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MO. S^ c, -V
V-et. F^. m 3. 141 gf
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MO. ^L c, V
V^. F-r. Hr B. 1412'
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JOURNAL INÉDIT
DARNAULD D'ANDILLY
A
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JOURNAL
INEDIT
D'ARNAULD D'ANDILLY
(^6^4-^620)
Piblié et aio«té '
Par Achille nALPHEN*,
Juge suppléant du tribunal civil de Versailles,
Membre de la Société des sciences morales, des lettres et des arts
de Seine-et-Oise.
PARIS
CHEZ J. TECHENER, LIBRAIRE
PLACE nil rot VUE, iO, AU PREMIER.
185
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PaHs. - Ty|> WrTTFR.'îBFiM, nie Monlinorcnry,
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PRÉFACE
En parcourant, il y a quelques années, les
nombreux volumes du Recueil de Conrart, con-
servé au dépôt des manuscrits de la bibliothè-
que de l'Arsenal, je rencontrai au tome xi in-4,
un journal historique occupant 286 pages
(p. 197 à 485), s'étendantdu 4 *' janvier 4 64 4 au
54 décembre 4 64 9, et auquel la table ancienne
du même tome donnait ce titre : Journal histo-
rique et anecdote de la Cour et de Paris, par un
homme d'Etat. C'est ce Journal, écrit par un
des personnages les plus célèbres du xvif siè-
cle, que je publie aujourd'hui, après m'étre
assuré, autant qu'on peut avoir une certitude
à cet égard, qu'il est inédit.
Conrart, on le sait, n'a point pris la peine de
nous faire connaître les auteurs de la plupart
des pièces historiques et littéraires conservées
par lui. J'avais à rechercher d'abord quel était
l'homme d'État non nommé, dont je retrouvais
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Il PRÉFACE.
le Journal. Plusieurs passages fournissaient heu-
reusement des données précieuses pour arriver
promptement à le découvrir.
En effet, Fauteur, dans le cours de son récit,
dit à plusieurs reprises : « fay ouy dire d M. Bar-
6in, le 25 niars \ 6^ 8, comme j'estais un de ses
trois Commissaires. » Or les Mémoires du temps
donnant des détails sur l'arrestation et le pro-
cès de Barbin , il était bien facile de savoir les
noms de ces trois commissaires et de n'avoir
plus ensuite qu'à déterminer auquel des trois
appartenait le Journal conservé par Conrart.
Richelieu, ami de Barbin, et qui était comme
lui, à cette époque, un des chefs du parti de la
Reine-mère, dit que les trois Commissaires dont
il s'agit étaient le Président le Bailleul, un
Conseiller d'État qu'il ne nomme pas, et Ar-
nauld d'Andilly, lequel était secrétaire de la
commission, spécialement chargé d'écrire les
réponses de Barbin *. Des Mémoires de Riche-
lieu je courus naturellement à ceux d'Arnauld
d'Andilly et j'y trouvai le passage suivant qui
était presque la solution de la question : « Au
mois de mars de l'année suivante, ^6^8, on
découvrit uiie entreprise que M. Barbin, pri-
* V. coll. Michaud et Poujoulat, Mém, de Richelieu,
année 1618, p. 182.
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préfa<;e. m
sonûiier à là Bastille, avoit faite pour sortir la
Reine-mère de Blois, où elle étoit comme pri-
sonnière. Cette affaire étant très-importante
à cause des personnes de qualité qui s'y trou-
voient mêlées, on choisit trois Conseillère
d'État pour en instruire le procès* Ce furent
M. le Président de Bailleul , M. l'Avocat et
moi; et parce qu'on ne voulut pas se confier
à un greffier, et qu'ainsi il falloit que ce fût
l'un des Commissaires mêmes qui tint la
plume, ce fut à moi à la prendre étant le plus
jeune. » Un peu plus loin, d'Andilly ajoute:
« Néanmoins lorsque je l'interrogeois, ce que
ces Messieurs me laissoient le plus souvent
faire, à cause que tenant la plume j'avois
la mémoire plus fraîche des interrogatoires
et des réponses, etc. » Le Journal manuscrit
Rapportant presque textuellement les réponses
de Barbin, il était plus naturel de l'attribuer à
Arnauld d'Andilly, chargé de noter ces répon-
ses, qu'à ses deux collègues, le P* de Bailleul
et l'Avocat; et ce qui fortifiait encore cette pré-
somption , c'est que Tauteur du Journal ren-
voie plusieurs fois à un Mémoire particulier
sur l'affaire de Barbin , mémoire qui était pro-
bablement le travail officiel de la commission,
rédigé par Arnauld d'Andilly. Mais ces pré-
somptions graves devaient se changer en cer-
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IV PREFACE.
titude quand j'arrivai, dans le Journal, au pas-
sage suivant :
« On dit à M. deSchomberg que son^affaire
» estoit résolue, et il me dit qu'il désiroit que
» je fusse auprès de lui. »
On sait, en effet, qu'Arnauld d'Andilly, par-
ticulièrement attaché à M. de Schomberg, fut
choisi par lui pour être son premier commis,
lorsque ce personnage fut élevé à la Surinten-
dance des finances, et d'Andilly dans ses Mé-
moires ne manque pas de donner des détails
sur sa nomination à ce poste important *.
Si d'autres preuves avaient été nécessaires
on les aurait trouvées dans un rapprochement
entre quelques autres passages des Mémoires et
du Journal. Comme j'ai pris soin dans cette
première édition du Journal d'Arnauld d'An-
dilly de rapporter textuellement tous les pas-
sages correspondants du même auteur, je n'in-
sisterai pas sur ce point, me contentant d'y
renvoyer le lecteur. J'ajouterai seulement,
pour ne rien négliger de ce qui peut confirmer
cette démonstration , que , quant à la forme , il
* F. coll. MichaudetPoujoulat. Mem. d'Am. d'Andilly,
p. 433.
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PRIÎFACE. V
suffit de comparer attentivement le style des
Mémoires et celui du Journal (quoique celui-ci
soit d'une époque plus ancienne et qu'il soit
très-négligé), pour reconnaître que ces deux
ouvrages émanent de la même plume ; et que
quant au fond, certains personnages, que Fau-
teur du Joupnal fait souvent intervenir dans son
récit, sont les mêmes que ceux que Ton re-
trouve souvent aussi dans les Mémoires d'Ar-
nauld d'Andilly, et notamment ceux qui avaient
avec lui quelque lien de parenté ou d'alliance,
comme MM. de Feuquières, deFontenay-Ma-
reuil, de Fossé, et surtout son oncle, Isaac Ar-
nauld, Intendant des finances, celui qui fut pour
lui, comme il le dit dans ses Mémoires, un se-
cond père , et qui le forma aux affaires ainsi
qu'on le verra plus loin. A ce dernier person-
nage, l'auteur du Journal donne une impor-
tance très-exagérée, suivant l'habitude connue
d'Arnauld d'Andilly lorsqu'il parle des siens et
surtout lorsqu'il parle de lui-même, ainsi qu'on
en peut juger par ses Mémoires. Ne se conten-
tant pas de rapporter l'opinion d'Arnauld l'in-
tendant, comme celle des autres membres du
Conseil, il la donne toujours in extenso et fait
l'analyse de ses discours, ce qui s'explique
quand on sait qu'il était premier commis de
son oncle et que celui-ci le chargeait toujours
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VI PRÉFACE.
de préparer ses travaux. Ce que je viens de dire
des parents d'Arnauld d'Andilly s'applique aussi
aux hommes d'État qu'il aimait le plus ou qui
l'honoraient de leur bienveillance, comme
M. le Prince, MM. de Bassompierye, de Pras-
lin, de Schomberg, et particulièrement le co-
lonel, depuis maréchal d'Ornqno^ son intime
ami, dont le Journal rapporte textuellement
deux discours, probablement écrits pour lui
par Arnauld d'Andilly, Le Journal, comme les
Mémoires, cite de préférence ces personnages
lorsque l'occasion s'en présente. Si les hommes
qu' Arnauld d' Andilly affectionnait le plus repa-
raissent souvent dans le Journal comme dans
les Mémoires, les matières qui lui étaient le
plus familières et les faits dont il s'occupa le
plus, comme nous l'apprennent ses Mémoires,
ses écrits et sa correspondance, sont aussi les
sujets qui sont traités avec le plus d'étendue ou
relatés avec le plus de soin dans le Journal, par
exemple les questions de finances qui rentraient
dans ses attributions, en sa qualité de premier
commis d' Arnauld l'Intendant, celles relatives
à la solde des Suisses, travail dont il fut spécia-
lement chargé, comme il le dit dans ses Mé^
moires, les graves querelles de préséance et
d'étiquette, les duels, passion fatale de l'épor
que, qu'il poursuivit avec une persévérance
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PRérAGS. VII
digne d'un serviteur de Richelieu^ à ce point
que plus de vingt ans après les événements dont
U'aite notre Journal^ Arnauld d'AndiUy> parmi
les avis qu'il donnait à la Reine-mère et au Roi
pour attirer les bénédictions du ciel sur la
France, mettait en première ligne la destruction
de ce fléau : « Comme il n'y a point de crime,
dit-il, dans son Mémoire pour un Souverain,
qui déshonore plus Dieu que les duels, parce
que Ton y sacrifie aux démons les âmes qu'il a
racheptées de son propre sang, se résoudre à
ne donner jamais de grâce pour ce sujet *. » Et
passant de la théorie au fait, par une lettre à la
Reine, en date du 4 6 décembre \ 643, il de-
mandait que rÉdit rendu contre les duels quel-
ques mois auparavant, fût appliqué au duc de
Guise qui venait de tuer Coligny *. Arnauld
d'Andilly avait pour cet Édit une sollicitude de
père, car c'est lui qui avait été chargé de le
dresser.
Si toutes les circonstances que je viens de
rappeler m'ont fait reconnaître Arnauld d'An-
dilly comme Fauteur du Journal historique
* V, TAvis à la Reine et le Mémoire pour un Souverain,
dans Tappendice, note F, t. i, p. 349 de Touvrage de
M. Varin sur les Arnauld, dont nous allons parler.
* y. Même ouvrage, 1. 1, p. 358.
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VIU PRÉFACK.
dont il s'agit, d'autres sont arrivés de leur côté
au même résultat. M. Cousin, qui, en tirant de
ce Journal quelques renseignements pour ses
charmantes études sur Madame de Longueville
et Madame de Sablé, le citait daas les premières
éditions comme l'œuvre inédite d'un auteur
inconnu, dans la troisième et dernière édition
de l'histoire de Madame de Longueville, non-
seulement nomme Arnauld d'Andilly, mais
ajoute encore que le manuscrit, auquel il ren-
voie, est de son écriture bien connue^ et que cet
ouvrage mérite d'être publié. Je suis heureux
en réalisant un désir, que j'avais depuis long-
temps, d'obtenir par avance l'approbation de
l'illustre écrivain, qui, plus que tout autre,
nous a ramenés aux pures sources du Grand
Siècle.
Parmi les documents précieux conservés au
dépôt des manuscrits de la Bibliothèque de
l'Arsenal, se trouve une partie des papiers de
la grande famille des Arnauld. Les correspon-
dances inédites d' Arnauld d'Andilly et du
marquis de Pompone, son fils, et les négocia-
tions diplomatiques, également inédites de ce
dernier, y tiennent la plus large place. Ces
papiers importants, d'abord disséminés, ont
été réunis par les soins de M. Pierre Varin, an-
cien conservateur adjoint de cet établissement.
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PRÉFACE. IX
DeTétude de ces nombreux documents, M. Va-
rin a fait le sujet d'un ouvrage qu'il a publié
en ^ 847 sous ce titre : La Vérité sur les Arnauld,
complétée à l'aide de leur correspondance inédite * .
Dans l'espoir de trouver peut-être quelques
renseignements au sujet du journal d'Arnauld
d'Andilly, je consultai cet ouvrage rempli de
détails curieux sur la vie intime des Arnauld ,
et grande fut ma surprise quand j'arrivai à un
chapitre intitulé : Journal inconnu de d'An-
dilly, courtisan, dans lequel M. Varin annon-
çait la découverte par lui faite d'un journal
historique inédit, beaucoup plus étendu, comme
on va le voir, que celui qui se trouve dans la
collection de Conrart, et que d'ailleurs M. Va-
rin ne connaissait pas. Voici ce qu'il dit à ce
sujet :
« A ravant-dernière page du Catalogue (le
Catalogue des pièces composant la collection
des papiers des Arnauld dressé au commence-
ment du xvnf siècle) sont désignés huit vo-
lûmes in^A'' renfermant un journal très-curieux,
qui s'étend dei&\^ à ^ 652. Aucun de nos ma-
nuscrits catalogués, aucun de ceux que nous
avions réunis pour les cataloguer ne répondant
* 2 vol. in-8°, Paris, librairie de Poussielgue-Rusand,
1847.
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X Plil^FACB.
à cette indication^ nos investigations étaient à
recommencer. Dana le dépôt de la musique^
déplacé par suite d'un échange de bâtiment
auquel l'Arsenal a été naguère autorisé, nous
trouvâmes enfin huit volumes manuscrits for-
mat in-4% contenant un journal très-complet
qui commence au ^ " février ^ 64 5 et g'arrête au
iA décembre 4653« — Ces huit volumes de-
vaient être ceu^ qu'indique le Catalogue. —
Mais à quel titre avaient-ils fait partie de notre
collection? Dans un passage de ses Mémoires,
qui avait jusqu'à cette heure échappé aux bi-
bliographes, Robert (Arnauld d'Andilly) dit :
a II me seroit facile de m'étendre beaucoup
a davantage sur l'histoire de ce temps-là,
» parce que j'ai un journal très-exact que j'ai
» fait de tout ce qui en est venu à ma connois-
» sance. Mais comme je n'ai autre dessein dans
» ces Mémoires que ce qui me regarde et ma
» famille, je me contente de ce qui peut servir
» à mieux faire comprendre les choses que j'en
» rapporte ^ » Ain&ii, daûs les Mémoires de Ro-
bert, nous n'avons qu\ine biographie de fa-
mille; outre ces Mémoires il avait rédigé un
Journal où se trouvaient consignés les événe-
ments politiques dont sa position le mettait à
* Mém. d'Arnaud d'Andilly^ part. 1, p. 150.
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PRlâFAGB. XI
même d'être parfaitement instruit. Sans con-
tredit, le Jourpal était de beaucoup préférable
aux Mémoires*. »
Après ces observations, M. Varii^, par up
rapprochement entre un passage des Mémoires
d'Arnauld d'Andilly, relatif à la première ar-
restation du colonel d'Ornano, et un extrait
très-étendu du Journal, montre que ce Jour-
nal est, aussi bien que les Mémoires, l'œuvre
ded'Andilly*.
Dn tel ouvrage , écrit par un homme aussi
considérable qu'Arnauld d'AndiUy, et sur une
période de notre histoire si féconde en événe-r
ments, méritait certes de ne pas rester inédit.
Cependant il n'a pas reçu les honneurs de l'im-
pression. J'espérais avoir la bonne fortune de
le tirer de l'oubli et de publier, non plus le
fragment conservé dans le recueil de Conrart,
et ne comprenant que six années, de 4 64 4 fi
à 1620, mais le Journal même de d'Andilly^
s'étendant jusqu'à l'année \ 652 et embrassant
une période de dix-sept ans, c'est-à-dire trojs
fois plus considérable que celle du manuscrit
* La vérité sur les Arnaud, t. 1 , p. 222.
' Cet extrait du Journal est tiré du 4« vol., P 71 v°, et
suiv. Je le reproduis en appendice afin de réunir dans ce
volume tout ce qui nous reste actuellement du Jqurnal
d^Amauld d^Andilly.
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XII PRIÎFACE.
dont je m'occupais. J'allai dans cette intention
à la Bibliothèque de rAi*seiial pour examiner
les huit précieux volumes manuscrits retrou-
vés par M. Varin.
Malheureusement, soit que M. Varin ait
classé à part le Journal dont je viens de parler,
dans rintention de le publier, soit que les huit
volumes reconnus par lui aient été déposés
par erreur ailleurs qu'à la place qui leur avait
été assignée, toutes les recherches faites sur
ma demande pour les retrouver ont été infruc-
tueuses. M. Varin seul aurait pu fournir quel-
ques renseignements à ce sujet; mais il est
mort en ^ 849 , enlevé subitement aux Lettres
par le choléra. Il est donc à craindre que nous
soyons pour longtemps privés de cet ouvrage,
qu'une circonstance fortuite fera peut-être dé-
couvrir une seconde fois sur quelque rayon
poudreux de la Bibliothèque à laquelle il ap-
partient.
Mais il faut dire que M. Varin a eu le
grand tort de ne pas cataloguer et chsser ré-
gulièrement un ouvrage manuscrit et probable-
ment autographe, si précieux à tant de titres*.
* Parmi les conservateurs de la bibliothèque de TArsenal
qui ont bien voulu rechercher le Journal de d'Andilly, je'
dois surtout témoigner ma reconnaissance à M. Ravaisson,
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PREFACE. XUI
A défaut des huit volumes in-4 de d'Andilly,
malheureusement égarés, force m'est donc de
revenir au manuscrit qui m'avait d'abord oc-
cupé ; et je dois rendre grâce à la prévoyance
de Conrart, qui me permet de publier dès au-
jourd'hui la première partie du Journal d'Ar-
nauld d'Andilly. On remarquera même que
tandis que dans les huit volumes retrouvés par
M. Varin le récit ne commence qu'au 4^' fé-
vrier ^ 64 5, dans le manuscrit de Conrart il re-
monte au \ ^'' janvier 4 64 4. 11 est vrai que cette
première année 4644 est beaucoup plus som-
maire que les suivantes et qu'elle a même des
lacunes de plusieurs mois.
Ainsi que le fait remarquer M. Varin dans le
passage cité plus haut, il y a une grande diffé-
rence entre les Méûioires d'Arnauld d'Andilly
et son Journal. Les Mémoires publiés pour la
première fois en 4 754 par l'abbé Goujet avaient
été commencés par d'Andilly à Port-Royal, sur
les instances de son fils de prédilection, et il
les avait terminés en sa retraite de Pomponne
en 4 667, longtemps après les événements, long-
temps surtout après ceux qui font l'objet de la
première partie du Journal dont nous nous
qui a en vain exploré toutes les parties du dépôt considé-
rable confié à ses soins.
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JOV PftÉPàlDte.
occupons (^644-4620)i Ecrivant cet ouvrage
pour ses enfaiits> d'Andilly s'y occupe plus
particulièrement de lui-même^ de la part qu'il
a eUé aux aflFaires, de ses relations à la Cour; il
y fait en termes pompeUx son éloge et celui de
ses amis^ et si en racontant sa vie d'Andilly a
fait un livre d'histoire plein d'intérêt, c'était
moins son but que la conséquence du rôle joué
par lui et de sa position dans le monde. Dans
son Journal, au contraire, écrit longtemps
avant ses Mémoires et à l'aide duquel il les a
rédigés, ainsi que cela résulte du passage cité
plus haut, Arnauld d'Andilly s'efface complè-
tement, ne se préoccupant que des faits et des
événements qu'il note au moment même où ils
se passent, presque jour par jour, en simple
rapporteur de tout ce que sa situation person-
nelle et ses hautes relations lui permettent de
voir et de savoir.
Malheureusement si ce Journal a une grande
valeur historique, il n'en a aucune au point de
vue littéraire. C'est une œuvre de premier jet,
écrite au courant de la plume, sans aucun souci
de rédaction. Consigner les faits, jeter à la hâte
sur le papier tout ce qui lui paraissait digne
d'être mentionné, c'est tout ce qu' Arnauld
d'Andilly a voulu faire, se réservant sans doute
de donner une forme littéraire à son Journal
Digitized by LjOOQ IC
PRÉFAQK. XV
si ridée lui venait un joUf de le livrer à la pu-
blicité. Aussi trouve-t-dn à chaque instant des
répétitioUs choquaUtes , des phrases, des mots
sans suite^ quelquefois même incompréhen-
sibles, parce que Fauteur ne livrait au papier
qu'une partie de sa pensée, confiant le reste à
son souvenir; puis> quand un renseignement
lui manque au moment où il écrit, notamment
les paroles de tel ou tel personnage, il met des
points avec Tintention sans doute de complé-
ter le récit quand il aura trouvé le renseigne-
ment ou le discours qui lui fait défaut. Ça et là
des noms des dates ou des chiffres lui échap-
pent, il les laisse en blanc; mais comme
avant tout c'est la vérité qu'il recherche, il
donne quelquefois deux, trois, quatre et jus-
qu'à cinq versions différentes du même fait,
indiquant, lorsqu'il le peut, les sources où il a
puisé. Rarement d'Andilly se permet une
courte réflexion personnelle consignée par un
mot : faute y OU bien : devait dire... devait
faire; réflexion où perce quelquefois l'ardeur
bien connue de son caractère, comme lorsqu'à
propos d'une inconvenance du Cardinal de
Sourdis envers le Prince de Condé , il ajoute
que celui-ci aurait dû répondre que, sans le
respect de Leurs Majestés, il lui eût passé son
épée au travers du corps. On pourra remarquer
Digitized by LjOOQ IC
XVI PAÉFACE.
qu'il se rencontre quelquefois dans le cours du
récit la mention d'un fait postérieur de plu-
sieurs mois y et même d'un ou de deux ans à
l'ordre chronologique suivi par Arnauld d'An-
dilly . N'ayant eu sous les yeux que le manuscrit
autographe ou non du Recueil de Conrart, je
ne saurais dire si ce sont des additions inter-
calées postérieurement dans le récit ou mises
en note par d'Andilly sur son Journal, ou si le
manuscrit conservé par Conrart n'est lui-même
qu'une copie faite plus tard sur l'original, et
dans laquelle l'auteur a ajouté telle ou telle
circonstance qu'il n'avait pu connaître lors de
la première rédaction.
Après avoir expliqué quelle est, suivant moi,
la cause de cette négligence, ou, si je puis le
dire, de cette absence de style, j'ajouterai que
ce défaut même ajoute encore à la valeur his-
torique du Journal d' Arnauld d'Andilly, en
montrant que ce n'est point une œuvre faite
après coup , élaborée avec soin , inspirée par
l'esprit de parti comme tant d'autres écrits du
temps, mais que c'est en quelque sorte un
procès-verbal où tous les faits sont scrupuleu-
sement relatés, sans que celui qui ne le destine
qu'à son propre usage ait rien à retrancher ou
à modifier par égard pour les personnes, ou
pour quelque considération que ce soit. Un
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PAJSFAGE* XVJf
pareil travail laissé à la postérité par un specta-
teur quelconque des événements ne serait pas
sans intérêt; à plus forte raison doit-il avoir de
l'importance quand il émane d'un homme que
de hautes fonctions dans le Gouvernement et
que des relations avec la plupart des person-
nages éminents mettaient à même d'être par-
faitement instruit des principales affaires de
l'État. Il n'est donc pas inutile de rappeler
sommairement la première partie de la vie
d'Arnauld d'Andilly, c'est-à-dire sa position
dans le monde et le rôle qu'il y a joué comme
homme politique, car c'est surtout sa retraite
à Port-Royal, la part considérable qu'il a prise
par lui et par les siens dans les luttes du Jansé-
nisme et ses nombreux ouvrages qui ont rendu
son nom célèbre. Quelques détails sur sa car-
rière d'homme d'Etat feront apprécier la va-
leur de son témoignage sur une époque de plus
de vingt-cinq ans antérieure à sa retraite. Je
me bornerai à résumer en quelques mots ce
que d'Andilly a longuement raconté dans ses
Mémoires.
Robert Arnauld d'Andilly, né à Paris en ^ 589,
était l'aîné de dix enfants survivants sur vingt
qu'avait eus le célèbre avocat Antoine Arnauld.
Le dernier de ces dix enfants, nommé Antoine
comme son père, est celui qui, élevant sa re-
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XVra PRIÊPACB.
nommée au-dessus de celle de tous les mem-
bres de cette famille illustre par les hommes
comme par les femmes, a reçu de Thistoire le
rare et glorieux titre de grand Amauld! Leur
aïeul, Antoine , seigneur de la Mothe-Arnauld,
avait été Procureur Général de Catherine de
Médicis, charge qui avait passé à leur père.
Les oncles de Robert avaient tous des positions
importantes : l'un , Isaac , était Intendant des
finances; un autre, Pierre, était mestre de
camp général des carabins de France et gou-
verneur de Fort-Louis. Robert était donc dans
les meilleures conditions pour tirer parti de ses
brillantes facultés. Après lui avoir donné sous
ses propres yeux une forte éducation, son père
voulut le former à la meilleure école. Il le con-
fia en ^ 602 à Sully, qui se rendait en Angle-
terre comme Ambassadeur extraordinaire. Mal-
heureusement le jeune Robert étant tombé
malade en route ne put suivre ce grand homme
d'État. En ^605, Isaac Arnauld ayant été
nommé Intendant des finances, le prit auprès
de lui en qualité de premier commis, quoiqu'il
ù'eût que seize ans; et ayant été appelé en
4644 à faire partie du Conseil de la Direction,
Isaac obtint que son neveu, malgré soh jeune
âge, assistât aux séances, où il se tenait debout
derrière le Roi et la Reine-mère. Il dut à cette
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haute faveur d'être initié promptement aux
grandes affaires, d'être dans le secret des plus
importantes délibérations du Gouvernement,
et de se lier avec les hommes d'État les plus
éminents. De plus, son oncle, pour exercer
son intelligence, lui faisait faire des extraits
des affaires dont il était chargé et les lui faisait
rapporter à ses collègues. En 4645, Robert
épousa la fille de M. de la Boderie, diplomate
éminent, que ses négociations ont rendu célè-
bre. En 4644 il suivit le Roi et le Conseil en
Bretagne.
Ici se termine le manuscrit mis au net une première fois
par Fauteur qui y aurait sans doute lait encore des addi-
tions et des corrections. La suite est tirée d'un simple
brouillon, nous la reproduisons littéralement.
Pendant le voyage du Roi, en 4 64 9 et 4 64 6,
Arnauld Tlntendant faisant partie du Conseil
resté à Paris et ayant Fadministration des
finances, Arnauld d' AndiUy travailla avec lui ;
il assistait au Conseil, rédigeait leâ lettres, les
mémoires et les expéditions. La Reine-mère,
pour le récompenser de ses services, lui en-
voya le brevet de sa première pension. A cette
époque il se lia avec les Luynes, prévoyant
leur grande faveur, et plaça près d'eux Déa-
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XX PREFACE.
géant, qui devint Ministre; mais cette liaison
dura peu, car, en 4 64 6, son oncle s'étant démis
de sa charge d'Intendant des finances en sa
faveur, Luynes s'opposa à ce qu'elle lui fût
donnée. A la fin de cette même année il fut
chargé de travailler à l'état général des finances
pour 4 64 7 et à tous les états de l'épargne qui
en dépendaient. En 4 64 7 il fut chargé de la
vérification du Compte de 4 608 pour la solde
des Suisses au service de France, et sur l'ordre
de M. de Bassompierre , Colonel général des
Suisses et d'Arnauld l'Intendant, il fit des mé-
moires par lesquels il procura, dit-il dans ses
Mémoires, une économie de cent mille écus
par an. Cette année, son oncle étant mort,
le Chancelier, Villeroy et le P. Jeannin vou-
lurent lui faire avoir sa place. Luynes s'y op-
posa encore. A la fin de l'année 4647 il suivit
à Rouen le Roi, qui s'y rendait à l'occasion de
l'Assemblée des Notables. Le 9 mars 4648,
d'Andilly fut nommé Conseiller d'État avec
2,000 livres de gages et 2,000 livres d'en-
tretènement, et en cette qualité, dans le même
mois il fut, comme on l'a vu plus haut, un
des trois commissaires chargés d'instruire le
procès de Barbin, accusé d'avoir voulu favo-
riser la sortie de la Reine-mère de Blois. La
même année il fut chargé d'une mission im-
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PREFACE. XXI
portante auprès du duc de Bouillon. Il refusa
la charge de secrétaire du Cabinet, attendant
celle d'Intendant qu'on lui avait promise. En
^6^9 il suivit le Roi dans son voyage à Tours,
où il resta jusqu'à la fin des négociations avec
la Reine-mère. Il fut même chargé de rédiger
une lettre importante que le Roi écrivit à la
Reine-mère pour l'engager à faire la paix. A
la fin de cette année, ^6^9, M. de Schom-
berg ayant été nommé Surintendant des finan-
ces, lui donna le principal emploi auprès de
lui. En 4620 il fit la connaissance de l'abbé
de Saint-Cyran, et commença cette liaison
intime qui devait ajouter encore à sa célébrité
par le dévouement qu'il témoigna à ce grand
théologien pendant sa disgrâce. En i 624 , M. do
Schomberg faisant la charge de Grand Maître
de l'artillerie au siège de Montauban, Amauld
d'Andilly resta auprès du Roi au château de Pi-
quecos, le suivit dans tout son voyage, exerçant
en fait la charge de Surintendant des finances,
travaillant directement avec lui; de même, en
4622. Cette année le Roi lui ofiErit la charge de
secrétaire d'État vacante par la mort de M. de
Sceaux , moyennant une récompense de cent
mille livres aux héritiers de celui-ci. Amauld
d'Andilly, ne voulant pas donner cette somme,
refusa la charge. « Les suites ont fait voir, nous
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XXII priSfage.
dil-il dans ses Mémoires, que je fis une grande
faute; mais on la doit pardonner en ce qu'étant
venu à la Cour sous le règne de Henri-le-Grand,
j'avois été nourri dans la créance qu'il suffi-
soit de travailler à se rendre digne des charges
pour espérer, comme autrefois , de les obtenir
sans argent. » En i 625, M. de Schombergfut dis-
gracié et remplacé par M. de la Vieuville, On
offrit à Arnauld, s'il faut le croire lui-mêmB, la
charge d'Intendant des finances; mais dans la
disgrâce de son bienfaiteur et de son ami, il ne
voulut rien accepter et se tint à l'écart jusqu'à I4
mort de M. de Schomberg. En i 623, Arnauld
d'Andilly fut nommé Intendant général de la
maison de Monsieur. La môme année ou lui
offrit (toujours suivant ses Mémoires) la charge
de Contrôleur général des finances qu'il refusa
pour ne pas quitter Monsieur, et qu'il fit don-
ner à M. Marion, président au grand Conseil,
son oncle materneL En 4625, le Cardinal de
Richelieu, qui l'affectionnait particulièrement,
ayant rintention d'en faire un Secrétaire d'État,
voulut le préparer à cette charge, et, à cet
effet, lui remit toutes les instructions et les
pièces qu'il avait touchant les affaires étran-
gères, en le chargeant de les mettre en ordre
comme il l'entendrait. En 4626, Arnauld d'An-
dilly en présenta au Caidinal plusieurs volumes
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PRÉFkCE. XXra
très-bien écrits. La même année, sa grande
faveur fut cause qu'on intrigua pour le faire
disgracier, et il fut éloigné de Monsieur. Pen-
dant les années suivantes, le grand accablement
d'affaires qu'avait le Cardinal de Richelieu le fit
oublier du Cardinal, et il n'était pas homme à
le faire souvenir de lui. Il passait alors une par-
tie de l'année à Pomponne, dans une grande
tranquillité d'esprit au milieu de sa famille et
de ses livres. En 4 654, il fut nommé intendant
de l'armée du Rhin, commandée par les ma-
réchaux de la Force et de Brézé, avec pouvoir
de disposer de dix mille livres par mois sans
être obligé d'en rendre compte aux généraux.
Arnauld, dans ses Mémoires, donne des détails
sur la campagne de l'armée du Rhin, dont il
fit, sur la demande du Cardinal, une relation.
Après la mort du Roi, au commencement de
la régence d'Anne d'Autriche , il fut un de ses
principaux conseillers; mais l'idée de la re-
traite le préoccupait depuis plusieurs années:
la mort de sa femme en 4657, celle de l'abbe
de Saint-Cyran en 4645, le déterminèrent à
prendre ce parti. 11 se retira à Port-Royal en
4645 ou 4646.
Je ne dirai rien de cette seconde partie de
la vie d' Arnauld d'Andilly, consacrée tout
entière au service d'une piété ardente, aux
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XXIV PKÉF4CE*
controverses religieuses qui ont eu un grand
retentissement, et à Fétude à laquelle nous
devons les ouvrages qui ont rendu son nom cé-
lèbre. Son histoire est associée dès lors à celle
des turbulents solitaires de Port- Royal, qui a
donné lieu à de nombreux écrits depuis ceux
des solitaires eux-mêmes et de leurs amis jus-
qu'aux travaux de Térudition moderne, au
nombre desquels je ne citerai que l'histoire
de Port-Royal par M. Sainte-Beuve, J'ajouterai
seulement pour terminer cet aperçu biogra-
phique sur l'auteur du Journal que je publie,
qu'en 4674 il reparut à la Cour pour remer-
cier Louis XIV qui venait de réaliser son vœu
le plus cher en élevant au Ministère le mar-
quis de Pomponne son fils, et qu'après une vie
presque également partagée entre le monde et
la retraite , il mourut en 4 674 âgé de quatre-
vingt-cinq ans. Cet aperçu suffit pour montrer
la valeur du témoignage d'Arnauld d'Andilly.
Il n'est pas sans intérêt de faire remarquer que
ce Journal est le premier ouvrage qui nous soit
resté d'un écrivain devenu célèbre •
Après avoir rappelé brièvement l'importance
de l'auteur, il me reste à dire quelques mots de
la valeur de l'œuvr^ et du profit qu'elle apporte
aux études historiques. Ainsi que je l'ai dit, la
première partie du Journal d'Arnauld d'Andiliy
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PABPAGE. XXV
a trait à une partie des premières années du
règne de Louis XIII. Sur cette époque, les Mé-
moires ne sont pas très-nombreux, et ne sont
pas aussi complets que sur les années suivantes ;
les principaux sont ceux de Richelieu, de Fon-
tenay-Mareuil et de Pontchartrain ; ceux de
Bassompierre, du maréchal d'Estrées, du duc
de Rohan, de Brienne, n'en parlent que d'une
manière très-sommaire. Notre Journal est loin
d'avoir l'importance des précieux Mémoires
de Richelieu, dont le récit plus complet, plus
étendu que celui de tous les autres écrivains
du temps est accompagné de réflexions sérieu-
séis, profondes, éloquentes parfois, qui em-
pruntent un caractère plus grave du génie de
celui qui les a dictés ou inspirés ; ou des char-
mants Mémoires de Fontenay-Mareuil, si pleins
d'intérêt, écrits d'un style si agréable et semés
de réflexions si judicieuses, qui décèlent l'hon-
nête homme sous le charmant conteur ; ni des
Mémoires de Pontchartrain, dont le récit sim-
ple et rapide expose avec clarté les événements
auxquels l'auteur, comme Secrétaire d'Etat,
prenait une large part ; ni enfin et surtout du
Mercure français, qui est l'ouvrage le plus
complet sur cette époque, et qui a l'avantage
très-grand de fortifier son récit en rapportant
la plupart des documents authentiques tels que
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XXyi . PRÉFACE,
les arrêts du Conseil et ceux du Parlement, les
lettres du Roi et de la Reine-mère, des Princes
et des principaux personnages du temps, ainsi
que l'analyse des principaux pamphlets et écrits
sur les événements et les hommes. Mais, si les
ouvrages que je viens de citer sont plus com-
plets et plus détaillés sur la plupart des événe-
ments, quand le Journal d'Arnauld d'Andilly
ne ferait que confirmer le récit deTun ou infir-
mer le récit de l'autre, il aurait encore son im-
portance. Mais ce que je n*ai trouvé dans aucun
des Mémoires du temps que j'ai pu consulter
et comparer avec le Journal d'Arnauld , c'est
d'abord un ordre chronologique qui présente
les faits mois par mois et presque jour par jour,
d'une manière beaucoup plus précise que le
Journal de Pontchartrain, celui de tous qui par
la forme se rapproche le plus du Journal de
d'Andilly ; là chaque fait a sa date certaine puis-
qu'il est noté pour ainsi dire au moment où il se
passe, et Arnauld donne ainsi une date cer-
taine non-seulement aux événements qu'il rap-
porte, mais encore à ceux qui sont racontés
sans dates dans les mémoires des autres auteurs
ses contemporains; c'est ensuite le compte
rendu et pour ainsi dire le procès-verbal des
principales séances du Conseil auxquelles Ar-
nauld d'Andilly, ainsi qu'on l'a vu plus haut.
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assistait toujours ayant pris soin de noter non-
seulement les décisions^ mais encore Topiniou
et souvent les propres paroles de chaïque per-
sonnage sur les questions soumises aux délibé-
rations du Conseil. Il les met en scène dans son
récit. Si nous entendons parler, je ne dirai pas
le Roi, trop jeune encore pour avoir une opi-
nion personnelle, mais la Reine-mère avec sa
vivacité méridionale allant souvent jusqu'à la
colère, le Prince de (k)ndé qui, en sa qualité de
Premier Prince du sang, veut être le maître
pendant la minorité du Roi, les ducs de Ven-
dôme, de Mayenne, de Bouillon, de Rohan, de
Nevers, de Longueville, plus préoccupés de
leur grandeur personnelle que de celle de TEtat,
les Guise défendant souvent la cause royale
en haine des autres Princes, le duc d'Épernon
dont Tàge n'a point calmé l'insolente fierté,
les hommes d'Etat vieillis dans les affaires tels
que les Sillery, les Villeroy, les Jeannin, les
Châteauneuf ; les nouveaux dépositaires du pou-
voir tels que les Barhin, les Déageant, les
Mangot, les du Vair, sous ce point de vue le
Journal d'Amauld, non-seulement pourra ser-
vir à confirmer et à compléter les notions ac-
quises à l'histoire sur ces grands personnages,
mais peut-être y trouvera-t-on des éléments
nouveaux pour leur biographie; il en est de
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XXVnt PRIÎFACE,
même pour les discussions au Parlement dans
lesquelles Arnauld fait connaître l'opinion des
orateurs en les nommant. De plus, Arnauld
ayant plus spécialement les finances dans ses
attributions et souvent chargé de travaux spé-
ciaux sur ces matières, expose les discussions
sur ce point avec beaucoup plus de détails qu'on
n'en trouve dans les autres Mémoires du temps.
C'est là, je le répète, le principal intérêt et la
véritable importance du Journal d'Amauld
d'Andilly. Malheureusement le manuscrit de
Conrart ne donne du Journal d'Amauld que les
six premières années, de 4644 à 4620. Mais
ces quelques années sont fécondes en événe-
ments. C'est l'époque de transition entre la
grande administration d'Henri IV et de Sully
et le glorieux gouvernement de Richelieu.
Sully apparaît bien encore; mais, comme si le
poignard de Ravaillac avait frappé du même
coup le grand Roi et le grand ministre, ce n'est
plus qu'un noin. Richelieu paraît sur la scène,
il n'est encore que M. de Luçon ; mais déjà son
génie le révèle aux Etats-Généraux de 4644.
C'est lui qui porte la parole au nom du clergé,
et quand il entre au Conseil comme secrétaire
d'État, quoique le dernier venu, il veut, avoir
et il a la préséance. Habile et prudent toutefois,
il est du parti de la Reine-mère contre celui du
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PREFACE. XXIX
Roi mineur; plus tard il sera pour le Roi ma-
jeur contre Tex-régente. Entre ces deux gran-
des royautés du génie, Sully et Richelieu, se
succèdent ces deux petites royautés de la faveur,
Concini et Luynes. Tandis que le Maréchal
d'Ancre et sa femme, en gagnant l'esprit de
la Reine-mère, gouvernent à leur fantaisie,
et se font haïr de tous ceux que leur puissance
imméritée offusque et irrite; Luynes, en flattant
les goûts du jeune Roi, monte rapidement tous
les degrés du pouvoir; et comme pour monter
jusqu'où peut s'élever la médiocrité portée par
la fortune, l'un deviendra Maréchal de France,
l'autre ira plus loin encore et sera Connétable.
En ces temps de scandale et d'anarchie, on ne
recule devant aucun moyen pour satisfaire ses
vengeancesou son ambition. Pour se débarras-
ser du Maréchal on le fait assassiner, et le bâton
qui tombe de sa main est donné au marquis de
Vitry pour prix de ce forfait ; une victime ne
suffit pas ; la favori te de Marie de Médicis, la Ma-
réchale d'Ancre, accusée de crimes imaginaires,
est condamnée comme coupable de magie et de
sorcellerie, et sa tête tombe sur la place de
Grève. Sous un tel gouvernement la guerre ci-
vile est en permanence ; quand de part et d'autre
on est à bout de ressources, les Princes rebelles,
souverains dans leurs gouvernements, traitent
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XXX PREFACE.
avec le Roi de puissance à puissance, et imposent
plutôt qu'ils ne reçoivent les conditions d'une
paix éphémère. Le fanatisme religieux se joint
aux ambitions politiques. Les Réformés font^
comme on Ta dit, un État dans TÉtat; ils ont
leurs assemblées, leurs députés, bientôt ils au-
ront leurs armées, leurs généraux, et après des
combats sans nombre et des sièges mémorables,
il faudra l'indomptable énergie de Richelieu
pour rendre à l'autorité royale sa force et son
prestige. Tel est le tableau que présente la
France et que la plume d'Arnauld d'Andilly
retrace fidèlement.
En terminant ce court avertissement je ne
puis qu'exprimer le regret de n'avoir pu publier
le Journal d'Arnauld d'Andilly tout entier. Si
quelque jour de nouvelles recherches ou le
hasard venait à le faire retrouver, je serais heu-
reux de le donner au public. Telle quelle, je crois
que la partie que je publie aujourd'hui mérite
l'attention de tous ceux qui s'intéressent à la
science historique. J'ai joint au texte de courtes
notes biographiques sur la plupart des person-
nages cités, pour lesquelles j'ai surtout mis à con-
tribution l'inappréciable ouvrage du P. An-
selme et à son défaut les Dictionnaires deMorérî
et de Michaud, et des renvois aux différents Mé-
moires du temps; et pour faciliter les recher-
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PR^FAGE. XXXI
ches j'ai joint les sommaires de chaque année
formant une table chronologique et une table
alphabétique de tous les personnages cités dans
le Journal. Si le lecteur trouve quelque intérêt
dans ce Journal, si désormais il est inséparable
des Mémoires du même écrivain et s'il est jugé
digne d'être placé à côté d'eux dans toutes les
grandes collections historiques, je m'estimerai
heureux d'avoir rendu la vie à un de ces témoins
qui gisent depuis des siècles oubliés dans les
vastes nécropoles de nos dépôts publics , et en
rendant la parole à un des principau:^ person-
nages du plus grand siècle de notre histoire, de
l'avoir mis à même de venir déposer devant la
postérité, au grand profit de la vérité, de ce qu'il
a vu et de ce qu'il a fait.
FIN DE LA PRÉFACE.
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JOURNAL INÉDIT
D ARNAULD D'ANDILLY
SOMMAIRE
Janvier. — Mort de M. d*Attichy. — DoUé, intendant. — Barbin,
intendant de la maison de la Reine. — Duel de MM. d^OuailIy et
Maigneux contre Routeville et Chantemerle. — Duel de M. du Pes-
ché contre M. d*Erouville. — Mort de Cavart. — Mariage du marquis
de Sablé avec M"* de Souvré. — Retraite du duc de Nevers. — En-
lèvement de M. de Vertau. — MM. de Luxembourg et Barrin. —
M. le Prince va à Châteauroux. — Rappel du duc d'Epemon. —
Duel de MM. de Bours-Montmorency et Bucan contre MM. de Refuge
et Desbordes-Valencey. — M. du Maine s'éloigne. — Duel de
MM. des Marests et de Sainte-More contre le marquis de Rouillac et
Saint-Vincent. — Départ de M. de Bouillon.
FÉVRIER. — MM. de Ventadour et de Boissise envoyés vers M. le
Prince. — Départ de M. de Longueville. — Arrestation de M. de
Vendôme. — Le maréchal d'Ancre va à Amiens. — Duel de M. de
Miraumont contre M. de Nausé. — Cadenet envoyé en Champagne.
— Retour de MM. de Ventadour et de Boissise. — Le comte de la
Roche mis à la Bastille. — M. de Nevers s'empare de Mézières. —
Évasion de M. de Vendôme. — Lettres de M. le Prince à la Reine et
au Parlement.
Marô. — m. de Thou va vers M. le Prince.
Avril. — M. le Prince dépêche à M. de Rohan. — Les Princes à Sois*
sons. — On traite avec M. le Prince. — Mort du Connétable.
(D'avril à septembre^ lacune dans le Journal. )
Septembre. — M. le Prince revient vers le Roi.
1
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2 JOURNAL INEDIT
Octobre. — Le.Roi va aa Parlement. — Étata-Généraux.
Novembre. — Affaire de Tenlèveraent d'un prisonnier par le duc
d'Epernon.
DÉCEMBRE. — Gonseâ de la direcUoa ohangé. — Brouille de M"»* de
Longueville et du duc de Nevers. — Brouille de M. de Villeroy et du
maréchal d'Ancre. — Chambre ardente. — Jia paulette. — |kIort du
mayéct)î|| d| Ifi C^aitre, reij^placé p%r J^. dç pQ(^uel%ure^
Janvier 161*. 2. Mort de M. d' Attichy. — M. Dollé * , sa charge
d'intendant. — M. Barbin ^, celle d'intendant de là
maison de la Reyne^ En avoit voulu bailler vingt-
trois mil livres à M. d' Attichy ; sa femme en vouloit
vingt-quatre. Sur cela, M. d' Attichy estant mort,
M"* la maréchale d'Ancre* a eu quarante mil livres
de Biarbin, Sur quoy n'en a esté baillé aucune
chose à M*^» d^ Attichy.
7. Combat de MM. d'OQailly et Maigneux contre
MM. deBouteviUe (fort blessé) et Ghantemerle, tué.
Tous à M. le maréchal d'Ancre. Depuis, M. de
Boutevillç, ayant ^té coipm^ guéry, mourut de sa
blessure.
* l^ouis Polé, après avoir été quelque temps avocat, devint coBseiUer
4'État, piuis intendant des finances, et, protégé par le maréchal d'Ancre,
4 jona nn r^e assez impoirtant dans les ail^res de l'État. Mort en 1016.
2 Barbin, 4evenu contrôleur général des finances, prit une part «on-
pldérable ^ la direction des affaires de TÊtat, mais bientôt compromis
par son attachement à la cause de la Heine-M^re^ il fut mi» à la 1^-
tille, jug4 n^i* le Grand-conseil et condamné au bannissement, peine
convertie en un emprisonnement qu'il subit à la Bastille, jusqu'À ce
que, rendu à la liberté par la faveur de la |leine-I4ère, il reçut l'ordre
de sortir de France.
' La reine-mère Mario de Medicis.
* Léonora Galigaî, favorite de la Reine-mère, arrêtée après l'assas-
sinat du maréchal son mari, condamnée à mort comme sorcière et
exécutée en 1617.
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d'abnauld d'andilly. s
Combat de M, du Pesché, près Pontoise, contre Janvier im*.
M. d'Erou ville, tué. Querelle. Cavart, tué par le
cuisinier de M. du Pesché, sur les terres de M. d'E-
rouville.
9. Mariage de M. le marquis de Sablé, fils de
M. le maréchal de Boisdauphin, avec M"** de Souvré *.
M. de Ne vers ^ part mal content de la Cour et s'en
va à la Cassine \ 11 avoit fait de grandes soumissions
à la Royne, sur ce que M. le président Jeannin*
l'avoit assuré qu'elle y correspondrait, ce qu'elle ne
fit, dont il demeura fort indigné, et luy dit qu'il s'en
alloit dans son gouvernement et qu'il ne seroit ja-
mais autre que très-bon serviteur du Roy (ne dit
point d'elle). M, le président Jeannin en fut fort
mécontent aussi, parce qu'il avoit baillé sa parole h
M. de Nevers,
M. de Vertau, trésorier de France à Châlons, en-
^ Phllippe^Emm>niiel de LaviU-Montmorency, marquis de Sablé, fils
du maréchal de Boisdauphin. — Madeleine de Souvré, fille de Gilles
de Souvré, gouverneur de Louis XIII, maréchal de France, est la célèbre
marquise de Sablé, dont M. Cousin vient de placer le portrait à côté
de celui de M"**^ de Longue ville, dans sa charmante galerie des femmes
illustres du xvu^' siècle.
2 Charles de Gonzague-Clèves, duc de Nevers, pair de France, gou-
verneur de Champagne, duc de Mantoue en lô27, mort en 4637,
5 Ghàteau-fort des ducs de Nevers, près de Sedan. Le célèbre Louis
de Gonzague, duc de Nevers, père de celui dont il s'agit, y triuta ma-
gnifiquement Henri IV en 1591, ( f'oy, Palma»<iayet, édition Petitot,
1" série, vol. 40, p. 311.)
^ Pierre Jeannin, né à Autun en 1540, premier présidept du Parlement
de Bourgogne, chargé par Henri IV des nùssions les plus import&Qtes,
surintendant des finances pendant la régence de Marie de Medicis, mort
À Pads le 31 octobre 1622. Ses Négociations ont été publiées pour la
première fois, en 1656, par l'abbé deCastille, son petit-fils.
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4 JOURNAL INÉDIT
Janvier tet4. levé par quatre hommes à cheval, au milieu de Châ-
lons, et emmené à la Cassine. Il avoit informé d'une
levée que les habitans de Rethelois font sur eux
pour M. de Nevers, sans permission du Roy. Et
avoit aussi fait mention, en son information, de di-
verses autres choses, comme : que lesdits habitans
appellent M. de Nevers Monseigneur, sans queue,
ont mis ses armes au-dessus de celles de France,
font faire montre à certaines compagnies, sans per-
mission du Roy. Ledit sieur de Vertau est habillé en
fol, et monté sur un asne, mené par toute la ville de
la Cassine et autres lieux où il avoit informé. —
M. de Nevers dit que quand il s'en estoit plaint à
M. le Chancelier *, il luy avoit dit que c' estoit un fol,
et qu'il l'avoit voulu traitter en fol. Sentence pro-
noncée audit sieur de Vertau par un homme habillé
en juge, cheveux et barbe rasez ^.
9. M. de Luxembourg ' porta le poignard à la
gorge d'un nommé Barrin, maître des Requestes.
Décret d'ajournement personnel.
^ Nicolas Brulart, marquis de Sillery, seigneur de Puisieux, conseil-
ler au Parlement en 1568^ président aux Enquêtes en 1584, maître
des Requêtes en 1588, ambassadeur en Suisse en 1589 et 1593, pré-
sident à mortier en 1597, plénipotentiaire à Vervins en 1599, ambas-
sadeur en Italie, en Suisse en 1602, garde des sceaux en 1604, chan-
celier de Navarre en 1606, chancelier de France en 1607, rendit les
sceaux en 1616, les reçut de nouveau en 1623, les rendit en 1624,
mort la môme année. (P. Anselme, t. vi, p. 524.)
2 Cette affaire se trouve aussi racontée dans les Mémoires de Pont»
chartrain (collection Petitot, 2* série, vol. 17, p. 35), mais le trésorier
si maltraité est designé sous le nom de Le Jau.
» Henri de Luxembourg, duc de Piney, prince de Tingry, pair de
France, né en 1593, mort en 1616.
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d'arnauld d'andilly. 5
M. le Prince ' part mal content de la Cour et s'en J*»^»»^ *•»*•
va à Chasteauroux.
On mande M. d'Espemon, qui estoit party mal
content de Fontainebleau, en octobre 1613, à cause
de la charge de premier gentilhomme de la chambre
refusée à son filz aisné, et s'en estoit allé à Metz
establir M. de la Vallette, son puisné ^.
17. Combat de MM. de Bours-Montmorency et
Bucan à la place Boyale contre le jeune Befuge
(tué) et des Bordes-Valencey.
24. M. du Maine * part mal content.
25. Combat de MM. des Marets et de Sainte-
More contre le marquis de Boûillac et Saint-Vincent,
à minuit et demy, sous les galeries de la place
Boyale. Sainte-More tué.
28. M. de Bouillon* part, emporte vaisselle d'ar-
gent et ineubles précieux.
* Henri II, prince de Condé, père du grand Condé, né en 1588, pre-
mier prince du sang, premier pair de France, gouverneur de Guyenne ,
chef du conseil de Régence à la mort de Louis XIH, mort en 1646.
2 Jean-Louis de Nogaret de la Valette, duc d'Epemon, né en 1554, duc
et pair, gouverneur de Normandie en 1581, amiral de France en 1587,
gouverneur de Provence, de Guyenne ; mort en 1642. — Henri, duc de
Candale. — Bernard de Foix et de la Valette, duc de la Valette, né en
1592, gouverneur de Guyenne; mort en 1661. — Le troisième fils du
duc d'Epernon était Louis de Nogaret, archevêque de Toulouse, qui
s'est rendu célèbre sous le nom de cardinal de la Valette, par son atta-
chement au cardinal de Richelieu, qui lui donna le commandement
des armées en Allemagne et en Savoie. D mourut en 1639.
* Henry de Lorraine, fils du célèbre chef de la Ligue, duc de Mayenne
et d'Aiguillon, pair et grand chambellan de France, gouverneur de
Guyenne, né en 1578, tué au siège de Montauban en 1621. Il est ap-
pelé tantôt duc de Mayenne, tantôt duc du Maine.
* Henri de la Tour-d'Auvergne, vicomte de Turenne, duc de Bouil-
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6 JOURNAL ÏNIÎDIT
Février m4. 7, M. dô VentadouF* et M. de Boissise^ envoyez
vers M. le Prince.
10. M. de Longueville* estant revenu et ayant
eu les lettres de son gouvernement, part, sans dire
adieu, de nuit. Il avoit donné parole de ne bouger
à la Reyne et à M. le comte de Saint-Paul \
11. M. de Vendosme'arresté dans sa chambre,
Ion, ué en 1555, maréchal de France en 1592, mort en 1623. {Foy, se»
mémoires.) Il fut père du grand Turenne.
* Anne de Lévis, duc de Ventadour, pair de France, gouverneur du
Limousin, lieutenant général du gouvernement de Languedoc ; mort
en 1632.
> Conseiller d'ÉUt.
* Henri d'Orléans , II« du nom, duc de LongueviUe, né en 1595^
pair de France, gouverneur de Picardie, puis de Normandie, plénipo-'
tentiaire à Munster en 1644, mort en 1663, après avoir joué un grand
rôle dans la Fronde, ainsi que sa seconde fenune, la célèbre sœur du
grand Condé, Anne-Geneviève de Bourbon, à qui M. Cousin a donné
une illustration nouvelle.
. 4 François d'Orléans, comte de Saint-Paul, pair, gouverneur d'Or-
léans, de Blois et de Tours, grand maître de France au sacre d'Henri IV
en 1594» gouverneur de Picardie pendant la minorité du duc de Lon-
gueviUe, son neveu, duc de Fronsac en 1608 ; mort en 1631.
s Cé§ar, duo de Vendôme, fils aîné de Henri IV et de Gabrielle d'Ës^
trées. — On peut voir des détails sur le départ des princes et la ligue
qu'ils formèrent^ dans les Mémoires de Sully (collection Petitot, 2* série,
vol. 9, p. 351), dans ceux de Richelieu (même coll., vol. 21 bis, p. 184),
et dans ceux de Pontchartrain (id., vol. 17, p. 37). Mécontents de la
Cour qui ne les favorisait point assez et sous prétexte de désordres
dans l'administration des affaires, les princes résolurent d'imposer leur
volonté par les armes; ils partirent furtivement, Condé le premier,
puis les ducs du Maine, de Bouillon, de LongueviUe^ etc. Le duc de Ven-
dôme seul ne put s'échapper et fut arrôté au Louvre par M. de Plain-
ville, capitaine des gardes ; mais il s'évada bientôt et se rendit dans
sou gouvernement de Bretagne. Ces mouvements se terminèrent par
une espèce de paix qui fut l'objet du traité de Sainte-Menehould, signé
le 15 mai 1614. — Au sujet du passage des Mémoires de Sully, auquel
je renvoie, je ferai remarquer que co passage se trouve dans un cha-
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D*AlKNâULD D*ANDItLY. 7
au Louvre, par M. de Plainville, au sortir du cabi^ i^tiier mu.
net de la Reyne. Chambre grillée*
12* M. le maréchal d'Ancre* part avec âO ou
40 chevaux pour aller à Amyens.
IS. Combat du sieur de Miraumont contre
M. de Nausé, au cloistre Saint-Gertnain»
14. M. de Cadenet^ envoyé à toutes les villes de
Champagne*
15. MM. de Ventadour et de Boissiae revenus
sans avoir veu M* le Prince^ qui estoit party de
Chasteauroux avec 20 chevaux, estoit passé l'eau
à Sully (M. de Sully n'y estoit) et de là est p^ssé à
Troyes, où il est entré, puis s'en est allé'.
16. Le comte de la Roche mis à la Bastille.
M. de Nevers bloque la citadelle de Mézières,
dont le lieutenant qui y commandoit luy avoit fermé
la porte. Ecrit à la Reyne. — La prend le lendemain
pitre intitulé : Précii de la Bé^ènce dé Matie dt Mèdicfs M dU H^ne
de Louis Xlll jusqu'en 1628, et qu'une note indique que ce mûrceùU a
été fait par un officier proteêtOHt qui étoit dans la Rochelle pendant le
siége^ et qui partagea toutes tes souffrances des habitants de cette mal-
heureuse ville* Ce chapitre, assez étendu, se retrou te^ atec quelques
variantes dans les Mémoires de Rohan. Lès éditeurs des collections
Petitot et Micbaud ont donc reproduit deux fois ce fi'agment UistdHque
assez considérable, d'abord dans les Mémoires de Sully, ensuite dans
ceux du duc de Rohan, auxquels il me parait appartenir plus légitime-
ment. (Conf. collect. Micbaud. Mém. de Sully, pi 589 el suit, et Mém.
de Rohan, p. 502 etsuiv.)
1 Goncino Concini, favori de Marie de Medids, marquid d'Ancre eh
1610, maréchal de France en 1613, a$«sassiné en 1617.
> Honoré d'Albert, sieur de Gadenet^ frère du duc de Lujrties, duc
de Chaulnes en 1619, pair de France en 1621, maréchal de Franeè,
gouverneur de Picardie en 1633, mort en 1649.
8 Voy. Pontchartrain, éd. citée, p. 168.
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8 JOURNAL INÉDIT
Février teu. gans résistance. — M. de Praslin y est envoyé avec
un exempt. Comme il est proche, M. de Nevers luy
escrit pour le prier de ne passer outre. Sur cela il
demeure et dépesche à la Reyne ; mais, sans attendre
réponce, il passe outre. M. de Nevers refuse de
rendre la place \
49. M. de Vendosme se sauve à huit heures du
soir, par la porte de derrière, d'une garde-robbe où
il estoit entré, avec madame sa femme ^.
21. M. du Roger apporte à la Reyne des lettres
de M. le Prince*.
22. M. de Fiefbrun en apporte au Parlement*.
Mars. 1. M. de Thou va vers M. le Prince ^
AvriL 5*. M. le Prince envoyé un gentilhomme à M.
* Foy, collect. Petitot, Fontenay-Mareuil, l'« série, vol. 50, p. 233;
Pontchartrain, 2* série, vot 17, p. 35 ; Richelieu, vol. 21 bis, p. 187,
et le Mercure français^ t. m, p. 312.
* Voy, Mercure français^ t. m, p. 359, des détails sur révasion du duc
de Vendôme et la lettre qu'il écrivit au Roi à son arrivée en Bretagne.
* Voy, Mercure français^ p. 317, ces lettres, ou plutôt ce manifeste
dans lequel le prince de Condé expose à la Reine les causes pour les-
quelles lui et les Princes se sont assemblés à Mézières.
* Voy. sur toute cette affaire le Merc, fr,^ p.. 327 et suiv., où se trouve
toute la correspondance échangée entre la Reine et le prince de Condé,
au sujet du départ des Princes»
* Jacques-Auguste de Thou, le célèbre historien, président à moi^
tier au Parlement de Paris, conseiller d*État, né en 1553, mort en 1617.
6 Lacune d'un mois dans le manuscrit Pendant ce mois il ne se
passa rien d'important. La mission du président de Thou, qui était
de convenir d'une conférence, entre les Princes et des députés de la Cour
pour faire la paix, avait réussi. On avoit décidé que cette conférence se
tiendrait le mois suivant à Soissons. ' >
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d'arnauld d'andilly. 9
de Rohan\ qui lui envoyé M. de Hautefontaine. Avruwu.
6. MM. les Princes arrivent -à Soissons avec
3,000 hommes de pied et 500 chevaux. Ils avoyent
stipulé que la Reyne feroit retirer ses trouppes et
n'avoient esté obligez à faire le mesme. — Faute.
MM. de Ventadour, de Thou, Jeannin et de Bois-
sise vont vers MM. les Princes pour traitter ^.
7. Nouvelle de la mort de M. le Connestable^
29 \ M. le Prince revient trouver le Roy. septembre.
^ Henri de Rohan, II« du nom, premier duc de Rohan, pair de
France, né en 1579, colonel général des Suisses, général en chef des
armées protestantes en 1621, mort en 1638, Il a laissé des mémoires
et d'autres écrits politiques importants. Le duc de Rohan dit dans ses
mémoires que, lorsque Hautefontaine, son envoyé, arriva auprès des
Princes, la paix étoit conclue, et que dès lors il n*eut plus à s'entendre
avec eux sur les conditions de Talliance proposée.
2 Arnauld d'Andilly oublie de mentionner M. de Bullion, conseiller
d'État.
* Henri,. I*' du nom, duc de Montmorency, premier baron, pair,
maréchal et connétable de France, gouverneur du Languedoc, né en
1534, mort le 2 avril 1614. Il était le quatrième connétable de sa maison.
'* Lacune de près de six mois dans le manuscrit. Les principaux
événements pendant cette période furent : la paix conclue entre la
Cour et les princes et signée le 1 5 mai à Sainte-Menehould. Les condi-
tions de ce traité furent : la convocation des États-Généraux pour la
réformation des désordres de l'État, et la surséance des mariages espa-
gnols (du Roi et de Madame) jusqu'à la minorité du Roi, ainsi que des
avantages considérables accordés aux Princes rebelles {Voy» ce traité,
Merc, fr., t. m, p. 428) — la mort du chevalier de Guise— le soulè-
vement du duc de' Vendôme en Bretagne et le tumulte de Poitiers —
Je voyage de la Reine-Mère et du Roi en Poitou et en Bretagne, pour
reprimer ces désordres — la mort du prince de Conty — le retour du
Roi à Paris (Voy. à l'année 1614, coUect. Petitot, Richelieu, 2« série,
t. XXI bis, Pontchartrain, t. xvii, Rohan, t. xviii, et surtout le Merc. fr,^
même année, t. m).
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Octobre 1614.
\0 jOOftN/iL ÎNIÎDÎT
2. Le Roy va au Parlement'»
25. Estats ouverts*.
0 Rejm* MABGUERfllî.
Madame. Madame Chîiestieicne.
M.duPerrow.
© ©
Ri. DE Sourd».
-M. le PRiifCE. REYWE. Monsieur.
M. DE Larochefou-
-M. le Comte. t ©
CAULT.
42
U- Rot.
-M. bE GUÎSE. ^
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-M. DE Rheims. ^ j,„ picrts M. T)U Maine.
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-M. DE Sully.
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Comte DE Saint Paul,
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Barreau. \ ^
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M. Tarchey. de Lyon, pour le Clergé.
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M. de Po*T-ST-PiER!iE,p*la Noblesse
©
M. Mtron , pour le Tlers^Estat.
Il se veid que les evesques et gentilshommes des-
< Pour la déclaration de sa majorité. Il venait d'accomplir sa
treizième année* {Voy, le compte rendu de cette solennité, Merc, fr.^
t. m, p. 588.)
2 C'est le 27 et non le 25 qu'eut lieu l'ouverture des États. — H y ft
quelques omissions dans le tableau d'Arnauld d'Andilly, notamment
celle des maréchaux de France, (voy, pour les détails de cette «oleu-
nité le Merc. fr., t. m, 2« part., p. 1 ot suiv.)
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D^ARNAOLD D'ANDILLY. Il
putez se sont assis en des bancs devant les conseillers
d'Estat, ce qui ne s' estait jamais pratiqué^ attendu
qu'ils sont là en qualité de supplians. Mais un peu
devant que le Roy vint, M. le cardinal de Sourdis\
M. d'Angers et M- Davy^ (qui alla parier à M. le
cardinal du Perron') firent une rumeur pour cela,
et M. le Chancelier, se fondant sur ce qu'il se pouvoit
faire qu'ils fesoyent cela à dessein pour rompre
l'assemblée, leur accorda de s'y mettre sans tirer à
conséquence; ce que M. de Villeroy* dit depuis
n'estre raisonnable et ne s'estre jamais pratiqué* Il y
fut apporté remède à la conclusion des Ëstats.
Octobre teu»
Duel de deux soldats des Gardes. Celuy qui avoit
tué, nommé , pris, par le bailly de Saint-Ger-
main et mis en prison.
M. d'Espemon, prétendant avoir commandement
du Roy et de la Reyne, sur ce qu'il leur avoit repré-
senté, marche à la teste d'une compagnie de Gardes
en armes (il en avoit une qui tenoit le Pont-Neuf) ,
va à la prison, demande le prisonnier. Sur ce que l'on
diffère, enfonce une porte et puis se le fait rendre.
Novembre.
* François d'Esooubleau, cardinal de Sourdis^ archevêque de Boiv
deaux en 1599, mort en 1628.
3 Jean Davy du Perron, seigneur de la Guette, conseiller au conseit
privé du Boi, archevêque de Sens, frère du célèbre cardinal.
* Jacques Davy du Perron, cardinal et grand aumônier de France,
né en 1556, mort en 1618«
^ Nicolafi de Neufville^ seigneur de Villeroy, né en 1542, seo'étaire
d'État sous Charles IX, Henri HI, Henri IV et Louis XIII, mort en
1§17. (yoy. Topinion de Richelieu sur ce personnage» Petitet^ 2* sé-
rie, t. XXI bi5», p. /|86.)
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12 JOOflNAL INÉDIT
Noyembrei«u. Lc Parlement prend connoissance de l'affaire.
Lorsque le Parlement vouloit délibérer sur cette
affaire, M. d'Espernon, avec 180 gentilshommes, va
au Palais (avoit soldats qui gardoyent les portes),
s'arreste à la boutique de la gantière ; ses gens com-
mettent infinies insolences. •»•
24. Jour qu'on devoit ouvrir le Parlement et les
chambres (M. du MesniP, et M. Perrot avoyent au-
paravant esté desputez vers Monsieur le premier Pré-
sident, pour luy dire que Messieurs des Enquestes
désiroyent se trouver en cette occasion, et que c' es-
toit chose que l'on ne leur pouvoit refuser). Mon-
sieur le Prince et M. de Sully ^ s'y trouvèrent sur le
sujet de l'ouverture.
M. de Praslin * vient avec, des lettres de cachet
et de créance portant que le Roy mandoit à Mes-
sieurs du Parlement différer deux jours de tra-
vailler en cette affaire. On opine. Trois sortes d'avis.
M. le Prince, M. Gilot, M. de Grenoble et M. Ma-
réchal opinèrent fermement. Passé que l'on super-
* Président des enquêtes.
2 Maximilien de Béthune, duc de Sully, né en 1560, pair de
France, surintendant des finances en 1597, grand maître de Tartillc-
rie, gouverneur du Poitou, maréchal de France en 1634, mort en
1641. Éloigné du gouvernement à la mort de son ami Henri IV, le
grand duc de Sully siégeoit comme pair.
3 Charles de Choiseul, marquis de Praslin, chevalier des Ordres,
conseiller d*État, lieutenant général au gouvernement de Champagne,
maréchal de France en 1619, gouverneur de Saintonge, commanda
aux sièges de Saint-Jean-d*Angély, de Montauban, de Montpellier
en 1622, mort en 1626. ï\ s'était trouvé à cinquante-trois sièges,
quarante-sept combats ou batailles, et avait reçu vingt-deux blessures.
{Voy, P. Anselme, t. vu, p. 440.)
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d'arnaold d'andilly. 13
sederoit les deux jours que le Roy vouloit, et que ce- Novembre leu.
pendant^ on n'ouvriroit point le Parlement. M. le
Prince dit à M. le premier Président (qui disoit
qu'il n'y avoit point d'apparence de faire cesser la
justice) , qu'il estoit question de compter les voix (qui
passoyent de plus de soixante) et non de discourir.
26. M. le Prince retourne au Parlement.
27. Lettres patentes du Roy au Parlement por-
tant qu'ils ayent à rendre la justice. Ordonné que
l'on obéiroit aux lettres. (Ensuite de quoy le Parle-
ment fut ouvert le lendemain) , et par restriction, que
l'on travailleroit incessamment à l'affaire de M. d'Es-
pemon.
28. M. de Ventadour va au Parlement leur dire
que le Roy remettoit entièrement l'affaire à leur
jugement ; mais qu'il les prioit d'avoir égard à l'âge
et à la qualité de M. d'Espemon. Sur quoy ils ré-
pondirent qu'ils feroyent tout ce qui plairoit au Roy.
Et sur cela, fut convenu que M. d'Espemon iroit
le lendemain leur faire des excuses. Ordonné que
l'information sera mise au greffe, sans estre veûe.
29. M. d'Espemon va au Parlement, avec M. le
Grand \ (M. le Prince y estoit encore que la Reyne
l'eût prié de n'y assister point, ce qu'il luy refusa.^
M. de Ventadour y alla premièrement, et puis entra
* Roger de Saint-Lary et de Termes, duc de Bellegarde, grand écuyer
de France, sous Henry IH, Henry IV et Louis XUI, gouverneur de
Bourgogne et de Bresse, duc de Bellegarde et pair de France en 1619,
surtintendant de la maison et premier gentilhomme de la chambre de
Gaston duc d'Orléans, mort en 1646. (V, P. Anselme, t, viii. p. 507.)
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là JOURNAL INÉDIT
Novembre isi*. avec M. d'Espcmon, lequel dit : que luy qui eatoit
un vieil capitaine, blanchy sous les armes, a voit
creu devoir maintenir sa jurisdiction, contre un petit
juge de néant, qui ne pouvoit entrer en aucune com-
paraison aveo luy, Que, pour le regard de la Cour,
il n'avoit jamais rien tant désiré que d'avoir l'hon^
neur d'estre de son corps, et qu'il seroit très-marry
de jamais rien faire qui luy pust déplaire. Le premier
Président de Verdun * répondit, entre autres choses,
que la Cour recevoit ses excuses et la satisfaction
qu'il luy faisoit, Sur quoy il dit, en jurant, à M. de
Ventadour, qu'on le traictoit comme criminel, et
qu'il vouloit répliquer. M. de Ventadour le retint, et
l'en empescha, et au sortir de là, parla à luy de
bonne sorte \
A Nicolas de Verdun, pFeoùep préfixent 4u Parlement de Toulouse,
nommé en 1611 premier président du Parlement de Paris. L'Estoile,
dans son journal, dit que cette dernière charge lui coûta, tant en prix
d^achat qu'en épingles, trois cent dix mille livres 1 Après avoir donné
de curieux détails sur la nomination du président de Verdun , il
ajoute : « Sur quoi je ne puis arrester ma plume, que je n*escrive ici
et déplore le vilain traficq et infâme prostitution qui se fait de nos
principaux estats en France pour de l'argent et principaleipent de
ceux de judicature. Car vendre la justice, qui est la" chose la plus
sacrée du monde, c'est vendre la République, c'est vendre le sang des
subjects, c'est vendre les loix, et, en estant les loiers de l'honneur, de
vertu, de savoir, de piété et de religion, ouvrir la porte aux larcins,
concussions, avarice, injustice, ignorance, impiété ; brief, à tous vices
et ordures. » (Petitot, 1" série, t. xlix, p. 190.)
2 Cette affaire est rapportée avec beaucoup plus de détails dans les
mémoires de Mathieu Mole, publiés pour la aociété de l'Histoire de
France, par M. Aimé GhampoUion-Figeac (t. i, p. 517), Mole venoit
d'être nommé procureur général. Reçu en cette qualité au Parlemeet
le 15 novembre, c'est le 18 qu'il porta plainte contre le duc d'Eper-
non. Le récit de Molô est d'autant plus important, qu'il- est appuyé
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d'aRNAULD o'Af^PItLY. 15
6. Conaeil de la Direction changé \ Ordonné Décembre len.
que la semaine se lira, et les principales affaires con-
cernant les finances se traicteront tous les sainedys
après rnidy, en un autre Conseil dans le Louvre, au-
quel assisteront le Roy, la Reyne, M, le Prince,
M. le cardinal de Joyeuse % M, de Quise% M, de
Nevers, M. de Bouillon, M. d'Eapernon, M. le Chan-
celier, MM. les préoédens Directeurs, M. de Pont-
Carré et M. de Bulli<» \
44. Madame de Longuevilla^ mal contente de
M. de Nevers, son frère, disant que son fils s'estoit
engagé, pour son seul respect, aux t)rQuilleries pas-
sées, et que maintenant, quand on avoit fait ce con-
seil de la Direction, il n'avoit dit un seul mot pour
sur les documents officiels. M. Aimé Champollîon-Figea«, not^ 3, p. 5,
reproche à M, Bazin d*avoir été ieexaot, en disaqt que M. d'Epw non ne
cessa de ce moquer du Parlement en des paroles fort hautes. Le compte
rendu d*Arnauld d'Andilly justifie quelque peu l'assertion du regret-
table M. Bazin, {f^ey, la môme afi'ah^, lUcbelieu^ t. xxi bii, 9* at^rie,
p. 215; Pontchartpain, t. xvii, p. 61.)
* Après la mort d'Henri IV, Sully ayant été disgracié en 1611, ou
établit des directeurs des finances pour faire la charge de surintendant.
(Vay. Mém. d*Arn. d'Andilly.)
3 François de Joyeiise, né en 1562, mort doyen des cf^rdinaux en
1615. (Foy, Merc. fr., t iv, p. 441, une notice sur cet illustre per-
sonnage.)
3 Charles de Lorraine, duc de Guise et de Joyeuse, prince de Join-
ville, pair et grand maître de Fi*^ce, né en 1571, mort en 1640-
* Claude de Bullion, seigneur de Bonnelle, conseiller m Parlement,
président aux Enquêtes, conseiller d'Etat, directeur des finances, su-
rintendant des finances en 1632, président ^ mortier en 1636, mort
en 1640. (F«|i, Tallem^pt des R^aux, t. 11, p. 145, l'historiette de ce
personnage qui fut un des principaux agents de Richelieu.)
5 Gatbenne de Gonzi^ue-Clèves, fille de Louis de Geinz^gue, duc de
^e?ers, 4achas^ douairière ^^ Longueviile, ^lorte en 1£^Q.
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16 JOURNAL INÉDIT
Décembre 1614. luy. M. de NeveFs l'ayant esté voir, elle s'enfenna
dans son cabinet, et luy tounia le dos.
19. M. de Villeroy, s' estant pleint à la Reyne de ce
que M. le maréchal d'Ancre avoit tenu mauvais pro-
pos de luy, et la Reyne luy ayant répondu qu'ils n'a-
voyent rien à démesler ensemble luy et M. le maré-
chal d'Ancre, ledit sieur de Villeroy se retire mal
content à Conflans. Aucuns disent que M. le maré-
chal d'Ancre voulant que M. de Longueville prit la
Normandie pour gouvernement, et luy laissast la
Picardie, M"' de Longueville dit qu'elle suivroit le
conseil de ses amis, et particulièrement de M. de
Villeroy. Et que depuis, l'affaire ne s' estant achevée
le maréchal auroit creu que M. de Villeroy en estoit
cause, dont il se pleignit tellement qu'il vint jusques
à l'appeller traistre, dequoy M. de Villeroy s' estant
pleint à la Reyne, elle ne l'auroit satisfait.
M. de Pisieux * l'ayant esté trouver à Conflans, il
revint le 20, qui estoit un samedy ^ Alla voir M. le
* Pierre Brulart, marquis de Sillery, vicemte de Puîsieux, né en
1583, grand trésorier des ordres du roy, secrétaire d*État et des com-
mandements et finances en 1606, conseiller d'État en 1607, ambassa-
deur en Espagne en 1612, mort en 1640. Il épousa en premières noces
Madeleine de Neufville-Villeroy, fille de Charles de Neufville, marquis
de Villeroy et d'AIincourt, morte en 1618 et en secondes noces Char-
lotte d*Etampes-Valençay, fille de Jean d'Etampes seigneur de Valen-
çay, mariée en 1615, morte en 1677.
^ M. de Puisieux étoit probablement porteur de la lettre suivante,
écrite au nom de la Reine à M. de Villeroy par le président Jeannin
pour rengager à revenir à la Cour, lettre que je copie sur l'autographe
original qui m'appartient : « Monsieur, j*ay communiqué vostre lestre
» à M. le Chancelier aussitost que Tay receue et luy et moy avons
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d'arnauld d*andilly. 17
maréchal d'Ancre (ce qui fut trouvé indigne de owembrtieu.
luy) avec le cardinal de Sourdis qui l'y mena. Y fut
longtemps.— N'en sortit trop satisfait. On a voit pro-
posé dans les Estats de demander qu'il fust rap-
pelle. — S'il fust demeuré encore quelques jours à
Conflans, il l'eust esté glorieusement. — La Reyne,
à son retour, le tança, disant qu'il l'avoit, en se reti-
rant, laissé exposée à l'envie, pour ce qu'il avoit sem-
blé qu'elle eust esté méconnoissante des services
qu'il avoit rendus. — Outre la cause cy-dessus allé-
» jugé qu'il estoit expédient de parler à la Roine sur ce qui vous
» concerne et mesrae de luy faire tenir la mesme lestre qui est si
» bien, considérant que ne luy pouvions rien dire plus à propos,
» Sa Majesté en a volontiers entendu la lecture et nous a fait rcs-
» ponce qu'elle estoit très assurée de vostre affection et fidélité au
» service du Roy et au sien quelle vous prioit instaraent a vous y con-
» duire comme avez fait et que de son costé elle feroit en vostre en-
» droit comme elle a accoustumé, adjoustant que Monsieur le Chan-
» celier et moy vous en donnions advis. Monsieur le cardinal de
» Joieuse nous a parlé et Monsieur d'Espemon aussi qui se monstre
n très-affectionné en vostre endroit et sommes tous d'advis que venies
» ici des demain si pouves pour y estre un jour si ne voules y estre
» davantage et après retourner à Conflans pour y faire vostre feste.
» Vostre départ de ceste Cour qu'on publie estre ainsi {illisible) est
» grandement préjudicable au service de Leurs Majestés, et si ne faites
» perdre ceste opinion par vostre retour et en vous conduisant conmie
» aves accoustumé, la Roine croira que le faites exprès pour en faire
» tomber la hayne sur elle. Je vous suplie humblement de ne le pas
» faire et de donner quelque foi au conseil de ceux qui vous honorent
» et a moy particulièrement qui suis. Monsieur, vostre humble et
» obéissant serviteur,
» P. Jeai<inin.
« A Paria, ce samedi au soir xx décembre. »
Au dos : A Monsieur Monsieur de Villeroy.
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18 JOURNAL INiSdIT
DéeenibN iti«. guée de cctte affaire, on dit que la Reyne ayant de^
mandé à T ambassadeur d'Espagne, si son maistre
n'estoit pas résolu d'accomplir promptement les ma^
riages, il reapondit que l'affaire n'estoit pas en termes
de s'avancer, puisque M. de Villeroy avoit escrit h
M. de Vaucelas *, qu'attendu les mouyemens qui
estoient en France, il taschast de différer pour deux
ans l'accomplissement des mariages. Que sur cela, la
Reyne s'en estoit mis fort en colère, disant qu'elle
n'avoit point donné charge de cela. Et ayant mandé
M. de Villeroy, lui parla avec aigreur sur ce sujet ;
et que le maréchal d'Ancre, qui estoit derrière elle,
dit tout haut : ce n'est pas la première trahison qu'il
a faite. Que sur cela, la Reyne ne dit mot, et que
M. de Villeroy piqué s'en alla à Conflans.
Or après que M. de Villeroy eut veu M. le maré-
chal à son retour de Conflans, ledit sieur maréchal
envoyaprier M. le premier Président de le venir voir,
et luy dit sur quel sujet estoit venue la broûillerie, et
notamment que c' estoit à cause que M. de Villeroy
avoit escrit en Espagne. Il dit la mesme chose à
beaucoup d'autres, ce qui est interprété comme une
espèce de manifeste, afin d'éviter l'envie qu'il en-
courroit sur l'opinion que l'on concevroit qu'il au-
roit esté cause de la disgrâce de M. de Villeroy.
Cause de l'inimitié dudit sieur Maréchal envers
M. de Villeroy : que sur le sujet du gouvernement de
* André de Cochefilet, baron de Vaucelas, conseiller d^État, capi-
taine do 50 hommes d'armes, ambassadeur en Espagne et en Savoie.
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d'ARNAULD O^ANDILr.Y. 19
Picardie, ledit sieur de Villeroy dit que c'estoit bien
assez de donner des lieutenances de gouvernernens à
des estrangers, mais que de leur donner en chef, il
n'y a point d'apparence. — Sur ce différent, M. d'A-
lincourt * arriva le 23 ou 24 en poste de Lyon, et
en mesme temps, alla voir M. le maréchal d'Ancre.
Depuis, M. le Maréchal a désisté d'insister sur la
lettre écrite par M. de Villeroy, mais a dit quMl
avoit tenu lesdits propos avec l'ambassadeur d'Es-
pagne ; ce que ledit ambassadeur a dénié *.
20. M. le président Jeannin, assisté de M
va dire, aux Augustins, à Messieurs des Estats, que
le Roy leur accorde la recherche des finances, sous
le nom de chambre ardente \
29. Messieurs du Parlement s'assemblèrent, sur
le sujet de la paulette, et aussi le 30 et 31 \
* Charles de Neuf ville, marquis d'Alincourt, gouverneur du Lyon-
nais, fils de M. de Villeroy et père de Nicolas de Neufville, marquis
de Villeroy qui fut gouverneur de Louis XIV et maréchal de France. Le
marquis de Villeroy devant épouser la fille du maréchal d*Ancre, cette
alliance projetée permettait à M. d*Alincourt de s'interposer entre le
maréchal et M. de Villeroy. Ce mariage n*eut pas lieu.
2 Foy. sur cette brouille entre Villeroy et le maréchal d'Ancre,
Pontchartrdin, t. xvn, p. 64.
> C'était une commission extraordinaire nommée pour rechercher
les malversations dans les finances et juger les agents coupables de ces
malversations.
^ La paulette ou pâlotte qui a été la cause d'interminables débats
entre le Parlement et le grand Conseil^ était un impôt prélevé
annuellement sur les offices de justice et de finances, moyennant le-
quel le privilège de l'hérédité leur était assuré. On appelait aussi cet
impôt le droit annuel. Cette mesure fiscale établie par Henri 1\, en
consacrant la vénalité des charges et en les rendant héréditaires, leur
fit acquérir une valeur considérable. (Voy, sur cette question le Merc.
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20 JOURNAL INIÊDIT
Décembre leu. Mort de M. Ic iTiaréchal de la Ghastre *. Sa charge
donnée à M. de Roquelaure \
fr.^ U III, 2* part., p. 72 et suiv., où se trouve Tanalyse de toutes les
raisons pour et contre la paulette.)
* Claude, baron de la Chastre, né en 1526, gouverneur du Berry
sous Charles IX, maréchal de France en 1593, mort en 1614.
s Antoine, seigneur de Roquelaure, grand maître de la garde-robe
en 1580, gouverneur de Guyenne, maréchal de France en 1615, mort
en 1625.
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^6^5
SOMMAIRE
Janvieb. — Remontrances du Parlement sur Tarticle l*' du cahier du
Tiers-État. — Arrêt du Conseil à ce sujet. — La paulette. — Dis-
cussion sur Tart. 1*'. — Brouille du cardinal de Sourdis et de M. le
Prince. — Duel du marquis de la Force avec M. de Grammont. —
Réclamations de l'ambassadeur d'Angleterre contre le cardinal du
Perron. — État des finances. — Propositions d'Amauld l'intendant.
Violences exercées envers M. de Riberpré. — M. de Puisieux chargé
des deniers du taillon. '— Amboise enlevé à Monsieur le Prince. —
Suppression du 1" article. — Jugement d'une prise faite sur les Espa-
gnols par Barre et Fleury, capitaines français. — Duel de Livarrot
et Auvilars contre la Fei*té et la Trye. — Le clergé récuse la juri-
diction du Parlement. — L'Évêque d'Angers et le Chancelier.
FÉVRIER. — Violences de M. de Bonneval envers M. de Chavaille. —
Bonneval condamné à mort — Affaire de Marsillac et de Rochefort.
—Conduite de Monsieur le Prince envers le Parlement et la Reine.—
Plaintes du député Digoine. — Excuses de M. le Prince. — Délibé-
rations des États. — Brouille de M. de Souvré et de M. de Luynes.
— Clôture des États. — Séance royale.
I^ns. — M. de Luynes a le gouvernement d'Amboise. — Délibéra-
tions du Parlement et du Conseil sur la paulette. — Les trois Ordres
au Louvre. — Mort de la reine Marguerite. — Soumission de M. de
Vendôme.
Avril. — Réconciliation du maréchal d'Ancre avec M. de Longueville
et M. de Villeroy. — Duel de M. de Bressîeux et de M. de la Valette.
— Duel du vicomte de Rabat et de M. de Longnac. — Discussion au
Conseil sur les finances ; discours d'Amauld. — Le Parlement mandé
au Louvre. — Remontrances. ~ Querelle d'étiquette au sujet de la
queue du manteau royal. — M. de Candale, premier gentilhomme de
la Chambre. — Soumission de Monsieur le Prince.
Haï. — Duel de M. de Losières et de M. de Madaillan. —Surséance à la
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22 JOURNAL INÉDIT
révocation de la paulette.— Départ de Monsieur le Prince pour Valéry.
— Remontrances du Parlement sur les désordres de l'État. — Discus-
sions entre le Parlement et le Conseil. — Paroles de la Reine. —
Arrût du Parlement cassé.
JoiN. — Délibérations du Parlement au sujet de Tarrêt cassé. — Rè-
glement du Conseil. — M. le Prince à Saint-Maur. — Violences de
M. de Canisy. — Querelle d'étiquette entre M"* de Longueville et la
duchesse de Guise.
Juillet. — M. de Villeroy député vers M. le Prince. — Prétentions
de celui-ci. — Le Roi fait tirer douze cent mille livres de la Bastille.
— Conférences des Princes. — Assassinat de M. de Prouville par Ma-
rianna. — Rupture des Princes avec la Cour. - Pontchartrain en-
voyé vers Monsieur le Princô
AooT. - M. de Longueville se retire à Amiens. — Duel de MM. de
Montmorency et de Portes contre MM. de Retz et de Vitry. — Le ma-
réchal d'Ancre va à Amiens. — Le Parlement mandé au Louvre au
sujet du départ du Roi pour son mariage. — Mesures pour la sûreté
de Paris pendant l'absence du Roi. — M. de Chevry nommé inten-
dant des finances — Ordre au président le Jay d'accompagner le Roi.
— Manifeste de Monsieur le Prin(;e. — Le maréchal de Boiîîdauphiu
chargé du commandement général de l'armée. — Le Conseil délibère
sur la guerre. — Le Parlement délibère sur le danger du départ du
Roi. — M. de Loménie fils a la survivance de la charge de son père.
— Départ de la Reine-Mère et du Roi. — Arrestation du président
le Jay. — Remontrances du Parlement. — Détails sur le voyage du
Roi. — Administration des affaires pendant l'absence du Roî. — Ar-
restation du sieur de Foraise, agent de Monsieur le Piince.
Septembre. — Nouvelles du voyage du Roi et de la marche de son
armée. — Assemblée de Grenoble. — Déclaration du Roi contre
Monsieur le Prince. — DéHbérations du Parlement
Octobre. — Affaires entre les armées du Roi et celles de M. le Prince.
— Mariage du Roi à Burgos et de Madame à Bordeaux. — Prise de
Clermont par le maréchal d'Ancre. — Passage de Rony par l'armée
de M. le Prince. — Conduite du maréchal de Boisdauphin.
Novembre. — Échange de Madame et de l'Infante. — Nouvelles de la
guerre. — Le Roi et la jeune Reine font leur entrée à Bordeaux. —
Marche des armées.
DÉCEMBRE. - M. de Guise , lieutenant général des armées du Roi.
— Duel de M. de Montglat et de M. de Vitry. — M. de la Roche-
Guyon, grand louvetier. - M. de Rheims, cardinal. — L'amice de
Monsieur le Prince à Olcron
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D^AKNAULD D'ANDILLY. S8
% Messieurs les gens du Roy, ayant fait leurs J«nv»«^ *«•••
remonstrances à la Cour sur les disputes et opposition
faite par le clergé en la résolution du premier ar-
ticle du cayer du Tiers-Estat de Paris, touchant la
puissance temporelle prétendue par le Pape, (M. le
cardinal du Perron avoit harangué la Noblesse, et
Tavoit gagnée,) la Cour ordonna qu'on reliroit tous
les arrests donnez sur ce sujet.
3. Conseil tenu au Louvre , (auquel assistoyent
les officiers de la Couronne et entre autres MM. de
Buillon, de Rohan et de Sully) sur le fait dudit ar*
ticle. — Tous opinèrent unanimement pour la con*
servation de la puissance et de la personne du Roy.
— Ordonné que le Roy interdit tant aux Estats qu'à
la cour de Parlement la connoissance de cette alTaire
et la retient à soy et à son Conseil, et envoyé arrest
et lettres patentes au Parlement sur ce siyet.
M, d'Espernon auteur de toute cette menée.
4. M. le Premier Président pour le Parlement,
M. le président de Cbevry* pour la Chambre des
Comptes, M* le président Chevalier^ pour la Cour
des Aydes, et M. Lefèvre pour les Trésoriers de
^ Charles Duret^ seigoeur de Chevry, conseiller d*État, intendant et
contrôleur général des finances, président en la Chambre des comptes
de Paris, greffier des ordres du Roi, mort en 1636. n était le frère du
médecin Jean Duret. {f^oy. Thistoriette de ces deux personnages,
Tallemant des Réaux, édition Monmerqué et Paulin Paris, 1. 1, p. 421,
et surtout le savant et précieux commentaire de M. P. Paris.)
' Nicolas Chevalier, né en 1563, surintendant de Navarre et de
Béarn, deux fois ambassadeur en Angleterre, premier président de la
cour des Aides.
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2/i JOURNAL INEDIT
janMer i«». Fratice , haranguèrent le Roy et la Reyne pour la
conservation de la paulette.
Quand la Reyne vit Messieurs du Parlement, elle
leur dit qu'ayant le Roy à leur porte, ils ne devoyent
point délibérer d'une affaire de si grande consé-
quence (parlant de celle de l'article du Tiers-Estat)
sans l'avertir, et leur défendit de signer l'arrest, qui
n'est signé que du rapporteur.
7. M. Tevesque d'Angers ', assisté de Messieurs
du clergé et de quelques-uns de la noblesse, vient
trouver le Roy et la Reyne sur le sujet de l'arrest du
Conseil du 3 précédent, et parle fort hardiment.
8. Le lendemain matin, ledit evesque d'Angers,
assisté de MM. les cardinaux de Sourdis, du Perron,
de Larochefoucauld ^, et Bonzy ', de plusieurs eves-
ques et de plusieurs gentilshommes, vient de rechef
trouver le Roy, et parle avec une insolence ef-
froyable.— Demande la cassation tant de l'arrest du
Parlement, que de celuy du Conseil. — Soutient que
la connoissance de cette affaire n'appartient ny au
Parlement ni au Roy, attendu que c'est un point de
conscience, dont le clergé est seul le juge. — Disent..
* Cet évêque d'Angers qui joue un si grand rôle dans les États et
parle avec tant d*énergie pour le clergé, est Charles Miron, oncle de
Robert Miron, prévôt des marchands et président de Tordre du Tiers,
n avait été nommé en 1588 évêque d'Angers, à l'âge de dix-huit ans,
devint archevêque de Lyon en 1626 et mourut en 1628.
2 François de la Rochefoucauld, né en 1558, cardinal en 1607, grand
aumônier de France en 1618, mort en 1645.
5 Jean Baptiste Bonzy, né en 1554 à Florence, évêque de Béziers,
cardinal en 1611, mort en 1621.
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d'arnauld d*andilly. 36
( ce fut M. le cardinal du Perron qui dit cela ) que ianvier nu.
si on ne leur accorde, ils quitteront rassemblée des
Estats ; qu'ils useront de toutes sortes d'incomprefr-
tations, et d'excoinmiuiications, et d'anathématisa-
tions, contre tous ceux qui s'opposeront à cette
créance, afin de les précipiter dans les peines, les
géhennes, le feu, les enfers. — Demandent que ceux
de la religion ayent à se désister d'opiner sur celte
affaire (sur cela M. de Buillon prenant la parole, dit
que le Roy et la Reyne sa voient avec quelle modestie
luy et ceux de la Religion avoyent parlé en cette af-
faire, lorsque le Roy leur avoit commandé d'en opi-
ner, en qualité d'officiers de la Couronne, mais que
pour le fond, luy et tous ceux de la religion ren-
droyent toujours au Roy l'obéissance qui luy est
deue) ; que le premier advocat du Roy du Parlement
soit toujours ecclésiastique, et que M. Servin' soit
déposé. — Après, M. le cardinal du Perron prit la pa-
role et confirma tout cela, et sur le sujet de l'excom-
munication dont il parla. Monsieur le Prince dit (je
l'ay ouy de sa bouche) : Nonobstant toutes les excom-
munications, il se trouvera toujours beaucoup de
François , qui , en conservant le respect qui est deû
au Pape, pour ce qui concerne le spirituel, employè-
rent volontiers tous leurs biens et leurs vies, pour la
* Louis Servin, conseiller d*État, premier avocat général au Parle-
ment de Paris, mort dans Texercice de ses fonctions en 1626, tandis
qu*au nom de sa compagnie il faisait des remontrances au Roi tenant
son lit de justice. Les plaidoyers de ce magistrat célèbre par son élo-
quence et son énergie ont été recueillis en 1631, in-4^ Il a laissé plu-
sieurs autres ouvrages tant latins que français.
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36 JOURNAL INJÉDIT
Janvier !«!•» conservatioti de Tautorité et du service du Roy.—
Sur cela, M. de Yilleroy dit: qu'il sçmble que Teveâ-
que d'Angers se soit porté fli violemment en cette
affaire, et ayt offencé le Parlement expressément
afin d'obtenir évocation d'un procès qu'il a contre
son clergé d'Angers, craignant de retomber au ju-
gement dudit Parlement où il a déjà esté maltraitté.
On leur devoit répondre : que le Roy avoit très*
agréable qu'eux et tous ceux qui oseroyent penser à
tenir des langages si insolcns se retirassent des Es-
tats, et laissassent ceux qui voudroyent demeurer,
résoudre les affaires, et sur cela, faire expédier une
déclaration. — On tient qu'en cette affaire, ils ne
prennent avis que des cardinaux et des evesques, et
non des capitulans , et que le prieur des chartreux *
et carmes ayant voulu prendre la parole sur des
propositions que faisoit le cardinal du Perron, et
voyant la violence dont il usoit pour l'empêcher de
parler, disant qu'après tant de grands prélats qui
avoient traitté cette affaire , il s'estonnoit comme il
en pouvoit douter, il répondit que puisque cette af-
faire se traittoit par autorité et non par raison , il
n'avoit plus rien à dire.
Les cardinaux sont récusables sur cette affaire,
attendu que n'y ayant qu'un degré d'eux au Pape,
ils peuvent estre Papes, ou faire les Papes.
Semble que M. le cardinal du Perron se porte à
^ Adam Oger, député du clergé pour la préYdtéi rille el vicomte
de Paris.
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d'ARNAULD D'AWDILLr. 27
ces aigreurs extraordinaires par la suggestion de JanriepMiK
son frère qui a grand part avec M. d'Espemon, les
Jésuites, et la duchesse de Guise. — L'evesque d'An-
gers traitte avec luy pour Tarchevesché de Sens.
Le cardinal du Perron dit aussi que l'on vouloit
introduire en France la confession d'Angleterre , et
que c'estoient des pensionnaires du Roy d'Angleterre
qui le procuroyent.
Le cardinal de Sourdis dit à Monsieur le Prince,
qu'il le récusoit au nom de tout le clergé, à ce qu'il
s'abstint d'opiner sur toutes les affaires qui regardent
l'Eglise. A quoy Monsieur le Prince répondit (causé
de la récusation , sur ce qu'il s'estoit ouvert) : Cela
est bon aux autres compagnies, mais non au Conseil*
où l'on ne laisse d'estre juge encore que l'on s'ouvre.
La Reyne témoigna estre piquée de tant d'inso-
lences. Le Roy leur répondit: qu'ils dressassent leurs
cayers promptement, et qu'il leur donneroit toute
sorte de contentement. Monsieur le Chancelier ne dit
quasi rien.
L' après disnée, le ca/dinal de Sourdis vint au
Conseil des finances ; après y avoir un peu esté , il
s'en alla. Monsieur le Prince ne luy osta son cha-
peau. Après que le Conseil fut levé, il rentra. Comme
Monsieur le Prince le vit approcher, il dit au Roy et
à la Reyne^ qu'ils savoyent l'insolence dont le Car-
dinal a voit usé le matin contre sa qualité de Prince
du sang ; qu'il supplioit leurs Majestez de ne point
sou^ffrir qu'il fust opprimé en cette qualité, et de luy
permettre de savoir si le clergé le voudroit avouei* ;
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28 JOURNAL INlâDIT
Janvier i6i». en cc cas, foriTier SE pleinte contre le clergé, et s'i.
le désavouoit, former sa pleinte contre le cardinal de
Sourdis en particulier. — Le Roy et la Reyne luy
répondirent assez doucement , qu'il fist ainsy qu'il
avîseroit. — Après, le cardinal de Sourdis approcha,
qui dit, qu'il supplioit leurs Majestez d'avoir agréable
la récusation qu'il avoit faite contre Monsieur le
Prince, attendu qu'il s' estoit ouvert, et que tout juge
qui s'ouvre est récusable. Ensuite de cela, Monsieur
le Prince demeura un peu, puis parla à M. le maré-
chal d'Ancre, et sortant incontinent après, il dit : que
le cardinal de Sourdis estoit un prestre, qu'il ne le
pouvoit offencer, qu'il avoit rendu au Roy et à la
Reyne tout le respect qu'il leur devoit, que pour le
fond de l'affaire , il se tiendroit toujours en gros
pour le service du Roy ; que quant à son particulier,
il feroyt ce que leurs Majestez luy commanderoyent.
— On dit que sa résolution est de savoir si le clergé
avoue M. le cardinal de Sourdis; s'il l'avoue, de for-
mer sa pleinte contre tout le clergé, sinon, de la faire
contre le cardinal de Sourdis en particulier. — Cette
procédure n'est bonne, car il y a apparence que le
Clergé ne le désavourra pas, mais il faudroit former
la pleinte contre luy en particulier, attendu qu'il ne
luy appartient point d'avancer cette parole sans en
avoir charge expresse du Clergé, par délibération
faite exprès sur ce sujet; ou que si cela n' estoit
point, il devoit estre chastié, etc.
On remarque que MM. de Guise furent ce jour là h la
chasse, et que M. d'Espernon n'alla point au Louvre.
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d'arnaold d'andilly. 29
Lorsque le cardinal de Sourdis fit sa récusation , Janvier imi.
Monsieur le Prince devoit répondre que sans le res-
pect du Roy et de la Reyne, il luy eust passé son
espée à travers le corps, pour avoir esté si téméraire
que d'oser prononcer cette parole contre un Prince
du sang, sur le sujet d'une affaire si importante \
9. M. le marquis de la Force ^ ayant de long-
temps querelle avec M. de Grammont ', se dérobbe
le soir, auparavant de ses gens, dans le Louvre;
sort par la porte des cuisines où deux chevaux de
M. de Saint-Angel, son cousin, les attendoyent. Vont
coucher hors la ville. Le lendemain 9, à quatre
heures du matin, Saint-Angel va dire à M. de Gram-
mont que M. de la Force l'attendoit en tel lieu*
M. de Grammont va avec luy, avec son escuyer ré-
puté vaillant. — Arrivé, dit qu'il se veut battre à
cheval. — M. de la Force dit qu'il n'estoit raison-
nable, veu qu'il estoit mal monté, et que l'autre
avoit le Cardinal (barbegris à M. de la Rochefou-
cault, valant 1200 écus). Néantmoins, se battent.
M. de la Force blesse M. de Grammont au bras, re-
tournant à la passade, et M. de Grammont blesse
en... du corps; son cheval fait un saut, le jette
à terre. M. le marquis de la Force luy fait rendre
^ Voy, le Merc, fr.^ t. m, qui entre dans les plus grands détails sur
les délibérations des assemblées des États et donne l'analyse des prin-
cipaux discours prononcés dans les réunions des trois ordres.
' Armand Nompar de Gaumont, deuxième duc de la Force, pair,
maréchal de France en 1652, mort en 1675.
' Antoine de Gramont, deuxième du nom, comte de Gramont, de
Guiche, de Louvigny, duc et pair en 1643, mort en 1644.
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MDVier IMt.
SO JOURNAL INéBIT
Tespée (ne le veut tuer), puis va séparer les se-
conds qui se battoyent à pied, à Tespée seule. Saint-
Angel avoit baillé un coup d'espée à son homme au
bras; ils estoient aux prises, il luy oste les armes;
puis s'en viennent luy et M. de la Force, avec les
quatre espées, chez M. de la Force le bonhomme* ;
de là chez M. de Rohan, où ils couchèrent M, de
Grammont dit que M. de la Force avoit fait ce qu'il
put pour le tuer, qu'il luy fit passer son cheval cinq
ou six fois sur le ventre et le laissa pour mort, et
que luy avoit perdu le sentiment à cause des fou-
lures du cheval ; et que sur cela, M. de Saint-Angel
estant venu, ramassa son espée. Cause de nouvelle
querelle. — Le lendemain, un gentilhonune de M, de
Grammont qui n'ayant esté par le chemin que son
maître luy avoit dit, ne l'avoit pu trouver, fait ap^
peler M. de Saint-Angel chez M. de Rohan qui en
fut fort indigné ^
M. l'ambassadeur d'Angleterre fut trouver M. de
Villeroy pour avoir audience de la Reyne, afin de se
pleindre de ce qiie le cardinal du Perron avoit dit, et
à Sa Majesté, et par plusieurs fois dans les Estats^
que c'estoyent des pensionnaires d'Angleterre qui
* Jacques Nompar de Caumont, premier duc de la Force, père du
narquis, né en 1550, maréchal de France ep 1622, duc et pair en 16S7,
mort en 1652. U a laissé des mémoires.
> « En ce temps les duels furent si communs que deux seigneurs
de Gascongne, sçavoir : le comte de Grammont, Tun des députei aux
Estats et le marquis de la Force, capitaine des gardes du corps,
avec leurs seconds, se trouvèrent et se battirent à cheval au Pré aux
Clercs. » {Merc fr.^ t. m, p. 210.)
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d'ABNÂDLD D*AlfOILLY. 81
procuroyent et avoyent mis en avant Tapticle du Jtinn^iiWi
Tiers-Etat — M. de Villeroy l'en veut dissuader,
mais ne peut le faire.
Le Parlement s'assemble but le sujet de l'arrest
du conseil et letfare^-patentes qui luy avoyent esté
envoyées, portant interdiction de connoistre de ce
qui concerne l'article du Tiers -Estât Dix opinent
vertement — On dit qu'un d'entre eux dit au Pre-
mier Président qu'il ne méritoit point de les prési-
der, puisqu'il se portoit si laschement à une affaire de
telle conséquence. — L'heure sonne, on se retire.
10. Le Parlement se r' assemble; on achève
d'opiner. Ordonné que l'arrest du conseil et lettres-
patentes ne seront enregistrez dans le registre de la
Cour, mais qu'ils seront gardez à part
Au conseil de l'Entresolle, M. le président Jeannin
lit l'estat général des finances ; la conclusion est,
qu'il y a un million d'or de faute de fons. — Après
cela, il se taist, et se passe un fort long temps avant
que personne ne die mot. Ce que voyant, M. Ar-
naud ' prend la parole, dit : qu'il voyoit que per^
* Isaac Arnauld, seigneur de Corbeville et de la Roche, intendant des
finances, oncle d'Ârnauld'cl*Andilly. Nonimé intendant en 1605, il prit
en qualité de premier commis son neveu, quoique celui-ci n*eût alors
que seize ans et le forma aux affaires. « La reine-mère, Marie de Me-
» dicis, alors régente , alloit d'ordinaire au conseil des finances (dont
» Arnauld faisait partie), et quand le feu Roi commença à croître, il y
» alloit aussi. Comme mon oncle étoit extrêmement considéré de la Reine
» et des ministres à cause de son extrême capacité, J'avois l'avantage
» que nul autre k l'âge que j'avois alors n'a jamais eu, d'entrer dans la
» conseil et d'y demeurer tant qu'il duroit derrière les chaises du Roi
» et de la Reine à voir opiner, ce qui ne me donnoit pas une petite con-
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32 JOURNAL INÉDIT
Janvier 1616. soDHe nc disoit mot ; que néantmoins il tenoit que
l'affaire qui se présentoit estoit la plus importante
qui se présentast aujourd'hui dans l'Estat ; et que,
de ce que la Reyne résoudroit présentement, dépen-
doit ou la ruine ou le salut du royaume, et tout en-
semble de son autorité, pour ce que la faute de fons
des finances estoit qui pouvoit apporter le plus grand
désordre; que le Trésorier de l'Espargne n'ayant
point d'argent, ne pourroit faire sa charge; que
tout ce que l'on luy ordonneroit ne serviroit de rien.
Sur cela, la Reyne luy dit : Et bien, que faut-il donc
faire? Il reprit : qu'il faloit donc nécessairement re-
médier à cette faute de fons d'un million d'or; que
le seul moyen estoit de se retrancher sur la dépence ;
qu'il croyoit que le devoir de sa charge et sa con-
science l'obligeoyent de dire franchement et nette-
ment la vérité ; qu'il estimoit donc que pour ce qui
concemoit la dépense de la maison du Roy, il estoit
comme impossible d'y rien retrancher; qu'il faloit
venir aux pensions qui estoient montées à une somme
si excessive, qu'il faudroit avoir les Indes-Orientales
et Occidentales pour y subvenir; qu'il estoit donc
d'avis d'en retrancher un quartier montant à onze
cent mil livres; qu'un des autres plus grands re-
tranchements qui se pouvoyent faire estoit sur les
» noissance des affaires. » (Mémoires d'ArnauId d'Andilly, édition citée,
p. 360.) Foy, en tête des mémoires d'ÂruauId d'Andilly la notice qu*il
consacre à son oncle Isaac Amauld, riutendant des finances, dont il
analyse plusieurs fois dans ce Journal les discours et les propositions
au conseil des finances.
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d'arnaold d*andillt. 8S
gens de guerre ; qu'il désireroit qu'on en peust en- ^i»ti«r lus.
tretenir deux fois davantage, mais qu'il valoit beau*
coup mieux en retrancher que de courir à une ruine
infaillible ; qu'on avoit parlé de retrancher la moitié
des Suisses ; mais que puisque la Reyne se vouloit
tenir forte, afin d'accomplir les mariages, qu'il pen-
soit que l'on se pourroit contenter de 1200 en gar-
dant 10 compagnies de 180 hommes chacune ; qu'il
faloit aussi prendre les deniers du taillon. Sur cela,
M. le Prince ayant pris la parole (M. de Bulion n'y
estoit) , et fait un grand discours, après l'avoir laissé
tout dire, il répliqua : que quand le Roy mourut on
en prenoit deux cent mil livres, qu'auparavant on
en avoit pris trois cent quatre-vingt-dix mil livres,
et qu'on avoit mesmeestéjusqu'à six cent mil livres;
que les gens d'armes coustoient beaucoup, et ne ser-
voyent quasy point; que la Reyne n'en vouloit point
mener en son voyage, mais seulement des chevaux-
légers ; et qu'il estoit d'avis d'en prendre six cent
mil livres ; qu'il se dépensoit quatre cent mil livres
pour les fortifications; que tout cela se mangeoit par
les trésoriers, controlleurs et gouverneurs de places ;
qu'il estoit d'avis d'en retrancher trois cent mil
livres et laisser cent mil livres pour les gages d'of-
ficiers, pour travailler à une ou deux places, telles
que Sa Majesté aviseroit et pour entretenir ce qui
est commencé; et qu'il valoit beaucoup mieux ne
point faire de fortifications cette année et conserver
l'ordre dans l'Estat, que non pas en en faisant, s'in-
commoder de telle sorte, que ceux qui voudroyent
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M JOtJftNA.L INÉDIT
imivi€t> iBii. entjrepréûdm sur nous, nous pussent faciteraent atta-
quer; de là, il suivit sur les bastimens et quelques
auù'eè dépenses, tant qu'il trouva son remplacement.
M. le président Jèannîn disoit quelquefois quelque
petit mot. La Reyne approuva tout extrêmement ;
dit qu'il le falloit faire; personne ne put contredire.
Au sortir, chacun demeura d'accord qu'il n'y avoit
là dedans que luy qui sçêust conduire les affaires»
11. M* de Riberpré, sortant d'une académie^
pettsa estre assassiné par un nommé d'Arcueil (qui
est au maréchal d'Ancre) et deux autres. — Se pleint
au Roy le lendemain \
On présenta à la Chambre des comptes des lettres-
patentes portant connoissance à M. de Puisieux des
deniers du taillon, sans que l'on peust recevoir sur
ce sujet aucunes expéditi<Htô lignées d'autres que
luy.
M. le président de Nicolay % voyant que cela tou-
dîôit extrêmement M* de Villeroy, arreste la vérifi-
cation et porte les lettres à M» de Villeroy, qui luy
* Voy, sur cette aflfaire, Richelieu, éd. citée, t. xxi bis, p. 236. On
Jjensa que ïë maréchal d'Ancre avait fait faite le coup pour se Tenger de
ee que M. de Ribefpr^ gonverDeur de la citadelle d'Ait#ns, s'était
déclaré pour M. de LongueviJle, — Le marquis de Riberpré était de la
maison de Moy.
* Jean II de Nicolay, premier président de la Chambre des Comptes
çn 1587. Neuf membres de cette famille ont été successivement pre-
miers présidents de la Chambre des Comptes depuis Jean I'', en 1506,
J«squ'àAimarGhat4et, le dernier présfdeat de l'ancienne Chambre des
Comptes. (Foy. le commentaire de M. Paulin Pari» à l'historiette du
président Nicolay dans sa belle et excellente édition de Tallemant des
Héaui, U IV, p. Ma.)
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d'arnadld d'andilly. S5
dît qu'il n*en sçavoit rien et qu'il luy avoit fait plaî- J"»»^ ««^
sir. Et qu'afin qu'il ne semblast que Ton eust fait
cette affaire contre son gré, il vouloit signer les
lettres; et ainsi les fit refaire et les signa.
19. Assemblée faite dans le Tiers-Estat (à la
poursuite de M. d'Espernon) , sur le sujet de T article,
— Ordonné qu'il seroit osté. — Quelques-uns pro-
testent au contraire (entre autres le lieutenant civil) ,
et dirent qu'ils feront des remonstrances.
La Reyne envoyé quérir le lieutenant civil * et
quelques autres, dit : qu'elle ne veut point en tout
que l'on luy fasse des remonstrances sur ce sujet.
Ainsy on veut qu'ils se réassemblent, afin que cette
affaire se passe sans remonstrances. — M. Myron *
abandonna entièrement Tarticle.
Résolu dans le Tiers-Estat que Monsieur le Prince
rendroit Amboise et qu'on osteroit la garnison de
Soissons.
La Reyne avoît envoyé quérir les Députez de
Normandie et de Rretagne, et leur avoit commandé
d'oster l'article. — M. de Guise avoît fait le sem-
blable pour la Provence; M. d'Espernon, pour
Guyenne ; idem pour Dauphiné. Yoilà cinq
provinces.' Languedoc, Lyonnois et Champagne
*• Henri 4e Meuiiet, Meuteaant dtw'A de la prévôté et TÎcomté de Pa-
ris, président à mertier au Pariement, ppésidait la chambre du Tiers-
État en l'absence dtt prévdt des mardiands.
3 Robert Miron, pvévôt des marchands, président et m*ateur de
Vorére du Tiers-État, ambassadeur «n Suisse, intendant en Languedoc,
mort en t^l« il était frère 4e Françoki MIron, leeélèbre prévôt des
marchands sous Henri IV,
. DigitizedbyVjOOQlC
36 ' JOURNAL INIÈDIT
Janvier i6!5. furent partis, ainsy leurs voix ne servirent de rien.
Reste quatre provinces qui furent pour l'article, sa-
voir : Isle de France, Picardie, Bourgogne (M. Le
Grand avoit voulu faire aux Députez comme dessus ;
ils luy répondirent qu'ils ne pouvoyent). Et ainsy, il
passa, à la pluralité, que l'article seroit osté. Et
dans le cayer, on a mis ainsi : 1" article. Cet article
n'est icy d'autant qu'il a esté porté particulièrement
au Roy par son très-exprès commandement, comme
grandement important au bien de son service et de
son Estât. — Ainsi on commença le cayer au se-
cond article *.
Monsieur le Prince fut trois fois au Louvre avec
les lettres d'Amboise pour les remettre à la Reyne, et
trois fois il les reporta. — Enfin, il les luy laissa et
écrivit à la Grange, commandant dans Amboise,
qu'il remist la place entre les mains de Meurs,
exempt des gardes. La Reyne ayant les dites lettres-
patentes, les porta au Roy avec dne extrême joye,
et luy dit, que de toutes les actions de sa Régence,
il ne luy estoit resté qœ celle-là sur le cœur, qui
luy donnoit peine; mais qu'elle y avoit esté forcée
^ Le premier artide du cahier du Tiers-État établissait la séparation
absolue du temporel et du spirituel, et proclamait Tindépendance du
souverain vis-à-vis de la cour de Rome. On attachait une telle im-
portance à cette déclaration, qu'elle venait la première sous le titre
des Lois fondamentales. Le Parlement appuyait le Tiers-État. La No-
blesse et le Clergé s'opposèrent à l'adoption de cet article et firent
une telle résistance qu'un arrêt du conseil, pour ramener la paix
entre les trois ordres, en ordonna la suppression. {Foy, le Merc. fr,^
U III, où se trouvent les harangues des orateurs des différents ordres
et les résolutions adoptées.)
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d'arnauld d'andilly. 37
par prudence, et qu'elle loûoit Dieu de quoy la chose J-ovier ie«.
estoit remise en son entier. — Le Roy témoigna une
extrême joye.
27. Le samedy auparavant, on avoit apporté
au conseil une affaire touchant une prise faite sur les
Espagnols par Bare et Fleury, capitaines françois,
au-delà de l'isle des Açores. Il y en avoit procédures
faites par les officiers de l'amirauté, d'autres au par-
lement de Rouen qui avoit instruit le procès. Sur
cela, on avoit évoqué au Conseil, à la requeste de
l'ambassadeur d'Espagne, qui se vouloit servir d'une
enqueste faite en Espagne, en laquelle les tesmoins
se contredisoyent. — Ordonné (le dit jour Qi) , qu'il
seroit donné temps à l'ambassadeur d'Espagne pour
faire sa preuve.
Le 27, Bare ayant représenté que le temps qu'on
donnoit à l'ambassadeur d'Espagne estoit inutile,
pour ce qu'il ne pouvoit faire de preuve qui valût
mieux que la première , l'affaire est remise tout de
nouveau en délibération. — Grande contestation aux
opinions. — De 32 juges, la moitié, qui est 16, ayant
esté d'avis de juger sur le champ que la prise est
bonne et légitime, et donner main-levée à ces mar-
chans (Monsieur le Prince soustenoit cet avis) ,
l'autre moitié jugea qu'avant que de rien décider, il
faloit donner le temps à l'ambassadeur d'Espagne
pour le rendre capable de cette affaire. Monsieur le
Chancelier soustenoit ledit avis. La Reyne partit en
faveur de Monaeur le Chancelier, dont Monsieur le
Prince demeura fort piqué, et dit : la Reyiie veut
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38 JOURNAL INÉDIT
Janvier iiif. qu'il passo à Tavis de Monsieur le Chancelier, j'y
reviens donc.
27. Maximes sur ce sujet.
Partout où l'Espagnol nous empesche le trafic,
nous le pouvons prendre justement. Les lignes se
doivent entendre par le premier méridien, qui passe
aux Açores, et par le tropique du Cancer; mais on
y a aucun égard, mais seulement à ce qui est dit cy
dessus. *^ L'Espagnol tient toujours des gallions au
cap fiaint- Vincent pour tâcher de prendre tous les
vaisseaux qui sont armez en guerre et ont apparence
d'aller en long cours. L'Espagnol nous traitte fort
rendement lorsqu'il a l'avantage sur nous. Par im
jugement rendu depuis peu en l'isle Saint-Domi-
nique, où est le siège de la justice des Indes, dé*-
fenôes sont faites aux Espagnols de trafiquer javec
les François^ sur peine de la vie, et aux François
aussy, sur peine de la mort. Les ordonnances obli-
gent d'amener deux hommes de l'équippage déprédé,
afin qu'on le» puisse interroger séparément, pour
savoir le lieu où a esté faite la prise et apporter la
charte-partie, c'est-à-dire, Testât de la cargaison de
toutes les marchandises, faite au lieu d'où elles sont
parties, afin que par là on ne puisse faire de tort aux
marchans avictuailleurs, ni aux autres qui ont part
au navire. Toutefois, au cas qu'on ne le face point,
X l'ordonnance n'y met point de peine. — Un vaisseau
ne peut aller en voyage de long cours qu'il n'ayt
congé de l'amiral, enregistré, et qu'il ne face au
greffe les submissions nécessaires, et donné les cau-
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tions sufSsantes, et le nom et la dameurQ de toug le^ •'•ovier h».
hommes de lem* équippage.
28. Combat de livarrot et Auvilars contre la
Ferté et- la Trye (tué), au chasteau de Vincennq,
Livarrot eut huit coups d'espée.
29. M. de Marillac* rapporte uue requeste au
nom de tout le clergé, par laquelle il demande que,
dès à présent, toutes les causes de MM. les cardinaux
du Perron et de Sourdis et de M. l'evesque d'An*
gers, soyent évoquées du Parlement au Grand-Con-
seil, attendu ce qui s'estoit passé touchant l'article,
et l'empeschement qu'ils avoyent apporté à l'exécu-'
tion de l'arrest du Parlement donné à ce sujet
Ledit M. de Marillac dit en sa conclusion qu'il
inclinoit d'autant plus volontiers à cette requeste,
que la Reyne avoit témoigné avoir pour agréable de
la leur accorder, et ainsi opina à ce qu'elle leur fust
accordée. — Après opinèrent MM. de ^illemontée^
et de Monthelon. M. de Villemontée fut contre, mais
ne dit quasy mot; M. de Monthelon fut pour; puis
vint M. do Barentin, qui fut l'avis entièrement con-
traire, opina très-bien et dit, entre nutoes raisons,
que Messieurs du Conseil cas$oyent tou^ les jours le§
^ Michel de Marillao, né en lA6d, eonseiH«r au Parlement en 1586,
maitue des requétee en 1905^ çomieïLler d'£tat ^t sunn^ndaot 466
finances en 1624, garde des sceaux en 1626, disgracié en 1630 après
la Journée des dupes, mort es prison à Ch&teaudun en 1682. (Foy. Pe-
titot, 1" série, t. xux, Jes Mémoires de Marillac et la Nqtic^ sur ç^
illustre personnage.)
2 François de Villemontée, s^gneur de Montaiguillon , conseiller
d'Étut, intendant en Poitou, evâque 4e Saint^MaJo w 1907»
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40 JOURNAL INIÈDIT
Janvier 1618. aiTests du Parlement, et que, néantmoins, on n'évo-
quoit point leurs causes. M. DoUé fit très-bien, dit
entr'autres choses que : Jà à Dieu ne plaise que Ton
die aux nations estranges que le clergé de France
s'est voulu soustraire de la jurisdiction du Parle-
ment; que cette affaire estoit très-dangereuse et de
très-pernicieuse conséquence; que les évocations es-
toient fondées ou sur la personne des juges ou sur
celle des parties; que, pour le regard des juges, qui
estoient le Parlement, ils n'avoyent point sujet de
vouloir mal en particulier à Messieurs du Clergé pour
avoir soutenu une autre opinion que la leur ; que,
pour le regard des parties, qui estoyent Messieurs du
clergé, ils n'avoyent point de sujet d'entrer en dé-
fiance de Messieurs du Parlement ni de leur justice.
— Mais, en voulant complaire sur ce sujet et louer
le corps du clergé, il laissa échapper ce mot : qu'il
estimoit que, sur le fait de l'article, ils n'avoyent
parlé à leurs Majestez qu'avec tout respect et rete-
nue... — M. de Boissise dit, en tr' autres choses, que
le corps du Parlement est qu'il y avoit quan-
tité d'ecclésiastiques, et qu'ainsi il ne voyoit point
de lieu d'en vouloir éviter la juridiction. Bref, tous
d'une voix furent d'avis de refuser la requeste ; mais
les uns opinoyent à mettre à néant, les autres à la
rendre sans réponse ; auquel avis il passa , et M. le
Chancelier en fut. M. d'Espernon fut d'avis qu'il
faloit qu'on ne parlast plus de cela.
M. le Prince n'estoit point au Conseil. (On dit que,
piqué du quartier de sa pension retranché, des gar-
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d'arnauld d'andilly. 41
des de la garenne de Saint-Maur ostez, fasché d' Am- Janvier mn.
boise et possible, de ce qui se passa au Conseil le
mardy touchant l'Amirauté, fasché de la mort de la
TryeS il s'en alla en carrosse on ne sait encore où.)
M. le cardinal de Sourdis estoit au Conseil.
* M. d'Angers vint parler à M. de Marillac qui estoit
au bout d'en bas. Il dit qu'il ne rapportoit point la
requeste, si la Reyne ne le commandoit. Après, on
luy fit dire qu'il la rapportast et monta au bout d'en
haut, derrière la chaise de la Reyne. Un peu aupa-
ravant, M. le cardinal de Sourdis avoit parlé à* la
Reyne, la Reyne à M. le Chancelier, puis tous trois
avoient parlé ensemble, et aussitost le dit sieur car-
dinal sortit.
Le Roy, M. de Lorraine^ M. de Ventadour, M. de
Rohan n'estoyent au Conseil.
Quelqu'un ayant dit à M. de Thou qu'il s'estonnoit
comme M. de Marillac s' estoit chargé de cette re-
queste, et que, s'il l'eust refusée, nul autre ne l'eust
voulu prendre, il répondit : Celuy qui a esté d'avis
autrefois d'emprisonner le Parlement pouvoit bien
estre capable de rapporter cette requeste-là.
A la levée du Conseil, chacun murmuroit touchant
la hardiesse et l'insolence de cette requeste ; et, en
mesme temps, on couppa une bourse dans le Conseil,
30. M. d'Angers fut trouver le matin au sceau
* La Trye, tué en duel ainsi qu'on Ta vu plus haut, était un gentil-
homme particulièrement attaché à M. le Prince. (Voy, Pontchartraiu,
t. XVII, 2^ série, p. 45, le récit d'une sédition dont il fut cause à
Poitiers.)
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m JOOANAL INEDIT
iiwvier ittf. Monsieur le Chancelier. Ils en vinrent à des pafolea
violentes.
Au sortir de là, M. d'Angers alla aux Augustins,
où il déclama avec furie contre Monsieur le Chance*
lier et sa maison ; dit qu'elle abusoit des jeunes ans
du Roy et de la facilité avec laquelle on menoit la
Reyne, et qu'elle s'estoit nouvellement agrandie teU
lement, qu'on en voyoit un Chancelier, un secrétaire
d' Estât*, un ambassadeur en Espagne*, qui, au re-
tour, seroit surintendant des fmances. 11 déclama
aussi contre M. le maréchal d'Ancre.
Cela se passa sans que personne répondist rien.
31. Le lendemain, M. d'Angers, prenant sujet
sur ce que 12 evesques, qui estoyent le jour pré-
cédent au Louvre, n'avoyent oûy sa plainte, recom-
mence à dire les mesmes choses. Sur cela, Péricart',
evesquiB d'Avranches, l'un des 12, prit la parole avec
luy, et ensuite, Monsieur le Cardinal parla aussi long-
temps et avec colère ; dit, entr' autres choses, qu'il
désavoûoit entièrement la requeste, et n'avoit jamais
pensé à se soustraire à la jurisdiction du Parlement,
où il n'y avoit pas quatre jours qu'il avoit gagné un
procès, sans l'avoir solicité.
Fénier 1616. 3. Bonncval*, député pour la noblesse du haut
Limosin, irrité contre M. de Chavaine% lieutenant
^ M. 'de Puisieux, fils du chancelier.
s Le commaûdeur de Sillery, frère du chancelier.
* François de Péricart, évêque d'Évreux et d'Avranchea*
* Henry, sieur de Bonneval.
^ Jacques de Chavaille, député du Tiers-État.
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d'arnauld d'andillt. 48
général d'Usàrche, en liraoan, sur ce qu'il avoit ^^^f^ «w».
esté esleu malgré luy, le trouvant à la sortie des
Augustins, lui baille des coups de baston, puis se
sauve chez M. d^Esperuon, et de là s'en va.
Ce Bonneval, sur la fin de 1615, a eu un nouveau
régiment, que M. d'Espemon luy a fait bailler, et a
commis des cruautés horribles.
4. Messieurs du Tiers-Eslat, en corps, vont de-»
mander justice au Roy, qui leur dit qu'il en remet-
toit la connoissance au Parlement et qu'il tiendroit
la main à leur faire rendre justice.
Messieurs de la noblesse soustiennent que la con-
noissance n'en peut estre attribuée au Parlement.
Le clergé...
Commission expédiée au Parlement, qui lui attri-
bue pleine connoissance de ladite affaire» Arrest du
U mars 1615, par lequel ledit sieur de Bonneval
est condamné à avoir la teste tranchée *.
5. M. de Matsillac avoit esté à Monsieur le
Prince; depuis, l'ayant quitté, la Reyne s'en estoit
servie à luy donner des avis et luy avoit fait accorder
deux mil livres de pension. Il y avoit eu grande
broûillerie entre liiy et M. de Rochefort, et mesme
avoyent mis l'espée à la main l'un contre l'autre, il y
a environ un an. Depuis peu , ayant eu avis qu'on
luy vouloit faire un mauvais tour, il le dit à la Reyne,
qui mande à M. de Buillon d'en parler à Monsieur
« Voy. Petitot, Mém. de Richelieu, 2* série, vol. 21 bis, p. 233, et
JHerc, /r-., t. m, p. 225.
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44 JOURNAL INÉDIT
Février 1615. le Priiice. — Le matin, à 11 heures, dans la rue de
Beauvais, proche la nie Frementeau, vers le Louvre,
Marsillac est saîsy par derrière par un laquais de
M. de Rochefort (à cheval, suivy de 3 ou 4 autres,
et plusieurs laquais) , et se voyant chargé à coups
d'espée et de baston, se retire dans une porte, de-
meure blessé à la teste de deux coups d'espée don-
nez par Rochefort. La Reyne, avertie, envoyé M. de
la Mothe à Monsieur le Prince, qui dit qu'il avoûoit
ce qui s'estoit passé, et l'avoit commandé, pour ce
que Marsillac estoit un maraut qui l'avoit offencé.
La Reyne, fort indignée, en remit la connoissance
au Parlement, et envoya quérir le Procureur général,
afin qu'il en fist faire prompte justice.
Monsieur le Prince, ayant sçeu ce qu'avoit fait
Rochefort, se mit fort en colère, et dit qu'il avoit bien
que faire que l'embarrasser en une si méchante
affaire.
Dès le soir mesme, commission fut expédiée,
adressante au Parlement, pour en connoistre.
Le mesme soir, au bal. Monsieur le Prince dit
tout haut à... avec des sermens exécrables, qu'il
n' avoit point creu que la Reyne le dust trouver mau-
vais, et que M. de Buillon ne luy avoit jamais parlé.
M. de Buillon dit que la Reyne lui avoit bien
mandé par Boneuil qu'il en parlast à Monsieur le
Prince quand il le verroit, mais qu'elle ne luy avoit
donné charge de l'aller trouver, et qu'ayant la goutte,
il n' estoit point sorty depuis et n' avoit point veu
Monsieur le Prince.
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d'arnauld d'andilly. 45
6. Monsieur le Prince ayant sçeu que l'on infor-
moit de l'affaire de Marsillac, va au Louvre, trouve
le Roy et la Reyne ensemble, adresse sa parole à la
Reyne, luy dit qu'il avoit sçeu la commission qui
avoit esté addressée au Parlement; qu'il la prioit
d'en ester la connoissance au Parlement, pour ce que
c'estoit chose qui s'estoit faite par son commande-
ment; que Marsillac estoit un coquin qui avoit médit
de luy par tout. — La Reyne répondit : Monsieur,
je ne croys point que vous ayez fait faire cela, j'ay
trop bonne opinion de vous. — Sur cela il répondit
pour la seconde fois qu'il l' avoit fait faire, qu'il l'a-
voûoit et que l'on ne sçauroit qu'en dire. — La Reyne
luy ayant répondu comme à la première fois, il répli-
qua encore : Ouy, c'est moi, et que me saurait-on
faire pour cela? on ne sçauroit que me faire. — Sur
ces paroles, la Reyne dit : Monsieur, je vous prie de
me pardonner si je dis que voilà une grande inso-
lence et une grande effronterie d'oser dire, en la
présence du Roy et de moy que vous avouez des
coups de baston donnez à un gentilhomme qui est
au Roy et qui le sert. — A ces paroles, il répondit
que l'on n' avoit jamais traitté ni outragé Prince du
sang de la sorte ; qu'il voyoit bien qu'on le vouloit
éloigner du Roy, mais que, malgré ses ennemis, il y
demeureroit, et achevant cela, il s'en alla. Le Roy
voulut parler, Monsieur le Prince le retint.
Tout cecy se conte fort diversement.
Monsieur le Prince dit qu'il dit à la Reyne qu'il ne
croioit pas que Sa Majesté affectionnast tant Mar-
Février l«li.
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A0 JOURNAL INEDIT
fHHer im. siliac, et que si Teust creu, cela ne seroit pas arrivé.
Monsieur le Prince dit aussi qu'ayant dit à la
Reyne, p<Hur la b'oisième fois, qu'il avoûoit Roche-
fort, elle avoit appelle le Roy, disant : Mon fils, venez
voir Teffironterie et Tinsolence de Monsieur le Prince,
qui avoue d'avoir fait bailler des coups de baston à un
gentilhomme qui est à vous. Qu'à cela, il répondit :
Madame, le feu Roy mon seigneur et le vostre, a
quelquefois esté en colère contre moy, mais jamais il
ne m'a traitté comme vous me traittez ; qu'elle répon-
dit : Non, car jamais vous ne luy en eussiez donné le
sujet que vous m'en donnez. Qu'il ajouta : On n'est
point accoustumé d'offencer Bixm loi Princes du sang.
J'ay l'honneur d'estre de la maison, et ne tiens riea
de vous. Que sur cela, le Roy ayant voulu parier, û
hiy dit : Sire, je supplie très-humblement Vostre Ha*
jesté de ne point parier en cette affaire, car je sçay
que Vostre Majesté a esté prévenue , et si Vostre Ma-
jesté se mettoit en colère contre moy, cela me porte*
roit au désespoir. Vous estes mon Roy, vous estes
mon maistre, je répandray jnsques à la demi^^
goutte de mon sang pour vostre service, mais quant
à la Reyne, je n'en dis pas de mesme ; et que sur
cela, il s'en alla.
Mc^isieur le Prince bailla à rapporter i M. Gras-
seteau, aux Enquestes, une requeste par laquelle il
avoûoit l'affaire de Rochefort, et demandoit qwd les
chambres fussent assemblées sur œ sujet.
Tous les trois ordres de T Estât vinrent en corps
s'olErir à la Reyne sur le sujet de cette ai&ire, et
Digiîizedby Google
d'arnjluld dUndillt. 47
fiirenl reèeus dans la galme dorée^ en présence d* févrienm
toute la Cour. On dit que la Reyne avoit fait témoi*"
gner dans ieé Estais, qu'elle auroit cette députation
agréable.
Monteur ie Prince va dès cinq heures au Pala is.
10. Messieurs de la Grand Chambre font ap*^
pdler Messieurs les Gens du Roy, pour avoir leur»
conclusions. Gomme Monsieur ie Procureur Général
fut sorty, x>n ouvre Taudienoe. Il revient, se pleint
qu'on ne luy donne pas le loisir de prendre ses con-
clusions. Il apporte ses conclusions sur les informa*-
tions, et voyant plusieurs Conseillers des Enquestes
dans les lanternes, il dit tout haut : Que ceux qui
sont dans les lanternes se retirent, sinon je prendray
mes conclusions contre eux. — Sur cela, ils se reti-
rèrent tous. En ces entrefaites, on alla avertir Mon-
sieur le Prince. (qui estoit à la porte), que s'il n'en-
btrit promptement, le coup s'alloit frapper, pour ce
qu'ils alloyent donner arrest. H entra donc, fit une
grande harangue, dont la conclusion fut qu'il feroit
toute sQ^iie ds satisfaction, et rendroit toute sorte de
devoirs et de services au Roy et toutes sortes de res-
pects à ia Reyne; que cependant, ils les prioit de
différer jusques au lendemain. Sur cela, M^sieurs
du Parlenaent s'arrestèrent et naandèrent à Mes-
sieurs les Geifâ du Roy d'aller faire entendre à Leurs
Majestez ce qui s'estoit passé. Ensuite, ils furent tous
trois à huit heures chez Monsieur le Chancelier, à
dix au Louvre, dirent qu'ils -venoyent faire ce rap-
port sur relation, la Chambre ne les ayant point în-
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A8 JOURNAL INÉDIT
Février iM. formcz ellc-mesme . Que quant à la requeste d'aveu
de Monsieur le Prince, il n'y faloit avoir aucun
égard, et n'user d'aucune surséance. — Après disner,
sur les deux heures, Messieurs du Parlement furent
mandez au Louvre, et Monsieur le Premier Président
ayant dit que Monsieur le Prince a voit dit au Parle-
ment qu'il feroit toutes sortes de satisfactions, de de-
voirs et de services au Roy et à la Reyne, M. Servin
hocha la teste et dit, respect. — L'affaire estant mise
en délibération en présence de Messieurs du Parle-
ment, il passa tout d'une voix que l'on passeroit outre.
La Reyne avoit répondu à Messieurs les Gens du
Roy, que pour le regard de l'offence que Monsieur
le Prince avoit faite au Roy et à elle, il seroit tou-
jours reçeu à satisfaction, attendu qu'il estoit enfant
de la maison, mais que pour le reigard de Rochefort,
elle entendoit que justice en fust faite.
11. Monsieur le Prince fut à toutes les chambres
des Enquestes l'une après l'autre, haranguer sur le
sujet de son affaire.
La requeste qu'il avoit baillée luy a esté rendue à
la Grand Chambre.
Messieurs de la Grand Chambre décrétèrent contre
Rochefort.
12. Le Roy mande au Louvre tous les Présidens
du Parlement, tant de la Grand Chambre (M. le
président Séguier* n'y vint) que des deux chamhfes
^ Antoine Ségnier, né en 1552, conseiUer au Parlement, maître des
requêtes, surintendant de justice en Provence en 1576, conseiller
d'Etat, avocat général au Parlement de Paris, président à mortier en
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d'arnauld d'andilly. 49
des Requestes et cinq chambres des Enquestes, et Février i«ii.
quatre Conseillers de la Grand Chambre, MM. Pré-
vost, Courtin, Deslandes, Scarron, et deux anciens
Conseillers de chacune des autres chambres. — Mes-
sieurs du Conseil assistèrent lorsqu'on parla à eux.
*- Le Roy commença le premier. Après parla la
Reyne, qui leur dit : que le Roy avoit sçeu que le
jour précédent. Monsieur le Prince avoit esté en
toutes les chambres du Parlement ; qu'elle désiroit
sçavoir par leur rapport ce qui s'y estoit passé. —
Monsieur le Premier Président commença , et dit
que Monsieur le Prince leur avoit dit qu'ayant appris
qu'ils ne vouloyent point avoir égard à la requeste
qu'il leur avoit présentée, il les venoit prier de la luy
rendre; que sur cela, ils l'avoyent prié de se retirer,
et qu'après avoir mis l'affaire en délibération, ils
avoyent ordonné qu'elle luy seroit rendue ; et luy
ayant représenté qu'ils estoyent ses très-humbles
serviteurs, mais qu'ils estoyent encore plus obligez
au service du Roy, et au devoir de leurs charges, et
estimoyent qu'il luy seroit toujours honorable d'estre
bien avec Sa Majesté, il leur avoit répondu qu'il les
remercioit ; qu'il ne désiroit rien davantage, et qu'il
avoit employé la Reyne Marguerite et madame la
comtesse de Soissons * pour en parler à la Reyne.
1597, ambassadeur à Venise, mort en 1626. Antoine Séguier était le
cinquième fUs du président Séguier (Pierre I) et Toncle de Séguier
(Pierre III), le célèbre chancelier, en faveur de qui il résigna sa charge
de président à mortier.
* Anne, comtesse de Montafié, mariée au comte de Soissons en 1601,
morte en 164ft.
h
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60 JOl]RN\L INÉDIT
Fe^rtér im. Après cb1b4 la Reyne répondit: qu'il ne luy disoît
rien dé là faveur et de la cire. Il répondit : Madame,
je n'estimoië pas qu'il ftist besoin de représenter à
Voôtre Majeàté toutes ces particularîteEv mais puis-
qu'il Vous plaist de mé le oômmanderj là vérité est
que Monsieur le Prince dit qu'il n'y avoit plus de
jilstice ; que l'on usoit de faveur envers qui l'on voû-
tait, ^t de sévérité ênverô les Autre*. Mi le président
le Jay \ pour la Tournelle, dit fort peu de chose* et
passa l'affaire le plus doucement qu'il put — M» le
président Lescalopier ^* pouf la chambre de l'Edit*
parla hardiment et en bons termeâ, dit que Monsieur
le Prince aVoit dit ([ix^ la faveur et la cire estoyent
jointes ensemble., et que la faveur avoit fait fondre la
cire. M. Fayet^ M. du Mesnil* M* Crespin^ et autres
Présidens des Requesteset EnqaesteB parlèrent aussi»
M. Grespin entr'autres , dit que Monsieur le Prince
avoit dit qu'il y avoit des gens élevez de peu qui
pouvoyent tout auprès de Leurs Majestez, et qui en
reculoyent les grands*
Après qu'ils eurent tous parlée la Reyne prit la pa-
rotei et leur conta tout du long comnie l'aifaire s'es-
toit passée» depuis le commencement jusques à la
fin, ainsi qu'il est écrit cy-devant; parla toujours en
termei. fort honnestes de Monsieur te Prince ; dit
< Nicolas le Jay, conseiller au Parlement de Paris en 1600, procu-
reur du Roi ail Cliételet, lieutenant civil^ président à mortier, premier
président en 1630, garde des sceaux en 1636, mort en 1640.
2 Jean Lescalopier, conseiller au PailemeiU en 1597, maître des
requêtes en 1605, président à mortier en 1614, mort en 1620.
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d'arnauld d'andilly. 61
entr' autres choses : que madame la comtesse de l'evfier m».
Soissons luy estoit venu parler sur ce sujet, le soir
précédent, et les discours qu'elles avoyent eus en*
semble ; que Monsieur le Prince seroit toujours le
bien venu à revenir prendre sa place auprès du Roy,
qui Texcuseroit, et le traitteroit toujours comme
estant enfant de la maison ; que le Roy leur défeii-*
doit de plus recevoir Monsieur le Prince dans le Par^
lement, en façon quelconque* si ce n'estoit qu'il y
eust des affaires particulières ou qu'il allast dans la
Grand Chambre, prendre sa place pour juger, mais ^
que jamais il n' allast aux Enquestes, et ne parlast
dans le Parlemont d'affaires d' Estât, ~ Et après quo
cela fut fait, on leur donna congé*
Le soir, MM. de Ventadour et président Jeannin
furent de la part du Roy dire à Monsieur le Prince
que sa Majesté luy défendoit de plus aller en tout aux
chambres des Enquestes, et de n'aller aus^ au Par*
lement, s'il n'y avoit des affaires particulières, ou
qu'il ne voulust prendre sa place en la Grand Chambre
pour juger. Il leur répondit avec force honnestete^ et
soumissions. Et sur ce qu'ensuite , ces Messieurs luy
dirent qu'il pourroit voir le Roy et la Reyne quand il
luy plairoit , et mesme le pressèrent d'y laller dès le
soir mesn^ , il Içur dit qu'il desiroit prendre la nuit
pour conseil.
13. M. Digoine \ député de la noblesse de Bour-
* Théophile de Damas, baron de Digoyne, député de la noblesse ponr
le bailliage de Charolles, enseigne de la compagnie du duc de Mayenne,
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52 JOURNAL INÉDIT
Fevriw iej6. gogne , dit aux Estais (il a toujours très-bien fait
durant les Estais) qu'il avoit des choses d'extrême
importance à déclarer au Roy. Mais que pour le faire,
il estoit force d'attaquer et d'offencer deux grands;
qu'il savoit bien qu'il mettoit sa vie en hazard, mais
que cela ne l'empescheroit pas. Néantmoins, qu'il
les prioit de le prendre en leur singulière protection,
et tirer parole du Roy qu'il le prendroit aussi en la
sienne ; qu'il avoit pièces justificatives pour prouver
ce qu'il diroit. — Ils répondirent que le Roy ayant
assemblé les Estats, les avoit rendus seurs et libres ;
que de luy en demander une asseurance particulière,
estoit douter de sa parole ; c'est pourquoy, ils ne le
jugeoyent pas à propos; mais qu'il déclarast le len-
demain matin à l'assemblée ce qu'il vouloit dire , et
qu'ils luy promettoyent de répandre jusques à la der-
nière goutte de leur sang , pour empescher que l'on
entreprist sur luy.
D'autres disent que M. Digoine dit , qu'il vouloit
faire sa proposition au Roy en présence de plusieurs
personnes ; que sur cela , les voix ayant esté prises,
il passa à la pluralité, que l'on luy donneroit toute
sorte d'assistance ; ce qu'on blasme, d'autant qu'on
dit qu'ils l'accordèrent, sans savoir ce qu' estoit.
On dit que ces deux grands estoyent M. le maré-
chal d'Ancre et M. le Chancelier.
Le dit sieur Digoine est Bourguignon, de très-
servit longtemps le duc de Savoie , Charles Emmanuel, aux guerres
de Piémont et fut tut^ au siège de Verceil en 1617.
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d'arnauld d'andilly. 53
bonne maison , chef de la maison de Damas. Est Fcmer tm.
homme couvert de crimes , mesme accusé d'avoir
participé au vol et meurtre du frère de M. Tevesque
d'Autun dont les complices ont esté exécutez. N'est
fort habile homme. — A depuis esté tué à Verseil.
14. M. Digoine ne put faire sa proposition, pour
ce qu'il survint plusieurs affaires quil'empeschèrent.
15. M. du Mayne, que l'on tient en partie avoir
porté M. Digoine à faire ce qu'il avoit fait, l'envoyé
quérir, en ayant esté averty par la Reyne, luy dit
qu'il désire qu'il suive sa pointe, et qu'il veut encore
ajouster à ses mémoires. A cet effect, le prie de les
luy apporter tous, pour les voir. Les ayant, il les re-
tient. Et est à remarquer que la pluspart estoyent
signés. M. Digoine extrêmement fâché de cela, et se
voyant privé du moyen de faire ses preuves va le
lendemain lundy aux Estats, leur dit que n'ayant plus
les preuves qu'il avoit, il estoit résolu de se retirer,
et de faict, se prépare pour partir. Cela estant sçeu
au Louvre, on le veut faire arrester prisonnier, pour
ce qu'il n'est permis aux Députez de se retirer sans
permission du Roy. M. Digoine, en estant averty, jse
tient sur ses gardes, et va au Louvre. — Là, on luy
fait toutes sortes de caresses ; et le lendemain, il
retourne aux Estats comme auparavant.
D'autres disent qu'il dit à Messieurs des Estats
qu'il ne pouvoit dire ce qu'il avoit proposé, pour ce
que la Reyne luy avoit fermé la bouche, le luy ayant
défendu ; et que puisque les Estats n' estoyent pas
libres, il demandoit congé de se retirer.
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61 JOI/RNAL INÉDIT
Ferler itiff, A onze heures du matin, Monsieur le Prince va
au Louvre, et dit au Roy: Sire, je supplie très-hum-
blement vostre Majesté d'oublier tout ce qui s'est
passé, et me le pardonner. Le Roy répondit: Mon-
sieur le Prince, je vous le pardonne de très-bon
cœur, et seray topjours trôs-ayse de vous donner au-
près de moy le rang qui est deu à vostre qualité,
pourveu que vous n'y retoumioE plus, et n'y retour-
nez plus.
Après, il vit la Reyne, et parla à elle si bas, et elle
à luy, que personne ne l'entendit. Il parla environ la
moitié plus qu'il n'avoit feit au Roy. Après, il se re^
tira ; et voyant que personne du monde ne l'abor-
doit» il s'accosta de M. le comte d'Escars, et luy
demanda des nouvelles de son procès. Enfin, le comte
d'Escargi l'ayant aussi comme quitté, et sq voyant
geul, il fit la révérence et s'en alla \
30. M. l'Evesque de Reauvais ^ va haranguer la
poblesse pour faire recevoir le Concile de Trente ;
appelle en son discours ceux de la Religion plusieurs
fois hérétiques, dont quelques uns d'eux s' offencèren t.
Aprèsqu'il eut parlé. Monsieur le Vidame de Chartres*,
de la Rçligion , s'avança , et luy dit que le Concile de
* Voy, sur cette affaire de Marsîllac et de Rochefort et sur la
conduite de M. le Prinoe à cette occasion, Petitot, 2* aérle, Mém. de
Pontchartrain, t. xvii, p. 70; Mém. de Richelieu, t. xxi bis, p. 334, et
lUerc, fr.s t. m, 229. On trouve dans les msc. deConrart, t. xiii, in-4*',
p. 533-5^7, une «Relation de l'assassinat do M. de Marsillac par
M. de Rochefort » qui contient des détails très-intéressants.
2 René Potier, évOque et comte de Beauvais, pair de France.
5 Préjau de la Fin, vidame dd Chartres.
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D*AR1fAULD D^ANBILLT. 65
Trente décidoit qu'il ne faloit point tenir Iq toy aux **vrifr mi.
hérétiques ; que cela estant, les Edite de Pacification
nq pouvoyent subsister. Sur cela, l'evesquo d' Avpan-
ches, Péricart, commença à déclamer contre Deux
de la Religion, sur le sujet de Tinsolenoe faite par
quelque&-uns d'eux à.* ••••., en Provânoa, Mon-
sieur le Vidame de Chartres et M. du Vigecm répon-
dirent qu'il n'estoit point besoin d'exagérer cela ;
que c'estoit chose arrivée il y a deux mois; que l'af-
faire ne s'estoit point passée comme on le disoit ;
qu'il avoit esté décerné commission à la chambre de
Castres , pour faire le procès, et qu^eux-^meanep ae
joipdroyent pour requérir qu'on punisse trèa^sévère-
ment ceux qui avoient commis cet acte et ce crima.
Sur ces entrefaites, M. le baron de Digoîne s'avança,
et dit : C'est une honte que ceux de la Religion soyent
présents, lorsque l'on délibère sur la réception d'un
Concile r II faut qu'ils sortent tous. Monsieur le Vi-
dame de Chartres répondit : Vous nous gronderez at
nous aboyerez assez, mais vous ne nous ferei pas de
mal ; et dit à M. du Vigean î Sortons Monweur, sorv-
tons ; et ainsi s'en allèrent tous dwxv-r^M. de Chain-
baut *, fils de M. de Gouvernet, voyant cela, se leva,
et dit : Je ne say comme on entreprend de nous faire
sortir d'icy. Nous sommes icy en qualité de sujets du
Roy, et luy sommes aussi affectionnés qu'aucune des
autres ; et n'y a que le Roy seul qui nous puisse oster
* René de la Tour de Qouyernet, h^rm df Cbawiwium d^pi^ 0e la
noblesse du Languedoc.
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56 JOURNAL INÉDIT
Février 1M8. (Jc TïOB placBS. Quant à moy , je déclare que je ne
.sortiray point de la mienne. — Cette action de M. de
Chambaut fut fort approuvée par la Reyne et par
tout le monde.
20. Le lendemain, M. de Chambaut alla trouver
M. Arnaud, Intendant des finances, luy conta ce qui
s'estoit passé, et luy dit que Monsieur le Vidame de
Chartres et M. du Vigean, estant sortys de l'assem-
blée , s'ils n'y entroyent le lendemain , qui estoit le
dernier jour que l'on s'assembleroit, le bruit courroit
par les Provinces que l'on avoit chassé des Estats les
Députés de la Religion, ce qui pourroit apporter de
la brouillerie. — M. Arnaud, sur cela, alla voir Mon-
sieur le Chancelier, qui envoya quérir MM. le
.Vidame de Chartres et du Vigean, et leur commanda,
de la part du Roy et de la Reyne, d'entrer le len-
demain aux Estats.
Rrouillerie de M. de Souvré * avec M. de Luynes^.
Le Roy avoit , peu auparavant , baillé sa bourse à
M. de Luynes. Incontinent après, M. de Luynes eut
la charge de capitaine des Tuilleries de Monsieur le
général des Galères % et le Roy luy donna aussi la
* Gilles de Souvré, marquis de Courtanvaux, gouverneur de Tou-
raine, gouverneur de Louis XUI, maréchal de France en 1015, mort
en 1026.
* Charles d'Albert, seigneur de Luynes, né en 1578, gouverneur
d'Amboise en 1015, grand fauconnier en 1016, garde des oiseaux de la
chambre du Roi en 1617, duc et pair en 1619, Connétable de France et
garde des sceaux en 1621, mort le 15 décembre 1621.
* Philippe-Emmanuel de Gondy, comte de Joigny, général des Ga-
lères en 1598 , mort en 1626. Il était fils d'Albert dé Gondy , duc de
Retz, pair et maréchal de France.
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d'arnauld d'andilly. 57
charge de capitaine des Galères ; et ensuite , il eut Février my
aussi la charge de M. de Congis aux Tuilleries ; et
depuis, celle de M. de Fontenay * , de capitaine du
chasteau du Louvre ^.
21. Monsieur l'Archevesque de Lyon ^ fut l' après
disnée faire une harangue à la Reyne, sur le sujet
du Concile de Trente, et sur ce qui avoit esté fait en
Provence par ceux de la Religion.
23. Clôture des Estats. Séance Royale \
* François du Val, marquis de Fontenay-Mareuil, parent d*Arnauld
d'Àndilly, né en 1595, capitaine du Louvre, maréchal de camp, con-
seiller d*État, ambassadeur en Angleterre en 1626, à Rome en 1641 et
1647 , auteur des Mémoires publiés dans la collection Petitot par
M. Monmerqué, qui les a fait précéder d'une Notice biographique.
(f^oy, éd. citée, t. l, p. 341.)
2 Foy. sur l'élévation de M. de Luynes, Petitot, 2* série, Mém. de
Bohan, t. xviii, p. 144 et 148; Mém. de Richelieu, t. xxi bis, p. 211;
et 1'* série , Mém. de Fontenay-Mareuil, t. l, p. 138, 268, 341. — A
propos du gouvernement d'Amboise donné à Luynes pas la faveur du
maréchal d'Ancre, Richelieu fait cette réflexion triste et toujours vraie :
a En quoi paroît combien est grand l'aveuglement de Tesprit de
l'homme, qui fonde son espérance en ce qui doit être le sujet de sa
crainte ; car le Maréchal ne recevra mal que de celui de qui il attend
tout le contraire, et Luynes, qu'il regardoit comme un des principaux
appuis de sa grandeur, non seulement le mettra par terre, mais ne
bâtira sa fortune que sur les ruines de la sienne. »
* Simon de Marquemont, député du Clergé.
* Voy. le Merc. fr.^ t. m, p. 463, et pour tous les détails sur les
travaux remarquables de cette" grande assemblée , la relation de Flori-
inond Rapine, député du Tiers. Voy. aussi le chapitre consacré aux
inOmes États-Généraux par l'illustre historien M. Augustin Thierry
dans son histoire de VOrigine et des progrès du Tiers-État.
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58
JOURNAL INÉDIT.
M. le Prince
prétexte «on,. .
le jour
précédent.
c
Monsieur.
©
M.lecomt^de
Soissoirs.
MM. DE Guise
ne vinrent
à cause qu'on
avoit séparé ce
banc
d'avec l'autre,
bien que fust de
mesme hauteur,
au lieu qu'à
l'ouverture des
Estats,
leur banc
estoit continu
à luy.
Le Rot.
□
M DU Mayhe,
sur un plficet.
Le Cha;¥Cet.ter,
n^ ne ekaiie uis ëMsier.
0 M. DE Retz.
0 M. DR MmrTBAXON.
Trois bancs pour MM. les conseil-
lers d'Estqt de robbe loiague. —
Les intendants y estolenr.
Bancs des députez de l'Église.
etc., etc.
M. pE SpcvfiS.
M. le njaréch. d^AwcRE.
M. DE BOfSDAUPMIW.
M. DE BRISSAG.
M. DE Beau VAIS.
M. DE NOYON.
M. le cardinal Boifzy.
M. le cardinal de la
Rochefoucauld.
M. le cardinal db Sour-
DIS.
d
Trois bancs pour MM. les conseil-
lers d' Estât d'ëpée. — H y «volt
quantité de chevaliers de l'ordre.
Bancs des députez de la Noblesse,
etc., etc.
etc.
Bancs des députez du Tiers-État.
— 11 V avoit séparation d'envi-
ron trois pieds entre leurs bancs
et ceux du Qergé.
M. DE l.yçoN (1), pour le Clergé,
M. DE SÉNECEY, pour la Noblesse,
M. Myrow , pour le TiefS-Etat,
etc.
Bancs des députez du Tiers-État.
— 11 y avoit séparation d*ei»vt-
ron 8 pieds entre lesdits bancs
et ceux de la Noblesse.
S après avoir harangué, chacun d'eux, suivy
de son greO'^»", alloit trouver le Roy, et
là, prenant le caycr des maios du grefhcr,
le présentoit h S. M .
(1) Vov la harangue de l'évéque de Luçon, Armand-Jean du Plessis. depuis Cardinal-duc de Riche-
lieu (ïetltot J- s.; t. XI, p. îOl). Elle fut Imprimée avec celle de Miron che^ Cramoisi, après la
clôture des ÈtaU.
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d'^rnauld d'andilly. 60
Monsieur le Prince va trouver la Heyne à Saint- «''^riter m%
Victor. De là, il l'accompagne au Louvre. Luy dit
qu'il la venoit supplier de luy accorder la grâce de
Rochefort ; que c'estoit un gentilhomme à qui il avolt
de l'obligation pour ce qu'il l'avoit toujours très^fidè-
lemept servy. La Reyne luy répondit que c'estoit au
Roy qu'il se faloit addresser. Il luy répondit : Ma-
dame, je supplie vostre Majesté que je luy aye cette
obligation, car je crains que le Roy me la refusast.
Elle luy répondit : Non, non, allez à luy, je m'asseure
qu'il vous fera bonne réponce. Sur cela. Monsieur le
Prince ayant esté trouver le Roy , sa Majesté luy
répondit : Monsieur le Prince, je donne grâce à Ro-
chefort pour Tamour de vous, etc.
1. Le Roy donne à M. de Luyries l'ai^né le Mars,
gouvernement d'Amboise qui estoit demandé par
MM. de la Curée *, la Chastaigneraye^, le Renouart
et Descures*. On dit que le Roy en pria M. le maré-
chal d'Ancre. — En fit des remerciemens extrêmes
à la Reyne, mena luy-mesme M. de Luynes remer-
cier la Reyne qui répondit : C'est le Roy qu'il faut
remercier ; et le Roy disoit : Au contraire, c'est vous
* Gilbert Filhet, seigneur de la Curée et de la Roche Turpin, né
vers 1555, conseiller d'Etat, capitaine- lieutenant des chevaux-legers
de )a Garde, maréchal de camp, mort en 1633,
^ Commandant des gardes de la Heine.
3 M. d'Escures, qui avait acheté le gouvernem^ptd'AIBt>oi$^,av^tété
obligé de le céflpi à Monsieur le Prince (FoBtenijy-llareqiJ, U l, p. 24^).
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60 JOURNAL INÉDIT
Biars 1616. Madame, qu'il faut qu'il remercie. On dit que M. de
Vendosme ayda fort à cette affaire *.
2. Messieurs du Parlement résolurent d'assem-
bler les chambres, le vendredy en suivant, sur le fait
de la paulette , et menacèrent fort le Mayne , sur ce
qu'on leur avoit rapporté qu'il vouloit faire un party
de 1500 mil livres de toutes les partyes casuelles.
Depuis, le Mayne fut faire une protestation au Par-
lement que cela n'estoit point. Et sur ce qui fut le
jeudy rapporté au Parlement, de la part de la Reyne,
(je ne say quoy), les chambres ne s'assemblèrent
point le vendredy.
9. Mèssieuns du Parlement des chambres des
Enquestes députent deux de chaque chambre à la
Grand Chambre, vers Monsieur le Premier Président,
pour demander qu'on assemble les chambres. Mon-
sieur le Premier Président répond qu'il avoit receu
commandement de la Reyne de ne point assembler
les chambres. Sur cela, ils firent grande rumeur et
parlèrent fort rudement à Monsieur le Premier Pré-
sident, et demeurèrent trois heures sur cette contes-
tation, et peu à peu, en délibérant si on s'assemble-
roit, ils s'assemblèrent. On dit que M. Gilot dit qu'il
avoit autrefois ouy dire à M. le président de Thou
que le feu roy Charles luy ayant dit qu'il vouloit
faire quelques-uns du Parlement conseillers d'Estat,
> C'est par erreur que Richelieu dans ses Mémoires place cette do-
nation dans raiinée 1614. Pontcbartrain, Mém., t. xvii, p. 75, et le
P. Anselme, Généalogie du duc de Luy nés, sont d'accord sur ce point
avec Amauld d'Andilly. {Vay, Fontenay-Mareuil, t. l, p. 270.)
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d'arnauld d'andilly, 61
il lui répondit : Sire, ne faites pas cela, vous gasterez Ma» tm.
tout et ruinerez le Parlement.
On dit que M. le président le Jay dit que , s'il ne
sçavoit faire le Premier Pré^dent , il y en auroit
d'autres qui le feroyent bien.
10. Messieurs du Parlement assemblent les
chambres ; commencèrent à opiner.
M. de Saint-Géran* alla dire à Monsieur le Prince
que le Roy et la Reyne le prioient de ne se point
trouver au Palais, afin de ne fortifier point par sa
présence les résolutions qu'on y pourroit prendre.
Monsieur le Prince répondit qu'il iroit luy-mesme
rendre réponce à Leurs Majestez ; et quelque temps
après alla au Louvre et dit au Roy et à la Reyne
que, puisque Leurs Majestez ne vouloyent point qu'il
s'y trouvast, il n' iroit point.
On dit qu'il se plaignit, disant que M. de Saint-
Géran avoît soixante gendarmes disposez en divers
endroits, lorsqu'il l'estoit allé trouver le matin.
11. Messieurs du Parlement achèvent de délibé-
rer. Résolvent que remontrances seront faites au
Roy, tant sur le sujet de la paulette que sur autres
points ; et que cependant, et jusques à ce que cette
affaire soit entièrement résolue, on ne recevra au-
cuns ofiiciers qu'ils ne rapportent un certificat comme
la vefve et les héritiers seront contens et satisfaits
d'eux.
* Jean François de la Guiche, comte de la Palice, seigneur de Saint-
Géran, gouverneur du Bourbonnais, capitaine lieutenant des gendarmes
de la garde en 1615, maréchal de France en 1619, mort en 1632.
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62 JOURNAL INEDIT
Mars im« On dit que M. Ribier dit qu'il n'y avoit pas jus-^
qu'aux Pasquins qui ne les appellassent des poulies,
et qu'ils avoyent raison^ veû la lascheté qui se trou-
voit tant au chef qu'aux membres.
12. Conseil tenu le matin chex Monsieur le Chan-
celier sur le fait de la paulette. M» Arnaud, inten-
dant des finances, propose son avis ; tous en demeu-
rent d'accord*
L'après-disnée , Conseil tenu au Louvre sur le
mesme sujet, où estoyent tous les grans. M. Arnaud
propose de rechef son avis, qui est : de rembourser
le trésorier des parties casûelles ; rétablir trente sol«
sur minot de sel ; supprimer les offices qui vacque-
ront par mort, ju$qu'à ce qu'ils soyent réduits au
nombre ancien ; au bout de cinq ans, voir ce que
monteront les gages qui reviendront par ce moyen
au Roy, et diminuer d'autant l'imposition ; permettre
aux officiers de résigner, sans rien payer que le
droit de marc d'or, et, par ce moyen, supprimer
pour jamais la paulette et la vénalité» — Cet avis
l'emportoit à la pluralité des voix ; mais M. de Bulion
ouvrit un autre avis, qui est de ne permettre de
résigner à ceux qui achèteront doresnavant. M..,
en fut, Monsieur le Chancelier et deux ou trois
autres. Ainsi il n'y eut rien de résolu pour ce jour-là.
19* M. Ribier, lieutenant général de Blois*,
harangue au Roy au nom du Tiers-Estat, pour em-
* Guillaume Ribier, député du bailliage de Blois. {Voy. itère, fr*,
L ui, p. 422-425, la requête du Tiers-Etat.)
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d'arnauld d'andilly. 63
pescher rimposiUon de trente sols. Monsieur le Chôn* m«« imi.
celier répondit qu'ils n'avoyent deû s'asseitiblef de-
puis la présentation des ôayers»
24. Le Roy mande les députex des trois ordres
en la galerie du Louvre ; leur dit qu'il avoit com-
mandé à Monsieur le Chancelier de leur déclarer sa
volontéi Sur cela, Monsieur lô Chancelier, prenant
la parole, leut dit, en substance* que le Roy désirant
faire réussir des Estats tout le bien possible, et ré*-
pondre promptement les cayer$ qu'ils avoyent pré-
sentez, il avoit nommé des commissaires poui* y tra-
vailler jusqu'au nombre de plus de quarante ; mais
qu'il y avoit si grand nombre d'articles, qu'il estoit
impossible que l'expédition ea fust si prompte qu'il
desiroit, veû qu'il y en avoit plusieurs qui méritoyent
chacun un conseil tout entier. C'est pourquoy, pour
éviter les fraixque leur séjour apporteroit au peuple,
non-seulement Sa Majesté avoit agréable^ mais leur
commandoit de se retirer en leurs maisons; et que
cependant, pour leur donner les preuves de sa vo-
lonté aux plus importans articles, et que les trois
ordres avoyent conjointement demandez, il esteignoit
dès à présent la paulette et la vénalité, protestant
que, de son règne, il ne souffriroit qu'il ne fust jamais
vendu aucune charge, et qu'il obligeroit les roys, ses
successeurs, à le jurer en leur sacre, comme une des
loix fondamentales de T Estât ; qu'il leur accordoit
une chambre de justice, et que, dans trois jours, on
nommeroit les commissaires ; que, pour le regard
des pensions, il pourvoieroit au retranchement, de
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64 JOURNAL INÉDIT
ManiiMt. telle sorte qu'ils auroyent sujet d'en estre contens*.
27. Mort de la reyne Marguerite *, à 11 heures
du soir. MM. Arnaud et de Marillac commissaires
pour faire l'inventaire. Bagues valoyent 25 ou
30,000 escus. Tout le reste des meubles ne valoit
pas 6,000 escus. S'assemblent avec M. de Souvré,
comme premier gentilhomme de la chambre, pour
ordonner le deuil. M. de Souvré, M. le comte de la
Rochefoucaud ' , maistre de la garde -robbe en
charge, premiers valets de chambre et autres offi-
ciers du Roy prétendoyent devoir avoir deuil. Jugé
qu'il ne leur en appartenoit, mais que MM. de Sou-
vré et de la Rochefoucaud le prendroyent par bien
séance et se Tordonneroyent eux-mesmes. La dé-
pence du deuil des domestiques de la reyne Margue-
rite, de leur nourriture durant quinze jours, de l'effi-
gie et autres cérémonies faites en la maison, monte
à 14,000 escus. Si on eust fait un convoi, il eust monté
100,000 escus. Elle devoit 260,000 escus, sçavoir,
60,000 escus devant la donation* et 200,000 escus
depuis. Donnoit par an 100,000 livres aux pauvres'.
* Voy. Pontchartrain, t xvii, p. 78; Herc, fr, t. m, p. 421; Merc, fr,^
t. IV, p. 24*
2 Marguerite de France, duchesse de Valois, fille de Henri II et de
Catherine de Medicis, première femme de Henri IV qui fit annuler
son mariage en 1599.
* François, V« du nom, né en 1588, àucet pair en 162J, mort en 1650,
père de l'illustre auteur des Maximes.
* La donation entre- vifs qu'elle fit de tous ses droits en faveur du
Dauphin, depuis Louis XIII. *
6 Foy. Pontchartrain, t. xvii, p. 78; Richelieu, t. xxi bis, p. 241;
Fontenay-Mareuil, t l, p. 267.
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d'arnauld d'andilly. 06
28. Messieurs du Parlement s'assemblent matin M«rt %m.
et après-disnée. Donnent arrest portant que les
Princes du sang et les ofliciers de la couronne se-
ront mandez pour délibérer sur les remèdes qu'il est
besoin d'apporter aux désordres qui sont en TËstat '•
29. Conseil tenu au Louvre. Ordonné ce f}ui fut
exécuté le lendemain, ainsi qu'il suit :
30. Messieurs les gens du Roy font leur plainte
en la Grand Chambre, de ce que cest arrest avoit esté
donné sans les ouïr; qu'il préjudicie extresmement à
l'autorité du Roy. Requièrent qu'il soit biffé dans les
registres. — Messieurs du Parlement répondent que
Tarrest n'estoit pas tel qu'on l'avoit fait entendre à
Sa Majesté, pour ce qu'à la fin il y avoit: sous le
bon plaisir du Roy (mots qu'ils avoient adjoutez de*
puis, voyant que l' arrest n'estoit soutenable) ; qu'ils
chargeoient Messieurs les Gens du Roy d'aller vers
Sa Majesté pour la supplier d'avoir pour agréable
que l'arrest fust exécutée
Environ le dit jour, M. de Vendosme se départ de
l'union qu'il avoit avec les autres Princes et présente
au Roy une déclaration par écrit pour assurance de
sa fidélité. La Reyne la refuse et dit qu'il ne pouvoit
bailler d'assurance plus grande que ce à quoy la
naissance l'obligeoit ; que le Roy contraindroit de se
* Voy. Merc» fr,, t. iv, p. 25. Voy, dans les Mémoires de Mathieu Moié
le narré des remontrances du Parlement contenant tous les détails de
cette affaire et les pièces authentiques à Tappui (Mém. Math. Mole,
édition citée, p. 20-&8).
* Voy, Merc» fr., t. iv, p. 33, tous les détails relatifs à cette affaire
et notamment le rôle joué par Tavocat général Senrin.
5
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tiart mi. ranger à letir devoir tous ceux qui s'en seroient dé-
partis, etû«
Avril. &« Xa Rayne dit à M. de Longueviile, revenu
huit ou dix jours auparavant^ qu'elle Tavoit toujours
fort affectionné, comme elle faisoit encore; qu'elle
sçavoit qu'il avoit eu quelques mécontentemens du
maréchal d'Ancre, qu'elle le prioit d'oublier tout
cela} que le maréchal d'Ancre avoit toujours esté et
ôstoit encore son très-humble serviteur; qu'elle desi*
roît qu'il le rôçeust bien lorsqu'il le viendroit sa-
luer. M. de Longueville répondit : Madame, il ne
m'a jamais témoigné qu'il fust mon amy, et, quant
à moy , je ne l'ay jamais ni aimé ni haï, mais je feray
ce que Vostre Majesté commandera. Elle répondit :
Je désire que vous le teniez pour vostre serviteur et
veux qu'il le soit ; et sur cela fit avancer M. le mare-
chai d'Ancre, qui alla saluer M. de Longueville, et
puis ils s'embrassèrent, mais tout cela avec froideur
de la part de M. de Longueville.
Accord de M. le maréchal d'Ancre et de M. de
Villeroy» — M* de Guise dit à la Reyne qu'infinies
personnes trouvoyent étrange la froideur dont elle
usoit envers M. de Villeroy, veû les services qu'il luy
avoit faits et ceux qu'il estoit encore capable de
faire; que chacun sçavoit la mauvaise intelligence-
qui estoit entre M. le maréchal d'Ancre et luy ; que
cela estoit trouvé extresmement mauvais ; que, pour
luy, si cela continuoit, il ne pourroit toujours sup-
porter cette hayne, et que, s'il estoit contraint d'a-
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D'AftNAULD D'ANDÎLLY. 67
bandonner le Maréchal, il ne !a vouloit pas assurer Avrii ie«.
qu'il se passast deux jours sans qu'il courust fortune*
La Reyne lui répondit qu'il lui faisoit un plaisir ex-
tresme ; que cette affaire lui donnoit de la peine,
mais qu'elle ne savoit comment l'accommoder, pour
ce qu'il estoit besoin que quelqu'un s'entremist;
qu'elle le prioit de le faire et d'en parler comme il
faloit au maréchal d'Ancre. Sur cela, M. de Guise
parla à luy et l'affaire s'accommoda. Depuis, après
les festes de Pasques, M. de Villeroy estant revenu
de ses dévotions, il fut encore mieux reçeu.
7. Querelle de M. de Bressieux* contre M» de
la Valette ^
M, le vicomte de Rabat tue en duel M. de Longnac.
Conseil tenu chez M. le président Jeannin.
M. d'Herbaut ^ dit que les finances estoyent en une
entière confusion ; qu'il n'y avoit nul moyen qu'il fist
sa charge, si on ne lui bailloit des fons. M. le prési-
dent Jeannin en dit de mesme et conclud que, pour
y remédier^ il faloit, pour cette année, recevoir le
droit annuel. Sur cela, MM. de Ma... (Marillac),
Do... (Dollé) et Bu... (BulHon) ne disent mot. Ce
que voyant M. Arnaud, il prend la parole et dit qu'à
* Premier écuyer de la Reine-mère.
> Bernard de Nogaret de la Valette, second fils da duc d'Épemon,
duc de la Valette puis d'Épernon, pair, colonel général de rinfanterie
française, gouverneur de Guyenne, chevalier de la Jarretière, né
en 1592, mort en 1661. Il épousa Gabrielle Angélique, légitimée de
France, fille de Henri IV et de la marquise de VerneuiL
3 Raimond Phélipeaux, seigneur d'Herbaut, né en 1560, trésorier de
l'Épargne en 1599, secrétaire. d'État en 1621, mort en 1629.
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68 JOURNAL INÉDIT
Avril 1618. la vérité il y avoit une grande confusion aux affaires,
mais qu'elles n'estoyent point en si mauvais estât
qu'il n'y eust moyen d'y pourvoir ; et ensuite leur
montra clairement qu'ils n'avoyent besoin que de
trouver 100,000 escus comptant, et que, moyennant
cela, tout iroit bien; qu'on les pouvoit prendre à la
Bastille ; que, pour les trouver autrement, ils avoyent
les deux derniers quartiers des pensions de la reyne
Marguerite, montant à 250,000 livres; qu'il n'estoit
plus besoin que de 50,000 livres et 10,000 escus
pour les intérests d'un an; que l'on luy donnast
les quittances de l'Espargne pour les dits 330,000
livres sur de bonnes receptes générales et qu'il s'as-
suroit de trouver l'argent; que si la Reyne, pour
des considérations d' Estât et de peur de mécontenter
les officiers, vouloit, contre la parole qu'elle avoit
si solennellement donnée, remettre la paulette et
apporter un tel préjudice à l'Estat, il faloit obéir, et-
que si, sur cela, elle lui demandoit son avis, il le luy
diroit fort franchement; mais qu'il ne souffriroit ja-
mais qu'en une affaire de telle conséquence, et qui
importoit tellement au royaume, on prist le prétexte
de la nécessité des finances, et que, s'ils le vouloyent
faire, il iroit trouver la Reyne et lui feroit entendre,
en présence de tous les Princes et des Grans, Testât
des affaires et lui feroit voir comme ils ne les enten-
dent point.
9. Messieurs du Parlement furent au Louvre,
ayant esté mandez par le Roy. Sa Majesté leur dit
quelques mots ; et puis Monsieur le Chancelier prit la
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d'arnauld d'andilly. 69
parole, et leur dit que ils n'avoyent point deû s'as- Avril i««.
sembler pour ce qui concerne les affaires de l'Estat ;
qu'ils estoient seulement ordonnez pour rendre la
justice aux sujets du Roy; qu'il avoit choisy et esta-
bly ceux de son Conseil, pour aviser à ce qui est de
la conduite des affaires du royaume ; et que Sa Ma-
jesté leur défendoit de se plus assembler sur ce sujet.
Et à ce propos, leur allégua plusieurs exemples, et
entre autres du président de la Vacquerie, flamand,
qui ne voulut recevoir les pleintes du duc d'Orléans
(qui fut depuis Louis XII). On dit que Monsieur le
Premier Président répondit à Monsieur le Chance-
lier, que s'ils estoyent en lieu où l'on pust répliquer,
il y auroit bien moyen de répondre à ses exemples.
On dit aussi que Monsieur le Chancelier ayant dit à
Messieurs du Parlement, que plusieurs de leur com-
pagnie n'avoyent pas esté d'avis del'arrest, et en
cela, avoyent témoigné plus de prudence, Monsieur
le Premier Président répondit : Monsieur, ce que la
Cour ordonne, c'est toute la Cour, car elle ne se. di-
vise point.
L'après disnée, ils s'assemblèrent au Parlement.
Résolu que l'on députeroit pour faire remonstrances
au Roy, afin de luy faire connoistre qu'il y avoit plu-
sieurs réponces aux argumens faits par Monsieur le
Chancelier, et luy faire entendre de quelle sorte le
Parlement s'est toujours comporté en pareilles occu-
rences d'affaires que celles qui sont aujourd'huy *.
* roy. Richelieu, t. xxi bis, p. 246 ; Fontenay-Mareuil, t. l, p. 271-
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70 JOURNAL INÉDIT
Avril 1613. \0. Le Roy allant donner de l'eau béniste à la
reyne Marguerite, et sa queue devant (selon la cous-
tume) estre portée par trois Grans, et n'y ayant que
Monsieur le Prince et Monsieur le Comte', des princes
du sang, il se meut contention entre M. de Guise et
M, de Longueville. La Reyne jugea en faveur de
M, de Guise. Sur cela, M. de Longueville s'en re-
tourna à Amiens, et Monsieur le Prince et Monsieur
le Comte (qui veut marier Mademoiselle sa sœur^
à M. de Longueville) n'y voulurent estre. Telle-
ment que MM. de Guise, du Mayne et d'Elbeuf
portèrent la queue.
On tient que pendant le séjour de M. de Longue-
ville à Paris, on voulut envoyer 500 Suisses à Amiens;
que M. de Longueville, en ayant eu avis, vint prendre
congé de la Reine, disant qu'il avoit esté averty que
Sa Majesté envoyoit des Suisses à Amiens ; qu'il crai-
gnoit que le peuple, qui estoit assez fâcheux, ne les
276; Merc, fr,^ t. iv, p. 37-42, où se trouve le sommaire des discour»
prononcés en cette occasion,
* Louis de Bourbon , comte de Soissons, fils de Charles de Bourbcm,
mort en 1612 et d*Anne de Montafié, né en 1604, grand maître de
France et gouverneur du Dauphiné en 1612 , lieutenant-général dans
Paris et chef du Conseil pendant l'absence de Roi en 1626, gouverneur
de Champagne en 1631. S'étant révolté contre le Roi, il fut tué à la
bataille de la Marfée qu'il gagna en 1641 sur le maréchal de ChatiUon.
Le comte de Soissons, à qui Arnauld d'Andilly donne une volonté,
n'avait alors qu'onze ans.
2 Louise de Bourbon, sœur du comte de Soissons, née en 1603,
morte en 1637, devint en effet la première femme du duc de Longue-
ville dont elle eut la duchesse de Nemours, l'auteur des Mémoires,
3 Charles de Lorraine, IP du nom, duc d'Elbeuf, pair, gouverneur
de Picardie, blessé au siège de Saint-Jean-d'Angely en 1621, retiré en
Flaodres de 1631 à 1643, mort en 1657.
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D'AnNAUl.0 p'ABIDILtY. 71
voulust recevoir. Joint qu'en tellaa oocamons, t'ei^ ^y^ *«*••
toit aux Gouverneurs de province à y donner ordro.
C'est pourquoy il la supplioit de trouver bon qu'il y
allast, Sur la résistance apportée p^r la Reyne, pa*
rôles,... Service du Roy,.,. Maréchal d' Ancre.. •••
Traitteroit en vallet.
26. M, de Candale* fait le arment de premier
gentilhomme de la Chambre.
Logement de quelques Suisses de la reyne Mar-
guerite. Sur quoy on fit courir le bruit que la Reynf
vouloit mettre de» Suisses dans la ville çt d^iarmer
le peuple.
On disoit que Monsieur le Prince vouloit répudier
Madame sa femme ^ Elle le va trouver Iq (SQir> comme.
il estoit couché.
30. Monsieur le Prince voit la Reyne en présence
de M°** la comtesse de Soissons qui s'en est rendue
la médiatrice. Luy dit : que quelques mauvais rap-
ports qu'on luy eust faits de luy, il n'avoit jamais eu
autre intention que de servir le Roy et elle ; qu'il ne
mettoit point de différence entre les personnes de
Leurs Majestez, etc, ; que quant à ce qu'on estoit en-
tré en ombrage de ce qu'il se mettoit bien avecMea^
sieurs du Parlement, c' estoit à tort, parce qu'en cela,
il n'avoit esté porté d'autrç désir qu§ do ce qu'il ^
* Henry de Nogaret de la Valette, duc de Candale, premier gen-
tilhomme de la Chambre, gouTra-neur d'Agenaip et de Sfiiiit»ng9, ctUf
et pair en 1631, se signala dans les guerres de Hollande, d'ItfiUe, fu^
généralissime des armées de Venise et mourut en 1639.
a Charlotte Marguerite de Montmorencii fiUe Au GoooâtulWté
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72 JOURNAL INÉDIT
ATiitwii. timoit que cette compagnie fust fort affectionnée au
service du Roy; que pour le regard du Conseil, il
n*y venoit point à cause de l'extrême confusion qui y
estoit, et qu'il supplioit Sa Majesté de le dispenser
d'y aller jusqu'à ce qu'on y eust mis un autre
ordre, etc.
On dit qu'il insista sur deux points, l'un de réfor-
mer le Conseil, en telle sorte qu'il n'y entrast que
fort peu de personnes (qui sétoit rejester sur Leurs
Majestez la hayne de ceux qu'on mécontenteroit) ,
et l'autre de donner contentement à Messieurs du
Parlement sqr les choses qu'ils demandent (qui se-
roit s'acquérir une entière créance parmy eux, et se
faire reconnoistre tout puissant.)
La Reyne luy répondit : qu'elle l'avoit toujours
aymé, et faisoit cas de luy selon que son rang le mé-
ritoit; qu'elle désiroit qu'il eust part dans les affaires,
et que rien ne se fist sans son avis ; que quant à ce
qui estoit du Conseil, elle estoit bien aise qu'il y
vînt; que néantmoins, puisqu'il estoit d'avis de le ré-
gler, l'on rapporteroit cependant ce qui s'y estoit
résolu , et qu'au plustost on travailleroit à régler le-
dit Conseil. Et sur cela, ayant appelle MM. le Chan-
celier, de Villeroy et Jeannin, qui estoyent un peu à
l'écart, leur dit comme Monsieur le Prince estimoit
qu'il estoit besoin de régler le Conseil, et qu'elle le
trouvoit bon, et qu'il y faloit travailler. Ils répon-
dirent tous qu'ouy, et chacun d'eux salua Monsieur
le Prince. M. de Bullion se voulant aussi avancer,
il lui tourna le dos. Après, M"'* la maréchale d'Ancre
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D*ARNAULD dUnDÎLLV. 78
vint, et rendit toutes sortes de témoignages à Mon- A^m un.
sieur le Prince du contentement qu'elle avoit de cette
réconciliation, et Comme elle y avoit apporté tout ce
qui luy avoit esté possible *•
9. Combat de M. de Losière *, fils de M. de Thé- n»y.
mines % contre M. de Madaillan, tué. — Querelle
venue à cause du vicomte de Parât,
11. M. le président Nicolay, pour la Chambre
des Comptes, et M. le président Chevalier pour la
Cour des Aydes, furent haranguer au Louvre, pour
supplier le Roy de rétablir le droit annuel. Au mi-
lieu de la harangue du président Chevalier, deux so-
lives du plancher de dessous croulèrent, et une poutre
s'ébranla. Le Parlement ne voulut y venir.
12. On tient conseil au Louvre, où estoyent
MM. de Guise, officiers de la couronne, etc. Mon-
sieur le Prince, mandé par deux fois, ne s'y voulut
trouver. M. le président Jeannin fit la proposition, dit
que le Roy, pour plusieurs bonnes raisons, avoit
accordé à Messieurs des Estats d'abolir la paulette
et la vénalité ; qu'il en avoit esté fait des dépesches
dans les provinces, mais que depuis on avoit eu avis
de tous endroits de tant de mécontentemens des offi-
* Foff, Pontchartrain, t. xvii, p. 81.
3 Charles, seigneur de Lauzières, second fils du maréchal, tué du
vivant de son père au siège de Montheur en 1621.
3 Pons de Lauzières de Thémines de Cardaillac, marquis de Thé-
mines, sénéchal et gouverneur de Quercy, nommé maréchal de France
en 1616 pour avoir arrêté Monsieur le Prince, gouverneur de Bretagne
en 1626, mort en 1627«
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74 JQUafVAI. INÉDIT
myiw. ciersquî ont toujours fidèlement servy le Roy, quMl
senibloit à propos de leur donner ce contentement,
que de surseoir pour les trois années qui restoyent du
bail, l'exécution de la sjippression de la paulette.
Sur cela, le Reyne prit la parole, et dit, qu'à la vé-
rité, il y avoit eu tant de pleinte» d'officiers que elle
désiroit leur donner quelque contentement pour les
trois ans qui restoyent à expirer du bail. Monsieur le
Chancelier demanda à la Reyne, s'il Juy plaisoit pas
qu'il en demandast les avis de quelques-uns de la
compagnie? Elle ditqu'ouy, M. le président Jeannin
opina le premier, et dit qu'il estoit d'avis de dresser
un édit que Ton feroit vérifier au Parlement, por-
tant la révocation de la paulette et de la vénalité,
mais que néantmoins il y auroit surcéance pour
trois ans de l'exécution, M. de Chasteauneuf * dit
qu'il estoit d'avis que cela se fist seulement par un
arrest du Conseil, afin de ne s'engager à aucune vé-
rification, comme il n'y en avoit point jusques icy,
M. de Tbou, idem. Après cela, Monsieur le Chance-
lier demanda à la Reyne, s'il hii plaisioit qu'on en
opinast davantage? Elle répondit, qu'it n'en estoit
point besoin, pour ce que c' estoit une chose qu'elle
avoit déjà: avisée. M* le Chancelier fut d'avis d' ar-
rest, et non pas d'édit. Ainsi il passa là.
^ Guillaume de rAubespipe, biiron de Cb&teauneuf, conseiller au
Parlement en 1568, maître des requêtes en 1572, ambassadeur en An-
gleterre, conseiller d'Etat, chancelier de Louise de Lorraine, reine de
France, et chancelier des Ordres en 1606, mor^ en 1639, Son fils, le
marquis de Châteauueuf, devint garde des sccavix.
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^ D*ARNAULD O^ANDIiLT. 75
20, Monsieur le Prince part le soir, pour aller ii«y««.
à Valéry. Il avoit parlé quatre heures auparavant
à Madame sa femmç qui le suit le lendemain *.
On fît courir le bruit que la Reyne n'avoit pas
voulu qu'il se trouvast aux remonstrances que devoit
faire le Parlement. Mais le vendredy ensuivant.
Sa Majesté dit à Messieurs du Parlement, lors de
leurs remonstrances, que c'estoit très-faux, et que
tant s'en faut, elle luy avoit envoyé dire par un gen-
tilhomme, qu'elle le prioit de s'y trouver, et qu^
c'estoit chose qu'elle desiroit extrêmement; et que
Monsieur le Prince', au lieu de cela, s'en estoit allé,
sans prendre congé, ni du Roy, ni d'elle.
On fit aussi courir le bruit que Monsieur le Prince
s'en estoit allé pour ce qu'on se vouloit saisir de luy.
21, M. de Loménie père^ leut ^ Conseil les
réglemens faits sur le sujet de l'ordre et des affaires
qui se doivent traitter aux Conseils du Roy.
22, Messieurs du Parlement députent cinq prési-
dens de la Grand Chambre (MM. de Blancménil •*
et Séguier n'y estoyent) et quatre conseillers de
chaque chambre pour présenter leurs remontrances
au Roy. Monsieur le Premier Président porta la pa-
role et dit en substance les raisons qui les avoyent
* Foy. Poqtchartrain, t vfih P« 81.
2 Antoine de Loménie, c(Hnte de Qrieone, seoréuire d'Etni soua
Henri IV et Louis XHI, à qui Ton doit la précieuse poUection dça
manuscrits de BriennCy père de Fauteur des fiémoires,
5 Nicolas Potier de Blancmesnil, né en 1541, conseiller aw Parlement
en 1564, maître des requêtes en 1507, président à mortier, ep 1579,
chancelier de la Ueine-raère, mort en K>35.
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76 JOURNAL INÉDIT •
May 1618. meus à donner Tarrest du 28 mars portant que les
Princes, Pairs , et autres Officiers de la Couronne
seroyent assemblez , et depuis , à dresser leurs re-
monstrances sur ce que l'on n'avoit pas trouvé bon
leur arrest ; qu'il y avoit plusieurs exemples de re-
monstrances faites au Roy sur les affaires d' Estât, en
diverses occasions. Protesta toute sorte de service
au Roy*.
Après, le jeune M, de Loménie ^ leut les remons-
trances qu'ils présentèrent. Ensuite, la Heyne les fit
retirer, et dît qu'elle aviseroit avec son Conseil ce
qu'elle avoit à leur répondre. Lorsqu'ils furent sor-
tys, la Reyne se mit à la fenestre avec Monsieur le
Chancelier, M. le président Jeannîn
Puis, on les fit rentrer, et lors le Roy leur dit....
Et la Reyne, ensuite , prenant la parole, leur dit :
qu'elle estoit bien malheureuse de voir qu'au lieu de
recevoir des remercîmens et de la reconnoissance
de tant de peines et de travaux qu'elle avoit souffert
* Voy, Pontchartraîn, t. xvii, p. 81.
2 Henri Auguste de Loménie, comte de Brienne, né en 1504, mort
en 1661, ministre et premier secrétaire d*Etat sous Louis XHI et
Louis XIV, auteur des mémoire» qui portent son nom. « Le Roy mo
commanda d*en faire lecture ( des remontrances ) à la place de mon
père qui ne le pouvoit que très-difficilement à cause de la foiblesse
de sa vue : ce qui donna occasion à prédire que j'aurois bientôt la
survivance de sa charge, » (Mémoires du comte de Brienne, édition
Petitot, 2* série, t. xxxv, p. 300.) — Foy, dans les mémoires de M. Mole,
p. 28 et suiv., le texte officiel des remontrances du Parlement. C'est un
document très-important pour Hiistoire du temps. Ces remontrances se
trouvent aussi dans le Merc, fr.^ t. iv, p. 51 et suiv. avec le compte
rendu de cette séance mémorable.
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d'arnaold d'andilly. 77
pendant sa Régence, pour conserver la paix et la Mnyi6«.
tranquillité de T Estât, elle ne recevoit d'eux que de
l'ingratitude ; qu'ils entreprenoyent directement sur
l'autorité du Roy, mais qu'elle connaissoit par noms,
par surnoms , et connoissoit les maisons de cinq ou
six de ceux qui avoyent principalement fomenté ce
dessein, et que le Royales sauroit bien faire châtier.
Et puis dit : mais je voy bien que je m'emporte et que
je me pourrois laisser aller à la colère ; c'est pour-
quoy Monsieur le Chancelier vous dira le reste.
Après, Monsieur le Chancelier prit la parole , et ré-
pondit à tous les exemples qu'ils avoyent alléguez ,
et soustint qu'il n'y en avoit pas un formel pour té-
moigner une entreprise semblable à celle-cy ; qu'à la
vérité les Roys s'estoyent souvent utilement servis
des avis du Parlement , en plusieurs affaires impor-
tantes, mais que jamais on n'avoit souffert que le
Parlement se meslast de conseiller le Roy sans que
S. M. le luy eust commandé ; que quant aux évoca-
tions, il n'en avoit point scellé de plein mouvement ;
que pour les autres , estoyent eux-mesmes qui en
estoyent cause, à cause des officiers qu'ils avoyent
reçeus outre le degré de l'ordonnance, et des faveurs
et parentez qui estoyent entre eux ; que comme ils
n' avoyent que voir sur les chambres des Comptes ,
cours des Aydes, etc. , pour ce que leurs jurisdictions^
estoyent toutes séparées , de mesme , ils n' avoyent
que voir sur le Conseil du Roy ; que, quant à plusieurs
désordres sur lesquels ils avoyent fait des remons-
trances, s'ils eussent eu la patience d'attendre les
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7S lôûRNAt îniSdit
Biâyiêii. répoftces deô corps des Estats, ils eussent veu que
Ton eût satisfait à tout cela, et eussent aussi veu qu'il
y avoit plusieurs articles sur les désordres qui es-
toyent en leur compagnie.
Après, M. le président Jeannin dit : que puisqu'ils
avoyent taxé le maniement des Finances, la charge
qu'il avoit l'obligeoit de répondre pour luy et pour
ses compagnons; que les finances n'avoient jamais
esté plus sincèrement ni plus innocemment admi-
nistrées ; que Messieurs du Parlement ne devoyent
point taxer ainsi tout le monde en général , mais
qu'il faloit accuser en particulier ceux qu'ils esti-
raoyent estre coupables, et qu'il répondoit pour luy
et pour ses compagnons qu'ils ne demanderoyent
jamais ni gi'ace, ni pardon, ni abolition ; que quant
aux dépences, tant s'en faut qu'elles fussent moin-
dres, depuis la mort du feu Roy ; qu'au contraire,
elles estoyent de beaucoup augmentées ; que quant
aux impositions, tant s'en faut qu'on les eut augmen-
tées ; qu'au contraire, on ctvoit remis au peuple. Cha-
cun an, sur diverses fermes, plus de 2,000,000 de
livres ; que quant à Targent de la Bastille , on n'y
avoit touché qu'en ces derniers mouvemens-
Après, M. de Guise dit qu'il offroit au Roy son
épée et sa vie pour maintenir son autorité envers
tous et contre tous»
M. de Rheims*, M. de Vendosme, M. de Ven-
^ Louis de Lorraine, cardinal de Gnise, archevêque- duc de Reims,
pair*de France, né en 1585, archevêque de Reims en 1605, cardinal
en 1615, suivit rarmée de Poitou en 1621, se signala à l'attaque du
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D'ARNAtlLD 6'AMbîtLY. 7Ô
tfldour et M. de Montmorency* parlèrent aussi. iiayi«i5.
M. d^Espernon dit qu'autrefois le Parlement avoil
esté dit le Parlement des Pairs, lorsque le Roy, as-
sisté des Pairs de France, reftdoit luy-mesme la jus-
tice ; que depuis que l'on eut rendu le Parlement
sédentaire, il retint bien toujours le nom de Parle-
ment des Pairs, mais que, néantmoins, il n'avoit
plus l'autorité de convoquer ni d'assembler les Pairs,
lesquels n'estoyent obligés d'y allôr , que quand le
Roy le leur commandoit. Ensuite, ayant esté dit
quelques autres choses, M. d'Espernon dit encore :
Messieurs, vous parlez de réformation, mais si on
en vient à réformer, prenez garde que quelques-uns
de votre compagnie n'y aient part.
M. de Nevers, qui y estoit^ ne dit mot.
Après, la Reyne parla encore^ en colère, et par-
ticulièrement sur les libelles diffamatoires qui se fe*
soyent tous les jours, à quoy il» ne donnoyent aucun
ordre ; et qu'encore le jour de devant, on luy en
avoit apporté un intitulé Cassandre. Elle fit lire deux
feuillets dudit livre à M. de Pisieux, et puis on le
bailla à Monsieur le Procureur Général, pour en faire
faire justice. — M. le maréchal d'Ancre parla sur le
sujet de ces libelles diffamatoires ^é
faubourg de SiiinWeMhd*Angely, mort en 1631* U éuàt fU$ d*Henrt de
Lorraine, duc de Guiae, tué à Dlois. {Foy. P. Aoselme, t. ii, p^ 8a.)
* Henry, lU du nom, duc de Montmorency et de Oamville, premier
baron, pair, amiral et maréchal de France, suraoouné la Gloire Ue$
braves^ né en 1505, filleul de Htori IV, eut la tête tranchée à Toulouse
le 30 octobre 1632. {Voy, P. Anselme, t. ii, p. 60Ô.)
> Voy. Richelieu, Petitot, 2* sériei t. xxi bis, p. 247 { Fontenay-Ma-
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86 JOURNAL INJÎDIT
May 1615. 23. Messieurs du Parlement assemblèrent les
Chambres le matin. Monsieur le Président rapporta
tout ce qui s'estoit passé. Ils ordonnèrent que le tout
seroit enregistré, et que l'on enregistreroit aussi
comme M. le maréchal d'Ancre estoit assis et couvert
derrière la Reyne.
L'après-disnée, après que l'on eut leû la semaine,
Monsieur le Chancelier dit : que chacun savoit ce qui
s'estoit passé le jour précédent, et que le Roy vou-
loit qu'on opinast sur cette affaire. Et puis dit à M. le
président Jeannin qu'il opinast. M. le président
Jeannin répliqua qu'il ne pouvoit opiner, si, aupa-
vant, on ne proposoit ce sur quoy il faloit opiner. Mon-
sieur le Chancelier répondit que chacun savoit comme
le tout s'estoit passé, et qu'il pouvoit opiner sur cela.
M. le président Jeannin s'opiniâtra et ainsi n'opina
point alors. Monsieur le Chancelier, qui avoit aupa-
ravant fait appeller MM. de Vie *, de Commartin ^ ,
Jambeville, de Refuge, et de Boissise', demanda
reuil, id., !'• série, t. l, p. 276; Merc, fr,^ t. iv, p. 73-80. Le récit
du Mercure peut servir à contrôler l'exactitude de celui d'Amauld
d'Andilly.
* Mery de Vie, chevalier, seigneur d'Ermenonville, maître des re-
quêtes en 1581, président au Parlement de Toulouse et conseiller
d'Etat en 1507, surintendant de la justice en Guyenne, ambassadeur
en Suisse, garde des sceaux en 1621, mort en 1622. {Voy, P. Anselme,
t VI, p. 539.)
s Louis le Fèvre, chevalier, seigneur de GaumarUn, né en 1552,
conseiller au Parlement en 1579, maître des requêtes en 1585, prési-
dent au Grand-conseil en 1587, intendant de justice en Poitou en 1588,
intendant de Picardie en 1590, conseiller d'Etat en 1594, ambassadeur
en Suisse en 1605, garde des sceaux en 1622, mort en 1623. (roy. p.
Anselme, t. vi, p. 562.)
> Tous les trois conseillers d'Etat.
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d'arnauld d'andilly. 81
Tavis à MM. de Commartin et de Vie, puis aux iu>itti.
autres, et mesme à M. le président Jeannin* Tous
furent d^avis de casser Tarrest du Parlement, et or-
donner qu'il seroit osté des registres et leurs remons-
trances aussi. On ne demanda point Tavis de MM. de
Guise, de Yendosme , et autres grans à cause de la
dispute de leurs rangs. Mais la Reyne dit tout haut :
s'il y a quelqu'un d'autre avis et qui ayt quelque
chose à dire, qu'il le die.
L'arrest fut depuis dressé par M. le président
Jeannin, et corrigé diverses fois. Il y avoit mis que
tous ceux qui avoyent eu l'administration des finances
se soumettoyent à toutes sortes de peines , au cas
qu'ils eussent mal versé. Monsieur le Chancelier fit
oster cette clause*.
Ensuite , la Reyne fit commander par deux fois
à Messieurs les gens du Roy de lire l'arrest du Par-
lement, et leur manda pour la troisième fois qu'ils
eussent à n'y manquer, sur peine d'encourir l'indi-
gnation du Roy. Messieurs les gens du Roy viennent
à la Grand Chambre apporter l'arrest^.
1". Messieurs du Parlement leur dirent qu'ils
estoyent assemblez (sçavoir la chambre de l'Edit et
la Tournelle) sur ce sujet, et avoyent résolu de dé-
puter Monsieur le Premier Président et quelques
« Voy. Mém. de Matli. Mole le texte de cet arrêt du Conseil, p. 53.
Foy. aussi if ^c. />•., t. iv, p. 80 et suiv.
* Voy. Richelieu, Petitot, 2« série, t. 21 bis, p. 249; Foatenay*Ma-
reuil, id., l'* série, t. l, p. 279.
Juin.
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83 JôdâNAL î^ÉMf
autres vers Leurs Majestèfc ^ poui* leur faire toutes
scNTteB do sdttmisriofliS et de protestation^ de service
et d'obéisâÂtlce , et leur témoigner comme Ils n'a-
voyMt Bdtinda par un seul mot de leurs remons-
trânce^ dé toucher à ce qui les concernoit. Mais
qu'ils avoyent seulement voulu parler contre les dé-
sordres , et Contre ceux qui en estoyent la cause. Et
swr odla, prièrent Messieurs les gens du ftoy de rem^
porter Tarrest. A. quoy ils répondirent que c'estolt
chose qu'ils ne pouvoyent faire, ayant commande-
meut exprès du ttoy de le leur bailler. Voisin * prit
Tarrestéans te lire. -^ La Reyne ayant sçeu que Ton
vottloit députer vers elle le lendemain, manda à
Monsieur le Premier Président qu'ils n'y vinssent
point s'ils n'apportoyent les registres où estoyent
l'arrest et les remonstrances afin de les en oster.
On dit que sur cela, Monsieur le Premier Préelident
etMesdeurs les autres Présidons de la Grand Cham-
bre, hormis un, et quelques conseillers furent d'avis
de se conformer aux volontez de Leurs Majestez, mais
que le président le Jay et ceux de son avis en estant
avertis, dirent que ce seroit faire faire amende hono-
rable au Parlement et soutinrent que cela ne se pou-
toit résoudre sans assembler les Chambres et faire
opiner toui le monde* Tellement que Messieurs du
Parlement ne furent point au Louvre le lendemain^.
Messieurs les maistres des Requestes vont trouver
* Greffier d*attdiencè du Parlement.
* Merc» fr.^ t. iv, p. 88-87.
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d'ARNAULD O^ANDlLLy. 83
Monsieur le Chancelier sur le sujet du règlement du J«tn i«ii.
Conseil. M. de Beaumont portoit la parole. Monsieur
le Chancelier se fâcha , et en vinrent , de part et
d'autre, à des paroles si aigres que M. de Beaumont,
transporté de colère, dit qu'il ne pouvoit plus parler,
et laissa la parole à M. Masuyer qui recommença
avec encore plus d'aigreur. Le 2 juin, ils furent en-
core le matin trente ou quarante , trouver Monsieur
le Chancelier qui leur répondit qu'il les avoit tou-
jours estimez et affectionnez ; que le règlement n'estoit
point encore signé, et qu'il ne leur seroit fait aucun
tort. Ainsi ils s'en retournèrent , et ayant délibéré
entr'eux, trouvèrent que cette réponce n'estoit assez
précise, et retournèrent encore le soir avec luy, en
intention , au cas qu'il ne leur rendist réponce as-
seurée, d'en faire parler en plein Conseil par M. Man-
got '. Monsieur le Chancelier leur dit qu'il leur don-
noit sa parole que le règlement n'estoit point signé
et qu'il n'y seroit rien fait à leur préjudice.
Monsieur le Prince arrive à Saint-Maur où six
conseillers furent souper.
2. Monsieur le Prince arrive à Paris avec quatre-
vingts chevaux (on dit qu'il avoit quinze gardes) , fut
voir le président le Jay. Rencontra le Roy sur le
Pgnt-Neuf, qui lui fit assez froide mine. Monsieur le
Prince se retira sans luy dire à dieu. Il fut voir
* Claude Mangot, conseiller au Parlement en 1592, maître des re-
quêtes en 1600, ambassadeur en Suisse, premier président du Parle-
ment de Bordeaux, secrétaire d'Etat et garde des sceaux en 1616, des-
titué à la mort du maréchal d'Ancre, le 24 avril 1617.
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84 JODRNAL INÉDIT
Juin 1615. aussi puis retourna coucher à Saint-Maur. Dit
qu'il avoit eu avis qu'on se vouloit saisir de luy.
Batterie à la rue Saint- Martin entre les habitans
et des soldats des gardes.
3. Les chambres estant assemblées, M. Servin
requit que Tarrest du Conseil fust leu. Voisin le leut.
Messieurs du Parlement le font relire jusques à trois
fois. Après on vient aux opinions. M. le président
Séguier dit à Monsieur le Premier Président qu'il luy
devoit dire qu'il parlast avec plus de modération.
M. le Grand dit que ce n'estoit point la coustume
d'interrompre les gens de bien en leurs opinions.
Sur quoy M. le président Lescalopier, ayant pris la
parole en faveur de Monsieur le Premier Président,
et M. le Grand ayant encore répondu avec davan-
tage de violence, M. le président Lescalopier dit à
Monsieur le Premier Président : Monsieur, faites taire
cet homme ! Sur quoy M. le Grand répondit : Com-
ment ! faites taire cet homme ! J'estois conseiller céans
que vous n'estiez encore qu'un petit écolier, et vous
n'estes assis plus haut que moy que parce que vous
avez baillé 100,000 escus de vostre charge. Sur ces
contestations, l'assemblée se rompit, tellement qu'il
n'y eut que six qui opinèrent, les quels allèrent tous à
supplier Leurs Majestez de casser l'arrestdu Conseil,
et, en cas de refus, de les aller trouver pour re-
mettre à leurs pieds leurs robbes et leurs chaperons.
4. Les chambres sont encore assemblées, et dix
seulement ayant opiné, l'affaire fut remise après les
festes de la Pentecoste, qui estoit le dimanche T.
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d'arnacjld d'andilly. 85
Monsieur le Prince traitte avec M. le prince de juiowi».
Joinville * pour le prieuré de Saint-Martin, au lieu
duquel il lui baille 6,000 escus comptant et l'abbaye
de Coulom, qu'il avoit achetée de M. de Sully.
M* de Nevers obtient lestres pour faire assigner
M. de Sully touchant les terres qu'il avoit achetées •
de luy.
On dit que la Reyne envoya à M. de Rohan la
survivance du gouvernement de Poitou, dont M. de
Sully fut fort mal content. M. le marquis de Rosny ^
avoit demandé six mois à M. de Rohan pour l'obte-
nir de luy.
9. La Reyne eut plusieurs paroles avec M""' la
comtesse de Soissons touchant le voyage auquel Sa
Majesté dit que le Roy vouloit que M. le Comte as-
sistast. Et sur ce que Madame la Comtesse luy dit
qu'elle n'y pouvoit aller à cause qu'elle estoit incom-
modée, la Reyne lui dit qu'elle pouvoit donc de-
* Claude de Lorraine, frère puîné du duc de Guise, connu sous le
nom de duc de Chevreuse, porta d'abord le titre de prince de Joinville.
n naquit en 1578, se signala en 1596 au siège de la Fère, et en 1597 à
celui d'Amiens, alla guerroyer en Hongrie, fut créé duc de Chevreuse
et pair de France en 1612, servit en 1621 aux sièges de Saint-Jean-
d'Angely, de Montauban, fut grand chambellan et grand fauconnier,
gouverneur des Marches, de l'Auvergne, du Bourbonnais et de la Picar-
die, épousa, comme procureur de Charles P', la princesse Henriette,
en 1625 et la conduisit en Angleterre, fut au siège de la Rochelle en
1628, joua un certain rôle pendant la Fronde, et mourut en 1657. Il
avait épousé en 1622 Marie de Rohan, fille du duc de Montbazon, veuve
du connétable de Luynes, cette célèbre duchesse de Chevreuse dont
M. Cousin vient de retracer la vie romanesque.
2 Maximilien de Béthune, II« du nom, marquis de Rosny, fils du
grand Sully, né en 1588, grand maître de l'artillerie, mort en 1634.
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86 jroURNAL INÉDIT
Juin 1615. meurer, mais que Monsieur le Comte viendroit, etc.
13. M. deCanisy baille un soufflet au sieur...
et met la main à Tespée contre luy dans les Tail-
leries, le Roy y estant. Sur quoy les gardes ayant
crié qu'on allast aux portes, cela fit appréhender
qu'il n'y eust quelque entreprise sur la personne du
Roy. Le dit sieur de Canisy fut mis à la Bastille.
Monsieur le Prince parla à M»"* la maréchale
d'Ancre, comme elle revenoit de Lésigny.
21 . On descend la châsse de Sainte-Gçneviève \
22. Messieurs du Parlement continuent leur as-
semblée. Deux opinions courantes ; l'une de faire
remonstrances pour faire casser l'arrest du Conseil.
M. de Nevers se remet bien avec la Reyne, et
ensuite va vers MM. du Mayne, de Buillon et de
Longueville. On dit qu'il leur donna toutes sortes de
bonnes paroles, leur dit que Monsieur le Prince es-
toit raccommodé, que Messieurs du Parlement ne se
remuoyent plus, etc., et qu'eux, s'en estant fait en-
quérir à Paris, trouvèrent que tout cela n'estoit vray^
M, Broussel, qui fut le dernier qui opina, dit qu'il
ne se souvenoit bien de l'arrest et des remonstrances.
Voisin est mandé; dit qu'il les avoit baillez à du
Tillet'. M. du Tillet est mandé ; dit qu'il estoit vray
* u h^ ch&sse Sainte GenevieXve fut descendue le 21 dudit mois de
juin, et pour la seicheresse, et pour prier Dieu de conduire Leurs
Majesté». » {Merc, fr,^ t, iv, p. 116.) La Cour alloit partir pour Bor-
deau)(, k ropc^ion des noi^riages du Roi et de Madame.
2 Voy. Pontchartrain, t. xvii, p. 83.
3 Greffier en chef du Parlement Voy, Tallemant des Réaux, Thisto-
rie^tÇ cle M" 'du Tillet, et le commentaire de M. Paulin P^ris qui cite
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que Voisin I^ lai ^vpit baillq?; que, ppiir les wpé- #«rfii#M
ditiops ordinaire?, il les |ai(3«)it 4 Voisin, mw qw
celles qqi e§toyent d'unç telja CQpséqiiiîOpe, i| l^i^
gardojt dans son cabiijet, et que c'estoit lai qui «fr-
toit le greffe. Et sur cq qu'on luy dit que Voisin m
les luy avoit deu bailler isaps ^vprtjr I9 Çom, il ré^
pondit que Voisin estoit içon clerp et qi»e, p'il les juy
eust refusées , il l'ewst cba?»4. ^ OrdQflP^ ^nwite
que le tpqt seroit réintégré d^ns 1^^ regjiitras.
23. Messienrg du Parlement continuent teuF ^^
semblée, Résolvent de faire rernppstr^nç^S aw Bp^i
pour le §uppljer (Je crqjre que l>rre5t et ]^^ l^emOflS^
trances avpyent esté résolus par rqvia wnïfPHP d*
tout le l^prlement, et de croire que^ qmï^â }\ li*y
plfiirpit de se faire enquérir ou ip'ipformgf (Ju gpn*
tenu en leur§ renf)qnstrpnQes, il trPHVerpit qu'il n'y
avQJt rien dedan§ qui pe fvist très-véritAbIfu
M, le président Lesçalopier eut de gpapd/?s prises
avec M, Gilpt*, M, Perrot et quelqueii autrw ÇQPWih
lers^
h généalogie des du Tillct, dressée par Victor le Gris. « Cette famille
de grefifiers m pftef, dit M. Paulin f ^Fjs, |0Mj5^i|i 4'ijiije çf^psi^^f^
égale k Topulence qu'elle finit par acquérir.
i Jacques GiUot, déjà nommé, doyen de la cathédrale de Langres,
chanoine de la Sainte-Ch^pe;lI(B ^t} Pm^, GpDsei||fp-tfili^G fiu fiirl^'PPnl
de Paris, mort en 1619. Gijlot est auteur <)*ijne Relatipn cje cç qui se
passa au Parlement touchant la ségence de la roine Marie de Modicis,
les 14 et 15 mai 1610. Cet opuscule se trouve dans la collection Mi-
chaud et PoujouIa|, 1" série^ tr xi, p. 1^15. On a^ibg^ç §||§§j j^ jSJljot
une part dans la rédaction de la satire Ménipr^e, {Voy, la Notice ^\if
Gillot, en tôte de la Relation, dans rédjtiop cijée.)
« Merc, fr.^ t. iv, p. 112.
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88 JOURNAL INÉDIT
jniniéis. 25. Le jeudy de devant, jour de la Feste-Dieu,
M""' de Longueville avoit donné Tordre que ses tor-
ches marchassent à la procession devant celles de
M"* la douairière de Guise *. Ce jour-là, M. de Guise
envoya Monplaisir, capitaine de ses gardes, pour
faire placer les torches de Madame sa mère, et avoit
prié M. le marquis de Nesle^ de l'assister avec
soixante ou quatre-vingts gentilshommes. Le curé
avertit le Roy, qui envoya un nommé La Fosse,
exempt, sur le rapport duquel ils se résolurent de se
retirer. Mais y ayant eu contestation à qui se retire-
roit le dernier, sur cette dispute M. le marquis de
Nesle baille de l'épée à un de M"* de Longueville ;
sur quoy ayant tous, de costé et d'autre, mis l'épée
à la main, ils furent séparez par des soldats des
gardes et des archers du Grand-Prévost.
26. Monsieur le Prince part de Saint-Maurle
vendredy à la nuit, monté sur un petit mullet et fai-
sant semblant de s'aller promener dans le parc. Sort
par la porte de derrière ; va sur son mullet jusqu'à
Louvres; là prend la poste et va à Creil.
28. M. de Nevers, qui estoit allé vers MM. du
Mayne, de Longueville et de Buillon, rapporte qu'ils
estoient très-humbles et très-obéissans serviteurs du
Roy et de la Reyne, et que si Leurs Majestez le desi-
royent, ils feroyent le voyage, s' assurant qu'ils don-
* Catherine de Clèves, comtesse d*Eu, veuve du Balafré, morte
en 1633.
2 René aux Epaules, dit de Laval, marquia de Nesles, mai'écbal de
camp, gouverneur de la Fère, mort en 1650.
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d'aRNAULD D*ANDILLr. 89
neroyent à Monsieur le Prince et à eux, dans les Jumwn.
affaires, le rang et la participation que leur qualité
méritoit ; qu'elles reformeroyent le Conseil, répon-
droyent favorablement les cayers des Estats, donne-
royent contentement à Messieurs du Parlement et
regleroyent les rangs de tous les seigneurs de France*.
MM. de Guise et d'Espernon craignoyent qu'ils
n'eussent fait partie pour se rallier tous ensemble
fortement auprès du Roy et ainsi les en chasser;
dirent qu'il y avoit ligue signée entr'eux pour cet
effet.
4. M. de Villeroy va trouver Monsieur le Prince iuwet.
à Clermont; M. de Villesavin* avec luy.
6. M. de Villeroy retourne.
11. M. de Villeroy retourne ; meine M. de Vil-
lesavin avec luy. Envoyé M. de Villesavin. Mande
que Monsieur le Prince veut doresnavant traitter
article par article ; que le premier qu'il propose est
celuy du règlement du Conseil; qu'il demande que
dans le Conseil des affaires d' Estât, qui se tient les
matins à dix heures, il ayt la part que son rang re-
quiert ; que l'on se serve, pour les finances, de ceux
dont le feu Roy se servoit, et entr' autres de M. de
Sully ; que les arrests et autres expéditions du Con-
* Foy, Pontcbartrain, Petitot, 2« série, t. xvii, p. 83 ; Richelieu, id.,
t. XXI bis, p. 250 ; Fontenay-Mareuil, id., V* série, t. l, p. 584.
2 Jean Phélypeaux, seigneur de Villesavin, comte de Buzançois, se-
crétaire des commandements de la reine Marie de Medicis, maître des
comptes et conseiller d'Etat, mort en 1660. {Foy, Moreri, t. viii, p. 259. )
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90 ^PPHNAL INEDIT
juHrt 1618. sçji spyçnt sîgnéQs de aept persoppes, sçavoir : dç
luy, de M. de SMily, Monsieur le Chancelier, Mon-
sieur le Contrqsleur^général de^ flnances, du Rap-
porteur et des deux plus anciens du Conseil.
On dit qu'on lui répondit que, pour M. de Sully
et la signature dey arrests, c'estoit chose qui ne §e
pouyoit faire ; que, quant au Conseil de di^ heures,
il y auroit toujours le rang que sa qualité inéritoit*,
i5f tes leptres r- patentes du Roy pour tirer
i, 200,000 livres de la Bastille ayant esté refusées
cinq fois par la chambre des Comptes, on donne ar-
rest au Conseil le 14, qui estoit le jour précédent,
sigijé du Roy, de la Reyu^> Monsieur le Chancelier
et MM. Jeannin, Maupepu^, Arnaud et Dollé, por-
tant que la dite somme ^eroit tirée ; et le dit jour i5,
Leur^ Majestez, assistées de tpuii les Grans do la
Cour, furent faire tirer la dite spuime,
i7, Mf de Villeroy retourné. Monsieur le Prince
l'avoit quitté et c'en estoit allé à Muret, terre qui est
à luy, pour conférer ayeç MM. de BuiHon, de Lon-
gueville, du Mayne et comte de Saint-Paul.
M. de PrQuyille , gentil hoii^me de bonne maison
de Picardie, qui avoit trè^-bien servy, ayoit une
janibe de bois, sept en fans, une pension et esj^oit
sergentrpnajor d'Amiefls, est poignardé par un sp|-
dat italien de la citadelle nommé Alfonce Marianna,
1 yoy, Bferc, fr., t. iv, p, 116.
2 Gilles de M^upeou, né en ^551, conseiller d'Etat, intendant et
contrôleur générjil des finances spus Heuri IV çt Louis XIJI, mort
en 16Û1;
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en pis§ant mv le pont qui est entrç la ville et Tes- juuiet ini*
plapade de la citadelle, d'où il revenpit. Il y alloit
souvent donner le mot, Alfonce se jsauve dans la
citadelle; la ville s'émeut pour l'avoir. MM. deMai-r
gneux* et d'Hocquincourt% venus depuia peu- d«
Parjs, promettent de le rendre pt cependant le met-
tent en prison les fers aux pieds, Hautadeçlos, qui
commande dans la citadelle, prend vingt mousque-
taires et tire Alfonpe de prisoji, pqis sQpt avec luy
par une porte qui çi^t du cQ^\é des phamps, et mon^
tent tous deux à cheval et prennent le chemin d^
Flandre, Incontinent après l'assassinat, ceux d^ la
ville ayant pris Içs armes pour investir la citadelle
par dehors, on dit que M, de Alaigneux leur promit
qu'on leur rendroit Alfonce, et que, pur cela, ils se
retirèrent'.
M. le maréchal d'Ancre a depuis ipi» Haqtedeclo.^
pour commander dan;^ Qaille|:)œuf, au commence-
ment de l'année 1617.
21. A quatre heures du malin, M. de Villeroy
(assisté de M. de Neubourg) repart, va coucher à
Villers-Cotterets, pour de là aller le lendemain ipa-
tin à Noyon, où s'assemblent les Princes.
* igneux^ goi^verneur de Moq-
treu bre du Roi, lieijtejwit ^e l^
com ie de Mejiicis, pyj^ dq m^ré-
clia;
2 jin court, gouyeroeur de P^
roni
3 ; Fontenay-]V(^r^uij, p, 387
Vfr
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92 JOURNAL INIÎDIT
Juillet 1615. 26, M. de Pontchartrain * va porter une lettre
du Roy à Monsieur le Prince, par laquelle Sa Ma-
jesté lui commande d'estre samedy à Paris pour par-
tir avec elle; et, à faute d'obéir, dit à M. de Villeroy
que le Roy lui avoit commandé de s'en revenir,
après avoir sommé le Prince. Sur cela, le traitté se
rompt entièrement.
28. M. de Pontchartrain revient avec la réponse
de Monsieur le Prince, par laquelle il nomme les six
personnes dont il se pleint, et demande qu'ils soyent
mis hors des affaires. La datte est de Coucy^
La Reyne s'estoit trouvée fort mal la nuit du 27
d'un grand flux de ventre, qui la mena vingt-cinq
ou trente fois avec du sang. On en attribue la cause
à une colère qu'elle avoit eue le jour précédent.
Treize compagnies des gardes, prestes à partir,
furent arrestées sur ce sujet.
On tient que M. de Pontchartrain fut envoyé si
soudainement, afin que l'on rompist plus tost sur
le sujet du voyage que sur la nomination des six
personnes dont on se pleint.
On a dit depuis que ce fut MM. de Guise et d*Es-
^ Paul Phélypeaux, seigneur de Pontchartrain, né en 1569, secré-
taire des commandements de Marie de Medicis, secrétaire d*Etat en
1610, mort en 1621. Les précieux Mémoires de cet homme d'Etat ont
été publiés dans les collections Petitot et Michaud.
2 yoy. , dans les Mém. de Math. Mole, la lettre du Roi au prince de
Condé et la réponse de celui-ci, ainsi que la longue lettre écrite par
le Roi au Parlement, au sujet des démarches infructueuses faites au-
près de Monsieur le Prince, pour l'inviter à accompagner la Cour au
voyage de Guyenne (p. 62 et suiv.). Foy, les mômes pièces, Merc, fr.^
t. IV, p. 139-148.
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d'arnaold d'andilly. 93
pernon qui, craignant que la négociation s'accommo- '"«»«« »««•
dast à leur préjudice, firent, avec le Commandeur (de
Sillery) * et M. de Bulion, résoudre la Rey.ne à envoyer
M. de Pontchartrain sans que Monsieur le Maréchal
ni M. Dollé le sceussent.
Comme on eut leu la lestre de Monsieur le Prince,
sur ce que quelqu'un deraandoit ce qu'il faloit ré-
pondre, on dit que M, le maréchal d'Ancre dit que
c'estoit à ceux qui avoyent donné le conseil d'en-
voyer M. de Pontchartrain de dire ce qu'il faloit
faire.
On dit que sur ce que Monsieur le Maréchal dit
devant M. d'Espemon, que c'estoit un conseil violent
que l'on a voit donné à la Reyne, M. d'Espernon ré-
pondit : Monsieur, le conseil est très-bon et je suis
prestdele maintenir à la pointe de mon épée; que
sur cela, Monsieur le Maréchal répondit : Monsieur,
je ne parle pas pour vous, mais pour Monsieur le
Chancelier. A quoy M. d'Espemon répondit que le
conseil de Monsieur le Chancelier estoit très-bon.
Ce fut M. de Longue ville qui voulut que l'on
nommast le Maréchal et la Maréchale, et M. de
Buillon qui voulut que l'on nommast M. Dollé.
30. M. de Villeroy revient trouver le Roy.
31. On résout au Conseil d'envoyer à toutes les
bonnes villes leur dire qu'elles se gardent et ne
* Noël Brulart, dit le Commandeur de Sillery, d'abord chevalier de
Malte, puis premier ecuyer et chevalier d*honneur de la Reine, am-
bassadeur à Rome et en Espagne.
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94 JOURNAL ÎNÉDIT
Juillet liti. laisgent entrer aucuns des Prinôes et seigneurs mal-
contens**
Aoust i*\ M. de Nérestang^ va dans la citadelle d'i-
miens. M. de Longue ville estoit venu dans la ville,
sur ce qu'on l'avoit averty que M. de Nérestang
estoit venu avec peu de train. Le soir, sur la nuit,
prend six chevaux qui estoyent dans la citadelle,
avec vingt mousquetaires, et les fit passer et repas-
ser durant un fort longtemps sur un pont qui est
hors la citadelle, dont ceux de la ville peuvent bien
entendre le bruit, mais ne le sçauroyent voir. On
va dire à M. de Longueville qu'il estoit entré dans
la citadelle cinq ou six cents chevaux et grande quan-
tité d'hommes de pied. Sur cela, M. de Longueville
craignant quelque entreprise contre luy, se retire
le lendemain matin. M. de Nérestang, prenant le
temps de l'absence de M. de Longueville, va dans la
maison de ville présenter les lettres du Roy, pour ne
laisser entrer M. de Longueville, ni aucun autre
dans la ville, et leur dit que s'ils n'obéissoyent, il les
mettrait en poudre; et qu'ainsi, s' estant assemblez,
* Voy. Pontchartrain, p. 84-89. Pontchartrain raconte en détail les
circonstances de sa mission vers Monsieur le Prince ; il nomme les six
personnes dont celui-ci se plaignait, et qui étaient le maréchal d*Ancre,
le Chancelier, le commandeur de Sillery son frère, MM. de Villeroy,
Dolé et Bullion. Voy, Richelieu, p. 254-260; Fontenay-Mareuil, p. 284-
289; Rohan, p. 125-126; Merc. fr.^ t. iv, p. 155 et suiv.
^ Jean-Claude, marquis de Nérestang, conseiller d*Etat, capitaine de
cinquante hommc« d'armes des ordonnances du Roi et maréchal de
camp des armées de Sa Majesté, mort au siège de Turin en 1639.
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D'ARNàOLt) ù'AfIDÎLLy. 95
ils résolurent de faire la volonté du Roy. M. de Aou«ti«if.
Longuevîlle estant revenu, ils le prièrent d'avoir pi-
tié d'eux et de se retirer.
D'autres disent que la ville délibérant sur le pa-
quet du Roy, on vint dire à M. de Longuevîlle que
la pluralité dles voix alloit à le prier de se retirer, et
que sur cela, il alla à Corbie où est Riberpré. Ceux
de Corbie ont une compagnie de chevaux -légers du
sieur de Contenant
Combat de MM. de Montmorency et de Portes^
contre MM. de Retz^ et de Vitry *. — Leur querelle
fut pour une écharpe chez la Choisy.— -Paroles : ac-
coustumé d'avoir mon reste*. M. de Vitry fit l'appel
^ Voy. Pontchartrain, p. 90; Fontenây-^Mai^ettilf p. 2d8; Merc» fr»^
t. IV, p. 151. — Timoléon de Boves, sieur de Gontenan, capitaine des
chevaux-légers de la garde du Roi, gouverneur de Mantes, mort vers
1691. (yoy, son bistoriette, Tallemant des Réaax, t. iv, p. 283,)
2 Antoine Hercule de Budos, marquis de Portes, oncle de M. de Mont-
morency, lieutenant-général en Gevaudan et pays des Cevennes, vice-
amiral de France^ tué ail siège de Privas en 1«29 (P. Anselme, L tt^
p. 154).
3 Henry de Gondy, duc de Retz et de Beaupréau, pair de Fiance,
marquis de Belle-Isle, capitaine de cent hommes d'armes, né en 1990^
mort en 1650.
* Nicolas de l'Hôpital, marquis puis duc de Vitry, capitaine des
gardes-du-corps du Roi, maréchal de France en 1617 pour prix de
l'assassinat du maréchal d'Ancre> gouverneur de Provence en 1633 ^
enfermé à la Bastille de 1637 à 1643, duc et pair en 1644, mort la
même année {V^y, P. Anselme, t. vu, p. 431)*
^ Tallemant des Réaux raconte cette affaire et explique ce mot* Mé de
Montmorericy avait été marié avec M^* de Beaupréau. La Reine-Mère
fit rompre ce mariage, u Depuis, M. de Rets espousa M^'* de Beau-
» préau, et M. de Montmorency^ au lieu de duc de Retz, l'appela duc
» de mon reste. On les accorda sur l'heure, n (Tallemant des Réaux,
historiette de M. de Montmorency, t. u, p. 308.) On voit, au contraire,
d'après le récit d'Arnauld d'Andilly, que le duel eut lieu* Quant à la
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96 JOURNAL INEDIT
le samedy au soir; le dimanche matin, M. de Mont-
morency va si matin que le portier ne veut ouvrir la
porte. Il quitte ses chevaux, passe l'eau à pied et à
gué. M. de Montmorency tirant une estocade à M. de
Retz, M. de Retz pare si fort que Tépée de M. de
Montmorency luy tombe ; en mesme temps, il saisit
de la main gauche l'épée de M. de Retz et se jette
sur luy et le passe par terre. Ainsi, M. de Retz estant
dessous et M. de Montmorency n'ayant point d'épée,
comme ils virent qu'ils ne se pouvoyent que faire
l'un à l'autre, ils s'accordèrent et furent séparer les
seconds qui estoient aux prises. Puis, M. de Retz
baille son cheval à M. de Montmorency, et monte en
trousse, et ainsi vinrent déjeusner à l'hostel Montmo-
rency et disner à l'hostel de Retz*
5. A onze heures du matin, M. le maréchal
d'Ancre va à Amiens accompagné de M. de Plain-
ville et de quantité de noblesse, et en chemin il joi-
gnit la compagnie de chevaux-légers de M. de Con-
tenan. M. de Carbon^ alloit devant avec quelques
gentilshommes.
6. Leurs Majestez envoyent quérir Messieurs des
Choisy, c'était la maltresse de M. de Montmorency. « Il aima d'abord
la Choisy, fllle de bon lieu, mais très^alante, n dit Tallemant dans la
même historiette. M. Paulin Paris, dont le savant et précieux, com-
mentaire éclaire toujours le texte de Tallemant, nous apprend que la
Choisy était une des filles de Jacques de THospital, marquis de Choisy,
soit Louise, comtesse de Castries , soit Francienne, M"* de la Grange-
Quincy. Elle était donc parente de M. de Vitry qui fut le second de
M. de Retz.
* Voy.^ sur cette affaire, Pontchartrain, p. 89.
2 II fut tué au siège de Saint-Jean-d'Angely, en 1621.
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d'arnauld d'andilly. 97
compagnies souveraines qui se rendent à deux heures
au Louvre. Le Roy dit quelque peu de mots, puis la
Reyne prenant la parole, dit à Messieurs du Parlenient
que s'en allant en voyage, le Roy leur recommandoit
le soin de Paris et de la personne de Monsieur *.
Monsieur le Premier Président répondit avec toutes
sortes de protestations d'obéissance, puis supplia
Leurs Majestez de vouloir tacher d'appaiser tous les
mouvements émeus. A cela, la Reyne répondit que
la conclusion du mariage assureroit la paix dedans
et dehors le royaume. Sa Majesté dit fort peu de
chose à Messieurs des Comptes (M. de Verderonne ^
portoit la parole) , et à Messieurs de la Cour des
Aydes (M. de Rebours' portoit la parole). Tous les
présidens du Parlement y estoyent hormis M. Sé-
guier. Monsieur le Chancelier ne dit un seul mot.
Après que la Reyne eut parlé, on fit approcher de
Leurs Majestez tous les présidens pour prendre congé
d'elles, fors M. le président le Jay, lequel voyant
qu'on ne l'appelloit point s'approcha de luy-mesme.
On dit que la Reyne luy dit : Je n'ay que faire à
vous, ou bien, je ne veux point parler à vous. Sur
* Gaston -Jean-Baptiste de France, duc d'Anjon, puis duc d'Orléans,
né en 1608, mort en 1660.
2 Claude de l'Aubespine, seigneur de Verderonne, secrétaire des
finances du Roi et de la Reine-Mère, pré»dent de la chambre des
comptes.
* Guillaume le Rebours, né vers 1545, président à la Cour des
Ai^es en 1578, joua un certain rôle pendant le siège de Paris par
Henri IV, où il eut la jambe cassée par un boulet, conseiller d*Etat en
1597, mort en 1619 (Voy, son article. Biographie Michaud^ et Mém.
de l'Estoile, Petilot, 1'* série, t. xlvi, p. 50).
7
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98 JO0RN\L INEDIT
qaoy M. le Jay n*ayant laissé de parler, elle répon-
dit : Quand vous ferez ce que vous dites, vous ne fe-
rez que votre devoir*.
La Reyne écrit à Messieurs de Thostel de ville
qu'ils luy donnassent avis comme il estoit besoin de
faire pour la seureté de la ville et de Monsieur. Mon-
sieur le Premier, après avoir donné sa lettre, ne se
retira pas, contre ce qui est des registres de la ville.
Il passa à faire faire grande garde aux portes. M. Ar-
naud avoit esté d'avis de faire assemblée générale,
de faire garder Saint-Denis , Saint-Clou et autres
avenues , avoir des sentinelles perdues à cheval ,
mettre seulement dix ou douze hommes à chaque
porte, pour voir quels gens entrent, quels chevaux
de service, poudres, armes, etc. ; avoir des herses à
chaque porte et un homme dessus pour couper la
chaisne ou la corde en cas qu'il parust quelque chose ;
faire refaire les brèches, envoyer les eschevins pour
faire avaler les bleds qui sont à Châlons, Epemay et
ailleurs ; obliger les baillages de Gonnesse et autres
de fournir certaine quantité de pain chaque jour de
marché à certain prix.
7. Messieurs de la ville vont trouver la Reyne
pour dire leur résolution. Messieurs du clergé font
harangue à la Reyne. M. de Saint- Victor ^ portoit la
parole. Ils se pleignent fort d'un brevet obtenu par
*■ Voy, PontchartrikiD, p. 06.
2 François de Harlay de Cbanvalon, abbé de Saint-Victor de Paris,
archevêque de Roueo en 1615, se démit en 1653 en faveur de son
neveu du môme nom, mort en 1653.
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d'arnauld d^andilly. 99
M. de Lesdiguières* de l'abbaye de Saint- Antonin
en Dauphiné (chef d'ordre), en laquelle les moines
avoyent esleu selon la coustume. Il insista fort sur
le concile de Trente. La harangue finie, Monsieur le
Chancelier témoignîi estre fort en colère^.
M. de Ghevry fait Intendant des finances par le
moyen de la maréchale d'Ancre, à qui il donne qua-
rante mil écus.
M. de Loménie fut trouver M. le président le Jay
de la part du Roy' et luy dire que Sa Majesté luy
commandoit de la suivre en son voyage et de se
rendre le jeudy à Orléans. Il fit répondre que le Roy
luy faisoit beaucoup d'honneur, mais qu'il estoit fort
malade (il s' estoit mis au lit, etc.). Depuis M. de
Loménie y retourna pour la deuxième fois et luy dit
que le voyage ayant esté différé pour quelques jours,
le Roy luy mandoit qu'il n'y avoit plus d'excuse de
se rendre aussitost que luy à Orléans. Il s'excusa
derechef sur sa maladie, et puis dit que quand bien
il seroit en estât de pouvoir aller, il ne pourroit
néantmoins, estant président en la première Cour
souveraine de France et ayant esté porté à ceste
charge après que l'on l'en avoit jugé digne, s'asseoir
dans le Conseil après plusieurs autres qui le vou-
droyent précéder. Sur cela, M. de Loménie repondit
^ François de Bonne, duc de Lesdiguiëres, gouyerneur du Dauphiné,
maréchal de France en 1608, duc et pair en 1619, maréchal de camp
général des armées du Roi en 1621, Connétable de France en 1622,
mort en 1626.
2 Voy, Richelieu, p. 265. Foy, Merc, fr.y t. iv, p. 204. Suivant le
MercurCy cette remontrance fut faite par Tarchevôque d'Augustopolis
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100 JOUBNAL INÉDIT
Aoust 1615. que le Roy vouloit qu'il vinst nonobstant toutes ces
raisons ; et qu'en attendant que l'on partist Sa Ma-
jesté luy défendoit absolument de plus aller au Par-
lement. A quoy il répliqua que puisque la volonté
du Roy estoit de le priver ainsi dB sa charge sans en
avoir donné aucun sujet il ne manqueroit pas d'obéir,
mais qu'à tout le moins on luy permist d'aller dire
au Parlement comme on luy avoit défendu d'y plus
assister. M. de Loménie fut encore depuis, pour la
troisième fois pour luy dire que le* Roy vouloit abso-
lument qu'il vint. Sur quoy, il répondit : Monsieur,
le Roy se moque de vous et de moy, car si Sa Ma-
jesté désiroit que j'allasse, elle vous en auroit baillé
un commandement par écrit *.
9. Leurs Majestés croyant assurément partir le
lendemain, Marcongnet arrive sur les onze heures, et
leur apporte un manifeste de Monsieur le Prince ^ Sur
cela, le voyage est remis au jeudy. On prend sujet
sur des armes surprises et quatre hommes du mar-
quis de Bonnivet' tuez, qui menoyent des armes
^ Brienne, dans ses mémoires, ne parle pas de cette mission de son
père auprès du président le Jay. II dit seulement que lors du départ
du Roi, chargé d'inviter le Président à suivre la Cour, et en cas de
refus de s'assurer de sa personne, M. de Loménie feignit d'être malade
pour se soustraire à cet ordre (Brienne, éd. citée, p. 303).
2 Voy, Richelieu, p. 261-263 ; Fontenay-Mareuil, p. 289 ; Foy. Merc,
fr,^ t, IV, p. 159 et suiv., le texte de ce manifeste du prince de Condé,
avec les réponses que l'on y fit. Ce document curieux, qui expose lon-
guement les griefs du prince de Condé contre le gouvernement, peut
donner une idée de l'état de la France en ces temps d'anarchie.
8 Henry-Marc-Alphowse-Vincent Gouffier, soigneur de Grèvecœur,
marquis de Bonnivet, né en 1586, mort en 1645.
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d'arnauld d'andilly. 101
plein un chariot de chez M. de Montcavrel * son beau- aousi iws.
père, par le lieutenant de M. de Maigneux à IVJontreuil.
Le matin, la Reyne ayant fait son bonjour en la
paroisse de Saint-Germain, elle s'évanouit et se
trouva fort foible.
M. de Coubron apporte à M. d'Espernon un pa-
quet de Monsieur le Prince, et sous la première cou-
verture il y en avoit une autre qui s'adressoit à Mes-
sieurs les Ducs et Pairs de France.
10. On donne à M. de Bois-Daufm ^ le comman-
dement général de toutes les forces que Sa Majesté
laissera icy, et à M. de Praslin la charge de maré-
chal de camp général, et à M. de Bassompierre' cette
mesme charge en l'absence de M. de Praslin^.
11. Le sieur de Coubron porte le manifeste de
Monsieur le Prince au Parlement, et puis se retire
1 Jean de Monchy, seigneur de Montcavrel, gouverneur des ville et
château d'Ardres, mort en 1638.
2 Urbain de Laval, marquis de Sablé, seigneur de Boisdauphin, con-
seiller d'Etat, maréchal de France en 1595, gouverneur d'Anjou en 1004,
mort en 1629.
3 François de Bassompierre, né en 1579, colonel général des Suisses
et Grisons en 1614> ambassadeur en Espagne en 1621, fut aux sièges de
Saint-Jean-d'Angely, de Montheur, de Royan, de Montpellier ; maré-
chal de France en 1622, ambassadeur en Suisse en 1625, en Angleterre
en 1626, commanda au siège de la Rochelle, en Piémont en 1629.
S'étant brouillé avec Richelieu, il fut arrêté en 1631 et mis à la Bas-
tille où il resta jusqu'en 1643, mort en 1646. Il a laissé de précieux
Mémoires recueillis dans les collections Petitot et Michaud {Voy. P.
Anselme, t. vu, p. 464).
* Foy, Fontenay-Mareuil, p. 289-290 ; Rohan, p. 126 ; Voy, aussi le
discours du duc de Rohan sur le voyage du Roi, et les conseils qu'il
ddnne à la Reine, p. 161, même édition; Brienne, p. 302; 9ferc, fr,
T. IV, p. 197.
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102 JOURNAL INÉDIT
Aowt xM, sur l'avis qu'il eut que Messieurs du Parlement l'en-
voyèrent à la Reyne sans ouvrir le paquet.
12. Le voyage de Leurs Majestez qui se devoit
faire le lendemain, remis au lundy sur l'avis que
M. de Longueville assisté de trois cents chevaux fait
démolir Bacadours.
13. Conseil tenu pour la guerre auquel de vingt-
une personnes, il n y eut que MM. le Chancelier^
d'Espernon, le Commandeur (de Sillery) et de Bul-
Hon qui opinassent fermement à la guerre. Résolu
de laisser 12,000 hommes de pied, les compagnies
de la Reyne, de Monsieur, de Contenan, et huit
compagnies nouvelles de chevaux -légers de cin-
quante hommes chacune. Pour cela, faut dépendre
cinq cent mil écus en quatre mois, et pour cet effet,
résolu de prendre les treize cent mil livres restans
dans la Bastille \
14. Les trois chambres du Parlement estant as-
semblées, un conseiller proposa, qu'en Testât que
sont les affaires, et Paris demeurant en péril si Leurs
Majestez l'abandonnent, il sembloit à propos que la
Cour députast >rers elles, pour les supplier d'y donner
ordre, et mesme s'il estoit possible, de renvoyer vers
Monsieur le Prince. Sur cela, M. le président de
Bellièvre ^ dit que ceste proposition estoit séditieuse
1 Voy. Pontchartrain, p. 91-06*
2 Nicolas de Bellièvre, seigneur de Grignon, fils du Chancelier et père
du Premier Président de ce nom, né en 1583, conseiller au Parlement
de Paris en 1602, procureur-général en 1612, président à mortier ett
1614, se démit en 1642 en faveur de son fils, couseilier d'Etat, mort
en 1650. K était le gendre du chancelier de Sillery.
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D*ARNAULD D'AriDILLT. 108
et qu'il s'y opposoît M. Lescalopier suivit après et
M. Boucher. D'autres s'émeurent au contraire ; enfin
Monsieur le Preniier Président dit qu'il ne faloit point
s'aîtérer là-dessus et qu'il verroit la Reyne pour savoir
si elle l'auroit agréable. Et suivant cela il fut auLouvre.
On dit que le conseiller qui proposa fut M. Maré-
chal, et qu'il dit que c'estoit une honte à eux de voir
Leurs Majestez prestes à partir en Testât que sont les
affaires, et cependant se tenir les bras croisez; qu'il
luy sembloit à propos de députer vers elles pour les
supplier d'avoir agréable que le Parlement députast
vers Monsieur le Prince tels de son corps qu'elles-
mesmes voudroyent choisir ; que s'il réussissoit quel-
que bon accommodement du traitté, c'estoit ce que
l'on demandoit; sinon, qu'on mettroit Monsieur le
Prince à son tort.
Y ayant eu entreprise sur Soissons, M. de Guise en
donna avis à M. du Mayne (qui lui en fit des remer-
cîmens extraordinaires). La Reyne dit à M. de
Guise, que c'estoit luy qui avoit donné avis de l'en-
treprise à M. du Mayne; à quoy il répondit : qu'il
estoit vray, et que si M. du Mayne eust eu besoin de
de luy pour l'assister en cette occasion, il fust allé
fort volontiers porter sa vie; qu'il n' estoit point
obligé de tenir secret un conseil que l'on luy avoit
celé ; que M. du Mayne estoit son sang, et que Sois-
sons estoit une ville de seureté qui avoit esté baillée
à feu M. du Mayne \
A Charles de Lorraine, frère du Balafré, duc de Mayenne, pair, ami-
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104 JOURNAL INÉDIT
Aotwt 1615 M. de Loménie fait recevoir son fils en survivance
à sa chargea
16. Le Roy et la Reyne vont à la Bastille tirer
les treize cent mil livres restans ^.
17. Leurs Majestez partent, le Roy à quatre
heures et demie du matin, la Reyne à dix, Madame
à trois heures après midy accompagnée des officiers
de la ville \
A cinq heures du matin, M. de Launay ^, lieute-
nant des gardes, avec archers à cheval, et .....
à pied vont chez M. le président le Jay, et le font
monter dans un carrosse du Roy, et le mènent au
rai, grand chambellan, lieutenant-général de la couronne de France,
gouverneur de Bourgogne, gouverneur de l'Ile de France, né en 1554,
mort en 1611. 11 s'est surtout rendu célèbre comme chef de la Ligue.
* « Ce fut dans ce temps-là que la Reine-mère, ayant égard aux ser-
vices que mon père avoit eu Thonneur de rendre au feu Roi son mari,
me procura la survivance de la charge de secrétaire d'Etat, avec la
permission de signer en sa présence et en son absence, quoique je
n'eusse pas encore vingt ans accomplis. » (Mém. de Brienne, édition
citée, p. 302.)
2 Amauld d'Andilly dit dans ses Mémoires (édition citée, p. 367) que
la Reine-mère laissa cette somme de treize cent mille livres à la dispo-
sition d'ÂrnauId l'intendant, pour qu'il pourvût, pendant sou absence
et celle du Roi, aux dépenses qui pressaient de tous côtés, et particu-
lièrement celles de l'armée du Roi, commandée par le maréchal de
Boisdauphin.
* Louis XHT, né en 1601 et alors âgé de quatorze ans, allait épouser
Anne d'Autriche, fille de Philippe UI, roi d'Espagne, née en 1602,
âgée de treize ans. La sœur de Louis XIII, Elisabeth de France, née
en 1602, allait, le môme jour, épouser Philippe d'Autriche,^fiIs de Phi-
lippe III, qui succéda à son père en 1621. Il avait alors dix ans. La
Reine-mère, Marie de Medicis, Régente, conduisait à Bordeaux les jeunes
fiancés.
* Ludovic de Vièvrcs, seigneur de Lauuay, lieutenant des gardes-
du-corps.
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d'arnauld d'andilly. 105
Louvre, où leur ayant esté dit que Sa Majesté estoit ^««t i«w
partie, ils firent aller le carrosse après, et ainsi le
menèrent à la suite du Roy.
M"' le Jay présente le matin mesme sa requeste
au Parlement. — Ordonné que quatre Présidens et
six anciens conseillers iroient faire remonstrances au
Roy, pour le supplier de remettre ledit le Jay en
liberté s'il n'avoit rien fait contre son service, et si
au contraire, de le leur remettre pour le juger et en
faire justice. — Estant en chemin du Louvre, ils su-
rent que Leurs Majestez estoyent parties, et ainsi
s'en revinrent.
Monsieur le Prince ayant sçeu la prise de M. le
président le Jay, écrit à M. Virey * qui estoit à Paris,
qu'aussitost qu'il auroit reçeu sa lettre, il allast vers
le Roy luy témoigner qu'il sentoit comme fait à luy-
mesme le traittement fait audit sieur Président ; qu'il
pouvoir témoigner que tant s'en faut qu'il luy eust
jamais donné conseil violent, qu'au contraire, il avoit
toujours tasché à radoucir ses justes mécontente-
mens ; que si on vouloit traitter avec luy, on ne luy
pouvoit envoyer personne qui y fust plus propre ; que
tous ces nnaùvais conseils procédoyent de ceux que
l'on sait assez et qu'il a déclarez partout estre ses
ennemis, et que si par leurs artifices on traittoit mal
le président le Jay, il s'en vengeroit sur eux et sur
leurs successeurs jusques à la dixième génération, etc.
M. Virey ayant montré cette lettre à M'"'' la prési-
* Premier secrétaire de Monsieur le Prince.
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106 JOUEHAt IlflÎDIT
Atnnt WI8. dente le Jay, elle fut consdllée par ses amis de sup-
plier M. Virey de ne point faire le voyage, comme
estant plus préjudiciable que profitable à son mary
et écrivit sur ce sujet à Monsieur le Prince.
M. de Nevers ayant parlé fort résolument à la
Reyne, lors de son partement, et Sa Majesté estant
demeurée un peu étonnée sur ce qu'il luy avoit dit,
elle luy demanda enfin : Hé bien I que faudroit-il
faire? A quoy il luy répondit que si elle vouloit, il
s'entremettroit d'accord/ Elle dit qu'elle le trouvoit
fort bon, et ainsi, il prit congé d'elle. Depuis, comme
il estoit en Champagne, en intention de traitter, il re-
çoit lettres du Roy, par lesquelles défences luy furent
faites de rien traitter.
18. Le Parlement s'estant assemblé, ordonne
qu'il seroit écrit à Monsieur le Chancelier, pour le
prier de sçavoir de Leurs Majestez la cause de la
prise de M. le président le Jay, et que la lettre se-
roit portée par Dorron, secrétaire de la Cour,
Monsieur le Chancelier fit réponse : qu'il n' avoit
rien sceu de la résolution d'arrester le président le
Jay ; qu'elle avoit esté faite sans son conseil, et estoit
venue du propre mouvement du Roy ; que quant au
traittement, il s'assuroit qu'on le luy feroit fort bon,
et qu'après qu'il auroit parlé de cette affaire au
Roy et à la Reyne, il leur feroit plus ample réponse.
Depuis, le 26 aoust, le Parlement receut une lettre
de cachet du Roy, portant qu'il avoit fait avertir par
plusieurs fois le président le Jay de se tenir prest
pour son voyage, ce qu'il avoit méprisé ; sur quoy il
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d'arnaold d'andilly. 107
auroît résolu de l'envoyer quérir le matin de son par- Aoatt twi.
tement, pour certaines grandes considérations qu'il
leur diroit à son retour, et mesine, pour ce que c' es-
toit un homme capable de troubler le repos de la
ville ; que pour ce qui estoit du traittement , ils ne
s'en missent point en peine, et s'assurassent qu'il ne
luy seroit fait aucune sorte de déplaisir.
19. Le Parlement ordonne que M. le président
d'Onsembray * et MM. les Conseillers Courtin ^ et
Pelletier ' iroyent trouver le Roy, et le supplie^ de
renvoyer le président le Jay, sur caution de tout le
Parlement qui donneroit assurance à Sa Majesté cpie
ledit sieur le Jay n'entreprendroit rien contre son
service *.
ADDITION T00CH4NT LE VOYAGE DU ROY.
17 aovst 161^
Leurs Majestez partirent de Paris le 17 aoust
1615, sans donner ordre quelconque aux affaires de
' Jérôme de HacqaQviUe, a^gneur d'Oûsembraj ^ codseSll^r au Parle»
meot de Paris, puis président aux requêtes et quatrième président,
succéda à Nicolas de Verdun comme premier président, en 1627, et
mourut en 1636.
2 Doyen des conseillers laïcs.
* Doyen des conseillers clercs.
* Foy. PoQtchartrain, p» 97 ; Richelieu, p. 367 { Fonten^y-Mareuil,
p. 291 ; Brienne, p. S03. V^y» aussi, «ians les Mémoires de Math. Mole,
p. 72-86, le narré de l*a faire de M, le président le Ja\f. Ge récit authen-
tique confinue de tout point celui d'Arnauld d'AndiUy. yêy. Aietx. (r,^
t. IV, p. 207-210.
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108 JOURNAL INEDIT
Aouiti«i6. Paris (lors fort troublé, tant à cause de l'étonne-
ment du peuple de voir le Roy s'en aller, Monsieur
le Prince estant si proche avec des forces, qu'à
cause des factions que faisoyent dans Paris les par-
tisans de Monsieur le Prince) , sans establir aucun
Conseil, et mesme sans parler particulièrement à
M. de Liancourt *, Gouverneur, à Monsieur le Pre-
mier Président, à M. le Prévost des marchans, ni à
M. imaud.
Pour donner ordre aux affaires qui se présentoyent
de toutes parts, M. Arnaud voyoit Monsieur le Gou-
verneur et Monsieur le Premier Président chez lequel
se trouvoyent M. Myron, prévost des marchans et
Messieurs les eschevins Pasquier, le Bret et
Frezon.
Il y eut contestation entre Monsieur le Gouverneur
et Monsieur le Premier Président à qui iroit l'un chez
l'autre. Enfin Monsieur le Gouverneur vint le pre-
mier chez Monsieur le Premier Président et après y
avoir esté deux ou trois fois , Monsieur le Premier
Président vint une fois chez luy. Depuis, Monsieur le
Gouverneur retourna chez Monsieur le Premier Pré-
sident, et comme le jour fut assigné que l'on se devoit
trouver chez Monsieur le Gouverneur , et que déjà
Messieurs les Prévost des marchans et Eschevins et
< Charles du Plessis, seigneur de Liancourt, comte de Beaumont-
gur-Oise, marquis de Guercheville, conseiller d'Etat, premier écuyer
de la petite écurie, gouverneur de Metz, gouyemcur et lieutenant-
général en la ville, prévôté et vicomte de Paris, chevalier d'honneur de
la Reine-Mère, mort en 1620.
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d'arnauld d'andilly. 109
Monsieur le Procureur-général (lequel sur la fin se Aou8t nw.
trouvoit aussi au Conseil) , s'y furent rendus, on en-
voya demander à Monsieur le Premier Président s'il
ne vouloit pas venir. Il manda que non. Depuis,
Monsieur le Gouverneur ne fut plus chez luy et ne §e
sont point veûs depuis.
Ces contentions furent cause que M. Arnaud, in-
tendant des finances , après avoir fait résoudre une
affaire à un, l'alloit faire résoudre à l'autre. Et à
cause que chacun vouloit signer le premier , il faloit
toujours sur un mesme sujet faire double dépesche*.
D'autant que l'armée de Monsieur le Prince de-
meura longtemps aux environs de Paris, et qu'il
estoit besoin de pourvoir à toutes les petites villes
voisines, on leur fit délivrer quelques armes et des
* « M. Arnauld étant donc demeuré avec ce pouvoir, il fit tout ce
» qu'il put pour faire que M. de'Liancourt, gouverneur de Paris, et
» M. de Verdun, premier président du Parlement, vécussent en bonne
» intelligence ; et cela lui réussit durant quelques jours, mais ils se
» rebrouillèrent aussitôt, et ainsi nul d'eux ne pouvant aller chez
» l'autre, ni demeurer d'accord du rang de leurs signatures, il fallut
» faire toutes les expéditions doubles et il les signoit avec eux. Feu
» M. le cardinal de Retz, qui n'étoit alors qu'évoque de Paris, étoit de
» ce petit conseil, comme aussi M. Mole, procureur général et depuis
» garde des sceaux, et M. le président de Chevry, intendant des
» finances, en fut aussi durant quelques jours, après lesquels il alla
>• au voyage. Je faisois en leur présence, sur le bout de la table, toutes
» ces lettres et ces expéditions, dont le nombre étoit presque incroyable,
» parce qu'une partie des villes d'alentour de Paris étant menacées et
» dépourvues de toutes les choses nécessaires pour leur défense, et
» l'armée des Princes étant venue jusqu'à Dammartin, on avoit re-
» cours de toutes parts à ce petit conseil, qui étoit aussi obligé de
» pourvoir en môme temps à plusieurs choses nécessaires pour l'armée
» du Roi. » (Mémoires d'Amauld d'Andilly, p. 367.)
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liO JOURNAL INEDIT
Âotnt leii. munitions de Tarsenal. Et pour cet eflfet M. Arnaud
signoit les billets» tantost avec Monsieur le Gouver-
neur et tantost avec Monsieur le Premier Président ,
addressans à M. de la Chevalerie, lieutenant en l'Ar-
senal, et à M. Guillon, controUeur général de l'artil-
lerie.
Les vaccations estant finies, il fut besoin d'em-
prunter du sieur de Choisy quatre cens mil livres
pour le Roy, dont les lettres-patentes furent addres-
sées à MM. de Pontcarré*, de Boissise et Arnaud ;
et depuis, M. de Chasteauneuf estant revenu du
Berry, on luy en communiqua aussi. Depuis ce temps
tous les susdits Messieurs du Conseil s'assembloyent
quelques jours de la semaine chez Monsieur le Gou-
verneur, et de là en avant, on ne tint plus de Conseil
chez Monsieur le Premier Président.
Des affaires de conséquence qui se résolvoyent on
en dressoit des résultats (cette mesme forme avoit
aussi esté observée lorsque l'on s'assembloit chez
Monsieur le Premier Président) qui estoyent signez
par Monsieur le Gouverneur et MM. de Pontcarré,
de Chasteauneuf, de Boissise et Arnaud, et quelque- .
fois par Messieurs les Prévost des marchanset Esche-
vins, lorsque c'estoit chose qui regardoit l'intérest
de la ville de Paris.
Il n'y avoit point de difficulté en la signature de
ces derniers résultats, pour ce que M. de Chasteau-
neuf, le plus ancien de Messieurs du Conseil, ne fai-
* Pierre Camus de Pontcarré, conseiller d*£tat.
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d'arnauld d'andilly. lit
soit aucune difficulté de signer après Monsieur le Aourtwti.
Gouverneur. Et néantmoins je luy ay oûy dire qu'il
ne le voudroit aucunement quitter à Monsieur le Pre-
mier Président, lequel avoit toujours accoustumé
d'estre précédé par le plus ancien du Conseil, ainsi
qu'il s'estoit pratiqué chez Monsieur le Chancelier où
M. de Villeroy s'estoit assis au dessus de luy un peu
avant le voyage du Roy en aoust 1615,
25. M. le maréchal de Boisdaufin arrive à Meaux
au rendez-vous de l'armée.
27. Le Roy arrive à Tours. M. du Plessis * y vid
Sa Majesté , sembla réprouver la diligence dont on
usoiten ce voyage, toutefois fort modérément. Con-
clud que Messieurs de la Religion se conduiroyent
cette année comme ils avoyent fait l'année passée.
28. Députés de la Religion de l'assemblée de
Grenoble, ouïs par le Roy. Proposent trois choses.
La première, le premier article du Tiers-Estat. La
seconde, la plein te de la réception du Concile de
Trente par le Clergé. La troisième, que Monsieur le
Prince a envoyé vers eux les assurer qu'il tiendra la
main à ce qui leur est assuré par les traittez, et les
* Philippe de Mornay, sei^eur du Plessis-Marly, né en 1540, surin-
tendant des finances du roi de Navarre en 1575, surintendant général
de la Navarre pendant la Ligue, gouverneur de Saumur, mort en 1633.
Ce céfèbre chef des Réformés, ami de Henri IV et antagoniste du car-
dinal du Perron, a laissé plusieurs ouvrages et entre autres des Mé-
moires.
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H2 JOURNAL INEDIT
A0081 1618. prie aussi de se joindre à luy tant pour une bonne
réformation que pour la surséance. Et sur le tout, ils
ontdespesché vers luy pour le remercier de sa bonne
affection envers eux. — Pour le surplus , rien. Mais
ont prié Dieu de bien inspirer Sa Majesté afin de
suivre toujours le meilleur conseil. Ne dirent une
seule parole que Ton pust mal interpréter*.
Le sieur de Foraise pris à Chartres, portant des
commissions de Monsieur le Prince. Comme on tra-
vailloit à son procès, M. le Prince écrivit à M. le ma-
réchal de Boisdauphin, qui luy fit réponce. Depuis,
Monsieur le Prince écrivit aux commissaires dudit
procès des lettres qui furent surprises ^.
3t. Leurs Majestez arrivent à Poitiers. MM. de
Parabère' et de la Rochebaucourt * y furent inconti-
nent, et M""' de la Trémoille^ aussi •.
* Les députés de TAssemblée de Grenoble étaient Champeaux, Des-
bordes-Mercier et Mailleray {Voy. Mém. de Rohan, p. 127); Foy, Merc.
fr.^ t. IV, p. 211 etsuiv., les remontrances des députés de cette Assem-
blée.
* Foy., dans les Mémoires de Math. Mole, p. 86, le compte i-endu de
cette affaire, ainsi que les lettres dont il est ici question. Cet agent de
Monsieur le Prince était le sieur de Beaulieu-Friayse, suivant le récit
de Mole.
3 Henry de Baudean, comte de Parabère, marquis de la Mote-Sainte-
Heraye, gouverneur du Poitou, mort en 1653.
* Jean de Gallard de Béarn, comte de Brassac, baron de la Roche-
beaucourt, ambassadeur à Rome, gouverneur de Saintonge, surinten-
dant de la maison de la Reine, mort en 1645.
s Charlotte Brabantine de Nassau, fille de Guillaume de Nassau,
H* du nom, prince d'Orange, veuve de Claude, seigneur de la Tré-
moille, duc de Thouars, prince de Tarente, pair de France, mort en
1604. La terre de la Trémoille est en Poitou.
8 Voy, Pontchartrain, p. 99 ; Richelieu, p. 269. "
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d'arnauld d'andilly. 113
!•'. M. de Brison, gendre de M. de Chambaut septembre lei».
Gouvernet, fait instance au Roy au nom de rassem-
blée de ceux de la Religion de retarder son voyage.
Congnée envoyé par Monsieur le Prince en l'assem-
blée de Gien, fut cause de cette seconde députation.
M. de Lesdiguières a dit aux députez de la Reli-
gion qu'ils ne devoyent ni ne pouvoyent tenir que le
chemin des remonstrances.
Environ ce temps, Madame demeure malade à
Poitiers de la petite vérolle.
M. de Sully vient trouver le Roy au port de Pile,
avec MM. de€hastillon * et de la Boulaye ^
M. de Rohan fait le malade et écrit au Roy pour
différer le mariage, et s'excuse sur ce que M. de
Loudrière luy avoit esté envoyé par l'assemblée de
Grenoble.
M. de Sully ne logea pas au commencement dans
Poitiers, à cause du différent avec M. de la Roche-
foucaut, mais il y logea depuis, et parla bien pour le
service du Roy.
M. de la Trémoille • ne bouge de Vitré et fait le
malade.
^ Gaspard de Coligny, comte de Coligny, seigneur de Ghastillon, né
en 1584, amiral de Guyenne, gouverneur de Montpellier, colonel-géné-
ral des gens de pied français en Hollande en 1614, gouverneur d*Ai-
gues-Mortes en 1616, maréchal de France en 1622, commanda en Pié-
mont en 1630, gagna la bataille d'Avein en 1635, soumit Arras en 1640,
perdit la bataille de la Marfée contre le comte de Soissons en 1641,
mort en 1646.
» Philippe Eschalard, baron de la Boulaye, gouverneur de Fohtenay-
le-Comte en Poitou, mort en 1616.
» Henry, seigneur de IaTremoille,ducdeThouars,princedeTarente et
8
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114 JOURNAL INiPIT
septemhrf i««. ?• Desseln de Monsieur le Prince sur la Fera,
inutile.
Passage d^ Chauny refusé par M» de Genlis * à
Mt du Mayne.
9, L'armée du Roy part de Meaux, va le 10 à
Grespy en Valois. M, du Mayne avoit voulu passer
dans Chauny, mais M. de Genlis luy refusa le passage.
13. M. de Boisdauphin prend CreiJ, Rembaut
estoit dedans.
L'armée du Roy estoit allée le 11 à Pont-Sainte-
Maxence.
Celle de M. le Prince attaqua le 12 une barricade
du faubourg de Roye, Montebene^ avec six cens
hommes la repoussa \
On dit que M. de Sully se retira sans prendra
congé du Roy.
M. le Maréchal d'Ancre témoigna avoir découvert
une entreprise par le moyen de laquelle on faisoit
sauter le corps de logis dans lequel il couchoit dans
la citadelle d'Amiens, et des ruines on combloit le
fossé et ainsi on surprenoit la place.
Le Roy répond aux cayers de l'assemblée de Gre-
noble. Brevet des villes de seureté continué pour dix
ans. Ils demandoyent quatre cent mil livres pour
de Talmond, comte de Laval, né en 1599, pair de France, fut au sMge de
la Rochelle, où il abjura le calvinisme en 1628, mestre de camp de I»
cavalerie légère en 1633, servit au siège de Corhieen 1686,mort en 1674.
* Gilles Brulart, seigneur de Genlis, secrétaire d'Etat, baiHy et gou-
verneur de Chauny, gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi.
* Cyprien de Montebenne, maréchal de camp des armée» du Roi.
* roy. Mère* fr.^ t. iv, p. 244*
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d'arnauld d'andilly. 115
entretenir les Pasteurs, qui est deux cent mil livres septembre mu
d'augmentation : cinq cens mil livres pour l'entre-
tenement des garnisons. Il y avoit quelques autres
articles semblables. Le reste contenoit le !•' article
du Tiers-Estat, le Condlede Trente, la recherche de
l'assassinat conmiis en la personne du feu Roy, le
seraient du sacre, et quelques autres articles cy-de-
vant refusez aux autres cayers, comme de deux dé-
putez au lieu de six ; qu'ils nommeront trois gentils-
hommes au Roy pour en choisir un, avenant vacca-
tion des gouvememens des places de seureté ; que
Sully, Mouron et Rangé soyent places de seureté *.
Paquet pris à Favas *, passant par Tholose sans
parler, lequel estoit plein de mauvaises instructions.
Les plus fâcheux se pleignoient de ce que M. de
Lesdiguières ne vouloit estro de la partie.
Le serment envoyé par l'assemblée fut juré par
les gouverneurs des places de Poitou, à la réserve
du service du Roy.
Un advocat nommé Goignée faisoit feu à l'assem-
blée contre le service du Roy et contre la Reyne.
On envoyé au Parlement par Montcassin ' la dé-
claration contre Monsieur le Prince*.
* Voy. Pontchartraîn, p. 100.
2 Le sieur de Favas, particulièrement attaché à Monsieur le Prinoe,.
était un des plus ardents réformés. Il fut souyent chargé de misiions
importantes et périlleuses.
• Charles de Foix, seigneur de Villefranche et de Montcassin, gen-
tilhomme ordinaire de la Ghamluis du Roi.
A Voy, cette déclaration, Herc, fr,^ t. fv, p. 236^ Va\f, aussi Mém. de
Math. Mole, p. 91.
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116 JOURNAL INÉDIT
septembre leis. Oïl avoît proposé d'cnvoycr à M. de Lesdiguières
les cayers de ceux de la Religion répondus par le
Roy, avec charge de les délivrer lorsque l'assemblée
auroit nommé ses députez ordinaires, et qu'ils se-
royent sur le point de se séparer, mais enfin , on les
rendit aux députez mesmes et on leur rendit raison
de toutes les réponces.
!&. Madame retombe malade d'un flux de sang.
15. La déclaration du Roy contre Monsieur le
Prince (sur le sujet de laquelle M. de Montcassin
estoit venu) est présentée au Parlement. Cinq opi-
nèrent seulement. Le mecredy 15 vingt-cinq opi-
nèrent; lejeudy, cent (dont quatre-vingt-dix-sept
furent d'un avis) ; le vendredy le reste. Il y en avoit
trente qui estoyent d'avis de la vérification pure-
ment et simplement. Mais ils furent contrains de
revenir à un des deux autres avis, qui estoyent: celuy
de Tarrest, qui avoit soixante et seize voix, et Tautre
qui en avoit soixante treize. Adjoustoit, que les lettres
seroyent dès à présent enregistrées, et quant au sur-
plus, l'avis de Tarrest; ainsi, il ne passa que de trois
voix *.
L'armée du Roy va à Verberie, et tost après, à
Vemeûil, où elle estoit le 18.
Le Roy d'Espagne arrive à Burgos avec ses en-
fans.
M. le comte de Saint-Paul, qui estoit allé en
* Voy, Merc. fr. U iv, p. 237, Tarrôt rendu par le Parlement, le
1 8 septembre, contre Monsieur le Prince et les autres rebelles ; Voy, aussi
Ménn. de Math. Mole, p. 95.
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d'arnauld d'andilly. 117
Guyenne, se remet bien avec le Roy, et alla trouver septembre an.
le Roy à Bordeaux huit ou dix jours après qu'il y
estoit arrivé. On dit que M. de Rohan ne luy avoit
voulu céder la charge de lieutenant - général en
Guyenne, c'est-à-dire, le conunandement des forces*.
La Reyne fut malade quelques jours à Poitiers.
Quelques recrues de Navarre et Picardie qui al-
loyent joindre l'armée furent défaites par M. du
Mayne, au passage de la Braisle^
23. L'armée du Roy va à Barron.
Vingt conseillers de- la Cour vont à la chambre •
des vaccations. M. de Murât ^ portoitla parole. Ils
soustiennent que l'arrest publié estoit faux , n'ayant
point esté résolu que l'on nommeroit Monsieur le
Prince. Ils demandent à M. Gourtin, rapporteur ,
^ Le duc de Rohan n'avait pas encore rompu complètement avec la
Cour, conmie le prouve la lettre suivante écrite par lui à M. de Ville-
roy, le 20 septembre 1615, dont je possède l'autographe : « Monsieur,
n Vous apprendrez par le bonhomme la Ferté de mes nouvelles. Sy j'ay
» rhonneur de vous voir à Angoulesme comme j'espère, je vous parle-
» ray selon ma' franchise, car quoy quelle soit quelquefois mal inter-
» prêtée, je ne puis me persuader que ce soit de vous, je vous supplie
» donc de le croire en ce qu'il vous dira de ma part, j'addresseray
» tousjours mes prières à Dieu pour la prospérité du Roy et de la
» Reyne, j'ay deffendu audit sieur de la Ferté de parler d'aucune
n affaire particulière qui me concerne, il faut qu'elles cèdent aux gé-
» nérales. Pour vostre service particulier je ne le feray jamays céder à
» aucun autre. Car je Vous suis trop obligé pour que jamays vous
» manque, Monsieur,
n Vostre bien humble serviteur,
» Henry de R^^an. »
De Lor, ce fd^ septembre 1618.
3 Voy. Fontenay-Mareuil, p. 293.
s Antoine ou Arnaud de Murât, conseiller au Parlement de Paiâs.
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118 JOURNAL INÉDIT
septembre t««. pouTquoy il Tavoit signé. Il répond que le Premier
Président Tavoit envoyé quérir, Tavoit tenu plus de
deux heures, l'avoit pressé instamment, luy avoit dit
que c'estoit chose nécessaire pour le service du Roy,
que le sieur de Montcassin estoit présent, lequel
Tavoit menacé, disant qu'il avoit dès fils à la Gôur,
et qu'à la fin il avoit esté forcé de le signer. Ces
Messieurs ccmtinûent à faire de grandes pleintes, et
demandent acte de ce que disoit M. Courtin. M* le
président dé Bellièvre, qui présidoit, dit que la com-
• pagnie se souviendroit bien de ce qui se seroit passé ;
qu'au surplus, il ne savoit comme ils s'estoyent as-
semblez n'en ayant aucun pouvoir ; que quant à
l'arrest, il ne voioit pas pourquoy ils se pleignoyent
tant, veû qu'il n' avoit point esté dit qu'on en excep-
teroit Monsieur le Prince ; que s'ils l'avoyent en-
tendu, ils avoyent eu tort de ne pas le dire.
24. Les habitans de Chauny forcent M. de Guise
à se retirer.
26. L'armée du Roy va à Dampmartin*.
Ce jour arriva nouvelle à Leurs Majestez par lestres
de M. de Lesdiguières, que les députez de la Reli-
gion s'estoyent retirez de Grenoble, sans attendre
leurs cayers. Ils envoyèrent deux députez vers le
Roy, les sieurs de Saint-Privat et de Quergroîs, qui
est résidant à Saint-Jus *.
* Voy, Fontenay-Mareuil, p. 294.
2 Voy. Merc. fr,^ t. iv, p. 264, l'afis donné par le marédial de Les-
diguières en rAflsemblée de Grenoble.
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d'arnauld d'andilly. 110
M. de Rohan vint jusques à Saint*Maixant, sans
vouloir aller trouver Leurs Majestez à Poitiers.
M. de Sully fut tenu pour suspect à La Rochelle,
à cause qu'il avoit esté à la Cour.
Ceux de la Religion , de Guyenne, ont fait une
assemblée à ïonneins, pour résoudre d'empêcher le
passage du Roy ; mais ils n'y ont rien conclu. Oh
tient qu'ils se sont rassemblez à Sainte-Foy àcettefm.
28. Leurs Majestez partent de Poitiers.
Monsieur le Prince entre dans Chasteau^-Thierry,
où il estoit venu le jour de devant *.
30» L'armée du Roy va à Meaux^ pensant aller
au secours de Chasteau-Thierry.
septeittl»lt tMi.
5. M. de Fossez ^ défait le régiment de Canlay* à
Villeblevin, à trois lieues de Montereau *.
6. Monsieur le Prince entre dans Espemay. Les
habitans avoyent envoyé vers luy, pour luy offrir de
l'argent, à condition qu'il n'iroit point à eux. Mon-
sieur le Prince les prit , les mena avec luy et me-
Octobre.
* Voy, Fontenay-MareuU, p. 295 ; Pontchartrain, p. 101 et suiv. ;
Merc. fr.y t. iv, p. 248.
* Sous-lieutenant des gendarmes de la reine-mère, gouverneur de
Sainte^Menehould. Arnauld d'Andilly et Fontenay-Mareuil citent sou-
vent ce personnage ; je ne sais s'il est le môme que Gabriel de la
Vallée Fossez, marquis d*Everly, maréchal de camp, conseiller d'Etat,
gouverneur de Lorraine, de Montpellier et de Verdun, mort en 1636,
qui ayant épousé Madeleine du Val, fille de René du Val, seigneur de
Fontenay et de Mareuil, était le beau-frère du marquis de Fontenay,
Fauteur des Mémoires, lui-même parent d' Arnauld d'Andiily.
* Régiment que le baron û% Ganlay avait levé pour Mcmsiemr le PHnce.
* Voy., sur cette affaire» Fontenay-Mareuil, p« 205; Mert* fr,^ t* iv,
p. 2A9«
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120 JOURNAL INEDIT
octQbreiMi. naça les habitans de les faire pendi-e s'ils ne luy
ouvroyent les portes. Sur cela, ils se rendirent Ils
avoyent promis à M. le Maréchal de Boisdaufin de
tenir jusques au vendredy en suivant. Il fut à deux
lieues d'eux le mercredy, et avoit fait tirer son canon
à Montméril pour les avertir, et il trouva qu'ils es-
toyent rendus le jour de devant *.
9. Leurs Majestez arrivent à Bordeaux ^.
Le 3, l'armée du Roy alla à Fermoustier, le 4 à
la Ferté-Gaucher, et deux jours après à Montmirel, et
trois ou quatre jours après à Sézane. Le 12, elle va
de Sézane à Barbonne, et le là à Nogent-sur-Seine.
14. Monsieur le Prince ayant passé l'Aube à
Planty, passe la Seine à Méry, et son canon à gué.
On dit qu'il contraignit les habitans de Méry de
refaire en peu d'heures leur pont qu'ils avoyent rompu
. auparavant.
Faute de M. de Praslin, lequel, ayant huit cens
chevaux et trois mille hommes de pied, ne chargea
pas M. du Mayne, près de Sézane, qui s'estoit avancé
avec cinq cens chevaux et avoit une lieue de retraite
par un marais où l'on ne pouvoit passer que trois
à trois. En ceste occasion, M. de Longueville voyant
M. du Mayne en danger, alla à luy avec quinze che-
vaux et se pensa noyer dans le marais \
' Fay, Pontchartndn, p. 106 ; Merc. fr,, t. iv, p. 250.
* Suivant Pontchartrain, p. 107, l'arrivée à Bordeaux eut lieu le 7.
Richelieu, p. 273, donne la même date que Pontchartrain ; le Merc.ft.,
t. IV, p. 280, de même.
s Voy,, sur toutes ces affaires, les Mémoires de Fontenay-Blareiiil
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d'arnauld d'andilly. 121
Pendant que M. du Mayne faisoit ferme avec par- o«*obre leik
tie de la cavalerie, Tinfanteric de leur armée s'avan-
çoit vers Méry ; et ils ont depuis fait plusieurs fois
semblable chose.
16. Le dessein de Monsieur le Prince estant
d'aller à Sens où il avoit grande faction et où il
eust esté reçeu, M. le Maréchal de Boisdaufin y en-
voya devant M. de Fossez avec les gendarmes de la
compagnie de la Reyne et le régiment de Navarre,
et suivit après. M. de Fossez arriva à Saint-Clément,
à demy quart de lieue de Sens, le jeudy à minuit.
Envoyé à Tinstant deux gentilshommes demander
d'estre reçu dans le faubourg d'Yonne qui est une isle
forte. Les habitans refusent. M. de la Verrière, gou-'
vemeur, prie d'attendre au lendemain. Le lende-
main, M. de Fossez va dans la ville avec vingt
chevaux, trouve les habitans en rumeur. Enfin,
ils accordent qu'il entreroit au faubourg. Les habi-
tans de ce faubourg dient qulls ne le recevront point.
M. de Fossez , sur cela , dit que tous les serviteurs
du Roy se retirassent, et qu'il forceroit le reste. 11
approche avec son régiment en bataille. Ils se ré-
duisent. Monsieur le Maréchal arrive six heures
après. M. de Praslin vint devant avec vingt-cinq
chevaux, trouve le pont le vis levé contre M. de
Fossez; est reçeu dans la ville. Un habitant luy vint
qui faisait ses premières armes dans cette campagne sous les ordres de
M. de Fossez (Font-Mareuil, p. 295 et suiv.)> et les Mémoires de Bas-
sompierre qui avait un commandement dans l'armée du Roi (même
collection, 2* série, t. 20).
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122 JOURNAL INÉDIT
Octobre H». (lipQ qQ^ii vouloit entrer plus de gens qu'il n'avoit
dit. Il répond qu'il ne trouvoit pas bon qu'on luy
voulust faire la loy. Cet habitant se retire, fait re-
prendre les armes à tous. M. de Praslin se retire,
et fait le logement de Tarmée dans le faubourg.
Les habitans ferment leurs portes, paraissent en
armes sur les remparts. M. le Maréchal de Bois-
daufin, contre l'avis de tous, va coucher dans la
ville ; y est reçeu sans sa garde de Suisses. Les ha-
bitans font commandement à tous soldats de sortir,
sur peine de la vie. Le lendemain , ils s'apprivoi-
sèrent, ouvrirent les portes qu'ils avoyent condam-
nées^ firent peu de garde à toutes , laissèrent entrer
' librement tous les soldats. Monsieur le Maréchal
voulut bailler vingt^deux billets à vingtnieux fac-
tieux pour sortir. Les autres habitans intercédèrent
pour eux et furent cause qu'ils demeurèrent. Il les
fit tous jurer et crier : Vive le Roy. Le soir mesme
du 16, Monsieur le Prince vint une heure après
M. de Boisdaufln, loger à Malay, à un quart de
lieue d'un des faubourgs de Sens* Sans la diligence
de M. de Boisdaufin, Sens estoit perdu. Le soir qu'il
partit de Nogent, les paysans de Grange, où il
coucha, se firent tirer quatre coups de canon. Il y
en eut un de perdu*.
18. Mariages du Roy à Bordeaux et de Madame
à Burgos^
*• Voy. Fonteiiâ3F-Mareui], p. 900 \ Mém. d» â'Esti^», inOme coll.,
t. XVI, p. S96; Jfvrff* fr,^ t. iv, p» 950»
2 Voy, Brienne, p. 307 ; Pontchartrain, p. ÎOO. LQMefc, /V., t. iv,
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d'a«nauld d'andilly. 12S
21. Madame part de Bordeaux pour aller à oetobreiMi.
Bayonne. M. de Guise conduit Madame à Bayonne«
Les villes de Tartau et Mont-de-Marsan, hugue*
nettes, envoyent offrir leurs portes, et d'abattre de
leurs murailles, si elles n'estoyent assez grandes *.
Madame séjourne.... jours à Bayonne, sur ce
qu'on dit que la gouvernante de l'Infante estoit
morte. Le Roy d'Espagne amena sa fille jusques
à Saint-Sébastien*
M. le Maréchal de Boisdaufin, ayant sceu le matin
que Monsieur le Prince avoit passé Yonne avec toute
son armée, envoya M. de Praslin avec quelque gen-
darmerie, et ensuite fut enlevé le quartier de M. de
Luxembourg à la teste de l'armée ennemie ^.
Depuis, M. le Maréchal de Boisdaufin ayant sceu
que Monsieur le Prince avoit dessein sur Chastillon*
sur-Loin , il le devança et s'y alla loger* Il y estdt
encore le 26. De là, il alla à Bony.
2&. M. le Maréchal d'Ancre entreprend le -siège
de Clermont ; fait prendre ceste mesme nuit la basse
ville par pétard ; et après avoir depuis fait faire deux
tranchées, et que M. Arnaud' eut mis le canon à la
p. â67 et siiiv., donne de curieux détails sur la magniâcence de cette
Bolennité et des fôtes auxquelles elle donna lieu. C'est par erreur
qu'Arnauld d*Andilly dit que le mariage du roi se fit à Bordeaux et
celui de Madame à Burgos. Les mariages se firent par procuration,
celui de Madame à Bordeaux et celui du roi à Burgos. Le duc de Guise
représentait le i prince Philippe, et le duc d'Usseda, fils du duc de
Lerme, représentait Louis XIII.
^ Voy, Pontchartrain, p. 109; Richelieu, p. 374; Af^e» fr*^ t. iv, p^ S09.
* ^. les détails de cette afiEaire, Merc, fr,, U iv, p* 257.
> Pierre Amauld,^ oncle d'Arnauld d*Andilly, mestre de camp géné-
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i2/t JOURNAL INEDIT
Octobre im. sienne, à la portée du pistoUet, ceux du chasteau se
rendirent à composition de sortir, enseignes dé-
ployées, et d'avoir passe-port pour aller en seureté
jusques à Soissons. Il y avoit quelques quatre cens
hommes et quelques carabiniers conunandez par un
nommé *.
M. de Béthencourt* y est mis gouverneur. De-
puis , M. le Maréchal d'Ancre vint à Paris loger à
l'hostel de Montmorency, où M. de Portes le traitta.
11 envoya quérir Monsieur le Premier Président et
Messieurs de la ville sur le sujet de savoir d'eux ce
qu'ils vouloyent faire de Clermont '.
PASSAGE DB BONY.
26. Monsieur le Prince ayant investy les Cara-
bins de l'armée du Roy logez à... , M. le maréchal
de Boisdaufln les alla dégager ; et Monsieur le Prince
s' estant mis en bataille sur une colline voisine, M. de
Boisdaufln flt tirer son canon sur ses trouppes, et les
ébranla tellement qu'il fut obligé de quitter cette
rai des Carabins, mestre de camp dti régiment de Champagne, gouver-
neur du Fort-Louis, mort en 162/^. Vay, en tête des Mémoires d*Arnauld
d*Andilly la Notice pompeuse qu*il consacre à ce personnage, et où
il dit notamment que le maréchal d*Ancre ayant tu agir son onde
dans toutes les occasions et particulièrement aux sièges de Clermont
et de Soissons, conçut tant d*estime pour lui qu'il lui promit le com-
mandement de six mille Liégeois. (Ed. citée, t. xrxni, p. 327.)
^ Le sieur de Haraucourt, suivant le récit du Merc. ft,
> Le vit omte de Béthencoort.
> Voy. Pontchartrain, p. 111; Fontenay-Mareuil, p. 322; Mercfr.^
t. nr, p. 802.
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d'arnaold d'andilly. 125
colline, et s'aller mestre en bataille sur une autre octobw tm.
proche, où Monsieur le Prince mit son canon en
lieu très avantageux. Monsieur le Maréchal T ayant
ainsi poussé, se mit en bataille sur la mesme colline
qu'il avoit quittée (les soldats marchoyent en sau-
tant) , et ainsi il y avoit un vallon entre les deux
armées, lequel estoit inaccessible, pour aller à Mon-
sieur le Prince, du costé de la corne droitte de nostre
bataille, mais fort accessible du costé de la corne
gauche. Les canons commencèrent à tirer de part
et d'autre ; celuy de Monsieur le Prince nous en-
dommageoit fort, à cause qu'il estoit en lieu avanta-
geux, tellement que l'on fit retirer nos soldats d'alen-
tour du nostre, et les rangea-t-on le long des hayes.
Ce que voyant M. du Mayne, il vouloit charger,
disant que nosj;re canon estoit abandonné ; mais •
M. de Buillon luy répondit que tant qu'il veiToit de
ce bois là (montrant nos piquiers) , il se gardast bien
de charger de cavalerie. M. de Boisdaufin eût eu
avantage à donner bataille, car sa corne gauche trou-
voit Monsieur le Prince en une colline pleine de bois,
et au-dessus de laquelle il y avoit du bois et des -
vignes , lieux avantageux pour l'infanterie. Joint
qu'au dessus de la dite colline, il y avoit un fort
petit champ pour la cavalerie de Monsieur le Prince,
ce qui luy estoit un extrême désavantage. Chacun
au Conseil fut d'avis de donner bataille, et mesme
M. dp Refuge, qui opina fort courageusement. M. de
Boisdaufin seul ne le voulut, ce qui fâcha et décou-
ragea fort les soldats, les deux armées ayant esté à
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OdobrtMllk
i% JOURNAL INliDIT
veûe depuis neuf heures du mafîn josques à trois
heures après midy. Le soir estant proche» M. le ma*-
réchal de Boisdaufin alla loger au Piquet, à deux
lieues de là. (Il devoit loger sur le champ mesme »
ou tout contre; il n'auroit pas esté plus incommodé),
Monsieur le Prince ayant veû que M, le maréchal
de Boisdaufin avoit quitté cexîhamp, il y envoya de
sa cavalerie , comme pour dire qu'il luy estoit de-
meuré. Il alluma force mèche sur la colline et des
feus. Et cela fait, commença à faire passer son armée
à gué à Bony avec quelques bateaux qu'il avoit ar-
restez. On dit que Saint-Paul, qui menoit un régi-
ment, voyant que cela estoit trop long, défit ses
chausses et passa le premier à gué. Les habitans de
Bony fournirent six cens pains à l'armée de Monsieur
le Prince. Ce fut sans doute par coçnmandement de
M. de Nevers , lequel s'aboucha avec Monsieur le
Prince \
Novembre.
1, Monsieur le Prince fit sa feste à Sancerre.
* yoy, Merç, fr,^u iv, p. 261 ; Brieune, p, 307; Pontcbartraio, p. 111 ;
Richelieu, p. 277; Fontenay-Mareuil, p. 303; Bassompierre, môme
coll., 2* série, t. ]LX, p. 81. Lei ttratëgiftet peuvent comparer le récit
d'Arnauld d'Andilly avec celui du maréchal de BaMompierre, qui com*
mandait dans cette affaire, et celui de Fontenay-Mareuil, qui s^y trou-
vait aussi, sous les ordres de M. de Possex. Suivant Fontenay-Mareuil,
le maréchal de Boisdauphin fit de gr«nde« fautes dans cette Journée et
perdit l'occasion de terminer la guerre en anéantissant l'armée des
Princes. Voy, dans les Mémoires de Fontenay-Mareuil le jugement qu'il
porte «ur le maréchal de Boisdauphin (p. 309-310) et qu'il termine par
ceâ mots : a C'est pourquoy les Princes doivent bien regarder à qui ils
donnent leurs armées, et que ce ne soit pas par faveur ny autre con-
sidération, lee meilleura ny estant pas trop bona. >•
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D'AftNAULD d'ANDILLY. 197
Estant en Berry, il voulut attaquer Aubîgny ; maïs Rovembrem».
il y avoit dix compagnies de Boniface* ; ce qui Ten
empêcha. Après avoir couru le Berry, et pris à Ro-
morantin pour douze mil écus de draps pour habiller
ses soldats, dont il fit sa promesse, il voulut attaquer
Viarron ; mais il ne la put prendre*.
9. Echange de Madame et de l'Infante. On dit
que le Roy d'Espagne y estoit travesty. La Cour
d'Espagne paroissoit fort brave. — M. de Guise fit
mettre son armée en bataille sur une colline voisine'*.
10. M. le Maréchal de Boisdaufin passe la Loire
à Beaugency. Une lettre de M. des Cures porte que
ce fut à Blois. Monsieur le Prince, après avoir tra-
versé le Cher, l' Indre à Palluau et la Vienne à Noyers,
passe en Poitou, où il joint M. de Soubise *, avec
quelque douze cens hommes de pied et deux cens
chevaux, et M. de la Trémoilleet le Marquis de Rosny.
M. de la Trémoille estoit party de Bretagne contre
le consentement de Madame sa mère, et aussi n'avoit
* Mestre de camp et colonel dtf régiment de son nom» (Foy, Fonte-
nay-Mareuil, p. 308.)
» Mère, fr.^ t. iv, p. 265.
' roy. Pontchartrain, p. 112; Richelieu, p. 275; Fontenfty^Mftreuil,
p. 31(5. Ce dernier reproduit les lettres que Louis XIII et Anne d'Au-
triche s'adressèrent à cette occasion par Tentremise de M. de Luynes.
Le IHerc. fr, les donne aussi. Voy, dans cet ouvrage, p. 307 et suiv., le
récit des cérémonies qui eurent lieu pour l'échange des princesses.
* Beryamin de Rohan, seigneur de Soubise, né en 15$3, fut, avec
son frère le duc de Rohan, un des chefs du parti protestant, soutint
une lutte énergique et souvent malheureuse contre les armées du Roi,
et, après la ruine de son parti, se réfugia en Angleterre, où il mourut
en 1640.
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128 JOURNAL INÉDIT
Novembre 1616. pu rassembler, à beaucoup près, les forces qu'il avoit
espérées*.
M. le Maréchal de Boisdaufin suit Monsieur le
Prince, après avoir passé à Blois. Va à Cormery ;
de là à la Haye, en Touraine.
M. de Longueville veut passer la Loire à Saumur
ou Monsoreau pour venir en Picardie. On luy refuse
le passage. La levée est bordée des gens du pays
qui prennent les armes ; ainsi il est contraint de s'en
retourner. — M. de Sully va voir Monsieur le Prince
à Saint-Maixent, sur ce que Monsieur le Prince luy
avoit mandé qu'il luy donnast à disner audit Saint-
Maixent.
21. La Reyne arrive à Bordeaux au soir. Le
mecredy 25, le Roy et la Reyne ouïrent messe
ensemble, et le soir couchèrent ensemble. Le di-
manche 29, ils firent leur entrée à Bordeaux*.
M. le Maréchal de Boisdaufin estant à Chasteau-
neuf. Monsieur le Prince ne peut passer la Charente
qu'à Taillebourg ; de sorte que, de Jarnac où il sé-
journa quelques jours, il fut contraint de descendre
jusqu' audit Taillebourg, et ayant passé la Charente,
il entre dans la ville de Pons, dont M. Du Mont est
Gouverneur.
Le bagage de M. de Gyé^ fut pris, et quelques-
* Voy. Merc, fr.,t. iv, p. 344.
» Voy, Pontchartrain, p. 115 ; Richelieu, p. 275 ; Fontenay-Mareuil,
p. 315 et p. 318-319 ; Merc, fr.^ t. iv, p. 334 et suiv. Le Merc, fr,^ t. iv,
p. 353 et suiv , fait le récit des fêtes magnifiques qui eurent lieu à Bor-
deaux à cette occasion.
t Cësar de Balzac, seigneur de Gyé, colonel général des Carabins,
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d'arnàuld d'andillt. 12Ô
uns de ses carabins défaits par M. du Mayne, avant »#vHnbi« tm.
le susdit passage de la Charente, ni que M. de Bois-
daufin fust à Chasteauneuf.
M. deNevers, qui estoit arrivé... jours auparavant
à la Cour, va parler à M. le Prince, pour parler de
paix. Il éstoit lors à la Rochelle, où il avoit esté
receu avec deux cens chevaux, la cornette blanche
déployée. M"' de Nevers*, qui s'en revenoit de deçà
faire ses couches, vid M. du Mayne, son frère*.
7. M. de Guise part de Bordeaux et arrive le 10
à l'armée, à Barbesieux, avec cinq cens chevaux,
en qualité de Lieutenant Général des armées du Roy ;
la qualité de Lieutenant Général en ladite armée de-
meurant à M. de Boisdaufin*.
M. le Prince de Joinville, qui avoit amené cinq où
six cens bons chevaux d'Auvergne, joint l'armée.
17. Le Roy part de Bordeaux, fait Noël à Au-
beterre*.
M. de Monglat^ est tuA en duel par M. de Yitry.
Querelle : M. de Yitry jurant dans la chambre de
Décembre.
conseiller d'Etat, lieutenant général des armées du Roi, lieutenant-
général au gouvernement d*Orléans.
* Catherine de Lorraine, fille de Charles de Lorraine, duc de Maj^enne,
Je célèbre chef de la Ligue.
* Voy. Pontchartrain, p. 115 ; Richelieu, p. 279; Fontenay-Mareull,
p. 323 ; 9ferc. /r., t. iv, p. 365.
* Foif. Fontenay-Mareuil, p. 321.
* Voy. Pontchartrain, p. 120-121 ; Richelieu, p. 280 ; Fontenay-
Mareuil, p. 323 ; Merc, fr,^ t. iv, p. 307.
s On lit par erreur dans le manuscrit Montfort au lieu de Monglat
que je rétablis.
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ISO . JOURAilL IJViDJT
DMenttwtoAff. M* cle Guiae, M. de Giûse luy dit 2 Tu iie te sçauroîs
empeaciiei* de juircn Monglat\ sur cela dà^i Com«
ment s'en empescheroit-il, qu'il n'y a pas jusques à
son aumosnier qui, en attendant la messe, ne s'amuse
h jurer. M* de VUry répondît : El pioy je vis hi«r le
tien qui p'amusoit à phimer une poulie.
La charge de Grand Louvetier donnée à M. de Iq
RochehGuyon ^ Celle de premier Écuyer de Monsieur
jfut donnée au mois de septembre 1616 à M. de h^
sièros, fil» de M. de Thémines.
M, de Rbeinfâ fait GardSnaL
Monaieur le Priûee foit retirer aon infanterie dan»
le»irfead'Ol€a?*(m\
* Robert de Harlay, baron de Ménglat, grand fouvetier de France
^ 1^%%, mort w 1.615, iJU le Père AtowJme^ t vin, p^ TQfi, des bles-
sures qu*il reçut, djins un combat singulier avec, le seigneur de Viiry,
son plus intime ami. H mourut sans alliance, et le fils de sa sœur,
JeAQDe de HaHay^ feéritiè«>Q de ta buroj^aio (H MQQg)#t, «içiriée à par-
douin de Clermont, seigneur de Saint-Georges, fut le marquis de Mon-
glat, Tauteur des Mémoires.
« François 4é Siily» 4^q de la Roche-Guyoa, marqula d» Guercho-
viUe, graed louvetie» de France à la mort du précédeot eo l^ia, mon
au siège de la Rochelle en 1628.
* Arnauld d*Andilly (du moins 'dans la copie manuscrite que nous
suivons) néglige de parler des affaii:es assez importaates qui eureat lieu
en Champagne, pendant les mois de novembre et de décembre, entre
les armées du Roi et celles dos Princes. On en peut lire le récit dans
le Merc. fr,^ t. iv, p. 380-387.
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4 64 6.
SOMMAIRE.
JàHviBii. — Affaires entre rarmée du Roi et celle des Pnnees. — Dé^
part des députés de l'Assemblée de Nîmes. — Le Roi arri?e à Poi-
tiers. — M. de Candale se déclare de la Reltgion. — La Conférence
de Lottdun est décidée. -^ Disgrâce du commandeur de Sillery , de
MM. de Lorme et de Gurcm. — La Cour arrÎTe à Tours. — Accident
dans la chambre du Conseil.
Février. — • M. de Vendôme se prononce pour Monsieur le Prince. —
Brouille entre M. de Vendôme et le marquis de Cœuvres. — Noms des
députés à la Conférence de Loudun. — Mort de Montalte, médecin
de la reine-mère, et de M. Fleurance, précepteur du roi.
Mars. — Affaire près de Château-Thierry^ entre M, de Vitry et M. de
Novion. — Nouvelles de la Conférence. — Retour de la maréchale
d'Ancre à Paris. — Démêlés du marquis de Cœuvres avec les habitants
de Crespy. — Nouvelles de l'armée et de la Conférence. — Retour
du maréchal d* Ancre à Paris. — Le marquis de Bonnivet mis à la
Bastille. — M. de la Vieuvîïle achète de M. de Plainville la charge
de capftaîne des gardes. — Mort de M. UolTé.
Avril. — Rigueurs de M. d'Épernon en Limousin^ — Mort de M. de
Beaumont. — M. de Béthune envoyé en Italie. — Départ du maré-
chal d'Ancre. — Appel de M. de Vitry par le comte de la Suze. —
Mort de M. de ïa Boulaye. — Les sceaux retirés au chancelier.
Mai. — Paix signée à Loudun. — Retour delà reine-mère à P<»ris, —
Arrivée du roi et de la reine dans la capitale. — M. du Vairgavde
des sceaux. — Les Princes viennent trouver le Roi à Paris, —
M. Barbîn nommé contrôleur général, le préudem Jeannia sailn-
tendant, et M. de Castille intendant des fiBances»
JoiN. — Évasion de M. cb Marelle — Appel de M. de Montb«N»ï pat le
baron d'AoaeTal. — Le simur de Beauveau, condamné i Mort , tiré
de prison par commandement du Roi. -^ Remioatrances éa Parle-
ment. — Préséance contestée au garde d6s seeam par le Tafkmmt,
— M. Bfaagot nommé secrétaire d'État ceotto la volonté de fi, de Vil-
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182 JOURNAL INEDIT
leroy. — Soulèvement contre le maréchal d'Ancre. — Le comte
d'Auvergne sort de la Bastille.
Juillet. — Exécution de deux palefreniers du maréchal d'Ancre. —
Retour de quelques-uns des princes.
Août. — Arrivée de l'ambassadeur d'Angleterre au sujet du mariage
de M"* Chrétienne. — Réorganisation des Conseils du Gouvernement.
— Reddition de Péronne à M. de Longuevillo. — Démêlés entre
Monsieur le Prince et le maréchal d'Ancre. — Ce dernier se retire à
Caen. — Inimitié de M. de Gnise et du maréchal d'Ancre. — La
Reine-mère veut rétablir l'autorité du Roi.
Septembre. — Arrestation de Monsieur le Prince ; détails à ce sujet.
— Départ do MM. du Maine, de Bouillon et de la Trémouille. — M. de
Vendôme se sauve. — M. de Guise et M. de Joinville vont rejoindre
les princes à Soissons. — Départ de M. le président le Jay. — Pillage
do la maison du maréchal d'Ancre. — MM. de Thémines et de Monti-
gny nommés maréchaux de France. — Conduite de M. de Sully. —
Mariage de M"* de Soissons avec M. de Longueville. — Le Roi va au
Pailement faire vérifier la déclaration contre les Princes absents. —
M. le comte d'Auvergne nommé général de l'armée du Roi. — Duel
de M. de Brantes et de M. de Ryonne. — On envoie vers les princes
pour traiter avec eux. — Conduite de M. de Nevers. — Reddition
de Chinon. — Retour de MM. de Guise et de Joinville — Mort de
M, de la Chastaigneraye. — M. de Guise va à Soissons et obtient
raccommodement des princes.
Octobre. — Retour du maréchal d'Ancre. — Il se réconcilie avec
M. de Guise. — Brouille entre M. d'Épemon et les Rochellois. —
— M. de Luynes grand fauconnier. — Le maréchal d'Ancre fait
dresser des lettres d'érection de son marquisat en duché-pairie. —
Mort de M. de la Chevalerie. — Maladie grave du Roi. — M. de
Lesdiguières va secourir le duc de Savoie.
Novembre. — Changements dans les Conseils du Gouvernement. —
Exécution de Boursier, accusé d'avoir voulu tuer la reine-mère. —
M. de Lussay envoyé pour favoriser le passage du duc de Nemours
en Savoie. — L'entrée de Reims refusée à M"« de Nevers — M. de
Nevers fait piller la maison de Si appartenant à M. de la Vieu ville —
Bompar assassiné par Cusac. — M. de Blerancourt, gouverneur de
Péronne, Montdidier et Roye. — Duel du duc de Rohannois et de
M. de la Frezelière. — Le Roi exige que M de Nevers rende justice
à M. de la Vieuville. — Résistance opiniâtre de M. de Nevers. — Exa-
men de cette affaire au Conseil d'État. — Les dceaux sont retirés à
M. du Vair et donnés à M. Mangot. — M. de Luçon est nommé 5^e-
crétaire d'Etat à la place de M. Mangot. — Le maréchal d'Ancro
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d'arnauld d'akdillï. 158
part pour Rouen où il va tenir les Etats. — Le Rd danse son pre-
mier biUlet. — MM. de Nevers et de Bouillon se fortifient.
DÉCEMBRE. — Retour du maréchal d* Ancre. — Le gouvernement de la
Bastille enlevé à M. de Themiues ; sa conduite à ce sujet. — Mauvais
état des finances. — Projets du Roi pour y pourvoir. — Opposition
de la Cour des Aides. — Discours du garde des sceaux et du prébi-
dent Chevalier. — Sainte-Menehould repris à M. de Nevers. — Le * •
gouvernement en est donné à M. de Fossez. — M. de Schomberg en-
voyé en ambassade extraordinaire en Allemagne.
1. M. de Guise fit une traiste de vingt lieues JamieiisH.
avec deux mille chevaux et cinq cens mousquetaires à
cheval (M. de Boisdaufin menoit le reste de l'armée) ,
pour aller surprendre Monsieur le Prince et MM. du
Mayne, de Longueville et de Buillon qui estoyent
dans Saint-Maixant. — M. de Saint-Aignan * , qui
marchoit devant avec cinq cens chevaux-légers,
rencontre les carabins de M. de Sully, puis les gardes
de Monsieur le Prince; les chargea, ce qui fut en-
tendu, et donna l'alarme à Saint-Maixant. MM. le
Prince, de Longueville et de Buillon sortirent, et
M. du Mayne demeura pour assurer M. de Sully.
2. M. du Mayne, voulant avoir sa revanche, part
avec deux mil chevaux, pour enlever le quartier des
chevaux-légers du Roy, lesquels en ayant eu avis, se
* Honorât de Beauvillier, comte de Saint-Aignan, né en 1579, gen-
tilhomme ordinaire de la chambre du roi, conseiller d*Etat, mestro
de camp général de la cavalerie légère en 1611, commandant de la
cavalerie de Tarmée du Roi en 1615, lieutenant général du Berry en
1617. S'étant joint au parti de la Reine-mère, le comte de Saint-Aignan
fut fait prisonnier au Pont-de-Cé en 1620 , et privé de sa charge de
mestre de camp de la cavalerie légère II mourut en 1622. Son fils fut
premier duc de Saint-Aignan et membre de TAcadémie française.
(Foy, P. Anselme, t. iv, p. 795 ctsuiv.)
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Janvier 1<1«.
iâft JOUaAAL INÉDIT
retirèrent. M. de Praslin, croyant que M. duMayne
mettroit pied à terre, et demeureroit quelqiife heure
dans le bourg, pria M. de Guise de trouver bon qu'il
allast attaquer Tescarmouche avec cent chevaux ;
que Ton envoyast après les chevaux-légers pour le
soustenir, et puis que l'on fist marcher le reste de
l'armée. Il y fut donc. M. de Fossez menoit les douze
premiers, qui servoyent de courriers ; M. de Créquy^
suivoit à trente pas avec vingt-cinq ou trente ; et
M. de Praslin menoit après le reste. Ils trouvèrent
M. du Mayne deslogé ; s'il y eût encore esté, M. de
Praslin estoit taillé en pièces.
4. Les députez de l'Assemblée de Nismes, qui
avoyent voulu parler au nom des députez de l'Assem-
blée générale de Nismes, ayant seulement esté en-
tendus au nom de l'Assemblée de Nismes^, sur
l'instance de'M. de Thianges% qui, sur ce qu'on ne
les vouloit point ouïr du tout, dit ne pouvoir retourner
* Charles, sire de Gréqny et de Ganaples, prince de Poix, depuis duc
de Lesdiguières, comme héritier du connétable son beau-père, pair de
France, lieutenant général du Dauphiné, mestre de camp du régiment
des gardes en 1604, blessé au siège de Saint-Jean-d'Angely, maréchal-
de France en 1621, ambassadeur à Rome en 1633, tué d'un coup de
canon en 1638, dans un combat contre les Espagnols.
3 « Enfin le baron de Thianges dit au Roy qu'il ne pôuvoit retour-
ner vers Monsieur le Prince, que ceux de ladite Assemblée n'eussent
présenté leurs lettres à Sa Majesté, et qu'ils ne fussent ouys : Cela
leur fut accordé, comme députez de TAssemblée de Nismes, mais non
de l'Âs&embléo générale de ceux de la religion prétendue reformée. »
{Merc. fr.^ t. iv, 2* partie, p. 5.)
3 Charles Damas, baron puis marquis de Thianges, maréchal de
camp, lieutenant général en Bresse, capitaine de cinquante hommes
d'armes, mort en 1638.
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d'àrnàuld d'andilly. 1M
vers Monsieur le Prinœ^ qu'ils n'eussent esté ouls^
ledit jour donc partirent lesdits députer de la Roche**
foucaud où le Roy estoit^ pour retourner à Nismeê en
l'Assemblée ; et MM. de Nevers et l'ambassadeur
d'Angleterre ' sont aussi partis le tïiestne Jour pour
retourner vers Monsieur le Prince*»
6 ou 7. Le Roy arrive à Poitiers.
7. M. de Praslin ayant eu avis que les régi-
niens de Desostels, Basme et YiUurceaux^ estoyent
logés à Nanteûil , à une lieÛe de Saint^Màixant, va
kty quatorze ou quinzième en pourpoint ( dont M. de
Feuquière* ^ estoit l'un) les charger dans leor lo^
gement, enfonce leur barricade, taille en pièceê
* L'ambassadeur d'Angleterre Edmond avait été chargé par son
Souverain de s'offrir pour arbitre entre le roi et Mohsîeui' lé PHncè ht
de chercfaei' à leiii' faire faire la paix*
2 Voy, Herc.fr. y U iv, 2« partie, p. 2-18. M. de Thiange» avait été
envoyé vers le roi par le prihce de Condé potir lui proposer iâ tetiue
4'un9 Conférence dans laquelle des dépotée de l'un el île l'fekutrê putf
traiteraient des conditions de paix. Cette proposition fut acceptée. Le
Mercure entre dans de grands détails à ce sujet. On y trouve la lettre
de Monsieur le Prince au roi et la réponse du roi qui est trte^belle.
Voy, aussi Richelieu, p. 285.
3 Nicolas de Mornay^ seigneur de Villarceattx, mestre de oalUp en
l'armée de Monsieur le Prince, mourut à Saint-Maixant^ lors du Voyage
de Poitou en 1616. (P. Anselme, t. vi, p. 292.)
^ Manaaeès de Pas, marquis de Feuquière^ né en ISM, lieutennit-
général, fait prisonnier au siège de la Rochelle, ambassadeur en iJl«-
lâagne, lieutenant^oéral des gouvernements de Metz et de Toul en IMl^
de celui de Verdun en 1636, commandant en 1689, au siège de Thioiv-
vilie, où il eut le bras casaé, fut fait prisonnier el mOurUt en l640..On
a publié ses lettres et ses négociations pendant son ambassade en All^
Bu^pie en 1683 et 168^ Récemment on a édité la Correspondance des
Fe uquière* Le marquis de Feuqnière était cousin par alUan^ d'Amanld
d'Andilly.
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Iâ6 JOURNAL INiDIT
Mnvier mé. ceux qui la défendoyent. Les autres se sauvent dans
Téglise et à la fuite. Il prend quatre enseignes.
MM. de Vitry et de Bressieux donnèrent par un autre
costé *.
10. M. de Caudale se déclare de la Religion à
Alez, en TAssemblée des églises des Sév^nes et Ge-
vaudan*.
i5. M. de Brissac' et M. de Villeroy partent
pour aller trouver Monsieur le Prince à Niort, pour
résoudre quelques articles qui restoyent en diflTiculté
et convenir du lieu et des personnes de la Confé-
rence. Ils le trouvèrent à Fontenay. Le Conseil se
tenoit à l'entour du lit de M. de Buillon qui avoit la
goutte. Trêve résolue pour le mois de février. Con-
férence à Loudun le 10 février, et autres articles
portez par la trêve*.
Disgrâce de M. le Commandeur de Sillery, de
M. de Lorme et de M. de Guron*. M. de Fossez re-
vient à Paris avec luy, dont la Reyne s'offença, et
^ 9^0y. Mère, fr.^ X, iv, 2* partie, p. 18; Pontchaatraia, p. 124.
' Voy, Pontchartrain, p. 12/i.
s Charles de Cossé, H* du nom, duc de Biissac, gouverneur de Paris
pour la Ligue en 159&, maréchal de France en 1594, duc et pair en
1611, grand pannetier et grand fauconnier de France, mort, en 1621.
* Voy, Mère, fr,^ t. iv, 2* partie, p. 19. Le Mercure rapporte en
entier le traité préliminaire en onze articles par lequel il fut décidé
que la Conférence aurait lieu à Loudun le 10 février et quMl y aurait
une suspension d*armes. Foy, Richelieu, p. 285 ; Pontchartrain, p. 125.
^ Gabriel de Rechignevoisih, seigneur de Guron. Il fut souvent
chargé d'importantes missions, notamment lors du siège de Montau-
ban, auprès des rebelles auxquels il flt accepter les conditions pro-
))08ées par le Roi; une autre fois auprès du duc de Lorraine; et lors du
siège de Casai, auprcs du Pape et des Vénitiens.
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. d'aknauld d'andilly. 137
ne l'ayant voulu voir lorsqu'il la fut retrouver à
Tours, il se retira à sa maison d'où il ne bougea
jusques à quelque peu auparavant la prise de Mon-
sieur le Prince que la Reyne le manda et luy fit très-
bonne chère *.
15, Leurs Majestez partent de Poitiers pour
aller à Tours. Le plancher de la chambre de la
Reyne, où elle tenoit le Conseil à Tours, s'estant en-
foncé pour la plus grande part, M. le comte de
Soissons tomba, M. d'Espernon, M* de Villeroy, le
marquis de Villaine* (bien blessé), M. de Bassom-
pierre et plusieurs autres. La Reyne ne cheut point,
ni MM. le Chancelier, président Jeannin, de Pi-
sieux, etc. '.
Janvier IIH.
4. M. de BuUion arrive à Paris ayant esté ren-
voyé de- la Cour.
M. de Vendosme qui avoit levé des gens de guerre
avec des commissions du Roy et tiré toutes ses
armes de Paris avec des passe-ports de Sa Majesté,
disant qu'il vouloit aller au devant du Roy pour le
servir, se trouve avoir assemblé jusques à six ou sept
Février.
* Voy. Pontchartrain, p. 127.
2 Brandelis de Champagne, marquis de ViUaines, conseiller d'Etat,
capitaine de cinquante hommes d'armes des ordonnances du Roi, che-
valier du Saint-Esprit en 1599.
2 f^oy. Merc. /y*., t. iv, p. 2/i, Suivant le Mercure^ le Roi partit do
Poitiers le 21. L'accident eut lieu à l'hôtel de la Bourdaisière, où la
reine-mère était logée. Suivant Fontenay-Mareuil , p. 328, c'est aussi
le 21 que le Roi partit de Poitiers. Voy, Fontenay-Mareuil, p. 329 ;
Richelieu, p. 286 ; Pontchartrain, p. 128.
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138 . JOURNAL INÉDIT
Février mt, rnillc honimes de pied et sept ou huit cens chevaux •
Le Roy connoiâsant que oe n'estoit pas a» intention
de bien faire, envoyé vers luy M. de Yignolles * qui
rapporte à la Cour plusieurs demandes de M. de
Vendosme, et entre autres, d'avoir des cotïitnissions
pour ceux des ^ns qui avoyent levé sans conomis-
sion- M. de Vignolles le retourna trouver avec con-
tentement sur ce sujet et plusieurs autreâ« Néant-
moins, il persiste toujours et augmente ses forces du
débandement de l'armée du Roy et de celle de
Monsieur le Prince, s'avance en Bretagne et fait
mine de vouloir attaquer Nantes. On envoyé à Ghan-
tecé un héraut d'armes le sommer de désarmer, le-
quel parle à luy couvert, M. de Vendosme ayant la
teste nue. M. de Vendosme , après trois ou quatre
heures de temps qu'il demanda pour penser à sa
réponce , dit qu'il estoit très-humble Serviteur du
Roy, et qu'il avoit pris les armes pour venger la
mort du feu Roy, et que ses intérests estoyent joints
à ceux de Monsieur le Prince \
^ Bertrand de Vignolles, dit La Hire, marquis de VignoUes, capitaine
deâ gardes d'Henri, roi de Navarre, conseiller d'Etat, lieutenant géné-
ral en Champagne, capitaine de cent hommes d*armes, premier maré-
chal de camp des armées d'Henri IV et de Louis XIII, né en 1566, se
signala en 1587 à la bataille de Coutras, en 1S90 à celle dlyry, au
siège de Rouen en ISOS, en Bôam en 1621, fut premier maréchal
de camp au siège de la Rochelle en 1638, se distingua dans la cam-
pagne de Savoie en 1630, eut en 1632 le commandement de plusieurs
provinces en l'absence du prince de Gondé, et mourut en 16M. (Koy. P.
Anselme, t. ix, p. l/i5.)
> Vifff, Merc, fr,y t iv, p. 38. Le récit du Mereurt conânne entière*
ment celui d'Amauld d'ÀndiUy. Foy, FoDtenajr<^areuil, p» 930-331 $
Richelieu^ p. 286; Pontchartrain, p. 126 et 133.
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d'arnauld d'andilly. 159
M. le Marquis de Cœuvres * ne s'estoit point dé- F«vritr têa.
claré en faveur de Messieurs les Princes; mais
néantmoins témoignoit estre mal-content de ce que
Ton ne remplaioit point , de ce qu'on ne le faiaoit
point servir en la charge de Maistre de la garde-
robbe de Monsieur, etc. Enfin M. de Vendosme ar-
mant, il Talla trouver avec trois ou quatre cens Che-
vaux qu'il leva sans commissions du Roy ^, et qu'il
avoit fait ceste levée pour témoigner qu'il n'estoit
pas si peu capable de servir que l'on vouloit le faire
croire. M. de Vendosme s' estant déclaré contre le
Roy, on tâcha à la Cour de désunir d'avec luy M. de
Cœuvres; et enfin on le fit. On tient que le vray sujet
qui fit qu'il quitta M. de Vendosme vint sur ce que
M. le marquis de Cœuvres dit à M. de Vendosme que
Bocage, son secrétaire , luy donnoit de très-raauvais
conseils et le perdoit. M. de Vendosme luy répondit
que Bocage estoit fort homme de bien et qu'il ne
trouvoit nullement bon qu'il en parlast ainsi. Sur
quoy M. de Cœuvres répliqua que Bocage estoit un
coquin qui le perdoit ; et M. de Vendosme répandit:
mon oncle', n'en parlez pas davantage; je le me*
^ François Anaibal, marquis de Cœuvre», puis duc d*£strées, évèque
de NoyoDs en 1594, embrassa la profession des armes en 1597, gou-
verneur de risle de France, de Soissons, de laon, ambassadeur e»
Savoie en 1614, à Rome en 1621, en Suisse en 1624, maréchal de France
en 1626, de ooi^veau ambassadeur à Rome en 1636, duc et pair en
1648, fit la fonction de connétable au sacre de Louis XlV en 1654,
mort en 1670.
2 U y a probablement un membre de phrase passé dans le manuscrit.
^ lie marquis de Gcsuvres était fiire de Gabrielle d'Estrées, mère du
duc de Vendôme.
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1^0 JOUBNAL INÉDIT
Février i«i6. neray en croupe partout où vous voudrez. M, le
marquis de Cœuvres repartit : Monsieur, si un autre
que vous me disoit cela, je le quitterois. Et après
cela, il le quitta, et dit qu'il ne vouloit pas retourner
à la Cour, pour ce que les affaires de M. de Ven-
dosme estant en assez mauvais termes, il eust semblé
qu'il eust voulu profiter de son malheur. Et ainsi
s'en revint à sa maison de Cœuvres, et passa par
Paris où il ne vid personne. On dit qu'il receut let-
tres du Roy qui luy mandoit qu'il luy avoit fait un
très-agréable service; qu'il le reconnoissoit ; qu'il
tinst ses trouppes ensemble, et qu'il les mist en gar-
nison en la ville de son gouvernement qu'il aviseroit.
Pendant son absence, Beauregard, son lieutenant à
Laon, avoit pris de l'argent dans les coffres et y
avoit mis au lieu des blancs de M. le Marquis de
Cœuvres.
Conférence remise au 15. MM. de Brissac, de
Villeroy, deThou, de Vie et de Pontchartrain y vont
pour le Roy.
MM. le Prince , du Mayne, de Longueville, de
Buillon, de Sully, de la Trémoille, de Rohan, de
Soubise, de Caudale, de Tingry, de Thianges, dé-
putez de l'Assemblée de Nismes, y estoyent. (Des
Bordes-Mercier avoit sa voix dans le Conseil des
Princes.)
M"*' la Princesse douairière de Condé*. M™' de
* Cliarlotte Catherine de la Trémoille, veuve de Henri de Bourbon,
!•' du nom, prince de Condé, morte en 1629.
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D'AHNAtîLD D*ANDILLT. 141
Longueville, M"* de Rohan la douairi^ * et M"' de Fetner mf
Rohan la fille * y estoyent aussi.
M. l'Ambassadeur d'Angleterre Edmond *, M. le
Comte de Soissons, Madame sa mère, M, de Nevers
et M"** de la Trémoille (qui s'est toujours très-bien
conduite en toutes ces affaires-cy, et mesme a esté
remerciée par le Parlement de Rennes) y assis-
toyent *.
Monsieur le Prince dit qu'avant qu'entrer en Con-
férence, il demandoit deux choses, l'une, que M. de
Vendosme fustreceuâ la Conférence, et l'autre, que
la trêve fust prolongée pour tout le mois de mars ;
autrement, qu'il vouloit rompre. Sur cela, grande
contestation.
On envoyé vers le Roy. Enfin, M. de Vendosme
est receu à venir à la Conférence, et la prolongation
de la trêve accordée jusques au quinze mars. Con-
venu que Monsieur le Prince fera office envers
^ Catherine de Parthenay, dame de Soubize, veuve de René II, vi-
comte de Rohan, depais 1586, morte en 1631.
2 Marguerite de Béthune, fille du grand Sully, mariée en 1605 au
duc de Rohan, morte en 1660.
' Sir Thomas Edmondes, habile diplomate, fut chargé de négocia-
tions importantes et fut plusieurs fois envoyé comme ambassadeur en
France. Il se fit aussi remarquer au Parlement pendant le règne de
Charles I*', et mourut en 1639. On a publié sous le titre de Vue histo-
rique des négociations entre les Cours d'Angleterre^ de France et de
Bruxelles de 1592 à 1617, des extraits de douze volumes in-folio de sa
correspondance et de ses papiers. (Foy., dans la Biographie Michaud,
Tarticle de Suard sur ce personnage.)
* Voy, Mère, fr.^ t iv, p. 43. M. de Tingry est M. de Luxembourg,
duc de Pîney, prince de Tingry. Voy. aussi Fontenay-Mareuil, p. 331 ;
Pontchartrain, p. 134.
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142 JO0HNAL inédit'
Jmwtkr m$, M. de Vendosme pour le faire désarmer, au moins
pour la plus grande partie, et que ledit sieur de
Vendosine retirera toutes ses forces dé Bretagne,
et les pourra mettre au Mayne,. Aitjou, Perche et
Normandie ; que les contributiona seront réglées, etc.
La Conférence se comni^ce. Les députez du Boy
estoyent ceux qui sont ncnmnés ey^easus, et les dé^
putez de Monsieur le Prince estoyent
Environ le 16. Moct de Uontatte, juif, médecin
de la Reyne^m^re. Mort de M. Fleurance, précep*
teur du Roy.
Mars. 1". La trêve estant expirée à minuit, et la pro-
longation n'estant point publiée en Brie, M. de Vitry
ayant assemblé trois cens cinquante cuirassiers (dont
il y en avoit deux cens cinquante gentilshommes de
Brie) , trois cens carabins et cinq cens hommes de
pied des garnisons de Saint-Denis».*.. La Ferté-Mi-
Ion, etc. charge, près de Chasteau-Thierry , un
nommé Novion (qui est celuy qui a pris M. de
Forges et Grangemenant ) , lequel avoit avec luy
trois cens chevaux, dont il y en avoit quatre-vingt
des gendarmes de M. de Luxembourg, les met en
fuite, «n tue quinze, en prend prfeonniers cinquante
ou soixante. Les soldats gagnèrent cent vingt che-
vaux, des armes et de Targent que ces méchans
avoyent exigé du peuple. Novion se sauva à la fuite.
A dix heures du matin, la trêve fut agnifiée par un
trompette à M. de Vitry, lequel renvoya les prison-
niers.
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d'arnauld d'andilly. 143
2. Les affaires estant en fort bons terme» à la «•» <«•.
Conférence, M. de Yendosme y arrive, lequel avec
les offres qu'il leur fit, s'efforça de porter les affaires
à la guerre» et diangea toute la face des affaires.
Mais une visite de quatre heures que Monsieur le
Prince fit chez M. de Villeroy, remit toutes choses
en pareil train qu'auparavant On tient que Mon-
sieur le Prince, M. du Mayne, M. de Buillon sont
portez à la paix, et le reste à la guerre» principale-^
ment ceux de la Religion.
â. W^ la Maréchale d'Ancre part de la Cour
avec ses enfans et arrive à Paris le lundy 7. On tient
qu'elle venoît pour faire opiniastrer son mary à ne
point quitta ta citadelle d'Amies, pour estre rasée.
Elle manda son mary, qui ne vint pdnt, s'excussmt
mif un mal de goi^. Elle se logea dans le Louvre^
e^ qui fut trouvé fort étrange^ et fut trois ou quatro
jours sans vouloir voir pre8<îue peraoone.
Les a&ireg de la Conférenoe eôtant m zBset
mauvais twmes. Monsieur te Prince y entra, ce
qu'il n'avoit pomt fait auparavant, et en trois séances,,
avança plus le traitté que l'on B'aîa* fait en troifr
mws. La trêve prolongée jusqu'au 35 mars.
7. MM- de Nevers, de. Brissac^ Villeroy et Pont-
çhartraîn arrivent à Tours r ayant laissé MM. de
Thou et de Vie. Au commencement de ce mois,
M. de Guise témoigna à la Reyne qu*il estoît très-
mal content de ce qu'elle tenoit des Conseils secrets ;
et l'on disoît le 2 que te Roy luy avoit commandé de
se tenir prest pour se mestre en campagne le dixième.
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1&4 JOURNAL INIÉDIT
*««. 13. MM. de Nevers, de Brissac et de Pontchar-
train retournent à la Conférence chargez des volontés
du Roy.
16. M. le Marquis de Cœuvres, Lieutenant-gé-
néral au gouvernement de l'Isle de France (qui du-
rant ces derniers mouvemens avoit exempté Crespy
de garnison et de passage de gens de guerre ) ap-
prochant de Crespy avec quelques gens, les habitans
envoyèrent quatre d'entr'eux luy faire toutes sortes
de complimens, et mesme luy offrir d'entrer dans la
ville. A quoy il leur répondit que, puisqu'ils se met-
toyent en ce devoir, il oublioit la faute qu'ils avoyent
faite de luy témoigner cy-devant qu'ils ne désiroyent
pas qu'il entrast dans leur ville, lorsqu'il alla trouver
M. de Vendosme. Et que puisque ainsi estoit, il pas-
seroit dans Crespy avec quelques uns des siens. Sur
cela, ils le prièrent de ne vouloir point entrer dans
leur ville , à cause que quelques uns des habitans
pourroyent entrer en appréhension. Sur quoy il se
mit en colère, retint les quatre députez prisonniers ,
et s'en alla loger avec ses trouppes, dans le faubourg
de Crespy, et ainsi, avec cent vingt chevaux-légers
qu'il avoit, et cinquante ou soixante carabins, as-
siégea les habitans. Le 18, nouvelles de cela arrivent
à Paris. Messieurs du Conseil envoyentM. Déagent*,
^ Gaischard Déageant, recommandé à M. de Luynes par Ârnauld
d'Andilly, fut d'abord commis de Barbin, puis secrétaire du roi et
intendant des finances. H obtint une grande faveur et joua, pendant
quelque temps, un rôle assez considérable. Disgracié, il fut longtemps
enfermé à la Bastille, obtint sa liberté et fut relégué dans le Dauphiné,
sa province, avec la charge de premier président de la chambre des
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d'arnauld d'andilly. 145
secrétaire du Roy, vers M. le Marquis de Cœuvres Mmnm:
et vers les habitans, avec lettres de créance. Le 19,
M. Déagent estant arrivé, trouva que Ton tiroit de
part et d'autre ; que les habitans avoyent fait une
sortie en nombre de vingt-cinq, avoyent perdu un des
leurs, et tué deux de M. le Marquis de Cœuvres ;
que depuis, il y avoit eu encore deux des habitans
tuez, et quelques-uns de M. de Cœuvres blessez ; et
que M. le Marquis de Cœuvres faisoit provision de
pétars, échelles, mantelets, instrumens de sappe, et
autres choses, pour forcer la ville ; qu'il avoit envoyé
quérir deux cens hommes de pied à Laon , d'où il
menaçoit de faire venir du canon. M, Déagent, après
avoir représenté tout ce qui se pouvoit au dit Mar-
quis , sur ce sujet , et luy avoir ouvert plusieurs ex-
pédions, enfin, il se ferma à un , qui estoit que
Messieurs du Conseil qui estoyent à Paris, luy en-
voyeroyent tel nombre de gens de guerre qu'ils avi-
seroyent, avec lesquels il entreroit, seuldesatrouppe,
pourvu que l'on baillast aussi un prévost , pour faire
prendre trois ou quatre des habitans, les plus mutins,
qu'il nommeroit. M. Déagent tâcha de faire en sorte
d'amener les habitans à cela (sans leur parler tou-
tefois du prévost), mais il n'en put tirer autre chose,
comptes de Grenoble, qu'il exerça jusqu'à sa mort arrivée en 1626.
Déageant a laissé de courts Mémoires adressés au cardinal de Riche-
lieu sur quelques événements de sou temps. Cet ouvrage, publié en
1668, n'offre qu'un médiocre intérêt, mais il est bon à consulter, prin-
cipalement sur la mort du maréchal d'Ancre, événement auquel
Déageant prit une part plus importante qu'honorable. Arnauld d'An-
dilly s'oxpliquc longuement sur ce personnage dans se s Mémoires.
10
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Ill6 JOURNiL INÉDIT
sinon qu'ils iroyent porter les clefs des portes audit
sieur marquis, et luy faire toutes les soumissions qu'il
sçauroit désirer, pourveu que ni luy ni aucun des
siens n'entrassent dans la ville. Ainsi, M. Déagent
revient le lundy 21, On prend quatre résolutions au
Conseil : la première , de renvoyer le lendemain de
grand matin M. Déagent avec nouvelles lestres de
créance ; la seconde, d'envoyer M. de Vilaine à la
Cour, pour rapporter lestres du Roy à M. de Cœuvres,
portant qu'il face retirer promptement ses trouppes
de devant Crespy, et qu'il rende les quatre prison-
niers qu'il tient , et que l'on luy fera justice de ceux
des habitans de Crespy qui ont manqué à leur devoir
envers luy ; la troisième , de faire donner arrest au
Parlement portant qu'il sera envoyé un conseiller de
la Cour , sur les lieux , pour informer contre ceux
des habitans qui peuvent avoir failly au respect qu'ils
luy doivent , et cependant enjoint à luy de retirer
ses trouppes ; la quatrième, de faire avancer M. de
Ville-Gomblin en diligence avec sa compagnie (qui
est aux faubourgs de Manse), vers Creil, pour de là,
avec des compagnies de Saint-Denis, de la Ferté-
Milon et autres, s'aller jester dans Crespy, s'il en
estoit besoin. Tout fut exécuté , excepté qu'à cause
qu'il estoit le lendemain mardy procession générale,
on ne donna point d'arrest au Parlement. Mais Mon-
sieur le Premier Président écrivit à M. le Marquis
de Cœuvres, et Monsieur le Procureur gééral aussi.
Messieurs les Prévost des marchans et Eschevins
allèrent ledit jour lundy, trouver M*"' la Maréchale
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D^ARNAULD D*ANPILLY. 147
de Balagny \ gœur de M. le Marquis de Cœuvres, et iu« m$.
luy dirent que Paris estoit en telle rumeur de ceste
affaire que si son frère ne quittoit ce siège, il luy en
pourroit arriver quelque chose qui luy apporteroit
du déplaisir. Le 22, M. Déagent part le matin, comme
il avoit esté avisé. M. le Vicomte de Sardiny *, in-
time amy de M. de Cœuvres part aussi en poste, à
la prière de Messieurs du Conseil, avec lettres.de
créance audit sieur Marquis. Les lettres portoyent
que les habitans avoyent grandement failly, et qu'ils
méritoyent d'estre punis, mais que ce n' estoit pas
par cette voye qu'il les faloit chastier. C'estoit trop
accuser ces pauvres habitans , veu que leur faute
estoit fort excusable ; mais il le faloit faire ainsi pour
contenter ledit aeur Marquis qui se servoit de cette
lettre pour montrer à ses amis (ainsi que l'événe-
ment le fit connoistre, car il témoigna à M. Déagent
en estre très-satisfait, et mesme le pria de la mon-
trer aux habitans ; et au contraire, estre très-mal
content des lettres de Monsieur le Premier Président
et du Prévost des marchans). MM. de Sardiny et
Déagent, qui arrivèrent en mesme temps à Crespy,
trouvèrent que par l'entremise de MM. de la Borde
et de Billeraont, M. le Marquis de Cœuvres avoit ca-
pitulé avec les habitans, à condition qu'ils luy bail-
* Diane d'Estrées, sœur de Gabrielle d'Estrées et du marquis de
Cœuvres, veuve depuis 1603 de Jean de Montluc, seigneur de Balagny,
maréchal de France.
* Scipion Sardini, noble Lucquois, vicomte de Buzancy , baron de
Ghaumont-sur-Loire? {Foy. Bayle sur le mot Limeuil.)
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148 JOURNAL INÉDlt
Mars 1618. leroyent 1500 écus ; qu'il entreroit avec dix gen-
tilshommes et quinze de ses gardes ; que les portes
de la ville seroyent gardées par soixante mousque-
taires de la garnison de la Ferté-Milon, qui sont en-
tièrement pour le service du Roy ; que les habitans
luy feroyent des excuses ; et qu'ils ne paroistroyent
point armez ( toutefois ils se tinrent armés par
trouppes dans des maisons) ; qu'il iroit à la messe ,
feroit un tour par la ville, et puis sortiroit. Cela fut
exécuté le 23 au matin , nonobstant qu'il y eust eu
grande contestation entre les habitans, pour ce que
la populace ne vouloit point tenir ce que les princi-
paux avoyent fait, ni bailler d'argent. M. le Marquis
avoit dessein de les forcer. Il avoit fait venir cent
cinquante hommes de pied, et avoit mesme fait sol-
liciter la garnison de Soissons, et en cas, il se fust
précipité et déclaré pour Monsieur le Prince. Et ce
qui le fit résoudre à la capitulation , fut une lettre
que M"*' de Balagny, par l'avis de M. Déagent, luy
envoya toute la nuit, le 21, par laquelle elle luy man-
doit que s'il s'y opiniastroit, on luy feroit lever hon-
teusement le siège par force, comme on eust fait.
M. Déagent, le 26, va à la Cour, à la prière de M. le
marquis de Cœuvres , et requis par Messieurs du
Conseil pour justifier l'action dudit sieur Marquis.
Trêve continuée jusques à Pasques.
Tartas pris de nuit, par surprise, par M. de Gram-
mont et démantelé*.
* Voy, Merc, fr,, t. iv, p. 76.
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d'arnauld d'andilly. 1/|9
22. M. de Pontchartain arrive de Loudun à la ««» iw*.
Cour, touchant quelques points en difficulté. Retourne
le vendredy 25. Aussitost , Monsieur le Prince en-
voya lesdits articles à la Rochelle, en l'assemblée
de ceux de la Religion qui Tavoyent là transportée
de Nismes.
26. M. de Manicamp * , gouverneur de la Fère pour
M. de Vendosme, ayant eu quelque huit jours aupa-
ravant commandement sur commandement de M. de
Vendosme, enfin, le vendredy 25, fit entrer la nuit
dans la citadelle deux cens hommes des garnisons
de Messieurs les Princes. Le lendemain, comme le
lieutenant de M. de la Serre ^ estoit allé hors la ville
en dévotion au mont du Calvaire, et que ses enfants
eurent mené à la chasse le lieutenant de M. de Vil-
legaignon, il fit sortir par force les soldats des dites
deux compagnies , lesquelles ne dévoient estre que
de cinquante hommes chacune. M. le Marquis de
Cœuvres, ayant sceu cela à quatre heures du soir à
Paris le lendemain dimanche 27, partit à l'heure
raesme pour aller à la Fère.
27. M. le Maréchal d'Ancre arrive à Paris, loge
en sa maison proche le Louvre, dit à tout le monde
qu'il ne tiendroit point à la citadelle d'Amiens que
la paix ne se fist, et qu'il estoit tant obligé au Roy,
* Achille ou Philippe de Longueval, seigneur de Manicamp, gouver-
neur de Colmar et de la Fère.
* Jean-Jacques de Montesquieu, seigneur de la Serre, connu sous
le nom de capitaine de la Serre, capitaine puis lieutenant-colonel du
régiment de Vaubecourt?
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150 JOURNAL INÉDIT
Mars 1616. à la Reyne et à la France, qu'il ballleroit non seu-*
lement ses biens, mais sa vie, etc.. *.
28. M. le Maréchal d'Ancre fait mettre à la Bas-
tille le Marquis de Bonnivet, qui avoit esté prison-
nier à Calais, longtemps auparavant, pour avoir
esté en Angleterre pour Monsieur le Prince contre
le service du Roy ^.
29 ou 30. MM. de Chevry et de Flexelles ' partis
pour aller à Loudun. On dit que c'estoit pour por-
ter de l'argent afin de licencier les trouppes. Retour-
nez à la Cour le On dit que la Reyne fut fort
en colère contre M. de Villeroy de ce qu'au lieu de
traitter le point de Picardie le premier, il l' avoit ré-
servé pour le dernier. Cet article de la citadelle
d'Amiens a tenu la paix fort longtemps en incerti-
tude, car M. de Longueville s'opiniastroit à la faire
raser ou à l'ester au moins au Maréchal d'Ancre ; et
la Reyne luy offroit le gouvernement de Normandie
avec le chasteau de Caen, Dieppe et le Pont de
l'Arche; ce que M"* de Longueville sa mère, Mon-
sieur le Prince, M. du Mayne et M. de Buillon luy
conseilloyent d'accepter; mais il ne le leur vouloit
point accorder, disant que pour l'amour d'eux, il
quitteroit tout ce qui ne regardoit que son bien et
mesme sa vie; mais qu'il n'y avoit rien au monde
* Voy. Merc, /V., t. iv, p. 73, îa lettre du maréchal d'Ancre à la
reine-mère au sujet de la citadelle d*Amiens que les rebelles voulaient
faire raser.
' Voy, Merc. /V., t. iv, p. 73.
* Le sieur de Flesselles, secrétaire du conseil.
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d'arnauld d'andilly. 151
qui luy pût faire faire chose contre son honneur ainsi Mars ish.
qu'estoit cela , veû qu'il y alloit de la paroM qu'il
avoit donnée aux Picards. On dit qu'il avoit une fois
demandé que l'on mist dans ladite citadelle ou M. de
la Curée ou M. de Montigny * ou M. de Praslin. De-
puis, on dit que le Roy y vouloit mettre M. de Luynes;
ce qu'on dit que M. de Longueville consentit. Et que
sur cela, M. du Mayne répondit : Je pense que vous
estes fou d'aymer mieux le simple gouvernement de
Picardie que la Normandie avec les places que l'on
vous y offre. A quoy M. de Longueville ayant répli-
qué qu'il estoit fort homme de bien, M. du Mayne
répondit : Je ne doute point que vous ne soyez fort
homme de bien, et ce que j'en ay dit n'a nullement
esté pour vous offencer, mais pour ce que j'affectionne
vostre bien plus que vous-mesme. Et ainsi cela se
passa. M. de Buillon et Monsieur le Prince témoigné-
rent aussi à M. de Longueville, improuver extrême-
ment le conseil qu'il prenoit sur ce sujet. On dit que
M. du Mayne fut dix jours sans voir M. et M"* de Lon-
gueville. Je ne sçay si ce fut devant ou après cecy ^
* François de la Grange, seigneur de Montigny, gentilhomme de la
Chambre, capitaine des gardes sous Henri lU, gouverneur du Berry,
mestre de camp général de la cavalerie légère, se signala à la bataille
de Centras en 1587, où il fut fait prisonnier par le roi de Navarre,
servit au siège de Rouen en 1592, fut aux combats d'Aumale et de
Fontaine-Française en 1595, au siège d'Amiens en 1597, gouverneur de
Paris et de Metz en 1603, maréchal de camp dans l'armée du duc de
Guise en 1615, maréchal de France en 1616, mort en 1617. {Foy, P. An-
selme, t. VII, p. 624.)
* Voy. Merc, ft,^ t. iv, p. 55, une longue remontrance adressée au
roi pour le prier de faire raser la citadelle d'Amiens.
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152 JOURNAL INÉDIT
Le chasteau de Lombez, en Albigeois, surpris par
le vicomte de Panât, huguenot. La ville estoit tenue
par ceux de la Religion et le chasteau par le Roy.
On a dit depuis que ce vicomte n'estoit entré que
dans la ville, laquelle est huguenotte.
M. le Marquis de la Vieuville * achète de M. de
Plainville soixante-quatorze mil ecus la charge de
capitaine des gardes. Il a dispute avec Cornillan.
30. Mort de M. Dollé, à quatre heures du matin.
Il a voit esté malade quatorze jours. Lorsqu'il tomba
malade, la Reyne se confioit plus en luy des affaires
d' Estât qu'en nul autre. Il estoit fort bien avec Mon-
sieur le Prince, lequel lui avoit fait dire par l'abbé
d'Aumale, qu'il s'assurast qu'il ne luy vouloit aucun
mal, et qu'il estoit très-marry de ce qu'il avoit esté
mis hors le manifeste ; mais que M. de Buillon l'a-
voit voulu absolument. On dit qu'assurément ledit
sieur Dollé estoit au plus haut point de sa faveur et
de ses espérances. Il se jugea mort le second jour de
sa maladie, et fit son bonjour. II a laissé huit enfans.
— J'ay ouy la veufve se pleindre à M. Arnaud de ce
que nul autre de Messieurs du Conseil ne l' avoit visi-
tée que M. de Maupeou, et nul n'y avoit envoyé que
* Charles, V du nom, marquis puis duc de la Vieuville, premier ca-
pitaine des gardes du corps en 1616, grand fauconnier de France après
son père mort en 1612, lieutenant^général en Champagne, surintendant
des Hnances en 1623 ; disgracié sous Richelieu, il sortit de France et
fut condamné par contumace; rentré en France après la mort de
Louis XIII, il fut rétabli dans toutes ses charges et dignités en 16^3;
il fut de nouveau surintendant des finances sous Mazarin ; créé duc et
pair en 1651, il mourut en 1653. (Foy. P. Anselme, t. viii, p. 761.)
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d'arna^uld d'aindilly. 155
Monsieur le Chancelier et M. le Président Jeannin *. »i«» *«••
La Reyne permit à la veufve de vendre l'office de
son Procureur Général. Elle en traitte à six rail ecus
avec M. de Bercy -Malon ^ ; mais le Maréchal et la
Maréchale d'Ancré ne l'eurent agréable.
2. M. le Maréchal d'Ancre voulant aller en sa Avrii.
maison du faubourg Saint-Germain, accompagné de
quinze ou vingt gentilshommes, la sentinelle de la
porte de Bussy les arresta. Sur cela, ils dirent que
c'estoit M. le Maréchal d'Ancre, et dit-on, quelqu'un
d'eux ou le cocher dit que c'estoyent de beaux ba-
daux. Sur quoy la sentinelle cria aux armes, et un
cordonnier nonmié Picart, sergent de la compagnie,
se trouva là. M. le Maréchal d'Ancre, voyant le peu-
ple qui s'émouvoit, se retira dans l'hostel de Lyon.
M. d'Espernon, estant en Limosin, fit charger
quatre-vingt cuirassiers, qui conduisoyent l'attirail
de deux canons, que M. de Buillon vouloit mettre
à Turenne. Il y en eut trente de tuez. Depuis, il fit
pendre, à deux fois, quatorze soldats qui levoyent la
taille, et n'avoyent point de commission expresse de
Monsieur le Prince.
Mort de M. de Beaumont', fils de Monsieur le
* Voy, Pontchartrain, p, 140.
2 Claude Malon, seigneur de Bercy, maître des Requêtes, président
au grand Conseil?
s Christophe de Harlay, comte de Beaumont, lieutenant-général au
gouvernement d'Orléans, bailly du Palais, ambassadeur en Angleterre
de 1602 à 1607, mort en 1616,
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15/i JOURNAL II^ÉDIT
Avril i6ie. Premier Président de Harlay ', de fièvre de pourpre.
Ses charges de bailly du Palais de Paris et d*Orléans
furent conservées à son fils âgé de neuf ans *, en
vertu d'un brevet. Il est mort endetté de deux cent
mil écus.
M. de Béthune% frère de M. de Sully, estant à sa
maison, à Celles en Berry, mandé par la Reynepour
aller à Turin, Milan et Venise touchant les différeiis
émeus es ditâ pays. — Nota : défaveur à M. de Ram-
bouillet* qui avoit traitté cette affaire Tannée der-
nière.
8. Monsieur vint loger au Louvre. On remarque
que jamais Prince du sang n'y avoit logé en l'ab-
sence du Roy. On dit que la Maréchale d'Ancre le fit
faire, afin d'estre gardée par ses gdrdes.
9. MM. de Vîlleroy, de Nevers, de Brissac et
^ Achille de Harlay, comte de Beaumont, né en 1536, conseiller an
Parlement de Paris en 1557, président à mortier et conseiller d'Etat
en 1572 , premier président après la mort de Christophe de Thou, son
beau-père, en 1582 ; il se démit en 1611 en faveur de Nicolas de Ver-
dun, et mourut en 1616.
' Achille de Harlay, II* du nora^ comte de Beaumont, conseiller au
Parlement et maître des Requêtes en 1635, procureur général en 1661,
mort en 1671.
s Philippe de Béthune, comte de Selles, conseiller d'Etat, ambassa-
deur en Ecosse en 1599, à Rome en 1601, gouverneur du duc d'Or-
léans, ambassadeur en Italie en 1616, en Allemagne en 1624, en Italie
en 1629, mort en 1649.
^ Charles d'Angennes, marquis de Rambouillet, vidaroe et sénéchal
du Mans, capitaine des gentilshommes de la maison du Roi, eonseiUer
d'État et colonel général de l'infanterie italienne en 1620, maréchal
de camp, maître de la garde-robe, ambassadeur en PiénK)nt et en
Espagne en 1627, mort en 1652. Sa femme, Catherine de Vivonne, allé
du marquis de Pisani, a immortalisé le nom de Rambouillet.
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d'arnauld d*andilly. 155
de Pontchartrain arrivent de Loudun à Tours avec Anii me.
assurance de la paix. Et arrivèrent aussi M. et
M"* la comtesse de Soissons.
En mesme temps qu'ils estoyent partis. Monsieur
le Prince avoit envoyé M. de Sully à la Rochelle,
pour dire à l'assemblée de ceux de la Religion, qu'il
les prioit de trouver bon ce que le Roy leur accor-
doit, qui estoit très-juste, sinon qu'il ne* laisseroit
pas de faire la paix.
10. A huit heures du soir, M. le Maréchal d'An-
cre monte en carrosse avec trois ou quatre des sieiis,
va à la Bastille, dit à M. de Vauzay, qui y comman-
doit, qu'il vouloit sortir par là hors la ville; ce qu'il
fît, et trouva dehors plusieurs des siens qui estoyent
sortis deux à deux et trois à trois, en vertu de passe*
ports de Monsieur le Gouverneur et du Prévost de»
marchans et échevins. Et ainsi, les ayant joints, il alla
au rendez-vous qui estoit près la porte Saint-Denis,
où toutes ses trouppes l'attendoyent. Et là, prit lei
chemin d'Amiens. Il descendit avec une échelle dans
le fossé, et dit-on qu'il se mouilla les jambes.
On dit que sachant que la paix ne seroit signée
que dans huit ou dix jours, et craignant les placards
qui avoyent esté affichez contre luy dans les rues, il
se retira ainsi.
13. Trêve publiée et continuée jusques au 25.
M. Desmarests * venu à Paris* On dit que c' estoit
* Philippe Horault, seigneur du Marais, tué au siège des Ponts-de-
Cé en 1620.
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156 JOUKNAL INBDIT
Avril 1616. pour appeller M. de Vitry de la part du comte de la
Suze *, qui prétendoit que M. de Vitry avoit chargé
Novion au préjudice de la parole qu'il luy avoit
donnée, que lorsque la trêve expireroit, ils s'entr'a-
vertiroyent l'un l'autre, avant que de commettre au-
cun acte d'hostilité. M. de Vitry dit qu'il luy avoit
seulement mandé qu'il le tenoit si galant homme,
qu'il s'assuroit qu'il se trouveroit à la teste de ses
trouppes. M. Desmarests trouva que ce jour là M. de'
. Vitry avoit des gardes que l'on luy avoit envoyez de
la Cour, sur ce que l'on avoit sceu que M. le comte
de la Suze estoit party brusquement de Loudun. —
Ce prétendu dessein de M. Desmarests d' appeller
M. de Vitry fut trouvé tellement mauvais à Paris
que l'on vouloit l'arrester pour le mettre en la Bas-
tille; sur ce qu'on disoit qu'il n' estoit point tolérable
que luy qui estoit tenu pour serviteur du Roy, vint
appeller M. de Vitry, serviteur du Roy, pour un qui
portoit les armes contre le Roy.
Mort de M. de la Boulaye, beau-frère de M. Des-
marests. Son gouvernement de Fontenay-le-Comte
donné à son fils, avec pouvoir à M""* de la Boulaye ^
de commander durant son bas âge.
Courrier envoyé à la Cour, delà Rochelle, par
M. de Sully, lequel porta à Leurs Majestez toutes
^ Louis de Champagne, comte de la Suze, maréchal de camp des
années du Roi, mort en 1636. —Je crois qu'il s*agit plutôt ici du comte
de la Suze, parent de M. du Mayne.
> Marie Hurault, fille de François Hurault, seigneur de Chàteaupers,
maître des Requêtes, et de Rachel de Cochefllet.
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d'aunauld d*andilly. 157
sortes de bonnes nouvelles des députez de la Reli- ^vm lei*.
gion.
M. de Villeroy tombe malade d'une fièvre.
18. Le Roy part de Tours et vient coucher à
Amboise, à cause de la maladie qui estoit à Tours *.
On dit que MM. de Villeroy et Jeannin firent grand
ofEce vers la Reyne pour le Chancelier. On dit que
M. Ribier fut, par le commandement de la Maré-
chale, vers M. le président du Vair ^ en Provence,
pour luy promettre les sceaux.
19. La Reyne-mère part et va coucher à Blois.
On laisse Monsieur le Chancelier, M. le président
Jeannin, et autres de Messieurs du Conseil à Tours,
pour traitter les affaires ; et M. de Guise avoit sept
compagnies du régiment des gardes, qui entroyent
en garde devant son logis, comme estant lieutenant-
général des armées du Roy.
Monsieur le Prince fort malade à Loudun, d'une
grande fièvre continue avec pourpre et grands redou-
blemens. Le Roy luy envoya M. Petit, médecin, et
autres, avec plusieurs préservatifs ; et envoyoit tous
les jours des courriers savoir des nouvelles de sa
* yoy. Merc. fr., t. iv, p. 77.
* Guillaume du Vair, né en 1556, conseiller au Parlement de Paris
en 158/i, maître des Requêtes en 1594, premier président du Parle-
ment de Provence, garde des sceaux, du mois de mai au mois de no-
vembre 1616; remplacé par Mangot; de nouveau garde des sceaux, le
25 avril 1617, après l'assassinat du maréchal d'Ancre, évoque et comte
de Lisieux en 1618, mort en 1621. « n passa, dit le P. Anselme, pour
le plus intègre et le plus éloquent magistrat de son temps, et fut le
premier qui donna du lustre à la langue Françoise. » ( P. Anselme,
t- VI, p. 535.) — M. Ribier était neveu du président du Vair.
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158 * JOURNAL INIÈDIT
Avril i6i«. santé. On dit que Monsieur le Prince témoigna se
sentir fort obligé à Leurs Majestez du grand soin
qu'elles avpyent de luy *.
M'"*' la Comtesse de Soissons, voyant la maladie
de Monsieur le Prince> et craignant que s'il venoit à
faillir, on se saisit de Monsieur le Comte, l'envoya se
promener à Fontevraux, et de là à un chasteau fort
nommé Brézé, près de Saumur.
20, M. de Villeroy part pour aller à Loudun.
21. M"' de Pisieux^, après avoir fait la grosse,
neuf mois, enfm, se trouve n'estre point grosse.
25. Trêve continuée et publiée jusques au 5 may.
Monsieur le Chancelier arrive de Tours à Blois.
28. La Reyne commande à M. le Président
Jeannin d'aller dire à Monsieur le Chancelier qu'il
luy remist les sceaux entre les mains, pour les bailler
à celuy que le Roy aviseroit. (On disoit qu'ils avoyent
esté offerts à M. le Président Jeannin, et qu'il les avoit
refusez ; mais selon ce qui s'estoit passé touchant
M. du Vair, il n'y a point d'apparence qu'on les eqst
offerts à M. le Président Jeannin.) M» le Président
Jeannin pria la Reyne de les lui envoyer offrir par
un autre ; mais elle luy commanda absolument d'y
aller. Il y fut donc ; et ayant fait ce message à Mon-
* Voy. Merc, fr.^ t. iv, p. 77; Fontenay-Mareuil, p. 336; Pontchar-
train, p. 140.
« Charlotte d'Estampea-Valençay, fille de Jean d'Estampes, seigneur
de Valençay, mariée en 1615, qiorteen 1677. Elle était la seconde femme
de M. de Puisieux, qui avait épousé en premières noces Madeleine de
Neufville-Villepoy, fille de Charles de Neufville, marquis de Villeroy et
d*Alincourt, morte en 1613.
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d'aunauid d'andilly. 159
pieur le Chancelier, il demeura fort étonné; car AvruieK.
encore bien qu'il sceust bien qu'il estoit mal, néant-
moins il pe croioit pas que le coup fust si proche. 11
pria M. Iq Président Jeannin d'aller dire à la Reyne
qu'elle se faisoit tort d'en user ainsi ; que tout estoit à
elle; et qu'elle pourroit prendre les sceaux quand il
luy plairoit; mais qu'il la supplioit d'attendre encore
quelque temps, M. le Président Jeannin retourna. La
Reyne luy dit qu'elle vouloit qu'il les rendist. 11 vint
donc retrouver Monsieur le Chancelier, et luy dit :
que puisque c' estoit une chose nécessaire, il se faloit
résoudre à la faire courageusement, et qu'il luy con-
seilloit d'aller promptement trouver la Reyne, et luy
reporter les sceaux, pour ce que luy ne desiroit pas
de les recevoir. — L' après disnée, Monsieur le Chan-
celier y alla ; dit à la Reyne qu'il a voit sceu qu'elle
desiroit les sceaux ; qu'il les luy venoit rapporter,
et qu'elle pouvoit disposer, non-seplement de cela,
mais de tout ce qu'il avoit au monde. Elle luy répondit
qu'elle les recevoit, mais qu'il les gardast jusqu'à ce
que celuy à qui elle les vouloit bailler fust arrivé.
Le vendredy 29, il signa encore le bail des Gabelles
fait à Pâlot ^ — Le dimanche matin, il reporta les
sceaux au Roy. On dit qu'il le fit pleurer, en parlant
à luy, et que la Reyne pleura aussi.
Ce qui s'en suit est au vray, et comme je l'ay ouy
dire à M. Barbin, en présence de MM, Arnaud, in-
* Jean Pallot, secrétaire du Roi, contrôleur-général de Textraordi-
naire des guerres.
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160 JOURNAL INÉDIT
Avril leie. tendant, Vignier*, Tabbé de Sainte- Cornille, et
Déagent.
Monsieur le Chancelier estant demeuré à Tours,
M. . . . , maistre des Requestes, luy dit qu'il avoit avis
que M. du Vair venoit à la Cour ; sur quoy il demeura
extrêmement étonné. Quelques jours après, estant
au seau, il reçut une lettre de M. du Vair, qui com-
mençoit: Monseigneur, cinquante années de ser-
vice, etc. Lors, en se souriant, il montra le commen-
cement de cette lettre audit maistre des Requestes,
qui estoit présent, comme se voulant en effet moquer
de l'avis qu'il luy avoit donné. Le sujet de ceste lettre
estoit en faveur d'un conseiller d'Aix, qui avoit servy
cinquante ans, et demandoit permission de résigner
sa charge à son fils, et de l'exercer néantmoins,
tant qu'il vivroit. —Quelques jours après, un gentil-
homme de Provence luy ayant parlé d'une affaire,
il demanda ce qu'on disoit en son pays. Il répondit
qu'il n'y avoit rien de nouveau, sinon que M. du
Vair venoit, et qu'il l' avoit laissé à Avignon. Sur
cela, il demeura du tout estonné, se hasta de revenir
à Blois, et pria le Président Jeannin de voir la Reyne
sur ce sujet ; ce qu'il fit. Et luy ayant dit tout ce qu'il
pouvoit en faveur de Monsieur le Chancelier, elle luy
dit qu'il estoit vray qu'elle avoit mandé M. du Vair,
et que c' estoit une affaire à quoy il faloit que Mon-
sieur le Chancelier se résolust. M. le Président Jeannin
* Jacques Vignier, baron de Saint-Liébault et de Villemor, conseiller
d'Etat?
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d'arnadld d'andillf. 161
ayant rapporté cela à Monsieur le Chancelier, il le AvmiêM.
pria de retourner encore ; ce qu'il fit. Et ayant trouvé
la Reyne tellement fermée à ceste résolution qu'il
n'y avoit moyen quelconque de l'en démouvoir, il
vint redire à Monsieur le Chancelier qu'il n'y avoit
point d'espérance, et qu'il faloit se résoudre à faire
courageusement ce qu'il ne pouvoit éviter ; la Reyne
luy ayant mesme refusé entièrement de luy laisser les
sceaux jusques à Paris, comme il l'en avoit suppliée.
Ensuite Monsieur le Chancelier vint rapporter les
sceaux au Roy, en présence de la Reyne ; entra si
étonné et si tremblant qu'il fut contraint de s'ap-
puyer sur M"* Caterine* ; se mit à genoux, pleura,
et fit, en somme, toutes les actions qui peuvent témoi-
gner un extrême défaut de résolution. Voyant que
par toutes ses soumissions et prières, il ne pouvoit
obtenir, qu'on luy laissast un seul jour davantage les
sceaux de France, il supplia, avec une très-grande
instance, qu'au moins on luy laissast ceux de Na-
varre ; ce qui luy fut accordé.
28. Au dernier sceau que Monsieur le Chancelier
avoit tenu, on luy avoit présenté les lettres-patentes
pour le conseiller de Provence dont il est parlé cy-
dessus ; il les prit, les plia, les mit à part, et puis dit
tout haut : ce sont des lettres- patentes pour une
telle affaire dont M. du Vair m'a écrit, par plusieurs
fois, et que j'ay toujours refusées, d'autant que je
n'estime pas qu'elles se doivent accorder; mais
* Première femme de chambre de la reine.
11
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162 JOURNAL INÉDIT
AvHi i«i6. lorsque M. du Yair sera içy, il les pourra sceller
luy-mesme, s'il les trouve justes*.
May. % Monsieur le Chancelier part de Blois; alla
coucher à Orléans, chez M. Descures. Le jeudy 5, il
arriva à Bemy.
3. La paix signée à Loudun, à 9 heures du soir.
A trois heures après midy, tout avoit esté rompu,
sur ce que M. de Longueville disoit que le Roy luy
ayant donné le choix de la Normandie ou de la Picar-r
die, il optoit la Picardie, et estoit prest de signer.
M» de Villeroy répondit qu'il n' avoit point charge
d'accorder cela. Sur quoy Monsieur le Prince et
M. de Longueville répliquèrent qu'il les trompoit
donc, leur ayant toujours donné ceste assurance.
Et ensuite , il y eut grande division. Enfin, M"* la
Comtesse de Soissons, M. de Nevers et autres, firent
tant qu'ils firent signer Monsieur le Prince, et ensuite
MM. du Mayne et de Longueville, et puis les autres,
qui faisoyent fort les fâcheux^.
* Foy, Merc, fr,y t. iv, p. 78-70. hd Mercure à\i qu'on oe B^itpASce
qui se passa dans l'audience pendant laquelle le Chancelier rapporta
les sceaux. Le récit d'Âmauld d'Andilly, qui déclare tenir les détails
de cette scène de la bouche même de meml)res du Conseil présents à
cette audience, n*en est que plus intéressant. Voy,^ sur cette affaire,
Fontenay-Mareuil, p. 335 ; Richelieu, p. 291 ; Pontchartrain, p. 140.
Voy. aussi les M ém. de M. Mole, p. 110, où l'on trouye le discours pro-
noncé par le Chancelier devant les députés du Parlement lorsque les
sceaux luj furent retirés.
* Voy, Merc. fr,^ t. iv, p. 80, TÉdit de Loudun contenant les condi-
tions de la paix entre le Roi et les Princes. Cet acte important n'avait
pas moins de 5& articles, plus 15 articles particuliers. Voy. Fontenay-
Mareuil, p. 332 ; Brienne, p« 307 ; Rohaii, p. 133 ; Richelieu, p. S87 et
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d'arnaold d*andilly. 168
M. de Chevry fut envoyé à Loudun, pour donner ^ny m9.
ordre au licenciement des trouppes de Messieurs les
Princes, et M. de Maupeou travailla, à Tours, au
licenciement de celles du Roy^
M. de Vignoles fut envoyé à Xaintes vers M. d'Es-
pemon (très mal content) , afin de le faire désarmer;
à quoy il se résolut avec grande peine. Enfin, il en
donna parole. Quelque temps auparavant M. de Sou-
bise s'estoit avancé vers luy avec trouppes ; mais il
s'en revint, ayant appris que M. d'Espemon s'estoit
mis en estât de le bien recevoir, ayant assemblé,
compris les vieux régimens estant en garnison dans
son gouvernement , quatre mil hommes de pied et
cinq à six cens chevaux.
7. Leurs Majestez partent de Blois. Le }undy,
le Roy part d'Orléans et va coucher à Pithiviers, et
le lendemain à Fontainebleau ^.
8. M. le président du Vair arrive à Paris ; vid
Madame la Maréchale. Le jeudy, vid la Reyne, la-
quelle luy avoit escrit trois lettres pour le faire venir;
la première estoit en créance.
11. La Reyne régente arrive à Paris, descend à
et 291 ; Pontchartrain, p. 142. Fey. surtout le Journal de la Confé-
rence de Loudun par Pontchartrain, qui y joua un grand rôle. (Mém.
de Pontchartrain, éd. citée, p. 315.) Le récit en quelque sorte authen*
tique de Pontchartrain confirme entièrement, quant aux dates et aux
faits, celui d'Amauld d'Andilly.
* Voy, Merc. fr,^ t. iv, p. 80, l'ordonnance du roi pour la padfica-
tion des troubles et celle sur la retraite des gens de guerre; Voy,
aussi Ridielieu, p. 290.
* Voy, Merc, fr,^ t.iv, p. 83.
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164 JOURNAL INÉDIT
Mny 1816. Saint-VictoF ; de là, va à son bastiment *, et puis au
Louvre. Elle n'avoit point voulu d'entrée ; et néant-
moins, il fut quantité de monde et de peuple au de-
vant d'elle. Elle témoignoit un contentement extrême
de revenir à Paris. M. de Guise, M. de Schomberg*,
M. de Praslin et Monsieur le Grand-Prévost estoyent
avec elle.
Monsieur le Chancelier estoit encore à Bemy, lors-
que la Reyne arriva àParis; en quoy l'on trouve qu'il
fit très-grande faute. Il fut fort visité audit Bemy.
12. Monsieur le Chancelier vint coucher à Paris,
dans un carrosse fermé, et partit le lendemain matin
pour aller à Panfou. C'estoit pour prendre les papiers
de son cabinet 11 n'avoit osé entrer à Paris devant
Tarrivée de la Reyne, de crainte que l'on dist qu'il ne
fist quelque faction.
* Estant entrée dans Paris par la porte Saint-Victor , elle en sortit
par la porte Saint- Germain pour aller voir son superbe bastiment au
parc de Luxembourg, où elle fut recette par une musique de hauts-
bois que les ouvriers y avoient fait venir pour la resjouissance du retour
de Su Majesté, qui fut très aise de voir que ce bastiment n*avoit point
esté discontinué pour le trouble. Après qu'elle l*eut visité, elle rentra
dans Paris par la porte de Bussy et s*en alla au Louvre, les rues
estoient pleines d'une multitude de monde, joyeuse de son retour et
de la paix. » (Merc, fr,^ t. iv, p. 83.)
2 Henry de Schomberg, comte de Nanteuil, né en 1575, gouverneur
des Marches, maréchal de camp général des troupes allemandes au ser-
vice du Roi, lieutenant de Roi en Limosin en 1608, ambassadeur en
Allemagne en 1617, surintendant des finances en 1619, gouverneur de
Limosin, Saintonge et Angoumois en 1622, conseiller d'État, maréchal
de France en 1625, commanda au siège de la Rochelle en 1628, blessé
au pas de Suze en 1620, prit Pignerol en 1630, défit et fit prisonnier
le duc de Montmorency à Castelnaudar}* en 1632, gouverneur du Lan-
guedoc, mort en 1632.
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d'arnauld d*andilly. I(i5
16. Le Roy et la Reyne sa femme arrivent à ^««y i««.
Paris par le faubourg Saint-Jacques. M. de Chevry
(qui s'estoit fait nommer colonel général par Sa Ma-
jesté) alla au devant d'eux avec dix mil hommes dis-
posez en neuf bataillons, et avoit fait défences de
tirer, sur peine de la vie. Ils ne tirèrent point quand
le Roy les vid, mais lorsque la Reyne approcha
d'eux, ils firent une salve dont elle eut frayeur, et en
eut un très-grand vomissement toute la nuit. Sans
des gentilshommes qui arrestèrent les muUets de sa
litière, ils prenoyent l'épouvante. Leurs Majestez al-
lèrent droit à Nostre-Dame, où les Cours souveraines
les attendoyent en corps. Six muidsde vin que M. de
Chevry fit porter furent cause de tout ce désordre *.
Aussitost que le Roy fut dans le Louvre, il envoya
quérir M. du Vair, auquel il donna les sceaux. Le Roy
scella luy-mesme ses provisions \
47. M. le président Jeannin et Messieurs les In-
tendans des finances furent voir M. du Vair qui leur
parla très-honnestement.
Monsieur le Garde des sceaux donna au bonhomme
M. Combaut la charge de garde des rolles et acquits
des parties casuelles, dont il s'estoit défait entre les
mains de Renouard. Cette charge dépend du Chan-
celier ou Garde des sceaux qui entre en charge, le-
* Foy. Merc. fr,y t. iv, p. 84, le récit curieux de l'entrée solennelle
du roi et de la reine à Paris; Voy, Pontchartrain, p. 143, et Mém. de
Math. Mole, p. 111.
* Voy. Fontenay-Mareuil, p. 335 ; Brienne, p. 312; Richelieu, p. 295;
Pontchartrain, p. 144.
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166 JOURNAL INÉDIT
May 1616. quel la peut donner pour le temps qu'il est en charge.
18. Monsieur le Garde des sceaux scelle pour la
première fois ; parle fermement aux secrétaires ; leur
dit qu'il ne vouloit point qu'on luy présentast que des
lettres.de justice, et qu'il sauroit bien reconnoistre
ceux qui le voudroyent surprendre ; refuse infinies
mauvaises lettres.
20. MM. du Mayne, de Buillon et de la Tremoille
arrivent à Paris ; virent Leurs Majestez en mesme
temps, de qui ils furent bien reçus. Ils entrèrent en
carrosse dans Paris, suivant ce que le Roy leur avoit
mandé, sur ce qu'ils l'avoyent supplié de leur faire
savoir sa volonté sur ce sujet. M. de Buillon alla
loger chez M. de Laverdiii *, à la Place Royale, du-
quel il a acheté cent dix mil écus la terre de Negre-
pelisse que M. de Sully avoit marchandée ; ce qui
causa de la brouïUerie entre eux *.
21. M. de Brantés* revient d'un voyage que le
Roy luy avoit envoyé faire vers M; de Longueville.
25. M. Barbin est fait controlleur général des
* Henry de Beaumanoir, I*' du nom, marquis de Layardin, comte
dû Negrepelisse, gouverneur des comtés du Maine, du Perche et de
Laval, mort en 1633. Il était fils du maréchal de Lavardin mort
en 1614.
' Voy* Merc» fr»^ t iv, p. 87 et 148; Pontchartrain, p. 145.
'3 Léon d'Albert, seigneur de Brantes, chevalier des ordres en 1619,
capitaine lieutenant des deux cents chevau-légers de la garde, gouver-
neur de Blaye, duc de Luxembourg et de Piney, prince de Tingry et
pair de France en 1620, mort en 1630. Il était frère du duc de Luynes
et du duc de Chaulnes. Il devint duc de Luxembourg en 1620, par
son mariage avec Marguerite-Charlotte, fille et héritière de flenry de
Luxembourg, duc de Piney, prince de Tingry, mort en 1616. (P. An-
selme, t. IV, p. 274.)
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d'arnauld d'andilly. 167
finances, au lieu de M. le Président Jeannin (auquel »««y *"••
on donna la qualité de Surintendant) , et la charge
d'Intendant qu'avoit M. Dollé fut baillée à M. de
Ca3tille\ gendre de M. le Président Jeannin, auquel
on donna aussi douze mil écus.
J'ay ouy dire à M. Barbin que M"*' la Maréchale
d'Ancre l'affectionnoit avec une passion extrême, et
qu'il y avoit quatre ans qu'elle le pressoit sans cesse
de prendre le controUe général des finances, et que
l'on donnast à M. le Président Jeannin une charge
d'Intendant des finances que l'on demandoit pour son
gendre ; ce qu'il ne voulut point , afin qu'il ne fust
pas dit que l'on créast une charge d'intendant des
finances pour l'amour de luy ; mais que voyant
M. Dollé mort, alors ilreceut la faveur que luy faisoit
la Maréchale. Et Flexelles s' estant offert de parler à
M. le Président Jeannin, l'affaire fut incontinent con-
clue, comme il est dit cy-dessus. M. Barbin dit aussi
qu'en mesme temps qu'il estoit assuré à la Cour de
l'intendance de M. Dollé, le Maréchal d'Ancre..* ^
* Pierre de Castille, ambassadeur en Suisse, intendant puis contrô-
leur général des finances, avait épousé Charlotte Jeannin, fille du Pré-
sident.
2 H CepeDdant le maréchal et la maréchale d'Ancre avoient si bien
mis M. Barbin dans Tesprit de la reine-mère, que sur la fin de 1616
il n'exerçoit pas seulement la charge de surintendant des finances^
sous le nom de contrôleur général , mais étoit plus puissant que nul
autre dans les affaires. Il n'avoit point d*acquis ; mais c*étoit un
homme d'un très-grand sens et très-judicieux, qui avoit les mains
très-nettes et qui ne se prévenoit point ; ce qui est une qualité si rare
que je rai remarqué en peu de personnes. » (Mémoires d'Amauld
d'Andilly, p. 369.)
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. 168 JOURNAL INÉDIT
myim. M. Barbin marche devant les Intendans, lesquels
luy quittent, à cause de sa faveur ; car autrement ,
il n*avoit nul droit, et ne pouvoit prétendre rang que
suivant sa réception au Conseil d' Estât. Ainsi leur
raison pour quitter fut que la plus belle charge de
la Cour, c'est la faveur.
Juin. 1. M. Mareil du Drac, amené prisonnier par un
Prévost de Champagne, se sauve chez M. du Mayne.
Le Prévost et Archers le poursuivent avec pistollets,
sont repoussez par les gens de M. du Mayne, lequel
survient et empêche le désordre ; et se va pleindre
au Louvre de ce que le Prévost estoit ainsi entré en
armes dans son logis. Offre que l'on cherche par-
tout. On envoyé le Prévost en prison, pour n'avoir
pas seu garder son prisonnier; et l'on envoyé trois
Messieurs des Requestes et les Archers du Grand
Prévost pour informer chez M. du Mayne de la vérité
de l'affaire, et prendre M. de Mareil, s'il y estoit, et
l'amener au Fort-l'Evesque. 11 s' estoit sauvé sur un
cheval de M. du Mayne avec des gentilshommes de
M. du Mayne.
6. M. le Maréchal d'Ancre arrive à Paris.
Le Vidame de Normandie, autrement le Baron
d'Anneval, jeune homme de vingt-deux ans, qui
avoit eu une compagnie de chevaux légers sous le
Maréchal d'Ancre , fait appeler M. de Montbazon *.
< Hercule de Rohan, duc de Montbazon, pair et grand veneur de
France, gouverneur et lieutenant-général de la ville de Paris et de
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d'arnauld d'andillï. 169
La querelle vint sur ce que M. d' Anneval avoit levé Juin leu.
sa compagnie en Normandie dans le gouvernement
de M. de Montbazon sans l'en avertir, et que M. de
Montbazon estoit monté à cheval pour l'attraper.
M. de Montbazon voulant sortir pour s'aller battre,
est arresté, M. le Maréchal d'Ancre va chez M. d'An-
neval, et mande à M. de Montbazon qu'il y avoit
esté, non pour s'offrir à luy , mais pour le tanser
de la faute qu'il avoit faite de l'oser appeller, et
qu'il luy en feroit faire telle satisfaction qu'il vou-
droit.
M. de la Chastre * preste, entre les mains du Roy,
le serment de la charge de maréchal de France, à
luy accordée au lieu du gouvernement de Berry ^.
Monsieur le Garde des sceaux ayant refusé tout
haut au sceau un don controllé par M. Barbin,
M. Barbin témoigna en estre extrêmement offensé ;
mais on luy dit que tout ce qu'il pouvoit désirer dé
Monsieur le Garde des sceaux, estoit qu'il ne refusast
pas publiquement les expéditions controllées de luy
ou il trouveroit de la difficulté, mais qu'il les mist à
risle de France, mort en 165/Ii. La célèbre duchesse de Montbazon est
sa seconde femme, Marie d'Avaugour de Bretagne, fille de Claude de
Bretagne, comte de Vertus, et de Catherine Fouquet de la Varenne,
mariée en 1628, morte en 1657.
^ Louis de la Châtre, baron, de la Maisonfort capitaine de cent
hommes d'armes, gouverneur du Berry en 1 61 ^i, maréchal de France
en 1616, gouverneur du Maine, de Laval et du Perche, mort en 1630.
Il était fils de Claude de la Châtre, baron de Maisonfort, maréchal de
France, mort en 1614.
* yoy. Merc, fr.^ t. iv, p. 87; Fontenay-Mareuil, p. 336 ; Richelieu,
p. 304 ; Pontcbartrain, p. 143.
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170 JOURNAL INÉDIT
Juin i«ie. part ; et que ceux qui luy disoyent que Monsieur le
Garde des sceaux estoit obligé de sceller ce qu'il
controlloit, le flattoyent contre toute sorte de rai-
son, etc. On parla aussi à Monsieur le Garde des
sceaux, afin que pour chose qui ne dépend que de
quelque sorte de formalité , il se relachast à ne le
Vouloir aigrir^ attendu le préjudice que cela pourroit
apporter aux affaires du Roy et à son service, à cause
que ceux qui voudroyent brouiller, ne manqueroyent
pas de se servir du prétexte de la division qui seroit
entre ceux qui manient les affaires.
IS. Le sieur de Beauveau^ Lorrairi, fils d'un qui
avoit eu la teste tranchée aux Grans-jours de Poi-
tiers, vient à Paris avec des coins pour faire fausse
monnoye. 11 est pris par Défontis*, mis au Grand
Chastellet Le Roy baille un commandement, signé
de Loménie, à M. de Vitry, capitaine des Gardes,
pour l'aller tirer de prison» Le geollier refuse de
rendre le prisonnier. Enfin, M. de Vitry^ à l'heure
de minuit, avec des gens armez qu'il avoit, tire ledit
Beauveau de prison, lequel estoit condamnée avoir
la teste tranchée.
On avoit voulu faire sceller les lettres patentes à
Monsieur le Garde des sceaux, mais il les avoit refu-
sées. On pouvoit prendre un beaucoup meilleur expé-
dient : car le Roy pouvoit dire qu'il avoit appris que
le prisonnier avoit fait quelque entreprise contre son
Estât; que sur cela, il vouloit parler à luy. Et ainsi,
* Lieutenant-criminel.
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d'arnauld d'andilly, 171
se le faire amener. Et puis, en décharger luy-mesme
le Prévost, et en charger un capitaine de ses Gardes,
et le faire mener à la Bastille , d'où on l'eust tiré
puis après. Le Roy en a autrefois quasi usé de la
mesme sorte. Ce fut M. de Chanvallon *, qui au nom
du duc de Lorraine^ (car le sieur de Beauveau est
Lorrain) , fit cette poursuite. On dit que ce fut M. le
maréchal d'Ancre qui obtint sa grâce.
Le Parlement s'assemble. Résolu d'aller faire Re-
monstrances au Roy pour luy demander justice ; et
jusqu'à ce qu'elle leur eust esté faite , luy remettre
leurs charges.
14. Messieurs du Parlement, en nombre de
quatre-vingt ou cent, vont à pied, ^vec leurs bonnets .
quarrez, depuis le Palais jusqUes au Louvre. Là,
attendent fort tard que le Roy fust revenu. Monsieur
le Premier Président porta la parole fort bien et fort
courageusement, à ce que l'on dit. Enlr' autres
choses, il se pleignit fort de M. de Vitry, lequel estait
à costé du Roy. Le Roy répondit qu'il avoit com-
mandé à M. de Vitry de faire ce qu'il avoit fait, et que
Monsieur le Garde des sceaux leur diroit sa volonté
sur ce sujet. Après cela, Monsieur le Garde des sceaux
prit la parole, et repartit que le Roy ayant depuis
peu receu, en pareille occasion, d'un prince estran-
' Jacques de Harlay, seigneur de Champ vallon, grand écuyer du duc
d'AIençon, mestre de camp du régiment de ses gardes et de sa cavale-
rie légère, gouverneur de Sens, grand maître de Tartillerie pendant la
Ligue, chevalier du SaintrËsprit en 1602, chambelliui du duc de Lor-
raine et intendant de ses affaires en France, mort en 16S0.
2 Henri II dit le Bon, né en 1563, duc de Lorraine de 1608 à 162â.
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172 JOURNAL Ix>jÉDir
Juin 1618. ger, son voisin, lequel, en sa faveur, avoit de puis-
sance absolue sauvé un gentilhomme françois accusé
du mesme crime que celuy dont il s'agit, il n' avoit
pu luy refuser un semblable office ; que ce n'estoit
pas la première fois que Ton en avoit usé de pa-
reille sorte ; que le Roy avoit commandé à M. de
Vitry de tirer le prisonnier ; que pour le regard de
la violence, c'estoit chose qu'il n' avoit point enten-
due, et qu'il vouloit en estre éclaircy, pour s'en faire
raison à luy-mesme *.
16. Les lettres d'office de Monsieur le Garde
des sceaux furent rapportées par M. Courtin, doyen,
les chambres appellées. Il se trouva difficulté sur la
clause de préséance au Parlement. Monsieur le Rap-
porteur fut d'avis de l'entérinement pur et simple,
M. Pelletier, qui opina le second , ouvrit l'opinion
contraire. M. Maréchal suivit, et plusieurs autres.
M. de Grieux^ fut pour Monsieur le Garde des
sceaux, et après l'avoir extrêmement loué , dit qu'il
luy sembloit qu'il n'y avoit aucune difficulté en cette
clause, d'autant que personne n'y pouvoit avoir in-
térest que Monsieur le Premier Président , et qu'il
montroit bien n'y en avoir point, puisqu'il estoit de
l'assemblée pour y opiner ; qu'autrement, ce seroit
estre juge et partie. M. Fayet fut pour Monsieur le
1 yoy,^ sur cette affaire, Mém. de M. Mole, p. 117. Suivant le récit
de Mole, qui du reste est conforme à celui d*Amauld d'Andilly, il
s*aglssait du baron de Beauvoir, poursuivi pour crime de lèse-miû^té.
2 Conseiller au Parlement et Tun des seize colonels des bourgeois de
Paris.
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d'AÊNADLD t)'ANDlLLY. 173
Garde des sceaux , et dit entre autres choses, que 'wm ««»•.
jamais promotion n'avoit esté receue de tous les
gens de bien avec plus de contentement et de ré-
jouissance, etc. M. le Président Séguier opina du
bonnet et fut, avec tous ses aiiïis; contre Monsieur le
Garde des sceaux. Monsieur le Premier Président dit
qu'il n'estoit pas besoin de beaucoup opiner, puisque
l'affaire passoit de tant de voix; qu'il répondoit seu-
lement à ce que M. Fayet avoit dit : que jamais pro-
motion n'avoit esté plus agréable à tous les gens de
bien, et qu'il luy feroit voir des livres imprimez en
Aleman, Espagnol et Italien, par lesquels il connois-
troit qu'il y en avoit eu une autre, laquelle avoit esté
beaucoup plus agréable (entendant la sienne). M. de
Coigneux * avoit dit auparavant que puisque M. de
Grieux louoit tant la probité de Monsieur le Garde
des sceaux, et qu'il se fondôit en partie sur cela,
pour dire qu'il devoit présider au Parlement, il fau-
droit, par ce mesme argument, que le Prieur des
Chartreux , qui est un fort homme de bien, y vint
présider. Enfin , l'affaire passa de vingt-quatre voix
contre Monsieur le Garde des sceaux, lequel, le len-
demain, retira ses lettres d'entre les mains de
M. Courtin, rapporteur^.
18. La Reyne ayant résolu de mettre M. Man-
' Jacques, le Coigneux, seigneur de Bachaumont, conseiller au Par-
lement de Paris en 1611, président es Requêtes en 1616, conseiller
d*État et président en la Chambre des Comptes en 1619, chancelier de
Gaston, duc d'Orléans, président à mortier en 1630.
2 Foy, Mém. de M. Mole, p. 119 et suiv., les lettres-patentes dont il
s*agit.
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i7& JQOBBIÂL INEDIT
jiiiai<i«. got en la charge de M. de Pisieux, elle envoya
M. Barbin trouver M. de Villeroy à Gonflans pour
le luy dire et le prier d'instruire M. Mangot. M. de
Villeroy répoadit qu'il savoit le respect que l'on de-
voit au* Beyne^, et à cause d'elles, à ceux qui ve-
noyent de leur part ; et que s^ns cela, il luy eust
donné sujet d'avoir déplaisir de luy esfare venu porter
cette parole. Après quelques autres discours, et en^
tr' autres, qu'il y avoit cinquante-quatre ans qu'y
faisoit la charge, qu'il avoit encore assez de force et
de courage pour la faire Aussi bien que jamais ; que
c'estoit sa charge, que J'on ne luy pouvoit ester et
qu'il n'estoit nullement en humeur de se départir.
Il luy dit qu'il verroit la Reyne.
20. M. de Villeroy voit la Heyne, luy représente
coujrageasement toutes ses raisons. Après quelques
répliques, elle luy dit : Z/> voglio. A cela, il répliqua
re^ectueuseiment et fort fermement, et s'en alla chez
luy.
21. ]> lendemain. M, Barbin va chez le Prési-
dent Jeannin, et avec luy, chez M. fie Villeroy ; et 1$,
après plusieurs discours sur ce qui estoit de la
charge, M. de Villeroy se relâche à recevoir la ré-
compense. Mais sur cela, il s'éleva très-grande
difficulté, pour ce qu'il ne voubit passer la démis-
sion qu'on luy demandoit en faveur de M. Mangot,
qu'il ne vid l'argent chez luy, sans vouloir en
rien avoir affaire au Roy sur ce sujet ; et qu'il dit qu'il
demanderoit cinq cens mil livres de sa charge ; à
quoy on luy répondit qu'il ne l'avoit vendue que deux
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d'arnauld d'andilly. 175
cens rail livres à M. de Pisieux , et que Ton luy en ^^ *•*•.
bailleroit cette somme, sur laquelle il rendra à M. de
Pisieux les cent mil livres qu'il a receus de luy ;
les autres cent mil livres regardoyent Le mariage
de sa petite-fille. Depuis, M, Mangot en offrit trois
cens mil livres, et la Reyne dit que puisque M. de
Villeroy vouloit tant avoir de sa charge, il faloit
vendre celle de M. le Premier Président de Bor-
deaux *.
On dit que la connoiësance de M. Mangot avec le
Maréchal vient de ce que, quand on roua Magnas^ à
Fontainebleau en 16,., M. Mangot, qui estoit le Pré-
sident des Commissaires, ayant trouvé plusieurs let-
tres du duc de Savoye^ à Magnas et de Magnas au
duc de Savoye qui parloyent du Marquis d'Ancre et
de M. Dollé (avec lequel Magnas estoit ordinaire-
ment) , il les porta toutes à M. DoUé et au marquis
d'Ancre et n'en fit aucune mention dans le procès,
M. de Villeroy dit k la Beyne qu'il n'ayoit point
d'habitude avec M. Mangot, et que son humeur ne
pouvoit compatir avec la sienne ; qu'il avoit nourry
quinze ans M. de Pisieux, et qu'il l'assuroit qu'il
estoit fort homme de bien, et luy répondoit de ses ac-
tions passées et de celles à venir. La Reyne répliqua :
^ If. Mangot.
2 Magnas, accusé d'être un «spion du 4uc de Sayoie, avait été arrêté,
jugé et exécuté à Fontainebleau en mai 1^3. (Foy, Richelieu, éd. ci-
tée, t. XXI bia, p. 170, qui KQoàrm» 1» supposition rapportée par Ar-
nauld d'Andilly.)
> Charles-Emanuel, duc de Savoie, mort eo 1630.
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476 JOURNAL INÉDIT
Juin i«i«. Je ne me saurois servir du fils après avoir chassé le
père, et si je vous en demandois avis, vous ne me le
conseilleriez pas. M. de Villeroy dit : Au moins. Ma-
dame, si vous voulez que M. de Pisieux sorte, per-
mettez-moy de traitter avec quelques personnes dont
je vous puisse répondre, comme M. de Préaux *, ou
quelqu' autre. Elle répliqua : Je voy bien que c'est ;
vous y voulez nommer; il n*est pas raisonnable ; cela
appartient au Roy ^
On dit que le mécontentement de Messieurs du
Parlement, lorsque les lettres de M. le Garde des
sceaux y furent présentées, venoit de ce qu'il ne les
avoit point esté voir. Il ne le devoit faire ; car un
Garde des sceaux ne doit faire la cour à personne.
Quelques-uns dîsoyent qu'il devoit obtenir jussion,
et que la plupart de ceux qui avoyentesté contre luy,
y eussent obéy. D'autres dient qu'il faisoit mieux de
n'en point prendre et de témoigner qu'il méprisoit
leur refus; veu qu'aussi bien le mesme arrest ser-
^ Charles de l'Aubespine, né en 1580, abbé de Préaux, puis marquis
de Chàteauneuf, conseiller au parlement de Paris en 1603, ambassa-
deur en Hollande en 1609, puis à Bruxelles, chancelier des ordres on
1621, conseiller d*État, gouverneur de Touraine, ambassadeur en Alle-
magne, à Venise, en Angleterre en 1629 et 1630, garde des sceaux en
1630, présida au procès des maréchaux de Marillab et de Montmorency
en 1632 ; étant devenu suspect au cardinal do Richelieu fut disgracié
en 1633, arrêté et conduit prisonnier au château d*Angoulômc, où il
resta jusqu'en 1643 ; de nouveau garde des sceaux en 1650, remit les
sceaux à Mathieu MoIé en 1651 et mourut en 1653. Il était fils de
Guillaume de l'Aubespine, baron de Chftteauneuf, doyen des conseiUers
d'État, du vivant duquel il fut appelé M. de Préaux, du nom de son ab-
baye. (V. P. Anselme, t. vi, p. 358).
2 Voy, Pontchartrain, p. 1^9.
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d'arnadld d'andilly. 177
voit sur la vérification des autres points de la lettre. J"«» *•"•
19. Sur les cinq heures du soir le Picart, cor-
donnier, estant au faubourg Saint-Germain, en vue
de...., des palefreiyers de M. le Maréchal d'Ancre
(les uns disent cinq les autres huit), ayant bastons
et espées, le chargent à coups de baston. Il se jette
dans une maison ; ils en cassent les vitres et rompent
la porte ; il est contraint d'en sortir; ils le suivent à
coups de baston ; il s'enfuit dans une autre maison,
dont ils ne peuvent rompre la porte. Enfin, le peuple
s'assemblant, ils se retirèrent. Luy sort, prend une
halebarde, s'en va chez luy. Le peuple s'y amasse ;
un soldat parlant à l'avantage de M. le Maréchal
d'Ancre est bien battu. L'alarme en alla grande au
Louvre et à Saint-Germain où estoit le Roy. On di-
soit qu'ils estoyent quatre mil hommes en armes
qui vouloyent aller au Louvre demander justice. On
fit en diligence revenir les Suisses qui estoyent à
Saint-Germain. M. Mangot et M. le Prévost des
marchans furent faire écouler le peuple. Deux des
palefreniers qui avoyent fait le coup sont remis par
M. le Maréchal d'Ancre entre les mains de M. le Lieu-
tenant criminel, qui fut seulement d'avis de les ban-
nir pour trois ans. Le Procureur du Roy du Chastel-
let donna semblables conclusions ; mais six jeunes
conseillers, qui vinrent pour assister au jugement du
procès, allèrent avec quasy tous les autres, à la mort,
où il passa de beaucoup de voix. Ainsi ils furent con-
damnez par sentence à faire amende honnorable de-
vant l'Host^l de Ville; h estre pendus; et aupara-
12
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178 JOURNAL INEDIT
jbm wé. vant avoir la question ordinaire et extraordinaire *•
22. Résolu que M* de Longueville demeureroit
en Picardie, comme il y estoit auparavant; que
M. de Montbazon y prendroit Ja ville et citadelle
d'Amiens, et la Lieutenance du Roy, comme y avoit
le maréchal d'Ancre, auquel doivent estre Péronne,
Montdidier et Roye, et que ledit Maréchal prendroit
la Lieutenance de Normandie, avec Caen et le Pont-
de-r Arche, et cent mil ecus comptant. On dit qu'il
sera aussi remboursé des fortifications et avances par
luy faites dans la citadelle d'Amiens^*
26. M. le Comte d'Auvergne ' sort de la Bastille
où il avoit esté, à deux fois, près de quatorze ans.
M. de Montmorency estoit, quelques jours aupara-
vant^ revenu exprès de Languedoc, afin d'obtenir sa
* r#y. Merc. fr.^ t. iv, j>. 137. G« cordonnier Picart, sergent du
quartier de la rue de la Harpe, avait, comme on Ta vu plus haut, em-
poché le maréchal d'Ancre de sortir de Paris par la porte de Bussy,
«DUS prétexte qu'il n'avait pas de passeport C'est pour se venger de
cet affront que le maréchal fit infliger cette rude correction audit Picart.
Peut-être cependant les gens du maréchal agirent-ils de leur propm»
mouvement et pour leur propre compte ? Voy. aussi Richelieu, p. 300.
2 voy, Merc, fr,, t. iv, p. 88 ; Richelieu, p. 296 ; Pontchar train, p. 149 .
3 Charles de Valois, comte d'Auvergne, puis duc d'Angoulôme, fils
naturel de Charles £X et de Marie Touchet, né en 1573, grand prieur
de France en 1587, comte d'Auvergne en 1589, se signala à Arques
en 1581), à Ivry en 1590, à Fontaine-Française en 1595, accusé de cons-
piration et mis à la Bastille en 100/î, condamné à avoir la tête tran-
chée en 1605* peine commuée en prison perpétuelle, mis en liberté en
1616, réintégré dans ses charges et dignités, colonel général de la ca,
Valérie légère, duc d'Angoulôme et ambassadeur en Allemagne en 1650,
commandant au siège de la Rochelle, fit les guerres de Languedoc, de
Lorraine, d'Allemagne et de Flandres, et mourut en 1650. On a publié
ses Mémoires. {Voy. P. Anselme, t. i, p. 202, et son historiette, Talle-
mant des Réaux, avec le commentaire de M. t^aulin Paris.)
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D^ARNADLD D^ANDItLY. 179
délivrance. La Reyne l'avoit promise avant son JumMtf,
voyage de Bordeaux ; et M. de Montmorency ia trou-
vant aucunement refroidie, fit feu et flame et s'opi-
niastra de telle sorte qu'elle luy accorda ce qu'il
demandoit *. M. le Comte d'Auvergne, suivy de M. de
Vauzay, qui ne le quitta point jusqu'à ce qu'il l'eut
remis entre les mains du Boy, ne trouvant point la
Reyne au Louvre, alla jusques à Issy où il la re-
mercia. Après, il vid le Boy. — MM. de Guise, tous
(l'ois *, vinrent souper aveque luy à l'hostel de Mont-
morency et attendirent une grande heure avant qu'il
fust venu; luy témoignèrent beaucoup d'amitié, et à
M. de Montmorency, tout ce qui se peut au monde *•
Environ le 27. M"** la Princesse de Condé douai-
rière arrive* '
M. de Bochefort arrive aussi \
* Le comte d'Auvergne ayant épousé Charlotte de Montmorency,
fille (|n connétable, était le beau^frère au à\ic de Montmorency.
2 Le duc et le cardinal de Guise et le pripce de JoinviUe, depuis duc
de Chevreuse, tous trois fils du Balafré.
3 Le comte d'Auvergne était resté cette aeoonde fois onze ans et huk
mois à la Bastille ! Il fut réintégré dans sa charge de colonel de la ca-
valerie légère qu'avait eue à sa place le duc de Nevers. Le Mercure
fait à ce sujet la réflexion suivante : « Quel changement aux affaires du
temps ! de voir en liberté celuy qui estoit prisonnier et qui pensoit ja-
mais n'en sortir, commander trois sepmaines après les troupes du Roy,
et entendre la voix commune du peuple qui asseuroit qu'on avoit
mis sur la chambre où estoit ledit sieur Comte en la Bastille, ehamàre
à louer, n (Merc. fr,, t iv, p. 140.) Foy. aussi Fontenay-Mareuil, p. 336;
Brienne, p. 324; Richelieu, p. 295 ; Pontchartrain, p. 150.
A Voff. Merc. /h, t. iv,:p. 147. Ce gentilhomme en qui Monsieur le
Prince mettait toute sa confiance, était envoyé par lui vers le Roi à
l'occasion d'une difficulté survenue quant à jfexémition du 33* article
de FEdit de Loudun*
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180 JOURNAL INÉDIT
Juin 1616. Guill. dit que Monsieur le Prince avoit proixiis à
M. de Sully de faire oster la charge à M. Arnaud
l'intendant. Sur cela, il fut le mercredy 29 trouver la
Reyne à son disner, et luy ayant commencé à parler
de ce bruit, elle luy répondit tout haut qae c'estoyent
des méchans qui faisoyent courhr telles faussetez.
29. Six soldats des gardes voulant enfoncer la
porte de M...., conseiller du Chastellet, dans la rue
Saint-Julien-le-Pauvrej près la place Maubert, pen-
sant que ce fust celle d'un bordel, quelques voisins,
et entr' autres, un apothicaire nommé . . . , qui a autre-
fois esté de la compagnie de M. de Broûilly, sortent
de leurs maisons. Ces soldats mettent l'épée à la
main, et tirent des estocades audit apothicaire, dont
l*une le blesse au poignet ; et luy, d'un coup de per-
tuisane, tua un soldat, et d'un autre coup en blessa
un autre *.
Juillet. Environ le 5. M. de Rohan arrive à Paris '.
M. de Pisieux prend congé du Roy ; va à Panfou,
quelques jours après.
MM. le Maréchal de Brissac, de Vie et Champi-
gny ^ vont à Poitiers remettre les réfugiez qu'ils re-
mirent heureusement le . . .
En toutes les voix de l'Assemblée de ville, il n'y en
eut que une contre la volonté du Roy *.
* Voy. Mire, fr,^ t. v, p. 139. Le lieutenant-civil (It à cette occasion
une Ordonnance pour la sûreté publique.
> Voy, Mém. de Rohan, p. 138.
3 C'est la difficulté relative a Texécution du 33e article de l'Edit de
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b'ârnauld d'andilly. 181
7. Madame Déegeant meurt. Les deux palefre- '"»««» "««•
niers de M. le Maréchal d'Ancre qui avoyent esté
condamnez au Ghastellet, sont jugez au Parlement et
la sentence confirmée, excepté pour l'amende hon-
norable et la question. Ce jugement passe tout d'une
voix, hormis M. le Président Lescalopier, lequel fut
d'avis ; et ayant dit, entr' autres choses que
l'action faite par le Picard, à la porte de Bussy, ne
se pouvoit excuser, veu qu'il n'y avoit personne qui
ne connustM. le maréchal d'Ancre, M.Prévost Malas-
sise dit : Je croy qu'il s'en trouvera plusieurs qui ne
le connoissent point, et pour moy, je suis de ce
nombre. Ayant dit cela, chacun de tous les autres en
dit de mesme; et ainsi M. le Président Lescalopier
demeura seul de son avis. — L' après disnée, lesdits
palefreniers furent exécutez au bout du pont Saint-
Michel. Il y avoit une extrême quantité de monde ; et
on tient que tous les bourgeois du quartier estoyent
tout prests dans leurs maisons, avec leurs armes,
pour sortir, si quelqu'un s'efforçoit de les enlever.
Et continuèrent ainsi toute la nuit, jusques à quatre
heures du matin, à demeurer armez chez eux, ap-
préhendant que l'on vint oster la nuit les corps
morts de la potence, où ils vouloyent, à quelque
Loudun, dont il est parlé plus haut Cet article décidait que tous icu
officiers tant militaires que de judicature qui avaient quitté Poitiers
lors du trouble qui eut lieu dans cette ville le 23 juin 1614, seraient
réintégrés dans leurs charges. Les habitants de Poitiers demandèrent que
Ton n'accordât pas cette faveur aux militaires. Le prince de Condé in-
sista pour que Tarticle fût cntiëi ement observé. Mais la ville de Poitiers
ayant persisté dans ses rt^clamations, il y fut fait droit.
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182 JOUKNAL INEDIT
juiuet 1616. prix que ce fust, qu'ils demeuraBsent vingt-quatre
heures entières*
8. Le Roy et la Reyne vont à Saiht*Germain-en-
Laye. On tient que la Reyne vouloit, à la persuasion
de M. le Maréchal d'Ancre, aller à Rouen avec le
Roy, afin d'installer M. le Maréchal d'Ancre en sa
charge de Lieutenant du Roy en la Province, et faire
souffrir le peuple de Paris, dont elle estoit mal con-
tente, par l'absence de la Cour. Mais on remontra à
Leurs Majestez combien ce dessein estoit dangereux
par infinies raisons, et que c' estoit perdre Paris.
16. Leurs Majestez de i*etoar de Saint-Germain*
Environ ce temps , M. de Refuge * le Conseiller
d'Estat, est envoyé vers M* de la Force.
17 ou environ. M. du Mayne de retour de Sois-
sons où il estoit allé quelque temps auparavant.
Monsieur le Prince de retour. Il flvoit laissé M. de
Vendosme à Villebon \
* A l'occasion du retour de Monsieur le Prince à Paris, le Merc. fr.
Cite le passage suivatit qu'il emprunte à l'auteur de l'Apologie pour
Leurs Mi^estés : « Monsieur le Prince donc, aprèn plusieurs remises
recherchées pour raccommodement de ses affaires et pour Testablisse-
ment de son authorité, se rend enfin à la cour, où il se trouve au mi-
lieu de la pompe et de la gloire. Il est plus recherché et sdivy que le
Roy mesme : sa maison rend presque le Louvre désert : Tout le monde,
selon la légèreté françoise, adore ce Soleil levant; chacun s'efforce de
s'acquérir ses bonnes grâces : Aussi tout passe par ses mains; il est
absolu au Conseil; il dispose des finances ; il fait entrer aux chargea
ceux qui ont suivy sa fortune, et en recule ceux qui ont fldellement
servy le Roy ; et s'il faut dire franchement la vérité aux affaires d'Es-
tat, il ne laisse à Leurs Majestez que le nom et les vaines images delà
Royauté. {Mère, fr,, t. iv, 2« partie, p. 148.) Voy, aussi Richelieu,
p. 307; Pontchartrain, p. 152.
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d'arnauld d'andilly. 188
1" M. le Milord duc Hayect, ambassadeur eiC' ^ousi itit.
traordinaire du Roy d'Angleterre, sur le sujet du ma-
riage de Madame Christine, arrive en magniûcence
à Paris, conduit par M. le Prince de Joinville, lequel
avoit esté au-devant de luy jusques à Saint-Denis. H
eut audience de Leurs Majestez le dimanche 7, M. de
Guise le conduisant depuis le logis de la Reyne Mar^
guérite, où il estoit logé, jusques au Louvre. Depuis,
il eut audiance particulière dans le petit Cabinet de
la Reyne-mère, où il fut deux heures avec le Roy et
la Reyne. Depuis, il fut festiné par tous les Grans et
principaux Seigneurs de la Cour, comme Monsieur le
Prince, M. de Nevers, M. de Guise, M. de Rheims,
M. de Buillon, M. de Vitry, etc. , avec des super-
fluitez extraordinaires, jusques là que Monsieur le
Prince fit faire quatorze services * •
Environ ce- temps, M. de Sully arrive.
9. Après plusieurs propositions faites pour rei-^
gler les Conseils, enfin il fut résolu que les mardy et
jeudy au matin à huit heures, on tiopdroit dans le
Louvre un Conseil des finances tout semblable.à celuy
qui avoit accoustumé d'estre tenu auparavant, et au-
* Fify. 9rer€, fr.^ U iv, p. 140, le récit de toutes les fôtea qui eurent
lieu pour honorer le représentant de la Grande-Bretagne. Suivant le
Mercure^ cet ambassadeur extraordinaire était Jacques Hay, baron de
Saley, maître de la garde-robe. Voy, aussi Fontenay-Mftreuil, p, 397^
D'après ce dernier, Lord Hay, depuis comte de Carlisle, vint à Pari^
pour féliciter le Roi de son mariage, et parler de celui de Madame
Ghrétienae (quelques Mémoires du temps portent Qliristioe comme
Botre manuscrit), sœur du Boi, avec le prince de Galles. Cette union
ne se fit pas. Madame épousa peu de temps après le prince de Piémont.
{Voy. encore Richelieu, p. 314 ; Pontchartrain, p. 153*)
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iSli JOURNAL INÉDIT
Aoutt 1611 quel la mesine confusion est demeurée (et ce jour
fut tenu le premier desdits Conseils) , et où Monsieur
le Prince se trouveroit (comme il a toujours fait), et
signeroit les arrests.
10. Quant au Conseil de la Direction, il fut or-
donné qu'il se tiendroit les mercredy et vendredy, et
qu'il n'y auroit que Monsieur le Prince, M. Jeannin,
M. Barbin, et les quatre Intendans. Et ce jour fut
tenu le premier desdits Conseils, auquel ces sept per-
sonnes assistèrent.
Monsieur le Prince et M. de Buillon vouloyent
que la Reyne prescrivit l'ordre de règlement des
Conseils, afin de rejetter sur elle la hayne de tous
ceux qui en seroyent exclus ; ce qu'elle voulant éviter,
elle envoya M. Barbin, qui prit heure pour se trou-
ver chez Monsieur le Prince sur ce sujet, où M. de
Buillon se rendit. Et là, M. de Buillon voulant faire
parler M. Barbin, il dit qu'il n'avoit autre charge
de la Reyne, sinon de faire tout ce qu'ils voudroyent,
et qu'elle trou>teroit tous bons avis, pourveu que elle
pust dire qu'elle l'avoit fait avec leur conseil.
Quant au samedy, ce jour fut destiné pour lire le
matin la Semaine en un Conseil de Direction ; après,
la faire arrester à la Reyne ; et le reste du jour devoit
estre employé au Conseil desDépesches, c'est-à-dire,
pour les affaires d' Estât, auquel assistoyent les
Princes et officiers de la Couronne.
Cet ordre s'exécutant. Monsieur le Prince se ren-
dit si assidu à tous les Conseils , et y prenoit tant
d'autorité, que la Reyne en entra en jalousie. En ef-
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d'arnauld d'andilly. 185
fet, il faisoit le Surintendant des finances, et arrestoit
de sa main les rooUes de TEspargne et autres estais.
Là dessus, M. de Sully se jetta à la traverse, et vid
la Reyne, M* Mangot, M. Barbin, afin de rentrer
aux affaires*.
Environ ce temps, après plusieurs difficultez sur
difficultez apportées par M. de Villeroy au traitté
de sa charge avec M. Mangot, dont ils estoyent con-
venu le prix à quatre cens mil livres, enfin il dit qu'il
ne pouvoit conclure sans M. de Pisieux ; et fit venir
ledit sieur de Pisieux, lequel dit qu'il ne vouloit trait-
ier en façon quelconque. Tellement que sur cela ,
le traitté se rompit entièrement ; et on expédia et
scella le 12 une commission à M. Mangot pour faire
la charge entièrement, tant en l'absence qu'en la
présence de M. de Villeroy, lequel ayma mieux cela
que de quitter sa charge (d'autant qu'il vouloit,
comment que ce fust, mourir Secrétaire d' Estât). Le
lendemain samedy 13, M. Mangot presta le serment^
1/i. Les habitans de Péronne s' estant assemblez
en leur hostel de ville, tant sur ce que M. de Longue-
ville leur avoit mandé qu'il vouloit faire son entrée
le 25, que sur ce qu'ils avoyent eu avis que l'on
leur vouloit envoyer toute la garnison qui sortoit
d'Amiens, M. de Favrolles', qui commandoit dans
^ Foff, Pontchartrain, p. 153.
3 Foy, Fontenay-Mareuil, p. 344; Brienne, p. 312 ; Richelieu, p. 298 ;
Pontchartrain, p. 151 et 154.
' Le sieur deFavrolles (suivant d'autres Mémoires, de FavoUes ou de
Favols), gentilhomme gascon, était lieutenant du maréchal d'Ancre
au gouvemement île Péronne
Aoott 1616.
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186 JOURNAL INÉDIT
Aoust 1616. Péronne, vint à leur assemblée avec M. de Plainville»
et commença à user de paroles fort hautaines pour
leur faire rompre leur assemblée. Ils répondirent
qu'ils vouloyent obéïr au Roy, mais qu'ils n'avoyeut
nul commandement de Sa Majesté pour ne point
recevoir M. de Longueville, et pour recevoir les gar-
nisons qui gortoyent d'Amiens ; que durant les der-
nières guerres, il n'y avoit jamais eu que cinquante
hommes au plus en garnison en leur ville ; ^t que
maintenant, durant la paix, on leur en vouloit bail-
ler deux cens d'augmentation ; ce qui n'estoit pas
pas raisonnable ; qu'au reste^ il ne fist plus tant le
mauvais, et qu'ils n'estoyent plus résolus de Tendu"
rer. (On dit qu'il avoit baillé* il y a quelque temps,
quantité de coups de baston, en plein auditoire, à un
sergent qui l' avoit fâché). Comme sur cela, M, de
FavroUes voulut répondre aigrement, ils Tarrestèrent
en leur Hostel de Ville, et en mesme temps mandèrent
à M. de Longueville, qu'il y arrivast aussitost. Le
lundy 15, la nouvelle de cela arrive à Paris, à deux
heures après midy, et le soir mesme à sept heures,
M. Mangot part pour aller trouver M, de Longue**
ville. Le mercredy 17 , estant à sept heures du
matin arrivé auprès de Péronne, il trouve un capi-
taine avec quelques cavaliers qui l'arresta jusques au
soir, quoy qu'il luy pust dire ; et le soir, lorsqu'il
l'amena pour parler à M. de Longueville, i! le fit en-
core attendre trois ou quatre heures aux portes.
Tout cela, afin de donner, cependant, le loisir à
M. de Longueville de prendre le Chasteau, comme il
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d'arnaulj) d'andilly. 187
fit, par composition avec les soldats , de leur faire aousi mê.
payer quatre montres , moyennant quoy ils enfer-
mèrent Rame S qui les comtnandoit, et se rendirent.
M. Mangot trouva M. de Longuçville en résolutiori
de ne point rendre Péronne , et mesme il luy dit
que Ton se moqueroit de luy, s'il le rendoit; et qu'en
ce temps*cy, on ne rendoit point de tels morceaux.
Enfin, lorsqu'il revint, il croioit l'aVôir davantage
adoucy : et fut icy de retour le vendredy 19.
M. du Mayne envoya quatre compagnies de gefi9
de pied, enseignes déployées, se jetter dans Péronne,
lesquelles il avoit tirées de ses places. M. Bârbin a
dit qu'il y avoit cinq cens hommes.
Lorsque la nouvelle de Péronne arriva , Monsieur
le Prince estoit allé à une maison nommée.. ^ qu'il
avoit achetée sur le chemin de Vallery. M. de Buillott
luy envoya dire en diligence par un gentilhomme ce
qui s' estoit passé, et luy manda qu'il le prioit ins-*
tamment de ne parler à âme vivante, jusqu'à ce qu'il
l'eût veû chez M. du Mayne» où il l'attendoit, et par
où il faloit nécessairement qu'il passast. M. Vigni^
dit que, sachant cela, il fut, avec Monsieur l'Arche»-
vesque de Bourges% au devant de Monsieur le Prince;
luy dit que M. de Buillou l'attendoit ; mais qu'il
le supplioit de ne point se laisser emporter à ses per*
suasions ; que l'action estoit honteuse ; ne se pou voit
défendre ; et que ce seroit à ce coup, que la Reyne
< Le sieur de Rames Baqueville, cupitaine de la garnisoQ de Péronne.
2 André Fremiot, archevêque de Bourges, député du clergé aux
Btais àe 1614.
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Aoust 1616
188 JOURNAL INÉDIT
reconnoistroit ce qu'elle devoit attendre de la sincé-
rité de ses intentions. Monsieur le Prince le luy
promit. 11 alla chez M. du Mayne, où M. de Buillon
le persuada à ce qu'il voulut.
J'ay oûy dire à M. Barbin, le 23 mars 1618,
comme j'estois un de ses trois Conseillers, que les af-
faires du Roy estoyent lors en un estât si misérable,
et celles des Princes si relevées, qu'ils témoignoyent
tout haut trouver mauvais quand le Roy et la Reyne
parloyent à des gens de qualité, et jusques à des
gentilshommes de dix mil livres de rente , disant
qu'ils leur vouloyent débaucher leurs serviteurs ; que
M. du Mayne dit un jour à M. de Lusson, qu'il ne
pouvoit trouver bon que l'on l'envoyast vers Mon-
sieur.^, pour le leur débaucher; que Monsieur le
Prince manda un jour à la Reyne, qu'il ne se sou-
cioit plus qu'elle parlast tant qu'elle voudroit à M. de
Guise, parce qu'il estoit maintenant très assuré de
luy. Sur quoy la Reyne, par le conseil de M. Barbin,
parla à tous les Seigneurs de la Cour, afin de témoi-
gner qu'elle ne se vouloit pas laisser aller aux entre-
prises et aux insolences de ces Princes ; que M. du
Vair , amenant un jour M. de Buillon par la main à
la Reyne, luy dit : Madame, il ne faut plus que vous
ayez de défiance de M. de Buillon et de ces Messieurs,
car ils ne désirent que de bien servir le Roy. Sur
quoy la Reyne devint rouge ; que par l'avis du Ma-
réchal mesme, la Reyne estoit résolue de s'en aller
au Parlement, pour se démettre de l'administration
des affaires ; ce que M, Barbin luy déconseilla en-
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d'àrnauld d*andilly. 189
tièrement, luy disant que si elle le faisoit, le Royaume,
le Roy, et ses enfans estoyent perdus; d'autant que
Monsieur le Prince prendroit toute l'autorité, et que
chacun des Grans penseroit à tirer sa pièce; sur
lequel discours, le Roy estant entré dans le cabinet,
la Reyne, frémit et dit : Ho I je ne quitteray point les
alTaires, quoy qui en puisse arriver.
Environ le mardy ou mercredy 17 , M, le Comte
d'Auvergne part, pour aller investir Péronne avec les
compagnies de gendarmes et de chevaux légers qui
se trouvoyent icy autour et dix compagnies du régi-
ment des gardes. M. de Créquy n'y fut point, soit
qu'il refusast ou autrement. Ils trouvèrent que M. de
Longueville estoit demeuré dans Péronne avec c^it
ou six vingts gentilshommes et deux cens hommes
de pied (quelques un& dient sept cens ; mais je ne
le croy pas) *.
16. M. le Maréchal d'Ancre ayant eu avis qu'il y
avoiteu dessein fait par M. duMayne et M. le Prince
de Joinville, de l'enlever de sa maison du faubourg
Saint-Germain et de le faire passer l'eau à un bateau
qu'ils avoyent prest, puis l'emmener à Soissons, il
part en diligence, la nuit d'entre le mardy et le mer-
credy, pour s'en aller à Caen.
Monsieur le Prince ayant donné charge à M. l'Ar-
' Sur la sédition de Péronne qui, en rompant le traité de Lottdun,
commença ce qu'on a appelé la troisième guerre civile, et décida la
Reine-mère à faire arrêter Monsieur le Prince. (Foy. Merc, fr,, p. 179-
194 ; Fontenay-Mareuil, p. 345 et suiv. ; Brienne, p. 312 ; Rohan, p. 140 ;
Richelieu, p. 316 ; Pontchartrain, p. 154.
AoBst in«.
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190 JOURNAL INEDIT
i«i«< chevesquô de Bourges (qui se mesloit fort avant dans
ses afiE&ires et qui n'est pourtant qu'un tribouliet) de
porter rudes paroles à M. le Maréchal d'Ancre, et de
luy dire, entr' autres choses , qu'il ne le pouvoit ni
ne le vouloit plus garantir, et qu'il se conservast
comme il l'entendroit; il envoya quérir, quelque temps
après, M. Barbin, qui le vint trouver à Saint-Martin-
Là, il luy fit plusieurs honnestetez, et pour ce qui
estoit de Monsieur le Maréchal, et particulièrement
pour ce qiû estoit de luy.
M, Barbin luy ayant remontré les grans sujets de
mécontentement qu'il donnoit à la Reyne , il luy dit
qu'il le reconnoisfioit bien ; mais qu'il ne savoit com«
ment faire, et s'estoit trouvé fort empesché, pour ce
que M. de Buillon et ses Princes luy faisoyent en-
tendre que s'il abandonnoit ses amis, ils l'abandon-»
neroyent aussi ; et qu'après, il se trouveroit dans le
mépris, et plus bas que jamais ; mais qu'ayant esté
encore, le jour de devant, plus de quatre heures avec
eux, enfin il s'en estoit débarrassé, et qu'il vouloit bien
que le Roy et la Reyne sceussent qu'ils luy avoyent
plus d'obligation qu'à leur père, et qu'il le prioit de le
dire à la Reyne.
M. Barbin s'en allant, trouva PArchevesque de
Bourges qoi luy dit qu'il estoit bien aise de l'avoir
rencontré, et qu'ils s'en iroyent ensemble trouver
M. le Maréchal d'Ancre ; où estant arrivez , M. de
Bourges luy dit, de la part de Monsieur le Prince^
d'extrêmement mauvaises paroles, suivant ce que
dessus. Monsieur le Maréchal se mit en grande colère»
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d'ahnauld d'aptdilly. 191
et dit que Monsieur le Prince eètoit Prince du sang, aousi i«i«.
mais qu'il s'assuroit qu'il ne diroit point cela devant
luy. —M. Barbin^ sur cela, dit ce que le Prince luy
venoit de dire, et le lendemain, Monsieur le Prince
ayant envoyé quérir M. Barbîn, dit que M. de
Bourgeè n'avoit dû dire cdé*
Ld Maréchale d'Ancre couchoit aussi lors au fau*
bourg Saint- Germain. On dit que le dessein estoit
de les tuer tous deux. Monsieur le Prince manda à
M. le Maréchal d* Ancre^ qu'il luy avoit prorais de le
gareiitîr, mais qu'il ne le pouvoit plus faire. Et sur
cela; le Maréchal d'Ancre se résolut de s'en aller en
Normandie ; où estant près de Gaen, il fut visité et
nccompagné de quantité de noblesse. On dit que
M. Dumesnil Morânt' dépença deuK mil pis toiles à
le traitter. On dit aussi qu'il caressoît fort les bour*
geois de Caéti, et de familiarisoit avec euX| au con-
traire de ce qu'il faisoit à Amietis. Il coudimt dans
là ville.
J'ay oûy jurer à M. Barbin^ qu'il n'y avoit point
dessein de tCier ni de prendre M. le Maréchal d'Aa-
cre, et qu'il avoit résolu d'aller en Normandie, avant
que Monsieur le Prince luy eust mandé ce que des-
sus ; et qu'il est vray que le Maréchal s'en alloit pour
ne plus revenir, et se deyoit embarquer sur la mer,
et sa femme aussi, qui estoit malade, et monta raesme
en litière, pour s'en aller. Mais l'accès dé sa fièvre
* Thomas Morant, baron du Mesnil-Gamim*, tréiopier de l'épargne,
grand trésorier des Ordres en 1681.
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192 JOURNAL INiSdIT
Aoust 1616. luy ayant lors redoublé, elle descendit, et remit le
voyage, lorsqu'elle se porteroit mieux \
On dit que Tinimitié de M. de Guise avec le ma-
réchal d'Ancre venoit de ce que M, le Cardinal de
Guise, ayant désiré instamment d'estre du conseil de
la Direction, M. le prince de Condé en supplia la
Reyne avec affection. Sur quoy, elle dépescha, à
l'heure mesme, un courrier à Lésigny, où estoyent
Monsieur le Maréchal et Madame la Maréchale ; alors
qu'elle eut receu réponse, M. de Guise estant venu
luy renouveller la mesme supplication, elle répondit :
J'ay fait deux fois la guerre pour empescher que
Monsieur le Prince ne fust de la Direction, et je la
feray encore deux autres fois, pluslost que votre frère
y entre.— On dit aussi que MM. de Guise allant tous
trois voir Monsieur le Prince, ils trouvèrent le maré-
chal d'Ancre qui en sortoit, et les salua ; que lors,
M. de Guise et M. de Joinville le saluèrent, et qu'au
contraire, M. de Rheims enfonça son chapeau, et dit
haut : Si ce n'estoit le respect du lieu où je suis, je
luy baillerois d'un poignard dans le sein.
Environ ce temps, M. de la Douze- Charton^ con-
^ Suivant le duc de Rohan (Mém., p. 140), le projet de l'assassinat
du maréchal d'Ancre aurait été discuté, dès cette époque, dans un
conseil présidé par le Roi, où se trouvaient, entre autres grands de
l'Etat, le duc du Maine et le maréchal duc de Bouillon. Le maréchal
d'Ancre averti aurait pris la résolution de se retirer dans son gouver-
nement et de faire arrêter le prince de Condé et ses amis poar réta-
blir son autorité et celle de la Reine-mère. {Foy, Richelieu, p. 322-
334; Pontchartrain, p. 158.)
» André Charton, conseiller au parlement depuis 1587.
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d'arnauld d'andilly. 193
seiller en la Cour, vint trouver M. Barbin, pour le loutt i«w.
faire parler à la Reyne-mère, touchant affaires qui
importoyent au salut du Roy, d'elle, et de TEstat ; ce
qu'il fit, encore que la Reyne eust prit médecine.
M. Charton ayant, parlé à Sa Majesté, M. Barbin
le suivit, d'autant qu'il luy avoit dit, qu'après qu'il
auroit parlé à la Reyne, il luy diroit à luy les parti-
cularitez de l'affaire et les remèdes. Mais lors, il le
remit à M. de Sully, qui informeroit de tout cela, le
lendemain, le Roy et la Reyne. — Le lendemain, M. de
Sully vint trouver le Roy et la Reyne, à heure assi-
gnée, qui commença par ces mots : Pleut à Dieu que
Vos Majestez fussent maintenant au milieu de douze
cens chevaux ; et fit un grand discours de deux heures,
dont la substance estoit, que tout estoit perdu. Et
estant sorty, il rentra le corps à demy dans la cham-
bre, et dit qu'il déchargeoit sa conscience , ayant
averty Leurs Majestez; qu'il les souhaiteroit au mi-
lieu de douze cens chevaux; qu'il n'y avoit autre re-
mède au mal que d'armer puissamment; mais que
cela ne se pouvoit pas; et qu'il estoit trop tard\
25. M. de Buillon, de retour de Provence, où il
avoit esté quatre ou cinq jours auparavant, avoit
porté parole à M. de Longueville, que le Roy luy don-
neroit le choix de quatre gouvernemens, avec l'un
desquels, tel qu'il voudroit, M. le Maréchal traitteroit
le gouvernement de Péronne, Montdidier, et Roye.
— M. de Longueville, au contraire, vouloit en nom-
* Voy, Richelieu, p. 326.
13
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194 JOURNAL IHIJÔÎT
Aouèt i«H. mei' quatre, l'un desquels seroit choisy par le Roy, et
offroit de remettre la place entre les mains d'un
exent des gardes, pourveU qu'il n'amenast point d'ar-
chers avecque luy.
Environ le 20. La Reyne se voyant en peine de
Taffaife de t^éronne, et reconnoissant qu'il estoit né*-
cessaire que le Roy se meslast de la conduite des affai-
res, afin de conéerver l'autorité royale qui s'aflfoi-
blissoit journellement, elle lui dit, et luy en parla avec
affection^ ( M* le Maréchal estoit alors à Lésigny* )
— - Le Roy dit que, puisqu'elle le désiroit, il le feroit ;
et deux heures après, comme on lisoit la dépesche
que M. de Buillon devoit emporter, il y remarqua deux
grandes fautes , dont l'une estoit, que l'on vouloit
bailler à M* de Buillon le pouvoir de loger l'armée,
qui estoit le mettre en pique avec M* le Comte d'Au-
vergne. Aussitost que M. le Maréchal fut de retour,
elle rompit ce coup-là, et empescha que le Roy ne
prist connoissance des affaires.
Septembre. Joudy 1". Mousiour le Prince arresté prisonnier
dans la chambre de la Reyne, par M. de Thémines
et ses deux fils \ Il avoit esté au Conseil des finances
toute la matinée , e^ estoit sorty, et monté chez la
Reyne, suivy de M. de Rohaiî^ Monsieur le Garde des
sceaux, M. le président Jeannin, et quelques autres.
Il avoit trouvé le Roy dans ladite chambre, auquel il
^ Antoine de Lauzières, marquis de Thémines, tué au siège de Mon-
tauban en 1621, et Charles, seigneur de Lauzières, tué au siège de
Moiithcur, la même année 1621*
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d'arnauld d'andilly, 195
demanda s'il pourroit voir la Reyne. Le Roy dit qu'il septembre iêi«.
alloit y voir; et estant entré dans la Garde-Robbe ou
cabinet, M« de Thémines sortit, et dit à Monsieur le
Prince : Monsieur, le Roy m'a commandé de vous
dire, qu'il a besoin de vous pour une affaire qui se
doit résoudre cette après disnée, et qu'il vous prie de
ne bouger d'icy d'aujourd'huy ; et, pour ce sujet m'a
donné charge de vous arrester. — Comment! m'ar-
rester, moy ! ce dit Monsieur le Prince. Et en mesme
temps, voulant mettre la main à l'épée, il trouva que
M. de Thémines l'avoit saisie de la main gauche, et
il commença à crier : Comment ! arrester un Prince
du sang ! vous n'estes point capitaine des gardes.—
Non, répliqua M. de Thémines, mais je suis gentil-
homme , et obligé d'obéir aux commandemens dil*
Roy, mon maistre et le vostre, — Sur cela. Mon*
sieur le Prince se retourna vers M. de Rohan, et luy
dit : Mon cousin, souffrirez-vous que l'on arreste
ainsi prisonnier un Prince du sang?— M. de Rohan
répondit : Je suis tout seul ; il faut obéir au Roy. —
Après, Monsieur le Prince dit : Monsieur le Garde des
sceaux, qui vit jamais une pareille injustice ! Faites-
moy parler au Roy ou à la Reyne. Lors, Monsieur le
Garde des sceaux et les autres baissèrent la vue. Puis
il s'écria : Hé quoy ! n'ay-je point d'amis. Sur cela,
M. de Praslin entra, qui dit : Monsieur, il faut obéïr au
Roy. — Et M. de Thémines luy dit : Monsieur, ne vous
émouvez point, s'il vous plaist, et n'entrez en aucune
appréhension, car je vous répons sur mon âme et sur
mon honneur, que le Roy entend que vous soyez
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196 JOURNAL INJÎDIT
septembre iej«. traitté comiTie luy-mesme. Après, il le mena dans
une chambre qui estoit proche , où luy M. de Thé-
mines avoit trois siens gentilshommes; et en passant,
Monsieur le Prince ayant apperçeu M. Delbene, lieu-
tenant de la compagnie de chevaux légers de Mon-
sieur, avec douze ou quinze de ses compagnons, il s'é-
cria : Je suis mort, voilà un homme qui ne m'a ja-
mais aymé. Que l'on m'ameine vistement un prestre,
%t que l'on me donne au moins le loisir de penser à
ma conscience. Lors, M. Delbene luy fit une révé-
rence jusques à terre, et luy dit qu'il avoit toujours
esté son très-humble serviteur; qu'il le supplioit de né
le point prendre pour un bourreau, et de croire qu'il
n'y avoit personne qui eust le pouvoir de luy faire
accepter une telle charge. — Monsieur le Prince
Qstant un peu revenu de cette appréhension, deman-
da M. de Rochefort, son apoticaire, un certain valet
de chambre, et un certain cuisinier. On luy fit venir
les trois derniers, mais non le premier, qui estoit chez
M™' la Comtesse de Soissons, et à une heure, avoit pris
la poste au Bourg-la-Reyne, pour aller à Chinon (où
l'on dit que l'on fit écrire Monsieur le Prince, et à
Bourges aussi, où du Roger, oncle de Rochefort, s'en
alla, afin de faire remettre lesdites places entre les
mains de qui le Roy voudroit). Le Roy ayant envoyé
de sa viande à Monsieur le Prince, il la refusa, et Sa
Majesté s'en fascha. — Monsieur le Prince se trouva
estre malade de chancres, et autres vilenies, qu'il avoit
gagnées chez un maquereau nommé Chercaut, lequel
tient des femmes chez luy, et traitte en festins. Deux
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d'aRNAULD D^ANDILLY. 197
jours après, on grilla une autre chambre au Louvre, septembre i«i«.
où on mît Monsieur le Prince, et on luy osta tous ses
gens hormis Luisible, qui luy sert de valet de chambre
et d'apoticaire. Un nommé le capitaine Robert, au-
quel il se fie, appreste ses viandes, et les luy apporte à
la porte de la chambre, entre les mains de Luisible,
et Monsieur le Prince veut voir le visage de Robert,
afin d'estre assuré qu'elles n'ont passé que par les
mains des siens.
Monsieur le Prince avoit esté averty, par diverses
fois, qu'il y avoit un dessein de l'arrester, et encore
le mercredy au soir, allant au bordel, avec un seul
gentilhomme près Saint-Martin-des-Champs , il en
eut avis, et répondit : La beste est trop grosse.
• Pendant que Monsieur le Prince estoit au Conseil;
on avoit fait redoubler les gardes tant suisses que
françoises à la porte du Louvre, où estoyent MM. de
Créquy et de Bassompierre, et dedans le Louvre, on
avoit disposé toutes les gardes du corps du Roy.
La Beyne-mère ne se coucha point toute cette
nuit là. Elle manda le mercredy au soir à M. de
Bassonnpierre qu'il la vint trouver inconnu à trois
heures du matin. Il vint à deux ; il la trouva seule
dans son cabinet avec M. Barbin qui, estoit contre la
table, et elle se promenoit.
après avoir tenu quelques discours à M. de Bas-
sompierre sur la confiance qu'elle avoit en sa fidélité,
elle luy dit le dessein qu'elle avoit pris de faire ar-
rester Monsieur le Prince, M. du Mayne, M. de Ven-
dosme, M. de Buillon, M. de la Trémoille; qu'il
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196 JOURNAL INÉDIT
«eptenfire iw«. cssayast de faire que les Suisses fussent plus forte
que les gardes du Roy, dont elle ne se fioit pas ; et
pour luy montrer combien elle se fioit en luy, elle
avoit résolu, si l'affaire réussissoit mal, de se mettre
avec le Roy, ses enfans, et ses bagues, au milieu du
bataillon de ses Suisses, et aipsi s'en aller à Mante,
M. de Bassompierre qui avoit mandé dès le soir
à ses capitaines dans les quartiers, qu'ils se tinssent
prests au premier coup de tambour, luy dit qu'il luy
répondoitde se rendre le plus fort devant le Louvre;
mais qu'il croioit qu'elle se pouvoit assurer de M. de
Créquy, en l'engageant par générosité et ne le luy
disant que sur le point de l'exécution. Ainsi, elle l'en-
voya quérir à six heures du matin, et le retint avec
elle, jusquesà l'heure qu'il fut besoin d'agir; et M. de
Bassompierre se tint toujours auprès de luy, luy di-
sant qu'ils se serviroyent chacun de témoin de leurs
actions. Sur les six heures du matin, il vint un gen-
tilhomme de Poitou demander à parler à la Reyiie ;
elle se jetta sur son lit, et fit mettre derrière la ruelle
M. de Bassompierre, M. Barbin et M. de Fossez.
Il luy dit que tous ces messieurs estoyent avertis, et
qu'ils vouloyent monter à cheval et s'en aller. On y
envoya ; il se trouva qu'ils ne bougeoyent, Sur les
huit heures, le Roy estant avec la Heyne, on leur
vint dire que Monsieur le Prince estoit entré, dont ils
furent très-aises. Et puis, on leur dit que M. de Yen-
dosme estoit aussi venu (ce qui n' estoit vray). Et
lors, le Roy dit : Bon, voilà ce fils de putain pris.
Et quelqu'un dit en riant : Et deuf. La Reyna dit ;
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d'arhAui^d d'andijlly. 199
Il n'eet pas heur« de rire; il faut prier Dieu* septembre jw.
M. Mangot ne vint qu'à neuf heures du ypatip au
Louvre j qui estoit beaucoup trop tard, M. Barbin y
èstoît venu devant cinq heures.
Monsieur le Prince avoit continué sen débauches
de telle sorte, avec quelques conseillers de la Cour,
que M, du Mayne et M. de Buillon ne pouvoyent .
parler à luy ; de quoy s' estant mis en colère, M. (Je
Buillon, ou tous deux ensemble, luy mandèrent, que s'il
ne chassoit ses petits cpnseîllers, ilslesiroyent chasser
eux-^mesmes, à coups de baston. On dit que M. de
Buillon, ayant une fois fort affaire à luy, fut contraint
de l'aller chercher chez une nommée dame Marie.
Monsieur le Prince qui avoit couché à Saint^Mar-
tin, ayant esté Je matin, dès cinq heures, chez M. de
Buillon, M. de Buillon luy dit, qu'il avoit avis assuré,
qu'on le vouloit arrester, s'il ailoit au Louvre, Mon-
sieur le Prince ne le.voulut point croire, et luy dit qu'il
alloit bailler des fernjes. De là, M. de Buillon s'en alla
chez M. du Mayne, auquel il dit les propos qu'il avoit
eus avec Monsieur le Prince ; le pria de n'aller point
(Ke matin là au Louvre, et de mettre des gens aux
avenues du Louvre,, afin de découvrir ce qui se passa-
rpit, et se tenir sur ses gardes, de peur d'estre surpris ;
que cependant, il s'en alloit à Cbarenton, et revien-
droit fii^ner avec luy et chez luy ; que, s'il survenoit
quelque chose, il le prioit de luy en dûnner aviu.
Suivant cela, M. du Mayne envoya des gentilshommes
aux avenues et dedans le Louvre, lesquels ayant dé-
couvert la prise de Monsieur le Prince, luy en vinrent
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200 JOURNAL INIÎDIT
septembre 1616. donncF avis, à toute bride, dans les Jésuites, où il
oyoitla messe. Aussitost il envoya les mesmes gentils-
hommes à M. de Buillon, et s'en alla après eux. Les-
dits gentilshommes Ux)uvèrent M. de Buillon à Saint-
Antoine-des-Champs, qui revenoit en carrosse de
Charenton. (M. du Tremblay m'a dit que ce fut luy
qui luy porta la nouvelle, et que M. de Buillon dit :
Ce petit brouillon nous a tous perdus. Où est M. du
Mayne?) En mesme temps, il monta à cheval, sans
bottes. Incontinent après, M. du Mayne arrive, et
M. de la Tréraoille. Ils ramassent six ou sept vingt
chevaux, et se promenèrent assez long-temps le long
du rempart, en tirant vers le Temple, sur ce que
M. de Buillon disoit, qu'il croioit que l'on les envoye-
roit charger et qu'il vouloit tailler, en pièces tous
ceux qui viendroyent. Mais l'on tient qu'en effet,
leur dessein estoit de*voir s'il n'arriveroit point quel-
que émotion dans Paris. M. du Mayne vouloit opi-
niastrement rentrer dans Paris, avec cinquante che-
vaux, et faire garder la Porte Saint-Martin par trente
ou quarante autres, afin de tâcher à émouvoir le
peuple, et, s'il se trouvoit disposé à cela, s'en aller
droit au Louvre. Mais M. de Buillon l'en empescha.
En effet, M. du Mayne fut un gros quart d'heure à la
Porte Saint-Martin, avec trente ou quarante chevaux,
et envoya M. de Thianges le long de la nie Saint-
Martin, avec cinquante ou soixante chevaux, afin de
tâcher d'émouvoir le peuple ; mais chacun fermoit
sa boutique, et nul ne se bougeoit.
La Reyne ayant sceu qu'il avoit paru de la cava-
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d'aanaold d'andilly. 201
lerie vers le Temple, commanda à M. de Montmo- sn»iwibrt w,
rency de s'y en aller, lequel monta à cheval, sur les
trois heures, avec M. de Rets et quelque cent cin-
quante gentilshommes, et alla jusques à Montfaucon ,
mais il ne rencontra personne. M. du Tremblay, qui
avoit conduit M. de Buillon jusques à Claye, ayant
rencontré M. de Montmorency, qui alloit après M. de
Buillon et M. du Mayne, il luy dit : Monsieur, M. de
Buillon m'a commandé de vous dire, que vous luy
avez fait gaster aujourd'huy un bas de soie, mais
qu'il vous fera gaster plus de quatre paires de bottes.
On dit que M. de Montmorency marchoii avec si peu
d'ordre, que s'il eust rencontré M. de Buillon, qui
avoit disposé ses gens en trois trouppes et en très-
bon ordre, il y a grande apparence qu'il eust couru
fortune.
MM. du Mayne , de Buillon et de la Trémoille,
ayant ramassé le plus qu'ils purent de leurs amis,
partirent sur les deux heures, pour aller à Soissons;
mais craignant quelque rencontre, ils ne prirent pas
le droit chemin , et allèrent coucher , c'est-à-dire ,
faire repaistre leurs chevaux à Nantoûillet et le lende-
main arrivèrent à Soissons.
M. de Buillon, estant arrivé à Nantoûillet, se trouva
si extrêmement las de la traitte qu'il avoit faite à
cheval, qu'il dit, qu'il n'en pouvoit plus. On luy bailla
trois œufs; après, il but un coup, et on luy chercha
une charrette, dans laquelle il dit qu'il se mettroit,
lorsqu'il ne pourroit plus aller à cheval. Enfin, il alla
jusques à Soissons, sans entrer dana la charrette.
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202 JOUENAL JB[]iPÏT
«frptembre t«6. JJ y avpit à Louvres, en Pariai?, six vingte majgtres
de la compagnie de gens d' armes de la Rqyne, qui
pouvoyent empescher peg Messieurs de gagner Soii^
sons.
M. de Vendosipe estant au faubourg Saint-ïlo-
noré, ou dans sa maison, ou tout contre, M. de Saintr-
Géran reçut commandement de 1q prendre. Estant
arrivé, ij l'entreyit à travers la porte, et comme il
beurtoit, et que Ton n'pyvroit point, on dit que M^' de
Vendosme luy dit ; Monsieur, voilà M, de 8aint-Gé-
ran qui vous demande ; à quoy vous amusez-vous?
Que ne venez-vous? Cependant M. de Vendosme
monta à cheva}, )uy quatrç pu cinquième, et s'enfuit
par derrière son logis,
Mf de Saint-Géran courut après luy jusques vers
Montmorency, où l'on dit que M. de Vendosme estoit
prestde demeurer, à cause que son cheval, et de tous
ceux qui le suivoyent, estoyent hprs d'haleine. Il ren-
contra six gentilshommes auxquels il fit accroire, qu'il
avoit querelle, et ainsi, eut leurs chevaux ; tellement
que M. de 3aint-Géran, dont les chevaux estoyent
plus frais que ceux de M. de Vendosme, ayant ren-
contré ces gentilshommes, et sceu comme il avoit
pris leurs chevaux, fut obligé de s'en revenir, M. de
Vendosme se rendit ^ Soissons, avec les autres.
M. de Guise estoit, comme l'on croit, du dessein
contre le Maréchal d'Ancre. Lorsqu'il sceut que Mon-^
sieur le Prince estoit arresté , il envoya M* de Join-
ville faire toutes sortes d'offres h la Reyne, laquelle
estant agitée par les mouvémens qu'une si grande
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d'ajinauld d'andilly. 208
affaire luy donnoit, ne répondit pa» à M. de Jolnville «eptewiw %§t$.
avec assez d'affection, selon son gré; tellement qu'il
sortit du Louvre étonné, et vint donner TalarmQ II
M. de Gui$e, auquel déjà plusieurs personnes vou-
loyent persuader qu'on avoit du de.ssein contre luy ;
tellement qu'il se résolut de s'en allçr, et partit sur
les trois heures, avec M. le Prince de Joinville, et
arriva le lendemain aux portesi de Soi^sqns, sans pou-
voir entrer, jusques à ce que, trois heure» après,
M. du Mayne et ces autres Messieurs arrivèrent,
On dit que MM. de la Cave * et de Laubespin ^
fur^t ceux qui firent résoudre M. de Guise à s'en
aller, afin de se faire après de feste, pour çstre en»-
voyez vers luy, ainsi qu'il fut fait ; car le dimanche 4,
M. de Laubespin y fut, et M. de la Cave depuis. M, le
Cardinal de Guise estoit hors de Paris, lorsque Mon*
sieur le Prince fut arresté, et fut trouver Messieurs
ses frères. On tient que M. de Guise et sa troupe
pensèrent mourir de faim et de froid. Qn dit qu'assu-
rément la Reyne avoit si peu de dessein contre M, de
Guise, que lorsqu'elle cQounanda, avec le Boy, k
M. de Thémines d'aller arrester Monsieur le Prince,
elle luy dit : Allez, Monsieur de Thémines, aile? faire
les affaires de M. de Guise,
M"'* la Princesse de Condé douairière, sachant la
prise de Monsieur le Prince, s'en alla courant en car-
rosse par les rues, criant, que Ton vouloit poignarder
' Gilbert de 3ertheloa, seigneur de la Cave ?
^ François de Sainte^loml^, seigneur de l'AubespIn 7
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204 JOURNAL INIÈDIT
Septembre 1616. SOU fils. Bref, clle faisoit tout ce qu'elle pouvoît pour
exciter le peuple à sédition ; et mesme fut vers le
logis du cordonnier Picart ; mais il y eut des mar-
chans qui luy dirent que c'estoit elle qui estoit cause
de cela , et qui avoit donné ces mauvais conseils à
Monsieur le Prince , et qu'elle se retirast. Tellement
qu'elle entra en grande appréhension, et se retira en
grande haste. Il y en a qui croyept que, de ce pas,
elle alla à Villebon. Quelques jours après, elle re-
vint.
M. le président le Jay s'en alla à la Maison Rouge,
aussitost qu'il sceut la prise de Monsieur le Prince,
et écrivit à la Reyne, qu'ayant esté neuf mois en pri-
son, il la supplioit de luy pardonner si, sur les ap-
préhensions que l'on luy avoit données, il s' estoit re-
tiré. Depuis, il fut trouver Messieurs les Princes à Sois-
sons. Il estoit lors très bien avec M. de Guise, et non
plus tant avec Monsieur le Prince, duquel il estoit
mal content, et disoit qu'il ne se conduisoit nullement
bien. Il avoitdit au Chevalier du Guet, quelques jours
auparavant, qu'il se ruinoit en sa charge, et se met-
toit mal avec Messieurs du Parlement. L'autre luy
ayant demandé d'où venoit cela, il luy répondit : Je
croy que vous feriez mieux de ne venir point si sou-
vent au Louvre. — Nota, contre le service du Roy*.
^ foy., sur rarrestation de Monsieur le Prince, le Merc, fr,^ p. 104
et suiv. Le récit du Mercure confirme de tout point celui d*Arnauld
d*Andilly qui est cependant plus complet et contient des détails nou-
veaux et curieux sur cet événement important. — Conf. Foutenay-Ma-
reuii, p. 350 ; Brienne, p. 313 ; Rohan, p. 141 ; Richelieu, p. 334 ;
Pontchartrain, p. 159 ; Bassompierre, 2* série, t. xx, p. 119.
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d'arnauld d'andillt. 205
Quelques domestiques de Monsieur le Prince, ayant sepumkf hm.
crié partout dans le faubourg Saint-Germain, que Ton
tuoit les Princes du sang, et que c'estoit le Maréchal
d'Ancre, quelques manœuvres du Luxembourg et
autres, furent à lajnaiflon du Maréchal d'Ancre, et
commencèrent à piller. Incontinent le nombre s'aug-
menta. Monsieur le Gouverneur de Paris y fut, avec
neuf chevaux seulement (c'estoit une faute, et il y
devoit mener cinquante chevaux et force archers).
Lorsqu'il arriva, le peuple se pressa de telle sorte
pour sortir, qu'il y en eut deux d' étouffez. Mais dix
des gardes de Monsieur le Prince, gens résolus, qui
estoyent en haut dans la maison, voyant qu'il n'y
avoit que neuf hommes de cheval , descendirent en
bas, encouragèrent le peuple, et tirèrent deux coups
de carabine, dont l'un tua M. de la Dou ville. Ainsi,
Monsieur le Gouverneur se retira, et le peuple con-
tinua à piller. Et quand il eut pillé la maison et écu-
ries, commencèrent à démolir; et le lendemain, en
firent autant à la maison de Corbinelly, secrétaire du
Maréchal d'Ancre, jusques à onze heures du matin,
que M. de Créquy y fut avec deux compagnies des
Gardes. Aussitost qu'ils oûirent sonner le tambour,
ils s'enfuirent. On estime cent cinquante mil écus
la perte faite par M. le Maréchal d'Ancre. Il y eut
une robbe de la Reyne perdue, qui valoit cinquante
mil écus*.
* Foy. 3ferc. fr.^ p. 202 et 205; Fontenay-Mareuil, p. 353 ; Brienne,
p. 317; Rohan, p. 142; Richelieu, p. 345.
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306 JOURNAL ÎN^DIT
septembre 1616. LeuFô Majestez mandèrent l'après diênée diidit
jeudy^ 1*' septembre» Mesnieurs de» Cours souve-
raines > Prévost des marchans et Lieutenant civil,
pour les informer par la bouche de Monsieur le
Garde des sceaux, des cause» qui èvoyent forcé le
Roy de s'assurer de Monsieur le Prince. Et mandè-
rent aussi les principaux Ambassadeurs» comme Ës-^
pegne et Angleterre*
Mi de Thémines fait Maréchal de France, Trois
ou quatre jours après, M. de Montigny le fut aussi \
Mé le Comte d'Auvergne est redemandé de Pé-
ronne \
M. le duo de Savoye, ayant sceu la nouvelle de
r^rrest de Monsieur le Prince» envoya quérir M. de
Lesdiguières, qui estoit sur la frontière du Dauphiné»
et furent cinq heures à parler ensemble. Après, M. de
liesdiguières s'en revint en Dauphiné» et M. le Duo
de Savoye s'en retourna en Piémont.
On avoit estimé qu'en effet» M* de Lesdiguières
estoit arresté pat* M* de Savoyei
2. Leurs Majestez firent dire par Paris» le soir^
par les Capitaines» que l'on meneroit Monsieur le
Prince, la nuit, à la Bastille» et que chacun tinst un
homme armé» qui veillasU G' estoit pour voir ce que
l'on diroit»
â» Ayant esté tenu Grand Conseil au Louvre^
M. de Sully fut une grande heure à opiner, et corn-
* Voy, Merc, fr,^ p. 207; Fontenay-Mareuil, p. 355; Pontchartrain,
P4 163.
2 Voy» Merc, fr,^ id. ; Pontchartrain^ p. 163»
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D'ARNAtJLD D'ANDILLY. 007
metiça son avls^ par dire, qu'encore qu'il ne sceuôt septembre iêi«.
si ç'âvoit edté un bon conseil d'arrester Monsieur le
Prince, d'autant que pour en juger, il eust esté besoin
d'estre informé desmouvemènsqui y ont porté Leurs
Majestez, toutefois, puisque c'estoit une chose faite, il
tte faloit pas abandonner les affaires, etc. Sur Cela, la
Reyne l'interrouipit et se fâcha, disant, qu'il se de-
voit souvenir de ce qu'il luy avoit dit, à tels et tels
jours, et à telles heures, et en tels lieux. --Sur quoy,
il faut savoir que quelques jours auparavant, M. de
Sully avoit esté enfermé plus de trois heures avec la
Rcyne, n'y ayant que MM. Mangot et Barbin , luy
disant que les affaires estoyent perdues si on n'y
pourvoioit promptement par quelque grand Coup.
Sur quoy la Reyne luy ayant demandé par plusieurs
fois quel estoit ce grand coupi et ce qu'il estoit d'avis
de faire , il rentroit en infinis gi*ans discours, et con*-
clûoit toujours de mesme sorte. Ce que la Reyrte et
ceux qui estoyent présens, interprétoyent tous à ar-^
rester Monsieur le Prince* On dit que depuis, M. de
Sully a dit que, par ce grand coup, il entendoit que
l'on luy rebaillast les finances. Plusieurs croyent
qu'en effets îlsavoit le dessein d'arrester Monsieur le
Prince, et que M. de Rohan ne l'ignoroit pas. Té-
moin, ce que, incontinent après la prise de Monsieur
le Prince, on luy vint dire, que le Roy le demandoit.
Il répondit : Je m*en vay fort assurément, car je ne
crains rieni Et le mesme jour, il écrivit des lettres à .
ceux de la Religion, de ses amis, et à quelques villes,
pour les confirmer en l'obéissance du Roy»— Or,
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208 JOURNAL INÉDIT
Septembre 1116. quant à M. de Sully, on dit, sur le propos quQ des-
sus,, que M. Edmond, ambassadeur ordinaire d'An-
gleterre, l'alla voir et luy dit que Ton faisoit courir
le bruit qu'il avoit esté du conseil d'arrester Mon-
sieur le Prince , mais qu'il ne le pouvoit croire ; et
avoit esté bien aise de savoir de luy ce qui s'estoit
passé de sa part en cela, afin de pouvoir répondre à
cette calomnie. M. de Sully fit un grand discours de
tout ce qui s'estoit passé afin de justifier comme il
n'y avoit point pensé. — Après qu'il eut achevé,
M. Edmond luy dit : Monsieur, lorsque je suis entré
céans, je croiois que c'estoit une imposture; mais
maintenant, vostre discours me fait estimer qu'il est
véritable*.
Incontinent après la prise de Monsieur le Prince,
on estoit en grande appréhension de M. le Comte de
Soissons ; mais la Reyne le gagna, et Madame la Com-
tesse par le moyen du mariage de Madame Henriette
Marie ^; ce qui contenta fort aussi M"' de Longue-
ville (laquelle vint alors à Paris. On tient qu'elle est
la Princesse mentionnée en la Déclaration) , à cause du
mariage de M. de Longueville avec M"* de Soissons.
Environ ledit jour, samedy 3, M. d'Aumont^ fut
* Voy, Richelieu, p. 350.
> Henriette-Marie de France, fille d*Henri IV et de Marie de Médicis,
née en 1609, mariée en 1625 à Charles I*% loi d'Angleterre, morte à Co-
lombes, près de Paris, le 10 septembre 166Q. Elle avait alors sept
ans, et, d'après ce passage, aurait été promise au comte de Soissons;
ce qui devait plaire à M>^ de Longueville, dont le fiU était accordé
avec M"* de Soissons. yoy, Pontchartrain , p. 165, dont le récit con-
firme celui d'Arnauld d'Andilly.
» Antoine d'Aumont, 'marquis de Nolsy» gouverneur de Boulogne-
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d'arnauld d'andilly. è09
envoyé par le Roy vers M. de Guise, avec beaucoup sepimbrewt.
de grandes offres (mesiiie on parla de la charge de
Connestable). Il rapporta plusieurs belles paroles,
avec protestation qu'il n'estoit avec ces Princes, que
poury servir le Roy *.
4. Environ le 4, M. le Maréchal de Montigny va
en Berry ; ceux qui estoyent dans la tour de Bourges,
pour Monsieur le Prince, se trouvant sans munitions,
capitulèrent de se rendre s'ils n' estoyent secourus
dans dix jours. Depuis, ils se rendirent*.
6. Le Roy, qui n'estoit point sorty par la ville,
depuis la prison de Monsieur le Prince, va à l' àrcenal
en carrosse.
Le Maréchal d'Ancre, ayant sceu la prise de
Monsieur le Prince, coucha depuis dans le chasteau
de Caen, et quelques jours après, alla à Rouen, où il
fut receu magnifiquement.
Monsieur le Garde des sceaux dresse la déclaration
pour porter au Parlement ; mais sur ce qu'il n'y avoit
pas mis, à beaucoup près, ce qui estoit porté par les
mémoires qu'on luy avoit baillez, et résistoit à ce que
l'on vouloit y faire ajouster quelques uns des points
oubliez, la Reyne luy dit: Monsieur le Garde des
sceaux, si vous ne voulez servir le Roy, il y en a
sup-Mer, chevalier des ordres en 1597, capitaine de cinquante hommes
d'armes des ordonnances, mort en 1635. D était fils de Jean d'Aumont,
VI* du nom, maréchal de France, mort en 1595.
* Voy. Merc, fr.^ p. 210, la lettre que le duc de Guise écrivit en
cette occasion au Roi.
2 Voy. Merc, /h., p. 270 ; Fontenay-Mareuil, p. 356; Rohan, p. 143;
Pontchartrain, p. 169.
14
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210 JOURNAL INiPIT
Septembre leie. d'autres qui le serviront. — On dit qu'il avoit témoi-
gné par plusieurs actions, n'approuver nullement
l'arrest fait de Monsieur le Prince, Et depuis ce
temps, la Reyne ne témoigna pas faire tant de cas de
luy, que de coustume.
7. Le Roy va à cheval au Parlement, faire véri-
fier la Déclaration contre les absens, et l'Edit du...
engagement dés greffes \ Monsieur le Garde des
sceaux porta la parole. La Reyne-mère y estoit, Mon-
sieur, frère du Roy, MM. de Montmorency, de Rets,
de Rohan, de Sully.
Mesdames estoyent dans la lanterne. Monsieur le
Premier Président parla peu. M. Servin, beaucoup^.
Gorbie et Abbeville envoyent assurer le Roy de
leur fidélité. Sancerre en fait de mesme. On dit que
les habitans, se défiant de M. le Comte de Sancerre^
parent de Monsieur le Prince, feignirent, un jour
qu'il estoit allé à la chasse, qu'il y avoit un homme
qui avoit fait dessein de le tuer, et s'estant assemblez
*■ L^Êdit du rachat det greffes, mesure financière prise pour couvrir
les dépenses de la précédente guerre civile, qui, y compris les dons con-
sidérables faits aux princes, aux termes du traité de Loudun, s'élevaient
à plus de vingt millions de livres.
2 Foy. Merc, fr.^ p. 213-248, le récit du Lit de Justice tejiu par le Roi
et la Déclaration contenant les motifs de l'arrestation du prince de
Conàé.—Foy. Fontenay-Mareuil, p. 357 ; Richelieu, p. 351 ; Pontchar-
train, p. 164. Foy, aussi Mém, de Math. Mole, le compte^rendu àè-
taillé de ce Lit de Justice et la Déclaration contre Monsieur le Prince.
(Mém. de M. Mole, p. 125.)
' Jean de Bueil, comte de Sancerre et de Marans, grand échanson de
France, mort en 1638. U était par sa mère, Jacqueline de la Trémoille,
parent du prince de Condé, dont la mère était Charlotte Catherine de
la Trémoille.
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d'arnadld d'andilly.* ill
plusieurs sur ce sujet, firent semblant de le vouloir
mettre prisonnier dans le chasteau, et ainsi, s'en
firent ouvrir les portes, et s'en saisirent*.
H, M, le Comte d'Auvergne fait Général de
Tannée du Roy, dit, en recevant la charge, qu'il pro-
testoit à Leurs Majestez qu'encore qu'ils luy fissent
cet honneur, il obéiroit à qui il leur plairoit cy après
d'envoyer, et se contenteroit de faire sa charge de
Colonel de la cavalerie légère.
On expédia estats et commissions pour mettre
deux armées sur pied, l'une sous la charge de M. le
Comte d'Auvergne, et l'autre, sous celle de M. 1q ma-
réchal de Souvré, pour aller prendre Chinon, En la
première, il y avoit... compagnies de chacun des
vieux régimens ; les régimens de Vaubecourt% Ileim-
bures, Beaumont, la Mailleraye, Thorigny (chacun
de douze compagnies de cent hommes) , Cressia (qui
avoit en 1615 servy Monsieur le Prince) , de dix
compagnies, et quelques autres nouveaux régimens,
de six compagnies, de chacune cent hommes. Le
rendez-vous estoit à Meaux. L'équipage d'artillerie
estoit de six couleuvrines. Le pain de munition fut
adjugé à un sol.
On envoya M. de Castille, Intendant des finances,
faire une levée de quatre mille Suisses, laquelle il
* Foy, Merc. fr.^ p. 253 ; Richelieu, p. 848.
^- Jean de Nettancoupt, Comte de Vaubecourt, GonseiUep d'Etat,
Maréchal de camp, Colonel du régiment de sou nom. Lieutenant Géné-
ral au gouvernement de Verdun, Gouverneur de Châlons, mort en 1642.
Octobre 16i6.
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212 • JOURNAL INEDIT
Septembre leie. amena à Saint- Jean-de-Losne, environ le dernier
d'octobre.
Environ ledit jour 11, M"*' la jeune Princesse de
Condé arrive fort affligée. On dit que M. de Montmo-
rency fut mal content de ce que la Reyne ne luy
voulut pas permettre de voir Monsieur le Prince.
12. M. de Brantes se bat contre Ryonne, qui se
pleignoit partout de M. de Luynes. 11 luy donne un
coup d'épée à travers le corps, et la vie. Luy rebailla
son épée, son chapeau et son manteau, le ramena
penser. 11 revint après chez M. le Comte de Vitry ;
le soir, il alla à Saint-Germain-en-Laye, où M. de
Luynes l'alla quérir le jeudy, et le ramena.
13. MM. de Boissise et de Chanvalon partent
pour aller traitter. M. de Chanvalon entra dans Sois-
sons. M. de Boissise, lequel conféra toujours avec
M. de Guise seulement, près d'une grange, distante
d'une lieue et demie de Soissons*.
15. M. de Termes^ arrive de Soissons, où M. le
(irand l'avoit envoyé, avec lettres à M. de Guise.
Il dit que c'estoit pour l'exhorter au service du Roy:
néantmoins cette action a esté calomniée ; car on dit,
que M. de Guise ayant écrit à M. le Grand, et l'ayant
* f'oy, Merc, fr.^ p. 248 ; Fontenay-Mareuil, p. 358; Richelieu, p. 352;
Pontchartrain, p. 165.
* César-Auguste de Saint-Lary, baron de Termes, d'abord chevalier
de Malle et grand prieur d'Auvergne, puis premier écuyer jusqu'en
1616 et grand écuyer de France parla démission de son frère, mort
d'une blessure qu'il reçut au siège de Clérac en 1621. A sa mort, le
duc de Bellegarde reprit sa charge de grand écuyer.
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d'arnauld d'andilly. 213
prié de luy donner conseil, comme voulant suivre septembre i«ie.
entièrement ses avis, M. le Grand envoya M. de
Termes vers luy, afin de s'offrir à luy ; que quand
cela ne seroit point, il ne devoit point envoyer vers
M. de Guise un homme de créance tel que son frère,
sans qu'auparavant, il fust venu trouver le Roy, pour
savoir sa volonté. Ledit sieur de Tennes apporta
toutes bonnes paroles de M. de Guise.
Environ ce jour, M. de Nevers ayant envoyé ses
Maréchaux des logis, marquer ses logis dansChalons,
M. de Tresmes*, gouverneur, les fit sortir de la ville.
Sur quoy M. de Nevers luy ayant mandé qu'il n'y
vouloit entrer que luy sept ou huitième, il luy fit
réponce qu'il avoit défences expresses de le laisser
entrer, et montra des lettres patentes, scellées du
grand sceau, pour cet efiet. — On a découvert depuis
que M. de Nevers avoit expédié quarante commis-
sions, pour lever des gens de guerre, et qu'il alloit
à Châlons pour s'en rendre maistre, et là, prendre
de l'argent pour les payer; mais que son dessein
n'ayant réussi-, il retira lesdites commissions.
M. de Nevers s'en alloit en ambassade extraordi-
naire en Allemagne, sur le sujet du mariage du Roy,
et estoit encore sur la frontière, lorsque Monsieur le
Prince fut pris ; dont ayant sceu la nouvelle, il écrivit
* René Potier, comte de Tresmes, gouverneur de Châlons en 1608,
gouverneur de Monsieur, capitaine des gardes du corps en 1611, con-
seiller d'Etat en 1629, duc et pair en 1648, mcstre de camp de cavale-
rie en 1652, gouverneur de Pont-Audemer en 1661, mort en 1670.
(Foy. P. Anselme, t. iv, p. 771.)
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214 JOURNAL INÉDIt
septembre m«. uîie lettre au Roy, assez: hardies, demandant comme
raison de cette action *. - ri
M. de Nevers ayant, depuis le refus de rentrée de
Châlonô, témoigné estre extrêmement ulcéré. Leurs
Majestés eurent avis dé divers endroits, qu'il assem-
bloit des trouppes, et refbsoit attache et rendez- vous
à ceux que le Roy fàisoit lever : Sur quoy, le traitté
estant arresté avec les autres Princes et Seigneurs,
on résolut d'envoyer une partie des forces de l'armée
du Roy en Champagne, sous la conduite de M. de
Praslin. Environ lequel temps, M. de Maroles^ vint,
lequel assura que tout ce que Ton disoit de M. de
Nevers, estoyent calomnies ; et que si on Vouloit y
envoyer quelqu'un, on le reconnoistroit. Sur* quoy,
le 15 octobre, M. de Luçon' fut envoyé vers M. de
Nevers, lequel n'y trouva point de gens de gueri*e,
et reviilt aveci de bonnes paroles.
La Déclaration du 17 janvier 1617, contre M. de
Nevers porte, qu'ayant passé Rheims, il y revint,
lorsqu'il scout la prise de Monsieur le Princèi assem-
* Foy, Merc, fr,^ p. 211, cette lettre du duc de Nevers.
2 Claude de MaroUes, lieutenant colonel des cent-suisses de la garde
du corps, capitaine des gendarmes et chevau-Iégers, maréchal de camp
des armées de Champagne, de Picardie et de Piémont, mort en 1633.
Il était père de Michel de Marolles, abbé de Villeloin, à qui Ton doit
un grand nombre d'ouvrages, des Mémoires intéressartts, et la célèbre
collection d'estampes qui est une des richesses du dépôt de la Biblio-
thèque impériale. (Voy, Moreri, t. vu, p. 268.)
« Voy. Richelieu, p. 361 1 « Elle (la Reine) me fit l'honneur de me
choisir pour y Taire un voyage de la part de Sa Majesté, croyant que
j'avois quelque dextérité par laquelle je pourrois ménager son esprit
et le ramener à la raison ; mais tout cela fut en vain, car il n'en étoit
pas capable. »
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d'arnauld d'andilly. 215
bla les habitans, leur fit entendre qu'il se résolvoit septembre i«i«.
de lever six cens chevaux et quatre mil hommes de
pied, proposa aux esleus d'nnposer une partie de la
somme nécessaire pour les entretenir. Ce que ayant
refusé de faire sans commandement du Roy, il offroit
d'en faire l'avance, pourveu quMls consentissent la
levée, dont s' estant excusez, et remis aux trésoriers
de France à Châlons, il dit qu'il iroitdonc à Châlons,
sur ce sujet. - — • Envoya devant quelques-uns des
siens, qui demandoyent logis pour quatre cens che-
vaux, prirent deux hostelleries, proche des deux
principales portes de la ville, voulurent, contre la
coustume, marquer les maisons des chanoines, disant
qu'ils en avoyent besoin pour des seigneurs de qua-
lité. L'entrée de Châlons. ayant esté refusée audit
sieur duc de Nevers, il sortit quelque temps après
de Rheims*.
17. M. le comte d'Auvergne envoyé M. des Cures,
et part le lendemain matin, pour aller à Meaux *.
23. M. de Souvré part pour aller à Chinon, le-
quel fut depuis rendu par Rochefort, moyennant
quatre-vingt-dix-mil livres, et M. Delbene en eut le
gouvernement*.
24. M. de Guise et M. le Prince de Joinville
* Vùy. Mètc, fr,^ p. 249, la lettre du duc de Nevers au Roi, au sujet
4n reftis qui lui fut fait de le recevoir à Cb^ons. (roy, aussi Fentenaji^
Mareuil, p. 359 et suiv. ; Pontchartrain, p. 170.
2 yoy. Merc, fr,, p. 249.
» yoy. Merc, fr.^ p. 272. Suivant le récit du Mercure^ Rochefort ne
voulut aucune récompense pour la reddition de Chinon. (r&y, Fontenay-
Mareuil, p. 356 ; Richelieu, p. 860 ; Pontchartraio. p. ITI.
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216 JOURNAL INÉDIT
Septembre 1616. viennent à Paris trouver le Roy, et M. de Chanvalon
avec eux \
La nuit d'entre le samedy au dimanche, environ
minuit et demy, on mena Monsieur le Prince du
Louvre à la Bastille, pendant une très-grande pluye.
11 y avoit cinquante chevaux devant, conduits par
M. de Thémines^
Ledit jour samedy, M. de Rohan s'en va en Poi-
tou, ayant obtenu payement des cent mil livres qui
luy avoyent esté promis, après l'affaire de Saint-
Jean-d'Angely.
27. M. de Guise retourne à Soissons, trouver les
Princes, avec bonnes réponces de Leurs Majestez.
M. de Joinville demeure à Paris.
M. de Sully s'en va chçz luy, pas trop content.
M. de la Chastaigneraye, capitaine des Gardes de
la Reyne-mère, meurt. M. le marquis de Thémines
a sa charge.
29. M. de Guise revient de Soissons, après avoir
entièrement fait résoudre le Traitté à Messieurs les
Princes, lesquels s'en retournèrent chacun chez soy.
Rameine avec luy M. le cardinal de Guise. — Il
n' avoit rien fait signer, pour ce que la Reyne ne
l'avoit désiré ; mais depuis, ayant esté conseillée de
les faire signer, on parla que M. de Guise y retour-
neroit. Toutefois, M. de Thianges y fut seulement
envoyé, et M. de Boissise aussi, à cause que M. de
* Voy. Merc, fr.^ p. 258 ; Richelieu, p. 359 ; Pontchartrain, p. 168.
2 Foy, Merc, fr,^ p. 258 ; Pontctiartrain, p. 169 ; Bassompierre, p. 129.
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d'arnaold d'andilly. 217
Guise eust eu trop de peine à les voir tous, estant
séparez comme ils sont, et éloignez les uns des
autres. — On tient qu'ils ne se sont tous accommodez
que par force, et pour ce qu'ils n'avoyent point moyen
de lever des hommes, à cause que tous ceux dont ils
pouvoyent faire estât, estoyent en Savoye, et que le
Duc de Savoye se voyant pressé de deux armées du
Roy d'Espagne, l'une de quarante mil hommes du
costé du Piémont, et l'autre de vingt mil honmies
du costé de la Franche-Comté, conduite par M, de
Nemours \ il ne souffroit sortir de son service un
seul soldat françois (dont il avoit le nombre de vingt
mil au moins) , mais faisoit. pendre tous ceux qui se
débandoyent, et pour cet effet, faisoit garder les
passages dfes montagnes ^
St^ptembrc iet6.
2. M. le Maréchal d'Ancre revient à la Cour,
accompagné de quantité de Normans. On dit qu'il
entra par la porte Saint-Honoré , et que le peuple
luy donnoit tout haut infinies malédictions. On dit,
qu'ayant salué la Reyne dans la cour du Louvre,
lorsqu'elle descendit de carrosse, elle luy dit qu'il
estoit gras, et qu'il avoit bon visage, et que sur cela.
Octobre
* Henry de Savoie, I*' du nom, duc de Nemours, né en 1572, élevé à
la cour du duc de Savoie, commanda ses armées, s'empara du marqui-
sat de Saluées, fut du parti de la Ligue, ût la guerre en Dauphiné en
1591, s'accommoda avec Henri IV en 1596, eut un différend avec le duc
de Savoie en 1615, fit sa paix avec lui en 1616. Il mourut en 1632.
* Voy, Merc, fr.^ p. 259 et suiv., les treize articles présentés par le
doc de Guise au Roi, au nom des Princes, et les réponses du Roi. Ces
articles étaient relatifs à l'exécution de quelques clauses du Traité de
Loudun. Voy, Kontchartrain, p. 168.
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218 JOURNAL INIÉDIT
Octobre 1616. il luy répondit : Estr-ce pour cela que vous m'avez
envoyé quérir si viste \
4. La Reyne remet M. le Maréchal d'Ancre avec
M. de Guise. On dit qu'ils se firent froid à l'abord ;
et qu'après, Monsieur le Maréchal ayant esté recon-
duire M. de Guise jusques à son carrosse, M. de
Guise luy dit : c'est un excès d'honnesteté à M. le
Maréchal d'Ancre que, de vouloir mesme faire les
honneurs du Louvre. — M. le Prince de Joinville et
le cardinal de Guise ne se raccommodèrent point lors
avec M. le Maréchal d'Ancre. — Par le Traitté avec
les Grans , M. de Longueville remit Péronne, et on
acheta Han cent mil livres de M. le Vicomte de Bri-
gueil *, pour le luy bailler.
7. Leurs Majestez recourent avis par le retour de
M. de Boissise, de la signature de la paix; par tous
les Grans. M. de Ne vers continuant néantmoins à
faire plusieurs choses en Champagne, contraires au
service du Roy.
Le matin, M. le Maréchal d'Ancre vint à la Direc-
tion ; après leur avoir parlé quelque temps , il leur
dit, qu'ils ne laissassent pas pour luy de continuer
comme ils avoyent commencé ; et se tint là trois
quarts d'heure, les écoutant rapporter.
Enviroi} ce jour, M. TAmbassadeurdesHayess'en
< Voy, Pontchftrtrain, p. 169.
^ Louis de Crerant, vicomte de Brigueil, puis marquis d'Humières,
chevalier des ordres en 1619, conseiller d'Etat, capitaine de cinquante
hommes d'armes et des cent gentilshommes de la maison du Roi, gou-
verneur de Ham, puis de Compiègne, mort en 1648.
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d'arnauld d'andilly. 219
alla. Environ ce temps, arriva la broûillerie entre octobre leie.
M. d'Epernon et ceux de la Rochelle, qui sçachant la
prise de Monsieur le Prince, se saisirent de Roche-
fort, maison de M"^ de Loseraye, située sur la Cha-
rente, à cinq lieues de la Rochelle, et à.... deTem-
bouchure de la Charente. M. d'Epernon qui se
prétend gouverneur de la Rochelle et du pays d'Au*
nix (Messieurs de la Rochelle soutiennent le con-
traire, et dient, que c'est le Maire qui en est Gouver-
neur, et que les provisions de M. d'Epernon ne peu-
vent préjudicier à leurs privilèges) envoya diverses
fois dire à celuy qui commandoit dedans, qu'il eust à
sortir ; à quoy il fit réponce qu'il y avoit esté mis par
le Maire de la Rochelle, Gouverneur du païs d'Aunix.
Messieurs de la Rochelle voulant avoir le chemin
libre, depuis la Rochelle jusqu'à Rochefort, envoyè-
rent un grand vaisseau hollandoîs sur la Charente.
M. d'Epémon ayant envoyé visiter ce vaisseau et
le capitaine par deux gentilshommes, avec charge, à
ce (Jue disent ceux de là Rochelle, de gagner ledit
capitaine , les dits gentilshommes furent arrestez, et
menez à la Rochelle, où ayant esté enquis sur plu-
sieurs choses, ils furent renvoyez à M. d'Epernon ^
lequel estant indigné tout ce qui se peut, jetta des
hommes en garnison dans Surgères proche de....
lieues de la Rochelle ' , afin d'incommoder les ha-
bitans de la Rochelle ; et les choses s' estant de plus
en plus aigries, M. d'Epernon mit deux mil cinq cens
* A quatre lieues de la Rochelle, suivant le Merc, fr.
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220 JOURNAL INÉDIT
Octobre J6W. hommes de pied en campagne, et six ou sept cens
chevaux, et ainsi, incomraodoit fort ceux de la Ro-
chelle, lescpiels M. de la Trémoille voulant assister,
les alla trouver avec deux cens chevaux. Mais, estant
trop foible, il fut contraint de se tenir dans les mu-
railles de la Rochelle. Sur la fin d'octobre, le Roy en-
voya M. de Boissise, qui vit premièrement M. d'Eper-
non, duquel il tira parole qu'il désarmeroit, en mesme
temps que Messieurs de la Rochelle désarmeroyent.
Après, il fut à la Rochelle, où il fit une grande et très-
belle harangue en l'assemblée de Thostelde ville, qui
fit venir les larmes aux yeux à plusieurs habitans.
Enfin, il les disposa à tout ce qu'il désiroit, et receut
d'eux de très grans honneurs. Et ensuite, ils désar-
mèrent et remirent Rochefort entre les mains de la
Brosse, exempt des Gardes. Ensuite, M. d'Epemon
désarma aussi. — On tient qu'il y avoit des lettres
patentes pour le déclarer criminel de lèze Majesté,
s'il y eust manqué, et que M. de Thoulouse son fils
fut l'en avertir. Cecy fut au commencement de no-
vembre.
Il s'est trouvé depuis, que M. d'Epernon n' avoit
pas encore désarmé, mesme le dernier novembre, que
M. de Boissise estoit déjà de retour , tellement que
l'on résolut d'envoyer vers luy M. de Vignolles \
7. M. le Comte d'Auvergne estoit prest à faire
passer la rivière d'Oise à la plus -grande partie de
^ Voy,^ sur le différend entre les Rocbelois et M. d*Epemon, le Jferc.
/V., p. 272-300 ; Pontcbartrain, p. 172.
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d'arnauld d'andilly. 221
l*armée du Roy, pour aller charger huit cens hommes octobre hi«.
de pied et cent cinquante chevaux , que M. de Lon-
gueville avoit vers Roye, lorsqu'il receut avis que
tout le traitté estoit conclu, et que, partant, il n'eust
plus rien à entreprendre.
Environ ce temps, il fit faire monstre à l'armée, et
faisoit luy-mesme écrire par son secrétaire le nombre
d'hommes de chaque compagnie, tant d'infanterie que
de cavalerie, et les comptoit luy-mesme.
12. M. Barbin dit à Messieurs du Conseil des
finances, au sortir de la Direction, que la Reyne avoit
perdu une robbe valant soixante quinze mil écus, au
pillage de la maison de M. le Maréchal d'Ancre ;
que Monsieur le Maréchal avoit aussi fait plusieurs
grandes pertes ; que pour les récompenser la Reyne
luy avoit commandé de faire signer un comptant
de cent soixante quinze mil écus. — M. de Chevry
répondit : C'est bien peu. M. le président Jeannin
dit ; Puisque la Reyne l'a commandé, il le faut faire.
— Depuis, la dite somme de cent cinquante mil écus
fut employée dans un comptant, pour payer trois cent
mil livres sur Rouen, et cent cinquante mil livres sur
Caen, des deniers de 1617.
On dit que le Maréchal d'Ancre, voulant pouvoir
dire que le Roy l'avoit entendu, il luy dit qu'il avoit
beaucoup perdu pour son service, au pillage de sa
maison, et qu'il le supplioit de luy faire donner
quelque récompense; que sur cela, le Roy le laissa, et
s'jen alla, que Monsieur le Maréchal luy dit : Vostre
Majesté ne me dit rien ; et que le Roy luy répon-
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222 JOURNAL INEDIT
Octobre m«. dit : Entendez-voug pas bien ce que je vous dis? —^
On dit au^i que lorsque le R6y sceut que l'on avoit
baillé les dits cent cinquante mil écua à M. le Ma-
réchal d'Ancre, il dit : On dit qu'il n'y a point d'ar-
gent à l'Espargne lorsque je veux faire donner des
ordonnances de trente francs; mais on trouve bien
quatre cent cinquante niil livres pour le Maréchal
d'Ancre.
Environ le 19. M, de Luynes achète la charge
de Grand Fauconnier quarante cinq mil écus. — On
dit qu'il bailla six mil écus h M. de la Rochefoucaud,
pour sa prétention des oiseaux du Cabinet.
19, Le Roy se trouve mal d'une fort grande co-
lique, qui luy donne quelques jours des tranchées.
M. Héroûard* estoit lors à Vaugrigneuse. On se
voulut servir de cette occasion pour luy faire un mau-
vais office.
25. En vertu de lettres patentes du Roy, le Parr
lement s'assemble, pour vérifier les Déclarations faites
sur l'innocence des Grans, qui ont assisté Monsieur le
Prince, et celle sur la prise de Péronne par M. de
Longueville ".
26. M. le Maréchal d' Ancre va, pour la deuxième
fois, à la Direction. Leur dit, qu'ils'ennuyoit dans la
Cour, et qu'il les estoit venu voir ; discourt avec
^ Jean Héroard, premier médecin et conseiller du Roi. Il fut médecin
des rois Charies IX, Henri III, Henri IV et Louis XIH. Il a écrit plusieurs
ouvrages, et, antre autneç, un journal inédit de la santé du Roi, dont la
publication a été plus d'une fois «innoncée.
* Voy, ces lettres-patentes, 3ferc, fr.^ p. 26/i-270. Voy. aussi Mém.
de M. Mole, p. 137.
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d'arnauld d'anpilly. 323
M. Desfontaines-Boûer , touchant Maillac, roué à Fon- oetohn leie.
tainebleau, il y a quatre ou cinq ans. —M. Mangot,
M. Mazurier..,
M. le Maréchal d'Ancrç commença environ ce
temps à faire dresser des lettres d'érection du mar-
quisat d'Ancre en duché-pairie, Il se trouva qu'il n'y
avoit point de sûreté à cause que la terre est à sa
femme, et que son fils qui, après la mort de sa mère,
fust devenu seigneur d'Ancre, et par conséquent Duc
et Pair, à cause que c'est une dignité réelle, luy eust
disputé son rang ; comme aussi les Ducs et Pairs
reçus depuis luy et les Maréchaux de France , non
Ducs et Pairs le luy eussent disputé. — A quoi le seul
remède estoit de faire comme avoit fait feu M. de
Nevers (habile homme et qui avoit toujours près de
luy trois des plus habiles advocats du Parlement), en
l'érection de... en duché-pairie, qui est d'acheter une
terre relevant du Roy et du marquisat d'Ancre, l'unir
audit marquisat, et énoncer par les lettres, que l'un es-
toit à M. le Maréchal d'Ancre, et l'autre à Madame la
Maréchale, et que le Roy les érigeoit conjointement en
duché-pairie ; ce qui estant, et le mary et la femme
demeureroyent chacun Duc et Pair durant leur vie,
28. M. de la Chevalerie lieutenant de l'artillerie
en l'arcenal de Paris, meurt. —La Reyne donna la
charge à M. de la Motte son Écuyer. M. Desmarests,
qui l'avoit demandée, et disoit avoir la nomination de
M. de Sully, se veut battre contre luy. On luy baille
des Gardes. Depuis, on les accommoda, avec pro-
messe à M. Desmarests de faire pour luy.
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224 JOURNAL IIS]lÎDtT
Octobre leifi. 31. Le Roy extrêmement malade. S'estant cou-
ché sur les trois ou quatre heures après midy. et le
rideau estant tiré, le jeune Béringhen *, premier va-
let de chambre, entendit un grand ralement, et ca-eust
que c'estoit un chien qui dormist ; et ayant regardé
deux ou trois fois , partout avec un autre valet de
chambre qui estoit là, enfin ils ouvrirent le rideau du
Roy, et trouvèrent que c'estoit luy. Dequoy, extrême-
ment effrayez, ils allèrent chercher M. Héroùard,
qui estoit dans la cour ; et estant arrivé il jetta le Roy
hors du lit, et commença à le promener, et un valet
de chambre luy voulant mettre un doigt en la bouche
pour Tempescher de la fermer, il le luy tronçonna.
Après, on luy bailla un manche de cuiller, quMl serra
si fort qu'il se fit saigner les dents. Enfin, on le fit re-
venir de cette espèce d'apoplexie, que M. Héroùard
dit n'estre qu'une mauvaise vapeur des intestins.
Un valet de chambre s'en alla dire cette maladie
avec effroy à la Reyne-mère, qui estoit à Vespres aux
Feuillans. MM. Piètre et Seguin, médecins de Paris,
. furent appelez pour conseil *.
On continua de vouloir faire de mauvais offices
à M. Héroùard, lequel, voyant le Roy guéry, luy fit
demander son congé par M. de Luines, dont le Roy
se fascha extrêmement, et dit qu'il ne souffriroit ja-
mais qu'il le quittast*.
* Pierre de Béringhen, seigneur d'Ârmainvilliers, premier valet de
chambre du Roi.
2 roy, Fontenay-Mareuil, p. 359; Pontchartrain, p. 178.
» Voy. Richelieu, p. 369.
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d'arnaold d'andilly, 225
Temps incertain. On traitte avec M. d'Arquien '
pour le gouvernement de Calais à quatre-vingt mil
écus dont on luy baille quarante mil écus comptans;
on tient que c'est pour M. le Maréchal d'Ancre. De-
puis, le traitté fut rompu, et M. le Maréchal de Thé-
raines eut les quatre-vingt mil écus ^.
En ce temps, aimi que j'estime, M. de Lesdiguières
passe les monts avec huit mil hommes de pied et huit
cens chevaux et va secourir M. de Savoye. 11 écrivit
à un de ses amis, que bien qu'il ne fust que simple
Gentilhomme, néantmoins, leRoy luy avoit fait l'hon-
neur de l'obliger à maintenir le Traitté d'Ast entre
Espagne tît Savoye ; qu'il alloit pour cela, et que s'il
ne mourroit, il feroit tenir la pai'ole au Roy d'Es-
pagne. On dit qu'on luy a prédit qu'il gagnera une
bataille en Piémont, et puis, qu'il y mourra.
Ocrobie 1616.
Environ 7 ou 8. On changea les officiers de Mon-
sieur le Prince, et on le fit servir par des officiers du
Roy, dont il témoigna au commencement un déplai-
sir extrême, avec des fureurs et désespoirs merveil-
leux, disant, qu'on le vouloit empoisonner, et qu'il
se laisseroit plustost mourir de fahn. Incontinent
qu'il eut faim, il mangea deux œufs, et tost après, il
se mit à manger, et fut aussi gaillard comme aupa-
ravant, se réjouissant sur ce qu'il ne vivoit plus à
ses dépens ; et au lieu de deux pièces de rosty, et
Novembre.
* Jean-Jacques de la Grange, seigneur d'Arquien, gouverneur de
Calais en 1610.
3 yoy. Pontchartrain, p. 188.
15
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226 JOURNAL INÉDIT
Novembre 1616. autaiit de bouîlly, qu'il avoit à chaque repas, il en
demanda quatre*.
Jours de Conseils changés. MM. les Secrétaires
d' Estât prirent le mercredy et vendredy matin, pour
Conférer avec MM. les Ministres, et de là, aller chez
la Reyne. Et au lieu de ces deux matinées, qui
estoyent Conseils de Direction, on prit les mardis
et jeudis après-midy, pour la Direction.
9. Exécution de Boursier, pendu à la Grève, et
après, brûlé. Il estoit chevau-léger de la Compagnie de
Monsieur le Prince, et un jour qu'il estoit dans le Jeu
de Paume de Béquet, au faubourg Saint-Germain,
ayant sceu que la Reyne alloit à Luxembourg, il
alla chez luy, banda un pistoUet, y mit deux balles,
et y estant allé, comme il estoit prest de tirer, pour
la tuer, M. le Cardinal de Guise survint, qui se mist
entre deux ; et après, comme il chçrchoit son temps
pour faire son coup, lorsque la Reyne entreroit en
carrosse, M. de Bassompierre survint, et tant de gens,
qu'il ne put. Ainsi, il se retira, et s'en alla chez une
Demoiselle, logée audit faubourg, nommée Durfort
et l'ayant trouvée fort affligée, à cause qu'elle estoit
accordée au Premier Brigadier des Gardes de M. le
Prince, lequel s'en estoit allé après la prise de son
maistre, il luy dit, devant une sienne nièce, qu'elle
ne se fâchast point davantage , qu'il les vengeroit
bientost, et qu'il ne s'en estoit guères falu que le
coupn'eust esté achevé cette mesme après disnée;
* Voy, Merc. fr.yp, 305 ; Fontenay-Mareuil, p. 361 ; Richelieu, p. 374.
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D^ARNACLD d'ANDILLT. 227
et qu'aussi bien il estoit désespéré, et résolu de Novembre i6i«.
mourir, après l'avoir fait. Puis il leur conta ce qui
s*estoit passé, ce que Tune d'elles ayant dit à un Au-
mosnier de M"*' de Mercœur *, il en avertit M. le Ma-
réchal d'Ancre, qui le dit à la Reyne, laquelle fit
prendre Boursier par Défontis. On fit expédier Com-
mission à Messieurs du Chastellet, pour le juger pré -
vostalement; et les Lieutenans Civil, Criminel et
Particulier, et xi autres Conseillers firent le procès.
Il dénia tout. Les deux femmes soutinrent tout, et
ne varièrent jamais. Enfin, il fut condamné sur les
conjectures, et ordonné qu'avant d'estre exécuté, il
auroit la question, à laquelle deux Conseillers assis -
teroyent. Ils y voulurent estre tous, et en leur pré-
sence, il dit, que puisqu'il faloit mourir, il diroit tout :
Et ensuite, avoua tout, et le signa, comme aussi firent
tous les juges, et à l'eschelle, il confessa tout. Son
père avoit quitté la marchandise de soye, et a vaillant
cent mil écus. 11 avoit plaidé contre luy, et l' avoit battu
deux fois. Après la prise de Monsieur le Prince, sur
les défences faites à tous les siens de demeurera
Paris, où il avoit fait, à trois personnes, qu'il a nom-
mées depuis pour enlever, ou tuer la Reyne, et
la paix estant faite^ il estoit revenu à Paris. Il trouva
au logis où il alla chez la Demoiselle de Durfort^
l'abbé de la Trinité, oncle de ladite Demoiselle, le-
quel il fit tant qu'il fit sortir de la chambre, et puis
* Marie de Luxembourg, duchesse de Penthièvre, veuve de Phi-
lippe-Emmanuel de Lorraine, duc de Mercœur, mort en 1602. Elle
mourut en 1623.
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228 JOURNAL INÉDIT
Novembre leie. dit à ces feiiimes qu'il avoit des choses à leur dire,
dont elles seroyent bien réjouies *.
M. de Lassay ^ envoyé (par le moyen de M, Bar-
bin, qui le vouloit favoriser), vers M. le Grand, pour
le disposer à ne point empêcher le passage de M. de
Nemours en Savoye, avec les forces que le Roy d'Es-
pagne avoit sous sa conduite, en la Franche-Comté.
Frésier, ambassadeur de Savoye, découvre ce voyage,
prend la poste, atteint M. de Lassay, luy dit, qu'il
avoit appris de M. Barbin le sujet de son voyage,
et qu'il luy avoit dit, que s'il pouvoit raccommoder
M. de Nemours avec M. de Savoye, il feroit un ex-
trême service au Roy, et qu'il estimoit qu'il en rece-
vroit bientost la dépesche. Enfin, il fit en sorte qu'il
porta M. de Lassay à entreprendre cet accord, lequel
on fit ensuite, y ayant employé toute la créance qu'il
luy avoit baillée. Cela s'estant sceu icy, l'Ambassa-
deur d'Espagne en fut en une furie extrême, et lors-
que Lassay fut de retour, menaça de le tuer, et le
contraignit de s'en aller de Paris. La Reyne , et
M. Barbin en furent aussi en une extrême colère. Il
dit, pour s'excuser, que les Espagnols , au lieu de
prendre un passage court, et par lequel (suivant le
commandement qu' avoit M. le Grand de faire comme
semblant de se boucher les yeux, pour ne les pas voir,)
ils fussent plus tost passez que l'on ne s'en seroit ap-
* yoy. Merc. fr.^ p. 303 i Richelieu, p. 373.
ï M. de Lassay, conseiller d'Etat. Suivant Richelieu, cet envoy»i
était Lais»», trésorier de France à Bourges. {Foy. Richelieu, p. 377.)
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d'abnauld d'aisdilly. 229
perceu, ils avoyent voulu en prendre un par lequel Kovemhrf i6i«.
il y avoit plus de dix journées d'armée de chemin,
et dont le passage estoit à travers une ville où le
Roy tient Garnison, et que luy, leur avoit offert trois
passa ges. Mais le mal est que ledit S' de Lassay ne
peut nier d'avoir esté présent, lorsqu'on a traitté de
l'accord avec M. de Nemours. M. Barbin m'a dit
que M. de Lassay avoit pris de l'argent du duc de
Savoye \
Madame de Nevers, voulant aller à Rheims, (pour,
disoit-elle, y faire ses couches,) M. de la Vieuville
lieutenant du Roy audit baillage, luy manda qu'il la
supplioit très-humblement de n'y point venir. Sur
cela, elle se mit en colère, et ne laissa de passer
outre, et fit dire, tant à luy qu'aux habitans de
Rheims, qu'elle estoit la Gouvernante de la Province,
et qu'il n'avoit aucun pouvoir où elle estoit. Elle
estoit en litière, et n'avoit que quatre hommes de
cheval avec elle. Estant arrivée à la porte de la ville,
M. de la Vieuville, appuyé sur la barrière, luy fit la
révérence, un genou en terre, et luy dit, qu'il eust
voulu qu'il luy eust cousté un bras, et n'avoir point
le commandement qu'il avoit de ne la pas laisser en-
trer ; mais qu'il estoit obligé d'obéir aux volontez du
Roy. Elle luy répondit, que c' estoit un menteur, la-
* f^oy. Merc, fr,^ p. 395, le traité de paix conclu le 14 décembre 1616
entre le duc de Savoie et le duc de Nemours. Voy, aussi le âTerc, fr,^
p. 371 et suiv., le récit de la lutte entre le^^uc de Savoie et le Roi
d'Espagne, et les négociations auxquelles elle donna lieu. Conf. Fonte-
tenay-Mareuit, p. 362; Richelieu, p. Zlh\ Pontchartrain, p. 150, 186,188.
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230 JOURNAL INÉDIT
Novembre i6i«. qucUc parole elle répéta quatre ou cinq fois, et qu'elle
savoit bien qu'il n'avoit point ce commandement-là.
A quoi il répliqua, un genou en terre, qu'il eust
voulu qu'il luy eust cousté un bras, et n'estre point
refuser la porte. Sur quoy, elle, luy ayant dit plu-
sieurs paroles très-aigres, enfin, elle se retira.
Incontinent après, M. de la Vieuville, et les habi-.
tans de Rheim^, envoyent demander un aveu au
Roy, de ce qu'ils avoyent fait, lequel leur fut baillé.
On tient pour certain que M. de Nevers avoit fait
son intelligence si forte dans Rheims, que Madame
de Nevers estoit capable de s'en rendre maistresse,
et mesme un des siens, G. de Th. a dit, que les
habitans de Rheims luy avoyent écrit qu'il les vint
délivrer de la tyrannie de M. de la Vieuville.
Après le refus de Rheims, Madame de Nevers alla
à Troyes, où elle fut reçeue sans crainte, à cause
que tous les habitans sont très bons serviteurs du
Roy. De là, elle alla à Nevers, faire ses couches. On
dit que les habitans de Troyes l'avoyent priée de se
retirer après qu'elle eust demeuré quelques jours
dans leur ville.
La Déclaration contre M. de Nevers, de 1617,
porte que ladite dame .fit commandement aux habi-
tans et au Lieutenant de la ville de Rheims, de se
saisir de M. le Marquis de la Vieuville *.
Le Roy va à Saint-Germain, avec la Reyne Re-
* Voy. Merc,^ fr., p. 306; Fontenay-Mareuil, p. 359 et suiv. ; Riche-
lieu, p. 362 : Pontchartrain, p. 182.
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d'arnauld d'andilly. 231
gnante, d'où il revint le vendredy en suivant. Il de- Novembre i«i6.
meure des Compagnies du Régiment des Gardes
auprès de la Reyiîe-mère, laquelle, quelques jours
auparavant, trouva bon d'estre servie, par chacun
quartier, par cinquante Gendarmes de sa Compa-
gnie. Elle fit difficulté de s'y raidre, pour ce qu'elle
avoit résolu de se faire servir par ses chevaux-lé-
, gers. M. de Fossez surmonta cette difficulté , en
offi-ant de servir pour rien , c'est-à-dire, sans avoir
reçu par jour de récompense.
18. 11 vint nouvelle au Roy, que le mercredy 15,
M. de Nevers, avec cent ou cent vingt soldats, avoit
fait piller la maison de Si, appartenant à M. de la
Vieuville, et qu'il menaçoit de la raser. A l'instant
mesme on dépescha un exempt, nommé Barenton,
à Jl. de Nevers, avec une lettre fort expresse, et
fort ferme, portant, que Sa Majesté vouloit qu'il
fist réparer le tort fait à M. de la Vieuville, jus-
qu'à ce qu'il en fust content. Qu'autrement, il le
déclaroit criminel de Lèze-Majesté, et que ce bas-
ton seroit suivy de plusieurs espées. Et au mesme
temps, on donna aussi charge à M. de Praslin, de
partir, pour s'en aller droit en ladite maison, et où
estoit M. de Nevers, avec la Compagnie de la
Reyne, celle de Monsieur, et quelques autres de
Cavalerie, les Régimens de Vaubecourt, et de Beau-
mont, et les Suisses qui estoyent en Champagne.
Suivant ce Commandement, M. de Praslin, et M. de .
Fossez partirent le lendemain matin. La Reyne dit
à M. de Fossez , que quand il luy verroit couper
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232 JOURNAL INÉDIT
Ji^^^fn^rv ifiifi.' la gorge , il ne s'y employast pas avec plus de
courage.
Si, est une maison forte, où M. de Si n'avoit qu'un
receveur, lequel deux hommes de M. de Nevers ayant
fait venir sur le Pont, pour parler à eux, ils se rendi-
rent maistres de la Place, et le soir, y firent encore
venir huit soldats, et puis soixante ou quatre-vingt
le lendemain, et jusques à cent ou six vingts.
Est à remarquer, que la saisie, et establisseriient
de commissaire, ne furent faits par M. de Nevers,
que quatre ou cinq jours après la prise de la maison,
et lorsquMl sçeut que l'exempt y venoit.
Lorsque l'exempt arriva la première fois à Si,
celui qui y estoit luy offrit de luy remettre la maison,
pourveu qu'il le fist décharger de ce qu'il avoit esté
establi commissaire à la garde des fruits; ce que
l'exempt ne voulant faire, il alla trouver M. de Ne-
vers, lequel luy tint les paroles qui ont tant offencé
la Reyne. — Lorsque l'exempt somma celuy qui
commandoit dans Si, il menaça les soldats de les faire
pendre, et ils jetteront tous leurs bandoulières.
La deuxième fois que l'exempt retourna. Si luy fut
remis entièrement entre les mains. Ledit Baraton
s' estant troublé l'esprit, par l'appréhension qu'il prit
des menaces de M. de Nevers, lequel dit, quMl luy
feroit couper la langue; on luy bailla des Gardes, les-
quels, ayant oublié de luy ester un petit étuy, il se tua
d'un coup de canif dans le cœur, le 18 décembre.
* Voy, Merc. fr.^ p. 307 ; Brienne, p. 319; Richelieu, p. 362; Pont-
chartrsdn, p. 186.
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d'arnauld d'andilly. 233
19. M. le Président Jeannin va pour la pre- Ko>rmbre ifli*-.
mière fois, au Conseil de la Direction, chez M. Bar-
bin, où les huissiers du Conseil a voient leurs chaînes
d'or. Il n'y retourna plus depuis.
21. Bompar, premier page qu'ayt eu le Roy,
assassiné par un qui avoit esté page de M"' la Maré-
chale d'Ancre, appelé Cusac, auquel, et à un de ses
Compagiîons, nommé qui estoit de l'assas-
sinat, M. le Maréchal d'Ancre a donné à chacun une
compagnie au régiment de Normandie.
M. de Blérancourt* présenté par M. Arragon fait
serment au Parlement, de la charge de Bailly et
Gouverneur de Péronne, Montdidier et Roye, qu'il
avoit achetée, soixante mil écus de M. le Maréchal
d'Ancre.
28. M. de Marillac*, lieutenant de la Compagnie
> Bernai d Potier, seigneur de Blérencourt, cornette général de la
cavalerie légère en 1600, gouverneur de Fougères en 1598 et en 1605,
de Langres en 1602, de Pont-Audemer en 1605, lieutenant-colonel de
la cavalerie légère en 1609, conseiller d'Etat en 1614, vice-amiral et
capitaine des côtes de Normandie en 1615, gouverneur de Péronne,
Montdidier et Roye en 1616, maréchal de camp en 1621, mestre de
camp dMn(anterie en 1625, lieutenant-général de la cavalerie lég{>re,
mort en 1662. {Votj. P. Anselme, t iv, p. 770 )
< Louis de Marillac, né en 1573, sous-lieutenant des gendarmes de
Monsieur, ambassadeur en Italie en 1611, commissaire général des
camps et armées en 1617, maréchal de camp au siège de Montauban
où il fut blessé en 1621, capitaine lieutenant des gendarmes de la
Reine-mère, lieutenant-général aux évéchés de Metz, Toul et Verdun,
gouverneur de Verdun en 1625, se signala au combat de Tîle de Ré, au
siège de la Rochelle, à la prise de Privas, maréchal de France en 1^29,
commandant de Tannée d'Italie en 1630, arrêté comme un des chefs
du parti de la Reine-mère en 1630, condamné à mort par commissaires
dans le château du cardinal de Richelieu à Rueil, et exécuté en place
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234 JOURNAL INÉDIT
Novembre 1816. de Gendarmes de Monsieur, envoyé en Champagne,
pour revenir en diligence, apporter nouvelle si M. de
Nevers avoit obéy ; afin qu'au cas qu'il ne l'eust fait,
le Roy partist en diligence, pour aller en personne à
Rheims.
M, de MaroUes assure la Reyne, sur sa vie, que
M. de Nevers n' avoit fait autre chose que de saisir,
et établir Conmîissaire, par les voyes de Justice, en
la maison de M. de la Vieuville, à cause de devoirs
Seigneuriaux non rendus.
M. le duc de Rohannois* se bat à l'épée seule,
près la porte Montmartre, contre M. de la Frézelière,
gentilhomme de Poitou, auquel il donne la vie, et
remporta son épée, qu'il luy renvoya après, par
M. de Varennes. La querelle venoit de ce que M. .de
Rohannois croioit que M. de la Frézelière eut emeû les
habitans de Poitiers contre luy, lorsqu'il fut contraint
d'en sortir, il y a environ deux ans, et que luy ayant
promis de l'amitié, il luy eut au contraire rendu de
mauvais offices auprès de la Reyne.
24. L'Exempt des Gardes, de retour de Cham-
pagne, rapporta, qu'il avoit trouvé des commissaires
établis par Justice, dans la maison de M. de la Vieu-
ville, avec dix ou douze soldats, et un honneste
de Grève le 10 mai 1632. Son frère, le garde des sceaux, mourut en
prison peu de temps après. (Voy. P. Anselme, t. vu, p. 479.)
1 Louis Gouffier, duc de Rouannois, né en 1575, capitaine de cent
hommes d'armes des ordonnances, gouverneur de Poitiers, pair de
France en 1612, conseiller d'Etat en 1614, accusé d^ complot ave« le
pripce de Condé et condamné à mort par contumace en 1631, mort
en 1642.
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d'aunauld d'andilly. 235
homme qui leur commandoit, pour garder ladite Novembre \m.
maison ; lesquels n'avoyent fait aucun desordre, et
avoyent payé tous les vivres qu'ils avoyent pris, et
luy avoyent offert de sortir de la place, et de la
luy remettre, entre les mains, puisqu'il avoit Com-
mission du Roy ; que quant à M. de Nevers, il luy
avoit dit toutes sortes de bonnes paroles, et usé de
toutes sortes de soumissions, pour ce qui concernoit
la personne et le service du Roy. Mais que quant à
la Reyne, il avoit dit, qu'elle l' avoit traitté, luy, et
les autres Grans absens de la Cour, ainsi que des
Esclaves ; qu'il estoit hors de sa tyrannie, et que
d'autres qui y estDyent encore, n'y serôyent plus,
possible dans trois mois; qu'il ne la verroit jamais
qu'en peinture ; et que si M. de Praslin alloit à luy,
avec dix mil honmies, il iroit au devant, avec vingt
mille. Avec plusieurs autres paroles contre la Reyne,
et le Maréchal d'Ancre.
J'ay ouy conter à M. Rarbin cette affaire, le
23 mars 1618, qui est, que se devant tenir conseil
chez Monsieur le Garde des Sceaux du Vair, pour
cette affaire de Si, la Reyne luy commanda d'y aller,
résolu de ne dire mot. L'affaire ayant esté rapportée
par M. de.... Monsieur le Garde des Sceaux dit,
qu'il estoit d'avis de renvoyer tout au Parlement,
M. de Villeroy dit, que l'affaire estoit de telle consé-
quence, qu'il estimoit qu'il la faloit retenir au Conseil, .
d'autant qu'autrement, ce seroit laisser opprimer un
gentilhomme qui n'estoit en cette peine, que pour
avoir servy le Roy. M. le Président Jeannin dit, qu'il
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Ktj^embrt lfl«.
236 JOURNAL INEDIT
faloit distinguer, en renvoyant au Parlement, ce qui
estoit de la saisie féodale, et retenant au Conseil ce
qui estoit de la saisie par armes. M. Mangot fit un
long discours. — Après, Tavis estant demandé à
M. Barbin, il dit, qu'il luy sembloit qu'il faloit remar-
quer une chose qui n'avoit point esté dite, qui estoit,
que la saisie féodale n'avoit esté faite que quatre ou
cinq jours après la prise de la maison ; sur quoy
M. du Vair dit : si vous pensiez nous porter à vos
conseils violons, vous vous tromperiez fort.
Voicy comme Ton conte cette affaire dans le monde.
La Reyne ayant assemblé le Conseil, commanda à
TExempt, de dire tout ce qui s'estoit passé, et tout
ce que M. de Nevers luy a voit dit. Il répondit.
« Madame, vous plaist-il que je die tout?» Elle dît,
« Oui. » Et après, il dit tout ce que dessus (grande
imprudence). Cela fait, la Reyne voyant que per-
sonne ne disoit mot pendant un fort long temps, elle
devint rouge, et en se levant, dit : Puisqu'il n'y a
icy personne qui veuille conseiller le Roy, il faudra
qu'il se conseille luy-mesme ; et aussitost, s'en alla
à la fenestre, et tourna le dos à la table où ils estoyent
tous assis. — On dit qu'incontinent après elle dit
qu'elle ne prendroit jamais conseil de M. le Garde
des Sceaux, de M. de Villeroy, et de M. le Président
Jeannin.
M. de Guise, dit, le lendemain, chez M. de Cré-
quy, que cela se passa ainsi, et que pour luy, il
n'avoit point de conseil à donner pour estre d'avis de
ruiner son Cousin germain, mais que quand on luy
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d'arnauld d'andillv, 237
commanderoit» il obéiroit contre qui que ce fust, Novembre me.
fùst-ce son père, et son grand-père , sMls estoyenl
au monde.
On tient pour plus certain, que T Exempt ayant dit
à la Reyne toutes les paroles dites contre elle par
M. de Nevers, lesquelles il n'avoit point mises dans
son procès-verbal fait en Champagne, elle iuy com-
manda de faire un autre procès-verbal, et de les y
mettre.
On dit que ledit Conseil fut un conseil debout, où
personne n'estoit assis, et qu'après que l'Exempt eut
leû le Procès-Verbal, la Reyne dit. Eh bien. Monsieur
le Garde des Sceaux, dites vostre avis. A quoy il ne
répondit rien. Et que pour la deuxième fois, elle Iuy
dit la mesme chose ; à quoy il répondit. Madame,
vous vous conseillerez avec vos plus particuliers ser-
viteurs. Sur quoy elle dit en colère, Guy, ouy, le Roy
s'en conseillera avec ses fidèles serviteurs. Et pour-
quoy pensez-vous donc qu'il vous eût appelle à la
charge où vous estes, sinon pour Iuy donner conseil ?
J'ay ouy conter à M. Barbin comme ce Conseil se
passa, qui est que la Reyne estant venue, et ayant
dit qu'elle vouloit que le Procès- Verbal fust leû, M. le
Garde des Sceaux dit, qu'il n'estoit pas besoin de le
lire, on lut ledit Procès-Verbal. Après, la Reyne dit à
M. le Garde des Sceaux, ce qu'il estoit d'avis que
l'on fist sur cela? Il'se retira un pas en arrière, et
ne répondit rien. La Reyne Iuy dit la mesme chose
pour la seconde fois, et il ne répondit encore rien et
se retira un autre pas en arrière. Et puis, la troi-
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238 JOORNAL INÉDIT
Novembre 1616. sièmc foîs, ayaiit demandé, si Ton ne vouloit point
donner conseil au Roy de ce qu'il fàlloit faire, il
ne répondit encore rien. Sur quoy, la Reyne se leva,
rouge, et en très-grande colère, et dit, qu'il n'estoit
point besoin de tenir Conseil, puisque l'on ne vouloit
pas conseiller le Roy.
Tous les Conseillers d' Estât d'épée, qui estoyent
présens, firent un murmure, et dirent tout haut, que
l'on leur demandast leur avis, et qu'ils le diroyent.
M. de Créquy (qui a un brevet de Duc et Pair)
eétant dans le Cabinet de la Reyne, demanda un siège
à l'huissier, qui luy répondit qu'il ne le pouvoit faire,
si on ne le luy commandoit. Sur cela, il s'addressa
à M. le Maréchal d'Ancre, qui estoit assis, et le pria
de luy en faire bailler un. Il luy répondit, qu'il ne
se mesloit point de cela. Après, il s'addressa à la
Reyne, laquelle ne luy fit pas meilleure réponse;
dont il demeura fort mal content.
Le matin, le conseil se tenant chez M. le Garde
des Sceaux, M. de Chevry luy dit, qu'il estoit besoin
de résoudre les Edits ; sur quoy il commanda qu'on
les luy apportast, et dit, on me les apporte comme
des bottes d'allumettes, et deux jours après, on me
les redemande scellez. Je ne vay pas si viste que cela,
car je veux avoir le temps pour les voir. Après, il
fit lire les Edits, et y remarqua des contradictions et
autres fautes.
Le mesme matin, M. Barbin luy ayant dit, que la
Reyne vouloit que l'on évoquast au Conseil l'affaire
d'entre M. de Nevers et M. le Marquisde la Vieuville,
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d'arnauld d'andillt. 289
il dit, que pour ce qui concernoit la mouvance féo- NoTcmbr^ m%.
dale, il ne le pouvoit faire, à cause que cela devoit
aller au Parlement. Sur quoy M. Barbin répondit.
Il faut tout évoquer, Monsieur, car ta Reyne le veut.
Il répliqua : Il faut, vous ne devez point parler par :
il faut : je say bien ce qu'il faut, et vous ne serez
pas mal, si vous rendez aussi bon compte de vostre
charge, que je feray de la mienne. M. Barbin répon-
dit, Vous me querellez en vostre maison, adieu !
La vérité est qu'au Conseil des affaires d' Estât,
tenu ledit matin chez Monsieur le Garde dœ Sceaux,
le Procès-Verbal touchant l'affaire de M. de Nevers
ayant esté leu, comme ce fut aux opinions, M. le
Président Jeannin fut d'avis de renvoyer au Parle-
ment, et comme M. Mangot alloit opiner, M. Barbin
prit la parole, et dit : Il ne faut pas juger de cette
affaire, comme d'une affaire de particulier à particu-
lier, mais comme l'affaire du Roy, estant facile à re-
connoistre que c'est le Roy qui y est offlencé, plus
que M. de laVieuville, premièrement en ce que cette
prise de maison a esté faite par cinquante soldats,
lesquels se sont saisis du chasteau, six ou douze heures
avant que l'on eust estably aucun commissaire par
justice; en second lieu, cette prise a esté faite incon-
tinent après le refus fait à M"' de Nevers par M. de
la Vieuville ; et en troisième lieu, M. de Nevers a
pris sujet de saisir ladite maison, sur la félonie qu'il
prétend avoir esté commise contre luy par M. de la
Vieuville, au refus qu'il avoit fait à.M"*' de Nevers,
M. Barbin ayant dit cela, M. le Garde des Sceaux
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240 JOUENAL INÉDIT
Novembre teie. prit la paFole, ct dit : Je ne veux pas, en suivant vos
conseils violens, estre Ministre d'iniquité. Il faut faire
venir de MM. du Parlement, qui soyent capables
de juger de cette affaire. M. Barbin répliqua : Mon-
sieur, je suis très-homme de bien, et parler de con-
seils violens, c'est toucher le Roy et la Reyne. Vous
me querellez en vostre maison. Adieu, monsieur *.
25. Sur les cinq heures et demie du soir, M. le
marquis de la Force et de Loménie % allèrent trouver
M. le Garde des Sceaux, M. de Loménie luy dit, que
le Roy le prioit de l'aller trouver, et de luy faire ap-
porter les Seaux. Il répondit, avec unWisage gay et
résolu : Ouy, ouy; allons vistement, et en mesme
temps demanda les Sceaux et ût mettre les chevaux
au Carrosse. Entrant dans le cabinet, comme il vid que
Ton faisoit difficulté de laisser entrer le S' Du Mas,
qui portoit les Sceaux, il dit : Laissez-le entrer; il a
affaire icy. Et ayant trouvé le Roy et la Reyne dans
le petit Cabinet, où se trouvoyent aussi M. de Guise,
M. le Maréchal d'Ancre, M. de Loménie II mit
les deux genoux en terre, et addressant sa parole au
Roy, luy dit, que Sa Majesté luy ayant par deux fois
fait l'honneur de luy écrire pour luy donner la charge
de Garde des Sceaux lorsqu'il estoit premier Prési-
< yoy. Richelieu, 363 et suiv. ; Pontchartrain, p. 1Ô8.
^ Foy, Mém. de Brienne, p. 319 et suiv., le récit de ce qui se passa
lorsque les sceaux furent retirés à du Vair. M. de Loménie, père de
Brienne, ayant Joué un rôle dans cette affaire, la relation de son (ils a
- un caractère en quelque sorte authentique. Le récit de Brienne con-
firme pleinement celui d*Arnauld d*Ândilly.
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d'arnauld d'andilly. 241
dent en Provence, où il s'acquittoit de sa charge le Novembre leie.
plus dignement qu'il luy estoit possible, il Tavoit
très-humblement supplié de l'excuser, reconnois-
sant bien qu'il n'en estoit pas capable, et qu'il n'y
pourroit pas estre agréable à beaucoup de personnes
(désignant le Maréchal et la Maréchale d'Ancre) ;
qu'enfin, ayant, pour la troisième fois receu un com-
mandement exprès de Sa Majesté, il avoit obéy et
reçeu la charge avec une entière affection d'y ser-
vir fidèlement Sa Majesté ; que maintenant qu'elle luy
redemandoit les Sceaux, il les luy rapportoit, avec le
mesme désir du bien de son service qu'il les avoit
receus, et prioit Dieu qu'il luy fist la grâce de luy
donner un bon Conseil, dont il avoit bon besoin.
On dit' que la Reyne dit chose quelconque, et que
M. le Garde des Sceaux ne dit à la Reyne que deux
ou trois mots fort bas que personne n'entendit, et
que elle luy dit assez haut : On aura soin de vous.
En toute cette affaire M. du Vair a témoigné une
très grande constance*.
Incontinent après que M. Du Vair eut rendu les
Sceaux, le Roy commanda que l'on fist entrer M. Man-
got, qui estoit demeuré dans le grand Cabinet, et que
l'on avoit envoyé quérir chez luy, sur les sept heures,
qu'il estoit déjà avec ses mulles de chambre, sans
qu'il sceut chose quelconque de tout cecy, ainsi que
luy et M. Rarbin l'ont juré depuis (le mesme se dit
«
* Foy. Mém. de Math. Mole, p. 139, le discours remarquable adressé
par du Vair aux députés du Parlement lorsque les sceaux lui furent
retirés.
16
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242 JOURNAL INiDIT
Novembre i«i6. dc M. de Luçoii). Sa Majesté luy dit qu'il avoit tou-
jours creû qu'il le serviroit bien, en quelque charge
qu'il l'employast; que maintenant, M. Du Vair luy
ayant remis les Seaux, il les luy bailloit, sur cette as-
surance ; et que la Reyne sa mère en garderoit la clef
jusqu'à ce qu'il eust fait le serment. — Ainsi, M. Man-
got remporta chez luy les Sceaux dans le carrosse, dès
\e soir mesme. On tient qu'il ne fut pas trop content
de cette charge, pour ce qu'il reconnoissoit bien
qu'il n'estoit pas fort bien avec M. le Maréchal, et
qu'il appréhendoit qu'ils ne les luy baillassent que
pour un temps, et pour l'éloigner de celle de Secrétaire
d'Estat, en laquelle il désiroit de s'assurer, et mesme,
il estoit lors en termes d'en traitter avec M. de Ville-
roy, pour quatre cens mil livres, moyennant laquelle
somme il avoit aussi la survivance pour son fils aisné.
D'autres disent qu'il ne bailloit que deux cens mil
livres à M. de Villeroy, sans parler de survivance.
Mais je trouve plus d'apparence au premier. 11 avoit
vendu, il y avoit quelque temps, l'office de Pre-
mier Président à Bordeaux, à M. de Gourgues*, pour
soixante mil écus.
La charge de M. Mangot est baillée à M, l'Evesque
de Luçon ; et firent tous deux serment, l'un de Garde
des Sceaux, l'autre de Secrétaire !d' Estât, le lende-
main au matin, qui estoit le samedy. Mais depuis,
* Marc Antoiue de Gourgues, Premier Président du Parlement de
Bordeaux, épousa Marie Ségiiier, sœur de Pierre Séguier, lo célèbre
chancelier de France,
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d'arnauld d'andillv. 243
M. de Luçon ayant eu ses provisions, fit nouveau Novembre leie.
serment, le 2 décembre*.
26. M. le Maréchal d'Ancre part à sept heures
du matin, avec huit chevaux à son carrosse, un autre
carrosse à six chevaux qui suivoit, et environ cin-
quante hommes de cheval, pour aller à Rouen, tenir
les Estats.
27. Le Roy dance un ballet au Louvre, qui est
le premier qu'il ait dancé.
M. de Nevers disant avoir eu avis qu'on avoit fait
expédier des lettres patentes pour luy fermer les
portes de Retel, y fut en personne et y mit deux
ou trois cens hommes. Et le mardy 29, disant pa-
reillement qu'on luy vouloit oster l'entrée de S**-
Menehoud, il y fut avec sa maison, et y mit gar-
nison.
M, de Buillon renforce la garnison de Sedan.
* Fof. âferc. fi\^ p. 309. Le Mercure rapporte le discours plein de
dignité que prononça en cette occasion le garde des sceaux du Vair.
^•y« Fontenfty-^iareml, p. 360; Brienne, p. 319 etsuiv. Voy. Briennc»
p. 322, les contestations qui s'élevèrent au sujet de la préséance de.
l'évêque de Luçon sur les autres Secrétaires d'Etat. Voy, Rohan, p. 1/|3 ;
Richelieu, p. 365 et suiv. ; Pontchartrain, p. 190. Richelieu, évôquo
de Luçon, orateur du clergé aux États de lôl/i, aumônier de la Reino
régnante, avoit déjà, quoique très-jeune, une grande influence, particu-
lièrement sur resprit de la Reine-mère. Nommé secrétaire d'État à la
place de M. Mangot, qui lui-môme avoit remplacé M. de Puisieux dans
la survivance de la charge de M. de Villeroy, doyen des secrétaires
d'État, Richelieu voulut entrer dans le Conseil, non pas au rang de
M. Mangot, son prédécesseur, mais à celui de M. de Villeroy et avoir
ainsi la préséance sur ses collègues. Ceux-ci résistèrent énergiquement,
mais Richelieu l'emporta sur eux. Le génie dominateur du grand Mi-
nistre se révélait déjà.
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244 JOUUiNAL INJ^DIT
Décembre t««. i, M. de Ncvcrs, fait entrer une forte garnison
dans S*'-Menehoud.
9. M. le Maréchal d'Ancre revient à quatre heures
du soir, de Rouen, où il a voit tenu les Estats de
Normandie*.
10. Aseptiieuresdumatin, M. le Garde des Sceaux
Mangot vient chez M. Barbin. — Ils vont ensemble
chez M. le Maréchal d'Ancre, lequel, aussitost qu'ils
furent sortis, arrive chez M. Barbin, où ils reviennent
tout court; et entrent tous trois dans le Cabinet où
M. de Luçon estant venu, demy-heure après, ils de-
meurèrent trois heures, et jusqu'à ce que la Reyne
envoya quérir M. Barbin. MM. de Thémines et de
Montigny vinrent, et ne purent parler à M. Barbin.
M. le Comte d'Auvergne fut à l'entrée de la porte du
Cabinet, où il ne dit qu'un mot à M. Barbin, et puis
s'en retourna. On dit que l'après-disnée, ils tinrent
encore trois heures, ce mesme conseil. Ils parloyent,
entr'autres choses, de la Bastille.
M. le Maréchal d'Ancre témoigne vouloir oublier la
mauvaise volonté qu'il avoit eue contre M. de Luines.
Dès ce jour, on apprit que la Reyne vouloit oster
la Bastille à M. de Thémines ; ce qu'ayant appris il
l'alla trouver, et luy dit, en substance, qu'il luy remet-
troit la Bastille entre les mains, et toutes les charges
qu'il avoit, toutes et quantes fois qu'il luy plairoit, et
qu'il la supplioit très-humblement, que si elle la luy
vouloit oster, cela se fist de sorte qu'il ne luy fust
* Voy, Pontcliartrain, p. 192.
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d'arnauld d'andilly. 245
point déshonnorable. A quoy elle luy répondit, que
cela n'estoit point, et que c'estoit toutes impostures et
artifices.
il. M. de Thémines eut encore les mesmes dis-
cours avec la Reyne, et elle luy dit encore les mesmes
choses.
12. M. de Thémines, disnant chez Tabbé Ru-
cellay * avec M. de Guise, il sceut, que, sous prétexte
d'une querelle de M. de Saint Béarn, et autres arti-
fices, dont ensuite, on s'estoit servy, on avoit fait sor-
tir M. de Loirières son fils, et la plupart de ses Gen-
tilshommes, et puis qu'on leur avoit fermé les portes
de la Bastille.
Sur cela, il va trouver la Reyne, laquelle luy fit
dire, que s'il estoit en colère, elle ne vouloit point
parler à luy. Il luy fit répondre, qu'il n'etoit point en
colère, et sur cela, estant entré, la Reyne luy dit
qu'elle le prioit de ne point parler, s'il estoit en co-
lère, et qu'avant toutes choses, il sceût qu'elle luy
accorderoit tout ce qu'il luy demanderoit. Il répon-
dit, qu'il savoit assez ce qui estoit de son devoir, pour
jie point ignorer qu'il ne luy appartenoit pas de se
mettre en colère, contre ceux sous la Domination
desquels Dieu l' avoit fait naistre, comme le Roy et
elle, mais que, puisqu'elle luy faisoit l'honneur de
* L*abbé Ruccellai gentilhomme florentiu, introduit à la cour par le
maTécbal d'Ancre, signalé pendant quelque temps par ses intrigues en
faveur de la Reine-mère, mourut dans la retraite en 1627, après avoir
joué un rôle assez considérable. {Voy,, sur ce personnage, Moreri, t. ix,
p. 423, et Richelieu, Mémoires, éd. citée, t. xiii, p. 22û et suiv.)
Décembre tt1«.
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246 JOURNAL INEDIT
DecTmbre \m. luy promettie tout ce qu'il luy demanderoit, il la
prenoit au mot, et luy demandoit Congé, pour luy
et pour ses enfans, de se retirer en sa maison. Elle
luy dit, qu'elle ne le vouloit en façon quelconque, et
qu'au contraire, elle se vouloit servir d'eux. Et que
pour le luy témoigner, elle luy bailloit le brevet,
(qu'elle tenoit en sa main,) de la charge de Premier
Ecuyer de Monsieur, pour M. de M. Losières. Il ré-
pliqua, qu'il la remercioit très-humblement, et que
puisqu'on avoit voulu luy faire un tel affront, et à
Losières, il se réputoit indigne, et ses enfans aussi,
de servir le Roy en des charges honnorables; qu'il
luy avoit, par deux fois, sur les bruits qui couroyent
offert de luy rendre les clefs de la Bastille, qu'elle l'a-
voit refusé, et qu'ensuite, on luy avoit fait le plus
grand affront qu'il pust recevoir au monde. (On
dit, qu'il luy dit aussi qu'elle estoit très-mal conseil-
lée, et que sur cela, il luy parla très- hardiment.) La
Reyne luy dit, qu'elle voioit bien qu'il estoit en co-
lère, qu'il s'en allast à son logis, et qu'il la reverroit
le lendemain*.
Le Président Chevalier, avec le Président Re-
bours et quelques autres Présidens et Conseillers de
la Cour des Aydes, ayant esté mandez au Louvre,
Monsieur le Garde des Sceaux leur représenta la né-
cessité des finances, les excessives dépences que le
Roy est contraint de supporter, et comme cela le
contraignoit de trouver des moyens extraordinaires,
* Voij. Merc, fi'., p. 359; Riclielieu, p. 374; Pontchartrain, p. 193.
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d'arnauld d'andilly. 2ft7
pour y subvenir, etc. ; que pour ce sujet, le Roy vou- lyecrmue i«».«
loil envoyer M. le comte de Soissons à la Cour des
Aydes, assisté d'un Maréchal de France, et de trois
des plus anciens du Conseil, pour faire vérifier les
Édits, qui y avoyent esté portez, et que, partant, ils
se disposassent à exécuter l'intention de Sa Majesté.
Après cela, le Président Chevalier fit un pas en ar-
rière, et puis dit, en substance, que c'estoit un très
pernicieux conseil, que d'envoyer M. le Comte en leur
Compagnie, que le Roy leur avoit mis entre les mains
une partie de sa Justice; que l'on leur devoit envoyer
les Edits; que s'ils estoyerît justes ils les vérifie-
royent; sinon, qu'il n'en faloit jamais parler; que
s'il y avoit de la nécessité aux finances, comme on le
disoit, elles estoyent très-mal ménagées; qu'il sup-
plioit le Roy de luy permettre de dire devant la Reyne
sa mère, (Leurs Majestez estoyent présentes,) une
chose très-importante, laquelle, peut-estre, elleigno-
roit, qui est que sur l'affaire des droits de signature
de Rolledes Eleus, on avoit traitté à quatre cents mil
livres, et qu'il avoit papiers dans son sein, pour jus-
tifier que l'on offroit douze cent mil livres comptant,
qui est huit cent mil que l'on a fait perdre au Roy
sur cette seule affaire ; qu'il croiroit commettre un
crime, s'il n'avertissoit Sa Majesté de cela.
Monsieur le Garde des Sceaux répondit, que pour
le regard d'envoyer M. le Comte de Soissons à la
Cour des Aydes, c'estoit chose que le Roy avoit ré-
solue, pour de bonnes considérations; que quant à
l'affaire des Eleus, il y avoit si peu que le Roy l'avoit
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2/|8 JOURNAL INEDIT
Décembre i«i«. honnoré des Sceaux qu'il ne sa voit pas particulière-
ment comme elle s'estoit passée; mais qu'il s'en in-
fonïieroit, et s'assuroit que le Roy reconnoistroit que
ses finances sont trop bien ménagées, pour y avoir
esté commis une faute si préjudiciable au service de
Sa Majesté.
13. MM. des Finances s'assemblent le matin
chez M. le Garde des Sceaux, touchant l'affaire des
Eleus ; voyent tous les papiers, et trouvent que, sur
ce que les Eleus prenoyent plus que les trois droits
de signature de rooles qui leur estoyent attribués,
on avoit ordonné, qu'ils restitûeroyent le passé, et
que pour l'avenir, on leur augmenteroit deux droits
de signatures de roolles, qui estoyent cinq en tout;
et que pour cela, ils payeroyent dès maintenant
quatre cent cinquante mil livres; et qu'attendu que
ceux qui traittent, lesquels sont d'entre le corps
mesme des Eleus, et en grand nombre, ne pour-
royent de long-temps recouvrer l'argent qu'ils bail-
lent dès maintenant au Roy, et qu'il y pourra aussi
avoir de grandes non-valeurs, on leur baillera un pa-
risis davantage de finance, qui est le quart de la
somme, et partant, 62500 livres de finance, outre les
quatre cent cinquante mil livres par eux payez. En
quoy, s'il y a eu quelque chose de gratifications, c'a
esté en considération de ce que l'on traittoit avec les
officiers mésme, et qu'il n'y avoit nulle apparence que
d'autres en voulussent bailler davantage.
L'après-disnée, le Roy et la Reyne envoyent qué-
rir M. le Président Chevalier, et tous ceux qui estoyent
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d'abnauld d'andilly. 249
venus avec luy. Monsieur le Garde des Sceaux prit la Décembre i«!«.
parole, et fit excellemment bien, et courageusement.
11 dit, entr'autres choses, que le Roy ayant voulu
savoir particulièrement ce qui s'estoit passé touchant
l'affaire des Eleus, a voit trouvé que MM. de ses finan-
ces y avoyent apporté tout le ménage qui se pouvoit.
Et commença lors, à déduire particulièrement Taf-
faire, dont il avoit les papiers à la main, et ajoutta
que s'il en pouvoit faire trouver les douze cent mil
livres qu'il avoit dit, le Roy en donnoit dès à présent
deux cent mil à celuy qui voudroit traitter. Que le
Roy luy avoit commandé de dire, que pour ce qui
estoit de la Cour des Aydes, Sa Majesté en avoit toute
sorte de contentement ; mais que pour luy elle en
estoit très mal-contente ; qu'il avoit très insolemment
et calomnîeusement parlé en sa présence, et de la
Reyne sa mère, contre ceux qu'elle a chargez de la
conduite de ses finances; mais qu'il faisoit cela à
dessein, et par faction, afin de continuer le chemin
qu'ont tenu tant ceux qui ont voulu desservir le Roy,
qui est de rendre le Gouvernement odieux, et ensuite
ceux qui se meslent des aff'aires, afin de donner sujet
aux libelles diflamatoires, et par là, aliéner les esprits
des peuples, et les porter aux émotions que nous avons
veûes; que Sa Majesté l'avoit chargé de luy dire,
qu'il se devoit souvenir qu'il n'y avoit pas deux ans
qu'elle luy avoit fait grâce, et qu'il disoit grâce, (car
il répéta deux fois ce mot) ; qu'au surplus, il avoit
aussi parlé insolemment touchant la justice que le
Roy a mise entre les mains de ses officiers, laquelle
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250 JOURNAL INÉDIT
Drcrmbre i6if. dépendroit de la seule volonté de Sa Majesté, qui la
leur pou voit oster ainsi que bon luy sembleroit; au
lieu qu'il sembloit que l'on s'en voulust servir pour
faire les Souverains, contre Sa Majesté mesme ; que
pour luy, (il usa de ce mot : quant à nous) , le Roy
luy ayant fait l'honneur de luy mettre les Sceaux
entre les mains, il sçauroit bien faire ranger en leur
devoir, et luy, et tous ceux de robe longue, qui
s'en voudroyent éloigner, lesquels estoyent cause
d'une grande partie des malheurs que nous avons
vus, (il parla fort fermement sur ce sujet et fit con-
noistre qu'il n'épargneroit personne) , et que quand
il auroit mille vies, il les perdroit toutes, ou empes-
cheroit que les officiers de Sa Majesté abusassent de
leurs charges, contre son service.
13. Après cela, le Président Chevalier demanda
s'il luy estoit permis de répondre ? On luy répondit
qu'ouy. Il dit, qu'il avoit esté nourry page du feu
Roy, lequel l'avoit depuis fait Conseiller de la Cour,
et élevé en d'autres charges ; s'étendit fort sur sa
fidélité, et sur ce qu'il n'avoit jamais eu autre dessein
que de bien servir, et qu'il sçavoit assez qu'il n'y avoit
autre salut qu'en l'autorité Royale ; qu'il n'avoit point
entendu offencer en aucune sorte MM. des finances,
et qu'il n'avoit rien dit, qu'en ayant charge de sa
Compagnie ; qu'aux Compagnies Souveraines, on
estoit bien souvent obligé de porter des paroles contre
son propre avis, lorsqu'il passoit à la pluralité des
voix, et qu'il eust eu encore beaucoup d'autres choses
à dire, lesquelles il avoit tues par prudence. Sur cela,
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d'arnauld d'andilly. 251
M. rintendant Amauddit, qu'il supplioit très-hum- D^embrem*.
bleraent le Roy de lui pardonner, s'il interrompoit
M. le Président Chevalier, pour le prier de dire li-
brement tout ce qu'il avoit eu charge de dire sans
rien retenir de ce qu'il savoit contre MM. ses col-
lègues et luy. Après, le Président Chevalier vint sur
le calcul de l'affaire, pour vérifier que les droits de
cinq signatures de roolles, monteroyent à une bien
plus grande somme que celle dont on avoit fait party,
(à quoy, M. Arnaud dit aussi, qu'en cela, il se trou-
veroit une très-grande erreur de calcul, pour ce que,
de cette somme là il n'en faloit prendre que les deux
cinquièmes, à cause qu'auparavant le party fait avec
les dits Eleus, ils avoyent droit de prendre trois des
dits droits. — Après, il dit, qu'il avoit dit le jour pré-
cédent que l'on pouvoit tirer davantage de cette af-
faire, mais qu'il n'avoit point parlé de douze cent
mil livres ni qu'il eust les offres en main. M, le
Garde des Sceaux répondit, qu'il l'avoit dit, et le Roy
prit la parole, et dit, qu'il estoit vray, et qu'il l'a-
voit oûy '.
' Arnauld d'A'ndilly s'éteud toujours longueuieut sur les discustûons
relatives aux finances. Travaillant sous les ordres d*Amauld Tinten-
dant, il était initié plus que personne à ces sortes d*affaires, et ses
renseignements doivent dwe exacts. C'est à cette niùme époque, à la
fin de Tannée 1616, qu'il fut chargé de dresser Tétat général des finances
pour 1617. « Tous deux ensemble (Barbin et Arnauld) me chargùieiit
» de travailler non seulement à l'état général des finances pour 1617.
» mais aussi à tous les états qui en dépendent et que Ton nomme les
» états de l'épargne, tels que sont les états des maisons royales, des
» fermes et généralement tous les autres, n'y ayant point d'articles de
» l'état général des finances qui ne soit la matière d'un état particu-
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252 JOURNAL INEDIT
Décembre J6ie. M, Maiigot présenté au Parlement par Mt Arnaud,
en charge de Garde des Sceaux.
L'après-disnée, Monsieur le Garde des Sceaux ha-
rangua au Louvre, aux Colonels et Capitaines de Pa-
ris, (dans la Galerie peinte, en présence du Roy et
de la Reyne), sur le sujet de quelques bruits que l'on
avoit fait courir que l'on vouloit désarmer le peuple,
oster les chaines, et ne plus payer les Rentes. Il
parla une heure et demie fort courageusement, et
bien.
M. le Comte de Soissons va à la Cour des Aydes,
accompagné de M. le Maréchal de Thémines, de
MM. de Chasteau-Neuf et Pontcarré '...
26. S**-Menehoud repris sur M. de Nevers, qui
y avoit en garnison dans le chasteau, quatre Com-
pagnies de Gens de pied, (dont Fléchelles*, frère de
feu M. de Bours-Montmorency* encommandoitune,)
et une de Cavalerie, dans la ville. Bouconville \ Gou-
verneur, (nourry page de M. le Duc de Nevers, ayant
» lier ; ainsi le nombre en étant si grand, on étoit souvent fort avant
» dans Tannée courante avant que tous ces états de la même année
» fussent dressés. Mais lorsque j*eus reçu cet ordre, je m'en allai cher
» M. de Beaumarchais-, trésorier de l'épargne, qui entroit en charge
» en Tannée suivante, et y travaillai de telle sorte avec lui et M. Bar-
» bin, son premier commis, que, le premier jour de Janvier 1617, je
» portai à M. Barbin tous ces états au net. » (Mém. d'Aràauld d'An-
dilly, p. 370.)
« Fay. Pontchartrain, p. 19û.
> Jean de Montmorency, seigneur de Flesselles.
s Josias de Montmorency, seigneur de Bours, capitaine au n^glment
des gardes, mort en 1616.
♦ Christophe de Pradlnes, seigneur de Bouconville, gouverneur de
Sainte-Menehould.
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D'Aft>iAULD d'ANDILTY. 25S
dix mil livres de rente à l'entour de S*'-Menehoud) ,
avoit traitté avec M. de Praslin, par le moyen
de son cousin, (auquel a esté baillé deux
mil écus et une Compagnie en un des Régimens en-
tretenus,) pour remettre la Place, moyennant qu'il
en demeurast Gouverneur, et auroit dix mil écus,
quatre mil livres de pension, et la première Com-
pagnie vacante aux Gardes. M. de Prasiin, estant
aux portes de Sainte-Menehoud avec les forces du
Roy, M. de Bouconville voulut remettre la partie au
lendemain. Sur quoy MM. de Fossez et Delbène,
Lieutenant de la Compagnie de chevaux -légers de
Monsieur, prirent le hazard d'aller eux deux seuls
dans la ville, pour le faire résoudre.
Le Roy envoya à M. de Fossez les provisions du
Gouvernement de S*'-Menehoud. Depuis, M. de
Bouconville, ayant reçeu les dix mil écus, que l'on
luy avoit promis, et la Reyne luy offrant présente-
ment une Compagnie au Régiment des Gardes, au
lieu que l'on ne lui avoit promis que la première
vacante, il ne s'en voulut point contenter, et insistoit
à avoir son Gouvernement. Sur quoy la Reyne au
mois de février 1617 commanda à M. de Fossez d'al-
ler à S*'-Menehoud, de lever une compagnie de
cent hommes pour y mettre, en garnison, et de s'y
rendre le plus fort *. Ce qu'il fit ; et on luy bailla
aussi la compagnie de M. de Porcheux ^.
* Foy. Merc. fr.^ p. 361 ; Fontenay-Mareuil, p. 361 ; Richelieu, p. 371 ;
Pontchartrain, p. 196.
* Charles d'Aubourg, seigneur de Porcheux.
Décembre Hit.
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254 JOURNAL INEDIT
Décembre 181I. M. de Schombcrg part, pour aller en Allemagne,
en ambassade extraordinaire \
^ Voy. Pontchartrain, p. 195 ; Rkhelieu, p. 381. Foy, coll. Petitot,
2* série, t. xi, p. 224, Tinstruction donnée à M. de Scliomberg, et qui
est de la main de Richelieu.
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^en
SOMMAIRE
Janvier. — Mort de la fille du maréchal d*Ancre. — Duel de M. de la
Courbe avec M. de la Beyne. — Le marquis de Cœuvres refuse de
payer Timpôt à Laon ; ajournement personnel contre lui. — Mani-
feste de M. du Mayne. — Réponse du Roi faite par M. de Luçon. —
Déclaration contre M. de Nevers. — M. de Rohan arrive à la cour.
M. de Thémines va commander en Chanipagne. — Réconciliation
de Luynes avec la Reine-mère et le maréchal d'Ancre. — Les Princes
à Soissons.
FÉvaiER, — Le comte d'Auvergne va commander en quelques pro-
vinces. — Le maréchal d'Ancre va en Normandie. — Affaire entre
les troupes de M. de Candale et celles de M. de Vendôme. -— M"* de
Vienne enlevée par Saveuse. — Déclaration contre MM. de Ven-
dôme, du Mayne, de Bouillon.— M. de Joinville, grand Chambellan.
— M. de Guise va à Château-Thierry. — Conventions entre MM. de
Thémines et de Praslin. — Prise de Cufy et de Vouzy par le maré-
chal de Montigny.
Mars. — Vincenze, secrétaire du maréchal d'Ancre, fait prisonnier. —
La Grange, secrétaire de Monsieur le Prince, mis au Chàtelet. —
— Siège de Richecour. — Les Princes se séparent. — Confiscation
de leurs biens. — Prise d'Antrin et de Claniecy. — Le prjnce do
Château-Porcjen et le marquis de Gallerande faits prisonniers. —
Armée du comte d'Auvergne.— M. de Richelieu, maréchal de camp.
Siège de Saint-Pierre-le-Moustier. — Disgrâce de M. de Fiesque. —
Nouvelles des armées. — >l. de Nemours arrive à la cour. — M. do
Rohan vient â Paris. — Prise de Pierrefonds. — M. le maréchal
d'Ancre revient à Paris. — Prise de Château-Porclen.
Avril. — Soissons investi. — Le Maréchal d'Ancre va en Normandie.
Prise de Rethel. — Calomnie contre la Reine imputée par le baron
d'Uxelles au duc de Bellegarde. ~ Retour et assassinat du Mai'échal
d'Ancre. — Mauvais traitements envers la Reine-mère. — M. de
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256 JOURNAL INÉDIT
Vitry, maréchal de France. — Arrestation de la maréchale d'Ancre.
— Mauvais traitements envers son fils. — Disgrâce de Mangôt, de
révoque de Luçon ; arrestation de Barbin. — Rappel de M. de Vil-
leroy; Jeannin, surintendant des finances; du Vair, garde des
Sceaux ; le Chancelier, chef du Conseil ; M. de Maupeou, contrôleur
général des finances. — Faveur de M. de Luynes. — Mariage du duc
de Longueville avec M"« de Soissons.
Mai. — Départ de la Reine-mère pour Blois. — Condamnation de du
Travail. ~ Retour des Princes. — Mort du président de Thou. —
M. Déageant, intendant des finances. — Retour du comte d'Auvergne.
— Assassinat de M. d'Orvilliers Vialart. — M. de Vitry, reçu con-
seiller au Parlement. — L'Assemblée de la Rochelle se sépare. —
Madame la Princesse entre à la Bastille. •— Retour de M. de Guise.
— Duel de M. de la Vallette avec M. de Schomberg.
Juin. — M. de Luynes, conseiller au Parlement — Femme de Chartres
accusé d'avoir voulu tuer le Roi. — Différend entre MM. de Guise
et de Nevers. — Arrivée de l'archevêque de Pise, Ambassadeur de
Savoie,
Juillet. — Condamnation et exécution de la maréchale d'Ancre. —
Arrivée de M. de Montmorency et du prince de Sedan. — Livre des
quatre ministres de Charenton ; ajournement personnel. — Prise de
Fougères par le baron de Guémadeuc — Il est nfiis à la Bastille. —
— Prise de Verceil par dom Pedro de Tolède.
Août. — M. de Modène envoyé vers la Reine-mère. - L'évèché de Li-
sieux donné au garde des sceaux. — Déclaration touchant les Clin-
qiizùits. — Don de la confiscation de la maréchale d'Ancre à M. de
Luynes. — Complot pour tirer Monsieur le Prince de Ta Bastille.
Septembre. — Paix de Savoie. — Arrivée du général des Capucins. —
Mort du maréchal de Montigny. — Le maréchal de Vitry, gouver-
neur du Berry. — Itfariage du duc de Luynes avec M"» de Montba-
zon. — Mort de M. de Refuge. — Monsieur le Prince conduit à Vin-
ccnnes. — Condamnation et exécution de Geniers. — Démarches de
M. de Sully pour rentrer aux finances. — • Le marquis de Cœuvrc>;,
ambassadeur à Rome. •— Exécution de Guémadeuc.
Octobre. — Convocation de l'Assemblée des notables à Rouen. — Le
Roi veut supprimer la vente des gouvernements. — M. de Modène
envoyé à Blois. — Mort d'Amauld l'intendant.
Novembre. — M. d'Epemon revient à Paris. — Départ du Roi pour
Rouen. — Amauld d'Andilly y suit la Cour. — Conduite de M. de
Luynes en arrivant h Rouen. — Il est chargé d'ouvrir les États en sa
qualité de lieutenant-général au gouvernement de Normandie. —
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d'arnauld d'andilly. 257
Plan de l'Assemblée. — Discours de M. de Luynes. — Arrivée du
Roi à Rouen.
Décembre. — Ouverture de TAssemblée des Notables. — Conventions
entre la Noblesse et les officiers des Parlements. — Liste des mem-
bres de l'assemblée et tableau de leurs positions respectives. — Tra-
vaux de l'Assemblée. — Mort de M. de Villeroy. — Madame la Prin-
cesse accouche d'un enfant mort-né ; l'évoque de Paris refuse de lui
faire des obsèques. — Le cardinal du Perron présente au Roi le
cahier des délibérations de l'Assemblée. — Clôture de ladite Assem-
blée. — Départ et retour du Roi.
Dimanche 1. Mort de la fille de M. le maré-
chal d'Ancre, âgée de ... ans. On dit qu'il avoit des-
sein de la marier à M. de la Valette ^
Duel de la Courbe, fils d'un capitaine des gardes,
et la Beyne (qui a eu la compagnie), à pied, avec
une épée et un pistollet. Tous deux blessez, mais la
Beyne plus que la Courbe.
Un cœnmis des fermiers des cinq grosses fermes
à Laon, ayant esté pressé de payer les deniers de sa
recette, dît qu'il avoit défences de M. le marquis de
Cœuvres, et ayant ensemble esté trouver ledit sieur
Marquis, il leur fit réponce, qu'il attendoitdes expé-
ditions de la Cour, pour prendre cet argent; que ce-
pendant, il leur faisoit défences de l'emporter, et
que dans huit jours, il leur déclareroit sa volonté.
Le Procès-verbal de cela estant rapporté au Conseil,
il fut ordonné par arrest, décret d'ajournement per-
sonnel contre ledit sieur Marquis; qu'un huissier du
* Marie Concini, née en 1608. Elle avait eu Henri IV pour parrain
et la princesse de Condé pour marraine, (roy. Richelieu, p. û2/i; Bferc.
fr,, t. IV, MDCXVn, p. 162.)
17
Janvier 1617.
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258 JOURNAL INÉDIT
Janvier 1817. Conseil scroit envoyé pour faire payer l'argent par le
commis, etc.
11. Lestre en forme de Manifeste, écrite par
M. du May ne au Roy. Se pleint entr' autres choses,
de ce qu'un homme pris à Soissons, a esté envoyé, et
incité pour l'assassiner.
Cette affaire est renvoyée par le Roy au Parlement,
lequel ordonne, que le procès sera fait et parfait, jus-
ques à sentence définitive exclusivement, et que le
prisonnier et le procès seront amenez. Ensuite de cet
arrest, un Jieutenant du Prévost de l'Isle, ayant esté
à Soissons, avec dix archers, pour amener le prison-
nier, on les enferma dans une hostellerie, où on leur
fit bonne chère, on paya leur dépense, et puis on
les renvoya sans les laisser parler à personne.
Sur ce que M. du Mayne disoit, que le prisonnier
avoit dit que Défontis luy avoit baillé de l'argent
pour luy faire faire le coup, le Présidial de Soissons
décréta ajournement personnel, contre ledit sieur
Ûéfontis, lequel en appella au Parlement \
Le Roy répondit le 17 à la lettre de M. du Mayne.
M. de Luçon fit la dépesche \
17. Déclaration du Roy contre M. de Nevers,
^ Foy. Merc, fr.^ p. 132, la déclaration des Princes contre le maré-
chal d'Ancre, dans laquelle il est allégué que Deffuntis, créature du
maréchal et exécuteur ordinaire de ses violences, avait envoyé l'assas-
sin à Soissons pour faire le coup. '
2 Voy. Richelieu, p. 383. Le Merc, fr,^ t iv, MDCXVH, p. 13, donne
la lettre du duc de Mayenne et la réponse du Roi. L'individu accusé
d'avoir voulu assassiner le duc de Mayenne était le sieur Vaugré, déjà
compromis dans Taffaire de Boursier, rapportée plus haut.
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d'aknauld d'a.ndillv. 259
vérifiée au Parlement, par laquelle il luy est donné J«nvicr isjt,
quinze jours de temps pour revenir *.
18. M. de Rohan arrive h la Cour.
26. M. le Maréchal de Thémines part pour aller
en Champagne, commander l'armée du Roy, en l'ab-
sence de M. de (luise. (On tient que M. le Maréchal
d'Ancre avoit dessein de l'éloigner de la Cour). Lors-
que M. de Praslin avoit sceû, quelque temps aupa-
ravant, que l'on luy donnoit cette charge, il en avoit
témoigné un mécontentement extrême, et M. de
Fossez ayant esté envoyé à Sainte-Menehoud le
trouver sur ce sujet, il l'avoit trouvé résolu de se re-
tirer chez luy ; mais enfin, il le ramena à se confor-
mer à la volonté du Roy [Voyez 17 février) -.
M. de Thémines estant arrivé à Rheims, n'y
trouva forces quelconques.
Environ ce temps, on envoya six canons à Châ-
lons, par terre.
Environ ce temps, le sieur de Lousse, exempt des
Gardes de la Rey ne-mère, ayant esté envoyé faire la
reveûe de quelques compagnies de vieux régiments,
et ne les ayant trouvé complettes , cassa les sieurs
de Puyerlet, Trion, Porcheux, etc.. frère de M. le
maréchal de Montigny. Depuis, lesdits capitaines
étant venus trouver le Roy, ils se plaignirent extrê-
mement, disant, qu'on les avoit cassez contre toutes
* Voy, Fontenay-Mareuil, p. 365 ; Richelieu, p. 387; Pontcliartrain,
p. 201. Voy, Merc fr.^ p. 20, le texte de cette Déclaration.
2 yoy Fontenay-Mareuil, p. 366; Richelieu, p. 389; Pontchartrain,
p. 201.
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260 JOURNAL INÉDIT
Janvier 1617. les formcs dc la Guerre, attendu qu'ils n'estoyent pas
responsables du manque du monde de leurs soldats,
(dont plusieurs s'en alloyent après avoir reçeu la
montre, sans qu'il soit possible de les en empescher),
pourveu qu'ils offrissent, comme ils font, de bailler
par^écrit, le nom des lieux de leurs demeures, et de les
y aller prendre, si on veut leur bailler un prévost pour
ce sujet, avec charge de leur faire faire leur procès ;
que si c'estoit qu'en faisant la montre de leurs com-
pagnies, il s'y trouvast des passevolants, en ce cas,
ils reconnoissent qu'ils méritoyent d'estre cassez et
lesdits passevolans d'estre pendus, suivant les ordon-
nances.
Sur ce que le Roy trouva bon de rétablir lesdits
capitaines en leurs charges, mais que l'on avoit mis
dans les lettres expédiées pour cet effet, qae Sa Ma-
jesté leur avoit fait grâce, ils dirent qu'ils ne pou-
voyent souffrir ce mot de grâce, pour ce que n'ayant
point failly, ils ne devoyent point recevoir de grâce,
et que s'ils avoyent failly, il les faloit chastier et les
juger en conseil de guerre.
Environ la fin du mois, M. de Luines remis bien
avec la Reyne-mère, et puis avec le Maréchal
d'Ancre.
Vers ce temps-là mesme, M. de Nevers va à Sois-
sons, où M. de Vendosme se trouva \
* Voy, Richelieu, p. 387 ; Pontchartrain, p. 201 ; Merc. fr.y p. 34.
Voy, Merc, fr.^ p. 36, le manifeste du duc de Nevers, en réponse à la
Déclaration publiée contre lui.
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d'arnauld d'andilly. 261
Mécredy 1. M. le comte d'Auvergne part, avec Février mi.
un canon, et mie couleuvrine, pour aller commander
Tannée du Roy destinée pour servir es provinces de
Nornf>aûdie, Perche, Mayne, Pais Chartrain, Niver-
nois, etc. — Un des desseins estoit pour nettoyer
toutes les places, estant en quelques unes desdites pro-
vinces qui favorisent les Princes , comme la Ferté-
Vidame, la Louppe^ la maison du marquis d' Alligre *,
la Ferté-Bénard, Nogent-le-Rotrou, etc. — Hfittrèsr
bien en ce voyage,car toute la noblesse du païs estoit
preste à se soulever, et néantmoins, avec quinze ou
seize cens honames de pied, et environ trois cens che-
vaux, il contraignit tout de se tenir en devoir, et fit
abattre le chasleau du Mans. Le marquis de Laver-
din Gouverneur de la Province, qui a épousé une
nièce de M. du Mayne % et favorisoit son party, ne
parut point. Monsieur le Comte commit en sa place
au gouvernement du pays^ quatre des principaux sei-
gneurs de la Province, sçavoir, M. de la Flotte,
M. de Horée, M. de Bouille, et M. de Vassé ^
* Ëstienne d'Haligre ou d'Aligie, conseiller au grand Conseil, chef
du Conseil de Charles de Bourbon, comte de Soissons, tuteur hono-
raire de Louis de Bourbon, comte de Soissons son fils, conseiller d'État,
président au Parlement de Bretagne, garde des sceaux et chancelier
de France en 1624, destitué en 1626, mort en 1635. {Voy, P. Anselme,
t. VI, p. 550.)
^ Henri de Beaumanoir, Marquis de Lavardin, fils du maréchal et
gouverneur des comtés du Maine, du Perche et de Laval, avait épousé
en 1614 Marguerite de la Baume, fille de Rostaing de la Baume, comte
de Suze, et de Madeleine des Pi'ez-Montpezat. Le marquis de Lavar-
din étant mort en 1633, elle se remaria avec le comte de Modène.
3 Voy. Fontenay-Mareuil, p. 365; Richelieu, p. 389; Pontchartrain,
p. 202; Mercfr,, p. 111.
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262 JOURNAL INÉDIT
Février 1617. La iiiècc dc M. du Mayne, que M. le Marquis de
Laverdin a épousée, est fille de M. et M*"' de Suse,
laquelle est sœur de M. le Marquis de Vilars, et'
M"' de Montpesat , enfans de feu M"'* du Mayne et
de M son premier mary *.
M. le Maréchal d'Ancre part pour aller en Nor-
mandie, (toute la cour estoit à son lever pour luy dire
Adieu). On tient que c'estoit à dessein de fortifier
Quillebeuf, et que l'armée du comte d'Auvergne estoit
pour favoriser cette entreprise. Depuis, il s'est veu par
effet, qu'il a fortifié Quillebeuf, mais il avoit des
trouppes pour ce dessein, autres que celles de M. le
Comte d'Auvergne*.
5. La nuit d'entre le Dimanche et le Lundy gras,
la compagnie de Gendarmes de M. de Caudale, com-
mandée par Récourt, estant d'environ quarante
maistries, logez à près la Fère, est chargée par
des troupes envoyées par M. de Vendosme. Trois
maistres tuez, trois valets brûlez dans une maison,
* Henriette de Savoie, marquise de Villars, fille du maréchal et
amiral de Villars , épousa !• Melchior des Prez, seigneur de Montpezat,
maître des eaux et forêts, sénéchal de Poitou, lieutenant du roi en
Guyenne ; 2" Charles de Lorraine, duc de Mayenne, le chef de la Ligue.
De son premier mariage elle eut, entre autres enfants , Emmanuel Phili-
bert des Prez, marquis de Villars, chevalier des ordres en 1618, mort
des suites des blessures quMl reçut au siège de Montauban en 1621 ;
Henri des Prez, marquis de Montpezat, évoque de Montauban, puis
capitaine de cinquante hommes d*armes, gouverneur de Muret, de
Grenade, mort en 1619; Madeleine des Prez, comtesse de Suze. (Foy.
P. Anselme, t. vu, p. 190.) C'est donc à tort que notre manuscrit
porte madame au lieu de monsieur dc Montpezat, parmi les enfants do
la feuu duchesse du Mayne.
2 Foy. Merc, fr,^ p; 158 et 162.
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d'arnauld d'andilly. 263
Récourt , et tout le reste de sa troupe pris prisonniers, ^c^rter un.
avec tout leur équipage, où il y avoit plus de cent
bons chevaux. Trois hommes de ceux de M. de Ven-
dosme tuez. Il y avoit fort longtemps que cette troupe
faisoit tous les désordres du monde, et logeoit par-
tout, sans département, et mesme, avoit voulu loger
sur les terres de M"' de Caudales qui les en avoit
empêchez •.
12. M"* de Vienne enlevée par Saveuse. Sa Gou-
vernante la trahit, l'ayant menée à la porte, après
souper, sous prétexte d'oûir une Musique. Le Car-
rosse attendoit au Coin de la Rue des Rillettes. Il se
ronipit près la porte Sainlr Denis, où l'on fit monter
M"' de Vienne sur un cheval.
13. Déclaration contre MM. de Vendosme, du
Mayne et de Ruillon \
Nouvelle arrive, que M. le Maréchal de Thémines,
* yoy, Merc, /r.,p. 115.
2 Voy. Fontenay-Mareuil, p. 365 ; Pontchartrain, p. 202; Richelieu,
p. 388. Cette déclaration, qui comprenait aussi le Marquis de Cœuvres
et le Président le Jay, a été recueillie coll. Petitot, 2* série, t. xi,
p. 244. On la trouve aussi dans le Merc, fr,, p. 44, avec les Remon-
trances des Princes et les Réponses qui y furent faites, où on lit le pas-
sage suivant concernant révoque de Luçon : « Celuy qui a esté fait
» secrétaire d'Estat est un Prélat si plein de gloire pour l'innocence de
» sa vie, pour Teminence de son savoir et pour l'excellence de' son
» esprit, que tous ceux qui sçavent quel est son mérite advoueront
» aisément que Dieu Ta destiné pour rendre de grands et signalez scr-
» vices à Leurs Majestez, au milieu des tempestes de leur Estât. » A la
suite de ces pièces, le Mercure donne la Déclaration du Roy, en date
du M février 1617, sur le subject des nouveaux remuements de son
royaume. Ce document remarquable, contresigné Richelieu, est proba-
blement de sa main.
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264 JOURNAL INÉDIT
Février 1617. ayant seû que M. de Nevers retournoit à Chasteau-
Porcien, avec quatre censchçvaux, l'avoit saivy, mais
n'avoit pu le joindre. Il luy prit quelque bagage,
tua douze ou quinze de ceux qui le conduisoyent,
et s'estoit allé mettre en bataille à la portée du Ca-
non de Chasteau-Porcien, où il avoit demeuré assez
longtemps sans que personne osast sortir, encore que
M. de Nevers y fust en personne.
Environ ce temps, M. de Join ville fait serment
de la charge de chambellan, qui fut ostée à M. du
Mayne*.
17. M. de Guise ayant la charge de lieutenant-
général pour le Roy en ses armées, part pour aller
à Chasteau-Thierry. M. de Commartin, estoit Inten-
dant de la justice et des finances de ladite armée ^.
MM. de Thémines et de Praslin ne s' accommodant
pas bien ensemble, M. de Guise envoya M. de Feu-
quières vers M. de Praslin, lequel dit, que puisqu'il
avoit plû au Roy d'élever M. de Thémines au-dessus
de luy, il luy porteroit le mesme honneur qu'à un
Maréchal de France ; qu'en l'absence de M. de Guise,
il luy obéiroit entièrement; mais que de désirer de
luy qu'il se relâchast aux fonctions de la charge de
Maréchal de Camp, ce n'estoit chose raisonnable;
qu'il vouloit bien, après avoir fait des logemens, aller
trouver M. de Thémines, pour savoir s'il les ap{H*ou*
veroit ; mais que M. de Thémines n'eust le mot de
^ Vop, Pontcbartrain, p. 207. C'était la charge de grand chambel*
lan de France.
2 Voy. Merc.fr., ^, 116.
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d'arnauld d'andilly. 265
M. de Guise , et puis le luy baillast à luy, c'estoit février i«i7.
chose qui ne se devoit et ne s'esioit jamais prati-
quée ; et que, pour le montrer, M. de Biron *, qui
faisoit la charge de Maréchal de Camp au Siège
d'Amiens, prenoit le mot du Roy et non pas dé M. le
Connestable ; et que, de fait, si le Roy venoit en son
armée, il supplieroit M. de Guise mesme de trouver
bon qu'il reçeust le mot de Sa Majesté, et non plus
de luy ; ce qui témoignoit assez que ce n'estoit pas
manque de respect à la personne de M. de Thémines,
mais pour ce que Tordre de la guerre estoit tel ; et
que pour faire connoistre l'affection qu'il avoit de
servir, il demeureroit dans l'armée en qualité de
gentilhomme particulier , au cas qu'on ne luy vou-
lust laisser faire sa charge. — M. de Guise dit, sur
cela, qu'au voyage de Rayonne , M. de Vignolles,
Maréchal de Camp, prenoit le mot de luy, encore
que M. le Maréchal de Rrissac y fust, et qu'estant de
retour à Rwdeaux , M. de Vignolles le sqpplia de
trouver bon qu'il prist le mot du Roy. M. de Thé-
mines, au contraire, insiste sur sa commission , à la
fin de laquelle, (après le pouvoir qui luy est donné, de
faire, en l'absence de M. de Guise, les mesmes choses
que luy) , il y a une clause qui porte pouvoir d'exercer
les mesmes fonctions, tant en présence qu'en absence.
* Chartes de Gontaut, duc de Biron, second mai-échal de ce nom,
pair , amiral et maréchal de France, condamné à mort et exécuté en
1602. Il eut en 1507, comme maréchal général des camps et armées
du Roi, toute la conduite du siège d'Amiens, quoique le connétable
de Montmorency fût présent. {Voy. P. Anselme, t. vu, p. 363.)
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266 JOURNAL INÉDIT
Février i«n. M. Barbin dit, que cela avoit esté fait, parce que
M. de Thémines avoit dit ne pouvoir aller autrement,
d'autant que M. de Guise commandant, et M. de
Praslin estant seul Maréchal de Camp, il n' avoit sans
cela, aucun pouvoir en l'armée.
Environ le 25. Cufy pris par M. le Maréchal de
Montigny. Ils endurèrent deux cens coups de canon.
11 fut trois semaines devant, et l'eût pris plus tost,
s'il eust voulu ; mais il se fâchoit de perdre M. de
Meneton, neveu de sa femme, qui s'estoit jette de-
dans. Le Roy ayant sceû la nouvelle, manda à M. de
Montigny de faire raser la Place ; ce qu'il fit exécu-
ter par un Prévost, qu'il mena avec luy ; et depuis, a
fait le semblable à toutes les autres places qu'il a
prises*.
M. de Bersy fut envoyé. — Incontinent après
M. de Montigny prend Vouzy ^
Mars Environ le 1". Vincenze, secrétaire de M. le Ma-
réchal d'Ancre , pris prisonnier et mené à Sois-
sons ^
La Grange, secrétaire de Monsieur le Prince, mis
auChastellet pour ce qu'il se mesloit d'autres afiaires
que celles que le Roy luy avoit permis de traitter.
M. de Guise, avec trois mil hommes de pied et
* yo(j, Richelieu, p. 394 ; Pontchartrain, p. 20/i ; Merc. fr,^ p. 165.
2 Douzy, suivant le Mercure^ p. 166.
3 l\ revenait d'une mission en Allemagne et dans les Pays-Bas,
lorsqu'il fut ai^êté par les gens des Princes rebelles, qui s'emparèrent
de ses papiers.
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d'arinaild o'aindilly. 267
quatre ou cinq cens chevaux, assiège Ribecour et le *i«rs i«i7.
prend par composition le samedi 4". Le premier jour
du siège, M. de Guise et M. de Thémines allèrent,
en pourpoint, reconnoistre la place. Le capitaine
Saint-Martin (qui a voit salué M. de Guise, en quoy
il avoit fait faute), est tué d'un coup de pièce, par la
teste, entre M. de Guise, et M. de Feuquiéres. Son
chapeau tomba sur M. de Feuquiéres, II estoit du
Régiment de Beaumont. Ce jour-là, ceux de dedans,
au nombre de cent vingt soldats, tirèrent plusieurs
coups de pièce, et plus de quatre cens mousquetades.
Sur le minuit, M. de Guise envoya M. de Feuquiéres
à Châlons, quérir deux canons de baterie, et des
munitions pour tirer mille coups. 11 ne trouva pas
un oflBcier de l'artillerie, un seul cheval, ni une seule
charrette. 11 fit faire en vingt-quatre heures cin-
quante charrettes, assembla aux environs de Chà-
lons deux cens chevaux, écrivit de tous costez pour
ramasser et envoyer à M. de Guise les troupes qui ne
Tavoyent pas encore joint, et avec cinq cens hommes
de pied, et quelque soixante chevaux, mena le canon
à M. de Guise, qui, ayant pris Richecour, luy com-
niand ade faire alte à et puis de ramener le ca-
non à Chàlons.
La résolution d'amener ainsi du canon estoit bien
périlleuse, car il estoit aisé aux ennemis de défaire
ceux qui le conduîsoyent, et de le reprendre.
C'estoit témérité que de faire ce siège, car la place
est excellente, estant une maison bastie de pierre de
taille des quatre costez avec un fossé de douze toises
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268 JOUKNAL INÉDIT
Mur» i*n. (Je large, et un terre-plein dehors, avec quatre bas-
tions, dont tout le terrein est terre glaise, où la balle
ne fait que son trou, et puis, la terre se referme.
M. de Guise estoit foible. Les ennemis estoéent as-
semblez à Relel avec huit cens chevaux^ et ce qu'ils
pouvoyent tirer de leurs garnisons. Ils pouvoyent
empêcher que M. de Guise ne receust aucune des
forces qui le devoyent joindre, d'autant qu'il leur
estoit facile de les charger en chemin, y ayant douze
lieues de plaine à passer. Us le pouvoyent incom-
moda* de vivres, et deux mille coups de canon ne
pouvoyent cependant faire prendre la place, qui
estoit munie de vivres pour six mois. La témérité de
M. de Guise les étonna, et cette action leur a fait
perdre créance envers les leurs mêmes, et témoi-
gner à tout le monde leur impuissance.
M. de Guise fit démolir Richecour, mais d'autant
que les matériaux en estoyent si bons que Ton avoit
très-grande peine à en venir à bout, on mit le feu
dedans*.
Environ ce temps, messieurs les Princes, qui s' es-
toyent assemblez à Bétel ^, se séparèrent assez mal
* yoy, Pontchartrain, p. 205 ; Mera fr,^ p. 116.
2 Le résultat de cette conférence fut un long et curieux factum
contre le noaréchal d'Ancre, daté de Rethol, le 5 noars, et publié sous
ce titre : Déclaration et protestation des Princes, ducs, pairs, officiers
de la couronne. Gouverneurs des Provinces, Seigneurs^ Chevaliers^ Gentils-
hommes, villes et communautez^ associez et confederez^ pour le restablis'
sèment de Cauthorité du Roy et la conservation du royaume, contre ta
conjuration et tyrannie du Mareschal d'Ancre et de ses adhérents. Le
Merc, fr, donne en entier ce document, p. I2ft et suiv. 11 est pi^cédié
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d'arnauld d'andilly. 269
satisfaits les uns des autres. Car M. de Nevers les m^m hi?.
avdt voulu obligera aller, avec tout ce qu'ils avoyent
de forces, harceler M. de Guise ; et MM. du Mayne
et de Vendosme disoyent au contraire, quMl n'y avoit
point d'apparence qu'ils abandonnassent leurs Places,
lesquelles ils avoyent laissées derrière eux, sur l'as-
surance que M. de Nevers leur àvoit donnée qu'ils
trouveroyent de grandes forces en Champagne, ce
qu'il n'avoit nullement exécuté, et ainsi, les avoit
mis en hazard de leur honneur et de leur vie. M. de
Buillon s'en retourna aussi à Sedan.
10. Déclaration du Roy portant confiscation, et
réunion à la Couronne des biens de MM. de Nevers,
de Vendosine, de Mayenne, de Buillon et Prési-
dent le Jay. Vérifiée en Parlement, le 16 du mesme
mois *.
11. Nouvelle arrive au Roy de la prise d'An-
trin, par M. deMontigny. Il y avoit trois ou quatre
cens hommes dedans. Cette place avoit esté autre-
fois dénfiantelée, depuis raccommodée et se pouvoit
rendre très-bonne.
M. de Villedonné^, frère de M. de Montigny, ap-
porte nouvelle de la prise de Clamecy, aux condi-
d*ane lettre écrite au pape par le duc de Nevers, et suivi d'une dé-
fense pour M. de Nevers contre la déclaration publiée contre lui.
* Foy. Richelieu, p. 393. Voy, cette déclaration et Tarrèt du Parle-
ment, Merc. fr.^ p. 152. Le nom qui échappe à Arnauld d'Andilly ou
que le copiste du temps n'a pu lire est celui du Marquis de Cœuvres.
2 Charles Etienne de la Grange, seigneur de Villedonné, gentilhomme
ordinaire de la Chambre, mestre de camp d'un régiment, maréchal de
camp des armées du Roi et chambellan de Gaston, duc d'Orléans.
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Mare 1617.
270 JOURNAL INJÎDir
lions qui en suivent : que les soldats sortiroyent... ;
que les habitans payeroyent huit mil écus, pour se
racheter du pillage ; que Ton reinettroit entre les
mains de M. de Montigny quatre chasteaux.
M. le Prince de Chasteau-Porcien *, second fils de
M. de Nevers, pris dans Clamecy, et le marquis de
Gallerande% lequel avoit esté pris huit jours aupa-
ravant et avoit payé mil écus de rançon. M. le
Prince de Chasteau-Porcien fut mené à la Charité et
de là à Bourges \
M. le comte d'Auvergne part. On dit que c'esloit
pour aller à Noyon. On envoyé avec luy la compa-
gnie de <îhe vaux-légers du Roy, commandée par
M, de la Curée, et dix compagnies du Régiment des
Gardes (entre lesquelles estoit celle de M. de Brantes) ,
avec le régiment de Piémont, quelques autres troupes
et quatre canons de baterie.
M, de Rohan part avec M. le comte d'Auvergne ;
MM. de la Curée, de Saint-Luc \ de Saint-Géran,
Dandelot ^ Marcschaux de camp; M. Favier, Maistre
^ Charles de Gonzagucs-Clèves, prince de Mantoue et duc do Rethe-
lois, Pair de France, né en 1609, mort en 1631.
2 Georges de Ciermont, marquis de Gallerande, capitaine de cin-
quante hommes d'armes, Conseiller d'État;
* yoy, Richelieu, p. ^394 î Pontchartrain, p. 212 ; Merc, fr, , p. 166.
A Thimoléon d'Ëspinay, seigneur de Saint-Luc , gouverneur de
Brouage et des iles de Saintonge, vice-amiral de France, contribua
beaucoup à la victoire remportée sur les^Rochelois, en 1622, chassa
M. de Soubise de l'île de Ré, maréchal de France et lieutenant-général
du gouvernement de Guyenne on 1628, mort en IQkk»
^ Charles de Coligny, fils de l'amiral de Coligny, né en 1564, mar-
quis d'Andclot, maréchal de camp, lieutenant-général en Champagne,
mort eu 1632.
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d'arnauld d^andilly. 271
des requestes, Intendant de la justice et des finances mw» mt.
(ce disoit-on). M. de Chevry y fut envoyé le 28
comme intendant des finances *.
Quinze jours auparavant, on avoit toujours creû
de jour en jour, que le Roy et la Reyne partoyent,
mais tout d'un coup cela fut changé, et l'on envoya
les forces cy-dessus. On tient que ce changement si
prompt arriva sur ce que ceux de Noyon mandèrent
qu'ils estoyent aussy forts que la garnison et qu'ils
supplioyent que l'on allast droit à eux. Cela s'est
trouvé n'estre pas vray ^.
M. de Richelieu % frère de M. de Luçon, ayant
esté, environ ce temps, envoyé en l'armée de M. le
Maréchal de Montigny en qualité de Maréchal de
Camp, M. de Bourg Lespinasse *, qui avoit aupara-
vant fait la charge très-dignement, se retira de dé-
plaisir, en sa maison ^
Environ ce temps. M, le Maréchal de Montigny
ayant eu avis que les troupes de M™' de Nevers
alloyent assiéger Saint-Pierre-le-Moustier, part, avec
/a fleur de ses troupes, pour les aller secourir ; et si
ceux de Saint-Pierre-le-Moustier eussent eu le cou-
* Foy. Fontenay-Mareuil, p. 367 ; Pontchartrain, p. 207 ; Brienne,
p. 324 ; Rohan, p. 143.
* Foy, Pontchartrain, p. 209; Merc. fr.^ p. 165. -
3 Henry da Plessis, seigneur de Richelieu, frère aîné du grand Car-
dinal, maréchal de camp en Tarmée du duc de Nevers et du maréchal
de Montigny, tué en duel par le marquis de Thémines en 1619.
^ Antoine du Maine, baron du Bourg-rEspinasse, gentilhomme or-
dinaire de la chambre, maréchal de camp, gouverneur d*Antibes eu
1608^ mort en 1635.
^ Foy, Fontenay-Mareuil, p. 368.
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272 JOURNAL INÉDIT
Mars iei7. rage d'attendre seulement deux heures, le canon que
M™' de Nevers faisoit mine d'y vouloir mener, M. de
Montigny l'eust pris, sans doute, et taillé en pièces
toutes les troupes de M"'* de Nevers *.
M. de Fiesque ^, escuyer de la Reine, disgracié et
chassé de la Cour, par le commandement de la Reyne-
mère. 11 revint le jour de la mort du Maréchal d'An-
cre, et eut don de l'office de M. Aimeras, secrétaire
de la Reyne, mais il s'accommoda aveque luy moyen-
nant deux mille pistoUes. Il fit des reproches à la
Maréchale d'Ancre, lorsqu'on la menoit à la Bas-
tille, et depuis, prit avec luy son fils. {Fid. cy^près. )
Environ ce temps, M. du Mayne veut enlever le
quartiCT des chevaux-légers à Villers-Cotterests, com-
mandez par M. de ftohan, où M. Arnaud fit très-
bien avec ses carabins \
Environ ce jour, M. de Marolles, suivy de M. de
Nevers donna dans le quartier de quelques oompa-
gnies de chevaux-légers de M. de Guise, où M. de la
Feuillade* fit très-bien, et les repoussa.
* Foy. Ponlchartrain, p. 212. '
2 Je ne sais si ce gentilhomme, écuyer de la Reine régnante était
François de Fiesque, comte de Lavm^e, tué au tiége ^ Montauban
en t621 {Voy, P. Anselme, t. ix, p. 56), ou bien Hugues de Fiesque,
qui servit contre les calvinistes, fut du siège de Montauban en 1620,
et, de retour & Gênes, remplit des emploie importants, fut ambassa-
deur en Angleterre et général des galères. (Moreri, t. v, p. 152.) F^jf.
Pontchartrain, p. 224. H fit des reproches à la maréchale, parce que
c*était elle qui Tavait fait chasser de la cour sous prétexte qu'il avait
mal parlé contre le Maréchal.
' Foy. Fontenay-MareuiJ, p. 368 ; Rohan, p. 143; Met'c. fr,, p. 164.
4 Georges d*Aubusson, comte de la Fenillade, conseiller d'État, ca-
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D*ARNAULD d'aNDILLV. 273
18. M, le Prince de Joinville va en Auvergne, Mars un.
où il leva quatre ou cinq cens Irès-bons chevaux, et
un régiment de douze cens hommes de pied, dont
tous les capitaines estoyent gentilshommes, qui
avoyent au moins chacun dix mil livres de rente.
Cette cavalerie n'estoit pas encore sur pied *.
Le Marquis de Portes chargea Andredieu avec
quatre cens hommes des Sévènes, qu'il avoit encore
de reste, de ceux qu'il avoit assemblez contre le Roy.
Il le défit, le contraignit de se retirer à Gresay, où
il l'assiégea, et le contraignit de se rendre *.
23. M. de Nemours arrive à la Cour '.
M. de Rohan vient à Paris, sur ce que ceux de
Saint-Jean d'Angely avoyent nommé trois Maires,
pour en estre choisy un par luy, au lieu qu'il vouloit
qu'ils en prissent un qu'il leur avoit nommé. Il re-
part le lundy 27 \
24. M. le Comte d'Auvergne investit Pierrefons.
Villeneuve*, le Capitaine Saint- Martin , Desvaux,
trois autres hommes de commandement, et quelque
quatre-vingt soldats. Au commencement, M. le Comte
pitaine lieutenant des chevau-légers de la Rcine-mëre, Sénéchal dos
Marches, Maréchal de camp, mort en 1628.
* roy. Merc. fr,, p. 17/i.
* Foy, Pontchartrain , p. 205. Andredieu (suivant Pontchartraln,
Andrieu) était un gentilhomme de la Religion réformée, qui avait levé
des troupes pour le duc de Savoie et les avait mises au service des
Princes rebelles.
3 Foy. Pontchartrain, p. 213.
^ Foy, Fontenay-Mareuil, p. 369.
» Le capitaine la Villeneuve commandait à Pierrefons pour le Mar -
quis de Cœuvres.
18
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274 JOURNAL INÉDIT
Mars 1617. d'Auvergne vouloit faire un fort pour les bloquer,
à cause qu'il n'y avoit qu'une avenue. Mais ayant
appris enfin, que la place estoit la plus foible à l'en-
droit du portail, il fit tirer là, et fit brèche. Villeneuve
ayant esté soupçonné par le Marquis de Cœuvres,
fut mis dehors par son commandement. — Saint-
Martin et Devaux furent tuez du canon ; ce qui ayant
ébranlé ceux du dedans, et voyant qu'on alloit battre
leur puits, ils se rendirent le 2 avril *.
26, jour de Pasques. On fait partir par eau, pour
aller à Compiègne, et de là à Soissons, huit canons
de baterie, six couleuvrines, six bastardes, deux
moyennes, cent dix milliers de poudre, et sept mille
boulets ^.
28. M. le Maréchal d'Ancre arrive à Paris. 11
avoit mené, quelques jours auparavant, en l'armée de
M. le Comte d'Auvergne cinq mil hommes de pied,
dont il y avoit trois mil Liégeois, et sept ou huit cens
chevaux *.
^ yoy, Fontenay-Mareuil, p. 369 ; Richelieu, p. 395 ; Ponchartrain,
p. 212 ; Merc, fr,^ p. 16/i.
2 Foy, Fontenay-Mareuil, p. 370; Blerc, ft\^ p. 165.
* Foy. Pontchartrain, p. 208. Le Mercure rapporte à ce sujet une
lettre du maréchal d'Ancre au Roi, en date du 13 mars, qui mérite
d'être reproduite :
« Sire, dernièrement que j'eus l'honneur de prendre congé de Vostre
» Majesté, en vostre gallerie du Louvre, en luy faisant la révérence,
» je Tasseuray qu'au besoin, en quoy je la voyois je ne luy dirois
» comme force gens de ceux qui estoient obligez autant que j'ay Thon-
» neur de l'estre à Vostre Majesté, estoient accoutumez de luy dire,
» que si Vostre Majesté leur commandoit et leur donnoit les moyens,
» qu'ils vous ameneroient nombre de gens de guerre pour la servir :
» mais que lorsqu'il seroit temps, je la servirois avec six mille hommes
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d'arnauld d'andilly. 275
30. Chasteau-Porcien rendu à M. de Guise, après
un siège de... jours. La place estoit beaucoup
meilleure que l'on n'estimoit. 11 sortit neuf cent
trente hommes de dedans. Ils avoyent toujours dé-
fendu leurs dehors. La rivière d'Aisne passoit dans
la ville, et M. de Guise ne l'assiégeoit que d'un costé,
tellement que les Assiégez avoyent le costé de Rétel
et de Mézières entièrement libre; ce qui donnoit
moyen à M. de MaroUes de les faire rafraischir tous
les jours à la veûe de l'armée du Roy. Mais les mu-
nitions de guerre et les farines leur manquèrent,
à cause que Mézières et Retel ne soyent trop dé-
garnis ; et ainsi, ils furent contraints de se rendre.
Montereau, cornette de la compagnie de chevaux-
légers, brave et vaillant homme, élevé de peu
» de pied, et huit cens chevaux quatre mois à mes dépens; j*ay tenu,
» sire, ma parole, et satisfaict à cestë obligation : J'ay levé en vertu
» de vos commissions trois mille deux cents hommes de pied. Liégeois,
» et cinq cens chevaux, et deux mille huict cens François, et trois cens
» chevaux. Je meneray là où il plaira à Vostre Majesté cinq mille
» hommes de pied, et huit cens chevaux, et le surplus de Tinfanterie,
» je la laisseray dans les places plus importantes de ma charge pour
» les garantir de tous accidens qui leur pourroient arriver. J'attendray
» donc, Sire, vos commandemens, et ne retienne Vostre Majesté au-
» cune considération de la qualité qu*elle m*a donnée ny de la des-
» pense que j*y faits pour son service, de m*ordonner librement là, et
» conmie elle veut que je la serve ; que pourveu que la France me re-
» connoisse obeyssant et fidel subjet et serviteur de Vostre Majesté,
» toutes conditions me seront agréables : Tobeyray dans vos armées à
» tout le monde , et deferray à qui il plaira à Vostre Majesté, pour-
y> veu, Sire, que vous me permettiez que je conteste avec qui que ce soit
» le rang que je deftendray le plus. Sire, de Vostre Majesté, très-
» humble , trè&obeyssant, très-fidelle subject et serviteur, Concino. »
Cette lettre provoqua de nouvelles attaques dont le Mejxure donne la
substance.
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276 JOURNAL INÉDIT
Marsien. par son courage, y commandoit. Tous les soldats
firent serment de ne porter de trois mois les armes
contre le Roy, et les Walons furent conduits hors le
royaume. Montereau ne fit point ce serment. Il en de-
meura plus de deux cens en l'armée de M, de Guise
et une compagnie de mineurs *.
Avril. Samedy 1. Messieurs les Princes, croyant l'ar-
mée de M. de Guise du tout fatiguée par le siège de
Chasteau-Porcien, M. de Guise part à six heures
du soir, avec deux ou trois cens chevaux, et trois ou
quatre cens hommes de pied qu'il mit sur sa retraite.
Il arrive à l'aube du jour à un village, tout contre le
faubourg de Laon, charge le régiment de Balagny
qui y estoit logé, avec une compagnie de chevaux-
légers, tue vingt-cinq ou trente hommes, fait fuir le
reste à ce faubourg, et emmeine quelques chevaux*.
Environ le 6. Soissôns investy.
7. M. le Maréchal d'Ancre va en Normandie.
Environ ce temps, le Prévost des Maréchaux de. ..
prit à... un vallet de pied de M. du Mayne, portant
une lettre à M"*' de Nevers, toute écrite de la main
de son maistre, contenant que tout estoit pour eux,
qu'il avoit taillé en pièces la cavalerie légère du Roy
à Villers Gotterets, d'où M. de Rohan s'estoit à peine
sauvé; qu'ils avoyent fait lever hautement à M, de
Guise' le siège de Chasteau-Porcien ; qu'elle conti-
* yoy, Pontchartraiii, p. 212 ; Bassompierre, p. 141 ; Merc, fr,<, p.l66«
2 yoy, Merc. fr,^ p. 173.
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d'arisauld d'andilly. 277
nuast à bien faire, etc. La Reyne-mère mit dans Avniien.
sa boiste l'original de ladite lettre.
8. Retel investy par M. de Guise. Aux approches,
il se fit une rude charge par MM. de Thémines et de
Praslin, suivis de cinquante gendarmes de la Reyne-
mère. Ils menèrent battant et tuant jusque dans
leurs retranchemens, quatre-vingts ou cent chevaux
de l'ennemy. 11 en fut tué vingt ou vingt-cinq.
M. le Marquis de Thémines fut blessé d'une mous-
quetade au bras. Monsieur le Maréchal son père
témoigna une valeur extrême en ce combat , et dé-
gagea son fils. M. de Praslin fit aussi merveilles.
Nul des nostres ne fut tué. Lacoste y fut blessé.
M. de Marolles vint trouver M. de Guise, sur un
passeport, luy dit de la part de M. de Nevers qu'il
remettoit Retel entre ses mains, pourveû que l'on y
laissast seulement dix soldats de sa part, auxquels
M. de Guise bailleroit tel capitaine et leur feroit
faire tel serment qu'il voudroit ; et que, sur la moindre
lettre de cachet du Roy, M. de Nevers viendroit trou-
ver Sa Majesté. M. de Guise en donna avis au Roy,
qui luy fit réponce le jeudy 13, portant, qu'il approu-
voit la réponce qu'il avoit faite à M. de Marolles, et
que si le Duc de Nevers vouloit remettre effectivement
entre ses mains Retel et Mezières, il le pouvoit venir
trouver en toute sûreté ; Et que, cependant sans s'ar-
rester à ces propositions, il continuast toujours sans
que rien le pust divertir, d'aller à Mezières après la
prise de Retel *.
^ Voy. Poiitchartrain, p. 216 ; Bassompierre, p. 143 ; Merc, fr,^ p. 183.
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278 JOURNAL INÉDIT
Environ ce temps, M. le Baron d'Uxelles* qui
estoitmal avec M. le Grand, envoyé un gentilhomme
en poste, dire à la Reyne, qu'un passant estant arrivé
au Parlement à Dijon, M. le Grand y estant, et dit,
que la Reyne-mère avoit esté poignardée, M. le Grand
avoit témoigné publiquement une extrême joye, et
dit qu'elle ne pouvoit attendre autre chose, et qu'un
Gentilhomme amy du Baron d'Uxelles estoit présent.
La Reyne estant en une extrême colère de cela, et
M. Barbinne sachant comme y remédier, enfin, s'a-
visa de dire à la Reyne, que cette méchanceté estoit
si énorme, et l'affaire de si grande conséquence
qu'elle méritoit bien d'estre éclaircie , et qu'il faloit
mander au Baron d'Uxelles que, sous prétexte de
quelque autre affaire, il envoyast le gentilhomme qui
luy avoit donné cet avis, afin d'apprendre la vérité
par sa bouche. La Reyne ayant approuvé ce conseil,
et dit sa résolution à l'homme du Baron d'Uxelles, il
répondit, qu'il ne croioit pas que le Gentilhomme
voulust venir ; ce qui donna lieu à M., Barbin, de dire
à la Reyne qu'il croioit assurément que c'estoit une
calomnie ; et sur ce que la Reyne, estant en carrosse,
dit quelque chose de l'affaire tout haut, et en s'addres-
sant à la Princesse de Conty^ , sans toutefois nommer
* Jacques du Blé , baron puis marquis d'Huxelles, gouverneur de
Cliàlon et lieutenant-général en Bourgogne en 1611, mestre de camp
d'infanterie en 1613, conseiller d*État en 1615, maréchal de camp en
1625, mort de blessures au siège de Privas en 1629.
2 Louise-Marguerite de Lorraine, fille de Henri !•% duc de Guise et
de Catherine de Clèves, comtesse d'Eu, née en 1577, veuve depuis 1614
de François de Bourbon, prince de Conty, qu'elle avait épousé en 1605,
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d'arnauld d'andilly. 279
personne, et la Princesse de Conty ayant conjecturé athi i€I7.
que c'estoit de M. le Grand qu'elle vouloit parler,
envoyé quérir le Breton, qui alla trouver M. le Grand,
lequel fit faire un acte public dans le Parlement,
contenant tout ce qui s'estoit passé, lorsque ledit
homme inconnu estoit venu dire la nouvelle cy-»des-
sus, et envoya cet acte à la Reyne pour justifier son
innocence, et faire voir la calomnie. Mais il n'arriva
qu'après^la mort du Maréchal.
16. M. de Guise prend Retel, par composition :
que les soldats sortiroye.nt tambour battant, etc. Le
mesme jour de la capitulation , M. de Praslin fut
blessé dans les tranchées, d'une mousquetade à tra-
vers la cuisse, et M. de Bassompierre fut un peu
effleuré au petit ventre, d'une balle qui avoit déjà
frappé contre une muraille.
La Reyne-mère envoyé M. de Mailloc, l'un de ses
Gentilsbônrmies servans, visiter M^. de Praslin et de
Bassompierre, et témoigner à M. de Guise et aux
principaux chefs, le contentement qu'elle avoit d'eux * .
Soissons fut investy le 6, ou environ.
morte en 1631. Cette princesse, célèbre par sa beauté et par son es-
prit, que Henri IV voulut épouser, avait été en commerce de galan-
terie avec le duc de Bellegarde, grand écuyer. Elle s'attacha depuis
au Maréchal de Bassompierre et mourut, dit-on, de chagrin quelques
mois après que son vailJant amant fut mis à la Bastille. On attribue à la
princesse de Conty Y Binaire des Amours du grand Alcandre. {Voy, la
Notice de Bl. Weiss sur cette princesse. Biographie Michaud.)
' Foy. Bassompierre, p. Ik3 ; Merc, fr.y p. 183. Le récit du Mercure
qui donne les articles de la capitulation confirme entièrement celui
d'Arnauld d'Andilly.
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280 JOURNAL INÉDIT
Avru t«i7. Environ le 13, M. de Feuquièrcs fait en huit heu-
res un pont de basteaux.
M. Arnaud, maistre de camp des carabins, y per-
dit M. de Montarsis, sergent major de son régiment,
et du costé de M. du Mayne, le Baron de Montenant
y fut extrêmement blessé *•
17. Le Maréchal d'Ancre revient de Normandie
à Paris. On dit, que ce qui le ramena, estoit, qu'on luy
avoit donné avis que sa femme vouloit faire la paix.
24. Le Maréchal d'Ancre tué par commande-
ment du Roy.— Exécuteurs ; M. de Vitry (fait Maré-
chal de France, et eut un don de deux cent mil livres
sur l'argent de la Maréchale ; M. du Hallier ', son
frère, succéda à la charge de Capitaine des Gardes)
donna le premier coup de pistollet. M. le Baron de
Persan^ eut le jeudy 27 la Capitainerie de la Bastille
au lieu de M. de Vouzay, auquel on donna onze mil
écus, deux mil écus de pension, une charge de Mais-
tre d'hostel. Il donna le trois ou quatrième coup de
pistollet*.
Guichaumont, exempt des gardes, donna le
1 Voy. Richelieu, p. 395; Merc, fr.^ p. 188 et suiv.
? François de l'Hôpital, seigneur du Hallier, d'abord évèque deMeaux,
puis capitaine des gardes du corps en 1617, gouverneur de Lorraine,
de Champagne en 1640, maréchal de France en 1643, gouverneur de
Paris en 1649, mort en 1660. W 8*est rendu célèbre sous le nom de
maréchal de THôpital. (Voy. P. Anselme, t. vu, p. 533 )
' Henry de Vaudetar, baron de Persan, gouverneur de la Bastille
en 1617. Ayant épousé en 1607 Louise de THôpital, il était le beau-
frère de MM. de Vitry et du Hallier.
^ Voy, Fontenay-Mareuil, p. 388 ; Richelieu, p. 424 ; Pontchartrain,
p. 232 ; Brienne, p. 328.
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d'arnauld d'andilly. 281
deuxième coup de pistollet*. Ayant, après la mort Avriuen.
du Maréchal , appris qu'il avoit une belle croix de
Diamant sur luy, il vint à Cortade , archer de la
Prévosté de Thostel, qui gardoit le corps, et la luy
demanda de la part du Roy. Cortade, qui ne savoit
que c'estoit, le déboutonna, trouva ladite croix pen-
due à une chaine d'or, entre le pourpoint et la cami-
sole, et la luy bailla.
La Chesnaye, Taran, Gêniez, de Menan, du Fay',
Boyer ordinaires.
Sarroques, Galeteau% porte-arquebuse du Roy.
Sur les dix heures du matin, le Maréchal d'Ancre
estant au Louvre...., qui estoit sur le pont de la
porte, fit signe avec son chapeau, à un autre, qui fit
signe à M. de Vitry, lequel vint, suivy de quelques-
uns des susnommez]; et ayant demandé M. le Maré-
chal (lequel estoit entré avec cinquante Gentilshom-
mes), on luy dit : le voilà ; et il le trouva, qui lisoit
une lettre sur le pont du Louvre. M. de Vitry s'ap-
procha, et luy dit en le saisissant : le Roy m'a com-
mandé de vous arrester et de vous mener parler à
luy. Le Maréchal répondit : J'ay affaire à mon logis.
Sur cela, M. de Vitry luy bailla un si grand coup de
* Suivant le récit de Fontenay-Mareuil, Guichaumont aurait tiré le
premier coup de pistolet et aurait tué le Maréchal.
2 Jean Hurault de THôpital, seigneur du Fay, gentilhomme de la
Chambre du Roi. Il était fils de Robert Hurault, seigneur de Belesbat,
et de Madeleine de THôpital, fille unique et héritière de Timmortel
Chancelier.
* Galebeau, suivant Fontenay-Mareuil. Il eut pour récompense la
place de premier valet de chambre.
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282 JOLRNAL INÉDIT
Avril 1617. pqIjj (jg^^g iç ventre, qu'il le jetta contre la barrière ;
et lors, il luy fut tiré tout de suite quatre coups de
pistoUet, par les susnommez. (Toute la journée,, son
corps mort fut veû dans une petite chambrette ou
passage des soldats des Gardes de la porte du Lou-
vre). Quelques-uns de ceux qui suivoyent le Maré-
chal voulurent mettre la main à Fépée; mais plus-
tost pour se retirer que pour faire résistance.
M. le Colonel d'Ornano * qui estoit dans la cour du
Louvre lorsque cecy s'exécutoit vint dans le cabinet
des.....^ dire au Roy que c' estoit fait, lequel, tout
plein de joye vint à une des fenestres qui répondent
sur la cour, et ayant son épée à la main , cria tout
haut : Courage, mes amis, je suis maintenant Roy.
Et lors, tous ceux qui estoyent dans la cour du Louvre
mirent l'épée à la main, et haussant les bras, firent
un cri de réjouissance, et de protestation de service,
au Roy.
Après, le Roy s'en alla dans sa galerie, et se mit
sur le billard, où il recevoit, avec une contenance très-
contente, et très-assurée, toute la noblesse qui luy
1 Jean-Baptiste d*Ornano, comte de Mootlor, né en 1581, capitaine
des chevaa-légers et colonel des Corses en 1595, lieutenant du Roi en
Normandie , gouverneur de Quillebœuf, du Pont-de-rArche, du Pont^
Saint-Esprit, ' gouverneur de Gaston, duc d*Orléans, en 1619, disgracié
et mis à la Bastille, rappelé et nommé premier gentilhomme de la
Chambre et surintendant général de la maison du duc d*0rléans,
maréchal de France en 1626, disgracié une seconde fois par la haine
de Richelieu et enfermé au château de Vincennes, où il mourut em-
poisonné le 2 septembre 1626. Voy, le récit détaillé de sa première
arrestation, par Arnauld d'Andilly, son ami. Appendice.
3 Le cabinet des oiseaux, suivant Fontenay-MareuiU
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d'arnauld d'andilly. 285
venoit faire la révérence. Il y fut encore une partie ^vru mi.
de Taprès-disnée, et donnoit ordre luy-mesme à plu-
sieurs choses. Il dit, qu'il y ayoit cinq nuits qu'il n'a-
voit dorjny.
Ce fut une chose incroyable, que la quantité de
Noblesse qui se trouva ce jour-là au Louvre.
' Aussitost après la mort du Maréchal, MM. du Con-
seil, qui estoyent aux greffes, allèrent trouver le Roy,
lequel vint à eux, les larmes aux yeux de joye ; et dit,
que pour empescber les mauvais desseins que le Ma-
réchal d'Ancre avoit contre sa personne, et son Estât,
il avoit esté contraint de le faire mourir, et qu'à pré-
sent, avec la grâce de Dieu, il estoit Roy.
M"** Catherine, femme de chambre de la Reyne-
mère, ayant ouy le bruit et sceû la mort du Mafé-
chai, l'alla dire fort brusquement à la Reyne-mère,
laquelle se leva avec émotion, de dessus son siège,
fit trois ou quatre pas, puis, s'arresta tout court, et
dit : Quels conseils !
Depuis, elle se témoigna très-constante, et incon-
tinent après, envoya dire au Roy par M. de Bressieux
que s'il luy eust fait entendre le sujet des méconten-
temens qu'il avoit contre le Maréchal d'Ancre^^ elle
eust esté la première qui luy eust conseillé de faire
ce qu'il avoit fait; qu'elle prioit Dieu que tout réus-
sistpour son bien, et pour celuy de l'Estat, et luy de
se souvenir toujours qu'elle estoit sa mère, et de luy
faire ce plaisir de prendre la peine de descendre
en bas, afin qu'elle le pust voir. — Le Roy répondit
qu'il la supplioit de l'excuser, s'il ne la voioit,
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284 JOUllNAL INEDIT
Avril 1617. pour ce qu'il avoit maintenant tout plein d'affaires *.
Madame la Princesse de Gonty , allant voir la Reyne-
mère, et ayant seû que le Roy vouloit luy ester ses
Gardes, elle \ny dit, pour Ty amener doucement,
qu'elle estimoit qu'il seroit bon, pour donner toute
sorte de confiance au Roy, qu'elle témoignast ne
vouloir point d'autres gardes que les siens. Ce que
la Reyne-mère ayant bien entendu, elle dit, que ses
Gardes se retirassent. — M. de Vitry estant venu dire,
de la part du Roy, à M. de Presle, lieutenant de la
compagnie, qu'il fist retirer ses compagnons, il luy
répondit, qu'il lesupplioit de l'excuser de leur porter
cette parole, et s'il luy plaisoit d'en prendre la peine,
leur faire luy-mesme ce commandement. — Ge que
M. de Vitry fit ; et ainsi, on fit retirer les Gardes de
la Reyne-mère, et on luy bailla des Gardes du Roy.
Depuis, on ne la vit plus qu'avec permission du
Roy, et ne sortit plus de sa chambre, que lorsqu'elle
partit pour aller à Blois ; et Ton mura quelques-unes
de ses portes ^
La permission de la voir fut baillée à Mesdames \
à M. de Bressieux *, à M. de Luçon *, et à M. de
Ville-Savin*.
^ Voy,^ sur Tassassinat du maréchal d'Ancre, Fontenay-Marcuil,
p. 363, 374 et sui?.; Richelieu, p. 395 et suiv., où se trouve un juge-
ment très-remarquable sur le maréchal d*Ancre, et 414 et suiv.; Ponr
chartraio, p. 217 et suiv. ; Brienne, p. 325 ; Mém. de Mathieu Mole,
p. 144; Bassompierre, p. 147 ; Merc. fr,^ p 193 et suiv.
2 Voy, Pontchartrain, p. 227.
3 Mesdames Henriette et Chrétienne, ses filles.
>* Son premier éeuyer.
^ Son aumônier et chef de son Conseil.
* Son secrétaire des commandements.
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d'arnauld d'andilly. 285
Il avoit pleû incessamment quinze jours ou trois avhi un.
semaines durant, jusques à ce jour-là, et dès lors il
ne plut plus, jusqu'au jour que la Reyne-mère partit.
M. de Saint-Géran, qui avoit un Brevet de Maré-
chal de France , s'en alla mal-content de ce que l'on
avoit fait M. de Vitry Maréchal de France et luy
non. Ce fut le premier mal-content.
J'ay ouy dire à M. Barbin, le 2â mars 1618, que
véritablement les affaires du Roy estoyent en tel estât,
que tous les Princes ne pouvoyent pas durer encore
trois semaines, et estoyent réduits, ou à mourir sur la
brèche, ou à se jetter entre les bras du Roy et en sa
miséricorde, en rendant toutes les places qu'ils te-
noyent; et que, de fait, M. le comte d'Auvergne avoit
écrit, que M. le Président le Jay le pressoit de résou-
dre le traitté, avec M. du Mayne, dont il demeureroit
pour ostage ; et qu'afln de donner lieu de l'accom-
plir honorablement, le Roy s'acheminast à Compiè-
gne où M. du Mayne le viendroit trouver, et qu'en
effet, M. Barbin avoit le traitté dans sa pochette,
lorsque le Maréchal fut tué ; que M"' de Nevers
traittoit aussi, et que la capitulation que le Roy luy
fesoit, estoit qu'elle s'en vinst à la Cour, et qu'elle y
seroit la mieux venue que jamais, en laissant ses
places entre lès mains du Roy , qui estoit le mestre
et le seul party que l'on faisoit à tous les autres Prin-
ces ; que le tiers-parti que l'on alléguoit estoit une
chimère ( M. Déagent dit la mesme chose , mais le
Roy se servoit de ce bruit, pour retenir en devoir le
Maréchal d'Ancre) ; et que ceux qui estoient tous les
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286 JOURNAL INÉDIT
ATrti 1617 . plus assurez au service du Roy et de la Reyne sont
ceux, qui aujourd'hui, pour se rendre considérables,
veulent faire croire qu'ils eussent mis sus de grandes
forces pour ce tiers-party (imaginaire) ; que M. de
Montmorency n'eût pas seulement pensé à remuer ;
que M. de Lesdiguières offroit de venir trouver Leurs
Majestez, avec toutes ses forces, si elles le luy com-
mandoyent, et pour ne pas recevoir un affront, en
demeurant sans Gouvernement, le Roy luy en ayant
promis un, et Monsieur le Comte ne voulant pas lâ-
cher celuy de Dauphiné, on luy bailloit le Gouver-
nement de Berry ; que M. le Grand avoit offert tout
ce qui estoit en sa puissance, et mandé, qu'il ne sépa-
roit point le service du Roy d'avec celuy de la Reyne;
que M. d'Espernon demandoit seulement quelques
commissions, afin de contenir toutes choses en son
Gouvernement *, etc.
La nuit d'entre le lundy et le mardy, on vint à
coups de coignée , abattre le pont qui alloit de la
chambre de la Reyne-mère, au Parterre. Ce bruit la
surprit. Elle mit la teste à la fenestre, leur demanda
que c'estoit, et leur commanda de s^arrester. Ils ré-
pondirent que le Roy l' avoit commandé. Lors, elle
referma la fenestre , et dit : Il faut que le Roy soit
obéy. Elle dit aussi : On a tort d'avoir peur que je
m'enfuye. — Ce déplaisir a esté un des gtans qu'elle
ayt reçus. On demeura trois heures à toujours frap-
per, pour abattre ce pont
* Voy, Pontchartrain, p. 227.
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d'arnaold d'andilly. 287
Depuis, elle désira de s'en aller. On proposa Mou- Avm len.
ns, Tours, Blois. — Elle choisit Blois. Le Roy luy
3bai!la, et luy promit d'entretenir la compagnie en-
ère de ses Gardes.
Incontinent après la mort du Maréchal d'Ancre,
t la matinée mesme, M. de Vitry envoya... , exempt
es Gardes, arrester la Maréchale d'Ancre dans sa
lambre, et luy y vint après, et la mena dans la
lambre du Louvre, où l'on avoit mis Monsieur le
rince. Elle luy demanda permission d'emporter ses
igues, ce qu'il luy accorda, et elle les prit dans ses
binets et ses coffres, et les emporta dans ses Cas-
tles, dont on en porta une au Roy, qui la donna à
Reyne sa femme. Mais on dit que l'autre ne fut
int baillée, et fut prise à ladite Maréchale, laquelle,
yant demandée , lorsqu'on la mena à la Bastille,
luy ayant esté répondu, qu'on ne la trouvoit point,
3 s'écria qu'il y avoit dedans pour trois cens mil
;us de pierreries.
Ladite Maréchale témoigna , et encore depuis,
î résolution extrême, et peu de regret de la mort
son mary, disant, qu'il estoit cause de leur mal-
ir, et que s'il l'eust creûe, il y a longtemps qu'ils
sent esté en Italie, et qu'elle s'y en alloit sans luy;
qui estoit vray. Et de fait, on trouva plusieurs
res emballez chez elle, et la plus part de ses
ibles de Lésigny, jusques aux chenets, estoyent
I arrivez à Florence, où elle les avoit envoyez par
• d'Amsterdam.
'ay ouy dire à MM. les Aubry , maistres des Re-
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288 JOURNilL INIÎDIT
Avril i«i7.' questes, députez pour l'interroger et faire l'inven-
taire de ce qu'elle avoit dans la chambre où on Tavoit
menée, qu'ils n'avoyent jamais veû femme plus cons-
tante, ou de meilleur esprit. Ils ont dit à d'autres
qu'elle leur avoit dit, que s'ils la vouloyent sauver,
sans doute cecy s'accommoderoit; qu'elle pourroit
toujours sur l'esprit de la Reyne, autant que jamais,
et qu'elle feroit des merveilles pour eux.
Après avoir esté fort questionnée par MM. Aubry,
enfin elle reconnut avoir pour six cens mil livres de
promesses de Lumagne * (en la maison duquel on
avoit esté, et interrogé, il l'avoit reconnu) et les
bailla.
Elle avoit sur soy son filet de grosses perles , et
ayant esté fort pressée de dire où elles estoyent, elle
les baillast volontairement, après les avoir cachetées,
et prié qu'on les baillast au Roy en main propre. On
dit que le Roy les voulut donner à M. de Luynes, le-
quel ne les voulut accepter, et fit que le Roy les donna
à la Reyne sa femme.
Elle avoit acheté de la succession de M. le Cardi-
nal de Joyeuse pour cinq cens mil écus de principal
en rentes sur les monts de Rome ^
Il ne fut jamais une si infatigable avarice ; car
elle ne dépensoit pour toutes choses généralement
^ Banquier originaire dltalie.
2 Ce passage en explique un des Mémoires de Fontenay-Mareuil, où
il est dit que le Maréchal avait acheté à Rome quatre ou cinq cent
mille livres de lieux de monti. Le sens de ces mots échappant au sa-
vant éditeur de Fontenay-Mareuil, il met en note : On lit ainsi au
manuscrit autographe {Foy. Fonteuay-Mareuil, p. 300).
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d'arnauld d'andillt» 289
quelconques, que deux mil cinq cens écus par an. Avrinei?.
Elle n'avoit que quatre ou cinq vallets qui la servis-
sent d'ordinaire. Une bavolette accommodoit son
manger, qui n'estoit quasy rien, comme un pigeon,
et un petit morceau de veau, et mangeoit dans cinq
ou six écuelles d'or, disant que cela réjoûissoit le
coeur.
Elle passoit quelquefois cinq ou six heures de
temps à faire des boulettes de cire, dans de l'eau,
avec une bougie, et puis les mangeoit.
Le vendredy 28, elle fut menée à minuit à la
Bastille. Fiesque parla à elle , comme elle passoit.
Elleluy dit: Tais-toi, ingrat, etc.*.
Le jeudy 14 mai, elle fut menée à la Concierge-
rie. On luy laissa dans sa chambre, son apoticaire et
deux archers écossais, fort âgez, pour la garder.
Quelque temps après, la Cour ordonne cent francs,
pour sa nourriture, qui furent passez dans la semaine.
Le lundy 22 may, elle fut interrogée pour la pre-
mière fois.
A l'instant de la mort du Maréchal d'Ancre, on
envoya des Gardes en sa maison, proche du Louvre,
où estoit son fils.
Les meubles qui estoyent dans la dite maison sont
estimez trois cens mil écus. Ils furent entièrement
pillez par les Gardes, excepté quelques bagues em-
portées par les vallets de chambre du Maréchal ,
aussitost qu'ils surent sa mort.
< yoy. Pontchartrain, p. 228.
10
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290 JOURNAL INÉDIT
AVI II 1617; Le fils du Maréchal d' Ancre demeura là deux jours,
couché sur de la paille, mourant presque de faim.
Enfin, il fut mené au Louvre, et Fiesque le prit avec
luy. — On dit que le Roy et la Reyne régnante en
eurent pitié, ayant sceu cette inhumanité et que la
Reyne le voulut voir. On dit, qu'il est fort gentil, et
parle quatre ou cinq langues. Il dit à quelqu'un :
Tout misérable que vous me voyez maintenant, j'ay
eu l'honneur de bailler quatre fois la chemisé au Roy,
et de faire le serment de Premier Gentilhomme de sa
chambre \
Aussitost après la mort du Maréchal d'Ancre ,
M. de la Ville aux Clercs ayant trouvé M. Mangot
qui venoit au Louvre, sur le bruit de cette nouvelle,
il luy demanda les Sceaux de la part du Roy. Aussi-
tost, il va chez luy, les apporte, et trouve ledit sieur
de la Ville aux Clercs à la porte du Louvre, qui luy
dit, qu'il avoit charge du Roy de les recevoir. M. Man-
got lui dit : Les voilà ! — Sur cela, M, de Vitry sur-
vint, qui dit : Non Monsieur, s'il vous plaist de pren-
dre la peine de venir, je sauray du Roy s'il aura
agréable que vous montiez. Ils allèrent donc. M. Man-
got attendit au pied du degré. M. de Vitry revint,
qui le fit monter; et estant arrivez dans la salle,
M. de Luynes vint, qui dit à M. Mangot, que le Roy
luy avoit donné charge de recevoir les sceaux de luy;
< Henri Coacini, ué en 1603. L'arrêt qui condtmna sa mère Tayaot
déclaré ignoble et incapable de tenir états, offices et dignités en France,
il se retira à Florence sous le nom de comte de la Pena, {Foy, Riche-
lieu, p. 423; Pontchartrain, p. 223.)
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d'arnauld d'aiNdillv. :29l
ainsi il les bailla. Après, M. de Persan amena Avru len.
M. Mangot dans la chambre de M. de Vitry, ou il fit
apporter son disner, et y demeura jusques à cinq ou
six heures du soir, que M. de Brusselles-Courtin qui
l'estoit venu trouver là avec quelques-uns de ses
frères, ayant aussi trouvé au Louvre deux ou trois
autres maistres des Requestes, s'en revint avec luy,
et raccompagna jusques en son logis.
Au mesme temps, M. de Luçon estant venu trou-
ver le Roy, Sa Majesté luy dit qu'il allast en son
Conseil, avec les autres pour aviser à ce qu'il y avoit
à faire, et commanda à M. de Vignolles de l'y me-
ner. Y estant arrivé, MM. de Villeroy, de Chasteau-
neuf, Jeannin, etc. , commencèrent à le regarder, et
M. Arnaud seul fut au devant de luy. — M. de Vi-
gnolles dit à ces Messieurs la charge qu'il avoit du
Roy ; sur quoy M. de Villeroy , ayant concerté avec
M. de Chasteauneuf, le pria de retourner vers le Roy,
pour savoir s'il luy plaisoit qu'il travaillast en qualité
de secrétaire d'Estat, ou de conseiller d'Estat'.
Depuis, M. de Luçon a eu permission de voir la
Reyne-mère {vide supra) , et a parlé diverses fois à
M. de Luynes.
Aussitost après la mort du Maréchal d'Ancre , on
bailla des Gardes à M. Barbin; On scella chez luy, et
MM. de Castille et Aubry* luy furent baillez pour
* Foy, Fontenay-Mareuil, p. 377 ; Richelieu, p. 420, qui confiriiK;
de tous points le récit d*Amauld d'Andilly ; Voy. Pontchartrain, p. 222 ;
Brienne, p. 327; Rohan, p. 145; Meir, fr,y p. 200.
2 Aubry, Maître des Requêtes et Président du grand Conseil.
DigitizedbyCîjOOglC
292 JOURNAL INÉDIT
Avril 1617. commissaires, pour faire inventaire chez lui. Ils ne
trouvèrent que cinq mil neuf cens tant de livres en
argent, et pour quatre ou cinq cens écus de vais-
selle d'argent. Sur quoy, il vint infinis créanciers.
Enfin, il se trouva très-pauvre, et le capitaine Bour-
gongne. Exempt, et ses autres Gardes pillèrent tout
son argent, et sa vaisselle. Parmy ses papiers, il se
trouva plusieurs lettres du Maréchal d'Ancre, si in-
solentes qu'il ne s'est jamais rien veû de semblable,
car entr' autres choses, j'ai oûy dire à M. de Cas-
tille, qu'il y avoit: qu'il l'avoit mis en la charge
où il estoit, pour faire tout ce qu'il luy plairoit, et
qu'il avoit rage jusques dans la moelle des os, contre
luy de voir qu'il faisoit le contraire, et que cent dia-
bles, il vouloit qu'il fist avec des troupes sans ar-
gent, etc. \
Vendredy 28, M. Barbin fut mené dans son
carrosse au Fort-l'Evesque, à deux heures après
midy.
Quelque deux jours après, la Reyne-mère envoya
dire à M. le Président Jeannin, que s'il avoit quelque
souvenir d'elle , elle le prioit de s'employer pour
M. Barbin, lequel elle connoissoit pour très-homme
de bien. Et en disant à dieu au Roy, elle insista en-
core extrêmement sur cela.
May. Le dimanche 7 mai, M. Barbin fut mené à la Bas-
* Voy, Richelieu, p. 406. Richelieu cite un passage d'une de ces
lettres dans laquelle se trouvent presque textuellement les expressions
rapportées par Arnauld d'Andilly.
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d'arnauld d'ajndilly, 293
tille, et mis à la chambre de dessous Monsieur le AvriiiMT.
Prince.
M. Barbin, ayant seû la mort du Maréchal, voulut
aller au Louvre, mais à cause de la presse, il ne put
passer le coin de la chapelle de Bourbon , et luy
ayant esté conseillé par MM. de Fontaines-Bouée,
Lhoste et de Bragelonne d'entrer chez M. de Bres-
sieux , il y entra. M"" de Bressieux, qui avoit pris
médecine, vint demy-habillée le prier de monter en
haut. M. de Luçon arriva aussitost, qui dit à M. Bar-
bin, avec un visage fort content, qu'ils estoyent
maintenant en repos, et à couvert (ou autres paroles
semblables) , puisque le Maréchal d'Ancre estoit
mort. A quoy M. Barbin luy répondit : Hé ! Mon-
sieur, vous moquez-vous de ne juger pas que le
Contre-coup de tout cecy tombera sur nous ? Après,
arriva M. Mangot, qui s'amusoit à regarder à la fe-
nestre sur la rue , et puis le Capitaine Bourgongne ,
Exempt des Gardes, vint dire à M. Barbin, qu'il avoit *
commandement du Roy de le mener en son logis.
11 ne s'est jamais veû plus grandes insolences que
celles dont on usa envers M. Barbin. 11 vit emporter
tous ses meubles en sa présence , vendre ses che-
vaux et son carrosse, et sortit de chez luy, pour aller
au Fort-l'Evesque, avec un seul demy quart d'écu
dans sa pochette. 11 a esté les six premiers mois à
la Bastille si misérablement traitté, que le Roy don-
nant trois écus par jour pour sa nourriture, luy, et
un homme, ne dépensoient pas quinze sols, et es-
toyent souvent réduits au pain et à l'eau, pour ce que
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294 JOURNAL INÉDIT
Avril 1617. le peu de viande qu'on leur bailloit, estoit puante, et
le vin estoit aigre, et un jour, un soldat leur appor-
tant à disner, une vive, la plus petite, et la plus puante
qui fût jamais, dit à M. Barbin quMl fist bonne chère,
et que M. de Persan commandoit qu'il fust bien
traitté, et que Ton luy baillast tout ce qu'il demande-
roit '.
Dès que M. le Maréchal d'Ancre fut mort, on alla
sceller chez M. Feydeau, auquel on bailla un Exempt
des Gardes. On le crut dépossédé, mais il se remit,
On alla aussi chez M. de Choisy.
Après que l'on eust pris tout ce que le Maréchal
d'Ancre avoit sur luy, et dans ses quatre pochettes,
on bailla le corps, presque dépouillé à un nommé
Cortade , archer de la Prévosté de l'hostel, lequel
trouva dans une cinquième pochette, une liasse de
papiers, lesquels ayant montrez à la Rivière, l'un de
ses Exempts, ils les présentèrent ensemble, à M. le
Chancelier, et à M. le Président Jeannin. MM. de
Meaupou et Arnaud furent commis à en faire l'in-
ventaire. Il se trouva qu'ils montoyent à dix-neuf
cens tant de mil livres. On ordonna trois mil écus de
récompense à la Rivière et à Cortade. M. le Grand-
Prévost fit mettre Cortade en prison pottr ne luy
avoir baillé les papiers; ce qui fut trouvé fort mau-
vais.
Le Maréchal d'Ancre estant mort, le Roy manda
' Voy. Richelieu, p. 622. Les détails donnés par Richelieu sur Tar-
restation de Barbin et le traitement qu'on lui fit subir confirment
pleinement ceux d'Amauld d'Andilly.
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d'arinauld d'andillv, 295
incontinent M, de Villeroy (qui fut remis en sa Avriueii.
charge) , M, le Président Jeannin (fait surintendant
des fmances), M. du Vair (à qui Ton rendit les
Sceaux), et M. le Chancelier pour estre chef du con-
seil. Il estoità Panfou et arriva le lendemain 25. —
M. de Pisieux...*,
M. de Maupeou eut le ControUe Général des fi-
nances. Le Roy écrivit aux Gouverneurs des Provin-
ces une lettre très-bien faite -.
M. deLuynes eut les charges de Lieutenant Géné-
ral en Normandie et de premier Gentilhomme de la
chambre... Le pont de l'Arche et Quillebeuf... Il
commença dès cette nuit du 24, dans la chambre du
Koy\
* a Le 24 avril 1617, le Roi ayant fait tuer le maréchal d'Ancre et
» envoyé ensuite la Reine-mère à Blois, il rappela M. le chancelier de
» Sillery pour chef du Conseil, rendit les sceaux à M. du Vair, appela
» aussi M. de Villeroy, relégua en Avignon M. de Richelieu, lors évêque
» de Luçon et secrétaire d*État, depuis cardinal, et envoya M. Barhin
» prisonnier au Fort-l'Evôque, d*où il fut transféré à la Bastille, et
» toute la faveur et le crédit passèrent en un moment à M. de Luynes,
n qui avait eu la principale part dans le dessin de la mort du maréchal
» d'Ancre ; car M. de Vitry, qui fut ensuite maréchal de France, n'y
» avait eu que celle qu'il lui avait donnée ; et M. de Modène, parent
» de M. de Luynes, M. Déageant, dont j'ai ci devant parlé, et M. Fron-
» cin, étaient ceux qui avaient principalement été informés du secret;
» mais nul autre, pour ce qui était de mettre la main à la plume, n'y
» avait tant travaillé que M. Déageant ; et c'est ce qui fit sa fortune
» et lui donna tant de part dans les affaires, qu'il fut non-seulement
» ministre sans en porter le nom, mais celui de tous qui agissait da-
» vantage, etc. » (Mémoires d'Arnauld d'Andilly, éd. cjtée, p. 371.)
2 yoy, cette lettre, Merc, fr,^ p. 201.
3 Au sujet de l'élévation de Luynes à la place du maréchal d'Ancre,
•Richelieu rapporte un mot du duc de Bouillon : « La taverne, comme
» dit peu après le maréchal de Bouillon, étant toujours demeurée la
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206 JOURNAL INÉDIT
4v.il ifii7. 25. Le peuple déterre, dans Saint-Germain le
corps du Maréchal d'Ancre (que le Roy y avoit fait
enterrer le soir d'auparavant, à dix heures), le
traisne, pend au bout du Pont-Neuf, retraisne, met
en pièces, brusle, en jette les cendres au vent, et
outre toutes ces fureurs firent infinies autres inso-
lences effroyables *.
M. de Longueville vient trouver le Roy.
M. du Mayne envoyé le comte de Suse^, son ne-
veu au Roy, avec des lettres et toutes sortes d'offres.
M. de Thianges vint trois ou quatre jours après,
de la part de madame de Nevers, et M. de Marolles
de la part de M. de Nevers'.
M. du Mayne désarme à Soissons, On dit que le
Roy luy envoya dix mil écus sur ses appointemens,
pour ce qu'il n'avoit aucun argent pour licencier ses
troupes.
Deux et trois jours après, le Roy licencia tous les
» mùmc, n'y ayant eu autre^changeraent que de bouchon. » Richelieu,
p. 426. {Voy, Pontchartrain, p. 232 et 235; Brienne, p. 328; Rohan,
p. l/i8; Mercfr, p. 2U )
* Voy. Richelieu, p. 427, le danger que courut on cette circonstance
révoque de Luçon sur le Pont-Neuf, et la présence d'esprit avec la-
quelle il s'en tira {Voy, Pontchartrain, p. 231, et Merc fr.^ p. 206, des
détails horribles sur cette profanation des restes du Maréchal.)
2 Jacques Honorât de la Baume, comte de Suze, marquis de Villars,
fils de Rostaing de la Baume, comte de Suze, et de Madeleine des Prez
de Montpezat, sœur utérine du duc du Mayne. D'autres mémoires
disent que M. du Mayne envoya son beau-frère, ce qui me parait plus
vrai. Rostaing, comte de Suze n'étant mort qu'en 1622, son fils ne de-
vait pas porter son titre en 1617. Le comte de Suxe présenta au Roi
les clefs de la ville de Soissons.
' Voy, Fontenay-Mareuil, p. 386 ; Richelieu, p. 431 ; Pontchartrain,
p. 224 î'.V^rc. /r., p. 215.
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d'arnauld d'andilly. 297
nouveaux Régimens de l'armée de Soissons ; et ceux Avm \êM,
de Nivernois, incontinent après.
L'armée de M. de Guise demeura encore entrete-
nue afin d'empescher l'entrée des Reistres, et Wal-
lons, qui venoyent pour les Princes. M. de MaroUesdit
qu'il y a voit dix-huit cens chevaux, et huit cens mous-
quetaires à cheval. Un nommé G and conduisoit quel-
que huit cens de ces chevaux, les deux Cadets, deux
ou trois cens, et un nommé le reste. Ils avoyent
esté arrestez six semaines, faute d'argent; enfin,
M. de Nevers, ayant engagé le Duché de Retelois à
M. de Buillon pour six cens mil livres, M. de Buillon
répondit pour le payement dcsdiis Gens de Guerre
et trouva de l'argent sur son crédit en Allemagne*.
Il venoit par mer, pour le Roy, trois mil hommes
des Païs-Bas, savoir, quinze cens François, et quinze
cens Flamens commandez par M
On n'avoit pris que quinze cens François afin de
choisir les soldats et les capitaines la plus part ca-
tholiques et affidez. On leur bailloit un Colonel fla-
mend, afin qu'ils n'obéissent point à un chef fran-
çois qui n'eût pas entendu leur ordre.
Le Roy a voit demandé neuf mille hommes à MM.
des Estats, sçavoir, les quatre mil qu'il leur entre-
tient, et cinq mil qu'ils doivent fournir, suivant le
traitté; mais ils s'estoyent exécutez d'en bailler plus
de quatre mil, sur ce que les archiducs avoyent
armé, et que cela les tenoit en allarme. La vérité es-
* Foy, Merc. fr., p. 188.
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î298 JOURNAL INÉDIT
Avril 1617. toit, qu'au lieu des quatre mil promis, il n'en venoit
que trois mil *•
30. M, de Longueville njarié avec M"* de Sois-
sons, sans grande cérémonie, Oq croioit que le Roy
y seroit, mais un avis qu'on donna de quelque en-
treprise, fut cause de rompre ce dessein ^.
M, le Prince de Join ville arrive d'Auvergne.
M«y. Lundy, !"• On fut la nuit en allarme au Louvre,
sur un avis qu'on avoit donné, de quelque entreprise
• contre le Roy, laquelle on disoit qui se devoit exécu-
ter par la galerie.
Tous les prisonniers retenus durant ces derniers
mouvemens sur plusieurs avis, mis en liberté par le
Roy. — M. de Relébat ', maistre des Requestes, com-
missaire.
3. La Rey ne-mère part. Le Roy parle à elle dans
son antichambre d'elle, Monsieur estant avec luy.
I^ Reyne commença. Ce qu'ils devoyent se dire estoit
arresté. On avoit fait glisser dans ladite antichambre,
environ vingt seigneurs et gentilshommes affidez,
lesquels entroyent en disant à l'Exempt le mot de
saint Louis. Le Roy attendit dans ladite antichambre,
environ la longueur de deux Pater. Puis la Reyne-
mère sortit, avec une mine basse et alangourie. Le
* Votj, Pontchartrain, p, 233-236.
2 Voy, Fontenay-Mareuil, p. 385 ; Pontchartrain, p. 233; tuerc, fr.^
p. 215.
3 Pierre Hurault de l'Hôpital, seigneur de Belesbat, conseiller au
grand Conseil, maître des Requêtes en 1610, mort en 1623.
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D'ARNAUf.D d'AWDILLY. 299
Roy vint à elle, le chapeau à la main. Elle s'en alla M«y mi.
vers la fenestre, s'appuya sur son coude, pleura ;
puis elle vint, et luy dit ce qui avoit esté résolu ; et le
Roy luy répondit ensuite. Elle répliqua, et insista,
(outre ce qui estoit convenu) sur le fait de M. Bar-
bin ; à quoy le Roy ne répondit pas, de craiinle de
faillir. Le Roy alla ensuite sur le balcon.
Ce qui la suivit, pour demeurer avec elle : M. le
marquis de Thémines, M. de Bressieux, M. de Presle,
M. de Yillesavin, M. de Luçon.
Dames : M"*' de Guercheville *, M"'* de Bressieux.
Ce qui l'accompagna jusques à Blois, (où elle arri-
va le 8) : M. de la Curée, par commandement du
Roy, avec cinquante chevaux-légers.
Ce qui l'accompagna jusques au Bourg- la-Reyne:
M. de Monbason, M. de SaintrLuc, M. deLiancourt.
Dames : Mesdames Christine, et Henriette Marie,
M*"" la Douairière de Guise, M"'* d'Elbeuf.
MM. du Conseil, ni aucunes compagnies souve-
raines, ou autres, ne prirent congé d'elle.
* Antoinette de Pons, marquise de Guercheville, dame d'honneur de
la Reine-m^^e, morte en 1632. Elle avait épousé en premières noces
Henry de Silly, comté de la Roche-Gnyon, et, en secondes noces,
Charles du Plessis, seigneur de Liancourt, marquis de Guercheville,
gouverneur de Paris. Elle prit le titre de marquise de Guercheville
pour ne point porter celui de Liancourt qu'avait peu honoré la du-
chesse de Beaufort. On sait que la marquise de Guercheville fut plus
célèbre encore par sa vertu que par son éclatante beauté, et qu'elle
opposa aux poursuites de Henri IV une résistance d'autant plus louable
à une époque de grande licence. (Voy. son article par M. Hipp. de La-
porte, dans la Biographie Michaud, et les Mémoires de l'abbé de
Choisy, coll. Petitot, 2* série, t. lxiii, p. 215 et suiv )
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300 JOUKNAL INÉDIT
M«y i«i7. Tout le peuple témoigna estre fort triste, en la
voyant partir, et plusieurs pleurèrent. La pluye, qui
a voit esté depuis la mort du Maréchal, recommença
ce jour-là, et il plut le lendemain, jeudy 4, toute la
journée*.
Aussitost qu'elle fut partie, le Roy alla coucher au
bois de Vincennes, extrêmement acccompagné. Il
en revint le samedy 13, veille de la Pentecoste, et
fut confessé par le père Arnoux *, son confesseur,
pris au lieu du père Cotton^ Il toucha aussi les
malades*.
Le matin, les Cours souveraines vinrent haranguer
le Roy, pour louer l'action de la mort du Maréchal
d' Ancre ^
M. le Premier président de Verdun. Sacrifice...
Rencontre le Roy... Appelloit M. de Vitry, Aaron.
M. le Grand Écuyer arrive et va trouver le Roy.
Travail, (qui avait sceû le dessein de la mort du
Maréchal) pris, sur ce qu'il avoit voulu persuader à
M. de Luynes et à M. de Bressieux de tuer, ou em-
^ Voy, Fontenay-Mareuil, p. 385 ; Richelieu, p. /ï33 et h3S ; Pont-
chartrain, p. 234 ; Brienne, p. 329; Merc, fr , p. 215. Suivant la plu-
part de ces inémoii*es, c'est le 4 que partit la Reine-m?îre.
2 Le Père Jean Arnoux, jésuite, confesseur du Roi en 1617, à la re-
traite du P. Cotton, fut éloigné en 1621 et mourut en 1636. Prédicateur
habile, il s'est surtout signalé par ses controverses avec les ministres
protestants de Charenton.
3 Le Père Pierre Cotton, célèbre jésuite, né en 1564, confesseur de
Henri IV et de Louis XHI, mort en 1626.
* Voy, Fontenay-Mareuil, p. 385.
* Voy, Mém. de Mathieu Mole, p. 144 et suiv., le texte pour ainsi
dire authentique des paroles adressées par le Roi au Parlement lois de
l'assassinat du maréchal d'Ancre.
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d'arnauld d'andillt. 301
poisonner la Reyne-mère. Envoyé par le Roy au Maywn.
Parlement. MM, Courtin... commis par la Cour\
MM. de Luynes et de Bressieux déposent contre Tra-
vail, lequel reconnoist toute la déposition de M. de
Luynes estre très-véritable, et qu'il luyen avoit en-
core dit davantage. Condamné le mécredy (et exé-
cuté ledit jour) à estre roué, recevoir deux coups vif,
puis, étranglé, son corps, et le procès bruslés, et les
cendres jettées au vent *.
4. MM. du Mayne, de Nevers, de Vendosme,
de Cœuvres et le Président le Jay viepnent trouver
le Roy au bois de Vincennes ^
M. de Retz arrive de Bretagne.
7. M. de Thou meurt*; sa place du Conseil et
sa pension baillées à M. le Président Chevalier, qui. . .
Sa place de Garde de la Bibliothèque baillée à son
fils \
9. M. de Crequy arrive.
* Jean Courtois et Guillaume Délandes , Conseillers , suivant le
compte-rendu du Procureur Général MoIé.
2 Fontenay-Mareuil, p. 391; Richelieu, p. 433 et suiv., où se trou-
vent de curieux détails sur cette affaire et cet individu. V&y, aussi
Mém. de Mathieu Mole, p. 147, et les Mémoires de Déageant ; Merc. fr.,
p. 217.
5 Voy, Merc, fr.^ p. 216. Foy. aussi 3Ierc. fr,y p. 218, la Déclaration
en faveur des Princes, portant révocation des précédentes.
* Voy. Richelieu, p. 489. Le Président de Thou mourut le 8, suivant
\e Merc, fr.^p, 223,
» François-Auguste de Thou, fils aîné de l'immortel Président, né
vers 1607, Conseiller au Parlement, maître des Requêtes, Conseiller
d*État, compromis dans l'afifaire de Ciftq-Mars, condamné à mort, en
vertu d'une ordonnance de Louis XI, pour n'avoir pas révélé le com-
plot, et exécuté avec son ami en 1642,
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302 JOURNAL INÉDIT
May 1617. 17, M. Déagent fait par le Roy Intendant des
finances \
18 environ. M. le Comte d'Auvergne arrive. Le
Roy lui fit une très-bonne réception.
19, environ ce jour. M. d'Orvilliers Vialart\
Gentilhomme, estant avec M. de Fossez, assassiné
d'un coup de pistollet par les gens de M. de Boucon-
ville.
M. le Prince, ayant désiré voir quelqu'un de la part
du Roy, pour témoigner l'obligation qu'il avoit à sa
Majesté, M, de Modène ' y fut envoyé ; et après que
M. le Prince l'eust sondé de tous les costés, pour
essayer de tirer quelque chose de luy, voyant qu'il
n'en pouvoit venir à bout, enfin, il luy dit, qu'il luy
vouloit parler franchement, et que croyant que Ton
l'avoitplustostmis dans la Bastille par raison d'Estat,
que pour mal qu'il eust fait, il estimoit que le Roy
ne seroit pas, peut-estre, conseillé de l'en tirer si tost,
craignant que l'on ne se voulust servir de son nom,
pour prétexte de quelques mouvemens. Mais que cela
* Voy, Pontchartrain, p. 235 ; Mémoires d'Arnauld d'Andilly, p. 372,
passage cité plus haut.
2 Jean Vialart, seigneur d*Orvilliers ?
* Gentilhomme du comtat Venaissin, parent de M. de Luynes. Toy.,
sur ce personnage, Fontenay-Mareuil, p. 383. L'éditeur des Mémoires
de Fontenay-Mareuil le nomme Esprit Raymond de Mormoîron, depuis
Comte de Modène, et ajoute qu*il accompagna en 1647 le duc de Guise
dans son expédition de Naples. Mais ce Comte de Modène étant né en
1608 et mort en 1670, ainsi que Vindique l'article très-intéressant que
lui a consacré M. Hipp. de Laporte dans la Biographie Michaud, me
paraît 6tre le fils de celui dont il est question dans le Journal d'Ar-
nauld d'Andilly et dans les Mémoires sur la môme époque.
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d'arnauld d'andilly, 303
estant, il supplioit Sa Majesté de luy conserver sa way mi.
bonne volonté, et luy en faire sentir les effets, lorsque
ses affaires le luy permettroyent. Et que, cependant,
il le supplioit de faire une œuvre charitable, en luy
faisant bailler sa femme, à la charge qu'elle demeu-
reroit prisonnière aveque luy.
Environ ce temps, on luy àvoit démuré la fenestre
qui regarde sur les champs, à Touverture de laquelle
il s'evanouït, à cause du grand air. On dit que,
sans cela, il n'eust pas peu vivre longtemps, et qu'il
conomençoit déjà à s'enfler'.
21 ou environ. M. de Nevers, qui] s'en estoit
allé quelque temps auparavant, témoignant n'estre
guères content, revient à la Cour,
23. M, de Vitry au Parlement Maréchal de
France, Le jour précédent, il avoit esté receu Con-
seiller à la Cour. Sur la contestation meûe, savoir si
M. deVitry , comme Conseiller, et Maréchal de France,
précéderoit ceux qui n'estoy^nt que Conseillers, mais
plus anciens que luy, comme M. le Grand, et M. de
Liancourt ; il fut jugé qu'il n'auroit place qu'après
eux, suivant son ordre de réception. Cela estant
jugé, M. de Liancourt se retira, et, après la présen-
tation et le serment fait par M. de Vitry, Monsieur
le Président luy dit, que, comme Maréchal de France,
il n' avoit point là de séance, mais que, comme Con-
seiller à la Cour, il y en pouvoit prendre, selon son
ordre de réception *.
* Voy, Pontchartrain, p. 225.
2 Voy, Mém. de Math. Mole, p. 147 ; 9ierc. fr., p. 223.
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304 JOURNAL INÉDIT
May 1617. Il y assista M. le Comte de Soissons, (auquel Mon-
sieur le Premier Président demanda son avis à part;
ce que l'on dit ne se devoir faire qu'aux Fils de
France, Monsieur le Prince ayant souvent opiné avec
les autres), M. TEvesquede Noyon Pair de France*,
M. de Rets, M. de Monbason, M. de Rohan, M. de
Souvré, M. le Grand.
Monsieur le Premier Président ordonna à tous les
Gentilshommes, et Seigneurs, qui estoyent dans le
Parlement, d'oster leurs épées, ou de sortir. Ils
estèrent tous leurs épées.
Ce jour, M. de Luynesprit au Louvre, le départe-
ment qu'avoit M'"' la Marquise de Guercheville.
25. L'assemblée de ceux de la Religion préten-
due réformée , qu'ils tenoyent à la Rochelle, dès
auparavant la mort du Maréchal d'Ancre, se sépare*.
26. M"'* la Princesse de Condé va saluer le Roy,
(et la Reyne) et le supplier de luy vouloir permettre
d'entrer prisonnière dans la Rastille, avec Monsieur
le Prince.
Le Roy le luy accorde, et d'y mener seulement
une Damoiselle. Sur quoy, son petit nain ayant sup-
plié le Roy de trouver bon qu'il n'abandonnast pas
maîtresse, Sa Majesté le lui permit aussi. La mesme
après disnée. Madame la Princesse entra dans la
Rastille, où elle fut receûe de Monsieur le Prince avec
1 Charles de Balzac, trésorier de la Sainte-Chapelle, grand archi-
diacre de Rouen, doyen de Tours, évoque et comte de Noyon, pair de
France en 1596, mort en 1627.
2 Voy Richelieu, p. /i/i3.
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d'arnauld d'andilly. 305
tous les témoignages d'amitié qui se peuvent imagi- way len.
ner, et jusques-là qu'il ne la laissa jamais en repos,
qu'elle ne luy eust dit qu'elle lui pardonnoit *.
27. Le Roy va à Saint-Germain. Il revient le
lundy au soir, et souppe en chemin, à la Chaussée,
chez le Président Chevalier.
30. M. de Guise arrive, accompagné de mil
Gentilshommes. Le Roy avoit trouvé bon que l'on
allast au devant de luy. M. de Joinville, M. deRohan,
M. de Termes, M. de Candalle, M. de la Valette et
autres y avoyent mené chacun une troupe. Il trouva
le Roy dans la Grande Galerie, extrêmement accom-
pagné, et de telle sorte, que les plus vieux disoyent
n'avoir jamais veu la Cour plus grosse. Le Roy luy
fit la meilleure chère qui se puisse imaginer au
monde. On tient qu'il luy dit : Mon Cousin, vous
m'aviez bien dit qu'il se faloit défaire du Maréchal
d'Ancre, mais il n'estoit pas encore temps. M. du
Mayne estoit tout contre le Roy. On croioit que M. de
Guise et luy se feroyent froid ; mais M. de Guise, se
voyant avoir tout l'avantage, luy tendit la main, avec
un visage riant ; ce que voyant M. du Mayne, il
s'avança, et se saluèrent.
M. le Comte d'Auvergne, et M. de Longue vil le
estoyent aussi avec le Roy. M. de Ne vers n'y estoit
point, et je. n'y vis point non plus M. de Vendosme.
31. M. de la Valette, à trois heures et demie du
matin, fait appeller M. de Schomberg (revenu le soir
^ Voy. Pontchartrain, p. 237 ; Merc, fr.^ t. v, p. 229.
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306 JOURNAL INÉDIT
May letT. précédent avec M. de Guise) , à cause qu'il avoit
logé autour de Metz avec les Reistres et Lansquenets,
et mesme que quelques-unes de ses troupes avoyent
logé dans Tabbaïe de Sainte-Glossine, dont est ab-
besse une fille bastarde de M, d'Espernon *. Ils se
battirent à l'épée seule, et estant venus aux prises et
tous deux tombez par terre, M. de Créquy y arriva,
lequel les sépara et les accorda. Ils ne furent blessez
ni Fun ni l'autre, et M. de Schomberg eut seulement
le dessus de l'œil un peu froissé.
Juin. Mécredy 7. Le Roy va à Fontainebleau; revient
le mardy 37. La Cour y fut si grosse, que Ton y
compta jusqu'à trente-quatre Princes, et Princes-
ses... ^
Le mesme jour, M. deLuynes fut receu Conseiller
au Parlement.
10. Gardes redoublées. Et sur ce que l'on dit
au Roy que les Princes (qui la pluspart n'estoyent
pas encore venus) en pourroyent prendre de la dé-
fiance, il répondit, qu'il ne s'enquéroit point de cela,
et que partout où il seroît, il vouloit estre le maistre.
MM. du Mayne, de Ne vers et le Cardinal de Guise
vinrent à Fontainebleau en mesme Carrosse la se-
maine d'après, et le dit sieur Cardinal se témoigna
ouvertement amy de M. de Nevers contre son frère
M. de Guise, lequel ayant seû, durant le dit voyage
* Louise, bâtarde de la Valette, abbesse de Sainte-Glossine de Metz,
morte en 1647.
2 Voy. Pontchartrain, p. 240.
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d'arn\uld d'andilly. â07
de Fontainebleau , que quelques Gentilshommes J"»» »«»7.
avoyent tenu des paroles à son désavantage, dans la
chambre mesme du dit sieur Cardinal, il y alla, avec
quelques-uns des siens, et dit là, tout haut : On dit
qu'il y en a icy qui ont mal parlé de moy ; si je
savois qu'ils sont, je les jetterois tout à cette heure
par les fenestres.
1 2. Femme de Chartres prise dans les capucins
du faubourg Saint- Jacques par M. le Procureur Gé-
néral; avoue avoir, esté fort solicitée de tuer le Roy ;
monstre le Couteau *•
17. Environ ce temps, différend entre MM. de
Guise et de Nevers, touchant la Capitainerie duChas-
teau-Porcien.
M. et M"' la Comtesse de Soissons, mal ensemble
touchant la Table de Grand-Maistre, dont elle prenoit
l'argent, et que luy vouloit tenir, par le conseil de
M. de Longueville. Cela commença dès Paris, et
Madame la Comtesse ayant découvert ce dessein,
parla à son fils fermement.
24. L'archevesque de Pise, Ambassadeur ex-
traordinaire de Savoye^, eut aussi audiance, touchant
les affaires de Savoye *.
* yoy, Mém. de Mathieu Mole, plusieurs pièces concernant cette
affaire.
2 yoy, Pontchartrain, p. 238.
s Arnauld d*Andilly ne mentionne pas dans son Journal une affaire
importante qui fit beaucoup de bruit pendant les mois de juin et] de
juillet, savoir, le rétablissement de Texercice de la religion catholique
eu Béarn contre la volonté des Réformés. Foy, à ce sujet Richelieu,
p. 443 ; Pontchartrain, p. 248 ; Merc, fr„ p. 60 et suiv., 318 et suiv.
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308 JOUaN\L INÉDIT
Juillet 1617. Dimanches. Le Roy va à Saint-Germain, et
en revient le iundy 10.
6. La Maréchale d'Ancre monte, et est inter-
rogée.
7. Le procès est rapporté par MM. Courtin, et
Deslandes*, Commissaires. M. Courtin est d'avis de
la mort, et qu'elle fust pendue. M. Deslandes opine
au bannissement.
8. Arrest contre la Maréchale et exécution. Ils
estoyent dix-neuf juges. Il y en eut dixHsept à la
mort, et les deux autres y revinrent, qui estoyent
M. Deslandes et M. Paluau ^.
Lorsqu'on luy prononça son arrest, un prisonnier
luy dit à l'oreille, qu'elle dist qu'elle estoit grosse ;
ce qu'elle fit. Ce qui ayant mis les juges en peine,
on s'assembla chez Monsieur le Premier Président,
où on résolut de luy envoyer deux Conseillers, qui
luy représentèrent le tort qu'elle se faisoit, ayant dit
en son interrogatoire, qu'il y avoit quatre ans qu'elle
n'avoit couché avec son mary. Sur la quelle raison,
et aussi, qu'on la feroit visiter, et autres considéra-
tions, elle se désista. On luy nomma quatre Confes-
seurs. Elle choisit M. le Clerc. Elle demanda pardon
^ Guillaume de Landes, seigneur de Maigneviile, conseiller au Par-
lement de Paris en 1572, mort doyen de la Grand*Chambre en 1630.
2 Denis Palluau, reçu conseiller au Parlement de Paris en 1580. —
Amauld d*AndiUy dit que Deslandes, qui avait opiné pour le bannis-
sement, revint à la mort, mais Richelieu dit au contraire qu'il résista
énergiquement à toutes les instances qui lui furent faites et persista
dans son avis. Ce trait honore trop le courageux et loyal rapporteur
pour qu*on ne se fasse un plaisir de le rapporter.
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d'arnauld d'andilly. 309
à Patrocle *, et le pria de dire à Monsieur le Chan- imiiei tan.
celier, qu'elle le luy demandoit aussi ; et dit aussi
quelque chose du Commandeur de Sillery. Elle mou-
rut chrestiennement et fort courageusement. La
charrette n'ayant pu arriver, jusques à Téchaffaut,
à cause de la presse, on lui fit mettre pied à terre,
et elle marcha fort bien, et monta Téchaffaut sans se
faire tirer. Voyant le bourreau qui luy aydoit, elle
demanda avec quelque promptitude, qui il estoit. Son
confesseur luy dit que c' estoit un homme qui devoit
estre là. Elle dit alors au Bourreau : Venez, venez
donc, et me dites tout ce qu'il faudra faire. On tient
qu'elle avoit dit, un peu auparavant : qu'il ne prist
envie à personne d' estre en faveur auprès des Roys,
et des Grans, et que c' estoit un méchant métier.
Lorsqu'elle fut preste à recevoir le coup, elle se tint
les mains jointes, pour l'attendre, sans remuer en
façon du monde, et la teste tomba à ses pieds, sur
l'échaffaut mesme.
On dit que quand la Reyne-mère seût cette nou-
velle, elle frappa sur sa cuisse, et dit : la pauvre
femme ! Elle est cause de son malheur, et du mien ;
son mary est plus coupable qu'elle. Si elle m'eust
creûe, elle ne seroit pas où elle est. Après, elle de-
manda, si elle estoit morte constamment? Et comme
on luy répondit qu'ouy, elle dit : J'en loue Dieu ;
car je craignoîs le contraire pour elle *.
* Ecuyer de la Reine, gentilhomme du Commandeur de Sillery.
2 yoy.^ sur la condamnation et la mort de la Maréchale d'Ancre,
Fontenay-Mareuil, p. 389 ; RicheUeu, p. hUh ; Pontchartrain, p. 242 ;
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310 JOURNAL INÉDIT
Juillet 1617. Montaubert * et Yincenze ^ furent absous, et l'on
ordonna seulement à Montaubert de s'abstenir, pour
deux ans, d'aller en Picardie.
9. M. de Montmorency arrive.
Environ 12. Le Prince de Sedan arrive à la
Cour^
Environ ce jour. Livre des quatre ministres de
Charenton, pour réponce au Père Arnoux*.
Décret d'ajournement personnel , par le Lieute-
Brienne, p. 328. Il est à regretter que les Mémoires de Mathieu Mole
soient muets sur cette affaire. Le Merc, fr,^ qui s*étend longuement sur
rhistoire du temps et qui donne de grands détails sur tous les événe-
ments quels qu'ils soient, mentionne en quelques mots seulement
l'affaire de la maréchale d'Ancre à la dernière page du t. iv, et, ce
qui est digne de remarque, garde le silence sur le procès et sur la mort
de cette femme célèbre.
* François Gouffier, seigneur de Thois et de Montaubert, secrétaire
du maréchal d'Ancre, fils de Thimoléon Gouffier, seigneur de Montau-
bert, vice- amiral sur les côtes de Picardie.
2 Vincentio Ludovici, autre secrétaire du Maréchal d'Ancre.
3 Frédéric-Maurice de la Tour, fils aîné du duc de Bouillon et frère
du grand Turenne, né en 1605, prince de Sedan du vivant de son père,
puis duc de Bouillon , pair de France, fit la guerre en Hollande et se
signala au siège de Bois-le-Duc en 1629, et à celui deMastrick en 1632,
commanda la cavalerie en Flandres en 1635, et au siège de Breda
en 1637, se signala à la bataille de la Marfée en 16^ , fut lieutenant
général en Italie. Arrêté à Gazai en 16^2 comme accusé de conspira-
tion contre le Roi, il passa en Italie en 1646, revint en France, prit
part aux troubles de la Fronde, fit son accommodement en 1651, fut
duc d'Albret la môme année et mourut en 1652. {Voy, P. Anselme,
t. IV, p. 540.) Suivant Pontchartrain, p. 242, c'est le 29 juin que le
prince de Sédi^n arriva à la Gour.
A Ges quatre ministres étaient Montigny, Dumoulin, Durand et Mes-
trezat. {Voy, Richelieu, p. 472). L'évoque de Luçon, éloigné de la Reine
par l'ordre du Roi et relégué dans son évèché, consacra ses loisirs à
réfuter ce livre dans un ouvrage publié sous le titre de : La défense
(tes principaux points de notre créance contre ta tettre deo quatre mi-
nistres de Charenton,
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d'arnauld d'aisdilly. 311
nant Civil. Appel à la chambre de TÉdit. La Grand Jutiietien.
Chambre se saisit de l'affaire, d'autant que le Pro-
cureur Général estoit seul partie , et que le Roy ne
donne point de jM^ivilége contre luy. Deux Conseillers
de la chambre de l'Edit, M. de Grieux et M... en
viennent faire pleinte au Conseil. Ordonné, que la
Cause[seroit évoquée au Conseil, attendu la Conten-
tion entre le Parlement. Depuis, il fut remonstré par
ia Grand Chambre, qu'il n'y pouvoit avoir de con-
tention entr'elle et la chambre de l'Édit, qui n'estoit
nullement saisie de l'affaire *.
14. Nouvelle de la prise de Fougères par Gué-
inadeu^ L'affaire est, queGuémadeu, n'ayant pu
obtenir son abolition, touchant la mort du baron de
Nevet, il fut renvoyé au Parlement de Bretagne. Sur
cela, il se résout de reprendre Fougères ; fait son
entreprise, escalade, use d'infinies indignitez envers
la Fayolle, Lieutenant de la Compagnie des Gardes,
commandée par M. du Hallier, et assemble quel-
ques-uns de ses amis. Aussitost, le Roy fait partir
quatre compagnies du Régiment des Gardes, pour y
aller, et envoyé M. de Vendosme' et M. le Maréchal
de Vitry (qui eut grande broûillerie, sur ce sujet, avec
M. de Rets, indigné contre Guémadeu, pour lequel il
avait donné sa parole au Roy ; et de là fut rompue
* Voy. Merc. fr., p. 55 et suiv.
2 Le baron de Guémadeuc, un des^ principaux seigneurs de Bretagne,
gouverneur de Fougères, avait tué le baron de Nevet pour une question
de préséance aux États de cette Province. (Voy, Merc, /r., t. iv, p. 332.)
3 Le duc de Vendôme était (Gouverneur de Bretagne.
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312 JOURNAL INÉDIT
Juillet i«i7. leur amitié, qui auparavant, estoit très grande) , qui y
vont, avec vingt gentilshommes seulement. Guémadeu
se remet entre leurs mains. Us luy promettent de le
sauver. Le Roy, pour leur donner espérance d'en
venir à bout, leur mande de le mener au vieux Palais
de Rouen, au Gouverneur duquel, Sa Majesté manda
de le garder avec autant de soin, que sa propre vie.
Le mécredy 9 aoust, lorsque Ton n'y pensoit
point, M. du Rollet, ayant receu commandement du
Roy, amène Guémadeu, avec cinquante Archers,
dans la Bastille.
21 . Maugiron, fille d'honneur de la Reyne, s'en
va. Sa Majesté luy donne dix mil escus, à la charge
de se marier en Dauphiné, et par son Commande-
ment, et à condition aussi, qu'elle ne pourrait jamais
venir à la Cour.
27. Prise de Verôeil en Piémont \ par Dom Pe-
dro de Tolède, Gouverneur de Milan ^.
Le Roy va à St-Germain, et en revient le samedy.
Aoust. Dimanche 6. M. de Modène revient de Blois où
il avoit esté envoyé vers la Reyne-mère, laquelle fut
très contente de luy, et luy donna un diamant de
deux mil escus *.
< Voy, Fontenay-Mareuil, p. /^Ol ; Richelieu, p. 682. La villo fut
prise le 25, suivant Richelieu ; Voy. Pontchartrain, p. 238, 2^1, 245;
Merc, />•., p. 180 et suiv.
2 Don Pedro de Tolède, Général des Galères de Naples, Connétable
de Castille, Ambassadeur de France en 1608, gouverneur de Blilan.
{Voij, son article par M. Weiss, Biographie Michaud.)
s yoy, Richelieu, p. 676 ; Pontchartrain, p. 265.
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d'arnauld d'andilly. 313
M. de Bressieux arrive le jour mesme. aousi un.
11. L' Evesché de Lisieux , valant trente ou trente-
cinq mil livres, donné par le Roy à Monsieur le Garde
des Sceaux,
12. Le Roy va à Saint-Germain, et revient le
jeudy.
Déclaration touchant les. clinquans, observée. Le
Roy avoit envoyé au Parlement une prolongation
pour trois mois, laquelle fut refusée *.
16. Environ ce temps M. le Grand, mal avec
M. le Président Jeannin, touchant la charge de Sur-
intendant des finances.
22. Don de la confiscation de la Maréchale
d'Ancre, à M. de Luynes, vérifié entièrement au Par-
lement. Les conclusionè des Gens du Roy estoyent,
de donner seulement le bien confisqué, mais non les
Terres revenues à la Couronne. Monsieur le Procu-
reur Général et M. le* Bret ^ l'emportèrent contre
M. Servin, qui estoit d'avis conforme aux Lettres. Des
juges , dix-sept furent pour le don entier, six pour
les conclusions des Gens du Roy, et cinq pour refu-
ser entièrement. M. Courtin estoit rapporteur.
2/i . Le Roy fait défendre à Fiesque l'entrée de sa
chambre ; et quoyque M. de Luynes pust faire, il ne
* Voy. Mém. de Math. Mole, p. 148; Merc, fr.,\. v, p. 87.
2 Cardin le Bret, seigneur deFlacourt, né en 1558, avocat général à
la cour des Aides, puis avocat général au Parlement de Paris, conseil-
d*État , premier président du Parlement de Metz, mort en 1655. Il a
laissé plusieurs ouvrages recueillis avec ses Harangues et ses Plaidoyers.
{Voy. Moreri, t, ii, p. 262.)
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311 JOURNAL INÉDIT
Aoust i«i7. seul y rien gagner. La Reyne luy envoya aussi, puis
après, défendre l'entrée de sa chambre.
25. Le Roy va à Lésigny, et revient le Lundy.
29. Le Roy estant prest de tenir au faubourg
Saint-Honoré le fils aisné de M. de Vendosme' et
d'aller disner chez luy, (où il y avoit un festin pré-
paré qui coustoit dix mil francs) , revient des Feûil-
lans se trouvant fort mal d'une colique. On dit que
M. de Vendosme, M"* de Mercœur, et M"' de Yen-
dosme se vouloyoient jetter à genoux devant le Roy,
après le disner, pour obtenir la grâce de Guémadeu*.
31. Entreprise pour sauver Monsieur le Prince,
de la Bastille, découverte. Desoulas, autrefois Mi-
nistre à Fontainebleau, dénonciateur. M"* de Beau-
vais, nièce de M. le vicomte de Brigueil, arrestée
prisonnière, en son logis, avec des archers du Che-
valier du Guet, et élargie au bout de douze ou quinze
jours. M. . . , frère de M. Fradet, Conseiller de la Cour
et maistre d'hostel de Monsieur le Prince, arresté
aussi prisonnier sur ce sujet.
s*^pi**„,i>ie. Vendredi 1. M. et M"" de Nevers, M. leur fils
* Louis, cardinal, duc de Vendôme, de Mercœur, pair de France,
gouverneur de Provence, né en 1612, suivit Louis XUI en Savoie en
1630, passa en Hollande, fut à la bataille d*Avein en 1635, aux sièges
de Corbie en 1636, de Ilesdin en 163P, d'Ârras en 16/^0, où il fut blessé,
devint en 1650 vice-roi de Catalogne, épousa en 1651 une nièce du
cardinal Mazarin, fut gouverneur de Pi*ovence en 1652, commanda en-
suite en Italie, prit Valence eu 1656 ; devenu veuf, fut créé cardinal
en 1667 et mourut en 1669. {Foy. P. Anselme, 1. 1, p. 198.)
2 yoy, Fontenay-Mareuil, p. 398.
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d'arnauld d'andilly. 315
aisné^ et M. du Mayne ayant esté mordus d'un chien septembre len.
enragé, avec dix ou douze de leurs Gentilshommes,
partent le Dimanche pour aller à Saint-Vallery, à la
mer*.
2. Le Roy va à Saint-Germain , revient le sa-
medy 9. — Parla en particulier à M. de Guise, tou-
chant des choses où Ton Tavoit voulu embarquer.
M. de Guise luy dit tout ce qu'il en savoit, et té-
moigna d'estre extrêmement content de la confiance
que Sa Majesté luy avoit fait paroistre.
En ce voyage de Saint-Germain, le Roy signe les
articles de la paix de Savoye\
5. Le général des Capucins arrive à Paris ; le
Roy l'envoyé visiter par M. le colonel d'Omano; et à
la prière de Sa Majesté, presche à Saint Germain, le
vendredy 8. Le Roy le fut voir le 10. Quand
il s'en alla, qui fut le 19 ou 20 d'octobre, le Roy luy
1 François de Paule de gonzagues-CIëves, duc de Hethelois, Gouver-
neur de Champagne et de Brie, mort avant son père, en 1622, à l'âge
de seize ans, sans avoir été marié.
2 Voy, Pontchartrain, p. 267.
» Voy. Fontejiay-Mareuil, p. 402 ; Richelieu, p. 483; Pontchartrain,
p 2Û6; Rohan,'p. 146; Merc.fr,^ p. 190 etsuiv. Le Mercure diOnnG
des détails circonstanciés et très-intéressants sur la guerre de Savoie,
dans laquelle l'armée française envoyée au secours du duc dcSavoie sous
le commandement du Maréchal de Lesdiguières, ayant sous ses ordres
les ducs de Rohan et de Termes, les comtes de Candale et deSchomberg,
joua un grand rôle. Le Mercure fait connaître aussi les circonstances
delà paix qui se traitait en même temps entre l'archiduc Ferdinand,
roi de Bohême, et la république de Venise. Voy. Merc. fr,, p. 202 et suiv. ,
les pièces officielles des Traités de Madrid, de Paris et de Pavie, négo-
ciés pour la France par le chancelier de Sillery, le garde des sceaux
du Vair, MM. de Villeroy, Jeanniu et de Puisieux, avec les ambassa-
deurs des puissances belligérantes.
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316 JOUANAL INÉDIT
Septembre ifli7. eiivoya soii poftrait et une lettre à M. le Général des
Galères, pour luy faire bailler une Galère.
, Mort de M. le Maréchal de Montigny à Dolinville, &i
charge de Maréchal de France supprimée, à cause de
la contention qui estoit entre M. de Praslin et M. de
la Force. Sa charge de Gouverneur du Berry donnée
à M. le Maréchal de Vitry, et la Lieutenance à M. le
Comte de Saint-Aignan*.
13. M. de Luynes marié à M"* de Monbason.
Il eut la valeur de cinq cens mil livres en ma-
riage ^
14. Mort de M. de Refuge, Conseiller d' Estât,
habile, courageux, et homme de bien.
15. Monsieur le Prince mené de la Bastille au
bois de Vincennes. Le Roy prit sa résolution la veille.
Le matin 15, M. Déagent va avertir les Ministres de
se trouver au Louvre, où le Roy leur dit son inten-
tion ; et en mesme temps on exécuta. On fit dire aux
Compagnies de Suisses, qui sortoyent de Garde et
alloyent vers la pistolle, qu'ils s'arrestassent au Petit-
Saint-Antoine, et que le Roy s'en alloit au Bois de
Vincennes. On fit arrester sur le Pont-Neuf
Compagnies de François, qui venoyent en garde. On
manda aux Gendannes et chevaux-légers qu'ils vins-
sent à la porte du Louvre, et que le Roy vouloit aller
à la chasse, (comme de fait, il estoit botté). Lecar-
* Votj, Pontchartrain, p. 2^7. Suivant Pontchartrain, le maréchal
do Montigny mourut le 8 de ce mois de septembre.
3 Foy. Fontenay-Mareuil, p. 339; Richelieu, p. 479; Pontchartrain,
p. 247; Brienne, p. 333; Merc, fr.y p. 97.
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d'arnauld d'andilly. 317
rosse du Roy vint aussi sur ce sujet. En mesme temps, septembre un.
le Roy envoyé quérir M. de Vitry et M. de Persan
((}ui au commencement, croîoyent qu'on leurvouloit
ester Monsieur le Prince), qui leur dit sa résolution,
et commande à M. de Vitry de mener et de conduire
les troupes pour accompagner Monsieur le Prince,
auquel M. de Modène Talla dire auparavant, et puis,
le fit monter en carrosse. Longtemps auparavant, il
avoit demandé qu'on le mist au Bois de Vincennes,
pour y avoir meilleur air. M. de Modène luy dit, que,
se souvenant de cela, il avoit tant pressé le Roy sur ce
sujet, qu'enfin il l'avoit obtenu. Monsieur le Prince
répondit, que depuis il s'estoit accoustumé à l'air de
la Bastille, et ensuite, résista le plus qu'il put, jus-
qu'à ce qu'il falust aller.
Madame la Princesse alla aussi avec luy, en car-
rosse, n'ayant voulu entrer en litière. On dit qu'au
commencement. Monsieur le Prince croioit seulement
qu'on luy voulust oster sa femme. M. de Vitry, M. de
Persan et M. de Modène estoyent avec luy dans le
carrosse.
Depuis qu'il a esté dans le bois de Vincennes, on
luy a permis, environ le commencement d'octobre,
de se promener sur l'épaisseur d'une grosse muraille,
qui est en forme de galerie.
M. de Persan est demeuré dans le Donjon du Bois
de Vincennes, pour garder Monsieur le Prince, avec
la plus grande partie des soldats qu'il avoit dans la
Bastille ; et M. de Cadenet, avec douze Compagies
du Régiment de Normandie, fait garde dans la cour
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318 JOURNAL INÉDIT
septembre iii7. du chasteau , d'où les soldats ne sortent point *.
15. Geniers^ arresté prisonnier, et le sieur Her-
man son oncle, sur l'accusation qu'il avoit faite
contre MM. de Vendosme, et du Mayne. Ils furent
menez à la Bastille. M. de Boisise et M. Aubry Tais-
né, commissaires, l'interrogent. Il avoue tout, et se
dédit. Lejeudy 21, commission scellée pour envoyer
au Parlement, et le procès porté à M. le Procureur
Général, qui se rend partie.
M. de Vendosme void et solicite les juges. Le sa-
medy 23, Geniers et Herman furent menez à la Con-
ciergerie. Le mécredy 4 octobre, Geniers a la teste
tranchée. Il mourut peu courageusement ^
18. M. de Sully arrive, sur l'espérance que le
Président Chevallier luy avoit donnée, qu'en mariant
sa fille avec M. de Cadenet, il rentreroit dans les
finances*. Environ trois semaines depuis, voyant
qu'il n'en pouvoit venir à bout, il se joignit avec
M. de Montbason, auquel il fit penser à la charge,
* Voy. Richelieu, p. 477; Pontchartrain, p. 248; Bassompierre,
p. 151 ; Merc, fr,y p. 229.
2 Gentilhomme ordinaire du Roi.
* Voij. Fontenay-Mareuil, p. 339 et la note. Geniers avait accusé le
duc de Vendôme de vouloir empoisonner le Roi pendant le festin qu*il
offrait à Sa Majesté à l'occasion du baptême de son fils dont le Roi était
parrain, calomnie qui fut cause que le Roi n'alla pas à cette cérémo-
nie. Geniers fut condamné et exécuté pour avoir, dit l'arrêt, traîtreuse-
ment, malicieusement, et calomnieusement dit, qu'il y avait une entre-
prise sur la personne de Sa Majesté. {Voy, Merc. fr.y t. v, p. 96.)
^ Ce mariage ne se fit pas. L'une des filles de Sully, Marguerite de
Béthune, avait épousé en 1605 le duc de Rohan ; l'autre, Louise de Bé-
thune, née en 1602, épousa en 1620 Alexandre de I^vis, marquis de
Mirepoix.
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d'arnauld d'andillv. M9
sur l'assurance qu'il luy donna de l'y assister, et de
luy servir plustost de commis. Monsieur le Garde
des Sceaux se porta à ce dessein, mais il ne put le
faire réussir. L'intention de Monsieur le Garde des
Sceaux estoit de ruiner, par ce moyen, Monsieur le
Chancelier, M. le président Jeannin, et M. de Ville-
roy, d'attirer à luy M. de Luynes, et le Roy ensuite.
Environ ce temps. Résolu que M. le Marquis de
Cœuvres iroit Ambassadeur à Rome. M. de Ram-
bouillet dit, que tous les Ministres estoyentpour luy.
27. Guemadeu exécuté. Ordonné que sa teste
seroit portée à Fougères. Il mourut très-courageuse-
ment, et chrestiennement. Le Roy eut une fermeté
extrême à refuser sa grâce, et mesme, lorsque M. de
Vendosme et M. de Monbason luy demandèrent sa
teste, après qu'il fut mort; toutefois lorsqu'elle fut en
chemin, le Roy trouva bon qu'on ne l'y portast pas *.
Septembre 1617.
Dimanche 1" et 4. Ce jour, l'assemblée de Rouen
fut résolue au Conseil du Cabinet des livres du Roy^.
5. Leurs Majestez vont à Saint-Germain, et en
reviennent le samedy 14.
Le Roy refuse à plusieurs de vendre ou acheter
desCîouvernemensde Places, et entr' autres, à M. le
Colonel d'Ornano, le Chasteau Trompette de Bor-
iictobre..
* yoy.y sur l'affaire de Guémadeuc, Fontenay-Mareuil, p. 397; Pont-
chartrain, p. 243 ; Merc. fr., p. 91.
2 Foy. Richelieu, p. 483; Pontchartrain, p. 248. Voy. Merc, fr.^ p.230,
les lettres-patentes du Roi pour la convocation de TAssemblée des No-
tables.
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Octobre 1617.
320 JOURNAL INl^DIT
deaux. M. de Monbason vouloit aussi vendre le chas-
teau de Nantes à M. deVendosme; M. Darquien,
Calais à M. de Vitry, ou à M. delaVieuville, d'auUres
disent à M. d'Hocquincourt. Le Roy dit, mille bonnes
paroles à Monsieur le Colonel, et qu'il luy vouloît
faire plus de bien que son Gouvernement ne valoit,
mais qu'il n'estoit plus résolu de souffrir que l'on ven-
dist des Gouvernemens, comme on feroit des mai-
sons; et en se levant de dessus sa chaise, dit : Je ne
serois pas Roy, si cela estoit, et je le veux estre.
7. M. deModène va à Blois, vers la Reyne-nière,
et en revient environ trois semaines après.
12. Le Président Jeannin part, et revient à
Rouen, le jeudy 7 Décembre en suivant.
1 4. Mort de M. Arnaud , Intendant des finances * .
26. Le Roy va à Saint-Germain. Il revient le
mardy 31. La Reyne estoit malade lorsqu'il partit.
Novembre.
Lundy 13. M. d'Epernon arrive à Paris, où il
n'avoit point esté depuis le voyage de Bordeaux, en
1615 ^
* a Ce troisième de mes oncles paterneh mourut le 14 octobre 1617,
» âgé de cinquante ans, d'une veine qui se rompit, et je ne l'ai jamais
» vu que triste depuis que la Reinennëro, à qui il avait tant d*obliga-
» tiens, eut été reléguée à Blois. » (Mém. d'Arnauld d'Andilly, coll. Pe-
titot, 2* série, t/xxxiii, p. 322.) Voy, aussi, Mémoires d*Amauld d'An-
dilly, p. 372 et suiv., l'opposition que fit M. deLuynes à la proposition
soumise au Roi par les principaux membres du Conseil de donner à
Amauld d*Andilly la place de son oncle. Trompé par Luynes qui le
payait de belles paroles et de belles espérances, Amauld d'Andilly
n*eut pas la place. Il devint en 1619, comme on le verra plus loin,
premier commis de M. de Schomberg, Surintendant des finances.
2 Foy, Foutenay-Mareuil, p. 404 ; Pontchartrain, p. 251.
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d'arnaold d'andilly. 3-21
14. Le Roy va à Mantes coucher. Il disna à xovcmbre len.
Fresnede. M. d'Epernon estoit party de Paris, de
très-grand matin, avec M. le Grand, pour saluer le
Roy, avant qu'il partist de Saint-Germain, mais Sa
Majesté, qui estoit levé de bonne heure l'ayant at-
tendu environ demi-heure, enfin il s'ennuya et partit,
encore que Ton luy dist, qu'il estoit tout contre.
M. d'Epernon alla après, et attrapa le Roy au bout
du village, lequel luy fit fort bon accueil. Depuis,
M. d'Epernon voulant venir à Rouen, en l'assemblée,
fit dire au Roy que si M. de Candalle son fils y estoit,
il supplioit très-humblement Sa Majesté de le dis-
penser de s'y trouver; tellement que M. de Candalle
partît de la Cour, environ le 5 Décembre.
15. Le Roy va disner à Vernon, et coucher à
Gaillon, qu'il trouva si beau, qu'il luy prit envie de
l'acheter de l'Archevesque de Rouen, auquel il ap-
partient*.
17. M. de Luynes va à Rouen. Mon carrosse
dans lequel nous estions, M. Déagent, M. de Fonte-
nay, M. le Vicomte de et moi, verse en haut de
la montagne de Vaudreûil,.et fait cinq tours entiers
sans que pas un de nous receust aucune blessure
considérable.
M. de Luynes estoit en carrosse, et ne mit point
pied à terre pour recevoir quelque Noblesse qui vint
au devant de luy près le Pont-de-l' Arche ; ce qui ne
fut pas trouvé bon, car on dit, qu'il devoit monter à
* C'était alors Harlay de Chanvallon qui avait remplacé en 1615 le
Cardinal de Joyeuse dont il était le coadjuteur.
21
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322 JOURNAL INÉDIT
Novembre i6it. cheval. Lorsque les officiers de la ville vinrent à la
porte, le saluer et luy faire une harangue, il ne bou-
gea aussi de carrosse, et se tint couvert, ce qui fut
trouvé fort mauvais de toute la Noblesse du Pais.
M. de Blainville * dit, que les Princes du sang mesmes,
et entr' autres, M. le Comte de Soissons, n'en avoyent
pas usé comme cela. Ce fut M. de Rohan qui en fut
en partie cause, disant qu'il avoit toujours fait ainsi
• en son Gouvernement de Poitou ; maïs principale-
ment le comte de la Roche-Guyon et le comte de
Chasteauroux ^ qui estoyent dans le carrosse de
M. deLuynes. M. le Colonel d'Ornano dit que Mon-
sieur le Maréchal son père écoutoit nue teste les
corps des moindres communautez, et qu'autant qu'il
estoit impérieux lorsqu'il s'àgissoit de commander,
il estoit doux et gracieux aux actions de civilité, et
de complimens.
Montebene vint dire à M. de Luynes, à la ville :
Monsieur, voicy le païs du monde où il faut estre
le plus gracieux, et le plus audacieux tout en-
semble.
* Jean de Varigniez, seigneur de Blainville, Conseiller d*État, pre-
mier gentilhomme de la Chambre et maître de la garde-robe du Roi,
lieutenant au gouvernement du bailliage de Gaen, Ambassadeur en An-
gleterre, mort en 1628. {Voy.^ sur ce personnage, Fontenay-Mareuil,
p. 380.)
2 Jean de Maillé, baron de la- Tour-Landry, comte de Chasteauroux,
mort des blessures qu'il reçut au siège de Negrepelisse en 1635. Il
avait vendu en 1613 son Comté de' Gh&teauroux au Prince de Gondé.
* Alphonse Corse, dit d'Ornano, colonel général des Corses, lieute-
nant-général en Dauphiné et maréchal de France en 1595, lieutenant-
général en Guyenne en 1597, mort en 1610.
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d'arnauld d'andilly. 823
L'après disnée, M. de Luynes entra à Rouen, avec Novembre un.
quatre ou cinq cens chevaux.
Il avoit supplié tous ses amis de ne point venir au
devant de luy ; et néantmoins, il ne put empêcher
que ce nombre ne Taccompagnast. Il alla loger à
l'archevesché, où Monsieur TArchevesque le receut
avec toute la bonne chère du monde.
Le matin, les lettres de la Lieutenance Générale
en Normandie, accordées par le Roy à M. de Luynes,
furent présentées au Parlement de Rouen par le fils
de M. le Président d'Aufreville, âgé de vingt-deux
ans*.
Le samedy 18, M. de Luynes, comme Lieutenant
Général du Roy; fait l'ouverture des Estats de la pro^
vince de Normandie.
. * Jacques Poirier, sieur d'Amfreville , président à mortier au Parle-
ment de Rouen.
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324
JOURNAL INIÉDIT
Novembre 1617.
Quelques députez.
Députez d^Église.
I
■s
É
M. DE MOPLAntES^HALE,
Maistre des Requestes.
©
M. D£s Hameaux,
Préfl. des Aydes.
0
M. DE NONAN,
Souslieiitenaot
au
Bailliage
d*Aleiiçon.
Ilsavoyent chacun des let-
tres patentes pour avoir en-
trée aux Estats.
©
©
0
M. DE BLAOr-
M. DE
M. DE RY8,
VILLE,
LUYlfES.
Pram. Pré-
Sous-lieutenant
sident du
au BaiUlage
Parlement.
de Caen.
0 Greffier des
Estau.
0M. DE LA BrETIN 1ERE,
p. général au Parlement.
0 M. LE Normand,
Maistre des requestes.
0M. de Mauteville,
Président des Comptes.
©M. DE BOUTSROUD^,
8* Prés, du Parlement.
©M. DE Bernieres,
t« prés, du Parlement.
Le Greffier leut les lettres patentes et commission
du Roy pour l'Imposition des deniers des Tailles, et de
la creûe extraordinaire de l'année 161§, et ensuite
les commissions de MM. de Blainville et de Nonan *
pour entrer aux Estats.
* Jacques le Conte, marquis de Nouant, sous-lieutenant du gouver-
nement du bailliage d'Alençon.
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d'arnauld d'andilly. 325
M. de Lpynes parla, et dit : Messieurs, vous avez Novembre let?.
en cette assemblée un avantage qui s'y rencontre
peu souvent, c'est que tout ce que vous résoudrez
sera incontinent après présenté au Roy, qui s'ache-,
mine en cette ville comme en son siecond Paris, et
m'asseure que Sa Majesté s'efforcera de vous donner
toute sorte de satisfaction sur vos remonstrances.
Elle sayt l'Importance de cette grande Province et
son affection extrême à son service, ce qui lui a fait
désirer d'y tenir l'une des plus célèbres assemblées
qui se puisse convoquer en son Royajime ; tellement
que nous avons sujet d'espérer que Sa Majesté re-
médiera tout ensemble, et aux maladies particulières
de cette Province, et à celles qui luy sont communes
avec l'Estat en général. Pour mon regard, je ne
manqueray pas d'embrasser en toutes occasions ce
qui sera de vos intérests, comme y estant obligé par
le devoir de la charge dont il a pieu à Sa Majesté de
ip'honorer, et encore par l'amitié et bienveûillance
que vous me témoignez, laquelle je vous supplie de
tout mon cœur de me continuer, et je vous serviray
tous, et en général, et en particulier. Vous en-
tendrez par les lettres du Roy et par Messieurs les
Commissaires ce qui est des Intentions de Sa Ma-
jesté.
après. Monsieur le Premier Président harangua,
comme Commissaire député par le Roy.
Après, M. Castou, ecclésiastique, harangua pour
le Clergé.
Après, ledit sieur Castou demande jour pour la
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326 JOURNAL IISIÎDIT
Novembre 1617. closturc dcs Estats, lequel M. deLuynes assigna au
Vendredy suivant.
19. Le dimanche , M. de Luynes retourne à
Gaillon.
Durant que le Roy fut à Gaillon, outre M. Déa-
gent, le Président Jeannin estoit seul du Conseil au-
près de Sa Majesté, et, jusques au jeudy 16, que
M. de la Ville aux Clercs vint, il n'y avoit ni secré-
taire d'Estat, ni secrétaire du cabinet. M. Deagent
disoit que, comme secrétaire du Roy, il eust pu signer.
23. Le Roy va coucher de Gaillon au Pont-de-
r Arche, et le lendemain, à Rouen, sans cérémonie
quelconque. Sur quoy il avoit fait auparavant, à
Mante, une fort bonne réponce, sur ce que les Esche-
vins de Rouen le supplioyent de trouver bon que Ton
luy présentas! un poisle (à cause que cela leur ap-
porte quelque avantage) , il dit : Puisque je ne veux
point d'entrée, il ne faut point de Poisle. Je seroys
donc obligé de leur refuser, qui seroit leur faire af-
front, et j'en serois marry.
La coustume est que lorsque les Roys entrent en
l'église Notre-Dame de Rouen, ils jur^t sur TÉvan-
gile de conserver les Privilèges du pais; ce que le
Roy n'eust pas voulu faire, d'autant qu'il fuit extrê-
mement à s'obliger par serment. Sur quoy M. l'Ar-
chevesque de Rouen ayant assemblé son chapitre, il
leur fit trouver bon, avec dextérité, que l'on se con-
tenteroit de la parole du Roy, sans le presser de
jurer ; et en usa de cette sorte ; dont Sa Majesté fut
bien aise.
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d'arnauld d'andilly. 327
27. Le Roy va à Dieppe, et en revient le sa- Novembre «it.
medy.
Lundy 4. Ouverture de l'Assemblée des Nota-
bles, à Rouen.
Le vendi-edy premier, il y avoit eu de... grandes
contestations entre ^Messieurs de la Noblesse, et Mes-
sieurs des Parlemens touchant leurs Séances. Enfin,
le Roy ordonna qu'à l'ouverture de l'assemblée ils
seroyent comme en 15..., sans tirer à conséquence.
Le mardy 5, on croioit ouvrir l'Assemblée; mais
les différons de Messieurs du Parlement et de la No-
blesse l'empeschèrent. Chacun d'eux vouloit avoir
les bancs qui sont vis-à-vis des Ecclésiastiques , et
sur lesquels Messieurs les Ecclésiastiques avoyent
esté à l'ouverture de l'Assemblée.
Messieurs des Parlemens disoyent, pour partie
de leurs raisons, qu'en 1596 cela avoit été ainsi;
qu'ils ne peuvent estre réputez Tiers-Estat, puisqu'il
n'y en a jamais de leurs compagnies qui soyent Dé-
putez aux Estats-Généraux, et que leur corps est
composé des trois ordres; qu'ils ne reconnoissent
point les Gentilshommes députez en cette assemblée,
pour représenter le corps de la Noblesse, d'autant
que ce n'est qu'une forme de Conseil et non des
Estats.
Messieurs de la Noblesse soustiennent, au con-
traire, qu'il ne faut point alléguer l'exemple de 1596,
d'autant qu'on leur fit tort; mais qu'ils ne s'en sou-
cioyent pas, à cause qu'ils savoyent bien que ce ne
Décembre.
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328 JOURNAL INEDIT
Décembre i6i7. pouvoît cstre par mépris, veû les services qu'ils
avoyent fraîchement rendus au feu Roy, et qu'ils
estoyent encore sur le point de lui rendre, et que
cette assemblée n'estant convoquée principalement
que pour tirer des Impositions et levées de deniers,.
Sa Majesté estoit obligée de gratifier les compagnies
souveraines, où les vérifications en devoyent estrc
faites, et en second lieu que, représentant le corps
de la Noblesse, on ne peut leur disputer le second
rang.
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D ARNAUI.D D ANDIt.I.y.
329
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330 JOURNAL INÉDIT
Dccembrc 1617. Lc Roy ayant dit à rassemblée qu'il avoit com-
mandé à Monsieur le Chancelier de leur dire son
dessein , Monsieur le Chancelier prit la parole , et fit
une harangue d'environ trois quarts d'heure. Il
parla trèfr-fermement.
5. On proposa de les faire tous seoir pesle-
mesle, selon leur rang de Conseillers au Conseil d'Es-
tat ; ce que la noblesse receut avec contentement, et
en remercia le Roy ; mais le clergé et les officiers
s'y opposèrent; et véritablement, cela eust apporté
une extrême confusion, car tel Procureur Général
eust esté assis avant un Premier Président, et M. le
Président Nicolay, entr'autres, eust précédé le Pre-
mier Président du Parlement de Paris.
Enfin, on trouva pour dernier expédient, lequel a
esté exécuté, de bailler Monsieur pour Président, et
de faire asseoir les Députez conmie il se void cy-
après :
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DARNAULD DANDILLY.
331
Décembre 1«17.
H)
(«>
Tablé du gre//ler.
Banc de MM. les Sur-Intendant et Intendant
detjtnanceg.
^"nct de la J^ohW*^'
^attct de la Jfoblen^'
(1) Les cardinaux du Perron et de La ftochefoucaud, le duc de Montbazon et le
nuurtebal de Brlaiac aTaient été ekoiais par le Bol pour présider l'Assemblée eq
l'absence de Monsieur. — (l) Banc de» députés du Qergé. — (8) Banc des députés
des Parlemcntt. — (4) Banc des députés des Cours des Aides et du Prévôt des
marchands de Parts. * (i) Banc des députés des Chambres des Comptes de Parts.
et de noiicn. » <6) Entrée. — (7) Banc du Ueutenant civil de Puris.
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S32 JOURNAL INÉDIT
Derfinbrf mi,
AÔLLB DES DÉPUTBZ.
. ~ Parts.
L' Arche vesque de Lyon, au lîeu duquel fut TAr-
ehevesque de Tours. - '
L'Évesque de Paris Gondy.
L'Évesque d'Angers, cy-devant . Myron.
Messieurs D*Andélot,
De Paioiseau,
Du Plessis-Mornay,
De la Roche-Baucourt.
Le Premier Président du Parle-
ment de Paris deVerdun.
Le second Président du mesme
Parlement Séguier.
Le Procureur Général Mole.
Le Premier Président de la Cham-
bre des Comptes. Nicolay.
Le Procureur Général en ladite
Chambre ^ . . Luillier.
Le Prévost des marchans. é . . Bouchet.
Depuis ont esté ajoustez :
Le Premier Président de la Cour
des Aydes Chevalier.
Le Procureur Général de ladite
Cour Le Tonnelier.
Le Lieutenant civil ^ DëMesmes.
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D*ARNAULb d'andillt. 333
Rouen.
L'archèvesque de Rouen. .... De Harlay.
M. de la Meilleraye.
Le marquis de Beuvron, le père.
Le Premier Président du Parle-
ment De Faucon*.
Le Procureur Général au mesme
Parlement De Bretinières.
Depuis ont esté aj orniez ;
Le Premier Président en la Cham-
bre des Comptes De Mauteville.
Le Procureur Général en la mesme
Chambre DuValStJean^
Le Premier Président en la Cour
des Aydes Des Hameaux.
Le Procureur Général en ladite Cour^
Bretagne.
L^Évesque de Treguier Saint-Main.
M. de la Noue.
* Ce nom est probablement le nom patronymique du premier Prési-
dent du Parlement de Rouen, connu sous le titre de M. de Ris, ainsi
qu'Amaold d'Andiiiy lui-même rient de le désigner ci-dessus.
2 De la Vache Saint-Jean, suivant le Mercure,
* La Montagne.
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Bai JOURNAL INÉDIT
fitctBibniêis. IjQ Premier Président du Parle-
ment de Rennes, .•••.. De Cussé.
Le Procureur Général au mesme Parlement \
Tholose.
L'Archevesque de Narb'onné.
M. d'Ambres.
Le Premier Président du Parle-
ment .••••• Mazurier.
Le Procureur Général au mesme Parlement *.
Bordeaux.
L'Archevesque d'Ausch Destrappes.
M. de Monpesat.
Le comte de Vaillac.
Le Premier Président du Parle- 1 1
ment De Gourgues. > i%
Le Procureur Général au mesme Parlement. ] |^
Provence.
L'Archevesque d'Arles Du Laurens.
* De Merebœuf.
a De Saint-Félix.
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D*ARNAULD dUnDILLÎ. â55
M. de Soulier (autrement Saint -Cannât).
Le Premier Président du Parlement d'Aix *.
Le Procureur Général au mesme Parlement ^.
Dauphiné.
L'Évesque de Grenoble.
M, de Morges.
Le PrjBmier Président du Parlement de Grenoble'
Le Procureur Général au mesme Parlement*.
Bourgongne.
L'Évesque de Challon sur Saône.
M. de Ragny.
Le Premier Président du Parle-
ment de Dijon Bruslart
Le Procureur Général au mesme Parlement \
Monseigneur, frère du Roy, Q
* De Bras.
* De Vergons.
* De Frère.
* De Serrient.
* Picardet.
. O«oe«bre art.
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336 JOURNAL INÉDIT
Biecembreitt'ï. M. le Cardinal du Perron.
M, le Cardinal de la Rochefoucaut.
M. le duc de Monbason.
M. le^Màrèchalde Brissaç. □
M. de Brèves* estoit derrière ja chaire de Monsieur.
M. de Flexelles fut nommé greffier de l'assemblée.
Les huissiers du Conseil servirent en ladite As-
semblée.
Les Trésoriers de France poursuivirent pour estre
admis en ladite assemblée ; mais il3 ne le purent
obtenir.
Le Roy ordonna que les articles qu'il feroit propo-
ser en l'assemblée, seroyent mis entre les mains de
Monsieur le Procureur Général du Parlement de
Paris% pour les y présenter; lequel honneur et avan-
* François Savary, seigneur de Brèves» marquis de Maulevrier, gou-
verneur de Monsieur. î\ y avait encore derrière Monsieur, M. d*0uailly,
capitaine de ses gardes, M. de Mansan, son sous-gouverneur» et
M. Royer, son secrétaire.
' Mathieu Moié, seigneur -de Lassy et de Champlàtreux, né en 1584»
conseiller au Parlement de Paris on 1606, président aux Requêtes en
1610, procureur-général et garde du Trésor des Chartes en 1614» pre-
mier président en 1661» garde des sceaux en 1651, mort en 1656.
Mole était allié à la famille d*Arnauld d'Andilly. M. Aimé Charopol-
lion-Figeac publie en ce ;momént pour la Société de Thistoire de
France les {Papiers de ce grand Magistrat, sous le titre de Mémoires de
Mathieu Mole, La glorieuse dynastie des Mole s*est éteinte récemment»
le 23 novembre 1855, en la personne de Mathieu-Louis Mole» grand
Juge ministre de la justice sous Napoléon 1", ministre de la marine
sous Louis XVJII, ministre des affaires étrangères et président du con-
seil sous Louis-Philippe I", pair de France et membre de l'Académie
française, qui a ajouté encore à l'illustration de son nom et a montré
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A
d'arnauld d^andilly. 337
tage a esté donné à la personne et au mérite dudit Décembre len.
sieur Procureur Général, car cela ne dépendoit au-
cunement de sa charge ; et au contraire, la coustume
estoit que quelqu'un de Messieurs du Conseil alloit
proposer les articles de la part du Roy, et que Ton y
envoyoit tantost l'un, et tantost l'autre.
Sa Majesté ordonna que l'assemblée répondroit
par écrit à chacun article, ce qui a toujours esté ob-
servé ; et pour cet effet, on députoit quelques uns de
l'assemblée pour porter les articles au Roy, à mesure
qu'ils estoyent résolus *.
9. Première séance de l'assemblée. Nomination
du Greffier qui fut M. de Flexelles.
12. Mort de M. de Villeroy, d'une grande des-
cente de boyau. Il y avoit fort longtemps qu'il se sen-
toit de cette maladie. LeDimanche, il se portoit ex-
trêmement bien, et commença seulement à se trouver
mal le lundy, dont il mourut le lendemain.
Le Roy ordonna qu'il seroit fait un Inventaire de
tous ses papiers, concernant les affaires d' Estât, et
en chargea M. de Fleury\ son neveu \
en certaines circonstances qu*il avait du sang de son immortel aïeul
dans les veines.
* Voy, Merc, fr.^ p. 255 et suiv., des détails sur la tenue de TAssem-
blée, qui montrent l'exactitude du récit d*Arnauld d'Andilly.
2 Nicolas Clausse, seigneur de Fleury, fils de Henry Clausse, sei-
gneur de Fleury, grand maître des eaux et forêts de France, et de De-
nise de Ncufville, sœur de M. de Villeroy. Il fut après son père grand
maître et réformateur des eaux et forêts de France, et cette charge
ayant été supprimée, il devint lieutenant de la compagnie des Gen-
darmes du duc de Nevers.
8 Voy.^ sur cet homme d'État célèbre, Fontenay-Mareuil, p. /i09;
Richelieu, p. 486; Pontchartrain, p. 235; Mère, fr.^p, 217.
22
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Sâ6 JOURNAL INÉDIT
neeembre lêiT. Mcssleurs Ics autrcs Secrétaires d'Estat vouloyent
entrer en partage de la charge avec M, de Pisieux ;
mais il fut entièrement maintenu.
Environ le 20. Madame la Princesse, très-ma-
lade. Elle accouche dans le Bois de Yincennes à sept
mois, d'un fils mort-né , et fut plus de quarante-huit
heures, sans mouvement ni sentiment *. Jamais per-
sonne n'a esté en une plus grande extrémité , sans
mourir. Entr' autres médecins, M. Duret et M. Piètre
l'assistèrent, avec un soin extrême.
20. Sur ce que Monsieur le Prince désiroit que
l'on fist des obsèques à ce petit enfant, Monsieur l'E-
vesque de Paris ^, après le retour du Roy, assembla
des Théologiens, lesquels jugèrent que , puisque
n'ayant point receu le Baptesme, il n'estoit pas entré
dans l'Eglise, on ne devoit user aussi d'aucunes céré-
monies, sur le sujet de sa mort.
22. Le Roy ayant seû par une dépesche de Mon-
sieur l'Archevesque de Lyon', que le Roy d'Espagne
demandoit un chapeau rouge pour le Duc de Lerme*,
* Voy, Fontenay-Mareuil, p. 403; Pontchartrain, p. 254; Merc.fr. ^
p. 330.
> Henry de Goody, fils du maréchal duc de Retz, né en 1572, évoque
de Paris en remplacement du cardinal de Gondy, son oncle, en 1598,
proviseur de Sorbonne en 1616, cardinal en 1618, chef du Conseil en
1619, mort en 1622.
* Denis Simon de Marquemont, Archevêque de Lyon en 1612, Pré-
sident pour le Clergé, en qualité de Primat, aux États-généraux de 1614,
Ambassadeur à Rome, Cardinal en 1626, mort la même année.
* François de Roxas de Sandoval, duc de Lerme, premier ministre
de Philippe UI, roi d'Espagne depuis 1598. Ayant embrassé Tétat ec-
clésiastique, il devint Cardinal en 1618, fut disgracié la môme année,
poursuivi sous les plus odieuses accusations, dépouillé de ses biens
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d'arnauld d'andilly, 8â9
ou pour quelqu'un de ses proches ; et que, par con- i)«sembi« un.
séquent, il y avoit lieu d'en obtenir un pour la Francei
Sa Majesté écrivit pour Monsieur TEvesque de Paris,
qui n'en savoit chose quelconque, afin de luy en faire
donner un.
M. d'Espemon avoit fort désiré un chapeau rouge
pour M. de Thoulouse ; mais on tient que le Pape
n'en avoit voulu donner aucune espérance, à cause
de M. de Candale qui s'estoit fait de la Religion. Or^
après la conversion de M. de Candale , en janvier
4618, M. d'Espernon essaya de vouloir emporter
celuy que l'on avoit promis à M. de Paris.
23« M. le préaident d'Onsembray de Haqueville,
pour le Parlement, M. le président des Arches^
pour la Chambre des Comptes, M, le président de
Maupeou, pour la Cour des Aydes, et M. le Gras,
pour les Trésoriers de France, haranguèrent au Roy
pour la conservation de la Paulette, accompagne!
de divers autres députez de leurs corps.
Le Roy trouva mauvais que l'on luy alléguast pour
une forte raison que la Paulette estant establie il y «i
plus de dix ans, il y a prescription.
En mesme temps que ces Remonstrances se fai-
soyent au Roy, on parloit en l'assemblée, sur l'article
de la Paulette, et on déUbéroit sur celuy de l'aboli-
tion de la vénalité, qui passa de 34 à 17.
Ce jour fut le dernier que Messieurs de rassemblée
confisqués par ordre de Philippe IV, et mourut en 1635. {Foy, Tartide
que lui a consacré M. Weiss dans la Biographie Michaud.)
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S&O JOURNAL INiDIT
Décembre 1617. délibérèrent sur les articles qui leur furent proposez
par le Roy,
Quelques jours auparavant, M"* d'Halluyn * pré-
senta requeste contre M. de Candale, pour estre dé-
mariée à cause d'impuissance.
26. Messieurs de l'assemblée s'assemblent pour
charger M. le Cardinal du Perron du cayer de leurs
délibérations, lequel le présenta le soir au Roy, et
harangua au nom de tous les députez qui estoyent
présens.
Monsieur le Chancelier bailla ce cayer à M. Déa-
gent, dont M. de la Ville aux Clercs se formalisant ,
en disant, qu'il avoit accoustumé de recevoir les
cayers, Monsieur le Chancelier luy répondit : Ouy
bien, ceux des Provinces, mais non pas ceux-cy.
27. Le matin, le Roy void le cayer de l'assem-
blée dans son Cabinet, où il n'y avoit que Monsieur
le Chancelier, Monsieur le Garde des Sceaux, M. de
Luynes, M, le Président Jeannin, et M. Dea géant.
L'après-disnée, le Roy assemble les Princes, Ducs,
Pairs, ofBciers de la Couronne, et autres du Conseil,
et fait lire le cayer. Monsieur le Chancelier parla sur
la plupart des points.
28. Le Roy mande les Députez, à dix heures,
dans son Cabinet, et leur donne Rendez-vous à Paris,
le lendemain des Roys.
« Anne, duchesse de Hallwin, flUe de Florimond de Hallwin, mar-
quise de Piennes et de Megnelais, et de Claude Marguerite de Goudy,
mariée en 1611 avec M. de Candalle. Ce mariage ayant été déclaré
nul, elle épousa en 1620 Charles de Schomberg, maréchal de France,
et mourut en 1641. (^oy. P. Anselme, t. m, p. 914.)
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d'arnauld d*andilly, 3H
29. Le Roy part de Rouen, va coucher à Gaillon, Décembre mi.
qu'il veut acquérir de TArchevesque de Rouen, en
baillant autant de revenu en domaine, et 500 livres
davantage, et annexant audit Archevesché, l'abbaye
de Saint-Estienne de Caën, qui vaut quinze ou vingt
mil livres de rente.
30. Le Roy couche à Mante.
31. Le Roy part aux flambeaux, une grande
heure devant le jour, et va coucher à Saint-Germain,
où la Reyne arriva environ sur les une heure, en
mesme temps que luy. Elle n'estoit point allée en
voyage de Normandie, à cause qu'elle se trouvoit
maP-^
*■ Voy. sur la célèbre assemblée des notables de Rouen en 1617,
Fontenay-Mareuil, p. 605 ; Richelieu, p. 485 ; Pontcbartrain, p. 252.
Ce dernier n'entre dans aucun détail, se réservant de faire sur ladite
assemblée un mémoire spécial comme celui qu*il nous a laissé sur la
conférence de Loudun. Je ne sais si Pontcbartrain a accompli son
.projet, mais je crois quMl n*a été publié aucun écrit de cet homme
d*État sur FAssemblée des Notables de 1617. Voy, Brienne, p. 33î,
Voy, surtout. Mémoires de M. Mole, p. 154-212, le Narré de l'Assemblée
des Notables de Bouen , contenant les documents authentiques et le
texte officiel des vingt propositions qui furent soumises à l'Assemblée
et des réponses qu'elle y fit. Mole termine son compte rendu par
ces mots : « Le résultat de toutes ces assemblées fut qu'au mois de
«juillet 1618, on dressa un édit en 243 articles, d'après les remon-
n trances des trois États assemblés à Paris en l'année 16Î4, d'après
» celles du Parlement ci-dessus rapportées et d'après les avis des No-
» tables assemblés à Rouen en 1617. » Le cahier de cette Assemblée se
trouve aussi dans le Merc. fr,^ p. 261-317.
s y^oy. sur l'année 1617, deux discours du duc de Rohan, faits en
ladite année, F un intitulé: Discours sur le gouvernement de la Peine ^
p. 166 de ses Mémoires; l'autre intitulé: Li^e discours sur le temps
présent, p. 173, ib.
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^648
ftOMMAIRB
Janvibb. *- Retour du Roi à Paris. -^ Lee Cours souyeraines vont le
féliciter. — Discussion* sur la paulette. — Sa révocation. — M. de
Modène va en Piémont. — Remontrances du Roi au Parlement. —
M. de Candale se refait catholique. — M. de Cadenet* va trouver la
Reine-mère à Blois. — M, de Cussé nommé évoque de Nantis. -^ l^
Roi congédie les membres de l'Assemblée de Rouen.
FÉVRIER. — Exil de MM. de Richelieu et de Pont-Courlay. — M. de
Ruscellay frappé par le marquis de Rouillac; détails sur cette
affaire. — M. de Roissy envoyé vers la Reine-mère. — Rétablisse-
ment du collège des Jésuites à Paris. — Mort du prince d*Orangé.
— M. le Colonel d*Ornano part pour Orange à ce sujet.
Mars. — M. de Marsillac envoyé vers le prjnce Maurice devenu prince
d'Orange. — Mariage du comte de Brissac avec M"* de Schomberg. *
— M. de Montbazon arrange l'aflfaire de M. de Saveuse au sujet de
l'enlèvement de M"* de Vienne. — Querelle du marquis de Marigny
et du chevalier de Vendôme. — Incendie du Palais-de^Justice. —
Mort de M"»* de Nevers. — Procès entre M. et M"' de Candale. —
M. de Courtenay-Blaineau mis à la Bastille. — M. do la Tré-
moille arrive à la Cour. — J^e Duc de JSully va siéger à la Chambre
de l'Edit, — Boisguérin accusé d'avoir voulu assassiner le Roi. —
M. de Boiirnonville remplacé à la Bastille par M. de Launay. —
M. de Montmorency arrive à la Cour. — Procès de Barbin ; lettres
de la Reine-mère.
Avril. — Barbin mis à la Bastille avec MM. de Bournonville, de la
Ferté, l'Evesque , la Rose et le sergent Lisy. — L'évoque de Paria
promu au cardinalat, — Le résident du duc de Florence reçoit
l'ordre de quitter la France. — Exil de l'évèque de Luçon. — Re-
montrances du Parlement au sujet de la paulette. — Prêtre de Caen
accusé d'avoir voulu tuer le Roi. — Affaire de M. de Vaillac et de
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d'arnauld d^andilly. .343
M. du Vair ; due! à ce sujet. — M. de Sully quitte la Cour. —
Plaintes des ducs et pairs contre le garde des sceaux ; question de
préséance. — Querelle entre M. d'Epernon et Je garde des sceaux. —
Les maréchaux de France réclament la préséance sur les ducs et
pairs. — Le gouvernement de Monsieur enlevé à M. de Brèves ot
donné au comte de Lude. — M. d'Epernon exilé à Meti.
Mai. — m. des Portes-Baudouin, seigneur de Souspire, intendant des
finances à la place de M. Déageant; M. Bardeau, secrétaire du Con-
seil à la place de M. des Portes-Baudouin. — Duel de MM. de Quin-
say et de Maussy. — Le comte d'Auvergne revient à la Cour, — Le
duc de Rhetelois nommé gouverneur de Champagne. — M. de
Mayenne, gouverneur de Guyenne; M. de Luynes, gouverneur de
J'Ile-de-France ; M. le Colonel d'Ornano, lieutenant-général en Nor-
mandie. — Député de Lyon frappé par M. de Saint-Chaumont. —
Les frères de Sity , arrêtés. — Le Colonel d'Ornano va à Blois. — Le
poète Durand, arrêté.
Juin. — Le duc de Nemours présente à la Cour M"* d'Aumale, sa
femme. — Reddition de Verceil. — Le Roi va à Lésigny. — Incen*
die au port au Foin.
JuiLLBT. ^- Marsillac et Lesec mis à la Bastille. — Le Roi va à Saint-
Germain. — Durand et François de Sity, roués; André de Sity,
pendu. — M. Ribier, conseiller d'état.— Edit sur les propositions
soumises aux ËtatMjénéraux et à l'Assemblée de Rouen,
AoDT. — Mort de M. de Boucart, remplacé par M. de Brantes, — Décret
du Grand-Conseil contre M. de Persan. — Disgrâce de MM. de Rus-
cellay, de Sardiny, de Jouy, de Montpouillan. — Fête de S^t^Louia
célébrée pour la première fois. — Arrêt dd Grand-Conseil contre
Barbin et ses coaccusés.
Septembre. — Mort du cardinal du Perron ; le cardinal de la Roche-
foucauld, grand aumônier, à sa place. — M"» la Princesse accondie
de deux enfants morts. — Voyage du Roi, — Le Père Arnoux en-
voyé à Blois ; lettre du Roi à la Reine-mère. — M. de Luynes achète
la Fère à M. de Vendôme.
Octobre. — Le Roi va à Soissons. — M. de Montmorency va en Lan-
guedoc. — Suite du voyage du Roi. — M. de Longueville revient à
la Cour, — Retour du Roi. — M. de Modène envoyé à Blois. —
Disgrâce de Fiesque, de Bautru, de Boullanger, du père Crochart.
— Comédie de la Reine. — MM. de Béthune et de Modène vont au
devant du prince-cardinal de Savoie. — Disgrâce de la comtesse de
Moret.
Novembre. » Arrivée du cardinal de Savoie ; il demande la main do
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364 JOURNAL INÉDIT
M"* Chrétienne pour le prince de Piémont. — Le Roi le mène à
Saint-Germain. — Le Colonel d*Omano va en Normandie prendre
possession de sa charge de lieutenant-général; discours qu'il pro-
nonce à cette occasion. — M. du Fai^ envoyé en Espagne. —
M. de Cadenet va à Blois et à Amboise. — M. de Vaudémont arrive
à Paris avec le Prince son fils, *
DÉcEVBRi. — Les Espagnols de la Maison de la Reine sont congédiés.
Maladie de la Reine. —Disgrâce de M. Déageantetde M. de Lass(^.
— M** de Luynes, surintendante de la maison de la Reine ; M"* du
Vernet, dame d*atours. -' Querelle du comte de Soissons et du
pHnce de Vaudémont. — M. de Vandémont retourne en Lorraine.
Janvier. Vcnclredy, 5. Le Roy arrive de Saint-Germain
à Paris \
11, MM. les Présidents de Blancmesnil, pour le
Parlement, Nicolay pour la chambre des Comptes,
et Chevalier pour la cour des Aydes, accompagnez
de quelques-uns de leurs corps, vout saluer le Roy,
sur le sujet de son retour, et de l'assemblée de Rouen.
Quelques jours auparavant, plusieurs de MM. des
Enquestes, et des Requestes, et en tr' autres, MM. de
Grieux, Charpentier, Bauyn, Portail*, Grasseteau,
estant assemblez tumultuairement, dans la troisième
chambre des Enquestes, qui estoit une chambre
vuide, ils résolurent d'envoyer quelques-uns de leur
Compagnie vers le Grand Conseil, la Chambre des
Comptes, et la Cour des Aydes, pour les prier de
s'assembler tous ensemble dans la chambre de Saint*
* Foy. Fontenay-Marcuil, p. 413; Pontchartrain, p. 255 et 258.
2 Paul Portail, conseiller au Parlement, de 1585 à 1623. C'était un
grand original, comme le prouve son historiette, Tallemant des Réaux,
t. I, p. 453. Suivant M. Paulin Paris, ce M. Portail aurait été le type
du Dandin des Plaideurs, (Commentaire sur rhistorictte de Portail,
p. 454.)
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Louis, sur le sujet de la Paulette. Ensuite de quoy, janvier i«i8.
ils s'assemblèrent ledit jour jeudy 11, et continuèrent
les deux jours suivants, mais tout cela, avec tant de
confusion, et de diversité d'avis, qu'ils ne savoyent à
quoy se résoudre. Messieurs du Parlement donnèrent
séance à Messieurs du Grand Conseil, après le plus
ancien Conseiller du Parlement, qui se trouvoit en
l'assemblée ; séance la plus honorable que le Grand
Conseil ay t jamais eue avec le Parlement.
12. Monsieur le Premier Président, accompagné
de Monsieur le Procureur Général, va chez Monsieur
le Chancelier, sur le sujet de la Paulette, et y tient
plusieurs discours.
15. Le Roy envoyé M. leColonel d'Omano trou-
ver Monsieur le Premier Président, et Sa Majesté
signe luy-mesme la Déclaration portant révocation de
la Paulette. Il fit signer l'arrest par M. de Loménie*.
16. Ladite déclaration est scellée, et publiée au
sceau ^.
17. M. de Modène part, pour aller en Piémont,
touchant la paix d'entre le Roy d'Espagne, et le Duc
de Savoye'.
Messieurs du Parlement estant mandez par le Roy;
Monsieur le Premier Président vint, accompagné de
* Voy. Richelieu, p. 500 ; Pontchartrain, p. 255 et suiv.
* Voy, Merc, fr»<, t. v, année MDCXVUI, p. 1 et suiv., les proposi-
tions faites pour la conservation de la paulette, et le texte de l'arrêt
du Conseil portant rérocatioB de ce droit.
* Voy, Fontenay-Mareuil, p. 414; Pontchartrain, p. 259. Suivant
Pontchartrain, M. de Modène partit vers le 4 janvier; voy, aussi. JUerc,
fr.y X, V, année MDCXVin, p. 40.
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846 JOURNAL INléDIT
itinrkr 1618. MM. d'Onsembray, le Jay, Lescalopier, et de Belljè-
vre, Présidens, M. Deslandes et Messieurs les Gens
du Roy. Monsieur le Chancelier ayant pris la parole
par commandement du Roy, leur parla, sur le sujet
de la Chambre de l'Édit, qu'ils ont déjà refusée par
trois diverses fois. Et sur ce que le Roy ayant seû
qu'il avoit esté tenu plusieurs discours dans le Parle^
ment, sur ce qui est de la Paulette, préjudiciables à
son service, et contre son autorité, il avoit voulu en
estre éclaircy par leur bouche. Monsieur le Premier
Président répondit, que pour le regard de la chambre
de l'Édit, ils s'estoyent arrestez, sur ce qu'il avoit
esté ordonné, lors de l'institution de ladite chambre,
qu'elle seroit composée de tous les Conseillers du
Parlement à tour de rolle, et les uns après les autres;
que depuis, au lieu que l'on avoit accoustumé de les
changer tous les an3, on avoit avisé de les continuer
pour deux ans, et non davantage, ce qui s'estoit tou-
jours pratiqué depuis ; que le Roy devoit justice
égale aux Catholiques et à ceux de la religion, pré-
tendue réformée ; que de permettre qu'ils n'eussent
presque point d'autres juges, que ceux qu'ils affectent,
ainsi qu'il se void clairement qu'ils désirent de fah^e,
veû que sur le nombre de deux cens conseillers, qu'il
y a à la Cour, il n'y en a que trente ou quarante qui
ayent toujours esté de ladite Chambre de l'Édit, les
uns n'en estant pas si tost sortis, qu'en mesme temps,
ils demandent et obtiennent les autres ; et qu'au fait
particulier qui se présente, il y a encore une autre
Considération merveilleusement forte, qui est, que la
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d'aenauld d'andilly, 8A7
Chambre de l'Édit qui est à présent, a esté composée '«^^^ i««»
lors du Traitté de Loudun, auquel temps, ceux de la
religion prétendue Réformée, avoyent pris les armes
contre le service du Roy ; que si on permettoit une
telle continuation, la conséquence en seroit très-dan^
gereuse, et enfin, pourroit aller jusques à i*endre ladite
chambre perpétuelle. Monsieur le Chancelier répli-
qua, que le Roy vouloit que ladite chambre fust con-r
tinuée encore cette année seulement, et que S^
Majesté leur donnoit parole qu'elle la changeroit en
la prochaine. Après, M. le Premier Président dit, quç
pour ce qui est du second point, il n'avoit ouy tenir
aucun discours dans le Parlement, contre Thonneur
et le respect deû au Roy ; qu'il n'y avoit lieu aq
monde où Sa Majesté fust tant honnorée.et révérée
qu'au Parlement ; et que s'il y avoit eu quelqu'un si
hardi que de dire» une seule parole contre son devoir,
ils Fauroyent fait chastier si sévèrement, qu'il auroit
servi d'exemple, non-seulement 6 toute la France,
mais à teute l'Europe. M. le Chancelier répondit :
« Le Roy m'a commandé de vous dire, qu'il en est
donc mieux averty que vous, et qu'il vous commande
de vous en informer, et de luy en rendre réponce,
aussitost que vous en sere? éclaircis, et de ne point
permettre l'assemblée des chambres, puisqu'elle n'est
demandée que pour y faire des propositions préjudi- .
ciables à son service. »
Ensuite, Monsieur le Chancelier dit, que puisque
tous les discours faits dans le Parlement avoyent esté
sur le sujet de la Paulette, il estoit à propos que çha-
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Janvier 161t.
S48 JOUBNAL INIÉDIT
cun sceust comment cette affaire s'estoît passée, et
ainsi, représenta la Réquisition faite par les Estats. la
promesse du Roy dans la Grande Galerie, la résolu-
tion de l'Assemblée de Rouen, et celle de Sa Majesté,
de rentrer au droit de pourvoir à toutes sortes d'of-
fices. Monsieur le Premier Président répartit, qu'il
avoit toujours esté présent aux délibérations de l'as-
semblée, mais que jamais il n'y avoit esté rien résolu
sur la Paulette. A. quoy Monsieur le Chancelier ré-
pliqua qu'il s'estonnoit comme il disoit cela, veû que
les articles répondus par écrit, par l'assemblée, et
leûs devant le Roy font fay, comme il en a esté parlé
dans rassemblée, qui a loué, sur ce sujet, la bonne
intention de Sa Majesté.
19. M. de Caudale se refait catholique.
26. M. de Cadenet part pour aller trouver la
Reyne-mère, à Rlois, et en revient le 9 février.
L'Evesché de Nantes, vaquant il y avoit environ
quatre mois, par la mort de M. de Cussé, est donné
par le Roy, à M. de Cussé, son neveu, fils du Premier
Président du Parlement de Rretagne.
M. de Caudale voit M. d'Epernon, qui témoigna un
grand ressentiment, et pleura de joye.
29. Les députez de l'Assemblée, congédiez par
le Roy à Madrid * où Sa Majesté estoit allée le 23 \
Février.
Mécredy 7. Les chambres 'estant assemblées
pour recevoir un Conseiller, M. le Premier Président
' Le château de Madrid, près de Paris.
2 Voy, Pontchartrain, p. 259.
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d'abnauld d'andilly. 319
commença à leur dire ce que le Roy leur avoit fait Février uis.
dire par M. le Chancelier, combien il trouvoit mau-
vais les discours et les assemblées qui se faisoyent
par quelques-uns du Parlement; et à cause que
rheure, pressa ledit jour mécredy, on remit au Ven-
dredy l'assemblée des Chambres.
10. MM. de Richelieu et du Pont de Courlay *
partent, pour aller en leurs maisons, en ayant receu
commandement du Roy, par un Exempt des gardes*.
M. de Ruscellay estant à la foire, avec M. le
prince de Joinville, et voulant bailler la main à la
marquise d'Alhiye*, pour passer en une boutique, le
marquis de Roûillac* le poussa avec les mains, en
* René de Vignerot, seigneur du Pont-Courlay, gentilhomme ordi-
naire de la Chambre du Roi, mort en 1625. Il était veuf depuis 1015
de Françoise du Plessis, sœur de M. de Richelieu et de Tévèque de
Luçon, de laquelle il avait eu François de Vignerot, marquis du Pont-
Courlay, et Marie Madeleine de Vignerot, dame de Combalet, puis du-
chesse d'Aiguillon.
^ Foy. Ricbelieu, p. 494.
' Je ne sais s'il s'agit ici d'Isabeau Babou de la Bourdaisière, veuve
depuis 1602 de François d'Escoubleau, marquis d'Alluye, couseillor
d'État, gouverneur de Chartres et premier écuyer de la Grande Écurie,
et mère du cardinal de Sourdis, ou bien de Jeanne de Montluc et de
Foix, comtesse de Carmain, princesse de Chabannais, femme de
Charies d'Escoubleau , marquis d'Alluye et de Sourdis , mestre de
camp de la cavalerie légère, maréchal dç camp, gouverneur de l'Or-
léanais, conseiller d'État, mort en 1666.
^ Louis de Gotb, marquis de Rouillac, déjà cité, servit d'abord avec
éclat en Suède et fut nommé en 1610 général des Français au service
de Suède ; revenu en France, il gagna la bague au fameux carrousel
de la Place Royale, en 1612 ; devint mestre de camp d'infanterie et de
cavalerie, conseiller d'État, vice-amiral et lieutenant général surmer,
en Levant, ambassadeur en Portugal, en 1643 ; neveu du duc d'Éper-
Don, il prit son titre après la mort sans enfants de son cousin Bornacd
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850 . JOUENAL INÉDIT
*•«• luy disant : Pourquoy me pousséz-vous? Et à Fin-
stant, luy bailla quelques coups de baston, et dit,
ainsi que quelques-uns tiennent, à la Marquise d' Al •
luye : Madame » c'est pour vous que le jeu se fait,
l'objet émeut la puissance. Et aussitost, il se retira
et fut premièrement à l'hostel de Nevers. La hayne
estoit venue de ce que la marquise d'Alluye désirant
de retirer des lettres qu'elle avoit écrites au marquis
de Boûillac» et ne les pouvant r' avoir, elle en pria
M. de Ruscellay, qui donna de l'argent à un Espa-
gnol , lequel , sous prétexte de montrer la langue,
dérobba la cassette où estoyent lesdites lettres, et
quelques bagues. M. de Ruscellay se trouva fort as-
sisté à la Cour, de tous les seigneurs de qualité. M. le
prince de Joinville, qui se tenoit offencé de ce que
cela s' estoit fait en sa présence, vint le lendemain
matin, amener M. de Ruscellay au Roy, aux Feuillans,
pour le remercier de ce qu'il avoit promis, le soir
précédent, de faire faire justice sévère de cette action.
— Sa Majesté commanda au Grand Prévost d'aller le
lundy 12, recevoir la pleinte de M. de Ruscellay chez
luy-mesme. M. le Cardinal de Guise assista aussi
M. de Ruscellay. M. de Guise demeura neutre. Deux
ou trois jours après, à l'instance de M. le Prince de
Joinville, l'affaire fut renvoyée au Parlement. M. d'E-
pernon qui estoit aux Feuillans lorsque M. de Rus-
cellay y arriva, dit qu'il estoit bien impudent d'ap-
de Nogaret, marquis de la Valette, puis duc d'Épemoo en 1661, et
mourut en 1662. {Foy. P. Anselme, t. ii, p. 182, et Tallemant des
Réaux, bistoriett» du marquis de Rouillac.)
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d'aanauld d'andilly. 851
porter des coups de baston en si bonne conopagnie. Février lets.
Le samedy 24 mars, lesdits Sieurs de Ruscellay et
de Roûillac furent accordez. L'accord fut, que M. de
Roûillac alla trouver M, de Ruscellay, dans l'Eglise
des Capucins, et là se mit à deux genoux devant luy,
et ayant avoué la faute qu'il avoit faite, le supplia de
la luy pardonner, comme il vouloit que Jesus-Ghrist,
en la présence duquel il estoit, luy pardonnast les
siennes. Après cela, le Roy fit commander à M. de
Roûillac d'estre un mois hors de la cour pour satis-
faire à l'offence que Sa Majesté avoit aussi reçeue.
14. M. de Roissy * va à Blois, trouver la Reyne-
mère, de la part du Roy.
Le Collège des Jésuites de Paris, nommé le Col-
lège de Clermont, est ouvert, suivant un arrest du
Conseil du '.
20. Mort de M. le Prince d'Orange', à Bruxel-
les.
27. M. le Colonel d'Ornano part, pour aller au
Pont-Saint-Esprit (où il arriva le 6 mars) , et traitter
^ Jean-Jacques de Mesmei , seigneur de Roissi, conseiller au Parle-
ment en 1583, maître des Requêtes en 1594, conseiller d'État en 1600,
mort Doyen des Conseils en 1643. Le lieutenant civil Henri de Mesmes
était son fils, ainsi que Claude de Mesmes, comte d'Avaux, le célèbre
plénipotentiaire à Munster. (
2 F0^. Richelieu, p. 500. Pontchartrain dit à tort que cet arrêt fut
rendu dans le mois de mars. Le collège des Jésuites avait été fermé
en 1&97, après Tattentat de Jean Chàtel. Voy, Pontchartrain, p. 262.
Foy, Merc, /^., p. 6 et suiv., le texte de cet arrêt du 15 février 1618,
et tous les documents authentiques, relatifs au rétablissement des lec-
tures publiques au collège des Jésuites.
< Philippe Guillaume de Nassau, prince d'Orange, beau-frère du
prince de Condé, mort en 1618. Voy, sur ce personnage le Merc, fr, , p. 47.
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352 JOURNAL INÉDIT
Février ifiis. l'affaire d'Orange. Il trouva que le Gouverneur, qui
est Catholique, et que Ton vouloit gagner, avoit tenu
ferme pour le service du Prince Maurice * comme
successeur de son maistre, tellement que M. le colo-
nel ne put faire autre chose que d'aller à Orange, et
de luy offrir et au corps de ville la protection du Roy
loutesfois et quantes qu'ils en auroyent besoin.
Mars. Samedy 3. M. de Marsillac va vers M. le Prince
Maurice, faire office de condoléance sur la mort du
Prince d'Orange. M. le Comte de Brissac épouse la
fille de M. de Schomberg^ à laquelle fut donné en
mariage la valeur de
Ledit sieur Comte de Brissac a vaillant cent mil
livres de rente, cent mil écus de meubles ; la Lieute-
nance de Bretagne, valant quatre cens mil livres, et
Blavet, valant pareille somme.
4. M. de Montbason ayant entrepris entière-
ment l'affaire de M. de Saveuse, demeure d'accord
* Maurice de Nassau, gouverneur et capitaine général des Provinces-
Unies, prince d*Orange à la mort de son frère, en 1618. Foy, Mm. fr.y
p. 48.
2 François de Cessé, comte, puis duc de Brissac, fils du maréchal de
Brissac, pair, grand panetier de France, lieutenant général au gou-
vernement de Bretagne, gouverneur du Port-Louis, de Hennebon et
Quimperlé, mort en 1651. Son mariage avec Jeanne de Schomberg fut
annulé. Hs se remarièrent, lui avec Guyenne Ruellan, fiUe de Gilles
Ruellan, seigneur de Roger-Portail, elle avec Roger du Plessis de Uan-
court, duc de la Roche Guyon, duc de Liancourt et marquis de Guer-
' cheville. Jeanne de Schomberg mourut en 1674. On trouve des détails
curieux sur le mariage du comte de Brissac avec Jeanne de Schomberg
dans riiistoriette que Tallemant des Réaux a consacrée à M"« de
Liancourt.
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D'ARNAOLD D*ANDILLr. 553
avec les parens de M"' de Vienne, que Ton la leur m*» w»».
reraettroit entre les mains; ce qui fut fait ledit jour,
mais avec un exempt, et deux damoiselles, dont les-
dits parens se pleignoyent.
6. Querelle du Marquis de Marigny * avec M. le
chevalier de Vendosme^, dans Ormesson, où le Roy
estoit allé. Accommodé le soir mesme. M. de Saint-
Chamond ' assista le Marquis de Mariçny.
7. La grande salle du palais brûlée. Le feu s'y
mit environ à quatre heures du matin, et ne dura que
deux heures. Il ne resta chose quelconque de ladite
grande salle, qui ne fust brûlé, hormis les murailles,
les piliers, et partie des statues des Roys. La Table
de marbre mesme fut réduite en cendres. La pre-
mière chambre des Enquestes fut brûlée, et le Par-
quet des huissiers. Nul greffe ne fut brûlé. Si le
vent ne se fust tourné du costé de la Conciergerie,
tout estoit perdu, car le feu eust embrasé toutes les
maisons proches du Palais. Duarsy, Prévost de Tlsle
et Concierge du Palais, logé aux Consulta lions, estant
* Alexandre de Rohan, marquis de Marigny, frère du prince de
Guemeoé et du duc de Montbazon, capitaine de cent hommes d'armes,
chevalier des ordres en 1619.
2 Alexandre, dit le chevalier de Vendôme, fils d'Henri IV et de Ga-
brielle d*Estrées, né en 1598, légitimé en 1599, chevalier de Malte
en 1604, abbé de Marmoutier en 1610« grand prieur de France et
général des galères, ambassadeur extraordinaire à Rome en 1615,
arrêté à Blois en 1626; mort prisonnier au château de Vincenues
en 1629. {Voy, P. Anselme, t. i, p. 149.)
s Melchior Mitte, comte de Miolans, marquis de Saint-Chamond,
ministre d*État, lieutenant général des armées du Roi et au gouverne*
ment de Provence, ambassadeur à Rome, mort en 1C49.
23
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354 JOORNAL INÉDIT
Mars 1618. empesché à sauver «a famille avec des Échelles^ vis-
à-vis de Saint-Barthelemy, n'ouvrit point les portes
du Palais ; et ainsi , il les falut enfoncer ; ce qui
amusa beaucoup. Le Lieutenant Civil fit grand devoir.
Il fit tirer et jeter de l'eau par les rues , qui venoit
par les ruisseaux, conduits avec des arrests de fumier,
jusques dans la cour du palais, où on la puisoit à
pleins muids. On envoya aussitost quérir le Chevalier
du Guet, avec Deffontis, et leurs archers \
MM. du Parlement, assemblez dans la chambre
Saint-Louis, résolurent dèsl'après-disnée mesme, de
ne point désemparer.
M. de Hauterive ^ de retour de Bruxelles, où il
avoit esté faire condoléance de la part du Roy, à
Madame la princesse d'Orange'.
8. Mort de M"*' de Ne vers, d'une fièvre continue,
avec une constance et une piété extrêmes. Elle voulut
estre ensevelie en habit de Carmélite, qu'elle avoit
voué d' estre, si elle fust demeurée veufve. M. de Ne-
vers et M. du Mayne en eurent une extrême affliction.
Le^Roy prit le deuil, et toute la Cour, et mesme la
Reyne et les Dames. Plusieurs ne le conseilloyent
* Voy, Fontenay-Mareuil, p. 414. Le Merc, fr,, p. 18 et suit., donne
les plus grands détails sur cet incendie.
2 François de TAubespine, marquis d'Hauterive et de Chàteanneuf,
né vers 1594, gouverneur de Breda en 1639, mort en 1670. U était
frère du garde des sceaux de Châteauneuf. Foy. son historiette, Talle-
mant des Réaux, t. i, p. 492, et le commentaire de M. Paulin Paris.
* Éléonore de Bourbon, sœur du prince de Condé, née en 1587, ma-
riée en 1606 à Philippe Guillaume de Nassau, prince d*Orange, morte
en 1619.
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d'arnaold d'andilly. 355
pas, disàïit, que ce n'estoit là couôtume ; mais le Roy
fit connoistre qu'il le désiroit. M. de Nevers s'en
alla à Saint-Clou, chez M"' du Tillet\ où le Roy fut
le voir le mécredy 14. Et le mardy 13, il avoit esté
voir M* du Mayne en sa maison, à Paris.
M. de Caudale enlève sa femme à deux heures
après minuit II la meine à Dampierre, $t de là, luy
fait prendre le chemin de Castélnau de Rarbarin,
accompagnée de quatre soldats, et l'ayant menée jus*
qu'à...| il s'en revint à Paris.
Lorsque le procès se poursuivoit, les parties de-
meurèrent d'accord de M. le Président Séguier et de
M. de Rérule^ pour arbitres. Depuis, ils convinrent
que le congrès se feroit en une chambfe particulière,
chez M"" la marquise de Maignelay ' ; ce qui se de-
vant exécuter, M"*' Caudale ne voulut qu'il y eut
présens aucuns médecins et chirurgiens, et après
4 Charlotte du Tillet, née en 1551, morte en 1635 ou 1636. Par ses
relations avec les principaux personnages de son temps, par ses in-
trigues et par «on esprit. M"» du Tillet a joui d'une certaine célébrité.
Voy. son historiette, Tallemant des Réaux, t. i, p. 187, et surtout le
Commentaire de M. Paulin Paris.
» Pierre de Berulle, né en 1575, aumônier du Roi Henri IV, supé-
rieur général des Carmélites, fondateur de la congrégation de l'Ora-
toire en 1611, chef du Conseil de la Reine-mère Marie de Médicis,
négociateur de la paix de la Valteline, confesseur de la Reine Henriette,
cardinal en 1627, mort en 1629. Le cardinal de Berulle était par sa
mère, Louise Séguier, parent du président de ce nom. Voy, Moreri,
t. II, p. 420, la vie de ce célèbre prélat.
s Claude Marguerite de Gondy, fille du maréchal duc de Retz, veuve
depuis 1502 de Florimond de Hallwin, marquis de Maignelais, gouver-
neur de la Fère, et mère de M*"* de Gandale. La marquise de Maigne.
lais mourut en 1650.
M«n 1618,
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556 JOUANAL INEDIT
Mars je». avoîr esté couchée deux heures avec M. de Candale,
elle dit qu'elle estoit contente.
Le soir, il n'y vint point coucher, ni le lendemain
aussi, et le mécredy, l'ayant emmenée chez luy, il
luy osta tous ses gens, et l'enleva comme dessus.
M"* de Candale estant à Chasteauroux, se fait ar-
rester par les ofiSciers de la Justice, et dépesche à
M"* la Marquise de Maignelay. Sur cela, tous ses
parens, et d'un autre costé, M. de Candale et tous
ses amis, poursuivent instamment chacun pour la
recevoir. Sur quoy, le Roy, craignant que cela n'ap-
portast de grandes broûilleries, et que l'on n'en vint
de part et d'autre à faire de grandes assemblées de
Noblesse, ainsi que l'on eust fait, sans doute, Sa Ma-
jesté prend M"' de Candale en sa protection, et luy
envoyé un Exempt, et quatre Archers de ses Gardes
Écossois, afin de demeurer à Chasteauroux avec elle.
Tout cela est avenu environ depuis le 15 jusques
au 25 mars.
M. de Courtenay-Blaineau *, qui se prétend Prince
du Sang, ayant quelques jours auparavant esté mis
au grand Chastelet, pour dettes, et ayant satisfait,
M. le Lieutenant Civil l'en vint tirer par comman-
dement du Roy, et lè mit entre les mains de M. le
Chevalier du guet, qui le mena à la Bastille.
^ Edme de Courtenay, seigneur de Blenean, mort en 1640. La maison
de Courtenay réclamait pour ses membres la qualité de princes da
sang, comme issue de Pierre, seigneur de Courtenay, septième fils de
Louis le Gros.
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d'arnauld d'andillt. 357
Je n'en say autre chose, sinon, qu'il remuoit, «««mt.
et vouloit faire quelques levées pour M. le Prince,
et M. le Lieutenant Civil luy dit, que le Roy luy avoit
donné charge de luy dire que, s'il le vouloit traitter à
la rigueur, il y auroit assez pour luy faire trancher
la teste. A quoy il répondit, à ce que j'ay ouy dire
à M. le Lieutenant Civil, fort judicieusement, et
fort respectueusement.
Environ 12. M. de la Trémoille arrive à, la
Cour.
14. M. de Sully va, à dix heures et demie, à l'au-
dience de la chambre de l'Édit, et prend place. Trois
fautes en cela, la première d'arriver la Cour estant
assise, et si tard ; ce qui ne se fait jamais ; la seconde,
en ce que les Pairs ne vont jamais qu'à la Grand
Chambre; la troisième, en ce que la Chambre de
rÉdit n'est que par Commission, et que, partant, on
ne peut y entrer sans estre nommé.
Boisguérin, fils du Gouverneur de Loudun, mis
à la Bastille, sur un avis donné par son père, et en-
voyé par un autre de ses fils, qu'il vouloit faire un
coup de Ravaillac, et qu'il viendroit luy-mesme
après, en déclarer les particularitez qu'il prouveroit
par quinze témoins. Le Chevalier avoit esté prendre
à Angeville ledit Boisguérin, qui venoit par le coche
d'Orléans. Lorsqu'il estoit passé à Orléans, un de
ses frères qui venoit avec luy, avoit présenté requeste
pour le faire arrester prisonnier, et se constituer pri-
sonnier avec luy; ce que le juge n'ordonna pas; qui
fut une grande faute.
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358 JOURNAL IN]liDIT
Mwranis. 18. M. Barbin tiré de la Bastille. {Fide mé-
moire particulier de toute cette affaire*.)
21. M. de Boumonville* tiré de la Bastille, et
mis par le Roy en la Garde de M. le Maréchal de
Vitry ; et M. de Launay, Exempt des Gardes, oncle
de M. le Maréchal de Yitry, mis dans la Bastille
avec cinquante Suisses.
23. M. de Montmorency arrive à la Cour '.
29. M. de Canteloube apporte au Roy des lettres
de la Reyne-mère, portant créance en luy, sur le
sujet de l'affaire de M. Barbin. II dit à Sa Majesté
que la Reyne le supplioit d'envoyer M. Barbin au
Parlement, pour luy faire son procès, et que s'il
trouvoit qu'elle fust meslée dans aucune cabale ou
entreprise contre son service, elle vouloit que l'on
luy fist aussi le sien. La Reyne mandoit cela pour
obliger le Parlement. M. de Canteloube fut renvoyé
le samedy. Il disoit partout ce qu'il avoit dit au
Roy, et disoit aussi, que l'on ne le laisseroit guère à
Paris*.
* yoy, Richelieu, p. 499.
* M. de Boumonville, frère de M, de Persan, avait été chargé eu
commandement de la Bastille.
* Foy. Pontchartrain, p. 261.
* « Au mois de mars de Tannée suivante, 1618, on découvrit une en-
» treprifie i)ue M. Barbin, prisonnier à la Bastille, avoit faite pour sortir
» la Reine-mère de Blois, où elle étott comme prisonnière. Cette affaire
» étant très-importante à cause des personnes de qualité qui s'y trou-
» voient mêlées, on choisit trois conseillers dIStat pour en instraire \9
n procès. Ce furent M. le président de Bailleul, M. TAvocat et moi t
» et parce qu'on ne voulut pas se confier à un greffier, et qu'ainsi il
» falloit que ce fût l'un des conmûssaires mêmes qui tint la plume,
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d'arnaold d'andilly. 859
80. M. de Bassomplerre va à la Bastille recevoir umm.
les clefs de M. de Launay, qui y commandoit, et les
remettre entre les mains du Capitaine des Suisses qui
y entroit*, {Fide mémoire de l'affaire de Barbin,
ut suprà.)
M. de Bran tes entra dans la Bastille, avec sa Com-
pagnie.
Mécredy 4. M. Barbin remené à la Bastille. avhi.
MM. de Bournonville et de la Ferté, et TEvesque,
Larose, et le sergent Lisy ^, y sont aussi menez.
5. Nouvelle arrive de la promotion de M. l'Eves-
que de Paris au Cardinalat. Il se fait appeler Car-
dinal de Rets. M. d'Épernon estant allé voir M. le
» ce fut à moi à la prendre comme étant le plus jeune. A mesure que
» nous avancions dans cette affaire, nous en faisions le rapport m
» ministre chez M. le Chancelier, où M. de Luynes se trouvoit, puis
» on la rapporta devant le Roi. Elle fut ensuite envoyée au Grand
M Conseil pour la juger, comme il fit, et cette compagnie témoigna
» n'avoir point vu de procès mieux instruit. » (Mémoires d'Arnauld
d*Andilly, p. 375 ) Cette mission d'Arnauld d'Andilly lui permit de
rédiger le mémoire particulier sur Taffaire de Barbin, auquel il renvoie
plusieurs fois dans ce Journal, et c'est pourquoi il se dispense de don-
ner ici des détails sur ladite affaire. Ce mémoire n'a, je crois, jamais
été publié, du moins sous le nom de son auteur. On le trouverait peut-
être parmi les papiers d'Arnauld d'Andilly qui ont été conservés. Ainsj
qu'il le dit dans ses Mémoires, p. 376, d'Andilly qui tenait la plume,
interrogeait le plus souvent Barbin pendant l'instruction de son procès.
Des réponses de cet honmie d'État Amauld d'Andilly tire les renseir
gnements qu'il consigne dans divers endroits de son Journal, en les fai-
sant précéder de ces mots: J'ay ouy dire à M. Barbin, le 23 mars 1618,
alors que j'estois un de ses trois commissaires, etc.
4 Voy, Bassompierre, p. 152.
2 Sergent de la Bastille, accusé d'avoir fait passer à la Reine-mère
les lettres de Barbin,
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360 JOURNAL INÉDIT
Avril 1618. Nonce pour l'absolution de M. de Candale, et pour
faire avoir le chapeau à M. de Thoulouse, M. le
Nonce, qui avoit receu le courrier trois heures aupa-
ravant, luy dit, que pour le premier, il l'y serviroit ,
mais que quant au second, c'estoit chose résolue;
pour ce qu'il avoit receu nouvelle que M. de Paris
estoit promeu au Cardinalat. Sur cela, M. d'Éper-
non se leva, et s'en alla, sans luy dire parole quel-
conque*.
7. Le Roy fait commander dans le Conseil, et
en sa présence, par M. le Garde des Sceaux (M. le
Chancelier estoit malade), au Résident du Duc
de Florence, qu'il eust à sortir de Paris, dans
vingt-quatre heures, et du Royaume, dans dix-huit
jours, sans tenir autre chemin que l'ordinaire, et sans
envoyer aucun Courrier en lieu quelconque ; et qu'en
attendant qu'il fust hors de France, il y vescust
comme particulier. C'estoit parce qu'il avoit donné
avis et conseillé à Son Maistre d'entreprendre, ainsi
qu'il a fait, de faire arrester à Livourne, par forme
de représailles, des vaisseaux françois chargez de
marchandises, valant plus de trois cent mil livres,
sous prétexte de ce que les officiers de Sa Majesté
ont fait saisir en Provence un petit vaisseau chargé
de la valeur de quatorze ou quinze mil livres de mar-
chandises sujettes à confiscation ; dont, sur la pre-
mière Réquisition duPropriétaire, le Parlement donna
maîn-levée par provision, et depuis, sur le Comman-
* Foy, Fontenay-Mareuîl, p. 414; Rohan, p. 153; Mcrc fr., p, 20^
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d'arnauld d'andilly. 361
dément qu'il reçeut du Roy, en donna pleine et en- xmi leii.
tière main-levée.
Le soir, M. le chevalier du Guet alla trouver ledit
Résident, pour luy dire, qu'il regardas! en quelle
sorte il s'en voudroit aller, parce que le Roy luy avoit
commandé de luy faire bailler des chevaux. Il ré-
pondit, que puisqu'il n*estoit plus que comme parti-
culier, il s'en iroit seulement avec trois chevaux de
poste, sur lesquels il monteroit le lundy à dix heures
du matin. Le Chevalier du Guet luy dit aussi, que le
Roy craignant que l'on ne luy fist quelque déplaisir,
sur le point de son partement, ou que l'on ne déro-
bast quelque chose en sa maison, luy avoit com-
mandé de poser un corps de garde devant sa porte,
ainsi qu'il fit. Cela fut fait afin d'empescher que l'on
ne communiquast avec luy, et pour remarquer ceux
qui le viendroyent chercher.
Nonobstant ce qu'il avoit dit de son départ au
Chevalier du Guet, il se dérobba le Dimanche au soir,
et s'en alla sur des chevaux de louage.
Le mesme jour, le Roy signa une grande instruc-
tion, qu'il envoya à M. de Roissy, pour en faire en-
tendre le contenu à la Reyne-mère, sur le sujet de
son retour, et de tout ce qui s'estoit passé en l'affaire
de M. Barbin, pour réponce aux lettres 'apportées
par les sieurs de Villers, et de Canteloube.
Ladite instruction portoit aussi de faire sortir
d'auprès de ladite Dame, Luca de Gli Asini, confia
dent dudit agent de Florence. Et incontinent après,
le Roy commanda à MM. de Luçon, de Richelieu et
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862 lODRNAL IIVlâDIT
Anii iMi. de Pont-Courlay, de se retirer en Avignon , où ils
arrivèrent, le... *•
9. Remonstrances de Messieurs du Parlement
touchant l'Évocation des Rentes du clergé, et la Pau-
lette, par le Parlement. — Réponse de M. le Garde
des Sceaux. L'un et l'autre refusé.
13. Prestre de Caen pris dans le Louvre, qui
vouloit tuer le Roy.
13. M. de Yaillac ^ ayant tiré des mains des
Sergens un soldat nommé La Vallée, contre lequel,
à son occasion, M. du Vair, fils de M. de Raynac,
avoit obtenu prise de corps, ledit S' du Vair et
son frère y viennent, se battent; du Vair tué, et
Dourt Gentilhomme qui se trouva avec M. de
Vaillac, lequel, à ce qu'on dit, se sauva au bois de
Vincennes, où a Compagnie, et y fut quelques jours
caché.
17. M. de Sully s*en va de la cour. Il avoit
voulu marier M"' de Sully à M. de la Trémoille.
M. le Président Jeannin s'en va.
20. Le Roy estant au Cabinet du Conseil, M. de
Montmorency, assisté de M. d'Epernon , de M. de
*• Foff. Riehelieu, p. 493 ; o Je ne fus pas surpris à la réception de
» cette dépêche, ayant toujours attendu de la lâcheté de ceux qui
» gouvemoient, toute sorte d'injuste, barbare et déraisonnable traite-
» ment. » Il faut lire dans les Mémoires du grand Qardinal, éd. citée,
p. ^90 et suiv., le long et curieux plaidoyer qu'il fait en sa faveur
pour prouver la pureté de sa conduite à cette époque et l'injustice de
sa disgrâce.
2 Louis Ricard de Gourdon de Genouillac, comte de Vaillac, repré-
sentant de la noblesse à TAssemblée des Notables de Rouen en 1617,
mort après Janvier 1643.
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d'arnauld d'andilly. 363
Monbason et de plusieurs autres Ducs et Pairs, fit attuims.
pleinte au Roy de ce que M. le Garde des Sceaux
prenoit place dans le Conseil vis-à-vis de M. le Chan-
celier, de l'autre costé de la Table ; il ne restoit plus
aucune place honnorable aux Ducs et Pairs, lorsqu'ils
estoyent obligez d^aller au Conseil, touchant les aU
faires de leurs Gouvememens, ou de leurs Charges.
Après, M. d'Epemon prit la parole, dit en substance,
d'un ton de voix fort haut, que luy, et les autres Ducs
et Pairs, ayant toujours dignement servy les Roys,
et beaucoup d'entr^eux estant plus anciens Conseil^
1ers d' Estât que M. le Garde des Sceaux, il leur seroit
bien rude de se voir précédez par luy ; ce qui tf a-^
voit jamais esté entrepris par tous les autres Gardes
des Sceaux ; et que de fait , M. le Chancelier estant
Garde des Sceaux, n'en avoit jamais usé ainsi avec
M. le Chancelier de Bellièvre*; qu'il supplioit le
Roy de leur vouloir donner sur cela une résolution
prompte. M. le Garde des Sceaux dit après, s'adre&*
sant au Roy, qu'il ne demandoit autre rang, que
celuy qu'il avoit plû à Sa Majesté de luy donner, r^
mettant entre ses mains, en sa volonté, non-seule<^
ment cela, mais sa charge, sa viç, et tout ce qu'il
avoit au monde ; et la supplioit très*humblement de
i Pompone de Beliiëyre, seigpeur de Grignon, né en 1529, ambassa-
deur en Suisse sous Charles IX, conseiller au Parlement en 1569, con-
seiller d'État en 1570, surintendant des finances en 1575, président att
Parlement de Paris en 1576, ambassadeur en Angleterre en 1580, plé-
nipotentiaire à Vervins en 1598, chancelier de France en 1599, mort
en 1607.
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Avril 1618.
364 JOURNAL INEDIT
trouver bon, que sur ce qu'avoit dit M. d'Epemon,
il représentast que MM. les Ducs et Pairs n'ayant
esté créez qu'en la troisième race, et les Chanceliers
et Gardes des Sceaux ayant toujours esté, il n'y avoit
point d'apparence de leur disputer leur rang. M. d'E-
pernon répondit : Cela est bon pour les Chanceliers,
mais non pas pour les Gardes desS ceaux, entre les-
quels il y a grande différence , puisque vous n'avez
point la séance au Parlement. M. le Garde des
Sceaux répliqua', encore que le Parlement y ayt
voulu faire diflQculté, je ne laisse pas d'y avoir séance,
car mes lettres le portent , et aussi le rang que je
dois tenir. M. d'Epemon répliqua, vous avez mis
dans vos lettres tout ce que vous avez voulu, car vous
les avez scellées vous-mesme. M. le Garde des Sceaux
repart, ce n'est point moy, mais le Roy qui les a
scellées luy-mesme, en présence de tous les Princes.
M. d'Epernon répondit, il ne se trouvera point que
nuls autres Gardes des Sceaux ayent joûy de ce que
vous prétendez. — M. le Garde des Sceaux réplique,
vous vous trompez. — M. d'Epemon dit, vous vous
trompez vous-mesme, sauf le respect du Roy ; et j'ay
ce bonheur que je n'ay jamais servy que les Roys,
et que je ne tiens que d'eux toutes les charges que
je possède, lesquelles m'ont esté données pour ré-
compence de mes services, et de ma fidélité. — M. le
Garde des Sceaux répondit, je puis dire cela, et quel-
que chose davantage. M. d'Epemon répliqua, le
respect du Roy m'empesche de vous répondre. Sur
cela, le Roy se leva, disant quelques paroles qui témoi-
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d'aanaold d'andilly. 365
gnoyent qu'il ne vouloit point qu'ils parlassent da- avhi teiB.
vantage sur ce sujet. M. d'Epernon suivit le Roy.
M. le Garde des Sceaux estant demeuré dans le Cabi-
net, s'adressa à M. le Chancelier, et luy dit, pardieu,
c'est vous qui m'avez suscité tout cela. Le Chancelier
répondit, Dieu m'est témoin que je n'y ay pas pensé,
et que je ne say que c'est, en façon quelconque. M. le
Garde des Sceaux répliqua, par la mort-Dieu, je say
bien que c'est à vostre inscitation que tout cecy est
arrivé. M. le Chancelier répondit, en levant les
mains, je proteste par le Dieu vivant, qui connoist
vos intentions et les miennes, que j'en suis entière-
ment innocent, et que vous avez grand tort de dire
cela ; mais vous estes outré, c'est pourquoy je ne vous
en diray pas davantage *.
L'après-disnée, M. de Luynes et M. Déagent fu-
rent chez M. le Chancelier et chez M. le Garde des
Sceaux ; et sur le soir, le Roy les fit venir dans son
Cabinet des livres, où il les accorda ; et ils y furent
assez longtemps.
22. Le Roy s' estant trouvé mal, et purgé, fit
venir à la ruelle de son lit MM. de Montmorency,
qui marchoit devant, et d'Epernon ; et leur dit en
substance, j'ay commandé à M. le Chancelier de
voir tous les Réglemens touchant vos séances , et
après qu'il me les aura représentez, j'y pourvoyeray
et conserveray vostre droit. Cependant, je trouve bon
* Voy. Rohan, p. 153 : « L'intérêt des robes longues, dit Rohan, rem-
porta par dessus les Pairs de France. » Voy, aussi Brienne, p. 334.
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366 JOURNAL INl^DIT
Avril ms. que vous, M. d'Epernon, partiez dès demain pour
aller à Mets, et que vous oubliez tout ce qui s'est
passé ; et ce faisant, j'oublieray aussi Toffence que
j'y ay reçeue.
Il avoit esté résolu qu'aussitost que le Roy auroit
achevé, il se léveroit, et que M, le Chancelier le tou-
chetoit, pour luy faire signe quand il seroit temps ;
msÂs il n'eu fit rien, et donna le temps à M. d'Eper*
non de parler tant qu'il voulut; et luy, et M. le Pré-
aident Jeannin adoucissoyent, en sa faveur, tout ce
qu'ils pouvoyent. Ils avoyent baillé un mémoire au
Roy, de ce qu'il pouvoit dire, qui estoit entièrement à
l'avantage de M. d'Epernon. M. d'Epernon répondit,
en substance, d'un ton de voix fort haut, qu'ayant
esté offencé, comme il avoit esté, en présence du
Roy, par M. le Garde des Sceaux, il estoit bien, au
moins, raisonnable qu'il luy en flst aussi satisfac-
tion, en présence de Sa Majesté ; que sa c'eust esté un
homme d'épée, et qu'il n'eust pas esté devant le Roy,
cela ne se fust pas passé ainsi. Le Roy se leva de
dessus sa chaire; et dit, quoy! céans? M. d'Eper-
non répliqua, non Sire, mais hors de vostre maison,
et de la présence de Vostre Majesté ; et ajousta, que
M. le Garde des Sceaux l'avoit traitté en valet, en luy
disant qu'il se trompoit, mais qu'il eust plus aisé-
ment supporté qu'il luy eust dit qu'il estoit un co-
quin et un maraut, que non pas de l'avoir attaqué à
l'honneur, en touchant ce qui est de la fidéUté ; et en
disant qu'il pouvoit dire sur ce sujet là quelque chose
davantage que luy ; qu'il ne pouvoit savoir ce qu'il
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D'AilNAULD d'andilly. 867
avôît fait davantage, sinon qu'il avoit esté de la KfHun*.
Ligue, et que luy n'en avoit jamais esté ; que quant
à ce que le Roy luy avoit dit, qu'il pouvoit aller à
Mets quand il luy plairoit, il supplioit très-humble-
ment le Roy de trouver bon qu'il n'y allast point, aveo
cette honte sur le front, et de faire, auparavant, ter-^
miner cette afiTaire. Sur cela M. le Président Jeannin
prit la parole, et dit que le Roy seroit bien ayse
qu'il revint bientostdudit voyage, àquoy M. d'Eper-
non répondit, que le voyage ne pressoit point tant,
qu'il ne falust le remettre *
Après, le Roy dit, avec un visage émeû, qu'il ne
trouvoit nullement bon que l'on fist des Assemblées,
et qu'il vouloit bien que chacun le seust. M. d'Eper-
non répondit, qu'il ne trouveroit point qu'il eust fait
aucunes assemblées, et qu'il ne savoilpasqui avoit
voulu faire croire cela à Sa Majesté. Mais que si on
luy avoit rapporté qu'il avoit donné à disnef à
M. de Montmorency et à M. d'Usez*, on luy avoit dit
vray ; qu'il ne croioit point qu'il luy fust défendu ni
qu'il dust estre trouvé mauvais, qu'il donnast à dis-
ner à quatre ou cinq de ses amis, et qu'il n'y avoit
aucune apparence de vouloir dire sur cela, qu'il eust
fait des assemblées.
Environ demy heure auparavant, M. de Brissac,
* Le duc d'Épernon se rendit à Metz qu'il quitta au commencement
de Tannée suivante pour favoriser l'évasion de la Reine-mère.
* Emmanuel de Crussol, duc d'Uzès, pair de France, chevalier des
Ordres en 1611, chevalier d'honneur de la reine Anne d'Autriche,
en 1615, capitaine de 200 hommes d'annes en 1616, mort en 1657.
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368 JOUBNAL INEDIT
ATrti m$, accompagné de MM. de Boisdaufin et de Vitry, avoit
parlé au Roy, au nom des Maréchaux de France, et
dit , en substance, que par plusieurs Réglemens et
arrests du Conseil, et autres titres, ils justifieroyent,
qu'ils devoyent seoir dans le Conseil, au-dessus des
Ducs et Pairs, et qu'ils supplioyent très-humblement
le Roy de les conserver en leur droit ; que néant-
moins, sachant l'honneur qui estoit deû à la maison
de Montmorency, laquelle a porté tant de grans et
signalez Connestables, ils estoyent d'accord de céder,
à M. de Montmorency, et sachant bien aussi l'hon-
neur que l'on est obligé de rendre à ceux qui ont
l'honneur d'estre chéris particulièrement du Roy,
que s'il s'en trouvoit quelqu'un à qui le Roy voulust
faire une faveur spéciale, pour marque de l'affection
qu'elle luy porte, et de la part qu'elle luy donne en
ses bonnes grâces, ils luy déféreroyent volontiers.
Ce jour, ayant esté résolu que M. de Brèves * se-
roil osté d'auprès de Monsieur, M. le Chancelier le
* François Savary, seigneur puis comte de Brèves et marquis de
Maulevrier, né en 1560, ambassadeur à.Constantinople en 1591, rentré
en France après un séjour de yingt-deux ans en Orient, conseiller d*État
et gentilhomme de la Chambre en 1607, ambassadeur à Rome en 1608,
gouverneur de Monsieur, premier gentilhomme de sa chambre, lieute-
nant de sa compagnie et surintendant de sa maison, remplacé en 1618
par le comte du Lude, nommé premier écuyer de la Beiue, membre
de TAssemblée des Notables en 1626, membre du Conseil des Dépêches
en 1627, mort en 1628. M. de Brèves a laissé plusieurs ouvrages, et
entre autres la Relation de T audience dans laquelle le gouvernement
de Gaston, frère du Roi, lui fut retiré et donné au comte du Lude.
Ce récit confirme entièrement celui d'ArnauId d'Andilly. {Foy. dans la
Biograpliie Michaud la notice très-iutéressante que Tillustre Walkenaer
a consacrée à ce personnage.)
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d'arnadld d'andilly. 369
dit le matin à M. de Brèves. M. le Comte du Lude \ avhi lett.
qui a eu la charge, jura le soir, qu'il ii*en avoit oûy
parler en façon quelconque.
M. le Colonel d'Ornano revient du Pont St-Es-
prit. Le Roy estant dans le Grand Cabinet de la
Reyne, avec MM. le Garde des Sceaux, Président
Jeannin, de Luynes et Deagent, envoya quérir Mon-
sieur, que M. de Brèves luy amena. Monsieur estant
demeuré dans le petit Cabinet, M. de Brèves dit au
Roy, en substance, qu'il avoit apporté toute Taffec-
tion, la vigilance et la fidélité qui luy avoyent esté
possibles, en la charge que Sa Majesté luy avoit fait
l'honneur de luy commettre ; qiie s'il ne s'en estoit
acquitté aussi dignement comme il devoit, ç' avoit
esté faute de suffisance, mais non d'affection et de
bonne volonté; qu'il avoit Dieu pour témoin qu'il
n' avoit rien fait contre sa conscience, et son devoir;
et que si, d'aventure, on avoit voulu donner quel-
ques impressions contraires à Sa Majesté, il la sup-
plioit très humblement de trouver bon qu'il s'allast
rendre prisonnier dans la Conciergerie, estant prest
de souffrir tous les supplices que l'on sauroit imagi-
ner, s'il se trouvoit qu'il eust failly ; qu'il remercioit
très humblement le Roy de la gratification que
M. Déageant luy avoit dit qu'il luy vouloit faire.
^ François de Bâillon, comte du Lude, né en 1570, sénéchal d^Anjou
en 1585, lieutenant général au gouverneirent d'Auvergne, conseiller
d'État, gouverneur de Monsieur, premier gentilhomme de sa Chambre,
surintendant général de sa maison et lieutenant de sa compagnie de
doux cents hommes d'armes en 1018, mort en 161 d.
24
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870 JOURNAL INÉDIT
AjrHi IMS, Cette gratification estoit 50 mil écus dé récompence,
deux mil écus d'augmentation de pension, et l'esta-
blissement demaistre de la garderobbe, pour son fils.
Le Roy répondit qu'il avoit commandé à M. le Garde
des Sceaux, de luy faire entendre son intention. — Sur
cela, M. le Garde des Sceaux prit la parole, et parla
à M. de Brèves en très-bons termes, et bien choisis,
dont la substance estoit, que le Roy ayant jugé à
propos, pour deâ considérations importantes au bien
deson service, de retirer Monsieur son frère auprès
de luy, il F avoit envoyé quérir pour ce sujet; mais
que comme les secrets des Princes ne se devoyent
jamais apprendre , aussi n'estoit-il pas besoin d'en
exprimer davantage la cause ; que le Roy le tenoit
pour homme de bien, et son serviteur; €t que pour
marque de la gratification avec laquelle il le vouloit
traitter, il luy accordoit la récompence dont il luy
avoit fait parler par M. Déageant. Après, Monsieur
de Brèves alla quérir Monsieur, qu'il amena au Roy,
par la main ; et en le remettant en celle de Sa Ma-
jesté, luy dit qu'il le supplioit très humblement de
se souvenir de ce qu'il luy avoit dit, si souvent, qu'il
ne pouvoit attendre autre honneur, ni autre avan-
tage , que des bonnes grâces du Roy ; et qu'il luy
rendist toujours le respect, le devoir, et l'obéissance
qui luy sont deûs, en se remettant devant les yeux,
que de là dépendoit tout son contentement et tout
son salut. Monsieur dit assez gaillardement à dieu
à M. de Brèves, auquel les larmes vinrent jusques
sur le bord des yeux ; et le Roy dit, qu'il avoit esn
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d'arnauld d'andillt. 371
sayé à faire pleurer son frère. — M. de Brèves, s'en avhi kis.
allant, le Roy l'embrassa par deux et. trois fois; et
sur ce que M dit au Roy que M. de Brèves avoit
eu un brevet pour estre des affaires, et s'il ne trou-
voit pas bon qu'il en joûist, le Roy dit, M. de Brèves,
je veux que vous jouissiez du Brevet que vous
avez pour estre de mes affaires, et que vous y veniez
comme vous aviez accoustumé ; et assurez-vous que
vous y serez toujours le très bien venu. M. de Brèves
remercia fort le Roy de cela , et luy dit, entr' autres
choses, qu'il tenoit pour le grand honneur qu'il pust
recevoir au monde, la liberté de pouvoir approcher
Sa Majesté à son coucher, et à son lever, comme il
avoit fait auparavant.
Après, le Roy fit venir le Comte du Lude, et luy dit
en substance, M. le Comte du Lude, sachant vostre
naissance, vos bonnes qualitez et vostre affection
à mon service, je vous ay choisy pour vous mettre
entre les mains ce que j'ay de plus cher, qui est la
personne de mon frère. Ayez-en bien soin, je vous
prie. Et se tournant vers Monsieur, luy dit, mon
frère, je vous baille pour Gouverneur M. le Comte du
Lude, il faut que vous luy obéissiez , et faire tout ce
qu'il vous dira ; il vous traittera bien, et plus douce-i
meut que vous n'avez esté. Monsieur répondit au
Roy , Monsieur, je n'ay point esté mal-traitté.
M. de Brèves estant sorty le premier, seul, M. le
Comte du Lude sortit après, conduisant Monsieur.
Le mesme jour, le Roy va coucher à Vanve, chez
M, te Comte de St-Germain, d'où il ne reyintquele.-.
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372 JOURNAL INÉDIT
Avril K18. 27. Mercurialle tenue par Messieurs du Parle-
ment, en laquelle M. le Premier Président et M. Ser-
vin, eurent prise.
28. M. d'Épemon part, et va coucher à Fonte-
nay. Il avoit pris congé du Roy dès le mardy 2i, et
néantmoins il différa jusques audit jour, sous prétexte
de s'entremettre d'accommoder MM. de Guise et de
Montmorency, qui estoyent en différent touchant
l'Amirauté de la mer Méditerrannée.
29. M. d' Épernon estant entré en quelque alarme,
il monte sur un cheval d'Espagne, fait dix-sept lieues
d'une traitte, et se trouva si las, qu'il fut contraint de
s'arrester. Il arriva à Metz le mécredy suivant.
Biay. Mécredy 2. M. Des Portes-Baudoin, Seigneur de
Souspire * , entre en la charge d' Intendant des finances
de M. Déageant, pour cinquante mil écus, et vend
la sienne de Secrétaire du Conseil à M. Bardeau ,
75 mil écus.
lu Combat des sieurs de Quinsay et de Moussy,
cousins fort proches. La querelle vint pour un cha-
peau que Moussy avoit preste à Quinsay, lequel il
vouloit que Quinsay luy rendist en pleine rue ; et
néantmoins, il ne l'avoit pas. On dit que Quinsay
avoit reçeu deux coups d'épée, avant que de mettre la
main à l'épée. Moussy, gendre de M. de Contenant*,
^ Desportes-Baudouin, seigneur de Souspire, conseiller secrétaire du
Roi de ses finances, grand audieiicier de France, intendant des Fi-
nances en 1618.
.? Philippe Barjot, baron de Mou»^, avait épousé Charlotte de
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d'arnauld d'andilly. 373
fut tué sur-le-champ. Quinsay se sauva chez le Cardi- >'•>' «"••
nal de Guise. Par arrest du Parlement, le corps mort
de Moussy fut mené, sur une claye, à la voyrie.
Le 13 Juin, fut donné arrest définitif par contumace,
contre Quinsay, condamné à estre pendu, interdit
de feu et d'eau, etc. , suivant TÉdit. — Le lendemain,
Miraumont de Fontenay *, ayant osté le Tableau,
le 15, arrest portant décret de prise de corps contre
eux.
7. Le Roy va à St-Germain ; revient le mar-
dyl5.
Environ 9. M. le Comte d'Auvergne revient à
la Cour.
17. M. le Duc de Rhetelois fait le serment de
Gouverneur de Champagne. Le Roy luy témoigna
grande affection, et luy frappa tant qu'il put dans
la main. MM. de Nevers et du Mayne estoyent pré-
sens, lesquels en témoignèrent grand contentement.
20. Bonnet donné par le Roy à M. le Cardinal de
Rets, dans Notre-Dame, en cérémonie. M. le Cardi-
nal de Rets traitta toute la Cour.
21. Le Roy va à St-Germain, et en revient le
mécredy 13juin\
Bauves, fille d*Henry de Bauves, seigneur de Contenant. Après sa mort,
Charlotte de Bauves se remaria avec Henri de Saint-Nectaire, maré-
chal duc de la Ferté. (P. Anselme, t. iv, p. 891.)
^ Ce personnage pourrait Être le chevalier de Miraumont, camarade
et probablement parent de Fontenay Coup-d'Épée, tous deux duellistes
ou, comme on disait alors, gladiateurs, que Tallemant des Réaux,
t. m, p. 474, a réunis dans une même historiette.
* Foy, Poutchartrain, p. 264.
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37& JOURNAL INIÎBIT
v«y iws. 22. M. de Mayenne fait le serment de Gouver-
neur de Guyenne ; M. de Luynes, de Gouverneur de
risle-de-France; et M. le Colonel d'Ornano, de Lieu-
tenant Général au Gouvernement de Normandie *.
26. Un Député de la ville de Lyon reçeut des
coups de baston à St-Germain, dont on soupçonnoit
M. de St-Chaumont. Cette affaire fut portée fort
haut par le Roy et par MM. les Ministres.
27. François et André de Sity, pris prisonniers.
30. M. le Colonel d'Ornano va à Blois, trouver
la Reyne-mère, pour avoir son attache du Gouverne-
ment de Normandie ^ 11 revint le mardy 5 Juin. Ses
lettres furent présentées au Parlement de Rouen par
M. Salet, le mécredy 10 juillet.
Durand, pris prisonnier.
^"*"- 10. M. de Nemours arrive à St-Germain, au
retour de son mariage, fait avec M"' d'Aumale',
à... le...
16. Verceîl rendu \
* Foy. Richelieu, p. 504. C'est à tort que Richelieu dit ici que le
colonel d*Ornano fut nommé maréchal de Franco ; il ne ftit élevé à cette
dignité qu'en 1626.— Voy. aussi Fontenay-Mareuil, p. 419 ; Pontchar-
train, p. 263; Merc. fr., p. 259.
2 La Reine-mère avait le gouvernement de Normandie.
* Anne de Lorraine, duchesse d'Aumale, épousa à Bruxelles,
le 14 avril 1618, Henry de Savoie, duc de Nemours, et mourut en 1638.
Elle était fille de Charles de Lorraine, duc d'Aumale, pair et grand ve-
neur de France, gouverneur de Picardie, né en 1555, mort à Bruxelles
en 1631. — Pontchartrain, p. 263, dit par erreur que ce mariage fut
célébré dans le mois de juin.
^ Foy, Richelieu, p. 503. Pontchartrain place à tort la reddition de
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d'aknauld d'andIllv. 375
23. Le Roy va à Léslgny, d'où îl revint le lundy '«m "<»•
2 Juillet.
26. Le feu s' estant mis par une fusée, dans des
bateaux de foiti, au port au foîn, pensa brûler les
Ponts \
Yendredy 6* Les S" de Marsillac et Lesec pris juiiiet.
prisonniers, par arrest du Grand Conseil, et meness
à la Bastille.
9. MM. de Cadenet et Déageant reconciliez.
12. Le Roy va à St-Germain.
19. Durand et François de âity rouez, et leurs
discours brûlez ; et André de Sity pendu ^
23. M. Ribier prend Séance de Conseiller d' Es-
tai au Parlement, ou ses lettres avoyent esté vérifiées
tout d'une voix, à deux près ; et sortit immédiate-
Verceil dans le mois d'avril. (Pontchartrain, p. 262) ; Voy, aussi Merc.
A-., p. 40.
1 Voy. Merc. fr., p. 25, des détails intéressants sur cet accident
^ Durand et François de Sity étaient accusés d'avoir publié des li-
belles contre M. de Luynes et la Cour. Le crime d'André de Sity, frère
de François, était d'avoir copié un de ces écrits. — François de Sity^
Florentin, avait été secrétaire de l'archevêque de Tours, frère de la
maréchale d'Ancre. {Voy, Richelieu, p. 504.) — « En ce mesme temps
on fist mourir un nommé Durand, qui faisoit tous les ballets du Roy,
et deux Italiens qui avoient esté domestiques du mareschal d'Ancre,
pour quelques escrits faits à la louange de la Reine-mère, et contre le
gouvernement présent. » (Fontenay-Mareuil, p. 418, et la Note de l'É-
diteur qui donne quelques détails sur le poète Durand.) Voy. Pontchar-
train, p. 264. Il est à remarquer que Pontchartrain passe pour ainsi
dire cette affaire sous silence et ne nomme pas les personnes. Le Merc,
fr,^ p. 268, n'en dit aussi qu'un nfot. Durand y est ainsi désigné:
« Durant, l'un des gentils poëtes de son temps, inventif à dresser des
ballets. »
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376 JOURNAL INÉDIT
jutttct lets. ment après, le Premier ou Deuxième Président, ne
s'en estant trouvé ce jour là que deux à l'Audiance.
11 avoit auparavant vendu son office de Conseiller,
et avoit esté fait de la Direction, avec... d'appointé-
ment.
24; Edit fait sur les Estats-Généraux, et l'Assem-
blée de Rouen, et baillé à Messieurs les Gens du
Roy*.
31. M. de Mayenne fait son entrée à Bordeaux.
H estoit party de Paris, le... *.
Àoust.
Lundy 6. Mort de M. de Boucart. Ses charges
de Cornette de la Compagnie des chevaux-légers du
Roy, et de Bailly d'Orléans, données à M. de Branles.
8. Décret du Grand Conseil contre M. de Per-
san. En mesme temps, le Roy le mande au Louvre;
luy dit, en présence de MM. les Ministres, qu'il
luy pardonneroit, pourveû qu'il luy voulust tout
avouer. M. de Persan soutint qu'il estoit innocent,
et opiniastra à dire qu'il n'avoit point besoin de par-
don. Le soir, le Roy envoya le sieur de la Mont,
Exempt des Gardes, le garder chez luy, avec un ou
deux de ses Archers ^
*■ Voy. la note p. in fine. Voy. aussi Pontchartrain, p. 265.
2 Le duc de Mayenne quitta Soissous et alla à Bordeaux où il arriva
non à la fin mais au commencement de juillet, pour assister à l'enre-
gistrement de ses lettres de provision au Parlement. Cette formalité
fut remplie dans Taudience solennelle du 9 juillet. L'avocat général
du Sault prononça à cette occasion, en l'honneur du nouveau gouver-
neur, un discours qui est un spécimen des plus curieux de l'éloquence
hyperbolique du temps. (Foy. Merc, fr,^ p. 260 et suiv.)
* Voy, Richelieu, p. 505,
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d'arnauld d'andilly. 377
10. M. de Persan mené à la Bastille. M. le Ma- Aoustiêis*
réchal de Vitry tint plusieurs discours contre M. de
Luynes ; va le mesme jour à Coubert, après l'avoir
fait dire au Roy. M. de Crequy vint trouver M. de
Luynes, de la part de M. de Vitry, pour soutenir
qu'il n'avoit rien dit contre luy *•
11. Le Roy fit faire Commandement à MM. de
Ruscellay, de Sardiny, et de Jouy, de se retirer en
leurs maisons; ce qu'ils firent. M. de Ruscellay par-
tit le 16, et alla en son Abbaye de Signy en Cham-
pagne. Les deux autres allèrent près de Sois-
sons. M. de Jouy, par le moyen de M. de Montba-
son et de M. de Luynes, refit sa paix et vit le Roy à .
Soissons.
17. Congé de M. de Montpoûillan ^ résolu pour
la deuxième fois, car le Roy le luy avoit déjà donné
le 5. Enfin, il partit quelques jours après.
20. M. de Nevers part pour aller en Champa-
gne, établir en possession du Gouvernement, M. le
Duc de Rhetelois, son fils, et de là, il est allé en Alle-
magne.
* Foy. Fontenay-MiMreail, p. 418 ; Pontchartrain, p. 265 ; Merc. fr.^
p. 268.
2 Jean de Gaumont, seigneur de MontpouiUan, favori de Louis XHI,
fils de Jacques Nompar de Gaumont, maréchal duc de la Force, u Quel-
n ques mécoutentemeus qu'il eut à la Gour rengagèrent dans le parti
» huguenot, dont le Maréchal son père éLoit le chef en Guyenne. Il fut
» blessé à mort à la tête, dans une sortfe, en défendant Tonneins, et ne
» fut point marié. » {Foy, P. Anselme, t. iv, p. 472.) Les Mémoires du
marquis de MontpouiUan ont été publiés en 1843 avec ceux du maré-
chal de la Force son père et du marquis de Gastelnau son frère par
M* le marquis de la Grange, membre de l'Institut.
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â78 JÔOHNAL iNiDIT
Àoust im. 24. MM. de Bethune et de Modène de retour
de Piémont \
25. Feste de St-Loûis solennisée pour la pre-
mière fois ^
80. Arrest du Grand Conseil contre MM. de Per-
san, de BournonviUe, M"" du Tillet, M. Barbin,
M. de la Ferté, TEvesque et le sergent Lisy ^
4 Vùy, Richelieu, p. 503.
3 On trouve dans le MirCé fr,^ p. 37i et suir., Id bref du pape
Paul V pour la célébration de cette fête, le mandement du cardinal
de Retz, évêque de Paris, sur le même sujet, et le récit des réjouis*
sances publiques qui se firent à Paris.
3 Voy, Richelieu, p. 505 et suiy«, de curieux détails sur le procès
de Ëarbin et de ses co-accusés. « Bournonville et Persan sont du
» nombre, et au lieu de geôliers qu'ils etoient gardant les entres, ils
» deviennent prisonniers eux-mêmes. » BournoriviUe commandait à la
Bastille et M. de Persan, son frère, était chargé de la garde de M. le
Prince. Ils étaient accusés d'avoir conspiré avec Barbin pour rendre
le pouvoir à la Beine-mèré. Richelieu flétrit en termes énergiques et
éloquents la pression que l'on exerça sur les juges et la bassesse de
ceux qui se laissèrent plutôt guider par Tintérôt ou la crainte que
par leur conscience. Comme criminels de lèBe*majdsté, les accusés
furent condamnés % Barbin et l'Evesque au bannissement à perpétuité ;
Bournonville, à avoir la tête tranchée ; î^ersan et M"* Du Tillet, à s*é-
loigner de la Cour et de la Prévôté et vicomte de Paris pendant cinq
ans ; la Ferté, au bannissement pendant neuf ans ; et le sergent Lisy,
à être pendu. La condamnation obtenue, ils furent tous graciés, hor-
mis Barbin dont le bannissement fut Converti en prison peii>étuelle ;
ce qui, dans l'espèce surtout, était une aggravation de peine. Mais
c'était à ce fidèle serviteur de la Reine-mère qu'on en foulait particu-
lièrement. Voy. Ponchartrain, p. 260. Pontchartrfdn dit à tort qu'aucun
des accuiSés ne fut condamné à mort. Roban, p. i49 et suiv., donne
des détails très-intéressants sur cette aflfaire, dont il était, suivant son
récit, un des principaux meneurs. Il avait pour agent la Ferté, qui
était un de ses gentilshommes. C'est sans doute par une erreur de co*
piste qu'on voit figurer dans le récit de Rohan un certain évêque, tan-
dis qu'il s'agit de l'Evesque, serviteur dé Barbin. Voy, aussi sur cette
affaire un passage d'une lettré de Mole à Dupuy auquel il annooce ces
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D*ARNAULD d'ANDILLY. 379
Le mesme jour, le Roy accorde la grâce de M. de AourtiMs.
Bournonville à ses parens.
Le lundy 3 septembre , Reraonstances du Parle-
ment contre l'abolition; et depuis, commutation de
peine, en bannissement perpétuel, et amendes.
31. Marsillac et Le Sec jugez. Sortent de la Bas-
tille le lendemain.
Mécredy 5* Mort de M. le Cardinal du Perron *;
M. le Cardinal de la Rochefoucaud fait Grand Au-
mosnier.
Madame la Princesse accouche de deux garçons^
morts. Le Roy en témoigna très grand déplaisir.
Plusieurs personnes eurent permission de l'aller
voir ^.
Ambassade du Marquis de Cœuvres à Rome, en-
tièrement rompue. M. de Pisieux luy dit, de la part
du Roy, qu'il n'iroit point. Depuis, cela fut refait. On
dit que M. le Commandeur de Sillery y prétendoit, et
qu'il avoit fait offrir de l'argent pour l'obtenir.
11. Le Roy va à Lesigny ; et de là à Monceaux,
lesamedy 15'.
condamnations. L*arrèt du grand consei] étant du 30 août, suivant
Arnauld d*Andilly et Richelieu, la date du 2 août de la lettre de Mole
ne doit pas être exacte (Mém. de Mole, p. 216 et la note.) Il est à re»
marquer que le Merc, fr, ne consacre que quelques lignes à cette grave
affaire et la passe, pour ainsi dire, sous silence {Merc, fr,^ p. 269).
* Voy, Richelieu, p. 518, Téloge de cet illustre prélat. Voy, aussi ce
que dit de lui, à propos de sa mort, le Merc, fr,y p. 269.
2 Voy, Pontchartrain, p. 267.
' Voy, Poncbartraili, p. 267. Pontchartrain ou son éditedr met à*
tort Lagny au lieu de Lesigny.
Septembre.
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380 JOURNàL liNÉDlT
Septembre 1618. 21. M. Ic Cardinal de Rets assista au Conseil
étroit à Monceaux, en qualité de Ministre.
22. Le Père Arnoux, de retour de Blois, où il
avoit esté envoyé près la Reyne-mère. La lettre que
le Roy luy écrivit par luy, portoit ces mots, Ma-
dame, je vous envoyé le père Arnoux, mon confes-
seur, que j'ay choisy le seul propre pour vous assurer
de l'amour que j'ay pour vous. Il vous dira ce qui
vous peut nuire, et ce qui me doit servir. Il connoist
le fond de mon cœur, et de mon ame. Je vous sup-
plie de le croire comme moy mesme. C'est le seul
et dernier remède contre tant de bruits qui courent.
Vous devez désirer que désormais on sache que je
puis et veux régner seul. Aymez-moy toujours, je
vous en conjure, et vous souvenez que je suis *.
25. Le Roy va à Vilers-Costerests ; laisse MM. les
Ministres et le Conseil à Meaux. Il mena seulement
le Cardinal de Rets '
Environ 28. Traitté de M. de Luynes avec M. de
Vendosme , pour la Fère. On baille à M. de Ven-
dosme Verneûil au Perche, et Vendosme ; à M. de
Jumeau, qui estoit dans Vendosme,.... et à M. de
Manicjimp, qui estoit dans la Fère.
30. M. de Vendosme va en Bretagne ^
M. de Luynes va à Soissons prendre possession \
< Foy, Richelieu, p. 512; Fontenay-Mareuil, p. 424; Pontchartrain,
p. 268.
2 Foy. Pontchîfftrain, p. 268.
» Il allait avec le maréchal de Brissac et le duc de Montbazon tenir
les États de Bretagne à Nantes {Voy. Ponthartrain, p. 268).
^ Arnauld d'Aiidilly ne parle pas dai\s son Journal d'une missioQ
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d'arnadld d'andilly. 381
Lundy 1*'. Le Roy va à Soissons *. octobre m%.
Différent entre M. le Cardinal de la Rochefou-
caud, Grand Aumosnier, et MM. de St-Remy et de
Grieux, Maistres des Requestes, touchant la Prési-
dence , et confection des Actes, à la délivrance des
Prisonniers. Il fut ordonné , par provision , que le
S' Desmarests, Aumosnier du Roy, y assisteroit,
et le Lieutenant de la Prévosté de l'hostel , et que
M. le Cardinal ni les Maistres des Requestes n'y se-
royent point.
3. M. de Montmorency va à Soissons, et après
avoir demeuré quelques jours à Paris , va en Lan-
guedoc \
4. Le Roy va à Laon. Le vendredy 5, à Liesse
et à la Fère. Lesamedy6, àCoussy, et à Soissons, où
M. de Guise, revenant de Provence, arrive ce soir là
mesme ^
très-importante quMl aurait remplie de la part da Roi, en septem-
bre 1618, auprès du duc de Bouillon. Il s'étend longuement sur joe sujet
dans ses Mémoires, p. 377 et suiv.
* VQy. Pontchartrain, p. 268.
2 Foy, Pontchartrain, p. 268.
• a Ensuite de quoy M. de Luynes, qui se rendoit tous les jours plus
» hardy, mena le Roy en son nouveau gouvernement, et luy flst faire
» la visite de toutes ses places, sans y chercher de prétexte. Il fust
» aussy à Nostre-Dame-de-Liesse. » (Fontenay-Mareuil, p. 420). Foy, -
aussi Pontchartrain, p. 269; Mémoires d*Amauld d*Andilly, p. 383 et
suiv. D'Andilly, comme on le voit par ses Mémoires, suivit le Roi dans
ce voyage, et fit des tentatives inutiles auprès de M. de Luynes pour
obtenir de lui la réalisation de la promesse qu'il lui avait faite de le
faire nonwner intendant des finances. S'il faut l'en croire, on lui aurait
offert, en attendant, la charge de secrétaire du Cabinet, qu'il aurait re-
fusée, et M, de Luynes lui aurait fait dire qu'il songeait à le faire
nommer secrétaire d'Iiitat.
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â82 JOURNAL INlfDIT
oetobreieis. MM. du Conseil mandez pour aller à Soiseions, où
ils arrivèrent environ le mardy ou mécredy.
9, Le Roy va à Coucy, revient à Soissons le ven-
dredy 12.
M. le Duc de Rets arrive à la Cour d'où il partît
incontinent, pour aller aux Estats de Bretagne.
MM, de Rohan et de Montbason y estoyent aussi allez
quelques jours auparavant ^
13. M. de Longueville revientà Neufchastel, et
arrive à la Cour.
16. Le Roy part de Soissons ; va coucher à Vil-
lers-Costerets; le mécredy 17, disner à Nanteûil, et
coucher à Dampmartin.
18. Le Roy arrive à Paris*.
19, M. de Modène part pour aller à Blois, pour
rapporter la déclaration de la Reyne-mère *.
2/i. Le Roy va à St-Germain ; et en revient
le samedy 26.
27. Fiesque estant en Bretagne, avec M. de
Montbason, le Roy luy mande qu'il ne revienne plus
à la Cour. Quelques jours après, un de ses chevaux
et un de ses laquais ayant paru à la porte du Louvre,
le Roy commanda au Chevalier du Guet de le cher-
* Fêy. Pontchartrain, p. S68.
> Voy. Pootchartrain, p. 2G0; Mire, /V., p. 276.
>Foy. Rkhelku, p. 513, cette Déclaration, en date du 3 nOTembre,
par laquelle ta Reine-mère fait les soumissions les plus complètes
d^obéissance et de respect au Roi, et s'engage à ne venir à la Cour que
lorsqu'elle y sera rappelée. Suivant Ri(^lieu et suivant la Déclaration
éUe-mème^ c'est le Père Araoux qui obtint cet acte^ Oonf. Pontchar-
train, p. 260.
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d'arnauï.d d'andïlly. 383
cher, et le mettre à la Bastille. IL se trouva que c'es- * octobre leit.
toit son frère.
Le Roy fit donner Congé àBautru*, par M, de
Luynes. Il estoit fort amy avec Fiesque.
Uon donna aussi Congé à Boullanger ^ le mesme
jour; mais il a depuis paru souvent dans le Louvre.
Le vendredy 26, le Père Crochart avoit eu son
Congé.
28. Comédie de la Reyne.
M. le Cardinal de Savoye ' arrive à Orléans, où
MM. de Béthune et de Modène furent au devant de
luy.
31. Congé donné de la part du Roy à M"' la
Comtesse de Moret*, par M. de la Vieuville.
Vendredy 2. M. le marquis de Caluse , fils de Novembre.
M. le Comte de Yerrûe, arrive à Paris, devant M. le
Cardinal de Savoye.
i OuillauHie Bautru, comte de Serrant, né en 1588, eonseiller d'Etat,
introducteur des ambassadeurs, ambassadeur en Angleterre , en Es-
pagne, en Savoie et dans les Pays-Bas, membre de rAcadémie française,
mort en 1665. F»y., sur ce courtisan bel esprit qui s'est acquis une
certaine célébrité par ses bons mots, l'article de M. Salabéry dans la
Biog. Michaud, et son bistoriette, Tailemant des Beaux, t. ii, p, 314.
2 André Boullanger, prédicateur de Tordre deslAugustins réformés,
eonnu sous le nom de Pitii père André y né en l$8a, mort en 1657.
f>y., sur ce personnage, l'article 4a M. Tabaraud dans la Biog. fili*
chaud, et son historiette, Tailemant des Beaux, t. v, p. 339. Le Boul-
langer cité ici pourrait être aussi Jules-Qésar Boullanger, jésuite, au.
naôoier du Boi, mort en 1638. Voif. Moreri, t ii, p. 135.
* Maurice de Savoie, fils de Charles-Emmanuel, duc de Savoie, né
en 1593, cardinal, prince d'Oneille, mort en 1657.
A Jacqueline de Bueil, comtesse de Moret, maîtresse de Henri IV,
dont elle eut, en 1607, Antoine de Bourbon, comte de Moret« Elle
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S8Û JOURNAL INÉDIT
Novembre i«i8. 6. M. le Hiarquîs de Cœuvres va à Linas, au de-
vant de M. le Prince Cardinal de Savoye. M. de
Nemours* qui y avoit esté auparavant, comme parti-
culier, va au Bourg la Reyne, où M. de Cadenet va,
de la part de M. de Luynes. Estant arrivé à son logis
du faubourg St-Germain, M. de Luynes le va vi-
siter de la part du Roy, et l'amène voir Sa Majesté,
sans cérémonie; puis le remet en carrosse *.
Le Roy le loge au faubourg St-Germain, et luy
a baillé un département dans le Louvre ; mais il n'y
couche point. Sa Majesté le défraye, avec tout son
train, qui est de deux cens tant de personnes ; ce qui
couste quatre à cinq cens" par jour ^,
7. Monsieur le Prince Cardinal eut audiance so-
lennelle du Roy, de la Reyne, et de Mesdames.
épousa en 1617 René du Bec, marquis de Vardes, et mourut en 1651^
Voy, son historiette, Tallemant des Réaux, t. i, p. 155.
* On trouve, à l'année 1618, p. 217, dans les Mémoires de Mole,
publiés par M. Aimé Cbampollion, une lettre du Garde des Sceaux à
Mole datée de Poitiers le 6 novembre 1618, dans laquelle il est ques-
tion du royage du Roi en Béarn. Cette date est inexacte et la lettre
n*est pas à sa place, puisqu'à cette époque le Roi était à Paris où il
recevait le cardinal de Savoie qui venait officiellement demander la
main de Madame Chrétienne pour le prince de Piémont.
* Livres probablement
« Voy, Pontchartrain, p. 270. C'est par une erreur de copiste, sans
doute, qu'on lit dans les Mémoires de Ponchartrain, p. 267 et 269,
Madame Henriette au lieu de Madame Chrétienne. Voy, aussi Merc, fr,<,
p. 277 et suiv. Le cardinal de Savoie était logé à l'hôtel de Piquigny.
Le Mercure donne une description complète et curieuse du magnifique
feu d'artifice tiré pour la célébration de la fête du Roi et qui avait été
différé jusqu'à l'arrivée du Prince Cardinal. Ce feu d'artifice, chef-d'œu-
vre de Jumeau, ne le céderait pas aux merveiUes de nos Jours en ce
genre.
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d'aunadld d'andilly, 885
Le Roy, après luy avoir donné audiance, Talla «ovcmbr* «ip.
voir passer dans la chambre de la Reyne.
M"*' de Nemours se trouvant chez la Reyne, au-
dessous de MM"*" de Longueville, fit semblant de se
trouver mal, et se leva.
Monsieur le Prince Cardinal, qui s'estoit couvert
devant le Roy, et devant la Reyne, ne se couvrit point
devant Mesdames. Les uns dient que c'est à cause
de la recherche; et d'autres, que ce fut à cause que
Madame ne le luy dit pas.
13. Monsieur le Prince Cardinal fit au matin, au
Roy, la demande de Madame, pour M. le Prince de
Piémont, son frère *. Le Roy répondit, quMl verroit
les lettres du Duc de Savoye , son Oncle ; qu'il en
communiqueroit à Messieurs de son Conseil ; et puis
qu'il luy feroit réponce.
Ce mesme jour, le Roy mena Monsieur le Prince
Cardinal à St-Germain, et y estant, luy mena voir
toute la maison. Il le mena aussi à la chasse, luy
donna un couple de sa main, et luy fit courre un cerf,
avec cent veneurs, et cent chiens. II le luy fit prendre
en deux heures ^,
14. M. le Colonel d'Omano va en Normandie,
* Chrétienne de France, sœur de Louis Xni , née en 1606, épousa
le 10 février 1610, comme il est dit plus loin, Victor Amé, prince de
Piémont, fils de Charles Emmanuel, duc de Savoie, né en 1587, qui suc-
céda à son père en 1630, et mourut en 1637. Après sa mort. Chré-
tienne fut régente pour ses deux fils successivement, et après avoir
gouverné la Savoie pendant plus de vingtrcinq ans, mourut en 1663.
2 Voy. Richelieu, p. 516; Fontenay-Mareuil, p. ^15 et 423; Pont-
chartrain, p. 270 ; Merc, fr,^ p. 277 et suîv.
25
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886 , JOURNAL INÉDIT -
Hovcnbra iMi. prendre possession de sa charge de Lieutenant Géné-
ral. Il arriva à Rouen le Dimanche 18, et revint à Pa-
ris le If de Décembre. Il fut ^ bien reçeu, et réussit
si exceUemment en ce voyage, quMl ne se peut mieux.
Voicy la harangue qu'il fit à Messieurs du Parle-
ment de Rouen * :
Messieurs, l'honneur que j'ai reçeu du Roy pour
représenter sa personne en cette province, la plus
populeuse, la plus puissante par mer, et par terre, et
la plus voisine du Siège de son Empire, surpasse infi-
nies fois mes mérites. Mais il a pleû à Sa Majesté
de se souvenir des fidèles et passionnez services ren-
dus à la France par feu M. le Maréchal d'Ornano,
mon Père, et Monsieur le ColoneP mon ayeul, et de
considérer aussi la nourriture que j'ay reçeue dès ma
première jeunesse, et la ferme résolution que j'ay
prise, de n'avoir jamais autre objet au monde, que
le service de mon Roy, et la gloire de cette couronne,
avec un désir ardent de rechercher toute sorte d'oc-
casions pour employer courageusement mon sang et
ma vie, afin de faire que Sa Majesté soit aymée,
1 Je serais disposé à croire que les deux harangues insérées ici
textuellement étaient de la main d'Arnauld d'Andilly, de môme que le
discours du colonel d'Ornano rapporté dans l'extrait du journal de
d'Andilly relatif à l'arrestation de ce personnage, qui forme Tappendice
de ce volume. Arnauld d'Andilly était particulièrement attaché au co-
lonel, depuis maréchal d'Ornano, qui, dit-il, « étoit l'un des hommes
9 du monde qui m'a le plus véritablement aimé.» (Mém. d' Arnauld
d'Andilly, p. 375.)
2 Sampietro Corse, dit Bastelica, seigneur de Benane, colonel gé-
néral des €orses, tué en 1567. H avait épousé en 1528 Vanina d'Or-
nano. Voy. P. Anselme, t. vu, p. 3§1.
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D*ARNACJLD D'aNDILLY. S87
obéïe, et redoutée, en tous les endroits où elle me «•v«iii« hm.
fera la faveur de me charger de ses Commande-
mens. A quoy je suis tellement résolu, qu'il n'y a
considération quelconque qui soit capable de m'en
détourner. Ce que j'espère que Dieu me fera la grâce
de confirmer beaucoup plus fortement par mes ac-
tions, que par mes paroles; et ne doute point aussi,
Messieurs, que je ne vous trouve tous concurrens en
ce mesme dessein ; ce qui me fait croire que me te-
nant assidu en cette province, comme je dois, et
comme je feray, nous rendrons au Roy, et à l'Estat
des services très importans, et très signalez. En quoy
je ne désire avoir qu'une raisonnable distribution de
l'honneur qui en reviendra, et feray fidèlement en-
tendre à Sa Majesté la participation de louange et
de gloire qui sera deûe à votre Corps en général, et
à chacun de vous en particulier. Réputant à très
grand bon-heur d'avoir pour témoin, de mes dépor-
temens, une Compagnie si célèbre, et de laquelle
j'estime tellement le mérite, que l'un de mes plus
grans souhaits sera toujours d'en estre chéry, et de
me rendre digne de sa bienveûillance, par toute sorte
de services.
Il fit celle-cy à Messieurs... :
Messieurs, l'honneur extrême, et de beaucoup sur-
passant mon mérite, que j'ay reçeu du Roy, en me
constituant son Lieutenant Général en cette grande
et très-importante Province, m'oblige à n'avoir autre
soin, ni autres pensées, qu'à faire ressentir à ses
sujets les effets du bon-heur du Gouvernement de
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388 JOORNAL INÉDIT
novembre Mis. Sa Majesté, quc Dieu, dès sa première jeunesse, a
voulu accompagner de tant de piété et de justice,
que le plus grand désir qu'elle ayt au monde, est
de faire toujours marcher à ses costez ces deux
rares et excellentes vertus. Tellement que j'espère
qu'au lieu que cette célèbre assemblée se consom-
jnoit autrefois quasi toute, à dresser des Pleintes et
desRemonstrances, vous l'employerez doresenavant à
résoudre des Remerciemens et des Actions de Grâces,
et tout ensemble, à y proposer de belles et glorieuses
entreprises, pour fortifier le service du Roy, rehaus-
ser l'honneur de la Couronne, et remplir cette Pro-
vince de toute sorte de richesses. Pour mon regard,
je suis résolu d'y appliquer tous mes soins et mes
cogitations ; et vous supplie en général et en parti-
culier, de faire le semblable, et de vous assurer que
Sa Majesté, à qui Dieu a donné l'âme la plus gêné-
reuse qui soit au monde, favorisera et aydera vos
bonnes intentions, et en toutes choses, vous remplira
de bien-faits, et des contentemens que vous devez
attendre du meilleur Prince qui soit sur la Terre.
. 21. M. le Grand va en Bourgongne.
M, du Fargis * va en Espagne, sur le sujet du
mariage de Savoye, et revient le vendredy 11 Jan-
vier 1619. Il servit très bien en ce voyage ^
* Charles d*Angennes, seigneur du Fargis, comte de la Rochcpot par
sa femme^ conseiller d'Etat, maréchal de camp, ambassadeur en Es-
pagne, n se signala plus tard par ses intrigues ainsi que sa femme,
Madeleine de Silly, comtesse de la Rochepot, dame d*atours de la
reine Anne d'Autriche ; ce qui lui attira de cruelles disgrâces.
* Voy, Pontchartrain, p. 270.
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d'arnàuld d'andillt. 389
23, M. de Cadenet va à Blois, et de là à Amboîse. Nofertibrc i«n
28. M. de Vaudemont* arrive, et amène Mon-
sieur le Prince, son fils*, à la Cour, pour estre nourry
auprès du Boy.
Le Roy va à St-Germain, et revient le Lundy
10 décembre.
Samedy i. Toutes les Espagnoles qui estoyent
auprès de la Reyne, s'en vont en Espagne (excepté
la vieille Stéfanille, demeurée, et Osorio, envoyée en
Flandres), à savoir, la Comtesse de laTorre, la Com-
tesse de Castres, Mendoce, sa fille, Isabellique, et
plifeieurs servantes. La Comtesse de la Torre eut un
don du Roy, une littière, trois mullets, un carrosse, six
chevaux, et cinq mille éeus; la Comtesse de Castres,
pareil équippage , et trois mil écus ; le Roy leur a
donné à toutes, en tout, la valeur de cent mil livres.
Mendoce, avant que de partir, avoit eu la rou-
geolle, et l'avoit donnée à la Reyne, qui en avoit esté
assez malade'.
* François de LorraiDe, comte de Vaudémont, troisième fils de
Charles HI, duc de Lorraine et de Claude de France, né en 1572, se
fit reconnaître duc de Lorraine en 1625, remit quelques jours après le
duché à son fils Charles IV et mourut en 1632.
2 Charles IV, duc de Lorraine, né en 1604, fils de François, comio
de Vaudémontet de Christine de Salm, succéda en 162& au duc Henri,
te Bon^ son oncle, dont il avait épousé la fille et héritière , Nicole de
Lorraine; partagea d'ahord l'autorité souveraine avec sa femme, puis
céda le gouvemement à son père qui le lui rendit quelques jours apK'-s ;
il resta dès lors seul souverain. Il mourut en 1675. Foy, Biog. Mi-:
chaud la notice étendue et signée Henry, consacrée à ce prince dont
la vie privée fut aussi agitée que la vie politique.
3 Foy. Pou tchar train, p. 271.
Dcccinbre.
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390 JOORNAL INEDIT
Décembre 1618. 9^ |^mt jg Rechen * emmène Louise Osorio en
Flandra
12. M. Déageant ne va au Conseil du matin, au
Cabinet du Roy ^
14. M, lé chevalier du Guet fait Commande-
ment, de la part du Roy, à M. de Laissé, de sortir
de Paris, dans vingt-quatre heures, à peine d'encou-
rir son indignation.
16. M"*' de Luynes ' a la charge de Sur-Inten-
dante de la maison de la Reyne. Quelques jours au-
paravant, M"' du Vernet *, sœur de M. de Luynes,
avoit eu celle de Dame d'atour, au lieu d'Osorio.
18. Dom Ruade , chartreux, va à la grande
Chartreuse, en vertu d'une obédience de son Général,
venue quelques jours auparavant.
Querelle entre M. le Comte de Soissons, et M. le
Prince de Vaudemont ^^ au Manège, en présence du
* Anne Antoinette GonflSer, dame de Thiennes, fille de Henry Gouffier,
seigneur de Crevecœur et de Bonnivet qui eut dçs emplois considé-
rables en Flandres, et de Jeanne de Bocholt, née en 1580, mariée
en 1609 à Ernest de Lynden, baron, puis comte de Rechem près
Maestrick, colonel et gentilhomme de la chambre de l'Empereur d'Al-
lemagne, fils de Herman de Lynden, baron de Rechem, gouverneur de
Cologne, souverain de Uége, morte en 1620. {Foy. P. Anselme, t. v.,
p. 618.)
s Ce ministre était en disgrâce (Fùy. Pontchartrain, p. 371).
s La célèbre Marié de Rohan, depuis duchesse de Gfaevreuse, comme
il a été dit ci-dessus.
* Antoinette d* Albert, mariée en 1605 à Barthélémy, seigneur du
Vernet, remariée en 1628 à Henry Robert de la Marck, duc de Bouil-
lon, morte en I6kh.
6 Ces vaillants champions avaient alors l'un et l'autre 14 ans ! T\ est
vrai que le comte de Soissons était déjà grand maître de France et
gouverneur du Dauphiné. Son noble riVf^ était probablement aussi
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D*ARNAULD D'ANDILLY. 391
Roy. Le Roy les accorde le matin mesme, et dit, Décembre mis.
qu'il prenoit tout sur luy, la chose s' estant passée
en sa présence, et qu'il vouloit qu'ils demeurassent
amis. On avoit fait courre le bruit que M. de Vau-
demont vouloit aller à l'égal de M. le Comte, mais
cela ne se trouva vray. M. de Guise estoit présent à
l'accord, et s'y porta avec grande modération.
M. deVaudemonts'en va en Lorraine, et laisse
Monsieur le Prince son fils à la Cour,
investi de hautes dignités. Quant au Roi, leur auguste médiateur^ il
était plus &gé ; Sa Majesté avait alors 17 ans !
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4649
SOMMAIAE
Janvier. ~ M. de Gadenet nommé Ministre à la place de M/Déageaot.
— M. du Fargis revient d'Espagne. — Le Contrat de mariage de
Madame Chrétienne avec le Prince de Piémont est signé. — Mort
de la Duchesse d'Angoulôme. — Mariage du Duc d'Elbœuf avec
M"« de Vendôme. — Mort de la Princesse d'Orange. — M. d'Éper-
non part de Metz sans congé du Roi pour aller délivrer la BeJne-
mère.
FÉVRIER. — M. de Guise part pour aller poursuivre les pirates d'Alger.
— Arrivée du Prince de Piémont. — Mariage de Madame Chrétienne.
—Différend entre le Duc de Mayenne et le Maréchal de Roquelaure.
— Évasion de la Reine-mère du château de Blois. — Elle arrive à
Angoulôme. — Correspondance entre le Roi et la Reine-mère. —
Le Roi mande M. de Guise. — Le Maréchal de Vitry revenu à ia
cour est congédié par le Roi. — M. de la Chesnaye envoyé par le
Roi vers M. de Bouillon ; réponse de celui-ci.
Mars. — Le Roi commande à M. de Luçon d'aller trouver la Reine-
mère, — M. de Luçon part d'Avignon ; il est arrêté à Vienne, con-
duit à Lyon, remis en liberté par M. d'Alincourt et repart pour An-
goulème. — Le Père Suffren se rend auprès de la Reine-mère. --
Le Prince Cardinal de Savoie retourne en Piémont. — Offres du Roi
à M. de Saint-Luc ~ Disgrâce du comte de la Roche-Guyon. —
Mécontentements du Parlement. — Séance royale au Parlement —
Édits des petits sceaux et de revente de quelques domaines. —
MM. de Béthune et de Bérulle envoyés vers la Reine-mère. — Le^^
de la Reine-mère apportée par M. Villiers SaintrGenest. — I>"6' ""
jeune Villequier avec le jeune Bouteville. — M. de Blainville Am-
bassadeur en Lorraine. — Maladie de Monsieur le Prince; le R<^*
lui renvoie son épée. — Lo Roi envoie vers M. de SulJy qui ^^^"
aux avances de la Reine-mère.
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d'arnauld d'andilly. 395
Avril. — Reddition de Boulogne aux armes du Roi. -^ Retour à la
Cour du maréchal de Vitry. — M. de la Trémoille revient de Sedan,
où il avait épousé M^ de Bouillon. — Le Cardinal de la Roçhefou-
cairid envoyé vers la Reine-mère. — Prise de Tabbaye d*Uzerche par
M. de Schomberg. — Le Comte de BouIIay, Ambassadeur du duc de
Lorraine; il est nonmié Colonel des Vallons. -^ M. de la Valette
désarme les habitants de Metz. -^ M. de BraQtes, capitaine des .
chevau-légers du Roi à la place de M. de la Curée. — M. de Trai:»-
nel , envoyé comme Ambassadeur extraordinaire en Angleterre.
Mai. *- Départ du Roi pour Orléans. — Mort de la Maréchale de Fer-
vagues. — La Reine-mère accepte les propositions de paix. — M. do
Nevers chargé du commandement en Champagne. — Traité d*An-
goulême entre le Roi et la Reine-mère. — M. de Marousao envoyé
à Angoulôme. — Le Roi va à Blois et à Amboise. — Succès de M. de
Nevers. — Licenciement de Tarmée du Roi. — Le Roi va h Tours.
— Le comte de Brennes envoyé par la Reine-mère vers le Roi ; son
insolence envers M. de Luynes.
Juin. ~ M. de la Chesnaye envoyé à Angoulème. — La Reine-mère
désavoue M. de Brennes; cabale de M. de Russelay. — Le Prince
de Piémont va à Angoulème. — L'Ambassadeur d'Angleterre va à
la Cour à Tours. — Retour du Marquis de Traisnel. — M. de
Mayenne vient trouver le Roi à Tours avec la Noblesse de Guyenne.
— La Reine-mère se démet du Gouvernement de Normandie en
échange de celui d*Anjou. — Mutations dans le Gouvernement des
places d*Anjou. — Le martjuis de Mosny, mécontent de la Relnc-
mère, se rend à la Cour.
Juillet. — Mort de Gallati, Colonel du régiment des Suisses; nomi-
nations dans ce corps à la demande de M. de Bassompierre. — Le
Comte Henry, frère du Prince d'Orange, vient trouver le Roi à Am-
boise. — M. de Richelieu est tué eu duel par le Marquis de Thé-
mines. — M. de Russelay mécontent de la Reine-mère et de M. de
Luçon arrive à la cour. — M. de Montbazon envoyé vers la Heinc-
roère pour la prier de revenir auprès du Roi. — M. de Vendôiue,
Général de l'armée envoyée pour prendre Concarneau. ~ Disgrâce
de M. Déageaot ; il se retire en Daaphiné.
AOUT. — M. de Cadenet achète la Comté de Maillé. — M. de Longue-
ville reçoit le Gouvernement de Normandie ; M. de Lujmes, celui de
Picardie; M. de Montbazon, celui de TIle-de-France; M. de Cadenet
est nomme Lieutenant-Général en Normandie.— Prise de Concarneau
par les capitaines la Besne et la Courbe. — Mort de M. de Chaoï-
breL — MM. de Prasliu et de SaJntrGérau sout uommés Maréchaux
de France. — Maladie de Monsieur. — Naissance d'Anne-Geneviève
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394. /OURNAL INEDIT
Janvirriei». de Bourbon (Ift Duchesae de Longueville). — La Reine-mère part
d'AogouIôme pour venir à la Cour i cadeaux qu'elle fait au duc
d*Épemon et À ceux qui Tout assistée. ^ Duché-pairie de M. de
Luynes et de M. de Lesdiguièrçsi discussions à ce sujet au Parle-
ment.
Septcmbbb. — M. de Schomberg est nommé Surintendant des finances ;
il prend Amautd d'Andilly en qualité de premier commis. — Entre-
vue du Roi et de la Reine-mère à Couxières. — Suite du voyage du
Roi et de la Reine-mère. — Assemblée des Réformés à Loudun. —
Ëtata de Bretagne. — Mort du comte du Lude. -^ Le Colonel d'Or-
nano le remplace.
Octobre. — Le Roi va h Compiègne. — Les députés de l'Assemblée
de Loudun se rendent auprès du Roi. — Le Roi va à ChantiUy. —
Mise en liberté de M. le Prince; il va trouver le Boi à Chantilly.
Novembre. — Suite du voyage du Roi. — M. de Luynes fait le ser-
ment de Duc et Pair ; détails sur la séance du Parlement à ce sujet.
— Déclaration de Tinnocence de Monsieur le Prince.
Décembre. — M. de Blainvîlle achète de M. de la Rochefoucauld la
charge de Maître de la garde-robe. — Promotion de chevaliers du
Saint-Esprit. — M. de Cadenet est nommé Maréchal de France. —
Différend entre Monsieur le Prince et le Comte de Soissons au sujet
de la serviette du Roi. — M. de Nemours fait appeler M. de Guise.
Dimanche 6. M. de Cadenet fait Ministre au lieu
de M. Déagent, avec charge de porter les paroles du
Roy aux Ministres, et des Ministres au Roy. Il fut
mis en fonction de cette qualité en un Conseil étroit,
tenu Taprès-disnée du jeudy x\
11, M. du Fargis de retour d'Espagne. Il fit une
extrême diligence, car il vingt en cinq jours d'Irun;
ce qui arriva fort à propos, pour ce que Monsieur le
Prince Cardinal l'avoit tant pressé pour que Ton
signast le Contrat de mariage, que le Roy luy avoit
promis de le signer ce jour là, ainsi qu'il le fut*;
» Voy, Pontchartrain. p. 272. A Toccasion de la signature du con-
trat, il y eut à Turin des fêtes magnifiques dont le Merc, />•., t v,
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d'arnauld d'andillt. S95
tellement qu'il receut à beaucoup de faveur de ce J«mr»«ruii.
que Sa Majesté luy avoit accordé cette prière, sans
attendre réponce d'Espagne. Et d'ailleurs, le con-
trat n'ayant esté signé qu'après le retour de M. du
Fargis, le Roy d'Espagne, et tout le monde eut su-
jet de croire que l'on avoit rendu ce respect à Sa
Majesté Catholique de n'^avoir point signé le contrat,
qu'après avoir sceu sa réponce.
Le particulier de cecy est, que M. de Savoye eust
estimé avoir grand sujet de se pleindre, de ce
qu'ayant esté pressé, par MM. de Bethune et de
Modèrie , d'envoyer Monsieur le Prince Cardinal à
la Cour, sur le sujet du mariage, sans avoir aucune
assurance par écrit, que la demande en seroit agréée,
qui est contre ce qui est accoustumé de se prati-
quer entre les grans Princes ; néantmoins, pour plaire
au Roy, il envoya Monsieur le Prince Cardinal, but la
promesse que l'on luy fit, que six jours après qu'il
seroit arrivé, on signeroit le contrat. Estant arrivé,
les six jours se passent sans que l'on luy en parle.
De là, on va à Saint-Germain , où on luy promet
que l'on signera le Contrat, ce qui lie se fit point.
Enfin, il connut que l'on avoit voulu gagner temps
pour envoyer M. du Fargis en Espagne, dont il se
sentit extrêmement offencé. Sur quoy on luy pro-
mit que six jours après que le dit sieur du Fargis
seroit party, on signeroit le contract; et toutefois,
cela fut différé jusques à son retour.
année MDCXIX, p. 69, et suiy. rend compte avec les plus grands
détails.
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396 JOURNAL INÉDIT
lâovfcriMf. Outre cela, M. de Savoye se pleint de ce que
Ton avoit promis cent mil écus de pension à Mes-
sieurs ses enfans , et que l'on ne leur en a baillé
que soixante mil écus.
Le mesme jour, mort de M"' la duchesse d' An-
goulesme *.
20. M"' de Vendosme ^ mariée avec M. le duc
d'Elbeuf, M. de Vendosme luy bailla quatre cents
mil livres pour son partage, et le Roy pareille
somme sur ses dettes , dont il y en avoit cent mil
comptant^.
jyjmc |g^ Princesse d'Orange, sœur de Monsieur le
Prince, meurt à Meurs-Muret. Monsieur le Prince
en témoigna un extrême déplaisir. 11 esperoit en la
mariant, sortir de Prison. On dit qu'ils s'aymoyent
passionnément.
23. M. le Colonel d'Ornano revient de Blois, où
il avoit esté cinq ou six jours auparavant, porter si-
1 Diane, légitimée de France, Duchesse d*ÂngouIôme, fille naturelle
du roi Henri U et de Philippe Duc, demoiselle piémontaise, mariée
en 1552 avec Horace Farnëse, duc de Castro, qui fut tué à Hédin en
1554 ; en 1557 avec François, duc de Montmorency, pair et maréchal
de France ; duchesse de Ghatellerault en 1563 et d*Étampes en 1576,
veuve en 1579, duchesse d'Angoulôme en 1582, morte sans postérité à
Tâge de quatre-vingts ans en 1619. Le Roi donna en 1620 le duché
d*Angoulême au comte d'Auvergne, fils naturel de Charles IX, et par
conséquent neveu naturel de la duchesse d'Angouléme {Voy. P. An-
selme, 1. 1, p. 136). Suivant Pontchartrain, p. 273, la duchesse d*An-
goulôme décéda non le 11, mais le 12 janvier.
2 Catherine-Henriette, flUe naturelle d'Henri IV et de Gabrielle
d'Estrées, légitimée en 1597, mariée en 1619 avec Charles de Lorraine,
II« du nom, duc d'Ëlbœuf, morte en 1663.
* Voy. Pontchartrain, p. 273 ; Merc, fr,y p. 85.
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D*ABNADLD D'ANDILLY. 397
gner à la Reyne-mère le contrat de mariage dé Ma- envier uir.
dame. M. Barat porta la minutie. M. Guillard s' es- -
toit fait nommer, mais M. de Pisieux soustint que
l'on ne pouvoit l'obliger à mettre ses minuttes en
autres mains, que de l'un des siens.
25. Le Roy couche la première fois avec la
Reyne, dont il tesmoigna depuis avoir receu un ex-
trême contentement. M. de Luynes le porta entre
ses bras. Le Bonhomme M. de Berringhen, (qui mou-
rut lejeudy21 février), portoit le flambeau. Stépha-
nille, femme de chambre espagnolle, sortit de la
chambre, et M*"* Belliere, première femme de cham-
bre de la Reyne, y demeura seule*.
27. M. d'Epernon part de Metz, sans congé du
Roy, accompagné de cinquante gentilshommes, cin-
quante arquebusiers à cheval , cinquante carabins,
et son train. Les portes de Metz demeurèrent fer-
mées toute la semaine , et M. le marquis de la Va-
lette y demeura. Il alla coucher à une petite ville, à
quatre lieues de là, dont il fit aussi fermer les portes.
Il passa aux portes de Digoin, en Bourgogne, et ne
passa par nulles grandes villes, non pas mesme pour
traverser les rivières. Il avoit dii^posé ses amis pour
le joindre par le chemin, s'il avoit esté suivy ; mais
il n'en fut pas besoin. M. le Grand estoit arrivé à la
Cour quelques jours auparavant. Plusieurs personnes
seûrent à Paris la nouvelle du passage de M. d'E-
pernon, quatre ou cinq jours auparavant le Roy. Il
* Voif Pontchartrain, p. 273; Utrc, fr.^ p. 85.
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398 JOURNAL INÉDIT
jmtur itif. écrivit au Roy, du pont de Vichy, le 7 février *.
Février. Vciidredy 1. M. de Guise part pour aller à Mar-
seille, à son armement à la mer. Il avoit eu de
grandes broûilleries, quelques jours auparavant, avec
M. le Général des Galères, sur ce qu'il croioit qu'il
voulust traverser son voyage ^
6. Monsieur le Prince de Piémont, qui n'estoit
attendu que le samedy, fit vingt-deux postes ce jour
là, et arriva à Paris, vint descendre droit au Louvre,
accompagné de M. de Béthune, qui l'avoit jointe
Milly. Il fut voirie Roy à l'heure mesme (et le
prince Thomas' aussi). Sa Majesté le receut extrê-
mement bien, et le mena aussitost voir Madame \
9. Madame fiancée avec Monsieur le Prince de
Piémont.
10. Madame mariée dans la chambre de la
Reyne, à midy, au mesme lieu, et au bout de treize
ans jour pour jour, heure pour heure, qu'elle avoit
* Voy, Fontonay-Mareuil, p. 425 et suiy. et p. 433 ; Richelieu, p. 520
et 8uiv.; Pontchartrain, p. 273; Merc, fr., p. 127 et suiv. On trouTC
dans le Mercure la correspondance du Roi avec le duc d'Épernon,
notaaiment la lettre de ce dernier, écrite du pont de Vichy. Pendant
que ce personnage faisait au Boi les plus grandes protestations de
dévouement et de fidélité, il allait favoriser l'évasion de la Reine-mère.
2 Voy. Pontchartrain, p. 273 ; Merc. fr.., p. 85. Le duc de Guise, dit le
Mercure., allait nettoyer la mer des pirates d'Alger.
> Thomas-François de Savoie, prince de Carignan, fils de Charies-
Emmanuel I", duc de Savoie, frère du cardinal de Savoie et du prince
de Piémont^ né ea 15d6^ mort en 1656. Vùy, sur ce Prince, qui acquit
mie grande illustration dans la guerre, la Notice de M. de Villena?e,
Biog. Michaud.
* Voy, Pontchartrain, p. 273 ; Merc, fr,, p. 80.
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d'arnauld d'andillf. 899
esté née. On ne fit nulles cérémonies ; seulement le Fevie»* ^w»»'
Roy dança un ballet, le mardy gras, 12 février, du-
quel estoyent le Roy, Monsieur le Comte, Monsieur
le Grand Prieur , M. d'Elbeuf, M. de Rohan , M. de
Luynes, M. de Bassompierre, Monsieur le Général
des galères, M. de Courtenvaut*, M. le comte delà
Roche Guyon, M. de la Rochefoucaud, M. de Bran-
tes, M. de Blainville, M. de Liancourt, M. de Hu-
mières ^, M. de Chalais^ ; qui sont en tout , seize. Et
le premier dimanche de Caresme, 17, la Reyne dança
un ballet, dont estoyent, la Reyne, Madame la Prin-
cesse de Piémont, M"** la Duchesse de Longueville,
M"' de Montpensier *, M"** la Duchesse d'Elbeuf,
M"" de Rohan, M"* de Verneûil % M*"* la marquise
1 Jean de Souvré, fils du maréchal de Souvré, marquis de Courten-
vaux, premier gentilhomme de la Chambre, gouverneur de Touraine,
conseiller d*État, capitaine du ch&teau de Fontainebleau, grand fores*
tier et capitaine des chasses de la forêt de Bièvres, bois et buissons de
la Brie, maître particulier des eaux et forêts du bailliage de Meinn,
mort en 1656.
2 Charles-Hercule de Crevant, marquis d'Humières, premier gentil-
homme de la Chambre, capitaine de cinquante hommes d*armes, Gou-
verneur de Compiègne, tué au siège de Royan en 1622.
s Henri de Talleyraiid, comte de Chalaîs, né en 1599, favori de
Louis Xni, près duquel il fut élevé, maître de sa garde-robe, devenu
célèbre par ses intrigues sous le ministère de Richelieu, accusé de
conspiration, condamné à mort et exécuté en 1626. Voy, Biog. Michaud,
la notice de M. Weiss sur cet infortuné jeune homme.
A Marie de Bourbon, duchesse de Montpensier, fille unique et héri-
tière de Henry de Bourbon, duc de Montpensier, mort en 1608, et de
Henriette Catherine, duchesse de Joyeuse, remariée en 1611 avec
Charles de Lorraine, duc-de Guise, morte en 1656. M"' de Montpen-
sier naquit en 1605, épousa en 1626 Gaston de France, duc d'Orléans,
et mourut en 1627.
* Gabrielle-Angélique, fille naturelle d*Henri IV et de Catherine-
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400 JOURNAL INÉDIT
Ferricri*!». (Je Montlord *, M"" de Courtenvaut^, M*"' de Yen-
dosme*, M"* de Bouchavanes *, M"** de Courtenay*,
M"* de la Flotte, M"' d'Oquincourt •,»!"• Dandelot',
M"*' de Combalet* ; qui sont en tout, seize.
Henriette de Balzac, mai^uise de Vemeuîl, légitimée de France, ma-
riée en 1622 à Bernard de Nogaret, marquis de la Valette, puis duc
d'Épemon, morte en 1627.
* Marie de Raymond, marquise de Montlar, fille de Louis de Ray-
mond, marquis de Maubec et de Montlar et de Marie de Maugiron,
veuve de Philippe d'Âgoult, comte de Sauit, et femme de Jean-Baptiste
d'Omano, alors colonel et depuis Maréchal de France.
2 Catherine de Neufville, dame de Pacy, dame d'atonr de la Reine
Anne d'Autriche, fille de Charles de Neufville, marquis de Villeroy et
d'Alincourt, et de Marguerite de Mondelot, dame de Pacy, sa première
femme.
* Françoise de Lorraine, duchesse de Mercœur, fille unique et héri-
tière de Philippe-Emmanuel de Lorraine, duc de Mercœur, et de Ma-
rie de Luxembourg, mariée en 16C9 à César, duc de Vendôme, morte
en 1669.
* Madeleine de Créquy, fille de Claude de Créquy, II* du nom, sei-
gneur de BemieuUes, et de Claude de Rouvroy de Saint-Simon, mariée
en 1594 à Josias de Lamet, seigneur de Bouchavanes, gentilhomme de
}a Chambre, morte en 1634.
5 Catherine du Sart, fille d'Adrien du Sart, seigneur de Ville Saint-
Jacques et de Louise de Brucamp, mariée à Edme de Courtenay, sei-
gneur de Bleneau, mort en 1640 ?
^ Georges ou Jacques de Monchy, seigneur d'Hocquincourt, gou-
verneur de Boulogne et de Péronne en 1639, capitaine des chevau-
légers, premier maître d'hôtel de la Reine, grand prévôt de l'hôtel en
1630, lieutenant-général de Lorraine en 1636, fut marié deux fois :
X" en 1593 avec Claude de Moncloy, dame d'Aussennes ; 2'* avec Ga-
brielle du Chastelet, veuve du comte d'Escars. La première fut mère
du maréchal marquis d'Hocquincourt.
7 Huberte de Chastenay, fille de Joachim de Chastenet, seigneur de
Lanty et d'Agnès, dame de Dinteville, mariée en 1597 à Charles de
Coligny, marquis d'Andelot, mort en 1632. ,
s Marie d'Albert, sœur du duc de Luynes, mariée à Claude de Gri-
moard de Beauvoir du Roure, seigneur de Bonneval et de Combalet,
gouverneur d'Amiens et de Soissons, morte en 1686,
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d'arnadld d'andilly. àOl
On vid manger en public Mesdames, et Messieurs Février im.
les Princes de Savoye, en cet ordre.
14. Le Roy va à Saint-Germain , revient le Di-
manche 17, pour le ballet de la Reyne ; et repart le
Lundy 18. La Reyne y va le 19, et M. le Prince et
M"* la Princesse de Piémont, le 20 '.
Nouvelle arrive que M. du Mayne vouloit assiéger
la Réole, maison de M. de Roquelaure, pour avoir
les canons qui estoyent dedans, et que MM. de
Montmorency, d'Épernon, et de Gondrin ^ assis-
toyent M. de Roquelaure. On y envoya le Mayne
(qui revint le 12 mars), et le Roy écrivit à M. d'É-
pernon pour s'employer à cet acconuTiodement
(faute notable). Depuis, M. du Mayne prit la Réole
par composition, en tira les canons qui y estoyent,
et réduisit la garnison au nombre accoustumé. Et
ensuite, M. de Roquelaure, ayant une seconde fois,
augmenté la garnison, M. du Mayne la réassiégea
* Voy, Merc, fr,^ p. 86. Le Mercure donne les détails les plus curieux
fiur les fêtes merveilleuses qui eurent lieu à la Cour à l'occasion du
mariage de Madame Chrétienne avec le Prince de Piémont. Le sujet du
grand ballet du Roi, le plus beau que Ton eût encore vu, était la con-
quête de la Terre-Sainte par Godefroid de Bouillon. Le ballet de la
Reine était tiré de la fable de Psyché. Le Mercure fait aussi le récit
détaillé des fêtes magnifiques données à la même occasion par le duc
de Montmorency dans son gouvernement de Languedoc
> Antoine-Arnaud de Pardaillan, seigneur de Gondrin, né en 1562,
maréchal de camp, sénéchal et gouverneur d'Agenois en 1596, blessé
au siège d* Amiens, commandant de l'armée de Savoie, marquis de
Montespan et d'Antin en 1612 et 1615, chevalier des ordres en 1619,
Conseiller d'État, capitaine de cent hommes d'armes et des gardes- du-
corps, gouverneur de Navarre et de Béam, lieutenant-général au gou*
vernement de Guyenne, mort en 1624 {Voy. P. Anselme, t. v, p. 180),
26
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/iOS JOURNAL INÉDIT
Février i«if. encorc ; mais enfin, cela fut accommodé, en sorte
que les choses demeurèrent en Testât qu'elles
estoyent avant cette broûillerie, que M. de Roque-
laure verroit M. du Mayne, et quMls demeureroyent
amis.
Le commencement de cette affaire fut, qu'aux
mouvements de Guyenne, de 1615, M. de Roque-
laure ayant dit, qu'il ne se pouvoit opposer aux des-
seins des ennemis du Roy, en une occasion qui se
présenta , si on ne luy bailloit du canon, il luy fut
permis d'en tirer six du chasteau Trompette; ce
qu'ayant fait, il en mit trois dans le chasteau du Ha,
et trois dans sa maison de la Réelle, M. du Mayne
ayant le chasteau Trompette, et par conséquent,
prétendant le droit d'y remettre les six canons pris,
sur la fin de janvier 1618, estant entré par surprise
dans le chasteau du Ha, en fit tirer les trois canons
qui y estoyent ; M. de Roquelaure piqué de cela, et
craignant qu'il en fist autant à la Réolle, la fortifia
de gens de guerre. M. du Mayne prenant sur cela
de dire que c'estoit entreprendre contre le service
du Roy, que de mettre garnison dans une Place,
sans le sceû du Gouverneur de la Province, la vou-
loit assiéger, afin d'en tirer les canons qui y
estoyent *.
22. La Reyne-mère part de Blois, entre une
heure et deux heures après minuit , descend par la
* Foy., 8UP ce différend entre le duc de Mayenne, gouveroear de
Guyenne, et le maréchal de Roquelaure, lieutenantrgénéral audit
gouvernettient, le Merc, fr,^ p. 157.
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d'arnacli) d'andilly. 408
fenestre de son cabinet dans le fossé, accompagnée ''«^«' ^w»-
du comte de Brenes*, Nicolo Sardini (Bastard),
Marsé ^ et Desniazures, Exempt de ses Gardes ^ ;
Catherine et Selvage, deux de ses femmes de cham-
bre, Marine, naine, et deux valets de pied. La Reyne.
portant elle-mesme la cassette où éstoyent toutes ses
bagues, elle glissa le long de Téchelle, siu* la fin,
s'écorcha un peu le dos, et sa cassette tomba. Du
fossé, elle traversa tout le faubourg de la ville, et
passa tout le pont à pied. Elle fut reconnue par deux
hommes qui jettoyent des ordures «ur le pont, au
bout duquel elle trouva un carrosâe, et Chanteloube
qui Tattendoit, avec vingt-cinq ou trente chevaux,
avec lesquels elle alla jusques à Montrichard (Elle
n'entra pas dans la ville) , où elle trouva un autre
carrosse, et M. de Thoulouse et le comte de Ruscel-
lay avec cent vingt chevaux, ou environ. Estant
arrivée à Liège, à une poste de Loches, elle trouva
M. d'Épernon, avec deux ou trois cens chevaux. On
dit qu'ayant fait arrester son carrosse et mis pied à
terre, et M. d'Épernon luy ayant baisé la robbe, ils
se retirèrent chacun un pas en arrière , et se mirent
* Henry Robert de la Marck, comte de Brenne, pretiier écuyer de
la Reine-mère, capitaine • des cent-suisses de la garde ordinaire du
Roi, mort en 1652. Il était fils de Charles Robert dQ la Marck, comte
de Maulenier et de Breane qui, à la mort de Charlotte de la Marck,
duchesse de Bouillon, sa nièce, prit le titre de duc de Bouillon. Le
comte de Brenne porta aussi ce titre.
3 Jacques Goyon, baron de Marco, frère du marquis de la Moussaye,
mort ayant 1650.
* Merçay et La Maztu*e, exempt des gardes de la Reine-mère, sui
vant Fontenay-Mareuil, p. 435.
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liOli JOURNAL INÉDIT
Février 161». lous dcùx à rirc, et à dire, qu'il faisoit meilleur estre
là, qu'à Amboise. Le sieur le Conte la sert de secré-
taire, au lieu de M. de Villesavin, qui s'en est re-
venu *.
23. Le Boy estant à Saint-Germain, à la chasse
du cerf, etlaReyneetmadame de Savoye, avec luy ;
celte nouvelle luy fut apportée, laquelle le fit revenir
à Paris le lendemain. MM. du Conseil n'estoyent pas
encore allez à Saint-Germain ^.
24. La Reyne part de Loches, et arrive à An-
goulesme, le samedy 2 mars ; M. d'Épemon, monté
sur un cheval d'Espagne, la suivoit à la teste de deux
cens Gentilhommes très-lestes, ayant chacun deux
pistollets, et une carabine, et cent mousquetaires à
cheval, montez sur des chevaux de quatre-vingt et
cent écus, et disoit par les chemins à la Reyne, que
si elle l'eust perdu, comme ses ennemis le luy avoyent
voulu autrefois persuader, il ne luy rendroit pas
maintenant ce service.
25. Le Roy mande le matin MM. du Parlement.
Il leur fit dire, par M. le Chancelier, ce qui estoit
arrivé; qu'il s'en alloit (on disoit que Sa Majesté
partiroit assurément le samedy pour aller à Orléans,
et de là à Tours) , et qu'ils eussent soin icy de son
service.
Villiers Saint-Genest, Écuyer de la Reyne-mère,
^ Voy, Fontenay-Mareuil, p. 435 ; Richelieu, p. 527 ; Pontchartrain,
p. 274; Brienne, p. 336; Rohan, p. 154.
* Voy, Fontenay-Mareuil, p. 436; Pontchartrain, p. 275 ; Merc, fr.^
p. 136.
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d'artvauld d'andillt. Û05
arrive, avec une lettre de Sa Majesté au Roy, en 'cvrici' «w.
forme de manifeste, et une autre à M. le Prince de
Piémont. Ledit sieur de Villiers ne fut expédié que
plusieurs jours après, et seulement avec une lettre
de compliment, le Roy se remettant à luy écrire plus
amplement, par une autre voye. M. le Prince de Pié-
mont fit de mesme.
...Arrive aussi, avec des lettres de M. d'Épemon
au Roy. On dit que le Roy ne les voulut pas voir.
On fit commandement quelques jours après au sieur
Yallier, secrétaire de M. d'Épernon, de se retirer *.
26. Le Roy envoyé La Fare ^ à M. de Guise,
pour luy donner avis de ce qui estoit avenu, et luy
mander de venir à la Cour, s'il ne jugeoit point estre
nécessaire de delà. On ne luy écrivoit rien pour luy
donner assurance du commandement de l'armée;
mais on luy mandoit seulement de belles paroles par
La Fare.
M. le Maréchal de Vitry arrive au Louvre, sans en
avoir fait avertir Sa Majesté. Le Roy luy mande,
par M. de la Vieuville, qu'il ne le vouloit pas voir,
et qu'il s'en retournast, ce qu'il fit à l'heure mesme,
et alla coucher à Coubert, et dit, qu'il estoit venu
* Vùy. Fontenay-Mareuil, p. 438 ; Richelieu, p. 528 ; Pontchartraii^
p. 276. On trouve dans le Mercfr,^ p. 137 et suiv., la lettre de la
Reine-mère au Roi, celle du duc d'Épernon au Roi et celle de la Reine-
haère au Prince de Piémont, toutes trois datées de Loches le 23 février.
2 Jacques de la Fare, baron de la Fare, servit en Languedoc contre
les religionnaires en 1621, capitaine de cavalerie en 1638, premier
marquis de la Fare en 1646 mort en 1661? (Voy, P. Ansehne, t. ii,
p. 137.)
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&06 JOURNAL INÉDIT
wt^Herm% pour rendre preuve de son obéiôsance, et offirir au
Roy de lever quatre mil hommes de pied et cinq
cens chevaux, et d'avancer pour cela cinquante
mil écus qu'il avoit comptant. On m'a dit, qu'en
sortant du Louvre, il avoit dit que ses ennemis
n'avoyent osé se présenter devant luy , et que
c'estoyent des poltrons *.
27. M. de la Chôfinaye va, avec le sieur Justel,
trouver M. de Buillon de la part du Roy, et revient
le mécredy 6 mars, avec de belles paroles de M. de
Buillon, comme d'envoyer son fils au Roy avec
quatre cens chevaux, etc. Mais ensuite de tout cela,
il avoit dit que cette affaire estant entre le Roy, et
la Reyne sa mère, il estoit obligé de luy dire, qu'il
çroioit en sa conscience, qu'il devoit envoyer vers
elle, et que sur une affaire de si grande conséquence,
il estoit besoin d'assembler les officiers de la Cou^
ronne, et les Principaux du Royaume, pour y prendre
Conseil.
M. de la Chesnaye m'a dît que la créance dont
M. de Buillon Tavoit chargé envers le Roy, estoit
qu'il serviroit Sa Majesté, de sa vie, de son bien,
et de ses amis, envers et contre tous, sans exception,
distinction ni queue. Que sa créance à M. de Luynes
estoit, que les Roys ayant à avoir des Favoris, comme
il y en avoit toujours eu en France, il ne croioit pas
que la faveur pust tomber en meilleure main que
celle de M. de Luynes, qu'il estimoit fort homme de
* l^oy, Pontchartrain, p, 277.
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b'aenauld d'andilly. 407
bien ; et que ne jugeant pas que Ton pusti sans of- Fevriaricit.
fencer T autorité du Roy, s'attaquer, contre son gré,
à ceux qu'il ayme, pour ce qu'autrement, le Roy ne
seroit pas véritablement Roy, s'il ne luy estoit permis
de faire du bien à qui bon luy sembleroit ; et que
mesme en cela, il avoit intérest de s'y porter, parce
qu'il pourroit avenir que son fils recevroit quelque
jour des bien-faits et des gratifications du Roy ; pour
ces raisons, au cas que l'on voulust ruiner M. de
Luynes, il luy off'roit de le servir, et de l'assister de
sa vie, de son bien et de ses amis \
M. de Buillon, écrivit, en mesme temps, à M"* de
la Trémoille, qu'il ne changeoit point d'avis, depuis
le langage qu'il luy avoit prié de tenir, qui estoit que
se voyant abandonné des effects de la protection
qu'il attendoit de deçà, il avoit esté obligé de se
mettre bien avec tous ses voisins, M. d'Épernon entre
autres, avec lequel il vivoit en amitié, leurs enfans
estant parens*.
Environ ce jour, M. de Chambret' part de la
Cour, et va trouver la Reyne-mère. M. d'Épenion
le luy présenta, en disant, que s'il eust esté aussi
vaillant que luy, il luy eust rencju de bons Services.
Samedy 2. La Reyne-mère arrive à Angoulesme , mws.
* Voy, Merc, /V*., p. 149, Ja réponse du Maréchal duc de Bouillon au
Roi, en date à Sedan du h mars.
2 Voy. Richelieu, p. 529.
» « Chambret, entre autres, huguenot assez connu par les bonnes
actions qu'il avoit faites du temps du feu Roi, homme déterminé, et
qui sâvoit le métier de la guerre parfaitement » (Mém. de Richelieu,
p. 541.)
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408 JODRNAL INÉDIT
Mars 161». M. d'Épernon Taccompagnoit, monté sur un cheval
d'Espagne, à la teste de deux ou trois cens chevaux ;
et on tient qu'il luy dit un jour , « Pofardioux, Ma-
dame, si Vostre Majesté m'eust perdu, comme mes
ennemis le luy vouloyent autrefois persuader, je ne
luy rendrois pas maintenant ce service-cy. Il dit
aussi, que ces gens croioyent l'avoir matté; mais
qu'il avoit paré à la Dame ; que l'on disoit que Ton
luy feroit trancher la teste ; mais qu'il feroit dire au-
paravant force ScUve Regina.
Le Roy envoyé M. du T... * vers M. de Luçon,
pour luy commander d'aller trouver la Reyne-mère
à Angoulesme. M. de Luynes écrivit la lettre ; et le
Roy écrivit au bas. — M. de Luçon part d'Avignon
le Jeudy 7, fut arresté à Vienne par dix ou douze
des gardes de M. d'Alincourt, qui firent Corps de
garde la nuit , devant son logis. (M. d' Alincourt en
avoit receu commandement quelque temps aupara-
vant.) Puis il fut conduit à Lyon. M. d' Alincourt
luy envoya son carrosse, et après avoir veû son pou-
voir de s'en aller, luy donna à disner, et l'alla con-
duire hors la ville après disner. 11 devoit arriver à
Angoulesme lel5^
1 Le sieur du Tremblay, éonnu depuis sous le nom de Père Joseph,
capucin, confident et l'un des principaux agents de Richelieu.
2 Voy. Fontenay-Mareuil, p. 441 ; Brienne, p. 340. Les détails que
Ton trouve dans les Mémoires de Richelieu sur toutes les circonstances
de son rappel près de Marie de Medicis sont pleins d'intérêt comme
tout ce qui se rattache à la vie de ce grand Ministre* (Mém. de Riche-
lieu, p. 533 et suiv.}. Ce récit montre une fois de plus Texactitude du
journal de d'Andilly.
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d'arnauld d'andilly. 409
Le mesme jour, M. B..,* va trouver la Reyne- Mar^wia.
mère,
ft. M. de Luynes va voir Monsieur le Prince au
Bois de Yincenries.
6. Madame la Conneslable*, suivant les lettres
de M. de Montmorency, prend congé du Roy, et de la
Reyne, sous prétexte de s'aller purger, et s'en va à
Chantilly.
Le père SufiTren' , qui estoit revenu de Blois à la
Cour, et n'avoit point suivy la Reyne-mère, part
pour l'aller trouver à Angoulesme.
7. M. le Prince Cardinal part, pour s'en. re-
tourner en Piémont.
8. Six canons partent, pour aller à Orléans.
Le Roy envoyé M. de Cominges Guitaut*, trouva
1 u Le sieur Bouthillier étoit parti de Paris pour la venir trouver,
au même temps que les ordres du Roi me furent envoyés par le sieur
du Tremblay, pour lui rendre compte de tout ce qui s'étoit passe?. »
(Mém. de Richelieu, p, 537.) « Un des RouthiUier, dit-il, p. 533,
simple ecclésiastique pour lors, qui est depuis mort évC^que d*Aire,
homme de cœur et d*esprit tout ensemble, dont Tadresse et la fidélité
étoient égales. »
2 Laurence de Clermont, troisième femme du dernier Connétable de
Montmorency, qui Tépousa en 1599, voulut en vain faire annuler son
mariage, divorça et renvoya au château de Villiers-le^Bel, où elle de-
meura jusqu'à la mort du Connétable en 1614 ; rappelée à la Cour,
elle devint Dame d'honneur de la Reine Anne d'Autriche et mourut en
li>54.
s Jean Suffren, né en 1565, Jésuite, confesseur de la Reine-mère en
1615, puis confesseur du Roi. Disgracié, le Père Suffren suivit Marie
de Medicis en Angleterre et en Allemagne et mourut en 1641. Les ser-
mons du Père Suffren ont été publiés en 1622. On a de lui quelques
opuscules et V Année chrétienne^ publiée en 1641 eu 6 vol. in-4^ {Voy,
Biog. Michaud, notice de M. Weiss.)
^ Pierre de Comioges, seigneur de Guitaut, capitaine do deux cents
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&10 JOURNAL INISdIT
Mên itst. M. de Sain1>Luc, et luy ofirir le payement, en deux
ans, sur Broûage, de cent mil francs dont il avoit cy
devant eu don ; d'augmenter ses huit compagnies de
Broûage, qui sont de cinquante hommes chacune ,
jusques à huit cens hommes, et mesme mille, de lever
mille hommes de pied, et quatre compagnies de che*
vaux légers ; de commander en chef tout cela, et
mesme plus grandes forces en ce canton là, s'il en
estoit besoin. Et si lé Roy alloit d'un autre costé, et
y fai^oit une grande armée, d'y servir en qualité de
Maréchal de Camp. M. de Guitaut trouva M. de St-
Luc engagé avec la Reyne-mère, tellement que toutes
ces propositions ne servirent de rien*.
10. Le Comte de la Roche Guy on s'en va de la
Cour, à cause qu'il n' avoit pas donné à boire au Roy.
Il y revint trois ou quatre jours après.
11. Les chambres des Enquestes, ayant seû que
le Roy xievoit aller au Parlement, députent deux de
chaque chambre à la Grand Chambre, pour deman-
der permission de s'assembler à M. le Premier Pré-
sident. Il fit réponce que le Roy luy avoit mandé
par M. Tronçon, qu'il ne vouloit pas que l'on s'as-
semblast. Sur cela, les chambres ayant délibéré,
dirent, qu'ils n'estoyent point obligez de croire que
M. Tronçon eust porté cette parole à M. le Premier
Président, aussi peu que M. de Luynes l'eust dite à
hommes de pied en 1574, lieutenant au gouTernement de Brouage et
des lies de Saintonge en I604i gentilhomme ordinaire de la Chambre
en 1611, mort après 1619.
* Foy. Fontonay-lf areuil, p. 430 ; Rtdielieu, p. 548.
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D'ARNiVLD D'ANDILLT. &!!
M# Tronçon, ni que le Roy l'euét dite à M. de
Luynes; qu'il n^y avoit qu'une manière par laquelle
le Roy parlast au Parlement, qui estoit par lettres
patentes scellées du Grand Setu, et que sur cela, on
délibéroit ce que Ton avoit à y répondre ; que si on
les vouloit empêcher de parler au Roy tout bas, dans
son Cabinet, et en robbes noires, ils parleroyent tout
haut, en plein Parlement, et en robbes rouges ; que
si le Premier Président ne le vouloit faire, d'autres
Présidens le feroyent ; et que quand mesme ceux-là
manqueroyent, il n'y auroit pas faute de Conseillerô
qui Tentrèprendroyent.
Environ et temps, MM. de Rohan et de la Rodie^
foucaud vont en .Poitou.
12. Le Roy va au Parlement, où il fit passer les
Édits des Petits Seaux, ej; revente de quelques Do-
maines, et entr' autres de la forest d'Orléans*.
M. de Béthune part pour aller trouver la Reyne-
mère, de la part du Roy\
* Voy, Mère, fr,, p. 152, le compte renda de cette séance royale. « On
1» leut deux Edicts^ Tun pour la revente du Domaine royal aliéné et dé*
» laîisement à perpétuité à tiltre de ftef, ou cens, avec deniers d'en*
» trée t du fonds et propriété des bois en grufirie, grairie, segrairiOi
» tiers et danger des forêts, gardes et buissons du duché d'Orléans «t
» autres Provinces, où Sa Majesté avMt des bois de la nature susditOé
» Et l'autre, pour la vente et revente des droicts de petits seaux et
» augmentation d'îceux par tout le royaume de Trance. » A chaque
reprise de la guerre civile, on voit reparaître des mesures fiscales qui,
en créant des ressources momentanées au gouvernement, ruinent l'État.
La misère du plus grand nombre est toujours la conséquence de l'anap-
chie fomentée par l'ambition de quelques-uns.
2 M. de Béthune portait à la Reine-mère les réponses du Roi et du
Prince de Piémont, en date à Paris du 12 mars, aux lettres de la Reine-
mère du 28 février, (f^oy, ces réponses, Mère, fr>^ p. IftO et 145.)
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A12 JOUANilL INÉDIT
itort ifit. 13. M. de Bérule part en poste, pour aller, de
la part du Roy, trouver la Reyne-mère. Il revint le
cinq avril et repartit le neuf.
14. VilliersSaint-Genest arrive de la part de la
Reyne, avec une lettre de Sa Majesté au Roy*. —
Sur quelques paroles qu'il dit, le Roy luy dit, que
sans le respect de la Reyne sa mère, il luy auroit
fait trancher la teste. Villiers répondit qu'il ayme-
roit mieux mourir mille fois que d'avoir offencé Sa
Majesté, et que s'il l'avoit fait, il la supplioit très
humblement de luy faire trancher la teste.
Le jeune Chappes, nommé Villequier% âgé de
quatorze ou quinze ans, se bat avec M. de Routeville-
Montmorency*, environ de son âge.
* Voy, Mém. d*Arn*uld d*Andilly, p. 386 ; Richelieu, p. 530.
» Voy. Merc, fr.^ p. 161, cette seconde lettre de Marie de Medicis à
Louis XIII, datée d*AngouIêaie le 10 mars. On trouve dans le Mercure
trois autres lettres de la Reine-mère, en date du môme jour, adressées
au Chancelier, au Garde des Sceaux et au Président Jeannin, suivies
des réponses de ces grands hommes d'État.
s Antoine d'Aumout, second fils de Jacques d'Aumont, baron de
Chappes, mort en 1614, et de Charlotte-Catherine de Villequier, fut
élevé à la Cour comme enfant d'honneur du roi Louis XIII, porta
d'abord le titre de marquis de Villequier, servit au siège de Montauban
en 1621, devint capitaine des gardes en 1632, gouverneur de Boulogne
en 1635, Maréchal de France en 1651, gouverneur de Paris en 1662,
premier duc d'Aumont et pair de France en 1665 et mourut en 1669.
(Voy, P. Anselme, t. iv, p^ 877 et t. vu, p. 542.) Le Maréchal duc
d'Aumont étant mort en 1669, âgé de soixante-huit ans, suivant le
P. Anselme, aurait eu, à l'époque du duel dont il s'agit, environ dix-
huit ans. La Notice de M. Salabéry, dans la Biog. Michaud, confirme
le témoignage du Père Anselme et place la naissance du duc d'Au-
mont eu 1601.
^ François de Montmorency, seigneur de Bouteville, gouverneur de
Senlis, se distingua aux sièges de Saint- Jean* d'Angely, de Montauban,
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d'arnauld d'aptdilly. 415
15. M. de Blainville va Ambassadeur extraordi- ^a» le».
naire en Lorraine, sur le sujet de ce que l'on croioit
que M. de Lorraine favorisoitM. d'Epernon.
21. Monsieur le Prince tombe malade. — Mardy
2 avril, MM. Hélin, Duret et Seguin vont au Louvre
représenter Testât de sa maladie. La cause en estoit
attribuée à profonde mélancolie. Il fut tenu plusieurs
jours hors d'espérance. Il fut permis à Madame sa
mère, à Madame la Comtesse, à M"'* de Ventadour*,
à M"*' la Comtesse d'Auvergne*, à M"*' de la Tré-
moille % à M™' de Fontaines *, à M"* la Grande'* etc. . .
de l'aller visiter.
de Royan et de Montpellier, se rendit tristement célèbre par ses nom-
breux duels et surtout par le dernier contre le marquis de Reuyron,
à Toccasiou duquel il. fut condamné à avoir la tête tranchée, ce qui
fut exécuté le 22 juin 1627. {Voy. P. Anselme, t. m, p. 588.) D eut
pour fils posthume le célèbre maréchal duc de Luxembourg.
^ Marguerite de Montmorency, fille du Connétable et belle-sœur de
Monsieur le Prince, mariée en 1593 à Anne de Lévis, duc de Venta-
dour, morte en 1660.
* Charlotte de Montmorency, sœur de la précédente, mariée en 1591
à Charles de Valois, comte d'Auvergne, depuis duc d'Angoulôme,
morte en 1636.
' Le jeune duc de la Trémoille avait épousé le 10 janvier de cette
année 1619, sa cousine, Mavie de la Tour, fille de Henry de la Tour,
duc de Bouillon et d'Elisabeth de Nassau, qui mourut en 1665 ; mais
les nouveaux mariés n'étaient pas encore revenus de Sedan, comme
on le verra plus loin. Il s'agit ici de la duchesse de la Trémoille,
douairière, Charlotte Brabantine de Nassau, fille de Guillaume U de
Nassau, Prince d'Orange, et de Charlotte de Bourbon-Montpensier,
alliée de Monsieur le Prince.
^ Anne de Bueil, fille de Louis de Bueil, comte de Sancerre, grand
échanson de France, et de Jacqueline de la Trémoille, veuve depuis
1590 de Honorât de Bueil, seigneur de Fontaines, conseiller d'État,
vice- amiral, lieutenant-général en Bretagne, gouverneur de Saint-
Malo. Elle était par sa mère alliée à Monsieur le Prince.
* Anne de Bueil, dame de Fontaines, fille de» précédents et femme
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lilk JOUHNAt INlÈniT
i »«•. Le lundy 8 avril, le Roy luy renvoyé son épée par
M. de Gadenet, et luy écrit : Mon cousin, je suis
bien fâché de vostre maladie. Je vous prie de vous
réjouir. Incontinent après que j'auray donné ordre
à mes affaires je vous donn^ay vostre liberté. Bé-
jouïssez-^vous donc, et ayez assurance de mon amitié.
Jesuis.*..^
2â* Premier courrier de M. de Béthune arrive,
avec une grande dépesche de luy, dont quelque chose
du sommaire est, qu* ayant leû la lettre du Roy, la
Reyne dit à M. de Béthune, qu'e^;ant en créance sur
luy, elle seroit bien ayse de savoir ce qtf il avoit à
dire, (et cela en présence de M. d'Epernon), à quoy
M. de Béthune ayant répondu qu'il n' avoit charge
de parler qu'à elle seule, et en particulier, elle in-
sista fort disant qu'aussi, bien elle auroit la peine de
le luy redire. Enfin, il parla à elle, à part, et ne luy
ayant dit que les mesmes choses que contenoit sa
lettre, elle dit qu'elle s'étonnoit de cela, puisque la
lettre estoit en créance sur luy. Ensuite, elle luy fit
ses pleintes du mauvais traittement qu'elle avoit
reçeu, excusa fort M. d'Epernon, et en dit beaucoup
de bien. Enfin, estant entrez jusques aux avis des
désordres dont elle avoit à informer le Roy, elle dit
à M. de Béthune, que s'il vouloit, elle les luy feroit
entendre. A quoy M. de Béthune répondit, qu'il
n* avoit point charge de rien écouter de cela; (en cela,
de Roger de Saint-Lary et de Tennes, duc de Bell^rde, pair et grand
écuyer de France.
* Foy. Merc. /y*., p. 183.
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d'aanauld d'andilly. 416
on trouva qu'il avoit fait très grande faiite, pour ce Mâw tm.
qu'il pouvoit oûir, et dire à la Reyne, qu'il ne voioit
nulle apparence de parler de cela au Roy, etc.. Et
néantmoins écrire le tout au Roy),
35. M. Arnaud le Mestre de camp dés Carabins,
envoyé par le Roy vers M. Sully, trouva que la
Reyne mère luy avoit écrit trois ou quatre fois, et
qu'il commençoit à se fort engager de ce costé là.
Il le ramena à ce qu'on euât pu désirer* Revint le
samedy 30. Il y retourna encore depuis, un second
voyage, sur la fin du mois d'Avril, dont il revint le
dernier du dit mois. — Dix sept mil livres pour les
garnisons, non comprises en celles de seureté.
Lundy l. M. de Guise arrive à la Cour» Avm.
Il arrive nouvelle au Roy que les habKans de .
Boulongne s'estoyent barricadez contre le chasteau.
(Meuz qui y commandoit, n' avoit que sept ou huit
hommes, et point de pain.) M. de Longueville s'of-
fence extrêmement de ce que l'on refuse de l'y en-
voyer. Le Roy, quelque temps après, envoya quérir
ledit sieur de Meuz, lequel vint. Depuis, environ le
18 avril, on y dépesche FouqueroUes, Exempt des
gardes, avec deux Archers *.
* Voy. Richelieu, p. 542; Pontchartrain, p, 377; Merc. /a, p. 175.
Le Mercure rapporte une lettre que U Reine-mère écrivit au Roi au
sujet de cette affaire, pour se plaindre que l'on attaquait les places
dans lesquelles elle pouvait au besoin trouver sa sûreté. Le duc
d'Éperdon était gouverneur de Boulogne; son lieutenant remit la
place entre les mains du Roi.
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&16 JOURNAL INÉDIT
ATTii lert. 3. M. le Maréchal de Vitry revient à la Cour
avec le gré du Roy.
ft. M. de Vendosme refusé d'un pouvoir de com-
mander en Bretagne, et en Normandie, dit qu'il ne
seroit jamais avec M. de Luynes. Parle au Roy
contre luy. Le Roy l'interrompt et luy dit, qu'il estoit
en colère. M. de Luynes luy en ayant fait pleinte, il
dit, qu'il estoit vray, etc...
6. M. de la Tremoille revient de Sedan, où il
s' estoit allé marier à la fille aisnée de M. de Buillon,
quelque six semaines ou deux mois auparavant '.
M. d'Epernon part d'Angoulesme, avec deux ca-
nons, pour aller secourir Uzerche.
8. Le Roy écrit à Monsieur le Prince, et luy ren-
voyé son épée {vide supra) *.
9. Le Roy va à Saint-Germain \
M. de Bérule repart en poste, pour aller à Angou-
lesme.
M. le Cardinal de La Rochefoucaud part, pour aller
à Angoulesme, où il arrive le vendredy 19, avec
pouvoir d'offrir Angers^Chinon, Pont de Ce. Il re-
vient le 15 juin*.
12. L'abbaye d'Uzerche prise par M. de Schom-
berg, qui la fit attaquer par cinq ou six endroits,
pendant que ses gens entroyent par un trou de cave
« Voy, note 3, p. 413.
> Voy, Pontchartrain, p. 280.
* Voy, Pontchartrain, p. 279.
* Voy. Merc, fr,^ p. 180. Le Père de Bcrulle et le Cardinal de la
Rochefoucauld étaient chargés ainsi que M. de Béthune de traiter de
la réconciliation entre le Roi et la Reine-mère.
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d'arnauld d'andilly. M7
que leur avoit enseigné un prestre. M. d'Epernon Avrincio.
n'estoit qu'à deux lieues de là, avec cinq ou six cens
bons chevaux. On dit qu'il avoit laissé son canon à
dix lieues de là, avec son Infanterie, qui estoit de
deux ou trois mil hommes de pied'.
13. Le Comte de Boullay arrive comme Ambas-
sadeur extraordinaire du duc de Lorraine. On luy
donne un brevet de Colonel des Vuallons, et une pen-
sion de six mil écus, et quatre mil écus à quatre
gentilshommes qu'il nomma, dont Chamble estoit
un. Lesdits quatre mil écus en pension.
18. M. de la Valette ayant reconnu l'affection
que les habitans de Metz avoyent au service du Roy,
fit entrer la nuit dans la citadelle les Régimens de
Chamble et de Gastinois , montant à dix-huit cens
hommes, et le matin, estant sorty avec toutes ses
troupes et ce qu'il avoit auparavant, avec deux
pièces de canon, et ayant disposé ses gens dans
toutes les principales places et aux portes des églises,
où il savoit que les habitans avoyent leur rendez-
vous, il envoya des soldats, avec des flambeaux, et
de la paille allumée, crier par toutes les maisons,
que s'ils n'apportoyent à l'heure mesme toutes
* Voy, Fontenay-Mareuil, p. 439; Richelieu, p. 540 ; Pontchartrain,
p. 219i3Ierc. fr,^ p. 172. Le Mercure donne de grands détails sur la
prise de Tabbaye d*Uzerches. Le duc d'Epernon était possesseur de
cette abbaye, située dans son gouvernement de Limosin ; le comte de
Schomberg était lieutenant du Roi dans la môme province. On trouve
dans le récit du Mercure une lettre de la Reine-mère au Roi au sujet
de cette affaire, et la lettre par laquelle le comte de Schomberg an-
nonce au Roi le succl's de son entreprise.
27
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kiS JOURNAL INiSdIT
Avril im. leurs armes, chacun en TÉglise de sa Paroisse, on
mettroit le feu à leurs maisons ; à quoy ils obéirent
à Theure mesme. Mais ils ne rendirent pas tout Et
un d'entr'eux qui se vanta, quelque temps après,
qu'ils tf estoyent pas encore désarmez, fut cause que
Ton fit une seconde recherche , en laquelle il s'en
trouva encore quantité. Cependant, les portes de la
ville ayant esté fermées quelques jours, et y ayant
eu quelques coups de canon tirez en Tair, M. de
Yaudemont, qui creut qu'il y avoit eu émotion, en
donna avis au Roy, qui dépescha en mesme temps à
M. de Praslin, avec commandement, ou en son
absence, à M. de Feuquière, de mener toutes les
troupes de Sa Majesté à Metz, ce que M. de Praslin
fit; mais il estoit trop tard. 11 n' avoit que quinze
cens hommes de pied et deux cens chevaux. Depuis,
M. de la Yaliette fit faire encore une recherche
d'armes, et fit ester aux habitans jusques aux bro-
ches, serpes, fourches, etc. *.
21. Le Roy revient de Saint-Germain à Paris,
et y retourne le mardy 2â^
27. M. de Brante, pourveû de la charge de ca-
pitaine des chevaux l^ers de la Con^gnie du Roy,
qu' avoit M. de la Curée pour le prix de cent mil
écus, savoir soixante quinze mil écus comptant et la
charge de capitaine au Régiment des Gardes, qu'a-
voit M. de Brantes, baillée à M. de...... neveu de
* yoy. Richeli6u,''p. 560 ^ Pontchartraifl, p. 280; Bferc, />•., p. 186.
^ Vop, Merc, fr,^ p. 180, une longue lettre du Roi, datée de Paris
le 23 avril, en réponse à celle de la Heine-mère du il du même mois.
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D^ARNAULD D'ANDILLY. 419
M. de la Curée, estimée à trente mil écus. M, de AvHueit.
Brantes vend sa charge de Cornette à M. de Vie*,
quarante mil écus.
Le soir de ce mesme jour, M. de Bérule arrive au
faubourg Saint-Jacques ; et le lendemain, va à Saint-
Germain. La Reyne-mère demandoit Amboise, outre
ce qui luy avoit esté accordé; ce qui luy fut refusé.
Il repart le 4 may, pour retourner à Angoulesme'.
29. M. de Traisnel ' part pour aller Ambassa-
deur extraordinaire en Angleterre, avec charge de
parler du mariage du Prince avec M**' Henriette.
M. le Prince de Piémont s'est pleint de ce qu'ayant
travaillé à nous remettre en bonne intelligence avec
Angleterre, et mesme luy ayant esté dit qu'il faloit
penser à ce mariage avec une des Infantes de Savoye,
néantmoins, on a donné la commission cy dessus à
M. de Traisnel, sans luy en communiquer*.
Mardy 7. Le Roy part de Saint-Germain et va "«"y-
coucher à Linas, le mécredy à Estampes; le jeudy,
jour de l'Ascension, il y séjourne; le vendredy à
« Cédéon de Vie, seigneur d*firmenoiiville, fild du Garde des Sceaux
Méry de ^c, maréchal dos camps et armées du Roi, cornette de la
compagnie de deux cents chevau-légers de sa garde ordinaire en 1619,
mort en 1636.
* Voy. Mém. d»Arnauld d»Andîîly, p. 388, ce quMl dit de Teffet pro-
duit sur la Reine par une lettre du Roi dont Amauld, & la demande de
Déageant, avait rédigé la minute*
* François Jouvenel des Ursins, marquis de Traynel, chevalier des
Ordres, Ambassadeur à Rome et en Angleterre en 1619, maréchal des
camps et armées du Roi, mort en 1630. (f^ùy* P. Anselme, t vi, p. &07.)
* Voy, Pontchartrain, p. 281.
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420 JOUÛNAL INÉDIT
Mny 1619. Toury, et le samedy à Orléans. La veille de son
parlement de Saint-Germain, il avoit esté assuré de
la paix. Grande faute en ce voyage; car il ne faloit
point partir de Paris, pour ne pas amender sa con-
dition \
Mort de la Maréchale de Fervaques ^. M. de la
Trémoille y gagna vingt dnq mil livres de rente ,
qu'elle tenoit pour douaire, et M. d'Elbeuf, dix sept
mille.
9. Jour de TAscension. La Reyne-mère com-
manda au Père Suffren de faire entendre en son ser-
mon, comme la Paix esloit achevée; et après, fit chan-
* « En Tannée suiTante, 1619, M. le duc d'Épernon ayant enlevé
» la Reine-mère de Blois et rayant menée à Angoulême, chacun sait
» qu'il se passa une longue négociation dont M. de Bérulle, qui ne
» fut Cardinal que longtemps après, faisoit toutes les allées et venues.
» Le Roi, pour presser davantage Teffet de cette négociation, en s'ap'
» procbant plus près d*Angoul6me, partit de Saint-Germain le 7 mai
M et alla à Tours, où il demeura jusqu'à ce qu'elle fût terminée, et
» n'en partit, pour revenir vers Paris, que le 19 septembre. » (Méra.
d'Arnauld d'Andilly, p. 386). Les détails d'Arnauld d'Andilly sur le
voyage du Roi sont d'autant plus exacts qu'il suivait la Cour et qu'il
resta avec elle à Tours, ainsi qu'on l'apprend par ses Mémoires, p. 386
et suiv. Foy. aussi Pontchartrain, p. 282.
> Anne d'Alègre, fille de Christophe d'Alègre, seigneur de Saint-
Just, et d'Antoinette du Prat, veuve en premières noces de Guy Paul
de Coligny, comte de Laval, remariée en 1599 et veuve de Guillaume
de Hautemer, comte de Grancey, seigneur de Fervaques, maréchal de
France en 1595, lieutenant-général au gouvernement de Normandie,
içort en 1613. {Voy, P. Anselme, t. vu, p. 393 et 395.) Il s'agit ici du
douaire dont jouissait la maréchale de Fervaques comme veuve du
comte de Laval, qui n'avait laissé pour héritier que Guy de Coligny,
comte de Laval, XX" du nom, mort en 1605. « Par sa mort sans al-
» liance, dit le P. Anselme, tout le bien de la maison de Laval fut dé-
» volu à Henry, sire de la Tiémoillo, duc de Thouars. » {Foy, P. An-
selme, t. VII. p. 15C.)
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d'arnauld d'andilly. 421
ter le TeDeum en sa présence, en la principale Église. ««y «wt.
Et suivant cela, MM. le Cardinal de la Rochefoucaut
et de Béthune, envoyèrent à M. du Mayne une lettre
de cachet, qu'ils avoyent du Roy, pour faire retirer
ses troupes *. Il estoit à Chasteauneuf , que douze
cens hommes de M. d'Epernon luy avoyent quitté,
s' estant retirez de nuit, et bloquoit Congnac, où
estoyent MM. de Thoulouse, de Biron *, Ambleville\
13. M. de Nevers arrive en Tarmée de Cham-
pagne, dont il avoit le commandement. M. de Pras-
lin envoya M. de Feuquière le trouver, et puis y fut
luy mesme, jusques à quatre lieues du quartier ; et
M. de Nevers fut au devant de luy ; et se rendoyent
de grans honneurs Tun à l'autre.
14. Le Roy reçoit par Picaut les nouvelles de la
paix publiée à Angoulesme ; mais d'autant que la
Reyne-mère avoit dit à Messieurs les Députez du
Roy , que dans quatre ou cinq jours elle leur ren-
droit réponce , si elle acceptoit les offres que le Roy
luy faisoit d'Angers, Chinon, Pont de Ce, et Gou-
vernement d'Anjou, au lieu du Gouvernement de
Normandie; ou bien, si elle se tiendroit à ce qu'elle
avoit ; cette irrésolution mit le Conseil du Roy en
* Voy, Pontchartrain, p. 283.
> Jean de Gontaut, baron de Biron, fils du premier Maréchal de Bi-
ron et frère du second Maréchal de ce nom, décapité en 1602, mestre
de camp du régiment de Picardie en 1596, capitaine de cent hommes
à*armes en 1615, conseiller d*État, maréchal de camp, mort en 1636.
{Voy, P. Anselme, t. vu, p. 305.)
* Jean ou Berlin de Mornay, seigneur d'Ambleville. {Voy. P. An-
selme, t. VI, p. 294.)
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/i22 JOURNAL INEDIT
M^yiMt. peine, craignant qu'il n'y eust quelque chose caché
dessous; et on trouva mauvais que Messieurs les
Députez eussent mandé à M. du Mayne de se re-
tirer, avant que d'avoir eu une résolution finale ; de
sorte que par la dépesche qu'on leur fit, on ne leur
témoigna pas contentement de leur Procédure. Et m'a
esté dit, que Ton manda à M. du Mayne de ne pas
s'éloigner. On tient qu'il avoit dix à douze mil
hommes de pied, et de quinze cens à deux mil che-
vaux, tous fort bons hommes*.
14. En mesme temps, on envoyé M. de Marou-
san à Angoulesme, et je croy que ce fut luy qui porta
la susdite dépesche. Il trouva que la Reyne-mère
n'y entendoit point finesse ; mais que ce qui l'empes-
choit de se résoudre, estoit que d'un costé, ceux qui
estoyent près d'elle, comme M. de Meux% Cbante-
* Suivant Richelieu, p. 545, les conditions du traité d'Ângoulême
qui rétablit la paix entre le Roi et la Reine-mère furent : Foubli de
tout le passé ; la sûreté que le Roi donnait pour les personnes et pour
les charges de ceux qui avaient servi la Reine; 50,000 écus de récom-
pense accordés au duc d'Épemon pour Boulogne ; réchange du Gou-
vernement de Normandie que la Reine avait en celui d* Anjou et des
villes et châteaux d'Angers, du Pont-de-Cé et de Chinon ; 500,000 écus
accordés au Roi pour les frais de la guerre. Ce traité, comme tous les
précédents, fut bientôt violé, et Tanarchie -désola de nouveau le
royaume. {Foy, aussi Pontchartrain, p. 284.) Le Merc, />•., p. 200,
rapporte textuellement dix articles proposés au nom du Roi par le Car-
dinal de la Rochefoucauld et M. de Béthune et acceptés par la Reine-
mère le dernier jour d'avril . Ces articles ne renferment pas les princi-
pales conditions énumérées ci-dessus, qui firent l'objet d'un traité
particulier.
* Jean de Rouville, seigneur de Meux, capitaine de la cavalerie lé-
gère en Allemagne, des douze compagnies d'ordonnances. {Voy, P. An-
selme, t. vm, p. 713.)
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d'ARNAULD D^ANDILLY. 428
loube et autres, la vouloyent porter à accepter les uay 16».
places que le Roy luy offroit ; et de Tautre, son incli-
nation, et le conseil de plusieurs de ceux qui s'es-
toyent engagez à la servir , la portoyent à ne rien
prendre.
16. Le Roy va à Rlois, et le lendemain , à Am-
boise.
17. Ceux qui estoyent dans Pont à Moulins,
pour M. de la Yallette, ayant seû que le canon que
M. de Nevers attendoit estoit arrivé , ils sortirent
tous la nuit, et ne laissèrent que dix mousquetaires,
qui ouvrirent les portes à M. de Nevers, sans
aucune résistance» lorsqu'il se présenta le lendemain
matin.
Depuis la Pentecoste qui fut le 19, jusques au 23,
M. de Nevers prit, sans résistance, trois autres chas-
teaux, savoir, la Horgne, Vry, et Amery ; pour ache-
ver le tour entier de Metz, il devoit prendre le len-
demain la Douchant
23. M. de Rérule arrive à Amboîse, ne mettant
point en doute la conclusion de la paix, qu'il tenoit
entièrement achevée, dès le jour de T Ascension. Et
de fait , il ne vint point en diligence, mais en car-
rosse avec M. le Cardinal de Sourdis, qu'il rencontra
par occasion.
M. de Marousan arrive le mesme jour , qui rap-
porta aussi toutes bonnes nouvelles, et que ce que la
Reyne désiroit, estoit, que si le Roy avoit agréable
qu'elle prist les places qu'il lui offroit, il lui pleust le
luy témoigner par un mot de lettre.
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Ù24 JOURNAL INÉDIT
May 1619. M. de Marousan retourna à Angoulesme trois ou
quatre jours après.
28. On licencie l'armée, qui estoit à la suite du
Roy, en la sorte qui s'en suit. On casse entièrement
les Régimens de la Rinville et du Ménillet, et quant
à ceux de Picardie, Piémont, Navarre et Beaumont,
les dix compagnies qu'ils avoyent de cent hommes
chacune, sont réduites à cinquante hommes, qui est
une augmentation d'entretenement qu'ils n' avoyent
jamais eu auparavant en temps de paix ; car outre
ces dix compagnies des vieux Régimens entretenus
maintenant à la Campagne, les vingt vieilles Compa-
gnies demeurent toujours dans les garnisons.
Des seize cens Suisses de nouvelle recrue, en sont
conservez six cens ; le reste renvoyé. .
Quant aux Régimens de Champagne, Chapes *,
Bourg, Vaubecour, et Rambures% j'estime qu'ils
seront traittez comme les susdits. — Ce qui s'est fait
aussi.
Quant à la gendarmerie et cavalerie légère
* Ce régiment portait le nom de Jacques d'Aumont, baron de
Chappes, gentilhomme ordinaire de la Chambre, colonel dudit régi-
ment aa siège de Rouen en 1591, sous le Maréchal d'Aumont son père,
Prévôt de Paris en 159&, mort en jôl/ii. Le baron de Chappes eut entre
autres enfants le Maréchal duc d*Aumont. ( Voy, P. Anselme, t. iv,
p. 876.)
2 Charles, sire de Rambures, capitaine de cinquante hommes
d'armes, gouverneur de Doullens et du Crotoy, dit le brave Rambures^
maréchal de camp et mestre de camp d'un régiment entretenu par le
Roi, chevalier des ordres en 1G19, mort en 1633, o après avoir été
» contraint, dit le P. Anselme, de se faire couper le bras droit pour
» deux vieilles blessures reçues Tune à la bataille d'Ivry et l'autre au
)» siège d'Amiens. » {Voy. P. Anselme, t. vu, p. 68.)
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d'aanauld d'andilly. 425
Ce mesme jour, le Roy va à Tours*. M«y isit.
M. le comte de Brenne vient trouver le Roy, avec
lettres de la Reyne-mère ; n'ayant point encore veû
Sa Majesté, et estant dans l'antichambre, teste nûe,
comme tous les autres, M. de Luynes passe, le cha-
peau à la main, et jettant les yeux sur M. le comte
de Brenne, M. le Comte de Brenne se tint ferme , et
se recula, plustost que de s'avancer ; et M. d'Elbeuf
passant après, il luy alla faire une très grande révé-
rence, et ensuite à quelques autres. Le Roy, qui en
fut fâché, ne receut pas trop bien M. le comte de
Brenne, lorsqu'il luy rendit sa lettre^ laquelle se
trouvant estre en plus fâcheux termes, qu'aucune des
précédentes, et M. le comte de Brenne s' estant comme
laissé entendre , que ce qu'il n'avoit point salué de
Luynes, n'avoit pas esté sans que la Reyne le trou-
vast bon, on commençoit à entrer en défiance qu'il y
eust quelque chose de caché là dessous. Mais enfin,
on découvrit que tout cela procédoit de l'artifice de
Ruscellay et de sa cabale, comme le M de Mou. . . ^
qui estoyent très marrys de la paix , et cherchoyent
un moyen de rompre. Ce qui fut encore confirmé,
parce que le comte de Brenne, estant pressé, et en-
quisde diverses personnes, s'il avoit conunandement
de la Reyne Mère, de faire ce qu'il avoit fait, il re-
connut que non ; et M. de Marousan écrivit en mesme
temps, que la Reyne Mère estoit tellement résolue à
* Voy, Pontchartrain, p. 285.
2 Le marquis de Mouny ou Mosny, premier écuyer de la Reine-mèro,
grand ami de Russelay.
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llS6 JOUENAL INÉDIT
«•y i«f . faire tout ce qu'il plairoit au Roy, qu'elle avoit ap-
prouvé, sans aucune difiQculté, toutes les propositions
que M. le Cardinal de la Rochefoucaut luy avoit fait
de sa part.
30. Le Roy renvoyé M. le comte de Brenne,
sans lettre, (on en avoit fait une de quatre lignes,
mais qu'il ne voulut pas que l'on luy baillast) , avec
quelques paroles de compliment à la Reyne, et charge
de luy dire, qu'il luy feroît réponce par un Gentil-
homme exprès.
Juin. Samedy 1. M. de la Chesnaye part, pour aller à
Angoulesme.
2. M. de Bérule part, pour aller en poste à An-
goulesme, et porte la réponce du Roy à la lettre qu'il
avoit receue de la Reyne-mère.
ft. Le Roy va au Lude et en revient le...
La Reyne va à Nostre Dame des Ardillières, près
Saumur, et le lendemain au Verger, d'où elle revient
à Tours le...
6. M. de Vendosme vient de Bretagne, trouver
le Roy à Tours, où il attendit Sa Majesté.
M. de Marousan revient d' Angoulesme trouver le
Roy au Lude. — Il rapporte que la Reyne-mère avoit
accordé généralement tout ce que le Roy avoit voulu,
qu'elle désavoûoit entièrement l'action de M. de
Brenne, se sentoit obligée au Roy , de ce qu'en sa
considération, il ne Tavoitpas plus mal-traitté ; re-
connoissoit n'avoir point compris le sens de la lettre
dernière qu'elle avoit écrite au Roy par luy; que
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d'arnauld d'andilly. 427
c*estoit Ruccelay qui luy en avoit baillé la minutte, Juin iei9.
qu'il y avoit plus de trois semaines qu'il la luy avoit
baillée pour récrire ; mais que M. de Luçon ne l'ayant
point trouvée bien, elle ne l'avoit pas voulu signer;
que depuis M. Ruccellay luy avoit dit, qu'elle avoit
esté changée, et la luy avoit fait écrire ; qu'elle estoit
fort contente de la réponce que le Roy luy avoit faite
à ladite lettre, par M. de Bérule, et que sur cela, elle
en récriroit une autre telle à Sa Majesté, qu'elle espé-
roit qu'il en demeureroit content.
13. M. le Prince de Piémont part de Tours en
poste, va coucher à Poitiers, et le lendemain, disner
à Angoulesme.
M. de Bonneûil * l'accompagne, et M. de la Ro-
chefoucaut, pour faire l'honneur en Poitou. Il fut si
bien reçeu par la Reyne-raère, qu'au lieu qu'il croioit
revenir deux jours après, il ne revint que le lundy 24.
M. le Prince Thomas l'accompagna aussi, 11 eut une
chaisne de dix mil écus, et M. le Prince Major, un
diamant de seize mil écus *.
Environ 14. L'Ambassadeur d'Angleterre arrive
à Tours, à la Cour. M. le Marquis de Traisnel estoit
revenu quelques jours auparavant à Paris, et arriva à
la Cour, environ le 19.
15. M. le Cardinal de la Rochefoucaut revient
d'Agoulesme.
^ René de Thon, seigneur de Bonnenil et de Géli, introducteur des
Ambassadeurs. l\ était petit-fils du Premier Président et neveu de l'his-
torien de Thou.
2 roff, Fontenay-Mareuil, p. khS\ Pontchartrain, p. 386.
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428 JOURNAL INKDir
iniii icjf. 16. Le Roy va à Amboise, et en revient le me-
credy 19, pour ramour de M. du Mayne, car autre-
ment il ne fut revenu que le lendemain.
19. M. du Mayne arrive à Tours, accompagné
de deux cens Gentilshommes, dont plus de trente
ou quarante estoyent des principaux Seigneurs de
Guyenne, et entr' autres, MM. de Vilars, de Mont-
pesat * , Monclairac - , Comte de Vaillac , Boisse ' ,
Favas, aisné de Chalet *, Barrant % Théobon •, etc.
* MM. de Villars et de Montpezat, ain&i qu'il a été dit plus haut,
p. 262, note 1, étaient frères utérins de M. du Mayne.
^ Branddis de Gironde, gentilhomme de la Chambre du Roi et pre-
mier marquis de Montclera e^ 1616, mestre de camp d'un régiment
d'infanterie sous le duc de Mayenne en 1.619. {Voy, P. Anselme, t. viii,
p. 594 quater.)
< M. de Boisse-Pardaillan, colonel de l'infanterie des' Réformés dans
la Rébellion de 1615, allié du gouverneur de Monheur et de Sainte-Foix,
tué pendant la révolte de cette dernière place en 1621^ au moment où
il allait se faire catholique et recevoir le b&ton de Maréchal de France et
la lieutenance du Roi de Guyenne pour prix de son abjuration. Son fils
atné, le marquis de Mîrambeau et son gendre le marquis de Théobon
étaient les chefs de la Sédition. (Voy. Pontchartrain, p. 101 ; Fontenay-
Mareuil, p. 523 ; Merc, fr.^ t. vu, p. 880.) Je n'ai rien trouvé sur ce per-
sonnage ni dans le P. Anselme, ni dans Moréri, ni dans la Biog. Micliaud.
* Si ce seigneur de Favas est le frère aîné de l'infortuné Chalais,
c'est Charles îî de Talleyrand, né vers 1596, qui succéda au titre de
prince de Chalais, fut chargé d'une mission diplomatique en Turquie
et en Russie, Ait envoyé par le Czar pendant trois ans en Sibérie, et
revint en France en 1635. D'André de Talleyrand son frère, sortirent
les comtes de Grignols. (Foy, Biog. Michaud, la Notice de M. Weiss
sur Chalais.) J'ignore si ce Favas est le même que le Député général
des Réformés souvent cité dans ce journal et dans les Mémoires du
temps.
5 Antoine Joubert ou Jaubert, seigneur de Barrault, ou Aymery
Jaubert, seigneur de Barrault, beau-père du comte de Vaillac par la
troisième femme de celui-ci, Marie-Madeleine Jaubert. {Foy. P. An-
selme, t. VIII, p. 165.)
« Rochefort de Saint-Angcl, marquis de Théobon, brave gentilhomme
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d'arnadld d'andilly. 429
Le Roy le reçeut fort bien, et dans le parc du Pies- '»'" *«••
sis. La Reyne ne le regarda presque pas *.
Le mesme jour M. de Marousan renvoyé à An-
goulesme, avec démissions à la Reyne-mère de Char-
ges et Places que l'on luy donne. On avoit voulu
douter de luy bailler les canons et munitions qui sont
dans Angers ; mais enfin cela luy fut accordé ; il re-
vient le 30 ^
On baille à M. de Boisdauphin, pour son Gouverne-
ment, 200 mil livres et cpntinûation d'appointements
de 6000 livres.
A M. du Bellay ', Lieutenant audit Gouvernement
d'Anjou, 90 mil livres et continjuation de son appoin-
tement.
A M. Delbène, pour Chinon, 30 mil écus.
A M. le marquis de la Varenne *, pour Angers,
80 mile eus.
huguenot, dit Tallemant (Hist. du maréchal de la Force, 1. 1, p. 250). Ce
personnage est déjà cité sôus le nom de Saint-Angel, à propos du duel
entre le comte de Grammout et le marquis de la Force dont il fut le
second. {Voy, p. 29.) Il fut accusé d'avoir pris part avec le marquis
de Mirambeau à Tassassinat de M. de Boisse, leur père et beau-père.
(Foy. Merc, fr.^ t. vu, p. 880, et Fontenay-Mareuil, p. 523.)
* Vey, Pontchartrain, p. 286.
* Foy. Merc. fr.^ p. 205, la Déclaration du Roi du 2 mai, enregistrée
au Parlement le 20 juin, ordonnant le licenciement des troupes et le
rétablissement du statu quo ante betlum,
» Martin, seigneur du Bellay, prince d' Yvetot, marquis de Thouarcé,
conseiller d'État, Lieutenant-général en Normandie, puis en Anjou, ca-
pitaine de cinquante hommes d'armes, Maréchal de camp, mort en
1637.
* Guillaume Fouquet, marquis de la Varenne, gouverneur d'Angers
et de la Flèche.
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/^âO JOURNAL INEDIT
» ««•- AM.deBonnevaut,pour lePontde Ce, 20 mil écus*.
24. M. le Prince de Piémont de retour d' Angou-
lesme {videsuprà). Il fut si bien receu par la Reyne-
mère, qu'elle l'appella toujours, mon fils, et le fit
mettre dans son carrosse avec elle, (chose qu'elle
n'avoit jamais faite à personne). Mais, ce qui est
beaucoup plus que tout cela , elle luy ouvrit entiè-
rement son cœur avant qu'il s'en retournast. Le len-
demain matin, il alla en poste à Amboise, au-devant
de Madame sa femme, qui arriva le soir mesme à la
Cour \
27. Le Roy va à Azé ; et revient le samedy 29.
80. M. le Marquis de Mosny * arrive à la Cour,
mal-content de la Reyne-mère , laquelle l'ayant en-
voyé appeller en sa chambre, et fait sortir tout le
monde, luy dit, queiuy voulant témoigner le ressen-
timent qu'elle avoit de ses services, elle luy bailloit à
choisir de tout ce qu'elle avoit en sa disposition,
excepté d'Angers, qu'elle avoit esté obligée, pour
plusieurs considérations, de donner à M. de Riche-
lieu. Sur cela, il commença à dire, que M. de Riche-
lieu n'avoit rien, ni par naissance, ni par courage, ni
par fidélité, qui le deust faire préférer à luy ; qu'il
* Voy, Fontenay-MareuH, p. 444, qui n*est pas d*accord avec d*An-
dîlly sur les chiffres. Angers fut donné à M. de Richelieu, le Pont-de-
Cé au vicomte de Bétancourt et Chinon à M. de Chanteloube. La Reine-
mère eut le gouvernement d'Anjou à la place de celui de Normandie.
{Voy, Mém. de Mole, p. 223 ; Merc, fr,y p. 202.)
* Voy. Fontenay-Mareuil, p. 448; Sferc, /*r., p. 298.
^ Louis de la Marck, marquis de Mauny, frère du comte de Brenne,
chevalier des ordres, capitaine des Gardes du Corps, premier écuyer
de la Reine Anne d* Autriche, gouverneur de Gaen, mort en 1626.
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d'arnadld d'andilly. Û31
ne vouloît rien d'elle, ni demeurer davantage à son j»»»» im.
service ; et qu'il s'alloit jetter entre les bras de ses
ennemis. Elle luy répondit , je pense que vous se-
riez bien empesché à les trouver, car, par la grâce
de Dieu, je n'en croy pas avoir maintenant un
seul, etc. On dit que le marquis de Mosny luy dit en
sortant de la chambre, qu'il serviroit aussi bien M. de
Luynes, comme il l'avoit autrefois voulu servir.
Après cela, M. le Marquis de Mosny écrivit à M. de
Luynes, qui luy fit réponce, que la Reyne ayant
agréable qu'il revinst auprès du Roy, il s'assuroit
qu'il y seroit fort bien reçeu *.
M. de Marousan de retour d'Angoulesme, avec
démission de la Reyne-mère du Gouvernement de
Normandie, en laquelle on remarque une faute, en ce
qu'elle n'estoit passée par devant Nottaire ; mais seu-
lement par un brevet, signé Lecomte, lequel Lecomte
n'est pas mesme secrétaire de la Reyne mère \
Vendredy 5. M. de Bassompierre, ayant appris Juiuet-i
la mort du Colonel Galati % arrivée le !•' ou le 2 juil-
let, revient à Paris, où il estoit allé le samedy 29 juin.
* roy. RicheHeii, p. 553.
s Voy. Merc, fr,, p. 204, une lettre du duc d*Épernon au Roi à 1*0C'
casion de la paix, dans laquelle il cherche à justifier sa conduite, se
réjouît de la réconciliation du Roi et de la Reine-mère et exprime
Tespoîr de passer en paix au service de Sa Majesté le peu de temps
qui lui reste à vivre.
' Gaspard Gallati, Suisse, né en 1535, entré au service de France
en 1562, capitaine en 1570, commandant de quatre compagnies en
1579, commanda en Provence et en Dauphiné de 1580 à 1587, colonel
d'un régiment en 1587, contribua pour une grande part au gain de la
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432 JOURNAL INÉDIT
Juillet iMt. îje Colonel Galati avoit quatre charges : 1** celle de
Colonel du Régiment des Gardes Suisses du Roy;
2" celle de Capitaine de la Compagnie Colonelle;
3" celle de Lieutenant des Cent Suisses de la Garde :
à" et celle de Capitaine d'une Compagnie particulière,
dont son petit fils estoit Lieutenant. Messieurs les Mi-
nistres disoyent qu'il faloit bailler le Régiment au
Colonel Feugly, supprimer la Compagnie Colonelle...
M. de Bassompierre estant revenu, ne vit le Roy
qu'à Amboise, le samedy au soir, obtint de Sa Ma-
jesté tout ce qu'il luy demanda, et luy représenta
nécessaire pour le bien de son service, qui estoit, la
Compagnie Colonelle pour luy ; le Régiment pour le
capitaine Hessé;. (qui, entr' autres signalez services,
et outre sa capacité, a fait trois actions fort remar-
quables, la première à Arques, où il porta mort par
terre d'un coup de pique...; la deuxième aux Barri-
cades à Paris, où ayant esté mis par le Roy en la
place de Grève, et tous les autres Suisses ayant esté
désarmez, il fitsa capitulation, et de ne le point estre,
et qu'on luy ouvriroit les Barricades, pour aller trou-
ver le Roy au Louvre ; ce qui fut fait ; et il l'accom-
pagna jusqu'à Rambouillet ; la troisième pour s' estre
battu en duel, en Suisse, pour l'honneur de la France,
bataille d*Ârqucs en 158d, dans laqaélle il sauva, dit-on, le Roi ; lieu-
tenant des Gent-suisses en 1603, colonel du régiment des Gardes suisses
en 1616, mort en 1619. {f^oy, Biog. Michaud, notice signée Ustéri, et
Mém. du duc d'Angoulôme, coll. Petitot, !'• série, t. xliv, p. 573.)
C'est à tort, comme on le voit par le journal d*Arnauld d'Andilly, que
la notice de la Biog. Michaud prolonge la vie de ce brave soldat jus-
qu'en 1629.
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d'aenauld d'andilly. ftSS
contre un autre Suisse, qu'il tua, en présence de deux J«»«etiiit.
Cantons). Joint que le Colonel Feugly ne réside point
d'ordinaire en France *.
La lieutenance de la compagnie des Cent Suisses
fut donnée au Colonel Feugly. — La Compagnie par-
ticulière du colonel Galatj fut donnée à son petit-
fils, en considération des services du bonhomme.
Le Roy estant revenu à Tours, les Ministres firent
encore difficulté à tout ce que dessus, principalement
Monsieur le Chancelier et M. de Pisieux, qui dirent
qu'il en faloit demander avis aux Cantons. Mais no-
nobstant cela, le Roy commanda à M. de Pisieux de
faire les Expéditions conformes à ce qu'il a voit ac-
cordé à M. de Bassompierre ; lequel, environ trois
semaines auparavant, avoit rendu une extrême preuve
de probité, ayant ménagé douze mil écus par an au
Roy, sur les douze montres des dix Compagnies
Suisses qui sont en France, en faisant réformer à
treize cent soixante et tant d'écus pour Compagnie
la Capitulation qui avoit esté faite avec eux, depuis
cette dernière reveûe à quatorze cent soixante et
tant d'écus ; laquelle augmentation les Suisses luy
vouloyent donner.
Le Roy va à Amboise, et revient le mardy 9.
6. M. de Nevers arrive à Amboise, et fut fort
bien receu du Roy \
* Je n*ai rien trouvé tant sur le colonel Feugly que sur le brave ca-
pitaine Hessé, ni dans le P. Anselme, ni dans Moréri, ni dans laBiog.
Michaud, ni dans Texcellente et précieuse table de la collection Petitot.
> yoy. Pontchartrain, p. 287.
28
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Juillet Itlf.
&3/i JOURNAL INiSdIT
M. du Mayne va en poste à Paris,
7. M. de Gadenet y va aussi, mais en Carrosse.
(On disoit que le sujet de son voyage estoit, pour
observer MM. du Mayne. , . . Vemet. . . . argent. . . Bois
de Vincennes, et pour traitter du Gouvernement avec
M. de Longueville.) — Voyage précédent de M. le
Colonel (d'Omano), eust traitté pour le Pont de
TArche. Le Mayne envoyé avant que Monsieur le
Colonel revinst. M. de Gadenet promit Calais à M. de
Longueville, (dont M. de Luynes avoit dit auparavant
à Monsieur le Colonel qu'il trouveroit bon qu'il
traittast) , ou 80 mil écus pour l'avoir, ou quel-
qu' autre place. M. de Longueville disant que Mon-
sieur le Colonel estoit cause que M. de Vilars-Oudan '
s'en estoit en allé de Paris, dit, qu'il vouloit que les
Corses sortissent de Quillebeuf, et que le Roy y misl
des François. Madame la Comtesse écrit à M. de
Luynes qu'elle s' estoit fait fort que Monsieur le Colo-
nel estoit tant de ses amis, qu'il le voudroit bien.
8. M. le Comte Henry vient trouver le Roy à
Amboise ^
' M. de ViUars-Houdan , lieutenant de la compagnie de chevau-
légers du Roi en 1610, gouremeur de Dieppe en 1611.
' « Et le 8, M. le Prince Henri de Nassau, qui étoit envoyé par M. le
» Prince d'Orange, son frère, à Orange, pour y établir pour gouver-
II neur M. le Prince de Portugal leur neveu, vint jMisser à Tours et y
» arriva près du Roi, où il assura Sa Majesté, et depuis ceux de son
» Conseil, que l'intention de son frère n'étoit point que rien fût changé
» ni innové à Orange, môme au fait de la religton. » (Pontchartrain,
p. 287.) Henri Frédéric de Nassau, dont il s'agit ici, était fils de Guil-
launte de Nassau, prince d'Orange, fondateur de la république dei
Provinces-Unies, et de Louise de Coligny, fille de l'amira) Gaspard
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d'ahnauld d'ajcdilly. 435
M. de Richelieu tué à Angoulesme par M- le mar- jumctiew.
quis de Thémines (ce fut le jeudy II). M. de Thé-
mines, un jour ou deux auparavant, sortant d'avec
la Reyne mal satisfait, dit, F..tre des Gouverneurs,
ils ruinent cette pauvre Princesse. M. de Chante-
loube luy vint demander s'il entendoit cela pour luy ?
Il luy répondit : Vous, gouverneur, hé î qui se se-
roit jamais avisé de vous prendre pour cela? etc.
Chanteloube dit, Je suis donc satisfait M. de
Thémines répartit, Je ne satisfais que J'épée à la
main , et ensuite, ils allèrent pour se battre en un
faubourg. M. du Carbon sortant de chez M. de Ri-
chelieu, pour luy dire à Dieu, et voyant passer M. de
Thémines si viste, le suivit, et l'ayant trouvé prest à
se battre, se mit aussi de la partie avec un amy de
Chanteloube ; et sur cela furent accordez et séparez.
Le lendemain matin, M. de Richelieu, se trouvant
offencé des paroles du Marquis, l'envoyé appeler
par La Roche. M. du Carbon l'ayant seû par Na-
daillac, y va, et tous deux se mettent de la partie,
avec la Roche, et Saint-Julien, neveu de M. de
Chambret. M. de Richelieu les attendoît aux Capu-
cins ; ils y vont. Tous sont séparez et accordez par
la Reyne, le samedy 6. Le dimanche se passe sans
se rien dire. Le lundy, M. de Richelieu estant en
de Colîgny, sa quatrième femme. ïl était frère du célèbre prince 'Mau-
rice, alors Prince d'Orange, lui succéda en 1625, soutint dignement
le grand nom de son père et de son frère, et mourut en 1647. Le
Prince de Portugal était son neveu comme fils de sa sœur Emilie et
d'Emmanuel l*', prince de Portugal, vice-roi des Indes, (f^oy» Moreri,
t. YIII, p. 87.)
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436 JOURNAL INÉDIT
Juillet liit. housse, rencontra M. de Thémines, qui y estoit aussi ,
en la rue qui passe devant le citadelle ; et piqué des
discours que l'on luy avoit dit que M. de Thémines
avoit tenus depuis l'appel, luy cria, Marquis, pied
à terre. 11 faut mourir. Les Gardes du chasteau
venoyent pour les séparer ; mais ils se pressèrent de
si près, que M. de Richelieu fut tué d'un coup d'é-
pée dans le cœur, et M. de Thémines receut un coup
d'épée à la main, et un autre qui luy coupa sa che-
mise. M. de Richelieu dit avant qu'expirer. Mon
Dieu, pardonnez-moy ; et M. de Bérule se trouva
là, qui luy donna l'iibsolution. M. le marquis de Thé-
mines se sauva. La Reyne-mère donna le Gouverne-
ment d'Angers au Commandeur de la Porte', oncle
de M. de Luçon; et envoya M. de Villiers-Saint-
Genest au Roy, avec une lettre de six lignes, pour
prier Sa Majesté, que s'il y avoit lieu de confisquer
le bien de M. de Richelieu, il luy plust de luy en
donner la confiscation, d'autant que par Règlement
donné depuis peu au Conseil, il est défendu d'accor-
der les confiscations, jusqu'à ce qu'elles soyent décla-
rées acquises. Le Roy écrivit seulement à la Reyne
* Amador de la Porte, chevalier, grand'croix de Tordre de Saint-
Jean de Jérusalem, dit de Malte, prieur de la Madeleine aux portes de
Parthenay, grand-prieur de France, bailly de la Morée, commandeur
de Bracque, Ambassadeur de son ordre en France, gouverneur d'An-
gers en 1619, du Havre en 1626, lieutenant de Roi au pays d*Aunis et
Iles de Ré et d'Oléron en 1633, mort en 1644. (Voy. P. Anselme,
t. IV, p. 624). Il était oncle de Richelieu, parce que sa sœur, Suzanne
de la Porte, avait épousé François du Plessis, seigneur de Richelieu,
Conseiller d*État, Capitaine des Gardes du Corps et grand Prévôt do
France, p^redu Cardinal, mort en 1590. (^oy, Richelieu, p. 557.)
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d'arnadld d'andilly. Û37
sa mère, pour l'assurer que s'il y avoit lieu à confis- Juiiut leii .
cation, il la luy donneroit.
On a dit depuis que M. le marquis de Thémines
receut quatre coups d'épée, et que celuy qui tua
M. de Richelieu, n'entroit que trois doigts dans le
corps.
On a seû aussi qu'il estoit mort, quand M. de Bé-
rule arriva '.
10. M. de Rohan arrive à la Cour.
11. M. de Ruccellay arrive à la Cour. Il estoit
mal content de la Reine-mère, à cause de la faveur
de M. de Luçon. Il luy avoit demandé la charge de
son chevalier d'honneur, dont elle l' avoit refusé. Elle
luy avoit offert cent mil livres, mais il ne les accepta,
ni refusa. Il luy demanda congé de venir à Paris,
pour solliciter ses procès, puisqu'il n'avoit plus que
faire là pour son service. Elle le luy donna fort volon-
tiers. Estant de retour à la Cour, il s'y comporta fort
bien^
16. Le Roy va à Amboise, et en revient le ven-
dredy 19.
1
roy, Fontenay-Mareuîl, p. 444; Richelieu, p. 555. Richelieu, après
ayoip raconté les circonstances du duel dans lequel périt son frère,
termine par ces mots : « Je ne saurois représenter Tétat auquel me
» mit cet accident et Textrôme affliction que j'en reçus, qui fut telle
» qu'elle surpassa la portée de ma plume, et que des lors j'eusse quitté
» la partie, si je n'eusse autant considéré les intérêts de la Reine
n que les miens m'étoient indifférents. »
2 Richelieu, dans ses Mémoires, p. 547 et suîv., fait un véritable ré-
quisitoire contre Russelay, dans lequel il signale la mauvaise influence
de ce personnage auprès de la Reine-mère et donne la plus triste idée
de son caractère.
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&38 JOURNAL INÉDIT
•oiiie! 161t. 17. La Reyne-mère ne se disposant point d'aller
à Angers, à cause des défiances qu'on luy a voit
mises en l'esprit, M, le Président Jeannin part, pour
aller à Angoulesme, afin d'essayer à oster ces om-
brages, et faire que M. de Montbason rapportast au
Roy tout contentement. Il revint le 24 aoust. — On
croit que M, d'Epernon luy avoit mis ces craintes
en l'esprit, et l'avoit portée à dire ce qu'elle avoit
mandé (qui est, qu'elle ne pouvoit venir à Angers,
jusqu'à ce que le Roy fust retourné à Paris) ; à cause
de l'appréhension qu'il avoit, que la Reyne l'ayant
quitté, le Roy, qui estoit si proche, tournast teste,
droit à luy. La Reyne-mère ayant mandé ce que
dessus, M, le Prince de Piémont luy dépescha , et
luy écrivit, se plaignant que contre la parole que-
ls. M. de Montbason part d'Amboise, et arrive
à Angoulesme le dimanche 21, (Le Président Jean-
nin arriva le mardy 23,) Ilportoit, entr'autres cho-
ses, une lettre, par laquelle le Roy prioit la Reyne-
mère, de venir à la Cour \
23. MM. le commandeur de la Porte, de Ghante-
loube, et de Lielamour arrivent, pour prester le ser-
ment d'Angers, de Chinon, et du Pont de Ce.
Le Roy ne veut point ouïr parler de remettre en
leurs charges les sieurs du Rourdet et de Frumi-
gères , Capitaines au Régiment des Gardes , ni la
Hillière, sergent-major. Et on allègue contre M. d'E-
* Voy, Pontchartrain, p.* 288. On trouve dans le Merc, fr„ p. 299,
la lettre du Roi portée à la Reine-mère par le duc de Montbazon ; elle
est datée d*Amboise le 17 juillet.
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d'arnadld d'andilly. 439
pernon, ce qu'il allègue contre M, Beraut, Capitaine, ^""fe* *«*»^
(comme je croy) , au Régiment de Navarre *.
Environ ce jour. M. de Vendosme part pour
aller à Concarneau. Lezomis, Gouverneur, y avoit
cy- devant traitté avec le Roy, pour seize cens écuâ^
pour M. de Luynes. Il désavoue le traitté. On baille
à M. de Vendosme les vieux régimens composez
chacun de dix compagnies de cinquante hommes
chacune {vide suprà) ; et compagnies tirées de
celles du régiment des Gardes, avec la compagnie
de ses Gardes. La place est une de meilleures de
de Bretagne ^.
29. M. de Luynes trouve bon que M. Déageant
se retire en Dauphiné, et le luy fait dire par M. de
Brantes '. M. de Montbason et M. de Bérule arri-
vent d'Angoulesme.
30. Le Roy va à Tilly, et revient le 2 aoust
^ Ces capitaines ayaient porté les armes contre le service da Roi
pour la Reine-mère.
* Voy. Merc. fr,^ p. 291.
> On trouve dans les Mémoires d'Amauld d'Andilly des détails sur
la disgrâce de Déageant. M. de Luynes chargea Arnauld d'Andilly
d'annoncer cette disgrâce à Déageant; ce qu'il fit après avoir obtenu
pour cet homme d'État la conservation de sa pension de 15,000 livres,
a II parut bien que M. Déageant n'avoit guère songé durant sa faveur
» à faire des amis ; car je ne croîs pas que jamais homme se soit
» vu plus abandonné dans sa disgrâce, et je ne me souviens point
» qu'excepté moi il se soit vu assisté de qui que ce fût ; son abatte-
» ment fut extrême lorsque je lui portai cette nouvelle ; et il se retira
»* ensuite en Dauphiné, d'où il étoit originaire, pour y exercer la charge
» de premier président en la chambre des comptes de Grenoble, dont
» il avoit été pourvu durant sa faveur et qu'il a gardée Jusqu'à sa mort. »
(Mém. d'Amauld d'Andilly, p. 389).
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4/^0 JOURNAL INÉDIT
Jeudy 1. M. de Cadenet revient de Paris, où Ton
luy avoit adjugé à quatre-vingt mil livres, la Comté de
Maillé, dont il prend le nom. Broûillerie avec le Roy,
sur le 'logement des Suisses, sur les Paroisses de
Maillé.
à. M. de Longueville arrive à la Cour.
6. M. de Longuevilte et M. de Luynes font le
serment de Normandie et Picardie. Les conditions
des échanges sont, que M. de Longueville baile
Picardie et Ham, et on luy baille Normandie et
250 mil livres pour récompenser Dieppe, qu'il a
acheté de M. de Vilars-Houdan. Plus, il se fait pro-
mettre que Ton sortira les Corses de Quitlebeuf '.
M. de Bérule part de Tours pour retourner à An-
goulesme.
M. de Montbason fait le serment de Gouverneur
de risle de France, et M. de Cadenet de Lieutenant
Général en Normandie. Les conditions sont, que
M. de Montbason baille sa lieutenance de Picardie
et Amiens; et M. de Luynes luy baille Tlsle-de-
France, Soissons, Noyon, Chauny et Coucy. Brevet
de réserve du Gouvernement de Paris. Et de plus on
dit que par articles secrets, il luy remet 200 mil
livres qu'il luy devoit encore de son mariage, et
outre cela, luy fait encore bailler 50 mil livres pour
les armes d'Amiens*.
< Voy. Pontchartrain, p. 288.
2 Foy, Fontenay-Mareuil, p. 451 \ Pontchartrain, p. 288 ; Briennc,
p. 330 ; Rohan, p. 159; Bierc. fr,^ p. 340.
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d'arnauld d'andilly. ûftl
8. Le Roy va à Amboise, et revient le lundy 12. aousi wi».
9. Madame estant preste à partir pour aller à
Angoulesme dire à Dieu à la Reyne-mère, est contre-
mandée, à cause qu'on s'assuroit que la Reyne
vîendroit.
M. de Montbason part d' Amboise pour aller à
Angoulesme où il arrive le lendemain 10, porte à la
Reyne-mère le contentement qu'elle désiroit, pour
les Capitaines des Gardes, qui depuis ont esté remis
dans leurs charges. On dit que le Roy les voyant
venir, au moins Dubourdet et Loustelnau, dit qu'il
les haïssoit plus que la mort; et que si ce n'eust esté
pour l'amour de la R-eyne sa mère, il ne leur eust
jamais pardonné*.
13. Le Capitaine des Gardes de M. de Ven-
dosme, nommé.... *, apporte nouvelle au Roy de la
prise de Concarneau. Les vieux Régiments n'y
estoyent pas encore arrivez. M. de Vendosme estoit
devant, avec sa compagnie des Gardes et... compa-
gnie tirée de celle du Régiment des Gardes, com-
mandée par...'. On tira de part et d'autre; mais
Lezomis ayant peur, s'enfuit dans un Esquif; un de
ses frères estant demeuré, il s'émeut dispute entre
luy et un Lieutenant nonmié.../ à qui commande-
* Voy, Pontchartraîn, p. 288 et 289.
3 Ce capitaine des gardes de M. de Vendôme était le sieur de la
Courbe Hiré.
3 Les troupes tirées des régiments des gardes étaient commandées
par la Besne, capitaine des gardes du Roi.
^ Le lieutenant du sieur de Lezonnet dans Concarneau était, sui-
vant le récit du Mercure^ le sieur Querchesne.
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kb!2 JOURNAL INÉDIT
roit Le Lieutenant se trouva le plus fort et chassa le
frère qui s'en alla aussi dans un esquif; un jour ou
deux après, la garnison demanda à parlementer ; et
ce Lieutenant ayant seû qu'il n'y avoit point de par-
don pour luy à cause qu'il commandoit sans avoir
charge quelconque dans la Place, pour laquelle il
fust toujours employé dans T Estât du Roy, dit, qu'au
bout de six mois, il ne seroit pas encore prest à se
rendre. Sur cela, le Capitaine des Gardes de M. de
Vendosme m'a dit, qu'il commanda au< soldats de
ladite garnison de le prendre, les assurant qu'on leur
donneroit à tous la vie ; ce qu'ils firent, et l'ame-
nèrent au bout du pont Aussitost M. de Yendosme
le fit pendre, et les soldats, au nombre de trente-six
seulement, sortirent, sans qu'on leur fist mal. L'Eves-
que de Cornoûaille, frère de Lëzomis, alloit pour
tâcher d'accommoder l'affaire ; mais il arriva trop
tard. M. de Vendosme entra dans la Place, qui est
des quatre meilleures de Bretagne, et en revint le
vendredy, 80*.
15. Il arrive nouvelle au Roy, qu'assurément
la Reyne sa mère viendroit le trouver.
17. Le Roy et la Reyne régnante vont à Am-
boise et en reviennent le mécredy 21. — Le Roy y
arrivant, on luy apporte nouvelle que M. de Cham-
bret estoit mort en sa maison.
* f'ôy, Pontchartrain, p. 288. Suivant le récit de Pontchartrain, le
gouverneur de Concameau était le sieur de Lizonnet (de Lezonnet,
suivant le Mère, fr.), Voy. aussi Merc, />♦., p. 291 et suiv., le rapport
très-détaiilé de la prise de Concarneau par les capitaines la Besne et
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d'arnauld d'andilly. 44â
18. M. de Villiers St-Genest arrive à Auiboise, Aoost tm.
de la part de la Reyne-mère du Roy. Le vray sujet
de son voyage estoit, pour obtenir le chapeau pour
M. de Thoulouze, en la promotion que l'on dit que le
Pape va faire; et pour tirer promesse de M. de
Luynes et du Père Amoux, sur le sujet du retour
de la Reyne.
21. Le Mayne * revient d' Angoulesme, où il avoit
esté envoyé quelques jours auparavant. H rapporte
que la Reyne partiroit le lundy 26.
M. de Brantes part pour aller trouver la Reyne-
mère à Angoulesme de la part du Roy, et luy porter
assurance du service de M. de Luynes. Il fut très-
bien receu d'elle, et la disposa à partir le mardy, en-
core que depuis le retour du Mayne, on crut qu'elle
ne partiroit que le mécredy, et qu'elle eust résolu de
ne partir que le jeudy. M. de Brantes revient le
mardy 27, à midy, à Tours; et le jour mesme, alla
trouver le Roy au Lude*.
24. Le fils aisné de M. de St-Luc % âgé de quinze
ans, fait le serment de Broûage, en survivance.
Ce mesme jour fut résolu par le Roy, dans son
la Courbe, dans laquelle affaire le lieutenant de la place, le sieur
Querchesne, fit une résistance héroïque.
* Le Mayne, souvent cité dans le journal d*Andîlly, était gentil-
homme ordinaire de la chambre du Roi et conseiller d'État.
2 roy. Merc, fr.,p, 300.
* Le fils aîné de M. de Saint-Luc était Louis d'Espinay, abbé de
Cbartrices, en Champagne, nommé à l'archevêché de Bordeaux, mort
en 1644* Son second fils était François d'Ëspinay, marquis de Saint-
Luc, lieutenant général en Guyenne, gouverneur de Périgord, mort en
1670. {Voy. P. Anselme, t. vu, p. 476.)
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khk JOURNAL INÉDIT
Aoost i«if . Conseil, de faire MM. de Praslin et de St-Géran, Ma-
réchaux de France.
25. M. de Praslin * fait le serment de Maréchal
de France, et le Roy dépesche à M. de St-Géran,
afin qu'il vienne recevoir pareil honneur. M. de
St-Géran avoit eu le Brevet le premier.
26. Le Roy va au Lude.
27. Monsieur tombe malade de la petite vérole,
à Champ-Chevrier, et le mercredy 28 septembre,
arrive à Tours, estant entièrement guéry *.
28. Entre minuit et une heure, Madame la Prin-
cesse accouche d'une fille dans le bois de Vin-
cennes^
29. La Reyne-mère part d' Angoulesme, accom-
pagnée de M. de Montbason ; elle donna à M. d'Eper-
non un diamant de 36 mil écus, disant, que pour
1 « Gomme il n'y avoit point d*homme en France qui ait servi le roi
» Henri le Grand dans toutes ses guerres et continué de servir Sa
» Majesté avec plus de valeur, de fidélité et de zèle que M. le marquis
» de Praslin, Sa Majesté erut ne devoir pas différer davantage à rendre
» Justice à son mérite. Ainsi, durant le séjour qu'elle fit à Tours, elle
n l'honora de la charge de Maréchal de France, dans laquelle il a con-
n tinué Jusqu'à sa mort de la servir de telle sorte et avec un tel désin-
» téressement, dans tant de guerres auxquels les différents partis for-
n mes dans un État, et particulièrement celui des huguenots, ont
» donné sujet, que nul autre ne doit plus que lui ôtre proposé pour
» exemple d'un homme véritablement passionné pour son prince et
» pour sa patrie.» (Mém. d'Amauld d'Andilly, p. 387). Voy. aussi
Fontenay-Mareuil, p. Ii50 ; Pontchartrain, p. 289.
2 roy. Pontchartrain, p. 280. Suivant Pontchartrain, Monsieur tomba
malade à Champ-Février, maison appartenant au comte du Lude.
s Cette fille est la célèbre Anne-Geneviève de Bourbon, duchesse de
Longueville, dont M. Cousin a éloquemment raconté la vie chevale*
resque.
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d'arnâuld d'andilly. 445
marque de l'obligation qu'elle luy avoit à jamais,
elle luy donnoit ce diamant, comme la chose du
monde la plus durable, et afin que ce fust une mar-
que à la Postérité du service, qu'il avoit rendu à une
Reyne. Elle donna aussi à M. de Thoulouse un dia-
mant de 10 mil écus, et à M. du PlessisS sergent de
bataille, une enseigne de II mil écus et 2 mil écus de
pension. M. de Thoulouse accompagna, avec le
Comte de Brennes et MM. de Breauté *, de Maril-
lac, de Carbon.
30. M. de Luçon arrive à Tours, de la part de
la Reyne-mère. Il fut très-bien receu; et retourna le
lundy à Ste-More, audevant d'elle.
Ce jour, les lettres de Duché et Pairrie de M. de
Luynes furent vérifiées au Parlement. Quatre maistres
des Requestes entrèrent, MM. de Bailleul, de Ma-
rescot....
Les sept Présidents au mortier furent d'avis de la
vérification. Il y eut vingt voix contre onze. .M. de
Crequy ayant formé opposition, au nom de M. le ma-
réchal de Lesdiguières, dont les lettres avoyent esté
présentées longtemps auparavant, et estoyent suran-
nées, et n' avoit esté délibéré dessus, à cause que par
arrest du Parlement, il avoit esté ordonné, que durant
la minorité du Roy, il ne seroit délibéré sur aucunes
lettres semblables. M. de Cadenet passe accord avec
* Le sieur du Plessis, sergent de bataille, était un gentilhomme at-
taché au duc d'Épemon.
2 Pierre, marquis de Breauté, maréchal de camp, tué au siège d*Ar-
ras en 16/iO?
Aouftt lei».
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446 JOORNAL INiSOlT
Aomt Mif . M. de Crequy, portant que, encore que M. de Luynes
fust receu avant M. le maréchal de Lesdiguières ;
néanmoins il passeroit après luy ; mais que M. de
Crequy et ses successeurs luy céderoyent. Moyen-
nant cela, M. de Crequy se désista de l'opposition, et
demanda seulement que ses lettres fussent aussi vé-
rifiées. — Le Parlement ordonna, qu'en rapportant
lettres de Déclaration de la Volonté du Roy et ouy
les Conclusions des Gens du Roy, il en seroit déli-
béré. S'ils eussent eu des lestres de èurannation,
on croit qu'ils les eussent vérifiées pour M. le maré-
chal de Lesdiguières. Mais toujours cet arrest lève
celuy qui portoit qu'il ne seroit délibéré^sur aucunes
lestres de Duché et Pairrie \
Septembre. Mardy 3. M. le Grand part fort matin, et se
rend à Chastelleraut, au lever de la Reyne-mère,
l'allant visiter de la part du Roy. — Après digner,
M. le Cardinal Retz et le Père Arnoux vont à Ste-
More, où elle arriva le soir. Elle fit très-bonne chère
à M. le Cardinal de Retz, lequel l'entretint jusques
à minuit.
Le soir à xi heures, l'affaire de M. de Schom-
berg fut résolue, pour la Sur-Intendance des finances.
On dit à M. de Schomberg que son affaire estoit
A Voy. Mte. de If sthieu Mole, la lettre que le Ko! écrivit de sa
main au procureur général Mole à cette occasion. L'autographe du
Roi se trouve parmi les papiers de MoIé, ctA\, Colbert, t. v, p. 217.
(Mém. de Mole, t. i, p. 222, et note 1, p. 223.)
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d'arnauld d'andilly. 647
résolue, et il me dit qu'il désiroit que je fusse auprès septembre ««.
de luy *.
M. de Luynes va au-devant de la Reyne-mère ,
près de la Cousière, vers Montbason, pour la visiter
de la part du Roy. MM. le maréchal de Praslin, de
Bassompierre, de Schomberg, de Créquy, etc., en-
viron trois cens chevaux, accompagnent M. de
Luynes.
5. Le Roy disne de bonne heure; part à dix
heures, va, accompagné de toute la Cour à Gou-
sières^ La Reyne-mère vient au-devant de lui trente
pas avant, dans le parc. Ils s'embrassèrent par trois
diverses fois. La Reyne-mère pleura, et dit, que son
contentement estoit si extrême qu'elle ne pouvoit
* Araauld d'Andîlly, dans ses Mémoires, p. 391, donne des détails
sar rélévation de M. de Schomberg à la surintendance des finances et
sur sa nomination au principal emploi auprès du surintendant. «M. de.
» Luxembourg me vint dire : Je vous apprends une nouvelle, c'est que
» M. le comte de Schomberg est surintendant des finances au heu de
» M. le président Jeannin; mais j*ai sur cela une autre chose à vous
n dire, c'est qu'il a une telle estime pour vous, qu'il désire avec pas-
» sion que vous vouliez bien accepter le principal emploi auprès de
» lui pour le soulager en cette charge, dans laquelle il veut prendre
)» une entière confiance en vous, et M. de Luynes vous en prie. » D'An-
dilly, selon ses Mémoires, ^'aurait accepté cette position qu'après
avoir fait promettre à M. de Schomberg qu'il exercerait sa charge avec
un entier désintéressement. Il est peu probable que d'Andilly ait
eu le courage ou plutôt l'audace de poser une telle condition au nou-
veau surintendant. Du reste, on ne peut parler de soi-même avec plus
de suffisance et d'admiration que ne le fait d'Andilly dans tout le
cours de ses Mémoires. A l'en croire, il aurait été un des grands ressorts
de l'État. Malheureusement pour lui soo témoignage n'est confirmé par
aucun autre.
2 Maison du duc de Montbaxm, oit le Roi et la Reine-mere se réo-
nîrent.
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448 JOURNAL INÉDIT
s<i)teinbrc tci». parler. Elle témoignoit avoir tout son cœur sur ses
lèvres. Le Roy témoigna aussi très-grande joie, et
dit, qu'il y avoit longtemps qu'il souhaitoit ce bon-
heur, et eust les yeux humides.
Après disiier, la Reyne vint voir la Reyne-mère,
qui la receut trois pas avant dans la Cour, passa de-
vant elle, sans lui offrir la Porte. Après, Mesdames la
saluèrent, et puis les Princesses.
Pendant que la Reyne-mère disnoit, le Roy se
proraenoit dans le Parc, et après, il la revint voir.
Ils entrèrent dans un méchant Cabinet, où après, les
Princes et les Princesses entrèrent \
7. M. de Schomberg prend séance dans le Conseil
de la Direction, au-dessus de M. le Président Jean-
nin, et l'après-disnée, au Conseil des Ministres, au-
dessus de M. de Cadenet. Il a eu un brevet du 10,
pour marcher immédiatement après les Officiers de
la Couronne, pour la charge de Sur-Intendant des
finances, signée le 7 et scellée le 10. Nul n'en avoit
* yoy. Fontenay-Mareuil, p. 448; Richelieu, p. 557 et 568; Pont-
chartpain, p. 290. Le récit de Pontchartrain et celui d*Ândilly s'accor-
dent tellement, même par certains membres de phrases que Ton re-
trouve dans les deux, qu'il est permis de supposer que Tun n'a point
été étranger à la rédaction de l'autre. Différents autres passages et
toute la suite des dates et des événements viennent fortifier cette sup-
position. Pontchartrain et d'Andilly étant en rapports journaliers, l'un
a pu communiquer à l'autre son Journal. J'ajouterai seulement que
celui de Pontchartrain, tel que nous le possédons, est une œuvre rédi-
gée avec soin et longtemps après les événements, tandis que le Journal
d'Amauld d'Andilly n'est qu'un premier travail dans lequel l'auteur
s'est contenté de recueillir les faits, pour ainsi dire au jour le jour,
sans souci de rédaction. Voy. aussi sur l'entrevue entre Louis XIII et
Marie de Medicis, Merc, fr,, p. 301.
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d'arnauld d'andilly. 449
eu auparavant luy ; car M. de Sully n'avoit rien du septembre «i».
tout; et M. le Président Jeannin, seulement un bre-
vet *.
9. M. de Saint-Géran fait serment de Maréchal
de France.
19. Le Roy et la Reyne partent de Tours, pour
aller à Amboise, et le samedy, le Roy envoyé M. de
Brantes à Tours, pour visiter la Reyne sa mère^.
23. Le Roy part d' Amboise, et va coucher à
Blois.
La Reyne-mère part de Tours, pour aller à Chinon.
M. de Montbason l'accompagne*.
24. Le Roy va à Vendosme, le lendemain à
Chasteaudun,. et le jeudy 26 à Chartres.
25. L'assemblée de ceux de la Religion Préten-
due Réformée commence à Loudun*.
1 « Au commencement dudit mois, le Roi donna à M. le comte de
» Schomberg la surintendance de ses finances, du consentement de
» M. le président Jeannin, en faveur duquel on donna le contrôle gé-
n néral à M. de Castille, son gendre, et Ton donna récompense à M. de
» Maupeou.» (Pontchartrain, p. 291,)
2 Voy, Pontchartrain, p. 291.
s Foy. Mercure fr,^ p. 301. Le Mercure^ p. 313 et suiv., rend compte
de l'entrée solennelle à Angers, le 16 octobre, de la Reine-mere qui ve-
nait prendre possession de son nouveau gouvernement. Les plus grands
honneurs lui furent rendus. ^
* Le Uerc, fr,^ p. 302 et suiv., donne, avec de grands détails sur
cette assemblée, la liste de tous les députés envoyés des différentes
provinces de la France par ceux de la religion prétendue réformée. La
présidence fut décernée au Vidame de Chartres. « En ce commence-
» ment, dit le Mercure^ ce n*étoient que compliments des grands de la
» religion envers ceste assemblée : le viscomte de Turene, second fils
» du mareschal de Bouillon, passant avec sa mère à Louduh, leur dit,
» que son pore se porteroit tousjours au bien des Églises, et cmbrasse-
29
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450 JOURNAL INÉDIT
septMDbre iiif. Les Estats de Bretagne commencent* M. de Ven-
dosme> M. de la Tremoille, M. le duc de Rete y
furent.
M» Ribier y fut commissaire de la part du Roy.
Le pais a accordé ft05 mil livres, payables en 1620,
et 1621k Les greffes du païs> qui estoyent affermez
è soixante-quatorze mil livres, l'ont esté de nouveau
poiir..^ années. %. à*..
27. Mort de M. le comte de Lude. Il avoit traitté
de la charge de Lieutenant de la compagnie des Gen-
darmes dcMonaeur, avec M. de Marillac, Sous-Lieu-
tenant, à vingt-huit mil écus, et avoit baillé sa charge
de premier Gentilhomme de la chambre de Monsieur,
à M. le marquis d'Illiers', son fils aisné,
M. le colonel (d'Ornano), qui estoit alors à Paris,
mis par le Roy en toutes les charges qu'avoit M» le
Comte du Lude ; et par ce moyen, le traitté de M. de
Marillac rompu ^ Au lieu de la charge de premier
» roît volontiers leurs délibérations. » Lorsque celui qui devait faire de
Turenne un des plus grands noms de la France remplissait cette mis-
sion, il n'avait que huit ans. C'était probablement son premier acte
public.
* Thimoléon de Daillon, marquis d'Illiers, puis comte du Lude, né
en 1600, épousa en 1622 Marie Feydeau, fille unique d*Antoine Fey-
deau, seigneur de Bois-le-Vicomte , trésorier de l'Epargne. « Après
» avoir été longtemps à la Cour, dit le P. Anselme, il se retira en sa
ïi maison du Lude, où il mena une vie tranquille le reste de ses jours,
» et y mourut. » {Foy. P. Anselme, t viit, p. 192.)
2 « La Cour étant partie ensuite de Tours pour revenir à Paris,
» après le traité d'Angoulême achevé, et l'entrevue du Roi et de la
» Reine à Cousiers, le Roi reçut en chemin la nouvelle de la mort de
» M, le comte du Lude, gouverneur de Monsieur. Je pris ce temps
* pour faire instance sur le sujet de Monsieur le Colonel, et lui écrivis,
» sans dire pourquoi, de se hâter de revenir. Il partit & l'instant, et
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d'arnadld d'andilly. 451
Gentilhomme de la chambre de Monsieur ^ et en con-
sidération des services de M. le Comte de Lude, le
Roy donna vingt mil écus è la veufve^ et aux en-
fans, pour acquitter les dettes du defiunt, six mil écus
de pension à M. le marquis d'Illiers, la charge de
Lieutenant du Roy au Bas-Auvergne à M. le Comté de
Pontgibaut *, et quatre mil livres de pension è M . de. . .
le cadet Des quatre, le troisième est d'Eglise *.
SfptemlNV IMf .
Jeudy â* Le Roy part de Chartres, va à Eper-
non ; le Vendredy à Montfort, le Samedy à Mante, et
se rend à Compiègne, le Jeudy 10*
Les Députez de l'assemblée viennent trouver le
Octobre.
» cependant le Roi lui donna cette chaiige. J'en dressai moi-même les
» provisions, le Roi étant à Chartres, en des termes très-honorables
» pour Monsieur le Colonel ; je les laissai à M. de Modène pour les
» sceller, et ayant pris la poste pour m'en venir à Paris, Je rencontrai
» en chemin Monsieur le Colonel, et le saluai en qualité de gouverneur
» de Monsieur, dont il ne fut pas peu surpris. » (Mém. d'Amauld
d'Andilly, p. 393.) Voy, aussi Fontenay-Mareuil» p. 454 ; Richelieu,
p. 569 ; Pontchartrain, p. 292.
* Françoise de Schombcrg, fille de Gaspard de Schomberg, comte de
Nanteuil, gentilhomme allemand, colonel des Reistres sous Charles IX,
naturalisé eu 1570, gouverneur des Marches, intendant des finances,
conseiller d'Etat eu 1573, comte de Nanteuil en 1578, mort en 1599.
Françoise de Schomberg, née en 1577, épousa en 1597 François de
Daillon, comte du Lude. Elle était sceur d'Henry de Schomberg, surin*
tendant des finances et premier maréchal de ce nom.
> Roger de Daillon, comte de Pontgibaud, second fils du comte du
Lude, né en 1601, tué en duel par le comte de Chalais en 1626.
3 Le troisième fils du comte du Lude était Gaspard de Daillon, né
en 1603, abbé des Chastelli^rs, évêque d'Agen, puis d'Alby en 1634,
commandeur de l'ordre du Saint-Esprit en 1661, mort en 1670. Le
quatrième était Erasme de Daillon, comte de Briançon, né en 1605,
marié en 1635 à Anne Hurault, fille d'Henry Hurault, comte de Che-
verny, mort en 1637. {Voy, P. Anselme, t. viii, p. 192.)
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452 JOURNAL INBDIT
ortobrr i6if . Roy, Bvec dcs avant-cayers. Le Roy leur fait réponce
en son Conseil , Monsieur le Prince y estant , qui fut
environ le 25 ou 26, qu'il ne vouloit répondre que
sur le cayer général, ainsi qu'il estoit accoustumé *.
12* Le Roy va à Mouchy, à deux lieues de Com-
piègne, et M. de Luynes à Amiens, où M. le Prince
de Vaudemont, M. de Bassompierre , M. de Cour-
tenvaut, M. de Blainville et M. le marquis de Mauny
l'accompagnèrent. Il y demeura tout le dimanche,
vint trouver le Roy le lundy ; et revint avec Sa Ma-
jesté à Compiègne.
17. Conseil tenu, où Ton prit la dernière résolu-
tion de faire sortir Monsieur le Prince ; mais en eflfet,
elle estoit prise auparavant. M. deCadenet estoit de-
meuré à Paris pour cela.
18. Le Roy va à Chantilly, pour y attendre mon-
sieur le Prince ^
19. M. de Luynes va trouver Monsieur le Prince
au Bois de Vincennes, et coucha à Paris.
20. M. de Luynes va de bon matin au Bois de
Vincennes, et estant monté en carrosse avec Monsieur
le Prince et Madame la Princesse, où estoyent aussi
MM. de Cadenet et de Modène , il vint trouver le Roy
à Chantilly , et le vit dans un cabinet, où l'on dît
qu'il se mit à genoux, et fit des protestations extrê-
* yoy, Fontenay-Mareuil, p. 450 ; Ponchartrain, p. 293 ; Merc. fr„
p. 307. L'arant^cahier de rAssemblée de Loudun fut présenté au Roi
par le marquis de la Moussaye. D contenait sept principaux articles
dont le Mercure donne le texte.
> Foy, Mém. de MoIé. p. 227.
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d'arnauld d'andilly. 453
mes de fidélité, et de ressentiment de l'obligation octobre leie.
qu'il luy avoit *.
22. Le Roy revient à Compiègne, accompagné
de Monsieur le Prince. Madame la Princesse y arriva,
et vit la Reyne le mesme jour \
30. Monsieur le Prince va à Nostre-Dame de
Liesse.
Lundy % Le Roy part de Compiègne, va à. . . . . Novembre,
et le lendemain à Monceaux.
Le jour précédent, M. de Cadenet estoit party en
poste, pour aller en inconnu, voir M"' de Péquigny',
< tt Monsieur le Prince sortit le 20 octobre de la même année de sa
» prison du bois de Vincennes, et s'attacha entièrement aux intérêts
» de M. de Luynes. » (Méra. d*Arnauld d*AndilIy, p. 393.) Voy, aussi
Fontenay-Mareuil, p. 453; Pontchartrain, p. 292; Richelieu, p. 571.
A la même époque la Reine-mère obtint, suivant Richelieu, la déli-
vrance de Barbin qui sortit de la Bastille et reçut Tordre de quitter
immédiatement la France ; ce qu'il fit sans avoir pu attendre l'argent
que la Reine lui envoyait pour faire son voyage. D'après use lettre de
Mole à Dupuy, c'est le 23 septembre que Barbin sortit de la Bastille.
(Mém. de Mole, p. 224.)
2 Le Mercure français^ p. 334 et suiv., donne des détails intéressants
sur la mise en liberté de Monsieur le Prince qui, ayant été arrêté
le !•' septembre 1616, était resté prisonnier trois ans et vingt Jours.
Le duc de Luynes en allant chercher à Vincennes le prince de Gondé
lui remit cette lettre du Roi : « Mon cousin, je ne vous diray pas com-
» bien je vous ayme, vous le voyez. Je vous envoyé mon cousin le duc
» de Luynes qui sçait les secrets de mon cœur, et vous les dira plu9
» amplement i venez-vous-en le plus promptement que vous pourrez,
» car je vous attends avec impatience : et cependant je pileray Dieu
» de vous tenir en sa saincte grâce, Louys. De Chantilly, ce 19 d'octo-
» bre 1619. » L'impatience du Roi était bien naturelle après trois ans
de séparation l
3 Claire Charlotte d'Ailly, dame de Péquigny, comtesse de Chaulnes,
vidame d'Amiens, menine de l'Archiduchesse Gouvernante des Pays-
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libli JOURNAL INÉDIT
KoTcmbrcm». à Bruxelles. M. d'Effiat* estoit party auparavant luy.
Environ 6. M. de Montmorency arrive à Paris.
12, Le Roy part de Monceaux, va disner à Cou-
pevray, et coucher à Lésigny, d'où il part le ven-
dredy 15% et va coucher à Fontainebleau.
li, M. de Luynes fait serment de Duc et Pair. Il
estoit venu le mécredy de Lésigny, avec Monsieur
le Prince, et alla souper et coucher chez M. de
Ghevry. Monsieur le Prince y aoupa aussi: L'après-
disnée, il avoit veû tous ses juges. Le jeudy de bon
matin. Monsieur le Prince l'alla trouver et le mena
au Parlement, où furent aussi MM. le maréchal de
Praslin, de Schomberg, de Bassompierre, de Crequy,
d'AlinçQurt, le naarquis de Maupy et force Noblesse.
B»f^ fiUe uD^ue ot héritièfe de Plulib«irt ^mmaQuel d'Ailly^ seigneuv
da Péquigqy, Yi4»me d'Aviiea»^ xnort en 1617, et de Umise d^QgmeSf
comtesse de Cbaulues, daioe dA Magny, M^ de Péquigi^ épousa
en 1619 Honoré d^Albert, ^gqeur de Cadene^ depuis tom-éobal duc
de Chaulnes, et mourut en 1681. (Voy^ P. Anselme, t. nr, p. ^7%)
Elle était, lUt Fonten^y-MajreiMl, p. k^ la plua riche fiUe qu'il y eus(
loni en France, Fontenay-Hareuil donne au sujet de^ prétendants à la
main de M^ de Péquigny de curieux détails. Fa^ aui^i Poi|tcl)|krtraiB,
p. ^^
i Antoine Goeffior, dit Bnié, marqiûs d'Effîat, grand-maltre, surin*>
tendimt et général réformateur de^ n^nes et minières de France
en ±9ik% premier éouyer de la Gr^MMa ficnrie en 1616« capitaine dei
chevav^légers en 1617, envoyé en Flandres le 30 octobre 1619, ambas*
sadeur ei^traordinaire en Angleterre pour le mariage de Mme Hen-
riette e» i9Q^t surintendant des lances en l62e» conseiller d'honneur
au Parlement en 164)7, gr^-^naltre de Tartillerie par commissioQ
en 16^9, lieutenant général det armées en Piémont en 1630, noaréchal
de Franqe en 1631, sénéfhal de Bourhonn^ et d^Auyergne, gouver-
nenr d'Atûo^t d'Auvergne et de ^ourhonnais, commandant de |'amé«
d'Alsace en 1632, mort la même année. {Voy. P. Anselme, t. vu,
p. 493.) Ons4t que le m^^heureq]^ Çmq-Mars était fils du maréchal
d'Emat.
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d'aanauld d'andilly. &55
La réception fut à huis clos. Monsieur le Prince, Novembre mt.
M, de Mpntbason et M, de Liancourt entrèrent avec
Messieurs auparavant. Monsieur le Prince parla au
Parlement sur le sujet de sa liberté. Après, on fit en-
trer M. de Luynes. M. Talon*, (à présent A4i
vocat Général) , le présenta, et dit trois ou quatre
périodes. (On tient qu'il ne devoit rien dire du tout,
mais M. Servin le voulut, à cause qu'il désiroit de
haranguer. Après, parla M, Servin, et puis Monsieur
le Premier Président ayant pris les opinions, luy fit
prester le serment de Duc et Pair ; et celuy de Bailly
d'Amiens. Tous les sept Présidons y estoyent, excepté
M. Lescalopier. M. le Bret n'y estoit point, à cause
qu'il a résigné.
Après que M. de Luynes fut assis, M. le Roullier^
parla de l'affaire de M. le maréchal de Lesdîguières,
qui avoit obtenu relief de surannation de ses lettres
de Duché et Pairrie. Il fut ordonné que le soit montré
seroit mis. M. Voisin l'envoya aussitost à Monsieur le
Procureur Général, qui, à l'heure mesme, donna ses
conclusions, avec M. Servin, et renvoya les lettres à
M. Voisin, qui les bailla à M. le Roullier, lequel in-
terrompit une affaire commencée, disant, qu'il luy
devoit estre permis de reprendre le Bureau, pour une •
> Jacques Talon, avocat général au Parlement de Paris en 1621,
conseiller d'Etat en 1631. En cette année 1631, il céda sa charge
d'avocat général à son frère cadet, le célèbre Orner Talon, dont on ad«
précieux mémoires, des plaidoyers, et des poésies encore inédites. Les
manuscrits d'Omer Talon et ceux de Denis son fils sont conservés à 1%
bibliothèque du Corps Législatif.
> René le Roullier, conseiller au Parlement de Paris en 1579.
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456 JOURNAL INÉDIT
novembre wit . affaire commencée auparavant. Sur cela, contestation
si Ton donneroit deux arrêts en mesme temps ; et on
délibéra s'il en seroit délibéré. Enfin, il passa à
quatre voix près, qu'il en seroit délibéré. Et après,
la matière estant mise en délibération , il fut or-
donné que l'Information des vie et mœurs seroit
faite. Ensuite de quoy, l'après-dinée mesme, MM. de
Praslin, de Schomberg, de Bassompierre, de Lian-
court, et d'Alincourt, furent ouïs, par M. Dérivant,
et le lendemain , il y eut arrest , que M. de Lesdi-
gières et M. de Créquy, après luy, seroyent receus
au serment de Duc et Pair *.
21 • Le Roy part de Fontainebleau, et va à Ville-
roy. La Reyne vient à Paris ^.
26. Déclaration de l'innocence de Monsieur le
Prince vérifiée au Parlement^.
Dcccmbir. Mardy 3 ou mécredy 4. M. le colonel d'Or-
nano preste, entre les mains du Roy, le serment de
* f^oy, Fontenay-Mareuil, p. 453. On trouve dans les Mémoires de
Mole, p. 220, les lettres de Jussieu au Roi relatives à la duché-paii-ie
du maréchal de Lesdiguières et de M. de Créqui. Foy. aussi Merc fr,y
p. 341.
> Le Roi avait quitté Paris au mois de mai et il n'y revint qu*à cette
époque, lorsque la peste qui avait longtemps sévi dans la capitale eut
complètement disparu.
* Vay. Richelieu, p. 573. On trouve dans le Mercure français^
p. 337, le texte de la déclaration du Roi sur la délivrance du Prince
de Condé. Par cette déclaration datée de Fontainebleau le 9 novembre
et vérifiée au Parlement le 26 du même mois, le Roi donne un témoi-
gnage public de l'innocence du Prince de Condé, annule et supprime
tous les édits, lettres, arrêts, etc., rendus contre lui, et le rétablit dans
tous ses gouvernements, charges et dignités.
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d'aanauld d'andilly. 457
Gouverneur de Monsieur, et M. de Blainville celuy ^^m^ »•»••
de Maistre de la Garderobbe, par luy achetée à
à M. le Comte de la Rochefoucaut,.. — dont le Roy
luy en a donné... — et a augmenté de 6000 livres
la pension dudit sieur Comte, pour faire jusquesà
12 mil avec ce qu'il avoit déjà, et en estre payé par
forme d'entretenement.
5. Chapitre tenu à Saint Germain, par les dix-
sept anciens chevaliers qui s'y trouvèrent, où il en
fut nommé soixante-cinq sur le nombre de ceux qui
le prétendoyent *.
8. M. de Cadenet preste le serment de maré-
chal de France à Saint-Germain ^.
27. M. le comte de Soissons, tenant la serviette
pour la bailler au Roy à son souper. Monsieur le
Prince la voulut prendre ; et sur ce que M. le Comte
la luy refusa, ils eurent quelques paroles. Monsieur
le Prince luy ayant demandé s'il luy vouloit di^u-
ter son rang, il répondit que non, qu'il le reconnois-
soit sur son aisné , mais qu'il savoit bien faire sa
charge. Monsieur le Prince ayant répondu, que feu
M. le Comte ne luy avoit jamais disputé la serviette,
il répondit, qu'il l' avoit fait par civilité, mais qu'il
n'y estoit point obligé. Monsieur le Prince luy ayant
* Le Mercure français^ t. vi, année MDCXX, p. 1 et suiv., donne
des détails très-intéressants sur cette promotion de chevaliers du Saint-
Esprit, qui fut la quinzième depuis la création de Tordre par Henri lll
le 31 décembre 1578. Le Mercure donne les noms et qualités des nou-
veaux chevaliers au nombre de 59 laïcs et cinq associés ecclésiastiques,
ce qui ferait soixante-quatre au lieu de soixante-cinq.
2 Voy, Fonteuay-Mareuil, p. 450 ; Pontchartrain, p. 296.
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&58 JOURNAL INEDIT
Décembre iiif . dit quMl estoit uii enfant, il répondit qu*il avoit assez
d'âge pour savoir bien conserver les honneurs de sa
charge. Sur ces entrefaites, Monsieur le Prince par-
tait quelquefois à l'oreille du Roy, et Monsieur le
Comte garda toujours la serviette, avec une conte-
nance fort assurée. Enfin, on envoya quérir Mon-
sieur, auquel Monsieur le Comte bailla la serviette.
Monsieur le Prince estant allé chez luy, M. de Guise
l'y alla trouver et luy dit, qu'il ne faloit point traitter
cette affaire comme une querelle, mais demander
raison à Madame la Comtesse du tort que Monsieur
son fils luy avoit fait, M. de Montmorency l'alla donc
trouver pour ce sujet» et lui parla comme Monsieur
le Comte estant encore sous sa charge. Elle répondit,
qu'il y avoit déjà assez longtemps qu'elle avoit jugé
Monsieur le Comte capable de se conduire, et qu'elle
s' estoit déchargée de ce soin, particulièrement pour
ce qui estoit de sa charge ; et qu'en ce qui s' estoit
passé, il avoit tant eu de raison, qu'elle ne pouvoit
qu'elle n'approuvast ce qu'il avoit fait Que pour ce
qui estoit de luy. Monsieur le Prince ne pouvoit
choisir personne qu'elle estimast ni honorast davan-
tage. ' — M. de Montmorency répondit toujours en
tels termes, qu'il témoigna à Madame la Comtesse,
qu'il ne vouloit point porter des paroles qui pussent
aigrir l'affaire, au lieu de l'adoucir \
31. C'estoit le jour que l'on commençoit les
*■ Voy, sur cette grave affaire d^ \^ serviette, PontebartmiQ, p. 205 1
Merc. fr,, t. vi, année MPCXX, p, 2Ô8,
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d'arnauld d'andilly. 459
cérémonies des Chevaliers ^ M. de Nemours en- Décembre Mit.
voye M, de Courbezon pour appeller M. de Guise.
* Voy. Fontenay-Mareuil, p. 458 ; Richelieu, p. 576 ; Pontchartrain,
p. 294 ; Brienne, p. 340 ; Merc, fr., t. vi, année MDCXX, p. 1 et suiv.
Le Mercure^ p. 9. et suiv., donne le tableau général de tous les cheva-
liers du Saint-Esprit existant à cette époque. On y voit figurer avec
leurs titres et qualités et selon Tordre de leur réception un grand
nombre des personnages cités dans le Journal d'Arnauld d*Aifdilly.
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APPENDICE
(Extrait du Joarnal inédit d*Ârnaald d'Andilly, vol. iv, fol. 71.)
Lundy 20 may 1624. Le Roy sur le mîdy vint, May mk.
accompagné du marquis de la Viéville, trouver la
Reyne-mère (Marie de Médicis) qui estoit dans le
lict, et aprez luy avoir dict qu'il luy venoit parler
d'une résolution qu'il y ayoit longtemps qu'il avoit
prise, qui estoit d' ester M. le colonel (Ornano) d'au-
prez de Monsieur ; la Reyne respondant que c'es-
toit une chose à considérer à cause de l'affection que
Monsieur tesmofgnoit avoir pour luy, et qu'il ne se-
roit point mal à propos de luy en parler, offrit de
congnoistre son sentiment. Le marquis de la Vié-
ville, prenant la parolle, dit qu'elle gastoit les affaires
du Roy. Incontinent aprez , Monsieur, accompagné
de Monsieur le Colonel, estant entré dans la chambre
où estoient, outre ce que dessus, M. le cardinal de
Richelieu, M. du Rallier, M. de Bonveil, M. Hé-
rouard, Bautru et M. de Guiercheville, le Roy appella
Monsieur, et en présence de la Reyne-mère luy dit
qu'il ne vouloit plus qu'il eust de gouverneur, ny
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462 JOURNAL INÉDIT
May iit4. que Monsieur le Colonel fust auprez de luy. — Mon-
sieur : Pourquoy, Monsieur? — Le Roy : Pour ce que
j'ay appris qu'il vous est trop sévère. — Monsieur:
Trop sévère, Monsieur? Sy cela estoit, ce seroit à
moy à le sçavoir et à m'en plaindre. Mais tant, s'en
fault ; j'ay toutte sorte de subject de m'en louer et de
l'aymer» comme estant très homme de bien et auquel
j'ay beaucoup d'obligation. — Le Roy voulant per-
suader Monsieur par raison, Monsieur avec grands
pleurs respondit à toutes ces raisons, ce qui fit que
le Roy appella par deux diverses fois M. de la Vié-
ville pour disputer avec luy contre Monsieur, qui
insista tousjours très fortement; et le Roy luy ayant
dit par plusieurs fois qu'il défiirolt qu'il approuvas!
sa résolution, il respondit tousjours que comme Roy
il pouvoit tout, mais qu'il n'y consentiroit jamais.
Et sur ce que le Roy luy dit avec ini^ûce qu'il l'en
prioit ; il respondit : Monsieur, je ne le puis faire pour
vostre prière ; et dit ensuitte que c' estoit M. de la
Viéville qui avoit rendu un mauvais office à Monsieur
le Colonel, et que ledit marquis estoit un meschant et
un traistre, ayant voulu avoir avec iuy des intelli-
gences que le Roy he sceûst pas, dont il cotta les
temps et les lieux. Aprez cela, Monsieur ayant quicté
le Roy sort de la chambre en pleurant ; et jurant
tout hault que les traistres la luy payeroient, entre
dans la chambre de la Reyne régnante (Anne d'Au-
triche) qui disnoit, sans la saluer, sa cholère ayant
empesché qu'il ne prist garde à elle ; et estant arrivé
dans la sienne, dit à son chirurgien ordinaire nommé
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D'ARNâULD d'ANDILLY. 46â
Berthelot (ennemy juré de Monsieur le Colonel à cause
qu'ayant picqué deux fois Monsieur à sa grande ma-
ladie à Moissac sans le pouvoir ségner^ Monsieur lô
Colonel ne voulut plus depuis qu'il ségnat Monsieur) :
Comment^ coquin, estes-voussy impudent que de vous
présenter devant moy après avoir trahy Monsieur le
Colonel î Sortez d'icy ; ne vous présentez Jamais de-
vant moy. Je vous fais grande grâce de nt vous
point fère assommer à coups de baston. — Quelque
ti^nps aprez M. de La Roche-Haberl, son premier
ausmosnier, se voulant mesler de le consoler, Mon-
sieur luy dit : Comment pensez-vous que je sois sy
mal adverty que je ne sache pas qu'il y a plus de
quatre mois que vous trahissez Monsieur le Colonel î
Retirez^vous d'icy, et ne vous présentez plus devant
moy^ Comme on luy eust apporté son disner, il ne
mangea que trois ou quatre morceaux, et puis se fit
desservir, et aprez disner ayant demandé son ca-
resse pour aller chez la Reyne sa mère, M. de Man-
San voulant dire quelque chose pour l'en destourner,
il le rabroua fort*
Lorsque Monsieur sortit d'auprez du Roy, comme
il est dit cy-dessus, Monsieur le Colonel le voulant
suivre, le Roy l'appella et luy dit, en présence de la
Reyne-mère : Colonel, je suis très content de vos
services, et feray pour vous aux occasions» Mais je
ne désire plus que mon frère ayt de gouverneur.
Monsieur le Colonel respondit: Sire v je loue Dieu
de la résolution que Vostre Majesté a prise de ne
vouloir plus de gouverneur auprez de Monsieur, et
May im.
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ftCft JOURNAL INÉDIT
May tm. suis obligé de vous tesmoigner que pourveu qu'il
veuille prendre le soin de se conduire, comme j'es-
time qu'il fera, j'estime en ma conscience qu'il en
est fort capable. Il ne me reste maintenant qu'à
sçavoirde Vostre Majesté, comme il luy plaist que je
vive auprez d'elle et auprez de Monsieur. Le Roy
respondit : t Je veulx que vous demeuriez tousjours
dans la Cour et auprez de moy comme un homme
de vostre condition et de vostre qualité, et pour le-
quel je veux fère aux occasions. Monsieur le Colo-
nel respondit: Vostre Majesté me faict beaucoup
d'honneur de tesmoigner satisfaction de mes services,
et de vouloir que je me tienne souvent près d'elle ;
mais je la supplie très humblement de me dire comme
il luy plaist que je vive auprez de Monsieur dans les
charges que j'ay en sa maison. — Le Roy : Je ne
veux plus que vous voyiez du tout mon frère. — M. le
Colonel : Comment, Sire, vous ne voulez plus que
je voye Monsieur? Ce n'est donc pas son gouverneur
que vous luy ostez, mais c'est le Colonel que vous
ostez d' auprez de Monsieur, et que vous en ostez avec
honte et avec infamie. Les fidelles services que mes
prédécesseurs ont renduz à la France, et les miens,
Sire, n'ont point mérité un tel traictement, et je
n'avois garde de l'attendre ensuitte de tant de tes-
moignages que Vostre Majesté m'a renduz d'estre
contente de moy , et des promesses qu'elle m'a sy
souvent faictes de me garder tousjours une oreille
lorsque l'on me rendroit de mauvais offices auprez
d'elle. Maintenant je me voy condamné sans estre
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d'aunauld d'andilly. 465
ouy, et ruiné sans avoir moyen de me deffendre. Sy m«> letv.
j'ay bien faict, Sire, Yostre Majesté ne doilt nulle-
ment me traicter de la sorte ; et sy j'ay mal faict, il
est raisonnable que ma teste en responde, et que
vous me faciez fère mon procès. C'est la plus grande
grâce que je vous demande, et de m' envoyer pour
cest effect à la Bastille. Car aussy bien sy vous ne
m'y envoyez, je m'y en iray. — Le Roy respondit :
Voulez-vous que mon frère ayt de la barbe jusques à
la ceinture, et qu'il ayt encor un gouverneur? —
M. le Colonel: Sire, j'aydesjà dit à Vostre Majesté
que tant s'en fault que j'estime qu'il doibve tousjours
avoir un gouverneur, je loue la résolution que Vostre
Majesté a prise qu'il n'en ayt plus. Mais il n'est pas
juste que Vostre Majesté me tire avec honte de ceste
charge, ainsy qu'elle veult fère maintenant, en me
deffendant l'honneur de voir Monsieur. — Le Roy :
Je feray pour vous aux occasions.
— M. le Colonel : Sire, Vostre Majesté, en me
traictant de la sorte, ne sçauroit rien fère pour moy,
puisqu'on m' estant ainsy l'honneur, quand elle me
voudroit donner un million d'or, je le refuserois. On
vous a faict croire. Sire, que j'estois homme attaché
à mes inthérets. J'espère de vous .fère congnoistre le
controire ; et Vostre Majesté a desjà eu assez subject
de le congnoistre, en ce que m' ayant esté retranché
depuis quinze mois plus de cinquante mille livres
par an, tant sur mes pentions que sur l'entretene-
ment des gens de guerre de ma nation, et des places
accordées à mes pères par les Roys vos prédéces-
30
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&66 JOURNAL INiPIT
Mâjr iiM. seurs^ en récompence de leurs services et du sang
qu'ilz ont respandu pour la France, je n'ay pas seul-
lement pensé à ouvrir la bouche pour m'en plaindre
à Yostre Majesté , encor que tout autre que moy
n'eust pas mancqué de le faire. J*ay mieux aymé de-^
meurer dans le re^ect et dans le silence» que dMm*'
portuner tant soit peu Yostre Majesté en ce qui re-
garde la commodité de ses affaires. — Le Roy : Je
n*ay pas entendu que l'on vous retrandiast seulle*
ment le tiers de cela. — M. le Colonel : Sire, on m'a
autant retranché que je vous dis, et sy je n'ay pas
voulu vous en rompre la teste, encore que M. le Ma-
reschal d'Omano nem'ayt laissé autre bien au monde
que les bienfaicts de Yostre Majesté. Mais je mé-
prise fort tout cela, pourveu que l'honneur me reste,
lequel m'est mille fois plus cher que ma vye ; et la
seulle récompence qui me pourroit contenter main-
tenant seroit d'aller mourir à la teste d'une armée
pour le service de Yostre Majesté, sy elle en avoit
quelqu'une en campagne. — Et lors , se tournant
vers la Reyne-mère, il luy dit : Madame, il n'est
pas possible que tant de mauvais offices qui m'ont
esté renduz auprez du Roy ne soyent venuz jusqueis
aux oreilles de Yostre Majesté ; mais je croy avoir
9ervy sy fidellement, sy utilement, et j'ose dire a
glorieusement auprez de Monsieur, que je supplie
très humblement Yostre Majesté de me dire, en pré-
sence du Roy, comme elle en est satisfaicte. — La
Reyne respondit : Monsieur le Colonel, je ne puis
dire autre chose , sinon que vous avez très bien
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d'arnauld d'andilly. 467
nourry mon fil2 d'Anjou, et que j'en suis fort contente. May le».
Aprez, Monsieur le Colonel, addressant sa paroUe
au Roy, luy dit : Sire, il fault avouer que mes enne-
mis ont eu un grand pouvoir sur l'esprit de Vostre
Majesté, puisqu'ensuitte des asseurances qu'elle m'a
tant de fois confirmées de sa bonne volonté, il (s)
l'ont porté à me traicter plus mal qu'homme de
son royaume.
— Le Roy : Qui sont vos ennemis? — M. le Co^
Umel: Hz ne sont pas loing d'icy. Sire; le voilà à
ce coing, — Le Roy : Et qui 2 — M. le Colonel :
La Viéville, Sire. — Le Roy : Estes-vous son en-
nemy? — M. le Colonel: Non, Sire; mais il est le
mien. — Le Roy : Et pourquoy ? — M. le Colonel :
Pour ce que c'est un infâme et un lasche. Sire, et
que je suis fort homme de bien. — • Le Roy : Par-
lez bas. — M* le Colonel : Au contraire, Sire, j'es*-
lève ma voix affln qu'il l'entende ; car je ne crains
pas comme luy que l'on sache ce que je dis. Je vous
supplie très humblement de l'appeller, Sire, et je
luy maintiendray devant vous et l'espée à la main,
sy Vostre Majesté me faict la faveur de me le per-
mettre , que c'est un traistre et un meschant, qui a
voulu gangner Monsieur, et avoir des intelligences
avecluy que Vostre Majesté ne sceust point. — Le Roy
n'ayant pas voullu appeller M. de la Viéville, Mon-
sieur le Colonel luy dit ensuitte : Sire, l'on m'avoit
tousjours bien prédit que je périrois puisque je ne
m'attachois qu'au Roy. Sy j'eusse voulu prendre
d'autres appuis, je n'en aurois pas mancqué, et
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468 JOURNAL INÉDIT
Mny m\. subsisterois maintenant. — Le Roy : Comment? qui
est-ce qui eust eu le pouvoir de vous maintenir con-
tre moy? — M. le Colonel: Personne ne m'auroit
maintenu contre vous, Sire ; mais sy d'un costé on
m'avoit rendu de mauvais offices auprez de Vostre
Majesté , on m'en auroit rendu de bons de l'autre ;
et Yostre Majesté se voulant informer de la vérité,
m'auroit trouvé tel qu'elle sçauroit désirer pour son
service. Au lieu que ne m' estant fié qu'en ma pro-
bité et en la protection du Roy, c'est le Roy mesme
qui m'abandonne, et qui, au lieu de me maintenir,
me ruyne. Mais sy c'cstoit à recommencer, je ferois
encore la mesme chose ; car j'ayme mieux périr en
ne m' attachant qu'au Roy, que de me maintenir
par quelqu'autre moyen que ce puisse estre ; et Dieu
veuille. Sire, que mon exemple n'apprenne point à
beaucoup d'autres à ne fère pas de mesme. —
Aprez cela, le Roy luy ayant conmiandé de se re-
. tirer à son logis, et d'attendre là de ses nouvelles
qu'il lui feroit sçavoir le lendemain à midy, Mon-
sieur le Colonel respondit qu'il n'avoit point d'au-
tre logis qu'une chambre en celuy de Monsieur;
que s'il trouvoit bon qu'il y demeurast, il ne verroit
point Monsieur. — Le Roy respondit que non , et
qu'il s'en fist -marquer un à la ville. Et ainsy le
Roy se leva, et s'en alla disner qu'il estoit deux
heures, car son discours avec Monsieur avoit duré
une heure et demye ; et celluy avec Monsieur le Co-
lonel une demye heure. Monsieur le Colonel demeura
aprez cela assez longtemps chez la Reyne et dans
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d'arnauld d'andilly. 469
le logis du Roy , où plusieurs personnes de qualité m» t«».
luy parlèrent, dont M. d'Elbeuf fut le premier, et
admirèrent tous son courage, ses parolles et sa
contenance. Quelque temps après, ayant sçeu que
le Roy alloit à la chasse, il s'en alla le trouver.
Le Roy le voyant venir, vouloit esviter de le voir ;
mais Monsieur le Colonel se hastant, l'aborda au-
paravant qu'il peust monter à cheval, et luy dit tout
hault qu'il le supplioit très humblement de luy ren-
dre justice. — Le Roy luy respondit qu'il demeu-
rast à son logis, ainsy qu'il luy avoit commandé, et
que là il luy feroit sçavoir de ses nouvelles. — Mon-
sieur le Colonel, insistant par trois ou quatre fois,
et suppliant tousjours le Roy de luy rendre justice ;
enfin le Roy se fascha, et luy dit en cholère : Je
veux que vous vous en alliez à vostre logis, et vous
le commande. — Monsieur le Colonel respondit :
Puisque vous commandez, il fault obéir ; mais un
homme de bien ne craint rien. — Lors le Roy
monta à cheval et s'en alla. Et Monsieur le Colonel,
en passant dans la cour pour s'en aller chez luy
rencontra Monsieur qui s'en alloit chez la Reyne-
mère. Monsieur le voyant, de luy commanda au
cocher d'arrester le carrosse. Lors Monsieur le Co-
lonel venant à luy lui dit : Monsieur, puisqu'il ne
m'est pas permis de vous parler, je vous supplie très
humblement de me permettre de vous toucher la
main. Monsieur, en se baissant tout bas, l'embrassa
par plusieurs fois, et luy dit avec une très grande
affection qu'il s'asseurast qu'il ne l'oublieroit jamais,
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470 JOURNAL INÉDIT
uayim. et quelques autres mots semblables. Et aprez que
Monsieur le Colonel se fust retiré, il dit tout hault
dans le carrosse où estoient MM. d'Elbéne, de Man-
san, de Marcheville, et aussy je croy M. d'Ouailly :
Le diable m'emporte sy ces traistres ne me la payent;
je les cognois tous un pour un. — Monsieur estant
chez la Reyne-mère, luy parla avec très grande af-
fection pour Monsieur le Colonel.
M. de la Roche-Abert disant grâces aprez le dis-
ner de Monsieur , et ne les prononceant pas bien.
Monsieur luy dit: Comment, Monsieur de La Ro-
che? hé! vous donnez donc du galimathias à Dieu
aussy bien qu'aux hommes? — Un grand de la Cour
luy disant quMl falloit chanter liberté, il respondit avec
un visage irrité : Et pourquoy liberté ? ay-je esté dans
les fers? ay-je esté esclave? Je veux bien que l'on
sache que sy j'ay eu quelque contraincte, ce n'a esté
qu'autant que je l'ay voulu, et qu'elle m'a esté utile.
Mardy 21 May (1624). Monsieur trouvant le
Roy chez la Reyne-mère, luy dit : Monsieur, comme
mon Roy, vous pouvez fère tout ce qu'il vous.plaist,
et par conséquent m' ester Monsieur le Colonel ; mais
comme mon frère, vous ne pouvez refuser la très hum-
ble supplication que je vous fais de me le rendre ; puis-
qu'il est très homme de bien. — Le Roy s' excusant,
et Monsieur insistant tousjours; enfin ie Roy se
voyant pressé, luy dit qu'il le luy rendroit dans trois
mois. — L' après disner, M. l'archevesque de Tours
vint porter commandement à Monsieur le Colonel, de
la part du Roy, de partir le jour mesme pour aller en
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d'arnauld d'andilly. 471
sa charge de Lieutenant-Général en Normandye. UMytm.
Monsieur le Colonel respondit qu'il estoit très humble
et très obéissant subject et serviteur du Roy, mais
qu'il le supplioit très humblement de Texcuser s'il
ne pouvoit exécuter ce commandement. Que, quant
au premier point, son équipage n'estoit point si prest,
ny luy sy préparé à sortir de la Cour, qu'il peust
s'en aller le jour mesme. Que, pour le regard du se-
cond, il n'estoit point sylâche que de vouloir, aprez
le traictement qu'il avoit receu, aller, comme banny
de la Cour, se faire monstrer au doigt dans une pro-^
vince où il avoit toujours vescu avec autant d'hon* '
neur, de créance et d'estime , qu*ayt Jamais faict
aucun autre en pareille charge. Mais que sy son
service dans la Cour estoit désagréable au Roy,
encor qu'il ne deust rien moins attendre de luy,
aprez l'avoir sy dignement et sy fidellement servy,
il se retireroit à Paris, qui estoit la demeure com-
mune à tous les François, et particullièrement à ceux
de sa qualité; qu*il n'avoit point d'autre maison,
M. le mareschal d'Omano n'ayant pas laissé six pieds
de terre pour se faire enterrer.— M. de Tours ayant
rapporté cela au Roy, Sa Majesté dit qu'elle vouloit
donc bien qu'il s'en allast à Paris.
Mécredy 22 May. Monsieur le Colonel vient
avec un carrosse de relais de Compiégne à Paris.
Samedy 25 May. Monsieur le Colonel estant à
table,et Mesdames la marquise de Montlord, deMazar^
gués et de Verderonne, MM. deMazargues, de Sesse^
naye, d'Aiguebonneetd'Andillysouppantaveclviy, le
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Û72 JOURNAL 1NÉ0IT
Mm If». sieur Galeteau, premier vallet de chambre du Boy,
sans avoir parlé à qui que ce fust, entre dans la salle,
et s'adressant à Mondeur le Colonel, luy demande
(aprez luy avoir fait excuses de ce qu'il estoit venu
durant son souper) s'il luy pourroit dire un mot de
la part du Roy, En mesme temps Monsieur le Co-
lonel se lève et s'en va avec luy à quatre pas de
la table, et lors le sieur Galeteau luy dit : Monsieur,
le Roy m'a commandé de* vous venir trouver, pour
vous dire qu'il est extrêmement offencé de l'impu-
dence (ou insolence) que vous avez commise d'en-
voyer un gentilhomme vers Monsieur lequel l'a en-
tretenu fort longtemps ; qu'il vous commande de
partir dans deux ou trois jours au plus tard, avec voz
frères, vostre femme et vostre sœur, pour vous en
aller au Pont-Saincl-Esprit ; et que sy vous y manc-
quez, il vous sçaura bien fère obéir, et vous fère
congnoistre qu'il est vostre maistre. — Monsieur le
Colonel respondit audit sieur Galeteau : Monsieur,
avez tout dit ? — Et le dit sieur Galeteau répliquant
qu'ouy. Monsieur le Colonel reprit la parolle ; et dit :
Monsieur , je vous supplie de dire au Roy que pour
luy tesmoigner qu'il n'a point en son royaume un
plus respectueux et un plus fidelle subject et serviteur
que moy, je reçois maintenant avec le mesme hon-
neur et avec la mesme révérence les commandemens
et les outrages que vous m'apportez de sa part Je
n'ay passeullement pensé à envoyer un gentilhomme
vers Monsieur ; et mon frère de Mazargues y en ayanl
envoyé unnommé Vitrol pour avoir seing en son ab-
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d'aanauld d'andilly. 478
sence de ce qu'il fault à Tescurye de Monsieur, ainsy w^y kh.
qu'il avoit tou8Jours accoustumé, et mesme don-
ner ordre au payement de la despense des chevaux ;
s'il se trouve que je l'aye chargé d'aucunes lettres,
ny d'une seule parolle, je ne dis pas soulignent à
Monsieur, mais à qui que ce soit, ny que j'aye mesme
parlé à luy, je veux perdre 1 honneur ; et n'y eu ja-
mais une plus fausse calumnie que celle que l'on m'a
imposée en cela auprez du Roy. Quant au comman-
dement que vous m'apportez d'aller au Sainct-Esprit,
ceste mesme raison m'empesche de le pouvoir exécu-
ter ; et supplie très humblement Sa Majesté de con-
sidérer sur ce subject, que sy lorsqu'on sa présence
je la servois sy utilement dans la Cour auprez de
Monsieur, qu'elle m'en tesmoignoit toutte la satisfac-
tion que je pouvois souhaitter, mes ennemis ont eu le
pouvoir de luy rendre ma fidellité suspecte ; que sy
quand elle me commanda de m'esloigner de Mon-
sieur, elle me dit qu'elle vouloit que je demeurasse
dans la Cour comme un homme de ma condition et
de ma qualité, et qui l'a vois très bien servie ; que sy
aussytost que je l'eus perdue de veue, elle me fit
commander dés le lendemain de m'en aller en Nor*
mandye, et puis au lieu de cela à Paris, où je n'ay pas
plustost esté , que le pouvoir et la liberté qUe mes
ennemis ont de calumnier augmentant par mon es-
loignement, ilz ont sur la plus grande fausseté du
monde porté le Roy à m' envoyer dire par vous des
outrages ; il n'y a point de crimes dont ilz ne s'ef-
fôrceassent de me fère croire coupable par Sa Majesté
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/i7& JOURNAL INIÎDIT
uaymk. lorsque je serai en Tune des extremitez de son
royaume et dans des places dont Passiette leur don-*
neroit mille subjectz de me calumnien On luy diroit
que je caballerois avec les Huguenots, avec Savoye,
avec Espagne ; et sy je n'estois point chrestien , je
croy que l'on luy diroit mesrae que je traicterois
avec le Turc. C'est pourquoy je supplie très hunn
blement Sa Majesté d'avoir agréable que, pour con-
server mon honneur et ma fidellité non seullement
inviolables comme ilz le seront tousjours, mais
exeraptz de soubçons que les artifices de mes enne-
mis en pourroîent donner à Sa Majesté , je ne bouge
de Paris, affin qu'au moindre mcscontentement que le
Roy aura de moy, il me puisse fêre arrester, et sy je
suis coupable, me fère punir sans envoyer quérir ma
teste sy loing ; et que ma présence et mon visage
donnent de la retenue à la meschanceté de mes enne*
mis. Que sy mon séjour dans Paris est désagréable
au Roy , je demeureray en tel village proche qu'il
luy plaira, et ne verray que les personnes qu'il m' or*
donnera. Mais sy tout cela ne suflBt , je sçay un ex-
pédient qui luy estera tous les soubçons que l'on luy
pourroit donner de moy, et fermera pour l'advenir la
bouche à mes ennemis ; qui est de me mettre dans la
Bastille. Car ainsy estant soubs la clef du Roy , au-»
cune de mes actions ne luy sçauroit donner d'um-
brage, et je recevray avec joye ceste probation (?)
en attendant que le temps faisant congnoistre à Sa
Majesté ma sincérité et la fidellité de mes services,
elle me juge digne non seullement d'estre mis en li-
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d'arnacld d'andilly. /i75
berté, maïs d'avoir meilleure part que jamais en Htyiin
Thonneur de ses bonnes grâces. -«-^ Galeteau respon^
dit qu'il ne se pouvoit charger de fère ceste response
au Roy, pour ce qu'il ne retourneroit de quatre ou
cinq jours à la Cour. A quoi Monsieur le Colonel
réplicquant que c'estoit chose bien rude et bien ex-
traordinaire de luy apporter un commandement, et
ne se voulloir pas charger de la responce ; et Gale-
teau insistant à s'en descharger , et disant qu'il le
mandast au Roy par quelqu' autre ; Monsieur le Co-
lonel dit qu'il chercheroit donc quelqu'un qui luy
voulust rendre cest office. Et se retournant vers
M"*' la Marquise de Montlord et M"' de Mazargues,
dit à Galeteau : Quel traictement est cecy de vou-
loir envoyer de ceste sorte à cent cinquante lieues
d'icy ceste pauvre femme languissante (parlant de
M"* de Mazargues acouchée depuis peu , et qui
avoit esté fort malade depuis) ; et ceste autre qui
depuis dix ans n'a point porté de santé (parlant de
Madame la Marquise) ? A cela Galeteau respondit:
Monsieur, ceste excuse est fort bonne ; et sera bon,
s'il vous plaist, de la faire dire au Roy. — A quoy
Monsieur le Colonel répartit : Nullement, Monsieur,
je ne dis point par excuse ; car j'ayme beaucoup
mieux payer de ma teste , que de la maladie de
ma femme. — Aprez Galeteau vint à M. de Ma-
zargues, et luy dit qu'il avoit fait entendre à Mon-
sieur le Colonel la volonté du Roy sur son subject.
— Galeteau estant party. Monsieur le Colonel et Ma-
dame la Marquise sa femme envoyèrent supplier
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476 JOURNAL INÉDIT
May Hu M. le Mareschal de Créquy de les venir voir, et eètant
venu à l'heure mesme, le supplièrent d'aller trou-
ver le Roy pour luy représenter les raisons de Mon-
sieur le Colonel dont Galeteau n'avoit pas voulu se
charger. Ce que M. de Créquy leur ayant promis,
il partit le lendemain, jour de la Pentecoste, et le
lendemain lundy à trois heures aprez midy, au re-
tour de la chasse du Roy, parla à Sa Majesté, la-
quelle luy respondit qu'elle ne vouloit rien escouter
de la part de Monsieur le Colonel , jusques à ce qu'il
fust dans le Sainct-Esprit
Dudit jour 25. M. de Marcheville, soubz-gou-
verneur de Monsieur, part de \a Cour, ayant eu son
congé, pour ce que l'on le croyoit amy de Monsieur
le Colonel. M. de Montgenoust, ausmosnier ordinaire
de Monsieur, fut aussy osté, et M. Passart mis en
sa place. MM. de Pelegrin et Dolphin, ordinaires,
furent aussy estez, avec permission de tirer récom-
pence d'une des deux charges, et de la partager
entr'eux. Ordonné que M. de Valsin se desferoit
aussy de la sienne. Carrillon, chirurgien, aussy osté.
Entre le mardy (21 may), et le samedy (25).
Monsieur, parmy plusieurs quy estoient à l'entour de
luy, ayant aperçu M. d'Aiguebonne, l'appella, et luy
demanda s'il feroitce qu'il luy commanderoit? M. d'Ai-
guebonne luy ayant respondu qu'ouy, et qu'il s'en
tiendroit fort honoré, Monsieur luy commanda d'aller
trouver M. de la Viéville, et de luy dire qu'il luy
avoit mancqué de foy et de parolle touchant Mon-
sieur le Colonel; mais qu'il s'asseurast que s'il ne le
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d'arnauld d'andilly. 477
réparoit, il ne Toublieroit jamais, et qu'il n'auroit pas May leii.
tant de peyne à fère le bien qu'il en avoit eu à fère
le mal. — M, d' Aiguebonne ayant dit cela à M, de la
Viéville, il demeura fort surpris, et respondit en
termes généraulx avec de grands respects vers Mon-
sieur le Colonel, qu'il l'honoroit, qu'il l'estimoit au-
tant que seigneur de France, et n' avoit jamais pensé
à luy rendre de mauvais offices auprez du Roy ; que
c'estoit chose qui estoit venue du pur mouvement de
Sa Majesté et que s'il pouvoit servir Monsieur le
Colonel, il le feroit tousjours pour sa propre considé-
ration, et encor beaucoup d'avantage puisque c'estoit
chose qui agréoit à Monsieur. — M. d' Aiguebonne
luy ayant réphcqué que cela n'estoit pas respondre à
ce que Monsieur luy mandoit, qu'il luy avoit mancqué
de parolle, et désiroit qu'il réparast le mal qu'il avoit
faict, M. de la Viéville respondit en homme fort em-
barrassé. — Quelque temps aprez, M. de Joyeuse,
neveu de M. de la Viéville, vint trouver M. d' Aigue-
bonne, et luy dire que M. de la Viéville seroit bien
malheureux sy Monsieur avoit mauvaise satisfaction
de luy, et qu'il feroit tousjours tout ce qui seroit en
son pouvoir pour le servir.
Jeudy 30 may (1624). M. de Bonœil apporte de
Compiègne à Monsieur le Colonel un chappellet de
la part de la Reyne-mère. La chose est que quelques
jours auparavant, la Reyne-mère donnant quelques
chappelletz qu'elle avoit apportez de Liesse, Mon-
sieur luy dit devant toutte la Cour: Ma maistresse,
j'ay une faveur à vous demander, mais je voussup-
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lll% JOURNAL INIÉDIT
M^ i«^« plie très humblemmt de ne la point refufier. — La
Reyne hiy dit : Je n'ay garde, mon filz ; qu'est-ce?
— Ma maistresse, c'est cpie vous envoyiez, s'il vous
plaist, un de ces chappelletz à Monsieur le Colonel,
affin que tout ce mcnde cognoisse que vous n'estes
pas contre luy. Le Roy ayant sceu cela, il fut agité
gy on envoyeroit le chappellet, et à ce que quelques*
uns dient, résolu que non ; mais néantmoins il vint,
et M. de Bonœil se trouvant mal quand il arriva,
l'envoya par une de ses filles. Et le lendemain dès
trois heures du matin fut remandé pour aller à Id
Cour, à cause des ambassadeurs qui arrivoient, ce
qui fut cause que Monsieur le Colonel luy escrivit:
Monsieur,
Je commence à croire qu'une mauvaise fortune
peult estreacompagnée debonhœur, puisqu'il a pieu
à la Reyne-mère du Roy me tant obliger que m'en-
voyer le chapelet que vous avez pris la peyne de me
faire rendre de sa part. Ceste faveur m'est sy sen-
sible, qu'il n'y a point de remerciemens capables de
tesmoigner avec quel respect je la reçois. Mais sy
les occasions secondoient mes désirs, j'oserois espé-
rer de fère voir à Sa Majesté, par mes très humbles
et très fidelles services, que l'honneur de ses com-
mandemens me sera tousjours plus cher que ma vye,
laquelle je tiendrois trop heureusement employée sy
je pouvois, en la perdant, donner à Sa Majesté une
aussy grande marque de ma recognoissance, que j'en
reçois une de sa bonté. Vous m'obligerez extrême-
Fevrier.
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D'ARNAtJLD D'ANDILLY. it79
ment de Yen assurer ^ et de croire que nul ne sera ^y i«^*
jamais plus que moy...
Lundy â juin (162/i) • A onze heures dumatin, un Jum.
exempt des gardes de la compagnie de M. de Tresmes,
nommé Boislouez, vient faire commandement de
la part du Roy, à Monsieur le Colonel, de partir
dans vingt-quatre heures avec ses frères, sa femme
et sa sœur, pour aller au Sainct-Esprit. Monsieur le
Colonel fil response : que quant à ses frères, ilz
avoient desjà obéy. (M. de Mazargues estoit party en
poste le lundy matin, et M. d'Ornano le lendemain) ;
que pour luy il ne le pouvoit, à cause des mesmes
raisons quMl avoit représentées au sieur Galeteau, et
qu'il répéta lors ; mais qu'il révéroit tellement l'au-
thorité du Roy, que voyant le baston qui en portoit
la marque, il estoit prest de le suivre à la Bastille^
ou en tel autre lieu que Sa Majesté auroit agréable,
affin de luy faire cognoistre qu'il ne vouloit avoir
autre protection qu'en sa justice et en son innocence.
Ce que l'exempt, luy promit d'aller rapporter au
Roy. Mais Monsieur le Colonel, ayant apris qu'il avoit
seullement escript à la cour par un archer qu'il avoit
emmené avec luy et qu'il n' estoit bougé de Paris,
Monsieur le Colonel escrivit le soir mesme au Roy,
et luy envoya la lettre par le com(missai)re le
Berche; lequel le lendemain sur les dix heures donna
la lettre au Roy, comme il sortoit de sa chambre,
luy disant que c'estoit une lettre que M. le colonel
d'Omano luy avoit donné charge de luy présenter.
Le Roy la prit, voulut rompre la soye, et luy dit
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480 JOURNAL INEDIT
jofn im. qii'aprez la messe il la verroit, et qu'il le vînt re-
trouver ; et en mesme temps commanda à Boulanger
d'aller quérir le marquis de la Viéville,
COPIE DE LA LETTAE DE M. LE COLONEL AU EOT.
• Sire,
» Lorsque la calumnie et le crédit de mes enne-
mis ont eu le pouvoir de me fère commander par
Vostre Majesté de quicter la charge dont vous m'a-
viez honoré auprez de Monseigneur vostre frère, et
mesme vostre présence, j'ay incontinent obéy. Mais
quand leur violence les a portez jusques à arracher
de vostre bouche des paroUes de cholère contre mon
innocence, et un commandement de me retirer au
Pont Sainct-Esprit, que je ne pouvois exécuter sans
me confesser coupable, j'ay très humblement sup-
plié Vostre Majesté, ainsy que je fais encores, de m'en
vouloir dispenser; et de considérer, s'il luy plaist,
que sy dans vostre cour, et depuis n'en estant qu'à
vingt lieues, on a bien peu vous desguiser sy mali-
cieusement la vérité de mes actions, il n'y a point
d'accusation que je ne deusse craindre lorsque je
serois comme relégué en l'une des extrémitez de
vostre royaume. Sire, bien que mes ancestres ayent
eu le bonheur de se rendre assez recommendables à
la France par leurs services, j'atribue toutesfois
principallement à leur inviolable fidellité le grand
nombre d'honneurs et de charges importantes qu'ilz
ont reçeus des roys vos prédécesseurs, sçachant qu'ilz
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D'ARNAOLD l>'ANDILLy, 481
n*ont jamais eu tant de soin de leur fortune ny de
leur vye, comme de se garentir non seullement de
blasme , mais du moindre soubçon. Geste mesme
passion envers mon Roy m'estant héréditaire, et ne
trouvant rien de diflScile pour en rendre preuve à
Vostre Majesté, j'ay mieux aymé, affin d' ester tout
subject à mes ennemis de continuer leurs calumnies,
me résoudre à perdre ma liberté dans une prison,
que me retirer en des places dont Tassiette leur four-
niroit des prétextes de donner continuellement des
deffiences de moy à Vostre Majesté. Ainsy je ne ré-
siste à leurs persécutions que par les respectz et la
souffrance, qui sont les seuUes armes dont je me sers
contre eux, puisqu'ilz se servent de vostre authorité,
que je révère mille fois plus en effect qu'ils ne le
font en apparence. J'espère de vostre bonté. Sire,
que malgré leurs artifices vous aurez maintenant
agréable qu'en abandonnant tout le reste, je con-
serve au moins mon honneur, qui m'est incompara-
blement plus cher que ma vye, et attens de vostre
justice qu'aprez que vous aurez récognu la sincérité
de mes intentions et la fidellité de mes services,
Vostre Majesté me redonnera bientost la place qu'on
m'a voulu fère perdre en l'honneur de ses bonnes
grâces , lesquelles je m'efforceray tousjours de mé-
riter par les plus passionnez debvoirs que vous puisse
rendre, vostre très humble, très obéissant et très-
fidelle subject et serviteur.
d'Ornano.
De Paris, ce 3 Juin 1C24.
31
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A82 iOURNAI. IN^PIT
Le Roy, au retour de la messe, ayant esté chez
la Reyne-mère, où le marquis de la Viéville se trouva,
dit au sortir de là au comm(issai)re le Bercbe, qui
luy demanda s'il luy avoit pieu de voir la lettre de
Monsieur le Colonel ? qu'il Tavoit veue. Et le Bercbe
luy demandant s'il luy pkisoit de luy rendre res^
ponse? le Roy dit que non, et qu'il luy dist seulle*
ment qu'il vouloit obéissance. Et le Berche luy ayant
demandé s'il luy avoit pieu de considérer les raisons
de Monsieur le Colonel? Il respondit : « J'ay toutveu;
dictes'luy seullementque je veux obéissance. > Et in-
continent (?) aprez, ayant rencontré le Berche, il luy
dit les mesmes choses, et luy commanda de s'en aller.
Le mardy 4 juin(162/i). Le dit exempt revint à
trois heures asprès midy trouver Monsieur le Colo-
nel, et luy dit que les vingt- quatre heures estant
passées, il venoit sçavoir s'il n'avoit point changé de
résolution. — Monsieur le Colonel respondit que non,
d'autant que sa fidélité et son honneur l'obUgeoient
à préférer une prison exempte de tous soubçons, à la
liberté qu'il auroit ailleurs subjecte aux calumnies
de ses ennemis. — Ce que ledit exempt luy dit qu'il
feroit entendre au Roy ; et néantmoins fit comme la
première fois. — M. le mydlord des Hayes, comte
de Carlie, ambassadeur extraordinaire d'Angleterre
touchant le mariage, arrive à Compiègne fort acom-
pagné, et eut audience le lendemain, en laquelle il
mit le genoul en terre devant Madame, mais non
devant les Reynes.
Mécredy 5 juin (1624). Monsieur l'archevesque
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d'ainauld d'andilly. 483
de Tours vient trouver Monsieur le Colonel sur les
dix heures ou dix heures et demie du matin, luy dit
qu'ayant appris à Compiègne le jour précédent les
refus qu'il avoit faictz d'obéir au commandement
du Roy, d'aller au Sainct-Esprit, et en estant très-
affligé, comme son amy, à cause de l'extresme faulte
qu'il faisoit en cela, il estoit monté en carrosse à
l'heure mesme, sans en parler à personne (M, de
Tours recogneu depuis qu'il avoit parlé au Roy au-
paravant que de venir, et est aisé de juger par ses
discours que le Roy l'avoit envoyé) ; et le venoit
trouver pour le conjurer de changer de résolution.
Sur cela, estant entrez dans le cabinet de Monsieur
le Colonel, ils y demeurèrent environ trois quartz
d'heures ; et là, M. de Tours ayant dit à Monsieur le
Colonel tout ce qu'il se peust imaginer pour luy per-
suader d'aller au Sainct-Esprit, tant s'en fault qu'il
y peust rien gangner, qu'au contraire il trouva qu'il
6*affermissoit tousjours de plus en plus. — Après,
M. de Tours estant allé parler à M"'* la marquise de
Montlord, et Monsieur le Colonel entendre la messe
qui se dit chez luy, comme le prestre avoit quasy
achevé, l'exempt entra avec quatre archers ayant
leurs casacques et leurs carabines et pistolletz. Mon-
sieur le Colonel, qui prioit Dieu fort attentivement
dans la chapelle , n'apercevant rien de cela, M. de
Chaudebonne le luy feit dire ; et aussytost Monsieur le
Colonel se leva, sortit de la chapelle, et vint à
l'exempt, qui luy dit qu'il luy avoit desjà faict divers
commandemens de la part du Roy de se retirer au
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liSb JOURNAL INÉDIT
Sainct-Esprit ; que maintenant il iuy en apportoit un,
dernier et absolu, ou bien un autre qui estoit de le
suivre à la Bastille. — Monsieur le Colonel, avec
visage non seullement constant, mais guay, respon-
dit: Que quant au premier des deux commande-
mens qu'il Iuy apportoit, il ne le pouvoit exécuter^
pour les raisons qu'il avoit desjà tant de fois repré-
sentées, et mesmes escriptes au Roy ; mais que pour
le second, il y obéissoit de tout son cœur. Et en di-
sant cela, alla embrasser l'exempt, puis Iuy dit, en
se retournant vers l'autel : Je vous jure sur mon
salut, devant Dieu que voilà, que je n'ay jamais
receu nouvelle avec davantage de joye. Mainte-
nant je ne crains plus les calumnies de mes enne-
mis; je suis en la protection du Roy, auquel, mal-
gré tous leurs artifices, je tesmoigneray ma fidellité
aux despens de ma liberté. — Et comme l'exempt
le pressoit de vouloir aller au Sainct-Esprit, il Iuy
respondit en haussant sa voix : Je remetz de très-
bon cœur ma fortune et ma vye entre les mains du
Roy ; il en peult disposer absolument. Mais quant à
mon honneur, il n'y a homme vivant soubz le ciel
qui y ayt puissance. — Et l'exempt Iuy représentant
ensuitte qu'il Iuy seroit beaucoup plus advantageux
d'aller au Sainct Esprit, il Iuy respondit qu'il estoit
le seul gentilhomme de France qui ne se pouvoit
passer des bonnes grâces du Roy ; que les autres
pouvoient vivre chez eux sans le Roy , de ce que
Dieu leur avoit donné de bien. Que quant à Iuy,
pouvant jurer avec vérité que M. le mareschal d'Or-
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d'abnauld d'andilly. 485
nano ne luy ayant laissé vaillant au monde que onze
cents livres de rente, il luy estoit impossible , outre
la passion naturelle qu'il avoit au service du Roy,
de se passer de ses bonnes grâces. Que ses enne-
mis les luy vouloient fère perdre en Tesloignant de
luy pour luy rendre aprez ses actions suspectes;
mais qu'il les vouloit conserver malgré eux en re-
mettant entre ses mains sa vye et sa liberté dans un
lieu où ilz n'auroient plus l'advantage de le pouvoir
calumnier. — Aprez cela, l'exempt l'ayant pressé et
repressé par plusieurs fois de choisir plustost le Pont
3ainct- Esprit que la Bastille, et voyant qu'il ne le
pouvoit fère changer de résollution, il luy dit : Mon-
sieur, quand vous plaira-t-il donc d'aller à la Bas-
tille ? — Il respondit : Présentement ; et pour vous
monstrer que vous ne me surprenez point, mon
petit pacquet est tout prést sur la table de mon ca-
binet ; car il y a trois jours que j'attendois cecy avec
impatience. Et en mesme temps commanda que
l'on mit les chevaux à son carrosse. Mais quelqu'un
qui se trouva là ayant dit à l'exempt qu'il vaudroit
mieux n'aller qu' aprez disner, à cause qu'il estoit
plus de midy, et que l'on alloit porter la viande, il
dit à Monsieur le Colonel qu'il valloit mieux qu'il
disnast avant que de partir. — Monsieur le Colonel
respondit que cela estant indifférend, il le vouloit
bien. Et incontinent il fut trouver Madame la Mar-
quise, et luy dire qu'elle ne se devoit point affliger,
puisqu'il avoit ce qu'il avoit désiré. Elle se com-
porta en cela avec un très grand courage. Puis il
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&86 JOURNAL IHiDIT
vint disner, et en disnant beut à Texempt à la santé
du Roy, et le pria de luy dire que sMl luy bailloit
la Bastille pour punition de n'avoir pas exécuté le
commandement d'aller au Sainct-Espritj il la rece-
voit de bon cœur pour telle, sçachant que le Roy
est le maistre et qu'il pouvoit fère ce qu'il luy plaist
Que sy au contraire il la luy bailloit pour protection
contre les calumnies de ses ennemis, il là recevoit
comme une très grande grâce, et espéroit d'avoir
un jour plus de part que jamais aux bonnes grâces
de Sa Majesté, à laquelle il le supplioit aussy de dire
que, soit qu'il demeurast dix heures, ou dix jours, ou
dix mois, ou dix ans dans la Bastille, il la supplioit
très humblement de croire qu'il seroit aussy prest
au sortir de là, d'aller sacrifier sa vye pour son ser-
vice, que sy elle luy donnoit maintenant là charge
de Connestable. — 11 dit aussy à l'exempt en dis-
nant, qu'il luy donnoit sa foy et sa parolle, que quand
on laisseroit les portes de la Bastille ouvertes, il n'en
sortiroit jamais que le Roy ne l'en tirast, et qu'il
désavouoit pour ses amis tous ceux qui parleroient
pour sa liberté , ne la voulant attendre que du Roy
seul, et de la cognoissance que le temps luy donneroit
de sa fldelHté. Après, il se mit à parler en riant de
diverses choses, et l'exempt l'ayant encor fort
pressé aprez disner d'aller plustost au Sainct-Esprit
qu'à la Bastille, et luy ayant mesmô dit qu'il luy
donnoit encor vingt-quati'e heures pour y penser.
Monsieur le Colonel respondit qu'il ne falloit pas
différer davantage, et qu'il luy tordoit desjà d'y
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D*ARNADLD d'ANDILLY. 487
estre. Et ainsy disant adieu à MaSame la Marquise
il s'en alla acompagné seullement d'un des siens
nommé Clermont, et fit mettre l'exempt à la poi^
tière auprez de luy avec im visage et une constance
au delà de toutes paroUes. M, de Chaudebonne se
mit dans le carrosse et l'acompagna jusques à la
Bastille, à la porte de laquelle, et encor après qu'il
fut dedans, l'exempt le pressa derechef avec grande
instance d'en sortir pour aller au Sainct-Esprit , et
luy dit qu'il luy donnoit encore vingt-quatre heures
pour y penser, ce qu'il refusa. Incontinent aprez
M. de Luxembourg le vint voir, et le lendemain,
jour de la Feste-Dieu, comme il estoit prest de
se confesser pour communier, M. de Luxembourg
estant revenu, le pria de ne le pas fère jusques à
ce qu'il eust eu ordre de la Cour ; ce qui fascha
Monsieur le Colonel. Et depuis ayant eu ordre de
la Cour de le resserrer , et ne laisser parler per-
sonne k luy, il le mit dans la chambre de Monsieur
le Prince, et ne le laissa plus promener sur les tours.
Mais M. de Luxembourg estant incontinent aprez
allé à la Cour, il en rapporta ordre de luy laisser en-
tendre la messe tous les jours, de le laisser confesser
et communier quand il voudroit, de le laisser pro-
mener deux fois le jour, et de luy bailler encor un
page et un lacquais.
Le sieur de Boislouet , exempt susdit, estant re-
tourné le soir mesme à Compiégne , le M. de la
Vieville luy fit dire qu'il y avoit mille livres à gangner
pour luy s'il le vouloit voir avant que voir le Roy,
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(iSS JOURNU INÉDIT D'ARBNAULD D*ANDILLÎ.
Mais il n'en voulut rien fère et alla trouver M, du
Hallier, duquel il avoit receu le commandement,
lequel le niena chez Sa Majesté ; et bien gue le Roy
fust couché, il entra, tira son rideau, et luy présenta
Boislouet sans avoir voulu auparavant sçavoirdeluy
ce qui s'estoit passé. Boislouet conta tout au Roy en
fort homme de bien ; et quand il luy dit les injures
de Galeteau , le Roy tesmoigna grand mesconten-
tem^t, et se mordit le doigt. »
FIN DE L*APPBNDICB.
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TABLE DES MATIERES.
1614
Pages
Janvier. — Mort de M. d'Attichy. — Dollé, intendant. —
Barbin, intendant de la maison de la Reine. — Duel de MM.
d*Ouailly et Maignemt contre Bouteville et Chantemerie. —
Duel de M. du Pesché contre M. d'Erouville. — Mort de Ca-
vart. — Mariage du marquis de Sablé avec M"* de Souvré. —
Retraite du duc de Nevers. — Enlèvement de M. de Vertau.
— MM. de Luxembourg et Barrin. — M. le Prince va à Châ-
teauroux. •— Rappel du duc d^Epemon. — Duel de MM. de
Bours-Montmorency et Bucan contre BiM. de ReAige et Des-
bordes-Videncey. — M. du Maine s'éloigne. — Duel de MM.
des Marests et de Sainte-More contre le marquis de Rouillac
et Saint^Vincent — Départ de M. de Bouillon . 1
Fbvribr. —MM. de Ventadour et de Boisdse envoyés vers M. le
Prince. — Départ de M. de Longuevillo. — Arrestation de
M. de Vendôme. — Le maréchal d'Ancre va à Amiens. —
Duel de M. de Miraumont contre M. de Nausé. — Cadenet
envoyé en Champagne. — Retour de MM. de Ventadour et de
Boissise. -r Le comte de la Roche piis .à la Bastille. — M. de
Nevers s'empare de Mézières. — Évasion de M. de Vendôme.
— Lettres de M. le Prince à la Reine et au Pariemeni .... Q
Mars. — M. de Thou va vers M. le Prince 8
Avril. — M. le Prince dépôcbe à M. de Roban, ^ Les Princes
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A90 TABLE DES MATIÈRES.
Pages,
à Soissons. — On traite avec M. le Prince. — Mort du Conné-
table 8
(jy avril à septembre^ lacune dans le JoumaL)
Sbptbmbbb. — M. le Prince revient vers le Roi 0
OcTOBEB. — Le Roi va au Parlement — États-Généraux* ... 10
Novembre. — Affaire de l'enlèvement d'un prisonnier par le duc
d'Epemon. 11
DÉCEMBRE. — Conseil de la direction changé. — Brouille de
M"* de Longueville et du duc de Nevers. — Brouille de M. de
Villeroy et du maréchal d'Ancre» — Chambre ardente. — La
paulette. — Mort du maréchal de la Chastre, remplacé par
M. de Roquelaure 15
4645
Janvier. -^ Remontrantes du Pariement sur l'article fr du ca-
hier du Tienk^tat ^ Ah-èt du Conseil à ce sujet. — La pau-
lette. -^ Discussion sur l'art, l*'. — Brouille du cardinal de
Sourdis et de M. le Prince. — Duel du marquis de la Force
avec M. de Grammont. — Réclamations de l'ambassadeur
d'Angleterre contre le cardinal du Perron. — État des finances.
— Propositions d'Amàuld l'intendant. — Violences exercées
envers M. de Riberpré. — M. de Puisieux chargé des deniers
du taillon. — Amboise enlevé à Monsieur le Prince. — Sup-
pression du 1*' article. — Jugement d'une prise faite sur les
Espagnols ps^ Barre et Fleury, capitidnes français. — Duel
de Livarrot et Auvilars contre la Ferté et la Tr^re. — Le clergé
récuse la juridiction du Parlement. — L'Évêque d'Angers et
le Chancelier « . . ; . 23
FÉVRIER. — Violences de M. de Bonnevàl envers M. de Cha-
vaille. — Bonnevàl condamné à mort. — Affaire de Marsillac
et de Rochefort. — Conduite de Monsieur te Prince enyét& le
Parlement et la Reine. — Plaintes du député Digoine. —
Excuses de M« le Prtoee. — DétibéHOloiis ctoi Étata. —
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TABLB DES MATIÉRBS. A9i
Pages.
Brouille de M. de Souvré et de M* de Laynes. — Clôture des
États. — Séance royale. * 43
BfARS. — M. de Luynes a le goureniasieiit d*Amboise. — Dëli-*
bérations du Parlement et du Conseil sur la paulette. •— Les
trois Ordres au Louvre. — Mort de la reine Marguerite. -*
Soumission de M. de Vendôme. . . . * • 59
Avril. — Réconciliation du ma^éebal d'Ancre avec M. de Lon-
gueville et M. de Vîlleroy. — Duel de M. de Bressieux et de
M. de la Valette. — Duel du vicomte de Rabat et de M. de
Longnac. — Discussion au Conseil sur les finances ; discours
d'Amauld. — Le Parlement mandé au Louvre. — Remon-
trances. - Querelle d'étiquette au sujet de la queue du man-
teau royal. — M. de Caudale, premier gentilhomme de la
Chambre. — Soumission de Monsieur le Prince. 66
Mai. — Duel de M. de Losières et de M. de Madaillan. ~- Sur-
séance à la révocation de la paulette. ~ Départ de Monsieur le
Prince pour Valéry. — Remontrances du Pariement sur les
désordres de FÉtat. •*- Discussions entre le Parlement et le
Conseil. — Paroles de la Reine.— Arrêt du Parlement cassé. 73
Juin. — Délibérations du I^arlemeut au sujet de l'arrêt cassé.
— Règlement du Coûseîl. — M. le Prince à Saint-Maur. -^
Violences de M. de Canisy. — Querelle d'étiquette entee
M"* de Longueville et la duchesse de Guise 81
Juillet. — M. de ViUeroy député vers M. le Prince. — Préten-
tions de celui-ci. — Le Roi fait tirer douze cent mille livres de
la Bastille. — Conférences des Princes. — Assassinat de M. de
Prouville par Marianna. — Rupture des Princes avec la Cour.
— Pontchartrain envoyé vers Monsieur le Prince 88
Août. — M. de Longueville se retire à Amiens. — Duel de
MM. de Montmorency et de Portes contre MM. de Retz et de
Vitry. — Le maréchal d'Ancre va â Amiens. — Le Parlement
mandé au Louvre au sujet du départ du Roi pour son ma-
riage. — Mesures pour la sûreté de Paris pendant l'abseUce du
Roi. — M. de Chevry nommé intendant des finances. — Ordre
au président le Jay d'accompagner le Roi. — Manifeste de
Monsieur le Prince. — Le maréchal de Boisdauphin chargé
de commandement général de l'armée. — > Lte Conseil délibère
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&92 TABLB DBS IIATIÈAfiS*
Pages.
8UP la guerre. ^ Le Parlement délibère sur le danger du dé-
part du RoL — BL de Loménie fils a la survivance de la
charge de son père. — Départ de la Reine-mère et du Roi.—
Arrestation du président le J&y. — Remontrances du Parle-
ment — Détails sur le voyage du RoL — Administration des
affaires pendant l'absence du Roi. — Arrestation du sieur de
Foraise, agent de Monsieur le Prince. ^3
Septeiub. — Nouvelles du Toyage du Roi et de la marche de
son armée. ^ Ass^nblée de Grenoble. — Déclaration du Roi
contre Monsieur le Prince. ^ Délibérations du Parlement. . 112
OcTOBRB. — Affaires entre les armées du Roi et celles de M. le
Prince. —Mariage du Roi à fiurgos et de Madame à Bordeaux.
— Prise deClermont par le maréchal d'Ancre. — Passage de
Bony par l'armée de M. le Prince. — Conduite du maréchal
de Boisdauphin iid
NovEMiiRB. — Échange de Madame et de l'Infante. — Nouvelles
de la guerre. — Le Roi et la jeune Reine font leur entrée à
Bordeaux. — Marche des armées. 126
DÉCEMBRE. — M. de Guise , lieutenant général des armées du
Roi. — Duel de M. de Montglat et de M. de Vitry. — M. de
la Roche-Guyon, grand louvetier. — M. de Rheims, cardinal.
— L'armée de Monsieur le Prince à Oleron 129
1616
Janvier. — Affaires entre l'armée du Roi et celle des Princes.
— Départ des députés de l'Assemblée de Mîmçs. — Le Roi
arrive à Poitiers. — M. de Caudale se déclare de la Religion.
— La Conférence de Loudun est décidée, — Disgrâce du
conunandeur de Sillery, de MM. de Lorme et de Guron. — La
Cour arrive à Tours.— Accident dans la chambre du Conseil. 133
FÉVRIER. — M. de Vendôme se prononce pour Monsieur le Prince. •
— Brouille entre M. de Vendôme et le marquis deCœuvres. —
Noms des députés à la Conférence de Loudun. — Mort do
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TABLE DBS MATIÈRES* ft9â
Pages.
Montalte, médecin <lelaReino-mère, et de M. Flenrance, pré-
cepteur du Roi 137
Mars. — Affaire près de Château-Thierry, entre IL de Vitry et
M. de Novion. — Nouvelles de la Conférence. «- Retour de la
maréchale d*Ancre à Paris. — Démêlés du marquis de Cœuvres
avec les habitants de Crespy. — Nouvelles de Tarmée et de la
Conférence. — Retour du maréchal d'Ancre à Paris. — Le
marquis de Bonnivet mis & la Bastille. — M. de la Vieuville
achète de M. de Plainville la charge de capitaine des gardes.
— Mortde M. DoUé 142
Avril. — Rigueurs de M. d*Êpemon en Limousin. — Mort de
M. de Beaumont. — M. de Béthune envoyé en Italie. ~ Dé-
part du maréchal d'Ancre. — Appel de M. de Vitry par le
comte de la Suze. — Mort de M. de la Boulaye. — Les sceaux
retirés au chancelier • . 153
Mai. ^ Paix signée & Loudun. — Retour de la Reino-mëre à
Paris. — Arrivée du Roi et de la Reine dans la capitale. —
M. du Vair garde des sceaux. — Les Princes viennent trouver
le Roi à Paris. — M. Barbin nommé contrôleur général, le
président Jeannin surintendant, et M. de Castille intendant des
finances. 162
Juin. — Évasion de M. de Mareil. — Appel de M. de Montbazon
par le baron d'Anneval. — Le sieur de Beau veau, condamné
à mort, tiré de prison par commandement du Roi. ^ Remon-
trances du Parlement. ^ Préséance contestée au garde des
sceaux par le Parlement— M. Mangot nommé secrétaire d'État
contre la volonté de M. de Villeroy. — Soulèvement contre le
maréchal d'Ancre.— Le comte d'Auvergne sort de la Bastille. 168
Juillet.— Exécution de deux palefreniers du maréchal d'Ancre.
— Retour de quelques-uns des Princes. . . • • 180
Août. — Arrivée de l'ambassadeur d'Angleterre au sujet du
mariage de M"* Chrétienne. — Réorganisation des Conseils du
Gouvernement. — Reddition de Péronne à M. de Longueville.
— Démêlés entre Monsieur le Prince et le maréchal d'Ancre.
— Ce dernier se retire à Caen. — Inimitié de M. de Guise
et du maréchal d'Ancre. — La Reine-mère veut rétablir l'au-
torité du Roi 183
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ft91| TABLB DES MàTIÈHPS.
Pages.
Septbmbki. — Arreitation de Ifonùeur le Pnnce ; détails à ce
gujet. —Départ de MM. du Maine, de BouiUoii et de la Tré-
mouille. ~ M. de Vendôme se sauve.— M. de Guise et M. de
JoinTÎUe font rejoindre les princes à Soissons. — D^art de
M. le président le Jay. — Pillage de la maison du maréchal
d'Ancre. — MM. de Thémines et de Bfontigny nommés maré-
chaux de France. — Conduite de M. de Sully. — Mariage de
M^ de Soissons avec M. de Longueyille. — Le Roi va au Paiv
lement faire Térifier la déclaration contre les Princes absents.
— M. le comte d'Auvergne nommé général de l'armée du Roi.
«- Duel de M. de Brantes et de M. de Ryonne. ^ On envoie
vers les princes pour traiter avec eux. — Conduite de M. de
Nevers. — Reddition de Chinon. — Retour de MM* de Guise
et de Joinville — Mort de M. de la Chastaigneraye. — M. de
Guise va à Soissons et obtient l'accommodement des princes. 19&
Octobre. — Retour du maréchal d'Ancre.— Il se réconcilie avec
M. de Guise.— Brouille entre M. d'Épemon et les Rocbellois.
— M. de Luynes grand fauconnier. — Le maréchal d'Ancre
fait dresser des lettres d'érection de son marquisat en duché-
pairie. — Mort de M. de la Chevalerie. — Maladie grave du
Roi. — M. de Lesdiguières va secourir le duc de Savoie. . • 317
Novembre. — Changements dans les Conseils du Gouvernement.
— Exécution de Boursier, accusé d'avoir voulu tuer la Reine-
mère. — M. de Lussay envoyé pour favoriser le passage du
duc de Nemours en Savoie. — L'entrée de Reims refusée &
M"* de Nevers — M. de Nevers fait piller la maison de Si
appartenant à M. de la Vieuville. — Bompar assassiné par
Cusac. — M. de Blerancourt, gouvsmeur de Péronne, Mont-
didier et Roye. — Duel du duc de Rohanneis et de M. de la
Frezeliëre. — Le Roi exige que M. de Nevers rende justice
à M. de la Vieuville. — Résistance opiniâtre de M. de Nevers.
— Examen de cette affaire au Conseil d'État. — Les sceaux
sont retirés à M. du Vair et donnés à IL Mangot. — M. de
Luçon est nommé secrétaire d'Etat à la place de M. Mangot.
— Le maréchal d'Ancre part pour Rouen où il va tenir les
Etats. — Le Roi danse son premier ballet. — MM. de Nevers
et de Bouillon se fortifient S35
DÉCEMBRE. — Retour du maréchal d'Ancre. — Le gouvernement
de la Bastille enlevé à IL de Thonines; sa conduite à ce sujet,
r— Mauvais état des finances. — ^ Projets du Roi pour jr pouiw
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TABIB DES MiTIÈRBS. A95
Pages,
voir.— Oppetition de la GoUr des Aides.— Disœara du garde
des sceaux et du président Chevalier. — Sainte -Menebould
repris à Bl. de Mevers. — Le gouvernement en est donné à
M. de Fossez. — M. de Schomberg envoyé en amlMissade ex-
traordinaire en AUemagne. • • • S44
I6<7
jANvnA. — Mort de la flUe du maréchal d* Ancre. — Duel de
M. de la Courbe avec M. de la Beyne» — Le marquis de
Cœuvres refuse de payer l'impôt & Laon ; ajournement per-
sonnel contre lui. — Manifeste de M. du Mayne. — Réponse
du Roi faite par M. de Luçon. — Déclaration contre M. de
Nevers. — M* de Rohan arrive à la cour. M. de Thémines va
commander en Champagne. — Réconciliation deLuynes avec la
Reine-mère et le maréchal d'Ancre, t— Les Princes à Soissons. 357
FÉvRiBiu •— Le comte d'Auvergne va coomiander en quelques
provinces. — Le maréchal d'Ancre va en Normandie. -r- Affaire
entre les troupes de M. de Candale et celles de M. de Ven^
dôme. — M"« de Vienne enlevée par Saveuse. — Déclaration
contre MM. de Vendôme, du Mayne, de Bouillon. — M. de
JoinviUe, grand Chambdlan. — M. de Guise va à Ch&teau^
Thierry* — Conventions entre MM. de Thémines et de Praslin*
— Prise de Cufy et de Vousy par le maréchal de Montigny. . fi61
Mars. — Vincenze, secrétaire du maréchal d'Ancre, fait prison-
nier» — La Grange, secrétaire de Monsieur le Prince, mis au
Châtelet. — Siège de Richecour. — Les Princes se séparent.
—Confiscation de leurs biens.— Prise d'Antrin et de Clamecy.
— Le prince de Château-Porcien et le marquis de Gallerande
faits prisonniers. — Armée du comte d'Auvergne. — M. de
Richelieu, maréchal de camp. — Siège de Saint-Pierre-le-Mous-
tier. — Disgrâce de Mi de Fiesque. — Nouvelles des armées.
— M. de Nemours arrive à la cour. — M. de Rohan vient à
Paris. — Prise de Pierrefonds. — M. le maréchal d'Ancre
revient à Paris, — Prise de Château-Porcien 266
Avril. — Soissons Investi. — Le maréchal d'Ancre va en Nor-
mandie. — Prise de Rethel. — Calomnie contre la Reine im-
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/i96 TABLB DES IIÀTIÈAB6.
Pages,
putée par le btron dlJxeUes an duc de Betlegarde. * Retour
et assâBstnat du maréchal d'Ancre.^ Mauvais traiteinents en-
vers la Reinemère. — M. de Vitry, maréchal de France. — ^Ar-
restatko de la maréchale d'Ancre. -* Mauvais traitements
eiiveis son fils. ^ Disgr&ce de Mangôt, de Tévêque de Luçon,
arrestation de Barbin. — Rappel de M. de Villeroy ; Jeannin,
surintendant des finances ; du Vair, garde des Sceaux; le Chan-
celier, chef du Conseil ; M. de Maupeou, contrôleur général
des finances. — Faveur de BL de Luynes. ^ Mariage du duc
de Longueville avec Bl"* de Soissons. 276
Mai. -^ Départ de la Reine-mtîre pour Blois. — Condamnation
de du Travail. — Retour des Princes. — Mort du président
de Thou. — M. Déageant, intendant des finances. — Retour
du comte d'Auvergne. — Assassinat de M. d'Orvilliers Vialart.
— M. de Vitry, reçu conseiller au Parlement. — L'Assemblée
de la Rochelle se sépare. — Madame la Princesse entre à la
Bastille.— Retour de M. de Guise.— Duel de M. de la Valette
avec IL de Schomberg 298
Juin. — BL de Luynes, conseiller au Parlement — Femme de
Gliartres accusé d'avoir voulu tuer le Roi. — Différend entre
MM. de Guise et de Nevers..— Arrivée de l'archevêque de
Pise, Ambassadeur de Savoie. 306
Juillet. — Condamnation et exécution de la maréchale d'Ancre.
— Arrivée de M. de Montmorency et du prince de Sedan. —
Livre des quatre ministres de Charenton ; ajournement per-
sonnel. •— Prise de Fougères par le baron de Guémadeuc —
Il est mis à la Bastille. — Prise de Verceil par dom Pedro de
Tolède 308
AocT. — M. de Modène envoyé vers la Reine-mère. — L'évêché
de Lisieux donné au garde des Sceaux.— Déclaration touchant
les Clinquants. — Don de la confiscation de la maréchale
d'Ancre à M. de Luynes. — Complot pour tirer Monsieur le
Prince de la Bastille. 312
Septembre. — Paix de Savoie. — Arrivée du général des Capu-
cins. — Mort du maréchal de Montigny. — Le maréchal de
Vitry, gouverneur du Berry. — Mariage du duc de Luynes
avec M^^ de Montbazon.— Mort de M. de Refuge. —Monsieur
le Prince conduit à Vincennes. — Condamnation et exécution
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TABLE DBS MATIÈRES. &97
Pages
de Geniers. — Démarches de M. de Sutly pour rentrer aux
finances. — Le marquis de Cœuvres, ambassadeur à Rome.
— Exécution de Guémadeuc 314
Octobre. — Convocation de TAssemblée des notables à Rouen.
— Le Roi veut supprimer la vente des gouvernements. —
M. de Modène envoyé à Rlois. — Mort d'Arnauld Tintendant. 320
Novembre. — M. d'Epemon revient à Paris. — Départ du Roi
pour Rouen. — Amauld d'Andilly y suit la Cour. — Conduite
de M. de Luynes en arrivant à Rouen. — fl est chargé d'ou-
vrir les Ëtats en sa qualité de lieutenant-général au gouver-
nement de Normandie, —Plan de l'Assemblée. — Discours
de M. de Luynes. — Arrivée du Roi à Rouen 320
Décembre. — Ouverture de l'Assemblée des Notables. — Con-
ventions entre la Noblesse et les officiers des Parlements. —
Liste des membres de l'Assemblée et tableau de leurs positions
respectives. — Travaux de l'Assemblée. — ^Mort de M. de Ville-
roy. — Madame la Princesse accouche d'un enfant mort-né ;
l'évoque de Paris refuse de lui faire des obsèques. — Le car-
dinal du Perron présente au Roi le cahier des délibérations
de l'Assemblée. — Clôture de ladite Assemblée. -^ Départ et
retour du Roi. 327
1648
Janvier. — Retour du Roi à Paris. — Les Cours souveraines
vont le féliciter. — Discussions sur la paulette. — Sa révo-
cation. — M. de Modène va en Piémont. — Remontrances du
Roi au Parlement. — M. de Candale se refait catholique. —
M. de Cadenet va trouver la Reine-mère à Blois. — M. de
Cussé nommé évêque de Nantes. — Le Roi congédie les mem-
bres de l'Assemblée de Rouen 34/t
FÉVRIER. — Exil de MM. de Richelieu et de Pont-Courlay. —
33
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&98 TABLE DES MATIÈREB.
Pages.
M. de RusceRay frappé par le marquis de Rouillac; détails
sur cette affaire. — M. de Roissy envoyé vers la Reine-mère.
^ Rétablissement du collège des Jésuites à Paris. — Mort
du prince d*Orange. — M. le colonel d*Ornano part pour
Orange à ce sujet 348
Mais. — M. de Marsillac envoyé vers le prince Maurice devenu
prince d*Orange. — Mariage du comte de Brissac avec M"* de
Schomberg. — M. de Montbazon arrange l'affaire de M. de
Saveuse au sujet de Tenlèvement de M"* de Vienne. --
Querelle du marquis deMarigny et du chevalier de Vendôme.
— Incendie du Palais-de-Justice. — Mort de M"* de Nevers.
— Procès entre M. et M"* de Caudale. — M. de Courtenay-
Blaineau mis à la Bastille. — BL do la Trémoille arrive à
la Cour. — Le duc de Sully va siéger à la Chambre de l'Edit.
— Boisguérin accusé d'avoir voulu assassiner le Roi. —
M. de Boumonville remplacé à la Bastille par M. de Launay.
— M. de Montmorency arrive à la Cour. — Procès de Barbin ;
lettres de la Reine-mère 352
Avril. — Barbin mis à la Bastille avec MM. de Boumonville,
de la Ferté, TEvesque, la Rose et le sergent Lisy. — L'évèque
de Paris promu au cardinalat. — Le résident du duc de
Florence reçoit Tordre de quitter la France. — Exil de
révèque de Luçon. — Remontrances du Parlement au sujet
de la paulette. — Prêtre de Caen accusé d'avoir voulu tuer
le Roi. — Affaire de M. de Vaillac et de M. du Vair; duel
à ce sujet. — M. de Sully quitte la Cour. — Plaintes des
ducs et pairs contre le garde des sceaux ; question de pré-
séance. — Querelle entre M. d'Epemon et le garde des sceaux.
~~ Les maréchaux de France réclament la préséance sur
les ducs et pairs. — Le gouvernement de Monsieur enlevé
à M. de Brèves H donné au comte de Lude. — M. d'Epemon
exilé à Metz. 359
Mai. — M. des Portes-Baudouin, seigneur de Souspire, inten-
dant des finances à la place de M. Déageant; M. Bardeau,
secrétaire du Conseil à la place de M. des Portes-Baudouin. —
Duel de MM. de Quinsay et de Maussy. — Le comte d'Au-
vergne revient à la Cour. — Le duc de Rhetelois nommé
gouverneur de Champagne. — M. de Mayenne, gouverneur
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TABLE DES MATIÈRES. A99
Pages,
de Guyenne ; M. de Luynes, gouverneur de riIe-de-France ;
M. le colonel d'Ornano, lieutenant-général en Normandie. —
Député de Lyon frappé par M. de Sain^CIlaumont. — Les
frères de Slty , arrêtés. — Le colonel d'Ornano va à Blois. —
Le poète Durand, arrêté 372
JoiN. — Le duc de Nemours présente à la Cour M ^ d'Aumale,
sa femme. — Reddition de Verceil. — Le Roi va à^Lésigny.
— Incendie au port au Foin 374
Juillet. — Marsillac et Lesec mis à la Bastille. — Le Roi va à
Saint-Cermain. — Durand et François de Sity, roués ; André
de Sity, pendu. — M. Ribier, conseiller d*Etat. — Edit sur
les propositions soumises aux Etats<jénéraux et à l'Assemblée
de Rouen • . . . 375
AooT. — Mort de M. de Boucart, remplacé par M. de Brantes. *
Décret du Grand<Ionseil contre M. de Persan. — Disgrâce de
MM. de Ruscellay, de Sardiny, de Jouy, de Montpouillan. —
Fôte de Saint-Louis célébrée pour la première fois. — Arrêt
du Grand-Conseil contre Barbin et ses coaccusés 376
Septembre. — Mort du cardinal du Perron; le cardinal de la
Rochefoucauld, grand aumônier, à sa place. — M"« la
Princesse accouche de deux enfants morts. — Voyage du Roi.
— Le P^reAmoux envoyé à Blois; lettre du Roi à la Reine-
mère. — M. de Luynes achète la Fère à M. de Vendôme. . . 379
Octobre. — Le Roi va à Soissons. — M. de Montmorency va
en Languedoc. — Suite du voyage du Roi. — M. de Longue-
ville revient à la Cour. — Retour du Roi. — M. de Modène
envoyé à Blois. — Disgrâce de Fiesque, de Bautru, de
BouUanger, du père Crochart. — Comédie de la Reine. —
MM. de Béthune et de Modène vont au devant du prince-
cardinal de Savoie. — Disgrâce de la comtesse de Moret. . . 381
Novembre. — Arrivée du cardinal de Savoie ; il demande la
main de M"* Chrétienne pour le prince de Piémont. —
Le Roi le mène à Saint-Germain. ^ Le colonel d'Ornano
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500 TABLE DES MATIÈRES.
Pages,
va en Normandie prendre possession de sa charge de lieu-
tenant-général; discours qu'il prononce à cette occasion. —
M» du Fargis envoyé en Espagne. — M. de Cadenet va à
Blois et à Amboise. — M. de Vaudémont arrive à Paris avec
le Prince son fils» ^ 383
DÉCEMBRE. — Les Espagnols de la Maison de la Reine sont
congédiés. Maladie de la Reine. — Disgrâce de M. Déageant
et de M. de Lassé. — M"* de Luynes, surintendante de la
maison de la Reine; M*"* du Vemet, dame d*atours. —
Querelle du comte de Soissons et du prince de Vaudémont.
— M. de Vaudémont retourne en Lorraine. 389
1619
Janvier. — M. de Cadenet nommé ministre à la place de
M. Déageant. — M. du Fargis revient d'Espagne. — Le
contrat de mariage de Madame Chrétienne avec le prince
de Piémont est signé. — Mort de la duchesse d'Angoulème.
— Mariage du duc d'Elbœuf avec M"* de Vendôme. — Mort
de la princesse d'Orange. ^ M. d'Épemon part de Metz sans
congé du Roi pour aller délivrer la Reine-mère 394
FÉVRIER. — M. de Guise part pour aller poursuivre les pirates
d'Alger. — Arrivée du prince de Piémont. — Mariage de Ma-
dame Chrétienne. ^Différend entre le duc de Mayenne et le
maréchal de Roquelaure. — Évasion de la Reine-mère du
château de Blois. — Elle arrive à Angoulême. — Correspon-
dance entre le Roi et la Reine-mère. * Le Roi mande M. de
Guise. — Le maréchal de Vitry revenu à la Cour est con-
gédié par le Roi. — M. de la Chesnaye envoyé par te Roi
vers M. de Bouillon ; réponse de celui-ci 398
Mars. — Le Roi commande à M. de Luçon d'aller trouver la
Reine-mère. — M. de Luçon part d'Avignon ; il est arrêté à
Vienne, conduitii Lyon, rerais en liberté par M. d'Alincourt
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TABLE DES MATIÈRES. 501
Pages,
et repart pour Augoulême. — Le Père Suffren se rend auprès
de la Reinennère. — Le prince cardinal de Savoie retourne
en Piémont. — Offres du Roi à M. de Saint-Luc. — Disgrâce
du comte de la Roche-Guyon. — Mécontentements du Par-
lement. — Séance royale au Parlement. — Édits des petits
sceaux et de revente de quelques domaines. ^ MM. de
Béthune et de Bérulle envoyés vers la Reine-mère. — Lettre
de la Reine-mère apportée par M. Villiers Saint-Genest. —
Duel du jeune Villequier avec le jeune Bouteville. — M. de
Blainville ambassadeur en Lorraine. — Maladie de Monsieur
le Prince ; le Roi lui renvoie son épée. — Le Roi envoie vers
M. de Sully qui résiste aux avances de la Rèine-mère. . . . ^07
Avril. — Reddition de Boulogne aux armes du H^. — Retour
à la Cour du maréchal de Vitry. — M. de la Trémoille revient
de Sedan, où il avait épousé M"* de Bouillon. — Le cardinal
de la Rochefoucauld envoyé vers la Reine-mère. — Prise de
l'abbaye d*Uzerche par M. de Schomberg. — Le comte de
Boullay, ambassadeur du duc de Lorraine ; il est nommé
colonel des Vallons. — M. de la Valette désarme les habitants
de Metz. — M. de Brantes, capitaine des chcvau-légers du
Roi à la place de M. de la Curée. — M. de Traisnel , envoyé
comme ambassadeur extraordinaire en Angleterre 415
Mai. — Départ du Roi pour Orléans. — Mort de la maréchale de
Fervaques. — La Reine-mère accepte les propositions de paix.
— M. de Nevers diargé du commandement en Champagne.
*— Traité d'Angoulême entre le Roi et la Reine-mère. —
M. de Marousan envoyé à Angoulême. — Le Roi va à Blois
et à Amboise. — Succès de M. Nevers — Licenciement de
de l'armée du Roi. — Le Roi va à Tours. — Le comt» de
Brennes envoyé par la Reine-mère vers le Roi ; son insolence
envers M. de Luynes. Û19
Juin. — M. de la Chesnaye envoyé à Angoulême. —La Reine-
mère désavoue M. de Brennes; cabale de M. de Russelay.
— Le prince de Piémont va à Angoulême. — L'Ambassadeur
d'Angleterre va à la Cour à Tours. — Retour du Marquis
de Traisnel. —M. de Mayenne vient trouver le Roi à Tours
avec la noblesse de Guyenne. — La Reine-mère se démet du
gouvernement de Normandie en échange de celui d'Anjou. -^
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502 TABLE DES MATIERES.
Pa^es.
Mutations dans le Gouvernement des p.laces d'Anjou. — > Le
marquis de Mosny, mécontent de la Reine-mère, se rend à
la Cour •....., 426
Juillet. — Mort de Gallati, colonel du régiment des Suisses ;
nominations dans ce corps à la demande de M. de Bassom-
pierre. — Le comte Henry, frère du prince d'Orange, vient
trouver le Roi à Amboise. ~ M. de Richelieu est tué en duel
par le marquis de Thémines. — M. de Russelay mécontent
de la Reine-mère et de M. de Luçon arrive à la Cour. —
-M. de Montbazon envoyé vers la Reine-mère pour la prier de
revenir auprès du Roi. — M. de Vendôme, général de Tarmée
envoyée pour prendre Concameau.— Disgrâce de M. Déageant;
il se retire en Dsophiné , . . . . h^i
Août. — M. de Gadenet achète la comté de Maillé. — M. do
Longueville reçoit le gouvernement de Normandie ; M. de
Luynes, celui de Picardie ; M. de Montbazon, celui de Tlle-de-
France; M. de Gadenet est nommé lieutenant-général en Nor-
mandie. — Prise de Concarneau par les capitaines la Besne et
la Gourbe. — Mort de M. de Ghambret — MM. de Praslin et
de SaintrGéran sont nommés maréchaux de France. — Ma-
ladie de Monsieur. — Naissance d'Anne-Geneviève de Bourbon
(la duchesse de Longueville) . — La Reine-mère part d'An-
goulème pour venir à la Gour ; cadeaux qu'elle fait au duc
d'Épemon et à ceux qui l'ont assistée. ^ Duché-pairie de
M. de Luynes et de M. de Lesdiguières ; discussions à ce
sujet au Parlement. . . ^ hhO
Septembre. — M. de Schomberg est nommé surintendant des
finances ; il prend Arnauld d'Andilly en qualité de premier
commis. — Entrevue du Roi et de la Reine-mère à Gouzières.
— Suite du voyage du Roi et de la Reine-mère. — Assemblée
des Réformés à Loudun. — États de Bretagne. — Mort du comte
du Lude. — Le colonel d'Ornano le remplace 4A6
Octobre. — Le Roi va à Gompiègne. — Les députés de l'As-
semblée de Loudun se rendent auprès du Roi, — Le Roi va à
GhantiUy.^ Mise en liberté de M. le Prince; il va trouver le
Roi à Ghantilly 451
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TABLE DES MATIÈRES. 503
Pages.
Novembre. — Suite du voyage du Roi. — M. de Luynes fait
le serment de duc et pair ; détails sur la séance du Parle-
ment à ce sujet. — Déclaration de l'innocence de Monsieur
le Prince - 453
DÉCEMBRE. — M. deBUdnville achète de M. de la Rochefoucauld
la chaiige de Maître de la garde-4t>be. — Promotion de che-
valiers du Saint-Esprit. — M. de Gadenetest nommé maréchal
de France. — Différend entre Monsieur le Prince et le comte
de Soissons au sujet de la serviette du Roi. — M. de Nemours
fait appeler M. de Guise 456
Pin DR LA TABLE DRS MATIERE.^.
Paris. — Typographie A. Wittcrshcim, 8, rue Montirioi'ency.
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ERRATA.
P. XVI, ligne 17 et 18, j'ajouterai que ce défaut môme ajoute encore à la
valeur : //*^z j'ajouterai que ce défaut même contribue à la valeur.
P. XXVI, lig. 19, d'Andilly ; là chque fait, lisez d'Andilly ; là, chaque fait.
P. 18 , lig. 18, envoyaprier, lisez envoya prier.
P. 98 , lig. 8, contre ce qui est des registres, lisez es registres.
P. 105, lig. 18, pouvoir témoigner , lisez pouvoit témoigner.
P. 106, lig. 12 et 13, il reçoit lettres, lisez il reçut lettres.
P. 109, lig. 9, affaire à un, lisez affaire à Tun.
P. 111, lig. 11, M. du Plessis y vid Sa Majesté, sembla réprouver, lisez
M. du Plessis y vint. Sa Majesté sembla réprouver.
P. 120, lig. 6, à Montmeril, lisez à Montmirel.
Ib. lig. 14, Planty, lisez Plancy.
Ib, môme lig., et son canon à gué^ lisez canota gué.
P. 122, lig. 6, paraissent, lisez paroissent*
P. 129, lig. 3, Les villes de Tartau, lisez Tartas.
P. 133, lig. 17, rencontre les carabins, lisez rencontra.
P. 139, sans commissions du Roy, lisez sans commission.
Ib, lig. 24, de Noyons, lisez de Noyon.
P. 143, lig. 22, que Ton n*aist fait, lisez que Ton n'eust fait.
P. ie8, lig. 7 et 18, M. Mareil du Drac, lisez Mareuil du Drac.
P. 171, lig. 1, se le faire amener. Et puis, lisez se le faire amener, et puis.
P. 174, lig. 13 et 14, de se départir. Il lui dit. Usez de se départir, il
lui dit.
P. 194, lig. 3, exent des garder, lisez exempt des gardes.
P. 207, lig. 4, qui y ont porté. Leurs inajestez, lisez qui y ont porté, leurs
majestez.
P.J09, lig. 5, poury servir le Roy, lisez pour y servir le Roy.
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506
p. 226, lig. 5, Gonft
P. 240, lig. 21, et a<
P. 246, lig. 8, pour
P. 267, lig. 21 et 22,
P. 307, lig. 6, savoi!
P. 312, lig. 15, qu'e]
P. 317, lig. 15, jusq
P. 319, lig. 8, Envii
P. 327. lig. 0, coma
P. 346. lig 10, par
bouche, Moi
P. 347, lig. 17, ha«]
une seule pi
P. 366, lig. 4, j'y ay
P. 411, lig. 4 et 16,
P. 410, lig. 13 et U
P. 429, lig. 17, 80 n
P. 443, lig 20, Chiu
P. 465, lig. 24, a ok
Jb. lig. 25, cont
Ib, lig. 28, sur
P. 482, lig. 25, de <
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c/r\h
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