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Full text of "Journal inédit d'Arnauld d'Andilly (1614-1620)"

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MO.  S^  c,   -V 


V-et.  F^.  m  3.  141  gf 


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MO.  ^L  c,   V 


V^.  F-r.  Hr  B.  1412' 


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JOURNAL  INÉDIT 

DARNAULD   D'ANDILLY 


A 


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JOURNAL 


INEDIT 


D'ARNAULD  D'ANDILLY 

(^6^4-^620) 


Piblié  et  aio«té  ' 


Par  Achille  nALPHEN*, 

Juge  suppléant  du  tribunal  civil  de  Versailles, 

Membre  de  la  Société  des  sciences  morales,  des  lettres  et  des  arts 

de  Seine-et-Oise. 


PARIS 

CHEZ    J.   TECHENER,    LIBRAIRE 

PLACE    nil    rot  VUE,   iO,    AU    PREMIER. 


185 


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PaHs.  -  Ty|>  WrTTFR.'îBFiM,  nie  Monlinorcnry, 


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PRÉFACE 


En  parcourant,  il  y  a  quelques  années,  les 
nombreux  volumes  du  Recueil  de  Conrart,  con- 
servé au  dépôt  des  manuscrits  de  la  bibliothè- 
que de  l'Arsenal,  je  rencontrai  au  tome  xi  in-4, 
un  journal  historique  occupant  286  pages 
(p.  197  à  485),  s'étendantdu  4  *' janvier  4  64  4  au 
54  décembre  4  64  9,  et  auquel  la  table  ancienne 
du  même  tome  donnait  ce  titre  :  Journal  histo- 
rique et  anecdote  de  la  Cour  et  de  Paris,  par  un 
homme  d'Etat.  C'est  ce  Journal,  écrit  par  un 
des  personnages  les  plus  célèbres  du  xvif  siè- 
cle, que  je  publie  aujourd'hui,  après  m'étre 
assuré,  autant  qu'on  peut  avoir  une  certitude 
à  cet  égard,  qu'il  est  inédit. 

Conrart,  on  le  sait,  n'a  point  pris  la  peine  de 
nous  faire  connaître  les  auteurs  de  la  plupart 
des  pièces  historiques  et  littéraires  conservées 
par  lui.  J'avais  à  rechercher  d'abord  quel  était 
l'homme  d'État  non  nommé,  dont  je  retrouvais 


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Il  PRÉFACE. 

le  Journal.  Plusieurs  passages  fournissaient  heu- 
reusement des  données  précieuses  pour  arriver 
promptement  à  le  découvrir. 

En  effet,  Fauteur,  dans  le  cours  de  son  récit, 
dit  à  plusieurs  reprises  :  «  fay  ouy  dire  d  M.  Bar- 
6in,  le  25  niars  \  6^  8,  comme  j'estais  un  de  ses 
trois  Commissaires.  »  Or  les  Mémoires  du  temps 
donnant  des  détails  sur  l'arrestation  et  le  pro- 
cès de  Barbin ,  il  était  bien  facile  de  savoir  les 
noms  de  ces  trois  commissaires  et  de  n'avoir 
plus  ensuite  qu'à  déterminer  auquel  des  trois 
appartenait  le  Journal  conservé  par  Conrart. 
Richelieu,  ami  de  Barbin,  et  qui  était  comme 
lui,  à  cette  époque,  un  des  chefs  du  parti  de  la 
Reine-mère,  dit  que  les  trois  Commissaires  dont 
il  s'agit  étaient  le  Président  le  Bailleul,  un 
Conseiller  d'État  qu'il  ne  nomme  pas,  et  Ar- 
nauld  d'Andilly,  lequel  était  secrétaire  de  la 
commission,  spécialement  chargé  d'écrire  les 
réponses  de  Barbin  *.  Des  Mémoires  de  Riche- 
lieu je  courus  naturellement  à  ceux  d'Arnauld 
d'Andilly  et  j'y  trouvai  le  passage  suivant  qui 
était  presque  la  solution  de  la  question  :  «  Au 
mois  de  mars  de  l'année  suivante,  ^6^8,  on 
découvrit  uiie  entreprise  que  M.  Barbin,  pri- 


*  V.  coll.  Michaud  et  Poujoulat,  Mém,  de  Richelieu, 
année  1618,  p.  182. 


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préfa<;e.  m 

sonûiier  à  là  Bastille,  avoit  faite  pour  sortir  la 
Reine-mère  de  Blois,  où  elle  étoit  comme  pri- 
sonnière. Cette  affaire  étant  très-importante 
à  cause  des  personnes  de  qualité  qui  s'y  trou- 
voient  mêlées,  on  choisit  trois  Conseillère 
d'État  pour  en  instruire  le  procès*  Ce  furent 
M.  le  Président  de  Bailleul ,  M.  l'Avocat  et 
moi;  et  parce  qu'on  ne  voulut  pas  se  confier 
à  un  greffier,  et  qu'ainsi  il  falloit  que  ce  fût 
l'un  des  Commissaires  mêmes  qui  tint  la 
plume,  ce  fut  à  moi  à  la  prendre  étant  le  plus 
jeune.  »  Un  peu  plus  loin,  d'Andilly  ajoute: 
«  Néanmoins  lorsque  je  l'interrogeois,  ce  que 
ces  Messieurs  me  laissoient  le  plus  souvent 
faire,  à  cause  que  tenant  la  plume  j'avois 
la  mémoire  plus  fraîche  des  interrogatoires 
et  des  réponses,  etc.  »  Le  Journal  manuscrit 
Rapportant  presque  textuellement  les  réponses 
de  Barbin,  il  était  plus  naturel  de  l'attribuer  à 
Arnauld  d'Andilly,  chargé  de  noter  ces  répon- 
ses, qu'à  ses  deux  collègues,  le  P*  de  Bailleul 
et  l'Avocat;  et  ce  qui  fortifiait  encore  cette  pré- 
somption ,  c'est  que  Tauteur  du  Journal  ren- 
voie plusieurs  fois  à  un  Mémoire  particulier 
sur  l'affaire  de  Barbin ,  mémoire  qui  était  pro- 
bablement le  travail  officiel  de  la  commission, 
rédigé  par  Arnauld  d'Andilly.  Mais  ces  pré- 
somptions graves  devaient  se  changer  en  cer- 


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IV  PREFACE. 

titude  quand  j'arrivai,  dans  le  Journal,  au  pas- 
sage suivant  : 

«  On  dit  à  M.  deSchomberg  que  son^affaire 
»  estoit  résolue,  et  il  me  dit  qu'il  désiroit  que 
»  je  fusse  auprès  de  lui.  » 

On  sait,  en  effet,  qu'Arnauld  d'Andilly,  par- 
ticulièrement attaché  à  M.  de  Schomberg,  fut 
choisi  par  lui  pour  être  son  premier  commis, 
lorsque  ce  personnage  fut  élevé  à  la  Surinten- 
dance des  finances,  et  d'Andilly  dans  ses  Mé- 
moires ne  manque  pas  de  donner  des  détails 
sur  sa  nomination  à  ce  poste  important  *. 

Si  d'autres  preuves  avaient  été  nécessaires 
on  les  aurait  trouvées  dans  un  rapprochement 
entre  quelques  autres  passages  des  Mémoires  et 
du  Journal.  Comme  j'ai  pris  soin  dans  cette 
première  édition  du  Journal  d'Arnauld  d'An- 
dilly de  rapporter  textuellement  tous  les  pas- 
sages correspondants  du  même  auteur,  je  n'in- 
sisterai pas  sur  ce  point,  me  contentant  d'y 
renvoyer  le  lecteur.  J'ajouterai  seulement, 
pour  ne  rien  négliger  de  ce  qui  peut  confirmer 
cette  démonstration ,  que ,  quant  à  la  forme ,  il 


*  F.  coll.  MichaudetPoujoulat.  Mem.  d'Am.  d'Andilly, 
p.  433. 


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PRIÎFACE.  V 

suffit  de  comparer  attentivement  le  style  des 
Mémoires  et  celui  du  Journal  (quoique  celui-ci 
soit  d'une  époque  plus  ancienne  et  qu'il  soit 
très-négligé),  pour  reconnaître  que  ces  deux 
ouvrages  émanent  de  la  même  plume  ;  et  que 
quant  au  fond,  certains  personnages,  que  Fau- 
teur du  Joupnal  fait  souvent  intervenir  dans  son 
récit,  sont  les  mêmes  que  ceux  que  Ton  re- 
trouve souvent  aussi  dans  les  Mémoires  d'Ar- 
nauld  d'Andilly,  et  notamment  ceux  qui  avaient 
avec  lui  quelque  lien  de  parenté  ou  d'alliance, 
comme  MM.  de  Feuquières,  deFontenay-Ma- 
reuil,  de  Fossé,  et  surtout  son  oncle,  Isaac  Ar- 
nauld,  Intendant  des  finances,  celui  qui  fut  pour 
lui,  comme  il  le  dit  dans  ses  Mémoires,  un  se- 
cond père ,  et  qui  le  forma  aux  affaires  ainsi 
qu'on  le  verra  plus  loin.  A  ce  dernier  person- 
nage, l'auteur  du  Journal  donne  une  impor- 
tance très-exagérée,  suivant  l'habitude  connue 
d'Arnauld  d'Andilly  lorsqu'il  parle  des  siens  et 
surtout  lorsqu'il  parle  de  lui-même,  ainsi  qu'on 
en  peut  juger  par  ses  Mémoires.  Ne  se  conten- 
tant pas  de  rapporter  l'opinion  d'Arnauld  l'in- 
tendant, comme  celle  des  autres  membres  du 
Conseil,  il  la  donne  toujours  in  extenso  et  fait 
l'analyse  de  ses  discours,  ce  qui  s'explique 
quand  on  sait  qu'il  était  premier  commis  de 
son  oncle  et  que  celui-ci  le  chargeait  toujours 


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VI  PRÉFACE. 

de  préparer  ses  travaux.  Ce  que  je  viens  de  dire 
des  parents  d'Arnauld  d'Andilly  s'applique  aussi 
aux  hommes  d'État  qu'il  aimait  le  plus  ou  qui 
l'honoraient  de  leur  bienveillance,  comme 
M.  le  Prince,  MM.  de  Bassompierye,  de  Pras- 
lin,  de  Schomberg,  et  particulièrement  le  co- 
lonel, depuis  maréchal  d'Ornqno^  son  intime 
ami,  dont  le  Journal  rapporte  textuellement 
deux  discours,  probablement  écrits  pour  lui 
par  Arnauld  d'Andilly,  Le  Journal,  comme  les 
Mémoires,  cite  de  préférence  ces  personnages 
lorsque  l'occasion  s'en  présente.  Si  les  hommes 
qu' Arnauld  d' Andilly  affectionnait  le  plus  repa- 
raissent souvent  dans  le  Journal  comme  dans 
les  Mémoires,  les  matières  qui  lui  étaient  le 
plus  familières  et  les  faits  dont  il  s'occupa  le 
plus,  comme  nous  l'apprennent  ses  Mémoires, 
ses  écrits  et  sa  correspondance,  sont  aussi  les 
sujets  qui  sont  traités  avec  le  plus  d'étendue  ou 
relatés  avec  le  plus  de  soin  dans  le  Journal,  par 
exemple  les  questions  de  finances  qui  rentraient 
dans  ses  attributions,  en  sa  qualité  de  premier 
commis  d' Arnauld  l'Intendant,  celles  relatives 
à  la  solde  des  Suisses,  travail  dont  il  fut  spécia- 
lement chargé,  comme  il  le  dit  dans  ses  Mé^ 
moires,  les  graves  querelles  de  préséance  et 
d'étiquette,  les  duels,  passion  fatale  de  l'épor 
que,  qu'il  poursuivit  avec  une  persévérance 


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PRérAGS.  VII 

digne  d'un  serviteur  de  Richelieu^  à  ce  point 
que  plus  de  vingt  ans  après  les  événements  dont 
U'aite  notre  Journal^  Arnauld  d'AndiUy>  parmi 
les  avis  qu'il  donnait  à  la  Reine-mère  et  au  Roi 
pour  attirer  les  bénédictions  du  ciel  sur  la 
France,  mettait  en  première  ligne  la  destruction 
de  ce  fléau  :  «  Comme  il  n'y  a  point  de  crime, 
dit-il,  dans  son  Mémoire  pour  un  Souverain, 
qui  déshonore  plus  Dieu  que  les  duels,  parce 
que  Ton  y  sacrifie  aux  démons  les  âmes  qu'il  a 
racheptées  de  son  propre  sang,  se  résoudre  à 
ne  donner  jamais  de  grâce  pour  ce  sujet  *.  »  Et 
passant  de  la  théorie  au  fait,  par  une  lettre  à  la 
Reine,  en  date  du  4  6  décembre  \  643,  il  de- 
mandait que  rÉdit  rendu  contre  les  duels  quel- 
ques mois  auparavant,  fût  appliqué  au  duc  de 
Guise  qui  venait  de  tuer  Coligny  *.  Arnauld 
d'Andilly  avait  pour  cet  Édit  une  sollicitude  de 
père,  car  c'est  lui  qui  avait  été  chargé  de  le 
dresser. 

Si  toutes  les  circonstances  que  je  viens  de 
rappeler  m'ont  fait  reconnaître  Arnauld  d'An- 
dilly  comme  Fauteur  du  Journal  historique 


*  V,  TAvis  à  la  Reine  et  le  Mémoire  pour  un  Souverain, 
dans  Tappendice,  note  F,  t.  i,  p.  349  de  Touvrage  de 
M.  Varin  sur  les  Arnauld,  dont  nous  allons  parler. 

*  y.  Même  ouvrage,  1. 1,  p.  358. 


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VIU  PRÉFACK. 

dont  il  s'agit,  d'autres  sont  arrivés  de  leur  côté 
au  même  résultat.  M.  Cousin,  qui,  en  tirant  de 
ce  Journal  quelques  renseignements  pour  ses 
charmantes  études  sur  Madame  de  Longueville 
et  Madame  de  Sablé,  le  citait  daas  les  premières 
éditions  comme  l'œuvre  inédite  d'un  auteur 
inconnu,  dans  la  troisième  et  dernière  édition 
de  l'histoire  de  Madame  de  Longueville,  non- 
seulement  nomme  Arnauld  d'Andilly,  mais 
ajoute  encore  que  le  manuscrit,  auquel  il  ren- 
voie, est  de  son  écriture  bien  connue^  et  que  cet 
ouvrage  mérite  d'être  publié.  Je  suis  heureux 
en  réalisant  un  désir,  que  j'avais  depuis  long- 
temps, d'obtenir  par  avance  l'approbation  de 
l'illustre  écrivain,  qui,  plus  que  tout  autre, 
nous  a  ramenés  aux  pures  sources  du  Grand 
Siècle. 

Parmi  les  documents  précieux  conservés  au 
dépôt  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  de 
l'Arsenal,  se  trouve  une  partie  des  papiers  de 
la  grande  famille  des  Arnauld.  Les  correspon- 
dances inédites  d' Arnauld  d'Andilly  et  du 
marquis  de  Pompone,  son  fils,  et  les  négocia- 
tions diplomatiques,  également  inédites  de  ce 
dernier,  y  tiennent  la  plus  large  place.  Ces 
papiers  importants,  d'abord  disséminés,  ont 
été  réunis  par  les  soins  de  M.  Pierre  Varin,  an- 
cien conservateur  adjoint  de  cet  établissement. 


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PRÉFACE.  IX 

DeTétude  de  ces  nombreux  documents,  M.  Va- 
rin  a  fait  le  sujet  d'un  ouvrage  qu'il  a  publié 
en  ^  847  sous  ce  titre  :  La  Vérité  sur  les  Arnauld, 
complétée  à  l'aide  de  leur  correspondance  inédite  * . 
Dans  l'espoir  de  trouver  peut-être  quelques 
renseignements  au  sujet  du  journal  d'Arnauld 
d'Andilly,  je  consultai  cet  ouvrage  rempli  de 
détails  curieux  sur  la  vie  intime  des  Arnauld , 
et  grande  fut  ma  surprise  quand  j'arrivai  à  un 
chapitre  intitulé  :  Journal  inconnu  de  d'An- 
dilly,  courtisan,  dans  lequel  M.  Varin  annon- 
çait la  découverte  par  lui  faite  d'un  journal 
historique  inédit,  beaucoup  plus  étendu,  comme 
on  va  le  voir,  que  celui  qui  se  trouve  dans  la 
collection  de  Conrart,  et  que  d'ailleurs  M.  Va- 
rin ne  connaissait  pas.  Voici  ce  qu'il  dit  à  ce 
sujet  : 

«  A  ravant-dernière  page  du  Catalogue  (le 
Catalogue  des  pièces  composant  la  collection 
des  papiers  des  Arnauld  dressé  au  commence- 
ment du  xvnf  siècle)  sont  désignés  huit  vo- 
lûmes  in^A''  renfermant  un  journal  très-curieux, 
qui  s'étend dei&\^  à  ^ 652.  Aucun  de  nos  ma- 
nuscrits catalogués,  aucun  de  ceux  que  nous 
avions  réunis  pour  les  cataloguer  ne  répondant 


*  2  vol.  in-8°,  Paris,  librairie  de  Poussielgue-Rusand, 
1847. 


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X  Plil^FACB. 

à  cette  indication^  nos  investigations  étaient  à 
recommencer.  Dana  le  dépôt  de  la  musique^ 
déplacé  par  suite  d'un  échange  de  bâtiment 
auquel  l'Arsenal  a  été  naguère  autorisé,  nous 
trouvâmes  enfin  huit  volumes  manuscrits  for- 
mat in-4%  contenant  un  journal  très-complet 
qui  commence  au  ^  "  février  ^  64  5  et  g'arrête  au 
iA  décembre  4653« — Ces  huit  volumes  de- 
vaient être  ceu^  qu'indique  le  Catalogue.  — 
Mais  à  quel  titre  avaient-ils  fait  partie  de  notre 
collection?  Dans  un  passage  de  ses  Mémoires, 
qui  avait  jusqu'à  cette  heure  échappé  aux  bi- 
bliographes, Robert  (Arnauld  d'Andilly)  dit  : 
a  II  me  seroit  facile  de  m'étendre  beaucoup 
a  davantage  sur  l'histoire  de  ce  temps-là, 
»  parce  que  j'ai  un  journal  très-exact  que  j'ai 
»  fait  de  tout  ce  qui  en  est  venu  à  ma  connois- 
»  sance.  Mais  comme  je  n'ai  autre  dessein  dans 
»  ces  Mémoires  que  ce  qui  me  regarde  et  ma 
»  famille,  je  me  contente  de  ce  qui  peut  servir 
»  à  mieux  faire  comprendre  les  choses  que  j'en 
»  rapporte  ^  »  Ain&ii,  daûs  les  Mémoires  de  Ro- 
bert, nous  n'avons  qu\ine  biographie  de  fa- 
mille; outre  ces  Mémoires  il  avait  rédigé  un 
Journal  où  se  trouvaient  consignés  les  événe- 
ments politiques  dont  sa  position  le  mettait  à 

*  Mém.  d'Arnaud  d'Andilly^  part.  1,  p.  150. 


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PRlâFAGB.  XI 

même  d'être  parfaitement  instruit.  Sans  con- 
tredit, le  Jourpal  était  de  beaucoup  préférable 
aux  Mémoires*.  » 

Après  ces  observations,  M.  Varii^,  par  up 
rapprochement  entre  un  passage  des  Mémoires 
d'Arnauld  d'Andilly,  relatif  à  la  première  ar- 
restation du  colonel  d'Ornano,  et  un  extrait 
très-étendu  du  Journal,  montre  que  ce  Jour- 
nal est,  aussi  bien  que  les  Mémoires,  l'œuvre 
ded'Andilly*. 

Dn  tel  ouvrage ,  écrit  par  un  homme  aussi 
considérable  qu'Arnauld  d'AndiUy,  et  sur  une 
période  de  notre  histoire  si  féconde  en  événe-r 
ments,  méritait  certes  de  ne  pas  rester  inédit. 
Cependant  il  n'a  pas  reçu  les  honneurs  de  l'im- 
pression. J'espérais  avoir  la  bonne  fortune  de 
le  tirer  de  l'oubli  et  de  publier,  non  plus  le 
fragment  conservé  dans  le  recueil  de  Conrart, 
et  ne  comprenant  que  six  années,  de  4  64  4  fi 
à  1620,  mais  le  Journal  même  de  d'Andilly^ 
s'étendant  jusqu'à  l'année  \  652  et  embrassant 
une  période  de  dix-sept  ans,  c'est-à-dire  trojs 
fois  plus  considérable  que  celle  du  manuscrit 

*  La  vérité  sur  les  Arnaud,  t.  1 ,  p.  222. 

'  Cet  extrait  du  Journal  est  tiré  du  4«  vol.,  P  71  v°,  et 
suiv.  Je  le  reproduis  en  appendice  afin  de  réunir  dans  ce 
volume  tout  ce  qui  nous  reste  actuellement  du  Jqurnal 
d^Amauld  d^Andilly. 


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XII  PRIÎFACE. 

dont  je  m'occupais.  J'allai  dans  cette  intention 
à  la  Bibliothèque  de  rAi*seiial  pour  examiner 
les  huit  précieux  volumes  manuscrits  retrou- 
vés par  M.  Varin. 

Malheureusement,  soit  que  M.  Varin  ait 
classé  à  part  le  Journal  dont  je  viens  de  parler, 
dans  rintention  de  le  publier,  soit  que  les  huit 
volumes  reconnus  par  lui  aient  été  déposés 
par  erreur  ailleurs  qu'à  la  place  qui  leur  avait 
été  assignée,  toutes  les  recherches  faites  sur 
ma  demande  pour  les  retrouver  ont  été  infruc- 
tueuses. M.  Varin  seul  aurait  pu  fournir  quel- 
ques renseignements  à  ce  sujet;  mais  il  est 
mort  en  ^  849 ,  enlevé  subitement  aux  Lettres 
par  le  choléra.  Il  est  donc  à  craindre  que  nous 
soyons  pour  longtemps  privés  de  cet  ouvrage, 
qu'une  circonstance  fortuite  fera  peut-être  dé- 
couvrir une  seconde  fois  sur  quelque  rayon 
poudreux  de  la  Bibliothèque  à  laquelle  il  ap- 
partient. 

Mais  il  faut  dire  que  M.  Varin  a  eu  le 
grand  tort  de  ne  pas  cataloguer  et  chsser  ré- 
gulièrement un  ouvrage  manuscrit  et  probable- 
ment autographe,  si  précieux  à  tant  de  titres*. 


*  Parmi  les  conservateurs  de  la  bibliothèque  de  TArsenal 
qui  ont  bien  voulu  rechercher  le  Journal  de  d'Andilly,  je' 
dois  surtout  témoigner  ma  reconnaissance  à  M.  Ravaisson, 


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PREFACE.  XUI 

A  défaut  des  huit  volumes  in-4  de  d'Andilly, 
malheureusement  égarés,  force  m'est  donc  de 
revenir  au  manuscrit  qui  m'avait  d'abord  oc- 
cupé ;  et  je  dois  rendre  grâce  à  la  prévoyance 
de  Conrart,  qui  me  permet  de  publier  dès  au- 
jourd'hui la  première  partie  du  Journal  d'Ar- 
nauld  d'Andilly.  On  remarquera  même  que 
tandis  que  dans  les  huit  volumes  retrouvés  par 
M.  Varin  le  récit  ne  commence  qu'au  4^' fé- 
vrier ^  64  5,  dans  le  manuscrit  de  Conrart  il  re- 
monte au  \  ^''  janvier  4  64  4.  11  est  vrai  que  cette 
première  année  4644  est  beaucoup  plus  som- 
maire que  les  suivantes  et  qu'elle  a  même  des 
lacunes  de  plusieurs  mois. 

Ainsi  que  le  fait  remarquer  M.  Varin  dans  le 
passage  cité  plus  haut,  il  y  a  une  grande  diffé- 
rence entre  les  Méûioires  d'Arnauld  d'Andilly 
et  son  Journal.  Les  Mémoires  publiés  pour  la 
première  fois  en  4  754  par  l'abbé  Goujet  avaient 
été  commencés  par  d'Andilly  à  Port-Royal,  sur 
les  instances  de  son  fils  de  prédilection,  et  il 
les  avait  terminés  en  sa  retraite  de  Pomponne 
en  4  667,  longtemps  après  les  événements,  long- 
temps surtout  après  ceux  qui  font  l'objet  de  la 
première   partie  du  Journal  dont  nous  nous 


qui  a  en  vain  exploré  toutes  les  parties  du  dépôt  considé- 
rable confié  à  ses  soins. 


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JOV  PftÉPàlDte. 

occupons  (^644-4620)i  Ecrivant  cet  ouvrage 
pour  ses  enfaiits>  d'Andilly  s'y  occupe  plus 
particulièrement  de  lui-même^  de  la  part  qu'il 
a  eUé  aux  aflFaires,  de  ses  relations  à  la  Cour;  il 
y  fait  en  termes  pompeUx  son  éloge  et  celui  de 
ses  amis^  et  si  en  racontant  sa  vie  d'Andilly  a 
fait  un  livre  d'histoire  plein  d'intérêt,  c'était 
moins  son  but  que  la  conséquence  du  rôle  joué 
par  lui  et  de  sa  position  dans  le  monde.  Dans 
son  Journal,  au  contraire,  écrit  longtemps 
avant  ses  Mémoires  et  à  l'aide  duquel  il  les  a 
rédigés,  ainsi  que  cela  résulte  du  passage  cité 
plus  haut,  Arnauld  d'Andilly  s'efface  complè- 
tement, ne  se  préoccupant  que  des  faits  et  des 
événements  qu'il  note  au  moment  même  où  ils 
se  passent,  presque  jour  par  jour,  en  simple 
rapporteur  de  tout  ce  que  sa  situation  person- 
nelle et  ses  hautes  relations  lui  permettent  de 
voir  et  de  savoir. 

Malheureusement  si  ce  Journal  a  une  grande 
valeur  historique,  il  n'en  a  aucune  au  point  de 
vue  littéraire.  C'est  une  œuvre  de  premier  jet, 
écrite  au  courant  de  la  plume,  sans  aucun  souci 
de  rédaction.  Consigner  les  faits,  jeter  à  la  hâte 
sur  le  papier  tout  ce  qui  lui  paraissait  digne 
d'être  mentionné,  c'est  tout  ce  qu' Arnauld 
d'Andilly  a  voulu  faire,  se  réservant  sans  doute 
de  donner  une  forme  littéraire  à  son  Journal 


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PRÉFAQK.  XV 

si  ridée  lui  venait  un  joUf  de  le  livrer  à  la  pu- 
blicité. Aussi  trouve-t-dn  à  chaque  instant  des 
répétitioUs  choquaUtes ,  des  phrases,  des  mots 
sans  suite^  quelquefois  même  incompréhen- 
sibles, parce  que  Fauteur  ne  livrait  au  papier 
qu'une  partie  de  sa  pensée,  confiant  le  reste  à 
son  souvenir;  puis>  quand  un  renseignement 
lui  manque  au  moment  où  il  écrit,  notamment 
les  paroles  de  tel  ou  tel  personnage,  il  met  des 
points  avec  Tintention  sans  doute  de  complé- 
ter le  récit  quand  il  aura  trouvé  le  renseigne- 
ment ou  le  discours  qui  lui  fait  défaut.  Ça  et  là 
des  noms  des  dates  ou  des  chiffres  lui  échap- 
pent, il  les  laisse  en  blanc;  mais  comme 
avant  tout  c'est  la  vérité  qu'il  recherche,  il 
donne  quelquefois  deux,  trois,  quatre  et  jus- 
qu'à cinq  versions  différentes  du  même  fait, 
indiquant,  lorsqu'il  le  peut,  les  sources  où  il  a 
puisé.  Rarement  d'Andilly  se  permet  une 
courte  réflexion  personnelle  consignée  par  un 
mot  :  faute  y  OU  bien  :  devait  dire...  devait 
faire;  réflexion  où  perce  quelquefois  l'ardeur 
bien  connue  de  son  caractère,  comme  lorsqu'à 
propos  d'une  inconvenance  du  Cardinal  de 
Sourdis  envers  le  Prince  de  Condé ,  il  ajoute 
que  celui-ci  aurait  dû  répondre  que,  sans  le 
respect  de  Leurs  Majestés,  il  lui  eût  passé  son 
épée  au  travers  du  corps.  On  pourra  remarquer 


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XVI  PAÉFACE. 

qu'il  se  rencontre  quelquefois  dans  le  cours  du 
récit  la  mention  d'un  fait  postérieur  de  plu- 
sieurs mois  y  et  même  d'un  ou  de  deux  ans  à 
l'ordre  chronologique  suivi  par  Arnauld  d'An- 
dilly .  N'ayant  eu  sous  les  yeux  que  le  manuscrit 
autographe  ou  non  du  Recueil  de  Conrart,  je 
ne  saurais  dire  si  ce  sont  des  additions  inter- 
calées postérieurement  dans  le  récit  ou  mises 
en  note  par  d'Andilly  sur  son  Journal,  ou  si  le 
manuscrit  conservé  par  Conrart  n'est  lui-même 
qu'une  copie  faite  plus  tard  sur  l'original,  et 
dans  laquelle  l'auteur  a  ajouté  telle  ou  telle 
circonstance  qu'il  n'avait  pu  connaître  lors  de 
la  première  rédaction. 

Après  avoir  expliqué  quelle  est,  suivant  moi, 
la  cause  de  cette  négligence,  ou,  si  je  puis  le 
dire,  de  cette  absence  de  style,  j'ajouterai  que 
ce  défaut  même  ajoute  encore  à  la  valeur  his- 
torique du  Journal  d' Arnauld  d'Andilly,  en 
montrant  que  ce  n'est  point  une  œuvre  faite 
après  coup ,  élaborée  avec  soin ,  inspirée  par 
l'esprit  de  parti  comme  tant  d'autres  écrits  du 
temps,  mais  que  c'est  en  quelque  sorte  un 
procès-verbal  où  tous  les  faits  sont  scrupuleu- 
sement relatés,  sans  que  celui  qui  ne  le  destine 
qu'à  son  propre  usage  ait  rien  à  retrancher  ou 
à  modifier  par  égard  pour  les  personnes,  ou 
pour  quelque  considération  que  ce  soit.  Un 


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PAJSFAGE*  XVJf 

pareil  travail  laissé  à  la  postérité  par  un  specta- 
teur quelconque  des  événements  ne  serait  pas 
sans  intérêt;  à  plus  forte  raison  doit-il  avoir  de 
l'importance  quand  il  émane  d'un  homme  que 
de  hautes  fonctions  dans  le  Gouvernement  et 
que  des  relations  avec  la  plupart  des  person- 
nages éminents  mettaient  à  même  d'être  par- 
faitement instruit  des  principales  affaires  de 
l'État.  Il  n'est  donc  pas  inutile  de  rappeler 
sommairement  la  première  partie  de  la  vie 
d'Arnauld  d'Andilly,  c'est-à-dire  sa  position 
dans  le  monde  et  le  rôle  qu'il  y  a  joué  comme 
homme  politique,  car  c'est  surtout  sa  retraite 
à  Port-Royal,  la  part  considérable  qu'il  a  prise 
par  lui  et  par  les  siens  dans  les  luttes  du  Jansé- 
nisme et  ses  nombreux  ouvrages  qui  ont  rendu 
son  nom  célèbre.  Quelques  détails  sur  sa  car- 
rière d'homme  d'Etat  feront  apprécier  la  va- 
leur de  son  témoignage  sur  une  époque  de  plus 
de  vingt-cinq  ans  antérieure  à  sa  retraite.  Je 
me  bornerai  à  résumer  en  quelques  mots  ce 
que  d'Andilly  a  longuement  raconté  dans  ses 
Mémoires. 

Robert  Arnauld  d'Andilly,  né  à  Paris  en  ^  589, 
était  l'aîné  de  dix  enfants  survivants  sur  vingt 
qu'avait  eus  le  célèbre  avocat  Antoine  Arnauld. 
Le  dernier  de  ces  dix  enfants,  nommé  Antoine 
comme  son  père,  est  celui  qui,  élevant  sa  re- 


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XVra  PRIÊPACB. 

nommée  au-dessus  de  celle  de  tous  les  mem- 
bres de  cette  famille  illustre  par  les  hommes 
comme  par  les  femmes,  a  reçu  de  Thistoire  le 
rare  et  glorieux  titre  de  grand  Amauld!  Leur 
aïeul,  Antoine ,  seigneur  de  la  Mothe-Arnauld, 
avait  été  Procureur  Général  de  Catherine  de 
Médicis,  charge  qui  avait  passé  à  leur  père. 
Les  oncles  de  Robert  avaient  tous  des  positions 
importantes  :  l'un ,  Isaac ,  était  Intendant  des 
finances;  un  autre,  Pierre,  était  mestre  de 
camp  général  des  carabins  de  France  et  gou- 
verneur de  Fort-Louis.  Robert  était  donc  dans 
les  meilleures  conditions  pour  tirer  parti  de  ses 
brillantes  facultés.  Après  lui  avoir  donné  sous 
ses  propres  yeux  une  forte  éducation,  son  père 
voulut  le  former  à  la  meilleure  école.  Il  le  con- 
fia en  ^  602  à  Sully,  qui  se  rendait  en  Angle- 
terre comme  Ambassadeur  extraordinaire.  Mal- 
heureusement le  jeune  Robert  étant  tombé 
malade  en  route  ne  put  suivre  ce  grand  homme 
d'État.  En  ^605,  Isaac  Arnauld  ayant  été 
nommé  Intendant  des  finances,  le  prit  auprès 
de  lui  en  qualité  de  premier  commis,  quoiqu'il 
ù'eût  que  seize  ans;  et  ayant  été  appelé  en 
4644  à  faire  partie  du  Conseil  de  la  Direction, 
Isaac  obtint  que  son  neveu,  malgré  soh  jeune 
âge,  assistât  aux  séances,  où  il  se  tenait  debout 
derrière  le  Roi  et  la  Reine-mère.  Il  dut  à  cette 


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haute  faveur  d'être  initié  promptement  aux 
grandes  affaires,  d'être  dans  le  secret  des  plus 
importantes  délibérations  du  Gouvernement, 
et  de  se  lier  avec  les  hommes  d'État  les  plus 
éminents.  De  plus,  son  oncle,  pour  exercer 
son  intelligence,  lui  faisait  faire  des  extraits 
des  affaires  dont  il  était  chargé  et  les  lui  faisait 
rapporter  à  ses  collègues.  En  4645,  Robert 
épousa  la  fille  de  M.  de  la  Boderie,  diplomate 
éminent,  que  ses  négociations  ont  rendu  célè- 
bre. En  4644  il  suivit  le  Roi  et  le  Conseil  en 
Bretagne. 

Ici  se  termine  le  manuscrit  mis  au  net  une  première  fois 
par  Fauteur  qui  y  aurait  sans  doute  lait  encore  des  addi- 
tions et  des  corrections.  La  suite  est  tirée  d'un  simple 
brouillon,  nous  la  reproduisons  littéralement. 

Pendant  le  voyage  du  Roi,  en  4  64  9  et  4  64  6, 
Arnauld  Tlntendant  faisant  partie  du  Conseil 
resté  à  Paris  et  ayant  Fadministration  des 
finances,  Arnauld  d' AndiUy  travailla  avec  lui  ; 
il  assistait  au  Conseil,  rédigeait  leâ  lettres,  les 
mémoires  et  les  expéditions.  La  Reine-mère, 
pour  le  récompenser  de  ses  services,  lui  en- 
voya le  brevet  de  sa  première  pension.  A  cette 
époque  il  se  lia  avec  les  Luynes,  prévoyant 
leur  grande  faveur,  et  plaça  près  d'eux  Déa- 


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XX  PREFACE. 

géant,  qui  devint  Ministre;  mais  cette  liaison 
dura  peu,  car,  en  4  64  6,  son  oncle  s'étant  démis 
de  sa  charge  d'Intendant  des  finances  en  sa 
faveur,  Luynes  s'opposa  à  ce  qu'elle  lui  fût 
donnée.  A  la  fin  de  cette  même  année  il  fut 
chargé  de  travailler  à  l'état  général  des  finances 
pour  4  64  7  et  à  tous  les  états  de  l'épargne  qui 
en  dépendaient.  En  4  64  7  il  fut  chargé  de  la 
vérification  du  Compte  de  4  608  pour  la  solde 
des  Suisses  au  service  de  France,  et  sur  l'ordre 
de  M.  de  Bassompierre ,  Colonel  général  des 
Suisses  et  d'Arnauld  l'Intendant,  il  fit  des  mé- 
moires par  lesquels  il  procura,  dit-il  dans  ses 
Mémoires,  une  économie  de  cent  mille  écus 
par  an.  Cette  année,  son  oncle  étant  mort, 
le  Chancelier,  Villeroy  et  le  P.  Jeannin  vou- 
lurent lui  faire  avoir  sa  place.  Luynes  s'y  op- 
posa encore.  A  la  fin  de  l'année  4647  il  suivit 
à  Rouen  le  Roi,  qui  s'y  rendait  à  l'occasion  de 
l'Assemblée  des  Notables.  Le  9  mars   4648, 
d'Andilly   fut  nommé  Conseiller  d'État  avec 
2,000  livres  de  gages  et  2,000  livres  d'en- 
tretènement,  et  en  cette  qualité,  dans  le  même 
mois  il  fut,  comme  on  l'a  vu  plus  haut,  un 
des  trois  commissaires  chargés  d'instruire  le 
procès  de  Barbin,  accusé  d'avoir  voulu  favo- 
riser la  sortie  de  la  Reine-mère  de  Blois.  La 
même  année  il  fut  chargé  d'une  mission  im- 


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PREFACE.  XXI 

portante  auprès  du  duc  de  Bouillon.  Il  refusa 
la  charge  de  secrétaire  du  Cabinet,  attendant 
celle  d'Intendant  qu'on  lui  avait  promise.  En 
^6^9  il  suivit  le  Roi  dans  son  voyage  à  Tours, 
où  il  resta  jusqu'à  la  fin  des  négociations  avec 
la  Reine-mère.  Il  fut  même  chargé  de  rédiger 
une  lettre  importante  que  le  Roi  écrivit  à  la 
Reine-mère  pour  l'engager  à  faire  la  paix.  A 
la  fin  de  cette  année,  ^6^9,  M.  de  Schom- 
berg  ayant  été  nommé  Surintendant  des  finan- 
ces, lui  donna  le  principal  emploi  auprès  de 
lui.  En  4620  il  fit  la  connaissance  de  l'abbé 
de  Saint-Cyran,  et  commença  cette  liaison 
intime  qui  devait  ajouter  encore  à  sa  célébrité 
par  le  dévouement  qu'il  témoigna  à  ce  grand 
théologien  pendant  sa  disgrâce.  En  i  624 ,  M.  do 
Schomberg  faisant  la  charge  de  Grand  Maître 
de  l'artillerie  au  siège  de  Montauban,  Amauld 
d'Andilly  resta  auprès  du  Roi  au  château  de  Pi- 
quecos,  le  suivit  dans  tout  son  voyage,  exerçant 
en  fait  la  charge  de  Surintendant  des  finances, 
travaillant  directement  avec  lui;  de  même,  en 
4622.  Cette  année  le  Roi  lui  ofiErit  la  charge  de 
secrétaire  d'État  vacante  par  la  mort  de  M.  de 
Sceaux ,  moyennant  une  récompense  de  cent 
mille  livres  aux  héritiers  de  celui-ci.  Amauld 
d'Andilly,  ne  voulant  pas  donner  cette  somme, 
refusa  la  charge.  «  Les  suites  ont  fait  voir,  nous 


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XXII  priSfage. 

dil-il  dans  ses  Mémoires,  que  je  fis  une  grande 
faute;  mais  on  la  doit  pardonner  en  ce  qu'étant 
venu  à  la  Cour  sous  le  règne  de  Henri-le-Grand, 
j'avois  été  nourri  dans  la  créance  qu'il  suffi- 
soit  de  travailler  à  se  rendre  digne  des  charges 
pour  espérer,  comme  autrefois ,  de  les  obtenir 
sans  argent.  »  En  i  625,  M.  de  Schombergfut  dis- 
gracié et  remplacé  par  M.  de  la  Vieuville,  On 
offrit  à  Arnauld,  s'il  faut  le  croire  lui-mêmB,  la 
charge  d'Intendant  des  finances;  mais  dans  la 
disgrâce  de  son  bienfaiteur  et  de  son  ami,  il  ne 
voulut  rien  accepter  et  se  tint  à  l'écart  jusqu'à  I4 
mort  de  M.  de  Schomberg.  En  i  623,  Arnauld 
d'Andilly  fut  nommé  Intendant  général  de  la 
maison  de  Monsieur.  La  môme  année  ou  lui 
offrit  (toujours  suivant  ses  Mémoires)  la  charge 
de  Contrôleur  général  des  finances  qu'il  refusa 
pour  ne  pas  quitter  Monsieur,  et  qu'il  fit  don- 
ner à  M.  Marion,  président  au  grand  Conseil, 
son  oncle  materneL  En  4625,  le  Cardinal  de 
Richelieu,  qui  l'affectionnait  particulièrement, 
ayant  rintention  d'en  faire  un  Secrétaire  d'État, 
voulut  le  préparer  à  cette  charge,  et,  à  cet 
effet,  lui  remit  toutes  les  instructions  et  les 
pièces  qu'il  avait  touchant  les  affaires  étran- 
gères, en  le  chargeant  de  les  mettre  en  ordre 
comme  il  l'entendrait.  En  4626,  Arnauld  d'An- 
dilly en  présenta  au  Caidinal  plusieurs  volumes 


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PRÉFkCE.  XXra 

très-bien  écrits.  La  même  année,  sa  grande 
faveur  fut  cause  qu'on  intrigua  pour  le  faire 
disgracier,  et  il  fut  éloigné  de  Monsieur.  Pen- 
dant les  années  suivantes,  le  grand  accablement 
d'affaires  qu'avait  le  Cardinal  de  Richelieu  le  fit 
oublier  du  Cardinal,  et  il  n'était  pas  homme  à 
le  faire  souvenir  de  lui.  Il  passait  alors  une  par- 
tie  de  l'année  à  Pomponne,  dans  une  grande 
tranquillité  d'esprit  au  milieu  de  sa  famille  et 
de  ses  livres.  En  4  654,  il  fut  nommé  intendant 
de  l'armée  du  Rhin,  commandée  par  les  ma- 
réchaux de  la  Force  et  de  Brézé,  avec  pouvoir 
de  disposer  de  dix  mille  livres  par  mois  sans 
être  obligé  d'en  rendre  compte  aux  généraux. 
Arnauld,  dans  ses  Mémoires,  donne  des  détails 
sur  la  campagne  de  l'armée  du  Rhin,  dont  il 
fit,  sur  la  demande  du  Cardinal,  une  relation. 
Après  la  mort  du  Roi,  au  commencement  de 
la  régence  d'Anne  d'Autriche ,  il  fut  un  de  ses 
principaux  conseillers;  mais  l'idée  de  la  re- 
traite le  préoccupait  depuis  plusieurs  années: 
la  mort  de  sa  femme  en  4657,  celle  de  l'abbe 
de  Saint-Cyran  en  4645,  le  déterminèrent  à 
prendre  ce  parti.  11  se  retira  à  Port-Royal  en 
4645  ou  4646. 

Je  ne  dirai  rien  de  cette  seconde  partie  de 
la  vie  d' Arnauld  d'Andilly,  consacrée  tout 
entière  au  service  d'une  piété  ardente,  aux 


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XXIV  PKÉF4CE* 

controverses  religieuses  qui  ont  eu  un  grand 
retentissement,  et  à  Fétude  à  laquelle  nous 
devons  les  ouvrages  qui  ont  rendu  son  nom  cé- 
lèbre. Son  histoire  est  associée  dès  lors  à  celle 
des  turbulents  solitaires  de  Port- Royal,  qui  a 
donné  lieu  à  de  nombreux  écrits  depuis  ceux 
des  solitaires  eux-mêmes  et  de  leurs  amis  jus- 
qu'aux travaux  de  Térudition  moderne,  au 
nombre  desquels  je  ne  citerai  que  l'histoire 
de  Port-Royal  par  M.  Sainte-Beuve,  J'ajouterai 
seulement  pour  terminer  cet  aperçu  biogra- 
phique sur  l'auteur  du  Journal  que  je  publie, 
qu'en  4674  il  reparut  à  la  Cour  pour  remer- 
cier Louis  XIV  qui  venait  de  réaliser  son  vœu 
le  plus  cher  en  élevant  au  Ministère  le  mar- 
quis de  Pomponne  son  fils,  et  qu'après  une  vie 
presque  également  partagée  entre  le  monde  et 
la  retraite ,  il  mourut  en  4  674  âgé  de  quatre- 
vingt-cinq  ans.  Cet  aperçu  suffit  pour  montrer 
la  valeur  du  témoignage  d'Arnauld  d'Andilly. 
Il  n'est  pas  sans  intérêt  de  faire  remarquer  que 
ce  Journal  est  le  premier  ouvrage  qui  nous  soit 
resté  d'un  écrivain  devenu  célèbre  • 

Après  avoir  rappelé  brièvement  l'importance 
de  l'auteur,  il  me  reste  à  dire  quelques  mots  de 
la  valeur  de  l'œuvr^  et  du  profit  qu'elle  apporte 
aux  études  historiques.  Ainsi  que  je  l'ai  dit,  la 
première  partie  du  Journal  d'Arnauld  d'Andiliy 


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PABPAGE.  XXV 

a  trait  à  une  partie  des  premières  années  du 
règne  de  Louis  XIII.  Sur  cette  époque,  les  Mé- 
moires ne  sont  pas  très-nombreux,  et  ne  sont 
pas  aussi  complets  que  sur  les  années  suivantes  ; 
les  principaux  sont  ceux  de  Richelieu,  de  Fon- 
tenay-Mareuil  et  de  Pontchartrain  ;  ceux  de 
Bassompierre,  du  maréchal  d'Estrées,  du  duc 
de  Rohan,  de  Brienne,  n'en  parlent  que  d'une 
manière  très-sommaire.  Notre  Journal  est  loin 
d'avoir  l'importance  des  précieux  Mémoires 
de  Richelieu,  dont  le  récit  plus  complet,  plus 
étendu  que  celui  de  tous  les  autres  écrivains 
du  temps  est  accompagné  de  réflexions  sérieu- 
séis,  profondes,  éloquentes  parfois,  qui  em- 
pruntent un  caractère  plus  grave  du  génie  de 
celui  qui  les  a  dictés  ou  inspirés  ;  ou  des  char- 
mants Mémoires  de  Fontenay-Mareuil,  si  pleins 
d'intérêt,  écrits  d'un  style  si  agréable  et  semés 
de  réflexions  si  judicieuses,  qui  décèlent  l'hon- 
nête homme  sous  le  charmant  conteur  ;  ni  des 
Mémoires  de  Pontchartrain,  dont  le  récit  sim- 
ple et  rapide  expose  avec  clarté  les  événements 
auxquels  l'auteur,  comme  Secrétaire  d'Etat, 
prenait  une  large  part  ;  ni  enfin  et  surtout  du 
Mercure  français,  qui  est  l'ouvrage  le  plus 
complet  sur  cette  époque,  et  qui  a  l'avantage 
très-grand  de  fortifier  son  récit  en  rapportant 
la  plupart  des  documents  authentiques  tels  que 


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XXyi    .  PRÉFACE, 

les  arrêts  du  Conseil  et  ceux  du  Parlement,  les 
lettres  du  Roi  et  de  la  Reine-mère,  des  Princes 
et  des  principaux  personnages  du  temps,  ainsi 
que  l'analyse  des  principaux  pamphlets  et  écrits 
sur  les  événements  et  les  hommes.  Mais,  si  les 
ouvrages  que  je  viens  de  citer  sont  plus  com- 
plets et  plus  détaillés  sur  la  plupart  des  événe- 
ments, quand  le  Journal  d'Arnauld  d'Andilly 
ne  ferait  que  confirmer  le  récit  deTun  ou  infir- 
mer le  récit  de  l'autre,  il  aurait  encore  son  im- 
portance. Mais  ce  que  je  n*ai  trouvé  dans  aucun 
des  Mémoires  du  temps  que  j'ai  pu  consulter 
et  comparer  avec  le  Journal  d'Arnauld ,  c'est 
d'abord  un  ordre  chronologique  qui  présente 
les  faits  mois  par  mois  et  presque  jour  par  jour, 
d'une  manière  beaucoup  plus  précise  que  le 
Journal  de  Pontchartrain,  celui  de  tous  qui  par 
la  forme  se  rapproche  le  plus  du  Journal  de 
d'Andilly  ;  là  chaque  fait  a  sa  date  certaine  puis- 
qu'il est  noté  pour  ainsi  dire  au  moment  où  il  se 
passe,  et  Arnauld  donne  ainsi  une  date  cer- 
taine non-seulement  aux  événements  qu'il  rap- 
porte, mais  encore  à  ceux  qui  sont  racontés 
sans  dates  dans  les  mémoires  des  autres  auteurs 
ses  contemporains;  c'est  ensuite  le  compte 
rendu  et  pour  ainsi  dire  le  procès-verbal  des 
principales  séances  du  Conseil  auxquelles  Ar- 
nauld d'Andilly,  ainsi  qu'on  l'a  vu  plus  haut. 


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assistait  toujours  ayant  pris  soin  de  noter  non- 
seulement  les  décisions^  mais  encore  Topiniou 
et  souvent  les  propres  paroles  de  chaïque  per- 
sonnage sur  les  questions  soumises  aux  délibé- 
rations du  Conseil.  Il  les  met  en  scène  dans  son 
récit.  Si  nous  entendons  parler,  je  ne  dirai  pas 
le  Roi,  trop  jeune  encore  pour  avoir  une  opi- 
nion personnelle,  mais  la  Reine-mère  avec  sa 
vivacité  méridionale  allant  souvent  jusqu'à  la 
colère,  le  Prince  de  (k)ndé  qui,  en  sa  qualité  de 
Premier  Prince  du  sang,  veut  être  le  maître 
pendant  la  minorité  du  Roi,  les  ducs  de  Ven- 
dôme, de  Mayenne,  de  Bouillon,  de  Rohan,  de 
Nevers,  de  Longueville,  plus  préoccupés  de 
leur  grandeur  personnelle  que  de  celle  de  TEtat, 
les  Guise  défendant  souvent  la  cause  royale 
en  haine  des  autres  Princes,  le  duc  d'Épernon 
dont  Tàge  n'a  point  calmé  l'insolente  fierté, 
les  hommes  d'Etat  vieillis  dans  les  affaires  tels 
que  les  Sillery,  les  Villeroy,  les  Jeannin,  les 
Châteauneuf  ;  les  nouveaux  dépositaires  du  pou- 
voir tels   que  les  Barhin,  les  Déageant,  les 
Mangot,  les  du  Vair,  sous  ce  point  de  vue  le 
Journal  d'Amauld,  non-seulement  pourra  ser- 
vir à  confirmer  et  à  compléter  les  notions  ac- 
quises à  l'histoire  sur  ces  grands  personnages, 
mais  peut-être  y  trouvera-t-on  des  éléments 
nouveaux  pour  leur  biographie;  il  en  est  de 


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XXVnt  PRIÎFACE, 

même  pour  les  discussions  au  Parlement  dans 
lesquelles  Arnauld  fait  connaître  l'opinion  des 
orateurs  en  les  nommant.  De  plus,  Arnauld 
ayant  plus  spécialement  les  finances  dans  ses 
attributions  et  souvent  chargé  de  travaux  spé- 
ciaux sur  ces  matières,  expose  les  discussions 
sur  ce  point  avec  beaucoup  plus  de  détails  qu'on 
n'en  trouve  dans  les  autres  Mémoires  du  temps. 
C'est  là,  je  le  répète,  le  principal  intérêt  et  la 
véritable  importance  du  Journal  d'Amauld 
d'Andilly.  Malheureusement  le  manuscrit  de 
Conrart  ne  donne  du  Journal  d'Amauld  que  les 
six  premières  années,  de  4644  à  4620.  Mais 
ces  quelques  années  sont  fécondes  en  événe- 
ments. C'est  l'époque  de  transition  entre  la 
grande  administration  d'Henri  IV  et  de  Sully 
et  le  glorieux  gouvernement  de  Richelieu. 
Sully  apparaît  bien  encore;  mais,  comme  si  le 
poignard  de  Ravaillac  avait  frappé  du  même 
coup  le  grand  Roi  et  le  grand  ministre,  ce  n'est 
plus  qu'un  noin.  Richelieu  paraît  sur  la  scène, 
il  n'est  encore  que  M.  de  Luçon  ;  mais  déjà  son 
génie  le  révèle  aux  Etats-Généraux  de  4644. 
C'est  lui  qui  porte  la  parole  au  nom  du  clergé, 
et  quand  il  entre  au  Conseil  comme  secrétaire 
d'État,  quoique  le  dernier  venu,  il  veut, avoir 
et  il  a  la  préséance.  Habile  et  prudent  toutefois, 
il  est  du  parti  de  la  Reine-mère  contre  celui  du 


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PREFACE.  XXIX 

Roi  mineur;  plus  tard  il  sera  pour  le  Roi  ma- 
jeur contre  Tex-régente.  Entre  ces  deux  gran- 
des royautés  du  génie,  Sully  et  Richelieu,  se 
succèdent  ces  deux  petites  royautés  de  la  faveur, 
Concini  et  Luynes.  Tandis  que  le  Maréchal 
d'Ancre  et  sa  femme,  en  gagnant  l'esprit  de 
la  Reine-mère,  gouvernent  à  leur  fantaisie, 
et  se  font  haïr  de  tous  ceux  que  leur  puissance 
imméritée  offusque  et  irrite;  Luynes,  en  flattant 
les  goûts  du  jeune  Roi,  monte  rapidement  tous 
les  degrés  du  pouvoir;  et  comme  pour  monter 
jusqu'où  peut  s'élever  la  médiocrité  portée  par 
la  fortune,  l'un  deviendra  Maréchal  de  France, 
l'autre  ira  plus  loin  encore  et  sera  Connétable. 
En  ces  temps  de  scandale  et  d'anarchie,  on  ne 
recule  devant  aucun  moyen  pour  satisfaire  ses 
vengeancesou  son  ambition.  Pour  se  débarras- 
ser du  Maréchal  on  le  fait  assassiner,  et  le  bâton 
qui  tombe  de  sa  main  est  donné  au  marquis  de 
Vitry  pour  prix  de  ce  forfait  ;  une  victime  ne 
suffit  pas  ;  la  favori  te  de  Marie  de  Médicis,  la  Ma- 
réchale d'Ancre,  accusée  de  crimes  imaginaires, 
est  condamnée  comme  coupable  de  magie  et  de 
sorcellerie,  et  sa  tête  tombe  sur  la  place  de 
Grève.  Sous  un  tel  gouvernement  la  guerre  ci- 
vile est  en  permanence  ;  quand  de  part  et  d'autre 
on  est  à  bout  de  ressources,  les  Princes  rebelles, 
souverains  dans  leurs  gouvernements,  traitent 


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XXX  PREFACE. 

avec  le  Roi  de  puissance  à  puissance,  et  imposent 
plutôt  qu'ils  ne  reçoivent  les  conditions  d'une 
paix  éphémère.  Le  fanatisme  religieux  se  joint 
aux  ambitions  politiques.  Les  Réformés  font^ 
comme  on  Ta  dit,  un  État  dans  TÉtat;  ils  ont 
leurs  assemblées,  leurs  députés,  bientôt  ils  au- 
ront leurs  armées,  leurs  généraux,  et  après  des 
combats  sans  nombre  et  des  sièges  mémorables, 
il  faudra  l'indomptable  énergie  de  Richelieu 
pour  rendre  à  l'autorité  royale  sa  force  et  son 
prestige.  Tel  est  le  tableau  que  présente  la 
France  et  que  la  plume  d'Arnauld  d'Andilly 
retrace  fidèlement. 

En  terminant  ce  court  avertissement  je  ne 
puis  qu'exprimer  le  regret  de  n'avoir  pu  publier 
le  Journal  d'Arnauld  d'Andilly  tout  entier.  Si 
quelque  jour  de  nouvelles  recherches  ou  le 
hasard  venait  à  le  faire  retrouver,  je  serais  heu- 
reux de  le  donner  au  public.  Telle  quelle,  je  crois 
que  la  partie  que  je  publie  aujourd'hui  mérite 
l'attention  de  tous  ceux  qui  s'intéressent  à  la 
science  historique.  J'ai  joint  au  texte  de  courtes 
notes  biographiques  sur  la  plupart  des  person- 
nages cités,  pour  lesquelles  j'ai  surtout  mis  à  con- 
tribution l'inappréciable  ouvrage  du  P.  An- 
selme et  à  son  défaut  les  Dictionnaires  deMorérî 
et  de  Michaud,  et  des  renvois  aux  différents  Mé- 
moires du  temps;  et  pour  faciliter  les  recher- 


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PR^FAGE.  XXXI 

ches  j'ai  joint  les  sommaires  de  chaque  année 
formant  une  table  chronologique  et  une  table 
alphabétique  de  tous  les  personnages  cités  dans 
le  Journal.  Si  le  lecteur  trouve  quelque  intérêt 
dans  ce  Journal,  si  désormais  il  est  inséparable 
des  Mémoires  du  même  écrivain  et  s'il  est  jugé 
digne  d'être  placé  à  côté  d'eux  dans  toutes  les 
grandes  collections  historiques,  je  m'estimerai 
heureux  d'avoir  rendu  la  vie  à  un  de  ces  témoins 
qui  gisent  depuis  des  siècles  oubliés  dans  les 
vastes  nécropoles  de  nos  dépôts  publics ,  et  en 
rendant  la  parole  à  un  des  principau:^  person- 
nages du  plus  grand  siècle  de  notre  histoire,  de 
l'avoir  mis  à  même  de  venir  déposer  devant  la 
postérité,  au  grand  profit  de  la  vérité,  de  ce  qu'il 
a  vu  et  de  ce  qu'il  a  fait. 


FIN    DE   LA   PRÉFACE. 


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JOURNAL  INÉDIT 

D  ARNAULD  D'ANDILLY 

SOMMAIRE 

Janvier.  —  Mort  de  M.  d*Attichy.  —  DoUé,  intendant.  —  Barbin, 
intendant  de  la  maison  de  la  Reine.  —  Duel  de  MM.  d^OuailIy  et 
Maigneux  contre  Routeville  et  Chantemerle.  —  Duel  de  M.  du  Pes- 
ché  contre  M.  d*Erouville. —  Mort  de  Cavart.  —  Mariage  du  marquis 
de  Sablé  avec  M"*  de  Souvré.  —  Retraite  du  duc  de  Nevers.  —  En- 
lèvement de  M.  de  Vertau.  —  MM.  de  Luxembourg  et  Barrin.  — 
M.  le  Prince  va  à  Châteauroux.  —  Rappel  du  duc  d'Epemon.  — 
Duel  de  MM.  de  Bours-Montmorency  et  Bucan  contre  MM.  de  Refuge 
et  Desbordes-Valencey.  —  M.  du  Maine  s'éloigne.  —  Duel  de 
MM.  des  Marests  et  de  Sainte-More  contre  le  marquis  de  Rouillac  et 
Saint-Vincent.  —  Départ  de  M.  de  Bouillon. 

FÉVRIER.  —  MM.  de  Ventadour  et  de  Boissise  envoyés  vers  M.  le 
Prince.  —  Départ  de  M.  de  Longueville.  —  Arrestation  de  M.  de 
Vendôme.  —  Le  maréchal  d'Ancre  va  à  Amiens.  —  Duel  de  M.  de 
Miraumont  contre  M.  de  Nausé.  —  Cadenet  envoyé  en  Champagne. 
—  Retour  de  MM.  de  Ventadour  et  de  Boissise.  —  Le  comte  de  la 
Roche  mis  à  la  Bastille.  —  M.  de  Nevers  s'empare  de  Mézières.  — 
Évasion  de  M.  de  Vendôme.  —  Lettres  de  M.  le  Prince  à  la  Reine  et 
au  Parlement. 

Marô.  —  m.  de  Thou  va  vers  M.  le  Prince. 

Avril.  —  M.  le  Prince  dépêche  à  M.  de  Rohan.  —  Les  Princes  à  Sois* 
sons.  —  On  traite  avec  M.  le  Prince.  —  Mort  du  Connétable. 
(D'avril  à  septembre^  lacune  dans  le  Journal. ) 
Septembre.  —  M.  le  Prince  revient  vers  le  Roi. 

1 


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2  JOURNAL    INEDIT 

Octobre.  —  Le.Roi  va  aa  Parlement.  —  Étata-Généraux. 
Novembre.  —  Affaire  de  Tenlèveraent   d'un    prisonnier  par  le  duc 
d'Epernon. 

DÉCEMBRE.  —  Gonseâ  de  la  direcUoa  ohangé.  —  Brouille  de  M"»*  de 
Longueville  et  du  duc  de  Nevers.  —  Brouille  de  M.  de  Villeroy  et  du 
maréchal  d'Ancre.  —  Chambre  ardente.  —  Jia  paulette.  —  |kIort  du 
mayéct)î||  d|  Ifi  C^aitre,  reij^placé  p%r  J^.  dç  pQ(^uel%ure^ 

Janvier  161*.  2.     Mort  de  M.  d' Attichy. — M.  Dollé  * ,  sa  charge 

d'intendant.  —  M.  Barbin  ^,  celle  d'intendant  de  là 
maison  de  la  Reyne^  En  avoit  voulu  bailler  vingt- 
trois  mil  livres  à  M.  d' Attichy  ;  sa  femme  en  vouloit 
vingt-quatre.  Sur  cela,  M.  d' Attichy  estant  mort, 
M"*  la  maréchale  d'Ancre*  a  eu  quarante  mil  livres 
de  Biarbin,  Sur  quoy  n'en  a  esté  baillé  aucune 
chose  à  M*^»  d^  Attichy. 

7.  Combat  de  MM.  d'OQailly  et  Maigneux  contre 
MM.  deBouteviUe  (fort  blessé)  et  Ghantemerle,  tué. 
Tous  à  M.  le  maréchal  d'Ancre.  Depuis,  M.  de 
Boutevillç,  ayant  ^té  coipm^  guéry,  mourut  de  sa 
blessure. 


*  l^ouis  Polé,  après  avoir  été  quelque  temps  avocat,  devint  coBseiUer 
4'État,  piuis  intendant  des  finances,  et,  protégé  par  le  maréchal  d'Ancre, 
4  jona  nn  r^e  assez  impoirtant  dans  les  ail^res  de  l'État.  Mort  en  1016. 

2  Barbin,  4evenu  contrôleur  général  des  finances,  prit  une  part  «on- 
pldérable  ^  la  direction  des  affaires  de  TÊtat,  mais  bientôt  compromis 
par  son  attachement  à  la  cause  de  la  Heine-M^re^  il  fut  mi»  à  la  1^- 
tille,  jug4  n^i*  le  Grand-conseil  et  condamné  au  bannissement,  peine 
convertie  en  un  emprisonnement  qu'il  subit  à  la  Bastille,  jusqu'À  ce 
que,  rendu  à  la  liberté  par  la  faveur  de  la  |leine-I4ère,  il  reçut  l'ordre 
de  sortir  de  France. 

'  La  reine-mère  Mario  de  Medicis. 

*  Léonora  Galigaî,  favorite  de  la  Reine-mère,  arrêtée  après  l'assas- 
sinat du  maréchal  son  mari,  condamnée  à  mort  comme  sorcière  et 
exécutée  en  1617. 


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d'abnauld  d'andilly.  s 

Combat  de  M,  du  Pesché,  près  Pontoise,  contre      Janvier  im*. 
M.  d'Erou ville,  tué.  Querelle.  Cavart,  tué  par  le 
cuisinier  de  M.  du  Pesché,  sur  les  terres  de  M.  d'E- 
rouville. 

9.  Mariage  de  M.  le  marquis  de  Sablé,  fils  de 
M.  le  maréchal  de  Boisdauphin,  avec  M"**  de  Souvré  *. 

M.  de  Ne  vers  ^  part  mal  content  de  la  Cour  et  s'en 
va  à  la  Cassine  \  11  avoit  fait  de  grandes  soumissions 
à  la  Royne,  sur  ce  que  M.  le  président  Jeannin* 
l'avoit  assuré  qu'elle  y  correspondrait,  ce  qu'elle  ne 
fit,  dont  il  demeura  fort  indigné,  et  luy  dit  qu'il  s'en 
alloit  dans  son  gouvernement  et  qu'il  ne  seroit  ja- 
mais autre  que  très-bon  serviteur  du  Roy  (ne  dit 
point  d'elle).  M,  le  président  Jeannin  en  fut  fort 
mécontent  aussi,  parce  qu'il  avoit  baillé  sa  parole  h 
M.  de  Nevers, 

M.  de  Vertau,  trésorier  de  France  à  Châlons,  en- 


^  Phllippe^Emm>niiel  de  LaviU-Montmorency,  marquis  de  Sablé,  fils 
du  maréchal  de  Boisdauphin.  —  Madeleine  de  Souvré,  fille  de  Gilles 
de  Souvré,  gouverneur  de  Louis  XIII,  maréchal  de  France,  est  la  célèbre 
marquise  de  Sablé,  dont  M.  Cousin  vient  de  placer  le  portrait  à  côté 
de  celui  de  M"**^  de  Longue  ville,  dans  sa  charmante  galerie  des  femmes 
illustres  du  xvu^'  siècle. 

2  Charles  de  Gonzague-Clèves,  duc  de  Nevers,  pair  de  France,  gou- 
verneur de  Champagne,  duc  de  Mantoue  en  lô27,  mort  en  4637, 

5  Ghàteau-fort  des  ducs  de  Nevers,  près  de  Sedan.  Le  célèbre  Louis 
de  Gonzague,  duc  de  Nevers,  père  de  celui  dont  il  s'agit,  y  triuta  ma- 
gnifiquement Henri  IV  en  1591,  (  f'oy,  Palma»<iayet,  édition  Petitot, 
1"  série,  vol.  40,  p.  311.) 

^  Pierre  Jeannin,  né  à  Autun  en  1540,  premier  présidept  du  Parlement 
de  Bourgogne,  chargé  par  Henri  IV  des  nùssions  les  plus  import&Qtes, 
surintendant  des  finances  pendant  la  régence  de  Marie  de  Medicis,  mort 
À  Pads  le  31  octobre  1622.  Ses  Négociations  ont  été  publiées  pour  la 
première  fois,  en  1656,  par  l'abbé  deCastille,  son  petit-fils. 


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4  JOURNAL   INÉDIT 

Janvier  tet4.  levé  par  quatre  hommes  à  cheval,  au  milieu  de  Châ- 
lons,  et  emmené  à  la  Cassine.  Il  avoit  informé  d'une 
levée  que  les  habitans  de  Rethelois  font  sur  eux 
pour  M.  de  Nevers,  sans  permission  du  Roy.  Et 
avoit  aussi  fait  mention,  en  son  information,  de  di- 
verses autres  choses,  comme  :  que  lesdits  habitans 
appellent  M.  de  Nevers  Monseigneur,  sans  queue, 
ont  mis  ses  armes  au-dessus  de  celles  de  France, 
font  faire  montre  à  certaines  compagnies,  sans  per- 
mission du  Roy.  Ledit  sieur  de  Vertau  est  habillé  en 
fol,  et  monté  sur  un  asne,  mené  par  toute  la  ville  de 
la  Cassine  et  autres  lieux  où  il  avoit  informé.  — 
M.  de  Nevers  dit  que  quand  il  s'en  estoit  plaint  à 
M.  le  Chancelier  *,  il  luy  avoit  dit  que  c' estoit  un  fol, 
et  qu'il  l'avoit  voulu  traitter  en  fol.  Sentence  pro- 
noncée audit  sieur  de  Vertau  par  un  homme  habillé 
en  juge,  cheveux  et  barbe  rasez  ^. 

9.  M.  de  Luxembourg  '  porta  le  poignard  à  la 
gorge  d'un  nommé  Barrin,  maître  des  Requestes. 
Décret  d'ajournement  personnel. 

^  Nicolas  Brulart,  marquis  de  Sillery,  seigneur  de  Puisieux,  conseil- 
ler au  Parlement  en  1568^  président  aux  Enquêtes  en  1584,  maître 
des  Requêtes  en  1588,  ambassadeur  en  Suisse  en  1589  et  1593,  pré- 
sident à  mortier  en  1597,  plénipotentiaire  à  Vervins  en  1599,  ambas- 
sadeur en  Italie,  en  Suisse  en  1602,  garde  des  sceaux  en  1604,  chan- 
celier de  Navarre  en  1606,  chancelier  de  France  en  1607,  rendit  les 
sceaux  en  1616,  les  reçut  de  nouveau  en  1623,  les  rendit  en  1624, 
mort  la  môme  année.  (P.  Anselme,  t.  vi,  p.  524.) 

2  Cette  affaire  se  trouve  aussi  racontée  dans  les  Mémoires  de  Pont» 
chartrain  (collection  Petitot,  2*  série,  vol.  17,  p.  35),  mais  le  trésorier 
si  maltraité  est  designé  sous  le  nom  de  Le  Jau. 

»  Henri  de  Luxembourg,  duc  de  Piney,  prince  de  Tingry,  pair  de 
France,  né  en  1593,  mort  en  1616. 


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d'arnauld  d'andilly.  5 

M.  le  Prince  '  part  mal  content  de  la  Cour  et  s'en      J*»^»»^  *•»*• 
va  à  Chasteauroux. 

On  mande  M.  d'Espemon,  qui  estoit  party  mal 
content  de  Fontainebleau,  en  octobre  1613,  à  cause 
de  la  charge  de  premier  gentilhomme  de  la  chambre 
refusée  à  son  filz  aisné,  et  s'en  estoit  allé  à  Metz 
establir  M.  de  la  Vallette,  son  puisné  ^. 

17.  Combat  de  MM.  de  Bours-Montmorency  et 
Bucan  à  la  place  Boyale  contre  le  jeune  Befuge 
(tué)  et  des  Bordes-Valencey. 

24.  M.  du  Maine  *  part  mal  content. 

25.  Combat  de  MM.  des  Marets  et  de  Sainte- 
More  contre  le  marquis  de  Boûillac  et  Saint-Vincent, 
à  minuit  et  demy,  sous  les  galeries  de  la  place 
Boyale.  Sainte-More  tué. 

28.  M.  de  Bouillon*  part,  emporte  vaisselle  d'ar- 
gent et  ineubles  précieux. 


*  Henri  II,  prince  de  Condé,  père  du  grand  Condé,  né  en  1588,  pre- 
mier prince  du  sang,  premier  pair  de  France,  gouverneur  de  Guyenne , 
chef  du  conseil  de  Régence  à  la  mort  de  Louis  XIH,  mort  en  1646. 

2  Jean-Louis  de  Nogaret  de  la  Valette,  duc  d'Epemon,  né  en  1554,  duc 
et  pair,  gouverneur  de  Normandie  en  1581,  amiral  de  France  en  1587, 
gouverneur  de  Provence,  de  Guyenne  ;  mort  en  1642.  —  Henri,  duc  de 
Candale.  —  Bernard  de  Foix  et  de  la  Valette,  duc  de  la  Valette,  né  en 
1592,  gouverneur  de  Guyenne;  mort  en  1661.  —  Le  troisième  fils  du 
duc  d'Epernon  était  Louis  de  Nogaret,  archevêque  de  Toulouse,  qui 
s'est  rendu  célèbre  sous  le  nom  de  cardinal  de  la  Valette,  par  son  atta- 
chement au  cardinal  de  Richelieu,  qui  lui  donna  le  commandement 
des  armées  en  Allemagne  et  en  Savoie.  D  mourut  en  1639. 

*  Henry  de  Lorraine,  fils  du  célèbre  chef  de  la  Ligue,  duc  de  Mayenne 
et  d'Aiguillon,  pair  et  grand  chambellan  de  France,  gouverneur  de 
Guyenne,  né  en  1578,  tué  au  siège  de  Montauban  en  1621.  Il  est  ap- 
pelé tantôt  duc  de  Mayenne,  tantôt  duc  du  Maine. 

*  Henri  de  la  Tour-d'Auvergne,  vicomte  de  Turenne,  duc  de  Bouil- 


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6  JOURNAL   ÏNIÎDIT 

Février  m4.  7,     M.  dô  VentadouF*  et  M.  de  Boissise^  envoyez 

vers  M.  le  Prince. 

10.  M.  de  Longueville*  estant  revenu  et  ayant 
eu  les  lettres  de  son  gouvernement,  part,  sans  dire 
adieu,  de  nuit.  Il  avoit  donné  parole  de  ne  bouger 
à  la  Reyne  et  à  M.  le  comte  de  Saint-Paul  \ 

11.  M.  de  Vendosme'arresté  dans  sa  chambre, 


Ion,  ué  en  1555,  maréchal  de  France  en  1592,  mort  en  1623.  {Foy,  se» 
mémoires.)  Il  fut  père  du  grand  Turenne. 

*  Anne  de  Lévis,  duc  de  Ventadour,  pair  de  France,  gouverneur  du 
Limousin,  lieutenant  général  du  gouvernement  de  Languedoc  ;  mort 
en  1632. 

>  Conseiller  d'ÉUt. 

*  Henri  d'Orléans ,  II«  du  nom,  duc  de  LongueviUe,  né  en  1595^ 
pair  de  France,  gouverneur  de  Picardie,  puis  de  Normandie,  plénipo-' 
tentiaire  à  Munster  en  1644,  mort  en  1663,  après  avoir  joué  un  grand 
rôle  dans  la  Fronde,  ainsi  que  sa  seconde  fenune,  la  célèbre  sœur  du 
grand  Condé,  Anne-Geneviève  de  Bourbon,  à  qui  M.  Cousin  a  donné 
une  illustration  nouvelle. 

.  4  François  d'Orléans,  comte  de  Saint-Paul,  pair,  gouverneur  d'Or- 
léans, de  Blois  et  de  Tours,  grand  maître  de  France  au  sacre  d'Henri  IV 
en  1594»  gouverneur  de  Picardie  pendant  la  minorité  du  duc  de  Lon- 
gueviUe, son  neveu,  duc  de  Fronsac  en  1608  ;  mort  en  1631. 

s  Cé§ar,  duo  de  Vendôme,  fils  aîné  de  Henri  IV  et  de  Gabrielle  d'Ës^ 
trées.  —  On  peut  voir  des  détails  sur  le  départ  des  princes  et  la  ligue 
qu'ils  formèrent^  dans  les  Mémoires  de  Sully  (collection  Petitot,  2*  série, 
vol.  9,  p.  351),  dans  ceux  de  Richelieu  (même  coll.,  vol.  21  bis,  p.  184), 
et  dans  ceux  de  Pontchartrain  (id.,  vol.  17,  p.  37).  Mécontents  de  la 
Cour  qui  ne  les  favorisait  point  assez  et  sous  prétexte  de  désordres 
dans  l'administration  des  affaires,  les  princes  résolurent  d'imposer  leur 
volonté  par  les  armes;  ils  partirent  furtivement,  Condé  le  premier, 
puis  les  ducs  du  Maine,  de  Bouillon,  de  LongueviUe^  etc.  Le  duc  de  Ven- 
dôme seul  ne  put  s'échapper  et  fut  arrôté  au  Louvre  par  M.  de  Plain- 
ville,  capitaine  des  gardes  ;  mais  il  s'évada  bientôt  et  se  rendit  dans 
sou  gouvernement  de  Bretagne.  Ces  mouvements  se  terminèrent  par 
une  espèce  de  paix  qui  fut  l'objet  du  traité  de  Sainte-Menehould,  signé 
le  15  mai  1614.  —  Au  sujet  du  passage  des  Mémoires  de  Sully,  auquel 
je  renvoie,  je  ferai  remarquer  que  co  passage  se  trouve  dans  un  cha- 


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D*AlKNâULD    D*ANDItLY.  7 

au  Louvre,  par  M.  de  Plainville,  au  sortir  du  cabi^      i^tiier  mu. 
net  de  la  Reyne.  Chambre  grillée* 

12*  M.  le  maréchal  d'Ancre*  part  avec  âO  ou 
40  chevaux  pour  aller  à  Amyens. 

IS.  Combat  du  sieur  de  Miraumont  contre 
M.  de  Nausé,  au  cloistre  Saint-Gertnain» 

14.  M.  de  Cadenet^  envoyé  à  toutes  les  villes  de 
Champagne* 

15.  MM.  de  Ventadour  et  de  Boissiae  revenus 
sans  avoir  veu  M*  le  Prince^  qui  estoit  party  de 
Chasteauroux  avec  20  chevaux,  estoit  passé  l'eau 
à  Sully  (M.  de  Sully  n'y  estoit)  et  de  là  est  p^ssé  à 
Troyes,  où  il  est  entré,  puis  s'en  est  allé'. 

16.  Le  comte  de  la  Roche  mis  à  la  Bastille. 

M.  de  Nevers  bloque  la  citadelle  de  Mézières, 
dont  le  lieutenant  qui  y  commandoit  luy  avoit  fermé 
la  porte.  Ecrit  à  la  Reyne.  —  La  prend  le  lendemain 


pitre  intitulé  :  Précii  de  la  Bé^ènce  dé  Matie  dt  Mèdicfs  M  dU  H^ne 
de  Louis  Xlll  jusqu'en  1628,  et  qu'une  note  indique  que  ce  mûrceùU  a 
été  fait  par  un  officier  proteêtOHt  qui  étoit  dans  la  Rochelle  pendant  le 
siége^  et  qui  partagea  toutes  tes  souffrances  des  habitants  de  cette  mal- 
heureuse ville*  Ce  chapitre,  assez  étendu,  se  retrou te^  atec  quelques 
variantes  dans  les  Mémoires  de  Rohan.  Lès  éditeurs  des  collections 
Petitot  et  Micbaud  ont  donc  reproduit  deux  fois  ce  fi'agment  UistdHque 
assez  considérable,  d'abord  dans  les  Mémoires  de  Sully,  ensuite  dans 
ceux  du  duc  de  Rohan,  auxquels  il  me  parait  appartenir  plus  légitime- 
ment. (Conf.  collect.  Micbaud.  Mém.  de  Sully,  pi  589  el  suit,  et  Mém. 
de  Rohan,  p.  502  etsuiv.) 

1  Goncino  Concini,  favori  de  Marie  de  Medids,  marquid  d'Ancre  eh 
1610,  maréchal  de  France  en  1613,  a$«sassiné  en  1617. 

>  Honoré  d'Albert,  sieur  de  Gadenet^  frère  du  duc  de  Lujrties,  duc 
de  Chaulnes  en  1619,  pair  de  France  en  1621,  maréchal  de  Franeè, 
gouverneur  de  Picardie  en  1633,  mort  en  1649. 

8  Voy.  Pontchartrain,  éd.  citée,  p.  168. 


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8  JOURNAL  INÉDIT 

Février  teu.  gans  résistance.  —  M.  de  Praslin  y  est  envoyé  avec 
un  exempt.  Comme  il  est  proche,  M.  de  Nevers  luy 
escrit  pour  le  prier  de  ne  passer  outre.  Sur  cela  il 
demeure  et  dépesche  à  la  Reyne  ;  mais,  sans  attendre 
réponce,  il  passe  outre.  M.  de  Nevers  refuse  de 
rendre  la  place  \ 

49.  M.  de  Vendosme  se  sauve  à  huit  heures  du 
soir,  par  la  porte  de  derrière,  d'une  garde-robbe  où 
il  estoit  entré,  avec  madame  sa  femme  ^. 

21.  M.  du  Roger  apporte  à  la  Reyne  des  lettres 
de  M.  le  Prince*. 

22.  M.  de  Fiefbrun  en  apporte  au  Parlement*. 

Mars.  1.     M.  de  Thou  va  vers  M.  le  Prince  ^ 

AvriL  5*.     M.  le  Prince  envoyé  un  gentilhomme  à  M. 


*  Foy,  collect.  Petitot,  Fontenay-Mareuil,  l'«  série,  vol.  50,  p.  233; 
Pontchartrain,  2*  série,  vot  17,  p.  35  ;  Richelieu,  vol.  21  bis,  p.  187, 
et  le  Mercure  français^  t.  m,  p.  312. 

*  Voy,  Mercure  français^  t.  m,  p.  359,  des  détails  sur  révasion  du  duc 
de  Vendôme  et  la  lettre  qu'il  écrivit  au  Roi  à  son  arrivée  en  Bretagne. 

*  Voy,  Mercure  français^  p.  317,  ces  lettres,  ou  plutôt  ce  manifeste 
dans  lequel  le  prince  de  Condé  expose  à  la  Reine  les  causes  pour  les- 
quelles lui  et  les  Princes  se  sont  assemblés  à  Mézières. 

*  Voy.  sur  toute  cette  affaire  le  Merc,  fr,^  p..  327  et  suiv.,  où  se  trouve 
toute  la  correspondance  échangée  entre  la  Reine  et  le  prince  de  Condé, 
au  sujet  du  départ  des  Princes» 

*  Jacques-Auguste  de  Thou,  le  célèbre  historien,  président  à  moi^ 
tier  au  Parlement  de  Paris,  conseiller  d*État,  né  en  1553,  mort  en  1617. 

6  Lacune  d'un  mois  dans  le  manuscrit  Pendant  ce  mois  il  ne  se 
passa  rien  d'important.  La  mission  du  président  de  Thou,  qui  était 
de  convenir  d'une  conférence,  entre  les  Princes  et  des  députés  de  la  Cour 
pour  faire  la  paix,  avait  réussi.  On  avoit  décidé  que  cette  conférence  se 
tiendrait  le  mois  suivant  à  Soissons.      '  > 


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d'arnauld  d'andilly.  9 

de  Rohan\  qui  lui  envoyé  M.  de  Hautefontaine.        Avruwu. 

6.  MM.  les  Princes  arrivent -à  Soissons  avec 
3,000  hommes  de  pied  et  500  chevaux.  Ils  avoyent 
stipulé  que  la  Reyne  feroit  retirer  ses  trouppes  et 
n'avoient  esté  obligez  à  faire  le  mesme.  —  Faute. 

MM.  de  Ventadour,  de  Thou,  Jeannin  et  de  Bois- 
sise  vont  vers  MM.  les  Princes  pour  traitter  ^. 

7.  Nouvelle  de  la  mort  de  M.  le  Connestable^ 

29  \     M.  le  Prince  revient  trouver  le  Roy.  septembre. 


^  Henri  de  Rohan,  II«  du  nom,  premier  duc  de  Rohan,  pair  de 
France,  né  en  1579,  colonel  général  des  Suisses,  général  en  chef  des 
armées  protestantes  en  1621,  mort  en  1638,  Il  a  laissé  des  mémoires 
et  d'autres  écrits  politiques  importants.  Le  duc  de  Rohan  dit  dans  ses 
mémoires  que,  lorsque  Hautefontaine,  son  envoyé,  arriva  auprès  des 
Princes,  la  paix  étoit  conclue,  et  que  dès  lors  il  n*eut  plus  à  s'entendre 
avec  eux  sur  les  conditions  de  Talliance  proposée. 

2  Arnauld  d'Andilly  oublie  de  mentionner  M.  de  Bullion,  conseiller 
d'État. 

*  Henri,.  I*'  du  nom,  duc  de  Montmorency,  premier  baron,  pair, 
maréchal  et  connétable  de  France,  gouverneur  du  Languedoc,  né  en 
1534,  mort  le  2  avril  1614.  Il  était  le  quatrième  connétable  de  sa  maison. 
'*  Lacune  de  près  de  six  mois  dans  le  manuscrit.  Les  principaux 
événements  pendant  cette  période  furent  :  la  paix  conclue  entre  la 
Cour  et  les  princes  et  signée  le  1 5  mai  à  Sainte-Menehould.  Les  condi- 
tions de  ce  traité  furent  :  la  convocation  des  États-Généraux  pour  la 
réformation  des  désordres  de  l'État,  et  la  surséance  des  mariages  espa- 
gnols (du  Roi  et  de  Madame)  jusqu'à  la  minorité  du  Roi,  ainsi  que  des 
avantages  considérables  accordés  aux  Princes  rebelles  {Voy»  ce  traité, 
Merc,  fr.,  t.  m,  p.  428)  —   la  mort  du  chevalier  de  Guise—  le  soulè- 
vement du  duc  de'  Vendôme  en  Bretagne  et  le  tumulte  de  Poitiers  — 
Je  voyage  de  la  Reine-Mère  et  du  Roi  en  Poitou  et  en  Bretagne,  pour 
reprimer  ces  désordres  —  la  mort  du  prince  de  Conty  —  le  retour  du 
Roi  à  Paris  (Voy.  à  l'année  1614,  coUect.  Petitot,  Richelieu,  2«  série, 
t.  XXI  bis,  Pontchartrain,  t.  xvii,  Rohan,  t.  xviii,  et  surtout  le  Merc.  fr,^ 
même  année,  t.  m). 


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Octobre  1614. 


\0  jOOftN/iL  ÎNIÎDÎT 

2.     Le  Roy  va  au  Parlement'» 


25.     Estats  ouverts*. 


0  Rejm*  MABGUERfllî. 

Madame.      Madame  Chîiestieicne. 

M.duPerrow. 

©                             © 

Ri.  DE  Sourd». 

-M.  le  PRiifCE.    REYWE.                Monsieur. 

M.  DE  Larochefou- 

-M.  le  Comte.          t                            © 

CAULT. 

42 

U-                                    Rot. 

-M.  bE  GUÎSE.                          ^ 

i 

1 

!5 

-M.  DE  Rheims.      ^  j,„  picrts  M.  T)U  Maine. 

..           „                                                       0  CbAHCEtlER. 

-M.  DE  Sully. 

0 
Comte  DE  Saint  Paul, 
—mm  |ni4*Miitn. 

II 

i 

i 

1 

t^ 

8 

1 

1 
II 

.    1 

3- 

1 

il 

Barreau.       \                  ^ 

^.§ 

M.  Tarchey.  de  Lyon,  pour  le  Clergé. 

0 
M.  de  Po*T-ST-PiER!iE,p*la  Noblesse 

© 
M.  Mtron  ,  pour  le  Tlers^Estat. 


Il  se  veid  que  les  evesques  et  gentilshommes  des- 


<  Pour  la  déclaration  de  sa  majorité.  Il  venait  d'accomplir  sa 
treizième  année*  {Voy,  le  compte  rendu  de  cette  solennité,  Merc,  fr.^ 
t.  m,  p.  588.) 

2  C'est  le  27  et  non  le  25  qu'eut  lieu  l'ouverture  des  États.  —  H  y  ft 
quelques  omissions  dans  le  tableau  d'Arnauld  d'Andilly,  notamment 
celle  des  maréchaux  de  France,  (voy,  pour  les  détails  de  cette  «oleu- 
nité  le  Merc.  fr.,  t.  m,  2«  part.,  p.  1  ot  suiv.) 


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D^ARNAOLD  D'ANDILLY.  Il 

putez  se  sont  assis  en  des  bancs  devant  les  conseillers 
d'Estat,  ce  qui  ne  s' estait  jamais  pratiqué^  attendu 
qu'ils  sont  là  en  qualité  de  supplians.  Mais  un  peu 
devant  que  le  Roy  vint,  M.  le  cardinal  de  Sourdis\ 
M.  d'Angers  et  M-  Davy^  (qui  alla  parier  à  M.  le 
cardinal  du  Perron')  firent  une  rumeur  pour  cela, 
et  M.  le  Chancelier,  se  fondant  sur  ce  qu'il  se  pouvoit 
faire  qu'ils  fesoyent  cela  à  dessein  pour  rompre 
l'assemblée,  leur  accorda  de  s'y  mettre  sans  tirer  à 
conséquence;  ce  que  M.  de  Villeroy*  dit  depuis 
n'estre  raisonnable  et  ne  s'estre  jamais  pratiqué*  Il  y 
fut  apporté  remède  à  la  conclusion  des  Ëstats. 


Octobre  teu» 


Duel  de  deux  soldats  des  Gardes.  Celuy  qui  avoit 
tué,  nommé ,  pris,  par  le  bailly  de  Saint-Ger- 
main et  mis  en  prison. 

M.  d'Espemon,  prétendant  avoir  commandement 
du  Roy  et  de  la  Reyne,  sur  ce  qu'il  leur  avoit  repré- 
senté, marche  à  la  teste  d'une  compagnie  de  Gardes 
en  armes  (il  en  avoit  une  qui  tenoit  le  Pont-Neuf) , 
va  à  la  prison,  demande  le  prisonnier.  Sur  ce  que  l'on 
diffère,  enfonce  une  porte  et  puis  se  le  fait  rendre. 


Novembre. 


*  François  d'Esooubleau,  cardinal  de  Sourdis^  archevêque  de  Boiv 
deaux  en  1599,  mort  en  1628. 

3  Jean  Davy  du  Perron,  seigneur  de  la  Guette,  conseiller  au  conseit 
privé  du  Boi,  archevêque  de  Sens,  frère  du  célèbre  cardinal. 

*  Jacques  Davy  du  Perron,  cardinal  et  grand  aumônier  de  France, 
né  en  1556,  mort  en  1618« 

^  Nicolafi  de  Neufville^  seigneur  de  Villeroy,  né  en  1542,  seo'étaire 
d'État  sous  Charles  IX,  Henri  HI,  Henri  IV  et  Louis  XIII,  mort  en 
1§17.  (yoy.  Topinion  de  Richelieu  sur  ce  personnage»  Petitet^  2*  sé- 
rie, t.  XXI  bi5»,  p.  /|86.) 


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12  JOOflNAL  INÉDIT 

Noyembrei«u.         Lc  Parlement  prend  connoissance  de  l'affaire. 

Lorsque  le  Parlement  vouloit  délibérer  sur  cette 
affaire,  M.  d'Espernon,  avec  180  gentilshommes,  va 
au  Palais  (avoit  soldats  qui  gardoyent  les  portes), 
s'arreste  à  la  boutique  de  la  gantière  ;  ses  gens  com- 
mettent infinies  insolences.       •»• 

24.  Jour  qu'on  devoit  ouvrir  le  Parlement  et  les 
chambres  (M.  du  MesniP,  et  M.  Perrot  avoyent  au- 
paravant esté  desputez  vers  Monsieur  le  premier  Pré- 
sident, pour  luy  dire  que  Messieurs  des  Enquestes 
désiroyent  se  trouver  en  cette  occasion,  et  que  c' es- 
toit  chose  que  l'on  ne  leur  pouvoit  refuser).  Mon- 
sieur le  Prince  et  M.  de  Sully  ^  s'y  trouvèrent  sur  le 
sujet  de  l'ouverture. 

M.  de  Praslin  *  vient  avec,  des  lettres  de  cachet 
et  de  créance  portant  que  le  Roy  mandoit  à  Mes- 
sieurs du  Parlement  différer  deux  jours  de  tra- 
vailler en  cette  affaire.  On  opine.  Trois  sortes  d'avis. 
M.  le  Prince,  M.  Gilot,  M.  de  Grenoble  et  M.  Ma- 
réchal opinèrent  fermement.  Passé  que  l'on  super- 

*  Président  des  enquêtes. 

2  Maximilien  de  Béthune,  duc  de  Sully,  né  en  1560,  pair  de 
France,  surintendant  des  finances  en  1597,  grand  maître  de  Tartillc- 
rie,  gouverneur  du  Poitou,  maréchal  de  France  en  1634,  mort  en 
1641.  Éloigné  du  gouvernement  à  la  mort  de  son  ami  Henri  IV,  le 
grand  duc  de  Sully  siégeoit  comme  pair. 

3  Charles  de  Choiseul,  marquis  de  Praslin,  chevalier  des  Ordres, 
conseiller  d*État,  lieutenant  général  au  gouvernement  de  Champagne, 
maréchal  de  France  en  1619,  gouverneur  de  Saintonge,  commanda 
aux  sièges  de  Saint-Jean-d*Angély,  de  Montauban,  de  Montpellier 
en  1622,  mort  en  1626.  ï\  s'était  trouvé  à  cinquante-trois  sièges, 
quarante-sept  combats  ou  batailles,  et  avait  reçu  vingt-deux  blessures. 
{Voy,  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  440.) 


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d'arnaold  d'andilly.  13 

sederoit  les  deux  jours  que  le  Roy  vouloit,  et  que  ce-  Novembre  leu. 
pendant^  on  n'ouvriroit  point  le  Parlement.  M.  le 
Prince  dit  à  M.  le  premier  Président  (qui  disoit 
qu'il  n'y  avoit  point  d'apparence  de  faire  cesser  la 
justice) ,  qu'il  estoit  question  de  compter  les  voix  (qui 
passoyent  de  plus  de  soixante)  et  non  de  discourir. 

26.  M.  le  Prince  retourne  au  Parlement. 

27.  Lettres  patentes  du  Roy  au  Parlement  por- 
tant qu'ils  ayent  à  rendre  la  justice.  Ordonné  que 
l'on  obéiroit  aux  lettres.  (Ensuite  de  quoy  le  Parle- 
ment fut  ouvert  le  lendemain) ,  et  par  restriction,  que 
l'on  travailleroit incessamment  à  l'affaire  de  M.  d'Es- 
pemon. 

28.  M.  de  Ventadour  va  au  Parlement  leur  dire 
que  le  Roy  remettoit  entièrement  l'affaire  à  leur 
jugement  ;  mais  qu'il  les  prioit  d'avoir  égard  à  l'âge 
et  à  la  qualité  de  M.  d'Espemon.  Sur  quoy  ils  ré- 
pondirent qu'ils  feroyent  tout  ce  qui  plairoit  au  Roy. 
Et  sur  cela,  fut  convenu  que  M.  d'Espemon  iroit 
le  lendemain  leur  faire  des  excuses.  Ordonné  que 
l'information  sera  mise  au  greffe,  sans  estre  veûe. 

29.  M.  d'Espemon  va  au  Parlement,  avec  M.  le 
Grand  \  (M.  le  Prince  y  estoit  encore  que  la  Reyne 
l'eût  prié  de  n'y  assister  point,  ce  qu'il  luy  refusa.^ 
M.  de  Ventadour  y  alla  premièrement,  et  puis  entra 


*  Roger  de  Saint-Lary  et  de  Termes,  duc  de  Bellegarde,  grand  écuyer 
de  France,  sous  Henry  IH,  Henry  IV  et  Louis  XUI,  gouverneur  de 
Bourgogne  et  de  Bresse,  duc  de  Bellegarde  et  pair  de  France  en  1619, 
surtintendant  de  la  maison  et  premier  gentilhomme  de  la  chambre  de 
Gaston  duc  d'Orléans,  mort  en  1646.  (V,  P.  Anselme,  t,  viii.  p.  507.) 


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là  JOURNAL  INÉDIT 

Novembre  isi*.  avec  M.  d'Espcmon,  lequel  dit  :  que  luy  qui  eatoit 
un  vieil  capitaine,  blanchy  sous  les  armes,  a  voit 
creu  devoir  maintenir  sa  jurisdiction,  contre  un  petit 
juge  de  néant,  qui  ne  pouvoit  entrer  en  aucune  com- 
paraison aveo  luy,  Que,  pour  le  regard  de  la  Cour, 
il  n'avoit  jamais  rien  tant  désiré  que  d'avoir  l'hon^ 
neur  d'estre  de  son  corps,  et  qu'il  seroit  très-marry 
de  jamais  rien  faire  qui  luy  pust  déplaire.  Le  premier 
Président  de  Verdun  *  répondit,  entre  autres  choses, 
que  la  Cour  recevoit  ses  excuses  et  la  satisfaction 
qu'il  luy  faisoit,  Sur  quoy  il  dit,  en  jurant,  à  M.  de 
Ventadour,  qu'on  le  traictoit  comme  criminel,  et 
qu'il  vouloit  répliquer.  M.  de  Ventadour  le  retint,  et 
l'en  empescha,  et  au  sortir  de  là,  parla  à  luy  de 
bonne  sorte  \ 


A  Nicolas  de  Verdun,  pFeoùep  préfixent  4u  Parlement  de  Toulouse, 
nommé  en  1611  premier  président  du  Parlement  de  Paris.  L'Estoile, 
dans  son  journal,  dit  que  cette  dernière  charge  lui  coûta,  tant  en  prix 
d^achat  qu'en  épingles,  trois  cent  dix  mille  livres  1  Après  avoir  donné 
de  curieux  détails  sur  la  nomination  du  président  de  Verdun ,  il 
ajoute  :  «  Sur  quoi  je  ne  puis  arrester  ma  plume,  que  je  n*escrive  ici 
et  déplore  le  vilain  traficq  et  infâme  prostitution  qui  se  fait  de  nos 
principaux  estats  en  France  pour  de  l'argent  et  principaleipent  de 
ceux  de  judicature.  Car  vendre  la  justice,  qui  est  la"  chose  la  plus 
sacrée  du  monde,  c'est  vendre  la  République,  c'est  vendre  le  sang  des 
subjects,  c'est  vendre  les  loix,  et,  en  estant  les  loiers  de  l'honneur,  de 
vertu,  de  savoir,  de  piété  et  de  religion,  ouvrir  la  porte  aux  larcins, 
concussions,  avarice,  injustice,  ignorance,  impiété  ;  brief,  à  tous  vices 
et  ordures.  »  (Petitot,  1"  série,  t.  xlix,  p.  190.) 

2  Cette  affaire  est  rapportée  avec  beaucoup  plus  de  détails  dans  les 
mémoires  de  Mathieu  Mole,  publiés  pour  la  aociété  de  l'Histoire  de 
France,  par  M.  Aimé  GhampoUion-Figeac  (t.  i,  p.  517),  Mole  venoit 
d'être  nommé  procureur  général.  Reçu  en  cette  qualité  au  Parlemeet 
le  15  novembre,  c'est  le  18  qu'il  porta  plainte  contre  le  duc  d'Eper- 
non.  Le  récit  de  Molô  est  d'autant  plus  important,  qu'il- est  appuyé 


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d'aRNAULD   o'Af^PItLY.  15 

6.  Conaeil  de  la  Direction  changé  \  Ordonné  Décembre  len. 
que  la  semaine  se  lira,  et  les  principales  affaires  con- 
cernant les  finances  se  traicteront  tous  les  sainedys 
après  rnidy,  en  un  autre  Conseil  dans  le  Louvre,  au- 
quel assisteront  le  Roy,  la  Reyne,  M,  le  Prince, 
M.  le  cardinal  de  Joyeuse  %  M,  de  Quise%  M,  de 
Nevers,  M.  de  Bouillon,  M.  d'Eapernon,  M.  le  Chan- 
celier, MM.  les  préoédens  Directeurs,  M.  de  Pont- 
Carré  et  M.  de  Bulli<»  \ 

44.  Madame  de  Longuevilla^  mal  contente  de 
M.  de  Nevers,  son  frère,  disant  que  son  fils  s'estoit 
engagé,  pour  son  seul  respect,  aux  t)rQuilleries  pas- 
sées, et  que  maintenant,  quand  on  avoit  fait  ce  con- 
seil de  la  Direction,  il  n'avoit  dit  un  seul  mot  pour 


sur  les  documents  officiels.  M.  Aimé  Champollîon-Figea«,  not^  3,  p.  5, 
reproche  à  M,  Bazin  d*avoir  été  ieexaot,  en  disaqt  que  M.  d'Epw non  ne 
cessa  de  ce  moquer  du  Parlement  en  des  paroles  fort  hautes.  Le  compte 
rendu  d*Arnauld  d'Andilly  justifie  quelque  peu  l'assertion  du  regret- 
table M.  Bazin,  {f^ey,  la  môme  afi'ah^,  lUcbelieu^  t.  xxi  bii,  9*  at^rie, 
p.  215;  Pontchartpain,  t.  xvii,  p.  61.) 

*  Après  la  mort  d'Henri  IV,  Sully  ayant  été  disgracié  en  1611,  ou 
établit  des  directeurs  des  finances  pour  faire  la  charge  de  surintendant. 
(Vay.  Mém.  d*Arn.  d'Andilly.) 

3  François  de  Joyeiise,  né  en  1562,  mort  doyen  des  cf^rdinaux  en 
1615.  (Foy,  Merc.  fr.,  t  iv,  p.  441,  une  notice  sur  cet  illustre  per- 
sonnage.) 

3  Charles  de  Lorraine,  duc  de  Guise  et  de  Joyeuse,  prince  de  Join- 
ville,  pair  et  grand  maître  de  Fi*^ce,  né  en  1571,  mort  en  1640- 

*  Claude  de  Bullion,  seigneur  de  Bonnelle,  conseiller  m  Parlement, 
président  aux  Enquêtes,  conseiller  d'Etat,  directeur  des  finances,  su- 
rintendant des  finances  en  1632,  président  ^  mortier  en  1636,  mort 
en  1640.  (F«|i,  Tallem^pt  des  R^aux,  t.  11,  p.  145,  l'historiette  de  ce 
personnage  qui  fut  un  des  principaux  agents  de  Richelieu.) 

5  Gatbenne  de  Gonzi^ue-Clèves,  fille  de  Louis  de  Geinz^gue,  duc  de 
^e?ers,  4achas^  douairière  ^^  Longueviile,  ^lorte  en  1£^Q. 


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16  JOURNAL    INÉDIT 

Décembre  1614.     luy.  M.  de  NeveFs  l'ayant  esté  voir,  elle  s'enfenna 
dans  son  cabinet,  et  luy  tounia  le  dos. 

19.  M.  de  Villeroy,  s' estant  pleint  à  la  Reyne  de  ce 
que  M.  le  maréchal  d'Ancre  avoit  tenu  mauvais  pro- 
pos de  luy,  et  la  Reyne  luy  ayant  répondu  qu'ils  n'a- 
voyent  rien  à  démesler  ensemble  luy  et  M.  le  maré- 
chal d'Ancre,  ledit  sieur  de  Villeroy  se  retire  mal 
content  à  Conflans.  Aucuns  disent  que  M.  le  maré- 
chal d'Ancre  voulant  que  M.  de  Longueville  prit  la 
Normandie  pour  gouvernement,  et  luy  laissast  la 
Picardie,  M"'  de  Longueville  dit  qu'elle  suivroit  le 
conseil  de  ses  amis,  et  particulièrement  de  M.  de 
Villeroy.  Et  que  depuis,  l'affaire  ne  s' estant  achevée 
le  maréchal  auroit  creu  que  M.  de  Villeroy  en  estoit 
cause,  dont  il  se  pleignit  tellement  qu'il  vint  jusques 
à  l'appeller  traistre,  dequoy  M.  de  Villeroy  s' estant 
pleint  à  la  Reyne,  elle  ne  l'auroit  satisfait. 

M.  de  Pisieux  *  l'ayant  esté  trouver  à  Conflans,  il 
revint  le  20,  qui  estoit  un  samedy  ^  Alla  voir  M.  le 


*  Pierre  Brulart,  marquis  de  Sillery,  vicemte  de  Puîsieux,  né  en 
1583,  grand  trésorier  des  ordres  du  roy,  secrétaire  d*État  et  des  com- 
mandements et  finances  en  1606,  conseiller  d'État  en  1607,  ambassa- 
deur en  Espagne  en  1612,  mort  en  1640.  Il  épousa  en  premières  noces 
Madeleine  de  Neufville-Villeroy,  fille  de  Charles  de  Neufville,  marquis 
de  Villeroy  et  d'AIincourt,  morte  en  1618  et  en  secondes  noces  Char- 
lotte d*Etampes-Valençay,  fille  de  Jean  d'Etampes  seigneur  de  Valen- 
çay,  mariée  en  1615,  morte  en  1677. 

^  M.  de  Puisieux  étoit  probablement  porteur  de  la  lettre  suivante, 
écrite  au  nom  de  la  Reine  à  M.  de  Villeroy  par  le  président  Jeannin 
pour  rengager  à  revenir  à  la  Cour,  lettre  que  je  copie  sur  l'autographe 
original  qui  m'appartient  :  «  Monsieur,  j*ay  communiqué  vostre  lestre 
»  à  M.  le  Chancelier  aussitost  que  Tay  receue  et  luy  et  moy  avons 


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d'arnauld  d*andilly.  17 

maréchal  d'Ancre  (ce  qui  fut  trouvé  indigne  de  owembrtieu. 
luy)  avec  le  cardinal  de  Sourdis  qui  l'y  mena.  Y  fut 
longtemps.— N'en  sortit  trop  satisfait.  On  a  voit  pro- 
posé dans  les  Estats  de  demander  qu'il  fust  rap- 
pelle. —  S'il  fust  demeuré  encore  quelques  jours  à 
Conflans,  il  l'eust  esté  glorieusement.  —  La  Reyne, 
à  son  retour,  le  tança,  disant  qu'il  l'avoit,  en  se  reti- 
rant, laissé  exposée  à  l'envie,  pour  ce  qu'il  avoit  sem- 
blé qu'elle  eust  esté  méconnoissante  des  services 
qu'il  avoit  rendus.  —  Outre  la  cause  cy-dessus  allé- 


»  jugé  qu'il  estoit  expédient  de  parler  à  la  Roine  sur  ce  qui  vous 
»  concerne  et  mesrae  de  luy  faire  tenir  la  mesme  lestre  qui  est  si 
»  bien,  considérant  que  ne  luy  pouvions  rien  dire  plus  à  propos, 
»  Sa  Majesté  en  a  volontiers  entendu  la  lecture  et  nous  a  fait  rcs- 
»  ponce  qu'elle  estoit  très  assurée  de  vostre  affection  et  fidélité  au 
»  service  du  Roy  et  au  sien  quelle  vous  prioit  instaraent  a  vous  y  con- 
»  duire  comme  avez  fait  et  que  de  son  costé  elle  feroit  en  vostre  en- 
»  droit  comme  elle  a  accoustumé,  adjoustant  que  Monsieur  le  Chan- 
»  celier  et  moy  vous  en  donnions  advis.  Monsieur  le  cardinal  de 
»  Joieuse  nous  a  parlé  et  Monsieur  d'Espemon  aussi  qui  se  monstre 
n  très-affectionné  en  vostre  endroit  et  sommes  tous  d'advis  que  venies 
»  ici  des  demain  si  pouves  pour  y  estre  un  jour  si  ne  voules  y  estre 
»  davantage  et  après  retourner  à  Conflans  pour  y  faire  vostre  feste. 
»  Vostre  départ  de  ceste  Cour  qu'on  publie  estre  ainsi  {illisible)  est 
»  grandement  préjudicable  au  service  de  Leurs  Majestés,  et  si  ne  faites 
»  perdre  ceste  opinion  par  vostre  retour  et  en  vous  conduisant  conmie 
»  aves  accoustumé,  la  Roine  croira  que  le  faites  exprès  pour  en  faire 
»  tomber  la  hayne  sur  elle.  Je  vous  suplie  humblement  de  ne  le  pas 
»  faire  et  de  donner  quelque  foi  au  conseil  de  ceux  qui  vous  honorent 
»  et  a  moy  particulièrement  qui  suis.  Monsieur,  vostre  humble  et 
»  obéissant  serviteur, 

»  P.  Jeai<inin. 

«  A  Paria,  ce  samedi  au  soir  xx  décembre.  » 

Au  dos  :  A  Monsieur  Monsieur  de  Villeroy. 


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18  JOURNAL   INiSdIT 

DéeenibN  iti«.  guée  de  cctte  affaire,  on  dit  que  la  Reyne  ayant  de^ 
mandé  à  T ambassadeur  d'Espagne,  si  son  maistre 
n'estoit  pas  résolu  d'accomplir  promptement  les  ma^ 
riages,  il  reapondit  que  l'affaire  n'estoit  pas  en  termes 
de  s'avancer,  puisque  M.  de  Villeroy  avoit  escrit  h 
M.  de  Vaucelas  *,  qu'attendu  les  mouyemens  qui 
estoient  en  France,  il  taschast  de  différer  pour  deux 
ans  l'accomplissement  des  mariages.  Que  sur  cela,  la 
Reyne  s'en  estoit  mis  fort  en  colère,  disant  qu'elle 
n'avoit  point  donné  charge  de  cela.  Et  ayant  mandé 
M.  de  Villeroy,  lui  parla  avec  aigreur  sur  ce  sujet  ; 
et  que  le  maréchal  d'Ancre,  qui  estoit  derrière  elle, 
dit  tout  haut  :  ce  n'est  pas  la  première  trahison  qu'il 
a  faite.  Que  sur  cela,  la  Reyne  ne  dit  mot,  et  que 
M.  de  Villeroy  piqué  s'en  alla  à  Conflans. 

Or  après  que  M.  de  Villeroy  eut  veu  M.  le  maré- 
chal à  son  retour  de  Conflans,  ledit  sieur  maréchal 
envoyaprier  M.  le  premier  Président  de  le  venir  voir, 
et  luy  dit  sur  quel  sujet  estoit  venue  la  broûillerie,  et 
notamment  que  c' estoit  à  cause  que  M.  de  Villeroy 
avoit  escrit  en  Espagne.  Il  dit  la  mesme  chose  à 
beaucoup  d'autres,  ce  qui  est  interprété  comme  une 
espèce  de  manifeste,  afin  d'éviter  l'envie  qu'il  en- 
courroit  sur  l'opinion  que  l'on  concevroit  qu'il  au- 
roit  esté  cause  de  la  disgrâce  de  M.  de  Villeroy. 

Cause  de  l'inimitié  dudit  sieur  Maréchal  envers 
M.  de  Villeroy  :  que  sur  le  sujet  du  gouvernement  de 


*  André  de  Cochefilet,  baron  de  Vaucelas,  conseiller  d^État,  capi- 
taine do  50  hommes  d'armes,  ambassadeur  en  Espagne  et  en  Savoie. 


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d'ARNAULD   O^ANDILr.Y.  19 

Picardie,  ledit  sieur  de  Villeroy  dit  que  c'estoit  bien 
assez  de  donner  des  lieutenances  de  gouvernernens  à 
des  estrangers,  mais  que  de  leur  donner  en  chef,  il 
n'y  a  point  d'apparence. — Sur  ce  différent,  M.  d'A- 
lincourt  *  arriva  le  23  ou  24  en  poste  de  Lyon,  et 
en  mesme  temps,  alla  voir  M.  le  maréchal  d'Ancre. 

Depuis,  M.  le  Maréchal  a  désisté  d'insister  sur  la 
lettre  écrite  par  M.  de  Villeroy,  mais  a  dit  quMl 
avoit  tenu  lesdits  propos  avec  l'ambassadeur  d'Es- 
pagne ;  ce  que  ledit  ambassadeur  a  dénié  *. 

20.     M.  le  président  Jeannin,  assisté  de  M 

va  dire,  aux  Augustins,  à  Messieurs  des  Estats,  que 
le  Roy  leur  accorde  la  recherche  des  finances,  sous 
le  nom  de  chambre  ardente  \ 

29.  Messieurs  du  Parlement  s'assemblèrent,  sur 
le  sujet  de  la  paulette,  et  aussi  le  30  et  31  \ 


*  Charles  de  Neuf  ville,  marquis  d'Alincourt,  gouverneur  du  Lyon- 
nais, fils  de  M.  de  Villeroy  et  père  de  Nicolas  de  Neufville,  marquis 
de  Villeroy  qui  fut  gouverneur  de  Louis  XIV  et  maréchal  de  France.  Le 
marquis  de  Villeroy  devant  épouser  la  fille  du  maréchal  d*Ancre,  cette 
alliance  projetée  permettait  à  M.  d*Alincourt  de  s'interposer  entre  le 
maréchal  et  M.  de  Villeroy.  Ce  mariage  n*eut  pas  lieu. 

2  Foy.  sur  cette  brouille  entre  Villeroy  et  le  maréchal  d'Ancre, 
Pontchartrdin,  t.  xvn,  p.  64. 

>  C'était  une  commission  extraordinaire  nommée  pour  rechercher 
les  malversations  dans  les  finances  et  juger  les  agents  coupables  de  ces 
malversations. 

^  La  paulette  ou  pâlotte  qui  a  été  la  cause  d'interminables  débats 
entre  le  Parlement  et  le  grand  Conseil^  était  un  impôt  prélevé 
annuellement  sur  les  offices  de  justice  et  de  finances,  moyennant  le- 
quel le  privilège  de  l'hérédité  leur  était  assuré.  On  appelait  aussi  cet 
impôt  le  droit  annuel.  Cette  mesure  fiscale  établie  par  Henri  1\,  en 
consacrant  la  vénalité  des  charges  et  en  les  rendant  héréditaires,  leur 
fit  acquérir  une  valeur  considérable.  (Voy,  sur  cette  question  le  Merc. 


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20  JOURNAL   INIÊDIT 

Décembre  leu.        Mort  de  M.  Ic  iTiaréchal  de  la  Ghastre  *.  Sa  charge 
donnée  à  M.  de  Roquelaure  \ 


fr.^  U  III,  2*  part.,  p.  72  et  suiv.,  où  se  trouve  Tanalyse  de  toutes  les 
raisons  pour  et  contre  la  paulette.) 

*  Claude,  baron  de  la  Chastre,  né  en  1526,  gouverneur  du  Berry 
sous  Charles  IX,  maréchal  de  France  en  1593,  mort  en  1614. 

s  Antoine,  seigneur  de  Roquelaure,  grand  maître  de  la  garde-robe 
en  1580,  gouverneur  de  Guyenne,  maréchal  de  France  en  1615,  mort 
en  1625. 


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^6^5 


SOMMAIRE 

Janvieb.  —  Remontrances  du  Parlement  sur  Tarticle  l*'  du  cahier  du 
Tiers-État.  —  Arrêt  du  Conseil  à  ce  sujet.  —  La  paulette.  —  Dis- 
cussion sur  Tart.  1*'.  —  Brouille  du  cardinal  de  Sourdis  et  de  M.  le 
Prince.  —  Duel  du  marquis  de  la  Force  avec  M.  de  Grammont.  — 
Réclamations  de  l'ambassadeur  d'Angleterre  contre  le  cardinal  du 
Perron.  —  État  des  finances.  —  Propositions  d'Amauld  l'intendant. 
Violences  exercées  envers  M.  de  Riberpré.  —  M.  de  Puisieux  chargé 
des  deniers  du  taillon.  '—  Amboise  enlevé  à  Monsieur  le  Prince.  — 
Suppression  du  1"  article.  —  Jugement  d'une  prise  faite  sur  les  Espa- 
gnols par  Barre  et  Fleury,  capitaines  français.  —  Duel  de  Livarrot 
et  Auvilars  contre  la  Fei*té  et  la  Trye.  —  Le  clergé  récuse  la  juri- 
diction du  Parlement.  —  L'Évêque  d'Angers  et  le  Chancelier. 

FÉVRIER.  —  Violences  de  M.  de  Bonneval  envers  M.  de  Chavaille.  — 
Bonneval  condamné  à  mort  —  Affaire  de  Marsillac  et  de  Rochefort. 
—Conduite  de  Monsieur  le  Prince  envers  le  Parlement  et  la  Reine.— 
Plaintes  du  député  Digoine.  —  Excuses  de  M.  le  Prince.  —  Délibé- 
rations des  États.  —  Brouille  de  M.  de  Souvré  et  de  M.  de  Luynes. 

—  Clôture  des  États.  —  Séance  royale. 

I^ns.  —  M.  de  Luynes  a  le  gouvernement  d'Amboise.  —  Délibéra- 
tions du  Parlement  et  du  Conseil  sur  la  paulette.  —  Les  trois  Ordres 
au  Louvre.  —  Mort  de  la  reine  Marguerite.  —  Soumission  de  M.  de 
Vendôme. 

Avril.  —  Réconciliation  du  maréchal  d'Ancre  avec  M.  de  Longueville 
et  M.  de  Villeroy.  —  Duel  de  M.  de  Bressîeux  et  de  M.  de  la  Valette. 

—  Duel  du  vicomte  de  Rabat  et  de  M.  de  Longnac.  —  Discussion  au 
Conseil  sur  les  finances  ;  discours  d'Amauld.  —  Le  Parlement  mandé 
au  Louvre.  —  Remontrances.  ~  Querelle  d'étiquette  au  sujet  de  la 
queue  du  manteau  royal.  —  M.  de  Candale,  premier  gentilhomme  de 
la  Chambre.  —  Soumission  de  Monsieur  le  Prince. 

Haï.  —  Duel  de  M.  de  Losières  et  de  M.  de  Madaillan.  —Surséance  à  la 


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22  JOURNAL    INÉDIT 

révocation  de  la  paulette.— Départ  de  Monsieur  le  Prince  pour  Valéry. 

—  Remontrances  du  Parlement  sur  les  désordres  de  l'État.  —  Discus- 
sions entre  le  Parlement  et  le  Conseil.  —  Paroles  de  la  Reine.  — 
Arrût  du  Parlement  cassé. 

JoiN.  —  Délibérations  du  Parlement  au  sujet  de  Tarrêt  cassé.  —  Rè- 
glement du  Conseil.  —  M.  le  Prince  à  Saint-Maur.  —  Violences  de 
M.  de  Canisy.  —  Querelle  d'étiquette  entre  M"*  de  Longueville  et  la 
duchesse  de  Guise. 

Juillet.  —  M.  de  Villeroy  député  vers  M.  le  Prince.  —  Prétentions 
de  celui-ci.  —  Le  Roi  fait  tirer  douze  cent  mille  livres  de  la  Bastille. 

—  Conférences  des  Princes.  —  Assassinat  de  M.  de  Prouville  par  Ma- 
rianna.  —  Rupture  des  Princes  avec  la  Cour.  -  Pontchartrain  en- 
voyé vers  Monsieur  le  Princô 

AooT.  -  M.  de  Longueville  se  retire  à  Amiens.  —  Duel  de  MM.  de 
Montmorency  et  de  Portes  contre  MM.  de  Retz  et  de  Vitry.  —  Le  ma- 
réchal d'Ancre  va  à  Amiens.  —  Le  Parlement  mandé  au  Louvre  au 
sujet  du  départ  du  Roi  pour  son  mariage.  —  Mesures  pour  la  sûreté 
de  Paris  pendant  l'absence  du  Roi.  —  M.  de  Chevry  nommé  inten- 
dant des  finances   —  Ordre  au  président  le  Jay  d'accompagner  le  Roi. 

—  Manifeste  de  Monsieur  le  Prin(;e.  —  Le  maréchal  de  Boiîîdauphiu 
chargé  du  commandement  général  de  l'armée.  —  Le  Conseil  délibère 
sur  la  guerre.  —  Le  Parlement  délibère  sur  le  danger  du  départ  du 
Roi.  —  M.  de  Loménie  fils  a  la  survivance  de  la  charge  de  son  père. 

—  Départ  de  la  Reine-Mère  et  du  Roi.  —  Arrestation  du  président 
le  Jay.  —  Remontrances  du  Parlement.  —  Détails  sur  le  voyage  du 
Roi.  —  Administration  des  affaires  pendant  l'absence  du  Roî.  —  Ar- 
restation du  sieur  de  Foraise,  agent  de  Monsieur  le  Piince. 

Septembre.  —  Nouvelles  du  voyage  du  Roi  et  de  la  marche  de  son 
armée.  —  Assemblée  de  Grenoble.  —  Déclaration  du  Roi  contre 
Monsieur  le  Prince.  —  DéHbérations  du  Parlement 

Octobre.  —  Affaires  entre  les  armées  du  Roi  et  celles  de  M.  le  Prince. 

—  Mariage  du  Roi  à  Burgos  et  de  Madame  à  Bordeaux.  —  Prise  de 
Clermont  par  le  maréchal  d'Ancre.  —  Passage  de  Rony  par  l'armée 
de  M.  le  Prince.  —  Conduite  du  maréchal  de  Boisdauphin. 

Novembre.  —  Échange  de  Madame  et  de  l'Infante.  —  Nouvelles  de  la 
guerre.  —  Le  Roi  et  la  jeune  Reine  font  leur  entrée  à  Bordeaux.  — 
Marche  des  armées. 

DÉCEMBRE.    -  M.  de  Guise ,  lieutenant  général  des  armées  du  Roi. 

—  Duel  de  M.  de  Montglat  et  de  M.  de  Vitry.  —  M.  de  la  Roche- 
Guyon,  grand  louvetier.  -  M.  de  Rheims,  cardinal.  —  L'amice  de 
Monsieur  le  Prince  à  Olcron 


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D^AKNAULD   D'ANDILLY.  S8 

%  Messieurs  les  gens  du  Roy,  ayant  fait  leurs  J«nv»«^  *«••• 
remonstrances  à  la  Cour  sur  les  disputes  et  opposition 
faite  par  le  clergé  en  la  résolution  du  premier  ar- 
ticle du  cayer  du  Tiers-Estat  de  Paris,  touchant  la 
puissance  temporelle  prétendue  par  le  Pape,  (M.  le 
cardinal  du  Perron  avoit  harangué  la  Noblesse,  et 
Tavoit  gagnée,)  la  Cour  ordonna  qu'on  reliroit  tous 
les  arrests  donnez  sur  ce  sujet. 

3.  Conseil  tenu  au  Louvre ,  (auquel  assistoyent 
les  officiers  de  la  Couronne  et  entre  autres  MM.  de 
Buillon,  de  Rohan  et  de  Sully)  sur  le  fait  dudit  ar* 
ticle.  —  Tous  opinèrent  unanimement  pour  la  con* 
servation  de  la  puissance  et  de  la  personne  du  Roy. 
—  Ordonné  que  le  Roy  interdit  tant  aux  Estats  qu'à 
la  cour  de  Parlement  la  connoissance  de  cette  alTaire 
et  la  retient  à  soy  et  à  son  Conseil,  et  envoyé  arrest 
et  lettres  patentes  au  Parlement  sur  ce  siyet. 

M,  d'Espernon  auteur  de  toute  cette  menée. 

4.  M.  le  Premier  Président  pour  le  Parlement, 
M.  le  président  de  Cbevry*  pour  la  Chambre  des 
Comptes,  M*  le  président  Chevalier^  pour  la  Cour 
des  Aydes,  et  M.  Lefèvre  pour  les  Trésoriers  de 


^  Charles  Duret^  seigoeur  de  Chevry,  conseiller  d*État,  intendant  et 
contrôleur  général  des  finances,  président  en  la  Chambre  des  comptes 
de  Paris,  greffier  des  ordres  du  Roi,  mort  en  1636.  n  était  le  frère  du 
médecin  Jean  Duret.  {f^oy.  Thistoriette  de  ces  deux  personnages, 
Tallemant  des  Réaux,  édition  Monmerqué  et  Paulin  Paris,  1. 1,  p.  421, 
et  surtout  le  savant  et  précieux  commentaire  de  M.  P.  Paris.) 

'  Nicolas  Chevalier,  né  en  1563,  surintendant  de  Navarre  et  de 
Béarn,  deux  fois  ambassadeur  en  Angleterre,  premier  président  de  la 
cour  des  Aides. 


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2/i  JOURNAL   INEDIT 

janMer  i«».      Fratice ,  haranguèrent  le  Roy  et  la  Reyne  pour  la 
conservation  de  la  paulette. 

Quand  la  Reyne  vit  Messieurs  du  Parlement,  elle 
leur  dit  qu'ayant  le  Roy  à  leur  porte,  ils  ne  devoyent 
point  délibérer  d'une  affaire  de  si  grande  consé- 
quence (parlant  de  celle  de  l'article  du  Tiers-Estat) 
sans  l'avertir,  et  leur  défendit  de  signer  l'arrest,  qui 
n'est  signé  que  du  rapporteur. 

7.  M.  Tevesque  d'Angers  ',  assisté  de  Messieurs 
du  clergé  et  de  quelques-uns  de  la  noblesse,  vient 
trouver  le  Roy  et  la  Reyne  sur  le  sujet  de  l'arrest  du 
Conseil  du  3  précédent,  et  parle  fort  hardiment. 

8.  Le  lendemain  matin,  ledit  evesque  d'Angers, 
assisté  de  MM.  les  cardinaux  de  Sourdis,  du  Perron, 
de  Larochefoucauld  ^,  et  Bonzy  ',  de  plusieurs  eves- 
ques  et  de  plusieurs  gentilshommes,  vient  de  rechef 
trouver  le  Roy,  et  parle  avec  une  insolence  ef- 
froyable.— Demande  la  cassation  tant  de  l'arrest  du 
Parlement,  que  de  celuy  du  Conseil. — Soutient  que 
la  connoissance  de  cette  affaire  n'appartient  ny  au 
Parlement  ni  au  Roy,  attendu  que  c'est  un  point  de 
conscience,  dont  le  clergé  est  seul  le  juge. — Disent.. 


*  Cet  évêque  d'Angers  qui  joue  un  si  grand  rôle  dans  les  États  et 
parle  avec  tant  d*énergie  pour  le  clergé,  est  Charles  Miron,  oncle  de 
Robert  Miron,  prévôt  des  marchands  et  président  de  Tordre  du  Tiers, 
n  avait  été  nommé  en  1588  évêque  d'Angers,  à  l'âge  de  dix-huit  ans, 
devint  archevêque  de  Lyon  en  1626  et  mourut  en  1628. 

2  François  de  la  Rochefoucauld,  né  en  1558,  cardinal  en  1607,  grand 
aumônier  de  France  en  1618,  mort  en  1645. 

5  Jean  Baptiste  Bonzy,  né  en  1554  à  Florence,  évêque  de  Béziers, 
cardinal  en  1611,  mort  en  1621. 


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d'arnauld  d*andilly.  36 

(  ce  fut  M.  le  cardinal  du  Perron  qui  dit  cela  )  que  ianvier  nu. 
si  on  ne  leur  accorde,  ils  quitteront  rassemblée  des 
Estats  ;  qu'ils  useront  de  toutes  sortes  d'incomprefr- 
tations,  et  d'excoinmiuiications,  et  d'anathématisa- 
tions,  contre  tous  ceux  qui  s'opposeront  à  cette 
créance,  afin  de  les  précipiter  dans  les  peines,  les 
géhennes,  le  feu,  les  enfers. —  Demandent  que  ceux 
de  la  religion  ayent  à  se  désister  d'opiner  sur  celte 
affaire  (sur  cela  M.  de  Buillon  prenant  la  parole,  dit 
que  le  Roy  et  la  Reyne  sa  voient  avec  quelle  modestie 
luy  et  ceux  de  la  Religion  avoyent  parlé  en  cette  af- 
faire, lorsque  le  Roy  leur  avoit  commandé  d'en  opi- 
ner, en  qualité  d'officiers  de  la  Couronne,  mais  que 
pour  le  fond,  luy  et  tous  ceux  de  la  religion  ren- 
droyent  toujours  au  Roy  l'obéissance  qui  luy  est 
deue)  ;  que  le  premier  advocat  du  Roy  du  Parlement 
soit  toujours  ecclésiastique,  et  que  M.  Servin'  soit 
déposé.  —  Après,  M.  le  cardinal  du  Perron  prit  la  pa- 
role et  confirma  tout  cela,  et  sur  le  sujet  de  l'excom- 
munication dont  il  parla.  Monsieur  le  Prince  dit  (je 
l'ay  ouy  de  sa  bouche)  :  Nonobstant  toutes  les  excom- 
munications, il  se  trouvera  toujours  beaucoup  de 
François ,  qui ,  en  conservant  le  respect  qui  est  deû 
au  Pape,  pour  ce  qui  concerne  le  spirituel,  employè- 
rent volontiers  tous  leurs  biens  et  leurs  vies,  pour  la 

*  Louis  Servin,  conseiller  d*État,  premier  avocat  général  au  Parle- 
ment de  Paris,  mort  dans  Texercice  de  ses  fonctions  en  1626,  tandis 
qu*au  nom  de  sa  compagnie  il  faisait  des  remontrances  au  Roi  tenant 
son  lit  de  justice.  Les  plaidoyers  de  ce  magistrat  célèbre  par  son  élo- 
quence et  son  énergie  ont  été  recueillis  en  1631,  in-4^  Il  a  laissé  plu- 
sieurs autres  ouvrages  tant  latins  que  français. 


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36  JOURNAL  INJÉDIT 

Janvier  !«!•»  conservatioti  de  Tautorité  et  du  service  du  Roy.— 
Sur  cela,  M.  de  Yilleroy  dit:  qu'il  sçmble  que  Teveâ- 
que  d'Angers  se  soit  porté  fli  violemment  en  cette 
affaire,  et  ayt  offencé  le  Parlement  expressément 
afin  d'obtenir  évocation  d'un  procès  qu'il  a  contre 
son  clergé  d'Angers,  craignant  de  retomber  au  ju- 
gement dudit  Parlement  où  il  a  déjà  esté  maltraitté. 

On  leur  devoit  répondre  :  que  le  Roy  avoit  très* 
agréable  qu'eux  et  tous  ceux  qui  oseroyent  penser  à 
tenir  des  langages  si  insolcns  se  retirassent  des  Es- 
tats,  et  laissassent  ceux  qui  voudroyent  demeurer, 
résoudre  les  affaires,  et  sur  cela,  faire  expédier  une 
déclaration.  —  On  tient  qu'en  cette  affaire,  ils  ne 
prennent  avis  que  des  cardinaux  et  des  evesques,  et 
non  des  capitulans ,  et  que  le  prieur  des  chartreux  * 
et  carmes  ayant  voulu  prendre  la  parole  sur  des 
propositions  que  faisoit  le  cardinal  du  Perron,  et 
voyant  la  violence  dont  il  usoit  pour  l'empêcher  de 
parler,  disant  qu'après  tant  de  grands  prélats  qui 
avoient  traitté  cette  affaire ,  il  s'estonnoit  comme  il 
en  pouvoit  douter,  il  répondit  que  puisque  cette  af- 
faire se  traittoit  par  autorité  et  non  par  raison  ,  il 
n'avoit  plus  rien  à  dire. 

Les  cardinaux  sont  récusables  sur  cette  affaire, 
attendu  que  n'y  ayant  qu'un  degré  d'eux  au  Pape, 
ils  peuvent  estre  Papes,  ou  faire  les  Papes. 

Semble  que  M.  le  cardinal  du  Perron  se  porte  à 


^  Adam  Oger,  député  du  clergé  pour  la  préYdtéi  rille  el  vicomte 
de  Paris. 


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d'ARNAULD    D'AWDILLr.  27 

ces  aigreurs  extraordinaires  par  la  suggestion  de      JanriepMiK 
son  frère  qui  a  grand  part  avec  M.  d'Espemon,  les 
Jésuites,  et  la  duchesse  de  Guise. — L'evesque  d'An- 
gers traitte  avec  luy  pour  Tarchevesché  de  Sens. 

Le  cardinal  du  Perron  dit  aussi  que  l'on  vouloit 
introduire  en  France  la  confession  d'Angleterre ,  et 
que  c'estoient  des  pensionnaires  du  Roy  d'Angleterre 
qui  le  procuroyent. 

Le  cardinal  de  Sourdis  dit  à  Monsieur  le  Prince, 
qu'il  le  récusoit  au  nom  de  tout  le  clergé,  à  ce  qu'il 
s'abstint  d'opiner  sur  toutes  les  affaires  qui  regardent 
l'Eglise.  A  quoy  Monsieur  le  Prince  répondit  (causé 
de  la  récusation ,  sur  ce  qu'il  s'estoit  ouvert)  :  Cela 
est  bon  aux  autres  compagnies,  mais  non  au  Conseil* 
où  l'on  ne  laisse  d'estre  juge  encore  que  l'on  s'ouvre. 

La  Reyne  témoigna  estre  piquée  de  tant  d'inso- 
lences. Le  Roy  leur  répondit:  qu'ils  dressassent  leurs 
cayers  promptement,  et  qu'il  leur  donneroit  toute 
sorte  de  contentement.  Monsieur  le  Chancelier  ne  dit 
quasi  rien. 

L' après  disnée,  le  ca/dinal  de  Sourdis  vint  au 
Conseil  des  finances  ;  après  y  avoir  un  peu  esté ,  il 
s'en  alla.  Monsieur  le  Prince  ne  luy  osta  son  cha- 
peau. Après  que  le  Conseil  fut  levé,  il  rentra.  Comme 
Monsieur  le  Prince  le  vit  approcher,  il  dit  au  Roy  et 
à  la  Reyne^  qu'ils  savoyent  l'insolence  dont  le  Car- 
dinal a  voit  usé  le  matin  contre  sa  qualité  de  Prince 
du  sang  ;  qu'il  supplioit  leurs  Majestez  de  ne  point 
sou^ffrir  qu'il  fust  opprimé  en  cette  qualité,  et  de  luy 
permettre  de  savoir  si  le  clergé  le  voudroit  avouei*  ; 


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28  JOURNAL  INlâDIT 

Janvier  i6i».  en  cc  cas,  foriTier  SE  pleinte  contre  le  clergé,  et  s'i. 
le  désavouoit,  former  sa  pleinte  contre  le  cardinal  de 
Sourdis  en  particulier. —  Le  Roy  et  la  Reyne  luy 
répondirent  assez  doucement ,  qu'il  fist  ainsy  qu'il 
avîseroit. — Après,  le  cardinal  de  Sourdis  approcha, 
qui  dit,  qu'il  supplioit  leurs  Majestez  d'avoir  agréable 
la  récusation  qu'il  avoit  faite  contre  Monsieur  le 
Prince,  attendu  qu'il  s' estoit  ouvert,  et  que  tout  juge 
qui  s'ouvre  est  récusable.  Ensuite  de  cela,  Monsieur 
le  Prince  demeura  un  peu,  puis  parla  à  M.  le  maré- 
chal d'Ancre,  et  sortant  incontinent  après,  il  dit  :  que 
le  cardinal  de  Sourdis  estoit  un  prestre,  qu'il  ne  le 
pouvoit  offencer,  qu'il  avoit  rendu  au  Roy  et  à  la 
Reyne  tout  le  respect  qu'il  leur  devoit,  que  pour  le 
fond  de  l'affaire ,  il  se  tiendroit  toujours  en  gros 
pour  le  service  du  Roy  ;  que  quant  à  son  particulier, 
il  feroyt  ce  que  leurs  Majestez  luy  commanderoyent. 
—  On  dit  que  sa  résolution  est  de  savoir  si  le  clergé 
avoue  M.  le  cardinal  de  Sourdis;  s'il  l'avoue,  de  for- 
mer sa  pleinte  contre  tout  le  clergé,  sinon,  de  la  faire 
contre  le  cardinal  de  Sourdis  en  particulier. — Cette 
procédure  n'est  bonne,  car  il  y  a  apparence  que  le 
Clergé  ne  le  désavourra  pas,  mais  il  faudroit  former 
la  pleinte  contre  luy  en  particulier,  attendu  qu'il  ne 
luy  appartient  point  d'avancer  cette  parole  sans  en 
avoir  charge  expresse  du  Clergé,  par  délibération 
faite  exprès  sur  ce  sujet;  ou  que  si  cela  n' estoit 
point,  il  devoit  estre  chastié,  etc. 

On  remarque  que  MM.  de  Guise  furent  ce  jour  là  h  la 
chasse,  et  que  M.  d'Espernon  n'alla  point  au  Louvre. 


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d'arnaold  d'andilly.  29 

Lorsque  le  cardinal  de  Sourdis  fit  sa  récusation ,  Janvier  imi. 
Monsieur  le  Prince  devoit  répondre  que  sans  le  res- 
pect du  Roy  et  de  la  Reyne,  il  luy  eust  passé  son 
espée  à  travers  le  corps,  pour  avoir  esté  si  téméraire 
que  d'oser  prononcer  cette  parole  contre  un  Prince 
du  sang,  sur  le  sujet  d'une  affaire  si  importante  \ 

9.  M.  le  marquis  de  la  Force  ^  ayant  de  long- 
temps querelle  avec  M.  de  Grammont  ',  se  dérobbe 
le  soir,  auparavant  de  ses  gens,  dans  le  Louvre; 
sort  par  la  porte  des  cuisines  où  deux  chevaux  de 
M.  de  Saint-Angel,  son  cousin,  les  attendoyent.  Vont 
coucher  hors  la  ville.  Le  lendemain  9,  à  quatre 
heures  du  matin,  Saint-Angel  va  dire  à  M.  de  Gram- 
mont que  M.  de  la  Force  l'attendoit  en  tel  lieu* 
M.  de  Grammont  va  avec  luy,  avec  son  escuyer  ré- 
puté vaillant.  — Arrivé,  dit  qu'il  se  veut  battre  à 
cheval.  — M.  de  la  Force  dit  qu'il  n'estoit  raison- 
nable, veu  qu'il  estoit  mal  monté,  et  que  l'autre 
avoit  le  Cardinal  (barbegris  à  M.  de  la  Rochefou- 
cault,  valant  1200  écus).  Néantmoins,  se  battent. 
M.  de  la  Force  blesse  M.  de  Grammont  au  bras,  re- 
tournant à  la  passade,  et  M.  de  Grammont  blesse 
en...  du  corps;  son  cheval  fait  un  saut,  le  jette 
à  terre.  M.  le  marquis  de  la  Force  luy  fait  rendre 


^  Voy,  le  Merc,  fr.^  t.  m,  qui  entre  dans  les  plus  grands  détails  sur 
les  délibérations  des  assemblées  des  États  et  donne  l'analyse  des  prin- 
cipaux discours  prononcés  dans  les  réunions  des  trois  ordres. 

'  Armand  Nompar  de  Gaumont,  deuxième  duc  de  la  Force,  pair, 
maréchal  de  France  en  1652,  mort  en  1675. 

'  Antoine  de  Gramont,  deuxième  du  nom,  comte  de  Gramont,  de 
Guiche,  de  Louvigny,  duc  et  pair  en  1643,  mort  en  1644. 


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MDVier  IMt. 


SO  JOURNAL   INéBIT 

Tespée  (ne  le  veut  tuer),  puis  va  séparer  les  se- 
conds qui  se  battoyent  à  pied,  à  Tespée  seule.  Saint- 
Angel  avoit  baillé  un  coup  d'espée  à  son  homme  au 
bras;  ils  estoient  aux  prises,  il  luy  oste  les  armes; 
puis  s'en  viennent  luy  et  M.  de  la  Force,  avec  les 
quatre  espées,  chez  M.  de  la  Force  le  bonhomme*  ; 
de  là  chez  M.  de  Rohan,  où  ils  couchèrent  M,  de 
Grammont  dit  que  M.  de  la  Force  avoit  fait  ce  qu'il 
put  pour  le  tuer,  qu'il  luy  fit  passer  son  cheval  cinq 
ou  six  fois  sur  le  ventre  et  le  laissa  pour  mort,  et 
que  luy  avoit  perdu  le  sentiment  à  cause  des  fou- 
lures  du  cheval  ;  et  que  sur  cela,  M.  de  Saint-Angel 
estant  venu,  ramassa  son  espée.  Cause  de  nouvelle 
querelle. — Le  lendemain,  un  gentilhonune  de  M,  de 
Grammont  qui  n'ayant  esté  par  le  chemin  que  son 
maître  luy  avoit  dit,  ne  l'avoit  pu  trouver,  fait  ap^ 
peler  M.  de  Saint-Angel  chez  M.  de  Rohan  qui  en 
fut  fort  indigné  ^ 

M.  l'ambassadeur  d'Angleterre  fut  trouver  M.  de 
Villeroy  pour  avoir  audience  de  la  Reyne,  afin  de  se 
pleindre  de  ce  qiie  le  cardinal  du  Perron  avoit  dit,  et 
à  Sa  Majesté,  et  par  plusieurs  fois  dans  les  Estats^ 
que  c'estoyent  des  pensionnaires  d'Angleterre  qui 


*  Jacques  Nompar  de  Caumont,  premier  duc  de  la  Force,  père  du 
narquis,  né  en  1550,  maréchal  de  France  ep  1622,  duc  et  pair  en  16S7, 
mort  en  1652.  U  a  laissé  des  mémoires. 

>  «  En  ce  temps  les  duels  furent  si  communs  que  deux  seigneurs 
de  Gascongne,  sçavoir  :  le  comte  de  Grammont,  Tun  des  députei  aux 
Estats  et  le  marquis  de  la  Force,  capitaine  des  gardes  du  corps, 
avec  leurs  seconds,  se  trouvèrent  et  se  battirent  à  cheval  au  Pré  aux 
Clercs.  »  {Merc  fr.^  t.  m,  p.  210.) 


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d'ABNÂDLD  D*AlfOILLY.  81 

procuroyent  et  avoyent  mis  en  avant  Tapticle  du     Jtinn^iiWi 
Tiers-Etat  —  M.  de  Villeroy  l'en  veut  dissuader, 
mais  ne  peut  le  faire. 

Le  Parlement  s'assemble  but  le  sujet  de  l'arrest 
du  conseil  et  letfare^-patentes  qui  luy  avoyent  esté 
envoyées,  portant  interdiction  de  connoistre  de  ce 
qui  concerne  l'article  du  Tiers -Estât  Dix  opinent 
vertement  —  On  dit  qu'un  d'entre  eux  dit  au  Pre- 
mier Président  qu'il  ne  méritoit  point  de  les  prési- 
der, puisqu'il  se  portoit  si  laschement  à  une  affaire  de 
telle  conséquence.  — L'heure  sonne,  on  se  retire. 

10.  Le  Parlement  se  r' assemble;  on  achève 
d'opiner.  Ordonné  que  l'arrest  du  conseil  et  lettres- 
patentes  ne  seront  enregistrez  dans  le  registre  de  la 
Cour,  mais  qu'ils  seront  gardez  à  part 

Au  conseil  de  l'Entresolle,  M.  le  président  Jeannin 
lit  l'estat  général  des  finances  ;  la  conclusion  est, 
qu'il  y  a  un  million  d'or  de  faute  de  fons.  —  Après 
cela,  il  se  taist,  et  se  passe  un  fort  long  temps  avant 
que  personne  ne  die  mot.  Ce  que  voyant,  M.  Ar- 
naud '  prend  la  parole,  dit  :  qu'il  voyoit  que  per^ 


*  Isaac  Arnauld,  seigneur  de  Corbeville  et  de  la  Roche,  intendant  des 
finances,  oncle  d'Ârnauld'cl*Andilly.  Nonimé  intendant  en  1605,  il  prit 
en  qualité  de  premier  commis  son  neveu,  quoique  celui-ci  n*eût  alors 
que  seize  ans  et  le  forma  aux  affaires.  «  La  reine-mère,  Marie  de  Me- 
»  dicis,  alors  régente ,  alloit  d'ordinaire  au  conseil  des  finances  (dont 
»  Arnauld  faisait  partie),  et  quand  le  feu  Roi  commença  à  croître,  il  y 
»  alloit  aussi.  Comme  mon  oncle  étoit  extrêmement  considéré  de  la  Reine 
»  et  des  ministres  à  cause  de  son  extrême  capacité,  J'avois  l'avantage 
»  que  nul  autre  k  l'âge  que  j'avois  alors  n'a  jamais  eu,  d'entrer  dans  la 
»  conseil  et  d'y  demeurer  tant  qu'il  duroit  derrière  les  chaises  du  Roi 
»  et  de  la  Reine  à  voir  opiner,  ce  qui  ne  me  donnoit  pas  une  petite  con- 


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32  JOURNAL   INÉDIT 

Janvier  1616.  soDHe  nc  disoit  mot  ;  que  néantmoins  il  tenoit  que 
l'affaire  qui  se  présentoit  estoit  la  plus  importante 
qui  se  présentast  aujourd'hui  dans  l'Estat  ;  et  que, 
de  ce  que  la  Reyne  résoudroit  présentement,  dépen- 
doit  ou  la  ruine  ou  le  salut  du  royaume,  et  tout  en- 
semble de  son  autorité,  pour  ce  que  la  faute  de  fons 
des  finances  estoit  qui  pouvoit  apporter  le  plus  grand 
désordre;  que  le  Trésorier  de  l'Espargne  n'ayant 
point  d'argent,  ne  pourroit  faire  sa  charge;  que 
tout  ce  que  l'on  luy  ordonneroit  ne  serviroit  de  rien. 
Sur  cela,  la  Reyne  luy  dit  :  Et  bien,  que  faut-il  donc 
faire?  Il  reprit  :  qu'il  faloit  donc  nécessairement  re- 
médier à  cette  faute  de  fons  d'un  million  d'or;  que 
le  seul  moyen  estoit  de  se  retrancher  sur  la  dépence  ; 
qu'il  croyoit  que  le  devoir  de  sa  charge  et  sa  con- 
science l'obligeoyent  de  dire  franchement  et  nette- 
ment la  vérité  ;  qu'il  estimoit  donc  que  pour  ce  qui 
concemoit  la  dépense  de  la  maison  du  Roy,  il  estoit 
comme  impossible  d'y  rien  retrancher;  qu'il  faloit 
venir  aux  pensions  qui  estoient  montées  à  une  somme 
si  excessive,  qu'il  faudroit  avoir  les  Indes-Orientales 
et  Occidentales  pour  y  subvenir;  qu'il  estoit  donc 
d'avis  d'en  retrancher  un  quartier  montant  à  onze 
cent  mil  livres;  qu'un  des  autres  plus  grands  re- 
tranchements qui  se  pouvoyent  faire  estoit  sur  les 


»  noissance  des  affaires.  »  (Mémoires  d'ArnauId  d'Andilly,  édition  citée, 
p.  360.)  Foy,  en  tête  des  mémoires  d'ÂruauId  d'Andilly  la  notice  qu*il 
consacre  à  son  oncle  Isaac  Amauld,  riutendant  des  finances,  dont  il 
analyse  plusieurs  fois  dans  ce  Journal  les  discours  et  les  propositions 
au  conseil  des  finances. 


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d'arnaold  d*andillt.  8S 

gens  de  guerre  ;  qu'il  désireroit  qu'on  en  peust  en-  ^i»ti«r  lus. 
tretenir  deux  fois  davantage,  mais  qu'il  valoit  beau* 
coup  mieux  en  retrancher  que  de  courir  à  une  ruine 
infaillible  ;  qu'on  avoit  parlé  de  retrancher  la  moitié 
des  Suisses  ;  mais  que  puisque  la  Reyne  se  vouloit 
tenir  forte,  afin  d'accomplir  les  mariages,  qu'il  pen- 
soit  que  l'on  se  pourroit  contenter  de  1200  en  gar- 
dant 10  compagnies  de  180  hommes  chacune  ;  qu'il 
faloit  aussi  prendre  les  deniers  du  taillon.  Sur  cela, 
M.  le  Prince  ayant  pris  la  parole  (M.  de  Bulion  n'y 
estoit) ,  et  fait  un  grand  discours,  après  l'avoir  laissé 
tout  dire,  il  répliqua  :  que  quand  le  Roy  mourut  on 
en  prenoit  deux  cent  mil  livres,  qu'auparavant  on 
en  avoit  pris  trois  cent  quatre-vingt-dix  mil  livres, 
et  qu'on  avoit  mesmeestéjusqu'à  six  cent  mil  livres; 
que  les  gens  d'armes  coustoient  beaucoup,  et  ne  ser- 
voyent  quasy  point;  que  la  Reyne  n'en  vouloit  point 
mener  en  son  voyage,  mais  seulement  des  chevaux- 
légers  ;  et  qu'il  estoit  d'avis  d'en  prendre  six  cent 
mil  livres  ;  qu'il  se  dépensoit  quatre  cent  mil  livres 
pour  les  fortifications;  que  tout  cela  se  mangeoit  par 
les  trésoriers,  controlleurs  et  gouverneurs  de  places  ; 
qu'il  estoit  d'avis  d'en  retrancher  trois  cent  mil 
livres  et  laisser  cent  mil  livres  pour  les  gages  d'of- 
ficiers, pour  travailler  à  une  ou  deux  places,  telles 
que  Sa  Majesté  aviseroit  et  pour  entretenir  ce  qui 
est  commencé;  et  qu'il  valoit  beaucoup  mieux  ne 
point  faire  de  fortifications  cette  année  et  conserver 
l'ordre  dans  l'Estat,  que  non  pas  en  en  faisant,  s'in- 
commoder de  telle  sorte,  que  ceux  qui  voudroyent 


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M  JOtJftNA.L   INÉDIT 

imivi€t>  iBii.  entjrepréûdm  sur  nous,  nous  pussent  faciteraent  atta- 
quer; de  là,  il  suivit  sur  les  bastimens  et  quelques 
auù'eè  dépenses,  tant  qu'il  trouva  son  remplacement. 
M.  le  président  Jèannîn  disoit  quelquefois  quelque 
petit  mot.  La  Reyne  approuva  tout  extrêmement  ; 
dit  qu'il  le  falloit  faire;  personne  ne  put  contredire. 
Au  sortir,  chacun  demeura  d'accord  qu'il  n'y  avoit 
là  dedans  que  luy  qui  sçêust  conduire  les  affaires» 

11.  M*  de  Riberpré,  sortant  d'une  académie^ 
pettsa  estre  assassiné  par  un  nommé  d'Arcueil  (qui 
est  au  maréchal  d'Ancre)  et  deux  autres. — Se  pleint 
au  Roy  le  lendemain  \ 

On  présenta  à  la  Chambre  des  comptes  des  lettres- 
patentes  portant  connoissance  à  M.  de  Puisieux  des 
deniers  du  taillon,  sans  que  l'on  peust  recevoir  sur 
ce  sujet  aucunes  expéditi<Htô  lignées  d'autres  que 
luy. 

M.  le  président  de  Nicolay  %  voyant  que  cela  tou- 
dîôit  extrêmement  M*  de  Villeroy,  arreste  la  vérifi- 
cation et  porte  les  lettres  à  M»  de  Villeroy,  qui  luy 


*  Voy,  sur  cette  aflfaire,  Richelieu,  éd.  citée,  t.  xxi  bis,  p.  236.  On 
Jjensa  que  ïë  maréchal  d'Ancre  avait  fait  faite  le  coup  pour  se  Tenger  de 
ee  que  M.  de  Ribefpr^  gonverDeur  de  la  citadelle  d'Ait#ns,  s'était 
déclaré  pour  M.  de  LongueviJle,  —  Le  marquis  de  Riberpré  était  de  la 
maison  de  Moy. 

*  Jean  II  de  Nicolay,  premier  président  de  la  Chambre  des  Comptes 
çn  1587.  Neuf  membres  de  cette  famille  ont  été  successivement  pre- 
miers présidents  de  la  Chambre  des  Comptes  depuis  Jean  I'',  en  1506, 
J«squ'àAimarGhat4et,  le  dernier  présfdeat  de  l'ancienne  Chambre  des 
Comptes.  (Foy.  le  commentaire  de  M.  Paulin  Pari»  à  l'historiette  du 
président  Nicolay  dans  sa  belle  et  excellente  édition  de  Tallemant  des 
Héaui,  U  IV,  p.  Ma.) 


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d'arnadld  d'andilly.  S5 

dît  qu'il  n*en  sçavoit  rien  et  qu'il  luy  avoit  fait  plaî-      J"»»^  ««^ 
sir.  Et  qu'afin  qu'il  ne  semblast  que  Ton  eust  fait 
cette  affaire  contre  son  gré,  il  vouloit  signer  les 
lettres;  et  ainsi  les  fit  refaire  et  les  signa. 

19.  Assemblée  faite  dans  le  Tiers-Estat  (à  la 
poursuite  de  M.  d'Espernon) ,  sur  le  sujet  de  T article, 
—  Ordonné  qu'il  seroit  osté.  —  Quelques-uns  pro- 
testent au  contraire  (entre  autres  le  lieutenant  civil) , 
et  dirent  qu'ils  feront  des  remonstrances. 

La  Reyne  envoyé  quérir  le  lieutenant  civil  *  et 
quelques  autres,  dit  :  qu'elle  ne  veut  point  en  tout 
que  l'on  luy  fasse  des  remonstrances  sur  ce  sujet. 
Ainsy  on  veut  qu'ils  se  réassemblent,  afin  que  cette 
affaire  se  passe  sans  remonstrances.  —  M.  Myron  * 
abandonna  entièrement  Tarticle. 

Résolu  dans  le  Tiers-Estat  que  Monsieur  le  Prince 
rendroit  Amboise  et  qu'on  osteroit  la  garnison  de 
Soissons. 

La  Reyne  avoît  envoyé  quérir  les  Députez  de 
Normandie  et  de  Rretagne,  et  leur  avoit  commandé 
d'oster  l'article.  —  M.  de  Guise  avoît  fait  le  sem- 
blable pour  la   Provence;  M.   d'Espernon,  pour 

Guyenne  ; idem  pour  Dauphiné.   Yoilà  cinq 

provinces.'  Languedoc,   Lyonnois  et   Champagne 


*•  Henri  4e  Meuiiet,  Meuteaant  dtw'A  de  la  prévôté  et  TÎcomté  de  Pa- 
ris, président  à  mertier  au  Pariement,  ppésidait  la  chambre  du  Tiers- 
État  en  l'absence  dtt  prévdt  des  mardiands. 

3  Robert  Miron,  pvévôt  des  marchands,  président  et  m*ateur  de 
Vorére  du  Tiers-État,  ambassadeur  «n  Suisse,  intendant  en  Languedoc, 
mort  en  t^l«  il  était  frère  4e  Françoki  MIron,  leeélèbre  prévôt  des 
marchands  sous  Henri  IV, 


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36  '       JOURNAL  INIÈDIT 

Janvier  i6!5.  furent  partis,  ainsy  leurs  voix  ne  servirent  de  rien. 
Reste  quatre  provinces  qui  furent  pour  l'article,  sa- 
voir :  Isle  de  France,  Picardie,  Bourgogne  (M.  Le 
Grand  avoit  voulu  faire  aux  Députez  comme  dessus  ; 
ils  luy  répondirent  qu'ils  ne  pouvoyent).  Et  ainsy,  il 
passa,  à  la  pluralité,  que  l'article  seroit  osté.  Et 
dans  le  cayer,  on  a  mis  ainsi  :  1"  article.  Cet  article 
n'est  icy  d'autant  qu'il  a  esté  porté  particulièrement 
au  Roy  par  son  très-exprès  commandement,  comme 
grandement  important  au  bien  de  son  service  et  de 
son  Estât.  —  Ainsi  on  commença  le  cayer  au  se- 
cond article  *. 

Monsieur  le  Prince  fut  trois  fois  au  Louvre  avec 
les  lettres  d'Amboise  pour  les  remettre  à  la  Reyne,  et 
trois  fois  il  les  reporta.  — Enfin,  il  les  luy  laissa  et 
écrivit  à  la  Grange,  commandant  dans  Amboise, 
qu'il  remist  la  place  entre  les  mains  de  Meurs, 
exempt  des  gardes.  La  Reyne  ayant  les  dites  lettres- 
patentes,  les  porta  au  Roy  avec  dne  extrême  joye, 
et  luy  dit,  que  de  toutes  les  actions  de  sa  Régence, 
il  ne  luy  estoit  resté  qœ  celle-là  sur  le  cœur,  qui 
luy  donnoit  peine;  mais  qu'elle  y  avoit  esté  forcée 

^  Le  premier  artide  du  cahier  du  Tiers-État  établissait  la  séparation 
absolue  du  temporel  et  du  spirituel,  et  proclamait  Tindépendance  du 
souverain  vis-à-vis  de  la  cour  de  Rome.  On  attachait  une  telle  im- 
portance à  cette  déclaration,  qu'elle  venait  la  première  sous  le  titre 
des  Lois  fondamentales.  Le  Parlement  appuyait  le  Tiers-État.  La  No- 
blesse et  le  Clergé  s'opposèrent  à  l'adoption  de  cet  article  et  firent 
une  telle  résistance  qu'un  arrêt  du  conseil,  pour  ramener  la  paix 
entre  les  trois  ordres,  en  ordonna  la  suppression.  {Foy,  le  Merc.  fr,^ 
U  III,  où  se  trouvent  les  harangues  des  orateurs  des  différents  ordres 
et  les  résolutions  adoptées.) 


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d'arnauld  d'andilly.  37 

par  prudence,  et  qu'elle  loûoit  Dieu  de  quoy  la  chose     J-ovier  ie«. 
estoit  remise  en  son  entier.  —  Le  Roy  témoigna  une 
extrême  joye. 

27.  Le  samedy  auparavant,  on  avoit  apporté 
au  conseil  une  affaire  touchant  une  prise  faite  sur  les 
Espagnols  par  Bare  et  Fleury,  capitaines  françois, 
au-delà  de  l'isle  des  Açores.  Il  y  en  avoit  procédures 
faites  par  les  officiers  de  l'amirauté,  d'autres  au  par- 
lement de  Rouen  qui  avoit  instruit  le  procès.  Sur 
cela,  on  avoit  évoqué  au  Conseil,  à  la  requeste  de 
l'ambassadeur  d'Espagne,  qui  se  vouloit  servir  d'une 
enqueste  faite  en  Espagne,  en  laquelle  les  tesmoins 
se  contredisoyent.  —  Ordonné  (le  dit  jour  Qi) ,  qu'il 
seroit  donné  temps  à  l'ambassadeur  d'Espagne  pour 
faire  sa  preuve. 

Le  27,  Bare  ayant  représenté  que  le  temps  qu'on 

donnoit  à  l'ambassadeur  d'Espagne  estoit  inutile, 

pour  ce  qu'il  ne  pouvoit  faire  de  preuve  qui  valût 

mieux  que  la  première ,  l'affaire  est  remise  tout  de 

nouveau  en  délibération.  — Grande  contestation  aux 

opinions.  —  De  32  juges,  la  moitié,  qui  est  16,  ayant 

esté  d'avis  de  juger  sur  le  champ  que  la  prise  est 

bonne  et  légitime,  et  donner  main-levée  à  ces  mar- 

chans    (Monsieur  le  Prince  soustenoit  cet  avis) , 

l'autre  moitié  jugea  qu'avant  que  de  rien  décider,  il 

faloit  donner  le  temps  à  l'ambassadeur  d'Espagne 

pour  le  rendre  capable  de  cette  affaire.  Monsieur  le 

Chancelier  soustenoit  ledit  avis.  La  Reyne  partit  en 

faveur  de  Monaeur  le  Chancelier,  dont  Monsieur  le 

Prince  demeura  fort  piqué,  et  dit  :  la  Reyiie  veut 


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38  JOURNAL  INÉDIT 

Janvier  iiif.  qu'il  passo  à  Tavis  de  Monsieur  le  Chancelier,  j'y 
reviens  donc. 

27.     Maximes  sur  ce  sujet. 

Partout  où  l'Espagnol  nous  empesche  le  trafic, 
nous  le  pouvons  prendre  justement.  Les  lignes  se 
doivent  entendre  par  le  premier  méridien,  qui  passe 
aux  Açores,  et  par  le  tropique  du  Cancer;  mais  on 
y  a  aucun  égard,  mais  seulement  à  ce  qui  est  dit  cy 
dessus.  *^  L'Espagnol  tient  toujours  des  gallions  au 
cap  fiaint- Vincent  pour  tâcher  de  prendre  tous  les 
vaisseaux  qui  sont  armez  en  guerre  et  ont  apparence 
d'aller  en  long  cours.  L'Espagnol  nous  traitte  fort 
rendement  lorsqu'il  a  l'avantage  sur  nous.  Par  im 
jugement  rendu  depuis  peu  en  l'isle  Saint-Domi- 
nique, où  est  le  siège  de  la  justice  des  Indes,  dé*- 
fenôes  sont  faites  aux  Espagnols  de  trafiquer  javec 
les  François^  sur  peine  de  la  vie,  et  aux  François 
aussy,  sur  peine  de  la  mort.  Les  ordonnances  obli- 
gent d'amener  deux  hommes  de  l'équippage  déprédé, 
afin  qu'on  le»  puisse  interroger  séparément,  pour 
savoir  le  lieu  où  a  esté  faite  la  prise  et  apporter  la 
charte-partie,  c'est-à-dire,  Testât  de  la  cargaison  de 
toutes  les  marchandises,  faite  au  lieu  d'où  elles  sont 
parties,  afin  que  par  là  on  ne  puisse  faire  de  tort  aux 
marchans  avictuailleurs,  ni  aux  autres  qui  ont  part 
au  navire.  Toutefois,  au  cas  qu'on  ne  le  face  point, 
X  l'ordonnance  n'y  met  point  de  peine.  —  Un  vaisseau 
ne  peut  aller  en  voyage  de  long  cours  qu'il  n'ayt 
congé  de  l'amiral,  enregistré,  et  qu'il  ne  face  au 
greffe  les  submissions  nécessaires,  et  donné  les  cau- 


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tions  sufSsantes,  et  le  nom  et  la  dameurQ  de  toug  le^     •'•ovier  h». 
hommes  de  lem*  équippage. 

28.  Combat  de  livarrot  et  Auvilars  contre  la 
Ferté  et- la  Trye  (tué),  au  chasteau  de  Vincennq, 
Livarrot  eut  huit  coups  d'espée. 

29.  M.  de  Marillac*  rapporte  uue  requeste  au 
nom  de  tout  le  clergé,  par  laquelle  il  demande  que, 
dès  à  présent,  toutes  les  causes  de  MM.  les  cardinaux 
du  Perron  et  de  Sourdis  et  de  M.  l'evesque  d'An* 
gers,  soyent  évoquées  du  Parlement  au  Grand-Con- 
seil, attendu  ce  qui  s'estoit  passé  touchant  l'article, 
et  l'empeschement  qu'ils  avoyent  apporté  à  l'exécu-' 
tion  de  l'arrest  du  Parlement  donné  à  ce  sujet 

Ledit  M.  de  Marillac  dit  en  sa  conclusion  qu'il 
inclinoit  d'autant  plus  volontiers  à  cette  requeste, 
que  la  Reyne  avoit  témoigné  avoir  pour  agréable  de 
la  leur  accorder,  et  ainsi  opina  à  ce  qu'elle  leur  fust 
accordée.  —  Après  opinèrent  MM.  de  ^illemontée^ 
et  de  Monthelon.  M.  de  Villemontée  fut  contre,  mais 
ne  dit  quasy  mot;  M.  de  Monthelon  fut  pour;  puis 
vint  M.  do  Barentin,  qui  fut  l'avis  entièrement  con- 
traire, opina  très-bien  et  dit,  entre  nutoes  raisons, 
que  Messieurs  du  Conseil  cas$oyent  tou^  les  jours  le§ 


^  Michel  de  Marillao,  né  en  lA6d,  eonseiH«r  au  Parlement  en  1586, 
maitue  des  requétee  en  1905^  çomieïLler  d'£tat  ^t  sunn^ndaot  466 
finances  en  1624,  garde  des  sceaux  en  1626,  disgracié  en  1630  après 
la  Journée  des  dupes,  mort  es  prison  à  Ch&teaudun  en  1682.  (Foy.  Pe- 
titot,  1"  série,  t.  xux,  Jes  Mémoires  de  Marillac  et  la  Nqtic^  sur  ç^ 
illustre  personnage.) 

2  François  de  Villemontée,  s^gneur  de  Montaiguillon ,  conseiller 
d'Étut,  intendant  en  Poitou,  evâque  4e  Saint^MaJo  w  1907» 


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40  JOURNAL   INIÈDIT 

Janvier  1618.  aiTests  du  Parlement,  et  que,  néantmoins,  on  n'évo- 
quoit  point  leurs  causes.  M.  DoUé  fit  très-bien,  dit 
entr'autres  choses  que  :  Jà  à  Dieu  ne  plaise  que  Ton 
die  aux  nations  estranges  que  le  clergé  de  France 
s'est  voulu  soustraire  de  la  jurisdiction  du  Parle- 
ment; que  cette  affaire  estoit  très-dangereuse  et  de 
très-pernicieuse  conséquence;  que  les  évocations  es- 
toient  fondées  ou  sur  la  personne  des  juges  ou  sur 
celle  des  parties;  que,  pour  le  regard  des  juges,  qui 
estoient  le  Parlement,  ils  n'avoyent  point  sujet  de 
vouloir  mal  en  particulier  à  Messieurs  du  Clergé  pour 
avoir  soutenu  une  autre  opinion  que  la  leur  ;  que, 
pour  le  regard  des  parties,  qui  estoyent  Messieurs  du 
clergé,  ils  n'avoyent  point  de  sujet  d'entrer  en  dé- 
fiance de  Messieurs  du  Parlement  ni  de  leur  justice. 
—  Mais,  en  voulant  complaire  sur  ce  sujet  et  louer 
le  corps  du  clergé,  il  laissa  échapper  ce  mot  :  qu'il 
estimoit  que,  sur  le  fait  de  l'article,  ils  n'avoyent 
parlé  à  leurs  Majestez  qu'avec  tout  respect  et  rete- 
nue... —  M.  de  Boissise  dit,  en tr' autres  choses,  que 
le  corps  du  Parlement  est qu'il  y  avoit  quan- 
tité d'ecclésiastiques,  et  qu'ainsi  il  ne  voyoit  point 
de  lieu  d'en  vouloir  éviter  la  juridiction.  Bref,  tous 
d'une  voix  furent  d'avis  de  refuser  la  requeste  ;  mais 
les  uns  opinoyent  à  mettre  à  néant,  les  autres  à  la 
rendre  sans  réponse  ;  auquel  avis  il  passa ,  et  M.  le 
Chancelier  en  fut.  M.  d'Espernon  fut  d'avis  qu'il 
faloit  qu'on  ne  parlast  plus  de  cela. 

M.  le  Prince  n'estoit  point  au  Conseil.  (On  dit  que, 
piqué  du  quartier  de  sa  pension  retranché,  des  gar- 


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d'arnauld  d'andilly.  41 

des  de  la  garenne  de  Saint-Maur  ostez,  fasché  d' Am-     Janvier  mn. 
boise  et  possible,  de  ce  qui  se  passa  au  Conseil  le 
mardy  touchant  l'Amirauté,  fasché  de  la  mort  de  la 
TryeS  il  s'en  alla  en  carrosse  on  ne  sait  encore  où.) 

M.  le  cardinal  de  Sourdis  estoit  au  Conseil. 
*  M.  d'Angers  vint  parler  à  M.  de  Marillac  qui  estoit 
au  bout  d'en  bas.  Il  dit  qu'il  ne  rapportoit  point  la 
requeste,  si  la  Reyne  ne  le  commandoit.  Après,  on 
luy  fit  dire  qu'il  la  rapportast  et  monta  au  bout  d'en 
haut,  derrière  la  chaise  de  la  Reyne.  Un  peu  aupa- 
ravant, M.  le  cardinal  de  Sourdis  avoit  parlé  à*  la 
Reyne,  la  Reyne  à  M.  le  Chancelier,  puis  tous  trois 
avoient  parlé  ensemble,  et  aussitost  le  dit  sieur  car- 
dinal sortit. 

Le  Roy,  M.  de  Lorraine^  M.  de  Ventadour,  M.  de 
Rohan  n'estoyent  au  Conseil. 

Quelqu'un  ayant  dit  à  M.  de  Thou  qu'il  s'estonnoit 
comme  M.  de  Marillac  s' estoit  chargé  de  cette  re- 
queste, et  que,  s'il  l'eust  refusée,  nul  autre  ne  l'eust 
voulu  prendre,  il  répondit  :  Celuy  qui  a  esté  d'avis 
autrefois  d'emprisonner  le  Parlement  pouvoit  bien 
estre  capable  de  rapporter  cette  requeste-là. 

A  la  levée  du  Conseil,  chacun  murmuroit  touchant 
la  hardiesse  et  l'insolence  de  cette  requeste  ;  et,  en 
mesme  temps,  on  couppa  une  bourse  dans  le  Conseil, 

30.     M.  d'Angers  fut  trouver  le  matin  au  sceau 


*  La  Trye,  tué  en  duel  ainsi  qu'on  Ta  vu  plus  haut,  était  un  gentil- 
homme particulièrement  attaché  à  M.  le  Prince.  (Voy,  Pontchartraiu, 
t.  XVII,  2^  série,  p.  45,  le  récit  d'une  sédition  dont  il  fut  cause  à 
Poitiers.) 


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m  JOOANAL  INEDIT 

iiwvier  ittf.  Monsieur  le  Chancelier.  Ils  en  vinrent  à  des  pafolea 
violentes. 

Au  sortir  de  là,  M.  d'Angers  alla  aux  Augustins, 
où  il  déclama  avec  furie  contre  Monsieur  le  Chance* 
lier  et  sa  maison  ;  dit  qu'elle  abusoit  des  jeunes  ans 
du  Roy  et  de  la  facilité  avec  laquelle  on  menoit  la 
Reyne,  et  qu'elle  s'estoit  nouvellement  agrandie  teU 
lement,  qu'on  en  voyoit  un  Chancelier,  un  secrétaire 
d' Estât*,  un  ambassadeur  en  Espagne*,  qui,  au  re- 
tour, seroit  surintendant  des  fmances.  11  déclama 
aussi  contre  M.  le  maréchal  d'Ancre. 

Cela  se  passa  sans  que  personne  répondist  rien. 

31.  Le  lendemain,  M.  d'Angers,  prenant  sujet 
sur  ce  que  12  evesques,  qui  estoyent  le  jour  pré- 
cédent au  Louvre,  n'avoyent  oûy  sa  plainte,  recom- 
mence à  dire  les  mesmes  choses.  Sur  cela,  Péricart', 
evesquiB  d'Avranches,  l'un  des  12,  prit  la  parole  avec 
luy,  et  ensuite,  Monsieur  le  Cardinal  parla  aussi  long- 
temps et  avec  colère  ;  dit,  entr' autres  choses,  qu'il 
désavoûoit  entièrement  la  requeste,  et  n'avoit  jamais 
pensé  à  se  soustraire  à  la  jurisdiction  du  Parlement, 
où  il  n'y  avoit  pas  quatre  jours  qu'il  avoit  gagné  un 
procès,  sans  l'avoir  solicité. 

Fénier  1616.  3.     Bonncval*,  député  pour  la  noblesse  du  haut 

Limosin,  irrité  contre  M.  de  Chavaine%  lieutenant 

^  M. 'de  Puisieux,  fils  du  chancelier. 

s  Le  commaûdeur  de  Sillery,  frère  du  chancelier. 

*  François  de  Péricart,  évêque  d'Évreux  et  d'Avranchea* 

*  Henry,  sieur  de  Bonneval. 

^  Jacques  de  Chavaille,  député  du  Tiers-État. 


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d'arnauld  d'andillt.  48 

général  d'Usàrche,  en  liraoan,  sur  ce  qu'il  avoit     ^^^f^  «w». 
esté  esleu  malgré  luy,  le  trouvant  à  la  sortie  des 
Augustins,  lui  baille  des  coups  de  baston,  puis  se 
sauve  chez  M.  d^Esperuon,  et  de  là  s'en  va. 

Ce  Bonneval,  sur  la  fin  de  1615,  a  eu  un  nouveau 
régiment,  que  M.  d'Espemon  luy  a  fait  bailler,  et  a 
commis  des  cruautés  horribles. 

4.  Messieurs  du  Tiers-Eslat,  en  corps,  vont  de-» 
mander  justice  au  Roy,  qui  leur  dit  qu'il  en  remet- 
toit  la  connoissance  au  Parlement  et  qu'il  tiendroit 
la  main  à  leur  faire  rendre  justice. 

Messieurs  de  la  noblesse  soustiennent  que  la  con- 
noissance n'en  peut  estre  attribuée  au  Parlement. 

Le  clergé... 

Commission  expédiée  au  Parlement,  qui  lui  attri- 
bue pleine  connoissance  de  ladite  affaire»  Arrest  du 
U  mars  1615,  par  lequel  ledit  sieur  de  Bonneval 
est  condamné  à  avoir  la  teste  tranchée  *. 

5.  M.  de  Matsillac  avoit  esté  à  Monsieur  le 
Prince;  depuis,  l'ayant  quitté,  la  Reyne  s'en  estoit 
servie  à  luy  donner  des  avis  et  luy  avoit  fait  accorder 
deux  mil  livres  de  pension.  Il  y  avoit  eu  grande 
broûillerie  entre  liiy  et  M.  de  Rochefort,  et  mesme 
avoyent  mis  l'espée  à  la  main  l'un  contre  l'autre,  il  y 
a  environ  un  an.  Depuis  peu ,  ayant  eu  avis  qu'on 
luy  vouloit  faire  un  mauvais  tour,  il  le  dit  à  la  Reyne, 
qui  mande  à  M.  de  Buillon  d'en  parler  à  Monsieur 


«  Voy.  Petitot,  Mém.  de  Richelieu,  2*  série,  vol.  21  bis,  p.  233,  et 
JHerc,  /r-.,  t.  m,  p.  225. 


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44  JOURNAL   INÉDIT 

Février  1615.  le  Priiice.  —  Le  matin,  à  11  heures,  dans  la  rue  de 
Beauvais,  proche  la  nie  Frementeau,  vers  le  Louvre, 
Marsillac  est  saîsy  par  derrière  par  un  laquais  de 
M.  de  Rochefort  (à  cheval,  suivy  de  3  ou  4  autres, 
et  plusieurs  laquais) ,  et  se  voyant  chargé  à  coups 
d'espée  et  de  baston,  se  retire  dans  une  porte,  de- 
meure blessé  à  la  teste  de  deux  coups  d'espée  don- 
nez par  Rochefort.  La  Reyne,  avertie,  envoyé  M.  de 
la  Mothe  à  Monsieur  le  Prince,  qui  dit  qu'il  avoûoit 
ce  qui  s'estoit  passé,  et  l'avoit  commandé,  pour  ce 
que  Marsillac  estoit  un  maraut  qui  l'avoit  offencé. 
La  Reyne,  fort  indignée,  en  remit  la  connoissance 
au  Parlement,  et  envoya  quérir  le  Procureur  général, 
afin  qu'il  en  fist  faire  prompte  justice. 

Monsieur  le  Prince,  ayant  sçeu  ce  qu'avoit  fait 
Rochefort,  se  mit  fort  en  colère,  et  dit  qu'il  avoit  bien 
que  faire  que  l'embarrasser  en  une  si  méchante 
affaire. 

Dès  le  soir  mesme,  commission  fut  expédiée, 
adressante  au  Parlement,  pour  en  connoistre. 

Le  mesme  soir,  au  bal.  Monsieur  le  Prince  dit 
tout  haut  à...  avec  des  sermens  exécrables,  qu'il 
n' avoit  point  creu  que  la  Reyne  le  dust  trouver  mau- 
vais, et  que  M.  de  Buillon  ne  luy  avoit  jamais  parlé. 

M.  de  Buillon  dit  que  la  Reyne  lui  avoit  bien 
mandé  par  Boneuil  qu'il  en  parlast  à  Monsieur  le 
Prince  quand  il  le  verroit,  mais  qu'elle  ne  luy  avoit 
donné  charge  de  l'aller  trouver,  et  qu'ayant  la  goutte, 
il  n' estoit  point  sorty  depuis  et  n' avoit  point  veu 
Monsieur  le  Prince. 


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d'arnauld  d'andilly.  45 

6.     Monsieur  le  Prince  ayant  sçeu  que  l'on  infor- 
moit  de  l'affaire  de  Marsillac,  va  au  Louvre,  trouve 
le  Roy  et  la  Reyne  ensemble,  adresse  sa  parole  à  la 
Reyne,  luy  dit  qu'il  avoit  sçeu  la  commission  qui 
avoit  esté  addressée  au  Parlement;  qu'il  la  prioit 
d'en  ester  la  connoissance  au  Parlement,  pour  ce  que 
c'estoit  chose  qui  s'estoit  faite  par  son  commande- 
ment; que  Marsillac  estoit  un  coquin  qui  avoit  médit 
de  luy  par  tout.  —  La  Reyne  répondit  :  Monsieur, 
je  ne  croys  point  que  vous  ayez  fait  faire  cela,  j'ay 
trop  bonne  opinion  de  vous.  —  Sur  cela  il  répondit 
pour  la  seconde  fois  qu'il  l' avoit  fait  faire,  qu'il  l'a- 
voûoit  et  que  l'on  ne  sçauroit  qu'en  dire. — La  Reyne 
luy  ayant  répondu  comme  à  la  première  fois,  il  répli- 
qua encore  :  Ouy,  c'est  moi,  et  que  me  saurait-on 
faire  pour  cela?  on  ne  sçauroit  que  me  faire.  —  Sur 
ces  paroles,  la  Reyne  dit  :  Monsieur,  je  vous  prie  de 
me  pardonner  si  je  dis  que  voilà  une  grande  inso- 
lence et  une  grande  effronterie  d'oser  dire,  en  la 
présence  du  Roy  et  de  moy  que  vous  avouez  des 
coups  de  baston  donnez  à  un  gentilhomme  qui  est 
au  Roy  et  qui  le  sert.  —  A  ces  paroles,  il  répondit 
que  l'on  n' avoit  jamais  traitté  ni  outragé  Prince  du 
sang  de  la  sorte  ;  qu'il  voyoit  bien  qu'on  le  vouloit 
éloigner  du  Roy,  mais  que,  malgré  ses  ennemis,  il  y 
demeureroit,  et  achevant  cela,  il  s'en  alla.  Le  Roy 
voulut  parler,  Monsieur  le  Prince  le  retint. 
Tout  cecy  se  conte  fort  diversement. 
Monsieur  le  Prince  dit  qu'il  dit  à  la  Reyne  qu'il  ne 
croioit  pas  que  Sa  Majesté  affectionnast  tant  Mar- 


Février  l«li. 


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A0  JOURNAL  INEDIT 

fHHer  im.      siliac,  et  que  si  Teust  creu,  cela  ne  seroit  pas  arrivé. 
Monsieur  le  Prince  dit  aussi  qu'ayant  dit  à  la 
Reyne,  p<Hur  la  b'oisième  fois,  qu'il  avoûoit  Roche- 
fort,  elle  avoit  appelle  le  Roy,  disant  :  Mon  fils,  venez 
voir  Teffironterie  et  Tinsolence  de  Monsieur  le  Prince, 
qui  avoue  d'avoir  fait  bailler  des  coups  de  baston  à  un 
gentilhomme  qui  est  à  vous.  Qu'à  cela,  il  répondit  : 
Madame,  le  feu  Roy  mon  seigneur  et  le  vostre,  a 
quelquefois  esté  en  colère  contre  moy,  mais  jamais  il 
ne  m'a  traitté  comme  vous  me  traittez  ;  qu'elle  répon- 
dit :  Non,  car  jamais  vous  ne  luy  en  eussiez  donné  le 
sujet  que  vous  m'en  donnez.  Qu'il  ajouta  :  On  n'est 
point  accoustumé  d'offencer  Bixm  loi  Princes  du  sang. 
J'ay  l'honneur  d'estre  de  la  maison,  et  ne  tiens  riea 
de  vous.  Que  sur  cela,  le  Roy  ayant  voulu  parier,  û 
hiy  dit  :  Sire,  je  supplie  très-humblement  Vostre  Ha* 
jesté  de  ne  point  parier  en  cette  affaire,  car  je  sçay 
que  Vostre  Majesté  a  esté  prévenue ,  et  si  Vostre  Ma- 
jesté se  mettoit  en  colère  contre  moy,  cela  me  porte* 
roit  au  désespoir.  Vous  estes  mon  Roy,  vous  estes 
mon  maistre,  je  répandray  jnsques  à  la  demi^^ 
goutte  de  mon  sang  pour  vostre  service,  mais  quant 
à  la  Reyne,  je  n'en  dis  pas  de  mesme  ;  et  que  sur 
cela,  il  s'en  alla. 

Mc^isieur  le  Prince  bailla  à  rapporter  i  M.  Gras- 
seteau,  aux  Enquestes,  une  requeste  par  laquelle  il 
avoûoit  l'affaire  de  Rochefort,  et  demandoit  qwd  les 
chambres  fussent  assemblées  sur  œ  sujet. 

Tous  les  trois  ordres  de  T  Estât  vinrent  en  corps 
s'olErir  à  la  Reyne  sur  le  sujet  de  cette  ai&ire,  et 


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d'arnjluld  dUndillt.  47 

fiirenl  reèeus  dans  la  galme  dorée^  en  présence  d*     févrienm 
toute  la  Cour.  On  dit  que  la  Reyne  avoit  fait  témoi*" 
gner  dans  ieé  Estais,  qu'elle  auroit  cette  députation 
agréable. 

Monteur  ie  Prince  va  dès  cinq  heures  au  Pala  is. 

10.  Messieurs  de  la  Grand  Chambre  font  ap*^ 
pdler  Messieurs  les  Gens  du  Roy,  pour  avoir  leur» 
conclusions.  Gomme  Monsieur  ie  Procureur  Général 
fut  sorty,  x>n  ouvre  Taudienoe.  Il  revient,  se  pleint 
qu'on  ne  luy  donne  pas  le  loisir  de  prendre  ses  con- 
clusions. Il  apporte  ses  conclusions  sur  les  informa*- 
tions,  et  voyant  plusieurs  Conseillers  des  Enquestes 
dans  les  lanternes,  il  dit  tout  haut  :  Que  ceux  qui 
sont  dans  les  lanternes  se  retirent,  sinon  je  prendray 
mes  conclusions  contre  eux.  —  Sur  cela,  ils  se  reti- 
rèrent tous.  En  ces  entrefaites,  on  alla  avertir  Mon- 
sieur le  Prince. (qui  estoit  à  la  porte),  que  s'il  n'en- 
btrit  promptement,  le  coup  s'alloit  frapper,  pour  ce 
qu'ils  alloyent  donner  arrest.  H  entra  donc,  fit  une 
grande  harangue,  dont  la  conclusion  fut  qu'il  feroit 
toute  sQ^iie  ds  satisfaction,  et  rendroit  toute  sorte  de 
devoirs  et  de  services  au  Roy  et  toutes  sortes  de  res- 
pects à  ia  Reyne;  que  cependant,  ils  les  prioit  de 
différer  jusques  au  lendemain.  Sur  cela,  M^sieurs 
du  Parlenaent  s'arrestèrent  et  naandèrent  à  Mes- 
sieurs les  Geifâ  du  Roy  d'aller  faire  entendre  à  Leurs 
Majestez  ce  qui  s'estoit  passé.  Ensuite,  ils  furent  tous 
trois  à  huit  heures  chez  Monsieur  le  Chancelier,  à 
dix  au  Louvre,  dirent  qu'ils  -venoyent  faire  ce  rap- 
port sur  relation,  la  Chambre  ne  les  ayant  point  în- 


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A8  JOURNAL   INÉDIT 

Février  iM.  formcz  ellc-mesme .  Que  quant  à  la  requeste  d'aveu 
de  Monsieur  le  Prince,  il  n'y  faloit  avoir  aucun 
égard,  et  n'user  d'aucune  surséance. — Après  disner, 
sur  les  deux  heures,  Messieurs  du  Parlement  furent 
mandez  au  Louvre,  et  Monsieur  le  Premier  Président 
ayant  dit  que  Monsieur  le  Prince  a  voit  dit  au  Parle- 
ment qu'il  feroit  toutes  sortes  de  satisfactions,  de  de- 
voirs et  de  services  au  Roy  et  à  la  Reyne,  M.  Servin 
hocha  la  teste  et  dit,  respect. — L'affaire  estant  mise 
en  délibération  en  présence  de  Messieurs  du  Parle- 
ment, il  passa  tout  d'une  voix  que  l'on  passeroit  outre. 
La  Reyne  avoit  répondu  à  Messieurs  les  Gens  du 
Roy,  que  pour  le  regard  de  l'offence  que  Monsieur 
le  Prince  avoit  faite  au  Roy  et  à  elle,  il  seroit  tou- 
jours reçeu  à  satisfaction,  attendu  qu'il  estoit  enfant 
de  la  maison,  mais  que  pour  le  reigard  de  Rochefort, 
elle  entendoit  que  justice  en  fust  faite. 

11.  Monsieur  le  Prince  fut  à  toutes  les  chambres 
des  Enquestes  l'une  après  l'autre,  haranguer  sur  le 
sujet  de  son  affaire. 

La  requeste  qu'il  avoit  baillée  luy  a  esté  rendue  à 
la  Grand  Chambre. 

Messieurs  de  la  Grand  Chambre  décrétèrent  contre 
Rochefort. 

12.  Le  Roy  mande  au  Louvre  tous  les  Présidens 
du  Parlement,  tant  de  la  Grand  Chambre  (M.  le 
président Séguier*  n'y  vint)  que  des  deux  chamhfes 

^  Antoine  Ségnier,  né  en  1552,  conseiUer  au  Parlement,  maître  des 
requêtes,  surintendant  de  justice  en  Provence  en  1576,  conseiller 
d'Etat,  avocat  général  au  Parlement  de  Paris,  président  à  mortier  en 


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d'arnauld  d'andilly.  49 

des  Requestes  et  cinq  chambres  des  Enquestes,  et  Février  i«ii. 
quatre  Conseillers  de  la  Grand  Chambre,  MM.  Pré- 
vost, Courtin,  Deslandes,  Scarron,  et  deux  anciens 
Conseillers  de  chacune  des  autres  chambres. — Mes- 
sieurs du  Conseil  assistèrent  lorsqu'on  parla  à  eux. 
*-  Le  Roy  commença  le  premier.  Après  parla  la 
Reyne,  qui  leur  dit  :  que  le  Roy  avoit  sçeu  que  le 
jour  précédent.  Monsieur  le  Prince  avoit  esté  en 
toutes  les  chambres  du  Parlement  ;  qu'elle  désiroit 
sçavoir  par  leur  rapport  ce  qui  s'y  estoit  passé.  — 
Monsieur  le  Premier  Président  commença ,  et  dit 
que  Monsieur  le  Prince  leur  avoit  dit  qu'ayant  appris 
qu'ils  ne  vouloyent  point  avoir  égard  à  la  requeste 
qu'il  leur  avoit  présentée,  il  les  venoit  prier  de  la  luy 
rendre;  que  sur  cela,  ils  l'avoyent  prié  de  se  retirer, 
et  qu'après  avoir  mis  l'affaire  en  délibération,  ils 
avoyent  ordonné  qu'elle  luy  seroit  rendue  ;  et  luy 
ayant  représenté  qu'ils  estoyent  ses  très-humbles 
serviteurs,  mais  qu'ils  estoyent  encore  plus  obligez 
au  service  du  Roy,  et  au  devoir  de  leurs  charges,  et 
estimoyent  qu'il  luy  seroit  toujours  honorable  d'estre 
bien  avec  Sa  Majesté,  il  leur  avoit  répondu  qu'il  les 
remercioit  ;  qu'il  ne  désiroit  rien  davantage,  et  qu'il 
avoit  employé  la  Reyne  Marguerite  et  madame  la 
comtesse  de  Soissons  *  pour  en  parler  à  la  Reyne. 

1597,  ambassadeur  à  Venise,  mort  en  1626.  Antoine  Séguier  était  le 
cinquième  fUs  du  président  Séguier  (Pierre  I)  et  Toncle  de  Séguier 
(Pierre  III),  le  célèbre  chancelier,  en  faveur  de  qui  il  résigna  sa  charge 
de  président  à  mortier. 

*  Anne,  comtesse  de  Montafié,  mariée  au  comte  de  Soissons  en  1601, 
morte  en  164ft. 

h 


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60  JOl]RN\L    INÉDIT 

Fe^rtér  im.  Après  cb1b4  la  Reyne  répondit:  qu'il  ne  luy  disoît 
rien  dé  là  faveur  et  de  la  cire.  Il  répondit  :  Madame, 
je  n'estimoië  pas  qu'il  ftist  besoin  de  représenter  à 
Voôtre  Majeàté  toutes  ces  particularîteEv  mais  puis- 
qu'il Vous  plaist  de  mé  le  oômmanderj  là  vérité  est 
que  Monsieur  le  Prince  dit  qu'il  n'y  avoit  plus  de 
jilstice  ;  que  l'on  usoit  de  faveur  envers  qui  l'on  voû- 
tait, ^t  de  sévérité  ênverô  les  Autre*.  Mi  le  président 
le  Jay  \  pour  la  Tournelle,  dit  fort  peu  de  chose*  et 
passa  l'affaire  le  plus  doucement  qu'il  put  —  M»  le 
président  Lescalopier  ^*  pouf  la  chambre  de  l'Edit* 
parla  hardiment  et  en  bons  termeâ,  dit  que  Monsieur 
le  Prince  aVoit  dit  ([ix^  la  faveur  et  la  cire  estoyent 
jointes  ensemble.,  et  que  la  faveur  avoit  fait  fondre  la 
cire.  M.  Fayet^  M.  du  Mesnil*  M*  Crespin^  et  autres 
Présidens  des  Requesteset  EnqaesteB  parlèrent  aussi» 
M.  Grespin  entr'autres ,  dit  que  Monsieur  le  Prince 
avoit  dit  qu'il  y  avoit  des  gens  élevez  de  peu  qui 
pouvoyent  tout  auprès  de  Leurs  Majestez,  et  qui  en 
reculoyent  les  grands* 

Après  qu'ils  eurent  tous  parlée  la  Reyne  prit  la  pa- 
rotei  et  leur  conta  tout  du  long  comnie  l'aifaire  s'es- 
toit  passée»  depuis  le  commencement  jusques  à  la 
fin,  ainsi  qu'il  est  écrit  cy-devant;  parla  toujours  en 
termei.  fort  honnestes  de  Monsieur  te  Prince  ;  dit 


<  Nicolas  le  Jay,  conseiller  au  Parlement  de  Paris  en  1600,  procu- 
reur du  Roi  ail  Cliételet,  lieutenant  civil^  président  à  mortier,  premier 
président  en  1630,  garde  des  sceaux  en  1636,  mort  en  1640. 

2  Jean  Lescalopier,  conseiller  au  PailemeiU  en  1597,  maître  des 
requêtes  en  1605,  président  à  mortier  en  1614,  mort  en  1620. 


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d'arnauld  d'andilly.  61 

entr' autres  choses  :  que  madame  la  comtesse  de     l'evfier  m». 
Soissons  luy  estoit  venu  parler  sur  ce  sujet,  le  soir 
précédent,  et  les  discours  qu'elles  avoyent  eus  en* 
semble  ;  que  Monsieur  le  Prince  seroit  toujours  le 
bien  venu  à  revenir  prendre  sa  place  auprès  du  Roy, 
qui  Texcuseroit,   et  le  traitteroit  toujours  comme 
estant  enfant  de  la  maison  ;  que  le  Roy  leur  défeii-* 
doit  de  plus  recevoir  Monsieur  le  Prince  dans  le  Par^ 
lement,  en  façon  quelconque*  si  ce  n'estoit  qu'il  y 
eust  des  affaires  particulières  ou  qu'il  allast  dans  la 
Grand  Chambre,  prendre  sa  place  pour  juger,  mais     ^ 
que  jamais  il  n' allast  aux  Enquestes,  et  ne  parlast 
dans  le  Parlemont  d'affaires  d' Estât,  ~  Et  après  quo 
cela  fut  fait,  on  leur  donna  congé* 

Le  soir,  MM.  de  Ventadour  et  président  Jeannin 
furent  de  la  part  du  Roy  dire  à  Monsieur  le  Prince 
que  sa  Majesté  luy  défendoit  de  plus  aller  en  tout  aux 
chambres  des  Enquestes,  et  de  n'aller  aus^  au  Par* 
lement,  s'il  n'y  avoit  des  affaires  particulières,  ou 
qu'il  ne  voulust prendre  sa  place  en  la  Grand  Chambre 
pour  juger.  Il  leur  répondit  avec  force  honnestete^  et 
soumissions.  Et  sur  ce  qu'ensuite ,  ces  Messieurs  luy 
dirent  qu'il  pourroit  voir  le  Roy  et  la  Reyne  quand  il 
luy  plairoit ,  et  mesme  le  pressèrent  d'y  laller  dès  le 
soir  mesn^ ,  il  Içur  dit  qu'il  desiroit  prendre  la  nuit 
pour  conseil. 

13.  M.  Digoine  \  député  de  la  noblesse  de  Bour- 


*  Théophile  de  Damas,  baron  de  Digoyne,  député  de  la  noblesse  ponr 
le  bailliage  de  Charolles,  enseigne  de  la  compagnie  du  duc  de  Mayenne, 


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52  JOURNAL  INÉDIT 

Fevriw  iej6.  gogne ,  dit  aux  Estais  (il  a  toujours  très-bien  fait 
durant  les  Estais)  qu'il  avoit  des  choses  d'extrême 
importance  à  déclarer  au  Roy.  Mais  que  pour  le  faire, 
il  estoit  force  d'attaquer  et  d'offencer  deux  grands; 
qu'il  savoit  bien  qu'il  mettoit  sa  vie  en  hazard,  mais 
que  cela  ne  l'empescheroit  pas.  Néantmoins,  qu'il 
les  prioit  de  le  prendre  en  leur  singulière  protection, 
et  tirer  parole  du  Roy  qu'il  le  prendroit  aussi  en  la 
sienne  ;  qu'il  avoit  pièces  justificatives  pour  prouver 
ce  qu'il  diroit.  —  Ils  répondirent  que  le  Roy  ayant 
assemblé  les  Estats,  les  avoit  rendus  seurs  et  libres  ; 
que  de  luy  en  demander  une  asseurance  particulière, 
estoit  douter  de  sa  parole  ;  c'est  pourquoy,  ils  ne  le 
jugeoyent  pas  à  propos;  mais  qu'il  déclarast  le  len- 
demain matin  à  l'assemblée  ce  qu'il  vouloit  dire ,  et 
qu'ils  luy  promettoyent  de  répandre  jusques  à  la  der- 
nière goutte  de  leur  sang ,  pour  empescher  que  l'on 
entreprist  sur  luy. 

D'autres  disent  que  M.  Digoine  dit ,  qu'il  vouloit 
faire  sa  proposition  au  Roy  en  présence  de  plusieurs 
personnes  ;  que  sur  cela ,  les  voix  ayant  esté  prises, 
il  passa  à  la  pluralité,  que  l'on  luy  donneroit  toute 
sorte  d'assistance  ;  ce  qu'on  blasme,  d'autant  qu'on 
dit  qu'ils  l'accordèrent,  sans  savoir  ce  qu' estoit. 

On  dit  que  ces  deux  grands  estoyent  M.  le  maré- 
chal d'Ancre  et  M.  le  Chancelier. 

Le  dit  sieur  Digoine  est  Bourguignon,  de  très- 


servit  longtemps  le  duc  de  Savoie ,  Charles  Emmanuel,  aux  guerres 
de  Piémont  et  fut  tut^  au  siège  de  Verceil  en  1617. 


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d'arnauld  d'andilly.  53 

bonne  maison ,  chef  de  la  maison  de  Damas.  Est      Fcmer  tm. 
homme  couvert  de  crimes ,  mesme  accusé  d'avoir 
participé  au  vol  et  meurtre  du  frère  de  M.  Tevesque 
d'Autun  dont  les  complices  ont  esté  exécutez.  N'est 
fort  habile  homme.  —  A  depuis  esté  tué  à  Verseil. 

14.  M.  Digoine  ne  put  faire  sa  proposition,  pour 
ce  qu'il  survint  plusieurs  affaires  quil'empeschèrent. 

15.  M.  du  Mayne,  que  l'on  tient  en  partie  avoir 
porté  M.  Digoine  à  faire  ce  qu'il  avoit  fait,  l'envoyé 
quérir,  en  ayant  esté  averty  par  la  Reyne,  luy  dit 
qu'il  désire  qu'il  suive  sa  pointe,  et  qu'il  veut  encore 
ajouster  à  ses  mémoires.  A  cet  effect,  le  prie  de  les 
luy  apporter  tous,  pour  les  voir.  Les  ayant,  il  les  re- 
tient. Et  est  à  remarquer  que  la  pluspart  estoyent 
signés.  M.  Digoine  extrêmement  fâché  de  cela,  et  se 
voyant  privé  du  moyen  de  faire  ses  preuves  va  le 
lendemain  lundy  aux  Estats,  leur  dit  que  n'ayant  plus 
les  preuves  qu'il  avoit,  il  estoit  résolu  de  se  retirer, 
et  de  faict,  se  prépare  pour  partir.  Cela  estant  sçeu 
au  Louvre,  on  le  veut  faire  arrester  prisonnier,  pour 
ce  qu'il  n'est  permis  aux  Députez  de  se  retirer  sans 
permission  du  Roy.  M.  Digoine,  en  estant  averty,  jse 
tient  sur  ses  gardes,  et  va  au  Louvre.  — Là,  on  luy 
fait  toutes  sortes  de  caresses  ;  et  le  lendemain,  il 
retourne  aux  Estats  comme  auparavant. 

D'autres  disent  qu'il  dit  à  Messieurs  des  Estats 
qu'il  ne  pouvoit  dire  ce  qu'il  avoit  proposé,  pour  ce 
que  la  Reyne  luy  avoit  fermé  la  bouche,  le  luy  ayant 
défendu  ;  et  que  puisque  les  Estats  n' estoyent  pas 
libres,  il  demandoit  congé  de  se  retirer. 


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61  JOI/RNAL   INÉDIT 

Ferler  itiff,  A  onze  heures  du  matin,  Monsieur  le  Prince  va 

au  Louvre,  et  dit  au  Roy:  Sire,  je  supplie  très-hum- 
blement vostre  Majesté  d'oublier  tout  ce  qui  s'est 
passé,  et  me  le  pardonner.  Le  Roy  répondit:  Mon- 
sieur le  Prince,  je  vous  le  pardonne  de  très-bon 
cœur,  et  seray  topjours  trôs-ayse  de  vous  donner  au- 
près de  moy  le  rang  qui  est  deu  à  vostre  qualité, 
pourveu  que  vous  n'y  retoumioE  plus,  et  n'y  retour- 
nez plus. 

Après,  il  vit  la  Reyne,  et  parla  à  elle  si  bas,  et  elle 
à  luy,  que  personne  ne  l'entendit.  Il  parla  environ  la 
moitié  plus  qu'il  n'avoit  feit  au  Roy.  Après,  il  se  re^ 
tira  ;  et  voyant  que  personne  du  monde  ne  l'abor- 
doit»  il  s'accosta  de  M.  le  comte  d'Escars,  et  luy 
demanda  des  nouvelles  de  son  procès.  Enfin,  le  comte 
d'Escargi  l'ayant  aussi  comme  quitté,  et  sq  voyant 
geul,  il  fit  la  révérence  et  s'en  alla  \ 

30.  M.  l'Evesque  de  Reauvais  ^  va  haranguer  la 
poblesse  pour  faire  recevoir  le  Concile  de  Trente  ; 
appelle  en  son  discours  ceux  de  la  Religion  plusieurs 
fois  hérétiques,  dont  quelques  uns  d'eux  s' offencèren t. 
Aprèsqu'il  eut  parlé.  Monsieur  le Vidame  de  Chartres*, 
de  la  Rçligion ,  s'avança ,  et  luy  dit  que  le  Concile  de 


*  Voy,  sur  cette  affaire  de  Marsîllac  et  de  Rochefort  et  sur  la 
conduite  de  M.  le  Prinoe  à  cette  occasion,  Petitot,  2*  aérle,  Mém.  de 
Pontchartrain,  t.  xvii,  p.  70;  Mém.  de  Richelieu,  t.  xxi  bis,  p.  334,  et 
lUerc,  fr.s  t.  m,  229.  On  trouve  dans  les  msc.  deConrart,  t.  xiii,  in-4*', 
p.  533-5^7,  une  «Relation  de  l'assassinat  do  M.  de  Marsillac  par 
M.  de  Rochefort  »  qui  contient  des  détails  très-intéressants. 

2  René  Potier,  évOque  et  comte  de  Beauvais,  pair  de  France. 

5  Préjau  de  la  Fin,  vidame  dd  Chartres. 


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D*AR1fAULD    D^ANBILLT.  65 

Trente  décidoit  qu'il  ne  faloit  point  tenir  Iq  toy  aux  **vrifr  mi. 
hérétiques  ;  que  cela  estant,  les  Edite  de  Pacification 
nq  pouvoyent  subsister.  Sur  cela,  l'evesquo  d' Avpan- 
ches,  Péricart,  commença  à  déclamer  contre  Deux 
de  la  Religion,  sur  le  sujet  de  Tinsolenoe  faite  par 
quelque&-uns  d'eux  à.* ••••.,  en  Provânoa,  Mon- 
sieur le  Vidame  de  Chartres  et  M.  du  Vigecm  répon- 
dirent qu'il  n'estoit  point  besoin  d'exagérer  cela  ; 
que  c'estoit  chose  arrivée  il  y  a  deux  mois;  que  l'af- 
faire ne  s'estoit  point  passée  comme  on  le  disoit  ; 
qu'il  avoit  esté  décerné  commission  à  la  chambre  de 
Castres ,  pour  faire  le  procès,  et  qu^eux-^meanep  ae 
joipdroyent  pour  requérir  qu'on  punisse  trèa^sévère- 
ment  ceux  qui  avoient  commis  cet  acte  et  ce  crima. 
Sur  ces  entrefaites,  M.  le  baron  de  Digoîne  s'avança, 
et  dit  :  C'est  une  honte  que  ceux  de  la  Religion  soyent 
présents,  lorsque  l'on  délibère  sur  la  réception  d'un 
Concile  r  II  faut  qu'ils  sortent  tous.  Monsieur  le  Vi- 
dame de  Chartres  répondit  :  Vous  nous  gronderez  at 
nous  aboyerez  assez,  mais  vous  ne  nous  ferei  pas  de 
mal  ;  et  dit  à  M.  du  Vigean  î  Sortons  Monweur,  sorv- 
tons  ;  et  ainsi  s'en  allèrent  tous  dwxv-r^M.  de  Chain- 
baut  *,  fils  de  M.  de  Gouvernet,  voyant  cela,  se  leva, 
et  dit  :  Je  ne  say  comme  on  entreprend  de  nous  faire 
sortir  d'icy.  Nous  sommes  icy  en  qualité  de  sujets  du 
Roy,  et  luy  sommes  aussi  affectionnés  qu'aucune  des 
autres  ;  et  n'y  a  que  le  Roy  seul  qui  nous  puisse  oster 


*  René  de  la  Tour  de  Qouyernet,  h^rm  df  Cbawiwium  d^pi^  0e  la 
noblesse  du  Languedoc. 


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56  JOURNAL   INÉDIT 

Février  1M8.  (Jc  TïOB  placBS.  Quant  à  moy ,  je  déclare  que  je  ne 
.sortiray  point  de  la  mienne. — Cette  action  de  M.  de 
Chambaut  fut  fort  approuvée  par  la  Reyne  et  par 
tout  le  monde. 

20.  Le  lendemain,  M.  de  Chambaut  alla  trouver 
M.  Arnaud,  Intendant  des  finances,  luy  conta  ce  qui 
s'estoit  passé,  et  luy  dit  que  Monsieur  le  Vidame  de 
Chartres  et  M.  du  Vigean,  estant  sortys  de  l'assem- 
blée ,  s'ils  n'y  entroyent  le  lendemain ,  qui  estoit  le 
dernier  jour  que  l'on  s'assembleroit,  le  bruit  courroit 
par  les  Provinces  que  l'on  avoit  chassé  des  Estats  les 
Députés  de  la  Religion,  ce  qui  pourroit  apporter  de 
la  brouillerie. — M.  Arnaud,  sur  cela,  alla  voir  Mon- 
sieur le  Chancelier,  qui  envoya  quérir  MM.  le 
.Vidame  de  Chartres  et  du  Vigean,  et  leur  commanda, 
de  la  part  du  Roy  et  de  la  Reyne,  d'entrer  le  len- 
demain aux  Estats. 

Rrouillerie  de  M.  de  Souvré  *  avec  M.  de  Luynes^. 
Le  Roy  avoit ,  peu  auparavant ,  baillé  sa  bourse  à 
M.  de  Luynes.  Incontinent  après,  M.  de  Luynes  eut 
la  charge  de  capitaine  des  Tuilleries  de  Monsieur  le 
général  des  Galères  %  et  le  Roy  luy  donna  aussi  la 


*  Gilles  de  Souvré,  marquis  de  Courtanvaux,  gouverneur  de  Tou- 
raine,  gouverneur  de  Louis  XUI,  maréchal  de  France  en  1015,  mort 
en  1026. 

*  Charles  d'Albert,  seigneur  de  Luynes,  né  en  1578,  gouverneur 
d'Amboise  en  1015,  grand  fauconnier  en  1016,  garde  des  oiseaux  de  la 
chambre  du  Roi  en  1617,  duc  et  pair  en  1619,  Connétable  de  France  et 
garde  des  sceaux  en  1621,  mort  le  15  décembre  1621. 

*  Philippe-Emmanuel  de  Gondy,  comte  de  Joigny,  général  des  Ga- 
lères en  1598 ,  mort  en  1626.  Il  était  fils  d'Albert  dé  Gondy ,  duc  de 
Retz,  pair  et  maréchal  de  France. 


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d'arnauld  d'andilly.  57 

charge  de  capitaine  des  Galères  ;  et  ensuite ,  il  eut     Février  my 
aussi  la  charge  de  M.  de  Congis  aux  Tuilleries  ;  et 
depuis,  celle  de  M.  de  Fontenay  * ,  de  capitaine  du 
chasteau  du  Louvre  ^. 

21.  Monsieur  l'Archevesque  de  Lyon  ^  fut  l' après 
disnée  faire  une  harangue  à  la  Reyne,  sur  le  sujet 
du  Concile  de  Trente,  et  sur  ce  qui  avoit  esté  fait  en 
Provence  par  ceux  de  la  Religion. 

23.  Clôture  des  Estats.  Séance  Royale  \ 


*  François  du  Val,  marquis  de  Fontenay-Mareuil,  parent  d*Arnauld 
d'Àndilly,  né  en  1595,  capitaine  du  Louvre,  maréchal  de  camp,  con- 
seiller d*État,  ambassadeur  en  Angleterre  en  1626,  à  Rome  en  1641  et 
1647 ,  auteur  des  Mémoires  publiés  dans  la  collection  Petitot  par 
M.  Monmerqué,  qui  les  a  fait  précéder  d'une  Notice  biographique. 
(f^oy,  éd.  citée,  t.  l,  p.  341.) 

2  Foy.  sur  l'élévation  de  M.  de  Luynes,  Petitot,  2*  série,  Mém.  de 
Bohan,  t.  xviii,  p.  144  et  148;  Mém.  de  Richelieu,  t.  xxi  bis,  p.  211; 
et  1'*  série ,  Mém.  de  Fontenay-Mareuil,  t.  l,  p.  138,  268,  341.  —  A 
propos  du  gouvernement  d'Amboise  donné  à  Luynes  pas  la  faveur  du 
maréchal  d'Ancre,  Richelieu  fait  cette  réflexion  triste  et  toujours  vraie  : 
a  En  quoi  paroît  combien  est  grand  l'aveuglement  de  Tesprit  de 
l'homme,  qui  fonde  son  espérance  en  ce  qui  doit  être  le  sujet  de  sa 
crainte  ;  car  le  Maréchal  ne  recevra  mal  que  de  celui  de  qui  il  attend 
tout  le  contraire,  et  Luynes,  qu'il  regardoit  comme  un  des  principaux 
appuis  de  sa  grandeur,  non  seulement  le  mettra  par  terre,  mais  ne 
bâtira  sa  fortune  que  sur  les  ruines  de  la  sienne.  » 

*  Simon  de  Marquemont,  député  du  Clergé. 

*  Voy.  le  Merc.  fr.^  t.  m,  p.  463,  et  pour  tous  les  détails  sur  les 
travaux  remarquables  de  cette"  grande  assemblée ,  la  relation  de  Flori- 
inond  Rapine,  député  du  Tiers.  Voy.  aussi  le  chapitre  consacré  aux 
inOmes  États-Généraux  par  l'illustre  historien  M.  Augustin  Thierry 
dans  son  histoire  de  VOrigine  et  des  progrès  du  Tiers-État. 


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58 


JOURNAL   INÉDIT. 


M.  le  Prince 

prétexte  «on,. . 

le  jour 

précédent. 


c 


Monsieur. 

© 


M.lecomt^de 
Soissoirs. 


MM.   DE  Guise 

ne  vinrent 

à  cause  qu'on 

avoit  séparé  ce 

banc 
d'avec  l'autre, 
bien  que  fust  de 
mesme  hauteur, 

au  lieu  qu'à 

l'ouverture  des 

Estats, 

leur  banc 

estoit  continu 

à  luy. 


Le  Rot. 

□ 

M  DU  Mayhe, 
sur  un  plficet. 


Le  Cha;¥Cet.ter, 
n^  ne  ekaiie  uis  ëMsier. 


0  M.  DE  Retz. 

0  M.  DR  MmrTBAXON. 


Trois  bancs  pour  MM.  les  conseil- 
lers d'Estqt  de  robbe  loiague.  — 
Les  intendants  y  estolenr. 

Bancs  des  députez  de  l'Église. 


etc.,  etc. 


M.  pE  SpcvfiS. 
M.  le  njaréch.  d^AwcRE. 
M.  DE  BOfSDAUPMIW. 
M.  DE  BRISSAG. 

M.  DE  Beau  VAIS. 

M.  DE  NOYON. 

M.  le  cardinal  Boifzy. 

M.  le  cardinal  de  la 
Rochefoucauld. 

M.  le  cardinal  db  Sour- 

DIS. 


d 


Trois  bancs  pour  MM.  les  conseil- 
lers d' Estât  d'ëpée.  —  H  y  «volt 
quantité  de  chevaliers  de  l'ordre. 

Bancs  des  députez  de  la  Noblesse, 


etc.,  etc. 


etc. 
Bancs  des  députez  du  Tiers-État. 
— 11  V  avoit  séparation  d'envi- 
ron trois  pieds  entre  leurs  bancs 
et  ceux  du  Qergé. 


M.  DE  l.yçoN  (1),  pour  le  Clergé, 
M.  DE  SÉNECEY,  pour  la  Noblesse, 
M.  Myrow ,  pour  le  TiefS-Etat, 


etc. 
Bancs  des  députez  du  Tiers-État. 

—  11  y  avoit  séparation  d*ei»vt- 
ron  8  pieds  entre  lesdits  bancs 
et  ceux  de  la  Noblesse. 


S  après  avoir  harangué,  chacun  d'eux,  suivy 
de  son  greO'^»",  alloit  trouver  le  Roy,  et 
là,  prenant  le  caycr  des  maios  du  grefhcr, 
le  présentoit  h  S.  M . 


(1)  Vov  la  harangue  de  l'évéque  de  Luçon,  Armand-Jean  du  Plessis.  depuis  Cardinal-duc  de  Riche- 
lieu (ïetltot  J- s.;  t.  XI,  p.  îOl).  Elle  fut  Imprimée  avec  celle  de  Miron  che^  Cramoisi,  après  la 
clôture  des  ÈtaU. 


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d'^rnauld  d'andilly.  60 

Monsieur  le  Prince  va  trouver  la  Heyne  à  Saint-  «''^riter  m% 
Victor.  De  là,  il  l'accompagne  au  Louvre.  Luy  dit 
qu'il  la  venoit  supplier  de  luy  accorder  la  grâce  de 
Rochefort  ;  que  c'estoit  un  gentilhomme  à  qui  il  avolt 
de  l'obligation  pour  ce  qu'il  l'avoit  toujours  très^fidè- 
lemept  servy.  La  Reyne  luy  répondit  que  c'estoit  au 
Roy  qu'il  se  faloit  addresser.  Il  luy  répondit  :  Ma- 
dame, je  supplie  vostre  Majesté  que  je  luy  aye  cette 
obligation,  car  je  crains  que  le  Roy  me  la  refusast. 
Elle  luy  répondit  :  Non,  non,  allez  à  luy,  je  m'asseure 
qu'il  vous  fera  bonne  réponce.  Sur  cela.  Monsieur  le 
Prince  ayant  esté  trouver  le  Roy ,  sa  Majesté  luy 
répondit  :  Monsieur  le  Prince,  je  donne  grâce  à  Ro- 
chefort pour  Tamour  de  vous,  etc. 

1.  Le  Roy  donne  à  M.  de  Luyries  l'ai^né  le  Mars, 
gouvernement  d'Amboise  qui  estoit  demandé  par 
MM.  de  la  Curée  *,  la  Chastaigneraye^,  le  Renouart 
et  Descures*.  On  dit  que  le  Roy  en  pria  M.  le  maré- 
chal d'Ancre.  —  En  fit  des  remerciemens  extrêmes 
à  la  Reyne,  mena  luy-mesme  M.  de  Luynes  remer- 
cier la  Reyne  qui  répondit  :  C'est  le  Roy  qu'il  faut 
remercier  ;  et  le  Roy  disoit  :  Au  contraire,  c'est  vous 


*  Gilbert  Filhet,  seigneur  de  la  Curée  et  de  la  Roche  Turpin,  né 
vers  1555,  conseiller  d'Etat,  capitaine- lieutenant  des  chevaux-legers 
de  )a  Garde,  maréchal  de  camp,  mort  en  1633, 

^  Commandant  des  gardes  de  la  Heine. 

3  M.  d'Escures,  qui  avait  acheté  le  gouvernem^ptd'AIBt>oi$^,av^tété 
obligé  de  le  céflpi  à  Monsieur  le  Prince  (FoBtenijy-llareqiJ,  U  l,  p.  24^). 


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60  JOURNAL   INÉDIT 

Biars  1616.  Madame,  qu'il  faut  qu'il  remercie.  On  dit  que  M.  de 
Vendosme  ayda  fort  à  cette  affaire  *. 

2.  Messieurs  du  Parlement  résolurent  d'assem- 
bler les  chambres,  le  vendredy  en  suivant,  sur  le  fait 
de  la  paulette ,  et  menacèrent  fort  le  Mayne ,  sur  ce 
qu'on  leur  avoit  rapporté  qu'il  vouloit  faire  un  party 
de  1500  mil  livres  de  toutes  les  partyes  casuelles. 
Depuis,  le  Mayne  fut  faire  une  protestation  au  Par- 
lement que  cela  n'estoit  point.  Et  sur  ce  qui  fut  le 
jeudy  rapporté  au  Parlement,  de  la  part  de  la  Reyne, 
(je  ne  say  quoy),  les  chambres  ne  s'assemblèrent 
point  le  vendredy. 

9.  Mèssieuns  du  Parlement  des  chambres  des 
Enquestes  députent  deux  de  chaque  chambre  à  la 
Grand  Chambre,  vers  Monsieur  le  Premier  Président, 
pour  demander  qu'on  assemble  les  chambres.  Mon- 
sieur le  Premier  Président  répond  qu'il  avoit  receu 
commandement  de  la  Reyne  de  ne  point  assembler 
les  chambres.  Sur  cela,  ils  firent  grande  rumeur  et 
parlèrent  fort  rudement  à  Monsieur  le  Premier  Pré- 
sident, et  demeurèrent  trois  heures  sur  cette  contes- 
tation, et  peu  à  peu,  en  délibérant  si  on  s'assemble- 
roit,  ils  s'assemblèrent.  On  dit  que  M.  Gilot  dit  qu'il 
avoit  autrefois  ouy  dire  à  M.  le  président  de  Thou 
que  le  feu  roy  Charles  luy  ayant  dit  qu'il  vouloit 
faire  quelques-uns  du  Parlement  conseillers  d'Estat, 


>  C'est  par  erreur  que  Richelieu  dans  ses  Mémoires  place  cette  do- 
nation dans  raiinée  1614.  Pontcbartrain,  Mém.,  t.  xvii,  p.  75,  et  le 
P.  Anselme,  Généalogie  du  duc  de  Luy  nés,  sont  d'accord  sur  ce  point 
avec  Amauld  d'Andilly.  {Vay,  Fontenay-Mareuil,  t.  l,  p.  270.) 


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d'arnauld  d'andilly,  61 

il  lui  répondit  :  Sire,  ne  faites  pas  cela,  vous  gasterez       Ma»  tm. 
tout  et  ruinerez  le  Parlement. 

On  dit  que  M.  le  président  le  Jay  dit  que ,  s'il  ne 
sçavoit  faire  le  Premier  Pré^dent ,  il  y  en  auroit 
d'autres  qui  le  feroyent  bien. 

10.  Messieurs  du  Parlement  assemblent  les 
chambres  ;  commencèrent  à  opiner. 

M.  de  Saint-Géran*  alla  dire  à  Monsieur  le  Prince 
que  le  Roy  et  la  Reyne  le  prioient  de  ne  se  point 
trouver  au  Palais,  afin  de  ne  fortifier  point  par  sa 
présence  les  résolutions  qu'on  y  pourroit  prendre. 
Monsieur  le  Prince  répondit  qu'il  iroit  luy-mesme 
rendre  réponce  à  Leurs  Majestez  ;  et  quelque  temps 
après  alla  au  Louvre  et  dit  au  Roy  et  à  la  Reyne 
que,  puisque  Leurs  Majestez  ne  vouloyent  point  qu'il 
s'y  trouvast,  il  n' iroit  point. 

On  dit  qu'il  se  plaignit,  disant  que  M.  de  Saint- 
Géran  avoît  soixante  gendarmes  disposez  en  divers 
endroits,  lorsqu'il  l'estoit  allé  trouver  le  matin. 

11.  Messieurs  du  Parlement  achèvent  de  délibé- 
rer. Résolvent  que  remontrances  seront  faites  au 
Roy,  tant  sur  le  sujet  de  la  paulette  que  sur  autres 
points  ;  et  que  cependant,  et  jusques  à  ce  que  cette 
affaire  soit  entièrement  résolue,  on  ne  recevra  au- 
cuns ofiiciers  qu'ils  ne  rapportent  un  certificat  comme 
la  vefve  et  les  héritiers  seront  contens  et  satisfaits 
d'eux. 

*  Jean  François  de  la  Guiche,  comte  de  la  Palice,  seigneur  de  Saint- 
Géran,  gouverneur  du  Bourbonnais,  capitaine  lieutenant  des  gendarmes 
de  la  garde  en  1615,  maréchal  de  France  en  1619,  mort  en  1632. 


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62  JOURNAL   INEDIT 

Mars  im«  On  dit  que  M.  Ribier  dit  qu'il  n'y  avoit  pas  jus-^ 

qu'aux  Pasquins  qui  ne  les  appellassent  des  poulies, 
et  qu'ils  avoyent  raison^  veû  la  lascheté  qui  se  trou- 
voit  tant  au  chef  qu'aux  membres. 

12.  Conseil  tenu  le  matin  chex  Monsieur  le  Chan- 
celier sur  le  fait  de  la  paulette.  M»  Arnaud,  inten- 
dant des  finances,  propose  son  avis  ;  tous  en  demeu- 
rent d'accord* 

L'après-disnée ,  Conseil  tenu  au  Louvre  sur  le 
mesme  sujet,  où  estoyent  tous  les  grans.  M.  Arnaud 
propose  de  rechef  son  avis,  qui  est  :  de  rembourser 
le  trésorier  des  parties  casûelles  ;  rétablir  trente  sol« 
sur  minot  de  sel  ;  supprimer  les  offices  qui  vacque- 
ront  par  mort,  ju$qu'à  ce  qu'ils  soyent  réduits  au 
nombre  ancien  ;  au  bout  de  cinq  ans,  voir  ce  que 
monteront  les  gages  qui  reviendront  par  ce  moyen 
au  Roy,  et  diminuer  d'autant  l'imposition  ;  permettre 
aux  officiers  de  résigner,  sans  rien  payer  que  le 
droit  de  marc  d'or,  et,  par  ce  moyen,  supprimer 
pour  jamais  la  paulette  et  la  vénalité»  —  Cet  avis 
l'emportoit  à  la  pluralité  des  voix  ;  mais  M.  de  Bulion 
ouvrit  un  autre  avis,  qui  est  de  ne  permettre  de 
résigner  à  ceux  qui  achèteront  doresnavant.  M.., 
en  fut,  Monsieur  le  Chancelier  et  deux  ou  trois 
autres.  Ainsi  il  n'y  eut  rien  de  résolu  pour  ce  jour-là. 

19*  M.  Ribier,  lieutenant  général  de  Blois*, 
harangue  au  Roy  au  nom  du  Tiers-Estat,  pour  em- 


*  Guillaume  Ribier,  député  du  bailliage  de  Blois.  {Voy.  itère,  fr*, 
L  ui,  p.  422-425,  la  requête  du  Tiers-Etat.) 


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d'arnauld  d'andilly.  63 

pescher  rimposiUon  de  trente  sols.  Monsieur  le  Chôn*       m««  imi. 
celier  répondit  qu'ils  n'avoyent  deû  s'asseitiblef  de- 
puis la  présentation  des  ôayers» 

24.  Le  Roy  mande  les  députex  des  trois  ordres 
en  la  galerie  du  Louvre  ;  leur  dit  qu'il  avoit  com- 
mandé  à  Monsieur  le  Chancelier  de  leur  déclarer  sa 
volontéi  Sur  cela,  Monsieur  lô  Chancelier,  prenant 
la  parole,  leut  dit,  en  substance*  que  le  Roy  désirant 
faire  réussir  des  Estats  tout  le  bien  possible,  et  ré*- 
pondre  promptement  les  cayer$  qu'ils  avoyent  pré- 
sentez, il  avoit  nommé  des  commissaires  poui*  y  tra- 
vailler jusqu'au  nombre  de  plus  de  quarante  ;  mais 
qu'il  y  avoit  si  grand  nombre  d'articles,  qu'il  estoit 
impossible  que  l'expédition  ea  fust  si  prompte  qu'il 
desiroit,  veû  qu'il  y  en  avoit  plusieurs  qui  méritoyent 
chacun  un  conseil  tout  entier.  C'est  pourquoy,  pour 
éviter  les  fraixque  leur  séjour  apporteroit  au  peuple, 
non-seulement  Sa  Majesté  avoit  agréable^  mais  leur 
commandoit  de  se  retirer  en  leurs  maisons;  et  que 
cependant,  pour  leur  donner  les  preuves  de  sa  vo- 
lonté aux  plus  importans  articles,  et  que  les  trois 
ordres  avoyent  conjointement  demandez,  il  esteignoit 
dès  à  présent  la  paulette  et  la  vénalité,  protestant 
que,  de  son  règne,  il  ne  souffriroit  qu'il  ne  fust  jamais 
vendu  aucune  charge,  et  qu'il  obligeroit  les  roys,  ses 
successeurs,  à  le  jurer  en  leur  sacre,  comme  une  des 
loix  fondamentales  de  T Estât  ;  qu'il  leur  accordoit 
une  chambre  de  justice,  et  que,  dans  trois  jours,  on 
nommeroit  les  commissaires  ;  que,  pour  le  regard 
des  pensions,  il  pourvoieroit  au  retranchement,  de 


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64  JOURNAL   INÉDIT 

ManiiMt.  telle  sorte  qu'ils auroyent  sujet  d'en  estre  contens*. 
27.  Mort  de  la  reyne  Marguerite  *,  à  11  heures 
du  soir.  MM.  Arnaud  et  de  Marillac  commissaires 
pour  faire  l'inventaire.  Bagues  valoyent  25  ou 
30,000  escus.  Tout  le  reste  des  meubles  ne  valoit 
pas  6,000  escus.  S'assemblent  avec  M.  de  Souvré, 
comme  premier  gentilhomme  de  la  chambre,  pour 
ordonner  le  deuil.  M.  de  Souvré,  M.  le  comte  de  la 
Rochefoucaud  ' ,  maistre  de  la  garde -robbe  en 
charge,  premiers  valets  de  chambre  et  autres  offi- 
ciers du  Roy  prétendoyent  devoir  avoir  deuil.  Jugé 
qu'il  ne  leur  en  appartenoit,  mais  que  MM.  de  Sou- 
vré et  de  la  Rochefoucaud  le  prendroyent  par  bien 
séance  et  se  Tordonneroyent  eux-mesmes.  La  dé- 
pence du  deuil  des  domestiques  de  la  reyne  Margue- 
rite, de  leur  nourriture  durant  quinze  jours,  de  l'effi- 
gie et  autres  cérémonies  faites  en  la  maison,  monte 
à  14,000  escus.  Si  on  eust  fait  un  convoi,  il  eust  monté 
100,000  escus.  Elle  devoit  260,000  escus,  sçavoir, 
60,000  escus  devant  la  donation*  et  200,000  escus 
depuis.  Donnoit  par  an  100,000  livres  aux  pauvres'. 


*  Voy.  Pontchartrain,  t  xvii,  p.  78;  Herc,  fr,  t.  m,  p.  421;  Merc,  fr,^ 
t.  IV,  p.  24* 

2  Marguerite  de  France,  duchesse  de  Valois,  fille  de  Henri  II  et  de 
Catherine  de  Medicis,  première  femme  de  Henri  IV  qui  fit  annuler 
son  mariage  en  1599. 

*  François,  V«  du  nom,  né  en  1588,  àucet  pair  en  162J,  mort  en  1650, 
père  de  l'illustre  auteur  des  Maximes. 

*  La  donation  entre- vifs  qu'elle  fit  de  tous  ses  droits  en  faveur  du 
Dauphin,  depuis  Louis  XIII.    * 

6  Foy.  Pontchartrain,  t.  xvii,  p.  78;  Richelieu,  t.  xxi  bis,  p.  241; 
Fontenay-Mareuil,  t  l,  p.  267. 


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d'arnauld  d'andilly.  06 

28.  Messieurs  du  Parlement  s'assemblent  matin       M«rt  %m. 
et  après-disnée.  Donnent  arrest  portant  que  les 

Princes  du  sang  et  les  ofliciers  de  la  couronne  se- 
ront mandez  pour  délibérer  sur  les  remèdes  qu'il  est 
besoin  d'apporter  aux  désordres  qui  sont  en  TËstat  '• 

29.  Conseil  tenu  au  Louvre.  Ordonné  ce  f}ui  fut 
exécuté  le  lendemain,  ainsi  qu'il  suit  : 

30.  Messieurs  les  gens  du  Roy  font  leur  plainte 
en  la  Grand  Chambre,  de  ce  que  cest  arrest  avoit  esté 
donné  sans  les  ouïr;  qu'il  préjudicie  extresmement à 
l'autorité  du  Roy.  Requièrent  qu'il  soit  biffé  dans  les 
registres.  —  Messieurs  du  Parlement  répondent  que 
Tarrest  n'estoit  pas  tel  qu'on  l'avoit  fait  entendre  à 
Sa  Majesté,  pour  ce  qu'à  la  fin  il  y  avoit:  sous  le 
bon  plaisir  du  Roy  (mots  qu'ils  avoient  adjoutez  de* 
puis,  voyant  que  l' arrest  n'estoit  soutenable)  ;  qu'ils 
chargeoient  Messieurs  les  Gens  du  Roy  d'aller  vers 
Sa  Majesté  pour  la  supplier  d'avoir  pour  agréable 
que  l'arrest  fust  exécutée 

Environ  le  dit  jour,  M.  de  Vendosme  se  départ  de 
l'union  qu'il  avoit  avec  les  autres  Princes  et  présente 
au  Roy  une  déclaration  par  écrit  pour  assurance  de 
sa  fidélité.  La  Reyne  la  refuse  et  dit  qu'il  ne  pouvoit 
bailler  d'assurance  plus  grande  que  ce  à  quoy  la 
naissance  l'obligeoit  ;  que  le  Roy  contraindroit  de  se 

*  Voy.  Merc»  fr,,  t.  iv,  p.  25.  Voy,  dans  les  Mémoires  de  Mathieu  Moié 
le  narré  des  remontrances  du  Parlement  contenant  tous  les  détails  de 
cette  affaire  et  les  pièces  authentiques  à  Tappui  (Mém.  Math.  Mole, 
édition  citée,  p.  20-&8). 

*  Voy,  Merc»  fr.,  t.  iv,  p.  33,  tous  les  détails  relatifs  à  cette  affaire 
et  notamment  le  rôle  joué  par  Tavocat  général  Senrin. 

5 


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tiart  mi.      ranger  à  letir  devoir  tous  ceux  qui  s'en  seroient  dé- 
partis, etû« 

Avril.  &«    Xa  Rayne  dit  à  M.  de  Longueviile,  revenu 

huit  ou  dix  jours  auparavant^  qu'elle  Tavoit  toujours 
fort  affectionné,  comme  elle  faisoit  encore;  qu'elle 
sçavoit  qu'il  avoit  eu  quelques  mécontentemens  du 
maréchal  d'Ancre,  qu'elle  le  prioit  d'oublier  tout 
cela}  que  le  maréchal  d'Ancre  avoit  toujours  esté  et 
ôstoit  encore  son  très-humble  serviteur;  qu'elle  desi* 
roît  qu'il  le  rôçeust  bien  lorsqu'il  le  viendroit  sa- 
luer. M.  de  Longueville  répondit  :  Madame,  il  ne 
m'a  jamais  témoigné  qu'il  fust  mon  amy,  et,  quant 
à  moy ,  je  ne  l'ay  jamais  ni  aimé  ni  haï,  mais  je  feray 
ce  que  Vostre  Majesté  commandera.  Elle  répondit  : 
Je  désire  que  vous  le  teniez  pour  vostre  serviteur  et 
veux  qu'il  le  soit  ;  et  sur  cela  fit  avancer  M.  le  mare- 
chai  d'Ancre,  qui  alla  saluer  M.  de  Longueville,  et 
puis  ils  s'embrassèrent,  mais  tout  cela  avec  froideur 
de  la  part  de  M.  de  Longueville. 

Accord  de  M.  le  maréchal  d'Ancre  et  de  M.  de 
Villeroy»  —  M*  de  Guise  dit  à  la  Reyne  qu'infinies 
personnes  trouvoyent  étrange  la  froideur  dont  elle 
usoit  envers  M.  de  Villeroy,  veû  les  services  qu'il  luy 
avoit  faits  et  ceux  qu'il  estoit  encore  capable  de 
faire;  que  chacun  sçavoit  la  mauvaise  intelligence- 
qui  estoit  entre  M.  le  maréchal  d'Ancre  et  luy  ;  que 
cela  estoit  trouvé  extresmement  mauvais  ;  que,  pour 
luy,  si  cela  continuoit,  il  ne  pourroit  toujours  sup- 
porter cette  hayne,  et  que,  s'il  estoit  contraint  d'a- 


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D'AftNAULD   D'ANDÎLLY.  67 

bandonner  le  Maréchal,  il  ne  !a  vouloit  pas  assurer        Avrii  ie«. 

qu'il  se  passast  deux  jours  sans  qu'il  courust  fortune* 

La  Reyne  lui  répondit  qu'il  lui  faisoit  un  plaisir  ex- 

tresme  ;  que  cette  affaire  lui  donnoit  de  la  peine, 

mais  qu'elle  ne  savoit  comment  l'accommoder,  pour 

ce  qu'il  estoit  besoin  que  quelqu'un  s'entremist; 

qu'elle  le  prioit  de  le  faire  et  d'en  parler  comme  il 

faloit  au  maréchal  d'Ancre.  Sur  cela,  M.  de  Guise 

parla  à  luy  et  l'affaire  s'accommoda.  Depuis,  après 

les  festes  de  Pasques,  M.  de  Villeroy  estant  revenu 

de  ses  dévotions,  il  fut  encore  mieux  reçeu. 

7.     Querelle  de  M.  de  Bressieux*  contre  M»  de 
la  Valette  ^ 
M,  le  vicomte  de  Rabat  tue  en  duel  M.  de  Longnac. 
Conseil    tenu    chez    M.    le   président   Jeannin. 
M.  d'Herbaut  ^  dit  que  les  finances  estoyent  en  une 
entière  confusion  ;  qu'il  n'y  avoit  nul  moyen  qu'il  fist 
sa  charge,  si  on  ne  lui  bailloit  des  fons.  M.  le  prési- 
dent Jeannin  en  dit  de  mesme  et  conclud  que,  pour 
y  remédier^  il  faloit,  pour  cette  année,  recevoir  le 
droit  annuel.  Sur  cela,  MM.  de  Ma...  (Marillac), 
Do...  (Dollé)  et  Bu...  (BulHon)  ne  disent  mot.  Ce 
que  voyant  M.  Arnaud,  il  prend  la  parole  et  dit  qu'à 


*  Premier  écuyer  de  la  Reine-mère. 

>  Bernard  de  Nogaret  de  la  Valette,  second  fils  da  duc  d'Épemon, 
duc  de  la  Valette  puis  d'Épernon,  pair,  colonel  général  de  rinfanterie 
française,  gouverneur  de  Guyenne,  chevalier  de  la  Jarretière,  né 
en  1592,  mort  en  1661.  Il  épousa  Gabrielle  Angélique,  légitimée  de 
France,  fille  de  Henri  IV  et  de  la  marquise  de  VerneuiL 

3  Raimond  Phélipeaux,  seigneur  d'Herbaut,  né  en  1560,  trésorier  de 
l'Épargne  en  1599,  secrétaire.  d'État  en  1621,  mort  en  1629. 


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68  JOURNAL   INÉDIT 

Avril  1618.  la  vérité  il  y  avoit  une  grande  confusion  aux  affaires, 
mais  qu'elles  n'estoyent  point  en  si  mauvais  estât 
qu'il  n'y  eust  moyen  d'y  pourvoir  ;  et  ensuite  leur 
montra  clairement  qu'ils  n'avoyent  besoin  que  de 
trouver  100,000  escus  comptant,  et  que,  moyennant 
cela,  tout  iroit  bien;  qu'on  les  pouvoit  prendre  à  la 
Bastille  ;  que,  pour  les  trouver  autrement,  ils  avoyent 
les  deux  derniers  quartiers  des  pensions  de  la  reyne 
Marguerite,  montant  à  250,000  livres;  qu'il  n'estoit 
plus  besoin  que  de  50,000  livres  et  10,000  escus 
pour  les  intérests  d'un  an;  que  l'on  luy  donnast 
les  quittances  de  l'Espargne  pour  les  dits  330,000 
livres  sur  de  bonnes  receptes  générales  et  qu'il  s'as- 
suroit  de  trouver  l'argent;  que  si  la  Reyne,  pour 
des  considérations  d' Estât  et  de  peur  de  mécontenter 
les  officiers,  vouloit,  contre  la  parole  qu'elle  avoit 
si  solennellement  donnée,  remettre  la  paulette  et 
apporter  un  tel  préjudice  à  l'Estat,  il  faloit  obéir,  et- 
que  si,  sur  cela,  elle  lui  demandoit  son  avis,  il  le  luy 
diroit  fort  franchement;  mais  qu'il  ne  souffriroit  ja- 
mais qu'en  une  affaire  de  telle  conséquence,  et  qui 
importoit  tellement  au  royaume,  on  prist  le  prétexte 
de  la  nécessité  des  finances,  et  que,  s'ils  le  vouloyent 
faire,  il  iroit  trouver  la  Reyne  et  lui  feroit  entendre, 
en  présence  de  tous  les  Princes  et  des  Grans,  Testât 
des  affaires  et  lui  feroit  voir  comme  ils  ne  les  enten- 
dent point. 

9.  Messieurs  du  Parlement  furent  au  Louvre, 
ayant  esté  mandez  par  le  Roy.  Sa  Majesté  leur  dit 
quelques  mots  ;  et  puis  Monsieur  le  Chancelier  prit  la 


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d'arnauld  d'andilly.  69 

parole,  et  leur  dit  que  ils  n'avoyent  point  deû  s'as-  Avril  i««. 
sembler  pour  ce  qui  concerne  les  affaires  de  l'Estat  ; 
qu'ils  estoient  seulement  ordonnez  pour  rendre  la 
justice  aux  sujets  du  Roy;  qu'il  avoit  choisy  et  esta- 
bly  ceux  de  son  Conseil,  pour  aviser  à  ce  qui  est  de 
la  conduite  des  affaires  du  royaume  ;  et  que  Sa  Ma- 
jesté leur  défendoit  de  se  plus  assembler  sur  ce  sujet. 
Et  à  ce  propos,  leur  allégua  plusieurs  exemples,  et 
entre  autres  du  président  de  la  Vacquerie,  flamand, 
qui  ne  voulut  recevoir  les  pleintes  du  duc  d'Orléans 
(qui  fut  depuis  Louis  XII).  On  dit  que  Monsieur  le 
Premier  Président  répondit  à  Monsieur  le  Chance- 
lier, que  s'ils  estoyent  en  lieu  où  l'on  pust  répliquer, 
il  y  auroit  bien  moyen  de  répondre  à  ses  exemples. 
On  dit  aussi  que  Monsieur  le  Chancelier  ayant  dit  à 
Messieurs  du  Parlement,  que  plusieurs  de  leur  com- 
pagnie n'avoyent  pas  esté  d'avis  del'arrest,  et  en 
cela,  avoyent  témoigné  plus  de  prudence,  Monsieur 
le  Premier  Président  répondit  :  Monsieur,  ce  que  la 
Cour  ordonne,  c'est  toute  la  Cour,  car  elle  ne  se.  di- 
vise point. 

L'après  disnée,  ils  s'assemblèrent  au  Parlement. 
Résolu  que  l'on  députeroit  pour  faire  remonstrances 
au  Roy,  afin  de  luy  faire  connoistre  qu'il  y  avoit  plu- 
sieurs réponces  aux  argumens  faits  par  Monsieur  le 
Chancelier,  et  luy  faire  entendre  de  quelle  sorte  le 
Parlement  s'est  toujours  comporté  en  pareilles  occu- 
rences  d'affaires  que  celles  qui  sont  aujourd'huy  *. 

*  roy.  Richelieu,  t.  xxi  bis,  p.  246  ;  Fontenay-Mareuil,  t.  l,  p.  271- 


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70  JOURNAL  INÉDIT 

Avril  1613.  \0.     Le  Roy  allant  donner  de  l'eau  béniste  à  la 

reyne  Marguerite,  et  sa  queue  devant  (selon  la  cous- 
tume)  estre  portée  par  trois  Grans,  et  n'y  ayant  que 
Monsieur  le  Prince  et  Monsieur  le  Comte',  des  princes 
du  sang,  il  se  meut  contention  entre  M.  de  Guise  et 
M,  de  Longueville.  La  Reyne  jugea  en  faveur  de 
M,  de  Guise.  Sur  cela,  M.  de  Longueville  s'en  re- 
tourna à  Amiens,  et  Monsieur  le  Prince  et  Monsieur 
le  Comte  (qui  veut  marier  Mademoiselle  sa  sœur^ 
à  M.  de  Longueville)  n'y  voulurent  estre.  Telle- 
ment que  MM.  de  Guise,  du  Mayne  et  d'Elbeuf 
portèrent  la  queue. 

On  tient  que  pendant  le  séjour  de  M.  de  Longue- 
ville  à  Paris,  on  voulut  envoyer  500  Suisses  à  Amiens; 
que  M.  de  Longueville,  en  ayant  eu  avis,  vint  prendre 
congé  de  la  Reine,  disant  qu'il  avoit  esté  averty  que 
Sa  Majesté  envoyoit  des  Suisses  à  Amiens  ;  qu'il  crai- 
gnoit  que  le  peuple,  qui  estoit  assez  fâcheux,  ne  les 

276;  Merc,  fr,^  t.  iv,  p.  37-42,  où  se  trouve  le  sommaire  des  discour» 
prononcés  en  cette  occasion, 

*  Louis  de  Bourbon ,  comte  de  Soissons,  fils  de  Charles  de  Bourbcm, 
mort  en  1612  et  d*Anne  de  Montafié,  né  en  1604,  grand  maître  de 
France  et  gouverneur  du  Dauphiné  en  1612 ,  lieutenant-général  dans 
Paris  et  chef  du  Conseil  pendant  l'absence  de  Roi  en  1626,  gouverneur 
de  Champagne  en  1631.  S'étant  révolté  contre  le  Roi,  il  fut  tué  à  la 
bataille  de  la  Marfée  qu'il  gagna  en  1641  sur  le  maréchal  de  ChatiUon. 
Le  comte  de  Soissons,  à  qui  Arnauld  d'Andilly  donne  une  volonté, 
n'avait  alors  qu'onze  ans. 

2  Louise  de  Bourbon,  sœur  du  comte  de  Soissons,  née  en  1603, 
morte  en  1637,  devint  en  effet  la  première  femme  du  duc  de  Longue- 
ville  dont  elle  eut  la  duchesse  de  Nemours,  l'auteur  des  Mémoires, 

3  Charles  de  Lorraine,  IP  du  nom,  duc  d'Elbeuf,  pair,  gouverneur 
de  Picardie,  blessé  au  siège  de  Saint-Jean-d'Angely  en  1621,  retiré  en 
Flaodres  de  1631  à  1643,  mort  en  1657. 


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D'AnNAUl.0  p'ABIDILtY.  71 

voulust  recevoir.  Joint  qu'en  tellaa  oocamons,  t'ei^  ^y^  *«*•• 
toit  aux  Gouverneurs  de  province  à  y  donner  ordro. 
C'est  pourquoy  il  la  supplioit  de  trouver  bon  qu'il  y 
allast,  Sur  la  résistance  apportée  p^r  la  Reyne,  pa* 
rôles,...  Service  du  Roy,.,.  Maréchal  d' Ancre.. ••• 
Traitteroit  en  vallet. 

26.  M,  de  Candale*  fait  le  arment  de  premier 
gentilhomme  de  la  Chambre. 

Logement  de  quelques  Suisses  de  la  reyne  Mar- 
guerite. Sur  quoy  on  fit  courir  le  bruit  que  la  Reynf 
vouloit  mettre  de»  Suisses  dans  la  ville  çt  d^iarmer 
le  peuple. 

On  disoit  que  Monsieur  le  Prince  vouloit  répudier 
Madame  sa  femme  ^  Elle  le  va  trouver  Iq  (SQir>  comme. 
il  estoit  couché. 

30.  Monsieur  le  Prince  voit  la  Reyne  en  présence 
de  M°**  la  comtesse  de  Soissons  qui  s'en  est  rendue 
la  médiatrice.  Luy  dit  :  que  quelques  mauvais  rap- 
ports qu'on  luy  eust  faits  de  luy,  il  n'avoit  jamais  eu 
autre  intention  que  de  servir  le  Roy  et  elle  ;  qu'il  ne 
mettoit  point  de  différence  entre  les  personnes  de 
Leurs  Majestez,  etc,  ;  que  quant  à  ce  qu'on  estoit  en- 
tré en  ombrage  de  ce  qu'il  se  mettoit  bien  avecMea^ 
sieurs  du  Parlement,  c' estoit  à  tort,  parce  qu'en  cela, 
il  n'avoit  esté  porté  d'autrç  désir  qu§  do  ce  qu'il  ^ 

*  Henry  de  Nogaret  de  la  Valette,  duc  de  Candale,  premier  gen- 
tilhomme de  la  Chambre,  gouTra-neur  d'Agenaip  et  de  Sfiiiit»ng9,  ctUf 
et  pair  en  1631,  se  signala  dans  les  guerres  de  Hollande,  d'ItfiUe,  fu^ 
généralissime  des  armées  de  Venise  et  mourut  en  1639. 

a  Charlotte  Marguerite  de  Montmorencii  fiUe  Au  GoooâtulWté 


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72  JOURNAL  INÉDIT 

ATiitwii.  timoit  que  cette  compagnie  fust  fort  affectionnée  au 
service  du  Roy;  que  pour  le  regard  du  Conseil,  il 
n*y  venoit  point  à  cause  de  l'extrême  confusion  qui  y 
estoit,  et  qu'il  supplioit  Sa  Majesté  de  le  dispenser 
d'y  aller  jusqu'à  ce  qu'on  y  eust  mis  un  autre 
ordre,  etc. 

On  dit  qu'il  insista  sur  deux  points,  l'un  de  réfor- 
mer le  Conseil,  en  telle  sorte  qu'il  n'y  entrast  que 
fort  peu  de  personnes  (qui  sétoit  rejester  sur  Leurs 
Majestez  la  hayne  de  ceux  qu'on  mécontenteroit) , 
et  l'autre  de  donner  contentement  à  Messieurs  du 
Parlement  sqr  les  choses  qu'ils  demandent  (qui  se- 
roit  s'acquérir  une  entière  créance  parmy  eux,  et  se 
faire  reconnoistre  tout  puissant.) 

La  Reyne  luy  répondit  :  qu'elle  l'avoit  toujours 
aymé,  et  faisoit  cas  de  luy  selon  que  son  rang  le  mé- 
ritoit;  qu'elle  désiroit  qu'il  eust  part  dans  les  affaires, 
et  que  rien  ne  se  fist  sans  son  avis  ;  que  quant  à  ce 
qui  estoit  du  Conseil,  elle  estoit  bien  aise  qu'il  y 
vînt;  que  néantmoins,  puisqu'il  estoit  d'avis  de  le  ré- 
gler, l'on  rapporteroit  cependant  ce  qui  s'y  estoit 
résolu ,  et  qu'au  plustost  on  travailleroit  à  régler  le- 
dit Conseil.  Et  sur  cela,  ayant  appelle  MM.  le  Chan- 
celier, de  Villeroy  et  Jeannin,  qui  estoyent  un  peu  à 
l'écart,  leur  dit  comme  Monsieur  le  Prince  estimoit 
qu'il  estoit  besoin  de  régler  le  Conseil,  et  qu'elle  le 
trouvoit  bon,  et  qu'il  y  faloit  travailler.  Ils  répon- 
dirent tous  qu'ouy,  et  chacun  d'eux  salua  Monsieur 
le  Prince.  M.  de  Bullion  se  voulant  aussi  avancer, 
il  lui  tourna  le  dos.  Après,  M"'*  la  maréchale  d'Ancre 


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D*ARNAULD    dUnDÎLLV.  78 

vint,  et  rendit  toutes  sortes  de  témoignages  à  Mon-       A^m  un. 
sieur  le  Prince  du  contentement  qu'elle  avoit  de  cette 
réconciliation,  et  Comme  elle  y  avoit  apporté  tout  ce 
qui  luy  avoit  esté  possible  *• 

9.     Combat  de  M.  de  Losière  *,  fils  de  M.  de  Thé-         n»y. 
mines  %  contre  M.  de  Madaillan,  tué.  —  Querelle 
venue  à  cause  du  vicomte  de  Parât, 

11.  M.  le  président  Nicolay,  pour  la  Chambre 
des  Comptes,  et  M.  le  président  Chevalier  pour  la 
Cour  des  Aydes,  furent  haranguer  au  Louvre,  pour 
supplier  le  Roy  de  rétablir  le  droit  annuel.  Au  mi- 
lieu de  la  harangue  du  président  Chevalier,  deux  so- 
lives du  plancher  de  dessous  croulèrent,  et  une  poutre 
s'ébranla.  Le  Parlement  ne  voulut  y  venir. 

12.  On  tient  conseil  au  Louvre,  où  estoyent 
MM.  de  Guise,  officiers  de  la  couronne,  etc.  Mon- 
sieur le  Prince,  mandé  par  deux  fois,  ne  s'y  voulut 
trouver.  M.  le  président  Jeannin  fit  la  proposition,  dit 
que  le  Roy,  pour  plusieurs  bonnes  raisons,  avoit 
accordé  à  Messieurs  des  Estats  d'abolir  la  paulette 
et  la  vénalité  ;  qu'il  en  avoit  esté  fait  des  dépesches 
dans  les  provinces,  mais  que  depuis  on  avoit  eu  avis 
de  tous  endroits  de  tant  de  mécontentemens  des  offi- 


*  Foff,  Pontchartrain,  t.  xvii,  p.  81. 

3  Charles,  seigneur  de  Lauzières,  second  fils  du  maréchal,  tué  du 
vivant  de  son  père  au  siège  de  Montheur  en  1621. 

3  Pons  de  Lauzières  de  Thémines  de  Cardaillac,  marquis  de  Thé- 
mines,  sénéchal  et  gouverneur  de  Quercy,  nommé  maréchal  de  France 
en  1616  pour  avoir  arrêté  Monsieur  le  Prince,  gouverneur  de  Bretagne 
en  1626,  mort  en  1627« 


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74  JQUafVAI.  INÉDIT 

myiw.  ciersquî  ont  toujours  fidèlement  servy  le  Roy,  quMl 
senibloit  à  propos  de  leur  donner  ce  contentement, 
que  de  surseoir  pour  les  trois  années  qui  restoyent  du 
bail,  l'exécution  de  la  sjippression  de  la  paulette. 
Sur  cela,  le  Reyne  prit  la  parole,  et  dit,  qu'à  la  vé- 
rité, il  y  avoit  eu  tant  de  pleinte»  d'officiers  que  elle 
désiroit  leur  donner  quelque  contentement  pour  les 
trois  ans  qui  restoyent  à  expirer  du  bail.  Monsieur  le 
Chancelier  demanda  à  la  Reyne,  s'il  Juy  plaisoit  pas 
qu'il  en  demandast  les  avis  de  quelques-uns  de  la 
compagnie?  Elle  ditqu'ouy,  M.  le  président  Jeannin 
opina  le  premier,  et  dit  qu'il  estoit  d'avis  de  dresser 
un  édit  que  Ton  feroit  vérifier  au  Parlement,  por- 
tant la  révocation  de  la  paulette  et  de  la  vénalité, 
mais  que  néantmoins  il  y  auroit  surcéance  pour 
trois  ans  de  l'exécution,  M.  de  Chasteauneuf  *  dit 
qu'il  estoit  d'avis  que  cela  se  fist  seulement  par  un 
arrest  du  Conseil,  afin  de  ne  s'engager  à  aucune  vé- 
rification, comme  il  n'y  en  avoit  point  jusques  icy, 
M.  de  Tbou,  idem.  Après  cela,  Monsieur  le  Chance- 
lier demanda  à  la  Reyne,  s'il  hii  plaisioit  qu'on  en 
opinast  davantage?  Elle  répondit,  qu'it  n'en  estoit 
point  besoin,  pour  ce  que  c' estoit  une  chose  qu'elle 
avoit  déjà:  avisée.  M*  le  Chancelier  fut  d'avis  d' ar- 
rest, et  non  pas  d'édit.  Ainsi  il  passa  là. 


^  Guillaume  de  rAubespipe,  biiron  de  Cb&teauneuf,  conseiller  au 
Parlement  en  1568,  maître  des  requêtes  en  1572,  ambassadeur  en  An- 
gleterre, conseiller  d'Etat,  chancelier  de  Louise  de  Lorraine,  reine  de 
France,  et  chancelier  des  Ordres  en  1606,  mor^  en  1639,  Son  fils,  le 
marquis  de  Châteauueuf,  devint  garde  des  sccavix. 


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^  D*ARNAULD   O^ANDIiLT.  75 

20,  Monsieur  le  Prince  part  le  soir,  pour  aller       ii«y««. 
à  Valéry.  Il  avoit  parlé  quatre  heures  auparavant 

à  Madame  sa  femmç  qui  le  suit  le  lendemain  *. 

On  fît  courir  le  bruit  que  la  Reyne  n'avoit  pas 
voulu  qu'il  se  trouvast  aux  remonstrances  que  devoit 
faire  le  Parlement.  Mais  le  vendredy  ensuivant. 
Sa  Majesté  dit  à  Messieurs  du  Parlement,  lors  de 
leurs  remonstrances,  que  c'estoit  très-faux,  et  que 
tant  s'en  faut,  elle  luy  avoit  envoyé  dire  par  un  gen- 
tilhomme, qu'elle  le  prioit  de  s'y  trouver,  et  qu^ 
c'estoit  chose  qu'elle  desiroit  extrêmement;  et  que 
Monsieur  le  Prince',  au  lieu  de  cela,  s'en  estoit  allé, 
sans  prendre  congé,  ni  du  Roy,  ni  d'elle. 

On  fit  aussi  courir  le  bruit  que  Monsieur  le  Prince 
s'en  estoit  allé  pour  ce  qu'on  se  vouloit  saisir  de  luy. 

21,  M.  de  Loménie  père^  leut  ^  Conseil  les 
réglemens  faits  sur  le  sujet  de  l'ordre  et  des  affaires 
qui  se  doivent  traitter  aux  Conseils  du  Roy. 

22,  Messieurs  du  Parlement  députent  cinq  prési- 
dens  de  la  Grand  Chambre  (MM.  de  Blancménil  •* 
et  Séguier  n'y  estoyent)  et  quatre  conseillers  de 
chaque  chambre  pour  présenter  leurs  remontrances 
au  Roy.  Monsieur  le  Premier  Président  porta  la  pa- 
role et  dit  en  substance  les  raisons  qui  les  avoyent 


*  Foy.  Poqtchartrain,  t  vfih  P«  81. 

2  Antoine  de  Loménie,  c(Hnte  de  Qrieone,  seoréuire  d'Etni  soua 
Henri  IV  et  Louis  XHI,  à  qui  Ton  doit  la  précieuse  poUection  dça 
manuscrits  de  BriennCy  père  de  Fauteur  des  fiémoires, 

5  Nicolas  Potier  de  Blancmesnil,  né  en  1541,  conseiller  aw  Parlement 
en  1564,  maître  des  requêtes  en  1507,  président  à  mortier,  ep  1579, 
chancelier  de  la  Ueine-raère,  mort  en  K>35. 


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76  JOURNAL   INÉDIT  • 

May  1618.  meus  à  donner  Tarrest  du  28  mars  portant  que  les 
Princes,  Pairs ,  et  autres  Officiers  de  la  Couronne 
seroyent  assemblez ,  et  depuis ,  à  dresser  leurs  re- 
monstrances  sur  ce  que  l'on  n'avoit  pas  trouvé  bon 
leur  arrest  ;  qu'il  y  avoit  plusieurs  exemples  de  re- 
monstrances  faites  au  Roy  sur  les  affaires  d' Estât,  en 
diverses  occasions.  Protesta  toute  sorte  de  service 
au  Roy*. 

Après,  le  jeune  M,  de  Loménie  ^  leut  les  remons- 
trances  qu'ils  présentèrent.  Ensuite,  la  Heyne  les  fit 
retirer,  et  dît  qu'elle  aviseroit  avec  son  Conseil  ce 
qu'elle  avoit  à  leur  répondre.  Lorsqu'ils  furent  sor- 
tys,  la  Reyne  se  mit  à  la  fenestre  avec  Monsieur  le 
Chancelier,  M.  le  président  Jeannîn 

Puis,  on  les  fit  rentrer,  et  lors  le  Roy  leur  dit.... 

Et  la  Reyne,  ensuite ,  prenant  la  parole,  leur  dit  : 
qu'elle  estoit  bien  malheureuse  de  voir  qu'au  lieu  de 
recevoir  des  remercîmens  et  de  la  reconnoissance 
de  tant  de  peines  et  de  travaux  qu'elle  avoit  souffert 


*  Voy,  Pontchartraîn,  t.  xvii,  p.  81. 

2  Henri  Auguste  de  Loménie,  comte  de  Brienne,  né  en  1504,  mort 
en  1661,  ministre  et  premier  secrétaire  d*Etat  sous  Louis  XHI  et 
Louis  XIV,  auteur  des  mémoire»  qui  portent  son  nom.  «  Le  Roy  mo 
commanda  d*en  faire  lecture  (  des  remontrances  )  à  la  place  de  mon 
père  qui  ne  le  pouvoit  que  très-difficilement  à  cause  de  la  foiblesse 
de  sa  vue  :  ce  qui  donna  occasion  à  prédire  que  j'aurois  bientôt  la 
survivance  de  sa  charge,  »  (Mémoires  du  comte  de  Brienne,  édition 
Petitot,  2*  série,  t.  xxxv,  p.  300.) —  Foy,  dans  les  mémoires  de  M.  Mole, 
p.  28  et  suiv.,  le  texte  officiel  des  remontrances  du  Parlement.  C'est  un 
document  très-important  pour  Hiistoire  du  temps.  Ces  remontrances  se 
trouvent  aussi  dans  le  Merc,  fr.^  t.  iv,  p.  51  et  suiv.  avec  le  compte 
rendu  de  cette  séance  mémorable. 


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d'arnaold  d'andilly.  77 

pendant  sa  Régence,  pour  conserver  la  paix  et  la        Mnyi6«. 
tranquillité  de  T  Estât,  elle  ne  recevoit  d'eux  que  de 
l'ingratitude  ;  qu'ils  entreprenoyent  directement  sur 
l'autorité  du  Roy,  mais  qu'elle  connaissoit  par  noms, 
par  surnoms ,  et  connoissoit  les  maisons  de  cinq  ou 
six  de  ceux  qui  avoyent  principalement  fomenté  ce 
dessein,  et  que  le  Royales  sauroit  bien  faire  châtier. 
Et  puis  dit  :  mais  je  voy  bien  que  je  m'emporte  et  que 
je  me  pourrois  laisser  aller  à  la  colère  ;  c'est  pour- 
quoy  Monsieur  le  Chancelier  vous  dira  le  reste. 
Après,  Monsieur  le  Chancelier  prit  la  parole ,  et  ré- 
pondit à  tous  les  exemples  qu'ils  avoyent  alléguez , 
et  soustint  qu'il  n'y  en  avoit  pas  un  formel  pour  té- 
moigner une  entreprise  semblable  à  celle-cy  ;  qu'à  la 
vérité  les  Roys  s'estoyent  souvent  utilement  servis 
des  avis  du  Parlement ,  en  plusieurs  affaires  impor- 
tantes, mais  que  jamais  on  n'avoit  souffert  que  le 
Parlement  se  meslast  de  conseiller  le  Roy  sans  que 
S.  M.  le  luy  eust  commandé  ;  que  quant  aux  évoca- 
tions, il  n'en  avoit  point  scellé  de  plein  mouvement  ; 
que  pour  les  autres ,  estoyent  eux-mesmes  qui  en 
estoyent  cause,  à  cause  des  officiers  qu'ils  avoyent 
reçeus  outre  le  degré  de  l'ordonnance,  et  des  faveurs 
et  parentez  qui  estoyent  entre  eux  ;  que  comme  ils 
n' avoyent  que  voir  sur  les  chambres  des  Comptes , 
cours  des  Aydes,  etc. ,  pour  ce  que  leurs  jurisdictions^ 
estoyent  toutes  séparées ,  de  mesme ,  ils  n' avoyent 
que  voir  sur  le  Conseil  du  Roy  ;  que,  quant  à  plusieurs 
désordres  sur  lesquels  ils  avoyent  fait  des  remons- 
trances,  s'ils  eussent  eu  la  patience  d'attendre  les 


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7S  lôûRNAt  îniSdit 

Biâyiêii.  répoftces  deô  corps  des  Estats,  ils  eussent  veu  que 
Ton  eût  satisfait  à  tout  cela,  et  eussent  aussi  veu  qu'il 
y  avoit  plusieurs  articles  sur  les  désordres  qui  es- 
toyent  en  leur  compagnie. 

Après,  M.  le  président  Jeannin  dit  :  que  puisqu'ils 
avoyent  taxé  le  maniement  des  Finances,  la  charge 
qu'il  avoit  l'obligeoit  de  répondre  pour  luy  et  pour 
ses  compagnons;  que  les  finances  n'avoient  jamais 
esté  plus  sincèrement  ni  plus  innocemment  admi- 
nistrées ;  que  Messieurs  du  Parlement  ne  devoyent 
point  taxer  ainsi  tout  le  monde  en  général ,  mais 
qu'il  faloit  accuser  en  particulier  ceux  qu'ils  esti- 
raoyent  estre  coupables,  et  qu'il  répondoit  pour  luy 
et  pour  ses  compagnons  qu'ils  ne  demanderoyent 
jamais  ni  gi'ace,  ni  pardon,  ni  abolition  ;  que  quant 
aux  dépences,  tant  s'en  faut  qu'elles  fussent  moin- 
dres, depuis  la  mort  du  feu  Roy  ;  qu'au  contraire, 
elles  estoyent  de  beaucoup  augmentées  ;  que  quant 
aux  impositions,  tant  s'en  faut  qu'on  les  eut  augmen- 
tées ;  qu'au  contraire,  on  ctvoit  remis  au  peuple.  Cha- 
cun an,  sur  diverses  fermes,  plus  de  2,000,000  de 
livres  ;  que  quant  à  Targent  de  la  Bastille ,  on  n'y 
avoit  touché  qu'en  ces  derniers  mouvemens- 

Après,  M.  de  Guise  dit  qu'il  offroit  au  Roy  son 
épée  et  sa  vie  pour  maintenir  son  autorité  envers 
tous  et  contre  tous» 

M.  de  Rheims*,  M.  de  Vendosme,  M.  de  Ven- 

^  Louis  de  Lorraine,  cardinal  de  Gnise,  archevêque- duc  de  Reims, 
pair*de  France,  né  en  1585,  archevêque  de  Reims  en  1605,  cardinal 
en  1615,  suivit  rarmée  de  Poitou  en  1621,  se  signala  à  l'attaque  du 


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D'ARNAtlLD    6'AMbîtLY.  7Ô 

tfldour  et  M.  de  Montmorency*  parlèrent  aussi.         iiayi«i5. 

M.  d^Espernon  dit  qu'autrefois  le  Parlement  avoil 
esté  dit  le  Parlement  des  Pairs,  lorsque  le  Roy,  as- 
sisté des  Pairs  de  France,  reftdoit  luy-mesme  la  jus- 
tice ;  que  depuis  que  l'on  eut  rendu  le  Parlement 
sédentaire,  il  retint  bien  toujours  le  nom  de  Parle- 
ment des  Pairs,  mais  que,  néantmoins,  il  n'avoit 
plus  l'autorité  de  convoquer  ni  d'assembler  les  Pairs, 
lesquels  n'estoyent  obligés  d'y  allôr ,  que  quand  le 
Roy  le  leur  commandoit.  Ensuite,  ayant  esté  dit 
quelques  autres  choses,  M.  d'Espernon  dit  encore  : 
Messieurs,  vous  parlez  de  réformation,  mais  si  on 
en  vient  à  réformer,  prenez  garde  que  quelques-uns 
de  votre  compagnie  n'y  aient  part. 

M.  de  Nevers,  qui  y  estoit^  ne  dit  mot. 

Après,  la  Reyne  parla  encore^  en  colère,  et  par- 
ticulièrement sur  les  libelles  diffamatoires  qui  se  fe* 
soyent  tous  les  jours,  à  quoy  il»  ne  donnoyent  aucun 
ordre  ;  et  qu'encore  le  jour  de  devant,  on  luy  en 
avoit  apporté  un  intitulé  Cassandre.  Elle  fit  lire  deux 
feuillets  dudit  livre  à  M.  de  Pisieux,  et  puis  on  le 
bailla  à  Monsieur  le  Procureur  Général,  pour  en  faire 
faire  justice. — M.  le  maréchal  d'Ancre  parla  sur  le 
sujet  de  ces  libelles  diffamatoires  ^é 


faubourg  de  SiiinWeMhd*Angely,  mort  en  1631*  U  éuàt  fU$  d*Henrt  de 
Lorraine,  duc  de  Guiae,  tué  à  Dlois.  {Foy.  P.  Aoselme,  t.  ii,  p^  8a.) 

*  Henry,  lU  du  nom,  duc  de  Montmorency  et  de  Oamville,  premier 
baron,  pair,  amiral  et  maréchal  de  France,  suraoouné  la  Gloire  Ue$ 
braves^  né  en  1505,  filleul  de  Htori  IV,  eut  la  tête  tranchée  à  Toulouse 
le  30  octobre  1632.  {Voy,  P.  Anselme,  t.  ii,  p.  60Ô.) 

>  Voy.  Richelieu,  Petitot,  2*  sériei  t.  xxi  bis,  p.  247  {  Fontenay-Ma- 


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86  JOURNAL   INJÎDIT 

May  1615.  23.     Messieurs  du  Parlement  assemblèrent  les 

Chambres  le  matin.  Monsieur  le  Président  rapporta 
tout  ce  qui  s'estoit  passé.  Ils  ordonnèrent  que  le  tout 
seroit  enregistré,  et  que  l'on  enregistreroit  aussi 
comme  M.  le  maréchal  d'Ancre  estoit  assis  et  couvert 
derrière  la  Reyne. 

L'après-disnée,  après  que  l'on  eut  leû  la  semaine, 
Monsieur  le  Chancelier  dit  :  que  chacun  savoit  ce  qui 
s'estoit  passé  le  jour  précédent,  et  que  le  Roy  vou- 
loit  qu'on  opinast  sur  cette  affaire.  Et  puis  dit  à  M.  le 
président  Jeannin  qu'il  opinast.  M.  le  président 
Jeannin  répliqua  qu'il  ne  pouvoit  opiner,  si,  aupa- 
vant,  on  ne  proposoit  ce  sur  quoy  il  faloit  opiner.  Mon- 
sieur le  Chancelier  répondit  que  chacun  savoit  comme 
le  tout  s'estoit  passé,  et  qu'il  pouvoit  opiner  sur  cela. 
M.  le  président  Jeannin  s'opiniâtra  et  ainsi  n'opina 
point  alors.  Monsieur  le  Chancelier,  qui  avoit  aupa- 
ravant fait  appeller  MM.  de  Vie  *,  de  Commartin  ^ , 
Jambeville,  de  Refuge,  et  de  Boissise',  demanda 

reuil,  id.,  !'•  série,  t.  l,  p.  276;  Merc,  fr,^  t.  iv,  p.  73-80.  Le  récit 
du  Mercure  peut  servir  à  contrôler  l'exactitude  de  celui  d'Amauld 
d'Andilly. 

*  Mery  de  Vie,  chevalier,  seigneur  d'Ermenonville,  maître  des  re- 
quêtes en  1581,  président  au  Parlement  de  Toulouse  et  conseiller 
d'Etat  en  1507,  surintendant  de  la  justice  en  Guyenne,  ambassadeur 
en  Suisse,  garde  des  sceaux  en  1621,  mort  en  1622.  {Voy,  P.  Anselme, 
t  VI,  p.  539.) 

s  Louis  le  Fèvre,  chevalier,  seigneur  de  GaumarUn,  né  en  1552, 
conseiller  au  Parlement  en  1579,  maître  des  requêtes  en  1585,  prési- 
dent au  Grand-conseil  en  1587,  intendant  de  justice  en  Poitou  en  1588, 
intendant  de  Picardie  en  1590,  conseiller  d'Etat  en  1594,  ambassadeur 
en  Suisse  en  1605,  garde  des  sceaux  en  1622,  mort  en  1623.  (roy.  p. 
Anselme,  t.  vi,  p.  562.) 

>  Tous  les  trois  conseillers  d'Etat. 


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d'arnauld  d'andilly.  81 

Tavis  à  MM.  de  Commartin  et  de  Vie,  puis  aux  iu>itti. 
autres,  et  mesme  à  M.  le  président  Jeannin*  Tous 
furent  d^avis  de  casser  Tarrest  du  Parlement,  et  or- 
donner qu'il  seroit  osté  des  registres  et  leurs  remons- 
trances  aussi.  On  ne  demanda  point  Tavis  de  MM.  de 
Guise,  de  Yendosme ,  et  autres  grans  à  cause  de  la 
dispute  de  leurs  rangs.  Mais  la  Reyne  dit  tout  haut  : 
s'il  y  a  quelqu'un  d'autre  avis  et  qui  ayt  quelque 
chose  à  dire,  qu'il  le  die. 

L'arrest  fut  depuis  dressé  par  M.  le  président 
Jeannin,  et  corrigé  diverses  fois.  Il  y  avoit  mis  que 
tous  ceux  qui  avoyent  eu  l'administration  des  finances 
se  soumettoyent  à  toutes  sortes  de  peines ,  au  cas 
qu'ils  eussent  mal  versé.  Monsieur  le  Chancelier  fit 
oster  cette  clause*. 

Ensuite ,  la  Reyne  fit  commander  par  deux  fois 
à  Messieurs  les  gens  du  Roy  de  lire  l'arrest  du  Par- 
lement, et  leur  manda  pour  la  troisième  fois  qu'ils 
eussent  à  n'y  manquer,  sur  peine  d'encourir  l'indi- 
gnation du  Roy.  Messieurs  les  gens  du  Roy  viennent 
à  la  Grand  Chambre  apporter  l'arrest^. 


1".  Messieurs  du  Parlement  leur  dirent  qu'ils 
estoyent  assemblez  (sçavoir  la  chambre  de  l'Edit  et 
la  Tournelle)  sur  ce  sujet,  et  avoyent  résolu  de  dé- 
puter Monsieur  le  Premier  Président  et  quelques 


«  Voy.  Mém.  de  Matli.  Mole  le  texte  de  cet  arrêt  du  Conseil,  p.  53. 
Foy.  aussi  if ^c.  />•.,  t.  iv,  p.  80  et  suiv. 

*  Voy.  Richelieu,  Petitot,  2«  série,  t.  21  bis,  p.  249;  Foatenay*Ma- 
reuil,  id.,  l'*  série,  t.  l,  p.  279. 


Juin. 


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83  JôdâNAL  î^ÉMf 

autres  vers  Leurs  Majestèfc  ^  poui*  leur  faire  toutes 
scNTteB  do  sdttmisriofliS  et  de  protestation^  de  service 
et  d'obéisâÂtlce ,  et  leur  témoigner  comme  Ils  n'a- 
voyMt  Bdtinda  par  un  seul  mot  de  leurs  remons- 
trânce^  dé  toucher  à  ce  qui  les  concernoit.  Mais 
qu'ils  avoyent  seulement  voulu  parler  contre  les  dé- 
sordres ,  et  Contre  ceux  qui  en  estoyent  la  cause.  Et 
swr  odla,  prièrent  Messieurs  les  gens  du  ftoy  de  rem^ 
porter  Tarrest.  A.  quoy  ils  répondirent  que  c'estolt 
chose  qu'ils  ne  pouvoyent  faire,  ayant  commande- 
meut  exprès  du  ttoy  de  le  leur  bailler.  Voisin  *  prit 
Tarrestéans  te  lire. -^  La  Reyne  ayant  sçeu  que  Ton 
vottloit  députer  vers  elle  le  lendemain,  manda  à 
Monsieur  le  Premier  Président  qu'ils  n'y  vinssent 
point  s'ils  n'apportoyent  les  registres  où  estoyent 
l'arrest  et  les  remonstrances  afin  de  les  en  oster. 
On  dit  que  sur  cela,  Monsieur  le  Premier  Préelident 
etMesdeurs  les  autres  Présidons  de  la  Grand  Cham- 
bre, hormis  un,  et  quelques  conseillers  furent  d'avis 
de  se  conformer  aux  volontez  de  Leurs  Majestez,  mais 
que  le  président  le  Jay  et  ceux  de  son  avis  en  estant 
avertis,  dirent  que  ce  seroit  faire  faire  amende  hono- 
rable au  Parlement  et  soutinrent  que  cela  ne  se  pou- 
toit  résoudre  sans  assembler  les  Chambres  et  faire 
opiner  toui  le  monde*  Tellement  que  Messieurs  du 
Parlement  ne  furent  point  au  Louvre  le  lendemain^. 
Messieurs  les  maistres  des  Requestes  vont  trouver 


*  Greffier  d*attdiencè  du  Parlement. 

*  Merc»  fr.^  t.  iv,  p.  88-87. 


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d'ARNAULD    O^ANDlLLy.  83 

Monsieur  le  Chancelier  sur  le  sujet  du  règlement  du  J«tn  i«ii. 
Conseil.  M.  de  Beaumont  portoit  la  parole.  Monsieur 
le  Chancelier  se  fâcha ,  et  en  vinrent ,  de  part  et 
d'autre,  à  des  paroles  si  aigres  que  M.  de  Beaumont, 
transporté  de  colère,  dit  qu'il  ne  pouvoit  plus  parler, 
et  laissa  la  parole  à  M.  Masuyer  qui  recommença 
avec  encore  plus  d'aigreur.  Le  2  juin,  ils  furent  en- 
core le  matin  trente  ou  quarante ,  trouver  Monsieur 
le  Chancelier  qui  leur  répondit  qu'il  les  avoit  tou- 
jours estimez  et  affectionnez  ;  que  le  règlement  n'estoit 
point  encore  signé,  et  qu'il  ne  leur  seroit  fait  aucun 
tort.  Ainsi  ils  s'en  retournèrent ,  et  ayant  délibéré 
entr'eux,  trouvèrent  que  cette  réponce  n'estoit  assez 
précise,  et  retournèrent  encore  le  soir  avec  luy,  en 
intention  ,  au  cas  qu'il  ne  leur  rendist  réponce  as- 
seurée,  d'en  faire  parler  en  plein  Conseil  par  M.  Man- 
got  '.  Monsieur  le  Chancelier  leur  dit  qu'il  leur  don- 
noit  sa  parole  que  le  règlement  n'estoit  point  signé 
et  qu'il  n'y  seroit  rien  fait  à  leur  préjudice. 

Monsieur  le  Prince  arrive  à  Saint-Maur  où  six 
conseillers  furent  souper. 

2.  Monsieur  le  Prince  arrive  à  Paris  avec  quatre- 
vingts  chevaux  (on  dit  qu'il  avoit  quinze  gardes) ,  fut 
voir  le  président  le  Jay.  Rencontra  le  Roy  sur  le 
Pgnt-Neuf,  qui  lui  fit  assez  froide  mine.  Monsieur  le 
Prince  se  retira  sans  luy  dire  à  dieu.  Il  fut  voir 


*  Claude  Mangot,  conseiller  au  Parlement  en  1592,  maître  des  re- 
quêtes en  1600,  ambassadeur  en  Suisse,  premier  président  du  Parle- 
ment de  Bordeaux,  secrétaire  d'Etat  et  garde  des  sceaux  en  1616,  des- 
titué à  la  mort  du  maréchal  d'Ancre,  le  24  avril  1617. 


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84  JODRNAL   INÉDIT 

Juin  1615.        aussi puis  retourna  coucher  à  Saint-Maur.  Dit 

qu'il  avoit  eu  avis  qu'on  se  vouloit  saisir  de  luy. 
Batterie  à  la  rue  Saint- Martin  entre  les  habitans 
et  des  soldats  des  gardes. 

3.  Les  chambres  estant  assemblées,  M.  Servin 
requit  que  Tarrest  du  Conseil  fust  leu.  Voisin  le  leut. 
Messieurs  du  Parlement  le  font  relire  jusques  à  trois 
fois.  Après  on  vient  aux  opinions.  M.  le  président 
Séguier  dit  à  Monsieur  le  Premier  Président  qu'il  luy 
devoit  dire  qu'il  parlast  avec  plus  de  modération. 
M.  le  Grand  dit  que  ce  n'estoit  point  la  coustume 
d'interrompre  les  gens  de  bien  en  leurs  opinions. 
Sur  quoy  M.  le  président  Lescalopier,  ayant  pris  la 
parole  en  faveur  de  Monsieur  le  Premier  Président, 
et  M.  le  Grand  ayant  encore  répondu  avec  davan- 
tage de  violence,  M.  le  président  Lescalopier  dit  à 
Monsieur  le  Premier  Président  :  Monsieur,  faites  taire 
cet  homme  !  Sur  quoy  M.  le  Grand  répondit  :  Com- 
ment !  faites  taire  cet  homme  !  J'estois  conseiller  céans 
que  vous  n'estiez  encore  qu'un  petit  écolier,  et  vous 
n'estes  assis  plus  haut  que  moy  que  parce  que  vous 
avez  baillé  100,000  escus  de  vostre  charge.  Sur  ces 
contestations,  l'assemblée  se  rompit,  tellement  qu'il 
n'y  eut  que  six  qui  opinèrent,  les  quels  allèrent  tous  à 
supplier  Leurs  Majestez  de  casser  l'arrestdu  Conseil, 
et,  en  cas  de  refus,  de  les  aller  trouver  pour  re- 
mettre à  leurs  pieds  leurs  robbes  et  leurs  chaperons. 

4.  Les  chambres  sont  encore  assemblées,  et  dix 
seulement  ayant  opiné,  l'affaire  fut  remise  après  les 
festes  de  la  Pentecoste,  qui  estoit  le  dimanche  T. 


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d'arnacjld  d'andilly.  85 

Monsieur  le  Prince  traitte  avec  M.  le  prince  de        juiowi». 
Joinville  *  pour  le  prieuré  de  Saint-Martin,  au  lieu 
duquel  il  lui  baille  6,000  escus  comptant  et  l'abbaye 
de  Coulom,  qu'il  avoit  achetée  de  M.  de  Sully. 

M*  de  Nevers  obtient  lestres  pour  faire  assigner 
M.  de  Sully  touchant  les  terres  qu'il  avoit  achetées      • 
de  luy. 

On  dit  que  la  Reyne  envoya  à  M.  de  Rohan  la 
survivance  du  gouvernement  de  Poitou,  dont  M.  de 
Sully  fut  fort  mal  content.  M.  le  marquis  de  Rosny  ^ 
avoit  demandé  six  mois  à  M.  de  Rohan  pour  l'obte- 
nir de  luy. 

9.  La  Reyne  eut  plusieurs  paroles  avec  M""'  la 
comtesse  de  Soissons  touchant  le  voyage  auquel  Sa 
Majesté  dit  que  le  Roy  vouloit  que  M.  le  Comte  as- 
sistast.  Et  sur  ce  que  Madame  la  Comtesse  luy  dit 
qu'elle  n'y  pouvoit  aller  à  cause  qu'elle  estoit  incom- 
modée, la  Reyne  lui  dit  qu'elle  pouvoit  donc  de- 


*  Claude  de  Lorraine,  frère  puîné  du  duc  de  Guise,  connu  sous  le 
nom  de  duc  de  Chevreuse,  porta  d'abord  le  titre  de  prince  de  Joinville. 
n  naquit  en  1578,  se  signala  en  1596  au  siège  de  la  Fère,  et  en  1597  à 
celui  d'Amiens,  alla  guerroyer  en  Hongrie,  fut  créé  duc  de  Chevreuse 
et  pair  de  France  en  1612,  servit  en  1621  aux  sièges  de  Saint-Jean- 
d'Angely,  de  Montauban,  fut  grand  chambellan  et  grand  fauconnier, 
gouverneur  des  Marches,  de  l'Auvergne,  du  Bourbonnais  et  de  la  Picar- 
die, épousa,  comme  procureur  de  Charles  P',  la  princesse  Henriette, 
en  1625  et  la  conduisit  en  Angleterre,  fut  au  siège  de  la  Rochelle  en 
1628,  joua  un  certain  rôle  pendant  la  Fronde,  et  mourut  en  1657.  Il 
avait  épousé  en  1622  Marie  de  Rohan,  fille  du  duc  de  Montbazon,  veuve 
du  connétable  de  Luynes,  cette  célèbre  duchesse  de  Chevreuse  dont 
M.  Cousin  vient  de  retracer  la  vie  romanesque. 

2  Maximilien  de  Béthune,  II«  du  nom,  marquis  de  Rosny,  fils  du 
grand  Sully,  né  en  1588,  grand  maître  de  l'artillerie,  mort  en  1634. 


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86  jroURNAL   INÉDIT 

Juin  1615.       meurer,  mais  que  Monsieur  le  Comte  viendroit,  etc. 

13.  M.  deCanisy  baille  un  soufflet  au  sieur... 
et  met  la  main  à  Tespée  contre  luy  dans  les  Tail- 
leries, le  Roy  y  estant.  Sur  quoy  les  gardes  ayant 
crié  qu'on  allast  aux  portes,  cela  fit  appréhender 
qu'il  n'y  eust  quelque  entreprise  sur  la  personne  du 
Roy.  Le  dit  sieur  de  Canisy  fut  mis  à  la  Bastille. 

Monsieur  le  Prince  parla  à  M»"*  la  maréchale 
d'Ancre,  comme  elle  revenoit  de  Lésigny. 

21 .  On  descend  la  châsse  de  Sainte-Gçneviève  \ 

22.  Messieurs  du  Parlement  continuent  leur  as- 
semblée. Deux  opinions  courantes  ;  l'une  de  faire 
remonstrances  pour  faire  casser  l'arrest  du  Conseil. 

M.  de  Nevers  se  remet  bien  avec  la  Reyne,  et 
ensuite  va  vers  MM.  du  Mayne,  de  Buillon  et  de 
Longueville.  On  dit  qu'il  leur  donna  toutes  sortes  de 
bonnes  paroles,  leur  dit  que  Monsieur  le  Prince  es- 
toit  raccommodé,  que  Messieurs  du  Parlement  ne  se 
remuoyent  plus,  etc.,  et  qu'eux,  s'en  estant  fait  en- 
quérir à  Paris,  trouvèrent  que  tout  cela  n'estoit  vray^ 

M,  Broussel,  qui  fut  le  dernier  qui  opina,  dit  qu'il 
ne  se  souvenoit  bien  de  l'arrest  et  des  remonstrances. 
Voisin  est  mandé;  dit  qu'il  les  avoit  baillez  à  du 
Tillet'.  M.  du  Tillet  est  mandé  ;  dit  qu'il  estoit  vray 

*  u  h^  ch&sse  Sainte  GenevieXve  fut  descendue  le  21  dudit  mois  de 
juin,  et  pour  la  seicheresse,  et  pour  prier  Dieu  de  conduire  Leurs 
Majesté».  »  {Merc,  fr,^  t,  iv,  p.  116.)  La  Cour  alloit  partir  pour  Bor- 
deau)(,  k  ropc^ion  des  noi^riages  du  Roi  et  de  Madame. 

2  Voy.  Pontchartrain,  t.  xvii,  p.  83. 

3  Greffier  en  chef  du  Parlement  Voy,  Tallemant  des  Réaux,  Thisto- 
rie^tÇ  cle  M"  'du  Tillet,  et  le  commentaire  de  M.  Paulin  P^ris  qui  cite 


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que  Voisin  I^  lai  ^vpit  baillq?;  que,  ppiir  les  wpé-  #«rfii#M 
ditiops  ordinaire?,  il  les  |ai(3«)it  4  Voisin,  mw  qw 
celles  qqi  e§toyent  d'unç  telja  CQpséqiiiîOpe,  i|  l^i^ 
gardojt  dans  son  cabiijet,  et  que  c'estoit  lai  qui  «fr- 
toit  le  greffe.  Et  sur  cq  qu'on  luy  dit  que  Voisin  m 
les  luy  avoit  deu  bailler  isaps  ^vprtjr  I9  Çom,  il  ré^ 
pondit  que  Voisin  estoit  içon  clerp  et  qi»e,  p'il  les  juy 
eust  refusées ,  il  l'ewst  cba?»4.  ^  OrdQflP^  ^nwite 
que  le  tpqt  seroit  réintégré  d^ns  1^^  regjiitras. 

23.  Messienrg  du  Parlement  continuent  teuF  ^^ 
semblée,  Résolvent  de  faire  rernppstr^nç^S  aw  Bp^i 
pour  le  §uppljer  (Je  crqjre  que  l>rre5t  et  ]^^  l^emOflS^ 
trances  avpyent  esté  résolus  par  rqvia  wnïfPHP  d* 
tout  le  l^prlement,  et  de  croire  que^  qmï^â  }\  li*y 
plfiirpit  de  se  faire  enquérir  ou  ip'ipformgf  (Ju  gpn* 
tenu  en  leur§  renf)qnstrpnQes,  il  trPHVerpit  qu'il  n'y 
avQJt  rien  dedan§  qui  pe  fvist  très-véritAbIfu 

M,  le  président  Lesçalopier  eut  de  gpapd/?s  prises 
avec  M,  Gilpt*,  M,  Perrot  et  quelqueii  autrw  ÇQPWih 
lers^ 


h  généalogie  des  du  Tillct,  dressée  par  Victor  le  Gris.  «  Cette  famille 
de  grefifiers  m  pftef,  dit  M.  Paulin  f  ^Fjs,  |0Mj5^i|i  4'ijiije  çf^psi^^f^ 
égale  k  Topulence  qu'elle  finit  par  acquérir. 

i  Jacques  GiUot,  déjà  nommé,  doyen  de  la  cathédrale  de  Langres, 
chanoine  de  la  Sainte-Ch^pe;lI(B  ^t}  Pm^,  GpDsei||fp-tfili^G  fiu  fiirl^'PPnl 
de  Paris,  mort  en  1619.  Gijlot  est  auteur  <)*ijne  Relatipn  cje  cç  qui  se 
passa  au  Parlement  touchant  la  ségence  de  la  roine  Marie  de  Modicis, 
les  14  et  15  mai  1610.  Cet  opuscule  se  trouve  dans  la  collection  Mi- 
chaud  et  PoujouIa|,  1"  série^  tr  xi,  p.  1^15.  On  a^ibg^ç  §||§§j  j^  jSJljot 
une  part  dans  la  rédaction  de  la  satire  Ménipr^e,  {Voy,  la  Notice  ^\if 
Gillot,  en  tôte  de  la  Relation,  dans  rédjtiop  cijée.) 

«  Merc,  fr.^  t.  iv,  p.  112. 


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88  JOURNAL    INÉDIT 

jniniéis.  25.     Le  jeudy  de  devant,  jour  de  la  Feste-Dieu, 

M""'  de  Longueville  avoit  donné  Tordre  que  ses  tor- 
ches marchassent  à  la  procession  devant  celles  de 
M"*  la  douairière  de  Guise  *.  Ce  jour-là,  M.  de  Guise 
envoya  Monplaisir,  capitaine  de  ses  gardes,  pour 
faire  placer  les  torches  de  Madame  sa  mère,  et  avoit 
prié  M.  le  marquis  de  Nesle^  de  l'assister  avec 
soixante  ou  quatre-vingts  gentilshommes.  Le  curé 
avertit  le  Roy,  qui  envoya  un  nommé  La  Fosse, 
exempt,  sur  le  rapport  duquel  ils  se  résolurent  de  se 
retirer.  Mais  y  ayant  eu  contestation  à  qui  se  retire- 
roit  le  dernier,  sur  cette  dispute  M.  le  marquis  de 
Nesle  baille  de  l'épée  à  un  de  M"*  de  Longueville  ; 
sur  quoy  ayant  tous,  de  costé  et  d'autre,  mis  l'épée 
à  la  main,  ils  furent  séparez  par  des  soldats  des 
gardes  et  des  archers  du  Grand-Prévost. 

26.  Monsieur  le  Prince  part  de  Saint-Maurle 
vendredy  à  la  nuit,  monté  sur  un  petit  mullet  et  fai- 
sant semblant  de  s'aller  promener  dans  le  parc.  Sort 
par  la  porte  de  derrière  ;  va  sur  son  mullet  jusqu'à 
Louvres;  là  prend  la  poste  et  va  à  Creil. 

28.  M.  de  Nevers,  qui  estoit  allé  vers  MM.  du 
Mayne,  de  Longueville  et  de  Buillon,  rapporte  qu'ils 
estoient  très-humbles  et  très-obéissans  serviteurs  du 
Roy  et  de  la  Reyne,  et  que  si  Leurs  Majestez  le  desi- 
royent,  ils  feroyent  le  voyage,  s' assurant  qu'ils  don- 


*  Catherine  de  Clèves,  comtesse  d*Eu,  veuve  du  Balafré,  morte 
en  1633. 

2  René  aux  Epaules,  dit  de  Laval,  marquia  de  Nesles,  mai'écbal  de 
camp,  gouverneur  de  la  Fère,  mort  en  1650. 


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d'aRNAULD    D*ANDILLr.  89 

neroyent  à  Monsieur  le  Prince  et  à  eux,  dans  les  Jumwn. 
affaires,  le  rang  et  la  participation  que  leur  qualité 
méritoit  ;  qu'elles  reformeroyent  le  Conseil,  répon- 
droyent  favorablement  les  cayers  des  Estats,  donne- 
royent  contentement  à  Messieurs  du  Parlement  et 
regleroyent  les  rangs  de  tous  les  seigneurs  de  France*. 
MM.  de  Guise  et  d'Espernon  craignoyent  qu'ils 
n'eussent  fait  partie  pour  se  rallier  tous  ensemble 
fortement  auprès  du  Roy  et  ainsi  les  en  chasser; 
dirent  qu'il  y  avoit  ligue  signée  entr'eux  pour  cet 
effet. 

4.     M.  de  Villeroy  va  trouver  Monsieur  le  Prince        iuwet. 
à  Clermont;  M.  de  Villesavin*  avec  luy. 

6.     M.  de  Villeroy  retourne. 

11.  M.  de  Villeroy  retourne  ;  meine  M.  de  Vil- 
lesavin  avec  luy.  Envoyé  M.  de  Villesavin.  Mande 
que  Monsieur  le  Prince  veut  doresnavant  traitter 
article  par  article  ;  que  le  premier  qu'il  propose  est 
celuy  du  règlement  du  Conseil;  qu'il  demande  que 
dans  le  Conseil  des  affaires  d' Estât,  qui  se  tient  les 
matins  à  dix  heures,  il  ayt  la  part  que  son  rang  re- 
quiert ;  que  l'on  se  serve,  pour  les  finances,  de  ceux 
dont  le  feu  Roy  se  servoit,  et  entr' autres  de  M.  de 
Sully  ;  que  les  arrests  et  autres  expéditions  du  Con- 


*  Foy,  Pontcbartrain,  Petitot,  2«  série,  t.  xvii,  p.  83  ;  Richelieu,  id., 
t.  XXI  bis,  p.  250  ;  Fontenay-Mareuil,  id.,  V*  série,  t.  l,  p.  584. 

2  Jean  Phélypeaux,  seigneur  de  Villesavin,  comte  de  Buzançois,  se- 
crétaire des  commandements  de  la  reine  Marie  de  Medicis,  maître  des 
comptes  et  conseiller  d'Etat,  mort  en  1660.  {Foy,  Moreri,  t.  viii,  p.  259.  ) 


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90  ^PPHNAL   INEDIT 

juHrt  1618.  sçji  spyçnt  sîgnéQs  de  aept  persoppes,  sçavoir  :  dç 
luy,  de  M.  de  SMily,  Monsieur  le  Chancelier,  Mon- 
sieur le  Contrqsleur^général  de^  flnances,  du  Rap- 
porteur et  des  deux  plus  anciens  du  Conseil. 

On  dit  qu'on  lui  répondit  que,  pour  M.  de  Sully 
et  la  signature  dey  arrests,  c'estoit  chose  qui  ne  §e 
pouyoit  faire  ;  que,  quant  au  Conseil  de  di^  heures, 
il  y  auroit  toujours  le  rang  que  sa  qualité  inéritoit*, 

i5f  tes  leptres  r- patentes  du  Roy  pour  tirer 
i, 200,000  livres  de  la  Bastille  ayant  esté  refusées 
cinq  fois  par  la  chambre  des  Comptes,  on  donne  ar- 
rest  au  Conseil  le  14,  qui  estoit  le  jour  précédent, 
sigijé  du  Roy,  de  la  Reyu^>  Monsieur  le  Chancelier 
et  MM.  Jeannin,  Maupepu^,  Arnaud  et  Dollé,  por- 
tant que  la  dite  somme  ^eroit  tirée  ;  et  le  dit  jour  i5, 
Leur^  Majestez,  assistées  de  tpuii  les  Grans  do  la 
Cour,  furent  faire  tirer  la  dite  spuime, 

i7,  Mf  de  Villeroy  retourné.  Monsieur  le  Prince 
l'avoit  quitté  et  c'en  estoit  allé  à  Muret,  terre  qui  est 
à  luy,  pour  conférer  ayeç  MM.  de  BuiHon,  de  Lon- 
gueville,  du  Mayne  et  comte  de  Saint-Paul. 

M.  de  PrQuyille ,  gentil hoii^me  de  bonne  maison 
de  Picardie,  qui  avoit  trè^-bien  servy,  ayoit  une 
janibe  de  bois,  sept  en  fans,  une  pension  et  esj^oit 
sergentrpnajor  d'Amiefls,  est  poignardé  par  un  sp|- 
dat  italien  de  la  citadelle  nommé  Alfonce  Marianna, 


1  yoy,  Bferc,  fr.,  t.  iv,  p,  116. 

2  Gilles  de  M^upeou,  né  en  ^551,  conseiller  d'Etat,  intendant  et 
contrôleur  générjil  des  finances  spus  Heuri  IV  çt  Louis  XIJI,  mort 
en  16Û1; 


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en  pis§ant  mv  le  pont  qui  est  entrç  la  ville  et  Tes-  juuiet  ini* 
plapade  de  la  citadelle,  d'où  il  revenpit.  Il  y  alloit 
souvent  donner  le  mot,  Alfonce  se  jsauve  dans  la 
citadelle;  la  ville  s'émeut  pour  l'avoir.  MM.  deMai-r 
gneux*  et  d'Hocquincourt%  venus  depuia  peu- d« 
Parjs,  promettent  de  le  rendre  pt  cependant  le  met- 
tent en  prison  les  fers  aux  pieds,  Hautadeçlos,  qui 
commande  dans  la  citadelle,  prend  vingt  mousque- 
taires et  tire  Alfonpe  de  prisoji,  pqis  sQpt  avec  luy 
par  une  porte  qui  çi^t  du  cQ^\é  des  phamps,  et  mon^ 
tent  tous  deux  à  cheval  et  prennent  le  chemin  d^ 
Flandre,  Incontinent  après  l'assassinat,  ceux  d^  la 
ville  ayant  pris  Içs  armes  pour  investir  la  citadelle 
par  dehors,  on  dit  que  M,  de  Alaigneux  leur  promit 
qu'on  leur  rendroit  Alfonce,  et  que,  pur  cela,  ils  se 
retirèrent'. 

M.  le  maréchal  d'Ancre  a  depuis  ipi»  Haqtedeclo.^ 
pour  commander  dan;^  Qaille|:)œuf,  au  commence- 
ment de  l'année  1617. 

21.  A  quatre  heures  du  malin,  M.  de  Villeroy 
(assisté  de  M.  de  Neubourg)  repart,  va  coucher  à 
Villers-Cotterets,  pour  de  là  aller  le  lendemain  ipa- 
tin  à  Noyon,  où  s'assemblent  les  Princes. 


*  igneux^  goi^verneur  de  Moq- 

treu  bre  du  Roi,  lieijtejwit  ^e  l^ 

com  ie  de  Mejiicis,  pyj^  dq  m^ré- 
clia; 

2  jin court,  gouyeroeur  de  P^ 
roni 

3  ;  Fontenay-]V(^r^uij,  p,  387 
Vfr 


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92  JOURNAL   INIÎDIT 

Juillet  1615.  26,     M.  de  Pontchartrain  *  va  porter  une  lettre 

du  Roy  à  Monsieur  le  Prince,  par  laquelle  Sa  Ma- 
jesté lui  commande  d'estre  samedy  à  Paris  pour  par- 
tir avec  elle;  et,  à  faute  d'obéir,  dit  à  M.  de  Villeroy 
que  le  Roy  lui  avoit  commandé  de  s'en  revenir, 
après  avoir  sommé  le  Prince.  Sur  cela,  le  traitté  se 
rompt  entièrement. 

28.  M.  de  Pontchartrain  revient  avec  la  réponse 
de  Monsieur  le  Prince,  par  laquelle  il  nomme  les  six 
personnes  dont  il  se  pleint,  et  demande  qu'ils  soyent 
mis  hors  des  affaires.  La  datte  est  de  Coucy^ 

La  Reyne  s'estoit  trouvée  fort  mal  la  nuit  du  27 
d'un  grand  flux  de  ventre,  qui  la  mena  vingt-cinq 
ou  trente  fois  avec  du  sang.  On  en  attribue  la  cause 
à  une  colère  qu'elle  avoit  eue  le  jour  précédent. 

Treize  compagnies  des  gardes,  prestes  à  partir, 
furent  arrestées  sur  ce  sujet. 

On  tient  que  M.  de  Pontchartrain  fut  envoyé  si 
soudainement,  afin  que  l'on  rompist  plus  tost  sur 
le  sujet  du  voyage  que  sur  la  nomination  des  six 
personnes  dont  on  se  pleint. 

On  a  dit  depuis  que  ce  fut  MM.  de  Guise  et  d*Es- 

^  Paul  Phélypeaux,  seigneur  de  Pontchartrain,  né  en  1569,  secré- 
taire des  commandements  de  Marie  de  Medicis,  secrétaire  d*Etat  en 
1610,  mort  en  1621.  Les  précieux  Mémoires  de  cet  homme  d'Etat  ont 
été  publiés  dans  les  collections  Petitot  et  Michaud. 

2  yoy. ,  dans  les  Mém.  de  Math.  Mole,  la  lettre  du  Roi  au  prince  de 
Condé  et  la  réponse  de  celui-ci,  ainsi  que  la  longue  lettre  écrite  par 
le  Roi  au  Parlement,  au  sujet  des  démarches  infructueuses  faites  au- 
près de  Monsieur  le  Prince,  pour  l'inviter  à  accompagner  la  Cour  au 
voyage  de  Guyenne  (p.  62  et  suiv.).  Foy,  les  mômes  pièces,  Merc,  fr.^ 
t.  IV,  p.  139-148. 


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d'arnaold  d'andilly.  93 

pernon  qui,  craignant  que  la  négociation  s'accommo-       '"«»««  »««• 
dast  à  leur  préjudice,  firent,  avec  le  Commandeur  (de 
Sillery)  *  et  M.  de  Bulion,  résoudre  la  Rey.ne  à  envoyer 
M.  de  Pontchartrain  sans  que  Monsieur  le  Maréchal 
ni  M.  Dollé  le  sceussent. 

Comme  on  eut  leu  la  lestre  de  Monsieur  le  Prince, 
sur  ce  que  quelqu'un  deraandoit  ce  qu'il  faloit  ré- 
pondre, on  dit  que  M,  le  maréchal  d'Ancre  dit  que 
c'estoit  à  ceux  qui  avoyent  donné  le  conseil  d'en- 
voyer M.  de  Pontchartrain  de  dire  ce  qu'il  faloit 
faire. 

On  dit  que  sur  ce  que  Monsieur  le  Maréchal  dit 
devant  M.  d'Espemon,  que  c'estoit  un  conseil  violent 
que  l'on  a  voit  donné  à  la  Reyne,  M.  d'Espernon  ré- 
pondit :  Monsieur,  le  conseil  est  très-bon  et  je  suis 
prestdele  maintenir  à  la  pointe  de  mon  épée;  que 
sur  cela,  Monsieur  le  Maréchal  répondit  :  Monsieur, 
je  ne  parle  pas  pour  vous,  mais  pour  Monsieur  le 
Chancelier.  A  quoy  M.  d'Espemon  répondit  que  le 
conseil  de  Monsieur  le  Chancelier  estoit  très-bon. 

Ce  fut  M.  de  Longue  ville  qui  voulut  que  l'on 
nommast  le  Maréchal  et  la  Maréchale,  et  M.  de 
Buillon  qui  voulut  que  l'on  nommast  M.  Dollé. 

30.  M.  de  Villeroy  revient  trouver  le  Roy. 

31.  On  résout  au  Conseil  d'envoyer  à  toutes  les 
bonnes  villes  leur  dire  qu'elles  se  gardent  et  ne 


*  Noël  Brulart,  dit  le  Commandeur  de  Sillery,  d'abord  chevalier  de 
Malte,  puis  premier  ecuyer  et  chevalier  d*honneur  de  la  Reine,  am- 
bassadeur à  Rome  et  en  Espagne. 


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94  JOURNAL  ÎNÉDIT 

Juillet  liti.      laisgent  entrer  aucuns  des  Prinôes  et  seigneurs  mal- 
contens** 

Aoust  i*\     M.  de  Nérestang^  va  dans  la  citadelle  d'i- 

miens.  M.  de  Longue  ville  estoit  venu  dans  la  ville, 
sur  ce  qu'on  l'avoit  averty  que  M.  de  Nérestang 
estoit  venu  avec  peu  de  train.  Le  soir,  sur  la  nuit, 
prend  six  chevaux  qui  estoyent  dans  la  citadelle, 
avec  vingt  mousquetaires,  et  les  fit  passer  et  repas- 
ser durant  un  fort  longtemps  sur  un  pont  qui  est 
hors  la  citadelle,  dont  ceux  de  la  ville  peuvent  bien 
entendre  le  bruit,  mais  ne  le  sçauroyent  voir.  On 
va  dire  à  M.  de  Longueville  qu'il  estoit  entré  dans 
la  citadelle  cinq  ou  six  cents  chevaux  et  grande  quan- 
tité d'hommes  de  pied.  Sur  cela,  M.  de  Longueville 
craignant  quelque  entreprise  contre  luy,  se  retire 
le  lendemain  matin.  M.  de  Nérestang,  prenant  le 
temps  de  l'absence  de  M.  de  Longueville,  va  dans  la 
maison  de  ville  présenter  les  lettres  du  Roy,  pour  ne 
laisser  entrer  M.  de  Longueville,  ni  aucun  autre 
dans  la  ville,  et  leur  dit  que  s'ils  n'obéissoyent,  il  les 
mettrait  en  poudre;  et  qu'ainsi,  s' estant  assemblez, 


*  Voy.  Pontchartrain,  p.  84-89.  Pontchartrain  raconte  en  détail  les 
circonstances  de  sa  mission  vers  Monsieur  le  Prince  ;  il  nomme  les  six 
personnes  dont  celui-ci  se  plaignait,  et  qui  étaient  le  maréchal  d*Ancre, 
le  Chancelier,  le  commandeur  de  Sillery  son  frère,  MM.  de  Villeroy, 
Dolé  et  Bullion.  Voy,  Richelieu,  p.  254-260;  Fontenay-Mareuil,  p.  284- 
289;  Rohan,  p.  125-126;  Merc.  fr.^  t.  iv,  p.  155  et  suiv. 

^  Jean-Claude,  marquis  de  Nérestang,  conseiller  d*Etat,  capitaine  de 
cinquante  hommc«  d'armes  des  ordonnances  du  Roi  et  maréchal  de 
camp  des  armées  de  Sa  Majesté,  mort  au  siège  de  Turin  en  1639. 


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D'ARNàOLt)   ù'AfIDÎLLy.  95 

ils  résolurent  de  faire  la  volonté  du  Roy.  M.  de       Aou«ti«if. 
Longuevîlle  estant  revenu,  ils  le  prièrent  d'avoir  pi- 
tié d'eux  et  de  se  retirer. 

D'autres  disent  que  la  ville  délibérant  sur  le  pa- 
quet du  Roy,  on  vint  dire  à  M.  de  Longuevîlle  que 
la  pluralité  dles  voix  alloit  à  le  prier  de  se  retirer,  et 
que  sur  cela,  il  alla  à  Corbie  où  est  Riberpré.  Ceux 
de  Corbie  ont  une  compagnie  de  chevaux -légers  du 
sieur  de  Contenant 

Combat  de  MM.  de  Montmorency  et  de  Portes^ 
contre  MM.  de  Retz^  et  de  Vitry  *.  —  Leur  querelle 
fut  pour  une  écharpe  chez  la  Choisy.— -Paroles  :  ac- 
coustumé  d'avoir  mon  reste*.  M.  de  Vitry  fit  l'appel 

^  Voy.  Pontchartrain,  p.  90;  Fontenây-^Mai^ettilf  p.  2d8;  Merc»  fr»^ 
t.  IV,  p.  151.  —  Timoléon  de  Boves,  sieur  de  Gontenan,  capitaine  des 
chevaux-légers  de  la  garde  du  Roi,  gouverneur  de  Mantes,  mort  vers 
1691.  (yoy,  son  bistoriette,  Tallemant  des  Réaax,  t.  iv,  p.  283,) 

2  Antoine  Hercule  de  Budos,  marquis  de  Portes,  oncle  de  M.  de  Mont- 
morency, lieutenant-général  en  Gevaudan  et  pays  des  Cevennes,  vice- 
amiral  de  France^  tué  ail  siège  de  Privas  en  1«29  (P.  Anselme,  L  tt^ 
p.  154). 

3  Henry  de  Gondy,  duc  de  Retz  et  de  Beaupréau,  pair  de  Fiance, 
marquis  de  Belle-Isle,  capitaine  de  cent  hommes  d'armes,  né  en  1990^ 
mort  en  1650. 

*  Nicolas  de  l'Hôpital,  marquis  puis  duc  de  Vitry,  capitaine  des 
gardes-du-corps  du  Roi,  maréchal  de  France  en  1617  pour  prix  de 
l'assassinat  du  maréchal  d'Ancre>  gouverneur  de  Provence  en  1633 ^ 
enfermé  à  la  Bastille  de  1637  à  1643,  duc  et  pair  en  1644,  mort  la 
même  année  {V^y,  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  431)* 

^  Tallemant  des  Réaux  raconte  cette  affaire  et  explique  ce  mot*  Mé  de 
Montmorericy  avait  été  marié  avec  M^*  de  Beaupréau.  La  Reine-Mère 
fit  rompre  ce  mariage,  u  Depuis,  M.  de  Rets  espousa  M^'*  de  Beau- 
»  préau,  et  M.  de  Montmorency^  au  lieu  de  duc  de  Retz,  l'appela  duc 
»  de  mon  reste.  On  les  accorda  sur  l'heure,  n  (Tallemant  des  Réaux, 
historiette  de  M.  de  Montmorency,  t.  u,  p.  308.)  On  voit,  au  contraire, 
d'après  le  récit  d'Arnauld  d'Andilly,  que  le  duel  eut  lieu*  Quant  à  la 


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96  JOURNAL   INEDIT 

le  samedy  au  soir;  le  dimanche  matin,  M.  de  Mont- 
morency va  si  matin  que  le  portier  ne  veut  ouvrir  la 
porte.  Il  quitte  ses  chevaux,  passe  l'eau  à  pied  et  à 
gué.  M.  de  Montmorency  tirant  une  estocade  à  M.  de 
Retz,  M.  de  Retz  pare  si  fort  que  Tépée  de  M.  de 
Montmorency  luy  tombe  ;  en  mesme  temps,  il  saisit 
de  la  main  gauche  l'épée  de  M.  de  Retz  et  se  jette 
sur  luy  et  le  passe  par  terre.  Ainsi,  M.  de  Retz  estant 
dessous  et  M.  de  Montmorency  n'ayant  point  d'épée, 
comme  ils  virent  qu'ils  ne  se  pouvoyent  que  faire 
l'un  à  l'autre,  ils  s'accordèrent  et  furent  séparer  les 
seconds  qui  estoient  aux  prises.  Puis,  M.  de  Retz 
baille  son  cheval  à  M.  de  Montmorency,  et  monte  en 
trousse,  et  ainsi  vinrent  déjeusner  à  l'hostel  Montmo- 
rency et  disner  à  l'hostel  de  Retz* 

5.  A  onze  heures  du  matin,  M.  le  maréchal 
d'Ancre  va  à  Amiens  accompagné  de  M.  de  Plain- 
ville  et  de  quantité  de  noblesse,  et  en  chemin  il  joi- 
gnit la  compagnie  de  chevaux-légers  de  M.  de  Con- 
tenan.  M.  de  Carbon^  alloit  devant  avec  quelques 
gentilshommes. 

6.  Leurs  Majestez  envoyent  quérir  Messieurs  des 


Choisy,  c'était  la  maltresse  de  M.  de  Montmorency.  «  Il  aima  d'abord 
la  Choisy,  fllle  de  bon  lieu,  mais  très^alante,  n  dit  Tallemant  dans  la 
même  historiette.  M.  Paulin  Paris,  dont  le  savant  et  précieux,  com- 
mentaire éclaire  toujours  le  texte  de  Tallemant,  nous  apprend  que  la 
Choisy  était  une  des  filles  de  Jacques  de  THospital,  marquis  de  Choisy, 
soit  Louise,  comtesse  de  Castries ,  soit  Francienne,  M"*  de  la  Grange- 
Quincy.  Elle  était  donc  parente  de  M.  de  Vitry  qui  fut  le  second  de 
M.  de  Retz. 

*  Voy.^  sur  cette  affaire,  Pontchartrain,  p.  89. 

2  II  fut  tué  au  siège  de  Saint-Jean-d'Angely,  en  1621. 


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d'arnauld  d'andilly.  97 

compagnies  souveraines  qui  se  rendent  à  deux  heures 
au  Louvre.  Le  Roy  dit  quelque  peu  de  mots,  puis  la 
Reyne  prenant  la  parole,  dit  à  Messieurs  du  Parlenient 
que  s'en  allant  en  voyage,  le  Roy  leur  recommandoit 
le  soin  de  Paris  et  de  la  personne  de  Monsieur  *. 
Monsieur  le  Premier  Président  répondit  avec  toutes 
sortes  de  protestations  d'obéissance,  puis  supplia 
Leurs  Majestez  de  vouloir  tacher  d'appaiser  tous  les 
mouvements  émeus.  A  cela,  la  Reyne  répondit  que 
la  conclusion  du  mariage  assureroit  la  paix  dedans 
et  dehors  le  royaume.  Sa  Majesté  dit  fort  peu  de 
chose  à  Messieurs  des  Comptes  (M.  de  Verderonne  ^ 
portoit  la  parole) ,  et  à  Messieurs  de  la  Cour  des 
Aydes  (M.  de  Rebours'  portoit  la  parole).  Tous  les 
présidens  du  Parlement  y  estoyent  hormis  M.  Sé- 
guier.  Monsieur  le  Chancelier  ne  dit  un  seul  mot. 
Après  que  la  Reyne  eut  parlé,  on  fit  approcher  de 
Leurs  Majestez  tous  les  présidens  pour  prendre  congé 
d'elles,  fors  M.  le  président  le  Jay,  lequel  voyant 
qu'on  ne  l'appelloit  point  s'approcha  de  luy-mesme. 
On  dit  que  la  Reyne  luy  dit  :  Je  n'ay  que  faire  à 
vous,  ou  bien,  je  ne  veux  point  parler  à  vous.  Sur 

*  Gaston -Jean-Baptiste  de  France,  duc  d'Anjon,  puis  duc  d'Orléans, 
né  en  1608,  mort  en  1660. 

2  Claude  de  l'Aubespine,  seigneur  de  Verderonne,  secrétaire  des 
finances  du  Roi  et  de  la  Reine-Mère,  pré»dent  de  la  chambre  des 
comptes. 

*  Guillaume  le  Rebours,  né  vers  1545,  président  à  la  Cour  des 
Ai^es  en  1578,  joua  un  certain  rôle  pendant  le  siège  de  Paris  par 
Henri  IV,  où  il  eut  la  jambe  cassée  par  un  boulet,  conseiller  d*Etat  en 
1597,  mort  en  1619  (Voy,  son  article.  Biographie  Michaud^  et  Mém. 
de  l'Estoile,  Petilot,  1'*  série,  t.  xlvi,  p.  50). 

7 


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98  JO0RN\L  INEDIT 

qaoy  M.  le  Jay  n*ayant  laissé  de  parler,  elle  répon- 
dit :  Quand  vous  ferez  ce  que  vous  dites,  vous  ne  fe- 
rez que  votre  devoir*. 

La  Reyne  écrit  à  Messieurs  de  Thostel  de  ville 
qu'ils  luy  donnassent  avis  comme  il  estoit  besoin  de 
faire  pour  la  seureté  de  la  ville  et  de  Monsieur.  Mon- 
sieur le  Premier,  après  avoir  donné  sa  lettre,  ne  se 
retira  pas,  contre  ce  qui  est  des  registres  de  la  ville. 
Il  passa  à  faire  faire  grande  garde  aux  portes.  M.  Ar- 
naud avoit  esté  d'avis  de  faire  assemblée  générale, 
de  faire  garder  Saint-Denis ,  Saint-Clou  et  autres 
avenues ,  avoir  des  sentinelles  perdues  à  cheval , 
mettre  seulement  dix  ou  douze  hommes  à  chaque 
porte,  pour  voir  quels  gens  entrent,  quels  chevaux 
de  service,  poudres,  armes,  etc.  ;  avoir  des  herses  à 
chaque  porte  et  un  homme  dessus  pour  couper  la 
chaisne  ou  la  corde  en  cas  qu'il  parust  quelque  chose  ; 
faire  refaire  les  brèches,  envoyer  les  eschevins  pour 
faire  avaler  les  bleds  qui  sont  à  Châlons,  Epemay  et 
ailleurs  ;  obliger  les  baillages  de  Gonnesse  et  autres 
de  fournir  certaine  quantité  de  pain  chaque  jour  de 
marché  à  certain  prix. 

7.  Messieurs  de  la  ville  vont  trouver  la  Reyne 
pour  dire  leur  résolution.  Messieurs  du  clergé  font 
harangue  à  la  Reyne.  M.  de  Saint- Victor  ^  portoit  la 
parole.  Ils  se  pleignent  fort  d'un  brevet  obtenu  par 


*■  Voy,  PontchartrikiD,  p.  06. 

2  François  de  Harlay  de  Cbanvalon,  abbé  de  Saint-Victor  de  Paris, 
archevêque  de  Roueo  en  1615,  se  démit  en  1653  en  faveur  de  son 
neveu  du  môme  nom,  mort  en  1653. 


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d'arnauld  d^andilly.  99 

M.  de  Lesdiguières*  de  l'abbaye  de  Saint- Antonin 
en  Dauphiné  (chef  d'ordre),  en  laquelle  les  moines 
avoyent  esleu  selon  la  coustume.  Il  insista  fort  sur 
le  concile  de  Trente.  La  harangue  finie,  Monsieur  le 
Chancelier  témoignîi  estre  fort  en  colère^. 

M.  de  Ghevry  fait  Intendant  des  finances  par  le 
moyen  de  la  maréchale  d'Ancre,  à  qui  il  donne  qua- 
rante mil  écus. 

M.  de  Loménie  fut  trouver  M.  le  président  le  Jay 
de  la  part  du  Roy' et  luy  dire  que  Sa  Majesté  luy 
commandoit  de  la  suivre  en  son  voyage  et  de  se 
rendre  le  jeudy  à  Orléans.  Il  fit  répondre  que  le  Roy 
luy  faisoit  beaucoup  d'honneur,  mais  qu'il  estoit  fort 
malade  (il  s' estoit  mis  au  lit,  etc.).  Depuis  M.  de 
Loménie  y  retourna  pour  la  deuxième  fois  et  luy  dit 
que  le  voyage  ayant  esté  différé  pour  quelques  jours, 
le  Roy  luy  mandoit  qu'il  n'y  avoit  plus  d'excuse  de 
se  rendre  aussitost  que  luy  à  Orléans.  Il  s'excusa 
derechef  sur  sa  maladie,  et  puis  dit  que  quand  bien 
il  seroit  en  estât  de  pouvoir  aller,  il  ne  pourroit 
néantmoins,  estant  président  en  la  première  Cour 
souveraine  de  France  et  ayant  esté  porté  à  ceste 
charge  après  que  l'on  l'en  avoit  jugé  digne,  s'asseoir 
dans  le  Conseil  après  plusieurs  autres  qui  le  vou- 
droyent  précéder.  Sur  cela,  M.  de  Loménie  repondit 

^  François  de  Bonne,  duc  de  Lesdiguiëres,  gouyerneur  du  Dauphiné, 
maréchal  de  France  en  1608,  duc  et  pair  en  1619,  maréchal  de  camp 
général  des  armées  du  Roi  en  1621,  Connétable  de  France  en  1622, 
mort  en  1626. 

2  Voy,  Richelieu,  p.  265.  Foy,  Merc,  fr.y  t.  iv,  p.  204.  Suivant  le 
MercurCy  cette  remontrance  fut  faite  par  Tarchevôque  d'Augustopolis 


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100  JOUBNAL  INÉDIT 

Aoust  1615.  que  le  Roy  vouloit  qu'il  vinst  nonobstant  toutes  ces 
raisons  ;  et  qu'en  attendant  que  l'on  partist  Sa  Ma- 
jesté luy  défendoit  absolument  de  plus  aller  au  Par- 
lement. A  quoy  il  répliqua  que  puisque  la  volonté 
du  Roy  estoit  de  le  priver  ainsi  dB  sa  charge  sans  en 
avoir  donné  aucun  sujet  il  ne  manqueroit  pas  d'obéir, 
mais  qu'à  tout  le  moins  on  luy  permist  d'aller  dire 
au  Parlement  comme  on  luy  avoit  défendu  d'y  plus 
assister.  M.  de  Loménie  fut  encore  depuis,  pour  la 
troisième  fois  pour  luy  dire  que  le*  Roy  vouloit  abso- 
lument qu'il  vint.  Sur  quoy,  il  répondit  :  Monsieur, 
le  Roy  se  moque  de  vous  et  de  moy,  car  si  Sa  Ma- 
jesté désiroit  que  j'allasse,  elle  vous  en  auroit  baillé 
un  commandement  par  écrit  *. 

9.  Leurs  Majestés  croyant  assurément  partir  le 
lendemain,  Marcongnet  arrive  sur  les  onze  heures,  et 
leur  apporte  un  manifeste  de  Monsieur  le  Prince  ^  Sur 
cela,  le  voyage  est  remis  au  jeudy.  On  prend  sujet 
sur  des  armes  surprises  et  quatre  hommes  du  mar- 
quis de  Bonnivet'  tuez,  qui  menoyent  des  armes 


^  Brienne,  dans  ses  mémoires,  ne  parle  pas  de  cette  mission  de  son 
père  auprès  du  président  le  Jay.  II  dit  seulement  que  lors  du  départ 
du  Roi,  chargé  d'inviter  le  Président  à  suivre  la  Cour,  et  en  cas  de 
refus  de  s'assurer  de  sa  personne,  M.  de  Loménie  feignit  d'être  malade 
pour  se  soustraire  à  cet  ordre  (Brienne,  éd.  citée,  p.  303). 

2  Voy,  Richelieu,  p.  261-263  ;  Fontenay-Mareuil,  p.  289  ;  Foy.  Merc, 
fr,^  t,  IV,  p.  159  et  suiv.,  le  texte  de  ce  manifeste  du  prince  de  Condé, 
avec  les  réponses  que  l'on  y  fit.  Ce  document  curieux,  qui  expose  lon- 
guement les  griefs  du  prince  de  Condé  contre  le  gouvernement,  peut 
donner  une  idée  de  l'état  de  la  France  en  ces  temps  d'anarchie. 

8  Henry-Marc-Alphowse-Vincent  Gouffier,  soigneur  de  Grèvecœur, 
marquis  de  Bonnivet,  né  en  1586,  mort  en  1645. 


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d'arnauld  d'andilly.  101 

plein  un  chariot  de  chez  M.  de  Montcavrel  *  son  beau-       aousi  iws. 
père,  par  le  lieutenant  de  M.  de  Maigneux  à  IVJontreuil. 

Le  matin,  la  Reyne  ayant  fait  son  bonjour  en  la 
paroisse  de  Saint-Germain,  elle  s'évanouit  et  se 
trouva  fort  foible. 

M.  de  Coubron  apporte  à  M.  d'Espernon  un  pa- 
quet de  Monsieur  le  Prince,  et  sous  la  première  cou- 
verture il  y  en  avoit  une  autre  qui  s'adressoit  à  Mes- 
sieurs les  Ducs  et  Pairs  de  France. 

10.  On  donne  à  M.  de  Bois-Daufm  ^  le  comman- 
dement général  de  toutes  les  forces  que  Sa  Majesté 
laissera  icy,  et  à  M.  de  Praslin  la  charge  de  maré- 
chal de  camp  général,  et  à  M.  de  Bassompierre'  cette 
mesme  charge  en  l'absence  de  M. de  Praslin^. 

11.  Le  sieur  de  Coubron  porte  le  manifeste  de 
Monsieur  le  Prince  au  Parlement,  et  puis  se  retire 


1  Jean  de  Monchy,  seigneur  de  Montcavrel,  gouverneur  des  ville  et 
château  d'Ardres,  mort  en  1638. 

2  Urbain  de  Laval,  marquis  de  Sablé,  seigneur  de  Boisdauphin,  con- 
seiller d'Etat,  maréchal  de  France  en  1595,  gouverneur  d'Anjou  en  1004, 
mort  en  1629. 

3  François  de  Bassompierre,  né  en  1579,  colonel  général  des  Suisses 
et  Grisons  en  1614>  ambassadeur  en  Espagne  en  1621,  fut  aux  sièges  de 
Saint-Jean-d'Angely,  de  Montheur,  de  Royan,  de  Montpellier  ;  maré- 
chal de  France  en  1622,  ambassadeur  en  Suisse  en  1625,  en  Angleterre 
en  1626,  commanda  au  siège  de  la  Rochelle,  en  Piémont  en  1629. 
S'étant  brouillé  avec  Richelieu,  il  fut  arrêté  en  1631  et  mis  à  la  Bas- 
tille où  il  resta  jusqu'en  1643,  mort  en  1646.  Il  a  laissé  de  précieux 
Mémoires  recueillis  dans  les  collections  Petitot  et  Michaud  {Voy.  P. 
Anselme,  t.  vu,  p.  464). 

*  Foy,  Fontenay-Mareuil,  p.  289-290  ;  Rohan,  p.  126  ;  Voy,  aussi  le 
discours  du  duc  de  Rohan  sur  le  voyage  du  Roi,  et  les  conseils  qu'il 
ddnne  à  la  Reine,  p.  161,  même  édition;  Brienne,  p.  302;  9ferc,  fr, 
T.  IV,  p.  197. 


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102  JOURNAL  INÉDIT 

Aowt  xM,      sur  l'avis  qu'il  eut  que  Messieurs  du  Parlement  l'en- 
voyèrent à  la  Reyne  sans  ouvrir  le  paquet. 

12.  Le  voyage  de  Leurs  Majestez  qui  se  devoit 
faire  le  lendemain,  remis  au  lundy  sur  l'avis  que 
M.  de  Longueville  assisté  de  trois  cents  chevaux  fait 
démolir  Bacadours. 

13.  Conseil  tenu  pour  la  guerre  auquel  de  vingt- 
une  personnes,  il  n  y  eut  que  MM.  le  Chancelier^ 
d'Espernon,  le  Commandeur  (de  Sillery)  et  de  Bul- 
Hon  qui  opinassent  fermement  à  la  guerre.  Résolu 
de  laisser  12,000  hommes  de  pied,  les  compagnies 
de  la  Reyne,  de  Monsieur,  de  Contenan,  et  huit 
compagnies  nouvelles  de  chevaux -légers  de  cin- 
quante hommes  chacune.  Pour  cela,  faut  dépendre 
cinq  cent  mil  écus  en  quatre  mois,  et  pour  cet  effet, 
résolu  de  prendre  les  treize  cent  mil  livres  restans 
dans  la  Bastille  \ 

14.  Les  trois  chambres  du  Parlement  estant  as- 
semblées, un  conseiller  proposa,  qu'en  Testât  que 
sont  les  affaires,  et  Paris  demeurant  en  péril  si  Leurs 
Majestez  l'abandonnent,  il  sembloit  à  propos  que  la 
Cour  députast  >rers  elles,  pour  les  supplier  d'y  donner 
ordre,  et  mesme  s'il  estoit  possible,  de  renvoyer  vers 
Monsieur  le  Prince.  Sur  cela,  M.  le  président  de 
Bellièvre  ^  dit  que  ceste  proposition  estoit  séditieuse 

1  Voy.  Pontchartrain,  p.  91-06* 

2  Nicolas  de  Bellièvre,  seigneur  de  Grignon,  fils  du  Chancelier  et  père 
du  Premier  Président  de  ce  nom,  né  en  1583,  conseiller  au  Parlement 
de  Paris  en  1602,  procureur-général  en  1612,  président  à  mortier  ett 
1614,  se  démit  en  1642  en  faveur  de  son  fils,  couseilier  d'Etat,  mort 
en  1650.  K  était  le  gendre  du  chancelier  de  Sillery. 


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D*ARNAULD    D'AriDILLT.  108 

et  qu'il  s'y  opposoît  M.  Lescalopier  suivit  après  et 
M.  Boucher.  D'autres  s'émeurent  au  contraire  ;  enfin 
Monsieur  le  Preniier  Président  dit  qu'il  ne  faloit  point 
s'aîtérer  là-dessus  et  qu'il  verroit  la  Reyne  pour  savoir 
si  elle  l'auroit  agréable.  Et  suivant  cela  il  fut  auLouvre. 

On  dit  que  le  conseiller  qui  proposa  fut  M.  Maré- 
chal, et  qu'il  dit  que  c'estoit  une  honte  à  eux  de  voir 
Leurs  Majestez  prestes  à  partir  en  Testât  que  sont  les 
affaires,  et  cependant  se  tenir  les  bras  croisez;  qu'il 
luy  sembloit  à  propos  de  députer  vers  elles  pour  les 
supplier  d'avoir  agréable  que  le  Parlement  députast 
vers  Monsieur  le  Prince  tels  de  son  corps  qu'elles- 
mesmes  voudroyent  choisir  ;  que  s'il  réussissoit  quel- 
que bon  accommodement  du  traitté,  c'estoit  ce  que 
l'on  demandoit;  sinon,  qu'on  mettroit  Monsieur  le 
Prince  à  son  tort. 

Y  ayant  eu  entreprise  sur  Soissons,  M.  de  Guise  en 
donna  avis  à  M.  du  Mayne  (qui  lui  en  fit  des  remer- 
cîmens  extraordinaires).  La  Reyne  dit  à  M.  de 
Guise,  que  c'estoit  luy  qui  avoit  donné  avis  de  l'en- 
treprise à  M.  du  Mayne;  à  quoy  il  répondit  :  qu'il 
estoit  vray,  et  que  si  M.  du  Mayne  eust  eu  besoin  de 
de  luy  pour  l'assister  en  cette  occasion,  il  fust  allé 
fort  volontiers  porter  sa  vie;  qu'il  n' estoit  point 
obligé  de  tenir  secret  un  conseil  que  l'on  luy  avoit 
celé  ;  que  M.  du  Mayne  estoit  son  sang,  et  que  Sois- 
sons  estoit  une  ville  de  seureté  qui  avoit  esté  baillée 
à  feu  M.  du  Mayne  \ 

A  Charles  de  Lorraine,  frère  du  Balafré,  duc  de  Mayenne,  pair,  ami- 


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104  JOURNAL  INÉDIT 

Aotwt  1615  M.  de  Loménie  fait  recevoir  son  fils  en  survivance 

à  sa  chargea 

16.  Le  Roy  et  la  Reyne  vont  à  la  Bastille  tirer 
les  treize  cent  mil  livres  restans  ^. 

17.  Leurs  Majestez  partent,  le  Roy  à  quatre 
heures  et  demie  du  matin,  la  Reyne  à  dix,  Madame 
à  trois  heures  après  midy  accompagnée  des  officiers 
de  la  ville  \ 

A  cinq  heures  du  matin,  M.  de  Launay  ^,  lieute- 
nant des  gardes,  avec archers  à  cheval,  et ..... 

à  pied  vont  chez  M.  le  président  le  Jay,  et  le  font 
monter  dans  un  carrosse  du  Roy,  et  le  mènent  au 


rai,  grand  chambellan,  lieutenant-général  de  la  couronne  de  France, 
gouverneur  de  Bourgogne,  gouverneur  de  l'Ile  de  France,  né  en  1554, 
mort  en  1611.  11  s'est  surtout  rendu  célèbre  comme  chef  de  la  Ligue. 

*  «  Ce  fut  dans  ce  temps-là  que  la  Reine-mère,  ayant  égard  aux  ser- 
vices que  mon  père  avoit  eu  Thonneur  de  rendre  au  feu  Roi  son  mari, 
me  procura  la  survivance  de  la  charge  de  secrétaire  d'Etat,  avec  la 
permission  de  signer  en  sa  présence  et  en  son  absence,  quoique  je 
n'eusse  pas  encore  vingt  ans  accomplis.  »  (Mém.  de  Brienne,  édition 
citée,  p.  302.) 

2  Amauld  d'Andilly  dit  dans  ses  Mémoires  (édition  citée,  p.  367)  que 
la  Reine-mère  laissa  cette  somme  de  treize  cent  mille  livres  à  la  dispo- 
sition d'ÂrnauId  l'intendant,  pour  qu'il  pourvût,  pendant  sou  absence 
et  celle  du  Roi,  aux  dépenses  qui  pressaient  de  tous  côtés,  et  particu- 
lièrement celles  de  l'armée  du  Roi,  commandée  par  le  maréchal  de 
Boisdauphin. 

*  Louis  XHT,  né  en  1601  et  alors  âgé  de  quatorze  ans,  allait  épouser 
Anne  d'Autriche,  fille  de  Philippe  UI,  roi  d'Espagne,  née  en  1602, 
âgée  de  treize  ans.  La  sœur  de  Louis  XIII,  Elisabeth  de  France,  née 
en  1602,  allait,  le  môme  jour,  épouser  Philippe  d'Autriche,^fiIs  de  Phi- 
lippe III,  qui  succéda  à  son  père  en  1621.  Il  avait  alors  dix  ans.  La 
Reine-mère,  Marie  de  Medicis,  Régente,  conduisait  à  Bordeaux  les  jeunes 
fiancés. 

*  Ludovic  de  Vièvrcs,  seigneur  de  Lauuay,  lieutenant  des  gardes- 
du-corps. 


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d'arnauld  d'andilly.  105 

Louvre,  où  leur  ayant  esté  dit  que  Sa  Majesté  estoit      ^««t  i«w 
partie,  ils  firent  aller  le  carrosse  après,  et  ainsi  le 
menèrent  à  la  suite  du  Roy. 

M"'  le  Jay  présente  le  matin  mesme  sa  requeste 
au  Parlement.  —  Ordonné  que  quatre  Présidens  et 
six  anciens  conseillers  iroient  faire  remonstrances  au 
Roy,  pour  le  supplier  de  remettre  ledit  le  Jay  en 
liberté  s'il  n'avoit  rien  fait  contre  son  service,  et  si 
au  contraire,  de  le  leur  remettre  pour  le  juger  et  en 
faire  justice.  —  Estant  en  chemin  du  Louvre,  ils  su- 
rent que  Leurs  Majestez  estoyent  parties,  et  ainsi 
s'en  revinrent. 

Monsieur  le  Prince  ayant  sçeu  la  prise  de  M.  le 
président  le  Jay,  écrit  à  M.  Virey  *  qui  estoit  à  Paris, 
qu'aussitost  qu'il  auroit  reçeu  sa  lettre,  il  allast  vers 
le  Roy  luy  témoigner  qu'il  sentoit  comme  fait  à  luy- 
mesme  le  traittement  fait  audit  sieur  Président  ;  qu'il 
pouvoir  témoigner  que  tant  s'en  faut  qu'il  luy  eust 
jamais  donné  conseil  violent,  qu'au  contraire,  il  avoit 
toujours  tasché  à  radoucir  ses  justes  mécontente- 
mens  ;  que  si  on  vouloit  traitter  avec  luy,  on  ne  luy 
pouvoit  envoyer  personne  qui  y  fust  plus  propre  ;  que 
tous  ces  nnaùvais  conseils  procédoyent  de  ceux  que 
l'on  sait  assez  et  qu'il  a  déclarez  partout  estre  ses 
ennemis,  et  que  si  par  leurs  artifices  on  traittoit  mal 
le  président  le  Jay,  il  s'en  vengeroit  sur  eux  et  sur 
leurs  successeurs jusques  à  la  dixième  génération,  etc. 
M.  Virey  ayant  montré  cette  lettre  à  M'"''  la  prési- 

*  Premier  secrétaire  de  Monsieur  le  Prince. 


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106  JOUEHAt  IlflÎDIT 

Atnnt  WI8.  dente  le  Jay,  elle  fut  consdllée  par  ses  amis  de  sup- 
plier M.  Virey  de  ne  point  faire  le  voyage,  comme 
estant  plus  préjudiciable  que  profitable  à  son  mary 
et  écrivit  sur  ce  sujet  à  Monsieur  le  Prince. 

M.  de  Nevers  ayant  parlé  fort  résolument  à  la 
Reyne,  lors  de  son  partement,  et  Sa  Majesté  estant 
demeurée  un  peu  étonnée  sur  ce  qu'il  luy  avoit  dit, 
elle  luy  demanda  enfin  :  Hé  bien  I  que  faudroit-il 
faire?  A  quoy  il  luy  répondit  que  si  elle  vouloit,  il 
s'entremettroit  d'accord/  Elle  dit  qu'elle  le  trouvoit 
fort  bon,  et  ainsi,  il  prit  congé  d'elle.  Depuis,  comme 
il  estoit  en  Champagne,  en  intention  de  traitter,  il  re- 
çoit lettres  du  Roy,  par  lesquelles  défences  luy  furent 
faites  de  rien  traitter. 

18.  Le  Parlement  s'estant  assemblé,  ordonne 
qu'il  seroit  écrit  à  Monsieur  le  Chancelier,  pour  le 
prier  de  sçavoir  de  Leurs  Majestez  la  cause  de  la 
prise  de  M.  le  président  le  Jay,  et  que  la  lettre  se- 
roit  portée  par  Dorron,  secrétaire  de  la  Cour, 

Monsieur  le  Chancelier  fit  réponse  :  qu'il  n' avoit 
rien  sceu  de  la  résolution  d'arrester  le  président  le 
Jay  ;  qu'elle  avoit  esté  faite  sans  son  conseil,  et  estoit 
venue  du  propre  mouvement  du  Roy  ;  que  quant  au 
traittement,  il  s'assuroit  qu'on  le  luy  feroit  fort  bon, 
et  qu'après  qu'il  auroit  parlé  de  cette  affaire  au 
Roy  et  à  la  Reyne,  il  leur  feroit  plus  ample  réponse. 
Depuis,  le  26  aoust,  le  Parlement  receut  une  lettre 
de  cachet  du  Roy,  portant  qu'il  avoit  fait  avertir  par 
plusieurs  fois  le  président  le  Jay  de  se  tenir  prest 
pour  son  voyage,  ce  qu'il  avoit  méprisé  ;  sur  quoy  il 


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d'arnaold  d'andilly.  107 

auroît  résolu  de  l'envoyer  quérir  le  matin  de  son  par-  Aoatt  twi. 
tement,  pour  certaines  grandes  considérations  qu'il 
leur  diroit  à  son  retour,  et  mesine,  pour  ce  que  c' es- 
toit  un  homme  capable  de  troubler  le  repos  de  la 
ville  ;  que  pour  ce  qui  estoit  du  traittement ,  ils  ne 
s'en  missent  point  en  peine,  et  s'assurassent  qu'il  ne 
luy  seroit  fait  aucune  sorte  de  déplaisir. 

19.  Le  Parlement  ordonne  que  M.  le  président 
d'Onsembray  *  et  MM.  les  Conseillers  Courtin  ^  et 
Pelletier  '  iroyent  trouver  le  Roy,  et  le  supplie^  de 
renvoyer  le  président  le  Jay,  sur  caution  de  tout  le 
Parlement  qui  donneroit  assurance  à  Sa  Majesté  cpie 
ledit  sieur  le  Jay  n'entreprendroit  rien  contre  son 
service  *. 


ADDITION   T00CH4NT   LE   VOYAGE   DU   ROY. 

17  aovst  161^ 

Leurs  Majestez  partirent  de  Paris  le  17  aoust 
1615,  sans  donner  ordre  quelconque  aux  affaires  de 

'  Jérôme  de  HacqaQviUe,  a^gneur  d'Oûsembraj ^  codseSll^r  au  Parle» 
meot  de  Paris,  puis  président  aux  requêtes  et  quatrième  président, 
succéda  à  Nicolas  de  Verdun  comme  premier  président,  en  1627,  et 
mourut  en  1636. 

2  Doyen  des  conseillers  laïcs. 

*  Doyen  des  conseillers  clercs. 

*  Foy.  PoQtchartrain,  p»  97  ;  Richelieu,  p.  367  {  Fonten^y-Mareuil, 
p.  291  ;  Brienne,  p.  S03.  V^y»  aussi,  «ians  les  Mémoires  de  Math.  Mole, 
p.  72-86,  le  narré  de  l*a faire  de  M,  le  président  le  Ja\f.  Ge  récit  authen- 
tique confinue  de  tout  point  celui  d'Arnauld  d'AndiUy.  yêy.  Aietx.  (r,^ 
t.  IV,  p.  207-210. 


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108  JOURNAL   INEDIT 

Aouiti«i6.  Paris  (lors  fort  troublé,  tant  à  cause  de  l'étonne- 
ment  du  peuple  de  voir  le  Roy  s'en  aller,  Monsieur 
le  Prince  estant  si  proche  avec  des  forces,  qu'à 
cause  des  factions  que  faisoyent  dans  Paris  les  par- 
tisans de  Monsieur  le  Prince) ,  sans  establir  aucun 
Conseil,  et  mesme  sans  parler  particulièrement  à 
M.  de  Liancourt  *,  Gouverneur,  à  Monsieur  le  Pre- 
mier Président,  à  M.  le  Prévost  des  marchans,  ni  à 
M.  imaud. 

Pour  donner  ordre  aux  affaires  qui  se  présentoyent 
de  toutes  parts,  M.  Arnaud  voyoit  Monsieur  le  Gou- 
verneur et  Monsieur  le  Premier  Président  chez  lequel 
se  trouvoyent  M.  Myron,  prévost  des  marchans  et 

Messieurs  les  eschevins Pasquier,  le  Bret  et 

Frezon. 

Il  y  eut  contestation  entre  Monsieur  le  Gouverneur 
et  Monsieur  le  Premier  Président  à  qui  iroit  l'un  chez 
l'autre.  Enfin  Monsieur  le  Gouverneur  vint  le  pre- 
mier chez  Monsieur  le  Premier  Président  et  après  y 
avoir  esté  deux  ou  trois  fois ,  Monsieur  le  Premier 
Président  vint  une  fois  chez  luy.  Depuis,  Monsieur  le 
Gouverneur  retourna  chez  Monsieur  le  Premier  Pré- 
sident, et  comme  le  jour  fut  assigné  que  l'on  se  devoit 
trouver  chez  Monsieur  le  Gouverneur ,  et  que  déjà 
Messieurs  les  Prévost  des  marchans  et  Eschevins  et 


<  Charles  du  Plessis,  seigneur  de  Liancourt,  comte  de  Beaumont- 
gur-Oise,  marquis  de  Guercheville,  conseiller  d'Etat,  premier  écuyer 
de  la  petite  écurie,  gouverneur  de  Metz,  gouyemcur  et  lieutenant- 
général  en  la  ville,  prévôté  et  vicomte  de  Paris,  chevalier  d'honneur  de 
la  Reine-Mère,  mort  en  1620. 


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d'arnauld  d'andilly.  109 

Monsieur  le  Procureur-général  (lequel  sur  la  fin  se  Aou8t  nw. 
trouvoit  aussi  au  Conseil) ,  s'y  furent  rendus,  on  en- 
voya demander  à  Monsieur  le  Premier  Président  s'il 
ne  vouloit  pas  venir.  Il  manda  que  non.  Depuis, 
Monsieur  le  Gouverneur  ne  fut  plus  chez  luy  et  ne  §e 
sont  point  veûs  depuis. 

Ces  contentions  furent  cause  que  M.  Arnaud,  in- 
tendant des  finances ,  après  avoir  fait  résoudre  une 
affaire  à  un,  l'alloit  faire  résoudre  à  l'autre.  Et  à 
cause  que  chacun  vouloit  signer  le  premier ,  il  faloit 
toujours  sur  un  mesme  sujet  faire  double  dépesche*. 

D'autant  que  l'armée  de  Monsieur  le  Prince  de- 
meura longtemps  aux  environs  de  Paris,  et  qu'il 
estoit  besoin  de  pourvoir  à  toutes  les  petites  villes 
voisines,  on  leur  fit  délivrer  quelques  armes  et  des 


*  «  M.  Arnauld  étant  donc  demeuré  avec  ce  pouvoir,  il  fit  tout  ce 
»  qu'il  put  pour  faire  que  M.  de'Liancourt,  gouverneur  de  Paris,  et 
»  M.  de  Verdun,  premier  président  du  Parlement,  vécussent  en  bonne 
»  intelligence  ;  et  cela  lui  réussit  durant  quelques  jours,  mais  ils  se 
»  rebrouillèrent  aussitôt,  et  ainsi  nul  d'eux  ne  pouvant  aller  chez 
»  l'autre,  ni  demeurer  d'accord  du  rang  de  leurs  signatures,  il  fallut 
»  faire  toutes  les  expéditions  doubles  et  il  les  signoit  avec  eux.  Feu 
»  M.  le  cardinal  de  Retz,  qui  n'étoit  alors  qu'évoque  de  Paris,  étoit  de 
»  ce  petit  conseil,  comme  aussi  M.  Mole,  procureur  général  et  depuis 
»  garde  des  sceaux,  et  M.  le  président  de  Chevry,  intendant  des 
»  finances,  en  fut  aussi  durant  quelques  jours,  après  lesquels  il  alla 
>•  au  voyage.  Je  faisois  en  leur  présence,  sur  le  bout  de  la  table,  toutes 
»  ces  lettres  et  ces  expéditions,  dont  le  nombre  étoit  presque  incroyable, 
»  parce  qu'une  partie  des  villes  d'alentour  de  Paris  étant  menacées  et 
»  dépourvues  de  toutes  les  choses  nécessaires  pour  leur  défense,  et 
»  l'armée  des  Princes  étant  venue  jusqu'à  Dammartin,  on  avoit  re- 
»  cours  de  toutes  parts  à  ce  petit  conseil,  qui  étoit  aussi  obligé  de 
»  pourvoir  en  môme  temps  à  plusieurs  choses  nécessaires  pour  l'armée 
»  du  Roi.  »  (Mémoires  d'Amauld  d'Andilly,  p.  367.) 


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liO  JOURNAL   INEDIT 

Âotnt  leii.  munitions  de  Tarsenal.  Et  pour  cet  eflfet  M.  Arnaud 
signoit  les  billets»  tantost  avec  Monsieur  le  Gouver- 
neur et  tantost  avec  Monsieur  le  Premier  Président , 
addressans  à  M.  de  la  Chevalerie,  lieutenant  en  l'Ar- 
senal, et  à  M.  Guillon,  controUeur  général  de  l'artil- 
lerie. 

Les  vaccations  estant  finies,  il  fut  besoin  d'em- 
prunter du  sieur  de  Choisy  quatre  cens  mil  livres 
pour  le  Roy,  dont  les  lettres-patentes  furent  addres- 
sées  à  MM.  de  Pontcarré*,  de  Boissise  et  Arnaud  ; 
et  depuis,  M.  de  Chasteauneuf  estant  revenu  du 
Berry,  on  luy  en  communiqua  aussi.  Depuis  ce  temps 
tous  les  susdits  Messieurs  du  Conseil  s'assembloyent 
quelques  jours  de  la  semaine  chez  Monsieur  le  Gou- 
verneur, et  de  là  en  avant,  on  ne  tint  plus  de  Conseil 
chez  Monsieur  le  Premier  Président. 

Des  affaires  de  conséquence  qui  se  résolvoyent  on 
en  dressoit  des  résultats  (cette  mesme  forme  avoit 
aussi  esté  observée  lorsque  l'on  s'assembloit  chez 
Monsieur  le  Premier  Président)  qui  estoyent  signez 
par  Monsieur  le  Gouverneur  et  MM.  de  Pontcarré, 
de  Chasteauneuf,  de  Boissise  et  Arnaud,  et  quelque-  . 
fois  par  Messieurs  les  Prévost  des  marchanset  Esche- 
vins,  lorsque  c'estoit  chose  qui  regardoit  l'intérest 
de  la  ville  de  Paris. 

Il  n'y  avoit  point  de  difficulté  en  la  signature  de 
ces  derniers  résultats,  pour  ce  que  M.  de  Chasteau- 
neuf, le  plus  ancien  de  Messieurs  du  Conseil,  ne  fai- 

*  Pierre  Camus  de  Pontcarré,  conseiller  d*£tat. 


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d'arnauld  d'andilly.  lit 

soit  aucune  difficulté  de  signer  après  Monsieur  le  Aourtwti. 
Gouverneur.  Et  néantmoins  je  luy  ay  oûy  dire  qu'il 
ne  le  voudroit  aucunement  quitter  à  Monsieur  le  Pre- 
mier Président,  lequel  avoit  toujours  accoustumé 
d'estre  précédé  par  le  plus  ancien  du  Conseil,  ainsi 
qu'il  s'estoit  pratiqué  chez  Monsieur  le  Chancelier  où 
M.  de  Villeroy  s'estoit  assis  au  dessus  de  luy  un  peu 
avant  le  voyage  du  Roy  en  aoust  1615, 


25.  M.  le  maréchal  de  Boisdaufin  arrive  à  Meaux 
au  rendez-vous  de  l'armée. 

27.  Le  Roy  arrive  à  Tours.  M.  du  Plessis  *  y  vid 
Sa  Majesté ,  sembla  réprouver  la  diligence  dont  on 
usoiten  ce  voyage,  toutefois  fort  modérément.  Con- 
clud  que  Messieurs  de  la  Religion  se  conduiroyent 
cette  année  comme  ils  avoyent  fait  l'année  passée. 

28.  Députés  de  la  Religion  de  l'assemblée  de 
Grenoble,  ouïs  par  le  Roy.  Proposent  trois  choses. 
La  première,  le  premier  article  du  Tiers-Estat.  La 
seconde,  la  plein  te  de  la  réception  du  Concile  de 
Trente  par  le  Clergé.  La  troisième,  que  Monsieur  le 
Prince  a  envoyé  vers  eux  les  assurer  qu'il  tiendra  la 
main  à  ce  qui  leur  est  assuré  par  les  traittez,  et  les 


*  Philippe  de  Mornay,  sei^eur  du  Plessis-Marly,  né  en  1540,  surin- 
tendant des  finances  du  roi  de  Navarre  en  1575,  surintendant  général 
de  la  Navarre  pendant  la  Ligue,  gouverneur  de  Saumur,  mort  en  1633. 
Ce  céfèbre  chef  des  Réformés,  ami  de  Henri  IV  et  antagoniste  du  car- 
dinal du  Perron,  a  laissé  plusieurs  ouvrages  et  entre  autres  des  Mé- 
moires. 


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H2  JOURNAL   INEDIT 

A0081 1618.  prie  aussi  de  se  joindre  à  luy  tant  pour  une  bonne 
réformation  que  pour  la  surséance.  Et  sur  le  tout,  ils 
ontdespesché  vers  luy  pour  le  remercier  de  sa  bonne 
affection  envers  eux.  —  Pour  le  surplus ,  rien.  Mais 
ont  prié  Dieu  de  bien  inspirer  Sa  Majesté  afin  de 
suivre  toujours  le  meilleur  conseil.  Ne  dirent  une 
seule  parole  que  Ton  pust  mal  interpréter*. 

Le  sieur  de  Foraise  pris  à  Chartres,  portant  des 
commissions  de  Monsieur  le  Prince.  Comme  on  tra- 
vailloit  à  son  procès,  M.  le  Prince  écrivit  à  M.  le  ma- 
réchal de  Boisdauphin,  qui  luy  fit  réponce.  Depuis, 
Monsieur  le  Prince  écrivit  aux  commissaires  dudit 
procès  des  lettres  qui  furent  surprises  ^. 

3t.  Leurs  Majestez  arrivent  à  Poitiers.  MM.  de 
Parabère'  et  de  la  Rochebaucourt  *  y  furent  inconti- 
nent, et  M""'  de  la  Trémoille^  aussi  •. 


*  Les  députés  de  TAssemblée  de  Grenoble  étaient  Champeaux,  Des- 
bordes-Mercier et  Mailleray  {Voy.  Mém.  de  Rohan,  p.  127);  Foy,  Merc. 
fr.^  t.  IV,  p.  211  etsuiv.,  les  remontrances  des  députés  de  cette  Assem- 
blée. 

*  Foy.,  dans  les  Mémoires  de  Math.  Mole,  p.  86,  le  compte  i-endu  de 
cette  affaire,  ainsi  que  les  lettres  dont  il  est  ici  question.  Cet  agent  de 
Monsieur  le  Prince  était  le  sieur  de  Beaulieu-Friayse,  suivant  le  récit 
de  Mole. 

3  Henry  de  Baudean,  comte  de  Parabère,  marquis  de  la  Mote-Sainte- 
Heraye,  gouverneur  du  Poitou,  mort  en  1653. 

*  Jean  de  Gallard  de  Béarn,  comte  de  Brassac,  baron  de  la  Roche- 
beaucourt,  ambassadeur  à  Rome,  gouverneur  de  Saintonge,  surinten- 
dant de  la  maison  de  la  Reine,  mort  en  1645. 

s  Charlotte  Brabantine  de  Nassau,  fille  de  Guillaume  de  Nassau, 
H*  du  nom,  prince  d'Orange,  veuve  de  Claude,  seigneur  de  la  Tré- 
moille,  duc  de  Thouars,  prince  de  Tarente,  pair  de  France,  mort  en 
1604.  La  terre  de  la  Trémoille  est  en  Poitou. 

8  Voy,  Pontchartrain,  p.  99  ;  Richelieu,  p.  269.  " 


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d'arnauld  d'andilly.  113 

!•'.     M.  de  Brison,  gendre  de  M.  de  Chambaut    septembre  lei». 
Gouvernet,  fait  instance  au  Roy  au  nom  de  rassem- 
blée de  ceux  de  la  Religion  de  retarder  son  voyage. 
Congnée  envoyé  par  Monsieur  le  Prince  en  l'assem- 
blée de  Gien,  fut  cause  de  cette  seconde  députation. 

M.  de  Lesdiguières  a  dit  aux  députez  de  la  Reli- 
gion qu'ils  ne  devoyent  ni  ne  pouvoyent  tenir  que  le 
chemin  des  remonstrances. 

Environ  ce  temps,  Madame  demeure  malade  à 
Poitiers  de  la  petite  vérolle. 

M.  de  Sully  vient  trouver  le  Roy  au  port  de  Pile, 
avec  MM.  de€hastillon  *  et  de  la  Boulaye  ^ 

M.  de  Rohan  fait  le  malade  et  écrit  au  Roy  pour 
différer  le  mariage,  et  s'excuse  sur  ce  que  M.  de 
Loudrière  luy  avoit  esté  envoyé  par  l'assemblée  de 
Grenoble. 

M.  de  Sully  ne  logea  pas  au  commencement  dans 
Poitiers,  à  cause  du  différent  avec  M.  de  la  Roche- 
foucaut,  mais  il  y  logea  depuis,  et  parla  bien  pour  le 
service  du  Roy. 

M.  de  la  Trémoille  •  ne  bouge  de  Vitré  et  fait  le 
malade. 

^  Gaspard  de  Coligny,  comte  de  Coligny,  seigneur  de  Ghastillon,  né 
en  1584,  amiral  de  Guyenne,  gouverneur  de  Montpellier,  colonel-géné- 
ral des  gens  de  pied  français  en  Hollande  en  1614,  gouverneur  d*Ai- 
gues-Mortes  en  1616,  maréchal  de  France  en  1622,  commanda  en  Pié- 
mont en  1630,  gagna  la  bataille  d'Avein  en  1635,  soumit  Arras  en  1640, 
perdit  la  bataille  de  la  Marfée  contre  le  comte  de  Soissons  en  1641, 
mort  en  1646. 

»  Philippe  Eschalard,  baron  de  la  Boulaye,  gouverneur  de  Fohtenay- 
le-Comte  en  Poitou,  mort  en  1616. 

»  Henry,  seigneur  de  IaTremoille,ducdeThouars,princedeTarente  et 

8 


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114  JOURNAL  INiPIT 

septemhrf  i««.  ?•  Desseln  de  Monsieur  le  Prince  sur  la  Fera, 
inutile. 

Passage  d^  Chauny  refusé  par  M»  de  Genlis  *  à 
Mt  du  Mayne. 

9,  L'armée  du  Roy  part  de  Meaux,  va  le  10  à 
Grespy  en  Valois.  M,  du  Mayne  avoit  voulu  passer 
dans  Chauny,  mais  M.  de  Genlis  luy  refusa  le  passage. 

13.  M.  de  Boisdauphin  prend  CreiJ,  Rembaut 
estoit  dedans. 

L'armée  du  Roy  estoit  allée  le  11  à  Pont-Sainte- 
Maxence. 

Celle  de  M.  le  Prince  attaqua  le  12  une  barricade 
du  faubourg  de  Roye,  Montebene^  avec  six  cens 
hommes  la  repoussa  \ 

On  dit  que  M.  de  Sully  se  retira  sans  prendra 
congé  du  Roy. 

M.  le  Maréchal  d'Ancre  témoigna  avoir  découvert 
une  entreprise  par  le  moyen  de  laquelle  on  faisoit 
sauter  le  corps  de  logis  dans  lequel  il  couchoit  dans 
la  citadelle  d'Amiens,  et  des  ruines  on  combloit  le 
fossé  et  ainsi  on  surprenoit  la  place. 

Le  Roy  répond  aux  cayers  de  l'assemblée  de  Gre- 
noble. Brevet  des  villes  de  seureté  continué  pour  dix 
ans.  Ils  demandoyent  quatre  cent  mil  livres  pour 


de  Talmond,  comte  de  Laval,  né  en  1599,  pair  de  France,  fut  au  sMge  de 
la  Rochelle,  où  il  abjura  le  calvinisme  en  1628,  mestre  de  camp  de  I» 
cavalerie  légère  en  1633,  servit  au  siège  de  Corhieen  1686,mort  en  1674. 

*  Gilles  Brulart,  seigneur  de  Genlis,  secrétaire  d'Etat,  baiHy  et  gou- 
verneur de  Chauny,  gentilhomme  ordinaire  de  la  Chambre  du  Roi. 

*  Cyprien  de  Montebenne,  maréchal  de  camp  des  armée»  du  Roi. 

*  roy.  Mère*  fr.^  t.  iv,  p.  244* 


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d'arnauld  d'andilly.  115 

entretenir  les  Pasteurs,  qui  est  deux  cent  mil  livres  septembre  mu 
d'augmentation  :  cinq  cens  mil  livres  pour  l'entre- 
tenement  des  garnisons.  Il  y  avoit  quelques  autres 
articles  semblables.  Le  reste  contenoit  le  !•'  article 
du  Tiers-Estat,  le  Condlede  Trente,  la  recherche  de 
l'assassinat  conmiis  en  la  personne  du  feu  Roy,  le 
seraient  du  sacre,  et  quelques  autres  articles  cy-de- 
vant  refusez  aux  autres  cayers,  comme  de  deux  dé- 
putez au  lieu  de  six  ;  qu'ils  nommeront  trois  gentils- 
hommes au  Roy  pour  en  choisir  un,  avenant  vacca- 
tion  des  gouvememens  des  places  de  seureté  ;  que 
Sully,  Mouron  et  Rangé  soyent  places  de  seureté  *. 

Paquet  pris  à  Favas  *,  passant  par  Tholose  sans 
parler,  lequel  estoit  plein  de  mauvaises  instructions. 
Les  plus  fâcheux  se  pleignoient  de  ce  que  M.  de 
Lesdiguières  ne  vouloit  estro  de  la  partie. 

Le  serment  envoyé  par  l'assemblée  fut  juré  par 
les  gouverneurs  des  places  de  Poitou,  à  la  réserve 
du  service  du  Roy. 

Un  advocat  nommé  Goignée  faisoit  feu  à  l'assem- 
blée contre  le  service  du  Roy  et  contre  la  Reyne. 

On  envoyé  au  Parlement  par  Montcassin  '  la  dé- 
claration contre  Monsieur  le  Prince*. 


*  Voy.  Pontchartraîn,  p.  100. 

2  Le  sieur  de  Favas,  particulièrement  attaché  à  Monsieur  le  Prinoe,. 
était  un  des  plus  ardents  réformés.  Il  fut  souyent  chargé  de  misiions 
importantes  et  périlleuses. 

•  Charles  de  Foix,  seigneur  de  Villefranche  et  de  Montcassin,  gen- 
tilhomme ordinaire  de  la  Ghamluis  du  Roi. 

A  Voy,  cette  déclaration,  Herc,  fr,^  t.  fv,  p.  236^  Va\f,  aussi  Mém.  de 
Math.  Mole,  p.  91. 


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116  JOURNAL    INÉDIT 

septembre  leis.  Oïl  avoît  proposé  d'cnvoycr  à  M.  de  Lesdiguières 
les  cayers  de  ceux  de  la  Religion  répondus  par  le 
Roy,  avec  charge  de  les  délivrer  lorsque  l'assemblée 
auroit  nommé  ses  députez  ordinaires,  et  qu'ils  se- 
royent  sur  le  point  de  se  séparer,  mais  enfin ,  on  les 
rendit  aux  députez  mesmes  et  on  leur  rendit  raison 
de  toutes  les  réponces. 

!&.     Madame  retombe  malade  d'un  flux  de  sang. 

15.  La  déclaration  du  Roy  contre  Monsieur  le 
Prince  (sur  le  sujet  de  laquelle  M.  de  Montcassin 
estoit  venu)  est  présentée  au  Parlement.  Cinq  opi- 
nèrent seulement.  Le  mecredy  15  vingt-cinq  opi- 
nèrent; lejeudy,  cent  (dont  quatre-vingt-dix-sept 
furent  d'un  avis)  ;  le  vendredy  le  reste.  Il  y  en  avoit 
trente  qui  estoyent  d'avis  de  la  vérification  pure- 
ment et  simplement.  Mais  ils  furent  contrains  de 
revenir  à  un  des  deux  autres  avis,  qui  estoyent:  celuy 
de  Tarrest,  qui  avoit  soixante  et  seize  voix,  et  Tautre 
qui  en  avoit  soixante  treize.  Adjoustoit,  que  les  lettres 
seroyent  dès  à  présent  enregistrées,  et  quant  au  sur- 
plus, l'avis  de  Tarrest;  ainsi,  il  ne  passa  que  de  trois 
voix  *. 

L'armée  du  Roy  va  à  Verberie,  et  tost  après,  à 
Vemeûil,  où  elle  estoit  le  18. 

Le  Roy  d'Espagne  arrive  à  Burgos  avec  ses  en- 
fans. 

M.   le  comte  de  Saint-Paul,   qui  estoit  allé  en 

*  Voy,  Merc.  fr.  U  iv,  p.  237,  Tarrôt  rendu  par  le  Parlement,  le 
1 8  septembre,  contre  Monsieur  le  Prince  et  les  autres  rebelles  ;  Voy,  aussi 
Ménn.  de  Math.  Mole,  p.  95. 


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d'arnauld  d'andilly.  117 

Guyenne,  se  remet  bien  avec  le  Roy,  et  alla  trouver    septembre  an. 
le  Roy  à  Bordeaux  huit  ou  dix  jours  après  qu'il  y 
estoit  arrivé.  On  dit  que  M.  de  Rohan  ne  luy  avoit 
voulu  céder  la  charge  de  lieutenant  -  général  en 
Guyenne,  c'est-à-dire,  le  conunandement  des  forces*. 

La  Reyne  fut  malade  quelques  jours  à  Poitiers. 

Quelques  recrues  de  Navarre  et  Picardie  qui  al- 
loyent  joindre  l'armée  furent  défaites  par  M.  du 
Mayne,  au  passage  de  la  Braisle^ 

23.     L'armée  du  Roy  va  à  Barron. 

Vingt  conseillers  de-  la  Cour  vont  à  la  chambre  • 
des  vaccations.  M.  de  Murât ^  portoitla  parole.  Ils 
soustiennent  que  l'arrest  publié  estoit  faux ,  n'ayant 
point  esté  résolu  que  l'on  nommeroit  Monsieur  le 
Prince.  Ils  demandent  à  M.  Gourtin,  rapporteur , 


^  Le  duc  de  Rohan  n'avait  pas  encore  rompu  complètement  avec  la 
Cour,  conmie  le  prouve  la  lettre  suivante  écrite  par  lui  à  M.  de  Ville- 
roy,  le  20  septembre  1615,  dont  je  possède  l'autographe  :  «  Monsieur, 
n  Vous  apprendrez  par  le  bonhomme  la  Ferté  de  mes  nouvelles.  Sy  j'ay 
»  rhonneur  de  vous  voir  à  Angoulesme  comme  j'espère,  je  vous  parle- 
»  ray  selon  ma' franchise,  car  quoy  quelle  soit  quelquefois  mal  inter- 
»  prêtée,  je  ne  puis  me  persuader  que  ce  soit  de  vous,  je  vous  supplie 
»  donc  de  le  croire  en  ce  qu'il  vous  dira  de  ma  part,  j'addresseray 
»  tousjours  mes  prières  à  Dieu  pour  la  prospérité  du  Roy  et  de  la 
»  Reyne,  j'ay  deffendu  audit  sieur  de  la  Ferté  de  parler  d'aucune 
n  affaire  particulière  qui  me  concerne,  il  faut  qu'elles  cèdent  aux  gé- 
»  nérales.  Pour  vostre  service  particulier  je  ne  le  feray  jamays  céder  à 
»  aucun  autre.  Car  je  Vous  suis  trop  obligé  pour  que  jamays  vous 
»  manque,  Monsieur, 

n  Vostre  bien  humble  serviteur, 

»  Henry  de  R^^an.  » 
De  Lor,  ce  fd^  septembre  1618. 

3  Voy.  Fontenay-Mareuil,  p.  293. 

s  Antoine  ou  Arnaud  de  Murât,  conseiller  au  Parlement  de  Paiâs. 


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118  JOURNAL   INÉDIT 

septembre  t««.  pouTquoy  il  Tavoit  signé.  Il  répond  que  le  Premier 
Président  Tavoit  envoyé  quérir,  Tavoit  tenu  plus  de 
deux  heures,  l'avoit  pressé  instamment,  luy  avoit  dit 
que  c'estoit  chose  nécessaire  pour  le  service  du  Roy, 
que  le  sieur  de  Montcassin  estoit  présent,  lequel 
Tavoit  menacé,  disant  qu'il  avoit  dès  fils  à  la  Gôur, 
et  qu'à  la  fin  il  avoit  esté  forcé  de  le  signer.  Ces 
Messieurs  ccmtinûent  à  faire  de  grandes  pleintes,  et 
demandent  acte  de  ce  que  disoit  M.  Courtin.  M*  le 
président  dé  Bellièvre,  qui  présidoit,  dit  que  la  com- 
•  pagnie  se  souviendroit  bien  de  ce  qui  se  seroit  passé  ; 
qu'au  surplus,  il  ne  savoit  comme  ils  s'estoyent  as- 
semblez n'en  ayant  aucun  pouvoir  ;  que  quant  à 
l'arrest,  il  ne  voioit  pas  pourquoy  ils  se  pleignoyent 
tant,  veû  qu'il  n' avoit  point  esté  dit  qu'on  en  excep- 
teroit  Monsieur  le  Prince  ;  que  s'ils  l'avoyent  en- 
tendu, ils  avoyent  eu  tort  de  ne  pas  le  dire. 

24.  Les  habitans  de  Chauny  forcent  M.  de  Guise 
à  se  retirer. 

26.     L'armée  du  Roy  va  à  Dampmartin*. 

Ce  jour  arriva  nouvelle  à  Leurs  Majestez  par  lestres 
de  M.  de  Lesdiguières,  que  les  députez  de  la  Reli- 
gion s'estoyent  retirez  de  Grenoble,  sans  attendre 
leurs  cayers.  Ils  envoyèrent  deux  députez  vers  le 
Roy,  les  sieurs  de  Saint-Privat  et  de  Quergroîs,  qui 
est  résidant  à  Saint-Jus  *. 


*  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  294. 

2  Voy.  Merc.  fr,^  t.  iv,  p.  264,  l'afis  donné  par  le  marédial  de  Les- 
diguières en  rAflsemblée  de  Grenoble. 


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d'arnauld  d'andilly.  110 

M.  de  Rohan  vint  jusques  à  Saint*Maixant,  sans 
vouloir  aller  trouver  Leurs  Majestez  à  Poitiers. 

M.  de  Sully  fut  tenu  pour  suspect  à  La  Rochelle, 
à  cause  qu'il  avoit  esté  à  la  Cour. 

Ceux  de  la  Religion ,  de  Guyenne,  ont  fait  une 
assemblée  à  ïonneins,  pour  résoudre  d'empêcher  le 
passage  du  Roy  ;  mais  ils  n'y  ont  rien  conclu.  Oh 
tient  qu'ils  se  sont  rassemblez  à  Sainte-Foy  àcettefm. 

28.     Leurs  Majestez  partent  de  Poitiers. 

Monsieur  le  Prince  entre  dans  Chasteau^-Thierry, 
où  il  estoit  venu  le  jour  de  devant  *. 

30»  L'armée  du  Roy  va  à  Meaux^  pensant  aller 
au  secours  de  Chasteau-Thierry. 


septeittl»lt  tMi. 


5.  M.  de  Fossez  ^  défait  le  régiment  de  Canlay*  à 
Villeblevin,  à  trois  lieues  de  Montereau  *. 

6.  Monsieur  le  Prince  entre  dans  Espemay.  Les 
habitans  avoyent  envoyé  vers  luy,  pour  luy  offrir  de 
l'argent,  à  condition  qu'il  n'iroit  point  à  eux.  Mon- 
sieur le  Prince  les  prit ,  les  mena  avec  luy  et  me- 


Octobre. 


*  Voy,  Fontenay-MareuU,  p.  295  ;  Pontchartrain,  p.  101  et  suiv.  ; 
Merc.  fr.y  t.  iv,  p.  248. 

*  Sous-lieutenant  des  gendarmes  de  la  reine-mère,  gouverneur  de 
Sainte^Menehould.  Arnauld  d'Andilly  et  Fontenay-Mareuil  citent  sou- 
vent ce  personnage  ;  je  ne  sais  s'il  est  le  môme  que  Gabriel  de  la 
Vallée  Fossez,  marquis  d*Everly,  maréchal  de  camp,  conseiller  d'Etat, 
gouverneur  de  Lorraine,  de  Montpellier  et  de  Verdun,  mort  en  1636, 
qui  ayant  épousé  Madeleine  du  Val,  fille  de  René  du  Val,  seigneur  de 
Fontenay  et  de  Mareuil,  était  le  beau-frère  du  marquis  de  Fontenay, 
Fauteur  des  Mémoires,  lui-même  parent  d' Arnauld  d'Andiily. 

*  Régiment  que  le  baron  û%  Ganlay  avait  levé  pour  Mcmsiemr  le  PHnce. 

*  Voy.,  sur  cette  affaire»  Fontenay-Mareuil,  p«  205;  Mert*  fr,^  t*  iv, 
p.  2A9« 


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120  JOURNAL   INEDIT 

octQbreiMi.  naça  les  habitans  de  les  faire  pendi-e  s'ils  ne  luy 
ouvroyent  les  portes.  Sur  cela,  ils  se  rendirent  Ils 
avoyent  promis  à  M.  le  Maréchal  de  Boisdaufin  de 
tenir  jusques  au  vendredy  en  suivant.  Il  fut  à  deux 
lieues  d'eux  le  mercredy,  et  avoit  fait  tirer  son  canon 
à  Montméril  pour  les  avertir,  et  il  trouva  qu'ils  es- 
toyent  rendus  le  jour  de  devant  *. 

9.    Leurs  Majestez  arrivent  à  Bordeaux  ^. 

Le  3,  l'armée  du  Roy  alla  à  Fermoustier,  le  4  à 
la  Ferté-Gaucher,  et  deux  jours  après  à  Montmirel,  et 
trois  ou  quatre  jours  après  à  Sézane.  Le  12,  elle  va 
de  Sézane  à  Barbonne,  et  le  là  à  Nogent-sur-Seine. 

14.     Monsieur  le  Prince  ayant  passé  l'Aube  à 

Planty,  passe  la  Seine  à  Méry,  et  son  canon  à  gué. 

On  dit  qu'il  contraignit  les  habitans  de  Méry  de 

refaire  en  peu  d'heures  leur  pont  qu'ils  avoyent  rompu 

.   auparavant. 

Faute  de  M.  de  Praslin,  lequel,  ayant  huit  cens 
chevaux  et  trois  mille  hommes  de  pied,  ne  chargea 
pas  M.  du  Mayne,  près  de  Sézane,  qui  s'estoit  avancé 
avec  cinq  cens  chevaux  et  avoit  une  lieue  de  retraite 
par  un  marais  où  l'on  ne  pouvoit  passer  que  trois 
à  trois.  En  ceste  occasion,  M.  de  Longueville  voyant 
M.  du  Mayne  en  danger,  alla  à  luy  avec  quinze  che- 
vaux et  se  pensa  noyer  dans  le  marais  \ 


'  Fay,  Pontchartndn,  p.  106  ;  Merc.  fr,,  t.  iv,  p.  250. 

*  Suivant  Pontchartrain,  p.  107,  l'arrivée  à  Bordeaux  eut  lieu  le  7. 
Richelieu,  p.  273,  donne  la  même  date  que  Pontchartrain  ;  le  Merc.ft., 
t.  IV,  p.  280,  de  même. 

s  Voy,,  sur  toutes  ces  affaires,  les  Mémoires  de  Fontenay-Blareiiil 


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d'arnauld  d'andilly.  121 

Pendant  que  M.  du  Mayne  faisoit  ferme  avec  par-     o«*obre  leik 
tie  de  la  cavalerie,  Tinfanteric  de  leur  armée  s'avan- 
çoit  vers  Méry  ;  et  ils  ont  depuis  fait  plusieurs  fois 
semblable  chose. 

16.  Le  dessein  de  Monsieur  le  Prince  estant 
d'aller  à  Sens  où  il  avoit  grande  faction  et  où  il 
eust  esté  reçeu,  M.  le  Maréchal  de  Boisdaufin  y  en- 
voya devant  M.  de  Fossez  avec  les  gendarmes  de  la 
compagnie  de  la  Reyne  et  le  régiment  de  Navarre, 
et  suivit  après.  M.  de  Fossez  arriva  à  Saint-Clément, 
à  demy  quart  de  lieue  de  Sens,  le  jeudy  à  minuit. 
Envoyé  à  Tinstant  deux  gentilshommes  demander 
d'estre  reçu  dans  le  faubourg  d'Yonne  qui  est  une  isle 
forte.  Les  habitans  refusent.  M.  de  la  Verrière,  gou-' 
vemeur,  prie  d'attendre  au  lendemain.  Le  lende- 
main, M.  de  Fossez  va  dans  la  ville  avec  vingt 
chevaux,  trouve  les  habitans  en  rumeur.  Enfin, 
ils  accordent  qu'il  entreroit  au  faubourg.  Les  habi- 
tans de  ce  faubourg  dient  qulls  ne  le  recevront  point. 
M.  de  Fossez ,  sur  cela ,  dit  que  tous  les  serviteurs 
du  Roy  se  retirassent,  et  qu'il  forceroit  le  reste.  11 
approche  avec  son  régiment  en  bataille.  Ils  se  ré- 
duisent. Monsieur  le  Maréchal  arrive  six  heures 
après.  M.  de  Praslin  vint  devant  avec  vingt-cinq 
chevaux,  trouve  le  pont  le  vis  levé  contre  M.  de 
Fossez;  est  reçeu  dans  la  ville.  Un  habitant  luy  vint 


qui  faisait  ses  premières  armes  dans  cette  campagne  sous  les  ordres  de 
M.  de  Fossez  (Font-Mareuil,  p.  295  et  suiv.)>  et  les  Mémoires  de  Bas- 
sompierre  qui  avait  un  commandement  dans  l'armée  du  Roi  (même 
collection,  2*  série,  t.  20). 


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122  JOURNAL   INÉDIT 

Octobre  H».  (lipQ  qQ^ii  vouloit  entrer  plus  de  gens  qu'il  n'avoit 
dit.  Il  répond  qu'il  ne  trouvoit  pas  bon  qu'on  luy 
voulust  faire  la  loy.  Cet  habitant  se  retire,  fait  re- 
prendre les  armes  à  tous.  M.  de  Praslin  se  retire, 
et  fait  le  logement  de  Tarmée  dans  le  faubourg. 
Les  habitans  ferment  leurs  portes,  paraissent  en 
armes  sur  les  remparts.  M.  le  Maréchal  de  Bois- 
daufin,  contre  l'avis  de  tous,  va  coucher  dans  la 
ville  ;  y  est  reçeu  sans  sa  garde  de  Suisses.  Les  ha- 
bitans font  commandement  à  tous  soldats  de  sortir, 
sur  peine  de  la  vie.  Le  lendemain ,  ils  s'apprivoi- 
sèrent, ouvrirent  les  portes  qu'ils  avoyent  condam- 
nées^ firent  peu  de  garde  à  toutes ,  laissèrent  entrer 
'  librement  tous  les  soldats.  Monsieur  le  Maréchal 
voulut  bailler  vingt^deux  billets  à  vingtnieux  fac- 
tieux pour  sortir.  Les  autres  habitans  intercédèrent 
pour  eux  et  furent  cause  qu'ils  demeurèrent.  Il  les 
fit  tous  jurer  et  crier  :  Vive  le  Roy.  Le  soir  mesme 
du  16,  Monsieur  le  Prince  vint  une  heure  après 
M.  de  Boisdaufln,  loger  à  Malay,  à  un  quart  de 
lieue  d'un  des  faubourgs  de  Sens*  Sans  la  diligence 
de  M.  de  Boisdaufin,  Sens  estoit  perdu.  Le  soir  qu'il 
partit  de  Nogent,  les  paysans  de  Grange,  où  il 
coucha,  se  firent  tirer  quatre  coups  de  canon.  Il  y 
en  eut  un  de  perdu*. 

18.     Mariages  du  Roy  à  Bordeaux  et  de  Madame 
à  Burgos^ 

*•  Voy.  Fonteiiâ3F-Mareui],  p.  900  \  Mém.  d»  â'Esti^»,  inOme  coll., 
t.  XVI,  p.  S96;  Jfvrff*  fr,^  t.  iv,  p»  950» 
2  Voy,  Brienne,  p.  307  ;  Pontchartrain,  p.  ÎOO.  LQMefc,  /V.,  t.  iv, 


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d'a«nauld  d'andilly.  12S 

21.     Madame  part  de  Bordeaux  pour  aller  à      oetobreiMi. 
Bayonne.  M.  de  Guise  conduit  Madame  à  Bayonne« 
Les  villes  de  Tartau  et  Mont-de-Marsan,  hugue* 
nettes,  envoyent  offrir  leurs  portes,  et  d'abattre  de 
leurs  murailles,  si  elles  n'estoyent  assez  grandes  *. 

Madame  séjourne....  jours  à  Bayonne,  sur  ce 
qu'on  dit  que  la  gouvernante  de  l'Infante  estoit 
morte.  Le  Roy  d'Espagne  amena  sa  fille  jusques 
à  Saint-Sébastien* 

M.  le  Maréchal  de  Boisdaufin,  ayant  sceu  le  matin 
que  Monsieur  le  Prince  avoit  passé  Yonne  avec  toute 
son  armée,  envoya  M.  de  Praslin  avec  quelque  gen- 
darmerie, et  ensuite  fut  enlevé  le  quartier  de  M.  de 
Luxembourg  à  la  teste  de  l'armée  ennemie  ^. 

Depuis,  M.  le  Maréchal  de  Boisdaufin  ayant  sceu 
que  Monsieur  le  Prince  avoit  dessein  sur  Chastillon* 
sur-Loin ,  il  le  devança  et  s'y  alla  loger*  Il  y  estdt 
encore  le  26.  De  là,  il  alla  à  Bony. 

2&.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  entreprend  le  -siège 
de  Clermont  ;  fait  prendre  ceste  mesme  nuit  la  basse 
ville  par  pétard  ;  et  après  avoir  depuis  fait  faire  deux 
tranchées,  et  que  M.  Arnaud'  eut  mis  le  canon  à  la 

p.  â67  et  siiiv.,  donne  de  curieux  détails  sur  la  magniâcence  de  cette 
Bolennité  et  des  fôtes  auxquelles  elle  donna  lieu.  C'est  par  erreur 
qu'Arnauld  d*Andilly  dit  que  le  mariage  du  roi  se  fit  à  Bordeaux  et 
celui  de  Madame  à  Burgos.  Les  mariages  se  firent  par  procuration, 
celui  de  Madame  à  Bordeaux  et  celui  du  roi  à  Burgos.  Le  duc  de  Guise 
représentait  le i prince  Philippe,  et  le  duc  d'Usseda,  fils  du  duc  de 
Lerme,  représentait  Louis  XIII. 

^  Voy,  Pontchartrain,  p.  109;  Richelieu,  p.  374;  Af^e»  fr*^  t.  iv,  p^  S09. 

*  ^.  les  détails  de  cette  afiEaire,  Merc,  fr,,  U  iv,  p*  257. 

>  Pierre  Amauld,^  oncle  d'Arnauld  d*Andilly,  mestre  de  camp  géné- 


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i2/t  JOURNAL   INEDIT 

Octobre  im.  sienne,  à  la  portée  du  pistoUet,  ceux  du  chasteau  se 
rendirent  à  composition  de  sortir,  enseignes  dé- 
ployées, et  d'avoir  passe-port  pour  aller  en  seureté 
jusques  à  Soissons.  Il  y  avoit  quelques  quatre  cens 
hommes  et  quelques  carabiniers  conunandez  par  un 

nommé *. 

M.  de  Béthencourt*  y  est  mis  gouverneur.  De- 
puis ,  M.  le  Maréchal  d'Ancre  vint  à  Paris  loger  à 
l'hostel  de  Montmorency,  où  M.  de  Portes  le  traitta. 
11  envoya  quérir  Monsieur  le  Premier  Président  et 
Messieurs  de  la  ville  sur  le  sujet  de  savoir  d'eux  ce 
qu'ils  vouloyent  faire  de  Clermont  '. 

PASSAGE  DB  BONY. 

26.  Monsieur  le  Prince  ayant  investy  les  Cara- 
bins de  l'armée  du  Roy  logez  à...  ,  M.  le  maréchal 
de  Boisdaufln  les  alla  dégager  ;  et  Monsieur  le  Prince 
s' estant  mis  en  bataille  sur  une  colline  voisine,  M.  de 
Boisdaufln  flt  tirer  son  canon  sur  ses  trouppes,  et  les 
ébranla  tellement  qu'il  fut  obligé  de  quitter  cette 


rai  des  Carabins,  mestre  de  camp  dti  régiment  de  Champagne,  gouver- 
neur du  Fort-Louis,  mort  en  162/^.  Vay,  en  tête  des  Mémoires  d*Arnauld 
d*Andilly  la  Notice  pompeuse  qu*il  consacre  à  ce  personnage,  et  où 
il  dit  notamment  que  le  maréchal  d*Ancre  ayant  tu  agir  son  onde 
dans  toutes  les  occasions  et  particulièrement  aux  sièges  de  Clermont 
et  de  Soissons,  conçut  tant  d*estime  pour  lui  qu'il  lui  promit  le  com- 
mandement de  six  mille  Liégeois.  (Ed.  citée,  t.  xrxni,  p.  327.) 
^  Le  sieur  de  Haraucourt,  suivant  le  récit  du  Merc.  ft, 

>  Le  vit  omte  de  Béthencoort. 

>  Voy.  Pontchartrain,  p.  111;  Fontenay-Mareuil,  p.  322;  Mercfr.^ 
t.  nr,  p.  802. 


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d'arnaold  d'andilly.  125 

colline,  et  s'aller  mestre  en  bataille  sur  une  autre      octobw  tm. 
proche,  où  Monsieur  le  Prince  mit  son  canon  en 
lieu  très  avantageux.  Monsieur  le  Maréchal  T ayant 
ainsi  poussé,  se  mit  en  bataille  sur  la  mesme  colline 
qu'il  avoit  quittée  (les  soldats  marchoyent  en  sau- 
tant) ,  et  ainsi  il  y  avoit  un  vallon  entre  les  deux 
armées,  lequel  estoit  inaccessible,  pour  aller  à  Mon- 
sieur le  Prince,  du  costé  de  la  corne  droitte  de  nostre 
bataille,  mais  fort  accessible  du  costé  de  la  corne 
gauche.  Les  canons  commencèrent  à  tirer  de  part 
et  d'autre  ;  celuy  de  Monsieur  le  Prince  nous  en- 
dommageoit  fort,  à  cause  qu'il  estoit  en  lieu  avanta- 
geux, tellement  que  l'on  fit  retirer  nos  soldats  d'alen- 
tour du  nostre,  et  les  rangea-t-on  le  long  des  hayes. 
Ce  que  voyant  M.  du  Mayne,  il  vouloit  charger, 
disant  que  nosj;re  canon  estoit  abandonné  ;  mais  • 
M.  de  Buillon  luy  répondit  que  tant  qu'il  veiToit  de 
ce  bois  là  (montrant  nos  piquiers) ,  il  se  gardast  bien 
de  charger  de  cavalerie.  M.  de  Boisdaufin  eût  eu 
avantage  à  donner  bataille,  car  sa  corne  gauche  trou- 
voit  Monsieur  le  Prince  en  une  colline  pleine  de  bois, 
et  au-dessus  de  laquelle  il  y  avoit  du  bois  et  des  - 
vignes ,  lieux   avantageux  pour  l'infanterie.  Joint 
qu'au  dessus  de  la  dite  colline,  il  y  avoit  un  fort 
petit  champ  pour  la  cavalerie  de  Monsieur  le  Prince, 
ce  qui  luy  estoit  un  extrême  désavantage.  Chacun 
au  Conseil  fut  d'avis  de  donner  bataille,  et  mesme 
M.  dp  Refuge,  qui  opina  fort  courageusement.  M.  de 
Boisdaufin  seul  ne  le  voulut,  ce  qui  fâcha  et  décou- 
ragea fort  les  soldats,  les  deux  armées  ayant  esté  à 


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OdobrtMllk 


i%  JOURNAL    INliDIT 

veûe  depuis  neuf  heures  du  mafîn  josques  à  trois 
heures  après  midy.  Le  soir  estant  proche»  M.  le  ma*- 
réchal  de  Boisdaufin  alla  loger  au  Piquet,  à  deux 
lieues  de  là.  (Il  devoit  loger  sur  le  champ  mesme  » 
ou  tout  contre;  il  n'auroit  pas  esté  plus  incommodé), 
Monsieur  le  Prince  ayant  veû  que  M,  le  maréchal 
de  Boisdaufin  avoit  quitté  cexîhamp,  il  y  envoya  de 
sa  cavalerie ,  comme  pour  dire  qu'il  luy  estoit  de- 
meuré. Il  alluma  force  mèche  sur  la  colline  et  des 
feus.  Et  cela  fait,  commença  à  faire  passer  son  armée 
à  gué  à  Bony  avec  quelques  bateaux  qu'il  avoit  ar- 
restez.  On  dit  que  Saint-Paul,  qui  menoit  un  régi- 
ment, voyant  que  cela  estoit  trop  long,  défit  ses 
chausses  et  passa  le  premier  à  gué.  Les  habitans  de 
Bony  fournirent  six  cens  pains  à  l'armée  de  Monsieur 
le  Prince.  Ce  fut  sans  doute  par  coçnmandement  de 
M.  de  Nevers ,  lequel  s'aboucha  avec  Monsieur  le 
Prince  \ 


Novembre. 


1,     Monsieur  le  Prince  fit  sa  feste  à  Sancerre. 


*  yoy,  Merç,  fr,^u  iv,  p.  261  ;  Brieune,  p,  307;  Pontcbartraio,  p.  111  ; 
Richelieu,  p.  277;  Fontenay-Mareuil,  p.  303;  Bassompierre,  môme 
coll.,  2*  série,  t.  ]LX,  p.  81.  Lei  ttratëgiftet  peuvent  comparer  le  récit 
d'Arnauld  d'Andilly  avec  celui  du  maréchal  de  BaMompierre,  qui  com* 
mandait  dans  cette  affaire,  et  celui  de  Fontenay-Mareuil,  qui  s^y  trou- 
vait aussi,  sous  les  ordres  de  M.  de  Possex.  Suivant  Fontenay-Mareuil, 
le  maréchal  de  Boisdauphin  fit  de  gr«nde«  fautes  dans  cette  Journée  et 
perdit  l'occasion  de  terminer  la  guerre  en  anéantissant  l'armée  des 
Princes.  Voy,  dans  les  Mémoires  de  Fontenay-Mareuil  le  jugement  qu'il 
porte  «ur  le  maréchal  de  Boisdauphin  (p.  309-310)  et  qu'il  termine  par 
ceâ  mots  :  a  C'est  pourquoy  les  Princes  doivent  bien  regarder  à  qui  ils 
donnent  leurs  armées,  et  que  ce  ne  soit  pas  par  faveur  ny  autre  con- 
sidération, lee  meilleura  ny  estant  pas  trop  bona.  >• 


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D'AftNAULD    d'ANDILLY.  197 

Estant  en  Berry,  il  voulut  attaquer  Aubîgny  ;  maïs  Rovembrem». 
il  y  avoit  dix  compagnies  de  Boniface*  ;  ce  qui  Ten 
empêcha.  Après  avoir  couru  le  Berry,  et  pris  à  Ro- 
morantin  pour  douze  mil  écus  de  draps  pour  habiller 
ses  soldats,  dont  il  fit  sa  promesse,  il  voulut  attaquer 
Viarron  ;  mais  il  ne  la  put  prendre*. 

9.  Echange  de  Madame  et  de  l'Infante.  On  dit 
que  le  Roy  d'Espagne  y  estoit  travesty.  La  Cour 
d'Espagne  paroissoit  fort  brave.  —  M.  de  Guise  fit 
mettre  son  armée  en  bataille  sur  une  colline  voisine'*. 

10.  M.  le  Maréchal  de  Boisdaufin  passe  la  Loire 
à  Beaugency.  Une  lettre  de  M.  des  Cures  porte  que 
ce  fut  à  Blois.  Monsieur  le  Prince,  après  avoir  tra- 
versé le  Cher,  l' Indre  à  Palluau  et  la  Vienne  à  Noyers, 
passe  en  Poitou,  où  il  joint  M.  de  Soubise  *,  avec 
quelque  douze  cens  hommes  de  pied  et  deux  cens 
chevaux,  et  M.  de  la  Trémoilleet  le  Marquis  de  Rosny. 

M.  de  la  Trémoille  estoit  party  de  Bretagne  contre 
le  consentement  de  Madame  sa  mère,  et  aussi  n'avoit 


*  Mestre  de  camp  et  colonel  dtf  régiment  de  son  nom»  (Foy,  Fonte- 
nay-Mareuil,  p.  308.) 

»  Mère,  fr.^  t.  iv,  p.  265. 

'  roy.  Pontchartrain,  p.  112;  Richelieu,  p.  275;  Fontenfty^Mftreuil, 
p.  31(5.  Ce  dernier  reproduit  les  lettres  que  Louis  XIII  et  Anne  d'Au- 
triche s'adressèrent  à  cette  occasion  par  Tentremise  de  M.  de  Luynes. 
Le  IHerc.  fr,  les  donne  aussi.  Voy,  dans  cet  ouvrage,  p.  307  et  suiv.,  le 
récit  des  cérémonies  qui  eurent  lieu  pour  l'échange  des  princesses. 

*  Beryamin  de  Rohan,  seigneur  de  Soubise,  né  en  15$3,  fut,  avec 
son  frère  le  duc  de  Rohan,  un  des  chefs  du  parti  protestant,  soutint 
une  lutte  énergique  et  souvent  malheureuse  contre  les  armées  du  Roi, 
et,  après  la  ruine  de  son  parti,  se  réfugia  en  Angleterre,  où  il  mourut 
en  1640. 


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128  JOURNAL    INÉDIT 

Novembre  1616.  pu  rassembler,  à  beaucoup  près,  les  forces  qu'il  avoit 
espérées*. 

M.  le  Maréchal  de  Boisdaufin  suit  Monsieur  le 
Prince,  après  avoir  passé  à  Blois.  Va  à  Cormery  ; 
de  là  à  la  Haye,  en  Touraine. 

M.  de  Longueville  veut  passer  la  Loire  à  Saumur 
ou  Monsoreau  pour  venir  en  Picardie.  On  luy  refuse 
le  passage.  La  levée  est  bordée  des  gens  du  pays 
qui  prennent  les  armes  ;  ainsi  il  est  contraint  de  s'en 
retourner. — M.  de  Sully  va  voir  Monsieur  le  Prince 
à  Saint-Maixent,  sur  ce  que  Monsieur  le  Prince  luy 
avoit  mandé  qu'il  luy  donnast  à  disner  audit  Saint- 
Maixent. 

21.  La  Reyne  arrive  à  Bordeaux  au  soir.  Le 
mecredy  25,  le  Roy  et  la  Reyne  ouïrent  messe 
ensemble,  et  le  soir  couchèrent  ensemble.  Le  di- 
manche 29,  ils  firent  leur  entrée  à  Bordeaux*. 

M.  le  Maréchal  de  Boisdaufin  estant  à  Chasteau- 
neuf.  Monsieur  le  Prince  ne  peut  passer  la  Charente 
qu'à  Taillebourg  ;  de  sorte  que,  de  Jarnac  où  il  sé- 
journa quelques  jours,  il  fut  contraint  de  descendre 
jusqu' audit  Taillebourg,  et  ayant  passé  la  Charente, 
il  entre  dans  la  ville  de  Pons,  dont  M.  Du  Mont  est 
Gouverneur. 

Le  bagage  de  M.  de  Gyé^  fut  pris,  et  quelques- 

*  Voy.  Merc,  fr.,t.  iv,  p.  344. 

»  Voy,  Pontchartrain,  p.  115  ;  Richelieu,  p.  275  ;  Fontenay-Mareuil, 
p.  315  et  p.  318-319  ;  Merc,  fr.^  t.  iv,  p.  334  et  suiv.  Le  Merc,  fr,^  t.  iv, 
p.  353  et  suiv  ,  fait  le  récit  des  fêtes  magnifiques  qui  eurent  lieu  à  Bor- 
deaux à  cette  occasion. 

t  Cësar  de  Balzac,  seigneur  de  Gyé,  colonel  général  des  Carabins, 


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d'arnàuld  d'andillt.  12Ô 

uns  de  ses  carabins  défaits  par  M.  du  Mayne,  avant    »#vHnbi«  tm. 
le  susdit  passage  de  la  Charente,  ni  que  M.  de  Bois- 
daufin  fust  à  Chasteauneuf. 


M.  deNevers,  qui  estoit  arrivé...  jours  auparavant 
à  la  Cour,  va  parler  à  M.  le  Prince,  pour  parler  de 
paix.  Il  éstoit  lors  à  la  Rochelle,  où  il  avoit  esté 
receu  avec  deux  cens  chevaux,  la  cornette  blanche 
déployée.  M"'  de  Nevers*,  qui  s'en  revenoit  de  deçà 
faire  ses  couches,  vid  M.  du  Mayne,  son  frère*. 

7.  M.  de  Guise  part  de  Bordeaux  et  arrive  le  10 
à  l'armée,  à  Barbesieux,  avec  cinq  cens  chevaux, 
en  qualité  de  Lieutenant  Général  des  armées  du  Roy  ; 
la  qualité  de  Lieutenant  Général  en  ladite  armée  de- 
meurant à  M.  de  Boisdaufin*. 

M.  le  Prince  de  Joinville,  qui  avoit  amené  cinq  où 
six  cens  bons  chevaux  d'Auvergne,  joint  l'armée. 

17.  Le  Roy  part  de  Bordeaux,  fait  Noël  à  Au- 
beterre*. 

M.  de  Monglat^  est  tuA  en  duel  par  M.  de  Yitry. 
Querelle  :  M.  de  Yitry  jurant  dans  la  chambre  de 


Décembre. 


conseiller  d'Etat,  lieutenant  général  des  armées  du  Roi,  lieutenant- 
général  au  gouvernement  d*Orléans. 

*  Catherine  de  Lorraine,  fille  de  Charles  de  Lorraine,  duc  de  Maj^enne, 
Je  célèbre  chef  de  la  Ligue. 

*  Voy.  Pontchartrain,  p.  115  ;  Richelieu,  p.  279;  Fontenay-Mareull, 
p.  323  ;  9ferc.  /r.,  t.  iv,  p.  365. 

*  Foif.  Fontenay-Mareuil,  p.  321. 

*  Voy.  Pontchartrain,  p.  120-121  ;   Richelieu,  p.  280  ;    Fontenay- 
Mareuil,  p.  323  ;  Merc,  fr,^  t.  iv,  p.  307. 

s  On  lit  par  erreur  dans  le  manuscrit  Montfort  au  lieu  de  Monglat 
que  je  rétablis. 


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ISO  .       JOURAilL    IJViDJT 

DMenttwtoAff.  M*  cle  Guiae,  M.  de  Giûse  luy  dit  2  Tu  iie  te  sçauroîs 
empeaciiei*  de  juircn  Monglat\  sur  cela  dà^i  Com« 
ment  s'en  empescheroit-il,  qu'il  n'y  a  pas  jusques  à 
son  aumosnier  qui,  en  attendant  la  messe,  ne  s'amuse 
h  jurer.  M*  de  VUry  répondît  :  El  pioy  je  vis  hi«r  le 
tien  qui  p'amusoit  à  phimer  une  poulie. 

La  charge  de  Grand  Louvetier  donnée  à  M.  de  Iq 
RochehGuyon  ^  Celle  de  premier  Écuyer  de  Monsieur 
jfut  donnée  au  mois  de  septembre  1616  à  M.  de  h^ 
sièros,  fil»  de  M.  de  Thémines. 

M,  de  Rbeinfâ  fait  GardSnaL 

Monaieur  le  Priûee  foit  retirer  aon  infanterie  dan» 
le»irfead'Ol€a?*(m\ 


*  Robert  de  Harlay,  baron  de  Ménglat,  grand  fouvetier  de  France 
^  1^%%,  mort  w  1.615,  iJU  le  Père  AtowJme^  t  vin,  p^  TQfi,  des  bles- 
sures qu*il  reçut,  djins  un  combat  singulier  avec,  le  seigneur  de  Viiry, 
son  plus  intime  ami.  H  mourut  sans  alliance,  et  le  fils  de  sa  sœur, 
JeAQDe  de  HaHay^  feéritiè«>Q  de  ta  buroj^aio  (H  MQQg)#t,  «içiriée  à  par- 
douin  de  Clermont,  seigneur  de  Saint-Georges,  fut  le  marquis  de  Mon- 
glat,  Tauteur  des  Mémoires. 

«  François  4é  Siily»  4^q  de  la  Roche-Guyoa,  marqula  d»  Guercho- 
viUe,  graed  louvetie»  de  France  à  la  mort  du  précédeot  eo  l^ia,  mon 
au  siège  de  la  Rochelle  en  1628. 

*  Arnauld  d*Andilly  (du  moins  'dans  la  copie  manuscrite  que  nous 
suivons)  néglige  de  parler  des  affaii:es  assez  importaates  qui  eureat  lieu 
en  Champagne,  pendant  les  mois  de  novembre  et  de  décembre,  entre 
les  armées  du  Roi  et  celles  dos  Princes.  On  en  peut  lire  le  récit  dans 
le  Merc.  fr,^  t.  iv,  p.  380-387. 


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4  64  6. 


SOMMAIRE. 

JàHviBii.  —  Affaires  entre  rarmée  du  Roi  et  celle  des  Pnnees.  —  Dé^ 
part  des  députés  de  l'Assemblée  de  Nîmes.  —  Le  Roi  arri?e  à  Poi- 
tiers. —  M.  de  Candale  se  déclare  de  la  Reltgion.  —  La  Conférence 
de  Lottdun  est  décidée.  -^  Disgrâce  du  commandeur  de  Sillery ,  de 
MM.  de  Lorme  et  de  Gurcm.  —  La  Cour  arrÎTe  à  Tours.  —  Accident 
dans  la  chambre  du  Conseil. 

Février.  — •  M.  de  Vendôme  se  prononce  pour  Monsieur  le  Prince.  — 
Brouille  entre  M.  de  Vendôme  et  le  marquis  de  Cœuvres.  —  Noms  des 
députés  à  la  Conférence  de  Loudun.  —  Mort  de  Montalte,  médecin 
de  la  reine-mère,  et  de  M.  Fleurance,  précepteur  du  roi. 

Mars.  —  Affaire  près  de  Château-Thierry^  entre  M,  de  Vitry  et  M.  de 
Novion.  —  Nouvelles  de  la  Conférence.  —  Retour  de  la  maréchale 
d'Ancre  à  Paris. — Démêlés  du  marquis  de  Cœuvres  avec  les  habitants 
de  Crespy.  —  Nouvelles  de  l'armée  et  de  la  Conférence.  —  Retour 
du  maréchal  d* Ancre  à  Paris.  —  Le  marquis  de  Bonnivet  mis  à  la 
Bastille.  —  M.  de  la  Vieuvîïle  achète  de  M.  de  Plainville  la  charge 
de  capftaîne  des  gardes.  —  Mort  de  M.  UolTé. 

Avril.  —  Rigueurs  de  M.  d'Épernon  en  Limousin^  —  Mort  de  M.  de 
Beaumont.  —  M.  de  Béthune  envoyé  en  Italie.  —  Départ  du  maré- 
chal d'Ancre.  —  Appel  de  M.  de  Vitry  par  le  comte  de  la  Suze.  — 
Mort  de  M.  de  ïa  Boulaye.  —  Les  sceaux  retirés  au  chancelier. 

Mai.  —  Paix  signée  à  Loudun.  —  Retour  delà  reine-mère  à  P<»ris,  — 
Arrivée  du  roi  et  de  la  reine  dans  la  capitale.  —  M.  du  Vairgavde 
des  sceaux.  —  Les  Princes  viennent  trouver  le  Roi  à  Paris,  — 
M.  Barbîn  nommé  contrôleur  général,  le  préudem  Jeannia  sailn- 
tendant,  et  M.  de  Castille  intendant  des  fiBances» 

JoiN.  —  Évasion  de  M.  cb  Marelle  —  Appel  de  M.  de  Montb«N»ï  pat  le 
baron  d'AoaeTal.  —  Le  simur  de  Beauveau,  condamné  i  Mort ,  tiré 
de  prison  par  commandement  du  Roi.  -^  Remioatrances  éa  Parle- 
ment. —  Préséance  contestée  au  garde  d6s  seeam  par  le  Tafkmmt, 
— M.  Bfaagot  nommé  secrétaire  d'État  ceotto  la  volonté  de  fi,  de  Vil- 


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182  JOURNAL   INEDIT 

leroy.  —  Soulèvement  contre  le  maréchal  d'Ancre.  —  Le  comte 
d'Auvergne  sort  de  la  Bastille. 

Juillet.  —  Exécution  de  deux  palefreniers  du  maréchal  d'Ancre.  — 

Retour  de  quelques-uns  des  princes. 
Août.  —  Arrivée  de  l'ambassadeur  d'Angleterre  au  sujet  du  mariage 

de  M"*  Chrétienne.  —  Réorganisation  des  Conseils  du  Gouvernement. 

—  Reddition  de  Péronne  à  M.  de  Longuevillo.  —  Démêlés  entre 
Monsieur  le  Prince  et  le  maréchal  d'Ancre.  —  Ce  dernier  se  retire  à 
Caen.  —  Inimitié  de  M.  de  Gnise  et  du  maréchal  d'Ancre.  —  La 
Reine-mère  veut  rétablir  l'autorité  du  Roi. 

Septembre.  —  Arrestation  de  Monsieur  le  Prince  ;  détails  à  ce  sujet. 

—  Départ  do  MM.  du  Maine,  de  Bouillon  et  de  la  Trémouille.  —  M.  de 
Vendôme  se  sauve.  —  M.  de  Guise  et  M.  de  Joinville  vont  rejoindre 
les  princes  à  Soissons.  —  Départ  de  M.  le  président  le  Jay.  —  Pillage 
do  la  maison  du  maréchal  d'Ancre.  —  MM.  de  Thémines  et  de  Monti- 
gny  nommés  maréchaux  de  France.  —  Conduite  de  M.  de  Sully.  — 
Mariage  de  M"*  de  Soissons  avec  M.  de  Longueville.  —  Le  Roi  va  au 
Pailement  faire  vérifier  la  déclaration  contre  les  Princes  absents.  — 
M.  le  comte  d'Auvergne  nommé  général  de  l'armée  du  Roi.  —  Duel 
de  M.  de  Brantes  et  de  M.  de  Ryonne.  —  On  envoie  vers  les  princes 
pour  traiter  avec  eux.  —  Conduite  de  M.  de  Nevers.  —  Reddition 
de  Chinon.  —  Retour  de  MM.  de  Guise  et  de  Joinville  —  Mort  de 
M,  de  la  Chastaigneraye.  —  M.  de  Guise  va  à  Soissons  et  obtient 
raccommodement  des  princes. 

Octobre.  —  Retour  du  maréchal  d'Ancre.  —  Il  se  réconcilie  avec 
M.  de  Guise.  —  Brouille  entre  M.  d'Épemon  et  les  Rochellois.  — 

—  M.  de  Luynes  grand  fauconnier.  —  Le  maréchal  d'Ancre  fait 
dresser  des  lettres  d'érection  de  son  marquisat  en  duché-pairie.  — 
Mort  de  M.  de  la  Chevalerie.  —  Maladie  grave  du  Roi.  —  M.  de 
Lesdiguières  va  secourir  le  duc  de  Savoie. 

Novembre.  —  Changements  dans  les  Conseils  du  Gouvernement.  — 
Exécution  de  Boursier,  accusé  d'avoir  voulu  tuer  la  reine-mère.  — 
M.  de  Lussay  envoyé  pour  favoriser  le  passage  du  duc  de  Nemours 
en  Savoie.  —  L'entrée  de  Reims  refusée  à  M"«  de  Nevers  —  M.  de 
Nevers  fait  piller  la  maison  de  Si  appartenant  à  M.  de  la  Vieu ville  — 
Bompar  assassiné  par  Cusac.  —  M.  de  Blerancourt,  gouverneur  de 
Péronne,  Montdidier  et  Roye.  —  Duel  du  duc  de  Rohannois  et  de 
M.  de  la  Frezelière.  —  Le  Roi  exige  que  M  de  Nevers  rende  justice 
à  M.  de  la  Vieuville.  —  Résistance  opiniâtre  de  M.  de  Nevers. —  Exa- 
men de  cette  affaire  au  Conseil  d'État.  —  Les  dceaux  sont  retirés  à 
M.  du  Vair  et  donnés  à  M.  Mangot.  —  M.  de  Luçon  est  nommé  5^e- 
crétaire  d'Etat  à  la  place  de  M.  Mangot.  —  Le  maréchal  d'Ancro 


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d'arnauld  d'akdillï.  158 

part  pour  Rouen  où  il  va  tenir  les  Etats.  —  Le  Rd  danse  son  pre- 
mier biUlet.  —  MM.  de  Nevers  et  de  Bouillon  se  fortifient. 
DÉCEMBRE.  —  Retour  du  maréchal  d* Ancre.  —  Le  gouvernement  de  la 
Bastille  enlevé  à  M.  de  Themiues  ;  sa  conduite  à  ce  sujet.  —  Mauvais 
état  des  finances.  —  Projets  du  Roi  pour  y  pourvoir.  —  Opposition 
de  la  Cour  des  Aides.  —  Discours  du  garde  des  sceaux  et  du  prébi- 
dent  Chevalier.  —  Sainte-Menehould  repris  à  M.  de  Nevers.  —  Le  *  • 

gouvernement  en  est  donné  à  M.  de  Fossez.  —  M.  de  Schomberg  en- 
voyé en  ambassade  extraordinaire  en  Allemagne. 

1.  M.  de  Guise  fit  une  traiste  de  vingt  lieues  JamieiisH. 
avec  deux  mille  chevaux  et  cinq  cens  mousquetaires  à 
cheval  (M.  de  Boisdaufin  menoit  le  reste  de  l'armée) , 
pour  aller  surprendre  Monsieur  le  Prince  et  MM.  du 
Mayne,  de  Longueville  et  de  Buillon  qui  estoyent 
dans  Saint-Maixant.  —  M.  de  Saint-Aignan  * ,  qui 
marchoit  devant  avec  cinq  cens  chevaux-légers, 
rencontre  les  carabins  de  M.  de  Sully,  puis  les  gardes 
de  Monsieur  le  Prince;  les  chargea,  ce  qui  fut  en- 
tendu, et  donna  l'alarme  à  Saint-Maixant.  MM.  le 
Prince,  de  Longueville  et  de  Buillon  sortirent,  et 
M.  du  Mayne  demeura  pour  assurer  M.  de  Sully. 

2.  M.  du  Mayne,  voulant  avoir  sa  revanche,  part 
avec  deux  mil  chevaux,  pour  enlever  le  quartier  des 
chevaux-légers  du  Roy,  lesquels  en  ayant  eu  avis,  se 


*  Honorât  de  Beauvillier,  comte  de  Saint-Aignan,  né  en  1579,  gen- 
tilhomme ordinaire  de  la  chambre  du  roi,  conseiller  d*Etat,  mestro 
de  camp  général  de  la  cavalerie  légère  en  1611,  commandant  de  la 
cavalerie  de  Tarmée  du  Roi  en  1615,  lieutenant  général  du  Berry  en 
1617.  S'étant  joint  au  parti  de  la  Reine-mère,  le  comte  de  Saint-Aignan 
fut  fait  prisonnier  au  Pont-de-Cé  en  1620 ,  et  privé  de  sa  charge  de 
mestre  de  camp  de  la  cavalerie  légère  II  mourut  en  1622.  Son  fils  fut 
premier  duc  de  Saint-Aignan  et  membre  de  TAcadémie  française. 
(Foy,  P.  Anselme,  t.  iv,  p.  795  ctsuiv.) 


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Janvier  1<1«. 


iâft  JOUaAAL    INÉDIT 

retirèrent.  M.  de  Praslin,  croyant  que  M.  duMayne 

mettroit  pied  à  terre,  et  demeureroit  quelqiife  heure 
dans  le  bourg,  pria  M.  de  Guise  de  trouver  bon  qu'il 
allast  attaquer  Tescarmouche  avec  cent  chevaux  ; 
que  Ton  envoyast  après  les  chevaux-légers  pour  le 
soustenir,  et  puis  que  l'on  fist  marcher  le  reste  de 
l'armée.  Il  y  fut  donc.  M.  de  Fossez  menoit  les  douze 
premiers,  qui  servoyent  de  courriers  ;  M.  de  Créquy^ 
suivoit  à  trente  pas  avec  vingt-cinq  ou  trente  ;  et 
M.  de  Praslin  menoit  après  le  reste.  Ils  trouvèrent 
M.  du  Mayne  deslogé  ;  s'il  y  eût  encore  esté,  M.  de 
Praslin  estoit  taillé  en  pièces. 

4.  Les  députez  de  l'Assemblée  de  Nismes,  qui 
avoyent  voulu  parler  au  nom  des  députez  de  l'Assem- 
blée générale  de  Nismes,  ayant  seulement  esté  en- 
tendus au  nom  de  l'Assemblée  de  Nismes^,  sur 
l'instance  de'M.  de  Thianges%  qui,  sur  ce  qu'on  ne 
les  vouloit  point  ouïr  du  tout,  dit  ne  pouvoir  retourner 


*  Charles,  sire  de  Gréqny  et  de  Ganaples,  prince  de  Poix,  depuis  duc 
de  Lesdiguières,  comme  héritier  du  connétable  son  beau-père,  pair  de 
France,  lieutenant  général  du  Dauphiné,  mestre  de  camp  du  régiment 
des  gardes  en  1604,  blessé  au  siège  de Saint-Jean-d'Angely,  maréchal- 
de  France  en  1621,  ambassadeur  à  Rome  en  1633,  tué  d'un  coup  de 
canon  en  1638,  dans  un  combat  contre  les  Espagnols. 

3  «  Enfin  le  baron  de  Thianges  dit  au  Roy  qu'il  ne  pôuvoit  retour- 
ner vers  Monsieur  le  Prince,  que  ceux  de  ladite  Assemblée  n'eussent 
présenté  leurs  lettres  à  Sa  Majesté,  et  qu'ils  ne  fussent  ouys  :  Cela 
leur  fut  accordé,  comme  députez  de  TAssemblée  de  Nismes,  mais  non 
de  l'Âs&embléo  générale  de  ceux  de  la  religion  prétendue  reformée.  » 
{Merc.  fr.^  t.  iv,  2*  partie,  p.  5.) 

3  Charles  Damas,  baron  puis  marquis  de  Thianges,  maréchal  de 
camp,  lieutenant  général  en  Bresse,  capitaine  de  cinquante  hommes 
d'armes,  mort  en  1638. 


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d'àrnàuld  d'andilly.  1M 

vers  Monsieur  le  Prinœ^  qu'ils  n'eussent  esté  ouls^ 
ledit  jour  donc  partirent  lesdits  députer  de  la  Roche** 
foucaud  où  le  Roy  estoit^  pour  retourner  à  Nismeê  en 
l'Assemblée  ;  et  MM.  de  Nevers  et  l'ambassadeur 
d'Angleterre  '  sont  aussi  partis  le  tïiestne  Jour  pour 
retourner  vers  Monsieur  le  Prince*» 

6  ou  7.     Le  Roy  arrive  à  Poitiers. 

7.  M.  de  Praslin  ayant  eu  avis  que  les  régi- 
niens  de  Desostels,  Basme  et  YiUurceaux^  estoyent 
logés  à  Nanteûil ,  à  une  lieÛe  de  Saint^Màixant,  va 
kty  quatorze  ou  quinzième  en  pourpoint  (  dont  M.  de 
Feuquière*  ^  estoit  l'un)  les  charger  dans  leor  lo^ 
gement,  enfonce  leur  barricade,  taille  en  pièceê 


*  L'ambassadeur  d'Angleterre  Edmond  avait  été  chargé  par  son 
Souverain  de  s'offrir  pour  arbitre  entre  le  roi  et  Mohsîeui'  lé  PHncè  ht 
de  chercfaei'  à  leiii'  faire  faire  la  paix* 

2  Voy,  Herc.fr.  y  U  iv,  2«  partie,  p.  2-18.  M.  de  Thiange»  avait  été 
envoyé  vers  le  roi  par  le  prihce  de  Condé  potir  lui  proposer  iâ  tetiue 
4'un9  Conférence  dans  laquelle  des  dépotée  de  l'un  el  île  l'fekutrê  putf 
traiteraient  des  conditions  de  paix.  Cette  proposition  fut  acceptée.  Le 
Mercure  entre  dans  de  grands  détails  à  ce  sujet.  On  y  trouve  la  lettre 
de  Monsieur  le  Prince  au  roi  et  la  réponse  du  roi  qui  est  trte^belle. 
Voy,  aussi  Richelieu,  p.  285. 

3  Nicolas  de  Mornay^  seigneur  de  Villarceattx,  mestre  de  oalUp  en 
l'armée  de  Monsieur  le  Prince,  mourut  à  Saint-Maixant^  lors  du  Voyage 
de  Poitou  en  1616.  (P.  Anselme,  t.  vi,  p.  292.) 

^  Manaaeès  de  Pas,  marquis  de  Feuquière^  né  en  ISM,  lieutennit- 
général,  fait  prisonnier  au  siège  de  la  Rochelle,  ambassadeur  en  iJl«- 
lâagne,  lieutenant^oéral  des  gouvernements  de  Metz  et  de  Toul  en  IMl^ 
de  celui  de  Verdun  en  1636,  commandant  en  1689,  au  siège  de  Thioiv- 
vilie,  où  il  eut  le  bras  casaé,  fut  fait  prisonnier  el  mOurUt  en  l640..On 
a  publié  ses  lettres  et  ses  négociations  pendant  son  ambassade  en  All^ 
Bu^pie  en  1683  et  168^  Récemment  on  a  édité  la  Correspondance  des 
Fe  uquière*  Le  marquis  de  Feuqnière  était  cousin  par  alUan^  d'Amanld 
d'Andilly. 


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Iâ6  JOURNAL    INiDIT 

Mnvier  mé.  ceux  qui  la  défendoyent.  Les  autres  se  sauvent  dans 
Téglise  et  à  la  fuite.  Il  prend  quatre  enseignes. 
MM.  de  Vitry  et  de  Bressieux  donnèrent  par  un  autre 
costé  *. 

10.  M.  de  Caudale  se  déclare  de  la  Religion  à 
Alez,  en  TAssemblée  des  églises  des  Sév^nes  et  Ge- 
vaudan*. 

i5.  M.  de  Brissac'  et  M.  de  Villeroy  partent 
pour  aller  trouver  Monsieur  le  Prince  à  Niort,  pour 
résoudre  quelques  articles  qui  restoyent  en  diflTiculté 
et  convenir  du  lieu  et  des  personnes  de  la  Confé- 
rence. Ils  le  trouvèrent  à  Fontenay.  Le  Conseil  se 
tenoit  à  l'entour  du  lit  de  M.  de  Buillon  qui  avoit  la 
goutte.  Trêve  résolue  pour  le  mois  de  février.  Con- 
férence à  Loudun  le  10  février,  et  autres  articles 
portez  par  la  trêve*. 

Disgrâce  de  M.  le  Commandeur  de  Sillery,  de 
M.  de  Lorme  et  de  M.  de  Guron*.  M.  de  Fossez  re- 
vient à  Paris  avec  luy,  dont  la  Reyne  s'offença,  et 


^  9^0y.  Mère,  fr.^  X,  iv,  2*  partie,  p.  18;  Pontchaatraia,  p.  124. 

'  Voy,  Pontchartrain,  p.  12/i. 

s  Charles  de  Cossé,  H*  du  nom,  duc  de  Biissac,  gouverneur  de  Paris 
pour  la  Ligue  en  159&,  maréchal  de  France  en  1594,  duc  et  pair  en 
1611,  grand  pannetier  et  grand  fauconnier  de  France,  mort,  en  1621. 

*  Voy,  Mère,  fr,^  t.  iv,  2*  partie,  p.  19.  Le  Mercure  rapporte  en 
entier  le  traité  préliminaire  en  onze  articles  par  lequel  il  fut  décidé 
que  la  Conférence  aurait  lieu  à  Loudun  le  10  février  et  quMl  y  aurait 
une  suspension  d*armes.  Foy,  Richelieu,  p.  285  ;  Pontchartrain,  p.  125. 

^  Gabriel  de  Rechignevoisih,  seigneur  de  Guron.  Il  fut  souvent 
chargé  d'importantes  missions,  notamment  lors  du  siège  de  Montau- 
ban,  auprès  des  rebelles  auxquels  il  flt  accepter  les  conditions  pro- 
))08ées  par  le  Roi;  une  autre  fois  auprès  du  duc  de  Lorraine;  et  lors  du 
siège  de  Casai,  auprcs  du  Pape  et  des  Vénitiens. 


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.    d'aknauld  d'andilly.  137 

ne  l'ayant  voulu  voir  lorsqu'il  la  fut  retrouver  à 
Tours,  il  se  retira  à  sa  maison  d'où  il  ne  bougea 
jusques  à  quelque  peu  auparavant  la  prise  de  Mon- 
sieur le  Prince  que  la  Reyne  le  manda  et  luy  fit  très- 
bonne  chère  *. 

15,  Leurs  Majestez  partent  de  Poitiers  pour 
aller  à  Tours.  Le  plancher  de  la  chambre  de  la 
Reyne,  où  elle  tenoit  le  Conseil  à  Tours,  s'estant  en- 
foncé pour  la  plus  grande  part,  M.  le  comte  de 
Soissons  tomba,  M.  d'Espernon,  M*  de  Villeroy,  le 
marquis  de  Villaine*  (bien  blessé),  M.  de  Bassom- 
pierre  et  plusieurs  autres.  La  Reyne  ne  cheut  point, 
ni  MM.  le  Chancelier,  président  Jeannin,  de  Pi- 
sieux,  etc.  '. 


Janvier  IIH. 


4.  M.  de  BuUion  arrive  à  Paris  ayant  esté  ren- 
voyé de- la  Cour. 

M.  de  Vendosme  qui  avoit  levé  des  gens  de  guerre 
avec  des  commissions  du  Roy  et  tiré  toutes  ses 
armes  de  Paris  avec  des  passe-ports  de  Sa  Majesté, 
disant  qu'il  vouloit  aller  au  devant  du  Roy  pour  le 
servir,  se  trouve  avoir  assemblé  jusques  à  six  ou  sept 


Février. 


*  Voy.  Pontchartrain,  p.  127. 

2  Brandelis  de  Champagne,  marquis  de  ViUaines,  conseiller  d'Etat, 
capitaine  de  cinquante  hommes  d'armes  des  ordonnances  du  Roi,  che- 
valier du  Saint-Esprit  en  1599. 

2  f^oy.  Merc.  /y*.,  t.  iv,  p.  2/i,  Suivant  le  Mercure^  le  Roi  partit  do 
Poitiers  le  21.  L'accident  eut  lieu  à  l'hôtel  de  la  Bourdaisière,  où  la 
reine-mère  était  logée.  Suivant  Fontenay-Mareuil ,  p.  328,  c'est  aussi 
le  21  que  le  Roi  partit  de  Poitiers.  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  329  ; 
Richelieu,  p.  286  ;  Pontchartrain,  p.  128. 


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138  .      JOURNAL   INÉDIT 

Février  mt,  rnillc  honimes  de  pied  et  sept  ou  huit  cens  chevaux  • 
Le  Roy  connoiâsant  que  oe  n'estoit  pas  a»  intention 
de  bien  faire,  envoyé  vers  luy  M.  de  Yignolles  *  qui 
rapporte  à  la  Cour  plusieurs  demandes  de  M.  de 
Vendosme,  et  entre  autres,  d'avoir  des  cotïitnissions 
pour  ceux  des  ^ns  qui  avoyent  levé  sans  conomis- 
sion-  M.  de  Vignolles  le  retourna  trouver  avec  con- 
tentement sur  ce  sujet  et  plusieurs  autreâ«  Néant- 
moins,  il  persiste  toujours  et  augmente  ses  forces  du 
débandement  de  l'armée  du  Roy  et  de  celle  de 
Monsieur  le  Prince,  s'avance  en  Bretagne  et  fait 
mine  de  vouloir  attaquer  Nantes.  On  envoyé  à  Ghan- 
tecé  un  héraut  d'armes  le  sommer  de  désarmer,  le- 
quel parle  à  luy  couvert,  M.  de  Vendosme  ayant  la 
teste  nue.  M.  de  Vendosme ,  après  trois  ou  quatre 
heures  de  temps  qu'il  demanda  pour  penser  à  sa 
réponce ,  dit  qu'il  estoit  très-humble  Serviteur  du 
Roy,  et  qu'il  avoit  pris  les  armes  pour  venger  la 
mort  du  feu  Roy,  et  que  ses  intérests  estoyent  joints 
à  ceux  de  Monsieur  le  Prince  \ 


^  Bertrand  de  Vignolles,  dit  La  Hire,  marquis  de  VignoUes,  capitaine 
deâ  gardes  d'Henri,  roi  de  Navarre,  conseiller  d'Etat,  lieutenant  géné- 
ral en  Champagne,  capitaine  de  cent  hommes  d*armes,  premier  maré- 
chal de  camp  des  armées  d'Henri  IV  et  de  Louis  XIII,  né  en  1566,  se 
signala  en  1587  à  la  bataille  de  Coutras,  en  1S90  à  celle  dlyry,  au 
siège  de  Rouen  en  ISOS,  en  Bôam  en  1621,  fut  premier  maréchal 
de  camp  au  siège  de  la  Rochelle  en  1638,  se  distingua  dans  la  cam- 
pagne de  Savoie  en  1630,  eut  en  1632  le  commandement  de  plusieurs 
provinces  en  l'absence  du  prince  de  Gondé,  et  mourut  en  16M.  (Koy.  P. 
Anselme,  t.  ix,  p.  l/i5.) 

>  Vifff,  Merc,  fr,y  t  iv,  p.  38.  Le  récit  du  Mereurt  conânne  entière* 
ment  celui  d'Amauld  d'ÀndiUy.  Foy,  FoDtenajr<^areuil,  p»  930-331  $ 
Richelieu^  p.  286;  Pontchartrain,  p.  126  et  133. 


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d'arnauld  d'andilly.  159 

M.  le  Marquis  de  Cœuvres  *  ne  s'estoit  point  dé-  F«vritr  têa. 
claré  en  faveur  de  Messieurs  les  Princes;  mais 
néantmoins  témoignoit  estre  mal-content  de  ce  que 
Ton  ne  remplaioit  point ,  de  ce  qu'on  ne  le  faiaoit 
point  servir  en  la  charge  de  Maistre  de  la  garde- 
robbe  de  Monsieur,  etc.  Enfin  M.  de  Vendosme  ar- 
mant, il  Talla  trouver  avec  trois  ou  quatre  cens  Che- 
vaux qu'il  leva  sans  commissions  du  Roy  ^,  et  qu'il 
avoit  fait  ceste  levée  pour  témoigner  qu'il  n'estoit 
pas  si  peu  capable  de  servir  que  l'on  vouloit  le  faire 
croire.  M.  de  Vendosme  s' estant  déclaré  contre  le 
Roy,  on  tâcha  à  la  Cour  de  désunir  d'avec  luy  M.  de 
Cœuvres;  et  enfin  on  le  fit.  On  tient  que  le  vray  sujet 
qui  fit  qu'il  quitta  M.  de  Vendosme  vint  sur  ce  que 
M.  le  marquis  de  Cœuvres  dit  à  M.  de  Vendosme  que 
Bocage,  son  secrétaire ,  luy  donnoit  de  très-raauvais 
conseils  et  le  perdoit.  M.  de  Vendosme  luy  répondit 
que  Bocage  estoit  fort  homme  de  bien  et  qu'il  ne 
trouvoit  nullement  bon  qu'il  en  parlast  ainsi.  Sur 
quoy  M.  de  Cœuvres  répliqua  que  Bocage  estoit  un 
coquin  qui  le  perdoit  ;  et  M.  de  Vendosme  répandit: 
mon  oncle',  n'en  parlez  pas  davantage;  je  le  me* 

^  François  Anaibal,  marquis  de  Cœuvre»,  puis  duc  d*£strées,  évèque 
de  NoyoDs  en  1594,  embrassa  la  profession  des  armes  en  1597,  gou- 
verneur de  risle  de  France,  de  Soissons,  de  laon,  ambassadeur  e» 
Savoie  en  1614,  à  Rome  en  1621,  en  Suisse  en  1624,  maréchal  de  France 
en  1626,  de  ooi^veau  ambassadeur  à  Rome  en  1636,  duc  et  pair  en 
1648,  fit  la  fonction  de  connétable  au  sacre  de  Louis  XlV  en  1654, 
mort  en  1670. 

2  U  y  a  probablement  un  membre  de  phrase  passé  dans  le  manuscrit. 

^  lie  marquis  de  Gcsuvres  était  fiire  de  Gabrielle  d'Estrées,  mère  du 
duc  de  Vendôme. 


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1^0  JOUBNAL   INÉDIT 

Février  i«i6.  neray  en  croupe  partout  où  vous  voudrez.  M,  le 
marquis  de  Cœuvres  repartit  :  Monsieur,  si  un  autre 
que  vous  me  disoit  cela,  je  le  quitterois.  Et  après 
cela,  il  le  quitta,  et  dit  qu'il  ne  vouloit  pas  retourner 
à  la  Cour,  pour  ce  que  les  affaires  de  M.  de  Ven- 
dosme  estant  en  assez  mauvais  termes,  il  eust  semblé 
qu'il  eust  voulu  profiter  de  son  malheur.  Et  ainsi 
s'en  revint  à  sa  maison  de  Cœuvres,  et  passa  par 
Paris  où  il  ne  vid  personne.  On  dit  qu'il  receut  let- 
tres du  Roy  qui  luy  mandoit  qu'il  luy  avoit  fait  un 
très-agréable  service;  qu'il  le  reconnoissoit ;  qu'il 
tinst  ses  trouppes  ensemble,  et  qu'il  les  mist  en  gar- 
nison en  la  ville  de  son  gouvernement  qu'il  aviseroit. 
Pendant  son  absence,  Beauregard,  son  lieutenant  à 
Laon,  avoit  pris  de  l'argent  dans  les  coffres  et  y 
avoit  mis  au  lieu  des  blancs  de  M.  le  Marquis  de 
Cœuvres. 

Conférence  remise  au  15.  MM.  de  Brissac,  de 
Villeroy,  deThou,  de  Vie  et  de  Pontchartrain  y  vont 
pour  le  Roy. 

MM.  le  Prince ,  du  Mayne,  de  Longueville,  de 
Buillon,  de  Sully,  de  la  Trémoille,  de  Rohan,  de 
Soubise,  de  Caudale,  de  Tingry,  de  Thianges,  dé- 
putez de  l'Assemblée  de  Nismes,  y  estoyent.  (Des 
Bordes-Mercier  avoit  sa  voix  dans  le  Conseil  des 
Princes.) 

M"*'  la  Princesse  douairière  de  Condé*.  M™'  de 


*  Cliarlotte  Catherine  de  la  Trémoille,  veuve  de  Henri  de  Bourbon, 
!•'  du  nom,  prince  de  Condé,  morte  en  1629. 


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D'AHNAtîLD    D*ANDILLT.  141 

Longueville,  M"*  de  Rohan  la  douairi^  *  et  M"'  de     Fetner  mf 
Rohan  la  fille  *  y  estoyent  aussi. 

M.  l'Ambassadeur  d'Angleterre  Edmond  *,  M.  le 
Comte  de  Soissons,  Madame  sa  mère,  M,  de  Nevers 
et  M"**  de  la  Trémoille  (qui  s'est  toujours  très-bien 
conduite  en  toutes  ces  affaires-cy,  et  mesme  a  esté 
remerciée  par  le  Parlement  de  Rennes)  y  assis- 
toyent  *. 

Monsieur  le  Prince  dit  qu'avant  qu'entrer  en  Con- 
férence, il  demandoit  deux  choses,  l'une,  que  M.  de 
Vendosme  fustreceuâ  la  Conférence,  et  l'autre,  que 
la  trêve  fust  prolongée  pour  tout  le  mois  de  mars  ; 
autrement,  qu'il  vouloit  rompre.  Sur  cela,  grande 
contestation. 

On  envoyé  vers  le  Roy.  Enfin,  M.  de  Vendosme 
est  receu  à  venir  à  la  Conférence,  et  la  prolongation 
de  la  trêve  accordée  jusques  au  quinze  mars.  Con- 
venu que  Monsieur  le  Prince  fera   office  envers 


^  Catherine  de  Parthenay,  dame  de  Soubize,  veuve  de  René  II,  vi- 
comte de  Rohan,  depais  1586,  morte  en  1631. 

2  Marguerite  de  Béthune,  fille  du  grand  Sully,  mariée  en  1605  au 
duc  de  Rohan,  morte  en  1660. 

'  Sir  Thomas  Edmondes,  habile  diplomate,  fut  chargé  de  négocia- 
tions importantes  et  fut  plusieurs  fois  envoyé  comme  ambassadeur  en 
France.  Il  se  fit  aussi  remarquer  au  Parlement  pendant  le  règne  de 
Charles  I*',  et  mourut  en  1639.  On  a  publié  sous  le  titre  de  Vue  histo- 
rique des  négociations  entre  les  Cours  d'Angleterre^  de  France  et  de 
Bruxelles  de  1592  à  1617,  des  extraits  de  douze  volumes  in-folio  de  sa 
correspondance  et  de  ses  papiers.  (Foy.,  dans  la  Biographie  Michaud, 
Tarticle  de  Suard  sur  ce  personnage.) 

*  Voy,  Mère,  fr.^  t  iv,  p.  43.  M.  de  Tingry  est  M.  de  Luxembourg, 
duc  de  Pîney,  prince  de  Tingry.  Voy.  aussi  Fontenay-Mareuil,  p.  331  ; 
Pontchartrain,  p.  134. 


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142  JO0HNAL  inédit' 

Jmwtkr  m$,  M.  de  Vendosme  pour  le  faire  désarmer,  au  moins 
pour  la  plus  grande  partie,  et  que  ledit  sieur  de 
Vendosine  retirera  toutes  ses  forces  dé  Bretagne, 
et  les  pourra  mettre  au  Mayne,.  Aitjou,  Perche  et 
Normandie  ;  que  les  contributiona  seront  réglées,  etc. 

La  Conférence  se  comni^ce.  Les  députez  du  Boy 
estoyent  ceux  qui  sont  ncnmnés  ey^easus,  et  les  dé^ 
putez  de  Monsieur  le  Prince  estoyent 

Environ  le  16.  Moct  de  Uontatte,  juif,  médecin 
de  la  Reyne^m^re.  Mort  de  M.  Fleurance,  précep* 
teur  du  Roy. 

Mars.  1".     La  trêve  estant  expirée  à  minuit,  et  la  pro- 

longation  n'estant  point  publiée  en  Brie,  M.  de  Vitry 
ayant  assemblé  trois  cens  cinquante  cuirassiers  (dont 
il  y  en  avoit  deux  cens  cinquante  gentilshommes  de 
Brie) ,  trois  cens  carabins  et  cinq  cens  hommes  de 
pied  des  garnisons  de  Saint-Denis».*..  La  Ferté-Mi- 
Ion,  etc.  charge,  près  de  Chasteau-Thierry ,  un 
nommé  Novion  (qui  est  celuy  qui  a  pris  M.  de 
Forges  et  Grangemenant  ) ,  lequel  avoit  avec  luy 
trois  cens  chevaux,  dont  il  y  en  avoit  quatre-vingt 
des  gendarmes  de  M.  de  Luxembourg,  les  met  en 
fuite,  «n  tue  quinze,  en  prend  prfeonniers  cinquante 
ou  soixante.  Les  soldats  gagnèrent  cent  vingt  che- 
vaux, des  armes  et  de  Targent  que  ces  méchans 
avoyent  exigé  du  peuple.  Novion  se  sauva  à  la  fuite. 
A  dix  heures  du  matin,  la  trêve  fut  agnifiée  par  un 
trompette  à  M.  de  Vitry,  lequel  renvoya  les  prison- 
niers. 


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d'arnauld  d'andilly.  143 

2.  Les  affaires  estant  en  fort  bons  terme»  à  la  «•»  <«•. 
Conférence,  M.  de  Yendosme  y  arrive,  lequel  avec 
les  offres  qu'il  leur  fit,  s'efforça  de  porter  les  affaires 
à  la  guerre»  et  diangea  toute  la  face  des  affaires. 
Mais  une  visite  de  quatre  heures  que  Monsieur  le 
Prince  fit  chez  M.  de  Villeroy,  remit  toutes  choses 
en  pareil  train  qu'auparavant  On  tient  que  Mon- 
sieur le  Prince,  M.  du  Mayne,  M.  de  Buillon  sont 
portez  à  la  paix,  et  le  reste  à  la  guerre»  principale-^ 
ment  ceux  de  la  Religion. 

â.  W^  la  Maréchale  d'Ancre  part  de  la  Cour 
avec  ses  enfans  et  arrive  à  Paris  le  lundy  7.  On  tient 
qu'elle  venoît  pour  faire  opiniastrer  son  mary  à  ne 
point  quitta  ta  citadelle  d'Amies,  pour  estre  rasée. 
Elle  manda  son  mary,  qui  ne  vint  pdnt,  s'excussmt 
mif  un  mal  de  goi^.  Elle  se  logea  dans  le  Louvre^ 
e^  qui  fut  trouvé  fort  étrange^  et  fut  trois  ou  quatro 
jours  sans  vouloir  voir  pre8<îue  peraoone. 

Les  a&ireg  de  la  Conférenoe  eôtant  m  zBset 
mauvais  twmes.  Monsieur  te  Prince  y  entra,  ce 
qu'il  n'avoit  pomt  fait  auparavant,  et  en  trois  séances,, 
avança  plus  le  traitté  que  l'on  B'aîa*  fait  en  troifr 
mws.  La  trêve  prolongée  jusqu'au  35  mars. 

7.  MM-  de  Nevers,  de.  Brissac^  Villeroy  et  Pont- 
çhartraîn  arrivent  à  Tours  r  ayant  laissé  MM.  de 
Thou  et  de  Vie.  Au  commencement  de  ce  mois, 
M.  de  Guise  témoigna  à  la  Reyne  qu*il  estoît  très- 
mal  content  de  ce  qu'elle  tenoit  des  Conseils  secrets  ; 
et  l'on  disoît  le  2  que  te  Roy  luy  avoit  commandé  de 
se  tenir  prest  pour  se  mestre  en  campagne  le  dixième. 


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1&4  JOURNAL  INIÉDIT 

*««.  13.     MM.  de  Nevers,  de  Brissac  et  de  Pontchar- 

train  retournent  à  la  Conférence  chargez  des  volontés 
du  Roy. 

16.  M.  le  Marquis  de  Cœuvres,  Lieutenant-gé- 
néral au  gouvernement  de  l'Isle  de  France  (qui  du- 
rant ces  derniers  mouvemens  avoit  exempté  Crespy 
de  garnison  et  de  passage  de  gens  de  guerre  )  ap- 
prochant de  Crespy  avec  quelques  gens,  les  habitans 
envoyèrent  quatre  d'entr'eux  luy  faire  toutes  sortes 
de  complimens,  et  mesme  luy  offrir  d'entrer  dans  la 
ville.  A  quoy  il  leur  répondit  que,  puisqu'ils  se  met- 
toyent  en  ce  devoir,  il  oublioit  la  faute  qu'ils  avoyent 
faite  de  luy  témoigner  cy-devant  qu'ils  ne  désiroyent 
pas  qu'il  entrast  dans  leur  ville,  lorsqu'il  alla  trouver 
M.  de  Vendosme.  Et  que  puisque  ainsi  estoit,  il  pas- 
seroit  dans  Crespy  avec  quelques  uns  des  siens.  Sur 
cela,  ils  le  prièrent  de  ne  vouloir  point  entrer  dans 
leur  ville ,  à  cause  que  quelques  uns  des  habitans 
pourroyent  entrer  en  appréhension.  Sur  quoy  il  se 
mit  en  colère,  retint  les  quatre  députez  prisonniers , 
et  s'en  alla  loger  avec  ses  trouppes,  dans  le  faubourg 
de  Crespy,  et  ainsi,  avec  cent  vingt  chevaux-légers 
qu'il  avoit,  et  cinquante  ou  soixante  carabins,  as- 
siégea les  habitans.  Le  18,  nouvelles  de  cela  arrivent 
à  Paris.  Messieurs  du  Conseil  envoyentM.  Déagent*, 

^  Gaischard  Déageant,  recommandé  à  M.  de  Luynes  par  Ârnauld 
d'Andilly,  fut  d'abord  commis  de  Barbin,  puis  secrétaire  du  roi  et 
intendant  des  finances.  H  obtint  une  grande  faveur  et  joua,  pendant 
quelque  temps,  un  rôle  assez  considérable.  Disgracié,  il  fut  longtemps 
enfermé  à  la  Bastille,  obtint  sa  liberté  et  fut  relégué  dans  le  Dauphiné, 
sa  province,  avec  la  charge  de  premier  président  de  la  chambre  des 


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d'arnauld  d'andilly.  145 

secrétaire  du  Roy,  vers  M.  le  Marquis  de  Cœuvres       Mmnm: 
et  vers  les  habitans,  avec  lettres  de  créance.  Le  19, 
M.  Déagent  estant  arrivé,  trouva  que  Ton  tiroit  de 
part  et  d'autre  ;  que  les  habitans  avoyent  fait  une 
sortie  en  nombre  de  vingt-cinq,  avoyent  perdu  un  des 
leurs,  et  tué  deux  de  M.  le  Marquis  de  Cœuvres  ; 
que  depuis,  il  y  avoit  eu  encore  deux  des  habitans 
tuez,  et  quelques-uns  de  M.  de  Cœuvres  blessez  ;  et 
que  M.  le  Marquis  de  Cœuvres  faisoit  provision  de 
pétars,  échelles,  mantelets,  instrumens  de  sappe,  et 
autres  choses,  pour  forcer  la  ville  ;  qu'il  avoit  envoyé 
quérir  deux  cens  hommes  de  pied  à  Laon ,  d'où  il 
menaçoit  de  faire  venir  du  canon.  M,  Déagent,  après 
avoir  représenté  tout  ce  qui  se  pouvoit  au  dit  Mar- 
quis ,  sur  ce  sujet ,  et  luy  avoir  ouvert  plusieurs  ex- 
pédions, enfin,  il  se  ferma  à  un ,  qui  estoit  que 
Messieurs  du  Conseil  qui  estoyent  à  Paris,  luy  en- 
voyeroyent  tel  nombre  de  gens  de  guerre  qu'ils  avi- 
seroyent,  avec  lesquels  il  entreroit,  seuldesatrouppe, 
pourvu  que  l'on  baillast  aussi  un  prévost ,  pour  faire 
prendre  trois  ou  quatre  des  habitans,  les  plus  mutins, 
qu'il  nommeroit.  M.  Déagent  tâcha  de  faire  en  sorte 
d'amener  les  habitans  à  cela  (sans  leur  parler  tou- 
tefois du  prévost),  mais  il  n'en  put  tirer  autre  chose, 


comptes  de  Grenoble,  qu'il  exerça  jusqu'à  sa  mort  arrivée  en  1626. 
Déageant  a  laissé  de  courts  Mémoires  adressés  au  cardinal  de  Riche- 
lieu sur  quelques  événements  de  sou  temps.  Cet  ouvrage,  publié  en 
1668,  n'offre  qu'un  médiocre  intérêt,  mais  il  est  bon  à  consulter,  prin- 
cipalement sur  la  mort  du  maréchal  d'Ancre,  événement  auquel 
Déageant  prit  une  part  plus  importante  qu'honorable.  Arnauld  d'An- 
dilly  s'oxpliquc  longuement  sur  ce  personnage  dans  se  s  Mémoires. 

10 


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Ill6  JOURNiL   INÉDIT 

sinon  qu'ils  iroyent  porter  les  clefs  des  portes  audit 
sieur  marquis,  et  luy  faire  toutes  les  soumissions  qu'il 
sçauroit  désirer,  pourveu  que  ni  luy  ni  aucun  des 
siens  n'entrassent  dans  la  ville.  Ainsi,  M.  Déagent 
revient  le  lundy  21,  On  prend  quatre  résolutions  au 
Conseil  :  la  première ,  de  renvoyer  le  lendemain  de 
grand  matin  M.  Déagent  avec  nouvelles  lestres  de 
créance  ;  la  seconde,  d'envoyer  M.  de  Vilaine  à  la 
Cour,  pour  rapporter  lestres  du  Roy  à  M.  de  Cœuvres, 
portant  qu'il  face  retirer  promptement  ses  trouppes 
de  devant  Crespy,  et  qu'il  rende  les  quatre  prison- 
niers qu'il  tient ,  et  que  l'on  luy  fera  justice  de  ceux 
des  habitans  de  Crespy  qui  ont  manqué  à  leur  devoir 
envers  luy  ;  la  troisième ,  de  faire  donner  arrest  au 
Parlement  portant  qu'il  sera  envoyé  un  conseiller  de 
la  Cour ,  sur  les  lieux ,  pour  informer  contre  ceux 
des  habitans  qui  peuvent  avoir  failly  au  respect  qu'ils 
luy  doivent ,  et  cependant  enjoint  à  luy  de  retirer 
ses  trouppes  ;  la  quatrième,  de  faire  avancer  M.  de 
Ville-Gomblin  en  diligence  avec  sa  compagnie  (qui 
est  aux  faubourgs  de  Manse),  vers  Creil,  pour  de  là, 
avec  des  compagnies  de  Saint-Denis,  de  la  Ferté- 
Milon  et  autres,  s'aller  jester  dans  Crespy,  s'il  en 
estoit  besoin.  Tout  fut  exécuté ,  excepté  qu'à  cause 
qu'il  estoit  le  lendemain  mardy  procession  générale, 
on  ne  donna  point  d'arrest  au  Parlement.  Mais  Mon- 
sieur le  Premier  Président  écrivit  à  M.  le  Marquis 
de  Cœuvres,  et  Monsieur  le  Procureur  gééral  aussi. 
Messieurs  les  Prévost  des  marchans  et  Eschevins 
allèrent  ledit  jour  lundy,  trouver  M*"'  la  Maréchale 


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D^ARNAULD    D*ANPILLY.  147 

de  Balagny  \  gœur  de  M.  le  Marquis  de  Cœuvres,  et       iu«  m$. 
luy  dirent  que  Paris  estoit  en  telle  rumeur  de  ceste 
affaire  que  si  son  frère  ne  quittoit  ce  siège,  il  luy  en 
pourroit  arriver  quelque  chose  qui  luy  apporteroit 
du  déplaisir.  Le  22,  M.  Déagent  part  le  matin,  comme 
il  avoit  esté  avisé.  M.  le  Vicomte  de  Sardiny  *,  in- 
time amy  de  M.  de  Cœuvres  part  aussi  en  poste,  à 
la  prière  de  Messieurs  du  Conseil,  avec  lettres.de 
créance  audit  sieur  Marquis.  Les  lettres  portoyent 
que  les  habitans  avoyent  grandement  failly,  et  qu'ils 
méritoyent  d'estre  punis,  mais  que  ce  n' estoit  pas 
par  cette  voye  qu'il  les  faloit  chastier.  C'estoit  trop 
accuser  ces  pauvres  habitans ,  veu  que  leur  faute 
estoit  fort  excusable  ;  mais  il  le  faloit  faire  ainsi  pour 
contenter  ledit  aeur  Marquis  qui  se  servoit  de  cette 
lettre  pour  montrer  à  ses  amis  (ainsi  que  l'événe- 
ment le  fit  connoistre,  car  il  témoigna  à  M.  Déagent 
en  estre  très-satisfait,  et  mesme  le  pria  de  la  mon- 
trer aux  habitans  ;  et  au  contraire,  estre  très-mal 
content  des  lettres  de  Monsieur  le  Premier  Président 
et  du  Prévost  des  marchans).  MM.  de  Sardiny  et 
Déagent,  qui  arrivèrent  en  mesme  temps  à  Crespy, 
trouvèrent  que  par  l'entremise  de  MM.  de  la  Borde 
et  de  Billeraont,  M.  le  Marquis  de  Cœuvres  avoit  ca- 
pitulé avec  les  habitans,  à  condition  qu'ils  luy  bail- 


*  Diane  d'Estrées,  sœur  de  Gabrielle  d'Estrées  et  du  marquis  de 
Cœuvres,  veuve  depuis  1603  de  Jean  de  Montluc,  seigneur  de  Balagny, 
maréchal  de  France. 

*  Scipion  Sardini,  noble  Lucquois,  vicomte  de  Buzancy ,  baron  de 
Ghaumont-sur-Loire?  {Foy.  Bayle  sur  le  mot  Limeuil.) 


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148  JOURNAL   INÉDlt 

Mars  1618.       leroyent  1500  écus  ;  qu'il  entreroit  avec  dix  gen- 
tilshommes et  quinze  de  ses  gardes  ;  que  les  portes 
de  la  ville  seroyent  gardées  par  soixante  mousque- 
taires de  la  garnison  de  la  Ferté-Milon,  qui  sont  en- 
tièrement pour  le  service  du  Roy  ;  que  les  habitans 
luy  feroyent  des  excuses  ;  et  qu'ils  ne  paroistroyent 
point  armez    (  toutefois  ils  se   tinrent  armés  par 
trouppes  dans  des  maisons)  ;  qu'il  iroit  à  la  messe , 
feroit  un  tour  par  la  ville,  et  puis  sortiroit.  Cela  fut 
exécuté  le  23  au  matin  ,  nonobstant  qu'il  y  eust  eu 
grande  contestation  entre  les  habitans,  pour  ce  que 
la  populace  ne  vouloit  point  tenir  ce  que  les  princi- 
paux avoyent  fait,  ni  bailler  d'argent.  M.  le  Marquis 
avoit  dessein  de  les  forcer.  Il  avoit  fait  venir  cent 
cinquante  hommes  de  pied,  et  avoit  mesme  fait  sol- 
liciter la  garnison  de  Soissons,  et  en  cas,  il  se  fust 
précipité  et  déclaré  pour  Monsieur  le  Prince.  Et  ce 
qui  le  fit  résoudre  à  la  capitulation ,  fut  une  lettre 
que  M"*'  de  Balagny,  par  l'avis  de  M.  Déagent,  luy 
envoya  toute  la  nuit,  le  21,  par  laquelle  elle  luy  man- 
doit  que  s'il  s'y  opiniastroit,  on  luy  feroit  lever  hon- 
teusement le  siège  par  force,  comme  on  eust  fait. 
M.  Déagent,  le  26,  va  à  la  Cour,  à  la  prière  de  M.  le 
marquis  de  Cœuvres ,  et  requis  par  Messieurs  du 
Conseil  pour  justifier  l'action  dudit  sieur  Marquis. 

Trêve  continuée  jusques  à  Pasques. 

Tartas  pris  de  nuit,  par  surprise,  par  M.  de  Gram- 
mont  et  démantelé*. 

*  Voy,  Merc,  fr,,  t.  iv,  p.  76. 


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d'arnauld  d'andilly.  1/|9 

22.  M.  de  Pontchartain  arrive  de  Loudun  à  la  ««»  iw*. 
Cour,  touchant  quelques  points  en  difficulté.  Retourne 
le  vendredy  25.  Aussitost ,  Monsieur  le  Prince  en- 
voya lesdits  articles  à  la  Rochelle,  en  l'assemblée 
de  ceux  de  la  Religion  qui  Tavoyent  là  transportée 
de  Nismes. 

26.  M.  de  Manicamp  * ,  gouverneur  de  la  Fère  pour 
M.  de  Vendosme,  ayant  eu  quelque  huit  jours  aupa- 
ravant commandement  sur  commandement  de  M.  de 
Vendosme,  enfin,  le  vendredy  25,  fit  entrer  la  nuit 
dans  la  citadelle  deux  cens  hommes  des  garnisons 
de  Messieurs  les  Princes.  Le  lendemain,  comme  le 
lieutenant  de  M.  de  la  Serre  ^  estoit  allé  hors  la  ville 
en  dévotion  au  mont  du  Calvaire,  et  que  ses  enfants 
eurent  mené  à  la  chasse  le  lieutenant  de  M.  de  Vil- 
legaignon,  il  fit  sortir  par  force  les  soldats  des  dites 
deux  compagnies ,  lesquelles  ne  dévoient  estre  que 
de  cinquante  hommes  chacune.  M.  le  Marquis  de 
Cœuvres,  ayant  sceu  cela  à  quatre  heures  du  soir  à 
Paris  le  lendemain  dimanche  27,  partit  à  l'heure 
raesme  pour  aller  à  la  Fère. 

27.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  arrive  à  Paris,  loge 
en  sa  maison  proche  le  Louvre,  dit  à  tout  le  monde 
qu'il  ne  tiendroit  point  à  la  citadelle  d'Amiens  que 
la  paix  ne  se  fist,  et  qu'il  estoit  tant  obligé  au  Roy, 


*  Achille  ou  Philippe  de  Longueval,  seigneur  de  Manicamp,  gouver- 
neur de  Colmar  et  de  la  Fère. 

*  Jean-Jacques  de  Montesquieu,  seigneur  de  la  Serre,  connu  sous 
le  nom  de  capitaine  de  la  Serre,  capitaine  puis  lieutenant-colonel  du 
régiment  de  Vaubecourt? 


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150  JOURNAL   INÉDIT 

Mars  1616.  à  la  Reyne  et  à  la  France,  qu'il  ballleroit  non  seu-* 
lement  ses  biens,  mais  sa  vie,  etc..  *. 

28.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  fait  mettre  à  la  Bas- 
tille le  Marquis  de  Bonnivet,  qui  avoit  esté  prison- 
nier à  Calais,  longtemps  auparavant,  pour  avoir 
esté  en  Angleterre  pour  Monsieur  le  Prince  contre 
le  service  du  Roy  ^. 

29  ou  30.  MM.  de  Chevry  et  de  Flexelles  '  partis 
pour  aller  à  Loudun.  On  dit  que  c'estoit  pour  por- 
ter de  l'argent  afin  de  licencier  les  trouppes.  Retour- 
nez à  la  Cour  le On  dit  que  la  Reyne  fut  fort 

en  colère  contre  M.  de  Villeroy  de  ce  qu'au  lieu  de 
traitter  le  point  de  Picardie  le  premier,  il  l' avoit  ré- 
servé pour  le  dernier.  Cet  article  de  la  citadelle 
d'Amiens  a  tenu  la  paix  fort  longtemps  en  incerti- 
tude, car  M.  de  Longueville  s'opiniastroit  à  la  faire 
raser  ou  à  l'ester  au  moins  au  Maréchal  d'Ancre  ;  et 
la  Reyne  luy  offroit  le  gouvernement  de  Normandie 
avec  le  chasteau  de  Caen,  Dieppe  et  le  Pont  de 
l'Arche;  ce  que  M"*  de  Longueville  sa  mère,  Mon- 
sieur le  Prince,  M.  du  Mayne  et  M.  de  Buillon  luy 
conseilloyent  d'accepter;  mais  il  ne  le  leur  vouloit 
point  accorder,  disant  que  pour  l'amour  d'eux,  il 
quitteroit  tout  ce  qui  ne  regardoit  que  son  bien  et 
mesme  sa  vie;  mais  qu'il  n'y  avoit  rien  au  monde 


*  Voy.  Merc,  /V.,  t.  iv,  p.  73,  îa  lettre  du  maréchal  d'Ancre  à  la 
reine-mère  au  sujet  de  la  citadelle  d*Amiens  que  les  rebelles  voulaient 
faire  raser. 

'  Voy,  Merc.  /V.,  t.  iv,  p.  73. 

*  Le  sieur  de  Flesselles,  secrétaire  du  conseil. 


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d'arnauld  d'andilly.  151 

qui  luy  pût  faire  faire  chose  contre  son  honneur  ainsi       Mars  ish. 
qu'estoit  cela ,  veû  qu'il  y  alloit  de  la  paroM  qu'il 
avoit  donnée  aux  Picards.  On  dit  qu'il  avoit  une  fois 
demandé  que  l'on  mist  dans  ladite  citadelle  ou  M.  de 
la  Curée  ou  M.  de  Montigny  *  ou  M.  de  Praslin.  De- 
puis, on  dit  que  le  Roy  y  vouloit  mettre  M.  de  Luynes; 
ce  qu'on  dit  que  M.  de  Longueville  consentit.  Et  que 
sur  cela,  M.  du  Mayne  répondit  :  Je  pense  que  vous 
estes  fou  d'aymer  mieux  le  simple  gouvernement  de 
Picardie  que  la  Normandie  avec  les  places  que  l'on 
vous  y  offre.  A  quoy  M.  de  Longueville  ayant  répli- 
qué qu'il  estoit  fort  homme  de  bien,  M.  du  Mayne 
répondit  :  Je  ne  doute  point  que  vous  ne  soyez  fort 
homme  de  bien,  et  ce  que  j'en  ay  dit  n'a  nullement 
esté  pour  vous  offencer,  mais  pour  ce  que  j'affectionne 
vostre  bien  plus  que  vous-mesme.  Et  ainsi  cela  se 
passa.  M.  de  Buillon  et  Monsieur  le  Prince  témoigné- 
rent  aussi  à  M.  de  Longueville,  improuver  extrême- 
ment le  conseil  qu'il  prenoit  sur  ce  sujet.  On  dit  que 
M.  du  Mayne  fut  dix  jours  sans  voir  M.  et  M"*  de  Lon- 
gueville. Je  ne  sçay  si  ce  fut  devant  ou  après  cecy  ^ 


*  François  de  la  Grange,  seigneur  de  Montigny,  gentilhomme  de  la 
Chambre,  capitaine  des  gardes  sous  Henri  lU,  gouverneur  du  Berry, 
mestre  de  camp  général  de  la  cavalerie  légère,  se  signala  à  la  bataille 
de  Centras  en  1587,  où  il  fut  fait  prisonnier  par  le  roi  de  Navarre, 
servit  au  siège  de  Rouen  en  1592,  fut  aux  combats  d'Aumale  et  de 
Fontaine-Française  en  1595,  au  siège  d'Amiens  en  1597,  gouverneur  de 
Paris  et  de  Metz  en  1603,  maréchal  de  camp  dans  l'armée  du  duc  de 
Guise  en  1615,  maréchal  de  France  en  1616,  mort  en  1617.  {Foy,  P.  An- 
selme, t.  VII,  p.  624.) 

*  Voy.  Merc,  ft,^  t.  iv,  p.  55,  une  longue  remontrance  adressée  au 
roi  pour  le  prier  de  faire  raser  la  citadelle  d'Amiens. 


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152  JOURNAL   INÉDIT 

Le  chasteau  de  Lombez,  en  Albigeois,  surpris  par 
le  vicomte  de  Panât,  huguenot.  La  ville  estoit  tenue 
par  ceux  de  la  Religion  et  le  chasteau  par  le  Roy. 
On  a  dit  depuis  que  ce  vicomte  n'estoit  entré  que 
dans  la  ville,  laquelle  est  huguenotte. 

M.  le  Marquis  de  la  Vieuville  *  achète  de  M.  de 
Plainville  soixante-quatorze  mil  ecus  la  charge  de 
capitaine  des  gardes.  Il  a  dispute  avec  Cornillan. 

30.  Mort  de  M.  Dollé,  à  quatre  heures  du  matin. 
Il  a  voit  esté  malade  quatorze  jours.  Lorsqu'il  tomba 
malade,  la  Reyne  se  confioit  plus  en  luy  des  affaires 
d' Estât  qu'en  nul  autre.  Il  estoit  fort  bien  avec  Mon- 
sieur le  Prince,  lequel  lui  avoit  fait  dire  par  l'abbé 
d'Aumale,  qu'il  s'assurast  qu'il  ne  luy  vouloit  aucun 
mal,  et  qu'il  estoit  très-marry  de  ce  qu'il  avoit  esté 
mis  hors  le  manifeste  ;  mais  que  M.  de  Buillon  l'a- 
voit  voulu  absolument.  On  dit  qu'assurément  ledit 
sieur  Dollé  estoit  au  plus  haut  point  de  sa  faveur  et 
de  ses  espérances.  Il  se  jugea  mort  le  second  jour  de 
sa  maladie,  et  fit  son  bonjour.  II  a  laissé  huit  enfans. 
—  J'ay  ouy  la  veufve  se  pleindre  à  M.  Arnaud  de  ce 
que  nul  autre  de  Messieurs  du  Conseil  ne  l' avoit  visi- 
tée que  M.  de  Maupeou,  et  nul  n'y  avoit  envoyé  que 


*  Charles,  V  du  nom,  marquis  puis  duc  de  la  Vieuville,  premier  ca- 
pitaine des  gardes  du  corps  en  1616,  grand  fauconnier  de  France  après 
son  père  mort  en  1612,  lieutenant^général  en  Champagne,  surintendant 
des  Hnances  en  1623  ;  disgracié  sous  Richelieu,  il  sortit  de  France  et 
fut  condamné  par  contumace;  rentré  en  France  après  la  mort  de 
Louis  XIII,  il  fut  rétabli  dans  toutes  ses  charges  et  dignités  en  16^3; 
il  fut  de  nouveau  surintendant  des  finances  sous  Mazarin  ;  créé  duc  et 
pair  en  1651,  il  mourut  en  1653.  (Foy.  P.  Anselme,  t.  viii,  p.  761.) 


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d'arna^uld  d'aindilly.  155 

Monsieur  le  Chancelier  et  M.  le  Président  Jeannin  *.       »i«»  *«•• 

La  Reyne  permit  à  la  veufve  de  vendre  l'office  de 
son  Procureur  Général.  Elle  en  traitte  à  six  rail  ecus 
avec  M.  de  Bercy -Malon  ^  ;  mais  le  Maréchal  et  la 
Maréchale  d'Ancré  ne  l'eurent  agréable. 

2.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  voulant  aller  en  sa  Avrii. 
maison  du  faubourg  Saint-Germain,  accompagné  de 
quinze  ou  vingt  gentilshommes,  la  sentinelle  de  la 
porte  de  Bussy  les  arresta.  Sur  cela,  ils  dirent  que 
c'estoit  M.  le  Maréchal  d'Ancre,  et  dit-on,  quelqu'un 
d'eux  ou  le  cocher  dit  que  c'estoyent  de  beaux  ba- 
daux.  Sur  quoy  la  sentinelle  cria  aux  armes,  et  un 
cordonnier  nonmié  Picart,  sergent  de  la  compagnie, 
se  trouva  là.  M.  le  Maréchal  d'Ancre,  voyant  le  peu- 
ple qui  s'émouvoit,  se  retira  dans  l'hostel  de  Lyon. 

M.  d'Espernon,  estant  en  Limosin,  fit  charger 
quatre-vingt  cuirassiers,  qui  conduisoyent  l'attirail 
de  deux  canons,  que  M.  de  Buillon  vouloit  mettre 
à  Turenne.  Il  y  en  eut  trente  de  tuez.  Depuis,  il  fit 
pendre,  à  deux  fois,  quatorze  soldats  qui  levoyent  la 
taille,  et  n'avoyent  point  de  commission  expresse  de 
Monsieur  le  Prince. 

Mort  de  M.  de  Beaumont',  fils  de  Monsieur  le 


*  Voy,  Pontchartrain,  p,  140. 

2  Claude  Malon,  seigneur  de  Bercy,  maître  des  Requêtes,  président 
au  grand  Conseil? 

s  Christophe  de  Harlay,  comte  de  Beaumont,  lieutenant-général  au 
gouvernement  d'Orléans,  bailly  du  Palais,  ambassadeur  en  Angleterre 
de  1602  à  1607,  mort  en  1616, 


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15/i  JOURNAL   II^ÉDIT 

Avril  i6ie.  Premier  Président  de  Harlay  ',  de  fièvre  de  pourpre. 
Ses  charges  de  bailly  du  Palais  de  Paris  et  d*Orléans 
furent  conservées  à  son  fils  âgé  de  neuf  ans  *,  en 
vertu  d'un  brevet.  Il  est  mort  endetté  de  deux  cent 
mil  écus. 

M.  de  Béthune%  frère  de  M.  de  Sully,  estant  à  sa 
maison,  à  Celles  en  Berry,  mandé  par  la  Reynepour 
aller  à  Turin,  Milan  et  Venise  touchant  les  différeiis 
émeus  es  ditâ  pays.  —  Nota  :  défaveur  à  M.  de  Ram- 
bouillet* qui  avoit  traitté  cette  affaire  Tannée  der- 
nière. 

8.  Monsieur  vint  loger  au  Louvre.  On  remarque 
que  jamais  Prince  du  sang  n'y  avoit  logé  en  l'ab- 
sence du  Roy.  On  dit  que  la  Maréchale  d'Ancre  le  fit 
faire,  afin  d'estre  gardée  par  ses  gdrdes. 

9.  MM.  de  Vîlleroy,  de  Nevers,  de  Brissac  et 


^  Achille  de  Harlay,  comte  de  Beaumont,  né  en  1536,  conseiller  an 
Parlement  de  Paris  en  1557,  président  à  mortier  et  conseiller  d'Etat 
en  1572 ,  premier  président  après  la  mort  de  Christophe  de  Thou,  son 
beau-père,  en  1582  ;  il  se  démit  en  1611  en  faveur  de  Nicolas  de  Ver- 
dun, et  mourut  en  1616. 

'  Achille  de  Harlay,  II*  du  nora^  comte  de  Beaumont,  conseiller  au 
Parlement  et  maître  des  Requêtes  en  1635,  procureur  général  en  1661, 
mort  en  1671. 

s  Philippe  de  Béthune,  comte  de  Selles,  conseiller  d'Etat,  ambassa- 
deur en  Ecosse  en  1599,  à  Rome  en  1601,  gouverneur  du  duc  d'Or- 
léans, ambassadeur  en  Italie  en  1616,  en  Allemagne  en  1624,  en  Italie 
en  1629,  mort  en  1649. 

^  Charles  d'Angennes,  marquis  de  Rambouillet,  vidaroe  et  sénéchal 
du  Mans,  capitaine  des  gentilshommes  de  la  maison  du  Roi,  eonseiUer 
d'État  et  colonel  général  de  l'infanterie  italienne  en  1620,  maréchal 
de  camp,  maître  de  la  garde-robe,  ambassadeur  en  PiénK)nt  et  en 
Espagne  en  1627,  mort  en  1652.  Sa  femme,  Catherine  de  Vivonne,  allé 
du  marquis  de  Pisani,  a  immortalisé  le  nom  de  Rambouillet. 


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d'arnauld  d*andilly.  155 

de  Pontchartrain  arrivent  de  Loudun  à  Tours  avec       Anii  me. 
assurance  de  la  paix.  Et  arrivèrent  aussi  M.  et 
M"*  la  comtesse  de  Soissons. 

En  mesme  temps  qu'ils  estoyent  partis.  Monsieur 
le  Prince  avoit  envoyé  M.  de  Sully  à  la  Rochelle, 
pour  dire  à  l'assemblée  de  ceux  de  la  Religion,  qu'il 
les  prioit  de  trouver  bon  ce  que  le  Roy  leur  accor- 
doit,  qui  estoit  très-juste,  sinon  qu'il  ne*  laisseroit 
pas  de  faire  la  paix. 

10.  A  huit  heures  du  soir,  M.  le  Maréchal  d'An- 
cre monte  en  carrosse  avec  trois  ou  quatre  des  sieiis, 
va  à  la  Bastille,  dit  à  M.  de  Vauzay,  qui  y  comman- 
doit,  qu'il  vouloit  sortir  par  là  hors  la  ville;  ce  qu'il 
fît,  et  trouva  dehors  plusieurs  des  siens  qui  estoyent 
sortis  deux  à  deux  et  trois  à  trois,  en  vertu  de  passe* 
ports  de  Monsieur  le  Gouverneur  et  du  Prévost  de» 
marchans  et  échevins.  Et  ainsi,  les  ayant  joints,  il  alla 
au  rendez-vous  qui  estoit  près  la  porte  Saint-Denis, 
où  toutes  ses  trouppes  l'attendoyent.  Et  là,  prit  lei 
chemin  d'Amiens.  Il  descendit  avec  une  échelle  dans 
le  fossé,  et  dit-on  qu'il  se  mouilla  les  jambes. 

On  dit  que  sachant  que  la  paix  ne  seroit  signée 
que  dans  huit  ou  dix  jours,  et  craignant  les  placards 
qui  avoyent  esté  affichez  contre  luy  dans  les  rues,  il 
se  retira  ainsi. 

13.     Trêve  publiée  et  continuée  jusques  au  25. 

M.  Desmarests  *  venu  à  Paris*  On  dit  que  c' estoit 


*  Philippe  Horault,  seigneur  du  Marais,  tué  au  siège  des  Ponts-de- 
Cé  en  1620. 


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156  JOUKNAL   INBDIT 

Avril  1616.       pour  appeller  M.  de  Vitry  de  la  part  du  comte  de  la 
Suze  *,  qui  prétendoit  que  M.  de  Vitry  avoit  chargé 
Novion  au  préjudice  de  la  parole  qu'il  luy  avoit 
donnée,  que  lorsque  la  trêve  expireroit,  ils  s'entr'a- 
vertiroyent  l'un  l'autre,  avant  que  de  commettre  au- 
cun acte  d'hostilité.  M.  de  Vitry  dit  qu'il  luy  avoit 
seulement  mandé  qu'il  le  tenoit  si  galant  homme, 
qu'il  s'assuroit  qu'il  se  trouveroit  à  la  teste  de  ses 
trouppes.  M.  Desmarests  trouva  que  ce  jour  là  M.  de' 
.  Vitry  avoit  des  gardes  que  l'on  luy  avoit  envoyez  de 
la  Cour,  sur  ce  que  l'on  avoit  sceu  que  M.  le  comte 
de  la  Suze  estoit  party  brusquement  de  Loudun.  — 
Ce  prétendu  dessein  de  M.  Desmarests  d' appeller 
M.  de  Vitry  fut  trouvé  tellement  mauvais  à  Paris 
que  l'on  vouloit  l'arrester  pour  le  mettre  en  la  Bas- 
tille; sur  ce  qu'on  disoit  qu'il  n' estoit  point  tolérable 
que  luy  qui  estoit  tenu  pour  serviteur  du  Roy,  vint 
appeller  M.  de  Vitry,  serviteur  du  Roy,  pour  un  qui 
portoit  les  armes  contre  le  Roy. 

Mort  de  M.  de  la  Boulaye,  beau-frère  de  M.  Des- 
marests. Son  gouvernement  de  Fontenay-le-Comte 
donné  à  son  fils,  avec  pouvoir  à  M""*  de  la  Boulaye  ^ 
de  commander  durant  son  bas  âge. 

Courrier  envoyé  à  la  Cour,  delà  Rochelle,  par 
M.  de  Sully,  lequel  porta  à  Leurs  Majestez  toutes 


^  Louis  de  Champagne,  comte  de  la  Suze,  maréchal  de  camp  des 
années  du  Roi,  mort  en  1636. —Je  crois  qu'il  s*agit  plutôt  ici  du  comte 
de  la  Suze,  parent  de  M.  du  Mayne. 

>  Marie  Hurault,  fille  de  François  Hurault,  seigneur  de  Chàteaupers, 
maître  des  Requêtes,  et  de  Rachel  de  Cochefllet. 


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d'aunauld  d*andilly.  157 

sortes  de  bonnes  nouvelles  des  députez  de  la  Reli-      ^vm  lei*. 
gion. 
M.  de  Villeroy  tombe  malade  d'une  fièvre. 

18.  Le  Roy  part  de  Tours  et  vient  coucher  à 
Amboise,  à  cause  de  la  maladie  qui  estoit  à  Tours  *. 

On  dit  que  MM.  de  Villeroy  et  Jeannin  firent  grand 
ofEce  vers  la  Reyne  pour  le  Chancelier.  On  dit  que 
M.  Ribier  fut,  par  le  commandement  de  la  Maré- 
chale, vers  M.  le  président  du  Vair  ^  en  Provence, 
pour  luy  promettre  les  sceaux. 

19.  La  Reyne-mère  part  et  va  coucher  à  Blois. 
On  laisse  Monsieur  le  Chancelier,  M.  le  président 

Jeannin,  et  autres  de  Messieurs  du  Conseil  à  Tours, 
pour  traitter  les  affaires  ;  et  M.  de  Guise  avoit  sept 
compagnies  du  régiment  des  gardes,  qui  entroyent 
en  garde  devant  son  logis,  comme  estant  lieutenant- 
général  des  armées  du  Roy. 

Monsieur  le  Prince  fort  malade  à  Loudun,  d'une 
grande  fièvre  continue  avec  pourpre  et  grands  redou- 
blemens.  Le  Roy  luy  envoya  M.  Petit,  médecin,  et 
autres,  avec  plusieurs  préservatifs  ;  et  envoyoit  tous 
les  jours  des  courriers  savoir  des  nouvelles  de  sa 

*  yoy.  Merc.  fr.,  t.  iv,  p.  77. 

*  Guillaume  du  Vair,  né  en  1556,  conseiller  au  Parlement  de  Paris 
en  158/i,  maître  des  Requêtes  en  1594,  premier  président  du  Parle- 
ment de  Provence,  garde  des  sceaux,  du  mois  de  mai  au  mois  de  no- 
vembre 1616;  remplacé  par  Mangot;  de  nouveau  garde  des  sceaux,  le 
25  avril  1617,  après  l'assassinat  du  maréchal  d'Ancre,  évoque  et  comte 
de  Lisieux  en  1618,  mort  en  1621.  «  n  passa,  dit  le  P.  Anselme,  pour 
le  plus  intègre  et  le  plus  éloquent  magistrat  de  son  temps,  et  fut  le 
premier  qui  donna  du  lustre  à  la  langue  Françoise.  »  (  P.  Anselme, 
t-  VI,  p.  535.)  —  M.  Ribier  était  neveu  du  président  du  Vair. 


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158  *  JOURNAL  INIÈDIT 

Avril  i6i«.  santé.  On  dit  que  Monsieur  le  Prince  témoigna  se 
sentir  fort  obligé  à  Leurs  Majestez  du  grand  soin 
qu'elles  avpyent  de  luy  *. 

M'"*'  la  Comtesse  de  Soissons,  voyant  la  maladie 
de  Monsieur  le  Prince>  et  craignant  que  s'il  venoit  à 
faillir,  on  se  saisit  de  Monsieur  le  Comte,  l'envoya  se 
promener  à  Fontevraux,  et  de  là  à  un  chasteau  fort 
nommé  Brézé,  près  de  Saumur. 

20,  M.  de  Villeroy  part  pour  aller  à  Loudun. 

21.  M"'  de  Pisieux^,  après  avoir  fait  la  grosse, 
neuf  mois,  enfm,  se  trouve  n'estre  point  grosse. 

25.     Trêve  continuée  et  publiée  jusques  au  5  may. 

Monsieur  le  Chancelier  arrive  de  Tours  à  Blois. 

28.  La  Reyne  commande  à  M.  le  Président 
Jeannin  d'aller  dire  à  Monsieur  le  Chancelier  qu'il 
luy  remist  les  sceaux  entre  les  mains,  pour  les  bailler 
à  celuy  que  le  Roy  aviseroit.  (On  disoit  qu'ils  avoyent 
esté  offerts  à  M.  le  Président  Jeannin,  et  qu'il  les  avoit 
refusez  ;  mais  selon  ce  qui  s'estoit  passé  touchant 
M.  du  Vair,  il  n'y  a  point  d'apparence  qu'on  les  eqst 
offerts  à  M.  le  Président  Jeannin.)  M»  le  Président 
Jeannin  pria  la  Reyne  de  les  lui  envoyer  offrir  par 
un  autre  ;  mais  elle  luy  commanda  absolument  d'y 
aller.  Il  y  fut  donc  ;  et  ayant  fait  ce  message  à  Mon- 

*  Voy.  Merc,  fr.^  t.  iv,  p.  77;  Fontenay-Mareuil,  p.  336;  Pontchar- 
train,  p.  140. 

«  Charlotte  d'Estampea-Valençay,  fille  de  Jean  d'Estampes,  seigneur 
de  Valençay,  mariée  en  1615,  qiorteen  1677.  Elle  était  la  seconde  femme 
de  M.  de  Puisieux,  qui  avait  épousé  en  premières  noces  Madeleine  de 
Neufville-Villepoy,  fille  de  Charles  de  Neufville,  marquis  de  Villeroy  et 
d*Alincourt,  morte  en  1613. 


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d'aunauid  d'andilly.  159 

pieur  le  Chancelier,  il  demeura  fort  étonné;   car       AvruieK. 
encore  bien  qu'il  sceust  bien  qu'il  estoit  mal,  néant- 
moins  il  pe  croioit  pas  que  le  coup  fust  si  proche.  11 
pria  M.  Iq  Président  Jeannin  d'aller  dire  à  la  Reyne 
qu'elle  se  faisoit  tort  d'en  user  ainsi  ;  que  tout  estoit  à 
elle;  et  qu'elle  pourroit  prendre  les  sceaux  quand  il 
luy  plairoit;  mais  qu'il  la  supplioit  d'attendre  encore 
quelque  temps,  M.  le  Président  Jeannin  retourna.  La 
Reyne  luy  dit  qu'elle  vouloit  qu'il  les  rendist.  11  vint 
donc  retrouver  Monsieur  le  Chancelier,  et  luy  dit  : 
que  puisque  c' estoit  une  chose  nécessaire,  il  se  faloit 
résoudre  à  la  faire  courageusement,  et  qu'il  luy  con- 
seilloit  d'aller  promptement  trouver  la  Reyne,  et  luy 
reporter  les  sceaux,  pour  ce  que  luy  ne  desiroit  pas 
de  les  recevoir.  — L' après  disnée,  Monsieur  le  Chan- 
celier y  alla  ;  dit  à  la  Reyne  qu'il  a  voit  sceu  qu'elle 
desiroit  les  sceaux  ;  qu'il  les  luy  venoit  rapporter, 
et  qu'elle  pouvoit  disposer,  non-seplement  de  cela, 
mais  de  tout  ce  qu'il  avoit  au  monde.  Elle  luy  répondit 
qu'elle  les  recevoit,  mais  qu'il  les  gardast  jusqu'à  ce 
que  celuy  à  qui  elle  les  vouloit  bailler  fust  arrivé. 
Le  vendredy  29,  il  signa  encore  le  bail  des  Gabelles 
fait  à  Pâlot  ^  —  Le  dimanche  matin,  il  reporta  les 
sceaux  au  Roy.  On  dit  qu'il  le  fit  pleurer,  en  parlant 
à  luy,  et  que  la  Reyne  pleura  aussi. 

Ce  qui  s'en  suit  est  au  vray,  et  comme  je  l'ay  ouy 
dire  à  M.  Barbin,  en  présence  de  MM,  Arnaud,  in- 


*  Jean  Pallot,  secrétaire  du  Roi,  contrôleur-général  de  Textraordi- 
naire  des  guerres. 


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160  JOURNAL   INÉDIT 

Avril leie.       tendant,  Vignier*,  Tabbé  de  Sainte- Cornille,  et 
Déagent. 

Monsieur  le  Chancelier  estant  demeuré  à  Tours, 
M. . . . ,  maistre  des  Requestes,  luy  dit  qu'il  avoit  avis 
que  M.  du  Vair  venoit  à  la  Cour  ;  sur  quoy  il  demeura 
extrêmement  étonné.  Quelques  jours  après,  estant 
au  seau,  il  reçut  une  lettre  de  M.  du  Vair,  qui  com- 
mençoit:  Monseigneur,  cinquante  années  de  ser- 
vice, etc.  Lors,  en  se  souriant,  il  montra  le  commen- 
cement de  cette  lettre  audit  maistre  des  Requestes, 
qui  estoit  présent,  comme  se  voulant  en  effet  moquer 
de  l'avis  qu'il  luy  avoit  donné.  Le  sujet  de  ceste  lettre 
estoit  en  faveur  d'un  conseiller  d'Aix,  qui  avoit  servy 
cinquante  ans,  et  demandoit  permission  de  résigner 
sa  charge  à  son  fils,  et  de  l'exercer  néantmoins, 
tant  qu'il  vivroit.  —Quelques  jours  après,  un  gentil- 
homme de  Provence  luy  ayant  parlé  d'une  affaire, 
il  demanda  ce  qu'on  disoit  en  son  pays.  Il  répondit 
qu'il  n'y  avoit  rien  de  nouveau,  sinon  que  M.  du 
Vair  venoit,  et  qu'il  l' avoit  laissé  à  Avignon.  Sur 
cela,  il  demeura  du  tout  estonné,  se  hasta  de  revenir 
à  Blois,  et  pria  le  Président  Jeannin  de  voir  la  Reyne 
sur  ce  sujet  ;  ce  qu'il  fit.  Et  luy  ayant  dit  tout  ce  qu'il 
pouvoit  en  faveur  de  Monsieur  le  Chancelier,  elle  luy 
dit  qu'il  estoit  vray  qu'elle  avoit  mandé  M.  du  Vair, 
et  que  c' estoit  une  affaire  à  quoy  il  faloit  que  Mon- 
sieur le  Chancelier  se  résolust.  M.  le  Président  Jeannin 


*  Jacques  Vignier,  baron  de  Saint-Liébault  et  de  Villemor,  conseiller 
d'Etat? 


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d'arnadld  d'andillf.  161 

ayant  rapporté  cela  à  Monsieur  le  Chancelier,  il  le  AvmiêM. 
pria  de  retourner  encore  ;  ce  qu'il  fit.  Et  ayant  trouvé 
la  Reyne  tellement  fermée  à  ceste  résolution  qu'il 
n'y  avoit  moyen  quelconque  de  l'en  démouvoir,  il 
vint  redire  à  Monsieur  le  Chancelier  qu'il  n'y  avoit 
point  d'espérance,  et  qu'il  faloit  se  résoudre  à  faire 
courageusement  ce  qu'il  ne  pouvoit  éviter  ;  la  Reyne 
luy  ayant  mesme  refusé  entièrement  de  luy  laisser  les 
sceaux  jusques  à  Paris,  comme  il  l'en  avoit  suppliée. 
Ensuite  Monsieur  le  Chancelier  vint  rapporter  les 
sceaux  au  Roy,  en  présence  de  la  Reyne  ;  entra  si 
étonné  et  si  tremblant  qu'il  fut  contraint  de  s'ap- 
puyer sur  M"*  Caterine*  ;  se  mit  à  genoux,  pleura, 
et  fit,  en  somme,  toutes  les  actions  qui  peuvent  témoi- 
gner un  extrême  défaut  de  résolution.  Voyant  que 
par  toutes  ses  soumissions  et  prières,  il  ne  pouvoit 
obtenir,  qu'on  luy  laissast  un  seul  jour  davantage  les 
sceaux  de  France,  il  supplia,  avec  une  très-grande 
instance,  qu'au  moins  on  luy  laissast  ceux  de  Na- 
varre ;  ce  qui  luy  fut  accordé. 

28.  Au  dernier  sceau  que  Monsieur  le  Chancelier 
avoit  tenu,  on  luy  avoit  présenté  les  lettres-patentes 
pour  le  conseiller  de  Provence  dont  il  est  parlé  cy- 
dessus  ;  il  les  prit,  les  plia,  les  mit  à  part,  et  puis  dit 
tout  haut  :  ce  sont  des  lettres-  patentes  pour  une 
telle  affaire  dont  M.  du  Vair  m'a  écrit,  par  plusieurs 
fois,  et  que  j'ay  toujours  refusées,  d'autant  que  je 
n'estime  pas  qu'elles  se  doivent  accorder;    mais 

*  Première  femme  de  chambre  de  la  reine. 

11 


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162  JOURNAL   INÉDIT 

AvHi  i«i6.       lorsque  M.  du  Yair  sera  içy,  il  les  pourra  sceller 
luy-mesme,  s'il  les  trouve  justes*. 

May.  %     Monsieur  le  Chancelier  part  de  Blois;  alla 

coucher  à  Orléans,  chez  M.  Descures.  Le  jeudy  5,  il 
arriva  à  Bemy. 

3.  La  paix  signée  à  Loudun,  à  9  heures  du  soir. 
A  trois  heures  après  midy,  tout  avoit  esté  rompu, 
sur  ce  que  M.  de  Longueville  disoit  que  le  Roy  luy 
ayant  donné  le  choix  de  la  Normandie  ou  de  la  Picar-r 
die,  il  optoit  la  Picardie,  et  estoit  prest  de  signer. 
M»  de  Villeroy  répondit  qu'il  n' avoit  point  charge 
d'accorder  cela.  Sur  quoy  Monsieur  le  Prince  et 
M.  de  Longueville  répliquèrent  qu'il  les  trompoit 
donc,  leur  ayant  toujours  donné  ceste  assurance. 
Et  ensuite ,  il  y  eut  grande  division.  Enfin,  M"*  la 
Comtesse  de  Soissons,  M.  de  Nevers  et  autres,  firent 
tant  qu'ils  firent  signer  Monsieur  le  Prince,  et  ensuite 
MM.  du  Mayne  et  de  Longueville,  et  puis  les  autres, 
qui  faisoyent  fort  les  fâcheux^. 

*  Foy,  Merc,  fr,y  t.  iv,  p.  78-70.  hd  Mercure  à\i  qu'on  oe  B^itpASce 
qui  se  passa  dans  l'audience  pendant  laquelle  le  Chancelier  rapporta 
les  sceaux.  Le  récit  d'Âmauld  d'Andilly,  qui  déclare  tenir  les  détails 
de  cette  scène  de  la  bouche  même  de  meml)res  du  Conseil  présents  à 
cette  audience,  n*en  est  que  plus  intéressant.  Voy,^  sur  cette  affaire, 
Fontenay-Mareuil,  p.  335  ;  Richelieu,  p.  291  ;  Pontchartrain,  p.  140. 
Voy.  aussi  les  M ém.  de  M.  Mole,  p.  110,  où  l'on  trouye  le  discours  pro- 
noncé par  le  Chancelier  devant  les  députés  du  Parlement  lorsque  les 
sceaux  luj  furent  retirés. 

*  Voy,  Merc.  fr,^  t.  iv,  p.  80,  TÉdit  de  Loudun  contenant  les  condi- 
tions de  la  paix  entre  le  Roi  et  les  Princes.  Cet  acte  important  n'avait 
pas  moins  de  5&  articles,  plus  15  articles  particuliers.  Voy.  Fontenay- 
Mareuil,  p.  332  ;  Brienne,  p«  307  ;  Rohaii,  p.  133  ;  Richelieu,  p.  S87  et 


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d'arnaold  d*andilly.  168 

M.  de  Chevry  fut  envoyé  à  Loudun,  pour  donner       ^ny  m9. 
ordre  au  licenciement  des  trouppes  de  Messieurs  les 
Princes,  et  M.  de  Maupeou  travailla,  à  Tours,  au 
licenciement  de  celles  du  Roy^ 

M.  de  Vignoles  fut  envoyé  à  Xaintes  vers  M.  d'Es- 
pemon  (très  mal  content) ,  afin  de  le  faire  désarmer; 
à  quoy  il  se  résolut  avec  grande  peine.  Enfin,  il  en 
donna  parole.  Quelque  temps  auparavant  M.  de  Sou- 
bise  s'estoit  avancé  vers  luy  avec  trouppes  ;  mais  il 
s'en  revint,  ayant  appris  que  M.  d'Espemon  s'estoit 
mis  en  estât  de  le  bien  recevoir,  ayant  assemblé, 
compris  les  vieux  régimens  estant  en  garnison  dans 
son  gouvernement ,  quatre  mil  hommes  de  pied  et 
cinq  à  six  cens  chevaux. 

7.  Leurs  Majestez  partent  de  Blois.  Le  }undy, 
le  Roy  part  d'Orléans  et  va  coucher  à  Pithiviers,  et 
le  lendemain  à  Fontainebleau  ^. 

8.  M.  le  président  du  Vair  arrive  à  Paris  ;  vid 
Madame  la  Maréchale.  Le  jeudy,  vid  la  Reyne,  la- 
quelle luy  avoit  escrit  trois  lettres  pour  le  faire  venir; 
la  première  estoit  en  créance. 

11.     La  Reyne  régente  arrive  à  Paris,  descend  à 


et  291  ;  Pontchartrain,  p.  142.  Fey.  surtout  le  Journal  de  la  Confé- 
rence de  Loudun  par  Pontchartrain,  qui  y  joua  un  grand  rôle.  (Mém. 
de  Pontchartrain,  éd.  citée,  p.  315.)  Le  récit  en  quelque  sorte  authen* 
tique  de  Pontchartrain  confirme  entièrement,  quant  aux  dates  et  aux 
faits,  celui  d'Amauld  d'Andilly. 

*  Voy,  Merc.  fr,^  t.  iv,  p.  80,  l'ordonnance  du  roi  pour  la  padfica- 
tion  des  troubles  et  celle  sur  la  retraite  des  gens  de  guerre;  Voy, 
aussi  Ridielieu,  p.  290. 

*  Voy,  Merc,  fr,^  t.iv,  p.  83. 


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164  JOURNAL   INÉDIT 

Mny  1816.  Saint-VictoF  ;  de  là,  va  à  son  bastiment  *,  et  puis  au 
Louvre.  Elle  n'avoit  point  voulu  d'entrée  ;  et  néant- 
moins,  il  fut  quantité  de  monde  et  de  peuple  au  de- 
vant d'elle.  Elle  témoignoit  un  contentement  extrême 
de  revenir  à  Paris.  M.  de  Guise,  M.  de  Schomberg*, 
M.  de  Praslin  et  Monsieur  le  Grand-Prévost  estoyent 
avec  elle. 

Monsieur  le  Chancelier  estoit  encore  à  Bemy,  lors- 
que la  Reyne  arriva àParis;  en  quoy  l'on  trouve  qu'il 
fit  très-grande  faute.  Il  fut  fort  visité  audit  Bemy. 
12.  Monsieur  le  Chancelier  vint  coucher  à  Paris, 
dans  un  carrosse  fermé,  et  partit  le  lendemain  matin 
pour  aller  à  Panfou.  C'estoit  pour  prendre  les  papiers 
de  son  cabinet  11  n'avoit  osé  entrer  à  Paris  devant 
Tarrivée  de  la  Reyne,  de  crainte  que  l'on  dist  qu'il  ne 
fist  quelque  faction. 


*  Estant  entrée  dans  Paris  par  la  porte  Saint-Victor ,  elle  en  sortit 
par  la  porte  Saint- Germain  pour  aller  voir  son  superbe  bastiment  au 
parc  de  Luxembourg,  où  elle  fut  recette  par  une  musique  de  hauts- 
bois  que  les  ouvriers  y  avoient  fait  venir  pour  la  resjouissance  du  retour 
de  Su  Majesté,  qui  fut  très  aise  de  voir  que  ce  bastiment  n*avoit  point 
esté  discontinué  pour  le  trouble.  Après  qu'elle  l*eut  visité,  elle  rentra 
dans  Paris  par  la  porte  de  Bussy  et  s*en  alla  au  Louvre,  les  rues 
estoient  pleines  d'une  multitude  de  monde,  joyeuse  de  son  retour  et 
de  la  paix.  »  (Merc,  fr,^  t.  iv,  p.  83.) 

2  Henry  de  Schomberg,  comte  de  Nanteuil,  né  en  1575,  gouverneur 
des  Marches,  maréchal  de  camp  général  des  troupes  allemandes  au  ser- 
vice du  Roi,  lieutenant  de  Roi  en  Limosin  en  1608,  ambassadeur  en 
Allemagne  en  1617,  surintendant  des  finances  en  1619,  gouverneur  de 
Limosin,  Saintonge  et  Angoumois  en  1622,  conseiller  d'État,  maréchal 
de  France  en  1625,  commanda  au  siège  de  la  Rochelle  en  1628,  blessé 
au  pas  de  Suze  en  1620,  prit  Pignerol  en  1630,  défit  et  fit  prisonnier 
le  duc  de  Montmorency  à  Castelnaudar}*  en  1632,  gouverneur  du  Lan- 
guedoc, mort  en  1632. 


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d'arnauld  d*andilly.  I(i5 

16.  Le  Roy  et  la  Reyne  sa  femme  arrivent  à  ^««y  i««. 
Paris  par  le  faubourg  Saint-Jacques.  M.  de  Chevry 
(qui  s'estoit  fait  nommer  colonel  général  par  Sa  Ma- 
jesté) alla  au  devant  d'eux  avec  dix  mil  hommes  dis- 
posez en  neuf  bataillons,  et  avoit  fait  défences  de 
tirer,  sur  peine  de  la  vie.  Ils  ne  tirèrent  point  quand 
le  Roy  les  vid,  mais  lorsque  la  Reyne  approcha 
d'eux,  ils  firent  une  salve  dont  elle  eut  frayeur,  et  en 
eut  un  très-grand  vomissement  toute  la  nuit.  Sans 
des  gentilshommes  qui  arrestèrent  les  muUets  de  sa 
litière,  ils  prenoyent  l'épouvante.  Leurs  Majestez  al- 
lèrent droit  à  Nostre-Dame,  où  les  Cours  souveraines 
les  attendoyent  en  corps.  Six  muidsde  vin  que  M.  de 
Chevry  fit  porter  furent  cause  de  tout  ce  désordre  *. 

Aussitost  que  le  Roy  fut  dans  le  Louvre,  il  envoya 
quérir  M.  du  Vair,  auquel  il  donna  les  sceaux.  Le  Roy 
scella  luy-mesme  ses  provisions  \ 

47.  M.  le  président  Jeannin  et  Messieurs  les  In- 
tendans  des  finances  furent  voir  M.  du  Vair  qui  leur 
parla  très-honnestement. 

Monsieur  le  Garde  des  sceaux  donna  au  bonhomme 
M.  Combaut  la  charge  de  garde  des  rolles  et  acquits 
des  parties  casuelles,  dont  il  s'estoit  défait  entre  les 
mains  de  Renouard.  Cette  charge  dépend  du  Chan- 
celier ou  Garde  des  sceaux  qui  entre  en  charge,  le- 


*  Foy.  Merc.  fr,y  t.  iv,  p.  84,  le  récit  curieux  de  l'entrée  solennelle 
du  roi  et  de  la  reine  à  Paris;  Voy,  Pontchartrain,  p.  143,  et  Mém.  de 
Math.  Mole,  p.  111. 

*  Voy.  Fontenay-Mareuil,  p.  335  ;  Brienne,  p.  312;  Richelieu,  p.  295; 
Pontchartrain,  p.  144. 


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166  JOURNAL   INÉDIT 

May  1616.  quel  la  peut  donner  pour  le  temps  qu'il  est  en  charge. 
18.  Monsieur  le  Garde  des  sceaux  scelle  pour  la 
première  fois  ;  parle  fermement  aux  secrétaires  ;  leur 
dit  qu'il  ne  vouloit  point  qu'on  luy  présentast  que  des 
lettres.de  justice,  et  qu'il  sauroit  bien  reconnoistre 
ceux  qui  le  voudroyent  surprendre  ;  refuse  infinies 
mauvaises  lettres. 

20.  MM.  du  Mayne,  de  Buillon  et  de  la  Tremoille 
arrivent  à  Paris  ;  virent  Leurs  Majestez  en  mesme 
temps,  de  qui  ils  furent  bien  reçus.  Ils  entrèrent  en 
carrosse  dans  Paris,  suivant  ce  que  le  Roy  leur  avoit 
mandé,  sur  ce  qu'ils  l'avoyent  supplié  de  leur  faire 
savoir  sa  volonté  sur  ce  sujet.  M.  de  Buillon  alla 
loger  chez  M.  de  Laverdiii  *,  à  la  Place  Royale,  du- 
quel il  a  acheté  cent  dix  mil  écus  la  terre  de  Negre- 
pelisse  que  M.  de  Sully  avoit  marchandée  ;  ce  qui 
causa  de  la  brouïUerie  entre  eux  *. 

21.  M.  de  Brantés*  revient  d'un  voyage  que  le 
Roy  luy  avoit  envoyé  faire  vers  M;  de  Longueville. 

25.     M.  Barbin  est  fait  controlleur  général  des 

*  Henry  de  Beaumanoir,  I*'  du  nom,  marquis  de  Layardin,  comte 
dû  Negrepelisse,  gouverneur  des  comtés  du  Maine,  du  Perche  et  de 
Laval,  mort  en  1633.  Il  était  fils  du  maréchal  de  Lavardin  mort 
en  1614. 

'  Voy*  Merc»  fr»^  t  iv,  p.  87  et  148;  Pontchartrain,  p.  145. 

'3  Léon  d'Albert,  seigneur  de  Brantes,  chevalier  des  ordres  en  1619, 
capitaine  lieutenant  des  deux  cents  chevau-légers  de  la  garde,  gouver- 
neur de  Blaye,  duc  de  Luxembourg  et  de  Piney,  prince  de  Tingry  et 
pair  de  France  en  1620,  mort  en  1630.  Il  était  frère  du  duc  de  Luynes 
et  du  duc  de  Chaulnes.  Il  devint  duc  de  Luxembourg  en  1620,  par 
son  mariage  avec  Marguerite-Charlotte,  fille  et  héritière  de  flenry  de 
Luxembourg,  duc  de  Piney,  prince  de  Tingry,  mort  en  1616.  (P.  An- 
selme, t.  IV,  p.  274.) 


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d'arnauld  d'andilly.  167 

finances,  au  lieu  de  M.  le  Président  Jeannin  (auquel        »««y  *"•• 
on  donna  la  qualité  de  Surintendant) ,  et  la  charge 
d'Intendant  qu'avoit  M.  Dollé  fut  baillée  à  M.  de 
Ca3tille\  gendre  de  M.  le  Président  Jeannin,  auquel 
on  donna  aussi  douze  mil  écus. 

J'ay  ouy  dire  à  M.  Barbin  que  M"*'  la  Maréchale 
d'Ancre  l'affectionnoit  avec  une  passion  extrême,  et 
qu'il  y  avoit  quatre  ans  qu'elle  le  pressoit  sans  cesse 
de  prendre  le  controUe  général  des  finances,  et  que 
l'on  donnast  à  M.  le  Président  Jeannin  une  charge 
d'Intendant  des  finances  que  l'on  demandoit  pour  son 
gendre  ;  ce  qu'il  ne  voulut  point ,  afin  qu'il  ne  fust 
pas  dit  que  l'on  créast  une  charge  d'intendant  des 
finances  pour  l'amour  de  luy  ;  mais  que  voyant 
M.  Dollé  mort,  alors  ilreceut  la  faveur  que  luy  faisoit 
la  Maréchale.  Et  Flexelles  s' estant  offert  de  parler  à 
M.  le  Président  Jeannin,  l'affaire  fut  incontinent  con- 
clue, comme  il  est  dit  cy-dessus.  M.  Barbin  dit  aussi 
qu'en  mesme  temps  qu'il  estoit  assuré  à  la  Cour  de 
l'intendance  de  M.  Dollé,  le  Maréchal  d'Ancre..*  ^ 


*  Pierre  de  Castille,  ambassadeur  en  Suisse,  intendant  puis  contrô- 
leur général  des  finances,  avait  épousé  Charlotte  Jeannin,  fille  du  Pré- 
sident. 

2  H  CepeDdant  le  maréchal  et  la  maréchale  d'Ancre  avoient  si  bien 
mis  M.  Barbin  dans  Tesprit  de  la  reine-mère,  que  sur  la  fin  de  1616 
il  n'exerçoit  pas  seulement  la  charge  de  surintendant  des  finances^ 
sous  le  nom  de  contrôleur  général ,  mais  étoit  plus  puissant  que  nul 
autre  dans  les  affaires.  Il  n'avoit  point  d*acquis  ;  mais  c*étoit  un 
homme  d'un  très-grand  sens  et  très-judicieux,  qui  avoit  les  mains 
très-nettes  et  qui  ne  se  prévenoit  point  ;  ce  qui  est  une  qualité  si  rare 
que  je  rai  remarqué  en  peu  de  personnes.  »  (Mémoires  d'Amauld 
d'Andilly,  p.  369.) 


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.    168  JOURNAL   INÉDIT 

myim.  M.  Barbin  marche  devant  les  Intendans,  lesquels 

luy  quittent,  à  cause  de  sa  faveur  ;  car  autrement , 
il  n*avoit  nul  droit,  et  ne  pouvoit  prétendre  rang  que 
suivant  sa  réception  au  Conseil  d' Estât.  Ainsi  leur 
raison  pour  quitter  fut  que  la  plus  belle  charge  de 
la  Cour,  c'est  la  faveur. 

Juin.  1.     M.  Mareil  du  Drac,  amené  prisonnier  par  un 

Prévost  de  Champagne,  se  sauve  chez  M.  du  Mayne. 
Le  Prévost  et  Archers  le  poursuivent  avec  pistollets, 
sont  repoussez  par  les  gens  de  M.  du  Mayne,  lequel 
survient  et  empêche  le  désordre  ;  et  se  va  pleindre 
au  Louvre  de  ce  que  le  Prévost  estoit  ainsi  entré  en 
armes  dans  son  logis.  Offre  que  l'on  cherche  par- 
tout. On  envoyé  le  Prévost  en  prison,  pour  n'avoir 
pas  seu  garder  son  prisonnier;  et  l'on  envoyé  trois 
Messieurs  des  Requestes  et  les  Archers  du  Grand 
Prévost  pour  informer  chez  M.  du  Mayne  de  la  vérité 
de  l'affaire,  et  prendre  M.  de  Mareil,  s'il  y  estoit,  et 
l'amener  au  Fort-l'Evesque.  11  s' estoit  sauvé  sur  un 
cheval  de  M.  du  Mayne  avec  des  gentilshommes  de 
M.  du  Mayne. 

6.     M.  le  Maréchal  d'Ancre  arrive  à  Paris. 

Le  Vidame  de  Normandie,  autrement  le  Baron 
d'Anneval,  jeune  homme  de  vingt-deux  ans,  qui 
avoit  eu  une  compagnie  de  chevaux  légers  sous  le 
Maréchal  d'Ancre ,  fait  appeler  M.  de  Montbazon  *. 


<  Hercule  de  Rohan,  duc  de  Montbazon,  pair  et  grand  veneur  de 
France,  gouverneur  et  lieutenant-général  de  la  ville  de  Paris  et  de 


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d'arnauld  d'andillï.  169 

La  querelle  vint  sur  ce  que  M.  d' Anneval  avoit  levé  Juin  leu. 
sa  compagnie  en  Normandie  dans  le  gouvernement 
de  M.  de  Montbazon  sans  l'en  avertir,  et  que  M.  de 
Montbazon  estoit  monté  à  cheval  pour  l'attraper. 
M.  de  Montbazon  voulant  sortir  pour  s'aller  battre, 
est  arresté,  M.  le  Maréchal  d'Ancre  va  chez  M.  d'An- 
neval,  et  mande  à  M.  de  Montbazon  qu'il  y  avoit 
esté,  non  pour  s'offrir  à  luy ,  mais  pour  le  tanser 
de  la  faute  qu'il  avoit  faite  de  l'oser  appeller,  et 
qu'il  luy  en  feroit  faire  telle  satisfaction  qu'il  vou- 
droit. 

M.  de  la  Chastre  *  preste,  entre  les  mains  du  Roy, 
le  serment  de  la  charge  de  maréchal  de  France,  à 
luy  accordée  au  lieu  du  gouvernement  de  Berry  ^. 

Monsieur  le  Garde  des  sceaux  ayant  refusé  tout 
haut  au  sceau  un  don  controllé  par  M.  Barbin, 
M.  Barbin  témoigna  en  estre  extrêmement  offensé  ; 
mais  on  luy  dit  que  tout  ce  qu'il  pouvoit  désirer  dé 
Monsieur  le  Garde  des  sceaux,  estoit  qu'il  ne  refusast 
pas  publiquement  les  expéditions  controllées  de  luy 
ou  il  trouveroit  de  la  difficulté,  mais  qu'il  les  mist  à 


risle  de  France,  mort  en  165/Ii.  La  célèbre  duchesse  de  Montbazon  est 
sa  seconde  femme,  Marie  d'Avaugour  de  Bretagne,  fille  de  Claude  de 
Bretagne,  comte  de  Vertus,  et  de  Catherine  Fouquet  de  la  Varenne, 
mariée  en  1628,  morte  en  1657. 

^  Louis  de  la  Châtre,  baron,  de  la  Maisonfort  capitaine  de  cent 
hommes  d'armes,  gouverneur  du  Berry  en  1 61  ^i,  maréchal  de  France 
en  1616,  gouverneur  du  Maine,  de  Laval  et  du  Perche,  mort  en  1630. 
Il  était  fils  de  Claude  de  la  Châtre,  baron  de  Maisonfort,  maréchal  de 
France,  mort  en  1614. 

*  yoy.  Merc,  fr.^  t.  iv,  p.  87;  Fontenay-Mareuil,  p.  336  ;  Richelieu, 
p.  304  ;  Pontcbartrain,  p.  143. 


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170  JOURNAL    INÉDIT 

Juin  i«ie.  part  ;  et  que  ceux  qui  luy  disoyent  que  Monsieur  le 
Garde  des  sceaux  estoit  obligé  de  sceller  ce  qu'il 
controlloit,  le  flattoyent  contre  toute  sorte  de  rai- 
son, etc.  On  parla  aussi  à  Monsieur  le  Garde  des 
sceaux,  afin  que  pour  chose  qui  ne  dépend  que  de 
quelque  sorte  de  formalité ,  il  se  relachast  à  ne  le 
Vouloir  aigrir^  attendu  le  préjudice  que  cela  pourroit 
apporter  aux  affaires  du  Roy  et  à  son  service,  à  cause 
que  ceux  qui  voudroyent  brouiller,  ne  manqueroyent 
pas  de  se  servir  du  prétexte  de  la  division  qui  seroit 
entre  ceux  qui  manient  les  affaires. 

IS.  Le  sieur  de  Beauveau^  Lorrairi,  fils  d'un  qui 
avoit  eu  la  teste  tranchée  aux  Grans-jours  de  Poi- 
tiers, vient  à  Paris  avec  des  coins  pour  faire  fausse 
monnoye.  11  est  pris  par  Défontis*,  mis  au  Grand 
Chastellet  Le  Roy  baille  un  commandement,  signé 
de  Loménie,  à  M.  de  Vitry,  capitaine  des  Gardes, 
pour  l'aller  tirer  de  prison»  Le  geollier  refuse  de 
rendre  le  prisonnier.  Enfin,  M.  de  Vitry^  à  l'heure 
de  minuit,  avec  des  gens  armez  qu'il  avoit,  tire  ledit 
Beauveau  de  prison,  lequel  estoit  condamnée  avoir 
la  teste  tranchée. 

On  avoit  voulu  faire  sceller  les  lettres  patentes  à 
Monsieur  le  Garde  des  sceaux,  mais  il  les  avoit  refu- 
sées. On  pouvoit  prendre  un  beaucoup  meilleur  expé- 
dient :  car  le  Roy  pouvoit  dire  qu'il  avoit  appris  que 
le  prisonnier  avoit  fait  quelque  entreprise  contre  son 
Estât;  que  sur  cela,  il  vouloit  parler  à  luy.  Et  ainsi, 

*  Lieutenant-criminel. 


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d'arnauld  d'andilly,  171 

se  le  faire  amener.  Et  puis,  en  décharger  luy-mesme 
le  Prévost,  et  en  charger  un  capitaine  de  ses  Gardes, 
et  le  faire  mener  à  la  Bastille ,  d'où  on  l'eust  tiré 
puis  après.  Le  Roy  en  a  autrefois  quasi  usé  de  la 
mesme  sorte.  Ce  fut  M.  de  Chanvallon  *,  qui  au  nom 
du  duc  de  Lorraine^  (car  le  sieur  de  Beauveau  est 
Lorrain) ,  fit  cette  poursuite.  On  dit  que  ce  fut  M.  le 
maréchal  d'Ancre  qui  obtint  sa  grâce. 

Le  Parlement  s'assemble.  Résolu  d'aller  faire  Re- 
monstrances  au  Roy  pour  luy  demander  justice  ;  et 
jusqu'à  ce  qu'elle  leur  eust  esté  faite ,  luy  remettre 
leurs  charges. 

14.  Messieurs  du  Parlement,  en  nombre  de 
quatre-vingt  ou  cent,  vont  à  pied,  ^vec  leurs  bonnets  . 
quarrez,  depuis  le  Palais  jusqUes  au  Louvre.  Là, 
attendent  fort  tard  que  le  Roy  fust  revenu.  Monsieur 
le  Premier  Président  porta  la  parole  fort  bien  et  fort 
courageusement,  à  ce  que  l'on  dit.  Enlr' autres 
choses,  il  se  pleignit  fort  de  M.  de  Vitry,  lequel  estait 
à  costé  du  Roy.  Le  Roy  répondit  qu'il  avoit  com- 
mandé à  M.  de  Vitry  de  faire  ce  qu'il  avoit  fait,  et  que 
Monsieur  le  Garde  des  sceaux  leur  diroit  sa  volonté 
sur  ce  sujet.  Après  cela,  Monsieur  le  Garde  des  sceaux 
prit  la  parole,  et  repartit  que  le  Roy  ayant  depuis 
peu  receu,  en  pareille  occasion,  d'un  prince  estran- 

'  Jacques  de  Harlay,  seigneur  de  Champ  vallon,  grand  écuyer  du  duc 
d'AIençon,  mestre  de  camp  du  régiment  de  ses  gardes  et  de  sa  cavale- 
rie légère,  gouverneur  de  Sens,  grand  maître  de  Tartillerie  pendant  la 
Ligue,  chevalier  du  SaintrËsprit  en  1602,  chambelliui  du  duc  de  Lor- 
raine et  intendant  de  ses  affaires  en  France,  mort  en  16S0. 

2  Henri  II  dit  le  Bon,  né  en  1563,  duc  de  Lorraine  de  1608  à  162â. 


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172  JOURNAL   Ix>jÉDir 

Juin  1618.  ger,  son  voisin,  lequel,  en  sa  faveur,  avoit  de  puis- 
sance absolue  sauvé  un  gentilhomme  françois  accusé 
du  mesme  crime  que  celuy  dont  il  s'agit,  il  n' avoit 
pu  luy  refuser  un  semblable  office  ;  que  ce  n'estoit 
pas  la  première  fois  que  Ton  en  avoit  usé  de  pa- 
reille sorte  ;  que  le  Roy  avoit  commandé  à  M.  de 
Vitry  de  tirer  le  prisonnier  ;  que  pour  le  regard  de 
la  violence,  c'estoit  chose  qu'il  n' avoit  point  enten- 
due, et  qu'il  vouloit  en  estre  éclaircy,  pour  s'en  faire 
raison  à  luy-mesme  *. 

16.  Les  lettres  d'office  de  Monsieur  le  Garde 
des  sceaux  furent  rapportées  par  M.  Courtin,  doyen, 
les  chambres  appellées.  Il  se  trouva  difficulté  sur  la 
clause  de  préséance  au  Parlement.  Monsieur  le  Rap- 
porteur fut  d'avis  de  l'entérinement  pur  et  simple, 
M.  Pelletier,  qui  opina  le  second ,  ouvrit  l'opinion 
contraire.  M.  Maréchal  suivit,  et  plusieurs  autres. 
M.  de  Grieux^  fut  pour  Monsieur  le  Garde  des 
sceaux,  et  après  l'avoir  extrêmement  loué ,  dit  qu'il 
luy  sembloit  qu'il  n'y  avoit  aucune  difficulté  en  cette 
clause,  d'autant  que  personne  n'y  pouvoit  avoir  in- 
térest  que  Monsieur  le  Premier  Président ,  et  qu'il 
montroit  bien  n'y  en  avoir  point,  puisqu'il  estoit  de 
l'assemblée  pour  y  opiner  ;  qu'autrement,  ce  seroit 
estre  juge  et  partie.  M.  Fayet  fut  pour  Monsieur  le 


1  yoy,^  sur  cette  affaire,  Mém.  de  M.  Mole,  p.  117.  Suivant  le  récit 
de  Mole,  qui  du  reste  est  conforme  à  celui  d*Amauld  d'Andilly,  il 
s*aglssait  du  baron  de  Beauvoir,  poursuivi  pour  crime  de  lèse-miû^té. 

2  Conseiller  au  Parlement  et  Tun  des  seize  colonels  des  bourgeois  de 
Paris. 


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d'AÊNADLD    t)'ANDlLLY.  173 

Garde  des  sceaux ,  et  dit  entre  autres  choses,  que       'wm  ««»•. 
jamais  promotion  n'avoit  esté  receue  de  tous  les 
gens  de  bien  avec  plus  de  contentement  et  de  ré- 
jouissance, etc.  M.  le  Président  Séguier  opina  du 
bonnet  et  fut,  avec  tous  ses  aiiïis;  contre  Monsieur  le 
Garde  des  sceaux.  Monsieur  le  Premier  Président  dit 
qu'il  n'estoit  pas  besoin  de  beaucoup  opiner,  puisque 
l'affaire  passoit  de  tant  de  voix;  qu'il  répondoit  seu- 
lement à  ce  que  M.  Fayet  avoit  dit  :  que  jamais  pro- 
motion n'avoit  esté  plus  agréable  à  tous  les  gens  de 
bien,  et  qu'il  luy  feroit  voir  des  livres  imprimez  en 
Aleman,  Espagnol  et  Italien,  par  lesquels  il  connois- 
troit  qu'il  y  en  avoit  eu  une  autre,  laquelle  avoit  esté 
beaucoup  plus  agréable  (entendant  la  sienne).  M.  de 
Coigneux  *  avoit  dit  auparavant  que  puisque  M.  de 
Grieux  louoit  tant  la  probité  de  Monsieur  le  Garde 
des  sceaux,  et  qu'il  se  fondôit  en  partie  sur  cela, 
pour  dire  qu'il  devoit  présider  au  Parlement,  il  fau- 
droit,  par  ce  mesme  argument,  que  le  Prieur  des 
Chartreux  ,  qui  est  un  fort  homme  de  bien,  y  vint 
présider.  Enfin ,  l'affaire  passa  de  vingt-quatre  voix 
contre  Monsieur  le  Garde  des  sceaux,  lequel,  le  len- 
demain,   retira   ses   lettres  d'entre   les   mains  de 
M.  Courtin,  rapporteur^. 
18.     La  Reyne  ayant  résolu  de  mettre  M.  Man- 

'  Jacques,  le  Coigneux,  seigneur  de  Bachaumont,  conseiller  au  Par- 
lement de  Paris  en  1611,  président  es  Requêtes  en  1616,  conseiller 
d*État  et  président  en  la  Chambre  des  Comptes  en  1619,  chancelier  de 
Gaston,  duc  d'Orléans,  président  à  mortier  en  1630. 

2  Foy,  Mém.  de  M.  Mole,  p.  119  et  suiv.,  les  lettres-patentes  dont  il 
s*agit. 


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i7&  JQOBBIÂL  INEDIT 

jiiiai<i«.  got  en  la  charge  de  M.  de  Pisieux,  elle  envoya 
M.  Barbin  trouver  M.  de  Villeroy  à  Gonflans  pour 
le  luy  dire  et  le  prier  d'instruire  M.  Mangot.  M.  de 
Villeroy  répoadit  qu'il  savoit  le  respect  que  l'on  de- 
voit  au*  Beyne^,  et  à  cause  d'elles,  à  ceux  qui  ve- 
noyent  de  leur  part  ;  et  que  s^ns  cela,  il  luy  eust 
donné  sujet  d'avoir  déplaisir  de  luy  esfare  venu  porter 
cette  parole.  Après  quelques  autres  discours,  et  en^ 
tr' autres,  qu'il  y  avoit  cinquante-quatre  ans  qu'y 
faisoit  la  charge,  qu'il  avoit  encore  assez  de  force  et 
de  courage  pour  la  faire  Aussi  bien  que  jamais  ;  que 
c'estoit  sa  charge,  que  J'on  ne  luy  pouvoit  ester  et 
qu'il  n'estoit  nullement  en  humeur  de  se  départir. 
Il  luy  dit  qu'il  verroit  la  Reyne. 

20.  M.  de  Villeroy  voit  la  Heyne,  luy  représente 
coujrageasement  toutes  ses  raisons.  Après  quelques 
répliques,  elle  luy  dit  :  Z/>  voglio.  A  cela,  il  répliqua 
re^ectueuseiment  et  fort  fermement,  et  s'en  alla  chez 
luy. 

21.  ]>  lendemain.  M,  Barbin  va  chez  le  Prési- 
dent Jeannin,  et  avec  luy,  chez  M.  fie  Villeroy  ;  et  1$, 
après  plusieurs  discours  sur  ce  qui  estoit  de  la 
charge,  M.  de  Villeroy  se  relâche  à  recevoir  la  ré- 
compense. Mais  sur  cela,  il  s'éleva  très-grande 
difficulté,  pour  ce  qu'il  ne  voubit  passer  la  démis- 
sion qu'on  luy  demandoit  en  faveur  de  M.  Mangot, 
qu'il  ne  vid  l'argent  chez  luy,  sans  vouloir  en 
rien  avoir  affaire  au  Roy  sur  ce  sujet  ;  et  qu'il  dit  qu'il 
demanderoit  cinq  cens  mil  livres  de  sa  charge  ;  à 
quoy  on  luy  répondit  qu'il  ne  l'avoit  vendue  que  deux 


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d'arnauld  d'andilly.  175 

cens  rail  livres  à  M.  de  Pisieux ,  et  que  Ton  luy  en  ^^  *•*•. 
bailleroit  cette  somme,  sur  laquelle  il  rendra  à  M.  de 
Pisieux  les  cent  mil  livres  qu'il  a  receus  de  luy  ; 
les  autres  cent  mil  livres  regardoyent  Le  mariage 
de  sa  petite-fille.  Depuis,  M,  Mangot  en  offrit  trois 
cens  mil  livres,  et  la  Reyne  dit  que  puisque  M.  de 
Villeroy  vouloit  tant  avoir  de  sa  charge,  il  faloit 
vendre  celle  de  M.  le  Premier  Président  de  Bor- 
deaux *. 

On  dit  que  la  connoiësance  de  M.  Mangot  avec  le 
Maréchal  vient  de  ce  que,  quand  on  roua  Magnas^  à 
Fontainebleau  en  16,.,  M.  Mangot,  qui  estoit  le  Pré- 
sident des  Commissaires,  ayant  trouvé  plusieurs  let- 
tres du  duc  de  Savoye^  à  Magnas  et  de  Magnas  au 
duc  de  Savoye  qui  parloyent  du  Marquis  d'Ancre  et 
de  M.  Dollé  (avec  lequel  Magnas  estoit  ordinaire- 
ment) ,  il  les  porta  toutes  à  M.  DoUé  et  au  marquis 
d'Ancre  et  n'en  fit  aucune  mention  dans  le  procès, 

M.  de  Villeroy  dit  k  la  Beyne  qu'il  n'ayoit  point 
d'habitude  avec  M.  Mangot,  et  que  son  humeur  ne 
pouvoit  compatir  avec  la  sienne  ;  qu'il  avoit  nourry 
quinze  ans  M.  de  Pisieux,  et  qu'il  l'assuroit  qu'il 
estoit  fort  homme  de  bien,  et  luy  répondoit  de  ses  ac- 
tions passées  et  de  celles  à  venir.  La  Reyne  répliqua  : 


^  If.  Mangot. 

2  Magnas,  accusé  d'être  un  «spion  du  4uc  de  Sayoie,  avait  été  arrêté, 
jugé  et  exécuté  à  Fontainebleau  en  mai  1^3.  (Foy,  Richelieu,  éd.  ci- 
tée, t.  XXI  bia,  p.  170,  qui  KQoàrm»  1»  supposition  rapportée  par  Ar- 
nauld  d'Andilly.) 

>  Charles-Emanuel,  duc  de  Savoie,  mort  eo  1630. 


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476  JOURNAL   INÉDIT 

Juin  i«i«.  Je  ne  me  saurois  servir  du  fils  après  avoir  chassé  le 
père,  et  si  je  vous  en  demandois  avis,  vous  ne  me  le 
conseilleriez  pas.  M.  de  Villeroy  dit  :  Au  moins.  Ma- 
dame, si  vous  voulez  que  M.  de  Pisieux  sorte,  per- 
mettez-moy  de  traitter  avec  quelques  personnes  dont 
je  vous  puisse  répondre,  comme  M.  de  Préaux  *,  ou 
quelqu' autre.  Elle  répliqua  :  Je  voy  bien  que  c'est  ; 
vous  y  voulez  nommer;  il  n*est  pas  raisonnable  ;  cela 
appartient  au  Roy  ^ 

On  dit  que  le  mécontentement  de  Messieurs  du 
Parlement,  lorsque  les  lettres  de  M.  le  Garde  des 
sceaux  y  furent  présentées,  venoit  de  ce  qu'il  ne  les 
avoit  point  esté  voir.  Il  ne  le  devoit  faire  ;  car  un 
Garde  des  sceaux  ne  doit  faire  la  cour  à  personne. 

Quelques-uns  dîsoyent  qu'il  devoit  obtenir  jussion, 
et  que  la  plupart  de  ceux  qui  avoyentesté  contre  luy, 
y  eussent  obéy.  D'autres  dient  qu'il  faisoit  mieux  de 
n'en  point  prendre  et  de  témoigner  qu'il  méprisoit 
leur  refus;  veu  qu'aussi  bien  le  mesme  arrest  ser- 


^  Charles  de  l'Aubespine,  né  en  1580,  abbé  de  Préaux,  puis  marquis 
de  Chàteauneuf,  conseiller  au  parlement  de  Paris  en  1603,  ambassa- 
deur en  Hollande  en  1609,  puis  à  Bruxelles,  chancelier  des  ordres  on 
1621,  conseiller  d*État,  gouverneur  de  Touraine,  ambassadeur  en  Alle- 
magne, à  Venise,  en  Angleterre  en  1629  et  1630,  garde  des  sceaux  en 
1630,  présida  au  procès  des  maréchaux  de  Marillab  et  de  Montmorency 
en  1632  ;  étant  devenu  suspect  au  cardinal  do  Richelieu  fut  disgracié 
en  1633,  arrêté  et  conduit  prisonnier  au  château  d*Angoulômc,  où  il 
resta  jusqu'en  1643  ;  de  nouveau  garde  des  sceaux  en  1650,  remit  les 
sceaux  à  Mathieu  MoIé  en  1651  et  mourut  en  1653.  Il  était  fils  de 
Guillaume  de  l'Aubespine,  baron  de  Chftteauneuf,  doyen  des  conseiUers 
d'État,  du  vivant  duquel  il  fut  appelé  M.  de  Préaux,  du  nom  de  son  ab- 
baye. (V.  P.  Anselme,  t.  vi,  p.  358). 

2  Voy,  Pontchartrain,  p.  1^9. 


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d'arnadld  d'andilly.  177 

voit  sur  la  vérification  des  autres  points  de  la  lettre.       J"«»  *•"• 

19.  Sur  les  cinq  heures  du  soir  le  Picart,  cor- 
donnier, estant  au  faubourg  Saint-Germain,  en  vue 
de....,  des  palefreiyers  de  M.  le  Maréchal  d'Ancre 
(les  uns  disent  cinq  les  autres  huit),  ayant  bastons 
et  espées,  le  chargent  à  coups  de  baston.  Il  se  jette 
dans  une  maison  ;  ils  en  cassent  les  vitres  et  rompent 
la  porte  ;  il  est  contraint  d'en  sortir;  ils  le  suivent  à 
coups  de  baston  ;  il  s'enfuit  dans  une  autre  maison, 
dont  ils  ne  peuvent  rompre  la  porte.  Enfin,  le  peuple 
s'assemblant,  ils  se  retirèrent.  Luy  sort,  prend  une 
halebarde,  s'en  va  chez  luy.  Le  peuple  s'y  amasse  ; 
un  soldat  parlant  à  l'avantage  de  M.  le  Maréchal 
d'Ancre  est  bien  battu.  L'alarme  en  alla  grande  au 
Louvre  et  à  Saint-Germain  où  estoit  le  Roy.  On  di- 
soit  qu'ils  estoyent  quatre  mil  hommes  en  armes 
qui  vouloyent  aller  au  Louvre  demander  justice.  On 
fit  en  diligence  revenir  les  Suisses  qui  estoyent  à 
Saint-Germain.  M.  Mangot  et  M.  le  Prévost  des 
marchans  furent  faire  écouler  le  peuple.  Deux  des 
palefreniers  qui  avoyent  fait  le  coup  sont  remis  par 
M.  le  Maréchal  d'Ancre  entre  les  mains  de  M.  le  Lieu- 
tenant criminel,  qui  fut  seulement  d'avis  de  les  ban- 
nir pour  trois  ans.  Le  Procureur  du  Roy  du  Chastel- 
let  donna  semblables  conclusions  ;  mais  six  jeunes 
conseillers,  qui  vinrent  pour  assister  au  jugement  du 
procès,  allèrent  avec  quasy  tous  les  autres,  à  la  mort, 
où  il  passa  de  beaucoup  de  voix.  Ainsi  ils  furent  con- 
damnez par  sentence  à  faire  amende  honnorable  de- 
vant l'Host^l  de  Ville;  h  estre  pendus;  et  aupara- 

12 


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178  JOURNAL   INEDIT 

jbm  wé.  vant  avoir  la  question  ordinaire  et  extraordinaire  *• 
22.  Résolu  que  M*  de  Longueville  demeureroit 
en  Picardie,  comme  il  y  estoit  auparavant;  que 
M.  de  Montbazon  y  prendroit  Ja  ville  et  citadelle 
d'Amiens,  et  la  Lieutenance  du  Roy,  comme  y  avoit 
le  maréchal  d'Ancre,  auquel  doivent  estre  Péronne, 
Montdidier  et  Roye,  et  que  ledit  Maréchal  prendroit 
la  Lieutenance  de  Normandie,  avec  Caen  et  le  Pont- 
de-r  Arche,  et  cent  mil  ecus  comptant.  On  dit  qu'il 
sera  aussi  remboursé  des  fortifications  et  avances  par 
luy  faites  dans  la  citadelle  d'Amiens^* 

26.  M.  le  Comte  d'Auvergne  '  sort  de  la  Bastille 
où  il  avoit  esté,  à  deux  fois,  près  de  quatorze  ans. 
M.  de  Montmorency  estoit,  quelques  jours  aupara- 
vant^ revenu  exprès  de  Languedoc,  afin  d'obtenir  sa 


*  r#y.  Merc.  fr.^  t.  iv,  j>.  137.  G«  cordonnier  Picart,  sergent  du 
quartier  de  la  rue  de  la  Harpe,  avait,  comme  on  Ta  vu  plus  haut,  em- 
poché le  maréchal  d'Ancre  de  sortir  de  Paris  par  la  porte  de  Bussy, 
«DUS  prétexte  qu'il  n'avait  pas  de  passeport  C'est  pour  se  venger  de 
cet  affront  que  le  maréchal  fit  infliger  cette  rude  correction  audit  Picart. 
Peut-être  cependant  les  gens  du  maréchal  agirent-ils  de  leur  propm» 
mouvement  et  pour  leur  propre  compte  ?  Voy.  aussi  Richelieu,  p.  300. 

2  voy,  Merc,  fr,,  t.  iv,  p.  88  ;  Richelieu,  p.  296  ;  Pontchar train,  p.  149 . 

3  Charles  de  Valois,  comte  d'Auvergne,  puis  duc  d'Angoulôme,  fils 
naturel  de  Charles  £X  et  de  Marie  Touchet,  né  en  1573,  grand  prieur 
de  France  en  1587,  comte  d'Auvergne  en  1589,  se  signala  à  Arques 
en  1581),  à  Ivry  en  1590,  à  Fontaine-Française  en  1595,  accusé  de  cons- 
piration et  mis  à  la  Bastille  en  100/î,  condamné  à  avoir  la  tête  tran- 
chée en  1605*  peine  commuée  en  prison  perpétuelle,  mis  en  liberté  en 
1616,  réintégré  dans  ses  charges  et  dignités,  colonel  général  de  la  ca, 
Valérie  légère,  duc  d'Angoulôme  et  ambassadeur  en  Allemagne  en  1650, 
commandant  au  siège  de  la  Rochelle,  fit  les  guerres  de  Languedoc,  de 
Lorraine,  d'Allemagne  et  de  Flandres,  et  mourut  en  1650.  On  a  publié 
ses  Mémoires.  {Voy.  P.  Anselme,  t.  i,  p.  202,  et  son  historiette,  Talle- 
mant  des  Réaux,  avec  le  commentaire  de  M.  t^aulin  Paris.) 


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D^ARNADLD   D^ANDItLY.  179 

délivrance.  La  Reyne  l'avoit  promise  avant  son  JumMtf, 
voyage  de  Bordeaux  ;  et  M.  de  Montmorency  ia  trou- 
vant aucunement  refroidie,  fit  feu  et  flame  et  s'opi- 
niastra  de  telle  sorte  qu'elle  luy  accorda  ce  qu'il 
demandoit  *.  M.  le  Comte  d'Auvergne,  suivy  de  M.  de 
Vauzay,  qui  ne  le  quitta  point  jusqu'à  ce  qu'il  l'eut 
remis  entre  les  mains  du  Boy,  ne  trouvant  point  la 
Reyne  au  Louvre,  alla  jusques  à  Issy  où  il  la  re- 
mercia. Après,  il  vid  le  Boy. —  MM.  de  Guise,  tous 
(l'ois  *,  vinrent  souper  aveque  luy  à  l'hostel  de  Mont- 
morency et  attendirent  une  grande  heure  avant  qu'il 
fust  venu;  luy  témoignèrent  beaucoup  d'amitié,  et  à 
M.  de  Montmorency,  tout  ce  qui  se  peut  au  monde  *• 

Environ  le  27.     M"**  la  Princesse  de  Condé  douai- 
rière arrive*  ' 

M.  de  Bochefort  arrive  aussi  \ 


*  Le  comte  d'Auvergne  ayant  épousé  Charlotte  de  Montmorency, 
fille  (|n  connétable,  était  le  beau^frère  au  à\ic  de  Montmorency. 

2  Le  duc  et  le  cardinal  de  Guise  et  le  pripce  de  JoinviUe,  depuis  duc 
de  Chevreuse,  tous  trois  fils  du  Balafré. 

3  Le  comte  d'Auvergne  était  resté  cette  aeoonde  fois  onze  ans  et  huk 
mois  à  la  Bastille  !  Il  fut  réintégré  dans  sa  charge  de  colonel  de  la  ca- 
valerie légère  qu'avait  eue  à  sa  place  le  duc  de  Nevers.  Le  Mercure 
fait  à  ce  sujet  la  réflexion  suivante  :  «  Quel  changement  aux  affaires  du 
temps  !  de  voir  en  liberté  celuy  qui  estoit  prisonnier  et  qui  pensoit  ja- 
mais n'en  sortir,  commander  trois  sepmaines  après  les  troupes  du  Roy, 
et  entendre  la  voix  commune  du  peuple  qui  asseuroit  qu'on  avoit 
mis  sur  la  chambre  où  estoit  ledit  sieur  Comte  en  la  Bastille,  ehamàre 
à  louer,  n  (Merc.  fr,,  t  iv,  p.  140.)  Foy.  aussi  Fontenay-Mareuil,  p.  336; 
Brienne,  p.  324;  Richelieu,  p.  295  ;  Pontchartrain,  p.  150. 

A  Voff.  Merc.  /h,  t.  iv,:p.  147.  Ce  gentilhomme  en  qui  Monsieur  le 
Prince  mettait  toute  sa  confiance,  était  envoyé  par  lui  vers  le  Roi  à 
l'occasion  d'une  difficulté  survenue  quant  à  jfexémition  du  33*  article 
de  FEdit  de  Loudun* 


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180  JOURNAL   INÉDIT 

Juin  1616.  Guill.  dit  que  Monsieur  le  Prince  avoit  proixiis  à 

M.  de  Sully  de  faire  oster  la  charge  à  M.  Arnaud 
l'intendant.  Sur  cela,  il  fut  le  mercredy  29  trouver  la 
Reyne  à  son  disner,  et  luy  ayant  commencé  à  parler 
de  ce  bruit,  elle  luy  répondit  tout  haut  qae  c'estoyent 
des  méchans  qui  faisoyent  courhr  telles  faussetez. 

29.  Six  soldats  des  gardes  voulant  enfoncer  la 
porte  de  M....,  conseiller  du  Chastellet,  dans  la  rue 
Saint-Julien-le-Pauvrej  près  la  place  Maubert,  pen- 
sant que  ce  fust  celle  d'un  bordel,  quelques  voisins, 
et  entr' autres,  un  apothicaire  nommé . . . ,  qui  a  autre- 
fois esté  de  la  compagnie  de  M.  de  Broûilly,  sortent 
de  leurs  maisons.  Ces  soldats  mettent  l'épée  à  la 
main,  et  tirent  des  estocades  audit  apothicaire,  dont 
l*une  le  blesse  au  poignet  ;  et  luy,  d'un  coup  de  per- 
tuisane,  tua  un  soldat,  et  d'un  autre  coup  en  blessa 
un  autre  *. 

Juillet.  Environ  le  5.     M.  de  Rohan  arrive  à  Paris  '. 

M.  de  Pisieux  prend  congé  du  Roy  ;  va  à  Panfou, 
quelques  jours  après. 

MM.  le  Maréchal  de  Brissac,  de  Vie  et  Champi- 
gny  ^  vont  à  Poitiers  remettre  les  réfugiez  qu'ils  re- 
mirent heureusement  le  . . . 

En  toutes  les  voix  de  l'Assemblée  de  ville,  il  n'y  en 
eut  que  une  contre  la  volonté  du  Roy  *. 


*  Voy.  Mire,  fr,^  t.  v,  p.  139.  Le  lieutenant-civil  (It  à  cette  occasion 
une  Ordonnance  pour  la  sûreté  publique. 
>  Voy,  Mém.  de  Rohan,  p.  138. 
3  C'est  la  difficulté  relative  a  Texécution  du  33e  article  de  l'Edit  de 


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b'ârnauld  d'andilly.  181 

7.  Madame  Déegeant  meurt.  Les  deux  palefre-  '"»««»  "««• 
niers  de  M.  le  Maréchal  d'Ancre  qui  avoyent  esté 
condamnez  au  Ghastellet,  sont  jugez  au  Parlement  et 
la  sentence  confirmée,  excepté  pour  l'amende  hon- 
norable  et  la  question.  Ce  jugement  passe  tout  d'une 
voix,  hormis  M.  le  Président  Lescalopier,  lequel  fut 

d'avis ;  et  ayant  dit,  entr' autres  choses  que 

l'action  faite  par  le  Picard,  à  la  porte  de  Bussy,  ne 
se  pouvoit  excuser,  veu  qu'il  n'y  avoit  personne  qui 
ne  connustM.  le  maréchal  d'Ancre,  M.Prévost  Malas- 
sise dit  :  Je  croy  qu'il  s'en  trouvera  plusieurs  qui  ne 
le  connoissent  point,  et  pour  moy,  je  suis  de  ce 
nombre.  Ayant  dit  cela,  chacun  de  tous  les  autres  en 
dit  de  mesme;  et  ainsi  M.  le  Président  Lescalopier 
demeura  seul  de  son  avis.  —  L' après  disnée,  lesdits 
palefreniers  furent  exécutez  au  bout  du  pont  Saint- 
Michel.  Il  y  avoit  une  extrême  quantité  de  monde  ;  et 
on  tient  que  tous  les  bourgeois  du  quartier  estoyent 
tout  prests  dans  leurs  maisons,  avec  leurs  armes, 
pour  sortir,  si  quelqu'un  s'efforçoit  de  les  enlever. 
Et  continuèrent  ainsi  toute  la  nuit,  jusques  à  quatre 
heures  du  matin,  à  demeurer  armez  chez  eux,  ap- 
préhendant que  l'on  vint  oster  la  nuit  les  corps 
morts  de  la  potence,  où  ils  vouloyent,  à  quelque 


Loudun,  dont  il  est  parlé  plus  haut  Cet  article  décidait  que  tous  icu 
officiers  tant  militaires  que  de  judicature  qui  avaient  quitté  Poitiers 
lors  du  trouble  qui  eut  lieu  dans  cette  ville  le  23  juin  1614,  seraient 
réintégrés  dans  leurs  charges.  Les  habitants  de  Poitiers  demandèrent  que 
Ton  n'accordât  pas  cette  faveur  aux  militaires.  Le  prince  de  Condé  in- 
sista pour  que  Tarticle  fût  cntiëi  ement  observé.  Mais  la  ville  de  Poitiers 
ayant  persisté  dans  ses  rt^clamations,  il  y  fut  fait  droit. 


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182  JOUKNAL   INEDIT 

juiuet  1616.  prix  que  ce  fust,  qu'ils  demeuraBsent  vingt-quatre 
heures  entières* 

8.  Le  Roy  et  la  Reyne  vont  à  Saiht*Germain-en- 
Laye.  On  tient  que  la  Reyne  vouloit,  à  la  persuasion 
de  M.  le  Maréchal  d'Ancre,  aller  à  Rouen  avec  le 
Roy,  afin  d'installer  M.  le  Maréchal  d'Ancre  en  sa 
charge  de  Lieutenant  du  Roy  en  la  Province,  et  faire 
souffrir  le  peuple  de  Paris,  dont  elle  estoit  mal  con- 
tente, par  l'absence  de  la  Cour.  Mais  on  remontra  à 
Leurs  Majestez  combien  ce  dessein  estoit  dangereux 
par  infinies  raisons,  et  que  c' estoit  perdre  Paris. 

16.     Leurs  Majestez  de  i*etoar  de  Saint-Germain* 

Environ  ce  temps ,  M.  de  Refuge  *  le  Conseiller 
d'Estat,  est  envoyé  vers  M*  de  la  Force. 

17  ou  environ.  M.  du  Mayne  de  retour  de  Sois- 
sons  où  il  estoit  allé  quelque  temps  auparavant. 

Monsieur  le  Prince  de  retour.  Il  flvoit  laissé  M.  de 
Vendosme  à  Villebon  \ 


*  A  l'occasion  du  retour  de  Monsieur  le  Prince  à  Paris,  le  Merc.  fr. 
Cite  le  passage  suivatit  qu'il  emprunte  à  l'auteur  de  l'Apologie  pour 
Leurs  Mi^estés  :  «  Monsieur  le  Prince  donc,  aprèn  plusieurs  remises 
recherchées  pour  raccommodement  de  ses  affaires  et  pour  Testablisse- 
ment  de  son  authorité,  se  rend  enfin  à  la  cour,  où  il  se  trouve  au  mi- 
lieu de  la  pompe  et  de  la  gloire.  Il  est  plus  recherché  et  sdivy  que  le 
Roy  mesme  :  sa  maison  rend  presque  le  Louvre  désert  :  Tout  le  monde, 
selon  la  légèreté  françoise,  adore  ce  Soleil  levant;  chacun  s'efforce  de 
s'acquérir  ses  bonnes  grâces  :  Aussi  tout  passe  par  ses  mains;  il  est 
absolu  au  Conseil;  il  dispose  des  finances  ;  il  fait  entrer  aux  chargea 
ceux  qui  ont  suivy  sa  fortune,  et  en  recule  ceux  qui  ont  fldellement 
servy  le  Roy  ;  et  s'il  faut  dire  franchement  la  vérité  aux  affaires  d'Es- 
tat, il  ne  laisse  à  Leurs  Majestez  que  le  nom  et  les  vaines  images  delà 
Royauté.  {Mère,  fr,,  t.  iv,  2«  partie,  p.  148.)  Voy,  aussi  Richelieu, 
p.  307;  Pontchartrain,  p.  152. 


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d'arnauld  d'andilly.  188 

1"  M.  le  Milord  duc  Hayect,  ambassadeur  eiC'  ^ousi  itit. 
traordinaire  du  Roy  d'Angleterre,  sur  le  sujet  du  ma- 
riage de  Madame  Christine,  arrive  en  magniûcence 
à  Paris,  conduit  par  M.  le  Prince  de  Joinville,  lequel 
avoit  esté  au-devant  de  luy  jusques  à  Saint-Denis.  H 
eut  audience  de  Leurs  Majestez  le  dimanche  7,  M.  de 
Guise  le  conduisant  depuis  le  logis  de  la  Reyne  Mar^ 
guérite,  où  il  estoit  logé,  jusques  au  Louvre.  Depuis, 
il  eut  audiance  particulière  dans  le  petit  Cabinet  de 
la  Reyne-mère,  où  il  fut  deux  heures  avec  le  Roy  et 
la  Reyne.  Depuis,  il  fut  festiné  par  tous  les  Grans  et 
principaux  Seigneurs  de  la  Cour,  comme  Monsieur  le 
Prince,  M.  de  Nevers,  M.  de  Guise,  M.  de  Rheims, 
M.  de  Buillon,  M.  de  Vitry,  etc. ,  avec  des  super- 
fluitez  extraordinaires,  jusques  là  que  Monsieur  le 
Prince  fit  faire  quatorze  services  *  • 
Environ  ce- temps,  M.  de  Sully  arrive. 
9.  Après  plusieurs  propositions  faites  pour  rei-^ 
gler  les  Conseils,  enfin  il  fut  résolu  que  les  mardy  et 
jeudy  au  matin  à  huit  heures,  on  tiopdroit  dans  le 
Louvre  un  Conseil  des  finances  tout  semblable.à  celuy 
qui  avoit  accoustumé  d'estre  tenu  auparavant,  et  au- 


*  Fify.  9rer€,  fr.^  U  iv,  p.  140,  le  récit  de  toutes  les  fôtea  qui  eurent 
lieu  pour  honorer  le  représentant  de  la  Grande-Bretagne.  Suivant  le 
Mercure^  cet  ambassadeur  extraordinaire  était  Jacques  Hay,  baron  de 
Saley,  maître  de  la  garde-robe.  Voy,  aussi  Fontenay-Mftreuil,  p,  397^ 
D'après  ce  dernier,  Lord  Hay,  depuis  comte  de  Carlisle,  vint  à  Pari^ 
pour  féliciter  le  Roi  de  son  mariage,  et  parler  de  celui  de  Madame 
Ghrétienae  (quelques  Mémoires  du  temps  portent  Qliristioe  comme 
Botre  manuscrit),  sœur  du  Boi,  avec  le  prince  de  Galles.  Cette  union 
ne  se  fit  pas.  Madame  épousa  peu  de  temps  après  le  prince  de  Piémont. 
{Voy.  encore  Richelieu,  p.  314  ;  Pontchartrain,  p.  153*) 


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iSli  JOURNAL   INÉDIT 

Aoutt  1611  quel  la  mesine  confusion  est  demeurée  (et  ce  jour 
fut  tenu  le  premier  desdits  Conseils) ,  et  où  Monsieur 
le  Prince  se  trouveroit  (comme  il  a  toujours  fait),  et 
signeroit  les  arrests. 

10.  Quant  au  Conseil  de  la  Direction,  il  fut  or- 
donné qu'il  se  tiendroit  les  mercredy  et  vendredy,  et 
qu'il  n'y  auroit  que  Monsieur  le  Prince,  M.  Jeannin, 
M.  Barbin,  et  les  quatre  Intendans.  Et  ce  jour  fut 
tenu  le  premier  desdits  Conseils,  auquel  ces  sept  per- 
sonnes assistèrent. 

Monsieur  le  Prince  et  M.  de  Buillon  vouloyent 
que  la  Reyne  prescrivit  l'ordre  de  règlement  des 
Conseils,  afin  de  rejetter  sur  elle  la  hayne  de  tous 
ceux  qui  en  seroyent  exclus  ;  ce  qu'elle  voulant  éviter, 
elle  envoya  M.  Barbin,  qui  prit  heure  pour  se  trou- 
ver chez  Monsieur  le  Prince  sur  ce  sujet,  où  M.  de 
Buillon  se  rendit.  Et  là,  M.  de  Buillon  voulant  faire 
parler  M.  Barbin,  il  dit  qu'il  n'avoit  autre  charge 
de  la  Reyne,  sinon  de  faire  tout  ce  qu'ils  voudroyent, 
et  qu'elle  trou>teroit  tous  bons  avis,  pourveu  que  elle 
pust  dire  qu'elle  l'avoit  fait  avec  leur  conseil. 

Quant  au  samedy,  ce  jour  fut  destiné  pour  lire  le 
matin  la  Semaine  en  un  Conseil  de  Direction  ;  après, 
la  faire  arrester  à  la  Reyne  ;  et  le  reste  du  jour  devoit 
estre  employé  au  Conseil  desDépesches,  c'est-à-dire, 
pour  les  affaires  d' Estât,  auquel  assistoyent  les 
Princes  et  officiers  de  la  Couronne. 

Cet  ordre  s'exécutant.  Monsieur  le  Prince  se  ren- 
dit si  assidu  à  tous  les  Conseils ,  et  y  prenoit  tant 
d'autorité,  que  la  Reyne  en  entra  en  jalousie.  En  ef- 


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d'arnauld  d'andilly.  185 

fet,  il  faisoit  le  Surintendant  des  finances,  et  arrestoit 
de  sa  main  les  rooUes  de  TEspargne  et  autres  estais. 
Là  dessus,  M.  de  Sully  se  jetta  à  la  traverse,  et  vid 
la  Reyne,  M*  Mangot,  M.  Barbin,  afin  de  rentrer 
aux  affaires*. 

Environ  ce  temps,  après  plusieurs  difficultez  sur 
difficultez  apportées  par  M.  de  Villeroy  au  traitté 
de  sa  charge  avec  M.  Mangot,  dont  ils  estoyent  con- 
venu le  prix  à  quatre  cens  mil  livres,  enfin  il  dit  qu'il 
ne  pouvoit  conclure  sans  M.  de  Pisieux  ;  et  fit  venir 
ledit  sieur  de  Pisieux,  lequel  dit  qu'il  ne  vouloit  trait- 
ier  en  façon  quelconque.  Tellement  que  sur  cela , 
le  traitté  se  rompit  entièrement  ;  et  on  expédia  et 
scella  le  12  une  commission  à  M.  Mangot  pour  faire 
la  charge  entièrement,  tant  en  l'absence  qu'en  la 
présence  de  M.  de  Villeroy,  lequel  ayma  mieux  cela 
que  de  quitter  sa  charge  (d'autant  qu'il  vouloit, 
comment  que  ce  fust,  mourir  Secrétaire  d' Estât).  Le 
lendemain  samedy  13,  M.  Mangot  presta  le  serment^ 
1/i.    Les  habitans  de  Péronne  s' estant  assemblez 
en  leur  hostel  de  ville,  tant  sur  ce  que  M.  de  Longue- 
ville  leur  avoit  mandé  qu'il  vouloit  faire  son  entrée 
le  25,  que  sur  ce  qu'ils  avoyent  eu  avis  que  l'on 
leur  vouloit  envoyer  toute  la  garnison  qui  sortoit 
d'Amiens,  M.  de  Favrolles',  qui  commandoit  dans 

^  Foff,  Pontchartrain,  p.  153. 

3  Foy,  Fontenay-Mareuil,  p.  344;  Brienne,  p.  312  ;  Richelieu,  p.  298  ; 
Pontchartrain,  p.  151  et  154. 

'  Le  sieur  deFavrolles  (suivant  d'autres  Mémoires,  de  FavoUes  ou  de 
Favols),  gentilhomme  gascon,  était  lieutenant  du  maréchal  d'Ancre 
au  gouvemement  île  Péronne 


Aoott  1616. 


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186  JOURNAL  INÉDIT 

Aoust  1616.       Péronne,  vint  à  leur  assemblée  avec  M.  de  Plainville» 
et  commença  à  user  de  paroles  fort  hautaines  pour 
leur  faire  rompre  leur  assemblée.   Ils  répondirent 
qu'ils  vouloyent  obéïr  au  Roy,  mais  qu'ils  n'avoyeut 
nul  commandement  de  Sa  Majesté  pour  ne  point 
recevoir  M.  de  Longueville,  et  pour  recevoir  les  gar- 
nisons qui  gortoyent  d'Amiens  ;  que  durant  les  der- 
nières guerres,  il  n'y  avoit  jamais  eu  que  cinquante 
hommes  au  plus  en  garnison  en  leur  ville  ;  ^t  que 
maintenant,  durant  la  paix,  on  leur  en  vouloit  bail- 
ler deux  cens  d'augmentation  ;  ce  qui  n'estoit  pas 
pas  raisonnable  ;  qu'au  reste^  il  ne  fist  plus  tant  le 
mauvais,  et  qu'ils  n'estoyent  plus  résolus  de  Tendu" 
rer.  (On  dit  qu'il  avoit  baillé*  il  y  a  quelque  temps, 
quantité  de  coups  de  baston,  en  plein  auditoire,  à  un 
sergent  qui  l' avoit  fâché).  Comme  sur  cela,  M,  de 
FavroUes  voulut  répondre  aigrement,  ils  Tarrestèrent 
en  leur  Hostel  de  Ville,  et  en  mesme  temps  mandèrent 
à  M.  de  Longueville,  qu'il  y  arrivast  aussitost.  Le 
lundy  15,  la  nouvelle  de  cela  arrive  à  Paris,  à  deux 
heures  après  midy,  et  le  soir  mesme  à  sept  heures, 
M.  Mangot  part  pour  aller  trouver  M,  de  Longue** 
ville.  Le  mercredy  17 ,   estant  à  sept  heures  du 
matin  arrivé  auprès  de  Péronne,  il  trouve  un  capi- 
taine avec  quelques  cavaliers  qui  l'arresta  jusques  au 
soir,  quoy  qu'il  luy  pust  dire  ;  et  le  soir,  lorsqu'il 
l'amena  pour  parler  à  M.  de  Longueville,  i!  le  fit  en- 
core attendre  trois  ou  quatre  heures  aux  portes. 
Tout  cela,  afin  de  donner,  cependant,  le  loisir  à 
M.  de  Longueville  de  prendre  le  Chasteau,  comme  il 


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d'arnaulj)  d'andilly.  187 

fit,  par  composition  avec  les  soldats ,  de  leur  faire  aousi  mê. 
payer  quatre  montres ,  moyennant  quoy  ils  enfer- 
mèrent Rame  S  qui  les  comtnandoit,  et  se  rendirent. 
M.  Mangot  trouva  M.  de  Longuçville  en  résolutiori 
de  ne  point  rendre  Péronne ,  et  mesme  il  luy  dit 
que  Ton  se  moqueroit  de  luy,  s'il  le  rendoit;  et  qu'en 
ce  temps*cy,  on  ne  rendoit  point  de  tels  morceaux. 
Enfin,  lorsqu'il  revint,  il  croioit  l'aVôir  davantage 
adoucy  :  et  fut  icy  de  retour  le  vendredy  19. 

M.  du  Mayne  envoya  quatre  compagnies  de  gefi9 
de  pied,  enseignes  déployées,  se  jetter  dans  Péronne, 
lesquelles  il  avoit  tirées  de  ses  places.  M.  Bârbin  a 
dit  qu'il  y  avoit  cinq  cens  hommes. 

Lorsque  la  nouvelle  de  Péronne  arriva ,  Monsieur 
le  Prince  estoit  allé  à  une  maison  nommée.. ^  qu'il 
avoit  achetée  sur  le  chemin  de  Vallery.  M.  de  Buillott 
luy  envoya  dire  en  diligence  par  un  gentilhomme  ce 
qui  s' estoit  passé,  et  luy  manda  qu'il  le  prioit  ins-* 
tamment  de  ne  parler  à  âme  vivante,  jusqu'à  ce  qu'il 
l'eût  veû  chez  M.  du  Mayne»  où  il  l'attendoit,  et  par 
où  il  faloit  nécessairement  qu'il  passast.  M.  Vigni^ 
dit  que,  sachant  cela,  il  fut,  avec  Monsieur  l'Arche»- 
vesque  de  Bourges%  au  devant  de  Monsieur  le  Prince; 
luy  dit  que  M.  de  Buillou  l'attendoit  ;  mais  qu'il 
le  supplioit  de  ne  point  se  laisser  emporter  à  ses  per* 
suasions  ;  que  l'action  estoit  honteuse  ;  ne  se  pou  voit 
défendre  ;  et  que  ce  seroit  à  ce  coup,  que  la  Reyne 

<  Le  sieur  de  Rames  Baqueville,  cupitaine  de  la  garnisoQ  de  Péronne. 
2  André  Fremiot,    archevêque  de  Bourges,   député  du  clergé  aux 
Btais  àe  1614. 


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Aoust  1616 


188  JOURNAL   INÉDIT 

reconnoistroit  ce  qu'elle  devoit  attendre  de  la  sincé- 
rité de  ses  intentions.  Monsieur  le  Prince  le  luy 
promit.  11  alla  chez  M.  du  Mayne,  où  M.  de  Buillon 
le  persuada  à  ce  qu'il  voulut. 

J'ay  oûy  dire  à  M.  Barbin,  le  23  mars  1618, 
comme  j'estois  un  de  ses  trois  Conseillers,  que  les  af- 
faires du  Roy  estoyent  lors  en  un  estât  si  misérable, 
et  celles  des  Princes  si  relevées,  qu'ils  témoignoyent 
tout  haut  trouver  mauvais  quand  le  Roy  et  la  Reyne 
parloyent  à  des  gens  de  qualité,  et  jusques  à  des 
gentilshommes  de  dix  mil  livres  de  rente ,  disant 
qu'ils  leur  vouloyent  débaucher  leurs  serviteurs  ;  que 
M.  du  Mayne  dit  un  jour  à  M.  de  Lusson,  qu'il  ne 
pouvoit  trouver  bon  que  l'on  l'envoyast  vers  Mon- 
sieur.^, pour  le  leur  débaucher;  que  Monsieur  le 
Prince  manda  un  jour  à  la  Reyne,  qu'il  ne  se  sou- 
cioit  plus  qu'elle  parlast  tant  qu'elle  voudroit  à  M.  de 
Guise,  parce  qu'il  estoit  maintenant  très  assuré  de 
luy.  Sur  quoy  la  Reyne,  par  le  conseil  de  M.  Barbin, 
parla  à  tous  les  Seigneurs  de  la  Cour,  afin  de  témoi- 
gner qu'elle  ne  se  vouloit  pas  laisser  aller  aux  entre- 
prises et  aux  insolences  de  ces  Princes  ;  que  M.  du 
Vair ,  amenant  un  jour  M.  de  Buillon  par  la  main  à 
la  Reyne,  luy  dit  :  Madame,  il  ne  faut  plus  que  vous 
ayez  de  défiance  de  M.  de  Buillon  et  de  ces  Messieurs, 
car  ils  ne  désirent  que  de  bien  servir  le  Roy.  Sur 
quoy  la  Reyne  devint  rouge  ;  que  par  l'avis  du  Ma- 
réchal mesme,  la  Reyne  estoit  résolue  de  s'en  aller 
au  Parlement,  pour  se  démettre  de  l'administration 
des  affaires  ;  ce  que  M,  Barbin  luy  déconseilla  en- 


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d'àrnauld  d*andilly.  189 

tièrement,  luy  disant  que  si  elle  le  faisoit,  le  Royaume, 
le  Roy,  et  ses  enfans  estoyent  perdus;  d'autant  que 
Monsieur  le  Prince  prendroit  toute  l'autorité,  et  que 
chacun  des  Grans  penseroit  à  tirer  sa  pièce;  sur 
lequel  discours,  le  Roy  estant  entré  dans  le  cabinet, 
la  Reyne,  frémit  et  dit  :  Ho  I  je  ne  quitteray  point  les 
alTaires,  quoy  qui  en  puisse  arriver. 

Environ  le  mardy  ou  mercredy  17 ,  M,  le  Comte 
d'Auvergne  part,  pour  aller  investir  Péronne  avec  les 
compagnies  de  gendarmes  et  de  chevaux  légers  qui 
se  trouvoyent  icy  autour  et  dix  compagnies  du  régi- 
ment des  gardes.  M.  de  Créquy  n'y  fut  point,  soit 
qu'il  refusast  ou  autrement.  Ils  trouvèrent  que  M.  de 
Longueville  estoit  demeuré  dans  Péronne  avec  c^it 
ou  six  vingts  gentilshommes  et  deux  cens  hommes 
de  pied  (quelques  un&  dient  sept  cens  ;  mais  je  ne 
le  croy  pas)  *. 

16.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  ayant  eu  avis  qu'il  y 
avoiteu  dessein  fait  par  M.  duMayne  et  M.  le  Prince 
de  Joinville,  de  l'enlever  de  sa  maison  du  faubourg 
Saint-Germain  et  de  le  faire  passer  l'eau  à  un  bateau 
qu'ils  avoyent  prest,  puis  l'emmener  à  Soissons,  il 
part  en  diligence,  la  nuit  d'entre  le  mardy  et  le  mer- 
credy, pour  s'en  aller  à  Caen. 

Monsieur  le  Prince  ayant  donné  charge  à  M.  l'Ar- 


'  Sur  la  sédition  de  Péronne  qui,  en  rompant  le  traité  de  Lottdun, 
commença  ce  qu'on  a  appelé  la  troisième  guerre  civile,  et  décida  la 
Reine-mère  à  faire  arrêter  Monsieur  le  Prince.  (Foy.  Merc,  fr,,  p.  179- 
194  ;  Fontenay-Mareuil,  p.  345  et  suiv.  ;  Brienne,  p.  312  ;  Rohan,  p.  140  ; 
Richelieu,  p.  316  ;  Pontchartrain,  p.  154. 


AoBst  in«. 


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190  JOURNAL  INEDIT 

i«i«<  chevesquô  de  Bourges  (qui  se  mesloit  fort  avant  dans 
ses  afiE&ires  et  qui  n'est  pourtant  qu'un  tribouliet)  de 
porter  rudes  paroles  à  M.  le  Maréchal  d'Ancre,  et  de 
luy  dire,  entr' autres  choses ,  qu'il  ne  le  pouvoit  ni 
ne  le  vouloit  plus  garantir,  et  qu'il  se  conservast 
comme  il  l'entendroit;  il  envoya  quérir,  quelque  temps 
après,  M.  Barbin,  qui  le  vint  trouver  à  Saint-Martin- 
Là,  il  luy  fit  plusieurs  honnestetez,  et  pour  ce  qui 
estoit  de  Monsieur  le  Maréchal,  et  particulièrement 
pour  ce  qiû  estoit  de  luy. 

M,  Barbin  luy  ayant  remontré  les  grans  sujets  de 
mécontentement  qu'il  donnoit  à  la  Reyne ,  il  luy  dit 
qu'il  le  reconnoisfioit  bien  ;  mais  qu'il  ne  savoit  com« 
ment  faire,  et  s'estoit  trouvé  fort  empesché,  pour  ce 
que  M.  de  Buillon  et  ses  Princes  luy  faisoyent  en- 
tendre que  s'il  abandonnoit  ses  amis,  ils  l'abandon-» 
neroyent  aussi  ;  et  qu'après,  il  se  trouveroit  dans  le 
mépris,  et  plus  bas  que  jamais  ;  mais  qu'ayant  esté 
encore,  le  jour  de  devant,  plus  de  quatre  heures  avec 
eux,  enfin  il  s'en  estoit  débarrassé,  et  qu'il  vouloit  bien 
que  le  Roy  et  la  Reyne  sceussent  qu'ils  luy  avoyent 
plus  d'obligation  qu'à  leur  père,  et  qu'il  le  prioit  de  le 
dire  à  la  Reyne. 

M.  Barbin  s'en  allant,  trouva  PArchevesque  de 
Bourges  qoi  luy  dit  qu'il  estoit  bien  aise  de  l'avoir 
rencontré,  et  qu'ils  s'en  iroyent  ensemble  trouver 
M.  le  Maréchal  d'Ancre  ;  où  estant  arrivez  ,  M.  de 
Bourges  luy  dit,  de  la  part  de  Monsieur  le  Prince^ 
d'extrêmement  mauvaises  paroles,  suivant  ce  que 
dessus.  Monsieur  le  Maréchal  se  mit  en  grande  colère» 


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d'ahnauld  d'aptdilly.  191 

et  dit  que  Monsieur  le  Prince  eètoit  Prince  du  sang,  aousi  i«i«. 
mais  qu'il  s'assuroit  qu'il  ne  diroit  point  cela  devant 
luy.  —M.  Barbin^  sur  cela,  dit  ce  que  le  Prince  luy 
venoit  de  dire,  et  le  lendemain,  Monsieur  le  Prince 
ayant  envoyé  quérir  M.  Barbîn,  dit  que  M.  de 
Bourgeè  n'avoit  dû  dire  cdé* 

Ld  Maréchale  d'Ancre  couchoit  aussi  lors  au  fau* 
bourg  Saint- Germain.  On  dit  que  le  dessein  estoit 
de  les  tuer  tous  deux.  Monsieur  le  Prince  manda  à 
M.  le  Maréchal  d*  Ancre^  qu'il  luy  avoit  prorais  de  le 
gareiitîr,  mais  qu'il  ne  le  pouvoit  plus  faire.  Et  sur 
cela;  le  Maréchal  d'Ancre  se  résolut  de  s'en  aller  en 
Normandie  ;  où  estant  près  de  Gaen,  il  fut  visité  et 
nccompagné  de  quantité  de  noblesse.  On  dit  que 
M.  Dumesnil  Morânt'  dépença  deuK  mil  pis  toiles  à 
le  traitter.  On  dit  aussi  qu'il  caressoît  fort  les  bour* 
geois  de  Caéti,  et  de  familiarisoit  avec  euX|  au  con- 
traire de  ce  qu'il  faisoit  à  Amietis.  Il  coudimt  dans 
là  ville. 

J'ay  oûy  jurer  à  M.  Barbin^  qu'il  n'y  avoit  point 
dessein  de  tCier  ni  de  prendre  M.  le  Maréchal  d'Aa- 
cre,  et  qu'il  avoit  résolu  d'aller  en  Normandie,  avant 
que  Monsieur  le  Prince  luy  eust  mandé  ce  que  des- 
sus ;  et  qu'il  est  vray  que  le  Maréchal  s'en  alloit  pour 
ne  plus  revenir,  et  se  deyoit  embarquer  sur  la  mer, 
et  sa  femme  aussi,  qui  estoit  malade,  et  monta  raesme 
en  litière,  pour  s'en  aller.  Mais  l'accès  dé  sa  fièvre 


*  Thomas  Morant,  baron  du  Mesnil-Gamim*,  tréiopier  de  l'épargne, 
grand  trésorier  des  Ordres  en  1681. 


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192  JOURNAL  INiSdIT 

Aoust  1616.  luy  ayant  lors  redoublé,  elle  descendit,  et  remit  le 
voyage,  lorsqu'elle  se  porteroit  mieux  \ 

On  dit  que  Tinimitié  de  M.  de  Guise  avec  le  ma- 
réchal d'Ancre  venoit  de  ce  que  M,  le  Cardinal  de 
Guise,  ayant  désiré  instamment  d'estre  du  conseil  de 
la  Direction,  M.  le  prince  de  Condé  en  supplia  la 
Reyne  avec  affection.  Sur  quoy,  elle  dépescha,  à 
l'heure  mesme,  un  courrier  à  Lésigny,  où  estoyent 
Monsieur  le  Maréchal  et  Madame  la  Maréchale  ;  alors 
qu'elle  eut  receu  réponse,  M.  de  Guise  estant  venu 
luy  renouveller  la  mesme  supplication,  elle  répondit  : 
J'ay  fait  deux  fois  la  guerre  pour  empescher  que 
Monsieur  le  Prince  ne  fust  de  la  Direction,  et  je  la 
feray  encore  deux  autres  fois,  pluslost  que  votre  frère 
y  entre.— On  dit  aussi  que  MM.  de  Guise  allant  tous 
trois  voir  Monsieur  le  Prince,  ils  trouvèrent  le  maré- 
chal d'Ancre  qui  en  sortoit,  et  les  salua  ;  que  lors, 
M.  de  Guise  et  M.  de  Joinville  le  saluèrent,  et  qu'au 
contraire,  M.  de  Rheims  enfonça  son  chapeau,  et  dit 
haut  :  Si  ce  n'estoit  le  respect  du  lieu  où  je  suis,  je 
luy  baillerois  d'un  poignard  dans  le  sein. 

Environ  ce  temps,  M.  de  la  Douze- Charton^  con- 


^  Suivant  le  duc  de  Rohan  (Mém.,  p.  140),  le  projet  de  l'assassinat 
du  maréchal  d'Ancre  aurait  été  discuté,  dès  cette  époque,  dans  un 
conseil  présidé  par  le  Roi,  où  se  trouvaient,  entre  autres  grands  de 
l'Etat,  le  duc  du  Maine  et  le  maréchal  duc  de  Bouillon.  Le  maréchal 
d'Ancre  averti  aurait  pris  la  résolution  de  se  retirer  dans  son  gouver- 
nement et  de  faire  arrêter  le  prince  de  Condé  et  ses  amis  poar  réta- 
blir son  autorité  et  celle  de  la  Reine-mère.  {Foy,  Richelieu,  p.  322- 
334;  Pontchartrain,  p.  158.) 

»  André  Charton,  conseiller  au  parlement  depuis  1587. 


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d'arnauld  d'andilly.  193 

seiller  en  la  Cour,  vint  trouver  M.  Barbin,  pour  le      loutt  i«w. 
faire  parler  à  la  Reyne-mère,  touchant  affaires  qui 
importoyent  au  salut  du  Roy,  d'elle,  et  de  TEstat  ;  ce 
qu'il  fit,  encore  que  la  Reyne  eust  prit  médecine. 

M.  Charton  ayant, parlé  à  Sa  Majesté,  M.  Barbin 
le  suivit,  d'autant  qu'il  luy  avoit  dit,  qu'après  qu'il 
auroit  parlé  à  la  Reyne,  il  luy  diroit  à  luy  les  parti- 
cularitez  de  l'affaire  et  les  remèdes.  Mais  lors,  il  le 
remit  à  M.  de  Sully,  qui  informeroit  de  tout  cela,  le 
lendemain,  le  Roy  et  la  Reyne.  — Le  lendemain,  M.  de 
Sully  vint  trouver  le  Roy  et  la  Reyne,  à  heure  assi- 
gnée, qui  commença  par  ces  mots  :  Pleut  à  Dieu  que 
Vos  Majestez  fussent  maintenant  au  milieu  de  douze 
cens  chevaux  ;  et  fit  un  grand  discours  de  deux  heures, 
dont  la  substance  estoit,  que  tout  estoit  perdu.  Et 
estant  sorty,  il  rentra  le  corps  à  demy  dans  la  cham- 
bre, et  dit  qu'il  déchargeoit  sa  conscience ,  ayant 
averty  Leurs  Majestez;  qu'il  les  souhaiteroit  au  mi- 
lieu de  douze  cens  chevaux;  qu'il  n'y  avoit  autre  re- 
mède au  mal  que  d'armer  puissamment;  mais  que 
cela  ne  se  pouvoit  pas;  et  qu'il  estoit  trop  tard\ 

25.  M.  de  Buillon,  de  retour  de  Provence,  où  il 
avoit  esté  quatre  ou  cinq  jours  auparavant,  avoit 
porté  parole  à  M.  de  Longueville,  que  le  Roy  luy  don- 
neroit  le  choix  de  quatre  gouvernemens,  avec  l'un 
desquels,  tel  qu'il  voudroit,  M.  le  Maréchal  traitteroit 
le  gouvernement  de  Péronne,  Montdidier,  et  Roye. 
—  M.  de  Longueville,  au  contraire,  vouloit  en  nom- 


*  Voy,  Richelieu,  p.  326. 

13 


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194  JOURNAL  IHIJÔÎT 

Aouèt  i«H.  mei'  quatre,  l'un  desquels  seroit  choisy  par  le  Roy,  et 
offroit  de  remettre  la  place  entre  les  mains  d'un 
exent  des  gardes,  pourveU  qu'il  n'amenast  point  d'ar- 
chers avecque luy. 

Environ  le  20.  La  Reyne  se  voyant  en  peine  de 
Taffaife  de  t^éronne,  et  reconnoissant  qu'il  estoit  né*- 
cessaire  que  le  Roy  se  meslast  de  la  conduite  des  affai- 
res, afin  de  conéerver  l'autorité  royale  qui  s'aflfoi- 
blissoit  journellement,  elle  lui  dit,  et  luy  en  parla  avec 
affection^  (  M*  le  Maréchal  estoit  alors  à  Lésigny*  ) 
— -  Le  Roy  dit  que,  puisqu'elle  le  désiroit,  il  le  feroit  ; 
et  deux  heures  après,  comme  on  lisoit  la  dépesche 
que  M.  de  Buillon  devoit  emporter,  il  y  remarqua  deux 
grandes  fautes ,  dont  l'une  estoit,  que  l'on  vouloit 
bailler  à  M*  de  Buillon  le  pouvoir  de  loger  l'armée, 
qui  estoit  le  mettre  en  pique  avec  M*  le  Comte  d'Au- 
vergne. Aussitost  que  M.  le  Maréchal  fut  de  retour, 
elle  rompit  ce  coup-là,  et  empescha  que  le  Roy  ne 
prist  connoissance  des  affaires. 

Septembre.  Joudy  1".     Mousiour  le  Prince  arresté  prisonnier 

dans  la  chambre  de  la  Reyne,  par  M.  de  Thémines 
et  ses  deux  fils  \  Il  avoit  esté  au  Conseil  des  finances 
toute  la  matinée ,  e^  estoit  sorty,  et  monté  chez  la 
Reyne,  suivy  de  M.  de  Rohaiî^  Monsieur  le  Garde  des 
sceaux,  M.  le  président  Jeannin,  et  quelques  autres. 
Il  avoit  trouvé  le  Roy  dans  ladite  chambre,  auquel  il 

^  Antoine  de  Lauzières,  marquis  de  Thémines,  tué  au  siège  de  Mon- 
tauban  en  1621,  et  Charles,  seigneur  de  Lauzières,  tué  au  siège  de 
Moiithcur,  la  même  année  1621* 


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d'arnauld  d'andilly,  195 

demanda  s'il  pourroit  voir  la  Reyne.  Le  Roy  dit  qu'il     septembre  iêi«. 
alloit  y  voir;  et  estant  entré  dans  la  Garde-Robbe  ou 
cabinet,  M«  de  Thémines  sortit,  et  dit  à  Monsieur  le 
Prince  :  Monsieur,  le  Roy  m'a  commandé  de  vous 
dire,  qu'il  a  besoin  de  vous  pour  une  affaire  qui  se 
doit  résoudre  cette  après  disnée,  et  qu'il  vous  prie  de 
ne  bouger  d'icy  d'aujourd'huy  ;  et,  pour  ce  sujet  m'a 
donné  charge  de  vous  arrester.  —  Comment!  m'ar- 
rester,  moy  !  ce  dit  Monsieur  le  Prince.  Et  en  mesme 
temps,  voulant  mettre  la  main  à  l'épée,  il  trouva  que 
M.  de  Thémines  l'avoit  saisie  de  la  main  gauche,  et 
il  commença  à  crier  :  Comment  !  arrester  un  Prince 
du  sang  !  vous  n'estes  point  capitaine  des  gardes.— 
Non,  répliqua  M.  de  Thémines,  mais  je  suis  gentil- 
homme ,  et  obligé  d'obéir  aux  commandemens  dil* 
Roy,  mon  maistre  et  le  vostre,  —  Sur  cela.  Mon* 
sieur  le  Prince  se  retourna  vers  M.  de  Rohan,  et  luy 
dit  :  Mon  cousin,  souffrirez-vous  que  l'on  arreste 
ainsi  prisonnier  un  Prince  du  sang?— M.  de  Rohan 
répondit  :  Je  suis  tout  seul  ;  il  faut  obéir  au  Roy.  — 
Après,  Monsieur  le  Prince  dit  :  Monsieur  le  Garde  des 
sceaux,  qui  vit  jamais  une  pareille  injustice  !  Faites- 
moy  parler  au  Roy  ou  à  la  Reyne.  Lors,  Monsieur  le 
Garde  des  sceaux  et  les  autres  baissèrent  la  vue.  Puis 
il  s'écria  :  Hé  quoy  !  n'ay-je  point  d'amis.  Sur  cela, 
M.  de  Praslin  entra,  qui  dit  :  Monsieur,  il  faut  obéïr  au 
Roy. — Et  M.  de  Thémines  luy  dit  :  Monsieur,  ne  vous 
émouvez  point,  s'il  vous  plaist,  et  n'entrez  en  aucune 
appréhension,  car  je  vous  répons  sur  mon  âme  et  sur 
mon  honneur,  que  le  Roy  entend  que  vous  soyez 


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196  JOURNAL    INJÎDIT 

septembre  iej«.  traitté  comiTie  luy-mesme.  Après,  il  le  mena  dans 
une  chambre  qui  estoit  proche ,  où  luy  M.  de  Thé- 
mines  avoit  trois  siens  gentilshommes;  et  en  passant, 
Monsieur  le  Prince  ayant  apperçeu  M.  Delbene,  lieu- 
tenant de  la  compagnie  de  chevaux  légers  de  Mon- 
sieur, avec  douze  ou  quinze  de  ses  compagnons,  il  s'é- 
cria :  Je  suis  mort,  voilà  un  homme  qui  ne  m'a  ja- 
mais aymé.  Que  l'on  m'ameine  vistement  un  prestre, 
%t  que  l'on  me  donne  au  moins  le  loisir  de  penser  à 
ma  conscience.  Lors,  M.  Delbene  luy  fit  une  révé- 
rence jusques  à  terre,  et  luy  dit  qu'il  avoit  toujours 
esté  son  très-humble  serviteur;  qu'il  le  supplioit  de  né 
le  point  prendre  pour  un  bourreau,  et  de  croire  qu'il 
n'y  avoit  personne  qui  eust  le  pouvoir  de  luy  faire 
accepter  une  telle  charge.  —  Monsieur  le  Prince 
Qstant  un  peu  revenu  de  cette  appréhension,  deman- 
da M.  de  Rochefort,  son  apoticaire,  un  certain  valet 
de  chambre,  et  un  certain  cuisinier.  On  luy  fit  venir 
les  trois  derniers,  mais  non  le  premier,  qui  estoit  chez 
M™'  la  Comtesse  de  Soissons,  et  à  une  heure,  avoit  pris 
la  poste  au  Bourg-la-Reyne,  pour  aller  à  Chinon  (où 
l'on  dit  que  l'on  fit  écrire  Monsieur  le  Prince,  et  à 
Bourges  aussi,  où  du  Roger,  oncle  de  Rochefort,  s'en 
alla,  afin  de  faire  remettre  lesdites  places  entre  les 
mains  de  qui  le  Roy  voudroit).  Le  Roy  ayant  envoyé 
de  sa  viande  à  Monsieur  le  Prince,  il  la  refusa,  et  Sa 
Majesté  s'en  fascha. —  Monsieur  le  Prince  se  trouva 
estre  malade  de  chancres,  et  autres  vilenies,  qu'il  avoit 
gagnées  chez  un  maquereau  nommé  Chercaut,  lequel 
tient  des  femmes  chez  luy,  et  traitte  en  festins.  Deux 


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d'aRNAULD    D^ANDILLY.  197 

jours  après,  on  grilla  une  autre  chambre  au  Louvre,  septembre  i«i«. 
où  on  mît  Monsieur  le  Prince,  et  on  luy  osta  tous  ses 
gens  hormis  Luisible,  qui  luy  sert  de  valet  de  chambre 
et  d'apoticaire.  Un  nommé  le  capitaine  Robert,  au- 
quel il  se  fie,  appreste  ses  viandes,  et  les  luy  apporte  à 
la  porte  de  la  chambre,  entre  les  mains  de  Luisible, 
et  Monsieur  le  Prince  veut  voir  le  visage  de  Robert, 
afin  d'estre  assuré  qu'elles  n'ont  passé  que  par  les 
mains  des  siens. 

Monsieur  le  Prince  avoit  esté  averty,  par  diverses 
fois,  qu'il  y  avoit  un  dessein  de  l'arrester,  et  encore 
le  mercredy  au  soir,  allant  au  bordel,  avec  un  seul 
gentilhomme  près  Saint-Martin-des-Champs ,  il  en 
eut  avis,  et  répondit  :  La  beste  est  trop  grosse. 

•  Pendant  que  Monsieur  le  Prince  estoit  au  Conseil; 
on  avoit  fait  redoubler  les  gardes  tant  suisses  que 
françoises  à  la  porte  du  Louvre,  où  estoyent  MM.  de 
Créquy  et  de  Bassompierre,  et  dedans  le  Louvre,  on 
avoit  disposé  toutes  les  gardes  du  corps  du  Roy. 

La  Beyne-mère  ne  se  coucha  point  toute  cette 
nuit  là.  Elle  manda  le  mercredy  au  soir  à  M.  de 
Bassonnpierre  qu'il  la  vint  trouver  inconnu  à  trois 
heures  du  matin.  Il  vint  à  deux  ;  il  la  trouva  seule 
dans  son  cabinet  avec  M.  Barbin  qui,  estoit  contre  la 
table,  et  elle  se  promenoit. 

après  avoir  tenu  quelques  discours  à  M.  de  Bas- 
sompierre sur  la  confiance  qu'elle  avoit  en  sa  fidélité, 
elle  luy  dit  le  dessein  qu'elle  avoit  pris  de  faire  ar- 
rester  Monsieur  le  Prince,  M.  du  Mayne,  M.  de  Ven- 
dosme,  M.  de  Buillon,  M.  de  la  Trémoille;  qu'il 


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196  JOURNAL  INÉDIT 

«eptenfire  iw«.  cssayast  de  faire  que  les  Suisses  fussent  plus  forte 
que  les  gardes  du  Roy,  dont  elle  ne  se  fioit  pas  ;  et 
pour  luy  montrer  combien  elle  se  fioit  en  luy,  elle 
avoit  résolu,  si  l'affaire  réussissoit  mal,  de  se  mettre 
avec  le  Roy,  ses  enfans,  et  ses  bagues,  au  milieu  du 
bataillon  de  ses  Suisses,  et  aipsi  s'en  aller  à  Mante, 
M.  de  Bassompierre  qui  avoit  mandé  dès  le  soir 
à  ses  capitaines  dans  les  quartiers,  qu'ils  se  tinssent 
prests  au  premier  coup  de  tambour,  luy  dit  qu'il  luy 
répondoitde  se  rendre  le  plus  fort  devant  le  Louvre; 
mais  qu'il  croioit  qu'elle  se  pouvoit  assurer  de  M.  de 
Créquy,  en  l'engageant  par  générosité  et  ne  le  luy 
disant  que  sur  le  point  de  l'exécution.  Ainsi,  elle  l'en- 
voya quérir  à  six  heures  du  matin,  et  le  retint  avec 
elle,  jusquesà  l'heure  qu'il  fut  besoin  d'agir;  et  M.  de 
Bassompierre  se  tint  toujours  auprès  de  luy,  luy  di- 
sant qu'ils  se  serviroyent  chacun  de  témoin  de  leurs 
actions.  Sur  les  six  heures  du  matin,  il  vint  un  gen- 
tilhomme de  Poitou  demander  à  parler  à  la  Reyiie  ; 
elle  se  jetta  sur  son  lit,  et  fit  mettre  derrière  la  ruelle 
M.  de  Bassompierre,  M.  Barbin  et  M.  de  Fossez. 
Il  luy  dit  que  tous  ces  messieurs  estoyent  avertis,  et 
qu'ils  vouloyent  monter  à  cheval  et  s'en  aller.  On  y 
envoya  ;  il  se  trouva  qu'ils  ne  bougeoyent,  Sur  les 
huit  heures,  le  Roy  estant  avec  la  Heyne,  on  leur 
vint  dire  que  Monsieur  le  Prince  estoit  entré,  dont  ils 
furent  très-aises.  Et  puis,  on  leur  dit  que  M.  de  Yen- 
dosme  estoit  aussi  venu  (ce  qui  n' estoit  vray).  Et 
lors,  le  Roy  dit  :  Bon,  voilà  ce  fils  de  putain  pris. 
Et  quelqu'un  dit  en  riant  :  Et  deuf.  La  Reyna  dit  ; 


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d'arhAui^d  d'andijlly.  199 

Il  n'eet  pas   heur«  de  rire;  il  faut  prier  Dieu*     septembre jw. 

M.  Mangot  ne  vint  qu'à  neuf  heures  du  ypatip  au 
Louvre  j  qui  estoit  beaucoup  trop  tard,  M.  Barbin  y 
èstoît  venu  devant  cinq  heures. 

Monsieur  le  Prince  avoit  continué  sen  débauches 
de  telle  sorte,  avec  quelques  conseillers  de  la  Cour, 
que  M,  du  Mayne  et  M.  de  Buillon  ne  pouvoyent  . 
parler  à  luy  ;  de  quoy  s' estant  mis  en  colère,  M.  (Je 
Buillon,  ou  tous  deux  ensemble,  luy  mandèrent,  que  s'il 
ne  chassoit  ses  petits  cpnseîllers,  ilslesiroyent  chasser 
eux-^mesmes,  à  coups  de  baston.  On  dit  que  M.  de 
Buillon,  ayant  une  fois  fort  affaire  à  luy,  fut  contraint 
de  l'aller  chercher  chez  une  nommée  dame  Marie. 

Monsieur  le  Prince  qui  avoit  couché  à  Saint^Mar- 
tin,  ayant  esté  Je  matin,  dès  cinq  heures,  chez  M.  de 
Buillon,  M.  de  Buillon  luy  dit,  qu'il  avoit  avis  assuré, 
qu'on  le  vouloit  arrester,  s'il  ailoit  au  Louvre,  Mon- 
sieur le  Prince  ne  le.voulut  point  croire,  et  luy  dit  qu'il 
alloit  bailler  des  fernjes.  De  là,  M.  de  Buillon  s'en  alla 
chez  M.  du  Mayne,  auquel  il  dit  les  propos  qu'il  avoit 
eus  avec  Monsieur  le  Prince  ;  le  pria  de  n'aller  point 
(Ke  matin  là  au  Louvre,  et  de  mettre  des  gens  aux 
avenues  du  Louvre,,  afin  de  découvrir  ce  qui  se  passa- 
rpit,  et  se  tenir  sur  ses  gardes,  de  peur  d'estre  surpris  ; 
que  cependant,  il  s'en  alloit  à  Cbarenton,  et  revien- 
droit  fii^ner  avec  luy  et  chez  luy  ;  que,  s'il  survenoit 
quelque  chose,  il  le  prioit  de  luy  en  dûnner  aviu. 
Suivant  cela,  M.  du  Mayne  envoya  des  gentilshommes 
aux  avenues  et  dedans  le  Louvre,  lesquels  ayant  dé- 
couvert la  prise  de  Monsieur  le  Prince,  luy  en  vinrent 


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200  JOURNAL   INIÎDIT 

septembre  1616.  donncF  avis,  à  toute  bride,  dans  les  Jésuites,  où  il 
oyoitla  messe.  Aussitost  il  envoya  les  mesmes  gentils- 
hommes à  M.  de  Buillon,  et  s'en  alla  après  eux.  Les- 
dits  gentilshommes  Ux)uvèrent  M.  de  Buillon  à  Saint- 
Antoine-des-Champs,  qui  revenoit  en  carrosse  de 
Charenton.  (M.  du  Tremblay  m'a  dit  que  ce  fut  luy 
qui  luy  porta  la  nouvelle,  et  que  M.  de  Buillon  dit  : 
Ce  petit  brouillon  nous  a  tous  perdus.  Où  est  M.  du 
Mayne?)  En  mesme  temps,  il  monta  à  cheval,  sans 
bottes.  Incontinent  après,  M.  du  Mayne  arrive,  et 
M.  de  la  Tréraoille.  Ils  ramassent  six  ou  sept  vingt 
chevaux,  et  se  promenèrent  assez  long-temps  le  long 
du  rempart,  en  tirant  vers  le  Temple,  sur  ce  que 
M.  de  Buillon  disoit,  qu'il  croioit  que  l'on  les  envoye- 
roit  charger  et  qu'il  vouloit  tailler,  en  pièces  tous 
ceux  qui  viendroyent.  Mais  l'on  tient  qu'en  effet, 
leur  dessein  estoit  de*voir  s'il  n'arriveroit  point  quel- 
que émotion  dans  Paris.  M.  du  Mayne  vouloit  opi- 
niastrement  rentrer  dans  Paris,  avec  cinquante  che- 
vaux, et  faire  garder  la  Porte  Saint-Martin  par  trente 
ou  quarante  autres,  afin  de  tâcher  à  émouvoir  le 
peuple,  et,  s'il  se  trouvoit  disposé  à  cela,  s'en  aller 
droit  au  Louvre.  Mais  M.  de  Buillon  l'en  empescha. 
En  effet,  M.  du  Mayne  fut  un  gros  quart  d'heure  à  la 
Porte  Saint-Martin,  avec  trente  ou  quarante  chevaux, 
et  envoya  M.  de  Thianges  le  long  de  la  nie  Saint- 
Martin,  avec  cinquante  ou  soixante  chevaux,  afin  de 
tâcher  d'émouvoir  le  peuple  ;  mais  chacun  fermoit 
sa  boutique,  et  nul  ne  se  bougeoit. 

La  Reyne  ayant  sceu  qu'il  avoit  paru  de  la  cava- 


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d'aanaold  d'andilly.  201 

lerie  vers  le  Temple,  commanda  à  M.  de  Montmo-  sn»iwibrt  w, 
rency  de  s'y  en  aller,  lequel  monta  à  cheval,  sur  les 
trois  heures,  avec  M.  de  Rets  et  quelque  cent  cin- 
quante gentilshommes,  et  alla  jusques  à  Montfaucon , 
mais  il  ne  rencontra  personne.  M.  du  Tremblay,  qui 
avoit  conduit  M.  de  Buillon  jusques  à  Claye,  ayant 
rencontré  M.  de  Montmorency,  qui  alloit  après  M.  de 
Buillon  et  M.  du  Mayne,  il  luy  dit  :  Monsieur,  M.  de 
Buillon  m'a  commandé  de  vous  dire,  que  vous  luy 
avez  fait  gaster  aujourd'huy  un  bas  de  soie,  mais 
qu'il  vous  fera  gaster  plus  de  quatre  paires  de  bottes. 
On  dit  que  M.  de  Montmorency  marchoii  avec  si  peu 
d'ordre,  que  s'il  eust  rencontré  M.  de  Buillon,  qui 
avoit  disposé  ses  gens  en  trois  trouppes  et  en  très- 
bon  ordre,  il  y  a  grande  apparence  qu'il  eust  couru 
fortune. 

MM.  du  Mayne ,  de  Buillon  et  de  la  Trémoille, 
ayant  ramassé  le  plus  qu'ils  purent  de  leurs  amis, 
partirent  sur  les  deux  heures,  pour  aller  à  Soissons; 
mais  craignant  quelque  rencontre,  ils  ne  prirent  pas 
le  droit  chemin ,  et  allèrent  coucher ,  c'est-à-dire , 
faire  repaistre  leurs  chevaux  à  Nantoûillet  et  le  lende- 
main arrivèrent  à  Soissons. 

M.  de  Buillon,  estant  arrivé  à  Nantoûillet,  se  trouva 
si  extrêmement  las  de  la  traitte  qu'il  avoit  faite  à 
cheval,  qu'il  dit,  qu'il  n'en  pouvoit  plus.  On  luy  bailla 
trois  œufs;  après,  il  but  un  coup,  et  on  luy  chercha 
une  charrette,  dans  laquelle  il  dit  qu'il  se  mettroit, 
lorsqu'il  ne  pourroit  plus  aller  à  cheval.  Enfin,  il  alla 
jusques  à  Soissons,  sans  entrer  dana la  charrette. 


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202  JOUENAL   JB[]iPÏT 

«frptembre  t«6.  JJ  y  avpit  à  Louvres,  en  Pariai?,  six  vingte  majgtres 
de  la  compagnie  de  gens  d' armes  de  la  Rqyne,  qui 
pouvoyent  empescher  peg  Messieurs  de  gagner  Soii^ 
sons. 

M.  de  Vendosipe  estant  au  faubourg  Saint-ïlo- 
noré,  ou  dans  sa  maison,  ou  tout  contre,  M.  de  Saintr- 
Géran  reçut  commandement  de  1q  prendre.  Estant 
arrivé,  ij  l'entreyit  à  travers  la  porte,  et  comme  il 
beurtoit,  et  que  Ton  n'pyvroit  point,  on  dit  que  M^'  de 
Vendosme  luy  dit  ;  Monsieur,  voilà  M,  de  8aint-Gé- 
ran  qui  vous  demande  ;  à  quoy  vous  amusez-vous? 
Que  ne  venez-vous?  Cependant  M.  de  Vendosme 
monta  à  cheva},  )uy  quatrç  pu  cinquième,  et  s'enfuit 
par  derrière  son  logis, 

Mf  de  Saint-Géran  courut  après  luy  jusques  vers 
Montmorency,  où  l'on  dit  que  M.  de  Vendosme  estoit 
prestde  demeurer,  à  cause  que  son  cheval,  et  de  tous 
ceux  qui  le  suivoyent,  estoyent  hprs  d'haleine.  Il  ren- 
contra six  gentilshommes  auxquels  il  fit  accroire, qu'il 
avoit  querelle,  et  ainsi,  eut  leurs  chevaux  ;  tellement 
que  M.  de  3aint-Géran,  dont  les  chevaux  estoyent 
plus  frais  que  ceux  de  M.  de  Vendosme,  ayant  ren- 
contré ces  gentilshommes,  et  sceu  comme  il  avoit 
pris  leurs  chevaux,  fut  obligé  de  s'en  revenir,  M.  de 
Vendosme  se  rendit  ^  Soissons,  avec  les  autres. 

M.  de  Guise  estoit,  comme  l'on  croit,  du  dessein 
contre  le  Maréchal  d'Ancre.  Lorsqu'il  sceut  que  Mon-^ 
sieur  le  Prince  estoit  arresté ,  il  envoya  M*  de  Join- 
ville  faire  toutes  sortes  d'offres  h  la  Reyne,  laquelle 
estant  agitée  par  les  mouvémens  qu'une  si  grande 


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d'ajinauld  d'andilly.  208 

affaire  luy  donnoit,  ne  répondit  pa»  à  M.  de  Jolnville  «eptewiw  %§t$. 
avec  assez  d'affection,  selon  son  gré;  tellement  qu'il 
sortit  du  Louvre  étonné,  et  vint  donner  TalarmQ  II 
M.  de  Gui$e,  auquel  déjà  plusieurs  personnes  vou- 
loyent  persuader  qu'on  avoit  du  de.ssein  contre  luy  ; 
tellement  qu'il  se  résolut  de  s'en  allçr,  et  partit  sur 
les  trois  heures,  avec  M.  le  Prince  de  Joinville,  et 
arriva  le  lendemain  aux  portesi  de  Soi^sqns,  sans  pou- 
voir entrer,  jusques  à  ce  que,  trois  heure»  après, 
M.  du  Mayne  et  ces  autres  Messieurs  arrivèrent, 

On  dit  que  MM.  de  la  Cave  *  et  de  Laubespin  ^ 
fur^t  ceux  qui  firent  résoudre  M.  de  Guise  à  s'en 
aller,  afin  de  se  faire  après  de  feste,  pour  çstre  en»- 
voyez  vers  luy,  ainsi  qu'il  fut  fait  ;  car  le  dimanche  4, 
M.  de  Laubespin  y  fut,  et  M.  de  la  Cave  depuis.  M,  le 
Cardinal  de  Guise  estoit  hors  de  Paris,  lorsque  Mon* 
sieur  le  Prince  fut  arresté,  et  fut  trouver  Messieurs 
ses  frères.  On  tient  que  M.  de  Guise  et  sa  troupe 
pensèrent  mourir  de  faim  et  de  froid.  Qn  dit  qu'assu- 
rément la  Reyne  avoit  si  peu  de  dessein  contre  M,  de 
Guise,  que  lorsqu'elle  cQounanda,  avec  le  Boy,  k 
M.  de  Thémines  d'aller  arrester  Monsieur  le  Prince, 
elle  luy  dit  :  Allez,  Monsieur  de  Thémines,  aile?  faire 
les  affaires  de  M.  de  Guise, 

M"'*  la  Princesse  de  Condé  douairière,  sachant  la 
prise  de  Monsieur  le  Prince,  s'en  alla  courant  en  car- 
rosse par  les  rues,  criant,  que  Ton  vouloit  poignarder 


'  Gilbert  de  3ertheloa,  seigneur  de  la  Cave  ? 

^  François  de  Sainte^loml^,  seigneur  de  l'AubespIn  7 


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204  JOURNAL   INIÈDIT 

Septembre  1616.  SOU  fils.  Bref,  clle  faisoit  tout  ce  qu'elle  pouvoît  pour 
exciter  le  peuple  à  sédition  ;  et  mesme  fut  vers  le 
logis  du  cordonnier  Picart  ;  mais  il  y  eut  des  mar- 
chans  qui  luy  dirent  que  c'estoit  elle  qui  estoit  cause 
de  cela ,  et  qui  avoit  donné  ces  mauvais  conseils  à 
Monsieur  le  Prince ,  et  qu'elle  se  retirast.  Tellement 
qu'elle  entra  en  grande  appréhension,  et  se  retira  en 
grande  haste.  Il  y  en  a  qui  croyept  que,  de  ce  pas, 
elle  alla  à  Villebon.  Quelques  jours  après,  elle  re- 
vint. 

M.  le  président  le  Jay  s'en  alla  à  la  Maison  Rouge, 
aussitost  qu'il  sceut  la  prise  de  Monsieur  le  Prince, 
et  écrivit  à  la  Reyne,  qu'ayant  esté  neuf  mois  en  pri- 
son, il  la  supplioit  de  luy  pardonner  si,  sur  les  ap- 
préhensions que  l'on  luy  avoit  données,  il  s' estoit  re- 
tiré. Depuis,  il  fut  trouver  Messieurs  les  Princes  à  Sois- 
sons.  Il  estoit  lors  très  bien  avec  M.  de  Guise,  et  non 
plus  tant  avec  Monsieur  le  Prince,  duquel  il  estoit 
mal  content,  et  disoit  qu'il  ne  se  conduisoit  nullement 
bien.  Il  avoitdit  au  Chevalier  du  Guet,  quelques  jours 
auparavant,  qu'il  se  ruinoit  en  sa  charge,  et  se  met- 
toit  mal  avec  Messieurs  du  Parlement.  L'autre  luy 
ayant  demandé  d'où  venoit  cela,  il  luy  répondit  :  Je 
croy  que  vous  feriez  mieux  de  ne  venir  point  si  sou- 
vent au  Louvre.  — Nota,  contre  le  service  du  Roy*. 

^  foy.,  sur  rarrestation  de  Monsieur  le  Prince,  le  Merc,  fr,^  p.  104 
et  suiv.  Le  récit  du  Mercure  confirme  de  tout  point  celui  d*Arnauld 
d*Andilly  qui  est  cependant  plus  complet  et  contient  des  détails  nou- 
veaux et  curieux  sur  cet  événement  important.  —  Conf.  Foutenay-Ma- 
reuii,  p.  350  ;  Brienne,  p.  313  ;  Rohan,  p.  141  ;  Richelieu,  p.  334  ; 
Pontchartrain,  p.  159  ;  Bassompierre,  2*  série,  t.  xx,  p.  119. 


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d'arnauld  d'andillt.  205 

Quelques  domestiques  de  Monsieur  le  Prince,  ayant  sepumkf  hm. 
crié  partout  dans  le  faubourg  Saint-Germain,  que  Ton 
tuoit  les  Princes  du  sang,  et  que  c'estoit  le  Maréchal 
d'Ancre,  quelques  manœuvres  du  Luxembourg  et 
autres,  furent  à  lajnaiflon  du  Maréchal  d'Ancre,  et 
commencèrent  à  piller.  Incontinent  le  nombre  s'aug- 
menta. Monsieur  le  Gouverneur  de  Paris  y  fut,  avec 
neuf  chevaux  seulement  (c'estoit  une  faute,  et  il  y 
devoit  mener  cinquante  chevaux  et  force  archers). 
Lorsqu'il  arriva,  le  peuple  se  pressa  de  telle  sorte 
pour  sortir,  qu'il  y  en  eut  deux  d' étouffez.  Mais  dix 
des  gardes  de  Monsieur  le  Prince,  gens  résolus,  qui 
estoyent  en  haut  dans  la  maison,  voyant  qu'il  n'y 
avoit  que  neuf  hommes  de  cheval ,  descendirent  en 
bas,  encouragèrent  le  peuple,  et  tirèrent  deux  coups 
de  carabine,  dont  l'un  tua  M.  de  la  Dou ville.  Ainsi, 
Monsieur  le  Gouverneur  se  retira,  et  le  peuple  con- 
tinua à  piller.  Et  quand  il  eut  pillé  la  maison  et  écu- 
ries, commencèrent  à  démolir;  et  le  lendemain,  en 
firent  autant  à  la  maison  de  Corbinelly,  secrétaire  du 
Maréchal  d'Ancre,  jusques  à  onze  heures  du  matin, 
que  M.  de  Créquy  y  fut  avec  deux  compagnies  des 
Gardes.  Aussitost  qu'ils  oûirent  sonner  le  tambour, 
ils  s'enfuirent.  On  estime  cent  cinquante  mil  écus 
la  perte  faite  par  M.  le  Maréchal  d'Ancre.  Il  y  eut 
une  robbe  de  la  Reyne  perdue,  qui  valoit  cinquante 
mil  écus*. 


*  Foy.  3ferc.  fr.^  p.  202  et  205;  Fontenay-Mareuil,  p.  353  ;  Brienne, 
p.  317;  Rohan,  p.  142;  Richelieu,  p.  345. 


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306  JOURNAL  ÎN^DIT 

septembre  1616.  LeuFô  Majestez  mandèrent  l'après  diênée  diidit 
jeudy^  1*'  septembre»  Mesnieurs  de»  Cours  souve- 
raines >  Prévost  des  marchans  et  Lieutenant  civil, 
pour  les  informer  par  la  bouche  de  Monsieur  le 
Garde  des  sceaux,  des  cause»  qui  èvoyent  forcé  le 
Roy  de  s'assurer  de  Monsieur  le  Prince.  Et  mandè- 
rent aussi  les  principaux  Ambassadeurs»  comme  Ës-^ 
pegne  et  Angleterre* 

Mi  de  Thémines  fait  Maréchal  de  France,  Trois 
ou  quatre  jours  après,  M.  de  Montigny  le  fut  aussi  \ 

Mé  le  Comte  d'Auvergne  est  redemandé  de  Pé- 
ronne  \ 

M.  le  duo  de  Savoye,  ayant  sceu  la  nouvelle  de 
r^rrest  de  Monsieur  le  Prince»  envoya  quérir  M.  de 
Lesdiguières,  qui  estoit  sur  la  frontière  du  Dauphiné» 
et  furent  cinq  heures  à  parler  ensemble.  Après,  M.  de 
liesdiguières  s'en  revint  en  Dauphiné»  et  M.  le  Duo 
de  Savoye  s'en  retourna  en  Piémont. 

On  avoit  estimé  qu'en  effet»  M*  de  Lesdiguières 
estoit  arresté  pat*  M*  de  Savoyei 

2.  Leurs  Majestez  firent  dire  par  Paris»  le  soir^ 
par  les  Capitaines»  que  l'on  meneroit  Monsieur  le 
Prince,  la  nuit,  à  la  Bastille»  et  que  chacun  tinst  un 
homme  armé»  qui  veillasU  G' estoit  pour  voir  ce  que 
l'on  diroit» 

â»  Ayant  esté  tenu  Grand  Conseil  au  Louvre^ 
M.  de  Sully  fut  une  grande  heure  à  opiner,  et  corn- 

*  Voy,  Merc,  fr,^  p.  207;  Fontenay-Mareuil,  p.  355;  Pontchartrain, 
P4  163. 
2  Voy»  Merc,  fr,^  id.  ;  Pontchartrain^  p.  163» 


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D'ARNAtJLD    D'ANDILLY.  007 

metiça  son  avls^  par  dire,  qu'encore  qu'il  ne  sceuôt    septembre iêi«. 
si  ç'âvoit  edté  un  bon  conseil  d'arrester  Monsieur  le 
Prince,  d'autant  que  pour  en  juger,  il  eust  esté  besoin 
d'estre  informé  desmouvemènsqui  y  ont  porté  Leurs 
Majestez,  toutefois,  puisque  c'estoit  une  chose  faite,  il 
tte  faloit  pas  abandonner  les  affaires,  etc.  Sur  Cela,  la 
Reyne  l'interrouipit  et  se  fâcha,  disant,  qu'il  se  de- 
voit  souvenir  de  ce  qu'il  luy  avoit  dit,  à  tels  et  tels 
jours,  et  à  telles  heures,  et  en  tels  lieux. --Sur  quoy, 
il  faut  savoir  que  quelques  jours  auparavant,  M.  de 
Sully  avoit  esté  enfermé  plus  de  trois  heures  avec  la 
Rcyne,  n'y  ayant  que  MM.  Mangot  et  Barbin ,  luy 
disant  que  les  affaires  estoyent  perdues  si  on  n'y 
pourvoioit  promptement  par  quelque  grand  Coup. 
Sur  quoy  la  Reyne  luy  ayant  demandé  par  plusieurs 
fois  quel  estoit  ce  grand  coupi  et  ce  qu'il  estoit  d'avis 
de  faire ,  il  rentroit  en  infinis  gi*ans  discours,  et  con*- 
clûoit  toujours  de  mesme  sorte.  Ce  que  la  Reyrte  et 
ceux  qui  estoyent  présens,  interprétoyent  tous  à  ar-^ 
rester  Monsieur  le  Prince*  On  dit  que  depuis,  M.  de 
Sully  a  dit  que,  par  ce  grand  coup,  il  entendoit  que 
l'on  luy  rebaillast  les  finances.  Plusieurs  croyent 
qu'en  effets  îlsavoit  le  dessein  d'arrester  Monsieur  le 
Prince,  et  que  M.  de  Rohan  ne  l'ignoroit  pas.  Té- 
moin, ce  que,  incontinent  après  la  prise  de  Monsieur 
le  Prince,  on  luy  vint  dire,  que  le  Roy  le  demandoit. 
Il  répondit  :  Je  m*en  vay  fort  assurément,  car  je  ne 
crains  rieni  Et  le  mesme  jour,  il  écrivit  des  lettres  à  . 
ceux  de  la  Religion,  de  ses  amis,  et  à  quelques  villes, 
pour  les  confirmer  en  l'obéissance  du  Roy»— Or, 


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208  JOURNAL  INÉDIT 

Septembre  1116.  quant  à  M.  de  Sully,  on  dit,  sur  le  propos  quQ  des- 
sus,, que  M.  Edmond,  ambassadeur  ordinaire  d'An- 
gleterre, l'alla  voir  et  luy  dit  que  Ton  faisoit  courir 
le  bruit  qu'il  avoit  esté  du  conseil  d'arrester  Mon- 
sieur le  Prince ,  mais  qu'il  ne  le  pouvoit  croire  ;  et 
avoit  esté  bien  aise  de  savoir  de  luy  ce  qui  s'estoit 
passé  de  sa  part  en  cela,  afin  de  pouvoir  répondre  à 
cette  calomnie.  M.  de  Sully  fit  un  grand  discours  de 
tout  ce  qui  s'estoit  passé  afin  de  justifier  comme  il 
n'y  avoit  point  pensé.  —  Après  qu'il  eut  achevé, 
M.  Edmond  luy  dit  :  Monsieur,  lorsque  je  suis  entré 
céans,  je  croiois  que  c'estoit  une  imposture;  mais 
maintenant,  vostre  discours  me  fait  estimer  qu'il  est 
véritable*. 

Incontinent  après  la  prise  de  Monsieur  le  Prince, 
on  estoit  en  grande  appréhension  de  M.  le  Comte  de 
Soissons  ;  mais  la  Reyne  le  gagna,  et  Madame  la  Com- 
tesse par  le  moyen  du  mariage  de  Madame  Henriette 
Marie  ^;  ce  qui  contenta  fort  aussi  M"'  de  Longue- 
ville  (laquelle  vint  alors  à  Paris.  On  tient  qu'elle  est 
la  Princesse  mentionnée  en  la  Déclaration) ,  à  cause  du 
mariage  de  M.  de  Longueville  avec  M"*  de  Soissons. 
Environ  ledit  jour,  samedy  3,  M.  d'Aumont^  fut 

*  Voy,  Richelieu,  p.  350. 

>  Henriette-Marie  de  France,  fille  d*Henri  IV  et  de  Marie  de  Médicis, 
née  en  1609,  mariée  en  1625  à  Charles  I*%  loi  d'Angleterre,  morte  à  Co- 
lombes, près  de  Paris,  le  10  septembre  166Q.  Elle  avait  alors  sept 
ans,  et,  d'après  ce  passage,  aurait  été  promise  au  comte  de  Soissons; 
ce  qui  devait  plaire  à  M>^  de  Longueville,  dont  le  fiU  était  accordé 
avec  M"*  de  Soissons.  yoy,  Pontchartrain ,  p.  165,  dont  le  récit  con- 
firme celui  d'Arnauld  d'Andilly. 

»  Antoine  d'Aumont,  'marquis  de  Nolsy»  gouverneur  de  Boulogne- 


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d'arnauld  d'andilly.  è09 

envoyé  par  le  Roy  vers  M.  de  Guise,  avec  beaucoup     sepimbrewt. 
de  grandes  offres  (mesiiie  on  parla  de  la  charge  de 
Connestable).  Il  rapporta  plusieurs  belles  paroles, 
avec  protestation  qu'il  n'estoit  avec  ces  Princes,  que 
poury  servir  le  Roy  *. 

4.  Environ  le  4,  M.  le  Maréchal  de  Montigny  va 
en  Berry  ;  ceux  qui  estoyent  dans  la  tour  de  Bourges, 
pour  Monsieur  le  Prince,  se  trouvant  sans  munitions, 
capitulèrent  de  se  rendre  s'ils  n' estoyent  secourus 
dans  dix  jours.  Depuis,  ils  se  rendirent*. 

6.  Le  Roy,  qui  n'estoit  point  sorty  par  la  ville, 
depuis  la  prison  de  Monsieur  le  Prince,  va  à  l' àrcenal 
en  carrosse. 

Le  Maréchal  d'Ancre,  ayant  sceu  la  prise  de 
Monsieur  le  Prince,  coucha  depuis  dans  le  chasteau 
de  Caen,  et  quelques  jours  après,  alla  à  Rouen,  où  il 
fut  receu  magnifiquement. 

Monsieur  le  Garde  des  sceaux  dresse  la  déclaration 
pour  porter  au  Parlement  ;  mais  sur  ce  qu'il  n'y  avoit 
pas  mis,  à  beaucoup  près,  ce  qui  estoit  porté  par  les 
mémoires  qu'on  luy  avoit  baillez,  et  résistoit  à  ce  que 
l'on  vouloit  y  faire  ajouster  quelques  uns  des  points 
oubliez,  la  Reyne  luy  dit:  Monsieur  le  Garde  des 
sceaux,  si  vous  ne  voulez  servir  le  Roy,  il  y  en  a 

sup-Mer,  chevalier  des  ordres  en  1597,  capitaine  de  cinquante  hommes 
d'armes  des  ordonnances,  mort  en  1635.  D  était  fils  de  Jean  d'Aumont, 
VI*  du  nom,  maréchal  de  France,  mort  en  1595. 

*  Voy.  Merc,  fr.^  p.  210,  la  lettre  que  le  duc  de  Guise  écrivit  en 
cette  occasion  au  Roi. 

2  Voy.  Merc,  /h.,  p.  270  ;  Fontenay-Mareuil,  p.  356;  Rohan,  p.  143; 
Pontchartrain,  p.  169. 

14 


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210  JOURNAL  INiPIT 

Septembre  leie.  d'autres  qui  le  serviront.  —  On  dit  qu'il  avoit  témoi- 
gné par  plusieurs  actions,  n'approuver  nullement 
l'arrest  fait  de  Monsieur  le  Prince,  Et  depuis  ce 
temps,  la  Reyne  ne  témoigna  pas  faire  tant  de  cas  de 
luy,  que  de  coustume. 

7.  Le  Roy  va  à  cheval  au  Parlement,  faire  véri- 
fier la  Déclaration  contre  les  absens,  et  l'Edit  du... 
engagement  dés  greffes  \  Monsieur  le  Garde  des 
sceaux  porta  la  parole.  La  Reyne-mère  y  estoit,  Mon- 
sieur, frère  du  Roy,  MM.  de  Montmorency,  de  Rets, 
de  Rohan,  de  Sully. 

Mesdames  estoyent  dans  la  lanterne.  Monsieur  le 
Premier  Président  parla  peu.  M.  Servin,  beaucoup^. 

Gorbie  et  Abbeville  envoyent  assurer  le  Roy  de 
leur  fidélité.  Sancerre  en  fait  de  mesme.  On  dit  que 
les  habitans,  se  défiant  de  M.  le  Comte  de  Sancerre^ 
parent  de  Monsieur  le  Prince,  feignirent,  un  jour 
qu'il  estoit  allé  à  la  chasse,  qu'il  y  avoit  un  homme 
qui  avoit  fait  dessein  de  le  tuer,  et  s'estant  assemblez 


*■  L^Êdit  du  rachat  det  greffes,  mesure  financière  prise  pour  couvrir 
les  dépenses  de  la  précédente  guerre  civile,  qui,  y  compris  les  dons  con- 
sidérables faits  aux  princes,  aux  termes  du  traité  de  Loudun,  s'élevaient 
à  plus  de  vingt  millions  de  livres. 

2  Foy.  Merc,  fr.^  p.  213-248,  le  récit  du  Lit  de  Justice  tejiu  par  le  Roi 
et  la  Déclaration  contenant  les  motifs  de  l'arrestation  du  prince  de 
Conàé.—Foy.  Fontenay-Mareuil,  p.  357  ;  Richelieu,  p.  351  ;  Pontchar- 
train,  p.  164.  Foy,  aussi  Mém,  de  Math.  Mole,  le  compte^rendu  àè- 
taillé  de  ce  Lit  de  Justice  et  la  Déclaration  contre  Monsieur  le  Prince. 
(Mém.  de  M.  Mole,  p.  125.) 

'  Jean  de  Bueil,  comte  de  Sancerre  et  de  Marans,  grand  échanson  de 
France,  mort  en  1638.  U  était  par  sa  mère,  Jacqueline  de  la  Trémoille, 
parent  du  prince  de  Condé,  dont  la  mère  était  Charlotte  Catherine  de 
la  Trémoille. 


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d'arnadld  d'andilly.*  ill 

plusieurs  sur  ce  sujet,  firent  semblant  de  le  vouloir 
mettre  prisonnier  dans  le  chasteau,  et  ainsi,  s'en 
firent  ouvrir  les  portes,  et  s'en  saisirent*. 

H,  M,  le  Comte  d'Auvergne  fait  Général  de 
Tannée  du  Roy,  dit,  en  recevant  la  charge,  qu'il  pro- 
testoit  à  Leurs  Majestez  qu'encore  qu'ils  luy  fissent 
cet  honneur,  il  obéiroit  à  qui  il  leur  plairoit  cy  après 
d'envoyer,  et  se  contenteroit  de  faire  sa  charge  de 
Colonel  de  la  cavalerie  légère. 

On  expédia  estats  et  commissions  pour  mettre 
deux  armées  sur  pied,  l'une  sous  la  charge  de  M.  le 
Comte  d'Auvergne,  et  l'autre,  sous  celle  de  M.  1q  ma- 
réchal de  Souvré,  pour  aller  prendre  Chinon,  En  la 
première,  il  y  avoit...  compagnies  de  chacun  des 
vieux  régimens  ;  les  régimens  de  Vaubecourt%  Ileim- 
bures,  Beaumont,  la  Mailleraye,  Thorigny  (chacun 
de  douze  compagnies  de  cent  hommes) ,  Cressia  (qui 
avoit  en  1615  servy  Monsieur  le  Prince) ,  de  dix 
compagnies,  et  quelques  autres  nouveaux  régimens, 
de  six  compagnies,  de  chacune  cent  hommes.  Le 
rendez-vous  estoit  à  Meaux.  L'équipage  d'artillerie 
estoit  de  six  couleuvrines.  Le  pain  de  munition  fut 
adjugé  à  un  sol. 

On  envoya  M.  de  Castille,  Intendant  des  finances, 
faire  une  levée  de  quatre  mille  Suisses,  laquelle  il 


*  Foy,  Merc.  fr.^  p.  253  ;  Richelieu,  p.  848. 

^-  Jean  de  Nettancoupt,  Comte  de  Vaubecourt,  GonseiUep  d'Etat, 
Maréchal  de  camp,  Colonel  du  régiment  de  sou  nom.  Lieutenant  Géné- 
ral au  gouvernement  de  Verdun,  Gouverneur  de  Châlons,  mort  en  1642. 


Octobre  16i6. 


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212  •         JOURNAL   INEDIT 

Septembre  leie.     amena  à  Saint- Jean-de-Losne,  environ  le  dernier 
d'octobre. 

Environ  ledit  jour  11,  M"*'  la  jeune  Princesse  de 
Condé  arrive  fort  affligée.  On  dit  que  M.  de  Montmo- 
rency fut  mal  content  de  ce  que  la  Reyne  ne  luy 
voulut  pas  permettre  de  voir  Monsieur  le  Prince. 

12.  M.  de  Brantes  se  bat  contre  Ryonne,  qui  se 
pleignoit  partout  de  M.  de  Luynes.  11  luy  donne  un 
coup  d'épée  à  travers  le  corps,  et  la  vie.  Luy  rebailla 
son  épée,  son  chapeau  et  son  manteau,  le  ramena 
penser.  11  revint  après  chez  M.  le  Comte  de  Vitry  ; 
le  soir,  il  alla  à  Saint-Germain-en-Laye,  où  M.  de 
Luynes  l'alla  quérir  le  jeudy,  et  le  ramena. 

13.  MM.  de  Boissise  et  de  Chanvalon  partent 
pour  aller  traitter.  M.  de  Chanvalon  entra  dans  Sois- 
sons.  M.  de  Boissise,  lequel  conféra  toujours  avec 
M.  de  Guise  seulement,  près  d'une  grange,  distante 
d'une  lieue  et  demie  de  Soissons*. 

15.  M.  de  Termes^  arrive  de  Soissons,  où  M.  le 
(irand  l'avoit  envoyé,  avec  lettres  à  M.  de  Guise. 
Il  dit  que  c'estoit  pour  l'exhorter  au  service  du  Roy: 
néantmoins  cette  action  a  esté  calomniée  ;  car  on  dit, 
que  M.  de  Guise  ayant  écrit  à  M.  le  Grand,  et  l'ayant 


*  f'oy,  Merc,  fr.^  p.  248  ;  Fontenay-Mareuil,  p.  358;  Richelieu,  p. 352; 
Pontchartrain,  p.  165. 

*  César-Auguste  de  Saint-Lary,  baron  de  Termes,  d'abord  chevalier 
de  Malle  et  grand  prieur  d'Auvergne,  puis  premier  écuyer  jusqu'en 
1616 et  grand  écuyer  de  France  parla  démission  de  son  frère,  mort 
d'une  blessure  qu'il  reçut  au  siège  de  Clérac  en  1621.  A  sa  mort,  le 
duc  de  Bellegarde  reprit  sa  charge  de  grand  écuyer. 


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d'arnauld  d'andilly.  213 

prié  de  luy  donner  conseil,  comme  voulant  suivre  septembre i«ie. 
entièrement  ses  avis,  M.  le  Grand  envoya  M.  de 
Termes  vers  luy,  afin  de  s'offrir  à  luy  ;  que  quand 
cela  ne  seroit  point,  il  ne  devoit  point  envoyer  vers 
M.  de  Guise  un  homme  de  créance  tel  que  son  frère, 
sans  qu'auparavant,  il  fust  venu  trouver  le  Roy,  pour 
savoir  sa  volonté.  Ledit  sieur  de  Tennes  apporta 
toutes  bonnes  paroles  de  M.  de  Guise. 

Environ  ce  jour,  M.  de  Nevers  ayant  envoyé  ses 
Maréchaux  des  logis,  marquer  ses  logis  dansChalons, 
M.  de  Tresmes*,  gouverneur,  les  fit  sortir  de  la  ville. 
Sur  quoy  M.  de  Nevers  luy  ayant  mandé  qu'il  n'y 
vouloit  entrer  que  luy  sept  ou  huitième,  il  luy  fit 
réponce  qu'il  avoit  défences  expresses  de  le  laisser 
entrer,  et  montra  des  lettres  patentes,  scellées  du 
grand  sceau,  pour  cet  efiet.  —  On  a  découvert  depuis 
que  M.  de  Nevers  avoit  expédié  quarante  commis- 
sions, pour  lever  des  gens  de  guerre,  et  qu'il  alloit 
à  Châlons  pour  s'en  rendre  maistre,  et  là,  prendre 
de  l'argent  pour  les  payer;  mais  que  son  dessein 
n'ayant  réussi-,  il  retira  lesdites  commissions. 

M.  de  Nevers  s'en  alloit  en  ambassade  extraordi- 
naire en  Allemagne,  sur  le  sujet  du  mariage  du  Roy, 
et  estoit  encore  sur  la  frontière,  lorsque  Monsieur  le 
Prince  fut  pris  ;  dont  ayant  sceu  la  nouvelle,  il  écrivit 


*  René  Potier,  comte  de  Tresmes,  gouverneur  de  Châlons  en  1608, 
gouverneur  de  Monsieur,  capitaine  des  gardes  du  corps  en  1611,  con- 
seiller d'Etat  en  1629,  duc  et  pair  en  1648,  mcstre  de  camp  de  cavale- 
rie en  1652,  gouverneur  de  Pont-Audemer  en  1661,  mort  en  1670. 
(Foy.  P.  Anselme,  t.  iv,  p.  771.) 


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214  JOURNAL   INÉDIt 

septembre  m«.  uîie  lettre  au  Roy,  assez:  hardies,  demandant  comme 
raison  de  cette  action  *.      -     ri 

M.  de  Nevers  ayant,  depuis  le  refus  de  rentrée  de 
Châlonô,  témoigné  estre  extrêmement  ulcéré.  Leurs 
Majestés  eurent  avis  dé  divers  endroits,  qu'il  assem- 
bloit  des  trouppes,  et  refbsoit  attache  et  rendez- vous 
à  ceux  que  le  Roy  fàisoit  lever  :  Sur  quoy,  le  traitté 
estant  arresté  avec  les  autres  Princes  et  Seigneurs, 
on  résolut  d'envoyer  une  partie  des  forces  de  l'armée 
du  Roy  en  Champagne,  sous  la  conduite  de  M.  de 
Praslin.  Environ  lequel  temps,  M.  de  Maroles^  vint, 
lequel  assura  que  tout  ce  que  Ton  disoit  de  M.  de 
Nevers,  estoyent  calomnies  ;  et  que  si  on  Vouloit  y 
envoyer  quelqu'un,  on  le  reconnoistroit.  Sur*  quoy, 
le  15  octobre,  M.  de  Luçon'  fut  envoyé  vers  M.  de 
Nevers,  lequel  n'y  trouva  point  de  gens  de  gueri*e, 
et  reviilt  aveci  de  bonnes  paroles. 

La  Déclaration  du  17  janvier  1617,  contre  M.  de 
Nevers  porte,  qu'ayant  passé  Rheims,  il  y  revint, 
lorsqu'il  scout  la  prise  de  Monsieur  le  Princèi  assem- 

*  Foy,  Merc,  fr,^  p.  211,  cette  lettre  du  duc  de  Nevers. 

2  Claude  de  MaroUes,  lieutenant  colonel  des  cent-suisses  de  la  garde 
du  corps,  capitaine  des  gendarmes  et  chevau-Iégers,  maréchal  de  camp 
des  armées  de  Champagne,  de  Picardie  et  de  Piémont,  mort  en  1633. 
Il  était  père  de  Michel  de  Marolles,  abbé  de  Villeloin,  à  qui  Ton  doit 
un  grand  nombre  d'ouvrages,  des  Mémoires  intéressartts,  et  la  célèbre 
collection  d'estampes  qui  est  une  des  richesses  du  dépôt  de  la  Biblio- 
thèque impériale.  (Voy,  Moreri,  t.  vu,  p.  268.) 

«  Voy.  Richelieu,  p.  361 1  «  Elle  (la  Reine)  me  fit  l'honneur  de  me 
choisir  pour  y  Taire  un  voyage  de  la  part  de  Sa  Majesté,  croyant  que 
j'avois  quelque  dextérité  par  laquelle  je  pourrois  ménager  son  esprit 
et  le  ramener  à  la  raison  ;  mais  tout  cela  fut  en  vain,  car  il  n'en  étoit 
pas  capable.  » 


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d'arnauld  d'andilly.  215 

bla  les  habitans,  leur  fit  entendre  qu'il  se  résolvoit  septembre  i«i«. 
de  lever  six  cens  chevaux  et  quatre  mil  hommes  de 
pied,  proposa  aux  esleus  d'nnposer  une  partie  de  la 
somme  nécessaire  pour  les  entretenir.  Ce  que  ayant 
refusé  de  faire  sans  commandement  du  Roy,  il  offroit 
d'en  faire  l'avance,  pourveu  quMls  consentissent  la 
levée,  dont  s' estant  excusez,  et  remis  aux  trésoriers 
de  France  à  Châlons,  il  dit  qu'il  iroitdonc  à  Châlons, 
sur  ce  sujet.  - — •  Envoya  devant  quelques-uns  des 
siens,  qui  demandoyent  logis  pour  quatre  cens  che- 
vaux, prirent  deux  hostelleries,  proche  des  deux 
principales  portes  de  la  ville,  voulurent,  contre  la 
coustume,  marquer  les  maisons  des  chanoines,  disant 
qu'ils  en  avoyent  besoin  pour  des  seigneurs  de  qua- 
lité. L'entrée  de  Châlons.  ayant  esté  refusée  audit 
sieur  duc  de  Nevers,  il  sortit  quelque  temps  après 
de  Rheims*. 

17.  M.  le  comte  d'Auvergne  envoyé  M.  des  Cures, 
et  part  le  lendemain  matin,  pour  aller  à  Meaux  *. 

23.  M.  de  Souvré  part  pour  aller  à  Chinon,  le- 
quel fut  depuis  rendu  par  Rochefort,  moyennant 
quatre-vingt-dix-mil  livres,  et  M.  Delbene  en  eut  le 
gouvernement*. 

24.  M.  de  Guise  et  M.  le  Prince  de  Joinville 


*  Vùy.  Mètc,  fr,^  p.  249,  la  lettre  du  duc  de  Nevers  au  Roi,  au  sujet 
4n  reftis  qui  lui  fut  fait  de  le  recevoir  à  Cb^ons.  (roy,  aussi  Fentenaji^ 
Mareuil,  p.  359  et  suiv.  ;  Pontchartrain,  p.  170. 

2  yoy.  Merc,  fr,,  p.  249. 

»  yoy.  Merc,  fr.^  p.  272.  Suivant  le  récit  du  Mercure^  Rochefort  ne 
voulut  aucune  récompense  pour  la  reddition  de  Chinon.  (r&y,  Fontenay- 
Mareuil,  p.  356  ;  Richelieu,  p.  860  ;  Pontchartraio.  p.  ITI. 


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216  JOURNAL   INÉDIT 

Septembre  1616.  viennent  à  Paris  trouver  le  Roy,  et  M.  de  Chanvalon 
avec  eux  \ 

La  nuit  d'entre  le  samedy  au  dimanche,  environ 
minuit  et  demy,  on  mena  Monsieur  le  Prince  du 
Louvre  à  la  Bastille,  pendant  une  très-grande  pluye. 
11  y  avoit  cinquante  chevaux  devant,  conduits  par 
M.  de  Thémines^ 

Ledit  jour  samedy,  M.  de  Rohan  s'en  va  en  Poi- 
tou, ayant  obtenu  payement  des  cent  mil  livres  qui 
luy  avoyent  esté  promis,  après  l'affaire  de  Saint- 
Jean-d'Angely. 

27.  M.  de  Guise  retourne  à  Soissons,  trouver  les 
Princes,  avec  bonnes  réponces  de  Leurs  Majestez. 
M.  de  Joinville  demeure  à  Paris. 

M.  de  Sully  s'en  va  chçz  luy,  pas  trop  content. 

M.  de  la  Chastaigneraye,  capitaine  des  Gardes  de 
la  Reyne-mère,  meurt.  M.  le  marquis  de  Thémines 
a  sa  charge. 

29.  M.  de  Guise  revient  de  Soissons,  après  avoir 
entièrement  fait  résoudre  le  Traitté  à  Messieurs  les 
Princes,  lesquels  s'en  retournèrent  chacun  chez  soy. 
Rameine  avec  luy  M.  le  cardinal  de  Guise.  —  Il 
n' avoit  rien  fait  signer,  pour  ce  que  la  Reyne  ne 
l'avoit  désiré  ;  mais  depuis,  ayant  esté  conseillée  de 
les  faire  signer,  on  parla  que  M.  de  Guise  y  retour- 
neroit.  Toutefois,  M.  de  Thianges  y  fut  seulement 
envoyé,  et  M.  de  Boissise  aussi,  à  cause  que  M.  de 

*  Voy.  Merc,  fr.^  p.  258  ;  Richelieu,  p.  359  ;  Pontchartrain,  p.  168. 
2  Foy,  Merc,  fr,^  p.  258  ;  Pontctiartrain,  p.  169  ;  Bassompierre,  p.  129. 


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d'arnaold  d'andilly.  217 

Guise  eust  eu  trop  de  peine  à  les  voir  tous,  estant 
séparez  comme  ils  sont,  et  éloignez  les  uns  des 
autres. — On  tient  qu'ils  ne  se  sont  tous  accommodez 
que  par  force,  et  pour  ce  qu'ils  n'avoyent  point  moyen 
de  lever  des  hommes,  à  cause  que  tous  ceux  dont  ils 
pouvoyent  faire  estât,  estoyent  en  Savoye,  et  que  le 
Duc  de  Savoye  se  voyant  pressé  de  deux  armées  du 
Roy  d'Espagne,  l'une  de  quarante  mil  hommes  du 
costé  du  Piémont,  et  l'autre  de  vingt  mil  honmies 
du  costé  de  la  Franche-Comté,  conduite  par  M,  de 
Nemours  \  il  ne  souffroit  sortir  de  son  service  un 
seul  soldat  françois  (dont  il  avoit  le  nombre  de  vingt 
mil  au  moins) ,  mais  faisoit.  pendre  tous  ceux  qui  se 
débandoyent,  et  pour  cet  effet,  faisoit  garder  les 
passages  dfes  montagnes  ^ 


St^ptembrc  iet6. 


2.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  revient  à  la  Cour, 
accompagné  de  quantité  de  Normans.  On  dit  qu'il 
entra  par  la  porte  Saint-Honoré ,  et  que  le  peuple 
luy  donnoit  tout  haut  infinies  malédictions.  On  dit, 
qu'ayant  salué  la  Reyne  dans  la  cour  du  Louvre, 
lorsqu'elle  descendit  de  carrosse,  elle  luy  dit  qu'il 
estoit  gras,  et  qu'il  avoit  bon  visage,  et  que  sur  cela. 


Octobre 


*  Henry  de  Savoie,  I*'  du  nom,  duc  de  Nemours,  né  en  1572,  élevé  à 
la  cour  du  duc  de  Savoie,  commanda  ses  armées,  s'empara  du  marqui- 
sat de  Saluées,  fut  du  parti  de  la  Ligue,  ût  la  guerre  en  Dauphiné  en 
1591,  s'accommoda  avec  Henri  IV  en  1596,  eut  un  différend  avec  le  duc 
de  Savoie  en  1615,  fit  sa  paix  avec  lui  en  1616.  Il  mourut  en  1632. 

*  Voy,  Merc,  fr.^  p.  259  et  suiv.,  les  treize  articles  présentés  par  le 
doc  de  Guise  au  Roi,  au  nom  des  Princes,  et  les  réponses  du  Roi.  Ces 
articles  étaient  relatifs  à  l'exécution  de  quelques  clauses  du  Traité  de 
Loudun.  Voy,  Kontchartrain,  p.  168. 


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218  JOURNAL   INIÉDIT 

Octobre  1616.  il  luy  répondit  :  Estr-ce  pour  cela  que  vous  m'avez 
envoyé  quérir  si  viste  \ 

4.  La  Reyne  remet  M.  le  Maréchal  d'Ancre  avec 
M.  de  Guise.  On  dit  qu'ils  se  firent  froid  à  l'abord  ; 
et  qu'après,  Monsieur  le  Maréchal  ayant  esté  recon- 
duire M.  de  Guise  jusques  à  son  carrosse,  M.  de 
Guise  luy  dit  :  c'est  un  excès  d'honnesteté  à  M.  le 
Maréchal  d'Ancre  que,  de  vouloir  mesme  faire  les 
honneurs  du  Louvre.  —  M.  le  Prince  de  Joinville  et 
le  cardinal  de  Guise  ne  se  raccommodèrent  point  lors 
avec  M.  le  Maréchal  d'Ancre.  —  Par  le  Traitté  avec 
les  Grans ,  M.  de  Longueville  remit  Péronne,  et  on 
acheta  Han  cent  mil  livres  de  M.  le  Vicomte  de  Bri- 
gueil  *,  pour  le  luy  bailler. 

7.  Leurs  Majestez  recourent  avis  par  le  retour  de 
M.  de  Boissise,  de  la  signature  de  la  paix;  par  tous 
les  Grans.  M.  de  Ne  vers  continuant  néantmoins  à 
faire  plusieurs  choses  en  Champagne,  contraires  au 
service  du  Roy. 

Le  matin,  M.  le  Maréchal  d'Ancre  vint  à  la  Direc- 
tion ;  après  leur  avoir  parlé  quelque  temps ,  il  leur 
dit,  qu'ils  ne  laissassent  pas  pour  luy  de  continuer 
comme  ils  avoyent  commencé  ;  et  se  tint  là  trois 
quarts  d'heure,  les  écoutant  rapporter. 

Enviroi}  ce  jour,  M.  TAmbassadeurdesHayess'en 

<  Voy,  Pontchftrtrain,  p.  169. 

^  Louis  de  Crerant,  vicomte  de  Brigueil,  puis  marquis  d'Humières, 
chevalier  des  ordres  en  1619,  conseiller  d'Etat,  capitaine  de  cinquante 
hommes  d'armes  et  des  cent  gentilshommes  de  la  maison  du  Roi,  gou- 
verneur de  Ham,  puis  de  Compiègne,  mort  en  1648. 


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d'arnauld  d'andilly.  219 

alla.  Environ  ce  temps,  arriva  la  broûillerie  entre  octobre  leie. 
M.  d'Epernon  et  ceux  de  la  Rochelle,  qui  sçachant  la 
prise  de  Monsieur  le  Prince,  se  saisirent  de  Roche- 
fort,  maison  de  M"^  de  Loseraye,  située  sur  la  Cha- 
rente, à  cinq  lieues  de  la  Rochelle,  et  à....  deTem- 
bouchure  de  la  Charente.  M.  d'Epernon  qui  se 
prétend  gouverneur  de  la  Rochelle  et  du  pays  d'Au* 
nix  (Messieurs  de  la  Rochelle  soutiennent  le  con- 
traire, et  dient,  que  c'est  le  Maire  qui  en  est  Gouver- 
neur, et  que  les  provisions  de  M.  d'Epernon  ne  peu- 
vent préjudicier  à  leurs  privilèges)  envoya  diverses 
fois  dire  à  celuy  qui  commandoit  dedans,  qu'il  eust  à 
sortir  ;  à  quoy  il  fit  réponce  qu'il  y  avoit  esté  mis  par 
le  Maire  de  la  Rochelle,  Gouverneur  du  païs  d'Aunix. 
Messieurs  de  la  Rochelle  voulant  avoir  le  chemin 
libre,  depuis  la  Rochelle  jusqu'à  Rochefort,  envoyè- 
rent un  grand  vaisseau  hollandoîs  sur  la  Charente. 
M.  d'Epémon  ayant  envoyé  visiter  ce  vaisseau  et 
le  capitaine  par  deux  gentilshommes,  avec  charge,  à 
ce  (Jue  disent  ceux  de  là  Rochelle,  de  gagner  ledit 
capitaine ,  les  dits  gentilshommes  furent  arrestez,  et 
menez  à  la  Rochelle,  où  ayant  esté  enquis  sur  plu- 
sieurs choses,  ils  furent  renvoyez  à  M.  d'Epernon  ^ 
lequel  estant  indigné  tout  ce  qui  se  peut,  jetta  des 
hommes  en  garnison  dans  Surgères  proche  de.... 
lieues  de  la  Rochelle  ' ,  afin  d'incommoder  les  ha- 
bitans  de  la  Rochelle  ;  et  les  choses  s' estant  de  plus 
en  plus  aigries,  M.  d'Epernon  mit  deux  mil  cinq  cens 

*  A  quatre  lieues  de  la  Rochelle,  suivant  le  Merc,  fr. 


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220  JOURNAL   INÉDIT 

Octobre  J6W.  hommes  de  pied  en  campagne,  et  six  ou  sept  cens 
chevaux,  et  ainsi,  incomraodoit  fort  ceux  de  la  Ro- 
chelle, lescpiels  M.  de  la  Trémoille  voulant  assister, 
les  alla  trouver  avec  deux  cens  chevaux.  Mais,  estant 
trop  foible,  il  fut  contraint  de  se  tenir  dans  les  mu- 
railles de  la  Rochelle.  Sur  la  fin  d'octobre,  le  Roy  en- 
voya M.  de  Boissise,  qui  vit  premièrement  M.  d'Eper- 
non,  duquel  il  tira  parole  qu'il  désarmeroit,  en  mesme 
temps  que  Messieurs  de  la  Rochelle  désarmeroyent. 
Après,  il  fut  à  la  Rochelle,  où  il  fit  une  grande  et  très- 
belle  harangue  en  l'assemblée  de  Thostelde  ville,  qui 
fit  venir  les  larmes  aux  yeux  à  plusieurs  habitans. 
Enfin,  il  les  disposa  à  tout  ce  qu'il  désiroit,  et  receut 
d'eux  de  très  grans  honneurs.  Et  ensuite,  ils  désar- 
mèrent et  remirent  Rochefort  entre  les  mains  de  la 
Brosse,  exempt  des  Gardes.  Ensuite,  M.  d'Epemon 
désarma  aussi.  —  On  tient  qu'il  y  avoit  des  lettres 
patentes  pour  le  déclarer  criminel  de  lèze  Majesté, 
s'il  y  eust  manqué,  et  que  M.  de  Thoulouse  son  fils 
fut  l'en  avertir.  Cecy  fut  au  commencement  de  no- 
vembre. 

Il  s'est  trouvé  depuis,  que  M.  d'Epernon  n' avoit 
pas  encore  désarmé,  mesme  le  dernier  novembre,  que 
M.  de  Boissise  estoit  déjà  de  retour ,  tellement  que 
l'on  résolut  d'envoyer  vers  luy  M.  de  Vignolles  \ 

7.  M.  le  Comte  d'Auvergne  estoit  prest  à  faire 
passer  la  rivière  d'Oise  à  la  plus -grande  partie  de 


^  Voy,^  sur  le  différend  entre  les  Rocbelois  et  M.  d*Epemon,  le  Jferc. 
/V.,  p.  272-300  ;  Pontcbartrain,  p.  172. 


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d'arnauld  d'andilly.  221 

l*armée  du  Roy,  pour  aller  charger  huit  cens  hommes      octobre  hi«. 
de  pied  et  cent  cinquante  chevaux ,  que  M.  de  Lon- 
gueville  avoit  vers  Roye,  lorsqu'il  receut  avis  que 
tout  le  traitté  estoit  conclu,  et  que,  partant,  il  n'eust 
plus  rien  à  entreprendre. 

Environ  ce  temps,  il  fit  faire  monstre  à  l'armée,  et 
faisoit  luy-mesme  écrire  par  son  secrétaire  le  nombre 
d'hommes  de  chaque  compagnie,  tant  d'infanterie  que 
de  cavalerie,  et  les  comptoit  luy-mesme. 

12.  M.  Barbin  dit  à  Messieurs  du  Conseil  des 
finances,  au  sortir  de  la  Direction,  que  la  Reyne  avoit 
perdu  une  robbe  valant  soixante  quinze  mil  écus,  au 
pillage  de  la  maison  de  M.  le  Maréchal  d'Ancre  ; 
que  Monsieur  le  Maréchal  avoit  aussi  fait  plusieurs 
grandes  pertes  ;  que  pour  les  récompenser  la  Reyne 
luy  avoit  commandé  de  faire  signer  un  comptant 
de  cent  soixante  quinze  mil  écus.  —  M.  de  Chevry 
répondit  :  C'est  bien  peu.  M.  le  président  Jeannin 
dit  ;  Puisque  la  Reyne  l'a  commandé,  il  le  faut  faire. 
—  Depuis,  la  dite  somme  de  cent  cinquante  mil  écus 
fut  employée  dans  un  comptant,  pour  payer  trois  cent 
mil  livres  sur  Rouen,  et  cent  cinquante  mil  livres  sur 
Caen,  des  deniers  de  1617. 

On  dit  que  le  Maréchal  d'Ancre,  voulant  pouvoir 
dire  que  le  Roy  l'avoit  entendu,  il  luy  dit  qu'il  avoit 
beaucoup  perdu  pour  son  service,  au  pillage  de  sa 
maison,  et  qu'il  le  supplioit  de  luy  faire  donner 
quelque  récompense;  que  sur  cela,  le  Roy  le  laissa,  et 
s'jen  alla,  que  Monsieur  le  Maréchal  luy  dit  :  Vostre 
Majesté  ne  me  dit  rien  ;  et  que  le  Roy  luy  répon- 


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222  JOURNAL  INEDIT 

Octobre m«.  dit  :  Entendez-voug  pas  bien  ce  que  je  vous  dis?  —^ 
On  dit  au^i  que  lorsque  le  R6y  sceut  que  l'on  avoit 
baillé  les  dits  cent  cinquante  mil  écua  à  M.  le  Ma- 
réchal d'Ancre,  il  dit  :  On  dit  qu'il  n'y  a  point  d'ar- 
gent à  l'Espargne  lorsque  je  veux  faire  donner  des 
ordonnances  de  trente  francs;  mais  on  trouve  bien 
quatre  cent  cinquante  niil  livres  pour  le  Maréchal 
d'Ancre. 

Environ  le  19.  M,  de  Luynes  achète  la  charge 
de  Grand  Fauconnier  quarante  cinq  mil  écus. — On 
dit  qu'il  bailla  six  mil  écus  h  M.  de  la  Rochefoucaud, 
pour  sa  prétention  des  oiseaux  du  Cabinet. 

19,  Le  Roy  se  trouve  mal  d'une  fort  grande  co- 
lique, qui  luy  donne  quelques  jours  des  tranchées. 
M.  Héroûard*  estoit  lors  à  Vaugrigneuse.  On  se 
voulut  servir  de  cette  occasion  pour  luy  faire  un  mau- 
vais office. 

25.  En  vertu  de  lettres  patentes  du  Roy,  le  Parr 
lement  s'assemble,  pour  vérifier  les  Déclarations  faites 
sur  l'innocence  des  Grans,  qui  ont  assisté  Monsieur  le 
Prince,  et  celle  sur  la  prise  de  Péronne  par  M.  de 
Longueville  ". 

26.  M.  le  Maréchal  d' Ancre  va,  pour  la  deuxième 
fois,  à  la  Direction.  Leur  dit,  qu'ils'ennuyoit  dans  la 
Cour,  et  qu'il  les  estoit  venu  voir  ;  discourt  avec 

^  Jean  Héroard,  premier  médecin  et  conseiller  du  Roi.  Il  fut  médecin 
des  rois  Charies  IX,  Henri  III,  Henri  IV  et  Louis  XIH.  Il  a  écrit  plusieurs 
ouvrages,  et,  antre  autneç,  un  journal  inédit  de  la  santé  du  Roi,  dont  la 
publication  a  été  plus  d'une  fois  «innoncée. 

*  Voy,  ces  lettres-patentes,  3ferc,  fr.^  p.  26/i-270.  Voy.  aussi  Mém. 
de  M.  Mole,  p.  137. 


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d'arnauld  d'anpilly.  323 

M.  Desfontaines-Boûer ,  touchant  Maillac,  roué  à  Fon-      oetohn  leie. 
tainebleau,  il  y  a  quatre  ou  cinq  ans.  —M.  Mangot, 
M.  Mazurier.., 

M.  le  Maréchal  d'Ancrç  commença  environ  ce 
temps  à  faire  dresser  des  lettres  d'érection  du  mar- 
quisat d'Ancre  en  duché-pairie,  Il  se  trouva  qu'il  n'y 
avoit  point  de  sûreté  à  cause  que  la  terre  est  à  sa 
femme,  et  que  son  fils  qui,  après  la  mort  de  sa  mère, 
fust  devenu  seigneur  d'Ancre,  et  par  conséquent  Duc 
et  Pair,  à  cause  que  c'est  une  dignité  réelle,  luy  eust 
disputé  son  rang  ;  comme  aussi  les  Ducs  et  Pairs 
reçus  depuis  luy  et  les  Maréchaux  de  France ,  non 
Ducs  et  Pairs  le  luy  eussent  disputé.  —  A  quoi  le  seul 
remède  estoit  de  faire  comme  avoit  fait  feu  M.  de 
Nevers  (habile  homme  et  qui  avoit  toujours  près  de 
luy  trois  des  plus  habiles  advocats  du  Parlement),  en 
l'érection  de...  en  duché-pairie,  qui  est  d'acheter  une 
terre  relevant  du  Roy  et  du  marquisat  d'Ancre,  l'unir 
audit  marquisat,  et  énoncer  par  les  lettres,  que  l'un  es- 
toit  à  M.  le  Maréchal  d'Ancre,  et  l'autre  à  Madame  la 
Maréchale,  et  que  le  Roy  les  érigeoit  conjointement  en 
duché-pairie  ;  ce  qui  estant,  et  le  mary  et  la  femme 
demeureroyent  chacun  Duc  et  Pair  durant  leur  vie, 

28.  M.  de  la  Chevalerie  lieutenant  de  l'artillerie 
en  l'arcenal  de  Paris,  meurt.  —La  Reyne  donna  la 
charge  à  M.  de  la  Motte  son  Écuyer.  M.  Desmarests, 
qui  l'avoit  demandée,  et  disoit  avoir  la  nomination  de 
M.  de  Sully,  se  veut  battre  contre  luy.  On  luy  baille 
des  Gardes.  Depuis,  on  les  accommoda,  avec  pro- 
messe à  M.  Desmarests  de  faire  pour  luy. 


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224  JOURNAL   IIS]lÎDtT 

Octobre  leifi.  31.  Le  Roy  extrêmement  malade.  S'estant  cou- 
ché sur  les  trois  ou  quatre  heures  après  midy.  et  le 
rideau  estant  tiré,  le  jeune  Béringhen  *,  premier  va- 
let de  chambre,  entendit  un  grand  ralement,  et  ca-eust 
que  c'estoit  un  chien  qui  dormist  ;  et  ayant  regardé 
deux  ou  trois  fois ,  partout  avec  un  autre  valet  de 
chambre  qui  estoit  là,  enfin  ils  ouvrirent  le  rideau  du 
Roy,  et  trouvèrent  que  c'estoit  luy.  Dequoy,  extrême- 
ment effrayez,  ils  allèrent  chercher  M.  Héroùard, 
qui  estoit  dans  la  cour  ;  et  estant  arrivé  il  jetta  le  Roy 
hors  du  lit,  et  commença  à  le  promener,  et  un  valet 
de  chambre  luy  voulant  mettre  un  doigt  en  la  bouche 
pour  Tempescher  de  la  fermer,  il  le  luy  tronçonna. 
Après,  on  luy  bailla  un  manche  de  cuiller,  quMl  serra 
si  fort  qu'il  se  fit  saigner  les  dents.  Enfin,  on  le  fit  re- 
venir de  cette  espèce  d'apoplexie,  que  M.  Héroùard 
dit  n'estre  qu'une  mauvaise  vapeur  des  intestins. 

Un  valet  de  chambre  s'en  alla  dire  cette  maladie 
avec  effroy  à  la  Reyne-mère,  qui  estoit  à  Vespres  aux 
Feuillans.  MM.  Piètre  et  Seguin,  médecins  de  Paris, 
.  furent  appelez  pour  conseil  *. 

On  continua  de  vouloir  faire  de  mauvais  offices 
à  M.  Héroùard,  lequel,  voyant  le  Roy  guéry,  luy  fit 
demander  son  congé  par  M.  de  Luines,  dont  le  Roy 
se  fascha  extrêmement,  et  dit  qu'il  ne  souffriroit  ja- 
mais qu'il  le  quittast*. 


*  Pierre  de  Béringhen,  seigneur  d'Ârmainvilliers,  premier  valet  de 
chambre  du  Roi. 
2  roy,  Fontenay-Mareuil,  p.  359;  Pontchartrain,  p.  178. 
»  Voy.  Richelieu,  p.  369. 


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d'arnaold  d'andilly,  225 

Temps  incertain.  On  traitte  avec  M.  d'Arquien  ' 
pour  le  gouvernement  de  Calais  à  quatre-vingt  mil 
écus  dont  on  luy  baille  quarante  mil  écus  comptans; 
on  tient  que  c'est  pour  M.  le  Maréchal  d'Ancre.  De- 
puis, le  traitté  fut  rompu,  et  M.  le  Maréchal  de  Thé- 
raines  eut  les  quatre-vingt  mil  écus  ^. 

En  ce  temps,  aimi  que  j'estime,  M.  de  Lesdiguières 
passe  les  monts  avec  huit  mil  hommes  de  pied  et  huit 
cens  chevaux  et  va  secourir  M.  de  Savoye.  11  écrivit 
à  un  de  ses  amis,  que  bien  qu'il  ne  fust  que  simple 
Gentilhomme,  néantmoins,  leRoy  luy  avoit  fait  l'hon- 
neur de  l'obliger  à  maintenir  le  Traitté  d'Ast  entre 
Espagne  tît  Savoye  ;  qu'il  alloit  pour  cela,  et  que  s'il 
ne  mourroit,  il  feroit  tenir  la  pai'ole  au  Roy  d'Es- 
pagne. On  dit  qu'on  luy  a  prédit  qu'il  gagnera  une 
bataille  en  Piémont,  et  puis,  qu'il  y  mourra. 


Ocrobie  1616. 


Environ  7  ou  8.  On  changea  les  officiers  de  Mon- 
sieur le  Prince,  et  on  le  fit  servir  par  des  officiers  du 
Roy,  dont  il  témoigna  au  commencement  un  déplai- 
sir extrême,  avec  des  fureurs  et  désespoirs  merveil- 
leux, disant,  qu'on  le  vouloit  empoisonner,  et  qu'il 
se  laisseroit  plustost  mourir  de  fahn.  Incontinent 
qu'il  eut  faim,  il  mangea  deux  œufs,  et  tost  après,  il 
se  mit  à  manger,  et  fut  aussi  gaillard  comme  aupa- 
ravant, se  réjouissant  sur  ce  qu'il  ne  vivoit  plus  à 
ses  dépens  ;  et  au  lieu  de  deux  pièces  de  rosty,  et 


Novembre. 


*  Jean-Jacques  de  la  Grange,  seigneur  d'Arquien,  gouverneur  de 
Calais  en  1610. 
3  yoy.  Pontchartrain,  p.  188. 

15 


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226  JOURNAL   INÉDIT 

Novembre  1616.     autaiit  de  bouîlly,  qu'il  avoit  à  chaque  repas,  il  en 
demanda  quatre*. 

Jours  de  Conseils  changés.  MM.  les  Secrétaires 
d' Estât  prirent  le  mercredy  et  vendredy  matin,  pour 
Conférer  avec  MM.  les  Ministres,  et  de  là,  aller  chez 
la  Reyne.  Et  au  lieu  de  ces  deux  matinées,  qui 
estoyent  Conseils  de  Direction,  on  prit  les  mardis 
et  jeudis  après-midy,  pour  la  Direction. 

9.     Exécution  de  Boursier,  pendu  à  la  Grève,  et 

après,  brûlé.  Il  estoit  chevau-léger  de  la  Compagnie  de 

Monsieur  le  Prince,  et  un  jour  qu'il  estoit  dans  le  Jeu 

de  Paume  de  Béquet,  au  faubourg  Saint-Germain, 

ayant  sceu  que  la  Reyne  alloit  à  Luxembourg,  il 

alla  chez  luy,  banda  un  pistoUet,  y  mit  deux  balles, 

et  y  estant  allé,  comme  il  estoit  prest  de  tirer,  pour 

la  tuer,  M.  le  Cardinal  de  Guise  survint,  qui  se  mist 

entre  deux  ;  et  après,  comme  il  chçrchoit  son  temps 

pour  faire  son  coup,  lorsque  la  Reyne  entreroit  en 

carrosse,  M.  de  Bassompierre  survint,  et  tant  de  gens, 

qu'il  ne  put.  Ainsi,  il  se  retira,  et  s'en  alla  chez  une 

Demoiselle,  logée  audit  faubourg,  nommée  Durfort 

et  l'ayant  trouvée  fort  affligée,  à  cause  qu'elle  estoit 

accordée  au  Premier  Brigadier  des  Gardes  de  M.  le 

Prince,  lequel  s'en  estoit  allé  après  la  prise  de  son 

maistre,  il  luy  dit,  devant  une  sienne  nièce,  qu'elle 

ne  se  fâchast  point  davantage ,  qu'il  les  vengeroit 

bientost,  et  qu'il  ne  s'en  estoit  guères  falu  que  le 

coupn'eust  esté  achevé  cette  mesme  après  disnée; 

*  Voy,  Merc.  fr.yp,  305  ;  Fontenay-Mareuil,  p.  361  ;  Richelieu,  p.  374. 


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D^ARNACLD    d'ANDILLT.  227 

et  qu'aussi  bien  il  estoit  désespéré,  et  résolu  de  Novembre i6i«. 
mourir,  après  l'avoir  fait.  Puis  il  leur  conta  ce  qui 
s*estoit  passé,  ce  que  Tune  d'elles  ayant  dit  à  un  Au- 
mosnier  de  M"*'  de  Mercœur  *,  il  en  avertit  M.  le  Ma- 
réchal d'Ancre,  qui  le  dit  à  la  Reyne,  laquelle  fit 
prendre  Boursier  par  Défontis.  On  fit  expédier  Com- 
mission à  Messieurs  du  Chastellet,  pour  le  juger  pré  - 
vostalement;  et  les  Lieutenans  Civil,  Criminel  et 
Particulier,  et  xi  autres  Conseillers  firent  le  procès. 
Il  dénia  tout.  Les  deux  femmes  soutinrent  tout,  et 
ne  varièrent  jamais.  Enfin,  il  fut  condamné  sur  les 
conjectures,  et  ordonné  qu'avant  d'estre  exécuté,  il 
auroit  la  question,  à  laquelle  deux  Conseillers  assis - 
teroyent.  Ils  y  voulurent  estre  tous,  et  en  leur  pré- 
sence, il  dit,  que  puisqu'il  faloit  mourir,  il  diroit  tout  : 
Et  ensuite,  avoua  tout,  et  le  signa,  comme  aussi  firent 
tous  les  juges,  et  à  l'eschelle,  il  confessa  tout.  Son 
père  avoit  quitté  la  marchandise  de  soye,  et  a  vaillant 
cent  mil  écus.  11  avoit  plaidé  contre  luy,  et  l' avoit  battu 
deux  fois.  Après  la  prise  de  Monsieur  le  Prince,  sur 
les  défences  faites  à  tous  les  siens  de  demeurera 
Paris,  où  il  avoit  fait,  à  trois  personnes,  qu'il  a  nom- 
mées depuis pour  enlever,  ou  tuer  la  Reyne,  et 

la  paix  estant  faite^  il  estoit  revenu  à  Paris.  Il  trouva 
au  logis  où  il  alla  chez  la  Demoiselle  de  Durfort^ 
l'abbé  de  la  Trinité,  oncle  de  ladite  Demoiselle,  le- 
quel il  fit  tant  qu'il  fit  sortir  de  la  chambre,  et  puis 

*  Marie  de  Luxembourg,  duchesse  de  Penthièvre,  veuve  de  Phi- 
lippe-Emmanuel de  Lorraine,  duc  de  Mercœur,  mort  en  1602.  Elle 
mourut  en  1623. 


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228  JOURNAL   INÉDIT 

Novembre  leie.    dit  à  ces  feiiimes  qu'il  avoit  des  choses  à  leur  dire, 
dont  elles  seroyent  bien  réjouies  *. 

M.  de  Lassay  ^  envoyé  (par  le  moyen  de  M,  Bar- 
bin,  qui  le  vouloit  favoriser),  vers  M.  le  Grand,  pour 
le  disposer  à  ne  point  empêcher  le  passage  de  M.  de 
Nemours  en  Savoye,  avec  les  forces  que  le  Roy  d'Es- 
pagne avoit  sous  sa  conduite,  en  la  Franche-Comté. 
Frésier,  ambassadeur  de  Savoye,  découvre  ce  voyage, 
prend  la  poste,  atteint  M.  de  Lassay,  luy  dit,  qu'il 
avoit  appris  de  M.  Barbin  le  sujet  de  son  voyage, 
et  qu'il  luy  avoit  dit,  que  s'il  pouvoit  raccommoder 
M.  de  Nemours  avec  M.  de  Savoye,  il  feroit  un  ex- 
trême service  au  Roy,  et  qu'il  estimoit  qu'il  en  rece- 
vroit  bientost  la  dépesche.  Enfin,  il  fit  en  sorte  qu'il 
porta  M.  de  Lassay  à  entreprendre  cet  accord,  lequel 
on  fit  ensuite,  y  ayant  employé  toute  la  créance  qu'il 
luy  avoit  baillée.  Cela  s'estant  sceu  icy,  l'Ambassa- 
deur d'Espagne  en  fut  en  une  furie  extrême,  et  lors- 
que Lassay  fut  de  retour,  menaça  de  le  tuer,  et  le 
contraignit  de  s'en  aller  de  Paris.  La  Reyne ,  et 
M.  Barbin  en  furent  aussi  en  une  extrême  colère.  Il 
dit,  pour  s'excuser,  que  les  Espagnols ,  au  lieu  de 
prendre  un  passage  court,  et  par  lequel  (suivant  le 
commandement  qu' avoit  M.  le  Grand  de  faire  comme 
semblant  de  se  boucher  les  yeux,  pour  ne  les  pas  voir,) 
ils  fussent  plus  tost  passez  que  l'on  ne  s'en  seroit  ap- 


*  yoy.  Merc.  fr.^  p.  303  i  Richelieu,  p.  373. 
ï  M.  de  Lassay,  conseiller  d'Etat.  Suivant  Richelieu,  cet  envoy»i 
était  Lais»»,  trésorier  de  France  à  Bourges.  {Foy.  Richelieu,  p.  377.) 


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d'abnauld  d'aisdilly.  229 

perceu,  ils  avoyent  voulu  en  prendre  un  par  lequel  Kovemhrf  i6i«. 
il  y  avoit  plus  de  dix  journées  d'armée  de  chemin, 
et  dont  le  passage  estoit  à  travers  une  ville  où  le 
Roy  tient  Garnison,  et  que  luy,  leur  avoit  offert  trois 
passa ges.  Mais  le  mal  est  que  ledit  S' de  Lassay  ne 
peut  nier  d'avoir  esté  présent,  lorsqu'on  a  traitté  de 
l'accord  avec  M.  de  Nemours.  M.  Barbin  m'a  dit 
que  M.  de  Lassay  avoit  pris  de  l'argent  du  duc  de 
Savoye  \ 

Madame  de  Nevers,  voulant  aller  à  Rheims,  (pour, 
disoit-elle,  y  faire  ses  couches,)  M.  de  la  Vieuville 
lieutenant  du  Roy  audit  baillage,  luy  manda  qu'il  la 
supplioit  très-humblement  de  n'y  point  venir.  Sur 
cela,  elle  se  mit  en  colère,  et  ne  laissa  de  passer 
outre,  et  fit  dire,  tant  à  luy  qu'aux  habitans  de 
Rheims,  qu'elle  estoit  la  Gouvernante  de  la  Province, 
et  qu'il  n'avoit  aucun  pouvoir  où  elle  estoit.  Elle 
estoit  en  litière,  et  n'avoit  que  quatre  hommes  de 
cheval  avec  elle.  Estant  arrivée  à  la  porte  de  la  ville, 
M.  de  la  Vieuville,  appuyé  sur  la  barrière,  luy  fit  la 
révérence,  un  genou  en  terre,  et  luy  dit,  qu'il  eust 
voulu  qu'il  luy  eust  cousté  un  bras,  et  n'avoir  point 
le  commandement  qu'il  avoit  de  ne  la  pas  laisser  en- 
trer ;  mais  qu'il  estoit  obligé  d'obéir  aux  volontez  du 
Roy.  Elle  luy  répondit,  que  c' estoit  un  menteur,  la- 


*  f^oy.  Merc,  fr,^  p.  395,  le  traité  de  paix  conclu  le  14  décembre  1616 
entre  le  duc  de  Savoie  et  le  duc  de  Nemours.  Voy,  aussi  le  âTerc,  fr,^ 
p.  371  et  suiv.,  le  récit  de  la  lutte  entre  le^^uc  de  Savoie  et  le  Roi 
d'Espagne,  et  les  négociations  auxquelles  elle  donna  lieu.  Conf.  Fonte- 
tenay-Mareuit,  p.  362;  Richelieu,  p.  Zlh\  Pontchartrain,  p.  150, 186,188. 


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230  JOURNAL    INÉDIT 

Novembre  i6i«.  qucUc  parole  elle  répéta  quatre  ou  cinq  fois,  et  qu'elle 
savoit  bien  qu'il  n'avoit  point  ce  commandement-là. 
A  quoi  il  répliqua,  un  genou  en  terre,  qu'il  eust 
voulu  qu'il  luy  eust  cousté  un  bras,  et  n'estre  point 
refuser  la  porte.  Sur  quoy,  elle,  luy  ayant  dit  plu- 
sieurs paroles  très-aigres,  enfin,  elle  se  retira. 

Incontinent  après,  M.  de  la  Vieuville,  et  les  habi-. 
tans  de  Rheim^,  envoyent  demander  un  aveu  au 
Roy,  de  ce  qu'ils  avoyent  fait,  lequel  leur  fut  baillé. 

On  tient  pour  certain  que  M.  de  Nevers  avoit  fait 
son  intelligence  si  forte  dans  Rheims,  que  Madame 
de  Nevers  estoit  capable  de  s'en  rendre  maistresse, 
et  mesme  un  des  siens,  G.  de  Th.  a  dit,  que  les 
habitans  de  Rheims  luy  avoyent  écrit  qu'il  les  vint 
délivrer  de  la  tyrannie  de  M.  de  la  Vieuville. 

Après  le  refus  de  Rheims,  Madame  de  Nevers  alla 
à  Troyes,  où  elle  fut  reçeue  sans  crainte,  à  cause 
que  tous  les  habitans  sont  très  bons  serviteurs  du 
Roy.  De  là,  elle  alla  à  Nevers,  faire  ses  couches.  On 
dit  que  les  habitans  de  Troyes  l'avoyent  priée  de  se 
retirer  après  qu'elle  eust  demeuré  quelques  jours 
dans  leur  ville. 

La  Déclaration  contre  M.  de  Nevers,  de  1617, 
porte  que  ladite  dame  .fit  commandement  aux  habi- 
tans et  au  Lieutenant  de  la  ville  de  Rheims,  de  se 
saisir  de  M.  le  Marquis  de  la  Vieuville  *. 

Le  Roy  va  à  Saint-Germain,  avec  la  Reyne  Re- 


*  Voy.  Merc,^  fr.,  p.  306;  Fontenay-Mareuil,  p.  359  et  suiv.  ;  Riche- 
lieu, p.  362  :  Pontchartrain,  p.  182. 


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d'arnauld  d'andilly.  231 

gnante,  d'où  il  revint  le  vendredy  en  suivant.  Il  de-  Novembre  i«i6. 
meure  des  Compagnies  du  Régiment  des  Gardes 
auprès  de  la  Reyiîe-mère,  laquelle,  quelques  jours 
auparavant,  trouva  bon  d'estre  servie,  par  chacun 
quartier,  par  cinquante  Gendarmes  de  sa  Compa- 
gnie. Elle  fit  difficulté  de  s'y  raidre,  pour  ce  qu'elle 
avoit  résolu  de  se  faire  servir  par  ses  chevaux-lé- 
,  gers.  M.  de  Fossez  surmonta  cette  difficulté ,  en 
offi-ant  de  servir  pour  rien ,  c'est-à-dire,  sans  avoir 
reçu  par  jour  de  récompense. 

18.    11  vint  nouvelle  au  Roy,  que  le  mercredy  15, 
M.  de  Nevers,  avec  cent  ou  cent  vingt  soldats,  avoit 
fait  piller  la  maison  de  Si,  appartenant  à  M.  de  la 
Vieuville,  et  qu'il  menaçoit  de  la  raser.  A  l'instant 
mesme  on  dépescha  un  exempt,  nommé  Barenton, 
à  Jl.  de  Nevers,  avec  une  lettre  fort  expresse,  et 
fort  ferme,  portant,  que  Sa  Majesté  vouloit  qu'il 
fist  réparer  le  tort  fait  à  M.  de  la  Vieuville,  jus- 
qu'à ce  qu'il  en  fust  content.  Qu'autrement,  il  le 
déclaroit  criminel  de  Lèze-Majesté,  et  que  ce  bas- 
ton  seroit  suivy  de  plusieurs  espées.  Et  au  mesme 
temps,  on  donna  aussi  charge  à  M.  de  Praslin,  de 
partir,  pour  s'en  aller  droit  en  ladite  maison,  et  où 
estoit  M.   de  Nevers,  avec  la  Compagnie  de  la 
Reyne,  celle  de  Monsieur,  et  quelques  autres  de 
Cavalerie,  les  Régimens  de  Vaubecourt,  et  de  Beau- 
mont,  et  les  Suisses  qui  estoyent  en  Champagne. 
Suivant  ce  Commandement,  M.  de  Praslin,  et  M.  de  . 

Fossez  partirent  le  lendemain  matin.  La  Reyne  dit 
à  M.  de  Fossez ,  que  quand  il  luy  verroit  couper 


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232  JOURNAL   INÉDIT 

Ji^^^fn^rv  ifiifi.'  la  gorge ,  il  ne  s'y  employast  pas  avec  plus  de 
courage. 

Si,  est  une  maison  forte,  où  M.  de  Si  n'avoit  qu'un 
receveur,  lequel  deux  hommes  de  M.  de  Nevers  ayant 
fait  venir  sur  le  Pont,  pour  parler  à  eux,  ils  se  rendi- 
rent maistres  de  la  Place,  et  le  soir,  y  firent  encore 
venir  huit  soldats,  et  puis  soixante  ou  quatre-vingt 
le  lendemain,  et  jusques  à  cent  ou  six  vingts. 

Est  à  remarquer,  que  la  saisie,  et  establisseriient 
de  commissaire,  ne  furent  faits  par  M.  de  Nevers, 
que  quatre  ou  cinq  jours  après  la  prise  de  la  maison, 
et  lorsquMl  sçeut  que  l'exempt  y  venoit. 

Lorsque  l'exempt  arriva  la  première  fois  à  Si, 
celui  qui  y  estoit  luy  offrit  de  luy  remettre  la  maison, 
pourveu  qu'il  le  fist  décharger  de  ce  qu'il  avoit  esté 
establi  commissaire  à  la  garde  des  fruits;  ce  que 
l'exempt  ne  voulant  faire,  il  alla  trouver  M.  de  Ne- 
vers, lequel  luy  tint  les  paroles  qui  ont  tant  offencé 
la  Reyne.  —  Lorsque  l'exempt  somma  celuy  qui 
commandoit  dans  Si,  il  menaça  les  soldats  de  les  faire 
pendre,  et  ils  jetteront  tous  leurs  bandoulières. 

La  deuxième  fois  que  l'exempt  retourna.  Si  luy  fut 
remis  entièrement  entre  les  mains.  Ledit  Baraton 
s' estant  troublé  l'esprit,  par  l'appréhension  qu'il  prit 
des  menaces  de  M.  de  Nevers,  lequel  dit,  quMl  luy 
feroit  couper  la  langue;  on  luy  bailla  des  Gardes,  les- 
quels, ayant  oublié  de  luy  ester  un  petit  étuy,  il  se  tua 
d'un  coup  de  canif  dans  le  cœur,  le  18  décembre. 

*  Voy,  Merc.  fr.^  p.  307  ;  Brienne,  p.  319;  Richelieu,  p.  362;  Pont- 
chartrsdn,  p.  186. 


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d'arnauld  d'andilly.  233 

19.     M.  le  Président  Jeannin  va  pour  la  pre-     Ko>rmbre  ifli*-. 
mière  fois,  au  Conseil  de  la  Direction,  chez  M.  Bar- 
bin,  où  les  huissiers  du  Conseil  a  voient  leurs  chaînes 
d'or.  Il  n'y  retourna  plus  depuis. 

21.  Bompar,  premier  page  qu'ayt  eu  le  Roy, 
assassiné  par  un  qui  avoit  esté  page  de  M"'  la  Maré- 
chale d'Ancre,  appelé  Cusac,  auquel,  et  à  un  de  ses 
Compagiîons,  nommé  qui  estoit  de  l'assas- 

sinat, M.  le  Maréchal  d'Ancre  a  donné  à  chacun  une 
compagnie  au  régiment  de  Normandie. 

M.  de  Blérancourt*  présenté  par  M.  Arragon  fait 
serment  au  Parlement,  de  la  charge  de  Bailly  et 
Gouverneur  de  Péronne,  Montdidier  et  Roye,  qu'il 
avoit  achetée,  soixante  mil  écus  de  M.  le  Maréchal 
d'Ancre. 

28.    M.  de  Marillac*,  lieutenant  de  la  Compagnie 


>  Bernai  d  Potier,  seigneur  de  Blérencourt,  cornette  général  de  la 
cavalerie  légère  en  1600,  gouverneur  de  Fougères  en  1598  et  en  1605, 
de  Langres  en  1602,  de  Pont-Audemer  en  1605,  lieutenant-colonel  de 
la  cavalerie  légère  en  1609,  conseiller  d'Etat  en  1614,  vice-amiral  et 
capitaine  des  côtes  de  Normandie  en  1615,  gouverneur  de  Péronne, 
Montdidier  et  Roye  en  1616,  maréchal  de  camp  en  1621,  mestre  de 
camp  dMn(anterie  en  1625,  lieutenant-général  de  la  cavalerie  lég{>re, 
mort  en  1662.  {Votj.  P.  Anselme,  t  iv,  p.  770  ) 

<  Louis  de  Marillac,  né  en  1573,  sous-lieutenant  des  gendarmes  de 
Monsieur,  ambassadeur  en  Italie  en  1611,  commissaire  général  des 
camps  et  armées  en  1617,  maréchal  de  camp  au  siège  de  Montauban 
où  il  fut  blessé  en  1621,  capitaine  lieutenant  des  gendarmes  de  la 
Reine-mère,  lieutenant-général  aux  évéchés  de  Metz,  Toul  et  Verdun, 
gouverneur  de  Verdun  en  1625,  se  signala  au  combat  de  Tîle  de  Ré,  au 
siège  de  la  Rochelle,  à  la  prise  de  Privas,  maréchal  de  France  en  1^29, 
commandant  de  Tannée  d'Italie  en  1630,  arrêté  comme  un  des  chefs 
du  parti  de  la  Reine-mère  en  1630,  condamné  à  mort  par  commissaires 
dans  le  château  du  cardinal  de  Richelieu  à  Rueil,  et  exécuté  en  place 


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234  JOURNAL   INÉDIT 

Novembre  1816.  de  Gendarmes  de  Monsieur,  envoyé  en  Champagne, 
pour  revenir  en  diligence,  apporter  nouvelle  si  M.  de 
Nevers  avoit  obéy  ;  afin  qu'au  cas  qu'il  ne  l'eust  fait, 
le  Roy  partist  en  diligence,  pour  aller  en  personne  à 
Rheims. 

M,  de  MaroUes  assure  la  Reyne,  sur  sa  vie,  que 
M.  de  Nevers  n' avoit  fait  autre  chose  que  de  saisir, 
et  établir  Conmîissaire,  par  les  voyes  de  Justice,  en 
la  maison  de  M.  de  la  Vieuville,  à  cause  de  devoirs 
Seigneuriaux  non  rendus. 

M.  le  duc  de  Rohannois*  se  bat  à  l'épée  seule, 
près  la  porte  Montmartre,  contre  M.  de  la  Frézelière, 
gentilhomme  de  Poitou,  auquel  il  donne  la  vie,  et 
remporta  son  épée,  qu'il  luy  renvoya  après,  par 
M.  de  Varennes.  La  querelle  venoit  de  ce  que  M.  .de 
Rohannois  croioit  que  M.  de  la  Frézelière  eut  emeû  les 
habitans  de  Poitiers  contre  luy,  lorsqu'il  fut  contraint 
d'en  sortir,  il  y  a  environ  deux  ans,  et  que  luy  ayant 
promis  de  l'amitié,  il  luy  eut  au  contraire  rendu  de 
mauvais  offices  auprès  de  la  Reyne. 

24.  L'Exempt  des  Gardes,  de  retour  de  Cham- 
pagne, rapporta,  qu'il  avoit  trouvé  des  commissaires 
établis  par  Justice,  dans  la  maison  de  M.  de  la  Vieu- 
ville, avec  dix  ou  douze  soldats,  et  un  honneste 

de  Grève  le  10  mai  1632.  Son  frère,  le  garde  des  sceaux,  mourut  en 
prison  peu  de  temps  après.  (Voy.  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  479.) 

1  Louis  Gouffier,  duc  de  Rouannois,  né  en  1575,  capitaine  de  cent 
hommes  d'armes  des  ordonnances,  gouverneur  de  Poitiers,  pair  de 
France  en  1612,  conseiller  d'Etat  en  1614,  accusé  d^  complot  ave«  le 
pripce  de  Condé  et  condamné  à  mort  par  contumace  en  1631,  mort 
en  1642. 


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d'aunauld  d'andilly.  235 

homme  qui  leur  commandoit,  pour  garder  ladite  Novembre  \m. 
maison  ;  lesquels  n'avoyent  fait  aucun  desordre,  et 
avoyent  payé  tous  les  vivres  qu'ils  avoyent  pris,  et 
luy  avoyent  offert  de  sortir  de  la  place,  et  de  la 
luy  remettre,  entre  les  mains,  puisqu'il  avoit  Com- 
mission du  Roy  ;  que  quant  à  M.  de  Nevers,  il  luy 
avoit  dit  toutes  sortes  de  bonnes  paroles,  et  usé  de 
toutes  sortes  de  soumissions,  pour  ce  qui  concernoit 
la  personne  et  le  service  du  Roy.  Mais  que  quant  à 
la  Reyne,  il  avoit  dit,  qu'elle  l' avoit  traitté,  luy,  et 
les  autres  Grans  absens  de  la  Cour,  ainsi  que  des 
Esclaves  ;  qu'il  estoit  hors  de  sa  tyrannie,  et  que 
d'autres  qui  y  estDyent  encore,  n'y  serôyent  plus, 
possible  dans  trois  mois;  qu'il  ne  la  verroit  jamais 
qu'en  peinture  ;  et  que  si  M.  de  Praslin  alloit  à  luy, 
avec  dix  mil  honmies,  il  iroit  au  devant,  avec  vingt 
mille.  Avec  plusieurs  autres  paroles  contre  la  Reyne, 
et  le  Maréchal  d'Ancre. 

J'ay  ouy  conter  à  M.  Rarbin  cette  affaire,  le 
23  mars  1618,  qui  est,  que  se  devant  tenir  conseil 
chez  Monsieur  le  Garde  des  Sceaux  du  Vair,  pour 
cette  affaire  de  Si,  la  Reyne  luy  commanda  d'y  aller, 
résolu  de  ne  dire  mot.  L'affaire  ayant  esté  rapportée 
par  M.  de....  Monsieur  le  Garde  des  Sceaux  dit, 
qu'il  estoit  d'avis  de  renvoyer  tout  au  Parlement, 
M.  de  Villeroy  dit,  que  l'affaire  estoit  de  telle  consé- 
quence, qu'il  estimoit  qu'il  la  faloit  retenir  au  Conseil,  . 
d'autant  qu'autrement,  ce  seroit  laisser  opprimer  un 
gentilhomme  qui  n'estoit  en  cette  peine,  que  pour 
avoir  servy  le  Roy.  M.  le  Président  Jeannin  dit,  qu'il 


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Ktj^embrt  lfl«. 


236  JOURNAL   INEDIT 

faloit  distinguer,  en  renvoyant  au  Parlement,  ce  qui 
estoit  de  la  saisie  féodale,  et  retenant  au  Conseil  ce 
qui  estoit  de  la  saisie  par  armes.  M.  Mangot  fit  un 
long  discours.  —  Après,  Tavis  estant  demandé  à 
M.  Barbin,  il  dit,  qu'il  luy  sembloit  qu'il  faloit  remar- 
quer une  chose  qui  n'avoit  point  esté  dite,  qui  estoit, 
que  la  saisie  féodale  n'avoit  esté  faite  que  quatre  ou 
cinq  jours  après  la  prise  de  la  maison  ;  sur  quoy 
M.  du  Vair  dit  :  si  vous  pensiez  nous  porter  à  vos 
conseils  violons,  vous  vous  tromperiez  fort. 

Voicy  comme  Ton  conte  cette  affaire  dans  le  monde. 

La  Reyne  ayant  assemblé  le  Conseil,  commanda  à 
TExempt,  de  dire  tout  ce  qui  s'estoit  passé,  et  tout 
ce  que  M.  de  Nevers  luy  a  voit  dit.  Il  répondit. 
«  Madame,  vous plaist-il  que  je  die  tout?»  Elle  dît, 
«  Oui.  »  Et  après,  il  dit  tout  ce  que  dessus  (grande 
imprudence).  Cela  fait,  la  Reyne  voyant  que  per- 
sonne ne  disoit  mot  pendant  un  fort  long  temps,  elle 
devint  rouge,  et  en  se  levant,  dit  :  Puisqu'il  n'y  a 
icy  personne  qui  veuille  conseiller  le  Roy,  il  faudra 
qu'il  se  conseille  luy-mesme  ;  et  aussitost,  s'en  alla 
à  la  fenestre,  et  tourna  le  dos  à  la  table  où  ils  estoyent 
tous  assis.  —  On  dit  qu'incontinent  après  elle  dit 
qu'elle  ne  prendroit  jamais  conseil  de  M.  le  Garde 
des  Sceaux,  de  M.  de  Villeroy,  et  de  M.  le  Président 
Jeannin. 

M.  de  Guise,  dit,  le  lendemain,  chez  M.  de  Cré- 
quy,  que  cela  se  passa  ainsi,  et  que  pour  luy,  il 
n'avoit  point  de  conseil  à  donner  pour  estre  d'avis  de 
ruiner  son  Cousin  germain,  mais  que  quand  on  luy 


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d'arnauld  d'andillv,  237 

commanderoit»  il  obéiroit  contre  qui  que  ce  fust,     Novembre  me. 
fùst-ce  son  père,  et  son  grand-père ,  sMls  estoyenl 
au  monde. 

On  tient  pour  plus  certain,  que  T Exempt  ayant  dit 
à  la  Reyne  toutes  les  paroles  dites  contre  elle  par 
M.  de  Nevers,  lesquelles  il  n'avoit  point  mises  dans 
son  procès-verbal  fait  en  Champagne,  elle  iuy  com- 
manda de  faire  un  autre  procès-verbal,  et  de  les  y 
mettre. 

On  dit  que  ledit  Conseil  fut  un  conseil  debout,  où 
personne  n'estoit  assis,  et  qu'après  que  l'Exempt  eut 
leû  le  Procès-Verbal,  la  Reyne  dit.  Eh  bien.  Monsieur 
le  Garde  des  Sceaux,  dites  vostre  avis.  A  quoy  il  ne 
répondit  rien.  Et  que  pour  la  deuxième  fois,  elle  Iuy 
dit  la  mesme  chose  ;  à  quoy  il  répondit.  Madame, 
vous  vous  conseillerez  avec  vos  plus  particuliers  ser- 
viteurs. Sur  quoy  elle  dit  en  colère,  Guy,  ouy,  le  Roy 
s'en  conseillera  avec  ses  fidèles  serviteurs.  Et  pour- 
quoy  pensez-vous  donc  qu'il  vous  eût  appelle  à  la 
charge  où  vous  estes,  sinon  pour  Iuy  donner  conseil  ? 
J'ay  ouy  conter  à  M.  Barbin  comme  ce  Conseil  se 
passa,  qui  est  que  la  Reyne  estant  venue,  et  ayant 
dit  qu'elle  vouloit  que  le  Procès- Verbal  fust  leû,  M.  le 
Garde  des  Sceaux  dit,  qu'il  n'estoit  pas  besoin  de  le 
lire,  on  lut  ledit  Procès-Verbal.  Après,  la  Reyne  dit  à 
M.  le  Garde  des  Sceaux,  ce  qu'il  estoit  d'avis  que 
l'on  fist  sur  cela?  Il'se  retira  un  pas  en  arrière,  et 
ne  répondit  rien.  La  Reyne  Iuy  dit  la  mesme  chose 
pour  la  seconde  fois,  et  il  ne  répondit  encore  rien  et 
se  retira  un  autre  pas  en  arrière.  Et  puis,  la  troi- 


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238  JOORNAL   INÉDIT 

Novembre  1616.  sièmc  foîs,  ayaiit  demandé,  si  Ton  ne  vouloit  point 
donner  conseil  au  Roy  de  ce  qu'il  fàlloit  faire,  il 
ne  répondit  encore  rien.  Sur  quoy,  la  Reyne  se  leva, 
rouge,  et  en  très-grande  colère,  et  dit,  qu'il  n'estoit 
point  besoin  de  tenir  Conseil,  puisque  l'on  ne  vouloit 
pas  conseiller  le  Roy. 

Tous  les  Conseillers  d' Estât  d'épée,  qui  estoyent 
présens,  firent  un  murmure,  et  dirent  tout  haut,  que 
l'on  leur  demandast  leur  avis,  et  qu'ils  le  diroyent. 

M.  de  Créquy  (qui  a  un  brevet  de  Duc  et  Pair) 
eétant  dans  le  Cabinet  de  la  Reyne,  demanda  un  siège 
à  l'huissier,  qui  luy  répondit  qu'il  ne  le  pouvoit  faire, 
si  on  ne  le  luy  commandoit.  Sur  cela,  il  s'addressa 
à  M.  le  Maréchal  d'Ancre,  qui  estoit  assis,  et  le  pria 
de  luy  en  faire  bailler  un.  Il  luy  répondit,  qu'il  ne 
se  mesloit  point  de  cela.  Après,  il  s'addressa  à  la 
Reyne,  laquelle  ne  luy  fit  pas  meilleure  réponse; 
dont  il  demeura  fort  mal  content. 

Le  matin,  le  conseil  se  tenant  chez  M.  le  Garde 
des  Sceaux,  M.  de  Chevry  luy  dit,  qu'il  estoit  besoin 
de  résoudre  les  Edits  ;  sur  quoy  il  commanda  qu'on 
les  luy  apportast,  et  dit,  on  me  les  apporte  comme 
des  bottes  d'allumettes,  et  deux  jours  après,  on  me 
les  redemande  scellez.  Je  ne  vay  pas  si  viste  que  cela, 
car  je  veux  avoir  le  temps  pour  les  voir.  Après,  il 
fit  lire  les  Edits,  et  y  remarqua  des  contradictions  et 
autres  fautes. 

Le  mesme  matin,  M.  Barbin  luy  ayant  dit,  que  la 
Reyne  vouloit  que  l'on  évoquast  au  Conseil  l'affaire 
d'entre  M.  de  Nevers  et  M.  le  Marquisde  la  Vieuville, 


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d'arnauld  d'andillt.  289 

il  dit,  que  pour  ce  qui  concernoit  la  mouvance  féo-  NoTcmbr^  m%. 
dale,  il  ne  le  pouvoit  faire,  à  cause  que  cela  devoit 
aller  au  Parlement.  Sur  quoy  M.  Barbin  répondit. 
Il  faut  tout  évoquer,  Monsieur,  car  ta  Reyne  le  veut. 
Il  répliqua  :  Il  faut,  vous  ne  devez  point  parler  par  : 
il  faut  :  je  say  bien  ce  qu'il  faut,  et  vous  ne  serez 
pas  mal,  si  vous  rendez  aussi  bon  compte  de  vostre 
charge,  que  je  feray  de  la  mienne.  M.  Barbin  répon- 
dit, Vous  me  querellez  en  vostre  maison,  adieu  ! 

La  vérité  est  qu'au  Conseil  des  affaires  d' Estât, 
tenu  ledit  matin  chez  Monsieur  le  Garde  dœ  Sceaux, 
le  Procès-Verbal  touchant  l'affaire  de  M.  de  Nevers 
ayant  esté  leu,  comme  ce  fut  aux  opinions,  M.  le 
Président  Jeannin  fut  d'avis  de  renvoyer  au  Parle- 
ment, et  comme  M.  Mangot  alloit  opiner,  M.  Barbin 
prit  la  parole,  et  dit  :  Il  ne  faut  pas  juger  de  cette 
affaire,  comme  d'une  affaire  de  particulier  à  particu- 
lier, mais  comme  l'affaire  du  Roy,  estant  facile  à  re- 
connoistre  que  c'est  le  Roy  qui  y  est  offlencé,  plus 
que  M.  de  laVieuville,  premièrement  en  ce  que  cette 
prise  de  maison  a  esté  faite  par  cinquante  soldats, 
lesquels  se  sont  saisis  du  chasteau,  six  ou  douze  heures 
avant  que  l'on  eust  estably  aucun  commissaire  par 
justice;  en  second  lieu,  cette  prise  a  esté  faite  incon- 
tinent après  le  refus  fait  à  M"'  de  Nevers  par  M.  de 
la  Vieuville  ;  et  en  troisième  lieu,  M.  de  Nevers  a 
pris  sujet  de  saisir  ladite  maison,  sur  la  félonie  qu'il 
prétend  avoir  esté  commise  contre  luy  par  M.  de  la 
Vieuville,  au  refus  qu'il  avoit  fait  à.M"*'  de  Nevers, 
M.  Barbin  ayant  dit  cela,  M.  le  Garde  des  Sceaux 


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240  JOUENAL  INÉDIT 

Novembre  teie.  prit  la  paFole,  ct  dit  :  Je  ne  veux  pas,  en  suivant  vos 
conseils  violens,  estre  Ministre  d'iniquité.  Il  faut  faire 
venir  de  MM.  du  Parlement,  qui  soyent  capables 
de  juger  de  cette  affaire.  M.  Barbin  répliqua  :  Mon- 
sieur, je  suis  très-homme  de  bien,  et  parler  de  con- 
seils violens,  c'est  toucher  le  Roy  et  la  Reyne.  Vous 
me  querellez  en  vostre  maison.  Adieu,  monsieur  *. 

25.  Sur  les  cinq  heures  et  demie  du  soir,  M.  le 
marquis  de  la  Force  et  de  Loménie  %  allèrent  trouver 
M.  le  Garde  des  Sceaux,  M.  de  Loménie  luy  dit,  que 
le  Roy  le  prioit  de  l'aller  trouver,  et  de  luy  faire  ap- 
porter les  Seaux.  Il  répondit,  avec  unWisage  gay  et 
résolu  :  Ouy,  ouy;  allons  vistement,  et  en  mesme 
temps  demanda  les  Sceaux  et  ût  mettre  les  chevaux 
au  Carrosse.  Entrant  dans  le  cabinet,  comme  il  vid  que 
Ton  faisoit  difficulté  de  laisser  entrer  le  S'  Du  Mas, 
qui  portoit  les  Sceaux,  il  dit  :  Laissez-le  entrer;  il  a 
affaire  icy.  Et  ayant  trouvé  le  Roy  et  la  Reyne  dans 
le  petit  Cabinet,  où  se  trouvoyent  aussi  M.  de  Guise, 

M.  le  Maréchal  d'Ancre,  M.  de  Loménie II  mit 

les  deux  genoux  en  terre,  et  addressant  sa  parole  au 
Roy,  luy  dit,  que  Sa  Majesté  luy  ayant  par  deux  fois 
fait  l'honneur  de  luy  écrire  pour  luy  donner  la  charge 
de  Garde  des  Sceaux  lorsqu'il  estoit  premier  Prési- 


<  yoy.  Richelieu,  363  et  suiv.  ;  Pontchartrain,  p.  1Ô8. 

^  Foy,  Mém.  de  Brienne,  p.  319  et  suiv.,  le  récit  de  ce  qui  se  passa 
lorsque  les  sceaux  furent  retirés  à  du  Vair.  M.  de  Loménie,  père  de 
Brienne,  ayant  Joué  un  rôle  dans  cette  affaire,  la  relation  de  son  (ils  a 
-  un  caractère  en  quelque  sorte  authentique.  Le  récit  de  Brienne  con- 
firme pleinement  celui  d*Arnauld  d*Ândilly. 


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d'arnauld  d'andilly.  241 

dent  en  Provence,  où  il  s'acquittoit  de  sa  charge  le  Novembre  leie. 
plus  dignement  qu'il  luy  estoit  possible,  il  Tavoit 
très-humblement  supplié  de  l'excuser,  reconnois- 
sant  bien  qu'il  n'en  estoit  pas  capable,  et  qu'il  n'y 
pourroit  pas  estre  agréable  à  beaucoup  de  personnes 
(désignant  le  Maréchal  et  la  Maréchale  d'Ancre)  ; 
qu'enfin,  ayant,  pour  la  troisième  fois  receu  un  com- 
mandement exprès  de  Sa  Majesté,  il  avoit  obéy  et 
reçeu  la  charge  avec  une  entière  affection  d'y  ser- 
vir fidèlement  Sa  Majesté  ;  que  maintenant  qu'elle  luy 
redemandoit  les  Sceaux,  il  les  luy  rapportoit,  avec  le 
mesme  désir  du  bien  de  son  service  qu'il  les  avoit 
receus,  et  prioit  Dieu  qu'il  luy  fist  la  grâce  de  luy 
donner  un  bon  Conseil,  dont  il  avoit  bon  besoin. 
On  dit'  que  la  Reyne  dit  chose  quelconque,  et  que 
M.  le  Garde  des  Sceaux  ne  dit  à  la  Reyne  que  deux 
ou  trois  mots  fort  bas  que  personne  n'entendit,  et 
que  elle  luy  dit  assez  haut  :  On  aura  soin  de  vous. 

En  toute  cette  affaire  M.  du  Vair  a  témoigné  une 
très  grande  constance*. 

Incontinent  après  que  M.  Du  Vair  eut  rendu  les 
Sceaux,  le  Roy  commanda  que  l'on  fist  entrer  M.  Man- 
got,  qui  estoit  demeuré  dans  le  grand  Cabinet,  et  que 
l'on  avoit  envoyé  quérir  chez  luy,  sur  les  sept  heures, 
qu'il  estoit  déjà  avec  ses  mulles  de  chambre,  sans 
qu'il  sceut  chose  quelconque  de  tout  cecy,  ainsi  que 
luy  et  M.  Rarbin  l'ont  juré  depuis  (le  mesme  se  dit 

« 

*  Foy.  Mém.  de  Math.  Mole,  p.  139,  le  discours  remarquable  adressé 
par  du  Vair  aux  députés  du  Parlement  lorsque  les  sceaux  lui  furent 
retirés. 

16 


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242  JOURNAL    INiDIT 

Novembre  i«i6.  dc  M.  de  Luçoii).  Sa  Majesté  luy  dit  qu'il  avoit  tou- 
jours creû  qu'il  le  serviroit  bien,  en  quelque  charge 
qu'il  l'employast;  que  maintenant,  M.  Du  Vair  luy 
ayant  remis  les  Seaux,  il  les  luy  bailloit,  sur  cette  as- 
surance ;  et  que  la  Reyne  sa  mère  en  garderoit  la  clef 
jusqu'à  ce  qu'il  eust  fait  le  serment. — Ainsi,  M.  Man- 
got  remporta  chez  luy  les  Sceaux  dans  le  carrosse,  dès 
\e  soir  mesme.  On  tient  qu'il  ne  fut  pas  trop  content 
de  cette  charge,  pour  ce  qu'il  reconnoissoit  bien 
qu'il  n'estoit  pas  fort  bien  avec  M.  le  Maréchal,  et 
qu'il  appréhendoit  qu'ils  ne  les  luy  baillassent  que 
pour  un  temps,  et  pour  l'éloigner  de  celle  de  Secrétaire 
d'Estat,  en  laquelle  il  désiroit  de  s'assurer,  et  mesme, 
il  estoit  lors  en  termes  d'en  traitter  avec  M.  de  Ville- 
roy,  pour  quatre  cens  mil  livres,  moyennant  laquelle 
somme  il  avoit  aussi  la  survivance  pour  son  fils  aisné. 
D'autres  disent  qu'il  ne  bailloit  que  deux  cens  mil 
livres  à  M.  de  Villeroy,  sans  parler  de  survivance. 
Mais  je  trouve  plus  d'apparence  au  premier.  11  avoit 
vendu,  il  y  avoit  quelque  temps,  l'office  de  Pre- 
mier Président  à  Bordeaux,  à  M.  de  Gourgues*,  pour 
soixante  mil  écus. 

La  charge  de  M.  Mangot  est  baillée  à  M,  l'Evesque 
de  Luçon  ;  et  firent  tous  deux  serment,  l'un  de  Garde 
des  Sceaux,  l'autre  de  Secrétaire  !d' Estât,  le  lende- 
main au  matin,  qui  estoit  le  samedy.  Mais  depuis, 


*  Marc  Antoiue  de  Gourgues,  Premier  Président  du  Parlement  de 
Bordeaux,  épousa  Marie  Ségiiier,  sœur  de  Pierre  Séguier,  lo  célèbre 
chancelier  de  France, 


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d'arnauld  d'andillv.  243 

M.  de  Luçon  ayant  eu  ses  provisions,  fit  nouveau     Novembre  leie. 
serment,  le  2 décembre*. 

26.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  part  à  sept  heures 
du  matin,  avec  huit  chevaux  à  son  carrosse,  un  autre 
carrosse  à  six  chevaux  qui  suivoit,  et  environ  cin- 
quante hommes  de  cheval,  pour  aller  à  Rouen,  tenir 
les  Estats. 

27.  Le  Roy  dance  un  ballet  au  Louvre,  qui  est 
le  premier  qu'il  ait  dancé. 

M.  de  Nevers  disant  avoir  eu  avis  qu'on  avoit  fait 
expédier  des  lettres  patentes  pour  luy  fermer  les 
portes  de  Retel,  y  fut  en  personne  et  y  mit  deux 
ou  trois  cens  hommes.  Et  le  mardy  29,  disant  pa- 
reillement qu'on  luy  vouloit  oster  l'entrée  de  S**- 
Menehoud,  il  y  fut  avec  sa  maison,  et  y  mit  gar- 
nison. 

M,  de  Buillon  renforce  la  garnison  de  Sedan. 


*  Fof.  âferc.  fi\^  p.  309.  Le  Mercure  rapporte  le  discours  plein  de 
dignité  que  prononça  en  cette  occasion  le  garde  des  sceaux  du  Vair. 
^•y«  Fontenfty-^iareml,  p.  360;  Brienne,  p.  319  etsuiv.  Voy.  Briennc» 
p.  322,  les  contestations  qui  s'élevèrent  au  sujet  de  la  préséance  de. 
l'évêque  de  Luçon  sur  les  autres  Secrétaires  d'Etat.  Voy,  Rohan,  p.  1/|3  ; 
Richelieu,  p.  365  et  suiv.  ;  Pontchartrain,  p.  190.  Richelieu,  évôquo 
de  Luçon,  orateur  du  clergé  aux  États  de  lôl/i,  aumônier  de  la  Reino 
régnante,  avoit  déjà,  quoique  très-jeune,  une  grande  influence,  particu- 
lièrement sur  resprit  de  la  Reine-mère.  Nommé  secrétaire  d'État  à  la 
place  de  M.  Mangot,  qui  lui-môme  avoit  remplacé  M.  de  Puisieux  dans 
la  survivance  de  la  charge  de  M.  de  Villeroy,  doyen  des  secrétaires 
d'État,  Richelieu  voulut  entrer  dans  le  Conseil,  non  pas  au  rang  de 
M.  Mangot,  son  prédécesseur,  mais  à  celui  de  M.  de  Villeroy  et  avoir 
ainsi  la  préséance  sur  ses  collègues.  Ceux-ci  résistèrent  énergiquement, 
mais  Richelieu  l'emporta  sur  eux.  Le  génie  dominateur  du  grand  Mi- 
nistre se  révélait  déjà. 


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244  JOUUiNAL   INJ^DIT 

Décembre  t««.         i,     M.  de  Ncvcrs,  fait  entrer  une  forte  garnison 
dans  S*'-Menehoud. 

9.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  revient  à  quatre  heures 
du  soir,  de  Rouen,  où  il  a  voit  tenu  les  Estats  de 
Normandie*. 

10.  Aseptiieuresdumatin,  M.  le  Garde  des  Sceaux 
Mangot  vient  chez  M.  Barbin.  —  Ils  vont  ensemble 
chez  M.  le  Maréchal  d'Ancre,  lequel,  aussitost  qu'ils 
furent  sortis,  arrive  chez  M.  Barbin,  où  ils  reviennent 
tout  court;  et  entrent  tous  trois  dans  le  Cabinet  où 
M.  de  Luçon  estant  venu,  demy-heure  après,  ils  de- 
meurèrent trois  heures,  et  jusqu'à  ce  que  la  Reyne 
envoya  quérir  M.  Barbin.  MM.  de  Thémines  et  de 
Montigny  vinrent,  et  ne  purent  parler  à  M.  Barbin. 
M.  le  Comte  d'Auvergne  fut  à  l'entrée  de  la  porte  du 
Cabinet,  où  il  ne  dit  qu'un  mot  à  M.  Barbin,  et  puis 
s'en  retourna.  On  dit  que  l'après-disnée,  ils  tinrent 
encore  trois  heures,  ce  mesme  conseil.  Ils  parloyent, 
entr'autres  choses,  de  la  Bastille. 

M.  le  Maréchal  d'Ancre  témoigne  vouloir  oublier  la 
mauvaise  volonté  qu'il  avoit  eue  contre  M.  de  Luines. 

Dès  ce  jour,  on  apprit  que  la  Reyne  vouloit  oster 
la  Bastille  à  M.  de  Thémines  ;  ce  qu'ayant  appris  il 
l'alla  trouver,  et  luy  dit,  en  substance,  qu'il  luy  remet- 
troit  la  Bastille  entre  les  mains,  et  toutes  les  charges 
qu'il  avoit,  toutes  et  quantes  fois  qu'il  luy  plairoit,  et 
qu'il  la  supplioit  très-humblement,  que  si  elle  la  luy 
vouloit  oster,  cela  se  fist  de  sorte  qu'il  ne  luy  fust 

*  Voy,  Pontcliartrain,  p.  192. 


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d'arnauld  d'andilly.  245 

point  déshonnorable.  A  quoy  elle  luy  répondit,  que 
cela  n'estoit  point,  et  que  c'estoit  toutes  impostures  et 
artifices. 

il.  M.  de  Thémines  eut  encore  les  mesmes  dis- 
cours avec  la  Reyne,  et  elle  luy  dit  encore  les  mesmes 
choses. 

12.  M.  de  Thémines,  disnant  chez  Tabbé  Ru- 
cellay  *  avec  M.  de  Guise,  il  sceut,  que,  sous  prétexte 
d'une  querelle  de  M.  de  Saint  Béarn,  et  autres  arti- 
fices, dont  ensuite,  on  s'estoit  servy,  on  avoit  fait  sor- 
tir M.  de  Loirières  son  fils,  et  la  plupart  de  ses  Gen- 
tilshommes, et  puis  qu'on  leur  avoit  fermé  les  portes 
de  la  Bastille. 

Sur  cela,  il  va  trouver  la  Reyne,  laquelle  luy  fit 
dire,  que  s'il  estoit  en  colère,  elle  ne  vouloit  point 
parler  à  luy.  Il  luy  fit  répondre,  qu'il  n'etoit  point  en 
colère,  et  sur  cela,  estant  entré,  la  Reyne  luy  dit 
qu'elle  le  prioit  de  ne  point  parler,  s'il  estoit  en  co- 
lère, et  qu'avant  toutes  choses,  il  sceût  qu'elle  luy 
accorderoit  tout  ce  qu'il  luy  demanderoit.  Il  répon- 
dit, qu'il  savoit  assez  ce  qui  estoit  de  son  devoir,  pour 
jie  point  ignorer  qu'il  ne  luy  appartenoit  pas  de  se 
mettre  en  colère,  contre  ceux  sous  la  Domination 
desquels  Dieu  l' avoit  fait  naistre,  comme  le  Roy  et 
elle,  mais  que,  puisqu'elle  luy  faisoit  l'honneur  de 


*  L*abbé  Ruccellai  gentilhomme  florentiu,  introduit  à  la  cour  par  le 
maTécbal  d'Ancre,  signalé  pendant  quelque  temps  par  ses  intrigues  en 
faveur  de  la  Reine-mère,  mourut  dans  la  retraite  en  1627,  après  avoir 
joué  un  rôle  assez  considérable.  {Voy,,  sur  ce  personnage,  Moreri,  t.  ix, 
p.  423,  et  Richelieu,  Mémoires,  éd.  citée,  t.  xiii,  p.  22û  et  suiv.) 


Décembre  tt1«. 


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246  JOURNAL   INEDIT 

DecTmbre \m.     luy  promettie  tout  ce  qu'il  luy  demanderoit,  il  la 
prenoit  au  mot,  et  luy  demandoit  Congé,  pour  luy 
et  pour  ses  enfans,  de  se  retirer  en  sa  maison.  Elle 
luy  dit,  qu'elle  ne  le  vouloit  en  façon  quelconque,  et 
qu'au  contraire,  elle  se  vouloit  servir  d'eux.  Et  que 
pour  le  luy  témoigner,  elle  luy  bailloit  le  brevet, 
(qu'elle  tenoit  en  sa  main,)  de  la  charge  de  Premier 
Ecuyer  de  Monsieur,  pour  M.  de  M.  Losières.  Il  ré- 
pliqua, qu'il  la  remercioit  très-humblement,  et  que 
puisqu'on  avoit  voulu  luy  faire  un  tel  affront,  et  à 
Losières,  il  se  réputoit  indigne,  et  ses  enfans  aussi, 
de  servir  le  Roy  en  des  charges  honnorables;  qu'il 
luy  avoit,  par  deux  fois,  sur  les  bruits  qui  couroyent 
offert  de  luy  rendre  les  clefs  de  la  Bastille,  qu'elle  l'a- 
voit  refusé,  et  qu'ensuite,  on  luy  avoit  fait  le  plus 
grand  affront  qu'il  pust  recevoir  au  monde.  (On 
dit,  qu'il  luy  dit  aussi  qu'elle  estoit  très-mal  conseil- 
lée, et  que  sur  cela,  il  luy  parla  très- hardiment.)  La 
Reyne  luy  dit,  qu'elle  voioit  bien  qu'il  estoit  en  co- 
lère, qu'il  s'en  allast  à  son  logis,  et  qu'il  la  reverroit 
le  lendemain*. 

Le  Président  Chevalier,  avec  le  Président  Re- 
bours et  quelques  autres  Présidens  et  Conseillers  de 
la  Cour  des  Aydes,  ayant  esté  mandez  au  Louvre, 
Monsieur  le  Garde  des  Sceaux  leur  représenta  la  né- 
cessité des  finances,  les  excessives  dépences  que  le 
Roy  est  contraint  de  supporter,  et  comme  cela  le 
contraignoit  de  trouver  des  moyens  extraordinaires, 

*  Voij.  Merc,  fi'.,  p.  359;  Riclielieu,  p.  374;  Pontchartrain,  p.  193. 


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d'arnauld  d'andilly.  2ft7 

pour  y  subvenir,  etc.  ;  que  pour  ce  sujet,  le  Roy  vou-  lyecrmue  i«».« 
loil  envoyer  M.  le  comte  de  Soissons  à  la  Cour  des 
Aydes,  assisté  d'un  Maréchal  de  France,  et  de  trois 
des  plus  anciens  du  Conseil,  pour  faire  vérifier  les 
Édits,  qui  y  avoyent  esté  portez,  et  que,  partant,  ils 
se  disposassent  à  exécuter  l'intention  de  Sa  Majesté. 
Après  cela,  le  Président  Chevalier  fit  un  pas  en  ar- 
rière, et  puis  dit,  en  substance,  que  c'estoit  un  très 
pernicieux  conseil,  que  d'envoyer  M.  le  Comte  en  leur 
Compagnie,  que  le  Roy  leur  avoit  mis  entre  les  mains 
une  partie  de  sa  Justice;  que  l'on  leur  devoit  envoyer 
les  Edits;  que  s'ils  estoyerît  justes  ils  les  vérifie- 
royent;  sinon,  qu'il  n'en  faloit  jamais  parler;  que 
s'il  y  avoit  de  la  nécessité  aux  finances,  comme  on  le 
disoit,  elles  estoyent  très-mal  ménagées;  qu'il  sup- 
plioit  le  Roy  de  luy  permettre  de  dire  devant  la  Reyne 
sa  mère,  (Leurs  Majestez  estoyent  présentes,)  une 
chose  très-importante,  laquelle,  peut-estre,  elleigno- 
roit,  qui  est  que  sur  l'affaire  des  droits  de  signature 
de  Rolledes  Eleus,  on  avoit  traitté  à  quatre  cents  mil 
livres,  et  qu'il  avoit  papiers  dans  son  sein,  pour  jus- 
tifier que  l'on  offroit  douze  cent  mil  livres  comptant, 
qui  est  huit  cent  mil  que  l'on  a  fait  perdre  au  Roy 
sur  cette  seule  affaire  ;  qu'il  croiroit  commettre  un 
crime,  s'il  n'avertissoit  Sa  Majesté  de  cela. 

Monsieur  le  Garde  des  Sceaux  répondit,  que  pour 
le  regard  d'envoyer  M.  le  Comte  de  Soissons  à  la 
Cour  des  Aydes,  c'estoit  chose  que  le  Roy  avoit  ré- 
solue, pour  de  bonnes  considérations;  que  quant  à 
l'affaire  des  Eleus,  il  y  avoit  si  peu  que  le  Roy  l'avoit 


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2/|8  JOURNAL   INEDIT 

Décembre  i«i«.  honnoré  des  Sceaux  qu'il  ne  sa  voit  pas  particulière- 
ment comme  elle  s'estoit  passée;  mais  qu'il  s'en  in- 
fonïieroit,  et  s'assuroit  que  le  Roy  reconnoistroit  que 
ses  finances  sont  trop  bien  ménagées,  pour  y  avoir 
esté  commis  une  faute  si  préjudiciable  au  service  de 
Sa  Majesté. 

13.  MM.  des  Finances  s'assemblent  le  matin 
chez  M.  le  Garde  des  Sceaux,  touchant  l'affaire  des 
Eleus  ;  voyent  tous  les  papiers,  et  trouvent  que,  sur 
ce  que  les  Eleus  prenoyent  plus  que  les  trois  droits 
de  signature  de  rooles  qui  leur  estoyent  attribués, 
on  avoit  ordonné,  qu'ils  restitûeroyent  le  passé,  et 
que  pour  l'avenir,  on  leur  augmenteroit  deux  droits 
de  signatures  de  roolles,  qui  estoyent  cinq  en  tout; 
et  que  pour  cela,  ils  payeroyent  dès  maintenant 
quatre  cent  cinquante  mil  livres;  et  qu'attendu  que 
ceux  qui  traittent,  lesquels  sont  d'entre  le  corps 
mesme  des  Eleus,  et  en  grand  nombre,  ne  pour- 
royent  de  long-temps  recouvrer  l'argent  qu'ils  bail- 
lent dès  maintenant  au  Roy,  et  qu'il  y  pourra  aussi 
avoir  de  grandes  non-valeurs,  on  leur  baillera  un  pa- 
risis  davantage  de  finance,  qui  est  le  quart  de  la 
somme,  et  partant,  62500  livres  de  finance,  outre  les 
quatre  cent  cinquante  mil  livres  par  eux  payez.  En 
quoy,  s'il  y  a  eu  quelque  chose  de  gratifications,  c'a 
esté  en  considération  de  ce  que  l'on  traittoit  avec  les 
officiers  mésme,  et  qu'il  n'y  avoit  nulle  apparence  que 
d'autres  en  voulussent  bailler  davantage. 

L'après-disnée,  le  Roy  et  la  Reyne  envoyent  qué- 
rir M.  le  Président  Chevalier,  et  tous  ceux  qui  estoyent 


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d'abnauld  d'andilly.  249 

venus  avec  luy.  Monsieur  le  Garde  des  Sceaux  prit  la     Décembre  i«!«. 
parole,  et  fit  excellemment  bien,  et  courageusement. 
11  dit,  entr'autres  choses,  que  le  Roy  ayant  voulu 
savoir  particulièrement  ce  qui  s'estoit  passé  touchant 
l'affaire  des  Eleus,  a  voit  trouvé  que  MM.  de  ses  finan- 
ces y  avoyent  apporté  tout  le  ménage  qui  se  pouvoit. 
Et  commença  lors,  à  déduire  particulièrement  Taf- 
faire,  dont  il  avoit  les  papiers  à  la  main,  et  ajoutta 
que  s'il  en  pouvoit  faire  trouver  les  douze  cent  mil 
livres  qu'il  avoit  dit,  le  Roy  en  donnoit  dès  à  présent 
deux  cent  mil  à  celuy  qui  voudroit  traitter.  Que  le 
Roy  luy  avoit  commandé  de  dire,  que  pour  ce  qui 
estoit  de  la  Cour  des  Aydes,  Sa  Majesté  en  avoit  toute 
sorte  de  contentement  ;  mais  que  pour  luy  elle  en 
estoit  très  mal-contente  ;  qu'il  avoit  très  insolemment 
et  calomnîeusement  parlé  en  sa  présence,  et  de  la 
Reyne  sa  mère,  contre  ceux  qu'elle  a  chargez  de  la 
conduite  de  ses  finances;  mais  qu'il  faisoit  cela  à 
dessein,  et  par  faction,  afin  de  continuer  le  chemin 
qu'ont  tenu  tant  ceux  qui  ont  voulu  desservir  le  Roy, 
qui  est  de  rendre  le  Gouvernement  odieux,  et  ensuite 
ceux  qui  se  meslent  des  aff'aires,  afin  de  donner  sujet 
aux  libelles  diflamatoires,  et  par  là,  aliéner  les  esprits 
des  peuples,  et  les  porter  aux  émotions  que  nous  avons 
veûes;  que  Sa  Majesté  l'avoit  chargé  de  luy  dire, 
qu'il  se  devoit  souvenir  qu'il  n'y  avoit  pas  deux  ans 
qu'elle  luy  avoit  fait  grâce,  et  qu'il  disoit  grâce,  (car 
il  répéta  deux  fois  ce  mot)  ;  qu'au  surplus,  il  avoit 
aussi  parlé  insolemment  touchant  la  justice  que  le 
Roy  a  mise  entre  les  mains  de  ses  officiers,  laquelle 


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250  JOURNAL    INÉDIT 

Drcrmbre  i6if.  dépendroit  de  la  seule  volonté  de  Sa  Majesté,  qui  la 
leur  pou  voit  oster  ainsi  que  bon  luy  sembleroit;  au 
lieu  qu'il  sembloit  que  l'on  s'en  voulust  servir  pour 
faire  les  Souverains,  contre  Sa  Majesté  mesme  ;  que 
pour  luy,  (il  usa  de  ce  mot  :  quant  à  nous) ,  le  Roy 
luy  ayant  fait  l'honneur  de  luy  mettre  les  Sceaux 
entre  les  mains,  il  sçauroit  bien  faire  ranger  en  leur 
devoir,  et  luy,  et  tous  ceux  de  robe  longue,  qui 
s'en  voudroyent  éloigner,  lesquels  estoyent  cause 
d'une  grande  partie  des  malheurs  que  nous  avons 
vus,  (il  parla  fort  fermement  sur  ce  sujet  et  fit  con- 
noistre  qu'il  n'épargneroit  personne) ,  et  que  quand 
il  auroit  mille  vies,  il  les  perdroit  toutes,  ou  empes- 
cheroit  que  les  officiers  de  Sa  Majesté  abusassent  de 
leurs  charges,  contre  son  service. 

13.  Après  cela,  le  Président  Chevalier  demanda 
s'il  luy  estoit  permis  de  répondre  ?  On  luy  répondit 
qu'ouy.  Il  dit,  qu'il  avoit  esté  nourry  page  du  feu 
Roy,  lequel  l'avoit  depuis  fait  Conseiller  de  la  Cour, 
et  élevé  en  d'autres  charges  ;  s'étendit  fort  sur  sa 
fidélité,  et  sur  ce  qu'il  n'avoit  jamais  eu  autre  dessein 
que  de  bien  servir,  et  qu'il  sçavoit  assez  qu'il  n'y  avoit 
autre  salut  qu'en  l'autorité  Royale  ;  qu'il  n'avoit  point 
entendu  offencer  en  aucune  sorte  MM.  des  finances, 
et  qu'il  n'avoit  rien  dit,  qu'en  ayant  charge  de  sa 
Compagnie  ;  qu'aux  Compagnies  Souveraines,  on 
estoit  bien  souvent  obligé  de  porter  des  paroles  contre 
son  propre  avis,  lorsqu'il  passoit  à  la  pluralité  des 
voix,  et  qu'il  eust  eu  encore  beaucoup  d'autres  choses 
à  dire,  lesquelles  il  avoit  tues  par  prudence.  Sur  cela, 


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d'arnauld  d'andilly.  251 

M.  rintendant  Amauddit,  qu'il  supplioit  très-hum-  D^embrem*. 
bleraent  le  Roy  de  lui  pardonner,  s'il  interrompoit 
M.  le  Président  Chevalier,  pour  le  prier  de  dire  li- 
brement tout  ce  qu'il  avoit  eu  charge  de  dire  sans 
rien  retenir  de  ce  qu'il  savoit  contre  MM.  ses  col- 
lègues et  luy.  Après,  le  Président  Chevalier  vint  sur 
le  calcul  de  l'affaire,  pour  vérifier  que  les  droits  de 
cinq  signatures  de  roolles,  monteroyent  à  une  bien 
plus  grande  somme  que  celle  dont  on  avoit  fait  party, 
(à  quoy,  M.  Arnaud  dit  aussi,  qu'en  cela,  il  se  trou- 
veroit  une  très-grande  erreur  de  calcul,  pour  ce  que, 
de  cette  somme  là  il  n'en  faloit  prendre  que  les  deux 
cinquièmes,  à  cause  qu'auparavant  le  party  fait  avec 
les  dits  Eleus,  ils  avoyent  droit  de  prendre  trois  des 
dits  droits. —  Après,  il  dit,  qu'il  avoit  dit  le  jour  pré- 
cédent que  l'on  pouvoit  tirer  davantage  de  cette  af- 
faire, mais  qu'il  n'avoit  point  parlé  de  douze  cent 
mil  livres  ni  qu'il  eust  les  offres  en  main.  M,  le 
Garde  des  Sceaux  répondit,  qu'il  l'avoit  dit,  et  le  Roy 
prit  la  parole,  et  dit,  qu'il  estoit  vray,  et  qu'il  l'a- 
voit oûy  '. 


'  Arnauld  d'A'ndilly  s'éteud  toujours  longueuieut  sur  les  discustûons 
relatives  aux  finances.  Travaillant  sous  les  ordres  d*Amauld  Tinten- 
dant,  il  était  initié  plus  que  personne  à  ces  sortes  d*affaires,  et  ses 
renseignements  doivent  dwe  exacts.  C'est  à  cette  niùme  époque,  à  la 
fin  de  Tannée  1616,  qu'il  fut  chargé  de  dresser  Tétat  général  des  finances 
pour  1617.  «  Tous  deux  ensemble  (Barbin  et  Arnauld)  me  chargùieiit 
»  de  travailler  non  seulement  à  l'état  général  des  finances  pour  1617. 
»  mais  aussi  à  tous  les  états  qui  en  dépendent  et  que  Ton  nomme  les 
»  états  de  l'épargne,  tels  que  sont  les  états  des  maisons  royales,  des 
»  fermes  et  généralement  tous  les  autres,  n'y  ayant  point  d'articles  de 
»  l'état  général  des  finances  qui  ne  soit  la  matière  d'un  état  particu- 


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252  JOURNAL   INEDIT 

Décembre  J6ie.         M,  Maiigot  présenté  au  Parlement  par  Mt  Arnaud, 
en  charge  de  Garde  des  Sceaux. 

L'après-disnée,  Monsieur  le  Garde  des  Sceaux  ha- 
rangua au  Louvre,  aux  Colonels  et  Capitaines  de  Pa- 
ris, (dans  la  Galerie  peinte,  en  présence  du  Roy  et 
de  la  Reyne),  sur  le  sujet  de  quelques  bruits  que  l'on 
avoit  fait  courir  que  l'on  vouloit  désarmer  le  peuple, 
oster  les  chaines,  et  ne  plus  payer  les  Rentes.  Il 
parla  une  heure  et  demie  fort  courageusement,  et 
bien. 

M.  le  Comte  de  Soissons  va  à  la  Cour  des  Aydes, 
accompagné  de  M.  le  Maréchal  de  Thémines,  de 
MM.  de  Chasteau-Neuf  et  Pontcarré  '... 

26.  S**-Menehoud  repris  sur  M.  de  Nevers,  qui 
y  avoit  en  garnison  dans  le  chasteau,  quatre  Com- 
pagnies de  Gens  de  pied,  (dont  Fléchelles*,  frère  de 
feu  M.  de  Bours-Montmorency*  encommandoitune,) 
et  une  de  Cavalerie,  dans  la  ville.  Bouconville  \  Gou- 
verneur, (nourry  page  de  M.  le  Duc  de  Nevers,  ayant 


»  lier  ;  ainsi  le  nombre  en  étant  si  grand,  on  étoit  souvent  fort  avant 
»  dans  Tannée  courante  avant  que  tous  ces  états  de  la  même  année 
»  fussent  dressés.  Mais  lorsque  j*eus  reçu  cet  ordre,  je  m'en  allai  cher 
»  M.  de  Beaumarchais-,  trésorier  de  l'épargne,  qui  entroit  en  charge 
»  en  Tannée  suivante,  et  y  travaillai  de  telle  sorte  avec  lui  et  M.  Bar- 
»  bin,  son  premier  commis,  que,  le  premier  jour  de  Janvier  1617,  je 
»  portai  à  M.  Barbin  tous  ces  états  au  net.  »  (Mém.  d'Aràauld  d'An- 
dilly,  p.  370.) 

«  Fay.  Pontchartrain,  p.  19û. 

>  Jean  de  Montmorency,  seigneur  de  Flesselles. 

s  Josias  de  Montmorency,  seigneur  de  Bours,  capitaine  au  n^glment 
des  gardes,  mort  en  1616. 

♦  Christophe  de  Pradlnes,  seigneur  de  Bouconville,  gouverneur  de 
Sainte-Menehould. 


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D'Aft>iAULD    d'ANDILTY.  25S 

dix  mil  livres  de  rente  à  l'entour  de  S*'-Menehoud) , 
avoit  traitté  avec  M.  de  Praslin,  par  le   moyen 

de son   cousin,   (auquel   a  esté  baillé   deux 

mil  écus  et  une  Compagnie  en  un  des  Régimens  en- 
tretenus,)  pour  remettre  la  Place,  moyennant  qu'il 
en  demeurast  Gouverneur,  et  auroit  dix  mil  écus, 
quatre  mil  livres  de  pension,  et  la  première  Com- 
pagnie vacante  aux  Gardes.  M.  de  Prasiin,  estant 
aux  portes  de  Sainte-Menehoud  avec  les  forces  du 
Roy,  M.  de  Bouconville  voulut  remettre  la  partie  au 
lendemain.  Sur  quoy  MM.  de  Fossez  et  Delbène, 
Lieutenant  de  la  Compagnie  de  chevaux -légers  de 
Monsieur,  prirent  le  hazard  d'aller  eux  deux  seuls 
dans  la  ville,  pour  le  faire  résoudre. 

Le  Roy  envoya  à  M.  de  Fossez  les  provisions  du 
Gouvernement  de  S*'-Menehoud.  Depuis,  M.  de 
Bouconville,  ayant  reçeu  les  dix  mil  écus,  que  l'on 
luy  avoit  promis,  et  la  Reyne  luy  offrant  présente- 
ment une  Compagnie  au  Régiment  des  Gardes,  au 
lieu  que  l'on  ne  lui  avoit  promis  que  la  première 
vacante,  il  ne  s'en  voulut  point  contenter,  et  insistoit 
à  avoir  son  Gouvernement.  Sur  quoy  la  Reyne  au 
mois  de  février  1617  commanda  à  M.  de  Fossez  d'al- 
ler à  S*'-Menehoud,  de  lever  une  compagnie  de 
cent  hommes  pour  y  mettre,  en  garnison,  et  de  s'y 
rendre  le  plus  fort  *.  Ce  qu'il  fit  ;  et  on  luy  bailla 
aussi  la  compagnie  de  M.  de  Porcheux  ^. 

*  Foy.  Merc.  fr.^  p.  361  ;  Fontenay-Mareuil,  p.  361  ;  Richelieu,  p.  371  ; 
Pontchartrain,  p.  196. 

*  Charles  d'Aubourg,  seigneur  de  Porcheux. 


Décembre  Hit. 


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254  JOURNAL    INEDIT 

Décembre  181I.        M.  de  Schombcrg  part,  pour  aller  en  Allemagne, 
en  ambassade  extraordinaire  \ 


^  Voy.  Pontchartrain,  p.  195  ;  Rkhelieu,  p.  381.  Foy,  coll.  Petitot, 
2*  série,  t.  xi,  p.  224,  Tinstruction  donnée  à  M.  de  Scliomberg,  et  qui 
est  de  la  main  de  Richelieu. 


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^en 


SOMMAIRE 

Janvier.  —  Mort  de  la  fille  du  maréchal  d*Ancre.  —  Duel  de  M.  de  la 
Courbe  avec  M.  de  la  Beyne.  —  Le  marquis  de  Cœuvres  refuse  de 
payer  Timpôt  à  Laon  ;  ajournement  personnel  contre  lui.  —  Mani- 
feste de  M.  du  Mayne.  —  Réponse  du  Roi  faite  par  M.  de  Luçon.  — 
Déclaration  contre  M.  de  Nevers.  —  M.  de  Rohan  arrive  à  la  cour. 
M.  de  Thémines  va  commander  en  Chanipagne.  —  Réconciliation 
de  Luynes  avec  la  Reine-mère  et  le  maréchal  d'Ancre.  —  Les  Princes 
à  Soissons. 

FÉvaiER,  —  Le  comte  d'Auvergne  va  commander  en  quelques  pro- 
vinces. —  Le  maréchal  d'Ancre  va  en  Normandie.  —  Affaire  entre 
les  troupes  de  M.  de  Candale  et  celles  de  M.  de  Vendôme.  -—  M"*  de 
Vienne  enlevée  par  Saveuse.  —  Déclaration  contre  MM.  de  Ven- 
dôme, du  Mayne,  de  Bouillon.—  M.  de  Joinville,  grand  Chambellan. 

—  M.  de  Guise  va  à  Château-Thierry.  —  Conventions  entre  MM.  de 
Thémines  et  de  Praslin.  —  Prise  de  Cufy  et  de  Vouzy  par  le  maré- 
chal de  Montigny. 

Mars.  —  Vincenze,  secrétaire  du  maréchal  d'Ancre,  fait  prisonnier.  — 
La  Grange,  secrétaire  de  Monsieur  le  Prince,  mis  au  Chàtelet.  — 

—  Siège  de  Richecour.  —  Les  Princes  se  séparent.  —  Confiscation 
de  leurs  biens.  —  Prise  d'Antrin  et  de  Claniecy.  —  Le  prjnce  do 
Château-Porcjen  et  le  marquis  de  Gallerande  faits  prisonniers.  — 
Armée  du  comte  d'Auvergne.—  M.  de  Richelieu,  maréchal  de  camp. 
Siège  de  Saint-Pierre-le-Moustier.  —  Disgrâce  de  M.  de  Fiesque.  — 
Nouvelles  des  armées.  —  >l.  de  Nemours  arrive  à  la  cour.  —  M.  do 
Rohan  vient  â  Paris.  —  Prise  de  Pierrefonds.  —  M.  le  maréchal 
d'Ancre  revient  à  Paris.  —  Prise  de  Château-Porclen. 

Avril.  —  Soissons  investi.  —  Le  Maréchal  d'Ancre  va  en  Normandie. 
Prise  de  Rethel.  —  Calomnie  contre  la  Reine  imputée  par  le  baron 
d'Uxelles  au  duc  de  Bellegarde.  ~  Retour  et  assassinat  du  Mai'échal 
d'Ancre.  —  Mauvais  traitements  envers  la  Reine-mère.  —  M.  de 


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256  JOURNAL   INÉDIT 

Vitry,  maréchal  de  France.  —  Arrestation  de  la  maréchale  d'Ancre. 

—  Mauvais  traitements  envers  son  fils.  —  Disgrâce  de  Mangôt,  de 
révoque  de  Luçon  ;  arrestation  de  Barbin.  —  Rappel  de  M.  de  Vil- 
leroy;  Jeannin,  surintendant  des  finances;  du  Vair,  garde  des 
Sceaux  ;  le  Chancelier,  chef  du  Conseil  ;  M.  de  Maupeou,  contrôleur 
général  des  finances.  —  Faveur  de  M.  de  Luynes.  —  Mariage  du  duc 
de  Longueville  avec  M"«  de  Soissons. 

Mai.  —  Départ  de  la  Reine-mère  pour  Blois.  —  Condamnation  de  du 
Travail.  ~  Retour  des  Princes.  —  Mort  du  président  de  Thou.  — 
M.  Déageant,  intendant  des  finances.  —  Retour  du  comte  d'Auvergne. 

—  Assassinat  de  M.  d'Orvilliers  Vialart.  —  M.  de  Vitry,  reçu  con- 
seiller au  Parlement.  —  L'Assemblée  de  la  Rochelle  se  sépare.  — 
Madame  la  Princesse  entre  à  la  Bastille.  •—  Retour  de  M.  de  Guise. 

—  Duel  de  M.  de  la  Vallette  avec  M.  de  Schomberg. 

Juin.  —  M.  de  Luynes,  conseiller  au  Parlement  —  Femme  de  Chartres 
accusé  d'avoir  voulu  tuer  le  Roi.  —  Différend  entre  MM.  de  Guise 
et  de  Nevers.  —  Arrivée  de  l'archevêque  de  Pise,  Ambassadeur  de 
Savoie, 

Juillet.  —  Condamnation  et  exécution  de  la  maréchale  d'Ancre.  — 
Arrivée  de  M.  de  Montmorency  et  du  prince  de  Sedan.  —  Livre  des 
quatre  ministres  de  Charenton  ;  ajournement  personnel.  —  Prise  de 
Fougères  par  le  baron  de  Guémadeuc  —  Il  est  nfiis  à  la  Bastille.  — 

—  Prise  de  Verceil  par  dom  Pedro  de  Tolède. 

Août.  —  M.  de  Modène  envoyé  vers  la  Reine-mère.  -  L'évèché  de  Li- 
sieux  donné  au  garde  des  sceaux.  —  Déclaration  touchant  les  Clin- 
qiizùits.  —  Don  de  la  confiscation  de  la  maréchale  d'Ancre  à  M.  de 
Luynes.  —  Complot  pour  tirer  Monsieur  le  Prince  de  Ta  Bastille. 

Septembre.  —  Paix  de  Savoie.  —  Arrivée  du  général  des  Capucins.  — 
Mort  du  maréchal  de  Montigny.  —  Le  maréchal  de  Vitry,  gouver- 
neur du  Berry.  —  Itfariage  du  duc  de  Luynes  avec  M"»  de  Montba- 
zon.  —  Mort  de  M.  de  Refuge.  —  Monsieur  le  Prince  conduit  à  Vin- 
ccnnes.  —  Condamnation  et  exécution  de  Geniers.  —  Démarches  de 
M.  de  Sully  pour  rentrer  aux  finances.  — •  Le  marquis  de  Cœuvrc>;, 
ambassadeur  à  Rome.  •—  Exécution  de  Guémadeuc. 

Octobre.  —  Convocation  de  l'Assemblée  des  notables  à  Rouen.  —  Le 
Roi  veut  supprimer  la  vente  des  gouvernements.  —  M.  de  Modène 
envoyé  à  Blois.  —  Mort  d'Amauld  l'intendant. 

Novembre.  —  M.  d'Epemon  revient  à  Paris.  —  Départ  du  Roi  pour 
Rouen.  —  Amauld  d'Andilly  y  suit  la  Cour.  —  Conduite  de  M.  de 
Luynes  en  arrivant  h  Rouen.  —  Il  est  chargé  d'ouvrir  les  États  en  sa 
qualité  de  lieutenant-général  au  gouvernement  de  Normandie.  — 


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d'arnauld  d'andilly.  257 

Plan  de  l'Assemblée.  —  Discours  de  M.  de  Luynes.  —  Arrivée  du 
Roi  à  Rouen. 

Décembre.  —  Ouverture  de  TAssemblée  des  Notables.  —  Conventions 
entre  la  Noblesse  et  les  officiers  des  Parlements.  —  Liste  des  mem- 
bres de  l'assemblée  et  tableau  de  leurs  positions  respectives.  —  Tra- 
vaux de  l'Assemblée.  —  Mort  de  M.  de  Villeroy.  —  Madame  la  Prin- 
cesse accouche  d'un  enfant  mort-né  ;  l'évoque  de  Paris  refuse  de  lui 
faire  des  obsèques.  —  Le  cardinal  du  Perron  présente  au  Roi  le 
cahier  des  délibérations  de  l'Assemblée.  —  Clôture  de  ladite  Assem- 
blée. —  Départ  et  retour  du  Roi. 

Dimanche  1.  Mort  de  la  fille  de  M.  le  maré- 
chal d'Ancre,  âgée  de  ...  ans.  On  dit  qu'il  avoit  des- 
sein de  la  marier  à  M.  de  la  Valette  ^ 

Duel  de  la  Courbe,  fils  d'un  capitaine  des  gardes, 
et  la  Beyne  (qui  a  eu  la  compagnie),  à  pied,  avec 
une  épée  et  un  pistollet.  Tous  deux  blessez,  mais  la 
Beyne  plus  que  la  Courbe. 

Un  cœnmis  des  fermiers  des  cinq  grosses  fermes 
à  Laon,  ayant  esté  pressé  de  payer  les  deniers  de  sa 
recette,  dît  qu'il  avoit  défences  de  M.  le  marquis  de 
Cœuvres,  et  ayant  ensemble  esté  trouver  ledit  sieur 
Marquis,  il  leur  fit  réponce,  qu'il  attendoitdes  expé- 
ditions de  la  Cour,  pour  prendre  cet  argent;  que  ce- 
pendant, il  leur  faisoit  défences  de  l'emporter,  et 
que  dans  huit  jours,  il  leur  déclareroit  sa  volonté. 
Le  Procès-verbal  de  cela  estant  rapporté  au  Conseil, 
il  fut  ordonné  par  arrest,  décret  d'ajournement  per- 
sonnel contre  ledit  sieur  Marquis;  qu'un  huissier  du 


*  Marie  Concini,  née  en  1608.  Elle  avait  eu  Henri  IV  pour  parrain 
et  la  princesse  de  Condé  pour  marraine,  (roy.  Richelieu,  p.  û2/i;  Bferc. 
fr,,  t.  IV,  MDCXVn,  p.  162.) 

17 


Janvier  1617. 


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258  JOURNAL    INÉDIT 

Janvier  1817.  Conseil  scroit  envoyé  pour  faire  payer  l'argent  par  le 
commis,  etc. 

11.  Lestre  en  forme  de  Manifeste,  écrite  par 
M.  du  May  ne  au  Roy.  Se  pleint  entr' autres  choses, 
de  ce  qu'un  homme  pris  à  Soissons,  a  esté  envoyé,  et 
incité  pour  l'assassiner. 

Cette  affaire  est  renvoyée  par  le  Roy  au  Parlement, 
lequel  ordonne,  que  le  procès  sera  fait  et  parfait,  jus- 
ques  à  sentence  définitive  exclusivement,  et  que  le 
prisonnier  et  le  procès  seront  amenez.  Ensuite  de  cet 
arrest,  un  Jieutenant  du  Prévost  de  l'Isle,  ayant  esté 
à  Soissons,  avec  dix  archers,  pour  amener  le  prison- 
nier, on  les  enferma  dans  une  hostellerie,  où  on  leur 
fit  bonne  chère,  on  paya  leur  dépense,  et  puis  on 
les  renvoya  sans  les  laisser  parler  à  personne. 

Sur  ce  que  M.  du  Mayne  disoit,  que  le  prisonnier 
avoit  dit  que  Défontis  luy  avoit  baillé  de  l'argent 
pour  luy  faire  faire  le  coup,  le  Présidial  de  Soissons 
décréta  ajournement  personnel,  contre  ledit  sieur 
Ûéfontis,  lequel  en  appella  au  Parlement  \ 

Le  Roy  répondit  le  17  à  la  lettre  de  M.  du  Mayne. 
M.  de  Luçon  fit  la  dépesche  \ 

17.     Déclaration  du  Roy  contre  M.  de  Nevers, 


^  Foy.  Merc,  fr.^  p.  132,  la  déclaration  des  Princes  contre  le  maré- 
chal d'Ancre,  dans  laquelle  il  est  allégué  que  Deffuntis,  créature  du 
maréchal  et  exécuteur  ordinaire  de  ses  violences,  avait  envoyé  l'assas- 
sin à  Soissons  pour  faire  le  coup.    ' 

2  Voy.  Richelieu,  p.  383.  Le  Merc,  fr,^  t  iv,  MDCXVH,  p.  13,  donne 
la  lettre  du  duc  de  Mayenne  et  la  réponse  du  Roi.  L'individu  accusé 
d'avoir  voulu  assassiner  le  duc  de  Mayenne  était  le  sieur  Vaugré,  déjà 
compromis  dans  Taffaire  de  Boursier,  rapportée  plus  haut. 


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d'aknauld  d'a.ndillv.  259 

vérifiée  au  Parlement,  par  laquelle  il  luy  est  donné      J«nvicr  isjt, 
quinze  jours  de  temps  pour  revenir  *. 

18.     M.  de  Rohan  arrive  h  la  Cour. 

26.  M.  le  Maréchal  de  Thémines  part  pour  aller 
en  Champagne,  commander  l'armée  du  Roy,  en  l'ab- 
sence de  M.  de  (luise.  (On  tient  que  M.  le  Maréchal 
d'Ancre  avoit  dessein  de  l'éloigner  de  la  Cour).  Lors- 
que M.  de  Praslin  avoit  sceû,  quelque  temps  aupa- 
ravant, que  l'on  luy  donnoit  cette  charge,  il  en  avoit 
témoigné  un  mécontentement  extrême,  et  M.  de 
Fossez  ayant  esté  envoyé  à  Sainte-Menehoud  le 
trouver  sur  ce  sujet,  il  l'avoit  trouvé  résolu  de  se  re- 
tirer chez  luy  ;  mais  enfin,  il  le  ramena  à  se  confor- 
mer à  la  volonté  du  Roy  [Voyez  17  février)  -. 

M.  de  Thémines  estant  arrivé  à  Rheims,  n'y 
trouva  forces  quelconques. 

Environ  ce  temps,  on  envoya  six  canons  à  Châ- 
lons,  par  terre. 

Environ  ce  temps,  le  sieur  de  Lousse,  exempt  des 
Gardes  de  la  Rey ne-mère,  ayant  esté  envoyé  faire  la 
reveûe  de  quelques  compagnies  de  vieux  régiments, 
et  ne  les  ayant  trouvé  complettes ,  cassa  les  sieurs 
de  Puyerlet,  Trion,  Porcheux,  etc..  frère  de  M.  le 
maréchal  de  Montigny.  Depuis,  lesdits  capitaines 
étant  venus  trouver  le  Roy,  ils  se  plaignirent  extrê- 
mement, disant,  qu'on  les  avoit  cassez  contre  toutes 

*  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  365  ;  Richelieu,  p.  387;  Pontcliartrain, 
p.  201.  Voy,  Merc  fr.^  p.  20,  le  texte  de  cette  Déclaration. 

2  yoy  Fontenay-Mareuil,  p.  366;  Richelieu,  p.  389;  Pontchartrain, 
p.  201. 


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260  JOURNAL    INÉDIT 

Janvier  1617.  les  formcs  dc  la  Guerre,  attendu  qu'ils  n'estoyent  pas 
responsables  du  manque  du  monde  de  leurs  soldats, 
(dont  plusieurs  s'en  alloyent  après  avoir  reçeu  la 
montre,  sans  qu'il  soit  possible  de  les  en  empescher), 
pourveu  qu'ils  offrissent,  comme  ils  font,  de  bailler 
par^écrit,  le  nom  des  lieux  de  leurs  demeures,  et  de  les 
y  aller  prendre,  si  on  veut  leur  bailler  un  prévost  pour 
ce  sujet,  avec  charge  de  leur  faire  faire  leur  procès  ; 
que  si  c'estoit  qu'en  faisant  la  montre  de  leurs  com- 
pagnies, il  s'y  trouvast  des  passevolants,  en  ce  cas, 
ils  reconnoissent  qu'ils  méritoyent  d'estre  cassez  et 
lesdits  passevolans  d'estre  pendus,  suivant  les  ordon- 
nances. 

Sur  ce  que  le  Roy  trouva  bon  de  rétablir  lesdits 
capitaines  en  leurs  charges,  mais  que  l'on  avoit  mis 
dans  les  lettres  expédiées  pour  cet  effet,  qae  Sa  Ma- 
jesté leur  avoit  fait  grâce,  ils  dirent  qu'ils  ne  pou- 
voyent  souffrir  ce  mot  de  grâce,  pour  ce  que  n'ayant 
point  failly,  ils  ne  devoyent  point  recevoir  de  grâce, 
et  que  s'ils  avoyent  failly,  il  les  faloit  chastier  et  les 
juger  en  conseil  de  guerre. 

Environ  la  fin  du  mois,  M.  de  Luines  remis  bien 
avec  la  Reyne-mère,  et  puis  avec  le  Maréchal 
d'Ancre. 

Vers  ce  temps-là  mesme,  M.  de  Nevers  va  à  Sois- 
sons,  où  M.  de  Vendosme  se  trouva  \ 


*  Voy,  Richelieu,  p.  387  ;  Pontchartrain,  p.  201  ;  Merc.  fr.y  p.  34. 
Voy,  Merc,  fr.^  p.  36,  le  manifeste  du  duc  de  Nevers,  en  réponse  à  la 
Déclaration  publiée  contre  lui. 


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d'arnauld  d'andilly.  261 

Mécredy  1.     M.  le  comte  d'Auvergne  part,  avec      Février  mi. 
un  canon,  et  mie  couleuvrine,  pour  aller  commander 
Tannée  du  Roy  destinée  pour  servir  es  provinces  de 
Nornf>aûdie,  Perche,  Mayne,  Pais  Chartrain,  Niver- 
nois,  etc.  —  Un  des  desseins  estoit  pour  nettoyer 
toutes  les  places,  estant  en  quelques  unes  desdites  pro- 
vinces  qui  favorisent  les  Princes ,  comme  la  Ferté- 
Vidame,  la  Louppe^  la  maison  du  marquis  d' Alligre  *, 
la  Ferté-Bénard,  Nogent-le-Rotrou,  etc. — Hfittrèsr 
bien  en  ce  voyage,car  toute  la  noblesse  du  païs  estoit 
preste  à  se  soulever,  et  néantmoins,  avec  quinze  ou 
seize  cens  honames  de  pied,  et  environ  trois  cens  che- 
vaux, il  contraignit  tout  de  se  tenir  en  devoir,  et  fit 
abattre  le  chasleau  du  Mans.  Le  marquis  de  Laver- 
din  Gouverneur  de  la  Province,  qui  a  épousé  une 
nièce  de  M.  du  Mayne  %  et  favorisoit  son  party,  ne 
parut  point.  Monsieur  le  Comte  commit  en  sa  place 
au  gouvernement  du  pays^  quatre  des  principaux  sei- 
gneurs de  la  Province,  sçavoir,  M.  de  la  Flotte, 
M.  de  Horée,  M.  de  Bouille,  et  M.  de  Vassé  ^ 

*  Ëstienne  d'Haligre  ou  d'Aligie,  conseiller  au  grand  Conseil,  chef 
du  Conseil  de  Charles  de  Bourbon,  comte  de  Soissons,  tuteur  hono- 
raire de  Louis  de  Bourbon,  comte  de  Soissons  son  fils,  conseiller  d'État, 
président  au  Parlement  de  Bretagne,  garde  des  sceaux  et  chancelier 
de  France  en  1624,  destitué  en  1626,  mort  en  1635.  {Voy,  P.  Anselme, 
t.  VI,  p.  550.) 

^  Henri  de  Beaumanoir,  Marquis  de  Lavardin,  fils  du  maréchal  et 
gouverneur  des  comtés  du  Maine,  du  Perche  et  de  Laval,  avait  épousé 
en  1614  Marguerite  de  la  Baume,  fille  de  Rostaing  de  la  Baume,  comte 
de  Suze,  et  de  Madeleine  des  Pi'ez-Montpezat.  Le  marquis  de  Lavar- 
din étant  mort  en  1633,  elle  se  remaria  avec  le  comte  de  Modène. 

3  Voy.  Fontenay-Mareuil,  p.  365;  Richelieu,  p.  389;  Pontchartrain, 
p.  202;  Mercfr,,  p.  111. 


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262  JOURNAL    INÉDIT 

Février  1617.          La  iiiècc  dc  M.  du  Mayne,  que  M.  le  Marquis  de 
Laverdin  a  épousée,  est  fille  de  M.  et  M*"'  de  Suse, 
laquelle  est  sœur  de  M.  le  Marquis  de  Vilars,  et' 
M"'  de  Montpesat ,  enfans  de  feu  M"'*  du  Mayne  et 
de  M son  premier  mary  *. 

M.  le  Maréchal  d'Ancre  part  pour  aller  en  Nor- 
mandie, (toute  la  cour  estoit  à  son  lever  pour  luy  dire 
Adieu).  On  tient  que  c'estoit  à  dessein  de  fortifier 
Quillebeuf,  et  que  l'armée  du  comte  d'Auvergne  estoit 
pour  favoriser  cette  entreprise.  Depuis,  il  s'est  veu  par 
effet,  qu'il  a  fortifié  Quillebeuf,  mais  il  avoit  des 
trouppes  pour  ce  dessein,  autres  que  celles  de  M.  le 
Comte  d'Auvergne*. 

5.  La  nuit  d'entre  le  Dimanche  et  le  Lundy  gras, 
la  compagnie  de  Gendarmes  de  M.  de  Caudale,  com- 
mandée par  Récourt,  estant   d'environ    quarante 

maistries,  logez  à près  la  Fère,  est  chargée  par 

des  troupes  envoyées  par  M.  de  Vendosme.  Trois 
maistres  tuez,  trois  valets  brûlez  dans  une  maison, 


*  Henriette  de  Savoie,  marquise  de  Villars,  fille  du  maréchal  et 
amiral  de  Villars ,  épousa  !•  Melchior  des  Prez,  seigneur  de  Montpezat, 
maître  des  eaux  et  forêts,  sénéchal  de  Poitou,  lieutenant  du  roi  en 
Guyenne  ;  2"  Charles  de  Lorraine,  duc  de  Mayenne,  le  chef  de  la  Ligue. 
De  son  premier  mariage  elle  eut,  entre  autres  enfants ,  Emmanuel  Phili- 
bert des  Prez,  marquis  de  Villars,  chevalier  des  ordres  en  1618,  mort 
des  suites  des  blessures  quMl  reçut  au  siège  de  Montauban  en  1621  ; 
Henri  des  Prez,  marquis  de  Montpezat,  évoque  de  Montauban,  puis 
capitaine  de  cinquante  hommes  d*armes,  gouverneur  de  Muret,  de 
Grenade,  mort  en  1619;  Madeleine  des  Prez,  comtesse  de  Suze.  (Foy. 
P.  Anselme,  t.  vu,  p.  190.)  C'est  donc  à  tort  que  notre  manuscrit 
porte  madame  au  lieu  de  monsieur  dc  Montpezat,  parmi  les  enfants  do 
la  feuu  duchesse  du  Mayne. 

2  Foy.  Merc,  fr,^  p;  158  et  162. 


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d'arnauld  d'andilly.  263 

Récourt ,  et  tout  le  reste  de  sa  troupe  pris  prisonniers,  ^c^rter  un. 
avec  tout  leur  équipage,  où  il  y  avoit  plus  de  cent 
bons  chevaux.  Trois  hommes  de  ceux  de  M.  de  Ven- 
dosme  tuez.  Il  y  avoit  fort  longtemps  que  cette  troupe 
faisoit  tous  les  désordres  du  monde,  et  logeoit  par- 
tout, sans  département,  et  mesme,  avoit  voulu  loger 
sur  les  terres  de  M"'  de  Caudales  qui  les  en  avoit 
empêchez  •. 

12.  M"*  de  Vienne  enlevée  par  Saveuse.  Sa  Gou- 
vernante la  trahit,  l'ayant  menée  à  la  porte,  après 
souper,  sous  prétexte  d'oûir  une  Musique.  Le  Car- 
rosse attendoit  au  Coin  de  la  Rue  des  Rillettes.  Il  se 
ronipit  près  la  porte  Sainlr  Denis,  où  l'on  fit  monter 
M"'  de  Vienne  sur  un  cheval. 

13.  Déclaration  contre  MM.  de  Vendosme,  du 
Mayne  et  de  Ruillon  \ 

Nouvelle  arrive,  que  M.  le  Maréchal  de  Thémines, 


*  yoy,  Merc,  /r.,p.  115. 

2  Voy.  Fontenay-Mareuil,  p.  365  ;  Pontchartrain,  p.  202;  Richelieu, 
p.  388.  Cette  déclaration,  qui  comprenait  aussi  le  Marquis  de  Cœuvres 
et  le  Président  le  Jay,  a  été  recueillie  coll.  Petitot,  2*  série,  t.  xi, 
p.  244.  On  la  trouve  aussi  dans  le  Merc,  fr,,  p.  44,  avec  les  Remon- 
trances des  Princes  et  les  Réponses  qui  y  furent  faites,  où  on  lit  le  pas- 
sage suivant  concernant  révoque  de  Luçon  :  «  Celuy  qui  a  esté  fait 
»  secrétaire  d'Estat  est  un  Prélat  si  plein  de  gloire  pour  l'innocence  de 
»  sa  vie,  pour  Teminence  de  son  savoir  et  pour  l'excellence  de' son 
»  esprit,  que  tous  ceux  qui  sçavent  quel  est  son  mérite  advoueront 
»  aisément  que  Dieu  Ta  destiné  pour  rendre  de  grands  et  signalez  scr- 
»  vices  à  Leurs  Majestez,  au  milieu  des  tempestes  de  leur  Estât.  »  A  la 
suite  de  ces  pièces,  le  Mercure  donne  la  Déclaration  du  Roy,  en  date 
du  M  février  1617,  sur  le  subject  des  nouveaux  remuements  de  son 
royaume.  Ce  document  remarquable,  contresigné  Richelieu,  est  proba- 
blement de  sa  main. 


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264  JOURNAL   INÉDIT 

Février  1617.  ayant  seû  que  M.  de  Nevers  retournoit  à  Chasteau- 
Porcien,  avec  quatre  censchçvaux,  l'avoit  saivy,  mais 
n'avoit  pu  le  joindre.  Il  luy  prit  quelque  bagage, 
tua  douze  ou  quinze  de  ceux  qui  le  conduisoyent, 
et  s'estoit  allé  mettre  en  bataille  à  la  portée  du  Ca- 
non de  Chasteau-Porcien,  où  il  avoit  demeuré  assez 
longtemps  sans  que  personne  osast  sortir,  encore  que 
M.  de  Nevers  y  fust  en  personne. 

Environ  ce  temps,  M.  de  Join ville  fait  serment 
de  la  charge  de  chambellan,  qui  fut  ostée  à  M.  du 
Mayne*. 

17.  M.  de  Guise  ayant  la  charge  de  lieutenant- 
général  pour  le  Roy  en  ses  armées,  part  pour  aller 
à  Chasteau-Thierry.  M.  de  Commartin,  estoit  Inten- 
dant de  la  justice  et  des  finances  de  ladite  armée  ^. 

MM.  de  Thémines  et  de  Praslin  ne  s' accommodant 
pas  bien  ensemble,  M.  de  Guise  envoya  M.  de  Feu- 
quières  vers  M.  de  Praslin,  lequel  dit,  que  puisqu'il 
avoit  plû  au  Roy  d'élever  M.  de  Thémines  au-dessus 
de  luy,  il  luy  porteroit  le  mesme  honneur  qu'à  un 
Maréchal  de  France  ;  qu'en  l'absence  de  M.  de  Guise, 
il  luy  obéiroit  entièrement;  mais  que  de  désirer  de 
luy  qu'il  se  relâchast  aux  fonctions  de  la  charge  de 
Maréchal  de  Camp,  ce  n'estoit  chose  raisonnable; 
qu'il  vouloit  bien,  après  avoir  fait  des  logemens,  aller 
trouver  M.  de  Thémines,  pour  savoir  s'il  les  ap{H*ou* 
veroit  ;  mais  que  M.  de  Thémines  n'eust  le  mot  de 

^  Vop,  Pontcbartrain,  p.  207.  C'était  la  charge  de  grand  chambel* 
lan  de  France. 
2  Voy.  Merc.fr.,  ^,  116. 


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d'arnauld  d'andilly.  265 

M.  de  Guise ,  et  puis  le  luy  baillast  à  luy,  c'estoit  février  i«i7. 
chose  qui  ne  se  devoit  et  ne  s'esioit  jamais  prati- 
quée ;  et  que,  pour  le  montrer,  M.  de  Biron  *,  qui 
faisoit  la  charge  de  Maréchal  de  Camp  au  Siège 
d'Amiens,  prenoit  le  mot  du  Roy  et  non  pas  dé  M.  le 
Connestable  ;  et  que,  de  fait,  si  le  Roy  venoit  en  son 
armée,  il  supplieroit  M.  de  Guise  mesme  de  trouver 
bon  qu'il  reçeust  le  mot  de  Sa  Majesté,  et  non  plus 
de  luy  ;  ce  qui  témoignoit  assez  que  ce  n'estoit  pas 
manque  de  respect  à  la  personne  de  M.  de  Thémines, 
mais  pour  ce  que  Tordre  de  la  guerre  estoit  tel  ;  et 
que  pour  faire  connoistre  l'affection  qu'il  avoit  de 
servir,  il  demeureroit  dans  l'armée  en  qualité  de 
gentilhomme  particulier ,  au  cas  qu'on  ne  luy  vou- 
lust  laisser  faire  sa  charge.  —  M.  de  Guise  dit,  sur 
cela,  qu'au  voyage  de  Rayonne ,  M.  de  Vignolles, 
Maréchal  de  Camp,  prenoit  le  mot  de  luy,  encore 
que  M.  le  Maréchal  de  Rrissac  y  fust,  et  qu'estant  de 
retour  à  Rwdeaux ,  M.  de  Vignolles  le  sqpplia  de 
trouver  bon  qu'il  prist  le  mot  du  Roy.  M.  de  Thé- 
mines,  au  contraire,  insiste  sur  sa  commission ,  à  la 
fin  de  laquelle,  (après  le  pouvoir  qui  luy  est  donné,  de 
faire,  en  l'absence  de  M.  de  Guise,  les  mesmes  choses 
que  luy) ,  il  y  a  une  clause  qui  porte  pouvoir  d'exercer 
les  mesmes  fonctions,  tant  en  présence  qu'en  absence. 


*  Chartes  de  Gontaut,  duc  de  Biron,  second  mai-échal  de  ce  nom, 
pair ,  amiral  et  maréchal  de  France,  condamné  à  mort  et  exécuté  en 
1602.  Il  eut  en  1507,  comme  maréchal  général  des  camps  et  armées 
du  Roi,  toute  la  conduite  du  siège  d'Amiens,  quoique  le  connétable 
de  Montmorency  fût  présent.  {Voy.  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  363.) 


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266  JOURNAL    INÉDIT 

Février  i«n.  M.  Barbin  dit,  que  cela  avoit  esté  fait,  parce  que 

M.  de  Thémines  avoit  dit  ne  pouvoir  aller  autrement, 
d'autant  que  M.  de  Guise  commandant,  et  M.  de 
Praslin  estant  seul  Maréchal  de  Camp,  il  n' avoit  sans 
cela,  aucun  pouvoir  en  l'armée. 

Environ  le  25.  Cufy  pris  par  M.  le  Maréchal  de 
Montigny.  Ils  endurèrent  deux  cens  coups  de  canon. 
11  fut  trois  semaines  devant,  et  l'eût  pris  plus  tost, 
s'il  eust  voulu  ;  mais  il  se  fâchoit  de  perdre  M.  de 
Meneton,  neveu  de  sa  femme,  qui  s'estoit  jette  de- 
dans. Le  Roy  ayant  sceû  la  nouvelle,  manda  à  M.  de 
Montigny  de  faire  raser  la  Place  ;  ce  qu'il  fit  exécu- 
ter par  un  Prévost,  qu'il  mena  avec  luy  ;  et  depuis,  a 
fait  le  semblable  à  toutes  les  autres  places  qu'il  a 
prises*. 

M.  de  Bersy  fut  envoyé.  —  Incontinent  après 
M.  de  Montigny  prend  Vouzy  ^ 

Mars  Environ  le  1".     Vincenze,  secrétaire  de  M.  le  Ma- 

réchal d'Ancre ,  pris  prisonnier  et  mené  à  Sois- 
sons  ^ 

La  Grange,  secrétaire  de  Monsieur  le  Prince,  mis 
auChastellet  pour  ce  qu'il  se  mesloit  d'autres  afiaires 
que  celles  que  le  Roy  luy  avoit  permis  de  traitter. 

M.  de  Guise,  avec  trois  mil  hommes  de  pied  et 


*  yo(j,  Richelieu,  p.  394  ;  Pontchartrain,  p.  20/i  ;  Merc.  fr,^  p.  165. 

2  Douzy,  suivant  le  Mercure^  p.  166. 

3  l\  revenait  d'une  mission  en  Allemagne  et  dans  les  Pays-Bas, 
lorsqu'il  fut  ai^êté  par  les  gens  des  Princes  rebelles,  qui  s'emparèrent 
de  ses  papiers. 


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d'arinaild  o'aindilly.  267 

quatre  ou  cinq  cens  chevaux,  assiège  Ribecour  et  le  *i«rs  i«i7. 
prend  par  composition  le  samedi  4".  Le  premier  jour 
du  siège,  M.  de  Guise  et  M.  de  Thémines  allèrent, 
en  pourpoint,  reconnoistre  la  place.  Le  capitaine 
Saint-Martin  (qui  a  voit  salué  M.  de  Guise,  en  quoy 
il  avoit  fait  faute),  est  tué  d'un  coup  de  pièce,  par  la 
teste,  entre  M.  de  Guise,  et  M.  de  Feuquiéres.  Son 
chapeau  tomba  sur  M.  de  Feuquiéres,  II  estoit  du 
Régiment  de  Beaumont.  Ce  jour-là,  ceux  de  dedans, 
au  nombre  de  cent  vingt  soldats,  tirèrent  plusieurs 
coups  de  pièce,  et  plus  de  quatre  cens  mousquetades. 
Sur  le  minuit,  M.  de  Guise  envoya  M.  de  Feuquiéres 
à  Châlons,  quérir  deux  canons  de  baterie,  et  des 
munitions  pour  tirer  mille  coups.  11  ne  trouva  pas 
un  oflBcier  de  l'artillerie,  un  seul  cheval,  ni  une  seule 
charrette.  11  fit  faire  en  vingt-quatre  heures  cin- 
quante charrettes,  assembla  aux  environs  de  Chà- 
lons  deux  cens  chevaux,  écrivit  de  tous  costez  pour 
ramasser  et  envoyer  à  M.  de  Guise  les  troupes  qui  ne 
Tavoyent  pas  encore  joint,  et  avec  cinq  cens  hommes 
de  pied,  et  quelque  soixante  chevaux,  mena  le  canon 
à  M.  de  Guise,  qui,  ayant  pris  Richecour,  luy  com- 
niand  ade  faire  alte  à et  puis  de  ramener  le  ca- 
non à  Chàlons. 

La  résolution  d'amener  ainsi  du  canon  estoit  bien 
périlleuse,  car  il  estoit  aisé  aux  ennemis  de  défaire 
ceux  qui  le  conduîsoyent,  et  de  le  reprendre. 

C'estoit  témérité  que  de  faire  ce  siège,  car  la  place 
est  excellente,  estant  une  maison  bastie  de  pierre  de 
taille  des  quatre  costez  avec  un  fossé  de  douze  toises 


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268  JOUKNAL   INÉDIT 

Mur»  i*n.  (Je  large,  et  un  terre-plein  dehors,  avec  quatre  bas- 
tions, dont  tout  le  terrein  est  terre  glaise,  où  la  balle 
ne  fait  que  son  trou,  et  puis,  la  terre  se  referme. 
M.  de  Guise  estoit  foible.  Les  ennemis  estoéent  as- 
semblez à  Relel  avec  huit  cens  chevaux^  et  ce  qu'ils 
pouvoyent  tirer  de  leurs  garnisons.  Ils  pouvoyent 
empêcher  que  M.  de  Guise  ne  receust  aucune  des 
forces  qui  le  devoyent  joindre,  d'autant  qu'il  leur 
estoit  facile  de  les  charger  en  chemin,  y  ayant  douze 
lieues  de  plaine  à  passer.  Us  le  pouvoyent  incom- 
moda* de  vivres,  et  deux  mille  coups  de  canon  ne 
pouvoyent  cependant  faire  prendre  la  place,  qui 
estoit  munie  de  vivres  pour  six  mois.  La  témérité  de 
M.  de  Guise  les  étonna,  et  cette  action  leur  a  fait 
perdre  créance  envers  les  leurs  mêmes,  et  témoi- 
gner à  tout  le  monde  leur  impuissance. 

M.  de  Guise  fit  démolir  Richecour,  mais  d'autant 
que  les  matériaux  en  estoyent  si  bons  que  Ton  avoit 
très-grande  peine  à  en  venir  à  bout,  on  mit  le  feu 
dedans*. 

Environ  ce  temps,  messieurs  les  Princes,  qui  s' es- 
toyent assemblez  à  Bétel  ^,  se  séparèrent  assez  mal 


*  yoy,  Pontchartrain,  p.  205  ;  Mera  fr,^  p.  116. 

2  Le  résultat  de  cette  conférence  fut  un  long  et  curieux  factum 
contre  le  noaréchal  d'Ancre,  daté  de  Rethol,  le  5  noars,  et  publié  sous 
ce  titre  :  Déclaration  et  protestation  des  Princes,  ducs,  pairs,  officiers 
de  la  couronne.  Gouverneurs  des  Provinces,  Seigneurs^  Chevaliers^  Gentils- 
hommes, villes  et  communautez^  associez  et  confederez^  pour  le  restablis' 
sèment  de  Cauthorité  du  Roy  et  la  conservation  du  royaume,  contre  ta 
conjuration  et  tyrannie  du  Mareschal  d'Ancre  et  de  ses  adhérents.  Le 
Merc,  fr,  donne  en  entier  ce  document,  p.  I2ft  et  suiv.  11  est  pi^cédié 


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d'arnauld  d'andilly.  269 

satisfaits  les  uns  des  autres.  Car  M.  de  Nevers  les  m^m  hi?. 
avdt  voulu  obligera  aller,  avec  tout  ce  qu'ils  avoyent 
de  forces,  harceler  M.  de  Guise  ;  et  MM.  du  Mayne 
et  de  Vendosme  disoyent  au  contraire,  quMl  n'y  avoit 
point  d'apparence  qu'ils  abandonnassent  leurs  Places, 
lesquelles  ils  avoyent  laissées  derrière  eux,  sur  l'as- 
surance que  M.  de  Nevers  leur  àvoit  donnée  qu'ils 
trouveroyent  de  grandes  forces  en  Champagne,  ce 
qu'il  n'avoit  nullement  exécuté,  et  ainsi,  les  avoit 
mis  en  hazard  de  leur  honneur  et  de  leur  vie.  M.  de 
Buillon  s'en  retourna  aussi  à  Sedan. 

10.  Déclaration  du  Roy  portant  confiscation,  et 
réunion  à  la  Couronne  des  biens  de  MM.  de  Nevers, 
de  Vendosine,  de  Mayenne,  de  Buillon et  Prési- 
dent le  Jay.  Vérifiée  en  Parlement,  le  16  du  mesme 
mois  *. 

11.  Nouvelle  arrive  au  Roy  de  la  prise  d'An- 
trin,  par  M.  deMontigny.  Il  y  avoit  trois  ou  quatre 
cens  hommes  dedans.  Cette  place  avoit  esté  autre- 
fois dénfiantelée,  depuis  raccommodée  et  se  pouvoit 
rendre  très-bonne. 

M.  de  Villedonné^,  frère  de  M.  de  Montigny,  ap- 
porte nouvelle  de  la  prise  de  Clamecy,  aux  condi- 


d*ane  lettre  écrite  au  pape  par  le  duc  de  Nevers,  et  suivi  d'une  dé- 
fense pour  M.  de  Nevers  contre  la  déclaration  publiée  contre  lui. 

*  Foy.  Richelieu,  p.  393.  Voy,  cette  déclaration  et  Tarrèt  du  Parle- 
ment, Merc.  fr.^  p.  152.  Le  nom  qui  échappe  à  Arnauld  d'Andilly  ou 
que  le  copiste  du  temps  n'a  pu  lire  est  celui  du  Marquis  de  Cœuvres. 

2  Charles  Etienne  de  la  Grange,  seigneur  de  Villedonné,  gentilhomme 
ordinaire  de  la  Chambre,  mestre  de  camp  d'un  régiment,  maréchal  de 
camp  des  armées  du  Roi  et  chambellan  de  Gaston,  duc  d'Orléans. 


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Mare  1617. 


270  JOURNAL    INJÎDir 

lions  qui  en  suivent  :  que  les  soldats  sortiroyent...  ; 
que  les  habitans  payeroyent  huit  mil  écus,  pour  se 
racheter  du  pillage  ;  que  Ton  reinettroit  entre  les 
mains  de  M.  de  Montigny  quatre  chasteaux. 

M.  le  Prince  de  Chasteau-Porcien  *,  second  fils  de 
M.  de  Nevers,  pris  dans  Clamecy,  et  le  marquis  de 
Gallerande%  lequel  avoit  esté  pris  huit  jours  aupa- 
ravant et  avoit  payé  mil  écus  de  rançon.  M.  le 
Prince  de  Chasteau-Porcien  fut  mené  à  la  Charité  et 
de  là  à  Bourges  \ 

M.  le  comte  d'Auvergne  part.  On  dit  que  c'esloit 
pour  aller  à  Noyon.  On  envoyé  avec  luy  la  compa- 
gnie de  <îhe vaux-légers  du  Roy,  commandée  par 
M,  de  la  Curée,  et  dix  compagnies  du  Régiment  des 
Gardes  (entre  lesquelles  estoit  celle  de  M.  de  Brantes) , 
avec  le  régiment  de  Piémont,  quelques  autres  troupes 
et  quatre  canons  de  baterie. 

M,  de  Rohan  part  avec  M.  le  comte  d'Auvergne  ; 
MM.  de  la  Curée,  de  Saint-Luc  \  de  Saint-Géran, 
Dandelot  ^  Marcschaux  de  camp;  M.  Favier,  Maistre 

^  Charles  de  Gonzagucs-Clèves,  prince  de  Mantoue  et  duc  do  Rethe- 
lois,  Pair  de  France,  né  en  1609,  mort  en  1631. 

2  Georges  de  Ciermont,  marquis  de  Gallerande,  capitaine  de  cin- 
quante hommes  d'armes,  Conseiller  d'État; 

*  yoy,  Richelieu,  p. ^394  î  Pontchartrain,  p.  212  ;  Merc,  fr, ,  p.  166. 

A  Thimoléon  d'Ëspinay,  seigneur  de  Saint-Luc ,  gouverneur  de 
Brouage  et  des  iles  de  Saintonge,  vice-amiral  de  France,  contribua 
beaucoup  à  la  victoire  remportée  sur  les^Rochelois,  en  1622,  chassa 
M.  de  Soubise  de  l'île  de  Ré,  maréchal  de  France  et  lieutenant-général 
du  gouvernement  de  Guyenne  on  1628,  mort  en  IQkk» 

^  Charles  de  Coligny,  fils  de  l'amiral  de  Coligny,  né  en  1564,  mar- 
quis d'Andclot,  maréchal  de  camp,  lieutenant-général  en  Champagne, 
mort  eu  1632. 


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d'arnauld  d^andilly.  271 

des  requestes,  Intendant  de  la  justice  et  des  finances       mw»  mt. 
(ce  disoit-on).  M.  de  Chevry  y  fut  envoyé  le  28 
comme  intendant  des  finances  *. 

Quinze  jours  auparavant,  on  avoit  toujours  creû 
de  jour  en  jour,  que  le  Roy  et  la  Reyne  partoyent, 
mais  tout  d'un  coup  cela  fut  changé,  et  l'on  envoya 
les  forces  cy-dessus.  On  tient  que  ce  changement  si 
prompt  arriva  sur  ce  que  ceux  de  Noyon  mandèrent 
qu'ils  estoyent  aussy  forts  que  la  garnison  et  qu'ils 
supplioyent  que  l'on  allast  droit  à  eux.  Cela  s'est 
trouvé  n'estre  pas  vray  ^. 

M.  de  Richelieu  %  frère  de  M.  de  Luçon,  ayant 
esté,  environ  ce  temps,  envoyé  en  l'armée  de  M.  le 
Maréchal  de  Montigny  en  qualité  de  Maréchal  de 
Camp,  M.  de  Bourg  Lespinasse  *,  qui  avoit  aupara- 
vant fait  la  charge  très-dignement,  se  retira  de  dé- 
plaisir, en  sa  maison  ^ 

Environ  ce  temps.  M,  le  Maréchal  de  Montigny 
ayant  eu  avis  que  les  troupes  de  M™'  de  Nevers 
alloyent  assiéger  Saint-Pierre-le-Moustier,  part,  avec 
/a  fleur  de  ses  troupes,  pour  les  aller  secourir  ;  et  si 
ceux  de  Saint-Pierre-le-Moustier  eussent  eu  le  cou- 


*  Foy.  Fontenay-Mareuil,  p.  367  ;  Pontchartrain,  p.  207  ;  Brienne, 
p.  324  ;  Rohan,  p.  143. 

*  Foy,  Pontchartrain,  p.  209;  Merc.  fr.^  p.  165.  - 

3  Henry  da  Plessis,  seigneur  de  Richelieu,  frère  aîné  du  grand  Car- 
dinal, maréchal  de  camp  en  Tarmée  du  duc  de  Nevers  et  du  maréchal 
de  Montigny,  tué  en  duel  par  le  marquis  de  Thémines  en  1619. 

^  Antoine  du  Maine,  baron  du  Bourg-rEspinasse,  gentilhomme  or- 
dinaire de  la  chambre,  maréchal  de  camp,  gouverneur  d*Antibes  eu 
1608^  mort  en  1635. 

^  Foy,  Fontenay-Mareuil,  p.  368. 


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272  JOURNAL   INÉDIT 

Mars  iei7.  rage  d'attendre  seulement  deux  heures,  le  canon  que 
M™'  de  Nevers  faisoit  mine  d'y  vouloir  mener,  M.  de 
Montigny  l'eust  pris,  sans  doute,  et  taillé  en  pièces 
toutes  les  troupes  de  M"'*  de  Nevers  *. 

M.  de  Fiesque  ^,  escuyer  de  la  Reine,  disgracié  et 
chassé  de  la  Cour,  par  le  commandement  de  la  Reyne- 
mère.  11  revint  le  jour  de  la  mort  du  Maréchal  d'An- 
cre, et  eut  don  de  l'office  de  M.  Aimeras,  secrétaire 
de  la  Reyne,  mais  il  s'accommoda  aveque  luy  moyen- 
nant deux  mille  pistoUes.  Il  fit  des  reproches  à  la 
Maréchale  d'Ancre,  lorsqu'on  la  menoit  à  la  Bas- 
tille, et  depuis,  prit  avec  luy  son  fils.  {Fid.  cy^près.  ) 

Environ  ce  temps,  M.  du  Mayne  veut  enlever  le 
quartiCT  des  chevaux-légers  à  Villers-Cotterests,  com- 
mandez par  M.  de  ftohan,  où  M.  Arnaud  fit  très- 
bien  avec  ses  carabins  \ 

Environ  ce  jour,  M.  de  Marolles,  suivy  de  M.  de 
Nevers  donna  dans  le  quartier  de  quelques  oompa- 
gnies  de  chevaux-légers  de  M.  de  Guise,  où  M.  de  la 
Feuillade*  fit  très-bien,  et  les  repoussa. 


*  Foy.  Ponlchartrain,  p.  212.  ' 

2  Je  ne  sais  si  ce  gentilhomme,  écuyer  de  la  Reine  régnante  était 
François  de  Fiesque,  comte  de  Lavm^e,  tué  au  tiége  ^  Montauban 
en  t621  {Voy,  P.  Anselme,  t.  ix,  p.  56),  ou  bien  Hugues  de  Fiesque, 
qui  servit  contre  les  calvinistes,  fut  du  siège  de  Montauban  en  1620, 
et,  de  retour  &  Gênes,  remplit  des  emploie  importants,  fut  ambassa- 
deur en  Angleterre  et  général  des  galères.  (Moreri,  t.  v,  p.  152.)  F^jf. 
Pontchartrain,  p.  224.  H  fit  des  reproches  à  la  maréchale,  parce  que 
c*était  elle  qui  Tavait  fait  chasser  de  la  cour  sous  prétexte  qu'il  avait 
mal  parlé  contre  le  Maréchal. 

'  Foy.  Fontenay-MareuiJ,  p.  368  ;  Rohan,  p.  143;  Met'c.  fr,,  p.  164. 

4  Georges  d*Aubusson,  comte  de  la  Fenillade,  conseiller  d'État,  ca- 


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D*ARNAULD    d'aNDILLV.  273 

18.  M,  le  Prince  de  Joinville  va  en  Auvergne,  Mars  un. 
où  il  leva  quatre  ou  cinq  cens  Irès-bons  chevaux,  et 
un  régiment  de  douze  cens  hommes  de  pied,  dont 
tous  les  capitaines  estoyent  gentilshommes,  qui 
avoyent  au  moins  chacun  dix  mil  livres  de  rente. 
Cette  cavalerie  n'estoit  pas  encore  sur  pied  *. 

Le  Marquis  de  Portes  chargea  Andredieu  avec 
quatre  cens  hommes  des  Sévènes,  qu'il  avoit  encore 
de  reste,  de  ceux  qu'il  avoit  assemblez  contre  le  Roy. 
Il  le  défit,  le  contraignit  de  se  retirer  à  Gresay,  où 
il  l'assiégea,  et  le  contraignit  de  se  rendre  *. 

23.  M.  de  Nemours  arrive  à  la  Cour  '. 

M.  de  Rohan  vient  à  Paris,  sur  ce  que  ceux  de 
Saint-Jean  d'Angely  avoyent  nommé  trois  Maires, 
pour  en  estre  choisy  un  par  luy,  au  lieu  qu'il  vouloit 
qu'ils  en  prissent  un  qu'il  leur  avoit  nommé.  Il  re- 
part le  lundy  27  \ 

24.  M.  le  Comte  d'Auvergne  investit  Pierrefons. 
Villeneuve*,  le  Capitaine  Saint- Martin ,  Desvaux, 
trois  autres  hommes  de  commandement,  et  quelque 
quatre-vingt  soldats.  Au  commencement,  M.  le  Comte 


pitaine  lieutenant  des  chevau-légers  de  la  Rcine-mëre,  Sénéchal  dos 
Marches,  Maréchal  de  camp,  mort  en  1628. 

*  roy.  Merc.  fr,,  p.  17/i. 

*  Foy,  Pontchartrain ,  p.  205.  Andredieu  (suivant  Pontchartraln, 
Andrieu)  était  un  gentilhomme  de  la  Religion  réformée,  qui  avait  levé 
des  troupes  pour  le  duc  de  Savoie  et  les  avait  mises  au  service  des 
Princes  rebelles. 

3  Foy.  Pontchartrain,  p.  213. 
^  Foy,  Fontenay-Mareuil,  p.  369. 

»  Le  capitaine  la  Villeneuve  commandait  à  Pierrefons  pour  le  Mar  - 
quis  de  Cœuvres. 

18 


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274  JOURNAL  INÉDIT 

Mars  1617.  d'Auvergne  vouloit  faire  un  fort  pour  les  bloquer, 
à  cause  qu'il  n'y  avoit  qu'une  avenue.  Mais  ayant 
appris  enfin,  que  la  place  estoit  la  plus  foible  à  l'en- 
droit du  portail,  il  fit  tirer  là,  et  fit  brèche.  Villeneuve 
ayant  esté  soupçonné  par  le  Marquis  de  Cœuvres, 
fut  mis  dehors  par  son  commandement.  —  Saint- 
Martin  et  Devaux  furent  tuez  du  canon  ;  ce  qui  ayant 
ébranlé  ceux  du  dedans,  et  voyant  qu'on  alloit  battre 
leur  puits,  ils  se  rendirent  le  2  avril  *. 

26,  jour  de  Pasques.  On  fait  partir  par  eau,  pour 
aller  à  Compiègne,  et  de  là  à  Soissons,  huit  canons 
de  baterie,  six  couleuvrines,  six  bastardes,  deux 
moyennes,  cent  dix  milliers  de  poudre,  et  sept  mille 
boulets  ^. 

28.  M.  le  Maréchal  d'Ancre  arrive  à  Paris.  11 
avoit  mené,  quelques  jours  auparavant,  en  l'armée  de 
M.  le  Comte  d'Auvergne  cinq  mil  hommes  de  pied, 
dont  il  y  avoit  trois  mil  Liégeois,  et  sept  ou  huit  cens 
chevaux  *. 


^  yoy,  Fontenay-Mareuil,  p.  369  ;  Richelieu,  p.  395  ;  Ponchartrain, 
p.  212  ;  Merc,  fr,^  p.  16/i. 

2  Foy,  Fontenay-Mareuil,  p.  370;  Blerc,  ft\^  p.  165. 

*  Foy.  Pontchartrain,  p.  208.  Le  Mercure  rapporte  à  ce  sujet  une 
lettre  du  maréchal  d'Ancre  au  Roi,  en  date  du  13  mars,  qui  mérite 
d'être  reproduite  : 

«  Sire,  dernièrement  que  j'eus  l'honneur  de  prendre  congé  de  Vostre 
»  Majesté,  en  vostre  gallerie  du  Louvre,  en  luy  faisant  la  révérence, 
»  je  Tasseuray  qu'au  besoin,  en  quoy  je  la  voyois  je  ne  luy  dirois 
»  comme  force  gens  de  ceux  qui  estoient  obligez  autant  que  j'ay  Thon- 
»  neur  de  l'estre  à  Vostre  Majesté,  estoient  accoutumez  de  luy  dire, 
»  que  si  Vostre  Majesté  leur  commandoit  et  leur  donnoit  les  moyens, 
»  qu'ils  vous  ameneroient  nombre  de  gens  de  guerre  pour  la  servir  : 
»  mais  que  lorsqu'il  seroit  temps,  je  la  servirois  avec  six  mille  hommes 


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d'arnauld  d'andilly.  275 

30.  Chasteau-Porcien  rendu  à  M.  de  Guise,  après 
un  siège  de...  jours.  La  place  estoit  beaucoup 
meilleure  que  l'on  n'estimoit.  11  sortit  neuf  cent 
trente  hommes  de  dedans.  Ils  avoyent  toujours  dé- 
fendu leurs  dehors.  La  rivière  d'Aisne  passoit  dans 
la  ville,  et  M.  de  Guise  ne  l'assiégeoit  que  d'un  costé, 
tellement  que  les  Assiégez  avoyent  le  costé  de  Rétel 
et  de  Mézières  entièrement  libre;  ce  qui  donnoit 
moyen  à  M.  de  MaroUes  de  les  faire  rafraischir  tous 
les  jours  à  la  veûe  de  l'armée  du  Roy.  Mais  les  mu- 
nitions de  guerre  et  les  farines  leur  manquèrent, 
à  cause  que  Mézières  et  Retel  ne  soyent  trop  dé- 
garnis ;  et  ainsi,  ils  furent  contraints  de  se  rendre. 
Montereau,  cornette  de  la  compagnie  de  chevaux- 
légers,  brave  et  vaillant  homme,  élevé  de  peu 

»  de  pied,  et  huit  cens  chevaux  quatre  mois  à  mes  dépens;  j*ay  tenu, 
»  sire,  ma  parole,  et  satisfaict  à  cestë  obligation  :  J'ay  levé  en  vertu 
»  de  vos  commissions  trois  mille  deux  cents  hommes  de  pied.  Liégeois, 
»  et  cinq  cens  chevaux,  et  deux  mille  huict  cens  François,  et  trois  cens 
»  chevaux.  Je  meneray  là  où  il  plaira  à  Vostre  Majesté  cinq  mille 
»  hommes  de  pied,  et  huit  cens  chevaux,  et  le  surplus  de  Tinfanterie, 
»  je  la  laisseray  dans  les  places  plus  importantes  de  ma  charge  pour 
»  les  garantir  de  tous  accidens  qui  leur  pourroient  arriver.  J'attendray 
»  donc,  Sire,  vos  commandemens,  et  ne  retienne  Vostre  Majesté  au- 
»  cune  considération  de  la  qualité  qu*elle  m*a  donnée  ny  de  la  des- 
»  pense  que  j*y  faits  pour  son  service,  de  m*ordonner  librement  là,  et 
»  conmie  elle  veut  que  je  la  serve  ;  que  pourveu  que  la  France  me  re- 
»  connoisse  obeyssant  et  fidel  subjet  et  serviteur  de  Vostre  Majesté, 
»  toutes  conditions  me  seront  agréables  :  Tobeyray  dans  vos  armées  à 
»  tout  le  monde ,  et  deferray  à  qui  il  plaira  à  Vostre  Majesté,  pour- 
y>  veu,  Sire,  que  vous  me  permettiez  que  je  conteste  avec  qui  que  ce  soit 
»  le  rang  que  je  deftendray  le  plus.  Sire,  de  Vostre  Majesté,  très- 
»  humble ,  trè&obeyssant,  très-fidelle  subject  et  serviteur,  Concino.  » 
Cette  lettre  provoqua  de  nouvelles  attaques  dont  le  Mejxure  donne  la 
substance. 


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276  JOURNAL    INÉDIT 

Marsien.  par  son  courage,  y  commandoit.  Tous  les  soldats 
firent  serment  de  ne  porter  de  trois  mois  les  armes 
contre  le  Roy,  et  les  Walons  furent  conduits  hors  le 
royaume.  Montereau  ne  fit  point  ce  serment.  Il  en  de- 
meura plus  de  deux  cens  en  l'armée  de  M,  de  Guise 
et  une  compagnie  de  mineurs  *. 

Avril.  Samedy  1.     Messieurs  les  Princes,  croyant  l'ar- 

mée de  M.  de  Guise  du  tout  fatiguée  par  le  siège  de 
Chasteau-Porcien,  M.  de  Guise  part  à  six  heures 
du  soir,  avec  deux  ou  trois  cens  chevaux,  et  trois  ou 
quatre  cens  hommes  de  pied  qu'il  mit  sur  sa  retraite. 
Il  arrive  à  l'aube  du  jour  à  un  village,  tout  contre  le 
faubourg  de  Laon,  charge  le  régiment  de  Balagny 
qui  y  estoit  logé,  avec  une  compagnie  de  chevaux- 
légers,  tue  vingt-cinq  ou  trente  hommes,  fait  fuir  le 
reste  à  ce  faubourg,  et  emmeine  quelques  chevaux*. 

Environ  le  6.     Soissôns  investy. 

7.     M.  le  Maréchal  d'Ancre  va  en  Normandie. 

Environ  ce  temps,  le  Prévost  des  Maréchaux  de. .. 
prit  à...  un  vallet  de  pied  de  M.  du  Mayne,  portant 
une  lettre  à  M"*'  de  Nevers,  toute  écrite  de  la  main 
de  son  maistre,  contenant  que  tout  estoit  pour  eux, 
qu'il  avoit  taillé  en  pièces  la  cavalerie  légère  du  Roy 
à  Villers  Gotterets,  d'où  M.  de  Rohan  s'estoit  à  peine 
sauvé;  qu'ils  avoyent  fait  lever  hautement  à  M,  de 
Guise'  le  siège  de  Chasteau-Porcien  ;  qu'elle  conti- 


*  yoy,  Pontchartraiii,  p.  212  ;  Bassompierre,  p.  141  ;  Merc,  fr,<,  p.l66« 
2  yoy,  Merc.  fr,^  p.  173. 


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d'arisauld  d'andilly.  277 

nuast  à  bien  faire,  etc.  La  Reyne-mère  mit  dans      Avniien. 
sa  boiste  l'original  de  ladite  lettre. 

8.  Retel  investy  par  M.  de  Guise.  Aux  approches, 
il  se  fit  une  rude  charge  par  MM.  de  Thémines  et  de 
Praslin,  suivis  de  cinquante  gendarmes  de  la  Reyne- 
mère.  Ils  menèrent  battant  et  tuant  jusque  dans 
leurs  retranchemens,  quatre-vingts  ou  cent  chevaux 
de  l'ennemy.  11  en  fut  tué  vingt  ou  vingt-cinq. 
M.  le  Marquis  de  Thémines  fut  blessé  d'une  mous- 
quetade  au  bras.  Monsieur  le  Maréchal  son  père 
témoigna  une  valeur  extrême  en  ce  combat ,  et  dé- 
gagea son  fils.  M.  de  Praslin  fit  aussi  merveilles. 
Nul  des  nostres  ne  fut  tué.  Lacoste  y  fut  blessé. 

M.  de  Marolles  vint  trouver  M.  de  Guise,  sur  un 
passeport,  luy  dit  de  la  part  de  M.  de  Nevers  qu'il 
remettoit  Retel  entre  ses  mains,  pourveû  que  l'on  y 
laissast  seulement  dix  soldats  de  sa  part,  auxquels 
M.  de  Guise  bailleroit  tel  capitaine  et  leur  feroit 
faire  tel  serment  qu'il  voudroit  ;  et  que,  sur  la  moindre 
lettre  de  cachet  du  Roy,  M.  de  Nevers  viendroit  trou- 
ver Sa  Majesté.  M.  de  Guise  en  donna  avis  au  Roy, 
qui  luy  fit  réponce  le  jeudy  13,  portant,  qu'il  approu- 
voit  la  réponce  qu'il  avoit  faite  à  M.  de  Marolles,  et 
que  si  le  Duc  de  Nevers  vouloit  remettre  effectivement 
entre  ses  mains  Retel  et  Mezières,  il  le  pouvoit  venir 
trouver  en  toute  sûreté  ;  Et  que,  cependant  sans  s'ar- 
rester  à  ces  propositions,  il  continuast  toujours  sans 
que  rien  le  pust  divertir,  d'aller  à  Mezières  après  la 
prise  de  Retel  *. 

^  Voy.  Poiitchartrain,  p.  216  ;  Bassompierre,  p.  143  ;  Merc,  fr,^  p.  183. 


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278  JOURNAL   INÉDIT 

Environ  ce  temps,  M.  le  Baron  d'Uxelles*  qui 
estoitmal  avec  M.  le  Grand,  envoyé  un  gentilhomme 
en  poste,  dire  à  la  Reyne,  qu'un  passant  estant  arrivé 
au  Parlement  à  Dijon,  M.  le  Grand  y  estant,  et  dit, 
que  la  Reyne-mère  avoit  esté  poignardée,  M.  le  Grand 
avoit  témoigné  publiquement  une  extrême  joye,  et 
dit  qu'elle  ne  pouvoit  attendre  autre  chose,  et  qu'un 
Gentilhomme  amy  du  Baron  d'Uxelles  estoit  présent. 
La  Reyne  estant  en  une  extrême  colère  de  cela,  et 
M.  Barbinne  sachant  comme  y  remédier,  enfin,  s'a- 
visa de  dire  à  la  Reyne,  que  cette  méchanceté  estoit 
si  énorme,  et  l'affaire  de  si  grande  conséquence 
qu'elle  méritoit  bien  d'estre  éclaircie ,  et  qu'il  faloit 
mander  au  Baron  d'Uxelles  que,  sous  prétexte  de 
quelque  autre  affaire,  il  envoyast  le  gentilhomme  qui 
luy  avoit  donné  cet  avis,  afin  d'apprendre  la  vérité 
par  sa  bouche.  La  Reyne  ayant  approuvé  ce  conseil, 
et  dit  sa  résolution  à  l'homme  du  Baron  d'Uxelles,  il 
répondit,  qu'il  ne  croioit  pas  que  le  Gentilhomme 
voulust  venir  ;  ce  qui  donna  lieu  à  M.,  Barbin,  de  dire 
à  la  Reyne  qu'il  croioit  assurément  que  c'estoit  une 
calomnie  ;  et  sur  ce  que  la  Reyne,  estant  en  carrosse, 
dit  quelque  chose  de  l'affaire  tout  haut,  et  en  s'addres- 
sant  à  la  Princesse  de  Conty^ ,  sans  toutefois  nommer 


*  Jacques  du  Blé ,  baron  puis  marquis  d'Huxelles,  gouverneur  de 
Cliàlon  et  lieutenant-général  en  Bourgogne  en  1611,  mestre  de  camp 
d'infanterie  en  1613,  conseiller  d*État  en  1615,  maréchal  de  camp  en 
1625,  mort  de  blessures  au  siège  de  Privas  en  1629. 

2  Louise-Marguerite  de  Lorraine,  fille  de  Henri  !•%  duc  de  Guise  et 
de  Catherine  de  Clèves,  comtesse  d'Eu,  née  en  1577,  veuve  depuis  1614 
de  François  de  Bourbon,  prince  de  Conty,  qu'elle  avait  épousé  en  1605, 


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d'arnauld  d'andilly.  279 

personne,  et  la  Princesse  de  Conty  ayant  conjecturé  athi  i€I7. 
que  c'estoit  de  M.  le  Grand  qu'elle  vouloit  parler, 
envoyé  quérir  le  Breton,  qui  alla  trouver  M.  le  Grand, 
lequel  fit  faire  un  acte  public  dans  le  Parlement, 
contenant  tout  ce  qui  s'estoit  passé,  lorsque  ledit 
homme  inconnu  estoit  venu  dire  la  nouvelle  cy-»des- 
sus,  et  envoya  cet  acte  à  la  Reyne  pour  justifier  son 
innocence,  et  faire  voir  la  calomnie.  Mais  il  n'arriva 
qu'après^la  mort  du  Maréchal. 

16.  M.  de  Guise  prend  Retel,  par  composition  : 
que  les  soldats  sortiroye.nt  tambour  battant,  etc.  Le 
mesme  jour  de  la  capitulation ,  M.  de  Praslin  fut 
blessé  dans  les  tranchées,  d'une  mousquetade  à  tra- 
vers la  cuisse,  et  M.  de  Bassompierre  fut  un  peu 
effleuré  au  petit  ventre,  d'une  balle  qui  avoit  déjà 
frappé  contre  une  muraille. 

La  Reyne-mère  envoyé  M.  de  Mailloc,  l'un  de  ses 

Gentilsbônrmies  servans,  visiter  M^.  de  Praslin  et  de 

Bassompierre,  et  témoigner  à  M.  de  Guise  et  aux 

principaux  chefs,  le  contentement  qu'elle  avoit  d'eux  * . 

Soissons  fut  investy  le  6,  ou  environ. 


morte  en  1631.  Cette  princesse,  célèbre  par  sa  beauté  et  par  son  es- 
prit, que  Henri  IV  voulut  épouser,  avait  été  en  commerce  de  galan- 
terie avec  le  duc  de  Bellegarde,  grand  écuyer.  Elle  s'attacha  depuis 
au  Maréchal  de  Bassompierre  et  mourut,  dit-on,  de  chagrin  quelques 
mois  après  que  son  vailJant  amant  fut  mis  à  la  Bastille.  On  attribue  à  la 
princesse  de  Conty  Y  Binaire  des  Amours  du  grand  Alcandre.  {Voy,  la 
Notice  de  Bl.  Weiss  sur  cette  princesse.  Biographie  Michaud.) 

'  Foy.  Bassompierre,  p.  Ik3  ;  Merc,  fr.y  p.  183.  Le  récit  du  Mercure 
qui  donne  les  articles  de  la  capitulation  confirme  entièrement  celui 
d'Arnauld  d'Andilly. 


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280  JOURNAL   INÉDIT 

Avru  t«i7.  Environ  le  13,  M.  de  Feuquièrcs  fait  en  huit  heu- 

res un  pont  de  basteaux. 

M.  Arnaud,  maistre  de  camp  des  carabins,  y  per- 
dit M.  de  Montarsis,  sergent  major  de  son  régiment, 
et  du  costé  de  M.  du  Mayne,  le  Baron  de  Montenant 
y  fut  extrêmement  blessé  *• 

17.  Le  Maréchal  d'Ancre  revient  de  Normandie 
à  Paris.  On  dit,  que  ce  qui  le  ramena,  estoit,  qu'on  luy 
avoit  donné  avis  que  sa  femme  vouloit  faire  la  paix. 

24.  Le  Maréchal  d'Ancre  tué  par  commande- 
ment du  Roy.—  Exécuteurs  ;  M.  de  Vitry  (fait  Maré- 
chal de  France,  et  eut  un  don  de  deux  cent  mil  livres 
sur  l'argent  de  la  Maréchale  ;  M.  du  Hallier  ',  son 
frère,  succéda  à  la  charge  de  Capitaine  des  Gardes) 
donna  le  premier  coup  de  pistollet.  M.  le  Baron  de 
Persan^  eut  le  jeudy  27  la  Capitainerie  de  la  Bastille 
au  lieu  de  M.  de  Vouzay,  auquel  on  donna  onze  mil 
écus,  deux  mil  écus  de  pension,  une  charge  de  Mais- 
tre d'hostel.  Il  donna  le  trois  ou  quatrième  coup  de 
pistollet*. 

Guichaumont,  exempt    des  gardes,  donna  le 


1  Voy.  Richelieu,  p.  395;  Merc,  fr.^  p.  188  et  suiv. 

?  François  de  l'Hôpital,  seigneur  du  Hallier,  d'abord  évèque  deMeaux, 
puis  capitaine  des  gardes  du  corps  en  1617,  gouverneur  de  Lorraine, 
de  Champagne  en  1640,  maréchal  de  France  en  1643,  gouverneur  de 
Paris  en  1649,  mort  en  1660.  W  8*est  rendu  célèbre  sous  le  nom  de 
maréchal  de  THôpital.  (Voy.  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  533  ) 

'  Henry  de  Vaudetar,  baron  de  Persan,  gouverneur  de  la  Bastille 
en  1617.  Ayant  épousé  en  1607  Louise  de  THôpital,  il  était  le  beau- 
frère  de  MM.  de  Vitry  et  du  Hallier. 

^  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  388  ;  Richelieu,  p.  424  ;  Pontchartrain, 
p.  232  ;  Brienne,  p.  328. 


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d'arnauld  d'andilly.  281 

deuxième  coup  de  pistollet*.  Ayant,  après  la  mort  Avriuen. 
du  Maréchal ,  appris  qu'il  avoit  une  belle  croix  de 
Diamant  sur  luy,  il  vint  à  Cortade ,  archer  de  la 
Prévosté  de  Thostel,  qui  gardoit  le  corps,  et  la  luy 
demanda  de  la  part  du  Roy.  Cortade,  qui  ne  savoit 
que  c'estoit,  le  déboutonna,  trouva  ladite  croix  pen- 
due à  une  chaine  d'or,  entre  le  pourpoint  et  la  cami- 
sole, et  la  luy  bailla. 

La  Chesnaye,  Taran,  Gêniez,  de  Menan,  du  Fay', 
Boyer ordinaires. 

Sarroques,  Galeteau%  porte-arquebuse  du  Roy. 

Sur  les  dix  heures  du  matin,  le  Maréchal  d'Ancre 
estant  au  Louvre....,  qui  estoit  sur  le  pont  de  la 
porte,  fit  signe  avec  son  chapeau,  à  un  autre,  qui  fit 
signe  à  M.  de  Vitry,  lequel  vint,  suivy  de  quelques- 
uns  des  susnommez];  et  ayant  demandé  M.  le  Maré- 
chal (lequel  estoit  entré  avec  cinquante  Gentilshom- 
mes), on  luy  dit  :  le  voilà  ;  et  il  le  trouva,  qui  lisoit 
une  lettre  sur  le  pont  du  Louvre.  M.  de  Vitry  s'ap- 
procha, et  luy  dit  en  le  saisissant  :  le  Roy  m'a  com- 
mandé de  vous  arrester  et  de  vous  mener  parler  à 
luy.  Le  Maréchal  répondit  :  J'ay  affaire  à  mon  logis. 
Sur  cela,  M.  de  Vitry  luy  bailla  un  si  grand  coup  de 

*  Suivant  le  récit  de  Fontenay-Mareuil,  Guichaumont  aurait  tiré  le 
premier  coup  de  pistolet  et  aurait  tué  le  Maréchal. 

2  Jean  Hurault  de  THôpital,  seigneur  du  Fay,  gentilhomme  de  la 
Chambre  du  Roi.  Il  était  fils  de  Robert  Hurault,  seigneur  de  Belesbat, 
et  de  Madeleine  de  THôpital,  fille  unique  et  héritière  de  Timmortel 
Chancelier. 

*  Galebeau,  suivant  Fontenay-Mareuil.  Il  eut  pour  récompense  la 
place  de  premier  valet  de  chambre. 


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282  JOLRNAL   INÉDIT 

Avril  1617.  pqIjj  (jg^^g  iç  ventre,  qu'il  le  jetta  contre  la  barrière  ; 
et  lors,  il  luy  fut  tiré  tout  de  suite  quatre  coups  de 
pistoUet,  par  les  susnommez.  (Toute  la  journée,,  son 
corps  mort  fut  veû  dans  une  petite  chambrette  ou 
passage  des  soldats  des  Gardes  de  la  porte  du  Lou- 
vre). Quelques-uns  de  ceux  qui  suivoyent  le  Maré- 
chal voulurent  mettre  la  main  à  Fépée;  mais  plus- 
tost  pour  se  retirer  que  pour  faire  résistance. 

M.  le  Colonel  d'Ornano  *  qui  estoit  dans  la  cour  du 
Louvre  lorsque  cecy  s'exécutoit  vint  dans  le  cabinet 
des.....^  dire  au  Roy  que  c' estoit  fait,  lequel,  tout 
plein  de  joye  vint  à  une  des  fenestres  qui  répondent 
sur  la  cour,  et  ayant  son  épée  à  la  main ,  cria  tout 
haut  :  Courage,  mes  amis,  je  suis  maintenant  Roy. 
Et  lors,  tous  ceux  qui  estoyent  dans  la  cour  du  Louvre 
mirent  l'épée  à  la  main,  et  haussant  les  bras,  firent 
un  cri  de  réjouissance,  et  de  protestation  de  service, 
au  Roy. 

Après,  le  Roy  s'en  alla  dans  sa  galerie,  et  se  mit 
sur  le  billard,  où  il  recevoit,  avec  une  contenance  très- 
contente,  et  très-assurée,  toute  la  noblesse  qui  luy 


1  Jean-Baptiste  d*Ornano,  comte  de  Mootlor,  né  en  1581,  capitaine 
des  chevaa-légers  et  colonel  des  Corses  en  1595,  lieutenant  du  Roi  en 
Normandie ,  gouverneur  de  Quillebœuf,  du  Pont-de-rArche,  du  Pont^ 
Saint-Esprit,  '  gouverneur  de  Gaston,  duc  d*Orléans,  en  1619,  disgracié 
et  mis  à  la  Bastille,  rappelé  et  nommé  premier  gentilhomme  de  la 
Chambre  et  surintendant  général  de  la  maison  du  duc  d*0rléans, 
maréchal  de  France  en  1626,  disgracié  une  seconde  fois  par  la  haine 
de  Richelieu  et  enfermé  au  château  de  Vincennes,  où  il  mourut  em- 
poisonné le  2  septembre  1626.  Voy,  le  récit  détaillé  de  sa  première 
arrestation,  par  Arnauld  d'Andilly,  son  ami.  Appendice. 

3  Le  cabinet  des  oiseaux,  suivant  Fontenay-MareuiU 


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d'arnauld  d'andilly.  285 

venoit  faire  la  révérence.  Il  y  fut  encore  une  partie       ^vru  mi. 
de  Taprès-disnée,  et  donnoit  ordre  luy-mesme  à  plu- 
sieurs choses.  Il  dit,  qu'il  y  ayoit  cinq  nuits  qu'il  n'a- 
voit  dorjny. 

Ce  fut  une  chose  incroyable,  que  la  quantité  de 
Noblesse  qui  se  trouva  ce  jour-là  au  Louvre. 
'  Aussitost  après  la  mort  du  Maréchal,  MM.  du  Con- 
seil, qui  estoyent  aux  greffes,  allèrent  trouver  le  Roy, 
lequel  vint  à  eux,  les  larmes  aux  yeux  de  joye  ;  et  dit, 
que  pour  empescber  les  mauvais  desseins  que  le  Ma- 
réchal d'Ancre  avoit  contre  sa  personne,  et  son  Estât, 
il  avoit  esté  contraint  de  le  faire  mourir,  et  qu'à  pré- 
sent, avec  la  grâce  de  Dieu,  il  estoit  Roy. 

M"**  Catherine,  femme  de  chambre  de  la  Reyne- 
mère,  ayant  ouy  le  bruit  et  sceû  la  mort  du  Mafé- 
chai,  l'alla  dire  fort  brusquement  à  la  Reyne-mère, 
laquelle  se  leva  avec  émotion,  de  dessus  son  siège, 
fit  trois  ou  quatre  pas,  puis,  s'arresta  tout  court,  et 
dit  :  Quels  conseils  ! 

Depuis,  elle  se  témoigna  très-constante,  et  incon- 
tinent après,  envoya  dire  au  Roy  par  M.  de  Bressieux 
que  s'il  luy  eust  fait  entendre  le  sujet  des  méconten- 
temens  qu'il  avoit  contre  le  Maréchal  d'Ancre^^  elle 
eust  esté  la  première  qui  luy  eust  conseillé  de  faire 
ce  qu'il  avoit  fait;  qu'elle  prioit  Dieu  que  tout  réus- 
sistpour  son  bien,  et  pour  celuy  de  l'Estat,  et  luy  de 
se  souvenir  toujours  qu'elle  estoit  sa  mère,  et  de  luy 
faire  ce  plaisir  de  prendre  la  peine  de  descendre 
en  bas,  afin  qu'elle  le  pust  voir.  —  Le  Roy  répondit 
qu'il  la    supplioit  de  l'excuser,  s'il  ne  la  voioit, 


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284  JOUllNAL   INEDIT 

Avril  1617.        pour  ce  qu'il  avoit  maintenant  tout  plein  d'affaires  *. 

Madame  la  Princesse  de  Gonty ,  allant  voir  la  Reyne- 
mère,  et  ayant  seû  que  le  Roy  vouloit  luy  ester  ses 
Gardes,  elle  \ny  dit,  pour  Ty  amener  doucement, 
qu'elle  estimoit  qu'il  seroit  bon,  pour  donner  toute 
sorte  de  confiance  au  Roy,  qu'elle  témoignast  ne 
vouloir  point  d'autres  gardes  que  les  siens.  Ce  que 
la  Reyne-mère  ayant  bien  entendu,  elle  dit,  que  ses 
Gardes  se  retirassent. —  M.  de  Vitry  estant  venu  dire, 
de  la  part  du  Roy,  à  M.  de  Presle,  lieutenant  de  la 
compagnie,  qu'il  fist  retirer  ses  compagnons,  il  luy 
répondit,  qu'il  lesupplioit  de  l'excuser  de  leur  porter 
cette  parole,  et  s'il  luy  plaisoit  d'en  prendre  la  peine, 
leur  faire  luy-mesme  ce  commandement.  —  Ge  que 
M.  de  Vitry  fit  ;  et  ainsi,  on  fit  retirer  les  Gardes  de 
la  Reyne-mère,  et  on  luy  bailla  des  Gardes  du  Roy. 

Depuis,  on  ne  la  vit  plus  qu'avec  permission  du 
Roy,  et  ne  sortit  plus  de  sa  chambre,  que  lorsqu'elle 
partit  pour  aller  à  Blois  ;  et  Ton  mura  quelques-unes 
de  ses  portes  ^ 

La  permission  de  la  voir  fut  baillée  à  Mesdames  \ 
à  M.  de  Bressieux  *,  à  M.  de  Luçon  *,  et  à  M.  de 
Ville-Savin*. 

^  Voy,^  sur  Tassassinat  du  maréchal  d'Ancre,  Fontenay-Marcuil, 
p.  363,  374  et  sui?.;  Richelieu,  p.  395  et  suiv.,  où  se  trouve  un  juge- 
ment très-remarquable  sur  le  maréchal  d*Ancre,  et  414  et  suiv.;  Ponr 
chartraio,  p.  217  et  suiv.  ;  Brienne,  p.  325  ;  Mém.  de  Mathieu  Mole, 
p.  144;  Bassompierre,  p.  147  ;  Merc.  fr,^  p   193  et  suiv. 

2  Voy,  Pontchartrain,  p.  227. 

3  Mesdames  Henriette  et  Chrétienne,  ses  filles. 
>*  Son  premier  éeuyer. 

^  Son  aumônier  et  chef  de  son  Conseil. 
*  Son  secrétaire  des  commandements. 


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d'arnauld  d'andilly.  285 

Il  avoit  pleû  incessamment  quinze  jours  ou  trois  avhi  un. 
semaines  durant,  jusques  à  ce  jour-là,  et  dès  lors  il 
ne  plut  plus,  jusqu'au  jour  que  la  Reyne-mère  partit. 
M.  de  Saint-Géran,  qui  avoit  un  Brevet  de  Maré- 
chal de  France ,  s'en  alla  mal-content  de  ce  que  l'on 
avoit  fait  M.  de  Vitry  Maréchal  de  France  et  luy 
non.  Ce  fut  le  premier  mal-content. 

J'ay  ouy  dire  à  M.  Barbin,  le  2â  mars  1618,  que 
véritablement  les  affaires  du  Roy  estoyent  en  tel  estât, 
que  tous  les  Princes  ne  pouvoyent  pas  durer  encore 
trois  semaines,  et  estoyent  réduits,  ou  à  mourir  sur  la 
brèche,  ou  à  se  jetter  entre  les  bras  du  Roy  et  en  sa 
miséricorde,  en  rendant  toutes  les  places  qu'ils  te- 
noyent;  et  que,  de  fait,  M.  le  comte  d'Auvergne  avoit 
écrit,  que  M.  le  Président  le  Jay  le  pressoit  de  résou- 
dre le  traitté,  avec  M.  du  Mayne,  dont  il  demeureroit 
pour  ostage  ;  et  qu'afln  de  donner  lieu  de  l'accom- 
plir honorablement,  le  Roy  s'acheminast  à  Compiè- 
gne  où  M.  du  Mayne  le  viendroit  trouver,  et  qu'en 
effet,  M.   Barbin  avoit  le  traitté  dans  sa  pochette, 
lorsque  le  Maréchal  fut  tué  ;  que  M"'  de  Nevers 
traittoit  aussi,  et  que  la  capitulation  que  le  Roy  luy 
fesoit,  estoit  qu'elle  s'en  vinst  à  la  Cour,  et  qu'elle  y 
seroit  la  mieux  venue  que  jamais,  en  laissant  ses 
places  entre  lès  mains  du  Roy ,  qui  estoit  le  mestre 
et  le  seul  party  que  l'on  faisoit  à  tous  les  autres  Prin- 
ces ;  que  le  tiers-parti  que  l'on  alléguoit  estoit  une 
chimère  (  M.  Déagent  dit  la  mesme  chose ,  mais  le 
Roy  se  servoit  de  ce  bruit,  pour  retenir  en  devoir  le 
Maréchal  d'Ancre)  ;  et  que  ceux  qui  estoient  tous  les 


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286  JOURNAL   INÉDIT 

ATrti  1617 .       plus  assurez  au  service  du  Roy  et  de  la  Reyne  sont 
ceux,  qui  aujourd'hui,  pour  se  rendre  considérables, 
veulent  faire  croire  qu'ils  eussent  mis  sus  de  grandes 
forces  pour  ce  tiers-party  (imaginaire)  ;  que  M.  de 
Montmorency  n'eût  pas  seulement  pensé  à  remuer  ; 
que  M.  de  Lesdiguières  offroit  de  venir  trouver  Leurs 
Majestez,  avec  toutes  ses  forces,  si  elles  le  luy  com- 
mandoyent,  et  pour  ne  pas  recevoir  un  affront,  en 
demeurant  sans  Gouvernement,  le  Roy  luy  en  ayant 
promis  un,  et  Monsieur  le  Comte  ne  voulant  pas  lâ- 
cher celuy  de  Dauphiné,  on  luy  bailloit  le  Gouver- 
nement de  Berry  ;  que  M.  le  Grand  avoit  offert  tout 
ce  qui  estoit  en  sa  puissance,  et  mandé,  qu'il  ne  sépa- 
roit  point  le  service  du  Roy  d'avec  celuy  de  la  Reyne; 
que  M.  d'Espernon  demandoit  seulement  quelques 
commissions,  afin  de  contenir  toutes  choses  en  son 
Gouvernement  *,  etc. 

La  nuit  d'entre  le  lundy  et  le  mardy,  on  vint  à 
coups  de  coignée ,  abattre  le  pont  qui  alloit  de  la 
chambre  de  la  Reyne-mère,  au  Parterre.  Ce  bruit  la 
surprit.  Elle  mit  la  teste  à  la  fenestre,  leur  demanda 
que  c'estoit,  et  leur  commanda  de  s^arrester.  Ils  ré- 
pondirent que  le  Roy  l' avoit  commandé.  Lors,  elle 
referma  la  fenestre ,  et  dit  :  Il  faut  que  le  Roy  soit 
obéy.  Elle  dit  aussi  :  On  a  tort  d'avoir  peur  que  je 
m'enfuye.  —  Ce  déplaisir  a  esté  un  des  gtans  qu'elle 
ayt  reçus.  On  demeura  trois  heures  à  toujours  frap- 
per, pour  abattre  ce  pont 

*  Voy,  Pontchartrain,  p.  227. 


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d'arnaold  d'andilly.  287 

Depuis,  elle  désira  de  s'en  aller.  On  proposa  Mou-       Avm  len. 
ns,  Tours,  Blois.  —  Elle  choisit  Blois.  Le  Roy  luy 
3bai!la,  et  luy  promit  d'entretenir  la  compagnie  en- 
ère  de  ses  Gardes. 

Incontinent  après  la  mort  du  Maréchal  d'Ancre, 
t  la  matinée  mesme,  M.  de  Vitry  envoya... ,  exempt 
es  Gardes,  arrester  la  Maréchale  d'Ancre  dans  sa 
lambre,  et  luy  y  vint  après,  et  la  mena  dans  la 
lambre  du  Louvre,  où  l'on  avoit  mis  Monsieur  le 
rince.  Elle  luy  demanda  permission  d'emporter  ses 
igues,  ce  qu'il  luy  accorda,  et  elle  les  prit  dans  ses 
binets  et  ses  coffres,  et  les  emporta  dans  ses  Cas- 
tles,  dont  on  en  porta  une  au  Roy,  qui  la  donna  à 
Reyne  sa  femme.  Mais  on  dit  que  l'autre  ne  fut 
int  baillée,  et  fut  prise  à  ladite  Maréchale,  laquelle, 
yant  demandée ,  lorsqu'on  la  mena  à  la  Bastille, 
luy  ayant  esté  répondu,  qu'on  ne  la  trouvoit  point, 
3  s'écria  qu'il  y  avoit  dedans  pour  trois  cens  mil 
;us  de  pierreries. 

Ladite  Maréchale  témoigna ,  et  encore  depuis, 
î  résolution  extrême,  et  peu  de  regret  de  la  mort 
son  mary,  disant,  qu'il  estoit  cause  de  leur  mal- 
ir,  et  que  s'il  l'eust  creûe,  il  y  a  longtemps  qu'ils 
sent  esté  en  Italie,  et  qu'elle  s'y  en  alloit  sans  luy; 
qui  estoit  vray.  Et  de  fait,  on  trouva  plusieurs 
res  emballez  chez  elle,  et  la  plus  part  de  ses 
ibles  de  Lésigny,  jusques  aux  chenets,  estoyent 
I  arrivez  à  Florence,  où  elle  les  avoit  envoyez  par 
•  d'Amsterdam. 
'ay  ouy  dire  à  MM.  les  Aubry ,  maistres  des  Re- 


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288  JOURNilL    INIÎDIT 

Avril  i«i7.'  questes,  députez  pour  l'interroger  et  faire  l'inven- 
taire de  ce  qu'elle  avoit  dans  la  chambre  où  on  Tavoit 
menée,  qu'ils  n'avoyent  jamais  veû  femme  plus  cons- 
tante, ou  de  meilleur  esprit.  Ils  ont  dit  à  d'autres 
qu'elle  leur  avoit  dit,  que  s'ils  la  vouloyent  sauver, 
sans  doute  cecy  s'accommoderoit;  qu'elle  pourroit 
toujours  sur  l'esprit  de  la  Reyne,  autant  que  jamais, 
et  qu'elle  feroit  des  merveilles  pour  eux. 

Après  avoir  esté  fort  questionnée  par  MM.  Aubry, 
enfin  elle  reconnut  avoir  pour  six  cens  mil  livres  de 
promesses  de  Lumagne  *  (en  la  maison  duquel  on 
avoit  esté,  et  interrogé,  il  l'avoit  reconnu)  et  les 
bailla. 

Elle  avoit  sur  soy  son  filet  de  grosses  perles ,  et 
ayant  esté  fort  pressée  de  dire  où  elles  estoyent,  elle 
les  baillast  volontairement,  après  les  avoir  cachetées, 
et  prié  qu'on  les  baillast  au  Roy  en  main  propre.  On 
dit  que  le  Roy  les  voulut  donner  à  M.  de  Luynes,  le- 
quel ne  les  voulut  accepter,  et  fit  que  le  Roy  les  donna 
à  la  Reyne  sa  femme. 

Elle  avoit  acheté  de  la  succession  de  M.  le  Cardi- 
nal de  Joyeuse  pour  cinq  cens  mil  écus  de  principal 
en  rentes  sur  les  monts  de  Rome  ^ 

Il  ne  fut  jamais  une  si  infatigable  avarice  ;  car 
elle  ne  dépensoit  pour  toutes  choses  généralement 

^  Banquier  originaire  dltalie. 

2  Ce  passage  en  explique  un  des  Mémoires  de  Fontenay-Mareuil,  où 
il  est  dit  que  le  Maréchal  avait  acheté  à  Rome  quatre  ou  cinq  cent 
mille  livres  de  lieux  de  monti.  Le  sens  de  ces  mots  échappant  au  sa- 
vant éditeur  de  Fontenay-Mareuil,  il  met  en  note  :  On  lit  ainsi  au 
manuscrit  autographe  {Foy.  Fonteuay-Mareuil,  p.  300). 


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d'arnauld  d'andillt»  289 

quelconques,  que  deux  mil  cinq  cens  écus  par  an.  Avrinei?. 
Elle  n'avoit  que  quatre  ou  cinq  vallets  qui  la  servis- 
sent d'ordinaire.  Une  bavolette  accommodoit  son 
manger,  qui  n'estoit  quasy  rien,  comme  un  pigeon, 
et  un  petit  morceau  de  veau,  et  mangeoit  dans  cinq 
ou  six  écuelles  d'or,  disant  que  cela  réjoûissoit  le 
coeur. 

Elle  passoit  quelquefois  cinq  ou  six  heures  de 
temps  à  faire  des  boulettes  de  cire,  dans  de  l'eau, 
avec  une  bougie,  et  puis  les  mangeoit. 

Le  vendredy  28,  elle  fut  menée  à  minuit  à  la 
Bastille.  Fiesque  parla  à  elle ,  comme  elle  passoit. 
Elleluy  dit:  Tais-toi,  ingrat,  etc.*. 

Le  jeudy  14  mai,  elle  fut  menée  à  la  Concierge- 
rie. On  luy  laissa  dans  sa  chambre,  son  apoticaire  et 
deux  archers  écossais,  fort  âgez,  pour  la  garder. 
Quelque  temps  après,  la  Cour  ordonne  cent  francs, 
pour  sa  nourriture,  qui  furent  passez  dans  la  semaine. 
Le  lundy  22  may,  elle  fut  interrogée  pour  la  pre- 
mière fois. 

A  l'instant  de  la  mort  du  Maréchal  d'Ancre,  on 
envoya  des  Gardes  en  sa  maison,  proche  du  Louvre, 
où  estoit  son  fils. 

Les  meubles  qui  estoyent  dans  la  dite  maison  sont 
estimez  trois  cens  mil  écus.  Ils  furent  entièrement 
pillez  par  les  Gardes,  excepté  quelques  bagues  em- 
portées par  les  vallets  de  chambre  du  Maréchal , 
aussitost  qu'ils  surent  sa  mort. 

<  yoy.  Pontchartrain,  p.  228. 

10 


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290  JOURNAL   INÉDIT 

AVI  II  1617;  Le  fils  du  Maréchal  d' Ancre  demeura  là  deux  jours, 

couché  sur  de  la  paille,  mourant  presque  de  faim. 
Enfin,  il  fut  mené  au  Louvre,  et  Fiesque  le  prit  avec 
luy.  — On  dit  que  le  Roy  et  la  Reyne  régnante  en 
eurent  pitié,  ayant  sceu  cette  inhumanité  et  que  la 
Reyne  le  voulut  voir.  On  dit,  qu'il  est  fort  gentil,  et 
parle  quatre  ou  cinq  langues.  Il  dit  à  quelqu'un  : 
Tout  misérable  que  vous  me  voyez  maintenant,  j'ay 
eu  l'honneur  de  bailler  quatre  fois  la  chemisé  au  Roy, 
et  de  faire  le  serment  de  Premier  Gentilhomme  de  sa 
chambre  \ 

Aussitost  après  la  mort  du  Maréchal  d'Ancre , 
M.  de  la  Ville  aux  Clercs  ayant  trouvé  M.  Mangot 
qui  venoit  au  Louvre,  sur  le  bruit  de  cette  nouvelle, 
il  luy  demanda  les  Sceaux  de  la  part  du  Roy.  Aussi- 
tost, il  va  chez  luy,  les  apporte,  et  trouve  ledit  sieur 
de  la  Ville  aux  Clercs  à  la  porte  du  Louvre,  qui  luy 
dit,  qu'il  avoit  charge  du  Roy  de  les  recevoir.  M.  Man- 
got lui  dit  :  Les  voilà  ! — Sur  cela,  M,  de  Vitry  sur- 
vint, qui  dit  :  Non  Monsieur,  s'il  vous  plaist  de  pren- 
dre la  peine  de  venir,  je  sauray  du  Roy  s'il  aura 
agréable  que  vous  montiez.  Ils  allèrent  donc.  M.  Man- 
got attendit  au  pied  du  degré.  M.  de  Vitry  revint, 
qui  le  fit  monter;  et  estant  arrivez  dans  la  salle, 
M.  de  Luynes  vint,  qui  dit  à  M.  Mangot,  que  le  Roy 
luy  avoit  donné  charge  de  recevoir  les  sceaux  de  luy; 

<  Henri  Coacini,  ué  en  1603.  L'arrêt  qui  condtmna  sa  mère  Tayaot 
déclaré  ignoble  et  incapable  de  tenir  états,  offices  et  dignités  en  France, 
il  se  retira  à  Florence  sous  le  nom  de  comte  de  la  Pena,  {Foy,  Riche- 
lieu, p.  423;  Pontchartrain,  p.  223.) 


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d'arnauld  d'aiNdillv.  :29l 

ainsi  il  les  bailla.  Après,  M.  de  Persan  amena  Avru  len. 
M.  Mangot  dans  la  chambre  de  M.  de  Vitry,  ou  il  fit 
apporter  son  disner,  et  y  demeura  jusques  à  cinq  ou 
six  heures  du  soir,  que  M.  de  Brusselles-Courtin  qui 
l'estoit  venu  trouver  là  avec  quelques-uns  de  ses 
frères,  ayant  aussi  trouvé  au  Louvre  deux  ou  trois 
autres  maistres  des  Requestes,  s'en  revint  avec  luy, 
et  raccompagna  jusques  en  son  logis. 

Au  mesme  temps,  M.  de  Luçon  estant  venu  trou- 
ver le  Roy,  Sa  Majesté  luy  dit  qu'il  allast  en  son 
Conseil,  avec  les  autres  pour  aviser  à  ce  qu'il  y  avoit 
à  faire,  et  commanda  à  M.  de  Vignolles  de  l'y  me- 
ner. Y  estant  arrivé,  MM.  de  Villeroy,  de  Chasteau- 
neuf,  Jeannin,  etc. ,  commencèrent  à  le  regarder,  et 
M.  Arnaud  seul  fut  au  devant  de  luy.  —  M.  de  Vi- 
gnolles dit  à  ces  Messieurs  la  charge  qu'il  avoit  du 
Roy  ;  sur  quoy  M.  de  Villeroy ,  ayant  concerté  avec 
M.  de  Chasteauneuf,  le  pria  de  retourner  vers  le  Roy, 
pour  savoir  s'il  luy  plaisoit  qu'il  travaillast  en  qualité 
de  secrétaire  d'Estat,  ou  de  conseiller  d'Estat'. 

Depuis,  M.  de  Luçon  a  eu  permission  de  voir  la 
Reyne-mère  {vide  supra) ,  et  a  parlé  diverses  fois  à 
M.  de  Luynes. 

Aussitost  après  la  mort  du  Maréchal  d'Ancre ,  on 
bailla  des  Gardes  à  M.  Barbin;  On  scella  chez  luy,  et 
MM.  de  Castille  et  Aubry*  luy  furent  baillez  pour 


*  Foy,  Fontenay-Mareuil,  p.  377  ;  Richelieu,  p.  420,  qui  confiriiK; 
de  tous  points  le  récit  d*Amauld  d'Andilly  ;  Voy.  Pontchartrain,  p.  222  ; 
Brienne,  p.  327;  Rohan,  p.  145;  Meir,  fr,y  p.  200. 

2  Aubry,  Maître  des  Requêtes  et  Président  du  grand  Conseil. 


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292  JOURNAL   INÉDIT 

Avril  1617.  commissaires,  pour  faire  inventaire  chez  lui.  Ils  ne 
trouvèrent  que  cinq  mil  neuf  cens  tant  de  livres  en 
argent,  et  pour  quatre  ou  cinq  cens  écus  de  vais- 
selle d'argent.  Sur  quoy,  il  vint  infinis  créanciers. 
Enfin,  il  se  trouva  très-pauvre,  et  le  capitaine  Bour- 
gongne.  Exempt,  et  ses  autres  Gardes  pillèrent  tout 
son  argent,  et  sa  vaisselle.  Parmy  ses  papiers,  il  se 
trouva  plusieurs  lettres  du  Maréchal  d'Ancre,  si  in- 
solentes qu'il  ne  s'est  jamais  rien  veû  de  semblable, 
car  entr' autres  choses,  j'ai  oûy  dire  à  M.  de  Cas- 
tille,  qu'il  y  avoit:  qu'il  l'avoit  mis  en  la  charge 
où  il  estoit,  pour  faire  tout  ce  qu'il  luy  plairoit,  et 
qu'il  avoit  rage  jusques  dans  la  moelle  des  os,  contre 
luy  de  voir  qu'il  faisoit  le  contraire,  et  que  cent  dia- 
bles, il  vouloit  qu'il  fist  avec  des  troupes  sans  ar- 
gent, etc.  \ 

Vendredy  28,  M.  Barbin  fut  mené  dans  son 
carrosse  au  Fort-l'Evesque,  à  deux  heures  après 
midy. 

Quelque  deux  jours  après,  la  Reyne-mère  envoya 
dire  à  M.  le  Président  Jeannin,  que  s'il  avoit  quelque 
souvenir  d'elle ,  elle  le  prioit  de  s'employer  pour 
M.  Barbin,  lequel  elle  connoissoit  pour  très-homme 
de  bien.  Et  en  disant  à  dieu  au  Roy,  elle  insista  en- 
core extrêmement  sur  cela. 

May.  Le  dimanche  7  mai,  M.  Barbin  fut  mené  à  la  Bas- 

*  Voy,  Richelieu,  p.  406.  Richelieu  cite  un  passage  d'une  de  ces 
lettres  dans  laquelle  se  trouvent  presque  textuellement  les  expressions 
rapportées  par  Arnauld  d'Andilly. 


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d'arnauld  d'ajndilly,  293 

tille,  et  mis  à  la  chambre  de  dessous  Monsieur  le      AvriiiMT. 
Prince. 

M.  Barbin,  ayant  seû  la  mort  du  Maréchal,  voulut 
aller  au  Louvre,  mais  à  cause  de  la  presse,  il  ne  put 
passer  le  coin  de  la  chapelle  de  Bourbon ,  et  luy 
ayant  esté  conseillé  par  MM.  de  Fontaines-Bouée, 
Lhoste  et  de  Bragelonne  d'entrer  chez  M.  de  Bres- 
sieux  ,  il  y  entra.  M""  de  Bressieux,  qui  avoit  pris 
médecine,  vint  demy-habillée  le  prier  de  monter  en 
haut.  M.  de  Luçon  arriva  aussitost,  qui  dit  à  M.  Bar- 
bin, avec  un  visage  fort  content,  qu'ils  estoyent 
maintenant  en  repos,  et  à  couvert  (ou  autres  paroles 
semblables)  ,  puisque  le  Maréchal  d'Ancre  estoit 
mort.  A  quoy  M.  Barbin  luy  répondit  :  Hé  !  Mon- 
sieur, vous  moquez-vous  de  ne  juger  pas  que  le 
Contre-coup  de  tout  cecy  tombera  sur  nous  ?  Après, 
arriva  M.  Mangot,  qui  s'amusoit  à  regarder  à  la  fe- 
nestre  sur  la  rue ,  et  puis  le  Capitaine  Bourgongne , 
Exempt  des  Gardes,  vint  dire  à  M.  Barbin,  qu'il  avoit  * 
commandement  du  Roy  de  le  mener  en  son  logis. 

11  ne  s'est  jamais  veû  plus  grandes  insolences  que 
celles  dont  on  usa  envers  M.  Barbin.  11  vit  emporter 
tous  ses  meubles  en  sa  présence ,  vendre  ses  che- 
vaux et  son  carrosse,  et  sortit  de  chez  luy,  pour  aller 
au  Fort-l'Evesque,  avec  un  seul  demy  quart  d'écu 
dans  sa  pochette.  11  a  esté  les  six  premiers  mois  à 
la  Bastille  si  misérablement  traitté,  que  le  Roy  don- 
nant trois  écus  par  jour  pour  sa  nourriture,  luy,  et 
un  homme,  ne  dépensoient  pas  quinze  sols,  et  es- 
toyent souvent  réduits  au  pain  et  à  l'eau,  pour  ce  que 


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294  JOURNAL   INÉDIT 

Avril  1617.  le  peu  de  viande  qu'on  leur  bailloit,  estoit  puante,  et 
le  vin  estoit  aigre,  et  un  jour,  un  soldat  leur  appor- 
tant à  disner,  une  vive,  la  plus  petite,  et  la  plus  puante 
qui  fût  jamais,  dit  à  M.  Barbin  quMl  fist  bonne  chère, 
et  que  M.  de  Persan  commandoit  qu'il  fust  bien 
traitté,  et  que  Ton  luy  baillast  tout  ce  qu'il  demande- 
roit  '. 

Dès  que  M.  le  Maréchal  d'Ancre  fut  mort,  on  alla 
sceller  chez  M.  Feydeau,  auquel  on  bailla  un  Exempt 
des  Gardes.  On  le  crut  dépossédé,  mais  il  se  remit, 
On  alla  aussi  chez  M.  de  Choisy. 

Après  que  l'on  eust  pris  tout  ce  que  le  Maréchal 
d'Ancre  avoit  sur  luy,  et  dans  ses  quatre  pochettes, 
on  bailla  le  corps,  presque  dépouillé  à  un  nommé 
Cortade ,  archer  de  la  Prévosté  de  l'hostel,  lequel 
trouva  dans  une  cinquième  pochette,  une  liasse  de 
papiers,  lesquels  ayant  montrez  à  la  Rivière,  l'un  de 
ses  Exempts,  ils  les  présentèrent  ensemble,  à  M.  le 
Chancelier,  et  à  M.  le  Président  Jeannin.  MM.  de 
Meaupou  et  Arnaud  furent  commis  à  en  faire  l'in- 
ventaire. Il  se  trouva  qu'ils  montoyent  à  dix-neuf 
cens  tant  de  mil  livres.  On  ordonna  trois  mil  écus  de 
récompense  à  la  Rivière  et  à  Cortade.  M.  le  Grand- 
Prévost  fit  mettre  Cortade  en  prison  pottr  ne  luy 
avoir  baillé  les  papiers;  ce  qui  fut  trouvé  fort  mau- 
vais. 

Le  Maréchal  d'Ancre  estant  mort,  le  Roy  manda 

'  Voy.  Richelieu,  p.  622.  Les  détails  donnés  par  Richelieu  sur  Tar- 
restation  de  Barbin  et  le  traitement  qu'on  lui  fit  subir  confirment 
pleinement  ceux  d'Amauld  d'Andilly. 


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d'arinauld  d'andillv,  295 

incontinent  M,  de  Villeroy  (qui  fut  remis  en  sa  Avriueii. 
charge) ,  M,  le  Président  Jeannin  (fait  surintendant 
des  fmances),  M.  du  Vair  (à  qui  Ton  rendit  les 
Sceaux),  et  M.  le  Chancelier  pour  estre  chef  du  con- 
seil. Il  estoità  Panfou  et  arriva  le  lendemain  25. — 
M.  de  Pisieux...*, 

M.  de  Maupeou  eut  le  ControUe  Général  des  fi- 
nances. Le  Roy  écrivit  aux  Gouverneurs  des  Provin- 
ces une  lettre  très-bien  faite  -. 

M.  deLuynes  eut  les  charges  de  Lieutenant  Géné- 
ral en  Normandie  et  de  premier  Gentilhomme  de  la 
chambre...  Le  pont  de  l'Arche  et  Quillebeuf...  Il 
commença  dès  cette  nuit  du  24,  dans  la  chambre  du 
Koy\ 


*  a  Le  24  avril  1617,  le  Roi  ayant  fait  tuer  le  maréchal  d'Ancre  et 
»  envoyé  ensuite  la  Reine-mère  à  Blois,  il  rappela  M.  le  chancelier  de 
»  Sillery  pour  chef  du  Conseil,  rendit  les  sceaux  à  M.  du  Vair,  appela 
»  aussi  M.  de  Villeroy,  relégua  en  Avignon  M.  de  Richelieu,  lors  évêque 
»  de  Luçon  et  secrétaire  d*État,  depuis  cardinal,  et  envoya  M.  Barhin 
»  prisonnier  au  Fort-l'Evôque,  d*où  il  fut  transféré  à  la  Bastille,  et 
»  toute  la  faveur  et  le  crédit  passèrent  en  un  moment  à  M.  de  Luynes, 
n  qui  avait  eu  la  principale  part  dans  le  dessin  de  la  mort  du  maréchal 
»  d'Ancre  ;  car  M.  de  Vitry,  qui  fut  ensuite  maréchal  de  France,  n'y 
»  avait  eu  que  celle  qu'il  lui  avait  donnée  ;  et  M.  de  Modène,  parent 
»  de  M.  de  Luynes,  M.  Déageant,  dont  j'ai  ci  devant  parlé,  et  M.  Fron- 
»  cin,  étaient  ceux  qui  avaient  principalement  été  informés  du  secret; 
»  mais  nul  autre,  pour  ce  qui  était  de  mettre  la  main  à  la  plume,  n'y 
»  avait  tant  travaillé  que  M.  Déageant  ;  et  c'est  ce  qui  fit  sa  fortune 
»  et  lui  donna  tant  de  part  dans  les  affaires,  qu'il  fut  non-seulement 
»  ministre  sans  en  porter  le  nom,  mais  celui  de  tous  qui  agissait  da- 
»  vantage,  etc.  »  (Mémoires  d'Arnauld  d'Andilly,  éd.  cjtée,  p.  371.) 

2  yoy,  cette  lettre,  Merc,  fr,^  p.  201. 

3  Au  sujet  de  l'élévation  de  Luynes  à  la  place  du  maréchal  d'Ancre, 
•Richelieu  rapporte  un  mot  du  duc  de  Bouillon  :  «  La  taverne,  comme 

»  dit  peu  après  le  maréchal  de  Bouillon,  étant  toujours  demeurée  la 


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206  JOURNAL   INÉDIT 

4v.il  ifii7.  25.     Le  peuple  déterre,  dans  Saint-Germain  le 

corps  du  Maréchal  d'Ancre  (que  le  Roy  y  avoit  fait 
enterrer  le  soir  d'auparavant,  à  dix  heures),  le 
traisne,  pend  au  bout  du  Pont-Neuf,  retraisne,  met 
en  pièces,  brusle,  en  jette  les  cendres  au  vent,  et 
outre  toutes  ces  fureurs  firent  infinies  autres  inso- 
lences effroyables  *. 

M.  de  Longueville  vient  trouver  le  Roy. 

M.  du  Mayne  envoyé  le  comte  de  Suse^,  son  ne- 
veu au  Roy,  avec  des  lettres  et  toutes  sortes  d'offres. 

M.  de  Thianges  vint  trois  ou  quatre  jours  après, 
de  la  part  de  madame  de  Nevers,  et  M.  de  Marolles 
de  la  part  de  M.  de  Nevers'. 

M.  du  Mayne  désarme  à  Soissons,  On  dit  que  le 
Roy  luy  envoya  dix  mil  écus  sur  ses  appointemens, 
pour  ce  qu'il  n'avoit  aucun  argent  pour  licencier  ses 
troupes. 

Deux  et  trois  jours  après,  le  Roy  licencia  tous  les 

»  mùmc,  n'y  ayant  eu  autre^changeraent  que  de  bouchon.  »  Richelieu, 
p.  426.  {Voy,  Pontchartrain,  p.  232  et  235;  Brienne,  p.  328;  Rohan, 
p.  l/i8;  Mercfr,  p.  2U  ) 

*  Voy.  Richelieu,  p.  427,  le  danger  que  courut  on  cette  circonstance 
révoque  de  Luçon  sur  le  Pont-Neuf,  et  la  présence  d'esprit  avec  la- 
quelle il  s'en  tira  {Voy,  Pontchartrain,  p.  231,  et  Merc  fr.^  p.  206,  des 
détails  horribles  sur  cette  profanation  des  restes  du  Maréchal.) 

2  Jacques  Honorât  de  la  Baume,  comte  de  Suze,  marquis  de  Villars, 
fils  de  Rostaing  de  la  Baume,  comte  de  Suze,  et  de  Madeleine  des  Prez 
de  Montpezat,  sœur  utérine  du  duc  du  Mayne.  D'autres  mémoires 
disent  que  M.  du  Mayne  envoya  son  beau-frère,  ce  qui  me  parait  plus 
vrai.  Rostaing,  comte  de  Suze  n'étant  mort  qu'en  1622,  son  fils  ne  de- 
vait pas  porter  son  titre  en  1617.  Le  comte  de  Suxe  présenta  au  Roi 
les  clefs  de  la  ville  de  Soissons. 

'  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  386  ;  Richelieu,  p.  431  ;  Pontchartrain, 
p.  224  î'.V^rc.  /r.,  p.  215. 


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d'arnauld   d'andilly.  297 

nouveaux  Régimens  de  l'armée  de  Soissons  ;  et  ceux       Avm  \êM, 
de  Nivernois,  incontinent  après. 

L'armée  de  M.  de  Guise  demeura  encore  entrete- 
nue afin  d'empescher  l'entrée  des  Reistres,  et  Wal- 
lons, qui  venoyent  pour  les  Princes.  M.  de  MaroUesdit 
qu'il  y  a  voit  dix-huit  cens  chevaux,  et  huit  cens  mous- 
quetaires à  cheval.  Un  nommé  G  and  conduisoit  quel- 
que huit  cens  de  ces  chevaux,  les  deux  Cadets,  deux 

ou  trois  cens,  et  un  nommé le  reste.  Ils  avoyent 

esté  arrestez  six  semaines,  faute  d'argent;  enfin, 
M.  de  Nevers,  ayant  engagé  le  Duché  de  Retelois  à 
M.  de  Buillon  pour  six  cens  mil  livres,  M.  de  Buillon 
répondit  pour  le  payement  dcsdiis  Gens  de  Guerre 
et  trouva  de  l'argent  sur  son  crédit  en  Allemagne*. 

Il  venoit  par  mer,  pour  le  Roy,  trois  mil  hommes 
des  Païs-Bas,  savoir,  quinze  cens  François,  et  quinze 
cens  Flamens  commandez  par  M 

On  n'avoit  pris  que  quinze  cens  François  afin  de 
choisir  les  soldats  et  les  capitaines  la  plus  part  ca- 
tholiques et  affidez.  On  leur  bailloit  un  Colonel  fla- 
mend,  afin  qu'ils  n'obéissent  point  à  un  chef  fran- 
çois  qui  n'eût  pas  entendu  leur  ordre. 

Le  Roy  a  voit  demandé  neuf  mille  hommes  à  MM. 
des  Estats,  sçavoir,  les  quatre  mil  qu'il  leur  entre- 
tient, et  cinq  mil  qu'ils  doivent  fournir,  suivant  le 
traitté;  mais  ils  s'estoyent  exécutez  d'en  bailler  plus 
de  quatre  mil,  sur  ce  que  les  archiducs  avoyent 
armé,  et  que  cela  les  tenoit  en  allarme.  La  vérité  es- 

*  Foy,  Merc.  fr.,  p.  188. 


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î298  JOURNAL   INÉDIT 

Avril  1617.  toit,  qu'au  lieu  des  quatre  mil  promis,  il  n'en  venoit 
que  trois  mil  *• 

30.  M,  de  Longueville  njarié  avec  M"*  de  Sois- 
sons,  sans  grande  cérémonie,  Oq  croioit  que  le  Roy 
y  seroit,  mais  un  avis  qu'on  donna  de  quelque  en- 
treprise, fut  cause  de  rompre  ce  dessein  ^. 

M,  le  Prince  de  Join ville  arrive  d'Auvergne. 

M«y.  Lundy,  !"•    On  fut  la  nuit  en  allarme  au  Louvre, 

sur  un  avis  qu'on  avoit  donné,  de  quelque  entreprise 
•  contre  le  Roy,  laquelle  on  disoit  qui  se  devoit  exécu- 
ter par  la  galerie. 

Tous  les  prisonniers  retenus  durant  ces  derniers 
mouvemens  sur  plusieurs  avis,  mis  en  liberté  par  le 
Roy.  —  M.  de  Relébat  ',  maistre  des  Requestes,  com- 
missaire. 

3.  La  Rey ne-mère  part.  Le  Roy  parle  à  elle  dans 
son  antichambre  d'elle,  Monsieur  estant  avec  luy. 
I^  Reyne  commença.  Ce  qu'ils  devoyent  se  dire  estoit 
arresté.  On  avoit  fait  glisser  dans  ladite  antichambre, 
environ  vingt  seigneurs  et  gentilshommes  affidez, 
lesquels  entroyent  en  disant  à  l'Exempt  le  mot  de 
saint  Louis.  Le  Roy  attendit  dans  ladite  antichambre, 
environ  la  longueur  de  deux  Pater.  Puis  la  Reyne- 
mère  sortit,  avec  une  mine  basse  et  alangourie.  Le 


*  Votj,  Pontchartrain,  p,  233-236. 

2  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  385  ;  Pontchartrain,  p.  233;  tuerc,  fr.^ 
p.  215. 

3  Pierre  Hurault  de  l'Hôpital,  seigneur  de  Belesbat,  conseiller  au 
grand  Conseil,  maître  des  Requêtes  en  1610,  mort  en  1623. 


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D'ARNAUf.D   d'AWDILLY.  299 

Roy  vint  à  elle,  le  chapeau  à  la  main.  Elle  s'en  alla  M«y  mi. 
vers  la  fenestre,  s'appuya  sur  son  coude,  pleura  ; 
puis  elle  vint,  et  luy  dit  ce  qui  avoit  esté  résolu  ;  et  le 
Roy  luy  répondit  ensuite.  Elle  répliqua,  et  insista, 
(outre  ce  qui  estoit  convenu)  sur  le  fait  de  M.  Bar- 
bin  ;  à  quoy  le  Roy  ne  répondit  pas,  de  craiinle  de 
faillir.  Le  Roy  alla  ensuite  sur  le  balcon. 

Ce  qui  la  suivit,  pour  demeurer  avec  elle  :  M.  le 
marquis  de  Thémines,  M.  de  Bressieux,  M.  de  Presle, 
M.  de  Yillesavin,  M.  de  Luçon. 

Dames  :  M"*'  de  Guercheville  *,  M"'*  de  Bressieux. 

Ce  qui  l'accompagna  jusques  à  Blois,  (où  elle  arri- 
va le  8)  :  M.  de  la  Curée,  par  commandement  du 
Roy,  avec  cinquante  chevaux-légers. 

Ce  qui  l'accompagna  jusques  au  Bourg- la-Reyne: 
M.  de  Monbason,  M.  de  SaintrLuc,  M.  deLiancourt. 

Dames  :  Mesdames  Christine,  et  Henriette  Marie, 
M*""  la  Douairière  de  Guise,  M"'*  d'Elbeuf. 

MM.  du  Conseil,  ni  aucunes  compagnies  souve- 
raines, ou  autres,  ne  prirent  congé  d'elle. 


*  Antoinette  de  Pons,  marquise  de  Guercheville,  dame  d'honneur  de 
la  Reine-m^^e,  morte  en  1632.  Elle  avait  épousé  en  premières  noces 
Henry  de  Silly,  comté  de  la  Roche-Gnyon,  et,  en  secondes  noces, 
Charles  du  Plessis,  seigneur  de  Liancourt,  marquis  de  Guercheville, 
gouverneur  de  Paris.  Elle  prit  le  titre  de  marquise  de  Guercheville 
pour  ne  point  porter  celui  de  Liancourt  qu'avait  peu  honoré  la  du- 
chesse de  Beaufort.  On  sait  que  la  marquise  de  Guercheville  fut  plus 
célèbre  encore  par  sa  vertu  que  par  son  éclatante  beauté,  et  qu'elle 
opposa  aux  poursuites  de  Henri  IV  une  résistance  d'autant  plus  louable 
à  une  époque  de  grande  licence.  (Voy.  son  article  par  M.  Hipp.  de  La- 
porte,  dans  la  Biographie  Michaud,  et  les  Mémoires  de  l'abbé  de 
Choisy,  coll.  Petitot,  2*  série,  t.  lxiii,  p.  215  et  suiv  ) 


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300  JOUKNAL   INÉDIT 

M«y  i«i7.  Tout  le  peuple  témoigna  estre  fort  triste,  en  la 

voyant  partir,  et  plusieurs  pleurèrent.  La  pluye,  qui 
a  voit  esté  depuis  la  mort  du  Maréchal,  recommença 
ce  jour-là,  et  il  plut  le  lendemain,  jeudy  4,  toute  la 
journée*. 

Aussitost  qu'elle  fut  partie,  le  Roy  alla  coucher  au 
bois  de  Vincennes,  extrêmement  acccompagné.  Il 
en  revint  le  samedy  13,  veille  de  la  Pentecoste,  et 
fut  confessé  par  le  père  Arnoux  *,  son  confesseur, 
pris  au  lieu  du  père  Cotton^  Il  toucha  aussi  les 
malades*. 

Le  matin,  les  Cours  souveraines  vinrent  haranguer 
le  Roy,  pour  louer  l'action  de  la  mort  du  Maréchal 
d' Ancre  ^ 

M.  le  Premier  président  de  Verdun.  Sacrifice... 
Rencontre  le  Roy...  Appelloit  M.  de  Vitry,  Aaron. 

M.  le  Grand  Écuyer  arrive  et  va  trouver  le  Roy. 

Travail,  (qui  avait  sceû  le  dessein  de  la  mort  du 
Maréchal)  pris,  sur  ce  qu'il  avoit  voulu  persuader  à 
M.  de  Luynes  et  à  M.  de  Bressieux  de  tuer,  ou  em- 

^  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  385  ;  Richelieu,  p.  /ï33  et  h3S  ;  Pont- 
chartrain,  p.  234  ;  Brienne,  p.  329;  Merc,  fr  ,  p.  215.  Suivant  la  plu- 
part de  ces  inémoii*es,  c'est  le  4  que  partit  la  Reine-m?îre. 

2  Le  Père  Jean  Arnoux,  jésuite,  confesseur  du  Roi  en  1617,  à  la  re- 
traite du  P.  Cotton,  fut  éloigné  en  1621  et  mourut  en  1636.  Prédicateur 
habile,  il  s'est  surtout  signalé  par  ses  controverses  avec  les  ministres 
protestants  de  Charenton. 

3  Le  Père  Pierre  Cotton,  célèbre  jésuite,  né  en  1564,  confesseur  de 
Henri  IV  et  de  Louis  XHI,  mort  en  1626. 

*  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  385. 

*  Voy,  Mém.  de  Mathieu  Mole,  p.  144  et  suiv.,  le  texte  pour  ainsi 
dire  authentique  des  paroles  adressées  par  le  Roi  au  Parlement  lois  de 
l'assassinat  du  maréchal  d'Ancre. 


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d'arnauld  d'andillt.  301 

poisonner  la  Reyne-mère.  Envoyé  par  le  Roy  au  Maywn. 
Parlement.  MM,  Courtin...  commis  par  la  Cour\ 
MM.  de  Luynes  et  de  Bressieux  déposent  contre  Tra- 
vail, lequel  reconnoist  toute  la  déposition  de  M.  de 
Luynes  estre  très-véritable,  et  qu'il  luyen  avoit  en- 
core dit  davantage.  Condamné  le  mécredy  (et  exé- 
cuté ledit  jour)  à  estre  roué,  recevoir  deux  coups  vif, 
puis,  étranglé,  son  corps,  et  le  procès  bruslés,  et  les 
cendres  jettées  au  vent  *. 

4.  MM.  du  Mayne,  de  Nevers,  de  Vendosme, 
de  Cœuvres  et  le  Président  le  Jay  viepnent  trouver 
le  Roy  au  bois  de  Vincennes  ^ 

M.  de  Retz  arrive  de  Bretagne. 

7.  M.  de  Thou  meurt*;  sa  place  du  Conseil  et 
sa  pension  baillées  à  M.  le  Président  Chevalier,  qui. . . 
Sa  place  de  Garde  de  la  Bibliothèque  baillée  à  son 
fils  \ 

9.     M.  de  Crequy  arrive. 


*  Jean  Courtois  et  Guillaume  Délandes ,  Conseillers ,  suivant  le 
compte-rendu  du  Procureur  Général  MoIé. 

2  Fontenay-Mareuil,  p.  391;  Richelieu,  p.  433  et  suiv.,  où  se  trou- 
vent de  curieux  détails  sur  cette  affaire  et  cet  individu.  V&y,  aussi 
Mém.  de  Mathieu  Mole,  p.  147,  et  les  Mémoires  de  Déageant  ;  Merc.  fr., 
p.  217. 

5  Voy,  Merc,  fr.^  p.  216.  Foy.  aussi  3Ierc.  fr,y  p.  218,  la  Déclaration 
en  faveur  des  Princes,  portant  révocation  des  précédentes. 

*  Voy.  Richelieu,  p.  489.  Le  Président  de  Thou  mourut  le  8,  suivant 
\e  Merc,  fr.^p,  223, 

»  François-Auguste  de  Thou,  fils  aîné  de  l'immortel  Président,  né 
vers  1607,  Conseiller  au  Parlement,  maître  des  Requêtes,  Conseiller 
d*État,  compromis  dans  l'afifaire  de  Ciftq-Mars,  condamné  à  mort,  en 
vertu  d'une  ordonnance  de  Louis  XI,  pour  n'avoir  pas  révélé  le  com- 
plot, et  exécuté  avec  son  ami  en  1642, 


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302  JOURNAL    INÉDIT 

May  1617.  17,     M.  Déagent  fait  par  le  Roy  Intendant  des 

finances  \ 

18  environ.  M.  le  Comte  d'Auvergne  arrive.  Le 
Roy  lui  fit  une  très-bonne  réception. 

19,  environ  ce  jour.  M.  d'Orvilliers  Vialart\ 
Gentilhomme,  estant  avec  M.  de  Fossez,  assassiné 
d'un  coup  de  pistollet  par  les  gens  de  M.  de  Boucon- 
ville. 

M.  le  Prince,  ayant  désiré  voir  quelqu'un  de  la  part 
du  Roy,  pour  témoigner  l'obligation  qu'il  avoit  à  sa 
Majesté,  M,  de  Modène  '  y  fut  envoyé  ;  et  après  que 
M.  le  Prince  l'eust  sondé  de  tous  les  costés,  pour 
essayer  de  tirer  quelque  chose  de  luy,  voyant  qu'il 
n'en  pouvoit  venir  à  bout,  enfin,  il  luy  dit,  qu'il  luy 
vouloit  parler  franchement,  et  que  croyant  que  Ton 
l'avoitplustostmis  dans  la  Bastille  par  raison  d'Estat, 
que  pour  mal  qu'il  eust  fait,  il  estimoit  que  le  Roy 
ne  seroit  pas,  peut-estre,  conseillé  de  l'en  tirer  si  tost, 
craignant  que  l'on  ne  se  voulust  servir  de  son  nom, 
pour  prétexte  de  quelques  mouvemens.  Mais  que  cela 


*  Voy,  Pontchartrain,  p.  235  ;  Mémoires  d'Arnauld  d'Andilly,  p.  372, 
passage  cité  plus  haut. 

2  Jean  Vialart,  seigneur  d*Orvilliers  ? 

*  Gentilhomme  du  comtat  Venaissin,  parent  de  M.  de  Luynes.  Toy., 
sur  ce  personnage,  Fontenay-Mareuil,  p.  383.  L'éditeur  des  Mémoires 
de  Fontenay-Mareuil  le  nomme  Esprit  Raymond  de  Mormoîron,  depuis 
Comte  de  Modène,  et  ajoute  qu*il  accompagna  en  1647  le  duc  de  Guise 
dans  son  expédition  de  Naples.  Mais  ce  Comte  de  Modène  étant  né  en 
1608  et  mort  en  1670,  ainsi  que  Vindique  l'article  très-intéressant  que 
lui  a  consacré  M.  Hipp.  de  Laporte  dans  la  Biographie  Michaud,  me 
paraît  6tre  le  fils  de  celui  dont  il  est  question  dans  le  Journal  d'Ar- 
nauld d'Andilly  et  dans  les  Mémoires  sur  la  môme  époque. 


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d'arnauld  d'andilly,  303 

estant,  il  supplioit  Sa  Majesté  de  luy  conserver  sa        way  mi. 

bonne  volonté,  et  luy  en  faire  sentir  les  effets,  lorsque 

ses  affaires  le  luy  permettroyent.  Et  que,  cependant, 

il  le  supplioit  de  faire  une  œuvre  charitable,  en  luy 

faisant  bailler  sa  femme,  à  la  charge  qu'elle  demeu- 

reroit  prisonnière  aveque  luy. 

Environ  ce  temps,  on  luy  àvoit  démuré  la  fenestre 
qui  regarde  sur  les  champs,  à  Touverture  de  laquelle 
il  s'evanouït,  à  cause  du  grand  air.  On  dit  que, 
sans  cela,  il  n'eust  pas  peu  vivre  longtemps,  et  qu'il 
conomençoit  déjà  à  s'enfler'. 

21  ou  environ.  M.  de  Nevers,  qui]  s'en  estoit 
allé  quelque  temps  auparavant,  témoignant  n'estre 
guères  content,  revient  à  la  Cour, 

23.  M,  de  Vitry  au  Parlement  Maréchal  de 
France,  Le  jour  précédent,  il  avoit  esté  receu  Con- 
seiller à  la  Cour.  Sur  la  contestation  meûe,  savoir  si 
M.  deVitry ,  comme  Conseiller,  et  Maréchal  de  France, 
précéderoit  ceux  qui  n'estoy^nt  que  Conseillers,  mais 
plus  anciens  que  luy,  comme  M.  le  Grand,  et  M.  de 
Liancourt  ;  il  fut  jugé  qu'il  n'auroit  place  qu'après 
eux,  suivant  son  ordre  de  réception.  Cela  estant 
jugé,  M.  de  Liancourt  se  retira,  et,  après  la  présen- 
tation et  le  serment  fait  par  M.  de  Vitry,  Monsieur 
le  Président  luy  dit,  que,  comme  Maréchal  de  France, 
il  n' avoit  point  là  de  séance,  mais  que,  comme  Con- 
seiller à  la  Cour,  il  y  en  pouvoit  prendre,  selon  son 
ordre  de  réception  *. 

*  Voy,  Pontchartrain,  p.  225. 

2  Voy,  Mém.  de  Math.  Mole,  p.  147  ;  9ierc.  fr.,  p.  223. 


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304  JOURNAL   INÉDIT 

May  1617.  Il  y  assista  M.  le  Comte  de  Soissons,  (auquel  Mon- 

sieur le  Premier  Président  demanda  son  avis  à  part; 
ce  que  l'on  dit  ne  se  devoir  faire  qu'aux  Fils  de 
France,  Monsieur  le  Prince  ayant  souvent  opiné  avec 
les  autres),  M.  TEvesquede  Noyon  Pair  de  France*, 
M.  de  Rets,  M.  de  Monbason,  M.  de  Rohan,  M.  de 
Souvré,  M.  le  Grand. 

Monsieur  le  Premier  Président  ordonna  à  tous  les 
Gentilshommes,  et  Seigneurs,  qui  estoyent  dans  le 
Parlement,  d'oster  leurs  épées,  ou  de  sortir.  Ils 
estèrent  tous  leurs  épées. 

Ce  jour,  M.  de  Luynesprit  au  Louvre,  le  départe- 
ment qu'avoit  M'"'  la  Marquise  de  Guercheville. 

25.  L'assemblée  de  ceux  de  la  Religion  préten- 
due réformée ,  qu'ils  tenoyent  à  la  Rochelle,  dès 
auparavant  la  mort  du  Maréchal  d'Ancre,  se  sépare*. 

26.  M"'*  la  Princesse  de  Condé  va  saluer  le  Roy, 
(et  la  Reyne)  et  le  supplier  de  luy  vouloir  permettre 
d'entrer  prisonnière  dans  la  Rastille,  avec  Monsieur 
le  Prince. 

Le  Roy  le  luy  accorde,  et  d'y  mener  seulement 
une  Damoiselle.  Sur  quoy,  son  petit  nain  ayant  sup- 
plié le  Roy  de  trouver  bon  qu'il  n'abandonnast  pas 
maîtresse,  Sa  Majesté  le  lui  permit  aussi.  La  mesme 
après  disnée.  Madame  la  Princesse  entra  dans  la 
Rastille,  où  elle  fut  receûe  de  Monsieur  le  Prince  avec 

1  Charles  de  Balzac,  trésorier  de  la  Sainte-Chapelle,  grand  archi- 
diacre de  Rouen,  doyen  de  Tours,  évoque  et  comte  de  Noyon,  pair  de 
France  en  1596,  mort  en  1627. 

2  Voy  Richelieu,  p.  /i/i3. 


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d'arnauld  d'andilly.  305 

tous  les  témoignages  d'amitié  qui  se  peuvent  imagi-        way  len. 
ner,  et  jusques-là  qu'il  ne  la  laissa  jamais  en  repos, 
qu'elle  ne  luy  eust  dit  qu'elle  lui  pardonnoit  *. 

27.  Le  Roy  va  à  Saint-Germain.  Il  revient  le 
lundy  au  soir,  et  souppe  en  chemin,  à  la  Chaussée, 
chez  le  Président  Chevalier. 

30.  M.  de  Guise  arrive,  accompagné  de  mil 
Gentilshommes.  Le  Roy  avoit  trouvé  bon  que  l'on 
allast  au  devant  de  luy.  M.  de  Joinville,  M.  deRohan, 
M.  de  Termes,  M.  de  Candalle,  M.  de  la  Valette  et 
autres  y  avoyent  mené  chacun  une  troupe.  Il  trouva 
le  Roy  dans  la  Grande  Galerie,  extrêmement  accom- 
pagné, et  de  telle  sorte,  que  les  plus  vieux  disoyent 
n'avoir  jamais  veu  la  Cour  plus  grosse.  Le  Roy  luy 
fit  la  meilleure  chère  qui  se  puisse  imaginer  au 
monde.  On  tient  qu'il  luy  dit  :  Mon  Cousin,  vous 
m'aviez  bien  dit  qu'il  se  faloit  défaire  du  Maréchal 
d'Ancre,  mais  il  n'estoit  pas  encore  temps.  M.  du 
Mayne  estoit  tout  contre  le  Roy.  On  croioit  que  M.  de 
Guise  et  luy  se  feroyent  froid  ;  mais  M.  de  Guise,  se 
voyant  avoir  tout  l'avantage,  luy  tendit  la  main,  avec 
un  visage  riant  ;  ce  que  voyant  M.  du  Mayne,  il 
s'avança,  et  se  saluèrent. 

M.  le  Comte  d'Auvergne,  et  M.  de  Longue  vil  le 
estoyent  aussi  avec  le  Roy.  M.  de  Ne  vers  n'y  estoit 
point,  et  je. n'y  vis  point  non  plus  M.  de  Vendosme. 

31.  M.  de  la  Valette,  à  trois  heures  et  demie  du 
matin,  fait  appeller  M.  de  Schomberg  (revenu  le  soir 

^  Voy.  Pontchartrain,  p.  237  ;  Merc,  fr.^  t.  v,  p.  229. 

20 


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306  JOURNAL   INÉDIT 

May  letT.  précédent  avec  M.  de  Guise) ,  à  cause  qu'il  avoit 
logé  autour  de  Metz  avec  les  Reistres  et  Lansquenets, 
et  mesme  que  quelques-unes  de  ses  troupes  avoyent 
logé  dans  Tabbaïe  de  Sainte-Glossine,  dont  est  ab- 
besse  une  fille  bastarde  de  M,  d'Espernon  *.  Ils  se 
battirent  à  l'épée  seule,  et  estant  venus  aux  prises  et 
tous  deux  tombez  par  terre,  M.  de  Créquy  y  arriva, 
lequel  les  sépara  et  les  accorda.  Ils  ne  furent  blessez 
ni  Fun  ni  l'autre,  et  M.  de  Schomberg  eut  seulement 
le  dessus  de  l'œil  un  peu  froissé. 

Juin.  Mécredy  7.     Le  Roy  va  à  Fontainebleau;  revient 

le  mardy  37.  La  Cour  y  fut  si  grosse,  que  Ton  y 
compta  jusqu'à  trente-quatre  Princes,  et  Princes- 
ses... ^ 

Le  mesme  jour,  M.  deLuynes  fut  receu  Conseiller 
au  Parlement. 

10.  Gardes  redoublées.  Et  sur  ce  que  l'on  dit 
au  Roy  que  les  Princes  (qui  la  pluspart  n'estoyent 
pas  encore  venus)  en  pourroyent  prendre  de  la  dé- 
fiance, il  répondit,  qu'il  ne  s'enquéroit  point  de  cela, 
et  que  partout  où  il  seroît,  il  vouloit  estre  le  maistre. 

MM.  du  Mayne,  de  Ne  vers  et  le  Cardinal  de  Guise 
vinrent  à  Fontainebleau  en  mesme  Carrosse  la  se- 
maine d'après,  et  le  dit  sieur  Cardinal  se  témoigna 
ouvertement  amy  de  M.  de  Nevers  contre  son  frère 
M.  de  Guise,  lequel  ayant  seû,  durant  le  dit  voyage 

*  Louise,  bâtarde  de  la  Valette,  abbesse  de  Sainte-Glossine  de  Metz, 
morte  en  1647. 
2  Voy.  Pontchartrain,  p.  240. 


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d'arn\uld  d'andilly.  â07 

de  Fontainebleau ,  que  quelques  Gentilshommes  J"»»  »«»7. 
avoyent  tenu  des  paroles  à  son  désavantage,  dans  la 
chambre  mesme  du  dit  sieur  Cardinal,  il  y  alla,  avec 
quelques-uns  des  siens,  et  dit  là,  tout  haut  :  On  dit 
qu'il  y  en  a  icy  qui  ont  mal  parlé  de  moy  ;  si  je 
savois  qu'ils  sont,  je  les  jetterois  tout  à  cette  heure 
par  les  fenestres. 

1 2.  Femme  de  Chartres  prise  dans  les  capucins 
du  faubourg  Saint- Jacques  par  M.  le  Procureur  Gé- 
néral; avoue  avoir,  esté  fort  solicitée  de  tuer  le  Roy  ; 
monstre  le  Couteau  *• 

17.  Environ  ce  temps,  différend  entre  MM.  de 
Guise  et  de  Nevers,  touchant  la  Capitainerie  duChas- 
teau-Porcien. 

M.  et  M"'  la  Comtesse  de  Soissons,  mal  ensemble 
touchant  la  Table  de  Grand-Maistre,  dont  elle  prenoit 
l'argent,  et  que  luy  vouloit  tenir,  par  le  conseil  de 
M.  de  Longueville.  Cela  commença  dès  Paris,  et 
Madame  la  Comtesse  ayant  découvert  ce  dessein, 
parla  à  son  fils  fermement. 

24.  L'archevesque  de  Pise,  Ambassadeur  ex- 
traordinaire de  Savoye^,  eut  aussi  audiance,  touchant 
les  affaires  de  Savoye  *. 


*  yoy,  Mém.  de  Mathieu  Mole,  plusieurs  pièces  concernant  cette 
affaire. 

2  yoy,  Pontchartrain,  p.  238. 

s  Arnauld  d*Andilly  ne  mentionne  pas  dans  son  Journal  une  affaire 
importante  qui  fit  beaucoup  de  bruit  pendant  les  mois  de  juin  et]  de 
juillet,  savoir,  le  rétablissement  de  Texercice  de  la  religion  catholique 
eu  Béarn  contre  la  volonté  des  Réformés.  Foy,  à  ce  sujet  Richelieu, 
p.  443  ;  Pontchartrain,  p.  248  ;  Merc,  fr„  p.  60  et  suiv.,  318  et  suiv. 


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308  JOUaN\L    INÉDIT 

Juillet  1617.  Dimanches.     Le  Roy  va  à  Saint-Germain,  et 

en  revient  le  iundy  10. 

6.  La  Maréchale  d'Ancre  monte,  et  est  inter- 
rogée. 

7.  Le  procès  est  rapporté  par  MM.  Courtin,  et 
Deslandes*,  Commissaires.  M.  Courtin  est  d'avis  de 
la  mort,  et  qu'elle  fust  pendue.  M.  Deslandes  opine 
au  bannissement. 

8.  Arrest  contre  la  Maréchale  et  exécution.  Ils 
estoyent  dix-neuf  juges.  Il  y  en  eut  dixHsept  à  la 
mort,  et  les  deux  autres  y  revinrent,  qui  estoyent 
M.  Deslandes  et  M.  Paluau  ^. 

Lorsqu'on  luy  prononça  son  arrest,  un  prisonnier 
luy  dit  à  l'oreille,  qu'elle  dist  qu'elle  estoit  grosse  ; 
ce  qu'elle  fit.  Ce  qui  ayant  mis  les  juges  en  peine, 
on  s'assembla  chez  Monsieur  le  Premier  Président, 
où  on  résolut  de  luy  envoyer  deux  Conseillers,  qui 
luy  représentèrent  le  tort  qu'elle  se  faisoit,  ayant  dit 
en  son  interrogatoire,  qu'il  y  avoit  quatre  ans  qu'elle 
n'avoit  couché  avec  son  mary.  Sur  la  quelle  raison, 
et  aussi,  qu'on  la  feroit  visiter,  et  autres  considéra- 
tions, elle  se  désista.  On  luy  nomma  quatre  Confes- 
seurs. Elle  choisit  M.  le  Clerc.  Elle  demanda  pardon 


^  Guillaume  de  Landes,  seigneur  de  Maigneviile,  conseiller  au  Par- 
lement de  Paris  en  1572,  mort  doyen  de  la  Grand*Chambre  en  1630. 

2  Denis  Palluau,  reçu  conseiller  au  Parlement  de  Paris  en  1580.  — 
Amauld  d*AndiUy  dit  que  Deslandes,  qui  avait  opiné  pour  le  bannis- 
sement, revint  à  la  mort,  mais  Richelieu  dit  au  contraire  qu'il  résista 
énergiquement  à  toutes  les  instances  qui  lui  furent  faites  et  persista 
dans  son  avis.  Ce  trait  honore  trop  le  courageux  et  loyal  rapporteur 
pour  qu*on  ne  se  fasse  un  plaisir  de  le  rapporter. 


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d'arnauld  d'andilly.  309 

à  Patrocle  *,  et  le  pria  de  dire  à  Monsieur  le  Chan-  imiiei  tan. 
celier,  qu'elle  le  luy  demandoit  aussi  ;  et  dit  aussi 
quelque  chose  du  Commandeur  de  Sillery.  Elle  mou- 
rut chrestiennement  et  fort  courageusement.  La 
charrette  n'ayant  pu  arriver,  jusques  à  Téchaffaut, 
à  cause  de  la  presse,  on  lui  fit  mettre  pied  à  terre, 
et  elle  marcha  fort  bien,  et  monta  Téchaffaut  sans  se 
faire  tirer.  Voyant  le  bourreau  qui  luy  aydoit,  elle 
demanda  avec  quelque  promptitude,  qui  il  estoit.  Son 
confesseur  luy  dit  que  c' estoit  un  homme  qui  devoit 
estre  là.  Elle  dit  alors  au  Bourreau  :  Venez,  venez 
donc,  et  me  dites  tout  ce  qu'il  faudra  faire.  On  tient 
qu'elle  avoit  dit,  un  peu  auparavant  :  qu'il  ne  prist 
envie  à  personne  d' estre  en  faveur  auprès  des  Roys, 
et  des  Grans,  et  que  c' estoit  un  méchant  métier. 
Lorsqu'elle  fut  preste  à  recevoir  le  coup,  elle  se  tint 
les  mains  jointes,  pour  l'attendre,  sans  remuer  en 
façon  du  monde,  et  la  teste  tomba  à  ses  pieds,  sur 
l'échaffaut  mesme. 

On  dit  que  quand  la  Reyne-mère  seût  cette  nou- 
velle, elle  frappa  sur  sa  cuisse,  et  dit  :  la  pauvre 
femme  !  Elle  est  cause  de  son  malheur,  et  du  mien  ; 
son  mary  est  plus  coupable  qu'elle.  Si  elle  m'eust 
creûe,  elle  ne  seroit  pas  où  elle  est.  Après,  elle  de- 
manda, si  elle  estoit  morte  constamment?  Et  comme 
on  luy  répondit  qu'ouy,  elle  dit  :  J'en  loue  Dieu  ; 
car  je  craignoîs  le  contraire  pour  elle  *. 

*  Ecuyer  de  la  Reine,  gentilhomme  du  Commandeur  de  Sillery. 
2  yoy.^  sur  la  condamnation  et  la  mort  de  la  Maréchale  d'Ancre, 
Fontenay-Mareuil,  p.  389  ;  RicheUeu,  p.  hUh  ;  Pontchartrain,  p.  242  ; 


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310  JOURNAL   INÉDIT 

Juillet  1617.  Montaubert  *  et  Yincenze  ^  furent  absous,  et  l'on 

ordonna  seulement  à  Montaubert  de  s'abstenir,  pour 
deux  ans,  d'aller  en  Picardie. 

9.     M.  de  Montmorency  arrive. 

Environ  12.  Le  Prince  de  Sedan  arrive  à  la 
Cour^ 

Environ  ce  jour.  Livre  des  quatre  ministres  de 
Charenton,  pour  réponce  au  Père  Arnoux*. 

Décret  d'ajournement  personnel ,  par  le  Lieute- 

Brienne,  p.  328.  Il  est  à  regretter  que  les  Mémoires  de  Mathieu  Mole 
soient  muets  sur  cette  affaire.  Le  Merc,  fr,^  qui  s*étend  longuement  sur 
rhistoire  du  temps  et  qui  donne  de  grands  détails  sur  tous  les  événe- 
ments quels  qu'ils  soient,  mentionne  en  quelques  mots  seulement 
l'affaire  de  la  maréchale  d'Ancre  à  la  dernière  page  du  t.  iv,  et,  ce 
qui  est  digne  de  remarque,  garde  le  silence  sur  le  procès  et  sur  la  mort 
de  cette  femme  célèbre. 

*  François  Gouffier,  seigneur  de  Thois  et  de  Montaubert,  secrétaire 
du  maréchal  d'Ancre,  fils  de  Thimoléon  Gouffier,  seigneur  de  Montau- 
bert, vice- amiral  sur  les  côtes  de  Picardie. 

2  Vincentio  Ludovici,  autre  secrétaire  du  Maréchal  d'Ancre. 

3  Frédéric-Maurice  de  la  Tour,  fils  aîné  du  duc  de  Bouillon  et  frère 
du  grand  Turenne,  né  en  1605,  prince  de  Sedan  du  vivant  de  son  père, 
puis  duc  de  Bouillon  ,  pair  de  France,  fit  la  guerre  en  Hollande  et  se 
signala  au  siège  de  Bois-le-Duc  en  1629,  et  à  celui  deMastrick  en  1632, 
commanda  la  cavalerie  en  Flandres  en  1635,  et  au  siège  de  Breda 
en  1637,  se  signala  à  la  bataille  de  la  Marfée  en  16^ ,  fut  lieutenant 
général  en  Italie.  Arrêté  à  Gazai  en  16^2  comme  accusé  de  conspira- 
tion contre  le  Roi,  il  passa  en  Italie  en  1646,  revint  en  France,  prit 
part  aux  troubles  de  la  Fronde,  fit  son  accommodement  en  1651,  fut 
duc  d'Albret  la  môme  année  et  mourut  en  1652.  {Voy,  P.  Anselme, 
t.  IV,  p.  540.)  Suivant  Pontchartrain,  p.  242,  c'est  le  29  juin  que  le 
prince  de  Sédi^n  arriva  à  la  Gour. 

A  Ges  quatre  ministres  étaient  Montigny,  Dumoulin,  Durand  et  Mes- 
trezat.  {Voy,  Richelieu,  p.  472).  L'évoque  de  Luçon,  éloigné  de  la  Reine 
par  l'ordre  du  Roi  et  relégué  dans  son  évèché,  consacra  ses  loisirs  à 
réfuter  ce  livre  dans  un  ouvrage  publié  sous  le  titre  de  :  La  défense 
(tes  principaux  points  de  notre  créance  contre  ta  tettre  deo  quatre  mi- 
nistres de  Charenton, 


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d'arnauld  d'aisdilly.  311 

nant  Civil.  Appel  à  la  chambre  de  TÉdit.  La  Grand  Jutiietien. 
Chambre  se  saisit  de  l'affaire,  d'autant  que  le  Pro- 
cureur Général  estoit  seul  partie ,  et  que  le  Roy  ne 
donne  point  de  jM^ivilége  contre  luy.  Deux  Conseillers 
de  la  chambre  de  l'Edit,  M.  de  Grieux  et  M...  en 
viennent  faire  pleinte  au  Conseil.  Ordonné,  que  la 
Cause[seroit  évoquée  au  Conseil,  attendu  la  Conten- 
tion entre  le  Parlement.  Depuis,  il  fut  remonstré  par 
ia  Grand  Chambre,  qu'il  n'y  pouvoit  avoir  de  con- 
tention entr'elle  et  la  chambre  de  l'Édit,  qui  n'estoit 
nullement  saisie  de  l'affaire  *. 

14.     Nouvelle  de  la  prise  de  Fougères  par  Gué- 

inadeu^  L'affaire  est,  queGuémadeu,  n'ayant  pu 

obtenir  son  abolition,  touchant  la  mort  du  baron  de 

Nevet,  il  fut  renvoyé  au  Parlement  de  Bretagne.  Sur 

cela,  il  se  résout  de  reprendre  Fougères  ;  fait  son 

entreprise,  escalade,  use  d'infinies  indignitez  envers 

la  Fayolle,  Lieutenant  de  la  Compagnie  des  Gardes, 

commandée  par  M.  du  Hallier,  et  assemble  quel- 

ques-uns  de  ses  amis.  Aussitost,  le  Roy  fait  partir 

quatre  compagnies  du  Régiment  des  Gardes,  pour  y 

aller,  et  envoyé  M.  de  Vendosme'  et  M.  le  Maréchal 

de  Vitry  (qui  eut  grande  broûillerie,  sur  ce  sujet,  avec 

M.  de  Rets,  indigné  contre  Guémadeu,  pour  lequel  il 

avait  donné  sa  parole  au  Roy  ;  et  de  là  fut  rompue 


*  Voy.  Merc.  fr.,  p.  55  et  suiv. 

2  Le  baron  de  Guémadeuc,  un  des^  principaux  seigneurs  de  Bretagne, 
gouverneur  de  Fougères,  avait  tué  le  baron  de  Nevet  pour  une  question 
de  préséance  aux  États  de  cette  Province.  (Voy,  Merc,  /r.,  t.  iv,  p.  332.) 

3  Le  duc  de  Vendôme  était  (Gouverneur  de  Bretagne. 


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312  JOURNAL   INÉDIT 

Juillet  i«i7.  leur  amitié,  qui  auparavant,  estoit  très  grande) ,  qui  y 
vont,  avec  vingt  gentilshommes  seulement.  Guémadeu 
se  remet  entre  leurs  mains.  Us  luy  promettent  de  le 
sauver.  Le  Roy,  pour  leur  donner  espérance  d'en 
venir  à  bout,  leur  mande  de  le  mener  au  vieux  Palais 
de  Rouen,  au  Gouverneur  duquel,  Sa  Majesté  manda 
de  le  garder  avec  autant  de  soin,  que  sa  propre  vie. 

Le  mécredy  9  aoust,  lorsque  Ton  n'y  pensoit 
point,  M.  du  Rollet,  ayant  receu  commandement  du 
Roy,  amène  Guémadeu,  avec  cinquante  Archers, 
dans  la  Bastille. 

21 .  Maugiron,  fille  d'honneur  de  la  Reyne,  s'en 
va.  Sa  Majesté  luy  donne  dix  mil  escus,  à  la  charge 
de  se  marier  en  Dauphiné,  et  par  son  Commande- 
ment, et  à  condition  aussi,  qu'elle  ne  pourrait  jamais 
venir  à  la  Cour. 

27.  Prise  de  Verôeil  en  Piémont  \  par  Dom  Pe- 
dro de  Tolède,  Gouverneur  de  Milan  ^. 

Le  Roy  va  à  St-Germain,  et  en  revient  le  samedy. 

Aoust.  Dimanche  6.     M.  de  Modène  revient  de  Blois  où 

il  avoit  esté  envoyé  vers  la  Reyne-mère,  laquelle  fut 
très  contente  de  luy,  et  luy  donna  un  diamant  de 
deux  mil  escus  *. 


<  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  /^Ol  ;  Richelieu,  p.  682.  La  villo  fut 
prise  le  25,  suivant  Richelieu  ;  Voy.  Pontchartrain,  p.  238,  2^1,  245; 
Merc,  />•.,  p.  180  et  suiv. 

2  Don  Pedro  de  Tolède,  Général  des  Galères  de  Naples,  Connétable 
de  Castille,  Ambassadeur  de  France  en  1608,  gouverneur  de  Blilan. 
{Voij,  son  article  par  M.  Weiss,  Biographie  Michaud.) 

s  yoy,  Richelieu,  p.  676  ;  Pontchartrain,  p.  265. 


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d'arnauld  d'andilly.  313 

M.  de  Bressieux  arrive  le  jour  mesme.  aousi  un. 

11.  L' Evesché  de  Lisieux ,  valant  trente  ou  trente- 
cinq  mil  livres,  donné  par  le  Roy  à  Monsieur  le  Garde 
des  Sceaux, 

12.  Le  Roy  va  à  Saint-Germain,  et  revient  le 
jeudy. 

Déclaration  touchant  les.  clinquans,  observée.  Le 
Roy  avoit  envoyé  au  Parlement  une  prolongation 
pour  trois  mois,  laquelle  fut  refusée  *. 

16.  Environ  ce  temps  M.  le  Grand,  mal  avec 
M.  le  Président  Jeannin,  touchant  la  charge  de  Sur- 
intendant des  finances. 

22.  Don  de  la  confiscation  de  la  Maréchale 
d'Ancre,  à  M.  de  Luynes,  vérifié  entièrement  au  Par- 
lement. Les  conclusionè  des  Gens  du  Roy  estoyent, 
de  donner  seulement  le  bien  confisqué,  mais  non  les 
Terres  revenues  à  la  Couronne.  Monsieur  le  Procu- 
reur Général  et  M.  le*  Bret  ^  l'emportèrent  contre 

M.  Servin,  qui  estoit  d'avis  conforme  aux  Lettres.  Des 
juges ,  dix-sept  furent  pour  le  don  entier,  six  pour 
les  conclusions  des  Gens  du  Roy,  et  cinq  pour  refu- 
ser entièrement.  M.  Courtin  estoit  rapporteur. 

2/i .  Le  Roy  fait  défendre  à  Fiesque  l'entrée  de  sa 
chambre  ;  et  quoyque  M.  de  Luynes  pust  faire,  il  ne 


*  Voy.  Mém.  de  Math.  Mole,  p.  148;  Merc,  fr.,\.  v,  p.  87. 

2  Cardin  le  Bret,  seigneur  deFlacourt,  né  en  1558,  avocat  général  à 
la  cour  des  Aides,  puis  avocat  général  au  Parlement  de  Paris,  conseil- 
d*État ,  premier  président  du  Parlement  de  Metz,  mort  en  1655.  Il  a 
laissé  plusieurs  ouvrages  recueillis  avec  ses  Harangues  et  ses  Plaidoyers. 
{Voy.  Moreri,  t,  ii,  p.  262.) 


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311  JOURNAL   INÉDIT 

Aoust  i«i7.  seul  y  rien  gagner.  La  Reyne  luy  envoya  aussi,  puis 
après,  défendre  l'entrée  de  sa  chambre. 

25.     Le  Roy  va  à  Lésigny,  et  revient  le  Lundy. 

29.  Le  Roy  estant  prest  de  tenir  au  faubourg 
Saint-Honoré  le  fils  aisné  de  M.  de  Vendosme'  et 
d'aller  disner  chez  luy,  (où  il  y  avoit  un  festin  pré- 
paré qui  coustoit  dix  mil  francs) ,  revient  des  Feûil- 
lans  se  trouvant  fort  mal  d'une  colique.  On  dit  que 
M.  de  Vendosme,  M"*  de  Mercœur,  et  M"'  de  Yen- 
dosme  se  vouloyoient  jetter  à  genoux  devant  le  Roy, 
après  le  disner,  pour  obtenir  la  grâce  de  Guémadeu*. 

31.  Entreprise  pour  sauver  Monsieur  le  Prince, 
de  la  Bastille,  découverte.  Desoulas,  autrefois  Mi- 
nistre à  Fontainebleau,  dénonciateur.  M"*  de  Beau- 
vais,  nièce  de  M.  le  vicomte  de  Brigueil,  arrestée 
prisonnière,  en  son  logis,  avec  des  archers  du  Che- 
valier du  Guet,  et  élargie  au  bout  de  douze  ou  quinze 
jours.  M. . . ,  frère  de  M.  Fradet,  Conseiller  de  la  Cour 
et  maistre  d'hostel  de  Monsieur  le  Prince,  arresté 
aussi  prisonnier  sur  ce  sujet. 

s*^pi**„,i>ie.  Vendredi  1.     M.  et  M""  de  Nevers,  M.  leur  fils 


*  Louis,  cardinal,  duc  de  Vendôme,  de  Mercœur,  pair  de  France, 
gouverneur  de  Provence,  né  en  1612,  suivit  Louis  XUI  en  Savoie  en 
1630,  passa  en  Hollande,  fut  à  la  bataille  d*Avein  en  1635,  aux  sièges 
de  Corbie  en  1636,  de  Ilesdin  en  163P,  d'Ârras  en  16/^0,  où  il  fut  blessé, 
devint  en  1650  vice-roi  de  Catalogne,  épousa  en  1651  une  nièce  du 
cardinal  Mazarin,  fut  gouverneur  de  Pi*ovence  en  1652,  commanda  en- 
suite en  Italie,  prit  Valence  eu  1656  ;  devenu  veuf,  fut  créé  cardinal 
en  1667  et  mourut  en  1669.  {Foy.  P.  Anselme,  1. 1,  p.  198.) 

2  yoy,  Fontenay-Mareuil,  p.  398. 


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d'arnauld  d'andilly.  315 

aisné^  et  M.  du  Mayne  ayant  esté  mordus  d'un  chien    septembre  len. 
enragé,  avec  dix  ou  douze  de  leurs  Gentilshommes, 
partent  le  Dimanche  pour  aller  à  Saint-Vallery,  à  la 


mer*. 


2.  Le  Roy  va  à  Saint-Germain ,  revient  le  sa- 
medy  9.  — Parla  en  particulier  à  M.  de  Guise,  tou- 
chant des  choses  où  Ton  Tavoit  voulu  embarquer. 
M.  de  Guise  luy  dit  tout  ce  qu'il  en  savoit,  et  té- 
moigna d'estre  extrêmement  content  de  la  confiance 
que  Sa  Majesté  luy  avoit  fait  paroistre. 

En  ce  voyage  de  Saint-Germain,  le  Roy  signe  les 
articles  de  la  paix  de  Savoye\ 

5.  Le  général  des  Capucins  arrive  à  Paris  ;  le 
Roy  l'envoyé  visiter  par  M.  le  colonel  d'Omano;  et  à 
la  prière  de  Sa  Majesté,  presche  à  Saint  Germain,  le 

vendredy  8.  Le  Roy  le  fut  voir  le 10.  Quand 

il  s'en  alla,  qui  fut  le  19  ou  20  d'octobre,  le  Roy  luy 


1  François  de  Paule  de  gonzagues-CIëves,  duc  de  Hethelois,  Gouver- 
neur de  Champagne  et  de  Brie,  mort  avant  son  père,  en  1622,  à  l'âge 
de  seize  ans,  sans  avoir  été  marié. 

2  Voy,  Pontchartrain,  p.  267. 

»  Voy.  Fontejiay-Mareuil,  p.  402  ;  Richelieu,  p.  483;  Pontchartrain, 
p  2Û6;  Rohan,'p.  146;  Merc.fr,^  p.  190  etsuiv.  Le  Mercure  diOnnG 
des  détails  circonstanciés  et  très-intéressants  sur  la  guerre  de  Savoie, 
dans  laquelle  l'armée  française  envoyée  au  secours  du  duc  dcSavoie  sous 
le  commandement  du  Maréchal  de  Lesdiguières,  ayant  sous  ses  ordres 
les  ducs  de  Rohan  et  de  Termes,  les  comtes  de  Candale  et  deSchomberg, 
joua  un  grand  rôle.  Le  Mercure  fait  connaître  aussi  les  circonstances 
delà  paix  qui  se  traitait  en  même  temps  entre  l'archiduc  Ferdinand, 
roi  de  Bohême,  et  la  république  de  Venise.  Voy.  Merc.  fr,,  p.  202  et  suiv. , 
les  pièces  officielles  des  Traités  de  Madrid,  de  Paris  et  de  Pavie,  négo- 
ciés pour  la  France  par  le  chancelier  de  Sillery,  le  garde  des  sceaux 
du  Vair,  MM.  de  Villeroy,  Jeanniu  et  de  Puisieux,  avec  les  ambassa- 
deurs des  puissances  belligérantes. 


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316  JOUANAL   INÉDIT 

Septembre  ifli7.  eiivoya  soii  poftrait  et  une  lettre  à  M.  le  Général  des 
Galères,  pour  luy  faire  bailler  une  Galère. 
,  Mort  de  M.  le  Maréchal  de  Montigny  à  Dolinville,  &i 
charge  de  Maréchal  de  France  supprimée,  à  cause  de 
la  contention  qui  estoit  entre  M.  de  Praslin  et  M.  de 
la  Force.  Sa  charge  de  Gouverneur  du  Berry  donnée 
à  M.  le  Maréchal  de  Vitry,  et  la  Lieutenance  à  M.  le 
Comte  de  Saint-Aignan*. 

13.  M.  de  Luynes  marié  à  M"*  de  Monbason. 
Il  eut  la  valeur  de  cinq  cens  mil  livres  en  ma- 
riage ^ 

14.  Mort  de  M.  de  Refuge,  Conseiller  d' Estât, 
habile,  courageux,  et  homme  de  bien. 

15.  Monsieur  le  Prince  mené  de  la  Bastille  au 
bois  de  Vincennes.  Le  Roy  prit  sa  résolution  la  veille. 
Le  matin  15,  M.  Déagent  va  avertir  les  Ministres  de 
se  trouver  au  Louvre,  où  le  Roy  leur  dit  son  inten- 
tion ;  et  en  mesme  temps  on  exécuta.  On  fit  dire  aux 
Compagnies  de  Suisses,  qui  sortoyent  de  Garde  et 
alloyent  vers  la  pistolle,  qu'ils  s'arrestassent  au  Petit- 
Saint-Antoine,  et  que  le  Roy  s'en  alloit  au  Bois  de 
Vincennes.  On  fit  arrester  sur  le  Pont-Neuf 
Compagnies  de  François,  qui  venoyent  en  garde.  On 
manda  aux  Gendannes  et  chevaux-légers  qu'ils  vins- 
sent à  la  porte  du  Louvre,  et  que  le  Roy  vouloit  aller 
à  la  chasse,  (comme  de  fait,  il  estoit  botté).  Lecar- 


*  Votj,  Pontchartrain,  p.  2^7.  Suivant  Pontchartrain,  le  maréchal 
do  Montigny  mourut  le  8  de  ce  mois  de  septembre. 

3  Foy.  Fontenay-Mareuil,  p.  339;  Richelieu,  p.  479;  Pontchartrain, 
p.  247;  Brienne,  p.  333;  Merc,  fr.y  p.  97. 


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d'arnauld  d'andilly.  317 

rosse  du  Roy  vint  aussi  sur  ce  sujet.  En  mesme  temps,  septembre  un. 
le  Roy  envoyé  quérir  M.  de  Vitry  et  M.  de  Persan 
((}ui  au  commencement,  croîoyent  qu'on  leurvouloit 
ester  Monsieur  le  Prince),  qui  leur  dit  sa  résolution, 
et  commande  à  M.  de  Vitry  de  mener  et  de  conduire 
les  troupes  pour  accompagner  Monsieur  le  Prince, 
auquel  M.  de  Modène  Talla  dire  auparavant,  et  puis, 
le  fit  monter  en  carrosse.  Longtemps  auparavant,  il 
avoit  demandé  qu'on  le  mist  au  Bois  de  Vincennes, 
pour  y  avoir  meilleur  air.  M.  de  Modène  luy  dit,  que, 
se  souvenant  de  cela,  il  avoit  tant  pressé  le  Roy  sur  ce 
sujet,  qu'enfin  il  l'avoit  obtenu.  Monsieur  le  Prince 
répondit,  que  depuis  il  s'estoit  accoustumé  à  l'air  de 
la  Bastille,  et  ensuite,  résista  le  plus  qu'il  put,  jus- 
qu'à ce  qu'il  falust  aller. 

Madame  la  Princesse  alla  aussi  avec  luy,  en  car- 
rosse, n'ayant  voulu  entrer  en  litière.  On  dit  qu'au 
commencement.  Monsieur  le  Prince  croioit  seulement 
qu'on  luy  voulust  oster  sa  femme.  M.  de  Vitry,  M.  de 
Persan  et  M.  de  Modène  estoyent  avec  luy  dans  le 
carrosse. 

Depuis  qu'il  a  esté  dans  le  bois  de  Vincennes,  on 
luy  a  permis,  environ  le  commencement  d'octobre, 
de  se  promener  sur  l'épaisseur  d'une  grosse  muraille, 
qui  est  en  forme  de  galerie. 

M.  de  Persan  est  demeuré  dans  le  Donjon  du  Bois 
de  Vincennes,  pour  garder  Monsieur  le  Prince,  avec 
la  plus  grande  partie  des  soldats  qu'il  avoit  dans  la 
Bastille  ;  et  M.  de  Cadenet,  avec  douze  Compagies 
du  Régiment  de  Normandie,  fait  garde  dans  la  cour 


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318  JOURNAL   INÉDIT 

septembre  iii7.    du  chasteau ,   d'où  les  soldats   ne  sortent  point  *. 

15.  Geniers^  arresté  prisonnier,  et  le  sieur  Her- 
man  son  oncle,  sur  l'accusation  qu'il  avoit  faite 
contre  MM.  de  Vendosme,  et  du  Mayne.  Ils  furent 
menez  à  la  Bastille.  M.  de  Boisise  et  M.  Aubry  Tais- 
né,  commissaires,  l'interrogent.  Il  avoue  tout,  et  se 
dédit.  Lejeudy  21,  commission  scellée  pour  envoyer 
au  Parlement,  et  le  procès  porté  à  M.  le  Procureur 
Général,  qui  se  rend  partie. 

M.  de  Vendosme  void  et  solicite  les  juges.  Le  sa- 
medy  23,  Geniers  et  Herman  furent  menez  à  la  Con- 
ciergerie. Le  mécredy  4  octobre,  Geniers  a  la  teste 
tranchée.  Il  mourut  peu  courageusement  ^ 

18.  M.  de  Sully  arrive,  sur  l'espérance  que  le 
Président  Chevallier  luy  avoit  donnée,  qu'en  mariant 
sa  fille  avec  M.  de  Cadenet,  il  rentreroit  dans  les 
finances*.  Environ  trois  semaines  depuis,  voyant 
qu'il  n'en  pouvoit  venir  à  bout,  il  se  joignit  avec 
M.  de  Montbason,  auquel  il  fit  penser  à  la  charge, 

*  Voy.  Richelieu,  p.  477;  Pontchartrain,  p.  248;  Bassompierre, 
p.  151  ;  Merc,  fr,y  p.  229. 

2  Gentilhomme  ordinaire  du  Roi. 

*  Voij.  Fontenay-Mareuil,  p.  339  et  la  note.  Geniers  avait  accusé  le 
duc  de  Vendôme  de  vouloir  empoisonner  le  Roi  pendant  le  festin  qu*il 
offrait  à  Sa  Majesté  à  l'occasion  du  baptême  de  son  fils  dont  le  Roi  était 
parrain,  calomnie  qui  fut  cause  que  le  Roi  n'alla  pas  à  cette  cérémo- 
nie. Geniers  fut  condamné  et  exécuté  pour  avoir,  dit  l'arrêt,  traîtreuse- 
ment, malicieusement,  et  calomnieusement  dit,  qu'il  y  avait  une  entre- 
prise sur  la  personne  de  Sa  Majesté.  {Voy,  Merc.  fr.y  t.  v,  p.  96.) 

^  Ce  mariage  ne  se  fit  pas.  L'une  des  filles  de  Sully,  Marguerite  de 
Béthune,  avait  épousé  en  1605  le  duc  de  Rohan  ;  l'autre,  Louise  de  Bé- 
thune,  née  en  1602,  épousa  en  1620  Alexandre  de  I^vis,  marquis  de 
Mirepoix. 


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d'arnauld  d'andillv.  M9 

sur  l'assurance  qu'il  luy  donna  de  l'y  assister,  et  de 
luy  servir  plustost  de  commis.  Monsieur  le  Garde 
des  Sceaux  se  porta  à  ce  dessein,  mais  il  ne  put  le 
faire  réussir.  L'intention  de  Monsieur  le  Garde  des 
Sceaux  estoit  de  ruiner,  par  ce  moyen,  Monsieur  le 
Chancelier,  M.  le  président  Jeannin,  et  M.  de  Ville- 
roy,  d'attirer  à  luy  M.  de  Luynes,  et  le  Roy  ensuite. 

Environ  ce  temps.  Résolu  que  M.  le  Marquis  de 
Cœuvres  iroit  Ambassadeur  à  Rome.  M.  de  Ram- 
bouillet dit,  que  tous  les  Ministres  estoyentpour  luy. 

27.  Guemadeu  exécuté.  Ordonné  que  sa  teste 
seroit  portée  à  Fougères.  Il  mourut  très-courageuse- 
ment, et  chrestiennement.  Le  Roy  eut  une  fermeté 
extrême  à  refuser  sa  grâce,  et  mesme,  lorsque  M.  de 
Vendosme  et  M.  de  Monbason  luy  demandèrent  sa 
teste,  après  qu'il  fut  mort;  toutefois  lorsqu'elle  fut  en 
chemin,  le  Roy  trouva  bon  qu'on  ne  l'y  portast  pas  *. 


Septembre  1617. 


Dimanche  1"  et  4.  Ce  jour,  l'assemblée  de  Rouen 
fut  résolue  au  Conseil  du  Cabinet  des  livres  du  Roy^. 

5.  Leurs  Majestez  vont  à  Saint-Germain,  et  en 
reviennent  le  samedy  14. 

Le  Roy  refuse  à  plusieurs  de  vendre  ou  acheter 
desCîouvernemensde  Places,  et  entr'  autres,  à  M.  le 
Colonel  d'Ornano,  le  Chasteau  Trompette  de  Bor- 


iictobre.. 


*  yoy.y  sur  l'affaire  de  Guémadeuc,  Fontenay-Mareuil,  p.  397;  Pont- 
chartrain,  p.  243  ;  Merc.  fr.,  p.  91. 

2  Foy.  Richelieu, p.  483;  Pontchartrain,  p.  248.  Voy.  Merc,  fr.^  p.230, 
les  lettres-patentes  du  Roi  pour  la  convocation  de  TAssemblée  des  No- 
tables. 


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Octobre  1617. 


320  JOURNAL   INl^DIT 

deaux.  M.  de  Monbason  vouloit  aussi  vendre  le  chas- 
teau  de  Nantes  à  M.  deVendosme;  M.  Darquien, 
Calais  à  M.  de  Vitry,  ou  à  M.  delaVieuville,  d'auUres 
disent  à  M.  d'Hocquincourt.  Le  Roy  dit,  mille  bonnes 
paroles  à  Monsieur  le  Colonel,  et  qu'il  luy  vouloît 
faire  plus  de  bien  que  son  Gouvernement  ne  valoit, 
mais  qu'il  n'estoit  plus  résolu  de  souffrir  que  l'on  ven- 
dist  des  Gouvernemens,  comme  on  feroit  des  mai- 
sons; et  en  se  levant  de  dessus  sa  chaise,  dit  :  Je  ne 
serois  pas  Roy,  si  cela  estoit,  et  je  le  veux  estre. 

7.  M.  deModène  va  à  Blois,  vers  la  Reyne-nière, 
et  en  revient  environ  trois  semaines  après. 

12.  Le  Président  Jeannin  part,  et  revient  à 
Rouen,  le  jeudy  7  Décembre  en  suivant. 

1 4.     Mort  de  M.  Arnaud ,  Intendant  des  finances  * . 

26.  Le  Roy  va  à  Saint-Germain.  Il  revient  le 
mardy  31.  La  Reyne  estoit  malade  lorsqu'il  partit. 


Novembre. 


Lundy  13.     M.  d'Epernon  arrive  à  Paris,  où  il 
n'avoit  point  esté  depuis  le  voyage  de  Bordeaux,  en 

1615  ^ 


*  a  Ce  troisième  de  mes  oncles  paterneh  mourut  le  14  octobre  1617, 
»  âgé  de  cinquante  ans,  d'une  veine  qui  se  rompit,  et  je  ne  l'ai  jamais 
»  vu  que  triste  depuis  que  la  Reinennëro,  à  qui  il  avait  tant  d*obliga- 
»  tiens,  eut  été  reléguée  à  Blois.  »  (Mém.  d'Arnauld  d'Andilly,  coll.  Pe- 
titot,  2*  série,  t/xxxiii,  p.  322.)  Voy,  aussi,  Mémoires  d*Amauld  d'An- 
dilly,  p.  372  et  suiv.,  l'opposition  que  fit  M.  deLuynes  à  la  proposition 
soumise  au  Roi  par  les  principaux  membres  du  Conseil  de  donner  à 
Amauld  d*Andilly  la  place  de  son  oncle.  Trompé  par  Luynes  qui  le 
payait  de  belles  paroles  et  de  belles  espérances,  Amauld  d'Andilly 
n*eut  pas  la  place.  Il  devint  en  1619,  comme  on  le  verra  plus  loin, 
premier  commis  de  M.  de  Schomberg,  Surintendant  des  finances. 

2  Foy,  Foutenay-Mareuil,  p.  404  ;  Pontchartrain,  p.  251. 


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d'arnaold  d'andilly.  3-21 

14.  Le  Roy  va  à  Mantes  coucher.  Il  disna  à     xovcmbre  len. 
Fresnede.  M.  d'Epernon  estoit  party  de  Paris,  de 
très-grand  matin,  avec  M.  le  Grand,  pour  saluer  le 

Roy,  avant  qu'il  partist  de  Saint-Germain,  mais  Sa 
Majesté,  qui  estoit  levé  de  bonne  heure  l'ayant  at- 
tendu environ  demi-heure,  enfin  il  s'ennuya  et  partit, 
encore  que  Ton  luy  dist,  qu'il  estoit  tout  contre. 
M.  d'Epernon  alla  après,  et  attrapa  le  Roy  au  bout 
du  village,  lequel  luy  fit  fort  bon  accueil.  Depuis, 
M.  d'Epernon  voulant  venir  à  Rouen,  en  l'assemblée, 
fit  dire  au  Roy  que  si  M.  de  Candalle  son  fils  y  estoit, 
il  supplioit  très-humblement  Sa  Majesté  de  le  dis- 
penser de  s'y  trouver;  tellement  que  M.  de  Candalle 
partît  de  la  Cour,  environ  le  5  Décembre. 

15.  Le  Roy  va  disner  à  Vernon,  et  coucher  à 
Gaillon,  qu'il  trouva  si  beau,  qu'il  luy  prit  envie  de 
l'acheter  de  l'Archevesque  de  Rouen,  auquel  il  ap- 
partient*. 

17.  M.  de  Luynes  va  à  Rouen.  Mon  carrosse 
dans  lequel  nous  estions,  M.  Déagent,  M.  de  Fonte- 

nay,  M.  le  Vicomte  de et  moi,  verse  en  haut  de 

la  montagne  de  Vaudreûil,.et  fait  cinq  tours  entiers 
sans  que  pas  un  de  nous  receust  aucune  blessure 
considérable. 

M.  de  Luynes  estoit  en  carrosse,  et  ne  mit  point 
pied  à  terre  pour  recevoir  quelque  Noblesse  qui  vint 
au  devant  de  luy  près  le  Pont-de-l' Arche  ;  ce  qui  ne 
fut  pas  trouvé  bon,  car  on  dit,  qu'il  devoit  monter  à 

*  C'était  alors  Harlay  de  Chanvallon  qui  avait  remplacé  en  1615  le 
Cardinal  de  Joyeuse  dont  il  était  le  coadjuteur. 

21 


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322  JOURNAL   INÉDIT 

Novembre  i6it.  cheval.  Lorsque  les  officiers  de  la  ville  vinrent  à  la 
porte,  le  saluer  et  luy  faire  une  harangue,  il  ne  bou- 
gea aussi  de  carrosse,  et  se  tint  couvert,  ce  qui  fut 
trouvé  fort  mauvais  de  toute  la  Noblesse  du  Pais. 
M.  de  Blainville  *  dit,  que  les  Princes  du  sang  mesmes, 
et  entr' autres,  M.  le  Comte  de  Soissons,  n'en  avoyent 
pas  usé  comme  cela.  Ce  fut  M.  de  Rohan  qui  en  fut 
en  partie  cause,  disant  qu'il  avoit  toujours  fait  ainsi 

•  en  son  Gouvernement  de  Poitou  ;  maïs  principale- 

ment le  comte  de  la  Roche-Guyon  et  le  comte  de 
Chasteauroux  ^  qui  estoyent  dans  le  carrosse  de 
M.  deLuynes.  M.  le  Colonel  d'Ornano  dit  que  Mon- 
sieur le  Maréchal  son  père  écoutoit  nue  teste  les 
corps  des  moindres  communautez,  et  qu'autant  qu'il 
estoit  impérieux  lorsqu'il  s'àgissoit  de  commander, 
il  estoit  doux  et  gracieux  aux  actions  de  civilité,  et 
de  complimens. 

Montebene  vint  dire  à  M.  de  Luynes,  à  la  ville  : 
Monsieur,  voicy  le  païs  du  monde  où  il  faut  estre 
le  plus  gracieux,  et  le  plus  audacieux  tout  en- 
semble. 


*  Jean  de  Varigniez,  seigneur  de  Blainville,  Conseiller  d*État,  pre- 
mier gentilhomme  de  la  Chambre  et  maître  de  la  garde-robe  du  Roi, 
lieutenant  au  gouvernement  du  bailliage  de  Gaen,  Ambassadeur  en  An- 
gleterre, mort  en  1628.  {Voy.^  sur  ce  personnage,  Fontenay-Mareuil, 
p.  380.) 

2  Jean  de  Maillé,  baron  de  la- Tour-Landry,  comte  de  Chasteauroux, 
mort  des  blessures  qu'il  reçut  au  siège  de  Negrepelisse  en  1635.  Il 
avait  vendu  en  1613  son  Comté  de'  Gh&teauroux  au  Prince  de  Gondé. 

*  Alphonse  Corse,  dit  d'Ornano,  colonel  général  des  Corses,  lieute- 
nant-général en  Dauphiné  et  maréchal  de  France  en  1595,  lieutenant- 
général  en  Guyenne  en  1597,  mort  en  1610. 


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d'arnauld  d'andilly.  823 

L'après  disnée,  M.  de  Luynes  entra  à  Rouen,  avec     Novembre  un. 
quatre  ou  cinq  cens  chevaux. 

Il  avoit  supplié  tous  ses  amis  de  ne  point  venir  au 
devant  de  luy  ;  et  néantmoins,  il  ne  put  empêcher 
que  ce  nombre  ne  Taccompagnast.  Il  alla  loger  à 
l'archevesché,  où  Monsieur  TArchevesque  le  receut 
avec  toute  la  bonne  chère  du  monde. 

Le  matin,  les  lettres  de  la  Lieutenance  Générale 
en  Normandie,  accordées  par  le  Roy  à  M.  de  Luynes, 
furent  présentées  au  Parlement  de  Rouen  par  le  fils 
de  M.  le  Président  d'Aufreville,  âgé  de  vingt-deux 
ans*. 

Le  samedy  18,  M.  de  Luynes,  comme  Lieutenant 
Général  du  Roy;  fait  l'ouverture  des  Estats  de  la  pro^ 
vince  de  Normandie. 


.    *  Jacques  Poirier,  sieur  d'Amfreville ,  président  à  mortier  au  Parle- 
ment de  Rouen. 


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324 


JOURNAL   INIÉDIT 


Novembre  1617. 


Quelques  députez. 


Députez  d^Église. 


I 


■s 


É 


M.    DE    MOPLAntES^HALE, 

Maistre  des  Requestes. 

© 

M.  D£s  Hameaux, 

Préfl.  des  Aydes. 


0 

M.  DE  NONAN, 

Souslieiitenaot 

au 

Bailliage 

d*Aleiiçon. 


Ilsavoyent  chacun  des  let- 
tres patentes  pour  avoir  en- 
trée aux  Estats. 


© 

© 

0 

M.   DE  BLAOr- 

M.  DE 

M.  DE  RY8, 

VILLE, 

LUYlfES. 

Pram.  Pré- 

Sous-lieutenant 

sident  du 

au  BaiUlage 

Parlement. 

de  Caen. 

0  Greffier  des 
Estau. 


0M.  DE  LA  BrETIN  1ERE, 

p.  général  au  Parlement. 

0  M.   LE  Normand, 
Maistre  des  requestes. 

0M.  de  Mauteville, 
Président  des  Comptes. 

©M.   DE  BOUTSROUD^, 

8*  Prés,  du  Parlement. 

©M.   DE  Bernieres, 
t«  prés,  du  Parlement. 


Le  Greffier  leut  les  lettres  patentes  et  commission 
du  Roy  pour  l'Imposition  des  deniers  des  Tailles,  et  de 
la  creûe  extraordinaire  de  l'année  161§,  et  ensuite 
les  commissions  de  MM.  de  Blainville  et  de  Nonan  * 
pour  entrer  aux  Estats. 


*  Jacques  le  Conte,  marquis  de  Nouant,  sous-lieutenant  du  gouver- 
nement du  bailliage  d'Alençon. 


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d'arnauld  d'andilly.  325 

M.  de  Lpynes  parla,  et  dit  :  Messieurs,  vous  avez  Novembre  let?. 
en  cette  assemblée  un  avantage  qui  s'y  rencontre 
peu  souvent,  c'est  que  tout  ce  que  vous  résoudrez 
sera  incontinent  après  présenté  au  Roy,  qui  s'ache-, 
mine  en  cette  ville  comme  en  son  siecond  Paris,  et 
m'asseure  que  Sa  Majesté  s'efforcera  de  vous  donner 
toute  sorte  de  satisfaction  sur  vos  remonstrances. 
Elle  sayt  l'Importance  de  cette  grande  Province  et 
son  affection  extrême  à  son  service,  ce  qui  lui  a  fait 
désirer  d'y  tenir  l'une  des  plus  célèbres  assemblées 
qui  se  puisse  convoquer  en  son  Royajime  ;  tellement 
que  nous  avons  sujet  d'espérer  que  Sa  Majesté  re- 
médiera tout  ensemble,  et  aux  maladies  particulières 
de  cette  Province,  et  à  celles  qui  luy  sont  communes 
avec  l'Estat  en  général.  Pour  mon  regard,  je  ne 
manqueray  pas  d'embrasser  en  toutes  occasions  ce 
qui  sera  de  vos  intérests,  comme  y  estant  obligé  par 
le  devoir  de  la  charge  dont  il  a  pieu  à  Sa  Majesté  de 
ip'honorer,  et  encore  par  l'amitié  et  bienveûillance 
que  vous  me  témoignez,  laquelle  je  vous  supplie  de 
tout  mon  cœur  de  me  continuer,  et  je  vous  serviray 
tous,  et  en  général,  et  en  particulier.  Vous  en- 
tendrez par  les  lettres  du  Roy  et  par  Messieurs  les 
Commissaires  ce  qui  est  des  Intentions  de  Sa  Ma- 
jesté. 

après.  Monsieur  le  Premier  Président  harangua, 
comme  Commissaire  député  par  le  Roy. 

Après,  M.  Castou,  ecclésiastique,  harangua  pour 
le  Clergé. 

Après,  ledit  sieur  Castou  demande  jour  pour  la 


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326  JOURNAL   IISIÎDIT 

Novembre  1617.  closturc  dcs  Estats,  lequel  M.  deLuynes  assigna  au 
Vendredy  suivant. 

19.  Le  dimanche ,  M.  de  Luynes  retourne  à 
Gaillon. 

Durant  que  le  Roy  fut  à  Gaillon,  outre  M.  Déa- 
gent, le  Président  Jeannin  estoit  seul  du  Conseil  au- 
près de  Sa  Majesté,  et,  jusques  au  jeudy  16,  que 
M.  de  la  Ville  aux  Clercs  vint,  il  n'y  avoit  ni  secré- 
taire d'Estat,  ni  secrétaire  du  cabinet.  M.  Deagent 
disoit  que,  comme  secrétaire  du  Roy,  il  eust  pu  signer. 

23.  Le  Roy  va  coucher  de  Gaillon  au  Pont-de- 
r Arche,  et  le  lendemain,  à  Rouen,  sans  cérémonie 
quelconque.  Sur  quoy  il  avoit  fait  auparavant,  à 
Mante,  une  fort  bonne  réponce,  sur  ce  que  les  Esche- 
vins  de  Rouen  le  supplioyent  de  trouver  bon  que  Ton 
luy  présentas!  un  poisle  (à  cause  que  cela  leur  ap- 
porte quelque  avantage) ,  il  dit  :  Puisque  je  ne  veux 
point  d'entrée,  il  ne  faut  point  de  Poisle.  Je  seroys 
donc  obligé  de  leur  refuser,  qui  seroit  leur  faire  af- 
front, et  j'en  serois  marry. 

La  coustume  est  que  lorsque  les  Roys  entrent  en 
l'église  Notre-Dame  de  Rouen,  ils  jur^t  sur  TÉvan- 
gile  de  conserver  les  Privilèges  du  pais;  ce  que  le 
Roy  n'eust  pas  voulu  faire,  d'autant  qu'il  fuit  extrê- 
mement à  s'obliger  par  serment.  Sur  quoy  M.  l'Ar- 
chevesque  de  Rouen  ayant  assemblé  son  chapitre,  il 
leur  fit  trouver  bon,  avec  dextérité,  que  l'on  se  con- 
tenteroit  de  la  parole  du  Roy,  sans  le  presser  de 
jurer  ;  et  en  usa  de  cette  sorte  ;  dont  Sa  Majesté  fut 
bien  aise. 


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d'arnauld  d'andilly.  327 

27.     Le  Roy  va  à  Dieppe,  et  en  revient  le  sa-    Novembre  «it. 
medy. 


Lundy  4.  Ouverture  de  l'Assemblée  des  Nota- 
bles, à  Rouen. 

Le  vendi-edy  premier,  il  y  avoit  eu  de...  grandes 
contestations  entre  ^Messieurs  de  la  Noblesse,  et  Mes- 
sieurs des  Parlemens  touchant  leurs  Séances.  Enfin, 
le  Roy  ordonna  qu'à  l'ouverture  de  l'assemblée  ils 
seroyent  comme  en  15...,  sans  tirer  à  conséquence. 

Le  mardy  5,  on  croioit  ouvrir  l'Assemblée;  mais 
les  différons  de  Messieurs  du  Parlement  et  de  la  No- 
blesse l'empeschèrent.  Chacun  d'eux  vouloit  avoir 
les  bancs  qui  sont  vis-à-vis  des  Ecclésiastiques ,  et 
sur  lesquels  Messieurs  les  Ecclésiastiques  avoyent 
esté  à  l'ouverture  de  l'Assemblée. 

Messieurs  des  Parlemens  disoyent,  pour  partie 
de  leurs  raisons,  qu'en  1596  cela  avoit  été  ainsi; 
qu'ils  ne  peuvent  estre  réputez  Tiers-Estat,  puisqu'il 
n'y  en  a  jamais  de  leurs  compagnies  qui  soyent  Dé- 
putez aux  Estats-Généraux,  et  que  leur  corps  est 
composé  des  trois  ordres;  qu'ils  ne  reconnoissent 
point  les  Gentilshommes  députez  en  cette  assemblée, 
pour  représenter  le  corps  de  la  Noblesse,  d'autant 
que  ce  n'est  qu'une  forme  de  Conseil  et  non  des 
Estats. 

Messieurs  de  la  Noblesse  soustiennent,  au  con- 
traire, qu'il  ne  faut  point  alléguer  l'exemple  de  1596, 
d'autant  qu'on  leur  fit  tort;  mais  qu'ils  ne  s'en  sou- 
cioyent  pas,  à  cause  qu'ils  savoyent  bien  que  ce  ne 


Décembre. 


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328  JOURNAL    INEDIT 

Décembre  i6i7.  pouvoît  cstre  par  mépris,  veû  les  services  qu'ils 
avoyent  fraîchement  rendus  au  feu  Roy,  et  qu'ils 
estoyent  encore  sur  le  point  de  lui  rendre,  et  que 
cette  assemblée  n'estant  convoquée  principalement 
que  pour  tirer  des  Impositions  et  levées  de  deniers,. 
Sa  Majesté  estoit  obligée  de  gratifier  les  compagnies 
souveraines,  où  les  vérifications  en  devoyent  estrc 
faites,  et  en  second  lieu  que,  représentant  le  corps 
de  la  Noblesse,  on  ne  peut  leur  disputer  le  second 
rang. 


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D  ARNAUI.D    D  ANDIt.I.y. 


329 


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330  JOURNAL   INÉDIT 

Dccembrc  1617.  Lc  Roy  ayant  dit  à  rassemblée  qu'il  avoit  com- 
mandé à  Monsieur  le  Chancelier  de  leur  dire  son 
dessein ,  Monsieur  le  Chancelier  prit  la  parole ,  et  fit 
une  harangue  d'environ  trois  quarts  d'heure.  Il 
parla  trèfr-fermement. 

5.  On  proposa  de  les  faire  tous  seoir  pesle- 
mesle,  selon  leur  rang  de  Conseillers  au  Conseil  d'Es- 
tat  ;  ce  que  la  noblesse  receut  avec  contentement,  et 
en  remercia  le  Roy  ;  mais  le  clergé  et  les  officiers 
s'y  opposèrent;  et  véritablement,  cela  eust  apporté 
une  extrême  confusion,  car  tel  Procureur  Général 
eust  esté  assis  avant  un  Premier  Président,  et  M.  le 
Président  Nicolay,  entr'autres,  eust  précédé  le  Pre- 
mier Président  du  Parlement  de  Paris. 

Enfin,  on  trouva  pour  dernier  expédient,  lequel  a 
esté  exécuté,  de  bailler  Monsieur  pour  Président,  et 
de  faire  asseoir  les  Députez  conmie  il  se  void  cy- 
après  : 


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DARNAULD    DANDILLY. 


331 


Décembre  1«17. 


H) 


(«> 


Tablé  du  gre//ler. 


Banc  de  MM.  les  Sur-Intendant  et  Intendant 
detjtnanceg. 


^"nct  de  la  J^ohW*^' 


^attct  de  la  Jfoblen^' 


(1)  Les  cardinaux  du  Perron  et  de  La  ftochefoucaud,  le  duc  de  Montbazon  et  le 
nuurtebal  de  Brlaiac  aTaient  été  ekoiais  par  le  Bol  pour  présider  l'Assemblée  eq 
l'absence  de  Monsieur.  —  (l)  Banc  de»  députés  du  Qergé.  —  (8)  Banc  des  députés 
des  Parlemcntt.  —  (4)  Banc  des  députés  des  Cours  des  Aides  et  du  Prévôt  des 
marchands  de  Parts.  *  (i)  Banc  des  députés  des  Chambres  des  Comptes  de  Parts. 
et  de  noiicn.  »  <6)  Entrée.  —  (7)  Banc  du  Ueutenant  civil  de  Puris. 


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S32  JOURNAL   INÉDIT 

Derfinbrf  mi, 

AÔLLB   DES    DÉPUTBZ. 

.  ~  Parts. 

L' Arche vesque  de  Lyon,  au  lîeu  duquel  fut  TAr- 

ehevesque  de  Tours.       -    ' 

L'Évesque  de  Paris Gondy. 

L'Évesque  d'Angers,  cy-devant  .     Myron. 

Messieurs  D*Andélot, 

De  Paioiseau, 

Du  Plessis-Mornay, 

De  la  Roche-Baucourt. 


Le  Premier  Président  du  Parle- 
ment de  Paris deVerdun. 

Le  second  Président  du  mesme 
Parlement Séguier. 

Le  Procureur  Général Mole. 

Le  Premier  Président  de  la  Cham- 
bre des  Comptes. Nicolay. 

Le  Procureur  Général  en  ladite 

Chambre ^  .  .     Luillier. 

Le  Prévost  des  marchans.  é  .  .     Bouchet. 

Depuis  ont  esté  ajoustez  : 
Le  Premier  Président  de  la  Cour 

des  Aydes Chevalier. 

Le  Procureur  Général  de  ladite 

Cour Le  Tonnelier. 

Le  Lieutenant  civil ^  DëMesmes. 


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D*ARNAULb  d'andillt.  333 

Rouen. 
L'archèvesque  de  Rouen.  ....     De  Harlay. 

M.  de  la  Meilleraye. 

Le  marquis  de  Beuvron,  le  père. 

Le  Premier  Président  du  Parle- 
ment      De  Faucon*. 

Le  Procureur  Général  au  mesme 

Parlement De  Bretinières. 

Depuis  ont  esté  aj orniez  ; 

Le  Premier  Président  en  la  Cham- 
bre des  Comptes De  Mauteville. 

Le  Procureur  Général  en  la  mesme 

Chambre DuValStJean^ 

Le  Premier  Président  en  la  Cour 

des  Aydes Des  Hameaux. 

Le  Procureur  Général  en  ladite  Cour^ 

Bretagne. 
L^Évesque  de  Treguier Saint-Main. 

M.  de  la  Noue. 


*  Ce  nom  est  probablement  le  nom  patronymique  du  premier  Prési- 
dent du  Parlement  de  Rouen,  connu  sous  le  titre  de  M.  de  Ris,  ainsi 
qu'Amaold  d'Andiiiy  lui-même  rient  de  le  désigner  ci-dessus. 

2  De  la  Vache  Saint-Jean,  suivant  le  Mercure, 

*  La  Montagne. 


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Bai  JOURNAL   INÉDIT 

fitctBibniêis.    IjQ  Premier  Président  du  Parle- 
ment de  Rennes,  .•••..     De  Cussé. 
Le  Procureur  Général  au  mesme  Parlement  \ 

Tholose. 
L'Archevesque  de  Narb'onné. 

M.  d'Ambres. 

Le  Premier  Président  du  Parle- 
ment  .•••••     Mazurier. 

Le  Procureur  Général  au  mesme  Parlement  *. 

Bordeaux. 
L'Archevesque  d'Ausch Destrappes. 

M.  de  Monpesat. 
Le  comte  de  Vaillac. 

Le  Premier  Président  du  Parle-  1 1 

ment De  Gourgues.  >  i% 

Le  Procureur  Général  au  mesme  Parlement.     ]  |^ 

Provence. 
L'Archevesque  d'Arles Du  Laurens. 


*  De  Merebœuf. 
a  De  Saint-Félix. 


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D*ARNAULD    dUnDILLÎ.  â55 

M.  de  Soulier  (autrement  Saint -Cannât). 


Le  Premier  Président  du  Parlement  d'Aix  *. 
Le  Procureur  Général  au  mesme  Parlement  ^. 

Dauphiné. 
L'Évesque  de  Grenoble. 


M,  de  Morges. 


Le  PrjBmier  Président  du  Parlement  de  Grenoble' 
Le  Procureur  Général  au  mesme  Parlement*. 

Bourgongne. 
L'Évesque  de  Challon  sur  Saône. 


M.  de  Ragny. 


Le  Premier  Président  du  Parle- 
ment de  Dijon Bruslart 

Le  Procureur  Général  au  mesme  Parlement  \ 


Monseigneur,  frère  du  Roy,  Q 


*  De  Bras. 

*  De  Vergons. 

*  De  Frère. 

*  De  Serrient. 

*  Picardet. 


.  O«oe«bre  art. 


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336  JOURNAL   INÉDIT 

Biecembreitt'ï.    M.  le  Cardinal  du  Perron. 

M,  le  Cardinal  de  la  Rochefoucaut. 

M.  le  duc  de  Monbason. 

M.  le^Màrèchalde  Brissaç.      □ 


M.  de  Brèves*  estoit  derrière  ja  chaire  de  Monsieur. 
M.  de  Flexelles  fut  nommé  greffier  de  l'assemblée. 

Les  huissiers  du  Conseil  servirent  en  ladite  As- 
semblée. 

Les  Trésoriers  de  France  poursuivirent  pour  estre 
admis  en  ladite  assemblée  ;  mais  il3  ne  le  purent 
obtenir. 

Le  Roy  ordonna  que  les  articles  qu'il  feroit  propo- 
ser en  l'assemblée,  seroyent  mis  entre  les  mains  de 
Monsieur  le  Procureur  Général  du  Parlement  de 
Paris%  pour  les  y  présenter;  lequel  honneur  et  avan- 


*  François  Savary,  seigneur  de  Brèves»  marquis  de  Maulevrier,  gou- 
verneur de  Monsieur.  î\  y  avait  encore  derrière  Monsieur,  M.  d*0uailly, 
capitaine  de  ses  gardes,  M.  de  Mansan,  son  sous-gouverneur»  et 
M.  Royer,  son  secrétaire. 

'  Mathieu  Moié,  seigneur -de  Lassy  et  de  Champlàtreux,  né  en  1584» 
conseiller  au  Parlement  de  Paris  on  1606,  président  aux  Requêtes  en 
1610,  procureur-général  et  garde  du  Trésor  des  Chartes  en  1614»  pre- 
mier président  en  1661»  garde  des  sceaux  en  1651,  mort  en  1656. 
Mole  était  allié  à  la  famille  d*Arnauld  d'Andilly.  M.  Aimé  Charopol- 
lion-Figeac  publie  en  ce  ;momént  pour  la  Société  de  Thistoire  de 
France  les  {Papiers  de  ce  grand  Magistrat,  sous  le  titre  de  Mémoires  de 
Mathieu  Mole,  La  glorieuse  dynastie  des  Mole  s*est  éteinte  récemment» 
le  23  novembre  1855,  en  la  personne  de  Mathieu-Louis  Mole»  grand 
Juge  ministre  de  la  justice  sous  Napoléon  1",  ministre  de  la  marine 
sous  Louis  XVJII,  ministre  des  affaires  étrangères  et  président  du  con- 
seil sous  Louis-Philippe  I",  pair  de  France  et  membre  de  l'Académie 
française,  qui  a  ajouté  encore  à  l'illustration  de  son  nom  et  a  montré 


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A 


d'arnauld  d^andilly.  337 

tage  a  esté  donné  à  la  personne  et  au  mérite  dudit  Décembre  len. 
sieur  Procureur  Général,  car  cela  ne  dépendoit  au- 
cunement de  sa  charge  ;  et  au  contraire,  la  coustume 
estoit  que  quelqu'un  de  Messieurs  du  Conseil  alloit 
proposer  les  articles  de  la  part  du  Roy,  et  que  Ton  y 
envoyoit  tantost  l'un,  et  tantost  l'autre. 

Sa  Majesté  ordonna  que  l'assemblée  répondroit 
par  écrit  à  chacun  article,  ce  qui  a  toujours  esté  ob- 
servé ;  et  pour  cet  effet,  on  députoit  quelques  uns  de 
l'assemblée  pour  porter  les  articles  au  Roy,  à  mesure 
qu'ils  estoyent  résolus  *. 

9.  Première  séance  de  l'assemblée.  Nomination 
du  Greffier  qui  fut  M.  de  Flexelles. 

12.  Mort  de  M.  de  Villeroy,  d'une  grande  des- 
cente de  boyau.  Il  y  avoit  fort  longtemps  qu'il  se  sen- 
toit  de  cette  maladie.  LeDimanche,  il  se  portoit  ex- 
trêmement bien,  et  commença  seulement  à  se  trouver 
mal  le  lundy,  dont  il  mourut  le  lendemain. 

Le  Roy  ordonna  qu'il  seroit  fait  un  Inventaire  de 
tous  ses  papiers,  concernant  les  affaires  d' Estât,  et 
en  chargea  M.  de  Fleury\  son  neveu  \ 

en  certaines  circonstances  qu*il  avait  du  sang  de  son  immortel  aïeul 
dans  les  veines. 

*  Voy,  Merc,  fr.^  p.  255  et  suiv.,  des  détails  sur  la  tenue  de  TAssem- 
blée,  qui  montrent  l'exactitude  du  récit  d*Arnauld  d'Andilly. 

2  Nicolas  Clausse,  seigneur  de  Fleury,  fils  de  Henry  Clausse,  sei- 
gneur de  Fleury,  grand  maître  des  eaux  et  forêts  de  France,  et  de  De- 
nise de  Ncufville,  sœur  de  M.  de  Villeroy.  Il  fut  après  son  père  grand 
maître  et  réformateur  des  eaux  et  forêts  de  France,  et  cette  charge 
ayant  été  supprimée,  il  devint  lieutenant  de  la  compagnie  des  Gen- 
darmes du  duc  de  Nevers. 

8  Voy.^  sur  cet  homme  d'État  célèbre,  Fontenay-Mareuil,  p.  /i09; 
Richelieu,  p.  486;  Pontchartrain,  p.  235;  Mère,  fr.^p,  217. 

22 


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Sâ6  JOURNAL  INÉDIT 

neeembre  lêiT.  Mcssleurs  Ics  autrcs  Secrétaires  d'Estat  vouloyent 
entrer  en  partage  de  la  charge  avec  M,  de  Pisieux  ; 
mais  il  fut  entièrement  maintenu. 

Environ  le  20.  Madame  la  Princesse,  très-ma- 
lade. Elle  accouche  dans  le  Bois  de  Yincennes  à  sept 
mois,  d'un  fils  mort-né ,  et  fut  plus  de  quarante-huit 
heures,  sans  mouvement  ni  sentiment  *.  Jamais  per- 
sonne n'a  esté  en  une  plus  grande  extrémité ,  sans 
mourir.  Entr' autres  médecins,  M.  Duret  et  M.  Piètre 
l'assistèrent,  avec  un  soin  extrême. 

20.  Sur  ce  que  Monsieur  le  Prince  désiroit  que 
l'on  fist  des  obsèques  à  ce  petit  enfant,  Monsieur  l'E- 
vesque  de  Paris  ^,  après  le  retour  du  Roy,  assembla 
des  Théologiens,  lesquels  jugèrent  que ,  puisque 
n'ayant  point  receu  le  Baptesme,  il  n'estoit  pas  entré 
dans  l'Eglise,  on  ne  devoit  user  aussi  d'aucunes  céré- 
monies, sur  le  sujet  de  sa  mort. 

22.  Le  Roy  ayant  seû  par  une  dépesche  de  Mon- 
sieur l'Archevesque  de  Lyon',  que  le  Roy  d'Espagne 
demandoit  un  chapeau  rouge  pour  le  Duc  de  Lerme*, 

*  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  403;  Pontchartrain,  p.  254;  Merc.fr. ^ 
p.  330. 

>  Henry  de  Goody,  fils  du  maréchal  duc  de  Retz,  né  en  1572,  évoque 
de  Paris  en  remplacement  du  cardinal  de  Gondy,  son  oncle,  en  1598, 
proviseur  de  Sorbonne  en  1616,  cardinal  en  1618,  chef  du  Conseil  en 
1619,  mort  en  1622. 

*  Denis  Simon  de  Marquemont,  Archevêque  de  Lyon  en  1612,  Pré- 
sident pour  le  Clergé,  en  qualité  de  Primat,  aux  États-généraux  de  1614, 
Ambassadeur  à  Rome,  Cardinal  en  1626,  mort  la  même  année. 

*  François  de  Roxas  de  Sandoval,  duc  de  Lerme,  premier  ministre 
de  Philippe  UI,  roi  d'Espagne  depuis  1598.  Ayant  embrassé  Tétat  ec- 
clésiastique, il  devint  Cardinal  en  1618,  fut  disgracié  la  môme  année, 
poursuivi  sous  les  plus  odieuses  accusations,  dépouillé  de  ses  biens 


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d'arnauld  d'andilly,  8â9 

ou  pour  quelqu'un  de  ses  proches  ;  et  que,  par  con-     i)«sembi«  un. 
séquent,  il  y  avoit  lieu  d'en  obtenir  un  pour  la  Francei 
Sa  Majesté  écrivit  pour  Monsieur  TEvesque  de  Paris, 
qui  n'en  savoit  chose  quelconque,  afin  de  luy  en  faire 
donner  un. 

M.  d'Espemon  avoit  fort  désiré  un  chapeau  rouge 
pour  M.  de  Thoulouse  ;  mais  on  tient  que  le  Pape 
n'en  avoit  voulu  donner  aucune  espérance,  à  cause 
de  M.  de  Candale  qui  s'estoit  fait  de  la  Religion.  Or^ 
après  la  conversion  de  M.  de  Candale ,  en  janvier 
4618,  M.  d'Espernon  essaya  de  vouloir  emporter 
celuy  que  l'on  avoit  promis  à  M.  de  Paris. 

23«  M.  le  préaident  d'Onsembray  de  Haqueville, 
pour  le  Parlement,  M.  le  président  des  Arches^ 
pour  la  Chambre  des  Comptes,  M,  le  président  de 
Maupeou,  pour  la  Cour  des  Aydes,  et  M.  le  Gras, 
pour  les  Trésoriers  de  France,  haranguèrent  au  Roy 
pour  la  conservation  de  la  Paulette,  accompagne! 
de  divers  autres  députez  de  leurs  corps. 

Le  Roy  trouva  mauvais  que  l'on  luy  alléguast  pour 
une  forte  raison  que  la  Paulette  estant  establie  il  y  «i 
plus  de  dix  ans,  il  y  a  prescription. 

En  mesme  temps  que  ces  Remonstrances  se  fai- 
soyent  au  Roy,  on  parloit  en  l'assemblée,  sur  l'article 
de  la  Paulette,  et  on  déUbéroit  sur  celuy  de  l'aboli- 
tion de  la  vénalité,  qui  passa  de  34  à  17. 

Ce  jour  fut  le  dernier  que  Messieurs  de  rassemblée 


confisqués  par  ordre  de  Philippe  IV,  et  mourut  en  1635.  {Foy,  Tartide 
que  lui  a  consacré  M.  Weiss  dans  la  Biographie  Michaud.) 


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S&O  JOURNAL  INiDIT 

Décembre  1617.    délibérèrent  sur  les  articles  qui  leur  furent  proposez 
par  le  Roy, 

Quelques  jours  auparavant,  M"*  d'Halluyn  *  pré- 
senta requeste  contre  M.  de  Candale,  pour  estre  dé- 
mariée à  cause  d'impuissance. 

26.  Messieurs  de  l'assemblée  s'assemblent  pour 
charger  M.  le  Cardinal  du  Perron  du  cayer  de  leurs 
délibérations,  lequel  le  présenta  le  soir  au  Roy,  et 
harangua  au  nom  de  tous  les  députez  qui  estoyent 
présens. 

Monsieur  le  Chancelier  bailla  ce  cayer  à  M.  Déa- 
gent, dont  M.  de  la  Ville  aux  Clercs  se  formalisant , 
en  disant,  qu'il  avoit  accoustumé  de  recevoir  les 
cayers,  Monsieur  le  Chancelier  luy  répondit  :  Ouy 
bien,  ceux  des  Provinces,  mais  non  pas  ceux-cy. 

27.  Le  matin,  le  Roy  void  le  cayer  de  l'assem- 
blée dans  son  Cabinet,  où  il  n'y  avoit  que  Monsieur 
le  Chancelier,  Monsieur  le  Garde  des  Sceaux,  M.  de 
Luynes,  M,  le  Président  Jeannin,  et  M.  Dea géant. 

L'après-disnée,  le  Roy  assemble  les  Princes,  Ducs, 
Pairs,  ofBciers  de  la  Couronne,  et  autres  du  Conseil, 
et  fait  lire  le  cayer.  Monsieur  le  Chancelier  parla  sur 
la  plupart  des  points. 

28.  Le  Roy  mande  les  Députez,  à  dix  heures, 
dans  son  Cabinet,  et  leur  donne  Rendez-vous  à  Paris, 
le  lendemain  des  Roys. 

«  Anne,  duchesse  de  Hallwin,  flUe  de  Florimond  de  Hallwin,  mar- 
quise de  Piennes  et  de  Megnelais,  et  de  Claude  Marguerite  de  Goudy, 
mariée  en  1611  avec  M.  de  Candalle.  Ce  mariage  ayant  été  déclaré 
nul,  elle  épousa  en  1620  Charles  de  Schomberg,  maréchal  de  France, 
et  mourut  en  1641.  (^oy.  P.  Anselme,  t.  m,  p.  914.) 


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d'arnauld  d*andilly,  3H 

29.  Le  Roy  part  de  Rouen,  va  coucher  à  Gaillon,     Décembre  mi. 
qu'il  veut  acquérir  de  TArchevesque  de  Rouen,  en 

baillant  autant  de  revenu  en  domaine,  et  500  livres 
davantage,  et  annexant  audit  Archevesché,  l'abbaye 
de  Saint-Estienne  de  Caën,  qui  vaut  quinze  ou  vingt 
mil  livres  de  rente. 

30.  Le  Roy  couche  à  Mante. 

31.  Le  Roy  part  aux  flambeaux,  une  grande 
heure  devant  le  jour,  et  va  coucher  à  Saint-Germain, 
où  la  Reyne  arriva  environ  sur  les  une  heure,  en 
mesme  temps  que  luy.  Elle  n'estoit  point  allée  en 
voyage  de  Normandie,  à  cause  qu'elle  se  trouvoit 
maP-^ 


*■  Voy.  sur  la  célèbre  assemblée  des  notables  de  Rouen  en  1617, 
Fontenay-Mareuil,  p.  605  ;  Richelieu,  p.  485  ;  Pontcbartrain,  p.  252. 
Ce  dernier  n'entre  dans  aucun  détail,  se  réservant  de  faire  sur  ladite 
assemblée  un  mémoire  spécial  comme  celui  qu*il  nous  a  laissé  sur  la 
conférence  de  Loudun.  Je  ne  sais  si  Pontcbartrain  a  accompli  son 
.projet,  mais  je  crois  quMl  n*a  été  publié  aucun  écrit  de  cet  homme 
d*État  sur  FAssemblée  des  Notables  de  1617.  Voy,  Brienne,  p.  33î, 
Voy,  surtout.  Mémoires  de  M.  Mole,  p.  154-212,  le  Narré  de  l'Assemblée 
des  Notables  de  Bouen ,  contenant  les  documents  authentiques  et  le 
texte  officiel  des  vingt  propositions  qui  furent  soumises  à  l'Assemblée 
et  des  réponses  qu'elle  y  fit.  Mole  termine  son  compte  rendu  par 
ces  mots  :  «  Le  résultat  de  toutes  ces  assemblées  fut  qu'au  mois  de 
«juillet  1618,  on  dressa  un  édit  en  243  articles,  d'après  les  remon- 
n  trances  des  trois  États  assemblés  à  Paris  en  l'année  16Î4,  d'après 
»  celles  du  Parlement  ci-dessus  rapportées  et  d'après  les  avis  des  No- 
»  tables  assemblés  à  Rouen  en  1617.  »  Le  cahier  de  cette  Assemblée  se 
trouve  aussi  dans  le  Merc.  fr,^  p.  261-317. 

s  y^oy.  sur  l'année  1617,  deux  discours  du  duc  de  Rohan,  faits  en 
ladite  année,  F  un  intitulé:  Discours  sur  le  gouvernement  de  la  Peine  ^ 
p.  166  de  ses  Mémoires;  l'autre  intitulé:  Li^e  discours  sur  le  temps 
présent,  p.  173,  ib. 


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^648 


ftOMMAIRB 

Janvibb.  *-  Retour  du  Roi  à  Paris.  -^  Lee  Cours  souyeraines  vont  le 
féliciter.  —  Discussion*  sur  la  paulette.  —  Sa  révocation.  —  M.  de 
Modène  va  en  Piémont.  —  Remontrances  du  Roi  au  Parlement.  — 
M.  de  Candale  se  refait  catholique.  —  M.  de  Cadenet*  va  trouver  la 
Reine-mère  à  Blois.  —  M,  de  Cussé  nommé  évoque  de  Nantis.  -^  l^ 
Roi  congédie  les  membres  de  l'Assemblée  de  Rouen. 

FÉVRIER.  —  Exil  de  MM.  de  Richelieu  et  de  Pont-Courlay.  —  M.  de 
Ruscellay  frappé  par  le  marquis  de  Rouillac;  détails  sur  cette 
affaire.  —  M.  de  Roissy  envoyé  vers  la  Reine-mère.  —  Rétablisse- 
ment du  collège  des  Jésuites  à  Paris.  —  Mort  du  prince  d*Orangé. 

—  M.  le  Colonel  d*Ornano  part  pour  Orange  à  ce  sujet. 

Mars.  —  M.  de  Marsillac  envoyé  vers  le  prjnce  Maurice  devenu  prince 
d'Orange.  —  Mariage  du  comte  de  Brissac  avec  M"*  de  Schomberg.  * 

—  M.  de  Montbazon  arrange  l'aflfaire  de  M.  de  Saveuse  au  sujet  de 
l'enlèvement  de  M"*  de  Vienne.  —  Querelle  du  marquis  de  Marigny 
et  du  chevalier  de  Vendôme.  —  Incendie  du  Palais-de^Justice.  — 
Mort  de  M"»*  de  Nevers.  —  Procès  entre  M.  et  M"'  de  Candale.  — 
M.  de  Courtenay-Blaineau  mis  à  la  Bastille.  —  M.  do  la  Tré- 
moille  arrive  à  la  Cour.  —  J^e  Duc  de  JSully  va  siéger  à  la  Chambre 
de  l'Edit,  —  Boisguérin  accusé  d'avoir  voulu  assassiner  le  Roi.  — 
M.  de  Boiirnonville  remplacé  à  la  Bastille  par  M.  de  Launay.  — 
M.  de  Montmorency  arrive  à  la  Cour.  —  Procès  de  Barbin  ;  lettres 
de  la  Reine-mère. 

Avril.  —  Barbin  mis  à  la  Bastille  avec  MM.  de  Bournonville,  de  la 
Ferté,  l'Evesque ,  la  Rose  et  le  sergent  Lisy.  —  L'évoque  de  Paria 
promu  au  cardinalat,  —  Le  résident  du  duc  de  Florence  reçoit 
l'ordre  de  quitter  la  France.  —  Exil  de  l'évèque  de  Luçon.  —  Re- 
montrances du  Parlement  au  sujet  de  la  paulette.  —  Prêtre  de  Caen 
accusé  d'avoir  voulu  tuer  le  Roi.  —  Affaire  de  M.  de  Vaillac  et  de 


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d'arnauld  d^andilly.  .343 

M.  du  Vair  ;  due!  à  ce  sujet.  —  M.  de  Sully  quitte  la  Cour.  — 
Plaintes  des  ducs  et  pairs  contre  le  garde  des  sceaux  ;  question  de 
préséance.  —  Querelle  entre  M.  d'Epernon  et  Je  garde  des  sceaux.  — 
Les  maréchaux  de  France  réclament  la  préséance  sur  les  ducs  et 
pairs.  —  Le  gouvernement  de  Monsieur  enlevé  à  M.  de  Brèves  ot 
donné  au  comte  de  Lude.  —  M.  d'Epernon  exilé  à  Meti. 

Mai.  —  m.  des  Portes-Baudouin,  seigneur  de  Souspire,  intendant  des 
finances  à  la  place  de  M.  Déageant;  M.  Bardeau,  secrétaire  du  Con- 
seil à  la  place  de  M.  des  Portes-Baudouin.  —  Duel  de  MM.  de  Quin- 
say  et  de  Maussy.  —  Le  comte  d'Auvergne  revient  à  la  Cour,  —  Le 
duc  de  Rhetelois  nommé  gouverneur  de  Champagne.  —  M.  de 
Mayenne,  gouverneur  de  Guyenne;  M.  de  Luynes,  gouverneur  de 
J'Ile-de-France  ;  M.  le  Colonel  d'Ornano,  lieutenant-général  en  Nor- 
mandie. —  Député  de  Lyon  frappé  par  M.  de  Saint-Chaumont.  — 
Les  frères  de  Sity  ,  arrêtés.  —  Le  Colonel  d'Ornano  va  à  Blois.  —  Le 
poète  Durand,  arrêté. 

Juin.  —  Le  duc  de  Nemours  présente  à  la  Cour  M"*  d'Aumale,  sa 
femme.  —  Reddition  de  Verceil.  —  Le  Roi  va  à  Lésigny.  —  Incen* 
die  au  port  au  Foin. 

JuiLLBT.  ^-  Marsillac  et  Lesec  mis  à  la  Bastille.  —  Le  Roi  va  à  Saint- 
Germain.  —  Durand  et  François  de  Sity,  roués;  André  de  Sity, 
pendu.  —  M.  Ribier,  conseiller  d'état.—  Edit  sur  les  propositions 
soumises  aux  ËtatMjénéraux  et  à  l'Assemblée  de  Rouen, 

AoDT. —  Mort  de  M.  de  Boucart,  remplacé  par  M.  de  Brantes,  —  Décret 
du  Grand-Conseil  contre  M.  de  Persan.  —  Disgrâce  de  MM.  de  Rus- 
cellay,  de  Sardiny,  de  Jouy,  de  Montpouillan.  —  Fête  de  S^t^Louia 
célébrée  pour  la  première  fois.  —  Arrêt  dd  Grand-Conseil  contre 
Barbin  et  ses  coaccusés. 

Septembre.  —  Mort  du  cardinal  du  Perron  ;  le  cardinal  de  la  Roche- 
foucauld, grand  aumônier,  à  sa  place.  —  M"»  la  Princesse  accondie 
de  deux  enfants  morts.  —  Voyage  du  Roi,  —  Le  Père  Arnoux  en- 
voyé à  Blois  ;  lettre  du  Roi  à  la  Reine-mère.  —  M.  de  Luynes  achète 
la  Fère  à  M.  de  Vendôme. 

Octobre.  —  Le  Roi  va  à  Soissons.  —  M.  de  Montmorency  va  en  Lan- 
guedoc. —  Suite  du  voyage  du  Roi.  —  M.  de  Longueville  revient  à 
la  Cour,  —  Retour  du  Roi.  —  M.  de  Modène  envoyé  à  Blois.  — 
Disgrâce  de  Fiesque,  de  Bautru,  de  Boullanger,  du  père  Crochart. 
—  Comédie  de  la  Reine.  —  MM.  de  Béthune  et  de  Modène  vont  au 
devant  du  prince-cardinal  de  Savoie.  —  Disgrâce  de  la  comtesse  de 
Moret. 

Novembre.  »  Arrivée  du  cardinal  de  Savoie  ;  il  demande  la  main  do 


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364  JOURNAL   INÉDIT 

M"*  Chrétienne  pour  le  prince  de  Piémont.  —  Le  Roi  le  mène  à 
Saint-Germain.  —  Le  Colonel  d*Omano  va  en  Normandie  prendre 
possession  de  sa  charge  de  lieutenant-général;  discours  qu'il  pro- 
nonce à  cette  occasion.  —  M.  du  Fai^  envoyé  en  Espagne.  — 
M.  de  Cadenet  va  à  Blois  et  à  Amboise.  —  M.  de  Vaudémont  arrive 
à  Paris  avec  le  Prince  son  fils,  * 

DÉcEVBRi.  —  Les  Espagnols  de  la  Maison  de  la  Reine  sont  congédiés. 
Maladie  de  la  Reine.  —Disgrâce  de  M.  Déageantetde  M.  de  Lass(^. 
—  M**  de  Luynes,  surintendante  de  la  maison  de  la  Reine  ;  M"*  du 
Vernet,  dame  d*atours.  -'  Querelle  du  comte  de  Soissons  et  du 
pHnce  de  Vaudémont.  —  M.  de  Vandémont  retourne  en  Lorraine. 

Janvier.  Vcnclredy,  5.     Le  Roy  arrive  de  Saint-Germain 

à  Paris  \ 

11,  MM.  les  Présidents  de  Blancmesnil,  pour  le 
Parlement,  Nicolay  pour  la  chambre  des  Comptes, 
et  Chevalier  pour  la  cour  des  Aydes,  accompagnez 
de  quelques-uns  de  leurs  corps,  vout  saluer  le  Roy, 
sur  le  sujet  de  son  retour,  et  de  l'assemblée  de  Rouen. 

Quelques  jours  auparavant,  plusieurs  de  MM.  des 
Enquestes,  et  des  Requestes,  et  en tr' autres,  MM.  de 
Grieux,  Charpentier,  Bauyn,  Portail*,  Grasseteau, 
estant  assemblez  tumultuairement,  dans  la  troisième 
chambre  des  Enquestes,  qui  estoit  une  chambre 
vuide,  ils  résolurent  d'envoyer  quelques-uns  de  leur 
Compagnie  vers  le  Grand  Conseil,  la  Chambre  des 
Comptes,  et  la  Cour  des  Aydes,  pour  les  prier  de 
s'assembler  tous  ensemble  dans  la  chambre  de  Saint* 


*  Foy.  Fontenay-Marcuil,  p.  413;  Pontchartrain,  p.  255  et  258. 

2  Paul  Portail,  conseiller  au  Parlement,  de  1585  à  1623.  C'était  un 
grand  original,  comme  le  prouve  son  historiette,  Tallemant  des  Réaux, 
t.  I,  p.  453.  Suivant  M.  Paulin  Paris,  ce  M.  Portail  aurait  été  le  type 
du  Dandin  des  Plaideurs,  (Commentaire  sur  rhistorictte  de  Portail, 
p.  454.) 


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Louis,  sur  le  sujet  de  la  Paulette.  Ensuite  de  quoy,  janvier  i«i8. 
ils  s'assemblèrent  ledit  jour  jeudy  11,  et  continuèrent 
les  deux  jours  suivants,  mais  tout  cela,  avec  tant  de 
confusion,  et  de  diversité  d'avis,  qu'ils  ne  savoyent  à 
quoy  se  résoudre.  Messieurs  du  Parlement  donnèrent 
séance  à  Messieurs  du  Grand  Conseil,  après  le  plus 
ancien  Conseiller  du  Parlement,  qui  se  trouvoit  en 
l'assemblée  ;  séance  la  plus  honorable  que  le  Grand 
Conseil  ay  t  jamais  eue  avec  le  Parlement. 

12.  Monsieur  le  Premier  Président,  accompagné 
de  Monsieur  le  Procureur  Général,  va  chez  Monsieur 
le  Chancelier,  sur  le  sujet  de  la  Paulette,  et  y  tient 
plusieurs  discours. 

15.  Le  Roy  envoyé  M.  leColonel  d'Omano  trou- 
ver Monsieur  le  Premier  Président,  et  Sa  Majesté 
signe  luy-mesme  la  Déclaration  portant  révocation  de 
la  Paulette.  Il  fit  signer  l'arrest  par  M.  de  Loménie*. 

16.  Ladite  déclaration  est  scellée,  et  publiée  au 


sceau  ^. 


17.  M.  de  Modène  part,  pour  aller  en  Piémont, 
touchant  la  paix  d'entre  le  Roy  d'Espagne,  et  le  Duc 
de  Savoye'. 

Messieurs  du  Parlement  estant  mandez  par  le  Roy; 
Monsieur  le  Premier  Président  vint,  accompagné  de 


*  Voy.  Richelieu,  p.  500  ;  Pontchartrain,  p.  255  et  suiv. 

*  Voy,  Merc,  fr»<,  t.  v,  année  MDCXVUI,  p.  1  et  suiv.,  les  proposi- 
tions faites  pour  la  conservation  de  la  paulette,  et  le  texte  de  l'arrêt 
du  Conseil  portant  rérocatioB  de  ce  droit. 

*  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  414;  Pontchartrain,  p.  259.  Suivant 
Pontchartrain,  M.  de  Modène  partit  vers  le  4  janvier;  voy,  aussi.  JUerc, 
fr.y  X,  V,  année  MDCXVin,  p.  40. 


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846  JOURNAL  INléDIT 

itinrkr  1618.  MM.  d'Onsembray,  le  Jay,  Lescalopier,  et  de  Belljè- 
vre,  Présidens,  M.  Deslandes  et  Messieurs  les  Gens 
du  Roy.  Monsieur  le  Chancelier  ayant  pris  la  parole 
par  commandement  du  Roy,  leur  parla,  sur  le  sujet 
de  la  Chambre  de  l'Édit,  qu'ils  ont  déjà  refusée  par 
trois  diverses  fois.  Et  sur  ce  que  le  Roy  ayant  seû 
qu'il  avoit  esté  tenu  plusieurs  discours  dans  le  Parle^ 
ment,  sur  ce  qui  est  de  la  Paulette,  préjudiciables  à 
son  service,  et  contre  son  autorité,  il  avoit  voulu  en 
estre  éclaircy  par  leur  bouche.  Monsieur  le  Premier 
Président  répondit,  que  pour  le  regard  de  la  chambre 
de  l'Édit,  ils  s'estoyent  arrestez,  sur  ce  qu'il  avoit 
esté  ordonné,  lors  de  l'institution  de  ladite  chambre, 
qu'elle  seroit  composée  de  tous  les  Conseillers  du 
Parlement  à  tour  de  rolle,  et  les  uns  après  les  autres; 
que  depuis,  au  lieu  que  l'on  avoit  accoustumé  de  les 
changer  tous  les  an3,  on  avoit  avisé  de  les  continuer 
pour  deux  ans,  et  non  davantage,  ce  qui  s'estoit  tou- 
jours pratiqué  depuis  ;  que  le  Roy  devoit  justice 
égale  aux  Catholiques  et  à  ceux  de  la  religion,  pré- 
tendue réformée  ;  que  de  permettre  qu'ils  n'eussent 
presque  point  d'autres  juges,  que  ceux  qu'ils  affectent, 
ainsi  qu'il  se  void  clairement  qu'ils  désirent  de  fah^e, 
veû  que  sur  le  nombre  de  deux  cens  conseillers,  qu'il 
y  a  à  la  Cour,  il  n'y  en  a  que  trente  ou  quarante  qui 
ayent  toujours  esté  de  ladite  Chambre  de  l'Édit,  les 
uns  n'en  estant  pas  si  tost  sortis,  qu'en  mesme  temps, 
ils  demandent  et  obtiennent  les  autres  ;  et  qu'au  fait 
particulier  qui  se  présente,  il  y  a  encore  une  autre 
Considération  merveilleusement  forte,  qui  est,  que  la 


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d'aenauld  d'andilly,  8A7 

Chambre  de  l'Édit  qui  est  à  présent,  a  esté  composée      '«^^^  i««» 
lors  du  Traitté  de  Loudun,  auquel  temps,  ceux  de  la 
religion  prétendue  Réformée,  avoyent  pris  les  armes 
contre  le  service  du  Roy  ;  que  si  on  permettoit  une 
telle  continuation,  la  conséquence  en  seroit  très-dan^ 
gereuse,  et  enfin,  pourroit  aller  jusques  à  i*endre  ladite 
chambre  perpétuelle.  Monsieur  le  Chancelier  répli- 
qua, que  le  Roy  vouloit  que  ladite  chambre  fust  con-r 
tinuée  encore  cette  année  seulement,  et  que  S^ 
Majesté  leur  donnoit  parole  qu'elle  la  changeroit  en 
la  prochaine.  Après,  M.  le  Premier  Président  dit,  quç 
pour  ce  qui  est  du  second  point,  il  n'avoit  ouy  tenir 
aucun  discours  dans  le  Parlement,  contre  Thonneur 
et  le  respect  deû  au  Roy  ;  qu'il  n'y  avoit  lieu  aq 
monde  où  Sa  Majesté  fust  tant  honnorée.et  révérée 
qu'au  Parlement  ;  et  que  s'il  y  avoit  eu  quelqu'un  si 
hardi  que  de  dire»  une  seule  parole  contre  son  devoir, 
ils  Fauroyent  fait  chastier  si  sévèrement,  qu'il  auroit 
servi  d'exemple,  non-seulement  6  toute  la  France, 
mais  à  teute  l'Europe.  M.  le  Chancelier  répondit  : 
«  Le  Roy  m'a  commandé  de  vous  dire,  qu'il  en  est 
donc  mieux  averty  que  vous,  et  qu'il  vous  commande 
de  vous  en  informer,  et  de  luy  en  rendre  réponce, 
aussitost  que  vous  en  sere?  éclaircis,  et  de  ne  point 
permettre  l'assemblée  des  chambres,  puisqu'elle  n'est 
demandée  que  pour  y  faire  des  propositions  préjudi-   . 
ciables  à  son  service.  » 

Ensuite,  Monsieur  le  Chancelier  dit,  que  puisque 
tous  les  discours  faits  dans  le  Parlement  avoyent  esté 
sur  le  sujet  de  la  Paulette,  il  estoit  à  propos  que  çha- 


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Janvier  161t. 


S48  JOUBNAL   INIÉDIT 

cun  sceust  comment  cette  affaire  s'estoît  passée,  et 
ainsi,  représenta  la  Réquisition  faite  par  les  Estats.  la 
promesse  du  Roy  dans  la  Grande  Galerie,  la  résolu- 
tion de  l'Assemblée  de  Rouen,  et  celle  de  Sa  Majesté, 
de  rentrer  au  droit  de  pourvoir  à  toutes  sortes  d'of- 
fices. Monsieur  le  Premier  Président  répartit,  qu'il 
avoit  toujours  esté  présent  aux  délibérations  de  l'as- 
semblée, mais  que  jamais  il  n'y  avoit  esté  rien  résolu 
sur  la  Paulette.  A.  quoy  Monsieur  le  Chancelier  ré- 
pliqua qu'il  s'estonnoit  comme  il  disoit  cela,  veû  que 
les  articles  répondus  par  écrit,  par  l'assemblée,  et 
leûs  devant  le  Roy  font  fay,  comme  il  en  a  esté  parlé 
dans  rassemblée,  qui  a  loué,  sur  ce  sujet,  la  bonne 
intention  de  Sa  Majesté. 

19.     M.  de  Caudale  se  refait  catholique. 

26.  M.  de  Cadenet  part  pour  aller  trouver  la 
Reyne-mère,  à  Rlois,  et  en  revient  le  9  février. 

L'Evesché  de  Nantes,  vaquant  il  y  avoit  environ 
quatre  mois,  par  la  mort  de  M.  de  Cussé,  est  donné 
par  le  Roy,  à  M.  de  Cussé,  son  neveu,  fils  du  Premier 
Président  du  Parlement  de  Rretagne. 

M.  de  Caudale  voit  M.  d'Epernon,  qui  témoigna  un 
grand  ressentiment,  et  pleura  de  joye. 

29.  Les  députez  de  l'Assemblée,  congédiez  par 
le  Roy  à  Madrid  *  où  Sa  Majesté  estoit  allée  le  23  \ 


Février. 


Mécredy  7.     Les   chambres  'estant  assemblées 
pour  recevoir  un  Conseiller,  M.  le  Premier  Président 


'  Le  château  de  Madrid,  près  de  Paris. 
2  Voy,  Pontchartrain,  p.  259. 


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d'abnauld  d'andilly.  319 

commença  à  leur  dire  ce  que  le  Roy  leur  avoit  fait  Février  uis. 
dire  par  M.  le  Chancelier,  combien  il  trouvoit  mau- 
vais les  discours  et  les  assemblées  qui  se  faisoyent 
par  quelques-uns  du  Parlement;  et  à  cause  que 
rheure,  pressa  ledit  jour  mécredy,  on  remit  au  Ven- 
dredy  l'assemblée  des  Chambres. 

10.  MM.  de  Richelieu  et  du  Pont  de  Courlay  * 
partent,  pour  aller  en  leurs  maisons,  en  ayant  receu 
commandement  du  Roy,  par  un  Exempt  des  gardes*. 

M.  de  Ruscellay  estant  à  la  foire,  avec  M.  le 
prince  de  Joinville,  et  voulant  bailler  la  main  à  la 
marquise  d'Alhiye*,  pour  passer  en  une  boutique,  le 
marquis  de  Roûillac*  le  poussa  avec  les  mains,  en 


*  René  de  Vignerot,  seigneur  du  Pont-Courlay,  gentilhomme  ordi- 
naire de  la  Chambre  du  Roi,  mort  en  1625.  Il  était  veuf  depuis  1015 
de  Françoise  du  Plessis,  sœur  de  M.  de  Richelieu  et  de  Tévèque  de 
Luçon,  de  laquelle  il  avait  eu  François  de  Vignerot,  marquis  du  Pont- 
Courlay,  et  Marie  Madeleine  de  Vignerot,  dame  de  Combalet,  puis  du- 
chesse d'Aiguillon. 

^  Foy.  Ricbelieu,  p.  494. 

'  Je  ne  sais  s'il  s'agit  ici  d'Isabeau  Babou  de  la  Bourdaisière,  veuve 
depuis  1602  de  François  d'Escoubleau,  marquis  d'Alluye,  couseillor 
d'État,  gouverneur  de  Chartres  et  premier  écuyer  de  la  Grande  Écurie, 
et  mère  du  cardinal  de  Sourdis,  ou  bien  de  Jeanne  de  Montluc  et  de 
Foix,  comtesse  de  Carmain,  princesse  de  Chabannais,  femme  de 
Charies  d'Escoubleau ,  marquis  d'Alluye  et  de  Sourdis ,  mestre  de 
camp  de  la  cavalerie  légère,  maréchal  dç  camp,  gouverneur  de  l'Or- 
léanais, conseiller  d'État,  mort  en  1666. 

^  Louis  de  Gotb,  marquis  de  Rouillac,  déjà  cité,  servit  d'abord  avec 
éclat  en  Suède  et  fut  nommé  en  1610  général  des  Français  au  service 
de  Suède  ;  revenu  en  France,  il  gagna  la  bague  au  fameux  carrousel 
de  la  Place  Royale,  en  1612  ;  devint  mestre  de  camp  d'infanterie  et  de 
cavalerie,  conseiller  d'État,  vice-amiral  et  lieutenant  général surmer, 
en  Levant,  ambassadeur  en  Portugal,  en  1643  ;  neveu  du  duc  d'Éper- 
Don,  il  prit  son  titre  après  la  mort  sans  enfants  de  son  cousin  Bornacd 


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850  .       JOUENAL  INÉDIT 

*•«•  luy  disant  :  Pourquoy  me  pousséz-vous?  Et  à  Fin- 
stant,  luy  bailla  quelques  coups  de  baston,  et  dit, 
ainsi  que  quelques-uns  tiennent,  à  la  Marquise  d' Al  • 
luye  :  Madame  »  c'est  pour  vous  que  le  jeu  se  fait, 
l'objet  émeut  la  puissance.  Et  aussitost,  il  se  retira 
et  fut  premièrement  à  l'hostel  de  Nevers.  La  hayne 
estoit  venue  de  ce  que  la  marquise  d'Alluye  désirant 
de  retirer  des  lettres  qu'elle  avoit  écrites  au  marquis 
de  Boûillac»  et  ne  les  pouvant  r' avoir,  elle  en  pria 
M.  de  Ruscellay,  qui  donna  de  l'argent  à  un  Espa- 
gnol ,  lequel ,  sous  prétexte  de  montrer  la  langue, 
dérobba  la  cassette  où  estoyent  lesdites  lettres,  et 
quelques  bagues.  M.  de  Ruscellay  se  trouva  fort  as- 
sisté à  la  Cour,  de  tous  les  seigneurs  de  qualité.  M.  le 
prince  de  Joinville,  qui  se  tenoit  offencé  de  ce  que 
cela  s' estoit  fait  en  sa  présence,  vint  le  lendemain 
matin,  amener  M.  de  Ruscellay  au  Roy,  aux  Feuillans, 
pour  le  remercier  de  ce  qu'il  avoit  promis,  le  soir 
précédent,  de  faire  faire  justice  sévère  de  cette  action. 
— Sa  Majesté  commanda  au  Grand  Prévost  d'aller  le 
lundy  12,  recevoir  la  pleinte  de  M.  de  Ruscellay  chez 
luy-mesme.  M.  le  Cardinal  de  Guise  assista  aussi 
M.  de  Ruscellay.  M.  de  Guise  demeura  neutre.  Deux 
ou  trois  jours  après,  à  l'instance  de  M.  le  Prince  de 
Joinville,  l'affaire  fut  renvoyée  au  Parlement.  M.  d'E- 
pernon  qui  estoit  aux  Feuillans  lorsque  M.  de  Rus- 
cellay y  arriva,  dit  qu'il  estoit  bien  impudent  d'ap- 

de  Nogaret,  marquis  de  la  Valette,  puis  duc  d'Épemoo  en  1661,  et 
mourut  en  1662.  {Foy.  P.  Anselme,  t.  ii,  p.  182,  et  Tallemant  des 
Réaux,  bistoriett»  du  marquis  de  Rouillac.) 


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d'aanauld  d'andilly.  851 

porter  des  coups  de  baston  en  si  bonne  conopagnie.      Février  lets. 

Le  samedy  24  mars,  lesdits  Sieurs  de  Ruscellay  et 
de  Roûillac  furent  accordez.  L'accord  fut,  que  M.  de 
Roûillac  alla  trouver  M,  de  Ruscellay,  dans  l'Eglise 
des  Capucins,  et  là  se  mit  à  deux  genoux  devant  luy, 
et  ayant  avoué  la  faute  qu'il  avoit  faite,  le  supplia  de 
la  luy  pardonner,  comme  il  vouloit  que  Jesus-Ghrist, 
en  la  présence  duquel  il  estoit,  luy  pardonnast  les 
siennes.  Après  cela,  le  Roy  fit  commander  à  M.  de 
Roûillac  d'estre  un  mois  hors  de  la  cour  pour  satis- 
faire à  l'offence  que  Sa  Majesté  avoit  aussi  reçeue. 

14.  M.  de  Roissy  *  va  à  Blois,  trouver  la  Reyne- 
mère,  de  la  part  du  Roy. 

Le  Collège  des  Jésuites  de  Paris,  nommé  le  Col- 
lège de  Clermont,  est  ouvert,  suivant  un  arrest  du 
Conseil  du '. 

20.  Mort  de  M.  le  Prince  d'Orange',  à  Bruxel- 
les. 

27.  M.  le  Colonel  d'Ornano  part,  pour  aller  au 
Pont-Saint-Esprit  (où  il  arriva  le  6  mars) ,  et  traitter 

^  Jean-Jacques  de  Mesmei ,  seigneur  de  Roissi,  conseiller  au  Parle- 
ment en  1583,  maître  des  Requêtes  en  1594,  conseiller  d'État  en  1600, 
mort  Doyen  des  Conseils  en  1643.  Le  lieutenant  civil  Henri  de  Mesmes 
était  son  fils,  ainsi  que  Claude  de  Mesmes,  comte  d'Avaux,  le  célèbre 
plénipotentiaire  à  Munster.  ( 

2  F0^.  Richelieu,  p.  500.  Pontchartrain  dit  à  tort  que  cet  arrêt  fut 
rendu  dans  le  mois  de  mars.  Le  collège  des  Jésuites  avait  été  fermé 
en  1&97,  après  Tattentat  de  Jean  Chàtel.  Voy,  Pontchartrain,  p.  262. 
Foy,  Merc,  /^.,  p.  6  et  suiv.,  le  texte  de  cet  arrêt  du  15  février  1618, 
et  tous  les  documents  authentiques,  relatifs  au  rétablissement  des  lec- 
tures publiques  au  collège  des  Jésuites. 

<  Philippe  Guillaume  de  Nassau,  prince  d'Orange,  beau-frère  du 
prince  de  Condé,  mort  en  1618.  Voy,  sur  ce  personnage  le  Merc,  fr, ,  p.  47. 


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352  JOURNAL  INÉDIT 

Février  ifiis.  l'affaire  d'Orange.  Il  trouva  que  le  Gouverneur,  qui 
est  Catholique,  et  que  Ton  vouloit  gagner,  avoit  tenu 
ferme  pour  le  service  du  Prince  Maurice  *  comme 
successeur  de  son  maistre,  tellement  que  M.  le  colo- 
nel ne  put  faire  autre  chose  que  d'aller  à  Orange,  et 
de  luy  offrir  et  au  corps  de  ville  la  protection  du  Roy 
loutesfois  et  quantes  qu'ils  en  auroyent  besoin. 

Mars.  Samedy  3.  M.  de  Marsillac  va  vers  M.  le  Prince 
Maurice,  faire  office  de  condoléance  sur  la  mort  du 
Prince  d'Orange.  M.  le  Comte  de  Brissac  épouse  la 
fille  de  M.  de  Schomberg^  à  laquelle  fut  donné  en 
mariage  la  valeur  de 

Ledit  sieur  Comte  de  Brissac  a  vaillant  cent  mil 
livres  de  rente,  cent  mil  écus  de  meubles  ;  la  Lieute- 
nance  de  Bretagne,  valant  quatre  cens  mil  livres,  et 
Blavet,  valant  pareille  somme. 

4.  M.  de  Montbason  ayant  entrepris  entière- 
ment l'affaire  de  M.  de  Saveuse,  demeure  d'accord 


*  Maurice  de  Nassau,  gouverneur  et  capitaine  général  des  Provinces- 
Unies,  prince  d*Orange  à  la  mort  de  son  frère,  en  1618.  Foy,  Mm.  fr.y 
p.  48. 

2  François  de  Cessé,  comte,  puis  duc  de  Brissac,  fils  du  maréchal  de 
Brissac,  pair,  grand  panetier  de  France,  lieutenant  général  au  gou- 
vernement de  Bretagne,  gouverneur  du  Port-Louis,  de  Hennebon  et 
Quimperlé,  mort  en  1651.  Son  mariage  avec  Jeanne  de  Schomberg  fut 
annulé.  Hs  se  remarièrent,  lui  avec  Guyenne  Ruellan,  fiUe  de  Gilles 
Ruellan,  seigneur  de  Roger-Portail,  elle  avec  Roger  du  Plessis  de  Uan- 
court,  duc  de  la  Roche  Guyon,  duc  de  Liancourt  et  marquis  de  Guer- 
'  cheville.  Jeanne  de  Schomberg  mourut  en  1674.  On  trouve  des  détails 
curieux  sur  le  mariage  du  comte  de  Brissac  avec  Jeanne  de  Schomberg 
dans  riiistoriette  que  Tallemant  des  Réaux  a  consacrée  à  M"«  de 
Liancourt. 


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D'ARNAOLD    D*ANDILLr.  553 

avec  les  parens  de  M"'  de  Vienne,  que  Ton  la  leur       m*»  w»». 
reraettroit  entre  les  mains;  ce  qui  fut  fait  ledit  jour, 
mais  avec  un  exempt,  et  deux  damoiselles,  dont  les- 
dits  parens  se  pleignoyent. 

6.  Querelle  du  Marquis  de  Marigny  *  avec  M.  le 
chevalier  de  Vendosme^,  dans  Ormesson,  où  le  Roy 
estoit  allé.  Accommodé  le  soir  mesme.  M.  de  Saint- 
Chamond  '  assista  le  Marquis  de  Mariçny. 

7.  La  grande  salle  du  palais  brûlée.  Le  feu  s'y 
mit  environ  à  quatre  heures  du  matin,  et  ne  dura  que 
deux  heures.  Il  ne  resta  chose  quelconque  de  ladite 
grande  salle,  qui  ne  fust  brûlé,  hormis  les  murailles, 
les  piliers,  et  partie  des  statues  des  Roys.  La  Table 
de  marbre  mesme  fut  réduite  en  cendres.  La  pre- 
mière chambre  des  Enquestes  fut  brûlée,  et  le  Par- 
quet des  huissiers.  Nul  greffe  ne  fut  brûlé.  Si  le 
vent  ne  se  fust  tourné  du  costé  de  la  Conciergerie, 
tout  estoit  perdu,  car  le  feu  eust  embrasé  toutes  les 
maisons  proches  du  Palais.  Duarsy,  Prévost  de  Tlsle 
et  Concierge  du  Palais,  logé  aux  Consulta  lions,  estant 


*  Alexandre  de  Rohan,  marquis  de  Marigny,  frère  du  prince  de 
Guemeoé  et  du  duc  de  Montbazon,  capitaine  de  cent  hommes  d'armes, 
chevalier  des  ordres  en  1619. 

2  Alexandre,  dit  le  chevalier  de  Vendôme,  fils  d'Henri  IV  et  de  Ga- 
brielle  d*Estrées,  né  en  1598,  légitimé  en  1599,  chevalier  de  Malte 
en  1604,  abbé  de  Marmoutier  en  1610«  grand  prieur  de  France  et 
général  des  galères,  ambassadeur  extraordinaire  à  Rome  en  1615, 
arrêté  à  Blois  en  1626;  mort  prisonnier  au  château  de  Vincenues 
en  1629.  {Voy,  P.  Anselme,  t.  i,  p.  149.) 

s  Melchior  Mitte,  comte  de  Miolans,  marquis  de  Saint-Chamond, 
ministre  d*État,  lieutenant  général  des  armées  du  Roi  et  au  gouverne* 
ment  de  Provence,  ambassadeur  à  Rome,  mort  en  1C49. 

23 


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354  JOORNAL  INÉDIT 

Mars  1618.  empesché  à  sauver  «a  famille  avec  des  Échelles^  vis- 
à-vis  de  Saint-Barthelemy,  n'ouvrit  point  les  portes 
du  Palais  ;  et  ainsi ,  il  les  falut  enfoncer  ;  ce  qui 
amusa  beaucoup.  Le  Lieutenant  Civil  fit  grand  devoir. 
Il  fit  tirer  et  jeter  de  l'eau  par  les  rues ,  qui  venoit 
par  les  ruisseaux,  conduits  avec  des  arrests  de  fumier, 
jusques  dans  la  cour  du  palais,  où  on  la  puisoit  à 
pleins  muids.  On  envoya  aussitost  quérir  le  Chevalier 
du  Guet,  avec  Deffontis,  et  leurs  archers  \ 

MM.  du  Parlement,  assemblez  dans  la  chambre 
Saint-Louis,  résolurent  dèsl'après-disnée  mesme,  de 
ne  point  désemparer. 

M.  de  Hauterive  ^  de  retour  de  Bruxelles,  où  il 
avoit  esté  faire  condoléance  de  la  part  du  Roy,  à 
Madame  la  princesse  d'Orange'. 

8.  Mort  de  M"*'  de  Ne  vers,  d'une  fièvre  continue, 
avec  une  constance  et  une  piété  extrêmes.  Elle  voulut 
estre  ensevelie  en  habit  de  Carmélite,  qu'elle  avoit 
voué  d' estre,  si  elle  fust  demeurée  veufve.  M.  de  Ne- 
vers  et  M.  du  Mayne  en  eurent  une  extrême  affliction. 
Le^Roy  prit  le  deuil,  et  toute  la  Cour,  et  mesme  la 
Reyne  et  les  Dames.  Plusieurs  ne  le  conseilloyent 


*  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  414.  Le  Merc,  fr,,  p.  18  et  suit.,  donne 
les  plus  grands  détails  sur  cet  incendie. 

2  François  de  TAubespine,  marquis  d'Hauterive  et  de  Chàteanneuf, 
né  vers  1594,  gouverneur  de  Breda  en  1639,  mort  en  1670.  U  était 
frère  du  garde  des  sceaux  de  Châteauneuf.  Foy.  son  historiette,  Talle- 
mant  des  Réaux,  t.  i,  p.  492,  et  le  commentaire  de  M.  Paulin  Paris. 

*  Éléonore  de  Bourbon,  sœur  du  prince  de  Condé,  née  en  1587,  ma- 
riée en  1606  à  Philippe  Guillaume  de  Nassau,  prince  d*Orange,  morte 
en  1619. 


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d'arnaold  d'andilly.  355 

pas,  disàïit,  que  ce  n'estoit  là  couôtume  ;  mais  le  Roy 
fit  connoistre  qu'il  le  désiroit.  M.  de  Nevers  s'en 
alla  à  Saint-Clou,  chez  M"'  du  Tillet\  où  le  Roy  fut 
le  voir  le  mécredy  14.  Et  le  mardy  13,  il  avoit  esté 
voir  M*  du  Mayne  en  sa  maison,  à  Paris. 

M.  de  Caudale  enlève  sa  femme  à  deux  heures 
après  minuit  II  la  meine  à  Dampierre,  $t  de  là,  luy 
fait  prendre  le  chemin  de  Castélnau  de  Rarbarin, 
accompagnée  de  quatre  soldats,  et  l'ayant  menée  jus* 
qu'à...|  il  s'en  revint  à  Paris. 

Lorsque  le  procès  se  poursuivoit,  les  parties  de- 
meurèrent d'accord  de  M.  le  Président  Séguier  et  de 
M.  de  Rérule^  pour  arbitres.  Depuis,  ils  convinrent 
que  le  congrès  se  feroit  en  une  chambfe  particulière, 
chez  M""  la  marquise  de  Maignelay  '  ;  ce  qui  se  de- 
vant exécuter,  M"*'  Caudale  ne  voulut  qu'il  y  eut 
présens  aucuns  médecins  et  chirurgiens,  et  après 


4  Charlotte  du  Tillet,  née  en  1551,  morte  en  1635  ou  1636.  Par  ses 
relations  avec  les  principaux  personnages  de  son  temps,  par  ses  in- 
trigues et  par  «on  esprit.  M"»  du  Tillet  a  joui  d'une  certaine  célébrité. 
Voy.  son  historiette,  Tallemant  des  Réaux,  t.  i,  p.  187,  et  surtout  le 
Commentaire  de  M.  Paulin  Paris. 

»  Pierre  de  Berulle,  né  en  1575,  aumônier  du  Roi  Henri  IV,  supé- 
rieur général  des  Carmélites,  fondateur  de  la  congrégation  de  l'Ora- 
toire en  1611,  chef  du  Conseil  de  la  Reine-mère  Marie  de  Médicis, 
négociateur  de  la  paix  de  la  Valteline,  confesseur  de  la  Reine  Henriette, 
cardinal  en  1627,  mort  en  1629.  Le  cardinal  de  Berulle  était  par  sa 
mère,  Louise  Séguier,  parent  du  président  de  ce  nom.  Voy,  Moreri, 
t.  II,  p.  420,  la  vie  de  ce  célèbre  prélat. 

s  Claude  Marguerite  de  Gondy,  fille  du  maréchal  duc  de  Retz,  veuve 
depuis  1502  de  Florimond  de  Hallwin,  marquis  de  Maignelais,  gouver- 
neur de  la  Fère,  et  mère  de  M*"*  de  Gandale.  La  marquise  de  Maigne. 
lais  mourut  en  1650. 


M«n  1618, 


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556  JOUANAL  INEDIT 

Mars  je».       avoîr  esté  couchée  deux  heures  avec  M.  de  Candale, 
elle  dit  qu'elle  estoit  contente. 

Le  soir,  il  n'y  vint  point  coucher,  ni  le  lendemain 
aussi,  et  le  mécredy,  l'ayant  emmenée  chez  luy,  il 
luy  osta  tous  ses  gens,  et  l'enleva  comme  dessus. 

M"*  de  Candale  estant  à  Chasteauroux,  se  fait  ar- 
rester  par  les  ofiSciers  de  la  Justice,  et  dépesche  à 
M"*  la  Marquise  de  Maignelay.  Sur  cela,  tous  ses 
parens,  et  d'un  autre  costé,  M.  de  Candale  et  tous 
ses  amis,  poursuivent  instamment  chacun  pour  la 
recevoir.  Sur  quoy,  le  Roy,  craignant  que  cela  n'ap- 
portast  de  grandes  broûilleries,  et  que  l'on  n'en  vint 
de  part  et  d'autre  à  faire  de  grandes  assemblées  de 
Noblesse,  ainsi  que  l'on  eust  fait,  sans  doute,  Sa  Ma- 
jesté prend  M"'  de  Candale  en  sa  protection,  et  luy 
envoyé  un  Exempt,  et  quatre  Archers  de  ses  Gardes 
Écossois,  afin  de  demeurer  à  Chasteauroux  avec  elle. 
Tout  cela  est  avenu  environ  depuis  le  15  jusques 
au  25  mars. 

M.  de  Courtenay-Blaineau  *,  qui  se  prétend  Prince 
du  Sang,  ayant  quelques  jours  auparavant  esté  mis 
au  grand  Chastelet,  pour  dettes,  et  ayant  satisfait, 
M.  le  Lieutenant  Civil  l'en  vint  tirer  par  comman- 
dement du  Roy,  et  lè  mit  entre  les  mains  de  M.  le 
Chevalier  du  guet,  qui  le  mena  à  la  Bastille. 


^  Edme  de  Courtenay,  seigneur  de  Blenean,  mort  en  1640.  La  maison 
de  Courtenay  réclamait  pour  ses  membres  la  qualité  de  princes  da 
sang,  comme  issue  de  Pierre,  seigneur  de  Courtenay,  septième  fils  de 
Louis  le  Gros. 


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d'arnauld  d'andillt.  357 

Je  n'en  say  autre  chose,  sinon,  qu'il  remuoit,  «««mt. 
et  vouloit  faire  quelques  levées  pour  M.  le  Prince, 
et  M.  le  Lieutenant  Civil  luy  dit,  que  le  Roy  luy  avoit 
donné  charge  de  luy  dire  que,  s'il  le  vouloit  traitter  à 
la  rigueur,  il  y  auroit  assez  pour  luy  faire  trancher 
la  teste.  A  quoy  il  répondit,  à  ce  que  j'ay  ouy  dire 
à  M.  le  Lieutenant  Civil,  fort  judicieusement,  et 
fort  respectueusement. 

Environ  12.  M.  de  la  Trémoille  arrive  à, la 
Cour. 

14.  M.  de  Sully  va,  à  dix  heures  et  demie,  à  l'au- 
dience de  la  chambre  de  l'Édit,  et  prend  place.  Trois 
fautes  en  cela,  la  première  d'arriver  la  Cour  estant 
assise,  et  si  tard  ;  ce  qui  ne  se  fait  jamais  ;  la  seconde, 
en  ce  que  les  Pairs  ne  vont  jamais  qu'à  la  Grand 
Chambre;  la  troisième,  en  ce  que  la  Chambre  de 
rÉdit  n'est  que  par  Commission,  et  que,  partant,  on 
ne  peut  y  entrer  sans  estre  nommé. 

Boisguérin,  fils  du  Gouverneur  de  Loudun,  mis 
à  la  Bastille,  sur  un  avis  donné  par  son  père,  et  en- 
voyé par  un  autre  de  ses  fils,  qu'il  vouloit  faire  un 
coup  de  Ravaillac,  et  qu'il  viendroit  luy-mesme 
après,  en  déclarer  les  particularitez  qu'il  prouveroit 
par  quinze  témoins.  Le  Chevalier  avoit  esté  prendre 
à  Angeville  ledit  Boisguérin,  qui  venoit  par  le  coche 
d'Orléans.  Lorsqu'il  estoit  passé  à  Orléans,  un  de 
ses  frères  qui  venoit  avec  luy,  avoit  présenté  requeste 
pour  le  faire  arrester  prisonnier,  et  se  constituer  pri- 
sonnier avec  luy;  ce  que  le  juge  n'ordonna  pas;  qui 
fut  une  grande  faute. 


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358  JOURNAL  IN]liDIT 

Mwranis.  18.    M.  Barbin  tiré  de  la  Bastille.  {Fide  mé- 

moire particulier  de  toute  cette  affaire*.) 

21.  M.  de  Boumonville*  tiré  de  la  Bastille,  et 
mis  par  le  Roy  en  la  Garde  de  M.  le  Maréchal  de 
Vitry  ;  et  M.  de  Launay,  Exempt  des  Gardes,  oncle 
de  M.  le  Maréchal  de  Yitry,  mis  dans  la  Bastille 
avec  cinquante  Suisses. 

23.     M.  de  Montmorency  arrive  à  la  Cour  '. 

29.  M.  de  Canteloube  apporte  au  Roy  des  lettres 
de  la  Reyne-mère,  portant  créance  en  luy,  sur  le 
sujet  de  l'affaire  de  M.  Barbin.  II  dit  à  Sa  Majesté 
que  la  Reyne  le  supplioit  d'envoyer  M.  Barbin  au 
Parlement,  pour  luy  faire  son  procès,  et  que  s'il 
trouvoit  qu'elle  fust  meslée  dans  aucune  cabale  ou 
entreprise  contre  son  service,  elle  vouloit  que  l'on 
luy  fist  aussi  le  sien.  La  Reyne  mandoit  cela  pour 
obliger  le  Parlement.  M.  de  Canteloube  fut  renvoyé 
le  samedy.  Il  disoit  partout  ce  qu'il  avoit  dit  au 
Roy,  et  disoit  aussi,  que  l'on  ne  le  laisseroit  guère  à 
Paris*. 


*  yoy,  Richelieu,  p.  499. 

*  M.  de  Boumonville,  frère  de  M,  de  Persan,  avait  été  chargé  eu 
commandement  de  la  Bastille. 

*  Foy.  Pontchartrain,  p.  261. 

*  «  Au  mois  de  mars  de  Tannée  suivante,  1618,  on  découvrit  une  en- 
»  treprifie  i)ue  M.  Barbin,  prisonnier  à  la  Bastille,  avoit  faite  pour  sortir 
»  la  Reine-mère  de  Blois,  où  elle  étott  comme  prisonnière.  Cette  affaire 
»  étant  très-importante  à  cause  des  personnes  de  qualité  qui  s'y  trou- 
»  voient  mêlées,  on  choisit  trois  conseillers  dIStat  pour  en  instraire  \9 
n  procès.  Ce  furent  M.  le  président  de  Bailleul,  M.  TAvocat  et  moi  t 
»  et  parce  qu'on  ne  voulut  pas  se  confier  à  un  greffier,  et  qu'ainsi  il 
»  falloit  que  ce  fût  l'un  des  conmûssaires  mêmes  qui  tint  la  plume, 


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d'arnaold  d'andilly.  859 

80.  M.  de  Bassomplerre  va  à  la  Bastille  recevoir       umm. 
les  clefs  de  M.  de  Launay,  qui  y  commandoit,  et  les 
remettre  entre  les  mains  du  Capitaine  des  Suisses  qui 
y  entroit*,   {Fide  mémoire  de  l'affaire  de  Barbin, 
ut  suprà.) 

M.  de  Bran  tes  entra  dans  la  Bastille,  avec  sa  Com- 
pagnie. 

Mécredy  4.     M.    Barbin  remené  à  la  Bastille.  avhi. 

MM.  de  Bournonville  et  de  la  Ferté,  et  TEvesque, 
Larose,  et  le  sergent  Lisy  ^,  y  sont  aussi  menez. 

5.  Nouvelle  arrive  de  la  promotion  de  M.  l'Eves- 
que  de  Paris  au  Cardinalat.  Il  se  fait  appeler  Car- 
dinal de  Rets.  M.  d'Épernon  estant  allé  voir  M.  le 


»  ce  fut  à  moi  à  la  prendre  comme  étant  le  plus  jeune.  A  mesure  que 
»  nous  avancions  dans  cette  affaire,  nous  en  faisions  le  rapport  m 
»  ministre  chez  M.  le  Chancelier,  où  M.  de  Luynes  se  trouvoit,  puis 
»  on  la  rapporta  devant  le  Roi.  Elle  fut  ensuite  envoyée  au  Grand 
M  Conseil  pour  la  juger,  comme  il  fit,  et  cette  compagnie  témoigna 
»  n'avoir  point  vu  de  procès  mieux  instruit.  »  (Mémoires  d'Arnauld 
d*Andilly,  p.  375  )  Cette  mission  d'Arnauld  d'Andilly  lui  permit  de 
rédiger  le  mémoire  particulier  sur  Taffaire  de  Barbin,  auquel  il  renvoie 
plusieurs  fois  dans  ce  Journal,  et  c'est  pourquoi  il  se  dispense  de  don- 
ner ici  des  détails  sur  ladite  affaire.  Ce  mémoire  n'a,  je  crois,  jamais 
été  publié,  du  moins  sous  le  nom  de  son  auteur.  On  le  trouverait  peut- 
être  parmi  les  papiers  d'Arnauld  d'Andilly  qui  ont  été  conservés.  Ainsj 
qu'il  le  dit  dans  ses  Mémoires,  p.  376,  d'Andilly  qui  tenait  la  plume, 
interrogeait  le  plus  souvent  Barbin  pendant  l'instruction  de  son  procès. 
Des  réponses  de  cet  honmie  d'État  Amauld  d'Andilly  tire  les  renseir 
gnements  qu'il  consigne  dans  divers  endroits  de  son  Journal,  en  les  fai- 
sant précéder  de  ces  mots:  J'ay  ouy  dire  à  M.  Barbin,  le  23  mars  1618, 
alors  que  j'estois  un  de  ses  trois  commissaires,  etc. 

4  Voy,  Bassompierre,  p.  152. 

2  Sergent  de  la  Bastille,  accusé  d'avoir  fait  passer  à  la  Reine-mère 
les  lettres  de  Barbin, 


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360  JOURNAL   INÉDIT 

Avril  1618.  Nonce  pour  l'absolution  de  M.  de  Candale,  et  pour 
faire  avoir  le  chapeau  à  M.  de  Thoulouse,  M.  le 
Nonce,  qui  avoit  receu  le  courrier  trois  heures  aupa- 
ravant, luy  dit,  que  pour  le  premier,  il  l'y  serviroit , 
mais  que  quant  au  second,  c'estoit  chose  résolue; 
pour  ce  qu'il  avoit  receu  nouvelle  que  M.  de  Paris 
estoit  promeu  au  Cardinalat.  Sur  cela,  M.  d'Éper- 
non  se  leva,  et  s'en  alla,  sans  luy  dire  parole  quel- 
conque*. 

7.     Le  Roy  fait  commander  dans  le  Conseil,  et 
en  sa  présence,  par  M.  le  Garde  des  Sceaux  (M.  le 
Chancelier  estoit  malade),  au  Résident  du  Duc 
de  Florence,  qu'il  eust  à  sortir  de  Paris,   dans 
vingt-quatre  heures,  et  du  Royaume,  dans  dix-huit 
jours,  sans  tenir  autre  chemin  que  l'ordinaire,  et  sans 
envoyer  aucun  Courrier  en  lieu  quelconque  ;  et  qu'en 
attendant  qu'il  fust  hors  de  France,  il  y  vescust 
comme  particulier.  C'estoit  parce  qu'il  avoit  donné 
avis  et  conseillé  à  Son  Maistre  d'entreprendre,  ainsi 
qu'il  a  fait,  de  faire  arrester  à  Livourne,  par  forme 
de  représailles,  des  vaisseaux  françois  chargez  de 
marchandises,  valant  plus  de  trois  cent  mil  livres, 
sous  prétexte  de  ce  que  les  officiers  de  Sa  Majesté 
ont  fait  saisir  en  Provence  un  petit  vaisseau  chargé 
de  la  valeur  de  quatorze  ou  quinze  mil  livres  de  mar- 
chandises sujettes  à  confiscation  ;  dont,  sur  la  pre- 
mière Réquisition  duPropriétaire,  le  Parlement  donna 
maîn-levée  par  provision,  et  depuis,  sur  le  Comman- 

*  Foy,  Fontenay-Mareuîl,  p.  414;  Rohan,  p.  153;  Mcrc  fr.,  p,  20^ 


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d'arnauld  d'andilly.  361 

dément  qu'il  reçeut  du  Roy,  en  donna  pleine  et  en-      xmi  leii. 
tière  main-levée. 

Le  soir,  M.  le  chevalier  du  Guet  alla  trouver  ledit 
Résident,  pour  luy  dire,  qu'il  regardas!  en  quelle 
sorte  il  s'en  voudroit  aller,  parce  que  le  Roy  luy  avoit 
commandé  de  luy  faire  bailler  des  chevaux.  Il  ré- 
pondit, que  puisqu'il  n*estoit  plus  que  comme  parti- 
culier, il  s'en  iroit  seulement  avec  trois  chevaux  de 
poste,  sur  lesquels  il  monteroit  le  lundy  à  dix  heures 
du  matin.  Le  Chevalier  du  Guet  luy  dit  aussi,  que  le 
Roy  craignant  que  l'on  ne  luy  fist  quelque  déplaisir, 
sur  le  point  de  son  partement,  ou  que  l'on  ne  déro- 
bast  quelque  chose  en  sa  maison,  luy  avoit  com- 
mandé de  poser  un  corps  de  garde  devant  sa  porte, 
ainsi  qu'il  fit.  Cela  fut  fait  afin  d'empescher  que  l'on 
ne  communiquast  avec  luy,  et  pour  remarquer  ceux 
qui  le  viendroyent  chercher. 

Nonobstant  ce  qu'il  avoit  dit  de  son  départ  au 
Chevalier  du  Guet,  il  se  dérobba  le  Dimanche  au  soir, 
et  s'en  alla  sur  des  chevaux  de  louage. 

Le  mesme  jour,  le  Roy  signa  une  grande  instruc- 
tion, qu'il  envoya  à  M.  de  Roissy,  pour  en  faire  en- 
tendre le  contenu  à  la  Reyne-mère,  sur  le  sujet  de 
son  retour,  et  de  tout  ce  qui  s'estoit  passé  en  l'affaire 
de  M.  Barbin,  pour  réponce  aux  lettres 'apportées 
par  les  sieurs  de  Villers,  et  de  Canteloube. 

Ladite  instruction  portoit  aussi  de  faire  sortir 
d'auprès  de  ladite  Dame,  Luca  de  Gli  Asini,  confia 
dent  dudit  agent  de  Florence.  Et  incontinent  après, 
le  Roy  commanda  à  MM.  de  Luçon,  de  Richelieu  et 


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862  lODRNAL    IIVlâDIT 

Anii  iMi.  de  Pont-Courlay,  de  se  retirer  en  Avignon ,  où  ils 
arrivèrent,  le...  *• 

9.  Remonstrances  de  Messieurs  du  Parlement 
touchant  l'Évocation  des  Rentes  du  clergé,  et  la  Pau- 
lette,  par  le  Parlement.  —  Réponse  de  M.  le  Garde 
des  Sceaux.  L'un  et  l'autre  refusé. 

13.  Prestre  de  Caen  pris  dans  le  Louvre,  qui 
vouloit  tuer  le  Roy. 

13.  M.  de  Yaillac  ^  ayant  tiré  des  mains  des 
Sergens  un  soldat  nommé  La  Vallée,  contre  lequel, 
à  son  occasion,  M.  du  Vair,  fils  de  M.  de  Raynac, 
avoit  obtenu  prise  de  corps,  ledit  S'  du  Vair  et 
son  frère  y  viennent,  se  battent;  du  Vair  tué,  et 

Dourt Gentilhomme  qui  se  trouva  avec  M.  de 

Vaillac,  lequel,  à  ce  qu'on  dit,  se  sauva  au  bois  de 
Vincennes,  où  a  Compagnie,  et  y  fut  quelques  jours 
caché. 

17.  M.  de  Sully  s*en  va  de  la  cour.  Il  avoit 
voulu  marier  M"'  de  Sully  à  M.  de  la  Trémoille. 

M.  le  Président  Jeannin  s'en  va. 

20.  Le  Roy  estant  au  Cabinet  du  Conseil,  M.  de 
Montmorency,  assisté  de  M.  d'Epernon ,  de  M.  de 

*•  Foff.  Riehelieu,  p.  493  ;  o  Je  ne  fus  pas  surpris  à  la  réception  de 
»  cette  dépêche,  ayant  toujours  attendu  de  la  lâcheté  de  ceux  qui 
»  gouvemoient,  toute  sorte  d'injuste,  barbare  et  déraisonnable  traite- 
»  ment.  »  Il  faut  lire  dans  les  Mémoires  du  grand  Qardinal,  éd.  citée, 
p.  ^90  et  suiv.,  le  long  et  curieux  plaidoyer  qu'il  fait  en  sa  faveur 
pour  prouver  la  pureté  de  sa  conduite  à  cette  époque  et  l'injustice  de 
sa  disgrâce. 

2  Louis  Ricard  de  Gourdon  de  Genouillac,  comte  de  Vaillac,  repré- 
sentant de  la  noblesse  à  TAssemblée  des  Notables  de  Rouen  en  1617, 
mort  après  Janvier  1643. 


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d'arnauld  d'andilly.  363 

Monbason  et  de  plusieurs  autres  Ducs  et  Pairs,  fit  attuims. 
pleinte  au  Roy  de  ce  que  M.  le  Garde  des  Sceaux 
prenoit  place  dans  le  Conseil  vis-à-vis  de  M.  le  Chan- 
celier, de  l'autre  costé  de  la  Table  ;  il  ne  restoit  plus 
aucune  place  honnorable  aux  Ducs  et  Pairs,  lorsqu'ils 
estoyent  obligez  d^aller  au  Conseil,  touchant  les  aU 
faires  de  leurs  Gouvememens,  ou  de  leurs  Charges. 
Après,  M.  d'Epemon  prit  la  parole,  dit  en  substance, 
d'un  ton  de  voix  fort  haut,  que  luy,  et  les  autres  Ducs 
et  Pairs,  ayant  toujours  dignement  servy  les  Roys, 
et  beaucoup  d'entr^eux  estant  plus  anciens  Conseil^ 
1ers  d' Estât  que  M.  le  Garde  des  Sceaux,  il  leur  seroit 
bien  rude  de  se  voir  précédez  par  luy  ;  ce  qui  tf  a-^ 
voit  jamais  esté  entrepris  par  tous  les  autres  Gardes 
des  Sceaux  ;  et  que  de  fait ,  M.  le  Chancelier  estant 
Garde  des  Sceaux,  n'en  avoit  jamais  usé  ainsi  avec 
M.  le  Chancelier  de  Bellièvre*;  qu'il  supplioit  le 
Roy  de  leur  vouloir  donner  sur  cela  une  résolution 
prompte.  M.  le  Garde  des  Sceaux  dit  après,  s'adre&* 
sant  au  Roy,  qu'il  ne  demandoit  autre  rang,  que 
celuy  qu'il  avoit  plû  à  Sa  Majesté  de  luy  donner,  r^ 
mettant  entre  ses  mains,  en  sa  volonté,  non-seule<^ 
ment  cela,  mais  sa  charge,  sa  viç,  et  tout  ce  qu'il 
avoit  au  monde  ;  et  la  supplioit  très*humblement  de 


i  Pompone  de  Beliiëyre,  seigpeur  de  Grignon,  né  en  1529,  ambassa- 
deur en  Suisse  sous  Charles  IX,  conseiller  au  Parlement  en  1569,  con- 
seiller d'État  en  1570,  surintendant  des  finances  en  1575,  président  att 
Parlement  de  Paris  en  1576,  ambassadeur  en  Angleterre  en  1580,  plé- 
nipotentiaire à  Vervins  en  1598,  chancelier  de  France  en  1599,  mort 
en  1607. 


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Avril  1618. 


364  JOURNAL  INEDIT 

trouver  bon,  que  sur  ce  qu'avoit  dit  M.  d'Epemon, 
il  représentast  que  MM.  les  Ducs  et  Pairs  n'ayant 
esté  créez  qu'en  la  troisième  race,  et  les  Chanceliers 
et  Gardes  des  Sceaux  ayant  toujours  esté,  il  n'y  avoit 
point  d'apparence  de  leur  disputer  leur  rang.  M.  d'E- 
pernon  répondit  :  Cela  est  bon  pour  les  Chanceliers, 
mais  non  pas  pour  les  Gardes  desS  ceaux,  entre  les- 
quels il  y  a  grande  différence ,  puisque  vous  n'avez 
point  la  séance  au  Parlement.  M.  le  Garde  des 
Sceaux  répliqua',  encore  que  le  Parlement  y  ayt 
voulu  faire  diflQculté,  je  ne  laisse  pas  d'y  avoir  séance, 
car  mes  lettres  le  portent ,  et  aussi  le  rang  que  je 
dois  tenir.  M.  d'Epemon  répliqua,  vous  avez  mis 
dans  vos  lettres  tout  ce  que  vous  avez  voulu,  car  vous 
les  avez  scellées  vous-mesme.  M.  le  Garde  des  Sceaux 
repart,  ce  n'est  point  moy,  mais  le  Roy  qui  les  a 
scellées  luy-mesme,  en  présence  de  tous  les  Princes. 
M.  d'Epernon  répondit,  il  ne  se  trouvera  point  que 
nuls  autres  Gardes  des  Sceaux  ayent  joûy  de  ce  que 
vous  prétendez.  — M.  le  Garde  des  Sceaux  réplique, 
vous  vous  trompez. —  M.  d'Epemon  dit,  vous  vous 
trompez  vous-mesme,  sauf  le  respect  du  Roy  ;  et  j'ay 
ce  bonheur  que  je  n'ay  jamais  servy  que  les  Roys, 
et  que  je  ne  tiens  que  d'eux  toutes  les  charges  que 
je  possède,  lesquelles  m'ont  esté  données  pour  ré- 
compence  de  mes  services,  et  de  ma  fidélité. — M.  le 
Garde  des  Sceaux  répondit,  je  puis  dire  cela,  et  quel- 
que chose  davantage.  M.  d'Epemon  répliqua,  le 
respect  du  Roy  m'empesche  de  vous  répondre.  Sur 
cela,  le  Roy  se  leva,  disant  quelques  paroles  qui  témoi- 


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d'aanaold  d'andilly.  365 

gnoyent  qu'il  ne  vouloit  point  qu'ils  parlassent  da-  avhi  teiB. 
vantage  sur  ce  sujet.  M.  d'Epernon  suivit  le  Roy. 
M.  le  Garde  des  Sceaux  estant  demeuré  dans  le  Cabi- 
net, s'adressa  à  M.  le  Chancelier,  et  luy  dit,  pardieu, 
c'est  vous  qui  m'avez  suscité  tout  cela.  Le  Chancelier 
répondit,  Dieu  m'est  témoin  que  je  n'y  ay  pas  pensé, 
et  que  je  ne  say  que  c'est,  en  façon  quelconque.  M.  le 
Garde  des  Sceaux  répliqua,  par  la  mort-Dieu,  je  say 
bien  que  c'est  à  vostre  inscitation  que  tout  cecy  est 
arrivé.  M.  le  Chancelier  répondit,  en  levant  les 
mains,  je  proteste  par  le  Dieu  vivant,  qui  connoist 
vos  intentions  et  les  miennes,  que  j'en  suis  entière- 
ment innocent,  et  que  vous  avez  grand  tort  de  dire 
cela  ;  mais  vous  estes  outré,  c'est  pourquoy  je  ne  vous 
en  diray  pas  davantage  *. 

L'après-disnée,  M.  de  Luynes  et  M.  Déagent  fu- 
rent chez  M.  le  Chancelier  et  chez  M.  le  Garde  des 
Sceaux  ;  et  sur  le  soir,  le  Roy  les  fit  venir  dans  son 
Cabinet  des  livres,  où  il  les  accorda  ;  et  ils  y  furent 
assez  longtemps. 

22.  Le  Roy  s' estant  trouvé  mal,  et  purgé,  fit 
venir  à  la  ruelle  de  son  lit  MM.  de  Montmorency, 
qui  marchoit  devant,  et  d'Epernon  ;  et  leur  dit  en 
substance,  j'ay  commandé  à  M.  le  Chancelier  de 
voir  tous  les  Réglemens  touchant  vos  séances ,  et 
après  qu'il  me  les  aura  représentez,  j'y  pourvoyeray 
et  conserveray  vostre  droit.  Cependant,  je  trouve  bon 

*  Voy.  Rohan,  p.  153  :  «  L'intérêt  des  robes  longues,  dit  Rohan,  rem- 
porta par  dessus  les  Pairs  de  France.  »  Voy,  aussi  Brienne,  p.  334. 


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366  JOURNAL   INl^DIT 

Avril  ms.  que  vous,  M.  d'Epernon,  partiez  dès  demain  pour 
aller  à  Mets,  et  que  vous  oubliez  tout  ce  qui  s'est 
passé  ;  et  ce  faisant,  j'oublieray  aussi  Toffence  que 
j'y  ay  reçeue. 

Il  avoit  esté  résolu  qu'aussitost  que  le  Roy  auroit 
achevé,  il  se  léveroit,  et  que  M,  le  Chancelier  le  tou- 
chetoit,  pour  luy  faire  signe  quand  il  seroit  temps  ; 
msÂs  il  n'eu  fit  rien,  et  donna  le  temps  à  M.  d'Eper* 
non  de  parler  tant  qu'il  voulut;  et  luy,  et  M.  le  Pré- 
aident Jeannin  adoucissoyent,  en  sa  faveur,  tout  ce 
qu'ils  pouvoyent.  Ils  avoyent  baillé  un  mémoire  au 
Roy,  de  ce  qu'il  pouvoit  dire,  qui  estoit  entièrement  à 
l'avantage  de  M.  d'Epernon.  M.  d'Epernon  répondit, 
en  substance,  d'un  ton  de  voix  fort  haut,  qu'ayant 
esté  offencé,  comme  il  avoit  esté,  en  présence  du 
Roy,  par  M.  le  Garde  des  Sceaux,  il  estoit  bien,  au 
moins,  raisonnable  qu'il  luy  en  flst  aussi  satisfac- 
tion, en  présence  de  Sa  Majesté  ;  que  sa  c'eust  esté  un 
homme  d'épée,  et  qu'il  n'eust  pas  esté  devant  le  Roy, 
cela  ne  se  fust  pas  passé  ainsi.  Le  Roy  se  leva  de 
dessus  sa  chaire;  et  dit,  quoy!  céans?  M.  d'Eper- 
non répliqua,  non  Sire,  mais  hors  de  vostre  maison, 
et  de  la  présence  de  Vostre  Majesté  ;  et  ajousta,  que 
M.  le  Garde  des  Sceaux  l'avoit  traitté  en  valet,  en  luy 
disant  qu'il  se  trompoit,  mais  qu'il  eust  plus  aisé- 
ment supporté  qu'il  luy  eust  dit  qu'il  estoit  un  co- 
quin et  un  maraut,  que  non  pas  de  l'avoir  attaqué  à 
l'honneur,  en  touchant  ce  qui  est  de  la  fidéUté  ;  et  en 
disant  qu'il  pouvoit  dire  sur  ce  sujet  là  quelque  chose 
davantage  que  luy  ;  qu'il  ne  pouvoit  savoir  ce  qu'il 


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D'AilNAULD  d'andilly.  867 

avôît  fait  davantage,  sinon  qu'il  avoit  esté  de  la  KfHun*. 
Ligue,  et  que  luy  n'en  avoit  jamais  esté  ;  que  quant 
à  ce  que  le  Roy  luy  avoit  dit,  qu'il  pouvoit  aller  à 
Mets  quand  il  luy  plairoit,  il  supplioit  très-humble- 
ment le  Roy  de  trouver  bon  qu'il  n'y  allast  point,  aveo 
cette  honte  sur  le  front,  et  de  faire,  auparavant,  ter-^ 
miner  cette  afiTaire.  Sur  cela  M.  le  Président  Jeannin 
prit  la  parole,  et  dit  que  le  Roy  seroit  bien  ayse 
qu'il  revint  bientostdudit  voyage,  àquoy  M.  d'Eper- 
non  répondit,  que  le  voyage  ne  pressoit  point  tant, 
qu'il  ne  falust  le  remettre  * 

Après,  le  Roy  dit,  avec  un  visage  émeû,  qu'il  ne 
trouvoit  nullement  bon  que  l'on  fist  des  Assemblées, 
et  qu'il  vouloit  bien  que  chacun  le  seust.  M.  d'Eper- 
non  répondit,  qu'il  ne  trouveroit  point  qu'il  eust  fait 
aucunes  assemblées,  et  qu'il  ne  savoilpasqui  avoit 
voulu  faire  croire  cela  à  Sa  Majesté.  Mais  que  si  on 
luy  avoit  rapporté  qu'il  avoit  donné  à  disnef  à 
M.  de  Montmorency  et  à  M.  d'Usez*,  on  luy  avoit  dit 
vray  ;  qu'il  ne  croioit  point  qu'il  luy  fust  défendu  ni 
qu'il  dust  estre  trouvé  mauvais,  qu'il  donnast  à  dis- 
ner  à  quatre  ou  cinq  de  ses  amis,  et  qu'il  n'y  avoit 
aucune  apparence  de  vouloir  dire  sur  cela,  qu'il  eust 
fait  des  assemblées. 

Environ  demy  heure  auparavant,  M.  de  Brissac, 


*  Le  duc  d'Épernon  se  rendit  à  Metz  qu'il  quitta  au  commencement 
de  Tannée  suivante  pour  favoriser  l'évasion  de  la  Reine-mère. 

*  Emmanuel  de  Crussol,  duc  d'Uzès,  pair  de  France,  chevalier  des 
Ordres  en  1611,  chevalier  d'honneur  de  la  reine  Anne  d'Autriche, 
en  1615,  capitaine  de  200  hommes  d'annes  en  1616,  mort  en  1657. 


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368  JOUBNAL  INEDIT 

ATrti  m$,  accompagné  de  MM.  de  Boisdaufin  et  de  Vitry,  avoit 
parlé  au  Roy,  au  nom  des  Maréchaux  de  France,  et 
dit ,  en  substance,  que  par  plusieurs  Réglemens  et 
arrests  du  Conseil,  et  autres  titres,  ils  justifieroyent, 
qu'ils  devoyent  seoir  dans  le  Conseil,  au-dessus  des 
Ducs  et  Pairs,  et  qu'ils  supplioyent  très-humblement 
le  Roy  de  les  conserver  en  leur  droit  ;  que  néant- 
moins,  sachant  l'honneur  qui  estoit  deû  à  la  maison 
de  Montmorency,  laquelle  a  porté  tant  de  grans  et 
signalez  Connestables,  ils  estoyent  d'accord  de  céder, 
à  M.  de  Montmorency,  et  sachant  bien  aussi  l'hon- 
neur que  l'on  est  obligé  de  rendre  à  ceux  qui  ont 
l'honneur  d'estre  chéris  particulièrement  du  Roy, 
que  s'il  s'en  trouvoit  quelqu'un  à  qui  le  Roy  voulust 
faire  une  faveur  spéciale,  pour  marque  de  l'affection 
qu'elle  luy  porte,  et  de  la  part  qu'elle  luy  donne  en 
ses  bonnes  grâces,  ils  luy  déféreroyent  volontiers. 

Ce  jour,  ayant  esté  résolu  que  M.  de  Brèves  *  se- 
roil  osté  d'auprès  de  Monsieur,  M.  le  Chancelier  le 


*  François  Savary,  seigneur  puis  comte  de  Brèves  et  marquis  de 
Maulevrier,  né  en  1560,  ambassadeur  à.Constantinople  en  1591,  rentré 
en  France  après  un  séjour  de  yingt-deux  ans  en  Orient,  conseiller  d*État 
et  gentilhomme  de  la  Chambre  en  1607,  ambassadeur  à  Rome  en  1608, 
gouverneur  de  Monsieur,  premier  gentilhomme  de  sa  chambre,  lieute- 
nant de  sa  compagnie  et  surintendant  de  sa  maison,  remplacé  en  1618 
par  le  comte  du  Lude,  nommé  premier  écuyer  de  la  Beiue,  membre 
de  TAssemblée  des  Notables  en  1626,  membre  du  Conseil  des  Dépêches 
en  1627,  mort  en  1628.  M.  de  Brèves  a  laissé  plusieurs  ouvrages,  et 
entre  autres  la  Relation  de  T  audience  dans  laquelle  le  gouvernement 
de  Gaston,  frère  du  Roi,  lui  fut  retiré  et  donné  au  comte  du  Lude. 
Ce  récit  confirme  entièrement  celui  d'ArnauId  d'Andilly.  {Foy.  dans  la 
Biograpliie  Michaud  la  notice  très-iutéressante  que  Tillustre  Walkenaer 
a  consacrée  à  ce  personnage.) 


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d'arnadld  d'andilly.  369 

dit  le  matin  à  M.  de  Brèves.  M.  le  Comte  du  Lude  \       avhi  lett. 
qui  a  eu  la  charge,  jura  le  soir,  qu'il  ii*en  avoit  oûy 
parler  en  façon  quelconque. 

M.  le  Colonel  d'Ornano  revient  du  Pont  St-Es- 
prit.  Le  Roy  estant  dans  le  Grand  Cabinet  de  la 
Reyne,  avec  MM.  le  Garde  des  Sceaux,  Président 
Jeannin,  de  Luynes  et  Deagent,  envoya  quérir  Mon- 
sieur, que  M.  de  Brèves  luy  amena.  Monsieur  estant 
demeuré  dans  le  petit  Cabinet,  M.  de  Brèves  dit  au 
Roy,  en  substance,  qu'il  avoit  apporté  toute  Taffec- 
tion,  la  vigilance  et  la  fidélité  qui  luy  avoyent  esté 
possibles,  en  la  charge  que  Sa  Majesté  luy  avoit  fait 
l'honneur  de  luy  commettre  ;  qiie  s'il  ne  s'en  estoit 
acquitté  aussi  dignement  comme  il  devoit,  ç' avoit 
esté  faute  de  suffisance,  mais  non  d'affection  et  de 
bonne  volonté;  qu'il  avoit  Dieu  pour  témoin  qu'il 
n' avoit  rien  fait  contre  sa  conscience,  et  son  devoir; 
et  que  si,  d'aventure,  on  avoit  voulu  donner  quel- 
ques impressions  contraires  à  Sa  Majesté,  il  la  sup- 
plioit  très  humblement  de  trouver  bon  qu'il  s'allast 
rendre  prisonnier  dans  la  Conciergerie,  estant  prest 
de  souffrir  tous  les  supplices  que  l'on  sauroit  imagi- 
ner, s'il  se  trouvoit  qu'il  eust  failly  ;  qu'il  remercioit 
très  humblement  le  Roy  de  la  gratification  que 
M.  Déageant  luy  avoit  dit  qu'il  luy  vouloit  faire. 


^  François  de  Bâillon,  comte  du  Lude,  né  en  1570,  sénéchal  d^Anjou 
en  1585,  lieutenant  général  au  gouverneirent  d'Auvergne,  conseiller 
d'État,  gouverneur  de  Monsieur,  premier  gentilhomme  de  sa  Chambre, 
surintendant  général  de  sa  maison  et  lieutenant  de  sa  compagnie  de 
doux  cents  hommes  d'armes  en  1018,  mort  en  161  d. 

24 


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870  JOURNAL  INÉDIT 

AjrHi  IMS,  Cette  gratification  estoit  50  mil  écus  dé  récompence, 
deux  mil  écus  d'augmentation  de  pension,  et  l'esta- 
blissement  demaistre  de  la  garderobbe,  pour  son  fils. 
Le  Roy  répondit  qu'il  avoit  commandé  à  M.  le  Garde 
des  Sceaux,  de  luy  faire  entendre  son  intention. — Sur 
cela,  M.  le  Garde  des  Sceaux  prit  la  parole,  et  parla 
à  M.  de  Brèves  en  très-bons  termes,  et  bien  choisis, 
dont  la  substance  estoit,  que  le  Roy  ayant  jugé  à 
propos,  pour  deâ  considérations  importantes  au  bien 
deson  service,  de  retirer  Monsieur  son  frère  auprès 
de  luy,  il  F  avoit  envoyé  quérir  pour  ce  sujet;  mais 
que  comme  les  secrets  des  Princes  ne  se  devoyent 
jamais  apprendre ,  aussi  n'estoit-il  pas  besoin  d'en 
exprimer  davantage  la  cause  ;  que  le  Roy  le  tenoit 
pour  homme  de  bien,  et  son  serviteur;  €t  que  pour 
marque  de  la  gratification  avec  laquelle  il  le  vouloit 
traitter,  il  luy  accordoit  la  récompence  dont  il  luy 
avoit  fait  parler  par  M.  Déageant.  Après,  Monsieur 
de  Brèves  alla  quérir  Monsieur,  qu'il  amena  au  Roy, 
par  la  main  ;  et  en  le  remettant  en  celle  de  Sa  Ma- 
jesté, luy  dit  qu'il  le  supplioit  très  humblement  de 
se  souvenir  de  ce  qu'il  luy  avoit  dit,  si  souvent,  qu'il 
ne  pouvoit  attendre  autre  honneur,  ni  autre  avan- 
tage ,  que  des  bonnes  grâces  du  Roy  ;  et  qu'il  luy 
rendist  toujours  le  respect,  le  devoir,  et  l'obéissance 
qui  luy  sont  deûs,  en  se  remettant  devant  les  yeux, 
que  de  là  dépendoit  tout  son  contentement  et  tout 
son  salut.  Monsieur  dit  assez  gaillardement  à  dieu 
à  M.  de  Brèves,  auquel  les  larmes  vinrent  jusques 
sur  le  bord  des  yeux  ;  et  le  Roy  dit,  qu'il  avoit  esn 


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d'arnauld  d'andillt.  371 

sayé  à  faire  pleurer  son  frère.  —  M.  de  Brèves,  s'en       avhi  kis. 
allant,  le  Roy  l'embrassa  par  deux  et. trois  fois;  et 

sur  ce  que  M dit  au  Roy  que  M.  de  Brèves  avoit 

eu  un  brevet  pour  estre  des  affaires,  et  s'il  ne  trou- 
voit  pas  bon  qu'il  en  joûist,  le  Roy  dit,  M.  de  Brèves, 
je  veux  que  vous  jouissiez  du  Brevet  que  vous 
avez  pour  estre  de  mes  affaires,  et  que  vous  y  veniez 
comme  vous  aviez  accoustumé  ;  et  assurez-vous  que 
vous  y  serez  toujours  le  très  bien  venu.  M.  de  Brèves 
remercia  fort  le  Roy  de  cela ,  et  luy  dit,  entr' autres 
choses,  qu'il  tenoit  pour  le  grand  honneur  qu'il  pust 
recevoir  au  monde,  la  liberté  de  pouvoir  approcher 
Sa  Majesté  à  son  coucher,  et  à  son  lever,  comme  il 
avoit  fait  auparavant. 

Après,  le  Roy  fit  venir  le  Comte  du  Lude,  et  luy  dit 
en  substance,  M.  le  Comte  du  Lude,  sachant  vostre 
naissance,  vos  bonnes  qualitez  et  vostre  affection 
à  mon  service,  je  vous  ay  choisy  pour  vous  mettre 
entre  les  mains  ce  que  j'ay  de  plus  cher,  qui  est  la 
personne  de  mon  frère.  Ayez-en  bien  soin,  je  vous 
prie.  Et  se  tournant  vers  Monsieur,  luy  dit,  mon 
frère,  je  vous  baille  pour  Gouverneur  M.  le  Comte  du 
Lude,  il  faut  que  vous  luy  obéissiez ,  et  faire  tout  ce 
qu'il  vous  dira  ;  il  vous  traittera  bien,  et  plus  douce-i 
meut  que  vous  n'avez  esté.  Monsieur  répondit  au 
Roy ,  Monsieur,  je  n'ay  point  esté  mal-traitté. 

M.  de  Brèves  estant  sorty  le  premier,  seul,  M.  le 
Comte  du  Lude  sortit  après,  conduisant  Monsieur. 

Le  mesme  jour,  le  Roy  va  coucher  à  Vanve,  chez 
M,  te  Comte  de  St-Germain,  d'où  il  ne  reyintquele.-. 


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372  JOURNAL   INÉDIT 

Avril  K18.  27.     Mercurialle  tenue  par  Messieurs  du  Parle- 

ment, en  laquelle  M.  le  Premier  Président  et  M.  Ser- 
vin,  eurent  prise. 

28.  M.  d'Épemon  part,  et  va  coucher  à  Fonte- 
nay.  Il  avoit  pris  congé  du  Roy  dès  le  mardy  2i,  et 
néantmoins  il  différa  jusques  audit  jour,  sous  prétexte 
de  s'entremettre  d'accommoder  MM.  de  Guise  et  de 
Montmorency,  qui  estoyent  en  différent  touchant 
l'Amirauté  de  la  mer  Méditerrannée. 

29.  M.  d' Épernon  estant  entré  en  quelque  alarme, 
il  monte  sur  un  cheval  d'Espagne,  fait  dix-sept  lieues 
d'une  traitte,  et  se  trouva  si  las,  qu'il  fut  contraint  de 
s'arrester.  Il  arriva  à  Metz  le  mécredy  suivant. 

Biay.  Mécredy  2.     M.  Des  Portes-Baudoin,  Seigneur  de 

Souspire  * ,  entre  en  la  charge  d' Intendant  des  finances 
de  M.  Déageant,  pour  cinquante  mil  écus,  et  vend 
la  sienne  de  Secrétaire  du  Conseil  à  M.  Bardeau , 
75  mil  écus. 

lu  Combat  des  sieurs  de  Quinsay  et  de  Moussy, 
cousins  fort  proches.  La  querelle  vint  pour  un  cha- 
peau que  Moussy  avoit  preste  à  Quinsay,  lequel  il 
vouloit  que  Quinsay  luy  rendist  en  pleine  rue  ;  et 
néantmoins,  il  ne  l'avoit  pas.  On  dit  que  Quinsay 
avoit  reçeu  deux  coups  d'épée,  avant  que  de  mettre  la 
main  à  l'épée.  Moussy,  gendre  de  M.  de  Contenant*, 


^  Desportes-Baudouin,  seigneur  de  Souspire,  conseiller  secrétaire  du 
Roi  de  ses  finances,  grand  audieiicier  de  France,  intendant  des  Fi- 
nances en  1618. 
.?  Philippe  Barjot,  baron  de  Mou»^,  avait  épousé  Charlotte  de 


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d'arnauld  d'andilly.  373 

fut  tué  sur-le-champ.  Quinsay  se  sauva  chez  le  Cardi-       >'•>'  «"•• 

nal  de  Guise.  Par  arrest  du  Parlement,  le  corps  mort 

de  Moussy  fut  mené,  sur  une  claye,  à  la  voyrie. 

Le  13  Juin,  fut  donné  arrest  définitif  par  contumace, 

contre  Quinsay,  condamné  à  estre  pendu,  interdit 

de  feu  et  d'eau,  etc. ,  suivant  TÉdit.  — Le  lendemain, 

Miraumont  de  Fontenay  *,  ayant  osté  le  Tableau, 

le  15,  arrest  portant  décret  de  prise  de  corps  contre 

eux. 

7.  Le  Roy  va  à  St-Germain  ;  revient  le  mar- 
dyl5. 

Environ  9.  M.  le  Comte  d'Auvergne  revient  à 
la  Cour. 

17.  M.  le  Duc  de  Rhetelois  fait  le  serment  de 
Gouverneur  de  Champagne.  Le  Roy  luy  témoigna 
grande  affection,  et  luy  frappa  tant  qu'il  put  dans 
la  main.  MM.  de  Nevers  et  du  Mayne  estoyent  pré- 
sens, lesquels  en  témoignèrent  grand  contentement. 

20.  Bonnet  donné  par  le  Roy  à  M.  le  Cardinal  de 
Rets,  dans  Notre-Dame,  en  cérémonie.  M.  le  Cardi- 
nal de  Rets  traitta  toute  la  Cour. 

21.  Le  Roy  va  à  St-Germain,  et  en  revient  le 
mécredy  13juin\ 


Bauves,  fille  d*Henry  de  Bauves,  seigneur  de  Contenant.  Après  sa  mort, 
Charlotte  de  Bauves  se  remaria  avec  Henri  de  Saint-Nectaire,  maré- 
chal duc  de  la  Ferté.  (P.  Anselme,  t.  iv,  p.  891.) 

^  Ce  personnage  pourrait  Être  le  chevalier  de  Miraumont,  camarade 
et  probablement  parent  de  Fontenay  Coup-d'Épée,  tous  deux  duellistes 
ou,  comme  on  disait  alors,  gladiateurs,  que  Tallemant  des  Réaux, 
t.  m,  p.  474,  a  réunis  dans  une  même  historiette. 

*  Foy,  Poutchartrain,  p.  264. 


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37&  JOURNAL  INIÎBIT 

v«y  iws.  22.     M.  de  Mayenne  fait  le  serment  de  Gouver- 

neur de  Guyenne  ;  M.  de  Luynes,  de  Gouverneur  de 
risle-de-France;  et  M.  le  Colonel  d'Ornano,  de  Lieu- 
tenant Général  au  Gouvernement  de  Normandie  *. 

26.  Un  Député  de  la  ville  de  Lyon  reçeut  des 
coups  de  baston  à  St-Germain,  dont  on  soupçonnoit 
M.  de  St-Chaumont.  Cette  affaire  fut  portée  fort 
haut  par  le  Roy  et  par  MM.  les  Ministres. 

27.  François  et  André  de  Sity,  pris  prisonniers. 
30.     M.  le  Colonel  d'Ornano  va  à  Blois,  trouver 

la  Reyne-mère,  pour  avoir  son  attache  du  Gouverne- 
ment de  Normandie  ^  11  revint  le  mardy  5  Juin.  Ses 
lettres  furent  présentées  au  Parlement  de  Rouen  par 
M.  Salet,  le  mécredy  10  juillet. 
Durand,  pris  prisonnier. 

^"*"-  10.     M.  de  Nemours  arrive  à  St-Germain,  au 

retour  de  son  mariage,  fait  avec  M"'  d'Aumale', 
à...  le... 

16.     Verceîl  rendu  \ 


*  Foy.  Richelieu,  p.  504.  C'est  à  tort  que  Richelieu  dit  ici  que  le 
colonel  d*Ornano  fut  nommé  maréchal  de  Franco  ;  il  ne  ftit  élevé  à  cette 
dignité  qu'en  1626.—  Voy.  aussi  Fontenay-Mareuil,  p.  419  ;  Pontchar- 
train,  p.  263;  Merc.  fr.,  p.  259. 

2  La  Reine-mère  avait  le  gouvernement  de  Normandie. 

*  Anne  de  Lorraine,  duchesse  d'Aumale,  épousa  à  Bruxelles, 
le  14  avril  1618,  Henry  de  Savoie,  duc  de  Nemours,  et  mourut  en  1638. 
Elle  était  fille  de  Charles  de  Lorraine,  duc  d'Aumale,  pair  et  grand  ve- 
neur de  France,  gouverneur  de  Picardie,  né  en  1555,  mort  à  Bruxelles 
en  1631.  —  Pontchartrain,  p.  263,  dit  par  erreur  que  ce  mariage  fut 
célébré  dans  le  mois  de  juin. 

^  Foy,  Richelieu,  p.  503.  Pontchartrain  place  à  tort  la  reddition  de 


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d'aknauld  d'andIllv.  375 

23.     Le  Roy  va  à  Léslgny,  d'où  îl  revint  le  lundy       '«m  "<»• 
2  Juillet. 

26.  Le  feu  s' estant  mis  par  une  fusée,  dans  des 
bateaux  de  foiti,  au  port  au  foîn,  pensa  brûler  les 
Ponts  \ 

Yendredy  6*     Les  S"  de  Marsillac  et  Lesec  pris         juiiiet. 
prisonniers,  par  arrest  du  Grand  Conseil,  et  meness 
à  la  Bastille. 

9.     MM.  de  Cadenet  et  Déageant  reconciliez. 

12.     Le  Roy  va  à  St-Germain. 

19.  Durand  et  François  de  âity  rouez,  et  leurs 
discours  brûlez  ;  et  André  de  Sity  pendu  ^ 

23.  M.  Ribier  prend  Séance  de  Conseiller  d' Es- 
tai au  Parlement,  ou  ses  lettres  avoyent  esté  vérifiées 
tout  d'une  voix,  à  deux  près  ;  et  sortit  immédiate- 


Verceil  dans  le  mois  d'avril.  (Pontchartrain,  p.  262)  ;  Voy,  aussi  Merc. 
A-.,  p.  40. 
1  Voy.  Merc.  fr.,  p.  25,  des  détails  intéressants  sur  cet  accident 
^  Durand  et  François  de  Sity  étaient  accusés  d'avoir  publié  des  li- 
belles contre  M.  de  Luynes  et  la  Cour.  Le  crime  d'André  de  Sity,  frère 
de  François,  était  d'avoir  copié  un  de  ces  écrits.  —  François  de  Sity^ 
Florentin,  avait  été  secrétaire  de  l'archevêque  de  Tours,  frère  de  la 
maréchale  d'Ancre.  {Voy,  Richelieu,  p.  504.) —  «  En  ce  mesme  temps 
on  fist  mourir  un  nommé  Durand,  qui  faisoit  tous  les  ballets  du  Roy, 
et  deux  Italiens  qui  avoient  esté  domestiques  du  mareschal  d'Ancre, 
pour  quelques  escrits  faits  à  la  louange  de  la  Reine-mère,  et  contre  le 
gouvernement  présent.  »  (Fontenay-Mareuil,  p.  418,  et  la  Note  de  l'É- 
diteur qui  donne  quelques  détails  sur  le  poète  Durand.)  Voy.  Pontchar- 
train, p.  264.  Il  est  à  remarquer  que  Pontchartrain  passe  pour  ainsi 
dire  cette  affaire  sous  silence  et  ne  nomme  pas  les  personnes.  Le  Merc, 
fr,^  p.  268,  n'en  dit  aussi  qu'un  nfot.  Durand  y  est  ainsi  désigné: 
«  Durant,  l'un  des  gentils  poëtes  de  son  temps,  inventif  à  dresser  des 
ballets.  » 


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376  JOURNAL  INÉDIT 

jutttct  lets.  ment  après,  le  Premier  ou  Deuxième  Président,  ne 
s'en  estant  trouvé  ce  jour  là  que  deux  à  l'Audiance. 
11  avoit  auparavant  vendu  son  office  de  Conseiller, 
et  avoit  esté  fait  de  la  Direction,  avec...  d'appointé- 
ment. 

24;  Edit  fait  sur  les  Estats-Généraux,  et  l'Assem- 
blée de  Rouen,  et  baillé  à  Messieurs  les  Gens  du 
Roy*. 

31.  M.  de  Mayenne  fait  son  entrée  à  Bordeaux. 
H  estoit  party  de  Paris,  le...  *. 


Àoust. 


Lundy  6.  Mort  de  M.  de  Boucart.  Ses  charges 
de  Cornette  de  la  Compagnie  des  chevaux-légers  du 
Roy,  et  de  Bailly  d'Orléans,  données  à  M.  de  Branles. 

8.  Décret  du  Grand  Conseil  contre  M.  de  Per- 
san. En  mesme  temps,  le  Roy  le  mande  au  Louvre; 
luy  dit,  en  présence  de  MM.  les  Ministres,  qu'il 
luy  pardonneroit,  pourveû  qu'il  luy  voulust  tout 
avouer.  M.  de  Persan  soutint  qu'il  estoit  innocent, 
et  opiniastra  à  dire  qu'il  n'avoit  point  besoin  de  par- 
don. Le  soir,  le  Roy  envoya  le  sieur  de  la  Mont, 
Exempt  des  Gardes,  le  garder  chez  luy,  avec  un  ou 
deux  de  ses  Archers  ^ 

*■  Voy.  la  note  p.  in  fine.  Voy.  aussi  Pontchartrain,  p.  265. 

2  Le  duc  de  Mayenne  quitta  Soissous  et  alla  à  Bordeaux  où  il  arriva 
non  à  la  fin  mais  au  commencement  de  juillet,  pour  assister  à  l'enre- 
gistrement de  ses  lettres  de  provision  au  Parlement.  Cette  formalité 
fut  remplie  dans  Taudience  solennelle  du  9  juillet.  L'avocat  général 
du  Sault  prononça  à  cette  occasion,  en  l'honneur  du  nouveau  gouver- 
neur, un  discours  qui  est  un  spécimen  des  plus  curieux  de  l'éloquence 
hyperbolique  du  temps.  (Foy.  Merc,  fr,^  p.  260  et  suiv.) 

*  Voy,  Richelieu,  p.  505, 


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d'arnauld  d'andilly.  377 

10.  M.  de  Persan  mené  à  la  Bastille.  M.  le  Ma-       Aoustiêis* 
réchal  de  Vitry  tint  plusieurs  discours  contre  M.  de 

Luynes  ;  va  le  mesme  jour  à  Coubert,  après  l'avoir 
fait  dire  au  Roy.  M.  de  Crequy  vint  trouver  M.  de 
Luynes,  de  la  part  de  M.  de  Vitry,  pour  soutenir 
qu'il  n'avoit  rien  dit  contre  luy  *• 

11.  Le  Roy  fit  faire  Commandement  à  MM.  de 
Ruscellay,  de  Sardiny,  et  de  Jouy,  de  se  retirer  en 
leurs  maisons;  ce  qu'ils  firent.  M.  de  Ruscellay  par- 
tit le  16,  et  alla  en  son  Abbaye  de  Signy  en  Cham- 
pagne. Les  deux  autres  allèrent près  de  Sois- 
sons.  M.  de  Jouy,  par  le  moyen  de  M.  de  Montba- 
son  et  de  M.  de  Luynes,  refit  sa  paix  et  vit  le  Roy  à  . 
Soissons. 

17.  Congé  de  M.  de  Montpoûillan  ^  résolu  pour 
la  deuxième  fois,  car  le  Roy  le  luy  avoit  déjà  donné 
le  5.  Enfin,  il  partit  quelques  jours  après. 

20.  M.  de  Nevers  part  pour  aller  en  Champa- 
gne, établir  en  possession  du  Gouvernement,  M.  le 
Duc  de  Rhetelois,  son  fils,  et  de  là,  il  est  allé  en  Alle- 
magne. 


*  Foy.  Fontenay-MiMreail,  p.  418  ;  Pontchartrain,  p.  265  ;  Merc.  fr.^ 
p.  268. 

2  Jean  de  Gaumont,  seigneur  de  MontpouiUan,  favori  de  Louis  XHI, 
fils  de  Jacques  Nompar  de  Gaumont,  maréchal  duc  de  la  Force,  u  Quel- 
n  ques  mécoutentemeus  qu'il  eut  à  la  Gour  rengagèrent  dans  le  parti 
»  huguenot,  dont  le  Maréchal  son  père  éLoit  le  chef  en  Guyenne.  Il  fut 
»  blessé  à  mort  à  la  tête,  dans  une  sortfe,  en  défendant  Tonneins,  et  ne 
»  fut  point  marié.  »  {Foy,  P.  Anselme,  t.  iv,  p.  472.)  Les  Mémoires  du 
marquis  de  MontpouiUan  ont  été  publiés  en  1843  avec  ceux  du  maré- 
chal de  la  Force  son  père  et  du  marquis  de  Gastelnau  son  frère  par 
M*  le  marquis  de  la  Grange,  membre  de  l'Institut. 


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â78  JÔOHNAL  iNiDIT 

Àoust  im.  24.     MM.  de  Bethune  et  de  Modène  de  retour 

de  Piémont  \ 

25.  Feste  de  St-Loûis  solennisée  pour  la  pre- 
mière fois  ^ 

80.  Arrest  du  Grand  Conseil  contre  MM.  de  Per- 
san, de  BournonviUe,  M""  du  Tillet,  M.  Barbin, 
M.  de  la  Ferté,  TEvesque  et  le  sergent  Lisy  ^ 


4  Vùy,  Richelieu,  p.  503. 

3  On  trouve  dans  le  MirCé  fr,^  p.  37i  et  suir.,  Id  bref  du  pape 
Paul  V  pour  la  célébration  de  cette  fête,  le  mandement  du  cardinal 
de  Retz,  évêque  de  Paris,  sur  le  même  sujet,  et  le  récit  des  réjouis* 
sances  publiques  qui  se  firent  à  Paris. 

3  Voy,  Richelieu,  p.  505  et  suiy«,  de  curieux  détails  sur  le  procès 
de  Ëarbin  et  de  ses  co-accusés.  «  Bournonville  et  Persan  sont  du 
»  nombre,  et  au  lieu  de  geôliers  qu'ils  etoient  gardant  les  entres,  ils 
»  deviennent  prisonniers  eux-mêmes.  »  BournoriviUe  commandait  à  la 
Bastille  et  M.  de  Persan,  son  frère,  était  chargé  de  la  garde  de  M.  le 
Prince.  Ils  étaient  accusés  d'avoir  conspiré  avec  Barbin  pour  rendre 
le  pouvoir  à  la  Beine-mèré.  Richelieu  flétrit  en  termes  énergiques  et 
éloquents  la  pression  que  l'on  exerça  sur  les  juges  et  la  bassesse  de 
ceux  qui  se  laissèrent  plutôt  guider  par  Tintérôt  ou  la  crainte  que 
par  leur  conscience.  Comme  criminels  de  lèBe*majdsté,  les  accusés 
furent  condamnés  %  Barbin  et  l'Evesque  au  bannissement  à  perpétuité  ; 
Bournonville,  à  avoir  la  tête  tranchée  ;  î^ersan  et  M"*  Du  Tillet,  à  s*é- 
loigner  de  la  Cour  et  de  la  Prévôté  et  vicomte  de  Paris  pendant  cinq 
ans  ;  la  Ferté,  au  bannissement  pendant  neuf  ans  ;  et  le  sergent  Lisy, 
à  être  pendu.  La  condamnation  obtenue,  ils  furent  tous  graciés,  hor- 
mis Barbin  dont  le  bannissement  fut  Converti  en  prison  peii>étuelle  ; 
ce  qui,  dans  l'espèce  surtout,  était  une  aggravation  de  peine.  Mais 
c'était  à  ce  fidèle  serviteur  de  la  Reine-mère  qu'on  en  foulait  particu- 
lièrement. Voy.  Ponchartrain,  p.  260.  Pontchartrfdn  dit  à  tort  qu'aucun 
des  accuiSés  ne  fut  condamné  à  mort.  Roban,  p.  i49  et  suiv.,  donne 
des  détails  très-intéressants  sur  cette  aflfaire,  dont  il  était,  suivant  son 
récit,  un  des  principaux  meneurs.  Il  avait  pour  agent  la  Ferté,  qui 
était  un  de  ses  gentilshommes.  C'est  sans  doute  par  une  erreur  de  co* 
piste  qu'on  voit  figurer  dans  le  récit  de  Rohan  un  certain  évêque,  tan- 
dis qu'il  s'agit  de  l'Evesque,  serviteur  dé  Barbin.  Voy,  aussi  sur  cette 
affaire  un  passage  d'une  lettré  de  Mole  à  Dupuy  auquel  il  annooce  ces 


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D*ARNAULD    d'ANDILLY.  379 

Le  mesme  jour,  le  Roy  accorde  la  grâce  de  M.  de      AourtiMs. 
Bournonville  à  ses  parens. 

Le  lundy  3  septembre ,  Reraonstances  du  Parle- 
ment contre  l'abolition;  et  depuis,  commutation  de 
peine,  en  bannissement  perpétuel,  et  amendes. 

31.  Marsillac  et  Le  Sec  jugez.  Sortent  de  la  Bas- 
tille le  lendemain. 


Mécredy  5*  Mort  de  M.  le  Cardinal  du  Perron  *; 
M.  le  Cardinal  de  la  Rochefoucaud  fait  Grand  Au- 
mosnier. 

Madame  la  Princesse  accouche  de  deux  garçons^ 
morts.  Le  Roy  en  témoigna  très  grand  déplaisir. 
Plusieurs  personnes  eurent  permission  de  l'aller 
voir  ^. 

Ambassade  du  Marquis  de  Cœuvres  à  Rome,  en- 
tièrement rompue.  M.  de  Pisieux  luy  dit,  de  la  part 
du  Roy,  qu'il  n'iroit  point.  Depuis,  cela  fut  refait.  On 
dit  que  M.  le  Commandeur  de  Sillery  y  prétendoit,  et 
qu'il  avoit  fait  offrir  de  l'argent  pour  l'obtenir. 

11.  Le  Roy  va  à  Lesigny  ;  et  de  là  à  Monceaux, 
lesamedy  15'. 

condamnations.  L*arrèt  du  grand  consei]  étant  du  30  août,  suivant 
Arnauld  d*Andilly  et  Richelieu,  la  date  du  2  août  de  la  lettre  de  Mole 
ne  doit  pas  être  exacte  (Mém.  de  Mole,  p.  216  et  la  note.)  Il  est  à  re» 
marquer  que  le  Merc,  fr,  ne  consacre  que  quelques  lignes  à  cette  grave 
affaire  et  la  passe,  pour  ainsi  dire,  sous  silence  {Merc,  fr,^  p.  269). 

*  Voy,  Richelieu,  p.  518,  Téloge  de  cet  illustre  prélat.  Voy,  aussi  ce 
que  dit  de  lui,  à  propos  de  sa  mort,  le  Merc,  fr,y  p.  269. 

2  Voy,  Pontchartrain,  p.  267. 

'  Voy,  Poncbartraili,  p.  267.  Pontchartrain  ou  son  éditedr  met  à* 
tort  Lagny  au  lieu  de  Lesigny. 


Septembre. 


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380  JOURNàL   liNÉDlT 

Septembre  1618.  21.  M.  Ic  Cardinal  de  Rets  assista  au  Conseil 
étroit  à  Monceaux,  en  qualité  de  Ministre. 

22.  Le  Père  Arnoux,  de  retour  de  Blois,  où  il 
avoit  esté  envoyé  près  la  Reyne-mère.  La  lettre  que 
le  Roy  luy  écrivit  par  luy,  portoit  ces  mots,  Ma- 
dame, je  vous  envoyé  le  père  Arnoux,  mon  confes- 
seur, que  j'ay  choisy  le  seul  propre  pour  vous  assurer 
de  l'amour  que  j'ay  pour  vous.  Il  vous  dira  ce  qui 
vous  peut  nuire,  et  ce  qui  me  doit  servir.  Il  connoist 
le  fond  de  mon  cœur,  et  de  mon  ame.  Je  vous  sup- 
plie de  le  croire  comme  moy  mesme.  C'est  le  seul 
et  dernier  remède  contre  tant  de  bruits  qui  courent. 
Vous  devez  désirer  que  désormais  on  sache  que  je 
puis  et  veux  régner  seul.  Aymez-moy  toujours,  je 
vous  en  conjure,  et  vous  souvenez  que  je  suis *. 

25.  Le  Roy  va  à  Vilers-Costerests  ;  laisse  MM.  les 
Ministres  et  le  Conseil  à  Meaux.  Il  mena  seulement 
le  Cardinal  de  Rets  ' 

Environ  28.  Traitté  de  M.  de  Luynes  avec  M.  de 
Vendosme ,  pour  la  Fère.  On  baille  à  M.  de  Ven- 
dosme  Verneûil  au  Perche,  et  Vendosme  ;  à  M.  de 
Jumeau,  qui  estoit  dans  Vendosme,....  et  à  M.  de 
Manicjimp,  qui  estoit  dans  la  Fère. 

30.     M.  de  Vendosme  va  en  Bretagne ^ 

M.  de  Luynes  va  à  Soissons  prendre  possession  \ 

<  Foy,  Richelieu,  p.  512;  Fontenay-Mareuil,  p.  424;  Pontchartrain, 
p.  268. 

2  Foy.  Pontchîfftrain,  p.  268. 

»  Il  allait  avec  le  maréchal  de  Brissac  et  le  duc  de  Montbazon  tenir 
les  États  de  Bretagne  à  Nantes  {Voy.  Ponthartrain,  p.  268). 

^  Arnauld  d'Aiidilly  ne  parle  pas  dai\s  son  Journal  d'une  missioQ 


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d'arnadld  d'andilly.  381 

Lundy  1*'.     Le  Roy  va  à  Soissons  *.  octobre  m%. 

Différent  entre  M.  le  Cardinal  de  la  Rochefou- 
caud,  Grand  Aumosnier,  et  MM.  de  St-Remy  et  de 
Grieux,  Maistres  des  Requestes,  touchant  la  Prési- 
dence ,  et  confection  des  Actes,  à  la  délivrance  des 
Prisonniers.  Il  fut  ordonné ,  par  provision ,  que  le 
S'  Desmarests,  Aumosnier  du  Roy,  y  assisteroit, 
et  le  Lieutenant  de  la  Prévosté  de  l'hostel ,  et  que 
M.  le  Cardinal  ni  les  Maistres  des  Requestes  n'y  se- 
royent  point. 

3.  M.  de  Montmorency  va  à  Soissons,  et  après 
avoir  demeuré  quelques  jours  à  Paris ,  va  en  Lan- 
guedoc \ 

4.  Le  Roy  va  à  Laon.  Le  vendredy  5,  à  Liesse 
et  à  la  Fère.  Lesamedy6,  àCoussy,  et  à  Soissons,  où 
M.  de  Guise,  revenant  de  Provence,  arrive  ce  soir  là 
mesme  ^ 

très-importante  quMl  aurait  remplie  de  la  part  da  Roi,  en  septem- 
bre 1618,  auprès  du  duc  de  Bouillon.  Il  s'étend  longuement  sur  joe  sujet 
dans  ses  Mémoires,  p.  377  et  suiv. 

*  VQy.  Pontchartrain,  p.  268. 
2  Foy,  Pontchartrain,  p.  268. 

•  a  Ensuite  de  quoy  M.  de  Luynes,  qui  se  rendoit  tous  les  jours  plus 
»  hardy,  mena  le  Roy  en  son  nouveau  gouvernement,  et  luy  flst  faire 
»  la  visite  de  toutes  ses  places,  sans  y  chercher  de  prétexte.  Il  fust 

»  aussy  à  Nostre-Dame-de-Liesse.  »  (Fontenay-Mareuil,  p.  420).  Foy,  - 
aussi  Pontchartrain,  p.  269;  Mémoires  d*Amauld  d*Andilly,  p.  383  et 
suiv.  D'Andilly,  comme  on  le  voit  par  ses  Mémoires,  suivit  le  Roi  dans 
ce  voyage,  et  fit  des  tentatives  inutiles  auprès  de  M.  de  Luynes  pour 
obtenir  de  lui  la  réalisation  de  la  promesse  qu'il  lui  avait  faite  de  le 
faire  nonwner  intendant  des  finances.  S'il  faut  l'en  croire,  on  lui  aurait 
offert,  en  attendant,  la  charge  de  secrétaire  du  Cabinet,  qu'il  aurait  re- 
fusée, et  M,  de  Luynes  lui  aurait  fait  dire  qu'il  songeait  à  le  faire 
nommer  secrétaire  d'Iiitat. 


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â82  JOURNAL    INlfDIT 

oetobreieis.  MM.  du  Conseil  mandez  pour  aller  à  Soiseions,  où 
ils  arrivèrent  environ  le  mardy  ou  mécredy. 

9,  Le  Roy  va  à  Coucy,  revient  à  Soissons  le  ven- 
dredy  12. 

M.  le  Duc  de  Rets  arrive  à  la  Cour  d'où  il  partît 
incontinent,  pour  aller  aux  Estats  de  Bretagne. 
MM,  de  Rohan  et  de  Montbason  y  estoyent  aussi  allez 
quelques  jours  auparavant  ^ 

13.  M.  de  Longueville  revientà  Neufchastel,  et 
arrive  à  la  Cour. 

16.  Le  Roy  part  de  Soissons  ;  va  coucher  à  Vil- 
lers-Costerets;  le  mécredy  17,  disner  à  Nanteûil,  et 
coucher  à  Dampmartin. 

18.  Le  Roy  arrive  à  Paris*. 

19,  M.  de  Modène  part  pour  aller  à  Blois,  pour 
rapporter  la  déclaration  de  la  Reyne-mère  *. 

2/i.  Le  Roy  va  à  St-Germain  ;  et  en  revient 
le  samedy  26. 

27.  Fiesque  estant  en  Bretagne,  avec  M.  de 
Montbason,  le  Roy  luy  mande  qu'il  ne  revienne  plus 
à  la  Cour.  Quelques  jours  après,  un  de  ses  chevaux 
et  un  de  ses  laquais  ayant  paru  à  la  porte  du  Louvre, 
le  Roy  commanda  au  Chevalier  du  Guet  de  le  cher- 


*  Fêy.  Pontchartrain,  p.  S68. 

>  Voy.  Pootchartrain,  p.  2G0;  Mire,  /V.,  p.  276. 

>Foy.  Rkhelku,  p.  513,  cette  Déclaration,  en  date  du  3  nOTembre, 
par  laquelle  ta  Reine-mère  fait  les  soumissions  les  plus  complètes 
d^obéissance  et  de  respect  au  Roi,  et  s'engage  à  ne  venir  à  la  Cour  que 
lorsqu'elle  y  sera  rappelée.  Suivant  Ri(^lieu  et  suivant  la  Déclaration 
éUe-mème^  c'est  le  Père  Araoux  qui  obtint  cet  acte^  Oonf.  Pontchar- 
train,  p.  260. 


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d'arnauï.d  d'andïlly.  383 

cher,  et  le  mettre  à  la  Bastille.  IL  se  trouva  que  c'es-  *  octobre  leit. 
toit  son  frère. 

Le  Roy  fit  donner  Congé  àBautru*,  par  M,  de 
Luynes.  Il  estoit  fort  amy  avec  Fiesque. 

Uon  donna  aussi  Congé  à  Boullanger  ^  le  mesme 
jour;  mais  il  a  depuis  paru  souvent  dans  le  Louvre. 

Le  vendredy  26,  le  Père  Crochart  avoit  eu  son 
Congé. 

28.     Comédie  de  la  Reyne. 

M.  le  Cardinal  de  Savoye  '  arrive  à  Orléans,  où 
MM.  de  Béthune  et  de  Modène  furent  au  devant  de 
luy. 

31.  Congé  donné  de  la  part  du  Roy  à  M"'  la 
Comtesse  de  Moret*,  par  M.  de  la  Vieuville. 

Vendredy  2.     M.  le  marquis  de  Caluse ,  fils  de       Novembre. 
M.  le  Comte  de  Yerrûe,  arrive  à  Paris,  devant  M.  le 
Cardinal  de  Savoye. 

i  OuillauHie  Bautru,  comte  de  Serrant,  né  en  1588,  eonseiller  d'Etat, 
introducteur  des  ambassadeurs,  ambassadeur  en  Angleterre ,  en  Es- 
pagne, en  Savoie  et  dans  les  Pays-Bas,  membre  de  rAcadémie  française, 
mort  en  1665.  F»y.,  sur  ce  courtisan  bel  esprit  qui  s'est  acquis  une 
certaine  célébrité  par  ses  bons  mots,  l'article  de  M.  Salabéry  dans  la 
Biog.  Michaud,  et  son  bistoriette,  Tailemant  des  Beaux,  t.  ii,  p,  314. 

2  André  Boullanger,  prédicateur  de  Tordre  deslAugustins  réformés, 
eonnu  sous  le  nom  de  Pitii  père  André  y  né  en  l$8a,  mort  en  1657. 
f>y.,  sur  ce  personnage,  l'article  4a  M.  Tabaraud  dans  la  Biog.  fili* 
chaud,  et  son  historiette,  Tailemant  des  Beaux,  t.  v,  p.  339.  Le  Boul- 
langer cité  ici  pourrait  être  aussi  Jules-Qésar  Boullanger,  jésuite,  au. 
naôoier  du  Boi,  mort  en  1638.  Voif.  Moreri,  t  ii,  p.  135. 

*  Maurice  de  Savoie,  fils  de  Charles-Emmanuel,  duc  de  Savoie,  né 
en  1593,  cardinal,  prince  d'Oneille,  mort  en  1657. 

A  Jacqueline  de  Bueil,  comtesse  de  Moret,  maîtresse  de  Henri  IV, 
dont  elle  eut,  en  1607,  Antoine  de  Bourbon,  comte  de  Moret«  Elle 


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S8Û  JOURNAL   INÉDIT 

Novembre  i«i8.  6.  M.  le  Hiarquîs  de  Cœuvres  va  à  Linas,  au  de- 
vant de  M.  le  Prince  Cardinal  de  Savoye.  M.  de 
Nemours*  qui  y  avoit  esté  auparavant,  comme  parti- 
culier, va  au  Bourg  la  Reyne,  où  M.  de  Cadenet  va, 
de  la  part  de  M.  de  Luynes.  Estant  arrivé  à  son  logis 
du  faubourg  St-Germain,  M.  de  Luynes  le  va  vi- 
siter de  la  part  du  Roy,  et  l'amène  voir  Sa  Majesté, 
sans  cérémonie;  puis  le  remet  en  carrosse  *. 

Le  Roy  le  loge  au  faubourg  St-Germain,  et  luy 
a  baillé  un  département  dans  le  Louvre  ;  mais  il  n'y 
couche  point.  Sa  Majesté  le  défraye,  avec  tout  son 
train,  qui  est  de  deux  cens  tant  de  personnes  ;  ce  qui 
couste  quatre  à  cinq  cens"  par  jour  ^, 

7.  Monsieur  le  Prince  Cardinal  eut  audiance  so- 
lennelle du  Roy,  de  la  Reyne,  et  de  Mesdames. 


épousa  en  1617  René  du  Bec,  marquis  de  Vardes,  et  mourut  en  1651^ 
Voy,  son  historiette,  Tallemant  des  Réaux,  t.  i,  p.  155. 

*  On  trouve,  à  l'année  1618,  p.  217,  dans  les  Mémoires  de  Mole, 
publiés  par  M.  Aimé  Cbampollion,  une  lettre  du  Garde  des  Sceaux  à 
Mole  datée  de  Poitiers  le  6  novembre  1618,  dans  laquelle  il  est  ques- 
tion du  royage  du  Roi  en  Béarn.  Cette  date  est  inexacte  et  la  lettre 
n*est  pas  à  sa  place,  puisqu'à  cette  époque  le  Roi  était  à  Paris  où  il 
recevait  le  cardinal  de  Savoie  qui  venait  officiellement  demander  la 
main  de  Madame  Chrétienne  pour  le  prince  de  Piémont. 

*  Livres  probablement 

«  Voy,  Pontchartrain,  p.  270.  C'est  par  une  erreur  de  copiste,  sans 
doute,  qu'on  lit  dans  les  Mémoires  de  Ponchartrain,  p.  267  et  269, 
Madame  Henriette  au  lieu  de  Madame  Chrétienne.  Voy,  aussi  Merc,  fr,<, 
p.  277  et  suiv.  Le  cardinal  de  Savoie  était  logé  à  l'hôtel  de  Piquigny. 
Le  Mercure  donne  une  description  complète  et  curieuse  du  magnifique 
feu  d'artifice  tiré  pour  la  célébration  de  la  fête  du  Roi  et  qui  avait  été 
différé  jusqu'à  l'arrivée  du  Prince  Cardinal.  Ce  feu  d'artifice,  chef-d'œu- 
vre de  Jumeau,  ne  le  céderait  pas  aux  merveiUes  de  nos  Jours  en  ce 
genre. 


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d'aunadld  d'andilly,  885 

Le  Roy,  après  luy  avoir  donné  audiance,  Talla     «ovcmbr*  «ip. 
voir  passer  dans  la  chambre  de  la  Reyne. 

M"*'  de  Nemours  se  trouvant  chez  la  Reyne,  au- 
dessous  de  MM"*"  de  Longueville,  fit  semblant  de  se 
trouver  mal,  et  se  leva. 

Monsieur  le  Prince  Cardinal,  qui  s'estoit  couvert 
devant  le  Roy,  et  devant  la  Reyne,  ne  se  couvrit  point 
devant  Mesdames.  Les  uns  dient  que  c'est  à  cause 
de  la  recherche;  et  d'autres,  que  ce  fut  à  cause  que 
Madame  ne  le  luy  dit  pas. 

13.  Monsieur  le  Prince  Cardinal  fit  au  matin,  au 
Roy,  la  demande  de  Madame,  pour  M.  le  Prince  de 
Piémont,  son  frère  *.  Le  Roy  répondit,  quMl  verroit 
les  lettres  du  Duc  de  Savoye ,  son  Oncle  ;  qu'il  en 
communiqueroit  à  Messieurs  de  son  Conseil  ;  et  puis 
qu'il  luy  feroit  réponce. 

Ce  mesme  jour,  le  Roy  mena  Monsieur  le  Prince 
Cardinal  à  St-Germain,  et  y  estant,  luy  mena  voir 
toute  la  maison.  Il  le  mena  aussi  à  la  chasse,  luy 
donna  un  couple  de  sa  main,  et  luy  fit  courre  un  cerf, 
avec  cent  veneurs,  et  cent  chiens.  II  le  luy  fit  prendre 
en  deux  heures  ^, 

14.  M.  le  Colonel  d'Omano  va  en  Normandie, 


*  Chrétienne  de  France,  sœur  de  Louis  Xni ,  née  en  1606,  épousa 
le  10  février  1610,  comme  il  est  dit  plus  loin,  Victor  Amé,  prince  de 
Piémont,  fils  de  Charles  Emmanuel,  duc  de  Savoie,  né  en  1587,  qui  suc- 
céda à  son  père  en  1630,  et  mourut  en  1637.  Après  sa  mort.  Chré- 
tienne fut  régente  pour  ses  deux  fils  successivement,  et  après  avoir 
gouverné  la  Savoie  pendant  plus  de  vingtrcinq  ans,  mourut  en  1663. 

2  Voy.  Richelieu,  p.  516;  Fontenay-Mareuil,  p.  ^15  et  423;  Pont- 
chartrain,  p.  270  ;  Merc,  fr,^  p.  277  et  suîv. 

25 


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886  ,     JOURNAL  INÉDIT  - 

Hovcnbra  iMi.  prendre  possession  de  sa  charge  de  Lieutenant  Géné- 
ral. Il  arriva  à  Rouen  le  Dimanche  18,  et  revint  à  Pa- 
ris le  If  de  Décembre.  Il  fut  ^  bien  reçeu,  et  réussit 
si  exceUemment  en  ce  voyage,  quMl  ne  se  peut  mieux. 

Voicy  la  harangue  qu'il  fit  à  Messieurs  du  Parle- 
ment de  Rouen  *  : 

Messieurs,  l'honneur  que  j'ai  reçeu  du  Roy  pour 
représenter  sa  personne  en  cette  province,  la  plus 
populeuse,  la  plus  puissante  par  mer,  et  par  terre,  et 
la  plus  voisine  du  Siège  de  son  Empire,  surpasse  infi- 
nies fois  mes  mérites.  Mais  il  a  pleû  à  Sa  Majesté 
de  se  souvenir  des  fidèles  et  passionnez  services  ren- 
dus à  la  France  par  feu  M.  le  Maréchal  d'Ornano, 
mon  Père,  et  Monsieur  le  ColoneP  mon  ayeul,  et  de 
considérer  aussi  la  nourriture  que  j'ay  reçeue  dès  ma 
première  jeunesse,  et  la  ferme  résolution  que  j'ay 
prise,  de  n'avoir  jamais  autre  objet  au  monde,  que 
le  service  de  mon  Roy,  et  la  gloire  de  cette  couronne, 
avec  un  désir  ardent  de  rechercher  toute  sorte  d'oc- 
casions pour  employer  courageusement  mon  sang  et 
ma  vie,  afin  de  faire  que  Sa  Majesté  soit  aymée, 


1  Je  serais  disposé  à  croire  que  les  deux  harangues  insérées  ici 
textuellement  étaient  de  la  main  d'Arnauld  d'Andilly,  de  môme  que  le 
discours  du  colonel  d'Ornano  rapporté  dans  l'extrait  du  journal  de 
d'Andilly  relatif  à  l'arrestation  de  ce  personnage,  qui  forme  Tappendice 
de  ce  volume.  Arnauld  d'Andilly  était  particulièrement  attaché  au  co- 
lonel, depuis  maréchal  d'Ornano,  qui,  dit-il,  «  étoit  l'un  des  hommes 
9  du  monde  qui  m'a  le  plus  véritablement  aimé.»  (Mém.  d' Arnauld 
d'Andilly,  p.  375.) 

2  Sampietro  Corse,  dit  Bastelica,  seigneur  de  Benane,  colonel  gé- 
néral des  €orses,  tué  en  1567.  H  avait  épousé  en  1528  Vanina  d'Or- 
nano. Voy.  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  3§1. 


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D*ARNACJLD    D'aNDILLY.  S87 

obéïe,  et  redoutée,  en  tous  les  endroits  où  elle  me    «•v«iii«  hm. 
fera  la  faveur  de  me  charger  de  ses  Commande- 
mens.  A  quoy  je  suis  tellement  résolu,  qu'il  n'y  a 
considération  quelconque  qui  soit  capable  de  m'en 
détourner.  Ce  que  j'espère  que  Dieu  me  fera  la  grâce 
de  confirmer  beaucoup  plus  fortement  par  mes  ac- 
tions, que  par  mes  paroles;  et  ne  doute  point  aussi, 
Messieurs,  que  je  ne  vous  trouve  tous  concurrens  en 
ce  mesme  dessein  ;  ce  qui  me  fait  croire  que  me  te- 
nant assidu  en  cette  province,  comme  je  dois,  et 
comme  je  feray,  nous  rendrons  au  Roy,  et  à  l'Estat 
des  services  très  importans,  et  très  signalez.  En  quoy 
je  ne  désire  avoir  qu'une  raisonnable  distribution  de 
l'honneur  qui  en  reviendra,  et  feray  fidèlement  en- 
tendre à  Sa  Majesté  la  participation  de  louange  et 
de  gloire  qui  sera  deûe  à  votre  Corps  en  général,  et 
à  chacun  de  vous  en  particulier.  Réputant  à  très 
grand  bon-heur  d'avoir  pour  témoin,  de  mes  dépor- 
temens,  une  Compagnie  si  célèbre,  et  de  laquelle 
j'estime  tellement  le  mérite,  que  l'un  de  mes  plus 
grans  souhaits  sera  toujours  d'en  estre  chéry,  et  de 
me  rendre  digne  de  sa  bienveûillance,  par  toute  sorte 
de  services. 

Il  fit  celle-cy  à  Messieurs...  : 

Messieurs,  l'honneur  extrême,  et  de  beaucoup  sur- 
passant mon  mérite,  que  j'ay  reçeu  du  Roy,  en  me 
constituant  son  Lieutenant  Général  en  cette  grande 
et  très-importante  Province,  m'oblige  à  n'avoir  autre 
soin,  ni  autres  pensées,  qu'à  faire  ressentir  à  ses 
sujets  les  effets  du  bon-heur  du  Gouvernement  de 


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388  JOORNAL    INÉDIT 

novembre  Mis.  Sa  Majesté,  quc  Dieu,  dès  sa  première  jeunesse,  a 
voulu  accompagner  de  tant  de  piété  et  de  justice, 
que  le  plus  grand  désir  qu'elle  ayt  au  monde,  est 
de  faire  toujours  marcher  à  ses  costez  ces  deux 
rares  et  excellentes  vertus.  Tellement  que  j'espère 
qu'au  lieu  que  cette  célèbre  assemblée  se  consom- 
jnoit  autrefois  quasi  toute,  à  dresser  des  Pleintes  et 
desRemonstrances,  vous  l'employerez  doresenavant  à 
résoudre  des  Remerciemens  et  des  Actions  de  Grâces, 
et  tout  ensemble,  à  y  proposer  de  belles  et  glorieuses 
entreprises,  pour  fortifier  le  service  du  Roy,  rehaus- 
ser l'honneur  de  la  Couronne,  et  remplir  cette  Pro- 
vince de  toute  sorte  de  richesses.  Pour  mon  regard, 
je  suis  résolu  d'y  appliquer  tous  mes  soins  et  mes 
cogitations  ;  et  vous  supplie  en  général  et  en  parti- 
culier, de  faire  le  semblable,  et  de  vous  assurer  que 
Sa  Majesté,  à  qui  Dieu  a  donné  l'âme  la  plus  gêné- 
reuse  qui  soit  au  monde,  favorisera  et  aydera  vos 
bonnes  intentions,  et  en  toutes  choses,  vous  remplira 
de  bien-faits,  et  des  contentemens  que  vous  devez 
attendre  du  meilleur  Prince  qui  soit  sur  la  Terre. 
.     21.     M.  le  Grand  va  en  Bourgongne. 

M,  du  Fargis  *  va  en  Espagne,  sur  le  sujet  du 
mariage  de  Savoye,  et  revient  le  vendredy  11  Jan- 
vier 1619.  Il  servit  très  bien  en  ce  voyage  ^ 

*  Charles  d*Angennes,  seigneur  du  Fargis,  comte  de  la  Rochcpot  par 
sa  femme^  conseiller  d'Etat,  maréchal  de  camp,  ambassadeur  en  Es- 
pagne, n  se  signala  plus  tard  par  ses  intrigues  ainsi  que  sa  femme, 
Madeleine  de  Silly,  comtesse  de  la  Rochepot,  dame  d*atours  de  la 
reine  Anne  d'Autriche  ;  ce  qui  lui  attira  de  cruelles  disgrâces. 

*  Voy,  Pontchartrain,  p.  270. 


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d'arnàuld  d'andillt.  389 

23,     M.  de  Cadenet  va  à  Blois,  et  de  là  à  Amboîse.    Nofertibrc  i«n 
28.     M.  de  Vaudemont*  arrive,  et  amène  Mon- 
sieur le  Prince,  son  fils*,  à  la  Cour,  pour  estre  nourry 
auprès  du  Boy. 

Le  Roy  va  à  St-Germain,  et  revient  le  Lundy 
10  décembre. 


Samedy  i.  Toutes  les  Espagnoles  qui  estoyent 
auprès  de  la  Reyne,  s'en  vont  en  Espagne  (excepté 
la  vieille  Stéfanille,  demeurée,  et  Osorio,  envoyée  en 
Flandres),  à  savoir,  la  Comtesse  de  laTorre,  la  Com- 
tesse de  Castres,  Mendoce,  sa  fille,  Isabellique,  et 
plifeieurs  servantes.  La  Comtesse  de  la  Torre  eut  un 
don  du  Roy,  une  littière,  trois  mullets,  un  carrosse,  six 
chevaux,  et  cinq  mille  éeus;  la  Comtesse  de  Castres, 
pareil  équippage ,  et  trois  mil  écus  ;  le  Roy  leur  a 
donné  à  toutes,  en  tout,  la  valeur  de  cent  mil  livres. 

Mendoce,  avant  que  de  partir,  avoit  eu  la  rou- 
geolle,  et  l'avoit  donnée  à  la  Reyne,  qui  en  avoit  esté 
assez  malade'. 


*  François  de  LorraiDe,  comte  de  Vaudémont,  troisième  fils  de 
Charles  HI,  duc  de  Lorraine  et  de  Claude  de  France,  né  en  1572,  se 
fit  reconnaître  duc  de  Lorraine  en  1625,  remit  quelques  jours  après  le 
duché  à  son  fils  Charles  IV  et  mourut  en  1632. 

2  Charles  IV,  duc  de  Lorraine,  né  en  1604,  fils  de  François,  comio 
de  Vaudémontet  de  Christine  de  Salm,  succéda  en  162&  au  duc  Henri, 
te  Bon^  son  oncle,  dont  il  avait  épousé  la  fille  et  héritière ,  Nicole  de 
Lorraine;  partagea  d'ahord  l'autorité  souveraine  avec  sa  femme,  puis 
céda  le  gouvemement  à  son  père  qui  le  lui  rendit  quelques  jours  apK'-s  ; 
il  resta  dès  lors  seul  souverain.  Il  mourut  en  1675.  Foy,  Biog.  Mi-: 
chaud  la  notice  étendue  et  signée  Henry,  consacrée  à  ce  prince  dont 
la  vie  privée  fut  aussi  agitée  que  la  vie  politique. 

3  Foy.  Pou tchar train,  p.  271. 


Dcccinbre. 


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390  JOORNAL   INEDIT 

Décembre  1618.  9^  |^mt  jg  Rechen  *  emmène  Louise  Osorio  en 
Flandra 

12.  M.  Déageant  ne  va  au  Conseil  du  matin,  au 
Cabinet  du  Roy  ^ 

14.  M,  lé  chevalier  du  Guet  fait  Commande- 
ment, de  la  part  du  Roy,  à  M.  de  Laissé,  de  sortir 
de  Paris,  dans  vingt-quatre  heures,  à  peine  d'encou- 
rir son  indignation. 

16.  M"*'  de  Luynes  '  a  la  charge  de  Sur-Inten- 
dante de  la  maison  de  la  Reyne.  Quelques  jours  au- 
paravant, M"'  du  Vernet  *,  sœur  de  M.  de  Luynes, 
avoit  eu  celle  de  Dame  d'atour,  au  lieu  d'Osorio. 

18.  Dom  Ruade  ,  chartreux,  va  à  la  grande 
Chartreuse,  en  vertu  d'une  obédience  de  son  Général, 
venue  quelques  jours  auparavant. 

Querelle  entre  M.  le  Comte  de  Soissons,  et  M.  le 
Prince  de  Vaudemont  ^^  au  Manège,  en  présence  du 

*  Anne  Antoinette  GonflSer,  dame  de  Thiennes,  fille  de  Henry  Gouffier, 
seigneur  de  Crevecœur  et  de  Bonnivet  qui  eut  dçs  emplois  considé- 
rables en  Flandres,  et  de  Jeanne  de  Bocholt,  née  en  1580,  mariée 
en  1609  à  Ernest  de  Lynden,  baron,  puis  comte  de  Rechem  près 
Maestrick,  colonel  et  gentilhomme  de  la  chambre  de  l'Empereur  d'Al- 
lemagne, fils  de  Herman  de  Lynden,  baron  de  Rechem,  gouverneur  de 
Cologne,  souverain  de  Uége,  morte  en  1620.  {Foy.  P.  Anselme,  t.  v., 
p.  618.) 

s  Ce  ministre  était  en  disgrâce  (Fùy.  Pontchartrain,  p.  371). 
s  La  célèbre  Marié  de  Rohan,  depuis  duchesse  de  Gfaevreuse,  comme 
il  a  été  dit  ci-dessus. 

*  Antoinette  d* Albert,  mariée  en  1605  à  Barthélémy,  seigneur  du 
Vernet,  remariée  en  1628  à  Henry  Robert  de  la  Marck,  duc  de  Bouil- 
lon, morte  en  I6kh. 

6  Ces  vaillants  champions  avaient  alors  l'un  et  l'autre  14  ans  !  T\  est 
vrai  que  le  comte  de  Soissons  était  déjà  grand  maître  de  France  et 
gouverneur  du  Dauphiné.  Son  noble  riVf^  était  probablement  aussi 


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D*ARNAULD    D'ANDILLY.  391 

Roy.  Le  Roy  les  accorde  le  matin  mesme,  et  dit,     Décembre  mis. 

qu'il  prenoit  tout  sur  luy,  la  chose  s' estant  passée 

en  sa  présence,  et  qu'il  vouloit  qu'ils  demeurassent 

amis.  On  avoit  fait  courre  le  bruit  que  M.  de  Vau- 

demont  vouloit  aller  à  l'égal  de  M.  le  Comte,  mais 

cela  ne  se  trouva  vray.  M.  de  Guise  estoit  présent  à 

l'accord,  et  s'y  porta  avec  grande  modération. 

M.  deVaudemonts'en  va  en  Lorraine,  et  laisse 
Monsieur  le  Prince  son  fils  à  la  Cour, 


investi  de  hautes  dignités.  Quant  au  Roi,  leur  auguste  médiateur^  il 
était  plus  &gé  ;  Sa  Majesté  avait  alors  17  ans  ! 


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4649 


SOMMAIAE 


Janvier.  ~  M.  de  Gadenet  nommé  Ministre  à  la  place  de  M/Déageaot. 

—  M.  du  Fargis  revient  d'Espagne.  —  Le  Contrat  de  mariage  de 
Madame  Chrétienne  avec  le  Prince  de  Piémont  est  signé.  —  Mort 
de  la  Duchesse  d'Angoulôme.  —  Mariage  du  Duc  d'Elbœuf  avec 
M"«  de  Vendôme.  —  Mort  de  la  Princesse  d'Orange.  —  M.  d'Éper- 
non  part  de  Metz  sans  congé  du  Roi  pour  aller  délivrer  la  BeJne- 
mère. 

FÉVRIER.  —  M.  de  Guise  part  pour  aller  poursuivre  les  pirates  d'Alger. 
— Arrivée  du  Prince  de  Piémont.  —  Mariage  de  Madame  Chrétienne. 
—Différend  entre  le  Duc  de  Mayenne  et  le  Maréchal  de  Roquelaure. 

—  Évasion  de  la  Reine-mère  du  château  de  Blois.  —  Elle  arrive  à 
Angoulôme.  —  Correspondance  entre  le  Roi  et  la  Reine-mère.  — 
Le  Roi  mande  M.  de  Guise.  —  Le  Maréchal  de  Vitry  revenu  à  ia 
cour  est  congédié  par  le  Roi.  —  M.  de  la  Chesnaye  envoyé  par  le 
Roi  vers  M.  de  Bouillon  ;  réponse  de  celui-ci. 

Mars.  —  Le  Roi  commande  à  M.  de  Luçon  d'aller  trouver  la  Reine- 
mère,  —  M.  de  Luçon  part  d'Avignon  ;  il  est  arrêté  à  Vienne,  con- 
duit à  Lyon,  remis  en  liberté  par  M.  d'Alincourt  et  repart  pour  An- 
goulème.  —  Le  Père  Suffren  se  rend  auprès  de  la  Reine-mère.  -- 
Le  Prince  Cardinal  de  Savoie  retourne  en  Piémont.  —  Offres  du  Roi 
à  M.  de  Saint-Luc  ~  Disgrâce  du  comte  de  la  Roche-Guyon.  — 
Mécontentements  du  Parlement.  —  Séance  royale  au  Parlement  — 
Édits  des  petits  sceaux  et  de  revente  de  quelques  domaines.  — 
MM.  de  Béthune  et  de  Bérulle  envoyés  vers  la  Reine-mère.  —  Le^^ 
de  la  Reine-mère  apportée  par  M.  Villiers  SaintrGenest.  —  I>"6'  "" 
jeune  Villequier  avec  le  jeune  Bouteville.  —  M.  de  Blainville  Am- 
bassadeur en  Lorraine.  —  Maladie  de  Monsieur  le  Prince;  le  R<^* 
lui  renvoie  son  épée.  —  Lo  Roi  envoie  vers  M.  de  SulJy  qui  ^^^" 
aux  avances  de  la  Reine-mère. 


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d'arnauld  d'andilly.  395 

Avril.  —  Reddition  de  Boulogne  aux  armes  du  Roi.  -^  Retour  à  la 
Cour  du  maréchal  de  Vitry.  —  M.  de  la  Trémoille  revient  de  Sedan, 
où  il  avait  épousé  M^  de  Bouillon.  —  Le  Cardinal  de  la  Roçhefou- 
cairid  envoyé  vers  la  Reine-mère.  —  Prise  de  Tabbaye  d*Uzerche  par 
M.  de  Schomberg.  —  Le  Comte  de  BouIIay,  Ambassadeur  du  duc  de 
Lorraine;  il  est  nonmié  Colonel  des  Vallons.  -^  M.  de  la  Valette 
désarme  les  habitants  de  Metz.  -^  M.  de  BraQtes,  capitaine  des . 
chevau-légers  du  Roi  à  la  place  de  M.  de  la  Curée.  —  M.  de  Trai:»- 
nel ,  envoyé  comme  Ambassadeur  extraordinaire  en  Angleterre. 

Mai.  *-  Départ  du  Roi  pour  Orléans.  —  Mort  de  la  Maréchale  de  Fer- 
vagues.  —  La  Reine-mère  accepte  les  propositions  de  paix.  —  M.  do 
Nevers  chargé  du  commandement  en  Champagne.  —  Traité  d*An- 
goulême  entre  le  Roi  et  la  Reine-mère.  —  M.  de  Marousao  envoyé 
à  Angoulôme.  —  Le  Roi  va  à  Blois  et  à  Amboise.  —  Succès  de  M.  de 
Nevers.  —  Licenciement  de  Tarmée  du  Roi.  —  Le  Roi  va  h  Tours. 

—  Le  comte  de  Brennes  envoyé  par  la  Reine-mère  vers  le  Roi  ;  son 
insolence  envers  M.  de  Luynes. 

Juin.  ~  M.  de  la  Chesnaye  envoyé  à  Angoulème.  —  La  Reine-mère 
désavoue  M.  de  Brennes;  cabale  de  M.  de  Russelay.  —  Le  Prince 
de  Piémont  va  à  Angoulème.  —  L'Ambassadeur  d'Angleterre  va  à 
la  Cour  à  Tours.  —  Retour  du  Marquis  de  Traisnel.  —  M.  de 
Mayenne  vient  trouver  le  Roi  à  Tours  avec  la  Noblesse  de  Guyenne. 

—  La  Reine-mère  se  démet  du  Gouvernement  de  Normandie  en 
échange  de  celui  d*Anjou.  —  Mutations  dans  le  Gouvernement  des 
places  d*Anjou.  —  Le  martjuis  de  Mosny,  mécontent  de  la  Relnc- 
mère,  se  rend  à  la  Cour. 

Juillet.  —  Mort  de  Gallati,  Colonel  du  régiment  des  Suisses;  nomi- 
nations dans  ce  corps  à  la  demande  de  M.  de  Bassompierre.  —  Le 
Comte  Henry,  frère  du  Prince  d'Orange,  vient  trouver  le  Roi  à  Am- 
boise. —  M.  de  Richelieu  est  tué  eu  duel  par  le  Marquis  de  Thé- 
mines.  —  M.  de  Russelay  mécontent  de  la  Reine-mère  et  de  M.  de 
Luçon  arrive  à  la  cour.  —  M.  de  Montbazon  envoyé  vers  la  Heinc- 
roère  pour  la  prier  de  revenir  auprès  du  Roi.  —  M.  de  Vendôiue, 
Général  de  l'armée  envoyée  pour  prendre  Concarneau.  ~  Disgrâce 
de  M.  Déageaot  ;  il  se  retire  en  Daaphiné. 

AOUT.  —  M.  de  Cadenet  achète  la  Comté  de  Maillé.  —  M.  de  Longue- 
ville  reçoit  le  Gouvernement  de  Normandie  ;  M.  de  Lujmes,  celui  de 
Picardie;  M.  de  Montbazon, celui  de  TIle-de-France;  M.  de  Cadenet 
est  nomme  Lieutenant-Général  en  Normandie.— Prise  de  Concarneau 
par  les  capitaines  la  Besne  et  la  Courbe.  —  Mort  de  M.  de  Chaoï- 
breL  —  MM.  de  Prasliu  et  de  SaJntrGérau  sout  uommés  Maréchaux 
de  France.  —  Maladie  de  Monsieur.  —  Naissance  d'Anne-Geneviève 


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394.  /OURNAL  INEDIT 

Janvirriei».  de  Bourbon  (Ift  Duchesae  de  Longueville).  —  La  Reine-mère  part 

d'AogouIôme  pour  venir  à  la  Cour  i  cadeaux  qu'elle  fait  au  duc 
d*Épemon  et  À  ceux  qui  Tout  assistée.  ^  Duché-pairie  de  M.  de 
Luynes  et  de  M.  de  Lesdiguièrçsi  discussions  à  ce  sujet  au  Parle- 
ment. 

Septcmbbb.  —  M.  de  Schomberg  est  nommé  Surintendant  des  finances  ; 
il  prend  Amautd  d'Andilly  en  qualité  de  premier  commis.  —  Entre- 
vue du  Roi  et  de  la  Reine-mère  à  Couxières.  —  Suite  du  voyage  du 
Roi  et  de  la  Reine-mère.  —  Assemblée  des  Réformés  à  Loudun.  — 
Ëtata  de  Bretagne.  —  Mort  du  comte  du  Lude.  -^  Le  Colonel  d'Or- 
nano  le  remplace. 

Octobre.  —  Le  Roi  va  h  Compiègne.  —  Les  députés  de  l'Assemblée 
de  Loudun  se  rendent  auprès  du  Roi.  —  Le  Roi  va  à  ChantiUy.  — 
Mise  en  liberté  de  M.  le  Prince;  il  va  trouver  le  Boi  à  Chantilly. 

Novembre.  —  Suite  du  voyage  du  Roi.  —  M.  de  Luynes  fait  le  ser- 
ment de  Duc  et  Pair  ;  détails  sur  la  séance  du  Parlement  à  ce  sujet. 
—  Déclaration  de  Tinnocence  de  Monsieur  le  Prince. 

Décembre.  —  M.  de  Blainvîlle  achète  de  M.  de  la  Rochefoucauld  la 
charge  de  Maître  de  la  garde-robe.  —  Promotion  de  chevaliers  du 
Saint-Esprit.  —  M.  de  Cadenet  est  nommé  Maréchal  de  France.  — 
Différend  entre  Monsieur  le  Prince  et  le  Comte  de  Soissons  au  sujet 
de  la  serviette  du  Roi.  —  M.  de  Nemours  fait  appeler  M.  de  Guise. 

Dimanche  6.  M.  de  Cadenet  fait  Ministre  au  lieu 
de  M.  Déagent,  avec  charge  de  porter  les  paroles  du 
Roy  aux  Ministres,  et  des  Ministres  au  Roy.  Il  fut 
mis  en  fonction  de  cette  qualité  en  un  Conseil  étroit, 
tenu  Taprès-disnée  du  jeudy  x\ 

11,  M.  du  Fargis  de  retour  d'Espagne.  Il  fit  une 
extrême  diligence,  car  il  vingt  en  cinq  jours  d'Irun; 
ce  qui  arriva  fort  à  propos,  pour  ce  que  Monsieur  le 
Prince  Cardinal  l'avoit  tant  pressé  pour  que  Ton 
signast  le  Contrat  de  mariage,  que  le  Roy  luy  avoit 
promis  de  le  signer  ce  jour  là,  ainsi  qu'il  le  fut*; 

»  Voy,  Pontchartrain.  p.  272.  A  Toccasion  de  la  signature  du  con- 
trat, il  y  eut  à  Turin  des  fêtes  magnifiques  dont  le  Merc,  />•.,  t  v, 


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d'arnauld  d'andillt.  S95 

tellement  qu'il  receut  à  beaucoup  de  faveur  de  ce  J«mr»«ruii. 
que  Sa  Majesté  luy  avoit  accordé  cette  prière,  sans 
attendre  réponce  d'Espagne.  Et  d'ailleurs,  le  con- 
trat n'ayant  esté  signé  qu'après  le  retour  de  M.  du 
Fargis,  le  Roy  d'Espagne,  et  tout  le  monde  eut  su- 
jet de  croire  que  l'on  avoit  rendu  ce  respect  à  Sa 
Majesté  Catholique  de  n'^avoir  point  signé  le  contrat, 
qu'après  avoir  sceu  sa  réponce. 

Le  particulier  de  cecy  est,  que  M.  de  Savoye  eust 
estimé  avoir  grand  sujet  de  se  pleindre,  de  ce 
qu'ayant  esté  pressé,  par  MM.  de  Bethune  et  de 
Modèrie ,  d'envoyer  Monsieur  le  Prince  Cardinal  à 
la  Cour,  sur  le  sujet  du  mariage,  sans  avoir  aucune 
assurance  par  écrit,  que  la  demande  en  seroit  agréée, 
qui  est  contre  ce  qui  est  accoustumé  de  se  prati- 
quer entre  les  grans  Princes  ;  néantmoins,  pour  plaire 
au  Roy,  il  envoya  Monsieur  le  Prince  Cardinal,  but  la 
promesse  que  l'on  luy  fit,  que  six  jours  après  qu'il 
seroit  arrivé,  on  signeroit  le  contrat.  Estant  arrivé, 
les  six  jours  se  passent  sans  que  l'on  luy  en  parle. 
De  là,  on  va  à  Saint-Germain ,  où  on  luy  promet 
que  l'on  signera  le  Contrat,  ce  qui  lie  se  fit  point. 
Enfin,  il  connut  que  l'on  avoit  voulu  gagner  temps 
pour  envoyer  M.  du  Fargis  en  Espagne,  dont  il  se 
sentit  extrêmement  offencé.  Sur  quoy  on  luy  pro- 
mit que  six  jours  après  que  le  dit  sieur  du  Fargis 
seroit  party,  on  signeroit  le  contract;  et  toutefois, 
cela  fut  différé  jusques  à  son  retour. 

année  MDCXIX,  p.  69,  et  suiy.  rend  compte  avec  les  plus  grands 
détails. 


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396  JOURNAL   INÉDIT 

lâovfcriMf.  Outre  cela,  M.  de  Savoye  se  pleint  de  ce  que 
Ton  avoit  promis  cent  mil  écus  de  pension  à  Mes- 
sieurs ses  enfans ,  et  que  l'on  ne  leur  en  a  baillé 
que  soixante  mil  écus. 

Le  mesme  jour,  mort  de  M"'  la  duchesse  d' An- 
goulesme  *. 

20.  M"'  de  Vendosme  ^  mariée  avec  M.  le  duc 
d'Elbeuf,  M.  de  Vendosme  luy  bailla  quatre  cents 
mil  livres  pour  son  partage,  et  le  Roy  pareille 
somme  sur  ses  dettes ,  dont  il  y  en  avoit  cent  mil 
comptant^. 

jyjmc  |g^  Princesse  d'Orange,  sœur  de  Monsieur  le 
Prince,  meurt  à  Meurs-Muret.  Monsieur  le  Prince 
en  témoigna  un  extrême  déplaisir.  11  esperoit  en  la 
mariant,  sortir  de  Prison.  On  dit  qu'ils  s'aymoyent 
passionnément. 

23.  M.  le  Colonel  d'Ornano  revient  de  Blois,  où 
il  avoit  esté  cinq  ou  six  jours  auparavant,  porter  si- 


1  Diane,  légitimée  de  France,  Duchesse  d*ÂngouIôme,  fille  naturelle 
du  roi  Henri  U  et  de  Philippe  Duc,  demoiselle  piémontaise,  mariée 
en  1552  avec  Horace  Farnëse,  duc  de  Castro,  qui  fut  tué  à  Hédin  en 
1554  ;  en  1557  avec  François,  duc  de  Montmorency,  pair  et  maréchal 
de  France  ;  duchesse  de  Ghatellerault  en  1563  et  d*Étampes  en  1576, 
veuve  en  1579,  duchesse  d'Angoulôme  en  1582,  morte  sans  postérité  à 
Tâge  de  quatre-vingts  ans  en  1619.  Le  Roi  donna  en  1620  le  duché 
d*Angoulême  au  comte  d'Auvergne,  fils  naturel  de  Charles  IX,  et  par 
conséquent  neveu  naturel  de  la  duchesse  d'Angouléme  {Voy.  P.  An- 
selme, 1. 1,  p.  136).  Suivant  Pontchartrain,  p.  273,  la  duchesse  d*An- 
goulôme  décéda  non  le  11,  mais  le  12  janvier. 

2  Catherine-Henriette,  flUe  naturelle  d'Henri  IV  et  de  Gabrielle 
d'Estrées,  légitimée  en  1597,  mariée  en  1619  avec  Charles  de  Lorraine, 
II«  du  nom,  duc  d'Ëlbœuf,  morte  en  1663. 

*  Voy.  Pontchartrain,  p.  273  ;  Merc,  fr,y  p.  85. 


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D*ABNADLD   D'ANDILLY.  397 

gner  à  la  Reyne-mère  le  contrat  de  mariage  dé  Ma-      envier  uir. 
dame.  M.  Barat  porta  la  minutie.  M.  Guillard  s' es-  - 
toit  fait  nommer,  mais  M.  de  Pisieux  soustint  que 
l'on  ne  pouvoit  l'obliger  à  mettre  ses  minuttes  en 
autres  mains,  que  de  l'un  des  siens. 

25.  Le  Roy  couche  la  première  fois  avec  la 
Reyne,  dont  il  tesmoigna  depuis  avoir  receu  un  ex- 
trême contentement.  M.  de  Luynes  le  porta  entre 
ses  bras.  Le  Bonhomme  M.  de  Berringhen,  (qui  mou- 
rut lejeudy21  février),  portoit  le  flambeau.  Stépha- 
nille,  femme  de  chambre  espagnolle,  sortit  de  la 
chambre,  et  M*"*  Belliere,  première  femme  de  cham- 
bre de  la  Reyne,  y  demeura  seule*. 

27.  M.  d'Epernon  part  de  Metz,  sans  congé  du 
Roy,  accompagné  de  cinquante  gentilshommes,  cin- 
quante arquebusiers  à  cheval ,  cinquante  carabins, 
et  son  train.  Les  portes  de  Metz  demeurèrent  fer- 
mées toute  la  semaine ,  et  M.  le  marquis  de  la  Va- 
lette y  demeura.  Il  alla  coucher  à  une  petite  ville,  à 
quatre  lieues  de  là,  dont  il  fit  aussi  fermer  les  portes. 
Il  passa  aux  portes  de  Digoin,  en  Bourgogne,  et  ne 
passa  par  nulles  grandes  villes,  non  pas  mesme  pour 
traverser  les  rivières.  Il  avoit  dii^posé  ses  amis  pour 
le  joindre  par  le  chemin,  s'il  avoit  esté  suivy  ;  mais 
il  n'en  fut  pas  besoin.  M.  le  Grand  estoit  arrivé  à  la 
Cour  quelques  jours  auparavant.  Plusieurs  personnes 
seûrent  à  Paris  la  nouvelle  du  passage  de  M.  d'E- 
pernon,  quatre  ou  cinq  jours  auparavant  le  Roy.  Il 


*  Voif  Pontchartrain,  p.  273;  Utrc,  fr.^  p.  85. 


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398  JOURNAL   INÉDIT 

jmtur  itif.     écrivit  au  Roy,  du  pont  de  Vichy,  le  7  février  *. 

Février.  Vciidredy  1.     M.  de  Guise  part  pour  aller  à  Mar- 

seille, à  son  armement  à  la  mer.  Il  avoit  eu  de 
grandes  broûilleries,  quelques  jours  auparavant,  avec 
M.  le  Général  des  Galères,  sur  ce  qu'il  croioit  qu'il 
voulust  traverser  son  voyage  ^ 

6.  Monsieur  le  Prince  de  Piémont,  qui  n'estoit 
attendu  que  le  samedy,  fit  vingt-deux  postes  ce  jour 
là,  et  arriva  à  Paris,  vint  descendre  droit  au  Louvre, 
accompagné  de  M.  de  Béthune,  qui  l'avoit  jointe 
Milly.  Il  fut  voirie  Roy  à  l'heure  mesme  (et  le 
prince  Thomas'  aussi).  Sa  Majesté  le  receut  extrê- 
mement bien,  et  le  mena  aussitost  voir  Madame  \ 

9.  Madame  fiancée  avec  Monsieur  le  Prince  de 
Piémont. 

10.  Madame  mariée  dans  la  chambre  de  la 
Reyne,  à  midy,  au  mesme  lieu,  et  au  bout  de  treize 
ans  jour  pour  jour,  heure  pour  heure,  qu'elle  avoit 


*  Voy,  Fontonay-Mareuil,  p.  425  et  suiy.  et  p.  433  ;  Richelieu,  p.  520 
et  8uiv.;  Pontchartrain,  p.  273;  Merc,  fr.,  p.  127  et  suiv.  On  trouTC 
dans  le  Mercure  la  correspondance  du  Roi  avec  le  duc  d'Épernon, 
notaaiment  la  lettre  de  ce  dernier,  écrite  du  pont  de  Vichy.  Pendant 
que  ce  personnage  faisait  au  Boi  les  plus  grandes  protestations  de 
dévouement  et  de  fidélité,  il  allait  favoriser  l'évasion  de  la  Reine-mère. 

2  Voy.  Pontchartrain,  p.  273  ;  Merc.  fr..,  p.  85.  Le  duc  de  Guise,  dit  le 
Mercure.,  allait  nettoyer  la  mer  des  pirates  d'Alger. 

>  Thomas-François  de  Savoie,  prince  de  Carignan,  fils  de  Charies- 
Emmanuel  I",  duc  de  Savoie,  frère  du  cardinal  de  Savoie  et  du  prince 
de  Piémont^  né  ea  15d6^  mort  en  1656.  Vùy,  sur  ce  Prince,  qui  acquit 
mie  grande  illustration  dans  la  guerre,  la  Notice  de  M.  de  Villena?e, 
Biog.  Michaud. 

*  Voy,  Pontchartrain,  p.  273  ;  Merc,  fr,,  p.  80. 


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d'arnauld  d'andillf.  899 

esté  née.  On  ne  fit  nulles  cérémonies  ;  seulement  le  Fevie»*  ^w»»' 
Roy  dança  un  ballet,  le  mardy  gras,  12  février,  du- 
quel estoyent  le  Roy,  Monsieur  le  Comte,  Monsieur 
le  Grand  Prieur ,  M.  d'Elbeuf,  M.  de  Rohan  ,  M.  de 
Luynes,  M.  de  Bassompierre,  Monsieur  le  Général 
des  galères,  M.  de  Courtenvaut*,  M.  le  comte  delà 
Roche  Guyon,  M.  de  la  Rochefoucaud,  M.  de  Bran- 
tes,  M.  de  Blainville,  M.  de  Liancourt,  M.  de  Hu- 
mières  ^,  M.  de  Chalais^  ;  qui  sont  en  tout ,  seize.  Et 
le  premier  dimanche  de  Caresme,  17,  la  Reyne  dança 
un  ballet,  dont  estoyent,  la  Reyne,  Madame  la  Prin- 
cesse de  Piémont,  M"**  la  Duchesse  de  Longueville, 
M"'  de  Montpensier  *,  M"**  la  Duchesse  d'Elbeuf, 
M""  de  Rohan,  M"*  de  Verneûil  %  M*"*  la  marquise 


1  Jean  de  Souvré,  fils  du  maréchal  de  Souvré,  marquis  de  Courten- 
vaux,  premier  gentilhomme  de  la  Chambre,  gouverneur  de  Touraine, 
conseiller  d*État,  capitaine  du  ch&teau  de  Fontainebleau,  grand  fores* 
tier  et  capitaine  des  chasses  de  la  forêt  de  Bièvres,  bois  et  buissons  de 
la  Brie,  maître  particulier  des  eaux  et  forêts  du  bailliage  de  Meinn, 
mort  en  1656. 

2  Charles-Hercule  de  Crevant,  marquis  d'Humières,  premier  gentil- 
homme de  la  Chambre,  capitaine  de  cinquante  hommes  d*armes,  Gou- 
verneur de  Compiègne,  tué  au  siège  de  Royan  en  1622. 

s  Henri  de  Talleyraiid,  comte  de  Chalaîs,  né  en  1599,  favori  de 
Louis  Xni,  près  duquel  il  fut  élevé,  maître  de  sa  garde-robe,  devenu 
célèbre  par  ses  intrigues  sous  le  ministère  de  Richelieu,  accusé  de 
conspiration,  condamné  à  mort  et  exécuté  en  1626.  Voy,  Biog.  Michaud, 
la  notice  de  M.  Weiss  sur  cet  infortuné  jeune  homme. 

A  Marie  de  Bourbon,  duchesse  de  Montpensier,  fille  unique  et  héri- 
tière de  Henry  de  Bourbon,  duc  de  Montpensier,  mort  en  1608,  et  de 
Henriette  Catherine,  duchesse  de  Joyeuse,  remariée  en  1611  avec 
Charles  de  Lorraine,  duc-de  Guise,  morte  en  1656.  M"'  de  Montpen- 
sier naquit  en  1605,  épousa  en  1626  Gaston  de  France,  duc  d'Orléans, 
et  mourut  en  1627. 

*  Gabrielle-Angélique,  fille  naturelle  d*Henri  IV  et  de  Catherine- 


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400  JOURNAL   INÉDIT 

Ferricri*!».  (Je  Montlord  *,  M""  de  Courtenvaut^,  M*"'  de  Yen- 
dosme*,  M"*  de  Bouchavanes  *,  M"**  de  Courtenay*, 
M"*  de  la  Flotte,  M"' d'Oquincourt •,»!"•  Dandelot', 
M"*'  de  Combalet*  ;  qui  sont  en  tout,  seize. 


Henriette  de  Balzac,  mai^uise  de  Vemeuîl,  légitimée  de  France,  ma- 
riée en  1622  à  Bernard  de  Nogaret,  marquis  de  la  Valette,  puis  duc 
d'Épemon,  morte  en  1627. 

*  Marie  de  Raymond,  marquise  de  Montlar,  fille  de  Louis  de  Ray- 
mond, marquis  de  Maubec  et  de  Montlar  et  de  Marie  de  Maugiron, 
veuve  de  Philippe  d'Âgoult,  comte  de  Sauit,  et  femme  de  Jean-Baptiste 
d'Omano,  alors  colonel  et  depuis  Maréchal  de  France. 

2  Catherine  de  Neufville,  dame  de  Pacy,  dame  d'atonr  de  la  Reine 
Anne  d'Autriche,  fille  de  Charles  de  Neufville,  marquis  de  Villeroy  et 
d'Alincourt,  et  de  Marguerite  de  Mondelot,  dame  de  Pacy,  sa  première 
femme. 

*  Françoise  de  Lorraine,  duchesse  de  Mercœur,  fille  unique  et  héri- 
tière de  Philippe-Emmanuel  de  Lorraine,  duc  de  Mercœur,  et  de  Ma- 
rie de  Luxembourg,  mariée  en  16C9  à  César,  duc  de  Vendôme,  morte 
en  1669. 

*  Madeleine  de  Créquy,  fille  de  Claude  de  Créquy,  II*  du  nom,  sei- 
gneur de  BemieuUes,  et  de  Claude  de  Rouvroy  de  Saint-Simon,  mariée 
en  1594  à  Josias  de  Lamet,  seigneur  de  Bouchavanes,  gentilhomme  de 
}a  Chambre,  morte  en  1634. 

5  Catherine  du  Sart,  fille  d'Adrien  du  Sart,  seigneur  de  Ville  Saint- 
Jacques  et  de  Louise  de  Brucamp,  mariée  à  Edme  de  Courtenay,  sei- 
gneur de  Bleneau,  mort  en  1640  ? 

^  Georges  ou  Jacques  de  Monchy,  seigneur  d'Hocquincourt,  gou- 
verneur de  Boulogne  et  de  Péronne  en  1639,  capitaine  des  chevau- 
légers,  premier  maître  d'hôtel  de  la  Reine,  grand  prévôt  de  l'hôtel  en 
1630,  lieutenant-général  de  Lorraine  en  1636,  fut  marié  deux  fois  : 
X"  en  1593  avec  Claude  de  Moncloy,  dame  d'Aussennes  ;  2'*  avec  Ga- 
brielle  du  Chastelet,  veuve  du  comte  d'Escars.  La  première  fut  mère 
du  maréchal  marquis  d'Hocquincourt. 

7  Huberte  de  Chastenay,  fille  de  Joachim  de  Chastenet,  seigneur  de 
Lanty  et  d'Agnès,  dame  de  Dinteville,  mariée  en  1597  à  Charles  de 
Coligny,  marquis  d'Andelot,  mort  en  1632.    , 

s  Marie  d'Albert,  sœur  du  duc  de  Luynes,  mariée  à  Claude  de  Gri- 
moard  de  Beauvoir  du  Roure,  seigneur  de  Bonneval  et  de  Combalet, 
gouverneur  d'Amiens  et  de  Soissons,  morte  en  1686, 


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d'arnadld  d'andilly.  àOl 

On  vid  manger  en  public  Mesdames,  et  Messieurs       Février  im. 
les  Princes  de  Savoye,  en  cet  ordre. 

14.  Le  Roy  va  à  Saint-Germain ,  revient  le  Di- 
manche 17,  pour  le  ballet  de  la  Reyne  ;  et  repart  le 
Lundy  18.  La  Reyne  y  va  le  19,  et  M.  le  Prince  et 
M"*  la  Princesse  de  Piémont,  le  20  '. 

Nouvelle  arrive  que  M.  du  Mayne  vouloit  assiéger 
la  Réole,  maison  de  M.  de  Roquelaure,  pour  avoir 
les  canons  qui  estoyent  dedans,  et  que  MM.  de 
Montmorency,  d'Épernon,  et  de  Gondrin  ^  assis- 
toyent  M.  de  Roquelaure.  On  y  envoya  le  Mayne 
(qui  revint  le  12  mars),  et  le  Roy  écrivit  à  M.  d'É- 
pernon pour  s'employer  à  cet  acconuTiodement 
(faute  notable).  Depuis,  M.  du  Mayne  prit  la  Réole 
par  composition,  en  tira  les  canons  qui  y  estoyent, 
et  réduisit  la  garnison  au  nombre  accoustumé.  Et 
ensuite,  M.  de  Roquelaure,  ayant  une  seconde  fois, 
augmenté  la  garnison,  M.  du  Mayne  la  réassiégea 


*  Voy,  Merc,  fr,^  p.  86.  Le  Mercure  donne  les  détails  les  plus  curieux 
fiur  les  fêtes  merveilleuses  qui  eurent  lieu  à  la  Cour  à  l'occasion  du 
mariage  de  Madame  Chrétienne  avec  le  Prince  de  Piémont.  Le  sujet  du 
grand  ballet  du  Roi,  le  plus  beau  que  Ton  eût  encore  vu,  était  la  con- 
quête de  la  Terre-Sainte  par  Godefroid  de  Bouillon.  Le  ballet  de  la 
Reine  était  tiré  de  la  fable  de  Psyché.  Le  Mercure  fait  aussi  le  récit 
détaillé  des  fêtes  magnifiques  données  à  la  même  occasion  par  le  duc 
de  Montmorency  dans  son  gouvernement  de  Languedoc 

>  Antoine-Arnaud  de  Pardaillan,  seigneur  de  Gondrin,  né  en  1562, 
maréchal  de  camp,  sénéchal  et  gouverneur  d'Agenois  en  1596,  blessé 
au  siège  d* Amiens,  commandant  de  l'armée  de  Savoie,  marquis  de 
Montespan  et  d'Antin  en  1612  et  1615,  chevalier  des  ordres  en  1619, 
Conseiller  d'État,  capitaine  de  cent  hommes  d'armes  et  des  gardes- du- 
corps,  gouverneur  de  Navarre  et  de  Béam,  lieutenant-général  au  gou* 
vernement  de  Guyenne,  mort  en  1624  {Voy.  P.  Anselme,  t.  v,  p.  180), 

26 


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/iOS  JOURNAL  INÉDIT 

Février  i«if.  encorc  ;  mais  enfin,  cela  fut  accommodé,  en  sorte 
que  les  choses  demeurèrent  en  Testât  qu'elles 
estoyent  avant  cette  broûillerie,  que  M.  de  Roque- 
laure  verroit  M.  du  Mayne,  et  quMls  demeureroyent 
amis. 

Le  commencement  de  cette  affaire  fut,  qu'aux 
mouvements  de  Guyenne,  de  1615,  M.  de  Roque- 
laure  ayant  dit,  qu'il  ne  se  pouvoit  opposer  aux  des- 
seins des  ennemis  du  Roy,  en  une  occasion  qui  se 
présenta ,  si  on  ne  luy  bailloit  du  canon,  il  luy  fut 
permis  d'en  tirer  six  du  chasteau  Trompette;  ce 
qu'ayant  fait,  il  en  mit  trois  dans  le  chasteau  du  Ha, 
et  trois  dans  sa  maison  de  la  Réelle,  M.  du  Mayne 
ayant  le  chasteau  Trompette,  et  par  conséquent, 
prétendant  le  droit  d'y  remettre  les  six  canons  pris, 
sur  la  fin  de  janvier  1618,  estant  entré  par  surprise 
dans  le  chasteau  du  Ha,  en  fit  tirer  les  trois  canons 
qui  y  estoyent  ;  M.  de  Roquelaure  piqué  de  cela,  et 
craignant  qu'il  en  fist  autant  à  la  Réolle,  la  fortifia 
de  gens  de  guerre.  M.  du  Mayne  prenant  sur  cela 
de  dire  que  c'estoit  entreprendre  contre  le  service 
du  Roy,  que  de  mettre  garnison  dans  une  Place, 
sans  le  sceû  du  Gouverneur  de  la  Province,  la  vou- 
loit  assiéger,  afin  d'en  tirer  les  canons  qui  y 
estoyent  *. 

22.  La  Reyne-mère  part  de  Blois,  entre  une 
heure  et  deux  heures  après  minuit ,  descend  par  la 

*  Foy.,  8UP  ce  différend  entre  le  duc  de  Mayenne,  gouveroear  de 
Guyenne,  et  le  maréchal  de  Roquelaure,  lieutenantrgénéral  audit 
gouvernettient,  le  Merc,  fr,^  p.  157. 


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d'arnacli)  d'andilly.  408 

fenestre  de  son  cabinet  dans  le  fossé,  accompagnée  ''«^«'  ^w»- 
du  comte  de  Brenes*,  Nicolo  Sardini  (Bastard), 
Marsé  ^  et  Desniazures,  Exempt  de  ses  Gardes  ^  ; 
Catherine  et  Selvage,  deux  de  ses  femmes  de  cham- 
bre, Marine,  naine,  et  deux  valets  de  pied.  La  Reyne. 
portant  elle-mesme  la  cassette  où  éstoyent  toutes  ses 
bagues,  elle  glissa  le  long  de  Téchelle,  siu*  la  fin, 
s'écorcha  un  peu  le  dos,  et  sa  cassette  tomba.  Du 
fossé,  elle  traversa  tout  le  faubourg  de  la  ville,  et 
passa  tout  le  pont  à  pied.  Elle  fut  reconnue  par  deux 
hommes  qui  jettoyent  des  ordures  «ur  le  pont,  au 
bout  duquel  elle  trouva  un  carrosâe,  et  Chanteloube 
qui  Tattendoit,  avec  vingt-cinq  ou  trente  chevaux, 
avec  lesquels  elle  alla  jusques  à  Montrichard  (Elle 
n'entra  pas  dans  la  ville) ,  où  elle  trouva  un  autre 
carrosse,  et  M.  de  Thoulouse  et  le  comte  de  Ruscel- 
lay  avec  cent  vingt  chevaux,  ou  environ.  Estant 
arrivée  à  Liège,  à  une  poste  de  Loches,  elle  trouva 
M.  d'Épernon,  avec  deux  ou  trois  cens  chevaux.  On 
dit  qu'ayant  fait  arrester  son  carrosse  et  mis  pied  à 
terre,  et  M.  d'Épernon  luy  ayant  baisé  la  robbe,  ils 
se  retirèrent  chacun  un  pas  en  arrière ,  et  se  mirent 

*  Henry  Robert  de  la  Marck,  comte  de  Brenne,  pretiier  écuyer  de 
la  Reine-mère,  capitaine  •  des  cent-suisses  de  la  garde  ordinaire  du 
Roi,  mort  en  1652.  Il  était  fils  de  Charles  Robert  dQ  la  Marck,  comte 
de  Maulenier  et  de  Breane  qui,  à  la  mort  de  Charlotte  de  la  Marck, 
duchesse  de  Bouillon,  sa  nièce,  prit  le  titre  de  duc  de  Bouillon.  Le 
comte  de  Brenne  porta  aussi  ce  titre. 

3  Jacques  Goyon,  baron  de  Marco,  frère  du  marquis  de  la  Moussaye, 
mort  ayant  1650. 

*  Merçay  et  La  Maztu*e,  exempt  des  gardes  de  la  Reine-mère,  sui 
vant  Fontenay-Mareuil,  p.  435. 


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liOli  JOURNAL   INÉDIT 

Février  161».  lous  dcùx  à  rirc,  et  à  dire,  qu'il  faisoit  meilleur  estre 
là,  qu'à  Amboise.  Le  sieur  le  Conte  la  sert  de  secré- 
taire, au  lieu  de  M.  de  Villesavin,  qui  s'en  est  re- 


venu *. 


23.  Le  Boy  estant  à  Saint-Germain,  à  la  chasse 
du  cerf,  etlaReyneetmadame  de  Savoye,  avec  luy  ; 
celte  nouvelle  luy  fut  apportée,  laquelle  le  fit  revenir 
à  Paris  le  lendemain.  MM.  du  Conseil  n'estoyent  pas 
encore  allez  à  Saint-Germain  ^. 

24.  La  Reyne  part  de  Loches,  et  arrive  à  An- 
goulesme,  le  samedy  2  mars  ;  M.  d'Épemon,  monté 
sur  un  cheval  d'Espagne,  la  suivoit  à  la  teste  de  deux 
cens  Gentilhommes  très-lestes,  ayant  chacun  deux 
pistollets,  et  une  carabine,  et  cent  mousquetaires  à 
cheval,  montez  sur  des  chevaux  de  quatre-vingt  et 
cent  écus,  et  disoit  par  les  chemins  à  la  Reyne,  que 
si  elle  l'eust  perdu,  comme  ses  ennemis  le  luy  avoyent 
voulu  autrefois  persuader,  il  ne  luy  rendroit  pas 
maintenant  ce  service. 

25.  Le  Roy  mande  le  matin  MM.  du  Parlement. 
Il  leur  fit  dire,  par  M.  le  Chancelier,  ce  qui  estoit 
arrivé;  qu'il  s'en  alloit  (on  disoit  que  Sa  Majesté 
partiroit  assurément  le  samedy  pour  aller  à  Orléans, 
et  de  là  à  Tours) ,  et  qu'ils  eussent  soin  icy  de  son 
service. 

Villiers  Saint-Genest,  Écuyer  de  la  Reyne-mère, 

^  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  435  ;  Richelieu,  p.  527  ;  Pontchartrain, 
p.  274;  Brienne,  p.  336;  Rohan,  p.  154. 

*  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  436;  Pontchartrain,  p.  275  ;  Merc,  fr.^ 
p.  136. 


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d'artvauld  d'andillt.  Û05 

arrive,  avec  une  lettre  de  Sa  Majesté  au  Roy,  en  'cvrici'  «w. 
forme  de  manifeste,  et  une  autre  à  M.  le  Prince  de 
Piémont.  Ledit  sieur  de  Villiers  ne  fut  expédié  que 
plusieurs  jours  après,  et  seulement  avec  une  lettre 
de  compliment,  le  Roy  se  remettant  à  luy  écrire  plus 
amplement,  par  une  autre  voye.  M.  le  Prince  de  Pié- 
mont fit  de  mesme. 

...Arrive  aussi,  avec  des  lettres  de  M.  d'Épemon 
au  Roy.  On  dit  que  le  Roy  ne  les  voulut  pas  voir. 
On  fit  commandement  quelques  jours  après  au  sieur 
Yallier,  secrétaire  de  M.  d'Épernon,  de  se  retirer  *. 

26.  Le  Roy  envoyé  La  Fare  ^  à  M.  de  Guise, 
pour  luy  donner  avis  de  ce  qui  estoit  avenu,  et  luy 
mander  de  venir  à  la  Cour,  s'il  ne  jugeoit  point  estre 
nécessaire  de  delà.  On  ne  luy  écrivoit  rien  pour  luy 
donner  assurance  du  commandement  de  l'armée; 
mais  on  luy  mandoit  seulement  de  belles  paroles  par 
La  Fare. 

M.  le  Maréchal  de  Vitry  arrive  au  Louvre,  sans  en 
avoir  fait  avertir  Sa  Majesté.  Le  Roy  luy  mande, 
par  M.  de  la  Vieuville,  qu'il  ne  le  vouloit  pas  voir, 
et  qu'il  s'en  retournast,  ce  qu'il  fit  à  l'heure  mesme, 
et  alla  coucher  à  Coubert,  et  dit,  qu'il  estoit  venu 


*  Vùy.  Fontenay-Mareuil,  p.  438  ;  Richelieu,  p.  528  ;  Pontchartraii^ 
p.  276.  On  trouve  dans  le  Mercfr,^  p.  137  et  suiv.,  la  lettre  de  la 
Reine-mère  au  Roi,  celle  du  duc  d'Épernon  au  Roi  et  celle  de  la  Reine- 
haère  au  Prince  de  Piémont,  toutes  trois  datées  de  Loches  le  23  février. 

2  Jacques  de  la  Fare,  baron  de  la  Fare,  servit  en  Languedoc  contre 
les  religionnaires  en  1621,  capitaine  de  cavalerie  en  1638,  premier 
marquis  de  la  Fare  en  1646  mort  en  1661?  (Voy,  P.  Ansehne,  t.  ii, 
p.  137.) 


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&06  JOURNAL  INÉDIT 

wt^Herm%  pour  rendre  preuve  de  son  obéiôsance,  et  offirir  au 
Roy  de  lever  quatre  mil  hommes  de  pied  et  cinq 
cens  chevaux,  et  d'avancer  pour  cela  cinquante 
mil  écus  qu'il  avoit  comptant.  On  m'a  dit,  qu'en 
sortant  du  Louvre,  il  avoit  dit  que  ses  ennemis 
n'avoyent  osé  se  présenter  devant  luy ,  et  que 
c'estoyent  des  poltrons  *. 

27.  M.  de  la  Chôfinaye  va,  avec  le  sieur  Justel, 
trouver  M.  de  Buillon  de  la  part  du  Roy,  et  revient 
le  mécredy  6  mars,  avec  de  belles  paroles  de  M.  de 
Buillon,  comme  d'envoyer  son  fils  au  Roy  avec 
quatre  cens  chevaux,  etc.  Mais  ensuite  de  tout  cela, 
il  avoit  dit  que  cette  affaire  estant  entre  le  Roy,  et 
la  Reyne  sa  mère,  il  estoit  obligé  de  luy  dire,  qu'il 
çroioit  en  sa  conscience,  qu'il  devoit  envoyer  vers 
elle,  et  que  sur  une  affaire  de  si  grande  conséquence, 
il  estoit  besoin  d'assembler  les  officiers  de  la  Cou^ 
ronne,  et  les  Principaux  du  Royaume,  pour  y  prendre 
Conseil. 

M.  de  la  Chesnaye  m'a  dît  que  la  créance  dont 
M.  de  Buillon  Tavoit  chargé  envers  le  Roy,  estoit 
qu'il  serviroit  Sa  Majesté,  de  sa  vie,  de  son  bien, 
et  de  ses  amis,  envers  et  contre  tous,  sans  exception, 
distinction  ni  queue.  Que  sa  créance  à  M.  de  Luynes 
estoit,  que  les  Roys  ayant  à  avoir  des  Favoris,  comme 
il  y  en  avoit  toujours  eu  en  France,  il  ne  croioit  pas 
que  la  faveur  pust  tomber  en  meilleure  main  que 
celle  de  M.  de  Luynes,  qu'il  estimoit  fort  homme  de 

*  l^oy,  Pontchartrain,  p,  277. 


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b'aenauld  d'andilly.  407 

bien  ;  et  que  ne  jugeant  pas  que  Ton  pusti  sans  of-  Fevriaricit. 
fencer  T autorité  du  Roy,  s'attaquer,  contre  son  gré, 
à  ceux  qu'il  ayme,  pour  ce  qu'autrement,  le  Roy  ne 
seroit  pas  véritablement  Roy,  s'il  ne  luy  estoit  permis 
de  faire  du  bien  à  qui  bon  luy  sembleroit  ;  et  que 
mesme  en  cela,  il  avoit  intérest  de  s'y  porter,  parce 
qu'il  pourroit  avenir  que  son  fils  recevroit  quelque 
jour  des  bien-faits  et  des  gratifications  du  Roy  ;  pour 
ces  raisons,  au  cas  que  l'on  voulust  ruiner  M.  de 
Luynes,  il  luy  off'roit  de  le  servir,  et  de  l'assister  de 
sa  vie,  de  son  bien  et  de  ses  amis  \ 

M.  de  Buillon,  écrivit,  en  mesme  temps,  à  M"*  de 
la  Trémoille,  qu'il  ne  changeoit  point  d'avis,  depuis 
le  langage  qu'il  luy  avoit  prié  de  tenir,  qui  estoit  que 
se  voyant  abandonné  des  effects  de  la  protection 
qu'il  attendoit  de  deçà,  il  avoit  esté  obligé  de  se 
mettre  bien  avec  tous  ses  voisins,  M.  d'Épernon  entre 
autres,  avec  lequel  il  vivoit  en  amitié,  leurs  enfans 
estant  parens*. 

Environ  ce  jour,  M.  de  Chambret'  part  de  la 
Cour,  et  va  trouver  la  Reyne-mère.  M.  d'Épenion 
le  luy  présenta,  en  disant,  que  s'il  eust  esté  aussi 
vaillant  que  luy,  il  luy  eust  rencju  de  bons  Services. 

Samedy  2.     La  Reyne-mère  arrive  à  Angoulesme ,  mws. 

*  Voy,  Merc,  /V*.,  p.  149,  Ja  réponse  du  Maréchal  duc  de  Bouillon  au 
Roi,  en  date  à  Sedan  du  h  mars. 

2  Voy.  Richelieu,  p.  529. 

»  «  Chambret,  entre  autres,  huguenot  assez  connu  par  les  bonnes 
actions  qu'il  avoit  faites  du  temps  du  feu  Roi,  homme  déterminé,  et 
qui  sâvoit  le  métier  de  la  guerre  parfaitement  »  (Mém.  de  Richelieu, 
p.  541.) 


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408  JODRNAL  INÉDIT 

Mars  161».  M.  d'Épernon  Taccompagnoit,  monté  sur  un  cheval 
d'Espagne,  à  la  teste  de  deux  ou  trois  cens  chevaux  ; 
et  on  tient  qu'il  luy  dit  un  jour ,  «  Pofardioux,  Ma- 
dame, si  Vostre  Majesté  m'eust  perdu,  comme  mes 
ennemis  le  luy  vouloyent  autrefois  persuader,  je  ne 
luy  rendrois  pas  maintenant  ce  service-cy.  Il  dit 
aussi,  que  ces  gens  croioyent  l'avoir  matté;  mais 
qu'il  avoit  paré  à  la  Dame  ;  que  l'on  disoit  que  Ton 
luy  feroit  trancher  la  teste  ;  mais  qu'il  feroit  dire  au- 
paravant force  ScUve  Regina. 

Le  Roy  envoyé  M.  du  T...  *  vers  M.  de  Luçon, 
pour  luy  commander  d'aller  trouver  la  Reyne-mère 
à  Angoulesme.  M.  de  Luynes  écrivit  la  lettre  ;  et  le 
Roy  écrivit  au  bas.  —  M.  de  Luçon  part  d'Avignon 
le  Jeudy  7,  fut  arresté  à  Vienne  par  dix  ou  douze 
des  gardes  de  M.  d'Alincourt,  qui  firent  Corps  de 
garde  la  nuit ,  devant  son  logis.  (M.  d' Alincourt  en 
avoit  receu  commandement  quelque  temps  aupara- 
vant.) Puis  il  fut  conduit  à  Lyon.  M.  d' Alincourt 
luy  envoya  son  carrosse,  et  après  avoir  veû  son  pou- 
voir de  s'en  aller,  luy  donna  à  disner,  et  l'alla  con- 
duire hors  la  ville  après  disner.  11  devoit  arriver  à 
Angoulesme  lel5^ 


1  Le  sieur  du  Tremblay,  éonnu  depuis  sous  le  nom  de  Père  Joseph, 
capucin,  confident  et  l'un  des  principaux  agents  de  Richelieu. 

2  Voy.  Fontenay-Mareuil,  p.  441  ;  Brienne,  p.  340.  Les  détails  que 
Ton  trouve  dans  les  Mémoires  de  Richelieu  sur  toutes  les  circonstances 
de  son  rappel  près  de  Marie  de  Medicis  sont  pleins  d'intérêt  comme 
tout  ce  qui  se  rattache  à  la  vie  de  ce  grand  Ministre*  (Mém.  de  Riche- 
lieu, p.  533  et  suiv.}.  Ce  récit  montre  une  fois  de  plus  Texactitude  du 
journal  de  d'Andilly. 


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d'arnauld  d'andilly.  409 

Le  mesme  jour,  M.  B..,*  va  trouver  la  Reyne-       Mar^wia. 

mère, 
ft.     M.  de  Luynes  va  voir  Monsieur  le  Prince  au 

Bois  de  Yincenries. 

6.  Madame  la  Conneslable*,  suivant  les  lettres 
de  M.  de  Montmorency,  prend  congé  du  Roy,  et  de  la 
Reyne,  sous  prétexte  de  s'aller  purger,  et  s'en  va  à 
Chantilly. 

Le  père  SufiTren' ,  qui  estoit  revenu  de  Blois  à  la 
Cour,  et  n'avoit  point  suivy  la  Reyne-mère,  part 
pour  l'aller  trouver  à  Angoulesme. 

7.  M.  le  Prince  Cardinal  part,  pour  s'en. re- 
tourner en  Piémont. 

8.  Six  canons  partent,  pour  aller  à  Orléans. 
Le  Roy  envoyé  M.  de  Cominges  Guitaut*,  trouva 

1  u  Le  sieur  Bouthillier  étoit  parti  de  Paris  pour  la  venir  trouver, 
au  même  temps  que  les  ordres  du  Roi  me  furent  envoyés  par  le  sieur 
du  Tremblay,  pour  lui  rendre  compte  de  tout  ce  qui  s'étoit  passe?.  » 
(Mém.  de  Richelieu,  p,  537.)  «  Un  des  RouthiUier,  dit-il,  p.  533, 
simple  ecclésiastique  pour  lors,  qui  est  depuis  mort  évC^que  d*Aire, 
homme  de  cœur  et  d*esprit  tout  ensemble,  dont  Tadresse  et  la  fidélité 
étoient  égales.  » 

2  Laurence  de  Clermont,  troisième  femme  du  dernier  Connétable  de 
Montmorency,  qui  Tépousa  en  1599,  voulut  en  vain  faire  annuler  son 
mariage,  divorça  et  renvoya  au  château  de  Villiers-le^Bel,  où  elle  de- 
meura jusqu'à  la  mort  du  Connétable  en  1614  ;  rappelée  à  la  Cour, 
elle  devint  Dame  d'honneur  de  la  Reine  Anne  d'Autriche  et  mourut  en 
li>54. 

s  Jean  Suffren,  né  en  1565,  Jésuite,  confesseur  de  la  Reine-mère  en 
1615,  puis  confesseur  du  Roi.  Disgracié,  le  Père  Suffren  suivit  Marie 
de  Medicis  en  Angleterre  et  en  Allemagne  et  mourut  en  1641.  Les  ser- 
mons du  Père  Suffren  ont  été  publiés  en  1622.  On  a  de  lui  quelques 
opuscules  et  V Année  chrétienne^  publiée  en  1641  eu  6  vol.  in-4^  {Voy, 
Biog.  Michaud,  notice  de  M.  Weiss.) 

^  Pierre  de  Comioges,  seigneur  de  Guitaut,  capitaine  do  deux  cents 


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&10  JOURNAL   INISdIT 

Mên  itst.  M.  de  Sain1>Luc,  et  luy  ofirir  le  payement,  en  deux 
ans,  sur  Broûage,  de  cent  mil  francs  dont  il  avoit  cy 
devant  eu  don  ;  d'augmenter  ses  huit  compagnies  de 
Broûage,  qui  sont  de  cinquante  hommes  chacune , 
jusques  à  huit  cens  hommes,  et  mesme  mille,  de  lever 
mille  hommes  de  pied,  et  quatre  compagnies  de  che* 
vaux  légers  ;  de  commander  en  chef  tout  cela,  et 
mesme  plus  grandes  forces  en  ce  canton  là,  s'il  en 
estoit  besoin.  Et  si  lé  Roy  alloit  d'un  autre  costé,  et 
y  fai^oit  une  grande  armée,  d'y  servir  en  qualité  de 
Maréchal  de  Camp.  M.  de  Guitaut  trouva  M.  de  St- 
Luc  engagé  avec  la  Reyne-mère,  tellement  que  toutes 
ces  propositions  ne  servirent  de  rien*. 

10.  Le  Comte  de  la  Roche  Guy  on  s'en  va  de  la 
Cour,  à  cause  qu'il  n' avoit  pas  donné  à  boire  au  Roy. 
Il  y  revint  trois  ou  quatre  jours  après. 

11.  Les  chambres  des  Enquestes,  ayant  seû  que 
le  Roy  xievoit  aller  au  Parlement,  députent  deux  de 
chaque  chambre  à  la  Grand  Chambre,  pour  deman- 
der permission  de  s'assembler  à  M.  le  Premier  Pré- 
sident. Il  fit  réponce  que  le  Roy  luy  avoit  mandé 
par  M.  Tronçon,  qu'il  ne  vouloit  pas  que  l'on  s'as- 
semblast.  Sur  cela,  les  chambres  ayant  délibéré, 
dirent,  qu'ils  n'estoyent  point  obligez  de  croire  que 
M.  Tronçon  eust  porté  cette  parole  à  M.  le  Premier 
Président,  aussi  peu  que  M.  de  Luynes  l'eust  dite  à 


hommes  de  pied  en  1574,  lieutenant  au  gouTernement  de  Brouage  et 
des  lies  de  Saintonge  en  I604i  gentilhomme  ordinaire  de  la  Chambre 
en  1611,  mort  après  1619. 
*  Foy.  Fontonay-lf areuil,  p.  430  ;  Rtdielieu,  p.  548. 


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D'ARNiVLD   D'ANDILLT.  &!! 

M#  Tronçon,  ni  que  le  Roy  l'euét  dite  à  M.  de 
Luynes;  qu'il  n^y  avoit  qu'une  manière  par  laquelle 
le  Roy  parlast  au  Parlement,  qui  estoit  par  lettres 
patentes  scellées  du  Grand  Setu,  et  que  sur  cela,  on 
délibéroit  ce  que  Ton  avoit  à  y  répondre  ;  que  si  on 
les  vouloit  empêcher  de  parler  au  Roy  tout  bas,  dans 
son  Cabinet,  et  en  robbes  noires,  ils  parleroyent  tout 
haut,  en  plein  Parlement,  et  en  robbes  rouges  ;  que 
si  le  Premier  Président  ne  le  vouloit  faire,  d'autres 
Présidens  le  feroyent  ;  et  que  quand  mesme  ceux-là 
manqueroyent,  il  n'y  auroit  pas  faute  de  Conseillerô 
qui  Tentrèprendroyent. 

Environ  et  temps,  MM.  de  Rohan  et  de  la  Rodie^ 
foucaud  vont  en  .Poitou. 

12.  Le  Roy  va  au  Parlement,  où  il  fit  passer  les 
Édits  des  Petits  Seaux,  ej;  revente  de  quelques  Do- 
maines, et  entr' autres  de  la  forest  d'Orléans*. 

M.  de  Béthune  part  pour  aller  trouver  la  Reyne- 
mère,  de  la  part  du  Roy\ 

*  Voy,  Mère,  fr,,  p.  152,  le  compte  renda  de  cette  séance  royale.  «  On 
1»  leut  deux  Edicts^  Tun  pour  la  revente  du  Domaine  royal  aliéné  et  dé* 
»  laîisement  à  perpétuité  à  tiltre  de  ftef,  ou  cens,  avec  deniers  d'en* 
»  trée  t  du  fonds  et  propriété  des  bois  en  grufirie,  grairie,  segrairiOi 
»  tiers  et  danger  des  forêts,  gardes  et  buissons  du  duché  d'Orléans  «t 
»  autres  Provinces,  où  Sa  Majesté  avMt  des  bois  de  la  nature  susditOé 
»  Et  l'autre,  pour  la  vente  et  revente  des  droicts  de  petits  seaux  et 
»  augmentation  d'îceux  par  tout  le  royaume  de  Trance.  »  A  chaque 
reprise  de  la  guerre  civile,  on  voit  reparaître  des  mesures  fiscales  qui, 
en  créant  des  ressources  momentanées  au  gouvernement,  ruinent  l'État. 
La  misère  du  plus  grand  nombre  est  toujours  la  conséquence  de  l'anap- 
chie  fomentée  par  l'ambition  de  quelques-uns. 

2  M.  de  Béthune  portait  à  la  Reine-mère  les  réponses  du  Roi  et  du 
Prince  de  Piémont,  en  date  à  Paris  du  12  mars,  aux  lettres  de  la  Reine- 
mère  du  28  février,  (f^oy,  ces  réponses,  Mère,  fr>^  p.  IftO  et  145.) 


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A12  JOUANilL   INÉDIT 

itort  ifit.  13.     M.  de  Bérule  part  en  poste,  pour  aller,  de 

la  part  du  Roy,  trouver  la  Reyne-mère.  Il  revint  le 
cinq  avril  et  repartit  le  neuf. 

14.  VilliersSaint-Genest  arrive  de  la  part  de  la 
Reyne,  avec  une  lettre  de  Sa  Majesté  au  Roy*.  — 
Sur  quelques  paroles  qu'il  dit,  le  Roy  luy  dit,  que 
sans  le  respect  de  la  Reyne  sa  mère,  il  luy  auroit 
fait  trancher  la  teste.  Villiers  répondit  qu'il  ayme- 
roit  mieux  mourir  mille  fois  que  d'avoir  offencé  Sa 
Majesté,  et  que  s'il  l'avoit  fait,  il  la  supplioit  très 
humblement  de  luy  faire  trancher  la  teste. 

Le  jeune  Chappes,  nommé  Villequier%  âgé  de 
quatorze  ou  quinze  ans,  se  bat  avec  M.  de  Routeville- 
Montmorency*,  environ  de  son  âge. 


*  Voy,  Mém.  d*Arn*uld  d*Andilly,  p.  386  ;  Richelieu,  p.  530. 

»  Voy.  Merc,  fr.^  p.  161,  cette  seconde  lettre  de  Marie  de  Medicis  à 
Louis  XIII,  datée  d*AngouIêaie  le  10  mars.  On  trouve  dans  le  Mercure 
trois  autres  lettres  de  la  Reine-mère,  en  date  du  môme  jour,  adressées 
au  Chancelier,  au  Garde  des  Sceaux  et  au  Président  Jeannin,  suivies 
des  réponses  de  ces  grands  hommes  d'État. 

s  Antoine  d'Aumout,  second  fils  de  Jacques  d'Aumont,  baron  de 
Chappes,  mort  en  1614,  et  de  Charlotte-Catherine  de  Villequier,  fut 
élevé  à  la  Cour  comme  enfant  d'honneur  du  roi  Louis  XIII,  porta 
d'abord  le  titre  de  marquis  de  Villequier,  servit  au  siège  de  Montauban 
en  1621,  devint  capitaine  des  gardes  en  1632,  gouverneur  de  Boulogne 
en  1635,  Maréchal  de  France  en  1651,  gouverneur  de  Paris  en  1662, 
premier  duc  d'Aumont  et  pair  de  France  en  1665  et  mourut  en  1669. 
(Voy,  P.  Anselme,  t.  iv,  p^  877  et  t.  vu,  p.  542.)  Le  Maréchal  duc 
d'Aumont  étant  mort  en  1669,  âgé  de  soixante-huit  ans,  suivant  le 
P.  Anselme,  aurait  eu,  à  l'époque  du  duel  dont  il  s'agit,  environ  dix- 
huit  ans.  La  Notice  de  M.  Salabéry,  dans  la  Biog.  Michaud,  confirme 
le  témoignage  du  Père  Anselme  et  place  la  naissance  du  duc  d'Au- 
mont eu  1601. 

^  François  de  Montmorency,  seigneur  de  Bouteville,  gouverneur  de 
Senlis,  se  distingua  aux  sièges  de  Saint- Jean* d'Angely,  de  Montauban, 


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d'arnauld  d'aptdilly.  415 

15.    M.  de  Blainville  va  Ambassadeur  extraordi-       ^a»  le». 
naire  en  Lorraine,  sur  le  sujet  de  ce  que  l'on  croioit 
que  M.  de  Lorraine  favorisoitM.  d'Epernon. 

21.  Monsieur  le  Prince  tombe  malade. — Mardy 
2  avril,  MM.  Hélin,  Duret  et  Seguin  vont  au  Louvre 
représenter  Testât  de  sa  maladie.  La  cause  en  estoit 
attribuée  à  profonde  mélancolie.  Il  fut  tenu  plusieurs 
jours  hors  d'espérance.  Il  fut  permis  à  Madame  sa 
mère,  à  Madame  la  Comtesse,  à  M"'*  de  Ventadour*, 
à  M"*'  la  Comtesse  d'Auvergne*,  à  M"*'  de  la  Tré- 
moille  %  à  M™'  de  Fontaines  *,  à  M"*  la  Grande'*  etc. . . 
de  l'aller  visiter. 

de  Royan  et  de  Montpellier,  se  rendit  tristement  célèbre  par  ses  nom- 
breux duels  et  surtout  par  le  dernier  contre  le  marquis  de  Reuyron, 
à  Toccasiou  duquel  il.  fut  condamné  à  avoir  la  tête  tranchée,  ce  qui 
fut  exécuté  le  22  juin  1627.  {Voy.  P.  Anselme,  t.  m,  p.  588.)  D  eut 
pour  fils  posthume  le  célèbre  maréchal  duc  de  Luxembourg. 

^  Marguerite  de  Montmorency,  fille  du  Connétable  et  belle-sœur  de 
Monsieur  le  Prince,  mariée  en  1593  à  Anne  de  Lévis,  duc  de  Venta- 
dour,  morte  en  1660. 

*  Charlotte  de  Montmorency,  sœur  de  la  précédente,  mariée  en  1591 
à  Charles  de  Valois,  comte  d'Auvergne,  depuis  duc  d'Angoulôme, 
morte  en  1636. 

'  Le  jeune  duc  de  la  Trémoille  avait  épousé  le  10  janvier  de  cette 
année  1619,  sa  cousine,  Mavie  de  la  Tour,  fille  de  Henry  de  la  Tour, 
duc  de  Bouillon  et  d'Elisabeth  de  Nassau,  qui  mourut  en  1665  ;  mais 
les  nouveaux  mariés  n'étaient  pas  encore  revenus  de  Sedan,  comme 
on  le  verra  plus  loin.  Il  s'agit  ici  de  la  duchesse  de  la  Trémoille, 
douairière,  Charlotte  Brabantine  de  Nassau,  fille  de  Guillaume  U  de 
Nassau,  Prince  d'Orange,  et  de  Charlotte  de  Bourbon-Montpensier, 
alliée  de  Monsieur  le  Prince. 

^  Anne  de  Bueil,  fille  de  Louis  de  Bueil,  comte  de  Sancerre,  grand 
échanson  de  France,  et  de  Jacqueline  de  la  Trémoille,  veuve  depuis 
1590  de  Honorât  de  Bueil,  seigneur  de  Fontaines,  conseiller  d'État, 
vice- amiral,  lieutenant-général  en  Bretagne,  gouverneur  de  Saint- 
Malo.  Elle  était  par  sa  mère  alliée  à  Monsieur  le  Prince. 

*  Anne  de  Bueil,  dame  de  Fontaines,  fille  de»  précédents  et  femme 


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lilk  JOUHNAt  INlÈniT 

i  »«•.  Le  lundy  8  avril,  le  Roy  luy  renvoyé  son  épée  par 

M.  de  Gadenet,  et  luy  écrit  :  Mon  cousin,  je  suis 
bien  fâché  de  vostre  maladie.  Je  vous  prie  de  vous 
réjouir.  Incontinent  après  que  j'auray  donné  ordre 
à  mes  affaires  je  vous  donn^ay  vostre  liberté.  Bé- 
jouïssez-^vous  donc,  et  ayez  assurance  de  mon  amitié. 
Jesuis.*..^ 

2â*  Premier  courrier  de  M.  de  Béthune  arrive, 
avec  une  grande  dépesche  de  luy,  dont  quelque  chose 
du  sommaire  est,  qu* ayant  leû  la  lettre  du  Roy,  la 
Reyne  dit  à  M.  de  Béthune,  qu'e^;ant  en  créance  sur 
luy,  elle  seroit  bien  ayse  de  savoir  ce  qtf  il  avoit  à 
dire,  (et  cela  en  présence  de  M.  d'Epernon),  à  quoy 
M.  de  Béthune  ayant  répondu  qu'il  n' avoit  charge 
de  parler  qu'à  elle  seule,  et  en  particulier,  elle  in- 
sista fort  disant  qu'aussi,  bien  elle  auroit  la  peine  de 
le  luy  redire.  Enfin,  il  parla  à  elle,  à  part,  et  ne  luy 
ayant  dit  que  les  mesmes  choses  que  contenoit  sa 
lettre,  elle  dit  qu'elle  s'étonnoit  de  cela,  puisque  la 
lettre  estoit  en  créance  sur  luy.  Ensuite,  elle  luy  fit 
ses  pleintes  du  mauvais  traittement  qu'elle  avoit 
reçeu,  excusa  fort  M.  d'Epernon,  et  en  dit  beaucoup 
de  bien.  Enfin,  estant  entrez  jusques  aux  avis  des 
désordres  dont  elle  avoit  à  informer  le  Roy,  elle  dit 
à  M.  de  Béthune,  que  s'il  vouloit,  elle  les  luy  feroit 
entendre.  A  quoy  M.  de  Béthune  répondit,  qu'il 
n* avoit  point  charge  de  rien  écouter  de  cela;  (en  cela, 

de  Roger  de  Saint-Lary  et  de  Tennes,  duc  de  Bell^rde,  pair  et  grand 
écuyer  de  France. 
*  Foy.  Merc.  /y*.,  p.  183. 


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d'aanauld  d'andilly.  416 

on  trouva  qu'il  avoit  fait  très  grande  faiite,  pour  ce      Mâw  tm. 
qu'il  pouvoit  oûir,  et  dire  à  la  Reyne,  qu'il  ne  voioit 
nulle  apparence  de  parler  de  cela  au  Roy,  etc..  Et 
néantmoins  écrire  le  tout  au  Roy), 

35.  M.  Arnaud  le  Mestre  de  camp  dés  Carabins, 
envoyé  par  le  Roy  vers  M.  Sully,  trouva  que  la 
Reyne  mère  luy  avoit  écrit  trois  ou  quatre  fois,  et 
qu'il  commençoit  à  se  fort  engager  de  ce  costé  là. 
Il  le  ramena  à  ce  qu'on  euât  pu  désirer*  Revint  le 
samedy  30.  Il  y  retourna  encore  depuis,  un  second 
voyage,  sur  la  fin  du  mois  d'Avril,  dont  il  revint  le 
dernier  du  dit  mois.  —  Dix  sept  mil  livres  pour  les 
garnisons,  non  comprises  en  celles  de  seureté. 

Lundy  l.     M.  de  Guise  arrive  à  la  Cour»  Avm. 

Il  arrive  nouvelle  au  Roy  que  les  habKans  de . 
Boulongne  s'estoyent  barricadez  contre  le  chasteau. 
(Meuz  qui  y  commandoit,  n' avoit  que  sept  ou  huit 
hommes,  et  point  de  pain.)  M.  de  Longueville  s'of- 
fence  extrêmement  de  ce  que  l'on  refuse  de  l'y  en- 
voyer. Le  Roy,  quelque  temps  après,  envoya  quérir 
ledit  sieur  de  Meuz,  lequel  vint.  Depuis,  environ  le 
18  avril,  on  y  dépesche  FouqueroUes,  Exempt  des 
gardes,  avec  deux  Archers  *. 


*  Voy.  Richelieu,  p.  542;  Pontchartrain,  p,  377;  Merc.  /a,  p.  175. 
Le  Mercure  rapporte  une  lettre  que  U  Reine-mère  écrivit  au  Roi  au 
sujet  de  cette  affaire,  pour  se  plaindre  que  l'on  attaquait  les  places 
dans  lesquelles  elle  pouvait  au  besoin  trouver  sa  sûreté.  Le  duc 
d'Éperdon  était  gouverneur  de  Boulogne;  son  lieutenant  remit  la 
place  entre  les  mains  du  Roi. 


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&16  JOURNAL  INÉDIT 

ATTii  lert.  3.     M.  le  Maréchal  de  Vitry  revient  à  la  Cour 

avec  le  gré  du  Roy. 

ft.  M.  de  Vendosme  refusé  d'un  pouvoir  de  com- 
mander en  Bretagne,  et  en  Normandie,  dit  qu'il  ne 
seroit  jamais  avec  M.  de  Luynes.  Parle  au  Roy 
contre  luy.  Le  Roy  l'interrompt  et  luy  dit,  qu'il  estoit 
en  colère.  M.  de  Luynes  luy  en  ayant  fait  pleinte,  il 
dit,  qu'il  estoit  vray,  etc... 

6.  M.  de  la  Tremoille  revient  de  Sedan,  où  il 
s' estoit  allé  marier  à  la  fille  aisnée  de  M.  de  Buillon, 
quelque  six  semaines  ou  deux  mois  auparavant  '. 

M.  d'Epernon  part  d'Angoulesme,  avec  deux  ca- 
nons, pour  aller  secourir  Uzerche. 

8.  Le  Roy  écrit  à  Monsieur  le  Prince,  et  luy  ren- 
voyé son  épée  {vide  supra)  *. 

9.  Le  Roy  va  à  Saint-Germain  \ 

M.  de  Bérule  repart  en  poste,  pour  aller  à  Angou- 
lesme. 

M.  le  Cardinal  de  La  Rochefoucaud  part,  pour  aller 
à  Angoulesme,  où  il  arrive  le  vendredy  19,  avec 
pouvoir  d'offrir  Angers^Chinon,  Pont  de  Ce.  Il  re- 
vient le  15  juin*. 

12.  L'abbaye  d'Uzerche  prise  par  M.  de  Schom- 
berg,  qui  la  fit  attaquer  par  cinq  ou  six  endroits, 
pendant  que  ses  gens  entroyent  par  un  trou  de  cave 

«  Voy,  note  3,  p.  413. 

>  Voy,  Pontchartrain,  p.  280. 

*  Voy,  Pontchartrain,  p.  279. 

*  Voy.  Merc,  fr,^  p.  180.  Le  Père  de  Bcrulle  et  le  Cardinal  de  la 
Rochefoucauld  étaient  chargés  ainsi  que  M.  de  Béthune  de  traiter  de 
la  réconciliation  entre  le  Roi  et  la  Reine-mère. 


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d'arnauld  d'andilly.  M7 

que  leur  avoit  enseigné  un  prestre.  M.  d'Epernon       Avrincio. 
n'estoit  qu'à  deux  lieues  de  là,  avec  cinq  ou  six  cens 
bons  chevaux.  On  dit  qu'il  avoit  laissé  son  canon  à 
dix  lieues  de  là,  avec  son  Infanterie,  qui  estoit  de 
deux  ou  trois  mil  hommes  de  pied'. 

13.  Le  Comte  de  Boullay  arrive  comme  Ambas- 
sadeur extraordinaire  du  duc  de  Lorraine.  On  luy 
donne  un  brevet  de  Colonel  des  Vuallons,  et  une  pen- 
sion de  six  mil  écus,  et  quatre  mil  écus  à  quatre 
gentilshommes  qu'il  nomma,  dont  Chamble  estoit 
un.  Lesdits  quatre  mil  écus  en  pension. 

18.  M.  de  la  Valette  ayant  reconnu  l'affection 
que  les  habitans  de  Metz  avoyent  au  service  du  Roy, 
fit  entrer  la  nuit  dans  la  citadelle  les  Régimens  de 
Chamble  et  de  Gastinois ,  montant  à  dix-huit  cens 
hommes,  et  le  matin,  estant  sorty  avec  toutes  ses 
troupes  et  ce  qu'il  avoit  auparavant,  avec  deux 
pièces  de  canon,  et  ayant  disposé  ses  gens  dans 
toutes  les  principales  places  et  aux  portes  des  églises, 
où  il  savoit  que  les  habitans  avoyent  leur  rendez- 
vous,  il  envoya  des  soldats,  avec  des  flambeaux,  et 
de  la  paille  allumée,  crier  par  toutes  les  maisons, 
que   s'ils  n'apportoyent  à  l'heure    mesme   toutes 


*  Voy,  Fontenay-Mareuil,  p.  439;  Richelieu,  p.  540  ;  Pontchartrain, 
p.  219i3Ierc.  fr,^  p.  172.  Le  Mercure  donne  de  grands  détails  sur  la 
prise  de  Tabbaye  d*Uzerches.  Le  duc  d'Epernon  était  possesseur  de 
cette  abbaye,  située  dans  son  gouvernement  de  Limosin  ;  le  comte  de 
Schomberg  était  lieutenant  du  Roi  dans  la  môme  province.  On  trouve 
dans  le  récit  du  Mercure  une  lettre  de  la  Reine-mère  au  Roi  au  sujet 
de  cette  affaire,  et  la  lettre  par  laquelle  le  comte  de  Schomberg  an- 
nonce au  Roi  le  succl's  de  son  entreprise. 

27 


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kiS  JOURNAL  INiSdIT 

Avril  im.  leurs  armes,  chacun  en  TÉglise  de  sa  Paroisse,  on 
mettroit  le  feu  à  leurs  maisons  ;  à  quoy  ils  obéirent 
à  Theure  mesme.  Mais  ils  ne  rendirent  pas  tout  Et 
un  d'entr'eux  qui  se  vanta,  quelque  temps  après, 
qu'ils  tf  estoyent  pas  encore  désarmez,  fut  cause  que 
Ton  fit  une  seconde  recherche ,  en  laquelle  il  s'en 
trouva  encore  quantité.  Cependant,  les  portes  de  la 
ville  ayant  esté  fermées  quelques  jours,  et  y  ayant 
eu  quelques  coups  de  canon  tirez  en  Tair,  M.  de 
Yaudemont,  qui  creut  qu'il  y  avoit  eu  émotion,  en 
donna  avis  au  Roy,  qui  dépescha  en  mesme  temps  à 
M.  de  Praslin,  avec  commandement,  ou  en  son 
absence,  à  M.  de  Feuquière,  de  mener  toutes  les 
troupes  de  Sa  Majesté  à  Metz,  ce  que  M.  de  Praslin 
fit;  mais  il  estoit  trop  tard.  11  n' avoit  que  quinze 
cens  hommes  de  pied  et  deux  cens  chevaux.  Depuis, 
M.  de  la  Yaliette  fit  faire  encore  une  recherche 
d'armes,  et  fit  ester  aux  habitans  jusques  aux  bro- 
ches, serpes,  fourches,  etc.  *. 

21.  Le  Roy  revient  de  Saint-Germain  à  Paris, 
et  y  retourne  le  mardy  2â^ 

27.  M.  de  Brante,  pourveû  de  la  charge  de  ca- 
pitaine des  chevaux  l^ers  de  la  Con^gnie  du  Roy, 
qu' avoit  M.  de  la  Curée  pour  le  prix  de  cent  mil 
écus,  savoir  soixante  quinze  mil  écus  comptant  et  la 
charge  de  capitaine  au  Régiment  des  Gardes,  qu'a- 
voit  M.  de  Brantes,  baillée  à  M.  de......  neveu  de 

*  yoy.  Richeli6u,''p.  560  ^  Pontchartraifl,  p.  280;  Bferc,  />•.,  p.  186. 

^  Vop,  Merc,  fr,^  p.  180,  une  longue  lettre  du  Roi,  datée  de  Paris 

le  23  avril,  en  réponse  à  celle  de  la  Heine-mère  du  il  du  même  mois. 


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D^ARNAULD    D'ANDILLY.  419 

M.  de  la  Curée,  estimée  à  trente  mil  écus.  M,  de       AvHueit. 
Brantes  vend  sa  charge  de  Cornette  à  M.  de  Vie*, 
quarante  mil  écus. 

Le  soir  de  ce  mesme  jour,  M.  de  Bérule  arrive  au 
faubourg  Saint-Jacques  ;  et  le  lendemain,  va  à  Saint- 
Germain.  La  Reyne-mère  demandoit  Amboise,  outre 
ce  qui  luy  avoit  esté  accordé;  ce  qui  luy  fut  refusé. 
Il  repart  le  4  may,  pour  retourner  à  Angoulesme'. 

29.  M.  de  Traisnel  '  part  pour  aller  Ambassa- 
deur extraordinaire  en  Angleterre,  avec  charge  de 
parler  du  mariage  du  Prince  avec  M**'  Henriette. 
M.  le  Prince  de  Piémont  s'est  pleint  de  ce  qu'ayant 
travaillé  à  nous  remettre  en  bonne  intelligence  avec 
Angleterre,  et  mesme  luy  ayant  esté  dit  qu'il  faloit 
penser  à  ce  mariage  avec  une  des  Infantes  de  Savoye, 
néantmoins,  on  a  donné  la  commission  cy  dessus  à 
M.  de  Traisnel,  sans  luy  en  communiquer*. 

Mardy  7.     Le  Roy  part  de  Saint-Germain  et  va         "«"y- 
coucher  à  Linas,  le  mécredy  à  Estampes;  le  jeudy, 
jour  de  l'Ascension,  il  y  séjourne;  le  vendredy  à 


«  Cédéon  de  Vie,  seigneur  d*firmenoiiville,  fild  du  Garde  des  Sceaux 
Méry  de  ^c,  maréchal  dos  camps  et  armées  du  Roi,  cornette  de  la 
compagnie  de  deux  cents  chevau-légers  de  sa  garde  ordinaire  en  1619, 
mort  en  1636. 

*  Voy.  Mém.  d»Arnauld  d»Andîîly,  p.  388,  ce  quMl  dit  de  Teffet  pro- 
duit sur  la  Reine  par  une  lettre  du  Roi  dont  Amauld,  &  la  demande  de 
Déageant,  avait  rédigé  la  minute* 

*  François  Jouvenel  des  Ursins,  marquis  de  Traynel,  chevalier  des 
Ordres,  Ambassadeur  à  Rome  et  en  Angleterre  en  1619,  maréchal  des 
camps  et  armées  du  Roi,  mort  en  1630.  (f^ùy*  P.  Anselme,  t  vi,  p.  &07.) 

*  Voy,  Pontchartrain,  p.  281. 


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420  JOUÛNAL   INÉDIT 

Mny  1619.  Toury,  et  le  samedy  à  Orléans.  La  veille  de  son 
parlement  de  Saint-Germain,  il  avoit  esté  assuré  de 
la  paix.  Grande  faute  en  ce  voyage;  car  il  ne  faloit 
point  partir  de  Paris,  pour  ne  pas  amender  sa  con- 
dition \ 

Mort  de  la  Maréchale  de  Fervaques  ^.  M.  de  la 
Trémoille  y  gagna  vingt  dnq  mil  livres  de  rente , 
qu'elle  tenoit  pour  douaire,  et  M.  d'Elbeuf,  dix  sept 
mille. 

9.  Jour  de  TAscension.  La  Reyne-mère  com- 
manda au  Père  Suffren  de  faire  entendre  en  son  ser- 
mon, comme  la  Paix  esloit  achevée;  et  après,  fit  chan- 


*  «  En  Tannée  suiTante,  1619,  M.  le  duc  d'Épernon  ayant  enlevé 
»  la  Reine-mère  de  Blois  et  rayant  menée  à  Angoulême,  chacun  sait 
»  qu'il  se  passa  une  longue  négociation  dont  M.  de  Bérulle,  qui  ne 
»  fut  Cardinal  que  longtemps  après,  faisoit  toutes  les  allées  et  venues. 
»  Le  Roi,  pour  presser  davantage  Teffet  de  cette  négociation,  en  s'ap' 
»  procbant  plus  près  d*Angoul6me,  partit  de  Saint-Germain  le  7  mai 
M  et  alla  à  Tours,  où  il  demeura  jusqu'à  ce  qu'elle  fût  terminée,  et 
»  n'en  partit,  pour  revenir  vers  Paris,  que  le  19  septembre.  »  (Méra. 
d'Arnauld  d'Andilly,  p.  386).  Les  détails  d'Arnauld  d'Andilly  sur  le 
voyage  du  Roi  sont  d'autant  plus  exacts  qu'il  suivait  la  Cour  et  qu'il 
resta  avec  elle  à  Tours,  ainsi  qu'on  l'apprend  par  ses  Mémoires,  p.  386 
et  suiv.  Foy.  aussi  Pontchartrain,  p.  282. 

>  Anne  d'Alègre,  fille  de  Christophe  d'Alègre,  seigneur  de  Saint- 
Just,  et  d'Antoinette  du  Prat,  veuve  en  premières  noces  de  Guy  Paul 
de  Coligny,  comte  de  Laval,  remariée  en  1599  et  veuve  de  Guillaume 
de  Hautemer,  comte  de  Grancey,  seigneur  de  Fervaques,  maréchal  de 
France  en  1595,  lieutenant-général  au  gouvernement  de  Normandie, 
içort  en  1613.  {Voy,  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  393  et  395.)  Il  s'agit  ici  du 
douaire  dont  jouissait  la  maréchale  de  Fervaques  comme  veuve  du 
comte  de  Laval,  qui  n'avait  laissé  pour  héritier  que  Guy  de  Coligny, 
comte  de  Laval,  XX"  du  nom,  mort  en  1605.  «  Par  sa  mort  sans  al- 
»  liance,  dit  le  P.  Anselme,  tout  le  bien  de  la  maison  de  Laval  fut  dé- 
»  volu  à  Henry,  sire  de  la  Tiémoillo,  duc  de  Thouars.  »  {Foy,  P.  An- 
selme, t.  VII.  p.  15C.) 


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d'arnauld  d'andilly.  421 

ter  le  TeDeum  en  sa  présence,  en  la  principale  Église.  ««y  «wt. 
Et  suivant  cela,  MM.  le  Cardinal  de  la  Rochefoucaut 
et  de  Béthune,  envoyèrent  à  M.  du  Mayne  une  lettre 
de  cachet,  qu'ils  avoyent  du  Roy,  pour  faire  retirer 
ses  troupes  *.  Il  estoit  à  Chasteauneuf ,  que  douze 
cens  hommes  de  M.  d'Epernon  luy  avoyent  quitté, 
s' estant  retirez  de  nuit,  et  bloquoit  Congnac,  où 
estoyent  MM.  de  Thoulouse,  de  Biron  *,  Ambleville\ 

13.  M.  de  Nevers  arrive  en  Tarmée  de  Cham- 
pagne, dont  il  avoit  le  commandement.  M.  de  Pras- 
lin  envoya  M.  de  Feuquière  le  trouver,  et  puis  y  fut 
luy  mesme,  jusques  à  quatre  lieues  du  quartier  ;  et 
M.  de  Nevers  fut  au  devant  de  luy  ;  et  se  rendoyent 
de  grans  honneurs  Tun  à  l'autre. 

14.  Le  Roy  reçoit  par  Picaut  les  nouvelles  de  la 
paix  publiée  à  Angoulesme  ;  mais  d'autant  que  la 
Reyne-mère  avoit  dit  à  Messieurs  les  Députez  du 
Roy ,  que  dans  quatre  ou  cinq  jours  elle  leur  ren- 
droit  réponce ,  si  elle  acceptoit  les  offres  que  le  Roy 
luy  faisoit  d'Angers,  Chinon,  Pont  de  Ce,  et  Gou- 
vernement d'Anjou,  au  lieu  du  Gouvernement  de 
Normandie;  ou  bien,  si  elle  se  tiendroit  à  ce  qu'elle 
avoit  ;  cette  irrésolution  mit  le  Conseil  du  Roy  en 


*  Voy,  Pontchartrain,  p.  283. 

>  Jean  de  Gontaut,  baron  de  Biron,  fils  du  premier  Maréchal  de  Bi- 
ron et  frère  du  second  Maréchal  de  ce  nom,  décapité  en  1602,  mestre 
de  camp  du  régiment  de  Picardie  en  1596,  capitaine  de  cent  hommes 
à*armes  en  1615,  conseiller  d*État,  maréchal  de  camp,  mort  en  1636. 
{Voy,  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  305.) 

*  Jean  ou  Berlin  de  Mornay,  seigneur  d'Ambleville.  {Voy.  P.  An- 
selme, t.  VI,  p.  294.) 


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/i22  JOURNAL  INEDIT 

M^yiMt.  peine,  craignant  qu'il  n'y  eust  quelque  chose  caché 
dessous;  et  on  trouva  mauvais  que  Messieurs  les 
Députez  eussent  mandé  à  M.  du  Mayne  de  se  re- 
tirer, avant  que  d'avoir  eu  une  résolution  finale  ;  de 
sorte  que  par  la  dépesche  qu'on  leur  fit,  on  ne  leur 
témoigna  pas  contentement  de  leur  Procédure.  Et  m'a 
esté  dit,  que  Ton  manda  à  M.  du  Mayne  de  ne  pas 
s'éloigner.  On  tient  qu'il  avoit  dix  à  douze  mil 
hommes  de  pied,  et  de  quinze  cens  à  deux  mil  che- 
vaux, tous  fort  bons  hommes*. 

14.  En  mesme  temps,  on  envoyé  M.  de  Marou- 
san  à  Angoulesme,  et  je  croy  que  ce  fut  luy  qui  porta 
la  susdite  dépesche.  Il  trouva  que  la  Reyne-mère 
n'y  entendoit  point  finesse  ;  mais  que  ce  qui  l'empes- 
choit  de  se  résoudre,  estoit  que  d'un  costé,  ceux  qui 
estoyent  près  d'elle,  comme  M.  de  Meux%  Cbante- 


*  Suivant  Richelieu,  p.  545,  les  conditions  du  traité  d'Ângoulême 
qui  rétablit  la  paix  entre  le  Roi  et  la  Reine-mère  furent  :  Foubli  de 
tout  le  passé  ;  la  sûreté  que  le  Roi  donnait  pour  les  personnes  et  pour 
les  charges  de  ceux  qui  avaient  servi  la  Reine;  50,000  écus  de  récom- 
pense accordés  au  duc  d'Épemon  pour  Boulogne  ;  réchange  du  Gou- 
vernement de  Normandie  que  la  Reine  avait  en  celui  d* Anjou  et  des 
villes  et  châteaux  d'Angers,  du  Pont-de-Cé  et  de  Chinon  ;  500,000  écus 
accordés  au  Roi  pour  les  frais  de  la  guerre.  Ce  traité,  comme  tous  les 
précédents,  fut  bientôt  violé,  et  Tanarchie  -désola  de  nouveau  le 
royaume.  {Foy,  aussi  Pontchartrain,  p.  284.)  Le  Merc,  />•.,  p.  200, 
rapporte  textuellement  dix  articles  proposés  au  nom  du  Roi  par  le  Car- 
dinal de  la  Rochefoucauld  et  M.  de  Béthune  et  acceptés  par  la  Reine- 
mère  le  dernier  jour  d'avril .  Ces  articles  ne  renferment  pas  les  princi- 
pales conditions  énumérées  ci-dessus,  qui  firent  l'objet  d'un  traité 
particulier. 

*  Jean  de  Rouville,  seigneur  de  Meux,  capitaine  de  la  cavalerie  lé- 
gère en  Allemagne,  des  douze  compagnies  d'ordonnances.  {Voy,  P.  An- 
selme, t.  vm,  p.  713.) 


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d'ARNAULD    D^ANDILLY.  428 

loube  et  autres,  la  vouloyent  porter  à  accepter  les       uay  16». 
places  que  le  Roy  luy  offroit  ;  et  de  Tautre,  son  incli- 
nation, et  le  conseil  de  plusieurs  de  ceux  qui  s'es- 
toyent  engagez  à  la  servir ,  la  portoyent  à  ne  rien 
prendre. 

16.  Le  Roy  va  à  Rlois,  et  le  lendemain ,  à  Am- 
boise. 

17.  Ceux  qui  estoyent  dans  Pont  à  Moulins, 
pour  M.  de  la  Yallette,  ayant  seû  que  le  canon  que 
M.  de  Nevers  attendoit  estoit  arrivé ,  ils  sortirent 
tous  la  nuit,  et  ne  laissèrent  que  dix  mousquetaires, 
qui  ouvrirent  les  portes  à  M.  de  Nevers,  sans 
aucune  résistance»  lorsqu'il  se  présenta  le  lendemain 
matin. 

Depuis  la  Pentecoste  qui  fut  le  19,  jusques  au  23, 
M.  de  Nevers  prit,  sans  résistance,  trois  autres  chas- 
teaux,  savoir,  la  Horgne,  Vry,  et  Amery  ;  pour  ache- 
ver le  tour  entier  de  Metz,  il  devoit  prendre  le  len- 
demain la  Douchant 

23.  M.  de  Rérule  arrive  à  Amboîse,  ne  mettant 
point  en  doute  la  conclusion  de  la  paix,  qu'il  tenoit 
entièrement  achevée,  dès  le  jour  de  T Ascension.  Et 
de  fait ,  il  ne  vint  point  en  diligence,  mais  en  car- 
rosse avec  M.  le  Cardinal  de  Sourdis,  qu'il  rencontra 
par  occasion. 

M.  de  Marousan  arrive  le  mesme  jour ,  qui  rap- 
porta aussi  toutes  bonnes  nouvelles,  et  que  ce  que  la 
Reyne  désiroit,  estoit,  que  si  le  Roy  avoit  agréable 
qu'elle  prist  les  places  qu'il  lui  offroit,  il  lui  pleust  le 
luy  témoigner  par  un  mot  de  lettre. 


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Ù24  JOURNAL   INÉDIT 

May  1619.  M.  de  Marousan  retourna  à  Angoulesme  trois  ou 

quatre  jours  après. 

28.  On  licencie  l'armée,  qui  estoit  à  la  suite  du 
Roy,  en  la  sorte  qui  s'en  suit.  On  casse  entièrement 
les  Régimens  de  la  Rinville  et  du  Ménillet,  et  quant 
à  ceux  de  Picardie,  Piémont,  Navarre  et  Beaumont, 
les  dix  compagnies  qu'ils  avoyent  de  cent  hommes 
chacune,  sont  réduites  à  cinquante  hommes,  qui  est 
une  augmentation  d'entretenement  qu'ils  n' avoyent 
jamais  eu  auparavant  en  temps  de  paix  ;  car  outre 
ces  dix  compagnies  des  vieux  Régimens  entretenus 
maintenant  à  la  Campagne,  les  vingt  vieilles  Compa- 
gnies demeurent  toujours  dans  les  garnisons. 

Des  seize  cens  Suisses  de  nouvelle  recrue,  en  sont 
conservez  six  cens  ;  le  reste  renvoyé. . 

Quant  aux  Régimens  de  Champagne,  Chapes  *, 
Bourg,  Vaubecour,  et  Rambures%  j'estime  qu'ils 
seront  traittez  comme  les  susdits. — Ce  qui  s'est  fait 
aussi. 

Quant  à  la  gendarmerie  et  cavalerie  légère 

*  Ce  régiment  portait  le  nom  de  Jacques  d'Aumont,  baron  de 
Chappes,  gentilhomme  ordinaire  de  la  Chambre,  colonel  dudit  régi- 
ment aa  siège  de  Rouen  en  1591,  sous  le  Maréchal  d'Aumont  son  père, 
Prévôt  de  Paris  en  159&,  mort  en  jôl/ii.  Le  baron  de  Chappes  eut  entre 
autres  enfants  le  Maréchal  duc  d*Aumont.  (  Voy,  P.  Anselme,  t.  iv, 
p.  876.) 

2  Charles,  sire  de  Rambures,  capitaine  de  cinquante  hommes 
d'armes,  gouverneur  de  Doullens  et  du  Crotoy,  dit  le  brave  Rambures^ 
maréchal  de  camp  et  mestre  de  camp  d'un  régiment  entretenu  par  le 
Roi,  chevalier  des  ordres  en  1G19,  mort  en  1633,  o  après  avoir  été 
»  contraint,  dit  le  P.  Anselme,  de  se  faire  couper  le  bras  droit  pour 
»  deux  vieilles  blessures  reçues  Tune  à  la  bataille  d'Ivry  et  l'autre  au 
)»  siège  d'Amiens.  »  {Voy.  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  68.) 


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d'aanauld  d'andilly.  425 

Ce  mesme  jour,  le  Roy  va  à  Tours*.  M«y  isit. 

M.  le  comte  de  Brenne  vient  trouver  le  Roy,  avec 
lettres  de  la  Reyne-mère  ;  n'ayant  point  encore  veû 
Sa  Majesté,  et  estant  dans  l'antichambre,  teste  nûe, 
comme  tous  les  autres,  M.  de  Luynes  passe,  le  cha- 
peau à  la  main,  et  jettant  les  yeux  sur  M.  le  comte 
de  Brenne,  M.  le  Comte  de  Brenne  se  tint  ferme ,  et 
se  recula,  plustost  que  de  s'avancer  ;  et  M.  d'Elbeuf 
passant  après,  il  luy  alla  faire  une  très  grande  révé- 
rence, et  ensuite  à  quelques  autres.  Le  Roy,  qui  en 
fut  fâché,  ne  receut  pas  trop  bien  M.  le  comte  de 
Brenne,  lorsqu'il  luy  rendit  sa  lettre^  laquelle  se 
trouvant  estre  en  plus  fâcheux  termes,  qu'aucune  des 
précédentes,  et  M.  le  comte  de  Brenne  s' estant  comme 
laissé  entendre ,  que  ce  qu'il  n'avoit  point  salué  de 
Luynes,  n'avoit  pas  esté  sans  que  la  Reyne  le  trou- 
vast  bon,  on  commençoit  à  entrer  en  défiance  qu'il  y 
eust  quelque  chose  de  caché  là  dessous.  Mais  enfin, 
on  découvrit  que  tout  cela  procédoit  de  l'artifice  de 

Ruscellay  et  de  sa  cabale,  comme  le  M de  Mou. . .  ^ 

qui  estoyent  très  marrys  de  la  paix ,  et  cherchoyent 
un  moyen  de  rompre.  Ce  qui  fut  encore  confirmé, 
parce  que  le  comte  de  Brenne,  estant  pressé,  et  en- 
quisde  diverses  personnes,  s'il  avoit  conunandement 
de  la  Reyne  Mère,  de  faire  ce  qu'il  avoit  fait,  il  re- 
connut que  non  ;  et  M.  de  Marousan  écrivit  en  mesme 
temps,  que  la  Reyne  Mère  estoit  tellement  résolue  à 

*  Voy,  Pontchartrain,  p.  285. 

2  Le  marquis  de  Mouny  ou  Mosny,  premier  écuyer  de  la  Reine-mèro, 
grand  ami  de  Russelay. 


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llS6  JOUENAL  INÉDIT 

«•y  i«f .  faire  tout  ce  qu'il  plairoit  au  Roy,  qu'elle  avoit  ap- 
prouvé, sans  aucune  difiQculté,  toutes  les  propositions 
que  M.  le  Cardinal  de  la  Rochefoucaut  luy  avoit  fait 
de  sa  part. 

30.  Le  Roy  renvoyé  M.  le  comte  de  Brenne, 
sans  lettre,  (on  en  avoit  fait  une  de  quatre  lignes, 
mais  qu'il  ne  voulut  pas  que  l'on  luy  baillast) ,  avec 
quelques  paroles  de  compliment  à  la  Reyne,  et  charge 
de  luy  dire,  qu'il  luy  feroît  réponce  par  un  Gentil- 
homme exprès. 

Juin.  Samedy  1.     M.  de  la  Chesnaye  part,  pour  aller  à 

Angoulesme. 

2.  M.  de  Bérule  part,  pour  aller  en  poste  à  An- 
goulesme, et  porte  la  réponce  du  Roy  à  la  lettre  qu'il 
avoit  receue  de  la  Reyne-mère. 

ft.     Le  Roy  va  au  Lude  et  en  revient  le... 

La  Reyne  va  à  Nostre  Dame  des  Ardillières,  près 
Saumur,  et  le  lendemain  au  Verger,  d'où  elle  revient 
à  Tours  le... 

6.  M.  de  Vendosme  vient  de  Bretagne,  trouver 
le  Roy  à  Tours,  où  il  attendit  Sa  Majesté. 

M.  de  Marousan  revient  d' Angoulesme  trouver  le 
Roy  au  Lude. — Il  rapporte  que  la  Reyne-mère  avoit 
accordé  généralement  tout  ce  que  le  Roy  avoit  voulu, 
qu'elle  désavoûoit  entièrement  l'action  de  M.  de 
Brenne,  se  sentoit  obligée  au  Roy ,  de  ce  qu'en  sa 
considération,  il  ne  Tavoitpas  plus  mal-traitté  ;  re- 
connoissoit  n'avoir  point  compris  le  sens  de  la  lettre 
dernière  qu'elle  avoit  écrite  au  Roy  par  luy;  que 


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d'arnauld  d'andilly.  427 

c*estoit  Ruccelay  qui  luy  en  avoit  baillé  la  minutte,       Juin  iei9. 

qu'il  y  avoit  plus  de  trois  semaines  qu'il  la  luy  avoit 

baillée  pour  récrire  ;  mais  que  M.  de  Luçon  ne  l'ayant 

point  trouvée  bien,  elle  ne  l'avoit  pas  voulu  signer; 

que  depuis  M.  Ruccellay  luy  avoit  dit,  qu'elle  avoit 

esté  changée,  et  la  luy  avoit  fait  écrire  ;  qu'elle  estoit 

fort  contente  de  la  réponce  que  le  Roy  luy  avoit  faite 

à  ladite  lettre,  par  M.  de  Bérule,  et  que  sur  cela,  elle 

en  récriroit  une  autre  telle  à  Sa  Majesté,  qu'elle  espé- 

roit  qu'il  en  demeureroit  content. 

13.  M.  le  Prince  de  Piémont  part  de  Tours  en 
poste,  va  coucher  à  Poitiers,  et  le  lendemain,  disner 
à  Angoulesme. 

M.  de  Bonneûil  *  l'accompagne,  et  M.  de  la  Ro- 
chefoucaut,  pour  faire  l'honneur  en  Poitou.  Il  fut  si 
bien  reçeu  par  la  Reyne-raère,  qu'au  lieu  qu'il  croioit 
revenir  deux  jours  après,  il  ne  revint  que  le  lundy  24. 
M.  le  Prince  Thomas  l'accompagna  aussi,  11  eut  une 
chaisne  de  dix  mil  écus,  et  M.  le  Prince  Major,  un 
diamant  de  seize  mil  écus  *. 

Environ  14.  L'Ambassadeur  d'Angleterre  arrive 
à  Tours,  à  la  Cour.  M.  le  Marquis  de  Traisnel  estoit 
revenu  quelques  jours  auparavant  à  Paris,  et  arriva  à 
la  Cour,  environ  le  19. 

15.  M.  le  Cardinal  de  la  Rochefoucaut  revient 
d'Agoulesme. 


^  René  de  Thon,  seigneur  de  Bonnenil  et  de  Géli,  introducteur  des 
Ambassadeurs.  l\  était  petit-fils  du  Premier  Président  et  neveu  de  l'his- 
torien de  Thou. 

2  roff,  Fontenay-Mareuil,  p.  khS\  Pontchartrain,  p.  386. 


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428  JOURNAL   INKDir 

iniii  icjf.  16.     Le  Roy  va  à  Amboise,  et  en  revient  le  me- 

credy  19,  pour  ramour  de  M.  du  Mayne,  car  autre- 
ment il  ne  fut  revenu  que  le  lendemain. 

19.  M.  du  Mayne  arrive  à  Tours,  accompagné 
de  deux  cens  Gentilshommes,  dont  plus  de  trente 
ou  quarante  estoyent  des  principaux  Seigneurs  de 
Guyenne,  et  entr' autres,  MM.  de  Vilars,  de  Mont- 
pesat  * ,  Monclairac  - ,  Comte  de  Vaillac ,  Boisse  ' , 
Favas,  aisné  de  Chalet  *,  Barrant  %  Théobon  •,  etc. 

*  MM.  de  Villars  et  de  Montpezat,  ain&i  qu'il  a  été  dit  plus  haut, 
p.  262,  note  1,  étaient  frères  utérins  de  M.  du  Mayne. 

^  Branddis  de  Gironde,  gentilhomme  de  la  Chambre  du  Roi  et  pre- 
mier marquis  de  Montclera  e^  1616,  mestre  de  camp  d'un  régiment 
d'infanterie  sous  le  duc  de  Mayenne  en  1.619.  {Voy,  P.  Anselme,  t.  viii, 
p.  594  quater.) 

<  M.  de  Boisse-Pardaillan,  colonel  de  l'infanterie  des' Réformés  dans 
la  Rébellion  de  1615,  allié  du  gouverneur  de  Monheur  et  de  Sainte-Foix, 
tué  pendant  la  révolte  de  cette  dernière  place  en  1621^  au  moment  où 
il  allait  se  faire  catholique  et  recevoir  le  b&ton  de  Maréchal  de  France  et 
la  lieutenance  du  Roi  de  Guyenne  pour  prix  de  son  abjuration.  Son  fils 
atné,  le  marquis  de  Mîrambeau  et  son  gendre  le  marquis  de  Théobon 
étaient  les  chefs  de  la  Sédition.  (Voy.  Pontchartrain,  p.  101  ;  Fontenay- 
Mareuil,  p.  523  ;  Merc,  fr.^  t.  vu,  p.  880.)  Je  n'ai  rien  trouvé  sur  ce  per- 
sonnage ni  dans  le  P.  Anselme,  ni  dans  Moréri,  ni  dans  la  Biog.  Micliaud. 

*  Si  ce  seigneur  de  Favas  est  le  frère  aîné  de  l'infortuné  Chalais, 
c'est  Charles  îî  de  Talleyrand,  né  vers  1596,  qui  succéda  au  titre  de 
prince  de  Chalais,  fut  chargé  d'une  mission  diplomatique  en  Turquie 
et  en  Russie,  Ait  envoyé  par  le  Czar  pendant  trois  ans  en  Sibérie,  et 
revint  en  France  en  1635.  D'André  de  Talleyrand  son  frère,  sortirent 
les  comtes  de  Grignols.  (Foy,  Biog.  Michaud,  la  Notice  de  M.  Weiss 
sur  Chalais.)  J'ignore  si  ce  Favas  est  le  même  que  le  Député  général 
des  Réformés  souvent  cité  dans  ce  journal  et  dans  les  Mémoires  du 
temps. 

5  Antoine  Joubert  ou  Jaubert,  seigneur  de  Barrault,  ou  Aymery 
Jaubert,  seigneur  de  Barrault,  beau-père  du  comte  de  Vaillac  par  la 
troisième  femme  de  celui-ci,  Marie-Madeleine  Jaubert.  {Foy.  P.  An- 
selme, t.  VIII,  p.  165.) 

«  Rochefort  de  Saint-Angcl,  marquis  de  Théobon,  brave  gentilhomme 


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d'arnadld  d'andilly.  429 

Le  Roy  le  reçeut  fort  bien,  et  dans  le  parc  du  Pies-       '»'"  *«•• 
sis.  La  Reyne  ne  le  regarda  presque  pas  *. 

Le  mesme  jour  M.  de  Marousan  renvoyé  à  An- 
goulesme,  avec  démissions  à  la  Reyne-mère  de  Char- 
ges et  Places  que  l'on  luy  donne.  On  avoit  voulu 
douter  de  luy  bailler  les  canons  et  munitions  qui  sont 
dans  Angers  ;  mais  enfin  cela  luy  fut  accordé  ;  il  re- 
vient le  30  ^ 

On  baille  à  M.  de  Boisdauphin,  pour  son  Gouverne- 
ment, 200  mil  livres  et  cpntinûation  d'appointements 
de  6000  livres. 

A  M.  du  Bellay  ',  Lieutenant  audit  Gouvernement 
d'Anjou,  90  mil  livres  et  continjuation  de  son  appoin- 
tement. 

A  M.  Delbène,  pour  Chinon,  30  mil  écus. 

A  M.  le  marquis  de  la  Varenne  *,  pour  Angers, 
80  mile  eus. 


huguenot,  dit  Tallemant  (Hist.  du  maréchal  de  la  Force,  1. 1,  p.  250).  Ce 
personnage  est  déjà  cité  sôus  le  nom  de  Saint-Angel,  à  propos  du  duel 
entre  le  comte  de  Grammout  et  le  marquis  de  la  Force  dont  il  fut  le 
second.  {Voy,  p.  29.)  Il  fut  accusé  d'avoir  pris  part  avec  le  marquis 
de  Mirambeau  à  Tassassinat  de  M.  de  Boisse,  leur  père  et  beau-père. 
(Foy.  Merc,  fr.^  t.  vu,  p.  880,  et  Fontenay-Mareuil,  p.  523.) 

*  Vey,  Pontchartrain,  p.  286. 

*  Foy.  Merc.  fr.^  p.  205,  la  Déclaration  du  Roi  du  2  mai,  enregistrée 
au  Parlement  le  20  juin,  ordonnant  le  licenciement  des  troupes  et  le 
rétablissement  du  statu  quo  ante  betlum, 

»  Martin,  seigneur  du  Bellay,  prince  d' Yvetot,  marquis  de  Thouarcé, 
conseiller  d'État,  Lieutenant-général  en  Normandie,  puis  en  Anjou,  ca- 
pitaine de  cinquante  hommes  d'armes,  Maréchal  de  camp,  mort  en 
1637. 

*  Guillaume  Fouquet,  marquis  de  la  Varenne,  gouverneur  d'Angers 
et  de  la  Flèche. 


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/^âO  JOURNAL  INEDIT 

»  ««•-  AM.deBonnevaut,pour  lePontde  Ce,  20  mil  écus*. 

24.  M.  le  Prince  de  Piémont  de  retour  d' Angou- 
lesme  {videsuprà).  Il  fut  si  bien  receu  par  la  Reyne- 
mère,  qu'elle  l'appella  toujours,  mon  fils,  et  le  fit 
mettre  dans  son  carrosse  avec  elle,  (chose  qu'elle 
n'avoit  jamais  faite  à  personne).  Mais,  ce  qui  est 
beaucoup  plus  que  tout  cela ,  elle  luy  ouvrit  entiè- 
rement son  cœur  avant  qu'il  s'en  retournast.  Le  len- 
demain matin,  il  alla  en  poste  à  Amboise,  au-devant 
de  Madame  sa  femme,  qui  arriva  le  soir  mesme  à  la 
Cour  \ 

27.     Le  Roy  va  à  Azé  ;  et  revient  le  samedy  29. 

80.  M.  le  Marquis  de  Mosny  *  arrive  à  la  Cour, 
mal-content  de  la  Reyne-mère ,  laquelle  l'ayant  en- 
voyé appeller  en  sa  chambre,  et  fait  sortir  tout  le 
monde,  luy  dit,  queiuy  voulant  témoigner  le  ressen- 
timent qu'elle  avoit  de  ses  services,  elle  luy  bailloit  à 
choisir  de  tout  ce  qu'elle  avoit  en  sa  disposition, 
excepté  d'Angers,  qu'elle  avoit  esté  obligée,  pour 
plusieurs  considérations,  de  donner  à  M.  de  Riche- 
lieu. Sur  cela,  il  commença  à  dire,  que  M.  de  Riche- 
lieu n'avoit  rien,  ni  par  naissance,  ni  par  courage,  ni 
par  fidélité,  qui  le  deust  faire  préférer  à  luy  ;  qu'il 

*  Voy,  Fontenay-MareuH,  p.  444,  qui  n*est  pas  d*accord  avec  d*An- 
dîlly  sur  les  chiffres.  Angers  fut  donné  à  M.  de  Richelieu,  le  Pont-de- 
Cé  au  vicomte  de  Bétancourt  et  Chinon  à  M.  de  Chanteloube.  La  Reine- 
mère  eut  le  gouvernement  d'Anjou  à  la  place  de  celui  de  Normandie. 
{Voy,  Mém.  de  Mole,  p.  223  ;  Merc,  fr,y  p.  202.) 

*  Voy.  Fontenay-Mareuil,  p.  448;  Sferc,  /*r.,  p.  298. 

^  Louis  de  la  Marck,  marquis  de  Mauny,  frère  du  comte  de  Brenne, 
chevalier  des  ordres,  capitaine  des  Gardes  du  Corps,  premier  écuyer 
de  la  Reine  Anne  d* Autriche,  gouverneur  de  Gaen,  mort  en  1626. 


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d'arnadld  d'andilly.  Û31 

ne  vouloît  rien  d'elle,  ni  demeurer  davantage  à  son  j»»»»  im. 
service  ;  et  qu'il  s'alloit  jetter  entre  les  bras  de  ses 
ennemis.  Elle  luy  répondit ,  je  pense  que  vous  se- 
riez bien  empesché  à  les  trouver,  car,  par  la  grâce 
de  Dieu,  je  n'en  croy  pas  avoir  maintenant  un 
seul,  etc.  On  dit  que  le  marquis  de Mosny  luy  dit  en 
sortant  de  la  chambre,  qu'il  serviroit  aussi  bien  M.  de 
Luynes,  comme  il  l'avoit   autrefois  voulu  servir. 

Après  cela,  M.  le  Marquis  de  Mosny  écrivit  à  M.  de 
Luynes,  qui  luy  fit  réponce,  que  la  Reyne  ayant 
agréable  qu'il  revinst  auprès  du  Roy,  il  s'assuroit 
qu'il  y  seroit  fort  bien  reçeu  *. 

M.  de  Marousan  de  retour  d'Angoulesme,  avec 
démission  de  la  Reyne-mère  du  Gouvernement  de 
Normandie,  en  laquelle  on  remarque  une  faute,  en  ce 
qu'elle  n'estoit  passée  par  devant  Nottaire  ;  mais  seu- 
lement par  un  brevet,  signé  Lecomte,  lequel  Lecomte 
n'est  pas  mesme  secrétaire  de  la  Reyne  mère  \ 

Vendredy  5.     M.  de  Bassompierre,  ayant  appris        Juiuet-i 
la  mort  du  Colonel  Galati  %  arrivée  le  !•'  ou  le  2  juil- 
let, revient  à  Paris,  où  il  estoit  allé  le  samedy  29  juin. 

*  roy.  RicheHeii,  p.  553. 

s  Voy.  Merc,  fr,,  p.  204,  une  lettre  du  duc  d*Épernon  au  Roi  à  1*0C' 
casion  de  la  paix,  dans  laquelle  il  cherche  à  justifier  sa  conduite,  se 
réjouît  de  la  réconciliation  du  Roi  et  de  la  Reine-mère  et  exprime 
Tespoîr  de  passer  en  paix  au  service  de  Sa  Majesté  le  peu  de  temps 
qui  lui  reste  à  vivre. 

'  Gaspard  Gallati,  Suisse,  né  en  1535,  entré  au  service  de  France 
en  1562,  capitaine  en  1570,  commandant  de  quatre  compagnies  en 
1579,  commanda  en  Provence  et  en  Dauphiné  de  1580  à  1587,  colonel 
d'un  régiment  en  1587,  contribua  pour  une  grande  part  au  gain  de  la 


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432  JOURNAL  INÉDIT 

Juillet  iMt.  îje  Colonel  Galati  avoit  quatre  charges  :  1**  celle  de 
Colonel  du  Régiment  des  Gardes  Suisses  du  Roy; 
2"  celle  de  Capitaine  de  la  Compagnie  Colonelle; 
3"  celle  de  Lieutenant  des  Cent  Suisses  de  la  Garde  : 
à"  et  celle  de  Capitaine  d'une  Compagnie  particulière, 
dont  son  petit  fils  estoit  Lieutenant.  Messieurs  les  Mi- 
nistres disoyent  qu'il  faloit  bailler  le  Régiment  au 
Colonel  Feugly,  supprimer  la  Compagnie  Colonelle... 
M.  de  Bassompierre  estant  revenu,  ne  vit  le  Roy 
qu'à  Amboise,  le  samedy  au  soir,  obtint  de  Sa  Ma- 
jesté tout  ce  qu'il  luy  demanda,  et  luy  représenta 
nécessaire  pour  le  bien  de  son  service,  qui  estoit,  la 
Compagnie  Colonelle  pour  luy  ;  le  Régiment  pour  le 
capitaine  Hessé;.  (qui,  entr' autres  signalez  services, 
et  outre  sa  capacité,  a  fait  trois  actions  fort  remar- 
quables, la  première  à  Arques,  où  il  porta  mort  par 
terre  d'un  coup  de  pique...;  la  deuxième  aux  Barri- 
cades à  Paris,  où  ayant  esté  mis  par  le  Roy  en  la 
place  de  Grève,  et  tous  les  autres  Suisses  ayant  esté 
désarmez,  il  fitsa  capitulation,  et  de  ne  le  point  estre, 
et  qu'on  luy  ouvriroit  les  Barricades,  pour  aller  trou- 
ver le  Roy  au  Louvre  ;  ce  qui  fut  fait  ;  et  il  l'accom- 
pagna jusqu'à  Rambouillet  ;  la  troisième  pour  s' estre 
battu  en  duel,  en  Suisse,  pour  l'honneur  de  la  France, 

bataille  d*Ârqucs  en  158d,  dans  laqaélle  il  sauva,  dit-on,  le  Roi  ;  lieu- 
tenant des  Gent-suisses  en  1603,  colonel  du  régiment  des  Gardes  suisses 
en  1616,  mort  en  1619.  {f^oy,  Biog.  Michaud,  notice  signée  Ustéri,  et 
Mém.  du  duc  d'Angoulôme,  coll.  Petitot,  !'•  série,  t.  xliv,  p.  573.) 
C'est  à  tort,  comme  on  le  voit  par  le  journal  d*Arnauld  d'Andilly,  que 
la  notice  de  la  Biog.  Michaud  prolonge  la  vie  de  ce  brave  soldat  jus- 
qu'en 1629. 


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d'aenauld  d'andilly.  ftSS 

contre  un  autre  Suisse,  qu'il  tua,  en  présence  de  deux      J«»«etiiit. 
Cantons).  Joint  que  le  Colonel  Feugly  ne  réside  point 
d'ordinaire  en  France  *. 

La  lieutenance  de  la  compagnie  des  Cent  Suisses 
fut  donnée  au  Colonel  Feugly. — La  Compagnie  par- 
ticulière du  colonel  Galatj  fut  donnée  à  son  petit- 
fils,  en  considération  des  services  du  bonhomme. 

Le  Roy  estant  revenu  à  Tours,  les  Ministres  firent 
encore  difficulté  à  tout  ce  que  dessus,  principalement 
Monsieur  le  Chancelier  et  M.  de  Pisieux,  qui  dirent 
qu'il  en  faloit  demander  avis  aux  Cantons.  Mais  no- 
nobstant cela,  le  Roy  commanda  à  M.  de  Pisieux  de 
faire  les  Expéditions  conformes  à  ce  qu'il  a  voit  ac- 
cordé à  M.  de  Bassompierre  ;  lequel,  environ  trois 
semaines  auparavant,  avoit  rendu  une  extrême  preuve 
de  probité,  ayant  ménagé  douze  mil  écus  par  an  au 
Roy,  sur  les  douze  montres  des  dix  Compagnies 
Suisses  qui  sont  en  France,  en  faisant  réformer  à 
treize  cent  soixante  et  tant  d'écus  pour  Compagnie 
la  Capitulation  qui  avoit  esté  faite  avec  eux,  depuis 
cette  dernière  reveûe  à  quatorze  cent  soixante  et 
tant  d'écus  ;  laquelle  augmentation  les  Suisses  luy 
vouloyent  donner. 

Le  Roy  va  à  Amboise,  et  revient  le  mardy  9. 

6.  M.  de  Nevers  arrive  à  Amboise,  et  fut  fort 
bien  receu  du  Roy  \ 


*  Je  n*ai  rien  trouvé  tant  sur  le  colonel  Feugly  que  sur  le  brave  ca- 
pitaine Hessé,  ni  dans  le  P.  Anselme,  ni  dans  Moréri,  ni  dans  laBiog. 
Michaud,  ni  dans  Texcellente  et  précieuse  table  de  la  collection  Petitot. 

>  yoy.  Pontchartrain,  p.  287. 

28 


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Juillet  Itlf. 


&3/i  JOURNAL  INiSdIT 

M.  du  Mayne  va  en  poste  à  Paris, 

7.  M.  de  Gadenet  y  va  aussi,  mais  en  Carrosse. 
(On  disoit  que  le  sujet  de  son  voyage  estoit,  pour 
observer  MM.  du  Mayne. , . .  Vemet. . . .  argent. . .  Bois 
de  Vincennes,  et  pour  traitter  du  Gouvernement  avec 
M.  de  Longueville.)  — Voyage  précédent  de  M.  le 
Colonel  (d'Omano),  eust  traitté  pour  le  Pont  de 
TArche.  Le  Mayne  envoyé  avant  que  Monsieur  le 
Colonel  revinst.  M.  de  Gadenet  promit  Calais  à  M.  de 
Longueville,  (dont  M.  de  Luynes  avoit  dit  auparavant 
à  Monsieur  le  Colonel  qu'il  trouveroit  bon  qu'il 
traittast) ,  ou  80  mil  écus  pour  l'avoir,  ou  quel- 
qu' autre  place.  M.  de  Longueville  disant  que  Mon- 
sieur le  Colonel  estoit  cause  que  M.  de  Vilars-Oudan  ' 
s'en  estoit  en  allé  de  Paris,  dit,  qu'il  vouloit  que  les 
Corses  sortissent  de  Quillebeuf,  et  que  le  Roy  y  misl 
des  François.  Madame  la  Comtesse  écrit  à  M.  de 
Luynes  qu'elle  s' estoit  fait  fort  que  Monsieur  le  Colo- 
nel estoit  tant  de  ses  amis,  qu'il  le  voudroit  bien. 

8.  M.  le  Comte  Henry  vient  trouver  le  Roy  à 
Amboise  ^ 


'  M.  de  ViUars-Houdan ,  lieutenant  de  la  compagnie  de  chevau- 
légers  du  Roi  en  1610,  gouremeur  de  Dieppe  en  1611. 

'  «  Et  le  8,  M.  le  Prince  Henri  de  Nassau,  qui  étoit  envoyé  par  M.  le 
»  Prince  d'Orange,  son  frère,  à  Orange,  pour  y  établir  pour  gouver- 
II  neur  M.  le  Prince  de  Portugal  leur  neveu,  vint  jMisser  à  Tours  et  y 
»  arriva  près  du  Roi,  où  il  assura  Sa  Majesté,  et  depuis  ceux  de  son 
»  Conseil,  que  l'intention  de  son  frère  n'étoit  point  que  rien  fût  changé 
»  ni  innové  à  Orange,  môme  au  fait  de  la  religton.  »  (Pontchartrain, 
p.  287.)  Henri  Frédéric  de  Nassau,  dont  il  s'agit  ici,  était  fils  de  Guil- 
launte  de  Nassau,  prince  d'Orange,  fondateur  de  la  république  dei 
Provinces-Unies,  et  de  Louise  de  Coligny,  fille  de  l'amira)  Gaspard 


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d'ahnauld  d'ajcdilly.  435 

M.  de  Richelieu  tué  à  Angoulesme  par  M-  le  mar-  jumctiew. 
quis  de  Thémines  (ce  fut  le  jeudy  II).  M.  de  Thé- 
mines,  un  jour  ou  deux  auparavant,  sortant  d'avec 
la  Reyne  mal  satisfait,  dit,  F..tre  des  Gouverneurs, 
ils  ruinent  cette  pauvre  Princesse.  M.  de  Chante- 
loube  luy  vint  demander  s'il  entendoit  cela  pour  luy  ? 
Il  luy  répondit  :  Vous,  gouverneur,  hé  î  qui  se  se- 
roit  jamais  avisé  de  vous  prendre  pour  cela?  etc. 
Chanteloube  dit,  Je  suis  donc  satisfait  M.  de 
Thémines  répartit,  Je  ne  satisfais  que  J'épée  à  la 
main ,  et  ensuite,  ils  allèrent  pour  se  battre  en  un 
faubourg.  M.  du  Carbon  sortant  de  chez  M.  de  Ri- 
chelieu, pour  luy  dire  à  Dieu,  et  voyant  passer  M.  de 
Thémines  si  viste,  le  suivit,  et  l'ayant  trouvé  prest  à 
se  battre,  se  mit  aussi  de  la  partie  avec  un  amy  de 
Chanteloube  ;  et  sur  cela  furent  accordez  et  séparez. 
Le  lendemain  matin,  M.  de  Richelieu,  se  trouvant 
offencé  des  paroles  du  Marquis,  l'envoyé  appeler 
par  La  Roche.  M.  du  Carbon  l'ayant  seû  par  Na- 
daillac,  y  va,  et  tous  deux  se  mettent  de  la  partie, 
avec  la  Roche,  et  Saint-Julien,  neveu  de  M.  de 
Chambret.  M.  de  Richelieu  les  attendoît  aux  Capu- 
cins ;  ils  y  vont.  Tous  sont  séparez  et  accordez  par 
la  Reyne,  le  samedy  6.  Le  dimanche  se  passe  sans 
se  rien  dire.  Le  lundy,  M.  de  Richelieu  estant  en 

de  Colîgny,  sa  quatrième  femme.  ïl  était  frère  du  célèbre  prince 'Mau- 
rice, alors  Prince  d'Orange,  lui  succéda  en  1625,  soutint  dignement 
le  grand  nom  de  son  père  et  de  son  frère,  et  mourut  en  1647.  Le 
Prince  de  Portugal  était  son  neveu  comme  fils  de  sa  sœur  Emilie  et 
d'Emmanuel  l*',  prince  de  Portugal,  vice-roi  des  Indes,  (f^oy»  Moreri, 
t.  YIII,  p.  87.) 


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436  JOURNAL  INÉDIT 

Juillet  liit.  housse,  rencontra  M.  de  Thémines,  qui  y  estoit  aussi , 
en  la  rue  qui  passe  devant  le  citadelle  ;  et  piqué  des 
discours  que  l'on  luy  avoit  dit  que  M.  de  Thémines 
avoit  tenus  depuis  l'appel,  luy  cria,  Marquis,  pied 
à  terre.  11  faut  mourir.  Les  Gardes  du  chasteau 
venoyent  pour  les  séparer  ;  mais  ils  se  pressèrent  de 
si  près,  que  M.  de  Richelieu  fut  tué  d'un  coup  d'é- 
pée  dans  le  cœur,  et  M.  de  Thémines  receut  un  coup 
d'épée  à  la  main,  et  un  autre  qui  luy  coupa  sa  che- 
mise. M.  de  Richelieu  dit  avant  qu'expirer.  Mon 
Dieu,  pardonnez-moy  ;  et  M.  de  Bérule  se  trouva 
là,  qui  luy  donna  l'iibsolution.  M.  le  marquis  de  Thé- 
mines se  sauva.  La  Reyne-mère  donna  le  Gouverne- 
ment d'Angers  au  Commandeur  de  la  Porte',  oncle 
de  M.  de  Luçon;  et  envoya  M.  de  Villiers-Saint- 
Genest  au  Roy,  avec  une  lettre  de  six  lignes,  pour 
prier  Sa  Majesté,  que  s'il  y  avoit  lieu  de  confisquer 
le  bien  de  M.  de  Richelieu,  il  luy  plust  de  luy  en 
donner  la  confiscation,  d'autant  que  par  Règlement 
donné  depuis  peu  au  Conseil,  il  est  défendu  d'accor- 
der les  confiscations,  jusqu'à  ce  qu'elles  soyent  décla- 
rées acquises.  Le  Roy  écrivit  seulement  à  la  Reyne 

*  Amador  de  la  Porte,  chevalier,  grand'croix  de  Tordre  de  Saint- 
Jean  de  Jérusalem,  dit  de  Malte,  prieur  de  la  Madeleine  aux  portes  de 
Parthenay,  grand-prieur  de  France,  bailly  de  la  Morée,  commandeur 
de  Bracque,  Ambassadeur  de  son  ordre  en  France,  gouverneur  d'An- 
gers en  1619,  du  Havre  en  1626,  lieutenant  de  Roi  au  pays  d*Aunis  et 
Iles  de  Ré  et  d'Oléron  en  1633,  mort  en  1644.  (Voy.  P.  Anselme, 
t.  IV,  p.  624).  Il  était  oncle  de  Richelieu,  parce  que  sa  sœur,  Suzanne 
de  la  Porte,  avait  épousé  François  du  Plessis,  seigneur  de  Richelieu, 
Conseiller  d*État,  Capitaine  des  Gardes  du  Corps  et  grand  Prévôt  do 
France,  p^redu  Cardinal,  mort  en  1590.  (^oy,  Richelieu,  p.  557.) 


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d'arnadld  d'andilly.  Û37 

sa  mère,  pour  l'assurer  que  s'il  y  avoit  lieu  à  confis-      Juiiut  leii . 
cation,  il  la  luy  donneroit. 

On  a  dit  depuis  que  M.  le  marquis  de  Thémines 
receut  quatre  coups  d'épée,  et  que  celuy  qui  tua 
M.  de  Richelieu,  n'entroit  que  trois  doigts  dans  le 
corps. 

On  a  seû  aussi  qu'il  estoit  mort,  quand  M.  de  Bé- 
rule  arriva  '. 

10.  M.  de  Rohan  arrive  à  la  Cour. 

11.  M.  de  Ruccellay  arrive  à  la  Cour.  Il  estoit 
mal  content  de  la  Reine-mère,  à  cause  de  la  faveur 
de  M.  de  Luçon.  Il  luy  avoit  demandé  la  charge  de 
son  chevalier  d'honneur,  dont  elle  l' avoit  refusé.  Elle 
luy  avoit  offert  cent  mil  livres,  mais  il  ne  les  accepta, 
ni  refusa.  Il  luy  demanda  congé  de  venir  à  Paris, 
pour  solliciter  ses  procès,  puisqu'il  n'avoit  plus  que 
faire  là  pour  son  service.  Elle  le  luy  donna  fort  volon- 
tiers. Estant  de  retour  à  la  Cour,  il  s'y  comporta  fort 
bien^ 

16.     Le  Roy  va  à  Amboise,  et  en  revient  le  ven- 
dredy  19. 


1 


roy,  Fontenay-Mareuîl,  p.  444;  Richelieu,  p.  555.  Richelieu,  après 
ayoip  raconté  les  circonstances  du  duel  dans  lequel  périt  son  frère, 
termine  par  ces  mots  :  «  Je  ne  saurois  représenter  Tétat  auquel  me 
»  mit  cet  accident  et  Textrôme  affliction  que  j'en  reçus,  qui  fut  telle 
»  qu'elle  surpassa  la  portée  de  ma  plume,  et  que  des  lors  j'eusse  quitté 
»  la  partie,  si  je  n'eusse  autant  considéré  les  intérêts  de  la  Reine 
n  que  les  miens  m'étoient  indifférents.  » 

2  Richelieu,  dans  ses  Mémoires,  p.  547  et  suîv.,  fait  un  véritable  ré- 
quisitoire contre  Russelay,  dans  lequel  il  signale  la  mauvaise  influence 
de  ce  personnage  auprès  de  la  Reine-mère  et  donne  la  plus  triste  idée 
de  son  caractère. 


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&38  JOURNAL   INÉDIT 

•oiiie!  161t.  17.    La  Reyne-mère  ne  se  disposant  point  d'aller 

à  Angers,  à  cause  des  défiances  qu'on  luy  a  voit 
mises  en  l'esprit,  M,  le  Président  Jeannin  part,  pour 
aller  à  Angoulesme,  afin  d'essayer  à  oster  ces  om- 
brages, et  faire  que  M.  de  Montbason  rapportast  au 
Roy  tout  contentement.  Il  revint  le  24  aoust. —  On 
croit  que  M,  d'Epernon  luy  avoit  mis  ces  craintes 
en  l'esprit,  et  l'avoit  portée  à  dire  ce  qu'elle  avoit 
mandé  (qui  est,  qu'elle  ne  pouvoit  venir  à  Angers, 
jusqu'à  ce  que  le  Roy  fust  retourné  à  Paris)  ;  à  cause 
de  l'appréhension  qu'il  avoit,  que  la  Reyne  l'ayant 
quitté,  le  Roy,  qui  estoit  si  proche,  tournast  teste, 
droit  à  luy.  La  Reyne-mère  ayant  mandé  ce  que 
dessus,  M,  le  Prince  de  Piémont  luy  dépescha ,  et 
luy  écrivit,  se  plaignant  que  contre  la  parole  que- 
ls. M.  de  Montbason  part  d'Amboise,  et  arrive 
à  Angoulesme  le  dimanche  21,  (Le  Président  Jean- 
nin arriva  le  mardy  23,)  Ilportoit,  entr'autres  cho- 
ses, une  lettre,  par  laquelle  le  Roy  prioit  la  Reyne- 
mère,  de  venir  à  la  Cour  \ 

23.  MM.  le  commandeur  de  la  Porte,  de  Ghante- 
loube,  et  de  Lielamour  arrivent,  pour  prester  le  ser- 
ment d'Angers,  de  Chinon,  et  du  Pont  de  Ce. 

Le  Roy  ne  veut  point  ouïr  parler  de  remettre  en 
leurs  charges  les  sieurs  du  Rourdet  et  de  Frumi- 
gères ,  Capitaines  au  Régiment  des  Gardes ,  ni  la 
Hillière,  sergent-major.  Et  on  allègue  contre  M.  d'E- 

*  Voy,  Pontchartrain,  p.* 288.  On  trouve  dans  le  Merc,  fr„  p.  299, 
la  lettre  du  Roi  portée  à  la  Reine-mère  par  le  duc  de  Montbazon  ;  elle 
est  datée  d*Amboise  le  17  juillet. 


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d'arnadld  d'andilly.  439 

pernon,  ce  qu'il  allègue  contre  M,  Beraut,  Capitaine,      ^""fe*  *«*»^ 
(comme  je  croy) ,  au  Régiment  de  Navarre  *. 

Environ  ce  jour.  M.  de  Vendosme  part  pour 
aller  à  Concarneau.  Lezomis,  Gouverneur,  y  avoit 
cy- devant  traitté  avec  le  Roy,  pour  seize  cens  écuâ^ 
pour  M.  de  Luynes.  Il  désavoue  le  traitté.  On  baille 
à  M.  de  Vendosme  les  vieux  régimens  composez 
chacun  de  dix  compagnies  de  cinquante  hommes 

chacune  {vide  suprà)  ;  et compagnies  tirées  de 

celles  du  régiment  des  Gardes,  avec  la  compagnie 
de  ses  Gardes.  La  place  est  une  de  meilleures  de 
de  Bretagne  ^. 

29.  M.  de  Luynes  trouve  bon  que  M.  Déageant 
se  retire  en  Dauphiné,  et  le  luy  fait  dire  par  M.  de 
Brantes  '.  M.  de  Montbason  et  M.  de  Bérule  arri- 
vent d'Angoulesme. 

30.  Le  Roy  va  à  Tilly,  et  revient  le  2  aoust 


^  Ces  capitaines  ayaient  porté  les  armes  contre  le  service  da  Roi 
pour  la  Reine-mère. 

*  Voy.  Merc.  fr,^  p.  291. 

>  On  trouve  dans  les  Mémoires  d'Amauld  d'Andilly  des  détails  sur 
la  disgrâce  de  Déageant.  M.  de  Luynes  chargea  Arnauld  d'Andilly 
d'annoncer  cette  disgrâce  à  Déageant;  ce  qu'il  fit  après  avoir  obtenu 
pour  cet  homme  d'État  la  conservation  de  sa  pension  de  15,000  livres, 
a  II  parut  bien  que  M.  Déageant  n'avoit  guère  songé  durant  sa  faveur 
»  à  faire  des  amis  ;  car  je  ne  croîs  pas  que  jamais  homme  se  soit 
»  vu  plus  abandonné  dans  sa  disgrâce,  et  je  ne  me  souviens  point 
»  qu'excepté  moi  il  se  soit  vu  assisté  de  qui  que  ce  fût  ;  son  abatte- 
»  ment  fut  extrême  lorsque  je  lui  portai  cette  nouvelle  ;  et  il  se  retira 
»* ensuite  en  Dauphiné,  d'où  il  étoit  originaire,  pour  y  exercer  la  charge 
»  de  premier  président  en  la  chambre  des  comptes  de  Grenoble,  dont 
»  il  avoit  été  pourvu  durant  sa  faveur  et  qu'il  a  gardée  Jusqu'à  sa  mort.  » 
(Mém.  d'Amauld  d'Andilly,  p.  389). 


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4/^0  JOURNAL   INÉDIT 

Jeudy  1.  M.  de  Cadenet  revient  de  Paris,  où  Ton 
luy  avoit  adjugé  à  quatre-vingt  mil  livres,  la  Comté  de 
Maillé,  dont  il  prend  le  nom.  Broûillerie  avec  le  Roy, 
sur  le 'logement  des  Suisses,  sur  les  Paroisses  de 
Maillé. 

à.     M.  de  Longueville  arrive  à  la  Cour. 

6.  M.  de  Longuevilte  et  M.  de  Luynes  font  le 
serment  de  Normandie  et  Picardie.  Les  conditions 

des  échanges  sont,  que  M.  de  Longueville  baile 

Picardie  et  Ham,  et  on  luy  baille  Normandie  et 
250  mil  livres  pour  récompenser  Dieppe,  qu'il  a 
acheté  de  M.  de  Vilars-Houdan.  Plus,  il  se  fait  pro- 
mettre que  Ton  sortira  les  Corses  de  Quitlebeuf '. 

M.  de  Bérule  part  de  Tours  pour  retourner  à  An- 
goulesme. 

M.  de  Montbason  fait  le  serment  de  Gouverneur 
de  risle  de  France,  et  M.  de  Cadenet  de  Lieutenant 
Général  en  Normandie.  Les  conditions  sont,  que 
M.  de  Montbason  baille  sa  lieutenance  de  Picardie 
et  Amiens;  et  M.  de  Luynes  luy  baille  Tlsle-de- 
France,  Soissons,  Noyon,  Chauny  et  Coucy.  Brevet 
de  réserve  du  Gouvernement  de  Paris.  Et  de  plus  on 
dit  que  par  articles  secrets,  il  luy  remet  200  mil 
livres  qu'il  luy  devoit  encore  de  son  mariage,  et 
outre  cela,  luy  fait  encore  bailler  50  mil  livres  pour 
les  armes  d'Amiens*. 


<  Voy.  Pontchartrain,  p.  288. 

2  Foy,  Fontenay-Mareuil,  p.  451  \  Pontchartrain,  p.  288  ;  Briennc, 
p.  330  ;  Rohan,  p.  159;  Bierc.  fr,^  p.  340. 


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d'arnauld  d'andilly.  ûftl 

8.  Le  Roy  va  à  Amboise,  et  revient  le  lundy  12.       aousi  wi». 

9.  Madame  estant  preste  à  partir  pour  aller  à 
Angoulesme  dire  à  Dieu  à  la  Reyne-mère,  est  contre- 
mandée,  à  cause  qu'on  s'assuroit  que  la  Reyne 
vîendroit. 

M.  de  Montbason  part  d' Amboise  pour  aller  à 
Angoulesme  où  il  arrive  le  lendemain  10,  porte  à  la 
Reyne-mère  le  contentement  qu'elle  désiroit,  pour 
les  Capitaines  des  Gardes,  qui  depuis  ont  esté  remis 
dans  leurs  charges.  On  dit  que  le  Roy  les  voyant 
venir,  au  moins  Dubourdet  et  Loustelnau,  dit  qu'il 
les  haïssoit  plus  que  la  mort;  et  que  si  ce  n'eust  esté 
pour  l'amour  de  la  R-eyne  sa  mère,  il  ne  leur  eust 
jamais  pardonné*. 

13.  Le  Capitaine  des  Gardes  de  M.  de  Ven- 
dosme,  nommé....  *,  apporte  nouvelle  au  Roy  de  la 
prise  de  Concarneau.  Les  vieux  Régiments  n'y 
estoyent  pas  encore  arrivez.  M.  de  Vendosme  estoit 
devant,  avec  sa  compagnie  des  Gardes  et...  compa- 
gnie tirée  de  celle  du  Régiment  des  Gardes,  com- 
mandée par...'.  On  tira  de  part  et  d'autre;  mais 
Lezomis  ayant  peur,  s'enfuit  dans  un  Esquif;  un  de 
ses  frères  estant  demeuré,  il  s'émeut  dispute  entre 
luy  et  un  Lieutenant  nonmié.../  à  qui  commande- 


*  Voy,  Pontchartraîn,  p.  288  et  289. 

3  Ce  capitaine  des  gardes  de  M.  de  Vendôme  était  le  sieur  de  la 
Courbe  Hiré. 

3  Les  troupes  tirées  des  régiments  des  gardes  étaient  commandées 
par  la  Besne,  capitaine  des  gardes  du  Roi. 

^  Le  lieutenant  du  sieur  de  Lezonnet  dans  Concarneau  était,  sui- 
vant le  récit  du  Mercure^  le  sieur  Querchesne. 


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kb!2  JOURNAL    INÉDIT 

roit  Le  Lieutenant  se  trouva  le  plus  fort  et  chassa  le 
frère  qui  s'en  alla  aussi  dans  un  esquif;  un  jour  ou 
deux  après,  la  garnison  demanda  à  parlementer  ;  et 
ce  Lieutenant  ayant  seû  qu'il  n'y  avoit  point  de  par- 
don pour  luy  à  cause  qu'il  commandoit  sans  avoir 
charge  quelconque  dans  la  Place,  pour  laquelle  il 
fust  toujours  employé  dans  T Estât  du  Roy,  dit,  qu'au 
bout  de  six  mois,  il  ne  seroit  pas  encore  prest  à  se 
rendre.  Sur  cela,  le  Capitaine  des  Gardes  de  M.  de 
Vendosme  m'a  dit,  qu'il  commanda  au<  soldats  de 
ladite  garnison  de  le  prendre,  les  assurant  qu'on  leur 
donneroit  à  tous  la  vie  ;  ce  qu'ils  firent,  et  l'ame- 
nèrent au  bout  du  pont  Aussitost  M.  de  Yendosme 
le  fit  pendre,  et  les  soldats,  au  nombre  de  trente-six 
seulement,  sortirent,  sans  qu'on  leur  fist  mal.  L'Eves- 
que  de  Cornoûaille,  frère  de  Lëzomis,  alloit  pour 
tâcher  d'accommoder  l'affaire  ;  mais  il  arriva  trop 
tard.  M.  de  Vendosme  entra  dans  la  Place,  qui  est 
des  quatre  meilleures  de  Bretagne,  et  en  revint  le 
vendredy,  80*. 

15.  Il  arrive  nouvelle  au  Roy,  qu'assurément 
la  Reyne  sa  mère  viendroit  le  trouver. 

17.  Le  Roy  et  la  Reyne  régnante  vont  à  Am- 
boise  et  en  reviennent  le  mécredy  21.  —  Le  Roy  y 
arrivant,  on  luy  apporte  nouvelle  que  M.  de  Cham- 
bret  estoit  mort  en  sa  maison. 


*  f'ôy,  Pontchartrain,  p.  288.  Suivant  le  récit  de  Pontchartrain,  le 
gouverneur  de  Concameau  était  le  sieur  de  Lizonnet  (de  Lezonnet, 
suivant  le  Mère,  fr.),  Voy.  aussi  Merc,  />♦.,  p.  291  et  suiv.,  le  rapport 
très-détaiilé  de  la  prise  de  Concarneau  par  les  capitaines  la  Besne  et 


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d'arnauld  d'andilly.  44â 

18.  M.  de  Villiers  St-Genest  arrive  à  Auiboise,  Aoost  tm. 
de  la  part  de  la  Reyne-mère  du  Roy.  Le  vray  sujet 
de  son  voyage  estoit,  pour  obtenir  le  chapeau  pour 
M.  de  Thoulouze,  en  la  promotion  que  l'on  dit  que  le 
Pape  va  faire;  et  pour  tirer  promesse  de  M.  de 
Luynes  et  du  Père  Amoux,  sur  le  sujet  du  retour 
de  la  Reyne. 

21.  Le  Mayne  *  revient  d' Angoulesme,  où  il  avoit 
esté  envoyé  quelques  jours  auparavant.  H  rapporte 
que  la  Reyne  partiroit  le  lundy  26. 

M.  de  Brantes  part  pour  aller  trouver  la  Reyne- 
mère  à  Angoulesme  de  la  part  du  Roy,  et  luy  porter 
assurance  du  service  de  M.  de  Luynes.  Il  fut  très- 
bien  receu  d'elle,  et  la  disposa  à  partir  le  mardy,  en- 
core que  depuis  le  retour  du  Mayne,  on  crut  qu'elle 
ne  partiroit  que  le  mécredy,  et  qu'elle  eust  résolu  de 
ne  partir  que  le  jeudy.  M.  de  Brantes  revient  le 
mardy  27,  à  midy,  à  Tours;  et  le  jour  mesme,  alla 
trouver  le  Roy  au  Lude*. 

24.  Le  fils  aisné  de  M.  de  St-Luc  %  âgé  de  quinze 
ans,  fait  le  serment  de  Broûage,  en  survivance. 

Ce  mesme  jour  fut  résolu  par  le  Roy,  dans  son 

la  Courbe,  dans  laquelle  affaire  le  lieutenant  de  la  place,  le  sieur 
Querchesne,  fit  une  résistance  héroïque. 

*  Le  Mayne,  souvent  cité  dans  le  journal  d*Andîlly,  était  gentil- 
homme ordinaire  de  la  chambre  du  Roi  et  conseiller  d'État. 

2  roy.  Merc,  fr.,p,  300. 

*  Le  fils  aîné  de  M.  de  Saint-Luc  était  Louis  d'Espinay,  abbé  de 
Cbartrices,  en  Champagne,  nommé  à  l'archevêché  de  Bordeaux,  mort 
en  1644*  Son  second  fils  était  François  d'Ëspinay,  marquis  de  Saint- 
Luc,  lieutenant  général  en  Guyenne,  gouverneur  de  Périgord,  mort  en 
1670.  {Voy.  P.  Anselme,  t.  vu,  p.  476.) 


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khk  JOURNAL   INÉDIT 

Aoost  i«if .      Conseil,  de  faire  MM.  de  Praslin  et  de  St-Géran,  Ma- 
réchaux de  France. 

25.  M.  de  Praslin  *  fait  le  serment  de  Maréchal 
de  France,  et  le  Roy  dépesche  à  M.  de  St-Géran, 
afin  qu'il  vienne  recevoir  pareil  honneur.  M.  de 
St-Géran  avoit  eu  le  Brevet  le  premier. 

26.  Le  Roy  va  au  Lude. 

27.  Monsieur  tombe  malade  de  la  petite  vérole, 
à  Champ-Chevrier,  et  le  mercredy  28  septembre, 
arrive  à  Tours,  estant  entièrement  guéry  *. 

28.  Entre  minuit  et  une  heure,  Madame  la  Prin- 
cesse accouche  d'une  fille  dans  le  bois  de  Vin- 
cennes^ 

29.  La  Reyne-mère  part  d' Angoulesme,  accom- 
pagnée de  M.  de  Montbason  ;  elle  donna  à  M.  d'Eper- 
non  un  diamant  de  36  mil  écus,  disant,  que  pour 


1  «  Gomme  il  n'y  avoit  point  d*homme  en  France  qui  ait  servi  le  roi 
»  Henri  le  Grand  dans  toutes  ses  guerres  et  continué  de  servir  Sa 
»  Majesté  avec  plus  de  valeur,  de  fidélité  et  de  zèle  que  M.  le  marquis 
»  de  Praslin,  Sa  Majesté  erut  ne  devoir  pas  différer  davantage  à  rendre 
»  Justice  à  son  mérite.  Ainsi,  durant  le  séjour  qu'elle  fit  à  Tours,  elle 
n  l'honora  de  la  charge  de  Maréchal  de  France,  dans  laquelle  il  a  con- 
n  tinué  Jusqu'à  sa  mort  de  la  servir  de  telle  sorte  et  avec  un  tel  désin- 
»  téressement,  dans  tant  de  guerres  auxquels  les  différents  partis  for- 
n  mes  dans  un  État,  et  particulièrement  celui  des  huguenots,  ont 
»  donné  sujet,  que  nul  autre  ne  doit  plus  que  lui  ôtre  proposé  pour 
»  exemple  d'un  homme  véritablement  passionné  pour  son  prince  et 
»  pour  sa  patrie.»  (Mém.  d'Amauld  d'Andilly,  p.  387).  Voy.  aussi 
Fontenay-Mareuil,  p.  Ii50  ;  Pontchartrain,  p.  289. 

2  roy.  Pontchartrain,  p.  280.  Suivant  Pontchartrain,  Monsieur  tomba 
malade  à  Champ-Février,  maison  appartenant  au  comte  du  Lude. 

s  Cette  fille  est  la  célèbre  Anne-Geneviève  de  Bourbon,  duchesse  de 
Longueville,  dont  M.  Cousin  a  éloquemment  raconté  la  vie  chevale* 
resque. 


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d'arnâuld  d'andilly.  445 

marque  de  l'obligation  qu'elle  luy  avoit  à  jamais, 
elle  luy  donnoit  ce  diamant,  comme  la  chose  du 
monde  la  plus  durable,  et  afin  que  ce  fust  une  mar- 
que à  la  Postérité  du  service,  qu'il  avoit  rendu  à  une 
Reyne.  Elle  donna  aussi  à  M.  de  Thoulouse  un  dia- 
mant de  10  mil  écus,  et  à  M.  du  PlessisS  sergent  de 
bataille,  une  enseigne  de  II  mil  écus  et  2  mil  écus  de 
pension.  M.  de  Thoulouse  accompagna,  avec  le 
Comte  de  Brennes  et  MM.  de  Breauté  *,  de  Maril- 
lac,  de  Carbon. 

30.  M.  de  Luçon  arrive  à  Tours,  de  la  part  de 
la  Reyne-mère.  Il  fut  très-bien  receu;  et  retourna  le 
lundy  à  Ste-More,  audevant  d'elle. 

Ce  jour,  les  lettres  de  Duché  et  Pairrie  de  M.  de 
Luynes  furent  vérifiées  au  Parlement.  Quatre  maistres 
des  Requestes  entrèrent,  MM.  de  Bailleul,  de  Ma- 
rescot.... 

Les  sept  Présidents  au  mortier  furent  d'avis  de  la 
vérification.  Il  y  eut  vingt  voix  contre  onze.  .M.  de 
Crequy  ayant  formé  opposition,  au  nom  de  M.  le  ma- 
réchal de  Lesdiguières,  dont  les  lettres  avoyent  esté 
présentées  longtemps  auparavant,  et  estoyent  suran- 
nées, et  n' avoit  esté  délibéré  dessus,  à  cause  que  par 
arrest  du  Parlement,  il  avoit  esté  ordonné,  que  durant 
la  minorité  du  Roy,  il  ne  seroit  délibéré  sur  aucunes 
lettres  semblables.  M.  de  Cadenet  passe  accord  avec 


*  Le  sieur  du  Plessis,  sergent  de  bataille,  était  un  gentilhomme  at- 
taché au  duc  d'Épemon. 

2  Pierre,  marquis  de  Breauté,  maréchal  de  camp,  tué  au  siège  d*Ar- 
ras  en  16/iO? 


Aouftt  lei». 


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446  JOORNAL   INiSOlT 

Aomt  Mif .  M.  de  Crequy,  portant  que,  encore  que  M.  de  Luynes 
fust  receu  avant  M.  le  maréchal  de  Lesdiguières  ; 
néanmoins  il  passeroit  après  luy  ;  mais  que  M.  de 
Crequy  et  ses  successeurs  luy  céderoyent.  Moyen- 
nant cela,  M.  de  Crequy  se  désista  de  l'opposition,  et 
demanda  seulement  que  ses  lettres  fussent  aussi  vé- 
rifiées. —  Le  Parlement  ordonna,  qu'en  rapportant 
lettres  de  Déclaration  de  la  Volonté  du  Roy  et  ouy 
les  Conclusions  des  Gens  du  Roy,  il  en  seroit  déli- 
béré. S'ils  eussent  eu  des  lestres  de  èurannation, 
on  croit  qu'ils  les  eussent  vérifiées  pour  M.  le  maré- 
chal de  Lesdiguières.  Mais  toujours  cet  arrest  lève 
celuy  qui  portoit  qu'il  ne  seroit  délibéré^sur  aucunes 
lestres  de  Duché  et  Pairrie  \ 


Septembre.  Mardy  3.     M.  le  Grand  part  fort  matin,  et  se 

rend  à  Chastelleraut,  au  lever  de  la  Reyne-mère, 
l'allant  visiter  de  la  part  du  Roy.  —  Après  digner, 
M.  le  Cardinal  Retz  et  le  Père  Arnoux  vont  à  Ste- 
More,  où  elle  arriva  le  soir.  Elle  fit  très-bonne  chère 
à  M.  le  Cardinal  de  Retz,  lequel  l'entretint  jusques 
à  minuit. 

Le  soir  à  xi  heures,  l'affaire  de  M.  de  Schom- 
berg  fut  résolue,  pour  la  Sur-Intendance  des  finances. 

On  dit  à  M.  de  Schomberg  que  son  affaire  estoit 


A  Voy.  Mte.  de  If  sthieu  Mole,  la  lettre  que  le  Ko!  écrivit  de  sa 
main  au  procureur  général  Mole  à  cette  occasion.  L'autographe  du 
Roi  se  trouve  parmi  les  papiers  de  MoIé,  ctA\,  Colbert,  t.  v,  p.  217. 
(Mém.  de  Mole,  t.  i,  p.  222,  et  note  1,  p.  223.) 


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d'arnauld  d'andilly.  647 

résolue,  et  il  me  dit  qu'il  désiroit  que  je  fusse  auprès    septembre  ««. 
de  luy  *. 

M.  de  Luynes  va  au-devant  de  la  Reyne-mère , 
près  de  la  Cousière,  vers  Montbason,  pour  la  visiter 
de  la  part  du  Roy.  MM.  le  maréchal  de  Praslin,  de 
Bassompierre,  de  Schomberg,  de  Créquy,  etc.,  en- 
viron trois  cens  chevaux,  accompagnent  M.  de 
Luynes. 

5.  Le  Roy  disne  de  bonne  heure;  part  à  dix 
heures,  va,  accompagné  de  toute  la  Cour  à  Gou- 
sières^  La  Reyne-mère  vient  au-devant  de  lui  trente 
pas  avant,  dans  le  parc.  Ils  s'embrassèrent  par  trois 
diverses  fois.  La  Reyne-mère  pleura,  et  dit,  que  son 
contentement  estoit  si  extrême  qu'elle  ne  pouvoit 


*  Araauld  d'Andîlly,  dans  ses  Mémoires,  p.  391,  donne  des  détails 
sar  rélévation  de  M.  de  Schomberg  à  la  surintendance  des  finances  et 
sur  sa  nomination  au  principal  emploi  auprès  du  surintendant.  «M.  de. 
»  Luxembourg  me  vint  dire  :  Je  vous  apprends  une  nouvelle,  c'est  que 
»  M.  le  comte  de  Schomberg  est  surintendant  des  finances  au  heu  de 
»  M.  le  président  Jeannin;  mais  j*ai  sur  cela  une  autre  chose  à  vous 
n  dire,  c'est  qu'il  a  une  telle  estime  pour  vous,  qu'il  désire  avec  pas- 
»  sion  que  vous  vouliez  bien  accepter  le  principal  emploi  auprès  de 
»  lui  pour  le  soulager  en  cette  charge,  dans  laquelle  il  veut  prendre 
)»  une  entière  confiance  en  vous,  et  M.  de  Luynes  vous  en  prie.  »  D'An- 
dilly,  selon  ses  Mémoires,  ^'aurait  accepté  cette  position  qu'après 
avoir  fait  promettre  à  M.  de  Schomberg  qu'il  exercerait  sa  charge  avec 
un  entier  désintéressement.  Il  est  peu  probable  que  d'Andilly  ait 
eu  le  courage  ou  plutôt  l'audace  de  poser  une  telle  condition  au  nou- 
veau surintendant.  Du  reste,  on  ne  peut  parler  de  soi-même  avec  plus 
de  suffisance  et  d'admiration  que  ne  le  fait  d'Andilly  dans  tout  le 
cours  de  ses  Mémoires.  A  l'en  croire,  il  aurait  été  un  des  grands  ressorts 
de  l'État.  Malheureusement  pour  lui  soo  témoignage  n'est  confirmé  par 
aucun  autre. 

2  Maison  du  duc  de  Montbaxm,  oit  le  Roi  et  la  Reine-mere  se  réo- 
nîrent. 


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448  JOURNAL   INÉDIT 

s<i)teinbrc  tci».  parler.  Elle  témoignoit  avoir  tout  son  cœur  sur  ses 
lèvres.  Le  Roy  témoigna  aussi  très-grande  joie,  et 
dit,  qu'il  y  avoit  longtemps  qu'il  souhaitoit  ce  bon- 
heur, et  eust  les  yeux  humides. 

Après  disiier,  la  Reyne  vint  voir  la  Reyne-mère, 
qui  la  receut  trois  pas  avant  dans  la  Cour,  passa  de- 
vant elle,  sans  lui  offrir  la  Porte.  Après,  Mesdames  la 
saluèrent,  et  puis  les  Princesses. 

Pendant  que  la  Reyne-mère  disnoit,  le  Roy  se 
proraenoit  dans  le  Parc,  et  après,  il  la  revint  voir. 
Ils  entrèrent  dans  un  méchant  Cabinet,  où  après,  les 
Princes  et  les  Princesses  entrèrent  \ 

7.  M.  de  Schomberg  prend  séance  dans  le  Conseil 
de  la  Direction,  au-dessus  de  M.  le  Président  Jean- 
nin,  et  l'après-disnée,  au  Conseil  des  Ministres,  au- 
dessus  de  M.  de  Cadenet.  Il  a  eu  un  brevet  du  10, 
pour  marcher  immédiatement  après  les  Officiers  de 
la  Couronne,  pour  la  charge  de  Sur-Intendant  des 
finances,  signée  le  7  et  scellée  le  10.  Nul  n'en  avoit 


*  yoy.  Fontenay-Mareuil,  p.  448;  Richelieu,  p.  557  et  568;  Pont- 
chartpain,  p.  290.  Le  récit  de  Pontchartrain  et  celui  d*Ândilly  s'accor- 
dent tellement,  même  par  certains  membres  de  phrases  que  Ton  re- 
trouve dans  les  deux,  qu'il  est  permis  de  supposer  que  Tun  n'a  point 
été  étranger  à  la  rédaction  de  l'autre.  Différents  autres  passages  et 
toute  la  suite  des  dates  et  des  événements  viennent  fortifier  cette  sup- 
position. Pontchartrain  et  d'Andilly  étant  en  rapports  journaliers,  l'un 
a  pu  communiquer  à  l'autre  son  Journal.  J'ajouterai  seulement  que 
celui  de  Pontchartrain,  tel  que  nous  le  possédons,  est  une  œuvre  rédi- 
gée avec  soin  et  longtemps  après  les  événements,  tandis  que  le  Journal 
d'Amauld  d'Andilly  n'est  qu'un  premier  travail  dans  lequel  l'auteur 
s'est  contenté  de  recueillir  les  faits,  pour  ainsi  dire  au  jour  le  jour, 
sans  souci  de  rédaction.  Voy.  aussi  sur  l'entrevue  entre  Louis  XIII  et 
Marie  de  Medicis,  Merc,  fr,,  p.  301. 


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d'arnauld  d'andilly.  449 

eu  auparavant  luy  ;  car  M.  de  Sully  n'avoit  rien  du     septembre  «i». 
tout;  et  M.  le  Président  Jeannin,  seulement  un  bre- 
vet *. 

9.  M.  de  Saint-Géran  fait  serment  de  Maréchal 
de  France. 

19.  Le  Roy  et  la  Reyne  partent  de  Tours,  pour 
aller  à  Amboise,  et  le  samedy,  le  Roy  envoyé  M.  de 
Brantes  à  Tours,  pour  visiter  la  Reyne  sa  mère^. 

23.  Le  Roy  part  d' Amboise,  et  va  coucher  à 
Blois. 

La  Reyne-mère  part  de  Tours,  pour  aller  à  Chinon. 
M.  de  Montbason  l'accompagne*. 

24.  Le  Roy  va  à  Vendosme,  le  lendemain  à 
Chasteaudun,.  et  le  jeudy  26  à  Chartres. 

25.  L'assemblée  de  ceux  de  la  Religion  Préten- 
due Réformée  commence  à  Loudun*. 


1  «  Au  commencement  dudit  mois,  le  Roi  donna  à  M.  le  comte  de 
»  Schomberg  la  surintendance  de  ses  finances,  du  consentement  de 
»  M.  le  président  Jeannin,  en  faveur  duquel  on  donna  le  contrôle  gé- 
n  néral  à  M.  de  Castille,  son  gendre,  et  Ton  donna  récompense  à  M.  de 
»  Maupeou.»  (Pontchartrain,  p.  291,) 

2  Voy,  Pontchartrain,  p.  291. 

s  Foy.  Mercure  fr,^  p.  301.  Le  Mercure^  p.  313  et  suiv.,  rend  compte 
de  l'entrée  solennelle  à  Angers,  le  16  octobre,  de  la  Reine-mere  qui  ve- 
nait prendre  possession  de  son  nouveau  gouvernement.  Les  plus  grands 
honneurs  lui  furent  rendus.     ^ 

*  Le  Uerc,  fr,^  p.  302  et  suiv.,  donne,  avec  de  grands  détails  sur 
cette  assemblée,  la  liste  de  tous  les  députés  envoyés  des  différentes 
provinces  de  la  France  par  ceux  de  la  religion  prétendue  réformée.  La 
présidence  fut  décernée  au  Vidame  de  Chartres.  «  En  ce  commence- 
»  ment,  dit  le  Mercure^  ce  n*étoient  que  compliments  des  grands  de  la 
»  religion  envers  ceste  assemblée  :  le  viscomte  de  Turene,  second  fils 
»  du  mareschal  de  Bouillon,  passant  avec  sa  mère  à  Louduh,  leur  dit, 
»  que  son  pore  se  porteroit  tousjours  au  bien  des  Églises,  et  cmbrasse- 

29 


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450  JOURNAL   INÉDIT 

septMDbre  iiif.  Les  Estats  de  Bretagne  commencent*  M.  de  Ven- 
dosme>  M.  de  la  Tremoille,  M.  le  duc  de  Rete  y 
furent. 

M»  Ribier  y  fut  commissaire  de  la  part  du  Roy. 
Le  pais  a  accordé  ft05  mil  livres,  payables  en  1620, 
et  1621k  Les  greffes  du  païs>  qui  estoyent  affermez 
è  soixante-quatorze  mil  livres,  l'ont  esté  de  nouveau 
poiir..^  années. %.  à*.. 

27.  Mort  de  M.  le  comte  de  Lude.  Il  avoit  traitté 
de  la  charge  de  Lieutenant  de  la  compagnie  des  Gen- 
darmes dcMonaeur,  avec  M.  de  Marillac,  Sous-Lieu- 
tenant, à  vingt-huit  mil  écus,  et  avoit  baillé  sa  charge 
de  premier  Gentilhomme  de  la  chambre  de  Monsieur, 
à  M.  le  marquis  d'Illiers',  son  fils  aisné, 

M.  le  colonel  (d'Ornano),  qui  estoit  alors  à  Paris, 
mis  par  le  Roy  en  toutes  les  charges  qu'avoit  M»  le 
Comte  du  Lude  ;  et  par  ce  moyen,  le  traitté  de  M.  de 
Marillac  rompu  ^  Au  lieu  de  la  charge  de  premier 

»  roît  volontiers  leurs  délibérations.  »  Lorsque  celui  qui  devait  faire  de 
Turenne  un  des  plus  grands  noms  de  la  France  remplissait  cette  mis- 
sion, il  n'avait  que  huit  ans.  C'était  probablement  son  premier  acte 
public. 

*  Thimoléon  de  Daillon,  marquis  d'Illiers,  puis  comte  du  Lude,  né 
en  1600,  épousa  en  1622  Marie  Feydeau,  fille  unique  d*Antoine  Fey- 
deau,  seigneur  de  Bois-le-Vicomte ,  trésorier  de  l'Epargne.  «  Après 
»  avoir  été  longtemps  à  la  Cour,  dit  le  P.  Anselme,  il  se  retira  en  sa 
ïi  maison  du  Lude,  où  il  mena  une  vie  tranquille  le  reste  de  ses  jours, 
»  et  y  mourut.  »  {Foy.  P.  Anselme,  t  viit,  p.  192.) 

2  «  La  Cour  étant  partie  ensuite  de  Tours  pour  revenir  à  Paris, 
»  après  le  traité  d'Angoulême  achevé,  et  l'entrevue  du  Roi  et  de  la 
»  Reine  à  Cousiers,  le  Roi  reçut  en  chemin  la  nouvelle  de  la  mort  de 
»  M,  le  comte  du  Lude,  gouverneur  de  Monsieur.  Je  pris  ce  temps 
*  pour  faire  instance  sur  le  sujet  de  Monsieur  le  Colonel,  et  lui  écrivis, 
»  sans  dire  pourquoi,  de  se  hâter  de  revenir.  Il  partit  &  l'instant,  et 


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d'arnadld  d'andilly.  451 

Gentilhomme  de  la  chambre  de  Monsieur ^  et  en  con- 
sidération des  services  de  M.  le  Comte  de  Lude,  le 
Roy  donna  vingt  mil  écus  è  la  veufve^  et  aux  en- 
fans,  pour  acquitter  les  dettes  du  defiunt,  six  mil  écus 
de  pension  à  M.  le  marquis  d'Illiers,  la  charge  de 
Lieutenant  du  Roy  au  Bas-Auvergne  à  M.  le  Comté  de 
Pontgibaut  *,  et  quatre  mil  livres  de  pension  è  M .  de. . . 
le  cadet  Des  quatre,  le  troisième  est  d'Eglise  *. 


SfptemlNV  IMf . 


Jeudy  â*  Le  Roy  part  de  Chartres,  va  à  Eper- 
non  ;  le  Vendredy  à  Montfort,  le  Samedy  à  Mante,  et 
se  rend  à  Compiègne,  le  Jeudy  10* 

Les  Députez  de  l'assemblée  viennent  trouver  le 


Octobre. 


»  cependant  le  Roi  lui  donna  cette  chaiige.  J'en  dressai  moi-même  les 
»  provisions,  le  Roi  étant  à  Chartres,  en  des  termes  très-honorables 
»  pour  Monsieur  le  Colonel  ;  je  les  laissai  à  M.  de  Modène  pour  les 
»  sceller,  et  ayant  pris  la  poste  pour  m'en  venir  à  Paris,  Je  rencontrai 
»  en  chemin  Monsieur  le  Colonel,  et  le  saluai  en  qualité  de  gouverneur 
»  de  Monsieur,  dont  il  ne  fut  pas  peu  surpris.  »  (Mém.  d'Amauld 
d'Andilly,  p.  393.)  Voy,  aussi  Fontenay-Mareuil»  p.  454  ;  Richelieu, 
p.  569  ;  Pontchartrain,  p.  292. 

*  Françoise  de  Schombcrg,  fille  de  Gaspard  de  Schomberg,  comte  de 
Nanteuil,  gentilhomme  allemand,  colonel  des  Reistres  sous  Charles  IX, 
naturalisé  eu  1570,  gouverneur  des  Marches,  intendant  des  finances, 
conseiller  d'Etat  eu  1573,  comte  de  Nanteuil  en  1578,  mort  en  1599. 
Françoise  de  Schomberg,  née  en  1577,  épousa  en  1597  François  de 
Daillon,  comte  du  Lude.  Elle  était  sceur  d'Henry  de  Schomberg,  surin* 
tendant  des  finances  et  premier  maréchal  de  ce  nom. 

>  Roger  de  Daillon,  comte  de  Pontgibaud,  second  fils  du  comte  du 
Lude,  né  en  1601,  tué  en  duel  par  le  comte  de  Chalais  en  1626. 

3  Le  troisième  fils  du  comte  du  Lude  était  Gaspard  de  Daillon,  né 
en  1603,  abbé  des  Chastelli^rs,  évêque  d'Agen,  puis  d'Alby  en  1634, 
commandeur  de  l'ordre  du  Saint-Esprit  en  1661,  mort  en  1670.  Le 
quatrième  était  Erasme  de  Daillon,  comte  de  Briançon,  né  en  1605, 
marié  en  1635  à  Anne  Hurault,  fille  d'Henry  Hurault,  comte  de  Che- 
verny,  mort  en  1637.  {Voy,  P.  Anselme,  t.  viii,  p.  192.) 


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452  JOURNAL   INBDIT 

ortobrr  i6if .  Roy,  Bvec  dcs  avant-cayers.  Le  Roy  leur  fait  réponce 
en  son  Conseil ,  Monsieur  le  Prince  y  estant ,  qui  fut 
environ  le  25  ou  26,  qu'il  ne  vouloit  répondre  que 
sur  le  cayer  général,  ainsi  qu'il  estoit  accoustumé  *. 
12*  Le  Roy  va  à  Mouchy,  à  deux  lieues  de  Com- 
piègne,  et  M.  de  Luynes  à  Amiens,  où  M.  le  Prince 
de  Vaudemont,  M.  de  Bassompierre ,  M.  de  Cour- 
tenvaut,  M.  de  Blainville  et  M.  le  marquis  de  Mauny 
l'accompagnèrent.  Il  y  demeura  tout  le  dimanche, 
vint  trouver  le  Roy  le  lundy  ;  et  revint  avec  Sa  Ma- 
jesté à  Compiègne. 

17.  Conseil  tenu,  où  Ton  prit  la  dernière  résolu- 
tion de  faire  sortir  Monsieur  le  Prince  ;  mais  en  eflfet, 
elle  estoit  prise  auparavant.  M.  deCadenet  estoit  de- 
meuré à  Paris  pour  cela. 

18.  Le  Roy  va  à  Chantilly,  pour  y  attendre  mon- 
sieur le  Prince  ^ 

19.  M.  de  Luynes  va  trouver  Monsieur  le  Prince 
au  Bois  de  Vincennes,  et  coucha  à  Paris. 

20.  M.  de  Luynes  va  de  bon  matin  au  Bois  de 
Vincennes,  et  estant  monté  en  carrosse  avec  Monsieur 
le  Prince  et  Madame  la  Princesse,  où  estoyent  aussi 
MM.  de  Cadenet  et  de  Modène ,  il  vint  trouver  le  Roy 
à  Chantilly ,  et  le  vit  dans  un  cabinet,  où  l'on  dît 
qu'il  se  mit  à  genoux,  et  fit  des  protestations  extrê- 


*  yoy,  Fontenay-Mareuil,  p.  450  ;  Ponchartrain,  p.  293  ;  Merc.  fr„ 
p.  307.  L'arant^cahier  de  rAssemblée  de  Loudun  fut  présenté  au  Roi 
par  le  marquis  de  la  Moussaye.  D  contenait  sept  principaux  articles 
dont  le  Mercure  donne  le  texte. 

>  Foy,  Mém.  de  MoIé.  p.  227. 


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d'arnauld  d'andilly.  453 

mes  de  fidélité,  et  de  ressentiment  de  l'obligation     octobre  leie. 
qu'il  luy  avoit  *. 

22.  Le  Roy  revient  à  Compiègne,  accompagné 
de  Monsieur  le  Prince.  Madame  la  Princesse  y  arriva, 
et  vit  la  Reyne  le  mesme  jour  \ 

30.  Monsieur  le  Prince  va  à  Nostre-Dame  de 
Liesse. 

Lundy  %     Le  Roy  part  de  Compiègne,  va  à. . . . .       Novembre, 
et  le  lendemain  à  Monceaux. 

Le  jour  précédent,  M.  de  Cadenet  estoit  party  en 
poste,  pour  aller  en  inconnu,  voir  M"'  de  Péquigny', 


<  tt  Monsieur  le  Prince  sortit  le  20  octobre  de  la  même  année  de  sa 
»  prison  du  bois  de  Vincennes,  et  s'attacha  entièrement  aux  intérêts 
»  de  M.  de  Luynes.  »  (Méra.  d*Arnauld  d*AndilIy,  p.  393.)  Voy,  aussi 
Fontenay-Mareuil,  p.  453;  Pontchartrain,  p.  292;  Richelieu,  p.  571. 
A  la  même  époque  la  Reine-mère  obtint,  suivant  Richelieu,  la  déli- 
vrance de  Barbin  qui  sortit  de  la  Bastille  et  reçut  Tordre  de  quitter 
immédiatement  la  France  ;  ce  qu'il  fit  sans  avoir  pu  attendre  l'argent 
que  la  Reine  lui  envoyait  pour  faire  son  voyage.  D'après  use  lettre  de 
Mole  à  Dupuy,  c'est  le  23  septembre  que  Barbin  sortit  de  la  Bastille. 
(Mém.  de  Mole,  p.  224.) 

2  Le  Mercure  français^  p.  334  et  suiv.,  donne  des  détails  intéressants 
sur  la  mise  en  liberté  de  Monsieur  le  Prince  qui,  ayant  été  arrêté 
le  !•'  septembre  1616,  était  resté  prisonnier  trois  ans  et  vingt  Jours. 
Le  duc  de  Luynes  en  allant  chercher  à  Vincennes  le  prince  de  Gondé 
lui  remit  cette  lettre  du  Roi  :  «  Mon  cousin,  je  ne  vous  diray  pas  com- 
»  bien  je  vous  ayme,  vous  le  voyez.  Je  vous  envoyé  mon  cousin  le  duc 
»  de  Luynes  qui  sçait  les  secrets  de  mon  cœur,  et  vous  les  dira  plu9 
»  amplement  i  venez-vous-en  le  plus  promptement  que  vous  pourrez, 
»  car  je  vous  attends  avec  impatience  :  et  cependant  je  pileray  Dieu 
»  de  vous  tenir  en  sa  saincte  grâce,  Louys.  De  Chantilly,  ce  19  d'octo- 
»  bre  1619.  »  L'impatience  du  Roi  était  bien  naturelle  après  trois  ans 
de  séparation  l 

3  Claire  Charlotte  d'Ailly,  dame  de  Péquigny,  comtesse  de  Chaulnes, 
vidame  d'Amiens,  menine  de  l'Archiduchesse  Gouvernante  des  Pays- 


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libli  JOURNAL   INÉDIT 

KoTcmbrcm».     à  Bruxelles.  M.  d'Effiat*  estoit  party  auparavant  luy. 

Environ  6.     M.  de  Montmorency  arrive  à  Paris. 

12,  Le  Roy  part  de  Monceaux,  va  disner  à  Cou- 
pevray,  et  coucher  à  Lésigny,  d'où  il  part  le  ven- 
dredy  15%  et  va  coucher  à  Fontainebleau. 

li,  M.  de  Luynes  fait  serment  de  Duc  et  Pair.  Il 
estoit  venu  le  mécredy  de  Lésigny,  avec  Monsieur 
le  Prince,  et  alla  souper  et  coucher  chez  M.  de 
Ghevry.  Monsieur  le  Prince  y  aoupa  aussi:  L'après- 
disnée,  il  avoit  veû  tous  ses  juges.  Le  jeudy  de  bon 
matin.  Monsieur  le  Prince  l'alla  trouver  et  le  mena 
au  Parlement,  où  furent  aussi  MM.  le  maréchal  de 
Praslin,  de  Schomberg,  de  Bassompierre,  de  Crequy, 
d'AlinçQurt,  le  naarquis  de  Maupy  et  force  Noblesse. 

B»f^  fiUe  uD^ue  ot  héritièfe  de  Plulib«irt  ^mmaQuel  d'Ailly^  seigneuv 
da  Péquigqy,  Yi4»me  d'Aviiea»^  xnort  en  1617,  et  de  Umise  d^QgmeSf 
comtesse  de  Cbaulues,  daioe  dA  Magny,  M^  de  Péquigi^  épousa 
en  1619  Honoré  d^Albert,  ^gqeur  de  Cadene^  depuis  tom-éobal  duc 
de  Chaulnes,  et  mourut  en  1681.  (Voy^  P.  Anselme,  t.  nr,  p.  ^7%) 
Elle  était,  lUt  Fonten^y-MajreiMl,  p.  k^  la  plua  riche  fiUe  qu'il  y  eus( 
loni  en  France,  Fontenay-Hareuil  donne  au  sujet  de^  prétendants  à  la 
main  de  M^  de  Péquigny  de  curieux  détails.  Fa^  aui^i  Poi|tcl)|krtraiB, 
p.  ^^ 

i  Antoine  Goeffior,  dit  Bnié,  marqiûs  d'Effîat,  grand-maltre,  surin*> 
tendimt  et  général  réformateur  de^  n^nes  et  minières  de  France 
en  ±9ik%  premier  éouyer  de  la  Gr^MMa  ficnrie  en  1616«  capitaine  dei 
chevav^légers  en  1617,  envoyé  en  Flandres  le  30  octobre  1619,  ambas* 
sadeur  ei^traordinaire  en  Angleterre  pour  le  mariage  de  Mme  Hen- 
riette e»  i9Q^t  surintendant  des  lances  en  l62e»  conseiller  d'honneur 
au  Parlement  en  164)7,  gr^-^naltre  de  Tartillerie  par  commissioQ 
en  16^9,  lieutenant  général  det  armées  en  Piémont  en  1630,  noaréchal 
de  Franqe  en  1631,  sénéfhal  de  Bourhonn^  et  d^Auyergne,  gouver- 
nenr  d'Atûo^t  d'Auvergne  et  de  ^ourhonnais,  commandant  de  |'amé« 
d'Alsace  en  1632,  mort  la  même  année.  {Voy.  P.  Anselme,  t.  vu, 
p.  493.)  Ons4t  que  le  m^^heureq]^  Çmq-Mars  était  fils  du  maréchal 
d'Emat. 


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d'aanauld  d'andilly.  &55 

La  réception  fut  à  huis  clos.  Monsieur  le  Prince,  Novembre mt. 
M,  de  Mpntbason  et  M,  de  Liancourt  entrèrent  avec 
Messieurs  auparavant.  Monsieur  le  Prince  parla  au 
Parlement  sur  le  sujet  de  sa  liberté.  Après,  on  fit  en- 
trer M.  de  Luynes.  M.  Talon*,  (à  présent  A4i 
vocat  Général) ,  le  présenta,  et  dit  trois  ou  quatre 
périodes.  (On  tient  qu'il  ne  devoit  rien  dire  du  tout, 
mais  M.  Servin  le  voulut,  à  cause  qu'il  désiroit  de 
haranguer.  Après,  parla  M,  Servin,  et  puis  Monsieur 
le  Premier  Président  ayant  pris  les  opinions,  luy  fit 
prester  le  serment  de  Duc  et  Pair  ;  et  celuy  de  Bailly 
d'Amiens.  Tous  les  sept  Présidons  y  estoyent,  excepté 
M.  Lescalopier.  M.  le  Bret  n'y  estoit  point,  à  cause 
qu'il  a  résigné. 

Après  que  M.  de  Luynes  fut  assis,  M.  le  Roullier^ 
parla  de  l'affaire  de  M.  le  maréchal  de  Lesdîguières, 
qui  avoit  obtenu  relief  de  surannation  de  ses  lettres 
de  Duché  et  Pairrie.  Il  fut  ordonné  que  le  soit  montré 
seroit  mis.  M.  Voisin  l'envoya  aussitost  à  Monsieur  le 
Procureur  Général,  qui,  à  l'heure  mesme,  donna  ses 
conclusions,  avec  M.  Servin,  et  renvoya  les  lettres  à 
M.  Voisin,  qui  les  bailla  à  M.  le  Roullier,  lequel  in- 
terrompit une  affaire  commencée,  disant,  qu'il  luy 
devoit  estre  permis  de  reprendre  le  Bureau,  pour  une    • 


>  Jacques  Talon,  avocat  général  au  Parlement  de  Paris  en  1621, 
conseiller  d'Etat  en  1631.  En  cette  année  1631,  il  céda  sa  charge 
d'avocat  général  à  son  frère  cadet,  le  célèbre  Orner  Talon,  dont  on  ad« 
précieux  mémoires,  des  plaidoyers,  et  des  poésies  encore  inédites.  Les 
manuscrits  d'Omer  Talon  et  ceux  de  Denis  son  fils  sont  conservés  à  1% 
bibliothèque  du  Corps  Législatif. 

>  René  le  Roullier,  conseiller  au  Parlement  de  Paris  en  1579. 


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456  JOURNAL   INÉDIT 

novembre  wit .  affaire  commencée  auparavant.  Sur  cela,  contestation 
si  Ton  donneroit  deux  arrêts  en  mesme  temps  ;  et  on 
délibéra  s'il  en  seroit  délibéré.  Enfin,  il  passa  à 
quatre  voix  près,  qu'il  en  seroit  délibéré.  Et  après, 
la  matière  estant  mise  en  délibération ,  il  fut  or- 
donné que  l'Information  des  vie  et  mœurs  seroit 
faite.  Ensuite  de  quoy,  l'après-dinée  mesme,  MM.  de 
Praslin,  de  Schomberg,  de  Bassompierre,  de  Lian- 
court,  et  d'Alincourt,  furent  ouïs,  par  M.  Dérivant, 
et  le  lendemain ,  il  y  eut  arrest ,  que  M.  de  Lesdi- 
gières  et  M.  de  Créquy,  après  luy,  seroyent  receus 
au  serment  de  Duc  et  Pair  *. 

21  •  Le  Roy  part  de  Fontainebleau,  et  va  à  Ville- 
roy.  La  Reyne  vient  à  Paris  ^. 

26.  Déclaration  de  l'innocence  de  Monsieur  le 
Prince  vérifiée  au  Parlement^. 

Dcccmbir.  Mardy  3  ou  mécredy  4.     M.  le  colonel  d'Or- 

nano  preste,  entre  les  mains  du  Roy,  le  serment  de 


*  f^oy,  Fontenay-Mareuil,  p.  453.  On  trouve  dans  les  Mémoires  de 
Mole,  p.  220,  les  lettres  de  Jussieu  au  Roi  relatives  à  la  duché-paii-ie 
du  maréchal  de  Lesdiguières  et  de  M.  de  Créqui.  Foy.  aussi  Merc  fr,y 
p.  341. 

>  Le  Roi  avait  quitté  Paris  au  mois  de  mai  et  il  n'y  revint  qu*à  cette 
époque,  lorsque  la  peste  qui  avait  longtemps  sévi  dans  la  capitale  eut 
complètement  disparu. 

*  Vay.  Richelieu,  p.  573.  On  trouve  dans  le  Mercure  français^ 
p.  337,  le  texte  de  la  déclaration  du  Roi  sur  la  délivrance  du  Prince 
de  Condé.  Par  cette  déclaration  datée  de  Fontainebleau  le  9  novembre 
et  vérifiée  au  Parlement  le  26  du  même  mois,  le  Roi  donne  un  témoi- 
gnage public  de  l'innocence  du  Prince  de  Condé,  annule  et  supprime 
tous  les  édits,  lettres,  arrêts,  etc.,  rendus  contre  lui,  et  le  rétablit  dans 
tous  ses  gouvernements,  charges  et  dignités. 


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d'aanauld  d'andilly.  457 

Gouverneur  de  Monsieur,  et  M.  de  Blainville  celuy  ^^m^  »•»•• 
de  Maistre  de  la  Garderobbe,  par  luy  achetée  à 
à  M.  le  Comte  de  la  Rochefoucaut,..  —  dont  le  Roy 
luy  en  a  donné...  —  et  a  augmenté  de  6000  livres 
la  pension  dudit  sieur  Comte,  pour  faire  jusquesà 
12  mil  avec  ce  qu'il  avoit  déjà,  et  en  estre  payé  par 
forme  d'entretenement. 

5.  Chapitre  tenu  à  Saint  Germain,  par  les  dix- 
sept  anciens  chevaliers  qui  s'y  trouvèrent,  où  il  en 
fut  nommé  soixante-cinq  sur  le  nombre  de  ceux  qui 
le  prétendoyent  *. 

8.  M.  de  Cadenet  preste  le  serment  de  maré- 
chal de  France  à  Saint-Germain  ^. 

27.  M.  le  comte  de  Soissons,  tenant  la  serviette 
pour  la  bailler  au  Roy  à  son  souper.  Monsieur  le 
Prince  la  voulut  prendre  ;  et  sur  ce  que  M.  le  Comte 
la  luy  refusa,  ils  eurent  quelques  paroles.  Monsieur 
le  Prince  luy  ayant  demandé  s'il  luy  vouloit  di^u- 
ter  son  rang,  il  répondit  que  non,  qu'il  le  reconnois- 
soit  sur  son  aisné ,  mais  qu'il  savoit  bien  faire  sa 
charge.  Monsieur  le  Prince  ayant  répondu,  que  feu 
M.  le  Comte  ne  luy  avoit  jamais  disputé  la  serviette, 
il  répondit,  qu'il  l' avoit  fait  par  civilité,  mais  qu'il 
n'y  estoit  point  obligé.  Monsieur  le  Prince  luy  ayant 


*  Le  Mercure  français^  t.  vi,  année  MDCXX,  p.  1  et  suiv.,  donne 
des  détails  très-intéressants  sur  cette  promotion  de  chevaliers  du  Saint- 
Esprit,  qui  fut  la  quinzième  depuis  la  création  de  Tordre  par  Henri  lll 
le  31  décembre  1578.  Le  Mercure  donne  les  noms  et  qualités  des  nou- 
veaux chevaliers  au  nombre  de  59  laïcs  et  cinq  associés  ecclésiastiques, 
ce  qui  ferait  soixante-quatre  au  lieu  de  soixante-cinq. 

2  Voy,  Fonteuay-Mareuil,  p.  450  ;  Pontchartrain,  p.  296. 


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&58  JOURNAL   INEDIT 

Décembre  iiif .  dit  quMl  estoit  uii  enfant,  il  répondit  qu*il  avoit  assez 
d'âge  pour  savoir  bien  conserver  les  honneurs  de  sa 
charge.  Sur  ces  entrefaites,  Monsieur  le  Prince  par- 
tait quelquefois  à  l'oreille  du  Roy,  et  Monsieur  le 
Comte  garda  toujours  la  serviette,  avec  une  conte- 
nance fort  assurée.  Enfin,  on  envoya  quérir  Mon- 
sieur, auquel  Monsieur  le  Comte  bailla  la  serviette. 
Monsieur  le  Prince  estant  allé  chez  luy,  M.  de  Guise 
l'y  alla  trouver  et  luy  dit,  qu'il  ne  faloit  point  traitter 
cette  affaire  comme  une  querelle,  mais  demander 
raison  à  Madame  la  Comtesse  du  tort  que  Monsieur 
son  fils  luy  avoit  fait,  M.  de  Montmorency  l'alla  donc 
trouver  pour  ce  sujet»  et  lui  parla  comme  Monsieur 
le  Comte  estant  encore  sous  sa  charge.  Elle  répondit, 
qu'il  y  avoit  déjà  assez  longtemps  qu'elle  avoit  jugé 
Monsieur  le  Comte  capable  de  se  conduire,  et  qu'elle 
s' estoit  déchargée  de  ce  soin,  particulièrement  pour 
ce  qui  estoit  de  sa  charge  ;  et  qu'en  ce  qui  s' estoit 
passé,  il  avoit  tant  eu  de  raison,  qu'elle  ne  pouvoit 
qu'elle  n'approuvast  ce  qu'il  avoit  fait  Que  pour  ce 
qui  estoit  de  luy.  Monsieur  le  Prince  ne  pouvoit 
choisir  personne  qu'elle  estimast  ni  honorast  davan- 
tage. ' —  M.  de  Montmorency  répondit  toujours  en 
tels  termes,  qu'il  témoigna  à  Madame  la  Comtesse, 
qu'il  ne  vouloit  point  porter  des  paroles  qui  pussent 
aigrir  l'affaire,  au  lieu  de  l'adoucir  \ 
31.     C'estoit  le  jour  que  l'on  commençoit  les 

*■  Voy,  sur  cette  grave  affaire  d^  \^  serviette,  PontebartmiQ,  p.  205 1 
Merc.  fr,,  t.  vi,  année  MPCXX,  p,  2Ô8, 


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d'arnauld  d'andilly.  459 

cérémonies  des  Chevaliers  ^  M.   de  Nemours  en-    Décembre  Mit. 
voye  M,  de  Courbezon  pour  appeller  M.  de  Guise. 


*  Voy.  Fontenay-Mareuil,  p.  458  ;  Richelieu,  p.  576  ;  Pontchartrain, 
p.  294  ;  Brienne,  p.  340  ;  Merc,  fr.,  t.  vi,  année  MDCXX,  p.  1  et  suiv. 
Le  Mercure^  p.  9.  et  suiv.,  donne  le  tableau  général  de  tous  les  cheva- 
liers du  Saint-Esprit  existant  à  cette  époque.  On  y  voit  figurer  avec 
leurs  titres  et  qualités  et  selon  Tordre  de  leur  réception  un  grand 
nombre  des  personnages  cités  dans  le  Journal  d'Arnauld  d*Aifdilly. 


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APPENDICE 

(Extrait  du  Joarnal  inédit  d*Ârnaald  d'Andilly,  vol.  iv,  fol.  71.) 


Lundy  20  may  1624.  Le  Roy  sur  le  mîdy  vint,  May  mk. 
accompagné  du  marquis  de  la  Viéville,  trouver  la 
Reyne-mère  (Marie  de  Médicis)  qui  estoit  dans  le 
lict,  et  aprez  luy  avoir  dict  qu'il  luy  venoit  parler 
d'une  résolution  qu'il  y  ayoit  longtemps  qu'il  avoit 
prise,  qui  estoit  d' ester  M.  le  colonel  (Ornano)  d'au- 
prez  de  Monsieur  ;  la  Reyne  respondant  que  c'es- 
toit  une  chose  à  considérer  à  cause  de  l'affection  que 
Monsieur  tesmofgnoit  avoir  pour  luy,  et  qu'il  ne  se- 
roit  point  mal  à  propos  de  luy  en  parler,  offrit  de 
congnoistre  son  sentiment.  Le  marquis  de  la  Vié- 
ville, prenant  la  parolle,  dit  qu'elle  gastoit  les  affaires 
du  Roy.  Incontinent  aprez ,  Monsieur,  accompagné 
de  Monsieur  le  Colonel,  estant  entré  dans  la  chambre 
où  estoient,  outre  ce  que  dessus,  M.  le  cardinal  de 
Richelieu,  M.  du  Rallier,  M.  de  Bonveil,  M.  Hé- 
rouard,  Bautru  et  M.  de  Guiercheville,  le  Roy  appella 
Monsieur,  et  en  présence  de  la  Reyne-mère  luy  dit 
qu'il  ne  vouloit  plus  qu'il  eust  de  gouverneur,  ny 


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462  JOURNAL   INÉDIT 

May  iit4.  que  Monsieur  le  Colonel  fust  auprez  de  luy.  —  Mon- 
sieur :  Pourquoy,  Monsieur? — Le  Roy  :  Pour  ce  que 
j'ay  appris  qu'il  vous  est  trop  sévère. — Monsieur: 
Trop  sévère,  Monsieur?  Sy  cela  estoit,  ce  seroit  à 
moy  à  le  sçavoir  et  à  m'en  plaindre.  Mais  tant,  s'en 
fault  ;  j'ay  toutte  sorte  de  subject  de  m'en  louer  et  de 
l'aymer»  comme  estant  très  homme  de  bien  et  auquel 
j'ay  beaucoup  d'obligation. — Le  Roy  voulant  per- 
suader Monsieur  par  raison,  Monsieur  avec  grands 
pleurs  respondit  à  toutes  ces  raisons,  ce  qui  fit  que 
le  Roy  appella  par  deux  diverses  fois  M.  de  la  Vié- 
ville  pour  disputer  avec  luy  contre  Monsieur,  qui 
insista  tousjours  très  fortement;  et  le  Roy  luy  ayant 
dit  par  plusieurs  fois  qu'il  défiirolt  qu'il  approuvas! 
sa  résolution,  il  respondit  tousjours  que  comme  Roy 
il  pouvoit  tout,  mais  qu'il  n'y  consentiroit  jamais. 
Et  sur  ce  que  le  Roy  luy  dit  avec  ini^ûce  qu'il  l'en 
prioit  ;  il  respondit  :  Monsieur,  je  ne  le  puis  faire  pour 
vostre  prière  ;  et  dit  ensuitte  que  c' estoit  M.  de  la 
Viéville  qui  avoit  rendu  un  mauvais  office  à  Monsieur 
le  Colonel,  et  que  ledit  marquis  estoit  un  meschant  et 
un  traistre,  ayant  voulu  avoir  avec  iuy  des  intelli- 
gences que  le  Roy  he  sceûst  pas,  dont  il  cotta  les 
temps  et  les  lieux.  Aprez  cela,  Monsieur  ayant  quicté 
le  Roy  sort  de  la  chambre  en  pleurant  ;  et  jurant 
tout  hault  que  les  traistres  la  luy  payeroient,  entre 
dans  la  chambre  de  la  Reyne  régnante  (Anne  d'Au- 
triche) qui  disnoit,  sans  la  saluer,  sa  cholère  ayant 
empesché  qu'il  ne  prist  garde  à  elle  ;  et  estant  arrivé 
dans  la  sienne,  dit  à  son  chirurgien  ordinaire  nommé 


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D'ARNâULD   d'ANDILLY.  46â 

Berthelot  (ennemy  juré  de  Monsieur  le  Colonel  à  cause 
qu'ayant  picqué  deux  fois  Monsieur  à  sa  grande  ma- 
ladie à  Moissac  sans  le  pouvoir  ségner^  Monsieur  lô 
Colonel  ne  voulut  plus  depuis  qu'il  ségnat  Monsieur)  : 
Comment^  coquin,  estes-voussy  impudent  que  de  vous 
présenter  devant  moy  après  avoir  trahy  Monsieur  le 
Colonel  î  Sortez  d'icy  ;  ne  vous  présentez  Jamais  de- 
vant moy.  Je  vous  fais  grande  grâce  de  nt  vous 
point  fère  assommer  à  coups  de  baston.  —  Quelque 
ti^nps  aprez  M.  de  La  Roche-Haberl,  son  premier 
ausmosnier,  se  voulant  mesler  de  le  consoler,  Mon- 
sieur luy  dit  :  Comment  pensez-vous  que  je  sois  sy 
mal  adverty  que  je  ne  sache  pas  qu'il  y  a  plus  de 
quatre  mois  que  vous  trahissez  Monsieur  le  Colonel  î 
Retirez^vous  d'icy,  et  ne  vous  présentez  plus  devant 
moy^  Comme  on  luy  eust  apporté  son  disner,  il  ne 
mangea  que  trois  ou  quatre  morceaux,  et  puis  se  fit 
desservir,  et  aprez  disner  ayant  demandé  son  ca- 
resse pour  aller  chez  la  Reyne  sa  mère,  M.  de  Man- 
San  voulant  dire  quelque  chose  pour  l'en  destourner, 
il  le  rabroua  fort* 

Lorsque  Monsieur  sortit  d'auprez  du  Roy,  comme 
il  est  dit  cy-dessus,  Monsieur  le  Colonel  le  voulant 
suivre,  le  Roy  l'appella  et  luy  dit,  en  présence  de  la 
Reyne-mère  :  Colonel,  je  suis  très  content  de  vos 
services,  et  feray  pour  vous  aux  occasions»  Mais  je 
ne  désire  plus  que  mon  frère  ayt  de  gouverneur. 
Monsieur  le  Colonel  respondit:  Sire  v  je  loue  Dieu 
de  la  résolution  que  Vostre  Majesté  a  prise  de  ne 
vouloir  plus  de  gouverneur  auprez  de  Monsieur,  et 


May  im. 


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ftCft  JOURNAL   INÉDIT 

May  tm.       suis  obligé  de  vous  tesmoigner  que  pourveu  qu'il 
veuille  prendre  le  soin  de  se  conduire,  comme  j'es- 
time qu'il  fera,  j'estime  en  ma  conscience  qu'il  en 
est  fort  capable.  Il  ne  me  reste  maintenant  qu'à 
sçavoirde  Vostre  Majesté,  comme  il  luy  plaist  que  je 
vive  auprez  d'elle  et  auprez  de  Monsieur.  Le  Roy 
respondit  :  t  Je  veulx  que  vous  demeuriez  tousjours 
dans  la  Cour  et  auprez  de  moy  comme  un  homme 
de  vostre  condition  et  de  vostre  qualité,  et  pour  le- 
quel je  veux  fère  aux  occasions.  Monsieur  le  Colo- 
nel respondit:  Vostre  Majesté  me  faict  beaucoup 
d'honneur  de  tesmoigner  satisfaction  de  mes  services, 
et  de  vouloir  que  je  me  tienne  souvent  près  d'elle  ; 
mais  je  la  supplie  très  humblement  de  me  dire  comme 
il  luy  plaist  que  je  vive  auprez  de  Monsieur  dans  les 
charges  que  j'ay  en  sa  maison.  —  Le  Roy  :  Je  ne 
veux  plus  que  vous  voyiez  du  tout  mon  frère. — M.  le 
Colonel  :  Comment,  Sire,  vous  ne  voulez  plus  que 
je  voye  Monsieur?  Ce  n'est  donc  pas  son  gouverneur 
que  vous  luy  ostez,  mais  c'est  le  Colonel  que  vous 
ostez  d' auprez  de  Monsieur,  et  que  vous  en  ostez  avec 
honte  et  avec  infamie.  Les  fidelles  services  que  mes 
prédécesseurs  ont  renduz  à  la  France,  et  les  miens, 
Sire,  n'ont  point  mérité  un  tel  traictement,  et  je 
n'avois  garde  de  l'attendre  ensuitte  de  tant  de  tes- 
moignages  que  Vostre  Majesté  m'a  renduz  d'estre 
contente  de  moy ,  et  des  promesses  qu'elle  m'a  sy 
souvent  faictes  de  me  garder  tousjours  une  oreille 
lorsque  l'on  me  rendroit  de  mauvais  offices  auprez 
d'elle.  Maintenant  je  me  voy  condamné  sans  estre 


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d'aunauld  d'andilly.  465 

ouy,  et  ruiné  sans  avoir  moyen  de  me  deffendre.  Sy  m«>  letv. 
j'ay  bien  faict,  Sire,  Yostre  Majesté  ne  doilt  nulle- 
ment me  traicter  de  la  sorte  ;  et  sy  j'ay  mal  faict,  il 
est  raisonnable  que  ma  teste  en  responde,  et  que 
vous  me  faciez  fère  mon  procès.  C'est  la  plus  grande 
grâce  que  je  vous  demande,  et  de  m' envoyer  pour 
cest  effect  à  la  Bastille.  Car  aussy  bien  sy  vous  ne 
m'y  envoyez,  je  m'y  en  iray.  —  Le  Roy  respondit  : 
Voulez-vous  que  mon  frère  ayt  de  la  barbe  jusques  à 
la  ceinture,  et  qu'il  ayt  encor  un  gouverneur?  — 
M.  le  Colonel:  Sire,  j'aydesjà  dit  à  Vostre  Majesté 
que  tant  s'en  fault  que  j'estime  qu'il  doibve  tousjours 
avoir  un  gouverneur,  je  loue  la  résolution  que  Vostre 
Majesté  a  prise  qu'il  n'en  ayt  plus.  Mais  il  n'est  pas 
juste  que  Vostre  Majesté  me  tire  avec  honte  de  ceste 
charge,  ainsy  qu'elle  veult  fère  maintenant,  en  me 
deffendant  l'honneur  de  voir  Monsieur.  —  Le  Roy  : 
Je  feray  pour  vous  aux  occasions. 

—  M.  le  Colonel  :  Sire,  Vostre  Majesté,  en  me 
traictant  de  la  sorte,  ne  sçauroit  rien  fère  pour  moy, 
puisqu'on  m' estant  ainsy  l'honneur,  quand  elle  me 
voudroit  donner  un  million  d'or,  je  le  refuserois.  On 
vous  a  faict  croire.  Sire,  que  j'estois  homme  attaché 
à  mes  inthérets.  J'espère  de  vous  .fère  congnoistre  le 
controire  ;  et  Vostre  Majesté  a  desjà  eu  assez  subject 
de  le  congnoistre,  en  ce  que  m' ayant  esté  retranché 
depuis  quinze  mois  plus  de  cinquante  mille  livres 
par  an,  tant  sur  mes  pentions  que  sur  l'entretene- 
ment  des  gens  de  guerre  de  ma  nation,  et  des  places 
accordées  à  mes  pères  par  les  Roys  vos  prédéces- 

30 


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&66  JOURNAL  INiPIT 

Mâjr  iiM.  seurs^  en  récompence  de  leurs  services  et  du  sang 
qu'ilz  ont  respandu  pour  la  France,  je  n'ay  pas  seul- 
lement  pensé  à  ouvrir  la  bouche  pour  m'en  plaindre 
à  Yostre  Majesté ,  encor  que  tout  autre  que  moy 
n'eust  pas  mancqué  de  le  faire.  J*ay  mieux  aymé  de-^ 
meurer  dans  le  re^ect  et  dans  le  silence»  que  dMm*' 
portuner  tant  soit  peu  Yostre  Majesté  en  ce  qui  re- 
garde la  commodité  de  ses  affaires.  —  Le  Roy  :  Je 
n*ay  pas  entendu  que  l'on  vous  retrandiast  seulle* 
ment  le  tiers  de  cela.  —  M.  le  Colonel  :  Sire,  on  m'a 
autant  retranché  que  je  vous  dis,  et  sy  je  n'ay  pas 
voulu  vous  en  rompre  la  teste,  encore  que  M.  le  Ma- 
reschal  d'Omano  nem'ayt  laissé  autre  bien  au  monde 
que  les  bienfaicts  de  Yostre  Majesté.  Mais  je  mé- 
prise fort  tout  cela,  pourveu  que  l'honneur  me  reste, 
lequel  m'est  mille  fois  plus  cher  que  ma  vye  ;  et  la 
seulle  récompence  qui  me  pourroit  contenter  main- 
tenant seroit  d'aller  mourir  à  la  teste  d'une  armée 
pour  le  service  de  Yostre  Majesté,  sy  elle  en  avoit 
quelqu'une  en  campagne.  —  Et  lors ,  se  tournant 
vers  la  Reyne-mère,  il  luy  dit  :  Madame,  il  n'est 
pas  possible  que  tant  de  mauvais  offices  qui  m'ont 
esté  renduz  auprez  du  Roy  ne  soyent  venuz  jusqueis 
aux  oreilles  de  Yostre  Majesté  ;  mais  je  croy  avoir 
9ervy  sy  fidellement,  sy  utilement,  et  j'ose  dire  a 
glorieusement  auprez  de  Monsieur,  que  je  supplie 
très  humblement  Yostre  Majesté  de  me  dire,  en  pré- 
sence du  Roy,  comme  elle  en  est  satisfaicte.  —  La 
Reyne  respondit  :  Monsieur  le  Colonel,  je  ne  puis 
dire  autre  chose ,  sinon  que  vous  avez  très  bien 


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d'arnauld  d'andilly.  467 

nourry  mon  fil2  d'Anjou,  et  que  j'en  suis  fort  contente.  May  le». 
Aprez,  Monsieur  le  Colonel,  addressant  sa  paroUe 
au  Roy,  luy  dit  :  Sire,  il  fault  avouer  que  mes  enne- 
mis ont  eu  un  grand  pouvoir  sur  l'esprit  de  Vostre 
Majesté,  puisqu'ensuitte  des  asseurances  qu'elle  m'a 
tant  de  fois  confirmées  de  sa  bonne  volonté,  il  (s) 
l'ont  porté  à  me  traicter  plus  mal  qu'homme  de 
son  royaume. 

—  Le  Roy  :  Qui  sont  vos  ennemis?  —  M.  le  Co^ 
Umel:  Hz  ne  sont  pas  loing  d'icy.  Sire;  le  voilà  à 
ce  coing,  —  Le  Roy  :  Et  qui  2  —  M.  le  Colonel  : 
La  Viéville,  Sire.  —  Le  Roy  :  Estes-vous  son  en- 
nemy?  — M.  le  Colonel:  Non,  Sire;  mais  il  est  le 
mien.  —  Le  Roy  :  Et  pourquoy  ?  —  M.  le  Colonel  : 
Pour  ce  que  c'est  un  infâme  et  un  lasche.  Sire,  et 
que  je  suis  fort  homme  de  bien.  — •  Le  Roy  :  Par- 
lez bas.  —  M*  le  Colonel  :  Au  contraire,  Sire,  j'es*- 
lève  ma  voix  affln  qu'il  l'entende  ;  car  je  ne  crains 
pas  comme  luy  que  l'on  sache  ce  que  je  dis.  Je  vous 
supplie  très  humblement  de  l'appeller,  Sire,  et  je 
luy  maintiendray  devant  vous  et  l'espée  à  la  main, 
sy  Vostre  Majesté  me  faict  la  faveur  de  me  le  per- 
mettre ,  que  c'est  un  traistre  et  un  meschant,  qui  a 
voulu  gangner  Monsieur,  et  avoir  des  intelligences 
avecluy  que  Vostre  Majesté  ne  sceust  point. — Le  Roy 
n'ayant  pas  voullu  appeller  M.  de  la  Viéville,  Mon- 
sieur le  Colonel  luy  dit  ensuitte  :  Sire,  l'on  m'avoit 
tousjours  bien  prédit  que  je  périrois  puisque  je  ne 
m'attachois  qu'au  Roy.  Sy  j'eusse  voulu  prendre 
d'autres  appuis,  je  n'en  aurois  pas  mancqué,  et 


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468  JOURNAL  INÉDIT 

Mny  m\.  subsisterois  maintenant.  —  Le  Roy  :  Comment?  qui 
est-ce  qui  eust  eu  le  pouvoir  de  vous  maintenir  con- 
tre moy?  —  M.  le  Colonel:  Personne  ne  m'auroit 
maintenu  contre  vous,  Sire  ;  mais  sy  d'un  costé  on 
m'avoit  rendu  de  mauvais  offices  auprez  de  Vostre 
Majesté ,  on  m'en  auroit  rendu  de  bons  de  l'autre  ; 
et  Yostre  Majesté  se  voulant  informer  de  la  vérité, 
m'auroit  trouvé  tel  qu'elle  sçauroit  désirer  pour  son 
service.  Au  lieu  que  ne  m' estant  fié  qu'en  ma  pro- 
bité et  en  la  protection  du  Roy,  c'est  le  Roy  mesme 
qui  m'abandonne,  et  qui,  au  lieu  de  me  maintenir, 
me  ruyne.  Mais  sy  c'cstoit  à  recommencer,  je  ferois 
encore  la  mesme  chose  ;  car  j'ayme  mieux  périr  en 
ne  m' attachant  qu'au  Roy,  que  de  me  maintenir 
par  quelqu'autre  moyen  que  ce  puisse  estre  ;  et  Dieu 
veuille.  Sire,  que  mon  exemple  n'apprenne  point  à 
beaucoup  d'autres  à  ne  fère  pas  de  mesme.  — 
Aprez  cela,  le  Roy  luy  ayant  conmiandé  de  se  re- 
.  tirer  à  son  logis,  et  d'attendre  là  de  ses  nouvelles 
qu'il  lui  feroit  sçavoir  le  lendemain  à  midy,  Mon- 
sieur le  Colonel  respondit  qu'il  n'avoit  point  d'au- 
tre logis  qu'une  chambre  en  celuy  de  Monsieur; 
que  s'il  trouvoit  bon  qu'il  y  demeurast,  il  ne  verroit 
point  Monsieur.  —  Le  Roy  respondit  que  non ,  et 
qu'il  s'en  fist  -marquer  un  à  la  ville.  Et  ainsy  le 
Roy  se  leva,  et  s'en  alla  disner  qu'il  estoit  deux 
heures,  car  son  discours  avec  Monsieur  avoit  duré 
une  heure  et  demye  ;  et  celluy  avec  Monsieur  le  Co- 
lonel une  demye  heure.  Monsieur  le  Colonel  demeura 
aprez  cela  assez  longtemps  chez  la  Reyne  et  dans 


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d'arnauld  d'andilly.  469 

le  logis  du  Roy ,  où  plusieurs  personnes  de  qualité  m»  t«». 
luy  parlèrent,  dont  M.  d'Elbeuf  fut  le  premier,  et 
admirèrent  tous  son  courage,  ses  parolles  et  sa 
contenance.  Quelque  temps  après,  ayant  sçeu  que 
le  Roy  alloit  à  la  chasse,  il  s'en  alla  le  trouver. 
Le  Roy  le  voyant  venir,  vouloit  esviter  de  le  voir  ; 
mais  Monsieur  le  Colonel  se  hastant,  l'aborda  au- 
paravant qu'il  peust  monter  à  cheval,  et  luy  dit  tout 
hault  qu'il  le  supplioit  très  humblement  de  luy  ren- 
dre justice.  —  Le  Roy  luy  respondit  qu'il  demeu- 
rast  à  son  logis,  ainsy  qu'il  luy  avoit  commandé,  et 
que  là  il  luy  feroit  sçavoir  de  ses  nouvelles.  —  Mon- 
sieur le  Colonel,  insistant  par  trois  ou  quatre  fois, 
et  suppliant  tousjours  le  Roy  de  luy  rendre  justice  ; 
enfin  le  Roy  se  fascha,  et  luy  dit  en  cholère  :  Je 
veux  que  vous  vous  en  alliez  à  vostre  logis,  et  vous 
le  commande.  —  Monsieur  le  Colonel  respondit  : 
Puisque  vous  commandez,  il  fault  obéir  ;  mais  un 
homme  de  bien  ne  craint  rien.  —  Lors  le  Roy 
monta  à  cheval  et  s'en  alla.  Et  Monsieur  le  Colonel, 
en  passant  dans  la  cour  pour  s'en  aller  chez  luy 
rencontra  Monsieur  qui  s'en  alloit  chez  la  Reyne- 
mère.  Monsieur  le  voyant,  de  luy  commanda  au 
cocher  d'arrester  le  carrosse.  Lors  Monsieur  le  Co- 
lonel venant  à  luy  lui  dit  :  Monsieur,  puisqu'il  ne 
m'est  pas  permis  de  vous  parler,  je  vous  supplie  très 
humblement  de  me  permettre  de  vous  toucher  la 
main.  Monsieur,  en  se  baissant  tout  bas,  l'embrassa 
par  plusieurs  fois,  et  luy  dit  avec  une  très  grande 
affection  qu'il  s'asseurast  qu'il  ne  l'oublieroit  jamais, 


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470  JOURNAL   INÉDIT 

uayim.  et  quelques  autres  mots  semblables.  Et  aprez  que 
Monsieur  le  Colonel  se  fust  retiré,  il  dit  tout  hault 
dans  le  carrosse  où  estoient  MM.  d'Elbéne,  de  Man- 
san,  de  Marcheville,  et  aussy  je  croy  M.  d'Ouailly  : 
Le  diable  m'emporte  sy  ces  traistres  ne  me  la  payent; 
je  les  cognois  tous  un  pour  un.  —  Monsieur  estant 
chez  la  Reyne-mère,  luy  parla  avec  très  grande  af- 
fection pour  Monsieur  le  Colonel. 

M.  de  la  Roche-Abert  disant  grâces  aprez  le  dis- 
ner  de  Monsieur ,  et  ne  les  prononceant  pas  bien. 
Monsieur  luy  dit:  Comment,  Monsieur  de  La  Ro- 
che? hé!  vous  donnez  donc  du  galimathias  à  Dieu 
aussy  bien  qu'aux  hommes?  —  Un  grand  de  la  Cour 
luy  disant  quMl  falloit  chanter  liberté,  il  respondit  avec 
un  visage  irrité  :  Et  pourquoy  liberté  ?  ay-je  esté  dans 
les  fers?  ay-je  esté  esclave?  Je  veux  bien  que  l'on 
sache  que  sy  j'ay  eu  quelque  contraincte,  ce  n'a  esté 
qu'autant  que  je  l'ay  voulu,  et  qu'elle  m'a  esté  utile. 

Mardy  21  May  (1624).  Monsieur  trouvant  le 
Roy  chez  la  Reyne-mère,  luy  dit  :  Monsieur,  comme 
mon  Roy,  vous  pouvez  fère  tout  ce  qu'il  vous.plaist, 
et  par  conséquent  m' ester  Monsieur  le  Colonel  ;  mais 
comme  mon  frère,  vous  ne  pouvez  refuser  la  très  hum- 
ble supplication  que  je  vous  fais  de  me  le  rendre  ;  puis- 
qu'il est  très  homme  de  bien.  —  Le  Roy  s' excusant, 
et  Monsieur  insistant  tousjours;  enfin  ie  Roy  se 
voyant  pressé,  luy  dit  qu'il  le  luy  rendroit  dans  trois 
mois.  —  L' après  disner,  M.  l'archevesque  de  Tours 
vint  porter  commandement  à  Monsieur  le  Colonel,  de 
la  part  du  Roy,  de  partir  le  jour  mesme  pour  aller  en 


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d'arnauld  d'andilly.  471 

sa  charge  de  Lieutenant-Général  en  Normandye.  UMytm. 
Monsieur  le  Colonel  respondit  qu'il  estoit  très  humble 
et  très  obéissant  subject  et  serviteur  du  Roy,  mais 
qu'il  le  supplioit  très  humblement  de  Texcuser  s'il 
ne  pouvoit  exécuter  ce  commandement.  Que,  quant 
au  premier  point,  son  équipage  n'estoit  point  si  prest, 
ny  luy  sy  préparé  à  sortir  de  la  Cour,  qu'il  peust 
s'en  aller  le  jour  mesme.  Que,  pour  le  regard  du  se- 
cond, il  n'estoit  point  sylâche  que  de  vouloir,  aprez 
le  traictement  qu'il  avoit  receu,  aller,  comme  banny 
de  la  Cour,  se  faire  monstrer  au  doigt  dans  une  pro-^ 
vince  où  il  avoit  toujours  vescu  avec  autant  d'hon*  ' 
neur,  de  créance  et  d'estime ,  qu*ayt  Jamais  faict 
aucun  autre  en  pareille  charge.  Mais  que  sy  son 
service  dans  la  Cour  estoit  désagréable  au  Roy, 
encor  qu'il  ne  deust  rien  moins  attendre  de  luy, 
aprez  l'avoir  sy  dignement  et  sy  fidellement  servy, 
il  se  retireroit  à  Paris,  qui  estoit  la  demeure  com- 
mune à  tous  les  François,  et  particullièrement  à  ceux 
de  sa  qualité;  qu*il  n'avoit  point  d'autre  maison, 
M.  le  mareschal  d'Omano  n'ayant  pas  laissé  six  pieds 
de  terre  pour  se  faire  enterrer.— M.  de  Tours  ayant 
rapporté  cela  au  Roy,  Sa  Majesté  dit  qu'elle  vouloit 
donc  bien  qu'il  s'en  allast  à  Paris. 

Mécredy  22  May.  Monsieur  le  Colonel  vient 
avec  un  carrosse  de  relais  de  Compiégne  à  Paris. 

Samedy  25  May.  Monsieur  le  Colonel  estant  à 
table,et  Mesdames  la  marquise  de  Montlord,  deMazar^ 
gués  et  de  Verderonne,  MM.  deMazargues,  de  Sesse^ 
naye,  d'Aiguebonneetd'Andillysouppantaveclviy,  le 


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Û72  JOURNAL   1NÉ0IT 

Mm  If».  sieur  Galeteau,  premier  vallet  de  chambre  du  Boy, 
sans  avoir  parlé  à  qui  que  ce  fust,  entre  dans  la  salle, 
et  s'adressant  à  Mondeur  le  Colonel,  luy  demande 
(aprez  luy  avoir  fait  excuses  de  ce  qu'il  estoit  venu 
durant  son  souper)  s'il  luy  pourroit  dire  un  mot  de 
la  part  du  Roy,  En  mesme  temps  Monsieur  le  Co- 
lonel se  lève  et  s'en  va  avec  luy  à  quatre  pas  de 
la  table,  et  lors  le  sieur  Galeteau  luy  dit  :  Monsieur, 
le  Roy  m'a  commandé  de*  vous  venir  trouver,  pour 
vous  dire  qu'il  est  extrêmement  offencé  de  l'impu- 
dence (ou  insolence)  que  vous  avez  commise  d'en- 
voyer un  gentilhomme  vers  Monsieur  lequel  l'a  en- 
tretenu fort  longtemps  ;  qu'il  vous  commande  de 
partir  dans  deux  ou  trois  jours  au  plus  tard,  avec  voz 
frères,  vostre  femme  et  vostre  sœur,  pour  vous  en 
aller  au  Pont-Saincl-Esprit  ;  et  que  sy  vous  y  manc- 
quez,  il  vous  sçaura  bien  fère  obéir,  et  vous  fère 
congnoistre  qu'il  est  vostre  maistre.  —  Monsieur  le 
Colonel  respondit  audit  sieur  Galeteau  :  Monsieur, 
avez  tout  dit  ?  —  Et  le  dit  sieur  Galeteau  répliquant 
qu'ouy.  Monsieur  le  Colonel  reprit  la  parolle  ;  et  dit  : 
Monsieur ,  je  vous  supplie  de  dire  au  Roy  que  pour 
luy  tesmoigner  qu'il  n'a  point  en  son  royaume  un 
plus  respectueux  et  un  plus  fidelle  subject  et  serviteur 
que  moy,  je  reçois  maintenant  avec  le  mesme  hon- 
neur et  avec  la  mesme  révérence  les  commandemens 
et  les  outrages  que  vous  m'apportez  de  sa  part  Je 
n'ay  passeullement  pensé  à  envoyer  un  gentilhomme 
vers  Monsieur  ;  et  mon  frère  de  Mazargues  y  en  ayanl 
envoyé  unnommé  Vitrol  pour  avoir  seing  en  son  ab- 


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d'aanauld  d'andilly.  478 

sence  de  ce  qu'il  fault  à  Tescurye  de  Monsieur,  ainsy  w^y  kh. 
qu'il  avoit  tou8Jours  accoustumé,  et  mesme  don- 
ner ordre  au  payement  de  la  despense  des  chevaux  ; 
s'il  se  trouve  que  je  l'aye  chargé  d'aucunes  lettres, 
ny  d'une  seule  parolle,  je  ne  dis  pas  soulignent  à 
Monsieur,  mais  à  qui  que  ce  soit,  ny  que  j'aye  mesme 
parlé  à  luy,  je  veux  perdre  1  honneur  ;  et  n'y  eu  ja- 
mais une  plus  fausse  calumnie  que  celle  que  l'on  m'a 
imposée  en  cela  auprez  du  Roy.  Quant  au  comman- 
dement que  vous  m'apportez  d'aller  au  Sainct-Esprit, 
ceste  mesme  raison  m'empesche  de  le  pouvoir  exécu- 
ter ;  et  supplie  très  humblement  Sa  Majesté  de  con- 
sidérer sur  ce  subject,  que  sy  lorsqu'on  sa  présence 
je  la  servois  sy  utilement  dans  la  Cour  auprez  de 
Monsieur,  qu'elle  m'en  tesmoignoit  toutte  la  satisfac- 
tion que  je  pouvois  souhaitter,  mes  ennemis  ont  eu  le 
pouvoir  de  luy  rendre  ma  fidellité  suspecte  ;  que  sy 
quand  elle  me  commanda  de  m'esloigner  de  Mon- 
sieur, elle  me  dit  qu'elle  vouloit  que  je  demeurasse 
dans  la  Cour  comme  un  homme  de  ma  condition  et 
de  ma  qualité,  et  qui  l'a  vois  très  bien  servie  ;  que  sy 
aussytost  que  je  l'eus  perdue  de  veue,  elle  me  fit 
commander  dés  le  lendemain  de  m'en  aller  en  Nor* 
mandye,  et  puis  au  lieu  de  cela  à  Paris,  où  je  n'ay  pas 
plustost  esté ,  que  le  pouvoir  et  la  liberté  qUe  mes 
ennemis  ont  de  calumnier  augmentant  par  mon  es- 
loignement,  ilz  ont  sur  la  plus  grande  fausseté  du 
monde  porté  le  Roy  à  m' envoyer  dire  par  vous  des 
outrages  ;  il  n'y  a  point  de  crimes  dont  ilz  ne  s'ef- 
fôrceassent  de  me  fère  croire  coupable  par  Sa  Majesté 


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/i7&  JOURNAL   INIÎDIT 

uaymk.      lorsque  je  serai  en  Tune  des  extremitez  de  son 
royaume  et  dans  des  places  dont  Passiette  leur  don-* 
neroit  mille  subjectz  de  me  calumnien  On  luy  diroit 
que  je  caballerois  avec  les  Huguenots,  avec  Savoye, 
avec  Espagne  ;  et  sy  je  n'estois  point  chrestien ,  je 
croy  que  l'on  luy  diroit  mesrae  que  je  traicterois 
avec  le  Turc.  C'est  pourquoy  je  supplie  très  hunn 
blement  Sa  Majesté  d'avoir  agréable  que,  pour  con- 
server mon  honneur  et  ma  fidellité  non  seullement 
inviolables  comme  ilz  le  seront  tousjours,   mais 
exeraptz  de  soubçons  que  les  artifices  de  mes  enne- 
mis en  pourroîent  donner  à  Sa  Majesté ,  je  ne  bouge 
de  Paris,  affin  qu'au  moindre  mcscontentement  que  le 
Roy  aura  de  moy,  il  me  puisse  fêre  arrester,  et  sy  je 
suis  coupable,  me  fère  punir  sans  envoyer  quérir  ma 
teste  sy  loing  ;  et  que  ma  présence  et  mon  visage 
donnent  de  la  retenue  à  la  meschanceté  de  mes  enne* 
mis.  Que  sy  mon  séjour  dans  Paris  est  désagréable 
au  Roy ,  je  demeureray  en  tel  village  proche  qu'il 
luy  plaira,  et  ne  verray  que  les  personnes  qu'il  m' or* 
donnera.  Mais  sy  tout  cela  ne  suflBt ,  je  sçay  un  ex- 
pédient qui  luy  estera  tous  les  soubçons  que  l'on  luy 
pourroit  donner  de  moy,  et  fermera  pour  l'advenir  la 
bouche  à  mes  ennemis  ;  qui  est  de  me  mettre  dans  la 
Bastille.  Car  ainsy  estant  soubs  la  clef  du  Roy ,  au-» 
cune  de  mes  actions  ne  luy  sçauroit  donner  d'um- 
brage,  et  je  recevray  avec  joye  ceste  probation  (?) 
en  attendant  que  le  temps  faisant  congnoistre  à  Sa 
Majesté  ma  sincérité  et  la  fidellité  de  mes  services, 
elle  me  juge  digne  non  seullement  d'estre  mis  en  li- 


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d'arnacld  d'andilly.  /i75 

berté,  maïs  d'avoir  meilleure  part  que  jamais  en  Htyiin 
Thonneur  de  ses  bonnes  grâces. -«-^  Galeteau  respon^ 
dit  qu'il  ne  se  pouvoit  charger  de  fère  ceste  response 
au  Roy,  pour  ce  qu'il  ne  retourneroit  de  quatre  ou 
cinq  jours  à  la  Cour.  A  quoi  Monsieur  le  Colonel 
réplicquant  que  c'estoit  chose  bien  rude  et  bien  ex- 
traordinaire de  luy  apporter  un  commandement,  et 
ne  se  voulloir  pas  charger  de  la  responce  ;  et  Gale- 
teau insistant  à  s'en  descharger ,  et  disant  qu'il  le 
mandast  au  Roy  par  quelqu' autre  ;  Monsieur  le  Co- 
lonel dit  qu'il  chercheroit  donc  quelqu'un  qui  luy 
voulust  rendre  cest  office.  Et  se  retournant  vers 
M"*'  la  Marquise  de  Montlord  et  M"'  de  Mazargues, 
dit  à  Galeteau  :  Quel  traictement  est  cecy  de  vou- 
loir envoyer  de  ceste  sorte  à  cent  cinquante  lieues 
d'icy  ceste  pauvre  femme  languissante  (parlant  de 
M"*  de  Mazargues  acouchée  depuis  peu ,  et  qui 
avoit  esté  fort  malade  depuis)  ;  et  ceste  autre  qui 
depuis  dix  ans  n'a  point  porté  de  santé  (parlant  de 
Madame  la  Marquise)  ?  A  cela  Galeteau  respondit: 
Monsieur,  ceste  excuse  est  fort  bonne  ;  et  sera  bon, 
s'il  vous  plaist,  de  la  faire  dire  au  Roy.  —  A  quoy 
Monsieur  le  Colonel  répartit  :  Nullement,  Monsieur, 
je  ne  dis  point  par  excuse  ;  car  j'ayme  beaucoup 
mieux  payer  de  ma  teste ,  que  de  la  maladie  de 
ma  femme.  —  Aprez  Galeteau  vint  à  M.  de  Ma- 
zargues, et  luy  dit  qu'il  avoit  fait  entendre  à  Mon- 
sieur le  Colonel  la  volonté  du  Roy  sur  son  subject. 
—  Galeteau  estant  party.  Monsieur  le  Colonel  et  Ma- 
dame la  Marquise  sa  femme  envoyèrent  supplier 


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476  JOURNAL   INÉDIT 

May  Hu  M.  le  Mareschal  de  Créquy  de  les  venir  voir,  et  eètant 
venu  à  l'heure  mesme,  le  supplièrent  d'aller  trou- 
ver le  Roy  pour  luy  représenter  les  raisons  de  Mon- 
sieur le  Colonel  dont  Galeteau  n'avoit  pas  voulu  se 
charger.  Ce  que  M.  de  Créquy  leur  ayant  promis, 
il  partit  le  lendemain,  jour  de  la  Pentecoste,  et  le 
lendemain  lundy  à  trois  heures  aprez  midy,  au  re- 
tour de  la  chasse  du  Roy,  parla  à  Sa  Majesté,  la- 
quelle luy  respondit  qu'elle  ne  vouloit  rien  escouter 
de  la  part  de  Monsieur  le  Colonel ,  jusques  à  ce  qu'il 
fust  dans  le  Sainct-Esprit 

Dudit  jour  25.  M.  de  Marcheville,  soubz-gou- 
verneur  de  Monsieur,  part  de  \a  Cour,  ayant  eu  son 
congé,  pour  ce  que  l'on  le  croyoit  amy  de  Monsieur 
le  Colonel.  M.  de  Montgenoust,  ausmosnier  ordinaire 
de  Monsieur,  fut  aussy  osté,  et  M.  Passart  mis  en 
sa  place.  MM.  de  Pelegrin  et  Dolphin,  ordinaires, 
furent  aussy  estez,  avec  permission  de  tirer  récom- 
pence  d'une  des  deux  charges,  et  de  la  partager 
entr'eux.  Ordonné  que  M.  de  Valsin  se  desferoit 
aussy  de  la  sienne.  Carrillon,  chirurgien,  aussy  osté. 

Entre  le  mardy  (21  may),  et  le  samedy  (25). 
Monsieur,  parmy  plusieurs  quy  estoient  à  l'entour  de 
luy,  ayant  aperçu  M.  d'Aiguebonne,  l'appella,  et  luy 
demanda  s'il  feroitce  qu'il  luy  commanderoit?  M. d'Ai- 
guebonne luy  ayant  respondu  qu'ouy,  et  qu'il  s'en 
tiendroit  fort  honoré,  Monsieur  luy  commanda  d'aller 
trouver  M.  de  la  Viéville,  et  de  luy  dire  qu'il  luy 
avoit  mancqué  de  foy  et  de  parolle  touchant  Mon- 
sieur le  Colonel;  mais  qu'il  s'asseurast  que  s'il  ne  le 


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d'arnauld  d'andilly.  477 

réparoit,  il  ne  Toublieroit  jamais,  et  qu'il  n'auroit  pas  May  leii. 
tant  de  peyne  à  fère  le  bien  qu'il  en  avoit  eu  à  fère 
le  mal.  —  M,  d' Aiguebonne  ayant  dit  cela  à  M,  de  la 
Viéville,  il  demeura  fort  surpris,  et  respondit  en 
termes  généraulx  avec  de  grands  respects  vers  Mon- 
sieur le  Colonel,  qu'il  l'honoroit,  qu'il  l'estimoit  au- 
tant que  seigneur  de  France,  et  n' avoit  jamais  pensé 
à  luy  rendre  de  mauvais  offices  auprez  du  Roy  ;  que 
c'estoit  chose  qui  estoit  venue  du  pur  mouvement  de 
Sa  Majesté  et  que  s'il  pouvoit  servir  Monsieur  le 
Colonel,  il  le  feroit  tousjours  pour  sa  propre  considé- 
ration, et  encor  beaucoup  d'avantage  puisque  c'estoit 
chose  qui  agréoit  à  Monsieur.  —  M.  d' Aiguebonne 
luy  ayant  réphcqué  que  cela  n'estoit  pas  respondre  à 
ce  que  Monsieur  luy  mandoit,  qu'il  luy  avoit  mancqué 
de  parolle,  et  désiroit  qu'il  réparast  le  mal  qu'il  avoit 
faict,  M.  de  la  Viéville  respondit  en  homme  fort  em- 
barrassé. —  Quelque  temps  aprez,  M.  de  Joyeuse, 
neveu  de  M.  de  la  Viéville,  vint  trouver  M.  d' Aigue- 
bonne, et  luy  dire  que  M.  de  la  Viéville  seroit  bien 
malheureux  sy  Monsieur  avoit  mauvaise  satisfaction 
de  luy,  et  qu'il  feroit  tousjours  tout  ce  qui  seroit  en 
son  pouvoir  pour  le  servir. 

Jeudy  30  may  (1624).  M.  de  Bonœil  apporte  de 
Compiègne  à  Monsieur  le  Colonel  un  chappellet  de 
la  part  de  la  Reyne-mère.  La  chose  est  que  quelques 
jours  auparavant,  la  Reyne-mère  donnant  quelques 
chappelletz  qu'elle  avoit  apportez  de  Liesse,  Mon- 
sieur luy  dit  devant  toutte  la  Cour:  Ma  maistresse, 
j'ay  une  faveur  à  vous  demander,  mais  je  voussup- 


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lll%  JOURNAL   INIÉDIT 

M^  i«^«  plie  très  humblemmt  de  ne  la  point  refufier.  —  La 
Reyne  hiy  dit  :  Je  n'ay  garde,  mon  filz  ;  qu'est-ce? 
—  Ma  maistresse,  c'est  cpie  vous  envoyiez,  s'il  vous 
plaist,  un  de  ces  chappelletz  à  Monsieur  le  Colonel, 
affin  que  tout  ce  mcnde  cognoisse  que  vous  n'estes 
pas  contre  luy.  Le  Roy  ayant  sceu  cela,  il  fut  agité 
gy  on  envoyeroit  le  chappellet,  et  à  ce  que  quelques* 
uns  dient,  résolu  que  non  ;  mais  néantmoins  il  vint, 
et  M.  de  Bonœil  se  trouvant  mal  quand  il  arriva, 
l'envoya  par  une  de  ses  filles.  Et  le  lendemain  dès 
trois  heures  du  matin  fut  remandé  pour  aller  à  Id 
Cour,  à  cause  des  ambassadeurs  qui  arrivoient,  ce 
qui  fut  cause  que  Monsieur  le  Colonel  luy  escrivit: 

Monsieur, 

Je  commence  à  croire  qu'une  mauvaise  fortune 
peult  estreacompagnée  debonhœur,  puisqu'il  a  pieu 
à  la  Reyne-mère  du  Roy  me  tant  obliger  que  m'en- 
voyer  le  chapelet  que  vous  avez  pris  la  peyne  de  me 
faire  rendre  de  sa  part.  Ceste  faveur  m'est  sy  sen- 
sible, qu'il  n'y  a  point  de  remerciemens  capables  de 
tesmoigner  avec  quel  respect  je  la  reçois.  Mais  sy 
les  occasions  secondoient  mes  désirs,  j'oserois  espé- 
rer de  fère  voir  à  Sa  Majesté,  par  mes  très  humbles 
et  très  fidelles  services,  que  l'honneur  de  ses  com- 
mandemens  me  sera  tousjours  plus  cher  que  ma  vye, 
laquelle  je  tiendrois  trop  heureusement  employée  sy 
je  pouvois,  en  la  perdant,  donner  à  Sa  Majesté  une 
aussy  grande  marque  de  ma  recognoissance,  que  j'en 
reçois  une  de  sa  bonté.  Vous  m'obligerez  extrême- 


Fevrier. 


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D'ARNAtJLD  D'ANDILLY.  it79 

ment  de  Yen  assurer  ^  et  de  croire  que  nul  ne  sera       ^y  i«^* 
jamais  plus  que  moy... 

Lundy  â  juin  (162/i)  •  A  onze  heures  dumatin,  un  Jum. 
exempt  des  gardes  de  la  compagnie  de  M.  de  Tresmes, 
nommé  Boislouez,  vient  faire  commandement  de 
la  part  du  Roy,  à  Monsieur  le  Colonel,  de  partir 
dans  vingt-quatre  heures  avec  ses  frères,  sa  femme 
et  sa  sœur,  pour  aller  au  Sainct-Esprit.  Monsieur  le 
Colonel  fil  response  :  que  quant  à  ses  frères,  ilz 
avoient  desjà  obéy.  (M.  de  Mazargues  estoit  party  en 
poste  le  lundy  matin,  et  M.  d'Ornano  le  lendemain)  ; 
que  pour  luy  il  ne  le  pouvoit,  à  cause  des  mesmes 
raisons  quMl  avoit  représentées  au  sieur  Galeteau,  et 
qu'il  répéta  lors  ;  mais  qu'il  révéroit  tellement  l'au- 
thorité  du  Roy,  que  voyant  le  baston  qui  en  portoit 
la  marque,  il  estoit  prest  de  le  suivre  à  la  Bastille^ 
ou  en  tel  autre  lieu  que  Sa  Majesté  auroit  agréable, 
affin  de  luy  faire  cognoistre  qu'il  ne  vouloit  avoir 
autre  protection  qu'en  sa  justice  et  en  son  innocence. 
Ce  que  l'exempt,  luy  promit  d'aller  rapporter  au 
Roy.  Mais  Monsieur  le  Colonel,  ayant  apris  qu'il  avoit 
seullement  escript  à  la  cour  par  un  archer  qu'il  avoit 
emmené  avec  luy  et  qu'il  n' estoit  bougé  de  Paris, 
Monsieur  le  Colonel  escrivit  le  soir  mesme  au  Roy, 
et  luy  envoya  la  lettre  par  le  com(missai)re  le 
Berche;  lequel  le  lendemain  sur  les  dix  heures  donna 
la  lettre  au  Roy,  comme  il  sortoit  de  sa  chambre, 
luy  disant  que  c'estoit  une  lettre  que  M.  le  colonel 
d'Omano  luy  avoit  donné  charge  de  luy  présenter. 
Le  Roy  la  prit,  voulut  rompre  la  soye,  et  luy  dit 


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480  JOURNAL  INEDIT 

jofn  im.  qii'aprez  la  messe  il  la  verroit,  et  qu'il  le  vînt  re- 
trouver ;  et  en  mesme  temps  commanda  à  Boulanger 
d'aller  quérir  le  marquis  de  la  Viéville, 

COPIE  DE   LA  LETTAE   DE   M.    LE  COLONEL   AU   EOT. 

•  Sire, 

»  Lorsque  la  calumnie  et  le  crédit  de  mes  enne- 
mis ont  eu  le  pouvoir  de  me  fère  commander  par 
Vostre  Majesté  de  quicter  la  charge  dont  vous  m'a- 
viez honoré  auprez  de  Monseigneur  vostre  frère,  et 
mesme  vostre  présence,  j'ay  incontinent  obéy.  Mais 
quand  leur  violence  les  a  portez  jusques  à  arracher 
de  vostre  bouche  des  paroUes  de  cholère  contre  mon 
innocence,  et  un  commandement  de  me  retirer  au 
Pont  Sainct-Esprit,  que  je  ne  pouvois  exécuter  sans 
me  confesser  coupable,  j'ay  très  humblement  sup- 
plié Vostre  Majesté,  ainsy  que  je  fais  encores,  de  m'en 
vouloir  dispenser;  et  de  considérer,  s'il  luy  plaist, 
que  sy  dans  vostre  cour,  et  depuis  n'en  estant  qu'à 
vingt  lieues,  on  a  bien  peu  vous  desguiser  sy  mali- 
cieusement la  vérité  de  mes  actions,  il  n'y  a  point 
d'accusation  que  je  ne  deusse  craindre  lorsque  je 
serois  comme  relégué  en  l'une  des  extrémitez  de 
vostre  royaume.  Sire,  bien  que  mes  ancestres  ayent 
eu  le  bonheur  de  se  rendre  assez  recommendables  à 
la  France  par  leurs  services,  j'atribue  toutesfois 
principallement  à  leur  inviolable  fidellité  le  grand 
nombre  d'honneurs  et  de  charges  importantes  qu'ilz 
ont  reçeus  des  roys  vos  prédécesseurs,  sçachant  qu'ilz 


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D'ARNAOLD    l>'ANDILLy,  481 

n*ont  jamais  eu  tant  de  soin  de  leur  fortune  ny  de 
leur  vye,  comme  de  se  garentir  non  seullement  de 
blasme ,  mais  du  moindre  soubçon.  Geste  mesme 
passion  envers  mon  Roy  m'estant  héréditaire,  et  ne 
trouvant  rien  de  diflScile  pour  en  rendre  preuve  à 
Vostre  Majesté,  j'ay  mieux  aymé,  affin  d' ester  tout 
subject  à  mes  ennemis  de  continuer  leurs  calumnies, 
me  résoudre  à  perdre  ma  liberté  dans  une  prison, 
que  me  retirer  en  des  places  dont  Tassiette  leur  four- 
niroit  des  prétextes  de  donner  continuellement  des 
deffiences  de  moy  à  Vostre  Majesté.  Ainsy  je  ne  ré- 
siste à  leurs  persécutions  que  par  les  respectz  et  la 
souffrance,  qui  sont  les  seuUes  armes  dont  je  me  sers 
contre  eux,  puisqu'ilz  se  servent  de  vostre  authorité, 
que  je  révère  mille  fois  plus  en  effect  qu'ils  ne  le 
font  en  apparence.  J'espère  de  vostre  bonté.  Sire, 
que  malgré  leurs  artifices  vous  aurez  maintenant 
agréable  qu'en  abandonnant  tout  le  reste,  je  con- 
serve au  moins  mon  honneur,  qui  m'est  incompara- 
blement plus  cher  que  ma  vye,  et  attens  de  vostre 
justice  qu'aprez  que  vous  aurez  récognu  la  sincérité 
de  mes  intentions  et  la  fidellité  de  mes  services, 
Vostre  Majesté  me  redonnera  bientost  la  place  qu'on 
m'a  voulu  fère  perdre  en  l'honneur  de  ses  bonnes 
grâces ,  lesquelles  je  m'efforceray  tousjours  de  mé- 
riter par  les  plus  passionnez  debvoirs  que  vous  puisse 
rendre,  vostre  très  humble,  très  obéissant  et  très- 
fidelle  subject  et  serviteur. 

d'Ornano. 

De  Paris,  ce  3  Juin  1C24. 

31 


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A82  iOURNAI.   IN^PIT 

Le  Roy,  au  retour  de  la  messe,  ayant  esté  chez 
la  Reyne-mère,  où  le  marquis  de  la  Viéville  se  trouva, 
dit  au  sortir  de  là  au  comm(issai)re  le  Bercbe,  qui 
luy  demanda  s'il  luy  avoit  pieu  de  voir  la  lettre  de 
Monsieur  le  Colonel  ?  qu'il  Tavoit  veue.  Et  le  Bercbe 
luy  demandant  s'il  luy  pkisoit  de  luy  rendre  res^ 
ponse?  le  Roy  dit  que  non,  et  qu'il  luy  dist  seulle* 
ment  qu'il  vouloit  obéissance.  Et  le  Berche  luy  ayant 
demandé  s'il  luy  avoit  pieu  de  considérer  les  raisons 
de  Monsieur  le  Colonel?  Il  respondit  :  «  J'ay  toutveu; 
dictes'luy  seullementque  je  veux  obéissance.  >  Et  in- 
continent (?)  aprez,  ayant  rencontré  le  Berche,  il  luy 
dit  les  mesmes  choses,  et  luy  commanda  de  s'en  aller. 

Le  mardy  4  juin(162/i).  Le  dit  exempt  revint  à 
trois  heures  asprès  midy  trouver  Monsieur  le  Colo- 
nel, et  luy  dit  que  les  vingt- quatre  heures  estant 
passées,  il  venoit  sçavoir  s'il  n'avoit  point  changé  de 
résolution.  —  Monsieur  le  Colonel  respondit  que  non, 
d'autant  que  sa  fidélité  et  son  honneur  l'obUgeoient 
à  préférer  une  prison  exempte  de  tous  soubçons,  à  la 
liberté  qu'il  auroit  ailleurs  subjecte  aux  calumnies 
de  ses  ennemis.  —  Ce  que  ledit  exempt  luy  dit  qu'il 
feroit  entendre  au  Roy  ;  et  néantmoins  fit  comme  la 
première  fois.  —  M.  le  mydlord  des  Hayes,  comte 
de  Carlie,  ambassadeur  extraordinaire  d'Angleterre 
touchant  le  mariage,  arrive  à  Compiègne  fort  acom- 
pagné,  et  eut  audience  le  lendemain,  en  laquelle  il 
mit  le  genoul  en  terre  devant  Madame,  mais  non 
devant  les  Reynes. 

Mécredy  5  juin  (1624).     Monsieur  l'archevesque 


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d'ainauld  d'andilly.  483 

de  Tours  vient  trouver  Monsieur  le  Colonel  sur  les 
dix  heures  ou  dix  heures  et  demie  du  matin,  luy  dit 
qu'ayant  appris  à  Compiègne  le  jour  précédent  les 
refus  qu'il  avoit  faictz  d'obéir  au  commandement 
du  Roy,  d'aller  au  Sainct-Esprit,  et  en  estant  très- 
affligé,  comme  son  amy,  à  cause  de  l'extresme  faulte 
qu'il  faisoit  en  cela,  il  estoit  monté  en  carrosse  à 
l'heure  mesme,  sans  en  parler  à  personne  (M,  de 
Tours  recogneu  depuis  qu'il  avoit  parlé  au  Roy  au- 
paravant que  de  venir,  et  est  aisé  de  juger  par  ses 
discours  que  le  Roy  l'avoit  envoyé)  ;  et  le  venoit 
trouver  pour  le  conjurer  de  changer  de  résolution. 
Sur  cela,  estant  entrez  dans  le  cabinet  de  Monsieur 
le  Colonel,  ils  y  demeurèrent  environ  trois  quartz 
d'heures  ;  et  là,  M.  de  Tours  ayant  dit  à  Monsieur  le 
Colonel  tout  ce  qu'il  se  peust  imaginer  pour  luy  per- 
suader d'aller  au  Sainct-Esprit,  tant  s'en  fault  qu'il 
y  peust  rien  gangner,  qu'au  contraire  il  trouva  qu'il 
6*affermissoit  tousjours  de  plus  en  plus.  — Après, 
M.  de  Tours  estant  allé  parler  à  M"'*  la  marquise  de 
Montlord,  et  Monsieur  le  Colonel  entendre  la  messe 
qui  se  dit  chez  luy,  comme  le  prestre  avoit  quasy 
achevé,  l'exempt  entra  avec  quatre  archers  ayant 
leurs  casacques  et  leurs  carabines  et  pistolletz.  Mon- 
sieur le  Colonel,  qui  prioit  Dieu  fort  attentivement 
dans  la  chapelle ,  n'apercevant  rien  de  cela,  M.  de 
Chaudebonne  le  luy  feit  dire  ;  et  aussytost  Monsieur  le 
Colonel  se  leva,  sortit  de  la  chapelle,  et  vint  à 
l'exempt,  qui  luy  dit  qu'il  luy  avoit  desjà  faict  divers 
commandemens  de  la  part  du  Roy  de  se  retirer  au 


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liSb  JOURNAL   INÉDIT 

Sainct-Esprit  ;  que  maintenant  il  iuy  en  apportoit  un, 
dernier  et  absolu,  ou  bien  un  autre  qui  estoit  de  le 
suivre  à  la  Bastille.  —  Monsieur  le  Colonel,  avec 
visage  non  seullement  constant,  mais  guay,  respon- 
dit:  Que  quant  au  premier  des  deux  commande- 
mens  qu'il  Iuy  apportoit,  il  ne  le  pouvoit  exécuter^ 
pour  les  raisons  qu'il  avoit  desjà  tant  de  fois  repré- 
sentées, et  mesmes  escriptes  au  Roy  ;  mais  que  pour 
le  second,  il  y  obéissoit  de  tout  son  cœur.  Et  en  di- 
sant cela,  alla  embrasser  l'exempt,  puis  Iuy  dit,  en 
se  retournant  vers  l'autel  :  Je  vous  jure  sur  mon 
salut,  devant  Dieu  que  voilà,  que  je  n'ay  jamais 
receu  nouvelle  avec  davantage  de  joye.  Mainte- 
nant je  ne  crains  plus  les  calumnies  de  mes  enne- 
mis; je  suis  en  la  protection  du  Roy,  auquel,  mal- 
gré tous  leurs  artifices,  je  tesmoigneray  ma  fidellité 
aux  despens  de  ma  liberté.  —  Et  comme  l'exempt 
le  pressoit  de  vouloir  aller  au  Sainct-Esprit,  il  Iuy 
respondit  en  haussant  sa  voix  :  Je  remetz  de  très- 
bon  cœur  ma  fortune  et  ma  vye  entre  les  mains  du 
Roy  ;  il  en  peult  disposer  absolument.  Mais  quant  à 
mon  honneur,  il  n'y  a  homme  vivant  soubz  le  ciel 
qui  y  ayt  puissance.  —  Et  l'exempt  Iuy  représentant 
ensuitte  qu'il  Iuy  seroit  beaucoup  plus  advantageux 
d'aller  au  Sainct  Esprit,  il  Iuy  respondit  qu'il  estoit 
le  seul  gentilhomme  de  France  qui  ne  se  pouvoit 
passer  des  bonnes  grâces  du  Roy  ;  que  les  autres 
pouvoient  vivre  chez  eux  sans  le  Roy ,  de  ce  que 
Dieu  leur  avoit  donné  de  bien.  Que  quant  à  Iuy, 
pouvant  jurer  avec  vérité  que  M.  le  mareschal  d'Or- 


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d'abnauld  d'andilly.  485 

nano  ne  luy  ayant  laissé  vaillant  au  monde  que  onze 
cents  livres  de  rente,  il  luy  estoit  impossible ,  outre 
la  passion  naturelle  qu'il  avoit  au  service  du  Roy, 
de  se  passer  de  ses  bonnes  grâces.  Que  ses  enne- 
mis les  luy  vouloient  fère  perdre  en  Tesloignant  de 
luy  pour  luy  rendre  aprez  ses  actions  suspectes; 
mais  qu'il  les  vouloit  conserver  malgré  eux  en  re- 
mettant entre  ses  mains  sa  vye  et  sa  liberté  dans  un 
lieu  où  ilz  n'auroient  plus  l'advantage  de  le  pouvoir 
calumnier.  —  Aprez  cela,  l'exempt  l'ayant  pressé  et 
repressé  par  plusieurs  fois  de  choisir  plustost  le  Pont 
3ainct- Esprit  que  la  Bastille,  et  voyant  qu'il  ne  le 
pouvoit  fère  changer  de  résollution,  il  luy  dit  :  Mon- 
sieur, quand  vous  plaira-t-il  donc  d'aller  à  la  Bas- 
tille ?  —  Il  respondit  :  Présentement  ;  et  pour  vous 
monstrer  que  vous  ne  me  surprenez  point,  mon 
petit  pacquet  est  tout  prést  sur  la  table  de  mon  ca- 
binet ;  car  il  y  a  trois  jours  que  j'attendois  cecy  avec 
impatience.  Et  en  mesme  temps  commanda  que 
l'on  mit  les  chevaux  à  son  carrosse.  Mais  quelqu'un 
qui  se  trouva  là  ayant  dit  à  l'exempt  qu'il  vaudroit 
mieux  n'aller  qu' aprez  disner,  à  cause  qu'il  estoit 
plus  de  midy,  et  que  l'on  alloit  porter  la  viande,  il 
dit  à  Monsieur  le  Colonel  qu'il  valloit  mieux  qu'il 
disnast  avant  que  de  partir.  —  Monsieur  le  Colonel 
respondit  que  cela  estant  indifférend,  il  le  vouloit 
bien.  Et  incontinent  il  fut  trouver  Madame  la  Mar- 
quise, et  luy  dire  qu'elle  ne  se  devoit  point  affliger, 
puisqu'il  avoit  ce  qu'il  avoit  désiré.  Elle  se  com- 
porta en  cela  avec  un  très  grand  courage.  Puis  il 


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&86  JOURNAL    IHiDIT 

vint  disner,  et  en  disnant  beut  à  Texempt  à  la  santé 
du  Roy,  et  le  pria  de  luy  dire  que  sMl  luy  bailloit 
la  Bastille  pour  punition  de  n'avoir  pas  exécuté  le 
commandement  d'aller  au  Sainct-Espritj  il  la  rece- 
voit  de  bon  cœur  pour  telle,  sçachant  que  le  Roy 
est  le  maistre  et  qu'il  pouvoit  fère  ce  qu'il  luy  plaist 
Que  sy  au  contraire  il  la  luy  bailloit  pour  protection 
contre  les  calumnies  de  ses  ennemis,  il  là  recevoit 
comme  une  très  grande  grâce,  et  espéroit  d'avoir 
un  jour  plus  de  part  que  jamais  aux  bonnes  grâces 
de  Sa  Majesté,  à  laquelle  il  le  supplioit  aussy  de  dire 
que,  soit  qu'il  demeurast  dix  heures,  ou  dix  jours,  ou 
dix  mois,  ou  dix  ans  dans  la  Bastille,  il  la  supplioit 
très  humblement  de  croire  qu'il  seroit  aussy  prest 
au  sortir  de  là,  d'aller  sacrifier  sa  vye  pour  son  ser- 
vice, que  sy  elle  luy  donnoit  maintenant  là  charge 
de  Connestable.  —  11  dit  aussy  à  l'exempt  en  dis- 
nant, qu'il  luy  donnoit  sa  foy  et  sa  parolle,  que  quand 
on  laisseroit  les  portes  de  la  Bastille  ouvertes,  il  n'en 
sortiroit  jamais  que  le  Roy  ne  l'en  tirast,  et  qu'il 
désavouoit  pour  ses  amis  tous  ceux  qui  parleroient 
pour  sa  liberté ,  ne  la  voulant  attendre  que  du  Roy 
seul,  et  de  la  cognoissance  que  le  temps  luy  donneroit 
de  sa  fldelHté.  Après,  il  se  mit  à  parler  en  riant  de 
diverses  choses,  et  l'exempt  l'ayant  encor  fort 
pressé  aprez  disner  d'aller  plustost  au  Sainct-Esprit 
qu'à  la  Bastille,  et  luy  ayant  mesmô  dit  qu'il  luy 
donnoit  encor  vingt-quati'e  heures  pour  y  penser. 
Monsieur  le  Colonel  respondit  qu'il  ne  falloit  pas 
différer  davantage,  et  qu'il  luy  tordoit  desjà  d'y 


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D*ARNADLD    d'ANDILLY.  487 

estre.  Et  ainsy  disant  adieu  à  MaSame  la  Marquise 
il  s'en  alla  acompagné  seullement  d'un  des  siens 
nommé  Clermont,  et  fit  mettre  l'exempt  à  la  poi^ 
tière  auprez  de  luy  avec  im  visage  et  une  constance 
au  delà  de  toutes  paroUes.  M,  de  Chaudebonne  se 
mit  dans  le  carrosse  et  l'acompagna  jusques  à  la 
Bastille,  à  la  porte  de  laquelle,  et  encor  après  qu'il 
fut  dedans,  l'exempt  le  pressa  derechef  avec  grande 
instance  d'en  sortir  pour  aller  au  Sainct-Esprit ,  et 
luy  dit  qu'il  luy  donnoit  encore  vingt-quatre  heures 
pour  y  penser,  ce  qu'il  refusa.  Incontinent  aprez 
M.  de  Luxembourg  le  vint  voir,  et  le  lendemain, 
jour  de  la  Feste-Dieu,  comme  il  estoit  prest  de 
se  confesser  pour  communier,  M.  de  Luxembourg 
estant  revenu,  le  pria  de  ne  le  pas  fère  jusques  à 
ce  qu'il  eust  eu  ordre  de  la  Cour  ;  ce  qui  fascha 
Monsieur  le  Colonel.  Et  depuis  ayant  eu  ordre  de 
la  Cour  de  le  resserrer ,  et  ne  laisser  parler  per- 
sonne k  luy,  il  le  mit  dans  la  chambre  de  Monsieur 
le  Prince,  et  ne  le  laissa  plus  promener  sur  les  tours. 
Mais  M.  de  Luxembourg  estant  incontinent  aprez 
allé  à  la  Cour,  il  en  rapporta  ordre  de  luy  laisser  en- 
tendre la  messe  tous  les  jours,  de  le  laisser  confesser 
et  communier  quand  il  voudroit,  de  le  laisser  pro- 
mener deux  fois  le  jour,  et  de  luy  bailler  encor  un 
page  et  un  lacquais. 

Le  sieur  de  Boislouet ,  exempt  susdit,  estant  re- 
tourné le  soir  mesme  à  Compiégne  ,  le  M.  de  la 
Vieville  luy  fit  dire  qu'il  y  avoit  mille  livres  à  gangner 
pour  luy  s'il  le  vouloit  voir  avant  que  voir  le  Roy, 


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(iSS       JOURNU  INÉDIT  D'ARBNAULD  D*ANDILLÎ. 

Mais  il  n'en  voulut  rien  fère  et  alla  trouver  M,  du 
Hallier,  duquel  il  avoit  receu  le  commandement, 
lequel  le  niena  chez  Sa  Majesté  ;  et  bien  gue  le  Roy 
fust  couché,  il  entra,  tira  son  rideau,  et  luy  présenta 
Boislouet  sans  avoir  voulu  auparavant  sçavoirdeluy 
ce  qui  s'estoit  passé.  Boislouet  conta  tout  au  Roy  en 
fort  homme  de  bien  ;  et  quand  il  luy  dit  les  injures 
de  Galeteau ,  le  Roy  tesmoigna  grand  mesconten- 
tem^t,  et  se  mordit  le  doigt.  » 


FIN  DE  L*APPBNDICB. 


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TABLE  DES  MATIERES. 


1614 

Pages 
Janvier.  —  Mort  de  M.  d'Attichy.  —  Dollé,  intendant.  — 
Barbin,  intendant  de  la  maison  de  la  Reine.  —  Duel  de  MM. 
d*Ouailly  et  Maignemt  contre  Bouteville  et  Chantemerie.  — 
Duel  de  M.  du  Pesché  contre  M.  d'Erouville.  —  Mort  de  Ca- 
vart.  —  Mariage  du  marquis  de  Sablé  avec  M"*  de  Souvré.  — 
Retraite  du  duc  de  Nevers.  —  Enlèvement  de  M.  de  Vertau. 

—  MM.  de  Luxembourg  et  Barrin.  —  M.  le  Prince  va  à  Châ- 
teauroux.  •—  Rappel  du  duc  d^Epemon.  —  Duel  de  MM.  de 
Bours-Montmorency  et  Bucan  contre  BiM.  de  ReAige  et  Des- 
bordes-Videncey.  —  M.  du  Maine  s'éloigne.  —  Duel  de  MM. 
des  Marests  et  de  Sainte-More  contre  le  marquis  de  Rouillac 

et  Saint^Vincent  —  Départ  de  M.  de  Bouillon .         1 

Fbvribr.  —MM.  de  Ventadour  et  de  Boisdse  envoyés  vers  M.  le 
Prince.  —  Départ  de  M.  de  Longuevillo.  —  Arrestation  de 
M.  de  Vendôme.  —  Le  maréchal  d'Ancre  va  à  Amiens.  — 
Duel  de  M.  de  Miraumont  contre  M.  de  Nausé.  —  Cadenet 
envoyé  en  Champagne.  —  Retour  de  MM.  de  Ventadour  et  de 
Boissise.  -r  Le  comte  de  la  Roche  piis  .à  la  Bastille.  —  M.  de 
Nevers  s'empare  de  Mézières.  —  Évasion  de  M.  de  Vendôme. 

—  Lettres  de  M.  le  Prince  à  la  Reine  et  au  Pariemeni ....         Q 

Mars.  —  M.  de  Thou  va  vers  M.  le  Prince 8 

Avril.  —  M.  le  Prince  dépôcbe  à  M.  de  Roban,  ^  Les  Princes 


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A90  TABLE    DES    MATIÈRES. 

Pages, 
à  Soissons.  —  On  traite  avec  M.  le  Prince.  —  Mort  du  Conné- 
table          8 

(jy avril  à  septembre^  lacune  dans  le  JoumaL) 

Sbptbmbbb.  —  M.  le  Prince  revient  vers  le  Roi 0 

OcTOBEB.  —  Le  Roi  va  au  Parlement  —  États-Généraux*  ...       10 

Novembre.  —  Affaire  de  l'enlèvement  d'un  prisonnier  par  le  duc 
d'Epemon. 11 

DÉCEMBRE.  —  Conseil  de  la  direction  changé.  —  Brouille  de 
M"*  de  Longueville  et  du  duc  de  Nevers.  —  Brouille  de  M.  de 
Villeroy  et  du  maréchal  d'Ancre»  —  Chambre  ardente.  —  La 
paulette.  —  Mort  du  maréchal  de  la  Chastre,  remplacé  par 
M.  de  Roquelaure 15 


4645 


Janvier.  -^  Remontrantes  du  Pariement  sur  l'article  fr  du  ca- 
hier du  Tienk^tat  ^  Ah-èt  du  Conseil  à  ce  sujet.  —  La  pau- 
lette. -^  Discussion  sur  l'art,  l*'.  —  Brouille  du  cardinal  de 
Sourdis  et  de  M.  le  Prince.  —  Duel  du  marquis  de  la  Force 
avec  M.  de  Grammont.  —  Réclamations  de  l'ambassadeur 
d'Angleterre  contre  le  cardinal  du  Perron.  —  État  des  finances. 
—  Propositions  d'Amàuld  l'intendant.  —  Violences  exercées 
envers  M.  de  Riberpré.  —  M.  de  Puisieux  chargé  des  deniers 
du  taillon.  —  Amboise  enlevé  à  Monsieur  le  Prince.  —  Sup- 
pression du  1*'  article.  —  Jugement  d'une  prise  faite  sur  les 
Espagnols  ps^  Barre  et  Fleury,  capitidnes  français.  —  Duel 
de  Livarrot  et  Auvilars  contre  la  Ferté  et  la  Tr^re.  —  Le  clergé 
récuse  la  juridiction  du  Parlement.  —  L'Évêque  d'Angers  et 
le  Chancelier « .  .  ;  .       23 

FÉVRIER.  —  Violences  de  M.  de  Bonnevàl  envers  M.  de  Cha- 
vaille.  —  Bonnevàl  condamné  à  mort.  —  Affaire  de  Marsillac 
et  de  Rochefort.  —  Conduite  de  Monsieur  te  Prince  enyét&  le 
Parlement  et  la  Reine.  —  Plaintes  du  député  Digoine.  — 
Excuses  de  M«  le  Prtoee.  —  DétibéHOloiis  ctoi  Étata.  — 


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TABLB    DES  MATIÉRBS.  A9i 

Pages. 
Brouille  de  M.  de  Souvré  et  de  M*  de  Laynes.  —  Clôture  des 

États.  —  Séance  royale. * 43 

BfARS.  —  M.  de  Luynes  a  le  goureniasieiit  d*Amboise.  —  Dëli-* 
bérations  du  Parlement  et  du  Conseil  sur  la  paulette.  •—  Les 
trois  Ordres  au  Louvre.  —  Mort  de  la  reine  Marguerite.  -* 
Soumission  de  M.  de  Vendôme.  .     .  .  * •       59 

Avril.  —  Réconciliation  du  ma^éebal  d'Ancre  avec  M.  de  Lon- 
gueville  et  M.  de  Vîlleroy.  —  Duel  de  M.  de  Bressieux  et  de 
M.  de  la  Valette.  —  Duel  du  vicomte  de  Rabat  et  de  M.  de 
Longnac.  —  Discussion  au  Conseil  sur  les  finances  ;  discours 
d'Amauld.  —  Le  Parlement  mandé  au  Louvre.  —  Remon- 
trances. -  Querelle  d'étiquette  au  sujet  de  la  queue  du  man- 
teau royal.  —  M.  de  Caudale,  premier  gentilhomme  de  la 
Chambre.  —  Soumission  de  Monsieur  le  Prince. 66 

Mai.  —  Duel  de  M.  de  Losières  et  de  M.  de  Madaillan.  ~-  Sur- 
séance à  la  révocation  de  la  paulette.  ~  Départ  de  Monsieur  le 
Prince  pour  Valéry.  —  Remontrances  du  Pariement  sur  les 
désordres  de  FÉtat.  •*-  Discussions  entre  le  Parlement  et  le 
Conseil.  —  Paroles  de  la  Reine.—  Arrêt  du  Parlement  cassé.        73 

Juin.  —  Délibérations  du  I^arlemeut  au  sujet  de  l'arrêt  cassé. 

—  Règlement  du  Coûseîl.  —  M.  le  Prince  à  Saint-Maur.  -^ 
Violences  de  M.  de  Canisy.   —   Querelle  d'étiquette  entee 

M"*  de  Longueville  et  la  duchesse  de  Guise 81 

Juillet.  —  M.  de  ViUeroy  député  vers  M.  le  Prince.  —  Préten- 
tions de  celui-ci.  —  Le  Roi  fait  tirer  douze  cent  mille  livres  de 
la  Bastille.  —  Conférences  des  Princes.  —  Assassinat  de  M.  de 
Prouville  par  Marianna.  —  Rupture  des  Princes  avec  la  Cour. 

—  Pontchartrain  envoyé  vers  Monsieur  le  Prince 88 

Août.  —  M.  de  Longueville  se  retire  à  Amiens.  —  Duel  de 
MM.  de  Montmorency  et  de  Portes  contre  MM.  de  Retz  et  de 
Vitry.  —  Le  maréchal  d'Ancre  va  â  Amiens.  —  Le  Parlement 
mandé  au  Louvre  au  sujet  du  départ  du  Roi  pour  son  ma- 
riage. —  Mesures  pour  la  sûreté  de  Paris  pendant  l'abseUce  du 
Roi.  —  M.  de  Chevry  nommé  intendant  des  finances. —  Ordre 
au  président  le  Jay  d'accompagner  le  Roi.  —  Manifeste  de 
Monsieur  le  Prince.  —  Le  maréchal  de  Boisdauphin  chargé 
de  commandement  général  de  l'armée.  — >  Lte  Conseil  délibère 


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&92  TABLB   DBS   IIATIÈAfiS* 

Pages. 
8UP  la  guerre.  ^  Le  Parlement  délibère  sur  le  danger  du  dé- 
part du  RoL  —  BL  de  Loménie  fils  a  la  survivance  de  la 
charge  de  son  père.  —  Départ  de  la  Reine-mère  et  du  Roi.— 
Arrestation  du  président  le  J&y.  —  Remontrances  du  Parle- 
ment —  Détails  sur  le  voyage  du  RoL  —  Administration  des 
affaires  pendant  l'absence  du  Roi.  —  Arrestation  du  sieur  de 
Foraise,  agent  de  Monsieur  le  Prince. ^3 

Septeiub.  —  Nouvelles  du  Toyage  du  Roi  et  de  la  marche  de 
son  armée.  ^  Ass^nblée  de  Grenoble.  —  Déclaration  du  Roi 
contre  Monsieur  le  Prince.  ^  Délibérations  du  Parlement.   .      112 

OcTOBRB.  —  Affaires  entre  les  armées  du  Roi  et  celles  de  M.  le 
Prince. —Mariage  du  Roi  à  fiurgos  et  de  Madame  à  Bordeaux. 

—  Prise  deClermont  par  le  maréchal  d'Ancre.  —  Passage  de 
Bony  par  l'armée  de  M.  le  Prince.  —  Conduite  du  maréchal 

de  Boisdauphin iid 

NovEMiiRB.  —  Échange  de  Madame  et  de  l'Infante.  —  Nouvelles 
de  la  guerre.  —  Le  Roi  et  la  jeune  Reine  font  leur  entrée  à 
Bordeaux.  —  Marche  des  armées. 126 

DÉCEMBRE.  —  M.  de  Guise ,  lieutenant  général  des  armées  du 
Roi.  —  Duel  de  M.  de  Montglat  et  de  M.  de  Vitry.  —  M.  de 
la  Roche-Guyon,  grand  louvetier.  —  M.  de  Rheims,  cardinal. 

—  L'armée  de  Monsieur  le  Prince  à  Oleron 129 


1616 


Janvier.  —  Affaires  entre  l'armée  du  Roi  et  celle  des  Princes. 

—  Départ  des  députés  de  l'Assemblée  de  Mîmçs.  —  Le  Roi 
arrive  à  Poitiers.  —  M.  de  Caudale  se  déclare  de  la  Religion. 

—  La  Conférence  de  Loudun  est  décidée,  —  Disgrâce  du 
conunandeur  de  Sillery,  de  MM.  de  Lorme  et  de  Guron. —  La 
Cour  arrive  à  Tours.—  Accident  dans  la  chambre  du  Conseil.      133 

FÉVRIER. — M.  de  Vendôme  se  prononce  pour  Monsieur  le  Prince.    • 

—  Brouille  entre  M.  de  Vendôme  et  le  marquis  deCœuvres. — 
Noms  des  députés  à  la  Conférence  de  Loudun.  —  Mort  do 


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TABLE   DBS   MATIÈRES*  ft9â 

Pages. 

Montalte,  médecin  <lelaReino-mère,  et  de  M.  Flenrance,  pré- 
cepteur du  Roi 137 

Mars.  —  Affaire  près  de  Château-Thierry,  entre  IL  de  Vitry  et 
M.  de  Novion.  —  Nouvelles  de  la  Conférence.  «-  Retour  de  la 
maréchale  d*Ancre  à  Paris. — Démêlés  du  marquis  de  Cœuvres 
avec  les  habitants  de  Crespy.  —  Nouvelles  de  Tarmée  et  de  la 
Conférence.  —  Retour  du  maréchal  d'Ancre  à  Paris.  —  Le 
marquis  de  Bonnivet  mis  &  la  Bastille.  —  M.  de  la  Vieuville 
achète  de  M.  de  Plainville  la  charge  de  capitaine  des  gardes. 

—  Mortde  M.  DoUé 142 

Avril.  —  Rigueurs  de  M.  d*Êpemon  en  Limousin.  —  Mort  de 
M.  de  Beaumont.  —  M.  de  Béthune  envoyé  en  Italie.  ~  Dé- 
part du  maréchal  d'Ancre.  —  Appel  de  M.  de  Vitry  par  le 
comte  de  la  Suze.  —  Mort  de  M.  de  la  Boulaye.  —  Les  sceaux 
retirés  au  chancelier •  .      153 

Mai.  ^  Paix  signée  &  Loudun.  —  Retour  de  la  Reino-mëre  à 
Paris.  —  Arrivée  du  Roi  et  de  la  Reine  dans  la  capitale.  — 
M.  du  Vair  garde  des  sceaux. — Les  Princes  viennent  trouver 
le  Roi  à  Paris.  —  M.  Barbin  nommé  contrôleur  général,  le 
président  Jeannin  surintendant,  et  M.  de  Castille  intendant  des 
finances. 162 

Juin.  —  Évasion  de  M.  de  Mareil.  —  Appel  de  M.  de  Montbazon 
par  le  baron  d'Anneval.  —  Le  sieur  de  Beau  veau,  condamné 
à  mort,  tiré  de  prison  par  commandement  du  Roi.  ^  Remon- 
trances du  Parlement.  ^  Préséance  contestée  au  garde  des 
sceaux  par  le  Parlement— M.  Mangot  nommé  secrétaire  d'État 
contre  la  volonté  de  M.  de  Villeroy.  —  Soulèvement  contre  le 
maréchal  d'Ancre.— Le  comte  d'Auvergne  sort  de  la  Bastille.      168 

Juillet.— Exécution  de  deux  palefreniers  du  maréchal  d'Ancre. 

—  Retour  de  quelques-uns  des  Princes. .  .  •  • 180 

Août.  —  Arrivée  de  l'ambassadeur  d'Angleterre  au  sujet  du 
mariage  de  M"*  Chrétienne.  —  Réorganisation  des  Conseils  du 
Gouvernement.  —  Reddition  de  Péronne  à  M.  de  Longueville. 

—  Démêlés  entre  Monsieur  le  Prince  et  le  maréchal  d'Ancre. 

—  Ce  dernier  se  retire  à  Caen.  —  Inimitié  de  M.  de  Guise 
et  du  maréchal  d'Ancre.  —  La  Reine-mère  veut  rétablir  l'au- 
torité du  Roi 183 


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ft91|  TABLB  DES  MàTIÈHPS. 

Pages. 

Septbmbki.  —  Arreitation  de  Ifonùeur  le  Pnnce  ;  détails  à  ce 
gujet.  —Départ  de  MM.  du  Maine,  de  BouiUoii  et  de  la  Tré- 
mouille. ~ M.  de  Vendôme  se  sauve.—  M.  de  Guise  et  M.  de 
JoinTÎUe  font  rejoindre  les  princes  à  Soissons.  —  D^art  de 
M.  le  président  le  Jay.  —  Pillage  de  la  maison  du  maréchal 
d'Ancre.  —  MM.  de  Thémines  et  de  Bfontigny  nommés  maré- 
chaux de  France.  —  Conduite  de  M.  de  Sully.  —  Mariage  de 
M^  de  Soissons  avec  M.  de  Longueyille.  —  Le  Roi  va  au  Paiv 
lement  faire  Térifier  la  déclaration  contre  les  Princes  absents. 

—  M.  le  comte  d'Auvergne  nommé  général  de  l'armée  du  Roi. 
«-  Duel  de  M.  de  Brantes  et  de  M.  de  Ryonne.  ^  On  envoie 
vers  les  princes  pour  traiter  avec  eux.  —  Conduite  de  M.  de 
Nevers.  —  Reddition  de  Chinon.  —  Retour  de  MM*  de  Guise 
et  de  Joinville  —  Mort  de  M.  de  la  Chastaigneraye.  —  M.  de 
Guise  va  à  Soissons  et  obtient  l'accommodement  des  princes.     19& 

Octobre. — Retour  du  maréchal  d'Ancre.— Il  se  réconcilie  avec 
M.  de  Guise.—  Brouille  entre  M.  d'Épemon  et  les  Rocbellois. 

—  M.  de  Luynes  grand  fauconnier.  —  Le  maréchal  d'Ancre 
fait  dresser  des  lettres  d'érection  de  son  marquisat  en  duché- 
pairie.  —  Mort  de  M.  de  la  Chevalerie.  —  Maladie  grave  du 

Roi.  —  M.  de  Lesdiguières  va  secourir  le  duc  de  Savoie.  .  •     317 

Novembre. — Changements  dans  les  Conseils  du  Gouvernement. 
— Exécution  de  Boursier,  accusé  d'avoir  voulu  tuer  la  Reine- 
mère.  —  M.  de  Lussay  envoyé  pour  favoriser  le  passage  du 
duc  de  Nemours  en  Savoie.  —  L'entrée  de  Reims  refusée  & 
M"*  de  Nevers  —  M.  de  Nevers  fait  piller  la  maison  de  Si 
appartenant  à  M.  de  la  Vieuville.  —  Bompar  assassiné  par 
Cusac.  —  M.  de  Blerancourt,  gouvsmeur  de  Péronne,  Mont- 
didier  et  Roye.  —  Duel  du  duc  de  Rohanneis  et  de  M.  de  la 
Frezeliëre.  —  Le  Roi  exige  que  M.  de  Nevers  rende  justice 
à  M.  de  la  Vieuville.  —  Résistance  opiniâtre  de  M.  de  Nevers. 

—  Examen  de  cette  affaire  au  Conseil  d'État.  —  Les  sceaux 
sont  retirés  à  M.  du  Vair  et  donnés  à  IL  Mangot.  —  M.  de 
Luçon  est  nommé  secrétaire  d'Etat  à  la  place  de  M.  Mangot. 

—  Le  maréchal  d'Ancre  part  pour  Rouen  où  il  va  tenir  les 
Etats.  —  Le  Roi  danse  son  premier  ballet.  —  MM.  de  Nevers 

et  de  Bouillon  se  fortifient S35 

DÉCEMBRE.  —  Retour  du  maréchal  d'Ancre.  —  Le  gouvernement 
de  la  Bastille  enlevé  à  IL  de  Thonines;  sa  conduite  à  ce  sujet, 
r—  Mauvais  état  des  finances.  — ^  Projets  du  Roi  pour  jr  pouiw 


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TABIB  DES  MiTIÈRBS.  A95 

Pages, 
voir.—  Oppetition  de  la  GoUr  des  Aides.—  Disœara  du  garde 

des  sceaux  et  du  président  Chevalier.  —  Sainte -Menebould 
repris  à  Bl.  de  Mevers.  —  Le  gouvernement  en  est  donné  à 
M.  de  Fossez.  —  M.  de  Schomberg  envoyé  en  amlMissade  ex- 
traordinaire en  AUemagne.  •  •  • S44 


I6<7 


jANvnA.  —  Mort  de  la  flUe  du  maréchal  d* Ancre.  —  Duel  de 
M.  de  la  Courbe  avec  M.  de  la  Beyne»  —  Le  marquis  de 
Cœuvres  refuse  de  payer  l'impôt  &  Laon  ;  ajournement  per- 
sonnel contre  lui.  —  Manifeste  de  M.  du  Mayne.  —  Réponse 
du  Roi  faite  par  M.  de  Luçon.  —  Déclaration  contre  M.  de 
Nevers.  —  M*  de  Rohan  arrive  à  la  cour.  M.  de  Thémines  va 
commander  en  Champagne. — Réconciliation  deLuynes  avec  la 
Reine-mère  et  le  maréchal  d'Ancre,  t—  Les  Princes  à  Soissons.      357 

FÉvRiBiu  •—  Le  comte  d'Auvergne  va  coomiander  en  quelques 
provinces. — Le  maréchal  d'Ancre  va  en  Normandie. -r- Affaire 
entre  les  troupes  de  M.  de  Candale  et  celles  de  M.  de  Ven^ 
dôme.  —  M"«  de  Vienne  enlevée  par  Saveuse.  —  Déclaration 
contre  MM.  de  Vendôme,  du  Mayne,  de  Bouillon.  —  M.  de 
JoinviUe,  grand  Chambdlan.  —  M.  de  Guise  va  à  Ch&teau^ 
Thierry* — Conventions  entre  MM.  de  Thémines  et  de  Praslin* 

—  Prise  de  Cufy  et  de  Vousy  par  le  maréchal  de  Montigny.  .      fi61 

Mars.  —  Vincenze,  secrétaire  du  maréchal  d'Ancre,  fait  prison- 
nier» —  La  Grange,  secrétaire  de  Monsieur  le  Prince,  mis  au 
Châtelet.  —  Siège  de  Richecour.  —  Les  Princes  se  séparent. 
—Confiscation  de  leurs  biens.— Prise  d'Antrin  et  de  Clamecy. 

—  Le  prince  de  Château-Porcien  et  le  marquis  de  Gallerande 
faits  prisonniers.  —  Armée  du  comte  d'Auvergne.  —  M.  de 
Richelieu,  maréchal  de  camp. — Siège  de  Saint-Pierre-le-Mous- 
tier.  —  Disgrâce  de  Mi  de  Fiesque.  —  Nouvelles  des  armées. 

—  M.  de  Nemours  arrive  à  la  cour.  —  M.  de  Rohan  vient  à 
Paris.  —  Prise  de  Pierrefonds.  —  M.  le  maréchal  d'Ancre 
revient  à  Paris,  —  Prise  de  Château-Porcien 266 

Avril.  —  Soissons  Investi.  —  Le  maréchal  d'Ancre  va  en  Nor- 
mandie. —  Prise  de  Rethel.  —  Calomnie  contre  la  Reine  im- 


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/i96  TABLB  DES  IIÀTIÈAB6. 

Pages, 
putée  par  le  btron  dlJxeUes  an  duc  de  Betlegarde.  *  Retour 
et  assâBstnat  du  maréchal  d'Ancre.^  Mauvais  traiteinents  en- 
vers la  Reinemère. —  M.  de  Vitry,  maréchal  de  France.  — ^Ar- 
restatko  de  la  maréchale  d'Ancre.  -*  Mauvais  traitements 
eiiveis  son  fils.  ^  Disgr&ce  de  Mangôt,  de  Tévêque  de  Luçon, 
arrestation  de  Barbin. —  Rappel  de  M.  de  Villeroy  ;  Jeannin, 
surintendant  des  finances  ;  du  Vair,  garde  des  Sceaux;  le  Chan- 
celier, chef  du  Conseil  ;  M.  de  Maupeou,  contrôleur  général 
des  finances.  —  Faveur  de  BL  de  Luynes.  ^  Mariage  du  duc 
de  Longueville  avec  Bl"*  de  Soissons. 276 

Mai.  -^  Départ  de  la  Reine-mtîre  pour  Blois.  —  Condamnation 
de  du  Travail.  —  Retour  des  Princes.  —  Mort  du  président 
de  Thou.  —  M.  Déageant,  intendant  des  finances.  —  Retour 
du  comte  d'Auvergne. — Assassinat  de  M.  d'Orvilliers  Vialart. 

—  M.  de  Vitry,  reçu  conseiller  au  Parlement.  —  L'Assemblée 
de  la  Rochelle  se  sépare.  —  Madame  la  Princesse  entre  à  la 
Bastille.—  Retour  de  M.  de  Guise.—  Duel  de  M.  de  la  Valette 

avec  IL  de  Schomberg 298 

Juin.  —  BL  de  Luynes,  conseiller  au  Parlement  —  Femme  de 
Gliartres  accusé  d'avoir  voulu  tuer  le  Roi.  —  Différend  entre 
MM.  de  Guise  et  de  Nevers..—  Arrivée  de  l'archevêque  de 
Pise,  Ambassadeur  de  Savoie. 306 

Juillet.  —  Condamnation  et  exécution  de  la  maréchale  d'Ancre. 

—  Arrivée  de  M.  de  Montmorency  et  du  prince  de  Sedan.  — 
Livre  des  quatre  ministres  de  Charenton  ;  ajournement  per- 
sonnel. •—  Prise  de  Fougères  par  le  baron  de  Guémadeuc  — 
Il  est  mis  à  la  Bastille.  —  Prise  de  Verceil  par  dom  Pedro  de 
Tolède 308 

AocT.  —  M.  de  Modène  envoyé  vers  la  Reine-mère.  —  L'évêché 
de  Lisieux  donné  au  garde  des  Sceaux.— Déclaration  touchant 
les  Clinquants.  —  Don  de  la  confiscation  de  la  maréchale 
d'Ancre  à  M.  de  Luynes.  —  Complot  pour  tirer  Monsieur  le 
Prince  de  la  Bastille. 312 

Septembre.  —  Paix  de  Savoie.  —  Arrivée  du  général  des  Capu- 
cins. —  Mort  du  maréchal  de  Montigny.  —  Le  maréchal  de 
Vitry,  gouverneur  du  Berry.  —  Mariage  du  duc  de  Luynes 
avec  M^^  de  Montbazon.—  Mort  de  M.  de  Refuge.  —Monsieur 
le  Prince  conduit  à  Vincennes.  —  Condamnation  et  exécution 


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TABLE    DBS   MATIÈRES.  &97 

Pages 
de  Geniers.  —  Démarches  de  M.  de  Sutly  pour  rentrer  aux 
finances.  —  Le  marquis  de  Cœuvres,  ambassadeur  à  Rome. 
—  Exécution  de  Guémadeuc 314 


Octobre.  —  Convocation  de  TAssemblée  des  notables  à  Rouen. 
—  Le  Roi  veut  supprimer  la  vente  des  gouvernements.  — 
M.  de  Modène  envoyé  à  Rlois.  —  Mort  d'Arnauld  Tintendant.      320 

Novembre.  —  M.  d'Epemon  revient  à  Paris.  —  Départ  du  Roi 
pour  Rouen.  —  Amauld  d'Andilly  y  suit  la  Cour.  —  Conduite 
de  M.  de  Luynes  en  arrivant  à  Rouen.  —  fl  est  chargé  d'ou- 
vrir les  Ëtats  en  sa  qualité  de  lieutenant-général  au  gouver- 
nement de  Normandie,  —Plan  de  l'Assemblée.  —  Discours 
de  M.  de  Luynes.  —  Arrivée  du  Roi  à  Rouen 320 

Décembre.  —  Ouverture  de  l'Assemblée  des  Notables.  —  Con- 
ventions entre  la  Noblesse  et  les  officiers  des  Parlements.  — 
Liste  des  membres  de  l'Assemblée  et  tableau  de  leurs  positions 
respectives. —  Travaux  de  l'Assemblée. — ^Mort  de  M.  de  Ville- 
roy.  —  Madame  la  Princesse  accouche  d'un  enfant  mort-né  ; 
l'évoque  de  Paris  refuse  de  lui  faire  des  obsèques.  —  Le  car- 
dinal du  Perron  présente  au  Roi  le  cahier  des  délibérations 
de  l'Assemblée.  —  Clôture  de  ladite  Assemblée.  -^  Départ  et 
retour  du  Roi. 327 


1648 


Janvier.  —  Retour  du  Roi  à  Paris.  —  Les  Cours  souveraines 
vont  le  féliciter.  —  Discussions  sur  la  paulette.  —  Sa  révo- 
cation. —  M.  de  Modène  va  en  Piémont.  —  Remontrances  du 
Roi  au  Parlement.  —  M.  de  Candale  se  refait  catholique.  — 
M.  de  Cadenet  va  trouver  la  Reine-mère  à  Blois.  —  M.  de 
Cussé  nommé  évêque  de  Nantes.  —  Le  Roi  congédie  les  mem- 
bres de  l'Assemblée  de  Rouen 34/t 

FÉVRIER.  —  Exil  de  MM.  de  Richelieu  et  de  Pont-Courlay.  — 

33 


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&98  TABLE   DES    MATIÈREB. 

Pages. 
M.  de  RusceRay  frappé  par  le  marquis  de  Rouillac;  détails 

sur  cette  affaire.  —  M.  de  Roissy  envoyé  vers  la  Reine-mère. 

^  Rétablissement  du  collège  des  Jésuites  à  Paris.  —  Mort 

du   prince  d*Orange.  —  M.  le  colonel  d*Ornano  part  pour 

Orange  à  ce  sujet 348 

Mais.  —  M.  de  Marsillac  envoyé  vers  le  prince  Maurice  devenu 
prince  d*Orange.  —  Mariage  du  comte  de  Brissac  avec  M"*  de 
Schomberg.  —  M.  de  Montbazon  arrange  l'affaire  de  M.  de 
Saveuse  au  sujet  de  Tenlèvement  de  M"*  de  Vienne.  -- 
Querelle  du  marquis  deMarigny  et  du  chevalier  de  Vendôme. 

—  Incendie  du  Palais-de-Justice.  —  Mort  de  M"*  de  Nevers. 

—  Procès  entre  M.  et  M"*  de  Caudale.  —  M.  de  Courtenay- 
Blaineau  mis  à  la  Bastille.  —  BL  do  la  Trémoille  arrive  à 
la  Cour.  —  Le  duc  de  Sully  va  siéger  à  la  Chambre  de  l'Edit. 

—  Boisguérin  accusé  d'avoir  voulu  assassiner  le  Roi.  — 
M.  de  Boumonville  remplacé  à  la  Bastille  par  M.  de  Launay. 

—  M.  de  Montmorency  arrive  à  la  Cour.  —  Procès  de  Barbin  ; 
lettres  de  la  Reine-mère 352 


Avril.  —  Barbin  mis  à  la  Bastille  avec  MM.  de  Boumonville, 
de  la  Ferté,  TEvesque,  la  Rose  et  le  sergent  Lisy.  —  L'évèque 
de  Paris  promu  au  cardinalat.  —  Le  résident  du  duc  de 
Florence  reçoit  Tordre  de  quitter  la  France.  —  Exil  de 
révèque  de  Luçon.  —  Remontrances  du  Parlement  au  sujet 
de  la  paulette.  —  Prêtre  de  Caen  accusé  d'avoir  voulu  tuer 
le  Roi.  —  Affaire  de  M.  de  Vaillac  et  de  M.  du  Vair;  duel 
à  ce  sujet.  —  M.  de  Sully  quitte  la  Cour.  —  Plaintes  des 
ducs  et  pairs  contre  le  garde  des  sceaux  ;  question  de  pré- 
séance. —  Querelle  entre  M.  d'Epemon  et  le  garde  des  sceaux. 
~~  Les  maréchaux  de  France  réclament  la  préséance  sur 
les  ducs  et  pairs.  —  Le  gouvernement  de  Monsieur  enlevé 
à  M.  de  Brèves  H  donné  au  comte  de  Lude.  —  M.  d'Epemon 
exilé  à  Metz. 359 


Mai.  —  M.  des  Portes-Baudouin,  seigneur  de  Souspire,  inten- 
dant des  finances  à  la  place  de  M.  Déageant;  M.  Bardeau, 
secrétaire  du  Conseil  à  la  place  de  M.  des  Portes-Baudouin.  — 
Duel  de  MM.  de  Quinsay  et  de  Maussy.  —  Le  comte  d'Au- 
vergne revient  à  la  Cour.  —  Le  duc  de  Rhetelois  nommé 
gouverneur  de  Champagne.  —  M.  de  Mayenne,   gouverneur 


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TABLE    DES   MATIÈRES.  A99 

Pages, 
de  Guyenne  ;  M.  de  Luynes,  gouverneur  de  riIe-de-France  ; 

M.  le  colonel  d'Ornano,  lieutenant-général  en  Normandie.  — 

Député  de  Lyon  frappé  par  M.  de  Sain^CIlaumont.  —  Les 

frères  de  Slty ,  arrêtés.  —  Le  colonel  d'Ornano  va  à  Blois.  — 

Le  poète  Durand,  arrêté 372 


JoiN.  —  Le  duc  de  Nemours  présente  à  la  Cour  M ^  d'Aumale, 
sa  femme.  —  Reddition  de  Verceil.  —  Le  Roi  va  à^Lésigny. 
—  Incendie  au  port  au  Foin 374 

Juillet.  —  Marsillac  et  Lesec  mis  à  la  Bastille.  —  Le  Roi  va  à 
Saint-Cermain.  —  Durand  et  François  de  Sity,  roués  ;  André 
de  Sity,  pendu.  —  M.  Ribier,  conseiller  d*Etat.  —  Edit  sur 
les  propositions  soumises  aux  Etats<jénéraux  et  à  l'Assemblée 
de   Rouen •  .  .  .      375 

AooT.  —  Mort  de  M.  de  Boucart,  remplacé  par  M.  de  Brantes.  * 
Décret  du  Grand<Ionseil  contre  M.  de  Persan.  —  Disgrâce  de 
MM.  de  Ruscellay,  de  Sardiny,  de  Jouy,  de  Montpouillan.  — 
Fôte  de  Saint-Louis  célébrée  pour  la  première  fois.  —  Arrêt 
du  Grand-Conseil  contre  Barbin  et  ses  coaccusés 376 


Septembre.  —  Mort  du  cardinal  du  Perron;  le  cardinal  de  la 
Rochefoucauld,  grand  aumônier,  à  sa  place.  —  M"«  la 
Princesse  accouche  de  deux  enfants  morts.  —  Voyage  du  Roi. 
—  Le  P^reAmoux  envoyé  à  Blois;  lettre  du  Roi  à  la  Reine- 
mère.  —  M.  de  Luynes  achète  la  Fère  à  M.  de  Vendôme.  .  .      379 

Octobre.  —  Le  Roi  va  à  Soissons.  —  M.  de  Montmorency  va 
en  Languedoc.  —  Suite  du  voyage  du  Roi.  —  M.  de  Longue- 
ville  revient  à  la  Cour.  —  Retour  du  Roi.  —  M.  de  Modène 
envoyé  à  Blois.  —  Disgrâce  de  Fiesque,  de  Bautru,  de 
BouUanger,  du  père  Crochart.  —  Comédie  de  la  Reine.  — 
MM.  de  Béthune  et  de  Modène  vont  au  devant  du  prince- 
cardinal  de  Savoie.  —  Disgrâce  de  la  comtesse  de  Moret.  .  .      381 


Novembre.  —  Arrivée  du  cardinal  de  Savoie  ;  il  demande  la 
main  de  M"*  Chrétienne  pour  le  prince  de  Piémont.  — 
Le  Roi  le  mène  à  Saint-Germain.  ^  Le  colonel    d'Ornano 


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500  TABLE    DES    MATIÈRES. 

Pages, 
va  en  Normandie  prendre  possession  de  sa  charge  de  lieu- 
tenant-général; discours  qu'il  prononce  à  cette  occasion.  — 
M»  du  Fargis  envoyé  en  Espagne.  —  M.  de  Cadenet  va  à 
Blois  et  à  Amboise.  —  M.  de  Vaudémont  arrive  à  Paris  avec 
le  Prince  son  fils» ^ 383 

DÉCEMBRE.  —  Les  Espagnols  de  la  Maison  de  la  Reine  sont 
congédiés.  Maladie  de  la  Reine.  —  Disgrâce  de  M.  Déageant 
et  de  M.  de  Lassé.  —  M"*  de  Luynes,  surintendante  de  la 
maison  de  la  Reine;  M*"*  du  Vemet,  dame  d*atours.  — 
Querelle  du  comte  de  Soissons  et  du  prince  de  Vaudémont. 
—  M.  de  Vaudémont  retourne  en  Lorraine. 389 


1619 


Janvier.  —  M.  de  Cadenet  nommé  ministre  à  la  place  de 
M.  Déageant.  —  M.  du  Fargis  revient  d'Espagne.  —  Le 
contrat  de  mariage  de  Madame  Chrétienne  avec  le  prince 
de  Piémont  est  signé.  —  Mort  de  la  duchesse  d'Angoulème. 
—  Mariage  du  duc  d'Elbœuf  avec  M"*  de  Vendôme.  —  Mort 
de  la  princesse  d'Orange.  ^  M.  d'Épemon  part  de  Metz  sans 
congé  du  Roi  pour  aller  délivrer  la  Reine-mère 394 

FÉVRIER.  —  M.  de  Guise  part  pour  aller  poursuivre  les  pirates 
d'Alger. —  Arrivée  du  prince  de  Piémont.  —  Mariage  de  Ma- 
dame Chrétienne.  ^Différend  entre  le  duc  de  Mayenne  et  le 
maréchal  de  Roquelaure.  —  Évasion  de  la  Reine-mère  du 
château  de  Blois.  —  Elle  arrive  à  Angoulême.  —  Correspon- 
dance entre  le  Roi  et  la  Reine-mère.  *  Le  Roi  mande  M.  de 
Guise.  —  Le  maréchal  de  Vitry  revenu  à  la  Cour  est  con- 
gédié par  le  Roi.  —  M.  de  la  Chesnaye  envoyé  par  te  Roi 
vers  M.  de  Bouillon  ;  réponse  de  celui-ci 398 

Mars.  —  Le  Roi  commande  à  M.  de  Luçon  d'aller  trouver  la 
Reine-mère.  —  M.  de  Luçon  part  d'Avignon  ;  il  est  arrêté  à 
Vienne,  conduitii  Lyon,  rerais  en  liberté  par  M.  d'Alincourt 


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TABLE   DES   MATIÈRES.  501 

Pages, 
et  repart  pour  Augoulême.  —  Le  Père  Suffren  se  rend  auprès 

de  la  Reinennère.  —  Le  prince  cardinal  de  Savoie  retourne 
en  Piémont.  —  Offres  du  Roi  à  M.  de  Saint-Luc.  —  Disgrâce 
du  comte  de  la  Roche-Guyon.  —  Mécontentements  du  Par- 
lement. —  Séance  royale  au  Parlement.  —  Édits  des  petits 
sceaux  et  de  revente  de  quelques  domaines.  ^  MM.  de 
Béthune  et  de  Bérulle  envoyés  vers  la  Reine-mère.  —  Lettre 
de  la  Reine-mère  apportée  par  M.  Villiers  Saint-Genest.  — 
Duel  du  jeune  Villequier  avec  le  jeune  Bouteville.  —  M.  de 
Blainville  ambassadeur  en  Lorraine.  —  Maladie  de  Monsieur 
le  Prince  ;  le  Roi  lui  renvoie  son  épée.  —  Le  Roi  envoie  vers 
M.  de  Sully  qui  résiste  aux  avances  de  la  Rèine-mère.  .  .  .      ^07 

Avril.  —  Reddition  de  Boulogne  aux  armes  du  H^.  —  Retour 
à  la  Cour  du  maréchal  de  Vitry.  —  M.  de  la  Trémoille  revient 
de  Sedan,  où  il  avait  épousé  M"*  de  Bouillon.  —  Le  cardinal 
de  la  Rochefoucauld  envoyé  vers  la  Reine-mère.  —  Prise  de 
l'abbaye  d*Uzerche  par  M.  de  Schomberg.  —  Le  comte  de 
Boullay,  ambassadeur  du  duc  de  Lorraine  ;  il  est  nommé 
colonel  des  Vallons.  —  M.  de  la  Valette  désarme  les  habitants 
de  Metz.  —  M.  de  Brantes,  capitaine  des  chcvau-légers  du 
Roi  à  la  place  de  M.  de  la  Curée.  —  M.  de  Traisnel ,  envoyé 
comme  ambassadeur  extraordinaire  en  Angleterre 415 

Mai.  —  Départ  du  Roi  pour  Orléans.  —  Mort  de  la  maréchale  de 
Fervaques. —  La  Reine-mère  accepte  les  propositions  de  paix. 
—  M.  de  Nevers  diargé  du  commandement  en  Champagne. 
*—  Traité  d'Angoulême  entre  le  Roi  et  la  Reine-mère.  — 
M.  de  Marousan  envoyé  à  Angoulême.  —  Le  Roi  va  à  Blois 
et  à  Amboise.  —  Succès  de  M.  Nevers  —  Licenciement  de 
de  l'armée  du  Roi.  —  Le  Roi  va  à  Tours.  —  Le  comt»  de 
Brennes  envoyé  par  la  Reine-mère  vers  le  Roi  ;  son  insolence 
envers  M.  de  Luynes. Û19 


Juin.  —  M.  de  la  Chesnaye  envoyé  à  Angoulême.  —La  Reine- 
mère  désavoue  M.  de  Brennes;  cabale  de  M.  de  Russelay. 
—  Le  prince  de  Piémont  va  à  Angoulême.  —  L'Ambassadeur 
d'Angleterre  va  à  la  Cour  à  Tours.  —  Retour  du  Marquis 
de  Traisnel.  —M.  de  Mayenne  vient  trouver  le  Roi  à  Tours 
avec  la  noblesse  de  Guyenne.  —  La  Reine-mère  se  démet  du 
gouvernement  de  Normandie  en  échange  de  celui  d'Anjou.  -^ 


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502  TABLE   DES   MATIERES. 

Pa^es. 
Mutations  dans  le  Gouvernement  des  p.laces  d'Anjou.  — >  Le 
marquis  de  Mosny,  mécontent  de  la  Reine-mère,  se  rend  à 
la  Cour •....., 426 


Juillet.  —  Mort  de  Gallati,  colonel  du  régiment  des  Suisses  ; 
nominations  dans  ce  corps  à  la  demande  de  M.  de  Bassom- 
pierre.  —  Le  comte  Henry,  frère  du  prince  d'Orange,  vient 
trouver  le  Roi  à  Amboise.  ~  M.  de  Richelieu  est  tué  en  duel 
par  le  marquis  de  Thémines.  —  M.  de  Russelay  mécontent 
de  la  Reine-mère  et  de  M.  de  Luçon  arrive  à  la  Cour.  — 
-M.  de  Montbazon  envoyé  vers  la  Reine-mère  pour  la  prier  de 
revenir  auprès  du  Roi.  —  M.  de  Vendôme,  général  de  Tarmée 
envoyée  pour  prendre  Concameau.— Disgrâce  de  M.  Déageant; 
il  se  retire  en  Dsophiné ,  .  .  .  .      h^i 


Août.  —  M.  de  Gadenet  achète  la  comté  de  Maillé.  —  M.  do 
Longueville  reçoit  le  gouvernement  de  Normandie  ;  M.  de 
Luynes,  celui  de  Picardie  ;  M.  de  Montbazon,  celui  de  Tlle-de- 
France;  M.  de  Gadenet  est  nommé  lieutenant-général  en  Nor- 
mandie. —  Prise  de  Concarneau  par  les  capitaines  la  Besne  et 
la  Gourbe.  —  Mort  de  M.  de  Ghambret  —  MM.  de  Praslin  et 
de  SaintrGéran  sont  nommés  maréchaux  de  France.  —  Ma- 
ladie de  Monsieur.  —  Naissance  d'Anne-Geneviève  de  Bourbon 
(la  duchesse  de  Longueville) .  —  La  Reine-mère  part  d'An- 
goulème  pour  venir  à  la  Gour  ;  cadeaux  qu'elle  fait  au  duc 
d'Épemon  et  à  ceux  qui  l'ont  assistée.  ^  Duché-pairie  de 
M.  de  Luynes  et  de  M.  de  Lesdiguières  ;  discussions  à  ce 
sujet  au  Parlement.  .  .  ^ hhO 


Septembre.  —  M.  de  Schomberg  est  nommé  surintendant  des 
finances  ;  il  prend  Arnauld  d'Andilly  en  qualité  de  premier 
commis.  —  Entrevue  du  Roi  et  de  la  Reine-mère  à  Gouzières. 
—  Suite  du  voyage  du  Roi  et  de  la  Reine-mère.  —  Assemblée 
des  Réformés  à  Loudun. — États  de  Bretagne.  — Mort  du  comte 
du  Lude.  —  Le  colonel  d'Ornano  le  remplace 4A6 


Octobre.  —  Le  Roi  va  à  Gompiègne.  —  Les  députés  de  l'As- 
semblée de  Loudun  se  rendent  auprès  du  Roi,  —  Le  Roi  va  à 
GhantiUy.^  Mise  en  liberté  de  M.  le  Prince;  il  va  trouver  le 
Roi  à  Ghantilly 451 


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TABLE    DES    MATIÈRES.  503 

Pages. 
Novembre.  —  Suite  du  voyage  du  Roi.  —  M.  de  Luynes  fait 

le  serment  de  duc  et  pair  ;  détails  sur  la  séance  du  Parle- 
ment à  ce  sujet.  —  Déclaration  de  l'innocence  de  Monsieur 
le  Prince - 453 

DÉCEMBRE. — M.  deBUdnville  achète  de  M.  de  la  Rochefoucauld 
la  chaiige  de  Maître  de  la  garde-4t>be.  —  Promotion  de  che- 
valiers du  Saint-Esprit.  — M.  de  Gadenetest  nommé  maréchal 
de  France.  —  Différend  entre  Monsieur  le  Prince  et  le  comte 
de  Soissons  au  sujet  de  la  serviette  du  Roi.  —  M.  de  Nemours 
fait  appeler  M.  de  Guise 456 


Pin    DR    LA   TABLE    DRS    MATIERE.^. 


Paris.  —  Typographie  A.  Wittcrshcim,  8,  rue  Montirioi'ency. 


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ERRATA. 


P.  XVI,  ligne  17  et  18,  j'ajouterai  que  ce  défaut  môme  ajoute  encore  à  la 

valeur  :  //*^z  j'ajouterai  que  ce  défaut  même  contribue  à  la  valeur. 
P.  XXVI,  lig.  19,  d'Andilly  ;  là  chque  fait,  lisez  d'Andilly  ;  là,  chaque  fait. 
P.    18 ,  lig.  18,  envoyaprier,  lisez  envoya  prier. 
P.    98 ,  lig.  8,  contre  ce  qui  est  des  registres,  lisez  es  registres. 
P.  105,  lig.  18,  pouvoir  témoigner ,  lisez  pouvoit  témoigner. 
P.  106,  lig.  12  et  13,  il  reçoit  lettres,  lisez  il  reçut  lettres. 
P.  109,  lig.  9,  affaire  à  un,  lisez  affaire  à  Tun. 
P.  111,  lig.  11,  M.  du  Plessis  y  vid  Sa  Majesté,  sembla  réprouver,  lisez 

M.  du  Plessis  y  vint.  Sa  Majesté  sembla  réprouver. 
P.  120,  lig.  6,  à  Montmeril,  lisez  à  Montmirel. 
Ib.    lig.  14,  Planty,  lisez  Plancy. 
Ib,    môme  lig.,  et  son  canon  à  gué^  lisez  canota  gué. 
P.  122,  lig.  6,  paraissent,  lisez  paroissent* 
P.  129,  lig.  3,  Les  villes  de  Tartau,  lisez  Tartas. 
P.  133,  lig.  17,  rencontre  les  carabins,  lisez  rencontra. 
P.  139,  sans  commissions  du  Roy,  lisez  sans  commission. 

Ib,    lig.  24,  de  Noyons,  lisez  de  Noyon. 
P.  143,  lig.  22,  que  Ton  n*aist  fait,  lisez  que  Ton  n'eust  fait. 
P.  ie8,  lig.  7  et  18,  M.  Mareil  du  Drac,  lisez  Mareuil  du  Drac. 
P.  171,  lig.  1,  se  le  faire  amener.  Et  puis,  lisez  se  le  faire  amener,  et  puis. 
P.  174,  lig.  13  et  14,  de  se  départir.  Il  lui  dit.  Usez  de  se  départir,  il 

lui  dit. 
P.  194,  lig.  3,  exent  des  garder,  lisez  exempt  des  gardes. 
P.  207,  lig.  4,  qui  y  ont  porté.  Leurs  inajestez,  lisez  qui  y  ont  porté,  leurs 

majestez. 
P.J09,  lig.  5,  poury  servir  le  Roy,  lisez  pour  y  servir  le  Roy. 


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506 

p.  226,  lig.  5,  Gonft 
P.  240,  lig.  21,  et  a< 
P.  246,  lig.  8,  pour 
P.  267,  lig.  21  et  22, 
P.  307,  lig.  6,  savoi! 
P.  312,  lig.  15,  qu'e] 
P.  317,  lig.  15,  jusq 
P.  319,  lig.  8,  Envii 
P.  327.  lig.  0,  coma 
P.  346.  lig  10,  par 
bouche,  Moi 
P.  347,  lig.  17,  ha«] 
une  seule  pi 
P.  366,  lig.  4,  j'y  ay 
P.  411,  lig.  4  et  16, 
P.  410,  lig.  13  et  U 
P.  429,  lig.  17,  80  n 
P.  443,  lig  20,  Chiu 
P.  465,  lig.  24,  a  ok 
Jb.  lig.  25,  cont 
Ib,  lig.  28,  sur 
P.  482,  lig.  25,  de  < 


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