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Full text of "L'acoustique, ou, Les phénomènes du son"

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BIBLIOTHÈQUE 

DES MERVEILLES 

PUBLIÉE SOUS LA DIRECTIOK 

DE M. EDOUARD CHARTON 



L'ACOUSTIQUE 



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L'ACOUSTIQUE 



I 



LE SON DANS LA NATURE 



Bruit et son musical. — Grotte de Fingai. — Voix des aniinauv. — Langage des 
botes. — M. L... et les singes. — Le chien qui parle. — L'animal Haut. — 
Oiseaux chanteurs. — Insectes. — Reptiles et poissons, — Vie nocturne des 
animaux dans les forêts. 



Le son, c'est le mouvement qui devient sensible à 
distance. Le repos est muet. Tout son, tout bruit an- 
nonce un mouvement. C'est le télégraphe invisible dont 
se sert la nature. 

Aussi bien le son est un appel ; on ne le comprend 
pas sans l'oreille qui l'écoute, comme on ne comprend 
point la lumière sans l'œil qu'elle impressionne. Voix, 
parole, chant, il devient l'auxiliaire le plus précieux ei 
le plus important de la vie de relation. On sait que les 
aveugles qui entendent et parlent sont bien supérieurs 
aux sourds-muets, qui ne vivent que par les yeux. C'est 
par la voix, fille de l'air, que les êtres vivants se com- 
muniquent le plus complètement leurs m^^^'à^xQws» 



2 L'ACOUSTIQUE. 

leurs besoins OU leurs désirs; la voix appelle, avertît, 
attire ou repousse, menace ou caresse, implore ou 
maudit... Lorsqu'elle se fait parole dans la bouche de 
l'homme, elle exprime tout ce que l'esprit peut conce- 
voir ou le cœur sentir. Incarnation merveilleuse qui 
prête un invisible corps à la pensée, elle porte d^esprit 
en esprit les passions, la foi ou le doute, le trouble ou 
la paix. Conçoit-on une humanité muette ? 



Nous nous proposons d'étudier le son sous différentes 
formes, sans noufe préoccuper d'abord de la nature 
intime des phénomènes auxquels il donne lieu. On verra 
ensuite que ces phénomènes s'expliquent aussi com- 
plètement qu'on peut le désirer, par des considérations 
tirées de la théorie des vibrations, et que les règles de 
la musique même découlent en grande partie d'un 
certain nombre de faits physiques ou physiologiques 
qui sont du domaine des sciences d'observation. Il ne 
faut pas cependant que le lecteur s'effraye de cette per- 
spective ; nous ne ferons qu'effleurer ce côté de notre 
sujet, et nous nous bornerons, dans la plupart des cas, 
à l'indication des résultats obtenus, sans entrer dans 
aucun détail sur la démonstration des lois que nous 
ferons connaître. De cette façon, ce livre pourra être lu 
sans effort d'esprit par tous ceux qui aiment à com- 
prendre les phénomènes au milieu desquels se passe 
notre existence. 

Les impressions que perçoit Toreille sont très-variées ; 

les distingue habituellement en sons mm t eaux et 

its. Toutefois cette distinction n a rien de pré- 



lE SON DANS LA NATURE. 5 

cis; on ne saurait admettre entre les sons ot les hrnits 
une différence d'essence ou de nature. Tous les bruits 
se composent de sons de très-courte durée, presque 
instantanés, et plus ou moins dissonants. D*un autre 
côté, les sons musicaux, ou, pour parler avec plus de 
précision et ne rien préjuger sur les définitions, les 
sons employés par les musiciens, ont souvent une durée 
excessivement courte, et les combinaisons dans les- 
quelles on les fait entrer peuvent être parfaitement dis- 
sonantes. Où est la limite qui sépare le son musical 
du bruit? Elle est tracée par le degré de plaisir ou de 
déplaisir que nous causent les impressions d'un organe 
dont la sensibilité varie d'un individu à l'autre, et il ne 
faudrait pas en demander la définition à une personne 
qui sortirait d'un spectacle de foire. 

Le caractère le plus saillant du bruit, c'est l'irrégula- 
rité et la discontiimité de l'impression. Le roulement 
d'une voiture sur le pavé se compose d'une série d'explo- 
sions discordantes ; le bruit que fait l'eau qui tombe du 
robinetd'uneibntaine,est deméme une suite rapide de 
notes saccadées. Dans le doux murmure d*un ruisseau, 
dans le bruissement des feuilles, les transitions sont déjà 
moins brusques ; enfin, dans d'autres bruits tels que les 
longs mugissements du vent qui s'engouffre dans les che- 
minées, les notes montent et descendent par degrés in- 
sensibles. Dans tous les cas, cependant, nous rencontrons 
des successions irrégulières de sons hétérogènes, qui 
se suivent trop rapidement pour laisser h la sensation 
musicale le temps de naître, tandis que les impressions 
que constituent les sons musicaux sont assez prolongées 
pour être perçues distinctement. C'est dans le même 
fait que réside la différence entre le langage parlé et ' 
chant. D'habitude, on appelle aussi bruit uw \iv^« 



4 L'ACOUSTIQUE. 

confus de sons que l'oreille ne parvient pas à confondre 
dans une sensation une et homogène. Ainsi on produira 
un bruit eu posant la main étendue sur les touches d'un 
clavier de manière à faire entendre à la fois toutes les 
notes de la gamme. Il est clair, d'après ces exemples, 
que la distinction entre bruit et son peut n'être qu'une 
affaire de convention, et qu'on peut passer par mille 
transitions de l'un à l'autre, quoique la distance soit 
grande aux extrêmes. Tout le monde appelle bruit le 
cliquetis que produisent en tombant des morceaux de 
bois. Cependant, voici une expérience qui se fait souvent. 
On prend sept lames de bois dur, de même longueur et 
de même largeur, mais dont les épaisseurs décroissent 
de l'une à l'autre suivant une certaine loi. On en laisse 
tomber une seule sur le plancher ; elle donne un bruit 
qui paraît n'avoir aucun caractère musical ; ensuite on 
les jette l'une apfès l'autre, suivant Tordre de leurs 
épaisseurs décroissantes, et l'on entend parfaitement les 
sept notes de la gamme. 

En frappant sur des cailloux convenablement choisis 
et suspendus à des fils, les Chinois produisent des sons 
assez agréables* pour composer une mélodie. Beaucoup 
d'instruments employés dans les orchestres ne pro- 
duisent, à parler proprement, que des bruits cadencés 
qui viennent se mêler à la musique pour soutenir le 
rhythme; tels sont les cymbales, les castagnettes, les 
triangles. 

La nature inorganique ne produit que des bruits. La 
voix du tonnerre, celle de l'ouragan et celle de la mer 
ne sont que des bruits confus ^ 

Parfois cependant le hasard s'en mêle, et ces bruits 

* Les physiciens ne sont pas d'accord sur Texplicalion du tonncrn*. 
délonalion du coup de foudre esl causée ipat Vébtw^Vftcïvent de l'air 



LE SON DANS LA NATURE. 5 

prennent un caractère musical. La statue de Memnon, 
dont il sera question plus loin, rendait un son au lever 
du soleil. La grotte de Fingal, dans l'îlot de Staffa, pré- 
sente un aufre phénomène remarquable. Le fond de 
cette caverne est fermé et obscur comme un chœur 
d'église ; des piliers de basalte y figurent un buffet d'or- 
gue noirci par le temps. Lorsqu'on pénètre jusqu'à l'ex- 
trémité de la grotte, on aperçoit presque à fleur d'eau 
une espèce d'antre d'où sortent des sons harmonieux 
chaque fois qu'une vague en dépasse le bord et que 
l'eau vient s'y engouffrer. C'est pour cette raison que, 
dans le pays de Galles, on donne à la grotte le nom de 
Llaimh binn, qui signifie cave à musique. 

Pour obtenir du vent des notes musicales, on lui offre 
les cordes d'une harpe éolienne, — de six à dix cordes 
à boyau, tendues sur un cadre de bois léger qui est 
muni d'une table de résonnance. 

Dans le monde des animaux on rencontre une variété 
infinie de bruits et de sons musicaux ; ces bruits et ces 
chants constituent le langage des bêtes. « Les oiseaux, 
dit le P. Mersenne, les chiens et les autres animaux 
font un autre cri quand ils se fâchent, quand ils se plai- 
gnent ou qu'ils sont malades, que quand ils se réjouis- 
sent et se portent bien, et la voix est plus aiguë, en la 
tristesse et en la colère, que hors de ces passions; caria 
bile fait la voix aiguë, la mélancolie et le phlegme la fait 
grave, et l'humeur sanguine la rend tempérée... Mais 
la voix des animaux est nécessaire, et celle des hommes 
est libre ; c'est-à-dire que l'homme parle librement, et 
que les animaux crient, chantent, et se servent de leurs 

sur le trajet de l'élincelle ; le roulement qui suit la déloiintion s'explique 
|)eul-êlrc par les réflexions répétées du son qui arrive des dvÇÇ^\:Q,\v^.% 
points, inéga)ement éloign's, du trajet de ia foudre. 



6 L'ACOUSTIQUE. 

voix nécessairement... Plusieurs disent qu'ils ne crient 
pas nécessairement, d'autant qu'il n'y a, ce semble, 
rien de plus libre que le chant des oiseaux, comme du 
rossignol, du chardonneret, et des autres, etnéanmoins 
il faut avouer qu'ils ne chantent que par nécessité, soit 
que la volupté ou latrissesse les poussent à chanter, ou 
qu'ils soient excités par quelque instinct naturel, qui ne 
leur laisse nulle liberté de se taire, ou de cesser quand 
ils ont commencé à chanter. Et quant ils oyent un 
luth ou quelque autre son harmonieux, et qu'ils chan- 
tent à Tenvi les uns des autres, les sons qu'ils imitent 
ou qui les excitent à chanter, frappent tellement leur 
imagination qu'ils ne peuvent pas se taire, car leur 
appétit sensilif étant échauffé par l'impression de l'ima- 
gination, commande nécessairement à la faculté mo- 
trice de mouvoir toutes les parties qui sont nécessaires à 
la voix, » 

Cette théorie de la voix nécessaire ne laisse pas d'être 
passablement subtile, car on ne peut nier que beaucoup 
d'animaux ne parviennent à tenir entre eux de véritables 
conversations. 

Il faut citer ici Tintéressant livre de G.-E. Wetzel, in- 
titulé : Nouvelle découverte sur le langage des bêles ^ 
basée sur la raison et V expérience (Vienne, 1800). Le 
frontispice représente un groupe d'animaux supérieurs 
avec cette légende : Us ne mentent 'point ; la vérité est 
leur langue. L'auteur s'efforce de démontrer que les 
animaux se font comprendre les uns des autres par des 
combinaisons de sons qui constituent la plus simple 
des langues, une langue pleine de répétitions... qu'ils 
cherchent à se faire comprendre de l'homme et qu'ils 
en comprennent, à leur tour, le langage.., qu'enfin il 
?râ}t possible d'étudier les idiomes des différents 



LE SON DAKS LA NATURE. 7 

animaux ci d^cn déterminer les formes et les varia- 
tions. 

On trouve effectivement dans le livre de Wetzel les 
rudiments d'un dictionnaire de la langue des bétcs; cela 
remplit une vingtaine de pages. L'auteur a même essayé 
comme application de ses principes, de traduire en alle- 
mand plusieurs dialogues de chiens, de chats, de poules 
ci d'autres oiseaux. Il rapporte une conversation, com- 
posée de petits cris abrupts, qu'il prétend avoir surprise 
entre plusieurs renards captifs, et qui avait pour but 
de s'entendre sur les moyens propres à faciliter la fuite ; 
il faut croire que le sens de cette conversation ne fut 
pas très-clair tout d'abord pour notre linguiste, car les 
trois renards parvinrent à s'échapper. 

Il n'est pas douteux qu'à force d'observer les animaux 
on n'arrive à comprendre jusqu'à un certain point leur 
langue mystérieuse, et même à la parler. Voici, à ce 
propos, une histoire très-plaisante que j'emprunte à 
M. Jules Richard. 

« En allant visiter dans un hôpital militaire un ami 
malade, dit M. Richard, j'avais fait connaissance, il y a 
douze ans, d'un vieil officier d'administration nommé 
L... : c'était un méridional, un peu hâbleur, mais 
brave homme au fond, qui jurait comme un païen, et 
qui chérissait les animaux. Il avait apprivoisé tous les 
chats de l'hôpital, et un miaulement de lui à l'heure 
des distributions les faisait accourir des points les plus 
écartés de l'établissement autour de la soupière du vieil 
officier. 

c< J'avais toujours supposé que les chats, trompés par 
l'imitation parfaite de leur miaulement, ou habitués 
comme des soldats à l'heure de la soupe, arrivaient ma- 
chinalement se ranger auprès de leur au\\. 



8 L'ACOUSTIQUE. 

— Ils me comprennent, affirmait le père L...; ils me 
comprennent admirablement. Je sais parler chat, je 
sais parler chien ; mais je parle singe mieux que les 
singes eux-mêmes. 

Comme je souriais d'un air d'incrédulité : 

— Voulez-vous, me dit M. L..., venir demain avec 
moi au Jardin des Plantes, et je vous ferai assister 
à quelque chose d'extraordinaire ; je ne vous dis que 
cela. 

Je n'eus garde de manquer au rendez-vous, le père 
L... fut exact de son côté. lime conduisit au palais 
des singes ; à peine se fut-il accoudé sur la balustrade 
extérieure, que j'entendis à côté de moi un son gut- 
tural : 

Kirrouu ! kirriqidon ! courouqui ! quiriquioii ! 

Je cherche à reproduire les onomatopées qui sortaient 
de la bouche de mon voisin. 

Kirrouu ! 

Trois singes tombèrent en arrêt devant L... 

Kirriqinou ! 

Quatre autres singes imitèrent leurs camarades. 

Courouqui ! 

Ils étaient douze. 

Quiriquiou ! 

Ils y étaient tous. Le discours de L.... dura dix mi- 
nutes, pendant lesquelles les singes, rangés sur plusieurs 
lignes, assis à terre, les pattes de devant croisées sur 
leurs genoux, riaient, s'agitaient, écoutaient et répon- 
daient. Mon Dieu, oui, ils répondaient, et L... reprenait 
de plus belle ses Kirrouu ! kirriquiou ! courouqui ! kir- 
riquiou ! Nous restâmes là vingt minutes, et je vous 
garantis que les singes ne s'ennuyaient point. Tout à 
"^oup L... Ut mine de s'éloigner, ses auditeurs devinrent 



LE SON DANS LA NATURE. 

inquiets; puis, comme L... quittait la balustrade, ils 
poussèrent des cris de détresse. Nous partîmes; mais 
de loin nous apercevions les singes qui, grimpés dans 
les frises du palais, faisaient toujours des signes d'adieu 
à L... Il me sembla même que quelques-uns voulaient 
lui dire : 

Si tu ne reviens pas, au moins écris-nous ! 

Il paraît que les chiens peuvent apprendre à pronon- 
cer quel(]ues mots. Je trouve, en effet, dans VHistoire 
de r Académie royale des sciences (année 1715, p. 5), 
l'article suivant que je reproduis textuellement. « Sans 
un garant tel que M. Leibnitz, témoin oculaire, nous 
n'aurions pas la hardiesse de rapporter qu'auprès de 
Zcilz,dans la Misnie, il y a un chien qui parle. C'est le 
chien d'un paysan, d'une figure des plus communes, et 
de grandeur médiocre. Un jeune enfant lui entendit pous- 
ser quelques sons qu'il crut ressembler à des mots alle- 
mands, et sur cela se mit en tête de lui apprendre à 
parler. Le maître, qui n'avait rien de mieux à faire, 
n'y épargna pas le temps ni ses peines, et heureusement 
le disciple avait des dispositions qu'il eût été difficile de 
retrouver dans un autre. Enfin au bout de quelques an- 
nées le chien sut prononcer environ une trentaine de 
mots; de ce nombre sont thé, café, chocolat, assemblée, 
mots français, qui ont passé dans l'allemand tels qu'ils 
sont. 11 est à remarquer que le chien avait bien trois 
ans quand il fut mis à l'école. Il ne parle que par écho, 
c'est-à-dire après que son maître a prononcé un mot; il 
semble qu'il ne répète que par force, et malgré lui , 
quoiqu'on ne le maltraite point. Encore une fois, 
M. Leibnitz l'a vu et entendu. » Par contre, il paraît 
que les chiens des Esquimaux sont muets. 

On dit quelquefois d'une cacophonie *. m\vù(\ue Ae 



10 L'ACOUSTIQUE. 

chiens et de chais. 11 fut un temps où cela pouvait se 
dire sans métaphore ! Il y a eu des concerts de chats 
(je ne parle pas de ceux qui ont lieu sur les gouttières); 
des concerts de pourceaux, d'ours, de singes, de din- 
dons, de petits oiseaux qui ne chantaient pas de gaieté 
de cœur. 

Yoici, d'après les chroniques, celui qu'on donna à 
Bruxelles en 1549, le jour de l'octave derAscension,en 
l'honneur d'une image miraculeuse de la Vierge. Un 
ours touchait Torgue. Cet orgue se composait d'une 
vingtaine de chats renfermés séparément dans des 
caisses étroites au-dessus desquelles passaient les queues 
de ces animaux, liées à des cordes qui étaient attachées 
aux registres de l'orgue et qui correspondaient aux 
touches. Chaque fois que l'ours tapait sur le clavier, 
il tirait les queues des pauvres chats et les forçait de 
miauler sur tous les tons. 

Les historiens de la musique parlent aussi d'orgues 
de pourceaux réunis à des chats. Conrad von derRosen, 
le fou de l'empereur Sigismond, réussit, dit-on, à guérir 
son maître d'une noire mélancolie en jouant d'un orgue 
de chats rangés par gammes, dont il piquait les queues 
en frappant sur les touches. Vers 1803, on avait un 
orchestre de chats dans l'ancien théâtre de la Cité, alors 
transformé en lieu d'amusement. 

A Anvers, le jourdelaSaint-Dommergue, on attachait 
par la patte un certain nombre d'oiseaux aux bran- 
ches d'un arbre fraîchement coupé. Cet arbre était 
ensuite placé derrière la balustrade de la chapelle du 
saint qu'on voulait honorer. Tout le temps de la célé- 
bration de l'office divin, les enfants sautaient après cet 
arbre et tâchaient ^'attraper les oiseaux, ce qui don- 
ijâit lieu à un vacarme épouvauiablc et fort çeu édifiant. 



LE SON DANS LA NATURE. 11 

Le P. Kircher consacre aux rois des animaux un des 
chapitres les plus cOrieus de sa Mustirgie. En tète, il 
place l'aï ou paresseux ^en latin Pigritia et Animal 
Haul) . Il en donne une description accompagnée d'une 
ligure qu'il dit tenir d'un provincial de son ordre, re- 
venu du Brésil; nous la reproduisons a titre de curio- 




sité. D'après cette relation, le paresseux ne fait entendre 
sa voix que pendant la nuit ; son cri est Ha ha ha ha 
fia .'...; il se compose de six notes qui forment uncgamme 
ascendante et descendante : 

ut ré mi fa sol la sol fa mi réut. 

Ces notes sont émises à intervalles réguliers, chacune 
élant séparée de la suivante par une courte pause. 
Quand les Espagnols s'établirent dans le pays, ces cris 
nocturnes leur taisaient croire qu'Us entetiààwoX. \<» 



12 L'ACOUSTIQUE. 

hommes qui vocalisaient dans les forêts. Kircher ne 
tarit pas d'admiration pour la voix du paresseux. « Si 
la musique avait été inventée en Amérique, dit-il, je 
n'hésiterais pas à déclarer qu'elle dérive du chant miri- 
fique de cet animal. » 

Mais le P. Kircher nous réserve encore d'autres sur- 
prises. 

Dans un appendice intitulé de Phonognomia, il s'ef- 
force de démontrer que l'on peut jusqu'à un certain 
point conclure la nature d'un corps des sons qu'il rend, 
et le caractère ou le tempérament d'un homme ou d'un 
animal de sa voix. Un morceau de plomb rend un son 
sourd et grave : c'est un indice d'humidité intrinsèque, 
car le plomb contient beaucoup d'humidité mercurielle; 
un son clair et aigu caractérise les corps poreux, rem- 
plis d'air, tels que l'étain. Quant à la voix des hommes, 
voici de quelle singulière façon l'interprète l'auteur. 
Ceux qui parlent d'une voix forte et grave se rangent 
avec les ânes, d'après le témoignage d'Aristote.En effet, 
l'âne possède une voix assez forte et grave, et il est 
indiscret, pétulant, insolent ; donc ceux qui ont la même 
voix sont indiscrets, pétulants, insolents. Le P. Kircher 
ne trouve aucune difficulté à expliquer la raison de ce 
phénomène, et il achève de caractériser les voix de 
basse en ajoutant que les propriétaires de ces voix sont 
avares, peureux, d'une âme abjecte, d'une insolence 
intolérable dans la prospérité et plus timides que des 
lièvres dans le malheur. Tel, dit-il, était Caligula. Ceux 
dont la voix d'abord grave, devient aiguë à la fin de 
l'émission, sont moroses, colères, tristes, comme les 
bœufs. Une voix aiguë et sans force indique un caractère 
efféminé. Une voix grave, chez ceux qui parlent avec pré- 
cipitation, annonce de la force, de Vawdace. Une voix 



LE S05 DJI5$ LA ^ATCBE. 

aiguë et stridente est le propre dn bouc; die 
un teinpérameot pétulant et libidînem et annoore aoe 
odeur forte. Néanmoins, ces maoraises dispasîtîoos na- 
turelles peuvent être corrigées par Tédiicatioa et par la 

volonté. 

Les oiseaux sont de tous les animanx les mieux doué« 
sous le rapport de la voix. Void d*abord le perroquet, 
auquel rien ne manque pour imiter la parole humaine. 
Mais cette imitation est toute machinale, et la merveil- 
leuse faculté que nous admirons dans le perroquet ne 
lui donne aucune prééminence, ne suppose en lui au- 
cune supériorité sur les autres animaux: en répétant les 
mots qu'il entend prononcer, il prouve seulement sa 
parfaite stupidité. 

Les sansonnets, lesmerles, les geais, les corbeaux, les 
choucas, qui tous ont la langue épaisse et arrondie comme 
le perroquet, arrivent également à imiter la parole d*une 
manière plus ou moins parfaite. Pourquoi ces oiseaux 
restent-ils toujours privés de cette expression de l'intel- 
ligence qui fait le langage humain ? Buffon en trouve la 
raison dans leur prompt accroissement pendant le pre- 
mier âge, et dans la courte durée de leur société avec 
leurs parents, dont les soins se bornent à l'éducation 
corporelle et ne se répètent ni ne se continuent assez de 
temps pour produire ces impressions durables et réci- 
proques qui sont la source de Tintelligcnce. 

Les oiseaux qui ont la langue fourchue sifflent plus 
aisément qu'ils ne jasent. Quand cette disposition natu- 
relle se trouve réunie avec la mémoire musicale, ils 
apprennent à répéter des airs : le serin, la linotte, le 
larin, le bouvreuil, se distinguent par leur docilité. Le 
perroquet, au contraire, n'apprend guère à chanter, 
mai^ il imite les bruits et les cris des amm«Ma!L^N\^w 



U L'ACOUSTIOLiE. 

tend, il miaule, il aboie aussi facilement qu'il contrel 
la parole. Le merle moqueur est doué du même taie 
Le vrai chantre de nos forêts, c'est le rossignol. I 
la variété prodigieuse de ses intonations et par 1' 
pression passionnée que peut prendre sa voix, il effi 




Fig. i. ItotsigODl. 



tous ses camarades. Ordinairement le ctiant du ros 
gnol commence par un prélude timide, indécis ; peu 
peu il s'anime, s'échauiïe, et bientôt on l'entend lanc 
vers le ciel les fusées de ses notes vives et brillantes. ' 
sont des coups de gosier éclatants, qui alternent ai 
un murmure à peine perceptible ; des trilles, des ro 
lades précipitées et nettement articulées, des cadenc 
plaintives, des sons filés, des somyivïs iimaureux... d 



LE SON DANS LA NATUUE. 15 

temps à autre un court silence plein d'eifet, puis le ra- 
mage reprend et les bois retentissent de nouveau d'ac- 
cents doux et pénétrants qui remplissent l'âme de lan- 
gueur. La voix du rossignol porte aussi loin que la 
voix humaine, on l'entend très-bien à 2 kilomètres 
lorsque l'air est calme; on l'entend d'autant mieux que 
le rossignol ne chante que la nuit, alors que tout est 
silence alentour. En général, ce n'est que le mâle qui 
chante ; cependant, on a vu des femelles qui apprenaient 
également à chanter. Les rossignols captifs chantent 
pendant neuf ou dix mois de l'année ; en liberté, ils ne 
commencent qu'au mois d'avril et finissent au mois de 
juin ; passé ce mois, il ne leur reste qu'un cri rauque, 
une sorte de croassement. Pour les faire chanter en 
cage, il faut d'ailleurs les bien traiter, leur faire illu- 
sion sur leur captivité en les environnant de feuillages ; 
dans ces conditions, ils se perfectionnent même et 
chantent plus agréablement que les rossignols sau- 
vages. Le rossignol captif embellit son chant naturel des 
passages qui lui plaisent dans le chant des autres oi- 
seaux qu'on lui fait entendre. Le son des instruments, 
celui d'une voix mélodieuse l'excite, et stimule son ta- 
lent ; il cherche à se mettre à l'unisson et à éclipser ses 
rivaux, à couvrir tous les bruits qui se font à côté de 
lui ; on a vu des rossignols tomber morts à force de lut- 
ter contre un chanteur rival. 

Le P. Kircher, dans sa Miisurgie^ analyse longue- 
ment le chant du rossignol. « Cet oiseau, dit -il, est 
ambitieux et avide d'éloges ; il aime autant à faire pa- 
rade de son art que le paon de sa queue. Lorsqu'il 
est seul, il chante simplement, mais dès qu'il est 
assuré d'avoir des auditeurs , il étale avec bonheur 
les trésors de sa voix, et invente les moàv\V^\]vç>wà X^'s» 



16 L'ACOUSTIQUE. . 

plus variées et les plus mirifiques. » Le P. Kircher 
a essayé d'écrire ces modulations en mesurant la 
durée des notes par un métronome d'un nouveau 
genre : une corde d'un pied et demi, tendue de ma- 
nière que chaque oscillation complète correspondait 
à un battement de pouls. Pour apprécier la hauteur 
des sons, il les compare aux vibrations d'une corde 
longue d'un pas, épaisse comme un fétu de paille et 
tendue par un poids d'une livre; on conviendra que 
cette définition laisse à désirer. 

Après Kircher, Barrington a également tenté de no- 
ter le chant du rossignol, mais, de son propre aveu, 
sans succès. Les airs notés, étant exécutés par le plus 
habile joueur de flûte, ne rappelèrent pas du tout le 
chant naturel. Barrington dit que la difficulté doit 
venir de ce qu'il est impossible d'apprécier au juste la 
valeur de chaque note. Au reste, si l'on n'est pas en- 
core parvenu à écrire ce chant singulier, en revanche, 
on réussit parfois à l'imiter en sifflant. Buffon parle 
d'une homme qui, par son chant, savait attirer les rossi- 
gnol au point qu'ils venaient se percher sur lui et se 
laissaient prendre à la main. Quant à l'étendue de la 
voix du rossignol , elle ne paraît pas dépasser une 
octave; ce n'est que très-rarement qu'on entend quel- 
ques sons aigus qui vont à la double octave et passent 
comme des éclairs ; dans ce cas, l'oiseau fait octavier 
sa voix par un elfort de gosier exceptionnel et pas- 



sager. 



Il n'est pas bien prouvé que le rossignol puisse ap- 
prendre à parler, quoique Pline raconte que les fils de 
l'empereur Claude en avaient qui parlaient grec et 
latin. Le P. Kircher penche à croire que cet oiseau 
pourrait apprendre à imiter la parole humaine ; mais, 



LE SON DANS LA NATURE. 



17 




Fig. 5. Poule. 




Fig. 4. Coq. 





Fig. 3. Coucou. 






IS L'ACOUSTIQUE, 

dît-il, ce que Aldrovande rapporte de trois rossignols 
qui, pendant la nuit, se contèrent tout ce qui s'était 
passé dans la journée, dans un hôtel de Ratisbonne, a 
paru fabuleux à beaucoup de personnes, ou du moins 
inexplicable sans quelque insigne imposture ou sans 
l'intervention du démon. 

Il a noté également le chant du coq, celui de la 
poule qui va pondre ou qui appelle ses petits, celui du 
coucou et celui de la caille. Nous reproduisons les cu- 
rieuses figures où il représente les résultats de ces ob- 
servations; nous omettons le perroquet, dont le cri 
naturel est exprimé par le mot grec ■/ji'.ft {ekalré) qui 
signifie : bonjour. 




On peut dire que le chant est chez la plupart des 
oiseaux un appel d'amour. Presque seule, Valouetle se 
fait entendre depuis le printemps jusqu'à l'hiver ; c'est 
que seule aussi elle conserve ses ardeurs pendant toute 
la durée de la saison d'été. L'alouette ctiante en volant ; 
plus elle s'élève, et plus elle force la voix ; on l'entend 
encore hrsqu'cUc a disparu dans Voimx du ciel. Rien 



LE SON DA5S LA f^kJVtlZ. i9 

n*esl gai comme les not(^ perléei^ de r;i> Wiarit, (lu ft/iriUM 
a essayé de l'imiter dans un joli quatrain hum t'Àmim '. 

La gentille alouette* avec uh\ iïrtfUnff 
Tirelire, relire et tirelirant, tire 
Vers la voûte du ciel : |iui» tum vol tfti iH Uéfu 
Vire et semble nous dire : kâum, itâU^, it4té*ti \ 

La calandre est une esfièc^; Aê^t Um \Aun \^fntuU* i\utf 
l'alouette ordinaire ; elle e»t mmunuw ett iiM\if #fi tiHun 
le midi de la France. Dou^ d'tine voix Uptie, id M^rM^U% 
elle sait varier son chant en vjmirMimui \p, rmu^UPi du 
chardonneret, du serin, de la VtîuMiu id tnhfta le ft'mt* 
lement des poussins, le m de la eliatte, eU^ Iath \HdUn 
oiseaux dont le gai ramage rerriplit fH^fuisifti IVfÛf le« 
bois, les vergers, le» jardin» et le» lf#M#|Mei»^ iiftfmr^ 
tiennent, pour la plupart, au genre AenfauveitfM. i/utu^ 
des familles les plus remarqoakle» e»t ^-^rlle de^i /;//i/i/' 
/o^«, qui imitent à sV méprendre, le eliarit île t/;ii» le» 
autres oiseaux. On pourrait le» appeler moffueurn df 
France^ car il» partagent le talent du mofpteur A'Am^' 
riquc. 

L'oiseau sonneur ICampantroi a une voix tibrairt^ 
comme le son d'une cloche; on l'entend iii 14 kilO' 
mètres de distance, dan» le d^rt qu'il hahite^ 
Chaque matin, il entonne »e» chant», et encore k 
midi, quand l'ardeur do »oleil a fermé le bec de »e» 
collègues emplomé», il ne ce»»e pa» d'animer la soli- 
tude. C'est d'abord on en »trident, »fjivi d'one pao»#r 
qoi dore one mtnote ; poi» un second cri suivi d'une 
autre pause, et encore un cri qui expire dans un si- 
lence de six â hoit minutes que vient rompre une nou- 
velle série de cris saccadés. 

Chez les anciens, le cjgae figumi aua&x v^xvkv ^ 



St L'ACOUSTIQUE. 

oiseaux doués de la faculté de chanter; mais il ne 
chantait qu'au moment de sa mort. Cette fable a été 
longtemps fort accréditée ; encore aujourd'hui nous 
comparons au chant du cygne la dernière manifestation 
d'un génie qui s'éteint. Mais la voix du cygne n'est 
qu'une sorte de strideur que rend bien le mot drenser. 
Il fiistvrai que, d'après Buffon, on peut distinguer dans 
les cris du cygne sauvage une espèce de chant modulé, 
composé de notes bruyantes comme celles du clairon. 
Les anciens avaient ]ieut-étre sur 1 harmonie des 
idées très-différentes des nôtres. Ils adoraient le chant 
de la cigale, Anacréon lui a consacré une ode. a Heu- 
reuse cigale, dit-il, qui sur les plus hautes branches 
des arbres, abreuvée d'un peu de rosée, chantes 
comme une reine ! Tu es chérie des Muses-et de Phéfaus 
môme, qui t'a donné ton chant harmonieux. » Homère 
compare la suave éloquence des vieil- 
lards troycns au concert des cicades. 
Une légende rapporte qu'un jour 
une cigale décida l'issue d'une lutte 
entre deux Joucurt) de cithare, Ëu- 
nome et Ariston. Pendant qu'Eu- 
nomc jouait, une de ses cordes se 
brisa mais les dieux lui invoycrent 
une cigale qui s étant posée sur son 
u)<>trument lui remplaça la corde 
c-issee SI bien qu il remporta la 
Mctoiie 

Aujourd hui nous ne pouvons re- 
fy H (.gale eonmitre lu chant dans les notes 

stridentes et monotones de cet in- 
secte. Son appareil musical consiste en deux volets écail- 
/eux (dg. 8) placés sur le vcnlre cl içi\ t\'fcx\stent (\ue 




LE SOiN DANS LA NATrUK. ))i 

chei le mâle. Ces volots recouvrent doux ciiviti^H oi'i mu 
trouTent deux timbales ou inernbranoH pliHHi'^OH qui ri^nun- 
neni comme du parchemin sec, et dont Ioh contraetionn 
el relâchements répétés produiHent un hruit de Mtridu- 
lation. 

D'autres parties de cet appareil cornpti(|U(% pa* 
raissent être destinées à renforcer h Hon. Lu eifiah 
plAéienne est très-commune en Provence et remonte 
quelquefois assez loin dans le Nord ; on lu rencontre h 
Fontainebleau. « Quand elle chante, dit M. Maurice 
Girard, elle remue rapidement son abdomen, de ma- 
nière à l'éloigner et le rapprocher alternalivement deN 
opercules des cavités sonores. Sa stridulation ml forte 
et aiguë, formée d'une seule note fréquennnent réité- 
rée, finissant par s'affaiblir peu à peu et »ii terminant 
par une sorte de sifQenu^att comme gt, analogue au 
bruit de l'air sortant par uofi pi^tite .ouverture d'unie 
vessie que Ton comprime. Si on Iftiaivit, elle jette dm 
cris très-forts, qui diffèrent assez notablement de mou 
chant en liberté. x> En sifflant devant une cigale de ma- 
nière à imiter sa stridulation, on la cliarme et Tattire ; 
il est alors facile de s'en emparer. 

Dans les pays du Nord, on prend souvent pour la ci- 
gale la grande sauterelle verte dont le cri rappelle celui 
de la cigale ; les figures qui ornent les anciennes édi- 
tions de la Fontaine représentent au^si une sauterelle 
à propos de la fiable intitulée : la CUjale et la Fourmi, 
Ces deux insectes appartiennent cependant à deux or- 
dres entièrement distincts : la cigale est un hémiptère, 
la sauterelle un orthoptère. 

Chez tous les orthoptères sauteurs : grillons, saute- 
relles et criquets, le mâle appelle la femelle par une 
stridulation du^ au frottement des él^lrea-, «\i\*\^ vcà 



Sï L'ACOUSTIQUE. 

canisme qui produit ce bruit monotone diffère un peu 

d'une espèce à l'autre '. 

Le grillon ou en cri frotte l'une contre l'autre ses 
élytres entières, sillonnées de nervures épaisses, dures 
et saillantes. Les voyageurs racontent que, dans cer- 
taines régions de TAfrique, on élève les grillons dans de 
petites cages à claire-voie. Leur chant amoureux clianno 
les oreilles des indigènes; il dispose au sommeil. 

Les courtiliéres ou laupes-griUons émettent des no- 
tes lentes, monotones, moins pénétrantes que celles du 




Fie. 9. Crillon- 

grillon cliampctre, et qui rappellent vaguement le cri 
de la chouette ou de l'engoulevent. 

Les sauterelles produisent une stridulation aiguë par 
le frottement de deu.ï membranes transparentes et 
garnies de nervures, appelées miroirs, qui existent à la 
base des élytres et que l'on pourrait comparer à des 
cymbales. Le zig-M<j monotone de la sauterelle verte 

' Voy. le Mémoire du colonel Courenii dons les Annales de la Société 



LE SON DANS LA NATUUE: 23 

s'entend le soir et toute la nuit, dans les prairies un 
peu humides ; le deetique chante de jour, dans les blés 
mûrs. Enfin, les criquets ou acridimis (ce sont eus qui 
ravagent nos colonies) produisent des sons moins mu- 
sicaux, mais plus variés que ceux des espèces précé- 
dentes. Ils ont les cuisses et les élytres garnies de ner- 
vures saillantes très-dures. Les cuisses frottent sur les 




Fig. 10. Criqunl 



élytres comme un archet sur les cordes d'un violon. 
Ordinairement les deux pattes frottent à la fois, mais 
l'on voit aussi l'insecte se servir tour à tour de la patte 
gauche et delà droite. Une sorte de tamhour, recouvert 
d'une peau très-mince, qui se trouve de chaque côté 
du corps à la base de l'abdomen, semble destinée à 
renforcer le son. Le chant des criquets ressemble à un 
bruit de crécelle, mais avec des timbres très-divers, 
selon les espèces. On distingue plusieurs notes, et le 
chant se modifie suivant qu'il appelle une femelle ou 
qu'il provoque un rival. Yersin a essayé dt uftl^v Vti 
chant de ces insectes. Be même, C\iar\es Îiû\Xct,V»*- 



Î4 L'ACOUSTIQUE. 

teur de la Monarchie féminine^ a tenté de noter les 
bruissements d^ailes qu'on entend dans Tintérieur d'une 
ruche d'abeilles qui \a jeter. « Il a déterminé, dit Réau- 
mur, toutes les modulations du chant de l'abeille sup- 
pliante, qui aspire à conduire un essaim, les diiTérentes 
clefs sur lesquelles elles sont composées, et de même 
celles des chants de la reine mère. » Les bourdons pro- 
duisent, avec leurs ailes, un bruit que leur nom imite 
par onomatopée ^ Les vrillettes^ en oscillapt sur leurs 
six pattes, frappent le bois des vieux, meubles avec leurs 
mandibules fermées, et produisent ainsi les coups secs 
que l'on entend pendant la nuit. 

Les reptiles sont loin d'être muets. La voix des cro- 
codiles et des caïmans peut se comparer au miaulement 
d'un chat dans le jeune âge, et à des sanglots entre- 
coupés ou à des mugissements dans l'âge adulte. Ils 
trompent parfois les passants par des cris qui semblent 
venir d'un enfant. Le lézard chanteur de Birmanie, 
à ce que nous apprend M. Thomas Ânquetil, annonce 
les tremblements de terre par des cris aigus et souvent 
répétés. 

Les serpents n'ont, en fait de voix, qu'un sil'flement 
aigu, sauf le serpent à sonnettes, qui porte au bout de 
la queue un grelot formé par des cornets écailleux, 
emboîtés les uns dans les autres, et dont le nombre 
augmente avec Tàge. 

Le « peuple coassant )> des grenouilles et rainettes 

* On a remarqué que pendant le vol des insectes ce bourdonnement 
change de liauleur. Ainsi, d'après M. Oppel, une moucîie qui se pose 
t'ait entendre une note voisine du si, mais lorsqu'elle s'envole le sm 
monte au mi^. M. Tisko a constaté que le son s'abaissait au moment où 
rinsecte passait à côté de son oreille^ et il attribue ce phénomène à l'in- 
fluence du mouvement de la source sonore sur la hauteur du son. (Voy. 
pJus loin, page i'84.) 



LE SOUk DA5S LA NATURE. t5 

est connu par sa loquacité, qui un jour loi devint fu- 
neste, suivant la Fontaine : 

Les grenouilles se lassant 
De rétat démocratiqDe, 
Par leurs clameurs firent tant 
Que Jupin les soumit au pouToir monarchique. 

Les poissons, qui passent pour être muets, ne le sont 
pas tous. Les lyres, les malarmats, les maigres d^Eu- 
rope, les ombrines communes, les hippocampes à mu- 
seau court émettent des sons d'une nature particulière. 
Cette faculté, qui est commune aux mâles et aux fe- 
melles, atteint sa plus grande perfection à Tépoque du 
frai. Les maigres surtout, lorsqu'ils se rassemblent en 
troupes, produisent unbruit assez fort qui semble sor- 
tir de Teau et qui leur a mérité le nom d'orgues vi- 
vantes. M. Dufossé, qui s'est spécialement occupé de 
ce sujet, a trouvé que les bruits en question sont pro- 
duits par le frémissement de certains muscles; chez 
quelques espèces ils sont renforcés par la vessie pneu- 
matique. 

Ainsi, mille voix se réunissent pour faire jour et nuit 
le grand concert de la nature. L'air est toujours rempli 
de son. Même quand nous nous croyons dans un si- 
lence complet, nous sommes encore entourés de bruits; 
on s'en aperçoit bien quand on veut écouter quelque 
son très-faible que ces bruits empêchent d'arriver à 
nous distinctement. Pour savoir ce que c'est que le si- 
lence, il faut monter sur une haute montagne, sur une 
cime bien isolée. 

Chaque région de la terre a, pour ainsi dire, sa 
physionomie acoustique. Près des grandes villes, on 
entend mille bruits confus qui trahisscnl V^cX\n\VàV>v 



20 l.'ACOI)SriQI)B. 

inaine, comme II bouidonnenicnt des abeilles dans un: 
niche nous >e\ele qu elle est habitée. A Paris, ce sourd 
munnure persiste toute la nuit. Le jour, il y a des rues 
ou I on ne s'entend point parler, quand il y passe beau- 




coup de voitures Le roulement des voitures est encore 
renforce par le sol trop élastique de la grande ville, 
qui recouvre Its catacombes à la manière d'une table de 
Molon 

Dans nos campagnes d Europe, ce sont les petits oi- 
seaux qui donnent le ton général à l'orclicstre de la 
font En 4merique, ce sont d'awVtds "OiK plus puis- 



LE SON DANS LA NATURE. 27 

santés. Écoutons Alexandre de Ilumboldt lorsqu'il nous 
parle de la vie, ou plutôt des voix nocturnes des ani- 
maux dans les forêts des tropiques. Il passait la nuit 
sous la voûte du ciel, après avoir choisi sur les bords 
de TApure une plaine sablonneuse qui allait rejoindre 
à peu de distance la lisière d'une épaisse forêt vierge. 
La nuit était fraîche et éclairée par la lune. Un profond 
silence, troublé seulement de temps à autre par le ron- 
flement des dauphins d'eau douce, régnait dans la 
plaine et sur la rivière. « 11 était plus de onze heures, 
dit Humboldt, quand commença dans la forêt voisine un 
vacarme tel qu'il fallut reconcer absolument à dormir 
le reste de la nuit. Tout le taillis retentissait de cris 
sauvages. Parmi les voix nombreuses qui se mêlaient 
dans ce concert, les Indiens ne pouvaient reconnaître 
que celles qui, après une courte pause, recommençaient 
seules à se faire entendre. C'étaient les hurlements gut- 
turaux et monotones des alouates, la voix plaintive et 
flâtée dos petits sapajous, le ronflement du singe dor- 
meur, les cris entrecoupés du grand tigre d'Amérique, 
du cagouar ou lion sans crinière, du pécari, du pa- 
resseux et d'un essaim de perroquets, ceux des parra- 
quas et d'autres gallinacés. Lorsque les tigres s'avan- 
çaient vers la limite de la forêt, notre chien, qui aupa- 
ravant aboyait sans cesse, cherchait en hurlant un re- 
fuge sous nos hamacs. Quelquefois le rugissement du 
tigre descendait du haut des arbres; toujours alors il 
était accompa.^né des cris aigus et plaintifs des singes, 
qui s'efforçaient d'échapper à ce danger nouveau pour 
eux. » 

Si l'on demande aux Indiens la cause de ce tumulte 
continuel, ils répondent en riant que les» aimvw^w^ix- 
ment à voir la lune éclairer la forêt, c\vVV\s> louVlèV^V 



28 L'ACOUSTIQUE. 

la pleine lune. Mais ce n*est pas la lune qui les cicite 
le plus ; c*cst pendant les violentes averses que les cris 
sont les plus bruyants, ou lorsqu'au milieu des gron- 
dements du tonnerre un éclair illumine l'intérieur de 
la forêt. Ces sortes de scènes offrent un contraste sin- 
gulier avec le calme qui règne sous les tropiques vers 
l'heure de midi, par les grandes chaleurs, alors que le 
thermomètre marque plus de 40** à l'ombre. Les 
grands animaux s'enfoncent à cette heure dans les pro- 
fondeurs de la foret, les oiseaux se cachent sous le 
feuillage des arbres ou dans les crevasses des rochers, 
pour éviter les rayons ardents qui tombent du zénith ; 
en revanche, les pierres unies et les blocs arrondis sont 
couverts d'iguanes, de geckos, de salamandres, qui, 
immobiles, la tète levée et la bouche béante, semblent 
aspirer avec délices l'air embrasé. « Mais, dit Hum- 
boldt, si, durant ce calme apparent de la nature, on 
prête l'oreille à des sons presque imperceptibles, on 
saisit à la surface du sol et dans les couches inférieu- 
res de l'air un bruissement confus produit par le mur- 
mure et le bourdonnement des insectes. Tout annonce 
un monde de forces organiques en mouvement. Dans 
chaque broussaille, dans l'écorce fendue, des arbres, 
dans la terre que fouillent les hyménoptères, la vie 
s'agite et se fait entendre ; c'est comme une des mille 
voix que la nature adresse à l'âme pieuse et sensible de 
l'homme. » 



Il 



EFFETS 0« ftOM ««A kC« ÉTACt ITHTâlift 






Comme le peintre «Vttâ|Mire de U \mï%m^. (MMir eti 
faire un messager de Is petâ«^« le iiiai(i<ieti fvoiiitiisiidi^ 
aux sons et les charge de truduire d«w «etitiiiieiili', Iji 
musique est donc une laujçue o^iitiie ui«e 4Im4i'«>; 
langue d'autant plu« douoe et t>ia« clA^ruitftiii^ i|MVIle 
est moins précise et aioia« «tuUile ; i*'e«t le i^e de Is 
parole. 

On définit géoéralemeot la tiiu«i<(ue TaH d^ <y>tiil/îtM^ 

les sons d^une manière agréaUe à rgreille. l^e^arKteii» 

philosophes donnaient à œ loat un sen« li«'4Ui<»up plu« 

étendu. Pour eut, ia musi^fiie c^upr^'fJtaH la damte^ le 

gesie^ la poésie «t luéme toutes le» ««ieuoHi. Henné» 

déelare que la musique ei«t la ocHutiainiiauoe di^ 1 mi die 

de toutes choses ; Fiftha^oi^ kA l^latoo enseiiçtiaienf que 

Umt l'univen est musique. Be là 4)eite njuMque f>'U*Mte 

— harmonie des monde» — danse de» sphèfe», «\uî % 

troublé tanl de létes. 



30 L'ACOUSTIQUE. 

La musique a été probablement le premier des arts: 
l'homme avait dans l'oiseau un maître à chanter. Les 
instruments à vent — flûte et pipeaux — ont dû venir 
après. Diodore en attribue la première idée à quelque 
pâtre qui avait étudié le sifflement du vent dans les ro- 
seaux. Lucrèce est du même avis : 

Et Zephyri cava per calamorum sibila primum 
Âgresteis docuere cavas inflare cicutas. 

Les instruments à corde et ceux qu'on bat pour en 
tirer un bruit sourd — tambours et timbales — sont 
également fort anciens. L'antiquité attribuait l'invention 
de la musique tantôt à Mercure, tantôt à Apollon; 
Cadmus, qui amena en Grèce la musicienne Hermione, 
Amphion, Orphée et d'autres encore, sont cités comme 
étant les pères de la musique instrumentale. D'après la 
Genèse, les joueurs de flûte et de cithare descendent de 
Jubal, fils de Lamech et d'Ada de la race de Gain. La 
vérité, c'est que l'origine des instruments de musique 
se perd dans la nuit des temps. 

L'influence de la musique sur les mœurs des peuples 
et sa puissance sur les âmes sont reconnues par tous les 
philosophes de l'antiquité. Platon prétend qu'on peut 
assigner les sons qui font naître la bassesse et l'inso- 
lence, et d'autres qui produisent les vertus opposées. 
Pour lui, un changement introduit dans la musique doit 
en entraîner un dans la constitution de l'État. Si cela 
est vrai, M. Wagner révolutionnera la Bavière ! 

Polybe nous dit qu'en Arcadic, pays triste et froid, 

la musique était nécessaire pour adoucir les mœurs des 

habitants ; que nulle part il ne se commettait autant de 

crimes qu'à Cynète, où elle était négligée. D'après 

Athénéej on mettait aulretois eu ngt§> <i\. ^w xausic^e 



EFFETS DU SOPî SUR LES ÊTRES VIVANTS. SI 
Qutes les lois .divines et humaines, les préceptes de 
a morale, les légendes et l'histoire des peuples, et tout 
ala était chanté publiquement par des chœurs, au son 




es instruments. Les Israélites avaient des usages analo- 
ues. La musique prêtait à ces choses abstraiti-s un 
liarme particulier, et les gravait dans l'esprit des 
uditeurs. Est-ce le souvenir de ces antiques usages (\ui 
inspiré toul récemment à un MeyerbecT -jarieLec X\ift« 



38 LMCOUSTEQtlE. 

sau(;renue de mettre en symphonie la coustitution amé- 
ricaine? 

Selon les phîlosoplies du l'école dcPythagore, l'àme 
humaine est en (juclquc sorte formée d'harmonie. Ils 
croyaient possible de rétablir, par le moyen de la mu- 
si<]ue, cette harmonie préexistante et ptimitive de nos 
facultés intellectuelles, troublée trop souvent jp&r le 
contact des choses de ce lias monde. Les anciens auteurs 
sont pleins de récits qui se rapportent au pouvoir mira- 
culeux des sons. 




Les chants d'Orphée domptaient les bètes féroces, 
suspendaient le cours des neuves et faisaient danser les 
u"brcs et les rochers. Quand la mort lui eut ravi Eury- 
ice, il descendit aux cnïcvs-, \es somNàtwb Awinités, 



EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 33 

charmées par la douceur de ses accords, lui'accordèrent 
le retour de sa femme, qu'il aurait ramenée sur la 
terre, s'il avait pu s'empêcher de regarder en arrière 
pendant leur ascension. 

Le divin Amphion bâtit les murs de Thèbes au son de 
sa lyre; les pierres venaient d'elles-mêmes se placer 
les unes sur les autres, dans l'ordre prescrit. 

Agitataque saxa per artem 

Sponte sua in mûri membra coisse ferunt. 

Ici la musique fait naître les remparts d'une ville; 
ailleurs, elle les fera tomber : les murs de Jéricho s'é- 
croulent au son des trompes des prêtres d'Israël*. 

Dans les chants finnois, on voit les sables du rivage 
se transformer en diamants, les meules de foin accou- 
rir d'elles-même dans la grange, les flots de la mer se 
calmer, les arbres se mouvoir en cadence, et les ours 
s'arrêter avec vénération aux accents de la lyre de Waina- 
moinen, qui, saisi enfin lui-même, tombe dans une 
douce extase et verse, au lieu de larmes, un torrent de 
perles. 

Les Vêdas, ou livres saints des Indous, ne sont pas 
les derniers à célébrer le pouvoir de la musique. Là, 
elle fait marcher à la baguette hommes et animaux ; la 
nature inanimée est elle-même contrainte d'obéir aux 
ragas que le dieu Mahédo compose avec sa femme Par- 
butéa. Sous le règne d' Abker, le célèbre chanteur Mia- 
Tousine chanta une fois en plein jour un raga consacré 
à la nuit ; aussitôt le soleil s'éclipsa et les ténèbres se 
répandirent aussi loin que sa voix se faisait entendre. 
Un autre raga brûlait celui qui osait le chanter. Ahkcr, 

< Josué, Ti, SO 



3f L'ACOUSTIQUE. 

pour en faire l'aprcuye, ordonna à un musicien de chan- 
ter cette chanson pendant qu'il était plongé jusqu'au 
menton dans la rivière Djumna .Cela ne servit de rien : 
le malheureux fut la proie des flammes, et Abker sut 
désormais à quors'en tenir. 

Le pouvoir que Ton attribue à la musique d'exciter 
et de calmer les passions a fourni la matière d'un grand 
nombre de légendes. Tout le monde connaît l'histoire 
de David qui joue de la harpe devant le roi Saiil, toutes 
les fois que celui-ci est possédé du mauvais esprit. Fa- 
rinelli a renouvelé cette expérience. Lorsqu'il vint en 
Espagne, en 1736, les accents de sa voix arrachèrent 
le roi Philippe V à une noire mélancolie ; le roi se l'at- 
tacha, lui défendit de chanter en public et le combla de 
ses faveurs. 11 resta dans la même position sous Ferdi- 
nand VI. 

Le musicien Timothée excitait, dit-on, les fureurs 
d'Alexandre le Grand par le mode phrygien et les cal- 
mait par le mode lydien. 

Bocce nous apprend qu'un jour Pythagore trouva un 
jeune homme à qui la jalousie, de fréquentes libations 
et une mélodie phrygienne avaient tellement troublé la 
tête, qu'il se mettait en devoir d'incendier la maison de 
sa maîtresse. Il suffit alors au philosophe de Samos de 
faire jouer à la flûtiste un autre air plus calme pour ra- 
mener le jeune écervelé à des sentiments meilleurs. 

Une autre fois, une terrible sédition qui avait éclaté 
à Lacédémone fut apaisée par Terpandre, qui se mit à 
chanter au son de la cithare. En ce temps-là, cela réus- 
sissait. Je doute qu'aujourd'hui on obtînt des succès 
de ce genre en armant les sergents de ville de guitares 
H de petites flûtes. 
Les prêtres celtes se servaient de la musique pour 



EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 35 

adoucir les mœurs de la nation. Chez les Gaulois, les 
bardes arrêtaient par leurs chants la fureur des com- 
battants. Saint Augustin raconte quelque chose de plus 
extraordinaire : un simple joueur de flûte excita un tel 
enthousiasme chez un peuple naturellement sensible, 
qu'il en fut élu roi. 

Voici une autre légende qui rappelle l'histoire de Ti- 
inothée et d'Alexandre le Grand. 

Éric le Bon, roi de Danemark, entendit un musicien 
86 vanter qu'il pouvait à volonté provoquer chez ses au- 
diteurs la colère, la gaieté ou la tristesse. Éric voulut 
en faire l'expérience ; l'autre se récusa et représenta au 
roi le danger d'une pareille tentative ; mais plus il se 
rétractait et plus le roi insistait. Voyant qu'il fallait 
s'exécuter, le musicien fit emporter toutes les armes, 
puis il demanda que quelques spectateurs fussent placés 
hors de la portée des sons de sa harpe; ils devaient re- 
garder de loin et accourir à un moment donné pour lui 
arracher son instrument et l'en frapper à la tcte. Ensuite 
il s'enferma avec le roi et quelques fidèles serviteurs et 
il commença à jouer de sa harpe. D'abord il joua un 
air mélancolique qui plongea les assistants dans une 
grande tristesse; puis, changeant de ton, il modula des 
accents joyeux dont l'effet fut tel qu'ils faillirent danser 
et sauter. Mais subitement la mélodie devint acre et 
féroce, les auditeurs se sentirent excités outre mesure, 
et le roi entra visiblement dans une grande fureur. 
Aussitôt ses ^ens accoururent de dehors, on arracha la 
harpe des mains du joueur et on l'en frappa pour le cal- 
mer ; mais le roi fut difficile à dompter ; il eut le temps 
d'assommer quelques-uns de ses serviteurs de formi- 
dables coups de poings avant qu'on pût le contenir en 
jetant surlui dos coussins. Une autre \ers\oivà\\. o^^Vi 



35 L'ACOUSTIQUE. 

roi Éric eofonça la porte, s'empara d'une épée et tuî 
quatre personnes ; il s'en repentit si fort qu'il abdiqu< 
et s'en alla à Jérusalem pour expier son crime ; il mouru 
à Chypre. 

Sous Henri III, le musicien Claudin, jouant aux no 
ces du duc de Joyeuse, anima, non le roi, mais un cour 
tisan à tel point que ce|ui-ci s'oublia jusqu'à mettre l 
main aux armes en présence de son souverain ; mai 
Claudin se hâta de le calmer en changeant de mode. 

Le troubadour Pierre de Chateauneuf, qui vivait ai 
treizième siècle, avait le don d'émouvoir profondémen 
ses auditeurs. Voici ce que dit de lui Nostradamus, dan 
les Vies des troubadours provençaux : 

« Ce poëte estant au bois de Vallongue, venant di 
Roquemartine visiter le seigneur du lieu, fut pris pa 
des larrons qui brigandoyent les passants, et, après l'a 
voir démonté et osté son argent et dépouillé jusques 
la chemise, le vouloyent tuer. Le poëte les pria luy fair 
ceste grâce d'ouyr une chanson qu^il diroit avant qu 
mourir, ce qu'il feirent, et il se mit à chanter un chan 
sur sa lyre, qu'il feist promptcment à la louange de ce 
brigands, si qu'ils furent contraints luy rendre son ar 
gent, son cheval et ses accoustrements, si grand plaisi 
prindrent-ils à la douceur de sa poésie et de sa voix. 

Une célèbre légende allemande constate le miracu 
leux pouvoir d'un sorcier qui était en possession d'un 
flûte enchantée. L'an 460, dit la légende, il se présent 
à Hameln, en Saxe, un homme qui offrit de débarras 
ser la ville des rats qui l'infestaient, moyennant un 
forte somme que l'autorité municipale lui accorda. Ce 
homme se mit alors à jouer sur sa flûte un air particu 
lier qui fit sortir les rats par milliers de toutes les mai 
jsons; il les conduisit se noyer dans la rivière, puis rc 



EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 37 

vint pour réclamer la récompense promise. On refusa 
de lui payer ce qui était convenu. L'homme ne dit rien ; 
mais le lendemain il parut armé d'une autre flûte, et 
quand il en joua, tous les enfants de quatre à douze 
ans le suivirent. Il les conduisit dans une caverne ; ja- 
mais on ne les revit. Les bourgeois éplorés regrettèrent 
alors leur mauvaise foi. Depuis cette époque, les Ha- 
melois comptent les années de rémifjration des enfants y 
comme les Turcs les comptent de la fuite du Prophète. 
Une peinture dans l'église de Hameln représente le fu- 
neste événement. 

Sans remonter jusqu'aux temps légendaires, nous 
rencontrons dans l'histoire moderne des exemples célè- 
bres du pouvoir de la musique. Qui n'a entendu parler 
du Ranz des vaches^ cet air qui donnait le mal du pays 
aux Suisses engagés dans les armées étrangères? On se 
vil à la fin obligé de défendre, sous peine de mort, de 
jouer cet air dans leurs troupes, parce qu'il faisait fondre 
en larme s, déserter ou mourir ceux qui l'entendaient. 
«On chercherait en vain, dit J.-J. Rousseau, dans cet air 
les accents énergiques capables de produire de j-i éton- 
nants effets. Ces effets, qui n'ont aucun lieu sur les 
étrangers, ne viennent que de l'habitude, des souvenirs, 
de mille circonstances qui, retracées par cet air à ceux 
qui l'entendentetleurrappelant leur pays, leurs anciens 
plaisirs, leur jeunesse et toutes leurs façons de vivre, 
excitent en eux une douleur amère d'avoir perdu tout 
cela. La musique alors n'agit point précisément comme 
musique, mais comme signe mémoratif. Cet air, quoique 
toujours le même, ne produit plus aujourd'hui les mêmes 
effets qu'il produisait ci-devant sur les Suisses, parce 
qu'ayant perdu le goût de leur première simplicité, ils ne 
la regrettent plus quand on la leur rappeVYe. l^wV'A esî 



58 L'ACOUSTIQUE. 

vrai que ce n'est pas dans leur action physique qu'il 
faut chercher les plus grands effets des sons sur le cœur 
humain ! » 

La musique militaire joue néanmoins un rôle extrê- 
mement important dans l'histoire des batailles. Une 
musique rapide, éclatante, composée de notes brèves, 
fouette le sang et pousse à l'action. Shakspeare appelle 
le tambour le grand excitateur du courage. Que de 
sang la Marseillaise n'a-t-elle pas fait couler ! 

Les hommes ne sont cependant pas tous également 
sensibles à la musique. Quelques-uns montrent pour elle 
de l'indifférence et même de la répulsion . Saint Augustin 
les frappe d'anathème; à ses yeux l'aversion pour la 
musique est une marque de réprobation. C'est assuré- 
ment aller trop loin, car cette étrange exception ne sau- 
rait s'expliquer que par un défaut de l'organisation phy- 
sique, et l'on pout citer plusieurs grands hommes qui 
étaient affligés de cette infirmité. Il se rencontre, d'autre 
part, des organisations d'une sensibilité exagérée. Boyle 
parle de femmes qui fondaient en larmes lorsqu'elles 
entendaient un certain ton dont le reste des auditeurs 
n'était point affecté. Rousseau mentionne qu'il a connu à 
Paris une dame qui ne pouvait écouter un morceau de 
musique quelconque sans être saisie d'un rire involon- 
taire et convulsif. On lit dans VHistoire de V Académie 
des sciences qu'un musicien fut guéri d'une violente 
fièvre par un concert donné dans sa chambre. 

Il est certain que la musique pourrait servir, dans 
bien des cas, de moyen de médication. On sait que nos 
médecins aliénistes l'emploient utilement pour calmer 
leurs malades. Les journaux ont parlé récemment d'un 
concert donné par les pensionnaires de Charenton. 

Au moyen âge, on croyait que les sous couvaient 



EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 41 

guérir l'épilepsie, la rage, l'hystérie, les fièvres ner- 
veuses, et même la bêtise. D'après Baptisie Porta, une 
flûte en bois cl*e11ébore chassait i'hydropisie, une flûte 
en bois de peuplier la sciatique, et les sons des pi- 
peaux en bâtons de cannelle étaient souverains contre 
les évanouissements. 

Le P. Kircher nous dit que la musique est le remède 
ordinaire de la danse de Saint-Guy. Les personnes at- 
teintes de cette maladie bizarre sautent et dansent 
jusqu'à ce qu'elles tombent épuisées de Fatigue ; on les 
guérit par une musique fortement rhythmée qui les 
excite encore davantage, et fait pour ainsi dire aboutir 
le mal. Â Tépoque où cette maladie était endémique en 
certaines régions de l'Italie, des musiciens ambulants 
parcouraient le pa\s pour offrir leur assistance. Les 
airs de danse très-rapides qu'ils jouaient sont connus 
sous le nom de tarentelles, dénomination qui rappelle 
que le mal en question était attribué à la piqûre de la 
tarentule, grosse araignée venimeuse. Le P. Kircher 
prétend que la tarentule elle-même éprouve une envie 
de danser lorsqu'on joue l'air qui guérit le malade 
qu'elle a piqué. On l'a expérimenté, dit-il, à Andria, 
devant la duchesse et sa cour. On posa une tarentule 
sur une paille, et on la vit s'agiter et sautiller en me- 
sure au son de la harpe. Les diverses espèces d'arai- 
gnées sont impressionnées par des airs de musique 
différents ; pour guérir un malade il faut lui jouer l'air 
qui convient à l'espèce à laquelle il a eu aifaire. La 
chorée d'Ethiopie se guérit également par la musique ; 
dans ce pays, les malades ne dansent que des épaules. 

Sous le titre de Phonurgia iatrka, le P. Kircher 
consacre vn chapitre étendu à l'cmploî àe\^ wwixQjM 



44 L'ACOUSTIQUE. 

au-dessous de sa fenêtre. «Je ne rennarqùai point, dit-il, 
que le chat fût sensible au bruit de la trompette, et je 
jugeai à sa mine qu'il aurait donné toute la symphonie 
et tous les instruments du monde pour une souris. Il 
ne donna aucune marque de joie et s'endormit au soleil. 
Le cheval s'arrêta tout court devant la fenêtre et leva 
la tête de temps en temps à mesure qu'il paissait Pherbe, 
Le chien se mit sur son derrière comme un singe, te- 
nant les yeux attachés sur le joueur d'instrument. 1] 
demeura plus d'une heure en cette posture, et sem- 
blait y entendre (inesse. L'âne ne fit paraître aucun 
signe de sensibilité, mangeant ses chardons paisible- 
ment : asinus adlyram. La biche dressa ses grandes et 
larges oreilles et parut fort attentive. Les vaches s'ar- 
rêtèrent un peu, et après nous avoir regardés comme si 
elles nous connaissaient, elles s'en allèrent leur grand 
chemin. De petits oiseaux qui étaient dans une volière, 
et ceux qui étaient sur les arbres et les buissons, pen- 
sèrent se crever de chanter. iMais le coq ne pensant qu'à 
ses poules, et ses poules qu'à se gratter, ne nous firent 
pas connaître tous ensemble qu'ils prissent aucun plai- 
sir à écouter une trompette marine. » 

Buffon nous apprend que les chiens sont très-sen- 
sibles aux sons musicaux. « J'ai vu, dit-il, quelques 
chiens qui avaient un goût marqué pour la musique et 
<jui arrivaient de la ba^se-cour ou de la cuisine au con- 
cert, y restaient tout le temps qu'il durait, et s'en re- 
tournaient ensuite à leur domicile ordinaire. J'en ai vu 
d'autres prendre assez exactement l'unisson d'un son 
aigu qu'on leur faisait entendre de près, en leur criant 
à l'oreille. » L'organisation canine offre cependant de 
grandes diversités sous ce rapport. Beaucoup de chiens 
hurlent ]orsqu'on les oblige à euiendre VeV \u%Vcwk\^w\.., 



t 



EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 45 

ils resteat indifférents à d'autres instruments. On voit 
des caniches manifester leur antipathie pour certains 
sons, en se tordant de la façon la plus risible avec des 
hurlements plaintifs. 

J'ai connu une petite levrette qui habituellement se 
mettait à gémir quand sa maîtresse faisait des gam- 
mes. Un jour, après aVoir écouté quelque temps en 
silence un air qu'on jouait, elle éclata en petits cris ; 
elle accompagnait le piano en cadence. Surprise de 
cette révélation, sa maîtresse se leva, vint Tembrasser, 
lui donna des sucreries. Lolette s'en souvint plus tard. 
Quand elle avait dansé vainement devant Tarmoire au 
sucre, elle recourait au grand moyan, elle chantait son 
air. Elle savait que cela tirait à effet. 

Selon Buffon, Téléphant aime beaucoup la musique 
et apprend aisément à se remuer en cadence, à joindre 
même quelques accents au bruit des tambours et des 
trompettes. Pour vérifier cette thèse, on donna un 
concert aux deux éléphants du Jardins des Plantes, 
le 10 prairial an VI. Un air de violon parut causer un 
sensible plaisir à Tun de ces animaux, mais les varia- 
tions de ce même air le laissèrent indifférent; un air 
de bravoure de Monsigny ne lui produisit aucun effet. 
Ce qui parut lui plaire le plus ce fut Charmante Ga- 
hrielle^ joué sur le cor ; il Técoutait en se balançant 
sur ses grosses jambes et poussant quelques grogne- 
ments à Tunisson : parfois il allongeait sa trompe dans 
le pavillon de l'instrument, et aspirait l'air, de ma- 
nière à neutraliser le soufHe du musicien. Quand ce 
dernier eut fini le morceau, il le caressa avec sa 
trompe comme pour le remercier. On a cru pouvoir 
conclure de cette expérience que l'éléphant préfère le*» 
notes gvBves aux notes aiguës, la mélodie ^ YWtvxvoit 



46 L'ACOUSTIQUE. 

les airs simples aux airs compliqués , et Tadagio aux 
mouvements rapides. Il a des goûts essentiellement 
simples. 

Plutarque et Pline rapportent une foule d'anedoctes 
relatives à la sensibilité des animaux pour la musique. 
On connaît l'histoire du dauphin charmé par les accents 
d'Arion ; Schiller en a fait le sujet d'une de ses ballades. 
Les auteurs du moyen âge prétendent que chaque ani- 
mal a son instrument préféré : l'ours le fifre, le cerf la 
flûte, le cygne la cithare, les oiseaux chanteurs le fla- 
geolet, les abeilles les cymbales, etc. L'imagination 
a eu évidemment une grande part dans ces théories. 
Une histoire qui semble plus avérée, c'est celle du mu- 
sicien de village qui, rentrant chez lui d'une noce où il 
avait fait danser les paysans, tomba dans une fosse qui 
contenait déjà un loup. Instinctivement il se mit à ra- 
cler sur son violon. Le loup se tapit dans le coin opposé, 
hurlant. L'homme joua jusqu'au matin. H joua éperdû- 
ment ; les cordes sautèrent l'une après l'autre. Il en 
était à sa dernière corde, quand par bonheur des villa- 
geois vinrent à passer. Cette musique étrange qui sor- 
tait de terre excita leur curiosité. Ils s'approchèrent et 
virent Daniel dans la fosse. L'homme fut délivré et on 
tua le loup. 

Un animal inférieur qui paraît être particulière- 
ment soumis au charme des sons, c'est le serpent. Cer- 
tains nègres — les Psylles des anciens — apprivoisent 
les serpents et les font danser au son d'une douce um- 
sique. Voici encore ce que Chateaubriand a vu au Ca- 
nada : 

« Au mois de juin 1796, dit-il, nous voyagions dans 
le haut Canada avec quelques familles sauvages de la 
nation des OnoDÏagués. Un jour que nous étions arrêtés 



EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 47 

dans une grande plaine au bord de la rivière de Jénésie, 
on serpent à sonnettes entra dans notre camp. Il y avait 
parmi nous un Canadien qui jouait de la flufe ; il vou- 
lut nous divertir et s'avança contre ce serpent avec son 
arme d'une nouvelle espèce. A l'approche de son en- 
nemi, le superbe reptile se forme en spirale, aplatit sa 
tète, enfle ses joues, contracte ses lèvres, découvre ses 
dents empoisonnées et sa gueule sanglante ; sa double 
langue brandit comme deux flammes, ses yeux sont 
deux charbons, son corps gonflé de rage s'abaisse et se 
soulève comme les soufflets d'une forge, sa peau dilatée 
devient terne et écailleuse, et sa queue, dont il sort un 
bruit sinistre, oscille avec tant de rapidité qu'elle res- 
emble à une légère vapeur. 

« Alors le Canadien commence à jouer sur sa flûte. 
Le serpent fait un mouvement de surprise et retire sa 
tête en arrière. A mesure qu'il est frappé de l'effet 
magique, ses yeux perdent leur âpreté, les vibrations 
de sa queue se ralentissent, et le bruit qu'elle fait en- 
tendre s'affaiblit et meurt peu à peu. Moins perpendicu- 
laires sur leur ligne spirale, les orbes du serpent 
charmé par degrés s'élargissent et viennent tour à tour 
se poser sur la terre en cercles concentriques. Les 
nuances d'azur, de vert, de blanc et d'or, réprennent 
leur éclat sur sa peau frémissante, et tournant légère- 
ment la tétc, il demeure immobile dans l'attitude de 
l'attention et du plaisir. 

« Dans ce moment, le Canadien marche quelques pas 
en tirant de sa flûte des sons doux et monotones ; le 
reptile baisse son cou nuancé, entr' ouvre avec sa télé 
les herbes fines, et se met à ramper sur les traces du 
musicien qui l'entraîne, s*arrêtant lorsqu'il s'arrête, et 
recommençant a ïe suivre lorsqu'il commetvc^ '^ ^ ^Vâ- 



48 L^ACOUSTIQUE. , 

gner. Il fut ainsi conduit hors de notre camp, au milieu 
d'une foule de spectateurs tant sauvages qu'Européens, 
qui en croyaient à peine leurs yeux à cette merveille de 
la mélodie ; il n'y eut qu'une seule voix dans rassem- 
blée pour qu'on laissât le merveilleux serpent s'échap- 
per. » 

Les lézards sont aussi, dit-on, fort sensibles au 
charme de la musique. Le P. Labat, à la Martinique, 
alla à la chasse au lézard avec un nègre armé d'une 
perche au bout de laquelle était un nœud coulant. On 
aperçut bientôt un lézard étendu au soleil sur une 
branche d'arbre. Le nègre commença de siffler l'ani- 
mal, qui avança la tête comme pour découvrir d'où 
venait le son; alors le noir s'en approcha lentemenl, 
sifflant toujours, et lui chatouilla les côtés et la gorge 
avec le bout de la gaule. Le lézard y trouva tant de 
plaisir quMl tournait et retournait sans cesse sur son 
dos et sur ses côtés; à un moment donné, il se trouva 
si bien avancé hors de la branche, qu'on put lui passer 
le nœud coulant. 

On connaît aussi l'amour de Taraignée pour la mu- 
sique. Voici une anecdote que M. Michelet raconle à ce 
sujet : « Le célèbre violoniste Berthome devait ses suc- 
cès précoces à la réclusion où on le faisait travailler 
très-jeune encore. Dans sa solitude, il avait, nous dit 
M. Michelet, un camarade dont on ne se doutait pas, 
une araignée... Elle était d'aborJ dans l'angle du 
mur, mais elle s'était donné licence d'avancer de l'an- 
gle au pupitre, du pupitre sur l'enfant, et jusque sur 
le bras si mobile qui tenait l'archet. Ln, elle écoutait 
de fort près, dilettante émue, palpitante. Elle était 
tout un auditoire. Il n'en faut pas plus à l'artiste pour 
lui renvoyer, lui doubler son âme. 



EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 40 

(c L'enfant malheureusement avait une mère adop- 
tive, qui, un jour, introduisant un amateur nu sanc- 
tuaire, vit le sensible animal à son* poste. Un coup de 
pantoufle anéantit Tauditoire... L'enfant tomba à la 
renverse, en fut malade trois mois, et il faillit en 
mourir. » ^ 

D'où vient la puissance que la musique exerce sur les 
âmes? quelle est la secrète afBnitc par laquelle les sons 
excitent les passions ? 

La musique est rimage du mouvement. Elle emploie 
des sons échelonnés par intervalles réguliers, entre les- 
quels la voix monte et descend, selon les caprices du 
musicien. En faisant varier la durée et Tintensité des 
notes diverses qui se succèdent, il arrive à peindre 
toutes les nuances de vitesse, toutes les allures possi- 
bles, depuis la lenteur somnolente d'un cours d'eau 
qui se perd dans les sables, jusqu'à la fougueuse impé- 
tuosité du torrent. Or les sons agissent directement 
sur le système nerveux, par les frémissements qu'ils 
impriment aux libres sensitives; ils provoquent ainsi 
la disposition d'esprit qui correspond au genre de mou- 
vement exprimé par la musique. La gaieté est caracté*^ 
risée par une allure vive et légère, la gravité par un 
mouvement d'une lenteur solennelle, la colère par une 
précipitation saccadée. Ces différents caractères s'appli- 
quent, d'ailleurs, aussi bien aux mouvements du corps 
qu'à l'émission de la parole et aux mouvements des 
idées ; tout cela se tient, et c'est justement dans cette 
solidarité d'impression et d'action du corps et de Tàme 
qu'il faut chercher l'explication des effets de la mu- 
sique. La tristesse paralyse nos membres en même 
;emps qu'elle ralentit le discours et qu'elle arrête le 
lux des idées; une musique dont les nole^ ^T9NV&i^^wV. 



5ê L'ACOrSTIQrE. 

lentement et péniblement la faible pente des demi-tons 
dispose à de mébneoliqoes rèreries : quand au contraire 
les notes gambadent de quinte en octaTe, tout notre 
être est remué par une Telléité d*action et de trémous- 
sement qui a son expression symbolique dans la danse 
et le rire. 

Cette explication des effets psydiologiques de la mu- 
sique n*a pas échappé à Aristote. Pourquoi, dit-il, les 
rhythmes et les mélodies s'adaptent-ils aux dispositions 
de Tesprit, mais non les saveurs, ni les couleurs, ni les 
odeurs? Est-ce parce qu^iis sont des mouvements, 
comme le sont les actions ? Leur éneipe intrinsèque 
repose sur un ton déterminé et communique aussi ce 
ton. Les saveurs et les couleurs n'agissent pas de 
même... 

Il est d'ailleurs d'autres mouvements qui produisent 
sur nous des effets de tout point semblables à ceux de 
la musique. La cascade qui se précipite du haut d'un 
rocher, le filet limpide qui ruisselle doucement dans 
un lit sableux, les vagues qui, sans cesse renaissantes, 
attaquent le rivage de l'Océan, nous impressionnent 
comme une musique visible. On peut rester des heures 
entières, couché sur la plage, à regarder les ondes qui 
se succèdent en se poursuivant. « Le rhythme de ce 
mouvement qui n'est pas sans offrir un continuel chan- 
gement dans les détails, éveille un sentiment particu- 
lier de repos agréable sans ennui, et fait naître en nous 
l'idée d'une vie immense, mais régie par un ordre par- 
fait et harmonieux. Quand la mer est calme et sans 
rides, on peut s'amuser un temps à en contempler les 
belles couleurs, mais le plaisir ne dure pas autant que 
)or»f/iu} Venu est agitée. Les ondes plus petites qui se 



EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 51 

forment à la surface des nappes d'eau limitées, se suc- 
cèdent avec trop de précipitation et inquiètent plutôt 
l'esprit qu'elles ne l'amusent '. » 

* Helmholtz, Tonempfindungen. 



III 



PROPAGATION DU SON DANS LES DIFFÉRENTS MILIEUX 



Effet du vide. — Propagation dans les gaz — ■ dans l'eau — par le sol. — Expé- 
rience de M. Wheatstone. — Le stéthoscope,— On entend par les dents. 



Comment le son se transmet-il jusqu'à l'oreille qui le 
perçoit? quel est Tinvisible pont sar lequel il franchit 
les distances ? La réponse est facile. De toutes parts, un 
fluide élastique et léger nous environne ; les vents nous 
montrent qu'il peut produire les plus puissants effets 
mécaniques; toute agitation un peu forte s'y propage 
aussitôt et se fait sentir loin du point d'origine. N'est-il 
pas dès lors naturel d'admettre que le fluide aérien pro- 
page, de la même manière, les mouvements qui donnent 
lieu à un son? Nous voyons, d'ailleurs, qu'une détona- 
tion violente est toujours accompagnée d'un brusque 
déplacement de l'air, d'un choc fort sensible à distance. 
Aussi les physiciens n'ont pas tardé a soupçonner que 
l'air est le véhicule matériel du son, et ils ont songé à 
démontrer cette vérité en la retournant: sans air point 
de son. Voici l'expérience bien simple à l'aide de 
laquelle on peut s^en assurer. On suspend, par un fil 




PROPAGATION Dt SON. 55 

de soie ou de chanTre, une petite clochette dans un 
ballon de verre d'où Tair a été chassé par une pompe 
pneumatique (fig. 22). On fait sonner la clochette en 
agitant l'appareil ; on n'entend rien. 
Le batSant frappe toujours contre la 
panse, mais c'est du bruit dans le 
vide : le son ne parvient pas à se for- 
mer, à prendre un corps, pour ainsi 
dire. Si alors on ouvre le robinet 
qui fermait le ballon et qu'on y laisse 
rentrer l'air, le charme est rompu 
et la clochette cesse d'être muette. *^" 

L'expérience se fait encore avec un réveille-matin que 
l'on introduit sous le récipient d'une machine pneu- 
matique. Dans le premier moment, on entend fortement 
résonner le timbre de la sonnerie ; mais à mesure que 
l'air est raréfié, le son s'afFaiblil et semble expirer sous 
Faction de la machine, de sorte que les derniers coups 
ne s'entendent déjà plus, si le jeu de la pompe a été ra- 
pide. On peut même faire partir sous le récipient un petit 
pistolet de salon chargé à poudre : vous voyez l'éclair 
sans entendre la détonation. Toutefois, ces expériences 
ne réussissent qu'à la condition que les corps sonores 
(le réveille-matin, le pistolet, etc.) soient posés sur un 
coussin de ouate qui amortit le choc; sinon, l'ébran- 
lement se transmet au plateau de la machine, et de là 
à Tair environnant, qui le propage jusqu'à Toreille. Il 
est même difficile pour cette raison d'intercepter com- 
plètement le son qui tend à se produire dans l'intérieur 
de la cloche vidée d'air. C'est pour avoir oublié cette 
cause d'erreur qui nait des communications solides 
entre le corps sonore et l'air extérieur, que le P. Kir- 
cher crut avoir trouvé dans la même ciLçetvew!.^ ww 



54 L'ACOUSTIQUE. 

argument décisif contre l'existence du vide. Il avait fait 
le vide barométrique dans un tuyau de plomb de 1 0U 
pieds, terminé en haut par une ampoule de verre dans 
laquelle étaient fixés une clochette et un petit marteau 
qu*un aimant pouvait soulever du dehors. Quand le mar- 
telet retombait sur la cloche, elle rendait un son clair 
et limpide, et Kircher en conclut que ce « vide fantasti- 
que » du baromètre n'est qu'une dangereuse fiction 
des philosophes. 

Il est vrai que, pour lui, des corps épais et massifs, 
tels que des murs ou des rochers, ne peuvent pas trans- 
mettre le son d'une manière directe. Comment se fait-il, 
V dit Kircher, que si on frappe sur une muraille, une autre 
personne entende immédiatement le bruit en appliquant 
l'oreille du côté opposé? Cette transmission mystérieuse 
s'explique par la présence de l'air dans les pores de tous 
les corps ; c'est cet air intérieur qui propage le mouve- 
ment sonore. Si un corps est très-dense, il ne laisse 
passer que très-peu de son, parce qu'il contient très- 
peu d'air. Le verre est de tous les corps le moins poreux ; 
aussi, un homme enfermé dans une ampoule de verre 
hermétiquement close, n'entendrait rien dans sa prison, 
quelque bruit qu'on pût faire au dehors. Kircher ajoute 
qu'il existe, en Ecosse, un rocher appelé la roche ^sourde, 
parce que ceux qui s'y cachent n'entendent aucun bruit 
du dehors, pas même la détonation d'iin canon; la rai- 
son de ce phénomène doit être cherchée, selon lui, dans 
l'excessive densité de cette roche : elle est, dit-il, opa- 
que pour le son, tout comme d'autres corps le sont pour 
la lumière. 

S'il est vrai que c'est presque toujours par l'inter- 

diaire de l'air que les sons parviennent à l'oreille, 

w// cependant aujourd'hui que la çrésence d'un 



f 



PROPAGAirON DU SON. 55 

fluide gazeux n'est pas une condition nécessaire à leur 
transmission. Tous les corps élastiques : gaz, liquides 
et solides, propagent le son. Une montre à réveil que 
Ton enfonce dans Teau après Tavoir enfermée sous une 
cloche de verre, s'entend très-bien au dehors. Les plon- 
geurs entendent sous Teau les bruits qui se produisent 
à la surface. 11 est vrai que le son leur arrive très-affai- 
bli, mais cela vient d*une perte d'intensité qu'il subit 
en pénétrant dans un milieu plus dense que l'air. La 
quantité de mouvement qui a passé dans Teau s'y pro- 
page sans obstacle ; on peut s'en assurer en constatant 
qu'à la profondeur de quelques mètres on entend aussi 
bien que tout près de la surface. S'il en était autre- 
ment, l'organe de Touïe serait un luxe fort inutile chez 
les poissons. Or il est certain qu'ils entendent; ainsi, 
on a remarqué que les poissons apprivoisés répondent 
à l'appel d*un sifflet. 

Les corps solides transmettent le son avec une grande 
facilité. Le tic-tac d'une montre que l'on applique con- 
tre une extrémité d'un tronc d'arbre coupé s'entend 
parfaitement à l'extrémité opposée, non point parce 
qu'il y a de l'air dans les pores du bois, mais parce que 
le bois résonne sous les chocs de la roue d'échappe- 
ment. Lorsqu'on écoute en appuyant l'oreille parterre, 
on peut distinguer le bruit du canon à une distance de 
plus de 40 kilomètres, et le piétinement des chevaux 
s'entend de très-loin comme une espèce de roulement 
sourd transmis par le sol. 

Scuta sonant, puisuque peduin trcmit excita tollus. 

Virgile. 

On peut rendre cette transmission visible en posant 
par terre un tambour chargé de petits ea\\Vv>w\ \ çstv\s 



3$ L'ICOrêTlQUE. 

fr(Ml danser lorsqu'il passe de la cavalerie à ane grande 
àisiuiite. Dans les mines de G>moaaîlles, on pousse les 
foAmei jujsque sous la mer ; on y entend,- à travers le 
plafond de sable, le bruit des flots et celui des galets 
qui s'entre-choquent. Lorsqu'on creuse des galeries op- 
posées, les mineurs de la mine et de la contre-mine 
s'entendent à trarers le sol, et peuvant ainsi se diriger 
Tun sur Fautre. Ces bruits souterrains ont quelquefois 
donné lieu à des histoires de revenants. 

Il parait que le bois est de tous les corps solides celui 
qui conduit le mieux le son. Le sapin est, sous ce rap- 
port, préférable au buis, le buis au chêne, etc. Avec 
quatre fif^rchcs de sapin, M. Wheatstone a réussi à con- 
duire, à travers plusieurs étages d'une maison, un con- 
VÂ^ri donné dans la cave. Les perches, d'environ 0",02 
d'épaisseur, étaient appuyées par leurs extrémités 
inférieures, l'une sur la table d'harmonie du piano, 
une autre sur le chevalet du violon, la troisième sur 
celui du violoncelle, et la quatrième sur la base de 
l'anche d(* la. clarinette; elles traversaient la voûte de 
la cave où étaient les instruments et pénétraient jusque 
dans l'étage élevé où se tenaient les auditeurs. Chaque 
tringle se terminait par une tablette renforçante en 
bois mince et élastique. Tout ce système vibrait éner- 
giquenient lorsqu'on attaquait dans la cave un morceau 
de nnjsi(|ue, et à l'étage supérieur la chambre se rem- 
plissait de sons qui semblaient sortir des planchettes 
ensorcelées. Cette expérience est d'un effet magique : 
\i\ bois chante tout à coup comme s'il était animé, on 
se croirait au milieu d'un orchestre véritable, n'était le 
émoignage des yeux... M. Kœnig a fait la même expé- 

icc avec une boite à musique cachée dans une grande 
e ouatée k l'intérieur. Une longue tringle de bois 



PROPAGATION DU SON. 57 

traverse le dessus de la boite et se termine par une 
planchette carrée. Lorsqu'on enlève la planchette, on 
n'entend rien, mais dès qu'on Tappuie sur l'extrémité 
libre de la tringle, on entend très-distinctement l'air 
que joue la boite à musique. 

Les parties osseuses de la tète conduisent le son à 
l'oreille avec une facilité très-grande. On peut ainsi en- 
tendre par le front, les dents, etc. Deux personnes qui 
parlent très-bas en tenant entre leurs dents les deux 
extrémités d'une longue tige de bois ou d'un fil tendu, 
s'entendent à une distance considérable ; le résultat est 
le même si la personne qui parle appuie la lige sur sa 
gorge ou sur sa poitrine. C'est sur les mêmes principes 
que repose le stéthoscope^ inventé par Laennec en 1819 ; 
il se compose essentiellement d'un cylindre de bois que 
le médecin appuie sur la poitrine du malade, afin de 
mieux entendre les bruits du cœur ; cela s'appelle aus- 
culter. M. Wheatstone a proposé, de son côté, un in- 
strument auquel il donne le nom de microphone^ et qui 
est destiné à faciliter la perception des sons très-faibles. 
C'est un petit bassin de cuivre qui s'appUque sur l'o- 
reille et qui porte en son milieu une longue tige mé- 
tallique, sorte de tentacule ou de palpe qui doit propager 
le son. On peut adapter un appareil semblable à chaque 
oreille et réunir les deux palpes en une tige unique. 

Lorsqu'on frappe sur une cuiller d'argent, un timbre 
de verre ou tout autre corps sonore suspendu à un fil 
dont on introduit l'extrémité libre dans le conduit au- 
ditif ( on peut aussi la saisir entre les dents et se bou- 
cher les oreilles), on entend un son grave et plein, 
comme celui d'un bourdon éloigné. Un médecin danois, 
Herhold, a fait cette expérience avec une cuillet ^U*^- 
chée à un fil d'une longueur de 200 melte?^^ ^w>\. \«v& 



58 L'ACOUSTIQUE. 

extrémité était fixée à un pieu pendant qu'on tenait 
Tautre avec les dents. 

Les sourds-muets entendent très-bien par les dents 
quand la surdité ne provient pas d'une paralysie du 
nerf acoustique. On leur fait saisir avec les dents les 
bords d'une boite à musique ou l'extrémité d'une ba- 
guette appuyée sur la table d'harmonie d'un piano, et 
ils entendent alors les sons de ces instruments. Une 
personne qui a l'oreille dure comprend très-bien ce 
qu'on lui dit, si Ton parle dans un bassin de cuivre ou 
dans un verre sur le bord duquel elle appuie l'oreille 
ou les dents. 

Les corps mous, tels que l'étoupe, la ouate, les 
étoffes en général, la farine, la sciure de bois, ne 
transmettent par les sons d'une manière sensible. Un 
tapis de Smyrne étouffe le bruit des pas ; une épaisse 
portière empêche les paroles de pénétrer du salon dans 
Tantichambre. 



lY 



INTENSITÉ DU SON 



Circonstances qui font varier l'intensité des sons. — Intensité nocturne. — 
Portée des %ons. — Le carré inverse de la distance. — Porte- voix. — Tuyaux 
acoustiques. — Cornet acoustique. 



La force ou rintensité d'un son est primitivement 
déterminée par la violence du mouvement qui le pro- 
duit, mais ce qui en parviendra à Toreille dépend de 
la nature du milieu où le son se propage. Nous avons 
déjà vu que sous la cloche d*une machine pneuma- 
ti(|ue le son d'un timbre s'affaiblit graduellement et 
semble mourir peu à peu à mesure que Tair y est ra- 
réfié. Sur les hautes monta.L(nes, où Tair n'a qu'une 
faible densité, tous les bruits perJent leur force et 
semblent plus éloignés qu'ils ne le sont en réalité. Au 
sommet du mont Blanc, à 4,800 mètres au-dessus de 
la mer, Saussure a trouvé qu'un coup de pistolet ne 
produisait pas plus d'effet qu'un petit pétard dans la 
plaine. Dans les expériences que la Condamine institua 
à Quito, entre deux stations élevées de 3,000 et de 
4,000 mètres. Je bruit d'une pièce de cauow âi^ wcv&^ 



60 L'ACOUSTIQUE. 

à 20 kilomètres de distance, ressemblait à peine à celui 
d'une pièce de huit, entendue à 31 kilomètres dans les 
plaines des environs de Paris. Les aéronautes ont sou- 
vent constaté la faiblesse de leur voix dans les régions 
très-élevées de ratmosnhère. Voici ce que M. Glaisher 
a observé pendant les ascensions qu'il a faites en 1863 
avec M. Coxwell. Une fois, il entendît, à 3,000 mètres 
de hauteur, Faboiement d*un chien et la voix du vent 
qui mugissait au-dessous de lui. Les cris de plusieurs 
milliers de personnes avaient cessé d*étre entendus à la 
moitié de cette hauteur. Un autre jour, cependant, le 
sourd murmure de Londres leur arriva encore à 2 kilo- 
mètres d'élévation verticale. Le sifHet d'une locomotive 
fut entendu dans Tune de ces ascensions, à un& hau- 
teur de 6 kilomètres et demi ; c'est la plus grande à la- 
quelle une oreille humaine ait perçu des bruits partis 
de la surface du sol. L'air était ce jour-là exceptionnel- 
lement humide. 

Lorsqu'on songe à l'affaiblissement que le son éprouve 
nécessairement dans les régions supérieures de l'at- 
mosphère, on est stupéfait de l'intensité du bruit que 
produit quelquefois l'explosion d'un bolide. Un mé- 
téore qui fut observé en 1719 et qui, d'après les calculs 
de Halley, traversa Tair à une hauteur de plus de 100 
kilomètres, donna lieu à une détonation comparable 
à celle d'une pièce de gros calibre ; elle fit trembler 
les portes et les fenêtres, et à l'observatoire de Green- 
wich une lunette tomba de sa niche et se brisa sur 
le sol. Beaucoup de bolides éclatent avec un bruit 
semblable au roulement du tonnerre, et nous savons 
que l'explosion a généralement lieu à une très-grande 
hauteur au-dessus de la surface terrestre. Il faut donc 
^U€ ces déloneX\ox\% se fasseul avec wtv^ n\ç\wvç,^ \wwv\a. 



INTENSITÉ DU SON. 61 

Dans Fair comprimé, le son est considérablement 
renforcé, et l'audition y est exagérée. Dans les tubes 
où travaillaient les ouvriers employés à la fondation 
du pont d'Arcueil, tous les sons prenaient un timbre 
métallique qui ébranlait le cerveau ; quand on y parlait, 
on se sentait la base du crâne vibrer comme une trom- 
pette. Un autre effet non moins désagréable de la ten- 
sion de Tair comprimé était la résistance qu'il opposait 
au mouvement des lèvres; on y perdait le siffler, 
on bégayait. John Roebuck a également constaté la 
grande intensité des sons dans les soufflets d'un haut 
fourneau du Devonsjhire. 

Priestley a fait quelques expériences avec des gaz 
autres que Tair. Ayant rempli d'hydrogène une cloche 
sous laquelle était une sonnerie, il constata que le 
bruit du timbre cessait presque d'être entendu. On 
sait que la densité de l'hydrogène est 14 fois moin- 
dre que celle de l'air. Pilatre de Rozier ayant aspiré 
de grandes quantités de ce gaz trouva que sa voix 
était faible et nasillarde. Maunoir et Paul ont fait 
la même expérience à Genève; ils disent que leurs 
voix sont devenues grêles et flùtées d'une manière 
effrayante. 

Dans l'eau les sons se propagent avec beaucoup de 
force. D'après les expériences qu'il avait faites sur le 
lac de Genève, CoUadon estima qu'on pourrait commu- 
niquer en mer, par le moyen d'une cloche submer- 
gée, à des distances de quelque cent kilomètres. Fran- 
klin rapporte qu'il a entendu le choc de deux cailloux 
dans Peau à plus d'un demi-mille anglais (800 mètres). 

Quand le son passe d'un milieu dans un autre d'une 
densité différente, il éprouve une perte d'inteiisvt4^\>d& 
ou moins sensible. J'ai déjà dit que \ea ij\ow%'c>xx?k vl ^^- 



62 L'ACOUSTIQUE. 

tendent que faiblement les bruits qui viennent de la 
surface, tandis qu'on entend très-bien au-dehors les 
bruits qui sortent de l'eau : un coup frappé sur la clo- 
che à une profondeur de 10 mètres est parfaitement 
perçu à la surface. On en conclut que Teau transmet 
plus facilement les vibrations à Pair que l'air ne les 
transmet à Teau. Si les vibrations d'un corps solide, au 
lieu de se propager directement dans l'air, y arrivent 
par l'intermédiaire d'un liquide, elles conservent une 
plus grande énergie. Pérolle a fait, à ce sujet, une série 
d'expériences. Il prit une montre de poche, et l'ayant 
calfatée avec de la cire, la plongea, suspendue à un fil, 
dans un vase qu'il remplit successivement de divers li- 
quides. Dans Tair, le tic-tac delà montre cessait d'être 
perceptible à une distance de 3 mètres. Les liquides 
renforcèrent le son; plongée dans l'esprit-de-vin, la 
montre s'entendait encore à 4 mètres, dans Fhuileà 5, 
dans l'eau à 7 mètres. On voit que la portée du son 
augmentait avec la densité du liquide par l'intermé- 
diaire duquel il ébranlait l'air. 

Les vibrations d'un corps solide se transmettent 
difficilement à un milieu gazeux; il faut lui donner 
une grande surface pour en augmenter le son. Un dia- 
pason résonne plus fortement s'il est appuyé sur une 
tablette de bois qu'il ébranle et qui, à son tour, fouette 
une masse considérable d'air. C'est pour la même 
raison que, dans l'expérience de M. Wheatstone, que 
nous avons rapportée plus haut (p. 56), les tringles 
de bois étaient munies de planchettes offrant une cer- 
taine surface. 

Quand le son se propage dans l'air de haut en bas 

ou de bas en haut, il traverse aussi des couches d'iné- 

gale densité, Saussure et SchuVles oivl eouslaté (\ue le 



INTENSITE DU SON. 63 

son parvient plus facilement de la base au sommet 
d'une montagne élevée que du sommet à la base. Les 
aéronautes ont fait une remarque analogue. Pour Tex- 
plication de ces faits, il est essentiel de remarquer que 
la voix et tout autre son ont déjà, au moment de leur 
production, moins de force dans Tair raréfié des hautes 
régions de l'atmosphère que dans l'air plus dense de la 
plaine. 

Quand Tair inégalement écliaufFé par le soleil et par 
le rayonnement du sol cesse d'être homogène, le son 
doit y perdre beaucoup de sa force et se propager moins 
loin *. C'est par cette circonstance que Humboldt veut 
expliquer la différence d'intensité des sons pendant 
le jour et pendant la nuit. Nicholson cherche l'expli- 
cation de ce fait dans l'absence, pendant la nuit, des 
mille bruits confus qui, pendant le jour, agitent Tatmo- 
sphère autour de nous. Le silence de la nuit, dit-il, re- 
pose nos organes et les rend plus sensibles à de faibles 
impressions; le silence exalte l'ouïe comme Tobscu- 
rité aiguise la vue. Humboldt oppose à cette opinion ce 
qu'il a observé en Amérique. Dans les pays tropicaux, 
les animaux font plus de vacarme pendant la nuit que 
pendant le jour, et le vent ne s'élève qu'après le cou- 
cher du soleil. Néanmoins, le bruit des cataractes de 
rOrénoque s'entend à Aturès (à plus d'une lieue) avec 
trois fois plus de force la nuit que le jour. Humboldt a 
remarqué, en outre, que Taccroissement nocturne de 
l'intensité du son est plus sensible dans les plaines 
basses que sur les plateaux, et sur la terre ferme que 
sur la mer. 

* Lorsqu'on a établi la ventilation des deux palais du parlement de 
Londres, on a constaté que le courant d'air qui montait du milieu des 
salles au plafond rendait inintelligible la voix d'uu ot^V^vw \\%kxî, ^>\ ^^V»^ 
opposé. 



04 L ACOUSTIQUE. 

Il serait peut-être plus vrai d'attribuer ces faits à la 
réunion des différentes causes qui ont été signalées, et 
auxquelles on peut ajouter le froid de la nuit. L'accrois- 
sement d'intensité du son s'observe aussi bien dans une 
maison fermée qu*en rase campagne. Les coups de dent ' 
d'une souris qui grignote du bois résonnent la nuit 
autrement que le jour; on ne saurait dans ce cas invo- 
quer l'homogénéité plus grande dé l'air, et il faut bien 
chercher la raison de l'intensité des sons dans le con- 
traste du silence qui nous environne. L'obscurité y est 
peut-être aussi pour quelque chose ; on sait que pour 
mieux entendre, beaucoup de personnes ferment les 
yeux, et que le âens de l'ouïe est généralement très-dé- 
veloppé chez les aveugles. 

Nous venons de dire que le froid semble augmenter 
la portée des sons. C'est un fait constaté par beaucoup 
d'observateurs. Dans les régions polaires, le capitaine 
Parry entendit souvent à la distance d'un mille (1,600 
mètres) une conversation à voix ordinaire. Foster, l'un 
des compagnons de Parry, rapporte qu'à Port-Bowen 
il a pu converser avec un homme'de l'équipage à 2,040 
mètres de distance, par un froid de 28° au-dessous de 
zéro. On pourrait croire que ce phénomène est dû à la 
condensation de l'air; mais les expériences de MM, Bra- 
vais et Martins ne confirment pas cette opinion. Ces 
deux observateurs ont d'abord constaté, à Saint-Chéron 
(Seine-et-Oise), qu'un diapason monté sur une caisse 
de résonnance s'entendait à 254 mètres à une heure de 
l'après-midi, et jusqu'à 379 mètres à minuit. Sur le 
Faulhorn, le son parvenait à 550 mètres à minuit, sur 
le mont Blanc encore à 337 mètres, et pourtant l'airest 
bien moins dense sur ces hauteurs que dans la plaine. 

Ce résultai imprévu montre que ce \v'etî.t cas la con- 



liMËNSITË DU SON. 65 

densationdue au froid qui produit raccroissement d'in- 
tensité du son ; le phénomène est évidemment plus com- 
plexe, et il est probable qu'il doit se ramener, en partie 
du moins, à Tinfluence du calme qui règne sur les hau- 
teurs et dans les déserts polaires. 

On s'est enfin occupé de l'action du vent sur l'inten- 
sité du son. Il est certain que Ton entend toujours 
mieux dans la direction du vent que dans la direction 
opposée. De Haldat a fait quelques expériences dans les 
environs de Nancy avec un petit timbre ; il a trouvé que 
le son était entendu deux ou trois fois plus loin au-des- 
sus du vent que sous le vent. Plus tard, en 1813, De- 
laroche et Dunal ont fait des mesures plus précises dans 
la plaine d'Arcueil. Ils se plaçaient entre deux timbres 
égaux qui étaient frappés avec la même force, et cher- 
chaient la distance où les deux sons paraissaient de 
même intensité, quand la ligne droite menée d'un tim- 
bre à l'autre faisait avec la direction du vent tel ou tel 
angle. Alors le son le plus affaibli était évidemment 
celui qui émanait du timbre le plus rapproché. On 
trouva de cette façon que, pour les disLinces au-dessous 
de 6 mètres, l'influence du vent était insensible, qu'elle 
devenait appréciable pour des distances plus grandes 
et qu'elle croissait avec ces distances. Elle était plus 
marquée pour les sons faibles. Un vent contraire affai- 
blissait le son, mais, et c'était là le résultat le plus im- 
portant de ces expériences, tout autre vent l'affaiblissait 
aussi, quoique à un moindre degré. Par un air calme, 
ou dans une direction perpendiculaire à la ligne du 
vent, le son s'entendait toujours plus loin. L'agitation 
de l'air est donc toujours nuisible à la propagation du 
son, et cela se comprend si l'on veut admettre que les 
coups de vent donnent lieu à des mou\eu\ewV^ v.aw\v\v 



;i 



66 L'ACOrSTIQUE. 

toîres de Tair, susceptibles d^occasionoer dans la mar- 
che du son une perturbation semblable à celle qui s'ap- 
pelle interférence, Derham avait déjà fait une observation 
analogue à Porto-Feirajo (île d'Elbe) ; il avait remarqué 
que le canon de Livoume s'entendait mieux quand Pair 
était calme que lorsqu'il faisait du vent, même quand 
le vent venait de Livoume ; la distance est de 25 lieues. 

On peut encore citer à ce propos une remarque du 
baron de Zach. Cet astronome dit qu'à l'observatoire de 
Seeberg, qui a une position élevée et fort isolée, le son 
des cloches des églises voisines, le bruit des moulins, 
Taboiement des chiens et les voix des honmies montaient 
jusqu'à lui d'une manière très-distincte pendant les 
nuits où les images des astres se montraient bien tran- 
quilles, tandis qu'il n'entendait presque rien quand les 
étoiles tremblotaient dans le champ de la lunette ; la 
force du son peut donc, jusqu'à un certain points indi- 
quer l'élat de l'atmosphère. 

Ce qui rend ces sortes d'obser>'ations très-difficiles 
ci fort incertaines, c'est qu'on n'a aucun instrument 
pour mesurer Tintensilé du son, et qu'on est obligé de 
se fier au jugement de l'oreille. Or, la sensibilité de 
Touïe peut varier d'un jour à Tautre, elle n'est pas la 
même chez deux personnes différentes; souvent la 
même personne entend mieux d'une oreille que de l'au- 
tre. Enfin, ce qui est surtout fâcheux, l'organe de 
l'ouïe est plus fortement impressionné par les notes 
aiguës que par les notes graves. On aurait pu croire que 
l'intensité apparente d'un son devait être proportion- 
nelle au travail mécanique employé à le produire , il 
n'en est rien. Lorsqu'on fait tourner une sirène sous 
une pression d'air constante, les sons graves qu'elle 
émet au commencement sont beaucoup çlus faibles que 



INTENSITE DU SON. 67 

les noies aiguës qui se produisent quand le disque 
tourne de plus en plus vite. 

La sensibilité de Toreille augmente avec la hauteur 
des notes ; on a, en outre, constaté que les notes très- 
aiguës comprises de mi à sol résonnent dans Toreille 
avec une force tout exceptionnelle. Il est donc certain 
que l'on ne saurait comparer à l'aide de l'oreille que 
des sons de même hauteur. Si on voulait essayer de 
créer une mesuré absolue de l'intensité des sons, voici 
comment on pourrait s'y prendre. Le phonomètre serait 
un instrument donnant des sons d'une force toujours la 
même au moyen d'une soufflerie à pression constante. 
On chercherait la distance à laquelle un son du phono- 
mètre paraîtrait aussi fort que celui dont on aurait à 
déterminer l'intensité. Alors cette intensité serait à 
celle du son type dans le rapport inverse du carré des 
distances du phonomètre et de la source sonore. 

Tout mouvement qui rayonne librement en tous 
sens : lumière, électricité, chaleur ou son, se répand à 
partir du point d'origine sur des sphères concentriques. 
Or, la surface de ces sphères croissant toujours comme 
le carré du rayon, il s'ensuit que l'intensité de la force 
émanée du centre doit diminuer dans le même rapport 
à mesure qu'elle se distribue sur les sphères succes- 
sives. Donc, l'intensité d'un rayonnement décroît sans 
cesse à partir du centre ; elle est, en un point quelcon- 
que, en raison inverse du carré de la distance. 

C'est la loi qui régit aussi la gravitation ; toutes les 
forces attractives ou répulsives lui sont soumises. La 
théorie nous dit qu'elle doit également s'appliquer au 
son. Delaroche et Dunal l'ont vérifiée de la manière sui- 
vante. S'étant procuré cinq timbres parfaitement iden- 
tiques, ils en placèrent un à une exlrètavlè ôiww^Xv^^ 



68 L'ACOUSTIQUE. 

droite mesurée sur le terrain, et les quatre autres à 
l'extrémité opposée. Ils cherchèrent alors le point où 
le son qui arrivait du timbre isolé offrait la même in- 
tensité que celui que rendaient les quatre timbres 
frappés simultanément. Ce dernier son devait être, à 
distance égale, quatre fois plus fort que le premier. On 
trouva qu'il devenait égal à celui-ci lorsque l'observa- 
teur se plaçait au tiers de la distance qui séparait les 
deux sonneries, c'est-à-dire deux fois plus loin du 
groupe de quatre timbres que du timbre isolé. La loi 
se trouvait donc exacte. En effet, le carré de 2 étant 4 
et le carré inverse 1/4, la loi en question exige qu'à 
une distance 2 le son n'ait plus que le quart de l'inten- 
sité qu'il offrait à la distance 1 . Ainsi le son des quatre 
timbres réunis étant égal à 4 à la distance 1, il ne 
devait plus être que le quart de 4, c'est-à-dire 1, à la 
distance 2. Or c'est ce que l'expérience avait montré, 
puisqu'à cette distance les quatre timbres avaient donne 
autant de son que le timbre isolé, placé à la distance!. 
La portée des sons, ou la distance à laquelle l'oreille 
peut encore les distinguer, représente en quelque sorte 
la mesure de leur intensité. La voix humaine s'entend 
quelquefois très-loin. Nous avons déjà rapporté que, 
dans les régions polaires, Foster a pu tenir une conversa- 
tionavecune autre personne à 2,040 mètres de distance. 
Nicholson rapporte que, sur le pont de Westminster, à 
Londres, on entend très-bien, pendant la nuit, les voix 
des ouvriers (|ui travaillent dans les fabriques de Bat- 
•tersea, éloignées de 5 kilomèttes. Le même auteur 
nous apprend que les cris des sentinelles de Portsmouth 
sont entendus, pendant la nuit, à Ride, dans l'île de 
Wight ; la distance est de 7 ou 8 kilomètres. Le rire 
des matelots tVun navire de guerre aiW^Vm, ç^talionné à 



INTENSITÉ DU SON. 69 

Spithead, parvint jusqu'à Portsmouth, c'est-»T-dire à 
4kilomètres. Onapeinc à croire ce que Derham a dit 
avoir constaté à Gilbraltar, où la voix humaine aurait 
été entendue à plus de 10 milles anglais (16 kilomètres). 
Telle était tout au plus la voix de Stentor, qui, au dire 
d'Homère, criait comme cinquante hommes K 

D'après Hinriehs, les instruments de cuivre d'un 
orchestre russe s'entendaient à plus de 7 kilomètres. 
Le tambour battant la retraite au château d'Edimbourg 
fut entendu un jour à plus de 50 kilomètres. 

Le bruit du canon se propage très-loin parce qu'il 
fait trembler le sol. La canonnade de Florence fut en- 
tendue au delà de Livourne, c'est-à-dire à une distance 
d'environ 90 kilomètres, et celle de Gènes en mer à 
165 kilomètres. En 1792, le canon de Mayence fut en- 
tendu à Eimbeck, petite ville éloignéo de 245 kilo- 
mètres. En 1809, les coups de canon tirés à lleligoland 
étaient entendus à Hanovre (260 kilomètres); enfin, 
le 4 décembre 1832, le canon d'Anvers fut entendu en 
Saxe, dans les montagnes de l'Erzgebirge, dont la dis- 
tance est de près de 600 kilomètres! L'éruption du 
volcan Saint-Vincent, qui eut lieu en 1815, se fit en- 
tendre jusqu'à Demerary, sur une distance de 500 milles 
marins (550 kilomètres). 

Pour augmenter la portée de la voix, on fait usage 
d'un instrument nommé porte-voix (en anglais speaking 
trumpet^ en latin tuba stentorea) . C'est le plus ordinai- 
rement un tube conique (fig. 23), muni d'une cmbou- 
cljure qui s'applique sur la bouche, sans gêner le 
mouvement des lèvres, et terminé par un pavillon 
évasé. On s'en sert beaucoup en mer pour se faire cn- 

* Jhw,, //., r. 785. 



70 . L'ACOUSTIQUE. 

tendre aune grande distance malgré le vent et les flots; 
le guet avait jadis un porte-voix pour annoncer les in- 
cendies du haut de sa tour ; à la campagne on l'em- 
ploie pour appeler les ouvriers qui travaillent dans les 
champs. 

Le porte-voix a été inventé vers 1670 par le cheva- 
lier Samuel Morland, qui fit exécuter plusieurs mo- 
dèles d'abord en verre, puis en cuivre, et qui rendit le 



ISH^JI 



Fig. 23. Porte-voix. 

roi Charles II et le prince Robert témoins des effets 
surprenants qu'il obtenait avec sa trompette d'un nou- 
veau genre. Dans une expérience qui fut faite à Deal, 
avec un cône del'",68 de longueur, dont les deux ou- 
vertures avaient respectivement 0"^,05 et 0™,53 de 
diamètre, on put se faire entendre à une distance de 
5 kilomètres. 

Quand l'invention de Morland fut publiée, le P. Atha- 
naseKircher la revendiqua aussitôt, sous prétexte qu'il 
avait déjà employé des tubes de forme conique ; mais 
il est facile de voir que, dans ses écrits antérieurs, le 
savant jésuite n*a voulu parler que de tubes acousti- 
ques*. Kircher donne aussi à cette occasion une des- 
cription du Cor d^ Alexandre le Grande d'après un 
vieux manuscrit intitulé Sécréta Aristotelis ad Alexan- 



* 3Jor]and est uussi l'inventeur du baromètre à balance, à propos du- 
e/ Je P, Secchi a invente le mot rc inventer. 



INTENSITE DU SON. 71 

drnm Ma^um, qui existe à la bibliothèque du Vatican.. 
Ce cor, doat nous reproduisons la ligure, permettait à 
Alesandrc, toujours d'après l'auteur inconnu du manu- 
crit, de rappeler ses soldats lorsqu'ils s'étaient éloignés 
de 100 stades (18 kilomètres). Le diamètre de l'an- 




neau aurait été de 5 coudées (S^^iO). LeP: Kircher 
conjeclure que pour en Taire usage on le soutenait par 
trois perches. Vers la fin du siècle dernier, un physi- 
cien allemand, le professeur Iluth, a voulu se rendre 
compte des ciïets d'un pareil instrument. Il a fait con- 
struire un modèle en tôle, de dimensions un peu moin- 
dres que celles qui sont indiquées par Kiccber ; et il a 
trouvé qu'un cor de cette forme représente un porte- 
voix d'un effet considérable, surtout lorsqu'il est muni 
d'un pavillon évasé. Le moine Saiar, de l'ordre des au- 
^piOJm, avait fait consf ruirc le cor d' Wenanàt^ %^« 



72 . L'ACODSTIQUE. 

dès 1654, mais nous ne connaissons pas le résultat 
qu'il obtint. Dans tous les cas, cette expérience n'eut 
pas de suite. 

Peu de temps après la publication de Tinvenlion de 
Morland, Cassegrain proposa de d.onner au porte-voix 
une forme hyperbolique; Conyers le transforma en 
paraboloïdc, et Jean-Mathieu llase le composa dun 
ellipsoïde comme embouchure et d'un paraboloïde 
employé conmie pavillon. Tous ces projets, que l'expé- 
rience n'a pas justifiés, supposent que le renforcement 
des sons dans le porte-voix est dû à la réflexion inté- 
rieure des ondes sonores. Cette idée a été développée 
par Lambert dans sa théorie du porte-voix, publiée en 
1765, qui a passé dans presque tous les traités de 
physique. On pose en principe que le but de l'instru- 
ment est de rendre les rayons sonores parallèles à l'axe 
du tube, et l'on cherche la forme la plus propre à réali- 
ser ce parallélisme. Rien n'est moins conforme aux faits 
observés. 

D'après la théorie des réflexions, un tube cylindrique 
serait sans effet. Or Hassenfratz a constaté qu'il n'en 
est pas ainsi. Le tic-tac d'une montre qui, dans les cir- 
constances ordinaires, cessait d'être entendu à 1°\1 de 
distance, se distinguait encore à 2"', 25 lorsqu'on pla- 
çait la montre à une extrémité d'un tube cylindrique 
de 0"',60 de longueur et de 0"',04 de diamètre. Un 
tube cylindrique, muni d'un pavillon évasé, peut très- 
bien servir comme porte- voix. 

Lambert avait trouvé que le pavillon était un acces- 
soire inutile. L'expérience prouve le contraire : le pavil- 
lon contribue d'une manière évidente au renforcement 
du son. 
Enlin, Hassenfratz a constaté cça'eu âio\x\AMvV d'wvve 



INTENSITÉ DU SON. 75 

étofTe de laine rintérieiir d'un porte-voix en cuivre, il 
n'en diminuait l'effet que d'une manière à peine sen- 
sible. Or le revêtement de laine devait empêcher toute 
réflexion sur les parois intérieures du tube. 

Il résulte de ces faits que le renforcement du son 
c^épend uniquement de la forme géométrique de la co- 
lonne d'air d'où part la première impulsion. Comment 
cette influence s'exerce-t-elle? C'est ce que la théorie 
ne nous a pas encore révélé. On peut seulement dire 
que le tube du porte-voix contient les omles sonores, 
les empêche de se disperser trop tôt en tous sens, leur 
permet de se consolider ; c'est cette idée qui nous guide 
instinctivement quand nous nous faisons un porte-voix 
(le nos deux mains. Les anciens adaptaient aussi aux 
masques des acteurs une espèce de pavillon formant 
|)ortc-voix. 

Le porte-voix, d'ailleurs, ne renforce pas le son dons 
la direction de son axe seulement ; l'effet s'observe dans 
tous les sens à la fois. Ainsi lorsqu'on parle dans un 
porte-voix, à une certaine distance d'un mur élevé, on 
obtient un écho presque aussi fort quand le pavillon est 
tourné dn côté du mur, que lorsqu'il est tourné du côté 
opposé. 

Les tubes qui sont en usage à bord des navires ont 
rarement une longueur qui dépasse 2 mètres, avec 
0'",30 d'ouverture. En Angleterre, on en a fait d'une 
longueur de plus de 7 mètres, qui portèrent la ])îirole à 
une distance de plus de 4 kilomètres; lorsqu'il s'agit 
seulement de faire entendre un cri inarticulé, un bon 
porte-voix s'entend jusqu'à 5 ou G kilomètres. Il serait 
intéressant de faire sur ce sujet des expériences plus 
complètes. 

En Angleterre et en Amérique, ou s esV \iVi"»»kWW 



74 L'ACOUSTIQUE. 

occupé des moyens d'avertir les navires qui pasheut au 
large par les temps de brouillard, où les feux des pha- 
res cessent d'être visibles. Le plus souvent on se sert à 
cet effet d'une cloche. La cloche de File Copeland, daos 
la mer d'Irlande, est mise en branle par une machine; 
on dit qu'elle se fait entendre jusqu'à 24 kilomètres de 
distance. A Boulogne, on a une cloche installée au foyer 
d'un réflecteur parabolique; trois marteaux, mus par 
un poids qui descend, la frappent alternativement. A 
bord de quelques-uns des phares flottants, on emploie 
des tam-tam ou des canons. A l'île des Perdrix (Nou- 
veau -Brunswick), on a fait usage d'un sifflet à vapeur. 
Aux Skerries, près llolyhead, on protège, autant que 
possible, les oiseaux de mer dont les cris peuvent aver- 
tir les bâtiments ; malheureusement, des rats échappés 
du Régulas, qui fit naufrage dans cette partie du canal 
Saint-Georges vers 1856, se sont multipliés dans l'île 
et travaillent à la destruction des oiseaux. On a essayé 
d'un chat, mais l'on s'aperçut bientôt qu'il faisait cause 
commune avec les rats, et qu'il leur préférait les oi- 
seaux. 

La principale difficulté que soulève ce genre de si- 
gnaux est que le brouillard fait obstacle à la propagation 
du son. C'est du moins ce qui semble résulter des ob- 
servations de M. A. Cunningham ; on manque cepen- 
dant de données décisives à cet égard. Pour faire dis- 
tinguer les signaux des différentes stations, on peut 
employer des sons intermittents, ou une succession de 
notes différentes. M. Cowper et M. Holmes ont proposé 
pour cet usage des trompettes à vapeur ; le capitaine 
Ryder veut combiner un canon avec un sifflet. Peut-être 
serait-il possible de propager un son très-intense à 
travers Tcau même ; pour Venlendre,\e^TcvArâvs» ^lou- 



INTENSITÉ DU SON. 75 

géraient dans l'eau un long cornet acoustique comme 
celui que CoUadon employa sur le lac de Genève : ils 
pécheraient en quelque softe le son. Praetorius a inventé 
un instrument analogue pour la terre ferme : c'est une 
espèce de pelle qu'on enfonce dans le sol ; on applique 
l'oreille au manche, dont le frémissement trahit l'ap- 
proche de Tennemi. L'inconvénient de ces moyens, c'est 
qu'ils n'indiquent nullement la direction d'où vient le 
bruit. 

Quand le son se propage dans une masse d'air limi- 
tée, il ne perd que très-peu de sa force. Les tubes acous- 
tiques nous en offrent un exemple frappant. Ce sont de 
longs tuyaux de métal ou de caoutchouc à l'aide des- 
quels on peut tenir une conversation à distance. On 
8 en sert dans beaucoup de maisons pour communiquer 
à travers plusieurs étages, à bord des navires pour par- 
ier au gabier quand il est dans sa hune, etc. Quelqu'un 
a même proposé de tirer parti des tubes acoustiques, 
combinés avec des sonnettes électriques, pour rempla- 
cer les portiers par une communication directe avec 
tous les étages de la maison. 

Dans les expériences que Biot a faites sur la propaga- 
tion du son dans les tuyaux des aqueducs de Pnris, il 
s'est trouvé que les sons les plus faibles se transmet- 
taient parfaitement à travers une colonne d'air de 
950 mètres de longueur ; « de sorte, dit-il, que pour 
ne pas s'entendre, il n'y aurait eu qu'un moyen, celui 
de ne pas parler du tout. » Lorsqu'on tirait un coup de 
pistolet à une extrémité du conduit, Tair était chassé 
du dernier tuyau avec assez de force pour produire sur 
la main un vent impétueux, pour lancer à plus d'un 
demi-mètre des corps légers et pour éteindre des bor 
gies allumée^. 



76 L'ACOUSTIQUE. 

Dans les foires on )3tait toujours sûr autrefois de ren- 
contrer Voracle de Delphes, simple tête de Turc qui 
répondait très-bien aux demandes qu'on lui adressait 
en lui parlant à l'oreille. Ces effets étaient obtenus par 
l'emploi d'un tube acoustique caché dans le piédestal 
de l'appareil et communiquant avec une pièce où se 
tenait un compère. Ce qu'on a vu de plus ingénieux 
dans ce genre, c'est la femme parlante du gendre de 
M. de Kempelen. Une femme à tête de cire était assise 
sur une chaise que l'on plaçait tour à tour dans deux 
endroits différents de la salle où Ton recevait les cu- 
rieux. On lui parlait à l'oreille, la réponse semblait 
sortir de la bouche. Voici comment s'obtenait ce résul- 
tat. Un tuyau acoustique qui débouchait dans le creux 
de la tête de cire traversait l'un des pieds de la chaise. 
Deux autres tubes qui partaient d'une pièce voisine dé- 
bouchaient sous le plancher de la salle, en deux point? 
marqués chacun par un petit clou. Dans le voisinige de 
ces points, le plancher avait été usé en dessous, de ma- 
nière à ne plus former qu'une très mince cloison, et 
percé d'un très-petit trou. On avait soin de placer la 
ehaise de telle sorte que le pied qui était creux vîut se 
poser près de Tun des deux clous. 

La femme invisible qui excita, au commencement de 
ce siècle, une si ^^ande sensation dans les principales 
villes du continent , s'explique d'une manière tout 
aussi simple. L'organe le plus apparent de cette ma- 
chine (lîg. 25) était une sphère creuse, munie de quatre 
appendices en forme de tronq>etles, et suspendue libre- 
ment à un support en (il de Ter, ou bien au plafond de 
la chambre, ]>ar quatre rubans de soie. Cette sphère 
était entourée d'une cage en treillis soutenue par quatre 
/)//wrs, dont lun était creux el eowwcvwvvv^'axV %\^ le 



INTESSITÉ DU SOS. 77 

âo). Le tube acoustique qui le traversait débouchait au 
milieu de l'une des traverses horizontales supéiicures, 
où il y avait une fente très-étroile, à peine perceptible 
à l'œil, taisant face à l'orifice de Tune des quatre trom- 
pes. La voix semblait alors sortir de la sphère. Il est 
probable que la personne qui se tenait dans la pièce 
voisine et qui donnait les réponses, jwuvait voir pur 




Fig. ÎS. la temtae 1)1 

une fente dans le mur ce qui se passait dans la salle.' 
Les demandes se faisaient en pat tant dans I orilice de 
l'une des trompes. 

Les cheminées, les conduites de gi7 les calorifères 
propagent le son d'une manière i cniarquable I orsqu on 
applique l'oreille au foyer de certaines cheminées, on 
entend distinctement tous les bruits du dehors Dms 
les prisons et dans les mnisoiis de fous on cvitc d établir 
des tuyaux de conduite le lon^ des murs, parce t\vi ils 
(Kturraieiit /tennelfrc aux priaonti\CT3 àç, ç»v«to.\\\\\*y'»^'* 



78 L'ACOUSTIQUE. 

les uns avec les autres, et troubler les malades dont la 
folie est douce, en faisant arriver jusqu'à eux le bruit 
que font les fous furieux. 

A Carisbrook-Castle, près Newport, il existe un puits 
remarquable par ses propriétés acoustiques. Lorsqu'on 
y laisse tomber une épingle, on entend distinctement 
le choc qu'elle produit en frappant la surface de l'eau. 
Le diamètre de ce puits est de 3 mètres et demi, sa 
profondeur de 64 mètres. 

Dans les faits de ce genre, il est quelquefois difficile 
de décider quelle est la part pour laquelle la matière 
des parois contribue à la propagation du son qui mar- 
che dans un canal fermé. 

La même remarque peut s'appliquer à la transmis- 
sion du son le long d'une surface unie. Ilutton a con- 
staté qu'une personne qui lisait à haute voix était en- 
tendue sur la Tamise à une distance de 36 mètres, et à 
terre seulement jusqu'à 23 mètres. Dans lé théâtre 
Argentino, à Rome, on a remarqué que la voix des ac- 
teurs s'entendait beaucoup plus loin depuis qu'on avait 
construit une conduite d'eau squs le plancher de la 
salle. Dans ces cas, il est probable que l'eau n'était point 
sans influence sur la propagation du son. 

Sous les coupoles sphériques des églises on observe 
souvent des effets d'acoustique vraiment extraordinaires 
et qui ne s'expliquent pas plus que l'effet du porte-voix 
par la réflexion des ondes sonores. Ces voûtes semblent 
guider le son. Ainsi le P. Kircher affirme que deux per 
sonnes placées en deux points opposés de la large gaJc 
rie (juifait à l'intérieur le tour de la coupole de Saint- 
Pierre à Rome, s'entendent parfaitement en parlant à 
voix basse et sans qu'on puisse les entendre ailleurs. 
On peut encore citer, à ce sujet, la couçole de Saint- 



INTENSITÉ DU SON. 79 

Paul à Londres : une montre, placée près du mur, sur 
la galerie qui règne à la naissance de la voutc circulaire, 
s'entend distinctement du côté opposé. Dans l'église de 
Glocester, deux personnes qui se parlent bas sur la ga- 
lerie à l'est du chœur, s'entendent à une distance de 
50 mètres. D'après Brydone, Téglise cathédrale de Gir- 
genti offre un phénomène analogue. Quand la grande 
porte est fermée, tout ce qui se dit à voix bassse près 
de cette porte parvient à l'autre extrémité de la nef, 
mais Ton n'entend rien au milieu. 

Ces effets ne s'expliquent que d'une manière très- 
imparfaite par la réflexion des rayons sonores à l'aide 
de laquelle on rend compte des phénomènes des voûtes 
elliptiques, ainsi que nous le montrerons dans le cha- 
pitre suivant. Les surfaces agissent comme si elles 
guidaient le son. Hutton raconte que le long du mur 
d'un jjirdin de Kingston, deux personnes qui parlaient 
Irès-bas s'entendaient fort bien à 60 mètres de dis- 
tance. Ces effets sont encore plus saisissants quand le 
son est guidé par une gouttière demi-cylindrique ou 
par un autre canal ouvert. Hassenfratz plaça une mon- 
tre à l'extrémité d'une rigole formée par deux planches 
assemblées en toit ; il put alors entendre le tictac du 
balancier à une distance de vingt-cinq pas, tandis que, 
dans l'air libre, il cessait de l'entendre à plus de deux 
pas. Quelques édiRces offrent cette disposition d'une 
manière accidentelle. A l'Observatoire de Paris, il existe 
une salle hexagone dont les angles opposés sont réunis 
par une sorte de gouttière qui parcourt la voûte ; deux 
personnes, placées à deux angles opposés, peuvent y 
causer à voix basse sans être entendues par les assis- 
tints. Un vestibule voûté, au bas du grand escalier du 
Conservatoire des arts et métiers, à Çam, of^t^V^w^^^^^ 



80 L'ACOUSTIQUE. 

particularité. Les sous s'y propagcut suivant Tarètc d'une 
voûte en arc de cloître et descendent ensuite dans l'an- 
gle des mur^. 

Les effets des cabinets par/anfs reposent sur l'applica- 
tion habile de principes analogues ; très-souvent ils ré- 
sultent d'une disposition accidentelle des murs. L'exem- 
ple le plus curieux de ces phénomènes d acoiistiqne 
nous est offert par Y oreille de Denys, dans les carrièâres 
de Syracuse, en Sicile. C'est une caverne au fond, de 
laquelle le tyran de Syracuse avait fait construire; un 




Fig. 26. Plan do roreillc de Denys. 



cachot pour ses prisonniers, et dans laquelle le son se 
propage de telle façon que le moindre bruit, la moindre 
parole s'entendent distinctement à l'entrée du conduit 
souterrain, où se tenait un gardien. Voici, d'après Kir- 
cher, le pian de la caverne. L'entrée est en c, le cachot 
se trouvait en (/ ; ff est la projection d'une gouttière 
large de 0'",75, creusée au milieu du plafond de la ca- 
verne, à 30 mètres au-dessus du pavé : elle se termine 
en e, à la demeure du gardien. /; est une cavité prati- 
quée dans la paroi latérale. Le canal ff agit comme une 
sorte de conduit auditif. Il y a longtemps que l'orifice 
e a été muré, et il en résulte que l'antre du roi Deny^ 
produit liujourd'lnn des effets d'écho très-bizarres. U 



INTENSItÉ DU SO^. 83 

peuple lui a donné le nom de grotta délia Favella (grotte 
de la causerie). Kircher a visilé cette caverne. Il rapporte 
que le moindre son y est renforcé d'une manière pro- 
digieuse : un mot prononcé à voix basse devient une 
clameur, et si on frappe avec la main sur un vêtement, 
on dirait un coup de canon; Un chant à deux voix est 
répété de telle façon qu'il vous semble entendre 
un quatuor. La longueur totale de la caverne est de 
15 mètres. 

Kircher a imaginé une foule de constructions desti- 
nées à imiter l'oreille de Denys. Ce sont de grands 
tubes recoquillés dont le pavillon est tourné vers l'en- 
droit où se produisent les sons, et qui débouchent par 
l'autre extrémité dans l'intérieur de l'appartement où — 
les murs ont des oreilles. Cela nous amène à parler du 
cornet acoustique^ instrument destiné à renforcer les 
sons en les condensant. On lui donne une infinité de 
formes, dont la plus simple et la moins efficace est le 
cône. L'essentiel, c'est que le pavillon extérieur soit 
plus large que l'orifice que l'on introduit dans l'oreille. 
On comprend qu'alors le mouvement sonore contenu 
dans la tranche d'air qui remplit le pavillon se con- 
centre dans des tranches de plus en plus petites, et 
devient, par conséquent, plus intense en chaque point 
de l'orifice qu'il ne l'était dans le pavillon. 

Vers la fin du dix-septième siècle, on employait des 
cornets acoustiques qui avaient la forme des cors de 
chasse. Un des modèles les plus généralement usités 
est celui que représente le numéro 1 de la figure 28. 
Une autre forme très-employée est celle du numéro 2. 
Curtis a fait construire des cornets qui pouvaient s'étirer 
comme les lunettes d'approche (n** 3). Ittard n indiqué 
une série d^autres systèmes. Le premier ^^vV* V\ ^"sX \xr 



84 



I/ACOUSTIQUE. 



espèce d'ellipsoïde, muni d'un pavillon et d'un tube re- 
courbé qui s'enfonce dans l'oreille ; les lignes pointil- 
lées sont deux membranes en baudruche qui, sans, 
renforcer le son, le rendent moins confus. Un autre 
système est représenté par le numéro 5 ; pour le réali- 
ser, Ittard conseille de prendre une coquille de vis, de 
fuseau ou de strombe, et d'y ajouter un pavillon et un 




Fi p. 28. — Cornets acoustiques. 



petit tube pour roreille ; on peut encore, si Ton veul, 
introduire dans le pavillon une ou deux membranes en 
baudruche, comme l'indiquent dans la figure les lignes 
ponctuées. 

Tout récemment, M. Kœnig a construit un cornet 
acoustique qui est en même temps un stéthoscope (n*^6). 
Une capsule fermée par une membrane communique 
avec l'oreille au moyen d'un tube de caoutchouc, 
terminé par un bout en ivoire. Lorsqu'on parle 
devant la membrane^ celle-cî s'ag\le elipow^^^t \^ tç^V^uue 



INTENSITE DU SON. 85 

d*air qui est dans le tube contre le tympan de l'oreille. 
S'il s'agit d'employer cet appareil comme stéthoscope, 
on remplace la membrane simple par une lentille for- 
mée de deux membranes que l'on gonfle par insufflation 
au moyen d'un robinet latéral. La membrane antérieure 
s'applique sur la poitrine du malade, elle se moule sur 
la peau et en transmet iidèlement les frémissements à 
Tair emprisonné dans la lentille, qui les transmet jus- 
qu'à l'oreille du médecin. Avec cet appareil, on peut 
s'ausculter soi-même en pressant la capsule contre la 
poitrine et en introduisant le bout du tube de caout- 
chouc dans l'oreille. La même capsule peut recevoir 
jusqu'à cinq tubes, de sorte que, dans une clinique, 
plusieurs élèves peuvent ausculter simultanément le 
même malade. La longueur des tubes peut aller à 4 mè- 
tres et plus sans que le son paraisse affaibli. Avec 
ce stéthoscope, un médecin pourrait donc, sans sor- 
tir de son cabinet, entendre les battements du cœur 
d'un malade qui se trouverait à plusieurs étages au- 
dessus. 



VITESSE DU SON 



l!cr«^nn«. — Iji Bureau «le^ loDgitu<le>. — Le capitaine Parry. — M. Regnault. 
— |{<?udant. — iUMsttUn etStarm. — Biol. — Weilheim. — Dislances par le 
t>on ; M, d'Abbadie. — Dislance d'an orage. — Profondeur d'un lac par 
l'fkho du fond. 



Le son ne se propaj^e point instantanéineut ; c'est ce 
qu'ont remarqué les premiers observateui^ qui se sont 
occupés (les phénomènes sonores. Le bruit du tonnerre 
ne s'entend ordinairement que longtemps après l'éclair, 
et l'intervalle est d'autant plus grand que le nuage ora- 
geux est plus éloigné. Mais quel est le temps exact que 
le son met à franchir une distance donnée? en d'autres 
termes, quelle est sa vitesse de propagation? Cette (|ues- 
tion a déjà préoccupé Mersenne et Kircher. « La lu- 
mière, dit Mersenne, s'étend dans toute la sphère de 
son activité dans uninstnnt, ou si elle a besoin de quel- 
que temps, il est si court que nous ne pouvons le remar- 
<|uer : mais le son ne peut remplir la sphère de son ac- 
tivité (pie dans un espace de temps qui est d'autant plus 
long que le lieu où se fait le son est plus éloigné del'o- 
H''i))Of roinincïon expérimente en plusieurs manières, et 



VITESSE DU SON. 87 

particulièrement lorsque Ton voit que la hache ou le 
maillet du bûcheron ^ et des autres qui frappent ^ur 
quelque corps, a déjà frappé deux coups lorsque Ton 
oyt le premier coup ; ce qui arrive quand on est éloigné 
de cinq ou six cents pas, ou davantage. Or il faudrait 
faire plusieurs expériences pour savoir si la tardîveté du 
son suit la grandeur des espaces. . . » Le P. Mersenne dé- 
crit alors les expériences par lesquelles on pourrait 
connaître la vitesse du son ; elles consistent k compter 
les battements du pouls depuis le moment où l'on 
aperçoit le feu d'un mousquet ou d'une pièce d'artillerie 
jusqu'à celui ou l'on entend la détonation. Il rapporte 
les observations de ce genre qui ont été faites au siège 
de la Rochelle, par l'un des capitaines; mais les résultats 
sont très-discordants, et Mersenne en conclut que la 
vitesse de propagation du son varie beaucoup suivant 
les circonstances atmosphériques ou locales. Toutefois, 
il croit pouvoir admettre que le son va moins vite que 
la balle d'une arquebuse : en effet, dit-il, « on voit les 
oiseaux qui tombent morts de dessus les branches des 
arbres avant qu'on oye le bruit ou le son du coup, quoi- 
que l'oreille soit proche de ladite arquebuse. En 1675, 
Kircher déclare que rien de certain n'est encore connu 
sur la vitesse du son, mais que l'Acadéniie florentine 
s'occupe d'instituer des expériences destinées à éclaircir 
ce sujet délicat. Ces expériences paraissent avoir eu 
lieu dès 1660. On avait observé le temps qui s'écoulait 
entre l'éclair d'un coup de canon et l'arrivée du bruit. 
La vitesse trouvée était de 350 à 560 mètres par seconde. 
Un moyen direct d'acquérir une notion approchée de 
la vitesse du son est fourni par l'écho. Le P. Mersenne 

^ I.ucièce fait la même reinan|ue. 



88 L'ACOUSTIQUE. 

avait constaté, à l'aide d'un pendule qui battait la se- 
conde, que Ton peut prononcer sept syllabes dans cet 
espace de temps. Or un écho éloigné de 81 toises répond 
sept syllabes ; il faut une seconde pour les prononcer et 
on les entend qui reviennent pendant la seconde sui- 
vante. Le son parcourt donc 81 toises en allant et 
autant en retournant, c'est-à-dire 162 toises en toat 
dans l'espace d'une seconde ; « de manière, dit Mersenne, 
qu'ont peut choisir ce nombre de toises pour la vitesse 
des sons réfléchis, laquelle j'ai toujours trouvée ^Ic, 
soit que l'on use du bruit des trompettes et des arque- 
buses, ou de celui des pierres, et de la voix grave oo 
aiguë...» Ces expériences, d'après lesquelles la vitesse 
du son serait d'environ 516 mètres par seconde (nous 
verrons tout à l'heure que ce nombre est déjà très-rap- 
proché de la vérité), furent plus tard discutées par le 
P. Kircher, qui élève une foule d'objections contre la 
prétendue constance de la vitesse du son. 11 dit, par 
exemple, qu'un son très-fort doit se réfléchir plus vite, 
comme une balle poussée contre un mur revient d'au- 
tant plus vite que le choc est plus violent. La compa- 
raison est très-fausse, car le son n*est pas répercuté 
comme une balle, puisque la masse d'air dans laquelle 
se propage le sou ne change pas de place ; l'air reste 
immobile, il ne se précipite pas vers l'obstacle et n'en 
revient pas vers l'oreille. On ne peut donc pas juger du 
mouvement sonore d'après l'analogie du mouvement 
d'une balle élastique. Kircher prétend aussi que l'écho 
voyage plus vite pendant le silence de la nuit qu*à tra- 
vers les mille bruits confus du jour, et 'que les venls 
exercent une grande influence sur la propagation du 
son. 

Les j»remières expériences exactes suv la vitesse du son 



TITKSSE DU S0!(. 89 

ans Tair furent instituées en 175S par une commit- 
on de l'Académie des sciences, composée de Lacaille. 
[araldî et Cassini de Thury, qui s*adjoignirent plusieurs 
ides. Ils avaient choisi pour stations robserratoire de 
aris, la pyramide de Montmartre, le moulin de Fon- 
înay-aux-Àoses et le château de Lay, à Montihéry. Des 
ièces de canon placées sur les hauteurs de Monllhéry et 
e Montmartre, dont la distance est de 29 kilomètres, 
raient altematiyement, et lesobsenrateurs installés aux 
aatre stations mesuraient, à Taide d^un |>endule à se- 
)ndes, le temps qui s'écoulait entre Farrivée du bruit 
t Tarrivée de la lumière. On trouva que le son mettait 
n moyenne 1 minute 24 secondes à franchir la distance 
e 29, 000 mètres, ce qui donne 357 mètres par seconde 

la température d'environ 6"*. On reconnut aussi que le 
dn était retardé par un vent contraire, et accéléré 
>rsqu*il marche avec le vent. 

Ces expériences furent répétées, avec quelques mo- 
ifications, par Kaestner, Benzenberg, Goldingham et 
'autres physiciens, mais leurs résultats n'inspirèrent 
u'une médiocre confiance. Une i^ouvelle mesure fut 
onc entreprise en 1822, à la demande de Laplace, par 
PS membres du Bureau des longitudes. On fit porter 
eux pièces de canon. Tune sur la butte de Montihéry, 
autre sur celle de Villejuif ; la distance est de 18,615 
lètres. A Villejuif se trouvaient de Prony, Arago et 
I. Mathieu ; à Montihéry, Alexandre de llumboldt, 
ray-Lussac et Bouvard. Chaque observateur était muni 
'un chronomètre à arrêt qui marquait au moins les 
ixièmes de seconde. Les coups de canon tirés de Mont- 
liéry furent tous entendus à Villejuif, mais les coupf 
nverses étaient tellement affaiblis, qu^on n'en entend! 
|u* un petit nombre; cette circonstance s\i\vi^wV\Vx^ i 



90 L'ACOUSTIQUE, 

permit pas de tenir compte de l'in(]ucnce du veniaus» 
exactement qu'on l'aurait voulu. On Irouva la vitesse 
du son égale à 351 mètres à la température du zéro. 

Depuis ces mémorables expériences, on en a fait de 
nouvelles en Allemagne, en Hollande, dans l' Amérique 
du Nord, etc. Pendant le voyage de Franklin ans ré- 
gions polaires en 1S25, lo lieutenant Kendall fit tirer 
quarante coups de canon sur les bords du grand laedn 
Uurs, à des températures comjirises entre 2° et 40* 
dessous dezéro. Le capitaine Parry fit également 
ques observations sur la propagation du son à dea 
pératures très-basses : au Winter-Island ileut 41'^ 
port Ifowen 38° au-dessous de léro. 

Les résultats de tontes ces mesures montrent 
vitesse du son dans un air calme ne doit pas 
s'éloigner de 531 ou 552 mètres par secondai 
cbaquc degi'é de clialcnr il faut ajouter environ 0' 
sorte qu'à 15° cette vitesse devient égale à 540 

Itiot a imaginé une expérience ingénieuse pour 
rcr si les sons de hauteur dillérentc se pru|)ageiiti 
mentviLc. Si les noti'.sn'avaiL'ulpas toutes la nicme 
il est clair qu'un air musical, entendu de fort totii, 
ressemblerait plus ; la mesure serait trou Idée paiv«, 
certaines notes scniient entendues trop tèt ou trop 
Dans \iis circonstances ordinaires, on ne s'apercevrait pH 
d'une petileiuégalitéilausia propagation des notes, quind 
niénut elle existerait, parce que la distance oîi lesontlr» 
instruments de musique s'entend encore distinctement 
n'est pas snflisante pour faire apprécier une pamlli' 
inéKiditc'i, Voici aimnicnl s'y jirit ISiot pour augmenltr 
la distance. Il lit jouor un air de llùte à l'une des extn'- 
mités de l'aqueduc d'Arcncil, CDiuposé de tiiyanx d'une 
Ioitgncnrdelotale9ôlinèlres,d'oiiri'auavaitétérotin!'i'. 




VITESSE DL* ^ 



j^Inçant lui-même à l'autre limit, il ùcoiitnit. La 
nette et parfaitement rliythniéc ; les 
te se propageaient donc avec une vitesse uniforme. 
De I862à I86fî, M. VittorRegnauit a repris ces déter- 




linaLion:!! avec toutes les ressources de la pliysirji 
[iioilernc. lilnviron 400 coupsde eanonont été tires dans 
la plaine du Sutory. L'arrivée du Ijruit était constatée 
des membranes tendues qui, en repoussant un poti 
idiile, iulerroiiijt.iient tm tirruil é\eeVm\\\« . \; \ws\-»\\ 



J 



1t ^ «âl.iaTTJt'li. 

QL '^iiio itt ^n -^ ! ¥cr:j:9iit ht «w, «or li membraoe 
-»SMtvnL -aur^tfîhGr»» laur hl -aAmrayfa- Smsc sur une 
moitit m jiiousr r^ïKîiiiTNsus m 3uir >it fiakée. Sur la 
mmiK nantit, hih otsiuimtt: ■âgt.tiini narquait ia 
4<i»f»naiCit i ''Jit^ CjnÊi jumn» isM j nm AifKfeçoo TÎbrant, 
«ym Vii;;aifc iis» 'asmoani» -Àf jifinialif-. Ces expériences 
farai fi ï yéi m «r f è iTim ^ ca^iMif^â gn, et ender- 
OMT Sra dba» k Biamdt t«s»i^ iiimiliwt sous le boule- 
vard Saaat-MkkL j«r aBit «fïe de br;^ tubes de 
fonCe i)w fiwwBi BBe kotgMsr depht$d*iui kilomètre 
et demi. On oliaeitj it les iHtmrs smtoesâSs du bruit 
d^Bfl ffîstolel oo d'âne i io m p elle, en fennjot une trappe 
stmmU qœ le m» avait été Imcê dans le tnbe; il allait 
tfi revenait alors jnsqn'iâ dix lob« ébranlant les mem- 
tiran^ dûçposées le long de sa route. M. Regnault a étu- 
dié également la transmisâon d*nn simple choc cmnmu- 
niqué â la colonne d*air, sans effet sonore. J*ai assisté à 
quelques-unes de ces expériences, qui ont donné lieu i 
iUtn résultats curieux. 

M« Regnault a d*abord constaté que la vitesse du son 
diminue à mesure que la distance augmmte. Dans l'air 
cjilme, sec et à zéro, il Ta trouvée égale à 531'*,37, la dis- 
lance étant de 1 280 mètres, et à 550^,7 seulement quand 
la distance était de 2,445 mètres. Les expériences faites 
tivec les tuyaux ont donné un résultat analogue. Il a été 
('(Utstaté ensuite que la vitesse du son augmentait avec 
HOU intensité^ c'est-à-dire avec la charge de poudre 
qui hî produisait'. Dans les conduites, laportéeet la vi- 
loNNn nioynnne du son augmentaient encore, à charge 
ôgalo, avec le calibre des tuyaux. 

♦ C.o n^miUnl «»j»l «i'nowni nvoc une assertion de James Ross, qoi 
tMNt>nil PO r<i|))H«lor «|uo dans les oxpôricncos de Parry, où la distance 
iMail \\^ i kiloiiuMiV!*, los courts do canon éliiicnt entendus avant la voix 



J 



L. 



c 



■j 



VITESSE bU SON. 93 

M. Regnault distingue la portée sonore de la portée 
tilendeftsey qui correspond aux derniers mouvements 
des membranes. Voici les portées observées dans la 
conduite à gaz d'Ivry (calibre 0*^,1 1), dansune conduite 
de la route Militaire (O'^'fSO) et dans celle de Tégout 
Saint-Michel (l",!©), avec une charge de 1 gramme. 
Ces portées ont été estimées d'après le nombre des re- 
tours du son réfléchi. 



CALIBRE 


LOXGCEOK 


l'OnTÉE SONORR 


PORTÉE SILE.\CIEl'>E 


OMl 


5C7- 


1,15(r 


4,050" 


0-,30 


1,905 


5,810 


11,450 


1-,10 


i,590 


9,540 


19,850 



Dans une autre conduite de 1 '"J 0, qui forme le grand 
siphon de Yillemonble, on a constaté dix retours avec 
une charge de 2^,40, ce qui donne une portée si- 
I lencieuse de près de 100 kilomètres. La vitesse du son 

I diminuait d'un retour à l'autre ; ainsi dans la conduite 

I 

deTégout, elle descendait de 554 à 550 mètres; dans 
b conduite d'Ivry, de 551 à 526 mètres. La nature de 
la paroi exerce aussi son influence; on a remarqué que 

■J le son porte plus loin dans les galeries à parois lisses 

J que dans celles où les murs sont formés de meulière 
brute. 

^ Dans Tune des dernières expériences, il a été con- 
staté que les sons graves vont plus vite que les sons 
aigus ; M. Kœnig a entendu le son fondamental d'une 
trompette revenir avant les harmoniques, lesquels se 
succédaient par ordre d'acuité. 
M. Regnault a enQn mesuré la vitesse du son dans 
I des gaz autres que Tair. 11 l'a trouvé égale à 5,8 dans 

** Thydrogène, à 1,2 dans l'ammoniaque, à 0,8 dans 
l'acide carbonique et le protoxyde d'azote, en prenant 
pour unilé la vitesse observée dans l'air. 



94 L'ACOUSTIQUE. 

On s'est encore occupé de mesurer la vitesse av 
laquelle le son se propage dans les liquides. Beudant 
a songé le premier. Il fit amarrer deux bateaux dans 
port de Marseille en deux points dont la distance et; 
connue. Dans le premier était un aide chargé de fra 
per une cloche immergée à côté du bateau ; à chaq 
coup, il donnait un signal qu'on pouvait apercevoir 
Tautre bateau. L'observateur installé dans celui-ci ma 
quait le moment où il voyait le signal, et celui où i 
autre aide qui plongeait, lui annonçait l'arrivée du si 
dans Teau. La différence de ces moments devait être 
temps employé par le son pour franchir la distance d 
deux bateaux. Beudant trouva de cette manière que 
vitesse du son dans l'eau de mer était d'envin 
1 ,500 mètres par seconde ; mais il attacha si peu d'il 
portance à ce résultat, vu l'imperfection des moye 
employés, qu'il ne jugea pas à propos de le publier. S 
expériences sont r.ipportées dans le Mémoire de Coll 
don et Sturm. 

Ces deux physiciens ont mesuré en 1826 la vites 
du son dans l'eau du lac de Genève. La profonde! 
considérable du lac (elle est en moyenne de 140 m 
très), ctla limpiditéde son eau, qui ne contient que trè 
peu de substances étrangères, le recommandaient d'ui 
manière toute spéciale pour des expériences de ce genr 
La plus grande distance que l'on put se procurer ( 
eau profonde fut trouvée entre Rolle et Thonon : el 
est de 15'''',500. Près de Rolle, on amarra unebarqi 
portant une cloche du poids de 65 kilogrammes, qi 
plongeait dans l'eau. Tout était réglé de telle sorte qu'a 
moment où un marteau touchait la cloche, une mècl 
enflammée tombait sur un tas de poudre disposé sur i 
pont. Une /îiitre barque éu\l am^Yvè^ dw côté de Tli( 



VITESSE DU SON. 95 

lion. Les observateurs qui s'y trouvaient épiaient l'arri- 
vée du son dans l'eau avec un cornet acoustique d'une 
construction spéciale, représenté fig. 30. Il se composait 
d'un long tube en forme de cône 
évasé et recourbé, dont l'orifice \ 

était fermé par une membrane. il 

L'observateur tournait la surface b^ - — y^-J | ^,=.„^ 
de cette membrane du côté d'où ^— ~^--J^=^^^ -' 
le son devait arriver, et collait ^^^^^^^^= 
l'oreille à l'extrémité supérieure 2 -^^Ê^^^^-'-i 
du cône, en regardant attentive- — ir"3 y 
ment du côté de la barque qui ~ ~ 

portait la cloche. Au moment où *^* ^ ' 

il apercevait l'éclair, il lâchait la détente d'un compteur 
à pointage, sorte de montre dont l'aiguille peut être 
arrêtée ou remise en liberté par une simple pression 
sur un bouton. On l'arrêtait au moment où le son de la 
cloche était perçu : ce fut toujours environ 9 secondes 
après l'éclair. En divisant la distance des deux bateaux 
par l'intervalle observé, on obtenait la vitesse du son 
dans l'eau; elle fut trouvée égale à 1,435 mètres; 
c'est plus de quatre fois la vitesse que le son a dans 
lair. 

Ces expériences ont permis de faire plusieurs remar- 
ques intéressantes sur la manière dont le son se pro- 
page dans l'eau. 

Loin d'être vibrant et prolongé comme lorsqu'il est 
transmis par l'atmosphère, le son de la cloche était sec, 
comme le choc de deux lames de couteau. L'eau, qui 
est très-peu compressible, le dépouillait complète- 
ment de son timbre accoutumé. Le dernier jour, le lac 
était très-agité ; on avait toutes les peines du monde i 
tenir les barques en place, mais le mou\cmevvV,à^\^'aN 



96 L'.iCOU&TIQUE. 

se montra sans influence sur le résultat des observa- 
tions. 

Wertheim a, plus tard, déterminé la vitesse du son 
dans plusieurs liquides par une méthode indirecte, en 
les faisant vibrer et résonner comme des gaz. Dans Té- 
ther et dans l'alcool absolu, cette vitesse a été trouvée 
égale à 1 ,160 mètres ; dans une dissolution de chlorure 
de calcium elle était de 1,980 mètres; ce sont les deux 
extrêmes. 

Dans les corps solides, le son marche beaucoup plus 
vite que dans les gaz ou dans les liquides. Les premiers 
expérimentateurs qui ont voulu en mesurer la vitesse 
dans des lattes de bois, dans une corde, etc., l'ont 
trouvée trop grande pour être appréciée. Hassenfralz 
essaya en vain de la déterminer dans les parois des car- 
rières de Paris. Les premières mesures un peu sérieuses 
sont dues à lUot et Martin, qui se servaient des tuyaux 
de fonte destinés à porter les eaux de la Seine de la 
machine de iMarly à Taqueduc de Luciennes. Le son 
d'un petit timbre suspendu à une extrémité du conduit 
arrivait à l'autre extrémité de deux manières : d'abord 
par la fonte, puis, 2%50 plus tard, à travers la colonne 
d'air intérieure. La longueur totale des tuyaux était de 
951 mètres. Dans l'air, le son franchit cette longueur 
en 2%î»5 ; en retranchant de ce nombre l'avance de 2%50 
qu'il avait sur le son transmis par la fonte, on trouve 
que ce dernier employait 0%o5 à parcourir les tuyaux. 
H en résulte une vitesse d'environ 2,700 mètres. 

Cette détermination n'est pas exacte ; le nombre 

trouvé est trop faible. Cela s'explique par la résistance 

que les rondelles de plomb intercalées entre les tuyaux 

devaient opposer à la transmission du son. Plus tard, 

J/JJ. Dreguet et Wertheim oulmesvxtfe Vvi VvVftssede pro- 



VITESSE DU. SON- 97 

pagatioD du son dans les fils télégraphiques du chemin 
de fer de Versailles (rive droite). L'un d'eux frappait, 
à un moment donné, un coup de marteau sur un poteau 
tendeur; l'autre notait l'instant où il entendait le son. 
Ces observations ont donné 3,485 mètres pour la vitesse 
du son dans le fil de fer. 

Par la méthode des vibrations, qui est une méthode 
indirecte, Wertheim a trouvé la vitesse du son dans 
quelques autres métaux. Dans le plomb, elle est égale 
à quatre fois celle qui a lieu dans l'air, ou à environ 
1,300 mètres ; dans Targent et dans le platine, elle est 
d'environ 2,700 mètres; dans le zinc et le cuivre, elle 
atteint 3,700 mètres ; dans le fer et l'acier, elle devient 
égale à 5,000 mètres, et dans le verreà glaces elle est 
de 5,200 mètres. La plus grande vitesse du son est celle 
queChladni a constatée dans le bois de sapin, par une 
méthode analogue : 18 fois la vitesse qui s'observe dans 
l'air, ou près de 6,000 mètres. 

Pour comparer ces divers résultats, imaginons que 
le tunnel en maçonnerie que M. Thomé de Gamond 
propose de construire sous la Manche ait été réalisé. La 
distance du cap Grisnez à la pointe Eastware, stations 
projetées de la voie sous-marine, est d'environ 55 kilo- 
mètres. Un coup de canon tiré au cap Grisnez serait donc 
entendu à la station anglaise au bout d'environ 97 se- 
condes, à travers l'atmosphère ou par la colonne d'air 
enfermée dans le tunnel. L'eau de mer transmettrait la 
secousse en 23 secondes. Par les rails de la voie ferrée, 
«lie arriverait en 6%50, par les fils du télégraphe pro- 
bablement un peu moins vite. Enfin, s'il y avait une latte 
de sapin assez longue pour joindre les deux rives op- 
posées, elle transmettrait le son en 5% 50, le temps de 
prononcer rapidement trois alexandrins. 



96 L'ÀGOOSTIQUE. 

La vitesse du son dans l'air étant connue, on peut 
s^en servir pour mesurer approximativement une dis- 
tance ; on dbserve Tintervalle qui s'écoule entre Téclair 
d'un coup de feu et l'arrivée du bruit ; chaque seconde 
de retard représente 340 mètres. On estime ainsi Téloi- 
gnement d'un orage en comptant les battements de pouk 
entre l'éclair et le tonnerre ; 4 ou 5 battements corres- 
pondent à 1 kilomètre. L'idée de mesurer ainsi des dis* 
tances terrestres se rencontre déjà chez Mersennç. 
M. d'Âbbadie en a tiré partie en Ethiopie ; il y a mesuré 
plusieurs bases par le moyen du son. Ainsi, dans l'ile 
de Moçawa, pendant le ramadan ou mois de demi*jeûne 
des musulmans, on tire tous les soirs, au coucher du 
soleil, un coup de canon qui annonce la rupture du 
jeune. M. Antoine d'Abbadie en profita pour observer 
le temps qui s'écoulait entre l'éclair et l'arrivée du son 
au rivage opposé. Il prit station sur une colline près 
du village d'Omkullu, sur la terre ferme, et y attendit 
le coup de canon du fort Mudir. Le son lui arriva 18 se- 
condes après la perception de l'éclair, par une tempéra- 
ture de 35° ; la distance était donc de 6,440 mètres. 
Une autre fois, M. d'Abbadie mesura, par le même pro- 
cédé, la distance de la ville d'Adoua au mont Saloda. 
Son frère Arnauld s'installa sur la montagne avec un 
fusil à mèche ; lui-même était sur le toit d'une maison 
de la ville, armé d'une espingole. On tirait alternati- 
vement, et chacun notait les secondes à la montre. La 
distance fut trouvée égale à 3 kilomètres; mais l'on 
avait fait apparemment trop de bruit, car les deux frè- 
res furent exilés du Tigré. 

Newton donne une formule qui sert à calculer la pro- 
fondeur d'un puits par le temps qui s'écoule entre le 
moment où une pierre quille Va xuat^^VV^ ^l ç^lui où 



VITESSE DU SON. 99 

Ton entend le bruit qu'elle produit en frappant Teau. 
10 secondes donneraient une profondeur d'enviroa 
580 mètres. 

On pourrait enfin, afin de connaître la profondeur 
d'un lac ou celle de la mer, observer la réflexion d'un son 
assez fort pour revenir du fond. Arago avait proposé 
cette expérience à CoUadon dès 1826, mais elle ne fut 
tentée qu'en 1838, par Ch. Bonny-Castle, sur les côtes 
de la Virginie, et à la demande de l'amirauté des États- 
Unis. Le professeur américain trouva que le son était 
mieux perçu dans Pair que dans l'eau, et que la plus 
grande distance à laquelle il pouvait encore entendre 
une cloche sous Teau était de 5 kilomètres. Ces conclu- 
sions furent vivement combattues par Colladon , qui 
reprit aussitôt ses expériences sur le lac de Genève. 
En 1826, il avait parfaitement entendu une cloche de 
65 kilogrammes à 13 kilomètres; en 1841, une cloche 
de 500 kilogrammes, prêtée par une des églises du 
canton de Genève, fut très-bien entendue sur une dis- 
lance de 35 kilomètres (entre Promenthoux et Grand- 
Veau, près Cully) ; elle était suspendue à 15 mètres sous 
l'eau, et le marteau qui la frappait pesait 10 kilogram- 
mes. Colladon en conclut que, dans des circonstances 
favorables, le son se propagerait sous l'eau jusqu'à nne 
distance de quelque cent mille mètres. Les palettes 
d'un bateau à vapeur ne produisent qu'une sorte de 
bourdonnement qui cesse d'être entendu sous l'eau 
à 1,000 mètres. Mais le bruit d'une chaîne, agitée à une 
certaine profondeur, se distingue si bien que l'on re- 
connaît lorsqu'une barque éloignée de 3 ou 4 kilomè- 
tres lève son ancre. 11 est bien entendu qu'il faut tou- 
jours, dans ces expériences, se servir du cornet h^dro- 
zcomtique. Pendant celles qui étaient Î^VVe^ ^Ne.ç, \ 



100 L'ACOUSTIQUE. 

grosse cloche, chaque coup frappé put être compté dans 
une maison bâtie sur un remblai, à une distance de 
5 kilomètres, quoique cette maison fût séparée de la 
cloche par un promontoire ; le son paraissait sortir des 
fondations et des piliers des murailles. CoUadon ne se 
prononce pas sur la possibilité de mesurer la profon- 
deur de Teau par un écho du fond. 



VI 



RÉFLEXION DU SON 



Lois delà réflexion.' ~ Écho. — Écho polysyllabique. ~ Écho polyphone. — Écho 
hétérophone. — Réflexion et résonnance. — Échos célèbres. — Légendes. — 
Réfraction du son. 



La réflexion constitue une étroite analogie entre le 
son et la lumière. Comme les rayons lumineux, les sons 
se réfléchissent sur les obstacles qu'ils rencontrent, 
et de même que la surface unie d'un miroir renvoie 
plus de^ lumière qu'une surface dépolie, les différents 
corps ne sont pas tous également propres à répercuter 
les ondes sonores. Les corps durs et résistants les réflé- ^ 
chissent beaucoup mieux que les corps mous et flexi- 
bles, qui ne se redressent pas sous le choc qu'ils reçoi- 
vent. 

Les lois de la réflexion du son ne paraissent point 
être aussi simples que celles qui régissent les mouve- 
ments des rayons lumineux, car les ondes sonores peu- 
vent se propager suivant des lignes courbes; elles tour- 
nent les obstacles. Néanmoins il sera permis, pour sim- 
plifier les explications, de parler de ratjom sou(y) 



lOÎ L'ACOUSTIQUE, 

comme on parle de rayons lumineux ; ce seront des 
lignes droites par lesquelles nous pourrons représenter 
la marche d'un son depuis la source sonore jusqu'à 
l'oreille. Dès lors, nous dirons, pour le son comme pour 
la lumière, que le rayon incident et le rayon réjléàù 
font avec la surface réfléchissante des angles égaux et 
qu'ils sont compris dans nn même plan perpendicu- 
- laire à cette surface. La même loi s'observe aussi dans 
le choc des corps élastiques. Les personnes qui connais- 
sent le jeu de billard savent que la bille que l'on chasse 
contre la bande est repoussée dans une direction symé- 
trique avec celle qui lui avait été imprimée par le joueur. 
C'est ainsi que la voix qui rencontre un mur M dans une 




Fig. 51. — Héflœdon du son. 

direction AM (fig. 51), est renvoyée dans une direction 
MB symétrique à la première par rapport à la surface 
du mur, ou, ce qui revient au même, par rapport à la 
normale MN. L'angle que cette normale fait avec AM se 
nomme Vangle d'incidence; celui qu'elle fait avec MB est 
Va/tffte lie ré/lexion. Ces deux angles sont toujours égaux ; 



REFLEXION DU SON. 103 

de plus, le rayon réfléchi MB est toujours dans le plan 
qui renferme AM et la normale MN. 

Quand le point A d'où émane le son se rapproche de 
la ligne MN, le point B, vers lequel le son est réfléchi, 
s'en rapproche aussi, et ces deux points coïncident 
lorsque le son naarche dans la direction de la normale 
même. La voix qui part de N et qui rencontre le mur, 
dans la direction perpendiculaire NM, revient par le 
même chemin, de M en N, vers son* origine. 

Ces principes nous aideront à comprendre comment 
se produit le phénomène des échos. On appelle ainsi la 
répétition d'un son réfléchi par un obstacle éloigné. 
Supposons d'abord qu'il n'y ait qu'une seule surface ré- 
fléchissante. Si l'observateur veut entendre Técho de sa 
propre voix, il faut qu'il se place sur la normale MN 
qui est perpendiculaire à la surface réfléchissante ; s'il 
veut entendre l'écho d'un bruit produit en un point A, 
il faut qu'il se place en un point B, symétrique par rap- 
port à la normale MN. Avant d'entendre le son réfléchi 
qui parcourt la ligne brisée AMB, il entendra nécessai- 
rement le son qui arrive directement de A en B, puisque 
ce dernier fait moins de chemin que le son réfléchi. 
Nous supposons, bien entendu, qu'il n'existe entre A 
et B aucun obstacle qui empêche la transmission directe 
du son. 

L'observateur entendra donc, en général, deux sons 
successifs qu'il pourra distinguer l'un de l'autre, si le 
premier a cessé de se faire entendre au moment où ar- 
rive le second. Cette condition, qui doit être remplie 
pour que l'écho soit distinct, dépend évidemment de la 
distance de l'obstacle qui réfléchit le son. 

Considérons d'abord le cas où le son revient au point 
même d'où il est parti. L'observateur est alova ^wîi\vl 



iM L'ACOUSTIQUE. 

entend sa propre voix d'abord an moment même où il 
remet, puis de nouveau après que le son a parcouru 
deux fois la distance MN. Or il faut au moins 1 dixième 
de seconde pour prononcer une syllabe, et encore 
faudrait-il parler très-vite; en moyenne, on ne pro- 
nonce pas plus de cinq syllabes en -une seconde. Si 
donc l'obstacle est trop rapproché de l'observateur, 
la première syllabe reviendra avant qu'il ait pu pro- 
noncer la dernière, il y aura confusion, l'écho ne répé- 
tera que les dernières syllabes ou même ne se produira 
pas du tout. 

Nous avons vu que le son fait en moyenne 540 mè- 
tres par seconde; en 1 dixième de seconde, il fera donc 
54 mètres, et 68 dans 1 cinquième ou 2 dixièmes de 
seconde. Un obstacle, éloigné de 54 mètres en ligne 
droite, nous renverra donc le son après 1 cinquième de 
seconde, car le son mettra 1 dixième de seconde pour 
aller et 1 dixième pour revenir. Cette distance suffira 
pour obtenir un écho monosyllabique^ c'est-à-dire la 
répétition d'une seule syllabe. Pour la prononcer, il 
fallait i cinquième de seconde ; au moment où je pro- 
nonce la fin de ma syllabe, le commencement a déjà eu 
le temps de revenir, puisque le son met 1 cinquième de 
seconde à franchir deux fois la distance de 54 mètres; 
le reste revient ensuite dans l'ordre où il a été pro- 
noncé, et au bout d'un nouveau cinquième de seconde, 
le retour de la syllabe est accompli. Si l'obstacle est 
plus près que 54 mètres, le son réfléchi empiète déjà 
sur le son articulé, ils se mêlent et fc confondent; si 
l'obstacle est à une distance plus grande, il s'écoulera 
un temps plus ou moins long entre la fin de la syllabe 
articulée et l'écho qui la répète. 

Ce que nous avons dit de YédiQ Ts\ç>wos^llabique 



RÉFLEXION OU SON. 105 

s'applique immédiatement aax échos polysyllabiques^ 
ou de plusieurs syllabes; nous n'aurons qu'à multi* 
plier la distance en proportion du nombre de syllabes 
qui doivent être répétées. Pour deux syllabes, il faudra 
68 mètres, pour trois, 102 mètres, etc. On comprend 
d'ailleurs que ces distances pourront être prises plus 
petites, lorsqu'on prononce plus de cinq syllabes par 
seconde, et qu'il faudra les prendre plus grandes pour 
quelqu'un qui prononce moins de cinq syllabes par se- 
conde. Le principe est toujours le même; il faut que la 
distance soit suffisante pour permettre au son d'aller et 
de revenir pendant le temps employé à prononcer la 
phrase que l'écho doit répéter. Cependant, on peut 
admettre que lorsqu'on prononce plusieurs syllabes de 
suite, l'émission est un peu plus précipitée que lors- 
qu'on ne profère qu'une seule syllabe; c'est ce qui 
explique pourquoi Kircher a trouvé des distances dé- 
croissantes pour les échos polysyllabiques. Tandis qu'il 
donne 100 pieds pour une syllabe isolée, il n'a trouvé 
que 190 pieds au lieu de 200 pour deux syllabes, et 
que 600 au lieu de 700 pour les sept syllabes : 

Arma virumque cano. . . 

Il constate d'ailleurs que ces distances comportent 
une grande latitude ; ainsi, l'écho d'un son de trom- 
pette est distinct entre 90 et 110 pieds; la distance 
d'un écho de sept syllabes peut être réduite jusqu'à 
400 pieds ; d'autres fois, 600 pieds ne suffisent pas 
pour entendre la répétition de sept syllabes. Quand on 
prononce plus de syllabes que Técho n'en peut répéter 
distinctement, les premières qui reviennent sont cou- 
vertes par les dernières émises, et l'on n etvtew^ççx'vi^*' 



106 L'ACOUSTIQUE 

répétition tronquée de la phrase qui a été prononcée. 
On peut se servir de cette circonstance pour établir 
avec récho une conversation par demandes et réponses; 
il suffît que la fin de la phrase interrogative constitue 
une réplique. 

Cardan rapporte qu'un homme voulant passer une 
rivière ne trouva pas le gué. Désappointé, il pousse un 
soupir : oh ! Técho répond : oh ! Il croit alors qu'il n'est 
pas seul, et il s'établit le dialogue suivant. 

— Onde devo passar? 

— Passa I 
--Qui? 

— Qui? 

Cependant, voyant qu'il a devant lui un tourbillon 
dangereux, l'homme demande encore une fois : 

— Devo passar qui? 

— Passa qui ! 

L'homme eut peur ; il se crut le jouet du démon e! 
s'en retourna chez lui sans avoir osé passer l'eau. 
Il vint conter son aventure à Cardan, qui n'eut pas de 
peine à la lui expliquer. 

Nous avons toujours supposé jusqu'ici que l'obser- 
vateur entend T^écho d'un son qu'il produit lui-même, 
et qui revient par la réflexion à son point de départ. 
Le même raisonnement s'applique encore au cas où le 
son prend sa source à une certaine distance de l'obser- 
vateur, comme lorsque ce dernier se place en B (fig. 
30) et que le son vient du point A. On n'aura qu'j 
considérer la différence du chemin direct AB et du 
chemin indirect AMB ; cette différence représente 1( 
détour que fait le son refléchi, ou bien l'avance du soi 
transmis directement ; il faut qu'elle soit égale à dew 
fois 54 ou à 68 mètres pour wv\ écho monosyllabique 



HÉFLEXION DU SON. 107 

au double pour un écho de deux syllabes, et ainsi de 
suite. 

Il nous reste à parler des éclioa multiples ou poly- 
phones. Ce sont les échos qui reproduisent plusieurs 
fois de suite le même son ou la même phrase. Us se for- 
ment quand il y a plusieurs obstacles, placés à des 
distances différentes et qui agissent soit isolément, 
«lit ensemble, en se renvoyant le son par des réflexions 
I successives. La figure suivante, empruntée à Kircher, 




représente un écho heptaphone ou a sept voi\ Les 
I |Jaus de mur qui réHéchissent la \oix sont a peu près 
«gaiement espacés ; elle revient d abord du premier, 
qui est le moins éloigné, puis du second, puis des 
autres qui suivent. Si l'éclio doit répéter sept fois une 
syllabe isolée, il faut que les distances successives 
différent toujours d'au moins 54 mètres, pour deux 
syllabes; les intervalles doivent être de (18 mètres, 
et ainsi de suite. A mesure que l'écho revient de plus 
loin, il devient pius faible, parce que \e &o\\f>'«^'ç%t- 



U8 L'ACODSIIQUE. 

pille en route ; la voix expire peu k peu et finit par 

s'éteindre. 

Quand les obstacles qui produisent les échos succes- 
sifs, au lieu d^ètre également espacés, se rapprocheol 
et se resserrent à mesure qu'ils sont placés plus loin 
de l'observateur, les échos se confondent en partie, le 
deuxième arrivant avant la fin du premier, le troi- 
sième avant la fin du deuxième, etc. Kircher montre le 
parti qu'ont peut tirer de cette circonstance pour ob- 




Fig. 35, Échc 



tenir une phrase avec un mot. Supposons' un écbo n 
cinq voix {fig. 33) disposé de telle sorte que le premier 
obstacle répète distinctement le mot Clamoie. Si le 
deuxième obstacle était à une distance double, le troi- 
sièmes une distance triple, et ain^i de suite, on aurait un 
écho trisyllnbique et pentnphone. Mais rapprochonsie 
deuxième obstacle jusqu'à ce que le son des consonnes 
el se confonde avec la fin du premier écho Clamore. 
nous n'entendrons la seconde fois (\ue le mot Amore. 



REFLEXION DU SON, 103 

En rapprochant convenablement les obstacles suivants, 
nous réduirons le troisième écho à More, le quatrième à 
Ore^ le dernier à Re. Dès lors, si quelqu'un demande à 
haute voix ^ : 

Tibi vero grattas agam^ quo clamore? 

l'écho répond: 

Clamore. — Amore. — More.— Ore. — Jî^*. 

Le mot constabis se décomposerait, de cette façon, en 
stabis^ abiSy bis, is; mais la phrase ne présente pas 
comme la première, un sens intelligible. 

Kircher se pose encore le problème de construire un 
écho hétérophonej un écho qui réponde autre chose 
que ce qu'on lui chante'^. Voici comment il se tire 
d'affaire. Devant l'angle saillant que forment deux murs 
(fig. 34) on dispose un obstacle de telle sorte qu'au 
heu de renvoyer la voix au point d'où elle est partie, il 
la jette de l'autre côté du bâtiment, oii se trouve caché 
un compère ; celui-ci entend la demande et s'empresse 
de répondre ce qui lui plaît ; sa voix prend le chemin 
qu'a suivi la demande, et la réponse arrive ainsi à l'au- 
diteur mystifié. Dans la figure, on demande: Quod 
tibi nomen ? (comment vous appelez-vous?) et l'écho fal- 
lacieux répond : Constantinus. Kircher raconte qu'avec 
cette innocente mystification, il s'est beaucoup amusé 
aux dépens de ses amis, dans la campagne de Rome. 



' Par quels accents doîs-je te remercier ? 

* Par la voix, Tamour, la conduite, les lèvres et l'action. 

^ En Irlande, on dit que le meilleur écho du monde est celui du lac de 
KilUurney ; lorsqu'on lui crie : lïow do you do ? il répond : Thank yot/, 
very w^l. 



1» L-iCOeSTIQUB. 

Pour qne l'illusioa soit complcle, il finit que leedeui 
compères aient à peo {»vs la mêine voix. 




Fig. SI. Écho bétitopbiiae. 



Il serait possible d'utiliser les échos d'une église 
comme ornements du chant, en disposant habilem^it 
des pauses qui seraient remplies par les résonnances. 
Kircher donne plusieurs exemples de phrases musicales 
ainsi composées; il ajoute que les églises de Saint- 
Pierre et de Saint-Jacques des Incurables à flome of- 
frent des dispositions très-favorables pour mettre en 
œuvre ccturtilice. 
En hébreu, l'écho s' appeWe bal kol, Ç\\V«4ft Uioit, 



RÉFLEXION DU SON. i\\ 

pour les anciens poètes, c'est une nymphe qui aima le 
beau Narcisse; dédaignée, elle se fondit en larmes, et 
il n'en resta que la voix qui obéit à la passion d'un 
autre... 

Nec prior ipsa loqui didicit resonabîlis Echo. 

Les échos qui animent un paysage établissent en 
quelque sorte un lien de sympathie entre Thomme et la 
nature, qui semble répondre à ses appels. La forêt n'est 
pas insensible à nos joies : elle répète les cris des chas- 
seurs et les fanfares du cor. 

Noa canimus surdis, respondent omnia silvse. 

YlBGILE. 

Voilà, dit le P. Mersenne, comme le Créateur a 
donné un langage aux bois, aux rivières et aux mon- 
tagnes. 

Les «chos que Ton rencontre dans les villes et dans 
toutes les contrées un peu accidentées offrent des qua- 
lités très-variées. Tantôt la voix qui répond à l'appel est 
sourde et comme enrouée, tantôt elle est claire, vibrante 
et parfaitement accentuée. Ces différences qualificatives, 
qui dépendent évidemment de la nature des surfaces 
réfléchissantes, nous obligent à admettre qu'il y a dans 
l'écho encore autre chose qu'une simple réflexion. Il 
est hors de doute que les phénomènes de résonnance, 
dont nous nous occuperons plus loin, y jouent aussi un 
certain rôle. Tous les faits observés démontrent d'ail- 
leurs que la réflexion du son peut se faire d'une ma- 
nière remarquablement nette et distincte sur une sur- 
face très-irrégulière ; un vieux rempart, une tour en 
ruines, un arbre, une collinej une gorge bo\%ee>\^^^ 



11) L'ACOUSTIQUE. 

les ob.staclcs qui forment les meilleurs échos. L'imagi 
lumineuse est d'autant plus pure que la surface qui 1 
forme est plus unie; limage sonore n'est pas assujettit 
à cette condition. H faut donc croire que, dans la ph 
part des cas, le mode d'action des surfaces qui fonnen 
un écho n quelque analogie avec les effets des miroir 
courbes. Peut-âtre aussi que la résonnance des obstacle 
mêmes et celle des masses d'air qu'ils emprisonnen 
contribuent pour une large part à la production du phé- 
nomène. 

Ce (fui est cçrtain, c'est que les circonstances doni 
le concours doit être considéré comme utile ou néces- 
Hnire h lu formation d*un écho sont loin d'être connues, 
La théorie et l'expérience sont ici également en défaut. 
Dans (picl(|ues cas , il est vrai, les dispositions locales 
qui, d'après la théorie des réflexions, doivent donnei 
un écho d'une certaine nature, le donnent en effet ; mais 
souvent notre attente est trompée sans qu*ilsoit possible 
d'en découvrir la raison. 

Les échos des forêts dépendent peut-être beaucoup 
du mode de groupement des arbres. Voici quelques faits 
qui viennent à Tappui de cette opinion . 

Pans sa jeunesse, Gay-Vernon s'était souvent amuse 
à évoquer un écho formé par les bâtiments d'un moulin 
Après avoir passé quelques années à Paris, il revint i 
son village. Quel ne fut pas son étonnement lorsqu'i 
s'aperçut que son écho n'existait plus ! Rien n'étaii 
changé au moulin ; on avait seulement abattu un groupe 
d*arbres cpii Tombrageaient. 

Ihuis la plaine de Montrouge, près de Paris, il y avai 

autrefois un écho n^narquable formé par un mur au 

devant duquel étaient plusieurs rangées d'arbres. Has- 

s^^n/raU e^^ava de se rcwAte cowvçXe àss râ^AwsAjaoce 



REFLEXION DU SON. 115 

dont le phénomène pouvait dépendre. Il plaça à une 
certaine distance un aide chargé de produire le son 
dont il voulait obseirer la réflexion, puis il s'approcha 
lentement du mur, écoutant toujours. Il constata que 
l'écho s'évanouissait à mesure qu'il s'en rapprochait ; 
cependant il restait encore une résonnance sourde qui 
venait, non pas du mur, mais des arbres ; en collant 
Toreille à leurs troncs, on les sentait en effet frémir, 
tandis que le mur ne paraissait pas vibrer du tout. 

Ilassenfratz a observé que les murs de certaines mai- 
sons donnaient un écho quand les fenêtres étaient fer- 
mées ou bien lorsqu'elles étaient ouvertes, mais que 
l'on fermait les portes. Dans quelques souterrains, les 
échos ne se produisent que sous l'influence de certaines 
notes déterminées. L'écho de l'ancien collège d'ilarcourt 
offrait une autre particularité curieuse. 11 répétait la 
voix d'un homme placé au milieu de la cour, mais les 
notes graves s'entendaient dans la direction de la rue de 
La Harpe, les notes aiguës dans une direction qui était 
de 50*^ plus rapprochée du nord. 

Tous ces faits montrent bien que l'écho est une per- 
sonne exigeante dont il n'est pas toujours facile de de- 
viner les caprices. Voici, à ce propos, une histoire que 
j'ai entendu raconter à M. d'A..., un soir que nous 
étions assis devant un bon feu dans un caravansérail. 

Un Anglais qui voyageait en Italie rencontra sur sa 
route un écho tellement beau qu'il voulut l'acheter. 
L'écho était produit par une maison isolée. L'Anglais la 
fit démolir, numérota toutes les pierres et les emporta 
avec lui en Angleterre, dans une de ses propriétés, où 
il fit rebâtie la maison exactement comme elle avait été. 
H choisit pour emplacement un endroit de son parc 
çui était à uae distance du château égaler ^à ciâ^<^ ^ 



I 



i\A L'ACOUSTIQUE. 

l'écho avait été distinct en Italie. Quand tout fut prêt, 
l'heureux propriétaire résolut de pendre la crémaillère 
de son écho d'une manière solennelle. 11 invita tousses 
amis à un grand dîner et leur promit l'écho pour le 
dessert. On mangea bien, Thistoire ne dit pas si on ne 
but pas mieux... Quand on fut arrivé au dessert, Fam- 
phitryon annonça qu'il allait inaugurer son phénomène 
et se fit apporter sa boite aux pistolets. Après avoir 
chargé lentement les deux armes, il s'approcha de la 
fenêtre ouverte et tira un coup. Pas l'ombre d'un écho! 
Alors il prit le second pistolet et se brûla la cervelle. 
On n'a jamais su quel défaut de construction avait été la 
cause de cet échec. 

Les nuages répercutent aussi les bruits terrestres. 
Les membres du Bureau des longitudes, pendant les 
expériences qu'ils firent pour mesurer la vitesse du 
son, constatèrent que le bruit du canon était accom- 
pagné d'échos toutes les fois qu'un nuage passait sur 
leurs têtes. Le roulement du tonnerre s'explique en 
grande partie par les réflexions multiples que le son 
éprouve entre le sol et la nuée orageuse. Les aéronautes 
entendent Técho de leur voix que le sol leur renvoie : 
ce serait le dernier lien qui les rattacherait à la terre, si 
la pesanteur et les fuites de gaz ne se chargeaient de les 
ramener au bercail. 

Les toiles des navires et les vagues très-hautes for- 
ment écho également. Les paroles que l'on crie dans 
un porte-voix reviennent si elles rencontrent les surfa- 
ces convexes des voiles d une escadre. D'après Brandes, 
si l'on se trouve au bord de la mer par une soirée calme, 
on entend la voix revenir du côté de l'eau. 

C'est surtout dans le silence de la nuit que les échos 
sont dislinds ; les bruiU du jouv W^ viVttçèç.Keut d'être 



RÉFLEXION DV SON. 115 

neitement perçus. Mersenne rapporte que l'écho d'Or- 
messon, dans la y allée de Montmorency, répond qua- 
torze syllabes la nuit, et seulement sept le jour. 

On peut observer des échos multiples sous les arches 
des grands ponts suspendus dont les piles sont suffi- 
samment espacées; les réflexions successives sur les 
piles opposées multiplient le son à Pinfini s'il a une cer- 
taine intensité. Dans les vallées profondes, les échos se 
forment aussi très-facilement. Les berges creusées par 
les flots d'une rivière donnent souvent des échos très- 
remarquables. 

Un écho bien connu est celui qui existe entre Coblentz 
et Bingen, là où les eaux de 1^ Nahe se jettent dans le 
Rhin. Il répète. dix-sept fois, et la voix semble alterna- 
tivement s'éloigner et se rapprocher. On aime à l'évo- 
quer par des coups de feu pour amuser les touristes. 

Une fois le bateau à vapeur qui dessert cette partie 
du Rhin n'a point d'arme à feu à bord. On demande à 
grands cris un pistolet. A ce moment, un Polonais, qui 
ne comprend pas bien, se précipite sur le pont : « Un 
pistolet? crie-t-il, je n'en ai pas; mais voici un poi- 
gnard! )> 

Ebell rapporte qu'un écho qui existe à Derembourg 
(près d'Halberstadt) répète distinctement les vingt-sept 
syllabes de la phrase suivante : 

Conturbabantur ConstantinopoUtani innumerabilibus 
sollicitudinibus. 

On pourrait trouver plus étonnante la mâchoire ca- 
pable de prononcer cela couramment, que l'écho qui 
ne fait que le répéter. Mais Ebell ajoute que la distance 
de l'écho n'était que de 254 pas, ce qui ferait enviro 
200 mètres. Ce n'est pas assez pour un écho de 27 sy 
labes ;i\ y a probablement eu erreur sut \e ^«vwV. 



110 L'ACOUSTIQUE. 

Féclio se formait, ou bien il résultait de réflexions 
multiples, ou bien la chose n'est peut-être pas vraie. 

On dit qu'il y a dans les environs de Bruxelles un 
écho qui répète jusqu'à quinze fois. ARosneath, près 
Glascow, les rives de la Clyde répètent un air de mu- 
sique trois fois, et chaque fois dans un ton plus graTc; 
ce qui ne parait pas croyable. 

L'écho de Woodstock, dans la province d'Oxford, 
répète dix-sept fois pendant le jour et vingt fois pen- 
dant la nuit ; il faut se placer à une distance de 700 
mètres. 

A Genetay, à deux lieues de Rouen, il existe un écho 
remarquable dans une grande cour semi-circulaire. 
Quand on la traverse en chantant, on n* entend que sa 
propre voix, et les auditeurs placés en d'autres points 
n'en entendent que Técho, qui est simple ou multiple, 
selon leur position. 

A trois lieues de Verdun, deux tours distantes d'en- 
viron 50 mètres et isolées du bâtiment principal dont 
elles dépendent, produisent un écho qui répète 12 
ou 15 fois, avec une intensité toujours décroissante, 
un son proféré au milieu de l'espace qui les sépare. 
Lorscju'on s'écarte de la ligne droite qui joint les deux 
tours, l'écho cesse de manifester, mais entre le hà- 
tiinont et Tune des tours on retrouve un écho simple. 

Dans les environs d'Ileidelbcrg, on rencontre un écho 
qui imite le bruit d;i tonnerre. Pour l'évoquer, on liro 
un coup de pistolet à la base du llciligenberg : une 
gorge boisée qui s'ouvre en face réiléchit le son de telle 
sorte, que des personnes qui, placées en arrière et au- 
dessus du tireur, ne distinguent |)as le coup de feu pri- 
niitir, en entendent l'écho sou« la forme d'un roulement 
prolongé. 



RÉFLEXION DU SON. H7 

En Bohême, on trouve, près d'Aderbach, une espèce 
de cirque de six lieues de diamètre, hérissé de rochers 
nus et pointus. Au milieu de ce chaos il existe un endroit 
ou Técho répète trois fois une phrase de sept syllabes, 
sans la moindre confusion. A quelques pas de là, on 
n'entend plus rien. 

Dans les murs d'Avignon, Kircher a trouvé que la 
voix était répétée jusqu'à huit fois. Dans la ville de 
Rome, les échos répètent un cri de deux à sept fois, 
Boissard, dans sa Topographia romana^ donne la des- 
cription du tombeau de Cœcilia Metella, célèbre par 
les échos qu'il produit. C'est une tour ronde, dont les 
murs sont épais de 24 pieds et ornés de deux cents têtes 
de bœufs en marbre, en souvenir des deux hécatombes 
immolées aux funérailles de la fille de Mctellus Crassus. 
Ce monument est situé près de Saint-Sébastien ; le 
peuple l'appelle Gapo di bove. Lorsqu'on prononce à 
voix haute une phrase quelconque au pied de la colline 
qui porte la tour, il se produit un écho multiple. Boissart 
dit qu'ayant chanté à cet écho le premier vers de 
Y Enéide^ il l'a entendu répéter d'abord huit fois distinc- 
tement, puis encore plusieurs fois d'une manière plus 
confuse. Le P. Mersenne, qui parle aussi de cet écho 
célèbre, fait à ce propos les réflexions suivantes : « L'on 
voit encore, dit-il, la place dans laquelle on immolait 
des hécatombes, dont le retentissement faisait croire 
le sacrifice plus grand qu'il n'était. A savoir si le lieu 
s'est ainsi trouvé ou s'il a été choisi pour une plus grande 
vénération et célébration de sacrifices, ou s'il a été 
destiné pour la sépulture de ceux de la maison de Crassus 
et pour les immortaliser en quelque façon, afin que 
leur nom se multipliât à la postérité ; j'en laisse le ju- 
gement à part. Il est vrai qu'au logîs à'wtx ^^\\\^\sNSfî 



118 L'ACOUSTIQUE. 

l'écho n'est guère agréable, car il fait entendre bien 
loin tout ce qui se dit et ce qui se fait ; il n'y a qu'aux 
degrés et aux grandes salles et lieux de plaisance où 
l'on doive le souhaiter. Quant aux églises, s'il sert pour 
faire entendre un prédicateur, il Tinterrompt aussi et 
l'importune beaucoup, entrecoupant sa parole par son 
retentissement. » 

L'un des échos les plus célèbres est cetm qui existe à 
la villa Simonetta, près Milan dont nous reproduisons 
le dessin donné par Kircher. La longueur du corps de 
logis principal est de 62 aunes milanaises (37 mètres), 
mesurées à l'intérieur de la cour ; les deux ailes laté- 
rales ont 55 aunes (20 mètres). La hauteur de Tétage 
supérieur, mesurée entre la galerie et le toit, est de 
16 aunes (10 mètres) ; la galerie a une largeur d'envi- 
ron 5 mètres. Lorsqu'on tire un coup de pistolet de la 
grande fenêtre percée dans le mur de l'étage supérieur 
de l'aile gauche (à droite dans le dessin), l'écho le ré- 
pète quarante à cinquante fois ; le bruit de la voix est 
répété de 24 à 50 fois. Addison et Monge ont eu l'occa- 
sion de vérifier le fait. BernouUi prétend même qu'il a 
compté un jour jusqu'à 60 répétitions. 

Dans les édifices voûtés on observe souvent de sin'^u- 
liers effets d'échos qui s'expliquent d'une manière plus 







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r.-^-irrr 




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Fig. 


56. 


ElUpee. 





ou moins complète par les propriétés des courbes géo- 
mètriquey. L'ellipse est une courbe 3AVoTv%ée^^^Tc\Và\ai\U 



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1 RÉFLEXION SU SON. 12t 

À un cercle aplati ; à l'intérieur du contour sont deux 
points f, /"(ûg. 36) qu'on appelle les foyers parce que 
chacun d'eus reçoit la totalité des rayons lumineux ou 
sonores qui, partis de l'autre, se sont réHécliis sur le 
contour intérieur de la courbe. Une personne postée à 
l'un des foyers d'une voûte elliptique entend parfaite- 
ment les paroles prononcées à ¥oix sourde au foyer op- 
posé. J)eux personnes qui se placent aux deux extré- 
mités d'un mur bâti en hémicycle allongé peuvent ainsi 
converser à voix baase sans être entendues en aucun 
autre point. Un mur de ce genre existe à Muydcn, près 
d'Amsterdam. 
Les surfaces paraboliques ont un seul foyer, où 

I viennent convei;ger les rayons qui arrivent parallèles. 



Au contraire, les rayons qui partent du foyer devien- 
nent parallèles après la réflexion. Dès lors, si on installe 
ïis-à-ïis l'un de l'autre deux miroirs paraboliques, on 
entend au foyer de l'un le pins léger bruit qui se pro- 
duit au foyer de l'autre, ainsi que cela se voit dans la 
TigureS?. C'est cette propriété des surfaces çaraboli- 
ijuBs qui les fait choisir pour \es té&ftc.U\\K%\T\'à^^'i* 



122 L'ACOUSTIQUE. 

sur les phares et destinés à envoyer au loin la lumière 
des feux ou les sons d'une cloche ; elles transforment 
en faisceau parallèle les rayons divergents partis du 
foyer. On les choisit aussi, avec moins de raison assuré- 
ment, pour les cornets acoustiques. Dans ce cas, on 
suppose qu'elles condensent à leur foyer, où se place 
Toreille, les rayons sonores qui arrivent d'une certaine 
distance, absolument comme un miroir parabolique 
concentre à son foyer les rayons solaires. Les voiles des 
navires produisent quelquefois cet effet lorsqu'elles 
sont gonflées par le vent. Arnott raconte que, sur un 
bâtiment qui côtoyait le Brésil, il suffisait de se placef 
en un point déterminé en avant de la grande voile 
pour entendre les cloches de San Salvador, S Ml fÊ k& 
alors de 180 kilomètres. .■^'^' 

Les murs d'enceinte, les voûtes d'églises, lei^littiBS, 
etc., ofiTrent quelquefois accidentellement une' 'fentes 
dispositions qui explique alors les effets d'ac(Niitiqae 
dont nous avons déjà parlé dans un précédent chapitre. 
Dans une voûte elliptique, le son parti d'un point dé- 
terminé peut se concentrer tout entier en un aatre 
point déterminé, après une réflexion simple sur les 
murs. Entre deux voûtes paraboliques opposées le même 
effet s'obtient, d'une manière moins complète, il est 
vrai, par une double réflexion ^ On peut maintenant 
concevoir d'autres systèmes de courbes qui donneraient 
le même résultat par un plus grand nombre de ré- 
flexions successives ; ainsi deux paraboles combinées 
avec un mur droit le réaliseraient par trois réflexions 
(fig. 38). Il est donc possible que le jeu des réflexions 

* Les rayons qui, du foyer de la première parabole, tombent droit sur 
le contour de !a ssconde, ne sont painl réfléchis vers le foyer de celle-ci ; 
'« se perdent évidemment. 



RËFLEIION DU SON. 183 

multiples explique dans beaucoup de cas les effets en 
question. Dans d'autres cas, comme dans celui des cou- 
poles circulaires, on ne voit pas comment la réflexion 
pourrait rendre compte des phénomènes observés. Ce 
qui en rend l'explication si difticile, c'est que les condi- 
tions dans lesquelles ces phénomènes se produisent sont 
rarement indiquées par les auteurs avec une précision 
suffisante, de sorte qu'on flotte entre une foule d'hypo- 
thèses que ces descriptions incomplètes autorisent plus 
ou moins. 

Une des salles du musée des antiques, au Louvre, 



Fig. 38. — Ddui piraboles. 

forme un écbo particulier qui s'explique par la] dispo- 
sition du plafond. 

Dans les voâtes fermées, les échos multiples produi- 
sent quelquefois un renforcement extraordinaire du 
son. On sait que dans un des caveaux du Panthéon, le 
gardien qui les fait visiter n'a qu'à donner un coup sec 
sur le pan de sa redingote, pour faire éclater, sous ces 
voûtes retentissantes, un bruit comparable à un coup 
de canon. Le même phénomène s'obsene àai\%\ C>ve^\ft 



124 L'ACOUSTIQUE. 

de Demjs et dans la célèbre grotte du MammouWi, 
que Ton a découverte dans le Kentucky, au sud de 
Louisville. 

Olaus Magnus rapporte qu'il existe près de Viborg, 
en Finlande, une caverne miraculeuse dans laquelle il 
suffît de jeter un animal vivant pour qu'il en sorte une 
immense et épouvantable clameur. C'est la caverne de 
Smellcn. Les habitants du pays ont quelquefois tiré 
parti de ce phénomène pour se débarrasser de leurs 
ennemis. Lorsqu'ils les voyaient approcher, ils se bou- 
chaient les oreilles et se cachaient dans les caves pen- 
dant que le plus hardi prenait une béte quelconque et 
la précipitait dans la terrible caverne. Les mugisse- 
ments qui en sortaient aussitôt remers(&ent les ennemis 
comme des bœufs à rabattoir; alors les Finlandais 
quittaient leurs cachettes pour dépoùillef les TBineus. 
Pline raconte quelque chose d'ahàlogue d*une caverne 
située en Dalmatie, dans laquelle on n'a qu'à jeter une 
pierre pour exciter un ouragan. 

Clément d'Alexandrie raconte que, chez les Per- 
sans, il y a trois montagnes dans une campagne rase, 
qui sont tellement situées qu'en s'approchant de la pre- 
mière l'on n'entend que des voix confuses qui crient et 
qui chamaillent ; à la seconde, le bruit et le tintamarre 
est encore plus fort et plus violent ; et à la troisième, 
l'on n'entend que chants d'allégresse et de réjouissance 
comme après une victoire. 

La terreur panique qui s'empara des Gaulois, près 
du temple de Delphes, dont le dieu Pan avait pris la 
défense, est attribuée à l'eflet des échos. Mersenne 
rap|)orle à ce sujet une autre histoire. « Les Persans, 
dit-il, ravageant la Grèce et le pays des Mégaréens, 
sV*timt .'idrcssês à un écho duraul VaLWw\V.«»o\\vUvc^ cru- 



REFLEXION DU SON. 125 

rent que c^était l'ennemi qui répondait en cris dolents, 
et attaquèrent rudement une roche résonnante, sur la- 
quelle ayant lancé toute la furie de leur courage et 
de leurs dards, ils furent pris le lendemain et emmenés 
captifs. » 

Une autre analogie remarquable du son et de la lu- 
mière consiste dans la réfraction que les rayons so- 
nores subissent, comme les rayons lumineux, lorsqu'ils 
passent d'un milieu dans un autre. Une cuiller que 
Ton trempe dans un verre d'eau semble se déformer; 
on dirait qu'elle se brise au niveau du liquide; c'est un 
effet de réfraction. Les rayons qui sortent de Teau dans 
une direction inclinée se réfractent, c'est-à-dire chan- 
gent de direction au moment où ils pénètrent dans l'air ; 
la déviation est d'autant plus grande que l'incidence 
est plus oblique. Les effets des prismes et des lentilles 
reposent sur les réfractions successives que la lumière 
éprouve en passant d'abord de l'air dans le verre, 
puis du verre dans l'air; on travaille les surfaces 
du verre de manière à obtenir toutes les déviations 
voulues. 

Les rayons sonores éprouvent des déviations sembla- 
bles au moment où ils changent de milieu. M. llajech 
l'a constaté de la manière suivante. Ayant percé un 
trou dans le mur de séparation de deux chambres, il y 
fixa un tube fermé par deux membranes. Ce tube était 
successivement rempli d'eau , d'acide carbonique , 
d'hydrogène, de gaz ammoniac, etc. A l'une de ses ex- 
trémités s'ajustait un autre tube rempli d'air et terminé 
par une boîte où se trouvait une montre à réveil. La 
boîte était ouatée à l'intérieur pour empêcher le son de 
pénétrer au dehors ; il parcourait donc les tubes en tra- 
versant }e gaz et le liquide qui remçW^mV. \ ^^^v^ 



in L'ÂCOrSTIQCE. 

compris entre les deux membranes, et l'observateur 
placé dans la chambre opposée cherchait la direction 
dans laquelle le son transmis paraissait aToir le plus de 
force. Cette direction étail celle de Taxe même, quand 
les deux membranes étaient tendues en travers de Taxe 
des tubes ; dans ce cas, la déviation n'existait donc pas. 
Mais dès que la membrane antérieure était inclinée par 
rapport à Taxe, on observait une déviation sensible, que 
l'on mesurait en suivant un arc de cercle tracé sur le 
plancher et en tenant l'extrémité d'un fil à plomb au- 
dessous de Toreille. Ces mesures ont montré que la ré- 
fraction des rayons sonores est assujettie aux mêmes 
lois que celle des rayons lumineux : elle dépend de 
Tanglc sous lequel les rayons rencontrent la surface 
réfringente et du rapport des vitesses respectives avec 
lesquelles le son se propage dans les deux milieux. 
Elle est la même pour les sons qui entrent dans Tair 
après avoir traversé Teau que pour ceux qui ont tra- 
versé l'hydrogène, parce que la vitesse est la même 
dans rhydrogène et dans l'eau ; elle est très-différente 
pour les sons qui émergent de Pacide carbonique. 

M, Sondhauss a observé la réfraction du son au 
moyen d'une lentille en coUodion , gonflée avec de 
l'acide carbonique. En plaçant une montre sur Taxe 
de cette lentille, on constatait facilement que le son 
était concentré dans un autre point de Taxe, du côté 
opposé : là était le foyer, et le bruit de la montre s'y dis- 
tinguait nettement ; on cessait de l'entendre dès qu'on 
enlevait la lentille (fig. 39). L'observation se fait plus 
oonunodoment à Taide d'un résonnateur d'HelmhoItz, 
(|u\)n promène devant la lentille, en enfonçant dans 
Toroillc le bout d'un tube de caoutchouc attaché à ce 



RËFLEXIOH DU SON. 1ST 

Le P. Merscnne n'a?ail pas oublié de se poser la 
question : « si les sons se rompent, c'est-à-dire s'ils en- 
durent de la réfraction comme la lumière quand ils 
passent par des milieux différent?. » Mais il se borne à 



expliquer comment la réfraction a lieu pour la lu- 
mière et comment elle conduit à tailler des lentilles qui 
grossissent les objets; puis il ajoute : « Je ne croy pas 
que les rayons des sons soient susceptibles de ces figu- 
res par l'industrie des hommes ; car, quant aux anges, 
s'ils disposent des tremblements de l'air comme il leur 
plaist, je ne doute pas qu'ils ne pussent faire la même 
chose des sons que de la lumière. » 



YII 



RÉSONNANCE 



Résonnance. — Vases de Vilnive. — Tables d^harmonie. — Résonnaleurs. — U 
corde sen!»ible. — Verres brisés par la voix. — Acoustique des églises e( 
des salles de spectacle. 



Si nous avons dit que le son tourne les obstacles, il 
ne faut pas prendre cela d une manière trop absolue. 
Les corps très-massifs l'arrêtent plus ou moins com- 
plètement, comme un écran opaque arrête la lumière. 
Deux personnes séparées par une élévation de terrain et 
qui ne peuvent pas se voir, s'entendent néanmoins, 
parce que le son passe au-dessus de l'obstacle que la 
lumière ne peut franchir; mais elles s'entendraient 
beaucoup plus facilement si cet obstacle n'existait pas, 
car il a pour effet d'affaiblir le son. Dans le cas où le 
son est guidé par un tuyau ou par quelque autre canal 
fermé, il se propage très-bien sans diminution sensible 
suivant une ligne courbe quelconque ; dans l'air libre, 
il s'amoindrit en quittant la direction dans laquelle il 
a été émis. C'est un fait que vient confirmer rexpérience 
de tous les jours. Chacun sait, par Gxeiuçle.^ (\ue pour 



RESOMNANGË. 129 

bien entendre un orateur, il faut se placer autant que 
possible en face de la tribune. De même, pour mieux 
distinguer un bruit très-faible , on tourne instinctive- 
ment l'oreille du côté d'où il vient. 

Quand le flux sonore rencontre un obstacle qui 
l'oblige de s'écarter de la ligne droite, il peut donc 
encore pénétrer du côté opposé, comme un courant 
qui se referme derrière une île, mais il en résulte tou- 
jours une diminution d'intensité. C'est ainsi que les 
digues criblantes, que Ton construit en éparpillant des 
blocs des rochers dans le lit d'un fleuve, ont pour effet 
d'en ralentir le cours. 

Un obstacle très-large et très-massif amortit le son 
au point de le rendre imperceptible, et produit ce qu'on 
appelle une ombre sonore. Sous les arches des grands 
ponts, vous trouvez facilement à vous placer de manière 
que les bruits du dehors ne vous atteignent pas. Der- 
rière la masse d'eau verticale de la chute du Rhin à 
Schaffhouse, on se trouve dans un silence complet. 
Dans les rues, près des maisons, on entend souvent le 
son d'une cloche, dans une direction tout autre que 
celle où se trouve le clocher; c'est que les maisons 
font ombre au son direct et qu'on n'entend que celui 
qui est réfléchi par les murs placés du côté opposé. 
La Roche sourde, dont parle le P. Kircher, mérite 
d'être citée comme exemple d'une ombre sonore très- 
complète. 

Les corps élastiques, surtout ceux qui n'offrent 
qu'une faible masse, ne forment guère obstacle à la 
propagation du son dans l'air. Il les traverse tambour 
battant. Ces sortes de corps ne sauraient donc être d'un 
grand secours pour obtenir de l'ombre sonore ; ce serait 
comme si on voulait opposer à la WxmfeiG ^^^ fe.çx« 

Si 



130 L'ACOUSTIQUE. 

de verre. Une cloison de planches, une muraille de 
peu d'épaisseur, laissent passer toute espèce de bruit ; 
c'est ce qui rend les chambres d'hôtel si désagréables. 
La transmission du son par les corps élastiques est 
accompagnée de phénomènes de résonnance. La ma- 
tière élastique devient elle-même sonore et on la sent 
frémir sous la main. La même chose s'observe lors- 
qu'une surface élastique réfléchit le son. D y prend 
appui comme sur un tremplin pour s'élancer avec plus 
de force. C*cst ce qui explique pourquoi les échos ont 
quelquefois une si grande intensité. En même temps, 
d'autres sons, dont l'origine est dans la surface réflé- 
chissante, viennent parfois se mêler faiblement au son 
primitif: il est renvoyé avec une escorte d'indigènes. 
On dit alors que la surface résonne. C'est ainsi qu^un 
corps sur lequel se réfléchissent les rayons solaires 
finit par s'échauffer lui-même et par rayonner de la 
chaleur dans tous les sens. 

Ce qu'on appelle ordinairement la résonnance des 
voûtes est un phénomène complexe, dû autant à la ré- 
flexion qu'à la résonnance proprement dite. Le son, 
répercuté par les murs d'une voûte élevée, revient trop 
vite pour qu'il y ait un écho sensible, et cependant 
pas assez vite pour qu'il se confonde avec le son direct, 
ainsi que cela aurait lieu dans une chambre de dimen- 
sions modérées. 11 empiète donc sur ce dernier et le 
rend confus en s'y mêlant d'une manière irrégulière. 
En même temps, les vibrations des murs qui frémis- 
sent et résonnent sous l'influence de la voix qui les 
frappe, apportent un nouvel élément de trouble dans 
le phénomène général. A chaque appel de la voix ré- 
pondent mille bruits confus, dont le mélange chaotique 
produit ces effets si remîvr(\\iab\es dout nous avons 



RÉSONNANCE. i3i 

parlé à propos des échos. On Ifs observe souvent 
quand on passe, par exemple, à bord d'un bateau à va- 
peur sous un pont dont les piles et les arches ren- 
voient le clapotage des roues en le renforçant. Lors- 
qu'une locomotive lancée à grande vitesse passe au- 
dessous d'un pont, la réflexion du bruit sur les culées 
produit une sorte d'explosion violente. Le vacarme 
devient assourdissant dans un tunnel d'une longueur 
un peu considérable. 

Les nappes d'eau favorisent beaucoup ces effets par 
la facilité avec laquelle elles réfléchissent le son. 
Ainsi Cagniard-Latour a constaté que de deux silos 
dont Tun était à sec tandis que l'autre contenait un peu 
d'eau, le dernier était beaucoup plus sonore que le 
premier. Sous les arches des ponts, la résonnance 
devient sensiblement moins forte lorsqu'il n'y a pas 
d'eau. Les canotiers de la Seine savent aussi que leur 
voix retentit avec plus de force lorsqu'ils sont en 
bateau. 

On dit qu'un espace est sonore quand il favorise la 
résonnance ; on dit qu'il est sourde quand il l'empêche. 
Les draperies, les tapis, toutes les étoffes molles pro» 
duisent cet effet : elles rendent un espace sourd, comme 
une tenture noire l'assombrit. C'est pour cela que le 
meilleur piano a peu de son dans une chambre remplie 
de tapis et de meubles capitonnés ; c'est quelquefois 
très-heureux pour les voisins. Les appartements vides 
sont toujours remarquablement sonores. 

Dans les églises, dans les salles de séances des assem- 
blées, une résonnance trop forte nuit beaucoup à la per- 
ception distincte de la parole ; elle couvre la voix de 
l'orateur et la rend inintelligible. Dans une salle de 
concert, on ne s'en plaint pas ; là, on cWeXv^ ^w Ç|Ç>^- 



i32 L'ACOUSTIQUE. 

traire à augmenter la sonorité des murs par un revê- 
tement en boiserie mince. 

A l'époque de Rousseau, les orchestres les mieux 
construits étaient, disait-0in, ceux des théâtres d'Italie. 
On avait som d'en faire la caisse d'un bois léger et ré- 
sonnant comme le sapin, de les établir sur un vide afee 
des arcs-boutants, et d'en écarter les spectateurs par 
un râteau placé dans le parterre à un pied ou deux de 
distance. Grâce à cette disposition, le corps même de 
Torchestre portant pour ainsi dire en l'air et ne touchant 
presque à rien, vibre et résonne sans obstacle et forme 
comme une grande table d'harmonie qui -soutient les 
sons des instruments. A l'Opéra de Paris, l'orchestre 
était, au contraire, très-mal disposé sous ce rapport: 
enfoncé dans la terre et clos d'une enceinte de bois 
lourde, massive et chargée de fer, qui étouffait toute 
résonnance. 

Aujourd'hui ces fosses sonores, vantées par Rousseau, 
sont adoptées dans la plupart des théâtres spécialement 
consacrés à la musicjue. Il est vrai que des architectes 
compétents les considèrent comme inutiles ou même 
nuisibles. 

Vitruve nous apprend que les Grecs employaient, 
pour doinier plus de sonorité à leurs immenses théâtres, 
de grandes cloches d'airain, renversées sur des sup- 
ports coniques et placées dans des niches fermées, sous 
les gradins ^ On s'en servait surtout à Corinthe, d'où 
Muinmius les importa à Rome. Quelquefois on se con- 
tentait de vases en terre cuite, dont le prix était moins 
élevé. D'après Vitruve, ces cloches étaient accordées 
pour certaines notes de la gamme; il explique longue- 

' Les Grixs appolaionl ces \ascs écliéia \^ytvj:\. 



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RËSOMNANGE. 135 

ment la manière de les fabriquer et de les distribuer 
ensuite le long des murs. La figure 40 représente le plan 
du théâtre de Vitruve, tel que le P. Kircher Ta dessiné 
d'après les indications de l'architecte romain. Ce der- 
nier conseille d'accorder les différentes cloches de ma- 
nière qu'elles donnent la quarte, la quinte, l'octave, la 
onzième, la douzième et la double. octave, ou la série 
des notes 

sol ut ré sol^ ut^ ré^ sol^. 

Le P. Kircher trouve cet arrangement contraire aux 
règles de Tharmonie et le remplace par la série sui- 
vante : 

sol si ré sol^ s\ ré^ sol^, 

où la tierce est substituée à la quarte, ce qui nous 
ramène dans l'accord parfait. Il est fort probable que 
les vases d'airain ne résonnaient pas du tout, mais que 
l'efTet était dû aux masses d'air qu'ils contenaient et à 
celles qui étaient emprisonnées dans les niches. 

Les tables (Tharmonie des instruments de musique 
8ont des plaques de bois destinées à renforcer les sons 
trop grêles des cordes par une vigoureuse résonnance. 
les cordes offrent trop peu de surface pour ébranler 
directement une grande masse d'air ; elles la coupent 
sans la repousser ; il faut donc les tendre sur un tablier 
de bois qui reçoit les vibrations et les propage d'une 
manière plus efficace. De même, une fourchette d'acier 
a incomparablement plus de son lorsqu'elle est appuyée 
sur une surface de bois : c'est pour cette raison que 
l'on fixe les diapasons sur une caisse de bois pour en 
augmenter la sonorité. Mais il y a encore autre chose : 
la table de la caisse fait résonner la masse d'air 
gu^e}le reaterme^ et c'est cette résonuatvee q^\ ^«w 



136 L-ACOUSTIQUE. 

tant de volume au son du diapason. Il faut pour cda 
que la boite soit d'une dimensian en rapport avec U 
note qu'elle doit renforcer, autrement elle serait Bani 
cH'et. 

Les corps élastiques d'une forme déterminée : tiges, 
cordes, plaques, membranes, masses d'air limitées, etc., 
ont des sons propres, qu'ils rendent lorsqu'on lea 
ébranle, et qu'il renforcent aussi «le préférence par ré- 
sonnomenl. C'est ce que nous expliquerons plus claire- 
ment dans la suite. Le volume d'air contenu dans la 
caisse d'un diapason a donc sa note spécifique, et il faut 
que cetli; note soit exactement d'accord avec celle du 
diapason pour qu'il y ait résonnance et renforcement 
du son. 

M. lielmhollz a tiré parti de cette remarque pour 
créer un inslniment qui permet d'analyser un mé- 

Fig. IS. Bi^sonnaleur. 

lange conTus de sons. C'est le résonnateur, appareil fort 
simple qui se compose d'une sphère creuse en verreou 
en métal, percée de deux ouvertures dont lune est sur- 
montée d'une espèce de pavillon, l'autre d'un appen- 
dine pointu que l'on inVïw\u\\. iaoa V otsaW. Umstni- 



RÉSONNANGE. 137 

ment se manie plus facilement si on prolonge 
l'appendice postérieur par un tube de caoutchouc à 
bout d'ivoire que Ton enfonce dans le conduit auditif; 
en même temps, il est bon de se boucher l'autre oreille 
avec un tampon de cire rouge. Le volume intérieur de 
cette espèce de poire et les dimensions de l'orifice 
libre déterminent la note sous l'influence de laquelle il 
résonne ; pour connaître cette note on n'a qu'à souffler 
contre le bord de l'orifice, elle se produit alors d'elle- 
même. Si cette note existe dans un bruit quelconque, 
on l'entend fortement résonner dans le globe; toute 
autre note est sans effet. On a donc ainsi le moyen de 
découvrir l'existence de cette note au milieu d'autres 
sons qui la couvriraient complétenrient pour l'oreille 
nue. Une série de résonnateurs de dimensions diverses 
permet de faire une véritable analyse des bruits, 
surtout si on leur donne une forme cylindrique afin 
de pouvoir en faire varier les dimensions par des 
tubes de raccord. Nous verrons plus loin l'importance 
de ce moyen d'analyse pour les recherches d'acousti- 
que. 

Avec deux diapasons accordés pour la même note, on 
peut observer un autre phénomène de résonnance qui 
est très-frappant. On les installe aux deux extrémités 
d'une salle, les ouvertures de leurs caisses braquées 
Tune sur l'autre. On fait vibrer l'un pendant quelques 
secondes par des coups d'archet répétés, puis on l'arrête 
brusquement en posant la main dessus. Le son néan- 
moins ne s'éteint pas, il vient seulement de plus loin : 
c'est l'autre diapason qui est entré de lui-même en vi- 
bration et qui survit au premier : 

El sese lampada trudiinl . 



158 L'ACOUSTIQUE. 

La communication des vibrations sonores se fait ici 
par l'intermédiaire des caisses et de la colonne d'air 
qui les sépare : le premier diapason fait résonner sa 
caisse et le volume d'air qu'elle contient, Tatmosphère 
transmet le mouvement à l'air contenu dans la caisse 
de lautre diapason ; cette caisse commence à vibrer 
elle-même et le diapason qu'elle porte suit tous ses 
mouvements. 

Un violon ou un instrument à cordes quelconque ré- 
sonne aussitôt qu'on produit à quelque distance une des 
notes pour lesquelles ces cordes ont été accordées ; il 
demeure muet lorsque les notes que l'on produit sont 
en désaccord avec celles qu'il peut rendre. De là le dic- 
ton de la corde semible. 

La résonnance électivCy s'il est permis d'employer 
ce mot, s'observe souvent sous la forme d'une simple vi- 
bration mécanique, sensible au toucher, parce qu'on ne 
distingue pas le son de résonnance du son primitif. 
Kircher parle d'une grande pierre qui frémissait tou- 
jours au son d'un certain tuyau d'orgue ; Mersenne 
rapporte une observation toute semblable. Boyie dit que 
les stalles tremblent souvent au son des orgues, qu'il 
les a senties frémir sous sa main au son de Torgue ou 
de la voix, mais que celles qui étaient bien fortes trem- 
blaient toutes à quelque ton déterminé. On a souvent 
cité ce fameux pilier d'une église de Reims qui s'é- 
branle sensiblement au son d'une certaine cloche tandis 
que les autres piliers restant immobiles ; « mais ce qui 
ravit au son l'honneur du merveilleux, ajoute Rousseau 
en commentant cette histoire, est que ce même pilier 
s'ébranle également quand on a oté le battant de la 
cloche. » 11 serait alors difficile de comprendre ce qui 
niettuït le piJier en mouvemeul;\<i tivVV^V o^W ^?»1. taç- 



RËSONKANGE. 139 

porté par les auteurs n'a en lui-même rien qui puisse 
nous paraître extraordinaire. 

C'est ici le lieu de parler d'une expérience ou d*un 
tour célèbre qui consiste à briser un verre avec la voix. 
On sait que chaque verre a sa note spécifique ; il la fait 
entendre lorsqu'on le frappe avec une cuiller, lorsqu'on 
le rapproche dun autre verre pour trinquer, et aussi 
lorsqu'il se casse. Eh bien, il paraît que si un homme 
qui a la voix forte et très-juste, entonne cette note en 
se penchant sur l'orifice du verre, il peut le faire écla- 
ter au bout de quelques instants. D'après Bartoli ^ et 
Morhof *, il suffirait quelquefois de donner l'octave de 
la note en question ; les verres minces et bombés 
seraient les plus propres à faire réussir l'expérience; 
le son d'un violon produirait le même effet, tandis 
qu'on ne l'obtiendrait pas avec une trompette. Un 
physicien allemand raconte que, dans sa jeunesse, il a 
vu exécuter ce tour dans un cabaret, par un homme 
qui en faisait son métier : il rangeait plusieurs verres 
devant lui sur la table, les frappait Tun après l'autre 
avec une petite clef afin de connaître leur note, puis 
se penchait dessus et donnait cette même note d'une 
voix brève et forte : le verre éclatait toujours. Rien ne 
prouve, il est vrai, que les verres n'aient pas été pré- 
parés; on faciliterait singulièrement le tour en les 
entamant par un imperceptible trait au diamant. 

Ce qui est très-curieux, c'est que la première men- 
tion de faits de ce genre se trouve dans le Talmud. Voici 
la traduction du passage en question (Baba Kama, fol. 
18, Cj, II) : « Il a été dit par Ramé, lils de Jécheskel: 
Lorsqu'un coq aura tendu son cou dans le creux d'un 



* Trattaio del suono. fiologna, 1680. 

* Stenior hyaloclastes. Kil., 1683. 



140 L'ACOUSTIQUE. 

vase de verre et aura chanté dedans de manière à je 
briser, on payera le dommage entier. Et Raf Joseph a 
dit : Voici les paroles de Técole du Maître : Un cheval 
qui hennit, un âne qui brait et casse un vase, paye la 
moitié du dommage. » Si les écrivains du Talmud ont 
simplement inventé ces points litigieux, on doit dire 
qu'ils avaient l'imagination féconde. 

Les phénomènes de résonnance, nous venons de le 
voir, sont toujours accompagnés de mouvements vibra- 
toires très-sensibles des corps élastiques qui produisent 
ces phénomènes. Nous ne tarderons pas à généraliser 
cette remarque et à reconnaître que tous les sons résul- 
tent de vibrations d'une matière élastique quelconque, 
de sorte qu'il est permis de définir le son un' mowe' 
ment vibratoire perceptible à V oreille. Mais avant d'y 
arriver, nous devons nous arrêter un instant à un sujet 
qui se rattache intimement aux phénomènes qui vien- 
nent d'être exposés : nous voulons parler de Tacous- 
tique des salles de spectacle, amphithéâtres, églises, etc., 
problème épineux et qui n'a été encore étudié que d'une 
manière très-insuffisante. Comment faut-il construire 
une salle pour que le son qui émane d'un point déter- 
miné s'y transmette distinctement dans toutes les direc- 
tions? 

Les anciens avaient des amphithéâtres circulaires ou 
elliptiques dont les gradins entouraient l'arène, et des 
théâtres en hémicycle, avec une scène sans profondeur, 
enclose dans des murs épais et solides. Les gradins se 
développaient à partir de la scène suivant la loi d'un 
eone évasé ; tout cela représentait en quelque sorte un 
immense porte- voix qu'embouchaient les acteurs. Mais 
ces monuments étaient ouverts au ciel, sauf le cas où on 
Jes recouvrait des velaritt,\t»»\^Ti^^^V^Afe'5»^<5i'$i\^^^ 



BËSONNANCE. 141 

abriter les spectateurs et la scène contre les ardeurs du 
soleil. Ces tenlures ne pouvaient manquer de réfléchir 
le son, mais ce n'est point là-dessus que comptaient les 
architectes. Ils se contentaient de disposer les gradins 
de manière que la voix des acteurs pût monter sans 
obstacle à tous les auditeurs, dont le nombre était 
quelquefois du plusieurs milliers. Il est très-probable 




Fig. IS. Arïne) da Mmes. 

que ce but se trouvait généralement atteint, à en juger 
d'après ce qu'on peut encoreconstater aujourdhui dans 
les ruines d'anciens cirques ou théâtres. On y entend 
très-bien sur les gradins les plus éloignés la moindre 
parole prononcée dans l'arène. Le théâtre de la villa 
d'Adrien, à Tivoli, le cirque de Murviedro et l'amphi- 
théâtre de Nîmes sont, dit-on, très-remarquables sous 
ce rapport. 
La seuie chose ijae les andens arc\i\\ftc,Vc,4 se ^\toN.^ 



142 L'ACOUSTIQUE. 

permise dans le but d'augmenter la sonorité de leurs 
théâlres, c'est Temploi des vases renforçants dont nous 
avons déjà parlé plus haut. 

Les affaires publiques se traitaient aussi en plein air, 
dstns Tenceinle appelée forum. On se divertissait^ on 
tenait conseil, on se haranguait sous la voûte du ciel 
bleu. Aujourd'hui que la civilisation a quitté son ber- 
ceau pour se nationaliser sous des climats plus rudes, 
il a fallu remplacer cette architecture naïve par des 
salles de spectacles ou de concerts, des cirques, des am- 
phithéâtres, des salles d'assemblées politiques, sans 
compter les églises. Les plafonds, les piliers, les stalles 
et les loges apportent dans la propagation du son un 
trouble profond par les réflexions et les résonnances 
qui résultent de la présence de ces obstacles. Il faut 
donc entrer dans des considérations d'un ordre com- 
plètement nouveau pour découvrir les principes d'acous- 
tique applicables aux constructions modernes. 

Les voûtes circulaires sont en général d'un mauvais 
effet : elles donnent lieu à une résonnance trop forte 
et trop prolongée. Sous la coupole de Saint-Paul, à 
Londres, il vous semble entendre les sons courir le 
long des murailles. Dans la Rotonde, à Rome, cet effet 
est, dit-on, si bizarre, que beaucoup de gens n'assistent 
au prêche dans cette église que pour entendre le jeu des 
résonnances. Toutefois cet inconvénient n'existe pas 
dans la salle de concert circulaire de l'Académie des 
beaux-arts de Berlin ; il est vrai que les murs y sont 
percés d'un grand nombre d'embrasures très- pro- 
fondes. La coupole de l'église de Marie, à Dresde, est 
également remarquable par l'absence de toute réson- 
nance. Mais la grande salle de l'université de Munich 
^'ouit d'un écho quintuple. 




RÉSONNâNGE. 143 

Les voûtes ou salles elliptiques n'ont aucune raison 
d'être, puisque l'ellipse n'est propre qu'à concentrer 
en un seul point les rayons partis d'un autre point. La 
parabole, qui rend parallèles les rayons divergents, 
ie recommande davantage ; la chaire ou la tribune de 
orateur se placerait au foyer de la courbe. Chladni 
iropose d'arrondir en parabole le fond d'une salle rec- 
angulaire (fig. 45) ; cette corn- 
)iDaison se rencontre dans quelr 
|aes anciennes basiliques. On 
)ourrait compléter l'effet en don- 
nant une courbure parabolique à p. ^5 
a voûte du plafond. Des abat- 
oix ou dais de cette forme sont employés au-dessus de 
a chaire dans quelques églises ; leur mode d'action est 
e même que celui des réflecteurs en usage dans les 
)hares. 

Dans une salle de concert ou de conférence, il y 
mrait avantage à construire au-dessus de la tribune 
ine portion de voûte sphérique dont l'axe serait incliné 
?ers le centre de la salle. Une autre idée de Chladni est 
l'établir la tribune sous une espèce de cornet maçonné, 
m forme de demi-cône (fig. 44) ; mais il reconnaît lui- 






Fig. 44. Fig. -tô. 

même que cette construction serait laide et peu pratica- 
ble. L'orateur s'y trouverait comme autoTvAtfww^wVx^ 



144 



L'ACOUSTIQUE. 



et risquerait toujours de se cogner la tête contn 
parois de son porte-voix. 

Dans les théâtres, il faudrait naturellement reno 
à toute espèce de réflecteur disposé derrière la se 
La seule chose qui mériterait peut-être quelque al 
tion, c'est remploi des coulisses triangulaires des 
ciens, que Ton faisait tourner autour de leurs cen 
et qui laissaient perdre moins de son que nos couli 
en paravent (fig. 45). Quant à la disposition à dôi 
aux stalles ou banquettes où se placent les auditei 
riiémicycle n'est point compatible avec l'exiguïté 
nos scènes modernes. Une forme avantageuse se 
celle que représente la figure 46 ; c'est celle d'un 





Fiff. .46. 



Fig. 47. 



cicn théâtre d'Athènes. Le théâtre de Parme, qui 
célèbre par ses propriétés acoustiques, a la forme 
présentée figure 47. Les loges d'avant-scène coi 
tuent le défaut le plus saillant de nos salles moden 
Zamminer les compare à des souricières où les i 
viennent s'étrangler. Malheureusement, l'archit 
d'un théâtre est obligé de compter avec les gens qui 
vont pas pour écouter, mais pour se faire voir. 

Dans la construction de nos amphithéâtres et ( 
celle des ég^lises, ou né»V\ge \.to\i ^c^ws^wt les ^lus sim 



RËSONNâNGE. 145 

principes d'acoustique, et on obtient conséquemment 
des effets détestables. 

Le défaut le plus ordinaire est une trop grande so- 
norité qui empêche les paroles d'être distinctement 
perçues. L'hémicycle de TÉcoledes beaux-arts, à Paris, 
est, pour cette raison, une des salles les plus désavan- 
tageuses jpour s'y faire entendre, quoique assurément 
une des mieux décorées qui existent. Le grand amphi- 
ihéâtre de physique et de chimie du Jardin des Plantes 
jt Tamphithéàtre de physique du Collège de France 
jont également d'une sonorité fâcheuse. On a essayé d'y 
*emédier par des draperies destinées à rendre les murs 
)lus sourds et par des morceaux de bois disposés pour 
atténuer les vibrations des banquettes et des gradins , 
nais ce ravaudage tardif n'a pas produit grand eiïet. 
Dans l'église de Saint-Paul, à Boston, qui offre les mêmes 
défauts, la voix du prédicateur n'est intelligible qu'une 
Fois par an, à la fête de Noël ; ce jour-là, l'église est 
parée d'une manière exceptionnelle et les voûtes sont 
moins sonores qu'à l'ordinaire. 

Le Tabernacle des Mormons, immense voûte ovale 
posée directement sur le sol, offre au contraire de 
8[rands avantages : l'orateur s'y fait entendre sans diffi- 
culté de 1,200 personnes *. 

La forme semi -circulaire que l'on donne si souvent 
lux amphithéâtres laisse subsister une grande inégalité 
entre les places situées au centre de riiémicycle et celles 
fjui sont aux deux extrémités ; cette remarque s'appli- 
que dans toute sa force à ramphithèàtrc de physique 
de la Sorbonnc ; dans celui du Conservatoire des arts et 
métiers, l'inconvénient se trouve atténué par la dispo- 
sition de la chaire. La forme la plus avantageuse sera 

' J. Siegfried, Seàe mois autour du mo%\àt . 



140 VÀCOUSTIQUB. 

toujours celle qui se rapproche du quart de œrdef, 
parce que les murs guident alors beaucoup mieux le son 
?ers les auditeurs. 

Quant à l'élévation successive des gradins, on les 
échelonne ordinairement dans les amphithéâtres sui- 
vant une ligne droite qui va du plancher à la naissanee 
du plafond. Une ligne à courbure concave serait plus 
avantageuse, parce qu'elle permettrait de dégage les 
derniers rangs, en les élevant suffisamment au-dessus 
. de ceux qui sont plus rapprochés du centre. M. Scott 
Russell, M. Lachèze et d'autres ont proposé diverses 
courbes pour cet usage. 

Le projet le plus original qui ait été imaginé foat 
améliorer l'acoustique des salles de spectacle est ce^ 
tainement celui que le conseiller intime Langhans, de 
Berlin, communiqua à Chladni ; ce projet consiste à diri- 
ger de la scène sur les spectateurs un petit courant 
d'air qui leur apporterait les paroles des acteurs... On 
le produirait par une habile ventilation... 



VIII 



LE SON EST UNE VIBRATION 



Origine mécanique des sons. — Cordes et UiyauK. — Inslrumenl de Trevulyan. 
— Slalue de Memnon. — Flammes chantantes. — Fiammcs sensibles. — 
Pendule. — Ondulations de l'eau. — Ondes progressives et ondes» lues. — 
Vibrations des cordes, des tiges, des plaques. — Figures de Ciiladni. — Fi- 
gures de Kundt. — Méthode graphique. 



Jusqu'ici nous n'avons encore considéré que les phé- 
nomènes sonores qui, pour ainsi dire, tombent sous 
les sens, en faisant toujours abstraction de la nature 
intime du mouvement qui les produit. Il est temps 
d'éclaircir ce point important et de dire que le son ne 
peut avoir d'autre origine que les vibrations d'un corps 
pondérable. 

Les phénomènes de la résonnance nous conduisent 
déjà à cette conclusion. 

En effet, comment expliquer les frémissements des 
stalles et des piliers des églises aux sons de l'orgue, les 
trépidations de la table d'harmonie d'un instrument de 
musique, et tant d'autres faits du même genre, à moins 
d'admettre que le son résulte de certaines vibrations des 
corps sonores, transmises à distance par l'air ou paru 
autre milieu quelconque ? 



Itt L'ACODSTIQUI. 

L'expérience vulgaire nous montre qu'un ton nnpta 
fort est toujours accomp^é de Tibrationg sensîbln ta 
toucher. Les tambours qui passent dans la rue Ata- 
lent les vitres de nos croisées. Un coup de canon bit 
trembler le sol ; tous ceux qui se trouvent à peu de dit' 
tance de la pièce éprouvent une forte seconsse i la 
poitrine. Dans un concert, on n'a qu'à tourner l'ointf- 
ture d'un chapeau du cAté de l'orchestre en touchut 

I légèrement le fond du bout des doigts, 
pour y sentir aussitdt les frémisBeniNili 
der.ir. 
Dans beaucoup de cas, il est Irès-bdle 
de s'assurer directement que le son Dt 
peut pas se produire sans un mouvement 
vibratoire concomitant. Due corde ten- 
due que l'on fait résonner exécute des 
oscillations qui deviennent^isibles grtce 
à la persistance des impressions lunii- 
neuses : elle prend la forme d'un fuseau 
(fig. 48 ) parce que l'œil en voit à la foie 
les positions extrêmes. C'est pour la 
même raison que les contours d'un dia- 
pason un peu grand deviennent confi» 
'*" dès qu'il entre en vibration sonore. Poai 

constater les oscillations d'une corde horizontale, oc 
peut aussi la garnir de chevalets de papier, que l'oi 
voit entrer en danse aussitôt qu'elle résonne. 

Une cloche de verre qu'on ébranle au moyen d'ui 
archet ou d'un marteau de bois, communique des sou- 
bresauts très-vifs à une petite bille d'ivoire que l'on ei 
approche avec précaution, suspendue à ud Ql; chaqni 
fois qu'elle vient à toucher la cloche, la bille est lancé* 
au loin, et en rctomlianl eWa wm\»\e à »iàïMt«,v siit l 



LE SON EST UNE VIBRATION. 



149 



verre à coups précipités. Si on touche le bord de la 
cloche avec la pointe d'un crayon, on l'entend crisser 
contre le verre frémissant. En frottant avec le pouce et 
l'index enduits de colophane, dans le sens de sa lon- 
gueur, une tige d'atier horizontale, on lui fait rendre 
un son très aigu ; si alors on approche le petit pendule 
de l'une des deux extrémités, la bille est encore re- 
poussée avec une très-grande violence. Une verge de 
laiton de 1",4 de longueur et de 0'",035 d'épaisseur 
s'allonge en vibrant de 0'"™,6 ; 

il faudrait la charger de 5^,700 

kilogrammes pour obtenir le 

même résultat par traction. 
Une plaque de cuivre, de 

verre ou de bois, que l'on fait 

vibrer au moyen d'un archet, 

rend des sons différents, selon 

le point oii on l'attaque; si 

alors on la poudroie de sable, 

on le voit sauter et finalement 

se rassembler en courbes régu- 

lières qui marquent les lignes 

de repos. On peut aussi rendre 

visibles les oscillations d'une 

plaque de verre en n'éclairant 

qu'une série de points isolés 

de la surface vibrante par une 

lumière que l'on place derrière 

un écran percé de petits trous. 

Si Ton introduit dans un tuyau 

d'orgue, pendant qu'il parle, 

une petite membrane tendue 

sur un cadre de carton^ suspendue à lvo\s>SV«> ^V ç«vw« 




tJ(ùaiiiL»j 



Fig. 49. 



150 L'ACOUSTIQUE. 

d'une poudre bien sèche, cette poudre est projetée au 
loin et la membrane balayée. Pour mieux constater ce 
résultat, on fait construire des tuyaux vitrés (fig. 49). 

Il est toujours facile d'obtenir des sons par des ac- 
tions mécaniques répétées à de très-petits intervalles. 
Une carte flexible que Ton appuie sur le conlour d'une 
roue dentée en mouvement, et qui se plie ou se relève 
quand une dent la rencontre ou la quitte, donne nais- 
sance à un son d'autant plus aigu que la rotation esl 
plus rapide; c'est le mécanisme de la crécelle. Dans la 
sirène, appareil que nous décrirons plus loin, un cou- 
rant de gaz ou de liquide est dirigé contre un disque 
tournant percé de trous : il passe ou est intercepté al- 
ternativement, et ces intermittences font naître un son 
dans l'air ambiant. Dans les tuyaux à anche, le son est 
déterminé par les vibrations d'une languette élastique. 
Les lèvres frémissent lorsqu'on fait parler une flûte ou 
un cor. 

Il semble quelquefois que l'on puisse produire des 
sons par des mouvements continus ; c'est ainsi que les 
tuyaux à embouchure de flûte, et le sifflet ordinaire, 
semblent parler sous l'influence d'un jet d'air non in- 
terrompu. Mais dans ces cas, le jet se brise contre un 
biseau et se partage en deux branches, l'une qui pé- 
nètre dans l'embouchure, l'autre qui s'échappe dans 
l'air ambiant. Le courant qui entre comprime la tranche 
d'air voisine du biseau ; celle-ci réagissant par son élas- 
ticité repousse le courant, puis cède de nouveau, et 
ainsi de suite, de sorte qu'il y a là en réalité un va-et- 
vient continuel. Wertheim a réussi à faire vibrer de la 
même manière des tuyaux plongés dans un liquide, en 
y injectant un courant du même liquide. Les sons qu'il 
obtenait avaient le même cataLc\.et^Tttw^\ça\. o^Çi V^y^qjic 






LE SON EST UNE VIBRATION. 151 

les tuyaux -parlaient dans l'air. Cagniard de la Tour 
avait déjà fait vibrer de l'eau dans des (ubes de verre 
en frottant ces tubes dans le sens de la longueur, et 
Teau était devenue sonore. 

C'est ici le moment de parler du trembleur de Tre- 
velyan^ instrument dans lequel le son résulte du contact 
de deux métaux inégalement chauffés. 

Dès 1805, M. Schwartz, inspecteur d'une des fon- 
deries de la Saxe, ayant posé sur une enclume froide 
une coupe d'argent qui était encore chaude, entendit 
avec stupéfaction des sons musicaux s'échapper de ces 
masses métalliques. Un savant de Berlin, qui visita les 
travaux de la fonderie, répéta l'expérience et constata 
que la coupe tremblait d'une manière sensible tant que 
le son persistait et qu'elle cessait de trembler lorsqu'il 
s'éteignait par suite du refroidissement de l'argent. 
Le professeur Gilbert, — c'est le nom du savant, — se 
contenta d'enregistrer ces faits, renonçant à les ex- 
pliquer. 

Vers 1829, M. Arthur Trevelyan, voulant étendre de 
la résine avec un fer à souder, s'aperçut que son fer 
était encore trop chaud et l'appuya contre un bloc de 
plomb pour attendre qu'il eût pris la température con- 
venable. A peine le fer touchait-il le plomb, que M. 
Trevelyan entendit sortir de son instrument une note 
aiguë semblable, dit-il à celle d'un galoubet de Nor- 
thumberland. En même temps, il vit le fer se tourner 
et se retourner dans une vibration rapide. 

M. Trevelyan se mit alors à étudier des faits d'une 
manière approfondie, et il en donna une explication 
qui parait être la vraie. Les vibrations observées sont 
dues à l'expansion brusque de la masse froide au con- 
iad de la masse cfaaude. Au momenl o\x\^ ^^"c â^^ 



ISS ' L'iCOnSTIQDI. 

touche le plomb en un point donné, le plomb s'j bour> 
son&e et repouBse le fer; ce dernier le touche alon 
par quelque autre point, où le même éSet se ronouv^ 
pendant que le point qui avait été touché en premio' 
lieu, se refroidit et se dégonOe. C'est grâce à ce jeu de 
dilatations et de conlractioos alternatives que le tient- 
bleur (fig. 50) eiécute sa musique. On le fait ordinai- 



rement en cuivre ; c'est une barre prismatique dont 
l'an^gle inférieur est évidé par une rainure,'et que l'on 




fixe au bout d'un manche hieu arrondi. On chauffe cet 
af^areil à la température de V«an \»!Kï0^wQfub,vA.iu, 



LE SON EST UNE VIBRATION. 



153 



leu au delà, et on le pose sur un morceau de plomb. 
)n fait aussi la même expérience avec une pelle qu'on 
diauffe au feu et qu'on pose ensuite en équilibre 
rar deux lames de plomb fixées dans un étau (fig. 51); 
m la voit alors prendre un mouvement de tangage qui 
»t accompagné d'un son plus ou moins agréable ; on 
)eut modifier le son en soutenant légèrement la pelle 
MUT le manche. Quelquefois, on réussit même à faire 
ribrer et chanter une simple bague ou une pièce de 
monnaie, que l'on pose de champ sur un morceau de 
plomb, après l'avoir suffisamment chaulTée. 

Lorsqu'un courant d*air s'échauffe et se refroidit pé- 
riodiquement en un de ses points, il en résulte une 
suite de dilatations et de contrac- 
tions alternatives qui peuvent de- 
venir une source de vibrations so- 
nores. C'est ce qu'on peut consta- 
ter avec l'appareil de.Rijke. Il se 
compose d'un tube de verre dans 
lequel est fixée ( au tiers de la 
longueur) une petite toile métal- 
lique que l'on chauffe par une 
flamme d'alcool (fig. 52). Quand le 
fil a été porté au rouge, on retire 
la flamme. Au bout de quelques 
instants d'attente, le phénomène 
*e manifeste : un son plaintif, sorte de vagissement ti- 
mide semble errer autour du tube ; peu àpru il s'enfle, 
s'accroît devient très-fort; puis, à mesure que la toile 
se refroidit, le son s'évanouit et le tube redevient muet. 
On s'assure facilement que le son est dû aux vibrations 
du courant d'air ascendant qui s'échauffe en passi> 
ww les mailles de la toile et se retroiàil eu \^ ojivVNJ 




Fig. î>2. 



IN' L'ACCIUSTIQIIE. 

en effet, il siiffil d'incliner le tube dans une position 
horizonliile pour faire cesser momentanément Ip son par 
rinterruption du courant. Il est très-probable que les 
sons mystérieux que la statue de Memnon rendait le 




FiR. S3. Slalue da Hem 



malin au lever du soleil, étaient dus à des courants d'air 
qui montaient dans les fentes de la pierre quand celle- 
ci s'cchaufTait aux rayons de l'aurore. 

On entend quelquefois chanter une flamme de gai 
quand le bec est bouché par un obstacle qui gène l'é- 
mission du courant. Le jet, au lieu d'être continu, de- 
vieot alors intermitlent, e\. \e t^x^«:ca\Aft\» YiiMk- 




LE SON EST UNE VIBRATION. 155 

♦ 

Un courant d'hydrogène qui bnile dans un tube 
pre peut également produire un son. Cette re- 
le a été le point de départ d'une série de belles 
lences, dues au comte SchaiTgotscli et à quelques 
. physiciens. On introduit dans un tube de verre 
•4) un bec de cuivre effilé sur lequel 
une petite flamme de gaz. Si main- 
t on donne à distance la note propre 
be de verre, l'air qu'il contient se 

YÎbrer, communique ses pulsations 

amme, celle-ci s'allonge, tremble et 

; à son lour à chanter toute seule. On 

l taire en appliquant le doigt sur 

ce du tube : pour la faire résonner 

luveau, il suffit d'un autre appel de 

ix ; mais il faut rencontrer la note 

^ sans quoi la flamme ne répond 

. Avec quatre flammes et quatre tu- 

on peut composer un petit buffet 

[lie qui tient l'accord parfait do mi 

} aussi longtemps qu'on le veut, une 

[u'on lui a donné le ton. Quelquefois il arrive aussi 

a flamme se mette à chanter spontanément, si sa 

:e est placée en un point déterAiiné du tube. 

est facile de s'assurer que le son de flammes chan- 

8 est produit par une pulsation du gaz qui brûle 

le tube. La flamme passe alternativement du 
3 au bleu suivant l'abondance plus ou moins grande 
iz qui vient alimenter la combustion. Il suffit de 
ler la tète à droite et à gauche pour voir la flamme 
re se dissoudre en une série d'images bleues et 
ches qui, étant reçues en différents points de la 
}e, ne se confondent plus pour Y(B\\. Ow çJ*ù^\«oN.^WI 




Fig. 54. 



i 



158 L'ACOUSTIQUB. 

SOUS l'action des résistances- diverses qu'elles rencod- f 
trent ; comme celles du pendule, elles se reproduisent 
après des intenralles de temps constants : elles sont Uo- 
(kroties. 

Les vibrations successives d'un même son durent toute 
le même temps ; s*il y en a 100 par seconde, chacune 
dure 1/100* de seconde. Chaque son détermioéi 
sa durée de vibration dans l'échelle des sons percep- 
tibles; elle varie entre 1/30 et 1/30,000 de seconm. 

Quant à la nature particulière de ces mouvement! 
vibratoires qui donnent naissance à des sons, ils pes- 
vent être de différentes sortes. Dans Pair, ce sont dèi 
condensations et des dilatations alternatives. Une tige 
prismatique peut se contracter et se dilater danslesen 
de sa longueur, ou bien se ployer et se reployer tram- 
versalement, ou enfin exécuter des vibrations to1l^ 
nantes. Dans les liquides, les vibrations forïnent des 
ondes. 

Quand le son se propage, les molécules vibrantes ne 
changent pas sensiblement de place, elles se bornent à 
osciller autour de leurs positions d'équilibre, et le 
mouvement seul se transmet à distance. C'est ainsi que 
l'eau se déplace à peine pendant qu'une onde ordinaire 
en parcourt la surface. Pour nous en convaincre, jetons 
une pierre dans une nappe d'eau tranquille. Autour 
du point d'ébranlement, nous verrons naître des bour- 
relets concentriques qui iront se propager jusqu'au ri- 
vage en décrivant des cercles de plus en plus larges. 
Sur leur route, ils rencontrent une foule de corps flot- 
tants : morceaux de bois, feuilles tombées, brins de 
paille. Ces corps, tout légers qu'ils soient, ne sont point 
entraînés ; on les voit se soulever à l'approche d'une 
'onde et descendre un Vuslatvl «çTft%, Qfs«!eAL ^^ ^'4loi- 



LE SON EST UNE VIBRATION. 159 

gne, mais ils . ne changent pas de situation d'une 
manière perceptible. Ce n'est donc pas une onde maté- 
rielle qui est transportée à la surface de Teau : ce qui 
se transmet de proche en proche, c'est la secousse et 
la déformation qui en résulte. Le bourrelet mobile se 
di:iS0ut à chaque instant et, à chaque instant, se re- 
forme un peu plus loin avec des molécules nouvelles qui 
à leur tour ne tardent pas à rentrer au repos. Imagi- 
nons maintenant, au lieu d'une seule pierre qui s'en- 
fonce, une suite de pierres qui tombent Tune après 
l'autre au même point, à intervalles réguliers ; les ondes 
qu'elles excitent iront frapper le rivage dans une suc- 
cession tout aussi régulière, mais toujours [sans en- 
traîner bien loin les molécules d'eau qu'elles font 
monter et descendre dans un va-et-vient continuel et 
qui se transmettent de proche en proche Timpulsion 
reçue. Cela se passe comme dans une file d'ouvriers qui 
vont en relais avec des brouettes alternativement vides 
et pleines. 

D*aprcs les belles expériences des frères Ernest-llcnri 
et Guillaume Weber, les molécules liquides décrivent 
ordinairement des cercles pendant qu'une onde se pro- 
page dans la masse. Supposons, pour fixer les idées, que 
chaque molécule fasse un tour entier dans le temps que 
l'onde emploie pour aller du point jusqu'au point mar- 
qué 12 dans la figure 56; elle fera une douzième de 



¥i^. o6. GndulalioMs de IVaii. 



tour toutes les fois que l'onde franchira un des douze 
intervalle^ compris entre les poVtvls e\. \^, 



L'ÂCODSTIQDI. 

An moment OU l'onde Mn arriiée an point 3(fig. 57j 
la molécule aura déjà eo le tonps d'aoooaq>lbr 3/1! 
on 1/4 de toar, la soÎTanle 2/iS ou i/6 de toiir;! 
troisième, qui porte le nnméro S, anndt fait 1/lS d 
tour, et la quatrième (3) ne fen que commencer i 




SI. Qaart Joniuhtlaa. 



danse. A ce moment, la molécule sera arrivée au poin) 
le plus bas de sa course et de?ra remonter du côU 
opposé. 

La figure 58 représente la situation des molécula 




Fig. 58- I>eini-ondulation. 

au ^moment où Tonde est arrivée au point 6, la mole 
cule ayant exécuté un demi-tour, la molécule 3 ui 
quart de tour, etc. C'est maintenant 5 qui est au poin 
le plus bas de son orbite, pendant que est remonté 
au niveau de la surface générale. Entre Oct 6 esta 
val. 




Fig. 59. Trois quarts d'ondulation. 



Dans la figure 59, la première molécule a décrit li 
3/4 d'une circonférence el ^e Vx^xw^ ^xi^ ^^^vwt. cuUn 



;le son est une vibration. 101 

îianl de sa course, la molécule 5 a fait un demi-lour el 
«st remontée au uiveau moyen, toute la (île depuis 5 
jusquà 9 forme un val d'ondulation comme précédem- 
inenl la file comprise entre et 6. 

Enfin, dans la figure 60, le val s'est encore déplacé 
de trois points : il se trouve entre 6 et 12 ; le point 3 




Fig. 60. Oudulation complète. 

«st maintenant au sommet de sa course, pendant que 
le point 0, ayant décrit une circonférence entière, est 
revenu à sa position primitive. Entre et 6 il y a un 
mont ou une crête. L'ensemble de cette élévation el de 
la dépression qui s'étend de 6 à 12 forme une onde 
entière, et l'intervalle qu'elle remplit se nomme une 
longueur (Vonde. On remarquera que dans le fond du 
val les molécules se sont écartées les unes des autres, 
tandis que, vers le sommet du mont, elles se resserrent. 




Fig. r>l. Ondulations de l'eau. 

Les mêmes alternatives se renouvellent ensuite à in- 
tervalles de temps égaux. Quand la molécule a exé- 
cuté pour la seconde fois un tour entier, la molécule 12 
en a exécuté un pour la première fois ; il y a une onde 
complète entre et 12 et une autre entre 12 et 24 (fig. 
61). Quand la molécule a fait trois \o\\ts, Xe?^ viw\^%^ 



m L'ACOUSTIQUE. 

ioat propagées jusqu'au point 36 ; lorsqu'elle a bit 
quatre tours, les ondes sont arrivées su point 48, et 
ainsi de suite. Tendant chaque oscillation complète, il 
tête avance d'une longueur d'onde. 

La position actuelle d'une molécule dans son ( 
s'appelle sa phase. Chaque molécule coinmenco a 
cursion un peu plus tard que celli? (luî la i 
inunédiatement, et il en résulte qu'elle reste coid 
ment en retard sur cette dernière pendant louteUil 
du mouvement. Ce retard relatif s'appelle la diff, 
déphasé. Du point au point 5 elle est de 1/j, j 
9 de 3/4 d'une oscillation, etc. De à Vî il y a nia 
férence d'une phase entière, ce fjui équivaut i 
différence nulle, puisque les deu\ molécules c 
des positions semblables. Le mouvement & 
comme si chaque phise du point U i^c Iranf^mettai^ 
cessivemcnt à toute la Ole. 

Au lieu de décrire des cercles, k's luulécules peuven* 
aussi parcourir des ellipses, et ces ellipses peuvents'il- 
longer jusqu'à se transformer en lignes droites. Let 
particules liquides ne font plus alors que monter d 
descendre dans leur verticale, elles exécutent desimples 
vibrations transversales ^ comme on les observe dans les 
cordes, dans les plaques, les membranes, etc. La forme 
générale de l'onde reste la même ; seulement le mI 
et le mont deviennent syraùtriques : l'un est toujours 
l'inverse de l'autre, comme le montrent les courbes sui- 
vantes (fig. 62), qui représentent la progression d'unt 
vibration transversale. Telles sont aussi les ondulations 
de l'éther qui produisent la lumière. 

Si les orbites des molécules, au lieu de devenir dei 
ligues droites verticales, se transformaient en lignet 
droites horizontales l,\a çioça^aS^vovi ^% VotiA«, étani 



r!!ST USE VIBItATIOS. 



luiijours supposée horizontale), on aurait des vibratiotis 
lunijitiulhiales analogues S celles des corps gazeux. Les 





molécules ne font alors que s'écarter et se rapprocher 
luiir à tour, d'où il résulte des dilatations et des conn- 
pressiona alternatives, comme on peut le voir dans les 
rourlies de la figure 65, qui représente la proj,'rcssion 
d'une onde longitudinale. 

Dans les corps de fanne cylindrique, on peut encore 
observer une autre classe de vibrations : tes vibrations 
rie loi-sion ou vibrations loumanles. Les molécules oscil- 
lent alors circulairement autour de l'axe du cylindre, 
vt le mouvement se propage de la même manière que 
dans les aulres cas. C'est comme si chaque phase du 
mouvement de la première molécule se ti:a«9,Tft*!.\.Va\V. 
gucceasiieintnt l'i toiilc la file. Dans \cft VxW^'Cxowà Vx^ws*- 



161 L'ACOrSTIQUE- 

versales, nous voyons le sommet de l'onde se déplacer 
et voyager le longde la corde (fig. 62) ; dans les vibra- 
tions longitudinales, ce sont les compressions et les di- 
latations qui se transmettent de proche en proche (fig. 
63). 

Telle est la propagation des ondes progressives dans 
un milieu indérini. C'est de cette manière que le son 
est transmis dans l'air libre, que la lumière se propage 
dans l'étlier, que les ondulations se succèdi^nt dansune 
nappe d'eau illimitée. On peut aussi observer ces ondes 
progressives dans un long tube de caoutchouc fiié par 
un bout et dont on tient l'autre bout a la main ; un pe- 
tit coup frappé à celte extrémité détermine une onde 
transversale qui parcourt en serpentant toute la lon- 
gueur du tube et y forme les replis indiqués dans là 
figure 62 ; on peut la faire suivred'uneonde semblable 




111 t'rii|ipant do nouveau sur l'estrémilé du tubi' au itto- 
irirnl m'i elle rentre iui repos, puis d'une troisième et 
<■/>///(■ (|(i;i(ricme onde, plumsiAft ™\V.ft\\\ï*^\'4 tu «jic 



LE SON EST UNE VIBRATION. 105 

la première ait atteint le mur contre lequel le tube est 
flxé. A partir de cet instant, le phénomène change d'as- 
pect : les ondes ne pouvant plus avancer sont obligées 
de revenir en arrière, et les premières qui reviennent 
se croisent avec les dernières qui arrivent. Il en résulte 
ce qu'on appelle des ondes fixes. 

Les ondes fixes caractérisent les vibrations sonores 
des corps élastiques, soit qu'ils rendent les sons qui 
leur sont propres, soit qu'ils résonnent seulement sous 
l'influence de chocs périodiques. Voici comment ces 
ondes se distinguent des ondes progressives. Tandis que, 
dans celles-ci, les molécules entrent en vibration Tune 
après l'autre, dans les ondes fixes elles vibrent toutes 
à la fois et passent ensemble par les positions d'équi- 
libre. Ces ondes ne voyagent pas : elles naissent, meu- 
rent et ressuscitent toujours sur place. 
Cette transformation est due à l'intervention d'ondes 
lies. Les lois qui président à ces phénomènes sont 
compliquées ; pour nous en faire une idée, consi- 
ce qui se passe lors du choc de deux masses élas- 
K Soient A, B deux billes d'ivoire suspendues à 
fik parallèles ; soulevons la bille A et laissons-la 
)r contre la bille B. Si les masses sont égales 
64, I), A restera en repos après le choc, cédera 
sa Titesse à B, et B sera lancée en avant. Si la bille 
plus grosse que B (fig. 64, II), elle dépassera la 
MHîcale avec une vitesse un peu amoindrie, en chassant 
la petite bille devant elle. Enfin, si A est plus petite 
que B (fig. 64, III), elle reviendra en arrière avec une 
vitesse plus ou moins considérable. Plus la résistance 
opposée par la masse B est grande, plus la réflexion est 
énergique. 
Les choses se passent d'une mamète aw^o^xx^V^t^- 




iCÔ 



LAGOUSTIQUE. 



qu'une vibration se propage dans un milieu élastique. 
Les billes A, B de la figure I représentent deux molécu- 
les voisines qui se transmettent une onde progressive ; 
B reçoit toute la vitesse de A, et A rentre au repos jus- 
qu'à ce qu'une nouvelle impulsion vienne Tébranler. 
Mais si A et B sont, pour ainsi dire, les colonnes limi- 
trophes de deuK milieux de densités différentes, nous 
tombons dans Tun des deux cas représentés par les figu- 
res II et m. Si, par exemple, le milieu B est moins ré- 
sistant que le milieu A, la molécule A glisserQ en avant, 



II 



III 





A B A B 

Fig. JoA. Choc des billes élastiques. 



>•' 



tout en communiquant à B une vitesse dirigée dans le 
même sens (fig. II). Si, au contraire, le second milieu 
est plus résistant que le premier; si, par exemple, B re- 
présente un obstacle fixe, la molécule A reviendra en 
arrière, et B sera à peine ébranlé. 

Or qu'adviendra-t-il dans ces deux cas? La molécule 
A, n'étant pas rentrée au repos, deviendra une source 
de mouvement pour toute la file de molécules situées 
derrière elle. Il en résultera une onde réfléchie qui 
transportera en arrière le mouvement conservé en A, 
lequel sera, ou bien de même sens que celui dont A 

nit animé avant le choc (fig. Il), ou bien de sens con- 

re (fig. ni). 



LE SON EST UNE VIBRATION. 167 

Ces comparaisons serviront au moins à donner une 
idée approximative des phénomènes qui accompagnent 
la réflexion d'une onde sonore. Le premier cas, celui 
de la figure II, représente la réflexion d'un son à l'in- 
térieur d'un corps solide qui vibre dans l'air, A étant un 
point d'une surface libre et B une molécule d'air. Une 
réflexion de la même nature a lieu à l'extrémité d'un 
tuyau plein d'air qui s'ouvre dans l'atmosphère, car 
l'air ambiant, pouvant se dilater librement, représente 
un milieu moins résistant que l'air intérieur. Le son 
qui sort de la bouche d'un tuyau ouvert se réfléchit 
donc partiellement sur l'air extérieur et rentre dans le 
tuyau. Ce résultat, indiqué par la théorie, peut se vé- 
rifier par l'expérience : à l'extrémité d'un tuyau ouvert 
très-long, il se forme un écho très-perceptible. Biot a 
observé que les sons lui revenaient jusqu'à six fois lors- 
qu'il parlait à l'une des extrémités du conduit de fonte 
de 951 mètres qui forme l'aqueduc d'Arcueil. 

Le cas de la figure III est celui de la réflexion ordi- 
naire sur les obstacles fixes où la phase change de signe. 
Cest de cette manière que le son se réfléchit à l'inté- 
rieur d'un tuyau fermé, aux extrémités d'une corde 
fixée par ses deux bouts, etc. 

Une construction facile, mais qui nous mènerait trop 
loin, montre que dans les deux cas les ondes directes 
et les ondes réfléchies se combinent de manière à pro- 
duire des ondes fixes^ séparées par des points de repos 
qu'on appelle des nœuds. 

Les molécules comprises entre deux nœuds consécu- 
tifs forment ce qu'on nomme une onde simple * ; ani- 

' L onde simple équivaut à la moitié d'une onde complète ou double, 
eorame la vibration simple est la moitié d'uno vibration com\ilHc 
vibrai f on double. 



inil t.'AC()tJSTlQrE. 

liii^i'H il'iiii iiiDUVc-iiKiiileummun, elles 

i<ii*i'iiil>lu iliiiiN un nom, [)mir revenir 

t'iiiili'iuri'. 1.1^ l'ciilrv (le diaf|ii« onde est k âêgti'a 

Vi'iihf tir lilnatioH, C'est là que l'agititMa nt â ^ 

liinxiiinirii ; ilii vi'nkrtf aux noiucls elle dîaimne. Vim- 

\>\\\m\\' t\v* l'xoursiiJiis ilccroit, et toul 

tt'iiit ilmio li'H iiii'iids. 

I.ivi mnU'fîulus iU> i\m\ tmdcs cuntigoês v&fcnt te- 
jhinn l'ii nKiiH ii[i|iiisi''.t; si elles montent d'une part, Je 




i 



rtiutiii cllt^N tIcMct'iitloiit, et vice versa (fig. 65) ; si. 

il ini r<^l<^ olU'M H'iMiii^nunt ou se rapprochent du uœod 

i|iii Nt^jmi'o U'K (Imix «nili's, elles s'en éloignent ou s'en 

ni|i|in>rlii<nt lyalriiirnt do l'autre cdté. 
li'itili'rviille d(Ml<'ii\ nœuds ou de deux ventres con- 

néi-nlifs est uno lonyiieur d'onde simple ; le double re- 

pi'ÙNeiiti' ('« (ju'nn uppelle une longueur d'onde entière. 

Ajoiilnns <|iiu la longueur d'une onde fixe est égale à 
ollu (l'une onde ]>r»gressive ; c'est la quantité dont 
;eliu-ciavanco pendant le temps que dure une TÏfara- 

tion; en (i'autres termes, c"es.VYeaç*w *ç«Vw«.\hk- 



LE SON EST UÎN'E VIBRATION. 460 

court pendant ce temps*. Ainsi, lorsqu'une vibration 
dure un millième de seconde, la longueur d'onde cor- 
respondante est de 53 centimètres si le son se propage 
dans l'air, de 143 centimètres dans Teau, etc., puisque 
ces nombres représentent les espaces qu'il parcourt 
dans ces différents milieux pendant un milième de se- 
conde. 

Dans la réflexion par un obstacle fixe, il se forme un 
nœud contre cet obstacle même, puisque le choc direct 
et le choc réfléchi, étant de sens contraires, se détruisent 
Ifiyours. On rencontre donc des nœuds dans les points 
Iplll^squek un corps sonore est soutenu : aux extré- 
||(|||fp.d'ane corde tendue, aux points où une plaque est 
llpée par les mâchoires d'un é tau, etc. La disposition 
nœuds dépend de la forme du corps sonore 
i40A qu'il rend ou qui s'y propage. 
»rp8 élastique quelconque peut en général trans- 
MMfO tous les sons qui le frappent ; mais la résonnanco 
efi loin d'avoir toujours la même intensité. Elle n'est 
forte que lorsque les nœuds des ondes fixes qui résultent 
des réflexions intérieures du son affectent certaines 
dispositions régulières ; et dans ce cas, elle persiste en- 
core quand la cause extérieure qui la produisait a déjà 
cessé d'agir. Les sons qui développent dans un corps 
cette résonnance exceptionnelle sont précisément ceux 
(|u'il rend lorsqu'il est ébranlé par un choc mécanique; 
en d'autres termes, ce sont les sons propres à ce corps. 
Tout autre son n'y rencontre qu'un écho affaibli. 

Considérons les vibrations fixes de quelques corps 

* Vue longueur d'onde simple corresjwnd à une vibration simple 
comme une longueur d*ondc double (ou entière) correspond à une vibra- 
tion double (ou complùte).On emploie tantôt l'une, tantôt l'aulre de ce 
quantités; il s'a<,nt seulement de ne pas les cowtow^vt. \;.\ \vN\v^>i« 
d'ont/e simple peut varier ihiniis 5™" jusqu'à \Q™. 




.«»■ * L'ACOUSTIQUE, ^^^^^^^ 

Bonores, et cherchons la disposition des nomds qui ca- 
ractérisent leurs sons spéciltques; prenons d'abord une 
I corde tendue par ses deux bouts. Dans ce 
cas, il y a un nœud à chaque extrémité, 
puisque les extrémités sont immohiles ; eo 
outre, il pourra y avoir un nombre quel- 
conquti de nœuds échelonnés d'un bout 
k l'autre de la corde. Si elle vibre trans- 
vorsalcmcnl à toute portée (lig. 66), tous 
ses points décriront simultanément des 
orbites semblables, mais de dimensions 
dilTérentes; le centre de la corde décrira 
rorl)ite la plus spacieuse. Cette orbitt' 
puurra être une ligne droite verticale otf 
liorizontale, une ellipse, un cercle ûu une 
autre courbe, selon le mode d'ébranle- 
ment employé pour produire les vibra- 
*' lions. Si c'est une ligne droite, la corde 

vibre dans un plan ; si c'est un cercle , elle semble 
former un Tuseau conique. 

Pour la faire vibrer avec trois nœuds, on n'a qu'à 
toucher légèremenl avec le doigt le milieu C (6g. fS7), 



Fig. 67. 

en attaquant avec l'archet l'une des deux moitiés ; la 
corde se divise alors en deux concamérations, séparées 
en C par un nœud, et qui vibrent en sens contraires. 
En posant les doigts convenablement, on obtient de 
même trois, quatre, cinq,... concamérations (fig. 68), 
et à chaque mode de division cottc&^i^^>ui «iitre son 



LE SON EST UNE VIBRATION. 171 

de la corde. On peut constater rimmobilité des points 
de partage en y plaçant des chevrons de papier ; on les 
voit rester parfaitement tranquilles tant qu'ils sont sur 
un nœud ; en tout autre point ils sont désarçonnés. 





En frottant la corde dans le sens de sa longueur avec 
les doigts enduits de colophane, on y détermine des vi- 
brations longitudinales, qui consistent en dilatations et 
contractions alternatives. Lorsqu'il n'y a que ^deux 
nœuds, aux extrémités A, B (fig. 69), la moitié AC se 



4 c n 

Fig. 69. 



dilate pendant que BC se contracte, et vice versa; le 
milieu C devient un ventre de vibrations où le mouve- 
ment de translation est à son maximum, mais où la 
densité ne change pas : dans les nœuds A, B, au con- 
traire, la densité change le plus, et le mouvement est 
nul. Il ne saurait en être autrement, car si la tranche C 
se déplace plus que toutes les autres, elle talonne celles 
qui sont en avant et les force à se comprimer; en même 
temps elle distance celles qui sont en arrière, et celles- 
ci, pour la suivre, s'écartent de plus en plus. 

Maintenant, la corde pourra encore se subdiviser en 
concaroérations d'égale longueur, sfeYaxfe^^ ^^\ ^^'^ 



iTi L'ACOUSTIQUE. 

nœuds (6g. 70), qui deTiendront les centres de com- 
pressions et <ie dilatations successives. Des deux côtés 
d'un même nœud, les mouvements des molécules sont 
toujours dirigés en sens contraires ; il y a compression 
quand le nœud devient le point de concours de deux 
files qui se rapprochent, dilatation lorsqu'il est le 
point de départ de deux files qui s'écartent. 



k 




— >• 


D 






E 




— ^ 


r. 








D 






—L- 








A 


"* 












B 



Fig. 70. 



11 doit arriver assez souvent qu'une corde soit agitée 
à la fois par des vibrations longitudinales et par des vi- 
brations transversales plus ou moins compliquées, aux- 
quelles pourraient encore s'ajouter des vibrations de 
torsion ou tournantes^ Chaque molécule décrit alors une 
orbite en forme de spirale bizarrement contournée. Si 
on se figure une pauvre corde de violon, houspillée par 
l'archet frénétique d'un virtuose qui tour à tour la ca- 
resse, la frappe, la pince, la tiraille, on ne s'étonnera 
pas de lui voir exécuter des courbes échevelées comme 
la fantaisie d'aucun géomètre ne les a rêvées. 

Pour faire vibrer transversalement une lame prisma- 
tique, on peut la fixer en un de ses points ou la poser 
horizontalement sur les tranches de deux cales triangu- 
laires. On observe alors une série de ventres et de 
nœuds dont la distribution dépend de la manière dont 



* Une corde ne peut vibrer en travers sans s'allonger un peu, et ccl 
uUongcnient doit occasionner des vibrations longitudinales. Le son longi- 
tiidinal est quelquefois très-recQUTV8âs^VA<^ dMv&l& (a du violoncelle; c'est 
Je son que les musiciens appeWenl un canard. 



LE SON EST UNE VIBRATION. 173 

la verge est soutenue. Une règle générale, c'est qu'il 
y a toujours des ventres aux extrémités libres, et des 
nœuds aux points qui ont été fixés. Les nœuds se mon- 
trent sous la forme de lignes droites qui traversent la 
pièce dans toute sa largeur, et qu'on rend visibles en 
jetant du sablé sur la verge pendant qu'elle vibre : les 
grains de sable, repoussés par les ventres, où le tu- 
multe est à son comble, viennent se réfugier dans les 
nœuds, qui leur offrent un asile tranquille, et s'y grou- 
pent en fines lignes droites, les lignes de repos ou no- 
dules {&g. 71). 




Fig. 71. 

Les fourchettes d'acier qu'on appelle diapasons appar- 
tiennent à la catégorie des lames prismatiques ; elles vi- 
brent de telle sorte qu'il y ait deux ventres aux exi ré- 
mités des branches, qui se rapprochent et s'écartent 
alternativement, deux nœuds tout près 
de la base (fig. 72), et un troisième 
ventre au milieu, au fond même de la 
fourchette. Ce ventre du fond fait mon- 
ter et descendre la tige, de sorte que si 
on l'appuie sur une planchette de bois, 
elle fait résonner celle ci par des chocs 
incessants. ^'s ''^ 

Les vibrations longitudinales des tiges cylindriques 
ou prismatiques développent une force extraordinaire. 
Nous avons déjà dit qu'une grosse tige de laiton s'allon- 
geait en vibrant d'une quantité qu'on n'aurait obtep 
par traction qu'à l'aide d'une c\\at^ft ôi^ ^\^^ 




174 L'ACOUSTIQUE. 

3,000 kilogrammes. Cela montre que, pendant ses n- 
brations longitudinales, un fil de fer est soumis à des 
tractions formidables qui peuvent derenir assez fortes 
pour le rompre. Aussi, lorsqu'un poids est trop faible 
pour briser un fil métallique ou même pour y déter- 
miner un allongement permanent, on obtient soti?en1 
l'un ou l'autre de ces résultats en faisant vibrer le fil 
dans le sens de sa longueur pendant qu'il porte le poids 
en question. C'est pour cette raison qu'il faut toujours 
éviter de faire osciller régulièrement les chaînes des 
ponts suspendus. Ea Amérique, et en d'autres pays où 
l'on a construit de grands ponts suspendus pour les 
chemins de fer, on défend d'y laisser passer des compa- 
gnies de soldats ou des troupeaux de bêtes qui marchent 
en cadence, parce que Ton craint que les chaînes ne 
se mettent à vibrer. 

Pour faire vibrer transversalement une plaque de mé- 
tal, de bois ou de verre, on l'ébranlé par un archet sur 
un point de son contour. Le moyen le plus simple de 
la maintenir horizontale pendant cette opération consiste 
à la prendre entre le pouce et l'index si elle est assez pe- 
tite pour cela, ou à la faire reposer sur trois doigts si 
elle est grande. Le procédé le plus commode est cepen- 
dant de fixer à l'aide de quatre 
vis de pression garnies de liège 
(fig. 73), quatre points par les- 
quels on veut faire passer des 
p. nodales. On ébranle la plaque avec 

l'archet, que l'on promène verti- 
calement sur le bord. Un moyen barbare, employé par 
beaucoup de professeurs de physique, consiste à piquer 
les plaques sur des tiges verticales, comme on pique des 
H^rabées sur des épingles. 




LE SOK KSr USE ViBRATK 



Si avanl ou |)eiidaiit qu'on les éliranle, on saupoudre 
les plaques de sable fin, on voit les grains de sable 
(i'iibord sautiller tumultuensejiient, puis enfin venir 



Fig. 7t. Figures Jg Chladni. 

se ranger eu figures régulières et syniétriquca. Ce sont 
It'x li^fncs nodales de la plaque ; elles niarqueut les en- 
Jruils où les vibrations sont nulles, oîi il y a repos. 
Chaque nodale sépare deu\ concaniéra lions uù les mou 
vemenls ont des diieclions opposées ; s\ \a, ^wtWft i 



476 L'ACOUSTIQUE. 

gonfle dans Tune, elle se creuse dans l'autre, et vice 
versa. Les figures (74-75) représentent quelques-unes 
des nodales qui s'observent sur des plaques carrées, 
circulaires, triangulaires, polygonales, etc. 




Fig. 75. Figures de Chladni. 



Ces charmants phénomènes furent découverts et pu- 
bliés vers 1787 par Ernest-Florens-Frédcric Chladni, 
docteur en droit et en philosophie, qui passa la plus 
grande partie de sa vie à donner des représentations 
d'acoustique dans les villes d'Allemagne, de France et 
d'Italie, où le conduisait son humeur vagabonde. C'est 
à lui aussi qu'on doit le premier catalogue d'aérolitlies 
et l'affirmation précoce de leur origine extra-terrestre. 
Les figures de Chladni ont longtemps exercé la saga- 
cité des savants ; on les considérait comme une énigme 
insoluble. Savart s'en est beaucoup occupé ; comme 
d'habitude, il ne fit qu'embrouiller davantage un sujet 
déjà fort obscui\ La seule e\iOse w\Â\e Qjai'WVççiWN^^ c'est 



LE SOa BST USE VIDRATiOH. 177 

une découverte que fit son aide : en remplaçant le sable 
par de la poudre de tournesol et eu appliquant sur les 
figures qui prennent naissance une feuille de papier 
humecté, on peut les imprimer en rouge et en con- 
serrer les dessins capricieux. 




Fig. 76. Cliladn!. 

Les timbres, cloches, verres, etc., vilirent avec des 
nodales qui divisent la surface comme des coutures. On 
les constate en versant dans l'intérieur de la cloche ou 
du verre un liquide qui est projeté vis-à-vis des ven- 
tres et reste immobile au contact des nœuds. On peut 
ausn découvrir les nœuds en approchant de la surface 
TÎbranle un petit pendule, c'est-à-dire une bille sus- 
pendue à un fîl ; quand la bille reste en repos, on est 
«ir un nœud . 

iea membranes formées par des pcau\ (\\\& VonS^fv^ 



i78 L'ACOUSTIQUE. 

sur un tambour, ou par des feuilles de papier ou de 
collodioa collées sur des cadres, se divisent en eonca- 
mérations ciMmne les plaques, et Ton peut obserrer 
leurs grimaces en les saupoudrant de sable fin et tres- 
sée. 

Grâce à sa flexitHlité, une membrane un peu mince 
résonne d'ailleurs facilement sous llmpressicm d*un son 
quelconque. Le tympan de l'oreille nous en offire nn 
exemple frappant. Dès lors, pour découvrir remplace- 
ment des nœuds et des ventres dans une coloniie d'air 
qui vibre, on peut se émir de l'oreille on bieAi'un 
petit tambour couvert de sable. v :'! 

Nous avons déjà dit que les vibrations de ^d||^*•ont 
des vibrations longituàinales. Dans ïeâ , ventnp jl y a 
agitation, sans changement'^e densité ; àanp lès nCBods, 
calme complet, avec des alternatives de çOmprearion et 
de dilatation. La trépidation de Tair dans les ventres 
se communique à une membrane si elle est frappée 
perpendiculairement; les compressions et dilatations 
qui ont lieu dans les nœuds la font vibrer sî elles n'a- 
gissent que d'un seul côté. L'oreille est surtout sensi- 
ble aux changements de densité des nœuds. 

Les flammes de Kœnig, dont nous parlerons plus loin, 
permettent d^utiliser cette propriété des membranes 
pour rendre visibles les changements de densité de 
Fair. Ce sont des flammes nourries par un courant de 
gaz qui palpite sous la pression périodique d'une mem- 
brane insérée dans la paroi du conduit. Obsenées 
dons un miroir tournant, elles offrent l'aspect d'une 
série de languettes séparées par des espaces noirs dont 
In distribution dépend de la nature des vibrations si>- 
norcs (fig. 77). 

Dans ces derniers lcmçs,M.K\wvdl a réussi à rendre 



LB SON ESI UNE VIBRATION. 170 

risibles les vibrations d'une colonne d'air dans un tube 
<le verre, en y introduisant des poussières qui se ras- 
semblent pour former des dessins réguliers lorsqu'on 
fait parler le tube. M. Kundt a pu, par ce moyen, 
mesurer la longueur d'onde d'une note donnée dans 
l'air et dans d'autres gaz. Il a fait des expériences 
analogues avec des plaques d'air, enfermées entre deux 
disques de verre. 



iiWWW 



Un admirable moyen d'étudier les vibrations dos 
corps sonores nous est fourni par la méthode graphique 
ou phonograpkie, dont la première idée vient de Guil- 
laume Weber. 

Supposons qu'un pendule terminé par une pointe 
fasse des oscillations assez peu étendues pour que sa 
pointe ne quitte jamais une feuille de papier liorî/on- 
lale, couverte de noir de fumée. 11 est évident que la 
pointe creusera dans la poussière noire un sillon blanc 
qu'elle parcourra altcrnativcmeut de droite à gauche 
et de gauche à droite. Mais si on tire la feuille d'avan 
en arrière, à chaque instant la pointe rencontrera le 
papier à la hauteur d'un antre sillon parallèle au pre- 
mier, et au lieu d'une ligne droite, elle y tracera une 
courbe sinueuse à replis serpentants. 

Il en sera de mémo si, à la çVauc 4ii çcw^vi'i, wi 



1« L'JICOUSTIQUB. 

substitue une tige vibrante devant laquelle on fait 
glisaer une plaque <Ie verre noirci. Si la tige est année 
d'une pointe fine et flexible, elle tracera but le verre 
uiie série <te zigzags dont chacun représentera une 
vibration. 
Au lieu d'une plaque que l'on fait glisser entrai 
coulisses, ilcsLpIi^ 
niodcdVmpl 
-jE , — lindrctourn: 

1^ .AViU ^^i* l<^iuei on collé i 

l'i'uilUi ih piipicr'ntil 
cie à la tlnmme (l'une 
lampe. Quand le tracé 
est fait, on décolle le 
papier et on le trempe 
dans un bain d'alcool; 
le noir de fumée se fixe 
alors, et l'épreuve peut 
se conserver indéfmi- 
"iK- ■'«■ ment. 

Pour faire écrire un diapason, on plante sur l'une 
des branches, avec un peu de cire rouge, une pointe de 
enivre ou un fragment de tuyau de plume. Pour «^te- 
nir le trace des vibrations d'une membrane, il faut éga- 
lement commencer par l'armer d'une pointe quelconque: 
ce sera une barbe de plume* un crin, une soie de porc, 
un fragment de clinquant, que l'on fixera debout sur 
la membrane avec une goutte de cire d'Espagne. On 
observe la direction dans laquelle vibre le style, et on 
l'approche du cylindre de manière que les oscillations 
soient parallèles à l'axe de celui-ci. Quand la membrane 
est en repos, si on fait tourner le rouleau, la pointe y 
décrit une hélice régulière cl \,rè&-fi.'Bft \ rnavi dès <yie la 





membrane viiire, l'hélice est tremblée, et chaque I 
-inuosilé correspond à une oscillnlion du corps 



tnore. Li ii|^ure 79 représcnle diverses caurbes oble- 
l " 




inApparuleder Akiwtlk, \vei\i\tf, \Sfc^' 



J 



482 L'ACOUSTIQUE. 

M. Léon Scotl a eu l'idée ingénieuse de se servii 
d'une membrane, disposée comme il vient d'être dit. 
pour se procurer un tracé visible des vibrations de k 
voix ou 4'un autre son quelconque transmis par l'air 
C'est là le principe de l'instrumeiit que M.Eœnig con- 
struit sojka le nom.de phonautographe (fig. 80). Une 
membrane, nnùnie d'un style flexiblè,,est tendue aubou 
d une espèce degrauji cornet acoustique, de forme pa- 
raiboIoideV ètfé résonne fortement lors^^^ chante oi 

Sue Ton &it parler un tuyau d'orgue à l'autre extrémit< 
el^ppa^iraï/ët lajioiùte qu'efie porte^^^ ses vibra 
tidns sur iin rouleau qui avance en tournant. M. Kœnij 
est parvenu à écrire de cette façon un air de musiqui 
composé de sept notes ; il est peu probable qu'on puiss< 
aller plus loin et faire écrire à la membrane des chose: 
plus compliquées, car ses tracés ne sont pas, en général, 
très-fidèles. 



I 



IX 



HAUTEUR DES SONS 



lïesure des noies. — Cliladni, Mersenne, Pythagore. — Sonoraètre. — Crécelle 
(le Savart. — Sirènes. — Limites des sons perceptibles. — Étendue de 
Téchelle des sons musicaux. — Limites de la voix humaine. 



Nous avons vu que l'origine du son doit être cherchée 
dans les vibrations des corps élastiques. Ces vibrations 
sont essentiellement isochrones, c'est-à-dire que la 
même phase revient toujours au bout du même inter- 
valle et que chaque oscillation dure exactement le même 
temps que celle qui l'a précédée. II nous sera mainte- 
nant facile de définir la hauteur des sons, ou ce qui 
distingue un son grave d'un son aigu : c'est la durée de 
leurs vibrations ou le nombre des vibrations qu'ils 
accomplissent dans l'unité de temps. 

Les sons de même hauteur, quels que soient les 
corps sonores qui les donnent, correspondent à des 
nombres de vibrations égaux. Deux notes produites avec 
deux instruments différents, pourvu qu'elles offrent les 
mêmes nombres de vibrations, sont toujours à Tu 
son. Lorsqu'une note nousparail ipVvxa i\^^^^\» 



184 LÂGOUSTIQUE. 

vée qu'une autre, c'est qu'elle résulte de vibrations plu» 
rapides. 

Pour apprécier d'une manière exacte la hauteur d'un 
son, il faut donc mesurer le nombre des vibrations 
qu'il exécute en une seconde. Un des moyens les plus 
simples d'y parvenir nous est fourni par la méthode 
graphique. On ébranle le corps sonore et on lui donne 
de quoi écrire : une pointe et un cylindre tournant cou- 
vert de papier noirci. A côté on dispose un chronomètre 
pointeur, qui à chaque seconde fait une marque sur le 
même cylindre. On compte ensuite le nombre de zigzags 
compris entre deux marques, et on a la hauteur de la 

note observée. Si on possède 
Il ., un diapason dont on con- 

! ; naît deja le ton d une ma- 

; I niere tres-precise , on peut le 

mettre à la place du chrono- 
mètre ; il écrira à côté du 
corps sonore dont on veut compter les vibrations, et 
chaque sinuosité de son tracé représentera une fraction 
de seconde déterminée. Supposons, par exemple, que 
le diapason fasse régulièrement 100 vibrations par se- 
conde, et qu'à c^té de 50 de ses oscillations on en 
trouve 220 dans le tracé parallèle : on en conclura que 
le corps qui a donné ce tracé exécute 440 vibrations 
dans le temps que le diapason met à en accomplir 100, 
c'est-à-dire dans une seconde. 

Chladni avait trouvé un moyen ingénieux, mais mal- 
heureusement peu exact, de se procurer des corps so- 
nores à nombres de vibrations connus, en partant 
d'oscillations assez lentes pour agir sur l'oreille. 11 choi- 
sissait une règle métallique assez longue et assez mince 
pour qu^elle ne fît que cjuaU^ Q%d\\a^\«w^ ^^.t se- 



HAUTEUR DES SONS. 185 

conde, qu'il était facile de compter montre en main. 
D'après la théorie, une règle d'une longueur moitié 
moindre devait alors donner \ 6 vibrations, une règle 
quatre fois plus courte 64, et ainsi de suite. En rac- 
courcissant toujours la règle dans des proportions dé- 
terminées, on entrait dans le domaine des vibrations 
sonores. Mais ce procédé n'est bon qu'en théorie; dans 
la pratique il expose à de grandes erreurs. 

Le P. Mersenne mesurait la hauteur des notes par la 
longueur de corde qu'il fallait employer pour les pro- 
duire. Il avait reconnu que lorsqu'on fait vibrer deux 
cordes de longueur différente, mais identiques pour 
tout le reste et également tendues, les nombres de leurs 
vibrations sont toujours en raison inverse de leur lon- 
gueur. Une corde de 15 pieds, tendue par un poids de 
7 livres, lui donna 10 vibrations par seconde ; ces vibra- 
tions étaient trop lentes pour être entendues, mais en 
raccourcissant la corde au vingtième de sa longueur, 
Mersenne obtenait un son vingt fois plus aigu, ou de 200 
vibrations par seconde, qu'il prit pour point de départ 
de ses mesures. 

C'est sur le même principe que repose l'emploi du 
sonomètre (fig. 82), instrument très-utile pour déter- 
miner approximativement la hauteur d'une note. C'est 
une caisse rectangulaire de sapin dont la table porte 
deux chevalets fixes a, &, sur lesquels on tend une ou 
plusieurs cordes de laiton filé. Par un bout, ces cordes 
sont nouées à des goupilles fixes ; par l'autre, elles 
s'enroulent sur des chevilles que l'on fait tourner plus 
ou moins, ou bien elles passent sur la gorge d'une pou- 
lie et on les charge d'un poids. Entre les chevalets 
fixes, il y a une règle divisée sur laquelle glisse un che- 
valet mohiie ^ ; on s'en sert pour tèàxûte \^Vsvvg\^Nix 



Ige L'ACOUSTIQUE, 

de la première corde jusqu'à ce qu'elle soit à l'unisson 
de la note à dctorminer; à ce moment, on lit sur la 
règle la fraction de corde où l'on s'est arrêté, et un 
calcul fort simple donne la note qui correspond à cette 
fifiction, pourvu que l'on connaisse la note de la corde 



entière. Or, celle-ci se détermine par comparaison avec 
nn diapason, et nous verrons plus tard comment se fixe 
la note du diapason. 

On constate avec le sonomètre que la moitié d'une 
corde donne l'octave aiguë de la note que rend la corde 
entière ; que si on laréduitau.\ deux tiers dei^a longueur, 
le son monte à la quinte ; qu'en prenant les trois quarts 
de la corde, on obtient la quarte, etc. Si la corde 
entière donne 1'm(, ses trois quarts donneront le fa, 
les deux tiers le sol, la moitié l'octave de Yut, et ainsi 
de suite. Ces relations entre les longueurs des cordes 
et les notes de la gamme n'étaient point ignorées des 
pylhagoriciûnSy mais nous pouvons les interpréter au- 
Jotird'hui en disant que VoctaNft,\a<çïmVt,\%(ipas\*'îfi(ft.V 



J 



HAUTEUR DES SONS. 187 

(les intervalles caractérisés par les rapports|,f,| des 
nombres de vibrations. 

Nous dirons qu'une note est à l'octave aiguë d* une 
autre si elle fait dans le même temps deux fois autant 
de vibrations ; que deux notes sont à l'intervalle de la 
quinte si 5 vibrations de l'une correspondent à 2 de 
l'autre ; qu'elles forment une quarte si l'une fait tou- 
jours 4 vibrations pendant que l'autre en fait 3, et ainsi 
de suite.. 

Le sonomèti*e permet aussi de se faire une idée juste 
de la valeur d'une anecdote que l'on trouve chez beau- 
coup d'auteurs anciens. Un jour, disent-ils, Pythagore 
passa devant une forge où travaillaient quatre forge- 
rons. Il fut stupéfait de constater que les quatre mar- 
teaux qui venaient en mesure s'abattre sur l'enclume 
donnaient ensemble les intervalles de la quarte, de la 
quinte et de l'octave. 11 les fit peser, et trouva que 
leurs poids étaient entre eux comme les nombres 1, 



i 3 £) 



Rentré chez lui, le grand philosophe résolut de vé- 
rifier ce résultat par une nouvelle expérience. Il prit 
une corde et la chargea successivement de quatre poids 
qui reproduisaient exactement les rapports des mar- 
teaux ; en vibrant sous ses quatre charges, la corde 
donna quatre notes qui étaient entre elles dans les in- 
tervalles de la quarte, de la quinte et de Toctave! 

Malheureusement, les notes d'une corde ne varient 
point en raison directe de la charge; pour obtenir l'oc- 
tave, par exemple, il faut quadrupler, et non doubler 
le poids tenseur. Avec les quatre poids des marteaux, 
Pythagore n'aurait conc jamais obtenu sur sa corde les 
intervalles musicaux en question. Ensuite, il serait 
bien ditticile de trouver des marteaux. AowtvîiwV ôi^'à w^VJ 



188 L'ACOUSTIQUE. 

proportionnelles à leur poids : ce serait un pur hasard 
une coïncidence fortuite. Enfin, il faut le dire, cequ'oi 
entend dans une forge, c'est moins le marteau que 1 
barre qui est sur Tenclume. 

On a encore appliqué à la mesure des nombres d 
Tibrations un autre principe qui consiste à produir 
des sons par une suite d'impulsions périodiques éma 
nées d'une roue dont un compteur mécanique addi 
tionne les tours. Cette idée a été d'abord réalisée pa 
Hooké en 1681 ; il parait aussi que des expérience 
du même genre furent instituées par Stancari à Bolc 
gne. 

Sayart fit construire dans un but analogue, vers 185 
sa roue dentée^ espèce de vaste crécelle où les soi 
étaient produits par les oscillations d'une carte métal 
lique que les dents de la roue faisaient incessammei 
plier sous leur choc. La roue était misé en mouvemei 
par une courroie enroulée sur un volant à manivell 
(fig. 83) ; un compteur à engrenage, fixé sur Taxe d 
la roue, accusait le nombre de tours accomplis dans ui 
temps donné. En le multipliant par le nombre des dents 
on avait le compte des vibrations exécutées par la tran 
che de la carte et, par suite, la hauteur de la not 
qu'elle avait donnée. La difficulté de faire tourner 1 
roue avec une vitesse uniforme et la mauvaise qualit 
des sons de cet appareil encombrant Pont fait aban 
donner depuis longtemps. 

Savart s'était flatté de remplacer par sa grande cré 
celle les sirènes du baron Cagniard de la Tour. Voici c 
que c'est qu'une sirène. C'est, dans le principe, ui 
disque percé de trous qui sont distribués en cercle au 
tour du centre ; on fait tourner le disque et on s'ar 
range de manière qu'un co\ttau\. ôiixt ^wX \.wv\wa 



UAUI&UR DES SONS. 189 

dirigé contre un point du cercle troué ; le vent passe 
chaque fois qu'il rencontre un orifice, il est intercepté 
lorsqu'il rencontre les pleins. Si te disque fait dix tours 
par seconde, et si les ouvertures sont au nombre de 
<iouze, le jet d'air passera cent vingt fois par seconde ; 




f. 83. Crécella de Saoarl. 



ce sera aussi le nombre des vibrations du son obtenu. 
Cette disposition, imaginée par Secbeck, est très-utile 
pour beaucoup de recberches ; elle permet par exemple 
de démontrer que le son ne peut être engendre que 
par des impulsions qui se succèdent à intervalles égaux, 
car il est indispensable que les trous soient également 
espacés sur le disque si l'on veut obtenir le son corres- 
pondant à lear nombre. Des trous icié^Vxèïftnvct^. 4\v 



iW L'ACOUSTIQUE. | 

tribnés ne donnent qu'an bruit composé de plii»eon ' 
SORS plus graves. 

On peut faire tourner le disque par un volant à ma- 
nirdle ou par un mouvement d'horlogerie, qui compte 
en même temps le nombre des tours accomplis. L'in- 
strument primitif de Caffniard de la Tour, dont l'iuïeo- 
m^ tion date de 1819, marche par 

^^^^^^_ l'impulsion même du courant 
^^P^H^^^^ d'air qui produit le son. Le vent 
^^Ll^^^P^ qui Tient d'une soufflerie, entre 
^I^H^V d'abord par ("orifice a dans un 
^ * tambour cylindrique dont le 

fond sup^ieur est formé par ud 
disque troué (fig. 8^). Sur ce 
^i ^ disque il y en a un autre b, éga~ 
\|' ^ lement troué, qui tourne sur ua 
axe vertical c ; le vent passe quand 
les orifices sont en coïncidence, 
il est intercepté quand ils sont 
croisés. Les orifices sont percés 
obliquement et de telle sorte 
qu'aumoment d'une coïncidence, 
les deux conduits en regard soient 
à équerre. Grâce à cette disposi- 
le de c«gai*rd tion, le couraut qui vient d'en bas 
de In Tour. change brusquement de direction 

en passant de l'orifice inférieur dans l'orifice supérieur, 
et imprime au plateau mobile une impulsion suffisante 
pour le faire tourner comme un moulin à vent. Mal- 
heureusement la vitesse de rotation va toujours en 
croissant et le son s'élève outre mesure si l'on maintient 
^ans la soulTIerie une pressioa constante. On peut, il est 
>i, ralentir lemouvemenl en àïtoimiantlaçressiou. 




HAUTEUR DES SONS. IM 

mais quoi qu'on fasse, on parvient rarement à tirer de 
la sirène un son tout à fait uniforme. On cherche donc 
à tenir la note aussi bien que possible dès qu'on est 
arrivé à l'unisson de celle qu'il s'agit de déterminer, et 
l'on fait alors engrener le compteur qui doit faire con- 
naître le nombre de tours. Ce compteur, que Ton voit 
dans la figure à découvert, est mis en mouvement par 
une vis sans fin que porte l'arbre vertical c du plateau 
mobile ; il a deux cadrans dont les aiguilles marquent 
respectivement les centaines et les dizaines et unités. 
Si, au bout de cinq minutes, on lisait sur le premier 
cadran le chiffre 66 et sur le second 50, le nombre des 
tours accomplis serait 6630 ; en supposant que le disque 
porte 10 trous, cela donnerait 132, 600 pulsations du 
courant sonore en cinq minutes = 300 secondes, ou 
442 par seconde. On en conclurait que la note obtenue 
correspond à 442 vibrations doubles. 

La sirène peut chanter sous l'eau ; c'est de là que 
lui vient son nom. Plongée dans un liquide quel- 
conque, elle le fait résonner si on le pousse en jet 
puissant dans le réservoir. On peut ainsi faire chanter 
l'eau, l'huile, le mercure. Les sons se distinguent par 
un timbre particulier, mais les notes sont les mêmes 
que dans Tair. 

Seebeck, Dove, Helmholtz, et en dernier lieu, 
M. Kœnig, ont beaucoup perfectionné la construction 
de la sirène. La grande sirène de M. Kœnig a un grand 
nombre de disques de rechange ; elle est mise en rota- 
tion par un fort mouvement d'horlogerie. 

Pour engendrer le courant d'air qui fait parler ces 
instruments, on se sert d'une soufflerie, appareil com- 
posé d'un soufflet double (fig. 85), sur lequel on agit 
par une pédale p et un bâton t, el d'uw sommvev ^ 



m L'ACODSTiaUB. 

porte-vent e, qui eist percé d'un certain nombre d'ori- 
fices. C'est pai' ces orilicea que la itirène ou les tujaui 
qu'on veut faire parler recoiveat le i&il; on les ouvre 
en pressant des boutons. 




Fig. 85. 



Oti s'est naturellement demandé où se trouvent les 
limites des sons perceptibles, quelles sont les notes les 
plus basses et les plus élevées que l'oreille puisse en- 
core apprécier, 
.Sauveur, enl700, adme\.\aîl(ç\ft\t«stvV%^\a%^ça](e 



HAUTEUR DES SONS. 193 

était celui d'un tuyau de 40 pieds ouvert, qui corres- 
pond à 25 vibrations. 

Le tuyau le plus grave que les facteurs d'orgues 
construisent est celui de 32 pieds (10 mètres et demi); 
il doit donner Tut-,, qui correspond à 32 vibrations 
simples par seconde. D'un autre côté, on construit 
des tuyaux très-courts qui devraient donner dix mille 
vibrations et plus. Mais est-il prouvé que ces sons exis- 
tent réellement? 

Les notes les plus basses de Toctave de 16 pieds, 
l'ut de 65 et le r^de 73 vibrations, ne s'entendent déjà 
que comme une sorte de ronflement dont l'oreille la 
plus exercée ne reconnmt qu'à grand' .peine la hauteur 
musicale; on ne parvient à accorder les tuyaux qui 
donnent ces notes qu'en ayant recours à des méthodes 
indirectes. Sur le piano, où elles constituent la limite 
inférieure du clavier, on peut également remarquer 
M)mbien le caractère musical en est indécis, et dans la 
musique d'orchestre on ne descend jamais au-dessous 
lu mi de 82 vibrations de la contre-basse. Dans ces ré- 
gions, l'oreille commence déjà à percevoir les vibra- 
tions de Pair comme des chocs séparés. Cette sensation 
levient plus distincte à mesure qu'on s'avance dans 
[*octave de 32 pieds, et lorsqu'on approche de Yut de 
52 vibrations, on n'entend plus de son proprement 
lit; ce qui frappe l'oreille n'est qu'une suite d'explo- 
sions discontinues. Si néanmoins beaucoup de per- 
sonnes s'imaginent avoir entendu les notes de cette 
3ctave, c'est que les tuyaux d*orguc produisent, en 
même temps que leur note fondamentale, d'autres 
notes plus élevées dont nous parlerons dans la suite ; 
un tuyau de 32 pieds peut donc faire résonner fai- 
blement des notes appartenant à une odaN^^w^^tv^Nïe^. 



m L'ACOUSTIQUE. 

et c'est ce qui fait très-probablement Tillusion des 
auditeurs. 

La même illusion s'est mêlée sans aucun doute aux 
conclusions que Savart a tirées de ses expériences sur la 
limite de perceptibilité des sons. Il faisait tourner une 
barre de fer autour d'un axe horizontal et la dispo- 
sait de manière qu'elle passât à chaque demi-ré?olu- 
tion à travers une fente découpée dans une planche. 
Au moment où la barre y entre, elle refoule lair 
comme ferait un piston ; il se produit une sorte d'ex- 
plosion, et si la roue tourne assez vite, on entend 
un son d'une extrême gravité accompagné d'un ron- 
flement ou roulement très-intense. Sept ou huit coups 
par seconde donnaient encore un son perceptible, et 
Savart crut pouvoir en conclure que la note la plus grave 
que Toreille distingue encore correspond à 7 ou 8 vi- 
brations doubles, qui équivalent à 14 ou 16 vibrations 
simples. Mais Despretz n'eut pas de peine à. démontrer 
que c'était une erreur, car en disposant deux fentes au 
lieu d'une seule sur le trajet de la barre, on n'obtient 
pas de notes à l'octave, comme cela devrait être, 
puisqu'on a doublé le nombre des explosions. Il faut 
donc admettre que déjà avec 8 coups de la barre on 
produit la note qui correspond à 16 coups (32 vibra- 
tions), et ce résultat n*a rien d'étonnant si l'on con- 
sidère que les sons naturels sont presque toujours ac- 
compagnés de notes plus élevées, appelées harmoni- 
ques, ainsi que nous le verrons bientôt. En résumé, 
Tapparcil de Savart donne tout au plus une note d'en- 
viron 50 vibrations simples par seconde. 

M. Helmholtz eut recours à un autre procédé. Il prit 

une caisse de bois fermée de tous les côtés et y pratiqua 

une petite ouverture à laqueWe *\\ ^AaçV^ uu îjLube de 



HAUTEUR DES SONS. 195 

caoutchouc destiné à être introduit dans le conduit au- 
ditif. Sur cette caisse de résonnance, il tendit une 
corde de laiton, lestée à son milieu par une pièce de 
billon trouée ; grâce à cette précaution, la corde ne 
pouvait point donner les octaves supérieures de sa note 
fondamentale, qui était très-basse. 

Le son d'une corde qui donne une note moyenne de- 
vient, dans ces circonstances, d'une force presque in- 
tolérable; mais celle qui fut employée à ces expériences 
et qui était accordée pour le ré de 73 vibrations, ne 
produisit qu'un son très-faible et légèrement ronflant. 
En descendant jusqu'au si de 61 vibrations, M. Helm- 
holtz n'entendait presque plus rien. Il conclut de ces 
expériences que les sons perceptibles commencent à 
environ 60 vibrations simples par seconde, et qu'ils 
ne prennent un caractère musical qu'à partir d'environ 
80 vibrations, dans l'octave dite de 16 pieds. Toute- 
fois, ces limites varient peut-être d'une personne à 
l'autre ; il n'est pas non plus impossible qu'elles dé- 
pendent de l'habitude, et de l'intensité des sons. 

La limite supérieure des sons perceptibles n'est cer- 
tainement pas la même pour tout le monde. Beaucoup 
de personnes n'entendent plus du tout certaines notes 
très-élevées que d'autres distinguent encore parfaite- 
ment. Savart a constaté qu'un son de 31 ,000 vibra- 
tions simples, produit par les vibrations longitudinales 
d'un cylindre de verre de 0"*,16 de longueur, était en- 
core entendu par la plupart de ses auditeurs, tandi» 
que les 33,000 vibrations d'un cylindre de 9",15 n'é- 
taient pas toujours perçues distinctement. Avec de» 
roues dentées d'un grand diamètre, il produisait un 
son extrêmement intense qui ne disparaissait qu'au 
moment où il devait y avoir 4S,000 VyV^t^Naqw^ ^'^ ^ 



IW L'AGOUSnQUR. 

epnde ; mais il est difficile de prouver que, dans oe 
cas, la carte flexible rencontre enooro toutes les dents 
de la roue. 

Desprotz a cru reculer encoro cette Umite au moyen 
de diapasons qui donnaient jusqu'à 73,000 vibrations 
simples. Ce sont des miniatures de diapasons que Ton 
conserve encore à la Sorbonne et que Ton montre dans 
les occasions solennelles. Mais comment en a-t-on dé- 
terminé les notes ? C'est M. Marloye qui a accordé ki 
diapasons à l'oreille. Il a d'abord construit une gamme 
qui va de 16,000 à 32,000 vibrations, toujours en se 
laissant guider par l'oreille ; puis, il a accordé et la 
même manière un diapason à l'octave aiguë du dei^ 
nier, donnant par coifséquent 64,000 vibrations A 
correspondant à ut^^, puis enfin ler^^, de 73,000 vibra- 
tions. Or ces diapasons ne sont entendus que par les 
personnes qui ont l'oreille irès*sensible ; les notes ex- 
trêmement aiguës qu'ils rendent produisent une sen- 
sation douloureuse, un malaise indéfinissable, qui per- 
siste encore longtemps après ; il ne peut être question 
d'en saisir les rapports musicaux. Jusqu'à plus ample 
information, nous regarderons ces déterminations 
comme peu sérieuses. 

M. Kœnig a tout récemment repris ces expériences; 
les notes les plus aiguës qu'il pût entendre correspon- 
daient à 45,000 vibrations. Mais, comme nous l'avons 
déjà dit, cette limite varie pour diverses personnes. Les 
notes très-éîevées cessent d'être perceptibles pour beau- 
coup d'oreilles. WoUaston n'a-t-il pas constaté que bien 
des personnes sont incapables de distinguer la stridula- 
tion aiguë des grillons et même le pépiement des moi- 
neaux? Peut-être y a-t-il des animaux qui entendent 
encore des notes trop élevées i^vxr V^t^\VV^ \\>\maine. 



HAUTEUR DES SONS. 197 

Ea résumé, les sons perceptibles se trouvent renfer* 
mes entre les limites d'environ 60 et de 50,000 vibra- 
tions simples par seconde, limites qui, pour des oreilles 
exceptionnellement sensibles, se reculent peut-être des 
deux côtés. Les ondulations de l'éthcr qui produit la 
chaleur et la lumière sont infiniment plus rapides. La 
chaleur obscure commence à 65 trillions de vibrations, 
les couleurs visibles sont comprises entre 400 et 
900 trillions, les rayons chimiques atteignent déjà au 
quatrillion. Or, la chaleur n'est pas produite unique- 
ment par les vibrations du fluide éthéré, il est certain 
que les corps pondérables vibrent eux-mêmes lorsqu'ils 
s*échaufrent ; il faut donc admettre que leurs molécules 
peuvent accomplir des oscillations d'une rapidité inouïe. 
Maintenant que deviennent les vibrations dont le champ 
s'étend depuis 40,000 jusqu'à 65 trillions, qui sont 
trop rapides pour être sonores et trop lentes pour se 
faire sentir comme chaleur? Avons- nous des sens qu'elles 
affectent, des organes qu'elles impressionnent ? Faut-il 
chercher dans ces vibrations non classées l'explication 
de l'électricité et du galvanisme, que tout nous porte à 
considérer comme une forme du mouvement? Qui ré- 
pondra ? 

Il ne sera pas sans intérêt de mentionner ici l'éten- 
due des sons donnés par les instruments de musique les 
plus usités. Voici d'abord l'orgue, le plus riche de tous 
les instruments. Grâce à M. Cavaillé-CoU, il embrasse 
tout le champ des vibrations perceptibles, presque dix 
octaves. Le piano comprend à peu près sept octaves qui 
parcourent une échelle de notes comprises entre le /a-, 
et Tuî,, ou entre 54 et 8,400 vibrations. 

Les sons du yiolon s'étendent notma\ei{v^xv\. ^^ ï^&R 



m L'AG0USTI4}UE. 

6,000, à travers quatre octaves, mais l'on peut tirer d< 
cet instrument des notes beaucoup plus aiguës. L 
contre-basse se renferme entre 80 et 350 vibrations 
mais l'octo-basse de M. Vuillaume descendait jusqu* 
64 vibrations. Les cors, trombonncs et autres instru 
ments de cuivre rendent des sons très-variés. La note 1, 
plus aiguë que l'on emploie dans un orchestre est pro 
bablement le ré^ du piccolo, qui correspond à 9,400 vî 
brations simples. On peut dire que les sons qui ont un 
caractère musical décidé ne dépassent guère les limites 
de six octaves et demie et sont renfermés entre 80 et 
8,000 vibrations. 

Comme limites extrémel de la voix humaine on peut 
prendre le fa-^ de 87 et Yut^ d'environ 4,200 vibra- 
tions : 



Les Fischer. lia Baslardella. 



LES NOTES 



^pporU des notes. — Gamine. — Dénomination des notes. — Hymne de saint 
Jmd. — Notation musicale. — Mode majeur et mode mineur. — Les loups 
de la gamme tempérée. — Galin et Chevé. — Le ton de chapelle. — Diapa- 
son normal. — Caléidophone. — Méthode optique de M. Lissajous. 



La musique se préoccupe beaucoup moins de la hau- 
teur absolue des notes que de leurs rapports ou interval- 
les. C'est de ces rapports que dépend le plaisir que 
nous cause l'union de certains sons. Quand deux notes 
sont dans le rapport de deux nombres entiers très-sim- 
ples, elles forment un accord ou une consonnance ; les 
dissonances sont produites par des rapports complexes. 
C'est dans ce cas qu'on peut dire que la musique est 
toute dans les nombres. 

Pythagore n'ignorait pas que, si on partage une corde 
en deux sections d'inégale longueur, on obtient deux 
8ons parfaitement consonnants toutes les fois que les 
longueurs des deux parties sont dans un rapport très- 
simple, exprimé par deux nombres entiers. Le rapport 
1 : 2 correspond à l'octave, le rapport 2 : 3 à la quinte. 
5 : 4 à Ja quarte j et ainsi de &u\le. VV ^^\.V.\v^v^\^V^ 



• 



SM L*AGOUSTIQUE. 

que ]e philosophe grec avait appris cette loi des prêtres 
d'Egypte : c'est dire qu'elle a été connue depuis les 
temps les plus anciens. 

On sait aujourd'hui que les rapports des cordes se 
traduisent par les rapports inverses des nombres de yi- 
brations. Les intervalles consonnants reposent donc di- 
rectement sur les relations de hauteur des notes.^ Pre- 
nons comme exemple la quinte tif , sol. L'oreille nous 
apprend tout d'abord que cette consonnance peut exister 
avec le même caractère relatif entre deux notes très- 
basses ou très-élevées, et qu'elle ne dépend guère du 
nombre absolu des vibrations. Ensuite^ les mesures 
montrent que deux notes qui forment cet intervalle sont 
toujours dans le rapport de 3 : 2, et réciproquemmid 
que cet intervalle est constaté par l'oreille toutes les 
fois que deux notes sont entre elles comme 3 à 2. Enfin, 
on s'assure facilement que la consonnance est d'autant 
plus pure, d'autant plus suave, que le rapport en ques- 
tion se trouve plus exactement réalisé. Dès lors, nous 
appellerons le rapport 3 : 2 une quinte jmte; on va 
voir que la musique le réalise rarement dans toute sa 
pureté. 

Les consonnances ou accords simples admis par les 
musiciens sont caractérisés par les rapports suivants : 

Octave 1:2 

Quinte 2:3 

Quarte 3:4 

Tierce majeure 4:5 

Tierce mineure 5:6 

Sixte majeure 3:5 

Sixte mineure 5:8 

Oa dit qu'une note est àYodasftix^^ô^xvûfc^^aiw 



LES NOTES. 201 

lorsqu'elle fait dans le même temps deux fois autant 
de yibrations que cette dernière ; inversement, celle-ci 
est alors à l'octaye grave de la première. On distingue 
les octaves successives d'une note par des chiffres placés 
en indices ; de cette façon, ut^ signifie l'octave aiguë 
Sut (on n'écrit pas : ut^), uî, celle d'wf, ou la double 
octave à*uty etc. Pour descendre aux octaves inférieures, 
on emploie des indices négatifs : ut-^ est Toctave grave, 
d'u^, u^-, la double octave, et ainsi de suite. 

11 est facile de prévoir que trois ou quatre notes, 
qui, prises deux à deux, seraient consonnantes, le res- 
teront encore si on les réunit en accord multiple. C'est 
en effet ce qui s'observe. Les deux accords triples les 
plus agréables à Toreille sont Vaccord parfait majeur^ 
caractérisé par les trois nombres 4, 5, 6, et Vaccord 
parfait mineur^ qui l'est par les nombres |, |, \. 
L'un et l'autre, ils renferment une quinte (f équivaut 
k I), une tierce majeure (f) et une tierce mineure (|) ; 
la seule différence, c'est que dans l'accord parfait ma- 
jeur, la tierce majeure précède la tierce mineure, tan- 
dis que dans l'accord mineur. Tordre est renversé. 

Pour réaliser les accords, la musique a dû adopter 
une échelle de sons appelée gamme, qui se compose de 
sept degrés ; on peut les représenter par les sept notes 
suivantes (huit en ajoutant l'octave) : 

ut ré mi fa sol la si ut \ 

qui sont entre elles comme les nombres : 

24 27 30 32 36 40 45 48. 

Une première gamme se continue par une seconde, 
une troisième, etc., formées chacune en élevant d'une 

' En saluant, on dit do pour ut, * | 



Ktt L'ACOCSTIQUE. 

ocUve lotîtes les notes de la gamme précédente ; on dis- 



lingue les octaves 


successives par des indices, ainsi que 


nous l'avons déjii 


dit. Les rapports des différentes noies 


de la ffamme à la 


première constituent leu 


rs intervalleâ 


musicaux et son 


exprimés par les nombres suivants : 


ut — ut 


unisson 


1:1 


ut - ré 


seconde 


8:9 


ut — mi 


tierce 


4:5 ; 


ut — fa 


quarte 


5:4 ' 


lit — sol 


quinte 


2:3 


ut— la 


siste 


3:5 


ut — si 


septième 


8:15 " 


Ul — ll(j 


octave 


\ :-2 


M( — ré. 


neuvième 


4:9 


ut — mfj 


dixième 


■2:5 • 


ul — fa. 


onzième 


5:8 ; 


ut — sol. 


douzième 


1:3 • 


ut — ut. 


double octave 


1:4 


ut — mi. 


dix-septième 


d :5 



On voit que les noms des interfalles rappellent sim- 
plement la positioD des notes dans la gamme. La dou- 
zième, la double octave, la dix-septième, constituent 
des consonnances très-parfaites, aiasi que le fait pré- 
voir la simplicité des rapports qui les caractérisent ; si 
nous ne les avons pas menttomiées précédemment, c'est 
qu'on les considère comme des redoublementt de la 
quinte, de l'octave, de la tierce, desquelles on les 
déduit eaiDimtaat d'une ocVksk. 



LES NOTES. 203 

En associant deux à deux les notes d'une gamme, 
on est loin d'obtenir toujours des consonnances ; il faut 
pour cela faire un choix convenable ; mais l'on sait que 
les dissonances jouent elles-mêmes un rôle considé- 
rable dans la musique. L'intervalle de Vut au ré, qui 
s'exprime par | et que Ton appelle aussi un ton majeur ; 
rintervalle du ré au mi^ qui est égala ^ et se nomme 
UQ ton mineur; les intervalles mi — fa et si — af ^ , 
égaux tous deux à || et désignés par le nom de demi- 
ton diatonique, sont des dissonances très-caractérisées. 
La gamme telle que nous venons de l'expliquer ne 
suppose aucune connaissance de la hauteur absolue des 
Dotes ; elle n'en fixe que les rapports. La première note 
ou tonique, comme l'appellent les musiciens, peut être 
quelconque ; mais une fois sa valeur déterminée, celle 
de toutes les autres notes l'est aussi. C'est ce qu'on 
peut remarquer dans les exercices de solfège, qui con- 
sistent à chanter les notes de la gamme sur les syllabes do 
ré mi fa sol la si. On peut choisir arbitrairement le son 
qui représente le do, mais, par ce choix, on se donne en 
même temps la hauteur des autres notes : si le do fait, 
par exemple, 240 vibrations, il faut que le ré en fasse 
270, le mi 300, le fa 320, et ainsi de suite, sans quoi 
on détonne. 

Les noms dés six premières notes paraissent avoir été 
introduits en 1026 par le bénédictin Guido d'Arezzo, 
ou Guy l'Arétin ^ ; ce sont des commencements de mots 
tirés de l'hymne de saint Jean-Baptiste : 

Vt queant Iaxis rfsonare fibris 
JIftra gestorum /amuli tuorum. 
Salie poUuli lahn reatum, 
Sancte loannes. 

' M. Iioquephanon8afaitremnx{uet touVeCoift (\>ift, À^«kYi:V%^Ti^>K^tv 



1^ L'ACOUSTIQDE. 

] îttc hymne, tel qu'il se cliante aujourd'hui 

n b t-Jean, n'est pas tout à fait l'air ancien, oâ 
choisies par l'Arétin tombaient effcc^Te* 
l sui notes qu'elles désignent. Voici cet air, co- 
pié sur un manuscrit delà bibliothèque du chapitrode 
Sens; il a été transcrit en notes de plain-chant t 




Le mot si, tiré du quai a vers (S et 1), n'a 
ajouté pour désigner la st le noie qu'en 1 684, par 

le Français Lemaire. En iiane, on substitua bienidl, 
pour les besoins du solfège, à la syllabe ut, qui parut 
trop sourde, la syllabe do. L'usage des dé uomi nations 
proposées par Guy ne se répandit pas très-promple- 
ment, car du temps de Jean de Mûris, au quatorzième 
siècle, on solfiait encore à Paris sur les syllabes proto 
no do tu a ; mais enfm, elles remportèrent et furent 
admises assez généralement, sauf en Angleterre et en 
Allemagne, où l'on a conservé pour les notes lea iioins 
des lettres G D E F G A B (ou H) . 

Voici l'origine de cette dernière désignation. Depuis 
Grégoire le Grand, peut-être déjà avant le siitème 

du quiniiimG siècle, qui existe \ la bihliolh^ue Siinlt-GeneTière, In 
nomiiles noies auraient élé imagpnài par « un nommé PhoDluiTeiiloolcu) 
d'Alleimij^e. i Enfin, d'après Bohlen, ces noms aenient d'origine per- 
une, car en Pcnc on solRe sur les mots durr-i mufanal (chapelet de 
perk,}. 



LES NOTES. 20 

siècle, on avait formé une série de gammes de notes 
fixes, correspondant aux limites de la voix et aux 
sons des principaux instruments, et on les désignait à 
Faide des sept premières lettres de l'alphabet, de cette 
bçon : 

ÂBCDEFGabcdefgaabbcc... 

Plus tard, une note ayant été ajoutée en bas, on prit 
pour la désigner le Gamma ou G grec; de laie nom de 
la gamme. 

Guy d'Arezzo substitua à ces lettres des points posés 
sur des lignes parallèles, les portées^ à chacune des- 
quelles une lettre servait de clef. La clef fixait la valeur 
de la portée : ainsi, lorsqu'on avait écrit un F à Tori- 
gine d'une portée, tous les points placés sur cette 
portée représentaient la note F. Dans la suite, on gros- 
sit ces points, on s'avisa d'en poser dans les espaces 
compris entre les lignes, et on multiplia selon le be- 
soin ces lignes et ces espaces. Pour indiquer un accord, 
on plaçait les points les uns au-dessus des autres ; de 
là le nom de contre-point donné à la science des accords. 
Les signes des notes n'eurent d'abord d'autre usage 
que de marquer les différences d'intonation, sans égard 
à la durée. Jean de Mûris ou Moeurs inventa, vers 1338, 
des figures carrées pour distinguer la valeur ou durée 
relative des notes, et ces figures furent perfectionnées 
par Octavio Petrucci, qui trouva en 1502 le moyen 
d'imprimer la musique avec des types mobiles. De mo- 
difications en modifications, les signes des notes ont 
pris^a forme suivante : 

„ j j ; j» ,^ 

Ronde. Bbnche. Noire, Croche. DoulAe ctocYvft. Wv^'^ t\^Ov\^» 



L'ACOUSTIQUE. 

Une ronde vaut deux bUmeheSj une blanuhe deui 
noires j et ainsi de suite. Ces notés peuvent être rem- 
placées par des fUeuees équivalents : 

-.- j- < ^ ^ ^ 

Pause, Demi-païue. ISoapir. Demi- . Quart Huitîèiiie 

soupir, de soupir, de soupv. 

Pour fixer la durée obsoJiid des notes on emploie b 
métronome. 

La lettre G est dèyenue la def de sol fy, la lettre F 
la def de fa 9*, la lettre C la elefd'vt g, etc. 

I^es syllabes tU rend fa sol la ne désignaient pas, 
dansTorigine, des notes fixes, mais seulement les degrfi 
d'une gamme quelconque ; ils représentaient Theza- 
chorde de Guy d'Arezzo. On les écrivait au-dessous des 
lettres qui désignaient les gammes fixes. 

La même note fixe pouvait donc occuper différents 
degrés dans la gamme mobile, ce qui était quelquefois 
incompatible avec la conservation des intervalles. 11 en 
résultait différents modes plus ou moins harmonieux et 
une grande confusion du système musical. On sentit 
bientôt la nécessité d'altérer certaines notes fixes quand 
la gamme mobile était transposée de manière que les 
intervalles des notes fixes correspondantes ne réalisaient 
pas les intervalles primitivement désignés par les notes 
ut ré mi fa sella. Ainsi quand u^ s'écrivait au-dessous de 
F, et fa au-dessous de B, il aurait fallu que l'intervalle 
de F à 6 fût une quarte ; mais, comme en réalité il était 
plus grand, on le diminuait en baissant B d'un demi- 
ton. Cette note devenait alors le bmolle^ tandis qu'elle 
était b durum dans la gamme qui commençait à C ; on 
indiquait ce double rôle euèetvswvV. >Mv\)\wv4L^>\^iM:vé, 



f 



LES NOTES. 307 



et c'est de là que Tiennent les signes du bémol (|^) et du 
bécarre (|i|) . 

Ce n^est qu'après mille vicissitudes et tâtonnements 
que le système musical a pris sa forme actuelle. La 
règle principale est celle-ci : quelle que soit la note fixe 
par laquelle on commence la gamme, il faut que les 
autres notes reproduisent les intervalles ou rapports une 
fois adoptés. Pour satisfaire à cette condition, on altère 
les notes fixes, soit en les élevant d'un demi-ton, ce qui 
s'appelle diéser et s'exprime par le signe #, soit en les 
abaissant d'un demi-ton, ce qui s'appelle bémoliser 
el s'indique par un |^. Pour valeur de ce demi-ton, on 
prend le rapport f|, qui est plus petit que {|, valeur de 
I intervalle mi — fa. 

Les syllabes ut ré mi fa sol la si s'emploient mainte- 
nant pour désigner les principales notes fixes du piano 
et des autres instruments; en les faisant suivre des 
mots dièse on bémols on obtient le nom des notes alté- 
rées représentées sur le piano par les touches noires. 
Les gammes ou tons portent toujours le nom de leur pre- 
mière note, de la tonique. Toutes les gammes dites ma- 
jeures sont modelées sur la gamme primitive d'u^ 
formée par la série des notes naturelles : 

ut ré mi fa sol la si utj 

avec deux demi-tons (du 5® au 4* et du 7® au 8® degré). 
Ces gammes constituent le mode majeur. Le mode mi- 
neur est formé de gammes dont le type est la gamme 
de la mineur. Elle se fait avec deux demi-tons : 

OAMME MORTANTE 

la si ut ré mi fa# soltt la, 

GAMME DESCENDANTE 

la sol fa mi ré ut si /a. 



L'ACOUSTIQUE. 

OU bien avec trois demi-tons : 

la si ut ré mi fa sol # la 

La principale différence des deux modes réside dans 
l'introduction de la tierce mineure la-ut (5 : 6) a b 
place de, la tierce majeure ut-mi (4 : 5). Ils sont carac- 
térisés chacun par un accord parfait, formé avec k 
tierce et la quinte de la tonique : 

accord parfait majeur. . . ut mi sol 
accord parfait mineur. . . la ut mi, ou bien 

ut mi t sol. 

Si on voulait réaliser toutes ces gammes dans leui 
pureté théorique sur les instruments à sons fixes, on 
en compliquerait singulièrement la construction. D i 
donc fallu chercher un accommodement, et on l'atrou?< 
dans la gamme tempérée. L'oreille tolère encore des in 
tervallcs qui s'éloignent un peu des consonnances par 
faites, et cette circonstance a permis de simplifier Té 
chcUe des notes fixes, en confondant celles qui naissen 
de Taltération inverse de deux notes naturelles voisines 
On réunit donc Vut # au ré |^ , le r^ # au mi |^ , et ains 
de suite. De cette façon, il suffit d'intercaler cinq tou 
ches noires entre les sept touches blanches de chaqu 
octave du piano pour obtenir une gamme chromatique 
formée de douze demi-tons égaux, qui se prête à toute 
les exigences du système musical. II est vrai qu*on s 
trouve par là conduit à altérer aussi, d'une manier 
plus ou moins sensible, les notes naturelles représen 
técs par les touches blanches, et à modifier tous les in 
tervalles musicaux. 

Les demi-tons tempérés peuvent être approximative 
jnent représentés par le raççoxl \?j, el \mv ton tempér 



LES NOTES. 209 

diffère à peine d'un ton majeur f . La quinte et la quarte 
ne sont faussées par le tempérament égal que d'une 
manière tout à fait insensible, mais les tierces le sont 
beaucoup plus. Quelques auteurs du siècle dernier don- 
nent le nom de loups à ces intervalles sacrifiés où les 
dissonances semblent se donner rendez-vous pour hur- 
ler. Une voix naturelle qui n'est guidée que par l'instinct 
donne toujours les intervalles purs ; de même les violo- 
nistes qui n'ont pas l'oreille rompue aux sons des or- 
chestres jouent naturellement les tierces et les sixtes 
justes. 

Les inconvénients du tempérament égal ont été le 
motif d'une foule de tentatives pour revenir aux accords 
naturels, même dans la musique instrumentale. La 
harpe à double mouvement d'Erhard, les orgues dites 
enharmoniques de Poole et du général Perronet Thomp- 
son, l'harmonium imaginé par M. Helmhoitz, per- 
mettent de jouer dans tous les tons sans tempérer. 
L'enseignement delà musique vocale, tel qu'il a été pro- 
pagé en France par Galin et Chevé, tel que le pratiquent 
en Angleterre les nombreuses Tonic-Solfa- Associations 
ou sociétés de solfège, s'en tient également aux gammes 
naturelles. Les sociétés anglaises emploient pour solfier 
les syllabes do, ré^ miy fa^ sol^ la^ ti, do, et réduisent 
l'écriture musicale aux lettres r/, r, m, f, s, {, I, d» 
Galin, Paris et Chevé emploient au même usage les 
chiffres 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7 ; les octaves successives 
sont indiquées par des points ou des barres qui se pla- 
cent au-dessus ou au-dessous des chiffres. II ne reste 
plus alors qu*à donner la hauteur absolue de la tonique 
i, pour que toutes les notes soient parfaitement déter- 
minées. On voit quelle simplification s'obtient par ce 
procédé (déjà recommandé par Ro\xs^feîca\ , e\. çwrofcîss^^ 



»0 L'ACOUSTIQUE. 

il rend la musique plus populaire et plus accessible aux 
personnes qui n'ont pas de temps à perdre. 

« La musique, dit J.-J. Rousseau, a eu le sort des 
arts qui ne se perfectionnent que lentement. Les in- 
yenteurs des notes n'ont songé qu'à l'état où elle se 
trouvait de leur temps, sans songer à celui où elle poa- 
yait parvenir ; et dans la suite, leurs signes se sont 
trouvés d'autant plus défectueux, que Tart s'est plus 
perfectionné. A mesure qu'on avançait, on établissait 
de nouvelles règles pour remédier aux inconvénients 
présents ; en multipliant les signes, on a multiplié les 
difficultés, et à force d'additions et chevilles on a tiré 
d'un principe assez simple un système fort embrouillé 
et fort mat assorti... 

« Les musiciens, il est vrai, ne voient point tout cela. 
L^usage habitue à tout. La musique pour eux n'est pas 
la science des sons ; c'est celle des noires, des blanches, 
des croches, etc. Dès que ces figures cesseraient de frap- 
per leurs yeux, ils ne croiraient plus voir de la musi- 
que. D'ailleurs ce qu'ils ont appris difficilement, pour- 
quoi le rendraient-ils facile aux autres ? Ce n'est donc 
pas le musicien qu'il faut consulter ici, mais l'honune 
qui sait la musique et qui a réfléchi sur cet art. » 

Lorsqu'on veut jouer un morceau d'ensemble, il est 
évidemment indispensable . que tous les instruments 
soient d'accord ; c'est pour cela que, dans les orches- 
tres on les met à l'unisson au moyen d'un diapason qui 
garde une note fixe : c'est d'habitude le /a, la note de 
ta troisième corde du violon. Autrefois, le ton était 
donné à Torchestre par une espèce de sifflet muni d'un 
piston gradué à Taide duquel on pouvait raccourcir ou 
allonger le tuyau à volonlè, aÇ«v àicii \\\«t différents 



LES NOTES. 311 

sons fixes marqués sur la division. Il y avait le to7i du 
àœur pour le plain-chant, et pour la musique profane 
le ton de chapelle et le ton d'opéra. Ce dernier n'avait 
rien de fixe, on le haussait ou le baissait suivant la por- 
tée des voix ; le ton de chapelle, au contraire, était fixe, 
du moins en France, et ordinairement plus élevé que le 
ton d'opéra. Quant au ton du choeur, qui s'accordait 
aiec l'orgue, il est difficile de dire s'il était plus bas ou 
plus élevé que le ton de chapelle, car les auteurs se 
contredisent sur ce point ; à la fin, il parait qu'on met- 
tait simplement l'orgue au ton de chapelle. 

Depuis que la science est en possession de méthodes 
qui permettent de mesurer la hauteur absolue des notes, 
on a de temps à autre déterminé le ton des principaux 
orchestres d'Europe et, chose curieuse, on a constaté 
que partout il s'est élevé dans une progression rapide. 
Sauveur, qui parait avoir étudié cette question le pre- 
mier, trouva en i 700 que le la du bas du clavecin fai- 
sait 202 vibrations, et ïut du bas du clavecin, ou celui 
d'un tuyau d'orgue de 8 pieds ouvert, 244 vibrations, 
ce qui donnait un la de 810. D'autres déterminations 
du siècle dernier varient entre 820 et 850. En 1855, 
Henri Scheibler examina les diapasons des principaux 
théâtres et trouva qu'à l'Opéra on en avait deux de 853 
et de 868, aux Italiens et au Conservatoire d'autres de 
870 et de 881 vibrations ; à Berlin, il trouva un la de 
883 ; à Vienne, les diapasons variaient de 867 à 890 
vibrations. En 1857, M. Lissajous trouva les nombres 
suivants : 

Opéra de Paris 896 

(^éra de Berlin 897 

Théâtre de San Carlo, Naples . . 890 

Théâtre délia Scala, Milan. ... <i(i^ 

Maximum à Londres ^V^ 



312 L'ACOUSTIQUE. 

« 

Cette élévation croissante du ton des instruments est 
encore attestée par les anciennes orgues qui existent 
dans quelques basiliques. Quelle est la raison qui pousse 
les musiciens et les facteurs à monter sans cesse ? On 
suppose que la plupart des instruments ont plus d'é- 
clat dans les notes élevées, et que. c'est pour cela que les 
facteurs en ont peu à peu haussé le ton. Les chanteurs 
suivent en général la même pente, au détriment de leur 
voix. Toutefois, on est allé trop loin en attribuant la 
ruine de tant de beaux organes à l'élévation du diapa- 
son ; il serait plus juste d'en chercher la cause avec Ber- 
lioz dans la tendance des compositeurs modernes à 
écrire plus haut pour les voix que les anciens auteurs. 
Quelle que soit la hauteur du diapason, il est facile 
au compositeur de se renfermer dans des limites rai- 
sonnables. 

Il n'en est pas moins vrai que la variation progres- 
sive du diapason devait à la fin inquiéter les musiciens 
et qu'il était urgent de convenir d'un ton normal et ab- 
solument fixe. Sauveur avait insisté dès 1700 sur la 
nécessité d'adopter un son fixe. Il proposa d'abord pour 
cet usage le son qui fait juste 200 vibrations par se- 
conde et qu'il croyait être le la d'un tuyau de 5 pieds 
ouvert. Plus tard, ayant reconnu que ce la était en 
réalité un peu plus élevé, il s'arrêta à un autre ordre 
d'idées et proposa de prendre pour son fixe un ut de 
512 vibrations. On arrive à ce nombre par la progres- 
sion 1 , 2, 4, 8,.. en doublant toujours ou, ce qui est la 
même chose, en formant les octaves successives de l'u- 
niié. Chladni adopta plus tard le même ut de 512 vi- 
brations, auquel correspond un la naturel de 853 |, et 
on Je trouve ensuite employé parla plupart des savants. 
Cependant, comme le ton Ae?» otàv^i^U^'s» \û.wv\»\\. Iqu- 



LES N0TB5. 215 

jours, les physiciens allemands, réunis à Stuttgart en 
1834, décidèrent qu'il fallait choisir un la normal plus 
en harmonie avec l'usage des musiciens, et ils choi- 
sirent définitivement un la de 880 vibrations ; c'est le 
la allemand; il eât très-commode pour les calculs nu- 
mériques. Par malheur, le congrès de Stuttgart ne sut 
pas se faire écouter ; les diapasons montèrent toujours 
et d'une manière désordonnée. C'est alors que le décret 
du 16 février 1859 fixa pour la France un diapason offi- 
ciel. Ce diapason donne le la de 870 vibrations; il dif- 
fère à peine du la allemand et se prête mal au calcul 
des notes de la gamme. 

Voici les nombres des vibrations simples de la gamme 
tempérée basée sur le /a, français, et de la gamme natu- 
relle qui commence par le même ut. On obtient les oc- 
taves en doublant ou en divisant par 2. 



YTES, 


GAMME TEMPÉRiB. 


GAMME NATURELLE. 


RAPPORTS NATURELS. 


u^ 


517,5 


517,5 


24 


ré 


580,7 


582,0 


27 


mi 


651,8 


646,6 


50 


fa 


690,5 


689,7 


52 


sol 


775,1 


776,0 


56 


la 


870,0 


862,2 


40 


si 


976,5 


970,0 


45 


ut. 


1054,6 


1054,6 


48 



C'est l'octave moyenne du piano représentée par les 
notes suivantes : 



P 



1^^^ 



i^^ 



Désormais, tous les instruments seront accordés au 
moyen de diapasons comparés a\ec Yé\d\^w ^^^\à^ 



tt4 L'ACOUSTIQUE. 

Conservatoire ; Punité est donc assurée, et il n'y a pins 
à craindre que le ton des orchestres puisse monter. 

On accorde ordinairement le piano, le violon et les 
autres instruments avec le secours de Toreille. Une 
corde est mise à l'unisson du diapason, les autres sont 
accordées par les intervaUes musicaux, principalemeot 
par octatâs et quintes. 

D'après les essais dé Web^, une oreille très^fine peut 
encore apprécier directeinent une différence d'un mil- 
lième, ou d'une vibration sur mille ; c'est la limite. Ce- 
pendant, l'observation des battements, phénomène dont 
il sera question plus loin, permet d'aller beaucoup plos 
loin ; aussi est-ce par ce moyen qu'on accorde les orgues. 
Lorsqu'il s'agit d'obtenir une précision extrême, on a 
recours à une dernière méthode, due à M. Lissajous; 
c'est la méthode optique^ dont nous allons essayer d'ei- 
pliquer le principe. 

Une verge prismatique peut vibrer transversalement 
de telle sorte que l'extrémité libre décrive une ligne 
plane. Si cette extrémité porte une perle d'acier ou 
de verre étamé, la persistance des impressions lumi- 
neuses la fera paraître sous la forme d'un trait brillant. 
L'œil en effet a la faculté de conserver pendant un 
quinzième de seconde environ les impressions les plus 
fugitives; si doncle point lumineux met moins de j^dc 
seconde à parcourir son chemin, tout cet espace paraî- 
tra illuminé. C'est ainsi qu'un charbon ardent que l'on 
fait tourner en fronde dessine dans l'air un cercle flam- 
boyant. 

Si la section de la tige est rectangulaire, on peut la 
faire vibrer soit dans le sens de l'épaisseur, soit dans 
celui de la largeur. Dans les deux cas, la petite perle 
dessinera une ligne droVleXutmivevvsfcv V\ tqixsAa <\^'elle 



irt dans le premier cas est perpendiculaire à celle 
i suit dans le second. Mais nous pouvons encore 
cr la tige d'une autre manière, en la frappant 
ement. Elle se trouve alors poussée à la fois dans 
chemins qui se croisent à angle droit. Se déci- 
-elle à suivre l'un plutôt que l'autre? Quand on 
deux invitations également pressantes, on cher- 
té tirer d'affaire en les acceptant toutes les deux, 
linsi que fait la tige : elle prend un biais entre les 
chemins pour suivre un instant l'impulsion qui 
line dans le sens de l'épaisseur, puis un instant 
{ui la pousse dans le sens de la largeur, et ainsi de 

la petite perle parcourt un chemin plus ou 
entortillé dont le sillon lumineux permet de suivre 
ge dans ses évolutions rapides, 
nombre des vibrations droites est toujours pro- 
nnel à la dimension dans laquelle la verge vibre. 
e a une section carrée, qu'elle soit aussi épaisse 
arge, le nombre des vibrations sera évidemment 
me dans les deux 
Dans ce cas, la 

perle décrira 
llipse qui pourra 
ndir en cercle 
'aplatir jusqu'à 
ir une ligne 
!(ng.86). Le cal- 
fait prévoir. On 
rend même a 
i la ligne droite 
ipposant que la 

s'écarte diagonalement de sa position de repos, 
isaat toujours de petits pas éftttWJi «a. wtoà. A" 




drnte, M'iTtat H à drato,' pm^lFiMB^ irtJ ■*■«,<■ 
arrièreet à gauche, ea'imMetà-gMiAe,flkûBMit' 
aoite, comme ls,mootre'tâlfBri<M. PiW'«ii4ifHr 
l'dlipse, il nous faudnit aûnr> éuméai Wiuitei- 
tiooB tn^ étevées. 

Ouand les deux dimamen4tk«grga«aiilcsiHM' 
1 : 3, )« nombres Se TÏbntWM eaffmpândMitiMni* 
érid«Dmeat dans le ra[^K»!i d« l'oeMé i^d Im ■imim' 
MOUS sont comme 2 : 3, lea nbntiooa lerant' k It 
quinte, etc. La perle et le rayon rétléchî décrivent alors 
les courbes représentées plus loin par les figures 92 et 95. 
On peut donc dire que ces figures caractérisent les in- 
terviillos musicaux. 

C'est sur ce principe que repose le caléidophoiie de 
M. Wheatstone, appareil composé d'une série de Tcrges 
prismatiques dont les cdtés sont dans les rapports dei 
intervalles consonnants (fig. 87), Chaque verge porta 

JiL 

Fig. ST. CalfidophoDC 

au bout une petite perle qui décrit l'une des couroes 
représentées par les figures quandonfaitvibrer la verge 
par un petit coup donné avec le doigt. M. WheatshHM 
fit connaître cet appareil en 1827 ; on le trouve aujour- 
d'hui dans tous les cabinets de physique. Toici mainte- 
flan/ le parti que l'on çeul \.\vet à» «si 



Imaginons (Gg. 88) un miroir vertical, fixé au bout 
d'une tige horizontale qui puisse vibrer tour à tour 
dans un plan vertical et dans un plan horizontal. Sur 
ce miroir faisons tomber un rayon lumineux,, par 
exemple en plaçant un peu en avant une lampe entourée 
d'une cheminée opaque dans laquelle est percé un petit 
tmi pour laisser passer la lumière. Tant que le miroir 
restera immobile, le rayon réQéchi formera sur le mur 




un simple point brillant ; si on regarde directement 
dans la glace et qu'on y cherche l'image de la lampe, 
oq aperçoit la petite lumière comme une étoile parfaite- 
tDent fixe. Mais si l'on donne à la tige une secousse qui 
la fait osciller, le rayon réfléchi partage aussitôt le 
mouvement du miroir, l'image se déplace sur le mur, 
''étoile 6xe devient une planète. Que d'abord la tige ne 
vibre que dans un plan vertical, on verra sur le mur se 
dessiner un trait lumineux dirigé de haut en bas, et en 
regardant directement dans le miroir vibrant, on y 
apercevra également un sillon vertical. Si, au contraire, 
on imprime à la tige un mouvement horizontal, le trait 
réfléchi sera horizontal auâsi. Qu'on la fasse enfm vibrer 
ohhquement, on verra naître sur \e mut, om, \-OT&\'e. 



«1 L'iCOnSTIOUB. 

miroir même, les courbes biurrea du caltidophoH. 11 ■ 
sutura du reste, pour les obwrrer, de teoir eu r^rd < 
du miroir un petit objet brillant quelconque, un bootn 
de métal, une télé d'épingle, etc. L'image de cet ol^ 
se transTorme en une combe lumineuse dès que la 1^ 
est mise en branle, La forme de la eouri» dépend too- 
jours du rapport des vibrations droites que la m^ 
exécute si elle oscille d'abord dans un plan vertical, n- 
suite dans un plan horizontal. ^ 

On peut maintenant obtenir les mêmes jeux de h- f 
mière par une -double réQexion sur deux miroirs que \ 
l'on fait vibrer chacun dans un antre plan. On les plue ' 
en regard l'un de l'autre (0g. 89) de manière qu'an 




Fig. 89. 

rayon de lumière rédéchi par le premier tombe sur le 
second, qui le renvoie à son tour et le projette surk 
mûr. Si alors on fait vibrer un seul des deux miroirs, 
le point lirillant se transforme sur le mur en une ligne 
lumineuse dirigée dans le sens où se fout les vibrations, 
parce que le rayon réfléchi partage le mouvement de li 
surface réfléchissante. Mais si on fait osciller le premier 
miroir horizontalement et le second verticalement, le 
rayoa réfléchi re<;oit du çieiûeTWE^TaâMKvmftnthori- 



tonlal auquel s'ajoute, par la seconde réflexion, un 
mouTement vertical ; ces deux mouvements se combinent, 
comme dans le cas du caléîdophone, pour donner nais- 
noce aux courbes diverses que nous avons figurées plus 
haut. On les observe soit en regardant directement dans 
le second miroir, soit en recevant l'image du point lu- 
mineux sur un écran quelconque ; on lui donne plus 
deuelteté et d'éclat en faisant passer les rayons lumî- 
neni à travers une lentille. L'inspection seule des 
courbes fait reconnaître le rapport dans lequel se trou- 
ant les nombres de vibrations respectifs des deuv mi- 
roirs ; une ligne droite ou une ellipse indiquent l'unis- 
iOQ, un huit de chiffre l'octave, et ainsi de suite. 



-k 
N. 



I 



Fig. 99. ïélhode optique àe H. Lûsajous. 

Au lieu de fixer les deux miroirs au bout de deux ti- 
ges horizontales et parallèies, on peut tes fixer contre 
les branches de deux diapasons placés à équerrc, l'un 
horizontal, l'aulre vertical, comme dans la figure 90. 
Le premier imprime au rayon réfléchi un mouvement 
horizontal, le second le balance verticalement, et c'esl 
aio»i que l'oa obtient des courbes I^V\^. ^V-^i^ ^ia 



220 L'ACOUSTIQUE. 

Taspect révèle immédiatement le rapport musical des 
deux diapasons. C'est en cela que consiste la méthoie 
optique de comparaison des vibrations sonores, que 



Fig. 91. Unisson 1:1. 







Phase 



1 



1 



1 






5^ 
8 



3 
4 



7 



Fig. 92. 0clavel:2. 






Pha^e 



1 

V 



8, 

8 






5^ 
8 






2 

8 




1 

V 






1 

V 




M. Lissajous a fait connaître en d855. Elle permet 
d'apprécier T intervalle musical de deux corps vibrant^ 
avec une certitude inconnue avant cette belle décou- 
verte. 
On peut se demander çowtcçim wcv \çv^\«v^ ra\;i\|orl 






M L'ACOUSTIQUE. 1 

course (quand la phase est nulle), la trajectoire de ^ 
l'image lumineuse est une ligne droite ; dans tous les 
autres cas, c'est une ellipse ou« un cercle. Nous afoos 
écrit au-dessous de chacune de nos figures la différence 
de phase correspondante, en fraction d'une vibration 

entiàije. ,, ., 

Qpi|nd les vibra^ons dfa^ diwix diapasons sont eiacte- 
meofr dans le ra^jpoirt: de às^f, Qombites entiers, la figoie 
optii|i]e qu'ils donnent en oommen(^t leur mouvement ^ 
reste la même pendant toute la durée de ce mouvement, 
à cela près qu'elle diminue de grandeur à mesure qœ 
les vibraticns^s'éteignent. Dans ^ùt cas, on n^obs^ve 
donc qu'we.iseule desçpurbes îfiiil'ëaractérisent Tinter^ 
valle musical dont il s'agit. Màii^«i l'accord des diapa- 
sons n'est pas parfait, s'ils sont légèrement dissonants, 
la figure ne reste pas fixe, elle se transforme progreisi- 
vement de manière à parcourir le cycle complet des 
courbes diverses qui correspondent au même intervalle. 
C'est que le retard ou la différence de phase augmente 
alors sans cesse, comme l'écart de deux pendules qui 
ne sont pas d'accord ; il s'ensuit que la figure change 
aussi d'une manière continue. La transformation est 
d'autant plus rapide que le désaccord des diapasons est 
plus prononcé, 11 en résulte pour l'ellipse, qui caracté- 
rise l'unisson, un balancement dans lequel elle s'incline 
tantôt à droite, tantôt à gauche, en se fermante chaque 
fois de manière à passer par la forme d'une ligne droite. 
Cette titubation des figures trahit immédiatement le 
plus léger désaccord et permet, en outre, d'en appré- 
cier la valeur. 

C'est par ce moyen que les diapasons destinés à 

donner le la normal sont comparés à l'étalon du Con- 

servatoire ; une fois corrigea eV.tftÇiWvw»&^^'akR\&^ \Usont 



LES NOTES. 223 

poinçonnés comme l'argenterie à la Monnaie. Cette opé- 
ralion se fait nécessairement sans que le diapason à 
comparer soit orné d'un miroir, qui en changerait la 
note ; si les branches sont polies, elles servent comme 
des miroirs, et si elles ne le sont pas, il suffit de bien 
fixer un point dé leur surface en se servant d'un mi- 
croscope. 

Au reste, M. Lissajous a généralisé l'emploi de son 
procédé par l'invention du comparateur optique. C'est 
un microscope dont l'objectif, séparé du tube, est porté 
par l'une des branches d'un diapason placé à angle 
droit avec le tube. Quand le diapason vibre, il fait dan- 
ser l'objectif devant le tube, et les objets que l'on voit 
dans le champ du microscope semblent osciller dans le 
néme sens. Si maintenant l'un des objets vibre lui- 
(Déme dans un sens différent, la vibration réelle et la 
dbration apparente se composent, et la courbe qui en 
*ésalte peut faire connaître le nombre des vibrations 
lu corps que l'on étudie. 



XI 



LE TIMBRE 



Forme des ondes. -> Vibrations pendulaires. — Sons simples et sons ee m fleii». 
— Hirmoniqaes. — Timbre de la toix et des instruments de musique. — 
Sons musicaux. — Voyelles. — Résonnance midtiple. — . Analyse du Uflère. 

Nous avons vu que le ion ou la hauteur d'une note 
dépend de la rapidité avec laquelle se succèdent ses vi- 
brations. Est-ce là toute la différence qui peut exister 
entre deux sons? Évidemment non, car on ne confond 
point les sons d'origine diverse lors même qu'ils sont 
à l'unisson ; ils se distinguent encore par une qualité 
originelle que l'on nomme le timbre. Les sons du cor 
ne ressemblent point à ceux d'une harpe, le violon ré- 
sonne autrement qu'un tuyau d'orgue. La même note a 
un caractère différent suivant qu'on la chante sur un a 
ou sur un o, d'où il suit que les voyelles ne représen- 
tent que le timbre changeant de la voix humaine ; on 
pourrait même classer les timbres des instruments de 
musique en déterminant les voyelles dont ils semblent 
se rapprocher le plus. 

D'où vient le timbrel CommwvV Vai \SL&\»ft note peut- 



LE TIMBRE. 225 

elle produire des impressions si différentes ? Cette ques- 
tion à longteinps préoccupé les savants, et ce n'est que 
dans ces derniers temps que, grâce aux recherches de 
H. Helmholtz, elle a été résolue d'une manière satis- 
faisante. 

On avait toujours pensé, et avec raison, que le timbre 
devait avoir quelque rapport avec la forme particulière 
des vibrations du corps sonore. Une pareille différence 
se découvre aisément dans les ondulations des liquides : 
il y a des ondes d'aspect différent, des ondes pointues, 
crénelées, aplaties, offrant cependant toutes la même 
période de succession. Un coup de vent qui frise la sur- 
face de l'eau, y fait naître une foule de petites rides 
qui changent la forme des vagues sans en ralentir ni en 
accélérer le mouvement général. Mais qu'est-ce que la 
forme d'une vibration fixe comme celle d'une corde, 
pendant laquelle tous les points du corps vibrant ne 
font que monter et descendre, c'est-à-dire parcourir 
dans deux sens opposés la même ligne droite ? 

Rien n'est plus simple. De même qu'on peut aller de 
mille manières, en un quart d'heure, de l'arc de triom- 
phe de l'Étoile à la place de la Concorde — par exemple, 
en flânant pendant cinq minutes, en accélérant le pas 
pendant le3 cinq .mi,nute3 suivantes, et en reprenant 
ensuite yne allure tranquille — de même ude molécule 
qui vibre peut se transporter de plus d'une manière, 
en un centième de seconde, d'une extrémité à l'autre 
du chemin qu'elle doit parcourir. Elle peut aller d'a- 
bord lentement, puis très-vite, et enfin ralentir sa 
course ; mais elle peut aussi se relâcher deux ou trois 
fois avant d'arriver ai. bout de sa route. La méthode 
graphique et le miroir tournant nous permettent de 
constater ces accès de vitesse qui oui Uew ^^wdA.w^ \&»s 



W L'AiClWWHMl. 

même oscillation. Unefaùtle de papier enfumé qsi «e 
déplace rapidemeat seue use poqito. vibrante, jsrde. la 
trace visible de toutislea irré^piUrités ^ nourraunt 
oscillatoire ; on les deviœ d'apcèA l'wpectde Jk.C9iiri>e 
obtenue. Le miroir loiirnant nous inonlre une perle 
fixùe à l'extrémité d'une tige horizontale ilans une suite 
de perspectives difîérentea qui la font paraître comme 
un ruban lumineux ; si alors ta tige vibre perpendicu- 
lairement à ce ntban, la perte monte et descend, et le 
sillon lumineuï se transforme en une chaine de replis 
serpentants ; la courbe est tout à fait analogue à celle 
que forme le tracé grapliique. 

I^orsqu'oD connaît déjà a priori la nature partioilière 
d'un mouTement périodique, on peut tracer 1m cour 
bes en question sans les avoir vues. Sur une ligne jdrmte 
horizontale on marquera les secondes sucoemves i 
diaque division, on élèvera une cote verticale qui figure 
la hauteur oîi doit se trouver à ce moment le corps vi- 
brant, lequel est censé monter et descendre ; les estré- 
mités des cotes forment la courbe de la vibration. C'est 
ainsi que la figure 95 représente le mouvement pério- 



dique d'un marteau pilon que commande une roue 
hydraulique. 11 s'élève d'abord lentement pour retom- 
ber ensuite tout d'un coup ; à la première seconde, il 
?sl tout bas ; jusqu'à la nevi'iVème, \V lOôViXfc ^^içsaAuae- 



ment, de la neuvième à la diiïème, il redescend par 
une chute très-brusque. Le mouvement d'une corde at- 
taquée par un archet est tout à fait analogue. La figure 
d6 représente de la même manière les hauteurs où se 




iR. 96. ■ 



trouve au bout de 1, 2, 3... unités de temps une bille 
élastique qui rebondit verticalement après avoir touche 
le sol. Un miroir tournant la montrerait décrivant cette 
courbe qui est formée d'arcades successives. 

Le mouvement périodique le plus simple, ou le plus 
régulier, est celui d'un pendule. La courbe qui le re- 



présente a la forme sinueuse de la ligure 97; c'est ainsi 
qu'un pendule terminé par une pointe tracerait ses os- 
cillations sur une feuille de papier que l'on ferait glis- 
ser sous cette pointe : la ligne droite indique le sens 
dans lequel marcherait le papier, les oscillations son' 
perpendiculaires j cette ligne, comm'ï \TOÎ!i^^l^'»A.^ 



9Sfe L'ACOUSTIQUE. 

flèches. 11 est facile de reproduire à l'aide de cette 
courbe le mouYement pendulaire d'un point qui monte 
et descend; prenez un canif et une carte, pratiquez 
dans la carte une fente (étroite, et appliquez-la sur la 
courbe de manière que la fente soit yerticale, puis faites- 
la marcher leatemeni 4e droite à gaiiche; yous ne ver- 
rez toujouns .qii*TO pofxA de la 0Durbe, et il semblera 
osciller-dans U fente cotdôme un. jiepdule véritable. 

La loi du mouTement pendulaire peut en quelque 
sorte s'exprimer mathématiquement par une compa- 
raison. Imaginons un'point lumineux, par exemple une 
petite lanterne, attaché contre le bord d'une roue qui 
tourne avec une vitesse uniforme (/Ijf. 98). En vous 




Fig. 98. 



mettant de face vous verrez donc le luminaire décrire 
un cercle parfaitement régulier. L'apparence ne sera 
pas la même pour un observateur placé de champ qui 
ne peut voir la roue que par sa tranche. S'il est un peu 
loin, il pourra la prendre pour un bâton vertical, et le 
point lumineux lui semblera monter et descendre le 
long de ce bâton ; seulement, il lui fera l'effet de mar- 
cher beaucoup plus vite quand il sera à la hauteur de 
l'axe que lorsqu'il sera tout en haut ou tout en bas de 
Ja roue ; à ces deux înslai\\&^ \a ipeVÀVfe \\««>fet^ ^^^vica 



LE TIMBRE. S29 

s'arrêter momentanément avant de revenir en arrière. 
Eh bien, ce mouvement apparent sera l'imitation exacte 
d'un mouvement pendulaire qui ferait osciller le point 
lumineux le long du diamètre vertical de la roue. 

On appelle vibration pendulaire un mouvement pério« 
dique caractérisé par les mêmes alternatives de lenteur 
et de vitesse : vitesse nulle aux deux extrémités de la 
course, croissante vers le milieu, où elle est maximum. 
Un son simple est produit par une vibration pendulaire. 
Le va-et-vient des branches du diapason ordinaire ap- 
proche beaucoup de cette vibration-type ; le diapason 
donne une note à peu près simple, la flûte également. 

Tous les sons simples sont excessivement doux et 
nous semblent plus graves qu'ils ne le sont en réalité. 
Leur timbre a quelque chose de sombre qui rappelle 
le timbre de la voyelle OU ; il est indépendant de la 
matière du corps sonore. Nous verrons bientôt comment 
il faut faire pour produire un son simple ; dans la na- 
ture, c'est un oiseau rare que l'on ne rencontre presque 
jamais. 

On ne rencontre dans la nature que des sons com- 
plexes, c'est-à-dire composés de plusieurs sons simples 
de hauteur diverse. Chaque corps qui résonne libre- 
ment est à lui seul un petit orchestre. Le son le plus 
grave donne le ton, les autres, tous plus aigus les uns 
que les autres, accompagnent en sourdine. C'est cela 
qui fait le timbre. Un timbre riche est un nid de sons 
harmonieux dont le gazouillement nous plait sans que 
nous sachions pourquoi. 

11 était connu depuis fort longtemps que beaucoup 
de corps rendent, en même temps que leur son fonda- 
mental, quelques autres sons plus faibles, appelés /u»**- 
moniques; mais on ne se rendait ^as> ei^\»:^\.^ ^ 



Vê L'ACOUSTIQUE. 

qu'il fallait leur attribuer. On ne se disait pas qu'ils 
sont la cause principale, sinon unique, du timbre qui 
caractérise les différents instruments, et que c'est leur 
intervention qui explique les formes diverses des cour- 
bes vibratoires. 

Sauveur ^ a donné le nom à'hûrmani^ies d'un son 
fondamental aux sons qui font 2 « 3, 4, 5... vibrittions 
pendant que l'autre n'en flût qu'une. Ensemble, ils for- 
ment donc la série naturelle des nombres 1, 2, 5, 4, 
5... Le premier harmonique est l'octave du son fonda- 
mental, le second, la douzième ou octave de la quinte ; 
ceux qui suivent sont : la double octave, la dix-septième 
ou double octave de la tierce ; la dix-neuvième ou dou- 
ble octave de la quinte, etc. 

Aliu de rappeler toiyours les rapports de hauteur des 
harmoniques par leur désignation même, nous y com- 
prendrons le son fondamental, qui sera Tharmonique 1; 
Toctavo sera l'harmonique 2, la douzième Tharmo- 
nique 3 et ainsi de suite. 

En prenant Tu/,, pour son fondamental, nous avons 
la série que voici : 

Ml^ mf^ «rtlj III4 «W4 *^4 ^^4 •*» ^i "«S A**- 

I i 5 4 4 5 6 7 8 10 11 ... 

i>n voit quVn dèpil de leur nom, ces notes sont loin 
de fonm^r toujours entre elles des aceonls consonnants. 
Cela n*e!sl vrai que pour les six premières: 7 et 11, 



LE TIMBRE. 231 

représentées approximativement par /a # et fa #, n'ap- 
partiennent même pas à l'échelle musicale, ce sont des 
notes dissonantes, aussi bien que 9, qui est un ré. 
Quand ces notes se font sentir dans un son composé, 
elles en altèrent la beauté et lui donnent quelque 
chose de strident. 

Sauveur avait très-bien observé le phénomène des 
sons harmoniques ou de la résonnance multiple dès 1 700. 
« Une corde de clavecin étant pincée, dit-il, outre le 
son fondamental, on entend encore en même temps, 
quand on a Toreille fine et exercée, d^autres sons plus 
aigus que celui de la corde entière, produits par quel- 
ques-unes de ses parties, qui se détachent en quelque 
sorte de la vibration générale pour faire des vibrations 
particulières. Cette complication des vibrations se peut 
concevoir par l'exemple d'une corde attachée par les 
deux bouts et lâche, comme celle des danseurs. Car 
tandis que le danseur de corde lui donne un grand 
branle, il peut avec ses deux mains donner deux branles 
particuliers aux deux moitiés... 

« Aussi chaque moitié, chaque tiers, chaque quart 
d'une corde a ses vibrations à part tandis que se fait 
la vibration de la corde entière. C'est la même chose 
d'une cloche quand elle est fort bonne et harmo- 
nieuse... » 

Après avoir énuméré les harmoniques successifs qui 
accompagnent le son fondamental d'une corde sonore, 
Sauveur ajoute : 

« Il paraît donc que toutes les fois que la nature fait 
par elle-même, pour ainsi dire, un système de musique, 
elle n'y emploie que cette espèce de sons, et cependant 
ils étaient demeurés jusqu'à présent inconnus à la 
théorie des musiciens. Quand o\i\^% e;ci\.^\A^^ vsv\.\s 



trailaH de Inurns et d'irr%i4wi^i M l'on ae àtBfm- 
sait par ta de faire une l^rèche au systànM^^ûfalt 
et borné qui ^t «1 règne^ « 

Rameau reprit vingt-cio^ «ns |^ tard ees idée» et 
m .fit la bftse d'un nouveau. B;rtèrae:inu8ioal. . ..i.. 

Le son fondamental et ses harmomques, pm iaolih. 
ment, sont. des sons 8ifa{4e8 4 f ibrattoaspeaduUns; 
Lear mélange ctmstitue un apn copipleM iJont hê^ 
brati<Hia ont une forme plus ou moins cootpliquée.âH' 
cune de ces vibrations sacces8iTe»8e oompose l'âino» 
Tibratiw du son fondamental ; ,3* de deux Ti^nrtÙM» 
del'octave; 3° de trois de la douzième; i'dexpiti» 
de la double octave, et ainsi de suite. La forme génér 
raie de la courbe qui représente cette TibraU«n'.cQn!-' 
posée est déterminée par le son fondamental, nuit l» 
liannoniques en font osâller le contour en y prodni- 
sant des dépressions et des renflements. Dans la & 
gure 99 , le pointillé représente la courbe de son fon- 




damental, et le trait blanc la courbe qui résulte de l'ad- 
jonction de l'octave. C'est une courbe de ce genre qui 
caractérise le timbre d'un son complexe ; elle change 
déforme suivant l'intenftilé taVa^ÀMt iBfcXatvwMvvïjjss»,. 



LE TIMBRE. 235 

mais le nombre des grands replis ou périodes est tou- 
jours le même, et c'est ce qui fait que la hauteur du 
son mélange est celle du son fondamental. 

Inversement, une vibration périodique, de forme 
quelconque, peut toujours être décomposée en une série 
de vibrations harmoniques simples de la forme pen- 
dulaire. En d'autres termes, tout son complexe, de 
hauteur définie, peut se résoudre en une série harmo- 
nique de sons simples, commençant par un son fonda- 
mental de même hauteur que le son complexe. C'est un 
théorème de Fourier, un des plus féconds que possède 
l'analyse ; mais nous devons nous borner à l'énoncer 
ici. Il en résulte que si le timbre dépend de la forme 
des vibrations, cette forme dépend à son tour des har- 
moniques, de sorte qu'en définitive le timbre nait de 
la superposition de sons simples. Ce n'est point là une 
Gction mathématique, une définition subtile dénuéie de 
toute réalité physique : l'expérience confirme ces dé- 
ductions de la manière la plus frappante. 

Pour bien comprendre ce que c'est qu'un mouve- 
ment composé, reportons-nous encore une fois aux on- 
dulations d'une surface liquide. L'eau est agitée par 
deux pierres tombées en deux endroits différents ; il y 
a donc deux centres d'ébranlement d'oii se propagent 
deux systèmes de bourrelets circulaires et concentriques 
[{ui finiront par se rencontrer et se pénétrer, mais que 
l'œil pourra suivre encore après leur rencontre. C'est 
surtout au bord de la mer qu'il est facile de faire des 
3bservations de ce genre. Les lames qui arrivent du 
large et qui se reconnaissent à leurs crêtes couronnées 
d'une écume blanchâtre, atterrissent dans une succes- 
sion fort régulière ; réfléchies dans plusieurs directions 
suivant la configuration de la côte, e\\es> tm'^WûKsX. ^se^ 



\ 



S54 L'AGOUSTIOUB. 

arrière et s'eutre-croisent obliquement en tout sens. 
Un bateau à vapeur qui passe laisse derrière lui deux 
traînées divei^ntes de vagues tumultueuses ; un oiseau 
de proie^ qui plonge pour attraper un poisson, fait 
naître une suite de petites ondes circulaires qui che- 
minent à travers cette confusion générale. Il est rare 
qu'un observateur attentif ne puisse pas débrouiller et 
suivre dans ce péle-méle chaotique les divers mouiFe- 
ments partiels qui offrent chacun une direction et une 
forme particulières. 

De même, Toreille distingue parfaitement les diffé- 
rents mouvements sonores qui lui sont à la fois transmis 
par l'air. Transportons-nous par la pensée au milieu 
d'un bal, au moment où l'orchestre fait résonner une 
joyeuse fanfare. Quel mélange de sons' qui cependant 
se distinguent encore avec plus ou moins de netteté I 
Des cordes de la basse et des bouches des hommes pa^ 
tent des ondes sonores d'une longueur de trois à qua- 
tre mètres ; des lèvres roses des femmes s'élancent des 
ondulations plus courtes et plus rapides ; le frou-frou 
soyeux des robes et le bruit des pas produisent de pe- 
tits tourbillons d'ondes fines et serrées, et tout cela se 
pénètre et se mélange sans se confondre , puisque 
l'oreille distingue aisément les notes d'origine diverse. 
Cependant le conduit auditif, qui reçoit toutes ces im- 
pressions à la fois, n'est qu'un point en comparaison 
avec la masse d^air de la salle où se croisent tous ces 
mouvements vibratoires. L'oreille ne peut suivre les 
ondes sonores dans tout leur parcours comme l'œil qui 
observe Pagitation d'une nappe liquide. 

Si l'on jette une pierre dans une eau déjà agitée par 

des ondulations d'une certaine ampleur, on verra de 

petits cercles concentriqjxes ae ^pt^^^^î %\«\^^\fflSaRft. 



LE TIMBRE. 235 

ondulée comme ils se propageraient sur l'eau tran- 
quille. Au moment où le bourrelet circulaire coïncide 
avec la crête d'une des grandes ondes, la hauteur de cette 
onde se trouve subitement augmentée de la hauteur du 
iiourrelet ; de même, la dépression circulaire en s'a- 
joutant momentanément à la dépression qui existe entre 
deux ondes, aura pour effet de creuser cette dernière 
davantage. Au contraire, une dépression se rencontrant 
avec une élévation, il y aura affaiblissement de l'effet 
principal. Ainsi, l'addition des ondes plus petites aux 
grandes y produit simplement des bosses ou des creux ; 
et à moins d'embrasser d'un coup d'oeil l'ensemble de 
ces petites bosses dans leur distribution circulaire, on 
peut perdre de vue les ondes excitées par la pierre et 
ne plus voir que les grandes ondes un peu modifiées 
dans leur contour extérieur. C'est ainsi que l'oreille ne 
distingue pas toujours une note faible qui en accom- 
pagne une autre beaucoup plus forte ; il nous semble 
n'entendre que cette dernière, elle prend seulement 
un timbre spécial. 

La séparation des notes élémentaires qui se trou- 
vent associées dans un son naturel ou dans un bruit 
quelconque, peut néanmoins toujours être effectuée par 
l'oreille avec le seqpurs des résonnateurs que nous 
avons déjà décrits. On a vu que ces globes renforcent 
chacun une note particulière dont ils ont été constitués 
les gardiens; ils lui répondent, lui font écho, la reti- 
rent pour ainsi dire de la bagarre. Avec une série de 
résonnateurs façonnés chacun pour une note spéciale, 
il est donc facile de mettre ces notes en évidence pour 
peu qu'elles existent dans un mélange quelconque. On 
démontre ainsi aisément que les harmonic^ues des sou^ 
musicaux, bien loin d'être une iWwsvow Ôl^ \! wyvR.^ xv^ 



936 L'ACOUSTIQUE. 

phénomène tout subjectiff ont une eiistence parftite^ 
ment réelle. Ayoc un peu d'habitude, on anÎTe du 
leurs à les discerner par Toreille seule. 

Une fois accoutumée à écoutor, l'oreille écoute prm* 
que à notre insu. Ainsi, quand on entendra on tané 
bour à peu de distance, on remarquera d'abord un soÉ 
graye et sourd, qui est celui de l'air emprisonné dm 
la caisse ; puis une série de notes aiguës, plus datraa 
et plus nettes, que produit la peau tendue sur k 
cadre. D'autres notes stridentes, mais de courte duiée^' 
sont dues au fouettement des cordes sur la membrani^ 
inférieure, enfin les parois de la caisse font entendre un 
tintement métallique. 

La voix humaine est très-riche en harmoniques, ék 
prend des timbres extrêmement complexes. Ayec kt 
résonnateurs, on peut constater jusqu'à 16 harmom^ 
ques dans une voix de basse qui chante un A ou un E 
sur une note très-grave. Rameau n'ignorait pas ce phé- 
nomène, et beaucoup de musiciens l'ont observé depuis. 
Ainsi Seiler raconte qu'en écoutant, pendant des nuits 
sans sommeil, la voix du guet qui annonçait les heures 
aux bourgeois de Leipzig, il lui sembla souvent entendre 
d'abord la douzième d'une note et ensuite cette note 
elle-même. M. Garcia dit qu'en qpoutant sa voix, dans 
le silence de la nuit, sur le pont Neuf, il a souvent pu 
distinguer l'octave et la douzième de la note qu'il don- 
nait. Si nous nous apercevons si rarement de l'existence 
de ces notes parasites dans les sons de la voix, c'est que 
nous n'y songeons pas d'ordinaire. Mais voici comment 
on peut s'assurer de ce fait. Que Ton prie un chanteur 
de tenir un sur le mi \^ inférieur de la basse, et qu'on 
tasse résonner faiblement sur le piano le si ^ de l'octave 
moyenne afin de fixer Ya\.\£;Tv\À»iv ^\sx ^Nïfti \i^A&\ on 



LE TIVBRE. 23T 

ontinuera d'entendre le si ^ après que le doigt aura 
[uitté la touche et que la corde aura, par conséquent, 
essé de vibrer. C'est que le si ^ résonnant dans le mi l? 
le la voix remplacera le son de la corde. Si Ton veut 
le cette façon entendre le sol de l'octave suivante, ou la 
iîx-septième du mi |?, il vaut mieux choisir la voyelle A. 

Une circonstance qui mérite d'être rappelée ici, c'est 
loe les notes depuis mi^ jusqu'à sol^, qui appartiennent 
ï la dernière octave du piano, sont toujours enflées 
Fane manière toute spéciale par la résonnance du con- 
luit auditif ; elles acquièrent ainsi une intensité fac- 
liée qui donne quelque chose de perçant, de strident, 
lux sons qu'elles accompagnent à titre d'harmoniques. 
Pour une oreille très-fine la sensation est même doulou- 
reuse. Au reste, on sait que les chiens eux-mêmes sont 
sensibles à ces sortes d'impressions ; leur ouïe est frois- 
sée par le mi suraigu du violon, il les fait hurler. Cette 
Irritabilité de Toreille à l'égard des notes très-élevées la 
rend particulièrement sensible à ces dissonances désa- 
gréables qui nous frappent toujours dans les chœurs 
lliommes, surtout quand ils forcent un peu les voix, 
)d entend très-réellement au-dessus des notes basses 
m charivari de petites notes criardes, étrangères à 
'harmonie, qui accompagnent le chant comme un or- 
hestre de grelots ou de cymbales. 

Les cordes minces sont également très-fécondes en 
armoniques. Dans un fil d'acier très-fin, M. Helmholtz 
Q a observé jusqu'à dix-huit; les harmoniques 7, 9, 
1, 13,14, 17, 18, sont tous plus ou moins dissonants; 
ils avaient plus d'intensité et de persistance, ils pro- 
uiraient une affreuse cacophonie. Heureusement To- 
eille ne distingue ordinairement que les premières 
oies supérieures, qui sont consoTm^x\V«&«s^ç.\^w^\fc 



SM L'ACOUSTIQUE. 

fondamentale, et encore fiiutîl beaucoup d'attenticm 
pour les saisir. 

Il parait établi, par tous œs faits, que toute vibra- 
tion sonore qui offre un timbre particulier est décom- 
posée par l'oreille en sons simples formant une suite 
harmonique. Cette condunoo peut à première Toe pa- 
raître trop absolue et contraire au témoignage de nos 
sens, puisque d'habitude on ne se rend pas compta de 
l'existence de plusieurs notes dans un son musical. Tout 
au plus les musiciens distinguent-ils dans un accord les 
différentes notes qui le constituent, mais qui sont pro- 
duites séparément. La difficulté semble encore. aug- 
menter quand on forme l'accord avec des intervalks 
composés tels que la douzième, réplique de la quinte, 
et la dix-rseptième, triplique de la tierce (comme l'ap- 
pelle Sauveur), intervalles qui rentrent dans la suite 
harmonique. J'ai vu faire à M. Kœnig là jolie expé- 
rience que voici. Sur la boite de résonnance d'un 
énorme diapason qui résonne comme un bourdon, il 
groupe un orcliestre de diapasons plus petits accordés 
pour donner les quatre ou cinq premiers harmoniques 
du grand. D*un vigoureux coup d'archet il. fait parl^ 
d'abord le gros patriarche, puis tout son cortège : l'air 
se remplit d'un son grave et harmonieux, très-plein, 
mais qui semble unique à une oreille peu exercée ; on 
ne distingue pas du tout les voix des diapasons aigus. 
Alors M. Kœnig étouffe subitement le plus grave en 
posant la main dessus : aussitôt, on entend les autres, 
qui continuent de vibrer ; leurs voix se résolvent, se 
séparent nettement dès qu'on supprime la basse fon 
damentale qui les soutenait et les liait en faisceau. 
Ainsi, dans les circonstances ordinaires, l'oreille ne 
semble /pas effectuer ce motc^^tsv^wV. of». ^^%^ le 



LE TIMBRE. 230 

tÎEibre en ses éléments constitutifs. Mais ceci est une 
erreur ; il ne s'agit que de nous entendre sur les mots. 
En effet, il faut distinguer ici entre la perception ou 
sensation, qui est complexe, et Vimpression que reçoit 
Tesprit, qui est une. L'oreille perçoit bien réellement 
plusieurs notes quand le violon donne un fa, mais l'en- 
semble de ces notes n'éveille en nous que le souvenir 
d'un fa ayant un timbre particulier, le fa du violon ; 
nous n'avons aucun intérêt direct à analyser autrement 
notre impression. Le clavier de l'appareil auditif décom- 
pose le bruit complexe qui le frappe, mais la synthèse 
se refait dans le centre nerveux. La physiologie nous 
offre bien des exemples d'illusions tout à fait semblables. 
Ainsi, nous prenons pour des couleurs simples ces 
teintes que le prisme décompose en une infinité de 
nuances. La théorie de la vision binoculaire montre avec 
évidence que, pendant toute notre vie, nous voyons 
doubles tous les objets, à l'exception de ceux sur les- 
quels nous fixons le regard, et pourtant, pour nous en 
convaincre, il faut un grand effort d'attention. Peu de 
personnes savent qu'il existe dans la rétine un petit es- 
pace insensible, lepunctum csecum (point aveugle), et 
qu'en conséquence nous ne voyons pas dans une cer- 
taine direction, à peu près au centre du champ de la 
vision. Cette lacune est si grande, que sept disques lu- 
naires rangés à la file y trouveraient place, et qu'à 2 mè- 
tres un visage humain y disparait ; mais nous voyons 
toujours à côté. Quand Mariette démontra ce fait par 
ies expériences à la cour du roi Charles H d'Angleterre, 
il put s'amuser de la stupéfaction de ses illustres audi- 
teurs. On cite des exemples bien avérés de personnes 
qui n'ont découvert que par hasard qu'elles étaient 
borgnes depuis longtemps, c'esl-a-ÔLiT^ ^^l^v^Vfe^'Si 5J.>\wsi 



4to « LACOLSIUjrE. 

cécité dont tes caractères prouvaient qu'clli* rcmonliût 
déjà à plusieurs années. Telle est notre indifTérence 
pour un phénomène qui nous accompagne sans cesse. 
ISous ne nous rendons pas plus compte de la nature 
complexe d'un son musical que nous ne nous apcrcevom 
de la duplicité de l'image d'un objet que nous regardons 
avec les deux yeux ; et c'est cependant cette duplicité 
qui produit l'impression du reliei', comme te prouvent 
les effets du stéréoscope. Le timbre est le relief des 
sons. 

Nous ne sommes faits qu'à distinguer entre eux les 
sons d'instrumenLs différents, ou la voix de plusieurs 
personnes : et dans ces cas, pour nous aider nous avoiK 
encore en dehors du timbre une foule d'autres carae- 
tères disttnctifs, par exemple les petits bruits qui pré- 
cèdent ou suivent l'émission du son, sa durée, sa force, 
ses intermittences et ses variations. Mais quant à a 
qui est de décomposer le timbre et d'en avoir le sen- 
timent, il faut que l'oreille ait été formée à celle 
tâche. 

On appelle fourniture un jeu d'orgue formé de trois 
à sept tuyaux d etain pour chaque note, qui sont ac- 
cordés dans le rapport des consonnances harmoniques. 
Les tuyaux de chaque note sont à J'octave ou à la quints 
les uns des autres; quelques organicrs y font entrer la 
tierce, surtout ceux d'Italie, qui l'emploient toujours 
dans leur ripieno. Cet assemblage de petits tuyaux ré- 
sonnant avec les grands et confondant leur son de ma- 
nière à no plus produire qu'une sensation indécise, est 
pour l'ensemble une sorte d'assaisonnement, comme te 
cerfeuil, l'estragon, la pimprencile, dont la réunion si' 
nomme aussi fourniliire^ le sont pour la salade, l'addl- 
tioij de la fournituro aux \exïs. îc loaiS. iwMw. V ^Vw 



LE TIMBRE. 241 

jeu. Cet effet donne une idée très-juste de la nature du 
timbre. 

M. Helmholtz a corroboré ces déductions en compo- 
sant artificiellement des timbres divers avec les notes 
qu'ils étaient censés contenir. Voici une expérience 
que tout le monde peut faire sans difficulté. On soulève 
les étouffoirs d'un piano de manière à rendre à toutes 
les cordes leur liberté, et l'on chante fortement sur la 
voyelle A une note quelconque à proximité de la table 
d'harmonie de l'instrument. Le résonnement des cordes 
reproduit alors distinctement un A; la ressemblance 
est beaucoup moins franche lorsqu'on ne soulève que 
l'étouffoir de la corde dont on veut donner la note. C'est 
que la voyelle A est caractérisée par un timbre particu- 
lier, qui dépend de certaines notes aiguës ; les cordes 
qui correspondent à ces notes résonnent par communi- 
cation, et leur intervention imprime à l'écho de la voix 
le timbre que celle-ci avait pris en chantant sur TA. 
On peut imiter de la même manière le timbre de la 
clarinette, celui du cor, etc. 

La hauteur d'un son musical est donc toujours celle 
de la note qui domine dans le mélange harmonique, et 
cette note est généralement la plus grave de la série. 
Toutefois l'existence des sons supérieurs n'est pas tout 
à fait sans infiuence sur le jugement que l'on porte de 
la hauteur d'un son complexe ; ils l'aiguisent, lélèvent 
un peu dans l'échelle musicale. C'est pour cette raison 
que des musiciens même très-exercés se trompent par- 
fois d'octave en comparant des notes de timbre diffé- 
rent. 

Nous avons déjà dit plus haut que pour discerner des 
sons d'origine diverse, le jugement de l'oreille ne se 
fonde pas seulemexii sur le timbre, mi\^ ^'^ '^'^âssè 



S4S L'ACOUSTIQUE. 

de certains bruits accessoires. Dans beaucoup de cas, 
ces bruits caractéristiques ne se font entendre qu'aa 
moment où le son prend naissance ou bien lorsqu'il 
s'éteint. 

La manière dont se prépare l'émission du son forme 
un caractère tout aussi tranché que le timbre ; pour la 
Yoix humaine, les bruits qui précèdent l'émission des 
Toyelles sont si bien définis, qu'on les a désignés par 
une série de lettres : ce sont les consonnes explosives 
B, P, D, T, G, K. Elles donnent à la voyelle qui suit on 
précède un caractère particulier qui n'a rieii de com- 
mun avec son timbre. 

La production un peu forcée des sons dans les instru- 
ments de cuivre — ils semblent sortir .par soubresauts 
— ^ fait encore distinguer les cuivres de la flâte, du 
hautbois, de la clarinette, abstraction faite du timbre 
proprement dit. Enfin, la rapidité plus ou moins grande 
avec laquelle le son fondamental et ses harmoniques 
s'éteignent constitue une différence sensible entre les 
cordes à boyau et les cordes métalliques, encore qu'elles 
soient frappées d'une manière identique. Les vibrations 
des premières étant peu soutenues, leur son a quelque 
chose de sec et de vide, ainsi qu'on le remarque dans 
le pizzicato du violon : les vibrations des cordes métal- 
liques persistent plus longtemps, leur son est plein, 
mais moins pénétrant que celui des cordes légères. 

Dans d'autres cas, le son est accompagné de bruits 
pendant toute sa durée. Ainsi, à côté du son des instru- 
ments à vent, on distingue toujours une sorte de siffle- 
ment ou de bruissement produit par le frottement de 
l'air qui se brise sur le biseau de l'embouchure. Le 
grincement des crins de l'archet s'entend toujours plus 
mnoins distinctemenl peudi^wX. ^'^w\wy5. du violon. 



I LE TIMBRE. 243 

f Ce sont des bruits de cette espèce que nous désignons 
I par les lettres F, Y, S, Z, J, L, R. Les deux dernières 
I sont caractérisées par les intermittences que le frémis- 
' cernent de la langue produit dans l'émission de la voix. 
« LU — dit le maître de philosophie à M. Jourdain 
dans le Bourgeois gentilhomme — se prononce en por- 
tant le bout de la langue jusqu'au haut du palais : de 
sorte qu'étant frôlée par Tair qui sort avec force, elle 
lui cède et revient toujours au même endroit, faisant 
une manière de tremblement : R, RA. 

« Jourdain. — R, R, RA. R, R, R, R, R, RA. Cela est 
vrai. Ah! l'habile homme que vous êtes, et que j'ai 
perdu de temps ! R, R, R, RA. 

« Le Maitre de philosophie. — Je vous expliquerai à 
fond toutes ces curiosités. » 

Les voyelles mêmes sont constamment accompagnées 
de petits bruits qui nous aident à les deviner encore 
dans le chuchotement. Ces bruits se font entendre sur- 
tout avec I, U, OU ; s'ils sont plus accentués, l'I devient 
Y, l'OU devient le W anglais. La voix parlée les pro- 
duit plus distinctement que la voix chantée, qui fait 
ressortir, au contraire, le timbre ou la partie musicale 
de la voyelle en l'articulant avec moins de netteté. 
Cette partie musicale se distingue encore à une distance 
où les bruits cessent d'être perçus. Voilà pourquoi les 
consonnes s'entendent moins loin que les voyelles. 
C'est aussi pour la même raison qu'une voix lointaine 
peut être confondue avec le cor anglais. Seules, les con- 
sonnes M et N participent de la nature des voyelles par 
leur mode de formation, où les bruits ne jouent qu'un 
rôle très-secondaire. Si, par un temps calme, on écoute 
au pied d'une montagne des voix qui parlent ù une 
certaine hauteur, on ne comçretvA gwfe^^ ^^^sNx'îi.'è. wv^v^ 



1 

r 



«t L'ACOUSTIQDE. 

qne ceux qui sont formés avec M ou N, comme m 

non. 

Voici maintenant ce qui peut se dire des timbres di- 
Ters : 

En premier lieu, il est toujours possible d'oblenir t 
des sons simples, en renforçant le son fondamental d'un i 
diapason par une boîte de résonnance dont les notes ^ 
supérieures ne concordent pas avec celles du diapason. 
Le timbre des sons simples est très-doux et très-sombre, 
trop peu brillant pour la musique. 

Les sons accompagnés de notes supérieures non har- 
moniques — il y en a de toutes les espèces — ne ren- 
trent pas dans notredéQnition du son musical : on ne 
peut en faire usage en musique que si les notes supé- 
rieures s'évanouissent assez vite pour qu'on puisse les 
négliger et ne tenir compte que de la note principale. 
Dans cette catégorie se 
rangent les verges et 
les plaque»:, les di;ipa- 
sons, les cloclics, li's 
membranes. Les dia- 
pasons ont des iiutrs 
supérieures très - éle- 
vées; on les entend ail 
iiionipiit on on l'rappi-' 
!..■ mi. i)].i(jaM)ii m.»«i: le métal. La preiiiiiTi' 

est située aux environs 
de la douzième du son fondamental. L'oreille SL<{iai't' 
toujoui's ce.s notes aiguës et peu persistantes di; la 
note priiuipale ; elle n'a aucune tendance à les fondii' 
t'nsi.<]nble, coinnie elle fond les éléments liarmonieiix 
d'nii suu ninsii-ui. 
lu JHiiliérc des V\',îca « vttWwt ■^wv W\k '^s^wiivité i],i:i' 




LE TIMBRE. 245 

par le degré de persistance des sons supérieurs. Dans le 
bois, ils s^éteignent beaucoup plus vite que dans les sub- 
stances plus élastiques ; il s*ensuit que s'il fallait abso- 
lument choisir entre le claque-bois etTharmonica-tym- 
panon, dont les éléments sont de petits bâtons de verre 
ou d'acier, on donnerait la préférence au claque-bois. 
Vers 1850, Gusikow donnait encore des concerts sur 
ce dernier instrument, dont l'origine est très-an- 
cienne. 

Le son des cloches ordinaires ne saurait être qualifié 
de son musical ; mais il paraît qu'en façonnant conve- 
nablement les parois, les fondeurs parviennent à rendre 
harmoniques les premières notes supérieures d'une 
cloche, et alors elle possède un timbre satisfaisant. 
C'est ce qui explique l'effet agréable des carillons, qui 
sont surtout répandus dans les villes des Pays-Bas; on 
en compte huit à Amsterdam, dont un composé de qua- 
rante-deux cloches qui forment trois octaves et demie 
(entre ut^ et fa^ ) ; le plus célèbre est celui de Gand. 
Paris va en avoir un à Saint-Germain l'Auxerrois. 

Le son fondamental des cloches s^abaisse quand on 
augmente leur diamètre ou leur poids. La plus grosse 
cloche du monde est celle qui a été fondue à Moscou en 
1736; son poids est de 255,900 kilogrammes; mal- 
heureusement le bord en a été brisé avant qu*on ait pu 
s'en servir. Il y en a encore une autre à Moscou qui 
pèse 111,700 kilogrammes et qui date de 1507. Les 
grands bourdons de nos cathédrales pèsent rarement 
plus de 10,000 kilogrammes ; celui de Notre-Dame de 
Paris, fondu en 1680, pèse 15,000 kilogrammes. 

L'harmonica de Franklin se compose de cloches en 
verre que l'on fait vibrer en promenant les doi^ 
mouillés sur leurs bords ; les sons Ae ç.^V. \\\sXx>KKkM 



LE TIMBKE. 247 

"^^r-^Esquimaux, chez les Patagons, les Hottcntots et les 

>^^y-Zélan(lais. Un pot de terre, un morceau de bois 

ïîi.^,ux^ une calebasse, avec une pe^u d'âne, de crocodile 

de requin, forment les éléments de ces grossières 

.Uet de résonnance. Le tambour de basque et les cas- 

^ ^nettes, dont les peuples du Midi font un si gracieux 

:9fgb pour marquer le rhythme de leurs danses, sont 

origine très-ancienne. Le crotalon des bacchantes 

*est pas autre chose. 

Les cordes et les tuyaux forment la véritable matière 
première des instruments de musique; leur timbre est 
ï,««,,,^;Oiistitué harmoniquement. Une corde homogène, qui 
ribre en totalité, rend le son fondamental et la série 
2» 5, 4... de ses harmoniques ; mais Ton peut aussi la 
|Ure vibrer de manière qu'elle rende seulement un des 
feannoniques en se divisant en des ventres séparés par 
des nœuds. 

Le timbre des cordes varie suivant qu'elles sont pin- 

joées, comme celles de la harpe ; frappées avec un mar- 

- .teau, comme dans le piano ; attaquées avec Tàrchet, 

" comme dans le violon, ou agitées par le vent, comme 

dans la harpe éolienne. 

Dans la construction des pianos, Texpérience de deux 
nècles a conduit à une foule de règles empiriques qui 
ae trouvent aujourd'hui justifiées par la tliéorie. Ainsi 
le marteau frappe au septième ou au neuvième de la 
longueur des cordes moyennes, et le choix de cette 
place a été déterminé par le timbre qui en résulte ; *or 
la théorie fait voir que Ton supprime par cet artifice les 
harmoniques 7 et 9, les premiers qui soient en dis»' 
nance avec le son fondamental. Le temps pendant 
quel le marteau reste en contact avec \^ c^t^^ v 



I 



24S 



L'ACOUSTIQUE. 



également sur le timbre; c'est cette considération qui 
peut guider le choix des marteaux. 

Les cordes à boyau ont des harmoniques très-élevées, 
mais aussi très-peu persistants, ce qui en corrige l'in- 
fluence nuisible. Dans le violon, leur timbre est légère- 
ment modifié par la résonnance de la caisse, dont le 
son propre est d'ordinaire l'wf.. Les premiers harmoni- 
ques sont moins prononcés dans le timbre du violon 
que dans celui du piano ; les harmoniques aigus sont, 
au contraire, plus accentués dans le violon. 

Les tuyaux ouverts se comportent de la même ma- 
nière que Iqs cordes : ils ont un son fondamental dont 
le timbre comprend la série naturelle des notes i , 2, 
3, 4, 5... et on peut faire disparaître le son 
fondamental et n'obtenir qu'un harmo- 
nique en forçant le vent. Dans les tuycnix 
fennés^ les harmoniques d'ordre pair man- 
quent; ils rendent seulement les notes 1» 

JbJB Un tuyau fermé a toujours le même son 
fondamental qu'un tuyau ouvert de longueur 
double ; on peut s'en assurer en enfonçant un 
tiroir au milieu d'un tuyau ouvert (lig.102): 
on le change ainsi en tuyau fermé de lon- 
gueur moitié, mais le son reste toujours le 
même. Enfin, dernière loi qui explique la 
dénomination des registres de l'orgue, la 
hauteur du son fondamental est en raison 
inverse de la lonjîueur destuvaux. Un tuvau 
de seize pieds, ouvert, donne l'octave grave 
du tuyau de huit pieds ouvert, mais il est à l'unisson 
(lu tuyau (le huit pieds fermé ; le tuyau de huit pieds 
ouvevl {'i>l à l'oclave gvîwo Av\ Vwnjôav ^vi. ^^^Vt^^vA'i» 



Fig. 



10-2. 



LE TIMBRE. 249 

ouyerl et à Tunisson du tuyau de quatre pieds bou- 
ché, etc. 

Dans les jeux d'orgue, on emploie autant de tuyaux 
qu'il y a de notes à produire ; chacun ne donne que 
sa note fondamentale. Mais dans les instruments où 
Ton souffle par la bouche, on a recours à divers arti- 
fices pour tirer du même tuyau toutes les notes de la 
gamme. Ainsi, le cor est fait d'un tube de cuivre très- 
long, contourné sur lui-même ; on n'en tire que les 
harmoniques 8, 9, 10,... qui donnent la gamme ac- 
tuelle si on en modifie quelques-uns, ce qui s'obtient 
en introduisant le poing dans le pavillon. Dans le trom- 
bone^ on fait varier la longueur du tuyau par une cou- 
lisse; dans le cornet à piston^ par des tubes supplé- 
mentaires que le jeu des pistons intercale dans le circuit 
total. Dans d'autres instruments, comme la flûte, la 
clarinette, etc., le tuyau sonore est percé de trous que 
les clefs permettent de fermer et d'ouvrir. La colonne 
d'air du tube est forcée de vibrer de manière qu'il y 
ait des ventres en regard des orifices ouverts, et il en 
résulte que ces orifices produisent le même effet que si 
le tuyau était coupé aux endroits où ils sont situés. 
Grâce à ce mécanisme, le musicien a donc dans sa 
main toute une série de tuyaux de longueurs 
différentes, et il peut en tirer les sons les 
plus variés. 

Dans tous les instruments à vent , une 
des parties les plus importantes est Vem- 
bouchure. La plus simple est celle des tuyaux 
à bouche, comme la flûte et la plupart des 
tuyaux d'orgue; elle est représentée par 
le sifflet (fig. 103), qui est une simple em- '^* 
bouchure sans tuyau ; le vent \\eulttaç^eç ^\vc\^\^x: 




de la bouche avec ua^ ImàsÊSÊuttA que fmt pêvÂbm' 
sidérer comme un mélange de sons faiUes. La edoane 
d'dr du tuyra en refifuroe ^€iqttei'*iiat {Mar Yim de 
fésomiaBee éleettfet ce aoQt ka hannraiquèa ^a le 
tuyau |)eatireiidrei' h. vi» r .. i a 

Dans les embmekiarig è âmèk^ U^étsk^msÊa^ 
par un soufflet où par les pouméiia fait d'abéié^ 
ime languette métallique qm 1 interrompt |pénoci|liè' 
ment ; ce trémolo de^la languette donne â^muo^àiaK 
^tbe à% notes parmi* lesquelles 'la oolomfier #aif^ Ai 
toyau frii encore son ehoix'; mais le soti> â*eal pis le 
même que lorsqu'on fait piffler le tuyaîu plar »ue w^ 
boucbure ordmaire. A cette catégorie appaartiéim^ ks 
tuyaux d'orgue à anche, l'orgue expressif, k darinette) 
le hautbois, te basson^^ le eor anglais. • ^ ^ 
f Les lèTrès humaine fonctionnent comme andies 
membraneuses quand on embouché le cor, le trom- 
bone, rophicléide. L'influence de leur disposition et de 
leur tension se réduit à favoriser plutôt tel que tel 
autre harmonique du tube de l'instrument. 

Dans la production de la voix, ce sont les cordes 
vocales qui jouent le râle d'anches membraneuses, 
mais leur mode d'action est tout autre que celui des 
lèvres : elles déterminent directement la hauteur de la 
note sur laquelle on parle ou chante. Dans la clarinette 
ou le cor, la note dépendait toujours du volume d'air 
combiné dans le tuyau sonore ; ici, au contraire, elle 
ne dépend que de la tension de l'anche , c'est-à-dire 
des cordes vocales, et nullement de la masse d'air que 
renferme la cavité buccale ; sa hauteur est donnée uni- 
quement par les vibrations des ligaments. 

Toutefois cette résotvtvawce buccale devient très- 
importante à un autre i^\w\. Ôl^ nw^.^S^a xûs^^^^V. 



LE TIMBRE. 231 

timbre de la voix en y favorisant tel ou tel harmonique. 

C'est là l'origine des voyelles. 

Une voyelle n'est autre chose que le timbre particu- 
lier que prend une note quelconque si la résonnance 
de la bouche renforce, parmi les harmoniques de cette 
note, celui qui se rapproche le plus d'une certaine 
note fixe. Ainsi, par exemple, la voyelle A est pro- 
duite par la résonnance du si^^. Pour articuler un A, 
la bouche se dispose de manière à faire sonner le si^^ 
et quelle que soit alors la note fondamentale du son 
que nous émettons, c'est toujours l'harmonique le plus 
rapproché du si^^ qui sera mis en relief. 

En portant successivement devant la bouche, ouverte 
pour articuler telle voyelle, une série de diapasons de 
plus en plus élevés, on en trouve un qui est particu- 
lièrement renforcé ; sa note est celle qui répond au 
son propre du volume d'air confiné dans la bouche. 
M. Helmhoitz a constaté de cette manière que chaque 
voyelle est caractérisée par une ou par deux notes 
toujours les mêmes; seulement, ces notes spécifiques 
se modifient selon l'accent avec lequel on parle. 

On comprend qu'il doit en être ainsi. La définition 
des voyelles par cinq lettres de l'alphabet est tout à 
fait insuffisante ; le nombre en est pour ainsi dire il- 
limité si l'on veut tenir compte des nuances de la pro- 
nonciation. 11 faudrait en distinguer au moins sept 
principales qui se groupent comme il suit : 




u 



ou 



Dès lorSf si une voyelle est dè&me ^^t ^^waVfc^ 



9M L'ACOUSTIQUE. 

cifique, celle note devra varier avec ridiome auquel on 
emprunte la voyelle. Aussi les notes déterminées par 
M. Helmholtz pour les voyelles allemandes difièrent- 
elles de celles que M. Donders attribue aux mêmes 
voyelles prononcées à la hollandaise, 

Les voyelles A, 0, OU, n*ont toujours qu'une seule 
note spécifique ; mais pour les autres on trouve dew 
sons de plus forte réspnnance ; et cette dufdieité s'ex- 
plique si on réOéchit que la bouche prend alors la 
forme d'une bouteille dont le ventre est le fond de la 
bouche, le goulot étant représenté par la langue et les 
lèvres. Ces deux cavités vibrent séparément. Void les 
notes qui, d'après M. Helmholtz^ répondent aux diffé- 
rentes voyelles prononcées avec Taccent de TAUemagne 
du Nord. 



i 



f 



ou 
A». 



f 



é 






9^1 



A 

W|74 



AI 


E 


I 


E(J 


U 


«0/5 


sihi 


ré^ 


utn^ 


soZg. 


ré^ 


f^ 


f<h 


/•% 


fH 



I 



D'après M. Kœnig, les voyelles OU, 0, A, E, I sont 
caractérisées par les notes «il^,, si^^, si]^^^ si|?5, si^^^ qui 
embrassent ainsi quatre octaves. 

L'intensité des sons partiels d'une voyelle ne dépend 
donc pas du rang qu'ils occupent dans la série harmo- 
nique, mais seulement de leur hauteur absolue ; et c'est 
U ce qui distingue le \\m\)Te Ae^ NQi^^V\ft% de celui des 
instruments de musique. Ytew^w^ ^«s ^-ï^ths^r. >wsfc 



LE TlilBRE. 353 

flûte ; quelle que soit la note qu'elle donne, c'est tou- 
jours Poctave qui résonne en même temps. Mais ni l'on 
chante A sur une note quelconque, on ne peut pas 
prévoir, en général, quel harmonique sera renforcé; 
tantôt ce sera l'octave, tantôt la douzième ou la dix- 
septième ou quelque autre terme de la série harmo- 
nique. Ainsi, quand la note sur laquelle on chante A 
est le si ^,, ce sera l'oclave qui sera enQée, car la note 
spécilique de la voyelle A est l'octave du $![>,. Mais 
si la noie fondamentale est le fa tt, on entendra sur- 




Fig. lOt Vaiellcs abKrtcci 



tout le neuvième harmonique /att^, qui est le plus 
voisin du st^^. Il y là une vague analogie avec le 
violon, où la caisse renforce toutes les notes voisines 
de l'a/„ son propre de la masse 4'a\v e\v\\\\'aiwwia. 



85t L'ACOUSTIQUE. 

M, Eœnîg obtient une image visible du timbre des 
voyelles au moyen de ses flammes, sur lesquelles il fait 
agir directement la voix par un tube de caoutchouc 
muni d'un pavillon (iîg. 104). Elles sont alimentées par 



frrrmrmTrm 



JâkâéLJâdJéêééàJ/^ 

iiét/^ ijJtl/ //^Me uÀÊk 



F'iE. 10.".. Timbre ilci vo%gIIc>. 

un courant de gaz qui traverse une capsule creuse, l'cr- 
niécd'uncùtc par une membrane que la voix fait vibrer. 
Celle nieiiibranc agit sur la (lanime comme un soufllcl 
qui la ferait tour à tour flamber et pâlir. Si les sccou:?- 
« sont trop violentes ot la tlamnrc petite, elle s'éteint; 
eWe résiste, elle s' ctWo tVViWA.^ïv^ avanie nui 



Lt. TIMBRE. 355 

palpite ainsi parait dans le miroir tournant sous la 
tonne d'un ruban dentelé dont l'apparence changeante 
révèle le nombre et la force relative des harmoniques, 




Fig. im;. Apfurril de Komig pour I'uiIth du 



insi que le montre la ligure 105. La ligure 106 rc- 
)résente un assemblage de résonnatcurs combinés avec 
les flammes qui permettent d'observer les harmoniques 
'un son ùoiii la note foiidaiacnV&Vft tAVwt^.Qw^KiS. 



156 . L'ACOUSTIQUE. 

ainsi analyser le timbre de la voix ou d'un instrument 
de musique. 

Après avoir accompli l'analyse des timbres, M. Hdm- 
holtz a songé à les reproduire par voie de synthèse, en 
réunissant les notes que l'analyse y avait décelées. Il 
a fait construire une série harmonique de huit diapa- 
sons qui furent montés entre lei; branches d'un syat^ 
d'électro-aimants, de manière à pouvoir être maintenus 
indéfiniment en vibration par le jeu d'un courant pério- 
dique. En avant de cliaque diapason était disposée une 
boite de résonnance qu'on pouvait fermer plus ou 
moins complètement en appuyant sur les touches d'un 
clavier; la boite fermée, le diapason ne rend, qu'un son 
à peine perceptible, mais ce son devient de plus en plus 
fort à mesure qu'on découvre l'orifice de la boite. Avec 
cet appareil, on produit par exemple un très-distinct 
en faisant résonner fortement le «i|^„ plus faiblement 
si^^, eifa^ . On obtient un A en donnant avec une in- 
tensité modérée «i^,, si^j, /i»^, et avec force «tj^^ et 
ré^. Le diapason fondamental si i^, donne, en résonnant 
seul, un OU très-sombre. 

M. Kœnig a construit le même appareil avec dix dia- 
pasons. Les voyelles se distinguent surtout par le con- 
traste lorsqu'on passe alternativement de l'une à l'autre. 
Toutefois, il faut savoir que pour les voyelles d'un tim- 
bre clair, la ressemblance est en général discutable ; 
une seule fois, nous avons entendu un A très-parfait; 
c'était à laSorbonne, avant la conférence du regrettable 
M. Verdet sur le timbre des sons. 

Comment concevoir la merveilleuse faculté que pos- 
sède roreille de décomposer en vibrations simples des 
sons si complexes? On a vu que les cordes d'un piano 
iffectueni cette dissociaWow àa'a» >ftax\«vwC\Q^vi^^ ^uis- 



LE TIMBRE. 257 

qu*elles répondent à toutes les notes du mélange qui se 
trouvent à leur unisson. Imaginons une série de cordes 
parcourant toute la gamme des notes possibles, et nous 
aurons de quoi reproduire fidèlement toutes les variétés 
de timbres ou de sons composés. 

M. Helmholtz pense qu'il existe dans l'oreille un sys- 
tème de cordes de cette nature. Ce sont les fibres de 
Corti^ dont la membrane intérieure du limaçon se trouve 
tapissée et qui peuvent être considérées comme les ter- 
minaisons du nerf auditif. Le nombre en dépasse trois 
mille : en supposant que chacune de ces fibres réponde 
à une note particulière, il y a là un clavier de trois mille 
cordes, plus que suffisant pour recueillir et recomposer 
tous les sons de la création. Pour chaque octave, il y en 
aurait au moins 400. 

On pourrait, de la même manière, expliquer la per- 
ception des couleurs par l'existence de fibres du nerf 
optique accordées chacune pour une couleur simple. 
C'est là l'hypothèse émise par Thomas Young. On ne 
saurait nier que, grâce à cette théorie ingénieuse, tous 
les phénomènes de la perception des couleurs et des 
sons s'expliquent d'une manière fort naturelle. On com- 
prend maintenant que l'organe de l'ouïe doit fonction- 
ner comme un véritable prisme qui décompose le tim- 
bre en ses éléments, quoique la sensation complexe qui 
arrive au cerveau soit rarement analysée par l'esprit, 
habitué à ne juger que de l'ensemble de ses impres- 
sions. 

Les qualités de timbre les plus agréables à l'oreille 
et qui conviennent à la musique, contiennent, avec une 
intensité modérée, les harmoniques depuis 1 jusqu à 6. 
Comparés aux sons simples, les sons musicaux ont quel- 
que chose de plus riche, de plus tw^^uvVvççlV^ .^ \vs, >^>^ 

w 



i5lS L'ACOUSTIQUE. 

coloré ; ils paraissent d'ailleurs très-suaves tant que les 
notes supérieures plus aiguës ne viennent pas troubler 
rharmonie. C'est à cette catégorie qu'appartiennent les 
sons du piano, ceux des tuyaux d'orgue ouverts, ^ 
aussi les sons de la voix humaine et ceux du cor, s'ils 
ne sont pas forcés. Les flûtes se rapprochent, au con- 
traire, du timbre des sons simples. Avec les sons de 
cette espèce, on ne fait que de la musique griie; il but 
qu'ils soient soutenus par d'autres sons. Un harmo- 
nium composé de diapasons, qui rendent également 
des sons presque simples, ne saurait être agréable 
isolé. 

Les tuyaux d'orgue larges ne renforcent que très-peu 
les harmoniques du sou fondamental et donnent, par 
conséquent, des sons à peu près simples. Cette remar- 
que s'applique surtout aux tuyaux fermés. 

Quand le son ne contient de la série harmonique que 
les termes de rang impair (le son fondamental, la dou- 
zième, etc.), ainsi que cela a lieu pour les tuyaux d'orgue 
étroits et fermés, pour la clarinette, pour les cordes 
frappées au milieu de la longueur, le timbre devient 
creux ; il devient nasillard si le nombi^e des sons supé- 
rieurs augmente. Quand le son fondamental domine, 
le timbre est plein ; il est vide quand le son fondamental 
est comparativement trop faible. Le son d'une corde est 
moins plein lorsqu'on la pince avec les doigts que lors- 
qu'elle est frappée avec un marteau. 

Quand les harmoniques au-dessus de 6 sont très- 
distincts, le son devient déjà strident ou rauque, à cause 
des dissonances auxquelles donnent lieu les notes su- 
périeures de cette région. Toutefois, lorsqu'elles n'ont 
pas trop d'intensité, elles ne nuisent pas à l'effet d'en- 
semble; elles peuvent mèmç^ ewvV\^\v«\î V %lwvw^\ dft 



LE TIMBRE. 259 

Téclat et de la couleur au son d'un instrument. C'est ce 
que Ton constate aisément par les sons de la voix hu- 
maine, du violon, du hautbois, des instruments de 
cuivre. 

Le timbre, élément subtil et changeant dont nous 
venons de faire en quelque sorte Tanatomie, joue un 
rôle capital dans les rapports de la voix avec Tâme. 
C'est le timbre qu'elle a qui rend une voix sympathique, 
persuasive, caressante, ou bien provocatrice, agaçante, 
désagréable. 



XII 



INTCRFÉRCNCCt 



Battements. — Sons résultanbi. — Tonomètres de Schdbler et de KiBiiif. — 

Influence du mouvement de la source. 



Si paradoxe que cela puisse paraître, dans ce chapi- 
tre nous verrons les sons se battre, et, lorsqu'ils sont 
de même force, se détruire et faire place au silence. 
Les phénomènes de la résonnance nous laissaient en- 
trevoir parmi les sons comme des liens de sympathie 
réciproque : les cordes d'un violon accroché au mur 
chantent toutes seules dès qu'on essaye un autre violon 
dans la même chambre ; tout corps sonore héberge, 
en général, une famille de notes pouvant répondre 
d'elles-mêmes à la note anue qui les âoUicite. A présent, 
nous allons étudier la guerre des sons, connaître leurs 
inimitiés et leurs discordes. Nous verrons que tout le 
cortège des harmoniques respectifs se met de la partie 
quand deux sons se livrent bataille; souvent même on 
les entend grommeler seuls quand les deux chefs de 
aie ne se disent rien ; c'est comme dans la guerre des 
Capulet et des Moniagu. 



IKTËHFËRENGES. 261 

On dit que deux notes battent quand leur réunion 
donne lieu à des intermittences ou alternatives pério- 
diques de force et de faiblesse. Le phénomène est bien 
connu pour les tuyaux d'orgue. Lorsqu'on fait résonner 
ensemble deux tuyaux légèrement désaccordés, ils se 
troublent et donnent des battements; le son tantôt 
s enfle, tantôt diminue, et quand les coups de force sont 
très-rapprochés, cela devient un petit vacarme, une 
sorte de roulement prolongé. 

C'est encore Sauveur qui a étudié le premier ce bi- 
zarre phénomène, et il en a tiré immédiatement une 
application des plus importantes. 11 avait conclu de ses 
expériences que le nombre des battements est toujours 
égal à la différence de hauteur des deux notes : pour 
chaque vibration double que Tune fait de moins que 
l'autre, il y a un battement. Dès lors, rien de plus facile 
que de déterminer la hauteur absolue de deux notes 
en comptant leurs battements. Supposons, par exemple, 
que deux tuyaux soient accordés par les notes ut et ré ; 
l'intervalle étant d'un ton majeur, le premier fera tou- 
jours 8 vibrations quand l'autre en fera 9 ; la différence 
étant 1 , il y aura toujours 1 battement pour 8 vibrations 
de l'un et 9 de l'autre. Si maintenant on a compté 
4 battements par seconde, on en conclura que dans une 
seconde le premier tuyau a fait 4 fois 8 et Tautre 4 fois 
9 vibrations, soit 52 et 36, et l'on en connaîtra ainsi la 
hauteur absolue. 

Sauveur voulut répéter ces expériences devant une 
commission de l'Académie. Il les avait déjà fait voir à 
plusieurs musiciens de Paris, et elles avaient toujours 
réussi d'une manière très-heureuse. Il faut que la com- 
mission ait eu le mauvais œil : rien ne voulut marcher. 
tria difScuIté de recommencer Yeii^femwcfe^X^^^^àx^ 



les fe» { 



«or L'ACODSTIODB. 

qu'il Faut pour cela, d'autres oocupatioiu plus prasaui- 

tes de M. Sauveur, dit Fonteaelle, ont été cause qi^oo 

en est demeuré U ; mais od sait qu'en faitd'expérioiaea, 

il ne font pas se décourager aiflémeut et qu'elles oui 

pour ainsi dire leurs caprices, qu'on surmonte avec k 

temps. 

Les commissaires partis, leetufâuirederinrentsaoi 
doute dociles, car Sauveur détermina par ce procédé 
le sou fixe de 100 vibrations, et c'est encore co mojen 
qui sert aujourd'hui aux facteurs d'orgues à meltrcau 
ton les différents jeux,' On observe d'uillcurs les bit 
teœents aussi bien avec des diapasons ou avec tout 
corps sonore, pourvu que les vibrations dui-ent un 
appréciable. 

Quelle est la cause qui produU h phûiomèqe: 
battements? Sauveur l'a déjà entrevue. D'après hii, 
« le son des deox tuyaux ensemble doil avoir (dus de 
force quand leurs vibrations, après .ivoir été quolqut! 
temps séparées, viennent à se réunir et s'accoiiteit à 
frapper l'oreilte d'un même coup, s 

L'explication des battements repose sur les pbéno- 
mèncs i^interférence. On dit que deux vibrations tn- 
terfèrent quand elles se contrarient, quand elles tirent 
la molécule vibrante en deux sens opposés. C'est ici 
le cas de dire : l'union fait la force. Quand deux mou- 
vements vibratoires qui tendent à entraîner la même 
masse concordent, ils s'ajoutent et se renforcent; 
quand ils sont en opposition, ils s'amoindrissent ou 
même s'annulent. C'est pour cette raison que la lu- 
mière en s'ajoutant à la lumière peut produire de 
l'ombre ; c'est ainsi que deux sons en s'fgoutant pw- 
veat produire du silence. 
JVous avons déjà vu commcuX ï» CKiiBça!«sA.\ï& \fiss4r 



INTEIlFEaENCES. W3 

vements vibratoires et commenl cela peut se mettre en 
évidence au moyen d'une courbe. Imaginons deux vi- 
brations identiques qui commencent ensemble d'agir 
au même point : elles ne cesseront de marclier de front, 
et agissant toujours dans le même sens, elles s'ajoute- 
ront à cbaque instant : le résultat sera un mouvement 
de même période, mais beaucoup plus vif, plus éner- 
gique (fîg. 107). Si ces deux mouvements ne rencon- 




Pig. lOe. Opposi 



trent mal, de sorte que l'un tende, par exemple, à 
aire monter le inème point que l'autre fait descendre, 
Is se contrarient sans cesse et, s'ils ont même inlen- 
iité, se neutralisent complètement (fig. 108). Deus 
ions de même hauteur et de même force qui se cen- 
:ontrent ainsi se font taire. On peut constater ce ré- 
lultat surpienant avec deux tuyaux d'orgue fermés, 
ixactement semblables et montés à càté l'un de l'autre 
iur la même soufflerie. Tant qu'on ne fait parler qu'un 
eul des deux, H résonne vi(ço\iTen¥«mCTS.',V%^aA.-w 



^tt* 



L'ACOUSTIQUE. 
parler ensemble, il n'y a presque plus de son, etcï- 
pendant ils vil)reiit, on peut s'en assurer en approchant 
une barbe de pbime de la lèvre de l'emboucburc oii j 
vient se briser le courant d'air ; mais ils vibrent a 
opposition. Quand le jet d'air se précipite dans l'u< 
pour y produire une compression, il se fait une rwé- ' 
faction dans le tuyau voisin, et réciproquement; l'fiir 
ambiant est donc sollicité par deux actions couslani- 
ment contraires, et comme il n'y a pas de raison pour 
qu'il obéisï^e plutôt à l'une qu'à l'autre, il reste en 
repos : le son ne parvient pas à naître. 

Voici comment ce fait peut être mis en éyidence : On 
fait communiquer les deux tuyaux avec deux flammes 
de Kœnig disposées de telle manière que la pointe de 
l'une dépasse un petit miroir lise qui en caclie la base, 
mais qui montre par réflexion la base de l'autre flamme. 
Cela produit l'illusion d'une flamme unique. Si s 
tenant on rejtarde ceile image liybride dans le i; 
tournant jiendant qu'on fait parler les deux tuyai 



, V^ Vr^ ' 






Fig. 109. lolerf^enn. 



pointe se sépare de la base |tîg. 109) : ce qui prouve 
que les deux flammes brillent alternativement, et que 
l'une est aspirée quand l'autre est chassée en avant. Si 
les deux tuyaux agissent sur ta même flamme, l'efTet 
est nul, et la flamme reste immobile. 

Deux vibrations également rapides se renforcent 
donc ou bien s'alTaiblissent, selon la manière dont elles 
se combinent, mais \e mèmeftKeV'ç«"t%\*»«tysà\\fc\|«i- 



I iNTE;ni''ËitiiN'CES. ses. 

I daiit toute ia durée du mouvement commun. Il n'en 
J estpius de même si elles ont des périodes légèrement 
I dJRerentes. Dans ce cas, si l'une est d'abord en re- 
1 tard, elle finira par rattraper l'autre, la dépassera, res- 
I lera quelque temps en avance, puis retardera de nou- 
I feau, et ainsi de suite. Les rencontres se feront de 
I toutes tes manières possibles, il y aura tantôt renfor- 
f Km«it, tantôt défaillance ; les deux notes offriront des 
alternatives d'éclat et d'extinction plus ou moins com- 
plète. Si l'une fait, je suppose, exactement 9 vibra- 
tions pendant que l'autre en fait S, et si les deux 
mouvements sont à leur ongine en opposition, ils com- 
menceront par s'amoindrir mutuellemcut ; puis l'un 
prenant de l'avance, après 8 vibrations simples accom- 
plies d'un côté et 9 de l'autre, tes mouvements se trou- 



Fig. 110. BalLenifnls. 

veront d'accord (fig. HO) et se renforceront; ensuite, 
après S et 9 autres vibrations simples, ils seront en. 
core en opposition et s'affaibliront comme à l'origine. 
Dans l'intervalle de 8 vibrations doubles d'une part ou 
de 9 vibrations de l'autre, il y aura toujours uu coup 
de force ou un bnttement. Il y en aura un chaque fois 
que la note la plus rapide aura gagné sur l'autre une 
vibration double (aller et retour). 

On peut rendre visible \e Y>\véuo'«\ft'ft'i ^"^ï vjw*.\««xi 



466 L-ACOIISTIOI'E. 

manières. Le plionautographe, en écrivant OdèleDWll 
les vibrations de l'air, en révèle aussi l'inlensiié «ban- 
géante s'il y a eu des battements. Pour obtenir un : 
blable tracé avec deux diapasons légèrement dÛMfr 
cordés, on n'a qu'à coller sur l'un une plaque de vcrrf 
noirci et sur l'autre une pointe flexible ; on les fsil 




vibrer parallèlement, et ou déplace l'un de manière 
que la pointe trace un sillon sur l'antre. La courbe 
tremblée qui se dessine alors offre des l'utitlementï 
autant de fois que l'un des deux diapasons a ga<!nésur 
l'autre une vibration complète. La figure ii'2 montre 
<lcux tracés obtenus de cette manière avec deux notes 
qui étaient d'abord dans le rapport de 24 : 25, ensuite 
dans celui de 80 : 81 . Les flammes de Kœnig fournis- 
aent un troisième moyen d'observer les battements '. 
La perception physiologique des battements semble, 
à première vue, inconciliable avec l'hypothèse d'après 
laquelle l'oreille sépare toujours les notes de hauteur 
inégale. Si les deux sons n'agissent pas sur la même 
libre, comment peuvent-ils combiner leurs vibrations 
dans l'appareil auditif 7 La réponse est très-simple. Il ne 

' Vfiy. sur CCS milliodes ■. l'Uto, A['[iarale der ALuttUt. Tienne. 



INTERFÉRENCES. 367 

S oublier que les fibres nerveuses, comme tous 
ps élasliques, sont encore influencées, quoique à 
indre degré, par les vibra- 
eu éloignées de leur unis- 
; sorte que la sphère d'ac- 
1 deux sons très- voisins 
sur tout un large Faisceau 
es, au lieu de n'embrasser 
ux fibres déterminées. On 
dmettre qu'une note qui 
n demi-ton plus élevée ou 
isse que la note d'une fibre 
I, la fait résonner dix fois 
qu'une note qui est à l'u- 

issez sensible. On voit, 
I cela , que l'effet d'en- 

de deux notes voisines qui 
; doit se manifester dans 

les fibres intermédiaires, 

l'oreille doit en être affec- 

fsiquenient. 

id les coups de force se 

ml avec rapidilé, l'effet 

ttements devient trcs-dés- 

le; cela ressemble à une r 

ée,ou au grincement d'une 

r du bois. Le déplaisir est 

jomble quand il y a de 30 **■*» W:8i 

ittements par seconde ; au * 

devient difficile pour l'oreille de les séparer, et 
tssion n'est plus si forte. M. Helmhoitz affirme 
■>u distinguer jusqu'à 13îbat.lftmfti\\»»\».WM«sîÀ 



L'ACOUSyiQUE. 

(entre le m ^ et Vut^)^ sans pouvoir les compter, bien 
entendu. Comme le son le plus grave que ToreiUe 
puisse encore percevoir comprend environ 30 vibra- 
tions doubles, on voit qu'il est possible d'entendre des 
battements au moins quatre fois plus rapides que les 
vibrations des notes les plus basses. 

Cette observation contredit l'opinion commune d'après 
laquelle les battements très-rapides sont perçus par l'o- 
reille comme une note très-grave. Ce qui a donné liea 
à cette hypothèse, c^est que deux notes qui résonnent 
fortement ensemble engendrent une troisième note, ap- 
pelée son résultant, qui s'exprime simplement par la 
différence des deux notes primitives, ou, ce qui revient 
au même, par le nombre des battements que produit le 
concours de ces notes. 

Les sons résultants étaient connus avant d'être ex- 
pliqués. L'organiste allemand Serge en parle dans un 
ouvrage publié en 1745. Le célèbre violoniste Tartioi 
s'efforça, neuf ans plus tard, d'en faire la base d'un 
nouveau système musical ; mais son livre est si obscur 
que d'Alembert lui-même déclare n'y avoir rien com- 
pris. 

On a cru longtemps que les sons résultants devaient 
être toujours plus graves que les sons générateurs; 
mais M. Helmholtz a prévu, par la théorie, des sons 
résultants qui sont, au contraire, plus aigus, et Texpé- 
rience a confirmé sa prévision. Si personne ne les are- 
marqués avant M. Helmholtz, c'est qu'ils sont beaucoup 
plus faibles que les sons graves de même origine. 

Il y a donc deux espèces de sons résultants : 1^ les 
sons différentiels, dont la hauteur est donnée par la 
différence des nombres de vibrations des sons primai- 
res ; ce sont les plus tacWes ^ ofe^wscï \ ^ V& ^o\\:^ A* Oi^d- 



lî^TERFÊREMGES. 269 

dition^ dont la hauteur se trouve en faisant la somme 
des vibrations des sons primitifs. Supposons, par exem- 
ple, qu'on fasse parler ensemble deux tuyaux donnant 
la quinte. Leurs notes seront dans le rapport de 2 : 3, 
et la différence étant Tunité, le son différentiel sera 1, 
Toctave au-dessous du plus grave des deux sons. La 
somme de 2 et 3 est 5 ; on pourra donc aussi enten- 
dre une note qui sera à la sixte majeure du plus aigu 
des deux sons. Avec ut^ et «o/,, on obtiendra ainsi uti et 
mis; niais ce ne sera guère que Vuti qui sera perceptible, 
à moins que les deux sons générateurs ne soient très- 
iotenses. Si, comme cela arrive presque toujours, ces 
derniers sont encore accompagnés d'harmoniques, les 
rencontres croisées entre les harmoniques respectifs, les 
notes fondamentales et le premier son résultant peuvent 
lonner naissance à de nouveaux sons résultants, mais 
zes su perf état ions sont déjà difficiles à observer, à cause 
le leur peu d'intensité. Voici les sons résultants d'une 
tierce majeure : les blanches représentent les sons pri- 
maires ; la noire, le premier son difTérentiel ; les cro- 
ches, les produits croisés ; la note barrée, le son d'ad- 
dition. Pour entendre les sons résultants, il suffit de 



i 



^ 



3 

Torcer les notes génératrices. La théorie montre que ce 
phénomène doit être considéré comme une sorte de 
oerturbation du mouvement vibratoire, qui devient trop 
iriolent pour suivre encore les lois simples des vibrations 
ilastiques ordinaires. C'est par su\l^ i'vrn^ ^^^Vxv^V^'îiiissQL 



L'ACOUSTIQUE. 
analogue que les diapasons^et les cloches font entendra 
l'octave aiguë de leur son fondameatul toutes les fois 
qu'on les fait vibrer avec véhémence, tandis que, vi- 
brant avec une force modérée, ils ne produisent que àe/^ 
sous supérieurs non harmoniques '. 

Les sons résultants et les battements sont d'un grand 
secours lorsqu'il s'agit d'aecoriier des tuyaus d'orgues, 
-des diapasons, etc.; ils indiquent avec une très-grande 
précision la différence de hiiuteup de deux notes. M. Ko;- 
nig a pu ainsi accorder encore un ut, de 52,000 vibra- 
tions et un rt'gde 56,000 par leur son différentiel, qui 
est l'utt de 4,000 vibrations. Il espère mi'me qu'il par- 
viendra à accorder par leurs sons résultants des diapa- 
sons dont les notes fondamentales sont trop aiguës 
pour être encore entendues. 

C'est un manufacturier eu soieries de Créfeld, Henri 
Scheibler, qui a surtout contribué à vulgariser l'emploi 
des battements comme moyen d'nccorder les instruments 
de musique. Cet homme, qui s'était épris d'une belle 
passion pour l'acoustique, ne consacra pas moins de 
vingt-cinq ans à perfectionner sa méthode. Il construi- 
sit avec une 4)eine inouïe, vu l'état de la science à cette 
époque, une série de 56 diapasons échelonnés du ta de 
440 au la de 880, embrassant par conséquent une oc- 
tave entière par degrés de 8 vibrations simples. Cette 
série de diapasons formait ce qu'il appelait un tono- 
mètre. Pris deux à deux, dans l'ordre oîi ils se succè- 
dent, ils donnent toujours 4 battements par seconde, 
qu'il est facile de compter avec le secours d'une mon- 

' Il Tout encore menlloniicr ici les joni de variation, qui prenneM 
nuissimcc lors:|iriiii son éprouve des vacinliuns périodiques d'inlcnsil^. 
L'est le pliénoménc îles bnttcmenls idourné : le son inlermiUent prortiiH 
de'ixaons Iiies, l'un plus aigu, VBu*,niî\ii*%twitoiie\». çrewiiCT, 



IMTERFER£N€ES. 271 

ire. On les accorde ainsi par différences, et quand on 
arrive au dernier, il faut qu'il soit exactement à l'oc- 
tave du premier. Si ce résultat a été atteint, on est sur 
que le premier fait 440, le dernier 880 vibrations par 
seconde, car les battements prouvent qu'ils diffèrent 
de 440, et on sait, d'un autre côté, qu'ils sont entre 
eux comme 1 : 2. On comprend que ces 56 diapasons, 
dont les notes sont parfaitement déterminées, permet- 
tent d'accorder, avec une précision mathématique, une 
note quelconque comprise entre les limites de leur 
octave : on n'a qu'à compter les battements que cette 
note donne avec le diapason dont elle se rapproche le 
plus. Si la note est dans une autre octave^ on la déter- 
mine ipav procuration^ au moyen d'un diapason supplé- 
mentaire qui forme avec elle une octave juste. 

Scheibler publia sa méthode en 1834. 11 vint aussi à 
Paris pour y faire la propagande du tonomctre, mais la 
difficulté de lé construire effraya les facteurs. M. Wol- 
fel seul eut la patience de s'en construire un pour mieux 
accorder ses pianos. Aujourd'hui, grâce au progrès de 
la science, cette précieuse méthode est à la portée de 
tout le monde. M. Kœnig construit couramment des 
tonomètres de 65 diapasons qui embrassent l'octave 
moyenne du piano (de 512 à 1024 vibrations simples). 
Il est même allé plus loin : il a rempli de la même ma- 
nière toute l'échelle des sons perceptibles. Dans les oc- 
taves basses, on abrège en se servant de grands diapa- 
sons, munis de poids mobiles que l'on fait glisser sur 
les branches; suivant la position des poids, le diapason 
donne des notes différentes. Dans les octaves irès-élc- 
vées, M. Kœnig remplace les diapasons par des tiges 
droites. Le tonomùtre qu'il a exposé en 1867 se com- 
pose : 1* de huit grands diapasons \^owc V^"^ ç^^wj. ^v^x.^.- 



m L'ACOUSTIJQUS. 

yes comprises entre Vat de 32 et celui de 512 vibrations 
simples; chacun de ces diapasons p€|ut donner 32. oo- 
tes, de sorte qu'ils représentent ensemble une échelle 
de 256 notes; 2^ l'octave moyenne (512-1024) est re- 
présentée par 61, Toctave suivante'( 1024-2048) par 86, 
celle qui suit (2048-4096) par/172 diapasons, ceqû 
fait un total de 330 fourchettes d*acier ; 3^ à partir àb 
Vut^ de 4096 vibrations, M. Kœnig emploie des tiges 
d'acier, dont la longueur est inversement proportion* 
nclle à la hauteur de leur son longitudinal ; 96 tiges 
représentent ainsi les quatre octaves depuis ut, jusqu'à 
ti^io (64,000). La dernière octave est déjà en dehors des 
limites des sons perceptibles ; peu de personnes entes- 
dent encore le «o/, d'environ 48,000 vibrations. H.Kœ-. 
nig obtient cette note aussi par les vibrations traa8Te^ 
sales d'une tige d'environ 0*^,08. 

Deux diapasons accordés de manière qu'ils diffèrent 
exactement de deux vibrations simples, battent la se- 
conde absolument comme un pendule ; s'ils diffèrent 
davantage, ils peuvent battre une fraction de seconde 
aussi petite qu'on le voudra. En comptant les batte- 
ments, on peut aussivérifier un phénomène très-curieui: 
l'influence d'un mouvement de translation de la source 
sonore sur la hauteur de la note qu'elle donne'. M. Keenig 
prend deux diapasons u^^ donnant 4 battements par se- 
conde lorsqu^on les laisse en place ; il s'éloigne d'envi- 
ron 0"\65 du plus aigu , et promène l'autre entre 
celui-ci et l'oreille, les yeux toujours fixés sur un 
pendule; quand le mouvement de va-et-vient est 
rhythmé sur le balancier, l'observateur n'entend plus 
que 5 battements dans la seconde où le diapason grave 
s'approche de l'oreille, mais en revanche 5 pendant qu'il 
s'éloigne. Il s'ensuiV (\ue\e l^xv Ôl«> ç.^ AV*^%squ s'élève 



I INTERFERENCES. 27S 

d'une vibration double pendant la première seconde et 
s'abaisse d'autant pendant la seconde suivante. C'est 
qn'en effet, en le rapprochant de O^.ÔS, qui repré- 
sentent sa longueur d'onde, on doit gagner une vibra- 
tion complète, et en perdre une en l'éloignant d'au- 
tant, ab-solument comme les navigateurs qui font le 
tour du monde perdent bu gagnent un jour, suivant 
qu'ils vont avec ou contre le soleil (d'orient en occident 
ou d'occident en orient). 

Les cheininn de fer offrent souvent l'occasion d'obser- 
ver des phénomènes de ce genre. Ainsi, le sifRet du 
mécanicien parait plus aigu quand le train arrive que 
lorsqu'il s'éloigne. En prenant 50 kilomètres à l'heure 
pour la vitesse moyenne des convois, on trouve qu'ils 
font 14 mètres par seconde, ce qui est ^ de la vitesse 
du son; dès lors, le calcul montre que, pour un obser- 




Fig. 113. InDueDce 



valeur placé sur la voie, la noie du sifUet sera altérée 
clans le rapport de 24 à 25 ; il l'estimera Irop haute ou 
trop basae d'an demi-ton, sc^on \a »S\tc,\LV.wvt \\i.\îv'a>4.- 



274 L'ACOUSTIQUE. 

veroent. Si c'est un la pour le mécanicien, ce sera pour 
les cantonniers un la # à l'approche du train, et un la b 
après son passage. Un sifflet immobile produira le 
même eiïet pour les voyageurs ; ils n'entendront la note 
juste qu'au moment où ils passent. Si l'observateur et 
le sifflet sont emportés dans deux directions opposées, 
reiïet sera encore plus sensible ; la note semblera tour 
à tour trop haute ou trop basse d*un Ion entier ; au 
moment où les trains se rencontrent, elle sautera d une 
tierce majeure. 

M. Buys-Ballot a fait, en 1845, quelques expé- 
riences de ce genre sur le chemin de fer d'Utrechlà 
Maarsen. On avait placé, à des distances d'un kilo- 
mètre, trois groupes de musiciens le plus près possible 
de la voie. Un musicien, juché sur la locomotive, son- 
nait de la trompette, d'abord en partant d'Utrecht, 
puis entre les trois groupes, et enfin après les avoir dé- 
passés ; les autres estimaient la hauteur variable de la 
note ; elle était toujours conforme à la théorie. M. Scott 
Russe! a fait remarquer que la réflexion des bruits 
d'un convoi sur les piles d'un pont doit produire le 
même effet que le mouvement opposé de deux trains, 
et que les notes qui reviennent altérées d'un ton en- 
tier se mêlent alors désagréablement à celles qui sont 
entendues directement. Pour obtenir, par la réflexion, 
des tierces mineures, il faudrait faire marcher les con- 
vois avec une vitesse de 122 kilomètres à l'heure. 

Un savant allemand, le bergrath Doppler, a cherché 
dans ces faits, en les appliquant aux vibrations lumi- 
neuses, Texplicaiion des couleurs des étoiles. 



XIII 



LA VOIX 



Organe de la voix. — Basse, téoor, alto, soprano. — Les voix célèbres. — Chant 
et voix parlée. — Voyelles et consonnes. — Ventriloques. 

Les sublimes effets de la voix humaine sont pro- 
duits par un bien chétif organe. Quelques cartilages, 
une paire de ligaments, un faisceau de muscles, voilà 
ce qui a suffi à la nature pour ciéer un instrument 
musical dont aucune invention humaine n'a pu atteindre 
la suavité ni le pouvoir émouvant. 

L'appareil vocal de l'homme est une anche à deux 
lèvres. Il se compose du larynx^ tube cartilagineux 
qui forme en avant du cou la pomme (VAdam ; des 
cordes txfcales^ ligaments flexibles qui ne laissent entre 
eux qu'une fente étroite, Vouverture de la glotte ; des 
poumons, qui fournissent le vent, et des cavités de la 
bouche, où la voix brute est façonnée en voyelles et 
consonnes. 

Les cordes vocales peuvent s'écarter ou se rappro- 
cher, se relâcher ou se tendre, par l'action de muscles 
spéciaux; le courant d'air qui \\eul di^^ ^xmxvwv^Vî 



SÏ6 LMCOISTIQUE. 

fait vibrer, et c'est leur frémissement qui produit le 
son. Grâce au laryngoscope, appareil ingénîcus qui 
permet d'éclairer l'intérieur de la bouche et d'y obser- 
ver la formation de la voix, on connaît aujourd'hui 
d'une manière très-précise les difTêrentes conditions 
qui la niodilient. La voix de poitrine exige, pour se 
produire, un affrontement très-complet, un contact 
très-intime des lèvres de la glotte. Les rubans vocaux 
vibrent alors dans toute leur étendue. Dans le registre 
de fausset, ils ne vibrent que par leur bord libre, et 
la glotte s'ouvre de manière à former une fente ellip- 
tique. Des clianteurs esercés peuvent faire entendre 
alternativement la même note en voix de poitrine et eu 
voix de fausset sans respirer. Mais l'on doit classer 
parmi les miracles ce que Garcia raconte de paysans 
russes qu'il aurait entendus chanter simultanément un 
air en voix de poitrine et un air en voix de lète. 

Si les voix de femmes isont plus ai;j;nes qnt'. les voix 
d'hommes, c'est à cause des dimensions plus petites du 
laryni. Chez l'homme, l'ouverture de la glotte est à 
peu près deux fois plus grande que chez la femme ou 
chez les enfants. A l'âge de la puberté, ta glotte de 
l'homme se développe brusquement et sa voix descend 
généralement d'une octave : on dit alors qu'elle mue. 
Chez les castrats ce changement n'a point lieu, leur 
voix reste enfantine; c*est une voix abstraite, sans sexe. 
Dans <|uelques cas très-rares, le même arrêt de dévelop- 
pement se rencontre chez l'homme à l'état normal. 
Ainsi, M. Dupart, âgé de vingt-neuf ans et père de deux 
enfants, a une voix de soprano très-remarquable ; elle 
est souvent utilisée dans les messes solennelles qui se 
chantent h Paris. 
On divise les voix lYWtnmts tw V>as«ft ti'a\asiMA(S\%, 



LA VOIX. 



277 



baryton, ténor et premier ténm* ou haute-contre, voix 
devenue aujourd'hui fort rare. Les voix de femme sont : 
le contralto, le mezzo-soprano et le soprano. Voici la 
portée qu'on assigne ordinairement à ces différentes 
Yoix. 



^^^^i 




fa—ré^ ia—fa^ 
Basse. Baryton. 



Ténor. Contralto. Mezzo-soprano. SopraiM. 
(1" ténor.) 



Ce tableau montre que les voix ordinaires n'em- 
brassent pas deux octaves pleines. La différence entre 
le /a inférieur de la basse (174 vibrations simples) et 
le sol supérieur du soprano (1,566 vibrations) est d'un 
peu plus de trois octaves. Mais ces limites se reculent 
pour quelques voix exceptionnelles. D'une part, on cite 
des basses qui atteignaient le /a-^ de 87 vibrations, 



3; 



I 



qui appartient à la première octave du piano, et de 
l'autre des voix de castrats, d'enfants et de femmes, 
qui sont allées jusqu'au /a^, ou fa suraigu, de 2,784 
vibrations (de l'avant-dernière octave du piano), et 
même encore au delà. 

La voix du maître de chapelle danois Gaspard Forster 
s'étendait sur trois octaves (de Itt-^ «i la ^ ^^\fc \<^ \^ 



S7S 



L'ACOUSTIQUE. 



I 



plu8 jeune des sœurs Sessi embrassait trois ocUves «t * 
demie (de ut^ à /!»,). ' 




Fonter. 



SeMl. 



FarftwIlL 




La Caialani commandait également trois octaves et 
demie, comme aussi le célèbre castrat Farinelli, qui 
allait du la au ré^. 

A la cour de Bavière, il y avait, au seizième siède, 
du temps d*Orlaiido di Lasso, trois basses, les frères 
Fischer et un nommé Grasser, qui atteignait le fê-i 1 
de treize pieds, d'après ce que dit Prœtorius dans son 
Syntagma musicum. 

Mademoiselle Nilsson et Carlotta Patti atteignent des 
hauteurs inouïes. Lorsqu'elle joue la reine de la nuit, 
dans la Flùle enchantée^ mademoiselle Nilsson monte 
au fa suraigu (/a^). Mais la voix la plus élevée qui peut- 
élre ait jamais existé parait avoir été celle de Lucrezia 
Ajugari, dite la Basiar délia que Mozart a entendue à 
Parme en 1770. Dans une lettre adressée à sa sœur 
Marianne, il transcrit plusieurs passages que cette can- 
tatrice a chantés devant lui ; nous n'en citerons cpie 
le dernier, qui se termine par un ut ^\ 



' trouve là des InWes sw^ \fe té. ^\. «sX^^'^ ^w^^sccL^ais 



LA VOIX. 279 



%\ vraisemblables. Le père de Mozart ajoute, à ce 
pos, que la Bastardella chantait ces passages avec 
peu moins de force que les notes plus basses, mais 
t sa voix restait pure comme une flûte. Elle descen- 
l facilement jusqu'au «o/,. Elle n*était ni belle, ni 
le, avait quelquefois les yeux hagards comme les 
sonnes sujettes aux attaques de nerfs, et boitait. Sa 
utation était d'ailleurs excellente. 
)ulibicheff cite, comme pendant, une madame Decker 
, en 1823, étonna Saint-Pétersbourg par ses rou- 
es. Euhlau a écrit pour cette cantatrice la partie 
délaïde dans son opéra le Château des brigands^ le 
nd air du troisième acte va jusqu'au la^. A une re- 
sentation, au moment de donner cette note dange- 
ise, le chef d'orchestre la regarda fixement, ce qui 
Toubla tellement qu'elle donna un ut^. 
Le timbre de la voix dépend, comme nous l'avons 
à expliqué, du nombre et de la force de ses harmo- 
|ues. 

9n appelle une voix juste celle qui passe sans hési- 
ion d'une note à l'autre; Texercice y est pour beau- 
ip, mais il faut aussi de la mémoire musicale. La 
jteur absolue des notes se grave difficilement dans 
mémoire. Toutefois les musiciens de profession fi- 
sent par savoir leur la ; j'en connais un qui donne 
là voix, sans se tromper, une note quelconque 
i lui est désignée par son nom. 
La différence entre la voix de chant et la voix parlée 
isiste en ce que la première saute d'intervalle en in- 
valle, tandis que la voix du discours s'élève et s'a- 
isse par un mouvement continu. La voix chantante 
soutient sur le même ton, comme sur un point indi- 
ible, ce qui n'arrive pas daus la «»v«vçW ^t^wvasÂî 



ne L ACOCSTIQCE. 

Uon, où les »ofu ne sont pas assez uns pour être appré- 
âf» au point de Tue musical. 

La déclamation tragique des anciens se rapprochait 
du chant et .s'accompagnait par la lyre. On en retrouve 
comme un souvenir dans le débit traînant des déclama- 
teurs italiens et dans la récitation monotone de la li- 
turgie romaine. Au reste, le récitatif forme encore dans 
la musique moderne comme un trait d'union entre le 
chant et la parole. On peut même dire que jusqu'à un 
certain point U chant mélodieux n*est qu'une imitation 
artificielle, idéalisée, des accents de la voix parlante ou 
passionnée. On crie et l'on se plaint sans chanter, mais 
on imite en chantant les cris et les plaintes. 

Avec un peu d'attention, on remarque aussi dans le 
discours ordinaire des vestiges d'une intonation musi- 
cale. Les syllabes accentuées, les chutes de phrases, 
sont marquées par un changement de ton. D'après 
M. [Jelnilioltz, dans une phrase afïîrmative allemande, 
le point absolu est indiqué par une chute qui est d'une 
(juarle, et le point d'interrogation monte d'une quinte. 
On trouve des indications de ce «i^enre dans les formules 
du cbaiïl grégorien. 



o' 




i^mm^^E^^^m 



Sic oan - la coni • ma , sic du - o pun - cla : 
sic vo- n> puihium , Sic signum in-ter-ro- ca- ïî- o- nis? 

Uans la languo ohinoiso. Fintonation est même un 
êlênif^nl ii ranimai ioal . 
(•n»lrv s'amusiVu ;v wvAv^t a\\s^\ ^\.^M\«ft»ç\V ^^^'t \jos- 



LA VOIX. 281 

sible le bonjour^ monsieur deions ses visiteurs. « Si l'on 
pouvait traduire ainsi en sons musicaux les phrases les 
plus chantantes, les interrogations, les menaces, les 
sens ironiques, etc., dit M. Ch. Beauquier, on trouve- 
rait chez les individus d'une même nation une façon à 
peu près semblable d'accentuer les phrases. Pour une 
autre nation ce chant diiTérerait. L'Italien module beau- 
coup, l'Allemand un peu moins, l'Anglais pas du tout. . . » 
Les sons de la voix articulée se divisent en voyelles 
et consonnes. Les voyelles sont des timbres différents, 
dus à la résonnance de la bouche, les consonnes ne sont 
guère autre chose que des bruits, ainsi que nous l'avons 
déjà expliqué. Les lèvres, la langue, le palais, les dents 
prennent part à la production de ces bruissements ca- 
ractéristiques qui constituent pour ainsi dire la char- 
pente de la parole, et que les Orientaux écrivent seuls, 
en négligeant les voyelles. L'enfant s'en tient aux 
voyelles, il n'apprend que peu à peu à prononcer les 
consonnes, et en même temps son langage devient plus 
humain. 

On a cru remarquer que les lettres de l'alphabet 
avaient certains caractères psychologiques. Écoutons 
par exemple le P. Mersenne. 

« Les voyelles a et o, dit-il, sont propres pour signifier 
ce qui est grand et plein, et parce que a se prononce 
avec une grande ouverture de la bouche, elle signifie 
les choses ouvertes et les actions dont on use pour ou- 
vrir et pour commencer quelque ouvrage. De là vient 
que Virgile a commencé son Enéide par cette diction : 
Arma. 

a La voyelle e signifie les choses déliées et subtiles,- et 
est propre pour exprimer le deuil et la douleur. 

Ueu quœ me miserum tellus, qu» me »ç^\xw^^^?is>vv\\\ 



'itH L'ACOrSTIQUK. 

« La voyelle i signifie les choses très-ininces et trcfr 1 
petites. De là vient la diction minime. Elle e^Eprimc j 
aussi ce qui est pénétrant. 

« sert pour exprimer les grandes [tassions : OfiA- 1 
tria ! o lempora ! o mores ! et pour représenter les chosa I 
qui sont rondes, parce que la bouche se forme en rond I 
lorsqu'elle la prononce. 

« l] est affectée ans choses oliscures et cachées, i 

Il classe ensuite les consonnes. Il veut qu'une /"in- 1 
dique un souffle, un vent {flalm) ; s et x les chosH 
âpres [stridor) ; r les choses rodes, dures, raboteuses, 
les actions véhémentes et impétueuses, ce qui lui a valu ' 
le nom de lettre canine; m tout ce qui est gpnil 
(maynus, monstre) ; it des choses noires, cachées, ob- 
scures ; et ainsi de suite. r 

Boistc, ions ses Obsei-vatiotis sur ta prûiwnciation,iA | 
que Ve est comme l'âme de la langue française ; c'est U I 
lettre la plus mobile, la plus changeante, celle dont te I 
son a le plus de nunnees. D'après le même auteur " le | 
duubicmcnt de l'/'annoncc tour ù tour l'aigreur ou U 
prétention, le pédantisme ou la satire : il pique, il ré- 
gente, il domine, il mord avec eile dans en effet, qu'ai- 
je affaire, ceia suffit, c est af freux. \\ faut être né Fran- 
çais, et instruit, pour jouer avec art et justesse de ce' 
instrument non moins délicat que \'e, le c, etc. : il fait 
le désespoir de ceux qui soutiennent, contre le bon sens 
cl le tact, que la Prononciation est hgurablG. » 

Les mots formés par onomatopée imitent plus ou 
moins bien des bruits naturels : glouglou, cliquetis, 
froufrou, bourdonnement, etc. Les grands poètes ne 
négligent pas les caractères des voyelles et consonnes, 
et en tirent des effets souvent très-heureui. On coonait 
le vers de Virgile, dans Ve(\'ae.V Ve, bnûl des sabols 



tA VOIX. 283 

d'un cheval est rendu par une suite de vigoureux dac- 
tyles : 

Qiiadrupedante putrem sonitu quatit ungula campum, 

et ce vers d*Homère : 

Une remarque assez curieuse à faire à l'égard des 
voyelles, c'est que chacune a ses places favorites dans 
Téchellc musicale. D'après M. Helmholtz, les voyelles 
qui conviennent à une note donnée sont d'abord celles 
dont la caractéristique est un peu plus élevée que la note 
en question, ensuite celles dont la caractéristique est 
l'octave ou la douzième de la même note. L'OU, dont la 
caractéristique est /a,, se produit surtout avec facilité 
sur les notes r^,, mi^^ fa^ et fa. L'E aime surtout r^,, 
mi^y fa^j puis encore /a, et si b, à cause de sa caracté- 
ristique /a,. 



^^^^^i 



m 



ÉEË 



OU B 

Cette affinité des voyelles pour de certaines notes 
fixes se constate principalement aux limites des regis- 
tres de fausset ou de poitrine. Une voix de femme, qui 
veut donner une note plus grave que Vut^^ tourne tou- 
jours involontairement à l'O ou à l'OU. Au delà du mi^, 
c'est d'abord l'A qui sort avec le plus de facilité ; en 
dépassant le si^, on tombe dans le domaine de l'I. Ce 
sont là des faits qui intéressent à un haut degré les 
compositeurs et leurs paroliers. 

Jean Mûller et d'autres physiologistes ont étudié 
mécanisme de la voix humaine au \xvq^«v\ 4ft. W^ 



piB» L'ACOUSTIQUE. ^^BHIP^ 

artificiels, fabriqués avec des bandes de caoutchouc que 
l'on llxe à l'extrémité d'un tube et auxquelles des pinces 
permettent de donner une tension variable. En souf- 
flant dans ces appareils, on produit des sons très-sera- 
blaiiles à ceux de la voix. 

Pour imiter les voyelles, la théorie du timbre montre 
qu'il faut renfoncer dans ces sons certaines notes liises. 
C'est ainsi que M. Willis produit artificiellement les 
Toyelles à l'aide d'un sifflet à anche, monté sur un 
tuyau dont ou peut à volonté varier la longueur. A la 
place de ce tuyau on pourrait se servir de résonanleurs 
accordés par les notes caractéristiques des voyelles. 

En ajoutant à ces appareils des membranes suscep- 
tibles de produire les bruits qui caractérisent les cou- 
sonnes, il est possible d'imiter la parole. On connaît 
ces poupées mécaniques qui disent très-hien papa, ma- 
man. A Londres, j'ai vu chez M, Wheatstone une es- 
pèce de cornemuse qui prononce de courtes phrases. 
Werscnue parle d'un or;^ue qui prononçait les vojciles 
et les consonnes. En 1791, van Kempelen moDtrait un 
automate qui parlait, mais des témoignages contem- 
porains ne donnent pas une grande idée de la ressem- 
blance de ces sons artificiels avec ceux de la voix. La 
machine parlante qui fut construite plus tard (1842) 
par un mécanicien de Vienne, nommé Faber, était plus 
parfaite. On peut encore citer la machine parlante de 
Mical(1780) et celle de Kratzenstein (1782?). 

Le jeu d'orgue qu'on appelle la voix humaine n'est 
qu'un registre de tuyaux d'étain très-courts qui (mr- 
nissent un son le plus souvent aigre et criard. 

Chez les oiseaux, l'appareil vocal se trouve placé 
très-bas dans le gosier ; c'est ce qui fait que Cuvier a 
pu couper le cou à un oxïtau. «\wi ?.»]«> Vcraçêcher 



LA VOIX. 285 

de crier. Chez rhomme, une ouverture accidentelle 
du larynx rend la formation de la voix impossible : 
iMagendie connaissait un homme qui était obligé de 
porter toujours une cravate avec un clapet pour bou- 
cher une fuit^ qu'il avait dans le gosier. 

Les ventriloques ne parlent pas autrement que le 
commun des mortels, seulement ils évitent d*ouvrir la 
bouche assez grande pour qu'on puisse les voir parler, 
expirent le moins possible et remuent à peine les lè- 
vres. Leur voix parait alors changée, plus sourde, et 
comme venant de très-loin. Cela ne s'obtient pas sans 
un grand effort de poumons, qui fatigue la poitrine et 
qui oblige les ventriloques à reprendre de temps à autre 
leur voix naturelle ; le dialogue les repose en même 
temps qU*il les aide à tromper les assistants. Ils parlent 
aussi en aspirant, et le son étouffé qu'ils produisent 
ainsi semble avoir traversé des masses sourdes, comme 
les murs et le plancher. Ils complètent l'illusion en 
imitant les inflexions qu'on emploie quand on crie de 
très-loin, et en désignant d'une manière plus ou moins 
ingénieuse le côté où ils veulent que l'on cherche l'ori- 
gine du son. Mais une fois qu'on est familiarisé avec la 
voix d'un ventriloque, on n'est plus trompé par lui ; 
Robertson fit cette expérience avec son domestique, qui 
était un fameux ventriloque^ 

Ce que les ventriloques trouvent en général très- 
facile, c'est d'imiter une voix d'enfant. Ce qu'il y a de 
plus difficile pour eux, c'est de chanter avec une voix 
d'emprunt ; ils y réussissent rarement. 

Cet art libéral était connu de toute antiquité ; les 
sorciers et sorcières le pratiquaient. Parmi les ventri- 
loques célèbres, nous citerons Louis Brabant, valet de 
chambre de François P; Samt-GWX^ ^ \^ \i^^wv ^« 



L-lCOrSTIQFE 
Mengen, Charles, Comk, etc. On nconte sur ce dernier 
une foule d'anecdoles plus ou moins extravagantes. A 
Tours, il fit unjourenfoDceT une boutique fermée dans 
laquelle on entendait gémir une personne qui mourait 
de faini. A Keims, il sema la terreur parmi les habi- 
tants en faisant parler les morts. A ?(e¥ers, un âne dé- 
clara suliilement, avec forc« invectives, qu'il rcfusaitiJR 
porter plus loin son cavalier. Ailleurs, Comte guérit 
des possédés en exorcisant leurs démons, que l'uti eu- 
tcnd s'envoler en hurlant. Dans une église envaliie par 
des rcTolulionn aires qui s'apprêtent â y tout démolir. 
Comte fait parler les statues : cites reprochent aux icu- 
noclastes leur vandalisme, et ceus-ci prennent la fuite, 
affolés de terreur. Un jour, il se sauva ainsi desgrifîei 
des paysans de Fribourg, qui voulaient le brûler comme 
sorcier : il les mit en déroute par une voix de loniiene 
qu'il lit sortir du four vers lequel on le traînait. 

Une autre application de la ventriloquie est révélée 
par cette carte de visite : 

LAUHARD 

tEKTRILOQCl lUtii 
Imite les toii det licliiiui devanl les lOun d'tuiHt. 



XIV 



L'OREILLE 



(hreiUe externe et interne. — Osselets. — Mécanisme de l'aurlition. — Fibres de 
Corti. — Inégalité des deux oreilles. — Jugement de la direction des sons. 



Des deux côtés de la tête la nature a placé les oreilles, 
chargées de recevoir et d'introduire en présence de 
Vesprit les sons qui arrivent comme d'invisibles messa- 
gers de la nature. Ce n'est pas qu'ils ne puissent point 
parveniraunerf auditif par une autre porte. Nous avons 
vu qu'on peut entendre par l'intermédiaire des dents ; 
il existe même des exemples de sourds qui entendaient 
parl'épigastre; ainsi, une dame comprenait tout ce que 
disait sa servante quand celle-ci lui appliquait la main 
sur le creux de l'estomac. Mais la route normale par 
laquelle nous arrivent les impressions sonores, c'est le 
conduit auditif. 

Chez rhomme et chez les mammifères, l'organe de 
l'ouïe comprend trois compartiments successifs : l'o- 
reille externe j l'oreille moyenne^ l'oreille interne 
(fig. H5). 

L'oreiiJe externe se compose d\\w cwVwvw^vt Cx.^ ç^v 



L'ACOrSTHJVE. 
s'ouvre au dehors â la base de l'os temporal, et il'un 
pavillon cbarnu, soutenu par des carlilages. C'est uoe 
espèce de cornet acoustique, destiné à recueillir et à 
concentrer lesoudessonores; lorsqu'il manque ouqu'i 
est seulement aplati contre la tête, l'ouïe perd beau- 
coup de sa linesse. Cbez beaucoup d'animaux celte 



\ 




conque est mobile : les cbevaux, les cbiens dressent les 
oreilles pour mieux entendre. Ce mouvement est pro- 
duit par le muscle peaucier de la tète. Chez Tbomme, 
c'est une faculté très-rare. J'ai conuu un jeune méde- 
cin, le docteur M..., qui pouvait faire aller ses ureilles 
comme il voulait, 

L'oreille moyenne est séparée de l'oreilli* externe par 
une membrane T, appelée tympatt, qui forme une sorte 
de caisse creusée dans la partie la plus dure de l'os tem- 
poral. C'est cette membrane qui reçoit les vibrations 
sonores et les transmet à l'intérieur. Chez les oiseaux 
et les reptiles, elle est presc^ue à fleur de tétc. 

La caisse du t^mçan comtTOHftipaX-fetçwKsaN. wm 



L'OREILLE. 289 

rarnère-bouche par la trompe d^Eustache E, et c'est 
grâce à cette circonstance que l'air qu'elle renferme 
s'équilibre sans cesse avec l'atmosphère. On s'assure 
facilement que cette communication existe. Quand on 
souffle en fermant le nez et la bouche, on sent que le 
tympan se gonfle sous la pression de l'air intérieur, et 
si on aspire dans ces conditions, il est tiré en dedans. 
Ceci explique pourquoi il est bon d'ouvrir la bouche 
lorsqu'on est à côté d'une pièce d'artillerie qui* tire : 
on diminue ainsi la pression que la détonation exerce- 
rait sur le tympan, si elle n'arrivait que par le conduit 
auditif. 

La paroi osseuse opposée au tympan est percée de 
deux petits trous o, o', qu'on nonîme la fenêtre ronde 
et la fenêtre ovale, et qui sont fermés tous les deux par 
des membranes très-minces. La fenêtre ovale, qui est 
au-dessus de l'autre, communique avec la membrane 
du tympan par la chaîne des osselets ; ce sont : le mar- 
teau m (fig. 115) dont la queue s'attache 
au milieu du tympan t; l'encluine n, qui 
ressemble à une molaire et sur laquelle 
s'appuie la tête du marteau ; le petit os 
lenticulaire l et Vétrier e, qui adhère par 

sa base à la membrane de la fenêtre pig.^jg.osseieb. 
ovale. De petits muscles attachés aux 
parois de la caisse peuvent agir sur le marteau et sur 
l'enclume et les faire tourner ensemble autour d'un 
axe horizontal ; la queue du marteau tire ou pousse 
alors la membrane du tympan, et la queue de l'enclume 
agit surl'étrier. 

L'oreille interne ou labyrinthe se compose du vesti- 
bule V (fig. 114), surmonté des trois canaux semi-cir- 
cul air es R et du limaçon L, (\\\\ ;\ e^^ç\ft\w^vX.\^\^^\wt. 




S90 L'ACOUSTIQUE. 

extérieure et intérieure d*une coquille turbinée. Le ves- 
tibule s'abouche à la fenêtre ovale, le limaçon à la fe- 
nêtre ronde, mais ils communiquent entre eux par une 
ouverture assez large. Le labyrinthe osseux renferme le 
labyrinthe membraneux, espèce de sac qui a la même 
forme générale et qui représente la doublure intérieure 
de ces diverses cavités ; il nage dans un liquide appelé 
la vitrée auditive et reçoit les terminaisons du nerf 
acoustique N. 

Voici maintenant le mécanisme de l'audition. Les 
vibrations du tympan se communiquent par l'air de la 
caisse à la fenêtre ronde et par les osselets à la fenêtre 
ovale. Les membranes qui ferment ces orifices font vi- 
brer le liquide du labyrinthe et , par suite , les 6\e\& 
flottants du nerf acoustique ; c^est ainsi que nait la sen- 
sation du son. 

Le marteau sert probablement aussi à donner au 
tympan une tension variable lorsqu'on écoute avec at- 
tention. Les mouvements du muscle qui le commande 
peuvent être volontaires ; Fabrice d'Aquapendente pro- 
duisait un petit bruit dans son oreille en agissant sur 
le marteau, et Mùller, qui possédait la même faculté, 
faisait craquer ses osselets de manière qu'une autre per- 
sonne pouvait Tentendre. M. Daguin a observé que, 
lorsqu'il maniait dans le silence des objets très-petits 
et qu'il en laissait tomber un par mégarde, il entendait 
un tintement bref et aigu, dû probablement à la mémo 
cause. Ces faits peuvent prouver que le marteau tend 
le tympan lorqu'on prête V oreille^ comme la pu- 
pille s'accommode lorsqu'on veut fixer Tœil sur un 
objet. 

Le tympan n'est pas absolument indispensable '^ 
l'ouïe; quand il esl dèd\\tè,ow^vA.^wdeacore, quoique 



L'OREILLE. S9i 

moins bien, par- les membranes des deux fenêtres, que 
Tair ambiant ébranle alors directement. 

La membrane intérieure du limaçon est tapissée de 
fibrilles élastiques, qui ont été découvertes par le mar- 
quis de Corti et qui portent son nom. Les fibres de 
Cùrti forment, en quelque sorte, les terminaisons des 
filets du nerf auditif. M. Helmholtz pense qu'elles sont 
accordées chacune pour une note spéciale, et comme elles 
sont au nombre de plus de 3,000, il y en aurait envi- 
ron 400 pour chaque octave. L'intervalle d'une fibre à 
la suivante serait alors d'un 66"® de ton, et elles forme- 
raient un clavier bien suffisant pour représenter toutes 
les notes que l'oreille peut distinguer. Nous avons déjà 
TU comment cette disposition naturelle explique la per- 
ception du timbre et son morcellement en notes har- 
moniques. 

Cette idée profonde a été confirmée d'une manière 
inattendue par les récentes recherches de M. Victor 
Hensen sur Touïe des crustacés décapodes. Ayant placé 
des palémons ou des mysis dans de l'eau de mer chargé 
de strychnine, afin d'augmenter le pouvoir réflexe des 
centres nerveux, M. Hensen a vu ces animaux tomber 
en convulsions au moindre bruit. Il a constaté ensuite 
que l'audition a lieu chez eux par l'intermédiaire de 
poils auditifs, et que chaque brin vibre à l'unisson 
d'une note déterminée. Lorsqu'il regardait sous le mi- 
crocospe le point d'attache d'une corde nerveuse à la 
languette d'un poil pendant qu'un musicien jouait du 
cor, ce point devenait indistinct par suite du mouve- 
ment très-rapide du poil chaque fois qu'on donnait cer- 
taines notes, tandis que les poils voisins restaient im- 
mobiles. L'un de ces brins répondaità ré^U et à re\t^, un 
peu moins à sol^ et encore ïuoVvv^ '^ so\;*^ ^'îi>\,\^^^- 



Sn L'ACOUSTIQOS. 

blemeol pour ton fondamental un harmcmique oommuD 
à ces quatre notes et situé entre ré^ et réfi- Un aatn 
brin vibrait sous Tinfluence des notes /a^#, ré^tt et Isg, 
ce qui indiquait le ton lajt. 

Dans le vestibule et les canaux aemi-eirculaires k 
terminaisons des nerfs se trouvent dans d'autres oooéh 
tiens. On y remarque de petits eristaux appelés otoMa 
et des poils élastiques qui paraissent destinés à soutenir 
mécaniquement les vibrations des filets nerveux. Scàrfi 
et Tréviranus croyaient que cette constitution dilB- 
rente des diverses ramifications du nerf acousfiqBe 
devait avoir pour but de nous faire distinguer la haa* 
teur et le timbre des sons ; mais Tétat actuel de aoi 
connaissances ne permet pas encore de tout défiiûr 
dans cette mystérieuse organisation de Tappareil afr 
ditif. 

La paralysie du nerf acoustique entraîne une mtSUi 
incurable. L'atrophie de certaines parties du réseau de 
Corti expliquerait la surdité partielle qui est cause 
qu^on n'entend plus des sons d'une certaine hauteur. Les 
notes très-élevées cessent d'être perceptibles pour beau- 
coup d'oreilles. Wollaston a trouvé plusieurs personnes 
incapables de distinguer la stridulation aiguë des gril- 
lons, et d'autres qui n'entendaient même pas le pépie- 
ment des moineaux. Pourquoi n'y aurait-il pas des 
animaux pour lesquels les sons trop aigus pour les 
oreilles humaines seraient encore perceptibles? Certai- 
nes espèces de criquets se trémoussent comme leurs 
congénères, mais sans qu'on entende la moindre stri- 
dulation : peut-être qu'en réalité ils font une musique 
qui n'est perceptible que pour ses auditeurs naturels. 

On rencontre des musiciens qui jouent dans un or- 
astre et remarquent \^ TaovoÀs^ \«»asfcxtfAfe^\wm^i 



L'OREILLE. 293 

ne peuvent faire une conversation sans se servir d*un 
Gomet acoustique. Un phénomène très-bizarre est celui 
(fa^ M. Willis a désigné sous le nom de paracousis. 
Voici en quoi il consiste. Certaines personnes qui ont 
l'oreille dure et qui ordinairement n'entendent pas les 
sons faibles, les entendent tout à coup lorsqu'ils sont 
accompagnés d'un grand bruit. M. Willis a connu une 
dame qui se faisait toujours suivre par une servante 
chargée de battre le tambour pendant qu*on lui par- 
lait; elle entendait alors très-bien. Une autre per- 
sonne n'entendait que lorsqu^on sonnait les cloches. 
Holder cite deux autres exemples analogues : celui d'un 
homme qui était sourd lorsqu'on ne battait pas la 
grosse caisse à côté de lui, et celui d'un autre qui n'en- 
tendait jamais si bien que lorsqu'il était dans une voi- 
ture qui cahotait sur le pavé. Un apprenti cordonnier 
ne comprenait que pendant que le maître battait le cuir 
sur la pierre. Ces faits s'expliquent probablement par 
le relâchement habituel des muscles du marteau, qui 
ne tendent plus le tympan que lorsqu'ils sont excités 
par des vibrations très-fortes. 

Chez beaucoup de personnes, les deux oreilles sont 
inégalement sensibles. D'après les expériences de 
M. Fechner, on entend généralement mieux du côté 
gauche que du côté droit. M. Fechner croit que l'habi- 
tude de dormir sur l-oreille droite est la cause probable 
de cette différence. Ittard cite un autre fait plus cu- 
rieux : il dit avoir connu un individu dont les deux 
oreilles entendaient toujours deux notes différentes. 
M. Fessel, de Cologne, a fait récemment la même ob- 
servation sur lui même. Pour son oreillle droite, le 
même son est plus aigu que pour l'autre oreille. Frappa 
de ce fattf M. Fessel a examiné Vouv^ ^xxw %\^\A ^^^ 



L'ACOrSTIQUE. 
bre de personnes, el il a constate que la iiiêmB iiiBrmilé I 
était beaucoup plus répandue qu'on ne l'aurait cru. Di 
sorte qu'on peut demander à un musicien s'il enlenJ 
parler de son ta droit ou de son la gauche, M. Fessel 
prétend même que le phénomène est objectif, et i]uc 
le même diapason donne réellement une note de ré^on- 
nance plus élevée lorsqu'il vibre devant l'oreille à la- 
quelle il paraît plus aigu que lorsqu'il vibre devant l'o- 
reillc opposée ; cette note de résonnance est entendue 
de la même manière par une autre personne que celle 
qui fait l'expérience. 

Comme les deux yeux nous procurent l'imprcssioti 
du relief géomélrique des corps, les deux oreilles noui 
servent à juger de la direction des sons. Quand on a les 
yeux bandés et une oreille bouchée, on croit que tous 
les 3ona viennent dans la direction de Toreille libre; 
ou du moins le jugement devient très-incertain. C'est 
la conque de l'oreille qui nous aide surlout à nous 
orienter et à reconnaître la direction des ondes sono- 
res. Diderot rsconte qu'un aveugle qui se disputait avec 
son frère prit un objet qu'il avait sous la main et le 
jeta très-bien à la tête de l'autre; l'oreille avait guidé 
son bras. 

Les aveugles ont en général l'ouïe très-fine , parce 
qu'elle leur remplace jusqu'à un certain point la vue. 
Itard a imaginé , pour apprécier la finesse de l'ou'ie, 
un instrument qu'il appelle aeoumèlre. C'est un anneau 
de cuivre suspendu à un 61 , sur lequel frappe la boule 
d'un petit pendule que l'on écarte de la verticale d'une 
. quantité toujours la m^e. On mesure la distance à la- 
quelle le son cesse d'être entendu. Freycinet s'est servi 
de cet appareil pour è\udv«T Vquw des sauvages. 
Chez les oiseaux noc\uvQ«& tik. ^^\«& «avRvieu. ^a^ 



L'OREILLE. 295 

comme le lièvre , l'oreille externe est très-déve- 






oreilles des animaux inférieurs sont incomplètes, 
es poissons, c*est la caisse du tympan qui manque ; 
létres ronde et ovale sont à fleur de tête. 

articulés n'offrent pas d'appareil auditif appa- 
Parmi les mollusques , on n'en connaît qu'aux 
lopodes : il s'y réduit à l'expression la plus simple : 
ule et nerf acoustique. 



ÏY 



■ USIQUE ET SCIENCE 



PriBfîpe de )j nsaâqae. — Savivnr. — Evier. — Rameaa. — Hdmboltz. — 
Caoâoaiuiice eC dbâonaBce expliqaée» par le» iMttemcBU. — Accords.— 
■«4es aujear el mucar. 



Le dédain aTCC lequel la plupart des musiciens re- 
poussent toute tentatÎTe d'ipyasioa des sciences exactes 
dans leur domaine est jusqu'à un certain point justi- 
Gé. Le secours que les mathématiques avaient apporté 
à la science musicale se réduisait encore naguère à fort 
peu de chose; à peine avait-on indiqué quelques vagues 
analogies qui n'expliquaient rien. On tournait dans un 
cercle vicieux ; le plaisir de Toreille était érigé en prin- 
cipe et faisait la base de tous les systèmes ; il était à 
la fois le but et le point de départ. 

On savait ceci : les accords consonnants correspon- 
dent à des rapports de nombres entiers. Les pythago- 
riciens tournaient et retournaient ce thème sans en 
tirer autre chose que des aphorismes sur l'harmonie du 
monde et sur la puissance occuUe des nombres. On a 
ulu retrouver les sept noVes à^Vai ^^vs\\!ûfc \>\^a^^ ^^s»& 



MUSIQUE ET SCIENCE. 297 

les mouvements des corps célestes, et le grand Kepler 
lui-même s'abandonnnait volontiers à des spéculations 
niystiques sur cette matière. 

Les idées de Sauveur sont plus claires. Voici com- 
blent il s'exprime en 1701 : « L'âme, dit-il, par sa 
nature, aime en même temps, et les perceptions sim- 
ples, parce qu'elles ne la fatiguent point, et les per- 
ceptions variées, parce qu'elles lui épargnent l'en- 
Dui de l'uniformité. Toute variété qui plaît à l'âme est 
donc renfermée dans certaines bornes; il faut qu'elle 
•soit en. deçà du point où elle deviendrait difficile à 
apercevoir, confuse, trop mêlée, trop compliquée...» 
Il explique ensuite que les accords sont agréables par 
les rencontres plus ou moins fréquentes des vibrations. 
Quand ces rencontres deviennent déjà rares, comme 
dans les tierces, où elles n'ont lieu qu'une fois pour 
cinq ou six vibrations, les perceptions sont moins sim- 
ples, mais cependant encore agréables précisément 
parce qu'elles sont un peu variées , les contrastes faisant 
mieux ressortir les concordances. Mais il y a un terme 
où finit l'agrément de la variété, et ce terme est donné 
par le rapport 5:6. Sauveur fait ensuite remarquer 
que les accords ne donnent pas de battements et que 
les dissonances en donnent. 

VHistoire de l' Académie (année 1700, p. 145) ren- 
ferme encore à ce sujet le passage suivant : « Les bat- 
tements ne plaisent pas à l'oreille, à cause de l'inéga*- 
lité du son, et l'on peut croire avec beaucoup d'appa- 
rence que ce qui rend les octaves si agréables, c est 
qu'on n'y entend jamais de battements. En suivant cette 
idée, on trouve que les accords dont on ne peut en- 
tendre les baltements sont justement ceux (\ue les 
musiciens traitent de cojisonuarvce^^ eX cçûfc ç^evw^ ^^^ 



298 L'ACOUSTIQUE. 

les battements se font sentir sont les dissonances, et 
que quand un accord est dissonance dans une certaine 
octave et consonnance dans une autre, c'est qu'il bat dans 
l'une et qu'il ne bat pas dans l'autre; aussi est-il traité 
de consonnance imparfaite. Si cette hypothèse Bst vraie, 
elle découvrira la véritable source des règles de la 
composition, inconnue jusqu'à présent à la philosophie, 
qui s'en remettait presque entièrement au jugement de 
l'oreille. Ces sortes de jugements naturels, quelque 
bizarres qu'ils paraissent quelquefois, ne le sont point, 
ils ont des causes très-réelles, dont la connaissance ap- 
partient à la philosophie, pourvu qu'elle s'en puisse 
mettre en possession. » 

Sauveur (ou plutôt Fontenelle, l'historien de l'Aca- 
démie) ajoute plus tard, en revenant sur cette idée, 
que le terme de l'agrément des accords n'a peut-être 
pas été fixé par la nature, et que ce qu'on appelle une 
oreille fine est peut-être le résultat d'un long usage, 
d'anciennes habitudes et de préjugés arbitraires aussi 
bien que d'une faculté innée ; ce qui explique l'ex- 
trême différence du goût des nations pour la musique. 
Nous verrons bientôt que Sauveur approcha beaucoup 
de la vérité. 

Dans la première moitié du dix-huitième siècle, 
vers 1740, le grand mathématicien Léonard Euler s'ef- 
force à son tour d'expUquer les rapports des inter- 
valles musicaux par des considérations tirées de la 
psychologie. Voici son raisonnement : Ce qui nous plaît, 
c'est toujours ce qui, à notre sentiment, possède une 
certaine perfection, et dans toute chose où il y a de 
la perfection, il y a nécessairement aussi de l'ordre, 
c'est-à-dire une \o\ q\\e\eowc^\y^. \Iw chant nous plaira 
donc si nous reconaamowà \ o^ôit^ ^^^ ^ws& ^\ V 



MUSIQUE ET SCIENCE. 299 

composent, et il nous plaira d'autant plus qu^il nous 
sera plus facile de saisir cet ordre. Or, dans les sons 
il y a deux choses où l'ordre peut se manifester : 
l'une est la hauteur des sons représentée par le grave 
ou l'aigu, l'autre est la durée. La hauteur se mesure 
par la vitesse des vibrations, la durée par le temps 
durant lequel un son se fait entendre. L'ordre dans 
h durée est le rhythme ou la mesure ; l'ordre dans 
la hauteur consistera dans une proportion simple 
entre les vibrations. Le degré d'agrément de ces 
proportions, c'est-à-dire des intervalles musicaux, 
dépend de leur simplicité, car l'oreille les apprécie 
d'autant plus facilement qu'ils sont exprimés par des 
nombres plus simples, et le plaisir est plus grand lors- 
qu'il nous coûte moins. En développant ces principes, 
Euler parvient à établir les règles de l'harmonie. 

Ce qui manque à sa théorie, c'est qu'elle ne se fonde 
sur aucun fait certain. Rien, en effet, ne nous autorise 
à admettre que l'oreille puisse juger des rapports de 
vibrations qui no durent que des millièmes de seconde. 
Les observations des astronomes montrent que l'oreille 
sépare tout au plus deux battements de pendules dont 
l'intervalle est d'un cinquantième de seconde^ Comment 
supposer qu'elle puisse apprécier numériquement les 
rapports de deux nombres de vibrations tels que 5,000 
et 5,050, par exemple, où il y a respectivement 100 à 
101 vibrations par seconde? Et pourtant elle reconnaît 
facilement ce rapport en tant qu'intervalle musical ; il 
ne diffère pas beaucoup d'un comma. 

En 1726, Rameau donna une autre théorie, que 
d'Alembert ne dédaigna pas de prendre sous son égide. 
Elle semble, au premier abord, pouvoir rendre rakou 
du plaisir que nous cause lamus\c\\\e.\V ^V Vs:^'^-^^^'^^ 



Kœnig obtkM^^^^^^^^^^I 
voyelles an inoyaB j^^^^^^^^^^^^^^f 

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B ET SCIENCE. ^O' 

iierco, ou les sons qui correspondent auï 

t à 5 et de 4 à 5. Mais cette simplicité d( 

ji paiait constituer qu'une sorte de convc 

Isanle pour rendre raison d'un pliénomèm 

•lui fju'i I s'agit d'expliquer. 

BIS. poursuit- il, a regarder autour de m( 

îdana la nati»re ce que je ne pouvais Un 

,ro Ctind, ni siussi nettement, ni aussi swri 

'Jd tlfSstnriei . La recherche ne fut pas loi 

|tor son qmi 4"r"appa mon oreille fut un Ira 

1b m'aiierc»-»» tout d'un coup qu'il n'éta 

Ift l'impre&sion qu'il faisait sur moi étf 

ÎIA, me ilis— je sur-le champ, la différcn 

I son. Toiit.^ cause qui produit sur mi 

ipression larx^ et simple, me fait entend 

cause qui produit sur mon oreille u 

iposéc; de f->lusicurs autres, me fait ( 

. J'appelai le son primitif ou gêné 

^mental, s^s concomitants, sons hani 

r ensuite c|v_a«3 les sons harmoniques si 
îès-fugitiCs , tl^ sorte qu'ils ne doivent | 
pinnt nneo»-oiHe musicale et une orc 
il EiiHii, il s'assure que le cortège du i 
t composa »3e sa douzième et de sa c 
''--(lire (le l'octave de la quinic cl di 
s la tierce maj^^j.^ q^ ^.^,„^me il 
ilit-il, que l'octave n'est q"'""c 

,, et q»'«'"^f,'^-«*-c.c.3on s'est llxé. 



300 L'ACOUSTIQUE. 

de voir de quelle manière le célèbre artiste s'y est pris 
pour découvrir ce qu'il appelle le principe de l'har- 
monie, 

« Je compris d*abord, dit-il, qu'il fallait suivre dans 
mes recherches le même ordre que les choses avaient 
entre elles ; et comme, selon toute apparence, on avait 
eu du chant avant que d'avoir eu de l'harmonie Je 
me demandai comment on était parvenu à obtenir du 
chant. 

« Éclairé par la méthode de Descartes, que j'avais 
heureusement lue, et dont j'avais été frappé, je commen- 
çai par descendre en moi-même ; j'essayai des chants, 
à peu près comme un enfant qui s'exercerait à chan- 
ter ; j'examinai ce qui se passait dans mon esprit et dans 
mon organe, et il me sembla toujours (|u*il n'y avait 
rien du tout qui me déterminât, quand j'avais entonné 
un son, à entonner, entre la multitude de sons que je 
pouvais lui faire succéder, l'un plutôt que l'autre. Il y 
en avait, à la vérité, certains pour lesquels l'organe de 
la voix et mon oreille me paraissaient avoir de la pré- 
dilection, et ce fut là ma première perception ; mais 
cette prédilection me parut une affaire d'habitude. 
J'imaginai que dans un autre système de musique que 
le nôtre, avec une autre hnbitude de chant, la prédi- 
lection de Torgane et du sens aurait été pour un autre 
son ; et je conclus que puisque je ne trouvais en moi- 
même aucune bonne raison pour justifier cette prédi- 
lection, et la regarder comme naturelle, je ne devais ni 
la prendre pour principe de mes recherches, ni même 
la supposer dans un autre homme qui n'aurait point 
J'habitude de chanter ou d'entendre du chant. » 

// constate cepeudaul v\w^ \^^ %qws (\ui lui avaient 
semblé se succéder \e ç\u^ xv^\.wc^^^\sv<iw\. îi\sÎY^\!\.V 



MUSIQUE ET SCIENCE. 501 

quinte et la tierce, ou les sons qui correspondent aux 
rapports de 2 à 3 et de 4 à 5. Mais cette simplicité de 
rapport ne lui paraît constituer qu'une sorte de conve- 
nance, insuffisante pour rendre raison d'un phénomène 
aussi net que celui qu'il s'agit d'expliquer. 

« Je me mis, poursuit-il, à regarder autour de moi 
et à chercher dans la nature ce que je ne pouvais tirer 
de mon propre fond, ni aussi nettement, ni aussi sûre- 
ment que je le désirais. La recherche ne fut pas lon- 
f^iie. Le premier son qui frappa mon oreille fut un trait 
de lumière. Je m'aperçus tout d'un coup qu'il n'était 
pas un, ou que l'impression qu'il faisait sur moi était 
composée; voilà, me dis-je sur-le-champ, la différence 
du bruit et du son. Toute cause qui produit sur mon 
oreille une impression une et simple, me fait entendre 
du bruit; toute cause qui produit sur mon oreille une 
impression composée de plusieurs autres, me fait en- 
tendre du son. J'appelai le son primitif ou généra- 
teur, son fondamental, ses concomitants, sons harmo- 
niques. » 

Il reconnaît ensuite que les sons harmoniques sont 
très-aigus et très- fugitifs, de sorte qu'ils ne doivent pas 
frapper également une oreille musicale et une oreille 
qui ne l'est pas. Enfin, il s'assure que le cortège du son 
fondamental se compose de sa douzième et de sa dix- 
septième, c'est-à-dire de l'octave de la quinte et de la 
double octave de la tierce majeure. Or, comme il sait 
par expérience, dit-il, que l'octave n'est qu'une ré- 
plique^ il trouve tout naturel que son organe et son 
imagination rabaissent les harmoniques à leurs moin- 
dres degrés, et qu'ainsi sa préoccupation s'est fixée sur 
la tierce et sur la quinte du son fondamental, et nop 
sur leurs répliques^ lorsqu'il a cVv^Tdcv^ X^'s» ^wv^ ^ 



SM L'ACOUSTIQUB. 

l'oreille loi suggérait après le son fondamental. Aini, 
la résonnance multiple du corps sonore devient la bue 
sur laquelle s'élève le système musical. Rameau en dé- 
duit la formation de TécheUe diatonique et les princi- 
pales règles de Tharmonie. Mais son imagination en- 
bérante l'entratne plus tard jusqu'à vouloir tirer de la 
même source le principe de la géométrie, et c'est ici 
que d'Alemberty qui a eu le mérite de développer et de 
simplifier le système de Rameau, s'est vu dans l'eidi* 
gation de placer son veto et de circonscrire nettement 
la portée de la découverte du musicien. D'Alembeit n» 
cesse de répéter que la démonstration que Rameau pré* 
tend avoir donnée du principe de rharmonie n'en eit 
pas une, et qu'il entrera toujours dans la théorie d» 
phénomènes musicaux une sorte de métaphysique qui 
y porte son obscurité naturelle. 

Le jugement de d' Alembert sur le système de Rameau 
prouve assez que l'illustre mathématicien en connais- 
sait parfaitement les côtés faibles ou, pour mieux dire, 
rinsuffisance. En effet, il ne suffit point de dire que 
l'octave est une réplique, pour rendre compte du rôle 
capital que cet intervalle joue dans la musique ; et, 
d'un autre côté, le phénomène de la résonnance har- 
monique n'a point la généralité que Rameau lui attri- 
bue. Un grand nombre de corps sonores rendent, eft 
réalité, des sons simultanés parfaitement dissonants. 
Il n*est donc pas juste de poser en principe que les ac- 
cords dérivent de la résonnance naturelle; et cela fût-il 
exact, rappelons-nous que dans la nature le laid prend 
tout autant de place que le beau ; en qui prouve qu'une 
chose peut être naturelle et désagréable. 
U faut donc encore avouer que cette théorie manque 
06 base ratîonueWe, ip\ù*^'^^ \v^^^\q^^ ^^ «i- 



MUSIQUE ET SCIENCE. 305 

cune manière l'origine des dissonances. Néanmoins, on 
est frappé d'admiration en voyant ce que Rameau a su 
tirer de données si incomplètes, et on peut dire, sans 
crainte d'exagérer, qu'il a inauguré une ère nouvelle 
dans la théorie de la musique. 

Le célèbre Tartini publia, en 1754, un traité d'har- 
monie dans lequel il prit pour point de départ les sons 
résultants^ qu'il croyait avoir découverts : il les avait 
observés lorsqu'il jouait sur deux cordes à la fois. Tar- 
tini appelle les sons de la série 1, 2, 5... les monades 
harmoniques j du concours desquelles résulte un son ; 
toute l'harmonie, dit-il, est comprise entre la monade, 
ou l'unité composante, et le son plein, ou l'unité com- 
posée. Il énumère ensuite les sons résultants des inter- 
valles musicaux, en se trompant toujours d'octave, et il 
trouve qu'on peut ranger les divers intervalles, de 
manière qu'ils donnent tous le même son résultant, 
que Ton peut dès lors considérer comme leur base com- 
mune, etc., etc. 

Depuis ce temps, la théorie de la musique ne sortait 
pas d'un cercle d'idées complètement étrangères à la 
physique et à la physiologie ; le plus souvent les auteurs 
de systèmes s'égaraient dans de véritables spécula- 
tions mystiques. Le philosophe allemand Herbart n'a 
pas été le moins loin dans celte voie. Pour lui, deux 
sons quelconques éveillent toujours dans l'esprit deux 
idées qui exercent l'une sur l'autre à la fois une attrac- 
tion et une répulsion. Dans l'âme de la quinte, la haine 
vient de terrasser l'amour ; dans la tierce majeure, les 
deux puissances s'observent dans une neutralité armée. 
La conclusion la plus curieuse, c'est que la gamme 
tempérée est celle qui satisfait le plus une oreille mu- 
sicale I et dire que c'est Herbart qui a le ^ie.m^\ ^^^^^ 



914 L'A€OUSTl«Dfi. 

dé poser les fondements d'une («ychdogie niathéoir 
tiqae. II était, en outre, lui-méiBê trèt-bon n^nnciak 

Les Traités d'harmonie qui, de nos jonr^ servent d» 
base à l'cnsèignonent mnsÎGal, ne &*0Gcapent pas d'a- 
pliquer les effets des combinaisons que Tusage a osBNr 
crées. Ils posent en prindpe qu'il emste eQtra les sooi 
des affinités^ des attractions et des répnlsioos que l'o* 
reille constate et dont le musicien doit tirer parti. 

En i 863f parut en Allemagne un livre qui fit immi- 
diatement une très-grande sensation. C*est la Thécfkdê 
la pereeptUm des sons, d'Helmholla^ L'auteur ramiDi 
enfin à des phénomènes physiques, susceptibles d'Mn 
soumis au calcul, les rapports secrets de sympathisât 
d'antipathie qui existent entre les sons naturels, et dé- 
voilÎB h cause des sensations qu'ils nous font éprounr. 

H. Helmholtz est professeur de physiologie à Puni- 
▼ersité de Heidelberg, qui possède aussi Kirchhoff et 
Bunsen. Déjà illustre par les découvertes dont il a en- 
richi l'optique physiologique — c'est à lui que l'on doit 
rophlhalmoscope — et par d'autres travaux hors ligne, 
il était rhomme qu'il fnllait pour trouver la réponse à 
une énigme vieille de deux mille ans. 

Nous avons déjà parlé en détail des recherches aux- 
quelles M. Helmholtz s'est livré pour pénétrer la véri- 
table nature du timbre ; nous avons mentionné ses ex- 
périences sur les battements et les sons résultants. C'est 
là qu'il a découvert la clef de Tharmonie, le véritable 
pnncipe des consonnances et des dissonances. 

Essayons de comprendre ses ingénieux arguments, et 
occupons-nous d'abord des battements. La sensation 
désagréable qu'ils nous font éprouver s'explique aisé- 

' Théorie p/ii/stologique de la musique « car H. Helmholtz, Iradoiten 
'nçaûpar G. GuérouU.Pana, \^%.^.>l»saw\^\.T^%» 



MUSIQUE ET SCIENCE. .305 

ment. Toute excitation intermittente d'un nerf nous fa- 
tigue. On sait combien est désagréable une lumière 
tremblotante, comme celle d'une flamme agitée par le 
vent. Une lumière forte, mais tranquille, émoussebien* 
Ui l'irritabilité de la rétine, comme une pression con- 
tinue engourdit la peau ; un éclairage intermittent, une 
pression rapide et souvent répétée, permettent au con- 
traire aux nerfs de reprendre incessamment leur sen- 
sibilité primitive et deviennent, pour cette raison, une 
source de souffrance. Le chatouillement surexcite l'épi 
derme. De même, un son intermittent irrite l'oreille, 
et c'est pour cela que les battements sont un principe de 
dissonance, comme Sauveur l'avait déjà deviné. 

En étudiant les battements, M. Helmholtz a d'abord 
constaté que le degré de raucité qu'ils donnent à un 
intervalle musical ne dépend pas uniquement de leur 
fréquence; ils deviennent moins irritants dans les octaves 
basses, où le même nombre de battements correspond 
à un intervalle plus large. Ainsi, la seconde mineure 
^^ ut^ est très-dissonante, tandis que la quinte ut sol 
est une consonnance, et pourtant ces deux intervalles 
donnent l'un comme l'autre 53 battements par seconde. 
Cette circonstance s'explique par l'écartement plus grand 
des fibres qui répondent à un intervalle plus large ; le 
sol n'agit plus sur la fibre accordée pour ut^ eiVut 
n'ébranle plus la fibre sol^ d'où il suit que la résonnancc 
est ici impuissante à réunir les deux notes dans la même 
fibre et à y faire naître des battements. Au contraire, 
les notes si et ut font résonner un grand nombre de 
fibres en commun, ce qui fait que leurs battements de- 
viennent sensibles pour le nerf acoustique. 

Quand on observe des battements avec deux sons dont 
rintervaJJe est très-grand, le çhéuomauft ^«»l d4 ^mj 




MmI Vkitrmufmt iaUt^iatém IJÊÊknmm ih — É ■■ pet 
ffifmtmi^'^ Umryïïimsoet e ipli quc h ih i thi dsMV 
d« b IriMMpdie <.a des Ton de Ihhk fbreées. 

Oiitfid iJetff «Mii, d'an timbre qodconqoe, sont 
iftMiiâ^fu^ui à IVictaTe, les hannoniques du plus aigu se 
MÈiH'T\p4pn4'Mi ctiacun â un liarmonique du plus grave. 

l'T 1 2 5 4 5 6 7 8 9 10 . . . 



I 



I 



I 



I 
IT, *i i 6 8 10 ... 

7W /^/g lO/g fi/, )/U'g «(>/, /O);, f/^4 r^4 ?l?f4 

IIpn Ioi'n pliiN (le Imlleincnts ; mais pour peu que l'ac- 
nird Nn inuilild, nous on sommes avertis par un grand 
vnnu'ino (|tio produiMont les harmoniques dédoublés. 
I.'m/, Iwillni iivrr Tu/, «Itéré, Itt/javee Vut^ faux, et ainsi 
do Miiilp. Voilù pourquoi roolavc est l'intervalle consou- 
\\i\\\\ \u\v ovooUonvo. ol colui dont Toreille apprécie la 
ju?«los>o ihtv lo plus tioMhx'U\ Les battements rirtuels 
^^1 t^>oiUuolii di\H iittraiouiquo^ le caractérisent par leur 

l)ik%\ io pU\» Kv^vt v\^v>^>v\ ^ XxiXûlV ^>a^tâi Qar 



MUSIQUE ET SCIENCE. 307 

une grande cacophonie. Les autres consonnances sont 
bien moins caractérisées, comme on va voir. Prenons 
la douzième 1 : 5 ; voici l'ordre des deux tortéges : 



UT 12545678 



SOLj 5 6 9 . . . 

vt ut^ sol^ ut^ mt\ sol^ . . . ut^ ré^ ... 

JLa coïncidence des harmoniques a encore lieu ici, 
mais elle est moins importante. Les battements virtuels 
sont moins sensibles, la consonnance est donc moins 
précisée. 

Les autres consonnances, quinte, quarte, tierce, etc., 
renferment déjà des éléments de dissonance; ici les 
harmoniques ne se superposent qu'en partie ; il reste 
un levain de discorde. 

Voici, par exemple, la quinte : 

UT 

SOL 



Le 8ol^ et le sol^ sont à la fois harmoniques d'ut et de 
sol^ et coïncident quand la quinte est juste; mais le 
ré^^ du cortège de SOL, peut battre avec Vut^ et le m?, 
du cortège dTT. La consonnance de la quinte n est donc 
pas absolument pure ; de plus, elle est moins caracté- 
risée que l'octave, car une quinte fausse fait seulement 
battre des harmoniques de même rang que ceux qui 
battent dans une douzième fausse. 

On peut faire des remarques analogues sur les autres 
accords consonnants. Plus il y a d'harmoniques peu 
élevés gui coïncident, plus l'inler\a\W ^^l ^nm ^\. vûiftMS 



2 4 6 8 




10 


12 


1 






1 


3 6 


9 




12 


ut sol ut^ sol^ ut^ 


r4 


/«tj 


S0/5 



M L'AGOUBTIQUI. 

il est canelérité par les bittemeots éventuels de m 
hannomqoes. 

Dans là iotorvalles où il existe des hamumiqnes n- 
oeptibles de troubler raccord, il JEnit oooore tenir conqpte 
dn n^prochement plus ou moins étroit de ces notaf 
car les baUemenks seront d'autant plus lents ^'dln 
seront plus voisines. Nous avons déjà dit que Timprei* 
sion est surtout désagréaUe aux euTÛrons de trente-trok 
battements par seconde; des battements beaucoup (dus 
rapides cessent d'être sensibles; des. battements très- 
lents, loin de blesser l'oreille, donnent à la musique 
quelque chose de solennel, ou bien une expression plus 
mou? ementée, tremblante, émue, comme celle du tré- 
molo d(d la voix^ Il s'ensuit qu'un intervall§ sera d'su- 
tant plus dissonant qu'il offrira un plus grand nombre 
d'harmoniques peu élevés qui pourront produiro da 
battementi d^une certaine rapidité. 

D'après ces principes, il est facile de calculer a priori 
le degré de pureté des différents intervalles, considérés 
dans toutes les parties de l'échelle musicale. M. Helm- 
holtz appelle consonnances absolues ou franches les 
intervalles où lune des deux notes données coïncide 
avec un son partiel de l'autre, car, dans ce cas, il y a 
aussi coïncidence entre tous les harmoniques respectifs. 
C'est à cette catégorie qu'appartiennent Tunisson, les 
octaves successives, la douzième, la dix-septième, etc. 
Les intervalles qui viennent immédiatement après, au 
point de vue de la pureté, sont d'abord la quinte, puis 
la quarte, que l'on peut encore qualifier de conson- 
nances parfaites; la sixte et la tierce majeures sont des 

* On trouve en effet dans les organes modernes un jeu d'anches accou- 
•»'^e5 qui battent. L'efîet du reçisUe d\t unda maris repose aussi sur 
^Uements lents. 



MUSIQUE ET SUIENCt;. 3» 

coDsonnances moyenoes ; la tierce et la sixte mineures 

ne sont plus que des consonnances 

imparfaites. 
Les battemciits des tierces sont 

déjà très-sensibles pour les notes' 

graves de l'échelle ; aussi ne les 

a-t-on admises, à titre de conson- 
nances imparfaites, que depuis la 

fin du douzième siècle. L'emploi 

de la tierce et de la sixte mineures 

n'est guère justifié que par l 

nécessités de la construction des 

accords. 

Si les intervalles sont redou- 
blés, la quinte et la tierce majeure 
s'améliorent (elles se changent on 
douzième et en dixième majeure): 
au contraire, la quarte, la tierce 
mineure et les sixtes deviennent 
plus dissonantes. 

M. Helmholtzaessayé de mettre 
en évidence ces phénomènes et les 
lois qui les règlent au moyen 
d'une figure qui représente par 
une courbe très - accidentée le 
degré relatif de dissonance de deux 
notes quelconques du violon, cal- 
culé d'après l'intensité et la fré- 
quence des battements des sons 
supérieurs de ces notes, en sup- 
posant que l'efTet est maximum 
pour 33 battements par seconde 
(Bg. iiô). Sur une ligne ilroVte cm \^'a[i.'à^% «*. ■» 



3lé L'ACOUSTIQUE* 

présentée une note qui s'éloigne de VtU^, en nuHh 
tant par degrés insensibles jusqu'à la double octaie 
fil,, on mt s*élefer la Ciordillière du déplaisir. Des nt 
lées profondes sont indiquées aux endroits de TuniisoD, 
de la quinte, de Toetave, de la douzième et de la double 
octave ; le Chimbocazo de la dissonance existe tout près 
de Tunisson, oA le plus léger désaccord produit les bit* 
lements les plus sensibles ; des aspérités plus ou moins 
prononcées caractérisent les autres régions dissonantes, 
et des dépressions plus ou moins fortes les diverses con- 
sonnanoes* 

L'influence des sons résultants est de tout, point ana- 
logue à celle des sons supérieurs ou harmoniques. Lon 
de la réunion des deux sons accompagnés de leurs ha^ 
moniqnes, les . premiers sons différentiels ne prodd- 
sent que des battements identiques à ceux des harmo- 
niques, et comane ils sontt en général, beaucoup plus 
faibles que ces derniers, leur considération est peu im- 
portante pour la pratique, où nous n'avons affaire qu'à 
des sons musicaux doués d'harmoniques ; mais dès qu'il 
s'agit de sons simples, il faut recourir aux battements 
des sons résultants pour rendre compte des dissonances 
et pour caractériser les consonnances. 

Ainsi, le premier son différentiel de l'octave coïncide 
avec la plus grave des deux notes données ; il peut donc 
battre avec celle-ci dès que l'accord est troublé, et c'est 
là ce qui nous permet de juger encore de la justesse de 
l'octave formée de deux notes simples. La quinte, et 
peut-être aussi la quarte, sont encore caractérisées par 
les sons résultants, mais les autres intervalles perdent 
toute netteté, toute décision lorsqu'on n'emploie que 
des son& simples. C'est la vraie raison qui fait que les 
sons dépourvus d'harmon\c[ae& «i\vV\w!LYt^Y^^^V^5i.^s!»p 



MUSIQUE £T SCIENCE. 31i 

ique d'harmonie ; on ne peut s'en servir que pour ren- 
3rcer des sons plus riches. Cette remarque s'applique, 
lar exemple, aux tuyaux d'orgue larges et fermés, 
lorsqu'on joue sur Torgue un morceau de musique 
ans le registre fermé, il n'a plus ni caractère ni éner- 
ie; l'absence des harmoniques est cause que les con- 
onances se distinguent à peine des dissonnances, et 
ette indécision donne à la musique quelque cho^e de 
Qou et de faible qui iatigue à la longue. Le timbre de 
) flûte contient déjà, outre le son fondamental,' l'oë- 
ave aiguë et quelquefois la douzième ; les intervalles 
le Poctave et de la quinte y sont déjà un peu • mieux 
caractérisés, les lierccs et les sixtes ne le sont encore 
|ue très-faiblement. Aussi connaît-on ce dicton : quel'a 
)ire chose au monde, après une flûte, .ce^ sont d^x 
lûtes. Cet instrument devient cependant très-utile Iprs- 
i|u'il se joint à d'autres qui ont plus d'énergie. On peut 
lire la même chose de l'harmonium à diapasons. 

Les qualités des intervalles musicaux varient donc 
nécessairement avec le timbre des instruments. 

L'analyse du timbre des instruments les plus répan- 
dus a montré que l'oreille aime surtout les sons dans 
esquels les deux premiers harmoniques (octave et dou- 
ième) sont fortement accentués, les deux suivants mo- 
lérés, et les autres de moins en moins sensibles. En 
•artant de là, il est facile d'expliquer l'effet particulier 
e chaque instrument et d'établir a priori une foule de 
sgles pratiques connues des musiciens. 

On le voit, la considération des battements permet 
'expliquer le rôle des nombres entiers dans la fixation 
es intervalles musicaux. La loi de Fourier, en vertu 
e laquelle tout mouvement sonore est une somme de 
oies simples, devient ainsi la vèf\ia\A^\i^^^ ^>a. ^\!N;^^ 



MS L'ACOUSTIQUS. 

point, puisque les consonnaiioes dérivent de la super 
position des sons partiels, et les dissonances de îeui 
antagonisme. 

n nous reste- à parler des sons au point de vue d( 
Tefiet qu'ils. produisent lorsqu'ils sont réunis en musi- 
que. Ce sujet empiète sur le domaine de Testhétique, 
o& nous n'avons plus, pour nous guider, des principes 
fixes et invariables comme ceux des sciences puremcDl 
physiques. Les échelles musicales, les modes, etc.^ 9e 
sont développés pas à pas, à travera les siècles, et les 
changement» que le goât des différâtes nations y a 
apportés sont une preuve suffisante du peu de stabiUté 
de leurs fondements. La science du contre-point se base, 
en partie du moins, sur des lois esswtieUament perfiec- 
tiUes, et il serait téméraire d'affirmer qu'elle est anri- 
vée au deraier terme de son développement. 

Toutefois,- ici encore , nous retrouvons quelques lois 
générales qui semblent avoir guidé les^>artistes à leur 
insu, et qui dérivent naturellement de celles que nous 
avons établies précédemment. Elles font comprendre la 
nécessité philosophique des règles auxquelles a conduit 
un tâtonnement séculaire. 

Ainsi la formation des accords multiples repose sur 
les mêmes principes que celles des intervalles conson* 
nants. Il faut que les trois intervalles entre les trois 
notes qui composent un accord triple soient séparément 
consonnants pour que l'accord le soit aussi. En consi- 
dérant les intervalles qui existent dans les différents 
accords, on peut les classer par degrés de consonnance. 

La difTérence des modes majeur et mineur réside- 
rait, d'après M. Helmholtz, dans les sons résultants qui 
laissent de la combinai^ow do» trois notes ^ Dans les 

' Tartini avait déjà d\lq^e\(^ec\i<x&K^^vMX^\vft. 



MUSIQUE ET SCIENCE. 



313 



accords majeurs, les sons résultants ne sont que des 
répétitions des mêmes notes dans les octaves plus 
graves. Dans les accords mineurs, il n'en est plus de 
même ; les sons résultants y sortent de Fharmonie et 
forment entre eux des accords majeurs qui accom- 
pagnent en sourdine l'accord mineur. Cette interven- 
tion d'un élément étranger, et peut-être aussi les batte- 
ments très-faibles des sons résultants de deuxième 
ordre, donnent aux accords mineurs quelque chose de 
voilé et d'indécis que tous les musiciens ont senti sans 
pouvoir s'en rendre compte. 

Dans le tableau qui suit, les accords majeurs et mi- 
neurs sont figurés par des blanches, les sons résultants 
des notes fondamentales par des noires, les sons résul- 
tants dus à la combinaison de nqtes fondamentales et 
d'harmoniques par des croches et par des doubles cro- 
ches. Une pause placée après une note signifie que cette 
note est un peu plus élevée que le son qu'elle doit re- 
présenter. 




. su L'ÀCOUSTIQUB. 

Si nous passons à la réunion mélodique des sons, 
nous trouvons que la mélodie repose, comme l'harmo- 
nie, sur le phénomène dés sons supérieurs, en ce sens 
que ce sont ces derniers qui déterminent VaffinUé des 
sons entre eux, conmie l'affinité des accords résulte des 
notes qui leur sont communes. 

La mélodie est une suite de sons qui se succèdent 
d'une manière agréable à Toreille. D*après Rameau et 
d'Alembert, elle natt directement de rhann<mie ; Fod 
doit en chercher les effets dans rharmonie, exprimée 
ou sous- entendue, ou plus particulièrement dans la 
basse . fondamentale sous-entendue. Mais conune le 
chant homophone a existé bien avant la musique poly* 
phone, ou musique d'harmonie, l'histoire nous force à 
* chercher pour la mélodie une origine indépendante. 

Remarquons d'abord que la mélodie est un mouve- 
ment qui se traduit par le changement de hauteur des 
notes ; elle peut imiter toutes les allures diverses des 
mouvements mécaniques. Mais l'esprit ne pourrait ap- 
précier ni sentir ces nuances, si la progression n'avait 
pas lieu par degrés d'une valeur définie, c'est-à-dire par 
intervalles de tons ou demi-tons, et dans un rhythme 
déterminé. La mesure nous aide à diviser le temps, la 
progression par tons et demi-tons nous permet de frac- 
tionner la hauteur des notes, et c'est ainsi que nous 
comprenons le mouvement par le rhythme et par la 
mélodie. Les sensations que nous fait éprouver le spec- 
tacle d'une eau agitée où les vagues se succèdent à 
temps égaux, sont d'une nature tout à fait analogue. 
Dans la voix du vent, les notes se fondent sans faire de 
^ut ; aussi nous produit*elle une impression pénible et 

ifiise, à cause de Y absente 4ô toute mesure ou divi^ 

. La musique, au coT\lci\t^> ^wcv ^\a\sswYsv« ^ss&r 



f 

MUSIQUE ET SCIENCE. 315 

sarer le mouvement ascendant et descendant des sons, 

et cet étalon c'est la gamme. 

Mais quelle est la raison qui a fait adopter pour la 
gamme les notes dont elle se compose aujourd'hui? 
Pourquoi y rencontrons-nous tout d*abord l'o.ctave, la 
quinte, la quarte, les tierces? La réponse est facile, 
après ce que nous avons dit des sons partiels ou har- 
moniques. Le tableau suivant représente les rencontres 
des harmoniques des intervalles consonnants. 

Tonique (1) 12 3 4 5 6 7 8 9 

Octave (2) ._ 2 — 4 — 6 — 8 — 

Douzième (3) — — 5— — 6— — 9 
Quinte (§)— — 3— — 6— —9 
Quarte (|) — — — 4-— — 8 — 

Tierce (f) ___— 5 ______ 

Tierce (f) — _____ ^- 6 — — — 

L'octave, avec son cortège d'harmoniques, étant con- 
tenue dans le timbre de la tonique, il est clair qu'en 
montant d'octave on ne fait que répéter une partie, une 
fraction de la tonique. Voilà pourquoi il sera permis 
de dire, avec Rameau, que l'octave aiguë est une simple 
réplique, ou mieux, un rappel, un souvenir de la to- 
nique. 

La douzième étant le 5^ son partiel de la tonique, 
elle est également annoncée par celle-ci, mais moins 
complètement que l'octave, car elle ne reproduit que 
les harmoniques 3, 6... de la tonique. En l'abaissant 
d'une octave, nous avons la quinte, dont le 2"*® son par- 
tiel reproduit l'harmonique 5 de la tonique, le 4"* 
l'harmonique 6 de celle-ci, et ainsi de suite. La quinte 
est donc encore un écho partiel de la tonique, mais en 
même temps elle apporte des notes nouvelles qui ne 
sont pas comprises dans celle àeTvvvec^^ â\«5i. ^ ^^^^ 



moins d'affiiiilé pour la tonique que l'octave ou la dou- 
zième. L'affinité de la quarte est encore moindre, cir 
ici ce n'est que le 3°" son partiel ijui coïncide avec le 
4""' de la tonique. Aussi est-ce d'abord par les quintes 
que s'accompagnait le dessus du chanl polyphone, dans 
le moyeu âge. Les tierces et les sixtes rappellent latch- 
nique d'une manière encore bien moins sensible ; ells 
n'ont été introduites dans l'usage musical qu'à une 
époque où l'harmonie avait commencé à se dcveloppcc. 

M. llelmholtz appelle affinité du premier degré ixVit 
do deux sons qui ont au moins un harmonique de com- 
mun; altiiiité du deuxième degré celle de deux sont 
qui ont un harmonique de commun avec un troisième 
son. En partant de là, il réussit à construire d'une 
manière rationnelle récliellc diatonique avec des nota 
qui ont pour la tonique une affinité au premier ou SU 
dflOlième degré. ' 

La parenté directe de U tonique ut se compose des 
notes _. 

ut, sol, fa, la, mi et mit, 

si nous nous arrêtons aux six premiers harmoniqueSt 
les autres étant trop faibles pour caractériser l'afGniU. 
Nous a?ons alors les gammes : 

M( mi — fa — sol — la ut, 



ut mil. — /"« — «ol — la «I, 

car on ne saurait faire entrer dans la même gamme deui 
aotes aussi rapçiocAié«aa^ftmet mtlr. Pour fractionoet 
lea deux intervaftea troc ^«ûôa ojà «râ^wo*. iasa^rite 



MUSIQUE ET SCIENCE. 317 

série, il faut recourir à la parenté du sol^ qui se com- 
pose des notes ut^ ré^ mi*', si, ut^. Le ré et le si se trou- 
vent dont liés à Vut par une affinité du second degré ; 
en les intercalant dans les gammes ci-dessus, on ob- 
tient la gamme diatonique 

ut — ré —mi — fa — sol — la — si — ut^ 

qui devient la gamme mineure ascendante si nous met- 
ions mi^ à la place de mi. Le r^, que Ton prendrait, dans 
la parenté du fa, différerait d un comma du ré déter- 
miné par le sol. Ces exemples suffisent pour faire com- 
prendre la marche suivie par M. Helmhoitz. 

En étudiant les règles de l'harmonie, on s'aperçoit 
ensuite que les accords, considérés comme des sons com- 
plexes, présentent entre eux les mêmes relations d'affi- 
nité que les notes de^la gamme, par suite de la coïnci- 
dence de quelques-unes de leurs notes. Le rôle capital 
de la tonique dans la musique moderne, ou ce que 
M. Félis appelle le principe de la tonalité^ s'explique 
aussi par la nature des sons supérieurs de la tonique. 
Ces principes si clairs et si simples ont permis à 
M. Helmhoitz de déduire, de considérations pour ainsi 
dire mathématiques, les règles fondamentales de la 
Composition. 

Toutefois, il faut bien l'avouer, la dernier mot de la 
théorie de la musique n*est pas dit; toutes les déduc- 
tions de M. Helmhoitz ne sont pas hors de conteste. 
Ainsi, M. Arthur von Œttingen a critiqué avec quelque 
raison l'explication que M. Helmhoitz donne de la dif- 
férence des modes majeur et mineur, car le phéno- 
mène des harmoniques est quelquefois bien peu appa- 
rent. M. d' Œttingen cherche cette dÀSlfeîcwî.^ \^sv^^a 



|P L'ACOUSTIOUE. 

I i..^. ctproques de la toriicUé et de la phojticile. 
Lu lunici l'un intenallc ou d'un accord consiste dans 
la possi i de le considérer comme un groupe d'har- 
moniquf un même son Fondamental. C'est ainsi que 
l'accord i. jur se compose avec les harmoniques 4, 5, 
6 (le la fo ueou basse fanJamentale 1. La phonicilé 
serait lu ipriété inverse d'avoir un barmonique en 
commun accord mineur J, j, ; a le snn 1 pour har- 
monique cuinmun ou phonique. L'accord majeur a pour 
phuni'jue 60, i'ac ~ ..liuem a pour tonique ^. 

En développant ce uaalisme, l'auteur obtient la coq- 
struction parallèle des modes majeur et mineur. Maid . 
nous devons borner là ces détails, qui peut-être déjà, I 
fatiguent le lecteur. 1 

S'il est possible ainsi d'établir a priori les lois ht ' 
plus importantes de la musique, quelque grand que soit 
le résultat au point de vue de la philosophie de l'art, 
ne s'ensuit pas que la connaissance de ces lois sutli 
pourdevenirmusicien.il faut ici répéter ce que d'Alen> 
bert disait dans la préface de son livre sur la musique : 
« C'est à la nature à faire le reste ; sans elle on ae 
composera pas de meilleure musiq ne pour avoir lu ces 
Éléments, qu'on ne fera de bons vers avec le Diction- 
naire de Itichelet. Ce sont, en un mot, des éléments de 
musique, et non des éléments de génie que je prétends 
donner. » 

Dans les œuvi'es d'art que nous admirons, nous de- 
vinons instinctivement une loi secrète, à laquelle l'ar- 
tiste a obéi, mais à son insu. C'est dans ce sens qu'il 
faut prendre le mot si souvent cité de Leîbnitz •. 
Quand la loi est tellement manifeste qu'elle saule 

' Husica «si ciereilium «ittvtMÏui» w^oiXviun itsKienU» se numcnrc 



MUSIQUE ET SCIENCE. 319 

IX yeux, nous sentons l'intention, le calcul, et l'œuvre 
DUS laisse froids. C'est la loi inconsciente qui dis- 
ngue l'œuvre d'art d'une production systématique et 
ilciilée; il ne faut donc pas prétendre que la science 
uisse ou doive parvenir à découvrir et à mettre à nu 
)us les ressorts secrets de l'esprit créateur. 



FIi>i 



TABLE DES GRAVURES 



1. L'nnim.al Haiil 11 

2. Rossignol 14 

3. Poule 17 

4. Coq 17 

5. Coucou 17 

6. Caille 17 

7. Alouette 18 

8. Cigale 20 

9. Grillon 22 

10. Criquet 25 

11. Voix d'oiseaux 20 

12. Lyre d'Apollon •. 31 

13. IMectiuni 31 

14. 15, 10, 1 . Cithares 31 

18. Flûte douljle 31 

10. Flûte de Pan 31 

'10. Sitïlct pasloral ou llùle de Pan 32 

21. La larenlelle, d'après Kircher 39 

2-2. Effet du vide 53 

25. Porte-voix ^'^ 

21. Cor d'Alexandre le Grand 

25. La femme invi.«iblc 

SO Pian de iot\^illc de Denvs 



-l F, 



TABLE DES GRAVriiES. 

57. Oreille do Doiiys '81 

58. Cumcti acouslii)iii^^ K4 

39. ExpfricnCES du Kuri'iu des limgitud» 01 

30. Correl lijilratouiliiiue 05 

31. néHeiion du Eon. . . . ' 103 

3S. £clio heiilaphonc 107 

33. tdioi variitioni. . 108 

34. Écho li^tfrupbanc 1(0 

35. U tîUb SiinonelU, piès de Hlilnn 117 

3«. ElUpae '. 1» 

37. Miroir* ]Mrtboliqu«i> lit 

38. Deux paraboles 1S3 

3». Réfrtction du gui. lîT 

40. ThMi™ de Vilniïc 135 

41. RésonoRtenr 13ft 

4S. Arfnes do Slinc* 141 

43. Salle poniba1ii{ue 143 

44. S«llc conique 143 

45. CoulIssL's triinguliires 143 

46. 47. Plgns de Uiéitnu 144 

U. Corde en TÎbntioD 14Ï 

40, TuyâUïilrf H* 

50. Trembleur de Trevelyon 153 

51. Eïpérienïe de Trerelyan 15Î 

52. Tube de Rijko 153 

53. SUtue de Memnon. 151 

54. Flammes de Scbalfgotscb 15S 

55. l'cndule IM 

50. OndulotioDS de l'eau 159 

57. Quart d'ondiilalion IM 

58, Demi-ondulation IM 

50. Trois quarts d'ondulation ItO 

GO. Ondulalian complilc 161 

01. Ondulations de l'eau 101 

02. Progression d'une vibration transTonalc 163 

03. Progressicin d'une vibrelîon longitudinale 164 

S4. ChuK des billes ilasllquea 166 

05. Nceuds el lenlres l*î 

60. Corde vibrante HO 

97, lîS. ïibralion» dw cordes 170 171 

■», 70, Vibrtlions longilud'mn\es 171 Hî 

. Fibralions transïcrflRles Acs tonifs 'î'' 



TABLE DES GRAVUREp. 315 

72. Diapason 173 

73. Serre-plaque 174 

74. 75. Figures de Chladni 175 176 

76. Chladni 177 

77. Flammes de Kœnig 179 

78. Phonographe 180 

79. Phonogrammes 181 

80. Phonautographe 181 

81. Vibrations comptées ; 184 

82. Le sonomètre 186 

83. Crécelle de Savart 189 

84. Sirène de Cagniard de la Tour 190 

85. Soufflerie m 

86. Vibration d'une tige carrée 215 

87. Caléidophonc 216 

88. SJ, Miroii-s vibrants 217 218 

90. Méthode optique de M. Lissajous 210 

91. Unisson 1:1 .220 

92. Octave 1:2 220 

93. Quinte 2:5 221 

94. Quarte 3: 4 221 

95. 96. Mouvements périodiques 226 227 

97, 98. Mouvement pendulaiic 227 228 

99. Son fondamental et octave 232 

100. Diapason monté 244 

iOl. Sistres des anciens 246 

i02. Tuyau à clavelte 248 

103. Sifllet 249 

104. Voyelles observées à l'aide des iliunuiL's de Kœnig 253 

105. Timbre des voyelles 254 

106. Appareil de Kœnig pour l'analyse du linihr 255 

107. Concordance 263 

108. Opposition 263 

109. Interférence 264 

110. Battements 265 

lu, ll2. Tracé des battemenls 200 267 

m3. Influence du mouvement sur la hauteur d -s sjiis 273 

Ua. Oreille . 288 

^15. Osselets 289 

tl6. La Cordillère de la dissonance ^Hvfb 






I 



TABLE DES MATIÈRES 



I. — LE SON DANS LA KATUDE. 

Bruit et son musical. — Grotte de Fingal. — Voix des animaux*. 

— Langage des bétes. — M. L. .. et les singes. — Le chien qui 
parle. — L'animal Haut. — Oiseaux chanteurs. — Insectes. — 
Reptiles et poissons — Vie nocturne des animaux dans les forêts. 1 

IL — EFFETS DU SON SUR LES ÊTRES VIVANTS. 

Puissance de la musique. — Légendes et anecdotes. — La musique 
comme remède. — Les tarentelles. — Effets de la musique ^ur 
les animaux 29 

in. — PROPAGATION DU SON DANS LES DIFFÉR E N TS IIILI E UX. 

Effet du vide. — Propagation dans les gaz — dans Peau — par le 
sol. — Expérience de M. Wheatstone. — Le stéthoscope. — On 
entend par les dent< 52 

IV. — INTENSITÉ DU SON. 

Circonstances qui font varier l'intensité des sons. — Intensité noc- 
turne. — Portée des sons. — Le carré \u\ct?»t Aa V^ ^vi>VASkK&« 

— Porte- voix. — Tuyaux acoustiques. — Ç»w\tft\. *r»v»\\^^. * 




it des longIludPB. -. Le cnpitaine Pi 
Biaidunl. — Colladon et Stiirin. — Biot. — 
islBtircs par lo son; H. d'AbbadJe. — Dûlince 
'ruFondcui' d'un lue por l'écho du fuiid. , . 

- Écho. — Étho poljfïllabiquc. — Éclio pu')- 



oince. — Vases de Vilruve. — Tablgtd'IiBrinaiJÎi 

[lïurs. — Iji cqrdc sensible. — Verres brisés par 

istiquc dps (Jglisi^s al ifes sallrs de «peclncle. . . 



d'ï^ine miiarïi|ue des sons. — Coi'de* et luïuin. — Inslrunnul 
de Trcvelf an. — Slalue de llemnon. — Flammes chantante!. — 
Flammes sensibles. — Pendule. — Ondulations de Teau. — 
Ondes progi-essiyes et ondes Ci' s. •— Vibrntions des cordes, des 
liges, des plaques — Figuri^s de Cbladni. — Figures de kundt. 

— Flninmcs de Ki£ni|;. — Miîlliodc grapliiquc 1 

Meiurc des nnles. — Clilndni, (lersenne, l'jthagore. — Sonumèlre. 

— Crécelle de Snvnrl. — Sirènes. — Limiles des sons lurcep- 
tildes. — Étendue de l'éiliellc di'S !ons iiiusiciiux — Limites de 
la voix humuine 



Rnppods des notas. — Gamme. — Dénomination des notes. — 

Hymne de snînt Jean — Natation musicale. — iilode majeur et 

mode mineur. — Les buiis ilc la g.ainitie lempi^rjo. — Galiii et 

Cicvi?. — Le ton de cliapcUe. — ftisçaiow notmii. — ^\tAu- 

p/joiio. — ll«liodeoiit"iiiuc dcM. Usanjou-.- ■ '''** 



TABLE DES MATIÈRES. 527 

XI. — LE TIMBRE. 

;s ondes. — Vibrations pendulaires. — Sons simples et 
3mplexes. — Harmoniques. — Timbre de la voix et des 
nents de musique. — Sons musicaux. — Voyelles. — Ré- 
cc multiple. — Analyse du timbre 224 

XII. INTERFÉRENCES. 

its. — Sons résultants. — Tonometres de Scheibler et de 

. — Influence du mouvement de la source 259 

XIII. LA VOIX. 

le la voix. — Basse, ténor, allô, soprano. — Les voix cé- 
— Chant et voix parlée. — Voyelles et consonnes. — 
loques 275 

XIV. — l'oueille. 

xterne et interne. — Osselets. — Mécanisme deTaudition. 
)res de Gorti. — Inégalité des deux oreilles. — Jugement 
direction des sons 287 

XV. — MUSIQUE ET SCIENCE. 

de la musique. — Sauveur. — Euler. — Rameau. — 
loltz. — Consonnance et dissonance expliquées par les 
aenls. — Accords. — Modes majeur et mineur 509 



PARIS. — IMP. aiMOy RAÇON ET COUP., Î^W16 \!!'fcM\i\Vt\\» V.