune  autre  cause  sévèrement 
examinée  n'en  peut  rendre  raison.  Quant  à  la  deuxième 
perte,  qui  fut  peu  considérable ,  elle  serait  le  résultat  d'un 
dégorgement  utérin  sollicité  sympathiquement  par  les 
agacements  des  mamelons,  Torgane  étant  resté  conges- 
tionné par  du  sang  appauvri  et  d  u^ie  grande  fluidité. 

Maintenant  que  j'ai  cru,  dans  l'intérêt  au  sujet  que  je 
traite ,  devoir  rapporter  tout  au  long  et  textuellemeht  les 
deux  observations  et  les  courtes  réflexions  qu'elles  ont 
suggérées  à  H.  Négrier,  je  passe  aux  deux  faits  dont  j'ai 
été  témoin  et  qui  offrent  une  grande  analogie  avec  ceux 
observés  par  Faccoucheur  distingué  d'Angers. 

I"  Observation. 

Bassin  à  larges  dimenèîofis.  —  Acc&uchement  très-prompt. 
—  Inertie  du  fond  de  l'utérus.  —  Spasme  de  l'orifice 
supérieur.  —  Perte  interne  conmdérable.  —  Fouille  de 
la  cavité  utérine.  —  Compression  extérieure  de  la  ma- 
trice à  fàide  d'un!e  sangle.  —  Suspensi&n  de'  ïù  perte. 
Renouveltetnenl  brusqué  (fe  celk-ci  té  septième  jout,  éiu 


niotnfint  mime  de  Iq  sucmn  fort  doyJpureu^e  d'un  ma- 
mfidn  qlteint  de  gerçures.  —  Aspefsiqm  insuffisanfes 
d'eau  frQide  s^r  le  ventre  et  les  cuisses.  —  Tamponne- 
ment du  col  utérin  et  du  vagin.  —  Compression  eçoU- 
rieure  du  globje  utérin^  suivant  le  procédé  de  JUillot,  de 
pijon.  —  Cessation  de  l'aUaitemenL  —  Hétçtblissement 
très-lent. 

Une  fejfn^e  âgée  de  20  ans,  chairs  éiiolé^s,  accouche 
au  bovu,  d*une  heure  de  douleurs  qui  n'offrent  entre  ejles 
presqi^  pas  d'interruption.  Une  légère  perte  suit  l'extrac- 
tion du  délivre  :  cette  perte  cède  à  des  aspersions  froide^ 
sur  rhypogastre  et  au  massage  utérin.  L'enfant  est  mis  en 
nourrice. 

Un  a^  après,  la  fenime  a  un  accouchement  tellement 
prompt  que,  bien  que  voisin  de  son  domicile,  je  ne  puis 
arriver  à  efle  qu'alors  que  l'en&nt  a  franchi  la  vulve*  lie 
cordon  est  aoiirt  et  la  violence  des  contractions  a  entraîné 
dans  le  va^gin  le  placenta.  L'utérus  est  mol)a3$e;  il  ne  $e 
contracte  pas  vers  son  tiers  postérieur,  bien  que  1-^  col 
in^rne  parj^jsse  (oi;tement  resserré  :  aussi  uqe  a^sez  grande 
qjuaAtité  de  sajng  s'acpumuje  derrière  ce  resserrerpent  du 
col  et  exige  Ip  fouille  d^  la  cavité  utérine  :  500  gçamqnes 
environ  de  sang  coagulé  sont  extraits  et  la  main'rçst^  à 
demeure  dans  l'utérus  jusqu'à  ce  que  l'inertie  paraisse 
vaincue:  toutefois,  par  excès  de  précautions  sans  doute, 
l'utérus  e^t  coniprimé  extérieurement,  pe^ndant  douze 
heures,  par  la  ç^ifi^iire  de  jUiilot. 

La  ti^mcue  qui  a  perdu  S0[n  premier  eniapt  ep  nourrice, 
vept  absolument  ali/^iter  celui-ci.  L^  séprétion  Ifiiitç.useï 
s'élabht  difficileinent ,  etTenfant,  avide  de  tester,  exer^p 
une  succion  fort  douloureuse.  Bientôt  la  succion  d^evient 
d  autant  plus  i  douloureuse  que  le  marnelon  est  uijf^é. 
Cbaq^  fois  que  l'enfant  prend  le  mamelon  atteint  de  ger- 
çures, lafeipme  est  en,  proie  à  des  spasmes  qui  reten- 
tissent sur  l'utérus  :  alora  les  lochies  coulent  plus  abon-, 
dammei^t.  Le  septième  jour  après  l'accouchement,  au 
i]|iQmen|t  où, la  s)icpioji  du  o^ap^elon  est.  encprç, c^tte  fois« 


252  JOUBAAI  DB  MÉDECniB. 

plas  douloureuse  que  de  coutume ,  la  femme  est  mouillée 
par  du  sang  qui  continue  à  s'écouler  avec  une  telle  force 
par  la  vulve,  que,  dans  moins  d'un  quart  d'heure,  tout  le 
linge  du  lit  est  imbibé.  Le  sentiment  d'une  défaillance 
prochaine  fait  qu'on  ouvre  les  deux  fenêtres  de  la  chambre 
et  qu'on  fait  respirer  du  vinaigre  ;  mais  dans  quelques  ins- 
tants survient  un  évanouissement ,  et  lorsque  j'arrive,  mon 
premier  soin  est  de  faire  des  aspersions  d'eau  froide  sur 
le  ventre  et  les  cuisses.  La  tête,  qui  est  dans  une  position 
élevée ,  est  placée  dans  une  position  déclive.  Un  sang 
noirâtre  s'écoule  en  nappe  par  la  vulve.  N'ayant  pas  de 
seigle  ergoté  à  ma  disposition  et  Thémorrhagie  continuant 
en  dépit  des  aspersions  et  du  massage  de  la  région  hypo- 
gastrique ,  le  col  utérin  et  le  vagin  sont  solidement  tam- 
ponnés ,  tandis  que  des  compresses  superposées  en  forme 
conique  tiennent  précipitée  l'aide  d'une  sangle  en  cein- 
ture le  globe  utérin  dans  le  petit  bassin. 

Au  bout  de  24  heures,  le  tampon  qui  est  devenu  dou- 
loureux est  enlevé:  la  femme  peut  uriner.  L'allaitement  est 
supprimé,  et,  bien  que  les  soins  hygiéniques  les  mieux 
entendus  soient  donnés ,  la  santé  revient  si  lentement  que 
ce  n'est  qu'après  trois  mois  qne  les  occupations  ordi- 
naires peuvent  être  reprises.  La  femme  n*a  pas  eu  d'autre 
enfant. 

II^'.Obsebvàtion. 

Femme  primipare,  âgée  de  22  ans.  —  Constitution 
éminemment  lympathique.  -^  Leucorrhée  constitution- 
nelle. —  Chlorose.  —  Bassin  large.  —  Accouchement  au 
bout  de  deux  heures  de  douleurs  soutenues.  — '  Inertie 
complète  de  l'utérus  après  une  délivrance  rendue  prompte, 
un  cordon  court  et  enroulé  autour  du  cou  ayant  entraîné 
i'arrière-faix  dans  le  vagin  au  momont  de* l'expulsion  de 
l'enfant.  —  Perte  abondante.  —  Aspersions  d'eau  froide. 
—  Seigle  ergoté.  —  Massage  de  l'utérus  au  travers  de  la 
région  hypogastrique.  -^  Fouille  de  l'utérus.  —  Cessation 
de  rhémorrhagie.  —  Faiblesse  grande.  —  Sécrétion  lai- 
teuse lente  devenue  assez  abondante  vers  le  douzième  jour. 


-H 


JOURNAL  DE  MÉbEClNE.  253 

—  Ecoulement  lochiai  abondant  pendant  la  succion  tou^ 
Jours  fort  agaçante  des  mamelons.  —  Sensation  pendant 
celte  succion  d'une  douleur  sourde  et  de  la  nature  d'une 
tranchée  du  côté  du  petit  bassin,  —  La  face  hypogastriqu^ 
de  l'utérus  s  palpée  dans  ce  moment,  laisse  reconnaître  une 
contraction.  —  Pendant  •  cet  état  de  turgescence  et  d'éré- 
ihisme  de  Vutérus,  les  lochies  coulent  en  abondance. 

Le  toucher  vaginal,  pratiqué  avec  précaution,  n'ap- 
prend rien  autre  chose  qu'un  prolapsus  dans  le  vagin  du 
col  utérin.  L'orifice  inférieur  du  col  ne  permettrait  pas 
l'introduction  du  doigt  index  sans  forcer  le  col. 

Le  quatorzième  jour  après  Vaecauchement ,  la  femme 
donnait  le  sein  :  elle  était  fort  agacée  par  la  succion  dou- 
loureuse du  mamelon  lorsqu'elle  ressentit  tout  à  couf^  des 
tranchées  qui  la  forçaient  à  pousser  en  bas.  11  ne  s'échappa 
aucun  caillot  de  sang,  non  plus  qu'aucun  débris  placen- 
taire, mais  bien  du  sang  en  abondance,  comme  si  elle 
eût  été  au  fort  d'une  époque  menstruelle. 

Le  sang  continua  à  couler  et  d'une  manière  si  rapide 
que  bientôt  la  femme,  éprouvant  le  sentiment  d'une  dé- 
faillance, me  fit  appeler. 

Lorsque  j'arrivai  à  elle,  elle  venait  d'éprouver  une 
syncope,  le  sang  s'échappait  toujours  avec  force.  L'ou- 
verture des  fenêtres,  afin  de  ventiler  la  chambre,  des  as- 
persions d'eau  froide  vinaigrée  sur  le  ventre  et  les  cuisses , 
des  frictions  de  l'utérus  au  travers  des  téguments  de  la 
région  hypogastrique  ne  maîtrisant  pas  la  perte,  je  fus 
forcé  d'en  venir  au  tamponnement  du  col  utérin  et  du 
vagin  en  y  joignant  une  compression  méthodique  de  l'uté- 
rus à  l'aide  de  compresses  graduées  et  d'une  ceinture, 
suivant ,  en  cela ,  les  conseils  donnés  par  Alphonse  Leroi , 
Millot ,  etc.  Le  tampon  arrêta  la  perte,  et,  bien  que  l'utérus 
parût  être,  lors  de  son  application,  dans  un  état  d'or- 
gasme qui  eût  pu  faire  redouter,  phis  tard ,  une  métrite , 
rien  ne  vînt  confirmer  cette  crainte.  Le  tampon  fut  en- 
levé au  bout  de  douze  heures,  parce  que  sa  présence 
commençait  à  ne  pouvoir  plus  être  supportée ,  et  aucune 
hémorrhagie  inquiétante  ne  suivit.  Là  femme  cessa  d'allai- 


254  JOPiiui.  DE  irtpy4ff> 

ter;  ^lle  perdit,  pendiint  quelques  jours,  uo^  sérosité 
sanguiaoienle ,  et  aucun  accideut  ne  vint  contrarier  une 
convalescence  qui  fut  pourtant  de  longue  durée ,  mais  qui 
s'expliquait  facilement  par  la  faiblesse,  résultat  de  Thé- 
morrbagie. 

RÉFLlXIOlfS. 

Voici  quatre  observations  dont  Tanalogie  est  frappante 
et  dont  on  peut  tirer  d*utiles  eoseignfiments.  Quatre 
femmes  éprouvent  des  pertes  par  suite  de  l'inertie  de  Tu- 
térus,  rien  de  plus  commun;  mais,  ce  qui  est  excessive- 
ment rare,  c'est  que,  cbez  ces  mêmes  femmes,  l'on  voit 
ces  pertes  récidiver,  chez  l'une,  le  septième  jour  ;  cbez  une 
autre ,  le  onzième  jour  ;  chez  une  àixt^e ,  le  quatorzième 
jour;  enfin,  chez  une  autre,  au  bout  d'un  mois  après 
Taccouchement,  et  cette  récidive  coïncide  tellement  avec 
la  succion  agaçante  douloureuse  du  mamelon  que  l'on  est 
forcé  de  reconnaître  quâ  l'utérus  a  été  sjympajtbiquc^nent 
solicité  a  l'hémorrhagie. 

Les  corrélations  intimes  des  organes  mammaires  et  des 
organes  génitaux  constituent  un  fait  physiologique  qui 
a  non-seulement  frappé ,  dans  tous  les  temps  et  dans  tous 
les  pays,  les  médecins,  mais  qui  était  conni^  dans  les 
maisons  4e  débauche  de  l'antiquité  païenne.  Au  dire  de 
plusieuf*s  écrivains,  les  qourtis^nnes  de  la  Grèce  se  pro- 
curaient l'avortemeni  pa^>  les  baisers  lascifi^  de  leurs  aidants, 
par  la  titillation  du  clitoris ,  même  .  du .  col  utérin ,  en 
même  temps  que  par  la  succipp  erotique,  des  mamelons. 
Il  est  vrai  que  ces  attouchements  obscèpes,  au  dire  des 
mêmes  écrivains,  ne  déterminaient  q^e  rarement  l'avor- 
tement.  Il  y  avait  d'autres  moyei;^  qi^i ,  malheureusement, 
ne  son^  en^ployés  encore  que  trop  fréquemment  aujour- 
d'hui, que  l'autorité  païenne  tolérait,  à  oei  qu'il  pai^H, 
dans  les  lap^nare^  de  Ja.  Gjrèce,  puisqi|i'op  écrivait  publi- 
quenaent.sur  lés  mur§  de  ces  lieui^  ^e  débauche:  «r  Ici 
l'on  procure  Vaaoori&mnU  «> 

Hippocrate  avait  étudié   les   ^n^pathiçs  qui   ei^is^ni 
entre  les  fonctiQ(is  des  organes  ms^mm^ires  et  cdlesde^ 


I 


JOtmilAl  DE  HÉDECHŒ.  255 

organes  delà  reproduction.  Ce  serait,  toutefois,  se  mon- 
trer bien  peu  physiologiste  que  de  vouloir  généraliser 
l'aphorisme. 

(ï  Mulieri  menstruasi  veîis  cohibere ,  cucurbitam  quàm 
mcujcimamadmammas  appone.  »  (Sect.  5,  aph.  50.) 

11  n'y  a  point  en  thérapeutique  de  principe  absolu ,  de 
règle  générale,  et  ce  serait  manquer  de  philosophie  médi- 
cale que  d'examiner  les  faits  toujours  à  travers  le  même 
prisme.  Il  y  a  assurément  une  vérité  dans  cet  aphorisme 
du  père  de  la  médecine  :  le  tout  est  de  bien  comprendre 
les  tempéraments,  les  idiosyncrasies  individuelles;  en 
un  mot,  de  bien  saisir  les  indications  qui  permettent  de 
tirer  profit  de  cette  vérité  ;  car,  si  on  voulait  généraliser, 
pour  tous  les  cas,  l'emploi  de  très-larges  ventouses  aux 
mamelles  dans  le  but  de  ralentir,  diminuer,  supprimer 
les  menstrues  exhubérantes ,  on  s'exposerait  à  de  nom- 
breux mécomptes.  En  turgescent  les  organes  mammaires 
par  l'appel  des  fluides,  les  vastes  ventouses  détermineraient 
souvent  un  éréthisme  nerveux  qui  retentirait  sur  les 
ovaires,  l'utérus,  et  produirait  l'effet  opposé  à  celui  que 
l'on  se  proposerait.  C'est  ce  qu'apprend  l'expérienàe 
conforme  en  cela  à  la  saine  physiologie. 

Quant  aux  recherches  de  M.  Négrier,  sur  les  ovaires 
humains,  ouvrage  dans  lequel  ce  professeur  cherche  à 
démontrer  la  subordination  de  l'utérus  dans  la  fonction  de 
la  menstruation,  il  y  a  là  des  vues  ingénieuses  dont  quel- 
ques physiologistes,  quoique  M.  Négrier  dise  le  contraire, 
ont  contesté  l'exactitude  ;  mais  c'est  à  ces  vues,  j'aime  à  le 
reconnaître,  qu'est  dû  l'élan  donné  à  la  science  sur  ce 
point  de' physiologie. 

M.  Négrier  a  écrit  «  que  chaque  époque  menstruelle 
était  la  conséquence  du  développement  de  la  séparalion  et 
de  r écoulement  d\tn  (Buf  provenant  de  la  vésicule  de  De- 
graaf  ;  que  cet  œuf  portant  un  germe  vivant  et  non  fé- 
condé j  est  saisi  par  la  trompe  et  presque  toujours  conduit 
par  elle  jusque  dans  la  cavité  de  l'utérus,  etc. ,  etc.  » 
Dans  ce  système,  il  subordonne  entièrement  la  fonction  de 
l'utérus  à  la  fonction  des  ovaires.  Ce  n'est  pas  ici  le  lieu 

19 


256  J(M^ix  i»E  nAi^jififsufi. 

de  faire  ^onpajtre  les  opinions  des  ai^iei^f^  ^i  ont  critj/fuié 
G/e  systièoie.  Q]u'il  ipe  suffise  da  déclarer  ^uç,  saos  entrer 
dans  le  cœur   de  la  question,  je  me  range  voloo^ers  à 
l'opinio^i  du   professeur  Ifégrier,  au  «^et  du  retentisse- 
ment que  Texcitation  de$  orgaj^  mamm^ir^s  p^  J^  suc- 
cion des  paflf^elous,  a  sur  '^es  ojiraires   let  s^r  rulénps, 
surtout  à  r^Qque  imeosuelie  de  J'allai  tement  quiré{koi^d# 
chaque  époque  i^eusu^uelle  autant  l'^llaitemeol.  Il  y  a  i|ies 
noi^rr^res  qui  oni  fait  i^fie  étude  parlicuiiière  d'elles-môm^, 
eJL  qui  lioVOvt  as^juré  qu'elles  étaient  parfaitement  avjSfriies 
par  des  douleurs  de  reins ^t  dans  |e  bassin,  qi^répi^iji^e  du 
mois  à  laquelle  elles  se  trouvaient  répondais  à  TépiE^ue 
mensuelle  de  leurs  règles.  Les  douleurs  qu'éprouvant  les 
femmes  avapi  et  pendant  le  llux  menstruel  sont  a^sez 
caract|àristiqi^es,ppur  qu'jaucuoe  femfne  ne  se  méprenne  ^spi* 
la  nature  de  cesdoul^rs.  Il  y  a  à  remarquer  qu|3iou$  Les 
accoucheurs  ont  signalé  cette  manifestation  (de   ^épojq^^ 
menstruelle  pendant  tout  le  temps  de  1;^  gjçstat^ou ,  nnaai- 
te^tation  qui  se  ^ei^oifvelle  d'une  ^)anièr^ .  lateîiite  cba^M^ 
mois.  Il  est  vraisemblable  q^e  la  naU^re  qui  m  saurait  se 
soustraire  eptièrement  aux  lois  qu'elle  s'est  infpos^s  ré- 
veille, du  côté  des  ovaires ,  du  côté  de  l'utérus,  pepi^i^t 
la  £est|ition  et  pend/tnt  rallaiteji^ent ,  un  certaiu  orga3Rie, 
bien  que  les  fonctions  de  l'ovaire  et  de  l'utérMs,  c'^ ^à-dire 
la  menstruation ,  soient  alors  suspendues.  C'est  yxaisem- 
bjl^ement  aussi  à  l'excitation  des  man^ell^s  par  ia  suc* 
cion  qu'pst  dû  Téré^hisme  ovariq^e  et  ptérin  qui  détermine, 
daiis  les  premiers  tmps  de  l'allaite^xent ,  chez  l^s  femmes 
douées  dune  constitution  pçrveuse,  irritable,  Ip  fKioÙffii^ 
hémorrhagique  auquel  se  rattachent  les  quatre  observa- 
tions citées  ci-dessus.    —  Quand  on  songe,   en  effet,  a 
Tébranlemient  du  système  nerveux  que  cause,  chex  cer- 
taines femmes,  la  succion   avide  du  mamelpjQ  par  des 
nourrissons  très-vivaces,  à  la  douleur   quelquefois  poi- 
gnante que  détermine  cette  succion  lorsque  le  bout  du  sein 
est  escorié  :  quand  on  joint  à  cet  état  la  SMSceptibililé  i^r- 
veuse,  résultat   des  pertps  auxquelles,  comme  dans  les 
observations  précédentes,  ces  fenames  pnt  été  soumises; 


joinmiAi*  w  «ÉuGiNE.  257 

quand  on  tient  compte  de  la  laxité  de  la  spo^giosité  du 
tissu  utérin  à  la  suite  des  pertes  post- puerpérales  par  iner- 
tie,  on  conçoit  qu'une  hémorrhagie  par  exsudation  puisse 
se  réveiller  sous  Faction  sympathique  des  organes  mam- 
maires, alors  surtout  que  Fépoque  du  mois  correspond  à 
l'époque  de  la  fonclion  ovarique,  pour  toujours  raisonner 
au  point  de  vue  du  système  de  M.  Négrier.  Mais  on  objectera  : 
a  Toutes  les  femn^s  qui  allaitent  sont  soumises  à  Tinfluence 
delafonotion  ovarique^bien  que  cette  influence  soit  latente; 
plusieurs .d!entre  elles  ne  donnent  le  sein  qu'avec  douleur, 
uar  les  gerçures  des  mamelons  sont  chose  commune; 
comment  se  fait-il  donc  que  Thémorrhagie  que  vous  rat- 
tachez à  la  succion  douloureuse  du  mamelon  et  au 
retentissement  de  cette  douleur  surTutérus,  surtout  pen- 
dant la  fonction  ovarique,  soit  un  fait  si  rare?  N'est-il  pas 
présumable  plutôt  que  la  titillation,  la  succion  du  mame- 
lon même  la  plus  douloureuse,  ainsi  que  la  fonction  men- 
suelle des  ovaires,  fonction  très-contestable  au  point  de 
vue  de  Tintei^pré talion  que  voys  en  faites ,  restent  étran- 
gères à  la  production  de  ces  rares  hémorrhagies,  et  qu'il 
convient  de  ranger  ces  hémorrhagies  parmi  celles  appelées 
lochiales  parles  auteurs,  hémorrhagies  qui,  comme  cha- 
ciu)  le  sait ,  tiennent  à  différentes  causes  et  qui  sont ,  le 
plus  ordij^aireineAt,  liées,  suivant  H.  Jacquemier,  à  Tac- 
tion  de  se  lever,  de  marcher  ou  à  quelques  autres  écarts 
dans  le  r^ime  que  les  femmes  se  permettent  souvent 
après  la  fièvre  ^  lait?  Ce  flux  immodéré  des  lochies 
peut  aussi  dépendre  de  causes  particulières.  Âinsi«  M.  le 
professeur  Moreau  cite  deux  cas  de  pertes  abondantes 
survenues  huit  à  dix  jours  après  Taccouchement  et  qu'il 
attribue  à  des  matières  fécales  tellement  endurcies  qu'il 
&llût  Une  curette  pour  débarrasser  le  rectum.  Et  puis,  il 
faut  bien  en  convenir,  si  la  cause  de  ces  hémorrhagies 
passe  souvent  inaperçue,  c'est  que  Ton  recherche  cette 
cause  avec  trop  peu  de  soin.  Ces  hémorrhagies  tardives 
tiennent ,  comme  t)eaucoup  d'aujtres  hémorrhagies  puer- 
pérales, à  des  causes  diverses  :  tantôt,  c'est  un  caillot  de 
sang  retenu  par  Torifice  supérieur  du  col  qui  devient  une 


258  JOUBNÂL  DE  IIÉII&CIIIB. 

cause  d'irritation  du  tissu  utérin ,  et  celui-ci  se  dégorge 
d'une  grande  quantité  de  sang  au  moment  où  des  contrac- 
tions viennent  à  expulser  ce  caillot;  tantôt,  c*est  une  petite 
portion  de  placenta  qui  n'a  pas  été  extraite,  retenue  qu'elle 
était  par  une  adhérence ,  et  ce  corps  étranger  renouvelle , 
par  suite  de  l'irritation  du  (issu  utérin ,  une  hémorrha- 
gie ,  etc.  » 

On  convient  que  ces  objections  et  beaucoup  d'autres  que 
Ton  pourrait  faire  sont  fondées;  mais  on  peut  cependant 
répondre  à  toutes  ces  objections  d'une  manière  victorieuse, 
en  disant  que,  lorsque  l'on  a  reconnu  une  cause  à  une 
hémorrhagie ,  on  cite  cette  cause,  et  que  c'est  justement 
parce  que ,  dans  les  deux  cas  d'hémorrhagie  post-puerpé- 
rale pendant  l'allaitement,  rapportés  par  H.  Négrier,  et 
dans  les  deux  observations  qui  me  sont  propres ,  il  a  paru 
impossible  de  rattacher  ces  hémorrhagies  à  d'autres  causes 
qu'aux  corrélations  qui  sont  naturelles  entre  les  organes 
mammaires  et  les  organes  de  la  reproduction  et  à  l'in- 
fluence de  la  fonction  ovarique  que  l'on  a  rapporté  cette 
variété  d'hémorrhagie  à  ces  dernière  causes.  J'observerai 
que  si  ces  hémorrhagies  sont  d'une  si  excessive  rareté, 
c'est  que,  pour  qu'elles  se  produisent ,  il  faut  un  ensemble 
de  causes ,  un  enchaînement  de  faits  qui  ne  sont  heureu- 
sement pas  communs.  Il  faut  d'abord  qu'il  y  ait  eu  hé- 
morrhagie au  moment  de  la  délivrance  par  suite  d'inertie 
de  l'utérus;  il  faut  que,  quels  que  soient  les  moyens  em- 
ployés pour  triompher  de  cette  perte ,  que  l'utérus  soit 
resté  dans  un  état  de  mollesse  qui  laisse  craindre  le  retour 
de  rhémorrhagie  ;  il  faut  que  la  succion  du  sein  devienne 
assez  douloureuse  pour  ébranler  le  système  nerveux  et 
pour  réagir  sur  l'utérus;  il  faut,  avant  tout,  que  la  femme 
soit  d'une  constitution  irritable,  et  que  cette  irritabilité 
soit  accrue  par  la  faiblesse  qui  suit  les  pertes  puerpérales. 
Du  reste,  que  ces  explications  paraissent  plausibles  ou 
qu'elles  laissent  à  désirer,  il  vaut  mieux  les  risquer  que 
de  rester  sous  ce  doute  philosophique  qui  nous  porte  sou- 
vent à  nier  la  vérité. 

Que  cette  variété  d'hémorrhagie  se  rattache  à  telle  ou 


JOURNAL  DE  «HÉBECINS.  259 

telle  cause ,  le  traitement  reste  le  même  :  il  consiste  à 
réprimer  par  des  moyens  que  l'expérience  a  sanctionnés, 
la  perte  de  sang  sans  trop  de  retard  ;  car  toute  temporisa- 
tion deviendrait  d'autant  plus  nuisible ,  que  déjà  la  femme 
e.st  arrivée,  par  suite  de  le  perte  qu'elle  a  subie  immédia- 
tement après  la  délivrance,  par  des  lochies  abondantes, 
par  l'allaitement  à  un  dej^ré  de  débilité  des  forces  qui  ne 
permet  plus  la  privation  du  sang. 

Quand  Thémorrhagie  est  modérée ,  elle  cède ,  le  plus 
souvent ,  à  des  moyens  simples  et  à  la  portée  de  tout  le 
monde  :  les  aspersions  d*eau  froide  sur  le  ventre  et  les 
cuisses,  le  massage  utérin  au  travers  des  parois  hypogas- 
triques,  le  seigle  ergoté,  les  boissons  froides  acidulées  et 
légèrement  astringentes,  etc.  —  11  est,  toutefois,  à  re- 
marquer que  lexpérience  a  prouvé  que  le  seigle  ergoté 
agit  faiblement  sur  l'utérus,  lorsque  les  forces  sont  épui- 
sées par  des  pertes  successives ,  aussi  doit-on  peu  compter, 
dans  ce  cas,  sur  ce  moyen  hémostatique. 

Si  rhémorrhagie  persiste ,  il  reste  un  moyen  mécanique 
d'une  grande  puissance  et  qui  réussit  presque  toujours,  je 
veux  parler  du  tamponnement  du  col  utérin  et  du  vagin , 
en  joignant  à  ce  moyen  la  compression  extérieure  du 
globe  utérin.  Je  sais  que  quelques  accoucheurs  ont  cherché 
à  trop  généraliser  l'emploi  du  tampon;  mais  si  jamais  il 
est  rationnel  d'y  recourir,  c'est  assurément  dans  la  variété 
d'hémorrhagie  dont  il  vient  d'être  parlé.  Ici,  la  titillation  du 
col  utérin ,  le  massage  hypogastrique  de  l'utérus  ne  réus- 
sissent pas  à  déterminer  des  contractions  utérines  par  la 
raison  que,  à  cette  distance  de  l'accouchement,  le  retrait 
des  parois  utérines  s'est  effectué,  et,  à  ce  sujet,  il  est 
bon  de  consulter  les  curieuses  recherches  de  M.  Négrier. 
On  doit,  en  effet,  savoir  gré  à  ce  professeur  d'avoir,  par 
un  toucher  soigneux  et  persévérant,  cherché  à  apprécier 
le  retrait  gradué  du  tissu  utérin  pendant  les  quinze  jours 
qui  suivent  l'accouchement.  On  connaît  aujourd'hui  la 
marche  du  retour  des  parois  utérines  à  leur  état  naturel. 
Ces  études ,  d'une  difficile  exécution  et  qui  ne  pourraient 
pas  être  suivies  dans  la  pratique   civile,  ont  fourni  des 


260  jomMAL  M  HâMicm. 

résultats  qu'il  importe  de  counattre.  Le  tamponnement  du 
col  utérin  et  du  vagin  s'opposant  à  l'écoulement  du  sang 
par  la  vulve ,  il  n'y  a  pas  à  redouter,  ordinairement  du 
moin$,  la  transformation  d'une  perte  externe  en  perte 
interne,  parce  qu'à  cette  distance  de  l'accouchement  les 
parois  de  Tutérus  sont  assez  revenues  sur  elles-mêmes 
pour  ne  pas  se  laisser  distendre  par  l'accumulation  du 
sang.  Si  cependant  la  force  de  contractilité  paraissait 
vaincue  par  le  sang ,  il  faudrait  ajouter  au  tamponnement 
la  compression  extérieure  de  l'utérus ,  après  avoir  préala- 
blement vidé  la  vessie.  C'est  ainsi  que  se  comportaient 
Alphonse  Leroi,  Leroux,  de  Dijon,  Chanssier,  etc. 

Inutile  de  dire  que  ces  accidents  étant  en  partie  imputés 
à  la  succion  douloureuse  du  mamelon ,  il  convient  d'au- 
tant plus  de  cesser  l'allaitement,  qu'après  des  pertes  suc- 
cessives, la  femme  se  trouve  réduite  à  un  état  de  foiblesse 
qui  ne  lui  permet  plus  de  nourrir. 

CORCIUSIONS. 

Des  recherches  bibliographiques  auxquelles  je  me  suis 
livré,  il  appert  que  les  cas  d'hémorrbagie  de  la  nature  de 
ceux  qui  viennent  d'être  signalés  son  excessivement  rares, 
et  que  ces  cas  sont  rangés  par  les  auteurs  parmi  ceux  d'hé- 
morrhagies  lochiales. 

Avant  M.  Négrier,  aucun  médecin ,  que  }e  sache ,  n'a 
rattaché  ces  hémorrhagies  à  la  succion  douloureuse  du 
mamelon  et  aux  corrélations  qui  existent  entre  les  organes 
mammaires  et  les  organes  génitaux.  Quant  à  l'action  de  la 
fonction  ovarique  sur  la  production  de  ces  hémorrhagies, 
ce  système  appartient  exclusivement  au  professeur  d'accou- 
chements de  TEcole  d'Angers. 

Nantes,  i«t  septembre  1855. 


UttÈÈÀt  Dri  nihitti^tt.  2frl 


NOTÉ  sût  l'itioto^e  des  pêtroUdes  syinptoma- 
ticfues  ou  parotidites^  par  W.  Tbastoub,  Ù.-ST, 
ancien  interne  des  hôpitaux  de  Paris. 


Ub  mtà  est  toujmtraiiil  mal,  bieff  qu'il 
n'aille  pasjusqrii'k  rendre  martelle  k'affeé^ 
tion  dont  il  dépend. 

(EocHODX,  Diction,  en  30  voIm  ^^t.  Parotides^ 

Les  pdrotfdes  symptottiatiques  sont,  chacun  le  sail!, 
bien  dr8tinct«â  des  parotides'  idiopatfaiqiteâ  oti  oreillons , 
el  dont  surtout  observées  dans  les  matàdies  typhoïdes  6t 
pestiterilielles ,  dont  efles  sont  regardées  comme  une  des 
conifylioatioiié  lés  phis  caractéristiques.  On  les  voit  survenir 
aussi,  mais  plus  rarement,*  dans  des  affections  aiguës  ou 
chroiiritiueâ ,  qui  ne  présentent  aijicuni  signe  de  cette  altéra- 
tibn  des  htïMeurs  que  fea  ancîMid  désignaient  par  Ibs 
expressions  de  pnffîdiié  ou  de  wiaKgniti, 

Si,  dans  lé  premier  cas,  l'esprit  trouve  dans  la  nature 
spéoiate  de  la  maladie,  une  explication  asisez  satisfevsante 
et  ce  symptéme  sin^Kër,  il  n'en  est  plu^  aitisi  d^ns  le  se- 
cond, et,  quand  oh  y  réfléchit,  on  né  peut  se  défendre 
d'on  certain  étbnnement,  en  présence  d^un  phénomène 
qui  ttte  pWrail  avoit»,  au  premier  abord,  aucune  relatibn 
ave<&  l^afleetidn  prificipale.  De  ià  vient  que  les  idées  de 
ci^iie,  de  ndamifestrition  critique,  dont  leà  anciens  étaient 
si  prodigues  et  dont  le&  mwlerntes  sont  peat-*ètte  trop 
avares,  se  «ont  perpélloées  et  conservée^  jdëqii'à  nous, 
àf  Tégârd  des  parotides; 

Bneflfet,  tes  auteurs  les  pliss' récents  les?  divisent  encore 
en  critiques  et  acritiques.  Il  faut  bien  le  dire  pourtant ,  cette 


262 


JOUBNÀL  DB  MÉBBCDIB. 


distinction  supporte  difficilement  Texamen  et  ne  semble 
fondée  sur  aucun  signe  sérieux;  c'est  seulement  d'après 
I  issue  heureuse  ou  funeste  que  Ton  prononce  sur  la  nature 
critique  ou  non  critique  de  cette  complication.  Alors ,  à 
quoi  sert  cette  division? 

Il  est,  en  clinique,  une  foule  de  faits  qui  seraient  éga- 
ement,  pour  nous,  le  sujet  d'un  profond  étonnement,  si 
les  lumières,  puisées  par  la  pathologie  dans  les  recherches 
anatomiques  et  dans  une  saine  physiologie,  n'eussent 
dissipé  les  ténèbres  qui  les  environnaient.  Les  adénites  de 
la  racine  des  membres  par  suite  de  lésions,  situées  aux 
extrémités;  les  ophthalmies ,  liées  à  une  inflammation  du 
nez  ou  des  narrioes;  les  orobites,  les  cystites  dépendant 
de  phlegmasies  urétralfs;  les  catarrhes  et  les  abcès  des 
reins,  amenés  par  des  maladies  des  parties  inférieures  des 
voies  urinarres,  tous  ces  phénomènes  s'expliquent,  pour 
nous,  de  la  manière  la  plus  simple  et  la  plus  claire.  La 
loi  de  la  propagation  de  l'inflammation  à  la  surface  des 
muqueuses,  a  i  intérieur  des  conduits  et  des  vaisseaux, 
nous  met  sous  les  yeux  la  relation  directe  et  positive  qui 
existe  entre  des  phlegmasies  se  manifestant  successivement 
sur  des  points  si  différents  et  si  éloignés. 

La  physiologie  nous  a  prêté  de  même  uu  utile  secours 
pour  nous  rendre  compte  de  phénomènes  moins  élémen- 
taires restes,  jusqu'à  ces  derniers  temps,  entourés  d'obs- 
cunte.  Les  abcès  du  foie,  par  exemple,  si  communs  dans 

^.ntfT     a^^'  """^  ^"^"  '•^^  "»^  explication   satisfai- 
scime.  tn  effet,  nos  médecins  militaires,  en  Algérie,  ayant 

nn.    î?-     ''^P*^'^'  très-rarement  primitive,  vient,  le 

ïïsurSl'!?''^'"^^  ^  '*  ^"^'«  ^^^  affections  intestinales 

à  adm^uL       '^  T'"  ^^  '^  dysenterie,  on  ne  peut  hésiter 

ïo2n  r  "îî*  ?"^  l^^flaroinalion  se  propage,  ïar  voie  de 

SK'Î'^"'^"  *^"^  ^  conLt  cholédoque jus^ 

ïïiis  tt  '^.P^'»^"^*  <^  q«e  les  produite  mSrWdes, 

veiÏÏ  rn^J^  '^^^ns,  enflammés  et  ulcérés,  par  les 


\ 


JOUBIUi  PB  MÉDBGIMB*  263 

Ainsi  se  simplifient  et  s'éclaircissent  peu  à  ,peu  quel- 
ques-uns des  problèmes,  trop  nombreux  encore,  que  nous 
offre  la  paihogénie.  Tous  ces  faits,  conquis  à  Taide  de  la 
physiologie  pathologique ,  cette  science  nouvelle  qui  mar- 
che et  grandit  à  la  suite  de  la  physiologie  normale,  son 
aînée ,  doivent  nous  encourager  à  chercher  l'origine  et  le 
mode  de  développement  des  complications  bizarres  qui 
surgissent  dans  les  maladies  et  dont  nous  n  avons  pu  nous 
rendre  encore  un  compte  suffisant. 

L'observation  de  Tétat  normal  nous  montre  chaque  or* 
gane  recevant  les  matériaux  nécessaires  à  l'entretien  de  sa 
vie  propre  et  à  Tesercice  de  ses  fonctions,  par  des  voies 
constantes  et  régulières;  la  physiologie  pathologique  doit 
chercher  de  même ,  si  les  maladies  n'arrivent  pas,  en  gé- 
néral ,  aux  organes  par  des  voies  uniformes  et  déterminées 
et  s'efforcer  de  saisir  le  point  de  départ,  la  source  du 
mal ,  afin  de  le  prévenir  ou  de  leteindre  dès  son  origine. 
Voyons  donc  si  nous  ne  pourrions  pas  arriver  à  péné- 
\rer  le  mystère  dans  lequel  le  développement  des  parotides 
symptomatiques  est  encore  plongé. 

Les  observations  qui  forment  la  base  de  ce  travail,  et 
dont  je  ne  donnerai  que  les  détails  relatifs  à  notre  sujet, 
mo  semblent  de  nature  à  prouver  que  l'intlammation  des 
parotides  qui  vient  compliquer  un  certain  nombre  de  ma- 
ladies, a  souvent,  pour  point  de  départ,  une  cause  locale, 
une  inflammation  de  la  muqueuse  buccale  qui  se  propage 
par  Tbuverture  du  conduit  de  Sténon,  jusqu'à  la  glande 
elle-même.  Voilà  pourquoi  je  rappelais  tout  à  l'heure  des 
faits  pathologiques  du  même  ordre  qui  sont  acceptés,  sans 
contestation ,  dans  la  science ,  et  qui  peuvent  être  vérifiés 
tous  les  jours. 

Cette  inflammation  buccale  est  tantôt  simple,  tantôt 
accompagnée  d'une  sécrétion  particulière,  du  muguet  par 
exemple;  je  pense  que  toute  inflammation,  de  quelque 
nature  qu'elle  soit,  peut  avoir  le  même  efl^et;  mais,  dans 
le  petit  nombre  de  faits  que  j'ai  rassemblés,  c'est  le  muguet 
qui  a  surtout  été  rencontré  (3  fois  sur  4). 

L'explication  que  je  propose  et  dont  je  dois  la  première 
idée,  je  me  hâte  de  le  proclamer,  à  un  anatomo-patbolo- 


204  lotmivjkt  M  «tiliBCtNfi. 

giste  tipës^renommé,  à  mon  honorable  mivftris,  M.  Baftrth  (I  ) , 
n'a  pas  la  prétention  d'être  exciusite.  Les  parotkies  se 
montrant  partieulièreroent  dans  une  certaîne  classe  de 
maladies,  les  maladies  putrides  et  pestilentielles,  j'admets 
volontiers^,  pour  elles,  une  cause  prédisposante,  une  in- 
fluence générale  de  nature  spéciale.  Mats,  rtiéme  dans  ces 
ca6,}e  crois  qu*ii  sera  bon  de  rechercher  s*il  n*y  a  pas  ime 
cause  occasionnelle ,  une  influence  locale  qui  provoque 
Téruption de  cette  phlegmasie  singulière;  et,  d'un  autre 
c6té ,  lorsque  la  maladie  principale  n'aura  aucun  caractère 
de  malignité  ou  de  putridité,  j'espère  qu'on  pourra  se 
contenter  des  causes  locales,  si  on  parvient  à  les  constater, 
sans  fiiire  intervenir  des  principes  occultés  et  insaisissables. 

On  envisagera  ainsi,  il  me  semble,  cette  complication  à 
un  point  de  vue  plus  simple  et  plus  vrai  ;  on  sora  moins 
disposé  à  lui  attribuer,  dans  les  cas  heureux ,  une  rnfluence 
salutaire  qu'elle  ne  possède  sans  doute  pas;  on  accueillera 
plutôt  la  pensée  émise  à  ce  propos  par  Rochoux  :  un  mal 
est  toujours  un  mal,  bien  qu'il  n'arille  pas  jusqu'à  rendre 
mortelle  l'afl^ection  dont  il  dépend. 

J'ai  recueilli  le  premier  fait  qui  m'a  mis  sur  la  voie  de 
cette  explication  à  l'hôpital  Beaujon,  en  1853. 

OBSfiBVATiON  r«.  —  Au  n»  36  de  la  salle  Sainte-Marthe 
entra,  le  i«'  févriei*,  une  femme  Laurence,  âgée  de  34 
ans,  déjà  malade  depuis  i S  jours,  et  chez  laquelle  se 
développèrent  bientôt  tous  les  symptômes  curactéristiqoes 
d'une  nèvre  typhoïde  (stupeur,  céphalalgie,  insomnie, 
épistaxis,  toux,  dévoiement,  ballonnement  du  ventre, 
sécheresse  de  la  langue,  foligtnosités  des  dents  «  taches 
rosées  assez  nombreuses ,  etc.). 

La  maladie  suivit  sa  marche  ordinaire  avec  une  moyenne 
intensité,  le  pouls  variant  de  84  à  100  pulsations  par  mi- 
nute, jusqu'au  15  lévrier.  Seulement,  dès  le  9,  des  vo- 
missements ,  symptôme  assez  rare  dans  la  fièvre  typhoifde, 
étiaient  survenus;  la  malade  rejeta  d'abord  de  la  bile, 
ptlis ,  les  jburs  suivants ,  vomit  ses  tisanes  ;  sitôt  qti'elle 

(1)  M.  le  professeur  Plorry,  dans  son  Traité  de  médecine  prati- 
que, a  aussi  donfié  cette  oxpfioation  daspifarotiditea* 


JMUlilL  DB  VÈOÈCOmU  265 

avalait  des  liquides,  elle  les  rendait;  mais  si  on  là-  laissait 
tranquille,  sans  lui  présentera  boire,  elle  ne  vomissait 
pas.  Le  dévoiement  continuait,   la  stupeur  était  très- pro- 
fonde ,  et  l'hébétude  si  grande  que  la  malade  pleurait  quel- 
quefois sans  raison.  Jusque  là  le  traitement  avait  consisté 
en  tisanes  de  limonade  et  dégomme,  eau  de  Seltz,  juleps 
diacodés,  cataplasmes  sur  le  ventre.  Un  seul  jour,  le  10, 
2  grammes  de  diascordium  furent  administrés  et  vomis. 
Le  15,  à  la  visite  du  matin,  on  fut  assez  surpris  de 
trouver  les  deux  régions  pstrotidiennes  très-goniiées,  très- 
tendues  ,  surtout  du  côté  gauche ,   tr^s-douioureuses    et 
d'une  ferme  consistance  à  la  pression.  Le  pouls  n'était  qu'à 
92  ;  la  chaleur  modérée.  La  malade  avait  plus,  de  connais- 
sance que  la  veille;  la  douleur  diminuait  sa  stupeur;  elle 
se  plaignait  continuellement;  elle  avait  encore  vomi  dans 
la  nuit,  époque  du  développement  spontané  des  parotides. 
En  cherchant  à  examiner  ces  tumeurs  par  l'intérieur  de  la 
*  bouche,  on  vit  une  exsudation  blanchâtre ,  crémeuse ,  ca- 
ractéristique du  muguet,  sur   la  lèvre  inférieure  et  les 
gencives.  On  ne  s'en  était  pas  aperçu  jusque-là  ,  mais  on 
n'avait  pas,  il  est  vrai,  porté  son  attention  de  ce  côté. 
10  sangsues  à  la  base  de  la  parotide  gauche. 
Le  16,  les  sangsues  ont  bien  pris  et  fait  couler  beau- 
coup de  sang;  la  tun^ur  du  côté  gauche  a  diminué,  mais 
la  droite  a  augmenté.  La  douleur  est  très-vive.  A  la  région 
sous-maxill&ire ,  il  y  a  aussi  du  gonflement  et  de  la  sen- 
sibilité. Sur  tous  les  points  de  la  muqueuse  buccale  qu'on 
peut  voir,  le  muguet  est  très-intense.  Il  n'y  a  pas  eu  de 
vomissement  ;  3  selies  asse^  abondantes ,  pouls  très-petit , 
à  112. 

Onctions  mercurieiles;  garg.  au  borax. 
Le  17,  la  faiblesse  faisait  des  progrès  ;  le  pouls  était  à 
124;  les  deux  parotides,  gonflées  à  peu  près  uniformé- 
ment, gardaient  l'empreinte  du  doigt,  ofl'raientiin  peu  de 
rougeur,  mais  pas  encore  de  fluctuation.  Le  tissu  cellu- 
laire sous"-outané  était  infiltré  sous  la  rtiâchoire  inférieure , 
mais  la  peau  y  conservait  une  couleur  d'un  Uanc  maV. 
BagDolst  100  grant.;  plus,  le  traitement  de  la  veille. 


266  lOOBNÂI  OB  Mtoscois. 

Le  18,  le  goufleraent  des  parotides  diminuait,  les 
glandes  se  dessinaient ,  le  tissu  cellulaire  sous-cutané  n'é- 
tait plus  distendu,  mais  le  pouls  très-petit,  à  124,  le 
dévoiement  abondant,  la  faiblesse  qui  augmentait,  lais 
saientpeu  d'espoir.  La  mort  arriva  le  19,  à  7  heures  du 
matin.  —  Autopsie,  26  heures  après  la  mort.  —  La  cavité 
buccale  tout  entière  est  recouverte  d'une  couche  fibrineuse 
blanche  ou  lie  de  vin  en  raison  du  Bagnols  ingéré,  de 
consistance  molle,  mais  formant  cependant  des  plaques 
assez  étendues,  faciles  à  détacher  de  la  muqueuse,  qui  pa- 
raît légèrement  injectée. 

Dans  Tarrière-gorge,  cette  concrétion  recouvre  toute  la 
surface  pharyngienne,  les  amygdales,  la  face  antérieure 
de  Tépiglolte,  la  base  de  la  langue  ;  mais  la  muqueuse  des 
voies  aériennes  n'en  présente  aucune  trace,  et  sa  coloration 
est  infiniment  plus  pâle. 

Danr;  l'œsophage,  on  voit  de   longues   lamelles   fibri- 
neuses  c  pvrant  toute  la  surface  muqueuse  et  s'en  détachant         ' 
très- facilement  sous  un  filet  d'eau  ou  par  le  raclage.  Klles 
cessent  brusquement  au  cardia,  au  niveau  du  changement         I 
d'épilhélium.  Elles  sont   colorées  en  jaune  par  suite  du 
passage  d'un  liquide  biliaire  dont  il  existe  encore  deux  ou         | 
trois  onces  dans  l'estomac. 

Dans  le  cinquième  inférieur  de  l'intestin  grêle,  il  y  a         | 
une  très-grande  quantité  d'ulcérations  noirâtres,  sur  des 
plaques  ou  des  follicules,  la  plupart  en  voie  de  cicatri-         | 
sation. 

Dans  tout  le  gros  intestin,  on  retrouve  une  couche 
fihrineuse,  d'un  blanc  grisâtre,  chagrinée,  continue  it 
d'une  seule  pièce ,  analogue  à  celle  de  la  partie  supé- 
rieure des  voies  digestives.  Seulement ,  elle  est  plus  gru- 
meleuse à  sa  surface,  plus  adhérente  à  la  muqueuse  dont 
la  vascularité  est  aussi  plus  prononcée,  sans  ramollisse- 
ment cependant. 

Rien  de  semblable  sur  les  muqueuses  vaginale,  utérine, 
urétrale  et  vésicale. 

Je  passe  sous  silence  un  engorgement  d'une  partie  du 


iovuràl  de  HÉDBcniB*  267 

poumon  gauche,  une  adhérence  complète  du  péricarde  au 
cœur,  et.j'arriveà  Texamendes  parotides. 

Ces  glandes  sont  enlevées  avec  les  canaux  de  Sténon  et 
la  parlie  de  la  muqueuse  buccale  sur  laquelle  ils  s'ou- 
vrent. Celle-ci  est  recouverte  de  larges  plaques  fîbrineuses, 
mais  non  injectée.  Du  pus  sort  de  Fouverture  du  conduit 
(le  Sténon  à  la  pression  de  la  glande. 

La  parotide  droite  est  doublée  de  volume;  la  gauche 
est  encore  plus  grosse. 

On  incise  d'abord  le  conduit  de  la  parotide  droite  jus- 
qu'à ses  principales  ramifications  inclusivement;  on  trouve 
partout  du  pus.  Le  tissu  glandulaire  présente  à  la  coupe  : 

V  Une  coloration  rouge  générale  sur  laquelle  sont  dis- 
séminés des  points  blancs  nombreux,  dus  à  la  dilatation 
des  grains  glanduleux  par  du  pus;  en  pressant  la  glande, 
en  piquant  la  surface  de  ces  points  blancs ,  on  fait  sourdre 
un  liquide  purulent  d'un  blanc  crémeux. 

2°  Le  tissu  glandulaire  est  friable ,  ramolli ,  mais  à  des 
degrés  différents;  là  où  il  l'est  le  moins, , on  distingue  des 
vaisseaux  très-nombreux  qui  lui  donnent  la  coloration 
rouge  indiquée;  là  où  il  est  le  plus  ramolli,  il  y  a  eu 
combinaison  du  pus  avec  le  tissu  de  la  glande;  on  ne  dis- 
tingue  plus  qu'une  bouillie  lie  de  vie. 

La  parotide  gauche  est  exactement  dans  le  même  état. 

Les  glandes  sous-maxillaires  sont  saines  et  servent  de 
terme  de  comparaison  par  leur  tissu  blanc  résistant,  par 
leur  liquide  limpide,  pour  apprécier  le  degré  des  altéra- 
tions des  parotides. 

Bien  que  le  muguet  n'ait  été  constaté,  dans  ce  cas, 
qu'au  moment  de  l'apparition  des  parotides,  on  ne  refu- 
sera pas  d'admettre  qu'il  a  bien  pu  exister  auparavant  sans 
être  aperçu  ;  et  l'extension  de  l'inflammation  de  la  mu- 
queuse buccale,  par  les  conduits  salivaires,  jusqu'à  ces 
glandes,  rendra  un  compte  assez  satisfaisant  du  développe- 
ment de  cette  complication. 

Les  vomissements ,  je  l'ai  noté ,  se  sont  montrés  dès  le 
9  février ,  tandis  que  les  parotides  n'ont  paru  que  le  15. 


268  JOVBIUL  BE  flÉmOHE. 

Or,  la  rafeté  de  ce  symptôme  dans  la  fièvre  typhoïde 
simple  et  sa  fréquence  assez  grande  dans  les  cas.  de  mu- 
guet ,  surtout  lorsqu'il  s*élend ,  comme  chez  notre  malade, 
jusque  dans  Tœsophage,  me  semblent  appuyer  notre 
supposition  de  la  préexistence  de  la  pblegmasie  buccale. 

Mais,  dans  les  faits  qui  vont  suivre,  il  n'Vaura  pas  le 
moindre  motif  de  doute  à  cet  égard. 

L'un  d'eux  est  d'autant  plias  probant  qu'il  avait  été 
recueilli  antérieurement,  alors  que  je  n'avais  pas  du  tout 
ridée  de  la  rcflation  qui  pouvait  exister  entre  le  dévelop- 
peoi^nt  des  parotides  et  la  présence  du  muguet  ou  d'une 
autre  iofiammation  buccale.  L'observation  que  j'en  avais 
gardée  contient  de  très-lcmgs  détails  étrangers  à  la  ques- 
tion dont  je  m'occupe;  i)e  n'en  présenterai  donc  qu'Ain 
simple  résumé. 

Obsebvation  II.  —  Une  femme  ISerrier,  Françoise^  &gée 
de  76  ans,  entra,  le  28  février  1852,  à  l'infirmerie  de  la 
Salpétrière,  salle  Saint- Alexandre,  n**  21^  service  de  M. 
Mpissenet. 

Elle  ne  parut  d'abord  souffrir  quip  de  la  coi^stipation  et 
fut  soulagée  par  des  purgatifs;  mais^  le  3  mars,  dans  la 
soirée ,  après  avoir  mangé  avec  appétit ,  elle  fut  prise  de 
malaise,  de  point  de  côté  à  droite,  ide  frissons,  puis,  le 
lendemain  matin,  vers  4  heures,  vomit  à  plusieurs  re- 
prises d'abord  des  aliments  et  ensuite  de  la  bile.  Bientôt, 
tous  les  s^nes  d'uiie  inflammation  de  la  base' du  poumon 
droit  se  manifestèrent,  mais  avec  un  tel  abattement,  une 
telle  prostration,  qu'on  se  borna,  les  deux  premiers  jours, 
à  lui  donner  du  thé  et  à  lui  appliquer  des  sinapi^nes.  . 

Les  forces  s'étant  un  peu  relevées,  on  put  employer, 
les  jours  suivants,  des  moyens  plus  actifs  (sangsues,  vomi- 
tifs ,  vésicatoires) ,  après  desquels  les  symptômes  locaux  et 
généraux  .qui  av,aient  causé  de  grandes  inquiétudes  corn- 
méncèr^nt  à  diminuer.  L^  mutité  et  le  souffle  tuber  qui 
existaient  à  la  base  du  poumon  dro^t,  quelques  crachats 
rouilles  qui  avaient  été  rejetés,  la  langue  sale ,  sèche, 
croOteuse;  la  figure  très<a})attu^,  l'œil  terae,  le  teint 
jaune  avec  injection  des  pommettes;  tous  ces  phénomènes, 


JOraBAii  B&  MÉBSCiW.  %69 

parmi  Jesqueb  Fadynajnie  ^aii  la  fiiit  domioant,  dispa* 
laissaient  peu  à  peu,  quand,  le  14  mars,  on  aperçut, 
dans  ia  bouche ^  un  peu  de  muguet.  On  toucha  les  points 
qui  en  étaient  recouverts  avec  un  mélange  d'acide  chlo* 
rhydrique  et  de  miel  rosat. 

Néanmoins,  le  17,  le «luguet  était  revenu  plus  intense, 
et ,  le  ^C ,  un  gonflement  considérable  de  ia  parotide 
{4auch«  avec  douteur  vive ,  induration,  rougeur  de  la  peau, 
fut  constaté.  La  tumeur  augmenta  le  21  et  le  22;  le  23, 
bien  que  le  gooflemeat  eut  diminué ,  ia  douleur  était  plus 
forte  et  la  rougeur  plus  foncée.  On  croyait  ta  suppuration 
inévitable,  il  n'en  fiit  rien;  sans  autre  médication  que 
Vapplication  de  cataplasmes  émoUients ,  la  parotide  di- 
minua peu  à  peu,  et,  le  26,  elle  avait  presque  disparu, 
i\  ne  restait  plus  qu*tin  peu  de  sensibilité  à  ia  pression.  La 
langue  était  bqniiàe  et  nette,  la  peau  fraîche,  le  pouls  à 
92.  La  malade  prenait  volontiers  du  bouillon  et  du  vin 
qu'on  lui  avait  toujours  prescrit. 

Le  27,  on  vit  un  peu  de  muguet  de  nouvelle  formation 
sur  la  langue  et  à  la  face  interne  des  joues  ;  mais  le  gon- 
flement et  la  douleur  avaient  complètement  disparu  de  la 
région  parotidienne. 

La  pneumopie  avait  Qédé;  mais  une  bronchite,  peut- 
être  ()e  vieille  date,  persistait  avec  opiniâtreté  et  s'oppo- 
sait au  retour  de  la  santé.  Des  crachats  verts ,  opaques , 
assez  abondants,  étaient  rejetés;  des  râles  muqueux ,  ron- 
flants étaient  entendus  avec  du  retentissement  de  la  voix 
e^  une  respiration  souillante  dans  la  rooitip  inférieure  du 
pourpoB  droit. 

Le  1 3  avril ,  |a  parotide  gauclie  se  gonfla  et  s'iadura  de 
nouveau  avec  iwe  vive  douleur  dans  l'oreille  du  même 
côté.  Les  jours  suivants,  ces  symptômes  s'accrurest,  et, 
le  17,  la  tumeur  étant  moins  dure  et  la  peau  légèrement 
violacée;  on  crut,  de  npuveau,  que  la  suppuration  allait 
se  mootrer.  Cependant,  jusqu'au  23,  il  y  eut  plutôt  des 
siigDes  de  résolution  ;  ca  jour  là ,  on  vit  immédiatement 
sous  le  lobule  fie  Toreitle  «m  point  ramolli ,  gros  coinme 


270  JOVKHàh  DE  MÉDBCOIB. 

une  noisette,  fluctuant,  et  dont  la  peau  était  d'un  blanc 
bleuâtre. 

A  notre  grande  surprise ,  ce  point  si  ramolli  ne  s*ou- 
vrit  pas,  et  la  parotide  sembla  complètement  en  voie  de 
résolution  pour  la  seconde  fois. 

Enfin,  le  4  mai,  la  tumeur  reparut  à  la  partie  anté- 
rieure et  inférieure  de  la  glande,  et  une  incision  prati- 
quée le  6,  sur  un  point  fluctuant,  donna  issue  à  une 
assez  grande  quantité  de  pus  louable. 

Le  7,  du  pus,  mêlé  de  sang  altéré,  sortit  en  abon- 
dance. 

Après  un  affaiblissement  progressif,  pendant  les  jours 
qui  suivirent,  la  malade  succomba,  le  12  mai,  sans  symp- 
tômes nouveaux. 

A  l'autopsie ,  on  trouva  la  parotide  à  peu  près  guérie. 
Une  fausse  membrane  très-forte,  quoique  .peu  ancienne, 
existait  sur  le  lobe  inférieur  du  poumon  droit,  sain  d'ail- 
leurs ,  sauf  un  peu  de  condensation.  Un  noyau  de  pneur 
monie  chronique,  de  la  grosseur  d'une  pomme  d'api,  qui 
existait  dans  la  partie  antérieure  du  lobe  supérieur  du 
poumon  gauche,  et  du  muco-pus  dans  les  bronches  expli« 
quèrent  la  terminaison  funeste. 

En  raison  de  l'adynimie  profonde  que  présenta  cette 
malade,  on  pourrait  croire  à  une  influence  autre  que  celle 
de  la  pneumonie  dans  le  développement  des  symptômes 
observés. 

M.  Beau  a  donné,  sous  le  nom  de  typhus  sénile,  des 
faits  qui  ont ,  avec  le  précédent,  une  grande  ressemblance. 
(Voyez  ses  études  cliniques  sur  les  maladies  des  vieillards.) 

Mais ,  quand  on  est  familiarisé  avec  tes  physionomies  si 
diverses  que  peut  oflrir  la  pneumonie*dans  un  âge  avancé, 
on  ne  sent  plus  le  besoin  d'aller  chercher  au  loin  la  raison 
de  la  stupeur,  de  la  prostration  extrêmes  qu'on  rencontre 
parfois  dans  cette  affection.  Si  la  présence  du  muguet  ou 
d'une  autre  inflammation  buccale  peut  être  constatée  avant 
l'apparition  des  parotides  qui  viennent  aussi  quelquefois 
compliquer  la  maladie ,  ne  trouvera-t-on  pas ,  dans  cette 


JOUBNÀL  DE  HÉBEGIFŒ.  271 

cireoQSlance ,  un  motif  de  plus  pour  douter  de  la  réalité 
d*UDe  influence  oculte ,  typhique  ou  autre  ? 

On  a  remarqué  la  marche,  si  curieuse  et  si  bizarre  de 
la  parotide  dans  ce  cas;  je  n*ai  pas  besoin  de  m'appesantir 
sur  ce  point.  Mais  les  partisans  des  Crises  seraient,  il  me 
semble ,  assez  embarrassés  pour  classer  ce  fait. 
-  Mis  sur  mes  gardes  par  la  première  observation  que  j*ai 
citée,  je  in'étais  promis  d  épier  attentivement  les  rapports 
que  pouvait  avoir  l'éruption  des  parotides  avec  les  phleg- 
masies  de  l'intérieur  de  la  bouche.  J*ai  recueilli  dernière- 
ment deux  nouveaux  exemples  de  cette  complication  pro- 
duite ,  je  crois ,  par  cette  cause. 

Obsbbyatioi^  III.  —  Il  y  a  deux  mois,  remplaçant 
M.  Bonamy  dans  son  service  de  THôteUDieu,  je  vis,  au 
n""  ^1  de  la  salle  16  «  un  nommé  Beurrier,  âgé  de  61  ans, 
atteint  d'asci te  et  d'oedème  des  membres  inférieurs,  qui 
paraissaient  avoir  été  amenés  par  une  diarrhée  chronique 
et  par  une  aifectipn  ancienne  des  voies  génito-urinaires. 
Ce  malade  avait  d'abord  été  traité  dans  une  salle  de  chi- 
rurgie pour  une  rétention  d^urine,  puis  transporté  dans 
un  service  médical  pour  les  autres  maladies.  Tous  les 
moyens  dirigés  contre  la  diarrhée  eurent  peu  de  succès, 
les  forces  diminuèrent  et  le  muguet,  qui  se  voit  assez  sou- 
vent vers  la, fin  des  maladies  chroniques  dont  Tissue  doit 
être  fatale,  apparut  sur  toute  la  muqueuse  buccale. 

Je  le  traitai,  comme  on  le  fait  d'ordinaire ,  à  l'aide  des 
gargarismes  de  Borax  et  de  miel  rosat,  et  la  bouche  parut 
se  nettoyer.  Mais,  comme  la  diarrhée  continuait  toujours 
et  que  le  malade  déclinait,  j'essayai.,  comme  ressource 
extrême,  la. diète  lactée.  Au  bout  de  quelques  jours,  le 
muguet  reparut  avec  plus  d'intensité  et  fut  bientôt  suivi 
de  l'éruption  d'une  parotide  du  côté  gauche.  Je  mé  bornai 
à  appliquer,  sur  cette  tumeur  inflammatoire,  qui  n'était 
pas  extrêmement  douloureuse  à  la  pression,  des  cata- 
plasmes émoUients;  le  malade  succomba  trois  jours  après, 
sans  que  cette  complication  parât  avoir  hâté  la  termi- 
naison funeste. 

A  l'autopsie ,  je  trouvai  le  tissu  de  la  parotide  infiltré  de 

20 


272  JOURNAL  DE  MÉDBCIIfB. 

pus,  ramolli,  friable,  d'un  rouge  sanieux;on  voyait  très- 
distinctement  que  le  pus  se  formait  dans  les  glandules 
salivaires ,  mais  il  n'avait  pas  encore  rompu  leurs  parois 
de  manière  à  se  rassembler  en  foyers. 

Des  ulcérations  nombreuses  et  anciennes  dans  le  gros 
intestin  ;  une  hypertrophie  considérable  de  la  prostate  qui 
avait  pu  momentaném^^nt  causer  une  rétention  d*urine,  et 
de  petits  abcès  dans  l'un  des  reins,  furent  les  principales 
lésions  constatées  pour  expliquer  le  développement  de 
rhydropisie  et  la  mort. 

OssERVATion  IV.  —  Peu  de  temps  après  arriva,  dans  la 
même  salle ,  au  n<*  4 ,  urt  jeune  homme  de  23  ans,  nommé 
Gallène,  atteint  de  fièvre  scarlatine.  U  eut  une  angine  pal- 
tacée  fort  grave ,  qui  nécessita  plusieurs  cautérisations  avec 
une  forte  solution  de  nitrate  d'argent  ;  puis ,  le  cinquième 
ou  sixième  jour  de  la  maladie,  bien  que  l'éruption  n'eût 
pas  encore  perdu  beaucoup  de  son  intensité ,  il  fut  pris 
d'un  délire  nerveux  qui  dura  pendant  48  heures  et  qui 
céda  à  l'influence  du  chloroforme  et  de  l'extrait  thébafque 
donnés  à  l'intérieur  à  assez  forte  dose.  —  Vers  le  neu- 
vième jour,  il  se  plaignit  de  douleur  à  la  région  paroti- 
dienne  droite,  et,  le  lendemain,  une  tumeur  considérable 
très  douloureuse,  un  peu  rouge  è  sa  surface  et  très-dure, 
s'était  élevée  à  cet  endroit.  —  10  sangsues  furent  appli- 
quées à  sa  base  et  soulagèrent  un  peu.  —  Mais,  le  jour  sui- 
vant, lé  côté  gauche  se  prit  aussi ,  toutefois  à  un  bien  moia- 
dre  degré.  —  Malgré  cette  complication^  l'étal  général 
resta  assez  bon  et  la  convalescence  s'établit  peu  à  peu  ; 
mais ,  en  dépit  des  frictions  mercurielles  et  belladonées , 
des  signes  de  suppuration  se  montrèrent  dans  la  parotidie 
droite,  et  M.  Chenantais ,  qui  voulut  bien  m'assister,  pra- 
tiqua une  ouverture  par  laquelle  bientôt  la  suppuration  se 
fit  jour.  —  M.  Bonamy  ayant  repris,  à  cette  époque,  son 
service ,  j'ai  cessé  de*  suivre  le  malade ,  mais  j'ai  eu  le 
plaisir  de  le  trouver  ce  matin ,  dans  une  visite  que  je  lui 
ai  faite  à  l'hôpital ,  en  fort  bonne  voie.  U  a  fallu  faire  une 
contre  ouverture  ;  mais  aujourd'hui  la  parotide  droite  s'est 
presque  complètement  affaissée,  il  n'y  a  presque  plus  de 


JOVfillJU.  DB  MÉDBCINB.  273 

suppuration,  Tétat  général  est  très-satisfaisant.  La  paro- 
tide gauche  est  entrée  en  résolution  très-promptement , 
sans  avoir  acquis  un  grand  développement. 

Il  D*y  a  pas  ici  de  muguet  à  invoquer  pour  expliquer 
la  pai*otide;  mais  serait-il  déraisonnable  de  supposer  que 
l'angine  ptiltacée,  fort  grave,  quia  signalé  le  début  de  la 
maladie ,  s*est  étendue  jusqu'à  l'ouverture  des  conduits  de 
Sténon?  Ne  sait-on  pas  d'ailleurs  que,  dans  toutea  les 
fièvres  éruptives,  la  muqueuse  buccale  est  plus  ou  moins 
rouge,  gonflée,  enflammée?  Les  plaques  nacrées  qu'on 
voit  si  souvent  alors  sur  les  gencives  et  qui  sont  consti- 
tuées par  de  I  epilhélium  en  voie  d'exfoliation ,  qu'indi- 
3uent*elles  autre  chose ,  sinon  le  gonflement  inflammatoire 
u  iissu  muqueux  subjacent  ? 

Je  me  crois  donc  autorisé ,  d'après  ces  faits,  à  exprimer 
Ippinion  que  les  parotides symptomatiques,  qui  surgissent 
dans  les  maladies  aiguës  ou  cbroniques,  ont  souvent,  pour 
point  de  départ,  une  cause  locale,  une  inflammation 
quelconque  de  la  muqueuse  de  la  bouche  qui  arrive  par 
lesconduitasalivaires  jusqu'à  ces  glandes.  On  peut  dire,  il 
est  vrai ,  qu'il  y  a  bien  peu  d'exemples  de  parotides ,  en 
raison  du  nombre  immense  des  cas  d'inflammations  buc- 
cales, ie  reconnais  l'importance  de  cette  objection,  et 
c'est  pour  cela  que  je  ne  rejette  pas,  au  moins  pour  un 
grand  nombre  de  cas,  l'influence  d'une  cause  générale 
prédisposante.  Mais  je  désire  qu'on  s'enquière  aussi  des 
causes  locales  occasionnelles  qui  peuvent  exister ,  et  peut- 
être  un  traitement  topique,  soigneux  et  énergique ,  pourra 
prévenir  une  complication  qui  me  semble,  comme  à 
M.  Rocboux ,  toujours  &cheuse. 

La  cystite,  l'orcbite  ne  viennent  pas  compliquer  tous 
les  cas  de  blennorrhagie;  lophthalmie  n'arrive  pas  néces- 
sairement après  une  phlegmasie  des  narines;  mais,  comme 
on  est  averti  de  la  possibilité  de  ces  faits ,  on  n'est  pas 
étonné  quaùd  ils  se  montrent ,  et  l'on  se  tient ,  autant  que 
possible,  sur  ses  gardes  vis-à-vis  d'eux.  Je  n'en  demande 
pas  d'avantage  à  l'égard  des  parotides;  seulement,  dans  les 
cas  où  quelque  symptôme  anormal,  typhoïde  ou  autre. 


274  joubnàl  de  MÉDEcnffi. 

pourra  les  faire  craindre ,  qu'on  s'efforce  de  veiller  à  l'état 
de  la  bouche  et  de  combattre  surtout  très  soigneusement 
le  muguet. 

Les  faits  que  j'ai  cités,  et,  en  particulier  le  premier 
que  j'ai  donné  dans  tous  ses  détails,  serviraient  à  démon- 
trer, s'il  en  était  encore  besoin  après  les  travaux  de  M.  Mu- 
rât, de  M.  Louis,  que  le  siège  de  l'inflammation  dans  les 
parotides  symptomatiques  que  nous  observons  ordinai- 
rement, est  bien  dans  le  tissu,  dans  les  grains  sécréteurs 
de  la  glande  elle-même.  Il  paraît  que,  dans  la  peste,  le 
mal  occupe,  au  contraire,  les  ganglions  lymphatiques 
(Rochoux).  —  le  rappelle  ce  (ait  parce  que  je  n'ai  eu  en 
vue  que  les  parotides  observées  dans  les  maladies  de  nos 
contrées  ;  et ,  par  conséquent ,  c^est  à  elles  seules  que 
s'adresse  Texplication  donnée  plus  haut,  qui  trouve,  du 
reste,  un  nouvel  appui  dans  le  siège  anatomique  de  la 
lésion ,  à  Tintérieur  des  cellules  parotidienires. 

Mais  les  glandes  parotides  ne  jouissent  pas  seules,  à 
l'exclusion  des  autres  glandes  salivaires,  du  triste  privi- 
lège de  s'enflammer  dans  le  cours  des  maladies.  On  ren- 
contre aussi,  plus  rarement  à  la  vérité,  des  maxiUites» 
M.  Beau  (mémoire  cité)  en  a  publié  un  exemple.  J'en 
avais  recueilli  moi-même  un  cas  à  la  Saipetrière,  avant 
d'avoir  les  idées  que  je  viens  d'émettre. 

Il  vs'agissait  d'une  feuime  de  75  ans,  atteinte  d'une 
pneumonie  de  la  base  du  poumon  droit,  qui,  huit  à  dix 
heures  avant  sa  mort,  présenta  une  tumeur  dure  des  deux 
glandes  sous-maxillaires.  Dans  le  cours  de  la  maladie,  il 
n'y  avait  eu ,  en  fait  de  symptômes  extraordinaires,  qu'un 
éry  thème  violacé  delà  paume  des  mains,  qui,  ayant  ap- 
paru deux  jours  avant  la  mort ,  persista  jusqu'à  la  fin. 

A  l'autopsie ,  cet  érythème  n'avait  laissé  aucune  trace  ; 
mais  les  deux  glandes  sous-maxillaires  furent  trouvées 
gonflées  ,  indurées  ;  de  quelques  points  ,  déjà  ramollis  et 
friables,  on  pouvait,  par  la  pression,  fisiire  sortir  un  peu 
de  pus. 

Le  lobe  inférieur  du  poumon  droit  était  atteint  d'hépa- 
tisation  grise. 


JOCBNAL  DB  MÉDECINS.  275 

Je  n'ai  vu,  dans  mes  notes  sur  Tétat  de  la  cavité  buccale 
pendant  la  vie ,  que  l'indication  de  la  sécheresse  et  de  la 
coloration  noire  de  la  langue,  symptôme  si  commun  chez 
les  vieillards,  dans  la  pneumonie  surtout.  Je  ne  serais  pas 
éloigné  de  regarder  cet  état  de  la  muqueuse  buccale 
comme  une  des  variétés  d'inflammation  qui  peut  causer, 
en  se  propageant,  dans  certains  cas  donnés ,  la  phlegmasie 
des  glandes  salivaires.  J'ajouterai  que  le  tartre  stibié  avait 
été  donné  deux  fois,  5  jours  et  2  jours  avant  la  mort,  à 
la  dose  de  15  et  de  30  centigrammes.  Mais  je  ne  veux 
pas  m'appuyer  sur  un  fait  incomplet,  et  je  me  borne  à 
signaler  la  possibilité  du  développement  des  maxillites, 
comme  des  parotides,  sous  l'influence  d*une  irritation 
locale.  La  différence  de  calibre  des  conduits  excréteurs  des 
glandes  salivaires  suffirait  à  donner  la  raison  de  la  plus 
grande  fréquence  de  Tune  de  ces  phlegmasies ,  comparati- 
vement à  Tautre. 


JOUBNAL  DE  MÉDBGIME.  277 


TABLE  DES  MATIÈRES 

DO    XXXI'    VOLUME. 


Pages. 

Auhinais.  Voyez  quelques  réflexions  sur  les  fièvres 

périodiques  pernicieuses 64 

Aubinais.  Voyez  observations  pour  servir  à  This- 
toire  d'une  variété  d'bémorrhagie  post-puerpérale 
excessivement  rare,  et,  par  conséquent  encore  peu 

connue. 246 

Bulletin  des  séances 5,  59,  107,  175,  207 

Combeau.  Voyez  observation   de  farcin  chronique 

suivi  de  morve  aiguë .  • 183 

Discours  de  M.  Letenneur,  président 6 

De  la  nature  de  la  maladie  de  Bright ,  par  M,  Papin- 

Clergerte 20 

Du  changement  que  certaines  péricardites  appor- 
tent dans  le  rapport  de  fréquence  de  la  respiration  et 

du  pouls,  par  M.  Malherbe 1 80 

Gautron.  Voyez  notes  sur  plusieurs  calculs 200 

Huette.  Voyez  tableau  des  observations  météorolo- 
giques de  1854 59 

Letenneur.  Voyez  discours 6 

LetennAir.  Voyez  quelques  cas  d*autoplastie  fa- 
ciale    143 

Malherbe.  Voyez  observations  cliniques 82 

Mahot.  Voyez  observations  cliniques. 117 

Marcé.  Voyez  séméiologie  des  fièvres  intermittentes.  125 
Malherbe.  Voyez  du  changement  que  certaines  pé- 
ricardites apportent  dans  le  rapport  de  fréquence  de 

la  respiration  et  du  pouls. 1 80 

Malherbe.  Voyez  observation  d'acéphalie 195 

Note  sur  plusieurs  calculs,  par  M.  Gautron 200 

Note  sur  Tétiologie  des  parotides  symptomatiques 
ou  parotidites,  par  M.  Trastour 261 


278  JOUHRÂL  DE  HÉ]IBCn«« 

Pige». 

Observalion  d'empoisonnement  par  le  savon  arseni- 
cal de  Bécœur,  par  M.  Pincet 50 

Observation  d'un  cas  de  carcinome  du  pylore,  par 

M.  Papin-Clergerie. 53 

Observations  cliniques,  par  M.  Malherbe 82 

Observation  de  pneumo-thorax,  consécutif  à  une 
pneumonie  lobulaire,  par  M.  Vallin,  élève  interne  à 

rOôlel-Dicu 98 

Observations  cliniques,  par  H.  Mahot i  17 

Observation  de  farcin  chronique  suivi  de  morve 
aiguë,  par  M.  Combeau,  interne  de  l'Hôtel-Dieu.. .   183 
Observation  d'acéphalie,  par  M.  Malherbe. . ....   195 

Observations  pour  servir  a  Thistoire  d'une  variété 
d'bémorrhagîe   utérine  post-puerpérale  rare   et  par 
conséquent  encore  peu  connue,  par  M.  Aubinais...  246 
Papin-Clergeric.  Voyez  de  la  nature  de  la  maladie 

de  Brighl 20 

Papin-Clergerie.  Voyez    observation  d'un   cas  de 

carcinome  du  pylore 53 

Pincet.  Voyez  observation  d'empoisonnement  par 

le  savon  arsenical  de  Bécœur 50 

Prix  de  la  Société  de  Chirurgie  de  Paris • .  205 

Quelques  réflexions  sur  les  lièvres  périodiques  per- 
nicieuses à  l'occasion  d'un  accès  de  fièvre  pernicieuse, 

par  M.  Aubinais 64 

Quelques  cas  d'autoplastie  faciale,  par  M.  Letenneur.  143 
Quelques  mots  sur  la  méningite  des  enGints,*par 

M.  Ch.  Rouxeau 219 

Rouxeau.  Voyez  quelques  mots  sur   la  méningite 

des  enfants 219 

Séméiologie  des  fièvres  intermittentes,  par  M.  Marcé.  125 

Tableau  des  observations  météorologiques 59 

Table  des  matières 277 

Trastour.  Voyez  note  sur  Tétiologie  des  parotides 

symptomatiques  ou  parotidites. 261 

Vallin.  Voyez  observation  de  pneumo-thorax  • . . .     98 

Raotes,  Imp.  deH*  tente  C.  MeHiiwc. 


VINGT  ET  I7]fl£aif:  AXifriSB 

PE  LA  Î^OUVELLE  SÉRIE. 


LISTE  DES  MEMBRES  RÉSIDANTS 


DE  LA 


sis(iiva(Dsi  S)iB  8atos(oasis<a 


MM. 


ME1IBBE8  H01I0BAIBE8. 

MM. 


Lafond ,  docteur  en  chirurgie. 
Le  Ray,  docteur-médecin. 
Marchand,  docteur  en  chirurgie. 


Gautron  père,  docteur-médecin. 
Thibeaud ,  docteur-médecin. 
Hignard ,  docteur-médecin. 


MEMBRES  TITULAIBES. 


MM. 


AUard  (Emile) ,  doct'-médecin. 

Anizon,  docteur-médecin. 

Aubinais ,  docteur-médecin. 

Baré,  docteur -médecin. 

Blanche t  fils,  docteur-médecin. 

Bonamy  (Eugène)  ^  ,  docteur- 
médecin. 

Champenois ,  docteur-médecin. 

Ghenantais,  docteur-médecin. 

Citerne,  docteur-médecin. 

Gormerais,  pharmacien. 

Delamaro ,  docteur-médecin. 

Deluen ,  docteur-médecin. 

De  Rostaing  de  Ri?as,  docteur- 
médecin. 

Foulon ,  docteur-médecin. 

Galicier,  docteur-médecin. 

Gatterre ,  docteur-médecin. 

Gautron  fils,  docteur-médecin. 

Gély,  docteur-médecin. 

Georges,  pharmacien. 

Hélie,  docteur-médecin. 

Leborgne ,  docteur-médecin. 


MM. 

Lefeuyre ,  docteur-médecin. 

Le  Houx ,  docteur-médecin. 

Lequerré,  docteur'^médecîn,  an- 
cien chirurgien  de  marine. 

Letenneur,  docteur-médecin. 

Mabit,  docteur-médecin. 

Maguéro ,  pharmacien. 

Mahot ,  docteur-médecin. 

Maisonneuve  (Th.),  docteur- 
médecin. 

Malherbe ,  docteur-médecin. 

Marcé ,  docteur-médecin. 

Mauduit,  docteur-médecin. 

Moriceau  fils,  docteur-médecin. 

Padioleau ,  docteur-médecin. 

Papin-Clergerie,  docU-médecin. 

Petit,  docteur-médecin. 

PihanDufeillay,  doct.-médecin. 

Pincet,  pharmacien. 

Rouxeau ,  docteur-médecin. 

Trastour,  docteur-médecin. 

Turpin,  docteur-médecin. 

Villeneuve ,  docteur-médecin. 


JOURNAL 


DE  LA 


SECTION  DE  nÉDECINE 

DE  l  SOCIfiH  ÂllÂDlNIOliE 

■  DO 

DÉPARTEMENT  DE  LA  LOIRE -INFÉRIEURE. 


32«    yOLUME. 


H*  ANNÉE  DE  LA  NOUVELLE  SÉRIE- 


NANTES, 

IMPRIMERIE  DE  H-»  V*  CAMILLE  MELLINET. 
1856. 


JOURNAL 


DE  LA 


SECTION  DE  MEDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIODE. 


BDLLETm  DES  SÉANCES. 


Séance  du  14   décembre  1855. 

PBÉSIDENCE  DE  M.  LETENNEUR ,  PHÉSIDENT. 

-  Le  procès-verbal  lu  et  adopté ,  U  séance  est  coiisacrée 
aux  élections  éa  Bureau  ei  des  Cofhités  pour  l'année 
18»«. 


6  JOUaVAL  DB  MÉOBCXnE. 

En  voici  le  résultat: 

Biipeaa. 

MM.  Mabot  ,  Président  ; 

Malhebbb,  Vice- Président,' 
Lb  Houx,  Secrétaire; 
CiTBBNB,  Secréiairer Adjoint  y- 
Dblanabb,  Bibliothécaire; 
Dblubn,  Trésorier. 

Comité  de  Rédaction. 

HV.  Blanchbt,  Boûxbaiï,  Hélib,  iitulùires; 
MM.  Le  Bobone  et  ânizon,  memhres  suppléants* 

Comllé  de  Tiiccliiei 

MM.  âubinais,  Mabit  et  Mauduit. 

Comité  de  Topographie. 

MM.  BoNAHY,  Foulon  et  Allabd. 

Comité  d^AdmlnletratloB. 

MM.  Maguéeo,  Mabiti  LEQUEBBÉ,MoBiCEAuet  Mabghand. 

Séance  du  11  janvier  1856. 

PBÉSIDEnCE   DE  M.  MAHOT  «  PBÉSIDENJ. 

Avant  de  quitter  le  fauteuil  de  la  présidence,  M.  fieien- 
neur,  dans  une  simple  et  brève  allocution,  remercie  la 
Section  du  sympathique  appui  qu'elle  lui  a  accordé  duraot 
Texercice  de  ses  fonctions^  et  la  félicite  de  ses  travaux 


JOmUfÀL  B£   MÉDECIKE.  7 

solides  et  variés  attestant  que  son  zèle  ne  s  est  point  ra- 
lenti pendant  Tannée  écoulée;  un  grand  nombre  d'ouvrages 
importants  dont  s*est  enrichie  la  bibliothèque,  et  fadjonc- 
tion  prochaine  de  nouveaux  membres,  lui  semblent  en- 
core .  le  présage  d'une  prospérité  croissante  pour  notre 
Association. 

M.  Letenneur  invite  ensuite  les  membres  nouvellement 
élus  à  venir  prendre  place  au  Bureau,  et  M.  Mahot,  pré- 
sident, lit  le  discours  suivant  : 


<v  Messieurs, 

jo  Vous  avez  bien  voulu,  dans  votre  séance  du  14  décem 
bre  dernier,  me  confier  l'honneur  de  présider  vos  séances 
pendant  Tannée  1 856  ;  ]e  vous  en  rt^mercie  bien  sincèrement. 
J'ai  accepté  avec  empressement  la  mission  que  vous  m'a- 
vez confiée  :  je  sens  bien,  cependant,  qu'un  grand  nombre 
des  qualités  qui  doivent  se  retrouver  réunies  dans  un  Prési- 
dent, et  qui  distinguaient  mes  honorables  prédécesseurs, 
me  font  défaut,  mais  je  compte,  pour  y  suppléer,  sur 
mon  zèle  et  ma  bonne  volonté,  dont  je  suis  sûr  ;  sur  Tindul- 
gence  que  je  vous  prie  de  m'accorder  et  que  vous  ne  me 
refuserez  pas,  je  Tespère;  enfin,  je  compte  sur  les  conseils 
bienveillants  des  membres  du  Bureau  qui  m'ont  été  adjoints, 
conseils  auxquels  j'aurai  recours  avec  empressement,  toutes 
les  fois  qu'il  se  présentera  à  prendre  une  décision  qui 
pourra  avoir  quelque  gravité  pour  la  Section. 

*»  Je  crois  n'être.  Messieurs,  que  l'interprète  de  vos  sen- 
timents, en  adressant,  au  nom  de  la  Section  de  Médecine , 
des  remerciements  bien  mérités  au  Bureau  de  1855.  Nous 
avons  tous  été  à  même  d'apprécier  la  manière  conscien- 
cieuse et  distinguée  avec  laquelle  tous  les  membres  qui  le 
composaient  ont  rempli  leurs  fonctions  pendant  Tannée 
qui  vient  de  s'écouler. 

0  Depuis  deux  ans,  Messieurs,  le  corps  médical  de 
Nantes  a  été  frappé,  par  la  mort,  d'une  manière  bien 
cruelle,  et  cette  année  encore,  la  Section  de  Médecine  a  eu 


8  jotiRtiAL  te  MiÀÈCmË. 

à  déplorer  la  perte  de  trois  de  ses  membres.  Ce  n*est  pas 
ici  le  lieu  de  vous  présenter  la  biographie  de  MM.  les  doc- 
teurs Ménard,  Leroux  et  Fouré;  néanmoins,  pernrtettez- 
moi  de  ne  pas  laisser  passer  celte  occasion  sans  vous  rappeler, 
\sn  quelques  mots,  le  souvenir  des  collègues  que  nous  avons 
perdus. 

A  M.  le  docteur  Ménard ,  un  des  membres  les  plus  assidus 
a\ix  séances  de  la  Section  et  de  la  Société ,  avait,  pour  notre 
compagnie,  une  affection  toute  particulière,  fet  il  né  s'é- 
coulait pas  un  seul  jour  qu'il  ne  vînt  y  passer  quelques 
instants. 

D  Nous  voyons  tous  ici  la  place  qu*il  occupail  constam- 
ment parmi  nous,  et,  le  soir,  on  s'étonne  de  ne  plus  entendre 
sa  voix  forte  et  retentissante  dans  les  conversation^  qui 
accompagnent  si  souvent, trop  souvent  peut-être,  la  lecture 
des  journaux. 

«En  18â2,  M.  Ménard  ne  recula  pas  devant  les  chances 
du  concours  qui  fut  ouvert,  pour  urte place  de  chirurgien, 
par  TÂdministration  des  Hospices,  concours  qui  se  termina 
par  la  nomination  de  M.  le  docteur  Marchand. 

Pendant  plus  de  <0  années,  M.  Ménard  fut  le  chirurgien- 
major  de  la  garde  nationale  de  Nantes. 

»  Vous  savez  tous  avec  quel  zèle  et  quelle  régularité  il 
a  rempli,  dorant  de  longues  années ,  les  fonctions  dé  tréso- 
rier, qui  semblaient  si  bien  lui  appartenir,  qu'il  était,  à 
chaque  élection ,  renommé  par  une  acclamation   unanime. 

»  M.  Ménard  à  peu  écrit  dans  le  sein  de  la  Section ,  mais 
il  prenait  une  part  active  à  ses  discussions.  Fîdèle  obser- 
vateur du  règlement  i  il  délaissait  passer,  sans  opposition, 
aucune  mesura  qui  lui  paraissait  tontraire  à  la  lettre  et  à 
l'esprit  de  notre  code  disciplinaire,  et  souvent  isîes  observa- 
tions, dans  les  discussions  médicales,  étaient  Sagos,  judi- 
cieuses, et  portaient  le  cachet  du  bon  sens. 

n  M.  le  docteur  Ménard  s'^était  beaucoup  Occupé  de  chi- 
rurgie, et  il  a  laissé,  parmi  nous,  la  réputation  d'an  opérateur 
habile.  Moi-même,  dans  plusieurs  circonstances,  j'ai,  pu 
apprécier  soh  adre^e  manuelle,  vraiment  fort  remarquable. 
^     »  Notre  confrère  nous  a  été  enlevé  paV  une  maladie 


lOUftftÀL  DÉ   MÉDECINE.  9 

aiguè,  alors  que  son  Age  peu  avancé  et  sa  forte  constitu- 
tion semblaient  lui  promettre  encore  de  longs  jours. 

»  M.  le  docteur  Dominique  Leroux  fut  aussi  un  des 
concurrents  à  cette  épreuve  chirurgicale  dont  je  voUs  par- 
lais tout  à  l'heure  ;  cinq  de  nos  confrères  y  prirent  part , 
et  déjà  trois  d'entre  eux ,  MM.  Touzeau  ,  Ménard  et  Leroux 
ont  quille  cette  terre;  tous  les  trois  étaient  alors  pleins  de 
force  et  de  santé. 

»  A  son  début  dans  la  carrière  médicale,  M.  Leroux  fut 
interne  à  THôtel-Dieu  de  Nantes. 

»  Plus  tard  ,  il  rentra  dans  les  hôpitaux, d  abord  comme 
chirurgien  suppléant,  puis  comme  chirurgien  titulaire  ; 
enfin,  il  fit  partie  de  notre  Ecole  de  Médecine,  en  qualité 
de  professeur  suppléant. 

D  M.. le  docteur  Leroux  était  un  esprit  distingué  ,  sa  pa- 
role était  brillante  et  remarquablement  facile,  sa  conver- 
sation agréable  et  variée. 

»  D'une  constitution  robuste ,  on  pourrait  dire  athléti- 
que, notre  confrère  semblait  défier  la  maladie,  el  cependant 
il  fut,  on  peut  le  dire,  écrasé  par  des  affections  morales 
et  par  de  violents  chagrins  de  famille.  Il  perdit  une  jeune 
nièce  qu'il  regardait  comme  sa  fille,  qu'il  avait  adoptée 
pour  ainsi  dire  et  sur  qui  se  concentraient  toutes  ses  facul- 
tés aimantes.  Sa  femme  fut  atteinte,  à  la  même  époque, 
d'une  longue  et  cnielle  maladie. 

»  Notre  pauvre  confrère  ne  put  soutenir  ces  épreuves: 
sa  santé  s'altéra  rapidement,  et  tous  nous  fûmes  Frappés 
d'un  étonnement  douloureux,  en  renconIVant  dans  les  rues 
cet  homme  que,  quelques  jours  auparavant,  nous  avions  vu 
si  fort,  si  plein  de  santé  et  d'énergie,  maintenant  pâle, 
défait,  se  traînant  à  peine,  portant  empreint  sur  sa  figure 
le  cachet  de  la  décomposition  physique;  riert,  en  effet, 
n'a  pu  le  sauver;  il  a  lutté  pendant  quelque  temps,  el 
malgré  les  soins  éclairés  de  plusieurs  de  ses  amis  et  conJFrè- 
res,  il  a  succombé  au  mal  qui  lui  rongeait  le  cœur. 

»  Comme  je  vous  l'ai  dit,Mcssieurs,  je  n'ai  pas  ici  l'in- 
tention de  vous  faire  la  biographie  de  M.  le  docteur  Fouré  : 
im  de  nos  collègues  que  ïious  aiitions  et  que  nous  respec- 
tons tous,  a  pris   l'engagement  de   se  charger  de  cette 


10  JOumiÀL  DB  MÉHBCINE. 

tâche ,  qui  sera  bien  douce  pour  lui ,  je  n'en  doute  pas ,  et 
qu'il  remplira  mieux  que  tout  antre,  ayant  été,  pour  ainsi 
dire,  pendant  sa  vie  entière,  uni  à  notre  vénérable  doyen 
par  les  liens  d'une  intime  amitié. 

D  Qu'il  me  soit  seulement  permis  de  rendre  hommage  à 
la  mémoire  de  Thomme  de  cœur,  du  médecin  éminemment 
distingué,  qui  m'a,  pendant  iongucs.années,  honoré  d'une 
affection  toute  paternelle;  qui,  avec  une  bienveillance  qui 
ne  s'est  jamais  démentie,  a  bien  voulu  me  guider  dans  mes 
études,  me  diriger  et  m'assister  de  son  appui  et  de  ses 
conseils  à  mon  entrée  dans  la  carrière  si  honorable ,  mais  si 
difficile  et  si  épineuse  de  la  médecine. 

I)  Toute  ma  vie,  le  souvenir  de  rattachement  qu'il  m'a 
témoigné  restera  gravé  dans  mon  cœur,  et  je  lui  en 
conserve  une  bien  vive  reconnaissance. 

»  Je  n'essaierai  pas  de  vous  présenter  le  tabjeaude  toutes 
les  nobles  et  belles  qualités  qui  ont  fait  de. M.  Fouré  un 
homme  admirablement  organisé.  Comme  savant  et  comme 
homme  du  monde,  M.  Fouré  pouvait  briller  partout,  dans 
un  salon  comme  dans  une  Académie  ;  sur  tous  les  théâ- 
tres, il  fut  sorti  de  la  foule,  à  Paris  aussi  iiien  qu'en  pro- 
vince. 

0  M.  Fouré  fit,  à  Angers,  des  études  très-brillantes,  il 
travailla  beaucoup  alors  les  mathématiques ,  pour  lesquelles 
il  se  sentait  une  attraction  toute  particulière  :  il  réussit  par- 
faitement, dans  cette  étude,  et  je  lui  ai  souvent  entendu 
parler  des  succès  qu'il  avait  obtenus  dans  plusieurs  examens 
et  plusieurs  thèses -ayant  rapport  à  cette  spécialité. 

M.  Fouré  partit  très-jéune  pour  S-Domingue  ;  là,  il  sut  se 
créer  une  position,  qui,  sans  la  révolution,  l'eût  inévitable- 
ment conduit  à  une  grande  fortune;  mais,  en  même  temps, 
il  sut  mettre  son  temps  à  profit  pour  son  instruction ,  et  il 
revint  ruiné ,  mais  riche  d'observations  sur  les  maladies  des 
régions  tropicales.  Peut-être  même  est-ce  à  son  séjour  dans 
les  colonies ,  qu'il  faut  attribuer  en  partie  la  supériorité 
qu'il  a  toujours  conservée  dans  le  diagnostic  et  la  connais- 
sance des  affections  intermittentes. 

»  Loin  d'avoir  subi  l'action  énervante  des  pays  chauds 


JOVBIIAL  SB  MÉDECINB.  11 

qui  usent  si  rapidement  les  organisations  les  mieux  trem* 

péps,  M.  Fouré^à  peine  de  retour  en  France,  se  remet  à 

Véiude  avec  une  ardeur  toute  |)a$sionnée.  Il  se  lie  d*amitié, 

à  Parts  «  avec  tous  les  hommes  destinés  à  illustrer  leur 

époque,    Dupuytren,  Richerand,   Caillàud,   Dubois,  Ali- 

bert,  Pariset,  tous  le  regardaient  alors  commeleur  égal, 

comme  leur  émule,  et  comme  on  condisciple  digne  d*être 

associé  à  leurs  travaux;  et  certes,  s'il  est  permis  de  faire 

ici  l'application  du  proverbe:  Dis-moi  qui  lu  hantes  et  je 

te  dirai  qui  tu  es;  les  hommes  dans  le  groupe  desquels^se 

trouvait  alors  M.  Fouré  doivent  nous  donner  une  haute  idée 

de  ce    qu'il,  était  lui-même. 

»  Depuis  lors,  nous  avons  vu  M.  Fouré  à  Tœuvre,  aussi 
supérieur  dans  la  pratique  et  au  lit  du  malade,  que  lorsqu'il 
traitait  une  question  théorique. 

}>  Sa  belle  intelligence  lui  faisait  embrasser  cette  ques- 
tion dans  tout  son  ensemble,  et  lui  suggérait  des  considé- 
rations toujours  élevées,  toujours  philosophiques,  qui  par- 
fois approchaient  du  sublime. 

o  II  est  une  qualité  en  médecine  dont  tous  reconnaissent 
la  réalité  et  qu  il  est  cependant  bien  difficile  de  définir  : 
cette  qualité  à  laqu^le  on  a  donné  le  nom  de  tact  médical , 
et  qui  appartient  à  un  bien  petit  nombre  de  privilégiés, 
M.  Fouré  la  possédait  à  un  haut  degré. 

»  Combien  de  fois,  J'avons-nous  vu  près  d'un  malade, 
en  présence  d'un  cas  difficile,  réfléchir  profondément,  purs 
tout  à  coup  illuminé  par  une  sorte  d'intuition  divine ,  poser 
avec  précision  son  diagnostic,  et  en  déduire  comme. consé- 
quence un  traitement  admirablement  conçu. 

a  M.  Fouré  possédait  toutes  les  qualités  du  professeur  : 
sa  voix  était  douce  et  agréable ,  mais  si  faible  et  si  délicate 
qu'elle  ne  lui  permettait  pas  de  se  faire  entendre  dans 
toutes  les  parties  d'un  amphithéâtre  un  peu  vaste. 

»  Aussi,  loi*squ'il  professait,  ses  élèves  se  groupaient  et 
se  resserraient  autour  de  lui  dans  un  cercle  pressé,  afin  de 
ne  perdre  aucune  des  paroles  qui  coulaient  avec  douceur  de 
la  bouche  du  maître  vénéré.  Dans  l'hiver  de  tSS^i,  M.  Fouré 
entreprit  de  faire  aux  élèves  des  leçons  de  clinique  ;  sa 


12  jovBNA].  se  MÉmcaiiB; 

santé,  toujours  très-déhile,  et  ses  nombreuses  occupations 
ne  lui  permirent  pns  de  continuer  longtemps  ;  mais  le  peu 
de  leçons  qu'il  nous  donna  nous  fit  regretter  vivement  que 
dans  renseignement,  il  n'eut  pas  été  chargé  de  ce  cours 
préférablement  à  celui  qui  lui  avait  été  confié. 

0  M.  Fouré  avait ,  pour  les  sciences  ,  et  pour  la  science 
médicale  en  particulier,  un'  amour  si  passionné,- qu'il  tra- 
vailla jusqu'à  son  dernier  jour  avec  une  ardeur  toute  juvé* 
nile.  Avec  une  supériorité  d'esprit  qu'on  ne  retrouve  pas 
constamment  chez  les  gens  âgés ,  il  sut  toujours  apprécier 
justement  les  découvertes  modernes  et  se  maintenir  au  cou- 
rant des  sciences  médicales,  chimiques  et  naturelles. 

0  Chaque  fois  que  je  me  présentais  chez  lui,  dans  les 
dernières  années  de  sa  vie  ^  je  le  «trouvais  assis  dans  son 
grand  fauteuil ,  occupé  à  relire  les  anciens  auteurs,  qu'il 
possédait  parfaitement,  ou  les  brochures  et  les  ouvrages 
parus  i^cemment  et  qui  faisaient  quelque  bruit  dans  le 
monde  scientifique.  Quinze  jours  avant  sa  mort,  il  était 
encore  tout  occupé  à  traiter  une  grande  et  importante 
question  d'étiologie  médicale,  sur  laquelle  il  pensait  avoir 
émis  des  vues  nouvelles ,  qu'il  désirait  vivement  soumettre 
à  l'appréciation  de  l'Académie  de  Médecine. 

»  Tel  était  M.  Fouré  comme  savant.  Spirituaiiste  par 
conviction,  se  rattachant  à  la  grande  Ecole  médicale  de 
Montpellier,  et  cependant  admirate<jr  des  travaux  de  l'Ecole 
de  Paris,  dont  il  reconnaissait  toute  l'importance  et  qu'il 
prisait  à  leur  juste  valeur. 

»  Si  M.  Fouré  était  feit  pour  briller  dans  une  chaire  de 
professeur  et  dans  un  cercle  de  savant,  il  était  au  moins 
aussi  remarquable  et  aussi  distingué  dans  une  réunion 
d'amis. 

»  Lorsqu'il  se  trouvait  au  milieu  d'une  société  choisie 
et  qu'il  était  un  peu  stimulé  par  le  rang  ou  par  l'intelli^ 
gence  des  personnes  qui  l'entouraient,  il  devenait  un  cau- 
seur délicieux  et  un  narrateur  si  attachant ,  qu'il  tenait , 
pendant  une  longue  soirée ,  tout  son  auditoire  sous  le 
charme  de  ses  récits  et  des  anecdotes  variées  que  sa 
mémoire  heureuse  lui  fournissait  à  profusion ,  anecdotes 


XnjtMkL  DE  MÉBBGINE.  13 

parfois  drtantiques  ei  palpitantes  d'intérêt,  lorsqu'elles  se 

rapportaient  aux  dangers  qu*il  avait  eu  à  courir  pendant  la 

guerre  de  Saint-Domingue. 

»   Nul  ne  possédait  à  un  aussi  haut  degré  que  M.  Fouré 

ie  charme  de  la  pM^ole  et  de  la  diclion  :  expression  toujours 

admira btemefit   choisie  ci  appropriée  à   ce  qu'il  voulait 

dire. 

»  Organe  doux^  iDsiivuaat,  délicat  et   permettant  au 

causeur  de  faine  sentir  les  moindres  nuances  de  sentiment 

et  de  psœsion. 

»  Figuire  «fxpressive  et  sur  laquelle  se  peignaient  toutes 
les  impressions  que  ressentait  en  parlant  le  narrateur. 
Parole  tantôt  vive  et  spiritudle,  tantôt  caressante  et 
itisinitante^  rei^dant    avec    des  nuances    charmantes   les 

^émotkms  m  variées  parÊDts  douces,  parfois  énergiques,  qui 
se  succédaient  avec  la  rapidité  de  la  pensée  chez  M.  Fouré. 
Nu4  laie  pduvait  résistai  à  la  séduction  de  sa  parole ,  nul  ne 
pouv^â^  défendre  des  émotions  qu'il  ressen>tait  lui-snéme 
vivement.  Mais  si  M.  Fouré  réu&sissait  à  s'emparer  ainsi 
compiédement  du  cœur  et  de  l'esprit  de  ses  auditeurs,  c'est 
qu'on  sentait  que  le  causeur  aimable,  le  narrateur  spirituel 
était ,  en  même  temps,  un  être  aiuiant  et  dévoué ,  un  méde- 
cin éminemment  diaritable ,  un  homme  de  bien  en  un 
mot.  M.  Fouré  fut,  avant  tout,  un  ami  de  Thumanité  et 
àe  la  science,  et  jamais,  même  dans  un  âge  avancé,  il  ne 
refusa  d'aider  de  ses  conseils  et  de  sa  bourse  les  malheu- 
reux qui  venaient  en  foule  réclamea*  ses  soins. 

n  M.  «Foupé  se  regardait  comme  le  père  de  sa  trè§-nom- 
breusefamiUe et  s'était  fait  une  obligation  sacrée  de  veiUer 
sor  ses  parents,  de  les  diriger,  de  les  protéger.  Lorsqu'ils 
élwsent  ma!:: ries,  il  les  soignait  comme  ses  pro^pre^ -en- 
fants. Il  avait  voué,  particulièrement  à  «a  si»ur,M>^«  An- 
nette  Fouré,  et  à  son  frère  Benjamin,  le  colonel  de  la 
garde  nationale,  une  amitié  très-iendre ,  et  qui  ne  s'est 
jamais  démentie.  Jusque  dans  les  derniers -jours  de  sa  vie, 
dbaque  fois  que  sa  santé  lui  permettait  de  sortir  en  voi- 
ture, il  allait  rendre  visite  à  sa  sœur,  et  lorsque  les  iufirJiii- 
tésTie  lui  ^laissèrent  plus  la  iiiciilté<de  descendr<e.  de  ^a  voi- 


14  JODBIIAL  DB  MÉDBCniB. 

ture ,  il  se  faisait  conduire  à  ia  porte  de  sa  maison  et  s'in- 
formait de  ses  nouvelles. 

»  La  maladie  et  la  mort  de  son  frère  portèrent  à 
M.  Fouré  un  coup  dont  il  ne  s'est  jamais  relevé.  Il  s'éta- 
blit  près  de  son  lit,  à  la  campagne,  et  il  ne  le  quitta  plus. 
J'ai  assisté  à  toutes  ses  angoisses  pendunt  cette  maladies! 
longue  et  si  douloureuse,  et  Je  ne  comprenais  pas  que 
l'organisation  irèle  et  nerveuse  de  M.  Fouré  pût  résister  à 
des  émotions  si  fortes  et  surtout  si  prolongées. 

D  Ce  que  M.  Fouré  avait  surtout  d'attachant,  ce  qui  &isait 
qu'on  ne  pouvait  s'empêcher  de  l'aimer,  c'était  cette  fraîcheur 
de  sentiment,  cette  jeunesse  de  sensibilité  qu'il  a  conservée 
jusqu'à  sa  mort  ;  sensibilité  qui  le  rendait ,  du  reste,  d'une 
susceptibilité  bien  grande,  parce  que  toutes  les  impres- 
sions étaient,  pour  son  organisation  nerveuse,  d*une viva- 
cité extrême. 

»  Dans  mon  opinion  partagée,  du  reste,  par  toutes-les 
personnes  qui  l'ont  connu  intimement ,  M.  Fouré  était  \e 
cœur  le  plus  aimant,  Uami  le  plus  chaud  et  le  plus  dé- 
voué; mais,  plus  il  aimait  quelqu'un,  plus  il  devenait  sen- 
sible à  tout  ce  qui  pouvait  venir  heurter  ses  sentiments; 
un  rien  le  froissait;  le  moindre  défaut  d'égard  prenait,  à 
ses  yeux,  des  proportions  énormes  et  qui  l'affligeaient  pro- 
fondément. Ces  nuages,  du  reste,  se  dissipaient  facile- 
ment, et,  pour  peu  qu'on  lui  fît  quelques  avances  et  qu'on 
eût  avec  lui  une  explication  franche ,  il  ne  vous  en  aimait 
que  plus  tendrement.  Je  m'aperçois,  Messieurs,  que  mon 
sujet  m'emporte  bien  au-delà  des  bornes  que  je  m^étais 
prescrites,  je  vous  en  demande  pardon;  mais  vous  m'ex- 
cuserez, je  l'espère,  car  je  vous  parlais  d'un  homme  que 
j'ai  aimé  bien  tendrement,  et  que  je  considérais  comme 
un  second  père.  » 

Après  ce  discours,  M.  le  Président  dépouille  la  corres- 
pondance ,  qui  .comprend  : 

1°  Chirurgie  conservatrice  des  membres  ou  Traité  des 
priimpesM  des  moyens  d'éviter  lès  amputations  et  ks  ré- 
sections osseuses,  et  d'harmoniser  l'art  chirurgical  omc  les 


JOURNAL   DE   MÉDECINE.  15 

progris  de  la  science  de  l'homme  et  ceux  de  la  cmlisation  , 
par  Amédée  Massart. 

2®  Etude  nouvelle  sur  Ventrée  de  Voir  dans  les  veines, 
dans  les  cas  de  plaie  ou  d'opération  chirurgicale^  par  le 
même. 

L'auteur ,  membre  correspondant  de  la  Section ,  lui  fait 
hommage  de  ces  deux  brochures. 

L'ordre  du  jour  appelle  M.  Petit  à  Ta  tribune,  pour  lire 
une  observation  de  lypémanie  (i). 

Cette*lectute  faite,  les  jetons  sont  distribués  et  la  séance 
est  levée. 


Séance  du  ii  février  1856. 

PRÉSIDENCE   DE   H^   HAHOT,   PRÉSIDENT. 


Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  In  et  adopté. 

La  Section  a  reçu  de  M.  Cornaz,  docteur  en  médecine 
*et  en  chirurgie  da  KUniversrté  de  Berne ,  médecin  et  chi- 
rurgien en  chef  de  l^hôpital  Pourtalès  à  Neufchâtel;,  en 
Suisse ,  une  lettre  par  laquelle  il  demande  le  titre  de  mem- 
bre correspondant.  A  Tappui  de  sa  candidature,  M,  Cornaz 
adi*esse  à  la  Section  une  brochure  intitulée  :  Etudes  staUs- 
tiques  sur  la  fièvre  typhoïde. 

Cette  demande  est  renvoyée  au  Comité  central  de  la  So- 
ciété Académique,  conformément  au  Règlement. 

M.  Aubinais  est  appelé  à  la  tribune  et  donne  lecture  d'un 
travail- intitulé:  De  certains  phénomènes  hystérifofmes avec 
suppression  passagère  de  la  menstruation ,  pouvant  laisser 
soupçonner  à  tort  un  commencement  de  grossesse  (2). 


(1)  Voir  plus  loin ,  p.  20. 

(2)  Voir  plus  loin,  p.  33. 


16  JOUSHAL  DS  IIÉDSCIIfB. 

M.  Mabit  lui  succède  et  lit  une  Etude  sur  le$  direri  effets 
physiologiques  du  café ,  selon  ses  différents  modes  df  pré- 
paration^ communiquée  à  la  Société  par  M.  Offre! ,  phar- 
macien de  Nantes. 

En  1849,  M.  Offret  cul  occasion,  pour  satisfaire  au  caprice 
de  Tun  de  ses  clients,  de  préparer  de  l'extrait  aqueux  de  café. 
Jugeant  inutile  de  perdre  la  partie  aromatique  et  Tbaile 
essentielle  concrète  de  cette  substance,  il  eut  recours  à  la  dis- 
tillation alcoolique  du  café  torréfié  jusqu'à  la  couleur  de  bois 
de  noyer  foncé ,  et  soumit  le  résidu  de  cette  opération  préa- 
lable à  lepuisement  par  Teau  ;  il  obtint  ainsi,  d'une  part, 
un  produit  d'un  arôme  très-agréable,  et  de  l'autre,  l'extrait 
qu'on  lui  demandait. 

La  plus  grande  partie  de  cet  extrait  aqueux  lui  étant 
restée  entre  les  mains,  il  ne  crut  pouvoir  mieux  faire  que 
de  l'utiliser,  en  le  prenant  chaque  matin  à  la  dose  de  0^75 
à  U  dans  de  l'eau,  ave^^.  addition  de  lait,  au  lieu  et  place 
de  l'infusion  usitée  généralement.  Mais ,  après  quinze  jours 
d'usage  de  cette  préparation,  déjà  M.  Offret  éprouvait  quel- 
ques troubles  de  la  vue  et  une  constriction  légère  a  la 
gorge;  une  seconde  quinzaine  ne  s'était  pas  écoulée,  qu'il 
ressentait  la  plupart  des  symptômes  produits  })ar  les  nar- 
cotiques :  dilatation  notable  de  la* pupille,  voix  rauque , 
douleur  occipitjile,  somnolence,  vertiges,  troubles  passa- 
gers de  rinteliigence.  Une  saignée,  l'application  de  siua- 
pismes,  firent  cesser  ces  accidents,  dont  on  était  encore 
loin  de  soupçonner  la  cause,  et  que  les  médecins  consultés 
par  lui  avaient  pensé  tout  d'abord  être  dus,  soit  à  l'ingestion 
de  quelque  narcotique ,  soH  a  l'abus  des  spiritueux.  Depuis 
lors ,  M.  Offret  avait  complètement  renoncé  au  café ,  et  de 
pareils  symptômes  ne  s  étaient  pas  reproduits  cliez  lui  ;  il 
y  a  environ  trois  mois  qu'il  se  remit  à  lusage  de  cette  li- 
queur,  dans  je  but  de  mettra  à  profit  ses  vertus  anti-hypao- 
Uques  et  de  suflire  à  des  veilles  nécessitées  par  ses  travaux 
momentanément  exagérés.  Il  put,  cette  fois,  constater  et 
analyser  en  parfaite  connaissance  de  cause  les  effets  divers 
produits  sur  son  économie  par  le  cale,  Ain^  préparait-il 
lui-même  avec  tout  le  soin  désirable  une  infusion  d^  café 


H 


légèr^^mçQit,  tqri;4&é;  (ici,  ifi.  Offrit  4o^l\^  |e^  «J^tfils  de 
ce^e  prépaiTalion ,  plus  djéljiç£^te  qu'cM^  aç  lepep^^  çommu- 
néçnçn,t)  il  çp  Qbienait  l'effçt  at,^adjM ,  l'éveil  du  cerveai}  ej^ 
la  ^cviUé  d^  veiller  ^nojs;  fa),^ue,  fofl;  ayant  d§QS  la  ÇLyi^^ 
Fai9ai^-U,  «VU  contraire,  avec  inteutiw  e^  copiipe  terçiie. 
de  ççmp^ra^spn,  u$age  (;i'uDe  décpiçtioiii  de.  Wdvc.  (i^çafé  , 
aussi^^t  II  vojait  r^pi^raître  la,  séri^de3$yn^^e$.de^fkr- 
cotis^Qoe  éïxçfifié^  pl;U§  haMt,  syi^ptOçiies,  q^i,  sp  di^$jp%iç;)t 
facil^m^çpt  sp^  riiifluencfe  de  Vingostion  d'une  ^ni^iop  4fr 

D^  çeç  expériences,  per^nij^elleç  et  d^  qi^e|que$  ^v^f^s 
Ea^ils  doip^i  il  a»  ^lé  $pjç^  91^,  téinpi^,  I^.  Olfi;çt  se  crpit  ai^^ori^, 
à  conclure  qjAç ,  ^t^  Iç  çaS? ,  çgeixi^ep^  4^^  prijij^^si 
euli^içei?(ïwt  optf^ûsés  p^r  leurs,  prop^iç^és^,  Vw  rés^^nt 
i»sf^  Ifos;  par^ie^  volatile^  dç  1^  ff;m^  sQucai^ç.  ^  yf)  (tegré 
vouli^  |4e  torréfactions  et  dont  s'^mpa^e  ripfu$joi|  ^queii,^^ 
cQftyw?,!plew?«it  préparé^,  Va.utr^  ^meur^pt  d^ns  leiwçç, 
de  ce^e  in&iS|i|Q^  on  d^v^  k  gvoji^^  içritlK^f^  ^  un  d^gqé  ^M*. 
périei^r,  s^  djéye\6ppant  pey^^-^trq  ^n  p^fftie  aux  d^pe^^s  ^e^ 
re;iS!çnf5^  aromatique  et  d^  Tbi^if^  es^ptiftlie  çon^rètç.  fit, 
annihilé,  lui-même  p^r  u^  e;^cè3  d^  cha^çur  qui  p^^t  ali^ 
ju^iji'à  pr«^vijfe  la.  ca^bojii^ation  çopwe  tçrn?e  Mltinp^.  A 
ce.4ern,ijçr  pri^îcipp,  çaféioe  oi^  aiA^re^  prq^ui^  inimédJi^, 
ajPawçtielR<^raie^t  l^^  veçius  véw»eiv?es  et  nîircoijiqu^si  ;  s^\^ 
prç^ji^,  1^  yertus  ej^ci^^t^s  ^t  toniques. 

t'aut^qif  cpftdamne^  coro^^.  ccmj^Jij^ph  pratiquie  4e  siOft 
tr^v^il,  Ymsi9h  du  n^a^ç  ^^  café  SjC^u^  (Jurfq^ç  forWje  q,ve  cç 
spiV  II  oe  soiraM  p^  éloigné  d'aHribuer  c^rl^n?  ^flfqfe  fi^-. 
cheux  occasionnés  par  rus^g^  i^^pp^j^ré  dvi  «î^é  n(vr,  eff^î^ 
analog^\^  ^  cçux  Wpduit^  p^r  Vap.us  des  spiritueHX  et 
des.  parçpILiqi^  ,  à  la  pré^Éjpce.  di'w  wincipiot  particulier, 
c^inç.  p^  w^re,  SM^cqpUble,  aprè§  pi^  ^^^  ^XiçUar 
tiop  p^»4(vlabte,  à  rinsi^r  d^  pçiaçéi?,  ^  dét^çn^inç^  \\q 
ét^t  çp^estif  des  organes  çérébR^w  ?t  n^êiiRç,  r^poplexijç. 
Enfin,  4aï^,  r^piplpi  4m  café  çojWWiÇ  çpiA^r^-ppi^u  4^ 
Vopium,  il  faudrait,  selon  Tauteur,  avoir  bie^  s^^p  dç  i;i^'a4- 
«W^pr  ^  c^  iiSve  q\^  Ti^îiwipn  de  crfé  cpuw««iiriewent 
V^wAf^i  et  ^  dp§fi3  wftçlérée?,  ^^m  9^m  4>gw^yer  le. 
'^«'W  3e  Jffppose  4e  çpiftMtrç. 

2 


18  JOmiÀL  BB  VÉBBCHIB. 

M.  Offret  termine  son  intéressante  communication  en 
énumérant  les  divers  produits  mis  par  lui  à  la  disposition 
de  la  Société  et  qu'il  a  extraits  du  café  vert  non  torréfié , 
du  café  légèrement  torréfié,  du  café  torréfié  outre- mesure, 
enfin  du  café  carbonisé.  Ces  produits  sont  des  eaux  dis- 
tillées^ des  alcools  distillés,  des  extraits  aqueux  et  un  sirop 
hydro- alcoolique.  Ces  faits  encore  entourés  de  tant  d'obs- 
curité, lui  paraissent  assez  importants  au  point  de  vue  de  la 
chimie  organique,  de  l'hygiène  et  de  la  thérapeutique, 
attendu  l'usage  de  plus  en  plus  répandu  de  cette  précieuse 
substance  pour  mériter  de  la  part  d'une  Société  médicale 
une  attention  sérieuse  et  l'institution  d'expériences  qui 
seraient  soumises  à  son  contrôle  et  à  son  examen. 

Cette  communication  est  suivie  des  réflexions  suivantes  : 
ilf.  Pihan-Dufeillay  trouve  fort  intéressants  les  faits  qui 
viennent  d'être  exposés;  M*  Ofiret  n'a  pas,  il  est  vrai,  la 
prétention  d'avoir  découvert  dans  le  café  quelque  principe 
immédiat  nouveau  •  mais  il  a  le  mérite  d'avoir  appelé  l'at- 
tention, sur  les  effets  narcotiques  de  quelques-uns  des 
principes  déjà  connus ,  effets  qu'on  ne  saurait  attribuer 
entièrement  à  une  idiosyncrasie  spéciale.  Ainsi  ,  déjà 
Christison  avait  reconnu  a  la  caféine  et  à  la  théine  prises 
à  doses  élevées  des  propriétés  toxiques  et  stupéfiantes.  Les 
divers  modes  de  préparation  du  café  sont  donc  loin  d'être 
une  chose  indifférente  dans  la  pratique  ;  et,  dans  remploi 
de  cette  substance  comme  antidote  de  l'opium ,  par  exem- 
ple ,  on  pourrait  être  exposé  à  ajouter  un  narcotique  à  un 
narcotique ,  si  le  café  avait  été  trop  torréfié  ou  s'il  étail 
administré  à  doses  trop  considérables. 

il  propose  d'adresser  des  remerciements  à  l'auteur. 

M.  Âtabii  tient  de  marins  avec  lesquels  il  a  eu  occasion 
de  s'entretenir  sur  ce  sujet,  qiie  ceux-ci  connaissent  par- 
fiiitement  ces  propriétés  opposées  du  café ,  et  les  mettent 
souvent  à  profit  en  torréfiant  modérément  ou  avec  excès 
cette  graine  suivant  qu'ils  désirent  obtenir  un  état  de  veille 
ou  de  sommeil. 

M.  Atdrinais^  dans  un  voyage  qu'il  fit  en  Allemagne, 
remarqua  avec  un  certain  étonnement  que  l'on  servait  dans 
les  tavernes  deux  sortes  de  café^  au  gré  des  consomma- 


JOtniHÀL  DE  HÉlttCniB,  19 

teurs  :  Pun  froid  était  apporté  dans  des  carafes  ;  l'autre 
chaud  était  pris  comme  il  Test  chez  nous.  Il  apprit  d'un 
français  que  la  première  sorte  très-concentrée  et  à  laquelle 
on  ajoutait  de*  Teau-de-vie,  possédait  des  propriétés  stu- 
péfiantes et  était  destinée  aux  personnes  qui  ne  fumaient 
point. 

M,  Deluen  se  rappelle  avoir  pris  assez  longtemps  du 
café  préparé  par  décoction  à  son  insu  ;  n'en  obtenant  pas 
FefFet  attendu  et  fatigué  de  sa  saveur  amère,  il  prit  le  parti 
de  le  préparer  lui-même  par  infusion  au  moyen  d'une 
cafetière  à  vapeur.  Ce  dernier  café,  très-riche  en  huile-essen- 
tielle concrète,  lui  fit  éprouver  immédiatement  des  effets 
excitants  analogues,  sansr  être  absolument  les  mêmes,  à 
ceux  ressentis  par  M.  Offret.  On  lui  a  raconté  que  deux 
demoiselles,  ayant  pris  dans  une  partie  de  campagne,  du 
café  préparé  par  décoction,  éprouvèrent  après  cette  inges- 
tion des  crampes  et  des  étourdissements.  Tous  ces  faits 
tendraient  donc  à  établir  l'existence  de  propriétés  tout 
opposées  dans  la  décoction  et  Tinfusion  de  café. 

M.  le  Président,  conformément  au  désir  exprimé  par 
M.  Offret,  nomme  une  Commission,  composée  de  MM. 
Pihan-Dufeillay ,  Cormerais  et  Georges  ,  lesquels  auront 
à  contrôler  par  de  nouvelles  expériences  les  assertions 
énoncées  dans  le  mémoire  de  l'auteur.  Des  remerciements 
lui  seront  en  outre  adressés  pour  son  intéressante  com- 
munication. 

L'ordre  du  jour  appelle  M.  Le  Hoiix  à  lire  une  observa- 
tion de  tumeur  hydatiqv£  abdominale  (1). 

M.  Malherbe  cite,  à  cette  occasion,  un  fait  dont  il  a  été 
témoin  chez  un  malade  ayant  une  tumeur  dans  la  région 
sous-diaphragmatique  au  bord  postérieur  du  foie.  Cette 
tumeur,  due  ft  la  présence  d'hydatides,  finit  par  se  frayer  une 
route  dans  le  thorax,  et  après  une  expectoration  abondante 
d*un  liquide  d'abord  sanguinolent,  purs  purulent,  le  malade 
rendit  par  les  voies  aériennes,  dans  l'espace  de  deux  jours, 


(1)  Voir  plus  loin,  p.  44. 


M  JMBIM*  n 

pkMs  de  i20Q  hydatidas  doat  la  ^satut  Mmmi  «aire  eelk 
d'un  nayaa  de  eeriae  et  ceUe  d'un  œii£de  poule.  L'applû»- 
Uoo  de  caiapkemes  préparés  avee  de  l'eau  salée  pcov^^ 
vonpjait  ÎHHnédiatamtDl  Faspulsion  de  oes.  entoaoakes.  La 
makdia  succomba  plus  tard  à  uM  affectioo  de»  la  aoloiMie 
vertébrale  avec  tuberculisatîon  pulmonaire. 

Le  SêOPitHre^ 


QBSEBfrjTION  de  lypëmanie,  par  N.  k 
doctetar  Petît^  médecin  de  l^asik  des  aHiHé^  de 
Saint-Jacques. 


Louis  W . .  •  •  est  âgé  de.  34  ans,  marié  depvU  i&  mois, 
protestant  de  la  confession  d'Ausbourg,  né  à  Sofi^e^rock 
(Prusse),  donûcilié  à  Metz.  U  a  été  Longtemps  commis- 
voyageur  ;  depuis  son  mariage,  il  dirigeait  pouc  h^  compte 
de  son  frère  une  {abri()ue  importante.  Sans  être  didué  é'une 
grande  intelligence,,  M,  W«..  a  néanmoins  toutes  lesca«> 
pacités  nécessaires  pour  djrigejp  coavenablement  um  «iai$QO 
de  commerce  considérable.  Il  est  passionné  pour  la  musi()ue^ 
pianiste  babile.  Son  caractère  est  très  gai,  sa  moralité  sans 
reproche,  ses  rapportssocisux excellents^ 

U  est  d'un  temipéramenit  lympbatico^sanguin  »  trèa-ro* 
buste.  Sa  santé  a  toujours  été  bonne. 

Le  frère  de  M.  W  • .  •  beaucoup  plus  ftgé  que  lui,  doué 
d'une  intelligence  supérieure^  ayant  de  bonne  heure  acquis 


jovftNAl  BB  isÉMao^.  24 

à  iMetz  «inelMHe'posilion  oommerciale,  Louis  "fat  très-^jeun«i 
enddre  placé  Aons  la  même  maison  en  qualité  de  commis. 
f^r  stiite ,  la  déférence  d'infériettr  à  supérieur,  vint  domi- 
ner Tifithnllé  fraternelle,  et  l'atné  a  conservé  un  ^aiid  as- 
oenlIaM  «ur'l'eaprit  du  plus  jeune. 

^Lh  vie  active  de  oommts^voyageur  remplftcéie  par  une 
pedilion  dédeutah^e,  la  grandie  resporisafaîlité  qui  est  venue 
reposer  sur  lui ,  {Miralssetft  anroir  influé  sur  le  moral  de 
M.  W. .  •  Ses  amis  remarquaient  depuis  jAusieurs  mois  cer- 
txines  bizarreries,  plus  de  laisser-aller  dans  les  aflhires , 
tnoinfi  de  fermeté  dans  ses  opinions,  41  adoptaH  toujours 
avengléitoent  4'avis  de  sou  frère. 

Loote  W. .  •  était  en  mésintelligence  avecle^mécanicien 
côntre-fkiaftfe  ,  le  soupçonnant  'non  sans  motif  de  soigner 
beaiOGdup  «plus  ses  propres  intérêts  que  ceux  de  la  fiibrique. 

Les  choses  en  étaient  là,  -quand  le  29  juillet  184^6 ,  un 
violent  incendie  éclalte  dans  la  'partie  de  l'établissement 
voisitie  du  logement  de  SI.  W. . .  dont  l'appartement,  en 
quelques  «minutes,  est  envahi  par  les  flammes.  Sa  femme 
nllaitait  une  petite  'fille  de  trois  mois  ;  tous  ses  soins  se 
portèrerrt  sur  ces  deux  objets  de  sa  tendresse;  à  peine  il  a 
placé  tla  mère  évanouie  hors  de  la  portée  du  fléau.,  qu'il 
se  «précipite  de  nouveau  dans  le  bâtiment  embrasé,  sort 
avec  son  enfant ,  et  l'édiflce  s'abîme.  Mais  l'émotion  a  été 
trop  forte  ;  M.  W. . ..,  dont  les  forces  physiques  et  morales 
sont  épuisées.,  demeure  étranger  à  tout  ce  qui  se  passe 
autour  de  hii^  ne  s'inquiète  plus  des, progrès  de  l'incendie. 

Resté  cependant  sur  les  lieux  pour  présider  à  la  recons- 
truction de  l'usine ,  il  est  accablé  de  sinistres  îfppré- 
hensions;  la  figure  du  contre-maître  lui  apparaît  sans. cesse 
comme  un  cauchemar  dont  rien  ne  peut  le  délivrer ,  il 
redoute  une  ruine  complète,  il  voit  les  ouvriers^  dont  les 
travaux  sont'forcémerit  suspendus,  coalisés  contre  lui  et 
maîtres  de  ia  fiibrique  ;  il  s'imagine  qu'on  rejettera  sur  lui 
toute  la  responsabilité  du  funeste  accident.  Ha  conscience 
du  ëhangement  opéré  dans  son  intelligence,  va  trouver 
son  frère,  lui  fait  part  de  ses  craintes ,  dit  qu'il  est  incapa- 
ble'de  gérer  f>lus  longtïemps  les  affaires  >  se  jihint  d'être 


22  JOaUfAL  BE  MÉDSCINE. 

malade,  maie  refuse  de  consulter  un  médecin.  Le  frère 
espérant  voir  se  dissiper  cet  état  qu'il  attribue  à  Témo- 
tion  encore  récente,  se  borne  à  le  raisonner  un  peu^  et 
Louis  repart  pour  la  campagne.  Cependant,  les  mêmes  idées 
persistent  avec  plus  de  force,  et  M.  W. . .  prenant  la  ré^- 
iution  de  se  détruire,  se  précipite  d'une  fenêtre  du  i^'  étage 
dans  un  canal  très-peu  profond  conduisant  Teau  à  un  mou* 
lin.  C'était  vers  le  25  septembre  ;  il  n  éprouva  aucun  mal 
dans  sa  chute,  et  loin  d'être  submergé,  il  demeura  ac- 
croupi dans  leau  qui  lui  atteignait  à  peine  à  la  ceinture. 
Son  absence  fut  bientôt  remarquée ,  mais  on  visita  tout 
avaiit  de  se  douter  du  lieu  où  il  était;  le  hasard  seul  le  fit 
découvrir  après  un  assez  long  intervalle.  Depuis  ce  moment, 
M.  W . .  .  refuse  toute  nourriture ,  il  répond  rarement  aux 
questions  qu'on  lui  adresse  et  ses  paroles  se  rapportent 
aux  idées  qui  le  dominent  exclusivement. 

Un  médecin  appelé  près  de  lui  constate  le  désordre  des 
idées  et  croit  remarquer  des  symptômes  de  paralysie.  On  le 
ramène  de  force  en  ville;  il  est  saigné  sans  raodiiication 
du  délire,  seulement  on  croit  remarquer  qu'il  tremble  moins 
et   marche  mieux.  Il  persiste  a  ne  point  vouloir  manger. 

Le  28,  il  est  conduit  à  Maréviile.  Là,  il  fuut  le  retirer  de 
la  voiture  et  le  porter  jusqu'à  la  chambre  qui  lui  est  des- 
tinée; il  se  laisse  porter ,  déshabiller ,  coucher  sans  faire  de 
résistance,  mais  aussi  sans  faire  aucun  effort. 

Le  3,  à  là  visite  du  matin,  il  parait  en  proie  à  une  tristesse 
profonde ,  on  ne  peut  obtenir  de  lui  le  moindre  mot. 
M.  Archambault,  médecin  en  chef,  l'envoie  au  bain,  expri- 
mant le  regret  de  le  traiter  commt» un  fou.  A  la  première  aflu- 
sion,  il  promet  de  manger  et  prend  seulement  un  peu  de  vin 
dans  la  journée. 

4  octobre.  —  Même  état.  Placé  dans  le  bain ,  il  refuse 
de  parler;  deux  affusions  lui  délient  un  peu  la  langue,  il 
promet  de  manger  et  de  se  servir  de  ses  jambes.  En  effet, 
il  mange  seul  dans  la  journée.  (2  bains  de  2  heures  tous  les 
jours.) 

5  octobre.  —  H.  W... .  ne  répond  à  aucune  question^ 


JOUBUàL  de  MÉSfiCIHB.  23 

mais  se  promène  avec  le  médecin  qui  le  conduit  devant 
d'autres  malades,  lui  explique  leur  délire  et  chaîne  un  mo- 
nomaiiiaque  gai  et  spirituel  de  le  dérider.  M.  W. . .  parait 
prendre  quelque  part  à  ce  qui  lui  est  dit,  lève  les  yeux  et 
semble  étonné. 

6  oclobre —  M.  W. . .  n*avant  pas  voulu  manger,  reçoit 
uueaifusion  et  promet  de  parler  et  de  manger;  mais  dès 
qu'il  est  sorti  du  bain ,  il  retombe  dans  le  même  état  de 
résistance  passive.  Même  chose  a  lieu  le  7;  au  bain^  la 
menace  de  la  douche  lui  fait  promettre  d'écrire  à  sa  femme, 
mais  une  fois  sorti,  on  ne  peut  rien  obtenir* 

8  octobre.  -^  Il  promet  de  nouveau  et  à  plusieurs  re-r 
prises ,  d'écrire  à  sa  femme;  sorti  du  baip,  il  a  pris  le  papier 
et  la  plume ,  mais  sans  tracer  un  mot  :  la  sœur  de  son  quar* 
tier  l'exhortant  à  ne  pas  laisser  sa  famille  dans  l'inquiétude, 
il  est  sorti  de  son  apathie  ordinaire.  Ta  violemment  repous- 
sée, disant  qu'il  ne  voulait  pas  écrire  et  que  rien  ne  pou- 
vait  l'y  contraindre.  A  la  suite  de  ce  fait^  il  reçoit  une 
affusion  plus  forte  que  les  précédentes  ;  il  promet  alors  de 
nouveau,  mais,  ajoute-t-il,  je  ne  sais  ce   que  je  pourrai 
écrire ,  car  il  y  a  bien  longtemps  que  ma  tête  est  perdue» 
Il  sort  du  bain ,  et  n'écrit  pas;  le  soir,  il  refuse  de  dîner. 
Les  menaces  ne  suffisant  plus,  il  faut  avoir  recours  à  la 
violence  pour  lui  faire  avaler  quelques  cuillerées  de  potage. 
Il  reste  toujours  immobile.  S'il  est  couché,  il  faut  l'habiller; 
debout,  il  faut  rasseoir;  assis>  le  lever.  Depuis  ce  jour, 
néanmoins,  il  mange  seul. 

25  octobre.  —  M.  W...  parle  plus  volontiers,  mais 
refuse  toujours  d'écrire;  il  croit  toute  sa  famille  sous 
les  verroux ,  à  Maréville  ;  il  a  demandé  plusieurs  fois  à 
visiter  la  maison  pour  s'en  assurer.  La  veille,  il  a  sali  son 
pantalon,  bien  qu'il  n'eût  pas  de  dévoiement.  Il  se  plaint 
aujourd'hui  d'éprouver  un  frisson,  cependant  le  pouls  paraît 
normal. 

30  octobre.  —  M.  W. . .  ne  cesse  de  réitérer  ses  ins- 
tances pour  voir  sa  femme  et  ses  parents  que  l'on  tient 
enfermés,  à  ce  qu'il  dit.  Sur  sa  demande,  on  le  conduit 
dans  tout  le  quartier  des  hommes  >  il  refuse  de  voir  le 


24  jotMii  HiB  ioâti^tifitË. 

quafrtîer  des  fënnfmes:  a  C*e^,  dit-il,  înutîlè;  on  |)éfàtbiett 
cachfT  sa  femme  de  manière  à  ce  qu'il  ne  ta  retrotfve  p^s,  n 
Il  refcse  d'écrire  à  Metz  pour  s'assurer  de  la  vérité. 
(Continuation  des  bains.) 

3  novembre.  —  Il  croit  reconnaître  dans  dfeS  pen^on- 
mit^  (te  la  maiîâofft  plusieurs  de  ses  amis  intimes  :  chu  jetiDe 
lypémaïAaqùe  qtfi  fie  parle  >pas ,  l'ôcctipe  stirtofrt  ;  il  les 
appefle  par  fés  iicfm^  qo*ll  lefur  ^pp6se  ;  te^  accuse  de  te 
tromper,  lorsqu'ils  ne  lui  répdtidënt  pas  ; 'dëfiijc  pefriUs  -Midts 
ÉàtH  ses  tevéux. 

12  novembre.  -^  Il  fe'esi  enfin  décidé  â  écrire  â  îson 
médedin;  il  Itfi  dit  qtre  sa  santé  s'eM  ahfnélioré^ ,  le  ][jrie 
de  le  •réclamer  et  Itii  deihande  des  'ftoàvélles  de  sa  fa^itte, 
qu'il  pèrsisfte  à  croire  enfermée  à  Martévillè ,  malgré  les  dé- 
négatioife  de  M.  ArchamIbauH. 

(Prescription  d'unie  promenade  de  deux  Déùes  chèque 
jotïr.) 

20  novdnrfbre.  —  La  physioitomiie  de  n.  W . . .  est  jitas 
ouverte ,  il  cause  plus  volontiers  ;  il  écrit  à  son  frère  fiùe 
lettre  anaflogue  à  celle  qu'il  a  adressée  à  ^n  médecin,  mais 
comrhe  il  à  paru  draîrtdre  qu'elle  ne  parvînt  pas,  on  1-en- 
vôfe,  ôcdôriipagné  de  Son  domesliqtfe ,  la  porter  hi-toème 
a  Nàricy.  A  la  porte  de  la  ville,  Il  rencoritrè  un  de  ses 
ami^  eh  qtii  il  paraît  aVdir  ude  grande  confiance  'et  la  lui 
rértîët. 

24  nôVemfbre.  —  *Le  frëre  a  répondu ,  mais  M.  W. . .  ne 
paraît  pas  persuadé. 

Tl  se  figure  que  son  voisin  de  chambre  et  compagnon 
d'infortune  dont  Faccoutrement  et  là  figure  soht  passable- 
ment excentriques ,  le  fajt  toutes  les  nuits  desceridi^e  dans 
d'immenses  souterrains,  Tarmed'un  poignard  et  rdblige  à 
égorger  dés  milliers  de  personnes. 

30  novembre.  —  Un  piano  est  placé  dans  la  chambre  de 
M.  W.  4  .<,  mais  il  s'en  occupe  peu. 

5  jianVier  1847.  —  Aucun  obartgômeiït  notable  n'est 
jitrVëtJit  pendant  cette^pér iode  de  plus  d*un 'mois;  cependiint^ 
h  physionomie  e^t  tin  peu  moins  sombre,  tes  traits  expri- 


iOfvà^iL  *hE  'ÉÉbtecfniË.  2S 

ment  'Moins  de  terreur.  (Les  proMenades  sdflt  interrom- 
pues seulement  les  jours  où  le  tenrvps  est  trop  mauvais.) 

M.  W . . .  «pairie  moins  de  ses  idées  délirantes  son  main- 
tien e&t  meilleur. 

Il  a  écrit  à  ses  amis  quelques  lettres  assez  sensées  ;  lïiais 
il  cfott  encore  totts  les  siens  victimes  de  la  coalition  de  ses 
ouvriers. 

Les  tjabits  qu'on  lui  envoie,  Ont  été  volés;  H  è«i  Uh 
banqueroutier,  un  voleur  ,  un  assassin ,  Il  a  fait  tok*t  àplus 
de  ceiH  mille  personnes ,  H  doit  être  guillOtiYié.  La  justice 
n'ayant  pu  découvrir  sa  retraite  Ta  condamné  par  con- 

H.  W. . .  persistait  à  ne  point  s'occuper,  l'interne  pré- 
te&laM  feflors  le  désir  de  prendre  des  leçons  de  musique, 
vint  'passer  tous  les  jours  deux  heures  avec  lui.  M.  W. . . 
refusa  d'dbord  asseà  opiniàlrement  de  faîire  aucune  démofts- 
ttatîoin  ;  néanmoins^  il  céda  a^u'x  instances  réitérées,  d'abord 
avec  un  peu  d'humeur,  comme  psÉr  contrainte;  pèo-à-pëu, 
il  s'y^préta  plus  volontiers,  puis  éniin  cîn  vit  renaître  le 
goût  dé  la  musique. 

Tiant  qn'oti  Toccupe  de  sujets  étrahgers  à  son  déHre ,  sa 
conversation  est  agréable  et  très-sehsée  ;  mais  qu'on  le 
laisse  revenir  à  ses  idées  fixes,  ce  sont  des  divagations 
sans  fin;  alors  les  mêmes  terreurs  reparaissent  d'aularit 
plus  vives  qu'on  le  laisse  plus  longtemps  se  livrer  à  ées 
chimères. 

Ce  jour  là ,  5  janvier  ,  l'interne  lui  parle  d^un  opéra 
qui  doit  èti^e  représenté  à  Nancy  le  soir  môme  et  qu^îl  se 
propose  d'aller  enltendre;  on  en  vante  les  beautés,  et  après 
un  moment  de  conversation,  M.  W . . .  laisse  écbtipper 
cette  exclamation  :  «  Vous  êtes  'bien  heureux  de  pduvoir 
entendre  d'tjussi  belle  musique.  »  cdhne  tieift  qu'ià  vous-, 
répond  Tinterne ,  d'y  prendre  part,  et  pour  peu  que  voUs 
le  désiriez,  M.  le  médecin  en  chef  vdus  le  përihéttHi.  » 

Après  quelques  hésitations,  <fl  accepte.  On  dontre  à 
M.  W..'.  ses  habits  les  plus  propres,  mais  alors*,  il  ne 
veut  plus;  c'est  une  dépense  qu'il  nc'peUt  pas  se  (permettre, 
étant  TUiné;  et  puis,  il  n'est  pas  digne  d'aller  tto  spectucle, 


26  JOUBNAL  B£  VÉDBGHIB. 

il  esl  un  trop  ^rand  criminel.  L*inlerne  lui  reproche  vive- 
ment sa  mobilité,  ne  lui  laisse  aucun  répit  qu'il  ne  soit 
habillé,  mais  aloi*s  il  ne  veut  plus  sortir  du  quartier.  «  Vous 
êtes  un  mauvais  plaisant,  lui  dit  Tinterne^  vous  vous  riez 
de  ma  complaisance ,  vous  avez  voulu  aller  au  spectacle , 
j'en  ait  dit  la  demande  au  birocleur  et  au  médecin  en  chef 
qui  se  sont  empressés  d*y  accéder  :  toutes  les  mesures  né- 
cessaires ont  été  prises.  Eh  bien,  maintenant,  vousy  viendrez 
de  force  ou  de  *^ré;  s'il  le  faut,  je  vous  y  ferai  porter  et 
ce  sera  mie  curieuse  comédie  que  vous  donnerez  aux  spec- 
tateurs. » 

Après  bien  des  résistances,  nous  nous  mettons  euiin  en 
route.  Il  divague  tant  que  dure  le  chemin,  s'arrèie  à 
chaque  instant,  et  supplie  quon  le  laisse  retourner;  les 
gendarmes  vont  larrêler ,  les  ouvriers  de  Nancy  vont  s'a- 
meuter contre  lui;  dans  la  salle,  ou  le  sifflera,  on  lui 
criera  :  «  En  prison,  le  voleur!...  »  Tous  les  grillages  en  fer 
qu'il  rcncor)tre  ont  été  placés  sur  son  chemin  pour  lui  faire 
honte.  (Je  dois  faire  observer  que  c'est  une  tréGlerie  et 
une  fabrique  de  pointes  de  Paris  que  M.  W...  dirigeait.) 

Arrivé  à  Nancy ,  il  demande  à  passer  la  soirée  chez  un 
de  ses  amis;  mais  tout  est  inutile ,  il  faut  qu'il  aille  au  spec- 
tacle. Le  dîner  amène  une  diversion  ;  depuis  longtemps  il 
n'a  que  la  nourriture  monotone  de  l'asile  ;  il  parait 
satisfait  et  cause  raisonnablement  tout  le  temps  du  repas. 

Se  résignant  enfin  à  entrer  au  spectacle,  il  implore  pour 
dernière  grâce  d'être  placé  dans  une  loge  grillée  d'où  l'on 
ne  pourra  le  découvrir;  mais  son  compagnon  est  inflexible, 
il  ira  à  l'orchestre  d'où  il  pourra  être  vu  et  surtout  voir  con- 
venablement. Il  ne  fait  pas  de  résistance,  mais  il  s'empare 
d'un  coin  et  s'y  tapit  obstinément.  Depuis  lors,  jusqu'à  la 
fin  de  la  représentation,  il  n'a  plus  laissé  échapper  la  moin- 
dre folie ,  il  a  causé  avec  plusieurs  personnes  placées  au- 
près de  lui,  qui  n'ont  pu  se  douter  de  l'état  mental  de  leur 
voisin; seulement  il  s'est  obstinément  refusé  à  sortir  pendant 
les  entr'actes,  bien  que  la  salle  fut  encombrée  et  qu'il  y  fit 
une  chaleur  accablante. 

La  représentation  lui  a  fait  grand  plaisir ,  et  lorsqu'à  la 


JOUBNÀL  DE   MÉDBCINB.  27 

fin  ,  on  lui  demaDde  pourquoi  ouvriers  et  gendarmes  Tant 
laissé  parfaitement  tranquille  «  il  ne  peut  s'empêcher  de 
sovirire  et  ne  répond  pas. 

Le  lendemain,  6  janvier,  il  est  content,  mais  ne  veut  pas 
recommencer,  parce  qu'il  en  coûte  trop.  Du  reste ,  il  se 
croit  toujours  criininel ,  banqueroutier  et  doit  amener  la 
famine  et  la  peste  dans  tout  le  pays. 

Le  9  février  ,  pour  combattre  ses  idées  de  ruine,  M.  Ar- 
chambault  exige  que  M.  W . . .  demande  à  son  frère  de  l'ar- 
gent pour  ses  plaisirs  ;  la  lettre  est  f^iite  et  envoyée. 

12  février.  -^  La  réponse  du  frère  contient  un  bon  dont 
M..  W  .  .  •  va  recevoir  le  montant. 

16  février. —  J'accompagne  M.  W...  à  Nancy.  Pendant 
\a  voûte,  il  ne  cesse  de  me  reprocher  de  lui  faire  dépenser 
trop  d'argent  ;  il  se  croit  encore  ruiné  et  coupable  ;  il  s'of- 
fusque toujours  de  chaque  morceau  de  fil  de  fer  qu'il  ren- 
contre. Après  quelques  hésitations  il  se  décide  à  entrer  dans 
un  café  :  là ,  il  cause  très-sensément   avec  des  personnes 
qu'il   voit  pour  la  première  fois.  11  aperçoit ,  à  l'autre  ex- 
trénf)ité  de  la  salle  ,  un  de  ses  amis  qu'il  n'a  pas  vu  depuis 
fort  longtemps  et  témoigne  un  vif  désir  do  lui  parler.  «  Je  le 
veux  bien,  lui  dis-je,  mais  à  la  condition  expresse  que  vous 
ne  lui  direz  pas  de  folies.  »  11  s'empresse  de  promettre,  et 
l'entrevue  a  lieu.  iM.  S...  ignorant  le  malheur  arrivé  à  son 
ami ,  lui  fait  grand  nombre  de  questions  sur  sa  famille  et  sur 
ses  affaires.  M.  W...  répond  parfaitement  à  cesdemuiides,  qui 
cependant  se  rattachent  toutes  a  son  déhre.  Les  deux  inti- 
mes s'entrt'tiennent  fort  longuement,  fort  gaiment,  et  lors- 
qu'enfin  M.  W...  dit  que  depuis  longtemps  il  est  loin  de  sa 
famille,  qu'il  est  séquestré  parce  qu'il  est  fou,  M.  S...  refuse 
d'y  croire  et  ne  se  rend  que  sur  l'affirmation  générale  de 
leurs  amis  communs. 

Le  moment  du  retour  venu,  M.  W...  paie  spontanément 
la  dépense,  témoigne  le  regret  de  partir  aussitôt  et  se  pro^ 
met  de  reyeïiir  le  plus  tôt  possible. 

Dès  cet  instant,  M.  W...  n'a  plus  donné  le  nioindre  signe 
de  délire,  ni  dans  ses  paroles,  ni  dans  ses  actions. 
Le  2  mars,  il  demande  au  médecin  la  permission  d'é- 


S8  joimma  t»B  HÉttscniiB. 

crfre  à  9»n  trère  pour  lui  anaonceir  su  guérison ,  et  le 
prier  de  veiliir.  A  peine  la  lettre  était-elle  achevée,  que  ce 
dernier  «rrive ,  et  trouve  M.  W...  exactement  conforme  à 
sa  imanière  ë'étre  habrtuetle.  Ils  causent  longuement  des 
affaires  de  famille ,  des  affaires  commerciales ,  de  fc  fio^ion 
qu'occupera  M.  W...  à  son  retour  à  licJtz.  Ils  sortent  en- 
semble, et  le  convalescent  doit  passer  deux  jours  à  Nan<^y. 

15  mairs.  —  M.  W...  est  réeHemeni  bien  guéri  ;  depuis 
le  départ  de  son  frère ,  presque  chaque  jour  i\  va-à  Nancy, 
visite  ses  amis,  va  au  spectacle,  au  concert,  et   aucune 
idée  déllrarite  ne  s*est  manifestée.  Son  caractère  est  ex- 
trêmement gai,  très-affable  et  très-aflectueux.'ll  rend  compte 
de  toutes   les  sensalions  qu'il  éprouvait  dans  son  délire. 
Les  cris  des  idiots  voisins  de  son  quartier   lui    fivîsaienit 
croire  à  regorgement  de  milliers  de  persk)rïne$  dans  des 
souterrains.  La  voix  d'un  de  ces  petits  idiots  -ressemble  un 
peu  à  celle  de  l'un  de  ses  neveux,  et  c'est  ce  qui  lui  faisait 
croire  à  la  présence  de  toute  sa  famille.  Il  affirme  que  c'était 
bien  avec  la  résolution  de  se  donner  la  mort ,  qu'il  s'est 
(jirécfpité  dans  un  ruisseau.  Il  ne  pedt  s'empêcher  de  rire 
en  songeant  à  la  manière  dont  il  barboltait  'dans  fort  peu 
d'eau  et  beaucoup  de  boue  ;  il  entendait  les  perquisitions 
auxquelles  tout  le  monde  se  livrait,  mais  l'idée  de  répon- 
dre, d'appeler ,  ne  lui  venait'paa;  c'était  égirtlement  le  désir 
de  mourir  qui  le  portait  à  repousser  toute  espèce >de 'nourri- 
ture. L'aspect  d'une  force  a  laquelle  il  De  pouvait  résister  et 
la  vue  de  la  sonde  oesophagienne ,  en  le  persuadait  qu'on 
parviendrait  à  le  faire  manger  malgré  lui ,  avaient  seuls 
changé  sa  détermination  ;  du  reste,  toutes  ses  sensations 
avaieilt   quelque  chose  d'insolite,  de  voilé,   à  tel  point 
qu'il  demande  de  recevoir  une  afl^usiou'pour  en  comparer 
l'effet  à  l'impression  terrible  dont  il  a  gardé  le  souvenir. 

Il  explique ,  par  la  crainte  à  'laquelle  11  était  en  proie ,  le 
tremblement  qui  au  début  avait  'feit  redouter  la  parttlysie 
générale.  M.  W...  sort  de  l'Asile  le  22  mars  f847.  Au  mois 
d'octobre  suttarit,  j'ai  eu  occasion  de  le'voir  dans  âa  fiimille. 
Sa  santé  physique  etmorïile  s'e^t  parfaitement  maintenue.  Il 
a  repris' d'aUttes  occupations  toujburs  dans' la  même  affiiire; 


j.'ai  élé  témoin  de 9a vU  p9J6ibl<9aiip(è8.4'ui)efei»SBieeldiW 
enfiant q^'il  cbérij. ,  et  dont  la^ticlion  90  lui.  inAn<|U9  pas». 
C'était  L'anniv.éiïsaiire.  de  son  entrée  à  MairéviUeh  lous  ai^a 
anus  cedoutaîent  ce  moyien^.  De  péQJ,b|as  saiiivenii?$  kjii 
ont  été  rappelée ,  mm^  sa  ra^n  n'en,  a  subi  aucun  ébrau- 
leiAfsut.  IL  I9.'ai  eondiuiA  Ui-mêroe. ,  et  c'était  la  pfeopiè^e 
foÎ3  ^'il  repai^dissait  sur  ]^^  lieux ,  depuis  la  terrible  cal^Sr 
teof^ie ,,  sur  le  théâtre  du  s^n^tce ,  m>«^  a  exf  liqyé  1^$ 
pba$es ,  ui!et  mpu^^é  le  Duiaseaiv,  eà  il  s'était  jetô,  —  4e  n'ai 
pu  voir  sans  i|ne.  douée  émotion  «  Veinpresseinenit  d^nl 
i  eutouiraient  ces  envsieps,  pai|F  quit  il  uv^Mt  toi^wvsété  ju^le 
et  bon» 

M^  W...  est  deineuré  l'uA  de  mes  imiUieafs  amis  ;  je 
n!aii  j^a  (^^é  d'étxe  en  conrespondanca  avec  bjii;  sa  dernière 
lettre,  qinâdate  de  qi|elq«iea  pioi^  (juillet  1855),m'aneon$ait 
la.  pert€r  d'ue  enia^t*  Sa  raispa  i^'en  a  point  été  ébranîée. 
Il  n'a  paa  cessé  un  iosiant  de  reiiipiplir  ses  devoirs  ^ofi»^ 
sionnel)^  aveçU  Qaâaae  intelligence  qu'avant  sa  inajadie^  Sa 
guériaon  est^  donc  bien  compile. 

Cette  observatiw  Bons  isMMitre  un,  finit  qui  n'ofre  rieo;  de 
bien  e^eptiponel  et  peut  ménne  être  considéré  o^umne  un 
type  de.!^  ff^Wfi  ^'^Ménation  nieiMiale  nommée  par  Esqiftirol 
lypèiuaçie^  NéfMiiiwins,  cerl^Nupsea  cireonstan^es  me  seni'^ 
biept  dignes  d'appeler  ratt^^ntion,  et.  je  les  signalerai  en 
qpekqyues  Hgaes. 

Je  Qopstatei'ai  4'abord  la  pjré4i$po$itiion.h(éréditaireoa{ûiae 
dans^  le  eour&de  t'observaliion ,  paipce  q<fie  je  et'aiobtec^u.de 
renseignenaenls  pf'éeis  h  ce  «ujel  qu'après,  l'époque  (juillet 
t847)  o])i  elle  a  été  rédigée. 

M-^  W...  e^t  le  preoMev  de  sa  fanfiiUe  qui  ait  ea  mi  i^érir 
table  accès  d'aliénatioç,  mentale)  cependant  soa  pare, 
Uiaistre  lu^liévieii,  avait  été  pend^^iM  djix-buit  «oeia^  vers 
l'âge  de  36  à  38  ans,  dans  un  état  de  tri^a^se,  de  dége(àt  de 
laviequikùfai^eii  négl,i,(|er  et  presque  aha^n^er  Wfi  devoirs 
de  spn  ministère  et  le  soin  4e  s^  fimille.  Cet  étal  s'est  dissipé 
spputanémeut.  Vers  le  même  âge ,  le  frère  aîné  de  M.  W.. . 
pjcéneiRta  un  phénomène  à  peu-pvès  de  tems  paima  idemi- 
q|i^,  J^JD&I^  h  2'  &ére,  de  qaeiqu^  ^nées  yto  âgé  qae 


30  JOimNàL  BE  HàDSCniB. 

Louis,  habitant  une  dês  principales  villes  de  la  Prusse 
Rhénane,  fut  en  1848  désigné  pour  faire  partie  du  jury 
appelé  à  juger  les  auteurs  d'une  insurrection.  A  peine  le 
jugement  fut-il  prononcé,  que  M.  W...  manifesta  des  scru- 
pules extraordinaires ,  il  se  prétendait  coupable  de  n'avoir 
pas  prêté  une  assez  grande  attention  aux  débats  ;  puis  sur- 
vinrent des  hallucinations ,  il  voyait  des  insurgés  partout. 
Enfin,  il  tomba  dans  un  état  fort  analogue  à  celui  où  j'avais 
vu  sou  frère  Louis.  La  famille  le  fit  venir  d'Allemagne  et 
le  plaça  à  Maréville  que  je  quittai  peu  de  temps  après  ;  je 
n'ai  pu  suivre  la  maladie,  mais  j*ai  su  que  le  malheureux 
ne  s'est  pas  rétabli ,  et  qu'il  est  encore  dans  une  maison  de 
santé  en  Allemagne  où  habitent  sa  femme  et  ses  enfants. 

De  toutes  les  causes  éloignées  de  la  folie,  l'hérédité  est 
incontestablement  la  plus  fréquente.  Malgré  les  efforts  que 
font  la  plupart  des  familles  pour  cacher  cette  Ùtcheuse 
prédisposition  qu'on  voudrait  se  dissimuler  à  soi-même , 
Esquirol  l'a  constatée  22  fois  sur  iOO  dans  son  service  de  la 
Salpétrière,  24  fois  et  demie  dans  la  statistique  de  Charenton, 
et  57  fois  sur  100  dans  sa  maison  de  santé. 

M.  Archambault,  dans  ses  relevés  sur  Maréville  qu'il  n'a 
point  encore  publiés ,  mais  qu'il  a  bien  voulu  me  com- 
muniquer,  est  parvenu  à  établir  que,  55  fois  sur  100,  il  a 
existé  des  aliénés  chez  les  ascendants  ,  descendants  ou  col- 
latéraux proches.  Spécialement  à  la  iypémanie,  M.  Archam- 
bault a  trouvé  l'hérédité  59  fois  sur  89  malades  ;  c'est  l'é- 
norme rapport  de  67  pour  100.  Pour  M.  Moreau,  de  Tours, 
qui  considère  comme  prédisposition  héréditaire  à  l'aliéna- 
tion mentale  non -seulement  toutes  les  maladies  cérébrales 
de  quelque  nature  qu'elles  soient,  toutes  les  bizarreries  de 
caractères,  mais  encore  toutes  les  névroses ,  il  ne  peut  guère 
rencontrer  d'aliéné  qui  n'ait  eu  dans  sa  femille  quelque 
affection  de  ce  genre. 

C'est  de  25  à  35  ans,  suivant  Esquirol ,  que  Ton  rencon- 
tre le  plus  fréquemment  la  Iypémanie;  cependant,  elle  est 
encore  très-fréquente  jusqu'à  45  ans.  Ainsi,  c'est  à  34  ans , 
que  Louis  W...  devient  triste,  que  son  caractère,  ses  habitu- 
des se  modifient,  bien  qu'il  soit  encore    au  début  d'un 


JOURNAL  DB  MÉDSCHOS.  31 

mariage  qui  a  mis  le  comble  à  tous  ses  vœux ,  et  dans  une 
position  industrielle  de  nature  à  lui  faire  espérer  un  avenir 
de  tous  points  satisftûsant.  Peut-être  eût-il  éprouvé  seule- 
ment comme  son  père  et  son  frère  atné  un  état  de  spleen 
de  quelques  mois  de  durée ,  sans  la  terrible  catastrophe  qui 
vini   subitement  le  plonger  dans  le  délire  mélancolique  le 
plus  profond.  Quoi  qu'il  en  soit,  la  gravité  même  des  acci- 
dents fut  probablement  pour  lui  une  circonstance  heureuse; 
on   n'hésita  pas,  comme  il  arrive  trop  souvent,  à  le  mettre 
dans  des  conditions  de  traitement  favorables. 

Un  des  accidents  les  plus  redoutables  de  la  lypémanie  , 
est  certainement  Tidée  fixe  qu'ont  presque  tous  ces  malades 
de  se  laisser  mourir  de  faim.  Dans  le  cas  actuel,  nous  voyons 
ralîéné  vaincu  par  Taspect  d'une  force  imposante  et  par  la 
persuasion  qu'au  moyen  de  la  sonde  oesophagienne,  on  par- 
viendra à  le  &ire  vivre  malgré  lui.  Malheureusement,  il  est 
loin  d'en  être  toujours  ainsi  ;  cela  se  rencontre  quelquefois 
chez  les  hommes ,  très-rarement  parmi  les  femmes.  Mais  il 
est  bien  plus  ordinaire  de  voir  les  lypémaniaques  lutter 
jusqu'à  la  dernière  extrémité ,  s'efforcer ,  en  contractant 
onergiquement  les  muscles  du  pharynx,  d'opposer  une 
barrière  au  passage  de  la  sonde;  ils  y  réussissent  quelque- 
fois ;  on  en  a  vu  même  par  des  régurgitations  volontaires , 
vomir  aussitôt  après  le  retrait  de  la  sonde  les  aliments  in- 
troduits de  force  dans  l'estomac. 

Sa  passion  pour  la  musique  fut  certainement  pour  Louis 
W...  d'un  très-grand  secours;  c'est  à  son  aide  que  je 
suis  parvenu  à  occuper  un  peu  l'esprit  du  malade.  II  n'y  a 
point  de  chances  de  guérison  pour  le  monomaniaque  ou  le 
lypémaniaque  ,  tant  qu'on  ne  peut,  par  une  occupation 
quelconque,  soustraire  sa  pensée  aux  idées  fixes  qui  l'assiè- 
gent. Il  s'établit  dans  ce  cas  un  cercle  vicieux  trop  fré- 
quent en  pafhologie  ;  l'effet  devient  générateur  de  la  cause; 
la  maladie  enfante  l'idée  fixe,  et  à  son  tour  l'idée  fixe  en- 
tretient la  maladie. 

Pour  que  l'aliéné  commence  h  s'occuper  utilement ,  il 
faut  qu'il  ait  subi  une  amélioration  très-sensible;  cependant, 
il  est  encore  loin  d'être  guéri  ;  c'est  même  là  l'époque  la 


3^^  jwBf^j^  «B  wfm^vh 

pljMlk  critique  d\j{  tmtenM»;t& ,  c'est  ajorq  qu^  va  se  décider 
celle  leri[ible  question  :  le  malade  guériça-l-M ,  ou  sop  alii^- 
nalioo.  va,-t-eUe  passer  à  Tétat  chrooiqu^  ?  Tous  les»  travaux 
exécutés  dans  les  asiles  par  des  aliénés  incural^les  témoi* 
goent  éoergiquement  qu'il  reste  encoRç  bea^CQ^p  à  Caîire  au 
looroeot  où  l'on  est  parveuu  à  obtenir  qj^e  le  malbiçureux 
laisse  un  peu  de  côté  ses  iii^es  fixes  pour  une  occupiatioa  eo 
rapport  avec  ses  ha))iludes  a,D4érievres. 

Je  m'arrêterai  up  instaiit  sur  la  cessation  brusque  et 
complète  du  délire*  Je  n'ai  rencontré  ai^CM,D  auti:e  ei^empj^ 
d'une  modification  aussi  rapidement  cadicalp.  En  qi^kmes 
instanU,  la  physionomie,  U  laaintieo,,  les  idées  si^biire^ 
une  métamorphose  al^solue.  Les  M^aits  toul-à-l'heurç  çoa- 
tractés ,  e^pripiant  Tapprébension  et  1^  çoptraint^ ,  fii^eot 
place  4  une  expression  ouvert^  et  enjouée  qui,  esjtlana^nièr^ 
d'être  habituelle  de  Louis  W..-  î  il  devient  tp^t-à-coup  e( 
demeure  s^ussi  gai  q^'il  é^it  mx^^ose.,  aièssi  çoutem  qu'i^ 
étai^  liàciturne. 

Les  détasils;  d^  l'observatiou.  auront  siifiS ,  je  pense,  pour 
fiË^ir^  apprécier  la  méthode  de  tra,itement.  Dans  1^  prçmi^r^ 
période,  les  douch^ç  opt  été  employées  congi^e  moyen 
per^rbant  pour  rappeler  çn  quelque  sor^  9^  la  vie  exté- 
rieure te  malade  absorbé  par  ses  idée3  sinistres  et  ses.  hàX- 
lucin^tions.  En  même  temps  on  avait  recours  aux  bains  p|ro- 
longés  et  à  de  longues  proni^uades,  pour  apiçner  p^r  Ia 
vu^  d'objets  nouveaux  et  pjar  la  l^ssit^de  quelques  idées 
d'un  ordre  différent  et  surtout  UA  peu  d^  sou^nei,!  s^  rar^ 
et  si  précieux  pour  l^s  ^iénés.  Eipjin^  du  ipoment  que  son 
esprit  devient  accessible  àk  distraction,  ç'e^  de  ce  c^jié 
que  s^  porte^i^  tous  les  efibrts,  Lis  p^i^ir  est  inaposié  au 
maUd«  ^v^  W^  volonté  énergique  et  persistante,  qui  pe  lui 
lais^  a^ucuB  répjjt ,  ses  idées  fausses  son,^  at^quées  de  froot, 
sans  qu'il  soit  jwais  fait  la,  moin<i^e  conce§si^^  apporetii^. 
Je  dis  qfpftr^t^t^ ,  car  en  cela ,  Içs  ii^liénés  ressen^blent  ^ux 
enfants;  la  faiblesse  physique  et  intellectuelle  ef^gent  q^'o]|i 
sf  dépftfftisse  ^équemment  de  ^  rign^çii^Mr;  m^is^  alors  de 
i^ôme  q^'oA  feii[Lt  d'ignorer  1^  foute  q^'(VA  w  yeut  p^  py«Mr« 
iil  f^%\  i^^^  crp^r^  à  l'aliéna  qiie  ^on,  ret^^r  i^  ses  ijdéest 


jovbnàx  db  mébecinb.  33 

fausses  n'a  poinl  été  aperçu.  C'est  là  une  des  nombreuses 
appréciations  dans  lesquelles  doit  se  manifester  le  tact  du 
médecin  aliéniste. 


DE  CEBTAINS  PHÉNOMÈNES  hystinformes 
avecsuppressionpassagère  de  lamenslruationpou' 
vanl  laisser  soupçonner  à  tort  vn  commencement 
de  grossesse,  par  le  D'  AjJhiJSkis ,  président  du 
jury  de  médecine  du  déparlement  de  la  Loire- 
Inférieure. 


La  menstruation ,  cette  fonction  si  importante  que  l'on 
a  pu  dire  qu'elle  domine  à  la  fois  la  physiologie  et  la 
pathologie  de  la  femme,  se  supprime  rarement,  même 
pour  une  courte  durée  de  temps,  sans  susciter  dans  l'or- 
ganisme des  troubles  plus  ou  moins  notables.  Ces  troubles 
fonctionnels  sont  surtout  la  suite  des  atteintes  portées  par 
cette  suppression  à  l'innervation.  Multiples  et  protéiformes, 
les  accidents  spasmodiques  que  la  disparution  des  mens- 
trues entraîne,  empruntent  un  cachet  tout  particulier  à 
chaque  idiosyncrasie,  se  modifient  suivant  chaque  organi- 
sation :  c'est  ce  qui  explique  leur  diversité. 

Quelquefois  des  phénomènes  de  nature  hystérique  coïn- 
cident avec  la  disparition  des  règles,  et  Ton  est  fort  embar- 
rassé pour  savoir  si  ces  phénomènes  sont  la  cause  ou  l'effet 
de  cette  suppression.  Le  plus  souvent  ^  ils  en  sont  l'effet;  ils 
peuvent  pourtant  en  être  la  cause.  L'embarras  dans  lequel 
se  trouve  le  médecin  augmente  ,  s'il  est  en  droit  de  soup- 
çonner un  commencement  de  grossesse  ;  aussi ,  est-ce  tou- 

3 


34  JOUBUAI.  DE  «ÉD^CIRE. 

jours  avec  une  extrême  prudeoce ,  avec  la  plus  grande 
réserve  qu*il  formulera  soo  opinion  ,  surtout  s'il  est  consulté 
par  une  personne  qui  n'est  pas  mariée,  qui  est  veu,ve,  ou 
dont  il  suspecte  la  moralité. 

Exisle-t-il  des  signes  propres  à  faire  reconnaître,  d*une 
manière  infaillible, la  vraie  grossesse,  et  si  ces  signes  exis- 
tent, à  quelle  époque  de  la  grossesse  se  montrent-ils?  On 
connatt  Fétat  de  la  science  au  sujet  de  ce  problème  fort 
complexe  et  l'un  des  plus  importants  que  l'obstétrique  ait 
à  résoudre.  On  a  pesé  le  de^ré  de  copfiance  que  chaque 
signe  de  la  grossesse  inspire,  et  je  ne  puis  mieux  faire  que 
de  renvoyer  pour  l'étude  de  cette  question,  pour  la  sohitîon 
de  ce  prôUème  aox  ouvrages  êxprùfesm.  Qu'il  ine  suffise 
de  dire,  pour  prouver,  toutes  les  obscurités  qui   rni^ehp- 
peut  epcpre  Ifi  science ,  que  dans  certains  cas,  à  la  vérité 
très-exceptionnels,  le  problème  a  paru  tellement  difficile  à 
résoudre,  que  l'on  n'a  pu  acquérir  qu'une  certitude  de 
probabilité  même  à  l'époque  de  la  grossesse  où  ordinaire- 
ment le  toucher  et  l'auscultation  ne  laissent  plus  de  prise 
au  doute,  et   cependant   les  accoucheurs  qui    hésitaient 
enqore  à  sq  prononcer  étaient  fort  experts  dans  la  pratique 
du  toucher,  dans  le  maniement  du  stéthoscope  :  ils  avaient 
aussi  cherché  des  enseignements  dans  les  études  de  JÎf.  Jac- 
quemin,  sur  la  coloration  plus  foncée  dans  l'état  de  gesta- 
tion que  dans  l'état  de  vacuité  de  l'utérus  de  la  membrane 
muqueuse  vulvo-vaginal^  :  ils  n'avaient  p^s  non  plus  né- 
gligé de  tenir  compte  des  remarques  de  tt.  Hontgomme- 
rie  sur  les  changements  particuliers  que  subit  pendant 
l'époque  de  la  grossesse  l'aréole  du  mamelon;  enfin,  et  à 
l'imitation  de  HM.  les  professeurs  Andral  et  Gavarret,  ils 
avaient  examiné  le  sang,  analysé  l'urine  suivant  le  procédé 
de  M.  Donné. 

Le  diagnostic  de  la  grossesse  devient  d'autant  plus,  diffi- 
cile, que  la  grossesse  est  moins  avancée:  en  effet,  ainsi 
que  je  l'ai  dit  dans  un  autre  travail:  cr  Pendant  les  trois 
prenuers  mois  de  la  gestation ,  le  col  utérin  est  trop  haut 
placé  pour  pouvoir  être  facilement  exploré  par  le  doigt,  et 
cettp  exploration  fut-elle  même  facile ,  elle  ne  saurait  rien 


JOVBSIAL  DB  méseciue.  ^i 

apprendre,  puisque  le  col  n'a  encore  subi  aucun  change- 
ment appréciable*  La  petite  quantité  de  liquide  amnio- 
tique contenue alfiiBs  dêm  ki  oivité  de  rutéfos  rend  aussi  fort 
confuse  la  sensation  éprouvée  par  le  doigt  ou  les  mouve- 
ment$  passifs  du  fœtus,  ce  que  Ton  appelle  le  bqllottement. 
Quanta  la  perception  des  deux  bruits  différents  qui ,  selon 
M.  de  Kergaradcc,  annoncent  la  présence  dans  Futérusdu 
fœtus,  à  savoir:  le  brpiU  placenlaire  également  appelé  bruit 
de  souffle  et  le  bruit  à  doubles  ballemenls  ou  bruil  du  cœur 
du  fœtus ,  ceiie  perception  ne  peut  se  distinguer  pendant 
les  trois  premiers  mois,  le  produit  de 'la  conception  étant, 
jusqu'à  celte  époque  ,  à  l'état  embryonnaire.  » 

foutes  ces  considérations. font  que,  pendant  les  trois 
premiers  mois  de  la  grossesse,  le  diagnostic  de  la  grossesse 
est  tellement  obscur,  qu'une  Société  de  Médecine  consultée 
à  l'occasion  d'une  accusation  juridique,  s'il  existait  un  si- 
gne certain,  infaillible  de  reconnaître  la  grossesse  pendant 
les  trois  premiers  mois  de  la  gestation,  crut  devoir  répon- 
dre que  ce  signe  n'existait  pas.  Dans  l'état  actuel  de  la 
science,  c'était,  en  effet,  la  seule  réponse  que  Ton  pouvait 
donner. 

C'est  surtout'  chez  les  femmes  en  proie  à  Thystérie^que 
le  diagnostic  des  premiers  temps  de  la  grossesse  est  hérissé 
de  (iifllcultés  :  chez  certaines  hystériques,  il  se  développe 
quelquefois  des  accidents  tellement  propres  à  iiiasquer  la 
grossesse,  qu'ils  exigent ,  pour  que  la  lumière  se.  fasse  ,  une 
attention  toute  particulière.  Cette  ailention ,  bien  que  soi- 
gneuse, ne  conduit  pas  toujours  à  la  conviction,  et  il  suf- 
fît qu'une  place  soit  laissée  au  doute  'dans  l'esprit  du  mé- 
decin, pour  que  celui-ci  n'émette,  son  opinion  qu'avec  une 
extrême  réserve ,  avec  la  dernière  prudence.  C'est  dans  le 
.  but  de  servir  au  diagnostic  de  ces  grossesses  douteuses  chez 
les  femmes  hystériques,  que  j'extrais  de  mon  portefeuille 
trois  observations,  que  j'avais  rédigées  dans  le  temps,  me 
promettant  de-  les  communiquer  à  une  Société  savante , 
quand'  l'occasion  s'en  présenterait. 


36  JomufÀL  DE  vtoEcniB. 


Première  •bserratian. 


Une  jeune  personne,  douée  d'une  constitution  nerveuse , 
révélée  par  des  cheveux  noirs,  une  peau  brune  et  brûlante , 
de  ramaigrissement ,  fut  prise,  dans  le  courant  d'un 
voyage,  d'accidents  spasmodiques  extrêm.  ment  intenses. 
Appelé  près  d'elle ,  il  me  fut  facile  de  constater  de  suite 
que  l'attaque  de  nerb  se  rattachait  à  l'hystérie ,  car  la  sen- 
sation de  ce  que  l'on  a  appelé  la  houle  hystérique,  était 
par&itement  caractérisée.  J'attendais  l'eifet  d'une  potion 
anti-spasmodique,  lorsqu'une  question  que  j'adressai  à  la 
mère:  «r  Mademoiselle  est-elle  bien  réglée?  »  me  valut 
les  confidences  suivantes  : 

La  jeune  personne  avait  aimé  éperduement  un  jeune 
homme,  sans  fortune,  sans  état  et  d  habitudes  fort  légères. 
Les  parents  de  la  demoiselle  s'étant  refusés  au  mariage ,  le 
jeune  homme  avait  trouvé  le  moyen  de  la  séduire  :  ce- 
pandant ,  une  seule  cohabitation  avait  eu  lieu,  et  justement 
pendant  le  flux  menstruel;  toutefois,  les  règles, jusque  là 
régulières,  avaient  disparu  à  dater  de  ce  moment,  et  Tacte 
sexuel,  dont  la  jeune  personne  avait  fait  immédiatement 
Taveu  à  sa  mère,  remontait  déjà  à  quatre-vingt-quinze 
jours.  Les  accidents  hystériformes  avaient  précédé  de  plu- 
sieurs mois  la  cohabitation  :  ils  étaient  évidemment  sous 
l'action  de  l'orgasme  utérin  produit  par  les  assiduités  du 
jeune  homme.  Un  médecin  avait  essayé  de  calmer  ces 
accidents  par  de  petites  applications  de  sangsues  aux 
cuisses,  diverses  potions  calmantes,  et,  chose  surprenante 
ou  plutôt  qui  ne  saurait  surprendre,  la  mère  et  la  jeune 
personne  étaient  restées  seules  confidentes  de  ce  qui  s'était 
passé  :  le  père ,  le  médecin  étfiient  bien  loin  de  le  soup- 
çonner, et  c'était  d'après  l'avis  du  médecin  qu'on  se  rendait 
aux  bains  de  mer,  près  la  source  ferrugineuse  de  Préfailles. 
Les  bains  de  mer  chauds,  l'eau  ferrugineuse,  des  courses  à 
cheval  avaient  été  conseillés  en  même  temps  que  la  cessa- 
tion de  toute  médication  pharmaceutique. 


JOUHIfAt  DE   MÉDECINE.  37 

Cependant,  la  mère,  cruellement  tourmentée  par  la 
pensée  d'une' grossesse,  que  la  cessation  des  règles  rendait 
a  ses  yeux  plus  que  probable,  avait  tellement  fait  partici- 
per sa  fille  à  son  tourment,  que  celle-ci  passait  les  nuits 
à  pleurer.  Cette  insomnie  soutenue  n'avait  pas  peu  con- 
tribué à  agacer  le  système  nerveux  et  à  aggraver  les  acci* 
dents  spasmodiques. 

Honoré  d'une  confiance  absolue,  par  suite  de  cette  confi* 
dence,  il  me  fut  permis  de  chercher  à  apprécier  si  les 
craintes  inspirées  par  la  supposition  d'une  grossesse  étaient 
réellement  fondées.  Il  me  paraissait,  en  effet,  peu  ordi- 
naire, en  admettant  que  le  récit  que  Ton  venait  de  me  faire 
ne   contînt  que  l'exacte   vérité  (et   il   paraissait  empreint 
d'une  candide  véracité),  qu'une  seule  approche  sexuelle 
chez  une  personne  jusque   \h   vierge,  approche  pendant 
le  flux  menstruel,  eût  entraîné  aussi  facilement  la  concep- 
tion. Mon  doute  s'augmentait  surtout  de  cette  circonstance 
qui  m'était  apprise ,  que  le  coït  avait  été  pratiqué  debout 
et  à  la  dérobée. 

Dans  le  but  d'abréger  cette  observation ,  je  dirai  de  suite 
que*  la  palpation  de  l'abdomen  la  plus  soigneuse  éloignait 
tout  d'abord  de  la  supposition  d'une  grossesse  qui  devait 
entrer  dans  son  quatrième   mois.  Il  était  impossible  de 
trouver  le  moindre  développement  à  l'utérus;  mais,  com- 
bien ne  fus*je  pas  rassuré  lorsque  je  trouvai  l'anneau  vul- 
vaire  tellement  intact  que  le  bout  du  doigt  index  ne  pou- 
vait y  pénétrer  !  Pour  arriver  au  col  utérin ,  il  eut  fallu 
forcer  Tanneau  vulvaire,et  cette  douloureuse  dilatation  ne 
me  parut  pas  nécessaire.  J'insistai  tellement  sur  la  particu- 
larité que  le  coït  ne  me  semblait  nullement  avoir  été  con- 
sommé ,  que  je  versai  du  baume  dans  le  cœur  de  la  mère  et 
de  sa  demoiselle.  Je  leur  promis  d'aller  les  visiter  de  temps 
à  autre  à  Préfailles,  conseillant  à   la  jeune  personne  de 
n'employer  aucun  médicament;  de  prendre,  chaque  jour, 
un  bain  de  mer  chauffé  à  la  température  du  corps;  de  faire, 
en  mangeant,  usage  dé  l'eau  ferrugineuse  de  la  source  de 
Kirouard ,  laquelle  eau  devait  être  mélangée  à  un  quart  de 
vieux  vin  de  Bordeaux.  Je  joignis  à  ces  moyens  le  conseil 
de  faire  ,  chaque  jour,  une  promenade  à  âne.  Au  bout  de 


38  JOUBWAL  DE  MÉDECINE. 

quelques  jours  de  ce  traitement,  les  phénomènes  spasino- 
iJiques  perdirent  de  leur  fréquence  et  de  leur  intensité. 
Après  un  séjour  tie  cinq  semaines  sur  le  bord  de  la  mer, 
l'évacuation  menstruelle  reparut,  et  tout  se.  passa  d'une 
manière  si  normale,  que  le  doute  élevé  sur  une  grossesse  ne 
fut  plus  permis.  Ces  damés  passèrent  encore  trois  semaines 
à  Préfailles,  puis  eHes  revinrent  joyeuses  à  leur  domicile. 
Une  lettre  de  remefcîmenls ,  que  je  reçus  quelque  temps 
après,  m'apprit  que  la  santé  était*  parfaitement  recou- 
vrée. 

beaxiènie  observatibn. 

Une  jeune  fiHe,  victime  d'une  brutale  séduction,  devient 
tout  d'un  coup  sujette  à  des  atxidenls  hyslériformes  quelle 
n'avait  janriais  éprouvés.  La  mère ,  mise  immédiatement 
dans  la  confidence  de  ce  fait,  attribue  ce  nouvel  état  aux 
vives  émotions  de  sa  fille.  On  se  borne  à  des  infusions  de 
tilleul,  à  Teau  de  fleurs  d'oranger,  à  quelques  gouttes 
d'éther,  et  l'on  espère  que  les  règles,  qui  doivent  venir  rfans 
quelques  jours,  mettront  fin  à  ces  désordres  du  système 
nerveux. 

Cependant,  l'époque  menstruelle  si 'ardemment  atten- 
due manque  entièrement ,  et,*à  dater  de  cette  suppression, 
les  accidents  spasmodiques  se  rapprochent  lellerhent  que 
je  suis  appelé. . .  i  assiste  à  une  attaque  franche  d'hystérie, 
et  bientôt' je  suis  mis  au  courant  par  la  mère  de  la  jeune 
personne  de  tout  ce  qui  s'est  passé. 

^  Rien ,  assurément,  dans  l'examen  des  organes  génitaux, 
n'eût  pu  éclairer  sur  l'existenc^e  de  la  grossesse,  -car  le  rap- 
prochement sexuel  ne  datait  que  d'une  quinzaine  de  jours; 
aussi ,  sans  me  livrer  à  aucune  investigation  ,  je  me  bornai 
à  prescrire  une  potion  dans  laquelle  j'associai  la  valériane 
à  Topium,  et  j'engageai  la  mère  à  rentrer  dans  sa  famille, 
MNe  Y      ^^^  '^  nnonde  parlait  des  attaques  de  nerfs  de 

M  •  X Je  crus  devoir  remettre,  pour  le  médecin  de 

celte  famille,  une  lettre  dans  laquelle  je  lui  donnais  con- 
naissance  de  la  confidence  qui  m'avait  été  faite  et  dans 


JOtKNÀii  DE  kÉbEciNE.  39 

laquelle,  élevant  des  doutes  sur  la  gross'esse,  j'insistais  sur 
des   cataplasmes  Idudanisés  apposés  à  là  régiori  hypogàs- 
trique,  sur  des  quarts  de  lavements  éiYiollienls  avec  addî- 
lîou  de  quelques  gouttes  de  teintuï'e  de  musc,  et  de  quel- 
ques gouttes  de  laudanum  de  Sydenha'm ,  supposant  que 
les   phénomèi^es  hy&tériques,  ainsi   que  la  dist'iarition  des 
rinenslrues,  pouvaient  se  trouver  sous  la  dépendance   dé 
l'oï-gâsme  utérin.  Je  parlai,  toutefois  ,maiâ  avfec  une  ex- 
trême réserve,  delà  possibilité  à  la  rigueur  d'ud  commen- 
cement de  grossessie.  Au  bout  dé  deux  mois,  je  reçus  de 
mon  honorable  confrère  une  lettre  qui  m'annonçait  que  les 
menstrues  venaient  de  reparaître  ^  que  rien  ,  dans  Texamen 
dti  flux  menstruel ,  ne  légiiimait  le  soupçon  d'une  grossesse. 
J*aî  su,  depuis,  que  la  médication  calmante  que  j'avais  çon- 
selllièo  avdil.élè  régUlièrenienl  suivie;  qu'à  dater  de  la  réap- 
paritidii    des    règles,    les   spasmes    byslérilques   s*étaténl 
amoindris  ël  que  le  rfctour  à  la  santé  ne  s'était  pas  fait 
attendre. 


Troisiènie  ei  dernière  elmerTMleÉi. 

Un  jeiinc  homme;  se  trouvant  seul  avec  une  jeUné 
feiiime  de  chambre ,  consomma  l'acte  sexuel.  Pendant  les 
trois  jours  qui  suivirent  cette  cohabitation,  des  accidents 
hystériques  se  Hia  ni  lestèrent  aviec  unfe  telle  fréquence  et  Une 
telle  iiuetisité  chez  cette  jeune  fille,  qlic  je  crus  devoir 
conseiller  de  Ténvoyér  à  la  campagne ,  chez  ses   parents. 

Jusqu'à  répocjUe  de  la  ctthabitalidn,  les  règles  ,  malgré 
les  spasmes  hystériques,  s'étaient  riiontrées  t-égulières;  mais, 
à  dater  de  l'dcte  sexuel,  les  hienstirdës  rie  reparurent  J)as. 
Le  séjouir  à  la  campagne  et  lés  qiietqUëà  câlinants  que  le 
médecin  de  la  localité  avait  conseillés,  n'avaient  dinii- 
tiué  eh  rrerl  U  fréc^uëncé  et  l'inteiisité  des  {ihënomènès 
hystériques,  et  bientôt  ce  médecin,  bieh  rjue  h  jeune  tille 
né  lai  eût  pas  fait  la  cônHderiCe  de  àa  faute,  soUfiçoniia  tine 
grossesse.  Il  m'en  écrivit  conildëntiellement.  Je  crus  devoir 
en  pîtt'Iei'  att  jeune  hdmrhe  avec  ^ui  je  supposais  que  la 


40  JOimilAL  DB  aÉDBCnfB. 

fille  avait  eu  des  relations.  Celui-ci  me  confessa  toute  la 
vérité;  vérité  qui  me  fut  confirmée  plus  Urd  par  celte  tiUe, 
que  j'ai  accouchée.  La  date  de  raccouchement  sanctionna  la 
date  de  la  réunion  sexuelle.  Si  Ton  m  croit  cette  fille,  et 
je  n'ai  assurément  aucune  raison  à   alléguer    contre  U 
vérité  de  sa  déclaration ,  eUe  était  vierge  au  moment  du 
coït.  Cette  déclaration  semble  au  contraire  confirmée  |»r 
la  remarque  du  jeune  homme,  qui  assure  que  le  coït  fut 
douloureux  et  qu'il  fut  accompagné  d'effusion  de  sang: 
«  AptAd  mrgines  prima  nox  est  cruenta.  » 


■éf  extoMS* 

Chaque  médecin,  faisant  un  appel  à  ses  souvenirs,  pour- 
rait, sans  aucun  doute ,  citer  des  faits  analogues  à  ceux  que 
je  viens  de  relater.  Il  ressort  de  la  vulgarité  même  de  ces 
faits,  que  l'hystérie  a  son  siège  dans  la  matrice  et  que  ce 
n'est  pas  une  affection  cérébrale,  ainsi  que  plusieurs  au- 
teurs l'ont  écrit  en  faisant  considérer  que  cette  prétendue 
névrose  des  organes  de  la  génération  se  développe  quel- 
quefois chez  l'homme.  Il  est  vrai  que  certains  hommes  ont 
présenté  des  phénomènes  hystéri formes;  mais  si  on  exa- 
mine avec  soin  toute  la  série  des  troubles  dans  les  centres 
nerveux  qui  constitue  ces  phénomènes,  on  verra  que  ce 
n'est  pas  là  la  véritable  hystérie  de  la  femme.  Celle-ci  est 
toujours  sous  l'étroite  dépendance  de  Torgasme  utérin. 
Toute  excitation  de  d'autres  organes  qui  ont  des  corréla- 
tions intimes  avec  la  matrice, comme  le  clitoris ,  le  mame- 
lon, peut  faire  naître  des  phénomènes  hystériformes  ;  mais, 
assurément,  ces  troubles  fonctionnels  n'offrent  pas  la  sen- 
sation de  celle  boule  qui  semble  s'élever  de  la  matrice 
jusqu'à  la  poitrine  et  au  cou,  et  qui  produit  cet  étouffement, 
cette  strangulation  mi  generis  que  l'on  connaît ,  sensation 
qui  est  SI  caractéristique  de  l'hystérie. 

Lorsque  l'hystérie  se  développe  sous  des  causes  diverses 
chez  une  personne  jusque  là  régulièrement  menstruée ,  elle 
suscite  quelquefois  des  dérangemenU  dans  la  fonction  de  la 


JOUBNÀIi  DB   MÉDECINB.  41 

menstruation:  ces  troubles  peuvent  aller  jusqu'à  la  suspen- 
sion de  cette  fonction  ;  alors,  si  le  coït  a  coïncidé  avec  cette 
période  hystérique ,  on  peut  soupçonner  un  commence- 
meni  de  grossesse,  et  ce  soupçon  peut  pourtant  porter  a 
taux.  Les  deux  premières  observations  que  j*ai  rapportées 
confiraient,  au  milieu  de  tant  d'autres,  la  vérité  de  ce  fait, 
et  impliquent  l'obligation,  pour  le  médecin,  de  ne  présen- 
ter son  opinion  qu'avec  la  derpière  réserve ,  lorsqu'il  est 
app(*lé  à  se  prononcer  en  pareille  occurrence. 

Chez  certaines  femmes ,  dès  le  début  de  la  grossesse,  des 
phénomènes  bystériformes  apparaissent  et  semblent  être 
sous  l'étroite  dépendance  de  ce  nouvel  état  physiologique 
de  l*utérus;  mais,  chez  certaines  femmes   aussi,  et  alors 
qu'il  n'y  a  pas  un  commencement  de  grossesse^  il  se  mon- 
tre dans  les  premiers  temps  du  mariage  et  sous  Tempire  de 
l'excitation  des  organes  génitaux  des  phénomènes  égale- 
ment bystériformes  qui  font  d'autant  plus  croire  Si  la  ges- 
tation qu'ils  s'accompagnent  de  suspension  temporaire  de 
la  menstruation.  Ce  n'est  que  lorsque  la  grossesse  a  pu  se 
dégager  à  travers    ces    désordres    spasmodiques ,  qu'on 
peut  la  diagnostiquera  l'aide  d'un  ensemble  désignes  lien 
connus,  dont  les  plus  convaincants  sont  révélés  par  le  tou- 
cher et  l'auscultation.  Jusqu'à  ce  que  les  signes  pathogno- 
moniques  de   la  ^^rosscsse  aient    pu    être    reconnus,   lu 
médecin  qui  respecte  sa  profession  ne  doit  jamais  rien 
affirmer,  car  le  temps  a  souvent  donné  des  démentis  à  de 
téméraires  affirmations. 

Dans  la  dernière  observation,  on  voit  une  grossesse  chez 
une  fille  vierge  être  la  conséquence  d'une  seule  cohabita- 
tion. Il  est  vrai  que  l'acte  sexuel  avait  dû  être  entièrement 
consommé;  car  la  verge  avait  évidemment  forcé,  en  le 
déchirant  «  l'anneau  vulvaire,  à  en  juger  par  l'eiFusion  du 
sang  au  dehors  de  la  vulve.  Ces  cas  de  grossesse,  après 
une  première  et  unique  cohabitation,  ne  constituent  pas 
la  règle  ;  ils  constituent ,  chez  la  femme,  l'exception  ;  tandis 
que  dans  les  races  bovine ,  équine ,  porcine ,  canine ,  féline, 
la  femelle  est  presque  toujours  fécondée  par  le  seul  fait 
d'une  seule  approche ,  si  le  coït  a  été  consommé.  Il  est  vrai 


42  JOtmNAl   DE  MÉOCCINfe. 

que,  chez  la  (ille  dont  il  est  question ,  l'utérus  était  tlisposé 
à  la  conception  par  ce  surcroît  de  vitiililé-  que  I'oti  a  appe^ 
lée  orgasme  utérin.  Vitalité  surexci4ée  des  organes  géni- 
taux qui  s*était  manifestée  par  des  phénomènes  hystériques. 
Chez  la  femme ,  en  effet ,  selon  plusieurs  auteurs ,  un  cer- 
tain orgasme  des  ovaires  lel  de  Tulérus  paraît  nécessaire  à 
la  fécondation.  Cet  orgasme  exige  même  une  certaine 
durée  de  temps,  et  Ton  a  cru  remarquer  que,  dans  ia 
majorité  des  cas,  la  femme  qui  ne  porte  avfec  ellfe  aticune 
cause  de  slériliré  ne  devenait  guère  grosse  qu'après  la  pre- 
mière quinzaine  du  mariage  ;  mais  je  crois  que ,  dahs  cette 
appréciation ,  Ton  a  trop  perdu  de  vue  les  obstacles  que 
l'intégrité  des  organes  génitaux  (je  parle  de  la  fetnitie 
vierge)  oppose  à  ta  perpétration  de  lacté  sexuel.  La 
nature  se  montre  néanmoins  quelquefois  très-ponctuellê 
dans  l'accomplissement  de  la  fonction  physiologique  qui  loi 
est  dévolue,  et,  à  ce  sujet,  qu'il  më  soit  permis  de  citer 
le  fait  curieux  dont  j'ai  été  témoin  :  Deux  sœurs ,  âgées 
l'une  de  25  ans,  l'autre  de  20  ans,  ayant  éCé  élevées  d'une 
manière  si  religieuse  qu'il  n'est  pas  permis  de  suspecter 
leur  moralité,  se  marient  le  même  jour  à  deux  marins 
vigoureusement  constitués.  Le  navire  qu'ils  doivent  monter 
est  retenu  par  un  vent  contraire  ;  mais  la  première  nuit  du 
mariage  s'est  à  peine  écoulée  qu'un  vent  favorable  force  le 
capitaine  à  lever  l'ancre  :  tios  deux  marins  sont  arrachés  à 
la  couche  nuptiale.  Les  deux  femmes  accoucheht  le  même 
jour  et  juste  à  la  fin  du  neuvième  mois.  Les  faits  de  cette 
nature  ne  sont  pas  rares. 

L*on  voit  même,  assez  souvent,  déjeunes  mariées  fort 
vertueuses,  qui  sont  vivement  contrariées  d'accoucher 
avant  le  neuvième  mois  révolu,  à  dater  du  jour  do  leur 
mariage:  elles  se  consoIeraieYlt  si  elles  savaient  que  la 
science  n'est  pas  encore  parvenue  à  dissiper  les  irfcértitudes 
qui  enveloppent  la  fixation  par  la  nature  du  ierme  de  la 
grossesse,  bien  que  des  travaux  sét'ieux  aient  été  entre- 
pris dans  le  but  d'élucider  celte  question.  Il  est  au  ^oins 
positif  que  les  neuf  mois  qui 'constituant,  sclentiriquement 
parlant,  |je  terme  naturel  de  N  grossesse,  ne  sont  pas  les 


JOURNAL   DE   HÉDECINE.  43 

mois  Hu  Caletîdrier.  Toujours  est-il  que  quelques  faits 
prouvent,  d'une  manière  péremptcîire,  que  des  vierges 
sont  fécondées  par  le  premier  acte  sexuel,  même  en 
dehors  de  tout  orgasme  utérin ,  témoins  les  cas  de  viol  où 
la  défloration  a  été  le  résultatde  la  force  brutale. 

Pendant  les  premiers  mois  de  la  gestation  et  quelquefois 
même  pendant  tout  le  temps  de  la  gestation,  il  n'est  pas 
rare  d'observer  (tes  phénomènes  hystériques  chez  des 
femmes  qui  n'y  étaient  pas  sujettes  dans  l'étal  de  vacuité 
de  l'utérus.  C'est  à  cet  état  de  spasmt^s  qu'il  faut  rapporter 
la  constructiôïi  du*pliarynx  et  de  l'œsophage,  qui  donne  a 
la  femme  la  sensation  d'un  corps *él ranger  arrêté  daiis  le 
gosier  :  d'autres  fois ,  ces  spasmes  sont  suivis  de  ce  que  l'on 
a  appelé  (e  vertige  épUeptïque  ^  que  l'on  ne  doit  pas  con- 
fondre avec  la  syncope ,  et  encore  moins  avec  l'éclampsie, 
qiii  est'  une  sorte  d'épilepsie  aigué,  qui  tient  à  des  causes 
diverses  et  qui  a  toujours  urt  caractère'  de  gravité. 

Nous  avons  vu,  dans  la  première  observîttion,  que  l'on 
redoutait  une  grossesse  commençante  chez  une  jeune  per- 
sonne hystérique,  qui  avuit  subi ,'»endant  V époque  mehs- 
truelle j  une  seule  approche  seamelle  j,  et  dont  l'examen  du 
vagin  dénotait  l'intégrité  de  l'anneau  vulvaire,  d'où  l'on 
peut  induire  que  l'introdcrtion  de  la  verge  a  été  fort  in- 
complète. 

Il  est  positif  qu'il  n'est  pas  nécessaire  que  la  verge  soit 
introduite  profondément  dans  le  l^agin  pour  que  la  fécon- 
dation s'accomplisse.  L'on  comprend  que,  dans  la  fonction 
du  coït,  le  fluide  spermatique  est  lancé  au  moment  de 
l'éjacuiation  jusqu'à  l'ouverture  de  l'utérus  par  l'anneau 
vulvaire,  bien  que  celui-ci  soit  intact,  ou  par  toute  ouver- 
ture de  la  cloison  que  peut  former  la  membrane  hymen. 
On  ne  croit  plus  aujofurdJhu»  à  la  puissance  fécondante  de 
l'aura  seminalis ,  à  .son  arrivée  à  la  cavité  utérii^e  par  les 
pores  de  la  cloisoaque  l'hynTen ,  restée  intacte,  peut  pré- 
senter dé  manière  à  opérer  l'oCclusiôn  complète  du  vagin. 
Il  y  a  assurément  du  merveilleux  dans  tout  ce  que  l'on  a 
dit  et  écrit  à  ce  sujet.  Si  Ton  avait  apporté  plus  de  soin  à  la 
constatation  de  ces  faits  de  conception  où  l'on  assure  avoir 


44  JOUBNAL   DE  MÉDECINB. 

trouvé  la  membrane  hymen  entièrement  intacte  et  obtu- 
rant entièrement  le  vagin ,  on  eût  trouvé  sur  un  point  de 
cette  cloison  un  pcrtuis  par  lequel  le  sperme  a  pu  arriver 
à  l'utérus.  Il  liiut  que  le  sperme  pénètre  dans  la  cavité 
utérine  pour  que  la  conception  puisse  avoir  lieu ,  et  la  prin- 
cipale cause  de  stérilité  chez  la  femme  dépend  ,  selon  moi, 
des  obstacles  anatomiques  qui  s'opposent  à  la  libre  entrée 
de  la  liqueur  spermatique  dans  la  cavité  utérine.  Dans  un 
autre  travail ,  je  traiterai  cette  question,  car  j'ai  par  devers 
moi  des  faits  de  fécondation  qui  n'ont  pu  se  réaliser  chez 
des  femmes  jusque  là  stériles,  que  lorsque  je  suis  parvenu  à 
vaincre  et  détruire  les  obstacles  qui  empêchaient  le 
sperme  d'entrer  dans  la  cavité  utérine.  On  comprend 
que  je  veux  surtout  parler  ici  du  redressement  du  col 
utérin  ;  mais  je  m'aperçois  que  je  donne  trop  de  dévelop- 
pement aux  simples  notes  que  j'avais  recueillies ,  aha  de 
servir  à  l'histoire  de  l'hystérie  dans  ses  rapports  avec  le 
diagnostic  de  la  arossesse:  diagnostic  que  l'hystérie  masque 
et  rend  (|uelquefoi$  très-difficile. 

Nantes,  !«' février  1856. 


N  O  TE  sur  une  tumeur  hydatique  abdominale  ; 
ruptures  spontanées  et  périodiques  du  kyste^  sui- 
vies de  l'excrétion  de  son  contenu  par  la  voie 
intestinale;  persistance  de  la  tumeur  et  des  phi- 
nommes  énoncés  ci-dessus,  par  M.  Lb  Houx^  doc- 
leur-médecin. 


Messieurs,  ce  fut  au  mois  de  mai  1849  que  je  vis  pour 
la  première  fois  la  personne,  sujet  de  cette  observation,  qui 


JOUBNAL   DE   MÉDECINE.  45 

i*a  paru  présenter  assez  d'intérêt  pour  pouvoir  vous  être 
oommuniquée.  Cette  malade  me  fut  confiée  à  cette  époque 
f>2)r  le  docteur  Bernard ,  de  Frossay,  praticien  émérite  de 
In  médecine  rurale;  toutefois,  celui-ci  voulut  bien  consentir 
à  partager  avec  moi  la  direction  du  traitement  et  me  prêter 
le  concours  de  ses  conseils  et  de  sa  longue  expérience, 
concours  d'autant  plus  précieux  que  je  débutais  alors  dans 
la  carrière  médicale. 

Anne  0...  exerce  la  profession  de  lingère,  à  la  campa- 
gne; elle  est  célibataire,  d'un  tempérament  nerveux  très- 
prononcé  et  a  aujourd'hui  37  ans.  Depuis  sa  puberté  jus- 
qu'à ce  jour ,  sa  santé  a  toujours  été  fort  mauvaise.  A 
18  ans,  elle  demeura  privée  de  la  vue  pendant  quelque 
It^mps,  à  la  suite  d'une  affection  cérébrale  ou  typhoïque. 
Sans  parler  de  tous  les  troubles  nombreux  auxquels  sa 
santé  fut  en  proie  durant  le  cours  de  son  existence,  les 
fonctions  menstruelles  mal  établies ,  déviées  ou  suspendues 
à  diverses  reprises,  ont  été  pour  elle  l'occasion  fréquente 
de  mille  souffrances  et  accidents  divers.  L'hémorrhagie 
physiologique  était  souvent  suppléée  soh  par  des  hémopty- 
sies  soit  par  des  hémorrhagies  oculaires ,  nasales ,  cutanées. 
Puis,  c'étaient  des  névralgies  atroces  se  succédant  les 
unes  aux  autres,  de  telle  sorte  que  cette  pauvre  fille  a  pré- 
senté dans  sa  vie  comme  un  tableau  abrégé  des  perturba- 
tions nerveuses  et  sanguines  devenant  tour  à  tour  causes  et 
effets  les  unes  des  autres. 

Cinq  à  six  mois  avant  d'être  soumise  pour  la  première 
fois  à  notre  examen,  elle  avait  failli  mourir  au  milieu  des 
symptômes  d'une  péritonite  intense.  Au  mois  de  mai  1849 , 
nous  pûmes  constater  chez  elle  l'existence  d'un  état  chloro- 
anémique  des  plus  prononcés,  lequel  nous  parut  dominer 
tous  les  autres  phénomènes  pathologiques.  Rien  n'y  man- 
quait :  peau  de  même  que  les  ongles,  pâle,  exsangue, 
offrant  la  blancheur  mate  de  la  cire;  veine  sous-cutanées 
affaissées,  presque  vides  et  à  peine  perceptibles  ;  oppres- 
sion ;  palpitations;  souffles  cardiaque  et  carotidien,  etc. 

Pendant  longtemps  jusqu'au  commencement  de  1852, 
il  nous  fut  impossible  de  reconnaître  chez  cette  malade 


46  JOUUXAL  QE  MÉDECIHB» 

autre  chose  que  des  névralgies  intenses,  se  répétant,  à 
des  intervalles  irréguliers,   névralgies   faciale,   crânien- 
ne ,    gastralgie  ,   entéralgie  déterminant   souvent  ,  par 
Texcès  et  la    continuité   de   la   douleur  ,    de    véritables 
convulsions  hystériformes   suivies    de   défaillance   et    de 
lipothymies,  et  durant  lesquelles  les  battements  et  les  bruits 
du  cœur  avaient  une  énergie  telle  quon  se  prenait  à  ap- 
préhender une  rupture  immédiate  de  cet  organe.  Puis,  à  la 
sortie  de  ces  crises  effrayantes,  sç  montraient,  comme  par 
le  passé,  des  hémoptysies,  des  syncopes  suivies  d'une  £ii- 
blesse   extrême.    Presque   toujours  l'appétit  était   nul  ou 
Teslomac  rejetait  tout  ou  partie  des  aliments.  En  résumé, 
de  1849  à  1 852,  Tétat  des  choses  fut  celui-ci  :  Pertes  de  sang, 
pertes  nerveuses  répétées  et  presque  incessantes;   inso.m- 
nies;  alimentation  réparatrice  insuffisante,  et  malgré  tout 
cela  pas  d'amaigrissement  notable.  Joignez  à  ces  conditions 
physiques  une  sensibilité  morale  exquise ,  une  impression- 
nabilité  nerveuse  poussée  à  Texcès,   mises  Tune  et  Taulre 
pendant  tout  ce  laps  de  temps  aux  plus  rudes  épreuves  par 
des  chagrins  domestiques  et  de  violentes  émotions. 

Jusqu'alors  M.  le  docteur  Bernard  et  moi,  nous  avions 
cru  devoir  nous  borner  à  prescrire  en  principe  _  (car  les 
difficultés  de  lapplication  étaicntjiombreuses,  vu  Tintolé- 
rance  et  la  susceptibilité  excessive  des  organes) ,  un  régime 
substantiel  analeptique,  et  une  médication  tonique  où  le 
fer  entrait  avec  les  amers  comme  base  essentielle.  Mais  il 
fallut  trop  souvent  suspendre  ce  traitement  pour  faire  ex- 
clusivement la  médecine  des  symptômes  et  administrer  soit 
le  sulfate'de  quinine  contrç  la  périodicité  des  névralgies  , 
soit  les  narcotiques  de  tous  genres  contre  la  douleur ,  soit 
la  digitale  contre  la  vivacité  des  battements  cardiaques  , 
soit  enfin  les  astringents  contre  les  hémorrhagies ,  etc. 
Malgré  un  état  aussi  constitutionnel  et  aussi  invétéré,  en 
l'absence  de  toute  lésion  anatomique  des. solides^  du  moins 
reconnue  par  nous,  nous  ne  pouvions  ni  ne  voulions  sur- 
tout désespérer  de  notre  malade  ;  telle  qtait  notre  situation 
d*esprlt,  lorsqu'au  commencement  de  1852,  la  malade 
appela  pour  la  première  fois  notre  attention  sjujr  la  présence 
d'une  tumeur  douloureuse  qu'elle  avait  découverte  quelque 


JOG^AL   9B  Bf^I^Ci^.  47 

jours  auparavant  (li^ns  Ija  fosse  iliii|f|ue  gaiuelie,  dans  cel  en- 
droit même  d'où  irradiaient  le  plus  souvent  les  douleurs 
attribuées  à  une  entéralgie. 

C^tte  tuoneur,  peu  sensible  encore  à  la  vua,  était  par&î-^ 
tem^nt  appréciable   au  toucher:  d'une  dureté  pierreu<se, 
nou   mobile,  bosselée,  non  adbérenle  aux  os,  du  n)oif>s 
clans  la  partie  accessible  à  U  pniaiti,,  mate  à  l.i  percussion , 
excessiven]ieiH  douloureuse  à  la  pression,  elle  s'étendait  de 
la  région  pubienne  jusque  vers  1  hypochtondre  gauche  d'où 
elle  se  prolongeait  eo  mourant  vers  l'ombilic;  nous  n'y 
perçûmes janaais  ni  fluctuation,  ni  brnit  d'aucune  sorte.  De 
quellje  nature  était  cette  tt^meur?  A  quelle  époque  remon* 
tait  son  origine?  Quels  étaient  son  siège  précis  et  ses  rap-. 
ports?  Etait-ceune  tumeur  scrofiuleuse,  cancéreuse^  tuber-> 
culçuse,  séreuse  1   yolypeuse    ou    simplement    hypertro- 
phique?  Siégeait-elle  dans  l'ovaire,  dans  le  rein,  dans  la 
rate  ,  dj)p&  Tg^érus,  dans  les. parois  de  l'iptestin?  Fallait-il 
faire  rerppiUer  son  oiiigine  à  la  péritonite  donti  nous  avjons 
parlé  plu3  t^auli?  A^utiant  de.  questions  qu'il  nous  fallut  lais- 
ser indécises  pour  la  plppart.  Restaient  les  indications  à 
reipplir  ;  nous  crûmes  y  satisfaire  par  une  médecine  d'abord 
pal^iatjiv.e  et  nécessitée  pj^r  la  douleur  devenant  de  plus  en 
plus  intolérable  au  fur  et  à  mesure  que  la  tumeur,  prenait 
plfis  de  volume.et  qiie le  veiitre  se  ballonnait  sous  rinflueiice 
(le  ces  deux  cause»  réunies. 

.  Nous-euineSi  donc  recpuriS  a.des  applications  émoUientes 
et  narcotiques ,  plu^i  spécialement  a  des  bains  tièdes  qui , 
bien  que  coptre  indiqués  con^me  débilitants,  parvenaient 
souvent  seuls  à  SQ^Iag^r  la  patiente.  A  ces  moyens ,  nous 
joignîmes,  successivement  ou  simultanément,  l'emploi  des 
mer<curif^tti^ ,  de  la  cigtië,  des  vésiq^toires,  dit^  iodures.  de 
pota^ium  ^^  de.  fer,  et,  enfin,  de  purgatifs  doux.  Mais  le 
mal  augmentait  tpujpur^,  el  la  marche  et  le- mouvement 
devinrent  bientôt  impossibles,  grAce  à  la  douleur  et  aux 
tiraiUeipeqt^  ocK^asionnés  probablement  par  les  adhérences 
de.latmtneur. 

Déjà  plusif^ur;^  hémorrh^gies  intestinales  avaient;  eu 
lieu,  Igkvs^uau.  ippis  i^  déçen^br^  18£i2,  presque  un 
ap-  ap^ci^Sr  1(1  ipanif^staiion.  de   Texisit^oc^  de  la  tuûmir 


48  JOimilÂL  DB  HÉDBGHIB. 

abdominale,  nous  vîmes  une  nouvelle  phase  de  la  maladie 
se  dérouler  devant  nous. 

Les  douleurs  abdominales  étant  devenues  intolérables,  le 
ventre  énormément  ballonné  et  la  tumeur  plus  développée 
et  plus  sensible  que  jamais,  on  avait  plongé,  selon  Thabi 
lude  contractée  lors  de  ces  exaspérations ,  la  malade  dans 
un  bain  tiède.  A  la  sortie  du  bain ,  à  la  suite  d'efforts  très- 
douloureux  pour  aller  à  la  selle,  elle  avait  éprouvé  une 
syncope,  et,  en  vidant  le  vase  de  nuit,  on  y  trouva  des 
matières  sanieuses,  liquides  et  purulentes,  lesquelles 
avaient  été  jetées  à  tort.  La  malade ,  après  cette  crise,  était 
demeurée  dans  un  état  d'anéantissement  et  de  &iblesse 
extrêmes,  plus  grand  encore  qu'à  la  suite  de  ses  pertes  de 
sang;  mais  le  ventre,  nous  dit-elle,  était  à  peine  doulou- 
reux ,  et  s*était  complètement  aplati.  Je  m*empressai  im- 
médiatement de  vérifier  le  feit.  La  tumeur  était,  en  effet, 
affaissée  et  l'abdomen  devenu  souple.  Evidemment,  un  kyste, 
formant  en  tout  ou  en  partie  la  tumeur,  s'était  rompu  dans 
l'intestin,  et  une  voie  inattendue  s'ouvrait  à  la  guérison. 

Malheureusement,  cette  dernière  prévision  ne  se  réalisa 
pas;  peu  à  peu  le  ventre  se  bossela  de  nouveau  et  la  dou- 
leur reparut,  et,  au  bout  d'environ  un  mois,  les  tnèwes 
phénomènes  se  renouvelèrent.  Une  seconde  rupture  eut 
lieu,  et,  cette  fois,  nous  pûmes  constater  dans  les  matières 
excrétées  des  débris  de  pellicules  rougies  par  le  sang; 
l'une  de  ces  pellicules  avait  môme  conservé  une  forme 
globuleuse  et  contenait  des  débris  sanglants  et  in- 
formes et  quelques  matières  visqueuses  analogues  au  frai 
de  grenouille,  le  tout  disséminé  au  milieu  d'un  liquide 
trouble  et  jaunâtre.  L'aspect  de  ces  matières  expulsées  nous 
fit  penser  à  un  kyste  hydatique,  ce  dont  nous  eûmes  bien- 
tôt la  certitude,  car  à  quelque  temps  de  là  eurent  lieu  tantôt 
des  bémorrhagies  et  tantôt  des  évacuations  de  pus  ou  de 
sanie,  et  il  nous  fut  facile,  à  divers  reprises,  de  recueillir 
les  débris  de  vésicules  que  nous  faisons  passer  sous  vos 
yeux.  Plusieurs  de  ces  vésicules  sont  remarquables  par 
leurs  dimensions  et  l'épaisseur  de  leurs  parois. 

  partir  de  cette  époque ,  le  même  fait  se  montra  d'une 
manière  presque  périodique;  avec  ceci  de  particulier,  que 


JOUBRAL    DB  MÉDÈCIHB.  49 

chaque  évacuation  de  sérosité,  de  mucosité  et  de  pus  était 
suivie  d'une  prostration  beaucoup  pins  grande  que  celle  qui 
suivait  les  pertes  de  sang,  comme  nous  l'avons  déjà  fait 
remarquer.  Puis  la  malade  se  trouvait  soulagée  pour  une 
quinzaine  de  jours  ;  après  quoi,  la  douleur  augmentait  peu  à 
peu,  la  tumeur  se  bosselait  encore  et  se  durcissait,  et  ces  phé- 
nomènes locaux  allaient  s'aggravant  jusqu'à  une  nouvelle 
évacuation.    Nous    étions    donc    désormais   suffisamment 
éclairés, sinon  sur  le  siège,  du  moins  sur  la  nature  du  mal. 
1 1  y  avait  là  un  kyste  hydatifère  qui ,  soit  par  un  excès  de 
distension ,  soit  par  un  travail  inflammatoire,  se  brisait 
après  que  des  adhérences  protectrices  avaient  rendu  la 
communication  avec  une  portion  de  l'intestin  exempte  de 
dangers.  Mais  si  le  diagnostic  était  bien  établi ,  le  traite* 
ment  devait-il  en  retirer  quelque  bénéfice?  La  ponction 
nous  était  interdite  par  l'ignorance  du  siège  et  des  rapports 
du  kyste.  Restait  une  voie  indirecte,  celle  des  injections 
par  l'anus  ;  nous  y  eûmes  recours  tout  en  tremblant  de 
produire  une  péritonite  par  une  déchirure  des  parois  de  la 
fistule  ou  en  y  suscitant  un  travail  inflammatoire.  C'était 
une  dissolution  de  chlorure  de  sodium  que  nous  faisions 
injecter  par  cette  voie.  Ces  tentatives  réitérées  un  certain 
nouibre  de  fois,  déterminèrent  de  telles  douleurs,  que  nous 
jugeâmes  prud.ent  de  nous  arrêter  pour  le  moment,  quitte  à 
y  revenir  plus  tard.   Nous  nous  bornâmes,  pendant  fort 
longtemps ,  à  l'emploi  de  bains  d*eau  salée  et  à  des  purga- 
tifs doux ,  tels  que  le  calomel  ou  l'huile  de  ricin.  Les  acci- 
dents allèrent  en  s'éloigant  insensiblement  jusqu'au  mois 
de  juin  1853 ,  et  la  malade  put  marcher,  non  sans  douleur, 
avec  des  béquilles,  en  se  tenant  courbée  vers  la  terre  et 
inclinée  du  côté  gauche. 

Je  la  quiUai  à  cette  époque  ;  mais  sans  la  perdre  de  vue« 
Pendant  l'hiver,  son  état  s'aggrava.  Durant  Tété  de  1854, 
M.  le  docteur  Bernard ,  aux  soins  exclusifs  duquel  elle 
demeura  confiée ,  la  soumit  à  l'usage  de  bains  frais  avec 
douches  froides  sur  la  région  de  la  tumeur;  sous  l'in* 
fluence  de  ce  nouveau  moyen  ,  toujours  accompagné  de 
l'emploi  de  purgatifs  doux  et  de  la  médecine  nécessitée  par 


I 


90  JQWN^X.  9E  Mi^Wf^qi* 

l^s  syoïplônf^^s,  Télal  local  et  Véi^i  gér^^rM  saîpendèrei^l 
notablement ,  la  tumeur  s^affaissâ  de  pU)$  eii  plu$  »  qevipt 
|)resc[i|e  indolore,  les  évacuations  périodiques  cessèrent 
coqïnl^iemenl,  et  la  majade  gui  maVcner  sjins  béqjiilles» 
avec  moins  de  souffrances  et  en  se  tenapt  4p.  mcrins  en 
moins  courbée.  Celle  anpélioration  se  soqtjnt  dlix-huil 
mois  environ.  Pepuis  (|uelques  fpois,  la  tuaieur  fait  saillie 
A^  noijveau,  reçjevien^  douloureuse,  quoiq^iie  à  uq  ri^oindre 
degré  que  par  le  passé,  et  des  évaçij^atipns  an^ogqes  à 
celles  cj'autrefois  reparaissent. 

^Yl  eu  occsjsion'de  voir  i^ernièr^ment  Anne  Q...  J^es  pal- 
(Hita^lbns  etl^  dyspnée,  qvjj  lônt  tq^yiçMçMpHCDaeptéç ,  sont 
i^^aihtenant  presque  permaaentes  et  a^gVperitpnt  p^f  le 
réoindre  "mouvement  çl  la  marçli<^;  î^is^i  flie  toi^t-ellèfi 
craindre  un  coipmehcement  d'î^ffedipip.  organique  c]|^  cœur, 
rèsu|m.*  des  ipouyements  (jesordoncjés  ç.t  tHR^u|tueusf  ^^%- 
juéls  cet  oçgànç  esf  en  pmç  clepuis  sj  iQngtççp, j^  sovîs  fip- 
^uencé  prolongée  delà  diiuleur'p^sique  etmoca(^. 

lUFjLJixiofis. —  Cette  observaiipa,  Messiei^ra,  nous,  ferait 
offrir  uadottl4e  iatécèt:  d'abord  celui  qui  naît  du  ^il  M 
liH-nA4me,  de  cette  pocbe  hydaiiqftie  se  romf^ânt  sfM)ntaoé* 
m^M  à  dWerses  ireprises  et  laissant  échapj^r  au  delw)«s  par 
0»»  voiif  pAtureik  et  par  suide  iuofeimvè  pour  lai  naabMJk , 
1^  oiati^ras  qu'Ole  contient ,  bit  cuciei»  à  ajouter  à  bsc^ur- 
coup  d'airtres  de  ce  genre,  duresie;  nous  n'ipsisteroi^  pas 
s^  ce,  prjemier  ppiat  aMquel  la  hécvoscopie^  par  la  révéla- 
tÎQAd^s  détails  anatooûqàes,  donoerait  stu^e  tout  riniéeét 
d(f^  il  est  susceptible. 

Le  second  aspect,  qui  aibtire  plus  vcriontierç  niHve  es|^ri|, 
e^t  oeliiii  qui:  a  trait  aus  cieconstaaees  au  miJiif&u  df squelLes 
s*est  développée  cette  tumeur,  et  à  la  poss^iliié.  de  U  gu^ci- 
soi»^  maJ^é  ^. gravité  dii  ptooo^ic,  àfiu%  objets  sur  les- 
qtteknous  vous  (kQianderoQjS  lapefinission,  d'appeler,  q/ff^ 
qUes  iiis^oAs  votive  atteniioo  ;  la  patbogénie  et  la  curabiliVé 
de  ces  productions  morbides  aeoîdealelles  peuveo/l^  eo 
effrt,  ôt«e  encore  raagées  aa  nosibce  .d<{s  (kMaraliik  <j^  la 
saieôeemédiifeale. 

Seua  le  rapport. de  Tétiologie,  aous  avoo^  ici  soua^  les 
yeiix,  uye  jeune  fille  en  proie  toute  sa  vie  à  des  déviations 


OU irré^ulftrilés  moisir uell«s,  à  des  névroses  opiniâtres,  et, 
finalement,  un  étal  chloro^anémique des  plus  prononcés. 
Qu#ud  nous  la  vîmes,  pour  la  première  fois,  ret  état  était 
deyç^DU  invétéré  et  constitutionnel.  Maintenant,  quelle  cor- 
réûtipa-yu-t-il  à  établir  entre  cette  manière  d*étre  de  Té- 
COf^on^ie  et  1  apparition  des  liydHtides?  Nous  ne  savons, 
imis  i|  nous  semble  ri^ncontrer,  dans   le  cas  qui   nous 
pccupe,  Iq  réunion  des  conditions  les  plus  fnvorables  à  la 
pcfi^lHHion  de  cf  s  parasites  :  cau$es  débilitantes  de  toutes 
sortet»,  pertes  de  sang ,  perles  nerveuses  presque  continues, 
cb^grH^  et  émotions  (iouloureuses  incessantes,  puis  modi- 
fication spéciale   et  profonde  de  la  crase  du   sang  telle 
q^*^le.  ft^^iste  dur»  la  chlorose.  Voilà  pour  les  influences 
c€44imA9ç  et  générales,  causes  prédisposantes  constituant 
r^piittide  de  l'économie  a  ù(re  envahie  par  ces  produc- 
tions parasites.  Nous  premlrons  ensuit*^  en  considération  les 
&y<nptôfnes  d'infi|«mmaiion  abdominale  survenue  en  1848, 
ei  qui  pourraieot  bien  être  le  point  de  départ  initial  de  la 
fbrni^tiQo  i^t  do  développement  du  kyste.  Nous  serions ,  en 
^iSéi,  Vfilontiers  porté  à  penser  que  ks  états' pathologiques 
(W  f'écQQomie ,  résultant  d*un  déiàut  de  quantité  dans  hi 
QWissct  du  sang ,  ou  plutôt  d'un  défaut  de  proportion  de  cer- 
tains, de  $es  élémeuts,  accondpagné  presque  toujours  de  pro- 
fmides  perturbatious de  l'innervation,  sont  avec  les  inflam^ 
inations  locales  intercurrentes,  et  qui  jouent  ici  le  rôle  de 
cap^   occasionneik ,  les  meilleures  conditions  pathogé- 
ni<)U^  de  pareilles  productions. 

U  f^'esi  pas  rare,  en  oulre,  de  voir  Tanémie,  eHe-même, 
à  U|)stifr  des  pyrexies,  favoriser  h  dévelopipement  d'inflam- 
mations locales,  inflammations  qui  ont,  il  est  vrai, un  ca- 
çb^  sfiépial ,  noAKS  n'en  sont  que.  pins  redoutables  et  plus 
re)>€^Ue$;  eicette  cause  prédisposante,  des  phlegmasies  prête- 
r^  k  (ies  considéraiions  théoriques  et  pratiques,  que  nous 
nei  oous  seiUo^s  ni  la  vof ont^,  ni  surtout  la  force  d'aborder  fci. 
Noua  nous  boroberons  à  cçnstaler  cocnme  un  fait  acquis  à 
ï^fdmnae  journalière  la  cotncid4»nce  fréquente  d*url  état 
dapii^aMvrisseinent  du  sang  et  de  l'^iptitiude  de;  ces  organis- 
ons, appaa^vris  à  conAracter  avec  une  extrême  fecititédes 
inflammations.  Cela  se  voit  surtout  après  les  perles  brusques 


52  JOCKSÂL  DE  HÉDBCINE. 

et  abondantes  de  sang ,  telles  gae  celles  qui,  trop  souvent, 
accompagnent  ou  suivent  la  parlarition. 

Parlons  enfin  du  traitement  :  Les  pensées  que  nous  ve- 
nons d'émettre  sur  les  causes  de  la  production  de  cette  tu- 
meur bydatique,  résument  aussi  l'esprit  de  la  thérapeutique 
instituée  en  cette  circonstance ,  et  qui  a  été  celui-ci  :  Tenter 
de  modifier  Tétat  anémique  général,  combattre  ou  prévenir 
un  travail  inflammatoire  exagéré,  dans  la  tumeur  ou  la 
région  occupée  par  elle,  pouvant  devenir  fatal  à  la  malade; 
enfin,  provoquer  directement  ou  indirectement  la  destruc- 
tion du  kyste,  considéré  comme  un  résultat  des  causes  énu- 
mérées  ci-dessus. 

La  cbloro-anémie  a  été,  il  faut  Ta  vouer,  peu  modifiée, 
mais,  on  peut  croire  que  l'influence  du  régime  ana- 
leptique et  de  la  médication  tonique  Ta  empêché  d'attein- 
dre ses  dernières  limites.  Quant  aux  moyens  dirigés  contre 
la  tumeur,  un  seul  a  eu  du  succès,  l'emploi  des  douches 
froides  auxquelles  a  eu  recours  le  docteur  Bernard  ,  emploi 
qui  fut  suivi  de  dix-huit  mois  d'engourdissement  et  de 
repos  de  la  tumeur.  Aussi ,  notre  confrère  se  propose4-il 
de  revenir  à  ce  .moyen  c^t  été.  A  défaut  de  réussite  plus 
complète  et  radicale,  ne  serait-ce  pas  le  cas  d'avoir 
recours  à  l'acupuncture  d'Aug.  Bérard ,  ou  à  l'électro- 
puncture  ?  Ne  serait-ce  pas  encore  le  cas  d'appliquer ,  avec 
quelque  modification  ou  substitution  dans  le  choix  des* 
substances  ,  la  méthode  employée  par  Pravçz  dans  les 
tumeurs  anévrismales,  et  cette  introduction,  au  moyen 
de  l'électro-puncture,  ne  remplacerait-elle  pas  ici  avanta- 
geusement les  injections  qu'une  ponction  pr^lable  permet- 
trait de  &ire  en  d'autres  circonstances? 

Enfin ,  ne  pourrait-on  pas  encore  recourir  à  l'application 
d'un  cautère,  seul  moyen  qui  soit  parvenu  à  soulager  un 
malade,  que  j'ai  eu  occasion  de  voir  dans  le  service  hospi- 
talier dirigé  par  notre  honorable  président,  à  Saint-Jac- 
ques. Ce  malade  est  porteur,  depuis  sept  ans,  je  crois,  d'un 
kyste  bydatifère  dans  l'un  des  reins  et  l'expulsion  des  byda- 
tides  se  fait  par  le  canal  de  l'urèthre;  fexcrétion  desento- 
zoaires  est  constamment  suspendue  ou  ralentie  par  l'appli- 
cation d'un  cautère. 


rd 


Des  ObservationSfS  mètres^  à  peu  prés,  au^ttessus  des 


jiriO 


MOIS. 


JANVIKK. 


FÉVRIER. 


MARS. 


MAI. 


JUIN. 


PLUIE  TOMBÉS 


7    I 


Ma 
Mo 
PJii 
Moi 
Val 


UR  LA  PLATR-FORME. 


0  ln^t.  OUO  luill. 


Mo 

2^,^        0  niRt.  «37  mill. 
Mo 

Val 


Mo 
Mo 

PI 
M< 

Val 


Mi> 
Mo 
Plu 
Mo 
Va 


Mo 
Rio 

Plu 
Ma 

Val 


Mfl 

M 

Plu 

Ma 

Val 


H  m^t.  042  iniM. 


0  met.  0«3  iniU. 


0  met.  046  uiill. 


PHASES 

DE  \.k  LUNE 


P.  L.  le    3,  À  %  h.  88'm. 

D.  il.  le  11,  h  0  h.  13*   * 

N.  L   I«I8,  A  N  h.  47*in 

P.  O.  le  2%  à  I  II.  4b 'm 


P.  L.  le    2,  à   3  h.  .51*m. 
D.  Q    le    10,  à  3  h.  Jh*Di. 
N.  !..  le  16,  A  6  h.  57*  s. 
P.  Q.  Ir23,  ih    3h.  4)' s. 


P.  L.  lu    3.  à  U  h.  \V  %. 
I>.  Q.  le  11.  à  2  h.    9' s. 

I\'.  L.  le  18,  i     4  h  35*111 
P.  O.  le  23,  h  11  h.  33* lu 


P.  L.  le  2,  i  2  h.  38*  s. 
I).  Q.  le  9,k  9  II  46*  s. 
N.  L.  le  16,  à  3  h.  J4' ». 
P.  (I.  le  24,  A  6  h.  6'  m. 


P.  L.  le  2,  à  4  h.  iV  m. 
D.  Q.  le  2,  i  Sh.  Il*iu. 
N.  L.  le  16,  k  2  h.  23*  m. 
P.  q.  le  24,  i  Oh.  12*  m. 
P.  L.  Ir  31,  à    2  h.  53*  s. 


D.  Q.  le  7,  A  7  h.  57* 
IN.  L.  te  14,  à  2  h.  3K* 
P.  Q.  le  8ï,  à  5  h.  r  & 
P.  L.  le   2»,  A  11  h.  23 


s. 


au'desstis  du  sol,  et  40  mètres,  à  peu  près,  au-dessus  des 
BTTB  AÎNÉ,  à  Nantes. 

)  1855. 


ECTIOri 

ÉTAT 

PLUIE  TOMBÉE 

PHASES 

»  VENTS. 

DIT  CI  Kl 

SUR  LA  PLATE-FORME. 

DE  1  A   LUKE. 

. 

Beaux  jours 

S» 

K.               1 

Couvert 

2 

st                S 

Pluie 

21 

E.               1 

u(l                 8 

Gelée 
Biouill.-ird 

0 
fi 

0  vaH.  0£8  luill. 

D.  Q.  le    fi,  à    t  h.  37'  s 
l\.  L.lel4,  ib     4   b.  lO'i,, 

O.               ^1 

Vcnl 

25 

P.  Q.  le  22,  A    7  h.  59' m 

>.          u 

Gr^le 

0 

P.  L.  le  2ï,  à    6  h.  30' m. 

O.               1 

Neif;e 

0 

lomierrp 

y 

«. 

fi 

Kprfux  jours 

29 

E. 

4 

Couvert 

'f 

si 

4 

IMuio 

7 

D.  0    le     4,  ?  9  h.  30'  s. 

K. 

u 

(u'ice 

0 

N.  L.  le  12,  à  7  h   2'  s 

iid 

4 

Urouillard 

fi 

0  mh\.  002  mili. 

P.  Q.   Ir  20,  à     8  h.  iV  s. 

O.                    !    1 

Vint 

1/ 

P.  L.  le  27,  A    1  h.  30'  s. 

)■                 7  1 

GrélQ 

0 

0. 

I 

^eige 
runnerro 

0 

1 

^. 

3 

B.'aux  jours 

2fi 

E. 

K 

Couvert 

4 

st 

E. 

IJ 

Pluie 
((•■tée 

(1 

D.  Q.  le    3,  *  «  h.  33' m 

ul 
0. 

,1 

Urouillitra 

14 

0  met.  041  mlll. 

TV.  L.  le  11,  à  11  h    l'm. 

5 

Vtuil 
(irélc 

18 
0 

P.  O.  le  19,  A     7  h.   lO'm 
P.  t.  le  25,  à    9  h.  35'  s. 

O 

1 

.\uige 

0 

i'oDuerre 

0 

». 

(i 

Beaux  jours 

2fi 

E. 

2 

Couvert 

5 

si 
E. 
id 
O. 

». 

1 

Pluie 

23 
0 
Ib 
11 

(» 

1).  Q.  le    2,  h  11  h.  14'  s. 

B 

Gelée 
Brouillard 

0  met.  079  mill. 

N.  L.  le  11,  à    3  h.  .13' m 
V.  Q.  le  18.  A3  h.  47 's. 
P.  L.  le  25,à7I>.  se'  m. 

3 

lu 

Vent 
Gr«le 

0. 

1 

Neige 
lonnerre 

0 
0 

f. 

7 

Beaux  jours 

u 

•  E. 

i 

Couvert 

12 

st 

10 

Pluie 

5 

D.  Q.  lo    1,  à  5  h.  2fi's. 

E. 

1 

G»lée 

5 

TV.  L.  le   9,  à  7  h.  40'  s. 

id 

/i 

Brouillard 

23 

0  met.  003  mill. 

P.  Q.  Ie46,  i    II  h.  24' s. 

0. 

1 

Vent 

13 

P.  L.  le  23,  à  8  h.  1'  s. 

1. 

;i 

GrAlu 

0 

O. 

' 

^eige 
Tonnerre 

0 
0 

5 

Beaux  jours 

81 

E. 

2 

Couvert 

10 

it 

8 

Pluie 

10 

D.  Q.  le    1,  A  2  b.  20'  s. 
N.  L.  le    9,  àlOh.  27'm. 

R. 

i 

Gelée 

10 

id 

5 

Brouillard 

2« 

0  met.  031  mill. 

P    Q.  le  Ifi,  à  7  h.  6'  di. 

O. 

4 

Vent 

12 

P.  L.  le  23,  ft  10  h.48'm. 

). 

5 

Grêle 

0 

0.  0.  le  31 ,  i  0  h.  13'  s. 

« 

» 

\e:ge 
Tonuerro 

1 
0 

JOURNAL 


DE  LA 


SECTION  DE  MEDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


»^<il»<Bw 


sBULLËTm  DES  SÉAKCES. 


Séanee  du  14  mars  i8£6. 

PBÉSIDEKCE  DE   H.    MAHOT,    PBÉSIDENT. 

ilf.  Malherbe  présente  à  .la  Section  des  pièces  analo- 
miques  recueillies  par  lui  le  jour  même  ,  e]t  provenant  <jbi 
ca<javre  d'une  femme  morte  dans  son  service  de  rHûtel- 
Dieu,  quelques  jours  auparavant. 

5 


54  JOUBNAL  DE  MÉDECINE. 

Cette  femme,  malade  depuis  18  mois,  fîit  prise,  à 
la  suite  d'une  frayeur ,  de  chloro-anémie  et  de  névropa- 
thie  générale.  La  peau  devint  grise  ou  bistre ,  et  cette 
coloration  persista  jusqu'à  la  mort ,  survenue  subitement. 
Les  organes  mis  par  M.  Malherbe  sous  les  yeux  de  la  Sec- 
tion ,  sont  les  reins  et  les  capsules  surrénales.  Le  rein 
droit ,  un  peu  hypertrophié ,  était  le  siège  d'une  hypé- 
rémie  simple  ;  la  capsule  du  même  côté  est  peu  dé- 
formée ,  mais  remplie  de  tubercules.  Le  rein  gauche  est 
atrophié  et  farci  de  tubercules  caséeux  ou  ramollis  et  en- 
kystés ;  la  capsule  surrénale  gauche  arrondie  a  la  forme 
d'un  cylindre  et  est  pénétrée  d'une  multitude  de  petits  tu- 
bercules. Ces  productions  ont  été  également  rencontrées 
dans  les  ganglions  cervicaux.  Tous  les  autres  organes 
étaient  sains. 

H.  Malherbe  appelle  l'attention  de  l'assemblée  sur  cette 
couleur  bistre  de  la  peau  signalée  par  Addison ,  dans  les 
affections  des  capsules  surrénales.  Toutes  les  maladies  des 
capsules  ,  quelles  qu'elles  soient,  inflammation,  dégéné- 
rescence cancéreuse  ,  tuberculisation  ,  etc. ,  donnent 
presque  toujours  lieu  à  cette  altération.  —  Il  se  propose , 
du  reste ,  de  lire  ultérieurement  l'histoire  détaillée  de  h 
maladie  qu'il  a  observée  dans  son  service. 

M.  Leray  a  eu  l'occasion  d'observer  un  malade  dont 
la  peau  prit  la  teinte  brune  du  créole  le  plus  foncé.  Ce 
malheureux  ,  dont  l'autopsie  n'a  pas  été  faite  ,  succomba 
au  bout  de  15  mois  de  maladie,  après  avoir  vu  dispa- 
traître  graduellement  ses  forces ,  et  perdu  complètement 
le  sommeil  et  l'appétit. 

M.  Aubinais  a  souvent  rencontré  chez  les  femmes 
grosses  une  coloration  bistre  plus  ou  moins  foncée ,  par- 
tielle ou  générale  ,  qu'il  croit  n'être  pas  toujours  due  à 
la  même  cause.  Il  conclut  de  la  présence  des  tubercules 
existants  dans  plusieurs  des  organes  de  la  malade  de  H. 
Malherbe  ,  qu'ici  la  teinte  bistre  ne  doit  pas  être  attri- 
buée à  l'affection  des  capsules ,  mais  bien  à  une  tuber- 
culisation générale ,  dont  l'influence  aurait  retenti  dans 


JOUBIfAL  DE   MÉDBCII9S.  55 

toute   l'économie  et  déterminé  une  altération  de  la  sécré- 
tion pigmentaire. 

M.  Malherbe^  tout  en  reconnaissant  que  la  couleur 
bistre  est  l'effet  d'une  altération  de  la  sécrétion  pigmen- 
taire ,  n'en  persiste  pas  moins  à  croire  à  la  corrélation  qui 
existerait  entre  cette  teinte  et  la  maladie  des  capsules ,  cor- 
rélation bien  établie  par  Addison.  Toutefois  ,  on  n'a  pu 
encore  déterminer  quelles  étaient  les  maladies  des  cap- 
sules qui  donnaient  lieu  à  cette  coloration.  Aussi ,  dans  la 
circonstance  présente ,  n'a-t-il  pas  eu  d'autre  but  que 
d'apporter  un  fait  de  plus  à  l'appui  des  assertions  du  mé- 
decin  anglais. 

M.  Lequerré  demande  si  les  urines  ont  été  analysées , 
si  elles  ont  varié  en  quantité  ou  en  qualité?  Il  ajoute 
que ,  selon  lui ,  la  tuberculisation  ayant  été  générale , 
la  coloration  bistre  ne  saurait  être  attribuée  à  la  maladie 
des  capsules. 

M.  Malherbe  répond  que  l'examen  des  urines  a  été 
omis  ,  mais  qu'il  ne  peut  considérer  la  tuberculisation 
comme  ayant  été  générale  ,  celle-ci  n'ayant  pas  envahi  les 
organes  qui ,  d'habitude ,  sont  pour  elle  l'objet  d'une 
triste  prédilection. 

La  discussion  étant  épuisée  sur  ce  sujet ,  M.  Malherbe 
lit  une  Observation  de  néphrite  albumineuse ,  avec  encé- 
phalopathie  chronique  (1). 

M.  Petit  demande  la  parole.  Il  fait  observer  que  les 
aliénés  stupides  ne  sont  pas  toujours  atteints  d'œdème  ; 
chez  eux,  au  contraire,  Tanasarque  est  l'exception.  En 
outre  ,  beaucoup  d'aliénés ,  considérés  comme  apparte- 
nant à  cette  catégorie  ,  ne  sont  stupides  qu'en  appa- 
rence ;  si  ces  malheureux  ne  peuvent  exprimer  aucune 
idée ,  cela  tient  aux  hallucinations  dont  ils  sont  obsédés , 
et  ils  sont  alors  susceptibles  de  guérison.  Seuls  les  alié- 
nés stupides ,  atteints  d'œdème ,  sont  complètement  dé- 
nués d'idées. 


^1)  Voir  plus  loin ,  p.  71. 


56  JOtTEN^L  DE   VÉDECHHE. 

Af.  Malherbe  dit  qu'il  n'a  entendu  parler  que  des 
aliénés  stupides,  dont  l'histoire  est  rapportée  par  M.  Etoc 
de  Mazie. 

Gomme  M.  Petit,  il  ne  croit  pas  la  stupidité  nécessai- 
rement mortelle  et  incurable;  Texistence  même  de  l'œdème 
n*est  pas  toujours  un  signe  fâcheux. 

M.  Aubinais  assimile  l'état  de  la  malade  de  M.  Malherbe 
à  celui  de  certaines  femmes  grosses  atteintes  d'albutni- 
nutie.  Pour  lui,  les  attaques  éclamptiques  de  cette  ma- 
lade sont  l'effet  de  Talbuminurie  et  non  de  ses  chutes  sur 
la  fête. 

L'ordre  du  jour  appelle  M.  Trastour  à  lire  une  obser- 
vaixàn  ayant  pour  titre  :  Sytnplômes  graves  produits  par 
r administration  iu  èeigle  ergoté ,  à  la  dose  de  trois 
grammes ,  dans  l^ espace  d'une  heure,  dans  un  cas  dhé- 
morrhagie  utérme  après  îa  délivrance  (1). 

Cette  lecture  est  suivie  ele  diverses  réflexions. 

M.  Leborgne  trouve  la  dose  de  3  grammes  de  seigle 
ergoté  beaticoup  trop  forte;  il  ne  dépasse  jamais  t 
granmie  à  1  gramme  50.  Il  félicite  M.  Trastour  de  sa 
sincérité ,  le  récit  d'un  mécompte  étant  souvent  jrfos 
utile  à  la  science  que  celui  d'un  résultat  prévu  et  cou- 
ronné de  succès. 

'M.  ittiMnawTi'a  jamais  vu  d'empoisonnement  occasionné 
par  l'ingestion  de  3  grammes  de  seigle  ergoté.  Les  Anglais 
(Simpson)  l'administrent  à  la  dose  de  4  grammes,  5 
grammes  et  mètne  8  grammes ,  sans  provoquer  d'acci- 
dents toxiques.  Lorsqu'ils  voient  survenir  des  boûrdonne- 
nfients  d'oreJFle ,  de  l'hébétude  ,  ils  -donnent  un  vomitif 
qui  met  fin  à  ces  symptômes. 

M.  Malherbe  est  porté  à  rattacher  l'effet  toxique  pro- 
duit t^her  la  malade  de  M.  Trastour  à  une  idiosyncrasie 
qui  peut  ? e  rencontrer  accidentellement.  Quand  à  la  pra- 
tique des  Anglais,  H  se  l'explHque  par  la  prédoinfinance 
du   tempérament   lymphatique  dans  cette    nation ,  d'où 


(1)  Voir  plus  loin,  p.  88. 


joubual  de  NÉD^çnii^.  57 

la  nécessité  de  doses  exagérées  de  ce  médicament ,  pour 
obtenir  de  lui  une  stimulartion  saiRsanle. 

M.  Mauduit  fait  remarquer  que  le  seigle  ergoté  a  une 
action  qui  se  prolonge  longjtemps  après  ao»  ingestion. 

Dans  sa  pratique  ,  pour  que  ce  médicament  soit  mieux 
supporté  ,  il  a  l'habitude  de  Tadministrer  dans  de  Teau  de 
menthe.  Coo>me  M.  Aubinais,  il  n'a  jamais  vu  3  grammes 
de  seigle  ergoté  produire  d'accidents  sérieux. 

M.  Leray  porte  toujours  avec  lui  du  seigle  çrgoté.  Les 
résultats  fournis  par  sa  pratique  lui  ont  démontré  que  le 
seigle  ergoté,  même  à  fortes  doses ,  n'agit  pas  immédia- 
tement. 11  attribue  l'intoxication  rapportée  par  H.  Trastour 
au  trop  grand  rapprochement  des  doses. 

M.  Trastour  répond  que  les  accoucheurs  modernes  ont 
rhabitude  de  donner  le  seigle  ergoté  de  40  en  10  minutes, 
Vaction  du  médicament  se  manifestant  le  plus  souvent  au 
bout  de  ce  temps.  Si  M.  Leray  n'a  pas  observé  une  action 
aussi  prompte  chez  ses  malades ,  cela  lui  paraît  l^enir  à 
ce  que  le  seigle  employé  par  lui  était  trop  vieui^ ,  partant 
moins  actif.  Dans  le  cas  dont  il  s'agit ,  force  lui  a  été  de 
rapprocher  les  doseç,  l'hémorrhagie  utérine  devenant 
menaçante  pour  la  vie  de  la  malade. 

M.  Cormerais  soutient  en  opposition  avec  les  assertions 
émises  par  St.  Bouchardat  ,  que  le  seigle  ergoté  ne  p(}rd 
pas  de  ses  propriétés  en  vieillissant. 

M.  HÊabU  dit ,  qu'en  effet ,  le  seigle  ergoté  livré  par  les 
pharmaciens  est  pulvérisé  longtemps  à  l'avance  ,  malgré 
les  recommandations  contraires  des  médecins ,  et  cepen- 
dant son  action  est  tout  aussi  intense.  Il  agit  au  bout  de 
15  ou  20  minutes  ,  et  son  action  se  fait  sentir  pendant  une 
demi-heure  environ.  M.  Mabit  ne  dépasse  jamais  2  grammes 
à  3  grammes ,  donnés  par  doses  de  0  gramme  50. 

iV.  Deluen  préfère  le  seigle  pulvérisé  à  l'avance  à  la 
poudre  récemment  pulvérisée ,  celle-ci  préparée  précipi- 
tamment étant  généralement  en  grumeaux. 

Il  donne  également  la  préférence  à  la  décoction  ,  qui 
est  plus  facilement  absorbée  par  les  malades. 


58  JOUBNAL  DB  MÉDECUŒ. 

Séance  du  H  acril  1856. 

PBÉSIDEIICE  DE  M.    HÂHOT  ,    PRÉSIDENT. 

Ouvrages  reçus  par  la  Section  : 

l""  La  Fièvre  typhoïde  à  l'hôpital  Paurtalès,  pendant 
l'aunée  1853.  Notice  statistique,  par  le  docteur  Edouard 
Cornaz,  de  Neufchâtel  (Suisse). 

2°  Recherches  sur  le  développement ,  la  propagation 
et  la  transmission  du  choléra ,  par  le  docteur  Huette  (de 
Hontargis)  1855. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  lecture,  par  M.  Malherbe, 
d'une  observation  de  tibberculisation  des  capsiUes  surrénaleSj 
dont  il  a  déjà  donné  verbalement  quelques  détails  dans 
la  dernière  séance. 

M.  Aubinais  lui  succède  pour  lire  un  travail  intitulé  : 
Appréciation  de  la  méthode  de  Deventer,  ayant  pour 
but  de  faciliter  la  version  (1). 

M.  ifabit  a  rencontré  quelquefois  dans  sa  pratique  de 
ces  cas  difficiles ,  à  obliquité  antérieure  de  Tutérus  très- 
prononcée.  Il  se  rappelle  entre  autres  faits  de  ce  genre , 
celui  d'une  femme  tellement  obèse ,  que  cette  obésité  ne 
permettait  pas  d'apprécier  chez  elle  Tétat  de  grossesse  ; 
déjà  lors  de  deux  premiers  accouchements ,  il  lui  avait 
fallu  avoir  recours  au  forceps  et  surmonter  bien  des  diffi- 
cultés. Après  un  second  mariage ,  cette  femme  devint 
enceinte  une  troisième  fois ,  et  la  procidence  de  l'abdomen 
sur  les  cuisses  était  portée  plus  loin  que  jamais.  Instruit 
par  les  obstacles  rencontrés  dans  les  précédentes  couches, 
M.  Mabit ,  nonobstant  l'état  pléthorique  de  sa  cliente ,  la 
lit  coucher  de  manière  que  le  bassin  se  trouvât  plus 
élevé  que  la  tête  et  la  poitrine.  Grâce  à  cette  position , 
l'abdomen  fut  refoulé  en  haut  et  en  arrière ,  et  l'accou- 


(1)  Voir  plus  loin,  p.  95. 


JOUBNÂL  DE  MÉDECINE.  59 

chement  singulièrement  facilité.  Dans  d'autres  cas  ana- 
logues ,  la  compression  à  l'aide  de  la  main  ou  des  ser- 
viettes  lui  ont  également  été  utiles. 

Ces  faits ,  dans  lesquels  la  présentation  de  Tenfant  ne 
nécessita  pas  la  version  ,  il  est  vrai  ,  lui  paraissent  cepen- 
dant tendre  à  démontrer  l'utilité  dont  peut  être  l'appli- 
cation de  la  méthode  de  Deventer.  Grâce  à  l'emploi  de 
cette  méthode ,  il  put,  dans  une  autre  circonstance ,  où 
existait  une  rétroversion  des  plus  exagérées,  chez  une 
femme  primipare  ,  atteindre  le  col  utérin  derrière  le 
pubis  ,  raccrocher  avec  le  doigt,  et  terminer  enfin  l'accou- 
chement. 

L'ordre  du  jour  appelle  M,  Hahot  à  lire  une  observa- 

lion  de  tumeur  squirrheuse  développée  dans  le  médiastin 

antérieur,  avec  compression  de  la  veine-cave  supérieure 

et  oRdéme  de  toutes  les  parties  ' sus-diaphragmatiques  (1). 

La  séance  est  levée  après  cette  lecture. 


Séance  du  16  mai  1856. 

PRÉSIDENCE   DE   Bf.   MÂHOT ,   PRÉSIDENT. 

L'ordre  du  jour  appelle  à  la  tribune  M.  Marcé ,  pour 
lire  un  travail  ayant  pour  titre  :  Notes  sur  quelques  cas 
de  fièvres  eruptives  (2) ,  recueillis  à  l'Hôtel-Dieu  (service  de 
M.  Marcé),  par  M.  Vallin,  élève  interne. 

Cette  lecture  donne  lieu  à  diverses  observations. 

M.  Hélie  n' adhère  pas,  sur  tous  les  points,  aux  opi- 
nions qui  viennent  d'être  énoncées. 

Il  trouve  d'abord  une  différence  notable  entre  le  mode 
d'administration  de  la  belladone ,  adopté  par  M.  Marcé  , 
qui  a  eu  recours  a  des  doses  assez  élevées  et  pendant  un 


(1)  Voir  plus  loin,  p.  105. 

(2)  Voir  plus  loin,  p.  Ui. 


M  JOUIMAL  BB  MÉDBC^B. 

temps  fort  courte  et  celai  préconisé  par  les  naédecins  allé- 
maods  «  pour  lesquels  les  vertus  anti-scaFiatineoses  de  la 
belladone  sont  incontestables.  Ainsi  «  Habnemann  en  par- 
ticulier, donnait  la  belladone  à  doses  atomiques  durant 
plusieurs  mois,  et  ne  croyait  à  son  efficacité  préservatrice 
que  lorsqu*au  bout  de  ee  temps  elle  provoquait  une  érup- 
tion spéciale. 

Ensuite,  on  a  omis  de  dire  si  ces  trente  eofiiots  dont 
il  est  question,  avaient  ou  n'avaient  pas  eu  antéoédemment 
la  scarlatine  ;  dans  Tignorance  de  cette  circonstance  v  il 
croit  les  argunoents  favorables  aux  vertus  prophylactiques 
de  la  belladone ,  puisés  dans  ces  faits,  frappés  de  nullité. 

Pour  ce  qui  est  de  l'existence  de  la  scarlatine  sanfs  érup- 
tion ,  M.  Hélie  ne  diffère  pas  d'opinion  avec  M.  Marcé.  Il 
cite  à  Tappui  de  cette  manière  de  voir,  le  fait  d'une  ieuite 
femme,  qui  fut  prise  de  fièVre,  de  vomissements^  et  pré- 
senta une  angine  scarlatineuse  avec  enduit  pultacé  et  rou- 
geur  de  la  langue.  Pendant  ce  temps,  le  mari  eut  une 
scarlatine  des  mieux  caractérisées,  et,  au  moment  où 
l'éruption  avait  atteint  chez  celui-ci  son  plus  haut  degré 
d'intensité,  sa  femme  éprouva  une  desquamation  mani- 
feste. 

Enfin,  il  semble  à  itl.  Ilélie  qiié  l'on  a  confondu  à  tort  l'an- 
gine pultacée  et  l'angine  pseudo-membraneuse,  qui  sont  loin 
d'être  identiques.  Pour  lui,  sauf  deux  ou  trois  cas,  il  re- 
garde le^  angines  dont  on  a  parlé  comme  des  angines 
pultacées;  ces  dernières  se  guérissent  en  générai  assez 
vite  sous  l'influence  des  émoliients ,  sans  qu'il  sort  utile 
de  faire  intervenir  la  cautérisation. 

Il  faut  bien  distinguer  l'angine  simple  de  l'angine  pul- 
tacée, et  celle-ci  de  Tangine  pseudo*membraneuse ,  qui 
seule  réclame  un  traitement  énergique  et  spécial. 

M.  Sfariceau  croit  que  M.  Marcé  n'a  pas  prétendu  affir- 
mer, comme  une  chose  absolue,  la  Vertu  prophylactique 
de  la  belladone ,  mais  qu'il  a  seulement  voulu  apporter 
des  &its  favorables  à  cette  opinion  ,  faits  qui  démontre- 
raient, en  outre,  que  les  doses  et  le  mode  d'administra- 
tion employés  par  Habnemann ,  ne  sont  pas  nécessaires 


jouBifAL  ms  HÉineniB*  6f 

pour  obtenir  le  résultat  désiré.  Dernièrement ,  il  a  eu  oc- 
casion de  voir  une  famille  composée  de  trois  enfants  :  Tainé 
fut  atteint  d'une  scarlatine  normale,  mais  intense  ;  n'ayant 
pu  décider  les  parents  à  séparer  le  malade  des  autres  en- 
fants ,  il  mit  cecix-ei  à  l'usage  du  sirop  de  belladone.  A 
quinze  jouts  de  là,  ces  deux  enfants  furent  pris  de  symptô- 
mes qui  auraient  pu  lui  échapper,  s'il  n'avait  em  l'œil  au  guet  ; 
ils  eurent  une  angine  modérée  et  présentèrent  quelques 
plaques  scarlatineuses  dans  la  région  seule  des  lombes. 
N'est-ce  pas,  évidemment  là,  un  exemple  de  scarlatine  at- 
ténuée par  la  belladone  ? 

M.  Mareé ,  répondant  aux  observations  de  M.  Héiie , 
dit  que  la  salle  18  est  consacrée  partie  aux  enfants  atteints 
d  affections  chirurgicales,  partie  aux  enfants  malades,  en- 
fants de  6  à  15  ans  pour  la  plupart. 

M.  Patoureau,chefdu  service  chirurgical,  et  lui,  en  pré- 
sence de  l'épidémie  qui  sévissait ,  convinrent  d'avoir  re- 
cours à  ia  belladofie,  à  titre  de  remède  préventif  ;  et ,  à 
dater  de  ce  moment,  tout  enfant  qui  entrait  dans  la  salle 
prenait  immédiatement  de  la  belladone;  il  ignore,  il  est 
vrai,  si  tous  ces  enfants  avaient  eu  la  scarlatine,  mais  cela  ne 
lui  paraît  pas  probable.  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  qu'avant 
remploi  de  la  belladone,  quatre  ou  cinq  enfants  étaient, 
chaque  jour  V  pris  de  la  scarlatine ,  et  que,  depuis  lors,  ce 
nombre  alla  toujours  en  diminuant.  En  un  mot ,  il  trouve 
un  contraste  frappant  entre  les  deux  phases  de  l'épidémie  : 
dans  la  première,  la  transmission  était  rapide  et  incessante; 
dans  la  seconde,  elle  se  montra  très-ralentie.  Trente  en- 
fants prennent  de  la  belladone  et  ne  contractent  pas  la 
scarlatine  ,  cinq  n'en  prennent  pas  et  ils  sont  frappés  de  la 
maladie. 

Quant  à  la  distinction  des  deux  angines  pultacée  et 
pseudo-membraneuse  ,  M.  Marcé  en  reconnaît  l'importance, 
mais  il  ne  croit  pas  le  diagnostic  différentiel  toujours  très- 
facile  à  établir. 

M.  Rouœeau  rapporte  quelques  faits  qui  lui  senablent 
militer  en  faveur  des  vertus  anti-scarlatineuses  de  ta  bella- 
done. Ainsi,  depuis  le  commencement  de  l'épidémie,  il 


62  JOUBIIÀL  ]>£   MÉOBCUiE. 

a  pu  voir  uue  trentaine  de  cas  disséminés  dans  vingt  mai- 
sons environ.  Sitôt  Tapparition  de  cette  maladie  au  sein 
d'une  famille ,  il  administrait  la  teinture  de  belladone  aui 
membres  non  encore  frappés.  Cette  médication  préserva- 
trice ne  manqua  jamais  son  but;  partout,  elle  fut  suivie 
d'un  succès  complet,  même  dans  tes  familles  où  le  lit  des 
malades  était  partagé  par  des  enfants  qui  n'avaient  jamais 
eu  la  scarlatine;  une  famille  seule,  au  contraire,  où  l'emploi 
de  cette  médication  préventive  fut  omis,  vit  tous  ses  en- 
fants frappés  de  la  maladie. 

En  présence  de  pareils  résultats,  on  comprend  qu'il 
incline  fortement  à  croire  aux  propriétés  prophylactiques 
de  la  belladone. 

M.  Hélie  n'a  pas  encore  d'opinion  arrêtée  à  l'égard  de 
la  belladone,  si  ce  n'est  que  cette  substance  ne  saurait, 
en  tout  cas,  produire  d'effets  fâcheux.  Mais,  pour  appré- 
cier avec  justesse  ses  vertus  préservatrices,  il  y  a  à  tenir 
compte  de  bien  des  circonstances  et  de  bien  des  faits;  par 
exemple,  il  est  fort  rare  de  voir  tous  les  enfants  d'une 
même  famille  contracter  simultanément  la  scarlatine  ;  plu- 
sieurs ne  la  contractent  que  plus  tard,  dans  le  courant 
d'une  nouvelle  épidémie. 

Il  revient  ensuite  sur  la  distinction  à  établir  entre  la 
nature  des  diverses  angines,  distinction  des  plus  impor- 
tantes, puisque  les  unes  n'exigent  aucun  traitement  actif 
et  spécial,  les  autres,  au  contraire,  réclament  impérieu- 
sement une  médication  prompte  et  énergique.  Il  croit  les 
angines  gangreneuses ,  dont  a  également  fait  mention 
M.  Marcé,  consécutives. le  plus  souvent  à  des  gengivites 
ou  à  des  stomatites. 

M.  Lequerré  n'a  pas  l'intention  de  dénier  à  la  belladone 
les  vertus  qu'on  lui  attribue,  mais  il  croit  sage  de  suspen- 
dre son  jugement.  Celle  année,  au  Petit-Séminaire,  un 
jeune  homme  est  sérieusement  atteint  de  scarlatine;  la 
question  de  l'isolement  complet  et  efficace  ayant  dû  être 
écartée,  restait  celle  de  savoir  s'il  serait  opportun  d'adop- 
ter, comme  mesure  générale  et  préservatrice,  l'emploi  de 
la  belladone  chez  tous  les  autres  élèves  ;  ce  moyen  fut  éga- 


JOCBNÀL   DE  MÉDECINE.  63 

lement  rejeté.  Or ,  il  arriva  que  ce  premier  cas  de  scarla- 
tine fut  suivi  d'un  second,  moins  grave,  une  dizaine  de 
jours  plus  tard ,  puis  répidémie  s'arrêta  court.  N'cst-il  pas 
clair  que,  si  la  belladone  avait  été  administrée,  on  lui 
eût  fait  honneur  de  cet  arrêt  brusque  de  Tépidémie ,  et 
que  l'on  eût  été  ainsi  induit  dans  Terreur  la  plus  complète. 
11  ajoute,  sur  la  demande  précise  de  M.  Kouxeau,  que  les 
deux  malades  avaient  été,  durant  le  cours  de  la  scarlatine, 
en  contact  avec  leurs  camarades. 

I9Î.  Marcé  dit  s'être  toujours  bien  trouvé  de  Temploi  de 
Tesprit  de  nitre  dulcifié  dans  les  cas  de  scarlatine  accompa- 
gnée de  fièvre  très-forte,  de  délire  ou  d'accidents  céré- 
braux. Ce  moyen,  qui  lui  avait  été  recommandé  comme 
des  plus  efficaces  en  pareille  circonstance  ,  par  M.  Breton- 
neau ,  de  Tours,  lui  a  paru  tempérer  la  chaleur  de  la  peau 
et  modérer  la  circulation. 

M.  Mauduit  rappelle  un  mode  d'emploi  de  la  belladone, 
préconisé  par  M.  Bretonneau  ,  il  y  a  20  ans  environ  ;  il 
consiste  à  inoculer  sous  Tépiderme  la  teinture  de  bella- 
done ,  à  l'instar  du  vaccin.  Par  ce  procédé ,  l'action 
du  médicament  préservateur  serait  beaucoup  plus  prompte 
et  plus  certaine  que  lorsque  celui-ci  est  introduit  par 
l'estomac. 

M.  Aubinais  trouve  la  discussion  présente  des  plus  op- 
portunes, vu  le  grand  nombre  de  cas  graves  de  scarlatine, 
trop  souvent  suivis  de  mort ,  qui  ont  sévi  dans  le  courant 
de  l'année  sur  la  population  nantaise. 

Il  y  a  encore  à  peine  quinze  jours  qu'il  a  vu  mourir 
très- inopinément  une  jeune  femme  ,  dont  la  fièvre  scar- 
latine affectait  une  marche  très-régulière.  Subitement  , 
cette  malade ,  âgée  de  30  ans  environ  ,  fut  prise  de 
symptômes  effrayants  et  imprévus  :  selles  et  vomissements 
incessants  de  matières  cholériques  ;  peau  froide ,  face 
grippée  ;  éruption  disparaissant  pour  faire  place  à  des 
taches  bleuâtres,  sur  la  figure  et  les  mains.  Quatre 
heures  après  le  début  de  ces  accidents,  la  mort  survint. 

A  quoi  attribuer  cette  mort?  Fût-elle  le  résultat  d'une 


64  IWmÈOi  BE  MàDfiCCKB. 

aspbyiie  déterminée  par  la  (briBeiion  de  caillots  sanguins 
dans  les  gros  vaisseaux  ,  le  cœur  ou  les  poumons  ? 

M.  Makot  constate  et  déplore  Timpuissance  où  les 
médecins  se  trouvent  journellement  en  présence  de  la 
gravité  de  certaines  scarlatines ,  comme  cela  s'est  vu  cette 
année  dans  notre  ville.  Il  Tnit  appel  aux  lumières  et  à  l'ex- 
périence de  ses  confrères  ,  touchant  la  mise  en  pratique 
de  quelques  moyens  héroïques  peu  familiers  aux  médecins 
français,  tels  que  les  aiFusions  et  les  bains  froids  ,  et 
devant  lesquels  nous  reculons,  tandis  que  les  médecins 
anglais  et  allemands  y  ont  volontiers  recours. 

/ff.  Mauduit  se  souvient  d'avoir  vu  un  médecin  anglais 
traiter  deux  jeunes  filles  atteintes  de  scarlatine ,  dans  un 
pensionnat  où  cette  maladie  régnait  à  l'état  épidémique. 
Au  plus  fort  de  l'éruption  ,  qui  était  très-intense,  ce  mé- 
decin leur  fit  promener  rapidement  sur  tout  le  corps  une 
éponge  trempée  dans  de  l'eau  très-froide ,  et  immédiate- 
ment après  cette  opération ,  il  les  enveloppa  dans  une 
converture  de  laine.  Au  bout  de  huit  jours  ,  la  guérîson 
était  complète ,  et  ses  deux  malades  s'exposaient  impu- 
nément au  grand  air  ,  tandis  que  les  autres  élèves  ,  at- 
teintes de  la  même  maladie ,  voyaient  se  dérouler  bien 
plus  lentement  les  diverses  périodes  de  la  scarlatine  ,  et 
étaient  encore  longtemps  astreintes  à  garder  la  chambre. 
Dans  les  Indes ,  ce  mode  de  traitement  est  une  chose  vul- 
gaire. 

M,  Mabit  a  entendu  notre  confrère,  M.  Guissart,  qui 
a  longtemps  pratiqué  la  médecine  à  Rio-Janeiro ,  lui  ra- 
conter que  ,  dans  une  épidémie  de  scarlatine  qui 
était  accompagnée  de  symptômes  graves ,  d'éruption  in- 
complète ,  d'accidents  cérébraux ,  il  se  décida ,  après 
avoir  employé  infructueusement  bien  des  moyens,  et  après 
avoir  consulté  un  grand  nombre  d'anciens  auteurs,  à  plon- 
ger, par  immersion,  ses  malades  dans  um  bain  d'eau 
froide ,  pendant  2  minutes  environ.  Tous  ceux  qui  subi- 
rent cette  immersion ,  guérirent  ;  les  autres  succom- 
bèrent. 

Af.  Aubinais  dit  que   ces  iaits  sont  connus  de  tous , 


1 


JOmWÀL  DE  KÉBECOfE.  65 

mais  qu'il  n'est  permis  qu'à  un  petit  nombre  de  médecins, 
suffisamment  accrédités  dans  Tesprit  public ,  de  recourir 
à   ces    moyens  héroïques ,  sans   inconvénient  pour  eux- 
mÔBn^s  ou   pour  leur  art.  M.  Potonnier ,  alors  médecin  à 
la  Chapelle^Basse-Mer ,  ayant  à  lutter  contre  une  épidémie 
qui  décimait  la  population  ,  crut  devoir,  en  présence  d*ac* 
cidents   cérébraux   des  plus  intenses,  faire  mettre  deux 
jeunes  filles  atteintes   de   scarlatine  dans   un  bain  froid. 
Malheureusement,  elles  succombèrent  presque  immédiate- 
ment, et  peu  s'en  fallut  que  le  médecin  ne  fût  lapidé.  — 
M.  Aubinais,  lui-même,  durant  une  épidémie  de  scarlatine 
qui   sévit  en   1833  ou  1834,   dans  farrondisfiiement  de 
t^aimbœuf ,  se  trouvant  aux  prises  avec  des  accidents  cé- 
rébraux mortels  ,  et  une  éruption  qui  ne  se  formulait  pas 
surtout  chez  les  adultes,  eut  recours  aux  aiFvsions  froides 
chez   un  enfant  de  10  ans ,  dans  une  maison  où  il  venait 
lie  perdre  quatre  malades.  Elles  n'eurent  aucun  résultat, 
et  cet  enfant  succomba  comme  les  autres. 

Af.  P^dioleau  a  eu  à  s'applaudir  en  plusieurs  circons- 
tances ,  d'avoir  mis  ses  malades  dans  un  bain  tiède ,  en 
même  temps  que  des  aiFusions  froides  étaient  faites  sur  la 
tête.  Il  a  vu  céder  à  ce  moyen  des  accidents  qui  avaient 
résisté  aux  sangsues ,  aux  vésioatoires ,  etc. 

M.  Héiie  fait  observer  que  le  procédé  mis  en  pratique 
par  M.  Padioleau,  diffère  complètement  de  celui  qui  con- 
siste dans  l'emploi  de  lotions  ou  de  bains  froids. 

M.  Mûikot  vient  d*être  témoin  d'un  fait  q^ri  se  rap- 
proche beaucoup,  sauf  l'existence  de  la  scarlatine,  de 
celui  cité  par  M.  Aubinais.  Il  s'agit  d'un  véritable  cas  de 
choléra  ,  pour  lequel  il  a  été  appelé  lavant-filernière  nuit, 
à  Chantenay.  Après  un  léger  malaise  ,  datant  de  deux 
jours  ,  le  malade  fut  pris  subitement,  le  soir ,  de  coliques 
avec  selles  et  vomissements ,  devenant  de  plus  en  plus 
répétés,  et  s'accompagnant  de  crampes  dans  les  membres 
et   les  mâchoires. 

Il  le  trouva  dans  l'état  suivant ,  sur  les  deux  ou  trois 
•lieures  du  matin  :  voix  éteinte  et  cassée  ,  peau  cyanosée, 
seNes  incessantes  involontaires  à  odeur  spermatique  et  à 


66  JOUBIIAL  DE  HÉDBCIRE. 

aspect  d*oau  de  riz  ,  et  tellement  abondantes  que  les 
matelas  en  étaient  transpercés  ;  pouls  tendant  à  s*e£Pacer , 
et  refroidissement  très-marqué.  La  prostration  était  exces- 
sive ,  et  le  moindre  mouvement  provoquait  des  crampes 
atroces.  Des  sinapismes  et  une  potion  anti-émétique  avec 
addition  de  sirop  de  morphine  et  d  eau  de  mélisse  spiri- 
tueuse ,  furent  prescrits  sur  le  champ,  avec  de  Feau  froide 
sortant  du  puits ,  pour  calmer  la  soif  qui  était  intense  ; 
les  urines  étaient  supprimées. 

Les  vomissements  et  les  crampes  cédèrent  prompte- 
mont,  et  les  selles  diminuèrent;  mais  Tangoisse  et  l'op- 
pression persistèrent  jusque  sur  les  cinq  heures ,  époque  à 
laquelle  la  réaction  se  manifesta.  La  chaleur  reparut  d'abord 
H  la  paume  des  mains,  puis  çà  et  là,  par  plaques  partielles. 
Le  pouls  reprit  de  la  force  et  de  la  fréquence,  la  figure 
s  injecta.  Depuis  lors,  la  réaction  a  marché  franchement, 
tout  en  restant  modérée,  et  tout  fait  présumer  une  gué- 
rison  complète   et   prochaine. 

M*  Padioleau  a  eu  occasion  de  voir  ,  rue  Moquechîen , 
un  cas  analogue  à  celui-ci ,  qui  s'est  terminé  par  la 
guérison. 

M.  Deluen  a  traité  depuis  une  quinzaine  de  jours ,  un 
grand  nombre  de  diarrhées  dans  deux  sections  d'ouvriers, 
dont  il  est  le  médecin.  Les  purgatife  en  ont  eu  facilement 
raison.  Il  se  demande  si  ce  ne  serait  pas  là  de  ces  diarrhées 
prodroraiques  du  choléra. 

M.  Mat^uit  a  rencontré  également  des  symptômes  de 
ce  genre,  en  grand  nombre ,  dans  une  communauté  com- 
posée de  248  personnes.  11  les  a  combattus  avantageusement 
par  le  calomel  et  le  diagrède. 

Séance  dw  13  juin  1856. 

PBÉSmENCE   DE   M.   MÂHOT  ,   PRÉSIDENT. 

L'ordre  du  jour  appelle  M.  Thibeaud  à  la  tribune, 
pour  lire  un  travail  intitulé  :  Etudes  cliniques.  Des  hydro- 


— -^ 


JOUBNAL  DE  MÉDECINE.  67 

pisies  ,  suite  de  fièvres  intermiltentes  et  de  tewr  traite- 
ment ,  spécialement  de  l'acétate  de  potasse  à  haute 
dose  (i). 

Cette  lecture  achevée ,  M.  Malherbe  demande  la  parole  : 
Après  avoir   remercié  M.  Thibeaud   de  sa  communica- 
tion ,    non  moins  intéressante  au  point  de  vue  des  faits 
qu'elle  relate  ,  qu'à  celui  des  considérations  philosophiques 
dont    Fauteur  les  a  fait  suivre ,  il  demande  ,  toutefois ,  à 
faire  quelques  réserves  touchant  ces  dernières.  M.  Thibeaud 
lui  paraît  avoir  posé  d'une  manière  trop  absolue   le  prin- 
cipe des  tendances  médicatrices  de  la  nature  ;  oui ,  sans 
doute  ,  la  nature  montre  souvent  de  pareilles  tendances , 
et  nous  invite  à  les  seconder  ;  ainsi  agit-elle,  par  exemple,  dans 
la  cicatrisation   des  plaies    et  dans  la   consolidation  des 
fractures  ,  comme  on  a  eu  raison  de  le  dire  tout  à  l'heure; 
mais  dans   les  faits  qui  font  l'objet  des  réflexions  de  M. 
Thibeaud  ,  est-ce  bien  la  nature  ,  sauf  dans  le  dernier  cas, 
qui  s'est  montrée  médicatrice  ?  N'est-ce  pas,  au  contraire, 
le  médecin  qui  lui  adonné  un  vigoureux  coup  de  fouet , 
à  l'aide  d'un  médicament  fort  énergique  et  qui  a  réussi  à 
provoquer    des    mouvements    physiologiques ,   que    l'on 
aurait  probablement  attendus  en  vain  de  son  initiative,  et 
auxquels  elle  ne  paraissait  guère  songer.  Suivant  lui ,  on 
aurait  tort  de  toujours  compter  sur  la  nature  dite  médica- 
trice, laquelle  se  montre  même  le  plus  souvent  destructrice. 
M.  Aubinais  donnera,  lui  aussi ,   de  grandes  louanges 
au  travail  qui  vient  d'être  lu  ;  mais  ce  qui  l'a  particuliè- 
rement frappé  ,  c'est  l'absence  de  toute  préoccupation  des 
désordres  occasionnés  par  le  déplacement  du  cœur ,  sous 
l'influence  de  l'augmentation  de  volume  de  la  rate ,  dont 
on  nous  a  entretenus  jadis.  Ce  silence  lui  paraît  significatif 
et  est  loin  d'être  l'objet  d'un   blâme  de  sa  part.  Il  voit, 
au  contraire  ,  avec  plaisir,  mettre  enfin  de  côté  toutes  ces 
prétendues   causes  mécaniques  des  hydropisies ,  et  il  eût 


(1)  Voir  pins  loin,  p.  117. 


69  WVWÀL  DE  HÉnSCIIIB. 

&U   comise   M.   Thibeaud ,  s*il  eût  eu  à   traiter    ces 
questions. 

C'est  encore  avec  bonheur  qu'il  voit  ce  retour  vers  un 
médicament  aussi  énergique  et  aussi  efficace  que  l'acélate 
de  potasse.  Il  est  de  fait  qu'on  abandonne  trop  &cîiement, 
pour  expérimenter  des  médicaments  nouveaux  et  dou- 
teux «  d'autres  médicaments  doai  l'usage  avait  été  consa- 
cré par  l'expérience  des  siècles.  S'il  interroge  sa  pratique, 
il  est  d'accord  avec  M.  Thibeaud ,  pour  accorder,  parmi 
les  diurétiques,  ses  préférences  à  l'acétate  de  potasse.  Re- 
venu de  Paris  ,  imbu  des  doctrines  de  Broussais ,  toutes 
puissantes  à  l'époque  de  ses  débuts  dans  ta  carrière  mé- 
dicale, M  fut  surpris  de  voir,  dans  l'arrondissement  de 
Paimboeuf,  où  il  exerçait  alors  la  médecine,  les  prati- 
ciens les  plus  en  renom ,  tels  que  UM.  Bessard  et  Ber- 
nard de  Frossay ,  faire  un  emploi  journalier  de  ce  sel  , 
administré  à  hautes  doses.  Ce  ne  fut  que  contraint  ,  &a 
quelque  sorte  ,  dans  des  consultations  avec  ses  confrères , 
qu'il  se  décida  à  l'employer  aussi  hardiment.  Hais  se»*  ré- 
pugnances durent  promptement  tomber  devant  les  heureux 
résultats  obtenus  par  cette  médication. 

M.  Malherbe  ignore,  dit-il,  si  M.  Thibeaud  a  eu  l'in- 
tention de  présenter  un  travail  en  opposition  avec  celui 
de  M.  Ilifarcé,  auquel  on  vient  de  faire  allusion  ;  quoi  qu'il 
en  soit ,  il  trouve  bien  une  diiférence  entre  ces  deux 
études ,  mais  il  ne  saurait  y  voir  d'opposition.  En  effet , 
l'une  a  pour  objet  des  faits  thérapeutiques ,  l'autre  des 
faits  d^étiologie  et  d'anatonûe  pathologique. 

M.  iMalherbe  persiste  à  tenir  pour  constants  les  faits 
avancés  par  M.  Harcé  ;  il  a  pu  en  vérifier  plus  d'une  fois 
l'exi^titùde  ,  particulièrement  dans  la  chloro-anémie  ,  où 
le  cœur  et  la  tunique  musculeuse  des  intestins,^  sont  relâ- 
chés ,  tout  aussi  bien  que  les  muscles  de  la  me  de  rela- 
tion. Pans  ce  cas  de  défaut  de  tonicité  des  intestins ,  les 
préparations  strychnées  réussissent  parfaitement,  de  même 
que  le  fer  et  les  amers  remédient  à  la  dilatation  passagère 
du  cœur ,  simple  résultat  de  son  atonie.  Cet  état  de  mol- 
lesse et  de  flaccidité  du  cœur ,  cpïncidant  avec  le;s  ^nor- 


JOVBNAL  DB  HÉBBCHnE.  69 

mes  hypertrophies  de  la  rate ,  explique  suffisamment  les 
déplacements  du  premier  organe ,  et  les  accidents  qui  en 
sont  la  conséquence.  Il  ne  croit  pas  quil  soit  possible  de 
nier  Tencbaînement  de  cet  ordre  de  faits ,  si  bien  exposés 
par  H.  Marcé. 

M.  Tbibeaud  a  bien  ,  il  est  vrai ,  dit-il ,  opposé  dans 
le   temps  quelques  objections   aux  idées  émises  par   H. 
Marcé  ,   mais  il  n'a  nullement  eu  Tintention  qu'on  lui  a 
supposée  gratuitement.  Cependant ,  il  doit  dire  que  ,  dans 
les  observations  dont  il  est  question ,  il  n'a  rencontré  ai 
déplacement  du  cœur ,  ni  troubles  appréciables  dans  les 
fonctions  de  cet  organe.  Un  grand  phénomène  physiolo- 
gique a  surtout  fixé  son  attention  ,  la  substitution  d'une 
diurère  considérable  aux  suffusions  et  aux  épanchements 
séreux.  Il   n'a  pas    non  plus  voulu  dire  que  les    ten- 
dances de  la  nature  fussent  médicatrices ,  partout  et  tou- 
jours. C*est  justement  à  distinguer  ces  tendances ,  tantôt 
bonnes  ,  tantôt  mauvaises ,  que  doit  s'appliquer  notre  art 
pour  les  provoquer ,  les  aider  ou  les  combattre  au  be- 
soin. 

Cette  discussion  terminée,  M.  Le  Houx  lit  quelques  obser- 
vations d^empoisonnement,  par  les  tubercules  de  Vœnanthe 
orocata ,  recueillies  et  communiquées  par  M.  le  docteur 
Dusoucbay,  médecin  à  Vertou  (1). 

M.  Auiinais  rapproche  ces  faits  de  celui  qui  est  consi- 
gné dans  la  Toxicologie  d'Orfila  et  dans  le  grand  Dic- 
tionnaire des  Sciences  médicales,  au  sujet  de  3  soldats 
belges  ayant  succombé  au  milieu  d'accidents  analogues  à 
ceux  dont  on  vient  de  parler.  Il  serait  volontiers  tenté 
d'attribuer  au  jeune  âge  des  malades  de  M.  Dusouchay , 
le  rôle  prédominant  des  convulsions  dans  les  symptômes 
qu'ils  offrirent. 

M.  Deluen  ajoute  que,  malheureusement,  les  exemples 
d'empoisonnement  par  Vomanthe  crocala  ne  sont  pas  très- 


(1)  Voir  le  numéro  suivant. 


70  JOmUJL  BB  ■ÉBBCOIB. 

rares.  H  y  a  2  ob  9  ans  i  deux  enbnts  niangèrmit  des  tu- 
beroules  de  celle  pianle  vénéneuse  ,  qu'îb  prirenl ,  par 
une  méprise  Irop  facile  el  Irop  habilueile  dans  noire  ré- 
gion ,  pour  ceux  de  famanUiê  pewêdanifàHa*  Lé  plus  âgé 
survécul  seul.  Entre  autres  symptômes ,  ils  éprouvèrent 
una  dysphagie  Irès^iQarqnée.  Bn  vain  essaya^^il  de  les 
faire  vomir.  Le  trouble  de  la  vue  el  la  gdne  4e  ta  gorge 
peraistèrent  trois  ou  quatre  jours  chez  reofani  qui 
survécul. 

M.  Mokot  présente  des  pièces  analottiqnea  recimNies 
par  lui,  le  matin  même ,  à  l'amphilhéftire  de  rhospiee 
Sainl-iaoqoes ,  sur  te  cadavre  d'un  jeime  homme  atteint 
d'une  afieoiiott  du  cœur. 

Cal  organe  offre,  sur  la  paroi  tnlerne  d»  ventrioiile 
gauehe,  trois  orifices  doMnanl  accès  à  des  cavités  creueées 
daaa  la  cloison  ventrîcttiaire  épaissie  et  se  ter minsmt  en 
Qutde^sao;  ces  cavités,  placées  presque  immédialement  au- 
dessous  de  Torilke  aortique,  eonlemienl  uûe  petite  quan- 
tîlé  de  caillots  fibrineux ,  qui  étaient  toin  de  les  remplir. 
Des  trois  valvules  sigmoïdes,  deux  sont  saines,  la  troî- 
sième  est  à  pea  près  complètement  détruite;  la  valvale 
BUimle,  saine,  présente  quelques  concrétions  adhérentes 
à  ses  lamelleB.  Le  volume  ém  eœur  est  à  peu  près  nernMi. 

M.  Mahot  se  propose  de  rédiger  Tobservatioa  détaillée 
de  ce  malade  el  de  nous  la  fMre  cofmaftve  ainsi  d'âne  ma- 
nière complète. 

Nittlle  attire  eoianMinicalion  n^élaal  ferle,  la  séance  est 
le\ée. 

Le  Secrétaire, 

Le  Houx* 


1^ 


jOOtUIAi.  DE  IlÉttBCnlÈ.  71 


OBSERVATIONS   CLINIQUES,  par 

M.  Malherbe  ,  D.-M. ,  médecin  de  l'Hôtel-Ùieu 
de  Nantes  ,  secrétaire  du  Conseil  d'hygiène 
publique  et  de  salubrité  de  la  même  ville. 


Néphrite  albumineuse ,  encéphalopalhie  chronique  ,  eon- 
mlsionê  éeldmptiques.  Mort 

Le  nommé  Besnard  ,  âgé  de  37  ans ,  jonrnalier,  enîte 
à  l'hôpital  le  3  décembre  1855. 

Cet  homme ,  élevé  à  la  campagne ,  où  il  exerçait  lé 
niétier  de  laboureur  ,  a  mené  une  vie  régulière  et  a  tou- 
jours joui  d'une  bonne  santé  ,  jusque  vers  Tâge  de  24  ou 
!25  ans.  A  partir  de  cette  époque,  Fusage  immodéré' du 
viîi  blanc  a  ptodtiit  d'abord  de  Tihappétence,  par  foià  déâ 
indigestions,  de  là  diarrhée,  puis  bientôt  utre  diminution 
sensible  des  forces  et  une  grande  disposition  à  l'enroue- 
ment.  Le  sotntneil,  devenu  agité,  faisait  souvent  défaut  ; 
le  malade  éprouvait  de  la  raideur  dans  les  muscles  dés 
membres ,  et  depuis  deux  ans  des  crampes  fréquentes 
dans  les  mollets ,  pendant  la  nuit.  Il  était  qoelquefoîs 
exposé  à  la  pluie ,  et,  à  différentes  reprises ,  il  est  resté 
mouillé  toute  une  demi^journée. 

11  y  a  deux  ans ,  il  a  été  atteint  d'une  fièvre  tierce  qui 
dura  deux  mois  :  depuis ,  une  dizaine  de  récidives  ont 
eu  lieu  sous  le  même  type ,  chacune  se  composant  de 
deux  ou  trois  accès  seulement  ;  la  dernière  a  précédé  d'un 
mois  son  entrée  à  rhôpital.  Toutes  ont  eu  pour  cause 
occasionnelle  de  grandes  fatigues  ou  l'exposition  à  la 
pluie. 


72  joubual  db  sÉoBcmB. 

Devenu  garçon  d'écurie  depuis  quatre  mois  ,  il  était 
obligé  de  se  lever  assez  souvent  la  nuit.  Quoique  assez  bien 
nourri  (il  faisait  trois  repas  de  viande  par  semaine),  il 
sentait  depuis  quelque  temps  ses  forces  diminuer  de  plus 
en  plus  ,  et  il  avait  remarqué  qu'il  s'enrhumait  très- 
facilement. 

Dans  le  courant  de  novembre  1855  ,  il  fut  pris  de  dou- 
leur à  la  région  lombaire  gauche ,  avec  diminution  dans 
la  quantité  des  urines  ;  huit  jours  après  ,  il  se  manifesta 
aux  membres  inférieurs  un  œdème  qui  envahit  bientôt 
tout  le  corps  ,  excepté  les  membres  thoraciques. 

Nous  voyons  le  malade,  pour  la  première  fois  ,  le  4 
décembre ,  et  l'aspect  fatigué  du  visage  nous  le  fait 
prendre  pour  un  vieillard  ,  quoiqu'il  n'ait  que  37  ans. 
La  face  est  pâle  et  légèrement  bouffie ,  Tanasarque  n'est 
pas  considérable  ;  il  n'existe  pas  dans  le  péritoine  d'épan- 
chement  appréciable. 

Le  pouls  est  lent ,  modérément  résistant ,  le  cœur 
présente  un  dédoublement  du  second  temps ,  sans  aucun 
bruit  anomal.  Il  y  a  peu  d  appétit ,  les  selles  sont  na- 
turelles. 

Les  urines  peu  abondantes  se  colorent  en  rose ,  et 
précipitent  abondamment  par  lacide azotique;  le  précipité 
ne  se  redissout  que  dans  un  grand  excès  du  réactif. 

Nous  diagnostiquons  une  albuminurie  symptomatique 
d'une  altération  des  reins,  compliquée  d'intoxication  al- 
coolique. 

Vers  le  10  décembre ,  l'état  du  malade  paraît  s'ag- 
graver: il  a  tout  l'aspect  d'un  homme  en  démence ,  il  ne 
voit  presque  pas  ,  entend  plus  haut  que  de  coutume  ,  ne 
peut  se  tenir  sur  les  jambes  ni  manger  seul  ;  il  répond 
cependant  aux  questions  qu'on  lui  adresse,  mais  avec 
difficulté. 

12  décembre.  Persistance  et  augmentation  des  mêmes 
symptômes ,  pouls  assez  résistant  ;  on  lui  fait  une  saignée 
Ae  bras  de  250  grammes. 

ï,y  13,   H  accuse  à  la  région  du  rein    gauche    une 


'-1 


JOUBIfÀt  BB   MÉBEGIMB.  73 

douleur  que   la  pression  exaspère.  On  lui  applique  cinq 
sangsues. 

Le  1 5  décembre ,  raideur  et  douleur  dans  les 
muscles  du  cou;  ce  symptôme  dure  pendant  trois  jours, 
et  cède  à  des  frictions  de  pommade  de  belladone. 

Le  1 7  décembre ,  nouvelle  saignée  de  200  grammes , 
à  cause  de  la  persistance  des  symptômes  cérébraux. 

Les  jours  suivants  Je  malade  semble  aller  mieux,  mais 
il  reste  plus  faible  que  précédemment. 

A  partir  du  8  janvier,  douleur  à  l'oreille  gauche,  pen- 
dant 2  ou  3  jours. 

Le  1 5  janvier ,  les  accidents  cérébraux  reparaissent  sous 
la  même  forme ,  mais  avec  plus  d'intensité  que  la  première 
fois  ;  c'est  toujours  de   l'hébétude,  un  délire  fugace ,  une 
amaurose  presque  complète,  de  la  dureté  de  Touïe,  de  la 
faiblesse  musculaire.  L'état  de  débilité  générale  ne  permet 
pas  de  recourir  à  aucun  traitement  actif  ;  cependant,  vers 
\a  fin  du  mois ,  il  survient  un  peu  d'amélioration ,  le  ma- 
lade peut  se  lever  et  même  descendre  dans  la  cour. 
Le  9  février,  il  sort  de  l'hôpital  où  il  s'ennuie. 
Pendant  toute  la  durée  de  son  séjour,  il  a  eu  peu  d'ap- 
pétit ;  pendant  les  derniers  temps,  il  ne  mange  presque 
rien.  Les  nuits  ont  été  à  peu  près  constamment  sans  som- 
meil. L'anasarque  n'a  pas  cessé  d'exister,  sans  jamais  ac- 
quérir un  grand  développement  ni  présenter  d'oscillations. 
Les  urines  insensibles  aux  réactifs  colorés   ont    toujours 
été  pâles,  et  la  plupart  du  temps  troubles  ou  louches. 

L'acide  azotique  y  produisait  un  précipité  abondant, 
qui  a  cependant  diminué  d'une  manière  progressive  ;  la 
coloration  rose  déterminée  par  le  même  réactif  a  aussi 
diminué,  et  au  moment  de  la  sortie  du  malade,  elle  est 
presque  nulle. 

Outre  les  moyens  ci -dessus  mentionnés,  il  a  été  pres- 
crit, le  13  décembre,  15  grammes  d'huile  de  foie  de 
morue  ;  au  bout  de  4  jours,  la  diarrhée  en  a  fait  suspendre 
l'usage. 

Du  24  décembre  au  18  janvier,  il  a  été  pris  chaque 
jour  20  centigrammes  de  fer  réduit  par  l'hydrogène;  les 


74  JOVlMAt  PB  HÉpBCPffL* 

dev{x  ou  trois  derniers  jours  le  médicaoïeat  a  été  vomi. 

Du  6  au  17  décembre,  chaque  soir  50  centigrammes 
de  thériaque. 

Du  14  janvier  au  9  février,  5  centigrammes  d'extrait 
thébaïque. 

Quelqifes  verres  d*eau  de  Sediitz  ont  été  administrés  à 
diverses  reprises  quand  les  selles  faisaient  défaut. 

Le  26  févi^ier,  le  malade  rentre  à  l'tiôpital,  porté  par 
deux  hommes  ;  la  faiblesse  musculaire  e(  1^  trouble  de 
la  vue  lui  rendent.  Ifi  n^arche  impossible.  \l  est  dans  le 
même  état  que  lors  de  sa  sortie ,  seulen^eut  il  est  plus 
faible,  et  les  troubles  de  la  sensibilité  et  de  Vintelligence 
sont  plu^  marqués  ;  il  nous  apprend  que,  chez  lui,  il  a  peu 
mangé,  et  qu'il  a  bu  quelques  verres  de  vin  rouge. 
Les  urines  donnent,  par  l'acide  azotique,  un  dépôt  considé- 
rable d'albumine  sans  coloration  rose. 

Le  27  et  le  28 ,  il  fait  deux  cbutes  sur  la  tète  en  vou- 
lant se  lever  de  son  lit« 

Le  28  ^^  soir ,  convulsions  éclamptiques  qui  se  renou- 
vellent plusieurs  fois  dans  la  nuit-  Le  ^9  au  matin,  nous 
topâmes  témoin  d'un  accès  convulsif  d'vine  grande  inten- 
sité ;  dans  l'intervalle  des  attaques,  1^  malade  reste  plongé 
dans  un  coma  profond  avec  respii^ation  légèrement  ster- 
tojfeuse;  il  meurt  dans  la  nuit  du  29  février  au  1'^  mars. 

Autopsie  faik  le  2  mars  à  9  heures  du  matin. 

Crâne.  —  Dure-mère  t^due,  sans  injection.  Les  tissus 
contiennent  quelques  gouttes,  de  saq^  liquide,  noirâtre, 
^ai^  fo\n\  de  caillots.  Quand  on  incise  la  dnre-mère,  |es 
çircQnvolutions  cérébrales  tendent  à  faire  h^miç.  Peu  de 
sérosité  dans  la  pie-mère  qui  n'est  pas  épaissi^,,  les  mem- 
branes se  détachent  avec  facilité  ;  raicacbnoïde.  pjj^éseiUe 
des  traces  blanches  linéaires  le  long  4n  iK^^i  des^  vais- 
seanx,;  ceux-ci  sont  presque  vi^es.  La  surface  des  cir- 
convolutions est  humide,  pâle,  sans  adhérence  aux  ment- 
btiçanes.  Dans,  tout  l'encéphale,  la  sub^^Mice  g?ise  a  '^ 
mjème  conlenr  feujUil^  ijaortç  pâle.  Les  dem,  sul;>s|Uinçes 


JWBEUL  DB  BitiDBCaM»  75 

sont  anémiquaSf  de  eoBusUnce  normale,  très^huinidés , 
œdématiées.  Les  ventricules  ne  contiennent  que  peu  de 
séroftité  ;  il  ne  s'en  écoule  pas  non  plus  du  eanai  vf  rtébral. 
Les  artères  carotides  internes,  vertébrales  et  basilaire  sont 
cartîlagtiiîfiées. 

Thorax.  Poumons  adiiérents  par  toute  leur  surface, 
eogoués  daits  toute  leur  étendue ,  mais  surtout  dans  leur 
moitié  postérieure. 

CcBor  volumineux  »  ventricule  gauche  hypertrophié  ;  tes 
trois  autres  cavités  dilatées.  Tissu  musculaire  déeoforé 
mou  et  friable  se  déchirant  sous  la  pression  du  doigt; 
èpaicaîasiement  du  bord  des  valves  dé  la  valvule  mitrale  ; 
aucun  des  orifices  n'offre  de  rétrécissement  ni  d'insuffisance 
appréciable. 

Abdomen.  Reins  atrophiés  à  surface  bosselée;  le  droit 
en  partie  décoloré  extérieurement  présente  à  un  haut  àe* 
gré  la  transformation  granuleuse  :  le  gauche  présente  les 
inèmes  altérations,  mais  à  un  degré  moindre,  il  est  nfioins 
atrophié  que  le  droit.  Rate  peu  vohiminease  ttèa-^ferme, 
foie  de  volume  normal ,  sans  aucune  altération.  Le  tube 
digestif  n'a  pas  été  examiné.  Nulle  part  on  ne  trouve  de 
caiUota  fibt ineux ,  mais  du  sang  liquida  et  des  caillots 
cruoriques  diffluents. 

Le  sang  des  deux  saignées  a  été  analysé  par  M.  BaUevre. 
Le  sérum  de  ta  première  saignée  faite  le  i2  décembre, 
ne  cooti^it  que  7  %  de  matières  fixes,  tandis  que  la 
moyenne  de  l'état  normat  tombe  entre  9  et  10 ,  ainsi  qtfii 
résulte  des  ebiffres  obtenus  par  MM.  Prévost  et  Duma», 
Laasaigne  ,  Becquerel  et  Rodier.  Le  chiffre  de  Palbumine 
est  de  5,50  7o,  au  tieu  de  8,&8  selon  Hareet,  8,f2  , 
(Leeanu),  8  (Berselios,  Becquerel  et  Rodier). 

La  présence  de  l'urée  dans  le  sang  a  été  constatée. 

La  seconde  saignée  a  été  pratiquée  le  t7  décembre.  Le 
sérum  contenait  7  ""/o  d'albumine..  Le  sang,  renfermait  de 
l'urée  comme  la  première  fois. 

L'urine  examinée  à  l'époque  de  la  seconde  saignée  a  été 
lyouvée  claire,  inodore,  mousseuse.  Sa  densité  est  iic 


L 


76  JOUBRÀL  DE  MÉDBGDIE. 

1013,  chiffre  inférieure  la  moyenne  normale  qui  est  de 
1017 ,  selon  MM.  Becquerel  et  Rodier. 

Elle  précipite  par  le  bichlorure  de  mercure  et  l'acide 
azotique.  Sa  réaction  est  franchement  acide.  La  chaleur 
suffit  pour  la  coaguler  ;  un  accident  arrivé  au  liquide  en 
expérience  a  empêché  de  doser  l'albumine. 

Ces  résultats  analytiques  s'accordent  parfaitement  avec 
ceux  obtenus  par  les  auteurs  qui  se  sont  occupés  de  la 
maladie  de  Bright  ;  nous  n'avons  pas  à  nous  y  arrêter. 

Notre  observation  présente  aussi  une  grande  concor- 
dance avec  les  faits  déjà  connus,  sous  les  divers  points 
de  vue  des  causes,  des  symptômes  et  des  altérations  ca- 
davériques ;  mais  elle  offre  d'ailleurs  quelques  traits  spé- 
ciaux qui  nous  semblent  mériter  de  fixer  l'attention. 

Tous  les  auteurs  s'accordent,  pour  attribuer  à  l'action 
prolongée  du  froid,  la  première  et  la  plus  grande  part 
dans  le  développement  de  la  néphrite  granuleuse.  Cette 
circonstance  a  été  constatée  chez  notre  malade.  On  se  rap- 
pelle aussi ,  qu'il  avait  usé  immodérément  des  liqueurs 
alcooliques  ;  or ,  voici  ce  que  nous  lisons  à  ce  sujet  dans  le 
Compmdium  de  médecine  pratique  : 

L'abus  des  liqueurs  spiritueuses  est ,  suivant  la  plupart 
des  médecins  de  la  Grande-Bretagne,  la  cause  la  plus  fré- 
quente de  dégénérescence  rénale.  M.  Christison  dit  que 
cette  influence  s'est  montrée  à  lui,  dans  les  trois  quarts  ou 
les  quatre  cinquièmes  des  cas;  sur  69  malades,  M.  Becque- 
rel a  trouvé  que  9  seulement  étaient  adonnés  aux  boissons 
alcooliques.  Ce  relevé  tendrait  à  faire  croire  que  l'influence 
nuisible  signalée  par  les  médecins  anglais,  est  loin  d'être 
bien  établie.  (Comp.,  t.  VII ,  p.  358.) 

Cette  influence  est  assurément  bien  moins  contestable 
lorsqu'il  s*agit  de  rechercher  la  cause  des  complications 
cérébrales,  beaucoup  moins  fréquentes  en  France  qu'en 
Angleterre  et  dans  le  Nord  de  l'Europe ,  où  l'abus  des 
liqueurs  spiritueuses  est  porté  bien  plus  loin  que  dans 
notre  pays  (1). 


(1) 


rïous  remarquerons  en  passant  que  l'action  pernicieuse  du 


izzd 


JOURNAL  BE  MÉDECINE.  Tf 

Les  maladies  du  cœur  sont  regardées  comme  une  cause 
très-efficace  de  la  dégénérescence  granuleuse  des  reins , 
en  raison  de  i'bypérémie  habituelle  qu'elles  entretiennent 
dans  ces  organes;  on  se  souvient  que  notre  malade  avait 
une  énorme  dilatation  du  cœur,  avec  ramollissement  et 
décoloration  de  son  tissu. 

Parmi  les  symptômes  observés  chez  Besnard,  ceux  qui 
se  rapportent  à  la  complication  cérébrale,  sont  sans  con- 
tredit les  plus  dignes  d'intérêt.  Au  premier  abord,  nous 
nous  sommes  demandé  s'il  fallait  les  attribuer  à  la  dia- 
thèse  albuminurique  ,  ou  bien  à  Tintoxication  par  Talcool. 
Nous  pensons  que  ces  deux  influences  ont  dû  agir  con- 
curremment. La  marche  des  phénomènes  cérébraux  a  été 
telle  que  nous  pourrions  la  comparer  à  une  démence  pro- 
gressive, ou  bien  encore  à  cette  forme  spéciale  de  Talié- 
nation  décrite  par  M.  Etoc,  sous  le  nom  de  stupidité; 
nous  expliquerons  plus  loin  pour  quel  motif  nous  faisons 
ce  rapprochement. 

Dans  un  excellent  mémoire  publié  en  1852,  dans  les 
Archives  générales  de  médecine  ,  par  M.  Lasègne,  nous 
trouvons  à  propos  de  la  forme  chronique  des  complica- 
tions cérébrales  de  la  maladie  de  Bright ,  un  tableau  tracé 
d'après  Addison ,  pour  lequel  notre  malade  aurait  pu  servir 
de  modèle.  C'est  bien  le  même  affaissement  progressif  de 
^intelligence ,  des  fonctions  des  organes  des  sens  et  de 
l'appareil  locomoteur.  Nous  ne  reproduirons  pas  cette 
description ,  qui  a  été  citée  sans  indication  de 
sa  véritable  source ,  dans  le  Moniteur  des  Hôpitaux  , 
par  M.  Vidal. 

L'araaurose  qui  a  été  si  prononcée  chez  notre  malade,  ne 
peut  cependant  être  rapprochée  de  celle  observée  par 
M.  Landouzy  ;  elle  n'a  été  qu'un  trait  dans  l'ensemble  des 
symptômes  fournis  par  le  système  nerveux. 


froid  doit  bien  souvent  s'exercer,  sur  les  sujets  qui  abusent  de 
Palcool ,  que  l'on  voit  dans  l'état  d'ivresse  profonde  rester  exposés 
sans  mouvement,  à  l'air  libre,  pendant  un  temps  souvent  fort 
long. 


78  jommài.  9b  v^nBonoi. 

Nous  avons  également  eonsUié  la  dureté  mcraientanée 
de  Touîe  ;  nous  n*avoDs  pas  cherché  à  apprécier  l'état  des 
$enB  de  Todorat  et  du  goût*  mais  nous  serions  porté  à 
croire  que  ce  dernier  était  afiEaibii  et  qu'il  suivait  les 
phases  de  Tinappétenoe. 

Quelle  est  la  cause  matérielle  de  rencéphalopalhie  aibu- 
minurique?  C'est  une  question  controversée  et  sur  bquelle 
le^  auteurs  sont  divisés  en  deux  camps.  Bright«  Christtson, 
Addison  ,  etc. ,  re^gardent  la  présence  de  l'urée  daos  le 
sang  I  comme  la  cause  des  désordres  oérébraui  ;  Freriohs 
attribue  ce  qu'il  appelle  Tintoxication  urémique  à  la  présence, 
dans  le  liquide  nourricier,  du  carbonate  d'ammoniaciue.  On 
ne  saurait  nier  sai\s  doute  que  de  semblables  altérationa  du 
sang  ne  puissent  apporter  un  trouble  profond  dans  la 
nutrition  et  dans  les  fooctions  des  organes;  mais  pour 
avoir  le  droit  de  leur  attribuer  la  production  de  l'encépha- 
lopatbie  albuminurique,  il  faudrait  déntontrer  It  présence 
de  l'urée  dans  le  sang,  dans  toutes  les  ciroonstaiioes  où  ces 
désordres  cérébraux  sont  susceptibles  de  se  manifester, 
c'est-à-dire  dans  tous  les  cas  d'albunÙDurie.  Or  ^  comme  le 
disent  avec  raison  MM.  Becquerel  et  Rodier,  si  le  iaitest 
constant  pour  la  plupart  des  cas  de  maladie  de  Brtght,  il  a 
manqué  dans  un  certain  nombre,,  et  il  est  encore  à  démon- 
trer pour  toutes  les  autres  espèces  d'albuminurie,  ainsi 
que  dans  les  circonstances  où ,  sous  l'influence  d'autres 
causes  pathologiques,  la  sécrétion  urinaÂre  est  notable- 
ment diminuée,  comme  dans  la  rétention  d'urine,  les 
maladies  des  reins,  etcu 

D'après  ces  considérations,  nous  sommes  très-peu  porté 
à  admettre  Tinfluenee  attribuée  ici  à  L'urée,  et  iMius  con- 
clurions plutôt  avec  M.  RiUiet,  que  les  accidents  cérébraux 
sont  la  conséquence  de  l'hydfooéphalio ,  en  prenant  ce 
mot  dans  sa  plus  large  acception ,  e'est-àrdire  em  y  fri- 
sant rentrer ,  non-seulement  les  épanchements  intra  ou 
sous-arachnoïdrens  et  ventrieulaires,  mais  aussi  l'infiltra- 
tion séreuse  de  la  substance  cérébrale  elle-même. 

Nous  ajouterons  que ,  suivant  la  forme  et  le  volume  va- 
riables (jle  Téps^PQbement  de  sérosité,  la  lenteur  ou  la 
rapidité  de  son   développement,  l'existence  ou  l'absence 


JOUIRAI.    DB  «ÉORCIiqi*  79 

d'une  hypérémie  simultanée,  on  voit  varier  l'expression 
symptomatique  et  on  observe  les  formes  aiguës  ou  chro- 
niques ,  les  convulsions ,  le  coma ,  le  délire  ou  Tabolition 
lente  et  progressive  des  fonctions  du  système  nerveux. 

Notre  malade  a  présenté  à  Tautopsie  une  turgescence 
très-notable  du  cerveau,  avec  infiltration  séreuse  géné- 
rale ;  c'était  un  véritable  œdème  comme  chez  les  aliénés 
atteints  de  stupidité ,  rapport  qui ,  selon  nous,  parle  hs^u- 
tement  en  faveur  de  l'opinion  que  nous  défendons;  car 
Tétat  de  Besnard  nous  rappelait  parfaitement  celui  des 
aliénés  stupides  que  nous  avons  eu  occasion  d'observer. 
L'absepce  complète  d'hypérémie  nous  rend  compte  du 
défaut  d^  réaction,  et  on  pourrait  peut-être  attribuer  (es 
attaques  d'éclarnpsie  qui  ont  précédé  la  mort  aux  chutes 
sur  la  tête  qu'il  avait  faites  deux  jours  de  suite,  quoiqu'elles 
n'eussent  pas  laissé  de  traces  aux  téguments  ni  aux  parois 
du  crâne. 

Un  des  arguments  les  plus  concluants  en  faveur  de 
l'opinion  de  M.  Rilliet,  opinion  que  nous  adoptons  sans 
réserve,  c'est  le  développement  de  symptômes  cérébraux 
semblables,  non-seulement  dans  les  cas  d'albuminurie  sans 
maladie  de  Bright,  noais  encore  dans  des  états  morbides 
où  les  urines  ne  contiennent  pas  la  plus  faible  tr^ce  d'al- 
bumine. 

Enfin ,  pour  les  cas  aigus ,  l'efficacité  du  traiten^ent 
anti-phlogistique  et  révulsif,  et  surtout  les  résultats  rapides 
qui  suivent  son  application ,  résultats  définitifs  chez  (es 
malades  qui  n'ont  pas  d'altération  des  reins,  démontrent 
suffî^mment  que  la  cause  des  accidents  cérébraux  est  ail- 
leurs que  dans  l'intoxication  urémique,  et  qu'on  ne  doit 
la  chercher  que  dans  l'accumulation  de  la  sérosité. 

En  résumé ,  notre  observation  peut  servir  à  établir,  pour 
les  formes  chroniques  de  i'encéphalopathie  albuminurique^ 
ce  qu^  M.  Rilliet  a  prouvé  pour  les  formes  aiguës,  l'intluence 
de  l'hydrocéphalie  sur  le^ur  développenient. 


80  lOVftlIÀL  DE  MÉDECHŒ. 

Tuberculisation  des  capsules  surrénales. 

La  femme  Ouvrard,  âgée  de  48  ans,  journalière,  entre 
àThôpital  le  23  février  1856. 

Elle  est  malade  depuis  plus  d'un  an  :  elle  se  sent  faible, 
mais  ne  présente  aucun  symptôme  d'affection  organique 
viscérale.  Seulement,  les  ganglions  cervicaux  et  sous-maxil- 
laires du  côté  droit  sont  engorgés  et  forment  une  tumeur 
dure,  bosselée,  que  nous  considérons  comme  de  nature 
strumeuse.  Des  douleurs  vagues  existent  dansTabdomen  et 
dans  les  membres.  Les  carotides  sont  le  siège  d'un  léger 
souffle.  La  peau  est  d'une  couleur  terreuse  remarquable, 
à  travers  laquelle  on  saisit  cependant  la  pâleur  jaunâtre  de 
la  chlorose  ou  des  affections  organiques  à  leur  dernière  pé- 
riode :  l'amaigrissement  n'est  pas  très-prononcé.  Nous  con- 
cluons à  l'existence  d'une  chloro-anémie  avec  névropathic 
générale,  et  nous  prescrivons,  en  conséquence,  un  traitement 
ferrugineux  et  des  aliments  réparateurs. 

Au  bout  de  quelques  jours,  nous  sommes  forcé  de  sus- 
pendre traitement  et  régime ,  à  cause  d'une  diarrhée  abon- 
dante et  de  vomissements  répétés. 

En  même  temps,  Tétat  de  débilité,  déjà  très-marqué, 
augmente  progressivement  ;  le  pouls,  assez  lent,  devient 
d'une  faiblesse  extrême;  tous  les  aliments  répugnent,  et  le 
peu  de  substances  liquides  que  la  malade  ingère  est  rejeté 
presque  immédiatement  ;  enfin,  tout  fait  présager  une  fin 
prochaine. 

A  ce  moment ,  le  hasard  nous  fit  tomber  sous  les  yeux 
l'analyse  d'un  mémoire  de  M.  Addison ,  publiée  par  M. 
Lasègue,  dans  le  numéro  de  mars  des  Archives  générales  de 
médecine. 

Le  médecin  anglais  rapporte,  dans  son  travail,  un  cer- 
tain nombre  de  cas  d'affections  diverses  des  capsules  surré- 
nales, dans  lesquels  les  malades  présentaient  une  forme 
particulière  de  chloro-anémie,  qu'il  ne  savait  à  quelle  cause 
attribuer,  ne  rencontrant  dans  l'économie  aucune  des  cir- 
constances habituelles  qui  donnent  lieu  à  cette  maladie.  Le 
hasard  seul  vint  le  mettre  sur  la  voie  du  rapport  qui  exis- 


H 


JOUJUIÀL  D£  MÉDECINS.  81 

tait  entre  l'état  cbloro-anémique  et  les  altérations  des 
capsules  surrénales  ;  mais  le  fait  le  plus  curieux,  c'est  un 
changement  particulier  de  la  couleur  de  la  peau,  symp- 
tôme sans  lequel  la  chloro-anémie  spéciale  qui  nous  occupe 
ne  se  distinguerait  pas,  pendant  la  vie ,  de  celles  qui  dépen- 
dent d'influences  morbides  d'une  autre  nature. 

Cette  description  nous  rappela  ,  à  mesure  que  nous  la 
lisions,  l'impression  que  nous  avait  faite  l'aspect  de  la  femme 
Ouvrard ,  et  nous  comptions  l'observer  à  ce  point  de  vue , 
quand  nous  apprîmes ,  le  lendemain  à  la  visite  ,  qu'elle 
avait  succombé  la  veille,  12  mars  ,  à  6  heures  du 
soir. 

Nous  primes  alors  des  renseignements  et  nous  sûmes 
que  la  maladie  avait  débuté  dix-huit  mois  auparavant ,  à 
la  suite  d'une  vive  émotion  morale;  que,  depuis  lors, 
elle  avait  toujours  langui ,  et  qu'on  avait  remarqué  que  sa 
penu  ,  très-blanche  auparavant,  avait  pris  une  teinte  de 
plus  en  plus  foncée. 

Autopsie  faite  le  14  mars  au  matin. 

1-,'amaigrissement  n'est  pas  très- prononcé. 
La  couleur  enfumée  est  un  peu  moins  foncée  que  pen- 
dant la  vie.  Elle  est  plus  intense  à  la  face ,  aux  aisselles  et 
aux  aines ,  que  partout  ailleurs.  Elle  est  sensible  par  tout 
le  corps. 

Tous  les  ganglions  lymphatiques  sont  à  très-peu  près 
transformés  en  tubercules  ;  ils  ne  forment  de  tumeur  un 
peu  considérable  qua  la  région  cervicale  et  sous* maxil- 
laire du  côté  droit. 

Les  uns  sont  ramollis,  les  autres  indurés  ;  ces  deux  de- 
grés se  rencontrent  à  peu  près  en  proportion  égale. 

Pas  un  tubercule  dans  les  poumons  ni  dans  aucun 
autre  organe  parenchymateux  ou  membraneux.  —  Le  rein 
droit  ,  augmenté  de  volume  ,  est  légèrement  hypé- 
rémié. 

La  capsule  surrénale  du  même  côté  conserve  sa  fprme 
triangulaire,  mais  elle  est  beaucoup  plus  épaisse  qu'à  l'état 


êi  JOtJEIfAL  DE  IlÉIIEClIlfi. 

normal  et  contient  deut   gros  tubercules  enkystés ,  ne 
commençant  pas  encore  à  se  ramollir. 

Le  rein  gauche ,  bosselé  ,  présente  à  peine  la  moitié 
de  son  volume  normal  ;  il  est  plus  pâle  que  le  droit  et 
d'utle  couleur  grisâtre  ;  il  est  farci  de  tubercules  enkystés 
de  volume  variable  ,  les  uns  durs  ,  d'autres  à  l'état  ca- 
séeux  ,  d'autres  enfin  contenant  du  pus  liquide ,  qui  s'é- 
coole  à  riocision. 

La  capsule  surrénale  correspondante  a  complètement 
changé  de  forme  ;  c'est  Un  cylindre  légèrement  atténué  à 
ses  extrémités,  placé  transversalement  sut- l'extrémité  su- 
périeure du  rein.  Elle  est  de  consistance  lardacée,  comme 
du  tubercule  cru,  et  présente  un  grand  nombre  de  tuber- 
cules enkystés  à  l'état  caséeux  ,  variant  pour  le  volume 
depuis  celui  d'un  grain  de  millet  jusqu'à  celui  d'un  poîs 
tert. 

Nous  n'avons  d'autre  prétention  ,  en  publiant  cette  ob- 
servation ,  que  de  joindre  un  fait  à  ceux  publiés  par  H. 
Addison ,  auxquels  le  Médical  Times  en  a  déjà  ajouté 
quatre. 

Dans  tous  ces  cas,  excepté  un  seul,  le  changement  de  cou- 
leur de  la  peau  a  été  noté  ,  et  c'est  aussi  la  teinte  de  la 
peau  qui  nous  a  frappé  chez  la  femme  Ouvrard.  Ce  phé- 
nomène emprunte ,  à  notre  avis ,  une  gtande  valeur  à 
une  circonstance  physiologique  remarquée  par  Cassan  , 
nous  voulons  parler  du  grand  volume  des  capsules  surré- 
nales chez  les  nègres.  Ce  dételoppement ,  rapproché  de 
celui  des  organes  génitaux ,  qiii  caraetérise  cette  race , 
est-il  plutôt  corrélatif  à  celui  de  l'appareil  pigmentaire?  Le 
docteur  Addison  a  posé  la  question  sans  oser  la  ré- 
soudre. 

La  coloration  bistre  ou  enfumée  de  la  peau  ne  saurait 
dtl  reste  se  rapporter  à  telle  lésion  spéciale  des  capsules 
surrénales ,  puisque  ,  dans  les  cas  où  elle  a  été  observée , 
on  a  rencontré  les  affections  les  plus  diverses ,  telles  que 
hypertrophie ,  atrophie  ,  apoplexie ,  inflammation,  frans- 
foi'maitionâ  fibreuses ,  athéromateusé  ,  tubercijflense ,  can- 
eél*eQ9e  ;  oin  pourrait  supposer  tout  au  plus  que  l'altéra- 


jOtlltlAL  bB  UtilïfiGtltB.  83 

tion  pigmentaire  est  causée  par  toute  lésion  Capable  d'an- 
nihiler les  fonctions  inconnues  de  ces  organes. 

En  dehors  de  l'altération  des  capsules  surrénales  ,  Tob- 
servttiion  de  la  femme  Ouvrard  présente,  ce  nous  semble, 
un  assez  grand  intérêt ,  comme  exemple  de  tuberculisa- 
tion  bornée  presque  exclusivement  aux  ganglions  lymfiha- 
tiques.  Il  n'est  pas  ordinaire ,  en  efFet ,  chez  l'adulte  , 
quand  il  existe  des  tobercules  dans  l'économie ,  de  ren*- 
contrer  tine  pareille  intégrité  des  organes  parencby- 
nntteux* 

Nous  ignorons  si  les  «rines  présentaient ,  dails  ce  cas , 
quelque  chose  d'anormal ,  notre  attention  n'ayant  pas  été 
éveillée  asses  tdtt  pour  que  nous  eussions  la  pensée  de  di- 
riger nos  investigations  de  ce  côté. 


Pse^lis  terminé  par  la  mm. 

Briand  ,  Augusiine  ,  âgée  de  22  ans  ,  domestique , 
entre  à  l'Hôtel- Dien  le  28  mai  t8S6.  Elle  accuse  8  à  f  a 
jours  do  maladie  ;  mais  nous  avons  appris  plus  tard  , 
qu'avant  ces  8  ou  10  jours,  et  depuis  plus  d'un  mois, 
elle  marchait  avec  difficulté  ,  se  plaignant  d'une  douleur 
constante  dans  le  membre  pelvien  droit  et  dans  le  cèté 
correspondant  du  ventre. 

Voi-ei  te  résultat  de  notre  premier  examen.  Mouvement 
fébrile  iM^ononcé  «  abattement ,  diarrhée  ,  gargouillement 
cœcal,  inappétence ,  douiesr  dans  les  reins  et  particulière- 
ment dans  la  cuisse  droite ,  se  prolongeant  dans  le  Jambe. 
Les  mouvements  du  membre  sont  libres ,  l'extension  se 
bit  compiétementé  Nous  diagnostiquons  une  fièvre 
typhoïde ,  tout  en  conservant  quelques  doutes  à  ce  sajet , 
parce  qail  ne  nous  semble  pus  exister  une  stupeur  pro- 
partionnelle  à  l'ensemble  des  autres  symptômes  ;  et  nous 
demandant  si  nous  n'avions  pas  sous  les  yeux  une  de  ces 
fièvres  rémittentes ,  dont  la  véritable  nature  masquée  au 
début,  se  dévoile  sous  l'influence  de  ta  médicarfioll. 


84  JOCBNAL  DE  KÉlffiGKNB. 

Nous  prescrivons  une  potion  fébrifuge. 

Les  jours  suivants,  Tétat  de  la  malade  ne  varie  pas  sen- 
siblement. Le  gargouillement  cœcal  est  toujours  très- 
marqué.  Les  1''  et  3  juin ,  nous  administrons  de  l'eau  de 
Sediitz  ,  et  nous  faisons  frictionner  la  cuisse  droite  avec  de 
la  pammade  de  belladone. 

Le  8  juin ,  la  malade  est  prise  d*une  scarlatine  ano- 
male (il  existait  alors  plusieurs  cas  de  scarlatine  dans  la 
salle),  La  maladie  d'intensité  moyenne  ne  s'accompagna 
d'aucun  accident  spécial  :  mais  les  douleurs  du  membre 
abdominal  droit  allèrent  en  augmentant,  la  cuisse  se 
plaça  en  demi-flexion  sur  le  bassin  ,  et  la  jambe  se  fléchit 
de  même  sur  la  cuisse ,  en  môme  temps  que  le  genou  et 
le  pied  étaient  portés  dans  une  demi-abduction. 

Les  tentatives  faites  pour  imprimer  des  mouvements  au 
membre  ,  excitaient  de  vives  douleurs. 

La  percussion  sur  la  rotule,  dans  la  direction  du  fémur, 
occasionnait  de  même  une  sensation  douloureuse  ,  que  la 
malade  rapportait  à  l'aine. 

Nous  crûmes  voir  dans  ces  symptômes  ceux  d'une 
coxalgie.  Cependant  la  fièvre  continuait  toujours  ainsi  que  la 
diarrhée  ;  l'appétit  était  nul ,  la  faiblesse  et  l'amaigrisse- 
ment faisaient  des  progrès. 

Tout  le  mois  de  juin  se  passa  ainsi,  sans  modification 
dans  l'état  général  :  le  traitement  cousista  dans  l'emploi 
des  calmants  à  l'intérieur  et  à  l'extérieur. 

Le  4  juillet  au  matin ,  nous  voyons  la  malade  dont 
l'état  nous  semble  toujours  très*grave  ;  mais  sans  que  rien 
nous  fasse  présager  une  fin  imminente  :  dans  la  soirée, 
elle  rend  tout-à-coup  par  lanus  une  grande  quantité  de 
matière  sanieuse  ;  elle  s'afiaiblit  de  plus  en  plus ,  et  expire 
le  5  juillet ,  à  4  heures  du  matin.  Ce  mode  de  terminaison 
rapproché  des  symptômes  observés  pendant  la  vie  ,  nous 
fit  penser  à  l'existence  probable  d'un  psoïtis ,  maladie  que 
nous  n'avions  jamais  eu  occasion  d'observer.  Cette  tardive 
réflexion  fut  vérifiée  par  l'autopsie  faite  le  6  juillet,  à  9 
heures  du  matin. 

L'attitude  du  cadavre   était  celle  que  nous  avions  ob- 


joubnâl  db  hédeghcb.  85 

servée  pendant  la  vie  ,  l'amaigrissement  était  très-pro* 
nonce  ,  le  ventre  un  peu  météorisé ,  des  sudamina  exis- 
taient dans  les  régions  inguinales.  L'anus  était  teint  par 
la  sanie  qui  l'avait  traversé  ;  les  poils  des  parties  génitales 
étaient  agglutinés  par  ce  même  liquide  desséché.  Toutes 
les  parties  du  corps  étaient  remarquablement  exsangues. 
Le  grand  épiploon  était  aminci  et  détruit  par  places  ;  tout 
le  péritoine  présentait  des  traces  légères  d'une  péritonite 
subaiguê  ;  ces  traces  étaient  plus  évidentes  dans  le  petit 
bassin  que  partout  ailleurs. 

En  enlevant  la  masse  intestinale,  on  trouvé  sous  le  fascia 
iliaca  ,  du  côté  droit ,  une  tumeur  flasque  ,  volumineuse  « 
s*étendant  depuis  les  piliers  du  diaphragme  jusqu'à  l'arcade 
crurale,  refoulant  vers  la  ligne  médiane ,  l'utérus  ,  l'ovaire 
droit  et  la  trompe  du  même  côté  ,  organes  avec  lesquels 
elle  a  contracté  des  adhérences.  Elle  adhère  aussi  dans 
cette  région  ai^  rectum  ;  aux  points  d'adhérence  les  parois 
de  cet  intestin  sont  amincies ,  mais  non  perforées. 

Il  n'en  est  pas  de  même  de  deux  anses  de  l'intestin 
grèle  V  appartenant  l'une  au  jéjunum,  l'autre  à  Tiléum,  qui 
adhèrent  à  une  partie  plus  élevée  de  la  tumeur,  et  qui  pré- 
sentent toutes   deux  une  communication  étroite  avec  sa 
cavité  :  toutes  les   parties  de  l'intestin  situées  au-des- 
sous   des   perforations ,    présentent    des    traces    du    li- 
quide  sanieux  qui  s'est  écoulé  par  le  rectum.  Le  cœcum 
et  le  colon  ascendant  en  sont  complètement  tapissés.  Il 
en  est  de  même  du  rectum ,  qui,  même  après  le  lavage, 
se  montre  teint  en  rouge  sale,  dans  presque  toute  son 
étendue.   L'appareil  génital  ne  présente  aucune  trace  de 
grossesse  antérieure  ;  il  est  sain;  l'ovaire  droit  est  augmenté 
de  volume  et  rempli  par  un  caillot  fibrineux  rouge-noir 
à  sa  sur&ce  ,  et  dont  le  centre  commence  à  se  décolorer. 
La  présence  de  ce  caillot   se  rattache  sans  doute  à  une 
époque  menstruelle  qui  a  eu  lieu  peu  de  jours  avant  la 
mort.   Point  de  communication  entre  les  voies  génitales 
et  la  tumeur. 

La  vessie  contient  une  urine    trouble  et  qui  semble 

7 


nMée  4e  p«ui  ;  V^im  eumnée  à  Fépoque  da  U  «carlatine, 
ne  nous  levait  donoé  aucun  rénalM* 

Le  tMnmir  elle-même  oovis  présente  iine  coUection  de 
bouillie  stni^us^ ,  noirftire ,  roèlée  de  sMig  OQir  coagidé , 
et  danfi  laqiieUe  flottent  des  filaments  fibreux.  Les  téguments 
de  ia  région  Vmbaire  oorrespoudanie  ont  une  teinte 
viojacée  due  A  ^ne  ecchymose  qui  oeciApe  TéiMisseur  du 
derme  et  la  couche  sous*cutanée.  Les  oiuscles  (psoas^  i^que 
fi  carné  dea  lombes»  sont  con^pi^temeot  détruits. 

En  arrière ,  l'inflammation  a  atteint  et  détruit  les  li^- 
ments  de  la  symphyse  sacro-iliaque ,  et  Ion  pénètre  dans 
cette  articulation.  L'artère  fémorale  rejetée  en  dedans  de 
la  tumeur,  est  danç  un  état  de  par&ite  intégrité.  La  veine 
fémorale  au  contraire  «  depuis  le  creux  poplité  jusqu'à 
l'arcade  crurale,  est  remplie  par  un  caillot  adhérent  rou^e,- 
noirfttre.  Nulle  part  il  n'existe  de  pus  phlegmoneux.  La  veine 
iliaque  et  la  veine  cave  sont  vides. 

Tous  les  autres  organes  sont  à  l'état  normal.  Le  tube 
digestif,  en  particulier,  ne  présente  aucune  des  lésions 
«aradéristiques  de  la  fièvre  typhoïde. 

ÛuoiquMI  existe  dans  ta  science  un  certain  nombre 
d*obsenrations  de  psoïtis ,  il  est  constant  que  cVst  une 
maladie  assez  rare,  puisque  le  cas  que  nous  venons  de 
vous  racomer  est  le  seul  que  nous  ayons  été  à  même  d'ob- 
server. 

C'est  à  ce  thre  et  parce  qu'il  a  été  pour  nous  l'occasion 
i*une  erreur  de  diagnostic  ,  qu'il  nous  a  semblé  utile  de 
vous  le  communiquer. 

Voyons  d^alKird  comment  nous  aurions  pu  éviter  cette 
ei^eur.  Le  siège  de  la  douteur  à  droite,  la  coexistence  du 
gargoniNement ,  l'absence  ^ie  tumeur  appréciable  au  tou- 
dher,  ta  diarrhée  et  le  météorisme  du  ventre ,  nous  ont 
em^pêclié  ^'attacher  toute  la  valeur  qu*eHes  méritaient , 
aux  deuteurs  accusées  par  la  malade  dans  le  roemibre 
pelvien  correspondant.  Cependant ,  mafigré  l'aflhis^emeBt 
qui  résultait  de  la  vivacité  de  ses  doofleurs  et  du  travaît 
phlegmasique  qui  s'accomplissait,  il  n'a  jamais  existé  de 
véritable  ^^^peur;  plus  tard^  nous  aurions  fm  nous  éclairer 


par  la  pQ&iiion  da  membre  qui  était  inoliné  en*  dehors , 
tandis  que  dans  la  eoxalgie  il  s'ioclineen  dedaos.  Mais  à 
Tépoque  où  la  flexion  est  deveoMif^ennanente  et  s'est 
accompa^Qée  de  rot^tioo  en  dehors,'  les  désordres  étaient 
trop  considérables  pour  qu'aucun  traitement  pût  ea 
triompher.  —  On  sait  que  le  plus  gtaad  nombre  des  eas 
connus  de  psoïtis,  ont  eu  une  issue  folale,  et  dans  ceux  qàî 
sont  rapportés  comme  des  exemples  de  guérison  ,  il  reste 
des  doutes  sot  l'exactitude  du  diagnostic. 

L'extrême  gmvité  de  cette  affection  vient  sans  doute  de 
ce  que«  au  début,  il  est  très-diilicile,  pour  ne  pas  dire  impos*- 
sibtet  delà  reconnaître,  et  ce  serait  pourtant  alors  que  le 
traitement  aucait  quelque  eiBcaciié  ;  quand  le  mal  se  tra* 
duit  par  des  signes  évidents,  il  est  déjà  au-dessus  des  res^ 
sources  de  Tart. 

Cette  noaladie  est  ordinairement  le  résultat  de  pressions 
violenter  ou  de  tiraillements  exercés  sur  les  muscles  psoas 
et  iliaque;  aussi  Taccoucbement  est-il  signalé  comme  cause, 
dans  un  bon  nombre  des  cas  connus. 

Une  circonstance  curieuse,  qui  s'explique  sans  doute  par 
la  position  que  la  tête  de  l'enfant  affecte  le  pins  ordinaire- 
ment, c'est  que  les  psoïtis  arrivés  à  la  suite  deTaccoucbe^ 
ment  s'observent  le  plus  souvent  à  gauche;  c'est  le  contraire 
pour  ceux  qui  dépendent  de  causes  différentes.  Chez  notre 
malade,  nous  avons  trouvé  les  organes  génitaux  dans  un 
état  exclusif  de  toute  grossesse  antérieure;  le  mal  siégeait  à 
droite;  nous  n'avons  pu,  d'ailleurs,  obtenir  de  renseigne- 
ments sur  les  circonstances  antécédentes  auxquelles  il  fau- 
drait attribuer  son  développement. 

Ni>iis  remarquions  que  la  scarlatine  intereomiitei  n'a 
pas  semblé  avoir  la  moindre  induence  sur  la  marche  de  la 
maladie  principale. 

Qu'on  nous  permette  une  dernière  réflexion. 
Les  auteurs  dn  Compendiutn ,  marchant  en  cela  sur  les 
traces  de  M.  Grisolle ,  auteur  d'un  mémoire  ea^professo 
sur  la  matière ,  confondent ,  dans  une  même  description , 
la  psoîte  et  les  autres  tumeurs  phlegmoneuses  de  la  fosse 
iliaqua.  Ils  décrivent  troiaespèces  de  tumeur»  pUagmoneu- 


88  iÙVWHkh  DB  MÉBBCinB. 

ses  de  cette  région ,  sous  le  nom  d*abcès  intra-péritonéaux , 
souS'pérHonéaux  et*  sous-aponévrotiques.  Cette  dernière 
espèce,  on  le  convpfcfld,  représente  le  psoîtis. 

Nous  ne  croyons  pas  cette  manière  de  procéder  avan- 
tageuse; il  est  préférable,  selon  nous,  de  séparer  complè- 
tement des  deux  premières  espèces  la  description  de  l'in- 
flammation du  muscle  psoas. 

Voici  sur  quels  motifs  nous  fondons  notre  opinion. 

Les  symptômes  du  psoîtis  ont  une  forme  bien  plus  cons- 
tante que  ceux  des  autres  phlegmons  iliaques  ;  ceux-ci 
viennent  en  général  faire  saillie  sous  les  téguments ,  et  de 
la  manière  la  plus  variable  ,  ce  qui  n'arrive  jamais  «  oa 
presque  jamais  ,  pour  l'abcès  du  psoas  emprisonné  sous  le 
fascia  iliaca.  La  position  du  membre  est  bien  plus  cons- 
tante et  plus  caractéristique  ;  enfin ,  les  produits  de  l'in- 
flammation ne  sont  pas  identiques  ;  pour  le  psoîtis ,  ce 
n'est  jamais  de  véritable  pus  blanc  ,  mais  une  sanie  rouge 
noirâtre ,  résultat  de  la  fonte  du  tissu  des  muscles  en- 
flammés. 

Il  convient  donc ,  à  notre  avis  ,  de  ne  rapprocher  de 
cas  aussi  dissemblables  ,  que  pour  établir  leur  diagnostic 
difiérentiel  ;  pour  leur  description  spéciale  ,  elle  doit  être 
faite  séparément. 


SYMPTOMES  GRAVES  produits  par  L'admi- 
nistration  du  seigle  ergoté^  à  la  dose  de  trais 
grammes,  dans  l'espace  d'une  heure,  dans  un 
cas  d'hémorrhagie  utérine ,  après  la  délivrance, 
par  M.  Tbastoub^  D.-im.,  ancien  interne  des 
hôpitaux  de  Pari$ ,  médecin  suppléant  des  hô- 
pitaux de  Nantes. 


Le  28  janvier  1856,  à  7  heures  du  matin,  je  fusap- 


JODRNAL  DE   MÉBSCIUB.  89 

pelé,  rue   Kervégan,  près  d'une  femme  âgée  de  37 ans, 
mariée  à  un  ouvrier  cbarpeoHer,  à  laquelle  j'avais  donné 
des  soins  le  mois  précédent,  pour  une  bronchite  légère. 
Cette  femme ,  de  taille  moyenne ,  de  tempérament  lympha- 
tique, quoique  paraissant  d'une  ussez  forte  constitution, 
ayant   beaucoup   d'embonpoint,  mais  des  chairs  molles, 
avait  fixé,  dès  cette  époque,  mon  attention  par  le  désac- 
cord qui   existait  entre  les  symptômes  généraux  qu'elle 
présentait  et  la  maladie  locale.  Ainsi,  une  simple  bronchite, 
peu  intense,  avait  suffi  à  déterminer  un  abattement  consi- 
dérable ,  un  malaise  extrême  et  une  très-grande  accéléra- 
tion du  pouls.  L'idée  que  j'avais  gardée  de  cette  personne 
était  qu'il  fallait  peu  compter  sur  sa  force  de  résistance 
vitale,  et  que  son  embonpoint  était  plutôt  un  indice  de 
faiblesse  que  de  force. 

Cette  femme ,  mariée  depuis  peu  de  temps  à  un  homme 
plus  jeune  qu'elle  et  adonné  à  l'ivrognerie ,  est  t^ès-mal* 
heureuse  en  ménage;  des  tourments  continuels,  des  frayeurs 
incessantes ,  et  quelquefois  des  coups,  sont  les  seuls  béné- 
fices que  cette  infortunée  ait  retirés  de  sa  tardive  union. 
Devenue  enceinte,  elle  n'a  pas  été  plus  ménagée*  Se  trou- 
vant actuellement  à  7  mois  et  demi  ou  8  mois  de  grossesse, 
elle  a  fait  hier,  27  janvier,  une  course  assez  longue;  elle 
est  allée  jusqu'à  Chantenay  et  a  pris  l'omnibus  pour  reve- 
nir. Elle  s'est  couchée  bien  portante,  mais,  à  4  heures,  œ 
matin ,  elle  s'est  réveillée  avec  un  grand  malaise ,  des  en-* 
vies  de  vomir  et  des  coliques.  Elle  a  vomi  deux  fois  de 
la   bile  et  est  allée  aussi  deux  fois  à  la  selle  en  dévoie- 
ment. 

Les  douleurs  sont  assez  vives  e  très-fréquentes,  accom- 
pagnées d'un  malaise  et  d'un  abattement  considérable. 
Elles  n'ont  pas  franchement  le  caractère  des  douleurs  in* 
tcrmittentes  de  l'accouchement.  L'utérus  s'élève  jusqu'à 
4  travers  de  doigts  au-dessus  de  l'ombilic  ;  je  ne  sens  pas 
de  mouvements  de  l'enfant;  je  cherche  de  même,  en  vain, 
les  bruits  cardiaques  et  placentaires  ;  mais  hier  soir  encore 
l'en&nt  remuait.  .Au  toucher  ,  je  trouve  le  col  de  Tutérus 
irès-amoindri  en  longueur,  très-aminci ,  assez  mou ,  mais 


tO  JOrailAI.  SE  HÉMOm. 

c'eftt  à  peine  d  l'extrémité  de  Tiodex  peut  pénétrer  dans 
Forifice  externe;  la  dilatation  ne  fiiit  donc  que  oom> 
mencer. 

La  niakde  a  la  peau  chaude ,  le  pouls  très-fréquent  et 
petit,  la  iace  rouge  comme  dans  la  rougeole,  el  une  soif 
vive. 

Limonade  au  citron. 

A  9  heures  du  matin ,  les  eaux  s'écoulent  toat*à-eoup  ; 
je  touche  de  nouveau  «  et ,  comme  la  dilatation  du  col  a 
très-peu  fait  de  progrès ,  comme  d'un  autre  c6té  je  cherche 
toujours  en  Tain  les  bruits  du  cœur  du  imtus ,  je  commence 
à  croire  à  la  mort  de  l'en&nt. 

En  eflbt,  vers  3  heures  de  raprès-raidi,  l'aocoucbement 
se  fait,  et  un  enfant  d'environ  8  mois ,  d'un  eorpe  grêle 
et  maigre ,  vient  au  monde  sans  vie.  La  mort  parait  ré- 
cente; l'épiderme  n'est  nullement  décollé;  le  cadavre  n'a 
paa  d'odeur. 

La  mère  a  beaucoup  de  chagrin  de  cet  événement  qu'on 
ne  peut  lui  dissimuler.  La  délivrance  se  lait  cependant 
très4Men  et  très^&cilement,  au  bout  de  20  à  26  minutes. 

Le  placenta  et  les  membranes  sont  venus  en  entier  et 
ne  semblent  pas  altérés.  —  Mais  une  perte  assex  abon- 
dante ne  tarde  pas  à  se  déobrer  :  le  sang  coule ,  non  pas 
par  flots ,  mais  par  nappe  ;  l'utérus  est  mou  ,  se  contracte 
avec  peine  sous  l'influence  de  frictions  hypogastriques , 
et  ne  reste  pas  resserré.  J'envoie  chercher  deux  granomes 
de  seigle  ergoté  en  quatre  paquets,  et ,  en  attendant ,  je 
m'efforce  par  la  titillation  d'un  ou  de  deux  doigts  sur 
l'orifice  utérin  ,  par  des  frictions  soutenues  du  bas- ventre, 
de  bire  cesser  cet  état  d'inertie  de  la  matrice. 

Le  médicament  arrive  bientôt  ;  les  quatre  paquets  soiil 
avalés  successivement  de  10  minutes  en  10  minutes.  La  perte 
n'estpas  très-forte,  mais  elle  continue  ;  Tutérus  se  contracte 
momentanément ,  mais  faiblement  et  sans  persistance.  Les 
forces  diminuent ,  la  noabde  pâlit ,  va  tomber  en  syncope; 
j'applique  des  mouchoirs,  trempés  dans  l'eau  froide,  sur 
le  ventre  et  sur  les  cuisses;  j'exede  avec  les  doigts,  autant 
que  poesiblet  toutefois  sans  violence,  le  eot  de  l'utérus, 


JOinmAL  SE  XÉMCBtt.  91 

ei  je  fais  demander  de  nouveau  sit  paduets  de  seigle  ergoté, 
(ie  50  oenUgiramines  chacun.  Deut  de  ces  nouveaux  pa- 
quets sont  seulement  administrés  de  la  même  manière  al 
bien  tolérés  par  restomac.  Pendant  une  heure,  les  linges 
froids  sdnt  renouvelés  sur  le  ventre  et  tes  baisser  ;  enfin 
peu  à  peu  la  perte  s'arrête ,  Tutérus  devient  et  reste  dur. 
ie  quitte  la  malade  au  bout  d'bne  heure,  les  accidents 
paraissant  tout^à-fait  enrayés  ,  Tétat  général  étant  satidfei- 
sant ,  sauf  la  faiblesse  naturelle  dans  ces  circonstances,  h 
&is  de  nombreuses  recommandations  aux  personnes  pré- 
sentes ,  pour  éviter  tout  ce  qui  pourrait  ramener  rhétiior- 
rbagte.  J'ordonne  même  de  donner  «un  autre  paquet  de 
seigle  ,  si  le  sang  coulait  en  abondance ,  en  attendant  que 
je  pusse  revenir  près  de  la  malade. 

L'hémorrhagie  né  reparait  pas ,  et  on  ne  dohne  pas  ^ar 
conséquent  de  seigle  ergoté. 

Mais  la  nuit  se  passe  dans  un  malaise,  dans  une  agita- 
tion extrêmes  ;  la  malade  ne  peut  rester  en  place ,  elle  ne 
doK  pas  une  minute ,  elle  a  des  rêvasseries ,  une  esipèbe  de 
subdelirium  ,  du  hoquet  et  des  rapports  qui  ont ,  dit-elle , 
le  goût  d'œufs  pourris. 

Quand  j'arrive  près  d'elle,  le  29  janvier  «  k  7  heures  dn 
matin  ,  je  la  trouve  extrêmement  agitée  ;  elle  se  roule  i 
chaque  instant  d'un  côté  sur  l'autre ,  les  cheveux  en  dé- 
sordre )  la  figure  pâle  ,  les  lèvres  un  peu  bleues.  La  toil 
pourtant  est  assez  bonne ,  la  physionomie  n'est  pas  trè^- 
altérée  ;  mais  quand  je  veux  tâter  le  pouls ,  je  ne  puis 
percevoir  les  battements  de  l'artère  radiale.  Je  (Mtois  que 
je  cherche  mal ,  que  mes  doigts  sont  engourdis  par  le 
froid  ;  je  passe  d'un  bras  à  l'autre ,  j'explore  successive- 
ment les  artères  radiale ,  cubitale  et  même  bt^aebiale  de 
chaque  e6té  ;  je  ne  peux  saisir  aucun  battement.  Alarmé, 
je  mets  bien  vite  l'oreille  sur  le  cœur ,  il  bat  tégulièi*e- 
ment ,  sans  fréquence ,  assea  faiblement. 

Je  constate  que  la  malade  ne  perd  pas  de  sang ,  que  la 
matrice  n'est  pas  distehdue  et  se  maintient  bien  rétractée. 
La  malade  accuse  des  fourmillements  ;  du  froid  dans  les 
mams  et  dans  les  pieds;  elle  dit  qu'elle  ne  sent  pfus  ses 


92  JOimiTÀL  DE   MÉBBCWS. 

extrémités ,  qu'elle  a  les  membres  rompas  «  qu'elle  ne  peut 
les  bouger.  Les  extrémités  sont  ifroides  en  effet ,  la  peau 
et  les  ongles  ont  une  légère  teinte  bleue  aux  mains  et  aux 
pieds. 

Fort  inquiet  de  cet  état  dont  le  seigle  ergoté  ,  bien  que 
donné  à  une  dose  assez  modérée ,  me  paraît  être  la  cause, 
j'ordonne  de  donner  du  bouillon  et  du  vin  rouge  alterna- 
tivement tous  les  quarts  d'heure ,  et  de  réchauffer  les  ex- 
trémités. 

A  iO  heures,  je  reviens;  l'état  est  toujours  le  même; 
peu  alarmant)  si  on  ne  considère  que  la  figure,  mais  tou- 
jours très-inquiétant  quand  on  constate  l'état  des  membres. 
Car  je  ne  suis  pas  bien  sûr  de  trouver  quelques  batte- 
ments de  l'artère  radiale.  —  Je  fois  mettre  des  sinapismes 
aux  poignets  et  continuer  le  vin  et  le  bouillon. 

Le  soir,  le  pouls  n'est  pas  plus  perceptible  ;  la  malade 
se  plaint  toujours  de  froid  ,  de  fourmillement  et  d'engour- 
dissement dans  les  doigts  ;  de  plus ,  je  constate  à  la  face 
postérieure  des  jambes ,  sur  les  côtés  des  malléoles  ,  des 
taches  livides  dans  l'épaisseur  de  la  peau,  qui  ne  s'effaceot 
pas  sous  le  doigt  et  qui  m'effraient  beaucoup  ;  car ,  je 
crains  qu'elles  ne  soient  les  indices  précurseurs  de  quel- 
ques plaques  gangreneuses.  Le  pouls  est  toujours  imper- 
ceptible sur  les  artères  des  membres  ;  il  est  vrai  que  l'em- 
bonpoint de  la  personne  gène  dans  l'exploration  des  gros 
troncs  vasculaires. 

On  cause  de  la  douleur  en  frottant  les  extrémités  ;  la 
malade  a  bien  senti  les  briques  chaudes  qui  ont  été 
mises  aux  pieds  et  la  moutarde  qu'on  a  placée  sur  les 
poignets. 

*  Elle  a  pris  du  bouillon  et  du  vin  assez  fréquemment  ; 
elle  ne  se  plaint  plus  tant  de  sa  faiblesse  ;  les  lochies  cou- 
lent très*peu ,  le  bas- ventre  est  un  peu  douloureux  et 
tendu  ;  il  y  a  toujours  de  l'agitation. 

Sirop  thébaïque ,  ane  cuillerée  à  café  de  2  heures  en 
2  heures ,  jusqu  a  ce  qu'il  y  ait  du  calme.  Frictions  sur 
les  extrémités. 

Le 30.  —  La  nuit  a  été  assez  bonne,  grâce  à  trois 


JOUBRAL  DE  MÉBBCOIB.  93 

cuillerées  de  sirop.  H  y  a  encore  du  froid  ,  de  Tengour-- 

dissement,  des  fourmillements  dans  les  extrémités.  Les 

membres  sont  brisés  et  douloureux  à  la  pression  ;  il  y  a 

hyperesthésie  générale  de  la  peau  ;  la  langue  est  blanche , 

humide  ;   les  lèvres   bleuâtres  ;  un  peu  de  douleur  à  la 

gorge  ;  hoquet  fréquent ,  goût  d'œufs  pourris  et  rapports 

acides  ;  très-peu  de  flux  lochial  «  très-peu  d'urine  ,  pas  de 

selle  depuis  raccouchement ;  cependant,  la  vessie   n'est 

pas  distendue  et  le  ventre  est  moins  douloureux  qu'hier. 

J'ausculte  le  cœur  et  les  carotides  ;  leurs  bruits  sont 

réguliers  ,  peu  fréquents  et  plus   intenses  ;  mais  le  pouls 

radial  aux  deux  bras  est  toujours  douteux.  La  teinte  livide 

de  la  peau  des  jambes  a  diminué  ;  elle  persiste  seulement 

au  mollet  gauche. 

Magnésie  calcinée ,  6  grammes  en  3  paquets.  Bouillon. 

Sinapismes.  Frictions. 

Le  soir ,  un  peu  de  fièvre  commença  à  se  manifester , 
la  peau  devint  chaude  ;  le  pouls  était  perceptible  à  Tar- 
tôTo  cubitale  du  bras  droit  et  à  l'artère  radiale  du  bras 
gauche. 

Le  31.  —  Le  hocfuet  a  diminué  ainsi  que  les  aigreurs; 
il  est  vrai  que  la  malade  a  cessé  de  sucer  des  morceaux 
d'orange ,  ce  qu'elle  avait  fait  jusqu'alors.  H  y  a  eu  une 
selle  en  dévoiemeat  et  un  peu  d'urine  a  été  rendue.  La 
femme  se  trouve  assez  bien;  elle  a  dormi  à  l'aide  de  15 
grammes  de  sirop  thébajk}ue  ;  toutes  les  artères  de  l'avant-* 
bras  ont  des  battements  très-manifestes;  l'engourdisse- 
ment des  extrémités  a  diminué ,  le  fourmillement  disparu, 
la  température  de  la  peau  est  bonne  ;  les  taches  cuivrées 
du  mollet  gauche  diminuent  ;  il  reste  une  légère  exalta*< 
tion  de  la  sensibilité  de  la  peau ,  une  lassitude  extrême , 
un  peu  de  mal  de  gorge,  mais  sans  apparence  d'inflam- 
mation ;  le  siûn  gauche  commence  à  se  gonfler. 

Le  lendemain ,  1<'  février ,  la  malade  était  bien  ,  le 
pouls  à.  84  ,  trèS'bon  ;  tout  symptôme  inquiétant  avait  dis- 
paru ,  seulement  il  était  survenu  une  extinction  de  voix 
et  les  douleurs  des  membres  continuaient.  La  coovales- 


94  jonuvAi  BB  SÉMcnvK. 

oence  a  été  asset  lohgue  ;  les  forces  sont  revenaes  lente- 
ment ;  mats  aujourd'hui  la  sainte  est  parfaite. 


Réflextan». 

A  quoi  sont  dus  les  symptômes ,  véritablement  alar- 
itoants,  qui  se  sont  montrés  ches  la  personne  qui  fait  le 
sujet  de  cette  observation?  J'ai  pris  soin  de  relater  toutes 
les  circonstances  de  tempérament ,  de  constitutioti ,  de 
situation  morale,  qui  pouvaient  rendre  raison  de  leur 
développement;  mais  la  tréritable  cause  qui  les  a  dmenés 
ne  me  semble  pas  douteuse  ;  je  crois  que ,  dans  ce  cas , 
le  seigle  ergoté ,  bien  que  la  dose  administrée  m'ait  pas 
été  bien  élevée  et  soit  très-souvent  dépassée  dans  la  pra- 
tique ,  a  produit  un  commencement  d'empoisonnement. 

Il  est  impossible  d'attribuer  ces  accidents  à  Thémorrha- 
gie ,  qui  n'a  pas  été  excessive  ,  qiil  d'ailleurs  était  com- 
plètement arrêtée  et  depuis  longtemps ,  quand  ils  se  sont 
manifestés. 

Quand  il  y  a  absence  de  pouls  dans  les  hémorrhagies , 
il  y  a  pâleur  extrême ,  syncopes  l'éitérées  et  prolongées  , 
etc.  Ici ,  rien  de  tout  cela.  Mais  ,  au  premier  abord ,  que 
peot^on  penser  d'une  personne  dont  les  membres  n'offrent 
plus  de  battements  artériels ,  et  qui  cependant  vous  parle, 
vous  rend  compte  de  ce  qu'elle  éprouve ,  et  n'a  pas  la 
figure  très-altérée  ?  Le  corps  esl  encore  plein  de  vie,  mais 
les  membres  semblent  menacés  de  mort.  Pendant  48 
heures  que  les  pulsations  des  artères  des  membres  ont 
manqué ,  j'ai  été  réellement  fort  inquiet  sur  les  accidents 
qui  pouvaient  survenir  aox  extrémités.  Que  serait-il  arri- 
vé,  si  l'on  eût  été  obligé  de  recourir  de  nouveau  au  seigle 
ergoté  ?  Et  cependant ,  bien  des  praticiens  emploient  tous 
les  jours  des  doses  plus  considérables  de  ce  inédioament  ! 
Je  ne  sais  si  des  fiiits  analogues  à  cèltti-ci  existent  dans  la 
science ,  mais  j'ai  pensé  qu'il  était  utile  de  le  faire  con- 
naître, pour  mettre  mes  confrères  sur  leurs  gardes ,  vis* 
à-vis  d'un  remède  usuel ,  dont  on  ne  oraiivt  pas  d'effets 


JOVBIIAL  SB  XÉBBeniB.  95 

redoutables  «  au  moins  pour  les  mères  ,  dans  la  jpratiiiue 
des  aecottchemenls. 

Je  sais  que  le  seigle  ergoté  varie  beaucoup  de  qualité  ^ 
suivant  une  foule  de  circonstances  ;  aurait-il  été  plus  actif 
dans  ce  cas  qu'il  ne  Test  d'ordinaire  ?  Quelque  fait  acces- 
soire ,  tel  que  son  administration  rapide,  l'usage  de  bois- 
sons et  de  sues  acides ,  aurait*il  pu  augmenter  ses  effets 
sur  l'organisme?  Je  ne  puis,  à  cet  égard  ,  émettre  que 
des  doutes.  —  Le  sujet  était  probablement ,  par  idiosyn- 
crasie  ,  par  les  circonstances  que  j'ai  relatées,  plus  sen- 
sible qu'un  autre  à  l'action  du  seigle  ergoté  ;  il  n'en  reste 
pas  moins  établi  pour  moi  ,  que ,  sans  qu'il  soit  possible 
de  le  prévoir ,  une  dose,  môme  peu  élevée,  de  ce  mé« 
dicanMOt ,  peut  causer  quelques-uns  des  symptômes  les 
plus  inquiétants  de  l'ergotisme  gangreneux. 


APPUÈCIATION  de  la  méthode  de  Devmter , 
ayant  pour  kul  de  faciliter  la  version ,  par  te 
rf'  AVBiNÀis ,  Président  du  Jury  de  Médecine 
de  la  Loire-Inférieure. 


Chez  certaines  femmes  ,  dont  une  remarquable  obésité 
se  trouve  liée  d'ordinaire  à  une  constitution  lymphatique, 
l'abdomen  ,  à  la  suite  de  plusieurs  accouchements , 
porte  ,  vers  les  derniers  temps  de  la  grossesse  ,  dd  tout 
son  poids  sur  le  devant  des  cuisses.  On  a  coutume,  alors, 
de  dire  que  le  ventre  est  tombé  en  besace  sur  les  cuisses, 
et ,  dans  le  but  de  soulager  la  femme  des  douleurs  qu'elle 
éprouve  par  le  tiraillement  des  ligaments  larges,  on  cherolie 
à  soutenir  l'abdomen  de  bas  en  haut  par  un  bandage  de 


96  JOVBIfÀL  BE  HÉDECHŒ. 

corps.  C'est  ordinairement  une  large  serviette ,  dont  les 
bretelles  croisent  dans  le  dos  et  viennent  se  fixer  en  avant. 
Il  y  a  des  ceintures  élastiques  qui  obtiennent ,  dans  ces 
cas  ,    un  résultat  que  le  repos  au  lit  favorise  aussi. 

La  distension  démesurée  des  aponévroses  et  des  muscles 
abdominaux,  outre  qu'elle  dispose  aux  hernies,  devient 
pour  la  femme  très  douloureuse  vers  les  insertions  ou 
attaches  des  muscles  :  aussi,  M.  Jacquemier  a-t  il  raison 
de  dire  «  que  les  points  douloureux  que  beaucoup  de 
femmes  enceintes  éprouvent  à  la  base  de  la  poitrine  n'ont 
pas  ordinairement  d'autres  causes.  » 

Il  est  d'observation  aussi  que  les  femmes  ,  douées  d'une 
constitution  éminemment  lymphatique,  sont  prédisposées, 
par  le  fait  seul  de  leur  tempérament ,  à  la  distension  ou- 
trée de  l'utérus.  Chez  ces  femmes ,  en  effet ,  par  suite 
d'une  supersécrétion  de  la  membrane  amnios,  il  n'est  pas 
rare  de  voir  survenir  une  véritable  hydropisie  de  l'utérus , 
à  laquelle  il  faut  rattacher  la  maladie  décrite  par  le  pro- 
fesseur Nacgelé ,  sous  le  nom  d'hydrorrhée  utérine, 

La  procidence  sur  les  cuisses  d'un  ventre  démesuré- 
ment distendu  imprime  souvent  au  fœtus,  dans  la  cavité 
utérine ,  une  position  qui  se  traduira  au  moment  du  tra- 
vail ,  par  une  présentation  contre-nature  ;  de  là,  la  néces- 
sité de  recourir  à  la  version. 

Cette  remarque  n'avait  pas  échappé  aux  anciens;  mais  il 
faut  arriver  jusqu'à  Deventer  pour  trouver  l'indication  et 
l'explication  des  moyens  de  faciliter  la  version.  La  mé- 
thode qui  porte  le  nom  de  Méthode  de  Deventer,  consiste, 
chacun  le  sait,  à  placer  la  femme  sur  ses  genoux  et  sur 
ses  coudes.  Pendant  qu'elle  se  maintient  dans  cette  situa- 
tion ,  l'accoucheur  ,  placé  en  côté  et  un  peu  derrière  elle , 
tente  la  version. 

11  faut  reconnaître  que  Deventer  s'était  mieux  pénétré 
que  les  accoucheurs  distingués  ses  devanciers ,  des  ob- 
stacles apportés  à  la  version  par  les  diverses  déviations 
de  l'axe  de  l'utérus.  Quelquefois ,  à  l'aide  de  prudentes 
manœuvres,  il  devient  possible  à  l'accoucheur  de  con- 
vertir en  position  naturelle    une  présentation  contre-na- 


•— '1 


JOUBNAL  BB  uàBECINB.  97 

iure  ,  qui  résulte  de  l'obliquité  de  Tutérus  ;  mais  ,  le 
plus  souvent ,  lorsque  raccoueheur  est  appelé ,  le  travail 
est  toujours  trop  avancé ,  pour  qu'il  puisse  tenter  avec 
suecès  ces  manœuvres ,  et  le  plus  sage  est  de  recourir 
à   la    version. 

C'est  surtout ,  ainsi  que  je  l'ai  dit ,  chez  les  femmes 
obèses ,  dont  la  distension   de  la  peau  de  l'abdomen  est 
portée  au  point  de  produire  des  ecchymoses  dans  Tépaiâ- 
spur  du  derme  ,  que  le  ventre  tombe  au-devant  des  cuisses 
en  forme  de  besace  dès  le  septième  mois  de  la  grossesse. 
On  conçoit  qu'à  dater  de  cette  époque  jusqu'au  terme  de 
la  gestation  ,  le  fœtus  se  développe  en  dehors  et  en  avant 
du  bassin  dans  cette  partie  antérieure  de  la  cavité  utérine 
qui  repose  sur  les  cuisses.  Cette  situation  du  fœtus  dévie 
forcément  l'axe  obstétrical  de  l'utérus.  Deventer  en  cite 
plusieurs  exemples  et  cherche  à  démontrer  l'utilité  de  pla- 
cer la  femme  sur  les  genoux  et  les  coudes ,    position  qui 
facilite   singulièrement  la  version.  Smellie  partage  lopi* 
nion  de  Deventer ,  ainsi  que  le  constate  le  passage  sui- 
vant ,  extrait  textuellement  de  la  traduction  de  ses  œuvres  : 
rr  Dans  plusieurs  cas  de  version ,  j'ai   essuyé  beaucoup  de 
fatigue   avant  de    pouvoir  amener    les    pieds,    surtout 
lorsque  le  ventre  était  pendant  et  que  les  extrémités  infé- 
rieures de  l'enfant  étaient  logées  dans  la  partie  antérieure 
de  l'utérus.  —  La  femme  en  travail  est  dans  une  position 
plus   fermé  lorsqu'elle  est  couchée  sur  le  dos,  et  vous 
parvenez  aux  jambes  plus  aisément ,  lorsqu'elles  sont  vers 
la  partie  postérieure  ou  les  parties  latérales  de  la  matrice; 
mais ,   lorsqu'elles  sont  à  la  partie  antérieure  ,  vous   les 
trouvez  et  les  atteignez  beaucoup  mieux  lorsque  la  femme 
est  couchée  sur  les  genoux  et  sur  les  coudes  ,  parce  que 
vous  pouvez  vous  tenir  derrière  elle ,  et  le  pubis  ne  s'op- 
pose pas  autant  à  l'introduction  de  la  main,  que  si  celle-ci 
était  introduite  la  femme  étant  couchée  sur  le  dos.  —  Il 
m'en  est  encore  passé  dernièrement   par  les  mains  qui 
avaient  le  ventre  fort  pendant ,  et ,   en  les  faisant  cou- 
cher sur  le  côté ,  je   ne   pouvais  aisément  attrapper  les 
pieds.   Alors  ,  en  faisant  soutenir  la  malade  sur  ses  ge- 


98  johmai  db  xtoimiai. 

DOUX  et  sup  8M  coudes ,  j'atteignais  aux  piads  avec  une 
plus  grande  facilité  ,  parée  que  cetle  posture  permet  à 
la  main  d'arriver  dans  la  partie  amérieure  de  ruiérus, 
au*de8sus  et  en  avant  du  pubis,  oà  reniant  se  trouve 
logé.  C'est  là  la  méthode  de  Deventer.  d 

La  position  qu'il  eonvieat  de  faire  prendre  à  la  femme, 
lorsqu'il  s'agit  de  pratiquer  la  version ,  n'est  assuréns^t 
pas  chose  indiSéiente  :  la  conduite  de  raccouclieur  doit 
se  déduire  de  la  position  de  l'enfant  et  des  rapports  de 
ses  différentes  parties  avec  Tutérus.  C'est  cette  coonais- 
sanee  nette,  acquise  par  un  toucher  attentif,  qui  abré- 
gera des  tentatives  de  manœuvres,  dont  le  moindre  încon- 
véoient  est  la  fatigue  de  l'accoucheur. 

Dans  la  grande  majorité  des  cas,  ta  posture  à  donner  à 
la  femme  est  eelie  qu'elle  prend  pour  raccouohement  na- 
turel ,  à  savoir  la  position  sur  le  dos ,  pr^rable  ,  selon 
moi ,  à  la  position  sur  le  côté  ,  qui  est  usitée  en  Angle- 
terre :  oiais ,  ici ,  tout  est  de  mode  ,  et  si  des  contre- 
indications  ne  s'y  opposent ,  il  n'y  a  pas  de  graods  in- 
convénients à  se  conformer  à  l'usage  des  pays ,  aux  ha- 
bitudes contractées  dans  des  accouchements  précédents  ; 
seulement,  une  précaution,  qui  est  préakble  à  la  version, 
et  qui  est  trop  négligée ,  c'est  celle  de  s'assurer  de  Tétst 
de  la  vessie  et  du  rectum ,  afin  de  les  vider  ,  s'il  y 
a  lieu. 

Trois  observations ,  que  je  choisis  parmi  Irait  obser- 
vations ,  que  plus  de  vingt-cinq  apnées  die  pratique  ob- 
stétricale  m'ont  offertes  ,  ^ront  saisir  tout  l'avantage 
que  fon  peut  retirer  de  la  méthode  dite  de  |>eventer. 


f '«  tibfterTaÉiQiB. 

Une  pauvre  femme  adonnée  aux  rudes  travaux  du  la- 
bourage ,  avait,  vers  les  deux  derniers  mois  d'une  qua- 
trième grossesse ,  le  ventre  tellement  en  chute  sur  le  de- 
vant ées  cuisses  ,  par  suite  d'une  obésité  remarquable  et 
d'un  amfocissemeAt   de  la  ligne  blanche ,  que  le  foetus 


—H 


semblait  èlre  entièrement  coiiteou  en  avant  et  en  dehori 
du  bassin.  Je  i^i  avais  conseillé  de  prendre  du  repos  et 
de  maintenir  le  poUfe  d^  son  ventce  |mm*  une  large  serviette 
souieiiud  par  de»  bretaUe^*  Sa  profonde  misère  lui  avait 
fait  négliger  ces  conseils. 

Elle  étMi  dans  le  travail  de  l'enfantement ,  aasistée  seu- 
lement par  sa  voisine,  loraque  la  poche  des  eauK  vesiini  à 
s«*.  rompri^,  une  main  ne  tarda  pas  à  frai&cbir  la  vuivo.  Ce 
ne  fut  qu'^pr^  12  heurea  environ  de  la  s<Mrtle  de  la  main , 
que  îe  pus  arriver  au  secours  de  mUe  malheureuse.  La 
cavité  utérine  s'était  vidée  de  tout  le  liquide  amnioiique  : 
le^  paroi$  die  Torgane ,  ppr  «Mlle  de  douleurs  soutenues , 
s'étaient  moulées  sur  Lb  corps  du  fœtus  ;  la  main  droite, 
tuméfiée  et  d'une  couleur  violscée  «  était  au  debors  de  la 
vulve. 

Après  avoir  donné  Teau  du  baptême  sur  cette  main  ,  la 
femme  fut  couchée  en  supination  ,  la  tête  plus  déclive  que 
le  ventre  que  je  maintiaa  iabdament  relevé  avec  la  main 
gauche  ,  pendant  qu'à  l'aide  de  la  main  droite  je  tentai 
ia  version  ;  «vais  je  m'épuiaai  bientdt  en  ^orts  stériliss , 
par  le  snoÂil  que  Fouvertur^  du  coi,  par  suite  d*uue  obli- 
quité aatérîeure  fort  prononcée ,  était  presque  au  niveau 
de  l'auigile  sacro-vertébral.  La  main  de  Ten&fit ,  nsnirée 
après  uoe  peiue  indicible  dans  la  cavité  de  Totérus ,  j'avais 
réussi  à  a<:ci?QGher  le  col  à  Taide  du  doigt  index  et  à  le 
ramener  dans  Taibe  obstétrical ,  tandis  que  de  la  imm 
gauche  je  redreissais  fortement  de  bas  en  haut  «  la  (aceamé- 
rieu#!e  du  g)k>be  utérin,  et  tout  me  laissait  croire  à  la  réussite 
die  la  version,  lorsque  j'acquis  la  conviction,  apcès  m'étre 
consumé  en  de  veina  efforts ,  que.  dans  cefete  posture  de  la 
femme  je  ne  pourrais  arriver  aux  pieds  de  l'enfant. 

£n  «ffet ,  la  cavité  utérine  était  tellement  flissée  sur  le 
c<i)rps  de  fenfaut ,  celui-ci  paraissait  tellement  en  dehors 
et  eu  avaiOt  du  baasin ,  que  l'utérus  formait  une  éoûrnne 
luweur  en  boule ,  qui  venait  reposer  sur  le  devi^nt  des 
cuisses  ,  comme  si  il  y  eut  eu  .éyentration. 

l'étais  fort  embarrassé  loin  de  tout  secours ,  sur  le 
parti  que  je  devais  prendre,  lorsqiu'aprèt  avoir  donné  uja 


f  00  jrOUHHAL  DE  MÉDBCIIiB. 

peu  de  vin  chaod  et  sucré  à  la  femme ,  et  l'avoir  laîssëe 
une  heure  reposer,  l'idée  me  vint  de  la  placer  sur  ses 
genoux  et  sur  ses  coudes.  Bien  me  prit  d'avoir  eu  celle 
pensée ,  car  cette  posture  favorisa  singulièrement  la 
version. 

Placé  de  côté  et  un  peu  en  arrière  de  la  femme ,  j'in- 
troduisis la  main  droite  jusqu'au  col  utérin ,  puis ,  arc- 
boutant  le  bras  droit,  je  pus  l'introduire  dans  la  matrice 
et  passer  au-delè  de  l'arcade  du  pubis ,  et  saisir  un  pied  , 
après  avoir ,  par  la  force,  vaincu  la  contracture  des  parois 
utérines.  Un  pied  saisi  et  amené  dans  le  vagin,  la  recherche 
de  l'autre  pied  fut  moins  diflBcultueuse  :  l'en&nt  put  être 
extrait  ;  mais  malgré  tous  les  moyens  employés  en  pa- 
reil cas  ,  il  ne  fut  pas  possible  de  le  rappeler  à  la  vie. 


9*  Observation. 

Une  dame  âgée  de  trente-cinq  ans ,  atteinte  d'une  obli- 
quité antérieure  de  l'utérus,  par  suite  d'obésité  et  d'une 
grande  laxité  des  parois  abdominales  ,  avait  eu  trois  cou- 
ches qui  n  avaient  rien  offert  de  particulier ,  sinon  qu'elles 
avaient  traîné  en  longueur.  Dans  ces  trois  accouchements, 
il  y  avait  eu  présentation  delà  tête,  et  l'inclinaison  vi- 
cieuse du  globe  utérin  avait  été  en  partie  corrigée  d'une 
part ,  par  l'action  de  soutenir  relevée^  de  bas  en  haut ,  la 
&ce  antérieure  de  la  matrice,  et  d'un  autre  côté  ,  par  le 
redressement  du  col  utérin  à  l'aide  de  l'introduction  du 
doigt  dans  l'orifice ,  et  celui  de  la  lèvre  antérieure  vers  les 
pubis. 

Cette  dame  présenta,  dès  le  septième  mois  de  sa  qua- 
trième grossesse  ,  une  obliquité  antérieure  encore  plus 
prononcée  qu'à  la  grossesse  précédente.  Une  ceinturene 
parut  que  soulager  la  malade ,  sans  corriger  autrement 
l'inclinaison  vicieuse  du  globe  utérin  ,  car  sitôt  qu'on 
enlevait  la  ceinture,  le  ventre  était  entraîné  par  son  propre 
poids  au-devant  des  cuisses. 


rj 


JOURNAL  DE   MÉDECINE.  iOi 

Le  malheur  voulut  que  cette  fois  ,  et  dès  les  premières 
douleurs  ,  Tenfant  se  présenta  par  le  bras  droit  :  mais 
présent  auprès  de  cette  dame ,  lors  de  la  rupture  de  la 
poche  des  eaux  ,  et  alors  que  la  dilatation  était  complète, 
je  pus  ,  instruit  par  l'observation  précédente ,  tenter  sans 
aucun  retard  la  version  ,  en  me  conformant  aux  conseils 
donnés  par  Deventer. 

Je  fus  étonné  de  la  facilité  avec  laquelle  ,  la  dame  étant 
soutenue  sur  les  genoux  et  les  coudes ,  je  pus  introduire 
la  main  dans  Tutérus  ,  y  saisir  les  pieds  et  les  amener  au 
dehors  de  la  vulve.  Cette  manœuvre  fut  de  la  plus  courte 
durée  :  l'enfant  ne  parut  pas  en  souffrir  ;  il  est  vrai  que 
le  bassin  avait  une  grande  ampleur  et  que  l'introduction 
de  la  main  s'était  faite  au  moment  où  la  chose  est  ordinai- 
rement la  plus  facile  ,  c'est-à-dire  à  Tinstant  de  la  rupture 
de  la  poche  des  eaux. 


S«  Obserratien. 

Une  femme  qui  avait  les  parois  du  ventre  très-amincies, 
par  suite  de  sept  grossesses  ,  avait  à  la  fin  de  sa  huitième 
grossesse ,  le  fond  de  l'utérus  descendu  au-devant  des 
cuisses  et  presque  jusqu'aux  genoux.  Il  y  avait  évidem* 
ment  un  relâchement  des  plus  prononcés  de  la  ligne  blan- 
che :  le  corps  de  l'utérus  se  présentait  en  forme  allongée 
plutôt  que  ronde,  et  portait  de  tout  son  poids  sur  la  ligne 
blanche,  de  manière  à  la  déjeter  en  avant,  d'une  manière 
effrayante  pour  l'accouchement. 

Une  ceinture  bien  faite  remédiait  autant  que  possible 
à  cette  sorte  de  hernie  de  la  face  antérieure  de  l'utérus, 
à  travers  la  ligne  blanche. 

Dès  les  premières  contractions  utérines,  les  eaux  s'écou- 
lèrent :  le  coi  utérin  offrant  à  peine  la  dilatation  de  l'ou- 
verture du  goulot  d'une  bouteille,  répondait  à  l'angle  sacro- 
vertébral.   Ce  fut   avec  beaucoup  de  peine  que  le  doigt 

8 


101  JMWAI.  DB  HÉDBCniB. 

index  pàt  y  être  infrodiûi,  et  qu*il  pût,  en  s'y  «ocrochaDt, 
ramener  la  lèvre  antérieure  vers  les  pubis.  Aucune  fMtrtie 
de  l'enfiinl  ne  pouvait  être  touoliée  par  le  doigt ,  ce  fii 
donna  tout  d'abord  le  soupçon  d'une  présentation  contre* 
nature.  Bientôt  ce  soupçon  se  changea  en  certitude  :  à 
Taide  d'un  toucher  soigneux ,  on  put  reeonnaStre  une  posi- 
tion de  l'épaule^  sans  pouvoir  dire  si  c'était  l'épaule  droite 
ou  l'épaule  gauche.  Les  douleurs  étaient  de  booiie  nature, 
et  tout  laissait  craindre  qu'en  y  a})portant  du  retard  «  l'é* 
paule  ne  s'engageât  et  gènàt  les  tentatives  de  version.  L'é- 
ooulenrient  du  liquide  amniotique  commandait  aussi  d'agir 
sans  plus  tarder. 

La  position  du  oorps  de  l'enfant  fit  redouter  des  dii- 
cultés  insurmontables,  si  la  veraiou  était  essayée,  la  femtae 
étant  couobée  sur  le  dos;  car  l'enfant  paraissait  k»gé  dans 
la  partie  antérieure  de  l'utérus,  et  cette  partie  antérieure 
procidante  sur  les  cuisses  était  en  dehors  du  bassin.  En 
outre,  l'orifice  utérin,  par  suite  de  cette  inclinaison  vi- 
cieuse, était  tellement  en  arrière,  que  la  main,  après  l'avoir 
franchi,  ne  pourrait  facilement  se  courber,  pour  venir  à 
la  recherche  des  pieds ,  «en  «vaut  des  os  pubis.  Ces  di- 
sons firent  adopter  de  suite  la  méthode  de  Deventer. 

La  femme  qui  airait  encore  toutes  ses  fiorces ,  et  qui  ne 
manquait  pas  de  courage,  fut  placée  sur  ses  genoux  et 
sur  ses  coudes,  les  cuisses  un  peu  écartées.  (^  main  droite 
préidablement  trempée  dans  de  l'huile,  fut  introduite  pa^ 
derrière  dans  le  vagin  ;  le  col  utérin ,  pas  eiMore  suffi- 
samment dilaté,  fut  forcé;  l'épaule,  qui  s'engageait  dans  le 
col,  fut  repoussée ,  et  k  main  piH  à  ^and'peine  étve  ra- 
menée en  avant  des  os  pubis,  et  glisser  derrière  l'épaule , 
puis  le  long  de  l'épine  dorsale,  jusqu'à  la  rencontre  d'un 
pied  qui  fut  difiicultueusement  saisi.  Cependant,  ce  pied 
put  être  amené  au  dehors  de  la  vulve,  et  l'extraction  àe 
l'autre  pied  fut  loin  d'offrir  la  môme  difficulté.  Le  peAi^ 
bassin  était  large:  la  tète  y  fut  engagée  avec  facilité  et  la 
sortie  de  l'enfant  ne  se  fit  pas  atleodre.  Toutes  ces  mancBO- 
vre  ne  durèrent  peut-être  pas  dix  minutes,^  et  j'ai  la  oou- 
viction  profonde  que  ]a  position  indiquée  far  Deventer^ 


JOSBNAL  DB  MÉDECINB.  i03 

reodu    ici  la  version  plus  bcile  qu'elle  ne  leùk  été  dans 
toute  autre  posture  prise  par  la  fenupe. 

L'enfiEtnt  était  fatigué;  cependanit,  au  bout  de  quelques 
minutes,  la  respiration  devenue  plus  régulière  ne  tarda 
pas  à  le  ranimer  et  il  a  continué  à  vivre. 


Réflezi#ii«. 

On  a  longuement  et  savamment  discuté  suf  la  meil- 
leure posture  à  donner  à  la  femme  en  travail  ;  et  loin  de 
naoi  la  prétention  de  transcrire  ici  tout  ce  qui  a  été  dit  et 
écrit  sur  ce  sujet. 

L*abs^étrique  n'a  pu,  sur  ce  point,  comme  sur  tant  d'au- 
tres ,  que  fixer  l'attention  sur  les  rapports  de  l'enfant  avec 
la  cavité  utérine ,  et  surtout  avec  la  filière  qu'il  est  appelé 
à  parcourir.   C'est  en  dernière  analyse  la  connaissance 
exacte  de  ses  rapports  qui  doit  inspirer  l'accoucheur  et 
le  porter  ii  donner  la  préférence  à  telle  posture  sur  teUe 
autre.  Seulement ,  et  c'est  ici  un  reproche  que  Tobstétri- 
que   peut  justement  adresser  à  plus  d'un  accoucheur  , 
rarement  on  réfléchit  sur  la  posijtion  à  donner  à  la  femme, 
pendant  le  travail  :  on  sacrifie  en  cela  à  une  routine  qui 
est  soMTept  bien  éloignée  des  préceptes  de  la  science  ;  cair 
assurément,  la  position  que  doit  prendre  la  fenune  n'est 
pas  une^  elle  doit  varier  suivant  telle  ou  telle  indication,  et 
chacun  comprend  que  ce  serait  upe  puérilité  que  de  s'ér 
tendre  pfus  longuement  sur  ce  point. 

Dans  l'obliquité  antérieure  de  l'utérus,  alors  que  cette 
direction  vicieuse  est  fort  prononcée ,  le  globe  utérin  une 
fois  sorti  du  petit  bassin,  se  développe  non  en  suivant  son 
axe  normaU  mais  bien  en  avant  de  cet  axe,  et  cette  in- 
clinaison se  fait  au  détriment  des  parois  relâchées  de 
l'abdomen.  Ces  parois ,  en  effet,  ne  soutiennent  plus  le 
globe  utérin  dans  son  ascension  normale,  et  l'on  peut  dire 
que  dans  les  cas  d'obliquité  antérieure  très-prononcée, 
l'idée  de  la  méthode  de  Ueventer  a  pu  prendre  naissance 


104  JOVBIVAL  DE  mébechhe. 

de  la  méthode  suivis  par  les  vétérinaires  dans  le  part  des 
animaux.  Je  m'explique.  La  posture  de  la  femme  sur  ses 
genoux  et  sur  ses  coudes  se  rapproche  de  la  position  dé- 
volue par  la  nature  aux  animaux ,  et  la  version  tentée  chez 
la  femme  dans  cette  posture  est  en  tout  semblable  à  la 
version  tentée  dans  la  station  chez  les  femelles  de  Tes- 
pèce  équine ,  etc. 

Dans  la  version,  d'après  la  mélhode  de  Deventer,  Tac- 
coucheur  est  placé  en  côté,  et  un  peu  en  arrière  de  la 
femme.  Il  en  est  ainsi  du  vétérinaire  :  c'est  que  la  femme, 
placée  sur  ses  genoux  et  sur  ses  coudes ,  est  à  peu  près 
dans  la  même  position  que  la  femelle  du  quadrupède  dans 
la  station  ;  et,  si  c'en  était  ici  le  lieu,  je  pourrais  faire 
la  remarque,  d'accord  avec  plusieurs  naturalistes,  que  la 
méthode  de  Deventer  est  empruntée  à  l'état  de  nature , 
puisque  les  femmes  sauvages,  abandonnées  aux  seuls  ins- 
tincts de  la  nature ,  prennent  instinctivement  cette  posi- 
tion ,  qui  semble  aider  à  l'expulsion  de  l'enfant. 

Je  ne  voudrais  pas  que  l'on  pût  donner  à  cette  opinion 
plus  d'importance  qu'elle  ne  mérite  ;  je  prie  seulement 
de  remarquer  que  ce  qui  gène  surtout  la  main,  lorsqu'on 
tente  la  version  ,  dans  les  cas  de  forte  inclinaison  en  avant 
du  globe  utérin,  et  alors  que  celui-ci  tombe  avec  le  ven- 
tre en  besace  au-devant  des  cuisses ,  c'est  justement  la 
présence  des  os  pubis.  Les  extrémités  inférieures  de  l'en- 
fant se  trouvent  souvent  logées  en  avant  de  ces  os,  dans 
cette  partie  antérieure  de  la  matrice  qui  repose  sur  les 
cuisses,  et,  pour  que  la  main  puisse  y  venir  saisir  un  pied, 
il  faut  qu'elle  dépasse  l'arcade  du  pubis,  bien  que,  pour 
faciliter  cette  manœuvre ,  l'accoucheur  prenne  le  soin  de 
refouler  de  bas  en  haut  et  d'avant  en  arrière  le  globe  uté- 
rin. Or,  cette  difficulté,  souvent  insurmontable,  on  ne  la 
rencontre  pas  si  la  femme  prend  la  posture  indiquée  par 
Deventer. 

Il  est  vrai  qu'en  plaçant  la  femme  sur  un  siège  un  peu 
élevé ,  les  jambes  pendantes  et  écartées ,  l'accoucheur,  qui 
met  un  genou  en  terre,  trouve,  dans  cette  position,  une 
grande  facilité  pour  pratiquer  certaines  versions  difficiles , 


JOVBNÀL  DE   HÉDECUIE.  105 

telles  que  celles  qui  résultent  de  rinclinaison  vicieuse  de 
Tutérus  que  jo  viens  de  signaler  ;  mais  cette  posture,  prise 
par  l'accoucheur,  le  rend  moins  à  Taise  que  dans  celle  exi- 
gée par  la  méthode  de  Devcnter,  et  je  ne  saurais  trop  faire 
revivre  cette  méthode,  dont  le  judicieux  emploi  peut  ren- 
dre de  (j;rands  seiwices. 


TUMEUR  SQUIRUHEUSE  développée  dans  le 
médiaslin  antérieur.  Compression  de  la  veine 
cave  supérieure.  Œdème  de  toutes  les  parties 
sus-diaphragmaliques^  par  M.  M4H0T. 


Rieux.,  Antoine,  chaudronnier,  âgé  de  25  ans,  entra 
le  11  juin  1856,  à  la  succursale  et  fut  placé  au  n*"  2  de 
la  salle  Saint-Louis. 

Ce  jeune  homme,  qui  jouissait  habituellement  d'une 
bonne  santé,  avait  été  pris,  15  jours  auparavant,  de  cour- 
bature générale,  avec  fièvre ,  toux  et  expectoration  mu- 
queuse. 

Lors  de  son  entrée,  la  langue  était  très-sale  et  sabur- 
raie.  Le  ventre  un  peu  dur.  Rien  d'anormal  à  l'ausculta- 
tion. 

Le  \  2,  on  prescrit  une  bouteille  d'eau  de  Sedlitz  émétisée 
qui  provoque  deux  vomissements. 

Le  18,  tête  étourdie,  ventre  légèrement  ballonné,  pouls 
un  peu  accéléré,  selles  diarrhéiques. 

20.  Vomissements  ce  matin.  Langue  rouge;  4  selles 
liquides;  tête  étourdie. 

23.  Le  malade  se  trouve  mieux  ;  uu  peu  de  diarrhée,  pas 
de  fièvre. 


106  JOUBHA.!  DE  KÉMClMI. 

25.  L'amélioration  persiste.  Les  étourdissenienis  ont 
disparu. 

27.  Quelques  râles  muqaeux. 

29.  Toujours  diarrhée  et  toux. 

Depuis  son  entrée  jusqu'à  la  fin  du  mois ,  le  malade 
prend  chaque  jour  une  potion  pectorale  et  une  pilule  d'opium. 

3  juillet.  Toujours  diarrhée  ;  ventre  tendu  et  ballonne  ; 
pouls  calme. 

5.  Depuis  quelques  jours,  le  malade  est  bouffi  ;  la  figure 
surtout  est  le  siège  d'un  oedème  prononcé.  La  diarrhée  et 
l'état  abdominal  persistent;  pouls  calme. 

Potion  de  digitale,  cataplasme  émoilient  sur  te  ventre. 

6.  Œdème  du  col  et  de  la  face  pttts  marqué  à  d^roite  , 
cdcé  sur  lequel  le  malade  se  couche  constamment. 

9.  Gonflement  de  la  face  un  peu  moindre. 

11.  Le  bras  droit  est  œdématié. 

12.  L'œdème  augmente  ;  mal  de  gorge ,  luette  œdéma- 
teuse ;  précipité  rouge,  non  albumineux  par  l'acide  nitrique 
dans  les  urines. 

13.  L'œdème  augmente  visiblement  à  la  face;  pas  de 
douleurs  lombaires.  La  gorge  est  mieux;  rten  àe  notable  à 
l'auscuttatton.  Les  bruits  respiratoires  soiH  purs  dans  toute 
ta  poitrine 

Tisane  d'orge  et  chiendent ,  avec  nitrate  de  potasse  ,  8 
grammes.  (Bis). 

Une  bouteitte  eau  de  Sediitz. 

15.  Selles  très-nombreuses  ;  figure  sensiblement  désen- 
fiée. 

16.  Dix  selles  très-liquides,  sans  coliques  ;cedème  disparu. 
17, 18  et  19.  Les  selles  continuent  à  être  fréquentes  et 

diarrbéiques. 

20.  Deux  selles  seulement  ;  œdème  considérable  Ai  cou 
et  d^  la  face. 

21 .  L'œdème  augmente ,  bortré  au  col  et  à  la  farce. 
Deux  verres  eau  de  Sediitz. 

23.  Deux  verres  eau  de  Sediitz. 

24.  L'œdème  de  la  face  a  beaucoup  auguïenté  ,  surtout 
à  droite  ;  le  côté  droit  de  la  poitrine  est  également  œdé- 


JOtBNAIi  DE  HÉMCINB.  107 

mateuit.  Pouh,  120  pulsations;  oppression. Hien  (l'anormal 
à  l'ausGultalion  du  cœur  et  de  ki  poitrine. 

2:9.  L'oedème,  très-considérable,  est  borné  au  col,  à  la 
Êice ,  à  la  poitrine  et  aux  brt^s.  Toute  la  partie  sou6-dia- 
Y^hragmatique  du  corps  ne  présente  pas  la  moindre  trace 
d'înÉUlration.  Pouls  accéléré  ;  langue  rouge;  quelques  exsu« 
dations  blanches  sur  la  muqueuse  buccale. 

30.  Le  malade  a  eu,  depuis  hier,  plusieurs  selles  de 
sang  presque  pur  ;  ventre  souple. 

31.  Selles  non  sanguinolentes  liquides;  urines  abon- 
dantes. 

On  continue ,  pour  tout  traitement,  la  tisane  avec  nitrate 
de  potasse ,  1 5  grammes. 

1  août.  L'œdème  diminue;  le  malade  urine  beaucoup. 
Les  urines ,  examinées  à  plusieurs  reprises  ,  n'ont  jamais 
offert  la  nïoiiidre  trace  d'albumine.  Quatre  selles  très-abon- 
dantes, liquides;  oppression  allant  jusqu'à  l'ortbopnée; 
pouls  à  120.  Lorsque  le  malade  se  couche  un  peu  à  plat, 
la  face  devient  bleue  ;  douleur  à  la  pression,  dans  la  région 
lombaire  gauche.  Quelques  râles  ronflants  ;  bruits  du  cœur 
sourds ,  matitc  étendue  dans  la  région  sternale  et  précor- 
diale. 

Vésicatoire  le  4  sur  cette  région. 

5.  Oppression  très-forte;  décubitus  sur  le  côté  gauche. 
Pouls  très-accéléré  ;  figure  et  cou  cyanoses.  La  cyanose 
augmente  qnaind  on  remue  le  malade. 

Vésicatoire  Ift  5. 

Mort,  le  5  août,  h  8  heures  du  matin. 

Autopsie. 

L'autopsie  est  faite  à  peu  près  40  heures  après  la  mort, 
par  un  temps  chand<.  Les  téguments  de  l'abdomen  présen- 
tent déjà  une  teinte  verdâtre. 

Poitrine.  —  A  l'ouverture  de  la  poitritie  ,  au  moment 
où  l'on  enlève  le  sternum  ,  on  aperçoit  entre  les  2  pou- 
mons une  masse  blanchâtre  d'où  s'écoule  assez  abondam- 
ment  un  liquide  |atmâtre,  ayant  la  consistance  d'un  sirop. 


108  JOU&NAi  DE  MÉDEGUIE. 

Tout  le  médiastiu  antérieur  est  occupé  par  une  tumeur 
considérable ,  grosse  comme  les  2  poings.  Cette  tumeur 
est  formée  par  un  tissu  blanc  mou  par  endroits ,  dense  et 
criant  sous  le  scalpel  dans  d'autres,  offrant  laspect  du 
tissu  squirrheux  ramolli  et  non  ramolli.  Ou  fait  suinter 
par  la  pression  à  la  surface  des  coupes  un  liquide  lactescent. 
En  divisant  la  tumeur,  on  trouve  en  certains  points  des 
ilôts  rouges  et  injectés  de  sang.  La  grande  masse  de  la 
tumeur  ne  paraît  pas  parcourue  par  des  vaisseaux. 

La  tumeur  est  mal  circonscrite,  elle  se  confond  avec 
la  plèvre,  à  laquelle  adhère  de  chaque  côté  le  bord  an- 
térieur  des  poumons. 

Le  cœur ,  au  premier  abord  ,  ne  se  distingue  pas  ;  û 
est  complètement  englobé  dans  la  tumeur.  Les  2  feuillets 
du  péricarde  sont  confondus  par  des  adhérents  intimes  et 
forment  une  membrane  épaisse  qu*on  isole  avec  peine  du 
tissu  squirrheux  environnant. 

Le  cœur  n'avait  en  conséquence  aucune  indépendance 
dans  ses  mouvements  ;  en  incisant  la  masse  dans  laquelle 
il  est  contenu  ,  on  reconnaît  les  quatre  cavités;  elles  oui 
leurs  apparences  normales  ,  mais  elles  sont  très-petites. 

Les  valvules  sont  saines  ;  leurs  parois  sont  amincies.  Jl 
n'y  a  ni  sang  ni  caillots  librineux  dans  les  cavités  du 
cœur. 

L  aorte  parait  applatie. 

La  veine  cave  supérieure  est  entourée  partout  par  la 
tumeur  qui  la  comprime  fortement. 

Des  deux  côtés,  épanchement  de  sérosité  dans  les 
plèvres.  Les  deux  poumons  sont  adhérents  aux  côtes.  Ils 
sont  tous  les  deux  crépitants.  Mais  le  poumon  gauche 
offre  dans  sa  partie  supérieure  un  assez  grand  nombrt; 
de  tubercules,  à  différents  degrés  d'évolutions. 

Les  deux  poumons  sont  peu  volumineux.  Ils  ont  été 
réduits  par  le  développement  de  la  tumeur. 

La  trachée  arlère  a  conservé  son  calibre. 

Cavité  abdominale.  —  Foie  sain. 

Rate  consistante,  d'un  volume  ordinaire. 


JOCBNÀL  DE  BIÉDECINE.  109 

Les  reins  sont  injectés  ;  ils  ont,  du  reste ,  leurs  dimen- 
sions et  leur  aspect  ordinaires. 

Les  intestins  paraissent  sains  ;  ils  ne  sont  pas  ouverts. 
L'observation  dont  vous  venez  d'entendre  la  lecture,  Mes- 
sieurs ,   m'a    paru  intéressante  et  digne  ,  sous   plusieurs 
rapports ,  de  vous  être  présentée. 

La  tumeur  m'a  semblé  de  nature  squirrheuse  ;  cependant, 
vous  savez  combien  la  classification  des  tumeurs  laisse  encore 
à  désirer  ;  sur  certains  points,  son  tissu  était  dur,  d'un  blanc 
jaunt  âtre  et  criant  sous  le  scalpel  ;  sur  d'autres,  il  était 
ramolli,  imprégné  d'un  suc  lactescent  et  comme  sirupeux. 
D'Ans  quelques  endroits  ,  on  trouvait  des  vaisseaux 
pénétrant  dans  la  tumeur  ;  <lans  la  plus  grande  partie,  le 
tissu  de  nouvelle  formation  semblait  privé  d'organes  cir- 
culatoires 

Par  suite  de  la  position ,  la  tumeur  comprimait  plu- 
sieurs organes  importants ,  mais  cette  compression  s'exer- 
çait surtout  efficacement  sur  la  veine  cave  supérieure  , 
dont  les  parois  plus  molles  n'offraient  pas  la  même  résis- 
tance que  l'aorte ,  la  trachée  artère  et  les  grosses  bron- 
ches. Il  résulta  de  cette  compression  un  phénomène 
pathologique  très-remarquable,  et  qui  donna  à  la  maladie 
de  Rieux  un  cachet  tout  particulier  ;  toutes  les  parties 
dont  les  vaisseaux  veineux  vont  aboutir  dans  le  système 
de  la  veine  cave  supérieure  s'oedématièrent. 

Dans  le  système  de  la  veine  cave  inférieure  au  contraire, 
la  circulation  restant  libre,  les  membres  inférieurs  et  l'ab- 
domen ne  présentèrent  rien  de  semblable.  Les  jambes  et 
les  pieds  étaient  maigres  et  secs,  tandis  que  la  face  ,  le 
cou  ,  les  bras ,  étaient  le  siège  d'un  œdème  considérable,  . 
et  dans  les  derniers  jours  de  la  maladie,  cet  œdème  s'ac- 
compagna d'une  cyanose ,  qui  devint  de  plus  en  plus  pro- 
noncée. 

Le  cœur,  comme  nous  l'avons  dit,  se  trouvait  englobé 
et  confondu  dans  la  tumeur;  au  premier  abord,  il  était 
impossible  de  le  distinguer,  et  ce  n'était  que  par  une  dissec- 
tion attentive,  qu'on  arrivait  à  découvrir  une  membrane 
fibreuse   d'enveloppe  assez  épaisse,    et  qui  résultait    de 


tlO  iOUBHÂL  DB  MËMCimi. 

rutiion  inlime  d^  deux  feuillets  du  péricarde.  Dans  celle 
enveloppe  se  trouvait  contenu  le  cœur  partout  adhérent , 
partout  enveloppé  par  le  tissu  de  la  tumeur.  Ses  parois 
étaient  amincies  ,  mais  ses  cavités  avaient  conservé  leur 
forme  normale,  et  ne  contenaient  pas  de  caillots.  Oi»  se 
demande  comment  le  cœur,  dans  de  telles  conditions,  pou- 
vait continuera  fonctionner,  comment  les  parois  de  ses 
cavités  partout  adhérentes  extérieurement,  pouvaient  se 
contracter  de  manière  à  chasser  le  sang  contenu  dans  leur 
intérieur,  comment,  en  un  mot,  pouvait  s'exercer  la  systole 
et  la  diastole;  et  cependant  les  fonctions  du  cœur  ne  p- 
rurent  pas  très-notablement  troublées;  le  pouls  resta  calme 
et  régulier  jusque  dans  les  derniers  jours. 

A  rauscultation,on  ne  constata  rien  d'anormal,  seulement 
les  bruits  du  cœur  parurent  sourds.  A  Tautopsie,  on  trouva 
les  cavités  oreillettes  et  ventricules  à  peu  près  vides  de  sang 
et  ne  renfermant  pas  de  caillots;  c'est  là  une  preuve  de  plus, 
attestant  combien  il  y  a  encore  d'inconnus  dïins  la  phy- 
siologie normale  et  pathologique  du  eœur,  et  combien 
souvent  les  lésions  pathologiques  trouvées  après  la  mort, 
paraissent  peu  en  harmonie  avec  les  troubles  fonctionnels 
observés  pendant  la  vie. 

La  localisation  de  l'œdème  à  la  face,  puis  dans  les  par- 
ties sus-diaphragmatiques,  nous  fit  penser  d'abord  que 
nous  avions  affaire  à  une  affection  albuminurique  ;  mais 
jamais  les  urines  ne  donnèrent  le  moindre  précipité  aibu- 
mineux,  et  à  l'autopsie,  rien  dans  l'état  des  reins  n'indi- 
qua l'existence  d'une  maladie  de  ce  genre. 

L'œdème  fut  combattu  d'abord  par  les  purgatifs;  et  à 
la  suite  de  l'administration  d'une  bouteille  d'eau  de  Sedittz, 
il  s'étaMtt  une  diarrhée  très-abondante  et  très-séreuse  qui , 
en  quelques  jours,  amena  la  disparition  complète  de  l'infil- 
tration; plus  tard  et  dans  les  derniers  jours  de  la  vie,  l'rn- 
filtration  diminua  encore  notablemetit  sous  riiiHuence  des 
diurétiques.  Ce  sont  là  des  faits  remarquaMes  et  qui  prou- 
vent bien  la  puissance  ée  la  médication  dérivative  ,  dans 
les  cas  d'œdème  et  d'anasarque ,  suite  de  compressioti  des 
vaisseaux.  Seulement,  la  cause  persistant,  Tamélioration 
obtenue  ne  peut  être  que  fort  temporaire. 


ICnjUNAi  DB  MÉDSCniE.  lit 

Le  sthétoscope,  dans  le  cas  de  /lieux  ^  ne  procura  pas 
de  données  propres  ù  éclairer  le  diagnostic.  Rien  à  laus- 
callaiion  des  poumons,  battements  sourds  du  cœur  sans 
bruits,  anormaux.  La  percussion  indiqua  au  contraire  une 
matité  étendue  dans  les  régions  sous-sternale  et  précor* 
diale. 

En  rapprochant  cette  matité  des  signes  de  compression 
du  système  de  la  veine  caire  inférieure,  on  aurait  pu  diag- 
nostiquer ,  je  crois ,  une  tumeur  du  médiastin  antérieur 
comprimant  la  veine  cave ,  et  n'intéressant  pas  très-nota- 
ment  les  poumons  et  le  cœur. 

Enfin,  et  c'est  par  cette  réflexion  que  je  terminerai 
cette  note  déjà  trop  longue ,  j'appellerai  l'attention  sur  la 
rapidité  du  développement  des  accidents.  Le  malade  ne  fit 
à  i*hôpital  qu'un  séjour  de  deux  mois;  il  n'était  malade,  lors 
de  son  entrée,  que  depuis  15  jours,  et  los  accidents  qu'il 
avait  éprouvésjosqu'à  son  arrivée  à  Tiiôpitai,  ne  consistaient 
qu'en  des  symptômes  de  courbature  et  d'embarras  gas- 
ti-iques  ;  rien  alors  ne  pouvait  faire  prévoir  la  gravité  des 
accidents  qui  allaient  se  manifester. 


NOTES  sur  quelques  cas  de  fièvres  éruptives , 
recueillies  à  l'Hô tel-Dieu  {service  de  M.  Marge), 
par  M.  Vallin  ,  élève  interne. 


Scarlatines.  —  Le  30  octobre  1855,  «n  enfant  de  douze 
ans,  atteint  d'une  scarlatine  anomale  Irès-bénij^ne ,  entra 
dans  la  salfe  18,  lit  n°  *2;  il  n'en  sortit  qu'après  la  fin  de  la 
desquanmiation. 

Le  16  novembre  ,  environ  20  jours  après  l'entrée  de  ce 
premier  malade,  deux  autres  enfants,  retenus  depuis  long- 
temps dans  la  même  salle  pour  des  affections  chroniques , 
présentèrent,  après  quekfues  heures  de  prodromes,  tiii 
exanthème  scarlatîneux  non  équivoque  ,  avec  coïncidence 


112  JOVIUfAL   DE   MÉDBGinS» 

de  fièvre ,  de  rougeur  du  pharynx,  d'amygdalite  pseudo- 
raembraueuse.  L'exsudation  dipbthéritique  céda  ,  au  bout 
de  quelques  jours,  à  des  cautérisations  énergiques  avec 
la  solution  de  nitrate  d'argent;  la  fièvre  tomba  rapidement, 
et ,  chez  ces  deux  sujets ,  la  maladie  se  termina  sans  autre 
complication  fâcheuse. 

Le  18,  deux  jours  après  cette  première  manifestation 
delà  contagion  ou  de  l'infection  scarlalineuse,  un  autre 
enfant ,  dans  la  même  salle ,  est  pris  d'une  fièvre  très-forte, 
avec  lombago,  vomissement,  gêne  de  la  déglutition  ;  le 
3*^  jour,  un  enduit pultacé,  très-épais,  recouvre  les  amyg- 
dales  et  la  paroi  postérieure  du  pharynx.  Cependant,  on 
n'aperçoit  aucune  rougeur  à  la  peau  ,  soit  que  l'exanthème 
eut  manqué  tout  à  fait,  soit  quil  ait  été  de  si  courte 
durée,  et  si  peu  marqué,  qu'on  n'ait  pu  le  saisir.  Quoi- 
quil  en  soit,  le  dixième  jour  de  cette  maladie,  la  des- 
quammation  devenait  évidente  sur  plusieurs  points  du 
corps. 

Longtemps  après ,  alors  que  cette  desquammation  était 
déjà  terminée  et  sous  l'influence  de  l'épidémie  qui  durait 
encoredànsie  service,  ce  même  enfant  fut  atteint  d'une  angi- 
ne puitacée  Irès-intense.  Vers  le  mois  de  février,  il  lui  survint 
de  l'œdème  à  lafacedel'anasarque,  un  épanchement  asciti- 
que,  état  symptomatique  d'une  albuminurie  que  nous 
révéla  l'action  de  l'acide  azotique  sur  l'urine.  Vers  la  fin 
d'avril  dernier,  l'ascite  prit  un  tel  développement,  que  la 
suffocation  ,  devenant  imminente,  la  paracentèse  fut  pra- 
tiquée: plusieurs  litres  d'une  sérosité  citrine  en  furent  le 
résultat.  Depuis  cette  opération,  l'enfant  respire  librement, 
bien  qu'un  reste  d'épanchement  dans  le  ventre  fasse  pré- 
sager des  accidents  ultérieurs  (1).  Des  douleurs  vis-à-vis  la 
région  du  rein  droit  y  ont  motivé  l'application  d'un  vési- 
catoire.  Cet  enfant  est  atteint  du  mal  de  Pott;les  vertèbres 


(i)  Â  la  date  du  13  août  1856 ,  ces  accidents  n'ont  pas  en  lieu  : 
Teofant,  eu  égard  k  son  infirmité  habituelle,  est  aussi  bien  qud 
possible. 


^ 


JOUBNAL  DE   MÉDECINE.  113 

cervicales  exclusivement  atteintes  et  affaissées  ont  raccourci 
la    région  cervicale  à  un  point   tel  que  Tépiglotte  et    la 
glotte  même  apparaissent  au  fond  de  Tarrière-gorge  aussi 
manifestement  que  la  luette  et  le  voile  du  palais  lui-même. 
A  dater  du  18  novembre  1855,  onze  enfants,  dans  la 
salle   18,  furent  ainsi  successivement  atteints  de  scarla- 
tine.  Les  symptômes  prédominants  de  cette  épidémie  peu- 
vent se   résumer   en  quelques  mots  :  forme  anomale   et 
disparition  très-prompte  de  Texanthème;  dans  quelques  cas, 
épistaxis  ;    pharyngite  pseudo-membraneuse  constante   et 
assez  grave ,  jamais  mortelle ,  jamais  laryngienne,  accom- 
pagnée d*adénite  cervicale.  Dans  la  moitié  des  cas  de  diar- 
rhée au  début  et  souvent  persistante ,  variétés  dans  la  des- 
quaromation  qui ,  chez  deux  malades  ,  se  fait  à  deux  repri- 
ses successives;  chez  plusieurs,    éruption  abondante  de 
vésicules   miiiaires    contenant  d'abord  une  sérosité  cris- 
talline, puis  de  plus  en  plus  trouble.  Chez  trois  ou  quatre 
de   ces  enfants ,  la  scarlatine    fut  suivie   d'une  anasarque 
symptomatique  de    l'albuminurie;  dans  l'un  de  ces  der- 
niers cas,  devenu  mortel  chez  un  sujet  atteint  d'une  entéro- 
colite  chronique,  l'autopsie  montra  du  pus  dans  la  substance 
tubuleuse   d'un   des  reins.  Sauf  les    cas  d'anasarque  qui 
furent  traités  au  moyen  des  purgatifs,   la  médication  fut 
entièrement  expectante.  L'angine  pultacée  céda  constam- 
ment aux  cautérisations  avec  l'azotate  d'argent. 

Le  cabinet  de  femmes  n°  10,  nous  offrit,  quant  à  la 
transmission  contagieuse  de  la  scarlatine ,  des  faits  ana- 
logues à  ceux  de  la  salle  18.  Une  jeune  fille,  reçue  dans 
ce  cabinet  avec  la  scarlatine,  la  communiqua,  au  bout 
de  quelques  jours,  à  Tune  de  ses  voisines,  qui  la  transmit 
elle-même  à  une  autre.  Sur  11  lits,  4  ou  5  furent  bientôt 
atteints  par  l'infection  scarlatineuse,  qui  se  déclara  ainsi 
au  sein  même  de  l'hôpital,  chez  des  sujets  y  étant  venus 
pour  des  affections  parfaitement  étrangères  à  cette  mala- 
die éruptive.  Deux  de  ces  cas  observés  l'un  chez  une  jeune 
fille  de  15  ans,  l'autre  chez  sa  sœur,  âgée  de  18  ans,  se 
compliquèrent  de  délire  ,  de  coma ,  portés  au  point  de 
nous  faire  croire  à  une  méningite.  Cet  état  grave,  coïnci- 


114  JOUBSÀi  PS  «ÉOECIKB. 

dant  avec  une  accélératioD  grande  du  pouls,  s'améliora 
rapidement  sous  rinfluence  peut-être  d'une  mixlure  dont 

1  élément  principal  fut  l'esprit  de  nitre  dulcifié,  à  la  dose 
quotidienne  de  20  à  25  gouttes  par  jour. 

Ce  moyen  fut  par  nous  plusieurs  fois  employé,  avec 
un  égal  succès,  dans  des  cas  analogues,  dans  la  variole 
continente  avec  accélération  notable  du  pouls  et  toute 
cette  agitation  fébrile  qui  en  est  la  suite  ou  la  coïncidence 
habituelle. 

En  présence  de  cette  épidémie,  on  résolut  d'expéri- 
menter la  belladone  comme  moyen  prophylactique.  Une 
solution  fut  préparée  d'après  la  formule  suivante  : 
Extrait  de  belladone  ,  5  centigrammes. 
Teinture  de  cannelle,  30  grammes. 

Chaque  malade  dut  en  prendre  de  10  à  15  gouttes 
suivant  l'âge  ;  en  général,  autant  de  gouttes  qu'il  y  avait 
d'années. 

Voici  quels  furent  les  résultats  de  cette  médication. 

Pendant  le  temps  écoulé  entre  le  premier  et  le  dernier 
cas  apparu  dans  la  salle  18,  c'est-à*-dire  pendant  7  se- 
maines ,  35  enfants  furent  soumis  à  l'emploi  de  ta  bel- 
ladone, tous,  âgés  de  6  à  15  ans,  tous  par  conséquent, 
ou  à  peu  près,  aptes  à  contracter  l'infection  :  sur  ces 
35  individus,  5  seulement  furent  atteints  par  l'épidémie: 

2  après  avoir  pris  la  solution  prophylactiqge  pendant  4  et 
6  jours;  1  pendant  9  jours,  1  autre  pendant  14  jours,  le 
5'  pendant  un  mois.  Chez  3  d'entre  eux,  la  scarlatine  fut 
anomale  et  très-bénigne  ;  Texanthème  localisé  à  une  par- 
tie du  corps;  chez  un  4%  il  y  eut  de  l'angine  pultacée,  de 
la  desquammation ,  mais  pas  de  taches  scariatineuses  ;  la 
scarlatine  ne  parut  pas  avoir  été  modifiée  chez  le  5^. 

D'un  autre  côté ,  2  infirmiers ,  dont  1  avait  eu  déjà 
la  scarlatine,  et  4  malades,  qui  ne  prirent  point  de  bel- 
ladone, furent  atteints  par  l'épidémie:  c'est  dans  ce  groupe 
qu'on  trouve  les  cas  qui  ont  présenté  quelque  gravité,  et 
entre  autres  ,  celui  d'un  délire  violent  qui  dur$i  pendant 
deux  jours,  délire  tel  que  le  malade  sortit  de  son  lit  et  de 
la  salle  pour  courir  dans  l'hôpital,  et  qu'il  fallut  le  re- 


JOeBNAIi  DE   NÉDBCINB.  115 

tenir  de  force  peiidunt  4H  heures;  la  maladie  fut  grave, 
mais  se  (ermioa  par  la  gucrison.  Si  l'on  retranche  de  ce 
nombre  de  6 ,  un  malade  qmi  fut  pris  de  scarlatine  le  len- 
demain de  son  entrée,  et  qui,  par  conséquent,  n'usa  pas  de 
la  belladone,  on  arrive  à  ce  résultat  que  tous  ceux  sur  qui 
Ton  ci*a  pas  employé  la  médication  prophylactique  ont  été 
atteints,  tandis  que  sur  35  individus  aptes  à  contracter  la 
maladie,  mais  iniluencés  par  la  médication,  5  seuleinent 
n'ont  pas  été  épargnés,  résultat  qiii  semble  concluant,  et 
qui  doit  donner  confiance  dans  l'action  anti-scarlatineuse 
(le  la  belladone. 

Il  nous  reste  encore  à  ajouter  quelques  mots  touchant 
d'autres  fièvres  éruptives  qui  se  sont  présentées  à  notre 
observation. 

VairiQU$.  —  La  variole  devint  épidémique  parmi  des  ou- 
vriers icordonniers,  demeurant  ensenoblc ,  chez  la  mère  de 
leur  corporatiion,  petite  rue  Notre-Dame,  n°  15.  Sur  12  au 
moî^ns    atteints  de    variole,    dans   l'espace  de  quelques 
jours ,  6  ont  été  dans  une  des  salles  de  M.  Harcé  :  i'un , 
eut   une  variole  très-grave,  terminée  heureusement  ;  5 
d^eotre  eux ,  présentant  des  traces  vaccinales,  n'eurent  que 
des  varioles  modifiées,  et  assez  bénignes  ;  dans  les  autres 
services  de  l'Hôtel-Dieu ,  la  variole  s'est  présentée  spécia- 
lement chez  les  individus  de  cette  profession,  circonstance 
qui  s'explique  par  leurs  habitudes  de  travail  en  commun. 
Dans  la  majorité  des  cas,  et  même  dans  les  ras  légers, 
les  sympt6mes  du  côté   de  la  gorge  ont  été   constants  ; 
tous  ont  eu  une  pharyngite  pustuleuse  confluente. 

Rfmgeales. — Cette  complication  d'angine  si  marquée  dans 
lepidémie  de  scarlatine,  s'est  également  présentée  daos  tous 
les  cas  de  rougeoles. avec  le  caractère  pseudo-membraneux. 
Peut-être  fimt-il  rattacher  à  cette  particularité  épidémique  la 
terminaison  mortelle ,  par  gangrène  de  la  bouche  ,  d'une 
variole  extrêmement  confluente  survenne  à  la  fin  de  la 
convalescence  d'une  lièvre  typhoïde  très-grave.  Chez  la  jeune 
lille  qui  fait  le  sujet  de  cette  observation ,  les  frictions 
nifîrcurieUes  employées  pendant  qu4i<)ues  jours  ,  et  qui 
avaient  fait  complètement  avorter  les  pustules  sur  la  lace, 


116  jovrnàl  de  médecine. 

n'avaient  jamais  déternninë  la  moindre  inflammation  du 
côté  de  la  bouche,  et  ne  se  faisaient  plus  depuis  longtemps, 
quand  au  milieu  d'une  angine  avec  enduit  pultacé  très- 
épais,  se  manifestèrent  des  points  gangreneux  qui,  malgré 
les  cautérisations  avecracidechlorhydrique,  envahirent  toute 
la  muqueuse  buccale.  Presque  tous  les  cas  de  rougeole, 
avons-nous  dit,  furent  compliqués  de  pharyngite  pseudo- 
membraneuse ;  tous  le  furent  également  de  bronchopneu- 
monies qui ,  bien  que  très-graves ,  n'eurent  pas  une  ter- 
minaison fatale.  Les  autres  complications  furent  des  paro- 
tidites,  de  petits  abcès  multiples  ,  des  otorrhées.  delà 
diarrhée  chez  un  grand  nombre,  diarrhée  mortelle  chez 
deux  enfants.  La  rougeole  se  montra  presque  exclusive- 
ment chez  des  sujets  de  la  première  enfance  ;  il  n'en 
parut  aucun  cas ,  chez  ceux  de  la  seconde  enfance  sur 
lesquels  sévissait  exclusivement  l'épidémie  de  scarlatine. 
Comme  fait  contradictoire ,  nous  citerons  une  malade  adulte 
qui  présenta  à  la  fois,  d'une  manière  discrète,  sur  différents 
points  du  corps ,  des  vésicules  de  varicelle  ,  des  plaques 
d'exanthème  scarlatineux ,  et  des  taches  morbilleuses ,  qui 
se  terminèrent  par  desquammation  sans  aucun  accident. 

Vaccine. — Un  grand  nombre  de  très-jeunes  enfants,20  en- 
viron, furent  vaccinés  ;  la  moitié  seulement  le  fut  avec  succès  : 
tous  ceux  qui  étaient  fébricitants ,  ou  même  qui  séjour- 
naient depuis  longtemps  à  l'hôpital  pour  une  affection 
chronique  grave,  se  montrèrent  réfractaires  à  la  vaccina- 
tion. Chez  un  enfant  vacciné  3  jours  avant  l'apparition  de 
la  rougeole  ,  et  chez  lequel  les  pustules  vaccinales  avaient 
manqué,  il  survint,  vers  le  12^  jour,  une  variole  qui  fut 
anomale,  discrète,  avec  fièvre  secondaire  très-peu  marquée. 

Malgré  la  complication  d'une  parotidite  et  d'une  otorrhée, 
la  guérison  eut  lieu  ,  et  c'est  là  un  fait  digne  de  remarque, 
que  dans  un  hôpital  les  fièvres  éruptives  survenues  chez  des 
sujets  de  la  1"  et  de  la  2*=  enfance ,  malgré  des  compli- 
cations fort  graves  ,  aient  eu  toutes  une  issue  heureuse  et 
que  pas  une  ne  se  soit  terminée  p»r  la  mort. 

Au  milieu  de  tous  ces  faits,  nous  constaterons  particu- 
lièrement : 


JOUBNAL  DE   HÉDSCJNE.  117 

i*"  Que  le  caractère  propre  à  toutes  ces  fièvres  a  été  là 
pharyngite  pustuleuse  dans  la  variole,  pseudo-membraneuse 
dans  la  rougeole  et  la  scarlatine  ; 

2^  Que  la  scarlatine  a  été  presque  constamment  anomale, 
quelquefois  grave^  mais  généralement  de  gravité  moyenne  ; 

3^  Que,  dans  cette  maladie,  la  vertu  prophylactique  de  la 
belladone  semble  avoir  été  constatée  ; 

4^  Que  les  vaccinations,  chez  les  enfants  dans  un  mau- 
vais état  de  santé,  sont  demeurées  sans  succès. 


ÉTUDES  CLINIQUES.  Des  hydropisies,  suites 
de  fièvres  intermittentes  ,  et  de  leur  trai- 
tement y  spécialement  de  l^ acétate  de  potasse  à 
haute ,  dose ,  par  M.  Thibeaijd  ,  professeur  de 
clinique  à  l'école  préparatoire  de  médecine  et  de 
pharmacie  de  Nantes. 


Les  épanchements  de  sérosité  dans  le  tissu  cellulaire 
et  dans  les  grandes  cavités  séreuses,  les  hydropisies,  sont 
dues  à  des  causes  diverses.  Les  travaux  des  médecins  mo- 
dernes ,  et  particulièrement  les  recherches  de  Tanatomie 
pathologique  ,  ont  conduit  à  constater  ce  fait  général 
qui  avait  été  reconnu  par  les  expérimentations  des  phy- 
siologistes ,  l'oblitération  des  troncs  Vf^ineuœ  ou  des  veines 
de  certains  viscères,  comme  cause  du  plus  grand  nombre 
des  hydropisies.  Cependant,  l'hématologie  venant  à  Tappui 
de  l'opinion  des  médecins  antérieurs  à  notre  siècle,  a  re- 
connu comme  une  autre  cause  d'hydropisie ,  l'altération 
du  sang,  la  prédominance  de  sa  partie  séreuse  sur  le 
cruor  et  les  globules.  Cette  anémie,  ou  pour  nous  servir 
de  l'expression  de  M.  Piorry,  cette  hydrohémie  qui  sur- 
vient dans  la  chlorose ,  et  chez  les  sujets  atteints  depuis 
longtemps  de  fièvres  intermittentes,  amène  assez  souvent 
à  sa  suite  l'œdème  des  extrémités  inférieures,  puis  Tana- 
sarque,  quelquefois  enfin,  mais  plus  rarement,  des  épan- 


tiS  JOURNAL  DB  «ÉOBCINB. 

chemenu  dam  les  cavités  séreuses.  Quelque  danger  qu'elles 
fassent  courir  aux  malades ,  les  hydropistes  ainsi  prodaites 
sont  susceptibles  de  guérison ,  et  l'absence  de  lésion  des 
grands  viscères  et  des  g»os  troncs  veineux,  permi^t  aux 
médicaments  d'agir  avec  une  grande  efficacités 

C*est  spécialiement  dans  Temploi  des  moyens  propres  à 
activer  la  sécrétion  urinaire  que  le  médecin  a  recours  dans 
les  cas  de  ce  genre.  Les  mé<licaments  diurétiques  sont 
nombreux  ,  la  matière  médicale  est  riche  en  ce  genre. 
Notre  but  n'est  pas  d'examiner  en  particulier  chacune  de 
ces  substances,  d'analyser  et  d'étudier  leur  valeur;  nous 
avons  vouki  seulement  rappetet  à  l'aitention  des  médècJHs 
un  médicament  autrefois  fort  vanté,  oublié  pour  ainsi 
dire  depuis, et  qui  nous  paraît  devoir  reprendre  son  rang 
en  thérapeutique.  Nous  voulons  parler  de  l'acétate  de  po- 
tasse, terre  foliée  de  tartre  de  l'ancienne  chimie.  Il  mérite, 
d'après  tes  aulevrsdu  Traité  de  Thérapeutiqae,  MM.  Trous- 
seaux et  Pidoux,  d'occuper  une  place  assez  ifii|M>rtante 
parmi  les  diurétiques.  Employé  jadis  avec  beaucoup  de 
faveur,  il  est  aujourd'hui  presque  tombé  dans  l'oubli.  Les 
<loses  indiquées  dans  le  Formulaire  de  Bouchardat^  dans 
l'ouvrage  que  nous  venons  de  citer,  dans  toutes  les  ma- 
tières médicales  modernes,  sont  de  4,  6,  10  grammes. 
Ij^  médecins  qui  nous  ont  précédés  le  donnaient  à  des 
doses  bien  plus  fortes.  C'est  là  probalement  la  cause  des 
succès  qu'ils  lui  attribuent.  Toutefois,  ce  n'est  qu'après 
avoir  lu  dans  \aMnUére  médicale  de  Uesbois  de  Rockeforl, 
le  passage  suivant ,  que  nous  avons  été  conduit  à  prescrire 
ce  médicament  à  doses  plus  élevées  que  celles  auxquelles 
on  le  donne  aujourd'hui,  et  c'e^it  alors  que  nous  en  avons 
obtenu  des  effets  remarquables. 

«  La  terre  foliée  de  tartre ,  dit  Desbois,  s'emplc^ye  dans 
n  les  hydropisies,  les  engorgements  du  bas -ventre,  les  coii- 
«  ques  hépatiques,  etc.  Mais  pour  en  retirer  du  succès, 
»  il  faut  qu'elle  soit  donnée  à  certaine  dose,  et  continuée 
»  pendant  longtemps.  La  médecine  française,  d'aitteurs 
M  très-sage  et  très-savante ,  est  trop  timide  à  l'égard  de 
»  ce  remède ,  comme  à  l'égard  de  keaueeiiip  d  autres.  La 


JOUBNAL   DE  MÉDECINE.  il9 

»  terre  foliée  est  très-soluble,  et  peut  se  donner  à  la  dose 
»  de  2  gros  ,  demi-once ,  une  once  et  plus  par  jour. 
»  A  la  dose  d'une  demi-once,  c'est  un  excellent  diuréli- 
»  que  très-utile  dans  beaucoup  d'hydropisies.  »  {Desbois 
ae  Rochefort,  Mal'^  médic,  t.  2,  p.  122.) 

l'«  ObserTatiiMi* 

II  y  a  une  vingtaine  d'années,  dans  une  salle  de  mili- 
taires dont  nous  fûmes  appelé  à  faire  le  service,  se  trou- 
vait un  jeune  soldat  d'une  forte  constitution,  atteint  depuis 
plus  d'un  mois  d'anasarque  et  d'ascite.  La  sérosité  épan- 
chée dans  le  péritoine  était  très-abondante  ,  les  parois  de 
Tabdomen  fortement  distendues,    la  fluctuation  des   plus 
manifestes.  On   avait  employé   sans  succès  contre   cette 
maladie,  qui  s'était  développée  à  la  suite  de  fièvres  inter- 
mittentes prolongées,  divers  diurétiques,  des  purgatifs; 
toute  médication  intérieure  était  à  peu  près  abandonnée 
alors  que  nous  prîmes  le  service.  L'examen  du  malade  nous 
porta  à  croire  que  l'anasarque  et  l'ascite  n'étaient  qu'une 
conséquence  de  la  cachexie  paludéenne.  Il  n'existait  au- 
cune altération  organique  des  viscères  de  l'abdomen;  dç 
plus,  le  cœur  ne  présentait  rien  d'anormal.  Nous  rappelant 
le  passage  cité  de  Desbois,  nous  administrâmes  immédia- 
tement l'acétate  de  potasse ,  d'abord  à  6 ,  8  grammes,  puis 
en  quelques  jours  à  12,  15,  30  à  40  grammes  dissous 
dans  deux  à  trois  litres  de  tisane  d'orge  et  de  chiendent. 
La  diurèse  fut  abondante  et  s'établit  rapidement;  en  10  à 
12  jours  l'ascite  et  lanasarque  étaient  guéries,  il  ne  restait 
plus  rien  d'une   maladie   nécessairement  grave    et    qui 
avait  été  jusque-là  rebelle  à  tous  les  traitements. 

Depuis  cette  époque,  nous  avons  eu  l'occasion  d'obser- 
ver plusieurs  cas  analogues.  Nous  allons  en  faire  connaître 
quelques-uns. 

9«  Observation. 

Pellier ,  maçon ,  âgé  de  42  ans  ,  entré  à  l'Hôtel-Dieu  le 
24  décembre  1841,  est  placé  dans  la  salle  de  Clinique. 


f20  JOVRNAL  BE  MÉDSCHIB. 

Atteint  depuis  3  mois  de  fièvre  intermittente  d'abord  à 
type  quotidien  ,  puis  tierce ,  il  a  pris  à  différentes  fois  du 
sulfate  de  quinine.  I^es  accès  ont  été  suspendus ,  mais  il 
a  éprouvé  plusieurs  rechutes.  Â  la  suite  de  l'une  d'elles, 
il  y  a  3  semaines  environ  ,  de  l'œdème  commence  à  se 
montrer  aux  extrémités  inférieures. 

Du  20  au  28  décembre,  le  madade  a  un  accès  fébrile 
chaque  jour  précédé  d'un  léger  frisson  ;  mais  cet  accès 
est  faible,  et  s'éteint  graduellement  au  bout  de  5  à  6  jours, 
sans  qu'il  soit  nécessaire  d*avoir  recours  au  quinquina. 
L'anasarque  s'étend  jusqu'à  la  face;  il  existe  de  la  fluc- 
tuation de  l'abdomen.  Le  lendemain  de  l'entrée  on  admi- 
nistra comme  purgatif  15  grammes  de  crème  de  tartre, 
et  pour  boisson  une  tisane  nitrée. 

Malgré  la  cessation  de  la  fièvre,  fanasarque  et  l'ascite 
persistèrent.  On  commença  l'emploi  de  l'acétate  de  potasse 
le  28  décembre ,  d'abord  à   la  dose  de  4  grammes   dans 
un  demi-litre  de  tisane  simple,   puis  en  portant  rapide- 
ment la  dose  à  6,  8,  16  ,  30  et  40  grammes,  en  prenant 
soin  d'étendre  ces  fortes  doses  dans  2  à  3  litres  de  tisane 
que  le  malade  buvait  en  24  heures.  Le  3  janvier  ,  le  mé- 
dicament étant  alors  porté  à  30  grammes,  les  urines  com- 
mencèrent à  devenir  un  peu  plus  abondantes  ;  l(»s  4  et  5, 
elles  le  furent  beaucoup  plus;  la  dose  d'acétate  était   de 
36  à  40  grammes.  L'anasarque  et  l'ascite  diminuent  nota- 
blement. Les  6  et  7  janvier,  plus  de  3  litres  d'une  urine 
limpide  et  presque  incolore  sont  rendus  dans  les  24  heures. 
Le  volume  du  ventre  et    la   distension  de    la    peau   sont 
bien   moindres.  Le   12   janvier,  l'ascite  a  complètement 
disparu,  il  ne  reste  qu'un  peu  d'infiltration  aux  malléoles. 
On  diminue  la  dose  d'acétate  qu'on  cesse  le  16.  Pendant 
les  7  à  8  jours  qui  suivirent ,  quelques  légers  accès   de 
fièvre  à  type  irrégulier  >e  montrèrent;  on  remarqua  un 
peu  d'oedème  des  jambes  et  un  léger  gonflement  de  l'ab- 
domen. Quelques  doses  d'acétate  de  potasse  furent  admi- 
nistrées, mais  plus  faibles  celte  fois.  Tout  cela  disparut 
promptement,   et    Peltier    sortit  parfaitement    rétabli  le 
8  février. 


J0T7RNÂL  1)B  MÉDECINE.  121 

S"  ObfiervatioD. 

Anasarqueet  ascite,  suites  de  fièvres  inîermillentes. —  Gm- 
rison  rapide  par  l'acélate  de  potasse  à  haute  dose. 

Janiiais,  Joseph,  jardinier,  âge;  de  SOans^  entre  à  l'Hôlel- 
Dieli,  le  29  janvier  1842.  11  habitait  à  la  campagne  une 
chambre  basse  et  humide,  et  avait  été  atteint  de  fièvre 
intermittente  au  commencement  d'octobre  1841.  Dans  les 
premiers  jours  du  mois  de  novembre,  il  avait  été  reçu  à 
rhôpital  où  il  séjourna  un  mois.  Pendant  cet  espace  de 
temps,  il  continua  à  avoir  des  accès  de  fièvre,  et  bientôt 
après,  ceux-ci  furent  accompagnés  d'anasarque.  Comme 
Ton  crut  alors  reconnaître  quelques  signes  de  lésion  du 
côté  du  cœur,  on  pratiqua  plusieurs  saignées  ;  du  sulfate 
de  quinine  fut  en  outre  prescrit ,  et  la  fièvre  céda.  La 
digitale  et  plusieurs  autres  diurétiques  furent  ensuite  ad- 
ministrés. Le  malade  sortit  assez  bien  de  l'hôpital,  mais 
très-peu  après  il  éprouve  une  rechute,  les  accès  de  fièvre 
deviennent  quotidiens ,  l'anasarque  reparaît. 

Les  premiers  jours  qui  suivirent  l'entrée  de  Jannais  à 
l'Hôtel-Dieu  ,  on  crut  convenable  de  pratiquer  une  saignée 
que  l'on  fit  suivre  de  l'administration  d'un  purgatif.  Les 
accès  ayant  toutefois  continué  à  se  montrer  sous  le  type 
quotidien,  du  sulfate  de  quinine  les  suspendit. 

7  Février.  Etat  actuel ,  cessation  de  la  fièvre,  œdème  des 
jambes ,  des  cuisses ,  des  bras  et  de  la  face,  consistance 
assezferme  de  la  peau  sous  la  pression  du  doigt ,  fluctua- 
tion abdominale.  Pas  de  tuméfaction  de  la  rate.  L'auscul- 
tation ne  fait  découvrir  aucune  lésion  du  cœur. 

Acétate  de  potasse,  4  grammes  dans  un  litre  de  tisane. 

Les  8  et  9  février,  6  et  8  grammes. 

10  Février.  1 5  gramrties. 

li   Février.  25  grammes  dans  deux  litres  de  tisane. 

12  Février.  30  grammes. 

13  Février.  L'œdème  des  mains  diminue,  la  fluctuation  de 
l'abdomen  estmoindre.Augmentation  très-notable  des  urines. 

14  Février.  35  grammes  d'acétate  de  potasse. 

Le  15  février.  40  grammes  du  même  médicament  dans 
3  litres  de  tisane. 


122  JOUBKAL  D«  MâDfiCINE. 

Urines  très- limpides  et  très-abondantes.  La  fluctuation 
abdominale  se  perçoit  à  peine.  Le  malade  a  sué  assez  abon- 
damment la  nuit  précédente. 

Du  16  au  18  février.  Disparition  presque  complète  de 
lanasarque;  il  ne  reste  d'œdème  qu'à  la  partie  inférieure 
des  jambes;  l'ascite  a  complètement  disparu.  Les  urines 
sont  très-abondantes,  le  malade  en  rend  plus  de  4  litres 
en  24  heures.  (45  grammes  d  acétate  de  potasse  ont  été 
prescrits  le  18  février.^ 

19  Février.  Le  malaae  est  très-bien,  il  ne  subsiste  plus  de 
la  maladie  qu'une  légère  infiltration  autour  des  malléoles. 
Les  doses  élevées  du  médicament  n'ont  pas  eu  d'effet 
purgatif.  On  diminue  successivement  ces  doses  jusqu'au 
22,  où  on  les  suspend. 

L'infiltration  malléolaire  a  disparu.  Quelques  tasses  d'eau 
ferrugineuse  sont  prescrites.  Jannais  sort  le  24  février, 
parfaitement  rétabli. 

4*  ObfierTiilion. 

Ascile  et  anasarque,  suites  de  fièvre  intermiUejile  prolongée. 
Traitement  par  Vacétale  de  potasse  à  haute  dose.  Gué 
rison  en  9  jours.  (Observation  recueillie  à  la  Clinique 
par  M.  Màrcé^  élève  interne.) 

Calvet,  Joseph,  manœuvre,  âgé  de  33  ans,  vint  habiter 
Chalonnes  sur  les  bords  de  la  Loire,  au  mois  d'avril  1849, 
avec  sa  femme  et  deux  jeunes  enfants.  La  chambre  qu  oc- 
cupaient ces  pauvres  gens  était  étroite  ,  humide ,  située 
au  niveau  du  sol,  et  ne  recevait  jamais  les  rayons  du  soleil. 
Calvet  travaillait  tous  les  jours  aux  mines  de  charbon,  à 
une  grande  profondeur.  Au  bout  de  deux  mois  se  dé- 
clarent des  accès  de  fièvre  intermittente;  les  8  premiers 
jours,  ils  présentent  le  type  tierce,  puis  quotidien.  Pen- 
dant 3  mois,  la  fièvre  se  maintient  sous  ce  dernier  type. 
Combattue  à  quelque  distance  de  son  début  par  des  soins 
appropriés,  elle  cède  promptement,  mais  revient  au  bout 
de  1 5  jours  ;  et ,  lorsque  le  malade  entrait  à  l'Hôtel-Dieu, 
le  20  novembre  1849,  il  avait  la  fièvre  depuis  3  mois  et 
demi  sans  interruption.  Ses  deux  enfants   étaient  morts 


fOt)Hra>l   DE  MÉDKCIKE.  423 

Mtieîutsd'iufiilraiion  considérable  sut'voilUis  à  la  suite  dac 
c^ès  inlermiiteots  ;  sa  femme  entrait  en  même  temps  que 
1  ui  à  l'hôpital  également  alteinle  de  lièvre  inlermiitente, 
mais  saus  accidents  consécutifs. 

21  Novembre.  Depuis  un  mois,  il  v  a  de  Titscite,  et  de- 
puis trois  semaines  rinliltration  n  envahi  les  extrémités 
inférieures,  le  tronc  cl  les  hras.  La  face  est  bouffie  et  dé- 
colorée. La  région  splénique  est  douloureuse ,  mais 
.4'épauckement  péritonéal  empêche  de  constater  Thypertro* 
^phie  de  la  raie.  Il  existe  une  toux  fréquente  avec  un  râle 
sibilant  et  muqueux  dans  toute  .retendue  delà  poitrine, 
mais  surtout  à  gauche.  Le  malade  éprouve  de  l'oppression. 
La  langue  est  sale,  l'anorexie  complète.  Tous  les  jours  à 
uiidi  revieut  uji  accès  de  lièvre. 

Les  22,  23  et  24  novembre,  on  administre  le  sulfate  de 
quinine  en  potion  avec  8  gouttes  de  laudanum  de  Syden< 
liam;le  l"jour  à  la  dose  de  75  centigrammes,  le  2^ 
60  centigrammes,  le  3<^  jour  1  gramme  35  centigrammes, 
l'accès  n'ayant  pas  cessé  de  reparaître  après  les  premières 
doses. 

26  Novembre.  La  lièvre  n'exisie  plus,  mais  nul  change- 
ment ne  s*est  opéré  du  reste  dans  l'état  du  malade.  L'ana- 
sarque  et  l'ascite  |>ersistent.  Ou  prescrit  un  litre  de  tisane 
d!orge  et  de  chiendent  avec  un  gramme  de  i^ilrate  de 
potasse.  Cette  boisson  est  continuée  jusqu'au  29  novembre, 
sans  que  la  sécrétion  urinaire  en  soit  augmentée. 

Les  29  et  30  novembre,  on  commence  l'emploi  de  la* 
tevre  foliée  de  tartre  à  la  dose  de  4,  puis  de  6  grammes; 
le  1'^  décembre  on  en  donne  8  grammes.  Uès  la  nuit  du 
30  novembre  au  i^*  décembre  la  diurèse  était  obtenue, 
le  malade  rendit  près  de  3  litres  d'urines; 

Le  2  décembre,  la  dose  du  médicament  est  portée  à 
12  grammes,  le  3  à  15  grammes,  le  4  à  20  grammes. 

4  Décembre.  Le  malale  rend  eu  24  heures  au^moins 
&  à  6  litres  d'urine.  Déjà  l'œdème  a  diminué ,  la  .peau  des 
mollets  Qst  flasque  et  molle,  l'ascite  est  maintenant  diffi- 
cile à  constater.  11  n'y  a  plus  d'oppression. 

5  Décembre.  On  donne  24  grammes  d'acétate  de.pqtasse 


124  JOUBNAL  DE   HÉDfiCl^£. 

dissous  dans  2  litres  de  tisane  ;  ie  6  décembre  22  gram- 
mes. Chaque  jour  le  malade  rend  7  à  8  litres  d'une  urine 
claire  et  limpide.  L'ascite  et  Tanasarque  ont  complète- 
ment disparu  ;  les  saillies  de  Pavant- bras  commencent  à  se 
dessiner  :  la  peau  est  flasque  et  pendante  ,  la  face  n'est 
plus  œdématiée  et  a  changé  complètement  d'aspect.  La 
toux  et  les  râles  ont  cessé.  Le  malade  boit  facilement  sa 
tisane  et  n'accuse  que  quelques  coliques  sans  diarrhée. 

7  Décembre.  Un  litre  et  demi  de  tisane  avec  15 
grammes  d'acétate  de  potasse.  Le  malade  rend  encore  six 
litres  d'urine  dans  la  journée. 

8  Décembre.  Dernière  dose  de  8  grammes  du  médica- 
ment. 

Calvet  sort  de  l'Hôtel-Dieu  le  il ,  encore  grêle  et  maigre, 
mais  complètement  guéri. 

ft«  Obnervalion. 

Ascile  considérable  et  anasarque  survenues  à  la  suite 
d'une  fièvre  intermittente  datant  de  5  mois;  acétate  de 
potasse  à  haute  dose  ;  guérison  en  7  jours  ,  diurèse 
abondante.  {Observation  recueillie  par  M.  E.  Vallin  , 
interne  à  l'Hôtel-Dieu.) 

Baëlt,  belge,  âgé  de  48  ans,  habitant  un  village  près 
de  l'embouchure  de  l'Escaut ,  vint  à  Nantes  en  décembre 
1854,  pour  y  être  employé  comme  charpentier  de  navi- 
res. Cet  homme,  d'une  constitution  forte  et  robuste,  avait 
eu  la  lièvre  intermittente  dans  son  pays ,  mais  il  était 
assez  bien  portant  à  son  arrivée.  Un-  mois  après ,  com- 
mencement de  janvier,  rechute,  accès  en  tierce,  entrée 
à  l'hôpital  Saint- Jacques  où  il  reste  1 5  jours.  La  lièvre 
cesse.  Quelque  temps  après ,  les  accès  reparaissent  sous 
le  type  quarte  :  le  malade  entre  à  THôtel-Dieu  le  5  mars 
1855. 

6  Mars.  L'accès  de  fièvre  s'est  prolongé  pendant  la  nuit; 
ce  matin  le  malade  est  eu  sueur.  La  teinte  de  la  peau 
est  d'un  jaune  paille,  la  langue  un  peu  sale,  pâle,  étalée, 
la  membrane  muqueuse  de  la  face    interne  des  lèvres, 


JOUBNAL  D£   MÉDECINE.  125 

celle  des  gencives  et  la  conjonctive  palpébrale  sont 
d'une  grande  pâleur.  11  existe  une  ascite  considérable  ;  le 
malade  dit  ne  sêtre  aperçu  que  depuis  8  jours  du  gon- 
flHment  du  veutre.  La  raie  est  plus  volumineuse  que  dans 
Téiat  normal ,  mais  elle  est  refoulée  en  arrière  par  la 
sérosité  de  Tabdomen. 

(Prescription.  —  Sulfate  de  quinine,  un  gramme, 
tisane  nitrée.) 

9  Mars.  La  fièvre  n  a  pas  reparu  hier,  jour  d'arcès.  L'é- 
tat du  malade  est  du  reste  le  même. 

(Première  dose  d'acétate  de  potasse  de  4  grammes 
qu'on  augmente  un  peu  les  jours  suivants.) 

1 1  Mars.  Le  malade  rend  à  peine  2  verres  d'une  urine 
brune  et  foncée. 
La  soif  est  vive. 

Les  12  et  13  mars,  on  donne  8  et  12  grammes  d'acé- 
tate de  potasse.  Los  urines  sont  toujours  épaisses  et  peu 
abondantes. 

15  Mars.  Le  malade  éprouve  une  gêne  considérable , 
il  a  de  la  peine  à  se  retourner  dans  son  lit.  L'anasarque 
et  l'ascite  ont  augmenté;  le  dos  des  mains  est  extrême- 
nrient  tuméfié,  le  scrotum  est  infiltré.  On  augmente  la  dose 
du  médicament  que  l'on  porte  ce  jour  à  24  grammes 
dissous  dans  3  litres  de  tisane. 

17  Mars.  Les  urines  devienneitt  plus  abondantes. 
Dose  de  l'acétate  de  potasse,  35  grammes. 
Le  19  mars,  40  grammes;  4  litres  d'urines  sont  rendus 
dans   les    24   heures.  L'anasarque  et   l'ascite    n'ont   |)as 
encore  subi  de  diminution. 

20  Mars.  —  La  quantité  d'urines  rendue  depuis  ht 
veille  s'élève  à  7  litres.  Diminution  de  l'anasarque,  mais  non 
de  l'ascite.  L'état  général  est  plus  satisfaisant ,  la  lièvre 
n  a  pas  reparu  depuis  le  6. 

21  Mars.  Le  malade  a  rendu  6  litres  d'urine.  Diminu- 
tion très-notable  de  l'ascite  et  de  l'anasarque,  surtout  à  la 
cuisse  droite  ;  tension  beaucoup  moindre  de  labdomèn , 
scrotum  presque  revenu  à  l'état  normal.  Le  malade  s'est 
levé  et  promené  dans  la  journée. 


126  lOUlUfàL  D£ 

Du  23  au  26  mars.  On  diminue  peu  à  peu  la  dose  du 
médicament.  La  diurèse  continue  avec  autant  d  abondance, 
6  litres  d'urine  sont  rendus  en  24  heures.  L'anasarque 
disparaît  rapidement  ;  il  ne  reste  plus  qu'un  peu  d'oedème 
aux  jambes,  l/abdomen  est  mou  :  ses  parois,  qui  étaient 
considérablement  infiltrées,  ne  le  sont  plus  ;  la  maiité  que 
la  percussion  faisait  entendre  à  la  partie  déolive  de  l'ab- 
domen se  borne  de  plus  en  plus  ;  il  n'existe  aucune  fluc- 
tuation. 

29  mars.  On  cesse  ladminist ration  de  l'acétate  de  {Mi- 
tasse. Toutes  traces  d'anasanfue  et  d'ascitc  ont  disparu ,' 
mais  le  malade  offre  tous  les  signes  de  l'anémie ,  couse- 
quence  de  la  cachexie  paludéenne.  On  perçoit  un  peu  de 
^ouftle  au  cœur  et  aux  carotides;  les  membranes  muqueu- 
ses et  la  peau  sont  très-pâles. 

Quelques  doses  de  (artrate  de  )K)tasse  et  de  Cer,  20  cen- 
tigrammes par  jour  et  une  alimentation  réparatrice,  sont 
prescrites.  De  la  diarrhée  survenue  les  jours  suivants  force 
à  suspendre  le  fer. 

Le  2  avril,  elle  est  complètement  arrêtée.  On  ne  reprend 
pas  encore  l'usage  du  fer.  Cependant,  les  forces  paraissent 
revenir,  le  malade  se  promène  tous  les  jours  dans  les  cours 
de  Thôpital  ;  l'appétit  est  très-bon. 

Le  1 1  avril.  Baëlt  sort  parfaitement  rétabli. 

Les  faits  que  nous  venons  d'exposer  confirment ,  il  nous 
semble ,  l'opinion  des  physiologistes  qui  regardent  la 
sécrétion  urinaire  comme  faisant  antagonisme  à  ta  sécré- 
tion séreuse  tant  interstitielle  que  vésiculaire,  et  qui  pen^ 
sent  que  l'un  des  moyeris  les  plus  sûrs  dé  guérir  l'hydro- 
pisie,  c'est  d'activer  la  sécrétioti  des  urines.  (Burdach, 
Physiol.) 

Alors  que  les  forces  vives  de  l'organisme  ne  sont  pas 
épuisées,  et  que  surtout  les  principaux  viscères  ou  les 
veines  sont  libres  de  toute  altération  ,  calte  diurèse  ,  dont 
l'abondance  nous  a  frappé  et  que  provoquent  si  lapidemeol 
certains  médicaments ,  se  manifeste  spontanément  dans 
quelques  cas  ;  l'observation  suivante  nous  a  paru  sous  ce 
rapport  présenter  quelque  intérêt. 


JOtRNAL  D£  IttÉDECmE.  127 

6«  Obsemition. 

Le  nommé  Picot,  âgé  de  40  ans,  manœuvre  employé  à 
casser  des  pierres  sur  une  route  près  de  Chantenay,  contracte, 
dans  Tété  de  1854,  une  fièvre  intermittente  qui  persiste 
pehdant  environ  6  mots  ,  sous  le  type  quarte  ,  et  cesse  au 
commencement  de  janvier  1855,  à  peu  près  sans  traite- 
ment. Il  entre  à  THôtel-Dieu  le  19  février  1855  ,  dans  un 
état  d'anémie.  Les  forces  musculaires  sont  très-aftaiblies , 
la  face  est  pâle ,  maigre ,  les  paupières  supérieures  légè- 
rement œdématiées,  les  cuisses  et  les  jambes  infiltrées.  Il  y 
a  de  Tascite.  Le  volume  de  la  rate  ne  dépasse  que  fort 
peu  I  état  normal.  41  n'existe  aucun  signe  de  maladie  du 
cœur  ,  pas  de  souffle  aux  carotides  ni  d'accès  fébriles. 
L'appétit  s'est  conservé  ;  mais  depuis  six  semaines ,  le  ma- 
lade est  atteint  d'une  diarrhée  qui  a  commencé  par  quel- 
ques selles  sanguinolentes. 

'Après  avoir,  pendant  les  premiers  jours,  combattu  la 
diarrhée  sans  résultat  au  moyen  du  diascordium  additionné 
de  petites  doses  d*opium ,  on  a  recours  au  sous-nifr.ite  de 
bismuth  dont  on  pointe  gradueliement  la  dose  de  6  et 
8  grammes  à  30  et  35  grammes  par  jour.  La  diarrhée, 
d'abord  stationnaire  diminue  les  premiers  jours  de  mars, 
pour  céder  bientôt  complètement  le  6.  Ce  jour,  il  rend 
une  selle  de  matières  solides.;  la  physionomie  es^t  meil- 
Irure  ,  mais  l'anasarque  existe  toujours  ainsi  que  l'ascite. 
Du  7  au  8  mars ,  sans  que  de  nouveau  médicaments 
aient  été  donnés  ,  une  diurèse  abondante  s'établit.  Le 
malade  rend  près  de  8  litres  d'urine  dans  les  24  heures  ; 
les  jours  suivants,  8,  9,  10  et  11  mars,  6,  7,  et  jus- 
qu'à 9  litres.  L'ascite  et  Tanasarque diminuent  rapidement. 
Le  13  mars.  Il  n'existe  plus  de  fluctuation  abdominale. 
Les  13,  14  et  15  mars,  lé  malade  rend  de  2  à  4  litres 
d'urine  dans  la  journée.  L'anasarque  a  complètement  dis- 
paru ainsi  que  l'ascite,  l'état  général  est  satisfaisant. 

Le  25  mars.  On  prescrit  quelques  doses  de  tartiiate 
de  potasse  et  de  fer.  La  diarrhée  ayant  reparu,  on  les 
cesse,    et  quelques  jours  après  on  y  substitue  la  limaille 


128  JOUBNAL  OB   MÉDBCinE. 

de  fer  unie  au  diascordium.  La  dose  de  fer  esl  succes- 
sivement augmentée  et  portée  à  2  grammes  30  centi- 
grammes par  jour. 

Le  malade  reprend  des  forces  ;  la  coloration  de  la  peau 
reparait,  il  sort  parfaitement  rétabli  le  30  avril. 

Une  augmentation  rapide  et  considérable  de  la  sécrétion 
urinaire  est  donc  un  des  principaux  phénomènes  qui , 
dans  les  épanchements  de  sérosité  dans  le  tissu  cellulaire 
ou  les  séreusest  est  suivi  d'une  prompte  résorption.  Ainsi , 
la  fonction  éliminalrice  de  Tappareil  urinaire  ilans  l'état 
de  santé,  se  continue  dans  les  maladies;  et,  dans  les 
liydropisies  de  la  classe  de  celle  dont  nous  parlons ,  l'ac- 
tivité de  cette  fonction  augmente  et  produit  les  effets 
thérapeutiques  que  nous  venons  de  signaler.  Une  solidarité 
réelle  existe  en  effet  entre  plusieurs  fonctions  de  l'écono- 
mie vivante.  Si  lune  d'elles  vient  à  s'affaiblir  ou  à  cesser, 
une  autre  la  remplace  aussitôt.  Les  fonctions  de  la  peau  et 
les  fonctions  des  reins  paraissent  sous  ce  rapport  se  ba- 
lancer en  quelque  sorte.  Lorsque,  par  une  perversion  de 
la  nutrition  ,  la  partie  séreuse  des  fluides  et  spécialement 
du  sang  qu'éliminent  incessamment  les  deux  grandes  fonc- 
tions que  nous  nommions  tout  à  Theure  ,  vient  à  remplir 
les  cavités  séreuses  ou  le  tissu  cellulaire,  l'effort  éliminateur 
de  la  peau  ou  des  reins  arrive  au  secours  de  l'organisme  ; 
et,  pour  fournir  les  matériaux  nécessaires  à  l'activité  ac- 
crue de  ces  fonctions,  il  se  fait  une  prompte  résorption  des 
fluides  épanchés.  En  étudiant  avec  attention  les  faits  qui 
précèdent,  ce  but  d'activité  des  fonctions  urinaires  ne  peut 
être  méconnu,  et  c'est  précisément  parce  qu'il  se  manifeste  ici 
avec  une  clarté  pleine  d'évidence  que  nous  les  avons  rapportés. 

Il  est  donc  vrai  que  c'est  toujours  la  puissance  inhérente 
à  l'organisme  vivant  qui  guérit,  soit  qu'elle  se  traduise  au 
deliors  par  l'apparition  spontanée  de  phénomènes  spé- 
ciaux, soit  que  ceux-ci  aient  été  provoqués  par  les  moyens 
de  l'art.  Il  suit  également  de  là  qu'en  maladie ,  les  phéno- 
mènes anormaux  qui  viennent  à  surgir  dans  l'économie 
tendent  en  général  à  un  but,  la  guérison.  Ce  grand  fait 
trop  clair  en  chirurgie,  n'y  a  t-il  aussi  jamais  été  nié.  Le 


JOURNAL   DE   MÉDECINE.  129 

chirurgien  en  étudiant  le  merveilleux  travail  delà  cicatrice  et 
de    la  formation  du  cal  dans  les   fractures,  sait  fort  bien 
que  la  tendance  finale  à  la  cicatrisation  et   à  la  consoli- 
dation des  os  fracturés  est  leffort  incessant  de  la  nature. 
Kn  médecine,  il  n'en  pouvait  être  autrement;  et  cependant, 
comme  la  marche   des  phénomènes  a   quelque  chose  ici 
de  plus  obscur  ,  tes  faux  systèmes,  sous  Tapparence  super- 
ficielle d'une  plus  grande  clarté,  sont  venus  répandre  des 
nuages  sur  cette  vérité  reconnue  par  tous  les  siècles.  La 
llîérapeutique  presque  entière  était  fondée  sur  cette  idée 
hippocratique  des  tendances  delà  nature  vers  la  guérison. 
C'était  le  quô  natura  vergit  eo  ducendum ,  cette  maxime 
des  médecins    les  plus  éminents  de  toutes  les  époques. 
Naguère  encore  à   peu  près  méconnue,  elle  commence  à 
se  montrer  dans  quelques  écrits,  mais  surtout  elle  appa- 
raît de  plus  en  plus  dans  les  récentes  discussions  de  l'Aca- 
démie de  médecine.  Au  reste,  nous  ne   devons  pas    nous 
trop  étonner  d'avoir   vu   les  sciences  médicales  traverser 
cette  phase  critique.  A  la  suite  des  grands  naturalistes  du 
XVIH''  siècle,   de    Tillustre   Linnée  qui,    en  découvrant 
quelques  traces  de  l'intelligence  suprême  dans  les  œuvres 
de  la  création,  disait  dans  son  admiration  pour  celles  qui 
paraissaient  les  plus  petites  et  les  plus  nulles ,  quelle  force! 
quelle   sagesse  !    quelle    inexplicable    perfection  !   {Linn, 
Systema  nalurœ)  ,  sont  venus   d'autres  hommes    iloués 
certainement  d'incontestables  facultés,  mais  qui,  sous  l'in- 
fluence de  plus  en  plus  croissante  de    certains  systèmes 
philosophiques,  ont  nié  hautement  les  causes  intentionnel- 
les dans  la  formation  des  organes,  en  d'autres  termes  ont 
cherché  à  détruire  et  à  rendre    ridicule   la   doctrine  que 
les   anciennes  écoles  désignaient   sous  le  nom  de  causes 
finales,  La  philosophie  allemande,   le  panthéisme  maté- 
rialiste d'Hegel  et  de  ses  disciples  ont  repris  cette  tAche, 
et  l'autorité  qu'ils  ont  acquis**  est  plus  grande  qu'on  ne  le 
pense  vulgairement.  Il  est  plus  d'un  physiologiste  de  noire 
temps  qui  professe  ces  systèmes,  peut-être  sans  s'en  douter. 
Toujours    est-il   pour    nous  médecins,  qu'une  fois  la 
finalité  niée  en  physiologie,  la  négation  des  actes  salutai- 
res de  ce  qu'on  appelait  jadis  nature  médkalrice  suit  né- 


130  JOUENAL  BB   VÉDECIZIB. 

cessairement.  La  malière  médicale  et  la  thérapeutique  se 
trouvent  alors  abaissées  et  réduites  au  pur  empirisme. 
Heureusement  que  Tinteiligence  et  le  bon  sens  pratique 
de  la  France  ne  lui  permettent  pas  de  descendre  longtemps 
cette  pente,  et  la  ramènent  bientôt  à  la  véritable  obser- 
vation. En  effet,  en  renfermant  la  médecine  dans  Tétude 
purement  empirique  et  matérielle  des  phénomènes  mor- 
bides, on  a  cru  qu'en  répétant  un  nombre  indéfini  de  fois 
des  observations  laborieusement  recueillies,  on  constitue- 
rait ainsi  la  science ,  et  de  là  les  espérances  et  les  procé- 
dés de  la  statistique  appliquée  à  la  médecine.  Or,  à  moins 
qu'on  ne  professe  encore  cette  donnée  fondamentale  des 
derniers  représentants  du  matérialisme,  il  n'y  a  point  de 
lois,  il  n'y  a  qœ  des  fcUls  successifs ^  on  devra  reconnaître 
qu'en  accumulant  incessamment  et  sans  critique  des  his- 
toires fort  détaillées  de  maladies ,  on  a  fait  peu  de  chose 
au  point  de  vue  du  véritable  progrès. 

De  même  que  tous  Içs  écrivains,  nous  devrons,  dit  le 
docteur  Gendrin ,  prendre  pour  but  de  nos  recherches  el 
pour  principes  de  nos  doctrines  les  faits  et  l'observation. 
Mais  les  faits  sont  stériles  par  eux-mêmes,  ils  ne  devien- 
nent des  observations  que  lorsqu'on  les  soumet  à  l'ana- 
lyse et  à  la  discussion.  Les  conséquences  qu'on  en  déduit 
ne  peuveitt  se  généraliser  sans  crainte  d'erreur ,  que  lors- 
qu'elles conservent  le  cachet  de  l'observation  directe  dont 
elles  dérivent.  La  vérité  d'un  principe  résulte  moins  du 
nombre  des  fîûts  que  de  la  rigueur  du  raisonnement  et  de 
l'évidence  des  observations  qui  servent  à  l'établir.  (Gen- 
drin, Traité  philosophique  de  médecine  pratique.) 

Un  philosophe  de  nos  jours  a  dit  avec  une  haute  raison: 
La  perception  des  lois  universelles  des  êtres  est  excitée  en 
nous  et  non  déduite  de  ces  cas  qui ,  quelque  nombreux 
qu'ils  fussent ,  ne  sont  en  dernier  résultat  que  limités  et 
fixés.  Les  lois  de  la  vie  engendrent  et  régissent  les  phé- 
nomènes en  santé  et  en  maladie,  et  une  fois  reconnues  elles 
sont  la  lumière  qui  doit  éclairer  et  guider  le  médecin  dans 
l'étude  si  complexe  des  objets  auxquels  se  rapportent  ses 
méditations.  Dans  la  sphère  qui  leur  appartient ,  ces  lois 
vitales  participent  de  l'universel  comme  les  lois  géométri- 


JOVmnAl   DE    MÉMMZITKB.  131 

ques,  elles  ne  sont  pas  du  tout  un  mélange  confus  de  quel- 
ques cas  particuliers.  Ce  n'est  pas  en  multipliant  les  faits 
Tt^lalifs  à  la  chute  des  graves,  que  Newton  est  arrivé  à  la 
«lécouverte  des  lois  de  la  pesanteur.  C'est  en  réfléchissant 
profondément  aux  circonstances  de  la  marche  descendante 
d€»  corps.  Accumuler,  puis  compter  des  faits  dont  le  nom-- 
bre  finit  par  devenir  un  ferdeau    pour  la   science ,  c/eet 
perdre  le  temps  et  appliquer  Ic-s  forces  de  l'intelligence  à 
un  travail  sans  fruit.  En  procédant  ainsi,  il  n'est  plus  au 
pouvoir  de  l'esprii  de  poursuivre  Tétude  approfondie  et  com- 
parée de  quelques  faits,  de  les  examiner  sous  leurs  divers 
aspects  et  relativement  aux  éléments  qui  constituent  un 
fsiit  en  lui-môme. 

Dans  une  science  qui  a  pour  objet  les  phénomènes  de 
la  vie  toujours  essentiellement  complexes  et  variables,  dit 
encore  le  docteur  Gendriii ,   les  faits   quelque  nombreux 
qu'ils  soient ,  comptés ,  rassemblés  au  hasard  et  comparés 
(I  après  leurs  formes  extérieures  les  plus  saillantes,  ne  peu- 
veiil  servir  de   prémisses  à  des  couMusions  rigoureuses. 
Les  exceptions   négligées  peuvent  être  l'expression  de  la 
toi  la  plus  générale.  La  méthode  statistique  en  médecine 
a  conduit  des  hommes  de  bonne  foi  à  un  empirisme  sté- 
rile ou  à  un  scepticisme  exagéré.  La  philosophie  de  la 
science  procède»  d'une  manière  contraire  ;  elle  s'attache  à 
décomposer  les  Ëiits  par  l'analyse ,  à  en  comparer  les  élé- 
ments. Nous  regardons,  ajoulii  le  même  auteur,  les  con- 
séquences d'un  seul  &it  comme  établissant  une  vérité  in- 
contestable, quand   elles  sont  conformes    aux   principes 
déduits  immédiatement  d'observations  directes  ou  de  rap- 
ports constants  de  c^rnse  à  effet,  en  anatomie,  en  physio* 
logie  et  en  pathologie.  (7V.  Phit.  de  méd.  pratique.) 

L'éclectisme  ,  nous  continuons  de  citer  ,  a  la  prétention 
d'emprunter  à  toutes  les  doctrines  les  vérités  établies  par 
Tobservatioa ,  et  d'en  construire  la  sienne  ;  mais  en  mé- 
decine comme  en  philosophie,  l'éclectisme  tue  les  prin- 
pes  par  indifférence  et  dissout  la  science  par  le  scepticisme. 
Le  triage  de  l'éclectisme  suppose  une  doctrine  première, 
mesure  et  critérium  de  toutes  les  doctrines,  et  qui  rentre 
nécessairement  dans  l'opération   propre  et  personnelle  de 


132  joumâl  de  xébbcinb. 

c.haque  esprit  ;  admettre  cela ,  c'est  sortir  de  l*écleclisme. 
{Gendrin,  Traité  philosophique  de  médecine  preUique.) 

En  médecine  comme  en  toute  science,  avant  d*aborder 
l'observation ,  il  faut  donc  admettre  que  les  faits  |)atholo- 
giques  sont  régis  par  les  lois  vitales,  se  manifestant  dans 
un  état  anormal  de  I  économie  ;  autrement,  nous  n'aurions 
que  des  faits  successifs  sans  loi  universelle  ou  comroun<*. 
l)  où  il  suit  que  ne  pouvant  acquérir  la  connaissance  que 
d'un  certain  nombre  de  cas  particuliers,  en  droit,  nous 
ne  pourrions  rien  conclure;  et  c'est' en  effet  là  qu'on 
arrive  logiquement ,  tout  en  élevant  si  haut  l'observation , 
c'est-  à-dire  au  scepticisme ,  ou  en  d'autres  termes  au 
néant  de  la  science,  puis  ,  en  fin  décompte,  au  rire  de 
lecole  voitairienne.  L'oreiller  du  scepticisme  peut-être 
fort  commode  ,  a  dit  quelque  part  Montaigne ,  mais  il  faut 
pouvoir  se  résigner  â  la  nonchalante  torpeur  dans  laquelle 
ne  larde  pas  à  tomber  celui  qui  est  tenté  d'y  reposer  sa  tête. 

Ces  considérations  générales  sembleraient  n'être  qu'une 
digression,  et  cependant  elles  nous  ont  paru  se  rattacher  es- 
sentiellement au  travail  que  nous  venons  de  lire.  En  méde- 
cine, et  par  conséquent  en  physiologie,  l'étude  d'un  seul 
point  touche  à  tous  les  points  de  la  science. 

Pour  conclusion,  nous  croyons  pouvoir  établir  ce  qui  suit  : 

1°  Dans  les  hydropisies  qui  n'ont  pas  pour  cause  une 
altération  organique,  la  guérison  peut  souvent  avoir  lieu  ;  le 
plus  ordinairement  elle  s'obtient  par  l'accroissement  de  la 
sécrétion  des  urines,  fonction  faisant  antagonisme  à  la  sécré- 
tion séreuse  interstitielle  et  à  celle  des  membranes  séreuses. 

2°  Cette  diurèse  peut  se  manifester  spontanément,  et 
par  le  fait  de  la  puissance  médicatrice,  loi  de  l'organisme 
dans  l'état  de  maladie. 

3«  L'acétate  de  potasse  administré  à  haute  dose,  agit 
energiquement  comme  diurétique  dans  ces  cas,  et  déter- 
mme  rapidement  une  diurèse  abondante  et  salutaire. 


JOURNAL 


DB  LA 


SECTION  DE  MEDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉHIQDE. 


>«0«« 


BULLETIN  DES  SÉANCES. 


Séance  du  11  juillet  1856. 

PEÉSIOENCB   DE   M.   MÀHOT,   PRÉSIDENT. 

La  Section  a  reçu  entre  autres  ouvrages  : 

i"*  Observations  et  recherches  sur  l'oblitération  de  la 
veine^porte  et  sur  les  rapports  de  cette  lésion  avec  le  vo- 
lume du  foie  et  la  sécrétion  de  la  bile ,  par  E.  Gintrac , 

10 


134  JOUBIfÂL  DB  HtiDBCinX. 

professeur  de  clinique  interne  et  directeur  de  l'école  de 
médecine  de  Bordeaux. 

M*  Malherbe  est  nommé  rapporteur. 

2""  De  la  famille  des  Loganiacées  ei  des  plantes  qu*eUe 
fournit  à  la  médecine,  thèse  pour  le  doctorat  en  méde- 
cine, présentée  et  soutenue  le  7  juin  1856,  par  Louis- 
Edouard  Bureau. 

M.  de  Rostaing  de  Rivas  est  ûommé  rapporteur. 

L*ordre  du  jour  appelle  M.  Mabit  à  la  tribune  pour  lire  une 
note  au  sujet  des  empoisonnements  par  VŒnanthe  crocata. 
Dans  cette  note,  il  expose  succinctement  les  caractères  diffé- 
rentiels de  rOE.  peucedanifolia ,  de  VŒ.  pimpinelUndes 
et  du  Chenopodium-Denudatum ,  planter  dont  il  est  facile 
de  confondre  les  tubercules  avec  ceux  de  VŒnanthe 
crocata.  M.  Mabit  met  en  outre  sous  les  yéui  de  ses  col- 
lègues les  plantes  des  trois  premières  espèces. 

M.  Rouxeau  succède  à  M.  Habit  et  donne  lecture  de 
plusieurs  Obs&rvùtions  d'iclampsie  nÙmminurique ,  suite 
de  scarlatine  (1). 

M.  Sfalherbe  lit  ensuite  une  Observation  depsoïtis  ter- 
miné  par  la  mort  (2). 

Af.  Aubinais  demande  à  faire  une  communication  ver- 
bale au  sujet  d'un  accouchement  dans  lequel  le  fœtus  na- 
quit parfaitement  viable  et  vivant,  le  placenta  offrant 
cette  particularité  de  l'existence  d'une  masse  dure  qui  lui 
était  adhérente,  masse  qui  fut  reconnue  par  M.  Chenan- 
tais  pour  les  débris  d'un  fœtus  de  4  mois  environ. 

M.  Aubinais  croit  que  l'arrêt  de  développement  de 
l'un  des  fœtus  dans  les  grossesses  gémellaires ,  est  bien 
plus  souvent  le  résultat  d'une  cause  trauraatique,  comme 
dans  ce  cas-ci,  où  la  mère  avait  reçu  un  coup  dans 
le  flanc  gauche ,  pendant  les  premiers  mois  de  sa  ges- 
tation ,  que  réff'et  du  développement  prépondérant  de 
Tautre  fœtus. 


(2) 


Voir  plus  loin ,  p.  139. 

Voir  le  nninëro  précédent,  p.  95. 


JOUBNAl.  DB  M^PSGHfB.  135 

MM,  Malherbe,  Mabit  et  Deliun  rappellent  des  feits 
analogues,  mais  sans  pouvoir  rien  affirmer  touchant  la 
nature  de  la  cause  de  ces  arrêts  de  développements  de 
l'un  des  fœtus  jumeaux. 

Séance  extraordinaire  du  22  juillet  1856. 

PRÉSIDENCE  DE   M.   HAHOT ,  PRÉSIDEIÏT. 

Cette  séance  fut  consacrée  à  Texamen  de  &f.  E.-À. 
Groux  ,  de  Hambourg ,  porteur  d'une  fissure  congénitale 
du  sternum,  qui  permet  de  voir  et  de  palper  le  pouls 
aortique  et  surtout  les  mouvements  de  dilatation  et  de 
contraction  de  Toreiilétte  droite. 

Séance  du  22  aoûM856. 

PEÉSmENCE   DE   M.    HAHOT,   PRÉSmENT. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  lecture  d'une  Observation 
cliniqw  par  H.  Rouxeau  (1). 

M.  Letenneur  lui  succède  à  la  tribune  et  lit  deux  Obser- 
vations de  rupture  de  V utérus  (2). 

M.  Aubinais  demande  la  parole.  Il  reconnaît ,  comme 
l'a  dit  M.  Letenneur,  que  les  faits  de  rupture  de  l'utérus 
pendant  le  travail  sont  rares,  et  pense  exagérée  la  propor- 
tion d'un  de  ces  accidents,  sur  900  accouchements,  chiffra 
admis  par  la  statistique  et  consigné  dans  le  Manuel  des 
accouchements  de  J.  Jacquemier.  Quant  à  lui ,  il  est  du 
nombre  des  médecins  qui  ont  eu  Le  bonheur  de  n'avoir 
eu  aucun  de  ces  faits  à  observer.  Il  croit  ces  ruptures 
dues ,  le  plus  souvent ,  aux  moyens  employés  pour  déli- 


ai) Voir  plus  loin,  p.  155. 
(2)  Voir  plus  loin ,  p.  163. 


i36  JOUBNàL  DB  VÉDBCHŒ. 

vrer  la  femme  ou  à  de  fausses  manœuvres.  La  rupture 
spontanée  est  des  plus  rares,  s'il  s'en  rapporte  à  ses 
lectures. 

M.  Malherbe  demande  à  faire  une  communication 
verbale.  Chacun  de  nous ,  dit-il ,  se  rappelle  l'épidémie  de 
choléra  de  1854.  L'année  suivante  (1855),  on  compta  à 
Nantes  65  décès  dus  au  choléra.  Celte  année  (1856) , 
sous  rinfluence  des  violentes  chaleurs  que  nous  avons 
eues  à  supporter ,  nous  avons  vu  ,  de  nouveau ,  apparaître 
plusieurs  cas  de  choléra,  dont  quelques-uns  ont  été  mor- 
tels ,  et  un  grand  nombre  de  cholérines.  Les  décès,  jusqu'à 
présent ,  atteignent  le  chiffre  20.  Toutefois  ,  il  ne  &ut 
voir,  dans  cette  réapparition  du  choléra  en  1855  et  1856, 
que  les  reliquats  de  l'épidémie  de  1854,  et  non  une 
nouvelle  invasion.  Un  fait  à  remarquer,  c'est  la  dissémi- 
nation dans  toute  la  ville  de  la  maladie ,  qui  ne  remonte 
plus,  comme  en  1854,  le  lit  du  fleuve  et  a  même  complè- 
tement épargné  le  quartier  de  THermitage,  son  premier 
point  de  départ  à  cette  époque.  Cette  fois,  le  fléau  a  surtout 
frappé  de  mort  les  enfants  au-dessous  d'un  an.  (Choiera 
infantilis.)  Quelquefois  ces  diarrhées  ont  foudroyé  les  ma- 
lades dans  vingt  heures  ,  et ,  en  certains  cas ,  elles  ont  re- 
vêtu le  caractère  de  la  dysenterie.  M.  Malherbe  a  remarqué 
l'invasion  de  nombreuses  diarrhées  chez  les  enfants  coïnci- 
dant avec  le  développement  d'un  orage  ,  et  cette  ob- 
servation, il  l'avait  déjà  faite  dans  les  années  précédentes. 

M.  Rouxeau  a  vu  quatre  cas  de  choléra ,  deux  ont  été 
peu  intenses;  des  deux  autres,  l'un  a  été  mortel  en  36 
heures,  le  second,  en  6  heures;  celui-ci  a  sévi  sur  un 
goutteux  ,  faisant  depuis  longtemps  un  large  usage  des 
pilules  de  Lartigues. 

M.  Malherbe  demande  à  M.  Rouxeau  si ,  dans  ce  der- 
nier cas,  il  ne  s'agirait  pas  plutôt  d'un  empoisonnement 
par  le  colchique ,  que  d'un  choléra ,  les  caractères 
de  ces  deux  maladies ,  ayant  plus  d'un  rapport  commun. 
Ne  penserait-il  pas  du  moins  que  ces  deux  influences  ont 
pu  être  réunies  ? 

M,  Rouxeau  répond  que  le  malade  en  question  était 


JOUBMÀL  DE  UÉDBCINB.  137 

un  homme  ftgé  de  62  ans,  ayant  la  goutte  depuis  une 
vingtnine  d'années.  Lors  de  ses  attaques  ,  il  avait  Thabi- 
tude  de  prendre  6  à  8  pilules  de  Lartigues  par  jour. 
Cette  dernière  fois ,  il  avait  pris ,  pour  combattre  ses 
douleurs,  six  pilules  en  12  heures,  lesquelles  provoquè- 
rent une  diarrhée  suivie  de  réaction.  Alors  seulement , 
au  moment  où  le  malade  n'était  plus  préoccupé  que  de 
régler  son  régime ,  survint  Talgidité  accompagnée  des 
autres  symptômes  cholériques  qui  emportèrent  le  malade. 

M.  Padioleau  a  eu  à  donner  ses  soins  à  noire  confrère 
M.  Legouais,  qui  a  été  pris  subitement  d'un  véritable 
choléra,  actuellement  en  voie  de  guérison. 

M.  Hélie  a  soigné  un  enfant  chez  lequel  le  choléra  a 
duré  15  heures.  Il  a  également  vu  mourir  en  12  ou  15 
heures ,  une  femme  de  82  ans ,  qui  s'est  éteinte  sans 
douleurs,  après  un  affaiblissement  progressif.  Il  a  remarqué 
que  ,  dans  les  dernières  épidémies ,  st  le  choléra  est 
accompagné  généralement  de  souffrances  moindres ,  en 
revanche  ,  la  réaction  est  moins  sûre  et  moins  franche  que 
dans  l'épidémie  de  1832. 

ilf.  Deltiên  ajoute  à  tous  ces  faits  que,  depuis  un  mois, 
les  accidents  gastro-intestinaux  sont  très-fréquents  ;  déjà  il 
en  avait  signalé  l'existence  dans  une  précédente  séance , 
mais  depuis  quinze  jours  surtout  leur  recrudescence  est 
évidente.  Un  symptôme  qui  l'a  frappé  ,  c'est  la  sensation 
d'oppression  épigastrique.  En  présence  de  ces  symptômes 
gastro-intestinaux  ,  il  s'est  demandé  s'il  y  avait  avantage  à 
avoir  recOurs  aux  évacuants  et  à  les  préférer  aux  opiacés. 
Son  expérience  lui  a  décidément  fait  donner  la  préférence 
aux  premiers. 


Séance  du  12  septembre  1856. 

PRÉSIDENCE   DE  H.   MÂHOT  ,   PRÉSIDENT. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  lecture  d'un  rapport  sur  un 


138  JOUMIAL  DB   «ÉDBaUB. 

opuscule ,  de  M.  Giiitrac ,  directeur  de  l'école  de  médecine 
de  Bordeaux,  intitulé  :  Observations  et  recherches  sur 
toblitératian  de  la  veine-porte  ,  et  sur  les  rapports  de 
cette  lésion  avec  le  volume  du  foie  et  la  sécrétion  de  la  bile, 
par  M.  Malherbe  (1). 

M.  Herbeliu  est  ensuite  appelé  à  la  tribune  pour  donner 
à  l'assemblée  communication  d'une  note  sur  les  diffé- 
rentes magnésies  médicinales.  Il  en  compte  quatre  sortes  : 
I»  la  magnésie  du  codex  ;  2"^  la  magnésie  éteinte  ou  hy- 
dratée; 3**  la  magnésie  lourde,  dite  de  Henry  ;  4®  enfin 
le  sous-carbonate  de  magnésie.  Après  être  entré  dans 
quelques  détails  sur  leurs  caractères  différentiels  et  leurs 
propriétés  diverses ,  M.  Herbelin  croit  devoir  s'enquérir  de 
la  sorte  de  magnésie  qui  doit  être ,  en  définitive ,  livrée 
par  le  pharmacien  ,  lorsqu'on  demande  à  celui-ci  de  la 
magnésie  anglaise ,  les  praticiens  comme  les  auteurs  ne 
lui  paraissant  pas  d'accord  à  ce  sujet. 

Cette  question  provoque  une  discussion  à  laquelle 
prennent  part  MM.  Mabit ,  Pincet ,  Herbelin  ,  Hauduit , 
Malherbe  et  Deluen  ,  et  qui  démontre  ,  en  effet ,  l'exis- 
tence de  ce  défaut  d'accord ,  les  uns  entendant  désigner 
sous  le  nom  de  magnésie  anglaise  ,  sous-carbonOile  de 
magnésie,  et  les  autres,  la  magnésie  calcinée  du  codex.  On 
éviterait  ces  malentendus,  dit  H.  Malherbe,  en  bannis- 
sant de  nos  formules  l'épithète  indiquant  la  provenance  de 
la  magnésie ,  pour  y  substituer  toujours  le  langage  plus 
rigoureux  et  exempt  d'équivoque ,  de  la  chimie  nM>- 
derne. 

M.  MauduU  signale  l'abus  que  font  beaucoup  d'étran- 
gers ,  de  la  magnésie  lourde,  dite  de  Henry  ,  et  qui  a  quel- 
quefois pour  résultat  la  formation  de  concrétions  magné- 
siennes dans  les  intestins. 

M.  Hignard  a  vu  en  effet  la  mort  résulter  du  séjour 
dans  les  intestins  de  ces  amas  de  magnésie. 


(1)  Voir  plus  loin,  p.  169. 


Ia  discussion  étant  épuisée ,  ^.  le  président  prie  les 
fïiembres  qui  auraiept  quelques  renseignements  à  donner 
à  leurs  collègues,  sur  les  rpaladies  régnantes  et  la  constitu- 
tion médicale  actuelle  ,  de  vouloir  bien  prendre  la 
parole. 

M.  Hignard  dit  qu^il  a  constaté  depuis  trois  semaines 

ou  un  mois ,  l'existence  dans  ses  sajles  de  TH^tel-Dieu , 

d'un  très*grand  nonibre  de  dysenteries  parmi  les  militaires, 

m^îs  aucup  n'^  eqcore  succombé.  L^  traitement  a  été  chez 

tous  à  peu  près  le  mèm^  ;  poudre  d'ipéc^cuanh^  a  doses 

vomitives ,   et  cela  répété  jusqu'à  trois  fois  au   besoin. 

Chez  quelques-uns ,  i!  a  fallu ,  en  outre ,  administrer  la 

inanne.  Dans  deux  ou  trois  cas  seulement ,  où  la  donleur 

prédpminait ,  quelques  sangsues  ont  été  appliquées  dans 

la  fosse  iliaque  gauche.  Le  reste  du  traitement  a  consisté 

dans  r^dministration  des  tisanes  albumineuses  ou  gom- 

lueuses  ,  dans  des  quarts  de  lavement  d'eau  de  lin  et  de 

pavots ,  puis  enfin  dans  les  opiacés  à  Tintérieur ,  alors  que 

les  selles  devenaient  bilieuses. 

If  julle  autre  commMPicatipn  n'étant  faite ,  la  séance  est 
levée. 

Le  Secrilairej 

L|s  Houx. 


OBSERVATION  d'éclampsie  albuminurique , 
suite  de  scarlatine ,  par  M.  Ca.  Rouxeajd  , 
D.-M.-P, 


Messieurs  , 

Parmi  les  .différentes  variétés  de  jla  maladie  de  ftrigbt , 
pern^ette^-moi  d en  choisir  Mi^e  >  peut- être  la  plus  aiguë, 


140  JOVBIIÀL  DB  HÉDECnVE. 

certainement  la  plus  fugace ,  la  plus  bénigne,  puisqu'elle  se 
termine  habituellement  par  la  guérison  ;  je  veux  parler  de 
l'albuminurie  scarlatineuse.  Encore  doîs-jeme  borner  à  dé- 
crire une  seule  phase  de  cette  affection  si  bien  traitée  par 
les  écrivains  voués  à  l'étude  de  la  pathologie  infantile ,  no- 
tamment par  MM.  Legendre  et  Rilliet  ;  phase  qui  semble- 
rait assez  rare ,  si  l'on  en  juge  par  le  petit  nombre 
d'exemples  trouvés  dans  les  ouvrages  les  plus  récents.  MM. 
Barthez  et  Rilliet  eux-mêmes ,  dans  la  dernière  édition 
de  leur  remarquable  Traité  des  maladies  de  Venfance^  n'ont 
pu  réunir  sur  l'éclampsie  album'inurique  ,  suite  de  scarla- 
tine ,  qu'une  douzaine  de  cas,  dont  deux  seulement  leur 
sont  personnels.  Apporter  des  faits  nouveaux  et  scrupu- 
leusement observés  sur  une  maladie  rare ,  dont  rhistoire 
doit,  par  conséquent,  présenter  de  nombreuses  lacunes, 
des  points  obscurs  ,  des  explications  hasardées ,  m'a  paru 
chose  utile.  Mais  quelque  degré  de  certitude  qu'on  y  puisse 
rencontrer ,  ces  faits  ne  combleront  point  toutes  ces  la- 
cunes ;  ils  n'éclaireront  point  tous  ces  côtés  obscurs ,  ils 
ne  résoudront  point  toutes  ces  difficultés.  Ils  ont  même 
l'inconvénient  d'une  grande  uniformité  de  physionomie , 
que  l'éclampsie  scarlatineuse  n'affecte  certainement  pas 
toujours ,  puisqu'on  y  voit  prédominer  tantôt  les  convul- 
sions ,  tantôt  le  délire  ou  le  coma,  tantôt  la  paralysie. 
D'ailleurs,  on  n'écrit  pas  l'histoire  d'une  maladie  avec  trois 
ou  quatre  observations ,  quelque  sévèrement  recueillies 
qu'elles  puissent  être.  Je  les  regarde  seulement  comme  des 
matériaux  susceptibles  de  présenter  un  certain  degré  d'à- 
propos  et  d'utilité  à  une  époque  où  la  maladie  de  Bright 
est  l'objet  de  nouvelles  et  profondes  études.  C'est  à  ce  titre, 
Messieurs ,  que  je  viens  les  soumettre  à  votre  appré- 
ciation. 

f  >«  ObserTatlon. 

Jules  Lebrun ,  7  ans ,  d'une  bonne  santé  habituelle  , 
n'ayant  jamais  eu  de  symptômes  graves  du  côté  des  centres 
nerveux  ,  est  pris,  au  commencement  de  janvier  1856  , 


JOURNAL  DE  HÉDEGINE.  141 

d'une  maladie  caractérisée  par  de  la  fièvre  ,  de  la  cépha- 
lalgie ,  un  brisement  général,  quelques  nausées  et  un  peu 
de  mal  à  Tépigastre  et  à  la  gorge ,  et  de  la  rougeur  à  la 
peau.  Au  bout  de  quelques  jours ,  les  accidents  se  sont 
calmés,  la  rougeur  de  la  peau  et  Tangine  ont  disparu,  la 
fièvre  s'est  évanouie ,  l'appétit  est  devenu  plus  vif  ;  Fen- 
fant  veut,  se  lever  ,  et  les  parents  qui ,  malgré  la  présence 
d'une  épidémie  de  scarlatine  ,  n*ont  point  reconnu  la  na- 
ture d'une  maladie  légère  en  apparence ,  le  laissent  im- 
médiatement retourner  à  l'école. 

Je  le  vois  ,  par  hasard  ,  le  26  janvier  ,  à  l'occasion 
d'une  affection  semblable  chez  sa  sœur,  dont  j'aurai  bientôt 
à  parler.  La  face  est  pâle  ,  légèrement  bouffie  autour  des 
yeux  ;  la  peau  ,  généralement  sèche  ,  un  peu  œdématiée  , 
ne  gardant  nulle  part  l'impression  du  doigt,  présente  quel- 
ques traces  de  desquamation  sur  les  mains ,  les  épaules 
et  le  cou;  il  existe  un  peu  de  dysphagie  et  de  rougeur 
au  pharynx.  Du  reste  ,  l'enfant  est  gai ,  mange  bien  et  dort 
de  même.  J'engage  les  parents  à  garder  leur  fils  à  la 
chambre  ,  pour  traiter  une  anasarque  qui  peut  avoir  des 
suites  fâcheuses.  Mes  conseils  sont  reçus  avec  cette  incré- 
dulité traditionnelle  qui  ,  dans  le  peuple ,  ne  fléchit  pas 
toujours  devant  les  plus  rudes  leçons.  J.  L.  retourna  à  son 
école,  et  il  ne  fut  plus  question  de  lui  pendant  quelques 
jours. 

Cependant,  l'œdème  général  fit  des  progrès  ;  la  face  de- 
vint énorme;  les  paupières,  infiltrées,  voilèrent  une 
grande  partie  du  globe  oculaire;  les  membres,  le  scrotum 
furent  envahis.  Toutefois ,  te  sommeil  est  bon  ,  l'appétit 
presque  intact  ,  malgré  quelques  nausées  fugaces  et  un 
peu  de  constipation. 

8  février.  La  peau  est  chaude  ,  sèche  et  rénitente ,  ne 
conservant  point  l'impression  du  doigt  ;  le  pouls  ,  irré- 
gulier ,  n'a  qu'une  fréquence  modérée  ;  la  tête  est  un  peu 
lourde  ,  la  langue  un  peu  sale.  Les  urines  ont  la  couleur 
de  bière  trouble  ;  traitées  par  l'acide  nitrique  ,  elles 
donnent  un  coagulum  abondant  ;  examinées  au  microscope. 


142  JOQEKAL  J>B  MÉDIÏCIlf^. 

elles  présentent  une  grande  quantité  de  globiiles  san- 
guins. 

Huile  de  ricin,  tisane  nitrée  ,  infusion  de  digitale,  en- 
veloppement dans  une  couche  d'ouate. 

10  février.  Le  matin  ,  Jules  est  très-bien  ;  il  joue  sur 
son  lit ,  cause ,  chante  et  demande  à  manger  ;  la  cépha- 
lalgie a  disparu.  Tout  d'un  coup ,  sans  prodromes  ,  il 
est  pris  d^une  convulsion.  Les  parents,  épouvantés,  m  en- 
voient chercher. 

  mon  arrivée ,  je  trouve  le  petit  malade  privé  de 
connaissance  et  de  sentiment ,  pâle ,  les  yeux  fermés , 
les  pupilles  dilatées ,  les  lèvres  couvertes  d'écume  et  agi- 
tées à  intervalles  réguliers  par  une  expiration  bruyante , 
stertoreuse.  La  peau  est  moyennement  chaude ,  comme 
transparente  ;  le  pouls  fréquent.  Bientôt  il  se  renverse  en 
arrière  ,  les  yeux  s'ouvrent  largement,  deviennent  fixes  et 
agités  d'un  tremblottement  rapide.  Des  secousses  légères  , 
ressemblant  à  un  frémissement  incessant ,  ont  lieu  dans 
les  paupières  et  l'orbiculaire  des  lèvres.  Puis  la  tète  se 
tourne  tout  entière  du  côté  gauche  ,  les  bras  et  les  jambes 
se  raidissent  en  frissonnant  ;  puis  une  grande  agitation  de 
tout  le  corps  ;  face  vultueuse  et  violacée ,  surtout  aux 
lèvres  et  autour  des  yeux  ;  écume  à  la  bouche  ,  puis  dé- 
tente  générale  avt'C  ce  stertor  si  connu.. ..  Mais  je  m'ar- 
rête ,  car  je  m'aperçois  que  je  décris  minutieusement  une 
attaque  d'épilepsie  ou  d'éciampsie  puerpérale,  maladies  avec 
lesquelles  l'affection  que  je  décris  offre  une  ressembiapce  de 
forme  des  plus  complètes. 

Au  bout  de  quelques  minutes ,  nouvelle  attaque  ;  une 
trentaine  se  succèdent  ainsi  dans  la  journée.  Dans  l'inter- 
valle ,  résolution  des  meiinbres ,  surtout  à  droite  ;  perte 
absolue  de  connaissance  ;  abolition  de  la  vue  ,  de  l'ouïe  , 
de  la  sensibilité  générale.  On  peut  toucher  les  ponJQDctives 
avec  les  barbes  d'une  plume,  sans  déterminer  de  cUgjnotte- 
ment.  Le  pouls  est  petit ,  serré  ,  exoessivenient  fréquent; 
l'œdème  général  ,  quoique  peut-être  un  peu  diminué  ;  la 
peau  chaude  et  sèche  ,  surtout  au  front  ;  ventre  toujours 
serré  ;  un  vomissement  bilieux  entre  deux  att^ues. 


JODBNAL  DE  HàDBCWE.  143 

6  sangsues  aux  genoux  ;  elles  saignent  énormément  ;  2 
vésicatoires  aux  jambes ,  glace  sur  le  front  ;  50  centigr. 
de  calomel ,  qui  donnent  des  selles  abondantes  et  nom- 
breuses. 

1  i  février.  Tous  ces  accidents  ont  disparu  comme  par 
enchantement.  Le  malade  est  sans  fièvre,  sans  céphalalgie  ; 
mais  il  a  conservé  un  peu  d'étonnement  et  de  boufiissure. 
Ou  reste ,  il  est  assez  bien.  A  peine  reste-t-il  quelques 
traces  d'albumine  dans  les  urines,  qui  ont  conservé  leur 
couleur  de  bière  ,  et  quelques  rares  globules  sanguins  épars 
dans  le  champ  du  microscope.  Point  de  toux  ;  faim  très- 
accusée. 

Calomel ,  25  centig.  Tisane  nitrée  édulcorée  avec  le 
sirop  de  digitale.  Envelopper  l'enfant  dans  une  couche 
d'ouate. 

13.  Pas  de  fièvre  :  86-88  puis.  Bien  du  reste. 

t4.  L'anasarque  s'est  reproduite  plus  considérable  que 
jamais.  Toutefois  ,  il  reste  à  peine  des  traces  d  albumine 
dans  les  urines.  La  fièvre  s*est  rallumée  ;  pas  le  moindre 
symptôme  du  côté  des  centres  nerveux. 

Même  traitement. 

15.  Sous  l'influence  probable  de  quelque  imprudence 
que  i'on  n'ose  m'avouer  ,  la  nuit  a  été  mauvaise  ;  l'œdème 
général  est  énorme ,  surtout  au  scrotum  ;  l'urine  contient 
une  forte  proportion  d'albumine  ;  la  fièvre  est  vive ,  le 
pouls  à  130.  Du  reste  ,  fintelligence  est  saine  ,  le  som- 
meil parfait ,  et  les  accidents  cérébraux  que  l'on  pourrait 
redouter  ne  se  montrent  point. 

Calomel.  Teinture  d'aconit  et  de  digitale.  Le  reste  est 
s^rà.  Alimentation  légère. 

18.  L'anasarque  et  l'albuminurie  ont  presque  entière- 
ment disparu. 

3  potages.  Continuer  l'aconit  et  la  digitale. 

20.  Retour  de  l'hydropifiie  et  de  falbomine  dans  les 
urines ,  qui  sont  rougeâtres  et  troubles.  Point  de  fièvre  ; 
appétift  fort  vif. 

Même  traitement. 

A  partir  de  ce  jour ,  les  alternatives  d'augmentation  et 


144  JOURNAL  DE  BIÉDECIJIE. 

de  diminution  dans  Tanasarque  et  ralbumiuurie  cessent  de 
se  manifester  ;  rinfiltration  se  dissipe  lentement ,  mais 
sûrement  ;  Tacide  nitrique  détermine  dans  les  urines  un 
coagulum  de  moins  en  moins  abondant  ;  les  forces  diges- 
tives  s'éveillent  ;  le  sommeil  est  parfait.  La  digitale  et  la- 
conit ,  auxquels  on  ajoute  quelques  pastilles  de  fer ,  sont 
continuée  quelque  temps  encore  ;  une  nourriture  répara- 
trice est  prescrite,  et  J.  L.  sort  enfin,  vers  le  8  mars,  de 
cette  affection  si  grave  et  si  longue. 

9«  ObserTation. 

Marie  Lebrun  ,  9  ans  ,  brune  ,  forte ,-  bien  portante 
ordinairement.  Scarlatine  angineuse  débutant  le  22  jan- 
vier 1856, 

Le  8  février,  17  jours  après  le  début  de  cette  affection, 
malgré  toutes  les  précautions  possibles ,  un  œdème  léger 
occupe  la  face  et  les  membres.  La  peau ,  en  pleine  des- 
quamation ,  est  presque  transparente  ,  sèche  et  rénitente. 
Pas  de  fièvre  ;  anorexie ,  quelques  vomissements  ,  consti- 
pation opiniâtre  ;  urines  rares ,  couleur  de  bière ,  préci- 
pitant très-abondamment  par  Facide  nitrique  et  contenant 
du  sang ,  très  recoimaissable  à  Taide  du  microscope. 

Huile  de  ricin  :  10  gr.  Potion  avec  teinture  de  digit. En- 
veloppement dans  une  couche  d*ouate. 

10.  L'état  de  son  frère  la  jette  dans  une  épouvante  ira- 
possible  à  décrire.  Pourtant  elle  est  sans  fièvre ,  mais  très- 
infiltrée  ;  les  yeux  h  demi-fermés  par  les  paupières  œdé- 
matiées  ;  les  joues  ,  légèrement  colorées,  ont  une  réni- 
tence  remarquable.  La  peau  ne  conserve  nulle  part  Tim- 
pression  du  doigt.  Le  soir ,  un  peu  de  somnolence  et  de 
mauvaise  humeur. 

J'annonce  une  attaque  d'éclampsie  imminente  et  je 
prescris  des  sangsues  aux  malléoles  et  du  calomel  à  dose 
fortement  purgative. 

La  maladie  de  son  frère  fait  oublier  mon  pronostic  et 
ma  prescription. 

Le  11.  Ma  prévision  s'accomplit  à  la  lettre  :   Marie 


JOinUfAI.  DE  XÉBSCINB.  145 

est  prise  d'une  attaque  d'érjampsie  analogue  à  celle  de 
Jules  ,  et  qui  dure  quinze  heures.  Seulement,  les  convul- 
sions sont  moins  fréquentes. 

8  sangsues  aux  genoux  ;  elles  saignent  abondamment  ; 
1  vésicatoires  aux  jambes;  caloroeL  50  centig.  qui  donnent 
des  selles  nombreuses. 

Le  12,  les  accidents  sont  conjurés.  La  connaissance  est 
parfaite,  mais  Thumeur  est  assez  maussade ,  la  tête  légère- 
ment douloureuse.  La  fièvre  est  presque  nulle ,  la  peau  sè- 
che ,  livide,  très-infiltrée ,  surtout  aux  paupières,  aux 
pieds  et  aux  mains.  Point  de  toux  ;  anorexie  ;  quelques 
vomissements  causés  par  le  calomel.  Pas  de  selle  depuis 
hier.  . 

Calomel ,  50  centig  ;  teinture  de  digitale  et  d'aconit  ; 
ouate  autour  du  corps. 

14.  L'anasarque  se  dissipe  assez  rapidement,  excepté 
aux  paupières;  la  face  semble  diminuée  d'un  tiers.  11  existe 
encore  un  peu  d'albumine  dans  les  urines.  Appétit ,  point 
de  fièvre  ni  de  céphalalgie,  bon  sommeil. 

Contrairement  à  son  frère,  que  nous  avons  vu  marcher 
à  la  guérison  à  travers  des  alternatives  nombreusesde  mieux 
et  de  plus  mal ,  Marie  suit  une  progression  toujours  crois- 
sante vers  un  rétablissement  qui  est  à  peu  près  complet 
dans  les  derniers  jours  de  février. 

Comme  pour  Jules  ,  le  traitement  de  Tanasarque  a 
consisté  dans  l'administration  fréquente  du  calomel  et 
Tusage  longtemps  prolongé  de  la  digitale  et  de  Taconit. 
L  —  Que  Jules  L.  ailété  pris  d'anasarque  et  d'albuminu- 
rie ,  après  s'être  exposé ,  dès  les  premiers  jours  d'une 
convalescence  de  scarlatine  ,  au  froid  humide  des  mois 
de  janvier  et  de  février  ,  en  un  mot  à  toutes  les  intempé- 
ries que  les  enfants,  en  général,  redoutent  si  peu,  il  n'y 
a  rien,  à  coup  sûr,  dans  ce  fait,  qui  ait  droit  de  nous  sur- 
prendre. Tous  les  jours,  sous  l'influence  de  causes  bien  plus 
légères,  bien  fugitives,  insaisissables  même,  nous  voyons 
cette  fâcheuse  complication  rejeter  les  malades  dans  un 
nouveau  danger. 
L'histoire  de  Marie  L.  en  est  une  preuve.  Elle  suit  scru- 


i46  jotmNÂi  BS  HÉBScnai. 

puleusement  les  prescriptions  qui  lui  sont  faites,  aucune 
imprudence  n*est  commise  ;  l'air  de  la  chambre  n'est  re- 
nouvelée qu'avec  un  certain  luxe  de  précautions.  Néan- 
moins, roedème  se  manifeste  bientôt  et  acquiert  plus  de 
volume  que  chez  son  frère. 

Il  n'est  point  rare,  répéterai-je,  de  voir  des  enfants  que 
Ton  entoure  de  tous  les  soins  les  plus  vigilants  ,  dont  la 
température  la  plus  belle  semble  favoriser  la  convalescence, 
près  desquels  les  règles  les  plus  minutieuses  d'une  sag*^ 
hygiène,  sont  observées  avec  intelligence  et  qui  ne  peu- 
vent* échapper  à  Tanasarque  (t)  ;  tandis  que  d'autres  sont 
exposés  à  toutes  les  causes  les  plus  actives  d'hydropisie  et 
ne  sont  pas  atteints. 

Je  pourrais  citer  l'exemple  d'une  jeune  femme  qui  eut, 
au  commencement  d'avril  dernier,  une  scarlatine  grave, 
avec  délire  furieux  revenant  surtout  la  nuit.  A  chaque 
instant ,  elle  échappait  aux  personnes  qui  la  veillaient  et 
s'enfuyait  nu-pieds  et  en  chemise  dans  l'escalier  où  l'on 
avait  de  la  peine  à  la  saisir  et  à  s'en  rendre  maître. 
Malgré  ces  faits  regrettables ,  elle  n'eut  aucune  trace  d'al- 
buminurie ni  d'œdème. 

Serait-il  moins  dangereux,  au  point  de  vue  de  l'ana- 
sarque ,  de  s'exposer  au  froid  pendant  la  période  d'éruption 
que  pendant  celle  de  desquamation  ?  C'est  un  problème 
dont  je  n'ose  aborder  la  solution ,  faute  de  données  suf- 
fisantes. 

II.  —  Poursuivons  l'étude  comparative  de  nos  deux 
observations  : 

Nous  retrouvons  dans  l'évolution  des  symptômes  céré- 
braux la  même  différence  que  dans  celle  de  l'hydropisie. 
Marie  L.  assiste  à  toutes  les  péripéties  de  la  maladie  de 


(1)  J'ai  sous  les  veux  Pc^servation  d^ne  enfant  de  5  ans , 
Àlexandrine  G.,  de  PiUeux,  qui,  après  un  séjour  d'une  demi-heure 
k  peine  k  sa  fenêtre,  vers  le  20  ou  25»  jour  d'une  convalescence 
de  scarlatine^  au  mois  de  mai,  par  un  temps  magnifique,  fut  prise 
d'anasarque  avec  une  ascite  énorme. 


JOtmrtÀL  DE  MÉBECmfi.  147 

son  frère,  agrté  tFhorribles  bortVulsions ,  elle  voit  et  partage 
la  frayeur  et  le  désespoir  de  ses  parents  foudroyés  sous  le 
cobp  d'un  rhalheur  aussi  terrible  qu'inattendu.  Sa  frète  or- 
ganisatron  nerveuse,  déjà  ébranlée  par  une  double  affec- 
tion ,  reçoit  une  rtouvelle  et  irrésistible  secousse.  Nous 
pressentons  Tarrîvée  de  Téclampsie ,  elle  ne  se  fait  pas 
attendre.  Soit  que  Tbydropisie  ait  envahi  les  membranes 
ou  les  vèntriôules  du  cerveau,  soit  que  les  sympathies  de 
l'encéphale  aient  été  seules  en  jeu,  toujours  est-il  que  moins 
d^  2\  heures  après  le  début  des  convulsions  chez  Jules  , 
sa  sœur  est  prise  des  mêmes  symptômes. 

L'on  s'étonnerait  presque  que,  dominée  par  tant  de  cau- 
ses, une  scarlatine,  uneanasarque  des  plus  prononcées,  un 
chagrin  des  plus  violents  ,  une  terreur  aussi  subite,  cette 
pauvre  enfant  eût  échappé  à  cette  dernière  phase  de  sa  ma- 
ladie. Mais  il  est  n!iiûins  facile  d'ei^pliquerTéclampsie  chez  J. 
Quel()tie8  minutes  avant  l'invasion  des  accidents  convulsifs  , 
il  riait,  chantait  et  demandait  à  manger.  Il  n'éprouvait 
aucun  de  ces  syniptômes  avant-coureiirs  qui  annoncent  les 
affeclîon's  cérébrales;  point  de  céphâtalgie,  point  de  change- 
ment dans  fhu'rtîeur,  point  d'insomnie;  l'appétit  est  conservé; 
à  peine  quelques  nausées  et  une  légère  constipation  se 
sont-elles  fait  sentir,  encore  ces  phénomènes  ont-ils  dis: 
paru  sous  l'influence  de  quelques  grammes  d'huile  de  ricin. 
Je  ne  puis  expliquer  l'éclampsie  que  par  une  disposition 
insaisissable  de  l'économie.  Et  pourtant,  quand  je  considère 
que  J.  L.  n'avait  jamais  eu  de  symptôme  grave  du  c>ôté 
des  centres  nerveux,  quand  je  relis  l'observation  à  laquelle 
j'ai  fait  allusion  dans  ma  dernière  note ,  l'histoire  d'une 
enfant  qui  avait  eu,  dans  ses  premières  années  ,  une  affec- 
tion cérébrale,  que  j'ai  soignée  depuis  pour  une  fièvre  in- 
termittente pernicieuse  avec  délire  et  convulsions,  qui  n'a- 
vait jamais  la  moindre  maladie  qiîe  le  cerveau  n'en  éprouvât 
line  douloureuse  impression ,  et  qui ,  cependant ,  vit  sa 
confvalescence  de  scarlatine  compliquée  d'une  anasarque 
avec  ascite  énorme,  sans  le  moindre  retentissement  du  côté 
de  l'encéphale  ;  quand  j'envisage  toutes  ces  circonstances  , 
j'tfvooe  que  je  trouve  le  fait  de  J.  L.  plus  inexpKcable  en- 


148  JOUBRÂl  DB  HÉBSCailB. 

core.  Mais  que  de  choses  en  médecine  qui  échappent  à 
toute  explication. 

III.  —  La  première  observation  présente  dans  sa  marche 
certaines  anomalies ,  un  certain  désaccord  qui ,  tout  en 
constituant  un  problème  actuellement  insoluble  pour  moi, 
méritent  cependant  d'être  mentionnés.  La  gnérison  n'ar- 
rive qu'à  travers  plusieurs  alternatives  d'amélioration  et 
d'aggravation  ;  aujourd'hui  lenfant  semble  sauvé  ;  le  len- 
demain ,  rhydropisie  ,  Talbuminurie ,  la  fièvre  ont  aug- 
menté ;  ou  bien  c'est  Tun  de  ces  phénomènes  qui  reste 
stationnaire  ,  quand  les  autres  prennent  plus  d'importance. 
Mais  ce  que  je  regarde  surtout  comme  digne  d'attention, 
c'est  qu'à  plusieurs  reprises ,  l'anasarque  fait  de  rapides 
progrès  ,  la  fièvre  augmente ,  quand  l'albumine  semble  sur 
le  point  de  disparaître  des  urines  ;  c'est  qu'à  plusieurs  re- 
prises également ,  la  proportion  d'albumine  s'accroît  no- 
tablement ,  quand  Thydropisie  marche  vers  une  heureuse 
terminaison. 

Souvent,  en  examinant,  dans  la  même  séance,  les 
urines  du  frère  et  de  la  sœur,  je  suis  resté  étonné  en 
voyant  celles  du  sujet  le  plus  infiltré  bien  moins  albumi- 
neuses  que  les  autres.  Enfin  un  troisième  ordre  de  faits 
tout  aussi  curieux,  c'est  que  des  urines  fort  colorées  ,  chez 
lesquelles  je  m'attendais  à  trouver  une  quantité  très-considé- 
rable d'albumine ,  ne  m'en  offraient  que  des  traces , 
tandis  que,  quelques  jours  après,  elles  étaient  claires, 
limpides  et  fortement  coagulables.  Je  le  répète ,  ces  par- 
ticularités sont  restées  une  énigme  pour  moi.  11  eût  fallu , 
pour  l'expliquer ,  étudier  bien  des  faits  liés  à  ceux-ci  par 
une  étroite  connexion,  tels  que  la  quantité  et  la  nature  des 
boissons  ingérées ,  la  quantité ,  la  densité  et  la  compo- 
sition des  urines  excrétées ,  le  résultat  variable  des  pur- 
gatifs employés  constamment ,  la  relation  de  la  fièvre 
avec  les  autres  phénomènes  ,  etc.  ,  etc. ,  études  longues , 
difficiles,  auxquelles  enfin  Ton  ne  songe  pas  toujours, 
auxquelles  le  temps  ne  permet  pas  toujours  de  se 
livrer. 

IV. —  Dans  ces  deux  observations,  le  diagnostic  n'offre  au- 


jôuRRAii  DE  véhbchœ.  149 

cuBe  difficulté  :  scarlatine  bien  constatée,  anasarque  et  albu- 
minurie évidentes,  convulsions  formant  la  période  extrême 
de  cette  progression  pathologique ,  le  tableau  est  complet. 
Mais  il  n'en  est  pas  toujours  ainsi.  Voici  deux  autres  faits 
où  la  vérité  ne  peut  être  découverte  que  d'une  manière 
approximative  :  encore  te  doute  semble-t-il  fort  légitime  à 
l'égard  du  second. 

S«  Obsepiratloii» 

W^^  E.,  9  ans ,  rue  Saint^tmilien,  21  ,  est  prise  tout 
d'un  coup  et  pour  la  première  fois  de  sa  vie  ,  de  convul- 
sions violentes ,  épileptiformes ,  avec  perte  de  connais- 
sance ,  face  vuUueuse ,  écume  à  la  bouche. 

Le  19  février  1856.  Appelé  en  l'absence  du  médecin 
ordinaire ,  je- constate  un  état  des  plus  alarmants.  Les 
convulsions  exactement  semblables  à  celles  que  j'ai  dé- 
crites, dans  ma  preoiière  observation,  se  succèdent  ra* 
pidement  avec  un  crescendo  de  violence  et  de  durée.  Tout 
plein  encore  du  souvenir  des  enfants  liebrun  ,  mes  idées 
se  portèrent  immédiatement  et  tout  naturellement  vers  une 
éclampsie  albuminurique. 

Cette  jeune  fille  ne  comptait  dans  sa  famille  aucun  épi- 
leptique  :  elle  n'avait  jamais  eu  d'atteinte  de  mal  caduc; 
depuis  longtemps  elle  n'était  plus  sujette  aux  aifections 
vermineuses.  D'un  autre  côté,  elle  n'avait  point  eu  d'affec* 
tien  qui  l'eût  forcée  de  s'aliter.  L'urine  ne  pouvait  être 
examinée.  Toutefois ,  en  questionnant  attentivement  l'en- 
tourage de  la  malade ,  voici  ce  que  j'appris. 

Cette  jeune  fille  avait  éprouvé ,  vers  le  commencement 
de  février.,  un  mal  de  gorge  assez  violent  qui  avait  duré 
plusieurs  jours,  et  s'était  accompagné  de  fièvre  légère  avec 
sentinient  de  courbature  générale.  Y  avait-il  eu  rougeur 
de  la  peau  et  desquaouitioo  ?  On  n'en  savait  trop  rien  ; 
on  avait  l'air  de  le  croire ,  mais  n'était-ce  pas  par  con- 
descendance pour  mes  questions  ?  Toutefois  ,  un  phéno- 
mène qu'une  des  personnes  de  la  maison  avait  formelle- 
ment constaté  ,  et  dont  elle  avait  fait  tout  haut  la  remar- 

11 


150  satswàt  DE  ntiMMstiiB. 

que ,  o'esl  que  deux  o«  trois  jours  avant  les  convukhm , 
M*^*  R.  avait  eu  un  peu  de  bouffissure  au  visage ,  surtout 
aui  paupières  inftrieurea.  Grâce  à  ces  données  «  et  bien 
qu'il  n'existât  point  de  traees  de  desquamation,  il  était  bien 
fiicîle  de  croire  à  TexieCence  antérieure  d'une  de  ces  affec- 
tions scarlatineuses  avec  éruption  légère  «  fugace  o«  mètne 
nulle  ,  dont  Tépidémie  qui  dure  encore  noua  ar  dèoné  ptas 
d*un  exemple. 

Sans  pouvoir  dégager  ooinpUtênMnt  Tinconnue  de  ce 
problème,  il  était  facile  d'instituer  un  traitement.  Une 
vigoureuse  application  de  sangsues  aux  malléoles ,  du  ca- 
lomel  à  dose  fortement  purgative ,  une  potion  éthérée  et 
des  sinapismes  promenés  sur  les  extrémités. inférieures, 
firent  disparaître  en  7  ou  8  heures  tous  les  accidents. 

Le  lendemain  ,  M^**  E.  était  en  pleine  connaissance, 
la  nuit  avait  été  assez  bonne.  Il  existait  encore  un  peu  d'é^ 
tonnement  et  de  pesanteur  de  tête.  La  peau  était  chaude , 
un  peu  sèche ,  le  pouls  fréquent.  Il  restait  à  peine  des 
traces  d'infiltration  aux  paupières  inftrieures.  Les  faits  in- 
diqués par  les  personnes  de  la  maison  me  furent  alors 
confinnés  pat  la  malade ,  au  moîns  quant  à  Tangine  et  à 
l'oedème  des  paupières  ;  la  question  de  l'érvpiion  eet  restée 
douteuse;  de  desquamation,  il  n'en  existait  pas\  elle  n'en 
avait  vu  aucun  vestige,  et  cependant,  à  cette  époque 
(1 5  jours  après  Téruption  présuanée) ,  eMa  aurait  dû  être 
manifeste. 

n  restait  un  dernier  critérium  :  l'examen  des  urines. 
Celles  du  matin  du  21  me  furent  apporlées  ;  elles  étaient 
claires  ,  mousseuses ,  contenaient  de  rares  globules  de  sang 
et  précipitaient  par  l'acide  nitrique.  Le  doute  n'était  plus 
permis  ,  je  me  trouvais  bien  en  présence  d'une  éclampie 
albuminuriqûe.  Hais  cette  albuminurie  était^^eUe  scarla* 
ttneuse  ?  La  lumière  ne  s'est  pas  Mte  sur  cette  question  : 
il  faut  se  borner  à  regarder  le  feit  comme  possible  ,  pro- 
bable même ,  maïs  l'afiirmalion'  ne  peut  dépasser  cette 
limité.  Du  reste  ,  je  cessai  complétameiit  de  voir  cette 
jeune  fille  que  je  laissai  aux  soins  de  son  médecin  ordinaire. 
Je  n'en  ai  pins  entendu  pdrier. 


H>VMkh  HB  «É^ECINB.  151 

4«  ÙhmervMîon. 

Eugène  Gruère ,  30  mois ,  gros ,  fort  et  eoloré ,  d'une 
bonne  santé  habituelle ,  issu  d'une  mèfe  bien  portante  et 
d'tin  père  toussatit  habitoellenfient ,  a  la  rougeole  dans  le 
mois  de  janvier  1856.  Rien  d'anotmal. 

Depuis  le  15  février  il  a  un  peu  de  fièvre  ié  soir  ,  il  est 
pins  irritable ,  son  sommeil  est  un  peu  agité. 

Le  veMlredi  23  ,  augmentation  de  la  fièvre  et  de  Fagi- 
tation.  Dans  la  nuit  du  23  au  2i  ,  jactitation ,  insomnie , 
grincements  de  dents  ,  irritabilité. 

Le  samedi,  perte  subite  de  connaissance ,  convulsions 
épileptifermès ,  écume  à  la  bouche ,  face  violacée,  etc. 

Je  suis  appelé  à  une  heure ,  en  Tabsence  de  H.  Barjôlle, 
son  médecin. 

Visage  turgescent ,  yeux  fermés ,  pupilles  largement 
dilatées,  bouche  violacée  laissant  échapper  de  l'écume  san- 
guinolente ;  collapsus  général  consécutif  à  une  convulsion 
q^i  vient*  de  prendre  fin.  Quelques  grincements  de  dents. 
Peau  chaude,  pouls  petit,  à  180.  Une  selle,  pas  dé  vo- 
missements. 

J'apprends  que  le  matin  l'enfant  avait  le  corps  d'un  rouge 
framboise ,  qu'on  l'a  levé  pour  ses  besoins ,  et  sans  la 
moindre  [H^caution  ;  que  cette  rougeur  s'est  alors  com^ 
plétement  évanouie  en  quelques  instants. 

3  sangsues  aux  malléoles  ;  écoulement  de  sang  consi* 
dérable.  Sinap.  repétés  aux  extrémités  inférieures.  Galo^ 
mel ,  30  cent.  Point  de  selle. 

Le  soir<)  je  revois  le  petit  malade  avec  H.  Barjolle. 
Les  convulstons  ne  se  sont  pas  reproduites ,  mais  l'enfant 
semUé  toujours  sans  connaissance ,  les  yeux  fermés  ,  les 
pupiltes  dilatées ,  la  face  un  peu  nooins  congestionnée , 
quelques  grincements  de  dents  encore ,  ainsi  qu'un  peu 
d'agitation.  La  peau  est  chaude,  frafmboisée  sur  les  bras , 
les  épaufes  et  la  poitrine.  Le  pouls  s*est  un  peu  élargi ,  il 
est  à  160.  Pas  de  toux  ,  pas  de  vomissements  ,  pas 
de  sellées. 
Continuer  le  calomel. 


1S2  JOUBnii  DB  KÉDRCaRB. 

25.  Dans  la  nuit  du  samedi  au  dimanche,  le  sommeil  a 
été  assez  bon  et  la  connaissance  est  revenue  complète  à 
1  heure  du  matin. 

L'en&nt  est  assis  sur  son  lit,  jouant  et  causant  avec  ses 
parents.  L'éruption  a  totalement  disparu  ;  la  peau  est 
blanche ,  mais  modérément  chaude  ;  le  pouls  souple ,  à 
120  ;  la  langue  belle,  le  ventre  toujours  serré.  Pas  de 
toux.  L'urine  est  jaune  ,  trouble  ,  comme  de  Teau  tenant 
de  la  terre  glaise  en  suspension,  d'une  odeur  faible.  Traitée 
par  Tacide  nitrique,  elle  s*éclaircit  et  devient  rosée,  à 
commencer  par  les  couches  inférieures ,  puis  la  totalité 
du  liquide  devient  semblable  a  de  l'eau  légèrement  vineuse. 
Au  microscope  ,  on  découvre  ,  non  des  globules  de  sang , 
mais  une  masse  de  granulations  qui,  à  600  diamètres,  pa- 
raissent grosses  comme  la  pointe  d'un  cheveu  ,  isolées 
ou  groupées ,  et  agitées  d'un  mouvement  incessant  (Brow- 
nien). 

Huile  de  ricin  ,  8  gr.  (Quelques  selles.) 

Une  fièvre  rémittente  tierce  mal  dessinée  se  déclare  les 
jours  snivants  ,  au  dire  de  H.  Barjolle ,  et  cède  au  sul&te 
de  quinine. 

Que  nous  ayons  eu  à  traiter  une  attaque  d'éclampsie , 
le  fait  n'est  pas  douteux.  Les  convulsions  épileptiformes , 
l'écume  à  la  bpuche  ,  la  face  vultueuse  , .  le  stertor ,  l'état 
comateux  consécutif,  etc.,  tous  ces  traits  forment  un  tableau 
fort  reconnaissable.  D'un  autre  côté  ,  cette  rougeur  fram- 
boisée  ,  répandue  sur  tout  le  corps,  le  matin  du  24  ,  rou- 
geur précédée  de  quelques  jours  de  malaise  et  de  36  heures 
de  fièvre,  d'agitation,  d'insomnie,  de  grincements  de 
dents ,  dont  la  disparition  ,  sous  l'influence  d'une  impru- 
dence, est  suivie  bientôt  de  phénomènes  éclamptiques  ; 
qui  reparaît  le  soir ,  mais  par  places ,  sur  les  bras  ,  les 
épaules  et  la  poitrine ,  pour  s'évanouir  ,  sans  retour ,  le 
matin  du  25  ;  cette  rougeur,  dis-je,  était  bien  de  nature 
à  flaire  au  moins  soupçonner  une  scarlatine ,  surtout  en 
présence  d'une  épidémie  qui  frappait  à  tant  de  portes. 
Mais  ,  je  dois  l'avouer  ,  il  est  difficile  d'aller  au-delà  d'une 
simple  supposition.  D'ailleurs ,  nous  nous  trouvons  bientôt 


SOXmSfkL  DE  HÉDECtNB.  153 

arrêtés  par  une  nouvelle  difficulté.  Celle  allaque  d*éclampsie 
était-elle  liée  à  une  désalbuminalion  du  sang  ,  à  une  ma- 
ladie de  Bright ,  en  un  mot  ?    Il  n'existait  aucune  trace 
d*Gedème  ;  les  urines,  loin  de  se  coaguler  par  Facide  ni- 
trique, s'éclaircissaient  au  contraire,  et  devenaient  roses 
et     limpides. . . .  Des  auteurs  ,  M.  Imbert  Goubeyrre  en- 
tre DUtres,  prétendent  que  la  maladie  de  Bright  peut  avoir 
lieu  sans  anasarque  ,  sans  albuminurie ,  sans  lésion  rénale 
même.  M.  Hialhe  croit  que  la  désalbumination   du  sang 
précède  Thuminurie  et   Tanasarque.  Ces  deux  opinions 
sont  formellement  réprouvées  par  les  défenseurs  de  Tan- 
cienne  théorie ,  qui  font  ouvrir  la  série  des  symptômes 
morbides  à  Taffection  des  reins.  Lesquels  croire  ? 

En  relisant  cette  observation,  je  suis  tenté  de  me 
demander  si  nous  n'avons  pas  eu  plutôt  à  combattre 
une  fièvre  intermittente  à  forme  convulsive.  Cette  pyrexie 
rémittente  assez  vaguement  exprimée  dont  me  parla  notre 
confrère  et  qui  céda  au  sulfate  de  quinine,  pourrait 
jusqu'à  un  certain  point  légitimer  cette  question. 
Toutefois,  en  considérant  là  marche  continue  des  accidents 
initiaux ,  leur  disparition  graduelle  et  définitive  ,  des  le 
second  jour  de  leur'plus  grande  intensité,  la  manifesta- 
tion des  accès  rémittents  ,  seulement  quatre  ou  cinq  jours 
après  rinvasioh  de  Téclampsie,  on  est  plutôt  disposé  à 
croipe,  sinon  à  la  succession  d*une  maladie  différente  , 
du  moins  à  l'expression ,  sous  une  autre  forme ,  d'un 
principe  non  encore  épuisé. 

Du  reste,  malgré  les  desiderata  qui  se  rencontrent  dans 
rhistoire  de  ce  malade  que  je  n'ai  vu  que  trois  fois ,  elle 
ne  laisse  pas  que  d'être  curieuse,  ne  fût-ce  que  comme 
oJ)jet  de  comparaison ,  comme  moyen  de  diagnostic 
différentiel  avec  les  observations  précédentes. 

V.  —  Je  n'ai  rien  à  dire  dif  traitement.  Pris  au  dépour- 
vu ,  une  première  fois ,  je  me  suis  adressé  à  la  thérapeutique 
banale  des  affections  cérébrales,  sangsues,  révulsifs, 
calomel ,  etc. ,  moyens  toujours  employés  ,  quelquefois 
heureux;  souvent  inutiles.  La  guérison  rapide  du  premier 
cas    devait    m'encourager    à     persister    dans   la   même 


1S4  louBNii.  DE  nÉMcam. 

voie ,  a  me  servir  des  mâmes  armes  :  elles  me  sont  reslaes 
fidèles. 

Mais  ,  je  dois  l'avouer  :  en  voyant  quatre  fois  consécu- 
tives, guérir  en  quelques  heures,  franchement,  presque 
sans  convalescence ,  sous  Tinfluence  de  quelques  sangsues 
et  de  quelques,  centigrammes  de  calomel,  des  enfonts 
saisis  brusquement  d'accidents  aussi  formidables ,  je  .n'ai  pu 
me  défendre  d'un  certain  degré  d'étonnement ,  surtout  en 
songeant  à  la  gravité  des  affections  cérébrales  dans  le  jeune 
âge,  L'éclampsie  albuminurique  scarlatineuse  ne  serait- 
clle  donc,  malgré  ce  terrible  déploiement  de  convulsions , 
qu'une  maladie  assez  bénigne?  ie  ne  puis  le  supposer. 
Des  cas  mortels  signalés  par  MM.  Bartfaez  et  RiUiet 
prouvent  que  les  sujets  atteints  de  cette  affection  sont 
toujours  sous  la  menace  d'un  grand  danger.  Je  sois  plus 
disposé  à  croire  que  je  me  suis  trouvé  au  milieu  d'une  de 
ces  séries  heureuses  dont  on  n'apprécie  pas  toujours  la 
raison ,  mais  dont  il  faut  savoir  se  défier  dans  une 
statistique.  Que  conclure  d'ailleurs  de  quatre  observations? 

Je  ne  me  dissimule  point  toute  l'imperfection  ,  toute 
Tinsuffisance  de  cette  ébauche.  Parmi  les  questions  qui  se 
rattachent  à  ces  observations  d'éclampsie,  quelques-unes 
ont  été  à  peine  indiquées,  le  plus  grand  nombre  eoiqplète- 
ment  laissées  dans  le  silence.  Mais,  je  le  répète  :  donner  un 
résumé  des  opinions  régnantes  sur  une  maladie  «dont 
l'histoire  n'est  point  faite ,  me  semble  une  œuvre  stérile  : 
créer  du  nouveau  avec  des  données  insuffisantes ,  une 
œuvre  mort-née.  On  n'élève  point  un  édifice ,  sans  avoir 
laborieusement  déblayé  le  terrain,  consciencieusement 
accumulé  des  matériaux  nombreux ,  indispensables.  Cette 
sorte  de  création  préliminaire  exige  un  labeur  long, 
patient,  obscur.  Faute  de  cette  condition  essentielle,  bien 
des  théories  séduisantes  ont  eu  presque  tjans  le  même  jour 
leur  période  de  spleùdeur  et  leur  ruine  complète.  Sachons 
donc  attendre  et  étudier  avant  de  prouoncer ,  dussent  tous 
tous  nos  efforts  aboutir  au  modeste  rôle  d'apporter  uim^. 
simple  pierre  perdue  ^ans  un  édifice  élevé  par  d'autres 
mains. 


^WB»H»  VZ  MÉSiJU^W»  165 


O  BSERrJTION  clinique,  par  M*  RotJXBAC, 
Dgctew-Médecin. 


il  n'e^t  pas  rare  de  Irouver ,  sous  un  appareil  sympiô^ 
roaUque  biçq  traocb^ ,  bien  recoanu  y  des  affections  diffi- 
ciles à  apprécier ,  insaisissables  même ,  véritables  noU  ms 
tangen ,  diath^ses  rebelles  qui  00  ilécbie3eni ,  sous  une 
form^  ,  que  pour  renaître  sous  une  autre  ,  souvent  plus 
grave,  plus,  tenace;  vaincues  en  apparence,  mais  point 
domptées ,  finissant  par  prendre  sur  le  malade  et  sur  le 
médèpin  une  dernière  et  trjste  revanche  ,  si  le  hasard  ou 
une  observation  plus  rigoureuse  ne  fournissent  U  naédica-» 
tipu  qui  doii  eu  triompher,  £û  présence  de  cets  cas  ot^curs, 
aulent  que  singuliers  ,  on  3e  rappelle  iiivolontftirement 
le  vejrs  d'Horeu^e  : 

^  Natûram  furca  expeilas  ,  iamen  usquè  recurret. 
Un  exemple  : 

Une  fièvre  intermittente  se  présente  è  notre  observa^ 
iipn,  dégagée  de  toute  complioation  appréciable.  Le  sulfate 
de  quinine,  administré  avec  ^oute  l'attention  possible,  .en- 
lève les  acc^  plu^  ou  moins  &ci|ement  ;  quelques  jours 
après ,  le  jnalade  est  pris  d'une  céphalalgie  continuelle  ; 
d'étourdissements  ,  de  vertiges ,  de  brisement  général , 
d'anorexie,  de  douleurs  abdonoinales ,  d'une  petite  fièvre 
ûpntinue,  etc.,  tous  phénomènes  nouveaux ,  qui  laissent 
le  médecin  surpris  et  hésitant,  jusqua  ce  qu'enfin  un 
nouvel  accès  bien  caractérisé  vienne  remettre  lies  choses 
d£ins le. même  état  qu Vaut  l'adininistration  d'une  tbéra** 
peutique  intempestive  et  malencontreuse. 


i56  lOinUEIAL  BB  HÉDBGOIS. 

J'ai  recueilli ,  cette  année  ,  Tobservation  d'une  maladie 
analogue  :  elle  m'a  paru  curieuse  à  plus  d'un  titre  ;  je 
vous  demande  la  permission  de  vous  la  présenter,  toute 
incomplète  qu'elle  est. 

Huguier,  50  ans,  ancien  matelot,  a  perdu  un  bras  à  Na- 
varin. Caractère  violent  et  emporté,  il  a  toujours  joui  d'une 
excellente  santé  et  n'a  jamais  eu  la  syphilis. 

Depuis  3  ans ,  il  est  affecté  d'un  rhumatisme  articulaire, 
subaigu  ,  généralisé ,  sans  complication  du  côté  du  cœur. 
Les  saignées,  le  colchique  ,  les  vésicatoires,  les  bains  de 
vapeur  suivis  ou  non  de  douches  froides  ,  n'ont  eu  ,  jus- 
qu'ici, au  dire  du  malade,  qu'un  succès  douteux  ou  mo- 
mentané. 

Nous  commençons  un  nouveau  traitement  vers  la  6n 
de  l'année  1855.  Une  saignée  ,  la  teinture  d'aconit  napel , 
à  doses  croissantes  ,  de  20  à  60  gouttes,  une  couche  de 
collodion  sur  les  articulations  affectées ,  enlèvent  en  deux 
mois  cette  longue  maladie.  Il  reste,  toutefois,  un  peu  de 
raideur  dans  les  membres. 

Dans  les  derniers  jours  de  janvier  185&,  dix  ou  douze 
jours  après  la  disparition  complète  de  la  fièvre,  des  gonfle- 
ments et  des  douleurs  articulaires ,  une  bronchite  aiguè 
avec  toux  incessante  se  déclare  sans  cause  appréciable. 

Le  1^'  février,  pendant  une  quinte  de  toux,  une  ddh^ 
leur  déchirante  se  fait  brusquement  sentira  quatre  travers 
de  doigt  au-dessous  des  dernières  fausses-côtes  droites;  les 
mouvements  du  thorax  sont  presque  impossibles,  la  palpa- 
tion  très-douloureuse,  la  fièvre  intense  ;  la  toux  fréquente 
arrache  des  cris  plaintifs  au  malade;  rien  à  l'auscultation 
et  à  la  percussion  de  là  poitrine  et  du  cœur.  La  langue  est 
sale,  point  de  vomissements,  point  de  nausées^  le  ventre 
est  serré. 

Je  crois  avoir  affaire  à  une  péritonite  limitée. 

Saignée  de  300  gr.  (sang  couenneux,  peu  riche);  le 
st)ir,  lO^sangsuessur  le  point  douloureux. 

Le  2 ,  les  accidents  ont  peu  diminué  :  le  malade  croit 
sentir ,  dans  l'endroit  douloureux  >  une  tumeur  d'un  petit 
volume.  En  effet ,  le  doigt  promené  sous  l'hypochondre , 


JOtrBNAl  DE  MÉDECHtE.  157 

trouve  une  dureté  circonscrite,  grosse  comme  une  amande, 
dont  il  est  difficile  de  préciser  le  siège  et  |a  nature.  La  dou- 
leur  est  toujours  considérable  ,  la  dyspnée  extrême  ,  Tex- 
pectoration  difficile,  la  palpation  et  la  percussion  très-pé- 
riibles.  Point  de  nausées,  point  de  vomissements,  anorexie, 
soif,  constipation,  urines  médiocrement  abondantes  ;  peau 
chaude  et  moite,  pouls  à  96. 

2  pilules  de  colchique  et  d'extrait  de  coloquinte  ;  cata- 
plasmes émollients,  lavements  purgatifs. 

La  douleur  de  côté  et  les  autres  accidents  persistent,  en 
s  amendant  toutefois,  jusqu'au  6. 

Le  malin ,  la  douleur  spontanée  est  nulle ,  la  pression 
peu  pénible ,  la  respiration ,  les  efforts  de  toux  faciles  , 
l'expectoration  abondante.  La  bronchite  est  en  voie  de  ré- 
solution ,  Tappétit  revient. . .  Avec  un  peu  d'attention,  on 
saisit ,  à  quatre  travers  de  doigt  au-dessous  du  rebord 
des  fausses  côtes  droites,  une  tumeur  absez  superficielle  , 
située  probablement  dans  l'épaisseur  des  parois  abdomina- 
les et  du  volume  de  la  moitié  d'un  œuf  de  pigeon.  Quelle 
est  la  nature  de  cette  tumeur  ? 

Vers  deux  heures  de  l'après-midi ,  tout-à-coup ,  sans 
cause  appréciable,  sensation  d'une  douleur  déchirante, 
atroce,  au  niveau  de  la  tumeur.  Il  semble  au  malade  que 
de  l'eau  bouillante  est  versée  dans  l'abdomen  et  se  répand 
jusque  dans  les  testicules;  suffocation  imminente,  respi- 
ration presque  impossible  ,  râle  trachéal ,  lipothymies  , 
face  pâle,  égarée,  peau  couverte  d'une  sueur  froide;  pouls 
petit,  filiforme  ;  la  tumeur  dure,  parfaitement  circonscrite, 
a  acquis  12  centimètres  de  longueur  et  5  ou  6  de  lar- 
geur ;  son  niveau  supérieur  reste  fixe  à  quatre  travers  de 
doigt  du  rebord  des  fausses  côtes.  Quant  à  son  épaisseur, 
elle  paraît  peu  considérable;  sonorité  exagérée  tout  à 
l'entour;  il  semble  que  des  anses  intestinales  la  séparent 
du  foie  qui  est  refoulé  en  haut  et  gêne  le  jeu  des  pou- 
mons. 

Pratiquée  légèrement  sur  la  tumeur,  la  percussion  donne 
un  son  mat;  plus  profonde  ,  elle  donne  un   son  clair  qui 


ii9  JODjgiux  j>B  liriTOCiw^ 

dénote  que  les  intestins,  distendus  par  des  g^z,  sont  siiués 
au-dessous  et  à  une  &ible  distance. 

Le  soir  ,  la  tumeur  a  25  centimètres  d'étendue  dans 
tous  les  sens ,  mais  elle  est  peu  épaisse  et  ^dhérent^ 
aux  parois  abdominales  ;  le  malade  est  dans  une  anxiété 
extrême  ,  dans  une  sorte  de  demi -asphyxie;  râle  trachéal, 
peau  chaude  et  couverte  d'une  sueur  visqueuse  ;  pouls  petit, 
dur  et  serré. 

Quelle  est  la  nature  de  cette  tumeur?  Probablement 
sanguine  ,  si  Ton  s'en  rapporte  à  la  manière  dont  elle  s*est 
produite.  Son  siège?  Est-elle  située  entre  le  péritoine  el 
les  parois  abdominales ,  comme  je  l'avais  cru  d'abord  ?  Il 
est  difficile  de  s'arrêter  Içngtemps  à  cette  opinion  :  la 
séreuse  abdominale  si  tenue,  eut  infailliblement  cédée  sous 
la  pression  d'une  telle  masse  de  sang ,  et  une  péritonite 
foudroyante  se  fut  bientôt  déclarée.  Il  est  probable  que 
cet  épancbement  de  sang  existe  entre  les  feuillets  ^ponévro- 
tiques  des  muscles  abdominaux. 

Saignée  (couenne  inflanmiatoire ;  glace  sur  la  tumeur; 
boissons  froides,  immobilité  et  silence  absolus»  chlorydrate 
de  morphine  10  centig.) 

7.  Point  de  changement.  Le  soir,  un  vomissement  de 
matières  à  aspect  fécal. 

Même  pi*escription. 

8.  La  tumeur  a  pris  du  développement  en  largeur , 
mais  elle  est  moins  circonscrite ,  peu  épaisse  et  moins  dou* 
loureuse.  Un  vomissement  sembbble  à  celui  d'hier.  Point 
d'urines.  Là  vessie,  cependant,  semble  en  contenir  une 
certaine  quantité.  Le  cathétérisme  en  donne  environ  175 
grammes.  Constipation  opiniâtre. 

Huile  de  ricin  ;  peu  d'effet. 

10.  En  examinant  le  malade  dans  tous  les  seps,  j'aper- 
çois, sur. le  flano  droit  et  sur  las  iQpibes,  une  énorme  ec 
cljymose  qui  ne  laisse  plus  de  doute  sur  la  nature,  de 
l'affection. 

Le  1 1 ,  le  malade  est  très-bien ,  la  tumeur  se  résorbe 
rapidement.  Il  n'existe  pas  de  fièvre ,  p^  d^  toux  ;  Lçs  ar- 
ticulations soat  libres ,  le  sompaeil  e^  l'appétit  parfaits. 


Tout promeè  une  convalescence  franche  el  rapide»  quand 
un  frisson  violent  signale  le  début  d'une  parotite  à  gauche 
qui  se  développe  assez  rapidement  et  s'accompagne  d'une 
fièvre  intense  et  d'une  nouvelle  bronchite  avec  accès  suf- 
focants. 

Frictions  avec  une  pommade  composée  d'onguent  na- 
politain et  d'extrait  de  belladone,  parties  égales. 

12.  Suffocation  imminente,  face  bouffie,  pâle,  blaf- 
farde ,  toux  quinteuse ,  expectoration  de  matières  vis- 
queuses. Râle  sous- crépitant ,  des  deux  côtés  ,  en  bas  , 
et  postérieurement  ;  respiration  anxieuse.  Parotite  énorme, 
sans  indice  de  suppuration ,  fièvre  violente ,  pouls 
à  125. 

Kermès ,  50  centig.  ;  un  large  vésicatoire  dans  le 
dos  ;  continuer  les   frictions  mercurielles  sur  la  parotite. 

14.  La  tumeur  du  ventre  a  diminué  de  moitié,  la  pa- 
rotite sçmhie  se  résoudre ,  la  douleur  -y  est  beaucoup 
moins  considérable.  Le  pouls  est  à  92,  régulier,  lapeau  peu 
chaude ,  la  respiration  est  largç  et  facile ,  presque  nor- 
male ,  ia  toux  rare ,  les  râles  humides  moins  abondants. 
L'état  du  malade  est  des  plus  sati^aisants,  si  l'on  en  excepte 
toutefois  une  stomatite  mercurieUe  des  plus  prononcées. 

Continuer  le  kermès;  suspendre  les  frictions  mercu* 
rielles  et  les  remplacer  par  de  simples  cataplasmes  émol- 
lients  ;  gargarismes  alumineux  ;  toucher  les  gencives  avec 
de  rapide  chlorydrique. 

15.  L'épanchement  continue  à  se  résorber  rapidement  ; 
le  gonflement  parotidien  s*est  affaissé.  Bien  qu'il  reste  en- 
core un  peu  de  bronchite  et  que  la  salivation  merourielle 
ait  fait  peu  de  progrès  vers  sa  résoLutioD ,  Huguier  se 
trouve  de  mieux  en  mieux.  Malheureusement,  je  n'ai  pas 
songé  au  traitement  héroïque  de  la  stomatite  merourielle, 
le  chlorate  dé  potasse ,  et  le  malade  souffrira  encore  p(u  • 
sieurs  jour^  de  ee  regrettable  oubli. 

Vers  midi ,  nouveau  frisson  avec  mvasion  d'une  douleur 
tellement  vivp  d^ns  les  deux  épaules  et  d^ns  le  bras 
gauche,  qw  ie  nooindre   mouvement  arrache  des  cris 


160  jotmiiÂL  DE  MÉKcms. 

aupatient;  fièvre  intense,  pouls  dur,  à  120;  rien  au 
cœar. 

Saignée  (sang  couenneux)  ;  potion  avec  salfate  de 
morphine). 

Le  soir  à  10  heures.  86  pulsations,  point  de  toux, 
point  d'expectoration ,  de  douleurs  de  poitrine  ,  ni  dop* 
pression.  La  parotite  a  encore  diminué ,  mais  la  douleur 
des  épaules ,  du  bras  et  du  poignet  est  plus  intense.  La 
stomatite  mercurielle  reste  à  peu  près  stationnaire.  Je  ne 
serais  pas  éloigné  de  croire  à  la  présence  d'une  fièvre  in- 
termittente. 

16.  Un  accès  pernicieux  des  plus  violents.  Le  malade, 
dans  un  état  d'asphyxie  presque  complet ,  est  à  demi  assis 
dans  son  lit,  soutenu  par  des  chaises ,  la  face  est  bleuâtre, 
les  yeux  dilatés  d'une  manière  eflrayante ,  Fair  égaré ,  la 
peau  couverte  d'une  sueur  visqueuse. 

Sulfate  de  quinime ,  1  gr.  50  centig. 

Les  accès  de  fièvre,  la  toux  ,  les  douleurs  rhumatismales, 
tout  a  disparu  comme  par  enchantement. 

Le  18.  Le  malade  est  très-bien  ;  pour  la  troisième  fois  , 
la  convalescence  semble  se  dessiner  franchement.  Il  ne 
reste  de  toutes  les  souffrances  dont  nous  avons  donné  la 
longue  énumération  ,  qu'un  gonflement  fort  léger  à  la  ré- 
gion parotidienne ,  et  encore  un  peu  de  salivation. 

21.  Je  suis  péniblement  surpris  en  retrouvant  Huguier 
avec  une  nouvelle  fièvre,  et  une  tuméfaction  considérable 
de  la  parotite ,  avec  rougeur  vive  et  douleur  insupportable. 
La  bouche  peut  à  peine  s'entr'ouvrir  de  quelques  milli- 
mètres ,  la  déglutition  est  presque  impossible  ,  la  salivation 
mercurielle  est  presque  aussi  abondante  que  les  premiers 
jours.  Constipation. 

Malgré  la  difficulté  d'avaler ,  j'ordonne  50  grammes 
de  sulfate  de  magnésie,  qui  déterminent  Mes  selles  nom- 
breuses. 

22.  La  fièvre  s'est  calmée  ,  mais  la  parotite  est  énorme 
et  très-douloureuse  ,  la  salivation  persiste. 

Cataplasmes  émoltients  ;  lavement  purgatif. 

26.  Une  collection   purulente   des  plus  manifestes,  a 


JOUBUAL  de  HÉDBGirVB.  161 

lieu  dans  la  tumeur  parolidienne..  Une  ponction  faite  uû 
peu  en  arrière  de  Toreille,  laisse  écouler  une  grande  quan- 
tité de  pu& 

2  mars.  La  suppuration  est  presque  tarie  ,  le  gonfle* 
ment  faible  ,  la  fièvre  presque  nulle ,  le  pouls  à  78. 
lirais  la  main ,  les  genoux  et  le  pied  droit  sont  gonflés , 
engourdis  et  douloureux  ,  la  face  e>st  naturelle  ,  la  bouche 
mauvaise,  la  langue  sale  ,  la  salivation  fort  réduite. 

7.  Le  gonflement  de  la  parotite  se  reproduit  pour  la 
troisième  fois ,  l'ouverture  qui  s'était  fermée ,  est  rede- 
venue perméable  au  pus.  Les  jambes  sont  libres ,  mais  le 
poignet  est  très-douloureux  et  enflé ,  le  pouls  fébrile ,  à 
82.  Bouche  mauvaise ,  anorexie  «  langue  sale  ;  plusieurs 
selles  causées  par  une  pilule  purgative. 

14.  Les  douleurs  rhumatismales  et  la  protite  ont  beau- 
coup diminué  ,  peu  de  fièvre. 

lodure  de  potassium  ,  à  commencer  par  25  centig. ,  en 
augmentant  tous  les  jours  de  25  centig.,  jusqu'à  concur- 
rence de  1  gramme. 

17.  Quatrième  retour  du  gonflement  parotidien.  Mais 
ce  gonflement  diminue  peu  à  peu  sans  suppurer  :  le  30,  il 
n'en  reste  plus  que  des  traces.  A  cette  époque,  létat  gé- 
néral est  très-bon:  la  toux,  Toppression  ,  la  salivation 
mercurielle  ont  disparu  sans  retour,  l'appétit  est  vif,  le 
sommeil  profond  et  réparateur  ;  les  douleurs  rhumatismales 
s'effacent  graduellement ,  et  dans  le  courant  d'avril  tout  est 
rentré  dans  Tordre. 

Seulement ,  à  la  suite  de  cette  maladie  si  longue ,  si 
variée  dans  ses  phénomènes ,  Huguier  reste  avec  une  &i- 
blesse  extrême,  qui  ne  se  dissipe  que  lentement. 

Voilà,  certes,  un  véritable  protée  qui  succombe  à  peine 
sous  une  forme,  qu'il  reparaît  plus  menaçant  sous  une 
nouvelle,  laissant  chaque  fois  le  médeéin  plus  étonné ,  le 
malade  plus  affaibli,  les  ressources  thérapeutiques  plus 
bornées.  U|)  rhumatisme  multiarticulaire  sans  complica- 
tion apparente  ,  et  durant  depuis  trois  ans ,  cède  en  deux 
mois  aux  antiphlogistîques,  à  l'aconit,  au  collodion.  Mais 
la  joie  du  malade  est  de  courte  duré  :  bientôt  survient  une 


1<2  jonuiAL  BB  mûmcmÈ. 

bronchite  aig«ië ,  dont  les  quintes  déterminent  une  déchi- 
rure, avec  énorme  épanchement  de  sang  dans  les  parois 
abdominales ,  et  qui  compromet  sérieusement  l'existence. 
Ce  nouveau  danger  est  à  peine  passé ,  que  se  déclarent 
successivement  une  parotite  énorme  à  répétition  (si  je 
puis  prendre  cette  expression  puisée  dans  le  vocabulaire 
d'un  célèbre  syphilographe) ,  puis  une  fièvre  pernicieuse, 
sous  forme  de  catarrhe  asphyxiant ,  puis  une  troisième  re- 
prise de  la  parotite  ,  puis  <^nfin,  à  l'extrémité  de  ce  cercle, 
retour  à  l'état  primitif,  c'est-à-dire  explosion  d'un  rhu- 
matisme polyarticutaire ,  qui  ne  cède  qu'à  i'iodure  de  po- 
tassium. Encore,  dois-je  è  la  vérité  de  dire,  qu'il  y  a  quel- 
ques semaines,  H.  se  plaignait  de  douleurs  vagues  dans  les 
membres. 

Quelle  était  donc,  en  somme,  cette  bizarre  affection  ?  Me 
suis-je  trouvé  en  présence  d'une  diathèse  rhumatismale  mas- 
quée par  un  traitement  inopportun  ou  insuffisant?  C'est  pos- 
sible. N'ét^t-ce  point  une  syphilis  ancienne ,  se  trahissant 
sous  un  aspect  insolite  et  trompeur  ?  Les  assertions  de 
mon  malade  ne  m'ont  pas  semblé  une  garantie  suffisante  : 
un  matelot  qui  fournit  sa  carrière  sans  essuyer  quelque 
orage ,  me  semble  un  idéal  difficile  à  rencontrer.  Le  succès 
de  riodure  de  potassium  semblerait  encore  de  nature  à 
justifier  cette  présomption  ,  si  l'on  ne  savait  qu'il  guérit 
souvent  des  rhumatismes  complètement  dégagés  de  l'élé- 
meiH  syphilitique.  Ge  qu'il  y  a  de  certain ,  c'est  que  les 
jours  du  malade  ont  été  en  danger  pendant  toute  la  série 
des  phénomènes  qui  ont  succédé  au  rhumatisme  initial  ; 
que  le  danger  a  été  complètement  conjuré ,  du  jour  où 
les  articulations  ont  été  délînitivement  reprises  par  la  rou- 
geur et  le  gonflement. 

Ce  feit ,  joint  à  beaucoup  d'autres  semblables  ,  ne  prou- 
ve-t^il  pas  l'immense  difficulté  que  présente  le  diagnostic 
d'une  foule  de  maladies,  jé  ne  dis  pas  lé  diagnostic 
local  ,  anatomique  ,  presque  toujours  insuffisant  ;  mais  fe 
véritable  diagnostic  ,  celui  de  la  cause ,  de  la  nature  de 
l'affection  ,  la  connaissance  des  antécédents  du  malade , 
de  son  organisation  ,   de  ses  habitudes ,  etc.  Diagnostic, 


JOÙHirÀi  DE  nntBEÉlNË.  I6à 

s^ns  lequel  on  voit  toifê  les  jourâ  les  affeôtions  fes  ptus 

5^in]ples,  en  apparence  ,  opposer  aux  efforts  du  médeciti 

surpris  4    une   résistance  insormontablé  autant  qu'inat- 
teiwtue. 


DEUX  OBSÊRFJTIONS  de  rupture  de 
l'utérus,  par  le  docteur  Lbtennbub. 


Bien  que  les  cas  de  rupture  de  Tutérus  ne  soient  pas 
excessivement  rares  ,  il  est  cependant  un  grand  nombre 
de  médecins  qui  ont  eu  le  bonheur  de  n'en  point  ob* 
server  ;  c'est  pourquoi  il  y  aura  toujours  quelque  intérêt 
à  publier  les  faits  qui  se  rapportent  à  ce  redoutable  acci- 
dent de  la  parturition. 

La  rupture  de  l'utérus  peut  être  spontanée ,  ou  bien 
elle  est  dét^minée  par  les  mauffiovres  pratiquées  dans  le 
but  de  terminer  Taccouchement  ;  mais  dans  Tun  et  Tautre 
cas  ,  elle  a  lieu  le  f4iis  souvent  brsque ,  dans  une  position 
vicieuse  du  fœtus  ,  qui  s'oppose  à  son  expulsion  pair  les 
seules  forces  de  la  nature  ^  laecoucheur  n'intervient  pas 
à  temps  et  que  la  femme  lutte  énergiquement  contre  un 
obstacle  invincible.  Aussi  les  ruptures  de  Tutérus  sont- 
elles  rares  dans  les  villes  où  les  femmes  reçoivent  totajours 
des  soins  empressés  et  éclairés ,  tandis  qu'elles  sont,  re^ 
lativemejot  du  moins ,  fréquentes  dans  les  camipagnes  où 
la  pratique  desaceoucheikieeits  est  abandonnée  a  des  ma- 
trones ^  à  des  sages-femmes  dont  l'instruction  est  mal- 
heureusement presque  toujours  insuffisante. 

Ces  femmes  auxqnelles  on  peut  reprocher  quelquefois 
d'être  trop  audacieuses  ,  n'osent  pas ,  où  plutôt  ne  savent 
|ms  ,  dans  certaines  circonstancefH  agir  à  propos  ,  bien  que 


164  lOUBNAL  DB  HÉDBGniB. 

l'indication  soit  précise  et  que  l*expectation  soit  pleine  de 
dangers. 

Les  deux  observations  qui  suivent  en  sont  la  preuve , 
car  la  rupture  de  l'utérus  aurait  certainement  été  évitée 
dans  les  deux  cas  ,  si  la  version  eût  été  foite  en  temps  con- 
venable. 

t'«  ObserTatlon. 

Le  20  janvier  1845 ,  je  fus  appelé  par  le  docteur 
Mary ,  de  Palluau  (Vendée) ,  pour  voir ,  au  village  de 
la  Maladrerie  ,  la  femme  Perrochaud  ,  qui  depuis 
quatre  jours ,  était  dans  les  douleurs  de  l'enfantement. 
Cette  femme  ,  âgée  de  39  ans ,  avait  eu  plusieurs  enfants , 
mais  un  intervalle  de  douze  années  s'était  écoulé  entre  les 
deux  dernières  grossesses.  Lorsqu'elle  avait  ressenti  les 
premières  douleurs ,  elle  avait  fait  venir  près  d'elle  une 
sage-femme ,  qui  n'arriva  qu'après  la  rupture  des  mem- 
branes ^  et  lorsque  déjà  un  bras  s'était  engagé  dans  le 
vagin. 

Loin  de  faire  de  suite  la  version  qui ,  probablement  eut 
été  facile ,  elle  fit  sur  le  bras  des  tractions  fort  éner- 
giques, qui  eurent  pour  résultat  une  fracture  de  l'humérus 
et  la  déchirure  des  parties  molles  au  niveau  de  la 
fracture. 

C'est  alors  que  M.  Mary  fut  demandé  ;  il  constata  une 
contraction  spasmodique  permanente  de  l'utérus  ,  qui 
ne  lui  permit  pas  d'introduire  la  main  pour  faire  la 
version. 

Pour  combattre  cet  état ,  il  employa  divers  moyens , 
tels  que  saignée  du  bras ,  bains  de  siège ,  bains  entiers , 
injections  mucilagineuses  dans  le  vagin,  applications  émol- 
lientes  sur  l'abdomen,  etc.  Ces  moyens  furent  successive- 
ment mis  en  usage  pendant  trois  jours  ,  et  plusieurs  fois 
le  médecin  fit,  pour  pénétrer  dans  l'utérus  ,  des  tentatives 
qui  furent  toujours  infructueuses. 

Je  trouvai  la  femme  dans  un  grand  état  d'épuisement,  le 
ventre  était  très-douloureux  à  la  pression ,  la  vulve  tu- 
méfiée ,  chaude  et  sèche ,  le  bras  de  l'enfant    pendant 


.^-H 


entre  les  caisses  de  iftfeoime ,  était  neûr,  fksque  ^  froid  et 
dépouillé  de  soii  épiderme*'  •      ^'  ,     ,,-*.. 

Le  toucher  ine  fit  rçconnajjtre  une  sécheresse  ël^trême 
du  vagin.4j*épauW  était  engagée  dans  la-,  col»  donl*lfr»djk- 
tation  était'  cQmpIëte.  Les^  dottlenrA  avaient  cessé*';  ou 
plutôt,  l'utérus  Tipres  avpir  poussé  m  dehors,  toutes  les 
eaux  de  Tamnips ,  s'était  appliqué  de  Joutes  parts  soiis  le 
corps  de  reirfant,  qd*H  ^-cbmprinjait  par- une  cai}tfactii)n 
continue  et  sp^smodiqife  y  ainsi  que  déjà  l'avait  constaté 
mon  confrère',  M.  Mary.*^ J'essayai  d'tntfodtiire  la  main 
dans  la  catité  *  de  l'organe  ,  niais  Je  seflfis  jbfieirtôt  que 
cjétait  impossible..  '  /  ,  '         ' 

'  Je  chercliai  'alors  à  «y*  f^ire  pénétrer-  une  înjqctiori  com- 
posée d'une  décoction  épaisse  de  gfaine  de  lin  ;  kr  jîquide 
ne -revint  pas  en  entier  par  le*  vagin  ;  je  reï^duveJlai  plu- 
sieurs fois,  de  suite  ces 'miçcCions  ,  de  nàartifere  4  lubréfier 
autant  que 'possible  les  çarôis  d^.  Tutérijs.  Je  cifus  "alors-que 
je  pouvais' essayer  dèfairç  la  version.    •      ""   „  * 

La  main  dtojte  ^'.  pdussée  avec .  une  lenteur  exii'êg^, 
pénétra  tout  entière  ,  ^n  cefoulant  répaalO|'{)endi|iit'm]e 
la  main  gauche  ^utenaiC  le  ^îofid  dç  l'utérus;.  nMiisiiien* 
tôt  le  col  utérin  me  çOtnprinDant  le^  poignet ,  produiMt  un 
engourdissement  tel,  quâje'.cras4]u'il  nié  serait  impossi^ 
ble  d'avancer  plus  loin/  Après  une  '  pause  .prolongée , 
je  réussis  A  gag'ner  un  peu  de  ten^ia,^mais  bientôt  tes 
mêmes  diffibultés  se-pr4**"^^*^'r^Dfiî»  » 'ji^rpiVai  assez 
prpfondément  •pour  toucher  un  pied.  Au-'moment'où 
j'allais  le  saisir,  je  sentis suV lè^dos  de  in?  main  urte  sorte 
de  frémissement  ;Vétaît  l'iilQrus  qui  s'ëotr'o«vrait  de,ha'ui 
en  bas.  avec  assez  de  .Jepte.lîi*  ppur  .que  .je  pusse  lâisément 
me  rendre  eompte  de  ce  qui  se.passait.  \    :.    /  ' 

A  l'instant  môma  ma^maîa  se] trouva  lyxre,  et  je:ni^a- 
pecçus,  non  <sans  un.  véritable  «ïirol^  qv^'elle^se  trouvait 
au  milieu, de  ia^mas^^  int6sii/^ale  qœ^je^  rjBConnus..  pariai- 
teiment.  .,    .     *      •'.•***.' 

Je  rtiinenai  ))ro\njptemefit  \»  main  dansj'qtérus,  dont 
la  contraction  avait  en  ti^ement  cessé..  Je  pus  Saisir 'les 
pieds  et^faire  la  versioir  sans  «uclAref  diiricalté.\Des^  frictions 

V2 


1<6  JOiniUU.  DB  VÉMQIHB. 

soutenues  sur  ie  fond  deriilérQ&,  isivoriBèreBi  lapétraetienëc 
cet  organe  ;  le  placenta  se  présenta  bientôt  et  fut  extrait 
sans  effort  ;  et  rien  ^  au  dehors  ,  ne  traduisit  la  gravilé 
de  la  situation  dont  les  assistants  ne  se  doutèrent  noile- 
ment. 

L'épancbement  de  sang  qui  avait  dû  se  former  dans  le 
péritoine  n'était  pas  assez  abondant  pour  qu'il  fut  possible 
de  le  constater. 

Des  douleurs  violentes  dans  Thypogastre  eurent  lieu 
après  raccouchemeat  ;  elles  furent  calmées  .par  une  ap- 
plication de  sangsues  ,  et,  après  quelques  i cors,  1^  malade 
paraissait  dans  les  meilleures  conditions  ;  la  fièvre  de  lait 
fut  modérée  et  ne  dépassa  pas  la  durée  ordinaire.  Les  lo- 
chies coulaient  convenablement  et  tout  faisait  présager 
une  prompte  guérison,  lorsque,  huit  jours  après  l'accouche- 
ment, la  malade,  qui  venait  de  manger  un  potage  ,  se  trou- 
vant assez  bien  pour  changer  de  chemise  sans  se  faire 
aider,  fit  probablement  quelques  efforts  trop  violents  ,  et 
fut  prise  d'une  hémorrhagie  utérine  à  laquelle  elle  succomba 
en  quelques  minutes. 

9«  HtisertratioB» 

La  femme  qui  fait  le  siyet  (Je  la  seconde  observation  , 
habitait  au  village  de  la  Forêt,  commune  de  Saiot-Chris- 
tophe-du-Ligneron  (Vendée).  Agée  de  27  ans ,  elle  avait 
eu  déjà  deux  couches  heureuses  ;  sa  tiioi^ième  grossesse 
avait  suivi  une  marche  régulière,  aussi  elle  crut  pouvoir 
se  contenter ,  pour  l'assister  dans  son  accouchement,  d'une 
matrone  du  village.  (C'était  en  1846.) 

Après  quelques  douleurs,  les  eaux  s'écoulèrent,  et 
une  main  se  présenta  à  la  vulve.  La  malrofte  réolama 
l'aide  d'une  sage-femme  ;  celle-ci  reconnut  une  préseata- 
tion  de  la  face ,  et  demanda,  à  son  tour,  la  présence  d'un 
médecin. 

On  alla  successivement  dans  deux  communes  voisines 


joirauMii  DB  vÉf>9€tm.  167 

pour  cacher  des  médecim  qu*on  ne  put  reuqoiitrer , 
c^^est  alors  qu'on  vint  chez  moi.  Vingt  heures  avaient  été 
perdues  en  marches  et  en  contre-marches. 

J arrivai  près  de  ia  malade  à  onze  h^ures  du  matin. 
On  me  raconta  que,  vers  le  milieu  de  la  nuit,  après  avoir 
eu  des  douleurs  très-violentes  et  très-rapprochées,  la  mal- 
heureuse femme  sembla  réunir  toutes  ses  forces  dans  un 
suprême  eiFort ,  et  tomba  ^  immédiatement  après ,  dans  un 
état  de  coilapsus  complet  ;  le  visage  devint  pâle ,  le  pouls 
s'efiaça  et  la  sage-femme  reconnut  qu'une  tumeur  venait 
d'epparattre  au  eôté  droit  de  Futérus. 

Je  trouvai,  ia  femme  dans  Tétat  que  je  vieas  d'indiqper  : 
al^sence  de  ppuls  radial ,  une-^ueur  froide  couvrait  le  visag^t 
les  lèvres  étaient  violacées ,  il  y  avait  un  peu  de  subdéli- 
rium  ;  aucune  contraction  ne  se  faisait  sentir  dans  Tu- 
térus. 

Je  constatai  la  présence  d'up  bras  dans  le  vagin,  et  une 
présentation  de  la  face  en  travers  ;  le  menton  ,  en  arrière 
duquel  passait  le  bras  ,  correspondait  au  côté  droit  du 
bassin.  (Position  mento-iliaque  droite.) 

J'examinai  ensuite  la  tumeur  qui  s'était  foriuée  tout-à- 
coup  dans  le  côté  droit  du  ventre,  et  dont  l'apparition 
avait  coïncidé  avec  l'état  général  si  alarmant  que  j'ai  dé- 
crit plus  haut. 

Cette  tumeur  avait  son  siège  au-dessus  et  un  peu  à  droite 
de  l'ombilic  ;  elle  avait  le  volume  d'une  tête  d'enfant  à 
terme,  et  tenait  par  sa  base  à  l'utérus  ;  elle  avait  une  con- 
sistance notable,  mais  sans  dureté  osseuse.  On  pouvait  la 
comprimer  avec  force  sans  déterminer  de  douleurs  ;  mais^  à 
sa  base,  la  moindre  pression  arrachait  des  plaintes  à  la  ma- 
lade. En  outre,  cette  tumeur  paraissait  très-superficielle  et 
piacée  immédiatement  sous  les  parois  abdominale^  qui 
avaient  peu  d'épaisseur.  Enfin  ,  dans  le  sillon  qui  mar- 
quait la  base  de  cette  tumeur  ,  c'est-^à-dire  à  la  région  om- 
bilicale,  on  sentait  une  fluctuation  très-manifeste ,  rêvé- 


I6i(  jOtTRIfAi.  1A  IIÉ9SCI1IB. 

tant  la  présence^ dans  ce  point, d'tmecertaineqti&htité de 
riquide.  '*   ,  .         . 

Je  diagnostiquai  une  rupture  de  l'utérus^  avec- saillie  du 
placenta  dc^ns  la  cavité  du  péritoine  ,  'eft  éj)aac6einent  dé 
sang  à  la  région  ombilicale. 

Dans  la  crainte  que  ta  version  najBiginentai*)a  déchirure 
de  Tutérus,  je  voulus  tenter  rappiication*  du  forceps,  mais 
la  position  de  la  tête,  que  je  ne  pus  modifier,  et  la  présende 
du  bras  qui,  malgré  tous  mes  eports  poiiir  Je  i^fouler  *dan$ 
la  cavité  utérine^  retombait  toujûiv.s,  ne  me  perarireh}  pas 
de  fixer  d'une  manière  convenable  «les  branché»»  dô  -l'iiis- 
trument.  Je  fus  donc  obligé  de  renoncer  d' ce 'moyen  et 
d*avoir  recours  à*  ta  version, -malgré  les  "incont^ienls  que 
je  prévoyais.  -     •  -  •  ■ 

La  version  n'offrit  pas  de  diflicultës.^  l^lle  fut  faite  avfc 
la  main  droHe ,  portée,  dans  le  côté  gauclie  dé  la  cavité 
utérine  ,  c'est-à-dire  dans  le  poipt  opposé  à  îa  rupture. 
L'enfant  avait  cessé  de  vivre.  ^  '    -  .  • 

L'extraction  du  placenta  se  fit  ^u  mayen  de  tractions 
modérées  sur  le  cordon.  Elle  fut  suivie  'itnmédiatement 
d'une  hémonrhagie  abondante.       '*    /-    -       --  * 

J'introduisis  promptement  la  mab)  droite  d^QS  fiitqrti^t 
pendant  quavec  fa  nntin  gauche  je  frictionnai  rjiypegastre 
et  que  je  faisais  faire  des  aspersions  d'^aû  vinaigra  sur  la 
même  région  j  l'hémorrUagie  s'arrêta  par  stii^ed&ta  eoo- 
traetion  de,  l'utérus..       ".  *         /   \ 

La  version,  quoique  facile  et  pratiquée ave«  prudence , 
avait  consîdérablenient  augmenté  'la  solUtM  tïe  çohti- 
ni/îté,  ainsi  que  je  l'avais  craint.  L'ouverture  par* JiiguiBlle 
le  placenta  avait  fait  saillie  tians  la  cavité  abdominale  était 
d'abord  bornée  à  une  portion  très  limitée  du  corps  de 
l'organe  ,  tdndi»  qu'après  ^a  délivrance  ^^  et  apr^  qiie  fe 
globe  utérin  fut  revenu  à  des  dimensîonà  convenables  ;  la 
main  pouvait  passer Taciiemént  dans  la  cavité'  pérjtonéale 


JOIIBUAJ.  AB  M18D£«IJ!^.  â*69 

par  lioe^ulioiY  de  cpiUiiHii^é  qui, s'étendait,  deptds  ie 
fond 'de. lulëinjs  jusqu'au  col  iiklu&ivoinent* 

ko. femmer .succomba  dans  la  journée' du  lendvipain  , 
sans  qiVH  se  s^t  mantfesié  (e  moindre  signe  de  réac* 
Hoir,    .  •  .    *  -  ' 


t-  ^-»     :-* 


RJÉPORT  sur  im  fi^énKkiv^  jie  M.  .Gintrag  ,  d0 

;  Bordeaux^  sur  l'oôlitératîôn  delà  veine  porte  , 
-    pm  VL  MALUEaHB  ^  docteur-médecin  ,.médemn 
de' l^H^lel-ffieu  de  Nantes.  *      * 


MïSâU«R9  / 


Malgré  U;  yiyejumrère^etée  paç  les  travaux  «noderncs 
sujr  quelques  poiiU^'de  U  physic^jogié  etHe  la  palJioitogje 
du  Ibîe  ',  il  refile»  encore  bieiï  des  problèmes  à  résoudre  , 
bien  des  «ténèbres  à  dissipei;,,  à  -j^ropos  ées  fonctions  et 
des  maladies  de  i'ofgane  sécréteur*  d|,e  la  h\\e.  Aussi  doit- 
on  accueillir  aveo  ftiveur^  tout'ce  qui  peut  ajouter  à  nos 
connaissances  positives  swe  des  questions  à  la  fois  si  ardues 
et  d'yn  si  ^rand  inlérêl.  (.a  «part  importajile  du  foie  dans 
Facte  complexe  de  Iji  digestion ,  fait  de  son  iuitégrité 
4me  <les  principales  conditions  du  maintien  de  la  santé , 
en  même  temps  «fue  soa  pontaet  journalier  avec  les  pro- 
duits de  rabsorplioQ  intestinale  Texpose  sans,  cesse  À*uDe 


i70  JOVRflAt,   DE  «ÉDBCHCB. 

foule  de  dérangements  passagers  ,  dont  la  répétition  peut 
amener  de  graves*  altérations. 

Les  maladies  du  système  veineux  abdominal  sont  peu 
connues  et  doivent  cependant  être  assez  fréquentes;  mais, 
en  général ,  dans  les  autopsies  on  néglige  d*examiner  ees 
vaisseaux  ;  et ,  d*un  autre  côté  ,  leur  situation  profonde 
rend  ,  pendant  la  vie,  leur  exploration  très-difficUe. 

M.  Gintrac,  de  Bordeaux  ,  a  cherché  ,  dans  le  mémoire 
qu'il  vous  a  adressé  ,  à  jeter  quelque  jour  sur  ce  point 
de  pathologie. 

Ayant  eu  occasion  d'observer  six  fois  l'oblitération  de  la 
veine  porte ,  H  a  recherebé  avec  grand  soin  tous  les  cas 
connus  de  cette  affection  :  il  a  réuni  ainsi  ,  en  y  compre- 
nant les  siens  ,  un  total  de  36  faits*,  dont  il  a  tiré  les 
déductions  suivantes  ; 

«  La  veine  porte  peut  être  oblitérée  mécaniquement  , 
en  vertu  d'une  compression  exercée  par  des  tumeurs  con- 
tiguës  de  nature  très-diverses.  Les  parois  rapprochées , 
gênent  ,  ralentissent  la  circulation  du  sang  ;  ce  fluide 
tend  alors  à  se  concréter.  » 

€c  Le  tissu  qui  entoure  immédiatement  la  veine  porte  a 
quelquefois  été  le  siège  de  la  maladie.  H.  ^ruveilhier  a 
vu  l'inflammation  et  la  suppuration  occuper  la  périphé- 
rie de  ce  tissu  et  pénétrer  ainsi  dans  b  stibstance  du 
foie.  La  matière  purulente  enveloppait  et  conriprimait  les 
parois  veineuses. 

Il  existe  dans  la  science  un  senl  exemple  d'oblitération 
de  la  veine  porte  par  cause  trafuniatiqtfe  ;  il  est  rapporté 
par   M.  Ernest  Lambron. 

Un  homme  de  69  ans  avale  une  arête  de  poisson.  Ce 
corps  étranger  s'engage  dans  l'épaisseur  du  pyfore  ,  tra- 
verse l'eXfrémHé  droite  du  pancréas  et  va  s'implanter 
dans  le  tronc  de  la  veine  mésentériqo^  supérieure.  De  là 
une  inflammation  vholenCé  qui  se  propage  Ife  long  de  la 
veifie->^porte.  Orif  trouve  dans  ce  canal  du  pus  couleur  He 
de  vin  et  uwe  feusse  membrane  s'étettdant  dans  la 
veine  mésentérique  dont  te  calibre  e^  obfitérc  par  des 
oaîHots. 


JOVBHiLli  1>B  HlîiœGIBB.  171 

Dans  bon  nombre  de  cas ,  ToblitéraMon  de  la  veine 
é4«t  due  à  une  inflam»natior>  qui  avait  laissé  pour  traces 
des  fattssea  membranes  ,du  f)us,  des  abeès  dans  la  subs- 
tftDee  du  foie,  des  caillot»  plus  ou  moins  aliérésy  des  ossi- 
fications. 

Ces  altérations,  occupaient  tantoi  les  racines  ,  tantôt  le 
trono,  tantôt  les  brandies  de  la  veine-porte  «  isolétneot  o» 
simultanément. 

Nous  renvoyons  au  travail  de  H.  Gintrac  pouxr  les  dé- 
tails des  observations  el  pour  la  bibliographie,  qui  ne  pour- 
raient trouver  plaee  dans  ce  rapport. 

L'observation  suivante^  qoi  nous  a  été  communiquée  par 
M.  Gély,  nous  a  semblé  mériter  de  prendre  rang  à  Iq  suite 
des  faîis  rapportés  par  H.  Gintrac,  bien  qu'elle  laisse  à  dé- 
sirer au  point  de  vue  des  antécédents. 

Un  homme  de  45  ans,  atteint  d'bydropisie  depuis  plu- 
sieurs moia,  entra  à  l'Hôtet-Dieu  à  la  fin  de  novembre  1836, 
et  fut  ponctionné  plusieurs  fois,  à  la  distanee  de  qiuin^e 
jours  à  un  mois.  On  observa,  en  outre,  une  infiltration 
passagère  de^s  extrémités,  q'ui  strîvait  les  phases  de  Tascite; 
une  dilatation  de  la  veine  tégumenteuse  du  côté  gauche;  die 
la  débilité,  de  Toppressioii.  Il  mourut  le  i  tévriec  18S7. 

Autopsie.  ~  Poumon  droit  sain  ;  pounkon  gauche 
comprimé  par  un  épanchement  de  deux  lilres,  plièvre  en- 
flammée, épaissie,  opaque. 

Dix  à  douze  litres  de  liquide  dans  TabdonMin ,  péritoine 
très-épaissi,  d'un  h\mm  micré,  opaque  dans  toule  son  éten- 
due, rétraction  très-grande  du  mésentère ,  adhérence  cel- 
luleose  umssiini  les  circonvolutions  intestinales.  Vaisseaux 
iliaqlues  et  veine-cave  sains. 

Le  tronc  de  la  veine  porte  renferme  im  caillot  qui  la 
rei!i]f>liit  à  moitié ,  il  adhère  à  la  partie  supérieure  ;  il  se 
prolonge  du  côté  du  foie  et  devient  de  plu&  ^n  plus  vo- 
lumineux et  adhérent  ;  il  remplit  toutes  lies  divisions  de 
la  branche  'gauche  de  la  veine  porte;  il  est  noir,  un  peu 
mou  ,  granuleux  et  gris  rosé  au  centre.  Les  pai^ois  de  la 
veine  çont  évidemment  altérées  ;  el<les  sont  rugueuses  , 
rottge-brun,  pointiilées  ;  partout  ou  elles  ont  cet  aspect, 


172  JOORNi^  D£   Méf>BGINB« 

les^  adhérence»  sont  très-solidès.  Du'  côié  de  labdomen , 
cm  trouve  dans  te  trotic  de  la  veiife  porte  une  plaque 
ovale  y  ayant  pQr&ît^naent  ^aspeo^  d'une  niÎK|ueusè  «t. 
formé  par  4jne  fausse  înenibrave^  tomènteuse-,  adhérente 
sur  un  point  enflammé. 

Le  foie  est  p<$tt( ,  -ferme  \  granuleux  ,  )b  \che  gauche  où 
pénètre'  la  veine  matade  \  ne.diffèrei  ^xis  du  droit  Les  reins 
sont  mous  ,  d'un  rouge  violacé,  foncé.  *  • .      ,  -  •• 

.Lohfitération'  incomplète^  qui  .içxbtûU  ici  «lait  évidèm- 
ment'te  résultat  dlune  phlébite  coiiime  le 'démontrent  l'a- 
dhérence des  caillots  ;  .raltératbn  de  la  paroi  verîiei|se  aux 
points  adhérents,  ei  enfin  la*ptaqu6 psëudo-membraneuse 
IrcmVQe  dans  le  tronc  de  Vveiïlfe. 

L'bydropisie  ,  la  dilalation  .  d'une  des  veines  superfi- 
cielles de  rabdoroen  et  le  petit  rolùme-du  foie  sont  les  cir- 
constances les  phis  ira  portantes  à  noter  ef  <}^i  rappro- 
chent' 1^*  plu6  ce  (ait  de  plusieurs  da  ceux  rapportés  par 

Tauteur  dii  nïénïoire.-qiie'noiis  atialysons;  ; .      * 
'    '  * 

Voici,  maintérrant,  uïî  tableau  rapide  des  symptômes  ob- 
servés: :  --''.- 

Dans  les  ca^  argu^*,  signes  d'irritaifi&n  plus  où  moins 
vive  de&voi^digesttves,  vomissem^&dts  de  matières*  ver- 
dâtres,  quiolquefois  •niiôréés  de  sang  ,-^*une  teinte  noirâtre 
el«d*UDe  odeur  infecte.  ».'.-. 

•  Parfois  constipation^  plus  sbuvent  diarrhée,  selles  jaunes, 
bilieuse»,  parfois  sanglantes  ou  norrâtras.  Abdomen  tondu, 
mété^risé,  dôtilour^ux,  soif  vive.  •  '    * 

'  Pouls  fréquent.;  dans  quelques  cas  la  fièvre  s'est' mani- 
festée par  des  accès  très-pcononcéà,  anàlqguék  if  eeux  d'une 
pyreirië  inltrmittewttt  H«  débutaient  par.  uri  froid  très-vif 
etdes  frissons  répétés,. puis  arrivait  une  chaleur  Intense; 
ils  étaient  irréguiièrs/         *   ^       '        ;*'.*' 

D'autre^  symptônaès  étaient  plus  dircctènnent  caracté- 
ristiques dés  lésiona  du  foie  et  do  la  veine-poTte.  Douleur 
vive  à  l'hypochondre droit  ^étendknt  |)arfois  à  lepigastre, 
apparition  d'o»  ictère,  .  .*  '  * 

Quand  la' maladie  s^st  protongée,  ascite  plus  ou  moins 


JOUHNAL  DE   HÉDECDŒ.  173 

considérable;  quelquefois ,  développement   variqueux  des 
veines  sous-cutanées  deTabdomen. 

L'œdème  des  membres  inférieurs  a  eu  lieu  dans  plu- 
sieurs cas  ;  Turine,  généralement  rare  ,  déposait  quelque- 
fois un  sédiment  abondant. 

«  Cette  récapitulation  des  symptômes  offerts  pat*  les 
individus  chez  lesquels  s'est  opérée  l'oblitération  complète 
ou  incomplète  de  cette  veine ,  peut  éclairer  le  diagnostic. 
Elle  montre  un  certain  rapport  entre  les  lésions  et  les 
phénomènes,  et  permet  de  convertir  quelques-uns  de  ceux- 
ci  en  signes.  Ainsi ,  lorsqu'aux  indices  d'une  irritation 
vive  des  voies  digestives  ,  se  manifestant  avec  des  accès 
fébriles  irréguliers ,  se  joindront  une  douleur  plus  forte  à 
l'hypochondre  droit ,  des  évacuations  imprégnées  de  sang, 
un  épanchement  séreu?^  dans  le  péritoine  et  le  développe- 
ment des  veines  superficielles  des  parois  abdominales ,  on 
pourra  présumer  que  le  système  de  la  veine-porte  est  le 
siège  de  quelque  grave  lésion  ,  qui  met  obstaole  à  la  cir- 
culation du  sang. 

»  M.  Waller,  de  Prague,  et  M.  Roberts,  de  New -York, 
ont  essayé  de  fixor  les  bases  du  diagnostic  de  l'inflamma- 
tion de  cotte  veine.  Les  principaux  signes  indiqués  par 
le  premier  sont  l'augmentation  de  volume  du  foie  et  de 
la  rate,  l'ictère,  la .  douleur  épigastrique  ,  les  vomisse- 
ments ,  la  tulnéfaction  de  l'abdomen  ,  l'amaigrissement 
rapide. 

»  D'après  la  Commission  médicale  dont  M.  Roberts 
était  le  rapporteur ,  l'inflammation  de  la  veine-porte  se 
présente  diversement ,  selon  qu'elle  est  aiguë  et  suppu- 
rative,  ou  sub-aiguë  et  adhésive.  La  fièvre,  dans  la  pre- 
mière variété,  revêt  la  forme  typhoïde  ;  elle  s'accompagne 
de  frissons ,  et  semble  rémittente  ;  mais  elle  est  irrégu- 
lière ou  erratique;  des  sueurs  copieuses  terminent  les 
accès.  La  douleur  de  Tépigastre  et  de  l'hypochondre 
droit,  la  jaunisse,  le  goût  amer  de  la  bouche,  viennent 
s'ajouter  aux  indices  de  cette  afl^ection.  La  variété  adhé- 
sive donne  lieu  à  l'ascite.  M.  Roberts  convient  néanmoins 


174  icmmàh  be  MàuBcno. 

que  ces  divers  signes  sont  loin  d*èlre  parfetlemeQt  carao 
téristiques. 

»  Les  difficultés  du  diagnostic  s'augmentent  de  la  ra- 
reté des  occasions  de  vérifier  les  faits  ^  de  la  diversité  de 
ceux-ci ,  et  surtout  du  peu  d'attention  généralement  ac- 
cordée aux  lésions  du  système  veineux  abdominal. 

»  Toutefois  ,  la  pyléphlébite  porte  un  cachet  qai  frappe 
l'observateur  attentif.  M.  Schoeniein,  retrouvant  à  fa  cli- 
nique de  Berlin  les  traits  dont  il  avait  été  vivement  im 
pressionné  dix  ans  avant  à  Wurtzbourg  ,  annonce  à  ses 
élèves  une  inflammation  de  la  veine-porte  et  excite  au 
plus  haut  degré  leur  enthousiasme  par  l'exactitude  de  ce 
diagnostic.  Mais  longtemps  encore  une  pareilfe  chance 
demeurera  le  privilège  du  savoir  profond  et  de  la  sagacité 
personnelle  du  praticien.   » 

Nous  ne  suivrons  pas  M.  Gintrâc  dans  la  récapiiolatiott 
des  altérations  anatomiques;  €|u'il  nous  suffise  de  dire  que 
ce  sont  toutes  celtes  qui  se  peuveiH  rencontrer  dans  la 
phlébite  en  général  ,  isolées  ou  accompagnées  de  iéeions 
du  foie  ^  de  la  rate  ^  des  ganglions  Hrésentériques,  du  pé- 
ritoine, etc.,  et  concliioBS,  avec  4'auteur ,  que ,  àe  toutes  les 
circonstances  locales  qui  peuvent  produire  roblitératioa 
de  la  veine-porte  ,  Tintlammalion  eat  de  beaucoup  la  plus 
fréquente. 

Le  premier  effet  de  Tarrêt  du  sang  dans  la  veine-'portc 
c'est  l'engorgement  des  veines  intestinales  ;  d'où  tendance 
au  développement  de  Thydropisie  aseilo,  aux  flux  séreux 
et  hémorrhagiques ,  soit  par  Tesloinac,  sost  par  l'intestio  ; 
intumescence  générale  des  tissus ,  augmeniation  d'éfmis- 
seur  des  paroia  gastrique  et  intestinale,  expansion  des 
vaisseaux  hémorrboïdaux  ^  développement  de  la  raie.  Enfin, 
efforts  tentés  par  la  nature  pour  ré^iaUii*  la  cireutalion. 
Ces  communications  s'établissent  par  les  divisions  teroM* 
nales  de  ta  (letite  mésaraique  ,  et  par  les  rameaux  qui  s'a- 
nastoittoseal  avec  les  veines  des  parois ,  soit  avec  celles 
qui  sont  profondes,  soit  avee oelles  qui  rampent  à  la  sur- 
boede  l'abdottiea. 


JOeUIAIr  VE  MÉDBCmi*  I7S 

Ce  qui  précède  ,  nous^  montre  rimportance  du  signe 
fourni  par  la  dilatation  des  veines  superficielles  de  Tab-^ 
domen  ;  mais  ,  comme  il  appartient  également  aux  oMi- 
térations  de  la  veine-cave  inférieure,  il  ne  peut  être  consi- 
déré comme  pathognomonique. 

Pour  le  rapporter  avec  quelque  certitude ,  à  roWifeéra- 
tion  de  la  veine  porte  ,  il  faut  qu'il  se  rencontre  arec 
Tasciie ,    sans  œdème    des    membres    inférieurs. 

La  diminution  du  volume  du  foie  est  la  conséquence 
constante  de  l'interruption  du  cours  du  sang  dons  la  veine 
porte  ;  de  plus ,  cet  organe  présente  la  même  couleur 
que  dans  la  cirrhose  atrophique.  Un  fait  analogue  s'est 
produit  chez  les  animaux  auxquels  on  avait  lié  la  veine 
porte  ;   le  foie  était  pâle  et  diminué  de  volume:. 

Il  était  naturel  de  rechercher  qudie  influence  l'oblité- 
ration de  la  veine  porte  exerçait  sur  les  fonctions  du  foie. 
M.  Gintrac  a  conclu  de  ses  observations ,  e4  d'expériences 
faites  à  son  insf  igatioft  et  dont  nous  parierons  tout  à  l'heure , 
que  la  sécrétion  de  la  bite  n'en  continiiait  pas  moins,  quand 
kt  veine  porte  cessait  d'amener  du  sang  au  foie  ;  qu'en 
conséquence ,  ce  n'était  pas  le  sang  de  la  veine  porte  qui 
fournissait  lies  matériaux  de  la  bHe  ,  mais  qu'ils  étaierrt 
apportés  p»r  l'artère  hépatique  ,  et  que  la  bite ,  comme 
les  autres  produits  de  sécrétion  ,  sortait  du  saing  artérvei. 

Cette  conclusion  est  fondée  1°  sur  ce  que  chez  plusie«rs 
scijets  morts  avec  une  oblitération  de  la  veine  porte  ,  la  . 
vésicule  biliaire  contenait  de  la  bile,  par  fois  même  en 
grande  quantité ,  et  dans  un  cm  rapporté  pur  M.  Bouil* 
laud  ,  ce  réservoir  était  distendu  au  point  d'égaler  en  vo- 
Icnne  une  tête  d'enfant. 

2^"  Sur  h  continuation  de  la  sécrétion  biliaire  après  la 
ligature  de  la  veine  porte  ;  fait  qui  semble  i*é8ulter  des  ex- 
périences que  M.  Oré  vient  de  communiquer  à  l'Académie 
des  Sciences.  A  propos  de  cette  communication  ,  M. 
Audral  a  rapporté  l'histoire  d'un  malade  chez  lequel  des 
signes  extérieurs  faisaient  soupçonner  une  oblitération  de 
la  veine  porte  (diagnostic  véri&é  plus  tard  par  l'autopsie), 
et  qui  non^seulement  me  présentait  point  le&  syintàfDes 


176  JOOIIUI  DE   MÉBBGINB. 

qui  indiquent  une  suspension  de  la  sécrétion  biliaire , 
mais  encore  fournissait  la  preuve  que  la  foiiction  glycogé- 
nique  persistait ,  car  il  était  diabétique. 

Ces  faits  singuliers  semblent  bien  démontrer  que  te  saug 
de  la  veine  porte  ne  possède  pas  tout  seul  les  qualités  né- 
cessaires pour  fournir  les  matériaux  de  la  bile  et  du  sucre 
hépatique ,  mais  ils  ne  prouvtint  pas  du  tout  que  ce  sang, 
dans  l'état  physiologique,  ne  concourt  en  rien  à  ces  sécré- 
tions. Si  l'on  cherche  à  se  rendre  compte  des  effets  de  l'obli- 
tération spontanée  ou  de  la  ligature  de  la  veine  porte,  on  re- 
marque que  le  foie  diminue  de  volume  et  devient  exsangue, 
que  la  nature  fait  les  plus  grands  efforts  pour  créer  des  voii^s 
circulatoires  supplémentaires;  que,  dans  les  cas  palhologiqucs 
observés  sur  l'espèce  humaine,  ces  voies  insolites  sont  in- 
suffisantes, et  que  la  morl  arrive  par  suite  du  trouble  pro- 
gressif des  fonctions  (1)  ;  que,  dans  les  expériences^  sur 
les  animaux  ,  la  mort  n'est  pas  la  conséquence  nécessaire 
de  la  ligature  de  la  veine  porte,  puisqu'on  a  vu  des  chiens 
vivre  et  se  bien  porter  1  i  jours  et  même  20  jours  après 
l'opération.  Nous  pensons,  toutefois  ,  qu'il  faudrait  garder 
les  animaux  opérés  pendant  plusieurs  mois ,  pour  voir  si 
les  nouvelles  conditions  où  les  a  placés  l'opération  ,  n'in- 
fluaient pas  ultérieurement ,  d'une  manière  quelconque , 
sur  la  nutrition.  Ce  qu  on  est  en  droit  d'établir  dès  à  pré- 
sent ,  c'est  que ,  pour  que  la  vie  et  la  santé  puissent 
continuer ,  il  faut  que  les  produits  de  Tabsorption  intesti- 
nale pénètrent  complètement  dans  l'économie ,  et  y  su- 
bissent les  transformations  nécessaires  pour  leur  assimi- 
lation. 

M.  Ginlrac  termine  son  mémoire  par  les  réflexions  sui- 
vantes sur  la  thérapeutique  applicable  aux  maladies  de 
la  veine  porte. 


(1)  On  a  cependant  lieu  de  s'étonner  que  la  vie  puisse  con- 
tinuer assez  longtemps ,  comme  le  prouvent  les  cas  chroniques , 
avec  les  léùons  révélées  par  Pautopsie. 


lùCSJfAL  DE  KéiuBCHaz»  177 

fr  11  est  rare  qu'une  connaissance  plus  approfondie  des 
attributs  essentiels  d*un  état  morbide  demeure  entière- 
ment stérile  ,  et  qu  on  ne  puisse  en  faire  jaillir  quelques 
iiKluctions  sous  le  rapport  pratique.  Divers  points  de 
rhistoire  de  l'oblitération  de  la  veine*  porte  me  semblent 
pouvoir  offrir  des  données  utiles,  du  moins  servir  de  jalons 
pour  des  déductions  ultérieures  : 

i>l^  A  quelques  exceptions  près,  cet  état  pathologique 
a  pour  origine  une  inflammation  du  tronc  veineux 
sous^épatique ,  et  cette  affection  est  très-souvent  liée 
à  une  phlegmasie  plus  ou  moins  intense  des  viscères 
abdominaux.  C'est  donc  à  combattre  celle-ci ,  lorsqu'on 
peut  en  supposer  l'existence,  qu'il  faut  d'abord  s'at- 
tacher. 

»  2°  Les  accès  ou  les  paroxysmes  fébriles  irréguliers , 
précédés  de  frissons  et  de  froid  très-marqués ,  peuvent 
en  imposer  pour  des  accès  d'une  fièvre  rémittente  ou  in- 
termittente grave ,  ou  même  pernicieuse  ,  et  inspirer  la 
pensée  d'employer  les  anti*périodiques ,  en  particulier 
le  sulfate  de  quinine  à  haute  dose.  Des  faits  nombreux 
attestent  l'inutilité  et  même  le  danger  d'une  semblable 
médication. 

»  3^  On  ne  saurait  redouter  les  émissions  sanguines  lo- 
cales, et  principalement  l'application  des  sangsues  à  l'anus, 
pendant  la  période  d'acuité. 

»  4^  L'usage  des  délayants  et  des  laxatifs  doit  concou- 
rir à  favoriser  la  circulation  des  fluides  dans  les  vaisseaux 
engorgés. 

,i>  S*"  \jes  boissons  seront  rendues  alcalines  par  l'addition 
du  sous-carbonate  ou  du  bi-carbonate  de  soude  ,  afin  de 
s'opposer  autant  que  possible  à  la  tendance  du  sang  à  la 
coagulation. 

»  6°  La  maladie  faisant  des  progrès ,  l'état  phlegmasique 
aigu  étant  dissipé  la  sérosité  s'épanchant  dans  l'abdomen 
et  donnant  lieu  de  supposer  que  l'oblitération  de  la  veine- 
porte  pst  accomplie,  les  évacuations  sanguines  ne  doivent 
être  eiïiployées  qu'avec  réserve  et  seulement  pour  dimi- 
nuer la  pléthore  abdominale.  C'est  le  moment  d'user  des 


I7S  JOOBUI.  SB  MÉBBCBIB. 

évacuants ,  de  cens  surtout  cpû  provoquent  les  sécrétions 
séreuses  intestinales. 

o  7^  Hais  ces  moyens  senateni  nuisibles  s'il  y  avait  déjà 
des  vomissements  ou  de  b  diarrhée,  et  surtout  si  les  éva- 
cuations étaient  sanguinolentes.  Il  vaut  mieux  alors  s'abste- 
nir de  médicaments  actife. 

»  8**  La  paracenthèse  est  le  meilleur  moyen  de  diminuer 
la  gène,  le  malaise  que  produit  Tascite.  Cette  opération 
peut  être  réitérée  sans  inconvénient.  Il  n'en  est  pas  de 
môme  des  injections  iodées.  Une  de  mes  observations  le 
prouve  :  les  indices  d'une  lésion,  et  surtout  d'une  oblité- 
ration de  la  veine-porte,  doivent  former  une  contre-indi- 
cation très-grave.  On  conçoit ,  en  effet,  que  l'arrêt  du  sang 
dans  la  veine-porte  augmenterait  les  chances  de  péri- 
tonite et  d'entérite. 

j»  9°  Il  importe  d'éviter  aux  organes  digesti£s  un  travail 
fatigant,  et  il  faut  ne  pas  perdre  de  vue  que  des  deux  voies 
d'absorption  habituellement  oov^tes  dans  les  parois  intes- 
tinales, l'une  d'elle  est  hors  de  service;  il  est  donc  bonde 
nvéuager  celle  qui  continue  à  fonctionner.  » 


JOURNAL 


BB  lA 


SECTION  DE  MÉDECINE 

DE  LA  SOCIÉTÉ  ACADÉMIQUE. 


BULLETIN  DES  SÉANCES. 


Séance  du  10  octobre  1856. 

PBÉSIDENCE   DE   M.  HÂffOT,  PRÉSIDENT. 

H.  le  Président  donne  lecture  : 

1«  D'une  lettjne  par  laquelle  M.  Gautron  fils  annonce  sa 
nouvelle  résidence  ,  fixée  à  Paris  ,  et  réclame  le  titre  de 
membre  correspondant ,  en  échange  de  celui  de  membre 
résidant.  Accordé. 

13 


180  JOfJUlÂL  DB  JfÉDBCniB. 

2''  D'une  seconde  lettre  adressée  à  la  Section  par  les 
membres  de  la  Commission  de  souscripition  organisée  à 
Paris ,  en  faveur  des  veuves  et  de»  orphelins  desL  niédecihs 
et  pharmaciens  de  l'armée  et  de  la  flotté  d'Orient.  La  Sec- 
tion est  priée  de  prendre  à  Nantes  Hnitiative  de  cette 
souscription.  .  »  / 

Cette  demande  est  accueillie  avec  une^vive  et. unanime 
sympathie ,  et  la  sonscription^est  ouverte. séaace  tenante. 

L*ordre  du  jour  appelle  M.  HéKe  i^  lh*e  un  travail  inti- 
tulé :  Considérations  9ur  V épidémie  d'herpès  kmsurant,  ob- 
servée à  l'h&pitalSaint-Jacqfjtes^de,  1854  d  1856  (1)1 

Séance  extraordinaire  du  24  octobre.  1856. 

PBJtSIDBNCE  DB  K.  MALHBBBB  ,'  nCB->BÉSniBIIT. 

H.  le  Président  expose  à  l'assemblée  que  le  bût  de  la 
réunion  est  de  délibérer  sur  les  questions  qui  seront  mises 
au  concours  pap  la  Société  Académique  pour  raïuiée  1857. 
La  Section  est  invitée  à  adresser  au  Comité  central  les 
sujets  de  concours  proposés  par  eHé.  • 

Plusieurs  sujets  «ont  proposés^  mais  la  Section  fixe  son 
choix  sur  la  question  suivante,  proposée  par^MH.  Tfiibeaud 
et  Malherbe  : 

Etudes  de  statistique  médicale  suf  une  ou  plusieurs  lo* 
calités  du  département ,  et  spécialement  sur  celles  où 
s'observent  les  graves  endémies. de  fièvres  intermittentes 
ou  de  dysenteries.  * 

Signaler  toutes  les  Conditions  hygiéniques  auxquelles 

sont  soumis  les  habitants. 

*    '  ♦ 

fiance  du  li  novembre  1856. 

PRÉSIDENCB  DB  M.  M AHOT  ,  PBÉSnJBRT.. 

L'ordre.du  jour  appelle  à  la  4ribunç  M.  Thibeaud  pour 


(1)  Voir  plus  loin,  p.  181. 


JOUBNÂL  DB  HÉDECINE.  18*1 

lire  un  travail  intitulé  :  De  la  paralysie  faciale  ,•  —  trai- 
tement par  la  strychnine;  —  de  l'action  des slrythnèes^ 
—  ducuràre  dans  le  tétanos  (1).  Cette  lecture  donne  lieu  à 
une  dissertation  intéressante  sur  les  diverses  portes  de  pa- 
ralysie &ciale ,  sur  leur  traitement  variable  selon  leur  na- 
ture, sur  la  cborée  et  les  nombreux  moyens  thérapeutiques 
préconisés  contre  cette  névrose,  enfin  sur  le  curare  et  ses 
applications  possibles  à  la  thérapeutique. 

  cette  discussion  prennent  part  MM.  Letenneur,  Hélie, 
Malherbe,  Thibeaud,  Âubinais  et  Cormerais; 

Le  Secrétaire, 

Le  Houx. 


CONSIDÉRATIONS  svr  ^épidémi^  d'herpès 
tonsunmt,  observée  à  l'hôpital  Saint- Jacques, 
de  1834  à  1856,  par  M.Hélib,  D.-M.,  mé- 
decin de  l'hôpital  Saint-Jacques ,  professeur  à 
l'école  préparatoire  de  médecine. 


Lorsque  je  fus  chargé  du  service  de  la  division  des 
femmes,  à  l'hôpital  Saint-Jacques,  au  mois  d*août 
1854,  il  y  avait,  dans  la  section  des  orphelines ,  un  grand 
nombre  de  jeunes  filles  affectées  d*herpès  tohsurant.  J'en 
trouvai  25  qui  étaient  en  traitement  depuis  un  temps  plus 
ou  moins  long. 

L'herpès  tonsurant ,  maladie  éminemment  contagieuse, 
fut  introduite  dans  l'hôpital  Saint-Jacques  au  mois  de  mars 


(1)  Voir  plus  loin,  p.  201. 


I8i  jàtskffàk  bB  kÉtaidiftte. 

1852.  M.  Malherbe,  alors  chargé  de  ce  senricé,  Vou$  a 
exposé ,  dans  un  mémoire  très-întéressânt  qu'il  Vous  a  lu 
au  mois  de  septembre  de  la  même  année ,  cominent 
l'herpès  tonsurant  (îit  importé  à  Saint-Jacqnles ,  par  tene 
petite  fille  de  onze  ans  ,  fiai  ehtra  à  Toiphelinat,  et  y 
resta  qael()ués  jours  avant  d*étré  admise  à  rinfirtnerfe; 
Jusqu'à  cette  époque,  rbek*pès  tonsurant  était  ihéonnu 
dans  la  maison. 

La  maladie  se  propagea  rapidemeht  dtins  l'infiMnerre  et 
dans  l'orphelinat;  bientôt,  dans  Tespace  de  q^ielques 
jours  ,  H.  Malherbe  eut  à  traiter  1 5  orphelines ,  atteintes 
d'herpès  tonsurant. 

Depuis  celte  époque ,  l'herpès  tonsurant  a  continué  à 
régner  épidémiquement  dans  l'orphelinat. 

Le  nombre  des  malades  s'est  beaucoup  accru.  Un  cer- 
tain nombre  a  été  guéri.  Il  y  en  a  encore  aujourd'hui 
24  en  traitement. 

Il  m^a  donc  été  donné  d'otec^tèr  pendant  defux  ans 
cette  maladie  ^  sur  une  grai^de  échelle  ;  et  j'ai  pu  la  suivre 
dans  toutes  ses  périodes  sur  chaque  malade ,  car  les  orphe- 
lines ne  quittent  ta  maison  que  lorsque  leur  guérison  a 
été  constatée. 

L'amélioration  q\iepréè»èhtèl'élètvlei&  pltipl^A  de  celles 
qui  sont  encore  en  traitement ,  permettant  d'espérer , 
dans  un  avenir  prochain ,  la  fin  de  cette  épidémie ,  j'ai 
pensé  que  le  moment  était  venu  de  vous  soumettre  quel- 
ques considérations  sur  cette  maladie  singulière  ,  et  sur  le 
trailemeTlt  qui  m'a  sehiblé  le  plus  convenable. 

Je  n'ai  point  l'intention  de  tracer  une  description  de 
l'herpès  tonsurant.  M.  Cazenave  ,  dans  son  traité ,  si  jus- 
tement estimé  ,  des  'mâlàdîes  du  cuir  chevelu,  en  a  donné 
un  tableau  fort  ekact  ,  niais  ihcomplet  êù  queli^ues 
points. 

M.  Malherbe ,  dans  le  riiémoire  qu'M  tiouls  â  hi,  ô  ajofuté 
à  ce  tableau  quelques  traits  omis  par  M.  CàzehaVe. 

H.  Bazin ,  dans  ses  recherches  sur  les  teignes ,  publiées 
en  1853  ,  et  plus  récemment ,  dans  quelques  articles  in- 
sérés dans  la  Gazette  des  hôpitaàai^,  en  1 856  «  a  pifésenté 


çl45§  (iflnsidér^tiiO,ii^  curieuses  $i|r  c^t^p  maMip  ,  qii'i!  a  pq- 
visagée  sous  un  pojpt  de  yi^e  particulier. 

L'herpès  tQn§^rant  pflfr^  un  fi^ppc^  ai|S9i  car^ptéristique 
que  cplpi  dq  favus.  Avec  un  peu  d'habitude  ,  qp  le  ^istin- 
gU(E|ra  ,  jq  pf oi:? ,  loigours  aîaéinpqt  dps  fj^^re?  ^ffpctions  qu 
cujf  chevelj^. 

<(  l^'harpps  tpn^urapt  (rhprpès  circinné  du  puif  che- 
a  yçt|u)  est  caractérisé  pî^K  de$  plaques  d'in^g^le  gr^n- 
0  deur,  mais  exactempnt  ^rrondi^^i  sèchç^,  d'qi^  9^pfîct 
1)  grisâtre ,  et  reipffrqfiables  paf  une  alppécip  particulière, 
vt  d^ps  l^gqjelle ,  le  pluç  ?oi4yeï}f ,  )e§  cheyeux  sjont  ^eu|p- 
9  pipnt  cpupés  courts ,  isn  forme  j|e  tonsure  ,  uiaist  si  près 
»  de  la  peai^  que  Is^  d^i^^^atipn  paraît  complète  ^  pre- 
tt  filière  yu^.  9  (C^zenave,  tiçqilé  des  m^a^ies  du  ouir 
chevelu^  p.  193.) 

J'exapfiinprai  sqcc^^iyement  Ips  diffé^enfs  points  d^ 
cette  définjiion  qui  résuma  ex}  que}que$  mpts  Jles  prippi- 
paux  caractères  ^  l'herpè^  tonsurapt. 

I. 

L'herpès  tonsurant  n'est-il ,  comme  on  j'adiqet  gépépa- 
lemept  ,  <|U*Mpe  fojrpfi^  spécU^  de^  l'herpès  circinné  ?  ou 
bien  Therpès  tonsurant  et  Therpès  circinné ,  ppnsfUuent- 
ils  dpux  ^fiectjops  di^jl^ctes ,  et  seulemept  souvent  co- 
existantes ? 

Il  me  semble  diQicitp  de  pe  pas  ^dpiettre  ridqntif,é  dp 
cesf  deux  affectiQOS. 

Les  plaques  d'herpès  tonaurant  et  cel|es  d'herpès  cw- 
cii^né,  ^e  déyelqppf^ni  jUrès-souvpnt ,  ep  mépip  (j^ipps  ,  sur 
la  mêpie  pçrsQone»  ei  s^r  des  individus  habitant  GusefXï])}e. 
P((}ndapt  U  lojigue  durée  d'un  herpès  itonsur^p^ ,  ^fire,c)Lipn 
pssentiellement  chropi||ue ,  pp  voit  très-fréqpe^fiment  se 
reproduir^  de  ten^ps  pp  teipps  des  plaqpeç  d'i)prp|bs  cir- 
cippé  ^  çpr  divpr^  parties  du  pprp?. 

Rien  n'est  plus  commun  que  c|e  vpjr  au  j^pnt ,  apx 
tewp^  ^  à  la,  im^^ ,  ppe  pjaque  siégeant  môïtjp  spr  le 
cuir  pUevehi ,  moi^tié  ^vur  ]^  p^^u  jdépopryue  pe  pojU  «  et 


184  JOVSIIÀI.  DB  MÉDECIIfS. 

présentant  sur  le  premier,  tous  les  caractères  de  Therpës 
tonsurant ,  sur  la  seconde,  ceux  de  l'herpès  circinné. 

Ces  faits  signalés  par  tous  les  observateurs ,  j'ai  pu  les 
observer  souvent.  Au  priolemps  de  l'année  dernière 
(1855)  ,  l'épidémie  d'herpès  tonsurant  présenta  tout  d'un 
coup  une  exacerbation  remarquable.  Le  nombre  des  ma- 
lades augmenta ,  et  l'herpès  tonsurant  prit,  sur  la  plupart 
d'entre  elles ,  un  caractère  inflammatoire ,  et  se  compliqua 
d'eczéma  et  même  de  pustules  impétiginenses. 

*i'aurais  pu  attribuer  cette  irritation ,  insolite  dans 
rherpès  tonsurant,  à  Temploi  que  je  faisais  alors,  d'une 
pommade  alcaline  un  peu  active.  Hais  en  même  temps  que 
les  plaques  de  l'herpès  s'irritaient  chez  la  plupart  des  en- 
fanta en  traitement ,  la  maladie  se  propageait  à  d'autres 
enfants ,  et  des  plaques  d'herpès  circinné  se  dévelop- 
paient, et  sur  '  des  enfants  déjà  atteintes  de  l'herpès  ton- 
surant, et  sur  d'autres  personnes,  soit  enfants,  soit 
adultes,  qui  n'avaient  nulle  atteinte  d'herpès  tonsurant. 

De  ces  foits  qui  se  reproduisent  sans  cesse  ,  n'est-il  pas 
naturel  de  conclure  que  l'herpès  tonsurant  et  l'herpès 
circinné  ,  sont  identiques ,  ^  et  constituent  deux  formes 
d'une  même  maladie.' 

Mais  il  faut  réconnaître  que  ces  deux  formes  présentent 
de  notables  différences. 

La  plaque  érythémateuse  d'herpès  cirèînné  est  couverte 
au  début  de  vésicules  très-petites  ,  de  courte  durée ,  dont 
le  liquide  est  résorbé  en  quelques  heures ,  vésicules  très- 
semblables  à  celles  que  l'on  observe  souvent  dans  l'éry- 
Ihème  produit  par  un  coup  de  soleil. 

Dans  l'herpès  tonsurant,  l'existence  des  vésicules  est 
incertaine ,  et  admise,  ^plutôt  par  analogie  avec  l'autre 
forme  d'herpès,  que  constatée  par  une  observation  pré- 
cise. J'avoue  n'avoir  jamais  pti-  lés  distinguer.  Il 
est  vrai  que  l'herpès  tonsurant ,  causant  à  peine  un  peu 
de  démangeaison,  son  existence  ne  se  reconnaît  que  lors- 
qu'il à  déjà  quelque  durée. 

Pour  distinguer  ces  vésicules,  il  faudrait,  sur  des  ma- 
lades que  l'on  observe  très-fréquemmenl,  assister  au  déve- 


lOCrUUb  SI  MÉBBGniB.  18S 

loppemeift  d'une  plaque  nouyelte  ;  et  :dans*  ce  cas  même  « 
•qui  s'est'  présenté  jrfusieurs  fois.à  mon  observation ,  je 
n'ai  pa»  pu  apercevoir  les  vésicules.   . 

€i  les  vésicules  sont  difficiles  à  reconnaître  stfr  les  pla- 
ques d'faerpès  ïon^rant-  à  Jéur  début,  Térythème  y  est 
très-évident,  ^i démontre  leur  nature  inflammatoire. 

'  A  mesure  que  les  phiquesd'hôrpès  circinné  s'étendent , 
loCtr  centre  guérît  ;  elles  4)renneni  la  forme  annulaire, 
qu'elles  ont,  au'reste,  le  pluasouyeot  dès  leur  début.  L'an- 
neau, presque  toujours  complet,  très-régulièrement  arron- 
di, oyalahre  ou  elliptique,  acquiert*  quelquefois  un  énorme 
développement.  ^ 

Lé  centre  des  plaques  d'herpès  tonsorant  ne  se  guérit 
point  k  mesure  que  leur  circonférence  s'é^nd;  il  reste 
aussi  malade  qua  la  péripbérie;^  elles  ne  se  transforment 
jamais  en  anneaiîx.  *  -  ^   '  *  * 

Apï*ès  s'être  'étendues  pendant  Un-^celrtain  temps,  elles 
cisssenttle  s^'accrottre  et  Conserverit  la  même  largeur  pen- 
dant toute  leur. dun§«.    .      ' 

'  Elles  restent , -en  général,  bien  plus  petites  quô  les  an- 
neaux d'herpièscircinné;  Les  larges  plaques  d'herpès  ton- 
^racii,  que  l'tm  rencontre  isouvent,  résultent  de  la  fu- 
sion^de  plusieurs  plaques-voisines,  et  n'ont  plus  de  forme 
régulière.  * 

-  i»'faerpès  ciirciAné  e$t  aigu,  ne  dure,  souvent  que  une  ou 
detfx  semainéa,  riifenient  tô  prolonge  deux  ou  trois  mois, 
et  guérit  facilement  et  spontanément.  L'herpès  circinné  , 
chronique  et  rebelle  ,  est«  en  quelque  sorte  un  cas  excep- 
lionneL  .        •      " 

L'herpès  tonsurant  est  toujours  chronique  et  dure  non  pas 
seulement  des  mois,  mais  sonvent  des  années. 

Ihberpès  «ircinifé  peut  aiFecter  tous  îe^  ^és  ;  l'herpès 
tonsurani  est  une  mUadiâ  de  l'en&ncef 

Afirès  avdir  adHiis  l'identité  dé  l'herpès  tonsurant  et  de 
l'herpès  circinné,  on  serait,  je  crois ,  un  peu  embarrassé  de 
trouver  une  explication -satisfaisante  de  leurs  différences 
dans  4a  diflërenee'  de  iextnre  et  de  vitalité  de  la  peau  du 
crftno et  de-ceUe  du  reste  du  corps. 


186  JOIHUUL  M  HÉiuuaiis. 

II. 

L*berpès  tonsurani  est  émiaemnient  contagieux.  Tous 
les  médecins  qui  ooi  eu  l'occasion  de  l'observer ,  ont 
unstaté  sa  tmosmission  d'individu  à  individu. 

Qu'un  enfant  atteint  d'herpès  tonsurant  soit  placé  dans 
une  réunion  d'enfant,  dans  un  pensionnat,  bientôt,  souvent 
en  peu  de  jours  «  la  maladie  se  développe  sur  un  oèrtain 
nombre  d'enfants  en  rapport  avec  lui. 

M.  Cazenavequi,  le- premier,  a  fait  connaître  avec  pré- 
cision l'herpès  tonsurant,  cite  de  nombreux  exemples  de 
sa  transmission  par  contagion  évidente  dans  cas  circons- 
tances* (AntuUes  de$  maladiêi  dekupeoHj  t.  ij  1844.) 

Le  développement  de  l'herpès  tonsurant,  à  Thorphelinat 
de  Saint-Jacques,  aussitôt  après  l'arrivée  d'une  petite  fille 
atteinte  de  cette  naaladie ,  est  un  nouvel  exemple  de  sa 
transmission  par  contagion. 

J'ai  vu ,  depuis ,  des  jeunes  filles  contracter  k  nnaladie 
quinze  jours  ou  un  mois  après  leur  arrivée,  à  l'orphe- 
linat. 

Il  est  à  remarquer  qi»e,  jusqu'au  mois  d'août  1856,  il 
ne  s'est  pas  développé  qn  seul  cas  d'hei|)ès  tonsurant-  chez 
les  orphelins.  Leur  logement  n'est  séparé  de  celui  des 
filles  que  par  un  mur.  Il  est  naturel  de  conchire  que  la 
contagion  de  l'herpès  exige  un  contact  immédiat ,  et  ne 
se  fait  pas  à  distance ,  comme  celle  d'autres  maladies 
contagieuses.  On  regarde  comme  moyen  de  la  contagion , 
les  particules  qui  se  détachent  continuellement  des  sur- 
faces malades. 

Ce  ne  fut  qu'au  mois  d'août  1856h  fAm  de  quatre  ans 
après  son  introduction  à  Saint«Jaoques,  que  l'herpès  tonsu- 
rant pénétra  dans  Torphelinat  des  gal^oons.  Deux  enfants 
de  8  à  10  ans  en  furent  atteints.  Tous  deux  babilaifent  la 
maison  depuis  longtemps. 

L'herpès  tonsurant  ne  s'est  développé  SQr  aucune  jeime 
fille  arrivée  à  la  puberté.  Et  cependant  les  filles  adultes 
et  les  petites  filles  ne  sont  nuUenoeut  séfKirées  :  elles  babi- 


JOimMAL  DE  tfàûBOUK.  187 

tent  las  mêmes  dortoirs;  une  cour  commune  sert  à  leurs 
récréaiioQS. 

Depuis  quatre  ans ,  25  ou  30  orphelines  atteintes  en 
même  temps  d'herpès  tonsurant,  sont  mêlées  aux  autres 
orphelines  de  tout  âge  (il  y  en  a  environ  150),  et,  néan- 
moins, aucune  fille  adulte  n'a  été  atteinte  d'herpès  tonsu- 
ranl.  J'ai  vu  plusieurs  fois  l'herpès  ionsuront  guérir  aux 
approches  de  la  puberté. 

M.  Caze.nave  ne  l'a  jamais,  non  plus,  rencontré  sur  des 
adultes. 

L'herpès  tonsurant  est  donc  une  maladie  de  l'enfance  ; 
il  survient  spécialement  dans  la  seconde  enfance.  Nous 
n'en  avons  jamais  vu  sur  des  enfants  au-dessous  de  cinq 
ans ,  et  cependant  il  y  a  toujours  quelques  enfants  bien 
plus  jeunes  dans  la  salle  de  l'infirmerie  et  dans  l'orphe- 
linat. 

Lorsque  l'épidémie  d'herpès  tonsurant  prit,  au  prin- 
temps de  1855,  un  développement  plus  considérable, 
plusieurs  filles  adultes  furent  atteintes  d'herpès  circinné , 
dans  mon  service  et  dans  l'orphelinat.  Toutes  avaient  été 
en  communication  avec  les  enfants  affectées  d'herpès  ton- 
surant. La  sœur  du  service  qui  pansait  chaque  jour  les 
en&Qls,  eut  une  large  plaque  à  l'avant-bras.  Je  contractai 
moi-même  à  l'avant  bras  gauche ,  une  plaque ,  qui 
devint  énorme,  et  couvrit  de  son  disque  ovale  toute  la  face 
antérieure  de  l'avant-bras ,  depuis  la  main  jusqu'au 
coude. 

Plusieurs  en&nts  atteiniies  d'herpès  tonsurant,  furent 
aussi  affectées  de  plaques  plus  ou  moins  nombreuses  d'herpès 
circinné. 

En  considérant  oeUe  transQiission  simultanée  des  deux 
formes  de  l'herpès ,  comment  admettre  avec  .pkjsieui's  au- 
teurs ,  que  l'herpès  tonsvr^i^t  est  seul  ^ooiagieux  ,  .tandis 
que  l'autre  ne  le  serait  pas. 

Si  l'on  recomuiit  que  l'herpès  toosuranl  pmi  trans- 
mettre rherpès  oirv-isiné ,  comment  refuser  à  t'faerpès 
i^ircinoé  la  facilité  de  transirp^tre  J'herpès  tonsurant  ? 

Je  pFois  c^ljlie  ir»n$n)iSiSion  démontrée  par  dies  &its  irré- 


1-88  J017RIIÂL  DB  MÉOBGUIB. 

ensables;  mais  je  ne  sais   s'il   est  bien  démontré  que 
rherpës  circinné  peut  transmettre  l'herpès  tonsarant. 


IIK 

Le  caractère  essentiel  de  rheri)ès  tonsurani ,  c'est  la 
section  spontanée  des  cheveux,  à  quelques  millimètres  de 
la  peau.  Les  Cheveux  sont  coupés  à  une  longueur  presque 
uniforme  sur  toute  l'étendue  des  plaqueç  malades. 
Toutefois,  quelques  cheveux  échappent  toujoiirs  à  la 
section.  *  *        •• 

Que  l'on  rase  la  tète ,  puis  qu'on  laisse  pousser  les  che- 
veux pendant  un  mois  (et  chez  les  enfants  ils'  repoussent 
très-vite) ,  on  voit  les  cheveux  des  plaques  >  d'herpès 
rester  au-dessous  du  niveau  des  cheveux  qui  naissent  de 
la  peau  saine ,  et  ne  pas  dépasser  la  longueur  de  i»  à  6 
millimètres. 

Le  cheveu  est  devenu  friable  à  sa  sortie- du  ToHicule, 
et  sa  friabilité  augmentant  à  mesure  qu'il  croH ,  le  bit 
bientôt  tomber-  en  poussière ,  et  s'oppose  ainsi  à  son  ac- 
croissement ultérieur.  ^        *  "  - 

Si  on  veut  l'arracher  en  le  saisissant  avec  «une  pince, 
à  quelque  distance  de  sa  sortie ,  il  se  rompt  ;  si  çn  le 
saisit,  au  contraire,  à  l'issue  du  follicule  ,  on '  arrache 
souvent  toute  la  racine,  qui ,  à  la  vue  simple,  ne  fierait 
pas  altérée.  Les  cheveux  sont  souvent  un /peu  .grossis 
dans  toute  leur  longueur  ;  d'autres  cheveux  sont  arouicis , 
comme  étiolés. 

Je  n'ai  pas  observé  d'une  manière  bien  positive  la 
décoloration  de  cheveux ,  leur  teinte  irougeàCre  signalée 
par  M.  Bazin. 

Une  autre  altération  singtilière  des  cheveux,  c'«st  teur 
déviation.  '   '   • 

Au  lieu  de  croître  à  peu  près  parallèles  *les  .uns  aux 
autres,  ils  s'écartent  dans  tous  les  sens ,  en' décrivant  une 
courbe  ,  dès  leur  issue  du  derme.  Cette  déviation  esl  sur- 
tout  évidente ,  lorsque  sur  une  tête  raséer  depuis  15  à*  20 


lOVBMÂL  D£   MÉDBGnfBi  189 

jours ,  les  cheveux  ont  atteint  une  longueur  de  trois  ou 
quatre  millimètres. 

Quelle  est  la  nature  de  Taltération  que  les  cheveux  ont 
subie? 

Les  découvertes  des  micrographes  sur  ce  point  ,^  sont 
aujourd'hui  généralement  acceptées.  Suivant  eux  ,  un  vé- 
gétal parasite  ,  un  champignon ,  se  développe  dans  l'inté- 
rieur des  cheveux  ^  et  en  écarte .  les  fibres  longitudinales 
qui  ,  dissociées  et  altérées  se  rompent. 

On  s'explique  ainsi  le  grossissement  ou  Tétiolement  des 
cheveux  affectés ,  leur  fragilité,  leur  section  spontanée. 

Suivant  plusieurs  micrographes ,  les  champignons  se 
développent  primitivement  dans  les  couches  de  l'épiderme, 
se  prolongent  sur  le  cheveu  auquel  ils  forment  une  sorte  de 
gaîne  visible  à  l'œil  nu, -et  ne  pénétrent  que  secondairement 
dans  son  épaisseur. 

M.  Bazin  a  adopté  cette  théorie  qui  attribue  l'herpès 
tonsurant  à  la  production  et  au  développement  d'un  vé- 
gétal parasite  dans  le  cheveu  ;  et  il  a  fondé  sur  elle  le  trai- 
tement de  cettQ  maladie. 

Je  ne  prétends  point  discuter  l'existence  de  ces  pro-. 
ductions  végétales  dans  les  cheveux  affectés  ;  je  confesse 
mon  incompétence  sur  ce  point ,  ainsi  qu'en  microscopie. 
J'ai  vu  au  microscope ,  avec  M.  Thoinnet,  l'un  de  nos 
élèves  internes,  qui  s'occupe  avec  succès  d'observations  mi- 
croscopiques ,  les  cheveux  de  l'herpès  tonsurant ,  parfai- 
tement semblables  à  la  figure  donnée  par  M.  Robin  , 
et  un  peu  différente  de  celle  que  donne  M.  Bazin. 

J'admets  complètement  l'opinion  de  ces  observateurs  » 
sur  la  présence  d'un  champignon  ,  comme  cause  immé- 
diate de  l'altération  des  cheveux ,  mais  je  ne  puis  admettre 
avec  M.  Bazin,  que  la  lésion  du  cheveu,  ou  la  présence  du 
champignon  dans  le  cheveu  ,  soit  la  cause  première  de  la 
maladie  ,  soit  toute  la  maladie. 

Le  tissu  du  derme  est  malade  dans  l'herpès  tonsurant , 
surtout  à  sa  superficie.  Les  follicules  pileux  sont  égale- 
ment affectés.  N'est-il  pas  plus  rationnel  d'admettre  que 
la  lésion  des  tissus  producteurs  du  cheveu  est   primitive , 


(90  40UW«A|i  w  y^iiiPfiiW* 

que  de  U  croire  consécutive  à  l'^Itéi^tiaq  du  p^o4^it 
qu'ils  ont  formé  ? 

Le  chaoïpignoo  peut  se  développer  dans  1^  cheveu, 
altéré  par  un  vice  de  sécrétion  du  follicule ,  comme  des 
moisissures  se  forment  siir  des  matières  organique  en 
fermentation  ou  en  putréfaction. 

H.  Bazin  a  été  fort  embarrassé  pour  concilier  avep  sa 
théorie  de  la  production  de  Therp^s  tonsurant ,  l'identité 
si  évidente  de  cette  maladie  avec  Therpès  circinné  qui  se 
développe  sur  la  peau  dépoujrvue  de  poils. 

Dans  ses  recherches  sur  les  teignes ,  publiées  en  1853 , 
il  rejette  l'identité  de  ces  deux  aif^ctiops ,  tout  en  admet- 
tant que  l'herpès  circinné  favorise  le.  développement  de  la 
teigne  tondante,  et  que  ceile-c| ,  dans  |a  piajprilé  des  cas , 
est  précédée  de  l'herpès  ;  c  est  au  moins  reponf^aitre  une 
intime  connexion  entre  ces  deux  affections. 

Dans  son  mémoire  sur  les  teignes  ,  inséré  dans  la  Ga- 
zeiU  des  Hôpitaux:  en  1856 ,  M.  B^ziri  émet  ufie  toute 
autre  opinion  ;  U  admet  l'identité  des  dpux  herpès ,  ou 
plutôt  il  n'y  a  plus  pour  lui  qu'un  seul  herpès,  reconnais- 
sant toujours  pour  ç£|use  preqiière  un  champignon. 

II  n'y  a  point ,  suivant  lui ,  d'herpès  circinrié  simple  ; 
tout  herpès  circinné  est  le  signe  de  la  germination  du 
champignon  parasite.  Si  l'herpès  se  manif^sjte  sur  les  ré- 
gions où  les  poils  ne  sont  en  qiielqi^e  sorte  qu'à  l'état  ru- 
dimentaire  ,  la  teigne  tonsurante  avprte ,  faqte  d'un  ali- 
ment suffisant  pour  le  développement  du  végétal  parasite. 
Ce  n'est  qu'un  herpès  circinné.  Si  l'herpès  se  manifeste 
sur  le  cuir  chevelu  ,  le  végétal  parasite ,  trpuvant  4ps  con- 
ditions favorables,  s'y  développa,  l'herpès  tonsurant  s'é- 
tablit. 

Comment  M.  Bazin  expliquera-t-il  le  développisment  de 
l'herpès  circinné  que  l'on  rencontre  si  souvent ,  soi^  spo- 
radique,  soit  épidémique ,  indépeu/c^ynin^ent  de  tout  her- 
pès tonsurant  ?  jLe  microscope  art-il  daus  Therpès  ci^ciané 
montré  des  champignons  ou  leurs  débris? 

M.  Bazin  fait ,  sans  s'e^i  ^p^rcevoif ,  une  concessiop  im- 
portante aux  idéies  quil  coip^at.  Il  r^onuA^  que  J'affec- 


JOtUltAli  i»E   ttÉiMCtMS.  191 

lîdn  vériculeuse  ou  érythéiifràteuse  éé  4a  peau  pl*écède  lie 
développemient du  champignon  dans  le  cheveu,  ourallé- 
râtion  du  cheveu.  Lé.  germination  préalable  du  thampi- 
gnon  est  une  supposition  gratuite. 

M.  Bazin ,  en  constatant  la  suceesislon  des  phénomènes 
morbides  de  Therpès  tonsurant ,  succession  que  Mi.  Gaze- 
néve  it'avatl  pieUt^ètre  pas  bien  saisie ,  nous  autorise  à  con- 
sidérer rherpès  tonsurant  comme  une  affection  morbide 
des  tissus  élémentaires  de  <a  peau  ,  dont  Taltéràtioh  des 
cheveux  est  la  conséquence  ou  fe  réstiltat. 


IV. 

Le  tissu  de  la  peau  est  évidemment  phlogosé  dans  Ther- 
pès  tonsurant.  Au  débuts  la  trougeur  érythémateuse  des 
j[>4aques ,,  accompa^ée ,  ou  non ,  de  vésicules  éphémères , 
dénote  un  état  phlégmasrque.  Ptus  tard ,  et  pendant  tout« 
la  dut^  de  la  *  maladie ,  la  peau  est  un  peu  tuméfiée  et 
dépasse  seiïsibtettient  le  niveau  de  la  peau  environnante. 
Sa  couleur  est  modifiée  :  rosée  ou  d'une  teinte  lilas  sur  les 
têtes  blondes  ,  elle  est  plus  foncée  ,  grisâtre  ,  lorsque  les 
cheveux  sont  noirs.  Cette  teinte  grisâtre  est  due  au  pas- 
sage oblique  de  la  racine  des  cheveux  à  travers  la  peau 
d^rnl transparente.  Une  teinte  grise  ou  bleuâti*e  se  remar- 
que en  même  temps  sur  tout>e  rétettdue  de  la  peau  du  orâne 
fraîchement  rasée.  Et  si  dte  est  plus  foncée  sa<r  les  pla- 
quer d^horpès  toifisurant  s  c^t  que  là  les  cheveux  sont^  «A 
général ,  plus  gros  ,  et  que  la  peau  est  elle-même  Un  peil 
colorée.  S«r  les  têtes  dont  tes  oheveuic  sont  d*mi  blond 
pâfle  ^  la  teinte  morbide  de  la  peau  se  montre  isolée  de 
œlte  coloration  accessoire. 

£(flïe  feinle  morbide  ,  due  à  ttne  injection  légère  ,  «cet 
'épai^sisBetnent  si  pefu  mafrqiké  de  In  peau ,  suffiraient-its 
pour  caractériser  une  inflammation  dâfns  le  sens  attaché  à 
ee  m»»t? 

Je  tt'ose^is  le  décider. 

Mms   on    peut  ajouter  que   la   surfece  de  te    peau 


192  JOOUIAL  DB  MÉBScans. 

secrète ,  plus  activement  qu'à  Télat  normal ,  un  épi- 
derme  qui  se  détache  contiauellement  en  petites  écailles  ; 
et  que  si  les  plaques  d^herpès  tonsurant  sont  indolores  ha- 
bituellement ,  les  topiques  irritants  y  provoquent  très- 
bcilement  des  eczéma  et  des  pustules  impéitgineuses,  et 
aggravent  la  maladie. 

Les  follicules  pileux  sont  malades  dans  Therpès  tonsu- 
rant. Ils  sont  hypertrophiés ,  et  leur  orifice  &it  saillie  à 
la  surface  de  la  peau  et  lui  donne  un  aspect  chagriné. 

Cette  saillie  des  follicules  pileux  m'a  paru  surtout  pro- 
noncée dans  cette  forme  de  Therpès  ,  où  les  plaques  très- 
petites  ,  très-nombreuses  ,  sont  disséminées  sur  toute  Té- 
tendue  du  cuir  chevelu. 

L'affection  des  follicules  pileux  cause  ,  suivant  nous,  de 
l'altération  du  cheveu ,  est  moins  grava  que  dans  le 
favus;  elle  ne  tend  point  à  rompire  les  adhérences  de  la 
racine  du  cheveu  et  à  l'expulser  ;  leur  cavité  ne  tend 
point  à  s'oblitérer  ;  ils  recouvrent ,  à  la  guérison  de  la 
maladie,  l'intégrité  de  leur  fonction.  Les  cheveux  re- 
poussent aussi  beaux  qu'avant  son  développement. 


Je  regrette  de  n'avoir  pas  ,  dès  l'époque  où  je  pris  le 
service  de  l'hôpital  Saint-Jacques ,  tenu  des  notes  pré- 
cises sur  le  nombre  des  petites  filles  successivement  at- 
teintes d'herpès  tonsurant ,  et  sur  les  résultats  du  trai- 
tement. 

Il  y  en  avait  alors  25  en  traitement.  Pendant  la  pre- 
mière année,  je  n'ai  obtenu,  je  crois,  aucune  guérison 
complète.  Au  printemps  de  1855  ,  l'épidémie  ,  comme  je 
l'ai  dit,  présenta  une  recrudescence  fâcheuse;  le  nombre  des 
malades  augmenta ,  et  l'état  de  toutes  celles  qui  étaient 
en  traitement  s'aggrava  sensiblement. 

Ce  ne  fut  qu'au  commencement  de  Tannée  1856  que 
je  constatai  enfin  de  l'amélioration  sur  un  certain  nombre 
de  malades*  Au  mois  d'avril ,  trois  enfants  de  12  à  15  ans 


JOUBNAL  DE  MÉDBCINB.  193 

étaient  complètement  guéries.  Leur  guérison  s'étant  bien 
soutenue,  .elles  purent,  quelque  temps  après,  quitter  la 
maison. . 

J'ai  conInVencé  à  tenir  une  statistique  régulière  le  l'^'^ 
juiii  1856. 

Il  y  avait  alors  35  enfants  en  traitement,  affectées  d'her- 
pès tpnsurant  d'epuis  un  t<>mps  variable ,  quelques-unes 
depuis  Iq  commencement  de  répidémiè ,  d'autres  depuis 
un  an  ,  plusieurs  depuis  peu  de  mois. 

Préaque  toutes  avaient  contracté  la  maladie  dans  l'orphe- 
linat. Deux  ou  trois  étaient  venues  atteintes  d'herpès ,  de 
la  maison  dé  Sainte-Marie  ;  une  autre,  enfin,  était  arrivée 
de  Paris ,  atteinte  de  cette  maladie. 

La  plupart  étaient  âgées  de  9  à  13  ans,  une  de  5  ans, 
une  de  6  ans  ,  une  de  8  ans  ,  4  au-dessus  de  13  ans,  une 
seule' (le  16  ans.  Aucune  de  ces  dernières  n'était  réglée. 
La  puberté  est^  en  général,  un  peu  tardive  chez  les  jeunes 
filles  élevées  et  renfermées  dans  les  hôpitaux. 

En  jrônsidérant  ces  jeunes  filles  de  constitutions  diffé- 
rentes ,  )es.  unes  fortes  et  d'une  belle  santé  ,  d'autres  dé- 
licates ,  quelques-unes  maladives  et  scrofuleuses  ,  on 
acquiert  la  convictipn  que  l'herpès  tonsurant  ne  se  lie 
point  à  telle  OH  telle  constitution,  ne  dépend  point  d'un 
état  morbide  intérieur  oii  général,  mais  que  c'est  une  affec- 
tion toute  extérieure ,  toute  locale. 

.J^ajouterai  qu'une  observation  de  deux^  années  m'a  dé- 
montré ]a  complète  innocuité  de  l'herpès.  Je  ne  l'ai  jamais 
vu  ,  soit  en  santé  ,  soit  dans  un  état  de  maladie,  exercer 
une  influence  appréciable  sur  un  organe  ou  sur  l'état 
général. 

Je  n'ai  jamais  vu  non  plus  l'herpès  tonsurant  modifié 
par  une  maladie  fébrile  intercurrente,  comme  on  l'observe 
pour,  d'autres  maladies  cutanées  chroniques.  La  maladie 
intercurrente  termigée.  J'ai  retrouvé  l'herpès  dans  le  même 
état  qu'a  l'invasion  de  cette  maladie. 
.  Voici  Içs  résultat^  obtenus  : 

Aujourd'hui ,  7  octobre  ,  11  jeunes  filles  sont  guéries; 
la.  guérison  de  plusieurs  d'entre  elles  est  constatée  depuis 


194  lOtMiUi  BB  «ÉMGniB. 

trois  mois  ;  les  autres  me  sont  présentées  tous  les  15 
jours  ;  leur  guérison  se  maintient  depuis  un  mois  ou  deux. 
Elles  ne  suivent  plus  de  traitement. 

24  enfants  sont  encore  en  traitement ,  présentant  la 
plupart  une  amélioration  progressive.  L'état  de  la  moitié 
d'entre  elles  permet  d'espérer  leur  prochaine  guérison. 

Ainsi  f  trois  jeunes  filles  étaient  guéries  avant  le  l'^' 
juin  ;  la  guérison  de  onze  autres  jeunes  filles  a  été  ache- 
vée depuis  le  f  juin.  En  somme,  quatorze  jeunes  filles 
guéries. 


VI. 

J'arrive  Hu  traitement  de  l'herpès  tonsurant. 

Je  me  trouvai ,  à  mon  début  dans  le  service  ,  un  peu 
embarrassé  devant  une  maladie  dont  le  traitement  n'est 
point  fixé ,  et  sur  laquelle  je  n'avais  aucune  expérience 
personneiie.  La  lecture  des  auteurs  qui  ont  parlé  de  l'her- 
pès tonsurant  ne  pouvait  me  fournir  un  gukîe  bien  assuré. 
M.  Cazenave  avoue  son  embarras  et  ses  hésitations ,  lors- 
qu'il rencontra  pour  la  première  fois  œtte  maladie  ^  en 
1840. 

AsHis  9on  Trmti  des  rmUadies  du  cuir  chevelu  ^  publié 
dix  années  plus  tard ,  il  n'a  pas  de  traitement  arrêté ,  il 
se  borne  à  indiquer  les  médications  qui  lui  ont  le  mieux 
réussi ,  et  déclare  que  l'expérience  n  a  pu  encore  régler 
d'une  manière  positive  la  thiérapêutique  de  l'berpès  du 
ôuir  chevelu. 

M.  Bazin  ,  guidé  par  ses  idées  théoriques  sur  la  patho- 
génie  «de  l'herpès  tonsurant ,  préconise  une  méthode  de 
traitement  qui  a  pour  but  l'enlèvement  ou  la  destruction 
de  toutes  les  parcelles  du  végétal  parasite  ^  qu'il  considère 
comme  la  cAuse  de  la  maladie. 

Son  traitement  consiste  dans  l'arrachement  de  tous  les 
cheveux  qui  naissent  des  plaques  d'herpès  ,  et  dans  rem- 
ploi de  lotions  d'une  solution  de  sublimé  on  d'autres  sub- 
stances actives  q>u'il  considère  oomnte  devant  détruire  les 


jotnemu  bb  héiisgiiis*  195 

mollécules  du  végétal  parasite  qui  peuvent  se  trouver  dans 
les  follicules  pileux  oi>  dans  les  couches  épidermiques. 

Ce  traitement ,  dont  on  peut  lire  les  détails  ;  exposés 
avec  beaucoup  de  soin  dans  les  deux  mémoires  cités  de 
M»  Bazin ,  lui  a ,  dit-il ,  constamment  réussi.  L'herpès 
tonsurant  guérit  en  quelques  mois.    . 

te  dois  discuter  ce  traitement  /  afin  d'expliquer  pour- 
quoi je  ne  .l'ai  pas  suivi.. 

L'andiogie  admise  par  M.  Bazin  entre  l'herpès  tonsUrant 
et  le  favus«  sous  le'  rapport  de  la  cause  productrice  qu*il 
croit  être:,  pour  l'un  et  l'autre ,  un  végétal  parasite,  l'a 
conduit  à  employer ,  dans  l'herpès  ,  le  traitement  qui 
réussit  dans  le  &vas. 

Le  point  essentiel  du  traitement  du  favus  ,  c'est  Tépi- 
lation.  Le  favus  'ne  guérit  que  par  l'arrachement  des  che- 
veux altérés  qui  naissent  des  foUicules  malades;  l'arra- 
chement doit  être  répété  aussi  longtemps  que  le  cheveu 
repousse  altéré.  Les  autres  •  moyens  employés  simultané- 
ment, les  lotions  dites  parasitcides  de  M.  Bazin,  par  exemple, 
sont  très  secondaires^  le  favus  guérit  aussi  bien ,  aussi 
vite,  sans  cela. 

Dans  le  favus  ,  les  cheveux  altérés  tiennent  très  peu 
aux  follicules  d'où  ils  naissent  ;  ils  se  laissent  arrache^  par 
une  légère  traclion.  M.  Bazin  Ta  dit  avec  raison,  la  mala- 
dfe  est  le  meilleur  agent  épilatoire.  C'est  parce  qu'elle 
détruit  l'adhérence  de  la  racine  du  cheveu  avec  le  folli- 
cule ,  qu'on  peut  opérer  l'épilation  si  facilement ,  soit 
parla  calotte,  suivant  le  procédé  ordinaire  ,  soit  avec  les 
doigts ,  comme  les  frères  Mahon  ,  soit  avec  la  pince , 
comme  la  pratique  U.  Bazin.  La  douleur  que  produit  l'en- 
lèvement de  la  calotte  déiiend  moins  de  i'arrachement  des 
cheveux  malades ,  que  de  celui  des  cheveux  peu  nom- 
breux qui  sont  restés  sains  au  milieu  des  surfaces  affec- 
tées de  favus. 

Les  follicules  pileux  malades  dans  le  favus  ne  guérissent 
qu'aprèâ  être  restés  quelque  temps  débarrassés  du  poil 
qu'ils  contenaient.  Tantôt  le  follicule  vide  s'oblitère,  tantôt 
il    reproduit  un  poil  très  délié  ,  comme  étiolé ,  qui  tombe 

14 


et  est  rero^bcé  par  un  poil  novknul.  Le  fiwus  D!es(<  pfis 
toujounsi  à  beaucoup  ptàs.,  siByl  (VaiopétéiepenBiineiite. 

Ce  que  J6  viens  de  dire  du'  fiivtuâ  n'est  pAÂat  applicable 
à  i'herpèsiogsuraat.    •  . 

«.Noire  méthode  épilaloire 4  sitivier  djB; rimbibîlimtt  pa- 
»  ranticidé ,  dit  M.  Bazin  ^  réussirait 'à>*mePveiJ te  dlao&ia 
tt  teigne  toadaole;  n9ai6  4a  phremière  condîiiôirdii.suoçës, 
tt  t'épilation ,  ne  peut  être  que'  trè^ifficMement;  obtenue. 

•  lje&  cheveu»  s'enlèvent  tivec  facilita  etisans  dovdeur  sur 

•  les  plac|ae&  V  ra^is .  on  n'eoK  artacini  qu^un  tiè$*pet»t 
»  nombre;.  il»\i^nQent  presque:  tous  sans  raeifièj  lie 
j»;  champignon  qui  les.  VBpreigoe,  les  ^rend*  fragiles;,  ih 
ù  se  rompent  au  plus  léger  effort  de  toaolion^  qua  Foo 
»  bix  ppur  les  extValré,  »  {Heehert^es  attir  les*  tei§gms , 

p»  95.)  •  '  *  ,  :  *    •  •    ' 

Dans  ^oQ  secpnd  médnoire  ((Sajù<le  à»%  Hâpilanœ^  1 8^). 
Mv  Baun  rooonnaît  encore  t'eseesaive  difljieiitté  de-  l'épik- 
tien  coq^plète  4fti)^  Therpèfr  t'onsura^t. 

.J'ai  très-soiivent  cheitcbé  h  épÛer  des  iliaques  d'èep^iès^ 
(ouauranA';.beaueoupLdè.oheveuH  se  laiasent  aiiraeherconi^ 
plètementavec  la  racine,  si  on  a  rintention*  de  leepipoer 
.près  la  peau  V  U  oi^ilasonC  itfNns.friaUes;' ble^tieolip 
d'fl^utres  s(^  rompent  .par  la'  traelîon^  et  U  raoîne  reste  ; 
d'autres,  enûây  soni  conpés  speniaaéaienli  %l  près  de  1er 
peau  eu  iseiit ,  par  suite*  de*  leopt  déviation  v  télkipfieitt  colléâ 
à  sa  surface,,  que  la  pince  ne  peut  loa  saisir!        .     ^ 

En  sooNM,  i^  croie  j'épilatioA.G«9iplète  et  réislle  des 
pliiques^  d'iierpèa  non.  paadifiicite ,  noai^  à  .pèn^pnès  isi- 
possible  ,«<]tMlle  que  soit  la  -  bç^m  volonté  dje^  l.^pibteur 
et  la  pisbtience.du  Haaiad^  ; 

Je.  ne  sois  poii|t>étQi|né<,de  ^it  My  Bbein  reve|idiquer 
la  taknt  d'opérer  un&pàrfoite  épîlatiiQn.' '  \       '.     .  ^ 

S^uDeuaeineiit^'répiiation  n'est!pôifïtné)Qiesifûne  à^la  g^^ 
rison 'de  l'herpès  tonsurant. 

«  Ëxamnon^  Gomlnent  il  gttérit^.cô  q£|f*il< ei3t  trèsraiaé  d'ob- 
server sur  les  têtes,  souvent  raaélM^  La-  peau'  perd  peu  à 
peu<  sa  ■  4Hà)éfaction  et  -sa»  oouteup  morbide  ^  elfn  revient 
au  nîveaihdela'peau'  envronoante^iCti^sa* surface  reppendi 


pirr  l^afiMi^meiiit  d^s  fiilHèutè^  pilent,  le  |5ôli  qlif  apphr- 
tient  fidr  çùit!  êhîsvféiu'':  \k  âesqufifmatitiyti  é|iidèrn)i()tië  a 
cessé  ;  puis  tes  chmreux  ,  dont  les  lihs  étkient  gôriflés ,  lias 
airtfesrgrêlbs,  étiiylés,  l'èpfenuqtlit  lëût^voltuhfe norihaî.  Leur 
déviation  rme  quéiqute  tempe'  ëhtiorë  çÔmAïC  séuf  in- 
dice de^  pltfqu^  dont'  la  tlrace.  iié  se  recobnftît  pibssur  là 
p€»uô      .    ' 

Aj^rès  la  guérisM ,  les  chevem  sont -aitssf  abdndailt^ , 
aussi  longs,  aussi  bôaux'que  èuv  le  resté  de  la  tête. .  ^ 

Quelquefois'  de  petites  plaquées r'estëht  un'çeftàih  t'énips 
dépoQiVufSs  dé-ch^eux,  mai^  cet^êlat!  ih'a  pôt-u  temrlo- 
mire  ;<«' les  voit  se  recouvrir  piBtt  à  peu  de  chëVeûx.  LV- 
hjpécie  periHanentè  de  quelqtles'  J)feques  eist-  totit-à-fàit 
etceptioilnelfe;, tafidfs qûedans  le=fiivus,rafbpë€ie  |^artiellë 
ou»  générale  est- aussi  fréuiientë  qUe  l«r  i^pr6dui:Jt\on  des 
cheveux/quir  même  dans  les  cas  l'es  plus  heureux  ,  lie  re- 
poussent jaintfisau^  abondants  qk^àiraht  la' maladie. 

Les  follicules  piléu<  sont  nnilftdès'^  dans  fherpès ,  mais 
leur  «liiônf'à  la  jràëîfie'du  poil;  rt'eëlpùâ  diminuée  cotirtnie 
elleM'estdans  lefavus;  ils  ne  teUdëât  ptiifit^  à  rexpdsér; 
il^  n'oUt  pus  besj6iu;  (ToUr 'guérir,  d^êU  èti^  quelque  temps 
débttlri^ëséè.  Cé-dhëvcm,  à  me^fe  que*  ta  gùéfil^h  du 
follicule  s\)përe,repreild'peuè*pê<i  cf  sbuvent  tift^raplde- 
merît  son  état  normal: 

L^épflâtîpU  n^est  dôttc'^pas  rtéee^sail'e^dans  rhterjiès  ton- 
surent. 

tf  J'ardéjè  obséiVé  âssefc  dè-fiHts-,  dit'M.  Cazèniâ^e ,  pôtiH 
»  podvoi^  étffMir,ien  principe ,  que  lé  traileiiléht  dé  celle 
»'  maladie  eôtl^àtë  surtout  dau^" l'emploi  des;  topique^',  et 
0  principalbmëm  des,  tôpi^^ueé^'a^^  doux.  Je'  dois  dire 
»  que  j'en'  ai*'  èxpêrttneuté'<fe  tôtitésr  sortb*  ,  et  ce  qtië'jé 
))  puis  dès  à  présent  établir  côiHlhe.  nh  bbirit  Nôr's  de 
»i  conteste,  c'est  <|Uë^ les' tôpiqtfëd  (Inop  aëiifi  doivent  être 
»  rejetés  d'uUë  manièriË  absolue.  ((klVragecit(^,|i;  203.)  a 
•  L^éupérience  m'a  biefltôt  fditii^ortliàfttrte  la  vérité  de  ces 
prihçipeè. 
Voici  la  méthode  que  je  suis  : 
La  tété  est^  rasé«  ëtltiëreiUëttt^  tous'  les  IIUH  jôdi^s;  Cest 


f98  JODIIIU  DB  «ÂBCBIB. 

une  condition  indispensable  pour  que  les  médicaroeafs 
employés  soit  en  solution,  soit  en  poinmades  paissent  agir 
efficacement  sur  la  peau. 

Il  ne  suffit  pas  de  tenir  les  cheveux  courts,  de  les  couper, 
comme  on  Ta  recommandé,  ti  la  longueur  d*un  pouce  sur 
toute  la  tète.  Ces  cheveux  gêneraient  beaucoup  dans  l'ap- 
plication des  remèdes.  Il  est  indispensable  de  les  raser; 
Faction  du  rasoir  ne  cause  aucune  irritation  aux  sur&ces 
malades. 

Les  pansements  sont  faits  le  matin  et  le  soir. 

La  tête  est  lavée,*  à  chacjue  pansement ,  aVec  une  solu- 
tion de  sous-carbonate  de  potasse  (20  à  25  grammes  par 
litre  d'eau)  ;  la  solution  de  potasse  est  préférable  à  l'eau  de 
savon  ^  qui  laisse  une  sorte  de  crasse  sur  la  tète.  L'eau  de 
potasse  lave  mieux  le  cuir  chevelu  et  enlève  mieux  les  restes 
de  pomade.  .  ' 

Au  pansement  du  matin,  la  tète  lavée ,  essuyée,  est  cou- 
verte d'une  couche  de  pommade  au  sulfure  de  chaux  (en 
général  300  à  400  grammes  pour  1,000  grammes  d'aXon- 
ge),  puis  enveloppée  d'un  bonnet. 

Le  soir,  lotion  à  l'eau  de  potasse,  nouvelle  application  de 
pommade  que  Ton  recouvre  d'un  cataplasme  tiède  de  &rine 
de  lin,  rois  entre  deux  linges  ;  l'enfant  conserve  ce  panse- 
ment toute  la  nuit. 

L'emploi  quotidien  des  cataplasmes  est  nécessaire.  Ils 
entretiennent  l'humidité  et  la  souplesse  des  surfaces  affec- 
tées d'herpès,  qui  ont  une  extrême  tendaiîce  à  se  dessécher. 
Ils  concourent ,  avec  la  pommade  et  les  lotions  alcalines  à 
s'opposer  à  la  production  exagérée  de  ces  lamés  épidermi- 
ques  qui  se  détachent  en  écailles.  Si  on  suspend  l'usage  des 
cataplasmes,  en  peu  dfi  jours  les  plaques  se  sèchent  et  la 
desquamation  augmente. 

Tel  est  le  traitement  que  j'emploie  d'une  manière  uni- 
forme sur  toutes  les  petites  malades ,  depuis  plus  de 
quinze  mois;  aucune  complication,  aucun  accident  n'est 
venu  m'obliger  à  le  modifier.  C'est  depuis  que  je  l'emploie 
que  j'ai  obtenu  des  guérisons. 

Lorsque  je  pris  le  service ,  je  trouvai  déjà  établi  par 


JOtmilAL  DE  HÉDECmS.  199 

les  médeeins  qui  m'avaient  précédé  ,  H.  Malherbe  et  H. 
Dérivas  ^  l'usage  de  raser  la  tête  ,  d*y  faire  des  lotions  , 
d*y  appliquer  des  cataplasmes  ;  diverses  pommades  étaient 
employées. 

J'en  .  ai  ,  aussi  moi ,  employé  successivement  plu- 
sieurs :  la  pommade  à  Tiodure  de  soufre*,  la  pommade 
a  la  suie  desséchaient  les  plaques  d'herpès ,  et  ne  pro- 
duisaient aucun  bon  effet.  La  pommade  à  la  suie  a  d'ail- 
leurs l'inconvénient ,  assez  grand  dans  les  hôpitaux , 
de  salir  les  vêtements,  quelque  précaution  que  l'on 
prenne. 

Une  pommade  alcaline  que  j'employai  plus  tard ,  me 
parut  quelque,  temps  assez  avantageuse.  J'augmentai  peut- 
être  .un  peu  trop  la  dose  de  sous-carbonate  de  potasse  ;  la 
pommade  devint  irritante.  La  peau  s'injectait ,  rougissait  ; 
il  survenait  des  eczéma ,  des  pustules  impétigineuses,  de  la 
douleur  :  de  nouvelles  plaques  d'herpès  tonsurant  se  mon- 
traient. C'était,  il  est  vrai,  au  printemps  de  Tannée  der- 
nière ,  au  moment  où  l'épidémie  d*herpès  offrit  une  re- 
crudescence, de  sorte  qu'il  serait  difficile  de  faire  la 
part  de  l'irritation  produite  par  la  pommade  alcaline. 

Je  laissai  de  suite  cette  pommade  ,  et  me  bornai 
quelque  temps  à  l'usage  de  Taxonge ,  et  des  lotions  d'eau 
de  son. 

Ge  fut  alors  que  j'eus  recours  à.  la.  pommade  au  sulfure 
de  chaux,   conseillée  par  H.   Cazenave.    Elle  me  parut 
•  réussir  mieux  que  toutes  les  auties  à  modifier  avantageu- 
sement l'état  des  surfaces  malades.  J  en  ai  depuis  cons- 
tamment continué  l'usage. 

Il  y  a  deux  mois ,  j'ai  voulu  y  joindre  Teniploi  des 
lotions  de  sublimé,  préconisées  par  H.  Bazin.  Sans  adopter 
les  idées  théoriques  de  M.  Bazin  -,  *sur  l'étîologie  de  la 
maladie  ,.  j'ai  .essayé  ce  médicament  qui  lui  paraît  si 
efficace. 

Je  fis  faire  chaque  matin  sur  les  plaques  d'herpès  ton- 
surant ,  une  lotion  avec  la  solution  dont  il  donne  la  for- 
mule ,  dans  ses  recherches  sur  les  teignes  (2  granmies  de 
sublimé  dans   500   grammes  d'eau  distillée).  Cette  dose 


est  b€y»4cç|fy[»  trop  élevée.  Au  bo<«l  4e  quelques- Jouk., 
le^  j4aqMês  d'i^c^rpès  étaient  vivcmeet  irrîfées;  de  vou- 
yelles  plfujviç»  diberpës  trës-.petAte8  ie  formaient  aii^.  èo- 
virons ,  chez  quelques  enfants.  . 

(le  ré^^iftis  la  49^  de  wblin^é  ;  l*irrilalÂoa  diqiifi«a  « 
.ni^isiiex^esafi  p9^  jefu^  ol^Ùgé  de  jreuoiKi^  à  remploi  du 
r,efliède. 

Py^us  t^  «  j*aj  l|i  4^^  Lb  d.^r^iier  jfuémoioe  de  M.  Bazi», 

3u*ij  j|ie  met  plus. que  t^  ^  50  >c;ehtigrj»ai^mea4e  subUmé, 
aps'500  gr^wpe^  <4'eau.  *U  a  dçBojre^cuABu  les  mauvais 
eflfets  des  doses  élevées  de  sufriimé  ,  qu'il  jecommaodaif 
QQfnn^e  .yn  remède  .fii^tain. 

.Qu^bt  àJ^  dp^  iî^  i^'Ç^Usi^rà^es  de^ailH^^    dao^ 
*500  grai;)ii^^  d'e^u ,  eUe  m^  parait  prçvsque  nyuUe.    . 

L']^r,pës  ton^urânt  fisjt  .une.  malaiÛe  e83eoiieUeineiU 
chrpniqûe.  Son  iraiteiTçient  exige ,  dans  les  cas  les  filus 
Ueui-eu;i ,  #ji  moina.plui^j^urs  ^(Jik  î  m  général  ^^e  croîs,  • 
pluç  dune   année,  e(  souvepit,   bien  ^ifs    de  iemps 
encore*  .  . 

Et  pendant  ce  Tpag  espace  de  temps ,  il  ne  S»»^  pas  in- 
terronoprp  les  spji^3  qfiioiUtÀe^x  ^t  nigttiiei^n  qu'e&ige  le 
traitement  ;  o^  bieb  Tqn  perd  en'  peu  de  jôtti»>ne  amé- 
lioratiop  pénibjement.  ,obJteAU^.  ,  *     . 

Je  n*aL  point  parlé  de  médication  interne,  appliquée 
au  traitement  *^e  rberpèa  tWM>raAti  a}oyaofM  avec  M. 
Ç^n;jgra ,  qu'il  n*^'  a  .4'autre  m^^i^iou  intejrea  ou  gé- 
nérale indiquée  ,  qi^  x^^le  que  peut  océpliyner  la  coBStilu-- 
|.ion  du  malade.  A^pos  i^tQs  malades  déUcaifi^ou^ono- 
fuleuses ,  j'ai  dénué  les  antiscorbuiiqoes,  Thuile  de  foie^ 

ie  n  ai  pa^  remarqvé  que  ^s  méflicamwts  aient  -eu  le 
môjqdre  fJfkS  ^M^  Vaffe^tiion  du^uir.  clieyelu. . . 


jarBKEL  f)£  wÉBumtm.  VSdA 


DE  14  PARMrSÏE  fJCUlB,  Traitement 
par  ta  st^ycjknme*  — :  -Q^  Vof^tion  des  -^Uy^ 
aimées.  *r-  Du  eumrre  4anis  .  le  iitanm  ,p€ir 
H.  TftiB8Âir»)  ©.-M.^  professeur  4ê  i)Uniqt^  A 
l'école  préparatoire  de  médecine  et  de  pharmacie 
de  Nantes.  .... 


C'est  spécialement  datw  les  paralysrcs  qui  .ne  reteotinaii- 
sent  pas  pour  CÀuse  âne  akéraliort 'd'es  centimes  nejfvelix  ,  ' 
que  tes   moyens  ée  fart  ont  plus.de*  chance  dfe  succès. 
Dans  ces  cas ,  les  médications  les  jplus   diverses  ^nt  été 
conseillées.  -        *    * 

*  On*  connaît-  te  heureux  résultats  que' l'on  obtient  de 
Teniploi  de  la  noix  vottîique  et  de  ses  préparations  ,  dans 
certaines parapTégîesei  dans  les  paralysie^ saturtiines. 

Dans  une  paralysie  spéciale  ,  fë  plus  ordinairement  due 
âfinflnence  d'une  cause  extérieure;  dans  ta  paralysie  du  nerf 
facial,  la  strychnine  administrée  sous  aiffêretlies. formes', 
paraîtrait  amqner  plus  prqmptement  et  plus  sûrement  la 
guérlscfn  ;  que  tes  divers  laulrés.  moyens  en  (isa^e  dans 
cette  maladie'*  .  *      '  ,   - 

*  M.  'BoltUrDesni©rtiors,4ans sa' thèse  soulentiè  à  la  Fa- 
culté de  Médecine  de  Parls^*,  .en  -1834,  refcommànde 
comme  un  traitement  efficace  dans*  ceilé.  affection,  la 
strychnine  V  à  la  dose  de  6  $  10  mUligranimes ,  donnée 
à  l'intérieur,  ou  employée  par  la  méthoaè  erîdermiquei 

'  Les  faits  de  guérison  de  paralysie  faciale,  par  lâ  stry- 
chnine ,  sont  donc  connus  ;  cependant ,  comme  il  ti*en  â 
pas  élé  publié  un  grand  nombre  ^  nous  avons  pensé  que 
ceux  que  tious  allops  rapporter ,  pourraient  avoir  quelque 
intérêt.  •  ' 

fro  rtUservâiiton.  * 
W^^  C,  âgée  de  4  5  ans,  marchande  dlépicçnves,  deweiîiriM»t 


202  JOVlSlIitli  l>B  KÉDMBIB. 

à  Nantes,  quai  de  la  Fosse,  était  obligée,  par  la  nature  de  ses 
occupations,  de  se  tenir  pendant  tout  le  jour  au  comptoir 
d*un  magasin  non  clos,  et  exposé  à  de  forts  courants  d'air. 

Le  2  mars  1850,  à  son  réveil ,  l'irrégularité  qu'elle  re- 
marqua sur  les  traits  du  visage  Teffraya  vivement.  Les 
paupières  du  cAté  droit  ne .  pouvaient  se  rapprocher,  l'œil 
restait  constamment  ouvert ,  b  commissure  de  la  lèvre 
droite  était  abaissée ,  le  froncement  du  sourcil  et  du  front 
ne  pouvaient  avoir  lieu  de  ce  côté ,  et  pendant  la  masti- 
cation ,  les  aliments  séjournaient  entre  la  joue  et  les  ar- 
cades dentaires  du  côté  droit.  En  un  mot ,  tous  les  signes 
de  la  paralysie  {eiciale  existaient  ;  et  te  côté  atteint  était 
précisément  celui  qui  avait  été  frappé  par  un  courant  d'air. 

Une  saignée  de  bras  fut  pratiquée ,  la  malade  étant 
d'un  tempérament  sanguin  et  non  meûstiruée  depuis 
plusieurs  mois. 

Le  lendemain  on  lit  dissoudre  5  centigrammes  de  sul- 
fate de  strychnine,  dans  100  grammes  de  sirop  de  sucre, 
selon  la  formule  du  professeur  Trousseau. 

Le  1^'  jour ,  un  centigramme  du  médicament  fut  ad- 
ministré ,  et  pendant  les  15  jours  qui  jsuivirent ,  on  aug- 
menta graduellement  les  doses,  jusqu'à  atteindre  8  cen- 
tigrammes en  24  heures. 

Les  deux  semaines  suivantes ,  on  appliqua  ,  en  outre , 
à  la  tempe  droite ,  et  derrière  l'extrémité  supérieure  de 
la  branche  montante  de  l'os  maxillaire  inférieur,  de  petits 
vésicatoires  ammoniacaux,  que  L'on  pansa  aVec  1  et  2  cen- 
tigrammes du  sel  de  strychnine. 

Il  ne  se  passa  rien  de  particulier  pendant  les  quinze 
premiers  jours  du  traitement^  mais  le  17«,  de  vives  se- 
cousses se  firent  sentir  dans  les  muscles  de  la  face  du 
côté  paralysé ,  et  surtout  dans  les  extrémités  inférieures. 
En  même  temps,  quelques-uns  des  muscles  du  côté  malade 
commelacent  à  pouvoir  se  contracter  volontairement.  Toutes 
fois,  ce  ne  fut  que  vers  la  fin  de  la  4'  semaine,  que  le 
mouvement  reviiH  entièrement  au  front ,  au  muscle  sour- 
cillier,  à  Torbiculaire  des  paupières  et  à  la  commissure 
des  lèvres.  Le  muscle  buccinateur  était  devenu  moins 
inerte  dès  le  1 5*  jour  du  traitement. 


JOrBNAL  DE  HÉDBGUfB.  203 

La  gMérisou  était  à  peu  près  complète  la  6^  semaine. 
Il  ne.  restait  qu'un  peu  de  fiiiblesse  de  Torbiculaire  ^de 
sorte  qu^  li^  paupières  supérieure  et  inférieure  ne  pou* 
vaient  se  rapprocher  complètement.  Dix  à  douze  jours 
après  y  tout  signe  de  maladie  avait  disparu. 

•  ^«  ObserTallon. 

M'^''  R.,  âgée  de  13  ans,  d'une  constitution  délicate, 
et  n'étant  pas  encore  réglée  ,  fut  atteinte  le  5, mai  1850, 
après  avoir  été  exposée  à  un  fort  courant  d  air,  d'une  pa- 
ralysie faciale  gauche.  Le- releveur  de  la  lèvre  ne  se  con- 
tractant plus,  la  commissure  de  ce  côté  était  abaissée.  Du 
reste ,  tous  :  les  signes  qui  caractérisent  la  paralysie  du 
facial  existaient  chez  la' malade. 

Le  1 1  miai ,  le  sirop  'de  strychnine  préparé  suivant  la 
formule  précédente,  est  prescrit.  Chaque  cuillerée  à  café 
de.  4  grammes  contenait  deux  milligrammes  de  sulfate  du 
strychnine. 

Le  l*^'  jour  ,  on  administré  une  cuillerée  à  café 
du  médicament,  puis  on  augmepte  graduellement  les  doses. 

Le  18  mai,  on  en  donne  6  cuillerées.  On  obsei^ve 
quelques  contractions  dans  le  muscle  sourcillier  et  le  re- 
leveur des  lèvre^. 

22  mai.  2  centigrammes  de  strychnine  ont  été  admi- 
nistrés pendant  là  journée.  Le  soir ,  surviennent  subite- 
ment de  violentes  secousses  convulsives  dans  les  jambes , 
avec  faib|,esse  de-  la  jambe  gauche ,  chute  ,  serrenient  des 
mâchoires  ,  délire  penjdant  la  nuit. 

On  jcesse  l'administration,  de  la  strychnine  ,  on  prescrit 
une  potion  éthérée;  des  cataplasmes  sinapisés  sont  apposés 
aux  extrémités  inférieures. 

23  mai.  La  faiblesse  de  la  jambe  gauche  persiste  ;  mais 
les  contractions  convulsives  des  muscles  ont  cessé.  Là  ' mil- 
lade  peut  aujourd'hui  froncer  le  sourcil,  la  «commissure 
gauche  des  lèvres  commence  à  obéir  à  l!action  dii  muscle 
élévateur ,  les  contractions  de  lorbiculaire  des  paupières 
sont  rétablies,  celles-ci  peuvent  être  complètement  rappro- 
chées l'une  de  l'autre^ 

24  mai.  La  £Eiiblesse  de  la  jambe  gauche  persiste ,  et  la 


264  jeittBài  OB 

HuJade  y  ressent  «a  même  ienifis  de  la  douleur  ;  él  esîsie 
MU'  peu  4e  iremblemeni  dep  membf  qs  supôrienrs  ,  mais  le 
trismiis  a  disparu.  Le  côié  gancièe  de  ki  faqe  ^raft  revenir 
à  son  aspect  noroial. 

31  mai.  La  imdade  est 'panfailenient.  La.  jaiiib.e  gaoçiie 
est  maintenant  dans  Fétat  naturel  ^  l'expression  de  la  phy- 
sionomie est  la  même  des  deux  c6tés;  à  peine  reste-t-il 
tin  peu  de  faiUesse  de  rélévateur.des  lèvres.* 

€e8  deux  malades  ont  été  ,  comnie  l.ct»  voït. ,.  ^ssez.  ra* 
pidement  guéries ,  et  surtout  A  ji'est  resté  ebez  elles  i«- 
eiwe trace  de  k  maladie,  ce  qui  nXpas  Ueu toujours.  Il 
nous  arrive  de  rencontrer  assez  fréqueoimesit  d^i<  Cenmes 
chez  lesquelles ,  à  la  suite  d'une  paralysie  faciale-  iocom- 
plètement  traitée ,  l(i  commissure  labiale  «est  .demeurée 
abaissée  d'uncoié ,  abaissement  qui  se  produit  surtout  pen- 
dant le  rire. 

Aux  deux  fiiits  précédente,  nous  jsM&fus  jatAdve  lé  sui- 
vant ,  où  la  pile  voitaîque  fut  seraployée. 

C'était  en  1^41  ;  les  travaux  de  V..>Docfaesne  de  Bou- 
logue  sur  J électricité,  devaient  plus  tard  étendre,  bien 
au-delà  les  applications  de  ce  puissant  agent  daiis  le  do- 
maine pathologique  ,  apporter  à  ces  àpptimtions , des  biQ- 
dificaiious  radicales,  et  spécialement,  dofi^f^  lieu  à  des 
guérisons  beaucoup  plus  promptes.  «     '   .    . 

S"»  Observation. 

•  .  -        •  •* 

M^'^  K..,  âgée  de  18  ans,  d'une  bonne  eon^iûtutioo , 
d'un  tempérament  sanguin  et  un  |>eu  lymfiatlH€(ue,'.fut 
atteinte,  simuliauément,  au  commencement,  de  décembre 
1841  ,  d'angme  jtonsillaire  et  jde  paralysie  Êiciale ,  .^.  la 
suite  d'un  refroidissement  qui  s'était  bit ,  sentir  surtout  au 
câté  droit  de  la  lace.     .  ... 

*  Dés  gargarismes  émollients ,  la  diète ,  des  boissons 
mucilagineuses  et  un  purgatif  ,een^ituërent  le  traitisméat 
dirigé  contre  Tangiiie 

Oh  se  borna  «  quant  à  la  paralysie  ,  à  pratiquer  quelques 
f«icii^(iiis  aiumoniftcales  si|r  le  càté  droit  dela^&ce.  . 

8  janvier,  1842.  La.  paralysie  faciale  daMuit  d'un  mois , 
la  malade  est  soumise  à  l'jM^tioa<de  la  pile.  On  se  sectde 


rii|>pareii  à  «uga;  et  .Qt\  agit  siu*  -les  .{toÎHts  de  la  peau 
correspondant  aux  muscles  paralysés  ,  au^mpyen  d'uii  «k^ 
citateur  a  hoiule ,  et  d'aiguilles  à  acupuneture  ,  «ans  en* 
ffaire-  pénétiîer  'la  paioAe  daos  les.  tissus.  On.-doiMie  «tnsi , 
dans  Fespaûe  .de  tcois  jours ,  trois  ^ié^dees.  de  i  5  à  ^0  mi- 
nutes chaque. 

Au  il  au  I6\  00  «suspend  4e  irait»nent\  pour  je  re* 
|N*eudre  sans. .Interrupticm  jusqu'au  30..  On  promène  la 
^oule  de  ^'excitateur. sur  Ja  &€e  interne  de  1» -joue droite; 
alons  ies  secousses  convulsives -deviennent  irès-fortes  «l 
xiottloureuses ,  les  conjtractibns  musculaires  .appai*ai^seiH 
soUsTaspieet  de  rapides  trémoussements.  iDans  rintervalle 
des  séances ,  on  n'observe  (ju  reste  ^ucuu  ^changement. 

Cédant 'aux  sollicitations  de  M^^'  X.,  qui  se  p^int  des 
douleurs  que  lui  causent  les  séances  de  galvanisation  ,  on 
suspend  le  traitement  pendant  1 5  jours.* 
•  Le  2^  jour,  qui  suivit  cette  interruption',  on  commença 
à  remarquer  quelques^  mpuvemeols  dans. les.  points  pa-  ' 
ralysés.  La  commi8sar>e  dt^oite  des  lèvres  s'élève  un  peu  ', 
l'oodiision  de  f ôeni  droit  coqnmence  à*  s'opéVér.  On  donne 
trois  séances  galvaniques,  les  16  r  ^7  ot  i8<février  ,  en 
employant  uue  eau  moins  aciàu)ée<.  On  avait  mis  Jusque- 
là  un  €(uifizième  d'acide  9utfiifiqué  ;  on  en  n'ajoute  plus 
qu'un  trentième.  Les  contractions  musculaipe^  produites 
par  la  pile  sont  moina  foi^tes/  Cependant  i^n  coryza  avec 
rougeur  érysipél9t9use  de  la*  joué  ,*  paraissant  Vétre  dé- 
veloppé sous  l'excitâtiod  de  l'a^uillo  ^' f^ree  encore  à 
interrompre  ie  traitem^it  jusqu'au  24  février.  Alors  les 
séances  sont  repuîses ,  elles  se  prolongent  toujours  pendant 
eoviroin  20  minutes. 

Les  6  et  7  mars,  pas  de  iséaix^.  On  r^pv^nd  eeHes-ci 
et  l'on  <^ontijciue  peo^aiU  environ  3  seipaines.      . 

A  cette  époque ,  des  mouv^rnents  spontanés  s'observent 
dans  les  muscles  sfmrciHienS)  mais  la  comn»iss|ire  des  lèvres 
n'a  pas  encone  itecôuvré  son  mouvement  d'élévation.  Ce 
n'est  qu'ien  avril  que  toute'  trace  de  {mralysie  avait  disparu. 

Om  Vjoitf  par  les  feit^  que  nous  venons  d^expo^  ^'  q^ie.le 
traitement  a  consisté  à  solliciter  ,.  de  ja  part  des  muscles 
patoalysés.f  des  contractiqns  ariificie^^s,  «t  dans  ce  but  à 


206  JOmUUL  DE  HÉDBCniB. 

agir. sur  le  prÎRcipe  de  fo  coDtraciilité  musculaire,  ce$i-à- 
dire  sur  les  perfe  distributeurs  de  Tinflux  nerveux.  Ces 
contractions  doivent^  au  point  de  vue  thérapeutique  ,  ré- 
veiller dans  le  système  nerveux  la  vitalité  en  quelque  sorte 
engourdie,  et  ramener  .ainsi  le  mouvement  normal  on  vo- 
lontaire. 

Sans  nous  arrêter  aux  avantages  incontestables  que-pré- 
sente Télectricité  dirigée  surtout  d'après  les  découvertes 
du  savant  dont  nous  avons  parlé,  dous  insisterons  particu- 
lièrement sur  remploi  de-  la  strychnine.  Les  effets  remar- 
quables et  assez  rapides  qu'elle  a  produits  chez  les  deux 
malades  dout  nous  avons  donné  l'histoire,  nous  paraissent 
mériter  l'attention. 

Les  plantes  de  la  famille  des  strychnées  exercent ,  en 
effet,  une  action  puissante  sur  le  système  musculaire.  Les 
contractions  qu'elles  y  déterminent,  d'abord  clonique$  »  ne 
tardent  pas,  si  l'on  continue  leur  emploi,  à  se  transformer 
en  contractions  (om'çtiea.  La  roideur  des  mâchoires  devient 
alors  permanente,  les  muscles  inspirateurs  fortement  con- 
tractés n'agissent  plus ,  la  respiration,  ne  se  fait  qu'impar- 
faitement, l'asphyxie  est  imminente. 

Un  véritable  tétanos  que  l'on  pourrait  appeler  tétanos 
toxiquB  >  s'est  produit ,  et  représente  exactement  les  phé- 
nomènes caractéristiques  du  tétanos  Iraumatique. 

Dans  les  empoisonnements  par  la  strychnine  et  dans  les 
expérimentations  faites  sur  les  animaux  ,  cette  roideur  se 
maintient  longtemps  après  la  mort. 

Dans  la  thèse  de  M.. Edouard  Bureau  sur  la  famille  des 
loganiacées  et  les  plantes  qu'eile  fournit  à  la  médecine , 
thèse  soutenue  à  la  Faculté  de  Paris ,  le  7  Juin  1856,  sont 
rapportées  plusieurs  expériences  faites  sur  des  lapins  avec 
la  racine  de  SpigeUia-Marylandica  ,  plante  de  la  tribu  des 
Spigélies,  voisine  de  celle  des  strychnées. 

Le  principe  actif  de  cette  plante,  auquel  on  a  donné  le 
nom  de  spigéline ,  paraît  réunir  en  lui  les  deux  modes 
d'action  des  strychnées  à  effets  paralysants  et  à  effets 
tétaniques;  touiefpis,  ces  derniers  prédominent  et  précè- 
dent la  mort. 

Les    aoimaux ,  après  avoir  présenté   les   signes  d'un 


JOUBHAL  9B  iCâDBGIllE.  207 

affaissement  profond ,  succombent  à  la  suite  de  convul-  . 
sions  d'abovd  claniqites,  puis  toniques  ;  Tasphyxie  s'établit 
plus   ou  moins    rapidement ,  et   la  roideur  cadavérique 
s'observe  longtemps  après  la  mort,  quelquefois  plus  de  20 
heures. 

Dans  une  étude  que  publie,  (tf-  Tardieu  dans  les  Ànnale& 
d'hygiène  publiqtie  et  de  n^decine  légcUe y  sur  Tempoisonne- 
ment  par  la  strychnine,  considéré  du  point  de.vue  médico- 
légal  ,  l'auteur  analyse  les  faits  consignés  dans  le.  procès 
Palmer,  de  Londres.  *       \  .. 

A  l'autopsie  d'une  des  victimes  de  Palmei*,  autopsie 
faite  6  jours  après  la  mort,  la  roideur.  cadavérique  exiàtait 
encore.  Or,  comme  le  remarque  le  médecin  anglais  pré- 
sent, jamais,  chez  les  tétaniques  même,  la  roideur  cadavé- 
rique ne  se  maintient  aussi  longtemps. 

Le  fait  qui  semble  surgir  évidemment  de  l'action,  des 
strychnées  et  des  plantes  qui  s'en  rapprochent ,  est  donc 
une  modification  spéciale  imprimée  au  système  des  nerfs 
moteurs,  modification  telle  que  la  contractilité  musculaire 
s'accroît,  devient  bientôt  convulsive,  et  produit  enfin  l'as- 
phyxie par  cessation  d'action  des  muscles  inspirateurs: 

Chez  les  animaux  empoisonnés  par  la  strychnine,  après 
l'emploi  des  moyens  généraux,  on  a  eu  recours,  avec  quel- 
que avantage,  à  l'élher,  au  chloroforme,  substances  propres 
à  agir  directement  contre  la  contracture  tétanique*;  et,  en 
dernier  lieu,  à  la  respiration  artificielle.  • 

M.  Alvaro-Reynoso  serait,  dit-on,  porté  à  considérer  le 
cwrare  comme  le  véritable  contrer-poison  de  la  strychnine.  (1  ) 


(t  )  rious  Usions  ce  mémoire  le  14  novembre'18S6  k  la  Section  de 
Médec.  de  la  Société  Âcadém.  de  Nantes.  Or  ^  dans  le  n°'de  décem- 
bre des  Archives  générales  de  Médecine^  de  l'année  dernièfe,  on 
trouve  un  mémoire  du  D' Harley,  prof,  de  physiologie  et  d'histolo- 
gie k  l'Université  de  Londres,  dans  lequel  sont  rapportées  des  expé- 
riences fort  curieuses  sur  l'action  respective  de  la  strychnine  et  du 
curare.  L'auteur  termine  par  la  conclusion  que  le  curare  et  la 
strychnine  sont  antidotes  l'un  de  l'autre. 


2Wt  khMkIi  a& 

.  On,  on  saHi  aiijbarcyHiii,  d'aprb^  Ie0  vethéfcbes  de  Bllf;  de 
Homboldivde  Schoroburgiik  el  autres^vnAts^  i*éi!hérehé9  ré- 
sumées dam  la  tbèèo  dé  M.  E.  Bateau;  que  toutries  poisons 
connais  chezr- les  indiens  de  ^Amérique  dVi&id^  sOus*  fes 
noms  de  -Curare,  Woàrara^WaurcUi,  etc. ,  et  qui  servent 
efaea  ces  peuplades  à  eftipoifionnet*  leurs  fléchés  ,  agissent 
de  la'  même  manière  sur  réconomie  amifnftie'^  et  cotitieiiiiënt 
probablement  toutes  le  monte' principe.',  ôUtlu  nnoinëdes 
pnncipes  fort ànalogiyes  fournis *par  divers  végétaux,  dont 
iè  pliis  important  et  le  plus  coiinn  est  léstryehnoe  toùnf^'. 
6*estltti^  qui'iBntre ,  potiii^la  pHis  gnmdë  quam^é ,  dans  la 
cMtposhion  dti  cfîrai^. 

]iecurûte  niè  vetitèrttie  ddridpas  dé  venin  de  crotale;  il 
n'est  pas  ë)ilr«iit  par  les  natûi<els  de  l'AinériqUe,  de  là  vé- 
sicule du  serpent  à  sonnette!?,  ainsi  que  T^Vàit  fait  croire 
la  ressemBlance  de  ses  propriétés  tbkiquôSâVôc  celtes  dé  ce 
venin.        .  . 

En  effet,  comme  luj^  ie  curare',  introduit  âous  la  peau , 
agit,  ainsi  que  l'ont  détpôntré  les  nombreuses  expériences 
de  M.- Cj..  Bernard,  en  pàraCysaot  les  fonctions  cérébrales.  11 
abolit  la  sensibilité  et  tous  les  mouvements  des  muscles 
volontaires)  tandis.qve lecoaurcpntiaue.de  battre,  les  tu<- 
nlques  intestinales  à  se  mouvoir  chez  les  animaux.  J^a  res- 
piration est.  sù^p^odue,  et  rasph}^le  est  la  cause  immé- 
diate de  la  n;kort.  1^  aotiofi  paraît  s-'exercer  spécialement  sur 
1^  contraction  musculaire,  qu  elle  anéantit  tellement,  quV 
.  prèK  la  moirt  teâ.  rnusçles«ne^  peuvent  se  coptçacter  sous 
l!influeiice  des  plus  forts  courants  ..électriques. 

Chose  remarqua'ble,  nous  continuons  à  citer  la  thèse  de 
M.  E.  Bureau,  lès  strychhos  à  effets  tétaniques  et  les  strych- 
no»  qiikui.  pourrait  appeler  à  effets  paralysants,  arrivent  aux 
niômës  résultats  par  des  chemfin^^  opposés  ;- les  uns  en 
exalMrt,  les  autlres  en  pàhriysafat*  lès  fonctions  du^syslèmti 

En  outre,  les  étrychnées  contenant  là  strychnine  se  ren- 
contrent* toutes  dans  l^wicren'  centineni' ,  aux  îles  PhiUp* 
pines,  à  Java,  au  MalalVftt^  tafldSisqucr  Imstt^hfféèi^  dôht 


OBI  extrait  k-dtiratie  oroitsmi  loutes  dafis  le  nouv^éWQ' 
monde,  à  la  Guyjane«etdaf)s4fi>ikMite-AiiiaioiT0^ 

H  eirt  proiMibis  qtse  oVtet  en  néflléGliissant  -stuH^  éenS  feîts  , 
qu*iiAiniéd06}ri-vélérmRivev  M.  Sevi^llvàura  été  (Hitidtiit  à 
faire  tiMce  du  cti^eif»  sur  cfeuit  ote^aux>  att^ikit^  dô^unbs. 
Tous,  deux  guérirenU   ;  '      * 

Ce  feit'clté;dans  la  tttè^edé  M.  E.  Bureau,  est  extrait  du 
BkH&mûire  de  Jffêdiecîne  ,  cte  Beriin,  et  rapporté  par  le 
doclft^rUlunter.  Nous  regrettons  qu'il  ne  nous  ail  pas  èlé 
possible  de'  consirttéi*  f  ouvrage  lui-m^me. 

Ne  pourrait-on  pas  tenter  l'emploi  du  ct^mr^ .d^ns  le 
tétanos  chez.  î homme  ?' 

L'anajo^e.eonduità' cette  oonoiusion.  Si,  en  effet  ,•  k» 
stryiD^bâîne  ooavieiHioomme  excitateur  du  système. n6rv«tyx 
dans  les  patftlyaias,-  le  eurofte  qui  paralyse^  les*  fonctions  de 
ce  système  nne  c«i»batlrait'-il>  pas  avanti»gèusemenl  l^exoita- 
tion  morbide  du  sjistème  nerveuls  manifestée  pai<  lesier- 
ribles  effets  qui  constituent  le  iétmioêP 

Ulïmomiié  dût  curare ,  adminisirô  par  TestlMiats  che2 
les  animaux  v.étan4  çbnsMée  ,  ii  faudraitaTÔir  recours*^ 
la  métJiode^eiKlei^ique^etiniiioduire  cette  substance  sous 
répidUrme-y  .comme-  ou  le  fait  pour  la*  morpbin^  et  la 
jjiry'cbnine.      /  . 

Mais  ici  de  graves  difficultés  se  présentent.;  De  fortes 
dosea  tuent'Papiidenient ,  l^anknal  meun  comnle  foudroyé. 
Âi.d6ses  moin^dras,  la^reàpiration  s'drrôte',  Taâfiiblisi^menl 
général;  survianty  ou  bien  encore  quelques  convulsions  non 
tétaiMiiues*  précèdent  la  iliopté 

Ceppadaptifi  il  est»  deS'  doses  de  ctifteirt«  qui  ncrsant-  pf»s 
nôaessaivemonti  mortelles..  Il  est  rapporté  dans^k  thèse  que 
DOife  citons vj  que  les-  ludicfît^s  qui  sist^etvl^ni  pour  la 
chassejde  fléebesi  eadiûtea  de  cnrar^  ^  ne  cherchent  quelî- 
q^iefois  q«i'â.  engourdir  lès-^  animaïax  et  noii  à<  les'  tuer. 
Or,  ils  y  parviennent,  en  n'employant  que  do  faibles- dose^ 
du.poi^ons:$U<en<  le* mêlant  à  des  substances  inertes.  Si 
Ton  songeait' à  introduire»  k  ewhare  dans*  la  tbérapéulique 
du  tétitnosff  il  faUdmlidoDC  atiénuer  oonsidérablementii^s 


210  JOUIHÀL  DB  ■ÉMCniB. 

doses  ;  mais  ,  en  outre  ,  il  conviendrait  d'instituer  préala- 
blement deux*  séries  d'expériences. 

L'habileté  de  M.  Cl.  Bernard,  auquel  la  science  est  déjà 
redevable  de  nombreuses  recherches  sur  rempoisonne* 
ment  par  le  curare ,  aurait  bientôt  rendu  à  la  médecine 
ce  nouveau  service. 

Il  s'agirait  donc ,  en  premier  lieu  ,  et  à  l'aide  d'expé- 
riences sur  des  animaux  d'espèces  diverses^  de  déterminer 
les  doses  de  curare  entraînant  une  moct  plus  ou  moins 
prompte  ,  puis  les  doses  compatibles,  avec  le  maintien  de 
la  vie  ,  et  propres  à  agir  sur  le  système  nerveux  ,  de  ma- 
nière seulement  à  l'engourdir ,  à  suspendre  à  un  certain 
degré  l'influence  qu'il  exerce  sur  la  contractilité  muscu- 
laire ;  à  produire  ,  en  un  mot ,  une  sorte  de  mort  appa* 
rente ,  comme  le  font  les  chasseurs  indiens.-  On  devrait , 
de  plus,  constater  les  cas  où  la  vie  ne  pourrait  se  main- 
tenir qu'à  l'aide  de  la  respiration  artificielle  ,  et  ceux  où  il 
ne  serait  pas  nécessaire  d'y  avoir  recours. 

En  second  lieu  ,  on  pourrait  soumettre  à  de  nouvelles 
expérimentations  les  empoisonnements  par  la  strychnine 
chez  les  animaux ,  observer  leurs  divers  degrés ,  et  se 
servir ,  dans  les  cas  les  plus  graves ,  du  curare  comme 
contre-poison  ,  en  observant  ses  effets  et  établissant  les 
doses  nécessairement  très-minimes  auxquelles  il  devrait 
être  employé. 

Ce  n'est  qu'après  ces  études  préparatoires  suivies 
avec  le  soin  et  l'attention  qu'elles  comportent ,  que 
la  médecine  et  la  chirurgie  pourraient  tenter ,  sans  être 
accusées  de  témérité  ,  l'emploi  du  curare  dans  le  tétanos 
traumatique ,  maladie  presque  constamment  mortelle. 

Comme  nous  le  disions ,  l'analogie  ,  fondement  des  mé- 
thodes substitutives  auxquelles  la  thérapeutique  doit  plus 
d'une  conquête  ,  nous  semble  devoir  justifier  l'essai  d'une 
telle  médication  ,  quelque  hardie  et  nouvelle  qu'elle  pa- 
raisse. 

N'est-ce  pas ,  en  effet ,  à  la  méthode  substitutive  que 
nous  devons  l'emploi,  éminemment  avantageux,  des  stry- 
chnées  dans  les  paralysies  et  les  désordres  musculaires , 


tel$  que  la  charôe  ?  (Pourquoi  le»  phuX^s  de  ,ld  m^e  Aribu, 
reQfernoani  un  pnûicipe  qMJ|>i*oduJ:t  sjju*  Je  système  neiwauK 
des  effets  .paralysants^  ne  seraient-elJes  jias  TsM^^tidot^  4e6 
cQotractioDB  téJ^amfues  produites  p^rJi'sjp^renai^r^s^  et  de 
celles  bien  plus  graves  encQce  du  tétauos  ? 

Toute  substai^e  agisaaat  sur  ,uD^p|)areU40f;ga«i(fue  de 
manière  à  y  produire  .tfes  phénomèneg^coulxi^Ues  ou  ana- 
logue ^  ceRx  qui  résultent  de  inaction  d'un^  clause  »»ori- 
bide^  n  est-âUe  pas ,  en  génér.»J ,  le  mo^en  le  plus  j)wsr 
san^  à  opposer  t)  ^t^eUe-^i  ? 

Ce  principe  fondamentale' en  thér^peuiU()ue  i«o.us  sanible 
coai,pre!«dris  à  la  fois  ^  dans  aoa  évioncé  ^  4«ux  méthodes 
regardées  comme  aniagoitisies  Tune  4e  ïwtx^. 

En  réfléchi^aat»  en  effet ,  aux  faits  ^r  iesquols  ae 
fondent  les  deux  profi^dés  .ainsi  formulés,  cmtrjQurm  ca»- 
trariis^  smilia  simUbm  mranturt  n'arri^e-i-on  pas  à 
conclure  que  .^  dans  ces  deux  cas ,  J'action  spéciale  déter- 
minée dans  J'éconQmie  par  le  médicament,  cpusU^p^ 
essentiellement  la  inodiiication  thérapeutique  qui  d<Mt  «e 
substituer  à  la  modification  mQrl)ide.  Les  paéopmèn es  ^pro- 
duits par  Je  médicament  apparaissent  parfçii3  éyidemwent 
contraires;  d'autres  fois^  on  les  dirait  ^bsaluwetït  snpa- 
blables  aux  syjnptômes  par  lesquels  se  traduit  Ja  au- 
ladie. 

Nous  disons  qu'il  n'en  est  ainsi  qu*eiî  apparence^  elj^pour 
ainsi  parler^»  qu'au  Bremiericoup-d'œil  de  robservMe^ur.  Car., 
au  fond,  les  médicaments  ne  produisent  Jamais  dans  l!éca- 
nomie  l'ensemble  et  l'évolution  de  phénomènes  qui  coos- 
lîtuent  Tacte  morbide. 

La  belladone ,  bien  qu'elle  amène  des  xougeur^  à  1^ 
peau  ,  de  la  constriction  à  la  gor^e.,  le  quinqujxia  et  les 
sels  de  quinine,  bien  qu'ils  accélèrent  le  pouls  et  ms- 
citent  4ans  le  système  nerveux  des  troubles  rqmar^qablesp 
les  tintements  d'oieiMes,Jeslournoîemenis  de  tête,  des  hallu- 
cinations délirantes  ,'  ne  donnent  lieu  l'un  et  l'autre  ni  à 
la  scarlatine  ,  ni  à  la  fièvre  intermittente. 

Nous  en  dirons  autant  du  nitrate  d'argent  dans  cer- 
taines ophthalmies.   Assurément,   les  solutions  dans  les- 

15 


242  lOOUIAL  DE   HÉHECIRE. 

quelles  il  entre ,  loat  en  rougissant  l'œil  et  injectant  la 
conjonctive  ,  ne  produisent 'pas  une  opbthalmie  de  même 
nature  que  celles  que  Ton  observe  si  fréquemment  , 
tout  au  plus  reasetnblerait-ellé  à  l'inflammation  directe- 
ment produite  par  une  cause  physique. 

Les  modificat'Urs  médicamenteaic  diffèrent  par  leur 
nature  propre  '  et  par  leà  effets  qu'ils  déterminent 
dans  l'économie,  de  même  que 'les  maladies  diffèrent 
entre  elles.  Ce  point  d^  'doctrine  a  été  -parfaitement  éta- 
bli dans  le  beau  chapitre  sur  la  gfédicatian  sub$tttutive  du 
Traité  de  thérapeutique  de  MM.  Trousseau  et  Pidoux. 
Mais ,  de  plus  ,  l'action  des  modificateurs  médicamen- 
teux n'est  pas  essentiellement  identique  à  l'acte  morbide  , 
bien  qu'elle  semble  rêtrê  d'après  l'aspect  extérieur  des 
phénomènes  ;  l'effet  du  médicam'etit ,  en  un  mot  ,  n*est 
jamais  entièrelnent  atUqtuK  slu%  symptômes  de  la  maladie; 
le  iimilia  similibus  n'est  pas  vrai  logiquement.  La  seule 
chose  vraie  ,  c'est  la  modification  plus  ou  moins  profonde 
imprimée  à  l'organisme  par  le  médicament ,  et  la  substi- 
tution de  cet  état  à  l'état  morbide. 

Il  est  probable  que  c'est  à  ces  troubles  salutaires ,  à  ces 
modifications  intimes  suscitées  dans  l'économie  par  nos 
médicaments,  que  sont  dues  leurs  principales  propriétés 
curatives.  Les  influences  qu'ils  exercent  sur  lorganisme 
vivant  se  traduisent  au  dehors  par  des  maiiîfeslations 
diverses.  Tantôt  ces  rnanifestations*  diffèrent  de  celles  de 
la  maladie;  d'autres  fois,  elles  paraissent  avoir  avec 
celle-ci  des  analogies  plus  ou  moins  rapprochées  :  dans 
bien  des  cas  ,  enfin ,  elles  déterminent  au  sein  des  appa- 
reils des  mutations  plus  profondes  et  qui  échappent  à  notre 
vue.  Lorsque  ces  rapports  d'opposition  ou  d'analogie 
sont  plus  frappants,  c'est  alors  que  la  thérdpeulique 
triomphe  ;  il  est  donc  du  plus  haut,  intérêt  pour  l'avenir 
de  Fart  de  les  rexhercher  et  de  les  prévoir  ;  là  certaine- 
ment se  trouve  une  source  féconde  de  progrès. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 

DU   XyXIl*   yOLVMfi. 


'  Pages. 

Appréciation  de  la  méthode  de  Deventer ,  ayant 
pour  but  de  faciliter  la  version,  par  M.  Aubinais.    .     95 

Aubinais.  Voyez  appréciation  dé  la  méthode 
de  DeVent^ ,  ayant  pour  but  de  faciliter  la  version.     95 

Aubinais.  Voyez  de  certains  phénomènes  hystéri- 
formes  avec  suppression  passagère  de  là  menstruatioh 
pouvant  laisser  soupçonrier  à  tort  ifn  comroiencement 
de  grossesse  .  \ t    .' 33 

Bulletins  des  séapces.    .    .....   5,  53,  i33,  179 

Cônsfdépation  'sur  l'épidémie  de  Therpès  tonsurant 
observée  à  rhôpital  Satnt-Jacques ,  de  1854  à  i856  ,  - 
par   m:  Hélie.    .   \    .    •    . I    .    .    .    181 

De  c^tains  phénomènes'  hystériformes  avec  sup- 
pression passagère  de  ta  menstruation  pouvant-Iaisser 
soupçonner  à  ioti  ufl  dortimencenient  de^^rossesse  ,• 
par  M.  le  docteur  Aubinais '33 

De  la  paralysie  faciale;  traitement  par  la  strychnine, 
etc.,  par  M.  Thibeaud.    ...........   201 

Deux  observations  de  rupture  de*  l'utérus,  par  le 
docleair  Letenneur.        ............  163 

Etudes  cliniques.  Des  hydropisies  ,  suites  de  fièvres 
intermittentes,  par  M.  Thibeaud.    ........   117 

Hélie.  Voyez  considération  sur  l'épidémie  de  l'her- 
pès tonsurant  observée'à  l'hôpital  Saint-Jacques ,  de 

1854  à  1856. 181 

.  Huette.  Voyez  tableau  des  obsei'vations  météorolo- 
giques de  1855.    .    .    •    . ' 53 

Lé  Hôux.  Voyez  note  sur  une  tumeur  hydati'que 
abdominale  ;  ruptures  spontanées  du  kyste,  suivies  de 
l'excrétion  de  son  contenu  par  la  voie  intestinale,  etc.     44 

Letenneur.  Voyez  deux  observations*  de  rupture  de 
l'utérus 163 

Mahot.  Voyez  tumeur  squirrheuse  développée  dans 
le  médiastin  antérieur.  Compression  de  la  veine  cave 
supérieure.  (Kdème  de  toutes  les  parties  sus-diaphrag- 
matiques 105 


Malherbe.  Voyez  observations  cliniques 71 

Malherbe.  Voyez  rapport  sur  un  mémoire  de  M. 
Gintrac,  de  Bordeaux,  surVoblkération  de  la  veine-porte  1 69 

.Note  sur  une  tumeur  hydatique  abdominale  ;  rup- 
tures ap^fitaaée^i^t  péri^uliques  4a  kyste  ,  suivie»  .de 
l'^xcrétioQ  .de  son  coaienu  par  la  wQÏe  intestinale  , 
etc.,  par  M«  Le  Hqux.   ^    •  ..  ^   ..    «    .   ^     ^    .    .     44 

NoUe^  sur  «quelques  cas  de  fièvres  éruptivea,  recueil- 
lis à  J'Bôtel*  Dieu ,  par  M.  ValUn,  élève  interne,    .il! 
Obaenv^tioQ  clinique,  par  M- BAVxeau»    .   .   «   ^   i.5$ 
Observation  d'iclaoE^aie  albuminurique  ,   suitie  de 

scarlatine,  par  H.  Rouxeau ^    13^ 

Observation  de  lypémanie,  par  M.  le  .docteur  Petit .  20 
Obser,vatia«s  c)iniqiif.ç«  par  M^  Malherbe^  ^  >  .  71 
Petit,  Voy^z  (Aservatioq  de  lypémanie.  ^  .  •  .  20 
Rapport  sur  un  mémoire  de  M.  Gintrac,  de  Bordeaux, 
sur  iQhlitéraUon  de  ,1a  A'eâaa-porte  «  .par  ti,  JHalberJ>e .  1 69 
Ra^x.ea^.  Voyez  observation  clinique.  >  .  .  .  ,  155 
Rouxeau.  VovQz  obs^vatioti  d'éclampsie  albiuninu- 

rique,  suite  de  scarlatine ,.139 

Symptômes  gnaves  produits  par  radminJstration 

du  seigle  ergoté,  par  M.  Trastour,    .    « 88 

Table  des  matières^    .   ^  ^   ..........  213 

Tableau  des  observations  météorologiques  de  1855» 

parM.  Buatte.    .,...,,,.,. 53 

Xhibeaud.  Voyez  de  1^  paralysie  façi3le  ;  traite- 
ment p^  la  strychnine.   ^    .    <.    » ^201 

Thibeaud*  Voye^  études  cliniques.  Des  bydropisies, 

^ui^es  de  fièvres  intermittentes 1J7 

Traslour,  Vxjyez  symplf^Pes  graves  produits  par 

l'administration  du  seigle  ergoté 88 

Tumeur  sqpLrrheuse  développée  dans  le  médiastin 
antérieur.  Compres^on  de  la  veine-cave  supérieure. 
OEldème  de  tontes  les  parties  sus-diaphragmatiques  , 

par  M,  Mahot ,..  ^   .......   105 

Vallin.  Voyez  notes  sur  quelques  cas  de  fièvres 
éruptives ,  recueillis  à  THôtel-Dieu ,•,.111 


Nulles,  Imprimerie  de  M"*  veoTe  C.  Mellinei