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=,Coogk
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wi3,Cooi^le
kCooi^Ic
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=,Cot)j^lc
LA CONSTITUTION SUÉDOISE
LE PABLEMENTARISME MODERNE
=,Coogk
wi3,Copi^le
CONSTITUTION SUÉDOISIÎ
LE PHULEMiNTiKISHE MODERNE
Pontus FAHLBECK
PARIS
AI PHONSE PICARD F,T FILS, LIBHAIRR
=,Coogk
(1 ^ c^-^ ■^'1 ■^. ■
3,Cooi^le
AVANT-PROPOS
Nous avons jugé bon de faire suivre notre
exposé de la Constitution suédoise d'une revue
générale des antres formes d'État modernes. Ce
procédé nous a parti nécessaire potir mettre le
lecteur en état de bien juger du caractère spécial
de la Constitution qui s'est développée en Suède
sous l'influence des faits historiques et des ensei-
gnements qu'ils contenaient.
Il va sans dire qu'en exposant à grands traits
les constitutions des autres États, fauteur ne
donne guère d'indicatioiis qui ne se retrouvent
dons les grands ouvrages bien connais de Gneist,
de Franqueville, de Todd, de Holst, de Bryce et
auttes. C'est seulement dans l'arrangement et dans
la confrontation des faits connus qu'il espère offrir
quelque chose de nouveau; c'est là qu'on pourra
,A-.,HvsI^
VI AVANT-PROPOS.
tronvei; sur la nature des constitutions aussi bie?i
'iverses formes d'Étal et leurs rapports
e théorie assez différente des opinions
t reçues.
3,Cooi^lc
TABLE DES MATIÈRES
I
LA CONSTITUTION SUÉDOISE
Chapitre I. — Consliltilions ihrlrinaires et
ConstittiCions historiques. — ComlUiUions
rodifiées el non aodtpécs
Chapitre II. — Aperçu du dévchppcinenl du la
ComHtvlion depuis Us origines jusqu'à f80!>.
La plus ancienne Conslitution sué-
doise. - I,a Constitution aristocratique
duMoyenâge(t250-152l|.— Le royaume
constitutionnel des temps modernes
(15-21 -1081})- — Périodes d'absolutisme et
de gouvernement parlementaire. — Re-
tour au constilulionnalisme (1680-1809).
Chapitre IIL — La ConslUuUon de 1809 <
Origines de la Constitulion. — Les
nouvelles lois (ondamen laies. — Le
Roi. — Le Riksdag. — Le Conseil d'État
et les garanties politiqucp.
Chapitre IV. — Modifications posIéHenres. —
Caractère de la CoiislUulion 81
Nouvelles dispositions constitution-
nelles et refonte intérieure de la Cons-
lilution. — Caractère général de la
Constitution.
=,Coogk
MBLB DKS MATiÈRF.S.
LE PARLEMENTARISME EN SUEDE
ET DANS LES AUTRES PAYS
Chapitre V, — Les formes modernes d'État. —
■Absolutisme. — Monarchie constitutionnelle.
— Parlementarisme 113-138
Les différentes formes d'État. — Les
formes d'Élat modernes.
Chapitbk VI. — Le parlementarisme unitaire
anglais 139-198
Quelques traits caractéristiques de la
Conslitutiou anglaise. — Majorité de la
Chambre des Communes et Cabinet. —
Le Gouvernement. — Le parlementa-
risme anglais sur le Continent.
Chapitre VIL — Le parlementarisme dualifte. 199-287
Chapitre VIIL — Le parlementarisme suisse.
CoNCLCSiONS 288-309
Appendice : Texte de ta Constitution de 1809. 311-340
Index alphabétique 341-3i9
D-'Cnoi^lc
■isiiiMD, Google
kCooi^Ic
CHAPITRE PREMIER
Constitutions doctrinaires et Constitutions
historiques.
Constitutions codiliées et non codifiées.
Si nous mettons à part les régimes absolutistes
qui survivent encore en Russie et en Turquie,
nous constatons que les constitutions actuelles
sont, à. très peu d'exceptions près, de date
récente. La plupart d'entre elles sont apparues
en Europe comme conséquence de la Révolution
française et des Révolutions de 1830 et de 1848
qui en dérivent. En Amérique, les États-Unis, —
nés eux-mêmes aux alentours de 89, — ont fourni
le prototype que tous les grands États du Nouveau
Monde se sont appliqués à. reproduire. Ainsi donc,
les plus anciennes de toutes ces constitutions
n'ont pas beaucoup plus d'un siècle d'existence
et la plupart n'ont que la moitié de cet âge.
A côté de cela, nous ne trouvons, à proprement
parler, que deux pays qui possèdent des consti-
tuttODs d'orig;ine ancienne : ce sont TAngleterre
..G.Kvsl^
4 OÉNÉRAUTÉS.
et la Suède ; car la HoDgrie et la Suisse, qui ont
chacune derrièi-e elle une longue vie constitutioQ-
nelle, ont vu, en 1848 et plus tard, leur régime
gouvernemental profondément modifié et trans-
formé d'après des idées modernes.
Ce qui distingue les constitutions du premier
et du plus important de ces deux groupes, c'est
— outre leur jeunesse, — leur caractère éminem-
ment doctrinaire. Sans doute, elles ont eu
pour point de départ immédiat des besoins forte-
ment ressentis à un moment donné, et ces besoins
se trouvaient naturellement à la base du mouve-
ment populaire dont la constitution fut une con-
séquence. Mais pour créer celle-ci, la nation ne
prit pas conseil d'expénences personnelles acquises
dans le passé, — tout simplement parce que de
telles expériences faisaient défaut en matièt-e
constitutionnelle; elle s'inspira seulement de l'état
de choses existant et des idées politiques de
l'époque. Ce sont, avant tout, les systèmes poli-
tiques et les théories sur la forme idéale d'un
gouvernement qui ont imprimé à ces constitutions
leur caractère particulier. Elles ont été construites
suivant un schéma tout prêt, que le système choisi
pour modèle fût celui de Montesquieu ou celui
du parlementarisme anglais, ou un autre.
Il en va tout différemment des constitutions de
■"8'^
CONSTITUTIONS DOCTRINAIBES ET HISTORIQUES. 5
l'Angleterre ei de la Suède. Od ne trouve "derrière
elles ni théories d'aucune sorte, ni modèles im-
portés du dehors. Elles sont, d'un hout à l'autre, [
les produits d'une expérience nationale recueillie
au cours de plusieurs siècles. Pour ce qui est de
l'Angleterre, c'est là un fait généralement connu
et qui n'a pas besoin d'être exposé ici. Mais que
le cas soit le même pour la Suède, c'est ce qu'on
ignore complètement au-delà des froniières de ce
pays. On trouvera une explication de cette igno-
rance si l'on réfléchit que la constitution suédoise,
— différente en cela de la constitution anglaise,
— a été codifiée à une époque relativement tar-
dive dans quelques « lois fondamentales ». Maïs
ces (' lois fondamentales » {grundiagar) et parti-
culièrement la plus importante d'entre elles,
savoir la loi constitutionnelle de 1809, ne sont
pas autre chose que la mise en formules et le
résumé pur et simple des expériences politiques
faites dans les siècles précédents. Nous le démon-
trerons tout à l'heure plus en détail. Pour le mo-
ment, bornons-nous à noter que les constitutions
de cette espèce, qui sont des constitutions histo-
riques au sens propre de ce mot, ne peuvent
èlre bien comprises qu'à la lumière de l'histoire.
Car chacune de leurs prescriptions et chacun de
leurs paragraphes sont la transcription juridique
L..8.IIMD. Google
QÈHÉStLLVTÉS.
ement historique. C'est pourquoi l'exposé
vre de la constitution suédoise aura pour
on UD aperçu général de toute l'iiistoire
de la Suède.
tre diftérence, — celle-ci plus formelle,
es constitutions modernes porte sur leur
extérieur, sur leur rédaction en
)ts et en lois. Toutes, excepté celles
iterre et de la Hongrie, sont rassemblées
ou quelques chartes de date récente,
is pour 1h Suède d'aujourd'hui ainsi que
uède d'autrefois : car avant la Constitu-
(09, et bien avant qu'aucun autre peuple
rédiger des chartes constitutionnelles,
en possédait déjà. Les plus anciens de
nents, qui ne contiennent, il est vrai,
'ragments de constitution, se retrouvent
vieilles lois provinciales dont les pre-
dactions connues datent du ïm' siècle
première moitié du xiv'. En revanche,
s une constitution parfaitement élaborée
îde Général {AUmànna Landslagen) qui
sous le roi Magnus Eriksson vers l'an
bablement en 1347) et de nouveau sanc-
1442, par le roi Kristoffer'.
>rs du droit public concernant tout le royaumei
tina Landslag de 1347 contient seulement les
..,,..G.H,^1C
CONSTITOTIONS CODIFIÉES ET NON CODIFIÉES. 1
Cette ancienne loi constitutionnelle , est remar-
quable à beaucoup de points de vue. Tout d'abord,
parce qu'elle se trouve jointe à la loi civile et
criminelle et forme avec celle-ci un seul et même
Code. Les Suédois de ce temps ramenaient à l'unité
le droit privé et le droit public. La Constitution de
1330 se distingue en outre par ses efforts pour être
complète et systématique. Dans des cbapitres
spéciaux {balkar), elle légifère aussi bien sur les
questions relatives aui classes sociales, aux
a états », que sur la constitution proprement dite
dont elle examine les divers éléments : le roi, le
peuple, le Conseil, définissant les droits et les
obligations récîpioques. De même, la législation
et le système des impôts sont traités en passant.
Eu un mot, c'est toute l'organisation de l'État du
moyen âge que nous avons là devant nous, com-
plètement codifiée.
Ce texte, contenant la première constitution
suédoise détaillée, demeura, malgré les nom-
breuses innovations survenues par la suite, la
prescriptloDS de droit privé et d'organisation judiciaire
applicabies aut campagnes. — Pour les vilies fut édictée en
1357 une ioi municipale spéciale {Siaddag) qui renferme le
droit priTé et l'organisation judiciaire des citôa. — La
nouvelle édition de i'Almà'nna Landilag publiée en 1442 par
■ ~ ■ ~ reproduit h. peu près dans les mêmes
8 SÉNÉRAUTÉS.
véritable loi fondamentale du royaume jusqu'à la
fin du xvii" siècle. Parmi les inDOvations, il faut
signaler au moyen âge : les capitulations impo-
sées à chaque roi ; plus tard (à partir de 1544),
les lois successorales {Arfforeningar) qui déter-
minèrent dans les différentes maisons royales les
droits de l'hérédité au tr6ue; puis la lot organique
du Riksdag promulguée par Gustave-Adolphe
en 1617 ; la « Forme de gouvernement » {Regerings-
form)àe 1634, qui donna une organisation nouvelle
à l'administration supérieure du royaume (ajoulona-
y l'acte additionnel de 1660); enfin les privilèges des
classes publiés à différentes occasions (1569, 1613,
etc.). Plusieurs de ces nouvelles lois et conven-
tions vinrent compléter et mettre au courant des
exigences nouvelles les chapitres relatifs à. la
Constitution; d'autres, comme les lois de succes-
sion, annulaient en fait les dispositions corres-
pondantes contenues dans la Constitution. On les
laissa cependant subsister, et l'on continua du
reste à regarder l'ancien Code comme contenant
la constitution légale du royaume, jusqu'à l'époque
où Charles XI réclama des états et obtint une
interprétation des statuts relatifs au Conseil (1680)
et à la législation (1682) ; en fait, l'interpréta-
tion nouvelle détruisait complètement l'équilibre
jusque-là observé dans la répartition des pouvoirs
CONSTITUTIONS CODIPliSS RT NON CODIFI^BS. 9
et établissait le régime àe l'absolutisma. Quand
celui-ci fut renversé à son lour, en 1719, on
élabora de nouvelles lois constitutionnelles : ce
furent la Constitution de 1719, doublée par celle
de 1721, et la loi de 1723 sur l'organisation du
Iliksdag. Ces lois constitutionnelles furent main-
tenant séparées de la loi civile, qui reçut, en
1734, sa rédaction indépendante dans une loi
générale conlirmée la même année ; elles prirent
donc désormais une forme tout à fait moderne,
ne comprenant que le droit public en vigueur, à
l'exception des privilèges. Tel fut aussi le but
poursuivi par la constitution que rédigea Gus-
tave III, en 1772, et par son complément limi-
tatif, l'acte d'Union et de Sûreté de 1789.
Il ne faut donc pas s'étonner si la constitution ;
de 1809, aussitôt introduite, fut codifiée en plu-l
sieurs lois détaillées. Le peuple suédois s'était
accoutumé, dès le moyen âge, à voir sa consti-
tution réunie dans quelques chartes ou portions
de chartes spécialement rédigées à cet effet. On
peut ajouter que ce procédé est incontestablement
plus commode que le système suivi en Angleterre,
où les statuts de la Constitution sont dispersés
dans une série d'actes publics différents par la
date et par l'importance. Mais ce que l'on gagne
ainsi en clarté pratique est perdu pour la com-
L..8.IIMD. Google
. -i
OÉ NÉ R ALITÉS.
me de la Constitution avec sa
iveloppement, son esprit et son
Dvénients l'emportent de beaucoup
es qui résultent d'un manienient
3,Cooi^le
CHAPITRE II
Aperçu dn développement de la Constitution
depuis les origines jusqu'A 1809.
I
L4 PLUS ANCIENNE CONSTITUTIOH SUÉDOISE
Le royaume de Suède est à l'origine la réu-
nion de plusieurs royaumes'. Cette fusion des
nombreux états partiels en un royaume unifié
constitue le premier grand événement constitu-
tionnel qui se présente à nous. Comment furent
jetées les bases du nouvel Étatjc'est ce que nous
savons seulement par d'obscures traditions légen-
daires. La saga nous raconte qu'Ingjald Illrida,
roi d'Upsal, supprima par la violence ou la trahi-
son tous les autres petits rois et confisqua leurs
domaines à son profit. Ces événements doivent
avoir eu lieu dans le courant du vu" siècle. Nous
ne savons pas comment furent réglées les rela-
I DHvuinA /T,ii ^^piïait vers l'an 550 après Jéaus-Ctirist,
:s iiagas islandaises mentionnent éga-
lûmes.
12 HISTORIQUE DB LA CONSTITUTION.
tions eijtre le royaume conquérant et les royau-
mes conquis, mais à en juger d'après plusieurs
indices, tout le changement consista en ce que le
roi d'Upsal fut reconnu roi dans chacun des pays
soumis, en héritant pour chacun d'eux de la situa-
tion et des droits particuliers du roi dépossédé.
Aussi le changement à l'intérieur fut-il peu mar-
qué ou même insensible, tandis qu'à l'extérieur
le royaume uni se présentait désormais comme
le grand « Empire des Suédois » {Svia vâide) .
C'est seulement après l'extinction de Tancienne
dynastie royale vers 1060, c'est-à-dire au moment
où la domination normande s'établit en Angleterre,
que nous pouvons constater que la Suède est, au
pointde vue du droit, un État composé. En effet, nous
voyons commencer alors une guerre qui devait du-
rer plus de cent a'ns entre les différentes parties du
royaume, et surtout entre les « Vastgôtar s ouGotUs
de l'Ouest et les « Uppsvear « ou Suédois du Nord.
Cette lutte intérieure fut, il est vrai, soulevée au
début ^ar l'invasion du christianisme ; mais elle
eut pour principal objet de décider quelle par-
tie du royaume, en cas de vacance du
trône, désignerait le roi commun. Après une
longue période pendant laquelle les différents
pays élisaient chacun leur roi, l'idée d'unité finît
par triompher de l'esprit particulariste et on se
■ogl.
1.A PLDS ANCIENNE CONSTITUTIOK. 13
mit d'accord de la façon que nous indique le texte
célèbre de l'ancienne loi vestrogolhique, datant
de la première moitié du xiii' siècle : " Les Svear,
y est-il dit, possèdent le droit de choisir ou de
déposei- le roi. » En même temps oii règle la
date et les détails de 1' » Ëriksgata' », soit que
cette cérémonie fameuse fasse maintenant sa pre-
mière apparition, soit qu'elle ait été déjà prati-
quée précédemment, ce qui est peut-être l'hypo-
tbèse la plus vraisemblable.
Là phrase citée plus haut et qui a sans aucun
.doute la valeur d'un traité de paix mettant âri à
des discordes séculaires, abandonna à l'un des
anciens Etats confédérés le droit de décision dans
la plus importante des questions communes, à
savoir le "droit de donner un roi au royaume
quand besoin en serait.
Chose assez curieuse à constater, cette façon
primitive d'organiser des affaires communes d'une
union politique, a été encore adoptée de nos jours
lorsque la Suède, comme fondatrice de l'union
suédo-norvégienne, a pris en main et continue à
diriger les affaires étrangères des deux nations.
Cependant le régime nouveau qu'on venait
1 . On appelait « Eriksgataa t la tournée que le roi accom-
plissait dans les diverses parties de eoa royaume et au
cours de laquelle il recevait les bommages de ses sujets.
14 HISTORIQUE DE LA CONSTtTUTIOH:
d'introduire ne larda pas à être échangé contre
un système plus perfectionné qui donnait à toutes
les provinces un droit égal de participation dans
le choix d'un roi. Dans le Code Général de 1347,
promulgué en vue d'abolir et de remplacer les
lois particulières, il est décrété an second article
du chapitre de la royauté qu' « eh Suède il n'y
aura pas plus d'une couronne ni plus d'un roi ».
l*ar là, l'État composé est promu.au rang d'État
unitaire, et cette transformation persiste désormais,
bien que pendant des siècles encore survivent
dans le droit public et privé des souvenirs de
l'ancienne pluralité. Notamment les assemblées
provinciales [landskapstingen) disputèrent long-
temps au Riksdag commun le droit de représenter
le peuple. La dernière assemblée de ce genre eut
lieu en 1679. Âctuellenient, les seules survivances
de cette première forme de l'État suédois sont le
Utre de » roi de Svea et de Gota » attribué au
roi de Suède, et la disposition contenue au § 57
de la Constitution, d'après laquelle le droit d'im-
poser des taxes est exercé parle Parlement seul'.
J'ai voulu, en guise d'introduction, rappeler
I. D'après le texte primitit de 1809, le droit en queetioa
« est exerça seulemeut par les étals du royaume dans le
RiksdaK commun », c'est-fi-dire non plus comme autrefois
dans les assemblées régionales et daus les proviaces.
..G.Kvs'^
LA PLUS ANCIENNE CONSTITUTION. IB
cette première transformation politique de l'État
suédois, — poiut lie départ de toute son évolution
future, — afin de montrer quel est le sol où a
germé et grandi la constitution de la Suède et
d'indiquer sommairement les principes généraux
qui ont présidé h son développement. Je vais
maintenant esquisser à grands traits cette consti-
tution elle-même, tout d'abord sous sa première
forme à nous connue, et montrer ensuite comment
la coDstitation actuelle est sortie historiquement
de cette forme initiale.
Les premiers actes constitutionnels de la Suède
sont les statuts royaux [Konungabalkar), parmi
lesquels ceux de la coutume d'UppIand, — datant
de 1296,*^ sont les plus anciens qui nous soient
parvenus. D'après ces sources, on peut, sans dif-
ficulté, reconstruire dans ses traits essentiels la
Constitution suédoise telle qu'elle se présentait
avant qu'elle eût été pénétrée et en partie trans-
formée par le catholicisme et par l'organisation
des classes sociales au moyen âge. Les facteurs
principaux de cette ancienne constitution sont :
le Roi et le Peuple, celui-ci se composant de tous
les propriétaires d'alleux en état de porter les
armes et réunis par régions dans leurs assem-
blées ou « tings. » Un lien juridique est consti-
tué par des sermenU que le roi prête au peuple
f6 HlSTOalQOK DE LA. CONSTlTOirON.
et celui-ci au roi. Ces serments se renouvellent à
chaque changement de règne, mais la royauté
est héréditaire, et la succession au trône obéit
d'ailleurs à des lois que nous ne connaissous pas
très biei). Le rapport juridique exprimé dans les
serments forme, conjointement avecles anciennes
coutumes, le contenu matériel du droit public.
Au roi revient, nous dit la ioi d'Uppland, « le
soin de présider aux affaires du pays, de diriger
le royaume, d'affermir la loi et de maintenir la
paix. » Il s'ensuivait dans les anciens temps que
le roi pouvait convoquer son peuple à la guerre
et diriger l'arriiée s'il le voulait, enfin il avait le
droit de prélever les impôts fixés par la loi et de
percevoir pour son compte les revenus 3es biens
de la couronne [Uppsala ôd) ainsi que le produit
de certaines amendes. Il ne joue aucun rôle dans
la législation générale et ne fait des lois que pour
ses fonctionnaires et subalternes; mais il admi-
nistre comme bon lui semble les impôts et les
biens de la couronne, sans avoir cependant le
droit d'aliéner ceux-ci ni de les amoindrir. Le
peuple de son côté, ou plutôt les peuples des
diverses régions règlent chacun pour soi le droit
commun, sans la participation du roi et sous la
direction d'un délégué spécial, le lagman (légiste,
sénéchal), et la justice est administrée par son -
■"8'^
LA PLDS ANaBKNE CONSTITUTION. 17
intormédiaire et par celui des juges (kàradskô/-
dingar), élus comme lui et préposés à des terri*
toires plus petits; cependant le droit était réservé
à chacun, semble-t-il, de s'adresser au roi eu ap-
pel (« gàtill kungs •) et d'en obtenir un jugement.
Du reste, le peuple était tenu de payer les impôts
fixés par la loi et de se rendre à la guerre sur la
convocation royale. Le roi et le peuple veillaient
en commun au maintien de la paix, bien que ce
soin entrât de bonne heure dans les attributions
particulières du roi.
Ce qu'il y a de caractéristique dans cette cons-
titution, c'est que le roi et le peuple y apparaissent
comme deux parties contractantes et que chacune
a son lot bien délimité de droits et d'obligations.
Deux personnes juridiques se parlageanl le pou-
voir politique d' après une loi supérieure à toutes les
deux, — tel est le trait dominant de cette consti-
tution. Et la loi elle-même qui règle les droits et
les obligations réciproques, c'est-à-dire en d'autres
termes le partage des pouvoirs, ne peut être
modifiée que par le libre consentement des deux
parties. C'est pourquoi la constitution présente
dans sa forme l'aspect d'un contrat reposant
uniquement sur des serments échangéK et sur la
confiance mutuelle. Quanta une institution veillant
.„,,..G.Kvsl^
n
18 HISTORIQUE DB LA GONSTriDTION.
A l'observatioD de la foi jurée et au respect de
la convention légale, il ne s'en trouvait pas. Mais
on n'était pas pour cela complètement dépourvu
de garanties. La loi reconnaissait le droit de
résistance pour le cas où le roi violerait la Cons-
titution ou porterait en quelque manière atteinte à
la loi. Rappelons-oous que d'après la vieille Cou-
tume de Vestrogothie les (i Svear » ont le droit de
cboisir le roi et également de le déposer. Cette
disposition, certaînement très archaïque, ne se
retrouve pas dans les lois postérieures, mais nous
la voyous citée en différentes circonstances ' et elle
a constitué jusqu'à nos jours une partie du droit
public non écrit de la Suède. Le peuple suédois a
d'ailleurs exercé à plusieurs reprises ce droit
contre les rois qui violaient les lois existantes ou
qui mettaient te royaume en danger. Il l'exerça
par exemple en 1439, lorsque Eric de Poméranie
fut déposé après que le chef des paysans Engel-
brekt Eogelbreiitsson lui eut, quelques années
auparavant, signifié son congé dans les formes
légales ; en 1560, quand Éric XIV, déclaré atteint
d'aliénation mentale, vit sa déchéance prononcée
i. AiDsi par l'archevêque Olof dans sa lettre adressée au
concile de BfLle (U35), lettre qui contient ce passage bien
connu : rex ipie debeat huiusmodi luum juramentum
obttrvare oui rtgno carert.
CONSTITDTION ARISIOCBA.TIQtlE BD UOTEN AQB 19
p8r ses frères Johan et Karl et par les états du
royaume assemblés ; eo 1601, lorsque le catholique
Sigismond et sa race furent exclus du trôoe. De
même la suppression de l'absolutisme en 1719 peut
être considérée comme une application du même
principe, bien que la personne frappée par cette
mesure ne fût pas le roi qui avait violé la Cods-
titution, à savoir Chartes XII, mais la reine Ulrique-
Eléonore qui lui succédait. Enfin le même principe
trouva encore son application en 1809, lorsque le
malheureux Gustave IV Adolphe fut déposé avec
l'assentiment général. Il était réservé à l'époque
suivante, comme nous allons le voir, de fonder, à
côté de cette ultima ratio popiili, des institutions
fixes préposées à la défense de la Constitution et
au maintien des serments échangés.
LA CONSTITUTION ABISTOCRATIQUE DU MOYEN AGE
(1250-1521)
A partir de l'an 1060, qui vit s'éteindre l'an-
cienne dynastie royale, commence une évolution
de deux siècles qui aboutit au Code Générât de
1347 et au droit public qui s"y trouve contenu.
Le résultat d'ensemble de cette transformation,
c'est tout d'abord, — comme nous l'avons indiqué,
..G.Kvsl^
20 HISTORIQUE DE LA COMSTITÛTION-
— le passage de l'État composé à l'État
UDÏtaïre, et en outre la substitution de la royau-
té aristocratique du moyen âge à l'ancienne
royauté démocratique. Les forces qui ont agi sur
ce développement ont été, non seulement les
compétitions au sujet de la couronne avec les
événements historiques qui s'y rattachent (lutte
entre les maisons royales d'Eric et de Sverker),
mais aussi et surtout l'Église et le régime des
classes, autrement dit la formation d'une aristo-
cratie spirituelle «t temporelle. Les conséquen-
ces importantes qui en résultèrent au point de
vue constitutionnel, se ramènent tout d'abord à
une extension du pouvoir central de la royauté
âu détriment du la démocratie régionale. Les
obligations nouvelles qu'imposent avant tout la
protection de la paix publique et l'organisation
militaire, amènent la publication d'édits royaux,
lescjuels s'étendent peu à peu à toutes les choses
qui n'élaieut pas précédemment « déposées et
renfermées dans les lois »' et qui ne concernent
pas le droit commun. En même temps et en
vertu du même mouvement, les atlributions judi-
ciaires du roi arrivent à former une institution à
1. < I lag saue och gifmde &ro >. Termes empruntés à
l'ordonnance de Skcnninge (128B).
CONSTITUTION ARISTOCRATIQUE DU UOTBN AQB. 21
côté et au-dessus de l'aDciea système de justice.
Beaucoup plus importantes pour la Constitution
furent cependant deux innovations qui apparais-
sent à cette époque, savoir l'introduction de la
monarchie élective et la naissance du Conseil. Ces
deux institutions ont également leur point de dé-
part dans l'organisation des classes, et^ de même
que celle-ci, elles menacent de transformer de
fond en comble le vieil édifice constitutionnel.
Les constitutions politiques sont toujours un reQet
de l'organisation de la société en classes et en
« états ». Tout changement profond qui se pro-
duit dans cette dernière amène toujours dans le
droit public et dans l'organisation de l'État un
chaQgement parallèle, destiné à les mettre en bar-
monie avec l'état social.
La Suède vit grandir en même temps deux
aristocraties, dont l'une, spirituelle, provient de
l'organisation de l'Église catbobque, et dont
l'autre, temporelle, est le résultat du développe-
ment propre de la société ; l'avènement de la
seconde a été certainement accéléré par la réforme
que subit à ce moment l'art de la guerre et à
laquelle correspond la chevalerie. Ces éléments
nouveaux fournissent d'abord un appui au pou-
voir royal dans sa lutte contre le particularisme
régional et contre la démocratie populaire ; mais
..,,..G.Kvsl^
22 HISTORIQUE VK Lk. CONSTHUTION,
bientâi ils se retournent contre le pouvoir royal
lui-même. Favorisés par les événements hisloii-
quesj lis arrivent à faire prévaloir la monarchie
élective. « Maintenant si le roi de Suède vient à
disparaître, son successeur est désigaé par choix
et non point par droit d'héritage » : voilà ce que
déclare très explicitement le Code Généra) dans
ses prescriptions relatives à l'élection du roi
(Konungabalkar, IV). Le principe élecUf est ici
comme partout où il s'est manifesté, — excepté
dans l'Empire romain et dans la papauté, son hé-
ritière spirituelle, — le produit d'un développe-
ment aristocratique'. C'est se méprendre sur l'évo-
lution de l'Ëtat germanique que de croire avec
beaucoup d'historiens dont le plus récent est
Bruhhëb", que l'ancienne royauté avait été élec-
tive ou bien consislait en un mélange bizatre du
principe d'élection et du principe d'hérédité, La
forme élective de l'État se rencontre seulement
dans une société pourvue d'une aristocratie forte-
ment développée. Il en est ainsi dans le cas qui
1. La tentative faite par tes grands de Norvège en 1164.
sous la coDdnUc d'EttLiNO Skakkb, pour remplacer dans ce
pays l'ancienne royauté héréditaire par l'Etat électif nous
fournit uD exemple frappaot du processus en question.
2. Brunnbb, Deuticht Hechitgeichiehle, I, p. 122. — Voir
aussi B. HlLDBBBAND, Svettska StaUfSrfaltningtna hiiiorUka
vtveckiiag, p. 30 et suiv.
..G.Kvs'^
CONSTITUTION ARISTOCRATIQUE DU MOYEN AOS. 23
nous occupe. Mais bien qu'ayant transformé aussi
profondément l'ancienne royauté démocratique
et héréditaire, l'introâuction du principe électif
n'ébranle pas cependant les bases de la constitu-
tion. Au contraire, son caractère de contrat ne
se manifeste maintenant qu'avec plus de force,
en ce sens que chaque roi, en outre des serments
prescrits par la loi, donne ce qu'on appelle une
capitulation [handfâstning).
Les choses se passent tout autrement pour
l'autre innovation aristocratique, à savoir le
Conseil [Radet). Il est vrai que le Conseil est
mentionné dans les luis régionales, mais non
comme une institutî(în à demeure. C'est seulement
le Code Général de 13i7 qui lui assigne sa place
déBnitive et indépendante dans la constitution.
Cette place est déterminée par le râle que lui
assigne le Code en question et qui est « d'assurer
de toutes ses forces l'observation par le roi du
serment prêté au peuple et par le peuple du ser-
ment prêté au roi ». Beaucoup ont pensé qu'à
partir de cette époque il y a eu en Suède non pas
deux, mais trois pouvoirs : le Roi, le Peuple et
le Conseil. Celui-ci occupait la situation d'un
gardien préposé à la surveillance du roi et du
peuple ; et c'est là un rôle qui s'accordait assez
mal avec le reste de la constitution. Néanmoins
..G.Kvsl^
2i HISTOBIQUE DB LA CONSTITDTION.
les événements avaient créé ainsi l'institution stable
qui manquait à l'aucieniie constitution, et dont le
râle était de veiller à ce que les serments sur
lesquels reposait le droit public fussent respectés
religieusement. Mais on comprend que cette vigi-
lance esercée sur le roi et sur le peuple, devait
tiès facilement f«re naître le désir de les dominer
tous les deux. Eu fait, l'institution nouvelle, avec
sa base sociale qui était l'aristocpatie, est appelée -
à jouer pendant longtemps le rôle actif dans le
développement constitutionnel qui va suivre, parce
que ses empiétements menaceront les deux autres
pouvoirs et provoqueront ainsi leur résistance. A
deux reprises différentes, l'aristocFatie avec le Con-
seil à sa tète a voulu se subordonner la royauté et
se mettre au lieu et à la place du peuple, tentative
qui aurait pu aboutir à un bouleversement com-
plet de la Constitution. Mais ce plan a échoué. Les
deux autres pouvoirs de l'État restent debout et
repoussent les entreprises du Conseil, soit pour
se partager comme auparavant la puissance
gouvernementale^ soit pour la posséder cha-
cun à son tour.
La première fois que le Conseil et la noblesse
essayèrent de devenir l'élément central de la
Constitution et les maîtres dé l'État, ce fut dans
les derniers siècles du moyen âge {1319-1520).
CONSTITUTION ARISTOCRATIQUE DU UOYBN AOE. 2G
Des intérêts dynastiques et aristocratiques ame-
nèrent un rapprochement entre les trois royaumes
du Nord, et Ce rapprochement fut scellé par
l'Union de Kalmar en 1397. Mais les dépositaires
du pouvoir dirigèrent l'Union contre la nationalité
suédoise et la liberté du peuple suédois et par là
provoquèrent contre elle une résistance gui aboutit
à sa dissolution après un siècle de luttes. Le
soulèvement des paysans d'abord sous Eugelbrekt
(1435), ensuite sous les Stures (1470-1520), se
termine par la défaite de l'aristocratie et par le
rétablissement de la royauté nationale avec
Giistaf Wasa.
Pendant cette période, le Rikfdag, représentant
le peuple et le pays tout entiers, s'organise peu
à pen à c6té des assemblées provinciales [lands-
tingen). Surtout après que les juges provinci.iux
ou sénéchaux [lagman) eurent été appelés depuis
Magnus Ladulâs (1273-1290) au rôle de conseillers
du roi, les « landsting » perdirent leur importance
politique et même peu à peu leur périodicité. Le
Riksdag est sorti de deux sources différentes :
les assemblées de notables {kerredagar),
tenues par le Conseil et par les grands, et les
prescriptions du Code Généralau sujet de
l'élection du roi. On convoquait en effet à cette
occasion non seulement les sénéchaux (lagman)
2
..,,..G.Kvsl^
26 HISTORIQUE DE LA OONSTITUtlON.
mais encore douze représentants envoyés par
chaque province et désig^nés par les paysans dans
l'assemblée provinciale. Or, dès l'année 1359, on
invile ég:alemeDt les villes à envoyer des manda-
taires à l'assemblée générale du royaume. Mais
la composition de ces parlements ne fut pas
déterminée avec précision et ils étaient convoqués
seulement pour les élections royales et pour
d'autres questions de haute politique s'y ratta-
chant. Les questions de législation et d'imp6ts
ne les concernaient pas, car le droit de décision
en ces matières appartenait, d'après la loi, à tous
les citoyens réunis dans les « landsting ».
Malgré cela, les assemblées générales avaient
incontestablement le caractère d'une représenta-
tion véritable. Déjà les expressions bien connues
dont se sert le Code Général lorsqu'il traite du ser-
ment du peuple à l'occasion de l'élection royale,
nous montrent que l'idée d'une représentation
était nettement reconnue et présente aux esprits,
1' Far ce serment et cette promesse », y est-il dit,
« sont liés jeunes et vieux, nés et à naître, amis
comme ennemis, les absents comme ceux qui
étaient présents et qui ont juré et engagé leur
foi. »
wi3,Cooi^le
TEMPS MODERNES-
LE BOÏAUHE CONSTITUTIONNEL DES TEMPS HODEBDES
(1521-1680)
Des orages de la période dite « de l'Union •
sortent comme les premières conséquences des
événements historiques : la monarchie natio-
nale héréditaire et le réveil de la puis-
sance populaire. Les luttes intestines conti-
nuelles et en dernier lieu le massacre de
Stockholm en 1S20 (accompli par le roi danois
Christian 11) avaient afTaibh et abattu les grandes
familles uobles. De plus, la Réforme introduite
en 1527 vint porter un coup mortel à la puis-
sance de l'Église catholique. Aux deux aristocra-
ties vaincues succède avec Gustave Wasa (1521-
1560) la royauté nationale qui devient dès lors
la puissance centrale de l'État et de la société.
Après avoir définitivement brisé l'Union avec.
le Danemark, favorisée par la noblesse, Gustave
Wasa délivra aussi le pays de la domination
commerciale de Lûbeck, affermissant ainsi l'indé-
pendance de la Suède à l'extérieur. A l'intérieur
il rétablit la puissance royale longtemps foulée
aux pieds, tout d'abord en la rendant héréditaire
dans la maison de Gustave Wasa, et de plus en
..G.Kvsl^
28 HISTOSrQUK DE LA CONSTITUTION.
transportant toute l'administration entre les
mains du roi. Le Conseil, naguère si puissant,
se trouve par là mis à l'écart et on jette les
bases d'un régime administratif centralisé et
d'un gouvernement nouveau. Toutes ces réformes
ne s'accomplissent pas sans secousses. Mai.?
l'opposition vient maintenant beaucoup moins
des grands que du petit peuple. Pendant la plus
grande partie de son règne Gustave Wasa doit
se défendre contre des révoltes de pay-sans, et
ces révoltes ne sont pas, comme en d'autres
pays, causées par une oppression trop forte,
mais bien par l'esprit d'indépendance qu'ont déve-
loppé chez les paysans les luttes précédentes et
par leur répugnance h accepter docilement un
pouvoir royal qu'ils ont eux-mêmes contribué
à fonder.
En même temps se développe de plus en plus
l'idée d'une représentation nationale, bien qu'elle
revête encore des formes très indécises. Gustave
Wasa se met en relations avec le peuple dans les
assemblées provinciales, dans les marchés et
autres réunions, tout aussi bien que dans les
Riksdags généraux. A la place de la triarchie
médiévale ayant pour éléments le roi, le Conseil
et le peuple, nous voyons renaître la diarchie
primitive du roi et du peuple. Mais les rapports
TBMPS MODBBNES.
jurîdîques entre ces deux éléments ne sont pas
aussi clairs que dans l'ancien temps et le pouvoir
a des oblig:ations différentes et plus nombreuses.
Parmi les fils et Successeurs directs de Gustave
Wasa, le plus jeune, Charles IX {15t^-1611), est
le seul qui continue avec pleine conscience
l'œuvre de son glorieux père. Il fait échec au
projet d'une nouvelle union, — cette fois avec la
Pologne, — ainsi que d'une nouvelle domination
du Conseil, et il affermit ainsi à la fois la Réforme
et le pouvoir encore réce.nment fondé. 11 fut
réservé à son fils Gustave H Adolphe (1611-1632)
d'achever la réorganisation de la Suède d'après
les mêmes principes. Ce monarque remarquable,
aussi grand dans la paix que dans la guerre,
opère dans l'administration du royaume une
réforme dont les traits principaux sont demeurés
jusqu'à nos jours'. L'armée est refondue et la
justice reçoit une organisation nouvelle, qui
donne une forme plus moderne à. l'ancienne cou-
tume de l'appel au roi'. Le gouvernement cen-
tral du royaume prît lui aussi des formes
nouvelles et précises. Le Conseil devint un
1. Il s'agit ici de la Forme de gouvernemenl (Regerings-
fnrm) dô 1634, approuvée et sancUonnée par ios étals après
la mort du roi.
2, Code de procédure de 1614.
.A
JDB DE L/L CONSTITUTION.
l'administration, à la {ois comme
[tartie du gouvernement : en effet,
tires furent mis chacun à la tète
es charges du royaume (grand
:, connétable, amiral, chancelier
r). Enfin on donna au Riksdag,
'àndema), comme on l'appelait,
mieux définifl en même temps
ons nouvelles'.
tion suédoise, composée de la
■rgé, de la bourgeoisie et des
t tout remarquable pour la pur«té
ï reflète les principales fonctions
;îvi]isation assigne aux hommes
Conduire et pi-otéger le peuple,
rogrès de la culture et de la
Ht exercer soi-même les métiers
telles ont été les lâches que le
ur a comportées à toutes les
change suivant les -temps, c'est .
ces tâches entre les différentes
le conséquence, le groupement
« ilats » et classes. Au cours
. bien plus lard encore, jusqu'à
du Riksdag de 1017 et Forme da gou-
aiDsi que l'Ordre de la noblesse {Rut-
..G.Hvsl^
TKUPg UODEBMBS. 31
une époque toute récente, il existe une correB-
pondauce parfaite entre les rôles sociaux et les
groupements. Chaque classe prend sa part du
travail civilisateur. Mais nulle part cette harmo-
nie ne s'est exprimée aussi nettement qu'en
Suède dans la constitution politique : ici la repré-
sentation nationale donne une image aussi Ëdète
que possible de ces deux éléments.
A l'époque dont nous parlons, on voit aussi
s'élargir la compétence des états, qui conquièrent
de plus en plus la place que la représentation
doit occuper dans un Etat constitutionnel. En
effet, les droits qu'on recoDUaissait autrefois aux
assemblées de provinces en matière de législation
et d'imposition sont maintenant transférés au
Riksdag. La dernière des assemblées régionales
se tintj comme on l'a vu, en 1679, après qu'elles
eurent été interdites pour toujours en 1660. Ainsi
la représentation du royaume avait remporté une
victoire complète sur les anciens « tings » des
provinces, et elle était devenue le seul organe
qui permit au peuple de partager le pouvoir avec
le roi. Mais il restait encore beaucoup à faire
avant que la nouvelle institution fût en état de
tenir sa place comme seconde puissance du
royaume. La division en quatre corps (noblesse,
clergé, bourgeois et paysans) rendaût difficile une
..,,..G.Kvsl^
IQUE DB hK CONSTITUTION.
ne, et d'ailleurs aucune règle fire
core comment les choses devaient
;as de dissentiment. Pour celle
lais aussi et plutôt par suite des
iges de classes, l'impôt u'était pas
vement par tout le Riksdag, mais
)s séparément. Enfin la convoca-
ipendait du bon plaisir royal,
l'évolution se fait très vite. Une
itre la Constitution de 1634 et
il [Additamentet] qu'on y ajouta
montre la rapidité avec laquelle
ce des états,
nnel stipule que le Riksdag doit
tous les trois ans, et on y trouve
cipe de la responsabilité du Gon-
;nt devant les états,
le temps se développaient aussi
l'influence du Conseil. Grâce à
;inq hautes chargés, il en vint à
iritable gouvernement; et les évé-
ent que le Conseil eût pendant de
is et dans des circonstances cri-
I de diriger par lui-même l'adnai-
yaume (de 1632 à 1644, après la
e-Adolphe, et plus tard, de 1660
celle de Charles X Gustave). Il
..,,..G.Kvsl^
absolutisme: rotal. 33
s'acqaitta de cette tâche avec grand hoDoeur, da
moins aussi longtemps qu'il fut présidé par AseL
Osenstjerna (1632-1644). Naturellement ses pré-
tentions s'accrurent par là-méme. Un passage
souveot cité de la Constitution de 1634 nous ren>
seigne très clairement sur la façon dont le Con-
seil comprenait à cette époque sa propre situation
et l'importance de son rôle ; « Un Ëlat bien
réglé, nous dit ce texte, serait celui qui assure-
rait à chaque pouvoir ce qui lui est dû : au Roi
sa majesté, au Conseil son autorité et aux états
leur indépendance et leurs di-oits légitimes'. ■
Mais cette ambition croissante, qui s'explique par
les circonstances historiques, ne suffit pas à mo-
difier la Constitution. Celle-ci reste telle que
Gustave- Adolphe lui-même t'avait caractérisée
par ces paroles significatives : < Le rot et les
états, grands et petits, représentent ensemble à.
la place de Dieu ta haute majesté royale. » Le
roi et le peuple, — celui-ci représenté par les
états qui sont organisés comme lui en classes
supérieures et classes inférieures, — sont les
deux possesseurs du pouvoir et symbolisent
ensemble l'État ou, comme on disait alors, le
Royaume. Mais le dualisme abstrait qui régnait
1. Regeriruformen ISSi (Préambule).
L..o.wi=,Coogk
1
TOBIQUE DE LA CONSTITDIION.
t est devenu une collaboration
leux puissances pour constituer une
ernementate.
ég^ime politique de la Suède dans
est conslitutionnel au sens moderne
que les limites eiitre les deux puis-
itat soient encore niai définies dans
I cas et que les relations légales
et le peuple soient fondées sur une
tuelle plus que sur des paragraphes
IV
)'absoiutismb et de gouvernement
pableuentaire.
odr au constitutionnalisme
(1680-1809)
es Wasa et surtout celle de Gustave-
quent dans l'histoire de la Constitu-
i une restauration et une évolution
«spectant ses fondements antiques, la
.rmouie avec les exigences modernes,
oque est aussi un temps d'accalmie
âges ; car à peine une génération
liée après la mort du grand roi que
éclatent de nouveau et que l'équi-
ABSOLUTISME ROYAL.
libre péniblement obtenu entre les deux pouvoirs,
le Roi et le Peuple, est rompu par de violentes
secousses qui font pencher la balance tantâtd'un
côté tantôt de l'autre. Les conditions sociales
jouent maintenant encore te râle dominant et
actif, bien que soutenues, il est vrai, par différentes
circonstances extérieures et intérieures.
La noblesse, Â qui l'avènement des temps mo-
dernes avait fait perdre sa suprématie politique,
conserva intacte sa situation sociale et même la
développa par la suite. La réforme religieuse lui
permit d'acquérir de grandes richesses nouvelles :
grâce & Gustave Wasa, chacun put rentrer en
possession des biens que lui ou ses ancêtres
avaient donnés à l'Église, et le rot s'acheta ainsi
' un concours précieux pour l'introduction de la
Réforme. A cela s'ajoutèrent par la suite des
acquisitions nouvelles ; car la royauté, poussée
par un besoin d'argent qu'expliquent de longues
guerres, vendît à la noblesse un grand nombre
de biens de la couronne ainsi que des droits cen-
sitaires. Souvent même des propriétés »t des
rentes furent accordées et aliénées sans compen-
sation, — notamment par la reine l^hristine (1632-
1651). Cet enrichissement, joint aux grands privi-
lèges accordés en diverses circonstances à la no-
blesse au détriment des autres classes de la société.
,C.KV^1C
S6 HISTORIQUE DB LA CONSTITUTION.
portèrent chez celles-ci le mécontentement à son
comble. On demandait à grands cris udc restitu-
tion ou « réduction » . Déjà la diète de 1655 avait voté
une mesure en ce sens, mais c'est seulement en
1680 que le roi et les classes inférieures s'unissent
pour porter un grand coup à la puissance de
l'aristocratie et pour restituer à la couronne tous
les biens que la noblesse avait acquis sous les
gouvernements antérieurs. Par cette réducti<Hi,
la plus importante qui ait eu lieu dans l'Europe
' moderne, — excepté toutefois la grande confis-
cation opérée par la Révolution française, — la
suprématie sociale de la noblesse suédoise se
trouva abattue comme l'avait été précédemment
sa suprématie politique.
Mais le mouvement ne s'arrêta pas là, Charles XI
{1660-1697} se tourna aussi contre le Conseil en tant
qu'institution politique. L'autorité du Conseil était
une gène pour le roi, et d'ailleurs elle pouvait
apporter des obstacles à l'accomplissement de la
<( réduction ». C'est pourquoi Charles XI demande
aux états et obtient qu'on donne aux statuts du
<!lode Général sur la compétence du Conseil une
interprétation qui autorise lé roi à te rejeter tout
à fait à l'écart. Le monarque s'empare avec éner-
gie de cette autorisation, et désormais disparaît
de la Constitution suédoise ce qu'on avait appelé
..,,..G.K,^1Ç
le troisième pouvoir de l'Ëtat. Si utile qu'ait pu
être suL' le moment une pareille mesure, elle ne
laisse pas d'avoir eu des conséquences très graves.
C'est en effet à cette époque qu'il faut faire remon-
ter la faiblesse qui caractérise de nos jours en
Suède l'organe exécutif (Conseil, Conseil d'^lat,
gouvernement) et qui est un des plus grands
défants de la Constitution actuelle.
Le roi et le peuple, — celui-ci ayant le Riks-
'dag pour représentant, — restent maintenant les
seuls détenteurs du pouvoir politique. Mais on
s'aperçoit alors que le second n'est pas encore
mûr pour sou rOle, et le fonctionnement de la
Constitution, en ce qui concerne la part attribuée
aux états dans le pouvoir, présente certaines
lacunes qui ne seront comblées qu'après de
longues et coûteuses expériences. L'un de ces
défauts, c'est que rien n'indiquait que le Riksdag
dAt se réunir à des époques fixes. 11 est vrai
qu'eD 1660, sons la régence qui suivit la mort de
Charles X, il avait été statué que les états seraient
convoqués au moins tous les trois ans. Mais
lorsque Charles XI arriva lui-même à la tète du
gouvernement (1672), celte prescription ne fut
plus tenue pour valable ; et d'ailleurs on la vit
tomber sans regret, la convocation au Riksdag
étant généralement considérée comme une gène.
..G.Kvsl^
■^
36 HISTORIQUE DB LA CONSTITUTION.
L'autre lacune, c'était l'absenca de textes précis re-
lativement à la confection des lois. Le Code Général
De contenait pour ainsi dire rien à ce sujet. C'eat
pourquoi Charles XI, après avoir consulté le
Riksda^ sur sa compétence dans la matière, put
en 1682 étendre à son gré le pouvoir législatif
reconnu au roi de temps immémorial. Et comme
le Conseil était désormais écarté des affaires, le
Roi et le Peuple se retrouvaient directement face
à face, comme aux temps du pag:aDisme, avec
cette différence cependant que le premier était
armé de tous les moyens de pouvoir que lut
donnait le régime moderne pour l'administratiou
du royaume, et muni de droits législatifs très
étendus en matière économique. Ainsi le roi et
le peuple étaient déjà t'iiD vis-à-vis de l'autre
dans une situation très inégale. Cette inégalité '
allait s'aggraver encore.
Charles XI ne renonça pas k l'habitude suivie,
par ses prédécesseurs de convoquer fréquemment
les états et de les consulter sur les affaires du
royaume ; it est vrai qu'il le fît avant tout pour
obtenir un pouvoir dont aucun roi de Suède
n'avait joui avant lui et que le peuple lui accorda
par reconnaissance pour la famepse « réduction ».
D'ailleurs on n'entendait point par là que le roi
dépassât les limites prescrites à son pouvoir par
..,,..G.K,^1C
ABSOLUTISME ROYAL.
la loi et les traditions, mais leur maintieû dépen-
dait désormais du sentiment qu'il avait de son
devoir et de sa responsabilité. Charles XI n'y
faillit pas; mais son fils Charles XII, élevé dans
lès idées d'autocratie qui se généralisaient alors
en Europe, perdit de vue les vieilles traditions
suédoises et gouverna comme un roi absolu. Il se
passa complètement de la collaboration des États,
fit la guerre durant tout son règne et leva comme
bon lui semblait des soldats et des impôts. C'était
rompre entièrement avec l'ancienne Constitution
du pays. L'une des deux puissances de l'état
avait confisqué pour elle seule ce qui, d'après
le droit politique de la Suède^ devait être partagé
entre le roi et le peuple. Dans ce système de
balance qui est celui de la Constitution suédoise,
l'équilibre était violemment rompu, et il faudra
désormais un siècle avant qu'il soit bien rétabli.
Charles XII ne fut pas déposé, comme l'eàt
exigé cependant ce droit suédois non écrit dont
nous parlions plus haut. Les grands services que le
pouvoir absolu avait rendus au peuple par la
« réduction » et par le nivellement des classes,
mais avant tout, la puissante personnalité du roi
et la fascination que ce héros exerçait sur la nation,
empêchèrent qu'on ne recourût à ce parti extrême.
Mais à peine Charles XII était il tombé devant
..G.Kvsl^
IQIIE DB LA CONSTITOTIOW.
flS) que la puissance populaire
aspérée se redresse et avec J'uoa-
arfaite, renverse le système gou-
l'absolutisme qui avait été imposé
e coasentemeut des états. Mais
IX dont ou a fortement dérangé
e reprennent qu'après d'amples
immencent par occuper une posi-
de la précédente : c'est à peu près
irvons au point où nous eu sommes
institutionnelle de la Suède. On
à abolir l'absolutisme et à réta-
coup l'équilibre primitif entre le
; on alla jusqu'à l'extrémité op-
a domination exclusive de la
à la domination exclusive des états
Les u formel de gouvernement >
r20 ainsi que la loi organique du
3 remirent tout le pouvoir aux
ut plus qu'un personnage décora-
dont la majorité du Riksdag
j'est l'ère de la royauté parle-
s'exerce la domination des états
le la dignité royale,
écutif tomba désormais dans la
iplète du pouvoir lé^slatif, qui
le gouvernement. UnParlement
.......G.Kvslc
ABSOLtlTlSHB PARLE UBNTAIR8. 4t
gouvernant ; tel est en deux mots le caractère
de la nouvelle Constitution. Les états gouver-
nent directement par des comités dont le plus
important était le « comité secret » {Sekreta) et
par l'intermédiaire de commissions dans les inter-
valles des sessions ; ils gouvernent indirectement
au moyen du Conseil. Dans le Conseil les ques-
tions sont résolues par un vote, où le roi dispose
de deux voix seulement, et dans certains cas, de
trois. Mais le Conseil est responsable devant les
états et de plus ses membres sont choisis par eux,
bien que pour la forme ils soient nommés par le
roi. On comprendra combien profonde était l'im-
mixtion du Parlement dans tous les domaines de
la vie politique et sociale, si nous ajoutons que
les nominations de fonctionnaires ainsi que les
arrêts des tribunaux pouvaient être portés devant
les états et leurs comités pour être examinés et
révoqués par eux.
Une autre particularité de cette période qu'on
a appelée « l'ère de la liberté » [Frihetstiden),
c'est la formation de partis politiques, dont
les luttes pour le pouvoir fournissent quelques-
unes des pages les plus tristes de l'histoire du
ivHi* siècle suédois.
Il y avait deux grands partis, qui portaient les
noms absurdes de Chapeaux et de Bonnets, et qui
L..8.IIMD. Google
42 HISTORIQUE DB Là CONSTITUTION.
occupaient le pouvoir à tour de rfile. C'étaient à
l'origine de simples groupements d'opinions,
deus façons différentes de comprendre lapolitiqae
extérieure et le régime économique à adopter.
Longtemps auparavant (sous la régence de 1660-
1672), on avait déjà va se manifester des ten-
dances diverses en matière de politique exté-
rieure. Ces divergences se reproduisirent avec
une intensité beaucoup plus grande après le
désastre que la puissance suédoise avajt subi
sous Charles X.I1, et qui venait de se terminer par
la mort du roi. Les Chapeaux voulaient tirer
vengeance de la Hussie le plus vite possible, et
rendre à la Suède sa grandeur passée ; les Bon>
nets désiraient conserver la paix et entretenir des
relations amicales avec les puissances voisines.
Dans le domaine de la politique intérieure la
contraste entre les opinions des deux partis
était aussi tranché. Les Chapeaux tenaient forte-
ment pour le i< mercantilisme », c'est-à-dire pour
des théories analogues à celles des ploutocrates
français, tandis que les Bonnets se rapprochaient
par leurs idées des physiocrates. Il ne fallut pas
longtemps pour que ce conflit d'opinions s'adjoi-
gnit aussi un conflit d'intérêts, fiientôt la lutte
pour le pouvoir devint également une lutte pour
les places et pour tous les avantages pratiques
ABSOLUTISUS ?ABLBHBNTAniB. 13
que comporte l'exercice du pouvoir. Plus tard se
manifestèrent avec uns graode force les cod-
trastea sociaux, de sorte que vers la fin de cette
période les Chapeaux représentaient le parti de
la noblesse, taudis que les Bonnets se recrutaient
avant tout dans les classes roturières. Ainsi ce qui
était & l'origine use divergence d'opinions aboutit
peu à peu à une lutte d'intérêts o£i les oppositions
socîàleSj — qui d'ailleurs étaient apparues dès le
dtibut, — occupèrent naturellement la première
place. A mesure que se produisait cette évolution,
l'esprit de parti pénétrait de plus en plus profoD-
démeiit dans le peuple. Mais il sévissait surtout
dans les milieux parlementaires, et parmi les
fonctionnaires. Lé, il était enlretenu par l'or
de l'étranger et par un système de corruption
largement pratiqué.
Les étrangers se sont figuré souvent, autrefois
et de nos jours, que la Suède, pendant cette
période d' n hégémonie de la noblesse », comme
on dit, présentait l'aspect d'une seconde Pologne.
Rien de plus faux que cette conception. Tout
d'abord il ne s'agit pas d'une domination de la
noblesse, mais bien de la domination du peuple
suédois par l'intermédiaire du Riksdag; ce qu'on
peut dire seulement, c'est que la noblesse y tint,
surtout au début, le premier rang. Mais en outre
44 HISTORIQUE DB LA CONSTITUTION.
les i>rig:mes de cette période, non moins que son
aboutissement^ nous montrent que nous avons
affaire ici à une crise politique toute différente de
celle qu'on imagine, et chez un peuple tout dif-
férent. Nous avons devant nous un exemple
typique de la souveraineté populaire sous une
de ses formes les plus brutales et les pliis directes ,
c'est-à-dire sous la forme d'un parlement gouver-
nant. Voilà pourquoi celte période est très ins-
tructive et' du plus haut intérêt pour la science
politique. Mais elle enrichit aussi la Suède de
plusieurs institutions nouvelles et importantes, et
elle donna au peuple suédois une expérience qui,
— espérons-le, — lui reste -acquise pour toujours.
Parmi les nombreuses innovations que 1' « ère de
la liberté » apporta dans le domaine constitution-
nel, nous noterons que le Rik!|dag reçut alors son
organisation complète et son complet développe-
ment technique. L'ordre de ses travaux et surtout
cette répartition en comités si caractéristique du
système parlementaire suédois, reçurent uu règle-
ment qui subsiste encore dans ses traits essentiels.
On traça une ligne de démarcation définitive
entre la loi constitutionnelle ou « loi fondamentale »
[grtindlag) et les autres lois, Enfin on institua en
1766 la liberté de la parole et de la presse, comme
un moyen de remédier et de parer aux nombreux
I 1 Jt^ lil
CONSTTTDTION DE 1712, 45
abus et aus manîfestatioDS de violence et de tyran-
nie, auxquels avait donné lieu le régime « de la
Jiberté ».
Ce régime ne pouvait durer bien longtemps. Il
jurait trop nettement avec les traditions du peuple
suédois, avec sa façon de voir habituelle. De plus,
il exposait le pays à de grands dangers extérieurs.
Un État insulaire comme l'Angleterre pouvait
impunément laisser se développer et s'installer
un absolutisme parlementaire ; pour un royaume
comme la Suède, entouré de voisins avides, un
pareil régime était malsain. Aussi dès qu'une
royauté nationale occupa de nouveau le trAne de
Suède avec Gustave III (en 1771), il se produisit
une révolution pacifique qui mit fin à Thégémonie
des états et Be proposa pour but de rétablir l'équi-
libre primitif entre le Roi et le Peuple. Nous
touchons ici  la seconde période de la monarchie
constitutionnelle.
Malheureusement Gustave III (1771-1792) com-
mit une erreur en voulant ramener la Constitution
à ce qu'elle était avant l'avènement de l'absolu-
tisme en 1680, lorsque la répartition du pouvoir
entre le roi et Je peuple était assurée par la con-
fiance mutuelle plus que par des institutions solides.
La confiance faisait maintenant défaut, et c'est pour-
quoi les dispositions souvent assez vagues de la
46 HISTORtQUE DE LA COHSTITUTION.
CoQStitution de 1772 ne suffîsaîent pas à restaurer
l'équilibre détruit entre les deux possesseurs du
pouvoir. En outre, la Constitution nouvelle De pré-
voyait pas une convocation régulière du Riksdag,
et d'un autre c6té elle refusait au roi le droit
exclusif de présider à la politique extérieure et
de décider de la guerre et de la pais. Aussi
Gustave III se trouve-t-il bient^M en conflit avec
les états et notamment avec la ni>blesse, — ce
qui le conduit à un nouveau remaniement de la
Constitution. En abolissant les derniers restes
importants des privilèges de la noblesse, Gustave III
gagna l'approbation des trois autres ordres à. l'acte
« d'Union et de Sûreté» (1789); par cet acte le roi
redevient sinon absolu du moins plus maître de
ses décisions que ne devait l'être un roi constitu-
tionnel'. Il paya cette victoire de sa vie en 1792;
mais l'horreur qu'inspira au peuple le meurtre du
roi fut cause qu'on ne fit rien à ce moment pour
réduire les empiétements du pouvoir royal et
ramener la Constitution à son état d'équilibre nor-
mal. Il fallut pour cela toutes les fautes de Gus-
1. C'est cette Constilutioû de 1772 et de 1789 quË pos-
sédait la Finlande lorsqu'elle fut arrachée à la Suède
en 1808. C'est la même Coustilution qui fat reconnue et so-
lennel lement conflnnée, la même année, par l'empereur
Alexandre l" à la dièle de Borgâ-
CONSTITUTION DB 1772.
tave IV Adolphe et tous les malheurs que son
règne apporta à la Suède. Mais alors (en 1809)
la rupture se produisit, et cela suivant l'esprit de
la vieille loi de Vestrogothie : ie peuple renversa
le roi, puis il donna au royaume une Constitution
nouvelle et choisit tin nouveau roi.
=,Coogk
CHAPITRE m
La Constftntion de 1809.
0RI6INBS DB LA CONSTITUTION
S NOUVELLES LOIS FONDAMENTALES
le a rarement accompli dans des cîr-
extérieures aussi difficiles, ud acte aussi
que le peuple suédois eu 1809. Après
bde eut participé avec la Russie à la
) la France et le Danemark, elle fut
t attaquée en 1808 par son ancienne
venait de se réconcilier avec la France
alliance avec le Danemark. Les troupes
es avoir envahi la Finlande, avaient
1809 jusque dans la Suède du Nord,
i l'ouest, du côté de la Norvège, les
préparaient à une attaque. Dans cette
ùrit bientôt l'idée de déposer Gustave
tait son incapacité, venant se joindre
lu système gouvernemental, qui avait
..G.Kvs'^
CONSTITUTION DB 1809. 49
amené les malheurs dont gémissait le pays. Avec
la complicité de tous, le roi fut emprisonné le
13 mars dans le chdteau de Stockholm, après quoi
le gouvernement fut confié A son oncle le due
Charles, jusqu'à ce que les états eussent pu se
réunir. Leur réunion eut lieu le 1" mai, et après
différents pourparlers avec le duc régent ils char-
gèrent (le 12 du même mois) leur comité consti-
tutionnel d'élaborer une nouvelle Constitution.
OUe-ci était prête au bout de deux semaines de
travail à peine ; elle fut adoptée le 5 juin par les
états ; puis, le 6 juin, le duc Charles fut élu comme
roi et prêta serment à la nouvelle Constitution.
Si jamais occasion s'est présentée de fabriquer
une Constitution toute neuve, sur des patrons déjà
prêts et en s'inspirani de théories politiques en
vogue, c'est bien à ce moment-là, semble-t-it.
Tout paraissait devoir y pousser : la brièveté du
temps accordé au travail, les idées politiques
régnantes, les principes de la Révolution fran-
çaise, et l'exemple du parlementarisme anglais.
Dans le mémoire rédigé par le secrétaire du comité
de la Constitution, Hans Jxhta, — mémoire qui
accompagnait le projet dudit comité, — il est
parlé en effet de la théorie de Montesquieu sur la
séparation des pouvoirs, ainsi que de l'excellence
éprouvée de la Constitution anglaise. Mais ce sont
..G.Kvsl^
[ISTOBIQUK DE LA CONSTITUTION.
>ns de parler dont la portée ne va pas
[u'à montrer que les auteurs du projet
>urant de ces doctrines et systèmes
Le même Hans i&tta. devait faire dans
iccasion (en 1832) la déclaration sui-
,a. Constitution suédoise du 6 juin 1809
ée sur ie patron d'aucun des costumes
ilors à la mode dans le reâte de l'Europe,
d'après le vieux costume national de ta
Bc la jaquette de paysan serrée à la
plusieurs autres déclarations du même
^trouvent aussi bien dans le mémoire
laut, que dans les discours prononcés
états à propos du même projet. En
fûrmation du caractère national de la
D est si littéralement vraie qu'il est
d'indiquer avec certitude une seule
qui soit un emprunt fait à l'étranger ;
derrière chacun de ces 1 11 paragricphes,
ons des expériences nationales et des
s historiques.
;urs qui ont examiné la Constitution
sa formation, ont noté dans quelques
isemblances entre certaines institutions
t des institutions appartenant à d'autres
lais ces analogies ne prouvent pas
le étrangère. Des besoins identiques
..G.Kvs'^
CONSTITUTION DB 1809. Bi
doivânt conduire souvent à prendre des mesures
analogues; en ce cas il est impossible d'établir
l'emprunt, d'autre part les antécédents des ins-
titutions en question (par exemple la responsa-
bilité du CoDSeïl des ministres devant les états, et
le principe du contreseing) se retrouvent dans
des institutions anciennes de la Suède, et seule
la combinaison de ces éléments est une nouveauté :
en d'autres termes, les prémisses étaient posées
depuis longtemps, et il n'y a d'inédit que ta
conclusion.
L'idée directrice qui présida au travail consti-
tutionnel, c'était d'éviter et d'empêcher pour
l'avenir les excès de sens opposé entre lesquels
la Constitution suédoise avait été ballotlce au
cours des générations immédiatement précédentes.
La situation politique en 1809 était, à l'extérieur
comme à l'intérieur, très semblable à ce qu'elle
était en 1718. Mais quand on compare les
résultats des deux révolutions qui marquent ces
deux dates, on voit qu'ils diffèrent du tout au
tout. Tandis que dans le premier cas on se pré-
cipita d'un excès à un autre, ce sont précisément
ces excès que l'on veut éviter en 1809. On avait
constaté que la « liberté », c'est-à-dire la souve-
raineté du peuple sans contre-poids, n'est pas
.moins violente que l'absolutisme d'un roi. u Déli-
.„,,..G.Kvsl^
Ba HISTOBIQUB DE LA CONSTITUTION.
miter exactement » et u doser avec soin », l'an
en face de l'antre, les deux « pouvoirs constitu-
tionnela», celui du roi et celui des états : telle
est la pensée, souvent exprimée, qui n'a cessé de
guider les auteurs de la Constitution. Pour cela,
on prend dans le riche trésor des anciennes chartes
constitutionnelles que l'on avait à sa disposition,
tantôt un article concernant la majesté et les
pouvoirs du roi , tantôt un article sur les
attributions des états, mais en ayant soin d'opé-
rer UD mélange harmonieux, ou bien on rédige
des di^ositions nouvelles inspirées par des expé-
riences tontes récentes. Par le rétablissement de
l'équilibre entre le roi et le peuple, la Constitu-
tion se trouve également rétablie sur ses antiques
fondements. Voilà pourquoi le Comité constitu-
tionnel pouvait très justement dire en parlant de
lui-même ; « Le Comité ne propose pas de
grandes ni de brillantes modifications aux formes
traditionnelles dé notre Constitution politique. »
11 se contente de la ramener à son type originel,
c'est-A-dire à celui de la Constitution dualiste
dans l'État unitaire ; ce système, qui fonctionnait
encore sous Gustave- Adolphe et qui fut aban-
donné par la suite, se trouve maintenant restauré,
mais sous une forme plus riche et plus complète,
et sans les lacunes qui avaient causé sa décadence.
■ , ' ..,,..G.K,^1C
CONSTITUTION DK 1809. 53
C'est ainsi qae la Douvelle CoDsIîtution devient
pour ainsi dire la résultante de toute l'histoire
constitutionnelle du peuple suédois. La Forme de
gouvernement de 1809 est le fruit mûr d'un
développement poursuivi pendant des siècles.
Le principal document de la ConstitutioD sué-
doise est donc ce teste si souvent cité de la
Forme de gouvernement {Regeringsformen), c'est-
à-dire la Constitution du 6 juin 1809. Il faut y
joindre trois autres « lois fondamentales n, savoir :
la loi de succession de 1810 ; — la loi organique
du Riksdag, dont la forme ancienne est de 1810,
et la forme moderne de 1866 ; — et la loi de
181^ sur la liberté de la presse. Mais ces trois lois
fondamentales ne font que développer et préciser
chacune pour son domaine les principes généraux
de droit public posés dans la Regeringsform. C'est
pourquoi on peut s'en tenir à ce texte fondamental
pour donner un aperçu d'ensemble de la Gonsti-
tiition suédoise. Nous exposerons tout d'abord le
contenu de cette Constitution telle qu'elle est
apparue en 1809, après quoi nous rendrons
compte très brièvement des modifications
qu'elle a subies par la suite.
Au point de vue de la disposition extérieure,
la Constitution se compose d'une introduction et
d'un appendice, encadrant ll'i paragraphes,
..G.Kvs'^
HISTORIQUE DE LA CONSTITUTION.
48 premiers traitent du pouvoir royal,
ïributions et de son organisation générale,
i du Conseil des ministres ; les autres
ihes, du 49* au 114*, décrivent de la
lanière l'organisation des états. L'inti'o-
ii l'appendice, mais surtout la première,
tout d'abord d'attirer l'attention. Rien
mieux que cette préface faire comprendre
le mots l'esprit de la CoDstitution sué-
est pourquoi il me parait à propos de la
ïuellement, mais en y Taisant un certain
de coupures :
3, Charles, roi des Suédois, des Goths et
ides par la gr&ce de Dieu, etc., etc., fai-
oir ce qui suit : attendu que, dans un
t de confiance pleine et entière, nous
bandonné sans conditions aux étals du
l'établissement d'une nouvelle forme de
sment, . . . nous remplissons ... un devoir
r en publiant ici pour tous la loi fonda-
que les étals actuellement réunis.. .-. .. ^
e et adoptée d'un commun accord et
us ont remise en ce jour dans ta Salle
i, en même temps qu'ils nous offraient
t et unanimement la couronne et le gou-
nt de la Suède. Fin agréant cette offre,
[>oir d'un progrès dans nos efiorts conti-
..G.Kvs'^
CONSTITUTION DE 1
DUS pour le bien du pays s'est trouvé d'autant plus
afiermi que les droits et les devoirs réciproques
entre nous et nos sujets sont, avec une clarté
parfaite, délimités par la nouvelle ConsUtntiOD
de façon à maintenir à la fois au pouvoir royal
son caractère sacré et .sa force d'action, et au
peuple suédois sa liberté soumise aux lois. Nous
déclarons donc vouloir adopter, approuver et
sanctionner la ConsUtution votée par les états du
royaume, et nous l'acceptons entièrement, dans
les termes où elle se trouve publiée par la suite. »
« Nous soussignés, constituant les états du
royaume de Svéa, comtes, barons, évëques,
chevaliers et nobles, membres du clergé, bour-
geois, représentants du peuple et des paysans,
nous tous qui, en notre nom et au nom de
nos concitoyens restés chez eux, nous sommes
réunis en assemblée générale du royaume,
déclarons ce qui suit ; attendu qu'à la- suite
du nouveau changement de monarque auquel nous
avons donné notre approbation unanime, nous,
délégués du peuple suédois, avons acquis le
droit, par l'établissement d'une Constitution
nouvelle, de contribuer nous-mêmes à améliorer
pour l'avenir la situation de notre patrie; nous
avons décidé d'annuler d'abord toutes les lois
fondamentales plus ou moins en vigueur jusqu'à
..G.Kvsl^
06 HISTOBIQUK DB LA CONSTITUTION.
ce jour, savoir la Forme de gouvernetneat àa
21 août 1772, l'Acte d'union et de sdreté àa
21 février et du 3 avril 1789, la loi du Riksdag
du 24 janvier 1W7, ainsi que tous les autres
actes, lois, règlements, décisions et statuts anciens
on récents, qui ont été compris sous le nom de
lois fondamentales ; les dîtes lois ayant été abro-
gées, nous sommes tombés d'accord pour donner
au royaume de Svéa et aux pays y appartenants la
Constitution suivante, qui i partir de ce jour
entrera en vigueur comme loi suprême du
royaume, . . d
Dans l'appendice, la Constitution est confirmée
et sanctionnée d'abord par les quatre « orateurs »
on présidents des états, ensuite par le roi qui
l'accepte pour sa part comme une loi inviolable
et la recommande à l'obéissance de tous et de
chacun.
Ces deux textes, et principalement l'avant-
propos, constituent, comme on le vmt, une sorte
de dialogue. II semble qu'on y entende deux
personnages se donner la réplique et conclure
pour eux-mêmes et pour leurs descendants un
accord, un contrat où sont établis des droits et
des devoirs réciproques, — à peu près comme
au temps du paganisme, lorsque le roi et le
peuple se prêtaient serment l'un à l'autre. Le
...G.K.^IC
CONSTITtrriON OB 1609. S7
premier et le dernier, te roi y preod la parole et
fait ses promesses, parfois dans des termes em-
pruntés au style traditionnel des chancelleries, et
qui semblent le désigner comme souverain par
la grâce de Dieu et par droit de naissance. Mais
81 l'on regarde au contenu de ses déclarations et
non à leur forme, et si l'on passe ensuite à la
déclaration des états expliquant qu'ils possèdent
maintenant le droit de donner eus-mëmes au pays
une nouvelle Constitution «t d'abolir par là toutes
les lois fondamentales jusqu'alors en vigueur, on
voit clairement quel est ici te vrai souverain. Les
états ont seuls décidé de la Constitution et ils y
ont fixé de leur propre initiative les limites entre
leur pouvoir et celui du roi ; et c'est seulement
après cela qu'ils ont offert la couronne au duc
Cari, C'est juste l'inverse de ce qui se passe dans
l'adoption des Constitutions « octroyées », lorsque
le roi abandonne au peuple et au parlement cer-
taines parcelles de soo pouvoir.
On serait donc, dans une certaine mesure,
autorisé à définir la Forme de gouvernement de
1809 « une Constitution octroyée par le peuple n.
Cependant cette conception d'un souverain unique
limitant volontairement sa puissance au profit
d'autres copartageants du pouvoir ne s'accor-
derait pas bien avec les idées suédoises. Le
5s HISTOKtQUe DE LA CONSTITOTION.
peuple est en fait le vrai souveraiD^ car le peuple
est éteroel tandis que les dynasties royales sont
sujettes à s'éteiadre et à changer; mais yun'i/t-
quement parlant, le roi et lé peuple sont des
puissances égales dans l'État. C'est là une fiction
au point de vue historique, ntais c'est une réalité
au point de vue constitutionnel. Car l'idée cons-
tamment présente dans la Constitution de 1809,
c'est d'arriver à un partage aussi égal que pos-
sible entre les deux organes directs de l'État, le
Roi et le Peuple, ou plutôt le Riksdag. Cette idée
a reçu une expression singulièrement claire et
pleine de sens dans les deux textes qui encadrent
la Constitution, mais elle se retrouve, comme
nous allons le voir, dans chacune des parties de
l'édifice constitutionnel suédois.
Caractérisons d'abord la place du roi dans l'État.
Le roi doit professer la pure doctrine évangé-
lique et appartenir actuellement à la maison des
Bernadotte suivant le droit agnatique de primo-
géniture. Il est irresponsable dans ses actions ; il
gouverne le royaume et décide seul dans les
fc.._.^„
CONSTITDTION DE 1809. 39
questions qui concernent le ^uvernement. Mais
en cela il n'exerce sa volonté et sa puissance
qu'entouré de ses conseillers et sur les rapports
présentés par eux ou {jusqu'à 1840) plus ordinai-
rement par les quatre secrétaires d'Etat.
11 existe, d'après la nature des questions, diflé-
rentes espèces de conseils où prennent part un
plus ou moins grand nombre de « conseillers
d'Etat » c'est-à-dire de ministres' ; mais il
n'y a pas <le conseil des ministres au sens
ordinaire de ce mot^ On doit tenir un procès-
verbal des délibérations de chaque conseil.
Le roi décide seul, comme on l'a vu, mais pour
que ses décisions soient valables, il faut, — excepté
en ce qui concerne les questions * de commande-
ment », — qu'elles soient contresignées par un
ministre ou un secrétaire d'Utat. Ainsi aucune
décision royale ne -devient un acte de gouvernement
1. Voici quelles sont ces difTërenles sortes de conseils :
!• le conseil ordinaire, grand et petit (le rapporteur +
3 conseillers d'Ëtat), pour les airairesordinaireB;2° le conseil
ministériel, pour les questions diplomaiiques ; 3* le conseil
dit "du commandement » {Kommandokonscljen), pour les
questions militaires; et 4° le conseil de justice, pour les
affaires judiciaires {question des grâces, etc).
2. Seulementlorsqueleroiestabseat pour un long voyage
ou malade, le gouveruement est exercé par le i Conseil
d'Etat > {Htaitrâdel), c'est-à-dire le ministère; mais c'est là
un gouveruement intérimaire et non un conseil des
ministres.
..G.Kvsl^
CO HISTORIQUE DE L& CONSTITUTION.
sans la collaboration d'une personne responsable
devant le Parlement. Cette liniHatiou formelle de
la volonté du roi s'applique à tous ses actes gou-
vernementaux excepté à l'investiture des décora-
tions, qui. a lieu dans le » chapitre des ordres »
et qui lie constitue pas un acte gouvernemental au
sens ordinaire de ce terme. Au point de vue
matériel^ lavolontédu roi est libre dans certains
cas, et dans d'autres cas presque aussi limitée
qu'au point de vue formel. C'est ce que nous allons
voir en exposant successivement la part qui lui
revient dans chacune des fonctions de l'Ëtat :
fonctions executives, législatives (y compris les
finances) et judiciaires.
Le pouvoir f3:^CM/i/ est dans sa presque totalité
entre les mains du roi. Il se manifeste tout
d'abord, comme il est naturel, parla direction de
l'administration du royaume, par le commande-
ment de l'armée et de la flotte et par une initiative
générale dans les diflérents domaines de la vie
politique. De plus, le roi a une autorité illimitée
en matière de politique étrangère, de guerre et
de paix, aiusi que dans la nomination des fonc-
tionnaires'; il est seulement tenu d'observer les
1. Le roi aommc lous les fonotiooaalres d6 l'admiDislra-
ticn civile. Judiciaire elmiliiaire, saut les fonclionnairea
JDlérieurs, qui soni nommés par les autorités compétentes
,..,..G.Kvsl^
C0N8TITDT10N t>B 1809. 61
formes et les cobditions prescrites par ta loi, et
particulièrement dans le dernier cas signalé.
Remarquons eu passant que les fooctionnaires sué-
dois ont toujours occupé une situation très indépen •
dante. A. l'exception des chefs de services adrai-
uistratifs et des commandants de régiments ainsi
que des fonctionnures diplomatiques, — qui
constituent la catégorie dite des ic délégués » ou
« hommes de confiance a amovibles, — les
fonctionnaires ne peuvent être destitués qu'à la
suite d'une procédure légale. A d'autres points
de vue encore ils jouissent d'une grande indépen-
dance dans tous leurs actes en dehors du service.
Mais à part cette restriction, le roi est pour ainsi
dire le seul maître dans les domaines que nous
venons de signaler. Avec un soin tout particulier,
on s'oppose dans le § 90 de la Constitution à une
intervention quelconque des états dans les mesures
[bureaux cenlrauz. obefa de eerviee, etc...)- Pour 1% noml-
iiation des pasteurs, on fait une pan au principe ëlectlf :
dans la plupart des paroisses les électeurs ; collaborent
avec les chapitres diocésaiûs {domkapUlen). Les âvêques
soDt dâsignés par le roi parmi trois candidats que lui
présfiute le clergé du diocèse. Les bourgmeslres des villes
et à Stockbolm les autres Juges coDstituant le tribunal
de première Instance sont nommés suivant une procédure
analogue, les citoyens présentant au roi trois candidats. —
Les autorilés municipales et les fonctionnaires muuiclpaux
sont tous élus par le peuple ou par ses représentants.
..G.Kvsl^
ORIQUE DE U CONSTITUTION.
aies et dans la uorninatioD des fonc-
le § 105 soustrait de même à leur
Qaires diplomatiques et militaires^
|ui concerne les faits universellement
lalés par le comité de Constitution,
tristes expériences faites pendant
berté », lorsque le Parlement tout-
rvenaît dans l'admiaistration du
[Voyait aux places et accaparait la
ngère, on se trouva naturellement
ittre ces questions entièrement entre
)t et de ses conseillers responsables.
i le pouvoir royal est sous la dépen-
^cision du Riksdag; pour la plupart
auxquelles est jointe une dépense
se trouve lié par le budget à ta fois
cerne les dépenses et les recettes ;
épasser le chiffre fixé ai opérer des
ilement dans le cas où les dépenses
-ieures aux prévisions, il en résulte
I, le roi dispose de fonds dont il
j certaines limites et qu'il peut faire
tel but désigué par lui. Déjà lors
du budget de 1809-10^ on décida
ût la libre disposition des excédents
:hacun des huit articles qui compo-
budget ; on ajouta, il est vrai, qu'il
..,,..G.HvsI-'
CONSTITUTION DB 1809. 63
serait tenu de les affecter exclusivement à l'article
même où se serait produite l'économie. Ën£a on
met à la disposition d u rot des « crédits » [Regerings-
foi'men, § 63) auxquels il peut recourir dans des
circonstances extraordinaires (guerre ou tout autre
cas imprévu), mais à condition d'observer des
formalités spéciales.
Daiis ces limites, formelles et matérielles, le roi
possède à lui seul tout le pouvoir exécutif sauf
une exception sur laquelle nous reviendrons plus
tard. Nous ajouterons eu dernier lieu que le roi
promulgue seul toutes les décisions de l'État, non
sêulemeut les siennes propres et celles qu'il a
prises de concert avec le Riksdag, mais encore
celles qui proviennent du Riksdag isolément. Par
contre, il ne sanctionne pas toutes les lois et déci-
sions adoptées par le Riksdag, comme on va le
voir dans' ce qui suit.
Les attributions législatives du roi touchent de
très près à celles que nous venons d'examiner.
Sans doute en ce qui concerne la confection ou
la modification des lois constitutionnelles, des lois
civiles et criminelles ou encore des lois ecclésias-
tiques, le pouvoir du roi n'est ni plus ni moins
étendu que celui des états. Il règne ici entre le
roi el le Riksdag une égalité complète pour ce
qui est des droits d'initiative et de veto, et même
84 HISTORIQUE DE LA CONSTITUTION.
du droit de sanctioa : uoe loi proposée par le roi
et adoptée par le Riksdag n'a pas besoin de
sanction ultérieure, bieo qu'elle soit, comme on
l'a vu, promulguée par le roi. De plus, celui-ci
n'a' aucune espèce de pouvoir législatif provisoire.
De concert avec la Cour supfëme, il peut, en
l'absence du Riksdag, s'informer du vrai sens de
la loi et en donner l'iaterprétation ; mais les
états, au Riksdag suivant^ ont le droit d'annuler
sans autre forme l'interprétation royale.
En revanche, le roi de Suède po^^sède en matière
» économique » un pouvoir législatif étendu qu'il
exerce tout seul. Cette autonomie ne se borne pas
à des prescriptions administratives, à l'attributiou
de concessions pour entreprises privées et autres
actes analogues ; elle comprend aussi un grand
nombre de questions d'un intérêt général. L'ori-
gine de cette attribution royale doit être cherchée,
comme nous l'avons vu, dans le droit de légis-
lation pour la paix que le moyen âge recon-
naissait à ses rois'. Il s'adapta ensuite à toutes
1. Le texte le plus aucien où ce droit Boit mentioDOé
comme appartenant au roi seul {d'accord, il est vrai, avec
ie Conseil], se trouve dans les statuts de Skenninge, édic-
tés eu 12SS par Magnus Ladulâs. Dans l'âpoque moderne, le
droit d'émettre des ordonnances fut reconnu au roi d'une
manière expresse en 16S2, dans la réponse donnée par les
éiata a une question de Charles XI sur ce sujet.
..G.HvsI-
CONSTITUTION DE 1809. 6B
les questions nonvelles que le temps et les
progrès de la civilisation amenaient avec eux,
et qui ne se trouvaient pas inscrites sur le Code
Géntîral. La douane et l'accise ont aussi appai^
tenu à cette législation royale. Il est dilBcile
de lui assigner des limites bien définies, car on .
peut y faire rentrer « tout ce qui touche à l'éco-
nomie générale du royaume » et qui n'est pas
expressément désigné comme relevant de la légis-
lation commune du roi et du Riksdag'. Ce droit
législatif laisse au roi un domaine très considé-
rable où peut s'exercer son pouvoir autonome.
Par contre, son autorité sur les finarices de,
rËtat est très limitée. Sans doute la trésorerie
avec l'administration financière qui s'y rattache
sont placées sous sa haute direction, et les reve-
nus ordinaires du royaume, aussi bien que les
fonds extraordinaires votés par les états, sont à la
disposition du rot [Regeringsformen § 64). Mais
il n'a pas le droit de faire d'emprunt ni même
d'intervenir dans les affaires de la dette publique
et de la Banque du royaume,
1. Dans la loi organique du Riksdag de 1810 [§ 34) on
déclare que ce pouvoir législatif du roi s'applique & « tout
ce qui concerne l'administration économique générale du
royaume, 7 compris les oeuvres d'éducation et d'enseigne-
ment, l'assistance publique, l'économie rurale, les mines,
..G.Kvsl^
L
66 HISTORIQUE DB LA CONSTITUTION.
De même la part du roi dans l'établissement da
budget est relativement petite. C'est lui qni pré-
sente les projets, mais il possède seulement le
droit de veto contre l'abaissement éventuel des
dépenses et recettes fixes ou, comme on dit, « ordi-
naires » et encore tient-il ce droit plutôt de la
coutume que de la loi écrite ; il peut égale-
ment refuser d'accepter tel crédit que les états
auraient inscrit au budget contre sa volonté.
Quant à la gestion des biens de l'État, quoique
relevant du roi tout seul, elle a lieu suivant
les principes que prescrivent les états. Natu-
rellement le roi n'a le droit d'imposer aucune
contribution, taxe ni charge d'aucune sorte,
et il ne peut sans la volonté du Parlement
élever le taux de l'accise et des douanes, excepté
en ce qui concerne les droits d'entrée sur les
céréales. En revanche, il peut, suivant une cou-
tume reconnue, abaisser les droits non seulement
sur les céréales, mais sur tous les autres articles.
Ces deux concessions, qui marquent une adhésioD
à l'ancien droit, furent amenées par le long inter-
valle que l'on fixa en 1809 entre les sessions ordi-
naires du Riksdag.
De même, en vertu des plus anciennes tradi-
tions du droit suédois, le roi possède une part
du poavoir judiciaire, maisity participe seulement
DB 1809. 67
en ce sens qu'il peut siéger et délibérer avec les
membres de Ja Cour suprême, oùil a droit à Heux
voix, et que les condamnations à mort doivent
toujours lui être soumises. Naturellement il ne
fait jamais usage du premier de ces droits, qui
est comme une survivance respectable du temps
où le roi rendait vraiment la justice. Du resle, il
possède le droit de gr&ce en ce qui concerne
les crimes^ mais il doit décider sur cette matière
en Conseil d'État et sur Tavis de la Cour
suprême '.
Parmi les autres attributions du roi de Suède
nous signalerons les suivantes : il est le cbef ou
« primat » de l'Eglise luthérienue suédoise. Il
peut convoquer les états en session extraor-
dinaire, ce qui, avant 1866, était accompagné
d'élections nouvelles, mais, il est vrai, le roi ne
peut dissoudre le Riksdag une fois rassemblé,
1. La cour suprême (Hô'giia domttoltn), qui constitue la
deroière Instance au civil comme au criminel, — son rôle
correspond par conséquent en partie à celui de la Cour de
cassation française, — se compose, d'après le rëglemeut de
1809, de 12 et actuellement de 21 < conseillers de justice >
ijuHUU^-àd) nommés par le roi. La Cour suprême n'a pas
plus qu'aucune autre cour de Justice qualité pour décider si
led tels sont conformes à la Constitution (ce qui est le cas
pour la Cour suprême des États-Unis). En revanche, elle
. fouctionne comme conseil chargé de vériOer et d'examiaer
la plupart des projets de loi, — ce qui la rapproche du Con-
seil d'Ëtat français et d'autres institutions du même genre.
..G.Kvsl^
68 HISTORIQUE OB LK COSSTITOTIOK.
avant que quatre mois oe se soient écoulés à
partir de l'ouverture de la session'. De plus, c'est
lui qui désigne les présidents (taimàn) dans
chacun des ordres, excepté pour le clergé, où
l'archevêque d'Upsal avait de droit la présidence,
comme il le fait aujourd'hui encore dans les Cham-
bres. Ce privilège royal a une grande importance
constitutionnelle : d'abord parce qu'il permet
d'éviter les abus d'une majorité de parti dans
les sections du Riksdag ; ensuite et surtout parce
que le président a le pouvoir de l'efuser la mise
aux voix de projets qu'il juge contraires aux lois
fondamentales. Sans doute en pareil cas c'est le
Comité constitutionnel qui doit, si les circons-
tances l'exigent, juger entre le président et son
ordre, ou, comme aujourd'hui, entre le président
et la Chambre. Mais cela n'empêche pas que les
présidents ne soient, en vertu du droit que nous
venons de signaler, les gardiens impartiaux des
1. En réalité, k partir du moment où la propoaiUon du
budget a été déposée. — Suivant la Constitution de 1B86
(§§ 3 et S) le roi a le droit de prescrira de nouvelles élec-
tions pour une des Cbamt>rea ou pour toutes les deux avant
l'ûxplratloo du mandat. Si cette prescription se produit au
cours d'une session, le Riksdag est dissous pour se réunir
de nouveau dans la délai de trois mois au plus lard, et alors
Il ne peut être licencié avant quatre mois de présence. —
Le système de la prorogation est inconnu au droit public
de la Suède-
..G.Kvs'^
COHBTtTtlTION DE 1809. 69
lois fondamentales et de la Constitution cootre les
tentatives qu'on pourrait faire pour dépasser les
limites assignées aux pouvoirs du Riksifeg ou de
ses sections. Par là sont évités beaucoup de
conflitfi possibles noa seulement entre le Roi et
le Riksdag, mais aussi entre les différentes
parties du Riksdag:. Ce règlement est donc un
des nombreux rouages de sûreté dont dispose
la CoaslitutîoD suédoise pour préveoir des
conflits d'attributions comme il s'en présente si
souvent dans la vie politique ; mais il faut avouer
qu'il ne convient guère à ce type constitu-
tionnel .
Finalement le roi a encore un droit d'anoblis-
sement ; il peut créer des nobles, des barons et
des comtes,. promotions qui d'ailleurs n'apportent
avec elles aucune espèce de privilège ; les nou-
veaux titres ne passent en héritage qu'au fils
atné dans la ligne directe. Cette prérogative
royale n'est plus exercée que très rarement et
l'opinion publique tend à la faire disparaître '.
1. Depuis lSS9(datsderaTènemoatdeCbarles XV), le droit
en question a él6 exercé en tout t7 Fois, don 1 6 sous le règne
d'Oscar II. — Commo on se fait souvent, en dehors de la
Suède, des idées très fausses sur l'importance actuelle de
la noblesse daos ce pays, Je croie utile de donner à son
sujet quelques renBeignements précis. Le nombre des
familles nobles encore existantes et non tombées en
..G.Kvsl^
I LA CONSIITDTIOK.
III
LE HIK8DAG
Laissons oiainteDant le Roi, qui est le preDiier
pouvoir, pour nous tourner vers le second, c'est-
à-dire vers les étals [Sl'àndernd).
Lors de la Révolution de 1809, l'opinion publique
demandait que l'ancienne division en quatre
ordres, qui ne correspondait plus à l'organisation
sociale du peuple, fût remaniée et remplacée par
\\a autre genre de représentation. Les dangers
qui menaçaient alors le pays et le délai très court
dont on disposait, firent que cette réforme fut
quenouille élait, k la date du i" janvier t89S, de 717 sur un
chxBrt! tolftl de 3033 familleB créées. Ces 717 familles compre-
naient, toujours à la même date, 13 tos personnes, soit une
proportion de 0, 27 "/o de la population totale de la Suède.
Sur ce chiffre, ou comptait 6015 individus de sexe iD&Bea-
lin et 7 090 de sexe féminin. Parmi les femmes mariées,
6B, S>/t étaleat des roturières. L'es hommes adultes se répariis-
■alent entre les professions suivantes : OfDclerà de terre et
de mer 1054; fonctionnaires (fonctions civiles, judiciaires
et eccléaias tiques) 760 ; propriétaires terriens et agriculteurs
806; Industrie, commerce et navigation 521; professions
libérales (médcclDS, professeurs, etc.) Î07 ; ouvriers 238 ;
étudiants et divers 228. La noblesse suédoise, comme on
p^ut s'en rendre compte déjà par ces chlf^s, n'est pas
riche et ses familles s'éteignent rapidement, ce qui est
d'ailleurs le cas pour toutes les classes supérieures.
D'après l'ouvrage de P. Fablbbck, Der Adel Sehvieikni
(und Finlanils), fine itmogra^Uche Studit. Jena, 1903.
CONSTITUTION DE 1809. 71
remise à une époque plus favorable. Ainsi la loi
organique de 1810 fut en somme une remise en
vigueur de la loi du Riksdag de 1723, mais celle-
ci revenait avec d'importantes modifications pro-
venant de l'abolition des privilèges, qui avait eu
lieu précédemment, ainsi que de la forme nouvelle
donnée au gouvernemeut'.
Bien que le Riksdag se compose de la réunion
de quatre ordres, il ne représente pas néanmoins
les diverses classes sociales qui le constituent,
mais il représente avant tout le peuple suédois
dans son ensemble. 11 en était ainsi dès le début,
lorsque le Riksdag était seulement convoqué pour
les élections royales et autres grands événements
politiques ; et tel fut aussi son caractère dans les
1. La représentation réunie a» Riksdag comprenait ainsi;
pour la noblesse, ordinairement le'cbef de chacune des
familles introduites au Palais de la Noblesse (ftiddarhm) ; —
pour te clerKé, les éïêquea et le < paslor primarlos »
(pasteur-président) de Stockholm, plus quelques pasteurs
élus dans chacun des diocèses par leurs collègue» ; on y
ajouta plus tard (en 1823 et en 1840) des reprësentants des
Universités; — pour la bourgeoisie, des représentants
des Tilles, dont le nombre varie suivant l'importance de ces
dernières; ils sont élus par de vrais bourgeois, plus tard
(1856) par tous les indualriels et gens de métiers et par les
propriëlairesde malsons; de plus, quelques représenlants de
roxploitation minière; — pour les paysans, un représen-
tant par district, avec cette réserve que deux ou plusieurs
districts pouvaient se. réunir pour choisir un seul repré-
sentant.
TÎ HISTORIQUE DK LA COMSTITimOM.
temps modernes, bien avant que tes états devin-
rent l'assemblée gouvernante (1719-1772). C'est la
conception qui est exprimée dans 1« premier
paragraphe de la nouvelle loi organique du Rïks-
dag ; voici, en eflet, ce que nous y trouvons :
« Les états du royaume sont les représentants du
peuple suédois, et ils ne peuvent être soumis à
d'antres prescriptions que les lois fondamentales
du royaume', »
Nous rappellerons à ce propos qu'en Suède il
ne peut y avoir incompatibilité entre un mandat
parlementaire et l'exercice de telle ou telle fonc- '
tioH. Pendant « l'ère de la liberté ■ on interdit
aux conseillers d'État d'assister aux délibérations
de la Noblesse, à laquelle ils appartenaient. Mais
en dehors de cela, jamais en Suède aucune
fonction n'a formé un obstacle à la députatiou.
Les fonctionnaires constituèrent un ordre entier,
celui du clergé; beaucoup d'entre eux apparte-
naient à la noblesse, et depuis 1866 ils siègent en
grand nombre dans l'une et l'autre Chambre. Un
fait qui caractérise bien la vie politique suédoise.
1. La question de savoir si les députés étaient liés par
des Instructions' spéciales ou devaieat en demander à leurs
électeurs, avait été déjà résolue par Gustave- Adolphe en
1614, et elle le fut de nouveau en 1747 pendant < l'ère de la
liberté. •
3,Cooi^lc
CONSTITUTION DB 1809, 73
c'est que ces serviteurs de la couronne s'opposent
souvent aux projets présentés par le gouvernement.
Mais c'est là une conséquence directe du para*
graplie cité plus haut, et cette liberté s'accorde
d'ailleurs très bien avec l'esprit général de la
CoDStitution.
L'unité dans la préparation des questions était
obtenue par six comités mixtes : 1" un comité
constitutionnel, pour les questions qui touchaient
les lois fondamentales ; 2° ud comité des finances,
pour le règlement du budget; 3° un comité des
subsides, chargé d'examiner le mode de leur
répartition ; 4° un comité des lois, pourles questions
législatives ; &" un comité de la Banque pour
les affaires de la Riksbank ; 6° pour toutes les
autres questions, un comité « d'économie »
et des pétitions. En dehors de ces comités,
les ordres ou « états » pouvaient encore dis-
cuter entre eux par le moyen de >< députations »
provisoires. Pour qu'une décision du Riksdag
fût valable, on exigeait dans les questions cons-
titutionnelles l'assentiment des quatre ordres ;
pour les antres questions on se contentait
en général de l'adhésion de trois ordres
seulement. Pour les affaires concernant le
budget, les impôts et la Banque, au cas.
où les .états ne pouvaient se mettre d'accord à
t ■
.„,,..G.Kvsl^
7i HISTORIQUE DR LA CONSTITUTION.
leur sujet, elles étaient résolues à la simple majo-
rité dans le comité des finances renforcé.
D'autres questions pouvaient se résoudre de la
sorte, bien que ce procédé donn&t lieu à de per-
pétuels tiraillements. Ainsi donc, malgré la divi-
sion en quatre, od avait pris des mesures pour
que les étals pussent conserver leur uuité d'action
et d'attitude.
Uae chose remarquable dans la Constitution
suédoise, c'est qu'elle réserve au Riksdag, tout
comme au roi, certains domaines où il exerce
tout seul le pouvoir exécutif aussi bien que le
pouvoir législatif. C'est le cas pour la Banque
du Royaume {Riksbanh), qui depuis 1668 étwt
déjà ta banque des Etats, et pour le Comptoir
de la Dette publique {Riksff'aldskonior) qui
administre depuis 1789 la dette du royaume. Et
de même que le Riksdag dirige ces établissements
par l'intermédiaire de ses représentants, les com-
missaires de la Banque et de la Dette, de même
il est seul à leur donner des lois, et ce privilège,
— indépendamment de la loi peu importante de
1830, — s'est maintenu jusqu'à nos jours (1897),
Ce pouvoir autonome exercé par le Riksdag sur
la dette publique et sur la banque d'Ëtat, a son
principe dans les dures expériences qu'on avait
faites des empiétements du pouvoir royal sous
CONSTITUTION DB 1809. 75
Charles XII et tout récemment sous Gustave III.
L'autoDomie en question se rattache aussi
d'assez près à l'autorité considérable dont le
Riksdag* dispose en matière financière et êcono'
mique, et sur l'établissement du budget, qui se
fait en Suède non point sous forme de loi mais
par décision du Riksdag seul, et non poiat en bloc
mais chapitre par chapitre. Nous avons indiqué
plus haut la part prise par le roi dans la fixation
du budget. Son intervention est une barrière im-
posée au pouvoir du Parlement. Suivant une
coutume reconnue, celui-ci ne peut, sans l'assen-
timent du roi, réduire les dépenses ordinaires
affectées à l'administration, à l'armée, à la flotte,
etc. ., dépenses où le droit d'un tiers est généra-
lement intéressé. Le Riksdag ne peut pas non
plus diminuer les anciens revenus appelés « ordi-
naires », dont une partie remontent à un passé
lointain, comme par exemple le produit des biens
de la couronne et des autres propriétés de l'Etat,
les amendes, etc. . . Mais par ailleurs le Riksdag
détermine à lui seul les dépenses et les subsides ;
ces derniers sont appelés « bevillningar ». On
désigne sous ce nom de bevillning (Befjerings/or-
men, § 60) : le produit des douanes et des accises,
la taxe sur la fabrication et sur la vente des
eaux-de-vie, le droit du timbre, l'impôt direct sur
76 IIISTOBIQUB DB LA CONSTITUTION.
le revenu et la fortune, auquel s'ajoutent, — chose
assez curieuse, — les revenus àe la poste. Ainsi
tout le droit d'imposition proprement dit est entre
les mains du seul Riksdag. Joignez à cela que,
sauf l'exception signalée plus baut (p. 66), la
question si importante de la politique douanière
le concerne presque exclusivement.
Nous devons remarquer aussi que les décisions
du Biksdag au sujet des subsides (beviilningarna)
ne sont pas sanctionnées par le Roi. Il y a donc là
encore un domaine important de la vie politique
où le Parlement règne en toute indépendance.
 côté de ce droit de décision en matière
financière et économique, il faut signaler le droit
de contrôle que le Riksdag possède en ces deui
matières et qui est exercé pendant les sessions
par le comité des finances et entre les ses-
sions par 12 réviseurs (Slalsrevisorer). Ce con-
trôle consiste avant tout à s'assurer que les
crédits affectés à chaque destination particulière
n'ont pas été dépassés, que ces crédits n'ont pas
été transportés d'un article à un autre, enfin à
vérifier l'emploi des économies signalées plus
baut dans les principaux articles. Un autre
aspect non moins important du droit de con-
trôle attribué au Riksdag, c'est l'examen auquel
le comité constitutionnel soumet les procès-
..,,..G.H,^1C
CONSTITUTION DB 1809. 77
verbaux ou « protocoles ■ des délibérations du
Conseil d'Ëtat, excepté, — comme on l'a vu, —
ceux qui conceruent les affaires étrangères et
militaires. Cette attribution, particulière à la
ConstitutioD suédoise, remonte à « l'ère de la
liberté » et elle représente la forme sous laquelle
fut introduite la responsabilité ministérielle. Par
cet examen du protocole, le Riksdag peut suivre
dans tous tes détails non seulement les actes du
gouverneoient, mais encore les déclarations et
propositions des différents conseillers; elle peut
rendre ceux-ci responsables et leur demander des
comptes au cas où ils auraient a^ contre la loi
et la Constitution ou n'auraient pas de toute
autre manière rempli leurs hautes fonctions avec
le zèle et l'babileté nécessaires. (Regeriogsform,
§§ 106 et 107^.
Nous avons déjà parlé de la part du Riksdag
dans la législation. En ce qui concerne la Banque
du royaume, il légiférait seul jusqu'à 1897 ; par-
tout ailleurs, excepté dans la législation dite
« économique », il partage à égalité le pouvoir
avec le roi. Pour ce qui est des affaires relevant
de la législation >< économique », qui regarde
exclusivement le roi, le Rîksdag ne peut « déci-
der autre chose ou plus que des propositions et
des vœux destinés à être présentés au Roi. »
..G.Kvsl^
78 HlSTOHIQUa DE LA CONSTITUTION.
(Regeringsform, § 89). Mais si le roi abandonne
au Bîksdag une question de cette catégorie, il
est procédé avec elle comine avec les autres
questions législatives.
Parmi les autres attributions du Riksdag, nous
remarquerons les suivantes.
Le Riksdag fixe lui-même ta date de sa pro-
chaine session ordinaire. Il devait se réunir pri-
mitivement tous les 5 ans, mais ce chiffre fut
toujours abaissé à celui de 4 ou de 3 ans, qui
marque à partir de 1846 la durée ordinaire d'une
législature. En 1865 on prescrivit que le Riksdag
se réunirait sans convocation spéciale le 15 jan-
vier de chaque année.
Le Riksdag désigne un procureur général
(« justitieombudsman ») qui doit, au nom de la
diète, exercer sur les actes de tous les juges et
fonctionnaires la même surveillance que le chan-
celier de justice au nom du roi. En outre, il est
permis à tout citoyen suédois de signaler au dit
procureur toutes les mesures administratives par
lesquelles il se juge lésé dans ses droits. Cette
institution est particulière à la Suède, et elle
caractérise très bien le type de constitution qui
s'est développé dans noire pays. — De plus, le
Riksdag charge une commission pour la liberté de
la presse (« tryckfrihetskommité ») de veiller au
..G.Hvsl^
CONSTITUTION DE 1809. 79
t nom du Parlement à ce que la dite liberté soit
observée. C'est eocofe une institution qui, dans
une certaine mesure, fait pendant au i< chancelier
de la cour » et plus récemment au >< chancelier
de justice » surveillant la presse au nom du roi.
Cette institution est intéressante à. ce point de
vue ; mais elle a perdu depuis longtemps toute
signification. — Enfin le Riksdag, par l'intermé-
diaire d'un jury parlementaire {opinioiisnàmd),
se prononce sur les actes de la Cour Suprême,
en ce sens que le jury en question peut, — par
une procédure très compliquée il est vrai, —
voter rexclusion de trois membres au plus de la
dite Cour : d'ailleurs ce cas ne s'est jamus pré-
senté jusqu'ici.
Il est clair que dans le cas où l'héritier du
trône est mineur, le Riksdag institue à la mort
du roi une régence, et qu'en cas de vacance du
trône il dispose librement de la couronne et de
la Constitution. Tout cela va de soi. Mais il faut
signaler comme particulièrement suédoise la dis-
position suivante : si le rot, étant parti à l'étran-
ger, reste pendant douze mois absent de son
royaume et ne revient pas malgré l'invitation qui
lui en est faite, ou bien encore si une maladie
l'empêche de remplir pendant le même espace de
temps ses fonctions gouvernementales, >< les états
80 HISTORIQUE DE LA CONSTITUTION.
du royaume prendront au sujet du gouveraemeat
de l'État les mesures qui leur paraîtront tes plus
utiles. » Nous retrouvons dans ce paragraphe
l'écho des expériences faites par le peuple suédois
au temps de Charles XII.
IV
LS CONSEIL d'état ET LES GARANTIES POLITIQUES
Comme il ressort de ce qui précède, le roi et
le Riksdag sont, d'après la Constitution, précisé-
ment ces deux copartageaats du pouvoir qui dans
le préambule du texte fondamental sont repré-
sentés comme s'adressant l'un à l'autre et
signant entre eux un contrat. Ils constituent la
volonté de l'État, tantôt chacun pour soi dans
des sphères difiérentes, tantôt ensemble sur un
terrain commun. Mais ils ne se trouvent jamais,
— excepté dans certaines circonstances soleo-
nelles, — en contact immédiat l'un avec l'autre '. î\
existe entre eux un intermédiaire qui est, comme
au temps du vieux Code Général, ie Conseil d'Étal
(Statsrâdet) ; mais ni sa composition ni surtout sa
1. Une exception a lieu dans les cas fort rares où le ro!
convoque un « comité secret » pour se concerter avec lui
sur d'importantes questions d'Etal (S M).
CONSTITUTION DE 1809. 81
situation ne sont plus les mêmes que celles de
l'ancien Conseil. Il n'est plus le tiers qui menace
d'empiéter sar les sphères d'action des deux
autres pouvoirs ; c'est comme l'organe et le servi-
teur de ceux-ci, que le Conseil d'État occupe,
d'après le droit moderne, sa place dans la Cons-
titution. Les conseillers d'État sont les hommes
de confiance du roi, qui les choisit et les congé-
die à son gré. Il doit écouter leurs conseils et
leurs remontrances, mais il u'est pas obligé de s'y
conformer; pourtant, comme nous l'avons vu, il
n'a aucune puissance effective sans la collabo-
ration des conseillers ou de quelque autre per-
sonnage responsahle.
Le Conseil d'État, sous la forme que lui impose
la Constitution de 1809, est une combinaison du
Conseil tel qu'il était dans tes anciens temps et
du secrétariat d'État de Gustave IIL C'est pour-
quoi il est plutôt un conseil qu'un gouvernement.
De ses neuf membres, deux seulement, le ministre
d'Etat pour les affaires étrangères et le ministre
d'État pour la justice, prennent chacun sa part
du gouvernement. Les autres (six conseillers
d'État et le chancelier de la cour) ne s'occupent
pas de l'administration du royaume et même ne
présentent pas de rapport sur les questions
traitées en Conseil d'htat, sauf celles relatives à
82 HISTORIQUE DE LA CONSTITUTION.
la loi fondamentale et à la liberté de la presse,
lesquelles revenaient au chancelier de la cour.
Toutes les autres questions sont confiées à. quatre
secrétaires d'État, qui même peuvent contresigner
les décisions du roi et endosser ainsi la même
-responsabilité que les conseillers d'État.
Comme on le voit, la Suède n'a en aucune
façon ni un conseil des ministres ni un gouver-
nement ministériel. Cet état de choses, si par-
ticulier à notre pays, s'est toujours maint;enu,
malgré la modification qu'on apporta en 1840 au
-fonctionnement du Conseil d'État, et qui en fît
un véritable gouvernement. Les ministres suédois
ne peuvent prendre de leur propre initiative au-
cune décision tant soit peu importante, mais
seulement préparer par des mesures convenables
les questions gouvernementales, et en outre sta-
tuer sur l'application des décisions prises en
Conseil d'État. Toutes les affaires gouvernemen-
tales, même les plus insignifiantes, doivent être
présentées devant le roi dans le Conseil d'État,
pour y être tranchées par lui seul. Nous avons
encore là une conséquence de cette idée fonda-
mentale de la Constitution suédoise, à savoir que
seuls le roi et le Parlement doivent détenir et
exercer le pouvoir de l'État.
D'autre part, les conseillers d'État (et les secré-
CONSTITUTION DE 1809. 83
laires d'État) sont responsables de leurs actes
devant le Riksdag en tant que conseillers du roi
et contresignat&ires de ses décisions. Bien qu'ils
n'appartiennent pas aux états mais au Roi, ils
garantissent pourtant devant les états tous les
actes accomplis par le roi. Cet organe respon-
sable devant le Parlement, et liant vis-à-vis du
Parlement le roi irresponsable, est le rouage le
plus délicat de la monarcbie coastitutionnelle ; c'est
une invention bien suédoise, résultant d'une expé-
rience gagnée au cours d'une histoire politique
longue et mouvementée.
Notons aussi la façon très curieuse dont cette
responsabilité est réglée : elle se présente sous
la forme d'un examen des protocoles du Conseil
d'État. Nous ne trouvons de disposition semblable
qu'en Norvège, et encore est-ce là un emprunt
fait directement à la Suède et peu à sa place dans
l'autre pays. Chez nous ce système se rattache à
l'absence de tout gouvernement ministériel. Ce
ne sont pas les actes des conseillers d'État, niais
leurs délibérations qui sont l'objet propre de la
responsabilité, tout simplement parce qu'ils
n'accomplissent pas d'actes gouveruementaux
(excepté dans le cas d'un gouvernement intéri-
maire). Ils se contentent d'appuyer ou de décon-
seiller ces actes, et éventuellement de les contre-
..G.Kvsl^
84 HISTOBIQUK DE LA CONSTlTUTtOK-
sï^ner. C'est pourquoi il est prescrit dans la loi
foDdamenlale qu'un protocole sera teuu dans le
Conseil d'État et que les conseillers présents
auront à répondre non seulement pour leurs
déclarations mais encore pour leur silence; et
c'est pourquoi tes protocoles de ce genre sont mis
à la disposition de la commission constitution-
nelle du Riksdag. Ainsi une particularité en ap-
pelle une autre,
La responsabilité peut, en cas de besoin, être
appliquée de deux manières. Au point de vue
juridique elle a lieu par l'intermédiaire du
comité constitutionnel et du procureur général
de la diète, devant une Haute Cour composée de
fouctionnaires et réunie d'une façon particulière.
La responsabilité politique est mise en œuvre,
d'après la Constitution (§ 107), par le Riksdag
lui-même au moyen d'une requête présentée au
roi à l'eSet de renvoyer tel ou tel conseiller
d'État, — requête à laquelle le roi peut déférer
ou non, suivant qu'il le juge à propos. Ces deux
manières de demander des comptes aux conseil-
lers d'État sont par la suite sorties de l'usage, à
mesure que devenait plus étroit le contact entre
les ministres et le Parlement : leurs relations
mutuelles sont en effet devenues plus intimes '
avec le temps, en partie comme conséquence da
..,,..G.K,^1C
CONSTITUTION DE 1809. 85
droit accordé aux ministres de prendre part aux
discussions du Riksdag (depuis 1860), en partie
gr&ce à l'institutioD des Chambres annuelles
(depuis 1866). Au lieu de cela, voici le procédé
actuellement employé : le comité constitu-
tionnel ou bien, — sous forme de s réserva-
tion 11, — l'un de ses membres dénonce au Riks-
dag- les actes jugés illégaux, — ce sont d'or-
dinaire de simples bagatelles, — et il s'ensuit
tout simplement ce qu'on appelle une k discussion
de décharge » [dechargedebatl), laquelle n'aboutit
généralement â rien.
Mais en dehors de cette garantie pour le main-
tien de la Constitution, pour la liberté et la sécu-
rité générales, la Forme de gouvernement signale
encore une autre garantie, à savoir la liberté de la
presse. Dans les constitutions dVutres pays, la
liberté de la parole et de la presse est ordinaire-
ment considérée au point de vue exclusif de l'indi-
vidu, comme un de ses droits personnels. Or il n'en
est pas question dans l'acte d'habeas corpus de
la Constitution suédoise (§ 16), lequel est emprunté
directement à l'ancien serment royal. En revan-
che, un paragraphe spécial (§ 86) est consacré â
la liberté de la presse comme ^ un des éléments
essentiels de la Constitution ; et la mAme concep-
tion s'exprime aussi par ce fait que le règlement
86 historique: dk ia, constitution.
sur la liberté de la presse est une des lois fonda-
mentales du royaume. Les fondateurs de la Cons-
titution de 1809 ont affirmé avec insistance que
ta liberté de la presse était une des meilleures
garanties du régime nouveau, non seulement
comme une protection pour la liberté et les droits
des citoyens, maïs avant tout comme un moyea
pour contrôler le gouvernement du pays, et pour
conformer à la volonté populaire la volonté poli-
tique des deux éléments du pouvoir, le Roi et le
Parlement. C'est pourquoi le paragraphe 86 en-
tend par la liberté de la presse, non seulement
que tout citoyen suédois aura le droit de publier
des écrits sans aucun obstacle de la part des
pouvoirs publics et sans avoir de compte à en
rendre excepté devant une juridiction régulière,
mais encore que tous les actes et protocoles
publics, quelle que soit leur nature, pour-
ront être publiés, à l'exception de ceux
du Conseil d'État, de la Banque du royaume
et du Comptoir de la dette publique, les-
quels devront être secrets et seront examinés
seulement par le Riksdag. — Celte liberté de la
presse, introduite d'abord en 1766, mais plus
tard limitée puis supprimée, est une des pierres
angulaires de l'édifice que les hommes de 1809
construisirent. Le graud jour de la publicité est
CONSTITUTION DE 1809. 8*7
la meilleure garantie de lu liberté et le moyen le
plus sûr pour contrôler le gouvernement d^un
pays. Dans aucune constitution ce principe n'a
été compris aussi clairement ni exprimé avec plus
de force que dans la constitution suédoise. Que
la liberté de parole, à côté de ses avantages, ait
aussi de graves ÎDCOnvénieuts, par exemple quand
elle est mise au service d'une agitation poliliqiie,
c'est là ce qu'on ne pouvait guère prévoir au
commencement du XIX* siècle.
Cependant la première de toutes les garanties
pour la solidité de la nouvelle Constitution ainsi
que pour le maintien de la liberté et des droits
des citoyens, on la trouve en somme dans la Cons-
titution elle-même et dans sa structure particu-
lière. Le pouvoir n'est pas confié sans par-
tage à une seule maîn. Il existe deux pouvoirs
qui se limitent mutuellement et entre lesquels
l'exercice de la puissance publique est réparti de
façon à rendre impossibles tout despotisme et
toute violence. Telle est la pensée directrice qui
se manifeste dans l'œuvre de 1809 et qui a été
d'ailleurs fortement exprimée par les auteurs de
la Constïtuti»n. Nous y reviendrons encore loat
à l'heure.
It nous reste seulement à ajouter que toute
modification de la Constitution, et en général les
..,,..G.Kvsl^
88 mSTOBIQDB DB LA CONSTITUTION.
changements apportés aux lois fondamentales
exigent ]'adhésioD du roi et des quatre états
(aujourd'hui des deux Chambres), — l'assentiment
du Rïksdag étant donné deux fois, dont ladernière
immédiatement après de nouvelles élections.
3,Cooi^le
CHAPITRE IV
Moditicationa postérieures. Caractère
de la CoDstitation.
NOUVELLES DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES ET
HEFONTE INTÉRIEURE DE LA CONSTITUTION
La Constitution de 1809 reste encore solide sur
ses bases, malgré les modifications considé-
rables subies par elle au cours du siècle qui vient
de finir. Nous avons déjà eu l'occasion de signaler
quelques-unes de ces retouches ; nous allons exposer
brièvement les plus importantes et les plus
étendues.
11 faut placer en première ligue la réforme
accomplie dans le mode de représentation, réforme
par laquelle le vieux Riksdag à quatre « états »
est devenu un moderne Riksdag à deux Chambres,
Après toutes sortes d'amendements destinés à
élargir les cadres des anciens états et à y faire
entrer des catégories nouvelles d'individus, la
..G.Kvsl^
00 LA CONSTITUTION SUÉDOISE.
réforme définitive eut lieu en 1865 et l'on adopta
les principes suivants. Les deux Chambres, sans
tenir compte de la différence numérique, sont
placées sur le pied d'égalité complète. La Cham-
bre haute (150 membres) est nommée par les
conseils généraux [landsling], qui sont les repré-
sentations communales de degré supérieur, et
dans les grandes villes par les conseillers muni-
cipaux ; ses membres sont choisis dans les classes
aisées de la société' et élus chacun à part pour
une période de 9 ans. Les membres de la Cham-
bre basse sont actuellement au nombre de 230,
dont 150 pour les campagnes et 80 pour les villes ;
ils sont nommés dans des circonscriptions élec-
torales, — différentes pour les villes et pour les
campagnes, — parmi tous les individus qui jouis^
sent du droit de vote conformément à certaines
prescriptions censitaires ' ; leur mandat est de
1. Pour être,éIigiblo à la Chambre haute, il faut, en dehors
des aptitudes civiques ordinaires, 6tre ftgé de 3S ans au
moins et posséder ou bien un revenu annuel minimum de
U 000 couronnes (B 600 fr.) ou bien une propriété immobilière
valant au minimum SOOOO couronnes {113000 fr.).
2. Pour être électeur, il faut, — en plus des conditions
ordinaires, — avoir 21 ans accomplis (25 ans ponr être éli-
giblei et posséder soit un revenu d'au moins 800 couronnes
(1120 fr.), soit une propriété foncière valant au moins
1 000 couronnes (1 400 fr.), ou bien encore avoir pria à ferme
pour 5 ans ou pour la vie une exploitation agricole de
..G.Hvsl^
MODIFICATIONS RÉCENTES. 91
trois ans. Lès membres de la seconde Chambre
doivent appartenir aux circonscriptions électo-
rales ; à la différence de ceux de la première Cham-
bre^ il» touchent une indemnité parlementaire. Les
membres du Riksdag représentent chacun isolé-
ment le peuple tout entier, et suivant l'ancien
droit suédois, ils ne sont liés ni par un mandat
impératif ni par d'autres instructions.
L'organisation des comités ainsi que les for-
malités requises pour adopter une décision restent
dans leurs traits généraux les mêmes qu'au-
paravant. Seulement, au lieu du vote dans le
comité renforcé pour trancher les questions de
dépenses et d'impôts, etc. . ., au sujet desquelles
l'entente était impossible, on a adopté le système
du vote général des deux Chambres. Le Riksdag
entre en session le 15 janvier de chaque année
et dure pendant quatre mois.
(k>nsidérée en elle-même et au point de vue de
6 000 couroiines (â 400 fr.) au minlmuni ; il I&ut également
avoir payé ses contributions à l'État ei ù la commune. —
La statistique de 1902 nous apprend qu'avec ce système
censitaire, 34,3 "l- seulemeot de la population masculine
au-dessus de 21 ans jouissent du droit de vote. Eu fait
cependant, le nombre des citoyens remplissant les condi-
llons censiiaires et ayant un revenu de 600 couronnes est
beaucoup plus considérable que ne l'indique la statistique
offlclelle; mais beaucoup se soustraient à la taxation et
perdent ainsi le droit de voter.
..G.Kvsl^
LA CONSTITUTION SUÂDOtSE.
irieur de la représentation, cette
ementaire constitue une réorganisa-
lortante. En fait elle n'est pas aussi
; elle est menue beaucoup moindre
l'imagine couramment : c'est qu'en
le suédois continue & être représenté
;s éléments sociaux, bien que ceux-ci
nt plus entre eux dans les mêmes
Les paysans constituent actuellement
. le plus fort : il y en a 100 dans la
mbre. Ainsi la composition du Riks-
'tement démocratisée. Tel est au fond
;ement qui s'est produit. Mais dans
imune, pour ceux qui ne voient guère
ution que ce qui a trait aux luttes et
litiques du jour, — c'est-à<dire avant
: de représentation et au droit de vote,
le introduite en 1866 dans la re-
parlementaire apparaît comme une
lète de la Constitution suédoise, alors
cette réforme ne l'atteint guère direc-
point de vue du droit, les relations
X pouvoirs, le roi et le peuple, n'ont
aucune espèce de modification ; et
ncipe de l'égalité juridique des deux
semble même qu'en fait la réforme
îi- aucun, ébranlement dans l'édifice
..G.Kvs'^
MODIFICATIONS HâCRNTES. 93
coDStitutioiiDel . Car ce partage de la représeu-
tatioQ en deux Cbambres placées exactement au
même niveau et pourtant dififéreittes, forme, ainsi
que nous aurons l'occasion de le montrer plus lon-
guement, l'un des principes fondamentaux du type
de constitution qui s'est développé en Suède.
La première Chambre est aussi la création la
plus remarquable dans la nouvelle organisation
du Riksdag ; elle nous offre un type supérieur à
celui de presque toutes les autres Chambres
hautes. Elle émane entièrement en effet du
suffrage populaire, aucun de ses membres ne
siégeant par exemple en vertu du choix du
monarque ou d'un droit héréditaire ; d'autre part,
elle a dans les assemblées provinciales considérées
comme collèges électoraux un fondement orga*
nique solide où elle puise une grande force ; enfin,
la Constitution la met sur le pied d'égalité complète
avec la Chambre basse (sauf au point de vue numé-
rique), car, comme celle-ci, elle a dans ses attri-
butions le règlement de toutes les affaires, y com-
pris les questions financières. Ces principes n'ont
été que peu observés ou même ne t'ont point été
dans l'organisation de la Chambre haute des autres
pays; c'est pourquoi celte dernière joue partout un
rôlH inférieur à celui de la Chambre basse, sauf aux
États-Unis et en Suisse où ont prévalu des principes
9i Là CONSTITUTION SUÂDOISB.
esseatiellemeiit anato^es A ceux qui ont triomphé
en Suède. Toutes ces raisons font que la première
Chambre est maintenant le plus ferme appui de
la Constitution, depuis que le pouvoir royal ne
peut plus bien soutenir le r61e que la Constitu-
tion lui a confié.
De ce qui précède il ressort en outre que l'ins-
titution , aujourd'hui immisente , du suffrage
universel pour la seconde Chambre, ou même
une réforme de la première Chambre, si un jour
elle devient nécessaire, n'auraient que peu d'in-
fluence immédiate sur la structure de la Consti-
tution, en admettant toutefois que l'égalité com-
plète soit maintenue entre les deux Chambres et
que le système dualiste de la représentation lie
soit en rien ébranlé.
La modification constitutionnelle qui est la
plus frappante ensuite, la réforme du Conseil
d'État (1840) mentionfiée plus haut, consolidée
ultérieurement en 1876 par la nomination d'un
ministre d'État comm» président, n'a en rien
altéré les fondements de la Conslitution. Lorsque,
lors de la réforme ci-dessus mentionnée, les se-
crétaires d'Etat furent supprimés et que tous les
conseillers d'Etat à l'exception de trois devinrent
chacun chef de Leur département e( leur propre
rapporteur au Conseil d'État, le but visé était
MODIFICATIONS RECENTES. ^S
d'obtenir une collaboration plus intime entre le
législatif et l'exécutif, entre le gouvernement et
rudministration. Ce résultat fut atteint, mais en
même temps les liens se relâchaient entre les
membres du gouvemementj dont chacun, accablé
par la besogne, s'absorbait désormais dans les
affaires de son propre département'. C'est ft ce
' mal qu'on voulut remédier par la réforme de
1876 qui devait donner au gouvernement à là fois
une direction et une plus grande force de cohésion.
Il pourrait sembler à un observateur étranger
que par cette réforme le Conseil d'État suédois
fut transformé en un ministère, en un cabinet au
sens européen. Il est possible que même en Suède
beaucoup s'y soient trompés. Mais en réalité il
n'y a pas maintenant plus qu'auparavant de gou-
vernement ministériel sous aucune forme ni de
gouvernement de parti, conditions sans lesquelles
il n'est point de cabinet au sens où l'on entend ce
mot en Europe. En augmentant les attributions
des conseillers d'Etat et en donnant au Conseil
même une organisation plus solide, on n'avait
pas pour but d'en faire un organe pour le gouver-
nement de parti, mais, au contraire, de le ren-
1. Le Conseil d'Élat fonctionne aussi comme tribunal ad-
ministratif jugeant en dernière inelance, ce qui lui impose
beaucoup de travail.
=,Coogk
CONSTITUTION SUÉDOISE.
t plus propre ft résister aux empié-
.iksdag. Chacun sait qne ce but
eiot. Il faut en chercher la raison
t dans les Riksdags qui depuis
réunis tous les ans, mais encore
tre réforme dont les conseillers
l'objet. En 1860 les membres du
furent autorisés à assister aux
u Riksdag où, sauf de rares excep-
ient pas de siège. Cette innovation
de faciliter les relations entre les
le Roi et le Itiksdag, et de per-
i^ernement de défendre devant les
prétentions et ses projets. Cet
lèrement acheté. Car l'effet immé-
lesure est que le pouvoir exécutif
ilus perd Tautonomie qui lui est
evient dépendant du Riksdag. La
10 est au fond en contradiction avec
lODstitution et la nature des choses,
[ui ne peut diriger les travaux de
>n nationale n'a rien à faire à la
rmes, quelque importantes qu'elles
•,n soi, ont exercé sur la structure
ioQ une influence encore moindre
es précitées. Telles furent les non-
..G.Hvsl^
MODIFICATIONS RÉCBNTBS. 97
velles lois municipales de 1862, par lesquelles
l'ancienne autonomie paroissiale revêtit de noa-
velles formes, et l'organisation du synode (1863)
qui donna à l'Église suédoise une représentation
autonome et même, chose à noter, le droit de-
veto contre le roi et le Rîksdag en ce qui con-
cerne les questions de législation ecclésiastique.
C'est encore là une conséquence naturelle du
principe constitutionnel de la séparation des pou-
voirs. Enân on peut noter comme innovation que
des questions se raitachant à la législation écono-
mique royale sont assez fréquemment réglées
selon la procédure législative commune au roi et
au Riksdag. Cette restriction des droits du roi
d'une part est d'ailleurs compensée par «ne
extension de ces mêmes droits d'autre part'.
Ce serut pourtant une erreur de s'imaginer
qu'au cours du dei'nier siècle il ne se soit pas
produit des modifications très importantes qui
touchent le fondement de la Constitution, le rap-
port entre les deux pouvoirs et leur situation réci-
proque. Mais ces modifications, contrairement à
1. C'est ainsi que la loi municipale, la loi criminelle mili-
taire et la dernière loi sur la banque d'Etat, ontétésoumides
à la4procédurecommune»eD vertu du g ST. Mais d'un autre
côté on s'en remettait en même temps au roi du soin de ré-
gler certaines (luesiions de nature économique, sanitaire,
sociale, etc. que l'évolution présente sans cesse.
s
..,,..G.Kvsl^
98 LA CONSTITOTION SUÉDOISK.
celles dont nous parlions plus haut, se firent sans
bruit, et la plupart échappèrent à l'œil de la
foule,; leurs causes, surtout, restèrent cachées.
Ces causes résident en effet dans les conséquences
involontaires de dispositions visant un tout autre
but (par exemple l'accès des conseillers d'État au
Riksdag; ou les sessions annuelles de cette assem-
blée), conséquences qui dérivent de la logique
même des choses, le plus souvent ignorée des
auteurs de ces mesures et à peine soupçonnée
par ceux qui les appliquent. Ces causes jouent
dans la vie politique et dans l'évolution des cons-
titutions le même rôle que les forces géologiques
lentes dans la formation de la croûte terrestre.
Les modifications séculaires de l'écorce du globe,
qui échappent souvent aux yeux des vivants,
surpassent de beaucoup dans leurs effets les
ébranlements brusques causés par les tremble-
ments de terre. De même, des générations
passent sans qu'on remarque les causes politiques
et leurs effets, puis un beau jour les yeux
s'ouvrent et on constate qu'un grand changement
s'est produit, bien plus profond que les réformes
faites au milieu des discussions et du vacarme.
Cette transformation sera mieux mise en lumière
par l'étude que nous ferons plus loin du parle-
mentarisme suédois.
=,Cot)j^lc
C&RACràRE OÉNiiBAL.
U
CABACTtRB GÉNÉBiL DE LA CONSTITUTION
Le partage du pouvoir entre le roi et le Riksdag,
voilà en deux mots te trait fondamental de la Cons-
titution suédoise. Partout on voit ce caractère
ressortir avec une grande netteté. Nous le consta-
tons tout d'abord dans la délimitation des diffé-
rentes attributions du roi et du Riksdag ainsi
que dans leur coopération sur d'autres domaines.
La vie politique est pour ainsi dire partagée en
zones où les deux pouvoirs agissent séparément ou
de concert. Ce même principe se manifeste encore
dans le remarquable parallélisme des institutions
et des compétences : le Statskontor, le comptoir
des finances d'État qui dépend du roi, et le Riks-
gAldskontor, le comptoir de la dette publique qui
dépend du Riksdag — le Justitiekansler, le pro-
cureur général du roi, et le Justitieombudsman,
le procureur général du Riksdag; — de même en
ce qui concerne la surveillance de la liberté
de la presse, la sanction des lois, etc.
La Constitution suédoise est sans doute tout à
fait originale et elle diffère beaucoup de celles
qu'on trouve dans le reste de l'Europe. Elle est
..G.Kvsl^
100 LA CONSTITUTION SUEDOISE.
nationale et historique et cepeodant elle a revêtu
une forme moderne. Des considérations historiques
ci-dessus il ressort avec une grande clarté que la
Constitution suédoise est certainement une vieille
Constitution historique, en ce sens qu'elle est
l'aboutissement d'une évolution plusieurs fois sécu-
laire. Elle a ainsi tous ses points d'appui dans le
passé. Mais cet aperçu historique nous a fait voir
également qu'elle est sortie comme un produit
vivant de cette évolution et non comme un assem-
blage hétérogène des débris d'anciennes consti-
tutions et de principes juridiques surannés. Au
contraire, la Constitution de 1809, tout en conser-
vant les traits nationaux, est une constitution
éminemment nouvelle, et cela de deux façons.
Eu premier lieu, elle est en opposition directe avec
les deux régimes qui t'ont précédée immédiate-
ment, l'autocratie royale et le despotisme des
états. D'autre part, cette Constitution est nouvelle
en ce sens qu'elle est une œuvre pleinement
consciente et intentionnelle. En particulier le
partage du pouvoir entre le roi et le Riksdag est
le fruit d'une mûre réflexion et d'un dessein bieu
arrêté. Le problème consistait à trouver un régime
qui à l'avenir rendu impossible tout abus de pou-
voir, qu'il vint du roi ou du Riksdag. La solution
de ce problème suivant des principes nationaux
CARAcniBE oénAral. lot
donna la CoDstitution que nous avons aujourd'hui.
Car le partage du pouvoir, ou, comme on
s'exprimait alors, ■ a limitation réciproque des
pouvoirs politiques » est, — ainsi raisonnaient les
hommes de 1809, — la seule manière d'en empo-
cher l'abus.
La responsabilité ministérielle^ qui est une
garantie contre le prince, laisse l'Ëtat sans pro-
tection contre le Riksdag ou contre la puissance
populaire. Seulement, si le pouvoir est partagé
entre le roi et le Riksdag, les deux pouvoirs sont
limités et par là-mème se trouve assurée la liberté
de tous. Les législateurs de 1809, guidés par
leurs propres expériences, se rencontrèrent avec
Montesquieu, ('ar la vérité impérissable qui se
dégage de la politique de ce grand Français est
que le partage du pouvoir est le vrai palla-
dium de la liberté civile et politique. C'est
là aussi ie témoignage de l'histoire, non seule-
ment de notre histoire, mais de celle de tous les
peuples et de tous les temps. Le pouvoir sans
partage, qu'il soit aux mains d'un prince ou d'une
aristocratie ou de tout le peuple, met infaillible-
ment la liberté en danger et conduit à l'oppres-
sion. De nos jours on a souvent l'occasion de le
constater : en Russie d'une part, et d'autre part
dans les États à gouvernement démocratique, et
102 LA CONSTITUTION SDÉDOISB,
dans ce cas, ordinaicement sous la forme de Top-
pression de la minorité par la majorité. La
tyrannie d'une majorité est daiis la vie politique
moderne un phénomène habituel. Or, cette ty-
tyrannie est d'autant plus redoutable que de
uos jours la toute-puissance de l'État devient de
plus en plus menaçante. Nous nous rapprochons
de plus en plus de la conception qu'avaient les
anciens des droits de l'État sur Tindivîdu. Il y a
là pour la liberté un grand danger que l'on sçnt
parfaitement. C'est pour cela même qu'on a pris
différentes mesures pour parer aux violences d'un
parlement absolu et d'une majorité tyrannique.
Ce genre de précautions nous apparaît sous sa
forme la plus naïve dans la Déclaration des droits
de l'homme. Certes cette manifestation était
peut-être tout autant une protestation contre
l'oppression sous laquelle on gémissait, — et cela
particulièrement en France, — qu'une protection
contre tout abus du pouvoir ultérieur de l'État.
Mais il est certain que les auteurs de )a Consti-
tution de 1791 s'imaginaient avoir trouvé une
garantie réelle contre toute espèce de tyrannie
dans ce prioeipe des droits inaliénables de l'homme
qu'ils posaient en tète de la Constitution. Combien
cette garantie était précaire, on ne devait que
trop s'en apercevoir un an à peine après cette
,.VsIc
C&RACTÂBE O^ÂRAL. KH
proctHRiatioD . Il est donc imprudent de placer sa
confiaoce dans de telles déclarations, encore que
rédigées sous forme de textes de loi*.
D'une tout autre efficacité sont les moyens et
expédients de différents genres auxquels on a
recouru d'autre part. Par exemple, on a placé la
Constitution sous la protection des tribunaux,
comme aux Etats-Unis ; on a rendu plus difûcile
la modification de la loi fondamentale et on a fait
rentrer la loi civile dans la Constitution, comme
dans les différents États de l'Union ; d'autre part,
OD a adopté la représentation proportionnelle qui
de plus en plus semble gagner du terrain. Notons
encore le référendum en Suisse et dans les États
de l'Union.
Mais la plupart de ces mesures sont, précisé-
ment quand on en a le plus grand besoin, tout à fait
impuissantes. Tant que les hommes seront hom-
mes, tant que leur esprit et leur cœur ne change-
ront pas, la majorité ne respectera jamais la
minorité chaque fois qu'il se présentera un conflit
sérieux. Jusqu'à nouvel ordre le partage du pou-
voir entre les différents détenteurs de la puissance
de l'État, comme entre les deux Chambres, est le
1. Voir A. RsMBiN dans son exposé, d'ailleurs si remar-
quable, iatitulé : Ëlëmeals de droit constitutioanel
français et compara, 3* édition, 1903, p. 3S2 et suiv.
..G.Kvsl^
(04 LA CONSTITDTION SUÉDOISE.
rempart le plus sûr de la liberté individuelle'.
L'exception à cette règ:le que semble faire le
remarquable gouvernement de l'Angleterre est
plus apparente que réelle. Car même dans ce
cas il y a deux détenteurs du pouvoir, ne l'exer-
çant pas. en même temps, il est vrai, mais se
relevant alternativement, selon une tradition spé-
ciale aux partis anglais.
Mais si un tel partage du pouvoir, considéré
d'une façon générale, est la meilleure sauvegarde
de la liberté, il n'en résulte nullement que la
manière dont ce partage s'effectue dans la Cons-
titution suédoise est la meilleure qu'on puisse
imaginer, ou que ce système ne présente aucun
autre genre d'inconvénients. Les législateurs de
1809 n'avaient pas de modèle à imiter, et d'autre
part ils étaient liés par les institutions existantes
et les expériences du passé. Et comme les der-
nières impressions sont toujours les plus fortes,
on en tint compte dans certains cas plus qu'on
n'aurait dû le faire. C'est ainsi que les abus que Gus-
tave m avait faits des grandes douanes maritimes
firent placer ces douanes sous l'autorité presque
exclusive des états. Il en fut de même de la dette
1. Dans l'ancienne Rome on avait aussi compris l'impor-
tance du partage du pouvoir et on l'avait réalisé comme
nulle part ailleurs.
..Co^k'
c&ractère uAn^ral. 105
publique qui, comme la Banque du Rnyaume,
fut mise complètement sous leur surveillance.
Dans d'autres cas, des coutumes ou des concep-
tions anciennes conduisaient à des résultats iden-
tiques. Par exemple, la question des impôts en
général et de leur fixation n'est pas réglée par
une loi due à la collaboration du roi et du
Riksdag, mais par une décision de celte seule
assemblée agissant comme autrefois tes ordres
agissaient séparément.
Mais ce qu'il y a de plus grave, c'est que dans
cette répartition des pouvoirs le Conseil d'État,
qui est l'organe même du gouvernement, fut laissé
en dehors. On fit le partage de façon à ne rien
lui donner en propre. Le roi et les états prirent
tout et le Conseil d'État devint un organe n'ayant
que voix consultative, sans autonomie et sans
autorité. Ce fut I& une conséquence de la désor-
ganisation du Conseil en 1680. Autrefois on avait
eu en Suède un Conseil gouvernant et même un
gouvernement de cabinet. Mais la négligence
dont le Conseil se rendit coupable sous la régence
de 1660-1672, ainsi que le mécontentement contre
la noblesse l'avaient rendu à un haut degré impo-
pulaire. C'est pour cette raison qu'il fut facile
dans les temps qui suivirent et où alternèrent
l'absolutisme et le gouvernement par les états,
lOfi LA CONSTITUTION SUÉDOISE.
d'ôter toute indépendance au Coaseîl. Aussi,
lorsqu'on en vint en 1809 au grand règlement de
comptes entre les deux détenteurs du pouvoir, qui
depuis cent ans avaient joui tour à tour de la
souveraineté absolue, le Conseil fut-il laissé de
côté, ce ([ui d'ailleurs avait été son lot depuis
longtemps. Le nouveau Conseil d'Ëtat fut simple-
ment une Cbaïubre consultante au service du roi
et pour les états une garantie contre ce dernier,
mais rien de plus. Les réformes de 18i0 et de 1876
n'ont même apporté aucune modification sur ce .
point. Le Conseil d'État suédois est certainement
par là môme devenu un gouvernement eu ce qui
concerne l'administration, mais non pas pour le
reste. Le Conseil d'Ëtat en tant que gouverne-
ment est toujours un simple instrument entre les
mains du roi, sans autorité propre.
Tant que le roi comprit ses droits et ses devoirs
selon l'esprit de la Constitution et gouverna lui-
même te royaume, ceci fut de peu d'importance.
Mais sous l'influence de l'esprit du temps la
royauté depuis 1809 semble avoir subi les
atteintes de la vieillesse. Elle semble ne plus
avoir la force de tenir le r6le qui lui avait été
alors assigné. £n même temps le Conseil d'État,
par suite des causes mentionnées plus baut (p. 96)
est tombé sous l'influence de la représentation
..G.Kvs'^
CjMt&ClàRB GÉNÉRAL. l07
nationale, ce qui ne s'accorde pas avec le reste
de la CoDstituUon. Le pouvoir exécutif court
le risque de perdre sa force et en méine temps
le seotiment de sa responsabilité.
Voilà donc le point faible de la Constitution
actuelle de la Suède et ce qui a le plus de chance
de la faire évoluer au-delà de ses propres limites.
Mais la faute n'en retombe pas tant sur les hommes
de 1809 que sur ceux qui, après eux et sans avoir
une claire comprébeosion de la véritable nature
de t'œuvre, l'ont remaniée.
Mais si le type de la Constitution suédoise ne
ressemble à aucua autre et si pour cette raison
il a été méconnu à la fois chez nous et à l'étran-
ger, il n'en est pas moins tout aussi moderne que
les autres types de Constitution eu vigueur et
répond aussi bien qu'eux à l'idée de l'État uni-
taire moderne. Les critiques qu'on a coutume
d'adresser à la Constitution suédoise et qui revien-
nent à déclarer que le régime suédois a conservé
un caractère médiéval*, sont dépourvues de tout
fondement réel. Car le dualisme qui s'y manifeste
n'est pas, comme on le croit, une survivance du
temps où l'État était effectivement partagé entre
I. Ainsi surtout G. Jbll[nbk, ud des plus émloents
parmi les juristes allemands qui se consacrent à la science
politique ; Allgemeine StaaUlehre, 1900, p. 477. 488, 639.
..G(K)^|C
108 LA. COHSTITDTIOH SUdDOISE.
le monarque et les étals et oi\ on n'avait pas
encore compris que l'unité de l'État dominait l'un
et les autres. Ces jugements et toutes les appré-
ciatious analogues proviennent d'une part de
l'ignorance, bien naturelle chez des étrangers, du
passé de la Suède, et d'autre part, d'une méconnais-
sance de la véritable nature du dualisme suédois.
Jamais en Suède, même à l'époque la plus
aristocratique du moyen âge, ne s'est réalisé le
dualisme dont parle Jellinek, et qui par exemple
en Allemagne et en Pologne donnait aux états
leur armée et leur administration propres à côté
de celles de l'empereur ou du roi ; jamais en
Suède on n'a connu ce dualisme qui se présente
dans les pays où la féodalité a atteint son plein
développement. La Suède n'a pas eu d'aristocra-
tie de ce genre, et c'est d'une telle aristocratie
que dérive le dualisme dans l'État médiéval. Mais
d'autres circonstances encore s'opposaient à cette
évolution vers le dualisme. Le fait que la Suède
était composée de plusieurs royaumes lui donna
dès l'origine dans l'esprit des hommes une exis-
tence propre, indépendante de celle de ses élé-
ments constituants. Le mot bien connu du Code
général : « Pour toute la Suède il ne peut y avoir
qu'une seule couronne et qu'un seul roi, « et le
passage suivant : c Le roi ne doit pas diminuer
..,,..G.K,S1C
CABACTÂBE QÉNltRAL. (09
les (îroits de la couronne au profit d'un autre
roi M, montrent fort bien comment dès le moyen âge
on concevait le royaume et la royauté^ — l'un
comme l'État placé au-dessus de tout et l'autre
comme une institution dans l'État. Et depuis les
choses sont restées ce qu'elles étaient alors (1350).
En Suède, l'État ou le Royaume ou la Couronne,
comme on l'a appelé, a toujours été considéré
comme un tout supérieur dans lequel la royauté
de même que les « états » d'origine plus récente
entraient simplement comme organes' chargés
d'exercer le pouvoir. Cette conception, spéciale-
ment en ce qui concerne le roi, se manifesta très
clairement sous Gustave-Adolphe. Elle a bien pu
être temporairement obscurcie au temps où l'ab*
solutisme célébrait sa propre apothéose, mais la
réaction qui suivit prouve que cette conception
subsista. Ainsi en Suède a toujours prévalu celte
idée, que nous aimons à appeler moderne, de l'Etat
et de ses organes subordonnés exerçant le pouvoir.
Pour ce qui est du duaUsme, lequel se trouve
en fait dans la vie poUtique de la Suède, il ne
s'applique pas à l'État, et par suite il ne s'ap-
plique pas non plus à la puissance de l'État, mais
à la Constitution, c'est-à-dire à la règle juri-
dique suivant laquelle se crée la volonté de l'État
et s'exerce la puissance de l'État. Cette volonté
..G.Kvsl^
MO LA CONSTITOTiON SOÉDOISS.
et cette puissance sont unes et indivisibles comme
l'Etat lui-même. Pour qu'il y ait unité dans l'Ëlat
il faut non pas, comme l'enseignent les théories
allemandes, un monarque souverain ou un peuple
souverain, mais seulement la conscience vivante
de cette unité. Or l'unité de l'État s'accommode
fort bien d'un état de choses dans lequel les insti-
tutions ou les personnes juridiques qui créent la
volonté de l'Etat et exercent la puissance de l'État
sout au nombre de deux : Sa Majesté Royale et
le Parlement. Ce cas n'a d'ailleurs rien de spécial
à la Constitution suédoise. Nous le retrouvons
dans toutes les monarchies constitutionnelles, bien
que les théories politiques ne se soient pas encore
décidées à l'admettre. Par contre, les dispositions
suivant lesquelles l'un et l'autre pouvoir sont
appelés à créer la volonté d'État, ne sont pas les
mêmes en Suède et dans les autres monarchies.
Le dualisme suédois rappelle beaucoup, comme
nous le verrons plus loin, le partage du pouvoir
tel qu'il se présente dans les États-Unis. Or, de
même que dans la Constitution de la grande répu-
blique, le dualisme ou la séparation des pouvoirs,
comme on l'appelle là-bas, n'a rien à faire avec
le moyen âge ; de même la Constitution suédoise
actuelle n'a rien de commun avec la forme mé-
diévale de l'État.
■.8.liMD.COOl^lC
II
LE PARLEMENTARISME EN SUÈDE
ET DANS LES AUTRES PAYS
A CONSTITUTION PARLEMENTAIRE
=,Coogk
CHAPITRE V
Les formes modernes de l'Ëtat.
Absolntisme. — Monarchie coDStitntioDDelle.
Parlementarisme.
I
LES DIPFÊBEKTKS FORMES d'ÉTAT
Aucun chapitre de la science politique n'a donné
lieu à une collection aussi bigarrée d'opinions
diverses que le chapitre qui traite des formes poli-
tiques et de leur classement. Chaque auteur pour
ainsi dire a sa façon personnelle de les grouper.
Cette diversité a plusieurs causes : d'abord, chaque
Etat est en réalité unique en son genre ; même
dans les Hmites du même lype, on ne trouve pas
deux exemplaires qui soient su perposabi es. Autant
d'États, autant de formes d'État ou de nuances
difiérentes de la même forme. Mais à cela s'ajoute
qu'on n'a pas assez distingué comme il convenait
entre l'État d'une part et d'autre part la forme
d'Élat, autrement dit la constitution ; de là un
grand désordre dans les idées. Les États en eflet
llj LES DIFFiRGNTES FORMES D'IÏTAT.
peuvent se partager d'après iid grand nombre de
systèmes ou de critériums ; par exemple on les
divise d'après l'organisation sociale en États pri-
mitifs sans distinctions sociales, en Ëtats avec castes
ou ordres, en Ëtats modernes avec classes ; on on
les classe d'après.ia date et le degré de civilisation
(régime orientât, gréco-romain, État du moyen
âge et État moderne), d'après leur nature d'États
unitaires ou d'États fédératifs, etc., etc. Or toutes
ces distinctions portent sur l'État considéré comme
comprenant à la fois l'État et la société, mais
nullement sur la forme de l'État dans le sens pure-
ment constitutionnel. Et en effet, la constitution
peut être absolument la même dans des Ëtats de
nature très différente.
Si l'on s'en tient rigoureusement à la Constitu-
tion comme critérium, le classement n'est plus
aussi difficile. C'est même la seule méthode
rationnelle, car la Constitution révèle beaucoup
plus que tout autre élément la nature de l'État.
En effet, la nature de l'État réside dans la « sou-
veraineté », laquelle a pour expression immédiate
une volonté et une puissance d'État. Or la Cons-
titution est l'ensemble des règles juri-
diques suivant lesquelles se crée la
volonté de l'État et s'exerce directement
la puissance de l'État. Donc la forme de
..,,..G.H,^IC
CLASSIPICATION.
l'État est ce qu'est la Constitution. D'une façon
plus précise, voici comment se passent les cboses.
La volonté de l'État ne se crée pas d'elle-même :
elle est créée par certaines personnes ou certains
organes politiques déterminés. Or il y a plusieurs
cas possibles, suivant que les personnages ou
orgaues en question sont plusieurs ou se réduisent
à un seul, suivant qu'ils sont de telle ou telle
aature ou qu'ils fonctionnent de telle ou telle
façon. Ces variations donnent lieu aux diverses
formes d'État. C'est ce qui avait été déjà com-
pris par Aristote, le fondateur et le grand maître
de la science politique ; d'après ce principe il
avait divisé les formes d'État en monarchie,
aristocratie et démocratie. II avait ajouté à cela un
autre mode de répartition qui subdivisait les trois
grandes formes en deux espèces, suivant que le
pouvoir était exercé au proSt du gouvernement
ou au profit des gouvernés. Enfin, à côté de ces
formes simples il reconnaissait encore l'existence
de formes mixtes.
Le principe de cette répartition est encore
valable aujourd'hui, tout aussi bien qu'à l'époque
d'Aristole. Ce qui a changé, c'est seulement son
application dans la réalité concrète, autrement
dit les diverses formes d'État sont autres, du
moins- en partie. Nous ne trouvons plus d'aristo-
..,,..G.K,^1C
116 LES DIPF^BNTBS FORUBS D'ÉTAT.
cratie; quant à la monarchie, elle apparat sous
plusieui'B formes différentes inconnues au temps
d'Aristote ; de plus, le système représentatif était
étranger à l'antiquité; enfin, il y a de grandes
différences de nature entre l'État antique et l'État
moderne. Mais malgré tout ce qui les sépare nous
pouvons cependant continuer à nous servir des
principes de la classification d'Anstote, en y appor-
tant, bien entendu, les modifications nécessaires.
Ainsi nous ne partons plus d'une volonté d'État
créée par un personnage, ou par plusieurs, ou
par tous, car noua ne pensons pas ans personnes
physiques mais bien aux institutions qu'elles
incarnent. Le monarque par exemple n'est pas
le roi personnellement mais bien Sa Majesté
Royale, c'est-à-dire un organe de l'État. De
même encore nous jugeons superflue l'autre dis-
tinction d'Anstote qui se fonde sur le but assigné
au pouvoir de r£)tat, suivant que celui-ci sert au
bien du gouvernant ou au bien de tous; en effet,
il nous parait clair comme le jour que le pou-
voir de l'État doit s'exercer pour le plus grand
bien général. Mais il n'en était pas ainsi au tempq
d'Aristote, ni plus tard dans le moyen Age, ai
même bien avant dans les temps modernes.
D'ailleurs la distinction aristotélicienne est en soi
parfaitement logique. Traduite en langage mo-
CLASSIFICATION.
derne, elle veut dire que les personnes physiques
qui créent la volonté de l'État peuvent le faire ou
bien comme des personnes physiques, autrement
dit pour leur propre compte, ou bien comme des
org'anes d'un État placé au-dessus d'elles. Aujour-
d'hui nous ne connaissons plus celte distinction
que par l'opposition bientôt oubliée entre l'État
patrimonial et l'État de droit, entre le despotisme
personnel et l'absolutisme lé^al. Mais, encore
une fois, cette distinction d'Aristote avait sa rai-
son d'être à une époque antérieure.
Enfin les. formes mixtes présentent actuellement
une variété presque aussi grande que dans le
monde antique. Mais le mélange est de nature
différente : ce n'est plus, comme l'enteudait Aris-
tote et d'autres après lui, un mélange de monar-
chie, d'aristocratie et de démocratie, où chacun de
ces éléments formait un pouvoir particulier, muni
de ses attributions et de ses privilèges. Il y a
eu sans aucun doute de ces régimes mixtes, aux
époques où les détenteurs du pouvoir étaient con-
sidérés moins comme des organes politiques que
comme des êtres physiques, individuels ou grou-
pés en classes. D'après les idées modernes un
pareil mélange est impossible. Mais comme les
organes immédiats de l'État peuvent être plus
d'un, — par exemple Roi et Riksdag, — il se
.,sk
118 LSS DIFFÉBENTES FORUES H'iTAT.
produit en fait un mélange, si dous appeloDS
mélange le concours de différents pouvoirs pour
la formation de la volonté d'État. Le mélange est
ainsi devenu un partagée, une répartition des
attributions nécessaires pour fonder la
volonté de TEtat. C'est de la sorte qu'est née la
monarchie constitutionnelle etque se sont produites
les autres constitutions de type dualiste^ lesquelles
peuvent être désignées comme des formes milites.
Mais il nous reste encore un point à considérer
en ce qui concerne la répartition des formes
d'État d'après le principe indiqué plus haut.
Nous trouvons le principe du classement dans
la manière dont se crée la volonté de l'État. Mais
nous ne pouvons faire intervenir ici que le point
de vue juridique. Ainsi il peut arriver que dans
une monarchie absolue le pouvoir soit en fait entre
les mains d'une camarilla de favoris ; il peut se -
faire que dans une république les partis gou-
vernent l'État en dehors de la représentation ; mais
ce sont là des cas qui ne peuvent influer sur la
manière dont nous nous représentons la forme
politique ; et nous ne devons considérer ici que
les éléments qui, d'après la Constitution et en
tant qu'organes immédiats, ont formellement
part à la création de la volonté de l'État. Sur ce
point nous approuvons complètement l'opinion de
CLASSIFICATION. 119
M. Jellinek'. En revanche, il partage une erreur
commune & d'autres savants allemands lorsqu'il
attache une importance exclusive au côté formel,
€D refusant de tenir compte de la réalité des faits.
Il ne suffit pas de participer simplement pour la
forme à la création de la volonté d'État ; il faut
en outre, pour entrer ici en ligne de compte, la
déterminer réellement. Sans cela on pourrait
dire que le secrétaire qui contresigne une déci-
sion et qui en atteste ainsi la justesse formelle
prend autant de part à la volonté d'Ëtat que le
chef de gouvernement, le ministre ou le parlement
qui en détermine le contenu réel. Or il est impos-
sible de soutenir une pareille thèse. Ceux-là seuls
qui déterminent la volonté d'Ëtat à la fois
formellement et réellement doivent être pris
en considération lorsqu'il s'agit de répartir les
formes politiques d'après le mode dont se consti-
tue la volonté de l'État.
II
LES FORMES d'ÉTAT MODERNES
L'idée qui se présente tout d'abord à l'esprit
est de répartir les formes politiques modernes
t. Allgem. Staattlehre, p. 608 et sulr.
..G.Kvsl^
BNTES FORMES D'^AT.
Il chef de l'État et d'en faire
:ipaux : monarchie et répu-
ssi la division qui eut cours
usqu'au début du m* siècle,
Lvela la science politique. Les
it varièrent ensuite à l'iofini ;
rie populaire a eu dans ces
!gain de succès en Allemagne,
juridique, formelle, de l'Etat
it qui a conduit Jellinek et
ancienne division. Nous avons
nnion divergente en attribuant
au fait de prendre part à la
volonté d'Etat. Il ne suffit pas
soit simplement formelle, il
t une pleine réalité, sansquoi
■signifiante pour donner son
! à lout l'ensemble E majori
0. Une signature qui est for-
lur accomplir la volonté d'État
mine nullement le contenu, ne
la forme de l'État. Il est vrai
ais est historiquement et de
) ; mais il est en réalité un
imentaire et doit être classé
nous combattons attribuent
..,,..G.HvsI-'
CLiSSIFICWION.
beaucoup trop d'importaDce au chef de l'État pour
la détermination de la forme politique. Que le
chef d'État soit uu monarque héréditaire et irres-
ponsable, que ce soit un président nommé par
l'électioa et responsable, ce sont là des différences
qui ont une signification énorme nu point de vue
social et même parfois au point de vue politique,
par exemple en ce qui concerne le ministère. Hais
ces différences n'influent pas sur le mode de for-
mation de la volonté d'État. Découvrir là une rela-
tion de dépendance, c'est une tentative qui,
selon moi, est condamnée à échouer*. Entre
le mode de nomination du chef d'État, avec la
situation juridique qui en résulte pour Iui> et
d'autre part la création de la volonté d'État, il n'y
a, ni logiquement ni en fait, aucun lien Immédiat.
C'est pourquoi nous devons rejeter la division en
monarchies et républiques, si séduisante qu'elle
puisse paraître au premier coup d'oeil, car elle ne
s'accorde pas avec le seul critérium rationnel
d'une division, qui est le mode de création de la
volonté d'État.
1. L'opposition sur laquelle U. Jbllinbk appuie cette thâo-
rie, tevolr l'opposition entre une « Tolonté physique Indivl-
duelle » et une* volonté coUecUve Juridique ^ [AUgem. Staati'
Ukre, p. 609 et0!8) ne constitue pas une antilhësevérltableet
â'ailieuia elle n'est nullement suiasanie pour fonder une
..G.Kvs'^
122 LES DIFF^BBNTES FORMES D'ilAT.
Mais nous ne voulons pas nous attarder plus
lon^emps à ces discussions stériles. La science
politique en présente malheureusement beaucoup
trop, sous l'influence de la scotastique savante,
qui a engagé avec elle de longues disputes. Notre
intention est d'ailleurs beaucoup moins d'arriver
à une systématisation juridique des formes d'État
que d'en donner un résumé politique comme
introduction à la vie parlementaire de la Suède
et des autres États démocratiques modernes. Or
la vie politique réelle se joue des constructions
juridiques, comme Tavouent même les partisans
de cette dernière méthode. Les juristes peuvent
se tirer d'affaire lorsqu'ils se bornent à l'étude
des prescriptions de droit prises pour normes de
ta vie politique ; mais leur science est en défaut
lorsqu'il s'agit de cette vie elle-même et de la
répartilion des formes d'Ëtat. La TOlonté du monarque dans
l'Ëtat constltuilonnei, n'est pas, quoique Individuelle, une
ToloDté physique, mats juridique ; c'est ce qu'on exprime
lorsqu'on distingue entre la personne royale et d'autre part
Sa Majesté ou la Couronne (c'egt>&-dira le roi dans son
Conseil). D'un autre côté, la volonté du président aux Stats-
Unis est aussi individuelle que celte d'un monarque et elle
a souvent une force beaucoup plus déterminante sur la
volonté de l'Ëiat. Remarquons de plus que le monarque et
la représentation agissenl le plus souvent de concert pour
créer la volonté de l'Ë ta t, lorsqu'ils ne la créent pas chacun-
pour sol, comme c'est souvent le cas eu Suède..
ABSOLUTISUB. 123
manière dont elle s'accorde ou ne s'accorde pas
avec le droit écrit. De mètne l'idée évolutionniste,
si nécessaire à une juste compréhension des choses,
demeure inaccessible à la méthode juridique. Si
l'on veut bien comprendre la vie politique mo-
derne et les différentes formes qu'elle revêt, il
faut les considérer du point de vue de l'évolution
historique; car les formes actuelles sont des par-
ties d'un même développement continu.
En adoptant les principes que nous venons d'ex-
poser, on sera amené à rapporter les régimes
actuels à trois types principaux : gouvernement
d'un seul ou absolutisme; — monarchie constitu-
tionnelle ; — parlementarisme [démocratie).
L'absolutisme, qui, — si nous laissons de
côté la Turquie, — n'existe plus que dans l'Em-
pire Russe, est caractérisé par ce fait que le mo-
narque est seul à déterminer formellement et
réellement la volonté de l'État. Il peut céder en
partie ou totalement son pouvoir à d'autres, mais
il le reprend quand bon lui semble. Personne ne
partage légalement ce pouvoir avec lui. II
u'existe donc pas de représentation populaire, ou,
si Ton tolère quelque chose de semblable, c'est
seulement dans des assemblées locales (Z.afi<isfâWe,
zemstvos), et alors la représentation a tout au
plus le droit de pétition. L'histoire nous présente
124 LBS DIFFÉRENTES FORMES D'ÉTAT.
deux variétés de ce rég:ime, l'une qu'oD pourrait
appeler l'absolutisme « personnel » et l'autre
l'absolutisme i< légal'. »
Dans le premier cas, la volonté du monarque
devient à cbaque moment la loi, et elle n'est pas
liée par une loi fixée antérieurement ; dans le
second cas, le monarque n'agit pas contrairement
à une loi donnée, aussi longtemps que celle-ci
subsiste et n'a pas été formellement abolie pour faire
place à une loi nouvelle. Le premier régime est.
celui de Louis XIV et des Isars ; le second est
l'absolutisme de Charles XI de Suède et de Frédéric
de Prusse. La prédominance de l'une ou de l'autre
de ces deux formes peut dépendre du caractère
particulier du prince ; mais en somme elle dépend
surtout du degré de culture de la nation. Chez
un peuple de civilisation avancée le despotisme
personnel ne peut être qu'accidentel et passager.-
Du reste, il se transforme toujours avec le progrès
en un despotisme légal; mais alors il est en che-
min pour se dépasser lui-même.
Le second type, qui est la monarchie cons-
1. Outr« ces deux Tormes, on pourrait signaler aussi le
1 césarieme i; mais le césarisme peut Sire ou bien une
forme mixte avec assaisonnemeDt de démocratie plébisci-
taire (tel était ridéal de Napoléon III), ou bien le despo-
tisme pur avec une étiquette démocratique (exemple :
l'Empire romain).
HOKARCHIB CONSTITtl'nONNBLLE. 13»
titufioiinelle, consiste en ce que le monarque
ne peut déterminer par lui-même dans tous les
cas la volonté de l'Ëtat, et doit faire appel à une
représentation populaire. Le concours de la repré-
sentation est avant tout nécessaire quand il s'agit
de prélever les impôts et de faire des lois. De
plus, le monarque doit généralement accepter un
Conseil d'État, lequel répond de la légalité des
actes du roi et leur doune en raéme temps la
force juridique. La Constitution unitaire a fait
place à une Constitution dualiste. Ce sont mainte-
naot deux organes immédiats, le Prince et le
Parlement, qui administrent le pouvoir. Hais ici
encore nous pouvons distinguer deux variétés
bien caractérisées. Elles proviennent historique'
ment de la manière différente dont s'est produite
la monarchie constitutionnelle, et M. Esmein en
particulier a parfaitement noté ces deux types'.
Dans un des cas c'est le prince qui a accordé
on, comme on dit, « octroyé » la Conslitutioa. Il
est considéré comme possédant seul le pouvoir ;
mais, cotnnic dit la théorie, il se limite lui-même
par la représentation populaire. Celle-ci a reçu des
mains du prince tous ses droits ; elle est un
organe politique immédiat, mais d'ordre secou-
1 . Étimenli de droit eotuNMionnel, p. 5.
=,Coo^lc
J26 LBB DIFF^BENTES FORUKS D'ÉTAT.
daire. Ces principes sont formulés avec une
clarté toute spéciale d'uue part dans la Charte
française de ISH et d'autre part dans l'acte final
de la conférence ministérielle tenue à Vienne en
1820. L'introduction à la Charte et surtout le dis-
cours du chancelier de Louis XVHI, d'Ambray, qui
précéda la proclamation de ce texte célèbre, nous
apprennent que, par la nouvelle constitution le
roi entend fixer lui-même une limite à au pouvoir
qui revient à lui seul. De même il est dit au § 57
de l'acte de Vienne : « La puissance politique
totale demeure entière et sans partage au chef
de l'Ëtat ; et c'est pourquoi le souverain ne peut
dépendre de la collaboration du Parlement que
dans l'exercice de certains droits déterminés. »
Les mêmes expressions ont passé ensuite dans
plusieurs des Constitutions allemandes et de 1&
dans les théories juridiques qui ont paru en
Allemagne sur la monarchie constitutionnelle et
en général sur l'État. On peut dire que la science
politique allemande est complètement dominée
par ce § 57, et cela non seulement dans l'ancienne
école historique, mais encore dans la moderne
école juridique fondée par Gerber. Le monarque
est, dit-on, seul détenteur du pouvoir; le rôle de
la représentation populaire est simplement de le
limiter dans l'exercice de ce pouvoir, dont elle
MONARCHIE CONSTITUTIONNELLB. 127
o'a aucune part pour elle-même. Ainsi parle la
théorie ; mais en fait cette variante de la monar-
chie constitutionnelle se distingue par le r6le
prépondérant du roi dans l'Etat et par un minis-
tère dépendant exclusivement de lui et non res-
ponsable devant la représentation.
Dans l'autre type de monarchie constitution-
Délie, la Constitution a été donnée par une assem-
blée populaire, ou bien elle a été donnée dans
des circonstances qui mettent le peuple sur le
même rang que le monarque comme auteur et
gardien de la dite Constitution. La Belgique offre
un exemple du premier cas et le Danemark du
second. Sans doute la Constitution belge se rap-
proche beaucoup de la royauté parlementaire,
mais OQ peut y retrouver les principes de la mo-
narchie constitutionnelle. Suivant ces principes,
le roi etia représentation sont complètement égaux
en tant qu'organes d'État, bien qu'ils aient des
fonctions diSérentes. La volonté d'État résulte en
majeure partie de la collaboration des deux
organes, mais l'exercice du pouvoir est confié
entièrement au monarque ou à ses ministres.
Ceux-ci sont toujours des hommes librement choisis
par le monarque ; cependant ils occupent ici une
situation beaucoup plus indépendante que dans
le précédent type de monarchie. Ils surveillent et
..G.Kvs'^
128 LES DIFFÈBBNTES FORMES D'iÉT\T.
dirigent les actes du monarque selon les v<biis de
la représentation, tout autant qu'ils sont diriges
et mis en mouvement par lui ; car ils sont res-
ponsables devant la représentation, non seulement
juridiquement, mais aussi à un certain degré
politiquement. Ils exercent aussi par eux-mêmes
une partie de la puissance gouvernementale. Mats
ce qu'il y a de plus important dans cette monar-
chie, c'est que la représentation populaire est
largemeotadmise à déterminer, à égalité avec le roi,
la volonté de l'État. Ainsi il y a dans la Constitu-
tion un dualisme parfait, bien que le monarque dis-
pose du pouvoir exécutif. C'est aussi à lui seul que
revient la sanction des lois et des ordonnances*.
Cette forme de monarchie constitutionnelle est
beaucoup plus instable que la précédente. Elle
peut s'orienter d'un moment à l'autre vers une
forme d'Etat démocratique.
Le troisième type d'Etat moderne est le type
démocratique, ou comme je préfère l'appeler,
1. Ce droit ou ce devoir de sanction n'implique cependant
pas que le mocarque soit l'unique détenteur du pouvoir de
l'Ëtat comme l'interprètent les savants allemands (L&bind
tout d'abord et tact d'autres aprâs lui). Il est une
conséquence naturelle du fait que dans cette monarchie la
représentation ne détermine jamais seule la volonté d'Ëlat.
L'action ou la collaboration du monarque est tonjours
requise et par suite il doit tout sanctionner.
..G.„,gk
PARLEMENTABISUB. 120
parlementaire. Jusqu'ici le terme de ■ parlemeD-
larisme » a été appliqué exclusivement an système
anglais de gouvernement populaire. Mais il me
semble plus juste de l'étendre à toutes les varié-
tés modernes de la démocratie pour distinguer
ceile-ci de la démocratie antique. Et en effet, la
grande différence entre le gouvernement populaire
de l'antiquité et celui d'aujourd'hui, c'est que le
premier s'exerçait directement, tandis que l'autre
s'exerce par l'intermédiaire d'une représentation.
En outre, le terme de parlementarisme est préfé-
rable en ce que le trait dislinctif du type moderne
c'est précisément l'influence dominante de la
représentation.
Il est vrai qu'on donne généralement la
« souveraineté du peuple » comme le principe
fondamental des constitutions de ce genre; mais
cette souveraineté populaire ne se manifeste que
sous la forme du vote. Le peuple n'a pas d'in-
fluence directe sur la volonté de l'Etat, excepté
dans le cas où, comme en Suisse, on a adopté le
référendum ou telle autre institution analogue.
Or ce cas est jusqu'à nouvel ordre exceptionnel ;
il ne constitue pas une règle ; et du reste, même
alors, la représentation est le principal organe
politique. Dans les autres pays démocratiques, ou
bien la représentation détermine seule la volonté
..,,..G.Kvsl^
ÉÊi ..J
LES DlFFâRENTBS FORMES D'ÉTAT,
de l'État, on bien, si elle partage le pouvoir avec
le chef de l'État, elle a cependant son domaine
propre, où elle est souveraine et où ses décisions
sont valables sans la sanction du cheF d'État.
Dans la démocratie moderne le peuple, sauf l'ex-
ceptioû signalée plus haut, n'est pas un organe
de gouvernement, mais seulement un organe
de vote. Il désigne par élection l'un des deux
pouvoirs ou bien tous les deux, mais rien de plus.
C'est pourquoi on peut, si l'on veut, voir en loi
« le vrai souverain », mais à condition qu'on
n'attache pas à cette expression des idées erronées
sur son rôle véritable'.
Cependant les dispositions relatives aux deux
organes immédiats de l'État (chef d'État el repré-
sentation) et à la part de chacun d'eux dans la
formation de la volonté d'État, sont très différentes
et varient beaucoup suivant les États que noua
!• La théorie suivant laquelle le peuple électeur est, comme
on dit, le possesseur du pouvoir (par ex- Rbhu, Allgemeine
SlaaUlthre dans Marquardtefit Handbiicher des ëffentl. Recku,
Einleitungtband II) et par BuiCe te souverain dans ces sortes
de consli tu lions, serait seulement applicable aux cas où
les élus seraient liés par un mandat impëratiC et ne
seraient pas de véritables représentants. Là où cet usage
n'existe pas, le peuple n'a rien à faire dans la création
de la volonté d'E]tat ; or c'est là le point capital non
seulement en ce qui concerne les détenteurs du pouvoir,
maia surtout pour le classement des constitutions, dont
nous nous occupons ici.
PA RLEMBNT ABISMB .
considérons dans ce groupe. De même cet organe
médiat, subordonné, qui préside à la réalisation
du pouvoir (Conseil, ministère, etc.), occupe une
situation très différente selon les pays. Nous
sommes donc obligés de diviser le type parle-
mentaire en trois sous-types nettement distincts ;
ie parlementarisme unitaire (Angleterre), le par-
lementarisme dualiste [Suède, Amérique), et le
parlementarisme mixte, comme oa peut appeler
le ré^me -suisse. Il n'est pas impossible que
Tavenir nous apporte d'autres formes de démo-
cratie, par exemple le gouvernement direct du
peuple, à la manière antique, et un gouverne-
ment de comités comme dans la Suède
d'autrefois. On pourrait malheureusement signa-
ler des tendances vers l'une et l'autre de ces deux
formes. Mais nous n'avons pour le moment à
nous occuper que des types signalés plus haut.
Il nous parait cependant superflu d'énumérer
ici en détail leurs caractères spécifiques, étant
donné que nous aurons plus loin l'occasion de les
exposer tout au long. Par contre, il nous parait à
propos de dire quelques mots encore sur les rap-
ports mutuels de diverses formes politiques que
Qous avons brièvement esquissées, car elles cons-
tituent, comme nous l'avons dit, des chaînons
d'une même chalue de développement historique.
..,,..G.Kvsl^
132 LES DlFFftKBNTES FORMES d'^TAT.
11 est clair pour tout le monde que dans l'Eu-
rope moderne l'absolutisme évolue vers la monar-
chie constitutionnelle ; et en efiet cette évolution
s'est produite partout, sauf une seule exception
qui est la Russie ; d'ailleurs il semble en oe moment
que la Russie elle-mftme se prépare à suivre te mou-
vement européen. Mais on n'est paa aussi généra-
lement disposé à admettre que la monarebie cons-
titutionnelle conduit aux régimes démocratiques.
Et pourtant il nous semble que c'est là une chose
incontestable. Le fait s'est déjà passé pour plu-
sieurs monarchieSj comme celles de l'Angleterre,
de la Suède et de la Norvège, et il est clair que In
Belgique, l'Italie, le Danemark et d'autres Etats
sont déjà engagés dans la même voie. A vrai dire,
ce n'est guère qu'en Allemagne et en Autriche
que la monarchie constitutionnelle paraît solide-
ment assise, et cela principalement parce qu'elle
appartient à la catégorie ancienne, celle des cons-
titutions octroyées. Mais même dans ces deux
pays la monarchie ne semble pas appelée à durer
bien longtemps sous sa forme actuelle. Tout le
mouvement social et politique de l'Europe mo-
derne va précipiter cette évolution. D'une part la
dissolution du régime des états et le développe,
ment de l'instruction, et d'autre part, le système
représentatif conduisent logiquement et nécessai-
..G.Kvs'^
LEURS RAPPORTS MXITUKIS. 133
rement â des régimes dëmocratîquei. Le peuple,
soaa l'influence des idées d'égalité et de liberté,
se considère de plus eo plus comme le vrai sou-
verain, et exig:6 de plus en plus que «on organe,
c'est-à-dire la représentation, ait le rôle prépon-
dérant dans la vie de l'État. Et ainsi la souve-
raineté du prince doit céder la place à la souve-
raineté du peuple.
Mais si le développement qui mène de l'absolu-
tisme au constîtulionnalisme et de là an parle-
mentarisme est un développement simple et
uniforme, le régime parlementaire, qui en est ta
conséquence, n'est pas le même partout et il n'y
a pas de continuité entre les formes qu'il revêt.
Arrivé et ce point final, le développement »e par-
tage en lignes parallèles et donne comme résultat
différents types de parlementarisme absolument
distincts et fermés l'un à l'autre. Il n'y a là rien de
surprenant ni pour la logique ni au point de vue
de l'histoire. Nous rencontrons partout, dans le
inonde des hommes aussi bien que dans la nature,
des moyens différents employés pour parvenir à
un même but. Ainsi il n'y a pas deux pays dont
la justice et l'administration soient organisées de
même sorte; il n'existe pas non plus deux parle-
ments qui aient les mêmes règlements pour l'or-
dre des travaux et pour les commissions, lien
..,,..G.K,^1C
134 LES DIPPÉRENTES FOBUHS D'IËTAT.
est ainsi du régime parlementaire sous ses diffé-
rentes formes. Celles-ci représentent des moyens
différents pour réaliser la souveraineté populaire,
— il est vrai dans des proportions très diverses.
Ce ne sont pas )& des stades d'un même dévelop-
pement qui ferait sortir une forme de l'autre :
ce sont des types complètement indépendants.
Nous insistons sur ce faiî, car il a besoin d'être
signalé & l'atteution. On considère souvent ces
types parlementaires comme s'engendraut les uns
les autre.<), sans apercevoir clairement tes grandes
dissemblances qui les séparent. Par exemple, nous
ignorons généralement en Suède que nous possé-
dons une Constitution parlementaire et nous jetons
des regards enthousiastes sur le parlementarisme
anglais, comme s'il était l'idéal vers lequel s'ache-
mine notre évolution politique. En France on a
voulu mélanger dans la Constitution de 1875 deux
formes différentes de parlementarisme, celui de
l'Angleterre et celui de l'Amérique, bien que, —
suivant une remarque judicieuse', — il y ait
entre ces deux types une différence plus grande
qu'entre la Monarchie et la République.
Une conséquence naturelle des rapports que
1. WoDBOW WfLSON, Congi-estional Govemmtnl, 1901,
LEURS RAPPORTS UUTCELB. 135
nous venons de marquer entre les trois types
fondamentaux de constitutions modernes, c'est
qu'ils sont rarement purs et sans mélange. Une
forme récente contient des survivances de la
forme précédente ; parfois aussi des institutions
qui appartiennent aux types démocratiques
s'introduisent comme des avant-coureurs dans la
monarchie constitutionnelle. Nous trouvons un
exemple remarquable de ces deux cas dans le
régime belge, dont on ne sait pas très bien s'il
faut le rapporter à la monarchie constitutionnelle
Ou à la monarchie parlementaire. Des exemples
moins considérables mais cependant analogues se
retrouveraient facilement dans beaucoup de pays,
et nous pourrions citer entre autres les pres-
criptions relatives au droit de sanction dans la
Constitution anglaise. Le régime suédois a
également conservé des traces de la monarchie
constitutionnelle, par exemple les attributions
législatives du roi en matière économique. Ce sont
là des souvenirs d'un régime antérieur qui ont
survécu dans le régime suivaut. Il arrive peut-
être plus fréquemment encore que des institutions
de nature moderne soient enchâssées dans une
Constitution de type ancien ou bien qu'on ait
rassemblé dans une même construction constitu-
tionnelle des éléments disparates qui s'étonnent
13(> LES DIPP^RENIBS PORUES d'ÉIAT.
d'èlpe accouplés : en ce cas l'ignorance da
caractère intime des divers types a plus fait que
les tendances naturelles, et cela s'est produit sqp-
lout pour les nouvelles Constitutions doctrinaires.
Les auteurs de ces Constitutions doctrinaires
peuvent être comparés à des architectes qui ayant
à construire une maison dans un certain style, ne
sauraient pas très bien en quoi le roman se
distingue dp gothique ou du style Renaissance ;
alors ils mettront dans une façade gothique ici
une fenêtre romane, là un chapiteau Renaissance,
et ainsi de suite. Ainsi ont opéré les architectes
politiques du xix° siècle. Nous rencontrons partout
des institutions et des dispositions d'un certain type
insérées dans des Constitutions de caractère tout
différent. La Constitution française de 1373 nous
en fournit un exemple particulièrement instructif :
elle contient d'une part une application très
développée du système des deux Chambres et
d'autre part un gouverueraent de Cabinet imité de
l'Angleterre et qui exigerait bien plutôt un
système à Chambre unique. Un autre exemple
nous est donné par la monarchie constitutionnelle
prussienne, où la représentation a reçu une forme
empruntée à la royauté parlementaire (avec une
ChamBre basse ayant droit de priorité en matière
budgétaire et une Chambre haute à pouvoirs très
LEURS RAPPORTS MOTUKLS. 137
limités en celte matière et recrutée par vme
d'hérédité ou de nomination royale). Nous pourrions
citer beaucoup de cas analogues dans les Consti-
tutions modernes. Ainsion a méconnu les caractères
des difTérents styles politiques, et ils sont encore
aussi ignorés que l'étaient il y a une centaine
d'années les styles architecturaux.
Seulement cette ignorance n'est pas aussi
inofiensive que celle d'un architecte ordinaire.
En effet, quand il s'agit d'une maison, les styles
disparates peuvent rester tranquillement les uns
auprès des autres, sans autre inconvénient que de
choquer parfois l'œil d'un connaisseur. Il n'en va
pas de même des bâtisses constitutionnelles. Sans
doute les institutions et les principes de source
diverse peuvent aussi demeurer côte à c6te pen-
dant un temps assez long, sans qu'il se produise
d'accidents fâcheux. Mais un beau jour l'harmonie
est rompue. L'institution étrangère, introduite
sans discernement, prend conscience d'elle-même
sous l'influence des nécessités politiques, elle
veut se développer selon les tendances de sa
nature propre, et alors elle se trouve en conflit
avec les autres institutions. Ainsi naît un de ces
conflits constitutionnels comme nous en
avons des exemples dans la récente histoire politi-
que de la Prusse, du Danemark, de la Norvège,
..G.Kvsl^
138 LES DIFFÉRENTES FOBMBS D'ÉTAT.
et, — dans une certaine mesuce, — de la Ffabce.
Or cette sorte de conflits constitutionnels, — car
il y en a d'autre sorte, — dépend esclusivemeilt
de, ce que des éléments de nature différente ont
été rassemblés dans la même Constitution. La plu-
part des Constitutions modernes portent en elles
le germe de luttes semblables, puisque la plu-
part ne sont pas fondues d'un seul bloc mais
composées de morceaux souvent très hétéroclites.
...C.KvsIc
CHAPITRE VI
Le Parlementarisme UBÎtaire anglais.
OUELQVES TRAITS CAtlACTÉRlSTIQUES
DE Ll CONSTITUTION ANGLAISE
Un exposé de la Constitution anglaise est une
des t&ches les plus difficiles, mais aussi les plus
intéressantes que puisse se proposer la science
politique. Tout dans cette Constitution est si difié-
rent de ce que nous sommes habitués à trouver
dans les autres pays ! Et d'abord nous constatons
qu'elle n'est pas, comme les autres, codifiée dans
une ouplusieurs lois fondamentales. 11 fautla cher-
cher, non seulement dans plusieurs actes histori-
ques importants depuis la Magna Charta de 1215
jusqu'au Représentation Act àe 1884, mais encore
dans une multitude de lois diverses de moindre im-
portance, dans les ordres du jour des séances du
Parlement [Standing Orders) et surtout dans le
RLBUSMTARI9UB DMlTAIKB.
jp géaéral de l'Angleterre {Cotnmon
élé, comme on le sait, interprété
iiincipalement pai les sentences des
>utez à cela que des pratiques ad-
t parlemeatsires {conventions), géné-
krites, occupent dans la Constitiition
.é du droit constitutionnel organique
s grande que dans aucun autre pays,
itutions les plus importantes, telles
n de premier ministre et le Cabinet,
uement sur une pratique politique,
nos habitudes de réglementation
un pareil état de choses est une
sériante.
étrange peut- être nous apparaît
itre particularité caractéristique du
e l'Augleterre. Ici, la règle est qu'on
it une loi sous prétexte qu'elle est
mée et inutilisable. A l'exemple des
linSj OQ laisse subsister les lois une
mais on cess« de les appliquer. Cet
conséquences également remarqua-
mite d'abord que le droit vieilli et le
eur se trouvent placés côte & côte ;
i le premier est mentionné et décrit
l'ampleur que le second. Nous ren-
laque pas de ces monuments désaE-
..G.Kvs'^
INQLBTSRRB.
fectês <JU6 l'on conserve et que l'on entretient
pieusement comme des reliques vénérables. Nous
en avons un exemple bien connu dans la survi-
vance de ce principe d'après lequel le monarque
a le droit de refuser sa sanction à une décision du
Parlement; or ce droit de veto n'a jamws été ap-
pliqué depuis 1707, et s'il l'était, tout Anglais
verrait là un véritable coup d'Etat Cette repu,
gnance à toucher aus anciennes lois a encore une
autre conséquence : lorsqu'elles sont devenues par
trop archaïques^ alors que l'évolution politique et
sociale exigerait qu'on les raodiâàt, «n s'arrange
de façon à les éviter par un détour. De là toute
une série de lois exceptionnelles et spéciales, et
d'usages juridiques souvent bien étranges. Ainsi,
pour citer un exemple, voici par quel artitîce on
tourne une prescription qui remonte jusqu'à
Edouard II et d'après laquelle un membre de la
Chambre basse ne peut rt^signer son mandat. L'in-
téressé qui désire abdiquer demande au roi et
obtient une vieille fonction purement fictive, par
exemple « the stewardship of tbe three Ghiltern
Hundreds », et il perd du même coup sa place
dans la Chambre des Communes.
Ces bizarreries ont beau porter avant tout sur
les côtés extérieurs et formels de la Constitution
anglaise , elles produisent une confusion , un
..,,..G.Kvsl^
142 PARLBUBNTABISUB UNITAIBB.
manque de clarté et de logique qui pèuveot déses-
pérer un observateur. Gepeudaut il coovient
d'ajouter aussitôt qu'une étude plus approfondie
efface en partie cette impression' première. La
confusion subsiste toujours, mais le défaut de.
logique n'est ptus qu'apparent. C'est le cas pour
l'exemple cité tout à l'heure. En effet, d'après Cad
of seulement de 1701 et quelques prescriptions
sur la même matière, un citoyen ayant reçu un
emploi de la couronne ne peut conserver sa place
dans la Chambre basse à moins qu'il ne soit pro-
cédé à une réélection; il lui est mèine complète-
ment interdit d'y siéger si l'emploi en question a
été institué après 1705. Eo appliquant cette règle
comme nous avons vu, on évite les obstacles que
la loi oppose à la résignation du mandat parle-
mentaire. Il est impossible de méconnaître la
logique du procédé, mais d'autre part des arran-
gemeuts de ce genre étonnent un poHticién du
continent. Il juge en outre purement risibles une
foule d'autres usages et traditions ; ainsi, dans,
les occasions solennelles, par exemple lorsque le
roi sanctionne les décisions du Parlement, l'em-
ploi de certaines formules en vieux français : dans
ce dernier cas, le roy [la reine) le veult, et, pour
les private bills : soit fait comme il est désiré.'
Lorsqu'une communication doit être faite par la.
._J
ANQLBTBKBK.
royauté au Parlement, on convoque à la Chambre
haute les membres de la Chambre basse, qui
doivent entendre le message debout près de la
barre, tête nue, tandis que les lords restent assis,
le chapeau sur la tète. On pourrait citer bien
d'autres détails du même genre.
Mais si on regarde les choses d'un peu plus
près, la critique et l'ironie se transforment bientôt
en respect et.ea admiration. En effet, cet attache-
ment aux lois et aux coutumes du passé assure
une continuité de développement qui ne se trouve
cbez^ aucun autre peuple. Mus ce qui est plus
important encore, c'est que de la sorte toute la
série historique des causes qui se trouve à la base
du droit actuel et qui en explique la genèse, reste
présente à la conscience populaire. Par là le
peuple sent qu'il fait corps avec sa législation et
que celle-ci n'est pas seulement déposée dans un
parchemin et dans un texte morts, mais dans une
conscience vivante. C'est là peut-être le trait le
plus remarquable de la Constitution anglaise ; c'est
en tous cas celui qui donne à cette Constitution sa
force et sa stabilité extraordinaires jointes à une
souplesse qui la rend susceptible de ' réformes
lorsque le temps en est venu. Avec ce trait carac-
téristique présent à l'esprit, on peut comprendre
également une autre particularité qui distingue la
^nim^^^
144 PARLEHBNTABtSMB UNITAIBB.
CoDsUtution' anglaise de toutes les autres, je veux
dire la facilité & admettre uae modification. Le
Parlement décide une réforme constitutionnelle
profonde aussi aisément et dans les mêmes formes
qu'il prend une décision sur telle ou telle ques-
tion sans importance. Pareille chose ne peat avoir
lieu sans danger que chez un peuple pour qui le
passé est toujours présent, qui sait par suite
fondre en un tout harmonieux les éléments nou-
veaux et les éléments anciens et qui, ajoutonS-le,
obéit dans ses réformes non point à des tiiéories
mais à des besoins réels.
Il est clair, d'après ce qui précède, qu'il fau-
drait chercher dans l'histoire le secret de la
Constitution anglaise. Mais la place limitée dont
nous disposons ici ne nous permet pas même
d'esquisser dans ses grandes lignes cette évolution
historique. Nous dirons seulement quelques mots
des forces principales qui l'Ont dirigée.
Dans tout grand développement historique il faut
faire une place importante aux circonstances for-
tuites, aux actes accomplis dans un aulre but que
celui où tendait l'évolution naturelle, et avant
tout à la logique propre des événements. Il me
parait que cette place n'est nulle part plus consi-
dérable que dans l'histoire de la Constitution
anglaise, et tout particulièrement dans la dernière
..,,..G.H,^IC
période. Aiosi, pour donner des exemples, nous
rappellerons commenl, les deux premiers Georges
n'étant pas très au courant de la langue anglaise,
cette circonstance accideotelle fut d'un très grand
poids dans Tadoption de la coutume qui écarta
le monarque des délibérations du Conseil : or
c'est là UD événement capital pour le système
anglais du gouvernement de cabinet. Et de même
rien n'a plus contribué & la formation des deux
grands partis que les corruptions et les achats
de votes par lesquels la royauté au xviii' siècle
cherchait à se conserver une majorité solide dans
la seconde Chambre. On agissait dans une inten-
tion déterminée, et il en résultait quelque chose
de différent, qu'on n'avait jamais visé ni songé à
prévoir.
Mais en dehors de ces accidents dont il serait
aisé de multiplier les exemples, en dehors de ces
cas où des actes ont eu des conséquences impré-
vues, nous pouvon? dire que depuis Guillaume le
Conquérant jusqu'à la reine Victoria une seule et
même force n'a cessé d'agir sur la formation de
la Constitution anglaise : je veux dire la lutte
entre la puissance royale et la puissance popu-
laire. A part la guerre des deux Roses où entrent
en jeu des rivalités dynastiques et nobiliaires, on
peut dire que toute l'histoire antérieure de
..G.Kvsl^
P&RLBHBNTARISHE UMtTAÎBE.
e se ramène à ce duel des deui pou-
orme le cûlé conscient de l'évolution
n pays, où il apparaît constamment.
, les luttes de classes, qui constituent
facteurs les plus puissants du déve-
ont ici une importance très secoa-
fait si particulier à l'Angleterre est
us curieux que la Constitution anglaise
onlinue à être foncièrement arîstocra-
ibose est néanmoins facile à expliquer :
que par deux conditions en apparence
une à l'autre. D'une part, l'aristocratie
rre n'a jamais eu les mêmes privilèges
Mintinent et elle ne s'est jamais dérobée
ie façon aux charges publiques. C'est
les autres classes n'eurent pas les
jons de se sentir lésées et d'engager la
la noblesse. D'un autre cdté, il arriva
ysaus -propriétaires, qui avaient autre-
léla masse principale de la population,
s rangs s'éclaircir et se décimer à par-
a du moyen âge; si bien que vers la
m' siècle cette classe sociale avait
ssé d'exister. Les choses se passèrent
uridiquement et suivant les règles du
i : les nobles et d'autres acquéreurs
les fermes des paysans afin de les
..,,..G.Kvsl^
transformer en pâturages pi
moutons. Tbom&s Morus st
moutons dévorent les hom
que les loups. Et le mal ne fit (
Mais si les hommes d'État
mal et le déplorer, les ind
ne le sentirent pas comm<
n'en résulta donc pas de 1t
toute idée de résistance di
impossible à mesure que s'
paysans. La population rep
basse comprit exclusivemei
la petite noblesse possédai
une bourgeoisie riche et ]
population d'une part et
1. M. BouTur, dans son remar
pemeuL de la Constitutioa aogla
Conatilulion et de la locUli poUiiqi
rapporte la grande eilensioa di
partie du xyiii" siècle et au
(p. 231 et suiv.). Il a raison en ce.
terres communales passèrent, g
les mains des grands propriétaii
vant les fermes des paysans aval
dans de vastes proportions, c
seulement le témoignage cité de
de nombreuses interdictious lam
temps des Tudors. On ne doit pa:
qui se mêlent dans un résultat i
reste sont différents.
=,Coogk
148 FAKLBUBKTABISHB UNITAIRB.
l'autre, il a pu à la vérité se produire des diffé-
rends qui ont eu une grande importance politique
et ontexercé notamment une influence sur la situa-
tion réciproque des deux Chambres. Mais ces que-
relles sont insignifiantes si on les compare avec les
guerres de classes qui se sont produites dans
d'autres pays et qui y ont donné au développement
politique son caractère particulier; je fais allusion
par exemple à la Suède.
Par suite des circonstances que nous venons
d'indiquer, l'évolution constitutionnelle de l'Angle-
terre a pour centre les relations entre le roi et le
peuple, et c'est là ce qui lui donne son unité et,
— malgré quelques soubresauts, ^— sa continuité
remarquable. Une vue d'ensemble y découvre
uBe chaîne unique allant de l'autocratie au cons-
titutionnalisme et du régime constitutionnel au
parlementarisme. Nous ne pouvons, encore une
fois, décrire ici ce long processus, mais il convient
cependant que nous en donnions une idée sché-
matique. On peut dresser le schéma en indi-
quant les divers facteurs politiques dans leor
succession chronologique. Nous entendons par
« facteurs politiques » les institutions, ou encore,
pour employer la terminologie allemande, « les
organes immédiats de l'État * qui dans chaque
période ont déterminé la volonté de l'État
..,, ..Google
AMQLETEBRE. 149
qon seulement pour la forme mais dans la
réalité, et qui ont ainsi gouverné en fait l'or-
gueilleux vaisseau d'Albion. En marquant l'ordre
de succession de ces institutions dirigeantes, on
obtient sinon une vue d'ensemble de l'évolution
constitutionnelle, du moins les données historiques
strictement nécessaires pour comprendre la cons-
titution actuelle. Voici le schéma en question :
The King
King — Mcgnam cùnciliam regnl
King — Counctl — Pariiamenl
King — PHag Council — Commotu and Temporal and Spiritual Lords
King ~ Cabinet — Çommoni and Lords
Cabinet — Majorltg ûf tht Gommons
La chaîne commence par le roi à peu prés
absolu' et se termine par le gouvernement absolu
1. Il ; a, comme on )e sait, différentes opialoas sur la
nature du pouvoir quu Guillaume et ses successeurs Immé-
diat» établirent dans le paya conquis. Plusieurs auteurs
surtout anglais (Stubbs et Fkbbuan) ne veulent pas admet-
tre que l'on puisse caractériser ce pouvoir comme uu véri-
table despotisme. Quant ft moi. Je me range à une différente
opinion tout en observant naturellement qu'une royauté
absolue dans une société médiévale, téodalement ori^nisée,
a un tout autre caractère que dans les temps modernes. Deux
événements analogues survends antérieurement, savoir la
fondation de l'empire franc par CloTia et ses Uls, et la réunion
des provinces norvégiennes en un royaume par Harald
H&r&iger, eurent également pour conséquence de grands
progrès de la puissance rojale, dont l'envahi s se ment Tut, il
est vrai, moioE considérable en Norvège que chez les France.
■.8.liMD.CuO^IiJ
iSO PiLRLEUBNTABISUE UNITAIRE.
du cabinet et de la majorité de la Chambre basse^
D'ailleurs, il faut bien le remarquer, quoique le
précédent schéma élimine successivement certaines
institutions, cela ne veut pas dire qu'elles aient
cessé d'exister. Tout au contraire, elles vivent et
fonctionnent juridiquement comme autrefois. Ainsi
aucune décision du Parlement ne peut être valable
sans l'approbation de la Chambre haute et aucune
loi ne se promulgue sans la sanction royale. C'est
pourquoi d'éminents juristes allemands de la nou-
velle école peuvent continuer à soutenir qu'en
Angleterre le roi est le véritable dépositaire de la
puissance de l'État, absolument comme en Prusse.
C'est en tirant des conséquences de ce genre que
" la méthode juridique révèle son étroïtesse. Il est
bien vrai que tout acte immédiat de l'État exige
le consentement du roi, mais ce consentement ne
se refuse pas. Le monarque doit apposer sa signa-
lure, fût-ce à sa propre déposition ou à sa propre
sentence de mort, comme dit W. Bigebot avec
une certaine exagération oratoire. Le fait est qoe
la signature du roi est aujourd'hui une formalité
pure et simple, formalité qu'il faut toujours obser-
ver, mais qui ne signifie aucune décision prononcée
sur le contenu du texte. Par conséquent, la signa-
ture royale pourrait, sans danger pour la Consti-
tution, être remplacée par une griffe, comme ce
ANaLBTBRRE. ISl
fut le cas pendant l'état de faiblesse mentale de
Georges III et pendant la maladie de Georges IV.
L'importance encore très grande du roi pour )a
vie politique et la Constitution anglaises, il faut
la chercher non pas dans ces souvenirs du passé,
mais, — comme nous allons le voir, — '• dans un
tout autre domaine.
Une autre remarque & laquelle donne lieu le
schéma ci-dessus, c'est qu'aucune place n'y est
faite aa célèbre selfgovernment, c'est-à-dire à
l'autonomie des comtés. Depuis les études bien
connues de Gneist sur l'autonomie anglaise, celle-
ci a été volontiers regardée comme la véritable
source du gouvernement parleraentait-e dans ce
pays. On a vu dans le gouvernement parlemen-
taire une autonomie qui, partant des comtés, se
serait étendue à toute la nation, et qui aurait par
suite ses racines dans l'Angleterre de la période
anglo-saxonne. C'est là, selon nous, une erreur
complète. Il est bien vrai que dans les anciens
temps et aussi dans les temps modernes, avant
que la puissance du Parlement eût été déRaiti-
vement assise, la constitution des comtés avec
l'organisation judiciaire qui s'y rattachait, a
été le plus sûr garant de la liberté. Mais elle n'a
jamais eu dans la vie politique anglaise autre
chose que ce réle négatif, et celui-ci devient
.„,,..G.HvsI-'
152 FARLBMBNTABIBHB UNITAIRE.
même superflu à mesure que le Parlement devient
l'organe central de l'Etat anglais. A l'heure actuelle
ces institutions qui représentent le « seUgovern-
inent » sont purement municipales et elles peuvent
adopter telle ou telle organisation sans que ce fait
ait son retentissement sur la Constitution propre-
ment dite. Aussi ne puis-je partager les inquié-
tudes qu'inspire à Gneist la démocratisation du
gouvernement des comtés dans un esprit conti-
nental par suite des réformes de 1888, Rien dans
ces réformes ne peut autoriser à craindre que le
Parlement ne change de caractère pour se démo-
cratiser.
U
MAJORITÉ Dr LA CHAMBRE BASSE ET CABINET
Après cette introduction peut-être un peu
longue mais indispensable, nous arrivons à notre
sujet proprement dit, qui est le parlementarisme
anglais. Le schéma donné plus haut nous apprend
qu'actuellement les facteurs les plus importants
de la vie politique anglaise sont le Cabinet et la
majorité de la Chambre basse. Nous devons donc
nous occuper d'eux en premier lieu, de l«ur
organisation respective, de leurs rapports mutuels
et de leurs relations avec les autres institutions
ANaLEtEBRB. 1S3
immédiates de l'Elat. Il convient de commencer
par l'étude de la majorité et des partis qui soot
à sa base puisque ce qu'il y a de caractéristique
pour le parlementarisme anglais c'est qu'il est un
gouvernemeot de parti.
Oa rapporte généralement l'origine des deux
grands partis, Tories et Whig.Sj d'abord aux luttes
constitutionnelles du règne de Charles I'% lorsque
les démocrates et les puritains luttaient pour le
pouvoir populaire contre les partisans du roi,
contre les défenseurs de l'absolutisme et de la
religion catholique, et ensuite à l'antagonisme
entre les dynasties nouvelles d'Orange et de
Hanovre d'une part et d'aufre part la dynastie
déchue des Stuarts. Si juste que soit cette expli-
cation historique, elle ne sufiit nullement à expli-
quer, en particulier au point de vue constitution-
nel, la formation des partis anglais. Car il est
vrai qu'ils furent appelés à. la vie par les événe*
ments historiques en question ; mais ce ne sont
pas ces événements qui leur ont donné leur place
dans la Constitution ni qui ont assuré leur durée.
On ne trouve pas non plus uue explication défini-
tive dans les conflits sociaux et économiques,
bien qu'ils aient été liés pendant un certain temps
à la vie des partis. Depuis le milieu du xvia*
siècle les capitalistes, les industriels et les com-
..G.Kvsl^
ISJ PARLEUBNIARI&UE UNIIAIBE-
merçaats se sout opposés en qualité de whîgs aux
grands propriétaires terriens, lesquels étaieût
ordinairement tories. Mais même ces groupements
économiques eurent un caractère accidentel, tout
comme les groupements dynastiques et religieux.
En revanche, l'élément permanentet qui n'a cessé
de croître en solidité, c'est l'antagonisme entre le
parti de gouvernement et l'oppositioD. Et
cela s'esptique parce que la CoDslitutioo réclamait
impérieusement le premier parti, en face duquel
le second se forma par uue réaction naturelle. Si
la Constitution avait besoin d'une majorité goii-
vernante dans la seconde Càambre, c'est que
celle-ci avait déjà acquis de la puissance. Aucun
impôt ne pouvait être exigé sans son approbation ;
et après qu'on eut promulgué en 1689 tke Mutiny
aci, c'est-à-dire le vote annuel du budget de
l'armée et des lois militaires, aucun gouverne-
ment ne put se passer de l'assentiment de la
seconde Chambre, autrement dit d'une majorité
nécessaire pour accorder ce que demandait le
gouvernement. Désormais toute la politique de la
royauté vis-à-vis du Parlement tend à consolider la
dite majorité. Elle le fait eu s'assurant des élec-
tions dans les rotlen boroughs. Le développement
inouï de la corruption est, au point de vue moral,
la honte de la vie politique anglaise pendant le
..G.Kvs'^
ANOLBTERHB.
xviii* siècle ; mais elle a eu pour le pays des
conséquences très importaates et très heureuses.
Ce soDt eu eflet ces pots-de-vin , bien plus que les
événements historiques et les conflila économiques
ou sociaux, qui ont créé et surtout consoUdé les
partis des tories et des whigs. Plus tard, et même
avaat que la réforme parlemeutaire de 1832 eût
rendu impossibles de pareilles machinations, l'opi-
aion publique prit pour son compte le rdle
qu'avait exercé le roi en fondant et en maintenant
une majorité dans la Chambre des communes-
Par suite des circonstances que nous venons
d'indiquer, les deux partis anglais sont des par-
tis de gouvernement et pas autre chose. Des
antagonismes politiques, religieux, économiques
et sociaux sont venus à des époques diverses se
greffer sur cet antagonisme de partis, mais ils ne
l'ont jamais complètement déterminé depuis le
commencement du xvni* siècle. Actuellement les
partis sont désignés comme conservateurs ou
libéraux de nuances diverses ; mais cela tient
seulement à ce quk toute question qui se présente
peut être envisagée et traitée à des points de vue
différents, dont l'un est plutôt conservateur et
l'autre plus réformiste. Cela ne veut pas dire
qu'aucun des deux partis se soit lié à une doctrine
fixe. On sait que ce sont le plus souvent des
..G.Kvsl^
tB6 PAttLEUKNTÀRISUB DMTAIttB.
cabinets conservateurs qui ont fait triompher les
plus importantes réformes. Les étiquettes des
partis sont seulement pour la forme, et elles ne
dépendent jamais de véritables conflits d'intérêts
et d'opinions. Le seul antagonisme réel est entre
le fait de gouverner et celui de ne pas gouvernei;.
Les partis anglais sont aussi complètement que
possible des organes constitutionnels, ayant pour
mission l'un de gouverner le pays et l'autre de
veiller à ce que le gouvernement soit bien conduit.
C'est qu'en effet la minorité a ici un véritable
devoir à remplir : sa tAche, comme disait Fox,
est d'être les très Qdèles opposants de Sa Majesté.
Dans les autres pays la minorité est plus ou moins
opprimée et elle n'a généralement d'autre pensée
que de lutter pour ses propres intérêts. Rien de
semblable en Angleterre. La majorité sait que la
minorité est son héritière désignée, et c'est pour-
quoi elle se garde bien de lui infliger aucune vio-
lence. La minorité de son côté a conscience qu'elle
exerce un contrôle au nom de la nation et sous
ses yeux, et que sa vigilance critique lui vaudra
une confiance qui lui permettra de prendre à son
tour la direction du pays ; et elle peut nourrir cet
espoir, puisqu'elle ne représente, comme la majo-
rité, aucun intérêt particulier différent de celui
de la nation entière.
..C.K,gIc
ANaLBTEIlIlB. 1S7
Cela nous amëDe à envisager les parlis à un
autre point de vue, dans leurs rapports avec la
société. Ce cAté est encore plus étraog'e que le
càté constitutionnel esquissé précédemment. Ou
serait tenté de penser en effet que dans ce pays où
gouvernent les partis, ceux-ci ont dil plus qu'ail-
leurs imprégner le peuple de leur esprit el péné-
trer jusque dans les couches sociales les plus pro-
fondes, partageant la nation en deux camps
opposés et fortement organisés. Or il n'en est rien ;
et même on pourrait dire plutôt que la grande
majorité du peuple anglais reste absolu-
ment en dehors des partis. Les choses ne se
passaient pas ainsi sous les Stuarts, lorsque com-
meut^a à s'opérer l'organisation des partis : cette
organisaliou s'étendit, comme partout ailleurs, très
avant dans la société. Mais elle se restreignit de
plus en plus à mesure que les partis devinrent
des organes gouvernementaux; et aujourd'hui
c'est seulement tout en haut de l'échelle sociale,
dans un cercle relativement étroit d'individus et de
familles, que les partis ont une organisation solide
et permanente. Les grandes masses populaires
n'appartiennent à aucun parti. La preuve en est
que le même peuple qui vote aujourd'hui pour
les libéraux donnera demain ses voix aux conser-
vateurs, pour les reporter après-demain sur les
..,,..G.Kvsl^
tbS PARLEMSKTABISHB UNITAIBE,
lihéraQX, et ainsi de suite. Ce fait, dont il est
^généralement tenu trop peu de compte, est le
centre même du système des partis anglais ; c'est
par là qu'ils tranchent si complètement avec les
habitudes des autres nations. En effet, il ne faut pas
y voir le résultat d'une indtHérence ou d'une ver-
satilité générales, mais bien plutAt d'un certain
degré de réflexion et d'une compréhension très
nette de la supériorité de la patrie sur les partis.
Le corps électoral a le sentiment qu'il est placé
comme un juge en face des partis antagonistes ;
et c'est pourquoi il ne veut dépendre ni de l'un
ni de l'autre et leur décerne à tour de rôle le prix
da combat, suivant que tantôt l'un tantôt l'autre lui
parait le plus digne de présider aux destinées thi
pays. Ou bien encore, pour employer une autre ima-
ge, le peuple anglais ressemble à un homme debaute
taille placé debout au milieu d'une poutre en
balançoire, tandis que deux enfants sont assis
aux deux extrémités. Ceux-ci, qui représentent
les libéraux et les conservateurs^ s'élèvent et
s'abaissent selon que l'homme du centre appuie
plus fort d'un côté que de l'autre, mais lui-même
n'appartient que momentanément à l'un ou à
l'autre côté, et par suite il n'appartient en somme
à aucun des deux.
Voilà ce que nous trouvons à la base du gou-
..G.Ky'^
ANOLSTERKE. 1^9
vemeineiit de parti en Angleterce et du parleiB^Ua-
ri^ae asg^ais. Les partis proprement dits forment
une couche superficielle ; ce ne sont pas des partis
d'intérêts, et, — • ce qui n'est pas moins impor-
tant, — ils ne sont que deux, Des phénomènes
comme le parti irlandais du home-ruleoti comme
un parti ouvrier en voie de formation constituent
des anomalies dans la vie politique de l'Angle-
terre. Ils sont anormaux tout d'ahord parce qu'ils
englobent le corps électoral lui-même et qu'ils
sont de leur nature solidement établis et immua-
bles, en outre parce qu'ils sont des groupements
d'intérêts sur le modèle du continent et parla
s'écartent complètement du type gouvernemental
qui distingue les deux grands partis anglais. Enfin,
s'ils étaient abondamment représentés à la Cham-
bre des communes, ils bouleverseraient le jeu de
balançoire qui assure le fonctionnement de ce
mécanisme politique.
Une autre conséquence de l'organisation et du
rOle des partis anglais, c'est que dans la Chambre
dés communes ils doivent être des partis de ma-
jorité pure et simple. La représentation propor-
tionnelle est absolument incompatible avec le par-
lementarisme anglais. Ce système n'a d'ailleurs
pas rallié en Àngleterreles sympathies du public,
bien que les défenseurs ne lui aient pas manqué
160 PARLBMBNXA.BISME UNITAIBE.
et bien qu'on l'ait mis en partie à l'essai (1867).
Mais il est i remarquer qu'on le défend ou qu'on
le combat avec les mêmes arguments que dans
les autres pays, c'est-à-dire avant tout du point
de vue individualiste. Les Anglais ont une cons-
cience aussi peu claire que les autres peuples de
la structure particulière de leut* Constitution, ce qui
ne les empêche pas de sentir instinctivement ce
qui convient et ce qui ne convient pas.
Knfin il ne faut pas oublier, parmi les traits
caractéristiques de cette Chambre anglaise élue par
le peuple et des partis qui la composent, que sur
les 670 membres qui y siègent, on trouve à peine
une douzaine d'ouvriers ou de représentants des
ouvriers et pas un seul paysan. Malgré l'exten-
sion du droit de vote, la composition de la
seconde Chambre n'est rieu moins que démocra-
tique. Cela résulte, il est vrai, en partie du coût
toujours élevé des campagnes électorales et de
l'absence d'une indemnité parlementaire, mais
plus encore de la nature même de la Constitution
et du caractère purement constitutionnel des
partis.
Après nous être fait une idée de ces partis et
de la majorité de la Chambre basse, parlons
maintenant du Cabinet, qui est l'autre facteur
dominant de la vie politique anglaise. Le Obinet
jLNOLBTERRK. 161
est sorti historiqnement du Privy Council : il cons-
tituait le petit cercle des hommes avec lesquels le
roi s'entreteuait des affaires du royaume et dont
il se servait pour les mener à bonne fin. Les mi-
nistres, comme on les appela plus tard,
étaient à l'origine, comme daos tous les Etats
monarchiques, les hommes de confiance du roi.
Il choisissait ceux qu'il voulait et il les congédiait
lorsqu'ils avaient cessé de lui convenir. Cet état
de choses continua aussi longtemps qu'il fut pos-
sible à la royauté d'organiser elle-même une ma-
jorité dans la Chambre basse, c'est-à-dire jusqu'à
la dernière partie du règne de Georges 111.
En revanche, le principe de l'homogénéité du
Cabinet s'introduisit déjà au temps de Guillaume
d'Orange. Ce fut le premier pas vers l'émancipa-
tioD, vers le stade où le Cabinet cessa de dépen-
dre du roi pour dépendre de la majorité de la
Chambre des communes. On s'approcha encore de ce
stade avec Walpole, lorsque le Cabinet eut un
chef, le premier ministre, qui représentait le Ca-
binet devant le roi et qui le conduisait dans le
Parlemeot. Enfin le dernier stade fut franchi
lorsque, comme nous l'avons dit, la majorité de
la Chambre basse s'émancipa elle-même de la
royauté. La liaison entre le Cabinet et cette ma-
jorité était en effet si étroite que celle-ci devait
.„,,..G.Kvsl^
162 FARLËMBNTARI3UE UNITAIRE.
maintenaiit suivre cèlui-U. Aucun goùvernemetit
n'était possible sans l'accord avec la majorité par-
lementaire. C'est pourquoi le Cabinet dut suivre
la majorité comme la majorité avait suivi le Cabi-
net. C'est ainsi que le choix des ministres glissa
des mains du roi, et qu'il y eut en ce cas comme
dans tant d'autres, substitution de la Chambre à
la royauté. Sans doute la Chambre des com-
munes ne nomme pas les ministres et ne les in-
dique même pas; mais le monarque estnéanmoins
lié dans son choix. 11 doit prendre les person-
nages que la majorité reconnaît pour ses chefs ;
c'est généralement le plus en vue parmi eux qui
est appelé à dresser une liste des futurs ministres,
et cette liste est immédiatement approuvée.
Le Cabinet proprement dit comprend à peu
près les mêmes fonctionnaires que les ministères
des autres pays, quoique ces hauts personnages
anglais soient souvent chargés de fonctions et de
titres archaïques. Cependant le nombre des
hommes qui font partie du Cabinet est plus consi-
dérable que partout ailleurs, même si on néglige
la suite parlementaire que le Cabinet traîne après
lui et qui comprend même le personnel le plus
intime de la cour royale (par exemple les camé-
rières de la reine Victoria). On compte en tout
de cinquante à soixante personnes appartenant au
AKQLETEBRE.
Cabinet on qui l'accompagnent. Mais la question
de la composition du Cabinet est moins importante
pour notre exposé que la question de son exis-
tence. Le Cabinet se maintient ou tombe suivant
que les votes de la Chambre basse sont pour lui
ou contre lui ; ce que dit ou fait la Chambre haute
n'entre pas en ligne de compte. Il peut sembler
étrange, étant donné le système anglais du gou-
vernement d'un parti, que les votes puissent être
contraires au Cabinet. Que cela ait lieu dans les
pays où la majorité résulte d'une coalition de
partis différents, rien de plus naturel ; mais ici où
le gouTernement est le mandataire de la majorité,
le même fait prend un aspect plus singulier : voter
contre le gouvernement, c'est, semble-t-il^ se ren-
verser soi-même. Mais ceci nous prouve tout sim-
plement une fois de plus que l'Anglais n'est pas
homme de parti au sens continental du mot. Ce
n'est pas seulement la grande masse du peuple
anglais qui se tient en dehors des partis ; celte
indépendance s'étend jusqu'à la Chambre des
Communes, à (elles enseignes que des hommes
élus hier comme libéraux peuvent voter aujour-
d'hui avec les conservateurs et vice versa. Ce n'est
pas parce que la discipline leur a fait défaut, mais
parce que l'opinion du pays s'est retournée. Les
partis du Parlement anglais ne font pas en effet
..,,..G.Kvsl^
164
de politique pour leur compte personnel, comme
cela se fait ailleurs, mais ils sont en règle g^éoérate
un écho fidèle des mouvements d'opinion qui se
manifestent en dehors de leurs murs.
Autrefois, avant que le régime parlementaire
fût parvenu k la perfection qu'il possède aujour-
d'hui^ et lorsque la volonté du monarque signifiait
quelque chose, on voyait durer longtemps les
mêmes cabinets. De nos jours ils sont devenus
plus éphémères, c'est-à-dire qu'ils suivent mieux
les fluctuations de l'opinion publique. C'est celle-ci
en dernière analyse, c'est l'opinion publique
éclairée qui fonde ou qui renverse les cabinets.
Le choix des ministres par la nation a remplacé
le chois qui en était fait autrefois par le monarque.
Mais celui-ci n'est pas pour cela un simple spec^
tateur oisif des revirements de l'opinion. Au
contraire, c'est précisément dans ces occasions
que le monarque dépose le rAle passif auquel
l'évolution politique du pays a fini par le con-
damner. Représenter l'État d'une part et de
l'-autre s'entremettre dans les crises ministérielles
et en surveiller la marche, telles sont actuelle-
ment les deux t&ches les plus importantes du
monarque angltûs. La seconde en particulier exige
beaucoup de tact et une vue claire de la situation.
Eu effet, beaucoup de cas différents peuvent se
AN0LET&BRR. 16d
préseoter, et entre autres celui où la Chambre basse
ne correspond plus à l'opinion publique et où )a
dissolution du Parlement accompag:née d'un appel
aux électeurs peutse présenter comme une nécessité.
Or c'est au monarque qu'il revient de juger ce
cas ainsi que d'autres moins graves : telle est sa
tâche spéciale. Comme on le voit, le roi d'Angle-
terre est arrivé à prendre, dans ce domaine que
ne spécifie aucune loi écrite, un rôle considérable,
lequel est comme un dédommagement pour l'omui-
poteuce qui lui était enlevée sur d'autres teiTains.
En outre, il est incontestable que le roi peut
exercer une influence morale sur les ministres et
sur la direction du gouvernement ; mais cette
influence, qui n'est pas conditionnée par la Cons-
titution, est accidentelle et dépend des qualités
personnelles du monarque.
111
LE GOtVEHNEHENT
Après avoir indiqué le minimum nécessaire
sur la situation extérieure et l'organisation de la
majorité et du Cabinet, il nous reste à les consi-
dérer dans leur activité comme organes d'État,
et cela d'une façon générale aussi bien que dans
166 PAHLBUENTABI8UB DNITiJBE.
les rapports mutuels de ces deux organes. Le
Parlement est le seul véritable pouvoir de l'Etat;
il est tout- puissant. Suivant un mot connu dont
l'auteur est de Lolme, le Parlement peut tout,
excepté faire d'un homme une femme et d'une
femme un homme. Les juristes anglais depuis
Blackstone jusqu'à Dicet répètent à près la même
chose, mais avec leur formalisme tiabiluel ils
mettent en cause non le Parlement tout seul maÎB
tke King in Parliament, autrement dit les trois
personnes politiques dont l'approbatioD est offi-
ciellement requise pour chaque loi : King, Gom-
mons and Lords. Mais, comme nous l'avons indi-
qué, deux des personnes de cette trinité ne sont
que des comparses sans volonté; et surtout la
quote-part du roi dans le pouvoir a été réduite à
un minimum. On est donc fondé à affirmer qu'en
Angleterre le Parlement est le véritable souverain
et que le régime anglais est un gouvernemeDt
démocratique exercé exclusivement par le Parle-
ment. Si l'on examine une à une les attributions
de ce dernier, on pourra vérifier la justesse de
notre théorie.
Toutes les questions d'impôts, comme il
fallait s'y attendre, sont eiitre les mains du Par-
lement, et aussi tout ce qui concerne les dépenses
et les revenus de l'Etat. Il est vrai qu'environ les
..,,..G.H,^1C
ANOLETERBE.
6/7 des revenus totaux sont stable;
dit soustraits aux votes annuels, de
tiers environ des dépenses (dette pi
civile, pensions, etc..) Mais déjà sou
Charles II la Chambre des commui
garantie que tous ies articles inscrii
seraient ponctuellement observés, e
face aux dépenses, lesquelles sont c
spécifiées, il faut une autorisation
est donnée sous une forme générale p
priation act annuel ; à cela se joini
cipHne act {Mtitiny act) relatif à l'a
lois militaires ; cet acte, égalemçnt
ans, complète la toute-puissance 1
Parlement. Celni-ci dispose encore
législatif tout entier : la seule part
désormais le roi consiste à apposer t
au bas des décisions du Parlement, f
roi a théoriquement en réserve son i
qu'aucun acte ne lui a enlevé; mais
ce droit est suspendu pour toujout
s'est produite cette décadence, c'est
ne pouvons raconter ici en détail. Ë
duite sans que les hommes d'État ni
narque lui-même s'en soient aperçu
est pourtant une conséquence do
C'est ainsi que la logique naturelle dei
.Goagk
n
nLEMBNTABISllE UNITATRE.
it des plans conçus par les hommes
sont l«s eiforts constaDts du mo-
î'assurer la majorité parlementaire
. conséquences si désastreuses pour
al. Car comme l'harmonie complète
tuellement entre le gouvernement
i de la Chambre basse, celle-ci ne
! décision qui n'eût été par avance
monarque. Par suite la sanction
ultérieurement était une chose qui
Au cours d'un siècle de pratique,
nplanta si définitivement dans les
and plus tard le pouvoir de co&sti-
té vint à échapper au roi, le droit
en même temps. On s'était habitué
ngtemps à. considérer la sanctioo
jne pure formalité, qu'elle le devint
de bon. La couronne ne possède
lent aucun pouvoir propre eu ma-
ation, excepté en ce qui concerne
orcfers, c'est-à-dire le règlement de
es administratives peu importantes,
tte réglementation exige lapproba-
expresse du Parlement pour avoir
de contrôle exercée par la Chara-
emement n'est pas aussi développée
..,,..G.Kvsl^
AN&LKTBBBB. 169
que les autres fonctions : elle l'est en tous cas
beaucoup moins qu'en Suède. Tout d'abord, ce
contrôle ne porte que sur la gestion des finances
du royaume. Toutes les autres attributions du
gouvernement peuvent donner matière à inter-
pellation et à eiamen, mais tout à fait acciden-
tellement, car il n'esiste pas de procès-verbal à
examiner : il n'est tenu aucun protocole des
délibérations du Cabinet. Et même d'autres actes
demeurent en règle générale inaccessibles au
Parlement ; la plupart du temps c'est le ministre
intéressé qui juge lui-même s'il doit les réserver
ou les faire connaître. Même le contrôle de l'ad-
miniatration des finances a été jusqu'en 1866 très
incomplet. Il s'est perfectionné depuis cette date,
mais il est confié pour l'essentiel à un service
spécial de fonctionnaires à demeure {ihe Départ-'
ment 0/ Exehegner and Audit), ayant pour chef
ihe Comptroller gênerai. Les causes dernières
pour lesquelles ce côté de la puissance parlemen-
taire est resté si négligé, peuvent se ramener à
deux essentielles ; le peu de développement du
système des comités dans le parlement anglais
et, en outre, le régime du gouvernement de parti,
lequel a pour base principale la confiance. Le
gouvernement est composé précisément des
hommes de cpnGance de la majonté. Celle-ci ne
..,,..G.Kvsl^
=,Coogk
ANOLETBRRE. 171
Il y a cependant uoe attribution beaucoup pins
importaote ; c'est celle qui concerne les privale
bilh. Toutes les fois qu'une entreprise locale ou
privée exige une autorisation officieUe, cette
autorisation est demandée au Pariement, qui
l'accorde ou la rejette sans l'assistance du gou-
vernement. Toutes les demandes relatives au
droit d'exproprier des terrains, de construire des
chemins de fer, des canaux, des ports, etc..
sont adressées au Parlement, qui se trouve
exercer ainsi une des fonctions du pouvoir exécutif.
L'origine de cette curieuse usurpation de pouvoirs
doit être cherchée dans le droit général de légis-
lation attribué au Parlement. Les autorisations et
demandes en question étaient considérées comme
des exceptions au droit général et par suite elles
devaient être portées devant la même institution
qu*i avait fait les lois. Cependant les private bUts
ne sont pas traités de la même manière que les
autres projets de lois, et ils sont soumis à une
procédure qui ressemble à celle des tribunaux
ordinaires. — Enfin, pour nous en tenir aux attri-
butions politiques du Parlement, (on sait que les
deux Chambres ont en outre des attributions
judiciaires pour leurs affaires particulières et que
la Chambre des lords fait fonction de tribunal
suprême dans la juridiction générale), nous rap-
L..8.IIMD. Google
ILByENTABlSUE UMTAIHE.
ouvoir que possède chacune des
es d'instituer des commissions
s n'importe quelle circoostance,
d'entendre des témoignages sous
i voit, le Parlement anglais dispose
vraiment unique. On peut dire
ré en lui tout le pouvoir de l'État,
réfléchit que le ministère est seule-
station du Parlement. En tous cas,
1 de la Constitution toute entière, il
[louvoir avec aucune autre institu-
Mais voici maintenant le point le
lile de l'étonnante Constitution an-
s grande partie de cette aulorilé,
t ne la possède qu'en puis-
dire, elle n'est afïtuelle que dans
is par nous en dernier lieu (péti-
bills et commissions d'enquête) ;
, elle demeure pour ainsi dire en
que tout-puissant au point de
le Parlement anglais exerce
luîssance moindre qu'aucune
entation moderne. Ajoutez à
membres individuels sont aussi
e nulle part ailleurs. Le tout-puis-
. anglais est sur le point de subir
..G.Hvsl^
ANOLSTEKBR. 173
le mënie sort qui a frappé le monarque jadis
autocrate. Le pouvoir que le Parlement a arraché
au roi morceau par moroeau, il le perd lui-
même.., au profit du Cabinet. Le Cabioet, que
la constilutioQ écrite ne connaît même pas, hérite
QOQ seulement du pouvoir royal, mais encore de
la plus grande partie des pouvoirs du Parlement.
Le Cahiuet est à l'heure actuelle le
véritable souverain de l'Angleterre.
Il exerce cette puissance immédiatement et en
pleine indépendance par une autorité ministé-
rielle très étendue ; il gouverne tantêt collégiale-
ment, tantôt séparément et par ministères dis-
tincts. La politique étrangère^ qui est une ques-
tion vitale pour ce vaste Empire, est traitée par
le ministre compétent avec l'assistance de ses
collègues et avant tout du premier ministre, sans
immixtion du roi oi du Parlement. La royauté (sous
la reine Victoria) a eu de la peine à se réserver le
droit d'être simplement renseignée sur les affaires
étrangères; quant au Parlement, il ne peut même
pas prétendre à cela et doit se contenter de ce que
le ministre veut bien communiquer aux Chambres
et à la nation sous les espèces d'un « livre bleu a.
De plus, la nomination aux emplois est en règle
générale l'affaire personnelle du ministre, lors-
qu'elle n'est pas confiée à des autorités en sous-
..G.Kvsl^
LEUSNTARISMB UNITAIRB.
;, le ministère et ses membres tran-
siDS pouvoirs toutes les questions
ressort du gouvernement, excepté
ent dans la catégorie prioate bills.
isposent de ressources budgétaires
i réservent à l'avance avec droit de
i seulement pour l'administration
ft flotte. En même temps ils ne sont
nous l'avons vu, à aucun contrôle,
ni concerne les dépenses ordinaires
.al orders, qui doivent être présen-
nt.
ble que soit cette autorité gouver-
édiate, ce n'est cependant pas elle
jabinet sa puissance inouïe ; celle-
irectemeat de ses rapports avec le
nt il dirige complètement les
]te initiative, non seulement en
^islation, mais encore en matière
finances, a été transportée du Par-
stère. Pour cette dernière initiative
iransfert s'était produit de bonne
n 1706 un règlement permanent
') établit que la Chambre des com-
ssède l'initiative dans les questions
i, ne peut accepter de personne,
ironne, aucune pétition ni aucune
ANOLBTBRRB. 175
motion visant le budget de l'État. Celte prescrip-
tion est devenue par la suite une des règles fon-
damentales de la vie politique anglaise et une
garantie contre tes influences privées ou locales
qui s'exercent si souvent dans d'autres pays.
Mais par là aussi le pouvoir immédiat de la
Chambre se trouve singulièrement réduit dans
tous les domaines de la vie politique puisque
presque toutes les mesures exigent de l'argent.
Pour ce qui est de l'initiative des lois, la situa-
tion du Parlement n'est guère meilleure. Sans doute
cette initiative est laissée en théorie à tous les
membres des deux Chambres ; mais l'ordre dujour
met de tels obstacles aux propositions des motion-
naires que très peu d'entre elles sont acceptées pour -
examen ; et un projet n'a de chances de passer que
si le gouvernement veut bien le prendre en main, et
le faire sien. En somme, le droit de uiotiou, dont
on fait malgré tout un usage très fréquent dans
la Chambre des communes, ne donne guère do
satisfaction sauf dans des cas très rares. Le Cabi-
net répond à lui seul du travail législatif. Le Par-
lement se borne à adopter ou à rejeter, après
discussion naturellement, les projets du Ministère,
ou plus exactement il se borne à les adopter. Car
aussi longtemps que le Cabinet a la confiance de la
Chambre, c'est-à-dire aussi longtemps qu'il a pour
L..8.IIMD. Google
PABLBBdBNTi^RISUE UNITAIRE.
orité, la Chambre doit dire amen à tout
i propose. En Angleterre, disions-nous,
mt domine tout; mais le Cabinet domine
eut et c'est lui en lin de compte qui
it le pouvoir. Rousseaiij parlant de la
peuple anglais, dit quelque part que cette
devient réelle que dans les occasions oA
ïhoisit une nouvelle Chambre <. On pour-
ivec plus de raison que le Parlement
et puissant que dans le moment oti il
i Cabinet. En temps ordinaire il est seu-
instrument docile entre les mains du
présente à nous le parlementarisme
épouillé de ses ornements archaïques
rrompe-l'œil. Plusieurs s'étonneront de
e nous venons d'en tracer et la tronve-
différente de celle qu'on se forme
i. La souveraineté parlementaire qui
stituée, après des siècles de lutte, à la
té du prince, a en fait cédé la place à
monie ministérielle. C'est là le trait
'actéristique de ce type de parlementa-
is c'est aussi le plus énigmatîque. On
le involontairement : Comment a-t-il
twiaJ, livre III, chap. xv.
.NQLBTEBRE-
pu se faire que le pouvoir du Parlement ait
passé aussi complètement entre les mains du
ministère? Pourquoi le Parlement n'a-t-il pus
conservé par devers lui la puissance qu'il avait
conquise de haute lutte sur la royauté ? La
réponse à ces questions nous est fournie en
partie par toute l'histoire des deux derniers siècles
et notamment par cette prescription de 1706,
relative aux money bîlls. Mais il faut faire inter-
venir aussi, — je dirais même surtout, — un fuit
purement technique, savoir : lepeude dévelop-
pement du système des comités dans le
Parlement anglais. C'est seulement pour les
pétitions et les private btlls que nous trouvons
(les comités hien organisés, et encore sont-
ils de date tardive (années 1833 et suiv.}. On
ne peut faire entrer en ligue de compte les
standing commutées {pour les questions législatives
et les industries), institués en 1882. Du reste le
système des comilés comprend depuis très long-
temps la Chambre entière {Commiltee oflAe whole
Hotise), où les ministres et leurs suppléants sont
présents et dirigent le débat. Par là toute
domination des comités sur le ministère s'est
trouvée empêchée, et surtout le Parlement a été
hors d'état de traiter les affaires au lieu et place
du gouvernement ou de s'immiscer dans l'activité
Ci D. Google
FÀRLEHBNTABISUE UStTAtBE.
uementale. Cepeadant une tentative de ce
fut faite en 18aa, lorsqu'on institua une
ssion pour examiner la situation de l'armée
il la guerre de Crimée; mais, bien que
ue par PALMEnsTON, cette innovation fut
lement mal accueillie. Elle donna à Gulds-
'occasion de prononcer quelques paroles
priment bien les idées anglaises sur tes
ts mutuels du gouvernement et du Parte-
. « Une pareille commission, » disait-il,
:n( une commission gouvernante qui enlève
■voir exécutif les plus hautes et les plus
autes de ses fonctions. Je suis convaincu
istitntion d'une pareille enquête confiée 4
immission parlementaire est incompatible
i confiance que le Parlement doit avoir
ts chefs du gouvernement, et surtout avec
tige et l'autorité nécessaires aux ministres
louronne, t quelque parti qu'ils appartien-
t quels que soient leurs principes politi-
>. Ces paroles, qui visaient une commission
e, peuvent s'appliquer plus généralement
auière dont on envisage en Angleterre le
des comilés. Cette conception est à la fois
nséquence et une cause du gouvernement
>rès AN30N, The Inw, etc., p. 367.-
..G.Kvs'^
de cabinet tel qu'il se pratique en Âng'ieterre. Il
a manqué au Parlement anglais les orgaoes
nécessaires pour exercer la puissance qui était en
lui. C'est pourquoi cette puissance a été transfé-
rée au gouvernement; c'est pourquoi la Constitu-
tion anglaise est devenue ce qu'elle est actuelle-
ment, à savoir un gouvernement de parti
concentré dans un cabinet tout-puissant.
A la différence des autres variétés de parlementa-
risme, celle-ci peut être appelée non seulement
UD parlementarisme anitaire^ mais plus eiacte-
meat un parlementarisme de Cabinet.
m
LE PARLEMENTARISME ANGLAIS SUR LE COHTINKNT
Après avoir étudié le parlementarisme de Cabi-
net dans sa patrie d'origine, il convient de le
suivre dans les applications qu'il a reçues hors
de ses frontières. Mais on comprend que nous ne
puissions pas traiter ce sujet en détail. Nous nous
contenterons de passer en revue quelques cas, en
insistant particulièrement sur les déviations
diverses subies par le type primitif. Le système
politique de l'Angleterre a été plus admiré que
bien compris. Aussi les imitations sont-elles très
1
1P0 IMITATIONS DU STSTiME ANQLAfS-.
différentes de l'original. Il u'y a rien d'étonnaut
à cela, car la Constitution ai)g:laîse est l'œuvre en
grande partie inconsciente d'une évolution de
huit siècles, le produit naturel du génie d'une
race. De ce long travail ou ne pouvait copier que
les résultats extérieurs consignés dans les lois et
dans les institutions: mais l'esprit qui animait la
lu anglaise et qui avait présidé à sa
croissance n'était pas susceptible d'imitation. Même
l'imitation des caractères extérieurs n'a été réussie
qu'en partie^soitque les institutions anglaises soient
trop intimement liées & l'histoire et au génie du
peuple anglais pour pouvoir exister sans leurs ra-
cines, soit qu'on n'ait pas compris le mécanisme de
la Constitution prise pour modèle. Le moyen le
plus simple de bien apercevoir ces erreurs est de
dresser une liste des traits caractéristiques de la
Constitution anglaise et de la confronter avec les
bopies. Voici donc quelles sont les pierres angu-
laires du parlementarisme anglais :
Un monarque qui ne participe pas aux délibé-
rations du Cabinet et qui ne dispose pas du veto
contre les décisions du Parlemeat ;
Un Parlement composé eri fait d'une Chambre
unique, étant donné que la Chambre haute a perdu
toute importance politique et toute personnalité ;
L'absence de comités permanents pour diri-
-^""^\_,J
CIFFIÎBKNCKS ESSKNnBI.LES. 181
ger le Parlement el contrôler le iniDÎstère ; et
d'ailleurs absence totale de procès-verbaux, miois-
tériels que Ton puisse examiner et discuter ;
Le Cabiuet possédant l'initiative entière en ma-
tière de finances comme en malière de législation
et dirigeant les travaux du Parlement ;
Un Cabinet composé des hommes de confiance
de la majorité;
Une majorité parlementaire homogène et deux
partis seulement;
Le corps électoral échappant dans son ensemble
à l'influence des partis et donnant la prépondé-
rance tantôt à l'un tantôt à l'autre.
Si l'on compare avec ce schéma les constitutions
que l'on a établies après coup en Europe d'après
le modèle anglais, on constate partout de grandes
divergences. Presque toutes se séparent du modèle
en ce qui concerue la nature des partis. En
efi'et, ceux-ci ont souvent pour base une différence
de religion ou de nationalité, et alors l'antagonisme
prend un caractère permanent. Les partis ne de-
meurent plus à la surface, ils pénètrent dans l'inti-
mité de la nation ; si bien qu'il est impossible de
passer de l'un à l'autre à la manière anglaise.
Ou bien encore l'antagonisme des partis a un
caractère social, il s'agit d'une lutte de classes.
En ce cas également la scission est profonde, bien
..G.Kvsl^
IMITATIONS DU
(}ue moins grave et moins intime que dans le cas
précédent. Un revirement peut se produire ici
dans l'opinion et parmi les électeurs, mais il se
produit ordinairement après que le parti dirigeant
a fait beaucoup de mal au pays. En tous cas les
partis ont toujours derrière eux des intérêts à
défendre ; ce ne sont pas, comme en Angleterre,
de simples partis de gouvernement. D'ailleurs ils
sont plusieurs au lieu d'être seulement deux. De
même les idées continentales d'après lesquelles il
doit y avoir une droite, une gauche et un centre
aussi nombreux que possible, jurent complètement
avec l'organisation anglaise. Il en résulte que la
majorité parlementaire est souvent -tmc -majorité
de coalition, sans consistance et sans principes, et
par suite sans lien véritable avec la nation. En ce
cas le pays n'est pas gouverné d'après l'opinion
éclairée, mais suivant le hasard des groupements
de partis dans le Parlement.
A côté de ces dissemblances qui résident en
dehors de la Constitution proprement dite et qui
ont leur origine dans des différences historiques
ou psychologiques, il en est beaucoup d'autres
qui portent sur les institutions elles-mêmes. Il
convient d'en signaler une tout particulièrement,
parce qu'elle se présente à chaque pas: c'est" la
façon différente dont on a organisé les
...G.Hvsl-
J
DIFFÉRENCES ESSENTIELLES. 18'J
comités et dont ils fonctioanent. L'ab-
sence de comités permanents est, avons-nous
vu, un fait capital dans la Constitution parle-
mentaire anglaise; et ce fait nous a aidé à expli-
quer te régime du gouvernement ministériel.
Partout où le Parlement est arrivé à organiser
son travail et A le répartir entre un certain nom-
bre de petites délégations, celles-ci font des efforts
sHtoD pour prendre elles-mêmes la direction des
aSaires, du moins pour esercer sur les ministres
une sorte de tutelle et les transformer en exécu-
teurs plus ou moins soumis de leurs volontés. Il
est clair qu'ainsi l'autontédont les ministres peu-
vent disposer sur le Parlement leur échappe faci-
lement des mains. En tous cas ils doivent soute-
nir une lutte perpétuelle pour l'hégémonie. Ce
système porte en même temps atteinte à l'orga-
nisation intérieure du ministère etnuit à sa cohé-
sion, lorsque chaque ministre doit, comme en
Belgique et actuellement aussi en France, répon-
dre de ses actes devant un comité spécial et
discuter avec elle. Mais ce qu'il y a de pis,
c'est que le Cabinet n'est plus en état de conduire
le gouvernement avec rindépendance et la sûreté
de msdn qu'exige le bien général et qui devraient
précisément faire la force et la supériorité du par-
lementarisme de Cabinet. Il est curieux que les
..,,..G.Kvsl^
184 IMITATIONS DU SYSTEMS ANSLAtS.
hommes d'État n'aient pas vu clairement l'incom-
[lattbîlité de celte dernière forme de gouverne-
ment avec le système des comités. Du reste,
dans les pays qui ont adopté le même régime,
les Parlements nouvellement créés ont trouvé
dans l'exercice direct du pouvoir un avantage
trop tentant pour en foire sacrifice au ministère,
comme le système l'eût cependant exigé.
Enfin on peut rapprocher de cette déviation un
usage très général d'après lequel des projets budgé-
taires pei\veiit être présentés sous forme de motions
individuelles. Mais il semble qu'eu fait des motions
de ce genre ne se produisent pas bien souvent.
En dehors des différences générales que nous
remarquons entre les imitations et le modèle,
-chaque pays nous offre ses déviations particulières.
La Belgique, qu'il convient de citer en tète
puisqu'elle est considérée comme la première in-
troductrice de ce régime sur le continent, l'a en
fait si mal imité qu'on se demande, — comme
nous l'avons déjà dit, — si le système belge est
une monarchie constitutionnelle ou bien te parle-
mentarisme. Ainsi le roi y dispose d'une influen-
ce beaucoup plus grande que celle qui devrait lui
revenir dans un régime parlementaire du type
anglais. Et en effet il est dit expressément dans ta
Constitution belge que le roi exerce telle et telle
BELGIQUE. 189
fonction, saoctionne les lois^ — ou nnème leur
refuse son approbation, — fait et défait les mi-
nistres, dirige l'armée, s'occupe des affaires étran-
gères, etc. En Angleterre le monarque possède
théoriquement les mêmes attributions, mais elles
sont depuis longtemps recouvertes par la pous-
sière de l'oubli et l'on ne s'en sert plus. Par
contre, en Belgique, comme partout où le parle-
mentarisme a été codiGé à une date récente, les
prescriptions constitutionnelles ne sont pas lettre
morte. D'autres circonstances contribuent à donner
nu monarque un r<Me plusimportantqu'ilnedevrait
être dans c6 régime et qui, semble-t-il, ne fait que
s'accroître : ainsi la part qu'il prend aux délibéra-
tions du Conseil des ministres, les conférences
privées qu'il tient avec les ministres particuliers
à côté du chef de cabinet, et surtout l'étal des
partis, qui fait souvent de lui un véritable négo-
ciateur entre des adversaires acharnés et qui par
suite le rend maître de la situation politique. De
même le système à deux Chambres est en Belgi-
que plus développé qu'il ne conviendrait à ce type
de parlementarisme. Cependant ce défaut est
atténué par le fait que ce sont les mêmes élec-
teurs, — sauf la différence d'âge (25 et 30 ans), —
qui choisissent les députés et la plus grande par-
tie des sénateurs. Le système de la représenta-
..,,..G.Kvsl^
1S6 IMITATIONS DU STSTÈUK ANQLAIS.
tioD proportionnelle ne s'accorde pas non plus
avec le parlementarisme majoritaire. Mais la na-
ture des partis belles, — qui s'accorde encore
moins avec un tel régime, — rendait nécessaire l'in-
troduction de ce système de vote.
En Italie le ré^me des deux Chambres ne
constitue aucun obstacle réel à un gouvernement
de majorité, car le Sénat, entièrement nommé par
le roi, n'est guère autre chose qu'une assemblée
de conseillers et de réviseurs. Mais, il y a, dans
la Constitution même et plus encore en dehors
d'elle, d'autres circonstances qiri font que le sys-
tème italien présente des défauts graves. La
situation du Cabinet se trouve affaiblie d'un cdté
par l'influence du monarque et de l'autre par
celle de la représentation. Le roi peut prendre
part aux délibérations des ministres et même
conférer, comme en Belgique, avec les ministres pris
séparément; de plus, il participe activementà la for-
mation du Cabinet. Par suite de l'élat des partis,
celui-ci est régulièrement un ministère de coali-
tion. Il n'est donc pas homogène et ne trouve
pas parmi les représentants une majorité com-
pacte qui le soutienne. Au lieu de se présenter
comme les partis belges, en phalanges solides,
les partis italiens sont extrêmement mobiles et
vacillants. Mais le défaut capital c'est le u ré-
--' — 'B
ITALIB, ORàCE, NORVâQB. t87
gionalîsme », c'est-à-dire la tyrannie des intérêts
locaux et individuels, A ce point de vue Ja Caméra
dei deputati est à peine une représentation mo-
derne ; et la Chambre à laquelle elle ressemble
peut-être le moins^ c'est pi'éciséEnent la Chambre
des communes, dont on connaît les mœurs sévères
en matière d'influences locales et particuUères.
Dans la péninsule balkanique, et principale-
ment en Grèce, des tentatives ont été faites,
comme on le sait, pour acclimater le parlementa-
risme anglais. La Grèce satisfait extéiieurement
aux exigences de ce régime ; elle a une Chambre
unique et un gouvernement de Cabinet ; mais
l'élat des partis et le caractère de la nation ne
sunt pas & lu hauteur d'un système aussi perfec-
tionné.
De nos deux pays voisins, la Norvège et le
Danemark, le premier pré tend avoir appliqué jus-
qu'au bout le système parlementaire. Et en fait la
Norvège a établi complètement te gouvernement
populaire, à la suite d'un long conflit entre le
Storting et la Couronne, conflit dont la cause
profonde était dans le caractère hétérogène de la
Constitution de 181 i et qui se termina en 1884
par une condamnation, sans précédent dans
l'histoire moderne, des conseillers d'État. Par
certains côtés encore ce régiine rappelle beau-
^"■^^'w™
U STSTÈUE
ainsi par le système à une
adition nécessaire pour une
ar le droit de veto suspensif
V l'infliience très limitée de
le gouvernement exercé en
! la voie à un gouvernement
présence du monarque aux
et le Cabinet norvégien gou-
i large mesure. Enfin, ea
ngleterre nous ne trouvons
que deux grands partis,
es ressemblances qne nous
le gouvernement populaire
oïncide nullement avec le
abinet. En eflet, outre que
tés y est fort développé,
uède l'examen des procès-
es ministres. Or rien n'est
ce contrôle avec le parle-
anglais. Il soumet les
e minutieuse qui leur enlève
ïnce eu eux-mêmes et qui
eurs rapports avec la repré-
uoi l'initiative et la direc-
passé entre les mains du
s >( conseillers d'Etat » sont
I attentifs à la volonté du
DANEU\RE.
maître. Enfio, si l'on cousidère le caractère des
partis narvégieDS et l'esprit ultra-démocratique
qui anime toute ta vie politique de ce pays,, on
voit que la Coostitution Dorvégienne est loin du
type que nous appelons le parlementari&me de
Cabiaet. Elle me parait plutôt en train de passer
à une autre catégorie de parlementarisme, par
exemple à un régime oîi la Chambre gou-
vernerait.
En Danemark, où après de longues luttes, —
causées elles aussi, en dernière analyse, par des
antinomies constitutionnelles, — un ministère de
gauche est arrivé au pouvoir (1901), ce change-
ment politique a fait espérer l'introduction d'un
régime parlementaire sur le modèle anglais. Il
est possible que le Danemark en arrive là, malgré
la situation trop indépendante du landsting et
malgré l'importance du rôle attribué au roi.
Certaines particularités font que le terrain parait
ici mieux préparé que nulle part ailleurs à rece-
voir cette plante importée d'Angleterre, — pourvu
Baturellement qu'on ne g&che pas les choses
par ignorance. En Danemark, les comités ne
tiennent qu'une place très restreinte et on ne
connaît pas l'examen des procès-verhaux ministé-
riels. Les ministres ont de grandes attributions
gouvernementales, et nous trouvons dans la
L..8.IIMD. Google
"^
TATIONS DD STSTÈMK ANIïl^S.
e ministérielle » ainsi que dans le
outd'hui rarement appliqué, — de la
des éléments favorables à uu déve-
lus complet encore du gouvernement
Enfin la situation réciproque des
■,e petit pays est relativement simple
t pas impossible d'arriver à. un grou-
etix grands partis : uoedroUe et une
• le grand obstacle, ici comme ailleurs,
nation elle-même est engagée dans
t qu'il manque en Danemark cet
cratique si marqué dans le régime
ndant la France qui nous présente
curieux de parlementarisme unitaire.
',e régime n'est pas, comme à l'ordi-
: à une monarchie, mais & une répu-
élange n'avait de précédent que dans
ts de l'autre c6té de^l'Âtlantique : le
ezuela, Haïti et Saint-Domingue ; et
odèles n'étaient pas très engageants.
s du droit constitutionnel ne recOm-
is non plus cette-combinaison comme
déal. Il est vrai que les idées poli-
ips étaient favorables à une république
in parlementarisme majoritaire ; on
chacun de ces systèmes la garantie
d'une souveraineté populaire, mais od ne songeait
pas à les foadre ensemble. Ce furenl en fait le ha-
sard et les circoDstances, bien plus qu'une pensée
politique consciente, qui donnèrent à la France
en 1875 le régime conservé par elle depuis lors.
Deux partis se trouvaient en présence, dont l'un
voulait une monarchie sur le modèle anglais et
l'autre uoe république. Le résultat fut un compro-
mis qui réunissait les deux systèmes.
Beaucoup penseront peut-être qu'un pareil
compromis est condamné d'avance. Joindre
ensemble un régime qui s'est développé dans
une monarchie et qui porte des traces multiples
de celte origine, et d'autre part la république,
qu'on se représente généralement comme l'anti-.
thèse même de la monarchie, voilà une entrepiise
qui peut paraître bien risquée. Sans doute l'anti-
thèse populaire entre la république et la monar-
chie n'est pas juste, puisque, comme on l'a vu,
les constitutions politiques ne. se définissent pas
par le caractère du chef de l'Etat. Cependant il
est incontestable que ce dernier élément a une
grande importance et qu'il doit, comme tous les
éléments importants d'une constitution, être en
harmonie avec les principes fondamentaux du
système. On peut donc se demander-si un prési-
dent responsable et nommé à terme s'accorde
IMITATIONS DU STSIBMK
bien avec le gouvememeot de parti A la ma-
nière anglaise.
L'une des fonctions principales du chef d'État
dans uo semblable gouvernement, c'est de régler
les changements de ministères. Cette fonction
s'accomplit d'ordinaire sans grandes difficultés
non seulement dans un pays pourvu d'une tradi-
tion politique comme l'Angleterre, mais aussi
dans les autres monarchies parlementaires, gr&ce
à la présence d'un chef d'Ltat héréditaire et irres-
ponsable. Demeurant en dehors des partis, celui-
ci peut observer avec calme leurs fluctuatioas et
effectuer avec impartialité les changements de
gouvernement qu'exige le système. De même un
monarque, et encore mieux une reine, — car
c'est surtout à une femme que convient ce système
politique, — s'accommode en général fort bien
de la passivité imposée pour le reste au chef
de l'Ëtat, Exclus par leur éducation et par
le protocole des luttes et des travaux où se con-
sument les simples mortels, ils se font aisément
à ce rôle de rois fainéants que ta Constitution leur
a assigné.
Mais tout cela convient-il à un président de
république ? Avant d'être promu à sa haute dignité,
il était lui-même un homme de parti, mêlé
aux agitations et aux luttes du jour. Et comme on
n'élève. point à la présidence un homme qui ne
se distingue pas de la foule par son énergie et
par GOQ intelligence, il lui est doublement pénible
de déposer pour ainsi dire ses capacités au ves-
tiaire et de se condamner lui-même à l'inaction
supérieure que réclame son poste. Les présidenls
des autres répubHques, — la Suisse exceptée, —
sont ordinairement des hommes actifs, qui inter-
viennent dans la marche des événements et qui
ne se contentent nullement d'être des dalal-lamas
parlementaires. Il serait étrange qu'en France la
même^ndance ne se fit pas jour. (Vest aussi ce
qui a lieu dans la réalité, et les faits historiques
le démontrent. Sur les sept présidents qui se sont
succédé en France depuis 1875, on n'en compte
pas moins de trois qui ont résigné leurs fonctions
avant l'heure. Ils n'ont pas pu, comme l'exigeait
le système, tenir le rôle de point fisc au milieu
des révolutions ministérielles et observer d'un
œil passif le jeu de la mécanique parlementaire ;
ils ont mis le doigt dans les rouageç en mouve-
ment, occasionnant des crises auxquelles le parle-
mentarisme n'est pas exposé dans une monarchie.
C'est pourquoi le parlementarisme de cabinet et
la république ne vont pas très bien ensemble, du
moins étant donnée la situation qu'occupe en
France le président. On eût peut-être évité quel-
19'l IMITATIONS DD SYSTÈME ANQLAIS.
ques'unes des difficultés si le président avait été
nommé à vie ou élu par tout le peuple, au lieu
d'être choisi pour sept ans et par le Parlement.
Mais la. notion d'un président à vie est en contra-
diction avec les idées démocratiques, et le souve-
nir des événements de 1851 empêcha les Français
de confier au peuple l'élection du chef d'Etat. Eh
tous cas le temps et ]a pratique constitutionnelle
pourront aisément amener l'harmonie nécessaire
et prévenir dés tiraillements résnltaut de cette
cause.
Une autre déviation plus grave, c'est le dévelop-
pement pris en France par le système des deux
Chambres. Le Sénat est ici un facteur politique
beaucoup plus indépendant que lés institutions
correspondantes en Italie et même en Belgique. Les
deux Chambres ont des droits égaux, sauf que la
loi de finances doit être présentée d'abord devaDt
la Chambre des députés. Mais cela ne suffît pas
pour garantir à cette dernière la prépondérance ;
et de même les conseils d'abnégation que le
Sénat reçoit de savants juristes < ne peuvent guère
l'empêcher de faire sentir sa puissance lorsque
des courants d'opûuou divisent fortement les
esprits. La réforme de 1884, qui appliqua le prin-
' 1. Par exemple de M. ESmbin, ÉUmenti, p. 623 et suir.
cipe de l'élection à Ions les sénateurs, ne dut
faire que fortifier la haute assemblée dans le
sentiment du rôle important qu'elle pouvait et
devait jouer. Le conflit qui survint en 1896,
lorsque le Cabinet, malgré la confiance de la
Chambre, dut céder devant la désapprobation du
Sénat et se retirer, démontre clairement qu'il y
a U un organe dont l'adaptation n'est pas com-
plète. Il est du reste très possible que le Sénat
devienne l'appui solide de la Constitution contre
le parti socialiste si celui-ci prédomine dans la
seconde Chambre. Mais c'est là une éventualité
d'ordre politiiiue et qui nous intéresse très peu
dans cette étude des types constitutionnels.
Nous venons de noter deux points importants
par où le régime français s'écarte du parlementa-
risme unitaire. .On peut estimer comme des
divergences plus graves encore le développement
excessif des comités et le caractère toujours
incertain des majorités. Ces défauts se m<inifestent
en effet chaque jour, et tous deux de la même
façon, tous deux ay^nt pour résultat d'affaiblir la
situation du gouvernement et d'amener des crises
ministérielles réitérées. Celles-ci ont aussi pour
cause l'habitude des ordres du jour et des inter-
pellations, qui, bien qu'appartenant au type pri-
mitif, sont devenus en France une véritable plaie.
)96 IMITATIONS DU STSTÂME ANGLAIS.
Sous l'iafluence de ces causes la France a, si je ae
me trompe, usé jusqu'à ce jour quarante et quel-
ques ministères depuis l'itiauguratiou du nouveau
régime.
Par suite de l'émiettement des partis et de l'a-
semblage higarré qui constitue la majorité, autre-
ment dit « le bloc », le cabinet est rarement bien
homogène, et il n'a pas la force de diriger les
Chambres comme le voudrait le système. Cepen-
dant il faut reconnaître qu'on laisse une grande
initiative parlementaire au gouvernement, surtout
si nous comparons ce qui se passe en Suède à ce
qui se passe en France : dans ce dernier pays le gou-
vernement a toujours conservé sa place naturelle
el dirige vraiment les destinées de la nation. Ainsi
au cours des années 1885-1889, sur 598 projets
de lois présentés par le gouvernement et contenaot
des dispositions d'intérêt général, 429 furent adop-
tés, alors que dans le même temps, sur 618 mo-
tions individuelles 79 seulement obtenaient l'appro-
bation de la Chambre'. La puissance extraordinaire
1-L. DupniBZ, Les minûira dam lt4 principaux payt fC Europe
cl d'Amirigue, II [1893), p. 406. Cet excellerit travail dous fait
très bien comprendre les difûoultés avec lesqueUes le gou-
veroement est aux prises eD France comme dans quelques
autres pajs qui out cberclié k imiter le régime anglais.
Voir aussi Lawhbncb Lowbll, Govtmmenis and parties in
Continental Europe, t. I et II (1896).
dontdispose le f^ouveroement français en dehors des
Chambres le dédommage de sa situation dépen-
dante vis-à-vis des partis dans le Parlement et fait
de lui le centre de la vie de l'État. C'est par là
que nous entrevoyons la possibilité d'une marche
heureuse pour l'expérience politique tentée en 1875
malgré les altérations apportées au type et surtout
malgré le caractère des partis et celui de la ma-
jorité, si différents de ce qu'ils sont en Angleterre.
Comme on peut le conclure de cet exposé
succinct, les imitations continentales du célèbre
régime anglais sont à cent lieues de l'original. Le
parlementarisme anglais ou, — comme on dit
aussi, — K le parlementansme » tout court, ou
encore le gouvernement de la majorité, ne se
laisse pas transplanter en terre étrangère sans
que le type s'altère profondément et prenne des
caractères entièrement nouveaux. Toutes les
copies sont plus ou moins des caricatures. Mais
si elles nous apparaissent ainsi lorsqu'on les
confronte avec l'original, ne peuvent-elles pas
avoir malgré cela une valeur indépendante, et en
sont-elles pour cela moins aptes à remplir leup
fonction, qui est de maintenir et de diriger l'Ëtat
d'après les principes de la souveraineté populaire?
Même à ce point de vue, la réponse ne me parait
..G.Kvsl^
ràUB ANâLAlS.
a effet, uous De voyons
t satisfait complètemeot
ielles d'une bonne cons-
voir : 1" que celui ou
iait la voloDté d'État et
; des ministres portant
leine responsabilité
it être jugés par tous et
lu des députés indivi-
; 2° que la majorité
rite et ne se décerne
détriment du bien
itique anglaise, ces deux
d'une manière particu-
>r c'est là précisément
itrefaçons continentales.
,,..C.K,gI. 1
CHAPITRE VU
Le parlementarisme dualiste.
I
ORIGINES ET TRAITS DISTINCTIFS DE CE 3TSTÈMR
Le type de gouveraeineat populaire que nous
allons décrire pourrait, 'par droit de pluralité,
s'appeler le type américain. En effet, non seu-
lement il apparaît presque exclusivement en
Amérique, mais il est dans ce continent même le
type politique dominant, Sa patrie d'origine fut
ici la grande Union, dont la constitution était
fondée au début sur des principes dualistes. De
là, il s'est propagé successivement dans tous les
grands États de l'Amérique à l'exception du
Chili et du Venezuela. En Europe on ne l'a pris
nulle part pour modèle, pas même en Suisse,
bien que cejpays ait été chercher de l'autre côté
de l'Atlantique un certain nombre de matériaux
pour édifier sa constitution, La moitié de la cons-
titution suisse rappelle celle des Ëtats Unis, mais
..G.Kvsl^
EMENTABrSME DUALISTE.
est indigène, d'où il résulte un
ifférent malgré des ressemblances
la Suède, comme nous le savons
ué elle-même et sans rien prendre
ne Constitution parlementaipe à
La Suède est seule en Europe à
fpe constitutionnel. Naturellement
i en a été faite en Suède et vn
urait être identique ; mais, malgré
de détail, le type général est le
t paraître étrange  un non initié :
ficilement, sembie-t-il, deux États
]ue celui de la Suède et celui de
n américaine. L'un est un État
re UD État fédératif ; le premier
:hie, le second une république,
ences ne portent pas sur la Con&->
elles portent sur les espèces
rtaines parties extérieures de la
on sur son essence. Or c'est de la
le qu'il est question ici.
grande divergence que nous
lier et qui est vraiment radicale,
ans le régime constitutionnel pro-
is dans la forme externe de l'État,
nt en effet, comme on le sait, se
StiiDB ET ÉTATS-UNIS.
partager, — entre autres classifications, — en
Etats simples et Etats composés (Etats fédéraux
et confédérations d'Etats). Cette différence réagit
naturellement sur la Constitution, mais pas assez
pour en déterminer le caractère. La Constitution
se déSnit en effet comme la règle suivant
laquelle se crée la volonté d'État. Or cette règle
peut être la même dans des Etats d'espèce diffé-
rente. Les modifications les plus remarquables
qui, dans le cas considéré ici, dérivent de la
différence d'espèce, portent sur la composition de
la Chambre haute et sur l'étendue de l'action
exercée par l'Etat. Le Sénat des Etats-Unis est
élu par les divers États-membres et il était au
début leur représentation exclusive. De plus, par
suite de l'autonomie des États, l'Union dispose
d'un domaine d'action très limité. Mais cela
n'empêche pas la volonté de l'État de se créer
au fond de la même Taçon en Suède et dans
l'Union américaine.
D'ailleurs, s'il est bon d'avoir toujours présent
à l'esprit que l'Union résulte d'un assemblage de
13 colonies indépendantes, il ne faudrait pas
non plus exagérer l'importance de ce fait pour le
régime actuel. A l'exception de la Suède-Norvège
et de r Autriche-Hongrie qui semblent prendre un
chemin opposé, les Etat^ fédéraux de l'heure
..Google
30â PABLEUBNTABISUE DUALISTE.
actuelle soat en voie de développement rapide
vers l'Etat uoitaire. Tel est le cas en particulier
pour l'Amérique. Ainsi il n'existe en réalité
aucune difFéfence entre des Etats unilaires comme
le Pérou et la Colombie et des Etats fédéraux
tels qae les États-Unis et le Mexique. L'autonomie
provinciale peut être aussi grande dans les pre-
miers que dans les seconds. Mus il faut noter
avant tout que dans la plupart des cas les Etats
particuliers ou « Etats-membres » ne sont pas autre
chose que d'anciennes provinces comme dans
l'Argentine et au Brésil, ou des Etats institués par
l'Union comme aux Etats-Unis. C'est pourquoi la
population de ces États fédéraux est une popula-
tion unie à un degré aussi fort que dans aucun
des vieux États centralisés.
Nulle part ne se manifestent avec plus d'inten-
sité que dans les Etats-Unis le sentiment national
et l'orgueil d'être avant tout un citoyen de l'Union.
Et par suite, le Sénat représente désormais dans
ce pays la nation entière, tout autant que la
Chambre basse. On peut même dire qu'il n'existe
guère d'assemblée de même sorte, où la marque
provinciale originelle ait à ce point cédé devant
l'esprit unitaire.
Les principales différences entre les deux Cons-
titutions suédoise et américaine concernent le
SUÉDE ET ÉTATS-UNIS. '1&3
chef de l'Etat et la situation qu'il occupe. D'ub
côté, Qous avoas un président responsable et élu
pour UQ temps ; de l'autre cMé, un roi hérédi-
taire et irresponsable. Cette divergence qui saute
aux yeux de tous, doit être la raison pour laquelle
on a si peu remarqué, ou pour mieux dire totale<-
tuent méconns la concordance qui existe malgré
cela entre les deux constitutions. L'une a uu
extérieur modeste, et démouratiqtie, tandis que
l'autre s'accompagne du prestige de la royauté,
circonstance qui, jointe au principe électif, rend
toutes différejitès daiis les deux pays la vie et les
mœurs^pcditiques. Mais ce sont là des caractères
qui restent superficiels et influent relativement
peu sur le régime lui-même. C'est seulement en
ce qui concerne la responsabilité du ,chef d'Etat
que. l'inégalité des deux constitutions laisse après
elle des traces profondes. Et pourtant, comuie on
va le voir, nous constatons ces traces plutdt dans
l'anatomie de la Constitution que duns sa vie
intime et dans son activité fonctionnelle.
Une autre différence, sensible à tous,entre la Cons-
titution de la Suède et celle des Etats-Unis, résulte
de leur origine et de leur histoire respectives.
En Suède la Constitution provient directement,
par une évolution lente et bien remplie, de la mo-
narchie constitutionnelle; elle en soit il est vrai
..,,..G.Kvsl^
204 PARLSMENTABISUB OUAI.ISTE
par réaction contre celle-ci et contre l'acte d'aoton
et de sûreté de 1789, mais la tranâlion se fait
cependant sans secousse et une répartitioD bien
comprise et sagement mesorée s'opère entre la
puissance populaire et la puissance royale. En
Amérique, au contraire, nous royons apparaître
brusquement, au milieu de luîtes orageuses, une
Constitution nouvelle qui est l'expression complète
de la souveraineté populaire. Et pourtant cette
Constitution elle-même est théoriquement et dans
l'esprit de ses auteurs proche parente de la mo-
narchie constitutionnelle. En effet, lorsque les
colonies anglaises se réunirent eo 1778 et en 1787
pour fonder un Ëlat et une Constitution, il n'y avait
qu'un régime qu'elle connussent bien et qui pût
être pour elles un objet d'imitation : c'était la
monarchie constitutionnelle de l'Angleterre. Si
étrange que cela puisse paraître, c'estbien en effet
la Constitution anglaise que Washington, Hahilton
et tous les autres fondateurs de l'État américain
se proposaient pour modèle. Mais ils l'ont imitée
* telle qu'elle se présentait immédiatement à leurs
yeux et aussi telle qu'elle avait été exposée par
Blackstone et plus encore peut-èlre par Montes-
quieu. On regardait encore en ce temps la royauté
comme une puissance autonome dans l'État ; et
de même la Chambre des Lords apparaissait sur
,.VsIc
SUÈDK ET ÉTATS-UKIS. 205
]e tnime plan qiTe là Cbambre des Communes. Oq
attribuait ane- pleine réalité à la trtlo^e posée
par BlaclcstoUe et rl'eprés laquelle Kiiig, Commons
aiid Loi-ds représentaient les trois grands facteurs
du pouvoir de l'Etat anglais. Le Cabinet, qui a'est
pas mentionné dans \&CommonLaw et qui n'a
Aucune espèce d'existence orficielle, demeurait
complètement dt^ns t'ombre.
Nous autres qui avons assisté à l'évolution ul-
térieure et que l'histoire contemporaine a éclairés
sur le sens de l'histoire passée, nous savons fort
bien que cet équilibre entre la puissance royale
et le Parlement, entre la Cbambre des Lords et
la Chambre des Communes, était déjà une pure
illusion à la fîn du xviu' siècle. Mais les Améri-
cains de ce temps ue comprenaient pas la situation
comme nous la comprenons. C'est pourquoi ils se
mirent à imiter, avec les modifications nécessaires,
cette CouBtitulioA anglaise théorique. A la place
du monarque héréditaire on mit un président élu
et responsable; telle est, — avec le nouveau
mode de composition du Sénat, — la grande innova-
tion que nécessitaient les circonstances extérieures
et le moment historique, Sans doute on ne don-
nait au président d'autre arme que- le veto sus-
pensif; mais c'était là bien plutôt un retour aux
principes de la monarchie constitutionnelle qu'une
,.Vslc
1
marche en sens contraire ; car le veto que possé-
dait le monarque ang:lais avait àéjé. perdu en fait
foute sa vertu, tandis que les conditions établies
pour qu'une décision du Congrès eût force de loi
contre le veto présidentiel rendaient celui-ci
extrêmement efâcace. De même on adopta le
principe anglais d'après lequel toutes les ques-
tions budgétaires devaient être d'abord pi-ésentées
à la Chambre basse et discutées par elle ; mais,
il est vrai, le principe ^minant de l'égalité dés
différents pouvoirs enleva à celte disposition tout
effet politique. Car la théorie qu'on voulait appli4
quer avant tout dans cette constitution, c'est que
les deux grands pouvoirs, président et Congrès,
ainsi que les deux éléments dont se compose ce
dernier, jouissent chacun dans son domaine d'une
indépendance et d'une omnipotence parfaites.
C'est la trinité Kîng, Gommons attd Lords, telle
qu'on la coinprenait alors, qui fut transplantée
sur le sol de la libre Amérique.
Ainsi donc les grandes différences extérieures
signalées plus haut, non plus que les divergences
de détail que l'on pourrait découvrir çà et là,
n'empêchent pas la constitution delà jeune répu-
blique américaine et celle de la vieille monarchie
suédoise de se ramener, pour des raisons de
similitude interne, à un seul et même type cons-
TRAITS CABACTÉRISTIQUSS.
titutionnel, savoir ie parlementarisme dualiste.
Et en effet, dous allons voir que les traits carac-
ténstiques de ce type se retrouvent également
dans les deux pays.
Rappelons d'abord que la question centrale,
celle d'où dépend notre jugement sur le caractère
essentiel d'une constitution, est la suivante :
comment et par qui est créée lavolonté de
l'Etat? Dans toutes les constitutions parlemen-
taires cette opération se fait par l'entremise
d'organes politiques que le peuple nomme tem-
porairement à cette fonction, ou qu'il a désignés
une fois pour toutes. Mais ces organes immédiats,
lesquels doivent déteraiiner à la fois formellement
et réellement la volonté de l'État, peuvent être
ou deux ou trois ou seulement un : de là des
types différents de constitutions. Dans le parle-
mentarisme anglais, le droit de décision est laissé
sans partage au Parlement et au Cabinet consi-
dérés comme un organe unique. En effet, il ne
peut jamais y avoir entre eux ni contradiction ni
conflit ; ils doivent toujours être d'accord l'un
avec l'autre, et les troubles accidentels qui peu-
vent survenir entre eux sont immédiatement
calmés par un changement de ministère ou par
la dissolution du Parlement : nous pouvons donc
les considérer en ce cas comme un seul organe
..,,..G.Kvsl^
n
PARLEMENTARISME DUALISTE.
d'État, quelle que soit la manière dont ils se
répartissent les rôles. En Suisse, où l'on a déjà
un collège gouverne mental fixe et une représen-
tation, on a essayé aussi, par le référendum, de
transformer le peuple lui-mëmc en organe d'État
avec droit de décision ; et dès lors la Suisse s'est
trouvée munie de trois pouvoirs, bien qu'ils aient
une valeur très inégale. Mais aux États-Uuis et
en Suède règne le parlementarisme dualiste, dans
lequel le pouvoir de l'État est en principe
et en fait partagé entre deux organes dis-
tincts, le chef d'Élat et la représentation
populaire, et où tout a été disposé pour que
d'une part les deux pouvoirs soient égaux
en puissance et en influence, et que d'autre
part cette répartition et cette égalité soient
rigoureusement maintenues.
Comme c'est de là qXie dépend l'existence de
ce type, ses traits caractéristiques dérivent de la
manière dont la répartition a été faite et dont
elle se maintient. Le partage s'est effectué de façon
difEérenle dans les deux pays. Aux États-Unis on
a appliqué la division logique des fonctions de
l'État en fonction exécutrice et fonction législative ;
quant au pouvoir judiciaire, il demeure, ici
comme partout aujourd'hui, en dehors de la vie
politique proprement dite, malgré le rôle politique
"•;:-J
TRAITS CA.RACTâR1StIQlIK5. 309
que jouent les tribunaux aux États-Unis. Cepeu-
dant on n'a pas obseryé à la lettre cette division
classique, qui est d'ailleurs en elle-même impos-
sible à réaliser. En Suède la divi^ioa du pouvoir
entre le Boi et le Riksdag a eu pour but de
répartir les deux fonctions, exécutrice et législa-
tive, autant qu'il a été possible de le faire. Ainsi
la Constitution a attribué à chacun des détenteurs
du pouvoir son domaine spécial, soigneusement
délimité, et dans lequel ils déterminent la volonté
de l'État, tantôt indépeudaroment l'un de l'autre
(comme c'est le cas le plus souvent aux États-
Unis), tantôt en commun (cas fréquent en Suède) ;
et on a pris soin, comme nous l'avons vu, d'assu-
rer à tous deux ane situation aussi égale que
possible ou des pouvoirs égaux.
Mais ce partage du pouvoirentre les deux organes
immédiats (chefs d'État et représentation du
peuple) ne pourrait se maintenir longtemps s'il
n'avait d'autre appui que des paragraphes de la
Constitution. La puissance populaire, ayant pour
elle le nombre et les ambitions qu'elle excite, ne
tarderait guère & se soumettre l'autre pouvoir, si
elle-même n'avait pas subi la loi du partage. Le
partage de la représentation en deux
Chambres parfaitement égales mais com-
posées de façon différente est la seconde et peut-être
..,,..G.Kvsl^
PAttl.EMRNTABISMË DUALISTEt.
I importante condition d'existence pour ce type
tutionnel. C'est en somme la base sur laquelle
; tout l'édifice. Le principe du partage, qui
principe fondamental de ces constitutions,
! poursuivre plus loin que les deux pouvoirs de
et s'appliquer aussi au plus important et
s primitif des deux, qui est la représentation
ftire. Deux Chambres, ou comme- c'était le
1 Suède avant 1866, plusieurs Chambres à
irs égaux : tel est le second trait capital par
type constitutionnel se distingue du type
s, dans lequel au contraire le système à
I>re unique est aussi fondamental et aussi
is découvrons un troisième caractère distinc-
is la nature et la si tuât ion du ministère,
linistres sont les hommes de confiance du
'État, et non de la représentation. Par suite,
forment pas non plus un Cabinet au seus
ùre de ce mot, et l'autorité ministérielle
la forme d'une délégation du chef de l'État,
linistres n'exercent en règle générale aucune
oce sur la représentation et ils n'en dirigent
:s travaux. D'ordinaire ils ne sont pas admis
ïlus aux délibérations parlementaires. Les
de confiance et les votes de bl&me, ces
ments journaliers du parlementarisme de
TRAITS C*BACTéRlSTIQl!E8.
majorité, n'appartienneot pas, comme
le comprendre, à ce système dualiste, t
on constate à ce point de vue entre la
suédoise et la version américaine certai
serablances qui proviennent à leur tour
férences dans les attributions du chef de I'
Amérique celui-ci est responsable, et par
ministres ne le sont pas devant la représ
En Suède, où le monarque est irrespons
«conseillers d'État* doivent répondre à i
Mais cette dissemblance ne détruit pas I:
dance ni dans son ensemble ni en ce qui
les principales attributions du ministère
qu'organe de gouvernement.
Enfin nous pouvons signaler comme ue
caractéristique de ce type constitutionnel I
développement du système des c
En Suède le régime des comités se
pendant la période du despotisme parle
(1719-1772) et il a été organisé dans 3(
par la loi du Riksdag de 1810 ainsi
lut \tn de 1866 actuellement en viguei
institution n'est même pas mentionii
la Constitution des États-Unis, mais <
développée toute seule à partir du comm<
du ][ix° siècle, et elle a âoi par prendre
loppement extraordinaire. Institués tout
CD, Google
212 FARLEUENTASISUE DUALISTE.
pour préparer les affaires, les comités arri-
vent ensuite à dicter les décisions parlemen-
taires et à s'attribuer le contrôle constitutionnel.
Étant donnée la situation qu'occupe le Parlement
dans ces sortes de constitutions, il est pour ainsi
dire nécessaire qu'il s'organise pour l'exercice de
ses importants pouvoirs. Cette organisation s'ob-
tient par le moyen des comités et aussi, aux
États-Unis, par l'institution du speaker, qui a pris
une importance remarquable dans la Chambre
des représentants.
Après cette caractéristique générale du parle-
mentarisme dualiste nous allons maintenant l'eia-
miner de plus près dans les deux constitutions
oà il se manifeste le mieux : celle des États-Unis
et celle de la Suède.
Il
iTÀTS-UNIS
Les États-Unis ressemblent aux Étais modernes
en ce qu'ils possèdent une constitution écrite;
mais ils en diffèrent en ce que cette constitution
est demeurée presque sans changements depuis sa
naissance, c'est-à-dire depuis 1787. Sur lès qainze
amendements qui sont venus 's'y joindre, douze
■ ■■ t.'^yi^- .
dateot de l'époque immédiateineiit postérieure
& l'établissement de l'Union et contiennent tous, -—
à l'exception d'un seul, — des prescriptions rela-
tives aux libertés et aux droits généraux des
citoyens et des différents États. Quant aux trois
derniers, ils sont une conséquence de l'abolition
de l'esclavage. Ainsi l'article XII, adopté en 1804
et traitant de l'élection du président et du vice-
président, est le seul qui ait modifié une disposi-
tion antérieure. Cette stabilité dépend en partie
du caractère même de la constitution américaine,
constitution fédérative où le rôle de l'État se
réduit à quelques attributions essentielles; il faut
y voir aussi une conséquence des termes très
généraux dans lesquels sont conçues la plupart
des clauses de la Constitution ; mais ce fait tient
pour une part aussi grande aux difficultés qui
ont été soulevées contre une modification de la
Constitution, et au respect que celle-ci inspire, —
en particulier pour cette dernière raison, — aux
Américains eux-mêmes. Mais malgré l'immutabi-
lité que nous venons de constater dans la consti-
tution écrite , il ne faudrait pas cependant
s'imaginer que tout soit resté en repos dans
l'organisation politique de TUnion. Seulement les
cbaogements ne portent pas tant sur les institu-
tions elles-mêmes que sur leur mode de fonction-
2 M PARLBMBNTARIfUE DUALISTE.
nement et sur la vie politique. Ils se mani-
festent surtout dans les conditions sociales de
cette vie politique, — je veux dire dans les
partis , leur formation et les buts qu'ils poursui-
vent.
Le groupement des partis aux États-Unis rap~
pelle extérieurement l'organisation célèbre des
partis anglais. Nous trouvons en présence deux
groupes de forces égales : les républicains et les
démocrates, comme ils s'intitulent maintenant,
après des échanges de noms; nous les voyons
rivaliser sur tous les points pour obtenir la pré-
pondérance dans la vie publique et, à l'heure
actuelle, lutter pour ce seul but. Tout se passe,
semble t-il, comme en Angleterre ; et pourtant on
trouverait difficilement deux systèmes de partis
aussi différents l'un de l'autre. Les partis aux
États-Unis ont leur origine dans le conflit qui se
produisit, au moment de la formation de l'Union,
entre les États et la fédération. Les antifédéra-
listes voulaient avant tout conserver l'indépendance
des États, tandis que les fédéralistes tenaient pour
l'Union. A cette opposition politique vint se join-
dre bientôt un conflit d'intérêts entre le Sud
esclavagiste, qui était partisan du libre-échange,
et les États du Nord, qui interdisaient l'esclavage
et désiraient une protection à leur industrie nais-
santé. Ces contrastes, qui devenaient
pour la solidité de l'Union, furent ceper
nis par les grands événements de It
années suivantes. Cette crise sauva IT
ricaine ; et Ton vit disparaître dans di
sang non seulemeot l'antifédéralisme ai
encore les conflits économiques sigi
haut. Sans doute les conflits économiq
toujours un certain r6Ie dans le g
actuel des partis, mais leur importance
daire et il faut surtout y voir des ense
toràles, des amorces pour prendre les r
partis visent avant tout à conquérir la :
dans la vie politique, ou, pour parler (
plus précise, dans la vie électorale.
Mais s'il en est ainsi, ne pouvons-nous
ces partis américains en parallèle avec
vateurs et les libéraux anglais ? En auc
car ces derniers sont des partis de gou'
tandis que les autres ne le sont pas ; i
ment dans les communes, car leur inf
nètre jusque-là, que les partis américi
caractère dirigeant, mais par ailleu
exclusivement des partis électoraux.
États particuliers et plus encore dans I
gouvernement dirigé ou inspiré par un
titue sinon une impossibilité du rao
.Goagk
IBLEUBNTA.RISMB' DUALISTE.
'ant tout une circonstance non prévue
tutioD. Il en est ainsi d'aborci parce
les deux parUs a soavent la majorité
des deux Chambrer, ou encore parce
meut et le président sont d'im aiitre
ajorité de la Législation et du Congrès,
.'oppose en particulier à un gouver-
arti sur le modèle de l'Angleterre,
partition du pouvoir entre divei-ses
it l'alpha et l'oméga de la constitution
es partis américains peuvent être
istitutionnels». en ce sens qu'ils
istence de la Constitution et lui sont
Carj sans compter que le principe
st appliqué à l'intérieur des différents
us les domaines de la vie publique,
a fédérale iavite tous les quatre ans
m présidentielle. Cette prescription
permanente de l'organisation des
es causes ont pu l'obscurcir pendant
lis après que le développement poli-
its-Uhis les fut écartées, elle s'est
ec une évidence d'autant plu» grande,
e organisation de ce genre n'est-
ssaire à l'élection d'un président ?
on ne précise rien à ce sujet ; elle
se coDtente de dire que le choix se fera par
le suffrage indirect de la population des États.
Au début on appliquait des procédés différents
dans les différents États, tandis que la dési-
gnation du candidat partait de Washington
et émanait des congressistes réunis dans cette
ville. Mais dès 1812 New- York refusa de suivre
l'indication venue de Washington, et on re-
nonça à ce système de nomination du candidat
pour le remplacer par le système actuel. Eu
mëiue temps on adopta généralement le règle-
ment aujourd'hui consacré pour le choix des élec-
teurs: savoir le scrutin de liste dans les divers
États avec mandat impératif pour les élus, de sorte
que ceux-ci votent religieusement pour le candidat
mis en avant par la direction générale du parti.
Mais cette organisation sans laquelle, étant données
les prescriptions de la Constitution sur l'élection
par le peuple entier, il serait actuellement presque
impossible de désigner un président, exige un ap-
pareil considérable ; et cette machine électorale
est allée se développant jusqu'à l'organisation
actuelle qui, avec ses bosses, s&s conventions et ses
committees, commence à la plus petite commune
pour s'étendre à l'Union tout entière, en passant
par les États particuliers. C'est pour s'acquitter de
l'élection présidentielle prescrite par la Constitution
CNTAKISllE DUALIStK.
dû s'orgaaiseï' comme ils l'ont
fonction, c'est là leur raison.
Constitution elle-même,
e demander, comment est-il
^tion aussi purement constita-
loutir à donner une si grande
g, et à les faire pénétrer aussi
lu peuple américain 7 La fièvre
êriodiquement la nation entière
le élection à la Maison Blanche,
I qui sont faits des denx parts
et événement, montrent, plus
[ue les statistiques électorales,
ur les partis sont enracinés,
ce fait se trouve dans les iuté-
rsonnels, individuels, qui se
lions. The spoils belong to the
sartient an vainqueur : Ce mot
, le président Jacks(>n en 1829
mot d'ordre pour l'exercice de
ion que la GonslitutiQu accorde
oils, ce sont les emplois dont
victorieux, et avec eux l'admi-
:ces et de ta justice, les impàts
;es ont favorisé le développe-
le : ce sont ce qu'on appelle
..,,..G.K,^1C
(( the rotation » et le suffrage universel. Aucun
article de [a Coustitution de l'Union ne prescrit
que les fonctions doivent changer de titulaires
Dvec l'élection d'un nouveau président ; et en fait
jusqu'à l'époque de Jackson, il était d'usage que
la plupart des fonctionnaires fussent maintenus à
leur place, tandis que les présidents se succé-
daieot. Mais ce démagogue, à la fois avocat et
général, proclama te principe de la « rotation »
comme un des Tondemeots de la démocratie. Ue
la ConstitutioD unionnello, ce principe s'étendit
ensuite aux États et aux communes. Les fonctions
doivent changer de titulaires, afin qu'un plus
grand nombre soit appelé à jouir des avantages
qu'elles comportent : c'est ainsi que l'on raisonne
et que l'on agit dans cette démocratie moderne,
tout comme on faisait il y a plus de deux mille
ans dans ia démocratie de l'ancienne Grèce. La
conquête des places une fois devenue le but pour-
suivi par les partis et le lien qui assurait leur
cohésion, l'extension du droit de vote leur donna
les forces électorales qui leur étaient nécessaires.
Ce fut à qui gagnerait les masses de son c6té ; et
c'est pour cela, et non point pour des raisons
idéales, que le suffrage universel fut introduit dans
la plupart des États au cours des années 1830-t830.
Les circonstances que nous venons d'exposer
220 PAKLEHBNTABISHE DUALISTE.
ont amené les partis à descendre jusqu'aux cou-
ches profondes de la société et elles ont donné à
la vie politique des Ëtats-Unis son caractère
actuel. De nombreuses tentatives ont été faites
pour obtenir une Civii service reform, noiammeni
par le Pendlelon act de t883. Aucun obstacle
constitutionnel ne s'oppose à ce qu'an moins tous
les fonctionnaires de l'Union demeurent inamovi-
bles comme ses juges, tant qu'ils seront capables
de remplir dignement leur place ; mais les grandes
troupes électorales levées par le suffrage univer-
sel et qui vivent en grande partie de ce système
permettront difficilement qu'on y renonce. Et
comme les règles constitutionnelles relatives &
l'élection du président nécessitent une organisa-
tion électorale solide, il semblé bien que le sys-
tème actuel des partis, avec tous ses défauts, ait
beaucoup de chances de durée. C'est lui pour-
tant qui déshonore la vie publique des Etats-Unis
et donne A ceux-ci l'administration la plus détes-
table peut-être qu'il y ait actuellement dans
aucune nation civilisée. C'est ce même système
qui tranche si fortement avec les habitudes euro-
péennes, surtout avec nos habitudes suédoises,
et qui suffit pour rejeter dans l'ombre les ressem-
blances de structure observées par ailleurs entre
la Constitution des États-Unis et celle de la Suède.
LeB institutions qui forment la charpente solide
dfl la Constitutioo des États-Unis sont : le prési-
dent'chef (TfiAat et le Congrès des deux Chambres,
Nous pouvons dans cet exposé laisser de côté les
tribunaux de l'Union, qui jouent eux aussi un rôle
politique dans la Constitution des États-Unis.
Voici comment le pouvoir est partagé entre les
deux grandes institutions.
Le président a pour sa part tout le pouvoir
exécutif; une seule réserve y est apportée : c'est
que la nomination des hauts fonctionnaires exige
l'approbation du Sénat, de mâme que la conclu-
sion de traités avec les puissances étrangères ;
ajoutons que la guerre doit être décidée par te
Congrès tout entier. En outre, le président a le
droit illimité de congédier tous les fonctionnaires
excepté les juges, et il a la haute direction de
l'armée et de la flotte. Il exerce ce pouvoir seul
et sans partage avec ses ministres, lesquels sout
les serviteurs et les agents du président, non du
Congrès. 11 écoute leurs conseils quand il le juge
utile; mais il prend seuiriniliative d'une décision
parce qu'il est seul responsable des actes du
gouvernement. A cela se bornent les attributions
positives du chef de l'État américain. Il n'a donc
aucune espèce d'initiative en matière de législa-
tion et d'impôts. Il peut, il est vrai, adresser des
lENTABlSHK DUALISTE.
jrès et lui exposer sa manière
le telle ou telle question. Mais
donnent lien à aucune mesure
jart du Congrès ; celui-ci n'a
l'en tenir compte. En revanche,
ïde une attribution néfi^ative
importance dans le vetodécou-
l'il peut opposer à toutes les
Tes, c'est-à-dire non seulement
; mais encore aux décisions con-
!9 et les impôts ainsi que toutes
s^étaires. Il est vrai que le veto
>yé que rarement ; mais il n'en
du veto u muet », qui consiste
iclionner les décisions du Con-
ix derniers jours de sa réunion,
exclusif reconnu au président
lu pouvoir exécutif, le Congrès
tière de législation et d'impôts,
t attribué par ailleurs au chef
t au gouvernement, de promul-
nts pour l'application des lois
;rè5 l'exerce aussi en détermi*
is les moindres détails la ma-
devront être appliquées. Mais
t exercer d'action directe sur le
intervenir dans la direction
..G.Hvsl^
doDOée par celui-ci aux affaires iotérieures. Le
président peut en pareille matière suivre une
politique que le Congrès n'approuve pas. Le
Congères n'a pas aon plus qualité pour imposer
au gouvernement, par des adresses écrites, telle
t&che à accomplir ou telles indications à suivre.
C'est seulement dans les questions concernant les
affaires étrangères ou la nomination des hauts
fonctionnaires que le Congrès, par l'entremise du
Sénat, a une influence directe sur le pouvoir
exécutif. Naturellement il exerce en outre un con-
trôle scrupuleux sur les comptes et la gestion des
finances ; mais il n'y a pas comme en Suède,
d'examen du protocole par les Chambres. Enfin
le Congrès a le pouvoir de rendre le président
lui-même responsable, la Chambre des représen-
tants portant l'accusation devant le Sénat pris
pour juge : c'est d'ailleurs un pouvoir qui n'a
d'importance que par les conséqueuces qu'il peut
avoir dans les autres parties de la Constitution et
notamment en ce qui concerue la situation du
ministère. Pris en soi et considéré en tant que
moyen juridique, on peut le comparer, comme
dit très bien brtce', à un canon de cent tonnes
qu'on n'emploie jamais parce qu'il est trop difS-
1. James Bryce, Theamericancommûnioealth,],i9S8, p. 283.
.ElieMTABISHB DUALTSTB.
La seule fois qu'on ait essayé de
coutre le président Johnson en
eura sans effet, faute d'une majo-
our prononcer la condamnatioD.
lir les fonctions que nous venons
deux Chambres se sont organisées
soi en comités. Ajoutons que
ions très importantes il existe,
eterre, «n commutée of the whole
nités sont en nombre considé-
actuellement cinquante et quelques
: des représentants, quarante et
e Sénat ; elles ont en fait accaparé
part de l'autorité et du pouvoir
Notre pays, dit M. Wilson, est
!S rapporteurs de comités'. » Il est
Congrès est complètement dirigé
I Maison des représentants, cette
ncore concentrée entre les mains du
speaker >•■, lequel désigne seul les
leurs rapporteurs et dirige les
hambre. C'est pourquoi lesAméii-
vent que le président de la Cbam-
mutants est, après le président de
le plus puissant personnage de la
LSON, Congrfsiional Government, p. (02.
ÉTATS-UNIS.
nation. Il est ioujours l'un des et
et il agit esclusivement comme me
assurant par là à ses amis politi*]
décider de tout. Cependant, com
peut appartenir à un autre pai
Chambre et que le pouvoir se t
n'y a pas en fait une majorité
peut paraître étrange que la maji
différente dans les deux « maiso
ce sont les mêmes électeurs qu
représentants, directement dans u
tement dans l'autre. Mais cela
deux raisons : d'abord, les diffé
voient à la Chambre basse un ne
représentants, tandis qu'ils en e
deux à la Chambre haute ; il fai
plus la durée inégale des période
pour chaque assemblée (respecti'
six aus).
En principe, il y a égalité
Chambres, bien que chacune ait i
particulières : c'est au Sénat (
limiter les pouvoirs du PrésidenI
nominations et d'affaires étran.
l'affaire de l'autre Chambre de po!
relatives aux impôts et aux crédit
préparer le budget. D'après n
=,Coogk
UJTARISMB DUALISTK.
es au parlementarisme angolais,
rotative devrait assurer à la
uoe iaflueoce décisive dans le
'ea a pas été aÎDsi. Il n'existe
smmun, et par suite l'efEectif
lambres (Séuat ; 90 membres,
>7) D'à aucune importance. Il
iitage de comités communs;
lat,. — comme c'est toujours le
des modifications au budget
>re basse, et que celle-ci les
3 cela se produit également
institue une commission où
)res pris à chacune des deux
commission élabore une con-
'omis^ qui est soumis ensuite
!S pour être adopté ou rejeté
lé, suivant l'usage, on reforme
nblable ; mais alors I4S Cham-
isi dire dans l'obligation de
tement, faute du temps néces-
is longues discussions. Dans
ure c'est généralement l'avis
imphe, et cela presque sans
oint ce fait aux autres préro-
on voit que le centre de gra-
nettement déplacé du côté de
ÔTATS-UNia.
la Chambre la moins nombreus
composition très inférieure de la sec
création directe du suffrage unive
eelle-ci tout prestige dans l'opini
éclairés.
Les Étals-Unis sont totalemeni
ministère, au sens que l'on d(
dans les régimes de majorité. Il
nombre de ministres (8 actuellen
de Cabiaet et aucun chef de Cabine
SQot 4es cfaers d'administration, cl
département, et ils exercent en
pouvoir dont le président les inve
est fixé par les règlements. Ce p
étendu : il comprend le droi
des fonctionnaires et de décl
initiative dans beaucoup de circo
le tout avec l'assentiment du prési
sous sa responsabilité. Les min
conseillers et les serviteurs du p
prend ou les remercie à son gn
Sénat y intervienne comme il pe»
la nomination aux autres fonctio
(une seule exception à cette règ
intervention du Sénat eut lieu sou
si agitée de Johnson). Ainsi
n'apportent aucune entrave à la 1
..C()o>^k
PARI,BHENTARISUB DUALISTS.
!nt; ils ne le couvrent pas non plus
Parlement : cette dernière éventualité
rs impossible, attendu que les ministres
as partie des Chambres, qu'ils n'y
las, et qu'ils ne s'adressent même pas
■ écrit, sauf lorsqu'il s'agit de rendre
leur gestion. C'est pourquoi ils ne
on plus exposés à des interpellations
Dtes de bl&me. La seule communica-
, lieu entre les ministres et le Congrès
. dans les comités et pendant les
I tenues entre les présidents des dits
; les ministres. Mais si ces rela-
ie moyen par lequel le gouverne-
influer sur le Congrès, elles sont
noyen par lequel le Congrès, ou
deux Chambres et les partis qui y
tierchent à intervenir dans l'exercice
■ exécutif. Les présidents de comités,
is le Sénat, agissent souvent comme
es doublures des ministres, et récla-
eur avis et leurs désirs soient suivis,
on s'exposerait par exemple à des
crédits. Ainsi les affaires étrangères,
lier, sont traitées tout autant par le
lu comité compétent que par le secré-
t ministre de l'extérieur.
Telle est dans ses g:randes lignes la constitution
nmëricaine. .Deux grands principes soutiennent
tout l'édifice et président aux rapports mutuels
de ses diverses parties. Ce sont : 1" la réparti-
tion du pouvoir entre des mainsdifférentes;
2° la limitation du pouvoir, en quelque
main qu'il se trouve. Le mode de répartition
correspond aux grandes fonctions de l'État :
fonction executive et fonction lég:islative (à laquelle
il faut joindre celle de l'établissement des impôts).
Le Chef de l'État et le Congrès remplissent
chacun leur fonction, sans qu'il soit possible à
l'un de prendre le rfile de l'autre. Mais comme
l'omnipotence pourrait amener dans chaque
domaine l'oppression et la partialité, les deux
puissances ont reçu le droit de veto l'une contre
l'autre : le Congrès peut s'en servir contre le
président \à où l'autonomie de celui-ci pourrait
devenir dangereuse, et inversement le président
peut opposer son veto à toutes les décisions du
Congrès. En même temps le pouvoir a été réparti
également dans l'intérieur du (Congrès, de telle
sorte que les deux Chambres exercent l'une sur
Tautre un droit de limitation : et par là on
empêche, sinon complètement, du moins eu grande
partie, qtie le Congrès, avec ce désir naturel à toute
assemblée législative d'étendre son influence,
.t''H,^i^
MENTARISUB DUALISTE.
'oirs du président et du gouver-
- dernière sentinelle placée sur
i Cour suprême est là pour s'op-
tements et aux illégalités com-
lent et du Congrès, au cas ofi
[>artiend raient à un seul et même
it faire violence à la Constitution,
user à ce système des qualités
gique. Mais il est en contradic-
avec les idées européennes sur
le parlementarisme, que la plu-
en ont parlé dans ces derniers
ord pour ie déclarer mal venu,
le de cette constitution était plus
mu, il serait sans aucun doute
ment jugé par la grande masse
éraux et radicaux. Remarquons
larlementarisme américain
as avecla domination d'une
mieux, il s'y oppose consciem-
nt. Le principe des majorités ne
que dans chacune des Chambres
encore prend-on soin, dans les
rver au parti adverse la mol-
loins une. Pourtant le principe
nine les élections américaines,
même est ainsi un homme de
parti, qui doit agir comme tel lorsqu'il attribue
des fonctions publiques. Mais on peut dire que
cet usage est plutôt contraire à l'esprit de la
Constitution. En tous cas, le président est lié dans
la dislribuEion des places par le consentement du
Sénat. Et du reste le gouvernement du pays n'ap-
partient pas à une majorité : au contraire, on en a
banni autant que possible toute tyrannie de parti.
C'est là un fait qu'il est bon de méditer, surtout
-dans DOS pays. Une démocratie peut exister sans
une majorité tyrannique, sans le gouvernement
du plus grand nombre. En outre, le pouvoir peut
être réparti sans qu'il en résulte des conSits inso-
lubles. Mais c'est là une chose difficile à com-
prendre pour des Européens bantés par l'idée de
majorité. Ainsi M. Boutmt, enthousiasmé par les
u. dons de prudence, de mesure, d'esprit poli-
tique H pour ainsi dire « fixés dans le sang » des
Anglo-Saxons, déclare que ces qualités seules
expliquent la possibilité pratique du système
américiÛD'. Mais ne décernons pas aux Yankees
plus d'éloges qu'ils n'en méritent. C'est la struc-
ture même de leur constitution qui appelle cette
modération tant vantée et qui s'oppose aux longs
conflits. Leur système invite les différents pouvoirs
I. Éludes de droit eontlUutionnel, pp. l'a elsuiv., 162.
..,,..G.K,8l,
n
PARLEMENTARISME DUALISTB.
à des comprdmis obtenus par de mutuelles con-
cessions et' oblige ainsi à la modération et à
l'entente. En effet, les conflits ne deviennent longs
et pénibles que quand une des parties se croit en
état de faire fléchir l'autre par la force. Mais
quand les principes mêmes de la Constitution
s'opposent  de pareilles violences, alors les deux
parties sont bien obligées de se mettre d'accord
en abandonnant chacune une part de ses pi-éteo-
tions. Voilà le secret de la constitution des États-
Unis ; voilà les moyens qui permettent à la fois
d'apaiser les discordes et d'assurer la liberté.
Cela ne veut pas dire que des défauts de toute
sorte ne se trouvent pas dans la constitution amé-
ricaine. La manière dont le partage des pouvoirs
a été opéré et maintenu, empêche une collabora-
tion souvent nécessaire entre les deux coparta-
geants ; elle affaiblit le sentiment de la responsa-
bilité et fait éclater des conflits qui auraient pu
être évités par un contact plus fréquent et plus
intime. D'autre part, il ne faudrait pas mettre à la
-charge de la Constitution tous les défauts et tous
les abus qui font tache dans la vie publique des
Etats-Unis. Sans doute les prescriptions relatives
à l'élection présidentielle, jointes à l'amovibilité
des fonctionnaires, sont les causes indirectes du
système de la « rotation » avec tout son cortège
de maux. Mais la « rotation », ainsique le champ
très vaste accordé dans le Congrès aux intérêts
individuels, et le flot de pensions militaires qui
récompensent le zèle des partisans (ces pensions
s'élevaient en 1902 à un total de 138 millions de
dollars), tout cela est une conséquence des mœurs
et de la morale politique, et non de la Constitution.
UI
SUÈDE
Nous conoaissons déjà la Constitution suédoise
dans son contenu littéral et à l'état de repos ; il
aous reste à voir comment elle fonctionne et
quelle est la vie politique qui s'est développée
dans ses limites. Il n'est pas rare que cet élément
vivant s'éloigne du texte de la loi. C'est aussi ce
qui s'est passé en Suède. La Constitution de 1809,
notre texte fondamental, demeure, malgré la
réforme parlementaire de 18G6 et malgré d'autres
innovations indiquées plus haut, à peu près intacte
DOQ seulement dans son esprit et dans son essence.
mais encore dans ses paragraphes. Les institutions
qui règlent la vie de l'Etat sont les mêmes, ainsi
que leurs relations mutuelles au point de vue
juridique. Ce qui a changé, ce sont les relations
.„,,..G.Kvsl^
234 PARLEMENTARISME DUALISTE.
réelles entre les deux pouvoirs qui dominent la
Constitution suédoise, le Roi et le Riksdag. Et ce
changement de fait, qui se poursuit encore, arri-
vera sans aucun doute à réa^r sur la loi elle-iuËtne
et, ^ s'il ne subit pas d'arrêt, — à bouleverser
finalement le régime tout entier. Cette constata-
tion est par elle-même inquiétante et donne lieu
à des réflexions diverses. Mais ce qu'il y a de
plus inquiétant peut-être, c'est que tout ce revire-
ment se produit sans que nous eo ayons conscience.
Mais je ne veux pas anticiper sur l'exposé qui
va suivre, et je répondrai d'abord à la première
question que l'on doit se poser quand on examine
le parlementarisme moderne : Quelle est la base
sociale de la vie politique, autrement dit, comment
s'organisent les partis et quel rôle jouent-ils ?
La Suède, comme nous l'avons vu, a possédé
autrefois un vaste système de partis Ce qu'il y
avait de caractéristique pour ces partis du
xviii" siècle, c'est avant tout qu'ils étaient politiques
et représentaient des opinions ; ils luttaient pour
le pouvoir et l'exerçaient à tour de rôle. Naturel-
lement les questions personnelles intervenaient
aussi dans la constitution de ces partis, et il s'y joi-
gnit même, surtout dans la dernière période, des
questions sociales. Mais il n'en était pas ainsi &
l'origine : cela est d'autant plus remarquable que
,..G.»vsl^
SUÈDU : LES PA
la société par ùlleurs était doi
des classes ou « états » et cel;
que des facteurs tout difiéren
Qomiques et des distînctioas s<
dans l'organisatioD des partis,
opposition entre les partis élt
que, et s'il est vrai que ceux-<
de gouvernemeDt, réduits au
comment se fait-il que ce gou*
n'ait pas évolué vers un parle
jorité analogue à celui de l'Anj
valoir que le coup d'Ëtat de (
vint interrompre cette évolu
qu'une réponse incomplète
car la seule raison qui rend!
d'État libérateur, c'est précis
veroement de parti n'était pas
et s'était montré incapable de
Les raisons de cet échec c»
satisfont à la qu«s6on posée
les unes extérieures, les au
iobéreotes à la Constitution,
rieures, c'est d'abord que le <
le régime despotique précédf
force gouvernementale néces
jouet des états qui se l'assers
le système des comités qui s'<
3,Cooi^lc
PABLEUENTARISI
teineat du gouvemenaeat. Ces deux circonstaaces
réunies firent que la Suède, au lieu d'un gouver-
nement de Cabinet soutenu par une majorité
parlementaire, eut un Parlement g'Quvernant, ce
qui est le pire de tous les gouvernements, — à
la fois tyrannique et faible, tyrannique au dedans
et faible au dehors. Quant aux causes esiérieures
de la chute de ce régime, il faut les chercher
dans le voisinage dangereux que formaient pour
la Suède, le Danemark et la Prusse d'un c6té, et
la Russie de l'autre. Une pareille situation exigeait
une fermeté et une unité de gouvernement que
seul un monarque pouvait assurer à notre paya.
Telles sont les circonstances intérieures et exté-
rieures qui étouffj&rent ces germes de parteOien- '
tarisme ministériel que contenait eb elle l'organi-
sation des partis suédois.
Après 1809 et jusqu'en 1866, on ne vit appa-
raître aucun parti politique digne d'intérêt.- En
effet, les divers états, bien que constituant des
groupements d'intérêts, ne formaient pas chacuD
pour soi un parti; et l'opposition que rencontrait
le roi aux séances du Riksdag était, avant tout,
l'expression de la défiance exercée par l'un des
deux pouvoirs sur l'autre, — chose qui dérive de
la Constitution elle-même, mais qui ne saurait
servir de point de dépai-t à une organisation de
,..,..G.Kvslc
SOâDE : LBa PARTIS. 237
partis. Le seul véritable aatagonisme de partis
qu'il soit possible de mentionner pendant cette
période, c'est l'antagoûisine général entre les
libéraux et les conservateurs. Après 1866,
cette opposition poursuit son développement, et
s'il fallait la retrouver à l'beure actuelle, ce serait
entre ce qu'on appelle le « parti de concentration »
[samlingspartiet), — si vraiment ce groupe peut
passer pour l'héritier de l'ancien parti libéral, —
et d'autre part la première Chambre et les élé-
ments dont elle est composée. Les deui partis,
libéral et conservateur, ne sont pas fondés sur
des intérêts, bien que certains de leurs membres
puissent songer principalement à leurs avantages
personnels, ce qui se produit partout où il y a
des partis. Ce ne sont pas non plus à l'origine
des partis sociaux, car ils appartiennent tous les
deux aux mêmes classes de ta société. Mais par
suite de leurs relations avec d'autres partis, ils
ont peu à peu emprunté à ceux-ci quelque chose
de leur caractère. Ainsi les libéraux, renonçant à
leur indépendance, se sont joints comme avant-
garde ou comme arrière-garde, — suivant qu'on
envisage les choses, — au parti agrarien d'abord
et maintenant au parti ouvrier. Cette attitude a
eu nécessairement son contre-coup sur celle du
parti conservateur, qui a pris lui aussi une certaine
..G.Kvsl^
238 PABLRMENTABISME DDALISTS.
nuance sociale et représente aujourd'hui da pré-
férence les intérêts des hautes classes. Mais,
malgré tout, ils ont conservé tous les deux en
majeure partie leur caractère primitif, qui était
d'être des partis d'opinions'.
Il en va autrement des deux autres partis qui
sont nés après 1866, ou du moins qui n'ont pris
d'influence qu'après cette date, et qui ont fini par
déborder complètement les deux autres ; ce sont
le parti des paysans ou parti agrarieo
(landimannapartiel) et le parti ouvrier. Quaot
aux partis qui se sont constitués sur une question
unique, qu'il s'agisse de la politique commerciale,
de la tempérance ou des églises indépendantes,
nous pouvons les laisser de cAté : quelle que soit
l'agitation qu'ils aient pu produire, ils sont par
leur nature même des partis de circonstance,
recrutés dans toutes les classes et sans importance
pour l'ensemble de la vie politique. En revanche,
le parti agrarieu, qui est l'ancienne classe des
1. Pour juger le parti conservateur suétiois, il suflil de
se rappeler qu'eu 190t, répondant à l'appel qui lui étall
ftiit, il a accepté sans murmures ue impOt sur le revenu
dont voici les condiliona les plus importantes : Cet impAt
laisse de cùlé les petits revenus Inférieurs à looOcouronDes
(1380 francs), U reste dégressif jusqu'à un rereuu de «000-
6000 couronnes, et il est alors de 1 <</, ; après quoi il devient
progressif et va de 1 % à 'i % <lepuis uo revenu de 8 000
couronnes et au-dessus- L'impât sur le revenu s'applique
aussi bien aux compagnies par actions qu'aux particuliers.
SUÉDE : LBS PARTIS, 239
paysans et qui s'est renforcé de quelques parti-
sans pris parmi les propriétaires fonciers, a vrai-
ment dominé pendant une période la vie poli-
tique, bien que naturellement il n'ait pas gouverné.
Op ce parti est, ou plutôt était, — car il donne tous
les signes d'une désagrégation complète depuis
que L'impôt foncier et d'autres questions intéres-
sant ks campagnes ne sont plus là pour le
cimenter, — ce parti était, dis-je, purement et
simplement un parti d'intérêts et de classe, mais
d'ailleurs un parti fort raisonnable. On ne peut
pas adresser le même éloge au parti ouvrier qui
est maintenant en marche et qu'on a appelé c te
cinquième état ». Il est, bien plus exclusivement
et bien plus étroitement que ie « landtmannapar-
tiet s ie représentant de certains intérêts et d'une
certaine classe. On n'a jamais vu en Suède un
parti social aussi excessif, bien que, d'autre part,
la justice nous commande de ne pas le juger
d'après sa fraction la plus avancée et la plus
bruyante, les « social-démocrates ».
Ou comprend qu'envisagés au point de vue
constitutionnel, les partis suédois ne soient pas
qualifiés pour être des partis de gouvernement.
Sans doute conservateurs et libéraux ne sont pas
arrivés à un grand développement en tant que
partis de classes et d'intérêts; mais ils le sont
..,,..G.Kvsl^
2iO PABLEtHENTAEtISMB DUALISTE.
pourtaut daos uoe certaine mesure, et d'ailleurs
ils sout beaucoup trop faibles. Quant aux autres
pat'tis, ils suut par leur essence même impro-
pres au rôle gouvernemental. Eu etfet, là où les
partis gouverneat, là où ce système fonctionne è.
l'avantage du pays, il faut que les partis, si divi-
sés qu'ils puissent être quant à la solution de
certaines questions spéciales, ne cessent pas cepen-
dant de représenter tout le pays avec tous ses
intérêts et ses classes, et non des classes et
des intérêts particuliers. Ainsi manque à la Suède
la première condition d'un gouvernement parle-
mentaire de style anglais, à savoir des partis
luttant pour le pouvoii- sans représenter les inté-
rêts d'une catégorie sociale.
Ajoutez à cela que d'autres circonstances doa-
ueut aux partis suédois une situation toute parti-
culière. D'abord, notre constitution est tout aussi
peu que l'américaine disposée pour un gouverne-
ment de parti. Le partage du pouvoir entre
différentes mains, qui est le fondement de la Cods-
titution, ne saurait se concilier avec un gouverne-
ment majoritaire exercé par uu parti. Il s'ensuit
que la constitution suédoise ne réclame nullement
l'existence de partis organisés (nous parlerons
plus loin de leur importance pour la soluUon
des questions soumises aux Chambres). £d Angle-
SUÊDB : LES PARTIS. 241
terre et dans d'autres Etats de gouvernement
majoritaire les partis sont un élément de la Cons-
titution et par suite ils sont nécessaires; mais ils
sont superllus dans les pays où régne le parle-
mentarisme dualiste. Si le système des partis ans
États-Unis a un râle consUtntionnel à remplir,
ceci tient uniquement à la disposition constitua
tionneltequi veutquelechefde l'Etatsoitéluparle
peuple. Mais en Suède, où ne se présente aucune
tâche de ce genre, le système des parlis n'a
aucune raison d'être au point de vue de la
Constitution.
Ce fait capital, dont on doit tenir compte
lorsqu'on juge l'organisation des partis suédois, a
été aussi négligé qu'une foule d'autres traits
caractéristiques de notre constitution. On aperçoit
très bien la place importante que tiennent les partis
dans l'économie de TÊtat anglais ainsi que dans
beaucoup d'autres États, et l'on se figure aussitôt
que le cas doit être le même chez nous. Mais tout
aussi sûrement que l'Etat anglais subirait bienlAt
les changements les plus profonds si les partis
venaient tout à coup à lui faire défaut, un pareil
événement survenant en Suède ne laisserait pas
de traces sensibles dans te cours de la vie politi-
que ni dans le domaine de la Constitution, Et la
cause de ce fait est celle que nous venons de dire
..G.Kvsl^
242 PARLBHBNTARISUR DUALISTE.
ei qui réside dans le régime lui-mëine. Le seul
rôle public qui revienne aux partis en Suède et
dans le Parlement suédois, c'est de représenter
]ès grands intérêts du pays et de plaider leur
cause. Dans les anciens temps la représentation
n'avait pas d'autre but que d'exposer les diffé-
rents besoins de la société d'alors. De nos jours
elle est devenue avant tout un organe de gouver-
nement, le second pouvoir suivant le droit public
suédois. Mais sa fonction primitive, bien que relé-
guée au second plan, n'a pas disparu complète-
ment; et c'est précisément cette fonction d'inier-
pi'ète qui peut encore donner aux partis suédois
une certaine importance générale. Il y a en effet
un danger à ce que les principaux besoins sociaux
ne soient pas suffisamment pris en considération.
Mais autre chose est de prendre la parole au oom
des intérêts qu'on représente, autre cbose est de
lés amener au pouvoir et de dominer avec eux.
Or cette ambition, qui est celle de tous les partis
d'intérêts et de classes, contient évidemment un
grand périt. Si les partis suédois arrivent à la
réaliser, leur utilité publique, — d'ailleurs assez
restreinte, — descendra par là-mëme au-dessous
de zéro et par contre ils seront un grand mat poilr
la nation.
Aux traits g>^néraux que nous venons de signa-
..G.Kvs'^
SUàDB : LBS PARTIS. 2l3
1er se raitacbent toutes les autres particularités
des grands partis suédois. Le but de leurs efforts
n'est pas d'arriver au gouvernement comme en
Angleterre ni de s'emparer des fonctions publi-
ques comme aux États-Unis, mais simplement de
.réaliser leurs desiderata économiques et sociaux,
lesquels sont en dehors du domaine constitution'
nel. Ainsi donc leur groupement est déterminé
exclusivement par ceè desiderata et leur force de
cohésion est proportionnelle à celle de leur pro-
gramme. Si celui-ci a reçu satisfaction, comme
c'est maintenant le cas pour le parti agrarien,' le
lien se dissout et le parti s'en va à vau-l'eau.
Une autre conséquence du caractère social de nos
partis, c'est que le Riksdag ou plus spécialement
la seconde Chambre se trouve occupée par les
éléments sociaux qui luttent avec le plus d'éner-
gie pour la réalisation de leurs vœux, -Ainsi,
lorsque eut lien la réforme de la représentation, en
1866, la seconde Chambre fut peuplée en grande
partie par des paysans ; et il seml>le bien que le
suffrage universel doive y amener en grand nom-
bre des ouvriers ou leurs hommes de confiance.
Ce n'est donc pas comme en Angleterre, où les
réformes électorales de 1867 et de 1884 n'ont
modifié en aucune façon la composition de la
Chanibre des Communes. D'ailleurs, ce résultat
..G.Kvsl^
244 PARLEMBMTARISMB DUÀLISTB.
différent tient aussi à deux circonstances particu-
lières à la Suède : c'est que les membres de la
seconde Chambre reçoivent une indemnité et
ensuite que les élections ne sont pas influencées
par les classes riches et ne coûtent rien. En Angle-
terre el aux États-Unis les élections sont dirigées
en fait pnr les représentants du capital et il en
résulte que les élus appartiennent exclusivemeot
aux classes supérieures. Les choses ne se passent
pas de même en Suède, où la seconde Chambre'
donne au contraire, une image fidèle de la société
suédoise, du moins autant que le permet le droit
de suffrage et aussi la représentation majoritaire.
C'est avec l'aide des indications précédentes
qu'il convient de juger la question maintenant si
débattue en Suède de la représentation propor-
tionnelle. Dans un pays comme l'Angleterre,
avec ses partis de gouvernement et son parle-
mentarisme unitaire, ce mode de représentation
est tout à fait incompatible avec la Constitution,
comme on l'a vu précédemment. Mais en Suède,
où les partis sont avant tout des partis d'intérêts
et de classes, et où règne un parlementarisme
dualiste dans lequel les partis sont chose inutile
ou du moins indifférente au point de vue consti-
tutionnel, rien ne s'oppose au vote proportionnel,
au cas où celui-ci serait jugé utile. Or, sod
SUÈDE : LES PARTIS. 2i6
utititë parait en train de se manifester dans notre
pays, par snîte des modifications qu'on a fait
subir au type constitutionnel primitif en étendant
l'usage du vote par les deux Chambres simulta-
nément : ainsi s'est trouvé menacé en fait le
principe ancien de l'égalité des deux assemblées,
principe qui avait son fondement intime dans la
Constitution. Ce qu'on attend de la représentation
proportionnelle, c'est qu'elle empêche un parti. —
en l'espèce le parti ouvrier, — d'établir sa domina-
tion- dans la seconde Chambre et, grâce au vote
en commun, dans le Riksdag tout entier. Pour
ces raisons à la fois parlementaires et politiques,
le système du vote proportionnel est plus à sa
place dans une réforme électorale en Suède que
dans tout autre pays, à moins toutefois qu'on ne
préfère modifier les conditions du vote commun
ou bien le limiter, ce qui serait plus conforme à
l'esprit de la Constitution '.
1. Du reste, en ce qui concerne la représentation propor-
tionnelle, on a craint que bI on l'inlnxluisalt dans les élec-
tions à la seconde Chambre, elt<^ Q'eOt pour conséquence une
nouvelle * ère de la liberté * et ne laissât le champ libre &
la domination des partis. Ces craintes me paraissent mal
fondées. L'organisation que le nouveau système exige des
partis a pour objectit unique les ëlectiouB. Grâce à lui, len
électeurs qui ont déjà pris position dans un parii peuvent
s'unir pour le vote dans une action commune. Et c'est tout.
Ce système ne crée pas les partis, car ceux-ci ne doîTent
..G.Kvsl^
2i6 FABLEMBNTABIBUB DDALISTE.
Mais laissons cette question pour examiner de
plus pr^s le fonctionnement de la Constitution et
le parlementarisme qui a germé sur elle. Nous
avons tout d'abord à. nous demander comment se
sont développées les relations entre les deux
pouvoirs, Roi et Riksdag.
Lorsque les hommes de 1809 s'apprêtèrent à
donner au pays une Constitution nouvelle, ils
avaient encore présents à l'esprit les souvenirs
de deux régimes entièrement opposés : d'une part
la domination parlementaire exercée pendant
'( Tère de la liberté », et d'autre part la royauté
de 1789 où l'on retrouvait quelque chose de
l'absolutisme royal tel qu'il florissait un siècle
auparavant. Â l'extérieur, ces deux régimes
avaient mis le pays à deux doigts de sa perte, et
à l'intérieur tous les deux avaient établi In tyran-
nie. Il s'agissait de tirer parti de ces expériences
diverses et de trouver une Constitution qui empê-
chât tout empiétement de ia part des deux pouvoirs
leur existence qu'à des divergences d'inlérêta et d'opinions,
el non pas à un système de vote. Mais ce qu'il y a de plus
important, c'est que cette méthode ne favorise pas la
naissance de partis Kouvernants, comtite peut le faire te
vote majoritaire. Or c'est là précisément ce qui donne sur-
tout à la vie des partis ses passions et sa violence eias<
pérée. Tout conaldôré, le vote proportionnel me semble
appelé à produire uu résultat opposé à celui qu« l'on
redouta
3,Cooi^le
SCÂDE : KOI ET BIKSDAO. 247
et mit fin pour toujours à l'absolutisme soit du
Roi soit du Riksdag. On y parvint en partageant
entre eux, en deux portions aussi égales que
possible, la puissance de l'État dont chacun d'eux
avait abusé lorsqu'il l'avait détenue à lui tout
seul. On n'adopta pas pour cette répartition le
même principe que leS hommes d'Etat avaient
suivi de l'autre côté de l'Atlantique lorsqu'ils
divisaient le pouvoir d'après les fonctions de
l'État : fonction executive et législative, y compris
la fonction fiscale. Au lieu de cela on s'efforça de
répartir entre chaque main chacune de ces
diverses fonctions, mais en prenant garde que
chacun des deux pouvoirs eût sa tâche principale,
le Roi étant chargé de gouverner le pays, le
Riksdag de lui en donner les moyens tout en le
surveillant et de déterminer avec lui les principes
à suivi-e pour ce gouvernement.
L'idée très nette que les auteurs eux-mêmes de
la Constitution se formaient du partage des râles
ressort parfaitement des termes par lesquels ils
caractérisent, d'accord avec la théorie de Montes-
quieu, les détenteurs du pouvoir: « La commis-
sion, disent-ils, a cherché à fonder un pouvoir
exécutif agissant selon certaines formes déter-
minées, avec unité de décision et puissance entière
pour l'exécution; un pouvoir législatif, lent et
..G.Kvsl^
â48 PÀRLBHENTAItlSHB DUALISTE.
faible pour l'action mais ferme et bien armé pour
la résistance. » On se représentait te gouverne-
ment comme la force d'impulsion dans la vie
politique suédoise et le Riksdag comme un élément
plutôt passif. Or c'est l'inverse qui s'est produit, en
même temps que se produisait un important
déplacement de puïssansë de l'une à l'autre des
deux personnes actives de ce duo politique, le
Roi et le Rîksdag.
Nous constatons d'abord un semblable trans-
fert en ce qui concerne les finances et l'économie
publique et par suite la liberté d'action du gou-
vernement. Ce fait s'explique avant tout par la
modification intervenue dans le rapport entre les
revenus ordinaires, dépendant en partie du roi,
et les i m p 6 1 s [bevillningar), fixés par le Riksdag
tout seul. Alors que les premiers constituaient en
1809, y compris les prestations en nature, la
grande masse des revenus de l'Etat, ne laissant
aux seconds qu'une place resireinte, l'accroisse-
ment de la population et de la fortune, joint à la
réduction des anciennes charges foncières, ont
amené peu à peu tes choses à ce point que les revenus
ordinaires comparés nux impôts ne représentent
pas plus de la septième partie du budget total'.
1. Pour l'année 1904, on évalue en chiffres ronds les reve-
nus « ordinaires > à 28, 7 millions de couronnes et le produit
des « bevlllningar » à 137 millions.
StIKDB : ROI BT RIKSDAQ. 2i9
Mais d'autres circonstances ont eu une impor-
tance encore plus grande pour l'extension de la
puissance parlementaire : je veux dire la spécia-
lisation des dépenses et la limitation du
droit laissé au roi de disposer d,es
économies budgétaires. Les paragraphes
62 et 64 de la Constitution décident que le Riks-
dag réglera l'emploi de certaines sommes affectées
à des buts déterminés dans les divers chapitres
du budget. Ces paragraphes ne visaient origi-
nairement que les revenus fixés par le Riksdag
[bevillningar) ; ils ne s'appliquaient non plus,
dans la pensée des législateurs, qu'aux sommes
totales des huit chapitres principaux dont se
composait le budget de l'Etat. Si cette dernière
conception avait prévalu, le roi aurait eu pleine
liberté pour donner aux sommes laissées à sa
disposition l'emploi qu'il aurait jugé te meilleur.
C'est ce que fit aussi tout au début le roi
Charles-Jean XtV. Mais grâce au droit de con-
trôle du comité du budget et grâce aux
réviseurs du Riksdag, il s'est opéré ensuite, et
surtout depuis que les Riksdags devinrent annuels,
une spécialisation de plus en plus grande des
crédils suivant les divers chapitres du budget;
ce fait, joint au règlement de 1841 sur le droit
royal de disposer des économies, a enlevé au roi
2SD FABLBHSNTASISMK DUALISTE.
sa liberté d'actiou en tout ce qui concerne les
dépenses publiques. Or, comme toutes ou à peu
près toutes les aflaires de l'État exigeut de
l'argent, le Riksdag; ou plutôt le comité du
budget peut intervenir dans tous les domaines
de l'exécutif. Le comité du budg:et, qui est le
plus important du Rlksdag, ou plus exacte-
ment les huit membres (quatre pour chaque
Chambre) qui président à ses travaux peuvent en
fait être considérés comme formant à cAté du gou-
vernement proprement dit un autre gouvernement,
celui-l invisible et irresponsable. Nous retrou-
vons là comme un retour à l'hégémuaie parle-
mentaire du ivm° siècle. Il faut beaucoup de
prudence et de tact pobtique pour que cette
situation ne donne pas lieu à des incideats
capables d'ébranler la Constitution.
La seconde mutation de pouvoirs qui s'est pro-
duite porte sur l'initiative en matière législative
et le travail de réformes qui s'y rattache. Le
pouvoir croissant du Riksdag «n cette matière
tient tout d'adord à ce qu'il a son origine dans
le peuple, à ce qu'il représente la nation aux
mille volontés et à ce que chaque représentant a
une tendance naturelle h, se faire l'écho des dfoirs
et des réclamations populaires. Mais, en outre,
noua voyons là une conséquence du droit illimité
,..,..G.KvsI-'
SUÉDE : ROI BT BIKSDA6. 2-ït
de motioQ et du trop d'enipressement du Riksdag
à transformer ces motions en adresses au roi.
Tant que les Riksdags n'étaient pas annuels, l'inl'
tiative des états n'était pas prédominante ; elle
s'est développée avec l'abrègement des périodes
législatives, en 1845 et eu 1866. A. partir de cette
dernière date, le second pouvoir de l'État a com-
plètement débordé le premier en matière d'ini-
tiative tout de laème qu'eu matière budgétaire, tl
est vrai que le gouvernement maintient son ini-
tiative en ce qui concerne les crédits nouveaux
pour (les institutions déjà existantes ; et même il
semble que, de plus en plus, le RiUsdag lui
reconnaisse dans ce domaine une autorité exclu-
sive. Mais pour les questions de législation et
pour les nouveaux règlements de toute espèce,
— qu'ils nécessitent ou non des crédits, — le
Riksdag a depuis longtemps distancé le gouver-
nement. La masse des projets de ce genre, pro-
venant du Parlement, donnent tant de travail au
gouvernemeut, que celui-ci trouve difQcileiaeut
le temps de se livrer lui-même et d'une façon
indépendante à une semblable tâche. Il ne peut
même pas, avec les forces qu'il a à sa disposi-
tion, venir à bout de la tâche que lui impose le
Riksilag. Pour cette raison, ainsi que pour
d'autres, le gouvernement se décharge d'une
262 PARLEMENT ABISMH) DUALISTE.
partie de son travail sur des commissioas ins-
tituées à cette fin.
Les commissions, où eutreut surtout des par-
lementaires des deux Cliambres et de nuance
diverse, mais oi!l entrent aussi quelques hommes
de compétence spéciale, ont été élevées pour
ainsi dire à la hauteur d'un système de goaves-
nement. Cette institution forme comme un déri-
vatif nécessaire à tout ce grand zèle de réformes
qui, sans cela, submergerait à la fois gouverne-
ment et Parlemeut. Mais il est évident que le
gouvernement se retire de plus en plus devant
cette activité et ne prend d'initiative que dans les
grandes questions. Le résultat de tout ceci doit
donc être, sinon une modification du rapport
juridique entre les deux pouvoirs, du moins
une interversion réelle des rôles. Le Riksdag est
devenu la force motrice de la vie politique, pre-
nant ainsi la place et le rôle du gouvernement'.
I. Voici, comme Illustration de ce qui vient d'être dit,
quelques données statistiques sur le travail accompli dans
la session parlementaire de 1903.
Propositions royalee :
■ Plus ou moins IndépeadanteE SS
Amenées directement par des adresses parle-
meataires antérieures 18
Total 101
..G.Kvs'^
SUÉDE : ROI ET BIKSDAS. 2S3
Ainsi les dispositions constitutionnelles ont sou-
vent de graves conséquences qui vont au-delà ou
à côté du but poursuivi par leurs auteurs.
Si le Rihsdag: a vu grandir de la sorte son
iafluence dans les domaines où le roi et lui ont
des attributions égales, il est évident que sa
Classons mafntenaut les propositious a indépcndaates »
suIvanL leur objet :
a] Questions privées (ventés de terres domaniales, pen-
sions, etc.], ou revenant pâriodiquemenl (le budget, elc). 59
b] Questions accidentelles et autres affaires de moindre
importaoce 8
c] Lots et ordonnances générales 18
Sur la totalité des propositions, furent approuvées,
avec ou sans modiOcations (notamment dans te projet
du budget) 92
Sur les 18 propositions de ta catégorie e (lois générales,
etcO, qui peuvent être regardées comme la part propre du
gouvernement dans le travail législatif, 14 furent approu-
Dans le même temps furent présentées 265 motions, dont
90 étaient amenées par d'autres motions ou par des propo-
sitions royales soumises au cours du même Riksdag (amen-
dements).
Sur ces 265 motions, 169 furent repoussées et 4 retirées ;
le nombre des motions acceptées s'élevait donc à 92, c'est-
à-dire au même chiffre que celui des propositions royales.
Naturellement, un calcul de ce genre ne donne aucune
idée de l'importance et de la valeur de l'initiative comparée
'des deux pouvoir.% mais il est clair, du moins, que sur ce
point le Riksdag ne le cède en rien au gouvernement.
En effet, la plupart des ttlfandes questiojis dont la dernière
généraiiOQ a vu la solution, ont été soulevées sur l'initia-
tive du Biksdag, par l'entremise de motionnaires indivi-
duels.
..G.Kvsl^
'254 PABLEUENTARISUK DUALISTE.
puissance s^est accrue davantage encore sur
d'autres points où ta CoDstitutioo lui reconaais-
sait le droit de décision. Dans ua seul cas, savoir
en ce qui concerne la Banque du royaume, nous
avons vu se produire une évolution en sens opposé,
lorsque la réforme de 1897 attribua au roi le
droit de désig^ner un président pour la dite
Banque, et confia au roi et au Riksdag réania la
législation de cette institution fiosocière. Hats
pour ce qui est de la législation des impôts et des
subsides, ce qui constitue l'autre grand domaine
soumis à l'autorité prépondérante du Riksdag,
celui-ci est devenu de plus en plus le seul maître.
Il t'est devenu principalement en matière de légis-
lation douanière. Autrefois eu effet le roi, eo
vertu du § 60 de la Constitution, non seulement
fixait les droits de douanes sur les céréales, mais
encore pouvait abaisser les droits de douanes
d'une façon générale, en tenant compte du mo-
ment et des circonstances. La dernière fois qu'il
exerça ce droit dans toute son ampleur, ce fut
lors de la conclusion des traités de commerce
avec la Frauce en 1865, Après cette époque, le
droit en question, qui, lorsqu'il s'applique à
d'autres objets que les céréales, ne s'appuie pas
-sur un texte positif mais sur l'ioterprétstioD d'un
texte, sortit peu à peu de l'usage, et depuis la
..G.Hvsl^
SUàDS : BOI BT RlKBDA.tl. 255
grande controverse douanière qui mai^aa la
fin de la période décennale 1880-1890, et où
le gouvernement subit un échec, il semble bien
qu'il considère désormais la politique douanière
comme une chose qui ne le regarde pas. Ainsi
dans ces matières qui louchent pourtant aux
relations avec l'étranger, ainsi que d'une façon
générale en matière d'impositions, le Parlement
suédois dispose d'une puissance plus grande
qu'aucune des assemblées représentatives du
monde entier sans même en excepter celle de la
Norvège et celle de la Suisse. Car en Norvège le
Stortiog doit malgré tout tenir compte dans ces
questions de la réponse donnée par le ministère,
sans quoi il s'expose à renverser son propre gou-
vernemeut. ëq Suisse la représentation a au-dessus
d'elle le peuple lui-même qui peut annuler ses
décisions par le moyen du référendum. Et dans
les Etats-Unis, qui ont le même type constitution-
nel que la Suède, le président peut s'opposer par
son veto à toute modification dans les impôts et
dans les douanes. Quant aux autres pays, nous y
voyons que le gouvernement a sur les décisions une
influence fort grande et même prépondérante en ce
qui concerne spécialement la politique douanière.
C'est seulement en Suède que le Parlement décide
en souverain de la politique douanière aussi bien
256 P&BLEMENTA.R1SUK DDALISTB.
que deft questions d'impôts, sans même avoir
besoin du consentement royal.
Comme on le voit par ce qui précède, le Riks-
dag suédois possède des pouvoirs et une autorité
exiraordinaires. Mais on se demandera : comment
s'exerce cette puissance? Quelle main la dirige et
la fait servir au bien de tous? Qui règle les tra-
vaux du Riksdag et le guide dans ses décisions?
Ici encore aous constatons une grande différence
entre le Parlement suédois et ceux des autres
nations.
La direction formelle des travaux parlemen-
taires est assurée par la loi organique du Riksdag,
par les règlements spéciaux, ainsi que par les
statuts adoptés pour chacune des Chambres et
par de vieux usages. D'ailleurs ces travaux sont
conduits avec une précision et une sûreté que
donne seule une longue expérience parlementaire.
Voici les règles générales que l'on observe. L'or-
dre d'introduction des questions, qui doivent se
traiter au même temps dans les deux Chambres,
est déterminé par la conférence des présidents,
[talmamkonferensen ') . Aucune question appai*-
tenaiit à la compétence des cinq comités per-
1. Celle-ci se compose des présidente et vlca-présidenu,
atnsi que de trois députée désignés pour chacune des Cham-
bre a.
..G.Kvs'^
SUÉDE : LE TRAVAIL PABLEHENTATBE. 257
manents* ne peut se résoudre sans passer au
préalable entre les mains d'un de ces comi-
tés. Lors de l'examen définitif il y a liberté
complète de discussion; mais c'est on usage chez
nous que personne ne demande la parole plus de
deux fois sur la même question, excepté pour
répondre brièvement à des observations présen-
tées. La clôture du débat par décision spéciale
(clostire) ou par la demande de mise aux voix
(previoiis question) sont des usages tout à fait
étrangers au droit suédois. C'est qu'en effet il ne
s'est pas présenté dans le Riksdag suédois de ces
abus de la liberté de parole qui ont rendu néces-
saires ailleurs de semblables mesures. Ce qu'on
pourrait plutôt nous reprocher, ce serait une cer-
taine brièveté d'hommes d'affaires, principalement
dans la première Cbambre. On est an peu plus
loquace dans la seconde Chambre, mais nulle part,
à de rares occasions, la discussion ne
1. Il en exialBit un sixième, appelé i comité des
réciamatioDS et d'économie publique ; > il (ut remplacé
en 1868 par les comités dits temporaire*: ceux-ci ne
sont pas communs au Parlement tout entier; Ils sont
éluB dans chaque Ctiambre à chaque session, et leur nombre
est déterminé par l'assemblée. Beaucoup ont estimé ce nou-
veau système inférieur àl'aQCÏPn, c'est-à-dire au systèmedes
comités communs pour toutes les aCTalres. Il présente
cependant cet avantage de faciliter l'étoufTement des projets
mal venus.
..G.Kvsl^
DtlAUSTK.
prend l'envergure d'un s^and débat parlementaire.
Les discours atteignent rarement la durée d'une
heure, et plusieurs minutes suffisent d'ordinaire.
Mais si l'éloquence parlementaire est peu cultivée,
le tact parlem entai rr n'en est que mieux observé.
Dans aucun Parlement du monde les questions ne.
sont discutées avec plus de bon sens et de mesure
que dans le Parlement suédois.
Autant la direction formelle des travaux du
Riksdag est sàre et solidement organisée, autant
est faible et incertaine leur direction réelle, en ce
qui concerne le contenu même de ces travaux et
les décisions. Cette insuffisance se constate tout-
d'abord dans « l'initiative, » c'est-à-dire dans la
déposition des projets qui seront discutés par le
Riksdag. Comme on l'a vu précédemment, l'ini-
tiative en matière législative a été transportée de
plus en plus du gouvernement au Riksdag. C'est
ici qu'elle réside en grande partie, et elle est
entre les mains des divers molionnaires. Il est vrai
que quatre des comités possèdent le droit de
motion, mais ils l'emploient rarement et presque
tout est abandonné au zèle réformateur des indi-
vidus. Les projets individuels sont d'ailleurs trai-
tés suivant les mêmes formes que les propositions
du gouvernement et personne ne peut se plaindre
d'une injustice. Ces habitudes contrastent avec
,..,..G.Kvsl^
aUÈDB : LE TRAVAIL PARLBMKNTAIRB. 2B9
celles d'autres pays tels que l'ADgleterre.laFrance,
les Etats-Unis, etc. . . , où la majorité des motions
individuelles ne parviennent pas à se faire exami-
ner. Cet avantage accordé en Suède aux députés
individuellement est d'ailleurs fort souvent mis à
profit, surtout dans la seconde Chambre, dont les
membres s'efforcent ainsi d'attirer sur eux l'atten-
tion de leurs électeurs. Mais ce qu'il y a de plus
fâcheux, c'est que tout député peut présenter des
motions relatives à des crédits, quelle que soit la
destination de ceux-ci. Ainsi tous les gpcoupes d'inté-
rêts sociaux, si petits soient-ils, peuvent en dehors du
gouvernement porter leurs réclamations et leurs
demandes de subsides devant le Riksdag, c'est-
à-dire devant l'autorité qui dispose des impAts.
Comme on voit pnr là, le droit d'initiative dans
le Parlement suédois n'est ni limité, ni organisé'.
Aucun sujet n'est réservé à tel ou tel motioonaire
et aucune censure ne s'oppose à ce qu'un projet
passe par ta filière accoutumée. C'est là un des
1. La seule limitation. ~ d'ailleurs purement formelle, —
qu'il y ait au droit d'initiative est contenue dans le § SSde
la loi organique d'après lequel une oiotidQ relative à un
sujet du ressort d'un comité permanent doit être pré-
sentée dans les dix jours qui suivent l'ouverture du Itikg-
dag. Mais cette prescription ne 6'appltque pas aux projets
conalliutionnels ni aux projets qui se rattachent t un
événement survenu pendant la session ou aune décision
prisa par le Parlement.
..G.Kvsl--
260 PABLBMBNTARIBMB DUALISTE.
points par où la vie parlementaire de la Suède se
sépare îe plu» de celle des autres pays. Car en
Angleterre et dans les autres Ëtats où règne le
parlementarisme de cabinet, l'initiative revient en
majeure partie au gouveruement et elle est en
tous cas sous son cootrôle ; aux Etats-Unis elle est
comprimée par l'ordre du jour et par l'hégémonie
que possèdent en cette matière le speaker et les
' présidents de comités, — ce qui amène pour
les motions individuelles les conséquences indi-
quées plus h»ut. En Suède, au contraire, la liberté
est complète, Fort heuri<!U8ement il y règne autant
de liberté lorsqu'il s'agit de critiquer et d'exami-
ner les motions, et en dehors de cette critique
parlementaire il existe le veto royal pour les affai-
res qui exigent le consentement du monarque.
Cependant on pourrait souhaiter que la critique
fût encore plus approfondie en ce qui concerne les
affaires abandonnées à la seule décision du Riks-
dag (impôts et douanes), et que 1« droit de veto
fût pins souvent utilisé. S'il en était ainsi, on ne
trouverait pas à se plaindre de la multitude des
adresses présentées au roi par le Riksdag.
Oe même en ce qui concerne les travaux et les
décisions du Riksdag nous constatons une grande
indépendance, quoique la liberté sur ce point ne
soit pas aussi étendue qu'en matière d'initiative.
..C.H.^IC
SCÂDE : LE TRATAIL PABtBUBMTAlflE. 261
Le gouvememeot, qui dans les pays de parlemen-
tarisme anglais règle et dirige complètement ou
en grande partie le travail parlementaire, n'y
intervient point en Suède, — ce qui est d'ailleurs
une conséquence naturelle du caractère dualiste
de la Constitution. Le gouvernement ne peut tra-
vailler qu'officieusement pour les propositions
qu'il présente et parler en leur faveur lorsqu'elles
passent devant les Chambres, mais c'est là tout
simplement ce que fait chaque député pour la
motion qu'il apporte. Quant aux présidents, ils
n'ont absolument aucune autorité en cette matière.
La seule direction organisée qui puisse être meS'
tionnée est celle qui provient du système des
comités, Mais elle a peu de force et on ne
saurait la comparer avec la puissance qu'exercrnt
les comités dans le Congrès des Etats-Unis.
D'une façon générale nous pouvons dire que les
Chambres suivent l'avis des comités lorsque
ceux-ci demandent le rejet d'une proposition et
que leurs membres sont d'accord entre eux. lien
va de même de chacune des Chambres lorsque
ses représentants dans les comités sont d'ac-
cord contre ceux de l'autre Chambre. Mais dans
d'autres cas, si les comités concluent à l'ao-
ceptation ou qu'il y ait dans leur seio des diver-
gences d'opinion, la décision des Chambres est
..,,..G.Kvsl^
262 PIRLSHBNTJUIISMB DUALISTE.
souvent opposée, excepté en ce qai concerne l'a-
vis du comité du budget. Celui-ci est le
seul qui dirige vraiment les décisions du Biks*
àag. Les questions qu'il traite (règlement du
budget, propositions de crédits, etc.) présup-
posent ordinairement une compétence spt^cÏBle
et une connaissance du détail qui ne $ont pas &
la portée des autres membres des Chambres.
D'ailleurs une institution qui contribue à rendre
faible toute direction en matière financière ainsi
qu'en matière de politique douanière, c'est l'ins-
titution du vote en commun. Il est souvent impos-
sible de prévoir les résultats qu'il pourra donner.
Enfin le système des deux Chambres a un effet
analogue, en ce sens que les deux Chambres
s'arrêtent souvent à une décision différente,
déjouant ainsi toute tentative faite pour diriger
l'ensemble du Riksdag.
Il existe, il est vrai, dans l'intérieur de chaque
Chanibre des groupements de partis qui exercent
une certaine direction, du moins en ce qui con-
cerne les questions importantes. Tel était le cas
en particulier pour le grand parti agraire, au
temps de sa puissance ; rappelons encore les
protectionnistes et les libre-échangistes lors des
grandes discussions douanières, les partisans de
la tempérance, etc. . . Mais c'est seulement dans
..G.Kvs'^
SUÈDB : LE TRATAII. FARLEUENTA1RE-
les questions capitales prises comme plates-formes
par ces partis que l'on fait appel à l'esprit de disci-
pline de leurs représentants. Par ailleurs chacim
parle et vote suivant son idée ; cependant il se
trouve d'ordinaire pour chaque groupe de ques-
tions tel ou tel membre de la Chambre qui est
regardé comme une autorité et dont la majorité
suit le vote. 11 y a encore un domaine où ce
groupement de partis est actif et a vérifahlemeut
une fonction à remplir, je veux parler de l'élec-
tion aux divers comités. Ces élections seraient
très difficiles sans des listes dressées au
préalable. C'est aussi l'occasion où les partis
msuifestent le plus nettement leur existence/la
majorité s'altribaant plus de places qu'elle n'en
avait besoin. Ce qu'il y a de caractéristique pour
ces élections et en général pour le Biksdag
suédois, c'est qu'immédiatement après le principe
de la fidélité au parti on suit celui de l'ancien-
neté.
Maintenant, quelle est la nature etquelle est la
qualité des travaux fournis par )e Riksdag
.suédois? Il faut bien que nous disions quelques
mots sur ce sujet dans un tableau général de la
vie politique suédoise. Nous nous bornerons
d'ailleurs au strict nécessaire.
L'écueîl où le parlementarisme, s'il ne vient pas
..G.Kvsl^
261 PARLBUENTAB^HK DUAUSTE.
y faire nnufrage, subit du moins des avaries fré-
quentes, ce soDt les intérêts particuliers. A
l'origiDe, la représentation n'a pas eu d'autre râle
que de les défendre. Elle a continué à Je faire,
mais depuis que le Riksdag est devenu en outre
un orgtine de l'Etat, un organe gouvernant,
chargé avant tout de veiller aux intérêts géné-
raux du pays, le rôle ancien doit céder la place
au plus >écent. Or cette nouvelle fonction est
bien souvent difficile à remplir. Leâ intérêts par-
ticuliers sont exigeants, ils veulent se faire jour,
alléguant comme prétexte ou même croyant pour
tout de bob qu'ils se confondent avec le bien
public. C'est aussi ce qui s'est passé très souvent
en Suède après la réforme de la représentation.
Cependant ce ne sont JKmais les intérêts per-
sonnels qui se sont manifestés dans les Chambres.
En revanche, les intérêts de classes et de pro-
fessions ainsi que les intérêts locaux ont souvent
fait pencher la balance au lieu de l'intérêt géné-
ral qui devrait avoir la prédominance sur tous
les autres.
Comme nous l'avons dit, ce défaut, s'est mani-
festé avec plus de force après 1865 que dans
l'ancienne assemblée des quatre états. Il peut
sembler étrange que les intérêts de classes
puissent être pins impérieux dans un moderne
..G.Kvs'^
SUEDE : LE TRAVAIL PARLE U EN TAIRE. 265
Riksdag & deux Chambres que daus uue repré-
sentation fondée sur le principe des classes. Mais
cela s'explique si l'on songe que la division en
quatre états avait comme conséquence l'impossi-
bilité pour un « état » de faire prévaloif ses
désirs s'ils paiaissaient en conflit avec l'intérêt
général du royaume ; et d'autre part trois états
pouvaient, si les circonstances l'exigeaient, faire
céder le quatrième. Comme résultante de ce
jeu des forces opposées, c'était presque toujours
l'intérêt du royaume qui triomphait des ambi-
tions particulières.
Dans te nouveau Riksdag et spécialement dans
la seconde Chambre, un parti de classe, le parti
agrarien, prit dès la première heure une situation
prépondérante, et les ouvriers arrivent mainte-
nant sur ses traces pour constituer un parti du
même genre. Or, non seulement les intérêts de
classes, mais aussi les intérêts locaux jouent
maintenant un rêle plus important qu'il iie faur
drait. C'est en partie une conséquence du § 19 de
la loi du Riksdag, d'après lequel tout membre de
la seconde Chambre doit appartenir à la circons-
cription électorale appelée à le nommer'. La ten-
tation de ménager à la petite patrie électorale
1. Ajoutons que dans les deux Chambres les représentanls
AODi rangés d'après les provinces et non d'après les partis.
..G.Kvsl^
266 PARLEMENTARISME DUALISTE.
quelque avantage parliculîer, comme par exemple
la construction d'un chemin de fer, est plus forte
que la prescription de la loi organique d'après
laquelle le député représente le pays entier et
non une de ses parties.
Il serait cependant injuste de prétendre que la
seconde Chambre aussi bien que la première n'a
pas eu devant les yeux, à côté des intérêts spé-
ciaux, le bien général du royaume. Mais il est
certain que c'^st l'opposition entre ces deux
mobiles qui domine toute l'histoire politique
intérieure de la Suède après 1865 et qui parait
encore appelée à la dominer. C'est elle aussi qui
a donné naissance à ces <r compromis » célèbres
dans notre histoire parlementaire de ces derniers
temps. Le compromis n'est pas en sol quelque
chose de mauvais. Au contraire, dans le système
du parlementarisme dualiste, il est souvent le
dernier mot de ta sagesse politique. Mais il est
des compromis d'espèce différente; il y en a qui
consistent dans une réduction opérée sur des
prétentions mutuelles ; il y en a qui consistent à
vendre son approbation à une mesure d'intérêt
général en échange d'un appui prêté à ses ambi*
tions particulières, ou bien qui se font aux dépens
d'un tiers. Or ces deux dernières catégories de
compromis illicites n'ont pas été sans se produire
..,,..G.H,^1C .
SUÉDE : LS TRAVAIL PABLKMENTAIRB. SffT
à c6[é d'arrangements très loyaux. Le système
dualiste y prête, comme le démontrent abondam-
ment les expériences faites en Amérique.
Enfin, dans cette revue des principaux traits de
la physionomie politique du Riksdag, il ne faut
pas négliger de dire que Les deux Cbambres
présenteat, en dehors des points signalés précé-
demment, d'autres dissemblances frappantes.
Ainsi la Chambre basse s'est toujours distinguée
jusqu'ici par une très grande économie dans
l'emploi des ressources budgétaires, excepté, il
faut le dire, en ce qui concerne la haute culture,
dont des intérêts ont toujours été bien protégés
même dans cette Chambre. Mais pour le reste,
les demandes de nouveaux crédits présentées
par le gouvernement ont été le plus souvent
adoptées gr&ce à l'appui de la première Chambre,
par le moyen du vote en commun. En revanche,
dans des questions d'une autre nature, par
exemple, dans celles relatives à l'Église, A. la loi
civile, etc..., la Chambre basse est en majorité
disposée aux réformes, tandis que la Chambre
haute a une attitude plus réservée. Ainsi on peut,
en employant la terminologie courante, qualifier
la seconde Chambre de hbérale et la première
de conservatrice, bien que la différence se borne
le plus souvent à un délai d'un an ou deux avant
..,,..G.Kvsl^
288 PARLEMENTAHISMB DUALISTE,
l'approbation définitive. Il y a là une dissemblance
qui doit toujours exister entre une Chambre haute
et une Chambre basse, et qui contribue à assurer
au progrès une marche calme et sans à-coups.
Auprès du Riksdag, !e Conseil d'Etat occupe
dans ta vie politique de la Suède une place bien
modeste. Cette institution, qui dans les autres
États de l'Europe, parlementaires ou non, est
pour ainsi dire le cœur de la vie politique, l'organe
qui donne l'impulsion à tout le reste, joue en
Suède comme en Amérique un rôle assez limité.
Comme on l'a vu, elle ne dirige rien dans le Par-
lement. Au contraire, on peut dire que le gouver-
nement ou plus exactement ses divers membres
acceptent de plus en plus les ordres du Riksdag.
Les comptes-rendus des Chambres en portent des
preuves remarquables, surtout dans ces dernières
années. 11 ne faut pas s'étonner si dans ces
conditions des propositions et des demandes du
gouvernement soient souvent rejetées. Mais de
leur acceptation ou de leur échec ne dépeDd
nullement, sauf dans de rares exceptions, l'exis-
tence même du ministère. En ce cas la situation
serait impossible et il ne se passerait pas de
session sans une effroyable hécatombe de
ministres.
SUEDE : LE CONSBIL. 269
Eq Suède du resfe od épargne aux membres du
gouvernement les ordres du jour avec votes de
confiance ou de défiance et de même ils sont
presque coDiplètement & l'abrî de ces interpella-
tions si fréquentes d&ns le parlementarisme dtt
Cabinet. La première de ces deux institutions est
absolument étrangère à l{i vie parlementaire
suédoise et la seconde ue fonctionne que très
rarement. L'interpellation n'appartient pas plus à
notre type constitutionnel que l'introduction des
ministres dans le Parlement. Mais dès lors que
celle-ci est admise, celle-là peut naturellement
avoir sa raison d'être. Elle peut èlre un moyen
.commode d'adresser une représentation au gou-
vernement à propos d'une question à l'ordre du
jour. Si ce procédé est pourtant 1res peu employé
et si on lui préfère toujours le vieux procédé plus
compliqué et plus lent de la motion, cela tient
sans doute à ce que l'interpellation se fait dans
chaque Chambre séparée et n'amène pas le
Riksdag à se prononcer.
Une circonstance spéciale qui contribue beau-
coup à amoindrir la situation du gouvernement
en face du Hiksdag c'est ce droit que possède
chaque membre du Parlement de présenter sous
forme de motion un projet de crédit pour
n'importe quelle destination. Naturellement le
..G.Kvsl^
270 PARLEMENTARISME DUALISTE.
roi peut refuser de ratifier un crédit d« ce
geore, s'il a été accordé; mais uq pareil refus ne
se produit pour ainsi dire jamais, car il s'ag*!!
ordÏQairement d'une question d'intérêt général.
Or la proposition a passé en dehors du gouver-
nement; celui-ci n'est que spectateur, et par là
son prestige diminue lentement mais silrement.
Du reste nous avons expliqué comment il n'y
avait pas en Suède de gouvernement ministériel.
Nous nous bornerons à ajouter que si nos « coaseil-
1ers d'Etat » ont pour trait caractéristique de
n'exercer aucun pouvoir propre, pas mCme le
pouvoir limité dont disposent les secrétaires d'Ëlat
de l'Union américaine, ce fait a son origine dans
l'ancienne organisation administrative de la
Suède. Ici les administrations centrales sont char-
gées par exemple de nommer les fonctionnaires
subalternes et en général de remplir des fonc-
tions qui dans les autres pays reviennent aux
ministres.
Du r6Ie et de la place assignés au « Conseil
d'Etat » dans la Constitution suédoise il s'ensuit
qu'il n'a pas besoin d'être homogène. Le point le
plus important c'est que les membres qui le com-
posent soient personnellement en état de colla-
borer au travail commun. Pour ce qui est de la
composition du Conseil, remarquons du reste qu'il
SUàDB : I.B CONSEIL. 271
n'a pas dans son ensemble un caractère politique.
Il suf^t ordinairement que son chef soit un poli-
ticien espérimentt^. D'ailleurs le choix des mi-
nistres est laissé complètement à l'appréciation
du monarque. Ce choix est en Suède plus qu'ail-
leurs une opération délicate et difficile. Sous te
régime du parlementarisme de Cabinet, le chois
des ministres se fait pour ainsi dire automatique-
ment ; il porte sur les personnag-es les plus en vue
de la majorité, et ceux-ci sont en général des
hommes de valeur. Les mêmes garanties n'existent
pas dans le régime suédois.
Comme on le voit, le Conseil d'Élat suédois,
dans ses rapports avec le Rîksdag et aussi vis-à-
vis des administrations, est une institution assez
faible et mal armée. Il en est de même, au point
de vue légal, de ses rapports avec le monarque ;
la Constitution n'a reconnu au Conseil aucune part
indépendante dans la direction du royaume. Si
malgré cela il peut détenir et est arrivé à
détenir l'administration des affaires du royaume,
du moins en ce qui concerne les attributions
royales, cela dépend de la conception que le
monarque s'est faite de sa situation et de son
rôle.
La Constitution reconnaît au roi le droit exclu-
sif d'administrer le pays et de décider dans toutes
..,,..G.Kvsl^
272 PARLEMENTARISUB DUALISTE.
les affaires d'Etal. <>)nrormé[nent à Tesprït aussi
bien qu'à la lettre de la Constitution, il est entendu
que cette attribution royale doit être exercée réel-
lement. Le roi est le seul pouvoir exécutif du
royaume ; et personne ne peut lui enlever les
droits et les devoirs attachés à cette fonction. Mais
&i^ tout en conservant formellement l'exercice du
pouvoir, — dont rien ne saurait le dispenser, —
il préfère en confier à d'autres la réalité, il est
clair que c'est là une chose qui dépend de lui per-
sonnellemeot. Il peut par exemple sanctionner une
décision qu'il laisse à un autre le soin de lui dicter.
Ce procédé n'est pas d'accord avec l'esprit de la
Constitution, mais elle ne peut l'empêcher. Sous
l'influence des idées modernes et de la couception
étrange qu'on s'est faite après coup de la Constî-
tution suédoise, le monarque s'est peu à peu sous-
trait au fardeau de la direction du royaume, en
l'abandonnant au Conseil d'Etat. Ainsi celui-ci a
reçu non pas formellement mais en fait une
puissance que la Constitution ne lui avait pas
destinée et qui fait pourtant de lui un gouver-
nement au vrai sens de ce mot. Cette évolution
étrangère à la Constitution a des conséquences
fort étendues.
Toutefois ce transfert de la puissance réelle
n'avait rien en soi qui put avoir une action fâcheuse
SU^DB : ROI ET BIKSDAa. 213
sur la Constitution ni porter préjudice au pays ;
au contraire, il pouvait mÉme être un bien dans
certaines circonstances. Mais le malheur est que
le Conseil d'État, pour les raisons données précé-
demment, est devenu de plus en plus dépendant
du Riksdag. Dès lors que le roi a, si j'ose ainsi
parier, livré son pouvoir au Conseil derrière le
dos de la ConstilutioD, la subordination de l'un
vis-à-vis du Parlement entraîne nécessairement
celle de l'autre. Par là cet équilibre des deux
pouvoirs. Roi et Riksdag, qui était, suivant la
Constitution de 1809 le principe fondamental du
nouveau régime, se trouve fortement menacé! Tel
est le changement profond qui atteint la Consti-
tution et dont les déplacements de pouvoirs signa-
lés plus haut (p. 260j n'ont été que des manifesta-
tions. Le premier pouvoir de l'État, c'est-à-dire
le Roi. est en train de. se placer avec le Conseil
sous la dépendance du Parlement. On comprendra
mieux ce qu'il y a de fondé dans cette crainte si
l'on compare la puissance du roi telle qu'elle est
devenue en fait dans les domaines où l'influence
du Riksdag peut se manifester complètement,
avec la puissance qu'il continue à posséder dans
les domaines où ne pénètre pas l'influence parle-
mentaire : par exemple la politique étrangère, y
compris les relations avec la Norvège. En ces
..G„.,Sk
274 PARLEHBNTARI5UB DUALISTE.
matières il n'y a guère de place pour rinittative
parlementaire ni pour les motions individuelles,
et d'ailleurs les procès- verbaux des affaires étran-
gères sont en règle générale soustraits à l'exannen
du comité constitutionnel. Aussi le roi a-t-il
maintenu sur ce point l'indépendance que
lui reconnaît la Constitution, Tel est également le
cas pour la nomination des fonctionnaires, qui
reste en dehors des atteintes du Parlement, en
vertu du § 90 de la Constitution. Mais partout
ailleurs le premier pouvoir du royaume est en
train de se soumettre à l'autre, et cela par l'inter-
médiaire du Conseil des ministres ; et ainsi se
trouvent ébranlées les bases mêmes de la Consti-
tution actuelle.
En présence de celle évolution, on se demande
tout naturellement comment elle a pu se produire
et quels eu ont été les facteurs. Il est clair que
l'admission du Conseil aux délibérations du Riks-
dag eut une large part dans la transformation dont
il s'agit. Mais cette part est plus négative que
positive. La voie se trouvait aiusi frayée pour
cette transformation, qui devenait beaucoup plus
facile, mais cela n'a pas sufli à la mettre eo
marche. D'autres influences ont été actives, et il
faut citer en première ligne l'ambition naturelle
à toutes les assemblées représentatives d'étendre
SVitiS : BOI BT R1K3SAQ. 275
leur puissance. Or cette ambition est particuliè-
rement vive dans le parlementarisme dualiste où
le Riksdag possède déjà, en vertu de la Constitu-
tion, une part si grande dans la formation de la
volonté d'État et où le système des comités a
pris une telle ampleur. Mais en dehors de ces
tendances communes à toutes les représentations
populaires, d'autres causes plus spéciales sont
entrées en jeu . Les unes sont objectives et résident
dans la Constitution ; les autres sont subjectives
et se rattachent à certaines idées et à certains
vœux.
La cause objective, constitutionnelle, d'un dé-
placement de pouvoir entre le Roi et le Riksdag,
c'est que dans certains cas le besoin d'une sup-
pléance peut se faire sentir. Le parlementarisme
dualiste, comme du reste toutes les monarchies
constitutionnelles dont la Constitution comporte
au fond un dualisme, exige en effet que le chef
de l'État soit dans la plénitude de sa force ; il
doit avoir à la fois la capacité et la volonté d'ac-
complir sa lourde lâche. Ces conditions ne sont
pas nécessaires, on le sait, dans le régime du
parlementarisme de Cabinet ; mais elles le devien-
nent dans les régimes où le chef d'Etat contribue
de sa personne à fonder la volonté de l'Etat. Dans
les républiques à Constitution dualiste, on peut
..G.Kvsl^
276 FAKLBUBNTARISUB DUALISTE.
obtenir saos diniculté que le chef d'État remplisse
ta c(>nditiou requise et soit un homme d'action*.
Mais on comprend aisément qu'il ne puisse en
être toujours ainsi dans une monarchie héréditaire.
Vu par ce' côté, le régime en question s'harmo-
nise mieux avec une république qu'avec une mo-
narchie.
Cependant il est possible de trancher la diffi-
culté comme il a été dit, le monarque prenant
pour ainsi dire un fondé de pouvoirs et veillant
seulement à ce que ce représentant, ou plutôt le
Conseil d'État dans son ensemble, ne trahisse pas
son maître inconsciemment. Nous pouvons citer
un esemple d'une suppléance du même genre;
cet exemple nous est fourni, il est vrai, par une
monarchie constitutionnelle, savoir la monarchie
prussienne au temps de Guillaume 1°' et de son
ministre Bismarck. Ceci soit dit sans poursuivre
plus loin la comparaison. Ce qu'il faut en ce cas,
ce ne sont pas précisément des génies, mais des
hommes ayant assez de force et de prudence, et
cela non seulement au poste de premier ministre
1. C'est ausBt ce qui arrive toujours en fait, — biea qu'on
doive également reconnaitrc avec Bbvcb (American eapn-
tnomiitalih, p. 100 et suiv.) que les vrais grands hommes
pénètrent rarement ou ne pânètrent jamais dauslaUaison
Blanche.
..Coglc
SUÂDB : ROI ET RIESDAO. 2T7
mais à tous les postes. Cependant le point le plus
important, c'est qu'il n'y ait pas d'erreur sur la
nature et sur le but de cette délégation ; il ne
faut pas qu'elle aboutisse à un abandon véritable
de la puissance que la Constitution attribue au
monarque.
Or un malentendu de ce genre s'est produit
dans la réalité ; et c'est là que nous trouvons les
causes subjectives, c'est-à-dire en fait les causes
les plus actives de ce déplacement de puissance
que nous avons signalé entre le Roi et le Riksdag.
On a interprété la délégation des pouvoirs comme
un fait normal ; ou l'a interprétée comme signi-
fiant que le monarque doit, sans intervention
personnelle, abandonner au Conseil d'Etat le soin
de gouverner en son nom comme il l'entendra.
Et d'autre part le Conseil d'État a subordonné de
plus en plus sa volonté à celle du Parlement.
Tout le changement vient de cette double méprise
sur le râle du monarque et sur celui du gouver-
nement.
Du côté du monarque, la méprise en question
est facilement explicable et l'on doit y voir plu-
tôt un désir très loyal de se conformer aux ten-
dances de notre époque. Ces tendances vont,
comme nous l'avons vu, vers des régimes démo-
cratiques. L'évolution générale part de l'absolu-
278' PARLEMENTARISME DUALISTE.
tisme et aboutit au parlementarisme en passant
par la monarchie constitutionnelle. On comprend
très bien comment, sous l'impression des idées mo-
dernes et d'ailleurs sans comprendre parfaitement
le caractère particulier de notre Constitution, les
monarques consciencieui et loyaux qui ont expé-
rimenté le nouveau régime, ont pu s'appliquer à
eux-mêmes de bonne foi le principe célèbre : le
roi règne, mais ne gouverne pas. Ils y
étaient du reste amenés par cette circonstance
que dans l'autre pays dont ils portaient la cou-
ronne, c'est-à-dire en Norvège, ils devaient suivre
le principe en question. L'état d'esprit qui conve-
nait au roi de Norvège ne devait se communiquer
que trop facilement au roi de Suède, étant donné
que ces deux personnes juridiques se rencon-
traient dans la même personne physique. Mais ce
fameux principe, de même que la constitution
norvégienne, appartient au régime du parlemen-
tarisme de Cabinet. Ainsi donc c'était ce régime
que l'on avait devant les yeux et suivant lequel
on se réglait, oubliant que la Constitution sué-
doise est toute diflérente. C'est donc en dernière
analyse une compréhension insuffisante de la Cons-
titution propre qui est la cause du malentendu
signalé plus haut et par suite de toute l'évolution
qui'tneBaee le régime actuel.
..,,..G.K,gl.
RâSIUB SUÉDOIS BT HââlUE ANQLAIS. 279
Mais cette incompréhension n'a pas été person-
nelle au monarque. Tout le peuple a été frappé
du même aveuglement. Le fail est surprenant ,
mais il est pourtant exact. Les hommes d'Ëtat
et les puhlicistes suédois sont en train
d'oublier les principes mêmes de leur
propre Constitution et de s'imaginer
qu'ils possèdent le gouvernement majo-
ritaire du régime anglais; ils croient
i[ue si ce régime ne fonctionne pas en-
core en Suède comme il devrait fonction-
nef, c'est seulement parce que l'évolution
politique de leur pays se trouve en
retard. II serait impossible de croire à l'exis-
tence d'une pareille erreur, si des témoignages
très clairs n'en donnaient des preuves convain-
cantes. Déjà les réformes qui se sont produites,
— admission des ministres au Riksdag et surtout
organisation du vote commua des deux Cham-
bres, — montrent bien qu'on ne comprenait plus
le caractère spécial de la Constitution suédoise.
Ainsi le vote commun avec deux Chambres
différentes est, malgré les précautions prises,
une infidélité faite au système dualiste et un
pas accompli vers le parlementarisme unitaire.
Un vote commun ainsi organisé est parfaitement
en harmonie avec ce dernier régime. 11 est même
..G.Kvsl^
260 PARLEMENTARISME DUALISTE.
étonnaot qu'on n'ait pas découvert ce procédé
très simple en Belgique, en France et dans les
autres pays qui ont importé le parlementarisme
anglais en combinaison avec le système des deux
Chambres. En Suède au contraire, comme en
général dans le parlementarisme dualiste, ud
pareil procédé tel qu'il a été organisé en 1866, est
en contradiction absolue avec le régime politique
actuel. On possédait la même institutioa depuis
longtemps déjà sous la forme du vote commun
en comité renforcé, et il n'y- aurait eu aucun
inconvénient à la transporter dans le Riksdsg* à
deux Chambres, à condition que les membres
participant au vole eussent été en nombre égal
comme dans le comité renforcé. Mais on ne fit
pas attention à cela et ainsi l'iDStitutlon s'éta^
blit telle qu'elle est maintenant, c'est-à-dire en
contradiction avec un des principes de ce type
constitutionnel, qui est l'observation stricte du
système des deux Chambras. En ce cas comme
en beaucoup d'autres la contradiction a pu durer
pendant longtemps sans avoir de conséquences
fâcheuses ; cela tient à ce que, par suite de ta
composition de la seconde Chambre, les votes en
commun sont aussi souvent favorables à l'une des
Chambres qu'à l'autre. Mais que l'extension du
droit de voter vienne à nous donner une seconde
,..,..G.Kvsl^
RÉQIMB SUÉDOIS BT BÉSIHK ANOLAIS. 281
Chambre bien homogène, et alors celle-ci trioni-
phera toujours dans les scrutins en commun.
Ainsi le système des deux Chambres se trouverait
en fait aboli pour toutes les questions importantes,
qui nécessitent le vote commun (imptVts, douanes,
etc..) et par suite la Constitution subirait un
grave échec. Voilà un résultat que les lé^slateurs
de 1865 n'avaieut pas prévu, tout simplement
parce qu'ils ne comprenaient plus la nature exacte
du réaime qu'ils réformaient; non plus que les
autres architectes politiques du xviii^ siècle ils
n'étaient au courant de la difEérence des styles
constitutionnels.
Dès lors s'est implantée de plus en plus forte*
ment dans les esprits cette idée fausse que la
Suède possède juridiquement une constitution
parlementaire sur le modèle anglais. Cette idée
revient jusque dans nos débats parlementaires et
elle a même trouvé des interprètes sur les bancs des
ministres ; de même elle se présente presque jour-
nellement dans notre presse de toute nuance. Les
journaux n'hésitent pas à déclarer que le parle-
mentarisme anglais est le but vers lequel
devraient tendre nos efforts. Ou reconnaît, il est
vrai, que ce but n'est pas proche, mais la faute en
est, dit-on, à la lenteur de notre évoluliou politique.
Ce curieux contre-sens a plusieurs causes, par-
..G.Kvsl^
282 PARLEMEHTARI SMS DUALISTE.
mi lesquelles nous citerons celle-ci : le système
politique que 1 'oq appliqua en 1 809 était si étranger
aux théories philosophiques et constitutionnelles
de l'Europe et même de la Suède qu'à partir
du moment où il ne se trouva plus personne pour
l'expliquer et pour le défendre, son sens pri-
mitif ne tarda pas à s'obscurcir; il fut éclipsé par
les théories régnantes. La science juridique alle-
mande et la doctrine politique de notre philosophe
Bostrôm étaient d'accord pour expliquer que le
pouvoir de l'État réside un et indivisible entre les
mains'du monarque et qu'un partage du pouvoir
était à ta fois une impossibilité pratique et une
monstruosité philosophique. Ainsi s'effaça de la
conscience du public instruit le véritable contenu
de la Constitution de 1809. Mais une influence
plus puissante encore et qui s'étendit à. un public
bien plus vaste fut celle qu'exerça le spectacle de
l'Europe et en particulier de l'Angleterre. Le par-
lementarisme anglais était généralement considéré
comme le parlementarisme par excellence, comme
la seule forme de gouvernement populaire dont
il put être question. La plupart des pays de
l'Europe s'efforçaieut de l'imiter et à leur tête
venait notre sœur jumelle la Norvège, Cette vue
nous hypnotisa de plus en plus et c'est là ce qui
a faussé notre jugement ainsi que celui de nos voi-
..,,..G.Kvsl^
RÉaiHE SUÉDOIS ET RdOIMB ANGLAIS. 283
sins. Si ces voisins avaient été les Etats-Uois an
lieu de la Norvège, personne n'aurait certaine-
ment p\i oublier ou méconnaître le vrai caractère
de notre Constitution. Mais on ne voyait ou on ne
croyait voir autour de soi que des constitutions à
pouvoir unique et indivis; d'où l'idée erronée
qu'il en était de même aussi en Suède et que le
parlementarisme de Cabinet était la ïorme poli-
tique vers laquelle nous conduisait l'évolution
démocratique.
On se rendra mieux compte de la nature
du malenteodu en parcourant ce petit tableau
comparatif où nous résumons les traits carac-
téristiques du régime suédois et du régime
SUÉDE
Le roi admÎQistre seul
le royaume, c'est pour-
quoi loua les actes gouver-
nementaux doivent
décider devant lui dans le
Conseil d'État.
Les ministres ou « con-
seillers d'État ne possè-
dent ni individuellement
ni en corps aucun droit de
décision.
ANGLETERRE
Le roi ne participe que
formellement au gouver-
nement du pays, et consÉ-
quemment il ne participe
pas aux délibérations du
Cabinet.
Cbaque ministre gou-
verne son déparlement et
l'ensemble des ministres
gouverne le pays entier.
..G()o>^lc
PARLEMENTARISME DUALISTE,
Le système des deux
Chambres est rigoureuse-
ment appliqué et il y a en
principe égalité entre les
deux assemblées pour
toutes les questions.
Les conseillers d'État
sont les délégués du Boi
et non du ttiksdag.
Les conseillers d'État
n'exercent pas la moindre
direction sur les travaux
du Biksdag.
Le Riksdag possède un
système complet de co-
mités, qui looctionne
comme un second gouver-
nement, en particulier par
le moyen du comité du
budget.
Des propositions rela-
tives àdes crédits peuvent
être soulevées par des
individualités parlemen-
taires et acceptées ou
repoussées par le Biksdag
indépendamment du gou-
■ vemement.
L'initiative en matière
de lois est exercée en
grande partie, pour ne pas
dire principalement, par le
Riksdag, à ta suite de mo-
tions individuelles.
Le système des deux
Chambres n'est appliqué
que d'une manière fictive
et la Chambre haute a
perdu toute influence.
Les minisires sont lesdé-
légués de la majorité de la
Chambre des communes.
Les ministres dirigent
complètement les travaux
du Parlement.
[1 n'existe aucun co-
mité ayant une impor-
tance quelconque.
Les propositions rela-
tives à des crédits ou à des
subsides sont présentées
par le gouvernement ex-
clusivement.
Il est très rare qu'un
projet devienne une loi
s'il ne provient pas du
gouvernement.
3,Coo^le
BéQlMB SUÉDOIS BT RÉOIMS ANGLAIS.
Le Ftiksdag décide seul,
el sans que le gouverne-
ment puisse y intervenir,
non seulement en ce qui
concerne la plupart des
impAts mais encore en ma-
tière de politique doua-
nière.
Le Biksdag coulrAle et
examine minutieusement
les procès-verbaux du Con-
seil d'État.
Les conseillers d'État ne
sont nullement obligés de
démissionner à la suite de
votes parlementaires.
Les rapports entre le
gouvernement et ta repré-
sentation du peuple sont
marqués au coin d'une
défiance perpétuelle.
Le gouvernement- tient
en ses mains la direction
de la législation financière
aussi bien que celle de la
politique doua ai ère.
n n'existe aucun procès-
verbal susceptible d'exa-
Le ministère se relire en
général au premier vole
défavorable.
Une pleine confiance
règne, jusqu'à la chule du
ministère, entre le gouver-
nement et le Parlement.
Il est bon de rappeler enfin la différence
profonde qui distingue les partis anglais des
partis suédois. Celte différence suffirait à elle
seule pour rendre impossible chez nous un
gouvernement de majorité sn r le modèle de
l'Angleterre. Tout considéré, on ne trouverait
guère actuellement deux régimes qui soient
plus éloignés l'un de l'autre que la monar-
..G.Kvsl^
286 PAKLBUENT&BISHE DUALISTE.
chie anglaise et la monarchie suédoise. Mais,
objectera-t-on^ s'il eu est aiosi k l'heure actuelle,
le régime suédois ue peut-il pas se transformer
après coup et subir une refonte qui le reode
semblable à l'autre? Les conceptions et les désirs
des hommes ne peuvent-ils pas peser sur l'évolu-
tion au point que nous arrivions finalement à
posséder nous aussi un parlemeutarisme de
Cabinet?
Va examen calme et approfondi de la quesUon
nous permet de répondre résolument par la néga-
tive. Bien mieux, noire évolution politique nous
entraîne de plus en plus loin du régime qu'on
nous propose comme un idéal. Nous eu étions
plus rapprochés il y a cinquante ans que nous ne
le sommes aujourd'hui. Les partis que nous
avions alors, parti conservateur et parti libéral,
auraient pu sans aucun doute se développer de
façon à devenir des partis politiques gouvernants;
et à celte époque le gouvernement avait encore la
haute main sur les destinées du pays. Tout a beau-
coup changé depuis lors, mais les changements
qui se sont produits ne nous ont nullement orientés
vers un parlementarisme de Cabinet: tout au con-
traire. Plus l'esprit démocratique a fait de pro-
grès, plus nous nous sommes éloignés d'un tel
ré^me. Le genre de démocratie que comporte le
BÉOIHE SUÉDOIS ET BÉQIME ANGLAIS. 287
parlementarisme dualiste, rend le Riksdag de plus
en plus autonome ; et rien ne peut nous faire
croire qu'il veuille céder jamais son autorité à un
ministère et, suivant une expression qui a été
dite, <> voter au commandement ». Autant que la
structure même de la Constitution, toutes les tra-
ditions et les habitudes du Parlement suédois
s'opposent à une pareille solution. Ceux qui vien-
nent nous expliquer que nous marchons vers le
parlementarisme anglais ne savent pas ce qu'ils
disent.
=,Coogk
CHAPITRE VIII
Le parlementarisme suisse.
Conclusions.
I
LE PARLBMKNTARISUI! SUISSE
La troisième espèce de démocratie moderne est
celle qui s'est développée en Suisse, Elle n'est
représentée dans aucun autre pays, bien que cer-
taines de ses particularités puissent se retrouver
dans les États fédératifs de la grande Union améri-
caine. La démocratie suisse est aussi la seule démo-
cratie moderne qui ait des traits communs avec
celle de l'antiquité.Le peuple dans sa totalité prend
part à la Tormation de la volonté d'Etat, comme
cela se faisait dans les républiques' antiques. La
représentation, — qui existe naturellement ea
Suisse comme ailleurs, — a au-dessus d'elle le
peuple pour lut donner l'impulsion et l'initiative
ou pour la juger en dernière instance. En Suisse
la souveraineté populaire est donc une réalité, ce
■cvslc
PARI.KHSNT&RISUE SUISSE. 289
qu'elle n'est pas ailleurs. Nous avons déjà pro-
testé (p. 129) coutre l'opinion très répandue d'après
laquelle le peuple serait, dans les autres démo-
craties modernes, le détenteur du pouvoir de
l'Etat. Le peuple se contente partout ailleurs de
nommer les organes d'Etat immédiats, mais il ne
détermine pas lui-même la volonté de l'Ëtat. C'est
pourquoi le nom qui convient k ces régimes est
celui de parlementarisme ou de souveraineté par-
lementaire, puisque la vie politique y gravite
autour de la représentation. Tel n'est pas le cas
en Suisse ; ici le pouvoir est partagé entre la
représentation et le peuple lui-même ; de là vient
qu'il est difficile de trouver une désignation con-
venable à un tel régime. En effet, il contient un
métauge de souveraineté parlementaire et de sou-
veraineté populaire. Nous avons préféré l'appeler
tout simplement le parlementarisme suisse, étanl
donné que la représentation y détient toujours la
part principale dans la formation de la volonté
d'État et que d'autre part le système est unique
en son genre et spécial à la Suisse,
. Dans ce pays, comme dans les autres États fé-
déraux, l'activité de l'État est faible en comparai-
son de ce qu'elle est dans les régimes unitaires.
Cependant, elle est ici beaucoup plus étendue que
dans l'Union américaine par exemple, et son im-
..,,..G.Kvsl^
PARLRMKNTABISME S
portance s'accroît cbaque jour. En effet, la Suisse
est déjà trèis avancée sur la voie qui conduit vers
l'Ëtai tinîlaire. Cette marche, que nous avons
déjà signalée (p. 202) comme un trait com-
mun à la plupart des Etats fédératifs, apparaît
en Suisse avec une grande netteté. A ce point de
vue la Suisse marche évidemment sur les traces des
Pays-Bas. Après les orages de la Révolution et
la Restauration de 1815, la Suisse fut jusqu'en
1848 une fédération d'Ëtats sans cohésion. LCn
1848 elle passa au rang d'Ëlat fédéral, et la nou-
velle Constitution de 1874 ainsi que des événe-
ments postérieurs (achat de chemins de fer^ etc.)
ont fait faire de grands progrès à l'Idée unitaire.
Le cas de la Suisse nous fournit d'ailleurs un
exemple intéressant à l'appui de cette théorie
d'après laquelle c'est la communauté des destinées
historiques qui crée avant tout l'unité d'un peuple
et d'une nation. Ou ne trouverait guère de pays
présentant des contrastes plus marqués de langue,
de religion et même de race ; et pourtant, sous
l'influence puissante des grands souvenirs com-
muns, un peuple s'est constitué avec ces éléments
disparates. Mais il n'est pas donné à des souve-
nirs historiques quelconques d'exercer «ne telle
action ; sans quoi la même chose aurait pu se
produire bien plus facilement encore pour les
P&RLBUBNTABISMB SUISSB. 291
deux peuples de la péninsule Scandinave, qui
parlent deux laugues-soeurs'et.qui ont la même
religion et la même origine. Ce n'est pas la com-
munauté dans la paix, mais la communauté dans
la guerre qui crée cette fraternisation des
âmes, d'où résulte une nation. Même les querelles
les plus acharnées entre les partis n'ont pu pré-
valoir sur le souvenir des luttes autrefois livrées
en commun. Il est vrai que le fait d'un Par-
lement représentant la confédération entière et
tous Je s actes électoraux qui en étaient la consé-
quence ont puissamment contribué au résultat
final. En dernier lieu ce sont ces actes électoraux
qui. ont achevé la transformation des cantons
s.uisses en une nation unie. En effet, des actes de
ce genre accomplis en commun sont nécessaires
pour assurer l'unité de . l'ensemble. Ainsi nous
voyons que dans les Etats fédératifs où se pro-
duisent des votes généraux l'unité se développe ;
là. où ces votes manquent, les États-membres
restent disjoints.
Les partis, qui forment la base sociale d'une
vie politique dans les régimes parlementaires,
sont particulièrement développés en Suisse. Ils
pénétrent jusque dans les couches profondes de
la nation et ne demeurent pas à la surface comme
L«s partis anglais. Ils se fondaient primitivement
..,,..G.Kvsl^
PARLEMENTARISME SUISSE.
sur des antagonismes de religion et de nationa-
lité. A cela vint s'ajouter l'opposition constitution-
nelle entre les fédéralistes (cantonalistes), qui
tenaient pour l'iodépendance des cantons, et les
partisans de l'unité, qui voulaient accroître ta
puissance de la Coofédéi'ation au détriment des
cantons. Comme aux États-Unis, cet antago-
nisme, qui se liait d'ailleurs ici à un antagonisme
religieux, aboutit à une lutte ouverte ; mais en
Suisse comme en Amérique l'idée unitaire triom-
pha. Les partis sont actuellement au nombre de
trois : la droite, le centre et la gauche ; la droite
est composée surtout de catholiques des régions
françaises ; les deux autres partis comprennent
les protestants, surtout de nationalité allemande,
mais de nuance politique variée : on y trouve des
modérés et des radicaux. Comme on peut le voir,
ce ne sont pas là des partis de classes, bien qu'il
s'y introduise aussi des antagonismes sociaux,
particulièrement dans le centre et dans la gauche.
Ce qu'il y a de plus remarquable cependant, c'^t
que dans ce pays où ils sont si florissants, les
partis n'out pas le caractère de partis gouver-^
nants, sauf dans les cantons. Sans doute, il règne
une majorité dans chacune des deux Gbambres
(Conseil des Etats et Conseil national) ; mais
d'ordinaire cette majorité n'est pas parfaitement
..G.Kvsl^
PAU LBU ENTA BIS HE S
homogène, et te centre, (|ni est le parti plus
faible, penche tantdt vei's la droite, tantôt vers la
gauche. En outre, IfS partis occupent en général
une situation différente dans les deux Chambres,
ce qui rend diTûrile le gouvernement par un
parti. Mais ce qui empêche complètement
un pareil système, c'est l'organisation du
gouvernement, et actuellement c'est enfin le
référendum. Un gouvernement de parti à la
mnnière anglaise présuppose l'esistence d'un
Cabinet ; mais le Conseil fédéral est aussi
différent que possible d'un Cabinet. D'un autre
côté, aucun gouvernement de parti ne peut se
produire, car il y » au-dessus de la représenta-
tion le peuple souverain, et celui-ci annule sou-
vent les décisions de celle-IA.
Comme on peut le conclure de ce qui précède,
les partis n'ont, dans cet Itltat fédéral, aucune
fonction constitutionnelle à remplir comme en
Angleterre ou comme aux l'^tats-IJuis. La Consti-
tution n'a pas besoin d'eux. Le rôle qu'ils ont A
jouer n'est pas politique, [nais social. Ils accom-
plissent la tâche qui était autrefois celle de la
représentation, et qui consiste à représenter et à
défendre les divers intérêts sociaux. Mais la ma-
nière dont ils le font est aussi caractéristique
qu'honorable pour ces partis. La majorité n'op-
..,,..G.Kvsl^
PABLEMBNTARISHB SUISSE.
prime pas eo géDéra! la minorité; elle lui laisse'
nue voix au chapitre et même une part dans le
gouvernement. Ainsi la représentation proportion-
nelle a été introduite dans plusieurs cantons. Du
reste, la meilleure preuve de cet état d'esprit nous
est fournie par la composilion du Conseil fédépal,
(|ui se recrute dans les trois partis. Ainsi, bien
que la gauche soit actuellement assez forte pour
pouvoir occuper toutes les places dn <>>nseil et
diriger à elle seule le pays, cependant trois places
au moins sur sept sont réservées à des représen-
tants des autres partis.
Les institutions constituantes dn régime
suisse sont le Conseil fédéral, l'Assemblée fédérale
avec ses deux Chambres (Conseil des États et
Conseil national), et lé peuple. Le Tribunal fédé-
ral, qui appartient- également à ces institutions,
peut être omis dans un exposé des traits caracté-
risliques de la vie politique en Suisse. Il nous
suffira de remarquer que. le Tribunal fédéral n »
pas, comme aux États-Unis, le droit d'invalider
une loi adoptée par le pouvoir législatif.
Extérieurement l'organisation pohtique de la
Suisse rappelle beaucoup celle de TUaion aioéri-
caine ; mais vue de plus près, elle s'en écarté
considérablement, comme dans le cas que noua
venons de signaler. L'écart le plus frappant porte
..,,..G.K,^1C
PARLEUBNTARISME SUISSE- 295
sur le gt)ùverneinent-chef d'État, sur son organi-
satioD et ses attributions. Au Heu d'un présideat
nous avons ici un collège ; et les limites très
Bettes que l'on a tracées en' Amérique entre le
pouvoir exécutif et le pouvoir législatif font com-
plètement défaut. Au lieu de la ."éparalion des
pouvoirs,' règne ici, comme on l'a dit avec raison,
la confusion des pouvoirs. Eu fait l'élément cen-
tral de cette Constitution est, du moins jusqu'à
nouvel ordre, la représentation. Son trait distinc-
tif est un Parlement gouvernant. Mais il suit de
là que le pouvoir exécutif ne possède pas ici Tau-
torité indépendante qui lui est généralement attri-
buée ; si bien qu'on peut sa demander s'il ne fau-
drait pas parler plutôt d'un partage du pouvoir
entre deux mains au lieu de ta tripartition pré-
sentée par nous précédemment (p. 208).
Le Conseil fédéral est un collège de sept
membres, dont chacun a la direction d'uu dépar-
tement. Ils sont nommés par l'Assemblée fédérale
tous les trois ans, après le reDouvelFement de la
Chambre basse. D'ailleurs on continue à réélire
les mêmes hommes, aussi longtemps qu'eux-mê-
mes se jugent en état de suffire A leur tâche
laborieuse. Comme on l'a vu, ils appartiennent
en règle générale à des partis différents. Le pré-
sident du Conseil, qui est désigné annuellement
..G.Kvsl^
PARLB11BNTA.RISHB SUISSE.
par l'Assemblée fédérale, est égaleraeot le prési-
dent de la République. Il dirige les délibérations
gOuvernemeotales et teprésente l'État au dehors,
mais pour le reste, il n'a pas une situation diffé-
rente de ses collègues. Toutes les décisions gou-
vernementales sont prises dans le Conseil réuni et
émanent du Conseil dans son ensemble; il n'y a
donc pas de gouvernement ministériel, bien qu'en
fait chaque membre du Conseil soit le maître dans
son département. La liberté d'action du Conseil
fédéral est fort limitée. Il nomme naturellement
les fonctionnaires, — excepté au Tribunal fédéral
et à deux ou trois autres places, — et il règle
toutes les affaires courantes. Mais il n'a pas le
droit d'édicter des règlements ni même des arrêtés
administratifs présentant quelque importance; en
efEet, toutes les mesures importantes, de quelque
catégorie qu'elles soient, émaUent de l'Assemblée
fédérale.
Ainsi donc le gouvernement, peut-on dire, agît
surtout d'api^s des instructions. Hais il a l'initia-
tive dans le Parlement, et il peut proposer lui-
même ou par l'entremise d'un parlementaire, des
lois et des mesures de toute espèce. Ses membres,
il est vrai, ne siègent ni ne votent dans le Parlement,
mais ils peuvent assister aux séances et y pren-
dre la' parole, et c'est un droit dont ils usent
..G.Kvs'^
FARLBMBNTABISUB SUISSB. 297
àboDdammâDt. Ils ne sont pas exposés à des
votes de défiance, et bien que leurs propositions
soient souvent repoussées, la cooGance préside à
leurs relations avec le Parlement. Un usage qui
caractérise très bien les rapports entre le gouvei>-
nement et ta représentation en Suisse, c'est le
fait que celle-ci demande le plus souvent l'avis
de celui-làj relativement à des projets de loi,
avant de passer à une décision. Le Conseil fédérai
est donc à la fois un organe exécutif et un organe
consultatif pour la toute-puissante Assemblée
fédérale'.
L'Assemblée fédérale est, ou peut-être plus
esacteaieat, était le véritable souverain, et déter-
iniuait eu grande partie à elle seule la volonté de
l'État. Elle partage maintenant cette puissance
avec le peuple et c'est ce qu'elle fera sans doute de
plus en plus. De même que le Congrès des Etats-
Unis, elle se compose de deux Cbaïubres dont
l'une doit représenter les cantons et l'autre le
peuple suisse tout entier. Il y a égalilé parfaite
entre ces deux Chambres. Comme it n'existe pas
de vote en commun, l'inégalité numérique des
deux assemblées ne trouble pas plus que dans le
1. DOPBIBZ {Les miniilrei, II. p. 22S) compare, non saus
raison, le ConBeil fédéral ji uue aorte de Conseil tCÉtat prépa-
rant les projets de loi.
..G.Kvsl^
PARLBUBNIARISUB SUISSE.
Congrès américaÏD leur situatïoa respective. Mus
à la différence de ce qui se passe en Amérique,
aucune des deui Chambres suisses n'a droit de
priorité sur l'autre. Ainsi les questions financières
peuvent être soulevées d'abord et examinées
d'abord dans le Conseil des Etats, et le cootnMe
des actes du gouvernement appartient au même
degré à toutes les deux. Il n'y a pas de co-
mités communs ; mais il s'en forme d'ailleurs en
grand nombre et la plupart ont un caractère
transitoire. Ils sont souvent transformés en
commissions qui ressemblent à celles delà Suède.
Il règne d'ailleurs dans les décisions à peu près la
même liberté que dans notre Riksdag. Si, comme
il arrive assez souvent, les deux Chambres
s'arrêtent à une décision différente, on tAche de
se mettre d'accord et on y réussit ordinairement.
Ici comme dans tous les régimes à deux Chambres
égales, on a recours au système du compromis pour
résoudre les conflits ; et l'esprit qui anime les
hommes politiques en Suisse rend l'appUcation
de ce système plus facile qu'ailleurs,
A càté des deux pouvoirs que nous venons
de signaler, le Conseil fédéral et l'Assemblée
fédérale, il en existe un troisième qui est le
peuple suisse. C'est là un trait particdlier au
régime qui s'est développé dans ce pays. Le
..c;.Hvsi'
' -. ^*« B
:bntarisub strisse.
peuple n'est, dans les autres États modernes, qu'un
organe de vote sans influence directe sur la
volonté de l'Etat. Il n'en est pas de mèine en
Suisse : ici le peuple est comme un troisième
pouvoir qui juge les daux autres en dernier
ressort. Le gouvernement direct du peuple se
fait de deux manières : par l'initiative et par le
référendum ou plutôt, suivant le terme très juste
dont se sert un historien, par la sanction'. Le
Il référendum », qui est la plus ancienne de ces deux
institutions, consiste à demander au peuple de se
prononcer par un vote régulier sur les lois et les
arrêtés adoptés parla représeutation. Le l'eferen-
dum est obligatoire dans le cas de réformes consti-
tutionnelles ; autrement il est facultatif et doit être
réclamé par trente mille citoyens ou huit cantons.
L' « initiative », qui est d'institution plus récente,
c'est le pouvoir accordé à un groupe de citoyens
suffisamment nombreux (50. 000^ de présenter un
projet de loi qui, après avoir passé entre les
mains de l'Assemblée fédérale, doit être soumis
au vote souverain du peuple. Le développement
de ces deu.T institutions, par lesquelles le peuple
est devenu un véritable organe de gouvernement,
1. Ch. Sbionobos, Histoii-e poUtiqu« de l'Europe t
poraine, 3- éd., 190Î, p. 254.
..G.Kvsl,
300 PAKLBMBNTABISME SUISSEE.
s'est fait d'abord dans tes cuntons, et de là elles
ont passé ensuite dans la Constitution fédérale
(1848 et 1874). A l'oriçioe elles visaient exclusi-
vement les réformes constitutionnelles, mais elles
iiri'ivèrent de bonne heure à s'étendre aussi à des
questions de législation ordinaire*.
GrAce à ces institutions, qui continuent à se
développer et dont le fonctionnement devient de
plus en plus facile, U souveraineté du peuple
n'est plus ici comme ailleurs une simple façon de
parler; ce n'est plus une expression sonore, mais
bien une réalité. D'autre part, il est clair (]u'à
mesure que celte réalité s'affirmera, l'Assemblée
fédérale verra dimiimer sou influence et son
prestige. Une décadence résultera nécessairement
pour elle du fait qu'elle n'est plus le principal
pouvoir de l'État et qu'elle en a un autre au-
dessus d'elle. Cependant ce n'est pas la défiance
et le mauvais vouloir contre la représentation et
ses actes, qui ont amené en Suisse l'adoption de
ces institutions populaires : le cas n'est pas le
même ici que dans les Etats-membres de l'Union
I. Légalement l'iultiaiive en matière de législaltoD n'est
pas eDCore accordée dans la ConfédëratioD ; maie après la
rerorme de 1991, qui autorise une réviBion partielle de la
Constitution, toute question peut, en fait, être soulevée par
l'initiative populaire.
3,Cooi^]e
PABLEUBNTAillSUB SUISSE. 301
américaine qui ont adopté des procédés analogues.
En Suisse la seule raison a été que les procédés
en question s'employaient déjà dans les cantons
et dans les communes et qu'ils plaisaient à la
masse. Par contre il parait vraisemblable qne le
gouvernement fédéral, qui jusqu'ici était surtout
le simple exécuteur des volontés parlementaires,
tirera des nouvelles institutions un accroissement
de pouvoir, — surtout si, comme il en a été question,
les membres du Conseil viennent à être élus par
le peuple et non plus par l'Assemblée fédérale.
Si ,1*00 essaye de caractériser en un mot ce
régime si particulier et si différent des autres
constitutions modernes, nous pourrons l'appeler
une constitution communale. Tel est en effet
son type spécial, et il tire son origine des cantons
et des communes. Nous avons là une évolution
entièrement opposée à celle qui s'est manifestée
aux États-Unis. Dans ce dernier pays les Ëtats-
membres se sont modelés sur l'Union ; en Suisse
la Confédération s'est modelée sur ses parties
composantes. A l'exception de l'Assemblée fédé-
rale qui a été organisée sur le modèle du Congrès
américain à deux Chambres, tout dans le système
suisse est emprunté aux cantons et, par l'intermé-
diaire de cenx-ci, aux communes : le gouverne-
ment collégial, l'Assemblée toute-puissante, enfin
.„,,..G.Kvsl^
302 CONCLUSIONS.
ie référendum et l'initiative. Les constitutions
d'États du type communal étaient ordinaires
dans l'antiquité ; actuellement nous n'en trouvons
pas d'autre exemple (jue la Suisse. D'une façon
générale elles ne sont possibles que dans un petit
pays, de faible population. Mais les conditions- le»
plus importantes pour qu'un tel régime puisse fonc-
tionner et durer, c'est d'abord que l'État en ques-
tion n'ait pas de voisins dangereux, c'est ensuite
que l'esprit de la population soit sage et pondéré.
En dernière analyse c'est le peuple lui-même bien
plus que ses institutions qui mérite les éloges
souvent décernés au régime suisse; car pour ce
qui est des institutions, — À l'exception de
l'Assemblée fédérale et de la bonne applicatioD
du système des deux Chambres, — on ne peut
guère se dissimuler qu'elles sont très primitives.
II
COKCLUSIOflS
L'étttde que nous venons de faire nous a appris
que les formes d'État modernes constituent des
types distincts et très différents les uns des autres
à la fois dans leurs origines el dans leur applica-
tion pratique. Mais nojis avons vu en même temps
que malgré cela ces types constitutionnels font
partie d'une évolution générale où ils sont comme
des chaînons tantôt successifs, tantôt parallèles.
Les formes d'État, oenuae les styles architectu-
raux, peuvent êtce à la fois très distinctes et pré-
senter cependant entre elles des rapports ■ très
étroits. De l'absolutisme, qui a été le régime le
plus général dans l'Europe moderoe, est sortie
par voie de développement la monarchie consti-
tutionnelle, et celle-ci a donné naissance au parle-
mentarisme sous ses deux types : parlementa-
risme unitaire (anglais), et parlementarisme dua-
liste (Suède-Améi'ique), le parlementarisme suisse
provenant d'un régime aristocratique.
Le principe actif de cette évolution a été celui
du gouvernement populaire. On a passé par
degrés de la souveraineté du prince et d'une aristo-
cratie à la souveraineté du peuple. Mais celle-ci
n'apparaît, sauf en Suisse, que sous la forme de la
souveraineté parlementaire. La représentation po-
pulaire est devenue, ou est en train de devenir le
principal pouvoir de l'Etat. Yoilà ce qu'il y a au fond
de ce développement puissant que parcourt l'Etat
moderne. Les stades antérieurs de ce développe-
ment se retrouvent dans l'autocratie russe ainsi
^ue dans les monarchies constitutionnelles de
l'Europe continentale ', le dernier stade apparaît
..G.Kvsl^
Sut CONCLUSIONS.
dans les formes diverses da parlementarisme.
C'est seulement ici que la représentation populaire
se développe dans toute sa puissance. Ainsi l'é-
volution s'est faite d'une souveraineté royale à
une souveraineté paflementaire, unique ou parta-
gée. 11 est évident que ce dernier réginae peut con-
duire à l'oppression tout comme le premier ; et ce
danger n'est guère moindre aujourd'hui qu'il ne
l'était dans les régimes démocratiques d'autrefois.
Le danger vient de deux cAtés différents ; do
dehors et de la représentation elle-même.
Le péril extérieur doit être cherché dans la
société, A côté de l'évolution qui a transformé le
Parlement d'une assemblée simplement consulta-
tive en un organe de gouvernement, détenteur du
pouvoir de l'Etat, nous en observons une autre
non moins remarquable et qui porte sur la com-
position du Parlement et sur l'idée même de la
représentation. Ces deux éléments se sont gran-
dement modifiés au cours des temps.
La représentation par « états » a cédé la place
à une représentation fondée sur le vote général
de toutes les classes ; et en outre le vote censitaire
a été remplacé ou va être remplacé par le suf-
frage universel. La représentation, qui émanait
des « classes dirigeantes, » est maintenant nom-
mée en majeure partie par les classes populaires.
CONCLUSION 8 ■
La question est donc celle-ci : la représentation
ainsi constituée sera-t-elle capable de remplir
pour te bien de l'État et àa peuple entier la lourde
t&cbe que lui imposent ses nouveaux pouvoirs?
Nous savons d'avance qu'il se trouvera des mil-
liers de voix pour répondre : oui. Ce sera la
réponse de ces classes populaires qui ont foi en
elles-mêmes; mais il leur serait difficile d'établir
cette foi sur des raisons solides. Si les hommes
sont par ailleurs impropres & comprendre et à
mènera bien, sans préparation, une tAcbe compli-
quée et difficile, ils ne s'improvisent pas davan-
tage une compétence spéciale lorsqu'il s'a^t du*
gouvernement de l'État, qui est une des entre-
prises les plus délicates qui existent. La grande
masse ne comprend parfaitement que ses propres
besoins et ses propres intérêts. Elle est donc
tentée de se servir de la représentation qu'elle a
dans sa main pour satisfaire ces besoins au détri-
ment du bien général. Te) est le grand danger
auquel est exposé l'État moderne sous le régime
de la souveraineté parlementaire.
Vu de plus près, ce danger nous apparaît
sous deux formes : l'omnipotence du nombre
et le mandat impératif. Il s'est développé à
l'époque actuelle un véritable culte de la majorité.
Là où est la majorité, là se trouvent aussi, dans
..G.Kvsl^
']
306 CONCLUSIONS.
l'opiaioa ' générale; oon seulemeàt Ift puissance
mais même la sagesse et le droit. Or il n'est rien
de plus inexact. Il est vrai qu'il existe quelque
part une majorité politique qui, dans la mesure
où le permettent l'humaine faiblesse et les imper-
fections inhérentes à la volonté des masses, possède
les qualités requises pour un bon gouvernement.
Je veux parler de la majorité qui préside ani
destinées de l'Angleterre actuelle. En effet, cette
majorité, comme nous l'avons exposé précédem-
ment, émané d'un corps électoral généralement
étranger aux partis et elle est fondée exclusive-
ment sur la défense des intérêts communs à tout
le royaume. Quel que soit le caractère parfois peu
édifiant des campagnes électorales d'oii elle est
sortie, il faut s'incliner avec respect devant une
telle majorité. Elle peut naturellement, comme
tous les groupes humains, se tromper dans son
appréciation de la situation politique et des inté-
rêts du pays, mais elle ii'a que ceux-ci en vue.
Ce ne sont pas les intérêts de classes ou les inté-
rêts locaux et personnels qui fondent et inspirent
cette majorité, mais c'est avant tout l'intérêt géné-
ral. On pourrait donc lui appliquer avec quelque
raison l'adage vox populi, vox Dei.
Mais nous ne trouvons pas de majorité analo-
gue hors de l'Angleterre. On peut copier les ins-
..,,..G.Kvsl^
CONCLUSIONS. 307
ytutions de ce pays, comme od l'a fait avec plus
ou moins d'intelligeDce. Mais oq ne peut pas
imiter l'organisatioa des partis anglais, et pour-
tant ce sont eux qui donnent une âme à ces ins-
titutions. Partout ailleurs tes partis représentent
des classes ou des intérêts spéciaux. La majorité
prend alors le même caractère, et du reste elle
peut èlre homogène ou ne l'être pas. Voilà pour-
quoi partout ailleurs le gouvernement de parti a
plus ou moins échoué. Hors de l'Angleterre, le
gouvernemeut de parti est le gouvernemeut d'une
classe ou d'un groupe d'intérêts : et par suite la sou-
veraineté parlementaire manque à ses devoirs et
devient trop facilement la tyrannie d'une majorité ..
Un autre moyen par où les intérêts particuliers
essayent de parvenir au gouvernement du pays,
c'est, nous l'avons dit, le mandat impératif. Le
mandat impératif dominait les vieilles assemblées
des « états, >> dont le r6le principal était de por-
ter devant le roi les doléances et les vœux des
grandes classes sociales. Lorsque la représenta-
tion reçut une part de la puissance publique et
devint un organe gouvernant, on lui imposa
comme premier devoir de représenter la nation
entière et non des parties de la nation, et on pres-
crivit que ses membres ne pourraient être liés
par des engagements. Il semble que l'on revienne
..,,..G.Kvsl^
CONCLUSIONS.
maintenant à la conception ancienne, à mesure
que les masiies prennent part à la représentation.
Les représentants reçoivent le mot d'ordre de
leurs électeurs et ne doivent pas s'écarter du pro-
gramme : tel est le principe adopté un peu par-
tout dans les pays où il y a des partis populaires.
Les dangers signalés jusqu'ici et qui mena*
cent le gouvernement populaire actuel viennent
du dehors et consistent essentiellement en ce que
la société essaye de conquérir et de dominer la
représentation. Il y a un autre danger qui consiste
dans les efforts tentés par la représentation pour
se soumettre le pouvoir exécutif et pour devenir
un Parlement gouvernant. Ce danger est
d'une autre nature que le premier, mais il lui
tient volontiers compagnie. Dans tous les cas il
expose la nation à être gouvernée sans aucune
responsabilité individuelle et par suite à ëtt-e mal
gouvernée. Car il va de soi que le gouvernement
exercé par un collège aussi- nombreux que le
Parlement est un gouvernement irresponsable,
lequel devient trop facilement un mauvais gouver*
nement.
Ces dangers externes et internes menacent toute
souveraineté parlementaire, mais d'une façon diffé-
rente suivant les différentes formes de gouverne-
ment. Le parlementarisme unitaire est spécialement
..,,..G.H,^1C
CONCLUSIONB. 309
exposé à la tyrannie de la majorité, le parlementa-
risme dualiste à la tyrannie du Parlement. On a
soupçonné instinctivement les inconvénients qui
allaient suivre la démocratie moderne, et on a
essayé de les prévenir, comme nous l'avons vu,
dans chacun de ces deux régimes. Il n'est pas
douleux en efiet que les institutions et les cons-
titutions ont un rôle préservatif important. Mais
tout dépend en dernière analyse des hom-
mes eux-mêmes, de leur bonne volonté et de
leur bon sens. Si ces qualités font défaut, les
meilleures institutions ne sont d'aucun secours, et
inversement des institutions même très impar-
faites peuvent donner de bons résultats pourvu
que l'esprit public ait les qualités requises. C'est
pourquoi nous devons chercher avant tout h faire
l'éducation et l'instruction de ces masses qui sont
appelées maintenant à prendre une part active à
la vie politique. Il n'est pas moins indispen-
sable d'acquérir sur la nature de l'Etat et sur les
différentes formes d'État des notions plus justes
et des idées plus claires que celles qui ont géné-
ralement cours; car la condition première d'un
bon gouvernement est de bien connaître et de
bien comprendre le régime qu'on est appelé à
faire fonctionner.
=,Coogk
3,Cooi^Ie
CONSTITUTION DU 6 JUIN 1809
LES ADDITIONS ET CII,VNGEMENTS SURVENUS JUSQU'A 19041
§ 1. — L'Stat de Suède sera gouverné par un Roi, et sera
un royaume héréditaire suivant l'ordre de succession établi
par la loi organique de euccessioD au trOae.
§ 2, — Le Roi devra toujours professer la pure doctrine
évangélique, telle qu'elle a été adoptée et expliquée par la
confession inallérée d'Augsbourg et par la décision du
syuode d'Upsal de 1593.
§ 3. — La Majesté du Roi sera sacrée et vénérée ; ses actes
-Ac pourront donner lieu à aucune critique.
g 4. — Le Roi gouvernera seul le royaume de la manière
prescrite par la présente Constitution ; il devra toutefois,
dans les cas ci-dessous déterminés, prendre avis et conseil
d'un Conseil d'Ëtat, auquel le rot appellera et nommera des
hommes capables, expérimentés, intègres, de bonne répu-
tation. Suédois de naissance et professant la pure doctrine
évangélique.
§ B. — Le Conseil d'État se composera de onze membres,
parmi lesquels le Roi en désignera un comme Ministre
d'État et premier membre du Conseil d'Ëtut. Ils devront
assister & la discussion de toutes les aHaires qui serout
traitées au Conseil. Le père et le fils, ou les frères ne peuvent
é<,re en même temps membres du Conseil d'Etat.
1. Celte Iraduution de In Regei-ingsform est, saurquclquescorrec-
lions, celle qu'a donnée M. R. Daresie àaoa Les Conslitutiom
modernes, l. Il, 1891.
..G.Kvsl^
CONSTITUTION SUÂDOIBE.
g 6. — Huit des membres du Conseil d'État seront cbets
de départemeats, et rapporteurs des attires de leurs dépar-
tements respect Ifrf'savoir : Le Ministre des affaires étran-
gères pour la département de l'extérieur; Un Chef du
départemeat de la justice ; Ud pour le département de la
défense du pays (guerre], qui sera en même temps conseiller
du Roi pour les afblres de commandement militaire de
l'armée ; Un pour le département de la détease maritime
[marine), qui sera en même temps conseiller du Roi pour
les alblres de commandement militaire de la flotte; Un
pour le département civil (intérieur) ; Un pour le départe-
ment de l'agriculture ; Un pour le département des finances ;
El un pour le département ecclésiastique — Le détail de la
distribution des allïiires entre les départements sera déter-
miné par le Bol, et Tera l'objet d'un r^lement spécial,
promulgué olflciellemenl. — Des trois conseillers d'État sans
département, deux au moins devront avoir rempli d«s
fonction I civiles.
§ 7. — Toutes les aOblres du gouvernement, à l'exception
de celles qui sont mentionnées aux art. 11 et 15, seront rap-
portées devant le Roi en Conseil d'Ëtat et ; seront décidées.
g S. — Le Roi ne peut prendre aucune décision dans les
atTaires sur lesquelles le Conseil d'Ëtat doit être entendu,
qu'en présence de trois au moins des conseillers d'Ëtat,
outre le rapporteur. Tous les membres du Conseil d'Ëtat,
lorsqu'ils n'ontpasd'empëchemeut légitime, doivent assister
à toutes les affaires d'Importance et de portée particulières,
qui, d'après les ordres du jour qui leur sont préalablement
communiqués, vierineut en délibération au Conseil d'gtai
et touchent à l'administration générale du rojaume. Telles
sont : les questions et projets relatifs & l'adoplion de nou-
velles lois générales ; à l'abrogaiion ou à la modiflcaiion de
celles qui sont en vigueur ; h l'établissement d'une nouvelle
organisation dps diverses branches de l'administration, et
autres de même nature.
§ 9. — Dans toutes les aOtiircs qui seront traitées devant
le Bol en Conseil d'Ëtat, il sera dressé un procès- ver bal.
Les membres présents du Conseil d'Ëtat ont l'obligation
absolut, sous leur responsabilité pour leuf aTis.'et aous les
U
peines dont il sera plus amplement tiAité auic articles
108 et iOi, d'exprimer et d'eipliquerleur opinion, qui sera
inaérée an procès-verbal ; la décision restant toutefois
réservée au Roi seul. Si, contre toute apparence, il arrivait
que la décision du Roi fût manifestement contraire à la
Constitution du royaume ou à la législation générale, il est
du devoir des memlïres du Conseil d'État de faire contre
cette décision des représentations énergiques. Celui qui n'a
pas fait consigner au proeès-vert)al d'opinion divergente
est responsable de la décision comme s'il avait contribué à
y déterminer le Roi.
§ 10. — Avant que les affaires soient rapportées au Roi en
Conseil d'État, elles seront préparées par le rapporteur,
qui demandera à cet effet tous documents aux adminis>
trations compétentes.
g 11. ~ Les affaires ministérielles, c'est-à-dire toutes
celles qui louchent aux relations du royaume avec les
puissances étrangères, seront préparées de la manière que
le Roi jugera convenable par te ministre des aPbires étran-
gères, qui est chargé d'en informer le Rot, el de lui en faire
le rapport, en présence du ministre d'Etat et d'un autre des
membres du Conseil d'État, ou, si le ministre des affcires
étrangères est en mémo temps ministre d'État, de deux
autres membres du Conseil d'Ëlat désignés à cet effet. SI
le ministre d'Etat est empêché, le Roi désignera pour le
remplacer un autre membre du Conseil d'Ëtat. En l'absence
du ministre des affaires étrangères, le rapport sera fait par
un membre du Conseil d'Éiat qui sera aussi dans ce cas
appelé par le Roi. lorsque le Roi aura pris et fait consigner
au procès-verbal l'avis de ces fonctionnaires, dont ils seront
responsables, il prendra sa décision en leur présence ; le
procès-verbal sera tenu par le membre spécialement désigné
à cet effet. Le Roi pourra faire porter à la connaissance du
Conseil d'État ce qu'il j ogera utile de ces décisions, afin que
le Conseil ait aussi quelque Informatiou de cette branche
du gouverne m en t. Toutes communications sur les affaires
ministérielles, aux puissances étrangères ou aux repré-
sentants du Roi k l'étranger, auront lieu, sans égard k la
nature de l'affaire^par le ministre des'affaires étrangères.
..G.„,glc
314 CONSTITUTION SUBDOISB.
g 12. — LeRoialedroitâecoDCluredes traltésetallianoeB
avec les puissances élrangèros. après avoir, comme il est
dit à l'arlicte précédent, entendu & cet égard le ministre
d'Ëtat, le mintslre des eHkires étrangères, et un autre
membre du Conseil désigné à cet effet, ou si le ministre
des aspires étrangères est en même temps ministre
d'Etat, deux autres membres du Ûouseil d'Etat spéciaie-
ment désigaés.
9 13. — Si le Roi veut déclarer la guerre ou conclure la
paix, it convoquera toas les membres du Conseil d'État eu
Conseil extraordinaire, leur exposera ias motih et les cir-
constances à prendre en considération, et leur demandera
leur aris, qu'ils devront donner chacun sépa'^ment et
faire insérer au procès-verbal soxs la responsabilité déter-
miuée à l'article 107. Le Roi a ensuite le droit de prendre
et d'exécuter la décision qu'il juge la plus utile k l'Ëlat.
g It. — Le Roi a le commandement en chef des forces
militaires de terre et de mer du royaume.
g IS. — Les affaires de commandement militaire, c'csl-À-
dirc celles que ie Roi dirige immédiatement eu qualité de
commandant eu chef des forces de terre et de mer, seront
décidées par le Roi, lorsqu'il gouvernera lui-même, en pré-
sence de celui des chefs des départements militairesau dépar-
tement duquel l'affaire appartient. Ce dernier est tenu, sous
sa responsabilité, lorsque ces afftires sont traitées, d'ex-
primer son opinion sur les entreprises décidées par le Roi,
et lorsqu'elle ne sera pas d'accord avec la dëcisioD du Roi,
de faire consigner ses objections et avis dans un procès-
verlKil dont le Roi certifiera l'exactitude pat l'apposition
de sa haute signature. Si le dit fonctionnaire Juge que les
entreprises sont d'une leudance et d'une portée dange-
reuses, ou qu'elles sont fondées sur des moyens d'exécu-
tion incerlalDs ou io^'u fusants, il devra en outre cherislier
& persuader au Roi de convoquer en /conseil de guerre,
pour en délibérer, deux ou plusieurs des officiers supé-
rieurs présents ; sous réserve, toutefois, du droit du Roi
de tenir de cet avis, ou, s'il y donne suite, des opinions du
Conseil de guerre consignées au procès -verbal, tel compte
que bon lui semblera.
g 16. ~ Le Boi doit maintenir et favoriser la justice et la
vérité, empêcher et défendre l'iniquité et l'injustice, ne
léser ni laisser léser qui que ce soit dans sa personne, son
lionneur, sa liberté personnelle et ses droits et intérêts.
s'il D'est légalement convaincu et condamné, ne dépouiller
ni laisser dépouiller personne d'aucun bien, meuble ou
Immeuble, sans instruction et Jugement dans les formes
prescrites par les lois et statuts de la Suède ; ne violer ni
laisser violer la paix du domicile de personne ; ne bannir
personne d'un lieu en un autre ; ne contraindre ni laisser
contraindre laconscience de personne, mais protéger cbacui>
daoa le libre exercice de sa religion, tant que la tranquillité
publique n'en est point troublée ou qu'il n'en résulte aucun
scandai» public. Lu Ilot fera juger chacun par le juge dont
il dépend et d'après la loi.
% il. — Le droit de Justice du Roi sera délégué k douze
juriBConBultesaii moins, vingt et un au plus, nommés par lui,
qui devront avoir rempli les conditions prescrites par les
lois pour remplir les fonctions judiciaires, et qui auront,
dans l'exercice de ces fonctions, fait preuve de savoir,
d'eipérleuce et d'intégritâ. Ils seront appelés conseillers
da justice, et constitueront la Haute-Cour du Roi. ^eur
nombre ne devra pas dépasser douze, tant que le Roi et le
Riksdag n'auront pas décidé de la maaière prescrite k l'ar-
ticle 87. % 1, que la Haute-Cour devra se diviser en sec-
tions; en ce cas, le nombre des conseillera, dans les
limites ci -dessus déterminées , et la répartition des
Boires entre les sections, seront réglés dans les mêmes
formes^
% 18. — Il appartient aussi h la Haute-Cour de con-
naître et de prononcer sur tous les recours formés devant
le Boi en cassatiou de Jugements passés en forme de chose
jugée, ou en relief de la déchéance résultant de l'expira-
tion d'un délai légal.
1 19. — Les demandes d'Interprétation de la loi portées
au Roi par les tribunaux ou les fonctionnaires, dans les cas
qui sont du ressort des tribunaux, seront également portées
à la Haute-Cour qui donuera l'interprétation demandée.
3 20. — En temps de paix, les atRiires provenant des
...G.Kvsl^
316 COKSTITUTION SUEDOISE.
cousetls de gaerre qui feront l'objet d'un recours au Rei,
seront rapportées et décidées & la Haute-Cour. Deux
officiers supérieurs, choisis et constitués par ie Roi k cet
effet, râcunbles et responsables comme les juges et sans
traitement spécial, assisteront à oee aHalres à la Uaute-
Cour, et prendront part au jugement, suis toutefois ,
que le nombre des jugés puisse dépassa huit. —, F.n temps
de guerre, il est procédé à cet égard suivant les disposi'
lions des lois militaire».
g 21. — Le Roi a deux vuix dans les allïiifes au rapport
et à la discuasioD desquelles il juge convenable d'assister
dans le sein de la Haute-Cour. Tontes les questions
d'interprétation de la loi seront soumises au Bol, et sea
Toix y seront prises et comptées, encore qu'il n'ait pas pris
part aux délibérations de la Cour en ce qui les conceme.
g 22. — Les affaires de moindre importance pourront être
examinées et aécidées k la Haute-Cour par cinq mem-
bres et même par quatre, si tous les quatre sont d'accord ;
sur les affaires les plus importantes sept au moins pren-
dront part au jugement. Aucune affeire ne pourra ^tre dé-
cidée par plus de huit membres, sauf les cas spéciaux où
il en est autrement ordonné conformément aux dispositions
de l'article 87, § t.
§ 23. — Tous les arrêts de Is Haute-Cour seront rédigés
au nom du Roi et revêtus de sa haute signature ou de son
g 21. — La Révision intérieure de justice du Roi sera
chargée de préparer les affaires judiciaires, pour être rap-
portées et décidées k la Haute-Courr
§ ^. — Le Roi a le droit de faire grftce en matière
pénale, de commuer la peine de mort, de réhabiliter et de
restituer les biens confisqués; toutefois, les requêtes k ce
sujet doivent être examinées par la Haute-Cour, et la
décision du Roi doit être prise en Conseil d'Ëtat.ffi sera
désormais loisible au coupable d'accepter la grftce que le
Roi lui accorde, ou de se soumettre à la peine & lequeUe il
aura été condamné.;
§ S6. — Lorsque les affaires judiciaires seront rapportées
en Conseil d'Etat, deux conseillers de justice, outre le chef
du dëpartemcDt de la justice et deux autres membres du
Conseil d'I^tat, dcvroDt assister à la délibération et seront'
tenus de faire consigner leur opinion au procès-verbal
comme il est dit à l'article 9.
g 27. — Le Bol nommera chancelier de justice un juris-
consulte babile et impartlnl, qui aura exercé des fonctions
judiciaires. Il aura pour principale mi3Sion,Qn qualité de
procureur général du Boi, d'exercer ou de faire exercer par
les procureurs fiscaux placés sous ses ordres, les poursuites
au nom du Roi dans les affaires qui toiicbent à. la sûreté
générale et eu droit de la couronne, ainsi que)de surveiller
au nom du Roi l'administration de la justice, et. en cette
qualité, de poursuivre les fautes commises par les juges et
les fonctionnaires.
§ 28. — i* Il appartient au Boi, en Conseil d'Êlat, de
nommer et de promouvoir des Suédois de naissance à tous
emplois et fonctions dans le royaume, supérieurs et inté-
rieurs, qui sont de ceux pour lesquels ie Rot délivre les
brevets ; ^auf les présentations qui devront Stre préala-
blement faites par qui de droit, comme elles ont eu lieu
jusqu'ici, (^e Rot pourra cependant, après avoir pris l'avis
ou sur la présentation des autorïtés compétentes, nommer
et promouvoir des étrangers d'un mérite distingué, faisant
profession de la pure doctrine évangélique, aux fonctions
de professeur aux universités, à l'exception pourtant des
cbalres de théologie, k celles de professeur, ou toutes
autres, dans les autres institutions consacrées à la science,
aux arts et manufactures, ou aux beaux-arts, ainsi qu'à
celtes de médecin. De même^ le Roi pourra employer au
service mllilaire des étrangers de rares talents, mais qui
ue pourront être commandants de forteresses. Dans toutes
les nominations, le Boi devra avoir égard au mérite et au
talent des candidats, et non à leur naissance. ^ul ne peut
être nommé aux fonctions ecclésiastiques, ni à aucun
emploi emportant obligation de donner l'instruction cbrû'
tienne ou d'enseigner la théologie, s'il ne fait profession
de la pure doctrine évangéllque. Fous tes autres emplois
et fonctions, sauf l'exception indiquée k rarticte 4 concer-
nant les membres du Conseil d'Ëtat, peuvent être remplis
..G.K,glc
316 CONRTITUIION SUÉDOISE.
par des adhéreois d'auires confessions chrétieDoes, ou
même de la religion mosaïque ; toutefois, nul ne peut, s'il
n'appartient à la pure doctrine érangélique, participer en
qualité do juge ou de titulaire d'une fonction publique à
la délibération ou à la décision des affaires relatives au
soin de la religion, & l'instruction religieuse ou aux nomi~
nations dans le sein de l'église suédoise^ Chaque chef de
département rapportera et expédiera toutes les alTaires
relatives aux nominations, promotions, congés et démis-
sions, pour toutes les fonctions et emplois des administra-
tions et services qui relèvent de son départemenL
2* Le Roi a le droit de conférer la naUonalité suédoise à
des étrangers par naturalisation, sous les formes et condi-
tions qui seront déterminées par une loi spéciale, rendue
de la manière prescrite à l'article 81, % 1. L'étranger ainsi
naturalisé jouira des mêmes droits et privilèges qu'on
Suédois de naissance, sans pouvoir toutefois être nommé
membre du Conseil d'État.
g 29. — L'archevêque et les évëques seront nommés par
le Roi sur une liste de présentation de trois candidats qui
lui sera proposée de-ra manière prescrite par la loi ecclé-
siastique.
g 30. — Le Roi nommera, de ta manière usitée jusqu'Ici,
aux fonctions de pasteur dans les cures royales. Les pré-
bendes dites consistoriales seront maintenues avec leur
droit d'élection.
§ 31. — Les habitants des villes ayant droit de vote pour
les élections au Riksdag, auront le droit de présenter au
Roi, pour les emplois de bourgmestre, trois candidats aptes
à les remplir, et le Roi en choisira un. Il sera procédé de
même pour les charges de conseiller et de secrétaire de
l'administration municipale de Stoclibolm.
8 32. — Les envoyés auprès des puissances étrangères et
le personnel des légations seront nommés par le Rui de
la manière prescrite à l'article H pour le mode de traiter
les aaaires miniaiériellea.
% 3^. — Lorsque les charges pour lesquelles des préseu-
tationsont été faites seront conférées par le Roi, les membres
du Conseil d'Etat devront s'exprimer sur les talents el
..G.Kvsl.
mérites des candidats. Ils auroat également le droit de faire
d'humbles représentatioDs contre les nominations que le
Roi pourra faire à d'autres emplois et foncllons-
§ 34. —(le ministre d'État et le ministre des affaires
étrangères seront revêtus .de la plus haute dignité du
royaume ; les conseillers d'Ëtat viendront immédiatement
après eux) Les membres du Conseil d'Ëtat ne pourront en
même temps exercer d'autres fonctions ni en percevoir les
émoliiments. Les conseillers de Justice ne pourront revêtir
ni exercer en même temps d'autres fonctions.
g 3S. — Les membres du Conseil d'Ëtat, les présidents et
les chefs descollégesoudesaiitresadminiBtraliona instituées
en leur place, le chancelier de justice, les chefs des prisons,
de l'arpentage, du trafic des chemins de fer de l'État, des
administrations du pilotage, des postes, des télégraphes,
des douanes et des forêts, les chefs d'expédition aux dépar-
tement» d'État, le gouverneur, le sous-gouverneur et le
mai tre'ae police de lacapitale, les gouverneurs de provinces,
les maréchaux de camp, les généraux et amiraux de tous
grades. les adjudants généraux, les adjudants supérieurs,
les adjudants d'état-major, les commandants de forteresses,
les colonels des régiments, les lieulenaots-colonels des
régiments de la garde à cheval et à pied et des régiments
de gardes du corps, ainsi que les chefs des autres corps de
bataillons militaires ayant une oi^anisation distincte, les
chefs de l'artillerie et des corps du génie, des ingénieurs et
des hydrographes, les ministres, les envoyés et les agents
commerciaux auprès des puissances étrangères, ainsi que
les fonctionnaires et employés au cabinet du Boi pour la
correspondance étrangère, et dans les légations, ont des
postes de confiance, dont le Roi peut les destituer quand il
le juge nécessaire au bien de l'Étal. Le Roi communiquera
toutefois ses décisions au Conseil d'Ëtat, dont les membres
seront tenus de lui faire à cet égard d'humbles représen-
tations, s'ils croient en avoir sujet.
g 30. — Ceux qui occupent des fonctions judiciaires,
supérieures ou inférieures, ainsi que tous les fonctionnaires
et employés autres que ceux qui sont énumérés à l'article
précédent, «e pourront être destitués par le Roi qu'à la
..G.Kvsl^
320 CONSTITUTION SUEDOISE.
suite d'une Instruction et d'un jugement, ni promus â
d'autres emplois ou déplacés que sur leur demande.
g 37. — Le Roi a le droit de conférer la noblesse aux
hommes qui, par leur fidélité, leur valeur, leur vertu, leur
science, leur service et leur Eële, ajiront particulièrement
bien mérité du Roi et du royaume.^eRoi pourra de même,
en récompense de grands et éminents services, conférer^
des nobles le rang de baron et aux barons celui de coml^
La noblesse^t les titres de baron et de comte qui seront
couférés parla suit^ne pourront appartenir qu'a celui qui
aura été anotili ou élève en titre, et après sa mort, en ligne
directe descendante, àÀ'ainé de ses descendants mAles de
la branche aînée, après l'extinction do celle-ci au plus proche
héritier mâle du chef de la famille, dans la branche aînée
survivante, etalnsi défaite. Si la noblesse passe par hérédité
à quelqu'un qui l'a déjà reçue lui-même ou qui en a hérité
daus une succession plus proche, sa propre noblesse cessera.
& moins qu'elle ne iioit d'un rang supérieur, auquel cas la
noblesse du chef de famille passera à la branche la plus
proche ; s'il n'en existe pas, la ligne sera éteinte. SI quel-
qu'un est déclaré déchu de la noblesse, elle passera à celui'
qui d'après les règles ci-dessus en e5t le plus proche héritier.
— Le règlement de l'ordre de la noblesse, qui sera arrêté de
concert par le Roi et la noblesse, preai^rira le mode de réunion
de la noblesse pour décider des affaires communes.
g 38. — Tous les actes et tous les ordres émanés du Roi,
sauf en matière de commandement militaire, doivent.
pour être valables, être revgtus de la signature du Roi et
contresignés de celui des rapporteurs que le sujet con-
cerne, lequel sera responsable de la conformité avec l'ori-
ginal au registre. Les chefs de départements pourront
adresser immédiatement à qui de droit toutes prescriptiona
et Instructions pour l'exécution des décisions prises. Si le
rapporteur Jugeait quelque décision du Roi contraire à
cette Constitution, il devrait lui faire à ce sujet des repré-
sentations en Conseil d'État; si toutefois le Roi insiste
pour que cette décision soif expédiée, il sera du droit et
du devoir du rapporteur d'j refuser son contre-seing et de
se démettre en conséquence de sa charge, f)our ne la
..G.Kvs'^
reprendre que lorsque sa conduite aura ëté ezaminée et
approuTâe par le RikadxK- ProviBOireuient, il conservera
son traltemenl et les autres émolumeats attachés à sa
cbarge.
§ 39. — Si le Rot veut voyager liors de Suède^t de
Norvège^il tera4)art de sod dessein au Conseil d'Ëtat in
pleno et prendra son avis comme il est dit à l'article 9. Si
ensuite ie Roi se décide à ce voyage et l'exécute, il ne s'oc-
cuperft point du ^uvernement, el n'exercera point te
pouvoir royal, tant qu'il séjournera hors de ses royaumes ;
le royaume sera gouverné, pendant l'absence du Rot, en
son nom, par le prince héritier présomptif du trône, s'il a
atteint l'âge Oxé à l'article 41. Ce prince gouvernera comme
Régent, avec tous les pouvoirs et l'autorité royale, confor-
mément à la présente Constitution ; toutefois il ne pourra
conférer les rangs el titres nobiliairea^ni élever au rang de
comte ou de l>aron, ni accorder des ordreà; de même, tous
les postes de confiance vacants ne pournint être rempli»
que provisoirement par ceux quelle Régent y nommera.
S'il n'existe aucun prince appelé à l'hérédité du trAue, ou
si rbéritier présomptil n'a pas atteint la majorité déter-
minée à l'article ii, ou s'il est empêché par maladie ou
par absence hors de Suéde Qt de Norvég^ de prendre le
gouvernement, le Conseil d'Ëtat gouvernera avec les mêmes
pouvoirs que le Régent. Les mesures à prendre pour le cas
où le Roi demeure bors du royaume plus de douze mois
seront déterminées à l'article 9t.
§ 40. — Si le Roi tombe malade au point de ne pouvoir
prendre soin des affaires du gouvernement, il aéra procédé
comme il est dit à l'article précédent.
g iX. — Le Roi sera majeur à dix-huit ans accomplis. Il
en sera do niâme du prince hérilier présomptif. Si le Roi
vient À mourir avant que l'héritier du trône ait atteint
oet âge, le Conseil d'État gouvernera, conformément h l'ar-
ticle 39, au nom du Roi, jusqu'à ce que le Riksdag se
réunisse et que les tuteurs nommés par le Riksdag nient
pris le gouvernement ; le Conseil d'Ëtat se conformera
d'ailleurs absolument à la présente Constitution.
g 42. — Si le malheur voulait que toute la ilyuaslle
..G.Kvsl^
CONSTITUTION SUÉDOISE.
royale ft taquelle est réservé le droit de eucceBeion au trAoe
Tînt k s'éteindre dans la ligne maBCuline, Je Conseil d'Étal
gouvernerait de même, avec les pouvoirs délerminës à
l'article 39, Jusqu'à ce que le Biksdag pût se réunir et faire
clioix d'une nouvelle dynastie, et que le Roi élu eût pris le
^uvemement.
§ 43. — si le Bol part pour la guefre, ou s'il voyage dans
les contrées reculées du royaume Cou dans le rojauine de
Norvège.Yl désignera trois membres du Conseil d'ËUt,
sous la présidence d'un prince de sa famille ou d'un con-
seiller d'État, qu'il nommera à cet effet, pour exercer le
gouvernement dans les affaires qu'il prescrira. Pour les
adtilres que le Roi décidera lui-même. Il sera procédé
comme il est dit à l'article 8. — Ce qui vient d'être dit du
Boi s'appliquera aussi au Régent, quand le gouvernement
sera exercé par lui.
§ H. — Aucun prince de la famille royale, prince royal,
prince héritier ou autre, ne peut se marier qu'au eu et du
consentement du Roi. S'il enfreint cette règle, il perdra
tout droit héréditaire pour lui, ses enfants et 'ses descen-
<iants.
g 45. — Ni le prince royal et héritier de Suède, ni les
princes de la famille royale n'auront de douaire ni de fonc-
tions civiles ; toutefois, il pourra leur être conféré, d'après
les anciens usages, des titres de duchés et de principaulés,
sans aucun droit sur les pays dont ils porteront le nom.
§ 46. ~ Le pays restera divisé en gouvernements, sous
l'autorité des administrations provinciales ordinaires. 11 ne
pourra plus être institué à l'avenir de gouverneur général
dans le royaume.
§ 47. — Les Cours royales et tous les autres ti^bunaux
j tigeront conformément aux lois et statuts légaux : les col-
lèges administratifs du royaume, les administrations pro-
vinciales et toutes tes autres, ainsi que les fonctionnaires
supérieurs et inférieurs administreront les aOaires qui
concernent leur charge conformément aux tnatruoliona,
règlements et prescriptions déjà rendus ou k ceux qui
pourront être rendus par la suite ; ils obéiront aux ordres
et commandements du Roi, et se prêteront la main mutuel-
..G.Kvs'^
lement pour les exécuter, ainsi que pour tout ce que le bien
de l'Slat pourra exiger, tout en demeurant responsables
envers le Rot, dans les termes do la loi, de leurs négligences
ou omissions ou de VillëgaUté de leurs actes.
§48. — La Cour du Bol est sous sa direction particulière;
il pourra & cet égard disposer ce que bon lui semblera. Le
Bol pourra conférer et retirer à sa guise les charges de la
Cour.
§ 49. — I^Riksdag représente le peuple suédoieÇ-es droits
et oMigaiiODs que les lois en vigueur altribuenl aux États
généraux du rojtauiiie seront désonnat /attribués au Riksdag.
Il se divise en deux Cbambres, donnes membres sont élus
de la manière déterminée par la loi organique du Btksdag.
^s Cbambres ont sur toutes les questions ta même com-
pétence et la même autorité) Le Riksdag devra, en vertu de
la présente Constitution, se réunir en sesslim ordinaire le
15 janvier de chaque année, ou si ce Jour tombe un jour
férié, le jour suivant. Le Bol pourra toutefois convoquer le
Rfkadag en session extraordinaire dans l'Intervalle de deux
aasaions ordinaires. — Il ne peut être traité en session
extraordinaire que les affaires qui ont donné lieu à la con-
vocation du Riksdag ou celles qui lui sont d'ailleurs sou-
mises par le Roi, et ton! ce qui se rattache à ces alTaires
d'une manière inséparable,
g SO.— Le Riksdag se réunira dans la capitale du royaume,
sauf dans les cas où l'approcbe de Tennemi, une pesle ou
quelque autre obstacle également grave le rendrait im-
possible ou dangereux pour sa liberté et sa sUreté. En pareil
cas, le Roi, après s'être concerté avec les délégués élus
par le Riksdag à la Banque et à la Caisse de la dette pu-
blique, désignera et fera connaître un autre lieu de réunion,
§ St. — Dans les cas où le Roi, le Régent ou le Conseil
d'État convoqueront le Riksdag, l'époque de la réunion sera
fixée après le T jour et avant le 30* à partir de celui où la
convocation aura été publiée dans le journal officiel.
% S2. — Les présidents et vice -présidents des Chambres
seront nommés par le Roi,
§ 53. — ^u session ordinaire^c Riksdag nommera, pour
la préparation des alTaires, les Comités suivants : un Comité
..G.K.glc
324 CONSTITUTION SU^DOtSE.
de coDstitution, pour faire et pecevoir les propositioDS
relatives à la moditlcatioa des loU constitutionnelles et
pour en doonerson a vU au Rlksdag, ainsi que pour examiner
les procès- verbaux tenus au ConEeil d'Ëiat ; Un Comité des
llnance», pour examiner et exposer au Rlksdag la situation,
l'admiDislration et les besoins du trésor et de la dette
publique: ua Comité des subsides, pour traiter les queBtions
de subsides ; un Comité de la banque, pour surveiller la
gestion et la situation de ia banque, et prescrire les mesures
relatives à son administration ; enltn un Comité de légis-
latiuu, pour élaborer les t'rojeta d'amélioration des lois
clvik-B, criminelles, communales et ecclési antique s qui iui
sont envoyés par les Chambres.^— Eu session extraordi-
naire le Rlksdag ne pourra nommer plus de comités qu'it
ne sera nécessaire pour la préparation des affaires qui lui
seront soumise^
g B4- — Si le Roi demande au Rikadag des dél^ués spé-
ciaux pour conférer avec iui sur des afiïireB qu'il croit
devoir tenir secrètes, ces délégués seront élus par les
Chambres ; cependant ils u'auroot droit de preudre aucune
décision, mais seulement de faire connaître au Boi leur avis
sur les affaires qu'il leur communiquera. Ils prêteront 8er>
ment de gitrder le secret, si le Roi l'exige.
§ SS. — Le Riksdag, les Chambres ni aucun Comité du
Riksdag ne peuvent discuter ni décider aucuue aflUx&Aa.
présence du Roi.
§ 56. — La loi oi^^anique du Riksdag déterminera les
formes dans lesquelles les propositions du Roi, ouïes motioas
faites par les députés dans le/seia des Ctaamtires, seront
discutées et décidées.
§ 57. — Le droit immémorial du peuple suédois de
s'imposer lui-même sera exercé par le Riksdag seul. -*- Les
lois communales, qui seront faites-en commun par le Roi
et le Rlksdag, détermineront dans quelle mesure les oom*
munes pourront s'imposer pour leurs besoins spéciaux •
§ 58. — A. chaque session ordinaire, le Roi fera présenter
au Riksdag un état de la situation Onanclère dans toutes
parties, recettes et dépeuses, créances et dettes. Si, à raison
des traitésavec les puissancesétrangères, quelque ressource
;.G.H,^ic
revenait à l'Elat, il en serait rendu compte de la même
manière.
§ ti9. — Camme annexe â l'état de la Bituation et des
besoins du trésor, le Roi présentera au Rlksdag un projet
relatif aui moyens do pourvoir par des subsides aux besoins
de l'Ëlat qui excèdent ses revenus ordinaires.
- 9 60. — Sont compris dans les subsides les droits de
douane et d'accise, les taxes postales, le timbre, les droits
sur l'eau-de-vle [fabriquée à domicile], et en outre l'impOl
direct sur les immeubles et suc le revenu qui sera établi
spécialement A chaque session par le BLksdag. Aucun impôt
géndral, quels qu'en soient le nom et la bature, ne pourra être
augmenté sans le consentement du Riksdag. à l'eiceptlon
des droits à l'entrée et à la sortie des céréales. Le Roi ne
pourra non plus affermer les revenus de l'Ëtat, ni établir
de monopoles pour s,on prollt ou pour celui de l'État, de
particuliers ou de corporations.
- §61. — Tâusles impfils que le Biksdag aura consentis sous
les dénominations menlionnees ft l'article précédent, se-
ront pergus jusqu'à La fin de l'année au cours de laquelle
le Rlksdag aura voté le nouveau subside.
§ 62. -~ 11 appartiendra au Riksdag, après constatation
des besoins iluaaciers, de consenllr un subside pour j
faire face, et de déterminer en mèoie temps l'affectation à
chaque objet particulier des différentes sommes & en pro-
venir, et de porter ces sommes au budget sous des cha-
pitres distincts.
§ S3. — En outre, il devra être constitué pour les cas im-
prévus, deux fonds spéciaux sûfOsants, qui seront fournis
par la caisse de la dette publique : l'un deviendra dispo-
nible, lorsque le Hoi, api^s avoir pris l'avis du Conseil
d'Ëlat entier, jugera absolument indispensable d'en user
pour la deteuse du royaume ou pour tout autre objet d'im-
portance et d'urgence majeures ; l'autre sera employé par
le Koi, en cas de guerre, après avoir entendu le Conseil
d'Stat in pleno tt convoqué le Hiltsdag- L'assignation
cachetée, que le Riksdag aura donnée sur ce dernier fonds,
ne pourra, être ouverte, ui la somme paj'ée par les ci
saires de la Caisse de la dette publique, avant que la c
..G.Kvsl,
326 CONSTITUTION SUÉDOISE.
Tocatioa du Riksdag ait été publiée dans le journal
officiel -
§ 6*- — Les revenus et ressources ordinaires de l'Ëiat,
ainsi que les Impositions qui seront volées par le Hiksd^,
comme il est dit ci-dessus, pour les besoins du trésor,
sous le nom de subsides on contributions extraordinaireG.
seront k la disposition du Roi, pour être employés à satis-
faire aux besoins reconnus par te Rlksdog d'après le budget.
8 65- — Ces resBOurees ne pourront être emploïées autre-
ment qu'il n'a été prescrit ; les membres du Conseil <PËUit
seront responsables s'ils permettent une infraetiou àcelte
règle sans avoir fait consigner au procès-TerbaJ leurs
représentations, en rappelant les preserlpUons du Blksdag
en cette partie.
§66. — La Caisse de la dette publique restera sons la
direction, le contrôle et l'adminlstrïtion du Blksdag, et,
comme le Blksdag répond de la dette de l'Etat, que le
comptoir administre, le Blksdag, après avoir dûment exa-
miné la situation et les besoins de la Caisse, fournira, par
un subside spécial, les ressources qui seront Jugées indis-
pensables pour le paiement de cette dette en intérêt et
capital, afin de maintenir et de préserver le crédit de
l'Eut
§ 67. — Le délégué du Roi près la Caisse de la dette pu-
blique n'assistiira aux réunions des commissaires que lors-
que ceux-ci exprimeront le désir de conférer avec lui.
g 68. — Les fonds appartenant ou affectés à l'admlnistia-
tion de la dette publique ne pourront, sous aucun prétexte
ni à aucune condition, en être distraits, ou être employés
h d'autres besoins qu'à ceux qui auront été déterminés
par le Riksdag. Toute disposition qui serait prise contrai-
rement à celle règle sera nulle.
% 69. — Lorsque les propositions du Comilé des Duances,
relatives k l'élablissement du budget ou à l'ensemble des
subsides calculés en conséquence, ou aux dépenses et
recettes de la Caisse de la délie publique, ou aux principes
de direction el d'administration de cette Caisse, viendroat
en délibération au Blksdag, ii sera procédé d'apris les
règles prescrites par la loi organique du Blksdag pour U
discQSEion des projets préseiiléB par ce comitâ. Si les
Chambres prenoent des râsolutioas différentes ei que
la conciliation n'ait. pu se faire, cbaque Chambre votera
séparément sur les résolutions que cbacune aura déjà adop-
tées; et l'aFis qui réunira le plus de voii, en comptant
celles des deux Chambres, vaudra cocume résolution du
Riksdag.
g 70. — Lorsque les Chambies auront pris des résolutions
différentes sur les règlements pour la Banque du royaume
ou sur les receltes et dépenses de la dite Banque ou sur
décharge pour les commissaires, elles voteront chacune
séparément comme il est dit à l'article précédent.
§71.-11 sera procédé de la même manière lorsque les
Chambres ne s'accorderont point sur les bases, le mode
d'application et de répartition d'un subside.
g 72. — La Banque du royaume demeure sous la garantie
du Rilisdag et elle sera administrée par des commissaires
nommés à cet effet, conformément à la loi faite par le Roi
et loRibsdag. — Les commissaires de la Banque du royaume
seront au nombre de sept, sur lesquels le Roi en désignera
un pour trois ans de suite, plus un suppléant ; les six
autres, avec trois suppléants, seront choisis par le Riksdag
suivant la manière et pour la durée prescrites par la loi
organique du Riksdag. Le membre ordinaire nommé par
le Roi sera le président des dits commissaires, mais il ne
doit pas exercer d'autre fonction dans la direction de la
Banque du royaume. Tout commissaire à qui te Rlltsdag
aura refusé de donner décbarge devra se démettre de ses
fonctions. Les ordonnances faites par le Roi relativement k
soncommissaireouau suppléant de celui-ci seront rapportées
lorsque le Roi le jugera à propos, — La Banque du royaume
aseule le droit d'émettre des billets qui seront regus comme
monnaie dans le royaume. Ces billets seront remboursés
par la Banque sur présentation, d'après leur valeur nominale
et en or.
g 73. — Aucune imposition, aucune levée d'hommes,
d'argent ni d'objets mobiliers ne pourra désormais être
ordonnée, exécutée ni exigée que du libre consentement
et autorisation du Riksdag, dans les formes ci-dessus pres-
crites.
..G.Kvsl^
CONSTITUTION SUÂDOISK.
§ 74. — A partir du jour où, snJvant la décision du Roi
dans son Conaeil eL après publication de la convocation du
Rilisd^, les Torces militaires du rojauue ou une partie de
ces forces sont mises sur le pied de guerre soit pour main-
tenir la neutralité du royaume au cas où dans une guerre
entre des puissances étrangères la dite neutralité se trou-
verait menacée ou violée, soit pour repousser une attaque
imminente ou déjà commencée, et jusqu'au jour où les
troupes seront remises sur le pied de paix, le Roi pourra,
dans les formes, aux conditions et suivant les réglée de
responsabilité matérielle qui seront Siées dans une loi
spéciale faite conjointement par le Roi et te Riksdag, faite
exiger des communes ou des particuliers les objets ou ser-
vices que pourra fournir la région, qui seront nécessaires à
l'eatretien et à la subsistance des troupes et <)ue cellea-el
ne pourraientpas se procurer d'autre faoon avec une rapidité
eufllsanie.
% 75. — Le taux annuel des mercuriales sera établi par
des commissaires élus de la manière prescrite spécialement
par le Biksdag ; ce que ces commissaires anront décidé t
cet égard servira de règle, & moins que la modification de
leur décision n'ait été demandée et obtenue dans les
formes légales.
% 76- — Le Roi ne peut, sans le consentement du Rlksdag,
contracter d'emprunts &l'intérieur ni à l'étranger, ni grever
l'Ëtat de nouvelles dettes.
§ 77. — Les domalues et les fermes de l'Etat, avec les
terres et Immeubles qui eu relèvent, les forêts, bois, parcs,
prairies de l'Ëiat, les prairies affectées aux écuries royales,
les pêcheries de saumon et autres, ainsi que tous autres
immeubles de l'État, ne pourront être vendus, engagés,
donnés par le Roi, ni aliénés d'aucune autre manière, sans
le couseutemeut du Rlksdag. Ils seront administrés d'après
les principes qui seront établis par le BiksJijg. Toute"
fols, les particuliers et les communes qui, d'après les lois
en Vigueur, sont en possession ou en jouissance.de biens
de l'Ëiai do cette espèce, jouiront de leurs droits conformé-
ment ft la loi, et tous les terrains défrichés ou susceptibles
de l'être dans les forêts de l'État pourront être vendus k
..G.Kvs'^
charge de redevance dans les formes habituelles, suivant
les lois en vigueur ou k venir.
g 78. — Aucune portion du royaurae n'en ponrra être
détachée par vente, engagement, donation, ou d'aucune
autre manière.
§79.-1* Aucune modification du hiason ou du pavillon
du royaume ne pourra avoir Heu snns le consentement
du Riksdag. — 2° Ne pourra non plus avoir lieu aucune
modiDcation du titre et du poids de la monnaie de l'Stat,
soit en plus, soit en moins, sans le consentement du Riks-
dag; «ans pourtant qu'il soit porté aucune atteinte au
droit^u Roi de battre monnaie.
g 80. — L'armée de terre, cavalerie et Infanterie, et l'armée
de mer, resterontorganiséesd'aprèsles contrats passés avec
les villes et les campagnes, et conformément au système ,
de répartition, dont les principes fondamentaux ne pourront
sublrauGun changement, jusqu'à ce que le Roi et le Riksdtig
Jugent nécessaire d'y faire de concert quelque modiOcation ;
aucune nouvelle conscription ni aucune aggravation de celle
qui existe ne pourra être établie que par une décision com-
mune du Roi et du Riksdag. — SI une loi spéciale abolit le
système de répartition et pose d'autres principes pour
l'oiganisation de l'armée de terre et de mer, cette toi ne
pourra être modifiée que d'accord parle Roi et les Chambres.
g 81. — La présente Constitution, ainsi que lesautre'i lois
coQstitutionnelles du royaurae, ne pourront être modldéea
ni abrogées que par décision du Roi et du Rlksd^g en deui
sessions ordinaires. — Les décisions du Riksdag sur les
questions constitutionnelles proposées par le Roi lui seront
uotîDées do la manière prescrite par la loi organique du
Riksdag. StIeRiksdagadop te une proposition de modiflcation
faite dans son sein, sa décision sera soumise au Roi. Le
Boi prendra en ce cas, avant la clôture de la session, l'avis
du Conseil d'Étal entier sur la question, et fera connaître au
Riksdag, dans la salle du trône, son consentement ou les
motifs qui le portent à le refuser.
§ 82. — Toute décision du Riksdag sanctionnée par le Roi,
ou toute proposition du Roi adoptée par le Riksdag en
matière de modiQcatlon aux lois constitullonDelles, aura
force de loi constitutionnelle.
..G.Kvsl^
330 CONSTITUTION SDÉDOISB.
§ 83. — II ne pourra être donné à l'avenir aucune intar-.
prétation des lois constitulionDelIes, si ce n'est de la ma-
nière prescrite pour la modidcation de ces mâmeslofs.
g S4. — Les lois consiilutioDnâlIes seront appliquées,
dans chaque cas particulier, d'après leur sens littéral.
g 85' — Seront considérées comme lois oonstitutionnelles,
la présente Constitution, la loi organique du Ribsdag, la
lui organique de succession et la loi sur la liberté de la
presse, adoptées de concert par le Riksdag et par le Roi,
conformément aux principes posés par la présente Gonsti-
g 86. — Par liberté de la presse, il faut entendre le droit
de tout Suédois de publier des écrits sans aucun obstacle
préalable de la part de l'autorité publique, de ne pouvoir
ensuite Être poursuivi, à raison du contenu de ces écrits,
' que devant les Tribunaux compétents, et de ne pouvoir être
puni pour ce fait que dans le cas où le contenu en est con-
traire à une loi formelle, établie pour garantir la pais
publique sans empêctier la propagation des lumières. Tous
autcs et procès-verbaux, sur quelque objet que ce soit, &
l'exception des procès- verbaux tenus au Conseil d'Stat et
devant le Roi dans les affaires ministérielles et de com-
mandement militaire, peuvent être, sans restrictions, pu-
bliés par la voie de la presse. Ne pourront être imprimés
les actes et procès- verbaux de rA.dministralion de la Banque
ou de la dette publique, concernaBt des affaires qui doivoul
être tenues secrètes.
g 81. — 1" Il appartient au Riksdag, de concert a?ec le
Roi, de faire les lois générales civiles et criminelles, et
les lois criminelles militaires, et de clianger et modifier
celles qui ont été faites antérieurement. Le Roi ne peut, sans
le consentement du Kiksdag, ni le Eiksdag sans celui du
Roi, faire aucune loi nouvelle ni en abroger une ancienne.
11 pourra être fait à ce sujet, dans le sein des Chambres,
des moltons dont le Riksdag décidera après avoir entendu
le Comité de législation. Si le Riksdag adopte pour sa part
quelque loi nouvelle, ou la modification ou l'abrogation
d'une loi existante, le projet en sera présenté au Roi, qui
prendra, à cet égard, l'avis du ConseL d'État et celui de la
..G.Kvs'^
Haule-Cour, el après avoir arrêté eb décision, communi-
quera au Hjksdag ou son assentimenl à sa requSte ou les
motifs de son refus. Si le Roi ne peut arrêter el communi-
quer sa décision avant la clôture de la session, il pourra,
avant l'ouverture de la session suivaute, sanctionner 1ë
projet tel qu'il est congu, mot pour mot, et le faire promul-
guer. S'il ne le fait pas, le projet sera considéré comme
écarté, et le Roi informera le Riksdag à s» première réunion
des motifs qui t'ont empêché de l'approuver. Si le Roi juge
& propos de soumettre au Riksdag quelque proposition de
loi, U demandera l'avis du Cunseild'Ëtatetcelui delà Haute-
Cour sur cette proposition et la communiquera, avec
ses avis, au Riksdag qui en délibérera comme il est ludique
dans la loi organique.
2° Il appartiendra aussi au Riksdag, de concert avec le
Koi, de modiUer ou d'abroger les lois ecclésiastiques, mais
le consentement du Synode général sera également requis
à cet effet. Sur les projets de loi de cette nature, les avU
du Conseil d'Etat etde la Uaute-Cour seront compris comme
il est dit an 1*' alinéa et communiqués au Riksdag avec
la proposition du Roi, lorsqu'il en prendra l'initiative. Si
les projets en question n'ont pas été promulgués comme
lois avant l'ouverture de la première session qui suit celle
où ils auront été fotés et adoptés, ils seront écartés, et le
Roi informera le Riksdag des motifs qui l'auront empêché
de les approuver.
§ 88. — Pour l'interprétation des lois civiles, crimiaelles
et eoclèsi astiques, il sera procédé comme pour la confection
de ces lois. Les interprétations que le Roi donnera, par
l'organe de la Ilaute-Oour, dans l'intervalle des sessions
du Riksdag, en réponse aux questions qui auront été sou-
mises sur le véritable sens de la loi, pourront être InQrmées
par le Biksdag à sa première session, ou, si l'interprétation
a trait à une matière relevant des lois ecclésiastiques, par
le premier Sjnode général qui se réunira après que la déci-
sion interprétative aura été rendue. Ces interprétations,
ainsi infirmées, perdront toute valeur et ne pourront plus
être observées ni invoquées par les Tribunaux.
§89. — Il pourra être fait, dans le sein dea Chambres du
..G.Kvsl^
332 CONSTITOTÏON SDKDOISB.
Riksdag. des motions tendant à la modlBcalion, & l'interpré-
tation et à l'abrogation des lois et ordonnances qui ont trait
à l'économie générale du royaume, à l'établi iisement de nou-
velles lois de ce genre, et aux principes d'organieation de
toutes les adoiiaistratloiii publiques. Toutefoic, le Rlksdag
n'aura pas le droit, en pareille mallÉce, de décider antre cho^e
ou plus que des propositions ou des vœux destinés & être
présentés au Ftol. auxquels le Roi, le ConEell d'Ëtat entendu,
aura tel égard qu'il Jugera utile au bien du royaume. Si le
Boi consent à charger le Riksdag de résoudre do coscert
avec lui quelque question relative au gouvernement général
du royaume, il sera procédé de la manière prescrite à
l'article 87, alinéa 1, pour les motions relatives aux lois
générales.
§90.-11 no pourra 6tre soumis aux délibérations du
Rlksdag, des Chambres, ni des Comités, autrement que
dans les cas et dans les formes littéralement prescrites par
les lois constitutionnelles, aucune question relative à la
nomination et à la destitution des fonctionnaires, aux
décisions, mutations et arrêtés des pouvoirs exécutif ou
Judiciaire, aux droite des particuliers, des corporations, ou
 l'exécution de quelque loi, statut ou règlement.
g 91. — Dans le cas prévu à l'article 39, où le Roi, après
avoir entrepris un voyage, resterait plus de douze mois
hors du royaume, le Régent, ou le Conseil d'Ëtat, quand il
gouvernera, réunira le Rlksdag par convocation offlcielle et
fera publier cette convocation dans ies quinze jours «jui
suivront l'expiration du terme susdit, dans le journal offl-
ciol. Lorsque le Roi en aura été informé, si néanmoins il ne
revient pas dans le royaume, le Riksdag prendra, sur le
gouvernement de t'Ëiat, les dispositions qu'il jugera les
plus utiles.
§ 92. — Il en sera de même si une maladie du Roi se
prolonge au point de l'cmpêcber pendant plus de douxe
mois de s'occuper des adtilres du gouvernement
g 03. — Lorsque le Roi vient h mourir et que l'béritier dn
trdno est encore mineur, le Conseil d'Ëtat doit convoquer
le Riksdag et faire publier cette convocation dans les quinn)
jours après la mort du-Roi, dans le Journal oCQclel. Il appttr-
,..,..G.KvsI-'
tiendra au Riksdag, saos avoir égard à aucun testament du
Roi défunt concernant le gouvernement, de désiKoer ud,
trois ou cinq tuteurs qai exerceront le KoaTememeot au
non] du Roi jusqu'à sa majorité, conformément à la présente
Constitution.
g 94. — Si le malbeur voulait que la dynastie à laquelle
«Bt réservé le droit de succession au trône vint à s'éteindre
en ligne masculine, le Conseil d'État convoquerait le
Rlksdag dans le délai déterminé è. l'article précéd^ent après
la mort du dernier Roi, afin d'élire une nouvelle dynastie,
en conservant la présente Constitution.
§ BS. — Si, contre toute attente, le Régent ou le Conseil
d'Etat omettait de convoquer immôdlatement le Hiksdaïf
dans les cas déterminés aui quatre articles précédents, il
serait du devoir absolu des Cours royales d'eu donner avis
par voie de publications ofâclelles, elln de permettre »u
RikBdag de se réunir pour aviser à la défense de ses droits
et de ceux de l'État. Le Blksdag s'assemblera en pareil cas
le vingtième jour après celui ou le Régent ou le. Conseil
d'Ëiat aurait dû, au plus tard, faire publier la dite convo-
cation.
8 96. — A chaque session ordinaire, ie Blksdag désignera
un juriscousulte de science éprouvée et d'intégrité particu-
lière, en qualité de procureur du Biksdag, chargé, d'après
les instructions que le Riksdag lui donnera, de surveiller
l'eiécution des lois par les juges et fonctionnaires, et de
poursuivre par les voies légales, devant les Tribunaux com-
pétents, ceux qui dans Texerclce de leurs fonctions, par
faveur, partialité ou tout autre motif, auront commis
quelque illégalité ou négligé de remplir convenablement les
devoirs de leurs fonctions. Il restera toutefois soumis à tous
égards à la même rasponeflbllité, et tenu aux mêmes devoirs
que le Code de procédure prescrit pour tes accusateurs
publics.
g 07. ~ Ce procureur de justice du Riksdag, qui pendant
toute la durée de ses Fonctions, tiendra le même rang à tous
égards que le chancelier de justice du Roi, sera élu de la
manière déterminée par la loi organique du Riksdag i il sera
également choisi une personne réunissant toutes les qualités
..G.Kvsl^
334 CONSTITUTION SUEDOISE.
exigées pour la fonction eUe-mème, pour lui Buccéder an
cas où 11 viendrait & dâcéder avant que le RiliBdag eiit pro-
cédé, & la première session ordinaire, â une nouvelle élec-
tion, comme aussi pour le suppléer guend 11 sera empècM
d'exercer ses roDclloDs par maladie grave ou par quelque
autre obstacle légitime.
§ 96.— Dans le cas où le [Hvcureur de justice du Riksdag,
au cours de la sessiou, viendrait h se démettre de ses
fooctions .ou à mourir, le RUcsdag devrait nommer aussitôt
à sa place la personne qui a été désignée pour lui succéder.
SI le Euccesseur désigné du procureur du Riiisdag, au cours
de la session, vient à résigner boq mandat, ou â prendre
les fonctions de procureur, on à mourir, il sera élu à sa
place, de la manière ci-dessus déterminée, une personne
remplissant les conditions voulues. Si l'uu on l'autre de
ces cas se présente dans l'intervalle des sessions, les droits du
Riksdag à cet égard seront exercés par les commissalrea h
la Banque et à la Caisse de la dette publique élus par le
Biksdag.
S99.— Le procureur du Rikadag pourra, lorsqu'il le jugera
utile, assister aux délibérations et résolutions de la Haute-
Cour, de la Révision inférieure de justice, des Cours
d'appel, des Collèges administratifs on des Admintstratious
établies à leur place, et de tous les Tribunaux inférieurs,
sans avoir toutetois le droit d'j exprimer son avis; il pourra
également preâ)h«; conimiEsauce des procès -verbaux et
actes dej' tous les Tribunaux, Collèges et autres Administra-
tions puitliques. Lés fonctionnaires de l'État, en général,
seront tenus de prêter main-forte au procureur du Rlksdag
et tous lés procureurs fiscaux de l'assister, lorsqu'il le
requerra, par l'exercice de poursuites.
^ 100. — Le procureur du Ribsdog sen tenu, à chaque
session ordinaire, de rendre compte au Rilcsdag de la
manière dont il a rempli les fonctions qui lui étalait con-
Cées et d'exposer, dans son rapport, l'état de l'administra-
tion de la justice dans le roj'aume, en signalant les débuts
de la législation et en proposant des projets pour l'amé-
liorer.
§ 401. — Si, contre toute attente, la Haute-Cour tout
..G.HvsIv
entière, ou l'un ou quelques-uns de ses membres, par Intérêt
personnel, iniquité ou négligence, venaient à rendre un arrêt
à ce point injuste, que contre le texte précis de la loi et
révidence de faits légalement établis, quelque personne en
subit ou encourût la perte de la vie, de la liberté person-
nelle, de rbûiineur et des biens, le procureur du Riksdag
sera tenu, et le chancelier de justice aura le droit, de mettre
le coupable ea accusation devant la Cour ci-dessous indi-
quée, et de pourauiïresa condamoalion conformément auï
lois du royaume.
g 102.— Cette Cour, qui portera le nom de Cour du royaume,
sera composée en pareil cas du président de la Cour d'appel
de Stockholm comme président, des présidents de tous les
Colletés administratifs du royaume, des quatre plus anciens
conseillers d'Ë ta t, du commandant en chef des'troupes en
garnison daus la capitale, du commandant présent le plus
élevé en grade de l'escadre de la Hotte en station dans la
capitale, des deux plus anciens conseillers de la Cour d'appel
de Slocitholm, ei du plus ancien conseiller de chacun des
Collèges administratifs. Lorsque le chancelier de justice
ou le procureur du Riksdag croira avoir sujet de poun^iilvre
la Haute-Cour en entier ou des membres delà dite Cour
devant la Cour du rojaume, il requerra du président de la
Cour d'appel de Stockholm, en sa qualité de président de
la Cour du royaume, de faire citer dans les formes légales
celui ou cens qui devront être mis en accusation. Le prési-
dent de la Cour d'appel prendra ensuite ses mesures pour
la convocation de la Cour du royaume, afin de délivrer la
citation et d'engager la procédure dans les formes légales.
Si, contre toute attente, il omettait de le faire, ou que quel-
qu'un des autres fonction tiairea ci-dessus mentionnés se
dispens&l de siéger à la Cour du royaume, ils encourront
les peines établies par la loi pour cette négligence ïol on -
taire des devoirs de leurs fonctions. Si l'un ou plusieurs
des membres de la Cour du royaume sont légitimement
empêchés, ou si quelqu'un d'entre eux est légalement repro-
chable, la Cour sera néanmoins en état déjuger ai douze
membres sont présents. Si le président de la Cour d'appel
est légitimement excusé ou reproché, il sera remplacé par
..G.Kvsl^
336 CONSTITUTION SUÉDOISE.
le président le plus andea en fonctlona. Après la clôture
de l'instruction, lorsque la Cour aura reodu son arr6t
conFormëment k la loi, elle le prononcera en audience
publique. Nul n'aura le pouvoir d'indriuer cet arrêt, sous
réserve toutefois du droit <ia Roi de laire grace.mais sans
que cette gr£loe puisse s'étendrejusqu'àla réintégration du
condamué dans le service de t'Siat.
S 103. — Le Riksdag nommera tous les trois ans, en
session orditiaire, de la manière déterminée par la loi
organique, une commission .cbargée de décider si tous les
membres de la Haute-Cour ont mérité d'être maintenus
dans leura importantes fonctiôDS, ou si quelques-uns d'entre
eux, sans être convaincus des cpimcs et fautes dont 11 est
traité à l'article précédent, donnent néanmoins sujet d'être
privés de l'eieroice du droit de rendre la judice. SI cette
commission, après avoir voté dans les fortoes prescrites
par la loi organique du Rlksdag. décide que l'un ou quel-
ques-uns des membres de la Haute-Cour doivent être
réputés avoir perdu ta conQance du Riksdag, ce membre ou
ces membres seront-destitués par le Roi sur lé rapport qui
lui en sera fait par le Biksdag. Toutefois, le Roi accordera
à chacun d'eux une pension annuelle de la moitié de leur
traitement.
g 104, — Le Riksdag ne pourra se livrer à aucun examen
particulier des décisions de la Haute-Cour, ni la commis-
sion à aucune délibération générale à ce sujet.
§ 103. ~ Le Comité de conslilutivh du Riksdag, en
session ordinaire, aura le droit de se foire représenter les
procès-verbaux tenus au Conseil d'Ëtat, a l'eseeption de
ceux qui août relatifs aux affaires ministérielles et de com-
mandement militaire, et dont la communication ne pourra
être requise que pour les parties qui toucbent à des faits
connus du public et indiqués par ie Comité.
% 108. — Si le Comité constate, à la lecture de ces procès-
vertwui, qu'un membre du Cunseil d'État, an rapporteur
commis pour la circonstance, ou le fanclionnaire qui a
conseillé le Roi d;ins une aCTaire de commandement mtli-
tnire, a manifestement agi contre la Constitution ou la loi
générale, qu'il en a conseillé la violation, qu'il a omis de
..G.H.^JC
faire des représcD talions contre cette violation, ou qnfl i'a
provoquée ou r&vorisée en disBimulant à dessein quelque
éclaircissement, ou que le rapporteur a omis de refuser son
contre-seing à !a décision rojale dans les cas prévus par
l'article 38 de la présente Constitution, le Comité do^ns-
titution le fera mettre en aecuEation par le procureur du
itilisdag devant la Cour du royaume, où siégeront en ce cas les
quatre plus anciens conseillers de justice au lieu des con-
seillers d'État ; il sera procédé d'ailleurs comme il est
prescrit aux articles 101 et 102 pour les poursuites contre la
Haute-Cour. Lorsque les membres du Conseil d'Etat ou
les conseillers du Roi en matière de commauderaenl mili-
taire se seront rendus coupables des faits ci-dessus men-
tionnés, la Cour du rojaume les jugera d'après laloi générale
et les dispositions spéciales qui seront établies par le Boi
et le Biksdag pour déterminer leur responsabilité.
§ 107. — Si le Comité de constitution constate que les
membres da Conseil d'État, ou que l'ua ou quelques-uns
d'entre eux, en donnant leur avis sur les mesures ji prendre
pour le bien de l'Ëtat, n'ont point eu en vue les véritables
intérêts du royaume, ou que quelque rapporteur a manqué
d'impartialité, de zèle, d'habileté ou d'activité dans l'accom-
plissement des devoirs de cet acte de conflance, le Comité
en fera part au Bilcsdag qui pourra, s'il le Juge nécessaire
au bien du royaume, eiprimer au Roi, par écrit, le vœu que
celui ou ceux qui auront donné matière à grief soient des-
titués et sortent du conseil d'État. — 11 pourra être fait des
motions à ce sujet dans les Chambres du Riksdag, qui
pourront aussi en être saisies par d'autres Comités que le
Comité de constitution, mats le Riksdag ne pourra en déci-
der qu'après avoir entendu ce dernier Comité. Dans les
délibérations du Riksdag sur cette matière, les décisions
du Roi sur des aHaires relatives aux droits et latérSls des
particuliers ou des corporatio:
mentionnées, et encore moins si
Rilcsdag. — Tout ce que
approuvé ou laissé sans observation, sera réputé avoir
obtenu décharge en ce qui touche les points examinés ;
aucun nouvel examen de nature à entraîner une responaa-
.Goagk
3.18 CONSTITUTION SOKDOISE.
bjlllé ue pourra être fait dans une nouTelle session sur la
même affaire ; toutefois, malgrâ le contrôle général de
l'emploi des revenus publics, opéra par le Comité ou tes
ré?iseurs du Rllisdag, les [onctionnaires seront tenus,
chacun en ce qui le concerne, de procéder à la révision
particulière qu'il leur appartient de faire à raison de leurs
fonction!.
glOS.— Le RiiisdaK nommera tons les trois ans, en session
ordinaire, de la manière prescrite par la loi organique, six
commissaires, de science et d'expérience reconnues, pour
veiller sur la liberté de la presse, conjointement avec le
procureur du fiiltsdag et sous sa présidence. Ces commis-
saires, dont deux, ouire le procureur du Rlicsdai;, seront
dus jurisconsultes, auront pour attribution de donner leur
avis sur les demandes qui leur seront faites parles auteurs
ou imprimeurs, lorsqu'un écrit leur sera soumis avant
l'impression avec réquisition d'avoir â décider s'il peut
être poursuivi d'après la loi sur la liberté de la presse; cet
avis devra être rendu par écrit par le procureur du
BUcBdag et trois au moins des commissaires, dont un ju-
risconsulte. S'ils déclarent que l'impression peut avoir lieu,
l'auteur et l'imprimeur seront dégagés de toute responsa-
bilité, et celle-ci retombera sur les commissaires.
g 109. -^a session ordinaire du Riksdag ne pourra être
close avant quatre mois, à compter de son ouverture, si ce
n'est sur la demande du Riksdag lul-mâme, & moins que le
Koi n'ordonne, de la manière prescrite à la loi organique,
(le nouvelles élections aux deuï Cliam^res ou à l'une d'entre
elles, auquel cas le Rlkadag se réunira au jour flxé par le
Hol pendant les trois mois de la dissolution, et la session,
qui reprendra le caractère de session ordinaire, ne pourra
plus être close avant que quatre mois se soient écoulés
depuis la nouvelle réunion. — Les sessions extraordinaires
du Rilisdag pourront être closes par le Boi quand il le
jugera convenable; elles doivent toujours être terminées
avant l'époque fixée pouc l'ouverture des sessions ordinaires^
— SI, contre toute attente, le Riksdag, au moment de sa
clôture, n'avait pas réglé le budget, ou qu'il n'eût pas volé
...G.Kvsl^
de nouveaux subsides* au montant fixe, le budget et les
Bubsides précédenls seront maintenus jusqu'à la prochaine
Beeaion. Si le montant des subsides est dëterminé, mais
que les Chambres soient en désaccord sur la répartition,
les divers articles de la dernière loi sur les subsides seront
augmentés ou diminués daas la proportion exislani entre
le montant de la contributioji établie et celui de la contri-
bution qui aura été répartie par le Itiksdag à la session
précédente; le RiliSdag chargera ses commissaires k
la Banque et à la Caisse de la dette publique d'élaborer
et de rédiger sut ces bases uue nouvelle loi sur les sub-
sides.
g 110. — Aucun membre du Riksdag ne pourra être
poursuivi ui privé de sa liberté à raison de ce qu'il aura
fait ou dit en cette qualité, si la Gbambre h laquelle il
appartient ne l'a autorisé par une résolution expresse, & la
majorité des cinq septièmes au moins des votants. Aucun
membre du Riksdag ne pourra non plus être expulsé du
lieu où se lient le Riksdag. Si quelque particulier ou quel-
que corps militaire ou civil, ou quelque /réunion, sous
quelque nom que ce soit, de son propre mouvement ou
sur l'ordre d'autrui, tente d'exercer des violences contre le
Riksdag, ses Chambres ou comités, ou l'un de ses mem-
bres, ou de troubler la liberté des délibérations et déci-
sions, ce fait sera répute trahison, et il appartiendra au
Riksdag de faire poursuivre les coupables dans les
[ormes légales, —Si un membre du Riksdag est inquiété
en paroles ou en actes, pendant la durée des sessions
ou dans le cours du voyage pour se reudre au Riksdag
ou eu revenir, lorsque cette circonstance sera connue,
OQ appliquera les dispositions du Code relatives aux vio-
lences et outrages conire tes fonctionnaires du Roi dans
l'exeicice ou h l'occasion de leurs fonctions. 11 en sera de
même dans le cas où les commissaires, les réviseurs ou le
projureur du Riksdag, les secrétaires ou employés de l'uDO
des Chambres ou de l'un des comités subiront des violen-
rayez § 60. — Noie de l'auleuc.
,„glc
340 COHSTITUTION SUÉDOISE.
ces ou dea outragea dans l'exercice ou à l'occasion de leurs
fonctions.
S 111. —Si UQ membre du Riksdeg est Inculpé d'un délit
grave, il ne pourra être arrêté avant que le juge, après
instruction, n'en ait reconnu la nécessité, à moins qu'il
n'ait été pris en flagrant délit ; toutefois, s'il no comparaît
pas sur le mandat du juge, il sera procédé conformément
aux dispositions de la loi générale sur ca sujet. Aucun
membre du Biksdag ne pourra être privé de sa liberté, si
ce n'est dans les cas prévus à cet article et à l'article précé-
dent. — Les commisxaires de ia Banque et de la Dette du
Rojaumc, et les réviseurs du Rilisdag ne pourront, dans
l'ese'rcice ou à l'occasion de leurs fooctlons, recevoir d'or-
dres que du Riksdag seul, et en conformité avec les
instructions données par lui ; lia ne pourront non plus
être soumis à aucune responsabilité ni reddition de
comptes, si ce n'est sur une décision du Riksdag.
§ lis. — Aucun fonctionnaire ou employé ne devra user
de son autorité pour exercer une influence illicite sur les
élections au Riksdag. a peine de dcsiilutlon.
g 113. — Les taxateurs chargés d'appliquer au nom du
Riksdag les prescriptions relatives aux impAts annuels ne
pourront être soumis à aucune responsabilité h raison des
taxes et évaluations par eux faites,
g 114. — Les privilèges, prérogatives, droits et libertés
des anciens Ordres du royaume resteront en vigueur &
moins qu'ils ne se rattachent indissolublement au droit de
représentation qui appartenait autrefois aux Ordres, et
qu'ils n'aient disparu avec ce droit. Ils ne pourront être
modiflés ou abrogés que par décision conforme du Roi et
du Riksdag, et, s'il s'agit des privilèges, prérogatives, droits
et libertés de la noblesse ou du clergé, du consentement de
la noblesse dans le premier cas, et dans le second, du
synode général.
3,Coo^le
INDEX ALPHABETIQUE
Pri-
Absolntisme ea Suède, 3'i sqq.
— Forme d'ÉUt moderne, 1^ ;
évolue vers la mcinarchie cons-
tilutionnellc, 132. — Absolu-
tisme «D Aogleterre après la
coaquète normands, 149.
Act of seltlemenl, l',2.
Acte uddiUoQDel de 1660, 32.
Attaires étraDgères, Suède, m,
81 ; pouvoir du Roi eo cea
malièrea, 273. — Élats-Unis,
221, Î23, 2S8.
Agrsrien [purti) en Suède, 238,
262, 265.
Augletarra. Constilution ; bis-
torique, b; aon codifiée, 6, 0,
tisiDe apparent, tlO sqq. Voir
chap. Vl.i-iï.
AntiNdéralistes. Ëtats- Unis,
BalkanB (États des), 167.
Banqne du lioraume {Riks-
banken), 74, 77, Ï5l.
Belgique : .Ûonarcliie conali-
tuiioauelie se rapprocljaui du
type parlemeatuire, 127. 135,
134 iqq. ; systi'me de comiLés,
183.
BeviJfiiiiiff , 75 (Voir Subsides).
Billa. Voir Uoney bili:
vale bills.
« Bonnets », 41 sqq.
Bosses. États-Unis, 217.
Budget. Suède, part du Rc
dans rélablissement du budget
eo ; part du iliksdag, 75.
- Angleterre, 167.
Cabinet. Anglelerre, 160 sqq. ;
repose seulement sur une pra-
tique politique, 140; est le
vrai souverain, 173, 176, 181.
— Moins indépendant sur le
continent, 183 ; États-Unis,
210, 2i!l, 227. Voir les divers
pays; cf. aussi Ministère, Con-
seil d'État.
Césarisme, 124 n.
Chambre. Système h Chambre
unique dans le perlementa-
ri.ime uoilaire, 180 ; en Grèce,
187 ; en Norvège, 188. Sys-
tème k deux Chambres en
Sutde, 8e sqq,, 262; avec
ïOtïïD commua, 91, 279; en
Angleteri'fl ivoir Parlementa-
* • " , 19i ; Bui
l3-Uni(
a>i. 21
B. Voir
' Égalité
complète des deux Chambres
dans le parlementarisme dm-
liste, 209. — Suède. Pre-
mière Chambre, composition,
90 ; situation et rôle, 93 ;
..G.Kvsl^
CONSTITUTION SUÉDOISE.
comparée nvae la seconde
Chambre, 2K, 367; Bïconde
Chamlire. 90, SOS, 267,
H Chapeaux » [\n), 41.
Cbarte fiao^ise de 1S14, 1!6.
— Voir Grande Charte.
Chartes cou sti lu lion net tes, 3 ;
les ancien Des Koiiungaialiar,
15 ; les teïtea aclueta, 53.
Cbiltern Ilundreds (ranctlan
ttclive] Angleterre, Ul.
ClOBare, Ï57.
Qialitioa (majorité de), Fréquente
sur le continent, 182 ; en
Italie, 186.
Coda Qénénl{Allmûnntt Lands-
lagen], 6. 19, 22, 23, 108.
Comitëa. Suède : sânt un véri-
tuble système de gourerné-
ment, £52; orgHniséà pendant
l'ère de la liberté, 41; empê-
chèrent alors la formation d'un
parlementarisme anglais, 235 ;
Constitution (te 1809, 73; ac-
tuellement, 91, 257 n. ; très
développés, 211: dirigent peu
les travaux du Hiksdag, 261,
saur le Comité du budget, 262.
— Angleterre (peu développés
169, 177. 180. - Sur le ion
tineol, 183; Norvège, 188
Danemaik, 1P9; France, 1».-
États-Unïs (très développés)
211, 22i ; Eonl un moyen de
Ires, 228. — Suisse, 298.
Comtnitteeof Ihewkole Hoase,
177. 224.
CoiamOB Iiui, liO.
CommuDes (Chambre des) 166,
a un caractère aristocratique,
160; choisit ei> Tait le Cabinet,
Compromis entre les pouvoirs
aui Éltils-Uois, 232; dans la
politique suédoise, entre les
intérêts généraux e( Us intérêts
de classes, 266 ; entre les
Chambres suisses, 298.
Congrès, IClats-Unis, 222.
Conseil {Riksràdel) au moyen
âge, 21, 23; de 1521 à 1680,
29 sqq. ; sa chute, 36, 105 ; ère
de la liberté, 41 ; sa faiblesse
empêche la naissance d'uu par-
lemenlarisme anglais, 2.^5; ne
doit pas appartenir au Riksdag,
72.
'< Conseil d'£ut u Slahi-âdet)
en Suède, 59; râle, composition
et fonctions après 1609, 80 sqq;
après 1840, 9i; a souffertdans
in répartition des poaroirs
( I309),1CB; dépend du Riksdag,
106-107, 268 sqq. ; ne tombe
pas sur un vote de blâme,
266 ; n'est pas homogène, 270;
n'a pas un caractère politique.
- 271 ; a refn du Roi l'exercice
du pouvoir, 272 sqq. ; Silualion
subordonnée vis-à-vis du
Riksdag, 2^3.
— dans la monaroliie constitu-
tionnelle. 125; eu Belgique.
185; en Danemark, 188. Voir
Cabinet, Ministère.
Conservateurs en Suède, 237.
CoDStituUon. DéHnition, 114;
est la base de la classillcatioa
des formes d'Ëtal, ibid. ; Con-
stiluti ons récentes etanciennet,
3 : Constitution a doctrinaires
et historiques, 4 sqq.; Con-
stUutions codillées et non co-
difiées, 6 sqq.; Cnnsiitutions
octroyées et Conslitulionadon-
..G.Kvs'^
INDBX ALPHABETIQUE.
nées psr une Assemblée po-
puluire. — Voir ËLat, Forme
de gouveroemeot.
Constitutionnelle (mouarchie)
dans l'uDcîeDDe Suède, 17, 23.
— Forme d'État moderne, ISû
Contrdle de la représentation
Hur le gouvernement ; Suède,
76; Anglelerre, 1S8; ÉtalR-
Unis, S23; Suisse, 298.
Danemark : Monarchie c<in-.li-
tulioonelle sur la voie du ré-
gime parlementaire, 127, le?.
Ddoocratos, Élals-Uais, 214.
Démocratie d'après Aristole,
llô sqq.; diFFéreace entre la
démoiralie antique et la dé'
I moderne, 139; pei
lialer «
ie de Is
majoillé, 230: c
de la démocratie antique se
retrouvent en Sui'^ae, 28U. 30?.
DiBBoIntîon du Hiksdag, G7.
Douanes. Législation doua '
nière : Suède, 66, 75 . 104,
354; dans le? autres pnys,
355.
Éligibilité au Rikidag,90.
État. Diverses Formée d'É'at.
113 sqq. — Organes d'Êlal,
114, m, U8; deux organes
immédiats dans la monarchie
coDstilulionnelle , 125; leur
eituiitton rispeclive dans l'État
parlementaire, 1>!0 : orj^ue»
immédiats en nombre diiïérent
dans lesdiFTérentes formes dik-
tat. 2Û7-Ï08, — Volonté d'É-
tat, 114, 115, 14S, formelle et
réelle, ilt!-119, déterminée
par la représenLition dans les
démocralies, 129 ; sa délermi-
outioD est l'élément eentral d'-.
(uule Constitution, 207.— Voir
Pouvoir,
Étata-Dnis. Constitution, l»J
sqq, ; comparée à celle de la
Suède, 200 sqq . 220; appa-
rentée b, In monarchie conati'
tutionnelle, 201; colillée,212;
subie, 2I2-ZI3; résumé carac-
léris tique, 229; ne s'accorde pas
avec ta Ivrannie d'une m^o-
rilé, 230'; défauts, 232. —
Voir Pouvoir,
Ëtrangérea (affalreG). — Voir
AfTairea.
Fédéralûtea. Ëtats-Unis, 214 ;
Suhse, 392,
Finances de l'Elut. Suèdr, 65.
2ig saq.; Contrôle des finan-
ces, 76; Priorité de la se-
conde Chambre en matière de
lioances : France, 191, Étals-
Unis, 306. ~ Voir Budget,
Fonctionnaires. — NomiDaUon
des funetioanaires sa Suède
pendant l'ère de la liberté,
41; actuellement, 60; pouvoir
du rtoi en cette matière, 274;
Angleterre, 173; ÉUts-Unis,
2iS sqq. 223, — Les foDCtiOQ-
naires dans te Riksdag suè-
dniï, 73.
..Google
CONSTITUTION SUÉDOISE.
peu près iolacte raéiae uprèf
1866, 233.
France. MéUngi; d'espèces dif-
féreoteB de parlsmeDlariBiae,
134, 136; république et parle-
uientarisme ftngîais, 190 sqq
Qaranties politiques en Suède,
82 sqq .
Qeatry, Angleterre, 147, ,
Gouvernement : Sa faiblesse
eu Suède, 37, 105, 248 sqq. ;
£0D râle dans |a direction des
Irsvaui parlementaires, 260.
— France : grande puissance
du gouvernement en deburs
du Parlement, 1%.
Grâce (droit de) du roi de Suède,
67.
e,139.
Impeacbment, 170. |
Impératif (mandai) D'existé pas
en Suède, 72, 91, 130 n. ;
Étals-Unis ; dans les élections
présidentielles, 217 ; dangereux
pour le régime parlementaire,
307.
Impôts. Suède : moyen Sge, 16.
26 ; époque moderne, 31, 33 .
droits du Riksdag en matière
d'impôts, 26, 66. 75. 251. -
Angleterre : 166 ; initiative
eiclusîTe du Cabinet en matière
d'impôts, 171.
s du
Cabinet, 174, 260; il n'en est
pas de même sur le continent,
133 ; Norvège : 188 ; France :
196 ; Etala-Unis; 221, 260 ;
Suisse : inilïative du gouver~
nemeot, 296. _ SnMe : la
Conslitnllondel809 attribuait
l'initiative au gouisrnemeitt,
2iS, mais elle pafiie mainte-
caot au RikscFag, 350 sqq.,
iba. — Suisse : initiative du
peuple, 299.
Interpellation, en France, 1E6 ;
u'exisle pas aux États-Unis,
OH ; peu employée en Suède,
Koaungabalkar, 1!3.
Lagmsu, 16, 25.
LaadBting, 90.
Landtmanaapartiet. — Voir
Agrarien.
Législatif (pouvoir). Suède :
dans la plus ancienne Consti-
tution, 16; pouvoir légiâlatir
du Boi BU moyen flge, 20 ;
pouvoir légialaliF d'après le
Code Général, 26; dans les
temps modernes, 31, 38 ; d'a-
près la Constilution actuelle,
63 sqq. ; pas de pouvoir légis-
latif provisoire, 64 ; législation
de la Banque du Royaume, 71.
— En matière " économique u,
63, 77, 97, I.S5. - Angleterre,
INDEÏ AI.PH\bÉTIQUE.
161 ; Initiative laissée su Cabi-
net, 175.
Législatnre. Suède; acte addi-
tionnel de 1660, 37; la Cooa-
litulion de 1172 ne prévoit pas
la durée régulière dee législa-
tures, 46 ; actuellemeiit, 18.
Libéraux en Suède, 2ST.
Lorda (Chambre des), 150; n'a
pas d'action sur le Cabinrt,
163; sans puissance indépen-
dante, iSO.
lion, IQj; elle existe peu en
Suisse, 29t ; elle est un danger
pour le régime parlementaire,
305; surtout pour le svslème
unitaire, 303-309,
Mandat. — Voir Impéralir,
Hinistére. Pas de minislère
proprement dit en Suède, 59;
gleterre, 145. Voir : Cabinet,
Conseil d'État.
HïDiatériel [ gfravernement )
n'cïisie pas en Suède, 82, 95,
105, 210. — Gouvernement
miaUtériel en Anjjleterre ,
113 sqq.; en Grèce, 1S1 ; en
Norvège, 188 ; comparaison
entre la Suède et les Etats-
Unis à ce point de vue, 210;
pas de gouvernement mimslé-
rtel en Suisse. 2%.
Hiniatres. Dans les monarctiies
ils sont les liommes de con-
Raoce du Roi, 161 ; aux Ëlats-
Unis, les hommes de conliance
du Président, 221,227; Suède,
voir : Conseil d'Étal.
Hinorité. Son rOle dans la
constitution anglaise, 156.
Honarcbie suivant Aristote,
115 sqq.; monarchie et répu-
blique, 120; monarchie d'après
les juristes allemands, 126.-
(Voir : Absolutisme, Constitu-
tionnelle); monarcliie élective,
22-23.
Money bills, 111
Motion (droit de) : Angleterre,
175 ; Suède, très employé,
251 sqq., 358 sqq. ; peut rem-
placer le droit d' interpellai ion,
269 ; appliqué aux projets de
crédits, amolodril la eituation
du gouvernement, 210.
Jlfuttnr act, 154, 167.
N
Nationalité, créée par la com-
munauté des guerres, 290.
Nobleaie suédoise jusqu'il la
actuel de la noblesse, 69 n.
Norvège, 181.
Opinîouauâaid, 79,
Opposition des Tonctionn aires
suédois contre le gouverne-
ment, 73 ; l'opposition comme
élément de la Constitution an*
glaise, 151 sqq.
.Google
CONSTITUTION SUEDOISE.
Parlement Cf. Cbaiabre, Parle-
tQcnlarlsme, Riksdag.
Parlementarisme. Suède : pen-
dacl l'ère de la liberté, 41.
— Forme d'État moderne, 129
sriq.;
is-lypea
1:îI;
liidépenduntii l'un d
133 ; danger créé par les inlé-
rèia particuliers, É6i Eçq. ; )e
par lemcntur lame se distingue
par !a grande puissance de la
représeotatioii populaire, 129,
£07;
: angla^
ment de Cabioet, 17C sqq. ;
est le produit d'une "évolulioD
BDlurelle, 180; éléments essen-
tiels, 180-181; imité et consi-
déré tomme le parlemen ta-
ri srae par excellence, 2SZ:
comparé avec le parlementa-
risme suédois fschéma), 283.
285; imitations contineotates,
179 sqq., W (Voir Angleterre,
Belgique, lUlie, Grèce, Nor-
vège, Danemark, France).
— dualiste, 199sqq.; traits carac-
téristiques,£07 sqq. ; peutcon-
duire à des compromis injus-
tifiés, 266; indépendance crois-
saute du Riksdag, S75, 237
(Voir Élals-Unis et Suède] .
— Suisse, 288 sqq.; mélange de
souveraineté parlementaire et
de souveraineté populaire, 286 ;
ses institutions, 291 sqq.; ré-
gime communal, 301 ; avec des
caractères antiques, 283, 302.
Partis. Angleterre, 133 sqq..
Kâle des achats de votes dans
la formation des partis, 145,
155 ; partis de gouvernement.
.élément de la Coasiitption, 155
■qq., 179; ne divisent pas le
peuple, ID7 ; ne sont pas des
parlia d'intérêts, 159, dUô ;
)mpaiibl
', 159.
, 139 sqq.,
I gouve
~ Sur
France, 196 (Voir d'ailleurs
les divers pays).
— Etats-Unis, 21 i sqq. ; ils sont
un élément de la CoDelitution,
216 ; bien qu'au Tond ils soient
superflus dans le parlemenla-
,241.
— Sutije, pendant l'ère de la
liberté, 41 sqq. ; leur caractère,
23t sqq. ; ils n'ont pas coa-
dnit à un parlemealarisme du
type anglais; CDUxes de ce
Fait. 2:fô; les partis après
, 1809 elacluellement,236sqq.;
partis de classes, 238, 264;
point de vue de la Conslilulioa,
ne sont pas des partis de gou-
vernemenl, 211 sqq. ; leur rôla
dun? la direction des travaux
parlementaires, 262, notam-
ment dans l'élection des comi-
tés. 263.
— Suisse, très développés ; ne
sont pas des partis de classes;
ne sont pas non plus gouver-
nants, 291 sqq.
Peodletoa act, 220.
Pouvoir (de l'Eut). Suède :
, SI,
6-37 ;
i, 247;
" législatif ".eSsqq., 97,247;
rinaocier, 65; '.judiciaire »,
6ti. — Fartage du pouvoir en
Suède : dans la plus ancienne
Constitution, 17 ; dans la
INDEX AI.PHABBTIQUi!:.
ConetilulioQ acluelle, 56, 87,
97, 99, 101 sqq. ; au délri-
meut do Conseil d'État, 105 ;
pouftanl l'État est un, 109
partage ne se concilie pas a
un gouvernement de p.nrti,
240 ; destiné en 180B à établir
l'équilibre, mais «D laissant
l'initiative gouiernemeotale,
217 ; transrerU, 2(8 sqq., 272
sqq, — Partage du ponvoir
dans la monarchie conetitU'
tionoelle en général, 110, 118,
125 ; dans le parlemenlarïsnie
dualiste, 208, ou le parlige
existe aussi dans la représen
talion, 209 ; particulièrement
au Étals-Unis, 229 ce qui
leud impossible ta tyrannie
d'un pnrti, 216 le système
n'est cependant pas à I abri
de la critique, 232 — Pou
voir partagé cd un certain sens
en Angleterre, 104 ; dans l'an'
cienne Rome, 101 n. — Tri-
partition du pouvoir en Suisse,
208, mais od pounait y voir
nnssi une bipartition, 295.
Président, 12M22 ; France,
192 sqq. ; États-Unis, 203,
205, 217, 22i ; responsabilité,
223 ; Suisse. 29S.
Président de CLambre. Voir
Preaae (liberté de !a) sous l'ère
de la libevté,4l: garantie cons-
titutionnelle, 35: comité, 7g.
PreviouB queatton, 257.
Private billE. 171. 177.
Privy Council. 113. 161.
ProcéB-verbal ministériel.
Suède, eiamen du 't protocole "
du Conaell d'État, 77, 83,
Promulgation. Suède, 63.
Proportionnelle ( représenta-
tion), remède contre l'oppres-
sion de la majorité, 103 ;
incompatible avec le parlemen-
lartFme anglais, 159; Belgique,
186 ; est à sa place daas le
régime suédois, 245 ; Suisse,
294.
Prorogation. N'ei
Suède, 68 u.
K Protocole ". Voir Procès-
Provisional orders, 163, 17 ^i.
ProviBoire (légslatnn) ne se
PruBse Melaage de caractères
a|.pjrtendnt k la monarcliie
coistiluti nnelle et k la mo
Refereudam en Suisse, 299;
les Ëlals-membres des Etats-
Unis, 300; protection contre
I ' oppression parlementaire,
103.
Regeringatormen. Voir « Vit-
me de gouvernement ».
« Régionalisme » en Italie, 1S6-
187.
RepréBentation.
,pé-
; époque modi
71. Idée étrangère à l'i
quité, 116. CF. mandat ii
ralir. — Itéforme de la re
seutalion, 89 sqq. ; elle ne
change pas l'esprit de la Cons-
titution, 233; elle a peuplé la
..G.Kvsl^
CONSTITUTION SUEDOIS B.
Féconde Cbambre de paysans,
213. —Voir ProportioDnelle,
Sépublicains nux Élats-ODÎs,
2U.
République et monarcbie, 120 ;
république unie en Knioce au
parlementarisme anglais, 190.-
Responsat)ilit6. Suède : res^
poDsabililé du Conseil devant
les Éiat'<, 32, 4t ; du Conseil
d'Élat devant le Itiksdag,, 83 ;
c'est une inslilulion nationale,
51, 83. — Responsabilité du
président des Etats-Unis op-
posée à l'iJTesponsatiilité du
roi, 203; ÉUta-Unia : minis-
tres irresponsables devant le
Congrus, 311; responsabilité
du président devant le Con-
grès, 223 ; le sentiment de la
responsabililé aETaibli par le
partaRe du pouvoir, 232. —
Itespoiisabilité devant la n:j-
tion, 193, m
Revenua de i'État en Suède, 75.
liapport entre les revenus or-
dinaires et Ua beviUningar,
248.
Bivissurs [Staitrevhorer), 76.
Riksbanken. Voir Banque du
Itovaume.
Riksâag. Naissance de la repré-
senlatfon par étetei, 2â; époque
moderne, 23 SQ!].. 31 sqq. ;
BiksJH^ gouvernanL, hi sqq.,
236, 216, 250, 308: sessions
eilraordioaires, 67; oomposi-
lioo (1809-1866) 71 n,; puis-
sance 6nanciÈre, 75; sessions,
78, 91; oompofiilion après 1866.
89 sqq.; de pluaen plus puis-
sant, 218, 252; direction for-
melle de ses travaux, 256;
direction réelle, ^8 ; nature et
valeur de ses travaui, 263sqq.
— Voir Chambre, Vole.
Riksgàldakaaloret (Comptoir
de la Délie publique), 71, 99.
Roi. Simple organe d'Ëtatcomjne
la représentai ion, 109, 116. —
Pouvoir royal f n Suède : dans
l'Élat primitif, 15 sjq. ; dans
le régime aristocratique mé-
diéval, 20 sqq.; royauté na-
tionale - constilutionnetle des
temps modernes, ^ sqq. ;
absolutisme, 38 sqq. ; a ère de
la liberté », 41 sqq.; Gus-
tave 111, 45; pouvoir royal dans
Ja Constitution actuelle, 58 sqq.;
sympt6mes d'affaitiliBsement
depuis lt09, 106; le Roi a
abandonné le gouvernement au
Cou seil d'Étal, 271 sqq. ;causes
de ce" fait, 275 sqq. — An-
gleterre, 149 sqq. ; rôle qui
reste au Roi, 161-165; il a
perdu son droit de veto, 167,
180. — Voir les divers pays.
Rotation, Élals-Uois, 219 sqq.
Rnsiie, 123, 132.
Samliagspartiet ;parti decon-
cenlralion), 237.
SanctioQ royale en Suède 63;
ne s'applique pas aux sob-
sidea, 76, Angleterre. 141.
Voir du reste au mot Veto.
SelIgoverBiaent {on a exagéré
son imporlance politique), 151
Sénat en France (plus
pendant qu'en Italie et e
gique), 19i; aux Élats-Uois,
composition et rûle, 201 , 202,
..G.Kvsk
INDEX ALPHABETIQUE.
2(K; iDiluence sur le pouvoir
eiéculif, 221, 223; élément
central du pouvoir, 226.
Speaker en Suède Italman),
68; a une graade imporlance
auï ÉtaLs-0nis, SJ12, 224. —
Conférence des présidents, £56.
Spoiling-system , Éials-Unis,
218.
standing Ordgrs, 139,
Subsides {bevîllningar) Ib, con-
stituent le principal reveou de
l'État, 248; le Rikadag en dis-
pose de plus en plus, 254.
Suéde. Constitution : historique,
5 aqq. 100; codifiée, 6; son
développement historique. 11
sqq.; CoDStitulion de 1801*,
48 sqq.j nationale, 52 ; la
Cooslitution de 1809 est pour-
tant une créatioD moderne,
100; dualiste, 57-58, 60, 87,
99, 109; mais non médiéval''.
109 sqq ; modincations depuis
1809,89 sqq. ; Ira ns formations
inaperçues, 98 ; Constitution
parlementaire nvec de» traces
de monarcliie coDsttlutioanelie,
1,35; Parlementarismedualiste,
199 Bflq. ; comparé avec celui
des États-Unis, 200 sqq ,220;
son fonctionnement politiqu'.
233 sqq. ; n'est pas organisé
pour un gouvernemeot de
parti, 241 sqq-; mais interprété
è lorl comme un parlementa-
risme du Ijpe anglais, 134,
219 sqq. ; causes de celle
erreur, 281 sqq. ; comparé
avec le par lemenUrisme anglais
(schéma), 283-285; s'éloigne
de plus en plus du tvpe an-
glaia, 286.
Sulfrage (droit de), 90 sqq,;
Conséquences probables du
suffrage universel, 243.
Saisse. Voir Parlemenlarisme.
Svear el G'otar (lutte entre], 12.
Dnîcin RU Ado-norvégien ne com-
parée 1 l'ancienne fédération
suédoise, 13. - Union amé-
ricaine (Voir Èt*la-Uni6)-
Testragothi« (lui de), 13.
Veto du chef d'Ëtat : Augle-
terre, 141,168; Norvège, 188;
Étals-Unis, 205, 222, 229;
Suède; contre les motions in-
dividuelles, 260.
Vote en commun des deux
Chambres. Suède, 91, 215,262;
sous la forme actuelle, est
contraire au parlementarisme
dualiste, 281.
Totesde conriance ou dedéftance
n'piislent pas aux États-Unis,
210; ni ea Suède, 269; ni en
Suisse, 2ffl.
W
=,Coogk
kCooi^Ic
>HlMBR1i: FRANCIS SIMON, ItBNNBS
=,Coogk
=,Coogk
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