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sboutin
La Curieuse Vie
Marcellin Desboutin
ÉDITION DE LUXE
a l'tr tiré do cet Ouvrage
60 Exemplaires numérotés
sur papier du Japon.
_3Hl
L'HOMME AU GRAND CHAPEAU
CLÉMENT-JANIN
La Curieuse Vie
Marcellin Desboutin
Peintre - Graveur - Poète
henfi FloutS
(j
Paris
h. floury - éditeur
2. Rue Sainl-Siilpicc et 4, Rim^ dr Condr
1922
A
MONSIEUR
JACQUES DOUCET
Fondateur de la
Bibliothèque d'Art et d'Archéologie
HOMMAGE
de son ancien Collaborateur
reconnaissant
C.-J.
Le rriiiin|)hc' di- SilniP ( l'ilulurr . /n','//
Coll. A. P.obln
AVANT- PROPOS
La physionomie' de Marcclliii Dcsboiiliii csl une di-s plus ciiiifiiscs .1 .i.s
plus attachantes cjui soient.
Lettré, et même érudil, poète, dramaturge, peintre, i,'raveur. |>orlraiti>le
remarquable, esprit vif, eieur ouvert, main lari,'e. dominant la mauvaise
fortune trop fréf|uenle, par son acharnement au travail, bohème par cir-
constance plus (pie par vocation, rachetant le débraillé de sa tenue par sji
distinction naturelle, Desboutin fut. dans la vie. le type «l'une humanité
fXceptioiuu-lU'. dont K's s|H-ciiiuMis anlcrimirs se ronconlrent avec les philo-
soplu-s cyni(pu's (rAiilisllu'-iu- à \)\n'A^'nc ci iW C.nilôs à Monip|)c. avec Socrate,
avec KpiclMc. puis, en saulaiil plus duii milléuairc, avec Villon, avec les
printres Hruau.lel el Ceorijes Michel, avec ce Neveu de Hameau que Diderot
evo.pia si |)laisaniMieiil, enfin, loul \nvs de nous, avec Hallanche, Gustave
Planche. C. de Nerval. IMcire Dupoul, Tahar, Chinlreuil, Desbrosses, et
plus près encore, avec I Imri Pille, Veilaiue, Léou Cladel, van (io^h. de Sivry
tt Toulouse i.autri'C. ,
I )f ees Diininaux. il y en eut toujours. Ils sont la satire vivante de leur temps.
On les ainu' pour ce (pi'ils synd)oIiseut de protestation, même involontaire,
contre la servitude, parfois iusupi)ortal)le, des conventions mondaines. Ils
soûl les veuf^eurs de ceux à (pii leur situation subalterne ou leur timidité ne
permet lent pas riudi-pendance de l'allure. Se vêtir à sa guise, jouir d'assez
(le proslauce pour (pie nulle dêfrocpie ne semble ridicule, avoir un ascendant
personnel. |)osséder un cerveau meublé d'idées orii^inales et de connaissances
variées, être assez libre de préjugés, pour dominer, sinon son époque, du
moins son entourage, el assez martpie de genlilhommerie pour ne tenir à
l'argent ([ue dans la nu'sure où il u'imi)li(pie i)as la bassesse, faire preuve,
enfin, d'un talent supérieur en ])lusieurs branches de l'art, voilà ce qui, à
travers les temps, s'est rencontré (juchpiefois, et ce que Marcellin Desboutin
a réalisé avec une i)uissanci' (jui a laissé le souvenir le plus vivace, et en a fait
comme l'hérilier d'un genre, qui eut ses prototypes en Benvenuto Cellini,
eu l'.vrano de liergerac et eu Casanova. Si Desboulin avait écrit ses mémoires,
mil doute (pi'il n'eûl atleinl à une réputation égale à celle de ces illustres,
avec plus de moralité cpie le dernier ce])endanl.
II y eut, eu Desboulin, le conflit de deux races. Il élail bien de celle époque
où Saudeau a place MddriiïoisrUr de la Seifilivre et Octave Feuillet Le Roman
d'un jeune lunuine pauvre. Seulement, celli' rivalité des Monlaigus et des
l'.apulels (pii, après la lieslauraliou, mettait aux prises les descendants des
émigrés el ceux de la l)ourgeoisie dédaignée, |)our aboutir, en fin de compte,
h des unions cpii accrurent h- nombre, sinon des vrais nobles, du moins de
leurs partisans, celle rivalité Desboulin la portait en lui. Sa mère était de
sang bleu el smi i)ère de sang rouge. ]1 tint de l'une ce mépris du qu'en dira-
ton, (ju'elle |iossédait comme une marcjuise du xviii" siècle et, de l'autre,
un besoin intime de régularité sans cc^sse étouffé i)ar un rare esprit de désordre,
mais qui apparaît d'une manière surprenante dans les lettres d'affaires que
nous avons eues sous les yeux. Desboutin savait fort bien discuter ses inté-
II
R'Is ; il les iiictKi loujoiirs avoc uiR- assez j»niu(h- hahili-lé. Qu'il s'.inil .l'""-
iniiiiiKiiidi' (le ri".t:il (iii de l:i Ville. (i"iiiic passr de clu-rnln di- fiT a <.l»
tle |)()rlrails à exétulor, d'un dranu- a " chauffer . seluu sou rxpn'ssion. il
s'eulendail parfaileiiieul à se servir «le ses <|ualil«'s de sédu<lii»u. ri iiori
moins de ses défiiuls. Sa eorrespuniiauee. au sujet dfs fani«-u\ l-raj^nuard,
de Grasse, élahiil, sans ré|)Ii(|iie, qu'il n'élail pas luiniine à se laisser Irnmprr
et qu'on ne l'écorchait pas sans (pi'il poussai des cris ;i auieuler... tout Mout-
marlre ! Mais il avait de uiauvaisi-s niclliodi-s.
Les l-"lorenlins disaienl de lui, pendant les sei/e aunéi'S de sou séjour a
VOinbrellinu, qu'il était uno bel liipo. (x fut. en effet, un type. Il appartenait
à cette catégorie d'artistes, mais ceux-là de médiocrt' envergure, (pie Murger
a peints sous des couleurs (pii ont atueiié à la Holiènic la sympathie des
Bovary de tous les mondes, en même temps (|u'ils déterminaii-nt de fâcheuses
imitations. Combien sont partis pour le royaunu- de Bohème et ses sept
châteaux, qui arrivèrent au négoce sauveur ! Ce furent les heureux. D'autres
se fourvoyèrent irrémédial)lemeut dans l'art |)our lefpud ils n'étaient pas
faits et le reconnurent trop tard, au rayon glace du noir soleil de la mé-
lancolie », fille de la réalité !
Ils ont |)U dire, avec Murger, (pii \écut celte triste vie, et avec Des-
boulin, qui, vieillissant, [)ensail comme Muiger :
...Ccllf mute si ln-lU-,
Quand j'y fis mes |)ruiiiit.TS pav.
MaiiitcnaïU. je la vois IcUv.
Telle ([u'elle existe, liélas !
.Je la vois étroite et sombre.
1^1 déjà j'entends les cris
•I)^' mes eomi)a'4nons, dans l'nmtire.
Qui marrlienl les pieds meurtris !
Ces cris, Desboutiu lui-même les poussa, à la fin <le sa longue carrière.
« Désordre et Génie >, avait écrit, avant Murger, .Mi'xaudre Dumas
père. L'un n'excuse pas l'autre, mais, à la rigueur, le fait passer. Desboulin,
qui fut toute sa vie un parfait honnête homme. — ■ Desboulin, la loyauté
même «, écrivait un journaliste (1 ), — i-t (jui disait lui-même, sur la fin de
sa vie « qu'il n'avait jamais fait |)enlre personne ■. n'eût pas le grave
(1) Ci. S()Lvi;n snck (Pseudonyme de .). (.iir>p. I'i>jar<> "Jl
III
ilt-s(»nlri' (iiu- le tlr;iin:tliiri;i' |)rôl:iil ;'i Kc;iii, mais i! eut assez de laleiil pour
(|u't»ii lui |i;u(l(»iiuàl un désordre, surtout malériel.
Il fui hicu. si l'on veut, et puisfiue lui-nuMiie se donna ce ([ualificalif,
un hn/ii'mr. mais un hnhème di's hauts sommets. Il avait, au demeurant,
plus de ress»nd)lan(e a\i'c (liiarlet, sou labeur, sa niellée, sa causerie spiri-
liu-lle cl sa \ali'ni-. attestée- de son vivant par Delacroix, — comme Puvis
de (',lia\aniu's di'\ail alieslci- eelii' de Desboutin, - (pi'avec les héros tapa-
geurs (In l'omau célèbre, successeui's de Cabrion. Il fut l'aigle parmi les moi-
ni';iii\ Iraucs.
Nous juijerons. au cours de cette étude, de la vi<»ueur de ses coups
d'aile, dans Ions les doniaiiU'S (pi'il aborda.
IV
Maison natale de Marccllin Desboutin, à C'-riTy (Allier)
LES PREMIÈRES ANNÉES
Gilbert-Marcelliii Deshoulin naquit à Cérilly, clu'f-licu de raiiloii di-
l'arrondissement de Montluçon (Allier), le 2() août 182i), k à sept heures du
soir », dans la maison de lïoeliefort-Fonlanges, son .grand-père maternel.
Cette maison, (pii existe encore, forme l'angle du faubourg triùi-llaut et île
la place où s'élève la mairie. Son apparence n'est point seigneuriale. Mlle
paraît dater du commencement du xix*^ siècle et représente bien, avec ses
hautes lucarnes à toits coniques, le type des vieilles demeures du bourgeois
campagnard. Il flotte aujourd'hui autour d'elle, comme une odeur d'humi-
dité et de moisissure.
L'acte de naissance constate que l'enfant était le » fils légitime du sieur
Barthélemi Desboulin, {propriétaire, et de dame .\nne-Sopliie-I)alie l'arges
1
,1,- H..rlu-f(.rl. (I..mi<-i!ii-s on In ville .1.' CcTilly. Premier lémoin : Pierre-Lazare
.II- Koehefurl, pn.|.riel:iire, (uule de reiilaiil ; deuxième lémoin : .loseph-
Alh.-rt (iirun. étudiant, non parent de l'enlant, tous deux majeurs, domieiliés
à Cérilly. »
Telles sont les énoneiatinns de rétal-civil. l-:iles suflisenl à établir, dès
r:il)ord. (|ue Deshoutin n'était pas baron, ou eomle, ou marcpiis, comme
on |\-erivit souvent et eomme, entre autres. Le Fifiaro, Armand Silvcstre
ft .lost-phin Peladan i-n aeereditèreuL la légende. Celle-ci dure encore et,
reeernnuMit. M. Widor s'en faisait l'écho sous la cou])ole même de l'Institut.
Il affirmait (pu- le m fastutaix manpiis de rîochefort », qui n'était {)as le
célèbre pamphlétaire, était devenu ])einlre et j^raveur réputé sons le nom
de .Mareellin Desbontin. (luil s'était ruiné en traitant à table ouverte d'in-
nombrables i)arasites et (pii! avait fini, en véritable plébéien, par tenir ses
assises dans les cafés du Houl' Micli. Voilà bien des fausses notes pour un
musicien ! (1) Mais cette léi^eude a. du moins, une source visible. C'est celle
de l'ascendance féminine. Bien ((ue. à notre connaissance, le bénéficiaire
n'en ail jamais fait état, sinon deux fois, une première fois dans une procu-
ration datée de Londres, l.'i avril LS.')!, où il est dénommé Desboutin de
Rochefort. sans aucun titre ; la seconde fois dans un acte sous seing privé,
|)assé à (ienève. et (pi'a vu M. Ilichard, avocat en celte ville, où il est dénom-
mé (. baron de Hocheforl ", il ne lui déplaisait probablement pas outre mesure
de voir son nom cassé en deux (des Boulins, avec un s, comme on l'écrivit
parfois) ou allongé, cl servir de su])porl au lion flamboyant du blason mater-
nel (2). Ajoutons (ju'il \écut, j)lusieurs années, dans un pays et en un temps
oii l'on était aisément Lxcellence, Illustrissime et même Prince, et que le
titre (h- baron ne lui fut décerné ([ue par la coutumière « amplification ita-
liiMine , selon l'heureust' t'xpression de M. K. Delaigue, l'un de ses biographes.
Si Madame Desboutin mère était de noble origine, le sjcurBarthélemi Des-
boulin n'était qu'un bourgeois notable de C-érilly. M. Créj)in-Leblond, qui
(1) Séance des Cinq .Vcadémies, septembre 1920 (élof^e de Georges Lafenestre).
(2) I,es armes des (".hauveau. l)arnns de Hocheforl, sciiincurs de Sirieyx, de Treignat
rt aiUrt's lieux, ori<iinaires du Limousin-Bourl)ounais, élaient d':uijcnl nu lion de gueules.
La famille l-'arfies, dont les armes étaient, suivant l'Armoriai manuscrit de la Généralité
(le l.imoijes, de fjurules () la ijerbc (/'or, hit substituée au nom et aux armes des Rochcfort,
a|i!-és l'extinction de cette famille, au milieu du xviii"^ siècle, jjar suite du mariage de Jean-
Haptiste-, Joseph Farges avec Anne-Marie de Chauveau de Hochefort (Comte dk Soultrait
\rmiiri-il du liourbuniuiis, 2<' édit.. t. 11, Moulins, André Paris, l.S'tO).
l,a mère du futur graveur était fille de Claude- Ignace I<"anies de Hochefort, qui portait
es armes ci-dessus rai)pclées, d'anjcnt au lion rampant de (jueulcs, et de Marie-.Ieanne Pctit-
1
.Jean
^f
Henri ROCHEFORT
(2' État)
a inihliù sur son cfltl)!-.' cumpatriolr. dans W liullrlin ilr hi ^...,,1, <, nniti.itmn
du Bourbonnais (juin l'.lO'i). une l'hnlc fort l)i.-ii <ln( innmlrr i-l .laltriivantc
lecture, que nous aurons souvent l'occasion di- imllrr a conlnbutiou. a fait
des recherches j)our savoir si Harthi-lcmi avait ctt-. coinru.- on I.- |.n-t.-ndait.
garde du corps de Louis W'III. ou si. coininc ManclUn U- crovail. il l'avait
été de Charles X. Xous n'avons Inaivc nulle part, dit-il, confirmation de
l'une ou l'autre de ces assertions. Les carions de la Maisc.n dn |{oi sous la
Restauration i (Arch. Xal. série (i:',) n'en offrent aucune trace. De niéiiir.
cette qualité n'est pas nunlionnee. on l'a vu, dans l'acte de naissance de
Marcellin, non plus (pie dans l'acti- de décès de liarllieleini lui-rnènn- (i
21 septembre 1812).
A vrai dire, ces origines n'ont (piun intérêt secondaire. La lij^nee des
Desboutin commence à .Marcellin.
Qui sort l)itn son pays ua pas htsnin d'aïi-ux !
Poursuivons-donc cette biographie rapide, l'.lle est assez curi«'Use pour
n'avoir pas besoin de l'éclat du passe.
Desboutin vécut d'abord à Cérilly, dont il aima toujours à évfiquer
les aspects familiers, et où il projetait «le retourner, i-n un ullinu' pel»Tinai;e.
quand la mort le frappa. Cérilly, bour^ clair, tapi au fonil d'un pli de ter-
rain, dans une plaine aux ondulations douces, aj»réablement coupée de bt»u-
quets de bois, de ruisseaux et d'étani»s. La forél di- Tronçay. où se donnent
de grandes chasses, à ipiehiues kilomètres de là, dondne la cité de sa masse
imposante.
Vers sa dixième année. Marcellin fut |)lacé au Petit Séminaire d'V/.eure.
qu'avait fondé Mgr de Pons, et où il se lia avec le neveu de ce prélat. Il v
fut brillant élève. Il fallait cependant un stimulant a son travail : Maman,
écrivait-il, si vous voulez ([ue je sois pri'mi<T à la i-omposition de mardi,
envoyez-moi, lundi, une dinde rolie. On aurail pu croire qu'un (ïrimod
de la Reynière, un Hrillat-.Savarin, ou un de .Montmaur, se j)réparait.
Mais non! Il était surtout ijros mangeur. Ltudiant, il faisait K [..i..
qu'il gagnait, île prendre trois rejias successivement dans trois auberges
réputées pour l'abondance de leur table. \n collège Stanislas où, de 1X.'W
à 1811, il acheva ses éludes sous la direction liu Père (iratry. .ses aptitudes
gastronomicjues n'ont pas laissé de trace. On n'en saurait être surpris : collège
et gastronomie, sont des mots sans parente. Par contre, il montra lies dis|ïo-
sitions particulières pour le ilessin, pour la littérature et l'Iiistoire (il obtint
un 3e accessit do version Inline, au concours général de LSll. ai)rès avoir
obtenu, en LSIO, des accessits de vcM'sion latine, de vers latins et de vers
grecs), lui littérature, c'était lui ([ui élail chargé, dans les grandes circons-
tances, des à-propos poélicpies. Atin de stimuler son iiispiralion, (jn renfer-
mait dans une salle avec de Tencre, une plume, du papier v\... du café, — la
méthode balzacienne ! VMc lui réussissait comme à rauleur (V lùigénic Grandet.
En dessin, il copiait à la |)hinie les illustrai ions de Tony .loliannol, gravées
en bois par Tliomi)S()n, Porret, l.avieille ou Lavoignat, coupeurs spiçituels,
nerveux et avertis, ('e sont bien là amusements de collégien, car quel col-
légien, un peu doué pour les arls d'imilalion, n'a pas usé son encre de Chine
à reproduire Irait [)onr laille les l)ois du Mdijdsin Pilloresqiie, du Musée des
lùiniillcs et, plus lard, du Joiirndl des Voiidfics, de V Illuslralioii ou du Monde
Illnslrr ? Mais il v a la copie i)énil)le et la copie aisée. Desboulin avait l'œil
et la main ; ses co|)ies étaient des merveilles d'exactitude.
Plus lard, étudiant en droit, il copiera encore, — il copiera d'ailleurs
toute sa vie — et, quand il aura à graver les b'ragonard de (Irasse, il com-
mencera j)ar en exéculc>r une copie peinte à la dimension de ses gravures,
excellente méthode, trop peu suivie des graveurs de reproduction. Ses copies
d'étudiant portaient surtout sur des dessins de Rembrandt, et ce travail,
qui était pour lui un enseignement, détermina l'influence que le maître des
maîtres exerça sur lui.
Que devenaient ces copies ? Elles étaient, à ce qu'il paraît, acquises
par des marchands et revendues en Amérique. 11 ne serait pas impossible
qu'on en retrouvât dans (juelques collections privées, sinon publiciues. Des-
boutin, aux environs de sa vingtième année, ne s'enquérait guère de ce que
devenaient ses œuvres ; il ne voyait, à travers elles, que le sourire avenant
de la grisette, le canotage à Asnières, ou les folles promenades, pleines de
rires et de cris, sur les ânes de Montmorency !
iMitre temps, il fit son droit, passa sa licence, se fit inscrire au barreau,
fut plus ou moins un stagiaire assidu, — et ne plaida jamais. Que faisait-il ?
Il pouvait répondre, comme le donneur de sérénades de Musset :
J'ai fait des vers, j'ai fait l'amour,
car la poésie continuait à être une de ses passions et ((uant à l'amour !...
Dans les loisirs qu'il lui laissait, il composait des chansons.
Il
LE CHOIX D'UNE CARF^IÈRE
All:iil-il (lune se tourniT vrrs la
lilkTatiMi- ? (loMiiiu' toutes les natu-
res bien dtiiiées, il était tiraillé entre
[liiisieiirs vocations. Ce fut l'aiilre (|ui
paMit tniil d'abord l'emporter.
|ji ISI.'». il entra à laeadéinie du
scuipliur l-.lex. |)uis. iii IX 17, à l'ate-
lier de 1 lioiiias (foulure, oii il fit d»iix
^••jniirs. le si-cond sur la fin de IM.H.
Il [ciniil na\tiir fré<iuenté assi-
(iiiiiuiit ni (lie/ bilex. ni chez Cou-
lure. .\ (|U()i bon ? . 1,'arl fait de
Iraililiniis, dont Coulure était un des
( orvpliees, était arrivé, d«' son temps,
.1 la décrépitude (1) •. Sans être un
révolutionnaire comme Manet. (|ui
lui, lui aussi, inscrit à cet atelier, de
lS.')(là l.S.'iCi, le ji-une homme avait
< rpen<lanl la mefiaiut- des formules.
I\spril indépendant, il se méfiait aussi
des professeurs, dont il ciUltestait
l'ulilile et même, chose plus j^rave,
la Inyaule prnfessioninlle II «lisait à
son cousin de Hochefort : Il ne faut
|)oinl compter sur »ii\ ; il faut arracher à larl ses secrets, car les pro-
fesseurs les garilent pour eux »d les cachent (2) . Il préférait ;'» cet ensei-
ilanl ;'i la Ta^^
(1) Tll: DllîKT. Millirl. \>. In (lloiir>. i-il.).
(J) Kapporlt- par .M. Cki)!!»-! .il.l«>ii<l. h>r. ni
iJiicnient hv])()CTiU' rétiulo dirrclc (1rs iiKulros. C'est par coLLe élude que se
forment les grands arlisles. Ils sciiilciil 1rs chefs-d'd'uvre, non pour les
pasticher, mais pour découvrir le véritable ressort du ijénie : chez celui-ci le
don spontané, chez tel autre la volonté tenace, chez un troisième l'esprit ou
le cœur, chez un (piatrième rà-|)ropos, rim|)révu ou l'invention, etc..
Degas a précisément donné la lonnule de cette initiation, lorsqu'il a
proféré ce pr()|)os, plein de superbe : " .le descends des maîtres, maisje ne
les imiti' j)as ! »
En 1(S1(S, Desboutin st' rend à Cosiie-sur-r(Kil, auprès de sa mère, qui
y habitait le château de Petil-Hois, de|)iiis la mort de son mari, survenue
à Cosne, le 21 septembre LSl'i.
Barthélemi s'était tué d'un coup de pislolcl, |)our échapi)er aux suites
des morsures de son chit'ii, i'iirai>é. Ou le trouva, un nui tin, mort dans son
poulailler. Les deux époux vivaient sé|)arés, en médiocre intelligence.
Ce Barthélemi Desboutin ne se recommande à l'attention que par un
t'ait : il eût pour donu'siicpie Louis-Pierre Louvel, (pii devait assassiner le
duc de Herry. k' 1.'5 février 1820. Louvel, né à Versailles, mais domicilié à
Cusset, fut aux gages de Barthélemi Desboulin, probablement sur la fin
de 1(S1.'), et ce serait sur la reconnnandation de son maître (pi'il serait entré
dans les écuries tlu l»oi. On ra|)porte (pie Louvel, renconlraut Barthélemi
quelque temps avant l'attentat, lui aurait dit :
— « Ah ! Monsieur, vous avez crû faire mon bonheur en me plaçant
ici ; c'est mon malheur (pic vous avez préparé !
On sait (jue u l'honune », comme le nonnnait sa victime mourante, pré-
méditait son acte depuis 18L1, depuis la rentrée des Bourbons « dans les
fourgons de l'étranger. » Ce jjrojjos signifierail-il (pie l'on avait facilité sa
|)erte en le rai)prochaiit du duc ?
Il se serait plaint aussi d'avoir été cravaché j)ar ce dernier. Ses décla-
rations, au cours de l'inslriKiion et à randience de la Chambre des Pairs,
contredisent cette version. Il déclara cpi'il n'avait aucun motif d'animosité
personnelle et comme le président stigmatisait son <( lâche attentat », il
s'écria : « Lâche ! Lâche ! (joyez-vous qu'il ne faille pas du courage pour
tuer un homme ([ui ne vous a rien fait ? -) Il convient donc de tenir |)()ur une
légende, ou une déformation de la vérité causée par les passions d'alors,
le propos de Louvel sur les sévices dont il aurait été l'objet.
Du chàleau i)rimilif, ou plutôt de cette construction, i)lus ferme que
palais, mais entourée d'un beau |)arc, il ne reste (|u'un corj)s de logis attenant
à un casU'l reiuiissaiici' (|ii'iiii arrliilccl.', :itiii <lii tlt-cor, «'•difia a sa place.
Dans cette eonstriidion. i! eiii>loba un Vfslij^e de l'ancicnin- <lffn«-tir<-, uru-
vieille tour, invisible tie ICvii r i. nt , .|iii ..ii ,i.- ,;,jjj. (ri-scalic-r.
PeLilc Lspiink- ( l'cinlitrc. IHTfit
(Coll. I)ur;)ii.l-l<U(l»
C'est au liiàlean de l'elil-Hois i\uc se nndil Mareelliii. ({uand la révo-
lution. (Idiil il ne Lîoùtail point les ris(|Ufs. su.rtoul après les journées d«'
juin si sanglantes, lui eût eonseillé de (]uiller Paris.
Il n'était (las l'honinu' des troubles dans la rue el iw s»- eomplaisail «pia
demi aux dangers ([u'ils engendrcnl. \'.u outre, il nainiail |)a.s Louis-Plulippi-
el moins encore la Hépubliciue. 11 était légiliniiste, coninie ses parents, et
tenait ferme pour Cliambord :
l'assiirt'Z-voiis, mes niiiis, je suis lihmc,
dit le refrain d'une de ses chansons.
11 rentra à i^aris, avec le calme, sur la fin de 1818, repassa à l'atelier
Couture, où il rencontra Puvis de Chavannes, avec cpii il ébaucha une
amitié dont la pleine floraison devait se i)roduire trente ans plus fard. Puis
il profila d'une inxilalion de son ami Armand de Pons, son ancien condis-
ci|)ie au séminaire d'W.eure, devenu fonctionnaire à Issoire, pour se rendre
dans cette ville (1819).
Issoire était alors une cité l'iche, du fait de ses vignes qui donnaient
un vin réputé. La société aisée se réunissait et se divertissait en des fêtes
n()nd)reuses. On y aimait la bom])ance. Le chemin de fer n'avait ])as encore
nus Lh'ini()id-l''erran(i à une heure de la s()us-|)réfecture, el la ville tenta-
culaire n'ext-rçail |)as encore', par ses industi'ies el ses ])laisirs, son action
pneumalicpie. Issoire, (pu devait recevoir un pi'emier coup de la création de
la voie ferrét'. en ri-çul un st'cond du phylloxéra. Le dicton dont elle s'enor
i^neillissaii :
Issoire,
lîuii \iii à ixiiic,
iic'lirs l'ilk's à VI ir,
ne fut plus vrai (pie partiellemeiil. II y reste de belles filles.
Desboulin n'était insensible à aucun de ces attraits. Ouehpies vieilles
gens ont i^ardé le souxcnir de folles écpiipées dont l'appailement (pi'il occu-
[)ail, avec son and de Pons phice de la 1 !é[)ubli(iue, fut l'impassible témoin.
Mais d'auli'es témoins, moins impassibles, se plai^iureid. Le propriétaire mit
à la polie (k's locataii'es assez impertinents poni' laisser la nuit leurs fenêtres
ouN'erles et éclairées, sons les regards avides de curieux (pn s'amusaient fort
du spectacle, mais criaient au scandale. Desboulin el de Pons allèrent loger
chez un pharmacien, qui avait un mauvais caractère et une jolie femme.
8-
1 1
D'ISSOIRE A L'OMBRI-.l.IJNO
(.(•llf fiiiimc il;iil l;i;iihI.- ri
lorlc, l)lniuli'. ;ivi'c un sfiiirirt- iléli-
ciiux, (les yeux :illir:ints. Us traits
iri^nliiTs et un Iriul admirai)!»-, un
U'inI (if flamanilr. Iransparml v[
lin. (loni un j^rain ilt- hi-auti-, sur la
joui' (Iroitr, pose conum- la inouclie
<linu' (ixincllc au Irinfis d»- la l'ara-
hi-rc. souii«^nail la fraidirur. i;ilc
l'Iail inli-llii^t-nli'. possédait un esprit
naturri it une voix a<,'ri'al)l«.'. \-A\v
se taisait rnltndrr. aux r'.'unions de
!a !i<ntr!i issoiricniu'. Dcsboutin aussi
•hantait. Ijiiuk' de Pierre Dupont.
mais dans une toute autre eouleur
;»iilili(pu', il interprétait ses propre^
chansons, imitées de Béranj»er. -
; eellis-là mêmes (pi'en eette année
IN.'tJ. il publiait en un volume dédié
à son «ami Armand de l'ons . i'.hun-
sons et Cliansoniivllrs ( 1% poi^raphie IMon frères, .iii. rue de N'aui^irard).
Une vieille dame, née en 1<S2<S, se souvenait encori". en avril l'Il."), de ees
fêtes et de ces chansons. Mlle Iredonnait parfi»is. de sa v«»ix eassée d'aïeule, (pii
fait ressembler la chanson à ces vieux sous usés, oii ne subsiste plus, ijc l'effi^ii-
souveraine, qu'un contour indécis, un couplet polilique dont voici le refrain :
iJu.iikI II Mnntijiiu* ;uiinulicr.i
De Miii rat.
r.n>(|iu-lf. ma miii-lti' (1).
l'cliLc l-"illo au foulard rou^^' { l'rinturr, i ^'
Coll. J. Desi.oiitiii
(1) Cette chanson lu" fi).;nre pas dans le reruci! <i «IcN-n-i.
M'"c C... — qifiMi raiiiillc on a|)|)elail la belle .Iiisline — bien que son
mari fui honaparlisle, on bien à cause de cela, chanlail aussi les airs léifiLi-
niisles de Desboulin. Ce mari était surnommé Pierre le Dur. C'était une sorte
d'ours ])harmaceulique, tout à ses bocaux et à ses juleps, honnête homme,
mais autoritaire cl brutal. La vie en ménage n'était pas, comme l'on pense,
des [)lus agréables. Aussi, quand la l)elle .Justine devint veuve, Desboutin
n'cût-il point de peine à en faire sa femme (début de 1851). Ils partirent
aussitôt |)our r.Vnglelerre, où ils se trouvaient encore le 13 avril 1<S51, date
de la procuration x Desboulin de Ixochefort » dont nous avons parlé ])lus
haut, t'ne fille, Marie, leur unique enfant, na([uit sur la fin de celte année.
Mais, de 1810 à 18.") 1. il y a c\m\ ans. b'.st-il vraisemblable que Desboutin
n'ait, duiaid ce ti'ini)s, pas l)ougé d'Issoire ? On dit bit'u ([u'i! y fît des por-
traits, mais nous n'en avons retrouvé aucun. 1mi réalité, il voyagea. Il visita
la Belgique, la Hollande, fit un assez long séjour à Amsterdam et il est pro-
bable qu'il alla une première fois à Londres. Il se mit, ici et là, à la recherche
de tableaux anciens et d'objets d'art. Le conunerce des antiqniles n'avait
pas pris l'extension que nous lui voyons aujourd'hui, où la moindre « vieil-
lerie ') a une valeur, rien que parce qu'elle est vieille. Les campagnes n'avaient
point encore reçu la visite méthodique d'astucieux marchands qui propo-
saient le troc, toujours accepté, de meubles démodés, de boiseries dont la
dorure s'éraillait, de faïences à l'émail craquelé, contre des mobiliers et des
ustensiles neufs. Au cours de ces voyages, Desboutin put donc amorcer la
fameuse galerie de l'Ombrellino.
Peu après, le couple se rendait en Italie, peut-être pour la santé de l'enfant,
car Desboutin fut toute sa vie, comme \e pouero d'Assise, un ami de «notre
frère le Soleil », et lui accordait toutes les puissances physiques et morales.
En Italie, les voyageurs ne dépassèrent pas Florence. Desboutin ne
voyageait pas pour le i)laisir de se déplacer et d'admirer, guide en mains,
des paysages réputés ; il voyageait pour un but : voir un ami ou un musée.
Cela fait, il s'arrêtait. Il racontait de lui-même ce trait : à dix-huit ans, sa
mère lui avait conseillé un séjour d'agrément, à l'étranger. Le jeune homme
acquiesce et on lui indique par surcroît, le i)ays à voir. Il part, accomplit la
tournée prévue, ponctuellement, sans flamme, et revient au logis, non pas
tirant l'aile et traînant le pied, ce que l'on pouvait attendre d'un beau garçon
vigoureux et plein de prest nce, mais rapportant, au contraire, une forte
partie du viatique qu'il avait reçu. vSon voyage n'avait été qu'une forme
nouvelle de ses devoirs d'écolier ; la tache finie, il se hâtait de revenir 1
10 '
X
^\v'
^
^
Alexandre DUMAS Fils
( I" tiAl)
Au fond, ce V()y;ij4.'ui-, (|ui iir parviiil (|iii' inoiurntaricmrrit :i fixrr sa
vie errante, n'aimait [)as les v()ya<»es. Il ne Us entreprit (jiie s(nis le roup .Ir
fouet de la nécessité et avic Tespuir de rené. mirer ri-',deii ou ri'.ldoradn lic
ses rêves. Quand il le rencontra, a Tf )nd)rellino. il s'arr»'-l:i. Mais rinfi)i lune
.M"> Dcsboulii! I Miju- lit pi, int'j
Coll. Dc.Nltoutin
vint, et il se remit en marche. Celle fois, son hul elail île ilevenir riciie ! Il
chercha la richesse à l'aris. à (ienèvi', a Niic, il la frôla parfois, ni.iis une
incroyable malchance l'empêcha de la saisir, l'.n dehors di- celle préoccu-
pation b()ur<^eoise, relevée par !e souci du lioidieur des siens, l.-s \>IU-s. connue
les maisons, lui étaient indifférentes.
Quand il arriva à Morciice, le hasard le conduisil sur ceLLe colline de
Bello-Souardo. (|ut fail, face à Mesole, cl d'où l'on a la merveilleuse vision
de la ville des Médicis, étendue « dans une vascjue de niontai^ncs, comme une
figurine d'art au fond d'une grande ai<^uiè.re (1) ». A (juoi bon aller plus loin ?
L'Ombrellino était à vcMidrt', il i'aclu'ta et s'y installa. Il ne visita pas le
reste de la péninsule, il connut Florence plus mal qu'aucun des touristes
français qu'il aimait à recevoir avec tant de cordialité. C'est Lafenestre qui
le mena, en 180 1, dix ans après, à Santa Maria Novella, voir les admirables
fresques de 1). Ghirlandajo. Il était bien décidé à vivre et à mourir sous la
fluide caresse de l'incomparable lumière de la Toscane et, de fait, il lui fut
fidèle tant qu'il put.
(A'tte « incuriosité », dont se flattait Montaii^ne, prouve une chose :
c'est que Uesboutin était de ces natures qui ont dans la vie une ou deux
passions et demeurent étrangères à toutes les autres. Il n'était rien moins
qu'un dilettante. 11 aimait la i)oésie et la peinture, mais il préférait en faire
plutôt qu'en lire ou en voir. Il était essentiellement un créateur. Ce besoin
de création fut sa sauvegarde et sa philosophie. Avec la même décision
qu'il acquérait l'Ombrellino, il s'installera, vingt ans plus tard, dans un
véritable taudis. Non pas seulement par pauvreté, moins encore par ce
mépris supérieur des agréments de l'existence qui caractérisait les philo-
sophes cyniques, mais un peu aussi parce que chercher mieux eût été du
temps pris à l'art et que le temps pris à l'art est du temps perdu.
(1) Taine, Votjauc (Il Ihilie, l. !I. p. Kl'.) (1 latluilc, ISCHi).
12-
I \-
LA FORTUNL Di; DI.SI«;L I IN
l'oni iU(|iuTir rnmhrrilimi, villa
liislnri(|Uf, riMi;ir(|ii;ilili- |»ar s«>ii archi-
Ucliirc. par srs jardins ri par sa situa-
linii. I )is|)(»iitiii «-lait donc hicii rirlu" ?
♦Ml la dit. on la t-«rit. on a fort
\af>frf.
l.ui-inOnir m- plaisait, (piand il tvo-
piail SCS splendeurs passées, a outrer
apposition ciilr»' sa fortune d'autrefois
et sa iiiis«re présente. Il racontait, par
e\eni|)le, a l'idinond de ( loiu-ourl. (pli le
consii<nait aussitôt dans son Jiiuri\al,
|iie sa nièli' avait dou/e cent mille
lianes, ipi'elle avait perdus en lui hiiss;int
des dettes (1) . |-".t ce |)ro|u)s était exact
dans sa sec<»nde partie, mais faux, pour
les neuf «lixièines, dans la première. Les
archives notariales sont la pour le
I.e l>f I.au^'iir. «leCrassi t l'iinltirr,lS.SJ ) prouver.
(".nll. r)esl)()utin , , . i i >, i , •
La fortune de Deshoutin. |or>c|u on
liciuida la coinnuinaute ayant existé entre ses père et mère et (|u'oii lui eut
attribué, en oulrt*. sa part dans les propres de son père. - que l'on veuille
bien excuser ce jnrqon juridi(iue ! — s'élevait à L'U..'>()7 francs, rien de plus.
Cela résulte dun procès-verbal de tira,i»e au sort du \2 avril IS")!. aux
minutes de M*^' Honniclioii. notaire à Cosne-sur-lJKil. où étaient situées
toutes les propriétés du futur Liraveur. Ln voici les dèsigiintiniis et
la valeur :
(1) Journal îles (ioncuiirl. t. V. |». 177 a IS".
Contenances
Ancien château et réserve de Pelit-Bois, valeur. 21.700 » i
Domaine des Roubles 30.870 » / ITJ h. 5 a. 65 c.
Domaine de Cachefève 2G.785 »
Réserve de Villaumont 3.700 )> } _^^, . .^.- y,.
Domaine de Villaumont 17. /98 » )
Total 130.8.53 »
A ajouter : Paît dans le mobilier (Tune nuuson
à Paris 1 . 91 1 ■>
Total 135.797 »
A retraneliei' : Soulte à payer 2.230 »
.Montant net (le la succession. . . 133.567 »
Le lendemain, 13 avril, le même notaire réi^ularisait un emprunt de
9.000 francs pour la garantie (kuiuel Desboutin hypothéciuait le domaine de
Villaumont, au profit de ses prêteurs, qui étaient ses neveux et sa nièce. Car
Desboutin avait eu une sœur, Virginie-Louise, née en 1827, qui avait épousé,
à vingt ans, .Jean-Baptiste-Théophile-Jacquelin Dubuisson. (>ette sœur était
morte, à Versailles, le 6 janvier 1852, laissant trois enfants mineurs. La
présence de ces mineurs avait contraint Madame Desboutin mère à liquider
la succession de son mari, en suspens depuis 1842 (1).
Mais il serait aventureux de fixer la fortune réelle de Desboutin à
133. 167 francs, attendu que trois ans plus tard, le 3 novembre 1857, il reven-
dait la totalité de ses biens à sa mère, pour le prix net de 100.000 francs.
Cent mille francs, augmentés d'une somme de 6.000 francs, empruntée le
23 juin, mais diminuée de 9.000 francs, remboursés aux consorts Dubuisson,
le 30 octobre de cette même année 1854, il restait net 97.000 francs.
Certes, pour l'époque, c'était déjà plus que l'aisance. M. Auguste, dont
Delacroix parle dans son Journal comme d'un homme riche, ce que confirme
Ernest Cliesneau dans ses Peintres et sculpteurs romantiques, n'avait pas
plus de 150.000 francs. M. Charles Saunier l'établit, pièces en mains, dans
la neuve et curieuse étude qu'il a consacrée dans la Gazette des Beaux-Arts
à cet artiste (1910). Félix Pyat, farouche révolutionnaire, mais adroit in-
tendant de ses deniers, avait à peu près la même réputation, avec le même
(1) Je tiens tous les rensei<»iienienls conceriuiiil !a fortune de Desboulin île M.Couderc,
notaire à Cosne, de son prédécesseur, M. Bonnichon, maire de Cosne, et de M. Nouvellon,
notaire h Orléans. Qu'ils veuillent bien recevoir ici, mes remerciements.
11
■^y
LES TROIS AMIS
pécuK'. Kriiili" Aubier, S( rilu-, - p.irmi lis plus iinloir.s. s'el:iicnl laim-s
dans la carrière des Icllros nMiilis di- ciiKi •' "•'"**• "''"'" francs d«- rcnt.-s. »|u«-
leurs rivaux enviaient fort. Le loyer de Tar^t-nl elail alors assez élevé et
la vie peu coûteuse. Kn Italie surtout, on p(»uvait vivre lar^»enient. en sacri-
fiant même aux mondanités, avec cent cirupiant»- francs par mois. I.rs capi-
taux se plaçaient avantaj,'euseinenl. Ia- chan'.;c était a 1.") 0 0 sur Milan.
i\ 2r> 0 0 sur (iènes, à X) 0/0 sur Xaples. lu hoinnie ilaffaires v trouvait
aisément son compte. Mais Deshoutin elait-il un lioimne il affaires ? Nous
avons déjà vu, dans notre préand)ule, (pi'il avait a ir liln' d»s pnlcnlions.
en partie justifiées. 11 aimait la s|)éculation, comme les lioninns daffair«N,
et s'y ruina, comme l)eaucou|) d'entre eux ; il avait l'audace dans la ron-
ce])tion, — tpie denormes projets n'a-t-il [)as ré\es 7 d la linnditi- ilaiis
l'exécution, — ses lettres à son ami Simonnet d'ileiine/el, au siijrt d»- scn
drames, en font loi ; il sut, en oulre, toujours sf)rlir d'embarras r[ vivrr dr
son art, ce (pu implicpit- un certain esprit prati(pie.
A la vérité, cela ne prouve pas cpie Desbcnitin ail tle un homme d'af-
faires, — comme le furent, par exemple, N'ietor IIulîo ou .!.-(!. (hi/.in,
mais seulement qu'il ait parfois, et même assez souvent. tfnl<- de l'être.
Xond^re d'artistes furent dans ce cas, et nous ne citerons, |»our mémoire,
que Balzac, imprimeur, et Lamartine, vii^neron. Le>. docnmerds, tu tout
cas, montrent que Desboulin ne fut pas dt-s plus habili-s dans la iiesliuti
de ses capitaux.
Il débuta par la gène, ce (pie prouvent les deux (■nq)ruids hypothécaires
qu'il contracta. Il est vrai cpu' le |)remier, de *.).(MKI francs était antérieur
au partage et que sa mère, fort dépensière, ne lui avait probablement [»as
toujours compté ses revenus avec l'Xactitude ; le secoml, de r).(MM» francs,
était le prélude de la vente (pi'il allait faire, à prrle, île ses biens immobiliers
et ne révélait pas non |)lus une situation pécuniaire exein{)te d'embarra>«.
Mais il avait vovagé, mais il avait commencé sa galerie, mais il avait femme
et enfant, enfin il s'était installe à l'Ombrellino, vraisemblablviiunl comme
locataire avec promesse de vente, puiscpi'il ne (U'vint propriétaire (pi'en l.S.">7,
et il est présumable que les (i.OOO francs de ce dernier emprunt avaient pour
objet le paiement tles frais et des droits, comme la vente à sa mère avait
été déterminée par l'intention île jtayer la plus grosse partie de sa princière
acquisition. Ajoutons (pi'un fils ([.li vend a sa mère peut consi-uii rie
qu'il doit normalement récupérer plus lard ; mais. ici. l'evein : ma
un démenti à ses prévisions.
C'est, (lu moins, ce (jui paraît résulter de la coinpaiaison des actes d'ac-
quisition et de vente. Il avaiL payé, en 18.')?, rOnihrellino l'i.'llcSO lires ;
il le revendait 1 12 000 lires en 187 l, mais Timmeuble était ijrevé d'une liypo-
thèciue de l.'iO.l.'ÎO lires 60 c. Il ne lui restait donc que 12.000 lires, déjà
absorbées par les dettes qu'il avait contractées, depuis son retour en l-'rance.
De sorte que, l'Onibrellino vendu, il ne lui restait rien de sa splendeur passée,
rien, sinon le souvenir.
L'Enfanl au Pnpillon (Peinture, issi)
Cnai. Wichaud
16-
\'
LE PROBLÈMK DE LA \ ||-
Nous virunis (U- Voir (|ue le
futur jiiiish- u'îivail vu pour tout
luritiij^c (\\n- (|n:ilrr-viiij^l-(lix-M()l
iiiilli- fraiiis, il <|n"il avnit p:i\'
Iniiil.rtlliii.. rj.i. 1X0 lin-s. v
clianm', 1rs dfUX soiimihs s iijui\;i-
laiiiil [irf>t|iic. Il III- m-Ntail aucun
nviMiu à I )rs|)iiu(iii, (|ui aclu-tait
ri|H'n(laiil tli's u-uvros d'art, (|ui
avait (Ic-s liahiludi-s «le jjeiu-rtusc
lins|)ilalilé l'I tic larLjf aisam-f. I )•■
<|U(ii duiic vivait-il ".'
\-'a\ vi-rité. roniiiii' il riiii\ ni
dix-scpl aiiN plus tartl. il tirait K-
diabk- |)ar la queue (I). occupa-
tion rré(pieiitf, dans hupielli- il tlut
passer niailrc. De plus, il avait
iiiprunté sur sa propriélc et. «laiis
une appréciable mesure, il tn«-ttait
à profil ses facultés d'arlisle. Il
faisait des copies, coninie jadis,
il peignait des |)ortrails. il gravait
à leau-forte et à la poiiile-sî'che.
I/esl:outill. nous l'avons d' > i
(lit, avait le don du fac-siniile. Il imitait a s'y mé|)reiidi.
plume, les frottis ilu crayon, les touches <lu pinceau «le tel ou i< i miiii. >..ii
d'il [xnaiit scruîail et discernait avec subtilité les particularités île la facture.
Petite- lille ;> li iiudnillo i l'cinlun- 1
Col). .1. L)e>l)( m in
(1) Lillrv «lu lit ;iiiùl 1S71, a Simonml d'I |iiit\r/rl ; I. miix air< iiliiiiir, .1.
d'années, à tirtr k- diabli- par la (lui'iif. «iiir m.i |i..>iti.>M |.u•^.■Ill^ i-.< m., ffr.ii. |..>
i:
Il aurait pu èlre le Calcar do notre siècle. Il se crsolut très vile à deinander
à son liabilelé les ressources dont il avait besoin.
lùnile Pessard, qui fut professeur d'harmonie au Conservatoire de Paris
et riiôte de Dcsboutin à l'Ombrellino, en 1868, m'écrivait :
(< Il avait constitué chez lui (à l'Ombrellino) une sorte de musée de-
peinture, dans lequel s'entassaient des tableaux de maîtres d'une grande
valeur, et des copies merncillcuscs laites par lui, et patinées si artisti(iuement
et si l'iilMenienl, (iiic les experts eiix-nièines les eonjoiuhnent avee les originaux »
Il racontait aussi ([ue Dcsboutin, lors de son voyage en Hollande, avait
aciieté, ciiez les fripiers, jilusieurs vieilles u croûtes » enfumées, et que s'exer-
çant un jour, avec son gi'attoir, sur une |)einture qui s'en allait ])ar écailles,
il découvrit un i morceau» (|ui hii lit pressentir un maître. Il nettoya la toile
avec ]irécauti()ii et fit re|)araitre \\\\ excellent tableau de l'école hollandaise.
Le conservateur de la vieille Pinacothèque, de Munich, — à ce que préten-
dait Pessard, — ([ui se trouvait à Amsterdam, eut vent de la découverte
et acheta la tableau.
('/était un bon début. Ce ne sont i)ourtant pas de ces débuts qu'il est
aisé de {poursuivre. Il y faut l'occasion. Dcsboutin, d'ailleurs, recherchait
les vieux tableaux par goût, par besoin d'étude, non |)our en faire le com-
merce. C'est i)ourqu()i il en cojiia tant. Puis, la nécessité, — « quelque diable
ausq le poussant, » — il en vendit. Sa curiosité, toujours en éveil, lui ])osait
le |)r()bK'nr^ des « apparences ». Il voulait à ses copies ces teintes i)rofondes
ou p uiois rancies, ces blancs jaunis, ce réseau de craquelures, qui ajoutent
du mystère à des œuvres qui, peut-être — telle la Ronde de Xuit (1), — n'en
eurent point dans leur nouveau-té.
Pour obtenir ce résultat, il enq)loya une multitude de procédés. En
dernier lieu, — c'est-à-dire vers 1865, car de retour à Paris il abandonna
les copies et ne fut plus que créateur (sauf en gravures et pour « nourrir
la nichée », comme il disait), — en dernier lieu, il s'était entendu avec un
boulanger voisin de l'Ombrellino, qui faisait cuire ses toiles dans son four
et les dorait comme ses pains. Elles revenaient de chez ce fornajo anciennes
à plaisir. Après quoi, il les accrochait dans sa galerie.
(1) A propos de la Ronde de Nuit, qui vient, h titre d'exemple, sous notre plume, rap-
pelons que I^esboutin fit une copie de cette reuvre célèbre, et (ju'ellc fiîjura à son exposition
postiuime (le 1902. Cette copie appartenait à .M. Cliéramy, qui, d'abord, la croyait de
Ricard. Ce n'est que lorsque Dcsboutin visita la collection de cet amateur-avoué. — dont il
grava le portrait — qu'il reconnut son œuvre et en fit changer l'attribution. Dcsboutin grava
aussi h la pointe sèche deux fragments de cette œuvre, en format très réduit.
18-
M"" BOUQUET DE LA GRVE
Fuis, vi'iKiiciil hs amis, (|iii s'rloiiuiiiciil (|tv:iiil rr\lr:n»r«liM:iirr |).'ilini',
puis k's ainaliiiis. La Idilc ne icslail |)as liMiLjIfnips a sou iluii. Il \ « n .'
niènu- iiiir, si l'on iii croil une plaisaiilr aiuiiiidc, i|iii |>rit, mu ;:
son aiiUuiiti(|iK- sdur, iiai,nifi\' rcssuscilcc a .\riislir<lain. Ii- rlicrnin «l'un
musée (roulic-l lliin.
Etifaiil :m iiiiiillol ( l'tiiiliiir. 1^:,)
Coll. Diiiiiiul-I'iiicl
Desboulin narrail lui-nièuie eelle aneedole. de sa voix linibree. f^russt ,
un peu Iraînanle, pleine de eliarnie cependant.
Un tcdi'scho élail venu le voir il lui avail demande, neiîliijemment
— (ju'avez-vuus de nouveau el dv beau a me montrer ?
— Oh ! moins ipie rien, avait repondu Drsbuulin. .l'ai bien fait un peu
de peinture, mais ce sont des éluiles.
— Pas de Iruuvailles ?
— Encore moins. .le veux dire de ces lr<tuvailles qui eoinplent.
ft
— C'csL donc (iiie vous en avez fait d'aulrcs ?
— Quand on csL un cliasseur comme moi, on fait toujours des trouvailles.
Ces propos étaient tenus dans le parc, et les interlocuteurs se dirii^eaient
vers la villa. Ils pénétrèrent dans la galerie. Desboutin se mit à montrer
ceci, cela, une [)()terie étruscpie, un dessin, une tapisserie, un tableau authen-
ti(|ue d'un nuiître inconnu, mais tout cela ne faisait pas l'affaire du herr
profcssor, qui avait besoin de se signak'r par une accpiisition sensationnelle.
Tout à coup, un ti'essaillemenl ! Les lunettes d'or se fix'ent près du
plafond.
— Qu'est cela ? interrogea-t-il, la voix altérée.
— Ça ? Une co|He de... (mettons Jordaens).
— Une copie, vous croyez ?
— J'en suis sûr I
— Peut-on voir ?
— Hicn de plus facile.
Le peintre approclie une échelle, le cadre est descendu, remis aux mains
de rex])ert. Il regarde, compare, scrute, médite. Il retourne la toile : elle
est très vieille. Sa gorge devient sèche. C^e tableau, il le connaît, mais il lui
semble, si ses souvenirs ne le trompent, qu'il y a, ici, une variante.
— Alors, vous dites que c'est une co()ie ?
— .T'en suis convaincu.
Une copie, soit, mais de la main du maître en tout cas I pense le profes-
seur. Et, s'il y a bien une variante, ce peut être un premier projet.
Il demande à réfléchir vingt-quatre heures, court aux bibliothèques,
retrouve la gravure du tableau. Il ne s'était pas mé[)ris ! C'est bien une autre
version. Là où la gravure montre un ])ilier, le tableau montre une figure.
Il repart i)our l'Ombrellino, proj)ose un nondjre ajipréciable de lires, enlève
l'affaire, cei)endant que Desboutin continue à affirmer :
— l^uisque je vous dis que c'est une copie 1
Et voilà comment Desboutin, en disant la vérité, comme un Français,
mais avec une finesse tout ilalit'uiie, contribua à enrichir une collection
allemande. De telles erreurs, les musées allemands n'ont malheureusement
pas le monopole.
L'artiste vivait donc de ses copies, — ce qui ne saurait surprendre dans
un pays oîi la copie est, en quelque sorte, une industrie nationale. Il vivait
également de ses portraits.
.20
Un U'moi<4iiage or;iI. de stci.iiilr m:iin. mais tout à fait di^iic «le foi.
nous rallcsU". Il dalc ck- l.HO.S.
Celle aniiée-là. Drshouliii avait, a l-lorciice iiumiic-, (iii iiia^iiifi<|ue atrlit-r
où voiiaieiil poser les clients, a (|iii il voiilail éparuner la |)i-nil)le asmisiuii
de sa belle colline. Il existe, à Issoire, un p(»rlr:iil de daine âf^»-e (1), peint dans
cet atelier, avec celle parlieularilé (pu- le visaj^e esl monté en eoid«-iir. parce
que le modèle, ([ui élail son hôtesse à r()nd)rellino. di-scendait à l-iorence
pour se faire iieindre. \'A celait en |)liin été! Sa fij^ure prenait, dans ce tra-
jet, un incarnai (pie le repos n'arrivait pas à atténuer.
Tirail-il éi,'alement un profil de ses L;raviires ? .!<• note simplement
que les premières dalelil de IN.')!!. 1,S.")<S ( l-'iinrtif iirroiidir, Efjel du soir,
L' Adoration des licificrs, — Iiu-oiimir on inrsoi/r hmrln', - Stn'nis lisaiil.
Saint portant une croix), el (piune si •4rande ardeur a pu avoir le stimulant
d'un gain. Deshoulin a peut-être, même en gravure, cessé d'ùtre un ama-
teur plus loi qu'on ne jiense, puisque ce (pii disliiiHue le |)rofessionnel de
l'amaleur, c'est (pie l'un donne ce (pie I'hIi. ^ ■'<•]. C'est jjourcjuoi tant
d'amateurs ont le désir de vendre.
(1) C'est le porlrnit do M"^"- l'ilUtiiT. (.iiic uuim- ^i\;iit .ncrompat'n»? :"! f'1 •
octoj^énairc, .M™» de Biauzat, la p-(p|>ri' iiu-ri- <lc .M"" I )is|iiiiiiin. ((iii allait vi'.
fille. M""' l'elUtier allait, en nulr<'. aijjirendre à Drsbmitin l'art... d'i-icvrr les \
Toujours la poursuite de la fortune I Elle passa trois mois à l'i )inl(rtllino. Dt-sliMuliii l.i
peignit de face, la fii,'ure roum. les mains blanches el fines et Us d(;tails : bniiues, f>n»iU<.
broche, guipure, très soignés.
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Dons It's Jardins de l'Ombrellino (Mine de plomb)
Coll. J. I)osl)oulin
L'< 'miuuci.i.ino. ■ I.i- l':ivil!()ii
\ 1
L'OMBRELLINO
Voilà donc l^osboiilin iiislalli' à l'OnihitlIiiH). sur l;i fin dr ISf»!. «t s;i
légende va s'ébaiuluT. l^lle éclora. lelli' K-miuK', de 1S7.> à INTfi. (]uand
le châtelain ruiné aura (|uillé k' pays du soleil |)i)ur l'affreux pays des bruinrs
et des glaces » et que l'on établira un parallèle entre la iniséri" d'alors et le
luxe de jadis, entre l'amateur de naguère el le lultiur d'à présent, entre
le dramaturge qu'il fut et (pi'il voudrai! éln- enei>re. et le poinle-sérhiste
qui se révèle. Cette àme de gentilhomme, (Uii perçait sous la defnxpie roman-
tique de don (lésar de liazan, celte cullnre ;pn se faisait jour ilans une eon-
versatio.n brillante, dont s'émerveillait la gent artiste, alors uNse/ fruste, la
(listiiiclioii (K's manières alliée à l'cxistiMicc la plus décousiu' el la plus sor-
(li(U', loul cela conlrihua à l'éclosion d'uiu' noloi'iélé (pii ne laiblil jamais.
L'OmhrelliiK), où le couple |)laula la leiile Tra^ile de sou bonheur —
Irai^ile comme Ions les bonheurs humains — était une uia^niricjuc j)ropriéLé,
située à Hello-Si^uardo. Ou s'y rendait, en sortant de b'Iorence par la porte
Homaua. non loin du |)alais Pilti ; des voies en lactd moidaienl jusc[u'au
souiuiet de la colline. ,
La route était bordée de murailles et peu sûre, uue fois la nuit tombée.
Desboutin, (pii n'était [)oint d'àme téméraire et ([ui, en cas d'alerte, avait
facilement recours à « lo sj)a(lone a due gambc », l'épée à deux jambes, ne
sortait le soir (jne ])récédé d'un domesti([ne, c(ui portait un flambeau et chan-
tait des cauti(pies ! .Mais le [)lus sûr daui«er j)roveuait de mâtins à demi-
sauvayes, redoutables comme ceux de ('.onstanlin()[)le. Clrouj)és autour d'une
fontaine devant laquelle il fallait passer, ils grognaient, hérissaient leurs
poils, montraient les crocs et forçaient souvent le visiteur tardif a rebrousser
chemin (1).
I.a villa Albizzi, jadis la villa Seigni, dont l'Ombrellino n'est que le sur-
nom tiré d'un parasol de tuiles rouges qui se trouve à une extrémité de
la terrasst' et (|ui ])araît avoir été édifié vers 1(S2,'). se dresse au sommet d'un
promontoire, que l'on voit très nettement dans la fres([ue du Vasari, au
l^alais \'ieux de Florence. Cette fresque, i)eintc en 1530, montre à gauche
la tour de liello-Sguardo et la villa Seigni adjacente. Du haut de ce promon-
toire, « la vue embrasse au loin renchevétremeut pittoresque des clochers,
des dômes et des palais florentins (2) ». C'est un merveilleux domaine, que
Boccace a décrit « comme un palais, avec une grande et belle cour en son
milieu, des terrasses, des galeries et des chambres toutes ornées de peintures
plus agréables les unes (jue les autres, un entourage de pelouses et de jardins
s[)lendides ; des puits d'eau fraîche, des caves remplies de bons vins, un
l)alais où il mena la troui)e plaisante de ses conteurs (.'î) ». Ce n'est pas là
pourtant, c[u'il conq)osa sou fameux Décamérou, mais à la villa Pianzano.
Si Boccace n'y fit que passer, Galilée y demeura. Il loua la villa, le
5 août 1617, pour cinq ans, à raison de cent écus l'année, avec droit à une
(1) C.'o.st ce (jui advint à M. Lalï'iiestrc. de cjui jt' liens l'anecdote.
(2) LArENKSTRi:. lor. cil.
{'A) Salvatore Minocciii, Bcllasgiiiinln a lù'rriizf. mrnviria sloriclie c lelternrie. Firenze,
Tii)i)<^rafia di l-'nrico Arlani, 1902. Cet ouvrai^e est rempli de vues photographiques qui
reiiseit^nent aliondaninuut sur la beauté île ces lieux enchantés.
part des proilliils : fniils. hk", fi-ves, hntill.s. pois r|iirlir>, tir. Ct-sl re qui
résullo tl'inu- lillrc ;ml«)i>i:iplic de lilliislir N:iv:inl (CkILtIjou M.ii^linhi--
cliiana, Ue parlk-). i;t co (|ui miloris:! s;iiis (luuli- (..nrf^rs I.afrntsUv a fain-
de Galilée un [)hysi(irii cidlivalciir. dans le ^^^•Iln• d<- Ciiicimialus. Il ih-diait.
eu effet, à Deshouliii, son pot'inc ('.iilUnrs liisranis. datr de rniMbrclliiio,
mai IcSiWj, où nous relevons ees vers :
Sur Cl- roc, (i;ililc? ccoiiljiit ...
Ces ilurs cypris l'onl vu, fitr in s;i ><iliiiii|<-,
.1 sa bt'rhr tir frr. ai>/>iiii(i/il son pinl nuif.
Ouvrir d'un \n\\\^ ri^Mrd le loni; voile i|. s vn\i\ d i.
Ce séjour du célèhie inatlunialieien, If^io ImisikIo, ipii dtvait lui surrc-
der dans les mêmes lieux. ;'i diiix siècles de dislauti- (a la vrrilé, c'est à la
villa voisine, de Bello-Si^uiardo. (|uil résida), ne man(jua pas. lui aussi, de le
chanter.
Vgo Foscolo, le i^rand patriote italiiii. autiur di-s l.tttrts ilr .facupu
Ortis, que Lamartine apprécie dans cet iinou\anl épisode des (lun/idenres,
qui a nom (iraziclhi, roman de la jeunesse étourdii" et de la jeunesse antou-
reuse. l'go Foscido vint liahiter sur la bille colline, non en août ISI'J, comme
le porte l'inscription de 1"( )ml)rellino, tiravée en 1X71, lois de la translation
des cendres du poêle, de rurnliam-(ireen à Santa Croce, mais en avril l.Sl.'-},
rectification qui résulte tl'une de ses lettres.
L'ouvrage de Minocclii donne la succession des projiriélaires et le ren-
seignement est assez intéressant et court pour être traduit iii-t:r{tns<>.
« En 1763, la villa dei Seigni fut vendue, pour le conq)te tie riujpital
de Santa Maria Nuova, à Filip|)o Shigoli et, par les fils de celui-ci. en ISOl.
à Pietro Ciseri. Les fils de Ciseri la vendiienl. en LSI.'), a la comtesse Tcresa
Spinelli, veuve degli Albiz/.i. Celle-ci. à sa mort, en l.S.'{.{. laissa la villa
qui, en quehpies années, avait pris le nom de rOinhnllinu, à son neveu Leo-
pardo Spinelli, qui, la luême année, la vemlit au cavalier .\meriiio de^li
Albizzi. En LS 1 1, le seigneur Alessandro degli .Mbiz/.i la céda au sieur de
Rast de Faal et celui-ci, en LSr)7, au sieur Desboutin. l-'inaUnunl. en 1.S71.
elle fut acquise par Mme .Maria Zoubow ■ et jiassee depuis a ses héritiers.
Desboulin fut lionc l'hole artiste d'un palazzo de marbre el de suju-rbcs
jardins (pn, de ce fait, ne tombèrent point entre des mains indignes. Dci
(1) Idylles el Chansuns. (I.cni' rn-. 1S71).
Soigni avaient é(é écrivains, int'nil)ros de la célèbre académie de la Crusca,
d'autres avaient porté les armes ; il semble qu'un j)eu de leur esprit soit
demeuré, sous la loggia à quadruple arcature, en compagnie de Boccace, de
Galilée et de Foscolo, pour allirer, par une sorle de magnétisme animique,
queUpie étranger à leur pairie, (pii l'ut cependanl de leurlamille intellectuelle.
Mnlre la villa du xiv^ siècle et celle (pi'acquit Desboutin, il y avait de
notables changements. « La villa, constatait, Jules Claretie, dans Miss
M(i(/(lc[i'iu nouvelle écrile vers 18()7 et dédiée à Desboutin, est bâtie dans
le style sobre des conslructions italiennes, avec des murailles peintes à fresque,
par des arlislt>s (pii n'onl |)as de nom et qui ont du goût (1). » Mais, dans les
modifications (pie le lemps et le caprice humain apportèrent, l'aspect primitif
avait \)v\\ vaiié. Aussi, ])our le nouveau propriétaire, la demeure était-elle
troj) grande et parfois sonnait-elle le vide. Les immenses salles avaient perdu
leur décoration murale et il aurait fallu un plus fastueux « seigneur » que
Desboutin pour rendre au palais sa splendeur abolie. Mais il restait l'archi-
tecture, la noble ordonnance, les jardins, les eaux fraîches et la vue mer-
veilleuse ! 11 y avait aussi, non loin de la villa, une construction plus modeste,
un (i villino », qu'il ne faut pas regarder avec dédain, car c'était une délicieuse
résidence, que Desboulin occupera à partir de 18()5, après avoir loué le
palais, par nécessité, « à des étrangers souvent maudits (2). »
Edmond Guillaume, qui fut, en 1856, le premier des grands prix de
Rome pour l'architecture, voyageant, l'année d'après, en Toscane, notait,
dans son carnet journalier, dont nous devons l'obligeante communication
à sa fille, Mme Lami, ces détails précis :
« 5 juillet 1857. — Le cocher nous mène, par de longs chemins cernés
de deux murs, à un endroit situé près de la propriété d'un Français, le comte
(sic) Marcellin Desboutin, endroit nommé Bello-Sguardo et d'oîi l'on a, en
effet, la plus admirable vue sur Florence, les Caséines, Fiesole, au delà et
même Pratolino. »
Trois jours après, il revenait sur la beauté du coup d'œil, dans ces lignes
intéressantes à plus d'un titre :
« Rendez-vous, à six heures, au café Doney, avec MM. Lcfèvre, Pelle-
cliet, Daumet, \'audremer, Ciiapu, |)our aller à Bello-Sguardo, chez M. le
comte Marcellin Desboulin. Bel effet de soleil couchant. Nous arrivons à tra-
(1) r.cs belles lù,li(s (Drntu, édit.)
(2) l.AFENESTRE, loc. cH.
2G
M CAMUS à rEventail
vers prés et vignes. I^arfnit.iiieiil rt-riis |.;ir Monsieur el M.ulanie. nous mon-
tons ensuite sur le iuiul de l;i nuiison, d'où hi vue est splmilide «-t romplèle.
Nous descendons à la galerie de tableaux, mais il ne fait plus clair ; une- st-uie
tète charmante, sur un clirvalcl mohiU-, est visible. Charmante p.-litt; fille (1).
Monsieur et Madame veulent nous inviter à déjeum-r sur riierhe. mais ces
messieurs j)artent après-demain ; (piant à moi, je reviendrai. -
Le « déjeuner sur liurhe avait lieu [)rès de V OiubreUiiw, le bizarre
parasol de tuiles rouges, (|ui parait avoir été l'endroit favori du maître de
la maison, l^dmond (iuillaume y dina trois fois. La dernière fois, il écrit ;
« Six heures, c'est l'heure du dîner, sur l'herbe toujours, et en face de
cette magnifique vallée de l'.Vrno (pie dore bientôt le soleil des feux chan-
geants de son coucher... Sous l'Ombrellino, conversation, visite, dame blanche
(5 août 1857). »
Dans cette résidence princière, iJesboutin. eu (ié[)it des difficultés de
la vie, mena une existence enviable, |)arlagé entre les arts, les lettres et la
chaude hospitalité. Il accueillait tous les I-'rançais de marque (|ui passaient
par Florence. .Vux noms cpie cite (iuillaume, le peintre .Jules Lefèvre, le
sculpteur Chapu, les architectes Daumet, Vaudremer. Pellechet, il faut
ajouter ceux cpie nous rencontrons dans d'autres parties de son journal,
Crauck, le statuaire, (iinain. autre architecte, Boyer photographe-graveur,
et, plus tard, Georges Lafeneslre, .Jules (^laretie, .Iules Amigues, le graveur
Laguillernice, Hobert-Fleury et son fils Tony, Sully-Prud'homme, l'/zielli,
Faure-Dujarric, Signorini, peintre et écrivain, lùlmond Texier, I''lo(piet,
Charles Ilabeneck, fils du chef d'orchestre, lui-même écrivain de mérite,
le compositeur ICmile Fessard, le peintre d'histoire l'rbain Bourgeois. Bol-
dini, e tutti (/nanti. Boldini, jeune alors, fit du ihàlelain. vers l.Stll ou 1S«».").
deux portraits : l'un est une fort belle tète grandeur nature, l'autre, sur
une petite toile, représente le maître de la maison, en robe de chambre à
carreaux noirs el rouges, fumant et regardant à ses pieds un chat (pii guette
une souris. Il fit aussi une esfpiisse peinte de Marie, dont la grâce el la viva-
cité l'avaient frappé.
Uesboulin, on le voit, se plaisait dans une société choisie, mai>. ....-
son insouciance habituelle, il accueillait l'autre volontiers. Nous le retrou-
verons tel aux jours dédorés du Café (iuerbois et île la Nouvelle .Mhènes.
Il eîit été digne, par ses inclinations et par son esprit, sinon par ■■■: »,.••.•
(1) .Marie, alors àgc? tlo trois :iiis.
27
iiuiit, (l\'liv iiii floiTiiliii (iu U'm|)s (le Lamviil le Mai^nifique et de Mnrcilc
l-'iriii. (Ut iiii vi'iiilii'ii <ie reiiloiirai^e du cardinal Bembo.
Il aiiiiail à reeevoir sans coiilraiiile, avec enjoiieiueiiL eL cordialilé. Il
ainiail aussi à liavailler, à |)eiiidie, à .graver, à composer des poèmes el des
draim-s. 11 peii^iiait le jour el écrivait la iiuil. De ce double labeur, pas trace
de falii^ue, preuve dune vilalilé i)uissanle. Ce (pii avait trait à la technique
des aris l'inléressail |)ar[iculièrement. Le carnet d'I^dmond (inillaume, que
nous ne saurions trop citer, tout en en déplorant la brièveté (notons que les
deux lionunes ne se revirent plus, même à Paris, sans doute parce que Des-
boulin n'allait jamais voir i)ersonne, Puvis de Chavannes excepté, et que
Ciuillaunu- ne mettait jamais les pieds an cale, salon de Desboutin !) le carnet
(riùlmonil Ciuillaumi-, disons-nous, rt-nlerme une vive escpiisse d'une journée
de l'Ombrellino :
» 22 juillet IS")?. — J'ai vu une terrible chaleur pour monter seid à
lîello-S.^uardo. d'v arrive entin. à (oui près de 10 heures et demie et je trouve,
comme je le craii»nais, "NI. et Mme Marcellin en train de déjeûner avec un
M. Hoyer, pholoi«ra|)he-graveur. Invité à me mettre à table. Café, cigare,
billard, tableaux, galerie. l-Lssai de i*ravure simplifiée. Arrivée de M. et
.Mme Baldimonney, moldaves. Conversation, salon, calembours, puis dîner
charnumt et excellent sur les prés de rOndjrellino. Billard. M. Baldimonney
m'offre une place dans sa voiture et nous revenons à Florence. »
C'est une journée comj)lète, à la vérité un peu exceptionnelle, puisque
c'est une journée de récej)tion. Ou ne travaille pas beaucoup. Pourtant,
nudgré la frivolité des passe-temps et des propos, nous voyons que les
uns et les autres tournent aisément au sérieux. « Tableaux, galerie »,
qu'est-ce ? Une visite aux collections, et l'on y parle d'art. « Essai de gra-
vure simplifiée », qu'est-ce encore ? Uesboutin, dont la première eau-forte,
datée de sa main, porte la date de 185(), avait déjà commencé la gravure.
Ce M. Boycr, « français, blond, à moustaches, ingénieur, jihotographe, inven-
teur (1) >s sous l'expression de « gravure simplifiée », n'initie-t-il pas son
hôte aux secrets de... l'héliogravure ? On serait assez disposé à le croire et
l'on saisirait, à cette date, le point de départ d'une techni(îue dont usa assez
souvent l'artiste, brcinlalis causa, sur la fin de sa carrière, mais dont, heu-
reusement, ses plus belles pièces, ses pièces les plus vivantes et les plus libres,
ne portent point la trace.
(1) N'oie (lu 5 août liS')".
28
Lin autri- jour, on s:iiiiiisrr;i :i des iss;iis dr cli.imhrf in»in- i-l de cliariibr».-
claire. » Il s'ai^il. vv[[r fuis, de dessin, iriais louJKurs dr prori-di.- r.ipidc. Ceci
esL du I aoûl. Le leiideiiiaiii, autre ehauson. le terme est exaet :
« 5 août IS.")?. ... Déjeuner, suivi de ehaiisoris charfiianli-s. pleines
de verve et de iacilité. (dMii)osees et dites i»:ir le baron (le titre a r|i;iiii«c !)
'l'oiiy ! îohcrt-Flfii: \ i \iinr .ir /.(..n/p
C')ll. .;. I)csl)oiiliii
Il faut absolument que j'en dise (juelques-unes des miennes. Ci^^'art-s. rafe.
billard. Le baron fait sa sieste. Nous lisons, la baronne et moi, le recueil
imprimé des chansons, parmi lestiuelles sont (|uel(pies odes, véritables poésies,
légèrement parfumées de léqitimisme (1). .\ son réveil, le baron nous lit
une grande pièce, en vers nuisseto-bvronii-ns, sur les romanti(|ues et les elas-
(1) C'est le recueil de Chonsaiis ri ('.baiisiinnrllr^, i|<i;it nous ,i\'>hn <li*Jù parti- ri uoit
le ton lé};;iliniiste (jue relive lûlniond (luilhiume.
si(|iu's, |ilciiu' (k- viTVi- l'I irmulacc ; puis, uik- pclilc ode cliarmanlc, inlilulée
PijgiiKilion (1). »
C'est tMicoro une journée complète, celle-là consacrée aux lettres ! Le
récit (le la matinée nous montre le « baron » et son équipage : « Knfin, à dix
heures passées, la calèclu' apparaît |)()iianl .M""' la baronne, toujours bonne
et aimable ; elle est venue amener Marie à son premier jour d'école, après
avoir al tendu \c retour de la domestique, envoyée aux achats (2). » On le voit,
nulle pose ; aucuiu" vanité (A). Son seul orgueil, s'il en avait eu, lui sérail
venu de sa galerie, l'ormée par lui, moins à coups de billets de banque que
par ce flair du chasseur, qui est aussi celui de l'homme averti, devant l'objet
dii»ne de son désir.
Cl) Ci's pièces ne j>araissent |);is avoir été publiées et ne se soûl pas retrouvées dans
les nianuscrils.
(2) Note (lu f) août.
Ci) Madatue « la haroime o nv se ehai'^'-t-elle pas d'aclieler un ehajjeau i)()ur Ginain,
malade ? (iiu'nie note, in /ine).
=30
VII
LES GAIJ':RIKS
Quelle était donc cette i»alerii' '.' Il est difficil.-, ;i | h, nrc ariu-ili-. >W\i
dresser l'inventaire. Nous pouvons (cpcndanl tu reconslitut-r i]Uf|(|UfS
éléments, au moyen des (iDcuiucnls tt des lémoif^na/,'cs (|ui nous ^oul [lar-
vcnus.
Re[)orlons-noiis. en prciiiicr lieu, à uur très précieuse note d'Kdrnoud
(iuillaume (l'historien doit bénir cis
inlilliiii-nces observatrices, iiiiiiu-
tieuses et réglées, ([ui C()nsij»iieijt
pour elles et. par la suite jxuir lui,
tout ce (pii les frappe dans le cour>
de leur vie !) :
' l.'i juillet l.S.')7. -.le nie diri^^e
\eis liello-SjLîuardo... Le baron n'y
ist pas ; il est avec sa famille à
l'Ionnce it va revenir. .le l'atlemls
en examinant sa f,'alerie. Son Paul
Véronèse. Ln frninic adultère, est
une très belle chose ; le (iiorgioijc.
en face, sur le nu''nu' sujet, est aussi
1res i)eau ; sa p/tite tète de fenitne.
de Haphael. ou de tout autre.
est uiu' orii,'inale et charmante
liosi'. Belle tête de Christ, galerie
(1 en bas...' Voilà une première
précision.
Jules' Clarelie,'' qui signait (i. .Souvenance, un chaud article dans
le Figaro du 21 mai ISS.'Î, parle d'un Heiubrandl vendu à Merlin .
Voilà donc, cinq tableaux - ce (jui. eu vérité, est insuffisant pour f«)r-
mer ce qu'on nomme une galerie, ternu' «pu im|)li(pu' la quantité au moins
Coll. l'aul Largy
;:i
aiit:iiil ([lie 1.1 ([iialiU-. VA (■«•si iW (/nlrrirs au pluriel ! ([uc nous eiilrelicnt
l-:<lni(.ii(l CuiliauMU' : ctlli' il'vn haut cl crllc (Tcn bas ! In arcliitocLe ne se
lroin|)i'|)assur la (lisliii)uli()n d'uiu' maison. (1. Souvenance les évo([UC, lui aussi,
ces ^'alcrics, ([uand il rappclli' « ces i»ran(les stalles de sluck et de marbre »,
tuais sans donner d'indication sur leur contiini. Il avait une raison. Quand il
li-s visita, vu LSlili, elles étaient déjà dé.tîarnics. 11 les voit « troj) vastes, trop
vides, sonnant le crt'ux ■. n'uiplies seulement par la faconde du maître.
M C'est là (pfil ['allait entendre Desboutin, al(»rs épris fortement de l'art
des prititilijs, - énaïuoure d'Orcai^nia, de Mlippo Lip|)i. trouvant déjà le
Péru!4in membre de l'Institut et Ha|)baël un bon élève delà classe de dessin —
dévilo[)per ses lliéories, peindre vraiment avec des mots ses sensations, ses
aspirations originales, curieuses, paradoxales et honnêtes. »
C.i-s ajji'rçus crili(pies, qui i)imenlérent toujours la conversation de Des-
boutin. nous renseiiînent sur les préférences de l'artiste, — ajoutons-y,
d'après M. lioldini. W'atteau, mais semblent les mettre en désaccord
avec ce <|ue nous saxons de sa collection. Chrentend-on par primitifs ? Dela-
croix en a\ait uua' définition lartje : « Les prais primitifs, ce sont les talents
orit^Mnanx (1). << A w vomplv, il y vu eut à toutes les éî)oques ! Desboutin
n'était ]»as si compiéhensif dans son pro])os. Pour lui, les priniilils étaient
b's artistes antérieurs à la lienaissance. l^ncore, les aimait-il à des dei^rés
divers. 11 ne Coûtait |)as en eux ce ([ue les idâilisles et les néo-mystiques y
j^'oùteri'ut tri'ute ans plus tard, ((uand ils s'éjjanouirent avec la Rose-Croix
v[ K's salons du .Sai' Peladan. Xt' nous étonnons !)as trop que Desboutin,
dont les tendances étaient diamétralem^-nt opposées, ait cependant participé
à ces salons. Il y avait droit d'entrée, en (jualité de i)ortraitiste du mage,
^'rand i)i-étre (h' la cha|)elle, ipii lui rendait sa politesse en rai)pelant mar-
quis. On lrou\'e de t(uit dans les ])rimi[ifs : ini«énuité, effort vers la vérité,
sentiment naïf, crédulité, ])iété, i^aucherie, mais aussi un al)solu respect de
la nature, (pii les ])()usse à multiplii'r h's |)()rtraits et à ne rien corriger du mo-
dèle, là où le sujet ne l'exige pas. (l'est, ne nous y trompons pas, ce côté
rciilistc des primitifs (pii charmait Desboutin, et c'est ce qu'explique fort
bien Creorges Lafenestre, ([uand il. écrit :
'< A b'Iorence, dans les fresques des (pialtrocentistes, il ne regarde que
les purs naturalistes : Masaccio, Filippo Li])pi, Crozzoli, (ihirlandajo ; encore
n'y regarde-t-il (pie les tètes et, parmi les tètes, les portraits contemporains ;
(1) Journal ilr Dr'acrvix, t. HT. p. 271.
Irur lîL'nic (riiivciilion |i(.rli(iiir. dr .r.iiipov.ilioii iinrnitivf nii .I.Toritr. .
lu- k' IoucIk- pas. Il Iroiiv.' fia .\ii,i,'.li<<. trop a«-ri.ii .•! lioltirrlli I:
Il lui faul une U'cliiii(|U(' plus rohusic. plus savant»- à la fois .1
il adori- les I^spaiînols, il a (pidcpi,- fail.lr punr Carava^,'.-. il n.- :
Iltudi's de tètes et main ( Mine de [)l<>mb)
Coll. F)esl>nutiii
certains bolonais et florentins y\n xvii*' siéelc, iiralicieiis liartlis ou >ul»lils.
dont il copie des morceaux, s'essayanl à leur \irlui>site (I).
Rappelons, en l)assant, ce (pie nous a\ous dit des copies de I)esl)ou-
lin. Mais soulignons, ici. w (pie M. I.afeiirstre énonce de sa pré<Ulertioii
pour les I^spa^iuds. certains liolonais et. dune manière tjeliérah'. pour l«»ut
jieintre à la \ isioii directe et ;'i la teciiiii(pie ^> robuste . C'est bien le cas de
(1) LAi-ENESTni:, l'n'facL' au C.alaloijnc de l' I-lxpusilioii i/«
Wrom-sr .K. (.iu,-io,u.. .1. lU.nl.ra.ull. cl de 1^m,.Iku-1. le Hn,)haël dos
,arlons vii-oinvux .1. S.mtl. Krnsini^lon ri <ir lanl «Ir porlnuls du palais
PHli rt dailK-iiis. ■ Tuul (T (|iii rsl iKTVc-iix, vivanl, caiaclcnse, sans joliesse
„i ..K.uieiv esl .le llaphael : le resle. de ses élèves, » affirmait Alphonse Legros,
aussi prof..nd eoi.naissrur (pie grand arlisle. Desboulin pouvait doue possé-
der dfs ifuvres de ees maîtres, ([uoi-
([u'ils ne fussent pas des primitifs, pare?
([u'ils repondaii'iil à ses goûts. Néaii-
Mioius. malgré raffirmalion de (luil-
laume, je penelierais pour des eopies ou
pour des i)i-inlures d.' leur éeole et dans
leur manière. Les noms sont, en vérité,
li-o|) grands, pour (fue rieii de ])récis ne
nous soit i)arvenu à leur sujet. A coté
des chefs de file, il y avait les autres,
les minores, les « dédaignés » de ce
XVI if* siècle italien, étouffé par les trois
siècles de gloire ([ui l'ont précédé ; il y
avait aussi les l-'spagnols, les l'xjlonais,
etc.. v[. cette fois-ci, c'est lui-même ([ui
nous rensi'igne.
Car nous avons sur '^ ses galeries »
son j)ropre témoignage. Ce sont ses
graNiuH's. l*uis([u'il i)ossé(lait une collec-
tion cl (pi'il s'essayait à la gravure,
n'élait-il pas naturel (pi'il gravai les tableaux (ju'il avait sous la main ?
Ia' contraire eut été surprenant. Pourtant nous ne rencontrons dans ces
planches ni Hemhrandt, ni Haphaël, ni (Vibrgione, ni Véronèse, — et c'est
dommage ! Hecounaissons toutefois (pic cette absence de gravure, qui nous
laisse tout iit)tre doute, n'é(piivandrait à une preuve que si Desboutin avait
gravé la (olalilr des tableaux de sa collection, alors ([u'il n'en grava qu'un
[ici il nombri'. La plupart (k' ces tableaux sont catalogués sous le nom de
ce fécond hjiiolo. ([ue l'on renconlre, avec des variantes (rorthogra})hc,
dans les |)lus grands musées du monde.
Si l'on examine ces gravures à la faveur de la tradition orale ((ue nous
ont transmise les fils de l'artiste, voici ce (pCelles nous apprennent de la
collection qu'elles reflètent.
Type de Ni(,-i)ise (Peinture., 18S7)
Coll. .J. IJesboutiu
•M
Duchesse COLONNA
(4 Eut)
C'e'sl (i'al)()r(l iiiu' Xdlii'ilr ou Adoralidii dis hirtjrrs. <l.- slvlr h(ilhnrlf>-
ilalicn du xviiic sicrli". avt-c Irs jeux de hunirre rjui- Silialk.n ,-1 (n-rard
Dow avaient mis vn si i,'raii(i liomuur ; puis, un Gutrcrl, de Nirolo lYanj»!-
l»ani (xvie siècle), seène pleiiu- <ir <,'aiilé. où ce piinlrr. ori>,Mnairr di- l'adouc
ou l)ien dUdine, fait soni^nr, un siècle d'avance, aux jovi-ux vacarnirs de
Jean Steen ; un Stiinl m Mrililulion rappelle [tar ses oppositions ènerK'i'(nes
Zurbaran ou son écoK' ; l'ia/./etla, venilieii du xviii" siècle (\i'>Ki-l7:)\),
du siècle de Tie|)olo, de C.analello, de (iiiardi et de Lonj^lii, mais loin d'eux
par roriginalitè. s'inspire du (iuercliin ou du (laravage dans ses Saiiils lisunl,
que Deshontin grava deux fois. De la même inspiration ((ue le Sainl m mddi-
lalion est le Siiiixl [j/irlanl sa croix, (\u\ <lul être dènielié dans (pielrpie oratoire
franciscain ; enfin, une Vicrf/c à l'IùifunL dont une épreuve est datée de
rOmbrellino, octol)re 18J8, a une grâce corrègieniie des plus sensible.
Voilà tout ce que nous savons des peintures. Desixmtin «^e doutait-il.
en les gravant, ([ue le niélier (piii aeipièrail lui ouvrirait, élargi, simplifié,
api)rofondi, les jjorles de la célébrité '.'... .Mais cette cidiection ne comptait
pas que des peintures.
Dans son Journal, le (1 février 1.S7."). l-jlmond de Cioncourl note (ju'il
est allé chez Desbonlin, invité par larliste à fairi- faire son [)orlrait à la
pointe-sèche.
(' L'atelier, écrit-il, est dans la cour d'une grande cité ouvrière (1).
bruyante de toutes les industries du bois et du fi-r. Il ist construit en planches
mal jointes ([ue recouvrent au dedans ditnnu'nst's tapisseries ra[tportées
d'Italie, re[)résenlant la Mort d'Anloinc, la (juislnnlion dr C.arlhmjr et met-
tant au mur, en leurs verdures fanées, dans une couleur haillonneuse. un
monde pâle et effacé de guerriers farouches à l'ajiparence s|)ectrale. »
Ajoutons donc les tapisseries aux peintures, l-'st-ce tout '.'
Le 23 décembre 1<SS0, I^esboulin fit uiu- vente à l'Hôtel Drouot de ses
œuvres propres, tableaux et gravures. |)lus ,">.') numéros cotnprenanl «les
meubles, — dont ses chevalets, car il partait [)our Nice. — et, ajoute le cata-
logue, des armes orientales, des faïences italiennes el françaises, enfin, une
importante série de » bronzes anciens pour la |)lupart. statuettes des xvi«.
XYii^, et xviii*^ siècles. >
Mais cette dernière i)artie ne jM-ovenait pas de Desboutin. Le catalogue
(1) Rue des Daines. ;52.
iiuluisMil m rrivur \v liTtnir sans nK'fKUWv. Les armes, les faïences, les
slahiclles itntwnaicnt <l"iin autre tond (1).
Nous avons donc un aperçu sommaire des colleclions de TOmbrellino.
M;iric Dcsboutin ( M inc de plomb)
Col!. I)arl)our
Lil)re à l'imatîinalion de les c()m[)léLer selon la vraisemblance, en n'oubliant pas,
loiilefois, que ces " vastes salles » ne furent sans doute jamais suffisamment
reni])lii's. comme le dit (1. Souvenance, sinon [)ar les cojjies issues du (ornajo
voisin.
(1) Qu'on lise, en effet, avec soin ce titre du calaloi^ue :
■ Vente du jeudi 2.'} décendire IcSSO, pour cause i!e départ. Tableaux, études, eaux-
fortes, par .Mareelliu Desboutin. Bronzes, faïences, meubles anciens, ol)jels divers. Préface
de .Jules Claretie. i> Cette dernière énuniération ne se rattache à la première que par une
ambi^'uité cju'il n'est i)as interdit de su])poser voulue.
36
l/OMIUU.I.I.ISn
I.i- I';ir;isul
\1 I I
LA VIE A L'OMBRELLINO
Elle était varier, ^aic. ainsi ([iic toute vir ([lu- uiiiromhriiil |M»iul 1rs
soucis matériels. c[uc l'on peul cousacnr aux arts il aux travaux <lr l'ïu-
telligeucc. Deshoulin recevait beaucoup, dans ce heaucou|i, il v avait
du mélange! - mais surtout des artistes et des écrivains, ses «•onfreres.
Sa femme et sa fille l'aidaient à faire li-s lioniieur-.. sa femme aux cheveux
gris, aimable et accueillante, ([ui eut porte avec grâce la collerette classinue
de Mierevell ou de l""ran/. liais, et sa fille, cliaraiante et spirituelle, ipii «otu-
plétait le trio de la famille, ou la vie de l\'sprit tenait la première place.
Ces lignes sont d'un témoin, M. nicliard. avocat à (ieiievi-. (|ui vécut à
Florence de 18(J.S à lN7n. Il «unuut et frecpienta beaucoup |)esl»outiii.
.t:
Mûrie DesboiiUii Griindc-diu-hcssc Marie
Coll. J. nesl/oulin (Sanf/ninc)
A celle ép()f[iu', pas de fasle. Y en eiil-il avant ? C'est peu probable et
les noies criùhnond (iuillaunie nous renseignent suffisamment à cet égard.
-Mais Texislence y élail large, tout en demeurant simple, et si, parfois, le
niaîlre se départait de cette simplicité, c'est que l'occasion l'y avait poussé !
Il racontait, avec bonhomie, une occasion de ce genre.
Un soir, un de ces beaux soirs d'été, toujours les mêmes, mais toujours
as
IIcMiiUT ( l'oinlc srclie)
lion (lu savaiil. ni k' ivvv du |)()i'li'.
Des nuisicu'iis étaient iiinutés à
Ik'llo-Sguardo, en doimaul dos con-
certs le long de la routi'. Ils denian-
dèrent au maître de l'Oiubrcllino à
se faire entendre. Cela tombait à
merveille. Deshoutin (|ui, pour ce
gala, avait engagé des ex t ras peu
coûteux, accueillit a\'ec faveur les
miisici. Ils n'augmenteraient guère la
dépense, se contentant, si-lon l'usage,
d'un fiasco de chianti ou dr ([urNpies
l)aïo<[ues. C'était de la magnifict'uce
à bon marché. Heureux temps!
Deshoutin, en homme qui visait
différents, tant la naliin- rsl diviTse
en ses ré|télitions. la tablr«-lait mis.-.
l)ruu- un cerlaiii nondirr d'ariiis. près
de rOinbr.Miuu. I.;i vue s'élt-inJail.
plus bille cncor»' «pie de coulUMic,
sur la vallée de i'Arno, drs .\pi-ii-
nins aux montagnes di- Lu(<pj«s. !,«•
ciel, ou déjà scintillaient les étoiles,
send)lait se pencher sur la terre,
comtiu- pour l'inviter à join-r avec
les |)i»'rreries de ses coilslcllalious,
jfii <|ui- ne refusent ni l'ohserva-
^^^ ^00*^1
( lùiii /urtt fl pointe f
.!".•
an llu-àlri- cl iiU'iKii,'c'ait st-s rfft'ls. (lisi)()sa k's imisicions. — • (jiii irélaient
rii'ii moins i|nr iH'nx lic la Pcr.^ola ! - (liTritTc un massif, (.'l leur ivcommaiula
(II- ne partir ([n'a son si^'nal.
Ia's amis arrivi'rcnl. La laide, sur la Icrrassc, monlrail son ar^enlorie
ol si's crislanx parmi les t'irnrs cl la vcrdnrf. Dans le pondroiemcnl des der-
niers lenx du jonr. J-'IoriMiee dressait si's dômes, ses tours et ses cam])aniles
d'or. On allait [>assi'r à table, ([uaiid \v porlicrc introduisit deux visiteurs.
Cela naxail rien d'anormal : on visitait rOmbreilino comme les jardins
lloboli. Mais K's étrangers, eraignanl de troubler la fêle, s'excusèrent, en
se nommant : rarihidueliesse Marie de lîussie et son époux. Desboutin se
fil II' eiei'rone du couple, émerveillé (K' la beauté du lieu et conquis par le
charme autant ipu' par les manières du châtelain. \''A lorscjue, au geste de ce
dernier, k-s cordes, les cuivres, les bois et les Noix s'élevèrent, la princesse
enthousiasmée ne i)ul retenir une exclamation :
- \\\ ! l'idéal de la \ie est ici !
l-'.lle y re\int et un délicieux portrait à la sanguine témoigne de ses visites.
Desboutin racontait avec plaisir cette anecdote. Elle fait comprendre
la nostalgie (ju'il eût. tout le reste de son existence, de ce coin de terre enchan-
teur, (piand il eut perdu et sa fortune cl rOnd)rellino.
11 api)r()chait à cette épo([ue de la ([uarantaine. Lafenestre nous l'a
déi)eint dans son allure liabitutdle :
« liien bâti, vigouriaix, basané, haut en couleur, un ])eu traînant dans
sa marche, toujours coiffé d'un vaste feutre noir et mou qui s'agitait de
travers sur une tignasse énorme, toison ébouriffée de boucles noires et fri-
santes, il terrifiait et ravissait, par les roulements rapides de ses gros yeux
de braise ardente, les Anglaises vai)oreuses. De loin, on le prenait pour un
brigand ronuinti((ue ou un condottiere en disponibilité ; de près, répouvantail
n'était ([u'un agniau. Ou vit rarement tel contraste entre la sauvagerie d'un
mascpu' et la douceur réelle de l'àme. (".eux ou celles (]ue ce farouche visage
avait d'abord effrayés, ne tardaient pas à être j)lus surpris encore, et bientôt
tout à fait ravis, lorsque, de cette étrange face, en partie immobilisée par
une ancienne paralysie, mais d'autant plus mobile à l'entour, jaillissait l'éclat
d'une intelligence nette, puissante el vive, en même tem])s que l'attrait d'une
bonté profonde et d'une candeur presque enfantine. Avec quelle tendresse
ces yeux de feu se noyaient en des rêveries insondables et lointaines ! Avec
quelle finesse, ces fortes lèvres, aisément crispées, laissaient glisser les paroles
pénétrantes, lorsque .ses compagnons ou ses interlocuteurs laissaient à sa
40
BOLDIM. — PORI KAl r DK MAKCI.LLIN Dl-SBOLTIN
(vers 1867)
|)i'iisé«' simple cl tnimlir l:i IiIkiIc (|iii lui dail iiéc4'ssain' pour pn-iwlrr luni
sou vol ! nutlic (•\ui)tniu(r iilois d'idèi-s et «rt-xpri-ssions orij^iualrs ! Ouc-ll.-
riclu'ssc niilunllr (i'i'lo(|ucu(i' tiauclic ••! iiiuij,»»-»-. fniiirhr :i la (ran
inuitJ[éo ;i lilalicuiu'. sur tous les sujets doul il t-lail pU-in. la po.- ■ ' '
turc ! (1) ■
Tel élail riloiuinc. h! élail le loj,'is. lels élaielit les hoirs. Ouxm-i tretahMil
pas toujours traités avee ret éclat, mais, cpu-ls cpi'ils fussi-nl. riio>pilalitr
qu'ils recevait-nt était j^éuéreusc. Dcshuuliu avait conservé la Iradilioii «le
nos provincis françaises, où rien n"est jamai> trop lu-au pour lion«»rer «-elui
qui vous fait liionneur de s'assioir à votre foyer. Quand le Nisiteur pr<riail
congé, souvent il em[)orlait son portrait, ou tout autre tableau du uiailre
de la maison, et portrait ou taldean était toujours remis rielu-meiil eiu'adré.
(Vêtaient là d'e.\(pnses manières ! Mlles n'empêchaient |)oint, <railleur>,
celui qui les avait d'aller chercher ses provisions, ménu' la viande. ch«'z
le boucher de la Porta-Romana. Cette simplicité excluait toute nu)rj4ue i-l
ra|)|)rochait les mieurs domestiquis de l'i )ml»rellino de celles d'ila(|ue ou d«-
l'île des Phéaciens. La comparaison n'eût pas déplu au romanlifpie Deshoiilin.
En 18<JG, l'Italie, alliée à la Prusse et p(mssée j)ar elle, avait déclare la
guerre à sa vieille enminie iWutrielu'. afin de récupén-r les territoires, objets
des plus ardentes aspirations irmlciitislts. Ou'allait-il sortir de ce conflit?
Pour être plus i)res des événements, les grands journaux île Paris avaient
délégué à Florence leurs meilleurs corres|)orulants : hMoquet. j-jlmond Texier.
Charles Habeneck, .Iules Claretie. etc.. etc.. et .luh-s .Vmigues. 'i'ous se délas-
saient des journées brûlantes de la capitale. - car l-'loreiu-e était capitale
depuis deux ans! — sous les fraîcheurs de l'Ombrelliiui. Ils y attendaient,
avec plus de patience, la fin de la guerre (2).
Georges Lafeiu-stre fit les présentations. Il en rap|>elle le souvenir .i.i>.-
sa belle préface au Catalogue de rexi)osition posthume de son ami. en même
temps qu'il évoque ces inoubliables spectacles de la Toscane, dont Desboutin
fut toujours hanté, l'xilé ([u'il était sous . les soleils nmnillés de ces ciels
brouillés '>, ([u'affectionnait le j)aradoxal liaudi-laire :
« Je me souviendrai toujours d'un diner à l'Ombrellino. par une adnu-
rable soirée de juin. Durant li' repas, le soleil s'était éteint, mais, tandis qu'a
(1) Lnc. cil., p. G t'I 7.
(2) Oïl sait que les aiiiiis iiilniiiiiN m luniil point iicuniiMs ;■» ('.iisloz/.i. m .i i inn.i.
Cepi'iiilaïU. la vieloire prussiiiuu- (h- Sadowa ni. il. lit li-> aff.iiriN .Ir l.i l'ciiiiisiilc. I.i- tr.iUé
de Vifiiiu- ccila la Nï-iiélie a l'IJnpinur il<s I i .n. us, «pii tii fit .l<>ii j l. Il.ilu-.
l'Horizon liO.lc hOsilaiciit à poiiuire les premières étoiles, une élrangc lumière
plus vive, plus proehe. seiulillanle et voltigeaule, s'élail de tous côtés allu-
méi- sur le sol. daus les gazons du jardin et sur les pentes des collines ; c'était
eonune un immense lapis, mouvant et léger, d'éclairs en fleurs. Aucun des
parisiens ne connaissait eiu'ore ces
illuminations des luiils luéridionales
par la levée en masse des lucioles. Ce
fut llabiiuck, je crois, (pii sortit
Ir premier ; il se retourna et poussa
un grand cri dadmiration, bientôt
suivi d'un vivat général. (1) »
Tille était la belle vie que
Desboutin menait h l'Ombrellino.
La peinture, la gravure, le dessin,
la poésie, des hôtes de qualité et
souvent éminents, une pro{)riété
magnifique, des espérances de for-
tune par sa mère dont il ignorait
la dissipation, comme l'on com-
prend ses regrets quand les heures
sombres furent venues ! .Juscpi'aux
derniers jours de sa vie, il soupirera
après (i les splendeurs i)aradisiaques
de l'Ombrellino (2) », et, quand il
achètera une maison à Nice, ce sera
avec la pensée de retrouver en petit ce qu'il avait possédé jadis, « quelques
centaines de mètres de terrain, pour des milliers, une petite maison-villa,
basse et humble, toute en bois, au bord du littoral, pour cette historique villa
Albizzi, sur sa fière colline, dominant la Toscane et Florence ! (3) » Mais
rii-n se retrouve-t-il jamais de ce que l'on a une fois perdu ?
.\ssunta (Peinture, 1S65)
Coll. Michaud
(1) Lafenestre, loc. cil., p. 9.
(2) Lettre h Claretie, 5 juillet 1891.
(3) Au même. 3 juillet 1882.
42
I x
MAURICE DE SAXE
I)«- (flic rriiiiiiiii forliiiti- «le rliro-
.ii<[iuurs. allait sortir pour Dislioutiii
un sitifJîuli.r avantaj^c : il allait «Icv»--
iiir auteur (lramati(|ur ! Nous voulons
<lirt' auteur (iraiiiali(|Ue joiu'. et joué.
où cela ? A la (!otnc«lic-I-'rau<,-aisc ! Il
s'iii fallul (le peu i(u"il ne «i«'vînt un pro-
fessionnel (les lettres, en nièrne temps
(ju'uii [)rofessionncl des arts. Mais ce
peu, en matière théâtrale, (juanil il s«-
nomme l'esprit d'inlrij^uc (ce n'est pas
fie celui (pie l'on ni' I <l «ns I. -> i.i.-. . v
([uil s'a«,Ml), est tout
Il avait si sérieusement pense a
celle ilualité île professions (pi'il écrivait
à .Iules lllarelie. le .") décembre IXJiG,
de Pisloie, où il se trouvait : . Pour
mon compte, l'exercice simultané de
deux arls (jui représentent ces deux j^enres (le plasli(pie-realisme et l'idéal),
l'étude de la peinture et de la lilléralure m'a bourré à ce sujet d'un tas de
théories et d'idées fixes dont il me tarde de soumet Ire le bai^a^e à In vérifi-
cation de votre sonde, à mon passage sur la frontière du monde des produc-
teurs. Cette rentrée dans le monde des vivants est subordonnée, vo
sentez, à la réussite du drame ipic j'ai fait en collaboration d" Amigues et
dont il a déjà ijrésenlé la plus j,'rosse pM''- ■ '• ' ■""■ •!'■ I'ran(;aise,
encouragé et dirigé par vos bons conseils.
Ce drame était Maurirc de Sa.vf. Durant les soirées do lOnibrellino.
Desboutin avait lu à ses visiteurs, ses drames en ■ " V ■ ' f{olami. le
.luK
('.(inliinil Dithiiis cl Mmiricr tic Save, Ions siijt'ls lires de riiistoire. L'iiomme
iiiiir iTsUiil l'idclr ;iii\ pirililrclioiis dr réfolicr.
Mdurin' (le Saxe traitpa .hili's Aini.mios. 11 k- frappa à ce point qu'il
proposa à son liôti' sa (•()liai)oratioM, lanl pour donner à sa pièce l'aplomb
sii'ni(pu' (pii lui uKUKjuaiU (jue ])our la faire recevoir au Théâtre Français.
Desitoulin, |)eu honiiiu' de cour. acce|)ta la i)rop()silion. Jules Aniigues revint
à Paris. a\fc le dessein bien arrêté de ne i)as doiuier trop longlepips la séré-
nade aux soeielaires. devant des jjorles récalcitrantes, ({ui n'offrent pas
l'aj^'réini'nt de celles de (iliiherti. Dés la fin de l'année, certains résultats
étaient déjà ol)lenus. Claretie en était le confident dans cette lettre du 5 dé-
cruibre l.SdC) dont nous venons de citer un passage :
I .\nii,i,nies a ohleiui, coiniue vous le savez, une lecture contradictoire
l)res de .M. (laillard c[ Thierry (l'administrateur) lui a rendu de cette formalité
le nu'illeur ténuiignage, lui disant qu'il pouvait dès lors regarder l'inscription
comme jnise et lui doniuinl droit à un tour de faveur. »
.Inlrs .\mii.;nes était, à ce nu)ment, « un grand beau garçon (jui n'avait
jias atteint la cpiarantaine. noir de cheveux, noir de barbe suj)erbe, avec une
belle \dix gutturale et méridionale, une carrure d'alhléte, un port de tête
de tribun (1). »
II fit les démarches nécessaires ; il obtint une lecture (8 décembre 1868).
Sa part de collal)oration a été esquissée par .Jules (".laretie, dans L'Opinion
.\ation<il(\ du (i ju.in 1870 :
(i .lamais honunes ne se rencontrèrent mieux faits pour marier leurs
deux talents, mâles l't \ibrants. Si jamais collaboration devait être bonne,
t'était la leur. Dnn es|)rit ])lus lu't, aussi vigoureux, aussi hardi, M. Amigues
(h'\ait être le pondérateur, en même temps (pie \v créateur dans l'associa-
tion (le ces t-sprits. C'est nn talent passionné anssi cl singulièrement vivant
et fort (pie le sien. On n'a (pi'â le voir |)our deviner juscproù il ira, se laissera
em|)orter, montera d'un bond. »
.lustpi'ou il alla ? Il alla justpi'au bout et ce bout ne fut pas aisément
atteint. Sarcey a raconté les péripéties de cette course à la représentation :
(( La Comédie ne Noulait pas recevoir la ])ièce (pii devait entraîner pour
elle beaucoup de frais ( t (pii était un drame historique. Mais elle venait de
refuser l .Xjjntnchi. île Latour Saint-^'bars et le (kitlenberg, d'Edouard
(1) ('.. S(>i'vi;\.\\c.i; (.hili's C.hiri'lic), Un oriqinal. Fiqaro. 21 mai 18S;{. I.o portrait
(r.\iiii;,'in.'s par Disl.oiUiii (pciiUure), figura au Salon de l'SGi).
Foiiinicr, (I.Mil les ailleurs. l.,iis .|,ii\ j<.iini:.lisl,-s. m..!,:,!..,!» mm.- vi%.
pagne (.•outre la coiniia^iiif.
« Cc'llo-ci, alors. rc(;ul Matirin- dr Save ru .-..i,,,... , .,, ,.,,. c n.i, Mm;^,.. s.
qui, lui aussi, ùlail pnH à iii.Hri- au vtiil sa |)liUMr <!.• joiirMalisl.-.
« La pièce reriic, il faliail la jouer. Coiiinu- i-IK- lu- lui plaisait ((u'a .li-im.
^^>\
N
Première Fcninu- de l'Auteur, nu Fcniiiic accouiléc f l'oinlr-sêchef
la Comédie offrit di- ])ayer un détlit. Les auteurs refusèrent. .Mors, ce fut à
qui de.s sociétaires n'accepterait pas de rôle. On monta enfin la pict-o, au
petit bonheur des volontés suspectes, mais, au cours des répétitions, il lui
arriva une heureuse fortune. Oot avait [)ris un pitit rôle, celui du curé liri-
faut. Seveste avait le grand r»')K', celui de Favart. Mais si (lut était excellent,
on n'en pouvait dire autant de Seveste. .Mors, huit jours avant la pr. i
il y eut permutation : (lol devint I-'avart et Seveste «loni Itrifaut (I)
Toute la peine qu'il s'était donnée, fit-elle ouhlier à Jules Aiuiiîues
(1) Lr Temps, G-7 juin 1870.
{|u'il :iv:iil un .ollahoialciir ? On If pourrait siii)ii()si'r. l)csl)()ulin clail si loin,
/<7)//;.s- ,s//^... Ombrcllirw, ou occupé de tant d'affaires, qui n'avaieul f^uère de
rapi)orls a\ ec Mniiricr de S<i.rc ! Le fait est que, un beau jour, Georges Lafenestre,
(jui. en sa (|ualilé de poêle, avait aidé Amigues de ses conseils, rencontrant
(■.(xiueliu aine. ap|)n'nd di' lui (jue la Comédie réi)était un drame en vers.
Il interroge :
De qui ce drame ?
— De .Iules Amigues.
— 11 a jxiur litre ?
— Mdiiricc (le Saxe.
-- Mdurice de .So.rc ? Favart, Conli, la Heaumesnard, lîriffaut ?...
— Vous connaissez donc la pièce ?
l)e|)uis au moins un lustre! I^lle est de Marcellin Desboutin, un
français de L^lorence. Jules Amigues l'a entendue i)our la i)remiére fois, en
ma préseiu-e, et devant des témoins que je puis appeler. Amigues n'est qu'un
collaborateur.
— Alors, il n'a pas le droit de signer seul ?
— Kvidemment, à moins de conventions ])arliculicres. Je vais, de ce
pas, télégraphier à l'auteur. La cane qui couve un œuf de poule ne peut
pas se préteuflre l'unique mère du poussin.
Desboulin, i)révenu, arriva incontinent. Il descendit chez son ami
Emile Pessard, et ses droits furent rétablis. Mais il existe deux attesta-
tions de ce « tirage à soi de la couverture », si fréquent dans les associations
(pielles (]u'elles soient : la première est aux archives mômes de la Comédie
française : la i)ièce y fut ])résentée, i)uis lue le 8 décembre 1868, sous le nom
de .Iules Amigues ; la seconde est une éi)reuve de la brochure, portant
ce même nom seul. Cette épreuve fut achetée sur les quais, par M. Georges
Saint-René-Taillandier, notre ancien ambassadeur au Maroc, et fils de l'his-
torien de Maurice de Saxe (Michel-Lévy, 1863), ouvrage dont s'était serv^
Desboutin. Le Journal d'Edmond Got fournirait aisément une troisième
preuve, s'il en était besoin. L'ancien sociétaire note, en effet, ceci :
( 2 juin 1870. — Ce soir, aura lieu la première re])résentation de Mau-
rice de Saxe, grand drame en cinq actes, en vers et à spectacle, de M. Jules
Amigues et Marcellin Desboutin, paraît-il, après coup (1). » Le dialogue que
(1) Journal d'Edmond Got (Pion, 1910), p. 97.
46
nous venons (k- r;i|»|i()rtii-
éclaire d'une luniiéri' \'\\v c.v
«paraît-il», toul d'abord assez
énigmalique.
Desboulin assista aux
dernières répétitions et même
à la répétition générale, à
côté de M"ie Jules Ainigues.
Mais il avait i)eine à recon-
naître son œuvre et l'on
prétend qu'il s'endormit au
second acte. Il alla attendre la
chute du rideau au café
voisin.
Que fut cette première?
Médiocre. Sarcey dit même
« exécrable ». Le Tout-Paris
parut s'y ennu\er. .Mauhan,
le Maréchal, était indisposé;
Victoria Lafontaine, Madame
Favart, était également souf-
frante. L'un hurlait, l'autre
n'articulait pas. Dans les Dé-
bats, Jules .Janin constatait
que la pièce avait été jouée « avec beaucoup de zèle et fort [»iu de InK-nt •.
Catulle Mendés, alors débutant dans Lr Diable, fi-uille oubliée. u'aNail (pu'
duretés pour l'œuvre et ses inler[)rétes. Le Fii/dm. selon son habitude, se
répandait en échos. Il notait ([u'à la [)remiére de .M<iiirict' de Saxe, - - une |)itTi'
fragile, — (il y eût beaucoup de mots de cette force dans les f»azelles). on
n'avait d'yeux et de lorgnettes que pour deux aiadémiciens fraiilieinent
nommés Emile Ollivier et .Iules .lanin.
1/ Indépendance belge, du 1 juin, donnait aussi sa nol»- persifleuse. S4ius
la signature d'Henri de Pêne : ' On a rencontré M. Lniile Ollivier et ses
lunettes dans les corridors de la ConuMiie bVanraise. à la i)renuere représen-
tation de Maurice de Saxe.
— Tiens, fit quel([u'un. Ollivier ii.i\;ui -hmm i-,i> promis à .Vmijiuos
d'assister à sa première, {(u'il y est venu ?
•le .Ir 1,
f l'rinliiri
Mais le (innlc (les Scraiix avait sans doute promis à son ami Amigues,
s"il vi-nail, dv ivstrr jiisciiià la fin. car il est parti an Iroisièmc acte. »
Pourtant, .yidiiricr dr Saxe ne fut pas un four ! « On s'attendait cà une
dcfaiti'. à une ciuite et tout s'est terminé par des fanfares et des bravos »,
constatait f.lii'nne Arai,'o, dans l'ADcnir XalionaL du <S juin. C'est souvent
le sort des pronostics. Cette aventure du vainqucuu- de iMmtenoy qui s'amou-
rache de Mme I"'avarl, la comédienne, et se fait l)erner par elle, de tiers avec
son mari et la troupe dont il est le Molière et dont elle est l'éloili^, ne parais-
sait pas un sujet digne du héros. Les Dclxils imprimaient :
(( Comment nos deux auteurs n'ont-ils i)as vu que plus ils entassaient
les [xtlmicrs sur les huiricrs, les f/loircs sur les nicloircs, i)lus le héros s'en
allait en fumée '!... Ils ont i,nand tort, les deux j)aladins du nouveau drame,
([uand ils nous montrent le terrible maréclial devenu le jouet de mesdames
et de messieurs de la Comédie et livré aux moqueries de la i)etitc Lamothe
et de la Ljrande Hi'aumesnard. Nous nous refusons à ces j)laisanleries mal-
séantes et ceux-là sont bien mal-api)ris (jui vont se nKxjuant. jns({u'en son
chàleau de Chambord. du vaincfueur de Laufeld, de l-'ontenoy et de Ro-
coux (1). ■' Toutefois, le Prince des (jiUijues reconnaissait la parfaite véracité
du dénouemenl. cette' mort inattendue du maréchal, tué dans un duel mysté-
rieux. |)ar le [)rince de Conti, ([ui le jalouse, l'envie et le hait.
Sarcey. lui, tapait à c()U[)s de poings :
« Comme il y a ])eu (res|)ril dans le dialogue, malgré tout le désir qu'ont
les jiersonnages d'eu montrer toujours ! One ce style est incorrect et rocail-
leux ! Que ces vers sont maladroits ! VA ([uelle langue, mes amis, quelle
langue ! c'est à faire frémir la iialure ! (sic. Quelle est la langue de la nature ?)
Mais il ajoute, ce ([ni rachète l'excès de ces sévérités :
<' Et ])ourtant. nous nous sonunes amusés de ce s|)ectacle ; il reluisait
à nos yeux comme une \ieilli' pièce d"or remise à neuf. On sentait dans tout
cela un certain mouvement, ce je ne sais 7//0/. r/;// (il n'y a i)as (pie le style
du drame de rocailleux !) au théâtre, vaut mieux (\uv toutes h^s (puUités du
monde et (pu s'ap])elle la vie. »
11 signalait la scène II du prt'mier acte, entre b'avart et sa femme,
comme " mieux ([ue belle, neu\ e, absolument neuve », le dételage de la voi-
ture du maréchal à la fin du deuxième acte, la scène des comédiennes chez
le curé, au troisième acte ; il blâmait les deux derniers actes et concluait :
(1) Jules Janin, Feuilleton des Débats du 20 juin 1870.
|)r:iiiif liiul plriii (I, i|ii;iliU's suixTii-iirt-s j-t i\v |irit«lii»i«ti
rifiucs. (le Iniils de t,ii d (rin((iii»-lault's ohsruritrs. Il tii:iiM|iii-
[);ir le slyU'. L;i hulule est iii«L|;ilc, l)i/.:irrr. loulc iioirc «h- srorir
(|iu' U- \vrs loulc (Us ("lilloiix (|ui se liriirlnil. I-i s«-iisntiMii «si
nihic (1) '.
Iiilis ('.lart-lif, (Imms n)j)iiii()n S'ulionalr, ou il a\ail prrsriilr au publu
lis (li'ux autours, analysait le tliaiiic au |>niut <l«- vm- |>sv^llo|ll^«M|ut•. |).s|hiu-
lin aimait à rappi'lcr ci- fi-uilklcui. ilu f» juin ISTn. «pii rar<-v^ail sa Irt^'ituiK-
fiortô L'I le sacrait honitnc df tluàlr.
" ... Lf ^'rand luiTilc de Irur draim- i st d\lrr liuniaïu. Il nous monlrr.
non (les pantins, mais des linmmcs. non des ficcllts. ruais ijrs filirrN. Ilumnit',
I-"avart si- dOliat à la fois ((nilrc la jalnusii-, cuiiln- la rnisiTi'. coiilri' 1rs sou-
M'uirs du cahutina^i'. ((uilrc la Icutalicui ik* lumhcr, contre le sorl ri cjjnlrt*
lui-mèiiu'.
" Honmu', .Mauricr de Saxe, pris iiitrr sa folii- df f»loiri- »-l sa folie «raniour.
étouffant dans Ir monde cpiil dominr. < lurihaul un uiiiviTs pour y lojjrr
si's rôvi's, affamé d'idéal it di' repos, se déhat contre l'obsession de ses douitles
ambitions d'amoureux et de sublime déclasse. l-"emm«-. .Iiisliiu- (Chantilly.
aimant son mari, baisse pourtant les yeux, fascinée devant le héros. I/aire
tlo l'aigle l'attire et le nid de la basse-cour la relieiil. I'".l voilà ^•^■ qui est char-
mant, voilà ce (pii est vrai, s<'il ' '■ ""i 'sl nouveau, voilà • •• '<><' • -• f"'-^
dans celte (ruvre...
— Quelle espèce de rôle ave/-\ous \oulu écrire là ".' denian<iait-<Mi a
M. Jules .Vmigues. In grand |>remier rôle ? In troisième rôle ? l'rj traître ?
- Ivsl-ce ([ue je sais, repondit-il. .l'ai voulu faire un /"■""". .1 v..il.
tout.
« La langue est fiere et forte. Le vers a des enjambements trop (re(|uent.s
(pii l'alléri-nt. Parfois la couleur s'y fait papillotant»- et «riarde. Mais la
marciue ilistinctive est l'énergie, la force ; cela est plein de seve. plein «le
sang, plein de fer. •'
Amédée .Vchard. <laus le Miinilriir Ciuiwrsrl, (pr.\migues venait île
(piiller pour fonder La Ktpuhliinic (juillet l.Sb'.»). dont le Préfet «le polnv
refusa le titre (.Vmigues. es|)rit frondeur, était républicain sttus l'Knipire.
mais devait redevenir bonapartiste smis la Hépubli(|ue !), .Vineilt-e Achartl
(1) Le Tenifis, t-7 juin l.s7o.
t'iail fort i'lo.i,'iiu\. lui aussi. A peine fait-il qut'i.fues réserves : la pièce est
un peu lon.^ni', \v sujet un ])eu ininee, le earaetere du maréchal un peu simple»
le lion rn^'it toujours, — mais il y a de la jeunesse et de la poésie. Dans
ces (lou7.e colonnes, jias une fois le nom de Desboutin n"esl cité ; tout l'hon-
lU'ur de la i)ièce est rendu à son collahoraleur (1).
Dans les couloirs, par conlre, on disait : « Jules Amigues a signé, mais
la l'ièce est de Desboutin ! » On transporlait à ce cas particulier le plemmque
jit. Il y avait erri'ur et injustice de part et (Tautre, mais Amècfée Achard»
(]iii jiouvait se renseigner, était i)lus eoui)al)le de sacrifier Desboutin que
le i)ul)lic de sacrifier Amigues.
I/essentiel était ([ue la pièce tînt, et la pièce tenait. A la lire, aujourd'hui,
sait-on dans <pielle catégorie elle se range ? Dans la catégorie des drames ou
des comédies où la tendresse, l'esprit, la vaillance, la timidité, l'audace, la
rondeur, la mélancolie, la force et la gaieté forment un harmonieux mélange,
pièces dont le [y\)v i)arl'ait s'est trouvé, près de vingt ans i)lus tard, avec
Cjjrniio de licryrrdc !
Nous ne voulons i)as dire que le vers de Desboutiu, même corrigé par
Amigues, ait l'allure désinvolte de celui de Hostand. Nos auteurs n'antici-
paient point. Ils auraient pu suivre Ponsard ou Augier, mais Desboutin,
dans ses drames histori([ues, au moins, avait un autre modèle : Victor Hugo.
Ku voici un exemple, que l'on pourra comparer avec la scène des portraits,
de Hcrnani, ou avec le monologue de Ruij Blas. C'est le même procédé : le
détail historique ai)puyé sur des chiffres, l'ènuméralion minutieuse, le vers
rompu. renjaud)ement :
Les .Maures de Grenade avaient fait prisonnier
Le comte Alvar Giron, .son ami. iMais mon père
Prit, pour l'aller chercher six cents hommes de guerre.
dit Hugo, et ailleurs :
...Nous avons, (le])uis l'iiilippe (juatre,
Perdu le Portugal, le Brésil, sans combattre,
Hn .\lsace, Brissach ;• Steinfort, en Luxembourg,
VA toute la Comté, jusqu'au dernier faubourg,
Le Roussillon, Ormuz, Goa, cent mille licuea
De côles...
(1) Moniteur Universel, G-7 juin 187U.
50
Voici. inaiiiltiKiiil, D.shoiilin. ,:,f 1;, iir:i.|.- miiv;ii.I.- |.:,i:,îi |„.r.
èliT (le I)i-sl)()uliii seul :
ACI !•: 1. S.i.NK V
t:oNTi
Alors, f|iu' nous viux-lu ?
Vous (lin- si'iilnnciit.
Messieurs du Ixl esprit, (|Ue cet ours :illrrii:in<l
Que le royal liàlard de la comtesse Aurore,
Ne fiH-il rien de plus, serait assez encore !...
F.e nom de Kœnif^smarek est un nom glorieux
Qui rayonne ;\ côté des noms de vos aïeux...
Le cinq mai scizi- ctril qiiarante-cinij, Turenne,
A Worms.... en «ranil péril qu'on l'écrasi- ou le prenne,
list sauvé par le vieux Kfi'ni<.'smarck, un routier
A qui Gustave-.\dol()he enseigna le métier...
l'n autre, Otto-Williem, à .Masirieht, en Hollande,
lîst maréchal de camp sous Turenne et commamlr
Le lional-Llranger, qui fut formé par lui...
Après Sénef, le roi... (|uon re;;relle aujourd'hui.
L'honora d'une épée !... Or, pendant (|u'en Tnrtpiie
Le comte Otto-Wilhem allait jouer sa vie,
L^n autre Kccnif^smarck, le comte Cliarles-.Iean.
.Meurt sous les nuirs d'.\rf.'os. harras^é, le péaid.
Par l'effort surhumain de ses coups homéri(iues...
L'inspiration paraît évidente.
Il ne re.ste, du nianuscril priiiiilif de Desltonliii, (initn seul acte, le (jua-
trièmc. Encore est-ce un hrouilloti et lOn ne saurait dire à (piel étal d"a\an-
ccnient du travail il se rapporte. Il nous senihle pourlaiil conli-mporain
de la collaboration et nous doniit', par coiiseiptiiil, la versimi définitive
du premier auteur.
La part de Deshoiitiii apparaît ])re])(»iideraiite. i!ii eunfnuilanl ce ma-
nuscrit avec la copie impriniée, on constate, non siiilement (|Ue toutes les
scènes ont été imaginées par l)es])oiitin ce (pii établit son aptitude au
théâtre — mais encore cpie sur 7)1 \ mis (pii composent cet acte, "Jl.") sont de
Desboutin, entièrement, et nombre d'autres parliellemeiit. Si. nh iino disce
omnes est un a[)horisme ap|)licable en resj)éce - et pour<pioi pas V - la
preuve que Desboutin fut bien l'iiuUur de Maurice de Sair et .Vmij^ues IntUip-
iatcur, est faite.
Il MU' |);ir;iil imlispciisablc di- citer (|iicl([ii{'s passai^U's caiacléristiqiics.
Voiri oi'i vu l'sl raclioii. lorstiuc le rideau sr le\c sur le ([iialrièiue acte. Le
iiKiréelial (le Saxe \ieiil de i^ai,'iier la halaille de liaucoux; le lloi, eu léiiioi-
f^'iKiLje de 1,'iatilude, lui a donné le domaine de Cliauiboi-d, mais Maurice veut
da\anlai!e. Il \eut l'ainour de .liisline T'avarl. la t'omédieinu\ v[ un royaume,
ful-ee à .Madaiîasear, ou ([uel(|ue pari, u'imporle où, avec les Hébreux recons-
titués iMi peuple. Malheureusement, Justine aime son mari et écliap[)e aux
piéi*es connut' à la \iiileuce. \\\\v a fui. Dans son ('.liambord, ou il attend
K' roi, Maurice traite ses officiers et la Iroupe de l-'avarL, veuve de son étoile.
Tout le inonde t'st i^'ai. lui seul esl mélancolique. Voici les passages du manus-
crit (pii se retrouvent dans la pièce :
m: l'iusi;, clxuiUutl
Aulrffdis (le ViTsailIc
.\itiis \('ii:iil le bon lioùt ;
Aiijounriiu! la caiiaillr
lU'.uno rt lionl If haut bout.
Si Paris se ia\alc,
! )i' (juoi s'ét<)!iiu'-l-<>n '.'
\"('sl-rf i)as (le la I lallc
Ouc nous vicnl lo poisson ?
(Rire des convdiens.)
i..\ ui;.\iTMi:sN.\uo (Gubé. dans la pièce)
Bravo ! mon ln'au l'Iianl'HU' !
MAUiuci:, bourru, à de Frise
Ail ! ea, va s- tu le taire,
.\vi'c ta l'onipadour... i'.llc fait son affaire
C.oiunie lu fais la tienne en eiUonnanl mon vin ! (1)
Belle, elle rè.L'ne autant de jjar le ilroil divin
Que notre roi Louis, lui-même (2)...
MDNTMDHiN (dans lu piccc. FrouUnj)
Rude lâche
D'égayer un héros réduit à la cravache
ICn |)lace île l'éiiée...
(1) Vers refaits dans la brochure :
.\vec la l'onipadour... C'esl son mélier de iilaire
Laisse-la donc tranquille cl cuve en paix mon vin !
(2) Vers refait :
Que notre seigneur roi lui-même.
52
iu;i.i,i;(;.\iti)i; {Urauvvitii. ihms la jiii'cc)
, ., , l-t s"it tlil fil i);iss:iiil.
Quand il a le vin triste...
.MAUHic.K, sombre, à lui-niérnr
On devrait eu naissant
Htre inscrit quelque part (1), ehaeun sur un ^'rand livre.
Pour sa part à manger et pour son temps a vivre.
Parqué dans son destin, comliien de crève-cœurs
L'homme s'éparytierait I
(i Habasli
Va presser mes i)i<iueurs !
.le veux faire hurler des chiens dans les clairières.
Grogner des sangliers, hètes franches et fières,
Au lieu d'enleiidre ici glousser la basse-cour.
On le voit, dans ce [)roniicT éclianlillon, il y a des incorrections, du laissi-r-
aller, mais de la verve el du souffle. Le dernier vers a belle allure cl (|uand
on lit cet hémistiche :
Parcjué dans son dcslin...
on com])rt'iid qu'Ed. Cadol ail écril, dans son feuilleton du Soir, du X juin
1870 : « J'entendais dire autour de moi de ces vers : - On dirait ([uils sont
commencés i)ar Corneille et ((ue personne ne les finit.
Voici, maintenant, une autri' scène. C'est reiitrevue ties rabbins cl du
maréchal. Elle parut inattendue et bizarre à la représentation, mais l'Iiis-
toire a de ces surin'ises et le vrai peut quel([uefois n"étri' pas xraisendihible :
MAURIC.K, () ll'irt
Aux autres parias... à mes juifs, maintenant.
(fl(ïiil)
Messieurs, ai)]iroclu'Z-vous (2).
(Les ruhhins s'iti)pr(nhenl. rexpcdiieiix et (^hahis)
Il vous semble étonnant
(1) Répétition évitée :
F.tre inscrit et coté...
(2) Ce vers et cet hémistiche sont remplacés dans la jiièce par (jualre vers :
Il me reste ces juifs... Y faut-il avoir foi '!
Ces hommes sont hardis, entreprenants, avares...
Ils ont tenté parfois des fortunes bizarres...
Qui sait ? Puis tout me man(]ue...
Eux seuls sont maintenant mon va-loul.
53
Quand vous voyez ce monde et ce luxe et ces fêles,
Ces canons, ces drapeaux, ces hulans, dont les têtes
S'inclinent sur ma trace et qui, de leurs hourrahs.
Vont réveiller au loin mes chenils, mes haras...
11 vous semble étonnant, avouez-le, mes maîtres,
One je veuille quiller, connue un chasseur ses >juêlres,
Cet I-:den de Chamhord, pour aller transplanter
Des juifs dans les forêts d'.\mérique, et tenter
Dans un nouveau désert le rôle de Moïse, '
Fn quête des douceurs de la Terre Promise ?
pniîMiHR RAnniN
l-'ranchement, Monsei^^neur, c'est à quoi nous songions.
DEUXlf^MIC HABHIN'
Il faut nous pardonner, si de vous nous jugeons
Par nos nia-urs et nos ^oiUs... nous avons jjour maxime
Qu'un tiens vaut mieux ([ue deux tu l'auras !
MAUHICK
C'est le crime
De votre race h vous d'avoir, chacun à part,
Creusé dans cliaque ville une fosse à l'écart,
Pour enfouir de l'or jusqu'à ce qu'on enterre
L'enfouisseur dans son trou, sous la fange ou la pierre. (1)
Voyons !...Me voulez-vous pour guide vers des cieux
Où de vierges terrains s'ouvrent devant vos yeux...
Où vos ongles crochus, jaunis j)ar l'or inerte
S'usent contre la pioche en cette mine ouverte,
Où vos bras affranchis deviennent les ressorts
De la libre industrie, artère des grands corps ?
— Troupeau qui sous le vent du destin tourbillonne.
Me voulez-vous pour chef, qui vous masse en colonne,
Qui, du gueux Laquedem sorte des bataillons,
VA qui de vos cinq sous fasse des millions ?
Los ral)biiis rofiisenl cl Ion coiiipreiid ([u'ils n'aient rien trouvé de
bien convain([uanl dans le disconrs filandreux et hautain mis dans la bouche
du maréchal ])ar Desboutin et conservé par Amigues. A l'objection d'un
rabbin que le peuple d'Israël attend un Messie, Maurice réplique, plus ner-
veux, mais un peu moins insolent :
(1) Vers de treize pieds, mais sujet ù correction.
54
Mais il n'est pas dit cjuil vienne de Hussie
Et Pologne, et qu'il doive apparaître à cheval
En bottes d'écuyer, chapeau de Maréchal !
C'est là ce qui vous fait louelur sous vos besicles
Casuistes maudits !... articles par articles,
Ergotez, alignez des textes, des décrets,
Empilez les écus dans vos coffres secrets,
Pesez au trébuchet l'or sous votre œil avide,
Pillez, faites suer la matière livide...
Allez 1... c'est votre rôle ! Un Messie, ah I vraiment (1),
C'est celui qui vous parle, ici, dans ce moment.
Vous le faut-il issu d'un grand roi ? Je m'en vante !
Faut-il qu'il ait au loin répandu l'épouvante ?
De la Vistule au Rhin, du Rhin à l'Océan,
Tout redit mes exploits !...
PREMIER R.^BBIN
Vous êtes un géant
DEUXIÈME RABBIN'
Un bras de l'I^Iternel !...
MAURICE, s' échauffant
Le Messie ! Eh ! bélîtres.
Que lui demandez-vous, pour marques et pour titres ?
Qu'il ait un cœur aimant et souffrant ? Enfoncez
Vos verres scrutateurs sur vos sourcils froncés !
Approchez!... Dans mon flanc, fourrez vos doigts rapaces
L'amour des opprimés remplit tous les espaces.
Que le contact des cours, des heureux, des mondains,
A fait vides et noirs à force de dédains...
Un tel roi, qui jamais ne naîtra de vos femmes.
En vous faisant un corps, vous eût donné des fîmes
Mais le sort d'un .Messie est d'être méconnu.
De mourir sur la croix, et vous, sur le sol nu !
Allez !...
Les trois avaiit-dcriiiers vers rachélonl. i)ar kur irIIcIô, ci- que tout
ce dialogue a d'hésitant et de boursouflé. Du rapproehemenl que |)erinel
le manuscrit, entre les passages qui sont de Deshoulin et eeux qui sont
(1) Ce vers, et les six qui jirécèdent, sont, dans le mamiscrit, d'une écriture autre que
celle de LJesboulin.
d'Aini.mu'S. il sriiihlc i-ésiiIttT (iiir. di'S deux collahoi;! Unis, le st'iil ([iii fui poêle,
inégal cl |)ar relais, riait I )i's])()ulin. Ainii^iics a|)|)artii'iil |)iul(')l à la calé-
iior'w (li's viTsini'aU'urs cl pas nièiiu' à la caléiforic (K's vcrsilicaU'iirs habiles,-
car si le vers de Dcshoulin roule parfois des cailloux, celui (rAinii,nies en
esl une véritable carrière (l). On comprend (fu"il ail fait ap[)el à la censure
de M. (leori^es Lafeneslre cl Ton rei,n-cl!c (pi il n"v ail pas l'ail a|)pel |)lus
souvent.
Nous n"irons |)as plus avant dans celle comi)araison des éléinenls d'un
(lualrièine acte, ([ui n'i'st pas le meilleur de la pieci'. Mais, si surprenante
que soil ])arfois cetU- langue, elle a du moins toujours de la verve, de la cha-
leur, cl. iMi déi)il de (fuekfues Irivialilés, elle ne p;u'aîl jamais basse. Elle est
K' refk'l de son principal auU'ur vl justifie, une fois de {)ius, Taphorisme
de Buffon.
L'affiche porta Maurice de Saxe jusqu'au 24 juillet. Ce jour-Là, Got
arriva très en relard, à plus de huit heures. 11 avait eu une peine inouïe à
trouver un fiacri-. On commença la rt-présentalion à neuf lu'ures moins \ingt,
devant une salle aux trois (piaiis xide. La guerre avec l'Allemagne était
déclarée depuis neuf jours ! Les représentations furent arrêtées définitive-
ment. « Hélas, disait la reine Marie Lec/.inska, — en api)renant la mort
du maréchal, ({ui était proleslanl, - (fuel dommage que nous ne puissions
pas dire un De profundis pour ([ui nous a tant fait chanter de Te Deum ! «
Pas plus celte fois ([ue l'autre, il n y i-ùt de De profundis à la mort scénique
du vain([ueur de ]''ontenoy. On avait d'autres larmes à verser.
Treize ans j)lus tard. Desboulin devait pourtant en verser — sur son
collaborateur ! 11 était ri'sté sans rancune du tour qu'avait voulu lui jouer
Amigues. Que dis-je ? 11 l'excusait même, en termes pleins d'humour et plus
encore de noblesse d'àmi'! .V C.lart'lie (jui lui avait annoncé la mort d'Amigues
(.'5U avril 1(S<S.')). en lui demandant des notes sur leur différend, il avait répondu :
<( Quant à mes débats avec Amigues, aux temps de notre collalxiration,
(1) Snas compler les incorrections, leg cnjambcnieiils excessifs, les chevilles, etc., Voici,
à titre d'échantillon, quelques vers d'Amit^ucs :
I-'avart devrait ici ]>rcndre le dialoi^ue...
...Aujourd'hui même, il devance la (^our,
// l'a promis du moins, pour jxjrfrr la réponse
Du minisire...
lUim 1 le chien (|ui lâche jjour londire sa tarfinel...
Oii ! (|ui <l(i/)r d(ins mon âme a versé ce poison.
Qui (loue, (/ui m'ouvrira, dans cette voie impure.
Une jjûle cspcrance, une lumière ohseure '.'
'56
je vous (lirai, mon l)on ami. (|ik' la ciiosc » ùl-dlc rxislr. le plus siniplf rts|nt l
de sa fin si récente m'inspirerait cetti' |)U(icnr ilr n'en point profiler pour
révéler ees tristes tiraillements. prescpie inséi)araliles de toute rollahoratiou
artistique et littéraire. — Mais, au fait, il n'y a jamais eu de ih-hnls cnlre
nous. Quelques prétextes ([ue j'eusse pu avoir à réclamer rt, à leur défaut,
mon bon i*oùt (fruit de Téducation - |)eut-étre !) et mon apalliii' et insou-
ciance (par le fait des habitudes et du li'mpérameiil !) m'eussent fait m'i-n
abstenir avec répulsion. I.a grosse part (la jxirl du lion) (pr.\nn,i,'ues a
semblé s'attribuer dans le succès de Mduricr de Snxc, n'était pas volée.
« Je ne me suis jamais dissimulé (|ue, sans lui, jamais cputtri' li.iînts écrites
de ma main de peintre-graveur, n'auraii'ut été récitées, même par une
doublure du Théâtre l'rançais. — Quel(|ue nombnux et Inifjr ([n'ait i)u être
mon apport dans ce drame de la deriuére heuie ^\\\ dernier llnipire. .Vmigues
a pu très bien arriver à se |)ersuader (pi'il avait IduI fuil, ayant seul à le pré-
senter, seul à le lire, seul à le faire mettre en scène, seul à lui faire subir tcjus
les changements et corrections (pii l'oid métamor|)liosé pour la représentation,
— et cela pendant que je me chauffais béatement au grand soleil de l'Om-
brellino. — Vous comprenez du reste ([u'aux prises avi-c cette rude besogne,
il eut fini par compter i)our peu de chose un miislr collal»orateur peintre,
dont il avait dû — si souvent - corriger les fautes d'orthographe et les
fautes de français ! — et arriver à dire, en toute conscience, au comte d'Ide-
ville : « Ce diable de Desboutin. je lui dois les meilleures idées et les meilleurs
« passages de mon •< Maurice de Saxe ! " (1 mai 18<S.'j).
Desboutin était un brave homme !
(ieorges Lafencslrc (Peinture, ISfiC)
Appartient à jM""' G. l.afcncstrc
^58
X
LA RUINE
Il n'avait pas at-
Iciidu la fin flis rcprè-
siii la lions (11- Maurice
lie Sd.if [)(iur n-prciulre
le clitinin (If rilalif.
Il (piilhiil Paris, le
.'1 juillit an malin, vn
m voyant à Clarctic
son |)oi'nu' Lis Purrurs,
cpic (k\ait «liiX' Didier
Scvfstr (1). Il avait à
l'iorcnct.' dis intérêts
pins |)r«.'ssants cpie rue
df Hiclulitu. Tout ce
(pii Ini restait était eii-
j^ai^é dans des affaires
anssi hrillanU's (juin-
laillibles ! Il avait spé-
culé sur les terrains. Il
en faisait, (piekpies an-
nées plus lard, la confi-
dence à Mdniond de
Goncourl, que celui-ci rapportait dans son Jounuil : Il avait acijuis des
terrains à Florence et une partit- de ces terrains lui était acludee "_;.")().()()() francs
pour le percement d'un boulevard, quand le Iransféremenl de la cajulale
de l'Italie à Rome a fait abandonner le projet (2). >'
M""- Desboulin aux lunellcs (Mine de plomb)
(^oU. Darbour
(1) Lettre à M"'? Clarelic mère, datée : < l'aiis. 3 juillet, matin de mon dépar» pour
l'Italie. »
(2) Journal des Goncourl. t. V, p. 177 à 180.
59
Il n'i'lail pas seul à spéfiikM". Toulo la noblesse florenline, à laquelle
le H baron l)es])outin de IJochelOrl » tenait par la conimnne renommée, avait
été |)rise de la inènu' fièvre. On voulait faire de b'iorenee. si belle avec ses palais
sombres pareils à des forteresses, ses sculjjtures, ses places, son Ponlc Vccchio,
ses éi^'lises. ses eanipaniles. une ville moderne, aux larges avenues dans des
([uartii'rs lU'ufs, capable de faire oublier la capitale bistoricfue, cette Rome
intangible mais toujours ri'greltée. vers la([uelK' se tournaient les regards
v\ montaient les soupirs. Homi'. dernier vestige du i)ouvoir temporel de
la pa[)auté. ])rolégé |)ar le <iu(>s cf/o de Xai)oléon 111. I."lMn|)ereur, qui avait
tant contribué à Tuiuté de 1" Italie, voulait ((ue cette unité se brisât contre
cettt' enclave, (".onunent résister à une volonté, dont une garnison française
assurait le respect et, derrière cette garnison, toute rarniée impériale ? Il
n"y a\ait ({u";i se résigner et à se contenter du Lys rouge à défaut de la Louve.
(".onime le siège du gouvernemenl dans une ville entraîne l'établissement
de ministères, de trou|)t's, (rassemblées délibérantes, d'ambassades, etc., il
était certain ([ue Morence allait se dévtdopper prodigieusement. Les habiles
({ui auraient su se uaidir à temps de terrains devaient réaliser des fortunes
considérables.
Desboutiu crut être de ci's habiles. Poussé par ce besoin de richesse ([ui
le hanta toute sa \ie, - les ])ohèmes ont de ces rêves ! — il spécula lui aussi.
lui même temps, — - comme les folies vont en troupe, — il entreprit l'élevage
des vers à soie ! Les vers à soie lui donnèrent ses premières déce|)tions.
Peut-être la spéculation immobilière aurait-elle réussi, si le temps n'avait
pas marché.
.Mais l'a\Tiiir n'est à i)t'rsnnnc',
et le temps, en marchaid. amena 1<S7().
Dés (|ue ri^mpire fut tombé, les Italiens sentirent renaître leurs espoirs.
Le 20 se|)tembre. après une brève caimnnade, les hcrsiif/lirri entraient, par
la bi'éche de la Porta Pia, dans la Ville Kternelle et, du même couj), ruinaient
Florence capitale, les si)éculateurs et Desboutiu.
Cette fois, ('■était la fin. Sa mère était morte, ruinée elle aussi, le 21) avril
de cette année funeste, l^lle était morte à Cdermont-Ferrand. 10, place d'Es-
pagne, dans une belle maison ([u'elle pouvait encore avoir l'illusion de croire
sienne, alors (pTelle n'y était ([ue tolérée i)ar ses créanciers, qui ne voulaient
pas jeter à la rue une vieille femme, toujours im])osante et fière, âgée de
soixante-neuf ans. \-'A\v axait dissipé tout son avoir de vingt façons, au cours
I
M"'" Hector de CALLIAS
( 1" Planche )
Jr-»
/
d'iiiir txisltiuc [['X\ivv (|iii, |i;is mic fuis. !r,in;iili;i un til/iiiir ;i smi Iih II
n'ij^'iiorail lini, s:nil l'cssciili. | : la (lissi|»;ili()ii du |i:il l'iriiniiii . mais m mhiI.hI
pas st' (li'paiiir de siui icspcd filial cl sa iiu-if flail rraillnns f<iiiii
rien écoiiliT. Créaliiic, dlr aussi, siiiL;iilirir ! i:ilr a\ail lor^mil
ascriKlaiicr, v[ Irailail d'rijal avec loiitc la iiuM.-ssf di- la rrLjiMii. \ l'ilil-
l'ois. où vWv a\ail iiivilc
Mgr de Drnix -lirt'zc,
cvèquo de .Moulins, ([ui
la riMiicrciail jtar sa
présence de sur|)|is ueul's
donnés aux entants de
chœur, comme elle savi-
sait de conseiller le prélat :
— Oh ! .Madame,
interi'ompit s|) iri t n el U'-
menl celui-ci. se souxe-
nanl d'un mot de h'Iechier.
— j'ai api)ris à o])éir aux
Fores de ri\glise. mais non
à ses Mères !...
Agitée, im|)ulsi\-e, tou-
jours en routi'. elle a\ail
la manie de la construc-
tion, hàtissait là où il lui
plaisait, revendant, au
mieux ou au pire, dés cpu'
le goût lui était passé. De
telles opérations sont rare-
ment fructueuses. l'.lle
avait également la main
large ouverti', comme son fils, id, sur la fin de sa vie. r\U- s'était lourn».'
sinuiltanénu'ut xcrs les leuxies pies et vers le jeu. Crlui-ci aeheva de lui
dévorer ce ([Ut- lui a\aient laissé celles-là. Le 27 septeMd)ri' ISTn. Deslmulin
renonçait à la succession di- sa mère; il faisait celle renoneialinu le di'rnier,
comme à regret, après les enfants de sa sieur, cl mui sans avoir conlracli-
lui-même, au nionunt des ol)sé<|Ues. une dette (|ui le gêna fnii. et au sujet
de la((uelle. un an plus tard, il écrivait à son ami Simoun^ i .il I. hm. i 1
t
N'icilk- l'i'iHim' fiilihmt son :iiuiiillf (Mim tic phirnh >
Coll Darhoiir
«.Jo suis Opuisc'. mis à sec, par colle niaudilc" cU-llc de 2.500 francs de Cler-
inonl, (pie j"ai dû i)ayer en mai dernier, car, avec les frais de prolèl et les
amendes pour non en'regislrement des billets et insuffisance du timbre, ce
])illel m'est relourné avec r)00 francs de frais » (10 août 1871).
^1^-
'^
M. William Brackcii (Mine de plomb)
Coll. Darboiu
<)2
XI
DERNIERS SOUBRESAUTS
Il ne restait plus au ciiàli-lain de rOmbrellirin '[m- ur -i(i-,s,s ci.ii.s.
des terres de spéculation, (pn-kines f)ieces di- sa collerlion, son talent (!«•
peint ri" et ses rêves de théàlrr. (ir
pouvait eneore être un actif irn|»or-
lanl. si la ciiancc s'i-n inrlail.
llllc parut tout d'abord lui sou-
rire, l'n riche An^'lais <lc vinj,'t ans.
son voisin de Hillo-Sj,niardo, fit deman-
der sa fille en niaria.i»i-. Marie était
fort jolii', mais lu- savait pas un mot
d'aiii^lais; William était fort dislint,«ué,
mais ne savait pas un m(»t de français.
.Seiitendireiit-ils en italien, ou seu-
lement par les yeux ? On ne sait.
Quoicpiil en soit. Marie, très courtisée.
se décida pour le jeune .Vntîlais, écar-
tant ainsi loules sorli-s de ^ens entre-
prenants {pii tournaient autour >]•■ ^'•-
seize ans.
Le mariai^e, décidé en principe.
un Ljros obstacle était à surmonter.
Desboulin avait promis une d«il
de trois cent mille francs, escomptant
la venti' de ses terrains. Son rêve
détruit, il reprit honnélemenl sa parole, m.iis son futur <jendre la lui rendit.
et il s'en montra justement satisfait.
« Sans cet heureux mariage, - écrivait-il dans la lettre citée plus haut (1).
La toiielLe (Peinture i-
Coll. I)r Robin
(1) Lettre inédite.
— nia |)()sili(Hi iiouvail iMrr |)iri\ dans ci-ltr Diaudilc aiuirc où j'ai vu avorter
mon avenir (lraniali(iue el l'esjioir de la vi-nte de mes inxlercs (fermes ou
lerres) au eas prévu, dans resj)aee de deux ans, |)our le passage du nouveau
boulevard, interrompu par le transfert de la eapilale à Home.
« Si le eiel veut (pu- nu-s loyers (ceux de r()nd)reliino, loué) se main-
tiennent où ils sont jus(iu"à fin octobre, je pourrai me soutenir jusqu'à ce
(\uv je fasse une vente, soit des jwdcrcs, soit de la villa elle-même, — mais
pour eela il faut attendre encore quelques années, afin (jue la panique, (jui
réij[ne aujoindliui sur Florence, soit enfin jiassée, et que cette pauvre ville
ail retrouvé (piebpie crédit. »
Ce répit de (lueUjues années, il ne pouvait l'obtenir. Alors, il jiroposa
à la mère de son gendre d'accpiérir |)our son fils r()nd)relliiio. î^es négociations
furent entamées, mais la famille firacken (c'était \v nom (\u gendre) s'effraya
de la dette :
« Quant à l'argent (pi'elle devait donner, ])our assurer entre les mains
du ii()u\eau ménagi', la |)ro|)riélé di' r()nd)rellino. elle (la mère) n'a pu obtenir
de la société indivise où elle est avec ses s(xnirs aînées, d'abord (fue l.").00() fr.
qui constituent les intérêts arriérés, j)lus .'i.OOO francs qu'elle a donnés en
avance. VA\v a donc reculé devant l'avance de r).()()0 francs environ, ([u'il
eût fallu verser au gouvernement italien, pour transférer la j)ropriété sur la
tète de son fils, et ses sieurs se sont d'ailleurs effrayées de l'idée de voir le
jeune liomme cbargé d'une dette de cent mille francs, remboursable après
(piin/.e ans. »
On comprend cet effroi. Tn ])eu plus tard, il pensa réussir i)ar une
autre voie :
« On m'écrit de l'Ondireilino (pi'uiie société d'drcof/litori (accoglitor,
celui qui recueille, le |)rofilt'ur), ceux même qui ont fait le viale Poggi, va
continuer le fameux boulevard, interrompu par le départ de la capitale (sic).
El dans ce cas ((pii paraît assez assuré, puisqu'ils n'attendent jilus que l'auto-
risation de la commune), la vente des trois (juarts de mes podrrcs (1) me
permettrait d'acquitter touti's mes dettes, grosses et petites et me procurerait
au moins une existence assurée, (iuoî([ue modeste, dans ce lieu de délices. »
(Au même, 21 mars 1872).
(1) (1 Dans k'ur mapiiificiue iiuli^i'iuc. les spirituels descendants des romains
nomment quatre acres de .terrain, avec une cliaumière au milieu, un pouvoir, « podere ».
QueMe puissance ! » Phil. Charles, Eludes sur le XV I^ siccte en Fran.-c (Charpentier,
1876), p. 406.
64
IV'lilc Fille au Ijoiiiict hlaiu' ^;^^.'y
Coll. .1. Desboutiii
C.e noiiNH'aii projel sombra. Il en avait souliailé le succès, disait-il, pour
« écarter la pers|)cctivc de la gène », non pour lui « qui la supporte vaillam-
ment, en vrai bohème ! mais pour sa pauvre vieille compagne, à laquelle
il aiu'ail pourtant bien nouIu i)rocurer uiu' fin d'existence moins dure (fue
les ))rèmisses » (Même lettre).
Il ])araîl avoir, à ce nH)ment, fait fleclie de tout bois cl, notamment,
des derniers débris de sa collection. Saint-Pétersbourg les aurait recueillis,
lui laissant entre les mains une somme (fui ne [)ou\ait combler' le gouffre
de ses dettes.
Ce qui lui coûtait le plus était de se sé|)arer de son cher ()ml)rellino.
» Comment voule/.-vous, disait-il à ses amis, (fuand déjà les nuages s'amonce-
laient dans son ciel, ([ue je ([uitte une si l)i'lk' demeure vi un tel panorama ? »
Et. de son bras étendu, il montrait la vue sjjlendide, dont ii n'était point las.
Aussi, lorsque la vtMite fut conclue (début de 1874), en éprouva-t-il un vif
chagrin. » .h' ne |)uis m'accontuîner, - écrivait-il, — à ce dernier et définitif
déracinement de tout mon passé, à la perte du dernier coin de terre qui cons-
tituât mon doiiicile, une base dans la vie de famille. Bien que prévu depuis
si longtemp-;, vv cou]) a ap|)orté une étrange désorganisation dans mon exis-
tence, et il m'a fallu d'assez longs jours |)()ur retrouver mon équilibre » (2 avril
l(S7l). Quel([ues jours plus lard, il r.nenait sur le même sujet, disant que
le travail si'ul, n un vei'tige de travail » le sortait un peu de ses « rêveries rètros-
pectivi's > et " parait U- coup du passé, ([ui lui retombait de haut et en bloc
sur le cd^ur ». Mais il confessait qu'il était « désormais seul, bien seul, avec
ses regrets et ses souvenirs » (17 avril 1<S74). Plus de vingt ans après, il par-
lait encore, avec la niènu' émotion. « du milieu féeri([ue de son séjour à l'heu-
reux Ombrellino. »
Lorsqu'il avait senti ({ue le pays du soleil lui échai)pait. ([ue c'en était
fait de la vie mouvementée mais, en fin de compte, facile, qu'il y avait menée,
il était revenu au ' sombre pays des ])rum.es » contre lequel il devait pester
jusqu'à sa dernière heure. Plus rien ne jjouvait le retenir sur les bords de
l'Arno, puisqu'il lui fallait gagner sa vie, celle d'une nouvelle femme et
celle d'un nouvel enfant.
Car, de même qu'il n'avait pas attendu la vente de l'Ombrellino pour
repasser les Alpes, de même il n'avait pas attendu la mort de sa première
fennne pour vu jjrendre une seconde. Une fraîche paysanne de Bello-
Sguardo, la filK' d'un de ses fermiers, avait accueilli ses hommages et un
fils était né (1870). Vxl événement ne contribua pas à lui rendre agréable
m
un intérieur, où tant de soucis malériels .-l tant (h- d.'boins aval. •ut
leurs ferments (1).
Il quitta l'Italie aussitôt a|)rès le rnariaj,'.- <!•■ s:i filli- (août 1.S71), iiwvr-
tain de ce qu'il devait faire, ne sachant quille carrirn- etiln-preudr.-. mais
bien décidé à user de toutes les corries de son arc : drame et [loùsie. d'abord,
peinture et gravure, ensuite. hYagonard aimait à répéter ([ue la naturt- lui
avait dit, en le poussant à la vie : " Tire-toi d'affaire comme tu |)ourras ! ^
C'est ce que Desboutin pouvait se dire, à son tour, ntais il ne naissait qu'à
la misère, et il a\ail quarante-luiil ans !
(1) Sa première femme mourut subitement, un miiiiti de l'iiiver «le \H~
\Ime Bractcen, eu sortant d'un jja!, M^^ Marie Hrael<en lialjilail avec sou ruar
à Florence.
hi
XII
A GENÈVE
L'incerliliuk' est iiiu' cliosc. le ItcsDUi en est uiic aiilrc (|iii s';icf(»mriMMlf
mal de la i)rcniicrc. Ayanl (léjà lire df iinl;il)lrs profits de son |iimi;iii. |)<s-
boutin jugea jirofilable d'y recourir à Mou\t;m.
11 ne viiU pas. tonl d'abord, à P;iris. (ui iir sait trop poiir(pioi. A l'iiicotilrf
de tant iJarlisUs (pii m- rèvi-iil (pu-
de Paris. Desboiiliii. lui, rêva d»-...
(il iirvr ! Il doit y avoir à crlt»- siii-
ijuiarilé une raison (pu nous (Mliappr.
Di'sboulin tut. à dtux reprises, allin-
par la belle rite, enchâssée coinnie
une pierii' |Mécieuse à la pointe du
Leinan. cl cliaipu- fois il crut y
trouver ce ([u'il n'y rencontra pas :
le nioven d'y \ ivre dans l'aisance
par ses |)ointes ou ses pinceaux.
Il n'est, sans doute, pas lutrs de
|)ropos de noter ([ui- la .Sidsse. --
mais Zurich an lieu de (ieueve.
avait déjà eu s(»n 1 )tsboutin... au
xviii^' siècle ! Il se nouunait Salotuon
Ciessiier (U'"" avril 17.' 10-2 mars IT.SS).
et avait été. lui aussi, peintn-. .gra-
veur, poète. .\ rencontre di* la muse
de Deslxtutin, (pii était historiipu',
celle de Cressner était élégiaifUL' , mais, connue Desbontin. (iessner était
meilleur en peinture et en gravure (pieu jioésie.
Desboulin arriva à (ienéve à l'automne de 1.S71. Le désenchauti'ment
ne se fit pas attendre : il tomba malade. ciiose nouvelle dans sa vie . Il
avait contracté >< une sorte de fièvre des marais, dans ci't iid'eit climat il'hiv» r
Aiycli») au f.iiieu ( l'tiiUuie, 1-^'>UJ
Coll. MirluuMl
I .' »
genevois » où il était resté « deux mois dans le brouillard sans voir le soleil ».
Que cela devait être pénible à ses yeux avides de clarté, accoulumés à cette
lumière {]n midi, ([ui |)orle le regard jusqu'au fond de l'horizon ! Il avait
loué, ])our sa l'aniilie, « dans la maison Bellami, en face le pré Lévèque, aux
r^aux-N'ives, route de (".haîne, toute une enfilade de ])iéces au troisième étage
pour 'M)i) francs ' (1) et. i)our lui, «un grand atelier, au rez-de-chaussée d'une
grande maison, sur les bords du lac et sur la grande promenade ^des étran-
gers en été. " Il y faisait de la peinture avec une facilité qui inspirait « une
sorti' de fanatisme aux artistes et aux ([uel((ues amati'urs de la ville » (2).
Mais ce fanatisme se bornait à être un mouvement violent de l'âme et ne
déterminait aucun mouvement, même modéré, de la main à la poche ! A
peini' l'xécutait-ii, dv ci, de là, ([uelques i)ortraits, « pour alimenter sa pauvre
sou|)e. » Il aurait voulu pouvoir offrir à son ami L'rédéric Raisin, avocat,
l'esquisse peinte qu'il avait faite de lui, mais sa gêne l'obligea à en demander
50 francs !
Pourtant, le milieu ne tarda pas à l'inléresser. Il écrivait à ce même
Raisin, le 2 janvier 1(S7I : « Au milieu du trouble de cette vie vertigineuse
et insaisissable de Paris, mes yeux fatigués et mon esprit ahuri se re[)ortent
toujours, comme repos dans le ])assé et dans l'avenir, vers la bonne ville de
Genève. — Oui, c'i'st bien là (pie je plaçais le lieu de ma retraite laborieuse,
c'est vers cette grande maison de Socrate (jue je tendais j)ar mon travail,
cherchant... à me rendre digne, par quelque succès à Paris, d'y figurer un
jour avec honneur, d'y ac(iuèrir droit de cité et de mériter d'être alors le
centre d'un mouvement artisti([ue, au([uel je crois la plus grande des-
tinée. »
Ce « faisceau d'iiommes et d'amis d'élite » ({u'il avait grouj)é et qui se
dispersa à son déj)arl, aurait pu lui valoir une carrière de professeur, d'au-
tant i)lus que des élèves se présentaient. Mais ce qu'il devait accepter plus
tard, il ne voulait pas l'accepter alors, non point que son opinion sur les
{)rofesseurs l'i-mbarrassât (ce qu'ils savent, ils se gardent bien de l'ensei-
gner !) car il eût fait excei)tion à la règle, mais il ne voulait pas laisser se
distendre une autre corde, la corde littéraire.
I)ei)uis Maurice de Saxe, et quoiqu'il en dît, elle lui semblait le plus sûr
débouché vers la gloire et surtout vers la fortune. Et quelle littérature ! La
(1) Lettre à Fréd. Raisin, 9 janvier 1888.
(2) Lettre du 24 mars 1872, à Siinonnet d'IIenuezel.
70
DURANTV
( 2' Etal )
littérature en vors : ks draiius hisl()ri([ius rt les lon^js pfn^nu-s, ri la tra<liir
tion, en vers, du Don .Juan de Hyrou !
Pendant ses dernières luures de Mnrence, où il sentait, pour ainsi dire.
rOmbrellino s'échai)per de ses mains, il trompait ses an^^oisses m rimant
des poèmes d'actualité. Versailles et le Tilrfiraphe (1). Il envoyait le premier,
à la date du 10 août 1.S71. au moment du maria^'e de sa fille, a son ami .Si-
monnct, sollicitant conseils et corrections : - J'ai tant besoin. — ajoulail-il.
— de gagner quelque chose, (jue je voudrais maccrucher fie (juehjue façon a
la carrière lillèraire, la seule (pii nu- soit immédiatement ouverte. Je tficlie
de faire quelques pièces détachées, en l'absence de tout succès |)robable au
théâtre, où je crois qu'on n'aura pas de sitôt un [)nl)lic d'élite, capable de
faire un succès à. des pièces de littérature, (eunres il'arl. ■
A Genève donc, il reprend concurremment sa boite à couleurs et sa
plume de poète. 11 écrit, c'est certain, aussi vite (pi'il peint, l'ne romédie,
en trois actes est couchée sur le papier. <lans le court temps (|u'il passe dans
la ville de Calvin (2). Cette comédie, dont il ne donne pas le titre, est ■ d'une
verve incontestable et dans toutes les conditions du succès, au dire de gens
comme Marc Monnier (3). » Il retouche en même temps ses autres drames.
Le Cardinal Dubois, Madame Roland, car il remet voloutiers l'ouvrage sur K-
métier. Il en agira de même pour ses pointes-sèches. Les corrections nom-
breuses sont la contre-partie de la facilité.
Genève ne répondant pas à son attente, il ispere trouver mieux a
Paris. L'écrivain, comme le i)eintre, y auront un jibis large champ d'action.
Il quitte donc la ville de l'Escalade et se dirige sur Paris, en passant par Lyon
et en s'arrètant quinze jours à lM)ntaine-lez-Dijon. chez son ami Simonnet
d'Hennezel, dans la vieille maison de camj)agne. à l'allure de château avec
sa tourelle d'angle, qu'il nomme, à l'italienne, l'ilhi.
Est-ce à l'aller, est-ce au retour, (ju'il faut [)lacer l'anecdote suivante.
(1) Versailles, poème par .M.\RrELLiN Desroltin. Genève, Hioluinl, et l'aris, I.eiiurre.
1872, in-8" de 32 p. Rcpul)lié, nprès la mort de l'auteur, dans Vrrsailli% illustré, nuiiu^ros d-
décembre 1902 et janvier l\n\'A. Desboulin envoyait son poème à Clarelie. le IH décembre
1871, « comme simjjle moyen de rajjpel de son obscure personnalité, après le naufra'.:e de
ce pauvre Maurice de Saxe, dont les représentations ont sombré les premières dans la grande
débâcle et par anticipation ».
Le Téléf/raphe aurait paru, daprès une lettre de Desboulin. dans Le Soir, "ii nous ne
l'avons pas retrouvé. Il fut reproduit, dans le l'elil 'Lcnu's de fivrier l'.'ii-j. puis dans le
Petit Xiçois, du 23 février suivant.
(2) D'octobre (?) 1871 au IT) juillet 1S72.
(3) Lettre à Simonnet, déjà citée, du 21 mars 1.S72.
71
rapporléo par G. SouNcnaiicc. dans le lugiiro du 21 mai 188.3 ? L'auteur
la place au ri'lour. I^lle vient donc, ici, à sou ordre ein'()iu)l()gi([ue.
u Lorscpiil \inl de Genève à Paris, drapé dans son manteau et son feutre
à l'oreille, sur le (puii de la gare, à Lyon, il apereul le général Bourbaki entouré
de ses officiers. Son œil profond s'arrêtait sur la figure du soldat, l'étudiait,
la scrulail. A la fin. les officiers de l'étal-major se demandèrent ce (jue pou-
vait bien vouloir an général ce grand gaillard planté là-bas. IJn capitaine
se détacha du groupe :
\'ous regarde/, le général avec une persistance singulière, Monsieur ?
— Oui, capitaine. .le suis pt'intre. .b' cherche un modèle de l)ravoure.
.le l'ai trouvé.
Il s"a\ança vers IJourbaki, ôta son large chajjeau et ajouta :
— Et je le salue ! •
XI I I
A PARIS
LES DRAMRS
Le voilà donc à Paris (août 1(S72). Son |»rrmicf soin n'«sl pris tU- iln-r-
cIkt un loi'is convi'iiahK' ; de tes ((intin^mi-cs il n'a ruvr ! mais <lf s"iMrn|)<r
de ses pièces. Le pnl>lic. amateur d' tenvics dail lln-.àlralfs, dont il duiilail
il y a un an. s'esl-il donc tout à eou|) déeouvcil ? lit-las. non. cl il n'v parailni
que trop dans ses Itltifs ! Mais il n'est
|)as homme à ne pas essayer de vio-
ItiiItT la clianct'. I-",n mèm»- tem[is
(|n'il s'occnpc de placer Lr C.iinliiMil
/>f//)o/.s au riuàlre français, il achevé
Minhinir linlund et cnln- en pour-
parlers a\'ec ('.lareli<' pour un drame
siii- la Liijiir. Il hii demande le \ olume
de .MicheU'l. sur cetli- période luToï-
ronncpu- di' noire histoire, (.larelie,
i|u"il aime Itien et (juil <l»-finil curieu-
Minent une ma< liine à va|)enr lit-
leraire . lui a\ait enli-ndu parler
le cette e|)o(pie. '. .le lui avais dit
jui- j'v vovais un splendide drame
liislori(pu'. frisant notre situation et
notre épocpie. |)ar îles allusions earae-
teristi(pies et pit toresipies. ■ .Mais il
ne voulait pas s'exposer à jouer dere-
chef le rôle de Haton. et à tirer les
marrons du feu. Il lu- refuse pour-
tant i)as la collaboration offerte et l'on devine |.ounpioi. .le redoute, expli-
quc-t-ilà son ami Sim(Hinet. la sul.jecliviti- dans la(pn-Ile j'ai dû me placer
avec Aniinues, et si j-aceei)te. (•'est i-ousse i)ar la nécessite de faire (lUeUiiio
chose (iinalwutisse d rapporte (7 janvier ISTi?). » Touj<.urs la même antienne !
(.11. lii^iut ( Pniitte-srchrj
Sous raiguillon de colle lu-ccssilé, il sr i)reiul i\ craindre que Claretie « manque
de persévérance », — c"esl d'ailleurs ce qui arriva.
INIais (".larelie défaillani, un autre K' renij)lace. « J'ai lail la connaissance
d'un composileur de niusitpie Davin Duvivier, auteur dun opéra-comi(iue
représenté en 18()*.), Déborah, qui ma chargé de faire un livret pour un grand
opéra et a choisi La Coupe et les Lèvres, d'A. de Musset... Je crois que dès
la si'uiaine prochaine, je pourrai me mettre il l'œuvre, espérant 'encore par
là courir la chauci> d'un dividende dans les bénéfices de droits d'auteur, »
(Même lettre).
1mi attendant, pour subsister, il fait de la [)einture. Durand-Ruel, avec
(]ui il \ienl d'entrer eu rt'lations, est dis])osé à lui acheter «une étude d'fiomme,
faite à l^lorence, ' à kupielle il met la dernière main. Ses camarades l'en-
gagent à rexjK)ser au Salon (1). Va\ même temj)s, il envoie trois toiles à l'ex-
position de Ciand et il commence » par le coffre à bois », la décoration du salon
de son ami Simonnet, à Fontaine-lez-Dijon. Nous voyons également, à cette
date de 1873, apparaître la gravure de portraits à la pointe-sèche, qu'une
fâcheuse bronchite catarrhale vient interrom[)re. « Cela m'a pris par une
grijjpe bénigne, au plus ])eau nu)ment de mes travaux de gravure, la semaine
où j'avais en persjjective le portrait de la duchesse Colonna et celui du papa
Victor Hugo. » (A Simonnet, 22 mars 1873).
Contentons-nous de noter cette reprise de la pointe-sèche et de mettre
un signet à celte page des occupations du j)oèle. Son état d'esprit, à cette
heure, est ([u'il voudrait enfoncer les portes du théâtre, mais qu'il pressent
fort bien qu'il ne les enfoncera pas. On n'a pas toujours sous la main un
bélier comme Amigues (un bélier qui voulait manger le berger), non plus
que le hasard des circonstances favorables. Alors, sagement, en homme de
bon sens, — car il en eut toujours et plus qu'il n'y parut, — il cultive et
améliore son jardin, c'est-à-dire la profession dont il vit.
Ecrire des drames, des comédies, « s'en tirer à son honneur, n'est pas
la difficulté. La difficulté, reconnaît-il, est tout entière dans le lancer. » Et
il expose très clairement les moyens de parvenir, qui ne sont pas les siens :
« Pour réussir, il faudrait, une fois la chose achevée, se transformer en un
hommes d'intrigues et de manœuvres mondaines, s'assujetir à des démarches
aussi compliquées que celles d'un littérateur (jui vise à l'Académie, se créer
(1) Kst-ce le l'ortrail de M. R. en costiune florentin, qui figura au Salon de 1873 ?
74
Hereld DUMAS
un (oiilro i\v ivlalioiis illiislics et iiiîlii.-iitcs. se fain-, <!.• .|inl(iii,-s rnaiMiin
donnant \v Ion au Paris arlislicin.- i-i liuùrairi'. un fort avancé, dou Ion
bâtirait iii brrclir cctlc citadrll.. du riK-àtri' français. Ilùlas! CVst ti partir
de ce moment et à re point de vue, ([ue je sens toute mon infériorité. • (A
Simonnet, août 1(S72).
Kt tant (juil n'aura pas niioiicc au llu'-fdri-. il reviendra sur relie im-
possil)iiité de sa nature. l*our arrivi-r a pnndre le départ, il m.- faudrait
être de ces liommes qui savent se poser, connue Ifs .\uLîicr. K-s Sardou, et les
Dumas fils... Mais l)ridé, serré comme je le suis ici par la ,i,'éne ((|ui va juscjuaux
vêtements), ahuri |)ar vini.;! années d'une vie solitaire et prcs(|uc .sauvaf|e,
dans une campai,'ne à l'étranger, je nu- sens tout à fait incapable de me faire
jour et de me poser, |)ar moi-même, dans le milieu parisit-n. où il fau<lrait se
présenter et se faire valoir avec aplond). » (Lettre à Simonnet. du 2 octobre
1874). Fallait-il qu'il eut le cieur gros, pour médire ainsi de son > cher ()(nbrel-
lino ! » l'ne campagne ! ('/est bien la seule fois d'ailleurs (jue l'amertume
l'ait rendu injuste pour son radieux séjour d'autrefois.
Où donc en soid-ils, ces drames ? L'un, Lr C.nniiiuil Dubois, est arrivé
jusqu'au cabinet du directeur de la Comédie-b'rançaise. Sarcey lui a valu
cette aubaine. 11 lui a mandé ((ue Perrin. nouvi-Ilement nonnué, serait ■ heu-
reux d'avoir une pareille représentation à grand elTet . VA Perrin n-çoil
l'auteur, lui parle avec éloges de Maurice de Save, n'est point elTrave de la
possibilité d'un scandale (à cause du sujet et des rapprochements (jue l'on
pourra faire), au contraire même, il y lrou\e un attrait [)our la pièce et une
raison de succès. 11 désire seulement (|ue le scandale - ue casse [)as trop les
vitres ». Desboutin fait copier son drame, le porte à la Clomédie et attend.
Perrin, « contrairement i\ l'usage a xoulu lire alli-nlivement les cin(| actes
et donner lui-même son avis, avant lecture au Comité. 'Le bon billet ! Perrin
est sollicité par Sarcey, par C.laretie. Il ne tiil ni oui. lù non, il fait un mot
assez anmsant, qui n'interdit j)as l'espoir :
— L'hiver s'annonçant rigoureux, on est prié de faire monter Dubois
à la Comédie I-^rani^-aise !
Pourtant ce Dubois a été « chautTé h blanc > ; '« bon nond)re de rha-
psodes en récitent déjà des tirades et le (piarlier des lù-oles s'en émeut par
avance... » C.laretie, très enthousiaste, en fait son alTaire. Si le I-* nuirais se
montre récalcitrant, < il croit pouvoir, sans hésitation, le faire passer comme
pièce d'ouverture de représentations (lramati([ues de la salle Ventadour. |)our
alterner avec les opéras. C'est Humaine (pu en va être le directeur et
7;i
Claretie dit [)oiiv()ir lui imposiT Dubois ». (A Simonnet, 5 septembre 1872).
Autant en enipoiie le veut ! Quatre mois se passent et Perrin ne donne
pas signe de \ie. C.laretie non plus. Desbouliu. (pii ['ivu[ à la scène de la rue
Richelieu, voudrait, à défaut du drame, lire au Comité cette comédie écrite
à ("renève. el ([ui paraît a\'oir eu i)our titre Eloa. comme le poème d'.\. de Vigny,
l-'.lle m (lilTciail ci'i-liiiiu'menl par le sujet, si Ton en juge par ces deux vers,
demeurés dans la mémoire de (piehpies amis du i)oète, et qui étaient passés
à l'état de u scie ' d'alelit'r :
Moi, ji- ni' fais danser que ina candidature
Au (Conseil général. -- Wivn de plus, je l'assure.
Mais on lil rt'Uiarcpier à l'auteur « ([ue le Comité étaii |)res(pie entièrc-
iiienl bonapartiste et (pie la pièce passerait pour une satire de cette épcxjue ».
(A Simonnet, 2 avril 1874).
Qui eût cru les pièces de Desboutin si subversives?
Il se raccrocha alors à Madame Roland. Il cou liait ses espérances à son
vieux camarade de collège, dans cette même lettre dont nous venons de citer
un j)assage :
<( Cette (ruvre commence à préoccu|)('r et à empoignt'r les f[uel([ues connais-
sances conipéliMiles aux(pielles j'en ai fait part, au fm* et à mesure que j'en
termine les scènes.
« Le côté le plus pratique el le j)lus positif de leurs espérances est la cou-
leur polit i([ue (pi 'ils constatent dans ce drame, c[ui est dans un esprit à pou-
voir p!ut(')t fiai 1er la censure (pie refiaroucher. L'esprit en est essentiellement
neutre et im|)arlial. An nom même du caractère français, on peut dire r{ue
l'idée ré|)ublicaine y est un peu roulée, tombée. Le dialogue de Dumouriez
el de la Roland est une i)ièce rare dans ce genre. Le 4^ acte entre Dumouriez,
Robespierre el Saint-, Just \enge le bon sens el la modération, des maximes
ratlicales et féroces de ces deux emballés. »
Ilélas ! Madame Roland n'eût pas un meilleur sort ! Malgré les conseils
de Sinu)nnet et de Charles i>igot, journaliste et écrivain d'une certaine répu-
tation, qu'il remercia i)ar un excellent i)ortrait à la pointe-sèche, le drame ne
parvint pas à triompher de l'indifférence directoriale. Il avait pourtant été
écrit avec cette i)assion (pie Desboulin mettait en toutes choses, d'abord à
Genève, puis à Paris dans son taudis de la rue d'Arcet, où il lui arrivait de
dicter ses vers à son ami Herald Dumas, tandis ({ue lui-même préparait,
dans un placard qui lui servait de cuisine, des moules marinières, — Caresme
7(1
Il Mn5ii;illlc ( i'itliiutf i^i i
.Musée lie Moulins
sur l'ik-licoii ! - Il avait eu pdiiitaiiL cv (Iraiiu-, l'Iiouiicur di' citadons dans
les journaux, apirs une conférence de Charles BigoL à la salle des Capucines
(2C) février LS?.')). Celui-ci lui avait amené, en renfort, « le journaliste
lùlniond Texier. et un <les lionmies de Paris les i)lus au fait du théâtre depuis
l.S;5(> et le plus eu relations avt'c les acteurs et les directeurs littéraires de la
capitale <. tout ce hruil s'éleii,'nit avant d'avoir atteint l'enipyrée de la rue
lîichelieu. Cet insuccès in([uiéte-l-ii Charles l'>i,iVot. (pii rêvait, lui aussi, de
droits d'auteur ? lîitjot a recours alors à l'arbitre suprême, à celui ([ui doit
raffermir ou détruire à tout jamais ses esp,()irs, à sa femme ! C'est, pour
eomi)le de comi([ue. une aniéricaini', dans hupielle il a la plus ifrande confiance,
|)arce (pi'elle résunu' pour lui ro|>inion (pie la partie féminine d'une salle
pourrait avoir de la représentation.» Deshoulin lil sa pièce: l'efîet en est
prodi;4ieux, et le lendemain Hiffol lui déclare » (jue jamais son américaine
n"a été aussi fortement impressionnée, — même i)ar le côté sensible et i)as-
sionnel de la chose. >> VA le brave honune, - c'est Desboulin ([ne je veux
dire, — ajoute, candide : » Ce ([ui est une rude victoire j)our moi ! » (A Simon-
net, S octobre 1(S71).
Victoire domesticpie ! 11 jx'ut dire de M(i(laii}c liohmd ce (pi'il disait du
CdrdinrtI Dubois : u elle semble dcNoir être le |)lus beau rossii,niol (pii ait
jamais chanté dans les rayons poudreux d'un placard, sur le([uel on aura
mis les scellés ad œlcrnum. ■< (Au même, 21 mars 1(S72).
h.l, douze ans plus tard, lors(jue, Claret ie devenu administrateur gênerai
du premier Théâtre l-'rançais, il lui remettra le manuscrit de cette infortunée
Madame Roland, il se trouvera (]ue l'administrateur a oublié les enthousiasmes
de l'ami. Alors l)esl>outin, sans élonuement, sans mauvaise grâce, un peu
désillusionné, — moins toutefois (jue ses véritables amis (jui esj)éraient de
Claret ie au moins une réception à corrections, — envoie à Herald Dumas,
qui lui fut toujours fidèle, cette lettre, du 14 août 188(),où sa fierté se cache
sous la raillerie :
... < Claretie, à qui j'ai remis Madame Roland, pendant mon séjour à
Paris, m'écrit de Viroflay ({u'il ne l'a pas encore lue. .le n'en crois rien ! C'est
un tampon mis entre moi et son refu!>. Du reste, je n'ai fait cette présenta-
lion (jue par ac(piit de conscience, (>l sans couper jamais dans le fol espoir
de la voir réussir. Les temps ne sont i)as encore mûrs pour les pièces graves
et simples. Je suis Irop grand pour mon siècle ! (llein? Hugo lui-même n'au-
rait pas trouvé ça ! Son om])re doit frémir de jalousie jKjslhume, ([n'en dites-
vous ?) »
7.S.
Cet échec, fie l(S<Sr), trouvait un lioiiiinc ([ui avait déjà rciioucé, sauf
dans quelque re[)li profond de sou r(ru\\ ou survivait cette attente de la
« veine » qui ne se décourage jamais, ^ à la carrière draniatifiue. Mais en 1871,
alors qu'il frappait du front, ici et là, pour pouvoir vivre, quels cou[)s pénibles
que ces aternioieiiients, a\aiil-cour('urs <\vs non possiimiis ! Pourtant, il ne
s'abandonne pas. Il ne cède pas au sort. Il lui op|)ose ([uebiurs luaiédictions
bien coni])réliensibles, sa ])hilosopliie et son labeur.
Chose grave ! Durant ces années crilicpu-s, alors (ju'il sentait plus lourd
le poids de la misère, il semble bien ([u'il ait aspiré au renoncement, (ju'il
ait voulu s'asseoir à son tour sur la chaise de Procuste, où toute individualité
expire, des fonctions maigrement, mais régulièrement rétribuées. Il écrivait,
en août 1872: « Je me donne encore un an d'essai, de lutte contre le sort. Au
bout de ce temps, si je n'ai pas réussi, j'aviserai à me faire, loin d'ici et pour
jamais, une autre existence, celle d'un gaçine-pain rcfiulicr et assuré. J'aurai
fait des privations une assez rude exi^érience, pour que le i)lus mince salaire
du plus nwdeste emploi me semble une vraie fortune.
Rendons grâces aux dieux f|ui écartèrent ce présage ! Faut-il leur rendre
grâces aussi de n'avoir point permis que Desboulin (|uillàt, pour la plume,
burins et pinceaux? On ne saurait se prononcer en connaissance de cause.
Il ne nous reste des manuscrits originaux ([u'un amas de brouillons incom-
plets. Desboutin n'avait pas plus de soin d'eux que du reste de son œuvre.
Il est probable cpie s'il a\ail consenti à les pulilier, comme le lui proposait
son ami Crépin-Leblond, il aurait été très embarrassé. Mais ce n'est j)as cette
raison qu'il donne de son refus. Celle qu'il allègue est plus intéressante, en ce
qu'elle montre la persistance des illusions. N'oici. en elTet, ce qu'il écrivait,
le 1" juillet 1805 :
« Quant aux oeuvres dramalicpies, mes amis conservent encore assez
d'espoir de trouver un joint de représentation, i)our fpi'ils m'interdisent
toute publication anticipée de ces drames en vers, notamment de Madame
Roland et du Cardinal Dubois. »
XIV
LES ANNÉES DIFFICILES
Nous avons vu Desljoulin, lorscjuil déharcjua à Paris, vn ce mois d'août
1872, se préoccuper fort peu de son iot^is. Il coniniença par demander asile
à son ami l-jnile Pessard, le eom|)()sileur applaudi du ('.(ij)il(nnv I-'nirassr,
qui habitait rue de Xa|)les, lO. l'ne
lettre à Simonne!, du f) septembre
suivant, porte cette adresse. Km. Pes-
siird avait, par ciTlains détails,
const'rvé le souvenir de ce séjour
de l'artislt' sous sou toit de L,'arçon.
La nuit \ cnue et la chandelle éteinte,
tous (\vu\ couchés dans la même
cluunbre, Desboutin pérorait et fu-
mait. Pessard, au ronron des disserta-
tions ])hilosophi(pies, ne tardait |»as à
perdre le lil, et à s'endormir. Soudain
révt'il l)rus(pu', {[u'étail-ce ? .Moins
(pie rien, Desboutin, crachant au pla-
fond, avait nianipié de souffle et le jet
était parabolicpu'nu'ul retombé sur
le nez du dormeur.
Peu de temps après, lailisti' sins-
lallail 10, rue d'Arcet-Hatiitnolles (1).
dans une mansardt', aussi peu nu'ublée
que possible, et dont le meuble le plus iuijiénieusement utilisé était un
escabeau à quatre marches. Sur celle du bas, il posait .sa palette, sur la
M""" Cornereau (Pcinlure, ISSO)
Musée (lu I.uxonibourfi
(1) La rue Darcet actuelle, qu'habitait Desljoulin. venait de reini)lacer la rue du
Boulevard ; la rue qui, autérieurenieiU, portait ce nom de l^arcet est devenue la rue l'uleaux.
i.a subslitulion .s'est faite tout au début de 1<S7."{.
Voici, d'ailleurs, la liste de ses domiciles :
Après la rued'.Vrcet, 10, et la rue des Dames, .'52, vituenl la rue Bréda. 21,1a rue de I.a
SI
di'iixiriiu', si's livres i-l ses niaimscrits. sur la Iroisième sa nourriture et sa
vaisst'llr, sur la (lualrièiue le litre de vin, son tabac, ses pipes et son argent.
Le tonneau de Dioijène au sixième étaj^'e ! C'est là qu'il convoquait son
secrétaire bénévole, son ami Herald Dumas, par de courts billets, de ce genre :
- Cher petit, \ene/. donc ce soir prendre un bock à (iuerbois entre 9 heures
l't '.) h. 1 2, - - nous rentrerons ensemble nous coller à la co|)ie et à l'intrigue
(de Madame lîolaïul) >'.
L'année suivante, il était rejoint par sa femme et par son fils, Mycho,
— dont il orthographiait alors le nom Michaud — et il transportait ses peu
encombrantes pénates, quehiues pas plus loin, 32. rue des Dames.
Là, il occupait un atelier, au premier, au fond (rune cour, où il succédait
h un plomI)ier. Au rez-de-chaussée, il avait pour voisin un collègue de profes-
sion et de misère, le peintre de fleurs Cauchois, cpii vendait ses tableaux deux
francs et les signait du nom du mois où il les avait peints. Les mar-
chands les re\endaienl couramment cent francs. Le logis n'était i)as luxueux,
('/était un l)ara{iuement. Une poussière noirâtre imprégnait les cloisons et
rendait o|)a((ue le \ilrage. Tout autre eût fui ce misérable relais; Desboutin
racce])ta. Insouciance? Peut-être. Désignation? C'est |)robal)le. Pauvreté?
C'est certain. L'enragé fumeur ([u'il était n'en était-il pas réduit à mélanger
à son tabac, par économie, du varech ({u'il extrayait du matelas de son enfant ?
Il déclarait d'ailleurs le mélange excellent. Pour vivre, il faisait des tableau-
lins dont, faute de modèles, il copiait les jx'rsoimages sur des gravures de
mo(h's. Il ne les signait pas et comme son voisin Cauchois les vendait cent sous.
iMlmond de Concourt l'a connu dans ce campement, plus sale, mais
toutefois plus meublé, (pie la mansarde de la rue Darcet. Il en a fait une
description troj) colorée ])our {pi'on ne la cite pas :
( (') février LS?.")... Je vais le trouver aux Dalignolles avec Burty. L'atelier
est dans la cour d'une grande cité ouvrière bruyante de toutes les industries
du bois et du fer. Il est construit en |)lanches mal jointes, que recouvrent
au-dedans dimmenses tapisseries rai)p()rLées d'Italie, rei)résentant la mort
d'.Vntoine, la construction de Cartilage, et mettant au nmr, en leurs verdures
fanées, dans une couk-ur haillonneuse, un monde pâle et efïacé de guer-
riers farouches à ra])parence spectrale. D'un côté du mur, la vieille tapisserie
Rochefouriuild. :i8, la rue de 1m;uu-c, 171», à Ni<-e, de rcclicf la rue l^ocliefhouarl, :{8, à Parus,
la rue de l'Iù-nle, !t, aux l'aquis, à Genève, iini)asse de (aielnui. 5, à l^iris, cité Véron, 9,
rue IJréda, 5, puis 15, villa .Mossa, puis rue Sainl-I-rançois-de-I'aule, ces deux derniers domi-
ciles, à Nice. Il mourut dans ce dernier.
H2
iH'inme cousant (J'cinliirc, l>s7J)
Coll. J. Dcsl.oiitin
83
fait la portion' (l'iiiir autre pièce, dans laquelle on euleiul des cris d'enfants.
» l'U ])art()ut.sur le ton sordide et jaunâtre de la laine déteinte, pendent à des
elous des châssis montrant sur les genoux et les ])ras d'une mère des nudités
d'enfants, de petits ventres, de petits culs au coloris rose et gris des esquisses de
1 .epicie : l'elal d'uni' chair, dans hupielk- on si'ut les entrailles d'un peintre-père.
l":i partout dans l'atelier sont épars des joujoux et du linge reprisé. Kt deux
petits chiens. iu)uveau-ués. gros comme des rats, se tiennent fraternellement
dans les pattes l'un (U' l'autre, se mordillant leurs petites gueules entr'ouvertes.
((Deshoutiu nie l'ait asseoir dans un grand fauteuil de velours vert, le meuble
d'apparat du logis. Il enduit d'huile une planche de cuivre pour en enlever
le brillant et se met à crayonner sur son genou.
«Soulevant la portière, une Italienni'. sa feninu', est entrée dans l'atelier,
l)romenant sur les bras, de long en large, une j)etite tille. Fuis, est a|)i)aru
sous la i)ortière. à cpiatre pattes, un joli gamin tout frisotté, qui, ai)rès ([uel-
(pu-s instants d'hésitation, s'i'st décidé à venir à nous. I-'.t là-(k'ssus est rentrée,
toute joyeuse de sa ])romenade dans la cour, la mère des petits chiens. »
Dans ces années 1 (S72, 187.') et 1874, qui furent celles où son avenir de
liointe-sècliiste et de peintre se décida (Goncourt n'aurait pas posé pour le
premit'r venu), l'ai'tisle vécut, c'est tout ce (pie l'on peut dire. « Je continue
toujours mon petit conunerce de lal)leaux, (jui me fait à i)eu prés mon entre-
tien. De |)lus, j'ai eu la chance de trouver un ])ortrait de 200 fr., puis, j'ai
\eii(lu à (îenéve un pi'tit tableau (pu* j'y avais envoyé et ([u'on m'a l)ayé
'JOO fr. aussi. — Ciràce à ci' petit courant, je puis pa>'er mou loyer de ce
trimestre et me suffire. Do ce côté, et en cela, ma situation commence
donc à s'améliorer un \)vu. Il me faudiail, pour me jui'tlre complètement à
fini, un ci'rtaiii succès an Salon, amenant la \ente de mon tableau, et sitôt,
je pourrais gaîmeul vi d'un esprit libre, aller |)ren(lre près de toi mes vacances
de morte-saison, me retrenq)er dans le sein de Ion intimité, en donnant ])rès
de loi et avec toi, la dei iiière nuiin à mou drame de MmUimc lioUunl, dont je
suis en train de fairi' le 1^' acte, (pii est le dernier, puisipu' le 5^ est à jieu près
fait, i (.V Simonnet, 2 avril 1871).
Ce succès au Salon, il l'étayait- sui" un .Joueur de violon, cpii ne fut pas
admis. Ii\(k inv. « b'igure-toi ((ue sur trois tableaux ipu' j'avais envoyés à
l'exposition, ce polisson de jury m'en a refusé deux et n'a reçu justement
(pie le portrait de femme, la [)lus insigniliante de ces trois œuvres et la moins
l)r()pre à faire connaître l'originalité de mon talent. Ils m'ont refusé mon
Joueur de Violon, le tableau sur le(piei je c()iii])tais légitimement pour la vente,
y
Hippolyte BABOU
( Premier Etal )
le tableau qui avait été déjà roconimaiidé à de forts acheteurs (|iii s'étaient
engagés à l'acquérir si, à l'exposition, il leur paraissait répondri' :'i léloi/e
fastueux ([ui leur en avait été fait (1).
« Ils m'ont refusé le petit portrait en pied que j'avais fait de l'acteur de
La Roche, du Théâtre l'''raiu;ais, dans le rôle de Fabrice de L' Aiicnluriirc,
et que tous les artistes ([ui l'ont vu avaient proclamé partout c(untne un
des plus nerveux [)elils [lorlraits costumés, faisant à la fois liihK-au di- genre ('!).
En un mot, une série d'articles étaient tout préparés ])ar des criticpu-s influents,
j)our me chauffer un succès à ce Salon et voilà (pie ces pignoufs, ces rapins
passés à l'état de i)ontifes, dont on a com[)()sé le jury, nu' font [jcrdri- le fruit
de cette campagne ! Je suis, du reste, en large et noml)reuse conq)agnie.
Ces messieurs pour faire du zèle et de la police autoritaire dans le sens de l'école
ont sacrifié de nombreuses toiles de la plus sérieuse importance artisti(jue,
— entre autres un Sarnson et Dalila de mon camarade Darier, une œuvre
qui avait fait, cette année, une vraie révolution à Genève, où plus de .'J.OOO per-
sonnes ont été la visiter à l'Athénée. » Par contre, on a reçu " cinq cents
croûtes, du niveau le plus bas. ■) (A Simonnel, 17 avril 1(S71.)
Il certifie pourtant à son ami Simonnet, sur le ton d'un écolier pris trop
souvent en faute, qu'il « n'a rien négligé dans ses tableaux >. et ((u'il " a fait
toutes les démarches possibles pour s'assurer des [)rotections ! » .Mais tous ses
amis furent défaillants : Lafenestre, Robert-Fleurv, ; dont il avait soigné le
fils pendant un mois, à l'Ombrellino », Plenner, ( aucpiel il avait fait a\oir
de.s commandes en Italie, à une époque où il était simi)le petit pensionnaire
à Home ! » Et, ])our coiuble de déce])ti()n. il maiu(ue le païuieau du salon de
son ami Simonnet, jiour s'être « laissé aller à troj) de verve > et avoir oublié
le « point de vue fort juste de la sévérité et de la décence d'un salon de réceiJ-
tion. )' (8 octobre 1874.)
S'il accuse les autres de son échec, c'est lui-même (pi'il morigène piuu-
son manque de tact dans la décoration du salon de son aiui ! l-^t il n'y va
pas de main-morte, ce pénitent de la Bohème, qui ne i)eut i)ourtant jamais
rompre ses vœux :
« C'est encore le résultat de cette vie excentrique, en dehors de toute
(1) I.e Joueur de Violon dut l'Ire rcpOché. car il ist mciUinniié sur le livret du Salon di-
1874, sous le litre de // .^Jusicante. Ce tableau. aetuelUimul au musée de Miuiriiis. e>l le por-
trait de son ami Herald Dumas.
(2) Le catalouue i)orte : Porlruit de .1/""^ IL L'année d'avant, il avait exposé le l'irrtnvl
de M. li. en costume floreidin. .Malgré les initiales, il ne s'aj^it doue pas dclaeleur La Roche.
S.")
Petite fille nu chien (Peinture. Tsst)
Coll. .Michaïul
86
couveiitiou sociale, où depuis lant d'années je m'enferme dans une indi-
vidualité tout artistique. Elle me rend, je le sens, impossible, et bien souvent
d'une impossibilité choquante, au milieu de i^ens comme il faut, vivant de
la vie sociale et régulière ! (Comme on voit (pi'il y asj)ire !)
« Hélas ! bien des fois, dans mon séjour chez toi, dans ce bienheureux
milieu où je renaissais à la vie de famille, je me sentais tomber dans des {)an-
neaux, tirant la langue et détonnant parmi cette société décente et de bon
goût, que mes tristes habitudes de bohème artisti([ue poussaient au ton
malotru et ridicule de la licence et de la gaminerie. »
C'est un mcd culpa sans réserve et il prévoit sa [)énitence :
« Je m'en veux mortellement et, si je ne [)uis me corriger (à mon âge,
chose difficile !) je devrai me condamner à la solitude, dans hupielle on fait
bien de laisser certaines vieilles brutes, auxffueiles on |)eut reconnaître le
talent et le mérite de Tesprit des oeuvres, mais ([ui sont franchement impos-
sibles dans le monde. » (Mèrne lettre.)
Cela dit, et ces verges données, il ne faut pas (jue son ami s'y trompe :
l'artiste, en dépit de l'erreur commise, est supérieur à i'homnn' ! 11 entonne,
là-dessus, un éloge de lui-même, à la fois adr(ut et pitpiant.
Simonnet avait dû lui reprocher une influence de Manet, sous ce couvert
que Manet ne savait pas peindre. Desboutin riposte :
« Manet, ou l'école qu'il représente, est en possession, même si tu veux
à l'état d'exagération et de charge, des vrais principes d'art et de peinture
dont je me suis aperçu ((ue je manquais, à mon retour d'ilalie et de Suisse. »
Puis il continue, après cette afiirmalion calégoricpie. dont nul aujour-
d'hui ne conteste la vérité :
« Quand au fonds esthétique de l'art, (pie tu crains être o])liléré vu moi,
faute d'études préliminaires classiques, correspondant à celles ([ue j'ai pu faire
en littérature, je peux te rassurer. Car, d'abord, je passe ici, aux yeux des
Henner et des Robert-Fleury père, pour un des i)einlres les i)lus en posses-
sion du métier, tel qu'il est enseigné à l'école et, d'autre part, le goût (pii peut
me diriger en littérature, ne i)eut me faire défaut dans les arts. Les essais
que tu m'as vu faire en pochades, n'ont aucune influence sur le fond, qui ne
s'altérera jamais et pourront tout bonnement (et i)ourraienl, si je n'étais
pas si vieux), m'aider à donner plus d'extension et plus de vérité à ma facture.
J'ai besoin d'une année peut-être pour me compléter dans ce sens, et j'espère
te prouver... qu'on peut s'inspirer de la nouvelle école et faire quelque chose
de complet et de classique. » (Même lettre.)
87
XV
LE CAFÉ GUERBOIS
Il écrivait cela, presque à l'heure où se vendait l'Ombrellino. Hormis
la plainte qu'il épanchait dans le sein de son fidèle Sinionnel. il pariait peu
de sa splendeur passée. Par dignité, peut-être, par philosophie, sans doute.
Puisque nous savons qu'il n'oubliait pas, croyons à sa philosophie, c'est-à-
dire à ce que l'on désigne connu uné-
nieiit par ce mot : l'acceptation des
conditions matérielles et morales de
la vie. Cette philosophie pratique n'est
pas plus fréquente que l'abstraite,
sur notre globe terraqué.
Pourlanl une fois, — et vrai-
seinl)la])leinenl vers cette date de
1871, — il fut ol)ligé de s'en ouvrir
à deux de ses amis, à Manet et à
Armand Silvestre. Il avait choisi les
plus représentatifs de ceux avc"
lescpiels il fréquentait quotidien-
nement, ([ui étaient ceux aussi vers
lecjuels il se sentait le plus attiré
par des goûts seml)lal)les, ici la i)ein-
ture, là, la j)oésie jointe à la verve
bon (Tonne et à la gaîté !
C'est Armand Silvestre ([ui conte
l'anecdote, — Armant! Silvestre, nar-
Ed. MaueL ( l^uintc-scche)
rateur d'histoires épicées, mais poète et ajjpréciateur d'art pénétrant :
« Ce fut un hasard qui nous rappela, à Manet et à moi, que notre ami
avait été un grand seigneur. Il nous pria, en effet, un jour, de l'accompagner
chez un notaire [)our y dresser l'acte de vente, devant témoins, d'une dernière
89
parcelle de sa propriéié, dont il se dépouillait pour éteindre ses dernières
dettes. Vn morceau de terrain valant deux ou trois cent mille francs,
« Le notaire était ahuri de \()ir un homme aussi romantiquement vêtu
parler d'une li-lle s(unme a\"ee une superbe ([ui frisait le dédain. Mais
nous ne fûmes j)as moins surpris que lui, quand Desboulin nous apparut,
sur cet acte authentique, où il avait signé avec nous, pourvu (fune baronnie
et d'un nom illustre dont il ne nous avait jamais parlé. I>e malheiyreux tabel-
lion se croyait de plus en plus dans une féerie, et les i)etits clercs ricanaient
comme si cela n'eut été qu'une grande mystification. Quand on nous demanda
nos j)rofessions, Manet me dit à l'oreille : « N'avouons pas que nous sommes
artistes, on ne i)rendrait plus rien au sérieux ! » 11 se déclara donc : proprié-
taire aisé et moi, i)our ne j)as demeurer en reste, je me dénonçai : rentier à
son aise. Ayant repoussé d'un coup de |)ied son dernier lopin d'opulence,
Desboutin sortit de l'étude avec une crànerie de matamore et lit au café
Guerbois, en notre compagnie, une entrée conq)arable à celle d'Agamemnon
dans ses Etats (1). »
Ramenons ce récit, rehaussé de couleurs vives et conventionnelles, à
ses lignes sinq)les ; il en résulte (pie, en 1(S74, Desboutin donnait procuration
par devant notaire, pour réaliser la vente de l'Ombrellino, et qu'il racontait
à ses témoins, quelques détails de son existence florentine. I.à-dessus, ils
entraient tous trois au café de l'avenue de Clichy, voisin du Père Lathuile,
où l'artiste aimait à passer de compagnie, les heures qu'il ne consacrait pas
au travail, — et c'était un rude travailleur 1 -- le café Guerbois.
Le café Guerbois a disi)aru. Sa notoriété fut brève. Il en doit la plus
grande i)arlie à Manet, d'abord, qui le fréquentait dès 1867, amenant avec
lui son cortège de novateurs, ])uis à Desboutin.
Desboulin était un causeur brillant, plein d'idées originales, et possédant
des clartés de tout. Il avait cette curiosité des choses de l'intelligence, qui
décèle riiomme cultivé. Autour de lui se constitua rapidement un groupe
d'interlocuteurs, ou plutôt d'auditeurs, car le monologue ne lui déplai-
sait pas. Il eût fait un excellent conférencier.
On l'écoutait. Des gloires ascendantes l'entouraient : Zola, Degas, Ma-
net (2), A. Silvestre, i)arfois l'^antin-Latour ; des notoriétés en herbe : Léon
(1) A. Sii.vESïiŒ, Au paijs des Souvenirs. Le Café Guerbois, p. 16.3 et s.
(2) Manet, déjà célèbre, mais d'autant plus critiqué, venait surtout le vendredi. Le
vendredi était pour ainsi dire « jour d'abonnement », et les habitués y manquaient fort peu.
90
y
' ..Us
DEGAS au Chapeau
(2' Ei«i
Cladel, Jean Béraud, Wilk'lk' ; d'autres, plus ou moins passées, mais (jui
reviendront, comme Duranty, méditant sa Nouvelle Peinture, (1870), af)rés
avoir écrit les Malheurs d'Henriette Gérard, illustrés d'eaux-fortes de Legros,
le sagace critique Philippe Burty, Hippolyte Babou, Vignaux, Zacharie
Astruc, brillant causeur, lui aussi, Belot, le graveur, dont le Ijou liork de
Manet, reproduit la rabelaisienne
figure, et toute une cohorte de
jeunes rai)ins, fiers de se frot-
ter aux chefs du combat pour
la liberté de la littérature et de
l'art.
Au café, Desboutin se reposait
de son travail de galérien. Le café
était pour lui comme un salon,
surtout en comparaison de son
atelier. Celui-ci aurait tenté la
verve du poète d'Albertus. ("."était
le plus étonnant capharnaiim, où
les objets les plus divers prenaient
un aspect d'unité sous leur manteau
de poussière.
Sur la table, les outils et les
ustensiles du graveur voisinaient
avec les casseroles, les savates et
les pots (tous ceux que l'on vou-
dra), mais l'artiste s'y retrouvait.
II possédait un flair qui lui faisait
mettre la main, du i)remier cou{),
sur ce qu'il cherchait, alors même que telle i)laque calait le pied d'une
armoire ou qu'une roulette était passée dans les outils de Mycho, féru de
mécanique.
11 ne consacrait guère au café que les dernières heures de la journée.
Il y arrivait d'habitude à huit heures et demie et en partait à onze. Il causait
beaucoup, fumait davantage et buvait... un bock ! La légende qui a fait
de Desboutin un pilier de cabaret est fausse. Le cabaret n'était que son lieu
de repos, où il rencontrait ses amis. Ce sont là mœurs de partout, même de
Florence. « Dès qu'on a un petit revenu, écrit Taine, on se drape dans son
91
ÉducaLion de Policliiaellc
(Fointe-sèclie)
rnaiiloaii el on va l)avard(T au café (1). » A Paris, ce goûL du café dale de la
Régence el on le coni prenait alors comme le comprenait Desboutin (2),
Diderot n'était point un pilier de cabaret, parce qu'il allait à la I^égence
voir (( pousser le bois. »
Mais V a-l-ii rien de i)lus indéracinable (pi'une légende, surtout fâcheuse?
Kt celle dont est victime Desboutin, vaut celle (\m stigmatisa ce pauvre
Faret, honnête écrivain et de bonnes mœurs, dont le nom rimait /trop bien
avec cabaret, ])our les épigrammatistes du xvii^ siècle. Desboutin a un accu-
sateur public dans un très beau tableau du Louvre, de la collection Camondo.
Le tableau ne prête guère à la confusion : une lille en blanc, devant un verre
d"al)sinllu\ Desboulin près d'elle, avec un ma/.agran. La hlle lourde, empâtée,
l)èle de la tète aux pieds, ([ui ne sont pas des pieds de danseuse — même
de l'Klvsée-Montmartre ! — Desboutin, le feutre jeté de travers .sur la toison
énorme, la pipe aux dents, l'avant-bras posé sur le marbre, immobile, d'une
immol)ilité qui couvre un intense remue-ménage de ])ensées. Cela se voit à
son œil, i)erçanl comme celui d'un cow-boy, bien fait pour tenter l'auteur du
tableau, Degas, le peintre des yeux ! Cet œil regarde un personnage invisible,
et l'écoute, car on écoute par la vue autant que par l'ouïe. Pourquoi faut-il
((ue ce chef-d'œuvre soit catalogué : L'Absinthe. Portrait de Marcellin Des-
boutin (3). Ce titre prête à une confusion déplorable et, de plus, il est inexact.
Ce n'est i)as Desboutin qui prend la boisson aux belles couleurs et aux désas-
treux idets : c'est la fille, (jue le hasard a placée près de lui (ou le peintre,
l)our son elTet,) et à laquelle il tourne presque le dos. Il faudrait dire : La
Buveuse d'absinthe et Marcellin Desboutin, ce qui désignerait plus complè-
tement le sujet et ne prêterait pas à l'ambiguïté.
Parfois, les propos de Desboutin prêtaient à l'interprétation erronée.
11 disait au sculpteur Jean Danqit, — un florentin, lui aussi, de l'école de
Donatello et de Mino da Fiesole :
— Vous n'allez jamais au café?
■ — Non.
— - Vous devez bien vous ennuver !
(1) Voijagn en Italie (Haflieltc, hSOli), t. Il, p. 121.
(2) 0 Sous la Hé.L'eiu'e, les cafés devinrent des lieux de discussion, des rendez-vous
d'oisifs, de littéraleurs, de critiques, de nouvellistes. » G. Renard, Méthode scientifique de
l'Histoire littéraire, p. 291.
(3) Musée du Louvre. Catalogue de la Collection Isaac de Camondo, n" 164, avec
reproductions.
92
VERLAINE
Puis il se mettait à parK-r de Miehcl- Aiiffc, disant ([tic cï-lait un ivrogne,
qu"]i tenait le fait de doeunienls jiassi's cnlfc ses mains, etc.
Cette boutade et cette affirmation donnent l:i noie, souvent [)arad()xale.
de ses propos. Mais, sur ce (ju'il pensait réellement (\i\ café, et, [)ar surcroît,
du milieu où son indigence le forçait à vivre, nous avons son propre aven,
en lettre autographe :
• — « Oh ! le café (luerhois, ses littérateurs et ses [)eintres, (|url mondi'.
comparé à la société d'élite qui se presse, les soirs, sur le perron de ta villa,
ou circule dans les allées de ton jardin ! I-:i la foule (pii défile sur l'avenue de
Cliehy, et les noces échevelées (jui hurlent dans les salons de .VX) couverts,
en face, chez Wepler, Boivin, ou au Père Lalhuile. puis, au ri'tour, dans la
maison Dutrou, les re[)asseuses, K's cordonniers, les plombiers, et la clientèle
du marchand de vins, quel trou d'oi)li([ue pour regardt-r au travi'rs. dans mes
souvenirs et dans les replis de mon cœur, cette société élégante et distinguée,
qui a passé sous mes yeux, i)endant ces deux dernières semaines. Félins
quitus est jortuna peracta ! ("/est une étrange loi ([ue celle ([ui condamne,
en vue d'une production excenlricpie et incertaine, certains êtres connue
moi à une vie et à un milieu étrangers à leur caractère et à leurs goûts. > (.\
Simonnet, août 1(S7'2.)
Six mois plus lard, son jugement ne s'était pas modifié. Il écrivait à ce
même ami, le 7 janvier 187;^, ces lignes, (jui révèlent un psyciiologue et un
observateur que l'on ne dui)e pas aisément :
« Ces gens-là sont les adorateurs du seul succès, si bien cpraucun n'a le
courage de vous chercher vn vous-même, pour vous-nième. mais ïhùw uni-
quement en vous la valeur que vous avez ])our le public. •>
C'.est bien là la marque ([ui distingue cette société ])arisienne. avide de
jouissances, et pour kuiuelle le succès est le seul critérium du mérite.
Ces haut-le-cœur sont assez typiques. On les ra|)proche. en pensée, du
cri de Murger expirant : « Pas de bohème, surtout pas de bohème ! ■ Mais il
en est des habitudes comme de la mauvaise réputation, on n'arrive jamais à
s'en défaire. l)es])outin vomissait la société du café Ouerbois, nuiis, ([uand
il quitta ce dernier, il l'entraîna tout entière à la Nouvelle .Mhènes.
Portrait d'enfanl f Pointe-sèche)
94
w
LA NOUVELLE ATHÈNES
I.a XouvclK' Allicnes était situt-c à l'arii^k' dr la nie J.a lîochcfniicînilil.
Le café existe encore, mais il a perdu son nom ; il s't-st transformé en un har
anonyme, Pallas Athenè n'ayant plus rien à voir avec les conversations cpii
s'y tiennent et les boissons qu'on y flé-
l)ite. Mais la dis|)osition inlfricurr a été
conservée.
Deshonlin. l()rs([u'il s"v transporta,
avait choisi, près dv l'entrée, un riidroit
où il n'y avait de place c[ue pour (piatrr
tables, l't si étroit et si resserré, (ju'on
l'axait baptisé V Omnibus. La place du
maître était mar([uée au mur par une
demi-douzaine de pipes, dont deux
énormes. C'étaient ses armes... fumantes !
Avait-il choisi cet t'udroit pour ;i'\
admettre que ses amis et écarter les
" raseurs » ? C'est possible. Mais il ne
put se protéi^er longtenqis dans ce
retrait. .\ux transfuges du café (iuerbois.
de nouveaux venus s'étaient ajoutés :
Camille Pissarro, l-'orain. Zan Domi-
neguî, Adol])he Vautier. Haffaëlli, le
poète Ciustave Mathieu, Paul Klenck,
Pajot, commissaire de police de Bel-
leville et peintre amateur, Michel Pelloutet, en art Michel de l'ilay, Huperl
Carabin, Dnbois-Pillet, Carrier-Belleuse, llem-i Pille, etc.. et même (.h. Mo-
quet ! . . , • .
Mallarmé aussi v fréquentait, mais i)our Mauet. Mallarme, séduisant cau-
seur, devait d'autant .uoins adn.irer la verve de Desboutin que leurs idées
Jules Jacquemart, aquafortiste
(F ointe- sèche)
étaient à l'opposito. Ils u'auraiiMil pu coiniminier (|iie dans leur aversion des
Parnassiens, mais leurs raisons d'haïr étaient si dissemblables ! L'auteur de
L'Après-midi d'un Faune combattait le Parnasse ])aree que ses images étaient
trop visuelles et pas assez syniboliques, l'auteur de Maurice de Saxe, parce
qu'il « corrompait le goût pul)lic » dont il découvrait le canon dans le roman-
tisme. Il s'en ouvrait, à Simonnet, le 24 mars 1872, et tirait de sa constatation
des conséquences politiques qu'en un autre temps, Charles X, son roi, n'avait
pas voulu admettre :
« Cette séquelle des Parnassiens, qu'on a érigée en corps d'élite, et qui,
au nom de la forme et de la facture, a relégué dans les ganaches les logiciens
de la pensée et du cœur humain, cette aristocratie byzantino-chinoise a
vraiment perverti le goût public et fait fust>r le naturel et le bon sens en miè-
vreries et en puérilités malsaines.
« C'est en considérant ce déplorable phénomène qu'on en vient à com-
prentire la nécessité d'un gouvernement fort, s'imposant et se faisant sentir
jus(iue dans la tournure de l'esprit et du goût. »
Onze ans plus tard, il avait encore les mêmes idées et vitupérait le
gouvernement dans une lettre à H. Dumas, du 29 mars 1883 : «Je vous dirai
qu'à moins d'être plongé dans le marais littéraire parisien, de façon à coudoyer
les Catulle Mendès et C'^ dans les antichambres Damala-Sarah-Bernhart,
je ne vois aucun moyen de fourrer ma note sévère et historique dans le concert
fantaiso-hystérico-adultéro-pornographique qu'il faut aux nerfs de notre
Directoire républicain. )>
Revenons à la Nouvelle Athènes.
L'Onuiibus, chaque soir, refusait du monde. Desboutin passa alors au
Cénacle, sorte d'amphithéâtre dans le fond de la salle, auquel on accédait
par une marche. Il occuj^a la table présidentielle, celle du milieu, contre la
muraille, pérorant, fumant, et recevant la réplique, tantôt de Jean Béraud,
habile à exciter la verve de son ancien, tantôt de Michel Pelloutet, spirituel,
vif, s'exprimant en un argot amusant ([ui faisait rire aux larmes la galerie
et Desboutin lui-môme.
Sur ce public d'artistes intelligents, apte à tout comprendre, avide d'idées
et de paradoxes, encadré par la masse bovine des l)uveurs et des joueurs,
Desboutin prit un rapide ascendant.
Il affectionnait les systèmes, qui sont des miroirs où la vérité se déforme,
mais où elle semble apparaître dans toute son étendue. C'est pourquoi les
systèmes sont si séduisants. Il s'en servait, vieux royaliste, pour défendre
96
Judith (Pointe sèche)
î»7
Chanibord et la royauté. Tl ne dédaignait pas non plus la fléchette de la « ros-
serie», bien qu'il n'eût pas l'àine méchante, la rosserie cette « façon » pari-
sienne de la critique. Ihie phrase picpianle, courte, partiellement juste,
voilà la recette, ('/est ainsi cpi'il surnomma ('azin « le Pu\is de C.havannes des
salons », ce qui définit malicieusement, mais en jirofondeur, le peintre subtil
de Judith ou du Soir de jêlc au M Juillet, et que deux artistes, Osberl et Séon,
demeurés les disciples trop fidèles du maîti*e décorateur, furent ^qualifiés,
certain jour où Fà peu-j)rès avait droit de visite, de « ])irates de la ... Cha-
vanncs .... n On ne se privait j)as de rire au Cénnelr, où l'on dis|)uLait sur
l'art, non plus qu'à l'Omnibus, où l'on dissertait surtout de littérature, les
sujets de conversation suivant l'ordre des préoccupations de l)cs])oulin.
C'est de la Nouvelle Athènes ([ue s'envola sa popularité. Elle rayonna
d'a])ord sur .Montmartre, qui ])réludait à peine à sa gloire tapageuse, et « des-
cendit » ensuite sur Paris et sur la b'rance.
On rapporli' ce fait, qui montre comment la notoriété passe des connais-
seurs à la foiUe moutonnière.
lîuhot et Norbert ("rœneutte, — ajoutons ces noms aux précédents, ■ — -
frécpientaient eux aussi la Nouvelle Athènes. Un jour, y pénétre un étranger,
({ui frappé de l'allure i)articuliére des trois graveurs et surtout de celle de
J^esboutin, s'informe :
— .Ce sont d'illustres artistes ! répond le voisin interrogé, qui, voyant
l'air du gobe-mouches, entame un j)anégyrique proche de l'hyperbole.
A quelque temps de là, le même béjaune, qui avait fixé dans sa mémoire
les traits des trois illustres, les rencontre sur le boulevard de Clichy. Il les
signale à un passant, celui-ci à un autre, qui en parle à un troisième. Paris
est fertile en badauds. Jiientôt se forme une escorte, et la Butte, apprend,
sans excès d'éLonnement du reste, qu'elle donne asile à trois demi-dieux de
plus.
De tous, Desboutin fut le plus populaire. La popularité tient à d'autres
causes que le talent. Le talent fait la notoriété, rarement, tout seul, la popu-
larité. Si Chevreul est devenu populaire, ce n'est point parce qu'il était chi-
miste, mais parce qu'il avait cent ans. Les souverains, les généraux, les grands
écrivains, sont jiopulaires, moins jiar leur gouvernement, leurs victoires ou
leurs œuvres, que par leurs images qui « reluisent à toutes les murailles »,
sur le métal des monnaies, ou sur le papier des journaux. Mais un bon moyen
de se faire accepter de la foule est d'être excentrique. Les excentriques ont
toujours eu ses faveurs. Elle se retournait jadis quand Chodruc-Dulcos,
98
Léon MAILLARD
« l'homme à la longue barbe », traversait le Palais-Royal, plein (i'aiiiiiialion
sous le règne de Charles X. Ce bohème avant la lettre était salué, malgré
ses haillons que devait acheter Frédérick-Lemaître pour son Robert Macaire,
par des hommes respectés, comme le poète Michaud, qui n'a laissé fpio le
titre d'un livre (c'est déjà quelque chose !), Le Printemps d'un proscrit ;
comme Martignac, le ministre de la Restauration; comme le l)on et érudit
Charles Nodier (1). Elle regardait di- même, avec une curiosité un peu étonnée,
ce dernier tenant de paganisme, Louis Ménard, qui se promenait avec solen-
nité au vernissage, coilTé d'un chapeau de paille décousu ; ou l'honorable
M. iMichou, f{ui fut dé|)ulé et que l'on v(\vait aux ré(H'|)lions du Président
de la Chambre en habit, comme l'exigeaient l'éticjuette et l'huissier de ser-
vice, mais avec une chemise au ])lastron moucheté j^ar les rejaillissements
des diverses boissons dont, de])uis ([uin/.e jours, il s'était al)reuvé. b'aul-il citer
encore le statuaire Just Becc[uet, Médaille d'Honneur du Salon et l)on violon-
celliste, qui se rendait, comme membre du jury, aux concours de musi([ue,
avec un habit dont les taclies innombraljles formaient une voie lactée
sur les revers décolorés, ou ICniile Faguet, prince de la négligence ? On se
souvient encore de l'intérêt ([ui s'attachait aux pourpoints de velours de feu
Josephin Péladan, du temps ({u'il était Sar, ainsi (pi'au justaucorps et au
chapeau crénelé de I"! loinnu- des Calliédrales.
Marcellin Desboulin a tous les droits de |)rendre place dans cette galerie.
Le châtelain sans ])o.se de rOm])rellino a fait place au bohème. Peut-être
exagère-t-il à dessein le débraillé, mêlé au pittorescjue, de sa tenue ; [)eut-ètre,
au contraire, ce débraillé n'esl-il cpie l'enseigne de son indifférence pour les
choses extérieures ; peut-être y a-t-il de l'un et de l'autre, c'est-à-dire affec-
tation d'une négligence à laquelle il ne j^ouvait remédier.
(1) Jules .Tanin, Hialoire de la Lilléralure dramniiqiie. t. IV. p. 2.")7.
m
XVII
SES PORTRAITS
Le voulez-vous voir ? Ce ne sont pas les portraits (pii inaiH|uent. Il s'est
lui-même représenté à d'innombrables exem])laires, ~ mais seulement quand
l'âge eut commencé à pétrir sa tête pleine de caractère et à y placer de vigou-
reux accents. Peinture, dessin, gravure, rien n'y manque, et nous avons même
des photographies ! Ce n'était point chez lui, nous le saNons, elïet de narcis-
sisme, mais besoin de peindre, même aux heures perdues, et avec le modèle
gratuit qu'il avait à sa disposition. Ce n'est pas davantage pour une autre
raison qu'il donna tant d'elTigies de sa femme et de ses enfants.
Ses confrères aussi le peignirent. Nous avons déjà parlé des deux por-
traits que Boldini fit du châtelain de rOmbrellino, puis vint Ricard, vers
1870, portrait qui appartient à M. Gaston .Joliet, de Dijon. Ce fut ensuite
le tour de de Xittis, vers 1(S7.'>, puis de Manet, Poilrail d'Arlisle (ISTH),
et une tête seule, ensuite de Degas, avec L'Absinthe de la collection Camondo
(1877) et Desboutin gravant avec le comte Lepic, (vers la même date), du
musée du Luxembourg, plus un crociuis lithographicpu' et un nionolyiJe au
caractère goguenard et caricatural. Nous reviendrons tout à Tlieure sur les
portraits de Degas et de Manet.
II faut encore signaler un portrait de M. Albert et trois ceuvres de
Léandre : un beau dessin, actuellement au Petit Palais. L'Homme à la pipe,
reproduit dans le livre de M. H. Lapauze, Le palais des Beaux-Arts de la ville
de Paris (page 8), un autre publié dans le Journal amusant, n" 87, souvi-nir
de la dernière visite du vieil artiste, à Paris, et (pii le représente chevelure
et barbe blanches et abondantes, calotte sur la tête, pipe à la main, conseil-
lant un jeune esthète : « Mon petit, i)our un jeune homme de bien et qui veut
vivre, il est indispensable d'avoir, parmi ses amis, d'abord un médecin, puis
une sage-femme, un financier, un commissaire de police et un huissier du
ministère... avec ça on peut marcher ! » Il ne faudrait pas jurer que ce propos
n'ait pas été entendu par le charmant et hn humoriste. Knlin la troisième
œuvre consacrée par Léandre à Desboutin est une peinture, donnée par fau-
101
teur à une tombola de guerre, où le vieux lutteur assis, son lils aîné (U'bout
derrière lui, est représenté vêtu etcoilTô de rouge, comme un cardinal, avec
son beau front, son œil vit, sa toison grise, le « descendu » de sa joue jadis
paralysée, sa moustache peu fournie et sa courte barbiche. 11 existe, en
outre, un certain nombre de charges, i)ar divers, et une gravure en couleurs de
M. .laccjues N'illon, peu connue, i)ar ce qu'elle fut peu tirée.
.\ côté des portraits peints, dessinés, ou gravés, il y en eut de littéraires.
Ils ne sont pas les moins explicites. Nous avons cité, au cha[)itre de la vie à
r()nd)reliin(), le vivant j)ortrait ([u'a ti'acé Oeorges Lafenestre, voyons les
autres.
(( {'nv tète originale, une tète à la (iiorgione, une tète toute cahoteuse
de méplats et de rondeurs turgescentes ; une tète de foudroyé », — écrit
Edmond de Goncourt, dans son Juiirnal (1). « Toujours la pipe aux dents,
coiffé en toute saison à la turque, d'une large chéchia rouge, et les pieds
jKTdus dans des savates éculées ; » (2) — « tète puissante, pensive et fiére,
dont l'expression dédaigneuse rappelle celle de Barbey d'Aurevilly ; » (3)
— « cette figure d'indépendant, cette tète d'homme pétrie par la vie, bronzée,
cuivrée, avec de grands yeux étonnés h la fois et scrutateurs, des yeux d'en-
fant candide et de |)enseur, une l)arbe frisée et de longs cheveux noirs striés
d'argent, bouclés et toml)ant comme ceux d'un florentin de Masaccio ; » (4)
— « grand, mince, une véritable toison noire foisonnant au-dessus d'un front
large et tourmenté ; des yeux comparables à des charbons mal éteints, tant
ils étaitMit noirs et chaudement éclairés à la fois ; uiw bouche très irrégulière,
mais très expressive et une barbe d'adolescent (ju'il tortillait toujours entre
ses doigts, des doigts effîlés et intelligents, éloquents et adroits tout ensemble,
... Il portait d'assez méchants habits, avec une cravate blanche largement
nouée au cou et les manchettes d'une chemise non empesée cachant, avec
un eirdochement de dentelle, ses mains de marquis ; sous cet accoutreiîient,
qui ne sentait pas la richesse, l'homme sentait à plein nez son gentilhomme
et don Cézar de Bazan ne portail pas autrement sa défro([ue dépenaillée, m (5)
Félicien Champsaur, dans un roman à clef, escpiissa la vie de notre
(1) Journal des Goncourt, l. V, ]>. 177 à IcSU.
(2) Thikb.vut-Sisso.n". Le Temps, 20 février 1902.
(3) Frantz Jourd.\in, Les Décorés. Ceux qui ne le soiiL pa.s, Figaro, suppl. liltér.,
16 septembre 1893.
(l) G. SouvENANCF-, Uii orii^iiuil. Figaro, 21 mai 1883.
(5) A. SiLVKSTRF, Au pays des Souvenirs : Le Café Giierbois, p. 103 et s.
102
Degas. — La Eiuveuse d'absinthe et Marcelliii Desboutiii (Fcinlun ,
Musée du Louvre
artiste avec assez d'exactitude dans les grandes lignes, sous le nom de
.Tacciues Brière.
K Jacques Brière, une cravate de dentelle autour du col, la barbe ainsi
que saujioudrée de grésil, la i)ipe aux dents, le regard bienveillant, les cheveux
épais et bouclés, uni- to([ue posée crânement en arriére, [)arle avec animation,
et |)arfois souligne d'un geste dans l'air du café, les mots ([ui saillent. 13rière,
excellent jiortraitiste, sait avec son burin attraper l'individualité du modèle
et retenir la \ le, dans la justesse des contours, sous le flou des chairs et des
ond)res. )i (1)
(les diverses touches dépeignent-elles assez le personnage ? Il suffira,
pour achever le portrait, tel ([u'il se complétera quelques années plus tard,
de monirer l)esl)outin i)ringue-ballant ses pipes sur sa poitrine, comme
des décorations, et couvert d'une éternelle houi)pelandc sous laquelle, en
été, il n'avait ([ue sa chemise qui débordait de la ceinture du pantalon. Et,
toujours, pour raclieter cette dégaine, des gestes et des mots dignes d'un
maréchal de Richelieu.
Willette, ([ue ses Pierrots et tant de pages de souriante satire, mèneront
à la postérité, a conservé le souvenir d'une petite scène qui montre le carac-
tère de l'homme.
« Nous nous réunissions, — dit-il, — l'été venu, à la terrasse de l'auberge
du Clou, d'où l'on i)longeait sur la rue des Martyrs. Les camarades nous appa-
raissaient d'abord par le chapeau, puis par les épaules, puis par le torse,
et cette ascension lente nous donnait tout loisir jjour « chiner » l'arrivant.
Beaucoup, qui redoutaient nos lazzi, faisaient un détour pour ne pas aborder
de front le redoutable retranchement.
« Desboutin ne |)renait pas cette i)récaution. On le voyait grimper la
jiente, sa houppelande sur son épaule, les pieds dans ses savates et uniquement
soucieux d'épargner à ses pipes des heurts affligeants.
(( On le « blaguait» lui aussi! Pourquoi le «père Desboutin», comme nous
l'appelions, aurait-il échappé à notre irrévérence ? Mais un jour, qu'il nous
api)araissait j)lns dé])raillé encore (pie de coutume et que nous étions plus en
verve, voilà qu'il atteint la terrasse du café au moment même où une voiture
s'y arrêtait. Une dame du monde, cjui venait en visite dans la maison, ouvre
la portière, va i)our descendre et hésite, devant ces yeux qui la « fusillent »,
(1) Félicien Cuampsaur, Dinali Samuel (OHendorff, 1882), p. 29i et s.
lu'»
L'HOMME A LA PIPE
et ces apostrophes de rapins, évidemment des hommages, mais traduits
dans le style de Montmartre, auquel elle n'était pas iiabituée.
« Alors Desl)outin, retirant son feutre et s'inclinant, lui tend la main d'un
geste si noble, si aisé, empreint d'un tel respect, que la dame accepte son
assistance, saute à terre, sourit et disparaît. — « Bravo ! Bravo ! » crions-
nous. Mais le vieux chevalier :
— Croyez-vous que ce soit pour rien. Messieurs, que j'ai traduit Don
Juan? »
Ceci se passait au moment de sa grande vogue, et il transportait dans
les milieux les plus raffinés ses allures dégagées.
A la duchesse Colonna, — en art Marcello, — il avait dit, en pénétrant
dans son salon, pour graver son portrait :
— J'ai là, mon principal instrument de travail.
— Votre pointe?
— Non, duchesse ! Ma pipe.
Et chez Labiche, où il venait pour la première fois (1), afin d'exécuter
le portrait qui devait accompagner le Théâtre du fécond auteur comique, il
demandait tout s'abord :
— On peut la fumer ?
La, c'était toujours elle, la pipe, la pipe qui, droite ou courl)ée, en écume,
en bois ou en terre, l'accompagne dans presque tous ses [)ortraits, comme elle
l'accompagna dans la vie. On ne s'offusquait point de ses manières, parce
qu'il avait la manière, parce qu'il savait être libre sans familiarité, dédaigneux
de certaines contingences, sans que sa négligence semblât triviale. En un mot,
sa bohème ne le déclassait point, parce que l'artiste dominait le bohème.
Au fond, ce laisser-aller était dans sa nature. Il l'appliquait à tout. Il
ne connaissait pas la fausse honte : on le rencontrait, le matin, faisant son
marché avec un cabas de bonne femme, et achetant des marchandises défraî-
chies pour les payer moins cher.
Un jour, il était invité à déjeûner dans un grand restaurant ; il l'oublie:
on va le chercher. Il était à son chevalet.
— C'est vrai, dit-il, je n'y pensais plus 1
Il décroche son feutre gris de poussière, le campe sur sa tignasse et, en
(1) « Degas vient de me dire : Labiche veut son portrait gravé par vous, d'après nature
(pour en-tête de ses œuvres, je crois). Faites-vous donner une lettre d'introduction par
Glaretie. » Lettre à Claretie, 22 mars 1879.
105
savates, sans se laver les mains, \a s'asseoir à la lai)l(' opulenlt', sous les regards
surpris des larbins !
11 élaiL bohème si marqué, qu'un jour le garçon d'un café où il entrait
le prit par le bras pour le mettre dehors, en lui disant : — « On ne chante pas
ici ! )) et ((ue la bonne de Jules Claretie, une autre fois qu'il venait pour
déjeûner chez son ami, n'osa le laisser seul dans l'antichambre, craignant
qu'il n'emportât quelque objet. ^Madame Ingres avait bien pris pour un modèle
italien lillustre François Rude et sa barbe de fleuve !
(larde-toi, tant que lu vivias,
De jii,ger les gens sur la mine 1
Clette insouciance, ce dédain du ([u"en-(lira-t-on, il les portait partout.
(( A Florence, dit encore Taine, on ne s'inquiète ni de ses enfants, ni de
ses parents, ni de personne » (1). Il resta toujours florentin. Il avait appris
à lire à sa première fdle, dans Rabelais, comme la Vivian Bell, du Lys rouge,
d'Anatole France, avait appris le français dans le Pantagruel et Villon. Plus
lard, il eut d'autres enfants et ne les éleva pas mieux. Tout petits, ses fds le
suivaient au café et ils grandissaient dans la promiscuité que ce lieu entraîne.
« INles fds, gouaillait-il, s'élèvent dans la rue. C'est parfait, tout le monde
s'occupe d'eux ! « Ils ont fait des hommes, ce qui prouve que l'éducation n'est
j)as tout et (jue l'exemple produit parfois des efïets contraires. Ils ont l'hor-
reur de la bohème. On raconte que l'un d'eux eut pour berceau une boîte à
sucre ! Cela jirouve uniquement que Desboutin ne pouvait faire les frais d'un
meuble ]dus a])i)roprié à sa destination.
Amoralité, pensera-t-on? On ne se trompera pas. Desboutin avait sur
la moralité courante les indulgences des pays chauds. Cette moralité-là est
en rapport direct avec le vêtement. Sous le soleil ardent, ([ui met du feu dans
les veines, riial)it est lâche et la morale aussi.
L'excuse de Desboutin, s'il a besoin d'une excuse, était (nous l'avons
déjà dit, mais il faut y revenir), dans l'inénarrable désordre de son intérieur.
Effet de rindifïérence, de la négligence italienne et plus encore de la pauvreté !
La mère de famille était impuissante, seule, à tenir son mari, sa maison et
les enfants qui, chaque année, lui tombaient du ciel. Desboutin ne pensait
pas, comme le Philosophe sous les toits, que le désordre constate « l'inaptitude
(1) Taixe, Voilage en Italie, t. II, p. 120 (éd. Hachette, ISGB).
llMi
DESBOUTIN (Lithographie)
à la vie intérieure » ; il afTinnail, au coutraire : « Le désordre, c'est ma joie !
Faisait-il pas mieux que de se plaindre?
Il disait aussi, avec fierté : " Ma ffiiunc me dontif di- beaux enfants ! »
Il en eut neuf, — sans eonipltT Marie. dont trois survivent. l-',t connu»-
l'artiste ne perd jamais ses droits, il sCmpressail de les dessiner, «le les j^raver
ou de les peindre. Il arriva, hélas ! {pie des entants moururent. Il les peij^nit
morts, après les avoir i)eints vivants. Telle est, du moins, la lé;,'.-nde. (piil ne
faut accepter que sous bénéfice d'inventaire. I-",lle veut même, cette légende.
qu'un jour il ait oublié un de ces petits corps dans un tiroir, et qu'il ait eu
quelque peine à se tirer de cette violation di-s reiLîlemeids. N'en crovons rien !
Un pareil oubli ne serait pas dun [)éri', et iJesboutin. toutes ses lettres en
font foi, adorait ses enfants. Il n"a\ait pour eux (|ue ten<lresse. orgueil et,
au total, faiblesse.
On ne prête (pfaux riches; Desbouliii. en fait (rexceiitricilé, mais là seule-
ment, pouvait prétendre à ropulence ! Ouand. en l.S.Sl. il acheta, à Nice,
une villa cpi'il voulait louer en nu'ublé aux ani,'lais. anus de la netteté et du
confort, il la faisait \isitei' telle (pielle, et l'on pouvait voir un lit de camp
dans le salon, des savates au milieu des chambres, des caisses défoncées un
peu partout, dont les enfants faisaient des voitures, des siéi,'es. des tréteaux et.
bien en vue, pour qu'on ni' la cherchât jamais lonijlenqis.
wtU" uriu'
DoiU ilia(|iu' luiinaiu se sert pour un Ixsoin iKu-liinu',
et qu'on reinarcpia toujours dans les (li\ers loijis <le Desboulin.
Il n'arrivait pas à louer, et s'en montrait surpris ! Il fallut le tremblement
de terre de l.S.ST. (jui éi)ari,nia son (piartier, j)oiir lui amener des locataires
que le cataclvsme avait chassés dv chez eux et rendus |)réls à tout accepter.
« La cataslro[)he a eu cela de bon. écrivait-il à liaisin {in mars 1.S.S7). tpie ma
maison a pris de la valeur et s'est louée entièrement... Mais j'y ai perdu de
1.500 à 2.000 fr. de portraits I "
ti»7
Ricard. — Desboutin
(Peinture, vers 1S70)
CoUect. Joliet, Dijon
108
\ V I I I
LE TRAVAILLEUR - LES AMIS
Ces défauLs, est-il nécessaire de le dire, avaient ixmt coiilr.-parlic d'admi-
rables qualités. Dcsboutin était serviable, plein de nrnir; s'il n'hésitait j)as à
recourir h ses amis pour des recommandations « en haut lien >, il n'hésitait
pas davantage a s'entremettre pour faire arriver ceux de ses confreies à qui
il croyait du talent (1). Mais, de toutes ses qualités, la plus frappante était
son amour du travail. 11 travaillait fantastiquement. — ce (|ui n'est quere
compatible d'ordinaire avec la vie de café, f'.'est cet acharnement au travail
qui séduisit Emile Zola et il le dit expressément dans sa préface au catalogue
de l'exposition de 1889 :
« Mais, ce qui me toucha davantage, ce fut f[ue, chez Desboutin. sous
cette allure d'ancien chef de bande, il y avait un travailleur acharné, un ar-
tiste convaincu et d'une absolue bonne foi. > (2) Le formidable romancier,
dont le labeur fut énorme, n'était pas homme à se méprendre sur la |)uissance
de travail d'autrui.
Desboutin lui-même se reconnaissait celle aptitude et il lii^nit [xMirquoi
il l'avait acquise :
« Pour moi, il ne s'agit plus malheureusement de chasse-[)(uu>uite de
la gloire littéraire, comme j'ai pu le rêver vers 67-70 !.. mais le slruggk for life
intense, acharné, depuis bien des années, ne me fait plus viser qu'à la valeur
démon outil et au rapport de mon métier, par gain et salaire. (Il désirait,
à cette époque, être mis hors concours au Salon et dispensé < de la périlleuse
et humiliante nécessité de se soumettre au jury. » Xaturellement. il avait
trop de mérite et pas assez d'intrigue i)our réussir. Il n'obtint qu'une mention!)
Tout le reste est mort, — bien mort et enterré chez nu)i, au fond de moi. —
(1) Le 17 octobre 1882, il recommande à Clarelic, avec une belle chaleur, le peintre
Rerolly (?) que Baud-Bovy et lui ont découvert. Il s'occupe aussi des peintres Lambert,
Albert, et d'autres.
(2) Chez Durand-Ruel. Cette préface a été inlét'ralenunt repr.i.init.- ,n tête du Cata-
logue de l'Exposition posthume, h Nice, en 19U2.
sous d'ùpaisscs (■(Uiclu's (1(^ rÔNolulioiis gôologirfuos. Aussi, a\cc (|U('lk> héati-
tudc\ avec ([ui'l charuic (l"al)s()Iu rcnonotMiieul, je vais «lilalanl cl étiraut
mes mcmhros de couvalescenl au i^rand soleil asei-ndaul de noire lilloral,
aux heuri's où je \ais re])oser, sur la Piouieuade des An.^lais ou sur la colline
Sainl-Philil)])e (jui domine ma in'lile villa, la brtc de sonunc ijui luiiinc Ui roue
du moulin à gnwuir cl à prinlurr au jond de mon (délier. » (12 août 1<S8().)
Celle l'xislenee de « ])èli' de somme ', pour re|)rcndrc son (expression,
(pu n"cst pas 1res juslc. car s'il lia\aillail lrénéli({uemcid, il Iraxaillail avec
joie, — il la mena, ji' crois bien, loule sa \ie, mais surtout à pai'lir de sa décon-
fiture. Du jour ou il se trou\a en face du problème du pain ([uotidien, il
chercha à le résoudre pai- le ti'avail.
n'auli'es, plus habiles, auraient fait jouer leurs relations, |)our déni-
cher la sinécure, ou rem])loi, — la sinécure parait toujours préférable, —
(pu les aurait fait vi\re sans les déclasser. Desboutin ne songea pas un
inslanl à ce mo\'en ; il avait un nu-lier, il \ i\rait de son métier, théàlre ou
peinture.
A Clené\-e, à Paris, dans les débuts, il se « débrouilla », connue il put.
Nous avons louché du doigt sa ndsére. Il Tallénuail i)ar (piehpies ouvrages
de peinlure, et notannuent i)ar des portraits de gens du commun, (jui lui étaient
pavés quarante ou cin(puinle francs. Ingres en avait fail pour moins que cela,
mais ceux de Desboutin, étaieid... à l'huile ! b'.t ([u'on ne croie pas qu'ils
étaient (( bâclés », enlevés du l)out du ])inceau ! Desboutin avait en art une
solide conscience. Il n'admellait pas (pron acceptât de faire le i)ortrait de
(juekju'un sans être à peu i)res sûr de lui donner son expression habituelle,
(pu constitue la plus grande partie de la ressend)lance, et il proNoquail
celle exjjression en faisant parler le luodéle sur sa ])rofession. .M. Léonce
Hénédile, tout jeune, assista un jour à une séance de ])ose d'un boucher ;
le peintre l'iideri-ogeait sm- le prix, la (pialité, la pesée de la viande, i' Il faut
loujours faire parler les gens de ce (pu les intéresse », ré])ondit le peintre, à
rinlerrogation étonnée du jeune homme.
Tant (pie dura son espoir de se faire une situation dans les lettres, il ne
demanda guère à la peintm'c (pie riiidisj)ensa])le. 11 consacrait à ses drames
le i)lus de temps ((u'il j)ouvail, et souvent une ])arlie de ses nuits. Ses repos
même étaient encore du travail. Durant l'été de 1873, après la season de Londres
où l'avait emmené de Nitlis, et où il a\-ail dessiné les portraits de Watts,
de Leighlon, de Millais et d'Alma-Tadéma, il traduisait, tout en iH'chant h
la ligne, le Don Juan de Byron, en plus de trente mille vers !
110
Léonci' Bcnéditt.- ( Peinliin-. lf>7Ti
Coll. I.. nén(:'dilo
III
Au sujet de ec voyage, nous ne résistons pas au plaisir de citer cette
curieuse lettre à Simonnet, du 22 mars 1873 :
« Serai-je assez remis (d'une bronchite qui l'a tenu quinze jours au lit)
pour pouvoir faire la saison à Londres, pour laquelle je trouve une merveil-
leuse occasion, dans le séjour que va faire là, pendant six semaines, mon
camarade italien le peintre de Nittis, qui va y faire un tableau : Les Cabs de
Piccndilly, qui lui est commandé et payé 22 000 fr. !! Pour exécuter oette toile,
il va ])rendrc toute une maison dans lacfuclU' il puisse faire entrer des voi-
tures et les faire poser tout attelées. Il m'a gentiment offert une chambre
chez lui, et ce serait pour moi un grand avantage que d'éviter la solitude.
Ajoute à cela l'influence qu'il a sur les amateurs et critiques d'art comme
peintre merveilleusement lancé à Londres où, l'an dernier, il a fait pour
(iO.OOO fr. d'alTaires. »
C'est cela qui met l'eau à la bouche du villonneux Desboutin ! « Tant l'on
crie Noël qu'il vient. »
Vers 1875, il se résigna à ne plus être que peintre, graveur et dessinateur.
D'avoir coupé résolument une des deux cordes de son arc, ne diminua pas son
travail de moitié. Tout l'effort fut reporté sur la corde restante, effort sans
cesse accru par la nécessité qui croissait, elle aussi, avec la famille.
Les livrets du Salon, où il exposa tous les ans, ne donnent aucune idée
de sa production. Les Salons ne sont qu'une foire d'échantillons. Tant qu'il
appartint aux Artistes français, et qu'il fut étranglé par le règlement de cette
société, il ne put guère laisser soujiçonner, sinon en gravure, sa fécondité. Il
montra dix pointes-sèches au Salon de 1875, douze au salon de 1877; dix-sept
au salon de 1879; sept en 1880. C'est la grande période, la période ascendante.
Par la suite, grâce à la liberté que lui donna la Société Nationale, il remplit
son ])anneau annuel de peintures, — et toujours de portraits ou de compo-
sitions qui étaient encore des portraits, car, de sa vie, à quelques exceptions
près, il ne fit autre chose.
Les peintures, qui en saura jamais le nombre? M. Crépin-Leblond pense
qu'il y en a de 1.500 à 2.000. L'exposition de 1902 en comptait 194.
Les gravures s'élèvent à 297. Les dessins sont légion. Rien que ceux qui
représentent ses enfants endormis, rempliraient plusieurs cartons, dit
Lafenestre.
Il ajoutait à cela une correspondance abondante, et des cahiers de notes
sur tous les sujets. J'en ai un sous les yeux. Il contient, pêle-mêle, des poésies,
des recettes photographiques, des pensées sur la littérature, des aphorismes
112
Jean RICHEPIN
philosophiques, des croquis! Cerveau toujours m (1)1111111.111, rnairi toujours
prête, Deshoutin ne pouvait pas ne pas réussir à Paris, la Villc-Luniiere.
mais plus encore la Ville-Fournaise, ou le succès est fils d.- l\-ITort associé
au talent.
Et, de fait, il réussit très vite. Si la sinj^ularilé de liiidividii y contribua,
la valeur de l'artiste y eut cependant la [)art prépondérante. Ceux rpii. naguère,
l'avaient connu à l'Ombrcllino, se portertiil ijarants fie cette valeur. .\u sur-
plus, il ne pouvait être le
premier venu, après Mau-
rice de Saxe, et les peintres
se souvenaient d'avoir vu
au Salon de 1809, le j)or-
trait de son collaborateur
.Iules Amigues et deux gra-
vures d'après Rembrandt
(Portrait du Bourfjmestre
Six et de sa femme). Puis,
de nouvelles amitiés lui
vinrent: Degas (tiu'il a\ail
peut-être déjà entrevu à
P'iorence, en ISf)?), Manet.
A. Silvestre, et les autres,
qui fréquentèrent au Café
Guerbois ou à la Nou-
velle Athènes. En outre.
il « soignait » beaucoup la
presse, en la puissance de
laquelle il avait une con-
fiance enfantine. Il y 1
croyait, comme à la
royauté ! Il avait donc des amis journalistes, de tous les bords : des rc<i;H-
teurs financiers, des courriéristes parlementaires, dis échotiers. di-s pamphlé-
taires, comme son «cousin» Henri Rochefort (pii lui promit sur U-s Fragonard
de Grasse des articles qu'il n'écrivit jamais. — enfin des crilicpies d'art. - et
là, on ne peut que le louer. Il a raison, en 187;{. détre enchanté d»- ce i\\\v le
critique parisien Philippe Burty prépare la saison de Londres, qu'il tioil faire
avec de Nittis, «par une espèce de notice biographicpie et artistique sur l'eau-
iia
foiiislc ci II' pi'iiitrc '. (li'stiiu'T à une revue aui^'laise (1 ), car ]Miili|)|)i' Burly est
(11' ceux (|ui coinpleiil dans la criliciui' d'arl de noire temps. Il le remercia
par deux poinLcs-sèches ; son porlrail et celui de sa fille Madeleine, depuis
Madame Haviland.
C'est par ses ])orlrails à riuiile et i)ar ses poinles-sèclies que nous con-
naissons ses amis. Ils onl tous posé devant son œil ])erçaiit et sous sa main
rapide. Le calaloi«ue de ses i^ravures est en majeure ])artic le répertoire de
ses amitiés. Nous n'y rencontrons, il est vrai, ni IJoldini, ni Ilicart, ni de Xitlis,
mais M""' de Nitlis y iigure sous le titre de Sortie de Bal, et De<ras et Manet, et
Renoir et Silvestre et Herald Dumas et Georges Lafenestre et Richard,
de Genève, et Durauly et Lepic et Zola et Rochefort et Puvis de Chavanncs,
son ami le ])lus cher, et tant d'autres !
Les artistes, nous l'avons dit plus haut, aimaient à peindre sa figure
pillores([ni' et «foudroyée». Nous devons revenir sur les plus illustres, Degas
v[ Manct. Puvis ne paraît pas s'être servi du modèle vraiment unique que
lui tournissait son ami. Manct, lui, le représente dans deux tableaux dont
l'un est célèbre sous le nom de L'Artiste. Desboutin est en pied, de face,
\clu i\v noii, le chapeau sur la tète, son chien blanc derrière lui ; il bourre
sa pipt' dans sa blague en \essie de ])orc (2) ; l'autre ])cinture n'est ([u'une
es({uissc, un buste (\v trois (fuarts à droite, ])iiic à la l)ouche, tenue de la main
droiti\
Ces portraits ont la picmière ([ualité des portraits : la vie. On a raconté
(pu- -Manct avait offert L'Artiste à Des])outin et cpie celui-ci n'en a\ail |)oint
voulu, peu satisfait de l'œuvre. Nous savons par la lettre h Simonncl, citée
plus haut (.■)), ce que Desboutin ])ensait de INIanet, et cela seul suffirait pour
rendre ce refus invraisemblable, si, d'antre i)art, Desboutin n'avait eu tro|)
dcdiu'ation jiour blesser un ami. La légende a probablement confondu. Elle
a du placer entre Des])outin et .Manct le différend qui se serait élevé entre
Manet et Degas. Degas aurait exécuté le double portrait de Manet et sa femme
(1) Xous n'avons pas retrouvé cet article.
(2) Ce portrait, refusé au Salon avec d'autres envois, fut exposé par Manct dans son
atelier. 4, rue de Saint-Pétersbourg, du 15 avril au !«■■ mai 1876. Cette exposition compre-
nait : Le bon Bock, — Femme occupée à laver du linge dans un jardin, — et le portrait de
Desboutin, sous cette désignation, dont l'absolu devait lui plaire : l'Artiste. On le revit à la
Cen-tennale de 1900 ; il passa aux mains de M. Pellerin, figura à une exposition chez Bernheim,
et fut acquis par un amateur de Munich. Reproduit dans l'excellent Manet de Th. Durf.t
(Floury, édit.).
(3) Page 87.
114
•4
Ilyac'.iUhc Lny^oii rWin- (;■• i>i"nM<
Suzanne Lcehnoff, pianiste de talent, et, selon son habitude, aurait souligné
ce que M^^ Manet avait de défectueux, son embon])oinl. Manel dit-on,
coupa la toile en deux et fit encadrer son portrait seul. (1)
De tous ses amis, Puvis de Chavannes fut celui vers lequel Desboutin
se sentit le plus attiré. Pendant
sept ans, le graveur monta chaque
matin chez son illustrç confrère
et, dit un témoin de leurs entre-
tiens, « je ne me rappelle pas
sans émotion les dialogues qu'ils
échangeaient, où il n'était pas
question de leurs contemporains,
ces dialogues étincclants où tous
deux, en un fraternel abandon,
pensaient tout haut et remuaient
ce qui fut la joie de toute leur
vie, les souvenirs des chefs-
d'œuvre rencontrés, évoqués et
rêvés. » (2)
Desboutin avait ])our Puvis
plus ([ue de l'admiration. Visitant
le musée de Marseille, il écrivait :
« .le me suis pâmé devant les
deux Puvis de Chavannes : La
Marseille moderne et la Marseille
(les Phocéens. Cette dernière sur-
tout a pour terrain de fond et
pour ciel le morceau de peinture
de la plus grande poésie que
j'aie jamais contemplé et m'aie
jamais fait rêver, même dans les chefs-d'œuvre des grands vénitiens et des
l)riniitifs toscans. Ce diable de Chavannes est décidément un grand poète
Labiche ( Poinle-sèche)
(1) Le fait est-il' exact ? Nous ne nous en portons pas garant. Nous ne connaissons
pas cep)itrait de Manet qui ne devait pas être flatté, si nous nous en rapportons aux !ïra-
vures que Degas fit du peintre de l'Olympia, et c[ui le roiirésentent, lui l'élépant et le fier,
hirsute et louche comme un mendiant.
(2) RoGER-MiLÈs, L'Eclair, février 1902.
116
Phillippe BURTY
(2 Etal)
aillant qu'un grand peintre, Nous pouvons (Mrc fiers d'un parti! artiste ! .. (1)
Desbouliu, consacra à la glorilicalioii de son ann son labUau le plus com-
plet et l'une de ses meilleures peintures. ■ Cette toile — écri\ait M. Albert
Sarraut, dans L'Aiiislc (Avril 1895) — est moins nn portrait (piun docu-
ment {)sychol()gi({ue, ([u'une synthèse morale, (pie la divulgation d'un carai-
tère... L'artiste a tenté l'ardue et délicate tâche de faire dire à ce visagt- les
vastes pensers (pril reflète aux heures de solitude et de vie intérieure. »
En voici le sujet : le peintre est assis et médite, le coude gauchi- au bras du
fauteuil, la joue api)uyée sur la main. Il vient fie sus[)endre son travail
et a gardé la blouse blanche de l'atelier. Ce (pi'il [jcignait, on le voit d»-rriere
lui ; c'est l'admirable fresque du musée de Lyon, les Muses auprès du bois
Sacré ! De ce tableau, actuellement au musée d'Amiens, il existi- une hélio-
gravure retouchée j)ar Desl)outin à la i)ointe, selon un procédé frécpienniunl
employé. Il fit aussi deux autres portraits de Puvis : un crayon, nnne de
plomb, profil à gauche, également reproduit j)ar l'héliograMire et une p(unte-
sèche, tête de face, inclinée à droite (1870).
Ce sont là autant d'hommages. Il lui en rendit un dernier et intime
quand le grand artiste mourut :
«Vous avez api)ris, sans doute, écrivait-il à -M""-' Simoniut d'Ilen-
nezel, le 12 septembre 1898, le triste événement de la mort de mon meil-
leur, de mon uniipie ami, M. Puvis de Chavannes ! C'est pour moi, à mon
âge, une perte irréparable et toute une seconde vie intime qui me fera
défaut quand, l'an i)rocliain, je rentrerai à Paris. »
(1) A M. John Grand-Carterel, 27 juillet, 188G.
117
Hy;u'inllio Loysou (l'ciiilmc IS77)
Coll. .T. Desboutiii
118
XIX
NOUVEL EXODE — LE REIOUR AU SOLEIL
De 187.") à 1880, la procliu'lioii de Deshmiliii. Miiioul en },'ravuri-, fut
aboudaiile cL de rare qualilé. Les belles pièces, je \eiix dire les piens sans
dessous (riiéliogravure, daleiil de eelte période : llippolyle IJahou. .M"-^" I5i-
rend, M'"e Bouquet de La Grye, BoavIs. William Bracken, .M""- liracki n
Bords (le Seine ( l'einlurc, i v^ V
CoU. J. Desbouliii
(Marie Desl)ouliu el son iils Robert), M"'-' Madeleinr linrtv. Philipi.e liurly.
Mme Hector de Callias, Jules Clarelie, 1 leury Cohen, le bibiio.uraiihe. auteur du
Guide de V Amateur des liures illustres du xviir' sicclr, — la duehesse (:.)l()nna.
l^:mma Dauvilliers, RalTaëlli, Uei,ms. Desehanip, Dumas Iils. n-.nfaut :j la
Tasse (une pièce exquise), Norbert (iœneutte, I-:<1. de Goneourt. Haas, le
11'.'
Comte Lopic, Mariet, Marllirlol, Ilayem, Héluis, Monselet, M^e Alice Ritter,
Monteliore, Borthe Morisot, Henri Rochefort, Henri Rouart, Emile Zola
et d'autres, qui constituent une galerie de premier ordre pour l'iconographie
et de premier mérite pour la valeur d'art. Il faut ajouter à cette liste abrégée,
ses propres {jorlraits, tant peints que gravés, dont le célèbre Homme à la
Pipe, médaille de 3^ classe en 1879 et médaille d'honneur à l'Exposition de
1900, une prestigieuse pointe-sèche, pleine d'aisance, de vie, de pittoresque,
d'accent, et de maîtrise dans la distribution lumineuse, comme dans le jeu
des noirs ; puis les portraits peints et les innombrables croquis de ses enfants
fait le soir à la lampe sur le papier du boucher ou de l'épicier, — des mer-
veilles de sensibilité et de justesse pour la plupart, et qui furent fort admirés,
à l'exposition posthume de 1902.
Ce fut une belle période, très utile à la réj)utation de l'artiste, qui prit
de profondes racines, mais une période de germination. Les fruits ne venaient
pas encore et les finances restaient précaires. La plupart de ses portraits,
nous l'avons dit déjà, étaient des portraits d'amis et il vivait, au jour le jour,
de ceux qui lui étaient payés.
Il y en avait. Il y avait les séries commandées par Rouquette, par Georges
Petit, par Jouaust. Il y avait les portraits d'enfants, de banquiers, de collec-
tionneurs, de diplomates, de littérateurs, d'auteurs dramatiques. Il y avait aussi
les portraits de bourgeois. Ceux-là lui étaient antipathiques. Il l'avouait
à Raisin : « A part les portraits dits de contemporains, qu'on ne considère
et n'épluche qu'à l'état de types, je suis furieusement dégoûté du portrait
de bourgeois ou particulier, en pointe-sèche manière croquis, abrupte ou char-
bonnée, dans laquelle nos braves gens ne se voient jamais ressemblants. J'ai
eu avec ce genre des déboires de toutes sortes » (10 Octobre 1886).
Si nous en jugeons par le prix que paya Héluis, chaque portrait lui pro-
curait 200 francs.
Ce début permettaitl'espoir. Il ne fallait que persévérer. Pourquoi fallut-
il que, à l'heure fugitive où le succès se décide, où la notoriété conquise va
amener avec elle une certaine aisance, Desboutin se trouvât contraint de
quitter Paris?
La raison, certes, était des moins discutables : il y allait de la santé de
son jeune fils, Chiquine, alors âgé de dix-huit mois, qui venait d'être atteint
d'une bronchite grave (1). Marie Bracken avait contribué à le sauver en se
(1) Chiquine, c'est François. François, en italien Francesco, par diminutif Frances-
120
..-c^
^
5v>
Vue ^-'éaiTale de Grasse (Peinlnit\ / ■> '
Coll. .). DesbDiiliii
IIM
chargeant des frais du médecin et du pharmacien ! Mais l'hiver était venu
et un soleil plus ardent que le pâle soleil de Paris était nécessaire j)our réta-
l)lir délinilivement le [)etit malade. De son côté, Desboutin et sa femme
n'étaient pas fâchés, eux aussi, de retrouver le ciel brillant de l'Italie, auquel
le ciel de Nice ressemble comme un frère. Desboutin était l'homme des dé-
cisions prom])tes. Il ramassa tout ce qu'il avait dans son atelier et fit une
vente aux enchères, à l'hôtel Drouot. Ce pouvait être le fiasco et le discrédit.
Ce fut le succès. Desboutin était déjà trop connu, pour que sa vente ne piquât
pas la curiosité, et il donnait trop d'espérances pour que la spéculation ne
s'en mêlât j)as. Il sut d'ailleurs aider sa veine ! Une anecdote que contait
Chaîne, plus tard marchand de tableaux, alors second de l'expert Lechat,
en porte le témoignage.
A l'exposition qui précéda la vente, Desboutin remarqua un Anglais
qui annotait le catalogue de prix nombreux.
Il faudrait, lui dit Chaîne, savoir quels sont les prix qu'il marque.
— S'il entre dans un restaurant, répond l'artiste, je m'en charge.
L'Anglais s'en va, Desboutin le suit. Il pénètre dans un restaurant,
Desboutin fait de même. Il accroche son pardessus à un porte-manteau,
au même porte-manteau l'homme à la pipe suspend sa houppelande.
L'Anglais enfin va s'asseoir à une table, mais Desboutin s'attarde. Il fait
signe au garçon, lui dit quelques mots, lui met dans la main une pièce blanche,
puis va s'asseoir à son tour, à une place hors de la vue de l'Anglais. Le
garçon prend alors dans la ])oche du pardessus le catalogue annoté, qu'il
porte à Desboutin ; celui-ci y relève les prix indiqués et fait remettre le
document à sa place. Le lendemain l'Anglais avait la satisfaction d'acquérir
tous les tableaux qui lui avaient plu au chiffre qu'il avait fixé, ce qui lui
donna une très haute idée de ses connaissances en estimations de peintures
modernes.
Ce tour d'adresse n'avait pas été, heureusement pour la \aleur de l'ar-
tiste, l'unique cause du succès. Claretie avait cautionné le j^eintre dans la
préface du catalogue. Il y disait :
« M. Des])outin fait songer parfois aux intimités puissantes des frères
Lenain. D'autres fois, dans la traduction du visage, du rire humain, des
violences de la chair, il a la verve et le coloris d'un Frans Hais. »
chino, par abréviation Cecchino, par francisation Chiquine ou Tchùiuine. Aujourd'hui, Jean
Desboutin. .Michaud ou Mycho, l'ainé, c'est André.
122
^ ,
Coll. J. Desboutiii
IK'iiivuscnuMil encore, le plus inij)orlant aeheteur ne fui pas l'Anglais,
mais un niareliand de tableaux, \v lanceur de rinii)ressionnisnu\ Durand-
Huel. « Il avoue aimer Ix'aueoup ma peinlui\' et ses .£*ros aelials vers <S1 me
Tout sul'lisammenl prouvé, " éerivait l'artiste à Alhoi/e, le .)() Janvier 1(S<S!).
(".elle vente, si l)ien ser\iepar les eireonslanees, produisit 18.147 fr. Aus-
sitôt Desboutin j)arlit pour le midi, soigner son enfant et s'enivrer, comme
une cii^ale. de lumière et de
- ' A ce moment, le bour-
geois de la \ ieille France repa-
rut sur le bohème échappé de
sa misère. Son premier soin fut
d'accpiérir une villa. Et, comme
la leçon des erreurs passées
n"a\ait ])as éteint en lui le
goût (k's entreprises, il arrêta
son choix sur nnv i)ropriété
pro(die de la promenade fies
Anglais, dont il comptait tirer
(rapj)réciables l)énérices.
Cette propriété était située
179, rue de France et se com-
l)osait, ■ — rei)renons le jargon
de la basoche, en nous rap-
])elanl tpie Stendhal, pendant
(pi'il écrivait la Chartreuse de
Parme, lisait deux ou trois
pages ih\ C.odr ci\il, pour se donnei' un bon modèle de ])récision, — cette i)ro-
priélé, disons-nous, consistait en <' bâtiment élevé sur terre-plein d'un rez-
de-chaussée et deux étages et d'un jardin aboutissant à un passage commun
au midi, le tout d'une superficie de 446 mètres et cadastré sous les numéros
r)l 1, 515, 515 et 51.S p. Section l\ confrontant, » etc. (1).
L"ac([uisition fut faite le '.) octobre 1(S<S1, moyennant 33.000 fr. dont
5.000 fr. seulement comptant, le surplus exigible le fer octobre 18cS7, avec
intérêts à 5 0 0.
i. 'atelier de gravure (Peinture, J8S''>)
Coll. .1. Dcshoutin
(1) Désignation prise dans l'afficlu- de la vente du Hi décembre KS91.
Berthe MORISOT
( 2.'' État )
L'avenir se Irouvail ainsi lonrflcinciil t,'rcvc. Il h- fut [ihis l'ncore, (iiiaiid
l'artiste fit construire an tond du jardin, sur le passai^'e a[)i)e]é Passaf,'e du
Commerce, une petite maison avec ali-lier. Cela fait, il emprunta .'iO.OOO fr.
au Crédit foncier. |)()ur 75 ans. lesfiuels .iO.OOU fr. [)asserent dans la poche
du vendeur, à peu |)rès entièrement.
four payer les amiuifés (U- cet emprunt, et jiour vivre. Dcshoutin
avait son talent, sa renonunée. son savoir-faire. On prétend ([u'il rlécora
une éi^lise de la réi^ion. mais nous ne savons larpielle : il ouvrit un atelier
de peinturi' et donna des leçons, il |)t'iifnit des paysages, des chiens, des
anglais, tant à l'huile qu'à la pointe ; et, en 1<S<S:>. riaal lui acheta un
tableau, qui lui fut payé 800 fr.. Porlrail de femme, ou la Juive à la Four-
rure ; enlin, en 1<S(S.'), il se livra à une nouvelk' s])éculalion, arlisti(pie celle
fois, ({ui, si elle lui procura heaucouj) d'ennuis et un niinei- |)rolil. accrut
du moins sa réputation de graveur. Nous voulons |)arler de la gravure di's
fameux Fragonard de Grasse (1).
(1) « M. Deslioutin, à tout événeim-nt. les .uiavc en ce moment à la pointe-sèche; ce
que nous en avons vu nous promi't une inlerprélation à la fois ori^'irmle et fidèle ». Bar"n
R. l'onT.M.is, Cazrttc des lirau.tArls, '2<- ] .-riode. l. XXX il (l,S,s5), ]-. 493.
1
leunc fille au chat (Peinture. lS7ô)
Coll. Durand-Ruel
12H
XX
LES FRAGONARD DE GRASSE
Rappelons, en quelques mots, ce quétak-nl ces l-ragonard fie Grasse ■,
comme on les désignait couramment.
En 1771, Mme Diibarry, ({ui venait de recevoir de son royal amant le
pavillon de Louveciennes, qu'achevait d'édifier l'architecte Ledoux, comman-
dait à Fragonard la décoration de son " troisième salon ■. lille voulait i une
idylle en peinture, inspirée par elle, une histoire de l'amour juvénile et vir-
ginal, qu'on s'étonnerait de rencontrer en un tel lieu, si la sensibilité du temps
n'en expliquait le choix. » (1) Fragonard se mit à l'œuvre. Il exécuta les
panneaux commandés avec une rare fraîcheur d'inspiration et de coloris.
On y voyait un jeune homme escaladant un mur bas et une jeune femme
effrayée, non de l'audace, mais de l'imprudence — si quelqu'un venait ! —
c'est La Surprise : puis, dans un autre endroit du parc ombreux, la même
jeune femme, sans émotion cette fois, regarde le même jeune homme qui fran-
chit à nouveau le mur, pour lui apporter une rose, tandis que la soubrette
écarte les bras dans un geste de protection et d'étonnement. C'est Le Rendez-
vous. Et toujours dans ce même parc à la française, au pied de la statue de
Vénus, les deux amoureux, tendri-ment enlacés se disent des douceurs, c'est
La Confidence, que suit bientôt une allégorie montrant que tout ce petit jeu
a eu sa conclusion habituelle, l'amoureux à genoux devant l'aimée qui pose
sur sa tète la couronne fleurie, symbole des derniers abandons. « L'attitude
est-elle bien ainsi? > semble demander la favorite cà Fragonard lui-même
qui. dans un coin du tableau, dessine la scène de V Amant Couronne?
Qu'est-ce qui ne plut pas, dans cette galante composition, à la capri-
cieuse maîtresse? On ne sait trop. Le fait est quelle n'en décora point son
troisième salon. Elle dédommagea Fragonard par une indemnité de IS.OOd
livTes et lui abandonna son œuvre.
(1) P. DE NoLHAr, Honoré Fragonird (Mnnzi. .Toyaiit et d', in-So, lOlS). p. 115.
127
Cliché Renaissance
11. l'HAGOXARD. — La'Surprise.
Le U'mps jiassa. Le Honian d'amour de la Ji'uncssr, roulé, relégué dans
un débarras, altendail des joins meilleurs, lorscpic la i'.i'volution survint.
Tout l'art léger et charmant qui. de Watleau à l*>agonard, et à Deburourt,
qui clôt le cycle, avait représenté la vie élégante et sensuelle d'une société
aristocratique, fui balayé, emporté par la tempête, anéanti, put-on croire,
à jamais. On ne voulut plus (pie Tauslérilé romaine, une [)einlure roifle
dérivée de la statuaire et des has-reliefs anti(pies. Fragonard, aini de David,
était dans les idées nouvelles et allié à Maximin Isnard, If futur |)résidcnt
de la Convention. Il jugea ceiiendaiil opportun, en 171)(». ilc (piittcr Paris
et de se réfugier à Grasse, sa ville natale, avec sa femme et sa belle-sœur,
Marguerite Gérard.
Il descendit chez son cousin Honoré .Maubt-rt. (pii habitait " une jtetite
maison toute sim()le. une maison de curé, au l)out d'une allée trmlïue (1) •-
dont il loua la partie qu'il occupa un an. du 12 février 1790 au 12 février 17'.)1.
Cette maison, bien située, possédait un vaste escalii'r, {[u'il commença par orner
de bustes et d'attributs révolutionnaires, après quoi, il s'avisa (pie le grand
salon conviendrait i)arfaitement à ses laissés pour com|)le de la Dubarry.
Il les j)rop()sa à Maul)ert (fui. homme de goût, s'empressa d'accepter. Le 10
mars 1791. Frago donnait (piil lance à son cousin du prix de ii.tiOO li\ res,
pour la décoration tout entière, cpii comprenait beaucou[) plus ([ue les quatre
panneaux. Comme un cin(piième emplacement réclamait son décor, il es(piissa
sur place une cin(|uième composition, conclusion désenchantée des quatre
précédentes : L'Abandon. La })auvre amoureuse, est seule, et se lamente,
assise contre une haute colonne que surmonte un Amour le doigt levé, (|ui
semble fredonner la chanson de .M"'® de Fomiiadour : ■ Vu n'iras plus au
bois, les lauriers sont coupés ! >' Cette es(piisse, restée inachevée, est déli-
cieuse, en sa grisaille satinée et légère. Le jieintre. pour com|)lèler rensemble,
peignit encore deux dessus de i)()rtes. un trumeau et une Apolhnisr de l'Amour,
demeurée inaclievèe. elle aussi, lùilre ciia(pie pamuaii, il tendit une magni-
fique suite de tapisseries de Heauvais. (pii i)rovenaient de la \'enle du duc
de Penthiévre. Les panneaux étaient sans cadres et mesuraient .".'"f)!) de
hauteur sur 2"i-10 de large. La décoration de ce sahui rectangulaire, dont la
vue donnait sur la campagne, était harmonieuse et riche, une décoration
d'un goût parfait.
Tel Fragonard l'avait disposé, tel ce salon demeura. La maison était
(1) X. Z., Les Fraqounnl de Grasse. Quinzaine bnurhonnaisr, l.S'JS, p. 91.
Cliclié Renaissance
H. FRAGONARD. — Le rendez-vous.
d'un accès difficile ; un « dragon provençal >, romme Desboutin qualifie
son propriétaire, en défendait l'entrée. Les Goneourl n'en parlent que par
ouï-dire au chapitre consacré h Fragonard, dans leur Arl du 18e siècle (\).
Quand Honoré .Maubert mourut (1806), la peinture de Fragonard était
tombée dans un profond discrédit. Si nous en croyons un récit plein d'humour
qu'aurait fait Victorien Sardou, mais qui semble avoir été rapporté avec plus
d'esprit que d'exactitude, les héritiers de Maubert ne pouvant s'entendre sur
le partage, auraient fait appel au juge de paix. Biaise Sardou, le cousin du
futur auteur des Pâlies de Mouches. Ce dernier racontait ainsi ce ((ui se passa.
«Biaise Sardou donne à l'un les meubles, à l'autre les instruments ara-
toires, au troisième les peintures. Celui-ci, Malvilan, se fâche. Il aurait
préféré les meubles ou les instruments. < Que \oulez-v()us tpie je fasse de
ces peintures ? A combien les estimez-vous? — Cincj cents francs ! » dit
Biaise, qui exagère un peu sur l'estimation, afin de radoucir l'héritier. Celui-ri
se résout, mais cesse de saluer le juge de |niix l()rs([u'il le rencontra. Cinq
cents francs, ces vieilles peintures !... » (2)
Quand Malvilan rencontra Dest)outin, il y avait déjà longtemps que le
goût des jolies choses du xviii^ siècle était revenu. Desboutin s'enthousiasma
pour le Roman d'amour de la Jeunesse et proposa de le reproduire ;i la pointe-
sèche, en cinq grandes planches de format in-folio. Malvilan sul)odora une
bonne affaire, enfarina Desboutin dans un traité ad hoc. et le travail com-
mença.
Ah ! ce traité, ([ue de soucis il causa au graveiu". f[ue de malédictions,
en langage imagé, il provoqua ! La moindre était (\uv. italianisant K- nom
de son adversaire il faisait de Malvilan, Maie villano, mauvais paysan. Inno-
cente vengeance d'un artiste aux prises avec un propriétaire rapace ! Des-
boutin, lui, malgré ses constants soucis d'argent, envisageait d'abord l'inté-
(1) Edition Cliarpentier, t. III, p. 2S1.
(2) Si'ARKLETT, Lc trottoir roulant. Echo de Paris, 22 .^vril 1907.
Ce Malvilan QUchel-Louis, 1815-1903) était cousin au huitième dei^ré du iieintrc.
Son père {1780-185.3\ était le fiis de Marie-Anne Maubert et avait épousé Marie-Thérèse
Delphine Court, arrière petite-fille elle-même d'Honoré Maubert (1719-1801), qui après avoir
fait sa fortune dans la parfumerie et la ganterie, avait acquis la décoration de son cousin
issu de germain, Honoré.
Les deux branches étaient donc parentes. C'est Delphine Court qui hérita, en 1S27.
de la maison Maubert. Elle épousa son cousin au septième degré, Jacques-Jean Malvilan.
dont elle eut deux enfants, une fille et un fils, l'aîné, Michel-Louis, qui recueillit pour sa
part, dans la succession maternelle, la maison de Grasse et son précieux contenu.
Ces renseignements précis sont dus à M. Martin, l'érudit et dévoué secrétaire de la
Société Fragonard, à Grasse, qui a démêlé l'imbroglio d'une généalogie très touffue.
D'après elle, Maubert n'avait pas trois héritiers, mais seulement deux.
. ^ W\s;
CliiKé Renaissance
II. I-"RAGONAÎU). — La Confidence.
rêt do son œuvre el sa propn' ir|)ulali()n : Malvilaii ne voyait (|iic le t»aiii.
Il se serait parfaileiiuMil coiilciilé d'une i^ravurc faite <Vuu jet. ayant de l'd-il.
mais qui n'aurait nécessité ni retouelies. ni surtout tant d'é|)reuves d'essai.
Il ne voulait entrer ni dans les frais des désaeiéra.ifes orcasionnés [)ar les
corrections, ni dans ceux des couvertures de la série des cin(| planclus. ni
même dans celui du prospectus, et moins encore dans les dons à la |)resse.
C'était bien le i>illanovu\nûv el disputant |)our la moindre dépense non prévue
au traité ! Xolaniment pour la presse. l-'Jle devait Irompelter l'ceuvre et
rasseml)ler les amateurs, cprimporle ! Il sr montrait intraitable. Dieu s;iit.
j)ourtant. cond)ien Deshoutin y a])portait de modération. Il prévovait. rn
tout et |)our tout, cpiatre séries à ([ualre crilif[ues !
Il écrivait à son ami Alboi/.e. directeur de VAilislc. le 'lA octobre l.S.SC) :
(i Du reste, je ne liens j)as à l'induire dans de grands sacri lices, n'i'stin:anl
pas à plus de (luatre grands critiques influents, le nombre de lanceurs-
écrivains, qu'il faut séduin' à laide des présents d'Artaxerces. Ces (pialre
crilicpies influents doublés, ne l'oublions |)as. de lantH-urs-écrixains. étaiiiil
Paton, rédacteur-financier des JJébals •< pour la P)()urse et les P)an{|ues /•
(19 nov. 188(), au même), I>ochefort, A. Silveslre et J.-L. l>i-o\vn. le peintre.
Pour les autres, pour les amis (pii devaient rabattri' les souscripteurs
et, selon sa pittoresc[ue exjjression. faire le Itois . il s'en<^ai^eait à ])rendre
sur ses propres épreuves, le tirai^e étant parfaire en deux parties égales. D'ail-
leurs, il ne prodiguait pas non j)lus ces épreuves-là ! Il recommandait à .\ll)oi/.e,
son (diargé d'alTaires à Paris et son ami. de mettre de côté les épreuves niai
tirées «pour dons à faire aux journalistes ou camarades-artistes» {2'.'> sept. IS.Sti).
Il s'entendait à payer en monnaie de singe la viande creuse des éloges, dont
il était pourtant friand ! Mais il est habituel de montrer (\n dédain j)our la
publicité, quitte à ressentir du dépit fpiand cellt^ prostituée semble à son tour
vous dédaigner.
Quoi qu'il en soit, il fallut tout le deNouement d'.Mboi/.e et la loyauté du
représentant de Malvilan, M. .Vstier, pour cpie le traité reçut une application
acceptable, au moment même où les assignations lancées, les tribunaux allaient
décider. Mais Desboutin garda rancune à Malvilan. ce sinistre personnage >■,
ce «sauvage », ce « père Grandet provincial s ce m corsaire, impatient (K- son
dividende » (1), et autres aménités, et ne lui pardonna jamais.
Comme bien l'on pense la sj)éculation fut meilleure i)our l'associé que j^nir
(1) 1 cttrcs à Raisin el à All)oize. Toutes les lellres lie Desboutin ;i Allmize oui été
Clirlii- Renaissance
H. FRAGONARD. —L'Amour couronné.
le graveur. Les planches elairoiiiiées, céléhrées. i-xi)o.sées. attirèrent lattcn-
tion du monde entier sur les originaux. On réclama ceux-ci pour le Louvre.
Les journaux annoncèrent l'intention de Malvilan d'en faire don à notre grand
musée. Son intention n'était pas cela. Il désirait hien (lu'ils entrassent au
Louvre, mais moyennant trois cent mille francs. Le prix, f)our l'ipoque
était un très gros prix. C'était l'avis de Desboutin cl a- fut dr même l'avis
du Conservateur d'alors, Georges Lafenestre. Plus tard, il advint «pu- l'Amé-
rique se « mit >> sur les Fragonard et en fit hausser le cours, l'n marchand d.-
Londres, acheta tout le salon et le revendit 1.2.50.000 fr. à M. Pi.rpc.nt Mor-
gan. Après la mort de ce dernier, ces panneaux furent accjuis, en février r.H.J.
par M. Frick, pour L425.000 dollars, soit 7.38L000 fr. au change normal.
Les cinq cents francs de Biaise Sardou avaient fait des petits !
Desboutin s'attela avec sa furia ordinaire à ce travail, faisant d'abord
des copies peintes avant de commencer à graver. Peintures en grisailles
qui lui donnaient les valeurs de sa gravure. Travail préparatoire et travail
définitif, le tout lui j)ril trois années (1884 à 1887). Ce fut le bon temps, quoi-
qu'il le qualifiât de « travail de i)risonnier sur noix de coco » (A Raisin, 10 oc-
tobre 188G). ]\Iais l'œuvre accomplie, il fallut la lancer. Il y employa ses élèves :
Alliou, Cuvillier, Bérend ; ses amis : Paton, Silvestre, .J.-L. Brown, Rochefort,
Alboize et Gaston Latouche (ju'il remercia par une épreuve de L'Homme à
la Pipe. A Genève, il pense naturellement à se servir de Raisin, qui ne ménage
pas sa peine. « Le 15 janvier il doit exposer les trois épreuves (|u'il a fait enca-
drer pour le wSalon Suisse (les deux dt-rnières planches n'étaient pas encore
terminées), et de ce côté-là il espère encore «harponner c|uel([ues saumons de
son lac » (A Alboize, 31 octobre 1886). Il les har])onna, en effet. A Bàle,
il entre en relation avec un marchand d'estampes, Georg, parce que ^ les
braves banquiers allemands sont très friands des belles gravures et ])articu-
lièrement des gracieusetés du xviii^ siècle » (/6iV/.). Enfin, à Paris, Durand-
Ruel devient son dépositaire. Et ce, sans compter les expositions sinmltanées
au musée des Arts décoratifs de Genève, aux Vingt de Bruxelles, aux Peintres-
Graveurs et chez Durand-Ruel, à Paris, ces quatre expositions en 1889,
et l'an d'après au Salon de la Société Nationale, alors dans toute la vogue
de sa nouveauté, sans compter non plus, les arlicU's de Bazire. dans r/n//(;n-
acqulscs par M. Jacques Doucct, pour l'admirable Bibliothèque d'Art el d'Arciiéolofrie qu'il
a fondée. Ces lettres forment le fonds le plus abondant, eciinu jusqu'ici, d'autographes
de Desboutin. .Nous y avons lar£iement puisé, ainsi qu'aux collections Haisin, Claretic
J. Grand-Carterct Slmonnet d'Hennezel. Massicot, etc.
135
Cliché RenaisEance
11. FllAGOXARD. — L'Abiuidon,
sigeani, de Martack', dans \v Figaro (2r) sc|)lc-ml)rc 188()) i-xlrails «l'un aiiln-
article d'A. SilvesLri'. dans la Hcuur (irnmilr, du 1.') septcnibrc |)réréd('nl.
11 y eut nièinc, - - ce dut être un c(»u|) (h- MaKilan, - un article dans
L'Art, où l'on vantait l'Yagonarfl, en i)assant sous silence son inter[)rete, el
où l'on aflirniait même ((ue les panneaux de Grass»" n'avaient jamais été
reproduits. <• .resjiére, écri\ait le i^raveur à Alhoi/e, rpie vous all</. pouvoir
tirer au clair l'étrange histoire de l'article de L'Art sur les l-"rago el en neutra-
liser l'influence par l'article que vous avez bien fait de différer. jusf|u'à ce
grand moment décisif du lançage... »
En dépit de ces etforts, les (\vu\ cents épri'uvcs, a cent francs
l'épreuve, se vendaient péniblement. 11 pensait as'oir coidre lui les gra\eurs
Institutifs, -- lisez de l'Institut ! — « horripilés par la liberté de sa manière
et cettt' rupture en visière a\'ec les traditions recto-linéaires des eau-forlisti-s
de tous les temps » (A Raisin, 12 déc. 1<S(S()). I.e baron Alphonse et la baronne
Xathaniel, (fui avaient souscrit, ce qui remplissait de fierté le graveur, ne se
pressaient ()as de payer, ce (fui navrait l'éternel « impécunieux ■ (fu'il était.
L'Etat, f)ar tloger Marx, secrétaire du directeur des Beaux-Arts, (lastagnary.
et par Bazire, (fui fut l'intermédiaire utile, actfuérait bien (fuatre collections des
cinq planches, mais en exigeait une cinquième à titre gracieux (.V .Mboize,
ô mars 1888). Pour comf)enser cette {)erle de 500 fr., l'artiste faisait profxjser
aux Beaux-Arts » quatre autres épreuves de gravures originales. > A Londres.
Alphonse I^egros, « un vieil ami, ne s'est engagé à f)arler à aucun des ama-
teurs, qu'un seul mot de lui déterminerait o (au même. 2o avril 1888). Enfin, couj)
de massue, Malvilan, cet alîreux Malvilan... Mais laissons [)arler Desbouiin :
... i< .Je n'ai vrannent pas de chance ! Figurez-vous (fue l'iùnpereur du
Brésil est ici, ])rès de Cannes, en villégiature. Xaturellemeiil. Orasse étant
dans son voisinage, il a été mené à la maison Malvilan, |)our voir les Fra-
gonard. Après avoir payé son tribut d'admiration, il a annonce à Malvilan
son intention de prendre chez le graveur Desboutin quehfues collections de
l'œuvre, qu'il savait être faite et terminée f)ar lui. Immédiatement, le .MaKi-
lan s'est posé comme seul possesseur et dépositaire de ces gravures et en a
poussé cinq collections à cet illustre souscripteur ! Je tente bien, par une
mienne connaissance de faire savoir à cette Majesté (fuOn l'a empêchée
par cette rouerie, d'exercer envers un honnête artiste militant, le protectorat
qu'il professe dans tous les lieux où il marque son i)assage par des encourage-
ments et des bienfaits, mais je ne me monte pas le coup, et c'est à jamais
une belle occasion perdue... n (A Alboize, 23 avril 1888).
i:iT
Petit^> amours dans le i) arc ( Pcinlure lf>S-',)
Coll. J. Desbout in
138
XIX
NOUVEAUX DÉBOIRES
LE TREMBLEMENT DE TERRE DE NICE
EXPOSITION MANQUÉE
RETOUR A PARIS, PUIS A GENÈVE
Lariiiéi' 1887 nv coninK'iiça |)as trop mal. Le vieil artiste l'écrivait à
Alboize, le 21 février :
u C'est une vraie série qui m'est arrivée tout d'un coup, depuis à peu
prés un mois. Après le grand portrait de femme que je crois \ous avoir signalé
et qui m'a heureusement procuré un millier de balles, cpiatre portraits me
.sont arrivés, portés les uns par les autres ; deux nouveaux sont en perspec-
tive... Serait-ce un peu de chance qui me reviendrait? Je suis depuis si long-
temps étrillé par le sort, (pi»' je ne crois à aucun revirement de la mauvaise
fortune.
Son pressentiment lU' le tromj)ait pas : à [leine cette lettri' était-elle
partie, que la terre niçoise tremblait et détruisait les quartiers neufs de
la ville, ceux hal)ités |)ar les étrangers, ses clients (2;') février). Heuri'usement
son quartier est éi)argné. Sa maison n'a pas même une lézarde. .Mais il perd
de I.ÔOO à 2.()()0 fr. de portraits, ses modèles ayant fui. Ceux qui restent, bra-
vant les fâcheux pronostics d'un allemand cpii annonce de nouvelles secousses,
louent sa maison, ce c(ui est une compensation. 11 en a une autre, qu'il
annonce à Raisin, le 10 mars :
Il J'ai réussi pourtant, à faire c[uek[ue argent et tpiekpies bonnes choses,
entre autres le portrait d'un monsieur (tètt' de vieux ligueur), ((ui a eu le
bon esprit de se faire peindre dans sa robe de chambre écarlate et en chemise
de nuit. » Serait-ce le portrait de M. Kigny. qui ligura au Salon de cette
année ?
Mais Nice lui ollre dorénavant d'insuffisantes ressources. Il revient
139
à Paris, où il it'lroiivi' \'\\n\\ pour le lermc d'avril 1887. son ancien alclior
du 38 de la rue Hochechouarl, « lo grand local du fond, contigu à celui où je
reloucliais mes cnixres. " Il le loue pour un an, y est alleinl d'artliritisme
au i)ouce droit, ce ([ui le giMie forl dans la rei)rise de sa quatrième plaque
des l''rai»o. laciuelle. au |)remier coup de i)resse, a manifesté, dans les deux
l.c pcliL inoilcli' (l'cinluic, Ji^J J
Coll. .1. Desbout iii
tètes i)rincipales, des avarii's (pu- deux corrections successives, même i)ar i)la-
nage radical, n'ont fait (pi'aggraver » (A Raisin, 18 juin, 1887). Le médecin
lui interdit tout tra\ail. et mènu' l'ècritui'e, mais il n'est pas au bout de ses
tracas, lui juillet, il a une congestion :
« Pas plus tard qu'hier, on a dû mv faire rentrer de la rue cluv. un phar-
macien, leijuel m'a fait accompagner, |)ar un docteur inconnu, jusqu'à mon
atelier, où on a victorieusement combattu la congestion par des sinapismes
140
l/D
Y\
'^ï^'
w
Durancl-IUicl / l'ointr-scrhr)
'il
aux mollets et des friclions à la téréhcnthiiu' sur la colonne vertébrale...
fl'est le premier coup de pioche à rédifice... (îare de dessous ! • (A Raisin,
7 juillel 1887). L'édifice, heureusemenl. était solide, et le coup n'était dû,
il le constate lui-même, « ipi'à ce dial)k' de climal « parisien. < pnistpi'à Xice,
en janvier, il n'a jamais rien senti de semblable. .'
Il passe donc toute son année à Paris, avec l\'spoir d'une i-xposilion
chez Rernheim jeune, pour hupielle il est (pu'stion d'un calalo.mje, analogue
à celui di" l'c^xposition Ribot, où les tableaux a\aienl été reproduits par
la gravure sur bois. Lui, on le conçoit, reproduirait les siens, par la pointe-
sèche. Il rexf)licpie à Raisin, avec sa truculence romanlicfue habituelle :
«L'exposition doit avoir lieu en mars 88. D'ici là, une fois mes faits et
gestes bien convenus avec nies barnunis, mes tableaux transportés de Nice
à Paris, et le choix fait de ceux à reproduire pour mon catalogue, je n'aurai
qu'à emporter avec moi les photographies desdits tableaux et à les truquer
à la plume. scciiiKliim iioviini melhodicurn mcum, prés de vous, à Genève,
et à les envoyer successivement à Paris pour être héliogravés et mis
en magasin jusqu'à fin janvier, où je passerai quelque lemi)s à en faire tirer
des épreuves d'essai, leur laissant le soin de tirer l'édition et de la mettre en
brochure.... Si les Rernheim aboulent les balles du petit capital anticijjé, ({u'ils
me présentent comme appoint désormais certain, il ne serait pas impossible
que, c|uelque beau jour, je vous porte moi-même mon ])elit stock de gravures
et que nous puissions nous mettre enstinble à r<L'U\i-e dn montage de coup. »
(31 (sic) septembre 1887).
Ce « montage de coup ^ a\ ait pour objet une autre exposition à Genève,
(pii eut lieu. OuanI à celle projetée par Hernheim. il écrivait, le 9 octobre,
à ce même Raisin, cpii lui fut toujours utile et dé\(nié :
« Les Rernheim m'ont crac[ué dans la main, au moment on il fallait
abouler les balles nécessaires à la campagne dv mon exposition générale,
imaginée par eux cl à lancer jxir eux. L'inct'rtitude des temps ])olitiques autant
que la façon déplorable dont s'annoncent les alTaires des Reaux-Arts à cette
rentrée, les font reculer devant les frais à faire immédiatement pour moi
conmu' graveur du catalogue (dont il faut jjayer au moins le temps de près
d'une demi année à consacrer exclusiveinent à ce travail), et les frais d'im-
pression, sans com])ter ceux de l'emballage de ma galerie et de son transport
de Nice à Paris, .le dois vous avouer que je n'ai été ([u'à moitié navré... »
Il retourne à Nice (12 janvier 1888), a lin de « tirer [)arti de sa propriété «
de ramener sa petite famille >. Il l'avait laissée au soleil, sur les conseils
142
Emile Zola à la bij*natiire (Pointc-sùche}
EpreuAc avant la siynaliire
H-i
du Dr Baréty (dont il avait fait le portrait peint, exposé au Salon de 1886,
puis une poinle-sèehe), à cause de « l'état valétudinaire de son pauvre garçon »,
André, qui avait un épanchenient de synovie. Il croyait ne rester à Nice que
peu de temps, et pouvoir arrêter à Genève, « l'épouxantable roulis de sa ba-
raque de saltimban(jue », mais il comptait sans « ]'inil)r()iflio de ses créanciers ».
Il en jirofita pour <■ reposer son cerveau ". v[ quand t-nlin, il eut trouvé un
locataire de 1.200 fr. pour Tatelier et une partie de la maison (A ^Alboize,
27 mai 1(S88), il s'empressa de Hier sur la Suisse.
11 arriva à Genè\(', le li juillet. Il com])tail, cet éternel illusionné, sur
une nombreuse clienteK'. cprattirerait son talent, appuyé sur une renommée
accrut', et (pie lui « rabattiaienl ses amis - Haisin, I^icbard, avocats, Vuillet.
médecin. Darier. ])eintre. Salmson. sculpteur, etc. Il comptait aussi sur rexj)o-
sition de ses (ruvres, pour laquelle il avait promesse du musée des Arts Déco-
ratifs.
Il commença par s'installer, aN'ec son insouciance coutumiére, 9, rue de
''Kcole, aux Paquis, et il raconte à .Mboizt-. les péripéties de son installation :
« Je n'entreprendrai pas, ici. de nous décrire par le menu les travaux
lierculéens et les combinaisons di' casse-lète cbinois par les([uelles il nous
a fallu passer pour arriver à coUoquer dans un petit atelier de II métrés de
profondeur v[ de .') métrés seulement de lari^eur, dans un a[)])artemenl de trois
|)iéces(dont une cuisine), tout le matériel (\c peintre, tons les tal)leaux, es([uisses
et gravures, tons les meubles et etïets à usagt', ({ui garnissaient à Nice tout un
étage de la grande maison ;le la rue de France, plus mon double atelier du
jardin, plus trois pièces de re/.-de-cbaussée (Ticelui ! bjilin, ça y est ! Tout
est colloque, excepté quel([ues pièces, ([ui nous sont inntik's comme mobilier
et que nous nous pr()j)()sons de vendre.
«Mon atelier est tout à fait convenable! lue vraie lrou\aille, tpii n'a
d'autre inconvénient (\nv rcvccntricitr du ([uartier. 11 consiste en deux arcades
de bouticpies, converties en atelier, grâce à leur situation en plein nord, — ■
avec l'espace libre d'une place devant. Sa profondeur est de 14 mètres,
dans lesquels, par un galandage en bois, (|ue j'ai trouNe mol)ile sur place,
je me suis réservé un atelier de gra\iire tout aussi bon (pie celui de Nice,
moins le jour du liant. an([uel je pourrai siip|)léer par un châssis incliné. »
(5 août 1888).
('et atelier de fortune ne conserxa pas longtemps ses avantages. .Vu mois
de septembre, « une bâtisse de l.j mètres de hauteur, » s'élevait sur la place
libre et lui enlevait sa lumière ! Desboutin résilie son bail, se met à la recherche
144
\ \
Emma DAUVILLIERS
(2 État)
friiii autre local, linil par en décoiurir un. occu|)é par uu (lc|tot dr niaduuis
(ce ([ui (lut lui rappek-r ralclit'r de la rur «les Daines), et. en allendant la
fin (lu procès ([uil engage contre son hailleui-. il |)répare son exposition.
Ce n'est pas une mince besogne, il travaille à la relouche de ses |)elits
cuivres. < qu'il n'avail pas vériliés par la presse depuis huit ans .. et ([ui
avaient été «saignés à blanc ■ par Cadarl. (\ Alboi/.c. 17 iio\ (•iid)rr l.S.SX).
L'exposition s'ouvrit le
30 décembre 1888. Imi janvier
1889, avait lieu l'exposition di's
Peintres-graveurs, à Paris, chez
Durand-lUiel, et le 1*^' févriei'.
à Bruxelles. celU' des Vin;/!. A
ces deux dernières inanil'esta-
lioiLS d'art graphique, Desboutin
avait les honneurs de rinxila-
tion. Si's pairs le rt'connais-
saienl pour un maître. - Il paraît
(|ue Braciuemond, l^esnardet moi
avons été les trois rois de la
fêle », - écrit-il le .'>() ian\ier
1889 à .Mboi/A'. sur rexj)ositiou
tles Peintres- (irdpt'urs, k et
Durand-Kuel s't'st rt'|)ris |)oui-
moi d'un renouveau de zélé et
d'offres de services, lise fait fort
de mejilacer des épreuscs de nu's
poiiiLes-sèches. un ci'rtain nom-
bre par mois, si je \-eux bien lui
conliei' un poi'tt't'euille. .h' le
ferai volontiers, mais sans grande illusion, car ji' nu' rappelle (pie. eu huit
années cpi'il a eu entre les mains un stock de mi's meilleures épreuves, il n'a
pas trouvé nmyen d'en placer une seule.
L'Exposition des \'in(/L où il a vingt-(piatre cadres <repreu\es (d'au-
tres lettres i)orlent dix-sept) sur ciiui à six métrés de cimaise, lui donne
toute confiance, surtout ])our l'écoulement de ses fameux l-Vagonard.
Quant à son ex[)Osilion à Genève, il s'en déclare absolunu-nt satisfait.
Il y avait envove - son (cuvre complet en gravure, cent (pialre-vingts pièces
Tt'lo (le r-'eminc ( Pciiiliirr, / ^ s sV
Coll. Durand-Hucl
145
t'iiviroii . (1) et la foule était accourue au musée des Arts Décoratifs :
.laniais concours plus sympathique ne s'était fait dans ce froid pays,
autour de lenvoi d'un artiste étranger. Plus de 500 amateurs l'ont visité;
les i^azetles de toutes les nuances en ont chanté les louanges sur tous les
modes et tons ! \i[ le journal. V llliistrdlion suisse, s'est emparé de mon por-
trait, [)our le faire paraître demain soir en grand format, avec biographie et
article criti([ue. ^
« Le résultat financier n'a été c[ue de ([uelques centaines de francs, mais la
réclame, à mou début dans celte ville. (>st d'une portée incalculable, qui me
donne bon espoir de portraits (au moins de portraits gravés), dès que j'aurai
pu trouver, au centre de la ville, un att'Iier a])ordal)le pour le client. '
l'",nlr" temps, « il faisait lui-même son marché. coilTé d'une petite calotte
rougt". et marchandait chez les fournisseurs de son ([uartier. » (2)
La réalité déçut encore une fois les espérances, toutes les es[)érances,
hélas ! de l'iidortuné graveur. Malgré la ])ublicité de V Illuslralion suisse,
l'exposition de (ienéve ne donna ([ue les maigres résultats que nous venons
fie voir, obtenus surtout |)ar la \-ente de son portrait " le dernier, de face,
au grand chapeau '. (pii s'est xendu à unv di/aine d'exemplaires. Mais ce
petit succès ne fut suivi d'aucun autre. .\nx Peintres (/rdveurs ce fut ])is encore.
" Pas un seid amateur n'a demandé k' |)rix d'une seule {)lanche ! » Pourtant
L'Homme au (jrimil chapemi, son poi'ti'ait cpii avait tant ])lu aux genevois,
avait été reproduit en première page de V Art jrançais: il avait « hguré toute une
semaine dans tous les kios(jues ; » (d cette rèclanu' n'a ])as « renvoyé un seul
acheteur à la gravure originale ». Quant aux Vinf/t. '• malgré un article à
tout casser de ce brave Ainiand .Silvestre ». résultat ideiditpie. C'est la
guigne noire. Elle le suit au delà de la Manche, sedef atrn cura :
« A Londres, où j'avais fait au Xoir et lilane un magnifi({ue envoi de cadres
d'élite, le Comité n'a pas voulu m "admettre, comme tro]) eiu'ombré lui-même
[)ar l'apport des sociétaires. A Glasgow, malgré l'appui d'un mien ami,
acadéiuicien d'iulimbourg, mes cadres n'ont obtenu que de vagues mentions,
et l'Académie d'LMlind)ourg, à laquelle ont été présentés mes Frago, a conclu —
à n'en rien ])rendre ! » (A Alboize. 1 février et 14 mars 18(S0).
Ces échecs successifs ne le découragent pas. Sa vaillance a été mise à
de plus rudes épreuves. A l'opposé de l'amant de Philis, il ne désespère
(1) n n'y a pas eu de catalogue imprimé.
(2) NisiAH, cité par Willy, la Suisse. 1') septembre 1 92(i.
146
Emile SOLDI
(2' Étal)
pas. alors même qu'il nVsporc plus. Il f;iil um- tiouvcllc exposition chez
Durand-Huel (1). il envoie a ri-;\[)()silioii Iiii\erselle d arct-ptc le principe
d'une exposition à Lausainn .
Puis, en 1(S90, la SociOlé Nationale se loiulr. Deshnulin. (|ui na pn venir
à Paris, faute d'argenl. ni |)our son exposition |»arliculiere ehe/. Durand-Huel.
ni pour TKxposition l'niverstdle. ou il avait tenté, en vain, d'envover " s;j
meilleure épreuve de L'Homme à la Pipe . d ou il ne lii,Mira ((u"avee le por-
trait de Leclaire,cn peinture. v[ celui du Comir L<j)iv .n «.'raviirc. se décirla.
au terme de cette fâcheuse année, à regagner la capitale.
(1) r.ataloiiuc avec préface dl-:milc Zola, reproduii,- p;ir Ir l-n/'im du ,s juillet et dans
les Annalfs bourbonnaises (p. 2.'39) qui s'excusent atipnv de ltur>; lecteurs de leur donner
du Zola !
147
I)r Clionnof ( l'einlarc. l<SSô)
Coll. H' J. Landau
148
XXII
NOUVEAU SÉJOUR A PARIS
LA DÉCORATION
D' Robin (C.rayun Conté rehaussé de sanguine)
>iin iiiUiilioii rlail de pas-
ser ;i Paris. jiisU- li- toinps «i'ar-
ian<^i'r srs afTairi's, après quoi, il
SI' riiiistalk'rail à Xitc. ou il
avait déjà l'Xpédié ses nu-ubli-s
cl sa gak'rio . k-s (jurk|Uf
deux iiMits tableaux qui consti-
lufiit son fonds ft son héritage.
ne laissant à (ieneve que l'in-
dispensahle. - et sa famille.
C.elle-ei devait t|uitter la
Suisse, sans esprit de retour, la
Suisse au climat brumeux,
g la ce, marécageux et surtout
|)luviiux et neigeux, en même
temps quil céderait lui-même
à la force et à la férocité d'appel
du soleil. (1) Il loua à Paris
un logement jtour trois mois,
puis il prolongea de trois mois,
puis de trois autres mois encore,
et ainsi de suiti' pendant sept ans !
Dans rinler\alle. cela va sans
dire, sa famille lavait rejoint.
Le revoilà tionc à Mont-
martre. Ci) Il est iialurellrmenl. lui, le militant . avec ceux (lui se séparent
(1) .\ AlliOi/.f, 14 niMrs IXX'J.
ri^ 5, impasse .le Gudina (1890-1891). puis cité Véron. 9 < 189-J- 189.5). rue Hreda. ..
149
hruyamiiu'iil de la Société, trop routinière, Irop poncive, trop académique à
leur i^ré. dos Artistes français. Il marche du même pas que Meissonier, que
|{odin, que Carrière et que son ami Puvis de C.havannes. dont l'influence
est grande. Là. au moins, on n'est plus étranglé |)ar un règlement ((ui
limite à deux le nond)re des cadres ! Aussi, la première année (1890)
exi)ose-l-il Ions ses 1^'ragonard, plus trois autres gra\urt's d'après P'rans Mais
(ou Donu'nico l-'eli) c[ lU-mbrandt, et dix peintures! (lelles-ci sQut bien
accueillies par la criticpie. (pii décon\ri' I )t'sl)oulin, [)i'inli'e, et ce succès l'en-
courage. (",ha([ue année il en exposera autant (pie faire se pourra, voulant
rpie son paniu-au ne soi! pas moins abondant (pie celui de ses émules. Et
cluupie fois, des |)eisonnages connus, - on (pii le de\iendronl, — - se ren-
contrent sous son pinceau : l'.lig. Lal)i(die et Léonce l'éiiédite. en 1890 ;
.l()sé])hin Péladan. en 189! ; Lrik Satie et Lipmann. en 189.'} ; miss Maud
Gone et Amilcare Cipriani. en 1891 : Puvis de ('.ha\annes, on 1895 ;
Willette, en 189(1: lùigeiic l'onrniei-e et Pierre Handin. en 1897; Maurice
Barrés, en 1898. (1) et. pi\'s(pie tous les ans aussi, son propre portrait,
dans une expression inxaiiable de sérieux. jamais il ne se représente
riant, comme b'rans Mais ! mais dans toutes les attitufles et axcc toutes
ses pipes !
Il ne négligeait pas. pour cela, la graxnre. 1/b^tal lui commandait, en
189.'J, sa grande î)ointe-sécho Fiimt'ur (illimuinl s<i pipe et. en 1896. la Ville
de Paris, La Fcininc nu (Hud.
Il était devenu un personnage. 11 appartenait a la catégorie de ceux qu'il
lui plaisait d'appeler, non sans un soupçon d'ironie, » les illustres ». Mais la
célébrité ne compassait pas ses manières ; elles imprégnaient trop l'homme,
dont elles constitnaienl an demeurant une partie de Toriginalité, pour ({u'il
lui fut ])()ssil)le. malgré (pi'elles l'eussent gêné naguère, de les déposer connue
un inas(pie. On le connaissait mainlenant, et |)ers()nne ne se montrait clnxiué.
Pas même M. le Directenr des licaux-Arts ! On raconte, — mais il y a dans
(1894-189.")) l't rue Hic'-da, 1,') (189G). Mais il ciuiiiiîcnil (l'apparleiin'iit dans la iia'iiie maison,
ne chercliant jamais de lo^jcment et p'-cnant,.à la derniîTe heure, ce qu'il tnjuvait.
(1) M. .Maurice Barrés ne fui pas salisfail de son portrait. Cela arrive aux jjortraitistes
les plus r(.'i)ut(''s. Le rhdisme de Deshoutin s'accommodait mal, sans doute, de l'impression
i()mi)le.\e el myst('riei!se d'un visa.Lie de psyclioloffue artiste, (pieut mieux senti un (barrière.
" Il faiU avouer, m'(;'crit M. Alauricc Barrés, que ce portrait est affreux 1 El je désire
bien sa ilestruction. AvaiU, je serai heureux de causer avec vous, et d'écouter les injurieux
reproclies (pie vous ne manquerez pas d'adresser à mes instincts de vandalisme.
« Nous serons d'accord pour dire cpie Desboutin était un rare et très attrayant artiste,
de la plus belle espèce.
« Barrés. »
150'
L-^àë
y
<v,
,?'
Tètes d'étude;. /Dessin a la plume)
Coll. J. Desbouliii
151
ce récit une lionne pari de fantaisie! - que ce dernier lui ayant com-
mandé une i«ra\ure d'après un lal)leau du musée de lîouen, Ld Clémence de
Traiim, de Delacroix. l)esl)oiiliu le pria, comme d'une chost- naturelle, de
l'aire envoyer l'original chez lui, alU'udu cpie, d'uiu' jiarl, il ne pouvait
se déplacer, vu son âge, et que, d'autre pari, il ne sérail pas digiu- de l'Etat
ïrançais ([ue la gravure lui exécutée d'aj)res une pholographie. Ce en quoi il
a\ail raison. J.e Direcleur, lui (lénu)nlra l'inqiossibililé où il élail de sous-
Iraire ce lableau au public cl de l'enlreiioser chez un particulier où il courrait
des ris(pu^s. Desboulin feignit de se rendre à ces raisons, mais il se déclara
conlrainl en loule hounèlelé, de renoncer à la gravure, en dépit de la situation
()récaire de ses linances. 11 élail louchanl.
— Qu'à cela ne liemu'. concéda le Direcleur, avez-\()us wnv aulre (eu\re
à me proposer '.'
— Cerlaint'menl, mon cnjanl !
Desboulin a|)pi'lail tout k' monde : mou enfaid. 11 imilail Louis WIIl
([ui, lui pourlanl, ne doimait ce lilre familier qu'au duc Decazes.
— Qu'esl-ce ?
— Mon portrait ! .le sais cpu' le Luxend)ourg n'esl pas les UlYizzi ; il
n'achète pas les pori rails des j)einlres par eux-mèmi's, mais vous l'accfuerrez
comme le porlrail de... ma pipe !
Le DirecU'ur souril, ne dit pas non, et chargea un inspecleur des Heaux-
Ai'ls de \()ir le chef-d'd'uvre. Le rap|)orl ayanl été favorable, l'achat eut lieu
cl Desboulin s'en vint remercier rb'.xcellence. .\u coui's de la visite, il avança,
eu cligna ni (k- l'œil :
Vous savez, mon enfant ! pour le même prix, ]v |)ourrai nous fournir
le peudanl : le |)orlrait de M"'*^ Desboutin !
Mais cette fois, le Direcleur n'eut [)lus le sourire.
La vérité, —telle du moins ({u'elle ressorl du dossier conser\é aux Heau.x-
Arls, — est un i)eu dilferenle. Desboulin n'y ai)paraît pas sous cet aspect
Lruculeul, nuus les dossiers olliciels ue conlienneut pas la phonoi/raphie des
conversations. Desboulin y a meilleure grâce, je vi'ux dire meilleures manières.
Il avait d'abord demandé à reproduire L'Entrée des Croisés à Constanlinople,
puis ai)prenant que Bracquemond avait fait la même demande eu 1879 (on
était alors en 1890), il s'était spontanément elTacé devant son confrère, et
avait sollicité le remplacement de cette œuvre par celle que le Musée de Rouen
])ossède du même peintre : La Justice de Trajan. Plus tard, ■ — ici, peut-être,
la légende côtoie la vérité, — il demanda une seconde réversibilité, cette fois,
452
Comte LEPIC.
( y Etat )
non plus sur uiir œuvre de reproduction, mais sur une œuvre originale :
Portrait dWrtistc. L'autorisation lui fut accordée le 2".) juillet 1.S93, sous la
condition habituelle qu'il donnerait le dessin original en même temps qu<- la
planche (Ij. Armand Silvestre, alors inspecteur des Heaux-Arts, avait écrit
une fort belle lettre à son directeur et ami, Henry lioujon, afin de le décider
à faire celte commande (n'oul)lions i)as que l'on était à cette épof[ue, dans
tout le feu de la lutte entre les reproducteurs et les originaux). Cette lettre
honore autant celui qui l'a écrite que celui qui la motiva et que le haut desti-
nataire, jugé, à bon droit, capable du beau geste qu'on lui demandait. Voici
les passages essentiels de cette lettre inédite :
' 5 juillet 18H3.
... « Desboutin avait d'abord pensé à faire revivre, dans une conqiosition
à la fois moderne et légèrement allégorique, les images des principaux roman-
ciers de ce temps, ce qui donnait à un cuivre, probablement destiné à la
célébrité, une valeur documentaire.
X Mais jnon illustre ami qui a, par l'indépendance aussi, les allures d'un
maître, a fait le rêve de s'immortaliser lui-même, et comme projet de ce qui
lui est commandé |)ar l'Ltat, il m'a montré un jxtrtrail de lui, un portrait
nouveau, plus merveilleusement intéressant encore cpie ceux i[ue l'on connaît
déjà... Ce sera la plus grande pointe-sèche qui ait jamais été entreprise, une
œuvre qui, réussie, donnerait à l'art français un équivalent des plus belles
de Hem])randt.
X Ce n'est pas seulement un portrait, mais un vrai tableau. ])ar l'arrange-
ment des mains, très ingénieusement occui)ées, par l'intérêt tlu fond, repré-
sentant l'atelier de l'artistt'. Quehfue chose comnu' le Bon fiork, qui n'est
pas seulement un portrait, non plus.
" ... .Je suis convaincu (pu-, comme moi. nous serez ému de ce seîitiment
uobk' et naît d'un vrai maître, qui voudrait laisser de ses propres trail^ une
image consacrée, déliant le lemiis, le vengeant dans l'avenir des indilïérences
du présent.
«Pour qui connaît l'ab.sence complète de vanité de ce graïui artiste, chez
cpii le caractère égale le talent, il y a, je vous assure, une certitude de bien faire,
une ambition de se surpasser soi-même, qui sont connue un cri de la conscience,
et qui méritent d'être pris eu sympathique considération.
(1) Le desshi a été attribué au LuxiMiibouri: le (î novembre l.syâ.
. Vous me pardonnerez. Monsieur le DirecU'ur, d'adresser ces lignes à
l'ami bien plus qu'à mon su|)érieur hiéraielii([ue el d'y mettre un peu de ce
([ui' je sens d'admiration |)our un homme dont je suis les travaux, dont je
|)énètre les hautes tendances artisli([ues (U'puis vingt ans, envers ([ui le respect
m'interdit tout sentiment de camaraderie, dont je ne |)ark' jamais ({u'en fai-
sant acte de foi. Je vous assure que ce sera une gloire pour vous ((ue de l'avoir
mis sous toutes les formes, à sa Nraie place, celle du maître de (^e tem])s. »
Ouehpies mois après, la conunande ayant été faite, Armand Sihestre
axait à juger le tlessiu. Il le taisait, comme bien Ton |)ense, vn lernu's élo-
gieux :
(1 (a' dessin, (jui est à l'échelle définitive, est le j)ortrait de M. Desboutin
lui-juème et dilTère absolument, par la grandeur et par la pose de ceux (jui
ont beaucoup contribué à sa renommée, à l'étranger surtout, où il est consi-
déré comme un di- nos maîtres. La gravure sera, ])ar ses dimensions, un échan-
tillon uni(iue du procédé dans lequel il est demeuré sans rival, celui de l'inter-
|)rétation directe à la pointe, maniée comme le crayon. Le sujet a été conçu
(le façon à mettri' une très vi\e pointe de lumière, - le feu d'une pi|)e s'allu-
mant, - - au centre même, et si I\L Desboutin est, comme tout le fait supposer,
en pleine ])()ssession de ses moyens ordinaires, il donnera là, par les opposi-
tions de lumière et d'ombre, un effet à la Rembrandt, dont la tradition n'appar-
tient actuellement ([u'à lui.
" Tout fait donc prévoir une œuvi'e absolument intéressante et il y aura
lieu de s'apjjlaudir d'avoir laissé maître et inspirateur du sujet qu'il avait à
graver, un artiste d'une originalité aussi j)uissanle el (fui est, en même temps
(jue graveur, un peintre de mérite... (1)
Si k' talent ser\ait l'artiste, l'homme était desservi, auprès du monde
olliciel, [)ar ses apparences. Sa bohème invétérée retarda de plusieurs années
sa décoration, (larnot, qui abhorrait le manque de tenue, faisait à toutes les
|)ropositions une opposition irréductible. Puvis jiourtant, correct el tlistant
comme le Président lui-même, axait beau plaider pour son ami. assisté de
(1) A la fin de son r;i])|)oii. A. Silvcslri- inciUioniu'. parmi los travaux |)ii'j)aiatoircs de
ce portrait, « une peinture à riuiile, dans les nuMnes dimensions, étude très inti^re'jsante et
très poussée. » Le titre de la gravure e^t Fumeur allumant sa pip''.
Xous devons la conununieation de ces documents à MM. Sé.auin et .MouUé, celui-ci
ayant succédé au ])remie.' dans les fonctions de chef du bureau des Beaux-Arts à
l'Administration de la rue de Valois, el nous les remercions tous deux de leur obligeance.
154
\ \ K
Armand Silveslre ( Pointe- sèche I
membres du Comité de la Société Nationale, parmi lesquels M. Jean Béraud
chaudement insistant, il n'obtenait du Président, dont Caran d'Ache a immor-
talisé la raideur, que cette protestation :
— Il est trop sale 1
Desboutin reconnaissait d'ailleurs la justesse de cette critique, qui n'avait
point empêché Villemain d'être ministre. — autres temps, autres mœurs I —
et il confessait à son confrère Hector Leroux, dans l'atelier d'Her^ner :
— « Trois choses me ferment les portes de la Légion d'honneur : ma pipe,
ma redingote et mon indépendance I »
Dans le même ordre d'idées, il disait à Jules Claretie, qu'il voyait enle-
ver des taches de bougie sur une cheminée.
— Vous suj)primez les taches? Moi, je les collectionne !
Le grand jour arriva néanmoins, puisque tout arrive, — à ce que j)réten-
dent les optimistes. Desboutin fut décoré, sous le ministère Lockroy, en 1895.
L'événement fit sensation. On aimait le « père Desboutin », dont le vêtement
pouvait être négligé, mais dont la vie était propre, et le talent avéré. Puis
cet événement survenait à une époque où il y avait des revues de jeunes
({ui, à l'occasion, se donnaient l'originalité de fêter le vieux. La Plume avait
l'entreprise de ces solennités. P^Ue célébra tour-à-tour Verlaine, Rodin, Puvis
de Chavannes, Octave JMirbeau, Paul Adam, etc. Pour ceux qui sont encore
en marche, les « vieux » sont ceux qui sont arrivés.
Desboutin éprouva une grande joie. Le 8 juin 1895, deux cents convives
se groupèrent autour de lui et de Puvis de Chavannes, qui avait accepté la
présidence du banquet. Le peintre de Ludus pro patria parla avec chaleur
de son vieil ami, « ligure légendaire », « âme que rien n'a jamais souillée », et
termina son toast profondément afl'ectueux par ces mots : « Mon cher Desboutin
je vous embrasse, je suis fier de vous embrasser ! » Après quoi, Armand Sil-
vestre lut ce beau sonnet :
Marcellin Desboutin, peintre, graveur, poète,
Grand artiste en trois. arts qu'on aurait cru rivaux,
l.e temps sera fidèle à te« nobles travaux
Et (l'un triple laurier couronnera ta tête.
Le public aujourd'hui, tout entier te fait fête.
Mais dans leurs cœurs jaloux et leurs saines cerveaux
Tes amis seulement savent ce que tu vaux,
Doux philosophe ïi l'ï^me orgueilleuse et discrète.
156
:y. ^^^:^
im^^
FUMEUR A LA FOURRURE
Ilninnie de vertu rare et d'espril |)réciciix.
Ou ne t'admire bien qu'en te connaissant mieux
Florentin de l'aris. quan.l Paris est Athènes,
Fils d'Iiomcre, conteur au lanfja^^c doré,
Dont le lont; souvenir, h l'art seul consacre-.
Rejoint les temps nouveaux ef les >»loires lointaines !
Puis, ce fuR'iil J. de Marthold cl P.aniil Gineslc f|iii lurent, le premier
une ballade, le second un sonnet, et Desboulin (lui répondit à tous ces com-
pliments en prose et en vers, par une allocution, oii il reporta sur l'ensemble
des artistes, dont il n'était que le doyen, l'bonneur qui lui était fait. Il but
« aux disparus : à Edouard INIanet, dans la peinture, à Cliabrier, dans la nin-
siqiie, à Villiers et à Duranty, dans la littérature. » Il n'oubliait |)as, on le
voit, ses amis du Café Guerbois et de La Nouvelle Athènes ; il n'en avait
oublié que les importuns, et remerciait Armand Silveslre fi'avoir conservé
le souvenir des autres dans ses écrits. (1)
L'artiste est, à cette beure, presque heureux. 11 jouit de sa notoriété,
de son talent reconnu, d'une existence plus facile. Ses fds ont débuté dans la
carrière paternelle, — qu'ils devaient plus tard abandonner, peut-être pour
y revenir un jour, — et ils ont eu des succès qui ont gonflé d'un légitim»-
orgueil son cœur de père. Une seule ombre, — mais est-ce bien une oml)re?
il se brouille avec Degas. Voici comment les choses se i)assèrent :
Degas plaisantait son ami sur son ruban rouge, tout éclatant i-ncore
de fraîcheur. Déjà, il avait dit : « Desboutin décoré ? Ça lui fera une tache
de plus ! » (2) Cette fois, il voulait, selon son habituelle tournure d'esprit,
ridiculiser l'emblème et amoindrir la joie. Travers agaçant, irritant, ([uoitpie
excusable chez un maître, qui avait vu toutes les médiocrités de son tenq)s
recevoir cette distinction, que Iroj) lard on lui avait offerte et ((u'il avait
refusée, en disant : "■ Je n'ai d'ordre à recevoir de jiersonne ! » Desboutin y
discernait le désir d'être lilessant ; il écoutait cette parole dont il aurait accepté
l'amertume, mais dont il ne pouvait tolérer le mépris ; sa colère grandissait
et soudain :
— Degas !... Vous voulez liafouer ma décoration'?.. .Te ne le soufTrirai
pas. Tenez-vous le pour dit !
(1) La Plume, dans son numéro du 15 juin 189.'., a donné le compte rendu du bancjuet.
avec les discours, les poèmes, une lettre de J. Clarctie et les noms des principaux con\nvcs.
(2) On prête aussi le mot au peintre Emile de Spetch et nu poète C.ustave Mnthieu.
En même temps, il se dressait et sa haiile taille dominait De^t^as. Celui-ci
battit en retraite.
— C'est qu'il avait l'air de vouloir coitner ! disait-il (|uel(|iu\s jours
|)lus tard, eu raeoutaul l'incideiil. l-'.t il est encore solide, le uiàliu ! »
Les deux hommes ne se rexirenl plus.
î.c !)■■ Albcrl lîobin (Peinlun: 7<?r,<?;
Coll. .!. Deshoutiii
l=),S
XXII
RETOUR A NICE - LES DERNIERS MOMENTS
En 1896, il roiitiiiiiail sur Nice \v xoya^'i' nilrcpiis sept ans aiiparavanl.
Sa propriété avait été vendue (1<S91). cl il avait loué une autre villa, la villa
.Mossa, route du Var, près du pont Ma^nan. Il y retrouvait son mobilier. (|ui
avait été expédié de (renéve. lorscpie lui-niènu- en était |)arli. Mais dans
quel état ! Il donnait à une amie (1) dinténssanls détails sur sa réinslalla-
tion au pays du soleil.
«... lùi fait de grève, je viens d'en tiler une toriiiidahlr 1 Pour la prcmii-rc
fois, en 2() ou .30 ans, je suis resté im|)roduetif, ou prcstjue. deiuiis mon départ,
ou plutôt mon arrivée dans cet azur soporiforme ! D'ailleurs, je ne sais trop
où j'aurais pu exercer mes petits talents de jirestidigitateur artisticjue. I-jitre
la formidable dégringolade des innombrables épaves de notre [pauvre mobi-
lier et de tout mon matériel d'atelier, dislocjué et <iétra(iué par l'incurir
d'un dépositaire infidèle, et l'encombrement de l'arrivée de .■)•) rolis portés
de la rue Bréda à la villa, je ne savais où nu- réfugier, refoulé de eluimbre
en eliambre dans (fuehiue coin on j'avais à |)eiiu' la place d'un li\i-e et de
ma pipe !
« Enfin, par des prodiges d'ingéniosité et de \rais tours de force, mon
jeune atbléte Cecchino a fini ])ar dresser tous les tableaux ou éludes les plus
importants, le long des murs de mon atelier (([u'il a\ail coinini-ncé par re-
peindre à lui tout seul). Il a réussi à en faire un i>nii rmisi-c. an milieu du(|ue!
je me prélasse dans la gloire de nmn ])assé artisti(iue i-t me simule, par antici-
pation, les honneurs d'uni' petite galerie La ("aze. dans un petit Louvri-, qui
serait situé entre les contreforts des Alpes-Maritimes et les Itord^ de In Médi-
terranée.
» ... .l'ai vraimenl tout ce (pi'un ;irtiste puisse le plus e\cepliomiellenn-nl
rêver comme installation. Modeste, si vous la comparez à certains palais r|c
(1) M"° Solange .Massicot ([iii a liien viulii nous ooininimifiuer les k-llrcs que lui écrivit
Desboutin.
I.V.»
certains princes de l'art, dans les quartiers princiers de Villiers-Monceau,
mais enchâssé dans une nature et éclairé par un soleil que toutes les merveilles
de l'industrie parisienne ne pourront jamais produire ! Tel que c'est, il y en
aurait au l)as mol pour (•in([ ou six mille de loyer, à la (iislauce du c(LHir de
Paris où nous sommes du cœur de Nice. »
Dans ce petit Louvre, il ne tarde pas à se remettre au travail, avec une ar-
deur rajeunie. Plus une heure de repos ! Comme il arrive aux graveurs vieillis-
sant, la peinture le requiert pres([ue tout entier. 11 faut, pour la gravure, des
yeux qui ne se fatiguent pas et tous les graveurs, à un certain âge, supi)ortent
mal la tension visuelle qu'exige le maniement du burin ou delà pointe et le
reflet douloureux du cuivre étincelaut. Pourtant, Deshoutiu n'abandonne pas
sa gravure. Il incise encore quelques portraits : le Docteur B.. (aréty) 1899,
le sien, par habitude ; il interprète quelques autres de ses tableaux, comme
La Marguerite (1(S08) (1), car composition ou ])ortraits ne sont plus gravés
directement d'après nature. Mais c'est la peinture qui le passionne. « Il passe
sa vie dans sa boîte à couleurs ! » raille affectueusement Chiquine. F.t. du
matin au soir, le vieil homme s'acharne à peindre, découvrant chaque
semaine quelque <( manière définitive », heureux de se sentir encore si ]dein
de verdeur et les oreilles fermées au bruit désobligeant de
La mort dniis l'escalier, (]ui ninnte :'i pas pesants.
Il ne regrette nullement Paris. Il s'applaudit au contraire, de s'être « thé
de la fange morale et matérielle dans lacpielle on \a jxatauger de plus en plus,
par relâchement de la voirie et de la morale. « Paris, ])ourtant, lui est utile.
Xice ne lui a pas procuré « grande clientèle », car il n'est plus « dans l'âge et dans
l'entrain des fréquentations mondaines» — comme s'il avait jamais connu cet
âge-là ! — et il vit « dans une sorte de retraite laborieuse, tout entier à l'art,
sans distraction du moins, s'il est sans grand profit.» (A la même, 10 janvier
1898, 7 janvier 1899.)
Au fond cela lui demeurait pénible de penser (pi'il ne \errait pas couronner
sa carrière, par une de ces fortunes -qu'étalent si orgueilleusement les « princes
de Villiers-Monceau ! "Vanité, non ! mais conscience de sa valeur, de l'équité du
sort qui le ferait riche, ressouvenir, jamais aboli, de l'aisance de sa jeunesse !
Et voilà, qu'il crut, un jour, son tour de chance venu.
(l) Il la grava deux fois.
160
I 1^
I
Vidlle femme cous^ml fiJessin à la p/um.-)
Il passait dans la rue. l'iic voilure s'arrête, (ii monsieur fort élégant
vu descend et l'aborde :
N'êtes-vous pas M. .Mareeiliu Deshoulin ?
- Lui-même.
iMichanté, cher maître ! Je suis aiualeur de peinture, de bonne [)einture
.le veux acheter de la vôtre. Voulez-vous que nous allions ensemble à votre
atelier ?
Le vieil artiste est émerveillé : il monte dans la voituri' de celui (ju'ij
nonune déjà in petto son .Mécène cl qui a\ait décliné son nom et sa (jualité :
X. I). (i., l)anquier à Amiens. (1)
Lelui-ci pénétre dans râtelier, \a des murs aux chexalets, a|)précie, choisit,
Xul besoin de l'exciter. 11 aiiue tout, il s'extasie sur tout, il achète presque tout.
Le Marcliand d'Oii/noiis le ravit. Ce sera la ])erle de sa tfalerie. Quand il se retire,
il a ac{[uis ()our cpiinze mille francs de peinlui'es, (pi'il \a solder à bref délai et
(pie rartisl(> lui exj)édiera aussitôt.
Quinze mille !.. Desboutin lâche la bride à son imagination, comme Per-
rette. Il n'a pas fini de brodei'. que survient un second monsieur, aussi correct
(pie le premiei-, ([ui se présenle. lui aussi: tuleur du bancfuier ! L'achat n'était
|)as valable. Mécène était intei'dit, mais pas ])lus certainemenl que le ven-
deur à ce moment-là.
Si la décoiuenue fut vive, elle dura |)eu. La même année, il vendait, pour
(pialrc mille francs, son Marchand d'Oignons delà Riviera h \a\i\lc de Pixvh (2)
(lettre du .'U juillet 1898, à Mme Simonnet d'Ilennezcl), et ce fut un excellent
lopi(pu'. Il était d'ailleurs, de ceux à (uii l'espérance tend toujours un rameau
\'erdoyant. l'no (wulso, non dcjicii altcr, dil un vieil adage, souvent reproduit
sur les médailles et les jetons ; u une de i)erdue, dix de retrouvées, » traduit
librement un proverbe français. Il écrivait le 7 janvier LS99. à W^^ Massicot :-
" IhHUH'usement, ipielques affaires avec Paris me maintiennent à flot, nmi
et ma petite famille et. en ce luomenl encore, j"es|)ére réaliser la grosse affaire
(1) Le même banquier avait acheté, à beaux (ienieis coiiii)laiUs, cette fois, toute la
l'Outi(]ue du « père Bonne ».
Le père Bonne était un original de Montniart'-e, précurseur, si l'on veut et à sa façon,
lies siraiids spéculateurs de l'art. Pour des prix variant de cinq à dix francs, il achetait aux
artistes en mal d"impécimiosité leurs tableaux, et l'on cite un peintre, devenu assez notoire,
(lui, aux heures sombres, sautait dans une voiture et durant le trajet qui séparait son domicile
de la boutique, brossait une toile, dont il recevait le jirix au débarcpié. Bonne achetait aussi
au « marché aux puces » les chefs-d'œuvre inconnus qu'il y rencontrait, mais ne les payait
pas, ceux-lù, plus de 0 fr. 50 à 1 franc.
(2) .\ctuellement à la mairie du xviii« arrondissement.
162
DEGAS LISANT (1873)
d'un portrait ((lu- j'ai expose en 05 du cher et pauvre vieil ami Puvis de Clia-
vannes, la seule effigie d'après nature ([ui reste de ce grand homme » (1). .le
poursuis en même temps la eommande d'un grand travail de graxiin- pour
l'Hôtel de Ville, pour lecfuel je suis aj»puyé par de bons amis, restés e«)nseillers
municipaux .
Tel était le lameaii ! Il n'en [uil lieii saisir. Xi sente ni commande. \nx
gravures d'un maître. l'Hôtel de Ville préféra des photographies ! Par contre,
la maladie ! Sa santé commençait à fléchir. La dernière cpiin/aine de 189S
avait été marquée par une rei)rise de bronchite eatarrhale (pii lavail beaucoup
tourmenté, puis, la prostate s'était enflammée et l'avail cloué sur un lit fl'hôtel.
à Paris, où il était revenu pour affaires. Il le (piitle cet affreux Paris, dont la
carapace de brumes et de glaces ne laisse filtrer aucun rayon de soleil "(2). le
20 novembre el rentre à Xice où il semble bien (pTil sente ap|)r()clier l'échéance
fatale. Il revit ses jours d'enfance, ce C.érilly ou il n'est |dns retourné depuis
1848, il l'évoque dans une lettre du 8 jauN ier 11>()(), a .M"" .Massicot, sa compa-
triote :
'» X'olri' chère Ici tri' i.\{\ jour de l'an t'st le seul el dernier sniirenir cpu luo
vienne de mon pays de naissance el d'autant plus cliei' et charmant |iour moi.
qu'il porte le doux nom de Soldiifjc, le plus musjcalemeul si u'imental (lui ail
charmé nu's oreilles d'eufaid, et réveillé a lui sru\ lous les échos du pays si
lointain et de mon |)assè presque séculaire.
Les souffrances ne lui font pas ITudier le lra\ail. son besoin et sa joie. coiUiue
il est \v besoin et la joie de Ions ceux (pu ont (pu'Upu' chose là. Il (eu\re. dèclarc-
t-il. " coiume un vieil i'iiii)loyé. ■' Il projette aussi un ullime voyage afin de
visiter la «fatidi(pu' Lx|)osition, di' se mêler nue dernière fois a la vi»- parisienne,
surtout montmartroise, et de se ndreniper dans le sein vivifiant de (jueUpies
amis, dont je puis conqiter le nombri' lout au plus p;ir celui des doigts de la
main (pii nous écrit. (Même lettre).
La maladie retarde encore l'exècutiou de ce piojel. b.n mai. il est obligé
d'aller consulter un oculiste a Monaco, à cause de son d'il droit atteint de
conjonctivite el dont la \isiou (ie\ ieiil de plus eu |i|us trouble et pénible. ■
(1) Acquis, après la iiu»r! (k- Dt-sljoulin, par le Mum'i' <l'.\miiiis. Ce n'est pas la seule
effiaic de Puvis. Tl v a aussi 'c portrait de [{ounal, el le buste de Hoilin. Desboutin décrivait
ainsi le portrait deBounal : Il l'a représenté cravaté, rolleté et en liihit lie ville, connue
un député à la tribune de la Chambre, — illusion coini)létée par un verre d'eau qui (i;:urait
sur la table contre laquelle il s'appuyait, comme à la barre d'uiu' tribune. Lettre ;"! M"" Si-
monnet d'Hennezel, 22 novembre 1898.
(2) Lettre du 20 novembre 1899, ;"i M"'^' Solau^^e M^ssicot.
163
TvC praticien le reconnaît atteint de cataracte, a de telle façon qu'après deux
on trois ans au plus, une opération deviendra nécessaire « (1).
(',e n'est que le 29 août qu'il demande à son ami M. Crépin-Lehlond,
(iirecleur du Courrier du Centre, à Moulins, pour lequel il vient de graver le
Maréchal de Villars. d'ai)rès Hyacinthe Rigaud, « le permis qu'il lui a promis »,
mais le i)ermis reçu, nouvel obstacle : sa fille Marie, fort éprouvée par des cha-
grins de famille et le décès de suu mari, meurt subitement, à Rad-Nauheim ;
(septembre). Chiquine qui revenait de Paris, après y avoir peint La Rue des
\afions, dont son père faisait grand cas, repart le même jour pour Florence, où
avaient lieu les obsèques. Le vieil homme est ému de cette fin inattendue,
[lourlanl prc^ssentie. dans C(>lte ville d'eau lointaine de la menteuse Allemagne.
Mais il est non moins tourmenté ])ar la pers|iective de son déménagement, car
le bail de la villa Mossa est ex|)iré et il a loué, au centre de la ville. « un bel
appaiiemenl, avec terrasse d'où l'on voit la mer, i"ue Saint-François-de-Paule.»
(',lii([uiiu' sera-t-il de retour à temps ?
Oui, et cela le soulage d'une inquiétude. Mais novembre est arrivé. L'Expo-
sition est prolongée. Il vient passer quinze jours à Paris, chez son fils, Mycho,
et son cerveau (\sl k pneumatisé par ces quinze journées de brumes, de pluie et
de froide bise, coupées par deux seules matinées de pâle soleil « (2). Cette cigale
n'aura décidément jamais aimé que le sanctus deus sol, comme le qualifie une
médaille du temps d'Héliogabale, le saint dieu Soleil ! Et cette dépression men-
tale s'aggrave d'une dépression physique : une nouvelle et violente crise de
proslatite, à laquelle l'a laissé arriver « l'ignorance et l'incurie des médecins de
Nice ». Il SI' met entre les mains du D'' Albarran, dont il avait gravé le portrait
cin(i ans auparavant. L'illustre chirurgien « ne lui laisse aucun répit », qu'il
n'ait quitté Paris, « dont le climat est délétère», et il regagne Nice, ayant
adjoint à sa maladie une rechute de bronchite.
Il se rétablit, tant bien (\uv mal, et, la crise passée, il écrit, infatigable :
<' Enfin ! Tant que l'état de ma \'ue et de ma main me j)ermettront de
tenir et de conduire encore mes cliers pinceaux et mon burin, je serai mal
venu de me plaindre, à un âge où les rares survivants, sont en j)resque majori-
té réduits à la vie oisivi- et routenip.làtive... » (A Crépin-Leblond 1900). Et il
accepte la commande de quatre grands portraits en pied, le père, la mère et
deux fils, qu'il parvient à exécuter au prix de véritables tortures, mais qui lui
(1) Lettre h M. Crépin-Lel)lond, 2ô mai 1900.
(2) A M. Crt^pin-Lebload, 20 novembre 1900.
164
sont payés iuiil mille Iraiics. 11 coiit'esst.' iicaiiiiKjiiis ([uc ■( leur i-xéculion se res-
sent de son état, au moins pour la lenteur et aussi poiu" l'énergie de la facture. "
(A iM°ie Simonnet d'Hcnnezel, 26 mars 1901).
C'en est fini, cette fois, des voyages «au long cours m; adieu Dijon, adieu
Cérilly ! Une visite à son bourg
natal le tentait, depuis qu'il en
avait évoqué l'image dans la lettre
plus haut citée ; en outre, le
Bourbonnais revendiquait son glo-
rieux fils et il savait que dans ce
pèlerinage il serait fêté, u Par
avance, il s'en réjouissait, décri-
vait à Chicpiine telle \allée om-
breuse où s'égarèrent ses pas
d'enfant, tel ruisseau où il avait
jadis péché à la ligne, et la loui-
carrée de l'église d'Yzeure, l'I le
quartier de cavalerie au([uel con-
duisent les treize arches jadis
fameuses du pont de Régemf)rtes...
Hoc erat in votis ! » (1) Il ne reverra
rien de tout cela, non plus que le
château transformé et méconnais-
sable de Petit-Bois, non plus
qu'lssoire et sa place rectangulaire
au rude pavé, restée pareille à
elle-même, non plus ([ue l'Ombrel-
lino fabuleux, auquel il songe tou-
jours.
11 s'appuie sur ses deux fils,
Myciio et Chiquine, et toutes ses
lettres témoignent de sa grande
tendresse pour eux, ainsi que pour sa fille .Jeanne, et de leur réelle piété filiale.
Enfin, un autre voyage se prépare où les souvenirs n'ont plus de rôle : Mar-
cellin Desboutin succombe le 18 févTier 1902, « à six heures et demie du
L'honiine à l'épée (l'cinlurc. Jinj
Coll. Duraiul-Ruel
(1) Crépin-Leblond, loc. cit., p. 130.
165
soir, après iiiic xcrilabU' agonir (rnii mois et une résistance dr son \ igourcnx
organisme dont les médecins elaienî surpris. (1)
Nice, (pii i"a\ail adopté et (pii était fiére *\v Ini. entoura de pompe son
cercueil. Sur la place Masséua. il y eut ■ une halte diipothéose . el des discours
pleins (K- l'hunme et de cœur
furent prononcés (2). Le
8 mars suivant, u«e expo-
sition posthume s'ouvrait
à l\4/7/.s7/7//r, avt'c ((uatre-
\ingl-(ii\-huit ])eintures et
ciucpianle t>ra\in"i's. Le ca-
talogue, reproduisait les
appréciât ions élogieuses des
principaux journaux pari-
siens et la pi'éface (i"l'"mile
Zola.
Les journaux el revues
de Paris, k's principales
feuilles des départements,
celles de lU'lgique, di'
Suisse ('[ d'Italie, consa-
crèrent des articles nécro-
logiques au maître disparu.
Si cette mort n'avait pas
( oïncidé a\-ec les fêtes don-
nées en riiouneur du cen-
tenaire de Victor Hugo, nul
doute c[ue les articles n'eus-
sent été encore plus nom-
breux et plus importants.
Son portrait fut toutefois
l.e n.aiel.aua .loinnons de la \Uy\,y^( Prinlnrr. I.^US) .^.. ^,,^^^^ ^^^.^^^^^^ ,^,.^^^
Maine (!u XVIlIe Arr', Pans ' ■
(1) l.cUn- (le ('.lii(|uine à M-'"^- Sinioimel (rilemiei'.el. du !•' lévrier 1902. Deblioutiii
suceomba à une crise de i)rostaLile el à un œdème pulmonaire. 11 mourut dans son nouveau
domicile de la rue Saint-Frauçois-de-Paule.
(2) Notamment par M. Sauvau, maire de Niée.
!66
FUMEUR ALLUMANT SA PIPE
cliques (1) et lorsque h' hruil i)arul s'apaisiT. il repril de plus hell.- :i\.c
la magistrale étude de (icorges Lafeneslic el la suiierhe .-xposilioii a
l'Ecole des Beaux-Arts du 11 au ."il décembre r.)0'_!. l-:ik- coniprenail. cell.-
expositiou, 177 gravures ou étals, ;;i dessius .-t l'.M peiulures ! ('-!)
l'^t depuis. Tassoupissemeul s'est i)roduil. I, 'obscurité |)araît plus |)rofoiide
quaud le boucpiel du feu d'artifice est éleiut. Toute mémoire subit celte
éclipse. Les regrets el les euthousiasmes (pii accompagneiil la mori, comme
jadis les pleureuses, feraieut croire (pu- jamais la cendre de l'oubli ur n-couvrira
le nom : mais elle ne tarde i)as à tomber, cette cendre, d'on ne sait (piel nuage
d'indifférence, d'intérêt ou den\ie, l'I. a[)res le cuips. c'est l'esprit lui-même
([ui semble a|)i)elé à mourir. Dur moment !
I.t- tiiiips (|ui siii- huili' ciiiihif fil \iTse mu- ]>hl^ tidirt'
\a-l-il enfermer le sou\enir, non pas " dans le linceul de pourpre ou dorment
les dieux nu)rts •, mais dans l'incolore tissu ou gil l;i foule, restituée ;i l'ano-
nymat, des insignifiants acteurs de la \ le V
C'est la jjostérité (pii juge ! C'est elle (pii casse ou (pii confirme les arrêts des
contemporains. Mlle ne pèse pas les Ames, comme l;i dixinité ég\ptienne. mais
la valeur.
Xe redoutons jjas son jugi'ment. I-Jle s'est déjà montret' bien\ cillante pour
Desboutin. Ses (inivies n'ont jam;us sul)i la défawur affligeante ipii atteint
la production de tant de » polilicpies v de l'art, dont le savoir-faire supplée le
talent. L'ascendant j)ersonnel deDesboutin a disparu, nuiis il conserve présent
l'ascendant de sa force. Son probe i-t fécond labeur |)arle |)our lui. Il était un
voluptueux (h\ travail. La recherche actuelle dont il i-st rol)jel, linlroduclion
de ses poiutes-séches dans le sévère cabinet d'I^stamiies modernes de la Biblio-
thèque d'Art et d'.\rchéologie, merveilleux outil de travail fondé par M..lac([ues
Doucet. sont la l'écompense de son dédain de l'habileté, de son amour du \ r:M.
(le son mépris pour le cabotinage artisti((ue. autant cpie de son intelligeiu-e,
de sa science, de sa sensibilité.
La |)lace envial)le i[ui leur est faite, sm-tout dans la gravure i-onlempo-
raine où il a son rang imirqué ])armi les portraitistes originaux, cpii ne furent
pas nombreux dans notre pays, l'utre Ciaillard, Bracqueimuid, Legros, cpii
(1) ReiHie Euaiclopédiiiui-, Moiule Jllustrr n\u\ irlclir;iil I)cs|.nii|i:i coninK' liiaviur
sur bois I) Pet't Bleu, de lîiuxclii's. etc.
(,2) 1! fut éfjnlemciit «iiicstioii d'iitit.' expusUioii :i Munich, .^l:li^ clli- iitiU i>;i> liiii.
167
le i)récèdorenl, llclleu, Besnard, qui lui succédèrent, est l'équitable rémuné-
ration de sa loyauté en toutes choses et de son culte exclusif de l'art. L'œuvre
accomplie est souvent un miroir où la netteté de la conscience se reflète. Elle
n'aurait ni celte finesse d'expression, ni celte distinction, ni cette tranquillité,
si l'àme du scripteur était trouble. Desboutin brûla toute sa vie pour ce qui
ennoblit la nature humaine; il a eu la flamme, il est juste qu'il ait le rayon !
Desboutin ii la lourruif {feintiire. I6i>4)
Coll. l.andau
168
XX IV
LE PEINTRE
L'artiste, en Uesboutin, se montre sous trois aspects : le peintre, le gra-
veur, le poète. Xous ne nous occuperons plus de ce dernier. Il tut, t-n quelquf
sorte épisodique et nous lui avons fait sudisanle mesure. Tout homme, a
un moment de sa vie, se trouve à une croisée de chemins. Le fait qu'il s'en-
gage dans l'un pour se raviser ensuite et s'avancer résolumenl dans l'autrr.
ne saurait imposer à l'historien l'obligation de suivre à son tour le premier
et d'y maintenir, au risque de fausser l'impression, l'attention du kcteur.
Que Desboulin ait i)ensé au théâtre après Maurice de Saxe, qu'il ail écrit,
dans cette intention, et son Cardinal Dubois et sa Madame Roland, rien de
plus exact, et rien de plus naturel. Mais nous le voyons vile renoncer à cette
carrière, inabordable pour lui, depuis qu'Amigues n'était plus là pour enfoncer
les portes. C'est à peine, s'il tente, nonchalamment, en 1881). à la faveur
d'une amitié, vieille déjà de vingt ans, de glisser Madame Roland à Claretie,
nommé administrateur de la Comédie française. Ses amis furent plus que lui
déçus de l'insuccès. Il déclarait dans la lettre jointe au manuscrit, « qu'il
était le dernier à y mettre de l'amour-propre > et i[u'il n'attachait dorénavant
à son œuvre « ({u"un intérêt d'argent pour les ])etils siens. / .\e nous montrons
donc pas plus royalistes que le roi et ne revenons pas. (pid ([ue soit k-ur inériti'.
sur des essais qui n'eurent jias de lendemam.
Par contre, l'œuvre du peintre et plus L'iicore l'œuvre tlu graveur, sont
d'une particulière importance. Joignons-y l'œuvre du dessinateur qui ne le
cède point aux deux autres.
.Vu temps de sa jeunesse. Desboulin avait fréquenté chez. ICte.x et chez
Couture. Xous ne savons guère ce qu'il y aNait appris, mais nous savons,
par sa lettre, déjà citée, à Simonnet d'Hennezel, cju'il n'y avait pas a|)pris
grand chose. Il reconnaissait n'avoir point fait, en peinture, des études
classiques analogues à celles (ju'il avait faites en iitleiature et (ju'il • man-
quait des vrais principes d'art (pie .Manel possédait jusqu'à 1 exagération. •
C'est donc que l'enseignement qu'il avait iii n ne hii naraissail pas le vrai.
IG9
qu'on ne lui avail rnsiMifiié (jue dos recel les doiileiises, relies qui faussent la
vision et im-llenl à la main des formules. D'ailleurs les jjrofesseurs ne lui
(lisaient rien de- bon. mais il pensait différemment des maîtres, de eeux
([ui ne [)arleiit plus ([u'a\H'C la persuasion de leurs (ruvres. Ceux-là, il ne
se lassait pas di- les étudier et i)lus encore de les admii'er. ("e n'est ])as
qu'il en eut beaucoup. 11 reposait volontiers sa léte, (pTil faisait si bien,
sur le d(uix id mol ort'illei' de l'insouciance et de l'incuriosité. Du jour où il
avail connu Rembrandt, Hubens, b'rans Mais, c'est-à-dire aux premiers
émois de sa jeunesse vib-rante, son enthousiasme s'était fixé, ('es trois demi-
dieux formaient sa sainte trinilé. l-^l, comme tous les croyants, il ne cherchait
pas à savoir si, sur d'autres autels, il n'y avait pas d'autres divinités. Ainsi,
lorsqu'il s'arrêta à Florence, en 1854, il parcourut d'un i)as rapide les musées et
ne visita (pie ])eu les églises, — ces musées où l'art, mis à sa place, déveloj)pe
toute son expression. Peut-être vit-il les Carminé et l'admirable fresque de
Masaccio, à cpii i)hysi(piement il ressemblait. Mais il fallut, dix ans plus
lard, la venue de Georges Lafenestre, pour qu'il allât voir L'Hisfoire de la
\'ier(ji\ de Domenico (ihirlandajo, et tant de i)ortraits merveilleux, dont la
signora J>enci mène le chd'ur, à Santa Maria Novella. Naturellement, il s'en-
flamma, car il n'était pas une àme sèche, et il semble que ce soit sous l'influence
du maître florentin (|u'il ail exécuté le i)()rtrait de son cicérone, — dont l'éru-
dition rélonnail (1).
11 admirait aussi le C.aravage et les Bolonais, pour leur réalisme, ainsi
(pie les {)orlrailisles anglais du xviiie siècle, parce qu'ils étaient de la
filiation de Rubens. Kn b>ance, pour la même cause, Watteau, puis Fragonard
(pi'il rattachait à (iainsborougli. Parmi ses contemporains, il dislinguail
Ricard, Degas, Manet et Puvis de Chavannes.
On retrouve ces diverses influences dans l'œuvre de Desboutin. L'îlumme
à la Pipe se ressent de Ricard : c'est la jnéme distribution lumineuse ; Degas
lisant se rattache sans difficulté à Manel ; Le Rémouleur descend en droite
ligne du Roman (V Amour de la Jeunesse ; L'Homme à VEpéc, c'est F'rans
Hais ; \ingt })ortraits de lui, c'est Rembrandt ; telle esquisse maîtresse,
de Mijiho enfanl, où les Nermillons s'exaltent, c'est Rubens; le jeune garçon
tenu sur le bras di-oit de sa mère, dans Une bonne bêle, c'est Revnolds.
(1) Lafenestre est représenté de faee, la tèle inclinée sur l'éjjaule droite et surmontée
d'une masse de cheveux cliûtains. Il est vêtu d'un veston «^ris. sur lecjuel se détache une
cravate i\ petits carreaux noirs et blancs, du ])Uis heureux effet. Ce portrait est typique,
chaud et harmonieux. (Heproduil page 5<S
170
a liiinno bêle (Peinture. I^S'J)
Petit Pillais
171
C'est tout cela, mais c'est avant tout ])esl)oulin. Le pi'inlre avait trop
de personnalité ))our ne pas déborder ses modèles. Puisque tout homme
procède de quelqu'un, il était utile d'indiciucr de (pii procédait le maître
bourbonnais, quels avaient été les « pères de sa pensée y, i)our enijjloyer le mot
d'Alfred de Vigny. Mais cela dit, il faut bien se convaincre que Desboutin
est avant tout lui-même, et que si parfois la lanq)c qui l'éclairc est tenue
par Rembrandt, l^icard ou Manet, cela ne l'empcche pas de faire^ son œuvre
[)ersonnelle, a\ec son inspiration proiire, sa vision bien à lui et son réalisme
en quelque sorte congénital. Ce seul caractère, (jui le rapproclie de Frans
Hais, suffit à le différencier de tous les autres.
Parlant du peintre, un critique a \ni écrire, avec heaucou]) de justesse,
à notre avis, qu « il était un petit maître. » (1) Grand éloge, dont Desboutin
lui-même eût été lier ! Un petit maître, peut s'entendre, d'une personnalité à
qui la variété a fait défaut. Tel est le cas de Desboutin, peintre presque exclusif
de portraits. Un petit maître est également un bon peintre, mais dont l'œuvre,
a sa place dans l'histoire de l'art plus que dans son évolution. Pratiquer
un art avec honneur et le faire évoluer sont deux choses. David, Gros, Dela-
croix, Corot, Ingres, Courbet, Millet, Manet, Puvis de Chavannes, Claude
Monet, Cézanne, Toulouse-Lautrec ont créé des courants que leurs confrères,
moins originaux, ont suivis, parfois avec le plus grand talent. Eux seuls sont
les maîtres, au véritable sens du mot. Ils sont les pater d'un chapelet dont les
autres sont les aue. C'est encore une élite qui compose ces ave.
Pourtant la réputation de Desboutin peintre n'atteint pas à celle de Des-
boutin graveur. Pourquoi? Parce qu'il n'a pas innové en peinture comme en
gravure et parce que le peintre est moins connu.
On ne le jugeait que sur les Salons ; deux toiles chaque année, jusqu'en
1889 1 Encore le jury ne lui permettait-il pas toujours d'exposer ces deux
toiles, ni la meilleure des deux. Quand la Société Nationale fut fondée, il
[)ut montrer plus d'abondance, mais rien ne vaut, pour juger un artiste, une
exposition d'ensemble, où l'on peut suivre ses variations et où, dans l'unité
de sa production, les caractères primordiaux se détachent comme en relief.
On voit tout de suite si l'on a affaire à un coloriste ou à un dessinateur, à
un imaginatif ou à un réaliste, à un sanguin ou à un nerveux, à un intellectuel
ou à un sensitif, à un fougueux ou à un pondéré, à un esprit qui se surveille
ou à une nature qui s'abandonne...
(1) Tristan Leclère, Salons de 1900 à 1904, p. 108.
172
Henri ROUART
(r Etat)
On vit toutccla, àlCxpositinn flo 1880 <•! surtout à l\-x|)osition posthuni''
de 1902. Il apparut que- l'artiste était aussi coloriste .pie dessinateur. [Au^
réaliste qu'Imaginatif, plus sanguin qur ii.-r\(ux. aussi intelN-rtuel qur
sensitif. plus fougueux que calme et malgré cela, doué d'un sens crilirpic
nettement afTirmé.
Comment se fait-il qui', en règle générale, le peintre-graveur soit tantôt
plus peintre (pie graveur vi tantôt plus graveur ({ue peintre? Quelle anti-
nomie existe-t-il donc entre les deux arts, |)our f|u'il soit difTicile à un même
homme d'exeeller a la fois et au même degré dans l'un et dans l'autre ?
S'il est surfout peintre, vous êtes à peu prés certain qu'il aura une tendance
à couvrir sa planche, à multiplier les valeurs, à "en mettre, cà en mettre ",
comme disait lîracquemond, et à poser les tailles à peu près au hasard ; si.
au contraire, il est surtout graveur, vous le verrez peindre dans une gamme
courte, résumer le modelé en quelques accents synthéticpies. colorer avec
une finesse pres([ue timide, (pii semble vouloir retourner au blanc et noir
dont elle sort. Ceci, avec toutes les corrections que comporte rintelligence
de l'artiste, qui connaît son défaut et le corrige, ici par des affirmations de
couleur, là par d'excessives simplifications. Il est évident que Corot est plus
peintre que graveur et .\lphonse I.egros plus graveur que peintre. Carrière,
en peinture, demeure un lithographe. Goya, graveur en ses picmicrs états
est peintre dans les suivants. Manet, qui suit Goya, n'est que peintre. Rembrandt
lui-même, malgré tant d'admirables pages, et notamment les Si/ndics
des Drapiers, où l'on voit ce tapotage de la bourse que tient le person-
nage de droite, fait a\ec le manche du pinceau pour rendre le granité di* la
broderie, qui est d'un métier étonnant. Piembrandt est |)lus gra\'eur que
peintre ! La Ronde de .Vu/7 est certainement d'un peintre, par la tache ((ue
fait la petite fille et son jîoulel, mais comme elle est \ue par un (eil de gra-
veur, où tout se construit par masses de lumière et d'ombre ! .Mais laissons
Rembrandt, qui est un dieu et comme tel écli:ip|ie aux clnssilications. — et
revenons à Desboulin (fu'il inspira souvent.
Desboutin était un graveur ! Il a. en gravure, des audaces, une virtuo-
sité et une couleur, cpii sont d'un maître, — 1 1 non [)lu> d'un petit mnîfre.
Quant au peintre, il s'en fallut peut-être de peu, ipiil ne jtai vînt ;i une égale
rnaîtrise. Si nous faisons ab.straction du sujet. i»our ne considérer que les
pratiques du pinceau, il est certain que Desl>outin était de la grande lignée.
Il a des pochades ex([uises. des frimousses d'enfants enlevées de vi't ve et chaudes
comme des Renoir ou même des Watteau. Il a aussi de la peinture noirâtre,
17:^
moins |)hiisanli' : ('"i-sl colle (|iril lit •") Paris. Son d'il inipn^ssioniialilo, son
tempérament réaliste, ne lui peiincllaii'ut ])as de corriger ce cpTil voyait.
Sons nn ciel oii la Inmiére \il)rail faibleinenl, dans nn alelici- froid, il ))eignait
sans éclat et sans chaleur. Mais
lrans])orlez-le à Nice on à (irasse,
sa ])aletle se réveille, vibre, et
donne toute sa i)uissanee.
11 faut hien distinguer ces deux
influences. A Pans, à (lenève, dans
les climats » de ])roni!lards et de
hi'umes », comme il disait, il n'est
pas, sauf excepliounellemenl, colo-
riste'. 11 aime, à é\()luer dans les
gris on, quand il en sort, à user
de tons ])nissants, voulus, cherchés.
C.c n'est ])as le jaillissement spon-
tané (|ui fait, ])ar exem|)le, d'une
|)ochade de Jordaens une fanfare,
c'est le raisonnement ou le souvenir
cpii guide ou cpii agit. Son fameux
lloiniur à l' hlpve, ins])iré de Frans
liais, est monté de tons, à ]>eu près
dans le genre de la composition
d'Ingres, Françoise de Riniini, qui
ia|)pelle les enluminures. N'exagé-
rons rien toutefois et bornons là le
rapprochement. Il n'est ([u'nn terme
de comi)araison.
■Mais ce qu'avait excellemment
Marcellin Desbonlin, c'était un maniement de la l)rosse d'une vivacité spiri-
tuelle, un modelé vigoureux, nn dessin serré, nerveux et distingué.
Il connaissait son métier à fond', bien ([u'il l'éludiàt toujours. Il le savait
assez i)our i)révoir ce que deviendrait sa ])einture. (juand le temps aurait
passé dessus : « .Te p(>ins quatre ans à l'avance, >* expliquait-il à 1\1. Léonce
P>énédite. dont il venait de faire le j)orlrail,au jour anniversaire des ses dix-
huit ans (1(S77), et (jui s'étonnait du ton plâtreux du tableau. En effet, ce
ton plâtreux a fait |)laci' à un ton doré, et tout s'est enveloppé dans une
M'"' .Jdst'phine ClniboL (J'eiuliirc. isss)
Coll. Durand-Riicl
patine délicate ! C'est un petit portrait eliarniaiil, exériité en une matinée.
Ces hautes qualités, |)r()(lnites par cil .•flort infatigable vers le mieux,
dont témoignent ses lettres, font de ses tableaux des œuvn-s dignes de
recherche. Xous tenons pour des toiles remarquables le portrait de Georges
Lafenestrc (18r>()) ; ce-
lui de Mme Pelletier
(1869), Dailly dans
Mes Boites (187(3),
Mme //.Dumas (1875),
Mlle Rea(l(\Hm), Pou-
ponne (188:^), L'fùi-
funhni papillon (1881),
Xus d' enfants (1882),
Assunta (18().")), La
Man/uerile (188(3), Le
Dr Laugier (18'.H)),
Femme étendue sur un
canapé. Il Musicante,
Mme Cornere<ui ( 1 S7i)),
Le Di- Landau (1893),
tant de portraits de lui-
même, et cent scènes
d'enfants délicieuses,
et, enfin, cet « austère
portrait de femme ".
(Juive à la fourrure)
exposé au Salon de
1883. et ac({uis par
l'l-:tal. C'est de celte
toile que Paul Mantz
disait, dans le Temps
du 27 mai 1883, — appréciation ({u'aimail à rap|ieler Desboutin : Sauf
l'exéculion. ([ui n'est pas celle du xvii'-' siècle, sauf le costume (pii est
d'hier, elle fait songer à ces portraits de religieuses pâles, (pii sous le pin-
ceau de Ph. de Chanq)aigne, sont la traduction vi\ante d'une pensée ou
d'une soulîrance. .M. Di'sboutin est presque seul à chercher ci-tle noie intinu-
et profonde. »
D^ Laiulau (Peinture, IS9-3)
V.nll. I.;ind:ui
1")
* *
Des portraits, des portraits, toujours des portraits ! Oui. ce fut jirosque
là, on peut le dire, comme de vau Dyek, runi([ue i«enre de Desboulin. 11
n'exposa jamais, dans les Salons annuels, {\uv des portraits (1), vl s'il fit
([uclqnes compositions autres et (juckines paysages, cela compte [)cu dans
son (LMure. est noyé sous la vague ])uissanle des portraits.
lue seule exception (\uï mérite d'être signalée : la décoration du salon
de son ami Simonnel d'Ilennezel. à r^Mitaine-lez-Dijon.
A l'entrée même du village, formant coin entre deux rouies, une grande
pro])riété. clôturée de murs, toute ombragée de vieux arbres, d(>scend en ter-
rasses vers la ville. A l'extrémité opposée, s'élève la maison, belle vi vaste
construction moderne, faite pour l'habitation confortable, durant les mois
d'été, particulièrement chauds dans la région dijonnaise.
Dans celte maison, ([ue Desboutin. par application d'une dénomination
italienne, vulgarisée par la suite, mais peu répandue alors, appelait une « villa '\
il y avait un jieau salon carré, dont les panneaux semblaient attendre une
décoration jx'inte. Il la proposa et on Taccepta. Il i)rit ses mesures et, de retour
à Paris, se mit à l'œuvre, avec son ardeur accoutumée.
Le travail était nonvi>au ]K)ur lui. Il le réussit j)arfaitemenl. Il s"y avère
peintre gracieux et adroit. La gamme claire et chantante' de sa palette,
s'harmonist' au mieux avec les panneaux blancs dans lestpiels elle est encas-
trée. Ce sont cinq comjiositions en hauteur, à ])ans coupés et incurvés, un
trumeau au-dessus de la glace de la cheminée, un plafoiui el un colTre à bois.
Le tout, sauf le plafond, est i)eint sur reps, jjour donnei- aux peintures un
« mouvement » de tapisserie. Cette pré(>ccupation iuditjue le ton général de la
décoration. Quant à la composition elle est nettement dans le goût du
xviii^ siècle. C'est, à Ndlonte, le souvenir de Watteau, d'Hubert Robert, de
Boucher et même, huit ans a\ant qu'il ne les connût , des frondaisons à la
Fragonard, — le Fragonard de drasse.
Le sujet est La Coincdie italienne. Si le décor est ins])iré des scènes ga-
lantes du tem])s de « la Parabère el de la Pompadour >, les typt-s viennent
(1) Exception faite pour les salons de 1884 : Chiens à vendre; de 1897, Bannière au
Carnaval de Nice ; de 1898, /.a poule au pot, natnrc morte ; de 1901, Un rémouleur. D'autre
part, Jm Marf/iierite, Marchand d'oignons, L' homme-orchestre, malgré leurs titres, sont encore
des portraits.
Ht)
de moins loin. Ils sont, ponr certains. eni|)runlés anx i^crsonnages dessinés
par .Manrice Sand dans son onvrage. Mas(iucs cl Boujions, et gravés par A. Man-
ccau, avec nn coloriage à la i)onpée (2 vol. .Michel-Lévy, 18(i()). C'est proba-
l>leinent même la lecture de cet ou \ rage, (pie jiossédail son ami Simonnct
d'ilenne/.el. (pii lui dicta son suji't. .Mais d(> ces éléments emjirnnlés, Desboii-
tin a su faire une (eu\i-e cajjtivante. (s(>pleml)re et octobre 1871).
D'ajirés M. (loriureau. membre de l'Académie de Dijon v[ neveu de
•M. Simomu't. cpii a ])ienvouln conti"{')ler sur place, avec le livre de Maurice Sand
les ligui'es de l)esl)outin. Noici (pielles sont leurs dilTérences et (juelles sont
leui's ressemblances: «1" Panneauà droite de la{)orled'enlrée, PoUicinella (vol. I,
p. l.'V7). seml)lal)le à la gravure : // rapilan Spavcnio (xol. T. p. 170) un peu
modifié. Il parle à une fenmie descendant l'escalier et son ern'e a été sup])ri-
mée. - 2" Panneau, à gancbe dv la poiie. Coralinc (\'ol. 1, ]). 22ri), un peu
mofifié : (".oraline est représentée avec un [)ersonnage Lâindre (\'ol. I. p. 317)
(pii lui prend le menton ; îiisecfilicsc vs[ semblable à la gravure : Fritellino
(\t)l. 2. p. 21)1) es! cacbé i)ar les personnages |)récédents, on ne voit (pie la tête
a\-ec le grand chapeau. — .")" Panneau, prés de la fenêtre, PdiUdlone (vol. II,
j). I), il (loKorc lUiloardo (vol. 11, p. 27) sont semblal)les aux gravures. La Can-
Idlricr (\()1. 11, p. .').')) est un peu modifiée, elle baisse la tète en regardant
son éxcntail et semble écouter Panliilonv (pii lui i)arle. »
Il est à rcmar([uer (}ue les scènes de Desboutin sont animées, alors que
les peisonnages de Maurice Sand sont isolés et s'a])parenlent tout <à fait à
ceux dont Bayai d illustra les (liuvics de lUuniiudichais. Vax outre, les deux
derniers panneaux sont entièrement de sa composition.
I>e trumeau de la cheminée s'accorde avec le plafond, dont il est question
plus loin. 11 représente le Triomphe d'Aniphitritc. Notons, encore, sur le palier
du |)remier étage deux trophées, peints en camaïeu : L'Arcliiteclurc et La
Musique.
Une lettre, du 1.") ocl()})re, annonçait {"arrivée de la décoration, et cette
ra])idité lui méritait des compliments. Mais il eût un mécompte. Il s'était
trompé, non sur les dimensions, non sur les coloris, mais sur le sujet ! Il a\ait
été trop libre ; il axait tro]) songé à la Régence ou aux contes de Crébillon
le fils; (pie n'a\ ait-il ])lut<)t relu Marmontel! Il écrivait à son ami, le 8 octobre :
« .le suis désolé, navré, de n'avoir |)as réussi à nous contenter avec ces
diables de panneaux, ([ne justement, je croyais d'un superbe cfTet ! .J'étais
si bien dominé |iar cette idée de donner de l'unité à ton salon et de justifier
la décoration commencée par la (Comédie italienne, en abondant dans ce sujet
178
i^
REPOS DE BÉBÉ
{ 1 " Etat )
pour on fnire un ensemble pittoresque, que je me suis laissé aller à trop de
verve, sans me mettre au point de vue fort juste de la sévérité d de la décenee
d'un salon de réception » — et de Conseiller à la Cour ! pouvons-nous ajouter.
Près d'un demi-siècle passé sur cette erreur l'ont corrigée. Les mmurs
ne sont plus aussi rii^'ides (pfelles pouvaient l'être alors et la peinture «le
Deshoutin est restée aussi fraîche (pi'au premier jour. C'i-st, au fond, l'essentiel.
l/artiste avait commencé par peindn- le eollre à bois, i)uis le [)laf<uid.
Il s'en expiicpie ainsi, dans une lettre du .'> septend)re :
" .J'ai (pour le coiTre à l)ois) eomposé exprés deux sujets : sur le e<tuvercle
est un Polichinelle (pii [)ousse Colombine dans un traîneau, sur la glace
d'un bassin de parc royal. La |)aroi de fac(- représente Pierrot enveloppant
Colombine de son mauli'au de théâtre, et tous deux s'approehant, au milieu
d'une camjiagne neigeuse, vers un feu allumé par (\vu\ petits amours. Sujets
d'hiver, appropriés à l'usage d'un coffre à bois.
« l-JiHn. la semaine dernière, j'ai conHuencé ton plafond. .Lai composé
tout exprés une ronde de huit petits amours, se sus[)i'n<lant à des guirlandi's
de feuillage, cjui se détachent d'une couronne centrale enroulée autour du
lustre.
« Malheureusement, j'ai à cond)attre a\H'c uni' tr)ile trop lisse et trop fraîche
d'impression et j'ai peur de tenir le ton de la décoration moins pâle et moins
vaporeux que tu le souhaites et que je conçois qu'il eût fallu l'avoir pour don-
ner plus de peispectiw à ci' travail. On ne fait i)as ce cpi'ou veut, la première
fois qu'on s'essaie tlans un genre, (car pour les autres décorations verticales,
je pourrai me livrer impunément à toute l'intcniation de ma palette). Ls[)érons
que, en définitive, l'effet ne sera pas trop lourd, car je crois la chose f(»rt déco-
rative. »
Telle est l'excei)ti()ii. fort intéressante, dans la carrière de Desbouliu.
Tout le reste est portraits. Ne nous en plaignons pas. » Mxer sur la toile ou sur le
cuivre l'image d'un être hunuiin, non par sa ress(,'nd)lanee fortuite et acciden-
telle, mais en devinant les traits qui sont vraiment lui-même, cela me parait le
but le plus élevé et le dernier mot de l'art. Lu portrait, en effet, exige de son
auteur une pénétration ou une intuition (pie \)vu d'artistes possèdent... Le
portraitiste doit être doublé d'un psychologue, ca[)able de comprendre la signi-
fication intime des traits et des formes et de la traduire. Cette tâche devient
plus difficile à mesure ([ue la physionomie devient plus complexe, comme
c'est le cas de notre temi)s... Le portraitiste modi'rne a pour modèles des gens
du monde, des gens de lettres ou d'affaires, extrêmement occupes, (jui lui mar-
ITlt
rhandenl leurs séances, et donl les attitudes dans la vie ne ressemblent jamais
aux poses de l'atelier. S'il se contente de les asseoir dans un fauteuil ou de les
mettre debout devant son chevalet, il ne les connaîtra i)as et ne les fera pas
connaîlr(\ Il faut qu'il les voie exister; et {[uand il les a compris, quand il a
saisi sur leur front, dans leurs
yeux, dans les ]ilis de leurs
lèvres, dans les i^estes cpi'ils
éliauchenl et n'achèvent ])as
toujours, le j>assai^e des fui^i-
lives pensées si nombreuses
et si contradictoires qui agi-
[vn[ sans cesse l'homme mo-
derne, il faut qu'il arrive à les
fixer et à les traduire. C'est si
difficile, ({n'en un moment
où les bons peintres a])on(ient.
les bons portraitistes sont plus
rares que jamais. »
Ainsi s'exjirimait Mdouard
Rod, écrivant sur Marcellin
Desl)outin. (1) Il aurait pu
ajouter à cette fine analyse
que Desboutin, par ces qua-
lités de perspicacité si bien
mises en évidence, se ratta-
chait aux grands portrai-
tistes de l'école française, des
Clouet à Rigault, de Largil-
liére à La Tour, (ie David à
François Gérard. C'est d'eux
(|ue l'on a |)n dire : «Les témoignages d'une ])enétration singulière, une intelli-
gence profonde de la physionomie et du caractère des modèles, l'expression en
un mot de la vérité morale, voilà ce qui recommande et distingue les por-
traits de l'école française, à quelque époque (pi "ils aj^j^arlieunent. » (2)
^]me Desboutin en décollelé (Aquarelle)
Coll. Landau
d) Gazelle des Beaux- Arts, l'^' janvier 1890.
(2) H. Delaborde, Eludes sur l,'s Beaux- A ris eu I-'rance et à l'Elranqrr (Renouaid.
18(vt), t. IT, p. 212.
IcSO
C'est aussi ce qui distiu^uail Desboulin. Il élnlL en cela servi jjar un dé-
(iouhkiuenl curieux de sa personnalité. Il n'avait en peinture aucune imagi-
nation ; cette faculté était entièrement réservée à la littérature. Il peignait ce
qu'il voyait et comme il le voyait, en réaliste, mais en réaliste (pii sait choisir,
entre les mille expressions qui s'enchevêtrent sur une face humaine, celle (pi'il
faut retenir parce (pi'elle décèle sa i)ersonnalité !
Il était admirablement lijpique. Son pinceau, son crayon ou sa {)ointe
définissent sans la moindre ambiguïté le caractère. Il est prescjue inutile de
savoir les noms des personnages pour leur attribuer leur profession, elle est
écrite sur leur figure : ici un intellectuel, là un ouvrier, plus loin un nn^ndain.
ailleurs un penseur, un artiste, un savant. Celte vieille dame en mantille, :i
autant de noblesse que de finesse et de bonté, cette autre, l'st également
de bonne naissance, mais elle fut une sensuelle et elle est restée gourmande ;
quant à celle-là, elle doit aimer la médisance, non moins que celle-ci la gaîté!
La Marguerite est une jolie fille sentimentale, (pii fait des heureux avec sa
beauté, Judith sorL du ruisseau et y rentre. Tout cela est ex|)rimé par FJesbou-
tin avec la i)lus grande netteté. Il lit sur un visage comme on lit dans un livre
et nous le lisons comme lui, après lui. On comprend que l'on ait |)u dire devant
Puvis de Chavannes qui i)artageait cet avis : Desboulin tst le plus grand
peintre de portrait du siècle ! » (1).
Réaliste, il ne corrige pas la nature, par conséquent ne la trahit i-a-. i.c
qui est gracieux, il le rend gracieux, ce qui est laid il le rend laid. Son appa-
reil physiologico-artistique tient dans son œil v[ dans sa main. Son cerveau
lui sert exclusivement à choisu' entre les données de la nature, mais celles-ci
déterminées, il les traduit comme il les voit.
Peint-il un Guignol en janiille ? (2) Les cin({ |)ers()nnages sont, comme on
le pense, cinq portraits : ses trois enfants, sa femme et la sœur de celle-ci, qui
rit d'une bouche édentée. Pourquoi n'avoir pas ajouté cette lienl et bouche
ce trou, qui est affreux ? Parce que le modèle était ainsi, [)arce tiue l'absence de
cette dent révélait l'indifférence de la fenune en matière de cotpiellerie. et (piil
importait fort à l'artiste que ce caractère fût bien marque.
Cette dépendance du peintre à l'égard de l'apparence explique même sa
couleur. Tant qu'il est à Genève ou à Paris, dans cette lumière sans vigueur,
sous ce ciel si souvent voilé, il ne perçoit rien de brillant ni de vif ; cju^il se Irans-
(1) RoGEK .Miles. Eclair, 2.') février 1902.
(2) C.oUect. Desboutin.
ISl
porte à Nice, et aussitôl, il va user, voire même alniser des tons [)iiissants,
nolaniinenl des rouges qu'il paraît affectionner.
l'n autre caractère de la ])einture de Desboutin est la i)assion.
Desbouliii l'u peignanl. lU' pai'aft pas obéir à uiic icK-c. mais à un Ix'soiii i\v
sa nature, à un instinct. ManiiT des brosses id des [)iiu-eau\, taire surgir sur la
toile le spcidacK' (pTil a sons It's yeux, c'est là tonte sa joie. Il peignait d'abord
pour lui. C'est vc cpii fait (pu' rien i\v ce (pi'il a produit n'est indifférent on
fr()i(l. La joie de l'exécntioii est pour Ix'auconp dans la (pialité de l'd'uvre
d'art.
Quand il avait revu la secousst' féconde, il fallait ([u'il peigint. l'u jour, à
Cirasse, il l'eniarcpie un léinouleui' dans sa cave, à plat-ventre devant ses
(\cu\ nu'ules. prescpu' au luxcau du sol en tei're battut'. C.^s meules sont
actioniu''es par nue roue à aubes, (|n'on ne voit pas, et l'ouvrier (pti les a mon-
tées, ne s'est pas mis eu frais d'imagination pour permettre au rémouleur de
tia\ailler dans des conditions plus commodes. \ cette éijocjue, l)es])onlin
copiait les b'ragonard de la maison .Maubert. 11 est frapi)é par le côté Irayo de
l'c sujet et le voilà (pii peint ce rémouleur en cotte bleue, avec des dégradations
et des blain liiemeuts dans les lumières, cpii rappellent les cassures de la soie
v[ du satin. Cependaid, la coltt' apparaît bien en toile. On voit ici dans quelle
mesure l)es])ontin s'inspir;dt d'un maître. Cela n'allait pas au didà d'un certain
voisinage de facturt- ; tout le reste, sujet, caractère, esprit, appartenait bien
à rexécutant.
11 y avait, c'est l'occasion de le noter, entre Frago et Desboutin. des ana-
logies de tempérament. Elles exi)liqnent ]iour(iuoi celui-ci s'éprit si vile du
HoriKin (l'anionr dv celui-là. Ils étaient l'un et l'antre ûvs jd presto ; ils avaient,
l'un et l'autre, l'impétuosité et le jet. Le portrait de La lîretèche, au Louvre^
jxude de la main du peintre tpi'il fut exécuté par lui, I lonoré Fragonard, en
une lu'ure de temps (17<iî)). Desboutin n'a sou\ent guère mis (hnantage, sur-
tout dans st's j)ro])res portraits.
lùitri' les deux lionunes, il y a encore celte ressemblance qu'ils furent
tous k's di'ux des peintres et des cU'ssina leurs d'enfants ; Fragonard, les en-
fants de tout le nujutle, (jin de\euaient u les enfants de son génie, petits dénu)ns
libres, épanouis, rayonnants, nn)ntrant des genou.x de Cupidons entre leur
culotte et leurs bas roulés, enfants gâtés du lionheur et de la canij)agnc, de
l'amour et de la nature, bâtards bénis des bergères et des grands seigneurs (1) »
(1) E. cl .1. DK (ioNCOiiHT, L' A ri du XVHI- siècle, Cliarpcnlirr, 1S.S2, t. III, p. 3Ul
182
Maïu'l ;u'cou(lé ( l'niiitr-sirlif)
is:
Dcsboutin, ses enfants propres, dans leurs jeux; leur espièglerie, leur sommeil,
en tant de ])einlures. de dessins el de poinles-sèchcs (jue leur eatalogue rempli-
rait un volume.
Si Desboulin fit surtout des portraits, c'est par don, nous venons de le
voir, mais aussi par nécessité. Le portrait est le seul genre qui « rapporte »
avec quelque régularité, quand le nom est connu. Dcsboutin avait besoin de
gagner sa vie et n'avait i)as le loisir de se lancer dans des compositions, pour
lesquelles d'ailleurs, il se sentait mal préparé.
Nous avons \ u (|ui' son œuvre i)résente cependant quelques exceptions.
En sus de la décoration du salon de son ami Simonuet, à Fontaine-lez-Dijon,
Fcninu'à la cuisine, La C'on.s-a//rt//on, LMnu/Zcur le rattachant auxintimistes hol-
landais ; deux natures-mortes Pommes de ferre et panier et le Canard au ventre rose
à demi déplumés évoquent Chardin ; une Ronde d'amours dans un parc, avec des
petits culs nus fouettés de vermillon, semble descendre d'un cadre de Boucher .
enfin, ([uehfues j)aysages, de valeur inégale, où, à côté d'un Bord de Seine
(Argenteuil, 1875) léger, délicat, fluide, à côté de certains aspects de Nice,
lumineuse, de Grasse, joliment verte et rose, on trouve une Vue de Menton,
pour laquelle il semble avoir emprunté la palette groseille et lie de vin du
Renoir des dernières années. Toutes ces œuvres prouvent néanmoins qu'en
d'autres circonstances Dcsboutin aurait pu apporter une contribution inté-
ressante en des branches de l'art qu'il n'aborda que fortuitement.
Il faut revenir, toutefois, à cause de son importance, sur la série des en-
fants. Elle date de Paris et de Nice. La série de Paris est généralement dans la
gannne des gris, des gris Stevens, disait-on ; celle de Nice est reconnaissable
au carreau rouge du parc[uet, qui était celui du « i)etit ombrellino », la villa de
la rue de France, au pont INIagnan.
U exécutait ces peintures, dans la journée, à n'imjxjrte quelle heure, dans ses
moments de réjnt, entre deux travaux. C'était-là ses repos. Il croquait les
occupationsetlesjeuxde ses enfants, en faisait d'esquises notes de fantaisie, d'in-
génuité, de vivacité : Enfant au panier. Enfant au chien. Le petit modèle. Enfant
au polichinelle, Petit lion en cage, (comprenez : dans un lit cage) et d'autres,
dont les titres significatifs sont inscrits au catalogue de l'Exposition de 1902.
Tout ceci montre à quel degré, avec quelle passion, Marcellin Dcsboutin
était peintre. En vieillissant, cette i)assion sembla s'exaspérer. Il ne vécut
plus que pour son art. Il fallait toujours qu'il eût au bout des doigts un pinceau,
un crayon, ou une pointe. Comme le réaliste qu'il était ne pouvait se passer de
modèle, à défaut de ses enfants, grandis et parfois récalcitrants, il se peignait
-184
lui-nièmc. Voilà pourciuoi nous avons taiiL (k- portraits <io sa main, ces portraits
qu'il faisait en une courte séance et «ju'il léj^uail, non à la i)ostérit(:' — il n'ùtait
pas si prétentieux — mais au tiroir! Ces prestes escpiisses ont encore leur inté-
rêt : elles montrent la sûreté du dessinateur et la virtuosité du j)eintre. Parffjis
une oreille est indiquée d'un seul coup <ie pincean, dans sa valeur et dans sa
forme. Il se qualifiait de « prestidigitateur artistique -, d il y avait de cela dans
sa pratique. Quelqu'un qui l'a vu au travail, ne cachait pas son étonneriient
d'une telle virtuosité :
« Sous rattouchement iiicessanl et preste du pinceau, l'image se précisait
avec une rapidité vertigineuse. Cela venait comme par nuigie. On eut cru par
instants que l'œuvre définitive existait déjà sur la toile et ({ue le peint'-, re-
faisait qu'effacer graduellement des teintes qui la voilaient. » (1)
Cals, ou le bonheur de peindre, a dit un crili({ue. L'expression pourrait
s'appliquer à Desboutin.
Et cette frénésie aux api)roches de la mort, alors que le vieil artiste était
tourmenté par les infirmités de la vieillesse ! Si la cataracte dont il était menacé
était arrivée à son terme, il n'aurait pas résisté à ce coup et serait mort de
chagrin.
Xi son creur, ni son cerveau, ni sa main ni' sul)issaient les atteintes de l'âge.
Ils restaient toujours actifs, toujours jeunes. Le besoin de se jK-rfectionner ne
se figeait pas en lui.. Des scènes comiques naissaient de ce noble tourment.
Parfois, sur ïe soir, quand déjà latelier était sombre et ne permettait
plus le travail, le vieil artiste allumait une l)ougie et appelait son plus jeune
fils, dans les dispositions artisticiues duquel il avait, ainsi (pie Puvis de (^havannes,
la plus grande foi.
— • Chi(iuine, viens voir I
Chiquine arrivait. Son père, masquant la flamme de sa (nain, le menait
vers son chevalet, éclairait soudain la toile et proférait :
— Voilà la vraie, la définitive manière de peindre !
— Je la connais, répondait Chiquine, incrédule. Il y a huit jours, tu avais
déjà trouvé la manière définitive, et tu as changé.
— Oh ' cette fois, protestait Desboutin. ce n'est pas la même chose. Je
sens que ça y est. Et ça y est si bien, que je vais prendre l'engagement par écrit,
entends-tu bien ? par écrit, de ne plus peindre différemment !
(1) Gabriel BEtiN.\RD, Pelil Niçois, 1 décembre 1899.
El Desboulin, effcu-livciiicn!, pnMiail la i>luiue vl ('•crivail à son fils Clii-
(luiiK' :
« Je m'engage à peiutîre (loréna\anl de lelle el lellc niaiiière. >
Il signait cl dalail, poncluellenient. Puis, quelque temps après, l'histoire
reeonimençait, même enthousiasme de l'artiste qui croit avoir découvert la
formule magique, même engagement, même sourire scepli<[ui' el affectueux
de son fils.
Il eut, comme cela, cin([ ou six manières dcfinili\cs, sans compter i-elles
(pii ne le furent pas.
Xe rions pas de ces travers. Ils sont la rançon de l'amour. « Toute la vie
pour apprendre ! >> affirmait le Titien et Chardin, et Delacroix et Chevreul.
Desboulin pouvait prendre, lui aussi, cette devise pour cri d'armes de
son blason d'artiste. C'est celte ])oursuite du jnieux qui le c!-is[)ail à son che-
valet. Que ne se contentait-il d'un paisible repos sur les lauriers acquis ? Tant
d'autres se seraient contentés de refaire L'Homme à la pipe ! Ne fut-ce pas le
cas d'IIenner et de Ziem, pour ne citer que des morts ? Mais Desboutin était
unv aulre nature ! Il aurait volontiers contresigné, s'il l'avait connu, cette
déclaration de racadémicien Viennet, poète plus châtié mais plus froid que lui :
u Je n'ai eu qu'une passion violente dans ma vie, c'est celle du théâtre.
Dans les canq)s, dans les chambres, au milieu des honneurs, je n'ai eu que cette
pensée. Tout le reste m'était indifférent. » (1).
II n'y a qu'à remplacer théâtre par peinture, pour que l'auteur oublié
(VArboydslc et de La Franciade ait exprimé la pensée de Desboutin.
Nous n'aurions {)as parlé suffisamment du peintre, si nous passions sous
silence le matériel dont il se servait. Ce matériel allait de pair avec l'homme.
De même qu'il dessinait sur le j)ai)ier du boucher ou de l'épicier, de même ce
papier, ou tout aulre, ou le premier nu)r('eau de carton venu, lui servait de
supî)ort. Il le préparait à la colle Dantin, ou à la gélatine, et l'enduisait de blanc
de Meudon ou même de blanc d'I*',spagne. Il préparait de façon analogue les
bandes de calicot dont il faisait ses toiles. Les bons ouvriers ont toujours de
suffisants outils! Quant à sa palette et à ses pinceaux, ils n'étaient, comme
lui, jamais nettoyés !
(1) l.et.Lri' iiiéditf à .luU's .lanin, du '.t srptcnibrc 18,')(i. N'it'iiml avait alors soixante-
treize an^.
186
Deshouliii lut donc un peintre doue, avec de la science et le goût du tra-
vail. Il lut. répétons-le, un petit maître. S'il avait découvert une formule
un éclairai^'e. une présentation, il aurait eu en peinture la même notoriété
qu"en gravure. Mais il n'eut jamais le loisir des méditations, des rêveries, des
flâneries, qui sont la genèse de rillumination créatrice. Il n'envisagea, en pein-
lure, (jue la poursuite du métier, de toujours plus de métier, montrant en cela,
un esprit digne du qiuillrocento.
Au |)()int de renommée où il était parvenu ])ar son seul talent et en l'ahs-
cence de toute brigue, avec son beau bagage de portraits, il ne lui a manqué,
pour s'imposer tout à fait et se placer à son rang parmi les « illustres », qu'un
léger coup de pouce du Destin.
Ce coup de i)ouce, cette chance, qu'il invoquait dans ses lettres, il l'obtint
[)our ses pointes-sèches. '.
TtHf d'i-iifaiil ( l'eittture)
is-
Ravel, ingénieur (Peinture, 1892)
App. à M. Maurice Ravel
188
XXV
LE DESSINATEUR
.Madame D. endormie (Dessin à la plume)
Coll. Darbour
A\nnt fie parler des pointes-sèches, occupons-nous des dessins.
Le dessinateur, en Desboutin, apparaît dans toutes ses œuvres. II était
précis, nerveux, souple et sobre à la fois. Mais nous voulons parler ici, des
dessins proprement dits, tantôt préparation de ses gravures, tantôt portraits
exécutés sans autre raison que celle que nous avons déjà indiquée, son inces-
sant besoin d'activité.
189
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7/
Petite (loniieuro (Mine de plomb)
CoU: .T. Desboutin
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Petits dormeur^ (Mine de phmb)
Cul!. ,1. DesbouUn
Nous ne reviendrons pas sur les dessins de sa jeunesse, copies adroites
mais qui ne sauraient eonipler à son actif (1). Nous indiquerons hrièvement
que dans les dessins faits à l'Ombrellino, il aimait à modifier sa facture, —
sinon toujours, du Tuoins souvent, — selon la matière employée. Il s'inspirait
d'Ingres, s"il dessinait à la mine de plomb, de Rembrandt, s'il dessinait à
ja plume, des quattrocenlistes. s'il maniait la san£,niine. Il ne reste malheu-
reusement, de celle épo([ue. ([u'un j)etit nomlu-e de crayons et un all)um
mutilé, mais dont la plupart des 24 dessins qui demeurent sont d'une déli-
cieuse qualité. Ah ! les charmantes sanijuines d'ai)rés sa première femme,
sa fdle Marie enl'anl, les visiteurs de rOmbrellino ! On y retrouve aussi deux
copies réduites à la plume d'api es des eaux-fortes de liembraudt, et elles
montrent la sensibilité et rintelli^ence du C()j)iste .11 n'y a qu'un maître pour
en sentir ainsi un autre, pour le rendre avec une telle dévotion.
Plus tard, à Paris, et surtout à Nice, de 1881 à 1887, il dessinera ses enfants»
modèles commodes, dont Prudhou avait naguère usé. Desboutin n'allait pas
au café, (piand il habitait Nice ; à ix'ine se distrayait-il dans « un bout de
causclle » avec ré})icier voisin et ses clients. Alors, pour occuper ses soirées,
il dessinait l'adorable sjx'ctacle qu'il axait s(nis la lampe : les mioches endor-
mis, la tète lombée sur le bras, aplatis sur la table dans toutes les poses !
Comme ils dorment ! Il n'y a pas une représentation supérieure de la
l)remière enfance, pour le rendu de la chair, l'abandon musculaire, la vérité
des attitudes, ou la maîtrise de l'exécution, chez Carrière ou chez Mary Cassatt.
L'enfant que peii^nit Rembrandt dans la Sainte Famille de la Vieille Pina-
cothèque, à ^lunich, ne dort pas mieux, n'a pas une jieau plus flexible et plus
douce, que Mycho, Chicpiine ou Jeanne, dans cent croquis de Desboutin.
C'est le sommeil de l'innocence que les trompettes du .Jugement dernier ne
troubleraient pas. Et leur mère aussi, entraînée par l'exemple, dort profondé-
ment sous le crayon de son mari.
Mais sur quels papiers sont faits ces dessins ! Papier de la viande, du
macaroni ou du beurre, papier enveloppant les pâtés niçois (c'est celui qu'il
préférait), tout lui était bon, pour ne i)as dire précieux. Georges Michel,
n'était pas plus dilllcile, cpiand il déroulait les cornets de tabac, pour jeter sur
leur surface commune les délicats croquis de Montmartre — du Montmartre
de 1820, avec ses vignes, ses enclos et ses moulins à vent I
Mais le papier dont usait Desboutin était pire. La baryte de plomb
(1) Voir chapitre premier
192
X
>• -,
X^
M"^' Daisy BEREND
qu'il contient le rend friable et il tombe en poussière si l'on ne prend pas soin
de le conlrecoller sur un suiiport plus résislanl. Heureux sommes-nous,
quand ces merveilles se rencontrent sur un morceau de papier lui^res de
couleur, repris au panier où l'avait envoyé un des élèves de l'atelier que
l'artiste avait ouvert à Xice ! Sur cette couleur, il pose de si justes et si fines
lumières, par quel([ues touches de blancs ! Ici, du moins, la matière est solide.
Mais, quelque soit le i)apier, la série des Petits dormeurs est un des plus beaux
titres de gloire du \ieiix maître disparu.
.\ côté de ces morceaux, si plein de sincérité et de naturel, Desbou-
tin a exécuté beaucoup de dessins en vue de ses portraits à la pointe-sèche.
Il procéda ainsi particulièrement dans les dernières années, alors qu'il deman-
dait à l'héliogravure le secours d'un pi-emicr travail de mise en place. Le
Fumeur allumant sa pipe, commandé par l'I^tal, la Femme au Chat, comman-
dée par la Ville de Paris, sont dans ce cas.
On ne rencontre dans son (X'uvre aucune composition «de chic ou de sou-
venir ». Il se déclarait incapal)le d'en faire de tels (à (irand-f'.arlerel. .") décembre
1885) et cela ne nous surprend pas.
Desboutin tira rarement profit de ses dessins, sauf ([uaml ils figurèrent
dans le prix d'une connuande. Ils étaient sa distraction, connue elle est
celle de beaucoup dv peintres ; il ne les exjjosait pas et ce fut une révélation
quand l'exposition de 1902 en montra une trentaine. Aujourd'hui, ils ont
pris rang parmi ses meilleurs ouvrages et on les recherche au même titre
que les tableaux et les pointes-sèches. — (pfils égalent souvent et dépassent
parfois.
19;:;
Drtias. — Dcsboutin cl le Comte Lepic <iravnnt.
Miisco (lu I uxcmbouri;
194
LE GRAVEUR
Deslioulin comiin'iiça à graver fiés les preniicri's aniu'cs de son st-ioiir a
rOiiihrellino. Sur la Frnunr au corsdge hrnrhr, iiric mciiliou de la main nu"'nic
de l'artiste. - f|ui avait la louable habitude des dates dans ses annotations
manuscrites et ses lettres, mais qui datait plus rarement ses planehes.
nous fixe à la lois sur l'ordre, le lieu et !"épo(|ue dv celte (inivre : Mo premii rc
gravure, Florence, 1856. C'est, nous l'avons \u par les notes d'Edmond ("ruil-
laiime, dans cette même année cfu'il se faisait initier par un M. Boyer, photo-
i^ra])hc, à des procédés de « graxiirc simplifiée . (f) La gravure» l'intéressait
donc, soit partout inné, soit par relTct de conversations oii s(>s visitenrs artistes
avaient pu lui jiarler du mouvement (jui entraînait la gravure vers de nouvelles
destinées. \"t'st-ce pas <à l'Exposition universelle de 18.")."), fjue Méryon avait
exposé y Abside de i\otre-I)(imc et (|ue P>rac(piemond avait débuté avec
éclat?
-Aussi, la i)remiére pointe-séche originale de Taulenr ne tarde-t-elle pas
à paraître. Xous n'en connaissons pas la date précise, mais cette Femme
accoudée la main sur la bouche, ejjet du soir, a été très \raisemblal)lenu'nl
faite \ers cette même année IH7)(\.
Par contre, sa toute première pointe-séche, mais non originak'. celU'-l;'i.
paraît bien être de cette année, (|ui fut une année fie recherches et d'essais.
Il s'agit de^ Saints lisant, d'après Piazzella. lîien qu'une annotation, qui
n'est pas de la main de l'artiste, indiciue la date de 18()(), la tradition conservée
dans la famille veut que cette pièce soit de quatre années antérieure. Et ••ette
antériorité est bien évidente si ces Saints lisant sont efTectivement le premier
essai de pointe-sèche de Desboutin, puisque la Vierge à l'enfant, (jui n'est
pas ce premier essai, est dédicacée et datée par Desboulin lui-même : Ombrel-
lino, octobre 1858.
On le voit: à l'exception d'une planche, qui est originale, Desboutin n'ap-
prend, dans ces primes années, la gravure ([ue par la reproduction. La gravure
( 1 ) Voir chapitre V 1 11.
195
d'interprétation d'alors, avait encore des maîtres : Boucher-Desnoyer, Mer-
curi, Calamatta, Jules François, et le plus illustre de tous, Hcnriquel-Dupont.
Desboulin n'alla pas loin pour trouver les originaux de ses gravures ; il
les prit dans sa propre collection.
Kn général, ce n'est pas une mauvaise discipline que la dépendance
envers un chef-d'œuvre : elle oblige le cerveau à analyser, la volonté à résoudre
et la main à obéir. Le graveur doit le respect à l'œuvre qu'il interprète, mais
il lui est loisible d'affîrmer sa personnalité dans la manière dont il effectue
la transposition, en valeurs lumineuses de blanc et noir, des valeurs colo-
rées et des Ions du tableau. Certains y ont de l'audace cl de la justesse ; ce
sont les bons ; d'autres sont incapables de résumer et copient tous les dégra-
dés de la pholograpliie dont ils usent ; ce sont les mauvais. Ils ont i)arfois de
l'adresse maïuielle, mais t'Ile ne suffit pas à compenser ce qui leur manciue.
Ils ont porté le plus rude coup à leur art ; celui-ci, d'ailleurs, ne j)eut j)lus être
aujourd'hui, en face de la chambre noire, qu'un procédé d'exception.
Desboutin. avec plus de métier, aurait été dans les bons. Il savait composer
sa gravure, c'est-à-dire en distribuer la lumière et les ombres, — ce qui est
la première qualité d'un graveur. 11 savait dessiner et comprendre une œuvre
dans son esprit. Il lit une cin([uanlaine de gravures de reproduction, qui se
ré|)arlissent à ])eu i)rès sur toute sa carrière Mais il n'était pas graveur de
métier v[ l'improvisation ])rillanle n'a ])as de place dans le travail de l'inter-
prète.
Néanmoins, il a laissé une œuvre de re])roduction célèbre : les Fragonard
de Grasse. Nous avons raconté leur genèse (1). Nous avons vu que la gravure
seule, demanda trois années, et ce, non compris le temps passé à exécuter
une co[)ie peinte des originaux, puis une grisaille en « hachures de graveur »
de ces copies. Car Desboutin était un consciencieux, comme tous les vrais
artistes. Il savait qu'il n'y a de bonne gravure d'interprétation que si le
graveur est bien pénétré de son modèle, et il n'en peut être bien pénétré que
s'il l'a dessiné, en vue de sa gravure. Il y a, dans le fait de graver une œuvre
peinte, tout un art de transposition des couleurs en valeurs, que seules l'intel-
ligence et la main du graveur peuvent elïectuer. La photographie n'opère
cette transposition qu'en apparence. Elle donne bien un blanc et noir, — ou
plutôt un gris et noir, d'une composition en couleurs, mais avec des transpo-
sitions à elle, qui souvent sont à contresens. Malgré les plaques orthochroma-
(1) Voir chapitre XIX.
196
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Henry Giiérard, aquafortiste (Pointe-sèche)
197
li(juc's. frrtaiiu's rouk'urs claires deviendront foncées cl vicc-versa. Un bean
jaune, formant, par liypothèse, la base lumineuse du tableau comme ebez le
Corrège ou cbez Hubens. cessera dans la reproduction pbotograpbique
d'êtnMine lumière. Par contre, un bleu sombre s'éclaircira. ( )n \)v\\[ atïirmer,
(pie si, à notre é|)o(pie. la gravure d'interprétation a per(hi tout intérêt, c'est
à sa st'rvilité envers la pbotograpliie tprelle k' doit. Le graveur ne va plus
soir le cbef-d'œuvre (pi'il interprète, il se contente d"a(dieter une pbotographie
et de faire marcber Toutil. Il interprète d'après une interprétation !
Desboutin. pour les Fragonard, tie Grasse. \'isail plus liant, (tétait la
première fois que Ton reproduisait cet admirable lioinan d'mnour de la Jeu-
nesse, — il n'a d'ailleurs jamais été regravé depuis et il voulait en faire une
(l'uvre digne de Fragonard et digne de lui. Il s'entoura, pour cela, de toutes
les précautions, c'est-à-dire cpi'il s'assujettit :'i un long travail préparatoire.
Il ècri\ait à Claretic, le 2 janvier 1884 : » J'ai ra[)porté les ([ualre [)rincipaux
carions (pie j'ai dessinés, « en hachures de qraneur », d'après les originaux de
l-'ragonard, après les avoir copiés en peinture, pour me donner le ton et l'aspect,
lorsque je Unirai de les gra\er dans mon atelier, où je serai |)rivé du secours
des originaux. -
Xous savons comment, ensuitt-, il procéda. Il lit reporter sur cuivre,
par riiéliogra\urt'. ces cartons, et ce re|)ort, qui lui économisait du temjis,
lui donnait en outre les d(>ssous qu'il recherchait. Il écrivait encore, le 19 janvier
1884, à (".laretie, dont il es|)érait des articles, et vis-à-vis de qui il se montrait
|)rodigue de détails, pour nous fort intéressants, (les lettres de Desboutin
sont du reste toujours abondantes et remplies de renseignements) :
(■ Mes cartons sont partis j)our Paris dans la fin d'octobre, pour être
ébauchés sur plaque de cuixrt' i)ar la reproduction béliographique du procédé
le plus récent et le plus parfait. Mais, hélas ! la chose ne va pas aussi vite
ni aussi facilement, ni surtout aussi correctement que je l'aurais cru et souhaité,
lui efl'et, pour nie dispenser de copier ces infiniment petits détails dans le
miroir, j'ai crii Invn faire (pie d'exécuter un carton sur papier cakpie, de fac^'on
à n'avoir qu'à retourner la chose pour avoir exactement mon dessin-modèle
à cojiier à l'envers. .Mais il |)araît que le papier-calque a des luisants qui rendent
la reproduction héliographi(jue très com[)lexe et, malheureusement, très
incomplète, de façon (pi'an commencement de janvier, j'en suis encore à
attendre un résultat incertain. » b'.nlin, il reçut son premier cuivre « avec
ébauche héliographique Dujardin. coût l.ôOO fr. » mais il trouva « que la
facilité acquise était telle, au moyen de l'exactitude de ce premier tracé »
198
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(jifil Ile riu'LLrail ' cfiruii mois par plaque au lit-ii de trois, s'il eût dû crùer
la chose (li planta sul ranic niido . (dircfU'iueiit sur le cuivre nu). 11 y iniL
beaucoup [)lus de temps. Ce diable de travail di-vient pour moi la toile de
Pénélope. I.a nécessité de faire tirer de mes plaques 150 à 200 épreuves,
m'entraîne dans des travaux de retouche et remaniements incessants, quj
ne sont rien quand on les exerce sur de petites plaques, mais qui mangent les
mois, comme les autres les jours, cpiand il s'agit de cuivres de ô.'jxTô. Je vous
avoue que si j'avais prévu rénorinité du tra\ail, je ne m'y serais pas engagé,
mais aujourd'hui, une fois dans la filière, il faut y passer tète et corps ! »
(A Claretie 2 janvier 188,")) « Je n'ai pu, dans le jeu de raquette où je suis
le volant, entre la rue \'a\in (Dujardin) j)our la remorsure de mes plaques,
la rue de l'Hôtel-Colbert (Eudes) où l'on m'imprime tout vif, et la rue Roche-
chouart, où je i-etouche, trouver un moment pour le pèlerinage de l'amitié. » {X
Herald Dumas, 22 avril 188G). Commencées en janvier ou février 1884, les
gravures ne furent achevées, pour les trois premières planches, que dans les
derniers jours de 1880 et i)our les deux autres, en 1887 seulement.
C'était néanmoins un tour de force. Armand Silvestre le célébrait, dans
L'Indépendance Ik'hjc, du G décembre 188G :
, « ... C'est à ces cinq compositions que M. Desboutin s'est attaqué, ten-
tant, ce ([ui n"avait januiis été essayé à la pointe-sèche, celle-ci n'ayant guère
servi jusque là qu'à de légers croquis.
« ... Fragonard revit tout entier dans ces traductions magnifiques, avec
les relations savantes de ses valeurs, avec le charme i)énétrant de ses tonalités,
avec la grâce voluptueuse de son dessin. Il y revit tout entier et un grand
artiste y \it à côté de lui. dans une fraternelle et mystérieuse étreinte. Jamais
deux esprits ne se nuiriérent plus heureusement, pour le rajeunissement d'un
chef-d'œuvre. Tel Virgile dans Corydon, ressuscita dans la nmsi({ue latine
certain vers entier du Pohjphhne de Théocrite, qu'André Chénier devait
ressusciter une seconde fois dans notre langue.
X ... Quelle maestria dans la main !.. Pour les fonds, ces jolis fonds [)seudo-
mythologiques faits de grands arbres se profilant dans le ciel et de statues
émergeant di' buissons de ro.ses, l'artiste est arrivé à donner l'impression
large et savoureuse du fusain. C'est puissant et c'est transparent tout en-
semble, vigoureux et aérien. Les ligures sont traitées dans un sentiment
vraiment exquis, (\\.\\ est tout esprit et toute élégance.
«... Une des plus belles et plus durables pages de la gravure française
vient d'être écrite... pour le nom désormais glorieux de Marcellin Desboutin. »
199
Lorsqu'il fiilrcprit les Fragonard, Dcsboutiii était déjà un vieux routier
de la pointe-sèche ! "Niais surtout en gravure originale. 11 n'abandonnait pas
toutefois la gravure de reproduction. Elle était une corde de plus à l'arc avec
lequel il chassait l'amaleur, pour subvenir à ses besoins. Il en faisait peu,
mais il voulait pouvoir profiter des occasions d'en faire. En 1876, il avait
gravé pour .Jouaust. huit portraits, d'après photographies, pour L'Opéra,
eaux-fork'S et (luatnnns. En 1887, Le Bon Vin, de Théodule Ribot illustra le
catalogue des œuvres de ce maître exposées chez Bernheim jeune. En 1889,
il grava pour Georges Pi'lit des portraits de peintres et L'/:n/rcc des Croisés
à Constanlinople, destinés à un ou\rage Les Maîtres chi Siècle, qui n'a jamais
paru. V.n 1890, ce fut, pour un amateur, un Joueur et une Joueuse de flûte,
qu'il attribue à l'Yans Mais, qu'il aimait fort, et que leur possesseur attri-
buait à Doinciiico Feti ; la même année, il reproduisit, pour Durand-Ruel,
en in-folio, le Portrait d^un homme de (/uarante ans, de Rembrandt, (notons
qu'au salon de 1 8()9, il avait exposé les portraits du bourgmestre Six et de sa femme,
et (pie cet admirateur passionné de Rembrandt, ce disciple, grava donc en
tout et pout tout, trois cjcuvres de son maître, plus deux cuivres minus-
cules d'après des tètes de la Ronde de Nuit ! ) ; enfin, la dernière planche
qui devait sortir de ses mains fut le Maréchal de Villars, d'après Hyacinthe
Rigaud, pour V Histoire de Moulins de M. Henry Faure. Là encore, bien qu'il
s'agisse plus d'une héliogravure retouchée à le pointe, que d'une gravure pro-
prement dite, l'artiste honnête envers son art se retrouve : comme il n'avait à
sa disposition cprune médiocre photograpliie, il la redessina en l'agrandissant
au format et en la précisant. C'est ce dessin qu'il envoya à l'héliogravure.
Ainsi donc, Desboutin aura toute sa vie mené de front les deux genres,
offrant de la sorte un terrain de conciliation aux âpres combattants qui,
de 1890 à 1900, s'invectivaient et se proscrivaient au nom des deux formules.
Mais, comme il se tenait loin de la mêlée, personne ne songea à jeter son nom
et son exemple dans la discussion. On se contenta de celui de Bracquemond.
Peut-être en eût-il été autrement, s'il avait exécuté la commande de
l'Etat, en gravant La Justice de Trafan, dont nous avons précédemment
parlée (1). Mais cette reproduction fut remplacée par un original : Fumeur
allumant sa pipe, dénommé d'abord Portrait d'artiste (29 juillet 1893).
(1) Henry Havard.. inspecteur des Beaux-Arts, s'était montré favorable à la commandai
mais avec des restrictions. Il doutait que l'artiste possédât les qualités nécessaires pour
graver le tableau de Delacroix, « aucun de ses ouvrages ne piîrmettant de se former une
opinion I » H. Havard ignorait les Fragonard, parus pourtant trois ans auparavant.
200
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Quel que soit riutérèt d'oriyinalilé de la plu|)iirL des interprétations
de Desboutin, c'est la gravure entièrement originale (fui constitue ses titres
de noblesse. Au début, il ne s'en doutait même |)as, tout à sa peinture, et
plus encore à sa poésie.
Il fallut une circonstance, prescpie un hasard, pour lui révéler sa vocation
C'était en 1872. Jean Béraud, Degas et de Xiltis étaient allés voir leur
ami, dans son atelier de la rue des Dames. Tout à coup, Béraud tombe en
arrêt devant une plaque de zinc, sur laquelle on voyait cette Femme accoudée,
la main sur la bouche, qui n'est autre que le [xyrlrait de la première femme
de l'artiste.
— Mais c'est très bien ! Voyez donc, Degas.
Degas prend la plaque :
— Parfait. Vous êtes graveur, Desboutin ; vous êtt's surtout cela !
ajoute-t-il avec son « mordant » habituel, en jetant un coup d'œil circu-
laire sur les toiles des murs et des chevalets.
Mais Desboutin ne retient que l'approbation. Manel la confirme. De ce
jour, il se livre à la gravure avec une fièvre croissante ; le graveur est né,
et l'année d'après, il écrivait à son ami Simonnet d'Hennezel : « Il faut, je
t'assure, un rude tempérament, pour résistera ce petit exercice de la gravure,
le plus énervant qui soit au monde, quand on y joint surtout la nécessité
de i)rendre les gens et d'abattre leur portrait, comme on casse des poupées
au pistolet dans un tir. » (22 mars 1873). La |)()inte-séche demeure son procédé
favori. Il dessine avec elle, — et c'est ce qui l'enchante. L'eau-forte ne lui
plaît aucunement, d'abord parce qu'il n'est ])as patient, ensuite parce qu'il
est d'une maladresse inimaginable. Cet homme aux mains de marquis ne sait
pas s'en servir. De plus, il est fermé aux sciences, complètement, un bou-
chage à l'émeri ! Reconnaissant son inaptitude à comprendre leau-forte.
il s'en venge par un mot : « C'est, dit-il, de la gravure dans le cataplasme ! '
Il adopte donc la pointe-sèche. Il possède d'ailleurs la force de poignet
nécessaire pour enfoncer dans le métal ce léger outil, dont le maniement
est plus fatigant qu'on ne pense. « Toute la fermeté de ma gravure vient de
là 1 » disait-il, en montrant son bras vigoureux. Et cela l'amuse de dessiner,
lui qui sait dessiner. La pointe est un stylet, le cuivre la tablette ; l'artiste
grave comme Cicéron écrivait. Un médiocre dessinateur ne sera jamais un
bon aquafortiste et encore moins un bon pointe-sèchiste. .Si Ingres l'avait
voulu, avec sa prodigieuse sûreté de main et son aptitude à ne rendre que le
significatif, il eût été le i)rince de la pointe-sèche. Son eau-forte, le portrait
201
de Mi»r tU' Prcssigny, jiioJiLrc ce (ju'il aurait pu faire en ^ra\ ure. (Ja pourrait
s'étonnor que Ferdinand Gaillard, qui préparait ses planches à la pointe non
éharbée (1). nail jamais poussé jusqu'au boni ce procédé, si l'on ne savait
(|ue le tunudl(> de ses |)réparations allait à l'enconlre mènie du caractère de
la [)oinle-séclie. Celle-ci réclame la spontanéité, elle vaut d'autant plus (ju'elle
paraît |)lus aisée. Les meilleures pièces de Desboutin sont celles ([ui sont
enlevées sur le genou ! (2)
bldniond de Cloncourt n'a ])as manqué de rajjporter, dans le fragnu'ut
(le son Journal (pie nous avons déjà cité, comment travaillait Desboutin :
Samedi, b février 1875. ■ — Un arliste nommé Desboutin, que je ne connais-
sais i)as, a apporté chez Burty, jeudi, deux ou trois portraits à la pointe-sèche :
des j)lanclu's suprêmement artistiques. Je les ai admirées, ces pointes-sèches !
Il m'a offert de me i^raver, et rendez-vous a été jiris.
« ... Desboulin a atlatjué avec la pointe le cuivre à vif, passant à tout mo-
ment l'euxers de son petit doigt, chargé de noir, pour se rendre compte de
son trawiil, cherchant en même temps, ainsi (ju'il le disait, la couleur et le
dessin, et laissaid transpirer son mépris ])our l'eau -forli-, (ju'il appelle de la
gravure dans un ealaplasine.
«11 travaille api)li(pié td ner\'eux, jetant di's mots italiens, dans une into-
nation tendre à sa femme, jetant des seccalore au bt'au i)etit garçon qui devient
trop familier, jetant des porclieria à la chienne Mouchetle, dont la gaîté se
j)ren(l j)ar moment à aboyer. Et je pose jusqu'à la nuit, charmé par le tableau
quv j'ai sous les yeux ».
C'était là la manière directe, » la poupée de tir cassée au pistolet », et
celle qu'entre toutes il préférait, du moins justpi'au jour où il introduisit
dans ses planches des éléments picturaux : les fonds, les modelés, la recherche
de l'effet » peintre ». Mais, comme il n'axait j)as toujours à sa disposition
un modèle aussi complaisant ([ue l'auteur de Manetle Salomon, il usait d'un
antre procédé plus expéditif. Il silhouettait le portrait sur la placpie au crayon
litliograi)lii(iue et n-passait, sans abandonner le modèle, le contour à la pointe.
Dès le [)remier encrage, le crayon disparaissait. .Vprès (juoi, il poussait l'œuvre
jusqu'à son achèvement. C'est ce .qu'il a])pelait, d'un terme pittoresque :
« enfoncer le clou !
(1) Voir une excellente (■liide sur Ferdinand (iaillard. de M. I.dys Ukltkii,, l'Estampe
el l'Afliche, 2'- année, 1898.
(2) Ceci n'est point une niélapliore. Desljoutin «gravait .son cuivre posé sur un ^enou.
Degas l'a représenté ainsi dans le portrait du Luxenii)ourg, où il voisine avec le comte t>epic.
202
Femme au métier
203
Qu'il procède par aUa(|iU' dirccti' du cuivre nu. ou j)ar un dessin préa-
labU' au cravon lilliographique, sur le niélal, ou encore qu'il iJrave d'après
un dessin iéii;èrt'nienl rt'|)()rlé sur la |)lanclu' par l'héliogravure, il n'en est i)as
iiKiiiis un ai)s()lu poinle-sechisU'. C'est en vvïu. ([u'il est novateur.
Avant lui, et surtoul dans la gravure d'inlerprétation, les graveurs ne
se servaient (\v la pointe (pie comme d'un moyen rapide d'achèvement. Au
wiii'" siècle. Le Jias en l'ii un large emploi, mais toujours de comi)lèment.
Pourtant les |)i-écè(leuls ne mancpiaient pas de pointe-sèchistes connus et
admirés, mais ("etaienl des originaux, .\lhert Durer et Reml)randt, [)our
ni'u nommer ipie (U'ux. l'ne importante partie de l'œuvre de Rembrandt
est à la i)ointe-seche. Des c()ntem|)orains même de Desboutin avaient produit
d'intéressantes et nombreuses pointes-sèches : Charles .lacque, Whistler,
Sevmour Haden, .lames llssot, Legros, etc.. et tout près de lui Henri
Sonnn, Haffaëlli, Hesnaid, l.essorre, Duez, Degas, Jeanniot, (ïaston la Touche,
1 lenri Dt-louche, et cet excjuis ilelleu, I^aganini de la pointe, dont le fin dia-
mant aura conservé la fleur de la beauté féminine de notre temps — et
leur maître à tous Auguste Hodin.
Ce procédé, avons-nous dit. \aut surtout par ses qualités de [)rime-
saul. 11 est ])arfait pour un croquis, pour une chose enlevée en une seule ou en
un tout petit nombre de séances ; il convient moins aux œuvres de longue
haleine, ([uoicpie M. Muirhead Houe, eu Angleterre, ait produit une admirable
suite de planches, aussi poussées, aussi puissantes et aussi variées que des
eaux-fortes.
Mais ce m- peut guère être qu'un nu)yen d'exce|)tion. Un de nos
maîtres actuels, M. Gustave Leheutre, écrit: «La pointe-sèche est souvent la
gravure des artistes cjui ne savent pas graver, qui s'miaginent, bien à tort, qu'il
est plus sinq)le et j)lus facile de ])rocéder ainsi ; c'est aussi la gravure des artistes
(pii ont i)lus de sj)ontanéité et de sensibilité impatiente, que de volonté réflé-
chie, amoureuse des combinaisons savantes de l'eau-forte, et de ses lenteurs
exaspérantes. Quoiqu'il en soit, c'est un procédé séduisant, mais limité, dans
ses moyens d'expression et donnant des résultats, entre des mains habiles,
sensiblement les mêmes toujours, et peu propres à mettre en évidence la per-
sonnalité de celui (jui l'emploie exclusivement.
« C'est un procédé un peu artificiel et factice, en ce sens que le cuivre
gravé par ce procédé présente cette particularité singulière de mettre entre
les mains de l'ouvrier qui en doit tirer des épreuves, une gravure à la fois en
relief et en creux. En effet, lorsque la pointe entre franchement dans le métal,
204 '
M"''^ VALENTIN
^T Ét.in
matière liante et souple au possible, elle ne le brise pas sous son artion. mais
le déchire, le déplace simj)lemeiit, eL laisse au bord de son passage un bourrelet
métallique, que l'on a[)pelle la barbe. C'est contre cette barbe cpie viendront
se buter, tout à l'heure, ces amas d'encre ffui. habilement amenés l;i par la
paume de la main, donneront ces t^H'os traits \-eloutés et gras qui procurent
à la ( belle épreuve „ d'une [)oiide-sèche, sa couU'ur accentuée et sa richesse.
-- excessive toujours, dans les états d'une pointe-sèche non terminre, avant
que le graveur, armé de l'ébarboir, ait fait tond)er, çà et là, l'excès des barbes
qui couvrent toute la i)lanche, en les usant |)ar place, en les amoindrissant
de façon à montrer sur l'épreuve, au bon endroit, l'entaille fine, nette et grisi-,
de la pointe-sèche conq)létement ébarbée.
» De tout ceci, il résulti', pour l'impression d'une planche ainsi traitée,
des soins ei des attentions parliculiéres. l.ors([ue la planche a été débarrassée
an chiffon de la bouillie noire (jue le lanq)on de l'imprimeur force à entrer
iuscpi'an fond des tailles et sous lat[uelle, tout d'abord, le cuivre dis[)araîl
entièrement, lorsqu'il s'agit, ])our parfaire l'enivre di' passer doucement
la paume de la main, d'effleurer savamment la surface du cuivre, pour la
nettoyer sans vider la taille de l'encre dont elle t'st pleine, la barbe, (jui
n'existe pas dans l'eau-forte, ajoute une difficulté di- |)lus. l-'Jle ri^li/iidra l'tMicre,
si l'action de la main se fait sentir [)erpendiculairement à la direction de la
taille, mais elle ne retiendra rien du tout si l'action de la main, au contraire,
est parallèle à cette direction, car l'encre alors ne trouve pas d'obstacle contre
le([uel elle vienne buter.
( Pour é((uilibrer les (dioses et donner à l'épreuve toute son harmonie,
il convient donc, d'al)ord, (K' ne pas essuyer la planche par [)arties. mais h'u'n
d'ensemble, sans hâte, |)arlout à la fois, sans s'éni'r\er et vouloir bruscpier les
(dioses en essuyant d'abord les parties non graxées, (imbécillité ([ue font d'ins-
tinct tous les imprimeurs, sans qu'il soit facile de leur en fain- conq)rendre
l'ineptie); ensuite, il faut t-ssuyer la |)lanche en la faisant tourner dans tous les
sens, sous l'action de la main (pii l'éclaircil, de façon à enq)ècher l'eiu-re de
» filer » le long de la taille, tout d'un cote, ce qui est fort laid a ré[)reuve. et
fort délicat à éviter, liref. il faut avoir affaire à un ouvrier intelligent, amou-
reux de son travail, et fort liabile dans son métier, pour avoir de belles épreuves
et sensiblement <• suivies.- d'un bout à l'autre d'un tirage, même limité. Géné-
ralement les ouvriers ne se sentent à l'aise. |)our obteinr ce résultat tpie lorsque
les barbes sont déjà affaissées, à moitié usées des les premières épn-uves, et
([ue. la planche ne donnant plus ([ue du gris assez veule el incolore, il devient.
205
facik' de lui faire (ioiincr rv i^ris cl cette incdincritc d'accent. — indéfininicnl
e( en toute trancjuillité d'esprit, en piMisant à autre cliose. Ml ceci est Vident
de tous les imprimeurs !
a Mais ne les accusons pas injuslemeul. l.orscpie l'artiste poinle-sèchisle
api)orte une planclie (pii, n'avant |)oint encore tiré, a déjà pei'du. par suite
d'un excès de traxail incertain, nud ctuieu, mal conduit, et déiuu' de cette
décision sponlaru'c qui est le charme de ce i^U'ure de i,;i"a\ure. toute fleur, toute
fraîcheur, toute virginité, l'imprimeur \\v peut èlrt- rendu responsable de ce
(fui est le fait des maladrt-sses et des insuffisances du uraxi'ur. La planche esL
défunte a\aid d'aNoii' vécu. •■
Nous axons tenu à donner la plus grande [)arlii' de cette lettre inédile, si
intéressante, en pixaiuer lieu. ])arce ([u't'lle entrait dans le cadre de celle étude.
vu second lieu, parce ([u'elle fournil sur le procédé des détails lechni([ues.
(pie seul un praticien aussi expériiuenlé (pu' .M. l.ehenlre. cl a\issi éj)ris de la
« ])elle é|)reu\(' , pou\ail a|)porter a\'ec une compéleiice indiscutable. 11 est à
remarquer, en outre, (pie les traités de i^n-avure ])arlenl foil peu, e! toujours
accessoiremenl, comme eu passant, de la pointe-seclie, (pii mériterait une
enquête plus approfondie, i-é\élat rice, j'en ai l;i conviction, de heancou]) de
choses uouxelles relatives à son importance dans la i>'ra\ ure. A celle eiupièle,
la lettre de M. l.ehenlre apportera une première c(mlribnlioii.
HcNcnons à Desbout in. Nous saxons pour (pielles raisons phiisiijucs il
axait adopté la poinle-séche de préférence à tout antre mode : axcrsicm pour
ce qu'il nommait -la mairie noire de l'eau-foide, et par c(mtre, vigueur (le son
poiîjuet. J .es vérila])les causes des actions humaines dérixenl ])i\'S(pu' toujours
du tempérament. On fait une (diose, pai'ce (pie l'on a en soi les moyens de la
faire. parfois aussi, (pioi(pie ])lns l'arement. parce (pie, ces mox'ens faisant
défaut, on \ ont laisser croire (pToii les a ; (»u !)ien encore parce (pie l'on est en-
traîné par l'exemple, l'hérédité. Vidée.
Vous axons \ n éi^alemeul pouixpioi l)esl)outiii fil de la i>rax lire : il x fiil
déterminé par l'approbalion de Deoas, de Maiiel, de .lean lîéraud. a une épocpie
oii la vie lui était très difficile et on il chercliail au boni de cpiel sentier il trou-
verait la pâture. Sa disposition naturelle xonlut (pi'il eut le tempérament
i^raveur et cela dexail serxir à merxeille sa réputation. Mais au fond, ce n'est pas
la gravure (pi'il aimait ! Il écrixail à son ami .Mboi/.i', le l féx rier 1<S89, ces
lignes où perce son désenchanlemeiit de n'être pas seulenu'nl un peintre :
« JJcpuis reiigouemenl progressif pour les écoles {Viris(di()ii lithochrouio-
coloristes, aujourd'hui j)alronuées et lancées par les Goupil, ces écoles ont
206
iviidu iniiilelli.qihlcs et répulsives aux amateurs les peintures faites, comme les
miennes, toutes de valeurs de clair-obscur, ou mieux de valeurs de tons de
dessin (1). Laissons donc couler l'eau, quoique je désespère, à l'àye où je suis
parvenu, de la voir, de mon vivant du moins, venir à mon moulin. et lâchons
de tirer de celle (ihsiraclion ai)pelée la «ravure eu pointe-séche. la plus «Grande
somme possible de bénéfices ([u'elle |)uisse retirer de ce (prelle lient de ma pein-
lure. dont elle n'est qu'une abréviation moins choquante |)our le.i^oùt du jour.»
Ainsi, pour Desboutin. la i*ravure n'est qu'un [)is aller. Celle abstraction
n'est ((u'une abréviation de sa peinture -. Qui ne prévoit que moins cette abré-
viation sera sensible, plus l'artiste sera satisfait. Dr. comment une gravure
peut-elle se rapi)roclier de la peinture ? Par les fonds. j)ar les modelés, par la
diversité des noirs, des gris, |)ar les valeurs des blancs. C'est ([uand elle ■• sug-
gère )), — nous n'écrivons pas : ([uand elle réalise, —les variétés de la peinture,
que l'on dit d'une gravure monochrome (ju'elle est colorée.
Cela s'obtient tantôt facilement, tantôt difficilement, avec la pointe, l'é-
choppe ou le burin. Il y suffit parfois d'un trait, d'un volume de blanc, opposé,
dans la direction et à la j)lace voulue, à un masse sombre, voyez la Pièce
(iii.v cent florins ! -- jionr cpie tout vibre, s'intensifie et fcinfarc ! D'autres fois,
mille travaux, mille tiaits gras, maigres, croisés. iu\tai)osés. reliés par des
points, renforcés, redoublés, etc., n'amèneront ([ue confusion, mollesse et
insignifiance. Cela, avec l'eau-forte, mais à plus forte raison avec la pointe-
séche ! Et surtout dans les planches de grandes dimensions, qui abondent
dans l'œuvre de Desboutin. Or. encore une tendance curieuse des graveurs ! -
aucun ne se résigne à ne faire que des planches moyennes. ])our lesquelles la
gravure semble créée. « Il faut proportionner à la finesse de l'outil, la surface à
couvrir )> enseignait Whist 1er. .Mais le tour d(> force • séduit les plus sages, et
ils sont entraînés à faire grand par la nécessité d'élre vus au .Salon.
Desboutin était poussé de plus, par le besoin de si- rap|)rocher de la pein-
ture. Ne voulant employer l'acide, il eut recours à toult's sortes de succédanés :
la roulette, le jiapier de \erre. la pierre-[)once. les fonds monotv[)és ; il égrati-
gna sa plaque avec tout ce qui i)ouvait servir à cet objet. et l'on sait cpie les
artistes sont fort ingénieux en ces sortes de découvertes. La c(ualité spécifique
de la pointe-sèche s'atténua. On peut se demandei- cv (\u"\\ y a sous La Femme
(1) Il est évident ([lU'. !);n- icllc définition môme. De.sboiitin iinnivc (lu'il i'>l plus tlessi-
nateur et graveur que peintre. (",e (|ui les distinijue. en effet, c'est (|ue le peintre joue de.s
tons colorés, en sus des valeurs de clair-obscur, tandis (lue le L'iaxcur ne dispose f|iie de ces
dernières.
L'OT
au Chai, sous le Fumeur allumant sa pipe, sous les Trois amis, etc. On n'y
retrouve plus la franchise du Rochefort, {hi Dumas, de V Homme à la Pipe, celic
merveille ! poui- eonii)arer les i^randes pièces entre elles. Nous sommes plus
loin encore de la saxtui- de \ina de Villarl. (VHippohjie Babou, de Berihe Mo-
risot, de Legendre, de Monlejiore, dv Degas en pied, de Renoir et de ciiuiuanle
autres petites el moyennes pièces, qui sont des chefs-d'œuvre d'esprit, de viva-
cité et de décision.
Il arriva bientôt ce qui devait arriver. La mise en place de ces importants
dessins préalables aurait pris un temps énorme; ne valait-il pas mieux recourir à
un moyen mécani({ue, prescjue instantané et plus sûr ([ue la main ? L'hélio-
i^ravure. dont il avait, selon toute proliabilité. accpiis la notion à Florence,
lui offrait sa facilité tentante : elle va devenir sa collal)()ratrice assidue. Tl
croyait d'ailleurs avoir découvert un procédé nouveau, - comme si Rops ne
le prati((uait ])as déjà! et s'applaudissait de sa trouvaille. 11 l'expliquait
ainsi : <■ l,e mode de t^ravure est pointe-sèehe à base hiiioqraphi<iue, d'aj)rès des
dessins à la phnne exécutés |)ar moi sur pa|)ier et reportés sur cuivre par les
liéli()gra})hes de la maison Foirel.
«Mais l'utre k- dessin, (pii est rcruxTe vivante et individuelle de l'artiste et
k's travaux innombrables de pointe-sèche, (pii harmonisent et finissent la
morsure. ;7 ne reste rien de meecmiijue à cette ceuure, cpie je me propose de c(mi|)lé-
ler par la rej)r()dncti()n par le même système, de mes études peintes les |)lus
pittoresques et les plus intéressantes. > (,\. Raisin, !•?' mai 1898).
C'est l'eni^renage. Il est pris. Mais on lui faisait des objections, et il y ré-
pondait :
« Votre re|)i()che de tranau.r i>ieilliss(nit le sujet par surcharge de Vhélio-
graimre. n'est, en effet, ])as sérieux, puisque^ cette héliogravure n'est qu'une
pâle ombre de calque i)holographi(pie, un imperceptible saupoudrage équiva-
lant à peini- au retroussis d'une jilanche encrée, tel que le donne rimj)rimeur
avec sa mousseline, et que toute la gravure, dans son corps comme dans ses
moindres traits de détails, est entièrement le résultat delà pointe aussi fournie,
aussi conduite (pie si j'eusse opéré sur le cuivre un et sur simple calque à la
sanguine.
u Rncore une fois, l'opération héliographique n'a fait là que fixer et régler
la ressemblance et donner aux travaux un lien ambiant qui les harmonise
sans les dénaturer ])lus que ne le fait le cou]) de chiffon de l'ouvrier, dont elle
peut dispenser au besoin, au grand bénéfice de l'unité des épreuves d'un tirage »
(A Raisin, 21 juin 1889).
208
---.ijf*? ""-,*
GLlGNuL L.\ lAMlLLE (1880)
Chose étrange ! Ce sont ces œuvres hybrides, on la main n'est plus seule,
qu'il préférera ; ce sont ces gravures ([u'il exécutera quand il les fera pour son
plaisir et à son gré, — je veux dire quand il reproduira les tableaux ou les fles-
sins dont il sera satisfait (La Marçiuerite, Jeune fille à la feuille de chou, le
Capitan, oie.) Ce ne sont point celles qu'affectionnera le plus l'amateur, dont le
choix ira aux pointes-sèches pures, car il y a plus de sensibilité dans le tracé
direct de la pointe, que dans le re[)ort ph()tograi)hi(|ue du plus sensible dessin.
Néanmoins, même là, Desboutin s'avère artisli'. Sur ces dessous couverts,
il le dit et c'est exact, il savait raviver les lumières, intensifier les noirs, jeter
en un mot le manteau diapré des valeurs. Car il avait au plus haut point
le sentiment de Vordre, dans ses gravures, s'entend ! Ce n'était pas lui qui
laissait les barbes se placer au y)etit bonheur, et il n'était pas de ceux ((ui
pensent qu'un noir de pointe-sèche est, n'importe où, le bien venu! 11 lui assi-
gnait son rang et sa fonction. La planche, dans sa position riormaU-. riscpiail-
elle de lui fournir une barbe contraire à l'effet voulu, il faisait faire demi-tour
à sa planche et la travaillait la tète en bas.
De même, quand le tirage ne l'avait pas satisfait, il corrigeait les épreuves à
la main : « Je suis depuis (|uinze jours, écrit-il à Alboize, le 23 septembre IS.sr).
au sujet des Fragonard, à les éplucher au gratloii- et au crayon sanguine et
j'espère, d'ici le commencement d'octobre, vous expédier un stoc!< de vrai
nanan, revêtu de ma griffe ! lue des trois surtout. l.'Esralade au rendez-i'ous,
me donne un tintoin du dial)le, car je dois enle\H'r des blancs à la gomme,
pour arriver à soutenir l'effet des deux autres. Mais bah ! peine île \ ilain ne
compte pour rien. •
l'n peu plus tard (le 10 octobre), il se faisait rt-nvoyer le cuivre pour faire
<( au brunissoir et à la [)()inte les corrections nécessaires à la régularité <le l'im-
pression.«Après quoi, il n'attendait plus ({ue le résultat de celle grande ba-
taille rangée, qui pouvait être aussi bien son .Vusterlitz cpie son Waterloo.»
(Au même. 12 novembre 1886).
A côté de ces armes de correction, il y avait celles de l'exécution. Desbou-
tin, comme on peut le supposer, n'avait pas besoin d'un matériel bien compliqué.
Le graveur n'était pas plus exigeant que le peintre ou le décorateur. Sa |)ointe
était une aiguille de machine à coudre, sa tal>le. son genou. Quand il s'adressa
à l'héliogravure, et notamment pour les gravures d'interprétation, soit d'après
les maîtres, soit d'après ses œuvres propres, le travail devint i)lus complexe.
Il faisait d'abord photographier l'original au formai de sa planche: puis il en
décalquait le contour sur papier bleu ou gris, redessinait au crayon on an fu-
sain, posait des rehauts de blanc pour les lumières et envoyait enfin à Thélio-
gravure. Une seule morsure lui suffisait, pour la mise en place et les dessous,
après quoi le graveur repreiKiil lous ses droits et attaquait le métal avec sa fou-
gue coutumière.
Les corrections minutieuses des Fragonard, dont témoignent ses nom-
breuses lettres, laisseraient croire que des mains de l'artiste ne sortaient que
(les épreuves parfaites. Il n'en est nialheurinisemeiit rien. 11 circule nombre
d'épreuves médiocres et le pis est (jue Desboutin lui-même ne rejetait i)as, à
priori, une épreuve défectueuse: il la réservait, nous l'avons vu au chapitre
XIX, pour ses amis !
0 Le tirage des b'ragonard est d'une assez grande unité, sauf quelques
é|)reuves maigres et blanches, (]ue vous mettrez à part pour journalistes ou
camarades artistes». (A. Alboize, 23 septembre 1886). Il conseillait au même,
le 10 octobre, en lui t-nvoyant ([uatre épreuves (2 du Hcndrz-i'oiis et 2 des Con-
lidences), « trop blanches et dégarnies |)our avoir été essuyées trop à chaud »,
de les garder ■ pour cadeaux futurs à des camarades. » Les bons billets ! Il
faut se méfier des épreuv es données, au moins dans la série des Frago.
Ajoutons (|ue l'on ne sa\ait guère imprimer la pointe-sèche, de 1876 à
1890. A Texi-eplion dArdail. (fui connaissait toutes les ressources et toutes
les (c ficelles > rie son métier, à part Delattre père, qui était un imprimeur de
première force. :i |)arl Leroy (pu- Desboulin avait formé, la plupart des ou-
vriers avaient conservé les liabiludesprises a l'impression des burins. Ils tiraient
(( en carte de visite " et essuvaient la planche, sans ménagements.
La pointe-sèche souffrait de ce traitement. Elle devenait glabre. Plus de
barbi's, partant |)lus de puissanci- î La planche grise et maigre paraissait vidée.
Il y a des Da/as ini chapeau rner\n'illeux et d'autres ramenés à un contour ténu
el sec, comme une gravure de lléveil ou de Landon.
Mais (piel tirage, si surveillé fut-il |)ar l'artiste, et cet artiste fut-il un amou-
reux de la belle épreuve, cpii ne donne lieu à un choix ? Ce choix est
même un des plaisirs de l'amateur ; il y contrôle son goût, sa science des tech-
ni(}ues, la finesse de son œil.
L'amateur de Desboutin peut exercer son jugement sur des pièces nom-
breuses. Cela ne veut pas dire (ju'il l'exercera avec facilité. Il hésitera souvent
entre un état et un tirage. Uétat comporte des retouches dans la gravure ; le
tirage peut donner des épreuves différentes par le seul encrage. N'oublions pas
que Desboutin « trijiotait » beaucoup ses planches et qu'il était l'ami du comte
Lepic, le i)arrain de Veau-forte mobile. I/eau-forte mobile, c'est l'art d'utiliser
210
■lA-î
lu noir ai-fOiKlé ( Fuinti-si-rlrr
L'Il
le " coup de torchon )^ c'est-à-dire d'enlever |)liis on nu)ins l'encre qui se trouve
hors des tailles et de varier ainsi les effets.
T>"eau-forte mobile, c'est presque une e()nii)inais()n de la gravure et du
inonotvpe. Or, en matière d'impression, eau-forte ou pointe-sèche, c'est tout
un. avec cette différence toutefois, que la pointe-sèche offre d'elle-même, par
ses l)arbes, une partie des effets que recherchait le comte avec son torchon.
Deshoutin ne tomba jamais dans les fantaisies de son ami. — même lors-
qu'il en i^rava le portrait. — une de ses plus nerveuses incisions. Cependant,
il ne pouxait dédai;*ner le secours qu'apporte une impression adroite à une
planciie (pii commence à faiblir. De là, certaines variations d'une épreuve à
l'autre, qui font poser la (pu'stion habituelle : « Kst-ce un état ? Est-ce un ti-
rajre ? -
On répondra assez souNcnt : (".'est un tiraj^e ; |)lus souvent encore :
("est un état.
("ar, rien n'est mobile reprenons, dans un autre sens, le mot de Lepic, —
comme une pointe-sèche de Desboutin. On découvre presque autant d'états
que dèprt'uves. Si vous comparez deux de ces dernières, d'aspects semblables,
aussitôt les différences apparaissent. Ici, (t'est une ombre allégée (Babou)
là, une piniiie au chapeau augmentée de volume {Duchesse Colonna), ailleurs,
une touffe de barbe arrondie (L'homme à la pipe). Un fond ajouté ou retranché,
une robe assoml>rie, un accessoire déplacé, parfois une |)lanche recommencée,
et la dixersité, la mobilité s'accroissent ! Le portrait du comte Lepic comporte
cinq états nettement différenciés, depuis celui qui montre un dessin encadré
derrière la tète dumodèle, jnstju'à celui qui n'en montre plus, en passant parcelui
qui étale ce même dessin, non encadré et cloué au mur. à une autre place.
Mais d'éi)reuve à épreuve, en étudiant trait par trait, il y a presque autant
d'états qut" d'ext'mplaires. L)e même i)our VHomme à la p//>e, de même pour
la scène enfantine intitulée Les premiers pas. L'enfant ([ui tient le toutou est
d'abord tout près de sa s(enr. \ers le milieu de la pla([ue. puis au 3^ état, il
s'en éloigne, reculé vers la droite. Xaturellement, ces modifications ne vont pas
sans plusieurs états. Là, encore, on n'en compte pas moins de cinq. Et, comme
si ce n'était pas assez, il y a une planche supi)lémentairt> de petit format !
La recherche de ces états révèle l'inquiétude d'un esprit toujours en
([uête du mieux, l^lle révèle aussi parfois, la nécessité de faire revivre certains
cuivres ou zinc abiniés, ainsi ({u'il résulte de la lettre suivante, à Alboize (27 mai
1888) :
^< Tous les petits cuivres-sujets ont été saignés à blanc par l'affreuse mai-
212
A. BRUANT
son Cadarl. si bien (lu'a i,francrpt'inc', j'ai pu diTMieroiiu-nl les retirer, ju>l.
pour quekpies épreuves, en vue des demandes que pourra m 'al tirer l'exposition
de mon œuvre gravé, dans une des salles du musée de Genève. •■ E[ le 17 no-
vembre suivant, il annonçait au même correspondant : •' Mis en mesure de
pouvoir vérifier, épreuve par épreuve. elia([ue cuivre ou zinc comjjosant ma
collection, j'ai dû misérablement reconnaître et constater que la plupart ont
été é[)uisés pour avoir été tirés à outrance dans cette maison de (ici. un qua-
lificatif que nous ne pouvons rei)roduire), où on a fait comnu-rce de mes gra-
vures, sans que j'en aie jamais tiré d'autre profit (pie le paiement de (pielques
factures atrocement enflées. Dès lors, dej)uis plus de deux mois, a commencé
pour moi un travail de galérien à la roue ! .J'ai dû retoucher presque toutes
mes plaques à fond, et en remanier à nouveau quelques-unes, bien que sur les
mêmes cuivri-s, et ce tra\ail de chinois sans inspiration, m'a coulé des j(jurs et
des jours.
1! (lit. dans un autre passage de la même lettre, (ju'il a ilû > retoucher
quarante à i-iiupiante planches ».
Que d'éiuts ! et, par contre-C()U|), que d'épreuves ! Combien Cadait en
a-t-il tiré de ces (juaranlc ou cinquante ])etites planches, abandonnées, pendant
huit ans. à son indistrélion ? On ne le saura januiis. Notons (jue Cadart — -le
fils — devait y ap[)orler d'autant moins de scrupule, que ses affaires ne nuir-
chaient pas et (juil allait être bientôt contraint de partager son matériel
entre ses ouvriers. [)our les i)ayer de ce (pii leur était dû II se i)eut aussi que
le tirage frauduleux n'ait pas été considérable, mais exécuté sans soins, ce
qui aurait suffi à épuiser la ])lanche.
Desboutin, d'ailleurs, ainsi (pie nombre de ses confrères, essayait volon-
tiers de payer ses imprimeurs en épreuves. Comme il savait par expérience que
les factures du retardataire sont toujours majorées, il avait pour habitude
de réduire de moitié la note ([u'on lui présentait et d'offrir des épreuves pour
solde de cette moitié ! l-'aute de pouvoir obtenir autre chose, l'imprimeur
acceptait et re\ endait ces estampes au mieux. Tout cela fait un certain nombre
d'épreuves en circulation, qu'il est parfaitement impossible de chiffrer.
Là même où il s'était engagé à limiter le tirage il se |)erd dans le nombre
des épreuves d'essai ! Lisez ce (pi'il écrit à .Mboize. le '2'.'> septembre 18(Sl), au
sujet de son désaccord avec l'imprimeur lùides. sur le tirage des trois [.«remieres
planches des Frago :
« Tout d'abord, sur la première facture de ô\7 fr. 70. il me compte 124
épreuves d'essai, quand, à mon compte, je n'ai fait tirer que tout au plus,
213
une 6(K d'épiviivcs, soit Sô que j'ai apportées avec moi à Nice et 20 ou 25 (pie
j'ai laissées à Paris, pour service des cniiiarades, épreuves avariées. » {\)
Ou \()il l"iiu"ertitu(li'. L'iiupriimur pose un chiffre précis : 124 ; Desboulin
répond pai- une énoncialion \ a^ne : une soixantaine. Qui pourra jamais s'y
reconnaître ! Quand il \viu\ une épreuve de son Homme à la pipe, il s'exprime
ainsi ; •' Le prix de cette épreuve est de cent francs. |)rix maintenu [)ar moi
|)our tous les l'xeinplaires de celli' planche, ([ui a été tirée ;'i un nombre irès-
lestreinL et dont K's rprcuNcs très rares l'ont aujourd'hui prime sur notre
place de Paris . (2)
Qu'on nous jjardonnt' l'expression : ce n'esl pas de la précision, c'i'st du
honiment !
Toutefois, ce (pi'il dit est, dans son ensemble, exact. Il est certain qu'il y a
peu d'épreuNcs, i-nlendez de bonnes épreuves, — • de L'Homme à la Pipe —
connue du |)lus iirand nombri' de ses autrt's pointes-séches. qui pour la plu[)art,
ne furent |)as aciérees.
Sa manière de procéder, ici conuiu' ailleurs, se rt'ssentait dv ce désordre
incorrigible, ([ui fut sa marque particulière. Quand uiu' |)lanche était amenée
au ])()int ([u'il désirait, il en faisait tirer ([uekjues épreuves et remettait le ti-
rage définitif à |)lus tard. Ce |)lus tard, soit oubli, soit faute d'argent, soit
perte ou détérioration de la phuiue, n'arrivait jamais.
Car la jeunesse tnrbuk'iite cpii formait sa famille. n'a\ail pas un respect
religieux des tra\anx i)aternels ! L'un se servait des cuivres pour y édifier
les constructions en papier qu'il architecturait à grand renfort de colle ; l'autre,
|)lus physicien et chimiste que son auteur, les découpait subrepticement pour
alimenter ses piles électri([ues. Quant à Desboulin lui-même, eh bien, il lui
ai-ri\ait sou\ent de faire planer une plaque ([ui n'avait presque pas tiré, afin
d'en rei)rendre le cui\ri'. On |)eut con;',tater, sur le remar(iual)le portrait de
Norbert (iœiu'utte. la trace d'un motif antérieur, insuffisanmient effacé.
Donc, impossibililé prescpie absolue, sauf exci-ption, de déterminer, à
riienre actuelle, l'importance des tirages. Le peut-on davantage f)our Rem-
brandt, dont il existe encore des cnixres authenticjues ?
.Vu fond, (|u'imj)orte : c'est une sottise de notre temps de faire passer la
rareté d'uiu' pièce avant sa (pialilé. Ce qui com|)te, c'est la bonne épreuve,
c'est l'éjjreuve à fleur de cuivre, avec ses l)arl)es bien placées, quand il s'agit
(1) !,es pauvres camarades qui ont cru recevoir de l)oniu's épreuves !
(2) Lettre sans date, mais très proljablemcnt de 19(10. écrite à un amateur nantais
(H. A. A.).
'2Pi
di' i)())iitc'-sèchc. l'A (le CCS r|)rcu\rs-|;t. le ii.nnhrf n'csl jamais hii-ii j^'raïuJ !
Il Ile peut |)as V('\rv. pour les raisons (pu- nous avons dites, cl qui se réfèrent a
la fragilité des préeieux copeaux de métal. Dune |)oinl(-sc(hc n>,n ucirrrr,
on ne peut guère obtenir plus de six ou sept épreuves vraiment belles cl celles-là
même, si on [)()uvail les aligner les unes à côte des autres, on constaterait
que leur qualité diminue au fur et à mesure cpic liur nombn- grandit, .\pres la
vingt-cinquiènn' ou la trentième épreuve, la pointe-scclic \\i' donne plus rien
de bon. (1)
C'est pour maintenir un tirage un peu suiri (pie Desboulin retraxailiail
sa planche sur la presse et la rivivifiait |)ar (pn-hpies coups de i)oiide (pii mul-
tipliaient les états, ('."est plus encore, peul-èlre. afin de perfectionner son ieu\ Te
qu'il la retravaillait ainsi.
Et voilà ([ue si' post" uut' ipiestion plus impoilanle, au regard de la cri-
tique, que la question des états et di's tirages : (pielle t'sl la valeur d'art des
portraits gra\és de Desbout in ?
Elle n'est pas iid'èrieure à celle des |jorlrails jieinls vi comme eux. ces
effigies sont typiques. d'un dessin magistral, d'une parfaite dislinclion. Ce sonl,
de plus, de magnificjues pages de gravure, aussi souples ([ue fiiim-s, aussi intel-
ligentes c[ue décidées, aussi complètes tjue sobres. Le succès (|ui a accueilli
ces feuilles n'était point usurpé. .Jules Laforgue donnait ce conseil. l'U juin
1883, à Max Klinger, cpii iirojelait un voyage à Paris : .; Tàclie/, de connaitrc
le graveur en pointe -sèche Desboutin et l'extraordinaire Rrac([ueniond.
Feuilletez les albums (U' .laccpicmart... (2). Le subtil K'cteur di' rim[)ératrice
Augusta mettait Desboulin en bonne compagnit-. (".larclic écrivait : \'u mo-
ment viendra où ces portraits, \raimenl hors de jtair. seront recherches.
poursuivis, j)ayés à [)rix d"or. C.etle heure n'est pas loin de sonner. (A)
Mais la (piable gra\t'ur ■ ne fra])|)e pas la foule. L'art de la gravure est
un art herriiéticpie [)oui- k'([uel il faul uiu- initiation. Le public ne conq)rend
rien à la gravure ! - confesse M. Waltner, il ne peut donc la goûter cpie pour des
qualités qui lui soient accessibles : la ressemblance, le caractère, la distinction.
La distinction est vv[[c ([ualité indéfinissable tpii. en art. comme dansla \ie.
(1) On raconte cependant <jue Cliarles .laeiiue. (luuul il avait fait lirer. suu;, .ses yeu.N.
vingt à vingt-cinci épreuves de ses pointes-sèches. faisait don «le sa planche à Délai Ire qui. grâce
à son tour de main et à son sentiment d'artiste, — car il était artiste ! — tirait une nouvelle
série, égale à la première, en nombre et en beauté.
(2) Exil, Pocmes. Spleen (La Connaissance. 1921».
(3) Un original. Fiqaro, 21 mai 1883.
s'()i)|)()Sf au trivial ot au commun. Klle est un don. r)csi)outin le possède. 11 n'y a
pas plus dr l)assi'ssi" dans sa pointe, son crayon ou son pinceau, que dans son ànie.
Il sait, en outre, choisir dans une figure ce (pu i-sl permanent et écarter
raecidtntei. ("est-à-dire déifai»er le caractère, autre importante qualité. Dégager
le caractère est évidemmeid le plus impérieux devoir dii portraitiste. Le ca-
ractèri" ne se confond pas avec la ressemblance. On |)eut faire ressemblant,
sans saisir le caractère, telle la photographie ; on peut souligner le caractère et
ne pas taire resseml)lant. telle la caricature. Un bon portraitiste obtient les
deux. I".xeniple. Ingres dans son Berlin l'ainé, la plus magistrale effigie du
xix^' siecK'.
Mais certains pt'iidres, id non des moindres, portent en eux une sorti'
d'idéal ((pu |)ourrail bien n'être souveid (pi une habitude de l'œil et de la main),
et donnent aux personnes les i)lus dissemblables par leurs origines, leur classe
ou leur nationalité, un air de famille. Ils ont une fa('on de dessiner la bouche,
ks veux, les mains, qui api)arente tous leurs modèles. Desbout in ne tomba
jamais dans ce défaut, — (\u\ ne nuisit d'ailleurs ni à la réi)utation de Van
l)\ ck, ni à celle de La Tour! Pour lui. le modèle était le modèle ; en sa présence
il i)erdait le souvenir dvs théories et des systèmes ; il demeurait le sincère tra-
ducteur de ce qu'il avait sous les yeux. On ne connaît pas de lui un seul dessin,
inu' siule gravure, une seule peinture de chic.
Il donnait à la fois la ressemblance et le caractère. Pourtant, aliquando
honus durmilal Honicrus. Il avait dormi au j)ortrait de Barrés. <' Pas ressem-
blant 'dit une annotation d'IIenri Kouart. au bas d'une épreuve de son por-
trait.cpn appartient au ("abinel des Estampes. De même Héluis se plaint, dans
son journal inédit, dont M. Moreau-Nélaton a bien voulu me transcrire une
page, de n'être pas ressi'nd)lant. Cela n'empêche pas ces pointes d'être de
|jrenner ordre.
La galerie au surplus, est d'une \ariètè étonnante. La distance qui sé-
pare une mai([uise d'Haut))oul. une duchesse Colonna, une ]Mme Camus, une
.MmeH()U(piet delaCirye. d'une .ludilh, d'une Moumou, d'une Emma Dauvilliers
est socialement considérable et se trahit par des allures i)articulières. Cette
distance on la perioit dans les gravures du maître. De même un Leroy tout
u beau ■ (pi'il soit, n'est tout de même pas de la même race que Puvis de Cha-
vaiines et cela se retrouve. On fera la même remarque en comparant Legendre,
marchand de tableaux et IlippolyteBabou, avec sa pipe;Babou, malgré sa pipe,
est un intellectuel, comme Banville, au fin \isage, comme Monselet, dont la
grasse figure à double menton pétille d'esprit, comme Hochefort, si nerveux
216
dont il semble que l'on sente mouvoir les traits, comme Zola, pensif, comme
Richepin désinvolte.
Belle i^alerie, en vérité, d'un art (jui ne cherche pas son idéal dans une
stylisation ai)i)auvrissante, mais dans la vérité. Et cette vérité, pour ([ui sait la
percevoir, contient tout l'idéal nécessaire, je veux dire, parlant de portraits
toute la définition du caractère. Bruant, par Deshoutin, a été l'incarnation de
la chanson argotique, qui célébrait la basse pègre, aux environs de 1890, Mme
Gaillard, l'héroïne de la Maison de la Vieille de Catulle Mendés, est la philan-
thrope bonasse et rusée, comme il y en a tant, etc.
Parmi ces [)ortraits de la noblesse, de la grande bourgeoisie, de la science
et des lettres, figurent. — et ce ne sont pas les moins typicjues, plusieurs [)or-
traits d'artisans :
Leroy, Marthelot, Alfred Cadart, imprimeurs en taille douce, Bridault,
planeur, etc. Ils étaient ses auxiliaires et il avait pour eux de l'affection. Ils la
lui rendaient en dévouement et en déférence. Ils aimaient à le voir travail-
ler, à écouter sa parole nourrie, à s'instruire de ses propos. Il axait le prestige
d'une force supérieure et d'une exemplaire conscience artistique. C'est de leur
frétiuentation quasi quotidienne et de leur sympathie réciproque que sont nés
ces portraits.
1/œuvre gravé de Uesboutin est, en fin d'analyse, entièrement original.
Je n'en excepte point les gravures d'interprétation (sauf une vingtaine de pièces,
surtout de la fin), puisque toutes il les grava d'après un dessin de sa main. Il y a
originalité quand la personnalité de l'interprète s'aperçoit. Mais, si nous nous
en tenons à ses i)ortraits ad uiinim, exécutés directement d'après nature, à
cette soixantaine de k chefs-d'œuvre par la hardiesse et la sou|)lesse du faire,
chefs-d'(euvre par la vivacité et l'acuité de l'observation » (Lafenestre). ils
sont, de toute évidence, ses sûrs répondants devant la postérité.
Us auraient placé sa gloire sur une plus solide assise, si d'autres soins les
avaient préservés. Mais le désordre est l'accompagnement de la bohème. L'ar-
tiste qui laisse se détruire son œuvre est coupable envers lui-même, et envers la
collectivité qu'il fruste d'œuvres qui, une fois sorties de ses mains, deviennent
le patrimoine de tous, pour la beauté (pfelles répandent. Mais l'artiste paie
sa négligence. Que serait la renonunée de Desboutin, si ses poinles-seches
avaient constamment frappé les yeux des amateurs, dans la condition où des
épreuves de cette valeur auraient dû se trouver ?
15
Et cei)(.'n(laiil. ccLU' reiioiiiniéc ne lui a pas fait défaut ! L'oeuvre supérieure
s'impose, malgré Loul. ]in vain, le Parthénon saute ! Les statues mutilées
de Phidias alLeslenl encore son génie. A-t-on vraiment besoin de tant de
lémoignages \)m\v discerner la maîtrise '? Un profil effacé, sur une monnaie de
Syracuse, suffit.
Desboulin laisse plus que cela. Son œuvre gravé comprend près de 300
luunéros, dont plus d'une centaine circulent constamment, en tous états, en
lous tirages, ("e soiil aulanl de hérauts qui proclament son talent.
11 n'en faut pas davantage pour faire inscrire son nom au Temple de
Mémoire et l'adjoindre à la liste brève des graveurs dont on doit se souvenir.
Y en a-t-il eu cinquante dans le siècle auquel il a appartetm ?
lid. de Cioncoiirt (Pointe-sèche — Épreuve d'artiste)
218
CATALOGUE
DES
GRAVURES
REMARQUES GÉNÉRALES
DIMENSIONS. — Les dimensions, sauf indications contraires,
sont prises au coup de planche.
TIRAGES. — Quand le nombre dépreuves n'est pas indi-
qué, on peut considérer qu'il n'en a guère
été tiré qu'une vingtaine. Les épreuves d'état
sont encore moins nombreuses car, à l'époque
où gravait l'artiste, les états n'étaient faits que
pour renseigner le graveur.
CUIVRES. — Les cuivres ou zincs ont généralement été
envoyés au planeur après ces faibles tirages.
Nous mentionnons ceux qui existent encore.
Ce travail est extrait du Catalogue de l'Œuvre gravé de Marcellin
Desboutin, avec reproductions de toutes les planches, préparé à la demande
de la Société' pour l'Etude de la Gravure Française.
220
1 ALBARRAX, Chirurjiîien, (vers 1895)
0.395, < 0.318
roio ^^ ^^r^' ^ête légèrement inclinée vers la droite, cheveux crépus divisés nar une
raie au milieu du front, moustache tombante relevée aux pointes Rare. ^
2 ANGLAISE INCONNUE (1888)
0.275x0.195
Hpr«i^H"<ii'i"'*'^'H*''"'"r'^^ ^^ ^'"^ ^^" '^ '^'■o'te, coiffure sur les cheveux, un éventail à
demi déployé dans la main gauche. D'après nature. t^Ntmaii a
3 AUGIER (Emile) (1878)
0.120x0.080
De face, tête légèrement tournée à gauche
«nf P"" portrait fait partie de la suite exécutée pour le libraire Rouquette. Les planches
Il existe quelques épreuves avant aciérage et lettres, qui seules sont rares
fc.u^^î^l^ K^"^'^ ^^^ ^'■.^^^^ ^"^ ^^^ ^'^^^^"s de l'artiste d'après des documents
lures originàîc's' ^^''' Photographie.) Ils ont donc le droit de figurer dan'TsJra:
Cuivres conservés.
L'ASSOMMOIR, Voir BAL DEBRAY. petite pièce.
4 BABOr (Hippolyte) (1875)
0.257x0.108
De face, tête légèrement tournée vers la droite. Il fume une pipe (inil tient de la
main gauche. Directement d'après nature. '
3 états, assez voisins.
50 épreuves.
5 BAL DEBRAY en 1875, ou LE BAL, ou LE MO CI IN-
DE LA GALETTE, grande pièce.
0.235x0.158
Tn canotier est accoudé, debout et penché, sur un guéridon de café, près d'une
grande fille debout en cheveux et les bras nus croisés. Au fond, des comptoirs et des con-
sommateurs, dont un en complet jaquette et en chapeau haut de forme. Pièce signce
au bas, à gauche du monogramme .M), et datée 1878
2 états.
6 BAL DEBRAY en 1875. ou LE BAL, ou L'ASSOMMOIR.
Ce dernier titre app]ical)Ie à cette petite pièce seule ou
encore : SCENE DE BRASSERIE, petite pièce, (1886)
0.140x0.091
Réduction de la pièce ci-dessus, exécutée pour le livre de M. .John Grand Qirteret
Raphaël et Gambrinus. 30 ox. de ce livre ont été tirés sur japon.
221
7 BANVILLE (Théodore de) (1891)
0.176x0.134
Surface gravée : 0.143x0.098
Ue face, avec fond.
Publiée par L' Artiste, en avril 1891, avec lettre : Marcellin Desboutin, Théodore
(le Bannillc: en f>ravure industrielle. (Hielque.s épreuves avant lettre, l'n second tirage
a été fait pour le tome II de ['llisloirc <lv Maiilins, de .M. Henry I"'aure, avec le mono-
graninie M). Pour ce tirage, l'artiste a niofiifié le fond de sa planche, dont la surface
gravée mesure alors 0.147 < 0.092.
Cuivre conserve. Appartient à .M. Crépin-I.eblond, imprimeur à Moulins.
,S BARBIKR (Auoiiste) (1878)
0.120x0.078
De trois-quarts tourné vers la droite.
Collection Rouquette (voir n" 3).
V) BARÉTY, Docteur, (vers 1899)
0..537X 0.413
Pointe-sèche et roulette, sur fond d'iiéliogravure, d'après une peinture de l'artiste.
.V mi-corps, de face, tète inclinée siu- l'épaule droite, la main droite tenant une
canne et la gauche un chapeau.
10 BARROIS, (entre 1886 et 1889)
0.119x0.075
De face. Cheveux droits, moustache et barbe. D'après nature.
BATAILLE, Voir OPÉRA.
11 BAin)KLAIRE.
0.143 :0.10S
Collection Houquctte (voir n° 3).
Quelques épreuves avant le monogramme ftD.
BAUX (M'i^), Voir OPÉRA.
BEAUGRAXD, Voir OPÉRA.
\'2 BÉCHEVET (Comte), (vers 1896)
0.343x0.243
De face, fumant et tenant sa pipe de la main droite, calotte noire sur la tète, toute
la barbe. Rare. Quelques épreuves en noir et on sanguine.
i:-| BÉRENI), P,niHitiier, (1879)
0.470 '0.3.'')5
De face, tourné vei-s la droite. Front dégarni, toute la bai'bi' blanclio, longue et
arrondie.
1 1 BÉRENI) (M'if' Daisy). depuis Baronne d'Estournelles
de Constant, (vers 1879)
0.273x0.195
De face, toque et col de fourrure. D'après nature.
15 BÉRENI) (E(hvard), (1879)
0.240x0.158
De face. (Cheveux rejetés en arrière, moustache naissante. D'après nature, (.f^rère
de la précédente et élève de Desboutin).
222"
K' BIGOT (Charles), (1877)
0.15« --0.120
De face. Cheveux droits, barbe divisée en deux pointes, inoustaclie tombante et
relevée aux pointes. D'aprrs nature.
BLOCH (Rosine), Voir OPÉRA.
17 BOREL (Petrus), (1878)
O.119,-JJ.07.S
De face. Tète longue et mince, front haut, moustache rejoignant la barbe taillée
en pointe.
Collection Houquctte (voir n" '.i).
BOUDOURESQUE, Voir OPÉRA.
18 BOUQUET DE LA GRYE (M^e) ([e profil ;, droite, (1879)
0.214x0.198
Agée, portant une coiffure sur ses cheveux en bandeaux, vue à mi-corps, l'avant-
bras droit posé sur le bras d'un fauteuil à peine intliqué. D'après nature.
19 BOUQUET DE LA GRYE (M'^o) assise et totiriiée vers
la gauche, (1879)
0.'237x 0.158
Le visage est presque de face, la joue appuyée sur la main droite, la main gauche
reposant naturellement sur la jupe. Pèlerine sur" les épaules. D'après nature.
•2(1 BOWLES, Critique d'art anglais, (1875)
0.250x0.151
Assis, tourné à droite, tète nue, cheveux avec raie au milieu, moustaclie tombante,
sans barbe, redingote boutonnée II tient de la main gauche, appuyée sur un genou,
sa canne et son chapeau. D'après nature.
21 BRACKEX (William), (vers 1879)
0.240x0.100
Mari de la fille du graveur. II est assis dans un fauteuil à haut dossier. pres([ue de
face, les deux mains aux doigts croisés posées sur ses genoux. D'après nature.
22 BRACKEN père, (vers 1872)
0.170x0.130
.\ mi-corps, tête de face, légèreiuent tournée vers sa gauche, entièrement rasée,
lunettes, traits creusés par l'âge, sinus accentué du menton, cravate ruban, vêtement
et fond. D'après photographie J'ointe-sèche sur héliogravure.
2:i BRACKEN (M^^e) et SON EILS ROBERT, ou LA 1-ILLL
DE DESROUTIX. cm MA FILLE (vers 1879)
ti.214 ■ 0.200
Une jeune femme au visage charmant et doux, se tient debout et appuie contre
son épaule un petit garçon assis sur un support indistinct, assezélevé pour que les che-
veux du bambin touchent la joue droite de sa maman. Sur un dessin fait d'après pho-
tographie.
24 BRIDAlT/r, Planeur sur métaux, (vers 1878)
0.445 x<l.,'M7
De face, légèrement tourné vers la droite, cheveux bien peignés, moustache cirée,
col droit ; tête de sous-officier. D'après nature.
223
•>ô BRUANT (Aristide), Chaiisoiuiier, (1<S95)
0.417x0.329
Pointe-sèche sur héliogravure, d'après la peinture eNi)osée à la Société Nationale,
en 1895.
C'est le Bruant du Mirlilon, avec son grand feutre rejeté en arrière, son niac-
farlane et son fameux caclie-nez rouge.
•2(^ BRUANT (Aristide) (189;))
o.:mo ■ o.2;?.s
l.ithograpliie.
Tirage ordinaire sur papier mécanique, portant celte indication : /ni/;. I.rinrrrirr,
Paris, et ces cpiatre vers, tirés de Philosophe, la pièce initiale de J^ans la Hue :
Et pis après, c'est la grand' sorgue.
Toi, tu t'en iras chez Maquarl,
Moi, j'irai p't'rt'ben à la Morijue.
Ou ben ailleurs, ou ben (uit'part.
\. HRUANr.
Quelques épreuves sur .Japon, avec les vers, mais sans la mention d'imprimeur.
•,>7 BURTY (Mlle Madeleine, deptii.s :\l'"<^ Ilaviland), (1875)
0.210 -, 0.1. 5.S
De face, chignon haut, col masculin aux IjouIs recoinhés. D'après nature,
^.>S BURTY (Pliilij)pe), Critique d'art, (1875)
0.291x0.218
Assis de face, la jacpietlc ouverte rejetée en arrière, la main droite posée sur la
cuisse, le bras gauche ])assé derrière le dossier de la chaise et ne laissant voir que la
main fermée qui gesticule. Travail arrêté à mi-mollets. D'après nature. Hare.
2 états. Dans le l<'', le vêtement n'est ])as ombré et le pan droit de la jaquette
est à peine amorcé.
?9 CADART (Alfred), Imprimeur en taille donee, (1875)
0.158x0.120
De face, tête tournée du côté gauche, cheveux ondulés, moustache courte tom-
bante. D'après nature.
:îO CAILLET, Chef de bureau dans un Ministère, (vers 1878)
0.150;: 0.107
Vieil homme à la figure chagrine, cheveux gris, moustache grise, barbe en pointe,
presque blanche, de face accoudé sur une table invisible, les deux mains croisées.
D'après nature. Rare.
'M CAUJAS (Mme Hector de), pièce aj)pelée aussi NINA DE
VILLART (1879)
0.2.37x0.158
.\ssise, coiffée d'une toque foncée à plume blanche, la tète appuyée sur la main
droite, un griffon lilanc sur les genoux. D'après nature. Hare.
n y a quelques épreuves ])ortant en remarque au bas, à droite, un petit Desboutin
en grand chapeau, mais tête à droite, au lieu de tête à gauche.
224
32 CALLIAS (M""' Hector de), (Inixirinc phnidu'. (1X79)
0.196- 0.147
La pose esl redressée, mais le costume et raltilude sont restés les mêmes. I.e
toutou est plus poussé, coiiuiie si on ;ivait demandé à l'artiste de faire aussi le por-
trait du chien.
(A'tte iilanche. moins vive que la précédenle, doit a\<iir élé exécutée a|)rès coup,
sur un dessin.
:VA CAMUS (Mn^e) (1873)
().2;^!i (1.1 m
Assise, la tèle de face, le buste tourné à droite e( les mains croisées sur son niron.
D'après nature. Hare.
3 états.
34 CAMUS (M'"e) A L'KVENTAIU (1872)
0.200 ;■: 0.1 17
.\ peu près même expression et même attitude (pie ci-dessus, mais |;i main droite
tient un éventail de plumes. D'après nature. I^are.
Nous connaissons une épreuve avec fond noir m()noly|)é.
CAHON, Voir OPÉRA.
35 CARRIEH-BELURUSK, Statimire, (enlrc l.SSC, vi 1889)
0.1 (ili -rO.l'J.'l
De face, tcte légèrement tournée sur sa franche. l{x|)ression énerj^ique. I)'a(>res
nature. Rare.
36 CHABOT (M^e), Daiiseusc de rOpcni. ou .liaXl-: l-^LLK
AU CHIEN (1888)
0.200 •' 0.1:51
Pointe-sèche avec dessous d'héliogravure.
Assise sur un fauteuil, corsage décolleté et bras nus. une médaille sur la poitrine,
elle tient un petit chien noir sur ses genoux : nn boimet léger recouvre ses cheveux.
D'après une peinture.
.3 états, dont le dernier avec fond noir mom)lypé.
37 CHANTEURS DES RUES, graiulo pièce, (1872)
0.30.^) > 0.217
Une grande fennne sèche avec un panier au bras droit, im gamin en képi, jouant
du violon à l'ilaliemie, chantent. I""ond de maisons de la place C.licln. a\ec une station
de fiacres.
4 états, dont les trois jiremicrs avant le fond de maiso:is et les fiacres.
38 CHANTEURS DES RUi^S, petite pièce, (1872)
0.11. s ■ 0.700
Même disposition des personnages, avec des différences de détail assez sensibles.
.\u fond, une maison avec une porte et une fenêtre aux volets ouverts.
39 CHANTEUSE DES RUES, (vers 1887)
0.'2.')2 0.1-1 S
Femme en cheveux, l'air conunun et d'un dessin médiocre. Il est probable ipic
cette pièce n'est ])as de Desljoutin, mais .M. Béraldi l'a attribuée à cet artiste sous le
n' 152 de son catalogue, au mot Desboutin, dans ses Graveurs du XI X' siècle.
10 CHASSAING. Docteur, (1880)
0.136x0.089
De face, jeune, front dégagé, barbe courte rejointe par la moustache. D'après
nature.
11 CHÉRAMY, Avoué et Collectioiiiieur, (1890)
0.200x0.210
Poinle-sôche sur héliogravure.
De face, binocle, cheveux avec raie au milieu du front, favoris partant de la com-
missure des lèvres. Indication des bras croisés.
Il y a des épreuves en sanguine et des épreuves en noir.
4-2 CHERFILS (1877)
0.197x0.151
Assis dans un fauteuil tourné à droite, le visage et le buste presque de face. Le bras
gauche est posé sur le bras du fauteuil et les deux mains s'enlacent. Moustache et barbe
taillées en pointe ; cheveux séparés par une raie à droite. D'après nature.
CHIEN ET CHAT, Voir TROIS AMIS (LES).
i;; CIIONNOF, Docteur, (1885)
Debout, tourné à gauche, appuyé sur sa canne. D'une dimension exceptionnelle.
1 I CHOPIN (Louise), (vers 1895)
0.310x0.280 (à la gravure)
Tète de face, un peu tournée vers sa droite, les cheveux pendants séparés par une
raie au milieu, les mains aux doigts croisés ramenés vers la gauche, contre le menton.
D'après nature.
Fort peu d'épreuves.
45 CIRASSE, Imprimeur, (vers 1895)
0.197 X 0.1.3.5
De face, tète très légèrement tournée à droite. Cheveux un peu en broussailles,
moustache toml)ante, barbe rasée, front plissé, type du prolétaire.
U> CLARETIE (Jules), Littérateur, (1878)
0.120x0.080
Tète seule, d'après une photographie, de trois-quarts h droite,
("ollection Rouquette (voir n° 2).
17 CLARETIE, (vers 1886)
0. 227 :■ 0.148
Assis de face, la jambe droite croisée sur la jambe gauche, la main droite posée sur
la cuisse droite, le bras gauche sur l'appui du fauteuil, la main pendante. La tête est
seule ]iousséc, le vêtement n'est qu'indiqué. D'après nature.
IS CLARETIl-:, (vers 1880)
0.185 X 0.115 (à la gravure)
De face, le corps un peu tourné vers la droite, les doigts de la main droite appuyés
sur les pages d'un livre ouvert sur les genoux. Fond. D'après nature.
l'Ji cet état, la pièce est médiocre, la main étant manquée. Peu d'épreuves.
Du premier état, tête seule, il y a également fort peu d'épreuves.
226
49 COHEN (Henry), auteur de VAmalrur de livres illustrés
au xixe siècle, (1878)
0.118x0.080
De face, lète longue, chauve, moustache courte, nez et lèvre inférieure sémites,
physionomie spirituelle. D'après nature.
Exécuté pour Pvoiupu'tle. mais en dehors de la suite désignée au n" .3.
5(1 COLLIN, Docteur, médecin des Fnlies-nerf/êre, (1879)
0.199x0.170
Assis, le corps tourne à droite, les mains croisées sur le ventre, la tôte de face,
chauve, avec des favoris et une moustache encore noirs. Lunettes. D'après nature.
ni COLONNA (Princesse, née d'Affrv), en art, MARCELLO»
snilpteiir, (1873)
0.228 xO.ie.'i
Assise (le iirofil à droite, les mains aux genoux, la tète coiffée d'un chapeau avec
plumes et rubans, robe et corsage de soie à larges ravures verticales. D'après nature.
l'"' état, tète seule (3 épreuves) ;
2® état, le col du corsage est fait,
.3" état, le corsage juse^i'au dessous de la gorge est achevé. Il'v a une épreuve en
bistre.
4« état, la planche est achevée. Il y a une épreuve avec fond monotype.
5« état, corrections au chapeau, à la robe, fond derrière les hanches, signature en
toutes lettres.
52 COQUELLN CADET, de la Comédie-Erançaise, (1881)
0.472x0.355
Tête seule de trois-quarts tournée vers sa droite, grandeur nature.
5:^» COURBET (Gustave), Peintre, (1878)
0.1 (il X 0.108
De face, à mi-corps, le buste tourné vers la droite. D'après la dernière photogra-
phie de l'artiste.
A paru en tète de GusUive Courbet cl son œuvre, par Camille Lemoiinier.d.emerre.
1878), signé du monogramme .YD, et indication de VImp. Cndurl.
Quelques épreuves avant aciérage, le monogramme et la lettre.
54 CROQUIS (planche de), (vers 1889)
0.210x0.290
De haut en bas : Marine ; Desboutin, assis et fumant ; 3 tètes d'enfants : petit
profil de Desboutin à droite ; un moulin ; un chien : un portrait d'homme (Soldi ?).
Planche en collaboration avec le Comte Lepic. Sur une épreuve cpii apjiartient à
.M. Moreau-Nélaton et qui ])rovient de Hurly. celui-ci a noté : ■ Les tètes d'enfants et la
tète d'homme sont de Desboulin ; le reste est de M. Lepic Cette attestation est exacte
et conforme à ce que révèle la facture. Mais on a parfois attribué le Desboutin fumant
à Guérard, la marine et le moulin à Buhot et le chien à Michel de l'IIay. .\utant
d'attributions fantaisistes.
55 CROQUIS D'ENFANTS, (vers 1875)
0.1-12x0.198
Cinq croquis d'.Vndré (Mycho), de .Fean (Chiquine), et de leur petite sœur, enfants
de l'artiste. L'un est sur un cheval de bois, l'autre joue au soldat avec un casque de
papier et un sabre de bois, la troisième est dans sa chaise d'enfant. Rare.
907
nfi CUISINIÈRE (LA), (vers 1875)
0.096x0.077
Près de son fourneau, au-fiessus duquel pend une louche, la cuisinière est debout
de profil à droite, la tète presque de face.
:>7 CUVILLIER (Eugène), Peintre, élève de Dcshoutiii, (1889)
0.159x0.110
Tète seule, de trois-quarts à droite. Front dégarni, visage long, nez retroussé,
barbe et moustache. D'après nature.
Quelques épreuves en sanguine.
r>S DAILLY, (Uni.s MES BOTTES, de V Assommoir, (1876)
0.181 xO.lOfi
Debout à mi-jambe, veston ouvert sur la chemise, pantalon de toile, casquette
en arrière de la tète ; il coupe en riant, un morceau du pain qu'il tient sous le bras.
D'après le tableau de l'auteur.
DAME A LA MANTILLE, Voir RAISIN (M'^e).
r)V) DAUDET (Alphonse), Écrivain (1878)
0.120x0.078
Tète seule, de face, légèrement tournée à droite, avec ses cheveux al)ondants et sa
l)arbe peu fournie. Collection Houquette (Voir n" 3).
r.O DAUVILLIERS (Emma) on UNE PARISIENNE,
(vers 1889)
0.390x0.257
A mi-corps, tournée vers hi droite, un chapeau cloche sur la tête, visage riant, les
mains sur la jupe, la gauche tenant un éventail ferme. D'après nature.
2 états.
61 DEGAS (Edgar), Peintre, (1876)
0.090 >: 0.074
Tète seule, de profil l'i droite. D'après nature.
6-2 DEGAS ALT CHAPEAU, ou DEGAS EN RUSTE (1876)
0.225 0 144
l" état. En pied, portant la redingote, la main gauche au creux de la hanche,
le chapeau haut de forme rejeté en arrière, Degas semble regarder quelque chose ou
écouter quelqu'un, l.'rci! ne suit jias la direction du corps, tourné vers la gauche. D'après
nature. Rare.
■2<' état. - Les jambes étaient trop courtes. L'artiste les a effacées à un centi-
mètre au-dessous de la redingote.
Une vingtaine d'épreuves.
DEGAS LA MAIN SUR LA BOUCHE
Deux pièces, l'une entièrement de profil à droite, l'autre de trois-quarts seulement
à droite.
Ces deux ])ointes- sèches sont assez fréquemment attriituées à Desbontin, mais,
selon toutes probalités, elles sont du peintre de Nittis.
22S
DESBOUTIN PAR LUI-MÊME
Tous les poiliails que Desboulin ;t lails de lui-ineiiie unt élé gravés d'après des
tableaux et des dessins. 11 se prenail coiislamnieut i)our mod(Me et, dans le même
temps, se peignait et se dessinait. La meilleure peinture était généralement envoyée
au Salon. I! y envoya aussi des gravures: L'Homme ù la pipe, en 1879; L'Homme au
grand chapeau, en 1889 ; Desbouliii tenant sa pipe de la main gauche, 1897 ; Fumeur
au grand chapeau, 1898, toutes pièces désignées aux livrets sous ces dénominations :
« Mon portrait ou portrait de l'auteur. «
6::! L'HOMME A LA IMPE (1879)
0.450x0.375
C'est la pièce maîtresse et la plus réputée, lille est d'ailleurs superbe de vigueur
et de décision. L'artiste se montre de trois-quarts à droite, les cheveux abondants et
bouclés couverts d'une calotte plantée en arrière, la barbe courte et noire rejointe par
les moustaches qui laissent passer la pipe en terre au court tuyau. - L'allure est magni-
fique de puissance. Cette tète qui vous regarde, en fumant sa pipe, respire et s'anime, et
elle est exécutée avec une carrure I... < (Iluysmans, L'Art moderne. Le Saion de 1879.)
On compte 5 états de cette planche, mais il ne faut pas oublier que Desboutin
retouchait presque toujours ses cuivres en cours de tirage et que ces corrections inces-
santes, la plupart du temps légères, n'en constituent i)as moins autant d'états. En ce
qui concerne L'Homme ù la pipe, nous n'avons jamais rencontré deux épreuves abso-
lument semblables ; nous nous bornons à indiquer les plus sensiblement différentes.
1'='^ état. ■ — Non signé. La chemise ainsi que la cravate sont très claires. Il y a des
lumières entre la calotte et les cheveux, une autre lumière sur le devant de la calotte.
Les trois pointes de la barbe sont nettes et foncées, de même que les cheveux à droite.
Les travaux du vêtement qui semble léger, sont exécutés par petites masses. A l'angle
gauche inférieur, la gravure est arrêtée par quelques traits verticaux. Il y a également
quelques traits verticaux dans le blanc de gauche, derrière le cou.
M. Ed. Sagot a eu en sa possession une épreuve de cet état.
Une épreuve intermédiaire entre cet état et le deuxième a passé dans la vente
Beurdeley-, (18 mars 1921), cataloguée l'"' état. - Voici les différences :
Aux trois pointes de la barbe, quelques traits ont été ajoutés pour donner du
vaporeux, et les traits verticaux, qui arrêtaient la gravure à l'angle gauche inférieur,
ont disparu.
Cette épreuve s'est vendue 40U fr., plus 17. 5U U/U.
2« état. — Signé du monogramme M), au bas à droite. Il y a une lumière nue au
sommet du front, à gauche (droite du spectateur). Les boucles des cheveux sont com-
pactes et très chargées de barbes. L'une d'elles, un peu plus haut que l'arcade sour-
cilière, se termine par une courte mèche roide, composée de deux traits. La lumière
étroite, au-dessus de la moustache c|ui rejoint la pil^c, consiste en une réserve blanche,
coupée d'imperceptibles hachures. Le fond de la calotte est relativement clair, de même
que le vêtement, d'aspect gris foncé. Quelques traits, comme d'essai de pointe, der-
rière la nuque, ù 2 centimètres du bord. Il y a enfin, au-dessus de la tête, une ligne hori-
zontale, qui a disparu dans les états postérieurs.
Une épreuve de cet état, qui a passé dans une vente du 30 mars 1916, portait au
crayon n° 16.
3e état. — Monogramme. La lumière au-dessus du front est atténuée par quelques
légers traits. La courte mèche de deux cheveux, au dessus du sourcil, s'accompagne
de plusieurs autres. L'étroite lumière au-dessus de la moustache est nettement coupée
de hachures verticales ; le fond de la calotte est moins clair, le vêlement de même,
et il y a de nouvelles hachures verticales sur le plastron de la chemise. Lnfin, le trait
horizontal au-dessus de la tête et les traits derrière la nuque ont été effacés.
Une épreuve de cet état faisait partie de la collection Jules Claretie et lui était
dédicacée.
229
Il existe des épreuves de eel état (el pcut-êlre des autres) où, probablement par
suite de l'essuyage, le niouograuuue u'est pas veau.
40 état. — INlouogramiue. Le vêtement a été éclaircl par de larges coups de grat-
toir, obliques et horizontaux, qui ont enlevé les barbes. Le modelé du visage a été
retravaillé et on remarcpie une ligne verticale qui part du milieu de l'oeil droit jusqu'à
la moustache.
5c étaL - iMonogranune. La i)lanche est l'aliguée et le vêtement a perdu de sa
vigueur. Mais la figure a été retouchée, notanunent sur le nez et la paupière inférieure
gauche. En cet état, la planche est plus dépouillée, mais plus nuancée.
Une é])reuve de cet élat, (jui ap])artient au Dr Landau porte (juelques retouches
au burin, notanunent prés de l'œil gauche.
Nous ne pouvons savoir combien d'épreuves ont été tirées de cette planche ma-
gistrale. M. Béraldi croit qu'il n'existe pas plus de cinq à six épreuves parfaites, c'est-à-
dire avec de belles masses d'ombre d'un noir velouté, encadrant le visage, car la planche
n'a pas été aciérée. Il ajoute : « Desboutin va la retoucher ».
Cette retouche, connue nous l'avons dit, a été constante, presque pour chaque
épreuve. De là. les états. Mais, en comprenant les épreuves d'essai « que je me réserve
exclusivement «écrivait l'artiste à M. J. Grand-Carteret, le 4 août LS88,et dont il don-
nait des exemplaires à son élève Maurice AUiou, à Gaston Latouche, à Claretie, à
Silvestre, à (piel chiffre ont pu s'élever les tirages ? car il y en eut plusieurs (au moins
deux, en 1879 et en 1888) ? Desboulin n'en savait rien lui-même. Il écrivait à un ama-
teur de Nantes, vers 1900 : « Le prix de cette épreuve est de cent francs, prix maintenu par
moi pour tous les exemplaires de cette planche, qui a été tirée à un nombre très res-
treint, et dont les épreuves très rares, font aujourd'hui prime sur notre place de Paris. »
Mais cela c'est un peu du boniment, ce ne sont pas des chiffres. Nous ne croyons pas
([u'il y ait plus de trente à quarante épreuves en circulation et le cuivre est perdu.
L'Homme à la pipe a obtenu une médaille de 3'^ classe au Salon de 1879 et une
Médaille d'honneur à la Gentennale de l'Exposition universelle de 1900. Légitime
récompense attribuée à un chef-d'œuvre.
(Vl L'HOMME A LA PIPE, petite plaïulie, (vers 1895)
0.114x0.077
Simple croauis, sans doute fait d'après la célèbre planche, ou d'après un dessin de
cette épocpie, lequel a été reproduit en tête du sonnet dit par A. Silvestre au banquet
offert à Desboutin à l'occasion île sa nomination dans la Légion d'Honneur. Le dessin
n'est pas absolument sendilable à cette petite pointe-sèche.
():> LE CAPrrAN, (vers 1895)
0.395 y 0.292
Pointe-sèche sur héliogravure.
Tète seule, de trois-quarts à gauche (spectateur) toque, sur les cheveux, l'air fiera
bras. Le dessin à la plume, rehaussé d'un lavis à l'encre de chine, qui servit de base à
l'hélio, fut exécuté par l'artiste d'après une photographie de son fils aîné.
ce. DESBOUTIN DE FACE, TENANT SA PIPE DE LA
MAIN DROITE, ou FUMEUR A LA FOURRURE,(1898)
0.515x0.375
Encore une très belle pièce 1 L'artiste vieilli s'est représenté de trois quarts à
droite, la lumière frappant le visage sous le feutre mou ainsi que la main qui tient la
pipe, une main superbe.
r>7 DESBOUTIN TENANT SA PIPE DE LA MAIN GAUCHE
ou L'AUTEUR FUMANT, A MI-CORPS, (1897)
0.199x0.159
A mi-corps, assis de face, le chapeau planté sur la gauche de la tête, celle-ci inclinée
également à gauche et tournée aux trois-quarts du même côté. Il tient sa pipe de la
main gauche, l'autre main posée sur sa cuisse. Fond.
2 états. — Dans le l""^, le fond ne couvre pas toute la planche.
230
68 DESBOUTliN ÂGÉ, (vers 1898)
0.446x0.350
Pointe-sèche sur héliogravure.
Tète seule, de trois-c|uarls à gauclie. l'eutre et iiiaiiU-aii avcv- cul de fourrure. La
figure est vieillie et fatiguée ; ce n'est plus le ■ .Masaccio de riloininc :'i la pipe. D'apnS
un portrait peint qui appartient au Df .Joseph Landau.
69 DESBOUT IX. lith()grai)hie (1894),
0.300 0.2LS
Tète seule, de trois-cjuarts à droite, le regard de face.
Publication des Peiiilres-Lillwf/rdphcs. alhum trimestriel.
Il y a des épreuves sur Japon fort, avec, en reniar(iue, une ])ii)0 de hruscre, jiour
les exemplaires de luxe de la même i)ul)lication.
Ce portrait et le portrait de P>ruaiit (n"2i>) sont les seules littiograpldes de Des-
boutin.
70 FUMEUR ALLUMANT SA PIFE (1895)
0.620x0.400
Pointe-sèche et roulette, sur zinc.
En buste. La tète nue, de face, un peu inclinée sur ré[)aule gauche, l'artiste
allume sa pipe, dont il tient le fourneau de la main gauche.
Commande de l'Etat.
Dans un 1«"" état, les travaux sont arrêtés au-dessous de la main droite.
71 FUMEUR AU GRAND CHAPEAU (1888)
0.2.50x0.192
Coiffé d'un vaste chapeau mou, aux larges ailes. Desboutin, de profil à gauche,
assis dans un fauteuil, fume une pi])e au tuyau courbé. Une quinzaine d'épreuves con-
nues.
72 L'HOMME A LA PALETTE (1885)
0.235x0.160
Pointe-sèche sur zinc.
En buste. De face, visage un peu tourné vers sa gauche, pipe, chapeau rejeté très
en arrière, palette et pinceaux. D'a])rès un portrait fait à Florence, vers 1865.
Très rare.
73 L'HOMME AU GRAND CHAPEAU, oraiide planche, (1888)
0.244x0.187
Pointe-sèche sur hélio.
Assis, tourné vers la gauche, la tète presque de face, et le grand cha])eau de cette
époque sur les cheveux, vêtement boutonné et jabot blanc.
2 étals fort peu différents. Dans le deuxième, le vèlemenl est renforcé par des traits
verticaux el d'autres obliciues, de gauche à droite, sur la poitrine.
Pièce réputée et assez rare.
Le catalogue du salon de 1888 i)orte : eau-forte et pointe-sèche. Mais le terme eau-
forte, comme ailleurs celui de morsure, doit s'entendre d'un dessous héliogravé.
74 L'HOMME AU GRAND CHAPEAU, petite plnnche, (1890)
0.200x0.160
Réduction par l'héliogravure de la planche précédente, avec retouclies à la pointe-
sèche
Pm Publiée par L'Arlistc (Avril 1890), les Annales bourbonnaises (octobre 1890) et
La Quinzaine bourbonnaise (30 décembre 1893).
Toutes les épreuves portent en gravure industrielle : Mnrrrllin I>rslhnilin, par
lui-même. Imp. Nys.
231
On peut joindre à cette liste la pièce suivante :
DESHOUTIN (1901)
0.180 X 0.079
lin busle, à droite, la ligure presque de face, son grand chapeau d'artiste planté sur
ses cheveux en révolte.
Héliogravure pure, par Arents, d'a|)rès une photographie de Chiquine, publiée
dansle numéro de juin 1002, du linÙclin de lu Sorirlr ({' lùjuilalion et des Beaux- Arts du
Bourbonnais.
75 DESBOUTIN (Andrù), dit MYCHU, à huit ans, (1878)
O.llGx 0.088
En buste. La lèle seule faite, de face, souriante et les cheveux en l)roussaille. L'en-
fant est appuyé sur une table, les bras croisés. D'après nature.
Fort jolie pièce. Kare.
7f) DICSHOUTIN (André) ou TÊTE D'ENFANT, (vers 1875)
0.140x0.100
Tète seule, de face, l'air un peu boudeur, les cheveu.x peignés avec une raie à
droite et retombant sur le front en lourdes boucles.
77 DESBOTTIX (M'»e), ou TÊTE D'ÉTUDE, (vers 1890)
0.1-11 -, 0.006
Tète seule, de face un peu tournée vers sa droite, les yeux baissés. Croquis d'après
nature.
Mue é|)reuve connue. Collection Moreau-Nélalon.
78 DESBOl'TIN, Cecchino ou Chiquine (.Jean), (vers 1888)
0.520 o.;iy2
Héliogravure retouchée à la jxjinte.
De face, un chapeau mou de forme haute sur ses cheveu.x frisés. Figure riante.
Le dessin original appartient à la Bibliothèque d'Art et d'.\rchéologie.
Quelques épreuves dédicacées et signées par l'auteur.
Dans la gravure le dessin est inversé.
79 DESHOUTIN (Jean), petit iorniat, (vers 1888)
0.270 X 0.201
Même description, mais la tète est dans le même sens que le dessin.
Le fond d'hélio est léger et la pièce reste grise.
80 DESBOU-ITN (Marie), ou ÉTUDE DE JEUNE FILLE
APIHJYÉE SUR UNE CHAISE, (vers 1878)
0.160x0.118
lin l)uste, assise, tournée vers sa droite, le visage long et jeune presque de face, un
peu incliné vers l'épaule gauche. Cheveux relevés et retenus par un nœud de rubans, à
la naissance de la natte pendante. Bras croisés. Proliablement d'après un dessin plus
ancien, fait à l'Ombrellino, vers 1867.
81 DESCHAMPS, Marchand de tableau.v à Londres, (vers 1875)
0.220 < 0.132
l'ète seule, de face, les cheveux abondants et frisés, la moustache fine, les cols de la
chemise et du vêtement faits. 1-ond. D'après nature.
Ce i)orlrait i)asse parfois, à tort, pour être celui de Léon Cadart, fils d'.\lfred
t-adart, inq)rimeur en taille-ilouce.
2 états. - Le [)renuer avant le fond el les travaux du col et du vêtement. Une
épreuve avec fond monotype.
232
8-2 i)ESCllAMi\S, (même date)
0.148/0.110
Tèle seule, de face, inclinée sur l'épaule gauche ; clieveuK houclés, petite mous-
tache, mouche sous la lèvre inférieure. D'après nature.
DESGRANGES (M"^^), Voir HITTEl^.
DEUX SCEURS, Voir LASSUS (Les dctix sœurs).
8:i DUJARDIN-BEAUMETZ, Iiii^ôiiieur, Irùre de l'homme
politique (vers 1888)
0.159,. 0.11 '.t
Tèle seule, de face. Clieveux abondants relevés en toupet, raie à droite, mous-
tache tombante, rejoignant la barbe au menton. D'après nature.
2 états. Le dossier du fauteuil, indiqué dans le i)remier état, a disparu dans le second.
84 DmiAS FILS, i^i-ande pièce, (1896)
0..377 ,< 0.28(j
Le célèbre dramaturge est assis à mi-corps en costume de travail, sorte de vareuse
boutonnée jusqu'au col, la tète tournée de trois-quarts vers sa gauche, le bras droit
accoudé sur le bras d'un fauteuil, la main gauche à demi-fermée appuyée sur la cuisse.
D'après un document. Très belle œuvre.
2 états. Dans le premier, la vareuse n'a pas reçu tous les travaux.
85 DUMAS FILS, petite pièce, (1878)
0.119X0.077
Tête seule de face.
Collection Rouquette (Voir n° 3).
86 DUMAS (Herald) (1874)
0.226x0.148
Assis, tourné à droite à califourchon sur une chaise, les bras posés sur le dossier et
les mains se rejoignant. La tète chevelue, à la barbe et à la moustache peu fournies, est
presque de face. La composition est arrêtée à mi-jambes. D'après nature.
87 DURAXD-RUEL, Marchand de tableaux, (1882)
0.197x0.147
Tête inclinée vers l'épaule gauche, presque de face. Visage souriant. Vêtement
jusqu'à mi-poitrine. D'après une œuvre de l'auteur. .Monogramme.
88 DURANT Y, Critique d'art, (vers 1876)
0.227x0.147
De face, front légèrement dégarni, barbe et moustaches. Fond. D'après une pein-
ture de l'auteur.
2 états. Le V avant le fond.
Le dessin, inversé, existe dans la collection Desboulin.
8'J ÉDUCATION \)K POLICHINELLE, ou ENFANT AU
POLICHINELLE, ligure tournée vers la droite, (vers 1878)
0.295 X 0.227
.\ndré, fils aine de lauleur, fait gesticuler un polichinelle. 11 est représenté assis,
à Uil-corps, la veste ouverte sur la chemise déboutonnée au col.
233
16
*l() ËDUCA'l'ION 1)]^: POLICHINELLE, figure tournée vers
la gauche^
Mêmes dimensions cl date.
La composition est entièrement différenlc. L'enfant toujours assis, sermonne le
polichinelle qu'il menace du doigt.
91 ENFANT A LA TASSE, ou MYCHO BOIT, (1879)
0.120x0.080
Un enfant vu de dos, la jambe gauche d'équerre avec la jambe droite, les coudes
sur un guéridon, boit une tasse de lait. D'après une peinture. Charmante pièce.
9-.> ENFANTS DESBOUTIN A LA VOLfURE ou LE PETIT
CHARIOT, ou FRÈRE ET SŒUR, (vers 1875)
0.220x0.200
iMycho, un genou à terre, montre à une petite sœur dans sa voiture, un polichi-
nelle dont elle s'émerveille. Fond d'arbres. (Cette petite fille, l'un des neuf enfants de
l'artiste, est morte en bas âge.)
9:^ ENFANTS DESBOUTIN A LA VOITURE, format
réduit, (vers 1875)
0.200x0.174
Le fond est moins l'ait (jue dans la pièce précédente et les figures des enfants sont
moins grandes de 2 m/m.
91 ENFANT AU CHIEN
0.200x0.280
Petit garçon à terre, s'appuyant sur un gros chien couché, tous deux tournés vers
la droite. Vague fond de paysage. Une épreuve dans la collection Beurdeley.
ENFANTS DE L'AUTEUR, Voir PREMIERS PAS.
ÉTUDE, Voir FEMME ACCOUDÉE.
ÉTUDE DE FEMME, d'après un modèle de Montmartre,
Voir JUDITH.
9.) ÉTUDE DE NU FÉMININ, (vers 1887)
0.306 X 0.070
l'enune nue debout, le corps presque de face, la tète de profil li droite, les deux
mains réunies appuyées sur un bâton.
Une épreuve connue.
FAMILLE (MA), Voir PREMIERS PAS.
9C. FEMME ACCOUDÉE LA MAIN SUR LA BOUCHE,
EFFET DU SOIR (1856)
0.125x0.103 (à la gravure)
De face, à mi-corps, accoudée sur une table (?) la main droite couvrant la bouche,
la gauche allongée sur le support. Vif éclairage de droite. D'après nature.
-234
La première pointe-sèche de l'auteur. Remarquée dans l'atelier de Desboulin par
Degas, .Jean Béraud et de Nittis, elle fit sacrer Dcsboutin graveur par Degas.
97 FEMME ACCOUDÉE, ou LA PREMIÈRE FEMME
DE L'AUTEUR, ou Étude, (1882)
0.113 : 0.14(3
A mi-corps, de face, les bras posés sur une table, le buste en avant, la tète inclinée
sur l'épaule droite.
3 états. Le premier avec la signature et la date 1882 est seul rare. Deuxième état,
signature effacée et planche reprise. Troisième état publié par V Artiste, avril 1880,
avec la signature gravée industriellement et le titre Etude.
98 FEMME AU CHAT (1895)
0.620x0.440
\ue à mi-corps, la tète de face, inclinée légèrement sur l'épaule droite, les mains
tenant un chat maintenu debout.
Flanche acquise par la Ville de Paris, 200 épreuves avec lettres.
Quelques épreuves d'artiste, avant lettre (10 environ), sur Japon.
99 FEMME AU CORSAGE BROCHÉ (1856)
0.128x0.084
En buste, presque de profil à droite, mais le visage légèrement tourné vers le
spectateur, de façon à montrer l'œil droit et un peu de la joue. Cheveux coiffés en ban-
deaux. Corsage à palmettes brochées avec étroits rubans de velours noir autour du col
échancré et de l'emmanchure. Fond. Hau-forte et pointe-sèche. D'après un tableau
italien C?) Deux épreuves connues. Celle de la collection de l'auteur' porte ; . .Ma pre-
mière gravure. Florence, 1856. •>
100 FEM:\IE au métier, (vers 1889)
0.163x0.120
Jeune femme assise, tournée à droite ; la tète presque de profil est appuyée sur le
bras droit, posé sur un métier à broder. Coques de rubans dans les cheveux, Vêtement
esquissé. D'après nature.
loi FEMME AU TOUTOU, ou AU CHIEN, (vers 1878)
0.1-20x0.078
A mi-corps, assise dans un fauteuil, la figure de face, le buste tourné vers la droite
appuyant contre sa poitrine un caniche qu'elle tient des deux mains. D'après un tableau
de l'auteur, avec reprise sur nature.
3 états, pr état, traits verticaux dans le visage, presque disparus dans le 2* état,
complètement enlevés dans le 3^.
10-2 FEMME COIFFÉE D'UNE FEUILLE DE CHOU,
Type de Niçoise, (1899)
0.518x0.387
De façe,tètelégèremcnt inclinée vers l'épaule gauche, rieuse, une fcuilledechou sur
les cheveux, des anneaux d'or aux oreilles. D'après un tableau de l'auteur : Bouque-
tière niçoise. (Salon de 1890). Pointe-sèche sur héliogravure.
I0:i FEMME DU PEUPLE METTANT SON CARACO,
(Vers 1895)
0.300 X 0.237
Elle a déjà passé la manche gauche et va enfiler la manche droite. La chemise gros-
sière découvre le cou et l'épaule. Ses yeux baissés regardent ce qu'elle fait et la main
gauche tient le col du vêtement pour l'empêcher de glisser. Rare.
2a^.
lui ]<EMMK ÉTENDUE SUR UN CANAPb: (1874)
0.160x0.275
Jeune femme, le busle nu, à demi relevé contre le dossier d'un canaj)é et le coude
gauclic posé sur un coussin, la lête de profil à droite.
Celte ])iècc est-elle de Dcshoutin ? Oui, d'après une annotation de Burty : Des-
boutin. dccembre 1875, de la collection Moreau-Nélalon, et son attribution à l'artiste
par le cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale. Non, d'après Degas, qui la
déclarait de de Nittis. Il est certain (ju'elle est d'une facture plus mièvre et moins colorée
(pie celle de Desboutin, mais d'autre part, M. Uurand-Ruel possède une peinture qui
se rapproche l)eaucoup de cette gravure. La jeune femme, dans la peinture, travaille à un
ouvrage de dame au lieu de rêvasser.
i^'EMMES. Pour toutes celles qui ne sont ])as désignées
ci-dessus, voir INCONNUES.
lo:. b^EUILLET (Octave), de l'Académie Française, (1878)
0.118x0.078
De face, front dégarni, barbe et moustache. D'après une photograpliie.
Collection Houquette (voir n" 3).
lOC) FEYDEAU (Ernest), Écrivain, (1878)
0.118x0.079
De face, tète légèrement tournée vers sa droite, moustache. D'après une photo-
graphie.
Collection Houquette (Voir n" 3).
FILLE (MA), Voir BRACKEN (M'"^) et SON FILS
ROBERT.
FILLETTE RIANT, Voir LASSUS (M^e).
FILS DE DESBOUTIN (LES), Voir GUIGNOL EN
CHAMIiRE.
1(17 FLEUR Y (Marquise de), née d'Hautpoul, (1880)
0.275x0.195
l'2n buste, de face, les mains jointes au-dessous du corsage, la tète légèrement
inclinée sur rèi)aule gauche, une coiffure de rubans sur les cheveux ondulés. D'après
nature.
ION FOURNIER, Peintre, élève de Desboutin, (1888)
0.119x0,080
Tèle seule, de trois-([uarls, à droite, cheveux rudes, plaqués sur le front en dents
irrégulières, nmustache courte, menton qui avance. D'après nature.
FRANÇOIS (MON PETIT), Voir NOUVEAU-NÉ.
FRÈRE ET SŒUR, Voir ENFANTS DE DESBOUTIN
A LA VOITURE.
FUMEUR (UN), Voir l'un des portraits de Desboutin
fumant, cette désignation : Un Fumeur, se rencontrant sur
différentes pièces.
230
GAILHARI), Voir OPËRA.
1(19 GAILLARD (M"^e^, (vers 1895)
0.123x0.080
De face, la tète entourée d'une capeline. D'après nature.
Une épreuve, rlédicacée au modèle et qualifiée d' ■ épreuve unique • par Desboului.
appartient à la Bibliothèque d'Art et d'Archéologie, qui a réuni, au temps où .M. .Jacques
Doucet en était le fondateur-propriétaire, le plus important nuvre gravé qui soit de
Desboutin.
110 GENTIL, (vers 1895)
0.160x0.119
Tète seule, de face, avec un binocle.
111 GŒNEUTTE (Norbert), Peintre, (1876)
0.235x0.156
Etendu, plus qu'assis, sur une chaise, les jambes allongées, les mains dans les
poches du pantalon, le chapeau en arrière sur les cheveux - à l'artiste -. D'après nature.
2 états, avant et après les travaux du vêtement. Une fort jolie i)ièce. pleine de
vivacité, en son premier état.
ll-.> GONCOURT (Edmond de), Littérateur, (1875)
0.157x0.120
Tète seule de face. D'après nature.
Voir une curieuse note dans le Journal des Goncoiirt (6 février 1875).
li:i GOUDEAU (Emile), Poète, (vers 1883)
0.395x0.315
Jeune. Tête seule, tournée de trois-quarts à droite, cheveux abondants avec une
grosse mèche sur le front, barbe arrondie, moustaches en croc.
114 GRAND-CARTERET (Victor), (vers 1886)
0.242x0.161
Tête seule de face. Cheveux blancs abondants, moustaches et favoris blancs.
D'après une photographie.
Une annotation sur l'épreuve de la Bibliothèque nationale porte: 10 épreuves.
115 GUÉRARD (Henri), Peintre-Grnveur, (vers 1876)
0.219x0.133
Tête seule, de face, un peu inclinée sur l'épaule droite. I.e bras gauche appuyé sur
le haut dossier du fauteuil et relevé à la hauteur des yeux, l'avant i.r i^ ri.ti.mhànt et
la longue main pendante. D'après nature.
l"^' état : décrit.
2^ état, la partie gauche est indiquée et la main gauche posée sur la cui-s.se.
116 GUIGNOL EN CHAMBRE, ou LES FILS DE DES-
BOUTIN (1879)
(i.ll0x(».lJ9
Le fils aîné de l'artiste, Mycho (à gauche du spectateur), fait mouvoir ic guignol du
petit théâtre posé à terre, tandis que de l'autre côté, le jeune Mélaiidri bal du tambour.
D'après un tableau de l'auteur.
2 états. Dans le l''^ les mains de Mycho sont vagues ei le visage du jeune .Mélandri
fort indécis.
Le catalogue de V Fxposilioii de l'œiirre i/nnu- de MunclUn /)e.<;i)o(;///i. chez Durand -
Ruel, en 1889, indique 3 états, mais nous n'en connaissons f[ue deux.
237
117 HAAS (Charles), Collectionneur, (1877)
0.160x0.120
Assis dans un fauteuil, les mains appuyées sur une canne, le tout à l'état d'esquisse,
sauf la tête. D'après nature.
2 états. Le l". tête seule.
I IS HALËVY (le fils de Ludovic), assis dans un fauteuil, (1879)
0.217 X 0.1 9<S
Le garçonnet est assis, de face, sur un large fauteuil capitonné. Ses jambes
demi-nues dépassent à peine le siège. Il s'appuie du bras droit sur le montant, il a la
tête nue et porte encore la robe. D'après nature.
MU IIALI^VY (le fils de Ludovic), assis sur une chaise, (1879)
0.193x0.174
L'enfant. i)rcsque de face, à mi-corps dans une pose un peu nonclialante, s'appuie
de la main sur le siège de la chaise, l'autre main ramenée sur sa cuisse. D'après nature.
2 états. Dans le premier, la chaise n'est pas indiquée.
12(1 HAY (iMichel de L')
Nous n'avons pu trouver aucune épreuve de cette pointe-sèche qui figurait au
Salon de la Société Nationale de 1891.
121 HAYEM (Charles), Collectionneur, (1877)
0.197x0.149
Assis, le corps à droite, la figure de face, la main gauche dans l'ouverture de
la jaquette, la droite posée sur la cuisse. D'après nature.
Très rare. 11 y a quelques épreuves tirées avec un cache sur la main droite, mal
venue.
122 HELinS (Emile), Bibliophile et Collectionneur, (1878)
0.244x0.16:5
Assis, tourné à droite, le visage de trois-quarts à droite, vu à mi-cuisses, la main
droite appuyée sur le pommeau d'une canne, la main gauche par-dessus le poignet
droit. Rare.
Portrait exécuté en .3 séances, d'après le journal d'IIéluis, inédit, communiqué par
M. Moreau-Nélaton.
12:^> IIENNER, Peintre, (1878)
0.160x0.118
Tête seule, de face, légèrement tournée à droite.
HOMME A LA PIPE, Voir DESROUTIN.
124 HOSCHEDÉ (E), Collectionneur et Critique d'art, (vers
1875)
0.163x0.121
Tête seule, de face, cheveux rares, une mèche sur le front et moustaches courtes.
D'après nature.
2'W
( loo2)
n.240x<).15fi
A mi-corps, tète presque chauve, toute la harbe, la joue droite innnvée ^iir l>.
ma.n droite repliée, l'index seul allongé. D'après nature CnoRramme'^^
Un certain nombre d'épreuves, tirées chez Lcmercier sont d'une encre plus pâle.
1->G IDEVILLF. FII.S (André) (1882)
0.159x0.120
Tête d'enfant tournée vers la droite, avec un col marin
l^preuvcs en noir ou en sanguine.
INCONNUS
C'est une série assez importante, dont nous avf)ns
désiiîné les individus par leurs ({iractéristicpies.
1-27 INCONNU A LA HARBE KOU\E (vers 1870)
0.08.5 X 0.06(i
Tête seule, de face, presque chauve, mais avec une épaisse barbe noire iM.e
énergique. >. u «n i. i \ pc
Cette pièce parfois attribuée à Desboutin, est probablement de de Xittis 1 ;, fu-
ture parait être la même que celle du Degas la main à la bouche.
12H INCONNU A LA BARBE SOIGNÉE (vers 1886)
0.162x0.122
Tête seule, légèrement tournée vers la droite, le regard de face, cheveux ave<- une
raie presque au milieu du front, barbe se divisant en deux pointes, moustaclie tombante.
V2[) INCONNU A LA BARBE DEMI-LONGUE
0.118x0.078
Tète seule, de face, légèrement tournée vers la gauche. Cheveux encore abondants
barbe fournie, tombant sur l'échancrure du gilet. Figure intelligente et décidée.
130 INCONNU AUX GROS YEUX
0.200x0.145 à la gravure)
Tête et buste de trois-quarts à gauche, cheveux plats, barbe et moustaches les
yeux saillants sous les paupières lourdes. Vêtement et fond.
131 INCONNU A LA GRANDE BARBE ET A L \ I ONGUE
MOUSTACHE
0.157 ■ 0.120
Tête seule, tournée de trois-quarts vers la gauche. Cheveux bien neignés barbe
longue et moustache droite, filant obliquement en flèche, vers le sol.
132 INCONNU AUX YEUX INQUIETS
0.298x0.210^
Tête seule, tournée de trois-quarts vers la droite. Cheveux avec une raie, barbe
taillée assez court et moustaches, sourcils contractés et une certaine iiuniiétude dans
le regard.
2.S9
l:r, INCONNU DE CINQUANTE ANS
0.114 V 0.087
Tète seule, de profil à fjauche, elicvcux l()ii<îs, l)arbe, mouslaehe et eravale lavallière.
r.W INCONNU AU COL DROIT
0.1S0^ 0.120
Tète .seule, de l rois-quarts à gauelie, clieveux, luoustaehes et barbe, col droit avec
cravate en rul)an.
i:;:. inconnu aux cheveux blancs
0.264x0.188
En busle, tète prescjue entièrement de profil, à gauche, cheveux droits et neigeux,
front plisse, barbe et moustaches fjrisonnantes, vêtement et fond.
Passe parfois, mais inexactement, pour être le portrait de Philippe Hurty.
i:'.() INCONNU VIEILLARD CHAUVE ET GLABRE
0.120x0.080
Tête seule, de face, large calvitie avec deux touffes de cheveux au-dessus des
oreilles. Homme d'environ 7.'i ans.
INCONNUES
VM INCONNUE AVEC UNE COIFFURE EN BONNET
0.226x0.187
En buste, de trois-(]uarts tournée vers sa droite, le visage un peu souriant et, sur
les cheveux en bandeaux, un bonnet de dentelles. Pièce ovale.
i:{« INCONNUE A L'AIR LANGOUREUX
0.1.52 : 0.1 20
En buste, de face, tète inclinée et tournée de trois-fiuarls vers sa droite. l<"igure
grasse et les yeux levés avec langueur.
V\\) INCONNUE LES MAINS CROISÉES
0.235x0.157
De face, assise le corps légèrement tourné vers la droite du s])ectateur, les mains
croisées sur le bras, assez indistinct, d'un canapé ou d'un fauteuil.
1 K» INCONNUE AUX CHEVEUX « A LA CHIEN »,
(vers 1880)
0.235x0.158
Presque entièrement de face, le bras droit écarté du corjis, le coude apjiuyé sur un
meuble, la main venant rejoindre la nuiin gauche sur le giron. Figure encore jeune, avec
la frange de cheveux coupés sur le front, à la mode de 1880.
Ml JACQUEMART (.Iules), Graveur, (187fi)
0.160-^0.122
b'.n buste, sans les mains, le front tourmenté, la barbe longue divisée en deux
pointes, le vêtement entièrement ombré.
Quelques épreuves avant lettre et un l^r état avant le vêtement.
240
Publiée par la Gazelle des Beniix-Arls avec lettre (numéro du 1" mars 1876). puis
dans le volume de Louis Gonsc. constitué par la réunion des articles de la Gazette ;
L Œuvre de Jules Jacquemart, et tiré à GO exemplaires, dont 10 contiennent une épreuve
avant la lettre. '
JEUNE FILLE AU CIIIEX. Voir M^^ CHAHOT.
14-2 JUDITH, modèle, ou p::TUI)E DE P^EMME, D'APHÈS
UX MODÈLE DE MONTMARTRE (1879)
0.197x0.148
Tête seule, presque de face, légèrement inclinée sur l'épaule gauche, chapeau avec
plume blanche, accroche-cftur sur les tempes.
ITi KARR (Ali)honse), Littérateur, (1878)
0.117 : 0.078
Tète seule, de trois-quarts à droite. D'après photographie.
Collection Rouquette (Voir n" 3).
144 KATZENSTEIN, Rauquier à Francfort, (1882)
0.237 X 0.1. ')8
Tête et amorce du buste. Presque de face. Front dégarni barbe blanche, mous-
tache grise, air souriant. D'après un portrait de l'auteur.
2 états. Le deuxième a des ombres à remmancluire de l'épaule.
145 LABICHE (Eugène), Auteur dramatique, (vers 1886)
0.120x0.080
A mi-poitrine, de face, tète légèrement tournée vers sa gauche, figure grosse et
rasée avec des cheveux plats. D'après nature.
146 LABICHE (Eugène), (même date)
0.138x0.089
Tête un peu plus relevée, nez plus pointu, bouche plus pincée. Dans le fond, à
hauteur de l'oreille droite, deux traits horizontaux, qui peuvent indiquer un dossier de
siège ou une boiserie. D'après nature.
147 LABICHE (Eugène), (même date)
0.138x0.189
Tête tournée à gauche et presque de profil. D'après une photographie.
2 états, le 2« avec le monogramme .^D.
148 LAFENESTRE (Georges), Poète et Écrivain d'art, (vers
1884)
0.180x0.135
De face, les cheveux encore noirs relevés sur les'oreilles. la barbe arrondie et blanche.
Fond.
2 états. Le premier est d'aspect général gris ; le deuxième est renforcé et encadré
d'un ovale coupé sur les côtés.
241
149 LA PERRINE D'HAUTPOUL (Comte de), (vers 1880)
0.237x0.158
Tctc seule, de face, front haut couronné de cheveux rejetés en arrière, moustache
et impériale, col droit aux bouts recourbés, largement ouvert.
150 LA PERRINE D'HAUPTOUL (Comtesse de), (Même date)
0.235x0.159
De face, avec un grand chapeau qui encadre sa tête, frange de cheveux sur le front,
broche au col, en forme de médaillon. D'après nature.
151 LAMBERT-LASSUS (M^e), (1879)
0.120x0.080
Tète avec un peu de buste, de face, légèrement tournée vers sa gauche, cheveux
avec de nombreux ■ boudins ' sur le sommet et retombant en catogan. Large nœud de
ruban au col. D'après une photographie. Monogramme.
15-2 LAMBERT-LASSUS (M^^), assise, (1879)
0.160x0.120
Assise, de trois-cpiarts à gauche, la main droite posée sur une table, la gauche sur
sa robe. Le corsage est entièrement fait, ainsi que la chaise à colonnes torses. D'après
nature.
2 états. Dans le premier la chaise n'est qu'indiquée.
153 LASSUS (Enfants) (1879)
0.159x0.120
l^n jeune garvon et une fillette, à mi-corps. Le petit frère, très sérieux, tient sa
sœur par la taille et la fillette rit. en appuyant sa tête sur celle de son frère. D'après une
photographie.
3 états. Dans le premier les tètes seules faites et vêtements indiqués. Dans le
deuxième vêtements et mains terminés. Dans le troisième, monogramme.
154 LASSUS (M"e) ou FILLETTE RIANT (1879)
0.120x0.080
A mi-corps, les mains serrant le dossier d'une chaise de velours, la fillette rit.
D'après une photographie.
2 états. Le premier légèrement esquissé à !a pointe, les mains à peine indiquées.
Deuxième état, planche complétée et monogramme.
155 LASSUS (LES DEUX SŒURS) (vers 1879)
0.160x0.122
Deux fillettes à mi-corps. Celle de droite, de face, a les mains appuyées sur une
sorte de balustrade, celle de gauche, de trojs-quarts à droite, a les cheveux pendants
dans le dos. et un nd'ud de ruban au col. Monogramme.
2 états. Dans le premier, le coussin sur lequel la fillette de face appuie ses mains
n'est qu'indiqué.
156 LASSUS (LE JEUNE LAMBERT)
Nous n'avons pas trouvé d'épreuve de cette pièce qui figura au Salon de 1889
(Société Nationale).
242
157 LEGENDRE, Courtier en tableaux, (1879)
0.220 X 0.200
Ami-corps, tourné de tiois-quarts à droite, assis dans un fauteuil,le bras droit appuvé
sur le bras du siège, la tète couverte d'un feutre mou. D'après nature.
2 états. Premier, tète seule faite, vêtement esquissé. On ne voit ni les mains, ni le
bras du fauteuil.
158 LEGRANI) (M'^e) (vers 1887)
0.227x0.107
Assise à mi-corps, tète presque de face, cheveux en l)andeaux séparés par une raie
au milieu du front, mains se rejoignant sur la robe.
159 LEIGHTON (Sir Frcrléric), Peintre an^flais, (vers 1880)
0.29.5 ■0.218
A mi-corps, assis, la tète de face, inclinée sur l'épaule droite, les doigts croisés,
barbe grise et cheveux frisés. D'après un dessin de l'auteur, de 187.'?.
160 LEMAITRE (M^e Claire), Peintre de fleurs, (1886)
0..306X 0.215
Assise mi-corps, la tète presque de face, inclinée sur l'épaule gauche, un chapeau
à larges bords auréolant son front, le bras gauche accoudé et la main pendante.
161 LEMAÎTRE (M'"-^ Claire), 2^ planche, (1886)
0.270x0.182
Assise de face, le buste droit, sans les bras, dans un ovale sur un rectangle mal
effacé. Même chapeau.
Epreuves en noir et en sanguine.
162 LEPIC (Comte), Graveur, (1876)
0.121x0.080
Tête seule, légèrement tournée à gauche. D'après nature.
Publiée en tète du volume : Les eaux-fortes de Lepic. Comment je devins graveur.
( Vve Cadart, 1876, in 4") et dans l'édition in 8", de la même année, sans les eaux-fortes.
163 LEPIC (Comte), grande planche, (1876)
0.315x0.2;}!»
Assis de face, les jambes croisées, le genou droit remonté à la hauteur de la poi-
trine et tenu dans les deux mains croisées, l'n chevalet au premier plan, à gauche ;
un tableau représentant un caniche, derrière la tête. Tètejde caniche, en remarque, au
bas du cuivre, à droite. D'après nature.
7 états.
1° Sans le tableau derrière la tète, ni la remarque.
2° Le même, avec indication d'un parquet.
3° Avec le tableau et la remarque.
4° Le tableau est effacé.
5° Il est rétabli sous forme de papier fixé à la muraille où le caniche est visible
presque en entier. La redingote est boutonnée.
6° Même description avec en plus, un fond, à partir de l'épaule droite. Cet état est
celui publié dans l'ouvrage du comte Lepic, cité au imméro i)récédent.
7» La planche coupée ne mesure plus que 0.192-0.140, et tout le bas des jambes
ainsi que le chevalet ont disparu. Publié, en cet état, par f.' .\rtistc, (.luin 1876) sous ce
titre : Un portrait d'artiste.
164 LÉPINE, Écrivain, en littérature QUATRELLES. (1888)
0.169x0.127
Tête seule, de face, inclinée sur l'épaule gauche, cheveux plats, barbe en pointe
grisonnante, moustache encore noire. D'après nature.
]i^'^ LEROY. Imprimeur d'eaux-fortcs, (1875)
0.2;)5 < 0.209
Debout ;i sa presse, en veste de travail aux manches retroussées. D'après nature.
3 états.
1° Tète seule faite. Vêtements, bras et mains indiqués.
2" La veste est ombrée.
3'^ La planclie est complétée. La main droile lient la planche de bois qui supporte
le cuivre, la jjauclie soulève l'épreuve. Le volani de la machine est fait et le fond de
l'atelier est occupé par des estampes.
ir.() LKYRAULT (Edmond), Violoncelliste, (1876)
0.235x0.159
.\ mi-jambes, un |)eu tourné à droite, il joue de son instrument. D'après un dessin
de l'auteur, qui inversé par le tirage, fait (pie l'artiste tient son archet de la main gauche
1 état. Le bas du violoncelle n'est pas fait et le fond à gauche est à peine ombré,
ir.7 LOCHAHI). Photographe, (1877)
0.179x0.153
A ini-corps, assis, la tète de face, le buste tourné à droite, les mains croisées sur les
cuisses, tète chauve et barbe blanche. D'après nature.
1G8 LYONNET (.\natole). Chanteur, (vers 1890)
0.135 0.095
Tête seule, de face, légèrement tournée à droite, cheveux rejetés en arrière, figure
rasée. D'après un dessin.
169 MAILLARD (Léon), Écrivain, (1894)
0.189x0.1.39
Kn buste, la tèle de face inclinée sur l'épaule droite, le gilet montre le dépassant.
Fond. D'après un tableau.
2 tirages, l'un à 25 épreuves, dont deux en sanguine et deux en bistre sur hollande ;
l'autre, pour la revue La Plume, fort médiocre et portant le monogramme AD. dans le
blanc de la marge inférieure droite. Planche perdue. Pointe-sèche sur héliogravure.
170 MANET (Edouard), Peintre, (1876)
0.165x0.133
Tète seule, de face, souriante. « D'après nature en une seule séance », note de l'au-
teur sur une épreuve qui ap]i irtient au D"" Landau.
Cette tète a été gravée siu' le même ci)ivre où Manet a gravé sa Bulle de Savon
( Mfircau-Nélaton, 3()). Il existe une épreuve de cette planche, avec les deux sujets, à
la Kunsthalle, de Brème.
171 MANET ACCOUDÉ (1876)
0.219 ; 0.13?
A ini-corps, de face, la tête inclinée vers l'épaule droite et appuyée sur son poing
fermé. Lu chevalet est esquissé à la gauche du modèle. D'après nature.
172 MARGUERITE (LA) ou PAS DU TOUT (1898)
0.140x0.332
l'ne jeune fille, la figure en jileine lumière tournée vers la droite, effeuille entre ses
doigts une marguerite. D'après un tableau qui figun; au Salon de la Société Nationale
de 1895.
244
LEROY, Imprimeur en taille -douce
( 2" Éui )
173 MARGUERITE (LA), petite planche, (vers 1899)
0.175x0.128
L'expression de la bouche est plus attristée.
174 MARTHELOT, Directeur de l'Imprimerie Cadart. (1X77)
<i.2inx0.1GU
A iiii-corps, mais la tète seule faite, le vèlenienl et les nuiins indiqués. De face,
cheveux qui i fuient » en dégarnissant le front, barbe conjiée en rond et moustaclie
D'après nature.
175 MÉLANDRI (Achille), Écrivain, (vers 1888)
0.104x0.125
Tête allongée, de face, cheveux rejelés en arrière, barbe terminée par deux pointes
que rejoint et dépasse à droite la longue moustache. Monogramme. D'après nature.
17G MÉRIMÉE (Prosper), de l'Académie Française, (1878)
0.112x0.075
Tète seule, de trois-quarts à droite. D'après une photographie.
Collection Rouquette (voir n° 3).
2 états. Le deuxième a, de plus que le premier, une cravate noire faisant le tour
du cou.
MICHAUD ou MYCHO BOIT, Voir ENFANT A LA
TASSE.
177 MILLET (Jean-François), Peintre, (vers 1889)
0.170x0.120
Tète seule, de trois-quarts à droite ^spectateur), une forte masse de noir sur la
barbe. Vêtement amorcé. Rare.
178 MONSELET (Charles), Écrivain, (1879)
0.120x0.080
A mi-corps, de profil à droite. D'après nature.
2 états. Le premier avant le monogramme.
179 MONTEFIORE (Edward-Lévi), Collectionneur et Graveur
amateur, (1875)
0.270x0.180
De face, un peu tourné vers la droite. Tête seule, barbe fournie sur les joues, assez
courte au menton et divisée en deux touffes arrondies. Front qui se dégarnit. D'après
nature.
2 états. Dans le premier, on voit l'oreille droite presquen entier et un trait
échappé dépasse nettement l'épaule droite.
Dans le deuxième, l'oreille droite n'apparaît plus que dans sa partie inférieure, le
trait échappé est à peine visible, l'épaule droite qui s'évasait trop a été ramenée à son
juste dessin et une ombre puissante et courte indique l'extrémité d'un col de velours
noir à gauche de la figure (droite du spectateur).
180 MORER. Compositeur de musiciue, (1887)
0.099 X 0.079
Tête et demi-buste. De face, un peu tournée à droite. Grands cheveux • à l'artiste »
autour d'une calvitie précoce, barbe rasée, moustache en crocs. D'après nature.
245
181 MORISOT (Berthe), peintre, (vers 1876)
0.260x0.175
Assise, de face, dans un fauteuil tourné de côté, la tête coiffée d'une sorte de tur-
ban, tenant tians ses mains un éventail jai)onais. D'après nature,
l"' état, tète seule faite, le reste au trait ;
2»^ état, tète reprise et poussée, vêtement entièrement fait,
lipreuves sur hollande, quelques-unes, rares, sur wtiatman et sur japon.
18-.> MOU-MOU (Mlle), modèle, (1880)
0.280x0.201
Tête seule, de trois-quarts à droite. Petite bouche sur un double menton. (Cheveux
reteims par un ruban clair, en diadème. D'après une étude peinte.
Nom : Mou-mou dans la i)artie f^jauche supérieure et, au bas à droite, monogramme,
qui n'est pas le monoj'rainme habituel. L'.M a les jambages recourbés en crochets et le
D, s'inscrivant en plus petit sur le jambage de droite, forme un 1^.
Parue dans l'album : L' Eau jorle en 18S0, publiée par Cadart, avec cette légende :
M. Desboulin pinx et se. — Mlle Mou-mou. — ■ \ ue A. Cadart, Edit. Jmp., 56, boulevard
Ilaussmann, Paris.
Quelques épreuves avant le nom, mais avec le monogramme.
18:*. NIEDERKORN, Docteur, (vers 1886)
0.159x0.122
Tète seule avec un peu de buste. Front découvert, barbe demi-longue divisée en
deux touffes, moustache courte. D'après nature.
181 NITTIS (M'ïie Je) ou SORTIE DE BAL (1873)
0.285x0.199
Debout, de profil à droite, tète nue, avec un haut chignon, elle ramène sur elle sa
sortie de bal de couleur foncée qui laisse à découvert au-dessous de la ceinture, une
robe claire garnie de volants. Dans le fond, une table à étagère. Grande ombre, à
droite.
185 iNOUVEAU-NÉ (LE) ou MON PETIT FRANÇOIS (1879)
0.100x0.115
L'enfant, tout nu, gesticule des pieds et des mains sur un coussin. D'après une
étude peinte.
4 états.
1° Enfant seul esquissé ;
2» Le coussin et le fond supérieur droit sont faits ; à l'angle inférieur droit, des
hachures.
3° Ces hachures renforcées forment une tache noire ;
4° La tache a été ébarbée et le travail redevenu clair. Le fond est complètement
achevé.
OPÉRA (L*), Eaux- fortes d Quatrains, (1876)
(Jouaust, 1870,in-12, 500 ex. sur hollande, avec lettre; 150 ex. sur chine, sans lettre).
Série de huit pointes-sèches, d'après des photographies de Pierre Petit, dessinées par
l'artiste, pour illustrer cet ouvrage anonyme, dû à Henrv (".ohcn. L'ouvrage renferme
d'autres gravures de différents artistes.
Toutes ces pointes-sèches mesurent 0.120x0.080. Il v a quelques épreuves sur hol-
lande, hors format et signées à la main par l'artiste.
246
186 BATAILLE
187 BAUX (M"e)
188 BEAUGRANl), Danseuse
189 BLOCH (Rosine)
190 BOUDOURESQUE
191 CAROX, Baryton
192 GAILHARl) (Pedro)
19:^
SANGALLI (Rita), Danseuse, d'après unu jjlioto^raphie
de Luckhardt.
PETIT CHARIOT, Voir ENFANTS DESBOUTIN A
LA VOITURE
194 PETITE FILLE AU CHIEN (1890)
0.528 xO.^U5
La fille de l'auteur, Jeanne, vue à mi-corps, tournée a droite, vêtue d'une chemise
qui laisse nus son col et ses bras. Elle tient en riant un petit chien, qui n'a pas l'air de
s'amuser. D'après un tableau de l'auteur, qui appartient au Dr I.andau. Dessous d'hé-
liogravure.
195 PIE IX, grand format, (1878)
0.445x0.346
Le pape est de face, assis, les mains sur les montants de son trône, la tête cou-
verte de la calotte blanchC; et en soutane également blanche. D'après une photographie.
Monogramme et date : 78. Indication de l'imprimerie Cadart. prés de la marge infé-
rieure droite.
Quelques épreuves sans ces lettres.
196 PIE IX, petite pièce, (1878)
0.107x0.0(55
Tête seule, avec indication de la soutane. D'après une photographie.
197 PIET (Alfred), Bibliophile, (1878)
0.180x0.1-23
En buste, presque de face, la tête un peu à droite, légèrement renversée en arrière,
cheveux avec une raie à droite, moustache et barbe grises, celle-ci divisée en deu.x pointes.
D'après nature.
Exécutée pour le libraire Rouquette et non mise dans le commerce.
198 PORTALIS (Baron Rooer), Bibliopliile tt Écrivain d'art
(1884)
0.147x0.110
Tête seule, de trois-quarts à droite, ronde, front dégarni, joues rasées, barlie en
touffe au menton et moustaches grises. Col du vêtement. Signature, lieu et date gra-
vés à la pointe, au bas, à gauche : M. Desboiilin, A/re, fcorier 81.
Exécutée pour le iibraire Rouquette et non mise dans le commerce.
247
\\)\) PREMIERS PAS (LES) ou ENFANTS DE L'AUTEUR,
ou EAMILLE DE L'AUTEUR (1879)
0.280x0.198
Myclio, en bras de chcMuise. s'avance vers_sa ])eLile s(i;ur, (iiii leiul les bras pour
saisir le luulou (lu'il lui apporle. l.a fillelle est dans un support conique en osier. D'après
nature.
5 étals.
1° Le fond, chaises, placard, vaisselle, etc. n'est ([u'indiqué ;
2" I,e fond est plus poussé. .Myclio se détache sur une sorte de tapisserie et der-
rière la fillette est un jouet, un tonneau d'arrosage attelé à un cheval.
3" Mycho a été effacé, assez mal et l'on aperçoit encore ses jambes au bas d'une
large tache grise. Puis, il a été remis derrière la chaise du premier plan à droite, sur la-
quelle se prélasse un fox, les pattes pendantes.
4" La tache a été nettoyée et le paysage de la tapisserie précisé.
5'^ Toulo la planche retravaillée et mise à l'effet, notamment le cercle d'osier de
la fillette.
De toute rareté.
'>()() PREMIEiiS PAS (LES), petite plauche, (1879)
0.07GX 0.156
Le sujet est inversé, la fillette est à droite et Mycho à gauclie. C'est la reproduction
du deuxième état de la planche précédente. La partie droite du cuivre n'est pas cou-
verte.
2 états. — Dans le premier, toute la planche est claire et le parquet n'est pas ombré.
'201 PUAUX, Pasteur, (vers 1886)
0.140x0.088
Tète seule, de face légèrement tournée à droite, rasée. Homme d'environ 60 ans.
D'après nature.
•>()-2 PU VIS DE CHAVANNES, Peintre (1876),
0.157x0.118
Tète seule, presque de face, inclinée sur l'épaule gauche.
QueUpies épreuves avant le monogramme et la date : 76.
Publié avec le monogramme et la date dans l'édition de luxe de La Plume (Janvier
1895) et par la revue //' Artiste, avec le nom de Puvis de Chavannes gravé.
•20:i PUVIS DE CHAVANNES, Peintre, (1895)
0.245x0.174
Pointe-sèche sur héliogravure.
De profil à gauche, la tète un peu renversée en arrière, sortant de la blouse d'ate-
lier. Signature au bas à droite.
Le dessin appartient à la Bibliothè(iue d'Art et d'Archéologie. Il en existe un autre,
au trait dans la collection Desboutin.
'204 PUVIS DE CHAVANNES, portrait et composition, (1895)
0.240x0.157
Pointe-sèche sur héliogravure, d'après un tableau de l'auteur, au Musée d'Amiens
L'artiste, en blouse de travail, assis dans un grand fauteuil, médite, la tête appuyée
sur la main gauche. Derrière lui, se déroule le fragment de droite du Bois Sacré (Lyon).
Publié par L'Artiste (Avril 1895).
My RAFFAELLI, Peintre-graveur, (vers 1877)
0.116x0.80
Tête seule, de face, un peu tournée vers la gauche, cheveux abondants et frisés
avec raie à gauche, barbe noire fournie, col de fourrur?.
248
206 RAISIN (M"'<^) ou DAME A LA MAXTlLiJ': fl898)
0.205x0.194
En busLc de Lrois-quaiLs à droite, coiffure de detUelle reLombiiiiL sur le derrière
de la tête, Ijoucle de clieveu.K venant prescjne rejoindre le sourcil droit, ^ros diamant à
l'oreille. D'après une pIio4ographie.
207 RENOIR (P.-A.), Peintre, (1877)
0.103x0.117
lùi buste, assis à califourchon sur une chaise au dossier de laquelle il appuie ses
bras, le gauche soutenant la tète tournée vers l'épaule droite. D'après nature.
208 RENOIR LES JAMBES CROISÉES (1877)
0.234x0.155
Assis dans un fauteuil à haut dossier, au bras duquel il s'accoude, la main gauche sup-
portant le menton, l'illustre peintre, au grand corps i dégingandé) comme le qualifie
Silvestre, a passé sa jambe gauche par-dessus la jambe droite et médite. Portrait d'un
naturel parfait. D'après nature.
209 REPOS DE BÉBÉ (1881)
0.298x0.199
L'enfant (Mycho) s'est assis, son petit chariot près de lui. contre sa maman, elle
même assise et la tète reposant sur les bras appuyés sur une balustrade. Fond de jar-
din. D'après un tableau de l'auteur de 1880. {Repos au square).
3 états. — Le premier sans le fond de jardin, le deuxième avec le fond, et le troi-
sième avec cette légende : M. Desboutin pinx. et se. Le Repos de Bébé. Vve .\. Cadart.,
56, boulevard Haussmann. Paris.
210 RICHARD (de Genève), Avocat-général, (1888)
0.256x0.183
Face michelangesque, chevelue et barbue, avec un vif éclairage sur les chairs.
D'après un dessin fait sur nature. Dessous d'héliogravure.
211 RICHARD, grand format, (même date)
0.410x0.310
Tête, plus droite avec moins d'oppositions. D'après nature.
4 états. — Premier, modelé du visage un peu brutal, vêtement indiqué; deuxième,
modelé adouci, vêtement plus indiqué, notamment l'angle du revers gauche ; troi-
sième, fond entièrement fait, le vêtement terminé, essai d'un ovale autour de la tête.
212 RICHEPIN (Jean), de l'Académie Française. (1877)
0.178 :< 0.123
Tète seule, de face, corps tourné vers la droite. D'après nature.
Collection Rouquette (voir n° 3).
Quelques épreuves d'essai.
2i::5 RITTER (Alice, M^^^ A. DESGRANGES) (1875-1877)
0.398x0.197
Assise, de face, la tête légèrement tournée vers la droite, la main droite posée sur
le poignet gauche, en chapeau. D'après nature.
3 états. — Le premier date de 1875. Il ne porte pas de signature; le deu.xième aie
monogramme suivi de 77 ; le troisième, cuivre coupé, qui ne mesure plus que
0.288 X 0.190. Le tirage est faible, le monogramme et la date à peine visibles.
249
17
21 I ROCHEFORT (Henri), journaliste, (1880)
0.278x0.198
En buste, de face, la main gauclie à demi allongée sur la joue ([ue creuse l'index,
le toupet blanc, en flamme de punch, .sur le front élevé. D'après un dessin. Très belle
pièce.
:i états. — Premier avanl le monogramme; deuxième, avec le monogramme nui a
la même forme (pie dans Mlle Mnii-inou : troisième, indication d'un fond.
215 ROUART (Henri), Peintre et Collectionneur, (1875)
0.272 X 0.200
Assis à califourchon sur une chaise, de profil à droite, la main droite sur la cuisse,
la gauche sur le dossier de la chaise. D'après nature.
U'f état. —Tête seule.
2" état. — Tète reprise, allongée, rendue plus ressend)lante et planche achevée
selon la description ci-dessus.
216 ROUQUETTE, Libraire-Éditeur, (1878)
0.120x0.080
En buste, tète de face, légèrement penchée en avant. D'après nature.
Exécutée pour l'éditeur. Non mise dans le commerce.
217 ROUQUETTE, 2^ planche, (1878)
0.161x0.120
Tête seule de trois-quarts à droite. D'accent moins vif cpie la précédente.
Exécutée pour l'éditeur. Non mise dans le commerce.
218 ROUQUETTE fils (1878)
0.160x0.120
.leune garçon, de face. D'après nature.
1" état. — Tête seule.
2« état. — Vêtement fait.
Cuivre conservé.
21V) ROZEN, Peintre suisse, (vers 1888)
0.112x0.099
En buste, tête à demi tournée vers la droite, figure jeune, barbe divisée en deux
pointes, moustaches retroussées.
220 SALOMÉ (Emile), Peintre, (vers 1888)
0.215x0.155
En buste, tète de trois-quarts à droite, binocle dont le cordon descend le long de la
joue gauche, barbe rare sur les côtés, moustache, cheveux rejetés en arrière. Dessous
d'héliogravure. D'après photographie.
221 SALMSON, Sculpteur genevois, (vers 1889)
0.238x0.155
Assis, le corps tourné à droite, le visage de face, déjà âgé, le cheveu rare, la courte
moustache tombante, la main gauche appuyée au bras du fauteuil, la droite à peine
amorcée.
250
22-2 SAXI) (George) (1878)
0.117 • U.07.S
• IcHine, à mi-corps et louriiée à droite-, la l.He nrcsaiic de fice t-l li m-.in ,i,v>ii<.
Quelques épreuves avant aciérage.
22:; SAiNDEAU (Jules), de l'Acadoinic I-Vanciiisc (187!»)
0.120. O.OT'.i
rilriftu miMullîpVr^^'î'''"''"'''"^' \' '.'''°'^^' '^'"'"^■^'' "^«'"^^^'^'h- l.la,.ciu-. col de chemise-
"'1?onJ;.Uo"; ltouTamc^'l^;?rS3)". ^'^""^'"^ '-''''■ '^■•'"^^^•^ ""^' l"-">g-P'^ie.
l1ns<M'iptio,M^;rS.-;X/!^ mo»ogrannne et dautres avec le n.onogran.n.e et
SANGALLI, Voir OPERA.
224 SICHEL, Antiquaire, (1887)
0.159x0.121
225 SILVESTRE (Arniund), Littérateur (188G)
0.198x0.149
Assis lourné vers la droite et iticliné en avant, la main gauciiu pendante sur le
genou, la droite appuyée sur la cuisse, la figure presque de facc^ D'après nature.
22G SOLDI (Emile). Statuaire, (vers 187G)
0.200x0.150
Debout tourné à droite il modèle une figure posée sur une selle. D'après nature
il est enUèremènt f'olïé!"'"' '^' ^"'''""'^ "'' ^"'"^ '^^"^ ^"" """"'^'^ = '^-^ "^ ^-■^'^"-'
227 SOMM (Henri), Dessinateur, (1891)
0.144x0.098
Tète seule, presque de face, légèrement tourné vers la droite. Chauve, barbe courte
et moustache retroussées, lîinocle. D'après nature.
Le cuivre appartient à .M. Nys.
SORTIE DE BAL, Voir XITTIS (M"ie ^je).
228 SORTIE DE BÉBÉ (LA) (1878)
0.276x0.198
L'enfant (Chiquine) est endormi dans sa voiture, sa mère (Mme Desboutiti) le
regarde en arrangeant sa couverture, son jeune frère (.Mvclio), debout, s'apprête à nous-
ser le léger véhicule. ' r^ p u:>
D'après un tableau de l'auteur.
2 états. — Premier état, le jeune garçon n'est qu'indiqué ; deuxième état, la planche
est terminée.
En cet état elle a paru dans V Eau-jorlc en 1897. G--- année, avec cette lettre •
M. Desboiitin pinx. et se. Lu Sortie de Bébé, Vve A. Cadarl, Edit. Imn., 5G Bnulerard
Haussmann, Paris.
229 SPETCH (Emile de), Peintre, (1886)
0.161x0.117
Assis de travers sur une chaise, dont le dossier se présente face au spectateur, le
bras droit appuyé sur ce dossier, le gauche naturellement posé sur la cuisse, la tète
encore jeune, aux cheveux bouclés et à la barbe frisée, presque île face. D'après' nature
Epreuves en sangu'ne et en noir.
2ôi
'?:*.() STENGER (Gilbert), Écrivain IxJiirboniiais, (1898)
0.130x0.19;')
1)0 face, cheveux el inouslaclies presque hlaiies, col droil eL cravate blanche,
l.a peinture orifiinale appartient à la Société des Gens de lettres.
Foiiite-séclu' sur liéliof^ravure.
■r.W lÈ'VK ])E FEMME, croqtiis, (vers 188'.))
0.090x0.124
Presque eutièrenienl de profil à gauche, et baissée : haut ciii^iioii. D'après nature.
Paraît être le même modèle que celui de Femme an m^licr.
-r.Vl TÈTI^ \)\i VIEILLARD (1888)
0.117 X0.07S
En buste de trois-tiuarls. à gauche, chauve avec une grande barbe blanciie. Fond.
D'après nature.
-rX) TROIS AMIS (LES) ou CHIEN ET CHAT (1880)
0.501 -.0.46,')
Un jeune garc^on (.Myclio) assis, la tète appuyée sur sa paume droite, tient dans
son bras gauche un jeune ciial vers lecpiel le chien du cabaret La Nouvelle Alhènes,
avance le museau.
3 états. — Premier état, les cheveux forment une masse blanche ; deuxième, les
clieveux sont ombrés, mais une lumière persiste sur les deux boucles du sommet ;
Iroisième, les cheveux forment une masse noire et l'ombre de gauche est faite de traits
(le roulette sur un frottis de papier de verre, surchargés de coups de pointe obliques et
verticaux.
•?:M VALENTIN (Mme) (igyg)
0.237x0.159
Assise, de profil à droite, la lète tournée vers le spectateur la main gauche près
du menton el le bras se dégageant d'une large manche à volants ; le modèle est
accoudé sur le bras du fauteuil, la nuiin droite étendue sur la robe et tenant une lettre.
Les cheveux sombres se déroulent sur les épaules, sous une i)etite capote claire.
3 états. — Premier, tète seule, le reste esquissé à la pointe, signature ; deuxième,
planche terminée, avec la signature à l'envers, et date ; troisième, travaux dans le
vêlement et le fauteuil, la signature a disparu.
lintre le deuxième et le troisième état, nous connaissons une épreuve qui ren-
ferme de nombreuses retouches ù la pointe pour rafraîchir la planche, mais qui font
autant de petites taches.
•>:{:> VALLOIS (1875)
Nous n'avons pas trouvé d'éiircuvc de cette figure tpii fut ex])osée au Salon de
1X75 de la Société Nationale.
•,>:'»<•, VERLAINE, Poète, (1896)
0.372 X 0.284
l",n busle jirescpie de face, la tête socratic|ue engoncée dans un col épais, tenant de
la nuiin droite un manuscrit et de la gauche son pince-nez.
2 états. — Le premier avant les ombres du vêtement.
2:>,7
VERT (Renée, M"i^ Alfred Albkrt) (vers 1880)
0.230x0.191
Pointe-scche sur héliogravure.
De face, tète inclinée «ur l'épaule ilroite, haut chignon, corsage broché, épaules
remontantes.
Travaux de roulette et tle pointe.
Très peu d'épreuves.
VIEILLARD CHAUVE ET GLABRE. Voir IXCONNLS.
VILLART (Nina de). Voir CALLIAS.
288 VILLIERS DE L'ILSLE-ADAM, P>crivaiii, (1802)
0.1.38x0 099
Pointe-sèche sur héliogravure.
De face, d'après un dessin qui appartient au musée de Saint-Brieuc.
Publié en tête du Villiers de l' Islr-Adam. de Stéphane Mallarmé (FSruxelIcs, La-
comblçz, 1892).
?:W VIOLANIE SONNIO
0.155x0.127
Pointe-sèche sur hélio.
De face, les cheveux séparés au milieu par une raie et s'échappant de chaque cAté
en mèches indisciplinées. Corsage indiqué à sa partie supérieure. Très rare.
•240 VOGT (William) (vers 1888)
0.117x0.087
Pointe-sèche sur héliogravure.
En buste, tourne à gauche, figure de face, cheveux - nature ■, menton rasé, mous-
taches courtes.
•211 WILLETTE (Adolphe), Peintre, (1896)
0.2.30 < 0.138
l)ei)out, en Pierrot, le poing sur la hanche, un chat noir se frottant ajirès ses jambes.
D'ajircs une peinture exposée au salon de la Société Nationale en 180tî.
Publié par V Artiste, numéro de mai 1896.
La signature à la pointe, au bas, à droite, est presque illisible.
Quelques épreuves d'essai.
•24-2 ZH:LIA(1883)
Nous n'avons pu trouver d'épreuve de cette pièce, qui fut exposée au Salon de
1883 (.\. F.). l'Ile figure peut-être dans les Inconnues.
■24:\ ZOLA. LA .MAIX AU MENTON (1875)
0.137x0.088
l",n buste, de trois-quarts à gauche, sans binocle, la main au menton, avec l'in-
dex et le médius allongés vers l'oreille. D'après nature.
Très peu d'épreuves.
24i ZOLA, DE FACE (1875)
0.120x0.080
•Jeune, (le face, tête seule, sans binocle D'après nature.
Planche vendue au libraire T^ouquette, en 1878. Cui> re probablement perdu.
•.>^:) ZOLA, LI<:S BRAS CHOISËS (1875)
0.i;?8:() 089
l'.ii busie, de l'ace, sans binocle, les bras croisés appuyés sur le dossier d'une chaise.
•>1('> ZOLA. A LA SIGNATURE (1879)
0.1G4- 0.116
TcMe seule, firossc, penchée, le Iront apiniyé sur la main gauclie, aux doigts écarlés,
le binocle aux yeux. l,a signature de l'écrivain est fac-similée en travers de la poitrine.
D'après nature.
La jiluparl des épreuves (12 ont été données à Zola) portent l'indicalion de l'ini-
prinierie Vrc A. (ladart, )nais il existe (piehpies éi)reuves avant le fac-similé de la
signature et l'indication de l'imprimeur.
Ilnlaiil un endormi' ^-^ '''"/"'■'', 1SH4)
254
LISTE DES
GRAVURES DE REPRODUCTION
1 AMAlU^KinS (LKS), d'après Israëls.
■2 BOX VIX (LE), (l"ai)rès Hihot.
:\ CIIRISI" V:i LA FiaiME ADILIÈHI-:. d'apK-s iiicomiii.
1 C()NCl^P.r (Li). daprès Fraiiojpaïu.
5 KCrIXl-: V:V .iriMri-:i^, d'après (rrciizc.
f) 1^:XTRÉK DES CROISÉS A COXS TAXTIXOIM.E. d'après
Delacroix.
7 l'"El TÏSTl^ (LE), d'après Er. Hais ou plus j»i-ol)al)li'iiK'ut
d'ajirès Oonieuico Feti.
.S FLUTISTE (LA), d'après le mémo.
LES FRAGONARD DE GRASSE
'.I LA SURLRlSi:.
1(1 LE Ri:xi)i-:z-vors.
11 L.v (:oxi'di)i-:x(:E ou li-:s sorvi-.xip.s.
1? LWM.vxr c.orRoxxi':.
\:\ i;.viL\xi)ox.
l'ianclu's in-folio, tiratii- l'ii saiisuiiu-. ;i "JnO i'|)ri'iivis luiiiuToti-fs, plus une soixan-
taine d'essais. 11 y a aussi de très rares épreuves d'étals.
\i liOMMI-: TRISri^, d'après inconnu.
15 LI^B1-:AL (M'"'^ .Jules), d'après Friaiil.
1() LECTURE (LA), d "après Fragoiiard.
17 MÉDITATION, d'après inconnu.
LS MUSIQUE (LA), d'après Fragonard.
19 NATIVITÉ (LA), d'a))rès inconnu.
•20 PORTRAIT D'UN HOMME DE 40 ANS, d'après Rem-
brandt.
•.M RONDE DE NUIT (2 pièces miiuiscnlcs), d'après Rem-
brandt.
-r^ SAINT PORTANT UNE CROIX (Ecole italienne).
•r.\ SAINT SÉRASTIEN, d'après Zurbaran.
24 SAINT LISANT, d'a])rès Piazzetta.
?:> SAINT LISANT, petite planche.
•je. I^OURGMESTRE SIX, d'après Rembrandt.
V7 ROURGMESTRE SIX (sa femme), d'après Rembrandt.
•i.S VIEILLARD A LA LONGUE RARRE, d'après inconiui.
■>0 VIERGE A L'ENFANT, d'après inconnu (1858).
:'.0 VILLARS (Maréchal de), d'après H. Rigaud.
LES MAITRES DU SIECLE
(Collection entreprise par (ieorges Petit, en 1889, et ai)an(lonnée. Desboutin exécutn
les portraits suivants sur des liélio^ravures (l'a])rès des peintures ou des photograpiiies.
Il n'y a pas eu de tirat;e. mais seulenienl (|uel(|ucs ('preuves d'essai. Les enivres sont
conservés.
?>\
RAUDRY (Paul).
1)2
ROILLY (2 planches).
:*»:{
COIGNET (Léon).
:u
C0R04' (copie du Corot (k
' l)i)(()iirt)
:i')
COUTURE.
;{6
DAUMIER.
'M
DAVID.
256
:5« DECAMPS.
39 DELACROIX.
tO FRAGONARD.
H GÉRARD (Baron François).
4-2 HOUDON.
4:i INGRES.
44 ISABEY.
45 MONNIER (Henri).
46 PAJOU.
47 PRUD'HON.
4.S ROBERT (Hubert).
41) TROYON.
VIGÉE-LE BRUX (AP"*?^ peioiiant.
VIGÉE-LE BRUN ET SA ITLLE (M^^c).
:>()
PIECES FAUSSEMENT ATTRIBUÉES
BAZIRE (Edmond), Journaliste.
De face, cheveux abondants et rebeUes. rnoiistacbe courte, col droit à i)oiiites
recourbées, vêtement indiqué.
Cette ^'ravure, dan.s la niauiÎMc du père, est d'.Vndré Desboutin.
CHANTEUSES DE RUES
De iH-ofil à gauche, tête renversée et inclinée sur l'épaule, haut chignon, chiens,
sur le front, mains dans les poches du caraco.
PLANCHE DE CROQUIS
Tète d'âne mangeant des chardons. Trois petits i)ersonnages, une femme et deux
hommes esquissés dans la partie gauche.
Voir, en outre, au catalogue des gravures originales :
DEGAS LA MAIN SUR LA BOUCHE (2 pièces),
(voir catalogue à ce nom).
PIÈCE DOUTEUSE
INCONNU A LA BARBE NOIRE (voir ii" 127j.
257
Myclio au chien (Peinture)
25S
ESSAI D'UNE
LISTE DES PEINTURES
PAR DATES APPROXIMATIVES DE PRODUCTION
ET AVEC LES NOMS DES POSSESSEURS ACTUELS
Le nom d'un marchand de tableaux parmi les propriétaires
n'est que l'indiGation que l'œuvre a passé par ses mains.
Les peintures exposées aux Salons (Artistes Français,
jusqu'en 1889, Société Nationale, à partir de 1890), sont
indiquées en tête de chaque année et précédées du mot :
Salon.
1860
LE TRIOMPHE DE S1LÈXI-: D^ All.orl Hohin
Mme n KT SON 1-:XFANT '«'lui Dr;i(kcn
L-AUTELu .iiaxi':
SAINTE .MADEEi:iXI-:
UN ARTISTE -
1863
L'HOMME A LA PALETTE (porlrail de
Dcsboutin) J- H^shoutin
ENFANT ITALIEN (lêto crùludo) (S. 1892) . X...
2f)9
1864
LE GHETTO DE FLORENCE, figures par
DesbouLin, paysage par Signorini M""" Uarbour
1865
ASSUNTA Michaud
FLORENTINE AU SEIN NU Paul Largy
d» (réplique) M^^ Darbour
1866
LA RONDE DE NUIT (d'après Rembrandt) . C^" Chéramy
G. LAFENESTRE M^e Lafenestre
1867
TÊTE DE BLONDE X...
UN INDUSTRIEL ITALIEN (S. 1875) . . . . X...
1868
M. CASSIOLI J. Desboutin
1869
Salon : JULES AMIGUES Famille Amigues
]\lme PELLE^TIER Daveziers (Issoire)
FLORENTINE (tête voilée) (S. 1890). .... X...
FLORENTINE (étude) (S. 1892) X...
TÊTF D'ITALIENNE (toile ovale) I. Desboutin
1873
Salon : M. R., en costume florentin M. R.
TÊTE DE JEUNE GARÇON D-" A. Robin
HERALD DUMAS J. Desboutin
ANDRÉ DESBOUTIN -
260
LA C.IIAISK ABÉliK Durnnd-Ruel
ITALIKXXE PEIGNANT SON ilM-AXT
ENFANT AI" MAILLOT fdans uiir corbeilkO . -
MftRE ALLAITANT SON EN I- A NT .... X...
M. GRISON j Desboiitin
LA TOILETTE (Ire peinture) l)r Hobin
BÉBÉ X...
BÉBÉ JOUANT X...
TENDRESSE .ma'1'i-:rni:lle X...
ÉTUDE DE FEMME X...
TÊTE D'ENFANT (étude) X...
LE BERCEAU X...
1874
Salon : IL MLSICASTH Musée de Moulins
DÉCORATION D'UN SALON, à Eoiilaine lez-
Dijon, et autres peintures murales Sinionriet dTIennezel
PETITE FILLE ACCOUDÉE X...
ÉTUDE DE PETITE FILLE N...
UN CHAT EN CAGE Durand-Rue!
ENFANT AU CHIEN BLANC DANS UN
FAUTEUIL VERT -
LECLAIRE (S. 1877) Famille Ledaire
L'HOiMMEALAPIPE Jean Desboutin
JEUNE HOMME AU MONOCLE Ch. G'ron.
ENFANT RIANT, A LA MÉDAILLI-: . . . J. Desboutin
LE BAIN DE PIEDS X. .
LA TOILETTE (2^ peinture) X...
BÉBÉ X...
LA COUTURE X...
LA MÈRE X...
2C.I
1875
Salon: UN IXDUSTRJEL /7ML/EA' (1897) X...
Salon : Mme I) Héral.l Dumas
LA LKCTUHi: (2^ i)eiiilure) X...
ÉTUDIA \)\-: FKMMK X...
FEMME COUSANT J. Desboutin
LES POMMES DE TEUHE Michaud
ENFANT EN ROBE BLEUE (un mouchoir sur
la tête) —
LEVRAULT, (violoncelliste) M^e Debierre
ENFANT AU POLICHINELLE Fleischmann
Mme RIVALS, (de l'Odéon) Munier
LE BAL DEBRAY en 1875 X...
DEGAS LISANT J. Desboulin.
LA MÈRE ET L'ENFANT Durand-Ruel,
ENFANTS JOUANT AVEC UN MASQUE . . -
FEMME SE PEIGNANT -
ÉTUDE DE JEUNE GARÇON -
JEUNE FILLE AU CHAT -
L'ENFANT AU MASQUE Bernheim jeune
JULES DE MARTPiOLD de Marthoîd.
LE CARNAVAL X...
DESCHAMPS, marchand de tableaux à Londres M^^^ Darbour
LA REPRISE X...
LE COSTUME X--
LA GRAND'MÈRE X--
1876
Salon : M. G X...
Salon : M. A X...
262
PETITE ESPII>(iLE Durand-Ruel
LA C0RRE(:TI(3N - -
L. WARCOLLIER Warcollier
ENFANT AUX LAMPIONS Hcniheim jt-uiie
FEMME ÉTENDUE SUR UN CANAP1-: . . . I)iiraiicl-l-{ii.|
TÊTE DE FE^LME EN COIFFURE liOUR-
GUIGNONNE -
FEMME AU TOUTOU . (,;illiiii;u<l
LA PART DU TOUTOU (sconc d'intérieur) . .
Mme cOPvNEREAU Mustr du LuxeiuhourK
Mme CORNEREAU (réplique) Cornereau, ;i Dijon
JEUNE FEMME AU CHIEN SUR LES
GENOUX \...
VIGNAUX X...
1877
Salon : LÉOX LECLAIHE (1871, réexposé
à la Cenlennale de 1889) FaniilK- Leclaire
MÈRE ET ENFANT Jean Desbout in
DESBOUTIN -
do copie exécutée eu 1(S97 .... Crépi n-Lehlond
EUGÈNE LABICHE (S. 1890) Jean Desboutin
Général CHARETTE -
Hyacinthe LOYSON Famille Loysou
Hyacinthe LOYSON (élude de tète) Jean Desboutin
Mme Hyacinthe LOYSON Famille Loyson
LE CHEVAL MÉCANIQUE Durand-Ruel
MtnG CORNEREAU JEUNE (esquisse) . . . Cornereau
Léonce BÉNÉDITE Léonce Bénéditc
Félicien CHAMPSAUR Ténicr
L'ÉDUCATION D'AZOR X...
LE MARTYRE D'AZOR X...
263
NOURRICK SUR PLACI-: X...
uéjeuni!:r du matin x...
LE BUVEUR X...
Li: SAVONNAGE X...
Ll<: PETIT PORTEUR 1)'1<:AU X...
LE REPASSAGE X...
ENFANT AU TABLIEli X...
NATURE MORTE X...
1878
Rien au Salon.
L'AMATEUR X...
LES MARIONNETTES ET MYCHO DM^obin
MYCHO SE RP:NDANT A L'ÉCOLE -
MYCnO MONTRANT UN CHAT A CHI-
QUINE Duraiid-Ruel
MYCHO AU PORT D'ARMES ou LE
VOLONTARIAT _
L'HOMME A L'ÉPÉE -
L'HOMME A L'ÉPÉE (réduclion) -
BÉBÉ DANS UNE CHAISE -
BÉBÉ DANS UN PANIER D'OSIER .... -
SORTIE DE BÉBÉ _
EN VOITURE -
ENFANT _
COMTE D'IDEVILLE J. Desbouliu
Dr Albert ROBIN -
LE FRÈRE NOURRICIER . . .' -
LE NOURRISSON _
LE SOMMEII _
LA GAMELLE _
LES PREMIÈRES LAR.MES ...... -
264
UX COIN D'ATKLll-l'v i i> i ,•
ÉTLDI-: DU CAllÇOX
LA TRICOTKUSH
LE HLVJ':iL \)K BKRK
LA PHK.MIKLvK DKXT
RÈVEHIK
PREMIÈHK LECOX DÉQUITATIOX
CHIEXETCHAT
GOUTER A LA PORTl-: 1J|-; LÉCOLl-: ...
1879
Salon : Mme B X
Salon: DMLLY DAX S MES BOTTES {\>^H\) .J. Uesboulin
DAILLY DAXS .MI-:S L,()T'ri-:s (iNTt;). . . . Daillv
^° .... Dr Landau
^'*^ (étu(k'). .F. (rrand-CarUTct
M'"e ROBLX. (mère) Dr Hobin
WAGXER _
Mme WAGXER
L'AMI CAUCHOIS X...
BÉBÉ ET MAMAX COURAXT Durand-Ruel
xouRRicE i:t XOURRISSOX
LE LEVEE, DE CES MllsSIEURS -
LA COXVERSATIOX _
AU PIED DU Mi:i\ _
COXFIDEXCES _
LE PHILOSOPHE _
A TABLE
LE EAVORI _
LE TRAVAIL (2e peinture) ^
CET AGE EST SAXS PITIÉ
265
L1-: BIHi:iU)X Dunmd-Uucl
];affai\ii^
LA siKS'n-: -
l'ii.i.i-.iri-: i-:r sa poiji'KI':
>n(:iu) LAriu':A'i" -
I/ACHOBATI-:
Li: .IiaJNI-: PHINTHI'.
1880
Sîiloii: Mme C. (Conifrcau) IcSTC Musée du Luxeinbourf^
Salon : LA FAMILLE L()\ SOS M""' II. Loyson
JELNK (.ARÇON DANS UN (xHANl) FAU-
TKl'lL (tenanl un chien) J. Df.s])uulin
.M\(:ii() AI (.iiii<:n —
JEUNE (lAHC.ON DANS UN (iHAND FAU-
TEUIL . U' Hobiii
M'"e DESI^OUTIN EN DÉCOLLETÉ .... Duraiid-Huel
]-:NFANT jouant (assl.s sur un lapis dans
l'cnibrasurr d'une |)oile) J. Desboulin
AMOURS —
ENFANTS .JOUANT (donl un dans une eliaise) —
LA CHAISb: PERCÉE Baniathan
S(.ÈNE MATINALE (nieieel 2 enfants). . . . J. Desboulin
L'HEURE DE LA SOIPE (2 enfanls assis
par terre el niangeanl) —
GUIGNOL b:N FAxMILLE —
LESBAINS (tI-:()RGES, A NICb: -
BÉBÉ AU CHAT (dans une pelilc chaise) . . . lîarnathan
SCÈNE MATINALE (mère el enfant) —
I E (JIARIOT D'OSIER J. Desboutin
M"e MOU-MOU X...
NATUBb: Moiun-: X- •
SOBTII-: 1)1-: BÉBÉ X--
2li(i
FILLETTE AU CHAPEAU GRIS {\^^A)
intkhii-:l'p> X--
COLLET L^L FOLi^lURI-: (portrait de ffiiim.-) Musca- de .M<.uliiis
Mlle VVOXXi-: (, Cornereau
.Mlle A\XE-.\L\H1L ( _
Mlle Jl-.AXXK (. _
(l<j _
KXFAXT AL .lOLKT I'. Hubi.iuel
.JEUN1-; 1-lLLL X...
REPOS AL SQLARE X...
1881
Salon : M. C X...
Salon : DURAS TV X...
LA COXSLLTATIOX AL CHAT L Desboutin
ENFAXT AL POLICHIXELLE _
LE PETIT MODÈLE
(lUIGXOL i:X FAMILLE -
CHIQLLXE EX CHAPEAL BLAXC ....
L'ÉCOLIER MODÈLE .Michaud.
LES PREMIERS PAS "(bébé se tenant à une
chaise) . ,1. Desboutin
ÉTUDE D'EXFAXT .Michaud
ENFANT AU PAPILLON -
FEMME AMUSANT SON ENFANT .VVEC
DES MARIONNETTES .\rbogast
MÈRE PEIGNANT SON ENFAXT J Desbouim
L'ENFANT AU LAPIN —
LE LIT CAGE (bébé endormi) —
UN PETIT TRAINEAU (chaise renversée) . . Arbogasl
PETITE FILLE A LA CHEMISETTE ROSI-: . Barnalhan
1882
Salon : ALASSOMÈRH I-":irnille Alassonière
267
ENFANT CIIFA'Al'CriANT UNE CANNE. . Arbogast
MARTI lA X...
NUS ])"i:N]^\\Nrs X...
i>ETiri-: Niçoisi-: x...
poiriiîAir iriio.MMi': X...
VIEILLI^ I)AM1<: DANS UN FAUTEUIL . . Barnalhnn
MATERNITÉ Micliaud
LA BONNE l^ÈTI': (femme ])()rtaiil deux
enfants) Pelil Palais
1^I-:HI': griffonnant (assis à lerre, en
chemise) Arbogast
TÈTE DE JEUNE Fl^lALMli X...
FRÈRE ET SŒUR J. Desboutin
ÉTUDE DE PETlTb: FILLE (assise, en chemise
blanche) J. Desboutin
FILLETTE AU CHAPEAU BLANC AUX
RUBANS NOIRS ArbogasL
1883
Salon • JiJVE A LA FOUJiRlUiE. . . . A((|uis par TÈlaL
PbyriTE FILLE AU CHIEN (S. de 1890). . .1. Desboutin
Pb/ITTE FILLE AU POLICHINELLE ... —
b:NFANT NU ENDORMI -
NICE (vue de la fenêtre de l'artiste) .... —
VUE DE NICE —
VUE DE NICb: -
DEUX ENFANTS JOUANT (assis dans un
bosquet Michaud
PETITE FILLE AU RUBAN BLANC T. Desl)outin
PETITE FILLE AU PANIER NOIR .... Barnathan
ENFANT BUVANT A LA CRUCHE -
UN JEUNE VIRTUOSE -
268
ENFANTS I)\NS T'N FAUTEfIL (nvc^- un
petit chai noir) Arhotjasl
FILLETTE ASSISE LES HHAS NES (ctiuk)
TÊTE DE JEUNE FILLE .1. I)('sl.f)Ulin
TÊTE DE JEINE NIÇOIS (de |)runi) . ...
TÊTE DE FE.M.MI-: LEVANT LES YEEN . .
ENFANT ASSIS LEVANT LA TÊTE (élude).
NIÇOIS AU BÉRET ROUGE Scliallat
PETITE FILLE AU CHAPEAU A LA
PLUME DE PAON (étude) Ail.oi,»asi
ENFANT AU PP:TIT THÉÂTRE -
UNE GRANDE REPRÉSENTATION .... J. Deslx.uliii
ÉTUDE D'ENFANT, (épaule nue)
FEMME ACCOUDÉE (élude) Mieliaud
DESBOUTIN A LA BLOUSE J. Deshoulin
D^ LAUGIER, de Grasse —
ENFANT AU CHAPEAi: DE FEUTRE ET
A LA FOURRURE —
ENr^-VNT DÉGUISÉ (eosluiiie blanc cl rouge) . —
d° , répii(pu' (le l.S'.l? ... Créi)in-L(bl<»nd
ENFANT BUVANT (sur la margelle d"un |)uils) Arhogasl
LA LECTUR1-: INTERROMPUE —
JEUNE FILL1-: ACCOUDÉE (au\ cheveux
épars) Mieliaud
ENFANTS AU MIROIR I. DcsI.ouliii
LALEÇONDECOUTUFvE Arhogasl
JEUNE GARÇON AU CHAPEAU DI-: PA1LLI-:
(profil) X...
PETITEFILLi: AU CHAPEAU NOIR J. DeslM.ulin
L1-:S l'RAGONAlil) Dl". «.IIASSI-:. riiui
l)ochadcs peintes, dont .'l perdues cl 2 à . .1. Deshoutin
do copies peintes en réductinu . X...
21 >9
1884
Salon : CHIENS A VENDRE
CMAT SUR UNP: CHAISE (pochade) ....
KNFANT AU POLICHINELLE DANS UN
FAUTEUIL
ENFANT AU PANIEH
LA FEMME AU CHIEN NOIR
UN PETIT SUISSE DE CATHÉDRALE . .
LA MÈRE JAQUONE
LE CHEMIN DE L'ÉCOLE
TÊTE D'ENFANT (au col plat)
ENFANT MENAÇANT SON POLICHINELLE
Ph/riTE FILLE AU CHIEN
ENFANT AU CHAPEAU BLANC
LA POULE ET LE POT
PETITE FILLE AU CHIEN POSÉ SUR UNE
CHAISE
FILLETTE AU CHAPEAU GRIS (avec ruban
de velours marron)
ENFANT NU COUCHÉ SUR LE GAZON . .
ENFANT AU CHAPEAU GRIS (dans un
fauteuil à fleurs)
ENFANT AU BONNET ROUGE, RIANT . .
ÉDUCATION DU POLICHINELLE .....
ENFANTS AUTOUR D'UNE TABLE RONDE
ENFANT AVEC UN CHIEN .lAUNE ....
1885
Salon : ÉTUDE POUR UNE PROCESSION
DES ENFANTS D'UN ASILE, A NICE
VUE GÉNÉRALE DE GRASSE
l-N RÉMOULEUR (S. 1901)
PETITE FILLE A LA MÉDAILLE (Nice) . .
270.
X...
.1. Deshonlin
d«
do
Bernheim jeune
Durand-Rue!
.Musée de Nice
Miehaud
Hariuilhan
Michaud
Barnalhan
.1. Deshoutin
Michaud
.1. Desboutin
Arbogast
Michaud
Barnathan
.1. Desboulin
X...
.1. Desl)oulin
1)1
iiraiul-I-'iii
irl
D'
Laiulau
Al
Ixif^asl
.).
I)(Sl»()lll
in
X
...
.1.
Dcshoul
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M
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.1.
DcsIh.uI
lin
B:
irnalli 111
.1.
DL'sboul
in
AMOLRS DANS CN 1>\1;(. ((.rass.) I. Di-sl.unlin
MYCllOTAOriXAN'l" I.I-: C.IIIIA l'.l.iol . . ^
L'ATELIl^H I)K (rnAVri{|-;, a Nier —
joueur 1)k vikli.i-:
i> chonnof
lazzahoxp:
LAZZAHOM-: (arcondé. un Inas liois ik- la
chemise)
JOUFXîH \)E F] A TE
PETITE FTLLE AU l-OULAP.I) ROUdl".
(S. 1800)
FEM.ME AU CORSAdE HLAXC
DEUX SŒURS (élude)
DESBOUTIX A LA T0QI:E XOIRE
ENFAXT A LA CRl'CHE
LE MARCHAND DE CHATS -
VIEUX MEXDLXXr APPUYE SUR SOX
BATOX Micliand
1886
Salon : in n Bart-lN. Députe
Mii« Louise RlvXD Loui^i- \\ciM\
M'"e DESBOUTIX (Xiee) M""" Do.sh)ulia
LA MAR(xUI-:Rrri-: '• Desh.mlin
JEUXE XK.OIS Dnrand-F^nrl
CAXoTAdi-: i-;t pp.osrrn tiox x--
Deux études pour c,' lahiran X- •
VIEILLE AXCrLAlSl-: l-.X l'.LAXC (élude) . . liainallian
DESBOUTIX AU lîAXDEAU Micliand
LA LESSIVE '• Desboulin
ENFAXT JOUAXT AVEC IX CIIII.X. (dans
un fauteuil à fleurs) .Mieliaud
271
1887
Salon : lUC.NY Hig'iv
JEUNE EILLE AU CHIEN !)•• Robin
PORTRATI' DE EEM.ME (Nice) X--
PORTHAir DIIOM.ME (lèlc do vieux iii,nieiii) X-.
1888
Salon : LK FILS DE LAITFA'R (Mycho). . X-.-
Salon : Mme M Darleyre (Nice)
JOSÉPIIINh: CHABOT Uuraiul-Rnel
DESBOUTIN AU VESTON BLANC Barnalhan
ANCIENS REMPARTS D'ANTIBES .... J. Desbontin
.JEANNE D'ARC (étude) X-.
ClIIQUINE AU CHAPEAU GIHS (datée PJOl) Cre|)ni-Lebl()nd
1889
Salon : L HOMME Ql l RIT X-.-
DESBOUTIN DANS LA PÉNOMBRE J. Desbontin
DURAND-MORIMBAU David
CANARD (nature morte) Michaud
DESBOUTIN (sur loile à gros grain) Barnathan
1890
Salon : CA' FUMEUR (Desbontin) X--
Salon : EUdÈNE LABICHE (1877) .... X---
Salon : Mme M X...
Salon : PETITE FILLE AU CH lEX (\HH?,) ]y Landau
d" réplique de 1(S*.)7 Crépin-Leblond
Salon : PETIT CARÇOX EX PITRE. . . X
Salon : UXE ROXXE BUTF (1882) . . . Petit Palais
Salon : BOUQUETIÈRE XIÇAJISE (.leune
fille coiffée d'une feuille de chon) X--
272
Salon : FfJ)I{i:.\ri\i-: (lC-[v v..ik-c) (18»;'.») . X...
Salon : POl P().\\E (ftude <!.• i.'t- -l.- netiU'
fille) (1885) X...
Salon : L/^OAT/- /;/^\7^/;/ 77: ,1877). . . la-onci' Bcnédite
•lOSÉPIIIX PÉLADAX (S. 18'.il) >!"•« K-ladan
PF/riTH FILLK ACCOlDHi; (,K. fare) J. Di-sboulin
1891
Salon : JOSEPH IS PÉPAbAS {18!i(»). . . Mme pùladan
Salon : niATIiE ï-yilDES X...
Salon : AQIARKIJJ-] D'APRES FI{\-
(iOXAPI) X...
MiieB MUeB.
ÉTUDE DE EE.M.ME. (la lèle appuvo," sur
'^ "lai") \rl)(.i,'ast
CHIQUIXE PEIfxXAXT I. Deshoulin
LAFEMME Ar(:iIAT(S. 189^) d"
PUVISDECHAVAXX1-:S (rorn|)osilion) . . . Musi-u d'Aniions
ETUDE (Porirail de .Maicfllin Drshoulin) . . .Musée. lu Liixi'niboiirg
1892
Salon : Mlle DE (7 M"^ de G.
Salon : E\EA.\T ITAUES (lèLe d'éludé)
(1863) X...
Salon ; RA V EL, Ingviiicur .Maurice Ravel
Salon : L'AI' TEC H (pastel vi peinture). . . Musée de .Moulins
Salon : UAL'THl'R X-.
Salon : FLORES LISE (étude 1869). . . . X...
M"e C. G Mtne Glace.
ARISTIDE BRUAXT ( S. 1869) I. Deshoulin
ARISTIDE BPvUAXT (réplique) A. Bruant
Mme FOULÉ
LA MARGUKHITK « Pas du tout »
DESBOUTIN A LA TOQUE NOIRE
(sans pipe)
PREMIER PRIX L)I^ SAGESSE
.Iia^XE FILLl^ (élude)
LA PROMENADE
LES CORNES
EILLI':TTE (étude)
LES premi1':rs pas
L'ÉCOLE
El<: TRAVAII. (U^^ peinture)
1893
Salon : ARISTIDE BRVANT (réexposé
à la Centennale de 1900)
L/sO\ MAILLARD
ERIK SATIE
Mme E
Mme H
POSSARI)
COMTE DE R
Mlle X
Mme DE S ROI' TIN
LIPMASS
BORDS DE SEINE
PRIÈRE (étude de femme). .......
Dr LANDAU
ENFANT JOUANT AVEC UN CHAT . . .
1894
Salon : A//.S'.S' MAUD (iOWE
Salon
Salon
Salon
Salon
Salon
Salon
Salon
Salon
Salon
Foulé
Rarnathan
Michaud
X
X .
X ...
X
X.
X
X
X...
.1. Desboutin
L. Maillard
Erik Satie
M'"^ F.
M'"'' R.
p^ois Ponsard
C'« de H.
X
X ...
Lipmann
.1. Desboutin
Rarnathan
D'" Landau
Grciisamer
M"'e Mac Rride
274.
Salon : ÉTIDE DE l'EMME X...
Salon: EEMMi-l M r.7/.r/' ( l.S'.ll ) . . . . X--
Salon : Mlle DE E MUe de li.
Salon : AMIECAE CU'HI.WI X...
TÊTK Di: .li:rXl-: IUAA: Iules Panis
DESBOUTIN A LA FOlîRHUKE 1)^ Landau
1895
Pas de peinture au Salon.
PIERRE HAl'DIX (S. 1X97)
MAURICE SARHAIT
FUMEUI^ ALLL.MAXT SA PIPE (mônic suj.t
que la i^ravure. |)ortrail de Desboulin) . . .
DESBOUTIN EN GRISAILLE
1896
Salon : WIEEEITE. en Pienol
Salon : Mlle X
1897
Salon : LA DAME Al TOITOV X...
Salon : USE EASSIEHE DHOWErH
AE CARXAVAE !)E MCE X...
Salon : L'Ai'TEEK MuséeiJ'J Luxembourg
Salon : AEEKEl) MOHTIEE Mortier
Salon : EU G. EOE liSIÈRE Famille l-'ournière
Salon : PIERRE H Al DIS (l.S'.)l) M"'<' P. Hau.lin
L'H()MMi':-()P.(;iii-:sri{i-: (S. i899) x...
1898
Salon : .\L\R(:nAM) iy()Ii,.\(>\S DE EA Mairie du 18e Arr'
RI V 1ER A (Paris)
275
M"ie H.
Baudin
Maurice
Sarraut
.1. Deshoutin
Clément -
Janin
X
M"'^ X
Salon : DAME MILA\AISE(oyi\\c). . .
Salon : MAIRICE BARRES
Salon : M. B
Salon : LA POVLE AU POT (nalurc morte
GILHiavr STRNGER
1899
Salon : L' Il OMM E-ORCII ESTRE (1897)
1900
Pas de Salon.
A la Décennalr :
BRUANT (1892)
Mme c. (1876)
PUVIS DR CHAVAXXES (composition) .
1901
X...
.Manrice Barrés
X ..
X ...
Société des Gens de
Lettres
x...
Salon
Salon
Salon
Salon
TA' RÈMOLLEUR (1885)
MATERMTÉ
LES PREMIERS PAS .
L AUTEUR
J. Desboutin
Musée (lu Luxembourg
Musée d'Amiens
,). Desboutin
X...
X...
X...
276
INDEX DES NOMS CITÉS
A l'exception de ceux contenus dans le Catalogue des Qravures,
fait par ordre alphabétique, et de ceux compris dans la Liste des Peintures.
Acliard lAiiK'déf). — 'l'J.
Adam (Paul). — l'iG.
Adoration des bergers. — 21. ;{.'>.
Albarraii (Dr). — 16'..
Albert (poinlr.). — lui, Kl'.).
Albizzi. — 24 cl suiv.
Alboizo. — 124, 133 ft suiv.. 2(i(;.
Alliou. — 135.
Aima- Tadcina. -— llO.
Aniigues (.Iules). — 27, 41, 44, 4.'> et
suiv., î)\, .")6, 7.5.
Annales bourbonnaises. — 1,')U.
Antistliène. — II.
Arago (Etienne). — 48.
Art (L'). — 137.
Art et Archéologie iBibl. d). - (i'i. H'.7.
Art (L' ) français. — 14 G.
Artistique (L). — 166.
Astier. 133.
Aslruc (Zacharie). — 91.
Aiiofier (Kniile). - 1ô. ôU, 75.
Aujiiuste (Morisieui-). --- 14.
Avenir National (ij. 48.
Babou (llipp.). '- 91. 110.
Baldimonney. — 38.
Ballanche. — II.
Balzac. — 15.
Baréty. - 144, 160.
Barrés (Maurice) . —
Baud-Bovy. — 109.
Baudelaire. — 41.
Baudin (l'ierro)
Bazire. — 135,
Becquet (Just).
Bellosiîuardo. -
Belot. — 91.
Bénédite (Léonce). - 110. l.">(», 174.
Béraud (Jean). — 90, 96, 2Ul.
Bérend. — 135.
150.
1.50.
137.
— 99.
- 23 et suiv.
l!eiii;ird («iabriel). IS.5.
1 iernlieim jeune. I 'l 2.
iJerry iduc de). 16.
Hesnanl lAlberlJ. — l'i5. 168. 20'i.
liiauzat (de). — 21.
Bi'.'ot iCiiarirs). — 76. 78.
Boecace. — 24.
Holdiiii. - 27, 'i2, Kil.
lione Muirhead). 2l)'i.
Honiial. 163.
HoiUie lie |)ère). 162.
Bonnielion. l.'i.
liollieejji. - 43.
l50Ul]Uel de la (iiN e. ! l'.i.
Bourbaki. 72.
Bour<îeois (Urbain). — 27.
Boyer. — 27, 28, 195.
Hràcken (W.). — 63.
Bracken (Marie). ^ 12ii.
Bract|ueniond i'elix . 145. 152, 167,
195. 215.
Bridault. 217.
Brown i.I.-L.). — 133.
Bruandet. — il.
Buhol (Félix). — 98.
Bulletin de la .'Société d' Eniulatiuu du
Bourbonnais. '.\.
Burly. — 91, 113. 11'.. 119.
Burty (Madeleine). 1 19.
Byron. — 70, 1 H».
Cadart. — 213. 217.
Cadol (Kdouard). — 53.
Calcar. — 17.
Callias (Mme H. d.). - 119.
(larabin (lluperli. - 95.
C.aravafîe. — 4.3.
( ardinal Duhnis (Le), drame. — 71.
72. 73 et suiv. 169.
(.a mot iSadil. 154.
( ^arrier-BelIeuse. -■- 95.
Casiinova
—
~ II.
Caucliois.
—
82.
Cazin
(J.
-C.)
. —
15,
U8
Ct'llini
- 6
CéiilK
0
, 3.
ig;{
Cézani
le.
—
172.
Cliabr
IT
(El
iinaïuiL'l
. -
(lliaîiH
122.
!.■)■
Cliinlieuii. 11.
Cliampaigiie (Pliil. de). ITâ.
Cliaiapsaur. 1U2, lU'i.
Cluuusuns et Cliansonnt'lles. --- '.>. 21).
Chapu. - 2(i.
Chardin. - 18». 1 8G.
Cliarkl. IV.
Cliéramv. - 18.
(^hesncau (Krnesl). l'i-
Clievrcul. - 98.
Chi(iuiiie. - 12U, l.'i'.», H',(). Ki'i, IGâ, 18.")
Cliodruc-Diiclo!*.
Cipriaiii (Amilcarc
Cladel iLcon)
- 15U.
II. W.
Clarctic (Juli-s). -- III, 27.
'l'i, VJ, 56. 5'.», l'A, 7'i, 75.
;iG,
78.
'i3,
1U2,
iiy, 12U, i;i5, 15
(^lcriiionl-l''erra 1 id .
Cohen (Henry). ll'J
(.olonna (Duidie.sse).
( 'oiinaissance (La) .
(.orneille. — 53.
(iurnerean. — 178.
Corot. - 172, 173.
Cosue-sur-1 QmI.
IU8.
60. 6
/ I .
215.
6, 13 el siiiv.
Coudcro. — l'i.
Courbe L 172.
Cuuture. - 5, 8,
169.
Cratès. — 11.
Crauck. — 27.
Crédit Foncier de
Franc
1'.
12.'
Crépin-Leblond.
2, 6
79
112
Cnslozza. — 'il.
C.uvillier. - 135.
Cyrano de Herperac.
II.
ItiV
Danipl (Jean). — 92.
Darier. — 85.
Daunita. - 26, 27.
Daiivilliers (iMiuna). 119.
David. — 172.
Davin-Duvivicr. — 1^.
Débals (Journal des). 47, 'i8.
Degas. — 16, 90 92, 101, 114, 119. 157.
170, 201, 204.
Delaborde (Henri). — 181.
I\.
42, i;
210, 215.
). -- 202.
119.
|15arthélenii;
(.Mme) mère
(.Mme,' ^e le
mmc de). — ■
10. 1
120
19,
63, 120,
passirn.
Delacroix. -
Delaigue. —
Delatire. —
Delteil (Loy
Dcscham|).
Deshoulin ( Harthélenii). 2, 6.
Desboiitin (.Mme) mère. — 2, 60.
Dosl)outin
37 et sniv., I 19.
Dcsboiilin (.Marie).
164.
Desboulin (les lils)
Deshrosses. — 11.
Detouche (Henri). - 20^
Diable (Le). — 47.
Diderot. -^ 11.
Diogène. -— 11.
Domiciles de
Doucel (.lae(|
Drcux-lirézé
Dubarry (la).
Dubois-Pillel.
Duhuisson. —
Duez. - 204
Dujardin.
Duniaine. — 75.
Dumas (.\.), père. - III.
Dumas (A.), lils. -- 119.
Dumas (Herald). — 76, 82, 84, 114
Dupont (Ficire). — 11, 9.
Duraiid-Uuel. — 74, 122, 135, 200
Durauty. -— 91, 114, 157.
Durrt l'i'ii.i. — 5, 114.
Eclair (L ). - 181.
Edimbourg. — 146.
Eloa, poème. — 76.
l^pictète. — II.
Estampe ( L' ) ri ï Ajjirhc. — 202.
Etex. — 5, 169.
Eudes. - 199.
Des
hou
lin.
- 8
1.
• es)
- -
44
135,
16
Mgi
• de
. -
- 61.
— '■
127
et
suiv.
—
95.
14
1 99
aguet (himiie).
antin-Ealour. —
aure (Henry). -
aure-Dujarric.
99.
90.
200.
27.
eiiuiie accoudée. — 21.
emine au chat (La). -
150.
200.
150,
11.
- 111, 2. 31. 47,
eti (Domenico). —
eudlct (Octave). —
''igaro (Le), journal.
i50, 215.
Floquot (Ch.). 27, 41. 51, 95.
Florence. — 12. (Voir Umbrellino), 59.
278
ISd.
l'.l.
170.
l"oiilaiiii-l(/-Diji)ii. 7 1 " ', 171, 1^',
l'orain. — ■ y.i.
Foscolo (Ujîo). - ;{.").
Fouriiièr<- (lùiif^èm-). i:,(j.
Fraïoiiard. — 1J7 <■{ stiiv., 1 7n Is-J
18'.. 196. 2U(), -JIU. .
Frtuigipaiii 1 .Nictjlo). — 30.
Frédérick-LL'iiiaîlrr. '.i",i.
Friek. 13,^.
Fumeur (illunnuil .\a in/te. 1 .jU.
(iaillani (FiTd.). Kw, lîDJ.
Gaiiisborough. 170.
Galilée. — 2/..
Gazette des Beaus-Aits. 12
Genève. ^ 2, 10, iV.K 1 :(.".. l'.'i
GessiKT. — 69.
Ghirlandajû (Doin.). — 12, '«:
Ginain. — 27, 30.
Giueste (Raoul). — l.')7.
GiorgioiK!. — 31.
Giron. — 10.
Glascow. — l'i().
Gœneutte (Norixrli. —
Gogli (Van). — II.
Goncourt (Ed. de).
102, 119, 184. 202.
Gone (Maud). 150.
Got. — 45, 46, 56.
Goupil. - 206.
Goya. 173.
Gozzoli. 42.
Grand-Carteret (.Joliii).
Grasse. — 129 et suiv.
Gratry (le P.). — 3.
Gros. — 172.
Guerbois (Café). — 89
(iuillaunie (Edmond). —
•i^. 195.
98, 119.
13,
135. 193.
l >ui \ .
26, 28.
Haas. 119.
Habeneck iCh.). 27, 41. 51.
lladen (Sevniour). — 204.
Hais (Franz). — 122. 150, 170. 200.
Havard (Henrv). — 200.
Ilaviland (:\Ime). — 112. 119.
Hav (Mieliel de L'). — 95.
Havem. — 120.
Helleu (Paul). — 168. 204.
Hftiuis. - 120.
Henner. — 85, 87, 156.
Hernani. — 50.
Homme à In pipe. 146, 213, 21'!.
Homme au grand chapeau. — 146.
llii^o iN'iilor). 15, 50, 74, 78, 166
Idi/Ufs et (luiii.Hons. ■ 25.
lilHstratiiit( Suisse. - 14 6.
I nronnuf au riirsa'^e bror/ié. 21.
I ndrprndiinre helf^e. 'i7.
In-n-,. — 172. 174, 201. 216.
Ingres i.Mine). I06,
Issoirr iPu\-d.-l)ôni.). 8, 21.
.lacijuf (Charles). - 2(J'i. 215.
.Jac(|ueniart (.Jules). 215.
.Janih i.lules). - 47, 48, 99, 186.
Ji-annirit (Georges). 2'>'i.
.Icdirl i(;as(on). lOl.
.louaii>l. 120, 2011.
.lourdain (l'rant/.). 102.
■ fouriial des (iniiruiirl. \i>ir Goncourt.
Klenck. — ■ 95.
Klinger (.Max).
215.
I.ai>iclie (Eug.). I(l5. 1 5n.
LatVnestre (George>|. — 12. 24, 26 et
sniv., 32. 40, 56, 85. I(t2, 1 11. 135. 167.
Lafonlaini- (N'icloriai. 'i7.
Laforgue I Jules). — - 215.
Laguillerniie. — - 27.
Lamartine. — 15, 35.
Lambert (peintri). - 109.
Lami (.Mme). 26.
Lapauze (II.|. - lOl.
La Hocb.-. - 85.
La Touche (Gastoni. I.35, 204.
La Tour. — 216.
Léandre. — 101.
Ledairc. — 147. 172.
Lec/.inska (Mariel. 56.
Leenhoff (Suz.|. - 116.
L.-févre. — 26.
Le^ros (Alph.). 3'i. '1'.. 91. 137. 167,
i73, 204.
Leheutre (Guslavii. ln\.
Liigiilon (Frédérici. I 1".
L.pic ^Comte). ^ 114. 119. 1 'i7. 2 In.
Leroux (Hector). 156.
Leroy, imprimi'ur.
L<îSsorre. — 204.
Ligue (La), drain.
Lipmann. 150.
Lippi iFilippo).
Lissa. — 41.
LoiiM-l I Pii-rre .
210. 217
279
Madagascar. — 52.
Madiiine Roland, drame. — 71, 73, 76,
78, 169.
Maîtres du Siècle (Les). — 200.
Mallarmé (St.). — 1)5.
Malvilan. — 131, 137.
Maiict. — 15, 87, 89, 90. 95. 101, 112,
116, 120, 157, 169. 170.
Mantz (Paul). — 175.
Marcadc. — 137.
Marie de Russie. - — 40.
Marthelot. — 120, 217.
Marthold (Jules de). — 157.
Martin (de Grasse). — 131.
Marx (Roger). — 137.
Masaccio. — 42, 170.
Massicot (Mlle). — 135. 159.
Mathieu (Gustave). — - 95, 157.
Mauban. — 47.
Maubert. — 129 et suiv.
Maurice de Saxe, drame. — 43 et suiv.,
75 et passij».
Ménard (Louis). — 99.
Mendès (Catulle). — 47, 96.
Ménippc. — IL
Méryon. — ■ 195.
Michaud ou Mycho
et passim.
Michaud (historien). —
Michel (Georges). — II
Michel-Ange. — 93.
Michou (député). — 99.
Miles (Roger). — 11 G, ISl.
Millais. — 110.
Millet. — 172.
Minocchi (Salv.). — 24, 25.
Mirbeau (Octave). — 156.
Monde Illustré (Le). — 167.
Monet (Claude). — 172.
Moniteur Universel (Le). — 49.
Monnier (Mare). — 71.
Monselel. — 120.
Montefiore. — 120.
Moreau-Nélaton. — 216.
Morisot (Berthe). — 120.
Moullé. — 154.
Murger (Henri). — III, 93.
Musset (A. de). — 74.
Napoléon III. — 59.
Nerval (Gérard de). — IL
Nice. — 1, 24, 139, 166, 192.
Niçois (Le Petit). — 71.
Nisiar. — 146.
Nittis (de). — 101, 110, 113, 201.
82, 91, 164, 165
99.
192.
Nittis ^Mme de). — 114.
Nodier (Charles). — 99.
Nolhac (de). — 127.
Nouvelle Athènes (La). — 95.
Ollivier (Emile). — 47.
Ombrellino (I'). — 10 et suiv., 15, 23 et
suiv., 47 et suiv., 89, 192.
Opinion Nationale (L'). — 49.
Orcagna. — 45.
Osbert. — 98.
Pajot. — 95.
Paton. — 133.
Paveurs (Les), poème. —
Péladan (Joséphin). — 2,
Pellechet. — 26.
Pellerin (Auguste). — 114
Pelletier (Mme). — 21.
Pelloutet (Michel). — 95,
Pêne (Henri de). — 47.
Perrin. — 75.
Pérugin. — 31.
Pessard (Emile). — 18, 27,
59.
99.
96.
81.
Petit (Georges). — 120, 200.
Petit- Bleu — 167.
Petit-Niçois. — 185.
Piazetta. — 35, 195.
Pierpont-Morgan. — 135.
Pille (Henri). — IL
Pinacothèque (vieille).
Pissarro (Camille). — 95.
Planche (Gustave). — II.
Plume (La). - — 156.
Pointe-sèche (sur la). — 204.
Pons (de). — 3.
Ponsard. — 50.
Portails (baron Roger). — 125.
Prud'hon. — 192.
Puvis de Chavannes. — IV, 8, 28, 114
116, 117, 154, 156, 163, 170. 172.
Pyat (Félix). — 15.
Pygmalion, poème. — 30.
Quinzaine bourbonnaise. — 129.
RaffaëUi. — 95, 204.
Raisin (Fréd.). — 70, 106, 135.
Raphaël. — 31, 34.
Rembrandt. — 4, 31, 170, 173, 200, 204.
République (La), journal. — 49.
Revue Énci/clopédique. — 167.
Reynolds. — 170.
•J(M».
170.
8ô.
18U.
\C>:i. 20'..
Mopif- di; l;ii.
50.
IS.
liiliol 'riH-o.lonl.
P.i.iir.l. - 18. loi
Hii'liiinl idf Goiièvc). -J, ."
I!i<j;uul lllviKintlicl. - IC/i.
nohrrt-FIciiry. 27, s."), 87
Hol(crt-f leury Trony). 27
l'ioclicl'orl d'il rri-L;iy;iic »|i|.
Kochcforl (F;h'<.'cs (le). 2.
Rocliclort-lVjiiian'rcs (de,. - 1.
Rochcfort (IJoiiri). — 1 1 :{ M;
\:vs, 156
l^od (Kdou.ird)
Rodin. — 156.
Roiiio. — 60.
Biiiide (le .\ uii
Rosliuid (iMaiiriicl. -
Rothschild. I;57.
Rouart I Henri). 120.
Roujoii (lIcMiy). 15:{
Rouqiicllc. — 120.
Rubciis. - 170.
Rud(> (Fraiicois). 10(i
riiii/Phis. - 50.
Sadowa. 'il.
Sailli en nii'dilulioii. .■{5.
Saint poilitiil une crois. 21. ."35.
Saints lisant. — 21. ;J5.
Saiiit-lîciié Taillandif-r (<li;or^cs). —
Sand (.Matirieo). -— 178.
Sandean (.Iules). — îl.
Sativan. — 166.
Sarah Rcinhardt. — 96.
Sarcev (Francisque) — 'l'i. 'i7. 'i8.
Sardou. — 75, 131.
Sarrau t (Albert). - 117.
Satie (Frik). 150.
Saunier (Charles). — Ki.
Scribe. — 15.
Séon (Alexandre). — !(8.
Séguin. — 15''i.
Seveste. — 45, 59.
Signorini. - 27.
Silvestre (Armand).
133, l-'.6. 153. 156. 19!l.
Sinionnet d'Ilennezel. pu
70, 85, 176.
Sivry (de). — II.
Sfiir (Le). — 53. 71.
120.
46.
;'.•. !MI. 102,
iia e t 5 '( .
S|.arkleit. _ 131.
S|elel, (de). — 1.57.
Stanislas (Coll.-ije). — .j.
Suisse (La), journal. 146.
.Sullv-I'rud'hornine. 27.
Tab^.r. II.
laine. — 12, 92, 106.
Ti'li'-<iraplie (Le), poème.
Temps (Le petit). — 71.
l'exier (Kdmond). 27. 41.
Thiél>aut-Sisson. — 102
Tissot (James). — 204.
Titi.n. — 186.
Toulouse-Lautrec (II. d.|.
.1. 7K.
li, 172
Uzzelli. — 27.
Vasari. — 34.
Vaudretner. — 26.
Vente de 1880. — 36
Verlaine. - II, 156.
Véronèse. — 31.
Versailles, poème. —
X'iennel. — 186.
Vierge à VEninnl. —
Vifrnaux. -- 91.
Villars i. Maréchal de). —
V'illeinain. — 156.
Villiers de rish-Adam.
Villon. — II.
Villon i.Iae(|ues|. 102
15.
164
15
215.
'.'1
Waltner.
Wattiau.
Watts. — 110.
Whistler. — 204.
Widor. — 2.
Willette. - - 90. Kl',
Willv. - 146.
07
Yzeure.
11. 18.
Zaïi Dnininegui. -7- 95.
Zola. — 90. 1(19., 120.. \^^.
Zoubow (Mme). — .35.
1»..
>;|
Étude de nu (Pointe-sèche)
2H2
TABLE DES PLANCHES HORS-TEXTE
Marceiliii Deshoiitiii. par liii-iiuMiic ( AV;/^/r, Miiséedu LuxnnhDunj)
Couverture.
L'Homme au grand chapeau. — Portrait de Desboutiii (Pniule-
sèche), 2e état, 1888) Frontispice
Norbert Gcjeueutte {Pointe-sèche originale) II
Henri Hochefort (2^^ état) 2
Alexandre Dumas lils (le"" état) 10
Les trois Amis (Poi/i/e-.sèc/zc, 3e état, 1880) M
MmeBouquet de la Grye 18
La Femme au toutou {Pointe-sèche originale) 24
Mme Camus à Téventail {Pointe-sèche avec fond monotype, d'après
la seule épreuve connue) 2ii
Duchesse Colonna, née (TAttry, en sculpture, Marcello (4^ étal). . 34
BoLDiiNi. — Portrait de Marcellin Desboutin {Reproduction en cou-
leurs) U)
Desboutin dit à la bavette (Pot/z/e-sèc/if ort^ina/e) 48
Mme Hector de Callias (Nina de Villart) U^ planche ȔO
Duranty, écrivain et critique d'art (2^ état) TU
Herald Dumas 74
Puxis de Chax'dnnes {Pointe-sèche originale) 78
Hippolyte Babou, littérateur, un des Tondateurs de la Société des
Aquafortistes, en 1862 84
283
Degas au chapeau (2^ étal) 90
Verlaine ('Pom/e-sèc/je, 2e é/a/ 1896; 92
Léon Maillard, homme de lettres et critique d'art 98
L'Homme à la pipe. — Portrait de Desboutin (3^ état, 1879) . . . 104
Desboutin (Lithographie, 1894) 106
Jean Richepin 112
Philippe Burty, critique d'art, exécuteur testamentaire d'Eugène
Delacroix (2e c/a/) 116
Berthe Morisot (2e é/aO 124
Emma Dauvilliers (2^ état) 144
Emile Soldi, sculpteur et écrivain d'art (2e (7a/) 146
Comte Lepic (5e é/a/) 152
Fumeur à la fourrure. — Portrait de Desboutin (Pointe-sèche, 1898 156
Degas lisant (/^eproduc/ion en couZeors) 162
Fumeur allumant sa pipe. — Portrait de Desboutin (Pointe-sèche,
lere/a/, 1895) 166
Henri Rouart, peintre et collectionneur (2e é/a/) 172
Repos de bébé (1er é/a/) 178
Mlle DaisyBérend, depuis Bo'i'^e d'Estournelles de Constant . . . 192
Les premiers pas. - — Enfants de l'Artiste (1er é/a/) 198
Les premiers pas. — Enfants de l'Artiste (5e é/a/) 200
Mme Valentin (2e état) 204
Guignol en famille (Reproduction en couleurs) 208
Aristide Bruant (Pom/e-séc/ie, 1895) 212
HenoÏT (Pointe-sèche originale) 216
Leroy, imprimeur en taile-douce (2e é/a/) 244
Fillette en chapeau gris (Reproduction en couleurs) 266
284
TABLE DES ILLUSTRATIONS DANS LE TEX FE
l'aees
Le Triomphe (le Silène (Pr/n/z/re 1860) I
Maison natale de Mareellin Desboutin, à Ccrilly (Allier) 1
Enfant à la tasse (Pointe-sèche) 5
Petite espiègle {Peinture, 1876) 7
Petite fille au foulard rouge (Pei/?/»re. 1885) 0
Mme Desboutin (.l/i/jedep/om6) 11
Le Docteur Laugier, (le Grasse (Pej/î/nrt', 1883) V^
L'Enfant au Papillon (Pef/î/ure, 1881) 16
Petite Fille à la Médaille (PezVî/wre) 17
Enfant au Maillot (Pem/ure, 1873) 10
Dans les Jardins de rOmbrellino (,"l7z/zt' (/e /j/o////^) 22
L'Ombrellino. — Le Pavillon 23
Tony Robert-Fleury (."l/i/?e(/ep/ooi6) 20
Florentine au sein nu (Pem/izre, 1865) 31
Etudes de têtes et main {Mine de plomb) 33
Type de Niçoise {Peinture, 1887) 31
Marie Desboutin {Mine de plomb) 3(>
LOmbrellino. — Le Parasol 37
Marie Desboutin. — Grande-Duchesse Marie {Sanguine). ... 38
Henner (Poin/e-sèc/ie) 39
Femme au Corsage broché (fîau-/or/e e/poz/î/e) 30
Assunta {Peinture, 1865) 42
Jules Claretie {Pointe-sèche) 13
Première femme de l'Auteur, ou Femme accoudée (Pointe-sèche) 15
Tête de blonde (Pezn/zzre, 1867) 47
Georges Lafenestre (Peinture, 1866) 58
Mme Dcsboiitin aux lunettes (A/i/?e de p/omô) 59
Vieille femme enfilant sou aiguille (A///îe de p/o/7î/)) 61
M. William Bracken (.l/me de p/om6) 62
La Toilette (Pez/7/n/T, 1873) 63
Petite fille au bonnet blanc (1882) 65
Mycho au chien (Pc{/7/»/T 1880) 69
Ch. Bigot (Poinle-si'che) 73
Il Musicante (Pei/?/77rc, 1874) 77
Mme Cornereau (Pe//7/î//e, 1880) 81
Femme cousant (Pc/n/j/rc, 1875) 83
Petite fille au chien (P('t/7/f7/-e, 1884) 86
Ed. Manet (Pointe-sèche). 89
Education de Policliiiicllc {Poiiitc-sèche) 91
Portrait d'enfant (Pointe-sèche) 94
Jules Jacquemart, aquafortiste (Pointe-sèche) 95
Judith (Poinle-sèclie) 97
Degas. — La buveuse d'absinthe et Marcellin Desboutin (Pein-
ture) 103
Ricard. — Desboutin (jPc7/?/77re, vers 1870) 108
Léonce Bénédite (Peinlnre. 1877) 111
Degas (Poinie-sèctie) 113
Hyacinthe Loyson (Mine de plomb) 115
Labiche (Poinle-sèclie) 116
Hyacinthe Loyson (Peintnre, 1877) 118
Bords de Seine (Pc7/7/77re, 1888) 119
Vue générale de Grasse (P^7/?/7/7r, 188.3) 121
Deux tètes d'enfants (C/a7/o/7 Co/7/é) 123
L'atelier de gravure (Pei/7/77/'e, 1885) 124
Jeune fille au chat (Pe7/7/77/c, 1875) 126
H. Fragonard. — La Siir))rise 128
H. Fragonard. — Le Rendez-vous 130
H. Fragonard. — La Confidence 132
H. Fragonard. — L'Amour couronné 134
H. Fragonard. — L'Abandon 136
286
Petits amours dans le parc (Pr//?/«rc, 1885) 138
Le petit modèle (Pe//?/arp, 1881) 140
Durand-Ruel (Pom/e-.sà7je) 111
Emile Zola à la signature (Po////e-.s<!c/ie) 113
Tête de femme (Pem/uT-e, 1888) 145
Docteur Chonnof (Pem/ure, 1885) 148
IJocteur Roh'iu {Crayon Conté rehaussé de sanguine) 149
Têtes d'études (De,s-.s{/î rt/rt p/nme) 151
Armand Silvestre (Pof/7/e-.sèc/ie) 155
Docteur Albert Robin (Pem/wre, 1878) 158
Vieille femme cousant (Dc.v.sz/Mif /r/ p/f /me) Itil
L'homme à l'épèe (Pcf7?/i/re, 1878) 1J)5
Le Marchand d'oignons de la Hiviera (Pc//?/ure, 1898) 1<)«)
Desboutin à la fourrure (Peinture, 1894) KxS
La bonne bète (Peinture, 1882) 171
Mlle Joséphine Chabot (/^em/wz-c, 1888) 174
Docteur Lanrlau (Pcz/z/n/T, 1893) 175
La Comédie Italienne (Pez/ï/t/n' déeorative, 187!) 177
Mme Desboutin en décolleté (Aquarelle) 18(1
Manet accoudé (Pointe-sèelie) 183
Tête d'enfant (Peinture) 187
Ravel, ingénieur (Pei/i/z/rc, 1892) 188
Vieilles fenunes endormies (De.s.sî/j à /</ />/u///c) 189
Petits dormenrs (3/i/îe (/c/)/o/n/)) 19U
Petits dormeurs (3////C rfep/om//) 191
DECiAS. — Desboutin et le comte Lepic gravant 191
Henry Guérard, acjuafortiste {Pointe-sèche) 197
Femme au métier {Pointe-sèche) 203
Renoir accoudé (Poi/?/e-.sèc/2e) 211
Ed. de Concourt (Poi/?/e-sèc//e) 218
Enfant nu endormi (Pezn/ure, 1884) 254
Mycho au chien (Peinlure) 258
Etude de nu (Pointe sèche) 2X2
Les enfants de M. de Lassus (Poz/î/e-sèc/ie, l^^ état) 28.S
2^7
^^jfe.
Les Enfants de M. de Lassus (Pointe-sèche)
288
TABLE DES MATIÈRES
Avant-Propos I
I. Les premières années 1
II. Le choix d'une carrière 5
III. D'Issoire à l'OmbrelIino 9
iV. La fortune de Desboutin 13
V. Le problème de la vie 17
VI. L'OmbrelIino 23
\'II. Les Galeries 31
VIII. La vie à rOmbrellino 37
IX. Maurice de Saxe 43
X. La ruine 59
XI. Derniers soubresauts 63
XI L A Genève 69
XIIL A Paris. - Les Drames 73
XIV. Les années difficiles 81
XV. Le café Guerbois 89
XV L La Xouvelle-Athènes 95
XVIL Ses portraits 101
XVIII. Le travailleur. - Les amis 109
XIX. Nouvel exode. - Le retour au soleil 119
289
XX. Les Fragonard de Grasse 127
XXI. Nouveaux déboires. - Le tremblement de terre de
Nice. - Exposition maïuiuéc. - Retour à
Paris, ])uis à Genève 139
XXIL Nouveau séjour à Paris. - La Décoration ... 149
XXllL Retour à Nice. - Les derniers moments .... 159
XXIV. Le peintre 169
XXV. Le dessinateur 189
XXVI. Le graveur 195
Catalogue des gravures 219
ESSAI D'UNE LISTE DES PELNTURES par dates ap])roxi-
matives de production avec les noms des possesseurs
actuels 259
INDEX DES NOMS CITÉS 277
TABLE DES PLANCHES HORS-TEXTE 283
TABLE DES ILLUSTRATIONS DANS LE TEXTE 285
290
Cet Ouvrage a été achevé d'imprimer
le 25 Novembre 1922
par riMPRlMERIF. LAURENT.
La rotogravure par les FlLS de VICTOR MICHEL.
Les phototypies par LEON MAROTTE.
Les eaux-fortes par LOLIS FORT.
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Clement-Janin, Noël
La curieuse vie de
Marcellin Desboutin
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