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CONTRE-POISON |
LA CONFEDERATION
C'EST LE SALUT DU BAS-CANADA
Il faut se Défier des Ennemis de la Confédération
MONTREAL
TYPOGRAPHIE D'EUSEBE SENÉCAL,
Rue St. Vincent, No. 6, 8 et 10.
1867
i,T
tCélS
PREFACE
Depuis le 1er juillet (1867) le Bas-Canada est régi par
un nouveau mode de gouvernement. Il n'est plus le
Bas-Canada, mais la " Province de Québec ; " avec ce
vieux nom français qui nous a été rendu, on nous a
donné un Gouverneur français et toutes les âmes vrai-
ment patriotiques, ont tressailli d'allégresse et d'un noble
orgueil, lorsque les journaux nous ont appris, que le
canon de la vieille citadelle de Québec avait tonné sa
grande voix pour saluer l'arrivée du premier gouver-
neur français depuis 1760 ! ! !
On nous a séparés du Haut-Canada, nous nous appe-
lons la Province de Québec, nous avons un gouver-
neur Canadien-français, le deuxième depuis rétablissement
du pays, nous allons avoir notre propre gouvernement et
nos propres chambres, où tout se fera par et pour les
Canadiens-français, et en français, Il faut être renégat,
ou, ce qui revient au même, annexioniste, pour ne pas se
trouver ému jusqu'au larmes, pour ne pas sentir son
cœur battre d'une joie indescriptible et d'une bien légi-
time fierté à la pensée de ces glorieux résultats du patrio-
tisme et de l'énergie indomptable de nos hommes d'état,
de nos chefs politiques qui, cent ans après la conquête
du pays par l'Angleterre, ont décidé celte dernière, tou-
chée de notre héroïsme et de notre loyauté, à nous rendre
à nous mêmes, à nous restituer notre autonomie com-
plète et à confier le dépôt sacré de nos traditions na-
tionales à un gouvernement choisi parmi nous et com-
posé des nôtres.
A qui devons-nous ces immenses bienfaits ? à qui la
nation canadienne française reconnaissante doit-elle éle-
ver dans son cœur un monument d'éternelle gratitude?
C'est ce que nous allons examiner dans les quelques
notes qui suivent. Nous avons cru quià la veille des
élections un petit travail démontrant succinctement
l'excellence de la confédération, le caractère de ceux qui
la soutiennent et la tendance et les principes ou plutôt
l'absence de principes de ceux qui la combattent, serait
utile au pays et notamment aux Canadiens- français pour
les guider dans le choix de leurs représentants et leur
faire connaître leurs véritables amis comme leurs véri-
tables ennemis.
Nous le ferons sans parti pris comme sans passion.
Etranger aux partis du jour, retiré de la vie publique
depuis bien des années, ayant toujours suivi de près la
marche des événements, nous nous croyons en état, —
appuyé que nous sommes sur la boussole infaillible des
grands principes religieux et sociaux qui seuls peuvent
faire vivre les peuples et les conduire à l'immortalité, —
d'apprécier et juger sainement les choses, comme nous
pensons avoir acquis le droit de dire franchement et im-
partialement la vérité à tout le monde.
Nous promettons la vérité et l'impartialité, et nous
tiendrons notre parole ; mais cela ne veut pas dire que
nous serons froid et indifférent. Nous avons au milieu
de nous des lâches, des hypocrites, des traîtres, qui font
bien tout leur possible pour cacher l'oreille de l'âne et
endormir la surveillance des vrais patriotes. Quelque-
fois pourtant, ils s'échappent et percent, comme dans le
guet-apens du Club St. Jean-Baptiste. Ma foi ! si nous les
rencontrons, nous ne pouvons nous engager à rester
maîtres de nous et, si nous avons une cravache à la
main, elle pourrait bien aller malgré nous labourer leur
figure flétrie et déjà entamée par le crime.
Alphonse B.
Montréal, 25 juillet 1867.
CONTRE-POISON
LA CONFEDERATION
C'EST LE SALUT DU BAS-CANADA
IL FAUT SE DEFIER DES ENNEMIS DE LA CONFEDERATION.
LA CONFÉDÉRATION ÉTAIT-ELLE DEVENUE NÉCESSAIRE ?
Gesta Dei per Franco*.
C'est la Foi qui a fondé le Canada, et c'est elle qui le main-
tient et fera sa gloire. " Noblesse oblige " est un proverbe aussi
Trai pour les peuples que pour les individus. Les pieux fonda-
teurs du pays n'ont pas, comme les étrangers qui vinrent après,
été amenés ici par l'espoir du gain, du lucre et de la spéculation.
Gagner des âmes à Dieu, conquérir un nouvel empire au Christ,
tel était leur désir, telle était leur mission. Un roi très-chrétien,
comme nous l'a encore prouvé la si belle histoire de l'abbé Faiilon,
s'associa à ces sublimes élans du zèle catholique, et cette heureuse
association de l'autorité royale avec les efforts du missionnaire
ont établi et colonisé la Nouvelle-France, d'où rayonna, plus tard,
le mouvement religieux qui fit sentir son influence bienfaisante
jusqu'aux coins les plus reculés de l'Amérique.
Ces débuts, bénis de Dieu, ne se démentirent pas. La Nou-
velle-France fut toujours un peuple de braves, de martyrs et de
héros. Et lorsque, après un siècle et demi de luttes gigantesques
avec les barbares, les colonies anglaises et l'Angleterre, le peuple
de la Nouvelle-France, abandonné de la mère-patrie, épuisé d'ef-
forts, d'hommes et de ressources, fut obligé de se rendre au vain-
queur, il avait déjà assez excité l'estime et l'admiration de ce
dernier pour en obtenir la garantie du libre exercice de sa Foi,
de ses institutions, ses lois et us et coutumes : c'était presque
tomber en triomphateur.
La Providence protégeait visiblement ce petit peuple et avait
les yeux fixés sur lui. L'Angleterre fit tout ce qu'elle put. de
temps à autre, pour nous arracher notre langue et notre religion.
Vains efforts ! Un événement imprévu, une guerre, un change-
ment de gouverneur, une intervention épiscopale arrivait toujours
à propos pour déjouer l'astuce et la perfidie à la veille de réussir.
Fatigues de nous voir grandir en dépit de toutes les entraves
jetées sur notre voie, quelques ennemis profitèrent de nos troubles
de 1837-1838 pour nous imposer, en 1840, l'Union des Canadas.
C'était le coup de mort de notre nationalité, criaient ceux qui ne
voient dans l'histoire que le jeu du hasard. On sait comment ils
ont eu raison. En 1760, nous étions 60,000 habitants ; en 1861,
nous avions atteint le chiffre de neuf cent mille âmes ! ! ! Il faut
compter avec un peuple aussi nombreux, et déjà depuis 1842 ou
1843, nos hommes d'état canadiens-français s'étaient emparés du
pouvoir et l'avaient administré à notre avantage, et nous sommes
devenus nombreux, puissants, riches et maîtres de nos destinées.
Un peuple qui a fait, en aussi peu de temps, d'aussi grandes
choses, a une mission spéciale et est certainement destiné à l'im-
mortalité. Nous sommes tenus d'honorer ce glorieux passé par
notre conduite future. Ce n'est pas là le langage d'un vision-
naire, d'un utopiste. Nous ne sommes pas le premier à regarder
ce noyau de Canadiens-français, qui s'est si prodigieusement con-
servé et développé depuis 1760, comme l'avant-garde, le boule-
vard, le plus sûr soldat de la civilisation chrétienne sur ce
continent; menacé de dissolution par les mille sectes protestantes
qui tendent à se perdre dans un indifférentisme et un rationa-
lisme désastreux. Et il y a du miracle dans notre conservation ;
tous les coups que l'on a voulu nous porter ont été mystérieu-
sement détournés de nos têtes pour se changer quelquefois en
moyens de salut pour nous.
Ces quelques réflexions, d'ailleurs, inspirées rar la situation,
nous ont semblé naturelles et nécessaires pour mieux comprendre
le rôle que nous avons à jouer sous le nouveau système. Elles
seront surtout propres à rassurer les timides que la moindre lutte
effraye. En voyant ce que nos pères ont fait dans un passé si
difficile, nous serons forcément amenés à la conclusion que sous
la confédération, qui nous est si avantageuse, nous n'aurons, pour
continuer leur sublime mission, qu'à le vouloir, qu'à nous
entendre, qu'à imiter leur énergique persévérance.
Et, d'abord, la confédération était-elle devenue nécessaire en'
1864 ? Nous répondons, sans hésiter : oui. Un changement cons-
titutionnel était devenu absolument nécessaire, et nous devons
ajouter que, de tous les changements imaginés par nos hommes
publics, la confédération était le seul qui fût propre à sauvegarder
nos droits, notre nationalité et notre religion. Les uns disent :
«e sont les grits du Haut-Canada qui, par leurs fanatiques exi-
gences, ont rendu la confédération nécessaire ; d'autres disent
encore : ce sont les rouges et les annexionistes du Bas-Canada
qui ont rendu la confédération nécessaire en attisant et soutenant
le fanatisme haut-canadien, par l'appui coupable et lâche qu'ils
n'ont cessé de lui prêter depuis 1849. Il y a du vrai dans ces
deux accusations. Une des principales causes qui ont nécessité
un changement est évidemment le fanatisme des grits et la
lâcheté des rouges et des annexionistes : nous reviendrons sur ce
sujet dans un instant.
Mais ce n'est pas là la seule cause ; des considérations d'un ordre
beaucoup plus élevé ont rendu la confédération nécessaire. Nos
hommes d'état, ceux dont s'honore le parti conservateur, tant du
Bas que du Haut-Canada, avaient senti que le premier coup de
canon tiré en 1860 au Fort Sumter, coup de canon qui mit en
feu tous les Etats-Unis, était pour nous un avertissement solennel
de penser à notre avenir. Jusqu'alors, en effet, nos voisins,
quoique riches et fort nombreux, n'étaient nullement à craindre
pour nous ; exclusivement adonnés à l'agriculture, à l'industrie
et au commerce, ils n'avaient pensé qu'à s'enrichir et à s'agrandir,
mais pacifiquement, et ils n'avaient ni armée ni marine militaire.
Frère Jonathan aimait bien un peu, comme ce sera toujours son
faible, le bien d'autrui; mais, voyant de ce côté-ci l'Angleterre
toujours prête à nous défendre, il aimait mieux tourner ailleurs
ses regards pour opérer de riches et faciles conquêtes chez les
Sauvages des Plaines et les Mexicains indolents. C'étaient des
triomphes aisés, si vous le voulez, mais qui suffisaient alors à son
orgueil encore bien modeste. Et s'il songeait parfois à nous,
c'était dans le temps seulement où les rêves criminels de nos
annexionistes écervelés lui promettaient l'acquisition de nos
trésors sans coup férir.
La guerre fratricide qui éclata et sévit entre le Nord et le Sud
changea comme en un clin-d'œil ces dispositions bénévoles.
" L'appétit vient en mangeant " ; c'est là un proverbe aussi vrai
qu'il est brutal. On ne devient soldat que pour désirer la guerre,
et l'on ne désire la guerre que pour faire des conquêtes. Mais
le Sud soumis, et il était impossible qu'il ne le fut pas, où se
porterait l'ardeur de nos belliqueux voisins ? Les américains
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ont besoin du Canada ; ils nous l'ont dit bien des fois et ont
même essayé de nous le prouver : ouvrez et lisez les journaux des
Etats et vous verrez cela comme nous ; aujourd'hui, d'ailleurs,
personne ne le conteste.
Nos hommes d'états, si perspicaces, ne manquaient pas d'être
frappés de ces considérations et de cette éventualité. Mais com-
ment nous protéger ? Il n'y avait que deux moyens : l'annexion ?
Horreur ! Le mépris public est la seule réponse donnée jusqu'ici
aux traîtres qui ont osé parler de cette ignominieuse alternative,
et la lâcheté est étrangère au Canadien-Français. Il est de fait
qu'à l'heure qu'il est il est impossible de rencontrer un honnête
homme qui soit annexioniste. Il ne restait donc que l'autre
alternative, que tous les gens intelligents devinaient et désiraient :
La Confédération, c'est-à-dire alliance fédérale entre plusieurs
peuples et union plus étroite, plus sympathique avec l'Angle-
terre pour mériter davantage et obtenir, en cas de danger, sa
protection et son concours plus efficaces.
C'est là que nos hommes publics ont senti la nécessité de la
Confédération, quoique, pour des raisons d'état faciles à com-
prendre, il leur fut difficile de l'avouer trop ouvertement. V ^
D'autres causes, les premières mentionnées, avaient fait désirer '
la Confédération par presque tous nos hommes publics. On
connaît l'histoire de la fameuse question de la représentation
basée sur la population.
Lors de l'Union des Canadas, en 1840, la population du Bas
était plus nombreuse que celle du Haut-Canada ; cependant, on
nous imposa l'égalité représentative dans les Chambres et le Bas-
Canada eut le même nombre de représentants que le Haut-
Canada. C'était une injustice flagrante, mais que nous dûmes
subir. Plus tard, surtout après 1850, le Haut-Canada, grâce à
une immigration européenne considérable, vit le chiffre de ses
habitants atteindre et dépasser le nôtre. Quelques fana-
tiques du Haut-Canada, guidés par George Brown, se mirent à
avocasser la représentation basée sur la population afin de ruiner
notre nationalité et d'anéantir notre foi en persécutant notre
clergé. Qui leur prêta main forte dans le Bas-Canada ?
les Bouges, que vous êtes toujours sûr de rencontrer quand il y
a une bassesse ou une trahison nationale à faire. M. Joseph
Doutre, homme propre à bien des choses pas toujours nettes, fut
lancé le premier comme ballon d'essai. Il prononça à Beau-
harnois à la fin de l'année 1857 ou au commencement de l'année
1858, ce fameux discours où il accepta la représentation basée
sur la population, discours qu'approuva " Le Pays," alors comme
aujourd'hui l'organe de l'Hon. A. A. Dorion, le chef du parti
9
rouge. En 1858, le fameux ministère Brown-Dorion monta au
pouvoir pour y séjourner juste 48 heures ; le mépris et l'indigna-
tion de la Chambre et du peuple le précipitèrent à bas dans la
boue. Ce fameux ministère avait promis de nous donner la
représentation basée sur la population : M. Dorion lui-môme
l'admit mainte et mainte fois depuis. (Tous ces avoués seront
prouvés plus loin.)
Qui s'opposa toujours à la représentation basée sur la popula-
tion ? L'Hon. G. E. Cartier et son parti ; sans lui, sans son
alliance si bienfaisante avec le parti conservateur du Haut-
Canada, il y a 9 ou 10 ans que nous aurions cette mesure, qui
eut été notre coup de mort. A-t-on en effet jamais songé aux effets
désastreux qu'aurait eus pour nous, Canadiens-Français, l'octroi
de cette mesure dans une union législative comme celle qui existait
entre le Haut et le Bas. Canada ? Toutes nos institutions eussent
été à la merci des fanatiques du Haut-Canada alliés aux Rouges,
aux impies et aux annexionistes du Bas-Canada ; et nous aurions
été sans garantie aucune ; le principe de la représentation sur le
nombre une fois admis, toute garantie devenait ridicule et illu-
soire parceque la majorité du lendemain aurait toujours pu
défaire ce qu'avait fait la majorité de la veille par le déplacement
d'une seule voix !
Grâce au patriotisme, à l'énergie et à l'habileté de M. Cartier,
nous avons pu échapper à ce terrible fléau. Mais comme nous
disions plus haut, la lâcheté de M. Dorion et de son parti n'en
a pas moins eu un très mauvais effet, celui d'encourager les fana-
tiques par la pensée et la certitude qu'il y avait des traîtres dans
la place assiégée, c'est-à-dire dans le Bas-Canada. C'est ainsi
que le parti clear grit continua à augmenter en nombre et en
exigences, exigences qu'il poussa jusqu'à nous menacer de la
guerre civile et de l'annexion. Heureusement pour nous, M.
Cartier était là : par son habileté, il sut museler et anéantir les
grits en en décidant une portion considérable à accepter la Con-
fédération, qui était devenue nécessaire depuis deux ou trois ans
par l'attitude des Etats-Unis comme ci-haut expliqué.
Pour nous résumer en deux mots, la Confédération était
devenue nécessaire dès 1864 et avant, à cause des circons-
tances critiques dans lesquelles nous plaçaient les changements
survenus chez nos voisins depuis 1860, et la crise politique qu'a-
vait amenée entre les deux Canadas la question de la représen-
tation basée sur le nombre, rendit opportune la discussion d'un
changement constitutionel et tout le monde tomba d'accord sur
les avantages et la nécessité d'une Confédération comme celle que
nous possédons pour parer aux dangers extérieurs, qui ne dépen-
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daient pas de nous, et que l'invasion fénienne vint aggraver, et
aux dangers intérieurs qu avaient produits et désirés les Rouges,
les annexionistes et les clubistes, trois catégories de renégats con-
fondus dans un seul et même parti acharné à la ruine du pays et
que nous ferons plus loin connaître en détail.
Donc, en 1864, la Confédération était devenu nécessaire, très
nécessaire même.
LA CONFÉDÉRATION NOUS SERA-T-ELLE AVANTAGEUSE ?
L'état fédératif a présidé à l'enfance de
presque tous les peuples naissants.
Eu lui-même, le système fédératif* est excellent ; nous le trou-
vons au berceau de toutes les nations. Il est commandé par la
nature et quelquefois par les circonstances : ici, la nature et les
circonstances nous en font une nécessité et nous le rendent très
précieux. Qu'est-ce au fond que le système fédératif ou une
Confédération ? C'est une alliance, une société formée entre
plusieurs petits peuples, qui mettent en commun leurs intérêts
généraux pour acquérir plus de force dans la défense comme dans
l'attaque en se réservant à chacun d'eux le contrôle et la gouverne
de leurs affaires et institutions locales et particulières. C'est, en
fin de compte, la mise en pratique du principe si connu, si vrai,
que " l'union fait la force." L'association, dans notre siècle,
comme dans tous les temps, a toujours doublé, triplé, centuplé la
force des associés. On ne s'est jamais avisé de contester la
vérité et la sagesse de ces principes sanctionnés par l'expérience
des siècles, et qui s'appliquent aux nations tout comme aux par-
ticuliers. Par exemple, dans une société, dans une compagnie
de commerce, d'industrie ou d'exploitation de mines, établie entre
dix associés, chacun met le surplus de son avoir disponible ; avec
ces petits capitaux réunis, on fait de grandes choses et si la société
est bien conduite, elle grandit et fait la fortune de chacun qui,
sans l'association, eut été impuissant à tenter d'aussi importantes
entreprises et serait toujours resté dans la pauvreté ou la médio-
crité.
Si, donc, la Confédération n'est quo la mise à exécution de ces
saines maximes, nous serons bien obligés de convenir qu'elle est
avantageuse pour toutes les parties concernées et notamment
pour nous. Eh ! bien, tel est le cas ; voyons plutôt,
Comme on le sait, c'est entre le Haut-Canada, le Bas-Canada,
le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Ecoss3 qu'est formée la
11
Confédération en force depuis le premier Juillet courant. La
première, l'une des principales clauses de la constitution est celle
qui opère le rappel de l'Union, tant demandé par les rouges, et
sépare le Bas-Canada du Haut-Canada.
La Confédération porte le nom de " Canada." Le Haut-
Canada s'appelle la " Province Ontario," le Bas la " Province
de Québec" et les provinces maritimes conservent leur nom res-
pectif. Ces dispositifs sont contenus dans les clauses 5 et 6 de
la constitution :
5. Le Canada sera divisé en quatre provinces, dénommées : — Ontario,
Québec, Nouvelle-Ecosse et Nouveau-Brunswick.
6. Les parties de la province du Canada (telle qu'existant à la passation
du présent acte) qui constituaient autrefois les provinces respectives du
Haut et du Bas-Canada, seront censées séparées et formeront deux pro-
vinces distinctes. La partie qui constituait autrefois la province du Haut-
Canada formera la province d'Ontario, et la partie qui constituait la
province du Bas-Canada formera la province de Québec.
Si le partie rouge n'était pas gangrené de haine, d'envie, de
perfidie et de mauvaise foi, il suffirait presque de citer cette
clause pour montrer les immenses avantages de la Confédération
et imposer silence à tous les braillards. Cette union des Canadas
tant maudite par les rouges et les annexionistes, la voilà donc
brisée par la volonté et l'énergie de M. Cartier et de son parti !
Ce rappel de l'Union si longtemps et si hypocritement réclamé
par les rouges et les annexionistes, le voilà donc effectué, et par
nous et pour nous ! Et cependant ces gens crient à la trahison !
ils ont lancé une meute de petits avocats sans clients comme sans
cervelle contre M. Cartier pour vociférer que celui-ci à vendu le
pays ! Pour Dieu ! peut-il se rencontrer dans le monde aussi
noire hypocrisie et le peuple indigné ne finira-t-il pas par voir
que les rouges et les annexionistes ne sont que des charlatans
sans cœur et sans patriotisme qui veulent le duper et s'engraisser
de ses sueurs et de ses épargnes en attendant l'heure où ils
pourront le pressurer et le livrer aux Etats-Unis?
Continuons notre étude. La constitution ayant divisé la Con-
fédération nouvelle en trois provinces, pour les fins fédérales
seulement, établit un gouvernement général ou fédéral chargé de
l'administration de toutes les affaires concernant toute la Confé-
dération. Ce gouvernement sera mis en opération par un Gou-
verneur Général, un conseil privé ou ministère responsable de
treize membres, un sénat et une chambre des communes; la
province de Québec aura 24 sénateurs, la province Ontario 24,
et le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Ecosse 24, en tout 72
sénateurs. Dans la chambre des communes, la province OnU.rio
12
aura 82 membres, la province de Québec 65, le Nouveau-
Brunswick 15 et la Nouvelle-Ecosse 19. Voici maintenant
quelles seront les attributions de ce gouvernement, telles que
tracées par l'article 91 de la constitution :
VI. — Distribution de3 Pouvoirs Législatifs.
Pouvoirs du Parlement.
91. Il sera loisible à la Reine, de l'avis et du consentement du Sénat et
de la Chambre des Communes, de faire des lois pour la paix, l'ordre et le
bon gouvernement du Canada, relativement à toutes les matières ne
tombant pas dans les catégories de sujets par le présent acte exclusive-
ment assignés aux législatures des provinces ; mais, pour plus de garantie,
sans toutefois restreindre la généralité des termes ci-haut employés dans
cette section, il est par le présent déclaré que (nonobstant toute dispo-
sition contraire énoncée dans le présent acte) l'autorité législative exclu-
sive du parlement du Canada s'étend à toutes les matières tombant dans
les catégories de sujets ci-dessous énumérés, savoir :
1. La dette et la propriété publiques.
2. La réglementation du trafic et du commerce.
3. Le prélèvement de deniers par tous modes ou systèmes de taxation.
4. L'emprunt de deniers sur le crédit public.
5. Le service postal.
6. Le recensement et les statistiques.
7. La milice, le service militaire et le sei vice naval, et la défense du pays.
8. La fixation et le paiement des salaires et honoraires des officiers
civils et autres du gouvernement du Canada.
9. Les amarques. les bouées, les phares et l'Ile de Sable.
10. La navigation et les bâtiments ou navire [shipping.)
11. La quarantaine et l'établissement et maintien des hôpitaux de
marine.
12. Les pêcheries des côtes de la mer et l'intérieur.
13. Les passages d'eau / ferries) entre une province et tout pays britan-
nique ou étranger, ou entre deux provinces.
14. Le cours monétaire et le monnayage.
15. Les banques, l'incorporation des banques et l'émission du papier
monnaie.
16. Les caisses d'épargne.
17. Les poids et mesures.
18. L^s lettres de change et les billets promissoires.
19. L'intérêt de l'argent.
20. Les offres légales.
21. La banqueroute et la faillite.
22. Les brevets d'invention et de découverte.
23. Les Sauvages et les terres réservées pour les Sauvages.
24. La naturalisation et les aubains.
25. Le mariage et le divorce.
26. La loi criminelle, sauf la constitution des tribunaux de juridiction
criminelle, mais y compris la procédure en matière criminelle.
27. L'établissement, le maintien, et l'administration des pénitenciers.
' 28. Les catégories de sujets expressément exceptés dans rénumération
des catégories de sujets exclusivement assignés par le présent acte aux
législatures des provinces.
13
Cette distribution des pouvoirs est parfaite et ne laisse rien à
désirer ; le plus ardent patriotisme comme le zélé catholique le
plus intelligent ne peuvent trouver à redire. On comprend que
le " mariage" mentionné au No. 25 ne s'applique qu'à la régle-
mentation du nouveau mariage que voudront contracter les pro-
testants divorcés sous l'autorité du parlement fédéral, puisque la
législation complète sur le mariage est laissée aux provinces et
aux législatures locales, comme nous allons le voir dans un
instant. D'ailleurs, cette partie de la constitution, comme tout
le reste, a reçu l'approbation complète des hautes autorités reli-
gieuses du pays. Il est bon d'observer que les rouges, dans un
petit pamphlet plein de mensonges intitulé : " La Confédération
couronnement de dix années de mauvaise administration," écrit
pour duper les électeurs à la veille des élections, ne dit rien du
tout contre cette partie de la constitution : il faut donc qu'elle
soit bien bonne.
A part le gouvernement fédéral, dont nous venons de voir tous
les pouvoirs, chaque province a un gouvernement complet pour
la gestion de toutes ses affaires intérieures. La province de
Québec a donc un lieutenant-gouverneur canadien-français, un
ministère ou conseil exécutif composé de sept membres, un conseil
législatif de vingt-quatre membres et une chambre des repré-
sentants composé de 65 députés. En un mot, la province de
Québec (le Bas-Canada) est complètement séparé du Haut-
Canada et a une organisation gouvernementale entière pour ad-
ministrer seule toutes ses affaires locales. Et nos pouvoirs sont
très-étendus, et se rapportent à tout ce qui nous est précieux,
cher et sacré ; les voici ; nous citons en entier la clause 92 :
Pouvoirs exclusifs des législatures provinciales.
92. Dans chaque province la législature pourra exclusivement faire des
lois relatives aux matières tombant dans les catégories de sujets ci-des-
sous énumérés, savoir :
1. L'amendement de temps à autre, nonobstant toute disposition con-
traire énoncée dans le présent acte, de la constitution de la province, sauf
les dispositions relatives à la charge de lieutenant gouverneur ;
2. La taxe directe dans les limites de la province, dans le but de préle-
ver un revenu pour des objets provinciaux ;
3. Les emprunts de deniers sur le seul crédit de la province ;
4. La création et la tenure des charges provinciales, et la nomination et
le paiement des officiers provinciaux ;
5. L'administration et la vente des terres publiques appartenant à la
province, et des bois et forêts qui s'y trouvent ;
6. L'établissement, l'entretien et l'administration des prisons publiques
et des maisons de réforme dans la province ;
7 . L'établissement, l'entretien et l'administration des hôpitaux, asiles,
14
institutions et hospices de charité dans la province, autres que les hôpitaux
de marine ;
8. Les institutions municipales dans la province ;
9. Les licences de boutiques, de cabarets, d'auberges, d'encanteurs et
autres licences, dans le but de prélever un revenu pour des objets provin-'
ciaux, locaux ou municipaux :
10. Les travaux et entreprises d'une nature locale, autres que ceux énu-
merés dans les catégories suivantes : —
a. Lignes de bateaux à vapeur ou autres bâtiments, chemins de fer, ca-
naux, télégraphes et autres travaux et entreprises reliant la province à une
autre ou à d'autres provinces, ou s'étendant au-delà des limites de la pro-
vince :
b. Lignes de bateaux à vapeur entre la province et tout pays dépendant
de l'empire britannique ou tout pays étranger;
e. Les travaux qui, bien qu'entièrement situés dans la province, seront
avant ou après leur exécution déclares par le parlement du Canada être
pour l'avantage général du Canada, ou pour l'avantage de deux ou d'un
plus grand nombre des provinces ;
11. L'incorporation de compagnies pour des objets provinciaux ;
12. La célébration du mariige dans la province ;
13. La propriété et les droits civils dans la province ;
14. L'administration de la justice dans la province, y compris la créa-
tion, le maintien et l'organisation de tribunaux de justice pour la province,
ayant juridiction civile et criminelle, y compris la procédure en matières
civiles dans les tribunaux ;
15. L'infliction de punitions par voie d'amende, pénalité, ou emprison-
nement, dans le but de faire exécuter toute loi de la province décrétée au
sujet des matières tombant dans aucune des catégories de sujets énumérés
dans cette section ;
16. Généralement toutes les matières d'une nature purement locale ou
privée dans la province ;
Il manque encore quelque chose : l'éducation. Mais que l'on
se rassure. Le patriotisme de nos chefs a pourvu à tout. Chaque
province aura le contrôle exclusif de son éducation. Il y a même
plus : M. Cartier a voulu que la provice de Québec, presque
toute catholique, eût le bonheur et le droit de protéger tous les
catholiques de chacune des autres provinces ; et pour atteindre ce
but vraiment louable et religieux, il a réservé tous les droits,
aequisget accordé aux minorités catholiques que les protestants
des gouvernements locaux voudraient molester, un droit d'appel
au ministère fédéral où toutes les influences catholiques pourront
et devront toujours peser d'un poids prépondérant en faveur des
co-religionnaires opprimés. Lisez cette belle clause, qui vient
immédiatement après celle que nous venons de citer.
Education.
93. Dans chaque province, la législature pourra exclusivement décréter
des lois relatives à l'éducation sujettes et conformes aux dispositions sui-
vantes : —
(1). Rien dans ces lois ne devra préjudicier à aucun droit ou privilège
15
conféré, lors de l'union, par la loi, à aucune classe particulière de per-
sonnes dans la province, relativement aux écoles séparées [dcnominational).
(2). Tous les pouvoirs, privilèges et devoirs conférés et hnposés par la
loi dans le Haut-Canada, lors de l'union, aux écoles séparées et aux
syndics d'écoles des sujets catholiques romains de Sa Majesté, seront et
sont par le présent étendus aux écoles dissidentes des sujets protestants
et catholiques romains de la Reine dans la province de Québec ;
(3). Dans toute province où un système d écoles séparées ou dissidentes
existera par la loi, lors de l'union, ou sera subséquemment établi par la
législature de la province, — il pourra être interjeté appel au gouverneur-
général en conseil de tout acte ou décision d'aucune autorité provinciale
affectant aucun des droits ou privilèges de la minorité protestante ou
catholique romaine des sujets de Sa Majesté relativement à l'éducation.
(4). Dans le cas où il ne serait pas décrété telle loi provinciale que, de
temp3 à autre, le gouverneur-général en conseil jugera nécessaire pour
donner suite et exécution aux dispositions de la présente section, — ou dans
le cas où quelque décision du gouverneur-général en conseil, sur appel
interjeté en vertu de cette section, ne serait pas mise à exécution par l'au-
torité provinciale compétente, — alors et en tout tel cas, et en tant seu-
lement que les circonstances de chaque cas l'exigeront, le parlement du
Canada pourra décréter des lois propres à y remédier pour donner suite et
exécution aux dispositions de la présente section, ainsi qu'à toute décision
rendue par le gouverneur-général en conseil, sous l'autorité de cette
même section.
Ceux qui nous ont fait l'honneur de nous lire jusqu'ici ont
déjà vu quel système beau, admirable et avantageux est la Con-
fédération pour nous, canadiens-français et catholiques. La
Confédération nous réserve encore pourtant d'autres avantages:
c'est que la province de Québec, le Bas-Canada, ou toute autre
province en particulier, ne pourra jamais être taxé pour les dé-
penses du gouvernement fédéral et que ce dernier ne pourra
jamais taxer nos terres pour quoique ce soit. C'est là la teneur
formelle de la clause 125 :
125. Nulle terre ou propriété appartenant au Canada ou à aucune pro-
vince en particulier ne sera sujette à la taxation.
Ainsi, plus d'inquiétude désormais : jamais nous n'aurons de
taxe directe foncière à payer pour le gouvernement fédéral ou
pour toute autre chose que ce soit, si ce n'est en ce qui concerne
la taxe directe pure et simple, pour nos propres besoins locaux,
dans le cas impossible où nous serions assez follement prodigues
pour ne pas nous contenter des vastes ressources que nous avons
à notre disposition, comme nous allons le démontrer bientôt.
Nous avons fait, suivant notre humble opinion, suffisamment
connaître la nouvelle constitution qui nous régit. Nous l'avons
fait connaître honnêtement, consciencieusement ; non par nos
commentaires, mais par les citations textuelles extraites de la
constitution elle même. Et, certes, en ce faisant, nous n'avons
16
que rempli un devoir dicté par les règles de la plus élémentaire
probité. Celui qui peut tenir une plume exerce un sacerdoce,
et, s'il ment, il est digne du mépris, car il trahit sa mission en
abusant d'un don précieux reçu de Dieu. Il doit la vérité à ses
lecteurs, comme le prêtre à ses ouailles, et s'il faillit, il devient
traitre ou apostat. Il est donc bien misérable celui qui ne prend
une plume que pour tromper ses compatriotes : c'est pourtant là
le rôle de tons les écrivains rouges. En voulons-nous un exemple
saillant, palpable ? Ayez le courage d'ouvrir et de lire avec nous
ce petit pamphlet hideux récemment publié par les rouges dans
l'intérêt de M. A. A. Dorion et de son parti. Nous conseillons
même à nos lecteurs de le parcourir, s'ils en ont la force, afin
qu'ils voient par eux-mêmes à quel degré de bassesse en doit être
rendu un parti qui n'a plus pour armes que le mensonge et la
calomnie. Aussi bien, ce sera pour nous un moyen de mieux
connaître et de plus aimer la Confédération en voyant comment
il est facile de confondre ces effrontés.
De prime abord, une chose vous frappe en lisant ce petit
pamphlet de " La Confédération couronnement de dix années de
mauvaise administration : " c'e-t l'absence complète de citations !
L'auteur, que nous félicitons beaucoup, dans son intérêt, d'avoir
caché son nom, se contente d'affirmer sans prouver. C'est plus
commode qu'honnête. Il remue mer et monde pour prouver que
la Confédération nous anglifie et nous tue, et il ne cite pas une
seule clause de la constitution. Ah ! bah, quand on est rouge et
enfant de la libre pensée, élève de Dessaulles par-dessus le marché,
on n'a pas besoin d'être si fier. Avant tout, il faut être fidèle
aux traditions de l'école et du papa Voltaire : " Mentez, mentez,
il en restera, toujours quelque chose."
Nous procédons par ordre. Le premier mensonge du petit
pamphlet est que le ministère Taché-McDonald n'a eu recours à
la Confédération que pour garder le pouvoir. Répondons caté-
goriquement. Nous avons assigné deux causes à la Confédération,
l'une d'essence, l'autre d'opportunité ; la cause essentielle, c'était
le danger nous venant des Etats-Unis par suite de leur grande
guerre civile, qui en faisait une puissance militaire de premier
ordre et pleine d'ambition et de convoitise. La preuve, elle est
dans le fait de la guerre elle-même; sur ce point, que nous avons
plus haut longuement développé, il n'y a rien à ajouter comme
rien à réfuter dans ce que nous avons constaté. Toutefois, si
un lec'eur plus exigeant, veut de plus amples preuves, il n'a qu'il
ouvrir le " New-York Herald" du onze février 1865, qui con-
tient une étude complète sur la question de l'annexion du Canada
aux Eiats-Unis. A cette époque, on s'en souvient, la question
17
de la Confédération était chaudement discutée et en Canada et
aux Etats-Unis; les Américains, cela va sans dire, étaient de
chauds adversaires de la Confédération pareequ'ils voyaient dans
cette mesure la ruine de leurs espérances sur le Canada. Le
"New-York Herald," principal organe du gouvernement et sur-
tout écho fidèle de l'opinion publique aux Etats-Unis, fit une
étude spéciale de la question de la confédération et de l'annexion
pour en arriver, naturellement pour lui, à la conclusion que les
Américains ne devaient pas laisser adopter la confédération ici,
mais qu'au contraire ils devaient presser instantanément l'an-
nexion, vu que le Canada, avec ses grands lacs et son beau fleuve
St. Laurent, leur était absolument indispensable ; mais suivons
notre b.mne hatitude de citer. Nous trouvons donc dans ce journal
du 11 Février 1865, à la première colonne de la deuxième page,
l'intéressant passage que nous traduisons:
u La question imposée à notre gouvernement."
" Le gouvernement américain doit s'occuper immédiatement
" de l'importante question de savoir s'il va se croiser les bras et
u laisser sans mot dire l'Angleterre ériger, dans des motifs d'hos-
" tilités ouvertement avoués, sur le continent américain une
11 série de forteresses imprenables, construire et armer de puis-
a sants bâtiments de guerre sur les lacs américains et organiser
" une milice considérable sous la conduite d'officiers anglais sur
" les frontières des Etats-Unis."
M Le temps est venu pour nous d'unir sans délai le Canada à
4t la république, paisiblement, si possible, par la force, si néces-
" saire."
Plus loin, on trouve encore dans le même article, que les
Américains doivent se hâter d'annexer le Canada avant la pas-
sation du projet de confédération. Cet article, long de treize
colonnes, est curieux à étudier. On y voit une volonté bien
arrêtée chez les Américains de nous posséder, surtout parce que
nous leur sommes utiles.
Nous disions, en second lieu, que les difficultés sectionnelles
entre le Haut et le Bas-Canada avaient été pour nos hommes
d'état, une occasion de hâter la mesure. De ces deux causes, il
n'est rien dit dans le fameux pamphlet. Et, lecteur, savez-vous
la vérité sur le sujet? Vous croiriez, d'après ce pamphlet, que les
rouges ont toujours ignoré les difficultés entre le Haut et le Bas-
Canada ; vous croiriez encore qu'ils ont toujours été étrangers à
ces difficultés ; vous croiriez encore que leur grand chef, leur
idole, l'Hon. A. A. Dorion, a toujours été contre la confédération
2
18
et qu'il n'en a jamais reconnu la nécessité. Puisque le pamphlet^
écrit pour M. Dorion, revisé par lui, avoue carrément que la
seule cause de la confédération était l'amour du pouvoir chez M.
Cartier et son parti, veus êtes bien obligé de le croire jusqu'à
preuve du contraire, et de penser que ces bons rouges et cet
excellent M. Dorion ont toujours été contre la confédération et
n'en ont jamais parlé. Lisez alors, mais bien attentivement, ce
que M. Dorion disait en Chambre le 6 Juillet 1858 : " Uabro-
'' gation de V Union, V Union Fédérale basée sur la population ou
11 quelque autre grand changement constitutionnel, doit, de toute
" nécessité, avoir lieu, et, pour ma, part, je suis disposé à exami-
" ner la question de la représentation basée sur la population
11 pour voir si elle ne pourrait pas; être concédée avec des garan-
" des pour la protection de la religion, de la langue et des lois
" des Bas-Canadiens. Je suis prêt pareillement à prendre en
" considération le projet d'une confédération lequel laisserait à
" chaque Province, F administration de ses affaires locales,
" comme, par exemple, le pouvoir de décréter ses propres lois
11 civiles, municipales et d'éducation, et au gouvernement géné-
" rai, V administration des travaux publics, des terres publiques,
" du département des postes et du commerce
il
u
tt
Avec le temps, les idées de M. Dorion marchèrent; en 1858,
il trouvait déjà que la confédération était uue bonne chose ; en
1860, il l'appelait de tous ses vœux. Le 3 mai 1860, il disait
encore :
" J'avertis les députés du Bas-Canada que, lorsque le temps
" viendra, toute la représentation du Haut-Canada s'unira et
" obtiendra la représentation basée sur la population avec l'aide
" des députés des townships de l'Est. Je regarde l'Union féde-
•' raie du Haut et du Bas-Canada comme le noyau de la grande
11 confédération des provinces de V Amérique du Xord, que j'ap-
" pelle de mes vœux. En concluant, je dois dire que je voterai
" pour la résolution, parce que c'est le seul moyen qu'aient les
" deux provinces de sortir de leurs difficultés actuelles. Je crois
" que l'union de toutes les provinces viendra avec le temps."
Est-ce clair? oui ou non ? C'est le chef qui a parlé ainsi ; son
organe le " Pays," tous ses disciples l'ont alors approuvé. Et
maintenant ces gens crient que la confédération n'était pas néces-
saire et n'a été proposée que comme expédient ministériel ! Il y
a encore quelque chose de pis ; on a vu plus haut que les pou-
voirs locaux ont l'administra tion de toutes leurs terres publiques :
19
qu'on relise le numéro 5 de la clause 92. M. Dorion, lui, vou-
lait, dans son discours de lr 58, laisser l'administration des terres
publiques au gouvernement fédéral ; la confédération que nous
avons obtenue est donc bien plus avantageuse que celle que M.
Dorion appelait de tous ses vœux en 1860. Nous avouons ici
ingénument que la plume nous tombe des mains en préseuce de
tant de mauvaise foi, de tant de contradiction et de tant d'abais-
sement. Comment! Vous, M. Dorion ; vous MM. les rouges,
vous avez, depuis 1858, reconnu la nécessité d'un changement
constitutionnel, vous avez, depuis 1858 et 1860, acclamé l'idée
d'une confédération moins avantageuse que celle que nous a
gagnée M. Cartier, et aujourd'hui, vous vous prononcez contre
cette confédération, jadis objet de tous vos vœux !
Au fond peut-être avons nous tort de nous indigner d'un phé-
nomène qui n'est que naturel ; tout peut s'expliquer aisément
quand on a suivi de près les évolutions du parti rouge et de ses
chefs. En 1858 en 1860 ils espéraient parvenir au pouvoir et
voyaient les américains peu s'occuper de nous. Kn 1867 tout
espoir d'arriver au pouvoir est pour eux perdu ; mais les intri-
gues américaines et les invasions féniennes les ramènent à leurs
projets chéris d'annexer leur pays au territoire de l'oncle Sam
et ils se prononcent contre la confédération, qui est notre seul
préservatif contre les dommages et les maux de l'annexion et les
infamies féniennes.
Et ces gens-là ont l'audace de parler d'honneur et de probité! ! !
Ab uno disce omnes. D'après ce premier mensonge du petit
pamphlet, jugez du reste, qui est de la même force.
Le petit pamphlet des rouges, dit en second lieu, que la confé-
dération ne nous a été donnée, que pour réaliser le fameux rap-
port de Lord Durham. Nous avons presque honte d'avoir à
nous occuper de cette ineptie. 11 faut être bien malhonnête ou
croire le peuple bien ignorant, pour faire un tel avancé. Lord
Durham venait en Canada à la suite des troubles de 1 837 et
1838, étudier les moyens d'anglifier le Canada Français, afin
de prévenir le retour de nouveaux troubles civils. Imbu des
préjugés de race que lui inculqua en arrivant l'oligarchie anglai-
se, acharnée à nous tyraniser depuis 1791, il proposa à la métro-
pole trois systèmes qui, suivant lui, devaient nous angliâer, nous
anéantir et rétablir par là la paix sur des bases permanentes :
1. L'Union législative du Haut et du Bas-Canada ; 2. l'U-
nion législative de toutes les Provinces de l'Amérique Britanni-
que du Nord, ou, 3. la Confédération de ces dernières Provinces.
Le projet de confédération fut mis de coté, comme inefficace à at-
20
teindre le résultat désiré et l'on eut recours à l'Union législative
pi2re et simple du Bas-Canada.
Voilà toute l'histoire de ce fameux rapport. L'union fut
adoptée comme le plus sûr moyen de nous réduire ; elle nous fut
imposée en 1840 et ses uniques effets ont été de nous grandir et
de nous permettre de nous affirmer comme nation ainsi que nous
3'avons surabondamment démontré plus haut.
Quelle analogie peut-il donc y avoir, entre ce rapport de Lord
Durham et la Confédération de 1867, que nous avons demandée
et acceptée spontanément et volontairement. C'en est assez
pour nous édifier sur la bonne foi et les connaissances historiques
de Messieurs les rouges.
La confédération qui nous régit fournit la plus ample protec-
tion possible à nos lois, à notre religion, à notre langue et nos in-
térêts matériels. Il suffit de lire les attributions conférées au
gouvernement de la Province de Québec pour prouver notre as-
sertion. Toutes ces choses précieuses et sacrées sont placées
sous notre contrôle immédiat et exclusif et tout droit d'ingérence
à ce sujet est formellement enlevé au gouvernement fédéral.
Mais il y a plus ; non-seulement notre belle langue française se-
ra la seule parlée dans le Parlement de la Province de Québec
où nous formons la presque totalité, mais elle sera encore la lan-
gue officielle dans le Parlement Fédéral conjointement avec la
tangue anglaise et l'usage en sera facultatif dans les débats. C'est
là la disposition formelle de la clause 133 de la Constitution :
133. Dans les chambres du parlement du Canada et les chambres de la
législature de Québec, l'usage de la langue française ou de la langue
anglaise, dans les débats, sera facultatif; mais dans la rédaction des
archives, procès-verbaux et journaux respectifs de ces chambres, l'usage
de ces deux langues sera obligatoire ; et dans toute plaidoirie ou pièce de
procédure par-devant les tribunaux ou émanant des tribunaux du Canada
qui seront établis sous l'autorité du présent acte, et par-devant tous les
tribunaux ou émanant des tribunaux de Québec, il pourra être fait égale-
ment usage, à faculté, de l'une ou de l'autre de ces langues.
Les actes du parlement du Canada et de la législature de Québec
devront être imprimés et publiés dans ces deux langues.
Les américains eux-mêmes, dont les rouges nous vantent tant
h libéralité, accordent moins aux Français de la Louisiane, que
nous n'avons obtenu de l'Angleterre et des colonies anglaise con-
fédérées avec nous. Dans le parlement local de l'Etat de la
Louisiane, la langue française n'est en effet que facultative dans
les débats, mais n'est pas langue officielle et tous les procès-
verbaux, archives, registres, projets de lois et statuts ne sont écrits
et imprimés qu'en anglais. Mais il existe encore une preuve
bien plus éclatante de l'excellence de la Confédération pour nous,
21
de la protection illimitée qu'elle donne à tous nos intérêts religieux,
moraux, matériels et nationaux, dans les paroles sacrées des hauts
dignitaires de l'église du Canada.
Quiconque sait un peu son histoire de la nouvelle France,
n'ignore pas que le clergé catholique a rendu au pays d'immenses
services et que c'est à lui que nous devons d'être restés Français
et catholiques, dans la plus belle acception du mot. A toutes les
époques critiques de notre histoire, nous voyons toujours nos
évêques pleins de dévouement et de zèle pour nos intérêts, inter-
venir dans la politique, pour prévenir les mesures dangereuses
projetées par les ennemis de notre race et de notre religion ; et,
en cela, l'épiscopat usait non-seulement d'un droit, mais remplis-
sait un devoir. Tout le monde sait en effet, comme le Pape l'a
plusieurs fois déclaré dans des encycliques demeurées célèbres,
que le clergé a le droit, bien plus, le devoir d'intervenir dans
toutes les questions politiques et gouvernementales qui toueheat
à la religion, à la morale, et aux intérêts généraux des peuples.
L'Episcopat actuel s'est montré digne de son prédécesseur; il a
suivi avec attention et anxiété, toute les discussions sur le projet
de Confédération depuis 1864, et lorsqu'en février ou mars
dernier, la Confédération devint un fait accompli, tous les évêques
catholiques tant du Bas-Canada, que des autres Provinces confé-
dérées, ont approuvé la constitution, l'ont déclarée bonne et avan-
tageuse aux intérêts des catholiques, et ont conseillé fortement à
leurs diocésains de ne travailler et de ne voter dans les prochaines
élections, que pour les candidats qui avaient contribué à la pas-
sation de cette mesure, ou qui déclareraient, formellement l'ap-
prouver et vouloir la soutenir en tous points.
Ecoutons d'abord, Monseigneur Cook, évêque de Trois-
Rivières, dans son admirable mandement du huit juin dernier
(18G7) dont nous extrayons les quelques lignes suivantes, où il
parle particulièrement du projet de confédération.
Vous n'ignorez pas, N. T. C. F., quelle fut la vivacité des débats sur
ce projet dans la Chambre d'Assemblée. La grande majorité des députés
le regardaient comme la seule planche de salut que la Piovidence offrait
à notre nationalité, tandis que la minorité le repoussait de toutes ses
forces, sans avoir toutefois de plan bien arrêté à mettre à la place pour
arracher le pays de l'impasse où il se trouvait. Un certain nombre des
membres de cette minorité laissait entrevoir assez clairement que l'annexion
du Canada aux Etats-Unis était bien la condition indispensable au salut
de notre nation. Quelques-uns auraient préféré laisser les choses comme
elles étaient, ou amener tout au plus quelques modifications à la consti-
tution qui n'auraient fait que reculer pour quelque temps la crise en
l'aggravant.
Pour tout homme, tant soit peu observateur, il était évident qu'à peu
près tous reconnaissaient la nécessité d'un changement de constitution,
22
et que la lutte véritable était entre la confédération et l'annexiou, c'est-à-
dire, qu'il s'agissait de décider si le Canada allait se préparer à devenir
un grand Etat prospère et libre, en marchant courageusement vers l'ac-
complissement des destinées que la Providence semble lui réserver ; ou
bien si, renonçant à la vie de peuple libre et maître chez lui, il allait pour
toujours enchaîner son avenir au sort d'une république qui n'a encore vécu
qu'à peu près l'âge d'un homme, et qui a déjà traversé plusieurs guerres
et notamment la dernière, la plus épouvantable des guerres civiles dont
les annales des nations fassent mention ; guerre civile qui lui a dévoré
plus d'un million de ses enfants, et creusé un abime où se sont englouties
pour des années ses richesses et sa propérité.
Quelques rouges, encore plus imbécilles que malhonnêtes, ont
osé lâchement vociférer, que M. Cartier et son parti était traîtres
à la religion et à la nationalité parce qu'ils avaient proposé et
adopté la confédération ; le public intelligent ne les a pas crus.
A part quelques Béotiens arriérés du rougisme, tout le monde a
fait justice de ces honteuses accusations. Le saint évêque de
Trois-Rivières, apprécie justement ces déclamations inspirées par
la sottise et la méchanceté et venge noblement nos patriotiques
hommes d'état ; jamais plus bel hommage n'a été rendu à l'intel-
ligence et aux sentiments nationaux, de M. Cartier et de son
parti :
Cependant, N. T. C. F., attendu que les divers moyens par lesquels on
pouvait essayer de tirer notre pays des difficultés où il se trouvait, étaient
matière d'opinion, et qu'il était libre à chacun de choisir celui qu'il croyait
le plus avantageux, Nous n'avons pas cru qu'il fut nécessaire délever la
voix en cette circonstance ; mais Nous n'en avons pas suivi avec moins
de vigilance la question dans toutes ses phases, afin de sauvegarder,
dans la mesure de nos forces, nos intérêts religieux, et de nous assurer
qu'ils seraient pour le moins aussi efficacement protégés sous la nouvelle
constitution. Voilà pourquoi nous avons dâ faire parvenir nos réclama-
tions respectueuses auprès du gouvernement impérial pour assurer aux
Catholiques du Haut-Canada une égalité de protection avec les protestants
du Bas-Canada sur la question de l'éducation.
Mais c'est avec peine que nous avons vu la violence avec laquelle quel-
ques-uns de nos compatriotes se sont élevés contre le projet de confédéra-
tion ; non qu'il ne fût permis de le discuter dans le temps ; mais il est tou-
jours repréhensible de manquer de modération. Nous eussious été heureux
de voir plus de calme dans la discussion : c'eut été la voie la plus propre
à faire juger sainement ce projet, qui après tout, était regardé par la ma-
jorité de nos concitoyens comme une nécessité bien grave, à la vérité,
mais comme le moyen, le plus praticable de sortir des circonstances diffi-
ciles où nous nous trouvions. Nous avons surtout regretté les efforts qui
ont été faits pour jeter l'alarme parmi vous, lorsque l'on a cherché à vous
faire croire que ce projet n'était rien moins qu'une trahison.
Ce sont là, des excès extrêmement regrettables, N. T. CF., que la
charité chrétienne condamne, et dont il faut se carder avec un grand
soin. Nous devons toujours observer les règles de la justice envers tout
le monde, et nous délier de semblables exagérations. Elles ne sont pro-
pres qu'à empirer la douloureuse division qui nous à déjà fait tant de mal.
23
C'est i\ la vérité, la justice et la modération que nous aurons la consolation
de voir renaître au milieu de nous la concorde et l'union. Tel est l'ensei-
gnement de nos livres saints ; u Misericordia et venin* obviaverunt subi :
justitia et fax osculatse sunt. " M La miséricorde et la vérité >t sont ^con-
trées : la justice et la paix se BOflJt embrassées." Ps. 84, v. 11. Non, Nous
ne voyons aucune raison pour justifier une accusation aussi odieuse et
aussi grave ; Nous ne connaissons rien qui puisse autoriser à croire que
la confédération soit un acte de trahison. Elle a été discutée assez long-
temps, examinée assez scrupuleusement par les hommes les plus dévoués
et les plus éclairés de toutes les provinces pour lever tout le doute à cet
égard. Cependant, il n'en est par moins Mai que ce n'est toujours
qu'avec crainte et en tremblant qu'il faut porter la main à la base sur la-
quelle repose un édifice tout entier, pour lui en substituer une autre; tant
le moindre défaut d'équilibre pourrait entraîner de funestes conséquences.
Le vénérable prélat ne s'est pas contenté d'approuver la con-
fédération et de louer le zèle et 1 inteligence de ses auteurs ; il a
encore voulu conseiller à ses diocésains de s'unir dans un même
effort patriotique, pour se soumettre au nouveau régime et n'élire
que des hommes disposés à l'approuver et à le faire fonctionner
pour la promotion de nos meilleurs intérêts. Nous ne pouvons
résister au plaisir de mettre devant les yeux du public la citation
suivante qui rappelle les plus beaux temps apostoliques :
Aujourd'hui que ce projeta reçu la sanction du gouvernement impérial
et qu'il est devenu la loi fondamentale du pays, nous devons nous rappe-
ler que notre devoir, comme catholiques, est de mettre un terme à toute
discussion sur ce sujet ; si nous avons eu parfaite liberté d'opinion dans
les limites du juste et de l'honnête, tant que la confédération n'a été qu'à
l'état de projet, si nous avons pu en toute sûreté de conscience être
pour ou contre, la combattre avec chaleur ou la défendre avec con-
viction, suivant que nous l'avons cru utile ou dangereuse, il rCen est plus
ainsi dtpuis qu'elle est pansée à V état de loi. Elle est devenue aujourd'hui
une chose jugée et obligatoire ; et c'est le temps de vous rappeler ce grand
principe du Catholicisme : Omnis anima potestatibus sublimioribus subdita
sit : non est enim potestas nisi à Deo : quœ autem sunt à JJeo ordinaUe
sunt. " Que tout le monde soit soumis aux puissances supérieures ; car
il n'y a point de puissance qui ne vienne de Dieiij et c'est lui qui a éta-
bli toutes celles qui sont sur la terre.'' Rom. XII. v. 1. Quelles qu'aient
été nos opinions antérieures, le bien de notre pays, et les enseignements
de notre religion nous font un égal devoir de l'accepter et de nous y sou-
mettre. Vous devez en conscience, N. T. C. F., et comme catholiques,
et comme amis sincères de l'ordre, de l'union et de la paix,, vous devez fa-
voriser dans la mesure de vos forces, et par le concours de votre bonne
volonté, le bon fonctionnement de la constitution qui va bientôt être
inaugurée.
Ce devoir, vous aurez à le remplir dans les prochaines élections, en
vous assurant que les hommes dont vous allez faire choix pour vous re-
présenter dans les parlements, seront animés de eet esprit de conciliation
de cette bonne volonté dont le concours est indispensable pour tirer de la
nouvelle constitution tout le bien que nous devons attendre.
24
Sa Grandeur Monseigneur l'Evêque de Rimouski n'est pas
moins explicite :
La Constitution qui fonde ainsi au Nord des Etats un grand et riche
empire, a été, Nous le croyons sincèrement, amenée providentiellement
par une suite de circonstances exceptionnelles. Les rouages de la ma-
chine gouvernementale ne pouvaient plus fonctionner ; mille riralités de
races, de croyances religieuses, d'intérêts politiques ou sectionnels, nous
menaçaient d'une anarchie complète ; lorsque plusieurs de nos hommes
d'Etat les plus éminents ont formé le projet, pour mettre fin à ces diffi-
cultés interminables et toujours renaissantes, d'agrandir leur sphère d'ac-
tion, et d'unir en un puissant Etat des Provinces qui, dans leur isolement,
n'avaint que bien peu de moyens de développer leurs ressources. C'est ce
proj ;t, fruit de mûres délibérations, qui a été soumis à l'approbation des
Parlements Provinciaux et à celle du Parlement Impérial, et qui est de-
venu dans toutes ces dispositions essentielles la loi du pays.
Vous allez donc choisir, X. 0. F. des Représentants capables de soute-
nir vos intérêts et de vous faire honneur par leurs principes honnêtes, par
leur éducation, par leur expériences des affaires publiques. Ils devront
vous promettre de travailler franchement- et cordialement à faire fonction-
ner le nouvel ordre de choses, et à seconder à cet effet ceux qui vont être
appelés à l'inaugurer. Vous vous défierez, s'il s'en rencontrait parmi
vous, de ces esprits mécontents qui rêvent le bonheur et la prospérité
dans l'annexion à un pays voisin. S'ils réussissaient dans leurs sinistres
projets, ce qu'à Dieu ne plaise, ce serait, à moins d'un miracle de la Pro-
vidence, la ruine de notre peuple, la perte de nos mœurs, de nos coutumes
de notre langue, l'anéantissement de notre nationalité. Vous exigerez
donc des Candidats une déclaration, explicite et formelle de principes,
l'engagement positif de soutenir la nouvelle Constitution.
L'Archevêque de Québec dans un mandement publié, il y a
quelques jours, disait encore, entre autres choses :
" Ainsi donc, N. T. C. E , comme l'union fédérale qui vient de s'opérer
émane de l'autorité légitime, vous la regarderez comme loi, et vous obéirez à
l'ordre de Dieu, en l'acceptant en toute sincérité. Il est, d'ailleurs, de
votre intérêt, comme c'est pour vous un devoir de conscience, de le faire,
pour qu'elle puisse contribuer à la prospérité commune, et procurer par
là l'avantage des individus. Bientôt vous serez appelés a choisir ceux qui
soit dans le parlement fédéral soit dans le parlement local, devront tra-
vailler à mettre en pratique la nouvelle constitution. Vous vous garde-
rez donc de donner vos voix à de? hommes disposés à la combattre ou à
mettre des entraves h son fonctionnement, mais vous les donnerez à des
citoyens éprouvés et reconnus comme ayant à cœur de la faire servir au
plus grand bien du pays.
" Ce qui doit nous rassurer, \. T. C. F. c'est que la nouvelle forme de
gouvernement qui vient de nous être donnée, a été préparée avec soin par
des hommes bien connus, eux aussi, par leur patriotisme, aussi bien que
par les services qu'ils ont rendus à leur commune patrie. Si elle n'est
pas sans défauts ; si eile n'est pas tout ce qu'on aurait pu désirer qu'elle
fut, rappelons nous que rien n'est partait dans ce monde, et que, dans un
pays commo le nôtre, ou tant d'intérêts divers sont en présence il était
25
impossible de se refuser à de mutuelles concessions, et d'arriver à un ar-
rangement qui put donner satisfaction à tout le monde. C'est r/jx hom-
mes à qui vous allez confier le soin de vous représenter dans l'un et l'au-
tre parlement, de s'unir fortement ensemble pour conjurer le danger, s'il
existe, et pour tirer le meilleur parti possible de la situation. Vous avez
donc une raison de les choisir parmi ceux qui se distinguent davantage
par leur honnêteté, leur énergie et leur dévouement à la chose publique.
L'éloquent évêque de St. Hyacinthe n'est pas resté en arrière
de ses vénérables frères en Episcopat. Il nous trace de main de
maître, un portrait fidèle des adversaires de la Confédération,
c'est-à-dire des rouges et des annexionnistes. En lisant les lignes
suivantes, on croirait voir Notre-Seigneur flagellant les pro-
fanateurs du temple :
Que la prudence vous mette en garde contre les ten-
dances de certains esprits et de certains journaux exaltés, qui sont loin
de Nous apparaître comme des guides que vous puissiez suivre sans
danger! Fermez vos oreilles à l'insinuation perfide, assez souvent répétée!
Plutôt V annexion que la confédération telle qu'elle nous est donnée. De-
meurez convaincus que pour ceux qui tiennent ce langage, la confé-
dération n'est qu'un prétexte mis en avant : l'annexion est clairement
l'objet de leur conviction politique, et d'une convoitise qu'ils flattent et
fomentent depuis assez longtemps, Nous en sommes témoin !
Et à notre estime, l'Annexion si jamais elle a lieu, sera la mort ou la
destruction certaine de notre nationalité, qui ne vit que par nos institu-
tions, notre langue, nos lois, et surtout notre Religion, et c'est parce que
Nous sommes plein de la conviction que tous nos intérêts religieux
auraient grandement à souffrir de notre Annexion aux Etats-Unis que
Nous nous fesons un devoir de vous signaler le danger. De sorte qu'en
vous parlant ainsi, Nous abordons un sujet qui intéresse plus la Religion
que la politique. Et Nous demandons aux hommes sérieux et sans passions,
s'il y aurait moyen d'oser affirmer le contraire ?
Et malgré cela, il demeure plus que certain qu'il y a parmi nous des
gens qui pensent et poussent à l'annexion ! Qui ignore, en efiet, aujour-
d'hui que la société secrète, designée sous le nom de Club de St. Jean-
Baptiste, qui se formait, il y a quelque temps à Montréal, et que des zéla-
teurs coupables ont cherché à répandre dans les campagnes, avait pour
but et pour fin de créer un courant annexionniste? Qui ne sait nùme que
quelques-uns de ses membres, dans le but de favoriser et de hâter l'An-
nexion, ont eu le triste courage de fraterniser avec la bande méprisable
des Féniens, qui, l'an dernier, ont envahi notre sol, et fait couler le sang
de nos concitoyens ?
Nous serions curieux de savoir ce que pensent de ce portrait,
les ci-devant députés des comtés d'Iberville, de Bagot et de Ri-
chelieu.
Sa Grandeur, Monseigneur l'Evêque de Montréal, avait déjà
depuis longtemps devancé ses illustres collègues, dans une lettre
du 11 mars 1867, adressée à l'honorable George Etienne Cartier,
et dans une circulaire à son clergé du 25 mai dernier (1867),
lettre et circulaire que tout le monde connaît et qui viennent
26
d'être publiées dans tous les journaux du pays. Tous les évêques
du Haut-Canada et des provinces maritimes ont également ap-
prouvé la Confédération.
La lettre de l'Evêque de Montréal , mérite certainement
reproduction :
Montréal, le 11 mars 1867.
M. le Procureur-Général,
Je reçois, à l'instant, la copie du British North America Bill que vous
avez eu la bonté de m'adresser ; et je m'empresse de vous présenter mes
sincères remerciements pour votre bienveillante attention.
Je comprends vivement que ce Bill intéresse à un haut degré notre pays,
qui, après toutes les phases d'administration par lesquelles il lui a fallu
passer depuis un certain nombre d'années, a grand besoin de se fixer sur
des bases stables et durables.
Il serait superflu de vous dire que le clergé, tout en se mettant en dehors
de toutes luttes de partis politiques, n'en est pas moins attaché au pays
qui l'a vu naître, et qu'il aime, comme un bon enfant aime sa mère, et cet
amour est d'autant plus ardent qu'il lui est inspiré par la religion.
Veuillez bien croire, M. le Procureur-Général, à la haute estime avec
laquelle j'ai l'honneur d'être votre très-humble et obéissant serviteur,
7 IG., ÉVÊQUE DE MONTRÉAL.
A l'Hon. G. E. Cartier, ï
Proc.-Gén., etc., j-
Palais de Westminster, Londres J
Il nous semble modestement que l'opinion des évêques, que
nous venons de rapporter, vaut bien celle de Messieurs Lanctot
et Dorion, les deux chefs du parti anti-fédéral. Nous est avis
même, que le peuple préfère ses saints évêques à ces deux
glorieux personnages, et surtout dans les affaires politiques ; en
effet, l'hon. A. A. Dorion en fait de sublimes conceptions poli-
tiques, n'a jamais dépassé l'invention des juges à paix électifs.
Pourtant, il a eu des moments d'oubli ; lorsque son parti ne l'ob-
sédait pas, il a eu le noble courage d'appeler de tous ses vœux,
une Confédération bien moins bonne que celle de M. Cartier ;
mais c'était dans l'heureux temps où ses partisans, éloignés de
lui, voulaient bien lui laisser démentir le spirituel Gaspard Le-
mage : l'on sait en effet qu'un jour, M. Dorion fatigué de n'être
que la queue du parti qui l'avait choisi pour chef, s'est écrié
dans un moment d amer découragement : " Je suis leur chef, il
faut bien que je les suive." M. Dorion avait été créé et mis au
monde pour être un excellent homme d'état de cinquième ordre
et il eut été admirable, s'il eut voulu comprendre que ses par-
tisans exploitaient sa réputation d'honnêteté professionnelle pour
en faire un chef qu'ils pussent décider à se contredire aussi souvent
que les besoins de la cause l'auraient exigé. Nous déplorons sin-
cèrement son sort. Qunnt à M. Médéric Lanctot, il a plus de
courage et n'a jamais reculé dans les grandes occasions où il s'a-
gissait d'affirmer les beaux principes du parti : combat au poing,
bris de vitres et de maisons, cour de police, amende ou emprison-
nement, rien ne l'effrayait. Aussi, s'est-il fait un nom notoire
et remarquable parmi la gent démagogique. Nous pouvons même
prédire qu'il ira loin, si, surtout, le gouvernement veut s'en
occuper. Lors de l'invasion fénienne, il put faire, grâce aux
fonds secrets qu'il reçut de la confrérie fénienne, tous ses efforts
et dans le club St. Jean-Baptiste et dans un journal extorqué
sous de fiux prétextes, pour attirer sur lui, l'attention de la
police et des autorités militaires. On le dédaigna : il en conçut
une rage morbide. Il espérait être emprisonné ; il le criait même
sur les toits, dans l'espoir de mieux vendre sa feuille barbouillée
aux épiciers peu fiers. Un jour, pourtant, il eut occasion de ma-
nifester son héroïque bravoure. La police eut à faire une des-
cente dans sa boutique, pour coffrer un de ses employés, qui
avait trop honoré Bacchus. M. Médéric Lanctot, crut que le
bonheur lui arrivait et qu'on en voulait à son auguste personne.
Ce fut sa journée " des éperons," et pour prouver qu'il était
vaillant, il alla faire une petite promenade aux Etats-Unis. Son
employé récalcitrant ayant réglé avec M. Penton, M. Lanctot
revint se livrer aux autorités qui ne l'avaient jamais réclamé. Il
fut heureux d'avoir échappé à un aussi grand péril, et ses colla-
borateurs l'en félicitèrent bien cordialement. Pour lui, en vrai
héros espagnol, il ne pardonna jamais à M. Cartier et à la police,
de lui avoir fait une aussi mauvaise affaire, et il ne se considéra
comme bien vengé de cet odieux attentat contre sa liberté, que
lorsqu'il eut essayé de corrompre nos braves ouvriers du faubourg
Québec, qui malheureusement commencent déjà à le connaître et
à l'apprécier. Mais il a déjà pourvu à cette sombre éventualité,
et le jour où la banqueroute le délaissera lui-même pour fondre
sur ses magasins au prix coûtant, il ira offrir ses services gratis,
bien entendu, à ses frères, les nobles Féniens, et leur vendra son
intéressante feuille, argent comptant, afin de mieux assurer le
paiement de la créance du père Marier.
Nous venons de faire impartialement l'historique de la confé-
dération et de ses avantages, de même que nous avons fait
connaître l'hypocrisie et la mauvaise foi de ceux qui combattent
cette mesure. On sait maintenant que penser des mensonges
du petit pamphlet rouge et de ce qu'il dit au sujet du rapport
de Lord Durham, de la question d'éducation et des mandements
28
de nos évèques. Nous pouvons ajouter que dans la confédération
les intérêts catholiques seront toujours protégés efficacement.
Voyons en effet, quel sera le nombre des catholiques dans la
confédération. Disons d'abord, en prenant pour base le recense-
ment de 1861, et en comprenant de suite, comme faisant partie
de la confédératioD, l'Ile du Prince-Edouard et Terre-Neuve,
qui de fait y entreront bientôt, que le chiffre total de la popula-
tion de la confédération est de 3,292,706 âmes ; sur ce total, la
confédération comptera 1,465,979 catholiques, répartis comme
suit, savoir :
Haut-Canada 258,141
Bas-Canada 943,253
Nouveau-Brunswick 85,238
Nouvelle-Ecosse 86,281
Ile du Prince-Edouard 35,852
Terre-Neuve 57,-214
Total 1,465,979
Ce qui fait à peu près la moitié de catholiques. Ainsi donc,
si les protestants dans le Parlement Fédéral voulaient molester
les catholiques, nous nous trouverions à lutter à peu près moitié
contre moitié, en mettant les choses au pis. Mais il y a des
circonstances qui changent complètement les chances et les tour-
nent toutes du côté des catholiques.
En premier lieu, la population catholique est toute homogène,
nullement dévorée par les divisions intestines des différentes
sectes, comme l'est le protestantisme ; elle devra opérer et il sera
toujours de son intérêt de marcher en un faisceau uni et com-
pact, pour que rien ne la divise. Il n'en est pas de même du
protestantisme, partagé en plusieurs dénominations dont quel-
ques-unes se jalousent ou se détestent, et qui ne pourront jamais
se réunir pour tyranniser les catholiques, parce que chacune de
ces dénominations étant faible, aura besoin, dans certains cas
donnés, du concours des catholiques de sa province.
Quelques chiffres, puisés aux meilleures sources vont nous
prouver ce fait. La confédération comptera :
Anglicans 517,542
Presbytériens 498,646
Wesleyens et Méthodistes 458,388
Baptistes 192,530
Luthériens 29,651
Congrégationalistes 1S,104
Croyances diverses 78,735
Sans aucune religion 18,860
Ceux dont les crovances ne sont pas connues 17.271
29
Ces dénominations comparées vis-à-vis la population totale, de
Ja Confédération, donnent le résultat géométrique suivant :
Les Anglicans représentant 15§ par 100
Les Presbytériens 15-J "
Wesleyens et Méthodistes 14 "
Baptistes 5J l(
Luthériens f "
Congréganistes J "
Croyances diverses 2^ ll
Sans religion ^ "
Croyances non connus J "
Les catholiques, eux, représentent vis-à-vis le
tout 44J "
Nous voyons de suite quelle supériorité numérique nous possé-
dons sur chacune des dénominations protestantes séparées.
Un second avantage qui éloigne tout danger des catholiques,
c'est la libéralité bien connue et presque extraordinaire des pro-
testants des provinces maritimes. Dans ces provinces la haute
éducation est presque toute entre les mains du clergé catholique
et notamment des Jésuites ; la plus grande partie de leurs
hommes politiques ont puisé, quoique protestants, leur éducation
dans des institutions catholiques et sont conséquemment pleins
de tolérance à l'égard de notre croyance. Là, les institutions
catholiques sont vues du même œil que les protestantes par toute
la population et par le gouvernement. Pour ne prrler que de
la Nouvelle-Ecosse, il y a dans cette province deux collèges
catholiques, sous la direction exclusive de prêtres et de jésuites,
et ces deux collèges reçoivent du gouvernement la même subven-
tion annuelle que les collèges protestants, savoir, mille piastres
par année : ce sont les collèges de Ste. Marie et de St. François-
Xavier, et il en est ainsi de toutes les autres provinces. Mais,
bien plus, dans chacune de ces provinces, la population catho-
lique excède de beaucoup le nombre de chaque dénomination
protestante, et dans deux d'entre elles, Terre Neuve et l'Ile du
Prince Edouard, l'élément catholique figure à peu près par
moitié dans le chiffre total de la population.
Il est donc de la dernière évidence que les catholiques dans la
confédération ne peuvent être molestés, et il faut être bien peu
soucieux de son honneur et de la vérité, pour prétendre que la
confédération met dans le gouvernement général, nos intérêts
religieux en danger, et ce, pour les deux bonnes raisons que nous
venons de développer, lo pour que le parlement fédéral n'a pas
juridiction sur l'éducation et nos institutions religieuses, 2o parce
^0
que s'il y avait appel d'un gouvernement local au ministère iédéral,
sur une question d'éducation publique, et que cet appel serait
fait dans le but de molester les catholiques, (et nous maintenons
que la supposition est impossible) nous verrions tous les protestants
des Provinces d'en bas, s'allier à la moitié catholique pour influ-
encer victorieusement le gouvernement fédérai. Nous pouvons
conclure hardiment que sous la confédération, nos intérêts reli-
gieux et nationaux se trouvent complètement à l'abri de tout
danger : la constitution nous le promet, et tous nos vénérables
évêques et les honnêtes gens ont trouvé la promesse suffisante et
l'ont sanctionnée par leur approbation.
Mais disent les rouges, et leur organe, Le Pays et le petit
pamphlet la confédération nous ruine, et va nous amener la taxe
directe. Nouveau mensonge que nous allons de suite mettre en
poussière.
FINANCES.
Dans le petit pamphlet rouge en question, la question financière
n'est nullement touchée ; on se contente de déclamations banales,
sur les prétendus gaspillages des dernières admistrations, qui
n'ont rien à voir dans le débat actuel.
Quant à la situation financière qui est faite à la Province de
Québec, sous la confédération, ou n'en dit rien du tout et pour
cause. M. le pamphlétaire se borne à des chiffres mensongers et
imaginaires et il a la force de donner, comme dépenses annuelles
de la Province de Québec, les dépenses générales annuelles des
deux Canadas avant la confédération, ce qui est de la plus odieuse
malhonnêtetés et de la plus grande fausseté. Il tait avec soin les
ressources de la Province de Québec, ne dit mot des bénéfices con-
sidérables que nous confèrent certains articles de la constitution
et il évite d'en citer un seul. C'est là la mesure exacte du respect
que messieurs les rouges ont pour le peuple ; au lieu de l'instruire
comme ils eu ont la prétention, ils emploient tout leur zèle
à le tromper par des assertion fausses et que chaque articles de
la constitution dénient. Encore une fois, si la constitution est
mauvaise et nous ruine, pourquoi ne pas citer les articles qui
prouvent leurs avancés ? La raison de leur silence est bien
simple ; s'ils mettaient devant le peuple les articles de la consti-
tution se rapportant aux finances et aux ressources du Bas-Canada,
ils se trouveraient dans la pénible nécessité de prouver eux-mêmes
qu'ils ne sont que de fieffés menteurs.
Nous allons de nouveau établir leur mauvaise foi, par la cons-
titution elle même :
31
109. Toutes les terres, mines, minéraux el réserves royales appartenant
aux différentes provinces du Canada, de la Nouvelle-Ecosse et du Nouveau-
Brunswick lors de l'union, et toutes les sommes d'argent alors dues ou
payables pour ces terres, mines, minéraux et réserves royales, appartien-
dront aux différentes provinces d'Otario, Québec, la Nouvelle-Ecosse et le
Nouveau-Brunswick, dans lesquelles ils sont sis et situes, ou exigibles,
restant toujours soumis aux charges dont ils sont grevés, ainsi qu?à tous
intérêts autres que ceux que peut y avoir la province.
110. La totalité de l'actif inhérent aux portinos de la dette publique
assumées par chaque province, appartiendra à. cette province.
111. Le Canada sera responsable des dettes et obligations de chaque
province existantes lors de l'union.
112. Les provinces d'Ontario et Québec serout conjointement respon-
sables envers le Canada de l'excédant (s'il en est) de la dette de la pro-
vince du Canada, si, lors de l'union, elle dépasse soixante-et-deux millions
cinq cent mille piasttes, et tenues au paiement de l'intérêt de cet excédant
au taux de cinq pour cent par année.
Les sommes suivantes seront annuellement payées par le Canada aux
diverses provinces pour le maintien de leur gouvernements et législa-
tures :
Ontario $80,000
Québec 70,000
Nouvelle-Ecosse 60,000
Nouveau-Brunswick 50,000
Total $260,000
Et chaque province aura droit à une subvention annuelle de quatre-vingts
centins par chaque tête de la population, constatée par le recensement de
mil huit cent soixante-un, et — en ce qui concerne la Nouvelle-Ecosse et
le Nouveau-Brunswick — par chaque recensement décennal subséquent,
jusqu'à ce que la population de chacune de ces deux provinces s'élève à
quatre cent mille âmes, chiffre auquel la subvention demeurera dès lors,
fixée. Ces subventions libéreront à toujours le Canada de toutes autres
réclamations et elles seront payées semi-annuellement et d'avance à
chaque province; mais le gouvernement du Canada déduira de ces sub-
ventions, à l'égard de chaque province, toutes sommes d'argent exigibles
comme intérêt sur la dette publique de cette province si elle excède les
divers montants stipulés dans le présent acte.
Pour appuyer d'avantage notre prétention, citons de nouveau
quelques paragraphes de l'article 92 déjà reproduit, pour faire
voir nos sources de revenus :
POUVOIRS EXCLUSIFS DES LÉGISLATURES LOCALES.
Dans chaque Province la Législature pourra exclusivement faire des
lois relatives aux matières tombant dans les catégories de sujets ci-dessous
énumérés, savoir :
3. Les emprunts de deniers sur le sous crédit de la province.
5. L'administration et la vente des terres publiques appartenant à la
province et des bois et forêts qui s'y trouvent.
32
8. Les licences de boutique, de cabarets, d'auberge, d'encanteurs et
autres licences dans le but de prélever un revenu pour des objets provin-
ciaux, locaux ou municipaux.
14. L'administration de la justice dans la Province, etc.
15. L'infliction de punitions par voie d'amendes, pénalité, etc.
On va voir maintenant que la Confédération nous laisse en
commun avec le Haut Canada, des propriétés qui nous don-
neront des revenus considérables dont au moins la moitié nous
appartiendra pour subvenir à nos dépenses ordinaires et extraor-
dinaires:
113. L'actif énuméré dans la quatrième cédule annexée au présent acte
appartenant lors de l'Union à la province du Canada, sera la propriété
d'Ontario et de Québec conjointement.
QUATRIÈME CÉDULE.
Actif devant la propriété commune d1 Ontario et Québec.
Fonds de bâtisse du Haut-Canada.
Asile d'aliénés.
Ecole Normale.
Palais de Justice dans le 1
Kamouraska, J
Société des hommes de loi, Haut-Canada.
Commission des chemins à barrières de, Montréal.
Fonds permanent de l'université.
Institution royale.
Fonds consolidé d'emprunt municipal, Haut-Canada,
Fonds consolidé d'emprunt municipal, Bas-Canada.
Société d'Agriculture, Haut-Canada.
Octroi législatif en faveur du Bas-Canada.
Prêt aux incendiés de Québec.
Compte des avances, Témiscouata.
Commission des chemins à barrières de Québec.
Education — Est.
Fonds de bâtisse et de jurés, Bas-Canada.
Fonds des municipalités.
Fonds du revenu de l'éducation supérieure Bas-Canada.
Après ces citations, nous pouvons bien rappeler les paroles de
l'un des publicités les plus éminents de l'Amérique du Nord,
lequel n'a jamais été partisan bien ardent de la confédération :
" Pour comprendre, dit-il, toute la signification de ces dispo-
11 sitifs, il est important d'avoir devant les yeux, avec cet avoir,
" les obligations qui en sont le débit.
" La séparation de l'administration provinciale de l'adminis-
l' tration fédérale a naturellement créé deux classes distinctes de
" revenus et aussi deux classes distinctes de dépenses. Ce que
" nous avons à constater pour le moment, ce sont, d'abord les
33
4* chiffres du revenu et de la dépense de l'administration du Bas-
11 Canada, tels que nous les fait la confédération, et à s'assurer
" ensuite, qu'en pratiquant l'éconoraie, sans nuire au développc-
** nient de nos ressources, de nos améliorations locales, de nos
'* institutions et généralement, de notre prospérité, nous sommes
" amplement pourvus pour l'avenir et que nous n'aurons pas
" besoin d'avoir recours au moyen extrême de la taxe directe.
" Commençons par le chiffre de la dépense. D'après des
" calculs basés sur des données puisées, presque toutes, à des
" sources officielles et quelques unes seulement, (celles relatives
" à la législature et au gouvernement) sur les probabilités
" appuyées sur l'expérience et sur la connaissance des choses et
" des besoins : d'après ces calculs, nous arrivons au résultat
4i suivant :
DÉPENSE.
Administration gouvernementale et législation $150,000
Judiciaire (administration) 100,000
Pénitentiaires 70,000
Ecoles 160,000
Asiles d'aliénés 90,000
Institutions littéraires 5,900
Hôpitaux et autres institutions de charité 21,390
Arts 3,500
Agriculture 4,000
Réparations d'édifices publics etc 15,000
Colonisation (chemins) 50,000
Autres chemins 15,000
Bureau des mesureurs de bois 35,009
Travaux publics 30,000
Contingents de bureau 30,000
Autres contingents 32.000
Glissoires 15,000
Arpentage 30,000
Terres (administration) 57,000
Autres dépenses non-énumérées 180,000
Total $1,099,790
Nous avons basé nos calculs en prenant les plus hauts chiffres
possibles, afin d'être sûrs de ne pas éprouver de déconvenue ; nos
dépenses seront certainement moindres que le total que l'on
vient de donner, et dans tous les cas, ne pourront jamais l'excéder.
Il nous reste à voir quelles ressources nous aurons pour rencon-
trer ces dépenses. —
3
34
REVENU.
D'après la clause 118 de la confédération, la Province
de Québec recevra du gouvernement fédéral une
allocation annuelle de $ 70,000
D'après la même clause, nous avons droit à une sub-
vention additionnelle de 80 cents par tête, payable
d'avance, ce qui donne, la population du Bas-
Canada étant, en 1861, de 1,111,566, le beau
chiffre de 889,252
Nos revenus locaux, dont la confédération nous laisse
la propriété exclusive et l'administration absolue,
en vertu des clauses 92, 109, 110, 111 et 112,
qui ont toutes été citées, produiront, en faisant
les plus modestes estimés basés sur les revenus
des dernières années, les diverses sommes suivantes :
Bois 105,000
Terres 300,000
Observons de suite que ce chiffre de $300,000 est
bien au-dessous de la moyenne. En 1865, le revenu
des terres s'est élevé à la somme de $830,992, dont .
au moins la moitié, savoir: $415,496, devrait repré-
senter la valeur annuelle approximative des terres du
Bas-Canada, puisqu'il y en a plus de disponibles ici
que dans le Haut-Canada, et cependant nous n'avons
fixé que $300,000, comme terme moyen, afin d'être
certain de rester au-dessous du vrai et de n'être pas
démenti dans l'avenir.
Autres revenus locaux, tels que : impôts sur l'admi-
nistration de la justice, licences, amendes, confis-
cations, s'élevant à au moins 300,000
Total du revenu $1,664,252
Total de la dépense 1,099,790
S 564,462
C'est donc une somme de $564,462 comme excédant de nos
revenus sur nos dépenses, et dont nous pourrons disposer pour
les objets qui nous seront les plus nécessaires. Il est impossible
d'inaugurer le nouveau système sous des circonstances plus pros-
pères. C3S chiffres sont basés sur des données officielles et sur
les articles mêmes de la constitution ; personne ne peut les
démentir, et, s'il y a exagération, c'est plutôt en moins qu'en plus.
Il est bien vrai qu'en vertu de l'article 112 de la constitution,
qu'on vient de voir, le gouvernement fédéral ne se charge de la
35
dette des deux Canadas que jusqu'au montant de $62,500,000,
et que la Province de Québec et la Province d'Ontario, tout en
étant déchargées du surplus de la dette vis-à-vis leurs créanciers,
seront néanmoins tenues de payer et rembourser au gouvernement
central l'intérêt sur ce surplus de la dette au taux de cinq pour
cent par an. La dette publique des deux Canadas était, d'après
les dernières statistiques officielles, de $07,203,994 ; le surplus
sera donc de $4,763,994. Nous sommes sûr d'exagérer considé-
rablement en plus, en prenant pour le Bas-Canada la moitié de
ce surplus de $4,763,994, c'est-à-dire 32,381,997. Nous aurions
donc, par ce partage, à payer annuellement en intérêts, sur cette
dette, une somme de $119,035 ; mais n'allons pas croire que
cette dernière somme entamera le surplus de nos revenus que
nous avons établi plus haut, à la somme de $564,402; car, dans
l'énumération que nous avons faite de nos ressources et de nos
revenus ordinaires, nous avons mis de côté, à dessein, pour nous
en occuper ici spécialement, une autre source de revenus et
profits très-considérables, tirée de l'article 113, déjà cité en entier.
Les statistiques les phis sûres fournies sur le sujet établissent, en
effet, ainsi qu'il suit, la valeur des propriétés laissées par le gou-
vernement fédéral aux Provinces de Québec et d'Ontario, qui
s'en partageront les revenus entre elles :
Fonds de bâtisse, H.- C $ 36,200
Ecole Normale, B.-C 47,777
Palais de justice, Aylmer, Montréal, Kamouraska.. 269,050
Société hommes de loi, H.-C 25,000
Compagnie chemins et barrières, Québec 42,600
" "< « Montréal 188,000
Fonds permanent d'Université 1,200
Institution royale 7.990
Fonds consolidé emprunt municipale, H.-C 7,294,800
Intérêts 2,429,540
Fonds consolidé emprunt municipale, B.-C 2,876,729
Intérêts 055,836
Société agriculture, H.-C 4,000
Octroi Législatif, B.-C 28,494
Prêt aux incendies de Québec 273,429
Fonds de Témiscouata 3,000
Education est 273,429
Fonds des Jurés 60,000
Fonds des municipalités 59,707
204,113
Fonds des revenus Education Supérieure 239,362
$15,029,366
36
En lisant attentivement cette nomenclature de notre avoir,
nous verrons que plus de la moitié se trouve dans le Bas-Canada,
et que conséquemment, notre part des revenus sera d'autant
plus élevée. L'intérêt de cet actif à six pour cent par an,
donnerait un revenu annuel de $903,318, dont la province de
Québec, pourrait avo r au moins une bonne moitié, savoir à peu
près $500,000. Mais mettons les choses au pire ; quelques-uns
de ces revenus pourraient être lents à entrer ; disons même que
le partage en sera injuste entre nous et le Haut-Canada et que
nous n'aurons que la juste moitié. Pour faire la part de ces
pertes et de ces inconvénients éventuels, supposons que cette
somme de 815,026,366 ne rapportera, par impossible, qu'un
intérêt de trois pour cent par an ; donc, à trois pour cent par an,
nous aurons encore un intérêt de 8450,880, dont au moins la
motié appartiendra à la province de Québec, savoir $225,440.
Ainsi nous nous trouvons avec un revenu extraordinaire, mais
sûr de $225,440, pour rencontrer la somme de $119,035, étant
notre part à payer des intérêts de la moitié du surplus de notre
ancienne dette, ce qui nous laisse un surcroit de $106,405, à
ajouter à notre excédant de $564,462, et en additionnant ces
deux dernières sommes, nous avons, savoir :
Excédant, de nos revenus ordinaires sur nos dépenses
ordinaires $564 ,462
Excédant de notre moitié des revenus de nos propriétés
communes sur les intérêts de la moitié du surplus
de l'ancienne dette des deux Canadas 106,405
Total de l'excédant de nos recettes générales sur nos
déboursés généraux $670,867
En face de ce résultat si beau, tous nos hommes bien pensant
et animés d'un patriotisme réel, tous nos vénérables Prélats n'a-
vaient-ils pas raison de s'écrier, que la confédération était notre
salut matériel, religieux* et national ? n'avaient-ils pas raison de
s'écrier que la confédération était le résultat heureux des efforts
combinés de nos hommes d'état les plus éclairés, les plus habiles
et les plus désintéressés ?
Ici doit venir une réflexion bien naturelle. Quel est l'intérêt,
le mobile des rouges dans leurs déblatérations continuelles à pro-
pos de taxes directes ou indirectes ? Qui est-ce qui les pousse à
mentir sans cesse depuis 1847, à propos de taxes et d'impôts ?
Jamais ils n'ont parlé au peuple de choses sérieuses, grandes,
propres à l'élever. Qu'on ouvre leurs brochures, qu'on parcoure
leurs journaux et l'on verra que leur grand cheval de bataille a
37
toujours été taxes et impôts. Cette manie chez eux révèle une
grande malhonnêteté et une grande hypocrisie ; elle est, de plusr
l'indice d'une absence lamentable de cœur et de patriotisme j elle
montre encore que le parti rouge méprise profondément le peu-
ple et n'a toujours cherché qu'à l'exploiter et à s'en faire un mar-
chepied pour atteindre le but de ses ambitions effrénées. En
fin de compte ces gens-là n'ont toujours cherché qu'à préjuger le
peuple contre les gouvernants et l'autorité : en criant sovs et
taxes. Ils croyaient le peuple descendu à leur niveau et c'est
pour cela que toute leur politique a toujours roulé sur les préju-
gés et les intérêts matériels. Des idées religieuses, grandes et
généreuses, ils n'ont jamais cherché à en répandre. Prenons par
exemple, leur petit pamphlet ; qu'y trouve t-on ? Il ne contient à
proprement parler, que deux objections contre la confédération :
le nouveau système d'après eux, va nous ruiner et nous conduire
à la taxé directe ; en second lieu, les prétendues prodigalités des
anciennes administrations vont encore nous mener à la taxe direc-
te. C'est en vain que vous checheriez autre chose dans ce produit
de cerveaux rouges. Nous venons de faire amplement et victo-
rieusement justice de la première objection. Nous avons démon-
tré que la confédération laisse à la Province de Québec d'immen-
ses ressources, que nous ne pour.ons jamais être taxés pour les
dépenses du gouvernement fédéral et qu'il nous est radicalement
impossible d'arriver à nous taxer directement pour nos intérêts
locaux. Cette objection de de la part des rouges, ne repose
donc que sur un mensonge, une odieuse fausseté. Quant à la
seconde objection, c'est un véritable hors d'oeuvre. Nous le de-
mandons à tout homme de bonne foi, qu'ont à faire ces stupides
accusations contre les anciens gouvernements, à propos du nou-
veau régime sous lcquelle nous vivons : Si la confédération est
mauvaise, citez les clauses de la constitution et montrez nous en
quoi elles sont préjudiciables à nos intérêts religieux, nationaux
et matériels. C'est le seul moyen honnête et convenable de com-
battre une mesure que l'on croit mauvaise. Cependant vous
n'en faites rien et vous vous contentez de divaguer à tort et à
travers sans rien citer.
Croyez-vous le peuple assez ignorant, assez insensé, pour vous
croire, et avez-vous la naïveté de penser qu'il vous suffit de men-
tir sur le compte des anciens gouvernements du Canada, comme
sur le compte des Honorables G. E. Cartier et J. A. Macdonald,
pour tourner la population contre un état de choses que n'ont pas
amené ces deux ministres éminents, mais qu'ils ont eu la sagesse
de croire acceptable, pour nous garder et nous protéger contre
les Américains, les Féniens et leurs alliés du Bas-Canada c'est-à-
38
dire vous, Mess, les rouges, les annexionnistes et les ciubistes.
D'ailleurs tous vos arguments reposent sur la contradiction et
l'hypocrisie la plus pitoyable. Dans tous vos écrits, dans tous
vos discours aussi vides de sens que pauvres de style, vous nous
parlez sans cesse, de progrès, de libéralisme, de liberté et de bon-
heur du peuple ; ouvrez l'histoire des dix ou quinze dernières an-
nées du Canada et montrez nous un peuple qui a fait autant de
progrès que nous ? Ouvrez encore nos comptes publics, nos
budgets annuels, et dites nous où sont allés et à quoi ont servi ces
emprunts, ces impôts, ou plutôt ces contributions contre lesquels
vous criez tant, pour ameuter notre belle population agricole et
ouvrière ?
Mais faisons ici quelques considérations sur l'économie poli-
tique. Vous ne savez p is, vous autres, messieurs les rouges, ce
que c'est que s'endetter pour s'enrichir et développer les res-
sources d'un pays neuf, afin d'en augmenter la population et la
fortune. Vous ignorez également la position géographique du
Bas-Canada et les avantages qu'on pouvait tirer de cette position.
Vous le savez peut-être, mais vous n'osez le dire au peuple, afin
de lui cacher ce qu'ont pu et fait pour lui, les hommes de génie
que vous vous acharnez à calomnier. Notre dette publique s'est
augmentée considérablement depuis 1850, cela est incontestable ;
les impôts indirects prélevés depuis 1850, ont aussi toujours été
croissants,, cela est encore vrai. Si pourtant, vous vouliez dire au
peuple, où sont allés, cette dette et ces impôts toujours croissants,
vous savez fort bien que l'on vous répondrait qu'il faut bénir !es
hommes qui ont su tirer parti des immenses ressources naturelles
que possède le Canada. Le pays, et nous parlons surtout du
Bas-Canada, était resté pauvre et faible en 1760, lors de la
cession du Canada à l'Angleterre. Durant la période de temps
qui s'écoula de 1760 à 1850 ou à peu près, la population cana-
dienne-française s'accrut considérablement, mais consuma pres-
que toutes ses forces dans la lutte qu'elle eut à soutenir, pour
s'affirmer et jouir de tous les droits que lui conférait le Traité
de Cession. En 1850, ou un peu avant, ou un peu après, nous
avions acquis la reconnaissance de notre autonomie et de nos
droits politiques et civils, de la part de nos compatriotes d'origine
étrangère. Ce n'est qu'alors que nous pûmes tourner nos regards
vers le développement de nos grandes ressources matérielles et le
perfectionnement de nos institutions domestiques. Le regretté
Sir L. H. Lafontaine comprit cela, mais ne put qu'inaugurer
faiblement l'ère nouvelle. L'honorable Georgo Etienne Cartier,
héritier naturel de sa politique arriva quelque temps après et sut
comprendre la nouvelle situation, les nouveaux horizons ouverts
39
•devant nous et continuer, agrandir et compléter l'œuvre à peine
commencée sous Lafontaine, que de regrettables nécessités poli-
tiques et une trop grande susceptibilité avaient forcé d'aban-
donner trop tôt la vie publique. Lors de l'Union, nous n'avions
ni système d'éducation, ni chemins vicinaux, ni routes de colo-
nisation, ni chemins de fer, ni navigation, ni canaux en un mot,
tout était à créer dans le pays. Consultez les comptes publics et
vous verrez à quoi ont été consacrés la dette créée et les impôts
prélevés.
Le Canada a donc dépensé et prêté aux municipalités, aux
compagnies de chemins de fer et autres, pour améliorations pu-
bliques et dans l'intérêt général une somme de $73,909,993,
somme qui naturellement ne peut représenter le chiffre de sa
dette, vu que plusieurs millions lui sont annuellement et régu-
lièrement remboursés.
Ces dépenses et ces prêts ont augmenté et centuplé la richesse
publique et privée du pays, en donnant l'élan et un accroissement
prodigieux aux intérêts de l'agriculture, du commerce et de l'in-
dustrie. En voulons-nous un exemple frappant ; qu'on consulte
encore les statistiques.
En 1850, les produits de l'agriculture exportés, s'élevaient à
une somme de $4,237,896* : Douze à quinze ans plus tard, après
la complétion de nos voies de communications, nous exportions
des mêmes produits pour une valeur de $18,236,476. Et toutes
les branches de nos ressources naturelles s'accrurent dans les
mêmes proportions ; citons encore par curiosité une couple
d'exemples. En fait d'objets manufacturés, la valeur exportée
en 1850, était de $26,708 seulement; en 1865, elle avait monté
jusqu'au chiffre énorme de $1,094,714 !
En 1850, la valeur du bois exporté était de $5,442,937; en
1865 elle avait atteint le montant de $14,283,207. Et pendant
tout ce temps d'accroissement rapide, l'augmentation de la popu-
lation canadienne française suivait au moins la même proportion.
Il n'est pas besoin d'ajouter que la valeur de la propriété a suivi
la même progression ascendante. Tout le inonde peut voir ces
chiffres comme nous, dans les mille rapports des départements du
ci-devant gouvernement canadien.
Il va sans dire encore, que la vente et la colonisation des terres
publiques, l'ouverture de nouveaux territoires suivirent de près,
sinon dépassèrent ces progrès merveilleux.
La demande augmentant suivant l'accroissement des produits
et l'augmentation de la population, le prix des objets que nous
avions à vendre, a, plus que triplé durant la même période.
Jadis, Pavoine se vendait de douze à quinze sous par minot et
40
un boa ouvrier se considérait heureux d'avoir trente sous par
jour; aujourd'hui la classe agricole et la classe ouvrière, ces
deux piliers de tout état, ont vu leur travail quintuplé en
valeur; quelquefois, il a même de beaucoup dépassé cette pro-
portion. Si le Canada s'était endetté pour des objets improduc-
tifs, comme par exemple, pour faire une guerre injuste, ou
n'acquérir qu'un simple prestige moral, nous comprendrions les
alarmes des rouges. Mais, qu'on ne l'oublie pas, le Canada a
emprunté pour améliorer et s'enrichir, rien que pour cela. Sui-
vant Jay Cook et tous les économistes remarquables, toute
nation qui emprunte ou se taxe, afin de produire plus et d'ex-
ploiter ses ressources, naguère improductives, fait un acte de
grande sagesse économique, qui doit nécessairement la conduire
à la fortune. C'est précisément ce qu'a fait le Canada. Notre
pays se trouvait exactement dans la position d'un agriculteur
sans capitaux, mais possesseur d'immenses terrains fertiles non
défrichés; si cet homme emprunte pour défricher, égouter et
améliorer ses terres, non-seulement il ne s'appauvrit pas, mais il
est sûr de s'enrichir considérablement. Ses propriétés une fois
améliorées et rendues productives, acquièrent une plus-value au
moins égale à la somme empruntée, et les riches rendements
qu'elles lui fournissent, ont bientôt payé et les intérêts et le
capital emprunté, et au bout de quelques années, notre cultiva-
teur intelligent se trouve propriétaire de beaux domaines dont
la valeur s'est au moins doublée et qui lui donne des revenus
plus que suffisants pour tous ses besoins. Ou, encore, prenez un
de nos artisans canadien-français qui sont si remarquables par
leur intelligence et leur assiduité au travail ; cet artisan a un
talent plus qu'ordinaire pour la menuiserie, la sculpture ou la
peinture; il possède, en outre, le grand avantage, d'une belle
réputation de probité, mais il est au début de sa carrière et n'a
pas d'épargnes. Si ce jeune homme emprunte de l'argent et hy-
pothèque son avenir, il pourra monter une boutique, un atelier
muni de tous les instruments nécessaires à l'exploitation de son
art ou métier ; il pourra faire de grandes entreprises et en peu
d'années, on le citera comme un de nos Crésus. Et pourquoi ?
Parce qu'il aura emprunté pour améliorer, pour agrandir la
sphère de son action et pour rendre plus productives ses connais-
sances en mécanique.
Nous le répétons, la position financière du Canada est identi-
quement la même que celle de cet ouvrier, de ce cultivateur
entreprenant et industrieux dont nous venons de parler. Le
pays possède un actif en propriétés de tous genres, qui repré-
sente au moins la valeur de notre dette publique, et, ce qui est
41
encore bien mieux, cet actif, ces propriétés fournissent au
Canada des revenus considérables qui lui permettent de faire
honneur à ses engagements, de payer toutes ses dépenses ordi-
naires et de consacrer une portion considérable de ces revenus
annuels, à encourager par des libéralités vraiment royales, l'édu-
cation, l'agriculture, l'industrie, le commerce, les hôpitaux et
institutions de charité, les arts et métiers, en un mot, tout ce
qui tend à l'agrandissement moral et matériel d'un peuple.
Les preuves vaudront encore mieux que nos paroles, quelque
sincères et véridiques qu'elles soient. En référant aux comptes
publics, nous trouvons la classification suivante de notre actif, de
nos propriétés, qui toutes, consistent en des travaux publics
d'une grande richesse, d'une grande valeur et qui rapportent au
pays d'immenses revenus, tout en développant considérablement
la richesse privée, ou, en sommes avancées à des compagnies de
chemins de fer, ou autres, ou aux municipalités, sommes qui,
sans produire un intérêt considérable et direct au gouvernement,
augmentent cependant d'une façon prodigieuse, les ressources du
gouvernement et du pays en général, par l'essor, le développement
et les progrès rapides imprimés à l'industrie, à l'agriculture et au
commerce.
Voici donc notre actif:
Travaux publics, savoir :
Canaux du St. Laurent $7,413,425,48
Canal Welland 7,386,545,53
Améliorations du canal Chambly
et de la Rivière Richelieu... 433,807,83
Canal de la Baie Burlington... 308,328,32
Améliorations du Lac St. Pierre 1,157,235,08
Travaux d'Ottawa 1,208.368,37
Amélioration du Trent 558,506,20
Havres et Phares 2,564,686,70
Chemins et Ponts 1,723,697,21
Bâtisses d'Ottawa (Parlement) 2,071,095,17
Prêts au compagnies incorporées 142,154,52
Ouvrages et bâtisses divers 1,759,755,98
26,727,606,89
Dû par les fonds de bâtisse et du havre 857,866,64
Comptes de chemins de faire, savoir :
Chemin de fer du Grand Tronc $23,902.403,41
" " " Great Western.. 3,727,082.85
" " " Northern 3,504,526,90
31,134,013,16
42
Montant rapporté 31,134,013,16
Dû par le fonds de dépôt 890,849,34
Comptes du fonds de prêt municipal 13,255,956,10
$72,866,292,13
Nous omettons, pour une valeur de deux ou trois millions de
propriétés différentes qu'il serait trop long d'énumérer, mais que
nous trouvons dans tous les comptes publics.
Nous devons observer pour la deuxième fois, que ce chiffre ne
représente pas notre dette publique, qui ne dépasse pas comme
nous l'avons dit plus haut $67,000,000, ou $68,000,000.
La vérité de notre assertion se trouve complètement établie
par l'état de notre actif que l'ont vient de voir.
Comme on l'a, en effet, aperçu, toute notre dette n'a été con-
tractée que pour des améliorations et des travaux publics, ou
pour prêter aux compagnies et aux municipalités ; et tout l'argent
emprunté est pour ainsi dire retourné dans la poche des contri-
buables.
N'est-il pas bien misérable celui qui cherche à préjuger, à
aveugler le peuple au point de lui cacher les vérités précieuses
que nous venons d'exposer, pour lui faire voir, dans les impôts
prélevés pour subvenir aux besoins d'une dette aussi profitable,
le résultat des intrigues de gouvernements corrompus, prodigues
et vénaux ?
Il est vraiment désolant d'avoir à lutter contre de pareils
adversaires et de les compter pour compatriotes. Heureusement,
le peuple a ouvert les yeux et sait à quoi s'en tenir là-dessus ; il
est assez intelligent et assez honnnête pour comprendre et avouer,
qu'une taxe indirecte, qu'une contribution en quelque sorte volon-
taire, prélevée pour payer le coût d'améliorations et de travaux
qui le font vivre et l'enrichissent, ne lai est ni préjudiciable, 'ni
odieuse, ni nuisible, mais, qu'au contraire, c'est pour lui une
obole donnée en échange de la prospérité et de la fortune. Il sait
si bien cela, le brave peuple du Canada, qu'il a toujours continué
à donner sa confiance aux hommes qui ont fait le pays grand et
l'ont lancé sur la voie d'une prospérité inouïe. D'ailleurs, mes-
sieurs les rouges, n'est-il pas de la dernière inconvenance pour
vous d'essayer à donner au peuple dos leçons sur un sujet qu'il
comprend bien mieux que vos prétendus grands hommes ; il sait
bien, nous pouvons vous l'assurer, qu'il tient les cordons de la
bourse publique et qu'il ne peut être taxé sans son consentement.
Et cependant, voilà près de vingt ans que vous lui criez à tue-
tête, qu'il se laisse écraser de taxes, et vos criailleries n'ont jamais
pu l'empêcher d'avoir confiance en nos hommes d'Etat.
43
Nous aurions pu, plus facilement, réfuter ou plutôt faire voir
les mensonges et l'hypocrisie des rouges ; il ne nous était pas
nécessaire d'expliquer tout le mécanisme financier du pays et les
causes de notre dette pour prouver que le petit pamphlet rouge
ne contient pas un mot de vérité ; si nous l'avons fait, c'était
pour réduire une bonne fois pour toutes, à leur juste valeur, les
hâbleries des rouges à propos de finances et de dette publique, et
établir, par des documents irréfragables, l'ignorance crasse ou la
mauvaise foi insigne de M. Dorion et de son parti.
Nous avions un moyen bien plus simple de les contredire et
même de les vouer au mépris. Ces gens ont été quelques mois
au pouvoir ; ils ont donc pu réduire la dette publique et faire
cesser les impôts, eux qui ont tant crié contre la dette et les
taxes. Eh bien ! le croira-t-on, loin de là, ils ont augmenté la
dette publique et les impôts durant leur courte administration.
Ouvrez les comptes publics de 1863, signés par le ministre des
finances rouge, et vous y verrez que ces faux libéraux, ces
sépulchres blanchis, ces ignobles charlatans, ont créé dans les
revenus un déficit de $2,704,536, et ont, par conséquent, aug-
menté notre dette publique d'autant. Cela se voit à la page III
des comptes officiels de 1863. Qu'on lise encore les estimés de
l'année 1863, pour le service de 1864, on y verra encore com-
ment les Rouges entendaient le progrès et l'amour du peuple :
ils ont diminué les octrois de vingt pour cent sur l'éducation
dans le Bas- Canada, de vingt-cinq pour cent sur la colonisation
et de vingt-cinq pour cent sur les hôpitaux et les institutions de
charité. Ils ne se sont pas contentés de réduire les octrois les
plus favorables au peuple, ils ont voulu encore établir de nou-
velles taxes qui retombaient principalement sur le pauvre peuple :
Par année.
Pour le droit de manufacturer du tabac $ 1 00.00
Pour permission de faire usage de presses à tabac, par
presse 20.00
Permission de faire usage de machines à couper le tabac,
chaque machine 20.00
Permission de faire usage de moulins à tabac en poudre,
chaque moulin 1 5.00
Pour droit de vendre du tabac en gros 20.00
en détail 5.00
Sur chaque livre de tabac haché, en torquettes ou pressé,
etc., manufacturé dans le pays 0.10
Sur chaque livre de tabac moulu 0.10
" " " haché et uniquement composé
de tiges 0.05
44
Sur toute autre description de tabac par livre 0.10
Pour le droit de tanner le cuir, par année 50.00
Pour l'usage de chacune des fosses, par année 1.00
Pour le droit de vendre le cuir en gros, par anné: 20.00
« " « en détail 5.00
Sur chaque livre de cuir de veau , 0.06
" " •' à empeigne 0.05
" u " à semelle, cuir fendu et cuir à
harnais 0.04
Sur chaque livre de toute autre espèce 0.05
Sur chaque livre de cuir importé, en sus des droits act. . 0.03
Il faut donc que les rouges aient beaucoup pillé, beaucoup cor-
rompu et beaucoup volé, pour nous servir de leur style élégant !
Ils ont augmenté les taxes et appauvri ce pauvre peuple qu'ils
aiment d'un véritable amour de crocodile, ils ont retranché les
octryis faits pour le peuple et malgré cela, leur administration
prodigue ou malhonnête a atteint un déficit d'au-delà de
$2,000,000.
Pour donner une idée de leurs principes rigides, voyons une
petite colonne de ce qu'ils ont gaspillé et volé.
Quelques-unes des dépenses inutiles ou injustifiables faites pur le
gouvernement rouge en 1862, 18b3 et 1864.
Octroi additionnel inutile pour les édifices d'Outaouais. $100,000
Excès de dépense sur le chemin Matapédia 50,000
Payé de trop aux vapeurs transatlantiques 392,000
Payé pour le service des. remorqueurs, offert pour rien. 16,000
Payé pour 'e chemin du nord-ouest, en dehors du Ca-
nada 50,000
Pour achat de la voix d'un membre 32,640
Pour l'exploration du chemin de fer intercolonial que le
gouvernement ne voulait pas faire 10,000
Commissions d'enquête pour persécuter les employés
conservateurs et caser les affamés ou banqueroutiers
rouges, tels que Dessaulles et autres 100,000
Total 8750,640
Les choses allant ce train, le pays courait vers sa ruine ; et si
les rouges n'eussent pas été balayés du théâtre, ils auraient cer-
tainement amené la banqueroute avant trois ans.
Oti vient de voir qu'ils ont été malhonnêtes ; on va maintenant
se convaincre au-delà de tout doute, qu'ils sont les plus hideux
hypocrites que jamais parti politique ait produits. Dans leur
petit pamphlet en question, ils posent en amis du peuple et font
45
semblant de s'apitoyer sur sod soit parce qu'ils le voient d'avance
écrasé sous le fardeau des taxes directes et indirectes, nécessitées
par la Confédération, et ils entassent chiffres sur chiffres, men-
songes sur mensonges, calomnies sur calomnies, pour le soulever
contre le parti conservateur, qui a tant fait pour le bien du pays.
Et pourtant, ces mêmes hommes en septembre 1863, voulaient
imposer la taxe directe dans ce pnys, afin de prélever assez d'ar-
gent pour satisfaire leur rapacité eL gorger leurs nécessiteux.
L'hon. L. Holton, ministre des finances de l'administration
McDonald-Dorion, disait en chambre à cette époque (septembre
1863), aux applaudissements de tous les rouges :
" J'incline à croire, que nous pourrions avec beaucoup d'a-
" vautages, alléger le fonds général du pays, d'un nombre consi-
" dérable d'items importants, laissant aux municipalités à les
<' fournir au moyen d'une taxe locale. Nous devons aborder la
(i question des taxes courageusement en face, et le moyen d'y
t* arriver, c'est de familiariser le peuple avec la taxe directe,
<• dont je viens de parler. Si plusieurs de ces items, qui sont
tl d'un caractère strictement local, étaient payés à l'aide d'une
<•' taxe locale imposée par les municipalités, nous aurions fait par
il là, un grand pas Vers un système rationnel de taxes."
Les commentaires sont inutiles, après ce que l'on vient de voir,
et si d'ailleurs, nous voulions parler, l'expression nous manquerait
pour flétrir du stigmate de l'infamie, le front d'airain de ces
gens, qui, après avoir pillé et volé le peuple, après avoir même
osé parler de taxes directes pour le mieux pressurer, viennent
maintenant outrageusement courtiser les faveurs de ce même
peuple, lui mentir insolemment et le menacer de taxes lourdes et
directes, qui seront impossibles sous le nouvel état de choses.
Nous n'avons pas cru devoir encore aborder la question des
Finances de la Confédération elle-même, c'est-à-dire du gouver-
nement fédéral. Les ressources se composeront des ressources
jadis possédées par chacune des provinces, excepté celles qui
sont spécialement exemptées pour l'usage propre de ces provinces,
comme on l'a vu plus haut. Toutes les dettes des provinces sont
mises à sa charge et le Bas-Canada se trouve enfin libéré de sa
dette qui a tant fait crier les rouges, à l'excepte des trois ou
quatre millions dont nous avons déjà parlé. Nous ne pouvons,
en aucune façon être appelés à contribuer aux dettes du gouver-
nement général : on suit la clause qui empêche ou prohibe toute
taxation pour cette objet imposée sur nos terres. 11 nous est
donc inutile de toucher cette question. Mais comme nous
tenons avant tout à faire un livre utile, nous allons citer les
46
clauses qui établissent les ressources, le passif et l'actif du gou-
vernement fédéral :
102. " Tous les droits et revenus que les législatures respectives du Ca-
" nada, de la Nouvelle-Ecosse et du Nouveau-Brunswick, avant et à l'é-
" poque de l'union, avaient le pouvoir d'approprier, — sauf ceux réservés
" par le présent acte aux législatures respectives des provinces ou qui
u seront perçus par elles conformément aux pouvoirs spéciaux qui leur
u sont conférés par le présent acte, — formeront un fonds consolidé de
" revenu pour être approprié au service public du Canada, c'est-à-dire de
" la confédération ou plutôt gouvernement fédéral de la manière et
" soumis aux charges prévues par le présent acte."
104. " L'intérêt annuel des dettes publiques des différentes provinces
" duCanada, de la Nouvelle-Ecosse et du Nouveau-Brunswick, lors de
" l'union, constituera la seconde charge sur le fonds consolidé de revenu
" du Canada, c'est-à-dire, du gouvernement fédéral."
108. " Les travaux et propriétés publics de chaque province, énumérés
" dans la troisième cédule annexée au présent acte, appartiendront au Ca-
" nada, n'oublions pas que Canada veut dire ici " Gouvernement Fédéral."
Voici cette troisième cédule :
TROISIÈME CÉDULE.
" Travaux et propriétés publiques de la province devant appartenir au
Canada.
"1. Canaux avec les terrains et pouvoirs d'eau y adjacents.
" 2. Havres publics.
" 3. Phares et quais, et l'île de Sable
" 4. Bateaux à vapeur, dragueurs et vaisseaux publics.
" 5. Améliorations sur les lacs et rivières.
" 6. Chemins de fer et actions dans les chemins de fer, hypothèques et
" autres dettes dues par les chemins de fer.
" 7. Routes militaires.
" 8. Maisons de douane, bureaux de poste, et tous autres édiûces publics,
" sauf ceux que le gouvernement du Canada destine à. l'usage des législa-
" tures et des gouvernements provinciaux.
" 9. Propriétés transférées par le gouvernement impérial, et désignées
" sous le nom de propriétés de l'artillerie.
" 10. Arsenaux, salles d'exercice militaire, uniforme, munitions de
" guerre, et terrains réservés pour les besoins publics et généraux."
" III. Le Canada (savoir le gouvernement fédéral) sera res-
" ponsable des dettes et obligations de chaque province exis-
" tantes lors de l'Union."
L'honorable M. Galt, dans ce langage si lucide et si magni-
fique qu'on lui connaît, a fait voir que la Confédération, avec
ces ressources mises à sa disposition, serait en état de subvenir
amplement à toutes les exigences du gouvernement fédéral. Nous
en faisous les quelques citations suivantes :
" Notre dette totale, à part le fond des écoles communes qui
47
" ne forme pas à proprement parler une partie de nos engage-
': ments, vis-à-vis des provinces d'en-bas, s'élève à $67,208,995.
" L'hon. A. A. Dorion — le chifire de $07,203,995 auquel on
" porte la dette du Canada, couvrc-t-il la première indemnité
tl seigneuriale accordée au Haut et au Bas-Canada sous l'acte de
" 1854?
" L'hon. M. Calt. — Oui, ce montant couvre l'indemnité en
" question, et au nombre des arrangements que le gouvernement
n a en vue, supposant toujours que la confédération ait lieu, il
" se propose de soumettre à la considération de cette chambre
" un projet tendant à faire assumer au Bas-Canada l'indemnité
" seigneuriale réglée par l'acte de 1859 ; l'effet de ce projet sera
" de rendre inutile l'obligation de donner une indemnité équi-
" valente nu Haut-Canada, ce qui opérera une économie de près
« de $3,000,000.
" Il est maintenant de mon devoir de soumettre à la chambre
11 un aperçu des ressources que les différentes provinces peuvent
11 apporter au fonds commun, et je suis en mesure d'ajouter, que
11 dans le but de pouvoir plus facilement vérifier l'exactitude de
u cet aperçu, j'ai pris pour base de mes calculs les rapports
" publics sur les finances de 1863. De l'étude de ces documents,
" il ressort que les revenus et les dépenses des différentes pro-
" vinces pouvaient, cette année-là, se décomposer comme suit :
il La Nouvelle-Ecosse, avec une population de 338,857, avait des
« revenus de $1,185,629, et des dépenses» s'élevant à $1,072,274 :
11 le Nouveau-Brunswick avec une population de 252,047, avait
" des revenus de $894,836, et des dépenses, s'élevant à $884,613 ;
" Terreneuve, avec une population de 130,000, avait des revenus
" de $480,000, et des dépenses s'élevant à $479,420 ; l'Ile du
" Prince Edouard, avec une population de 80,000, avait des
ht revenus de $197,384, et des dépenses s'élevant à $171,718.
" Le revenu total de toutes ces colonies se montait à $2,763,004,
" et la dépense totale à $2,608,025 : l'excédant réuni sur les
" dépenses de 1863, étant de $154,979 ; l'on pourra remarquer,
" en ce qui concerne ces provinces, que leurs revenus et dépenses
" sont tels qu'ils étaient en position de pouvoir faire partie de
" la confédération, dans une situation financière nullement infé-
" rieure à celle du Canada. Si Ton prenait objection à une pro-
" vince, en particulier, sur le principe de sa situation financière,
" la première à coup sûr serait le Canada. Les provinces mari-
" timesont été et sont actuellement en position de faire face, au
" moyen de leurs taxes, à toutes leurs dépenses, et ne peuvent
" être considérées comme apportant aucun fardeau au peuple du
" Canada. Il devient inutile que je parle en cette occasion de
48
" la situation financière.du Canada en 1863, mais je ne doute
" pas que la chambre apprendra avec un vif plaisir que le déficit,
" qui, malheureusement existait cette année-là, a été comblé en
" 1864, et que, conséquemment, nous ne nous verrons pas dans
•' la dure nécessité d'occuper dans la confédération une position
11 inférieure, sous ce rapport, à celle de nos sœurs colonies."
" L'hon. A. A. Dorion. — Le Bas-Canada devra donc assumer
" le fonds d'emprunt municipal, l'indemnité seigneuriale et la
" subvention scolaire."
l( L'hon. M. Glalt. — Je le repète, quelque soit l'opinion du
" gouvernement au sujet de la répartition des obligations exis-
" tantes entre le Haut et le Bas-Canada, la chambre pourra en
" ce cas apporter toutes les modifications qu'elle jugera à propos,
" vu qu'il ne s'agit ici que d'un arrangement local, qui ne con-
" cerne en rien la convention passée avec les autres provinces ;
" mais je dois insister en ce qui se rattache à la première in-
11 demnité seigneuriale, ainsi qu'au fonds d'emprunt municipal,
" sur le fait que ces deux items sont compris dans les soixante-
u sept millions auxquels, comme il a déjà été dit, se montent les
tl obligations du Canada, et que conséquemment ils ne sauraient
" être imputés au Bas-Canada ; il est de fait qu'en ce qui con-
" cerne le fonds d'emprunt municipal au lieu de le porter au
" passif, il appert que les sommes payées sous ce chapitre,
k< doivent être, au point de vue sous lequel j'envisage actuelle-
" ment la question, considérées comme actif, parce que nous
" sommes en ce moment occupés à examiner les sommes que le
" Bas-Canada reçoit comme actif; or, comme le fonds d'em-
" prunt municipal est compris sous ce chapitre, les sommes qui
" sont dues à ce fonds en vertu des arrangements en existence
" seront payables à titre d'actif à cette section de la province ;
" l'on ne manquera pas d'observer que dans le projet sous consi-
" dération certaines sources du revenu local, provenant du
" domaine territorial, des terres, des mines, etc. sont réservées
" aux gouvernements locaux. Le Canada devra retirer une
u somme considérable de ces sources."
Quelle mauvaise foi chez les rouges ? N'est-il pas clair comme
le jour que l'union double les forces ? Plus il y aura de provinces
réunies ensemble, plus les revenus seront considérables, plus les
entreprises et les améliorations seront grandes, plus, conséquem-
ment, grandira la richesse privée, seule base de la richesse
publique. Ce que le Bas-Canada seul n'a pu faire, nous l'avons
fait avec le Haut-Canada ; et ce que les deux Canadas n'ont pu
et ne pouvaient faire ensemble, la confédération le fera parce
49
qu'elle aura des débouchés et des ports de mer que nous n'avions
pas.
Nous demandons pardon au lecteur, de nous être étendu si
longuement sur cette question des Finances ; les rouges ont tant
fait, pour l'embrouiller, que nous avons cru devoir essayer de la
traiter à fonds, pour leur ôter jusqu'à ce dernier prétexte d'ar-
gent et de taxes, avec lequel ils prétendaient soulever le peuple.
LA CONFÉDÉRATION JUGÉE PAR SES ENNEMIS.
Un bon thermomètre pour juger des avantages de la confédé-
ration, c'est l'étude des gens qui l'opposent depuis qu'elle est
devenue fait accompli. Dans le Bas-Canada, il n'y a que deux
journaux français qui la combattent. Le Pays de Montréal
et le Journal de St. Hyacinthe. Nous ne parlons pas de
Y Union Nationale, qui n'est pas un journal, ni de son rédac-
teur-en-chef, qu'on ne peut décemment introduire dans une dis-
cussion sérieuse ; ce n'est qu'un petit bonhomme sans tête et
sans âme, qui ne sait que crier et vociférer, pour faire parler de
lui et se vendre un prix raisonnable. Nous ne mentionnons que
pour mémoire, Y Ordre de Montréal qui a naturellement
droit à nos sympathies, à cause de l'infirmité de son rédacteur et
de son propriétaire ; ce n'est pas leur faute, si leur feuille n'a ni
esprit, ni caractère, ni couleur; c'est un journal qui s'en va et
qui cherche à faire oublier ses anciennes alliances de mauvais
aloi, pour passer plus aisément dans le camp qui pourra le mieux
payer, lorsque le désabonnement complet se sera opéré, affaire de
quelques mois. Le Pays et le Journal de St. Hyacinthe, quoi-
quencore moins respectables, ont cependant, un caractère tran-
ché ; c'est, si vous le voulez, un caractère sali, comme celui de leurs
rédacteurs. On sait ce qu'ils veulent ; ils combattent la confé-
dération ouvertement et avec ardeur et désirent vivement l'anne-
xion ou la vente en bloc aux Etats-Unis. La nationalité
canadienne française et la religion catholique sont pour eux des
friperies dignes d'être jetées aux orties, comme l'ancien froc de
Mr. Lusignan, dont le plus amer regret est d'avoir porté la sou-
tane et de devoir son éducation à la générosité du Séminaire de
St. Hyacinthe. Brave garçon d'ailleurs, qui a cru devoir témoi-
gner sa reconnaissance à la maison qui l'avait nourri charitable-
ment du pain de l'intelligence, en se faisant le délateur de ses
anciens professeurs et le valet de Dessaulles. C'est là, le
rédacteur du principal organe du parti rouge.
11 a encore à la notorié'é d'autres titres que nous voulions
passer sous silence pour ménager sa modestie. C'est un braoi
de la plume, un bandit du journalisme, devrions-nous ajouter s'il
4
50
était moins lâche. Il a été très vite dans le métier et si loin
qu'un tribunal a récemment décidé que ça ne coûtait plus que
cinq piastres pour flageller le petit Lusignan jusqu'au sang. De
M. Lusignan, on pourra donc dire après sa mort, qu'il a passé
en méritant et recevant des coups de cravache. Le Pays a
encore pu baisser depuis Dessaulles qui, lui, se battait au
moins avec des pistolets vides, et a vu son honneur cotté à $100 ! ! !
C'est donc une buisse de 95 par cent pour le pauvre petit, sans
les soufflets. Ce que c'est que le progrès compris et pratiqué par
les disciples de Dessaulles !
Le Pays et le Journal de St. Hyacinthe sont les continuateurs
de V Avenir, journal fondé en 1847, par une clique de jeunes
voltairiens qui voulaient ruiner le catholicisme en Canada et
annexer leur patrie aux Etats-Unis, pour être plus sûrs d'anéan-
tir l'influence cléricale.
L'Avenir, le premier organe de AI. Dorion a publié les
odieuses lignes qui suivent :
" Le règne des prêtres a commencé au règne des Pharaons dans les sept
"■ années de famine. Les prêtres à emparèrent des biens du peuple et le
" tinrent dans V ignorance et la misère afin de le dominer. Les prêtres, dans
" tous les temps, ont su tirer partie de la faiblesse inhérente à notre nature
" pour dominer et satisfaire leurs passions.
" Une république démocratique n'a pas besoin de prêtres. Les prêtre»
" de l'antiquité n'étaient pas chrétiens à la vérité, MAIS LA RELIGION
" DU PRÊTRE NE FAIT RIEN DU TOUT A L'AFFAIRE. Le clergé,
" dans le moyen-âge, avait su amener le peuple à cet état de complète igno-
11 rance ! Le clergé est venu à bout d'effacer presque complètement
" toute trace de civilisation romaine."
Le même journal qui ne voulait ni Papes, ni Prêtres a encore
publié ces infamies :
« AUCUN DES DEGRÉS DE LA HIÉRARCHIE ECCLÉSIASTIQUE
« N'EST EXEMPT DES VICES QU'ENTRAINE L'AMOUR DU POU-
" VOIR ET DES RICHESSES.
" L'histoire de la papauté pendant une suite de siècles, EST L'HISTOIRE
" DE TOUS LES CRIMES QUI DÉSHONORENT L'HUMANITÉ."
Nous pourrions continuer à l'infini les citations ; ces deux
doivent suffire pour nous prouver que dès le début, le parti rouge
était l'ennemi juré de la religion et de son clergé. Nous frémis-
sons à la pensée que, quelques-uns de nos compatriotes, aient pu
écrire, que nous devions nous dispenser de prêtres.
Qui n'a entendu parler du notoire Dessaulles, dont les Six
Lectures sur l'annexion du Canada aux Etats-Unis ont fait les
délices des rouges et ont été en partie reproduites et chaudement
approuvées par tous leurs organes.
Depuis qu'il est tombé du Conseil Législatif, dans un sinécure
à la Cour de Police et qu'il a montré le niveau de son caractère,
51
dans la conspiration sans nom qui l'a fait descendre là, on ne s'oc-
cupe plus de lui si ce n'est pour gémir sur cette ruine morale.
Mais, dans le temps, il avait la vogue dans la secte voltairien-
ne et ses rapsodies faisaient autorité ; elles étaient d ailleurs en
conformité avec les principes du Parti. Il sera instructif de re-
produire quelques lignes de ses lectures :
A la page 14 l'auteur y dit :
" La civilisation, cette puissance à part, dans le monde, qui a
11 tiré l'humanité de l'état de barbarie, d'ignorance et de dépra-
" dation dans lequel le christianisme lui-même n'avait pas pu
11 l'empêcher de tomber. "
Ce n'est que le commencement, on ne fait qu'y insinuer l'im-
puissance du catholicisme.
Plus loin, il en vient à l'attaque brutale et il fait passer le ra-
tionalisme comme élément civilisateur, bien avant le christianis-
me qu'il essaie' de flétrir, sous le nom d'ultramontanisme. Ce
morceau mérite d'être cité ; il cadre parfaitement avec les deux
extraits de L'avenir que l'on connaît déjà.
" Enfin, messieurs, dit il, la civilisation a trouvé dans le monde
" le principe de l'égalité native des hommes entre eux que le
" christianisme y avait implanté ; mais elle a vu bientôt l'ultra-
" montanisme Romain refuser d'admettre les conséquences de ce
'• principe, et consacrer théoriquement et pratiquement, l'asser-
" vissement de l'intelligence, et conséquemment la dépendance
" morale et politique de l'individu."
" Alors la civilisation a imprimé au monde un mouvement
11 différent. Elle a protesté contre la réaction ultramontaine,et ne
" pouvant l'éclairer ni la faire sortir de son immobilité systéma—
" tique, elle l'a laissée loin derrière elle et' l'a, de fait, reléguée
" sur le dernier plan où elle occupe aujourd'hui une position
" analogue à celle de ces poudreux et vénérables bouquins que
i{ l'on conserve encore, pour mémoire, sur les rayons de nos bi-
" bliothèques:"
A la page 15, se place une insulte au clergé canadien :
11 En Canada seulement comme l'indépendance et conséquem-
" ment la liberté politique n'existent pas encore, la hiérarchie
" refuse de reconnaitre le dogme de la souveraineté du peuple et
li lui a déclaré une guerre à mort.
" Mais aussi comme il est excessivement probable que, du
" moment que l'heure de la liberté aura sonné, pour le pays,
•' elle le proclamera avec force saluts et bénédictions, laissons la
" exhaler une mauvaise humeur qui entre peut-être, qui sait,
11 dans les vues de la Providence, et qui n'entravera pas d'un
M ïota la mouche des événements."
52
A la page 17, il s'attaque violemment et en style vulgaire à la
papauté qu'il calomnie et qu'il injurie, comme lui seul possède
le secret de le faire :
" En Europe, messs'.eurs et en Europe seulement, je vois trois
" hommes, soutenus par quelques centaines de privilégiés, tendre
" leur bras en avant pour faire rétrograder les générations.
" Trois hommes y luttent encore, au moyen des proscriptions,
" des cachots, de l'exil, de l'échafaud, des meurtres juridiques
" des trahisons achetées, de la séquestration intellectuelle, de
" l'ignorance imposée aux masses, des excommunications, ana-
" thèmes contre le principe fondamental, nécessaire, indéniable
" de toute organisation sociale régulière."
" Ces trois hommes, vous les connaissez comme moi. C'est sa
11 majesté, l'Empereur d'autriche, l'infâme bourreau de la Hongrie
" et de l'Italie! C'est sa majesté le Czar de toutes les Russies,
" l'infâme bourreau de la Hongrie, de la Pologne et de la
" Circassie ! C'est enfin leur ami et allié, le roi de Rome, le chef
'• visible du catholicisme.
" Voilà, messieurs, les seuls représentants du despotisme dans
" le monde civilisé ! Voilà la glorieuse alliance que la hiérarchie
" Italienne a ménagée au père commun des fidèles ! Voilà le sort
11 qu'elle lui a fait ! Voilà le résultat de la victoire remportée sur
" l'évangile et sur le christianisme démocratique des premiers
" siècles, par la sacristie et le capuchon inquisitorial.
" Ces trois hommes ne se sont maintenus politiquement jusqu'à
" notre époque, qu'en proscrivant la presse, qu'en dégradant le
" sentiment national, qu'on éteignant chez les masses humaines
tl qu'ils oppriment, le flambeau de l'intelligence ; qu'en les
" séquestrant sévèrement de tout contact, moral avec les autres
" peuples. Ils se sont faits, chacun dans les limites de leurs
u états respectifs, les geôliers de la civilisation."
Il continue sur le même ton ; nous voulons citer sa dernière
tirade qui finit par un appel déguisé au poignard de Mazziui et
un petit soupir comprimé pour la chute ou l'assassinat du
Pape :
" Eh bien, messieurs, s'éerie-t-il qu'elle est la qualification qui
" convient à un gouvernement qui considérait comme son droit,
" la proscription de la pensée, comme une de ses plus importantes
" occupations, la saisie des enveloppes salies et chiffonnées des
" voyageurs ? Heureusement pour les peuples, ce despotisme
" abject et brutal ne sera pas encore longtemps possible."
C'était à la veille des tristes événements de 1849 ; c'était dans
le temps où l'illustre Pontife se préparait à donner, où il avait
même commencé à accorder des institutions libérales à son
53
peuple, que le courageux L. A. Dessaulles, écrivait ces lignes qui
resteront son éternelle flétrissure. Peu de temps après, le Pape
fuyait devant les hordes Mazziniennes, et son ministre Rossi
tombait sous les coups des libres penseurs .et des affidés aux so-
ciétés secrètes.
h' Avenir, se réjouit de ces horreurs et les approuva, et tout le
parti rouge se rangea du côté des assassins, contre la sainte vic-
time qui priait à Gaëte pour ses bourreaux. Il y eut même,
orgie des rédacteurs de Y Avenir, au restaurant Compain, pour
célébrer la victoire des bourreaux auxquels le Pape n'échappa
que par miracle.
Tirons le voile sur ces hontes et sur ces ignominies ; l'expiation
a déjà commencé pour quelques-uns de ces malheureux rouges et
elle arrivera infailliblement pour les autres. Ces crimes sont de
ceux que la colère divine ne laisse jamais impunis.
Si nous avons rappelé ce honteux passé des rouges, ce baptême
sanglant qu'ils se sont eux-mêmes donné, ce n'est pas pour flageller
M. Dessaulles en particulier. Pour lui, le châtiment est déjà
Tenu et a été complet. Sa réputation et sa fortune y ont passé ;
son intelligence, qui eût pu quelque chose, s'est rétrécie en per-
vertissant son cœur, et aujourd'hui M. Dessaulles n'est plus
qu'un pensionné du gouvernement, qui exhale sa haine impuis-
sante et son désespoir de n'être plus rien, à la face de ceux qui
le nourissent et le laissent faire par pitié.
Il est donc inutile de le combattre, puisqu'il suffit, que son
nom soit attaché à un écrit quelconque, pour soulever la dérision
et le mépris du public.
Il nous a fallu exhumer de l'oubli, ces pages néfastes, pour
faire connaître l'origine et les aspirations du parti rouge. Elles
constituent un témoin et un accusateur irréprochables, parce
qu'elles ont reçu la sanction et l'approbation de tous les rouges
marquants, et qu'elles ne sont d'ailleurs que la reproduction, sous
diverses formes, des idées et des principes que propageait Y Avenir.
Il était naturel que M. Dessaulles, après avoir insulté à la pa-
pauté, tournât ses regards vers le clergé canadien, pour essayer
de le salir de sa bave Yoltairienne. Il trouve défectueux et im-
moral l'enseignement donné par le clergé et lui administre une
leçon polie dont nous donnons un échantillon à nos lecteurs :
" Nous avons pleinement le droit de lui dire : Votre système
11 ne nous convient plus ; il entrave notre développement intel-
" lectuel et industriel ; il n'est pas adopté à notre situation poli-
" litique ni à notre avenir national : au point de vue social, il
" n'est pas à la hauteur de l'époque. Voilà pourquoi, nous
11 allons par nos propres moyens en créer un autre, séculariser
54
u V enseignement, afin de nous affranchir de votre tutelle morale ;
" doter une ou plusieurs universités avec les biens des jésuites
" qui n'ont servi jusqu'à présent qu'à exciter vos convoitises et
u dont le gouvernement responsable ne s'est servi que pour faire
" de l'intrigue."
A la fin de sa dernière lecture, Al. Dessaulles veut les insti-
tutions démocratiques pour le Bas-Canada, vu " qu elles seraient
il la plus sûre sauvegarde de notre nationalité, comme le meilleur
<( refuge contre V intolérance religieuse." (Lisez l'intolérance
catholique.)
Pauvre homme !
Impiété, haine du catholicisme, annexion, voilà l'essence des
conquêtes demandées par les rouges. Ils n'ont pas dégénéré. Ils
se sont dès leur début alliés aux fanatiques du Haut-Canada et
Brown fut leur dieu.
En 1852, M. Brown disait dans le Globe, son journal :
11 Le Papisme dans son essence est complètement opposé à la liberté
civile."
Dans la même année, il disait encore :
" Si les prêtres papistes, inculquaient cette doctrine, leurs revenus ces-
seraient. Les Messes, Vieux os, Vieilles guenilles et les Reliques seraient
tout à la fois rejetées par les fidèles et le Papisme mourrait de sa propre
pourriture."
Voici ce que l'on lit encore sur le " Globe" du 18 Février
1866:
" Dans quelques mois, on pourra voir émaner de Rome une bulle qui
avec Vaide et V assentiment de notre Gouvernement, va inonder le pays de
cette population (irlandais catholiques) et nous affliger ainsi d'une plaie
aussi dangereuse que les sauterelles pour la terre d'Egypte, &c , &c , &c.''
Le 7 Août 1857, Brown publiait dans son journal les paroles
suivantes, que Ton dirait copiées de Y Avenir :
11 Une pensée absorbe et ranime le plus chétif membre du Clergé Catholi-
que,— c'est que, tout infime qu'il soit, lui insecte venimeux se traînant dans
les crevasses et les parties en ruine de V édifice social, il est cependant un
associé de cette effroyable conspiration qui, depuis des siècles et avec des suc-
cès différents, n'a cessé de travailler à miner les institutions libres et à
étouffer les progrès de l'humanité."
Canadiens-Français, et catholiques, lisez, si vous le pouvez,
sans frémir, cet article du " Globe " du 4 Juillet 1857 ! ! !
" L'ignorance et la dégradation des prêtres offrent la partie la plus
ob-cure du tableau. Sortis des derniers rangs de la pauvreté, il est no-
toire qu'ils sont ignorants et dégradés. L'idée de leur dégradation est
même si enracinée partout, que lorsqu'un enfant est indomptable et que
ses parents n'ont pu réussir à lui faire entreprendre quelque carrière hon-
nête, ils considèrent souvent alors l'état ecclésiastique comms leur der-
nière et unique ressource.
55
u Ce fait peut être consigné dans un dicton qui peut être rendu ainsi :
Est-il vicieux, ignorant, glouton comme la brute,
Il ne nous reste plus que d'en faire un prêtre.
Voici maintenant ce qu'il pense des Canadiens-Français en
particulier. (Globe du 10 Juin 1852) :
11 Le départ de quelques canadiens-français pour les Etats-Unis n'aura
que peu d'effet sur toute la Province ; mais, si toute cette race émigrait en
corps, il en résulterait une plus grande force pour l'influence anglaise. La
vérité est que les Canadiens sont un obstacle réel pour le fonctionnement
des institutions Anglaises, &c.
Voici un renseignement précieux à récueiller et que nous tirons
d'un journal bien informé et des Rapports Parlementaires. Les
Rouges voulaient mettre en pratique leurs principes sur l'édu-
cation et restreindre la spbère des Collèges :
En 1854, il fut question en Chambre d'incorporer le Collège MassoD.
M. Hartman proposa la motion ci-dessous :
" Que la dite corporation n'aura point le pouvoir d'acquérir ou possé-
der aucuns immeubles, excepté ceux quipourront être nécessaires pour l'usage
du dit College.v
Cette motion mettait en suspicion l'honnêteté et l'intégrité des Direc-
teurs du Collège Masson. Elle insinuait très clairement que ceux-ci
pourraient acquérir des propriétés et les employer à d'autres fins qu'aux
fins de l'éducation. Malgré cela, MM. Dorion, Holton et deux ou trois de
leurs suivants votèrent pour la motion, en compagnie de George Brown.
En 1856 les rouges avaient encore progressé et demandaient
les Ecoles sans Dieu, ni religion, juisons la fameuse motion
Papin, appuyée de Dorion et de tous ses adeptes :
" Qu'il est désirable d'établir dans toute la province, un système géné-
ral et uniforme d'éducation élémentaire gratuite et MAINTENUE EN-
" TIÈREMENT AUX FRAIS DE L'ETAT, par le moyen d'un fonds spé-
11 cial qui serait crée à cet effet.
11 Que pour faire fonctionner ce système d'une maniée JUSTE et
" AVANTAGEUSE il sera nécessaire que toutes les écoles ainsi établies,
u soient ouvertes indistinctement à tous les enfants en âge de les ftvquen-
» ter, SANS QU'AUCUN D'EUX SOIT EXPOSÉ PAR LA NATURE DE
" L'ENSEIGNEMENT QUI Y SERA DONNÉ, A VOIR SES CROYAN-
« CES OU OPINIONS RELIGIEUSES VIOLENTÉES OU FROISSÉES
" EN AUCUNE MANIÈRE."
Sans la réprobation énergique de nos Kvêques et de notre clergé
le parti rouge, M. Dorion en tête, nous aurait déjà, de concert
avec M. Brown, imposé depuis longtemps un système d'écoles
communes d'où l'enseignement religieux eut été complètement
banni, et nos enfants seraient devenus suisses, comme Blanchet
ou impies vulgaires, comme les Fontaine du Journal de St.-
Hyacinthe, les Lusignan et les Dessaulles. Sûrement que nous
fierions bien avec des gens comme ç'i, pour moraliser une popula-
tion et défendre la patrie !
56
Le parti rouge ne se contenta pas de désirer l'annexion aux
Etats-Unis, comme l'un des meilleurs moyens de ruiner V influence
cléricale, et noyer la nationalité canadienne françaises; voyant
que les américains retardaient beaucoup à s'emparer du pays,
ils eurent recours de bonne heure à la représentation basée sur la
population ; dès le 12 août 1852, le Pays écrivait déjà:
« LE SUFFRAGE UNIVERSEL ; LA REPRÉSENTATION BASÉE
SUR LA POPULATION : V abolition de la qualification des représentants ;
le Conseil Législatif électif mais par tous les citoyens ; tous les officiers
ayant une autorité sur le peuple électifs ; tel est un échantillon des réforme»
rentables que nous demandons."
Le 26 août de la même année, le même Journal disait encore :
" Le principe de la représentation basée sur la population, EST JUSTE
D'UNE JUSTICE ABSOLUE. Kous % tenons maintenant comme ci-
devant; et nous répétons QUE LA REPRÉSENTATION N'EN EST PAS
UNE, SI ELLE N'A PAS LA POPULATION POUR BASE."
Mais d'abord qu'on oublie pas que le Pays avait succédé
à Y Avenir, anéanti par la banqueroute et l'opinion publique.
Les mêmes hommes et les mêmes principes présidaient à
l'esprit et à la rédaction du Pays, la seule différence entre
Y Avenir et le Pays, c'est que ce dernier fut à son début
moins grossier et moins brutale à l'égard du clergé et des prin-
cipes catholiques. On voulait duper le peuple et voler sa confi-
ance à l'aide de formules moins compromettantes. Mais l'on a
vu, depuis le commencement de la guerre d'Italie (1859) que le
Pays n'est toujours resté que Y Avenir ; il a toujours été du
côté de Mazzini et de Garibaldi. Sa guerre contre le saint évêque
de Montréal, à propos de Tlnstitut-Canadien et la reproduction,
avec éloge, et approbations, dans ses colonnes, des diatribes de
Dessaulles, contre le séminaire de St. Hyacinthe et ses prêtres les
plus éminents, ont complété plus que suffisamment, la preuve que
ce journal, n'est que le digue continuateur de Y Avenir. Revenons
à la question de la représentation basée sur la population.
En 1857, l'Hon. A. A. Dorion disait :
" Si l'Union actuelle doit continuer d'exister, elle ne peut exister qu'avec
la représentation basée sur la population. Je considère que c'est le seul
système juste.
" Je préfère une union fédérale, mais après cela, JE PRÉFÉRERAIS
A L'ORDRE DE CHOSES ACTUEL LA REPRÉSENTATION BASÉE
SUR LA POPULATION; — et je volerai pour cela, si aprH l'avoir tenté,
je ne puis obtenir V union fédérale?
En 1858, M. Dorion, dans son adresse aux électeurs de Mon-
tréal, s'exprimait ainsi:
" La discussion suggéra bientôt qu'au moyen de changements consti-
tutionnels accompagnés de restrictions et de garanties suffisantes pour la
57
protection des intérêts et des institutions de chaque section delà province,
ou par l'application du principe fédéral à notre système de gouvernement,
il était possible de préparer une mesure qui rencontrât l'approbation du
Haut et du Bas Canada, TOUT EN ADOPTANT LA POPULATION
COMME BASE DE LA REPRÉSENTATION."
L'on se rappelle que le ministère Brown-Dorion, pour se
dédommager de son court passage au pouvoir, se fit donner le 4
novembre 1858, un grand banquet, à la salle publique du marché
Bon-Secours, de Montréal, M. Dorion y prononça un long
discours ; nous allons en donner un court extrait, qui fera voir
la perfidie et les vues tortueuses de cet homme d'état. Il parle
de la question de la représentation basée sur la population ; on
sait qu'il avait concédé cette mesure à M. Brown et voyons les
ambiguités malhonnêtes dont il se sert pour avouer la chose
devant le Bas-Canada :
" La seule difficulté réelle qui s'élevât, était donc la question
M de la représentation d'après la population. Habitant le Bas-
" Canada, lui devant toute l'influence que je puis .posséder, je
" n'étais pas prêt à sacrifier un des justes droits de cette section
" de la province. Mais depuis longtemps, je sentais toutefois,
11 qu'il fallait en venir à un règlement de la question. Il fallait
" s'entendre. Les demandes du Haut-Canada devenaient de
" plus en plus pressantes à chaque élection et je voyais que l'opi-
" nion se faisait tellement forte que la mesure serait quelque
" jour emportée par l'influence du gouvernement impérial, jetée
'• dans la balance avec la majorité Haut-Canadienne, de manière
" à être injurieuse, peut-être désastreuse pour les intérêts du Bas-
11 Canada. Il fallait prévoir l'époque où cette mesure serait
" imposée. Il était du devoir des Bas-Canadiens de se prémunir
u contre cet état de choses. Nous avons des institutions, une
" langue, une religion qui nous sont chères et nous devons veiller
" à leur protection. Mais, d'un autre côté, sur les questions gé-
" nérales, il n'était pas à craindre que le Bas-Canada s'imposât
" au Haut-Canada, ni que le Haut-Canada s'imposât au Bas-
,c Canada, pas plus que le District de Québec n'a à appréhender
" l'influence du District de Montréal et le District de Montréal
11 celle du District de Québec. Il y avait saris doute, quelques
" difficultés pour arriver à une solution du problême ; il y avait
" certains intérêts qu'il fallait protéger, certains droits qu'il fallait
" consacrer par la législation ; mais après avoir donné cette pro-
" tection, il n'était pas malaise d'arranger une constitution.
" Messieurs, la question paraît plus épineuse au premier abord
" qu'elle ne l'est dans le fond."
Si nous voulons faire autant de citations pour prouver la
58
mauvaise foi du parti rouge et qu'il a toujours été favorable à
une mesure qui constituait notre ruine nationale et religieuse,
c'est uniquement pour faire disparaître complètement les préjugés
qu'il n'a cessé de répandre dans le peuple depuis des années.
Au reste, M. Dorion a, lui-même, reconnu avoir toujours été
prêt à accorder la représentation basée sur la population, ou, à
accepter une union fédérale entre le Haut et le Bas-Canada
ou une conféderatian pure et simple. Mais sait-on aujourd'hui,
pourquoi il s'oppose à la Confédération depuis 1865 ? Ecoutez
bien, lecteurs, qui croyez encore qne M. Dorion est la
pâte des hommes honnêtes et vertueux : cest parce que la
Confédération assure le triomphe des intérêts catholiques
et conservateurs du Bas-Canada sous le régime nouveau, grâce
aux nombreux conservateurs des Provinces maritimes, qui en se
joignant à ceux de la Province de Québec, nous mettront toujours
en état de repousser les tentatives des fanatiques du
Haut-Canada ; c'est en un mot, parce que sous la confédération
et dans le Parlement fédéral, Vêlement conservateur sera si fort
qu'il pourra rester au pouvoir, tandis que les Rouges, les Radi-
caux, ne pourront jamais gouverner. Ouvrez le volume qui
contient les débats officiels sur la Confédération et vous y ver-
rez cet aveu maladroit du grand chef, aux pages 253, 254, et
suivantes, dans la version anglaise.
Comprenez-vous maintenant la douleur patriotique de ce bon
M. Dorion, que la Confédération va empêcher de monter au
pouvoir, pour y placer sa légion d'affamés, de mauvais rhéteurs
et d'insulteurs publics ? Quel dommage pour le pays ? Est-ce
possible que la Confédération, puisse nous enlever l'espoir du
concours précieux des anciens collaborateurs de Y Avenir et de
tous les cuistres, qui noircissent de temps à autre, les colonnes
du Pays, du Journal de St. Hyacinthe, de Y Union Nationale
et de Y Ordre?
M. Dorion, permettez-nous de vous le dire, vous avez fait là
votre millième gaucherie. Tout le monde savait déjà que votre
seule objection à une mesure que vous avez toujours appelée de
tous vos vœux, n'était inspirée que par un misérable égoïsme et
d'étroits préjugés. Pourquoi venir l'avouer vous-même et mettre
à nu la pauvreté de votre caractère, ou la malhonnêteté de ceux
qui vous poussent ?
Nous avons surabondamment démontré que les seuls adver-
saires de la confédération, dans le Bas-Canada, sont les rouges es
les annexionistes, et que les seuls motifs qui en font les ennemit
décidés du nouveau régime sont leur haîne du catholicisme et
leur déloyauté ; ils sont, en effet, assez clairvoyants pour com-
59
prendre que l'ordre de choses récemment introduit consolide l'em-
pire de la religion et éloigne à jamais tout danger d'annexion. Ils
ont donné, dans le petit pamphlet rouge, la mesure de ce qu'ils
peuvent en fait de mensonges éhontés ; ils prétendent, à la page
13, que M. Dorion n'a jamais été pour la représentation basée
sur la population, et que M. Cartier, lui, a accordé la mesure !
On vient de voir comment M. Dorion s'est oppocé aux exigences
du Haut-Canada, et ce qu'il pense d'une union fédérale ou d'une
confédération. Quant à M. Cartier, il n'y avait qu'un rouge des
plus menteurs, et ce n'est pas peu dire, quant on sait que le
mensonge est la seule arme du parti, qui pût porter contre lui
une semblable accusation.
Nous avons expliqué, plus haut, la composition de notre légis-
lature locale et du parlement fédéral ; nous avous vu, par les
articles même de la constitution, que toutes nos institutions par-
ticulières et locales sont laissées sous notre contrôle exclusif, et
que le parlement fédéral ne pourra jamais y toucher. Les attri-
butions du parlement fédéral se rapportent seulement aux affaires
qui sont d'un intérêt général à toutes les provinces de la confé-
dération. Dès lors, il devient impossible pour quiconque sait un
peu raisonner, que jamais tentative n'y pourra être faite pour
léser qui que ce soit, parce que l'auteur du mal projeté devien-
drait lui-même victime comme les autres. Bien plus, dans la pré-
vision d'empiétements certainement impossibles, il y a des garan-
ties au sommet du nouvel édifice politique, par l'égalité intro-
duite dans la composition du sénat, où tous projets tendant à
molester quelque province particulière seraient de suite étouffés.
D'ailleurs, M. Dorion s'est chargé lui-même de nous rassurer; et
c'est lui qui nous a promis que les provinces maritimes marche-
raient toujours avec nous lorsqu'il s'agirait de combattre les
exigences des annexionistes d'ici et des radicaux du Haut-
Canada.
En outre, cette prétendue représentation bâ^ée sur la popu-
lation, adoptée à la chambre des communes du parlement fédéral,
n'est nullement dangereuse pour nous.
La clause 51, de la constitution est admirable de sagesse et
constitue pour nous une protection toujour efficace.
51. Immédiatement après le recensement de mil huit cent soixante-et-
onze, et après chaque autre recensement décennal, la représentation des
quatre provinces sera r 'partie de nouveau par telle autorité, de telle ma-
nière et à dater de telle époque que pourra, de temps à autre, prescrire le
parlement du Canada, d'après les règles suivantes ;
(1). Québec aura le nombre fixe de soixante-et-cinq représentants ;
(2). Il sera assigné à chacune des autres provinces un nombre de repré-
sentants proportionné au chiffre de sa population (constaté par tel recen-
60
sèment) comme le nombre soixante-et-cinq le sera au chiffre de la popu-
lation de Québec (ainsi constaté) ;
(3), En supputant le nombre des représentants d'une province, il ne sera
pas tenu compte d'une fraction n'excédant pas la moitié du nombre total
nécessaire pour donner à la province droit à un représentant ; mais toute
fraction excédant la moitié de ce nombre équivaudra au nombre entier ;
(4). Lors de chaque nouvelle répartition, nulle réduction n'aura lieu
dans le nombre des représentants d'une province, à moins qu'il ne soit
constaté par le de rnier recensement que le chiffre de la population totale
du Canada à l'époque de la dernière répartition du nombre des représen-
tants de la province, n'ait décru dans la proportion d'un vingtième ou
plus ;
(5). Les nouvelles répartitions n'auront d'effet qu'à compter de l'expi-
ration du parlement alors existent.
Ecoutons sur l'importance du paragraphe deux de la clause
51, les voix autorisées des Honorables Cauchon, Galt et Brown :
" Ce dispositif de la constitution à été au début, mal compris
" et mal interprêté. L'on se demandait pourquoi, lorsque les
" autres provinces pourront avancer, le Bas Canada devra rester
" stationnaire ! Ecoutons d'abord M. Galt, celui, de tous les
" ministres, qui a lo plus complètement expliqué et rendu la
" pensée de la convention de Québec dans son célèbre discours de
" Sherbrooke :
u. La population devra être la base de la représentation dans la
" chambre basse, et pour empêcher une augmentation exorbitante
u du nombre des députés dans cette chambre, à mesure que la
" population accroîtra, il fut convenu que l'on ferait une base sur
" laquelle l'on computerait le nombre des députés ; l'on choisit le
" Bas-Canada. Bien que le Bas-Canada ne possédât pas la
" population la plus considérable, cependant la sienne était nom-
" breuse, et croissait dans des proportions plus égales que celle
" des autres Provinces, n'augmentant pas aussi rapidement que
il celle du Haut-Canada, ni aussi lentement que celle des Pro-
" vinces atlantiques. Aussi le nombre des membres de la cham-
11 bre des communes, ne sera pas soumis à des variations aussi
" irrégulières que si l'on avait pris, pour base de la computation,
tl la population de l'une des autres Provinces."
" Cependant le ministre des finances n'a pas tout dit. Ce dispo-
" sitif est tout à l'avantage des provinces dans lesquelles les popu-
" lations, moins nombreuses déjà, augmentent encore d.;ns une
u proportion moindre. Le Globe, du reste, a parfaitement com-
" pris et parfaitement expliqué l'opération de ce paragraphe.
" Le principe de la représentation assise sur le nombre est con-
" sacré par le projet de la convention ; il y est tempéré, dans ses
" conséquences, par ses conditions d'existence ; sagement com-
61
l( primé par des freins, dans son travail d'expansion et retardé
u considérablement dans ses progrès.
" Pour bien nous faire comprendre, donnons un exemple: sup-
i( posons que la constitution dise : la chambre des communes se
" composera de trois députés ; comme vous ne comptez que pour
" un tiers dans l'ensemble de la population, vous y serez représen-
" tés par une voix, nous, nous aurons les deux autres, parce que
" nous sommes les deux tiers. Ici le priucipe de la population
11 est parfaitement reconnu et parfaitement pratiqué ; mais la
" majorité contre nous ne sera que d'une voix; et en déplaçant
" cette seule voix, nous aurons la majorité !
11 Maintenant, supposons un autre cas ; et disons que la rc-
il présentation, au lieu d'être de trois soit de trois cents députés,
" dans la chambre d.s communes. Notre tiers sera cent, et les
11 deux autres tiers deux cents. Les mêmes proportions seront
" parfaitement conservées avec le principe de la représentation
u basée sur la population, comme dans le premier cas, et cepen-
" dant, la majorité contre nous ici sera de cent ! Or l'on en con-
" viendra facilement, il est plus facile de déplacer une voix que
li d'en déplacer cent.
11 Donc tout en conservant la population pour base, on peut
" considérablement la modifier dans sa progression et l'amoindrir
" dans ses effets : il est évident parce que nous venons de dire,
'• que plus le chiffre autour duquel devra pivoter tout le système
" sera bas, le mieux ce sera pour nous et pour les provinces atlan-
u tiques.
" Maintenant, laissons de côté les hypothèses et opérons sur
" la réalité. Le Bas-Canada ayant une population de 1,110,664
" âmes et une représentation de 65 députés, chacun de ceux-ci
" représente en moyenne, 17,087 âmes. C'est la base adoptée
" par la convention, pour toutes les autres provinces, au point de
" départ. Si ce chiffre de 17,087, devait continuer à être la
" moyenne permanente de la population pour chaque député, et
(; que la population totale du Bas-Canada se doublât, en trente
•' ans, de 1861 à 1891, celui-ci aurait une population de 2,221,-
" 328 et une représentation de 130 députés.
11 Si le Haut-Canada au bout de la même période, avait, ce qui
" est possible, une population double de la nôtre c'est-à-dire de
" 4,442,656, il posséderait une représentation de 2G0 députés, et
tl une majorité sur nous de 130.
" Mais si au contraire le chiffre de 65, de notre représenta-
" ti m demeure station naire, à la même époque, la moyenne de la
" pipulation pour chaque député, dans toute l'étendue de la con-
" tédération sera de 34,174, et le Haut-Canada aura droit à 130
62
" députés. Ainsi donc dans le premier cas, le Haut-Canada au-
" rait sur nous une majorité de 130 voix, tandis que dans le
11 second, cette majorité ne serait que 65 voix. Il est donc im-
" portant, comme on le voit, que le chiffre de notre représenta-
" tion reste ce qu'il est."
Nous n'avons rien à ajouter à des explications aussi satisfaisan-
tes.
Le Haut-Canada devra donc, pour voir augmenter le nombre
de ses députés, accroître sa population dans une proportion d'à
peu près les deux tiers plus vite que le Bas-Canada ; or, la chose
est impossible. Qu'on lise bien le calcul suivant et l'on s'en con-
vaincra; bien plus, l'accroissement de la province de Québec
deviendra nécessairement plus rapide.
" Ce qui a jusqu'ici constitué la supériorité du Haut-Canada, c'est l'émi-
" gration. Depuis douze ans, pas moins de 300,000 émigrants se sont
" établis en Haut-Canada, quand il en est venu à peine 4,000 en Bas-
" Canada. Mais aujourd'hui la force des choses va changer le courant do
" l'émigration.
lo. D'abord, ayant la conduite de l'émigration entre les mains, nous
11 chercherons des émigrants qui, par leur origine, seront prêts à demeurer
" en Bas-Canada.
" 2o. Le Haut-Canada n'ayant plus de bonnes terres pour la coloni-
" sation, les émigrants devront en chercher en Bas-Canada. Voici 1»
u preuve de notre avancé :
Territoire. En culture.
« Bas-Canada 128,659,000 arp.— 1 3, 1 38,069 arp.
"Haut-Canada 31,741,000 « —18,587,783 "
t« Différence en faveur du Bas-Canada. . 96,918,000
" Il reste donc à coloniser en :
" Bas-Canada 115,511,000 arpents.
« Haut-Canada 13,154,000
" Différence en faveur du Bas-Canada.. 102,357,000
11 Cette différence entre le territoire total des deux provinces et le ter-
" ritoire habité, c'est-à-dire entre 46,918,000 et 102,357,000, fait voir que
" notre colonisation est 6 pour cent en arrière de celle du Haut-Canada.
M Le même tableau nous fait voir qne le Haut-Canada va être forcé de
" nous laisser profiter de l'émigration.
» Sur les 13,000,000 d'arpents du Haut-Canada, il faut déduire les
" rivières, les montagnes, les marécages et les terres impraticables. Reste
" à peu près 10,000,000 d'acres et pour le Bas-Canada, à la suite d'une
" même déduction 106,000,000.
" On comprend qu'il y a un très-mauvais choix à taire sur 10,000,000
" d'arpents laissés en arrière, alors que les précédents colons ont choisi
" le3 meilleurs."
" L'an dernier 16,000 émigrants se sont fixés en Haut-Canada. En
" mettant seulement à 2 p. cent l'augmentation naturelle de la population,
" par année, on trouve que 30,000 personnes y atteignent tous les ans
G3
•'leur majorité. Nous supposons que sur les 11,000 émigrants, 8,000
" s'établissent sur des terres et que des 30,000 âmes de population indi-
" gène, 6,000 seulement soient forcés de se fixer dans les townships si
11 nous accordons à chacun d'eux seulement 300 arpents de terre ; ils se
M trouvent à prendre dans une seule année 4,200,000 arpents de terre
" disponsibles. Le Haut-Canada n'a donc plus rien de terres que pour un
" an, s'il continuait à recevoir l'émigration dans la même proportion.
il Ce résultat nous fournit un double argument:
" lo. En enlevant forcément lïmigralion du Haut-Canada, nous lui
" ôtons une augmentation de ] 6,000 âmes par année. Nous pourrions
" mettre plus : car le terme moyen de IV migration depuis 14 ans est de
" 24,000 par année, dont 22,000 en Haut-Canada.
" N'importe, en gagnant 16,000 que nous leur ôtons, nous avons une
" différence annuelle de 32,000 en notre faveur. Cette différence pendant
"10 ans, nous donne une augmentation de 320,000 âmes. Or, la progres-
11 sion naturelle de notre population est près de un pour cent plus forte
" que celle du Haut-Canada, qui ne se rattrapait que par son immigration.
" En sorte que si notre progression ne l'emportait seulement que de §
" pour cent, nous aurions une majorité annuelle de 6,000 âmes, soit en
" dix ans 60,000 ou, en tout, près de 400,000 âmes, c'est-à-dire que notre
11 population l'emportera et pour toujours sur celle du Haut-Canada.
" 2o. Ce résultat nous prouve ensuite qu'il n'y plus d'émigration possible
" en Haut-Canada, et que nous profiterons de toute l'immigration pour la
u vente de nos terres."
Armée Permanente.
Les Rouges crient encore contre la Confédération, parce
qu'elle va nous amener une armée permanente, qui va dévorer
tous nos revenus et peut-être forcer ces braves gens à montrer
du cœur. Nous avouons que c'est désolent pour eux. Mais,
nous devons avouer que quant à nous, nous ne serions pas fâchés,
que dans un temps donné, les ressources de la Confédération
fussent suffisantes pour nous permettre d'organiser une bonne
milice active ou un noyau de petite armée permanente, avec
laquelle on pût imposer le respect aux Féniens et à leurs alliés,
les rouges, les annexion istes et les clubistes.
Toutefois ne nous décourageons pas : les Rouges au pouvoir,
et les Rouges qui veulent y arriver, forment un parti bien diffé-
rent. En 1863, ils étaient au pouvoir et nous ont présenté un
projet de loi sur la milice, dont la mise en pratique eût coûté
$613,000, et c'est à eux que nous devons l'établissement des
écoles militaires, qui nous ont donné des élèves distingués et
destinés à former cette armée permanente contre laquelle on
braille tant. Et ils ont fait cela, parce qu'il fallait le'faire, ou
descendre du pouvoir, et, comme ils aiment encore mieux empo-
cher l'argent du peuple, que faire de l'opposition, ils se sont
exécutés de bonne grâce et se sont faits belliqueux. Mettez un
queteux à cheval, il n'y a plus moyen de l'en faire descendre ;
64
avant de monter, il tempête contre les heureux mortels qui ne
vont pas à pied ; une fois monté, il s'y cramponne et oublie les
injustices de la société. C'est là l'histoire de nos rouges les plus
intelligents et les plus honnêtes.
Le parti rouge et annexioniste, fertile en s attises, a donné
naissance au club St. Jean-Baptiste, où alla se réfugier la secte,
pour faire dans l'ombre, ce que les chefs ne voulaient pas tenter
au grand jour. Ecoutez sur le compte du club St. Jean-Baptiste
la voix éloquente de quelqu'un qui a bien connu la sociétés des
compagnons et qui a reçu les révélations d'un membre converti
et repentant.
Le Club St. Jean-Baptiste.
Abordons maintenant le Club St. Jean-Baptiste, cette araignée
du parti libéral qui pendant près d'un an a tissé ses fils dans la
rue St. Jean-Baptiste en face du couvent de la Congrégation.
Cela n'existe plus bien entendu, parce que le balai a passé là
dedans. Les mouches qui furent prises dans la toile sont dis-
persées aussi. Beaucoup s'en sont retirées avec une aile ou une
antenne de moins, d'autres à demi sucées, quelques-unes, (rnais
elles sont rares) encore intactes. De celles-là on en voit voltiger
encore une ou deux, dans les rues du faubourg Québec. Je les
ai toujours soupçonnées d'être de connivence avec l'araignée.
Elles étaient là pour engager les autres à y venir.
— Vous croirez peut-être que je ris en écrivant ces lignes —
que je suis de gai et fol humeur — vous vous trompez, du tout
au tout ; on ne saurait être plus triste que je le suis en rap-
pelant ces souvenirs. Il y a là une leçon pour nous mais peu
c'en est fallu que nous y trouvions une grande honte et la cause
de notre ruine comme peuple religieux et moral. Car c'était
une société secrite que ce club de St. Jean-Baptiste, et une des
plus avilissantes encore. On y entrait en mettant le pied sur
une tête de mort pour attester qu'on était prêt à tout ; un
poignard était placé sur la poitrine du récipiendaire, pâle et
haletant, presque fou de terreur— cela voulait dire que la mort
le frapperait à la moindre trahison des ordres de la société. —
D'où viendrait cette mort? de tous cotés et de nulle part. Le
masque qui tenait le poignard ne s'expliquait qu'ainsi. Des
masques^ il y en avait quarante, cinquante et cent qui se tenaient
autour d'une vaste salle souterraine éclairée par une faible
lumière — un œil de bête fauve dans la nuit. — C'étaient des
hommes qui avaient honte de leurs actes ou de leur front. Beau-
coup d'entre eux, se cachaient, parce qu'ils sentaient qu'ils
65
feraient horreur au timide néophyte, qui demandait à devenir
leur frère.
Un serinent était prêté, serinent anti-religieux et anti-social,
serment qui rompait les liens civils et politiques, qui foulait aux
pieds les affections les plus chères pour le bénéfice, pour l'avan-
tage d'une association, dont le but apparent tl le progrès, la
nationalité'' n'était qu'un leurre, dont le but réel et indéniable
était l'élévation de deux ou trois individus, au détriment de
tous les autres. Ces deux ou trois Messieurs se sentaient petits
et traînards. Dans leur esprit qu'ils crurent plus grand que
leur condition ils révèrent de colossales destinées. Ils cher-
chèrent une échelle pour arriver au point que fixaient leurs
regards. Ils en trouvèrent une dans la boue, dans l'ordure ;
quelques-uns des barreaux étaient môme tachés de sang. " Pre-
nons toujours se dirent-ils, une fois là-haut, nous nous laverons
les mains." Ils ont dressé l'échelle, ils sont montés aussi, mais
arrivés au deuxième peut-être au troisième échelon, crac ! tout
se rompt et les voilà Gros Jean comme devant déplorant cepen-
dant bien fort, pour le succès de leur tentative que la lune soit
si haut placée.
Ils juraient donc, ces pauvres gens, ces moutons entêtés, ils
juraient qu'aucun devoir social, aucun lien de famille, aucun sen-
timent d'amitié, par suite, d'honneur, ne les empêcheraient
d'obéir aux ordres de la société, et ils juraient cela sur Vlionneiir.
Us juraient sur llwnneur, que l'occasion donnée, ils n'auraient
plus de devoir à remplir, plus de reconnaissance à éprouver, plus
d'affection au cœur, plus de cœur quoi ; ils juraient cela sur
Vlwnneur.
Us juraient sur Vhonneur, de prendre fait et cause pour un
frère en tout et partout, de le défendre par la parole et par les
armes, s'il le fallait envers et contre tous ; il juraient cela sur
l'honneur.
Une surprise se présente un jour— M. Chapleau sollicitait les
suffrages des électeurs d'un certain quartier de la ville de
Montréal. Un membre du club les sollicitait en même temps.
Pour la plupart des membres de cette association, l'adversaire
de M. Chapleau était un étranger, un premier venu. M. Cha-
pleau, lui, était un ami de tous les jours, un homme qui avait
rendu service à plusieurs d'entr'eux, un homme d'un talent
reconnu — admiré de tout le monde.
C'était une petite épreuve.
Qu'arriva-t-il ? Ces amis de dix ans, travaillèrent jour et nuit
contre leur ami le plus intime et le plus dévoué. Ils travaillèrent
en lui demandant pardon pour leur honte — ils travaillèrent si
6
66
bien que M. Chapleau dut se retirer pour laisser le champ libre
à son adversaire, qui certes était loin de pouvoir rendre les
mêmes services que lui à la municipalité. Que voulez-vous ?
il fallait bien en agir ainsi, puisqu'ils avaient juré sur l'honneur
de n'avoir plus d'amis, de n'avoir que des frères. Oh ! quels frères !
quelle famille ! bon Dieu ! Il fallait les voir, dans leurs réunions
de tous les soirs dans leurs salles enfumées de la rue St. Jean-
Baptiste, les uns trinquant, les autres jouant aux cartes en se
disputant quelques sous, tout leur pain du lendemain. Ea bas,
on conspirait, en haut on s'enivrait, on jurait, on volait.
Le cadre, du reste, valait bien le tableau. — Ce que c'était que
cette maison avant que le club s'en fut emparé, je ne le dirais
pas à une honnête femme. — On y vendait du vice, on n'y avait
jamais vu d'honneur. Les murs gardent encore quelques traces
de ces jours de dégradations. — Il y a à poine trois ans deux
hommes s'y sont égorgés à coups d^ rasoir. Leur sang est resté
sur le plancher, rien n'a pu l'effacer, et c'est sur cette tache de
sang que se dressait la table de jeu, que s'agitait le tripot, sur
cette tache de sang que venaient s'abimer le bonheur et la richesse
des familles. Quelques flacons de genièvre, un misérable tapis
vert suffisaient à ces ruines et à ces désespoirs. On se ruinait,
donc on s'éniviait, on se mettait le désespoir au cœur, là, là
mais ensuite pour oublier, après avoir bu et joué le paia de sa
femme et de ses enfants, on allait ailleurs les déshonorer. Pour
dire vrai ceux-là n'avaient pas juré sur l'honneur de faire le bon-
heur de leurs familles, ils ne l'avaient juré que devant Dieu.
C'était donc une société secrète que ce club St. Jean Baptiste,
une société secrète, parce qu'elle se recrutait dans l'ombre et dans
la nuit, une société secrète, parce qu'on y prêtait un serment in-
discret, une société secrète, parce qu'on y avait des secrets, des
mots de passe, des signes entre frères, une société secrète, puis-
qu'elle sacrifiait les intérêts de la grande société humaine à ses
propres intérêts, une société secrète, puisque le sang, puisque le
cœur n'étaient plus comptés pour rien par ceux qui en faisaient
partie et qu'il n'y avait plus, ni parents, ni amis, ni raison, ni
foi, ni loi, pour celui qui entrait dans l'association. Un frère ne
pouvait jamais avoir tort. Eût-il été assassin, voleur, sacrilège,
il fallait le protéger, le défendre contre les lois et la justice.
Des principes aussi monstrueux ne pouvaient réunir d'adhérents
que parmi les hommes tarés à qui il ne restait plus rien à risquer,
ou à perdre. Aussi, sur les deux ou trois cents membres com-
posant cette association, à peine en aurait-on trouvé dix qui ap-
partinssent à la bonne société. Encore, ceux là n'y firent-ils
qu'une courte apparition. Dès qu'ils sentirent que leur dignité
67
de gentilhotnines souffrait au contact de la tourbe ignominieuse
et disparate de leurs nouveaux frères ils se retirèrent du club
pour n'y plus remettre les pieds. La grande attraction s'exerçait
sur les hommes de métiers, sur les aubergistes, les boutiquiers de
tout genre, sur les avocats sans cause et les jeunes gens sans
emploi, presque tous oiseaux de proie que l'on conviait à dépecer
la grande société. Il en vint beaucoup de ceux-là, on leur pro-
mettait, voyez-vous, la protection, l'encouragement du club, et les
membres étaient tenus rigoureusement à cette règle. Le club
eût donc ses avocats, ses notaires, ses médecins, ses cordonniers,
ses tailleurs, etc. Tous devaient faire fortune. De fait, l'en-
couragement fut d'abord très-libéral. Le grand nombre qui
n'avait que des habits râpés, des souliers éculés se firent vêtir et
chausser ; on ne refusait pas à un frère ; mais tailleurs, bottiers,
aubergistes, etc., sont encore à courir après leur argent. Après
tout, un frère saura tout sacrifier pour un frère, mais en dépit de
sa bonne volonté il ne saurait battre monnaie.
Tous ceux qui sont entrés dans cette association ont été les
dupes de quelques intrigants politiques à la tête desquels figure
M. Médéric Lanctot. Il en était, lui, et l'un des premiers en-
core ; sous ses grandes phrases philanthropiques il cachait soi-
gneusement le germe de l'ambition qui aujourd'hui se développe
et menace bientôt d'envahir tout le pays si une main ferme ne
l'étouffé à temps. C'est là, dans ce bourbier infect que M.
Lanctot a nourri son patriotisme, a rêvé sa grandeur future, a
préludé à la régénération de l'ouvrier, qu'il opère aujourd'hui
avec un succès désespérant pour l'humanité. Il travaillait bien
pour son compte, celui-là, mais il était à peu près le seul qui
retirât quelque bénéfice de l'association. Tous les autres, ou à
peu près, qui sont entrés là avec quelqu'argent, quelques res-
sources, en sont sortis gueux et misérables. Il y aurait de cu-
rieuses statistiques à établir sur le nombre de banqueroutes et de
ruines dont le club a été la cause évidente, immédiate ; nous en
parlerons peut-être quelque jour.
La protection mutuelle, ayant pour principale considération la
nationalité canadienne française, telle a été d'abord le prétexte
de cette réunion. Aux badauds et aux niais on promettait un
pays de cocagne ; aux clairvoyants on ouvrait une autre perspec-
tive : la perspective du triomphe du parti rouge. La ruine de M.
Cartier, le succès du rougisine. telle est la vraie, la seule raison
de la formation de ce club, qui n'a été qu'une des formes du
Protée libéral, et la plus hideuse de toutes peut-être. On essaiera
de le nier dans certains quartiers, parce qu'on a honte de cette
sentine qui pue la crapule et le vice, mais les faits sont écrasants,
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à i'encontre de ces dénégations. La majorité des membres appar-
tenaient au parti rouge, tous les chefs étaient pris dans ses rangs.
Toute la presse libérale, les valets de MM. Dessaulles et Cie.,
les rédacteurs du Pays, de Y Union Nationale, de L'Ordre lui-
même, trônaient dans les assemblées. N<uis les mettons tous au
défi de protester contre cette assertion. Trois membres du parle-
ment sont descendus dans ce bouge, ont revêtu les insignes de
l'ignominie, c'étaient trois membres rouges. J'espère que les
comtés de Bagot, Richelieu et Iberville sauront leur payer, dans
les élections prochaines, le tribut d"hommages qu'ils méritent
pour une aussi louable action
Sans doute, M. Dorion n'a jamais osé descendre jusque là,
mais il y envoyait ses satellites, mais il défendait le club par ses
journaux, mais il l'encourageait par tous les moyens possibles,
parce qu'il voulait s'en servir comme d'une mine pour saper la
popularité de M. Cartier dans le faubourg Québec. M. Dorion
n'était pas du club, ce qui n'empêchait pas le club d'être à son
service ; et, pendant plus d'un au, tous les mouvements du parti
libéral sont partis du club. Qui a lutté contre la confédération
sur tous les hustings, à toutes les fenêtres et jusque sur les toits
du faubourg Québec, si ce n'est quelques forcenés du club com-
posant une petite cohorte dont Lanctôt était le chef et l'inspi-
rateur. Qui a levé le drapeau de l'indépendance, si ce n'est M.
Lanctôt ? Qui a été le plus ardent avocat de l'annexion depuis
quelques années, si ce n'est M. Lanctôt ? Qui a arboré le pavillon
fénien lors de l'invasion menaçante de c^s déguenillés ? M.
Lanctôt, toujours M. Lanctôt et le Club St Jean-Baptiste. Le
parti libéral s'effaçait devant ce parti naissant et le laissait agir,
sauf à profiter des avantages qu'il pourrait conquérir, Il songeait
aux dragées, mais se souciait fort peu des coups. Son échine
doit, du reste, être fort sensible, depuis si longtemps qu'il est
incessamment battu.
Force est donc au parti rouge d'accepter ce petit démagogue
comme un des siens, plus que cela, comme un de ses chefs, et
d'assumer en même temps toutes les hontes du Club St. Jean-
Baptiste. Il n'osera pas les renier, lorsque son principal organe,
le Pays, tressaille d'allégresse en parlant de la lutte que Lanctôt
se prépare à entreprendre contre M. Cartier. Il prévoit d'emblée
(on les connaît ces prophètes-là) la défaite de M. Cartier, et, là-
dessus, il entonne le chant de triomphe du parti libéral. Laissons-
les chanter aujourd'hui, c'est bien le moins qu'ils aient la gaies
de leurs chimériques espérances, ils ont si souvent éprouvé lsé
amertumes de la déception. Et encore, sont-ils loin d'avoir épuité
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leur calice de souffrance. Riez bien, mais rira mieux qui rira le
dernier.
Vous chantez des hymnes à M. Lanctôt, vous l'appuyez de
votre influence, vous le poussez, vous le lancez, quoi ! et vous
direz ensuite que le club St. Jean-Baptiste, dont il était le chef,
n'est pas une société secrète rouge, que vous le désavouez ; mais
le bon sens du peuple saura vous juger et rendre à chacun selon
ses œuvres.
Ce club a été une transformation soudaine de votre parti, qui
a travaillé pour vous et comme vous contre la religion, contre la
patrie, au profit des ennemis de nos institutions, de notre auto-
nomie et de notre avenir. Il a été flétri, comme vous l'avez été,
par la vcix éloquente de notre clergé et par toutes les consciences
honnêtes. Vainement Lanctôt se rattache à cette parole de la
chaire qui le stigmatise, vainement, vous aussi, vous essayez de
vous protéger de la croix qui domine notre petit peuple cana-
dien. Dans ses efforts comme dans les vôtres, vous me faites
l'effet d'un pendu qui s'est délié une main et qui cherche à se
cramponner à la corde qui l'étrangle. Ses forces s'épuisent bien-
tôt, on entend son râle d'agonie, les dernières convulsions agitent
son corps, il se roidit, il meurt enfin ; c'est un cadavre.
Le peuple, en bas, dit : " c'est juste," et tout est fini.
La Grève.
Le club est mort — mais l'esprit qu'il a soufflé sur une partie
de la population subsiste encore. — Un instant cet esprit avait
animé le corps d'un monstre qui habitait dans un antre — main-
tenant, sous un autre nom, dans un nouvel ordre d'idées il tour-
mente notre pauvre corps social. — C'est l'histoire du démon
chassé du lieu dont il avait pris possession et qui en ramène sept
autres plus dangereux que lui pour recouvrer sa conquête. M.
Lanctôt ne conduit plus discrètement les gens, à la nuit tom-
bante, dans une ruelle obscure, dans une maison plus obscure
encore, noire et enfumée, non, car cela n'a pas réussi, non, c'est
en plein air, c'est au grand vent qu'il expose ses doctrines sur la
grève, sur la misère du peuple, sur l'égalité absolue qui doit
exister entre tous les hommes, laissant espérer à l'ouvrier que
dans une société à lui, formée par lui, les oiseaux lui tomberont
tout rôtis dans la bouche et qu'il lui suffira de vouloir pour obte-
nir tout ce qu'il voudra.
Cette utopie inqualifiable a trouvé encore des dupes. Quel
est de fait le sot qui n'en trouve un plus sot que lui qui l'admire.
Cinquante à soixante claqueurs suivent journellement M. Lanc-
tôt de porte en porte pour applaudir à ses balivernes. Le peuple
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s'attroupe autour de lui pour admirer une aussi prodigieuse
source de sottises et le lendemain on lit dans L'Union Nationale
que deux milles auditeurs se pressaient au coin d'une rue pour
recueillir la parole éloquente du citoyen Lanctôt. — Petit Marat
va !
Il ne suffisait pas cependant à sa grande tâche de rénovation.
Il demanda de l'aide, mais personne ici ne voulut lui prêter
assistance. Alors il résolut d'implorer le secours de ses amis
MM. les Américains. Ils lui envoyèrent de suite M. Woodman
(homme des bois) ex-rédacteur de la Tribune, aventurier hardi,
prêt et résolu à tout, qui vint ici, pousser au milieu de nos
populations paisibles un cri de révolte contre l'Angleterre, en les
appelant toutes à l'annexion sous le plus bref délai, insultant à
nos célébrités en polisson politique qu'il est.
Avez-vous vu cette figure ? C'était celle d'un bandit et d'un
brigand.
Que voulait en faire Maître Lanctôt ? Il voulait le placer à la
tête d'un journal annexionniste qui devait sortir de son atelier ;
cela par pur patriotisme, bien entendu, dans l'intérêt de la religion
et de la nationalité.
Ce Woodman criait ainsi des injures rontre l'Angleterre dans
le seul but de se faire emprisonner. On lui disait un jour " mais,
si vous continuez on vous coffrera. " That is what 1 want, ré-
pondit-il.
Ne pouvant obtenir une prison, sa suprême espérance, ici-bas,
il résolut d'en finir avec l'ingrate humanité et mardi soir, 16
juillet, il se suicidait lâchement dans un hôtel de New-York. On
le trouvait, baignant daus son sang, mercredi matin. Une
balle de revolver lui avait traversé le cœur ! !
Grâce à la grève et aux associations ouvrières, Lanctôt espéra
pendant quelque temps échapper à l'infamie dont allait le cou-
vrir la chute du club St. Jean-Baptiste; il fit donc et fait encore
des efforts inouïs dans son nouveau genre d'exploitation. Il a
enlevé à ses créanciers jusqu'à leur dernière espérance ; il a tiré
des féniens et des américains tous les deniers qu'il a pu pour
masquer son ambition effrénée, inspirer et voler la confiance des
ouvriers et en arriver à les dominer pour s'en servir. Il faut
qu'il conspire ; c'est chez lui un besoin de sa nature perverse.
Au moyen de théories obscures, de promesses mensongères, il
compte tenir les ouvriers enchaînés et les faire se consacrer à
l'édification de sa fortune personnelle. Quelques-uns ont mordu
à l'appas ; mais le nombre des dupes diminue chaque jour et
bientôt Lanctôt, épuisé, meurtri et déshonoré sera obligé de fuir
le pays ou de se cacher soigneusement pour jouir en silence
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de la plus triste réputation laborieusement acquise par dix années
de conspiration, de vices et de crimes.
Résumé. — Conclusion.
Nous avons démontré, lo que la race canadienne-française
avait, à jouer sous la Confédération, un grand rôle, et que la
Confédération était pour nous, un moyen »ûr de remplir notre
mission providentielle ; — 2o que la Confédération était devenue
nécessaire ; -3o que la Confédération nous est très avantageuse,
en ce qu'elle offre et nous assure une protection, une garantie
certaine pour nos intérêts religieux, nationaux et matériels; —
4o que les accusations portées contre les hommes d'état qui nous
ont obtenu la confédération, n'étaient inspirées que par la jalou-
sie, la malveillance, le mensonge, l'hypocrisie, la déloyauté et la
malhonnêteté ; 5o que le parti qui s'oppose à la Confédération
est composé d'impies, d'annexionnistes et d'ex-affidés aux sociétés
secrètes, qui tous forment le parti rouge et qui tous refusent
d'accepter la Confédération, parce qu'elle est la sauvegarde de
toutes nos institutions les plus chères.
Ce parti infâme a pour chef, le triste Médéric Lanctôt et
l'Hon. A. A. Dorion, qui ont fini par opérer ouvertement l'union,
qui déjà, existait entr'eux secrètement, le Pays approuvant
depuis samedi, 20 juillet, (1867) la candidature de Lanctôt et
L'Union Nationale prêchant depuis la même date les vertus et
les mérites du compère Dorion. Qu'ont fait ces deux pauvres
sires ? M. Dorion par sa faiblesse et un certain prestige que lui
donne une réputation d'honnêteté usurpée, a soutenu le parti
rouge, annexionniste et voltairien ; le petit Médéric a essayé de
fortifier ce mauvais parti, en y introduisant l'élément des sociétés
secrètes et le communisme, par ses prédications burlesques, son
fénianisme, et le clubisme.
Le parti conservateur, le parti canadien-français, le parti
catholique marche sous la direction de l'Honorable George
Etienne Cartier, depuis 13 à 15 ans. Qu'ont fait M. Cartier et
son parti ?
Ils nous ont obtenu :
1. L'abolition des réserves du clergé, dont partie des revenus
a servi à bâtir nos palais de justice.
2. L'abolition de la tenure seigneuriale, qui a affranchi le sol.
3. L'extension du suffrage, qui a permis à tout ouvrier, à tout
cultivateur honnête, d'avoir voix dans nos assemblées délibé-
rantes.
4. Le système municipal, qui habitue le peuple à faire ses
propres affaires et à manier avantageusement la constitution.
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5. Le développement et les progrès immenses de la colonisation
et de l'agriculture.
6. Un système d'éducation commune et commerciale, propre
à promouvoir les intérêts du peuple.
7. Des canaux, des chemins de fer et une foule d'autres amé-
liorations qui ont centuplé la richesse publique et privée.
8. Le Codification de nos lois civiles et un Code de Procédure,
dont le besoin se faisait si vivement sentir.
9. La navigation libre et le creusement de nos rivières inté-
rieures.
10. La décentralisation judiciaire, qui met la justice à la
portée de tout le monde.
11. Enfin, la grande et belle confédération de l'Amérique
Britannique du Nord, digne couronnement d'un aussi beau passé
qui asseoit définitivement la nationalité canadienne française,
créé une grande nation et donne à notre pays une base solide et
durable, suivant la belle expression, de Sa Grandeur, Monsei-
gneur l'Evêque de Montréal.
Peut-on hésiter entre M. Dorion et M. Cartier, entre le parti
rouge et le parti conservateur ? Tous les honnêtes gens, à
quelque parti qu'ils appartiennent, répondront avec enthou-
siasme : donnons notre mépris à MM. Dorion et Lanctot, et nos
votes à M. Cartier et à son parti.
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