• jiîr
-^j-'
4^^»
>*
i . ,:»-<^-
%
GABRIEL HANOTAUX 1; i GEORGES VICAIRE
LA
JEUNESSE DE BALZAC
BALZAC IMPRIMEUR
BALZAC ET MADAME DE BERNY,
NOUVELLE EDITION AUGMENTÉE
DE LA CORRESPONDANCE
DE BALZAC ET DE MADAME DE BERNY
7Ja**<*iH>"*fc^ f
PARIS
LIBRAIRIE DES AMATEURS
A. FERROUD. — F. FERROUD, Successeur
127, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, I 2 7
MCMXXI
LA
JEUNESSE DE BALZAC
tU
Digitized by the Internet Archive
in 2010 with funding from
University of Toronto
http://www.archive.org/details/lajeunessedebalOOhano
\
(h. -2
GABRIEL IIANOTAUX et GEORGES VICAIRE
LA
JEUNESSE DE BALZAC
BALZAC IMPBIMEUB
BALZAC ET MADAME DE BBRNY
NOUVELLE EDITION AUGMENTEE
DE LA CORRESPONDANCE
DE BALZAC ET DE MADAME DE BERNY
PARIS
LIBRAIRIE DES AMATEURS
A. FERROUD. ~ F. FERROUD, Successeur
127, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, I 1"j
M C M X X I
*
Tous droit! de traduction, de îeproduction et d'adaptatioa
. éserrés pour tou-
Cop . _ - Hanotaux rt Geor.^ \
LA MEMOIRE
1)1:
Vicomte de Spoelbekch de Lovenjoul
AVIS
SUR LA PRÉSENTE ÉDITION
Il y a dix-huit ans, LaJeunessede Balzac parais-
sait pour la première fois avec le sous-titre de
« Balzac imprimeur ». L'édition était totalement
épuisée depuis un certain temps déjà, l'éditeur
nous pressait d'en donner une nouvelle et nous
allions satisfaire son désir, lorsque la guerre
éclata.
Ce projet, interrompu pendant plusieurs
années, nous le reprenons aujourd'hui.
Que notre première pensée, en publiant ce
nouveau livre, aille à celui que la mort a trop
tôt ravi aux Lettres françaises, au vicomte
de Spoelberch de Lovenjoul ! Notre ami très
regretté avait apporté à notre travail une pré-
cieuse contribution. Il a fait plus encore : il a
légué à l'Institut de France les trésors de sa
merveilleuse collection.
2 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Pour rond ri4 à la mémoire du savant collec-
tionneur et du maître balzacien l'hommage qui
lui est dû, nous avons pensé que nous ne
pouvions rien faire de mieux que de joindre à
notre livre, comme il le désirait vivement, les
lettres de Balzac à Madame de Berny et celles
de Madame de Berny à Balzac, qui faisaient
partie de sa collection. L'intérêt de cette impor-
tante et précieuse addition n'échappera pas au
lecteur. Elle fait l'objet d'un nouveau chapitre
ajouté à ceux de l'édition originale de La Jeunesse
de Balzac.
Lorsque parut notre première édition, nous
avons dû emprunter les extraits des lettres de
Balzac à Madame Hanska, à sa sœur, à des tiers,
aux Lettres à l'Étrangère et à la Correspondance,
publiée, en 1876, par la maison Michel Lévy.
Nous n'avions pas alors les autographes sous
les yeux; nous les avons aujourd'hui, et, après
avoir conféré les textes originaux avec les textes
imprimés, il nous est apparu qu'ils avaient été
mis au jour avec de regrettables inexactitudes.
Si Ton rapproche les deux textes, on constate
avec stupeur les déformations graves qu'ont
subies les lettres de l'illustre écrivain. Cer-
taines sont devenues, à l'impression, mécon-
naissables, tellement elles ont été arrangées,
AVIS SUR LA PRÉSENTE ÉDITION.
altérées, dénaturées et, pourquoi ne pas dire
le mol : truquées.
Nous avons donc, rétabli, dans cette nouvelle
édition, ainsi que nous l'avait conseillé le vi-
comte de Lovenjoul, les textes authentiqués de
Balzac; aux références primitives, soit aux
Lettres à l'Etrangère, soit à la Correspondance,
nous avons joint l'indication des cotes sous
lesquelles ces lettres autographes sont conser-
vées dans la Collection Lovenjoul, ce qui per-
mettra aux travailleurs de se rendre compte des
notables différences existant entre les textes
originaux et les textes imprimés.
Cette nouvelle édition de La Jeunesse de Balzac,
imprimée par la maison Lahure, est ornée des
portraits de Balzac, d'après la sépia de Devéria,
et de Madame de Berny, d'après une peinture h
lhuile, tous deux gravés par l'excellent artiste
Clément. Nous donnons aussi deux fac-similé
des écritures de Balzac et de Madame de Bernv.
AVERTISSEMENT
DE LA PREMIÈRE ÉDITION
Ce livre, consacré à la jeunesse d'Honoré de
Balzac, est annoncé depuis longtemps. Le
retard, que des circonstances indépendantes de
notre volonté ontapporté à sa publication, n'aura
pas été sans quelque profit pour le lecteur. Une
élaboration plus lente nous a permis d'être à la
fois plus exacts et plus complets; les documents
réunis dans les Appendices éclairent d'une façon
précise et qui nous paraît indiscutable une des
périodes les plus obscures et les plus intéres-
santes de la vie du grand écrivain, celle des
débuts, ainsi que la genèse de l'œuvre et la
première évolution de la pensée.
Le présent ouvrage est surtout documentaire;
mais quand il s'agit de Balzac, le document
prend une valeur singulière. Il n'était pas
homme à s'attarder dans la banalité : son ima-
gination animait et amplifiait tout. Ainsi la bio-
G LA JEUNESSE DE BALZAC.
graphie d'un imprimeur de l'époque roman-
tique devient, rien que par l'exposé des faits,
un véritable roman.
Le roman des premières amours de Balzac
s'est rattaché, sans que nous l'ayons voulu ni
cherché, à l'histoire de Balzac imprimeur et
fondeur de caractères. Dans l'encre nous avons
trouvé de l'azur. Un nom de femme, cité dans
un acte notarié, nous a permis de préciser ce
que la publication de la Correspondance avait
déjà dévoilé. L'inspiration de l'écrivain, la for-
mation de son esprit, l'origine de certaines
idées, le sens profond de certaines œuvres capi-
tales se sont expliqués soudain. Une femme
distinguée, filleule de Louis XVI et de Marie-
Antoinette, est apparue comme l'éducatrice de
Balzac. On comprendra, maintenant, bien des
pages énigmatiques, bien des allusions mysté-
rieuses, semées dans l'œuvre du romancier.
Notre livre découvre un peu l'envers de La Comé-
die humaine. Le prototype du Lys dans la Vallée
est connu désormais.
L'épisode de ces amours singulières anime
fort heureusement le récit que nous avons entre-
pris de l'équipée juvénile qui fit de Balzac,
apprenti écrivain, un négociant aussi éphémère
que malchanceux. Malgré la minutie de certains
détails, nous n'avons pas hésité à donner tout
AVERTISSEMENT DE LA PREMIÈRE ÉDITION. 7
l'historique des maisons Balzac et Barbier, Balzac,
Barbier et Laurent qui, en 1826, 1827, 1828,
s'étaient installées dans la rue des Marais-Saint-
Germain, Les bibliophiles nous sauront gré,
peut-être, d'avoir dresse une première liste des
impressions dues à une maison qui porta obs-
curément un nom glorieux.
Nous nous sommes appliqués aussi à faire
connaître, par le détail, les conditions d'exis-
tence d'une imprimerie et d'une fonderie de
caractères au temps des Renduel et des Urbain
Canel.
Les recherches et le travail dont nous don-
nons le résultat au public eussent été impos-
sibles si nous n'avions rencontré, de toutes
parts, les plus utiles concours. Nos remercie-
ments réuniront, d'abord, dans l'expression
d'une même gratitude, M. le vicomte de Spoel-
berch de Lovenjoul, qui nous a ouvert ses admi-
rables archives littéraires, et le directeur actuel
de l'ancienne maison Balzac et de Berny,
M. Charles Tuleu, qui nous a ouvert celles de
cette maison. Nous devons aussi à M. Tuleu la
communication du beau portrait de Balzac que
nous publions, ainsi que nombre de détails qui
tiennent à une parfaite connaissance de tout ce
qui se rapporte à Balzac. Nous lui devons plus
encore, c'est à savoir l'indication exacte et judi-
s LA JEUNESSE DE BALZAC.
cieuse dos précisions et des convenances dans
un sujet à la fois captivant et délicat.
Quant à M. de Spoelberch deLovenjoul, nous
n'avons qu'un mot à dire en lui soumettant
ce livre : tuus est. C'est une gratitude nouvelle
parmi celles que lui doivent les lettres fran-
çaises. Il est le maître incontesté et, comme on
disait autrefois, la source désormais consacrée
d'une partie bien précieuse de l'histoire litté-
raire, au dix-neuvième siècle.
Il faudrait une énumération homérique pour
rappeler toutes les bienveillances que nous
avons rencontrées. La publication, dans Le
Journal, de l'étude qui mettait en œuvre les pre-
miers documents, nous a valu de toutes parts
des communications intéressantes. M. Arthur
Rhoné, M. Sédillot, M. Moussard, employé de
la maison Tuleu, qui ont tout su de Balzac, ont
répondu sans se lasser à nos questions. MM. Fré-
déric Masson, P. de Nolhac, Georges Cain
nous ont aidé de leurs lumières et de leur obli-
geance. Sur des points spéciaux nous avons
reçu les communications les plus intéressantes
de MM. Dumaine, ministre plénipotentiaire, et
Gérard, ministre de France à Bruxelles, de
M. Alfred Caraven-Cachin, de M. l'abbé Genty,
deM.Ed.Gachot, de M. Coùard-Luys, archiviste
de Seine-et-Oise, de M. Maurice Tourneux, de
AVERTISSEMENT DE LA PREMIÈRE ÉDITION. 9
M. Paul Lacombe, parisien. Partout, à la
Bibliothèque nationale, aux Archives nationales,
aux archives du tribunal de commerce, dans
les archives de province el les archives parti-
culières, môme obligeance el même empresse-
ment. Le nom de Balzac ouvrait toutes les
portes; MM. Mortreuil, Henri Omont, Marchai,
Viennot, Pillon-Dufresnes, Marins Barroux,
Mmc Deprct, M. Bixio, M. Bourguignon el tanl
d'autres nous ont aidés. Qu'ils reçoivent ici
l'expression de tous nos remerciements.
Esl-il nécessaire d'attirer l'attention du lec-
teur sur la collaboration de notre éminent ami,
M. Lepère, dont les belles gravures sur bois
ornent si précieusement le présent volume? La
vignette qui sert d'encadrement aux pages du
texte est empruntée à l'ancien fonds de l'impri-
merie de Balzac; les caractères avec lesquels le
livre a été imprimé, par la maison Hérissey
d'Evreux, ont été fondus spécialement par la
maison Tuleu, 58, rue d'Hauteville, c'est-à-dire
précisément par la maison qui eut à sa tête
Honoré de Balzac et Alexandre de Berny.
Ainsi, après soixante-quinze ans, Balzac
imprimeur se retrouve chez lui : peut-être ce
retour des choses n'eût pas déplu à ce grand
amoureux de la gloire que fut Honoré de Balzac,
romancier.
LA
JEUNESSE DE BALZAC
PREMIÈRES ARMES
Balzac discutait avec Vidocq. Celui-ci soute-
nait que la réalité était parfois plus dramatique
que le roman. Le romancier était naturellement
d'un avis contraire : « Ah! vous croyez à la
réalité, mon cher Vidocq, disait-il. Vous me
charmez. Je ne vous aurais pas supposé si naïf.
La réalité ! Parlez-m'en. Vous revenez de ce beau
pays. Allons donc! C'est nous qui la faisons, la
réalité1! »
Or, voilà que la vie réelle de Balzac apparaît,
au fur et à mesure qu'elle se découvre, comme
un prestigieux roman.
Nous avons les Confessions de Jean-Jacques et
les Mémoires de George Sand2. Nous n'avons
1. Balzac chez lui. Souvenirs des Jardies, par Léon Gozlan.
Paris, Michel Lévy frères, 1862, in-18, p. 214.
2. Sous le titre : Histoire de ma Vie. Paris, Cadot, 1854-1855,
i vol. in-8.
12 LA JEUNESSE DE BALZAC.
pas l'autobiographie de Balzac. S'il l'eût écrite,
les lettres françaises se fussent enrichies du
plus précieux des documents humains. On eût
suivi, avec un intérêt passionné, toute la car-
rière de l'homme qui fut, peut-être, le plus
grand semeur d'idées du siècle et qui avait
inscrit au socle de la statue de Napoléon, posée
sur la cheminée de son cabinet de travail :
« Achever par la plume ce qu'il a commencé
par l'épée1. »
Il est vrai que la biographie de Balzac est
comme éparse dans son œuvre. Ce qu'il a dit,
il l'avait vu, il l'avait vécu. Poussé par le besoin,
emporté par cette fureur d'écrire qui fut le
tourment de sa vie, il a jeté* sa propre chair en
pâture au public. Mais ce ne sont que des lam-
beaux : disjecti membra poetx.
Il faudrait lire entre les lignes, il faudrait
deviner beaucoup; surtout, il faudrait connaître
le détail précis. La vie de l'auteur expliquerait,
souvent, l'inspiration et la genèse de l'œuvre.
Un travail complet sur Balzac n'a pas encore
été publié2. Sa sœur, Mme Laure Surville, a écrit
1. Balzac chez lui, p. 5(5.
2. Il a paru, sur Balzac, un grand nombre de livres, de bro-
chures et surtout d'articles de revues et de journaux. La plu-
part concernent spécialement l'œuvre littéraire du célèbre
romancier. Nous citerons, particulièrement, la magistrale His-
toire des Œuvres de H. de Balzac, par le vicomte de Spoelberch
de Lovenjoul, dont la « troisième édition entièrement revue et
phkmikuks ai;mi:s. 13
mi livre intéressant, (in, délicat ci attendri :
c'esl un pastel exquis. Mais la grâce ne suffit
pas pour peindre les lions.
M""" Surville n'a pas montré son frère, parce
qu'elle ne l'a pas vu. Elle l'aimait trop.
corrigée à nouveau » parut chez Calmann Lévy, on 1886, in-8° ;
elle forme le complément de l'édition des Œuvres complètes de
II. de Balzac, publiée en 24 volumes chez le même éditeur, de
1809 à 1870. Au point de vue biographique, voiei, par ordre
chronologique, la liste des principaux ouvrages écrits sur
l'auteur de la Comédie humaine:
— La Canne de M. de Balzac, par Mœo Emile de Girardin.
Paris, Dumont, 1830, in-8. — Galerie des contemporains illustres,
par un homme de rien [Louis de Loménie]. Paris, au bureau cen-
trât, rue des Beaux-Arts, 13, 1841, in-18. — M. de Balzac, par
Gustave Desnoiresterres. Paris, Paul Permain et Cie, 1851,
in-10. — Les Physionomies littéraires de ce temps. Honoré de
Balzae. Essai sur l'homme et sur l'œuvre, par Armand Bas-
ciiet, avec notes historiques par Champfleury. Paris, D. Giraud
et J. Dagneau, 1852, in-12. — Les Contemporains. Balzac, par
Eugène de Mirecourt. Paris, J.-J. Roret et Cie, 1854, in-18. —
Célébrités européennes, par J.-M. Cayla. Paris, IlippoUjte Bois-
gard, 1855, gr. in-8 (pp. 59-04, avec un portrait). — Collection
Hetzel. Balzac en pantoufles, par Léon Gozlan. Bruxelles, 1850,
in-32. — Honoré de Balzac, sa vie et ses œuvres : Biographie
par Théophile Gautier. Analyse de la Comédie humaine par
H. Taine. Bruxelles, H. Dumont, 1858, in-12 (avec un portrait
lithographie et un fac-similé de signature). La première édition
française a paru, en 1859, chez Poulet-Malassis, in-12 (avec un
portrait gravé à l'eau-forte par E. Hedouin et un fac-similé
d'autographe). — Balzac, sa vie et ses œuvres, d'après sa cor-
respondance, par Mm8 Laure Surville, née de Balzac. Paris,
Librairie nouvelle, 1858, in-12. Une nouvelle édition a paru, en
1878, chez Calmann Lévy, in-18. (C'est à cette édition que nous
renverrons le lecteur, chaque fois qu'elle sera citée.) — Por-
trait intime de Balzac. Sa vie, son humeur et son caractère,
par Edmond Werdet, son ancien libraire. Paris, A. Silvestre,
1859, in-12. — OEuvres illustrées de Champfleury. Grandes
figures d'hier et d'aujourd'hui. Balzac, Gérard de Nerval, avec
quatre portraits gravés à l'eau-forte par Bracquemond. Paris,
Poulet-Malassis et De Broise, 1801, in-12. — Balzac chez lui.
14 LA JLl'NLSSL DE BALZAC.
D'autres écrivains ont raconte le Balzac exté-
rieur qui encombrait, de son exubérance affairée,
les dernières années du règne de Louis-Phi-
lippe : le Balzac des libraires et des imprimeurs,
le Balzac des gazetiers et des huissiers, le Balzac
Souvenirs des Jardies, par Léon Gozl.yn. Paris, Michel Lcvy
frères, I86v2. in-12. — Champfleury. Documents pour servir à la
biographie de Balzac. I. Balzac propriétaire, avec plan des
Jardies et autographe. Paris, 1875, in-18. — Champfleury. Docu-
ments pour servira la biographie de Balzac. Balzac au collège,
avec une vue dessinée d'après nature par A. Queyroy. Paris,
A. Palay, 1878, in-18. — - Champfleury. Documents pour servir à
la biographie de Balzac. Balzac, sa méthode de travail, élude
d'après des manuscrits. Parts, A. Patay, 1879, in-18. — Balzac
by Edgar Evertson Saltus. Boston, Hougton, Mifflin and Com-
pany, 1884, pet. in-8. — R. du Pontavice de Heussey. Balzac en
Bretagne. Cinq lettres inédites de l'auteur des Chouans.
Rennes, Hlhe Caillière, 1885, in-lG carré. — Le Tiroir aux souve-
nirs, par Albéric Second. Paris, E.Dentu, 1886, in-18. Pp. 3 à 19 :
Balzac à Angoulème ; pp. 21 à 55 : Balzac à Paris ; pp. 57 à 52 :
Balzac à la campagne. — Balzac et ses amies, par Gabriel
Ferry. Paris, Calmann Léoy, 1888, in-18. — Comte G. de Con-
tades. Balzac alençonnais. Alençon. E. Renaut-De Broise, 1888,
in-8. — L'Œuvre de H. de Balzac, étude littéraire et philoso-
phique sur la Comédie humaine, par Marcel Barrière. Paris, Cal-
mann Lévy, 1890, in-8.— Julien Lemer. Balzac, sa vie, son œuvre.
Lettre adressée à l'auteur par Ernest Renan, de l'Académie
française. Paris, R. Sauvaître, 1892, in-18. — Paul Flat. Essais
sur Balzac. Paris, E. Pion, Nourrit et Cie, 1895, in-18. — Paul
Flat. Seconds essais sur Balzac. Parts, E. Pion, Nourrit et £>,
1894, in-18. — Edmond Biré. Honoré de Balzac. Paris, Honoré
Champion, 1897, in-8. — A. Fray-Fournier. Balzac à Limoges .
Limoges, Ve H. Ducourticux, 1898, in-8. — Balzac ignoré, par le
docteur Cabanes. Paris, A. Charles, 1899, in-4° (avec portraits).
— La médecine et les médecins dans l'œuvre de H. de Balzac
(thèse), par le Dr P. Caujole. Lijon, Slorck, 1900, in-8. — Balzac
à vingt ans, par Eugène Gilbert. Bruxelles, Société belge de
librairie, 1904, in-12. — Balzac dans l'intimité et les types de la
Comédie humaine, par J. Lhomer. Paris, Lemasle, 190 i, in-8. —
Balzac, l'homme et l'œuvre, par André Le Breton. Port*,
Armand Colin et 6>, 1905, in-12. — Honoré de Balzac, 1799-1850.
PREMIÈRES \RMES. '"■
garde-national1 et I»' Balzac rabelaisien, le
Balzac en robe <l<* chambre el le Balzac en
pantoufles, môme le Balzac à la canne, le Balzac
des Jardies*.
Tout ce qui, dans cette vie, prêtait à l'anec-
dote ou à la caricature, tout cela nous a été
exposé dans un Musée-Balzac qui commence à
prendre les proportions de ce Musée-Gœthe el
de ce .Musée-Shakespeare que les Allemands et
les Anglais ont consacrés à la mémoire de leurs
plus illustres poêles.
Mais l'extérieur n'est pas tout l'homme. Et,
sous celle averse d'observations et d'indiscré-
tions, parfois amusantes, le plus souvent super-
ficielles, le fond se dérobe.
Balzac a écrit : « Je suis inexplicable pour
par Ferdinand Brunetière. Paris, 1905, in-8. — Balzac juriscon-
sulte et criminaliste, par Fernand Roux. Paris, Dajarric, 1006,
in-12. — Balzac peint par lui-même, par Eugène Gilbert. Bru-
xelles, J. Goemare, 1906, in-8. — Balzac, ses idées sociales, par
l'abbé Charles Calippe. [Reims,] Lecoffre, 1006, in-12. — La
Dilecta de Balzac, Balzac et Mm8 de Berny, 1820-1836, par
G. Ruxton. Préface de M. Jules Lemaitre. Paris, Pion, Nourrit,
et O, 1909, in-12. — H. de Balzac. Pensées, sujets, fragmens...
avec une préface et des notes de Jacques Crépet. Paris, A.
Blaizot, 1910, in-8. — Louis Lumet. Honoré de Balzac, cri-
tique littéraire. Paris, Albert Messein, 1912, in-8. — Balzac, par
Emile Faguet. Paris, Hachette et Cip, 1913, in-16.
Pour les autres ouvrages, brochures ou articles, consulter
Y Histoire des Œuvres de H. de Balzac, par le vicomte de Spoel-
berch de Lovenjoul, 3e édit., pp. 551-406 et 471-496. Voir aussi
Manuel de l'amateur de livres du XIX' siècle, par Georges Vicaire.
Paris, Rouquette, 1894, t. I, col. 171-256.
1. Collection Lovenjoul, ms. A 547.
2. Collection Lovenjoul, mss. A 523-524.
16 LA JEUNESSE DE BALZAC.
tous, nul n'a le secret de ma vie, et je ne veux
le livrera personne1. »
Cependant, depuis qu'ont paru les Lettres à
l'Étrangère, un coin du voile se soulève. L'homme
qui a le plus fait pour la mémoire de Balzac, le
maître érudit et l'heureux collectionneur qui a
su arrachera la destruction les précieuses épaves
de la vie privée et de la vie littéraire de l'écri-
vain, le vicomte de Spoelberch de Lovenjoul,
aurait pu seul tout raconter, parce que, seul, il
savait tout. Il nous devait une vie de Balzac2.
1. Lettres à V Étrangère (1833-1842). Paris, Calmann Lévy, 1809,
in-8, p. 418 (lettre CXXVI, 19 juillet 1837).
'2. Le nom du vicomte de Spoelberch de Lovenjoul est tel-
lement uni à la mémoire littéraire de Balzac qu'il suffît de
le citer. Le travail du collectionneur, de l'érudit, du critique a
éclairé d'un jour entièrement nouveau l'œuvre énorme mais
confuse du puissant romancier. Voici les titres des principaux
ouvrages balzaciens du vicomte de Spoelberch de Lovenjoul :
— Histoire des Œuvres de H. de Balzac, par Charles de
Lovenjoul. Paris, Calmann Lévy, 1879, in-8. Une « troisième
édition entièrement revue et corrigée à nouveau » a paru chez
le même éditeur, en 1886, un vol. in-8. — Un dernier chapitre
de l'Histoire des OEuvres de H. de Balzac, par Charles de
Lovenjoul. Paris, Denlu, 1880, in-8. — Les Avatars d'une œuvre
de Balzac, par M. le Ve de Spoelberch de Lovenjoul. Extrait
de la « Revue rétrospective ». Paris, aux bureaux de la Revue
rétrospective, 55, rue de Rivoli, 55, 1892, in-12. — Notules sur
Honoré de Balzac, par un de ses amis, publiées par le vicomte
de Spoelberch de Lovenjoul. Paris, Techener, 1896, in-8. —
Vicomte de Spoelberch de Lovenjoul. Études balzaciennes.
Un roman d'amour. Pains, Calmann Lévy, 1896, in-18. —
Vicomte de Spoelberch de Lovenjoul. Études balzaciennes.
Autour de Honoré de Balzac. Paris, Calmann Lévy, 1897, in-18.
— V,e de Spoelberch de Lovenjoul. La Genèse d'un roman de
Balzac: Les Paysans. Lettres et fragments inédits. Paris. Paul
Otlendorff, 1901, in-18. — V* de Spoelberch de Lovenjoul. Une
Page perdue de II. de Balzac. Paris, Paul Ollendorjf] 1903. in-18.
PREMIÈRES \i;mi:s. it
Aucune convenance n'empêche d'aborder,
aujourd'hui, ce sujet. Emporté souveni par son
tempérament, par ses besoins, par sn fougue,
Balzac n'en fui pas moins, toute sa vie, labo-
rieux, généreux et probe. Il a été entouré des
pins nobles el des plus délicates affections. La
vérité ne diminuerait personne. Elle laisserai
entrevoiries faiblesses el les misères humaines,
sans rabaisser l'humanité.
Parlant de lui-même avec cet orgueil hou
enfant qui le soutint toujours, Balzac écrivait,
en 1837, à Mme Hanska : « Si vous n'admirez pas
un homme, qui, portant le faix d'une dette
pareille, écrivant d'une main, se battant de l'au-
tre, ne commettant jamais de lâcheté, ne pliant ni
sous l'usurier, ni sous le journalisme, n'implo-
rant personne, ni son créancier, ni son ami,
n'a pas chancelé dans le pays le plus soupçon-
neux, le plus égoïste, le plus avare du monde et
où Ion ne prête qu'aux riches, que la calomnie
a poursuivi, poursuit encore, que l'on a mis à
Ste-Pélagie quand il était auprès de vous, à
Vienne, vous ne savez rien de ce monde1 ! »
Cette existence du Titan moderne, cloué au
rocher, assailli par une nuée de vautours et par
une marée montante d'encre et de papier, cette
1. Collection Lovenjoul, ms. A 301, fol. 425. — Lettres à V Étran-
gère..., p. 416 (lettre CXXVI, 19 juillet 1857).
IN LA JEUNESSE DE BALZAC.
existence, la voilà résumée en dix lignes.
11 y eut aussi des heures de détente, d'apaise-
ment et de consolation, des heures intimes
et douces. Elles sont rappelées par Balzac
dans cette même lettre, qui est comme une
courte confession : « Je serais bien injuste si je
ne disais pas que, de 1823 à 1833 \ un ange
m'a soutenu dans cette horrible guerre. Madame
de B..., quoique mariée, a été comme un dieu
pour moi, elle a été une mère, une amie, une
famille, un ami, un conseil; elle a fait l'écrivain,
elle a consolé le jeune homme, elle a créé le
goût, elle a pleuré comme une sœur, elle a ri,
elle est venue tous les jours, comme un bienfai-
sant sommeil, endormir les douleurs2. »
De 1823 à 1833, ce sont les années de jeunesse
et de formation (Balzac était né en 1799; il avait
donc vingt-quatre ans en 1823 et trente-quatre
ans en 1833)3. Ce sont aussi les premières
années de lutte ; c'est le premier contact avec la
1. Balzac, dans sa lettre du 19 juillet 1837 à Mmo Hanska,
écrit bien 1823 : mais c'est 1822 qu'il faudrait lire, si l'on s'en
rapporte à la dédicace de Louis Lambert, datée de 1822-1832.
2. Collection Lovenjoul, ms. A 501, fol. 427. — Lettres à l'Étran-
gère... p. 418 (lettre CXXVI, 19 juillet 1837).
5. Voir Appendice I, pièce n°6. Né à Tours, Balzac était albi-
geois d'origine. M. Alfred Caraven-Cachin. de Salvagnac (Tarn),
a bien voulu faire, à notre intention, quelques recherches sur
les origines de la famille de l'illustre écrivain. On trouvera des
extraits de la notice qu'il nous a aimablement communiquée
au chapitre dans lequel il est plus particulièrement parlé du
père de Balzac, p. 122.
PREMIÈRES ARMES. 19
vie. Balzac <isi encore incertain sur la carrière
qu'il va suivre. Son père voudrait le détourner
des lettres. Sa mère, sa sœur surveillent avec
anxiété ses premiers battements d'aile, alors
qu'il est encore en cage clans la mansarde de la
rue Lesdiguières, non loin-de la Bibliothèque de
l'Arsenal \
C'est alors qu'il écrit ses premières œuvres,
une tragédie (Cromwell), qui fait hausser les
épaules aux Aristarques de la famille, des arti-
cles de journaux, des nouvelles, des romans
sans nombre2.
1. Le vicomte de Spoelberch de Lovenjoul a publié, dans le
Bulletin du Bibliophile (année 1896, pp. 601-614), des Notules sur
Honoré de Balzac par un de ses amis. Ces « notules » ont été
réimprimées dans Une page perdue de H. de Balzac. Notes et
documents. Paris, Paul Ollendorff, 1903, in-18; pp. 111-134. C'est
à ce dernier ouvrage que nous renverrons chaque fois que
nous aurons l'occasion de citer les Notules. L'ami de Balzac
dont il est ici question est M. Auguste Fessart. Quand, en
1858, parut, pour la première fois, le livre de Mme Surville, née
de Balzac, intitulé Balzac, sa vie et ses œuvres d'après sa corres-
pondance, Paris, Librairie nouvelle, 1838, in-12, M. Fessart s'em-
pressa d'annoter son exemplaire ; ce sont ces notes qu'a
publiées le vicomte de Spoelberch de Lovenjoul.
A propos de l'installation de Balzac, rue Lesdiguières, par
ses parents, M. Fessart écrit : « Il fallait entendre [MJ de Balzac
parler de sa position d'alors, et [dej la dureté de ses parents
à son égard ! »
2. Dans une lettre à sa sœur, écrite de Paris en septembre
1819 (et non 1820, comme il est imprimé par erreur dans la Cor-
respondance), Balzac lui envoie le plan de son Cromwell. « Ce
n'est pas un médiocre cadeau, écrit-il, et une petite preuve
d'amitié que je te donne en te fesant assister à l'accouche-
ment et à toutes les opérations lentes et préparatoires du
Génie (mocque-toi). Comme ce n'est qu'un croquis (où il y aura
'20 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Tout à coup, il prend un parti héroïque. Il
renonce à la carrière des lettres. Il rêve d'une
fortune rapide. Il se juge apte aux affaires. Il
achète un brevet d'imprimeur et il se consacre
à une entreprise qui absorbera les années de sa
jeunesse et qui accablera son avenir du poids
de cette fameuse dette qu'il ne parviendra jamais
à soulever.
Dans cette phase décisive, l'amie douce et
maternelle était auprès de lui. Elle souffrit de
ses peines et ses frêles mains de femme s'effor-
cèrent de soutenir le fardeau : u Sans elle,
certes, je serais mort1 », s'écrie-t-il encore,
et il n'oubliera jamais ce qu'elle avait fait
pour lui.
Or, c'est précisément cet épisode de la vie du
romancier, que des documents inédits nous ont
permis d'étudier, que l'obligeance inépuisable
du vicomte de Lovenjoul a éclairé à nos yeux
d'une façon presque complète et que nous
allons essayer de raconter.
A vrai dire, Balzac l'a raconté lui-même. Il l'a
cepend' quelques morceaux perfectionnés, çà et là), je te
laisserai une grande marge où tu pourras graver tes sublimes
observations. » Collection Lovenjoul, ms. A 276, fol. 14. — Œuvres
complètes de H. de Bahac, t. XXIV. Correspondance. 1819-1850.
Avec portrait et fac-similé. Paris, Calmann Lévy, 1876, in-8, p. 20.
Voir aussi Une Page perdue de H. de Balzac, p. 125.
1. Collection Lovenjoul, ms. A 301, fol. 427. — Lettres à l'Étran-
gère..., p. 418 (lettre CXXVI, 19 juillet 1837).
PREMIERES ARMES. 21
raconté dans les Illusions perdues* ; il l'a raconté
dans César Birotteau*; il l'a raconté dans Le Curé
de village*; il l'a raconté <mi cent endroits de la
Comédie humaine.
Le premier, Balzac a entouré la vie du maté-
riel de la vie. L'histoire d<* l'imprimerie dos
Séchard, dans Illusions perdues, c'est celle de
l'imprimerie de Balzac et Barbier, rue des Ma-
rais-Saint-Germain. La faillite de l'illustre César,
c'est la déconfiture de Balzac et de ses associés.
Ce sont les mômes figures, les mômes faits, les
mêmes événements, les mêmes sentiments, par-
fois les mêmes noms4.
Et c'est par là que l'œuvre de Balzac vous
prend aux moelles ; car ce grand imaginatif n'a
fait que revivre et recréer la réalité.
Balzac, donc, en 1822, avait vingt-trois ans. 11
avait fait ses classes au collège de Vendôme et
s'étaitplongé, dès lors, dans des lectures infinies,
trop fortes pour son âge, qui, un moment, avaient
1. Œuvres complètes de H. de Balzac, édition Lévy, t. VII.
pp. 133-738.
2. Œuvres complètes de H. de Balzac, édition Lévy, t. VIII,
pp. 321-593.
3. Œuvres complètes de H. de Balzac, édition Lévy, t. XIV,
pp. 1-232.
4. On retrouve, dans Illusions perdues, le nom de plusieurs
personnes avec lesquelles Balzac fut en relation comme impri-
meur: Gillé, Didot, etc. Voir Appendices VII et VIII, pièces
nos 65, 69 et 80.
M LA JEUNESSE DE BALZAC.
accanlé son intelligence et menacé sa robuste
santé1. Ayant terminé ses classes dans deux
institutions de Paris, il avait pris ses inscrip-
tions et commencé ses études de droit2. Pour-
tant, contrairement à ce qu'a écrit Mme Surville,
il n'avait pas poussé jusqu'à la licence. N'ayant
passé que le premier examen de baccalauréat
en droit, il était entré d'abord chez l'avoué
M. de Merville, puis chez le notaire M. Passez3.
1. « ... Ma mère, alarmée d'une fièvre qui, depuis quelque
temps, ne me quittait pas, et à laquelle mon inaction corpo-
relle donnait les symptômes du coma, m'enleva du collège en
quatre ou cinq heures. » Voir Louis Lambert, Œuvres complètes,
t. XVII, p. 49. — Voir aussi Balzac, sa vie et ses œuvres, par
Laure Surville, pp. 20-21, et Champleury, Balzac au collège,
pp. 10-13.
2. Voici, d'après la fiche conservée dans les archives de la
Faculté de droit de Paris, que nous a obligeamment commu-
niquée M. Petit, secrétaire, les dates auxquelles Balzac prit
ses inscriptions et passa un examen: lre Inscription, 4 no-
vembre 1816 — 2% 14 avril 1817 — 3% 11 juillet 1817 — 4% 11 no-
vembre, 1817 — 5e, 3 janvier 1818 — 6e, 3 avril 1818 — 7% 3 juil-
let 1818 — 8e, 10 novembre 1818 — 9% 4 janvier 1819 — 10e,
9 avril 1819. La fiche mentionne, en outre, que Balzac a passé
son premier examen de baccalauréat en droit le 4 janvier 1819 ;
elle indique les noms des professeurs dont il a suivi les cours.
En première année, MM. Boulage (Code civil) et Blondeau,
alors suppléant, sans indication du cours qu'il professait ; en
deuxième année, MM. Boulage (Code civil) et Pigeau (Procédure
civile); en troisième année, MM. Boulage (Code civil) et Cotelle
(Code civil approfondi).
3. « Honoré, écrit Mme Surville, entra dans l'étude de M. de
Merville, notre ami. M. Scribe venait de la quitter. Après dix-
huit mois de séjour chez cet avoué, il fut reçu chez M. Passez,
notaire, où il resta le même temps. M. Passez habitait la mai-
son où nous demeurions et était aussi l'un de nos amis
intimes. » Balzac, sa vie et ses œuvres, par L. Surville, p. 51.
C'est à M. Guyonnet-Merville que Balzac dédia Un Épisode
PREMIÈRES ARMES. 23
Son père, directeur des vivres h la première
division militaire de Paris, et, d'ailleurs, un
assez singulier original, voyait en lui un futur
notaire*. Balzac ne songeait qu'aux lettres.
Le père transigea; il consentit à faire l'essai
de la vocation littéraire de son iils et le laissa
s'installer, hors de la maison paternelle, en lui
assurant une rente annuelle de 1500 francs2.
Les premiers essais littéraires de Balzac ne
furent encourageants ni pour lui-même, ni pour
les siens. Les romans que Balzac parvint à
publier, sous des pseudonymes divers", n'eu-
sous la Terreur, paru en 1831. C'est le Derville de la Comédie
humaine. Voir Répertoire de la Comédie humaine de H. de Balzac,
par Anatole Cerfbeer et Jules Christophe... Paris, Calmann
Lcvij, 1887, in-8, p. 133.
L'étude de M. Guillonnet de Merville est actuellement celle
de Me L. Bertrand, successeur de Me* Desgranges et Paul Poto-
nié, 15, rue du Louvre.
M. Edouard-Victor Passez fut notaire du 15 juin 1819 au
22 janvier 1825 ; à cette date, son étude passa à M. Jean-
Baptiste Guiffrey, puis, le 25 août 1831, à M. Eugène Olagnier,
qui eut comme successeur M. Jules-Charles Desforges
(20 décembre 1856-25 août 1876). Le titulaire actuel de l'étude,
1, rue d'IIauteville, est Me Marcel Plocque, successeur de
Me Jules Plocque.
1. Voir p. 124, note 2.
2. Voir Balzac, sa vie et ses œuvres, par L. Surville, pp. 56-37,
et Une Page perdue de H. de Balzac, par le Vle de Spoelberch
de Lovenjoul, p. 128.
3. Voici les titres de ses premières œuvres :
— L'Héritière de Birague, histoire tirée des manuscrits de
Dom Rago, ex-prieur des Bénédictins, mise au jour par ses
deux neveux, M. A de Viellerglé, auteur des Deux Hector et
de Charles Pointel, et Lord R'Hoone. Paris, Hubert, 1822, 4 vol.
in-12. (Dom Rago est le pseudonyme d'Etienne Arago ; A. de
U LA JEUNESSE DE BALZAC.
rent pas de succès. Après deux ans, on lui
coupa les vivres et il dut rentrer sous le toit
paternel1.
Le jeune homme se désespère. L'avenir est
bien noir devant lui. Il voudrait être riche, il
voudrait être célèbre, il voudrait être aimé2.
Viellerglé, celui de M. Le Poitevin Saint-Alme ; et Lor<?
R'Hoone, l'anagramme d'Honoré [de Balzac].) — Jean-Louis ou
la fille trouvée, par A. de Viellerglé et Lord RHoone, auteur
de l'Héritière de Birague. Paris, Hubert, 1822, 4 vol. in-12.
— Clotilde de Lusignan, ou le Beau Juif ; manuscrit trouvé
dans les archives de Provence et publié par Lord R'Hoone.
Paris, Hubert, 1822, 4 vol. in-12. (Réimprimé en 1840, sous le
titre de UIsraélite dans les Œuvres complètes d'Horace de Saint-
Aubin, tomes XI et XII. Horace de Saint-Aubin est un pseudo-
nyme de Balzac). — Le Centenaire, ou les deux Béringheld,
publié par M. Horace de Saint-Aubin, auteur du Vicaire des
Ardennes. Paris, Pollet, 1822, 4 vol. in-12. — Le Vicaire des
Ardennes ; publié par M. Horace de Saint-Aubin, bachelier
es lettres, auteur du Centenaire. Paris, Pollet, 1822, 4 vol. in-12.
— La Dernière fée, ou la nouvelle lampe merveilleuse, par
M. Horace de Saint-Aubin. Paris. J. N. Barba; G. C. Hubert;
B. Mondor ; A. Bobée, 1823, 2 vol. in-12. — Annette et le Crimi-
nel, ou suite du Vicaire des Ardennes. Paris, Emile Buissot,
1824, 4 vol. in-12. — Du Droit d'aînesse, par M. D*"*. Paris,
Delongckamps ; Dcntu ; Petit, 1824, in-8. — Histoire impartiale
des Jésuites. Paris, Delongchamps ; Maze, 1824, in-16. 'Anonyme.'
— Wann-Chlore Paris, Urbain Canel ; Delongchamps, 1825, 4 vol.
in-12. (Anonyme. Réimprimé sous le titre de Jane la Pâle dans
les Œuvres complètes d'Horace de Saint-Aubin, tomes IX et X).
— Code des gens honnêtes ou l'art de ne pas être dupe des
fripons. Paris, J. N. Barba, 1825, in-18. (Anonyme. Réimprimé,
en 1854, avec le nom de l'auteur.) — Petit Dictionnaire critique
et anecdotique des enseignes de Paris par un batteur de pavé.
Paris, chez les marchands de nouveautés, 1826, in-16. [Un batteur
de pavé est le pseudonyme de Balzac.)
1. Voir Une Page perdue de H. de Balzac, pp. 135-128.
2. « Et l'on appelle vivre cette rotation de meule de moulin, ce
perpétuel retour des mêmes choses ! Encore si quelqu'un
;etiait sur cette froide existence un charme quelconque. Je n'ai
PREMIÈRES A.RMES.
Il était alors dans tout l'éclat de La plus magni-
fique jeunesse. Nous publions un portrait qu'a
fait de lui, vers ce temps-là, son ami Devéria1.
point encore eu les (leurs de la vie et je suis dans la Beule
saison où elles s'épanouissent. Qu'ais-je besoin delà fortune e1
de ses jouissances? Quand j'aurai 60 ans, quand od ne fait plus
que d'assister à la vie «les autres et que l'on a plus que sa
place à payer, qu'il est nécessaire d'avoir les babits des
acteurs! Un vieillard est un homme qui a dîné et qui regarde
ceux qui arrivent en faire autant. Or, mon assiette est vuide,
elle n'est pas dorée, la nappe est terne, les mets insipides.
J'ai faim et [rien] ne s'offre à mon avidité. Que me faut-il?.,
des ortolans, car je n'ai que deux passions l'amour et la gloire,
et rien n'est encore satisfait, rien ne le sera jamais. » (Collection
Lovenjoul, ms. A 276, fol. -i5 v°. — Œuvres complètes, t. XXIV, Cor-
respondance, p. 35 (lettre à sa sœur, datée de Villeparisis, 1821.)
1. Le portrait, non signé, que nous avons publié dans notre
première édition, gravé sur bois par Lepère, est toujours resté
dans la famille deBerny; généreusement offert par M. Charles
Tuleu à la Collection Lovenjoul, il en fait aujourd'hui partie ;
c'est ce même portrait que nous donnons dans notre nouvelle
édition, gravé par Clément. D'après les traditions que nous
avons recueillies, il est attribué à Achille Devéria, à qui Balzac,
en 18 i3, dédia l'un de ses romans, Honorine. L'original est exé-
cuté à la sépia. On voit dans la Correspondance publiée par
Mme Surville (Œuvres complètes, t. XXIV, p. 50) que, dès 1825,
époque à laquelle Balzac entreprit la publication du Molière
et du La Fontaine, des relations d'amitié s'établirent entré
l'artiste et l'écrivain. Il est donc possible que la lettre suivante
(Collection Lovenjoul, ms. A 286, fol. 200) se rapporte au portrait
que nous donnons :
Mon bon Achille,
Il me faut à l'instant une seppia (sic) de ma flgoure ; je viens ;
donnez-moi trois heures de votre tems. Mais trois heures sont
un immense sacrifice, vu que je suis traqué par le travail.
Brûlez ce petit mot, et dites oui ou non.
Mille gracieusetés.
de B[al]z[ac].
Le billet n'est, malheureusement, pas daté et le vicomte de
Lovenjoul nous écrivait à ce sujet : « A mon avis, la lettre est de
26 LA JEUNESSE DE BALZAC.
La (igure et le corps n'étaient pas empâtés
et alourdis; Balzac ne portait pas encore les
cheveux longs ; ils étaient coupés courts et se
dressaient en touffes épaisses sur un front su-
perbe; il ne portait pas non plus la moustache;
le contour de la physionomie était d'un galbe
extrêmement pur et plein sans rondeur; le dou-
ble menton s'esquissait à peine ; la bouche abon-
dante, fraîche, voluptueuse et mobile disait
toutes les ardeurs d'une nature puissante et
tendre; le nez, aux narines frémissantes, dessi-
nait le méplat du bout qui révélait en lui, d'après
lui-même, le flair du chien de chasse. Le tout,
enfin, était animé, éclairé, enflammé par le
magnifique regard de ces yeux bruns, « pailletés
d'or », que toutes les femmes qui l'ont vu ont
signalé : regard droit, regard pénétrant, regard
sincère, regard gai, regard mutin, regard en-
chanteur, qui paraîtrait presque féminin, s'il
n'était soutenu par la solidité de l'arcade sour-
cilière et par l'autorité du front.
la fin de 1834, ou de 1855 ; car elle est écrite à l'encre rouge,
encre dont Balzac s'est servi pendant fort peu de temps. Cer-
taines parties de ses manuscrits, datant de cette époque, tels
que ceux de Séraphita, du Père Goriot, etc., sont seules écrites
avec cette encre. »
Cependant la dédicace, écrite par Balzac au-dessous du por-
trait et qui est, en partie, celle de Louis Lambert, dédié à M™" de
Berny, et, d'autre part, l'existence des relations entre Devéria
et Balzac, dès 1825, permettent de penser que le billet se rap-
porte bien à l'exécution du portrait.
PREMIÈRES ARMES. 27
A cet âge, Balzac, qui fui si vite déformé j>;ir
la vie, étail beau, — beau d'une beauté ardente,
expansive el rayonnante; c'était un gars noir,
au teintcoloré, rond, le corps plein, « les mollets
énormes », robuste et bien portant, avec l'éclair
de la bonne humeur, le charme du sourire et la
Qamme du génie.
M™6 de Pommereul, qui le reçut dans son châ-
teau de Fougères, quelques années plus tard,
après la débâcle, alors que, ruiné, amaigri, déjà
changé, il cherchait en Bretagne un refuge pour
écrire Les Chouans, Mœe de Pommereul Ta peint
en quelques traits précis où Ton sent toute
l'acuité de l'observation féminine : « C'était un
petit homme avec une grosse taille, qu'un vête-
ment mal fait rendait encore plus grossière ; ses
mains étaient magnifiques ; il avait un bien
vilain chapeau; mais, aussitôt qu'il se découvrit
tout le reste s'effaça. Je ne regardai plus que sa
tête... ; vous ne pouvez pas comprendre ce front
et ces yeux-là, vous qui ne les avez pas vus : un
grand front, où il y avait comme un reflet de
lampe, et des yeux bruns remplis d'or, qui expri-
maient tout, avec autant de netteté que la
parole... Que vous dirai-je? Il y avait, dans tout
son ensemble, dans ses gestes, dans sa manière
de parler, de se tenir, tant de confiance, tant de
bonté, tant de naïveté, tant de franchise qu'il
38 LA JEUNESSE DE BALZAC.
était impossible de le connaître sans l'aimer...
une bonne humeur tellement exubérante qu'elle
devenait contagieuse. En dépit des malheurs
qu'il venait de subir, il n'avait pas été un quart
d'heure au milieu de nous, nous ne lui avions
pas encore montré sa chambre, et déjà il nous
avait fait rire aux larmes, le général et moi1... »
Tel était l'homme, en septembre 1828, quand
il alla chercher un refuge chez le général de
Pommereul. On peut deviner de quelle allure
large et vigoureuse il abordait la vie, quand, en
1822 et 1823, il se décidait à engager la lutte et
se jetait dans la mêlée.
11 est difficile de préciser les motifs qui déci-
dèrent Balzac à se faire éditeur d'abord, et bientôt
imprimeur. Il y a, dans tout cela, quelque mys-
tère.
Ses parents vivaient à la campagne. Mme Sur-
ville raconte que, quand Honoré venait à Paris,
il descendait dans l'appartement de son père et
qu'il fit ainsi la connaissance « d'un voisin,
homme d'affaires, qui lui conseilla de chercher,
pour se faire libre, une bonne spéculation, et qui
lui fournit les moyens de l'entreprendre2 ».
1. Voir Balzac en Bretagne, par R. du Pontavice de Heussey,
pp. 21-22.
2. Voir Balzac, sa vie et ses œuvres, par Mme Laure Surville,
p. 77.
PREMIÈRES ARMES. 29
On a <lil aussi que Balzac eut, le premier,
l'idée des éditions compactés, et que c'esl lui
qui songea, d'abord, à publier en un seul volume,
les œuvres de Molière el celles de La Fontaine.
Il peut y avoir du vrai dans loul cela, mais
c'esl une vérité un peu arrangée. L'idée des
éditions compactes n'appartient pas à Balzac.
11 ne fit que reprendre à son compte des projets
déjà en cours d'exécution.
Quant au « voisin homme d'affaires », nous
le connaissons, c'est M. d'Assonvillez. 11 paraît
avoir eu quelque liaison avec la famille de Berny,
qui allait jouer un si grand rôle dans la vie de
Balzac.
M. d'Assonvillez explique lui-même en termes
précis, dans une lettre adressée à Balzac, le rôle
qu'il a joué dans cette phase de la carrière de
son jeune ami : « Mon cher Honoré... vous savez
que je n'ai jamais connu M. Urbain Canel, que
je n'ai jamais eu confiance en lui, que je n'ai
jamais fait d'affaires avec lui et, dès lors, que
jamais je n'ai été à même de faire avec lui des
gains, qui pourraient aujourd'hui me consoler
de la perte énorme que l'on me propose. Dans
cette affaire, c'est vous seul que j'ai désiré
obliger; c'est une entrée dans les affaires que je
voulais vous procurer, etc...1 ».
1. Voir Appendice V, pièce n° 28.
30 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Balzac donne une autre explication : il assure
que c'est pour avoir voulu s'intéresser au sort
d'un ouvrier imprimeur qui lui parut avoir du
mérite, et qui devint son associé, qu'il se lança
dans ces affaires malheureuses1.
Ce qui résulte des documents que nous avons
sous les yeux, c'est que, antérieurement au mois
d'avril 1 825, lecélèbre éditeur romantique Urbain
Canel avait entrepris de publier un Molière et un
1. « Pendant huit jours, Latouche courut tout Paris pour
découvrir son Balzac ; à la fin, il apprit que son butor de génie
s'était fait imprimeur rue des Marais-Saint-Germain, avec un
prote de l'imprimerie Tastu pour associé. Ce prote se nommait
Barbier » Voir Henri Monnier, Mémoires de Monsieur Joseph Prud-
homme. Paris, Librairie nouvelle, 1857, 2 vol. in-12, t. II, p. 100.
« .... Ainsi, pour avoir 3 fois dans ma vie, voulu, moi faible,
m'intéresser à des malheureux et les prendre en croupe sur
mon cheval ou dans ma barque, trois fois, l'ouvrier impri-
meur, Jules Sandeau et Werdet, ont brisé le gouvernail, fait
sombrer la barque, m'ont jette à l'eau tout nu... » Collection
Lovenjoul, ms. A 301, fol. 373 v°. — Lettres à l'Étrangère, p. 555
(lettre CXV, 22 octobre 1836).
Le peintre Boulanger venait de terminer le portrait du roman-
cier. Balzac écrit à Mme Hanska que ce portrait sera bientôt en
route (car on l'emballe cette semaine) et, de la lettre qu'il lui
adresse à ce sujet, nous extrayons le passage suivant :
« ... Boulanger a vu l'écrivain et non la tendresse de l'imbé-
cile que l'on attrapera toujours, et -non la mollesse devant les
douleurs d'autrui, qui fait que tous mes malheurs viennent
d'avoir tendu la main à des faibles qui tombaient dans l'or-
nière du malheur. En 1827, pour rendre service à un ouvrier
imprimeur, je me vois, en 1829, accablé de 150.000 f. de dettes
et jette, sans pain, dans un grenier... » Collection Lovenjoul,
ms. A 301, fol. ,414 v°. — Lettres à l'Étrangère, p. 404 (lettre
CXX1V, 31 mar-3 juin 1857).
Voir aussi Balzac, sa vie et ses œuvres, par Mmr L. Suryille,
p. 80.
PREMIÈRES ARMES. 31
La Fontaine compacts, chacun en un seul volume
in-octavo*.
Le La Fontaine devait être « imprimé à deux
colonnes, en caractère dit mignone, tiré sur
papier cavalier vélin de la fabrique do M. Mont-
golfier, d'Annonay, orne de trente vignettes
environ, dessinées par Devéria et gravées
par Thompson », et ladite édition devait être
tirée à trois mille exemplaires, et vendue par
livraisons.
Le prospectus du Molière fut annoncé dans le
numéro de la Bibliographie de la France du
23 avril 1825 ; celui du La Fontaine dans le numéro
du 14 mai 1825.
Ce qui est certain également, c'est qu'à cette
même époque, c'est-à-dire vers le milieu d'avril
1825, il se constitua, spécialement pour l'entre-
prise des œuvres de La Fontaine, une société
entre le libraire Urbain Canel, M. Charles
Carron, médecin, demeurant à Paris, rue de
l'Odéon, n° 17, Honoré Balzac, homme de lettres,
demeurant à Paris, rue de Berry, n° 7, et M. Jac-
ques-Edouard Benêt de Montcarville, officier en
réforme, demeurant à Paris, rue Meslay, n°41.
Disons, tout de suite, que cette société fut
déclarée dissoute le 1er mai 1826 et que Urbain
1. Voir Appendice V.
32 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Canel, Charles Carron el de Montcarville cédè-
rent, à Honoré Balzac seul, tous les droits de
propriété sur le La Fontaine et sur le travail exé-
cuté1.
Cette cession fut faite par Canel et consorts à
Balzac pour indemniser celui-ci des sommes
qu'il avait servies à Canel en vue de l'entreprise
desdiles œuvres de La Fontaine, « que le sieur
Urbain Canel est dans l'impossibilité de conti-
nuer ».
A l'enregistrement, Balzac déclara ces som-
mes comme montant à cinq mille francs. Mais
un document plus précis et plus précieux nous
renseigne exactement. Car, par un acte du
9 mai 1826, Urbain Canel déclare qu'il s'est
couvert par trois billets, l'un de 2250 francs,
l'autre de 3000 francs, l'autre de 4 000 francs,
tirés du 15 mai 1825 au 31 août 1826, sur
Mmc Berny (sic). Ce qui donne le chiffre de
9 250 francs comme prix de la vente du La Fon-
taine*.
Voilà donc que nous est révélée, dès le début,
dans les affaires de Balzac, l'intervention de
l'amie chère qui s'était attachée à lui d'une
affection tendre et maternelle ; elle lui assurait
le moyen « de sefairelibre » et d'être un homme
1. Voir Appendice V, pièces nos 19 et 20.
2. Voir Appendice V, pièce n° 25.
PREMIERES ARMES. ">
maître de sa vie el n'en répondant pins quà
lui-même '.
La préface du La Fontaine <isi écrite par Bal-
zac, On peut supposer qu'il fut mis en contact
avec Urbain Cane! par la commando de cette
préface; qu'il fut, ainsi, amené à s'occuper de
Ta (Taire avec ses deux premiers associés,
MM. Carron et de Montcarville*.
L'association fut orageuse. Nous avons une
lettre du docteur Carron, où il s'excuse auprès
de Balzac de lavoir appelé menteur : « Si, dans
la vive discussion que nous avons eue, mercredi
dernier, je me suis écarté des règles de la poli-
tesse, j'y ai été poussé et par le bon droit de ma
réclamation et surtout par le ton hautain que
vous avez pris avec moi et auquel je ne suis
point habitué. L'expression de menteur dont je
me suis servi est, je l'avoue, trop énergique et
doit être réprouvée par la bienséance... Bien
qu'il me soit pennible (sic) d'être en guerre
ouverte avec un homme dont j'ai toujours estimé
le caractère, je ne puis, vu la justice de ma
cause, vous donner une plus ample rétrac-
tation3. »
C'était suffisant. Mais les rapports n'étaient
1. Voir Appendice V, pièce n° 25.
2. Voir Appendice V, pièces n09 19 et 20.
5. Voir le texte in extenso de cette lettre, Appendice V, pièce
n° 27.
54 LA JEUNESSE DE BALZAC.
plus possibles. La société fut dissoute, et Balzac
recueillit seul toute la charge d'une entreprise
qu'Urbain Canel, tombé en déconfiture, se
déclarait « dans l'impossibilité de continuer ».
Mauvais début! Associés véreux ou quinteux;
entreprise mal conçue et mal engagée; à peine
Balzac entre-t-il dans les affaires qu'il voit la
faillite à ses côtés.
Mais le jeune homme, pour des raisons trop
faciles à comprendre, a voulu quitter le domicile
paternel; il est libre; son imagination puissante
voit les perspectives immenses de la fortune et
de l'avenir s'ouvrir devant lui.
BALZAC IMPRIMEUR
Balzac ne s'en lient pas à l'affaire du La Fon-
taine. Pour lui et pour ses associés, il s'agit de
toute une collection des classiques français : La
Fontaine, Molière, Racine, Corneille. Les pre-
miers actes sont à peine signés que Balzac se
rend à Alençon et traite, le 17 avril, avec le gra-
veur Godard ' ; celui-ci doit travailler sans retard
aux vignettes d'après les dessins de Devéria.
De retour à Paris, Balzac se consacre à plu-
sieurs entreprises qui, tout en restant dis-
tinctes, se rapportent cependant à la même
idée initiale.
La publication d'un Molière fait l'objet d'un
contrat analogue à celui du La Fontaine. Il est
daté du 14 avril 1825 \ On ne voit pas figurer,
ici, les deux associés, Carron et Montcarville,
qui apparaissent dans l'autre combinaison.
Urbain Canel s'engage à partager avec Balzac
1. Voir Appendice V, pièce n° 18.
2. Voir Appendice V, pièce n° 43.
M LA JEUNESSE DE BALZAC.
les profits, bénéfices, charges et périls d'une
édition de Molière en un volume in-octavo entre-
prise, jusque-là, par Delongchamps et Canel.
L'ensemble de l'opération devait coûter dix mille
cent vingt-deux francs, y compris des intérêts
très lourds, qu'il fut nécessaire de verser
d'avance pour obtenir de l'argent de M. d'As-
sonvillez1.
Celui-ci est, à la fois, l'initiateur et le bailleur
de fonds. Les documents publiés à l'appendice
le montrent avançant l'argent dès le début,
1. Voir Appendice VI, pièces n09 45 à 40. Nous avons rencontré,
dans divers actes, le nom de ce personnage écrit tantôt (et le
plus souvent) d'Assonvillez, tantôt Dassonvillez. De quelques
documents conservés dans les archives de la mairie de Cer-
neux, près Provins (Seine-et-Marne), qu'a bien voulu nous indi-
quer l'instituteur de cette commune, M. G. Ravione, il résulte
que l'ami de Balzac, qui habitait le château de Montglas,
s'appelait Dassonvillez de Kougemont.
C'est évidemment à M. d'Assonvillez que fait allusion
Mme Surville (Balzac, sa vie et ses œuvres, p. 79) lorsqu'elle écrit :
« Le bailleur de fonds, qui avait ainsi perdu le gage de sa
créance, intéressé à voir prendre à mon frère une profession
qui lui donnât la chance de s'acquitter avec lui, le conduisit
chez un de ses parents qui faisait une belle fortune dans l'im-
primerie... » « Le créancier de mon frère, satisfait de cette
résolution, l'encourage, se charge d'obtenir le consentement
de nos parents et l'argent nécessaire à cette nouvelle entre-
prise ; il réussit; mon père accorde à Honoré, à titre de dot, le
capital de la rente qu'il avait désirée pour ne s'occuper que
de littérature. »
C'est également ce M. d'Assonvillez qui est visé par Balzac
quand, en juin 1833, il écrit à sa sœur : « ... Que diable allez-
vous faire à Montglat?... Enfin, vous êtes libres, et ce n'est pas
un reproche, c'est une curiosité ; entre frère et sœur, cela
se pardonne. » (Œuvres complètes, t. XXIV, Correspondance.
p. 177, (lettre CIX.)
BALZAC IMPRIMEUR. 51
poursuivant le remboursemenl de sa créance à
travers les différents avatars par lesquels passe
Balzac, prenant ses sécurités, intervenant à la
faillite d'Urbain Canel, mettani la main sur le
matériel de l'imprimerie, dont Balzac et son
associe, Barbier, ne seront pins que de simples
locataires, enfin, agissant, an moment de la
liquidation, pour tirer son épingle du jeu, tout
en écrivant à Balzac : « Ma sécurité ne peut
résulter que de la connaissance que j'ai de votre
extrême délicatesse. »
A travers les réticences de Mme Surville, on
sent bien que la famille Balzac a toujours, à tort
ou à raison, gardé rancune à cet ami trop zélé
qui se montrait, en même temps, un homme
d'affaires si pointilleux.
Sur la somme de dix mille cent vingt-deux
francs, avancée par M. d'Assonvillez, les deux
participants, Canel et Balzac, s'engagent au pro-
rata de leur prise de fonds, c'est-à-dire chacun
pour cinq mille soixante et un francs.
Ainsi, Balzac, du fait de sa spéculation sur
les deux ouvrages, se trouvait débiteur d'au
moins quatorze mille soixante et un francs. En
plus, il fallait vivre.
Il est vrai que l'on comptait sur le produit
prochain de la vente par livraisons. Les livrai-
sons du Molière et bientôt celles du La Fontaine
M LA JEUNESSE DE BALZAC.
parurent, en effet, régulièrement, dès le mois de
mai de l'année 1825. Elles se vendaient, chacune,
cinq francs. L'un ou l'autre des deux ouvrages,
complet, devait valoir vingt francs. On le cédait
aux libraires au prix de treize francs, sans
compter le treizième. On l'offrit même à huit
francs1.
Il est démontré, maintenant, que l'idée des
éditions compactes n'appartient pas à Balzac.
L'affaire était décidée avant qu'il s'en occupât.
D'ailleurs, s'il s'agit d'un type analogue à celui
du La Fontaine et du Molière, la conception, assez
banale, est, en même temps, des plus médiocres.
La non réussite de l'opération s'explique, sans
qu'on s'en prenne, comme l'a fait Mme Surville,
à la jalousie « des confrères patentés ».
Le La Fontaine et le Molière sont imprimés en
caractères trop fins; les gravures sont exécra-
bles2. En outre, le prix de l'ouvrage était trop
élevé. L'édition compacte n'eût pu avoir de
1. Voir Appendice V, pièce n° 21.
2. « J'ai fait voir aujourd'hui même vos gravures à Devéria.
qui en a été très content, et il nous a témoigné sa satisfac-
tion d'avoir su trouver en vous un digne traducteur de ses
dessins. Il m'a dit qu'il lui était impossible de vous donner
d'avis sur les gravures que je lui soumettais, parce qu'il n'en
connaissait pas le dessin primitif; mais il est persuadé qu'en
travaillant vous deviendrez, au bout de deux ou trois de nos
gravures, le plus redoutable adversaire de Thompson et des
Anglais. » Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. C^aîn'ï,liem. — Œuvres
complètes, t.XXIV, Correspondance, p. 50 (lettre XXII. à M. Godard
fils, à Alençon, 19 avril 1825). Voir aussi Appendice V, pièce n° 18.
BALZAC IMPRIMEUR. 59
BUCCès que si son prix lVù! niisr ;i la portée des
bourses modestes; cVsi ce que comprirent plus
tard, pour réaliser des conceptions analogues,
les Lefèvre el les Charpentier.
Balzac n'était pas homme à faire tant de
réflexions. Le conseil qui lui était donné, le
secours qui lui élait offert, la main amie qui lui
était tendue, tout devait l'engager dans cette
spéculation.
Les hommes d'affaires se jouaient assez aisé-
ment de ces deux impatiences unies s'excitant
lune l'autre. On livrait à Balzac du papier noirci,
des livraisons en feuilles, une chance douteuse
de gain en échange d'argent versé ou d'enga-
gements fermes. L'affaire était plus que médio-
cre : mais Balzac, novice, ne vit que les brillants
côtés de l'opération : il fut toujours l'esclave
de son imagination ; et, en ces temps-là, il l'était
deux fois.
L'insuccès du La Fontaine et du Molière fut
complet. En un an, on ne vendit pas vingt exem-
plaires l. Cette première erreur, au lieu d'avertir
1. « Ces éditions restèrent donc parfaitement inconnues : à
une année de leur publication, mon frère n'en avait pas vendu
vingt exemplaires, et pour ne plus payer le loyer du magasin
où elles étaient entassées et se perdaient il s'en défit au prix
du poids brut de ce beau papier qui avait coûté si cher à
noircir. » [Voir l'affaire Frémeau, à I'Appendice V.] Balzac, sa vie
et ses œuvres, par Mme Laure Surville, p. 78.
40 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Balzac, l'engagea dans une série d'autres. Il ne
lui suffit plus d'être éditeur : il veut devenir
imprimeur. En fréquentant les imprimeries,
Balzac avait rencontré, soit chez Rignoux,
soit chez Baudouin, un prote habile, nommé
A. Barbier1. Cet homme connaissait bien la
partie technique du métier. Il était chargé
de famille. Balzac s'intéressa à lui. Il résolut
de le prendre pour associé. La même per-
sonne qui avait conseillé la première entreprise
l'engagea à « s'établir » définitivement et à
acheter un fonds d'imprimerie. Mais, pour
cela, il fallait de l'argent, beaucoup d'argent2.
1. Rignoux, devenu imprimeur en 1820, était imprimeur de
l'Ecole de médecine. M. Paul Delalain a bien voulu nous
fournir, à son sujet, quelques renseignements extraits de YAn-
nuaire de V Imprimerie et de la Presse, par V. Eugène Gauthier,
ouvrier typographe :
« M. Rignoux est un vieillard actif et respectable, luttant
virilement contre le flot qui tend à submerger l'imprimerie et
la librairie... Une fonderie occupant quatre ouvriers est an-
nexée à cet établissement... » (Annuaire de 1854). — « En 1831,
M. Rignoux, qui eut longtemps la renommée d'habile impri-
meur, essaya, je crois, le premier, d'initier les femmes à l'art
typographique dans un établissement qu'il ouvrit à Montbar,
dans la Côte-d'Or, et dont il confia la direction à M. Théotiste
Lefèvre... » (Annuaire de 1855-1856).
On a vu que Balzac avait été en relations avec les Baudouin.
Ce serait plus vraisemblablement à leur imprimerie qu'il aurait
connu André Barbier. Joseph Tastu, en effet, acquit, le
12 août 1822, le brevet d'imprimeur de François-Jean-Charles
Baudouin qui, lui-même, le tenait de son père François-Jean
Baudouin (1er avril 1811). Cf. Paul Delalain, Liste des imprimeurs
typographes de Paris du 1" avril 181 J au 10 septembre 1870...
(Paris, impr. D. Dumoulin, 1899), gr. in-8, p. 9.
2. Voir ci-dessus la note 1 de la page 36.
BALZAC IMPRIME1 i;. il
On (il le siège du père. Séduit j > ; 1 1 * ridée de voir
son (ils prendre « une position », un « étal »,
poussé par les mêmes personnes, il se décida ;»
engager, à titre de dot, le capital de la renie de
quinze cents Francs qu'il allouait antérieurement
h Balzac, et celui-ci se trouva en mesured'ache-
tcr, à un sieur Laurens aîné, son fonds d'impri-
merie, situé rue des Marais-Saint-Germain
(actuellement rue Visconti), numéro 17l.
Le prix d'acquisition fut probablement de
30 000 francs: c'est la somme que Balzac devait
encore à Laurens aîné, au moment de la liqui-
dation de l'affaire, le 16 août 1828; et cette liqui-
dation signale, en outre, une somme de
12000 francs due par Balzac à son futur associé
Barbier, somme que celui-ci, probablement,
avait demandée, avant tout, pour quitter la
situation qu'il occupait dans la maison où il
travaillait.
Ainsi les dettes de Balzac s'accroissent en-
core : 15000 francs l'opération du La Fontaine
1. Voir Appendice VI, pièce n°50. Nous n'avons malheureuse-
ment pu trouver l'acte de vente passé entre Laurens et Balzac-
— Laurens aîné (qui s'appelait, en réalité, Laurens de Péri-
gnac et qui avait supprimé de Pérignac depuis la Révolution)
avait marié sa fille cadette, Mlle Rose-Céleste Laurens, à Eu-
gène Renduel, l'éditeur des Romantiques. Cf. Adolphe Jullien,
Le Romantisme et l'éditeur Renduel. Souvenirs et documents sur
les Écrivains de VÊcole romantique, avec lettres inédites adressées
par eux à Renduel, Paris, Charpentier et Fasquelle, 1897, in-18,
pp. 16 et 17.
U LA JEUNESSE DE BALZAC.
et du Molière; 30000 à Laurens, 12000 à Bar-
bier. En plus, une quinzaine de mille francs
pour l'acquisition du matériel1.
On peut admettre que, dans la somme de
30000 francs, due à Laurens, se trouvent com-
pris 22000 francs nécessaires pour Tachât du
brevet d'imprimeur.
A cette époque, ne s'établissait pas imprimeur
qui voulait; il fallait une autorisation royale*.
La demande d'autorisation adressée par Bal-
zac au ministre de l'Intérieur a été publiée par
M. Auguste Descauriet, avec le dossier admi-
nistratif se référant à cette demande. La péti-
1. « Mon frère, ayant la faillite en perspective, passa alors
par des angoisses qu'il n'oublia jamais et qui le forcèrent à
recourir de nouveau à sa famille. Mon père et ma mère com-
prirent la gravité des circonstances et vinrent à son secours,
mais après quelques mois de continuels sacrifices, ils se refu-
sèrent à fournir de l'argent le jour où la prospérité arrivait
peut-être ! » Balzac, sa vie et ses œuvres, par Minc Laure Sur-
ville, p. 81. Voir aussi Appendice VIII, pièces n0' 78, 79 et 81;
cf., ci-dessous, p. 105.
2. Voir Appendice VI. Le 5 février 1810, un décret « institua
une direction de l'imprimerie et de la librairie placée sous
l'autorité du ministre de l'Intérieur...; il décida (art. 5) que les
imprimeurs et les libraires seraient désormais brevetés et
assermentés, et réserva au ministre de l'Intérieur le droit de
retirer le brevet à tout imprimeur pris en contravention...
L'article 3 limita le nombre des titulaires. Les quatre cents
imprimeurs qui exerçaient dans la capitale, sans règlement
particulier, sans discipline, furent réduits à soixante... Un dé-
cret du 11 février 1811 porta leur nombre, à quatre-vingts ».
(Histoire de l'imprimerie, par Paul Dupont. Paris, chez tous les
libraires, 1854, 2 vol. in-12, t. II, p. 26G.)
Laurens aine fut l'un des vingt nouveaux imprimeurs de
Paris, nommés par décret du 2 mars 1811.
BALZAC IMPRIME! R. 43
lion esl du I2avril 1826; elle esl signée Honoré
Balzac, rue de Tournon, n° i'.
L'affaire suivit son cours, pendant 1rs mois
d'avril ei de mai 182(5, dans 1rs bureaux <lu
ministère de l'Intérieur et à la Préfecture de
police. Celle-ci, notamment, fournit, sur le péti-
tionnaire, des renseignements satisfaisants,
quoique d'une exactitude douteuse, puisqu'on le
fait naître à Paris, tandis qu'il était né à Tours.
La police reconnaît d'ailleurs que le postula ni
« appartient à une famille estimable et très aisée
de la capitale » ; elle déclare « que sa conduite
est régulière et qu'il professe de bons principes».
Le préfet de police a rencontré un sûr garant :
c'est un magistrat d'un rangélevé, M. de Berny,
conseiller à la cour royale de Paris, le mari de
l'amie qui veille sur les débuts si difficiles du
jeune Balzac.
M. de Berny, dans sa lettre de recommanda-
tion au ministre de l'Intérieur, s'exprime ainsi :
« Je connais depuis longtemps ce jeune homme;
la droiture de son cœur, ses connaissances en
littérature me persuadent qu'il s'est convaincu
préalablement des devoirs qu'impose une pa-
reille profession. La sévérité de mes fonctions
ne me permettrait pas d'élever la voix en faveur
1. Voir Appendice VI, pièce n° 50.
M LA JEUNESSE DE BALZAC.
de M.H.Balzac, si je n'avais une intime convic-
tion que Votre Excellence n'aura jamais à se
repentir d'avoir favorablement accueilli sa de-
mande1. »
L'excellent magistrat insiste bientôt auprès
du Directeur général de la police : « Permettez-
moi de rappeler à vos souvenirs mon jeune
protégé, Honoré Balzac. Ce n'est pas à lui que
son tems d'épreuve paraît long; je l'apprends à
se soumettre à tout et à s'y soumettre avec
reconnaissance. S'il y a un impatient dans l'af-
faire..., c'est un vieux conseiller qui désire vive-
ment le bonheur de ceux auxquels il s'intéresse
et qui ne cesse de le faire que lorsqu'il lui est
démontré qu'ils n'en sont pas dignes. »
Une autorité si indiscutable et une recomman-
dation si pressante l'emportèrent sur les len-
teurs ordinaires des bureaux, et, le 1er juin 1826,
Balzac obtint son brevet, en remplacement du
sieur Jean-Joseph Laurens, démissionnaire. Le
4 juin, il transportait son domicile au local de
l'imprimerie, 17, rue des Marais, au faubourg
Saint-Germain.
La rue des Marais était et est encore une des
rues les plus curieuses de Paris. Elle s'est
1. Voir Appendice VI, pièce n° 51.
BALZAC IMPRIMEUR. 45
élevée, peu à peu, au seizième el au dix-septième
siècles, sur les terrains vagues <j u i s'étendaient
entre l'abbaye Saint-Germain-des-Prés H le
quai Malaquais. De vastes jardins, des potagers,
lès communs des hôlels qui avaient leur façade
sur la rue du Colombier (maintenant rue Jacob)
l'occupaient autrefois; la population s'étant
accrue, les maisons hautes et plates du Paris
d'autrefois s'élevèrent en bordure de l'étroite
venelle et la plongèrent, pour toujours, dans
l'obscurité.
La rue subsiste, telle quelle, aujourd'hui :
c'est la rue Visconti. Elle est si étroite que deux
voitures ne pourraient s'y croiser. Son pavé,
gras et glissant, ne voit pour ainsi dire jamais
le soleil.
En entrant dans la rue Visconti, on est frappé
de l'aspect antique et sombre des constructions
qui la bordent; de larges portes cochères s'ou-
vrent au fond de baies profondes, destinées à
permettre aux carrosses de tourner.
Si on jette un coup d'œil par les portes
entr'ouvertes, on aperçoit des cours, des jar-
dins, et l'on s'étonne de trouver, au milieu de
Paris, ces vestiges survivants de la vie large et
discrète de nos aïeux.
Au numéro 19, une plaque fixée sur la muraille
évoque l'es gloires de l'ancien théâtre : « Hôtel
W LA JEUNESSE DE BALZAC.
de Ranes, bâti sur l'emplacement du Petit Pré
aux Clercs. Jean Racine v mourut, le 22 avril
1699, Adrienne Lecouvreur, en 1730. Il a été
habité aussi par la Champmeslé et Hippolyte
Clairon1. »
Or, c'est dans la maison voisine, celle qui
porte le numéro 17, que Balzac exerça la pro-
fession d'imprimeur. Seule peut-être de toutes
les constructions élevées sur la rue Visconti,
la maison numéro 17 est relativement moderne.
Elle est de plusieurs mètres en retrait; ce dé-
tail semble indiquer qu'elle fut élevée postérieu-
rement à un projet général d'alignement de la
rue qui pouvait dater du premier Empire. L'as-
pect de la bâtisse confirme la date de la cons-
truction, qui paraît être 1826.
Il est probable que la maison occupe, en
partie, l'emplacement des beaux jardins de Ni-
colas Vauquelin des Yveteaux, où celui-ci, au
dire de Tallemant des Réaux, recevait Ninon et
menait une vie « voluptueuse et cachée, comme
une espèce de grand seigneur dans son sérail ' ».
Le terrain ne fait qu'un seul tout avec l'immeuble
qui a son entrée principale sur la rue Jacob, et
où est installée actuellement la Librairie agricole.
1. Voir Appendice X.
ï. Cf. Les Historiettes de Tallemant des Réaux. 3e édition.
Paris, Tcchener, 1862, in-12, t. I, p. 236.
BALZAC IMPRIMEUR. 47
( Jette demeure, où Balzac a passé deux années
de son existence, es! moins une maison d'habita-
tion qu'un vaste atelier. Sur la rue, Hlr présente
deux corps de bâtiment construits en moellons
et <mi plâtras. La patine du temps n'a pn ennoblir
la banalité plate de la façade. L'un des corps de
bâtiment, élevé de quatre étages au-dessus du
rez-de-chaussée, est surmonté de la large baie
d'un atelier. L'autre partie de la construction
if a que deux étages au-dessus du rez-de-chaus-
sée. Les murs sont percés d'étroites fenêtres à
persiennes grises ou à demi-persiennes dor-
mantes. Le rez-de-chaussée des deux maisons
est occupé par un long vitrage qui se continue
d'un bout à l'autre des deux corps de bâtiment
et leur donne ainsi une certaine unité.
Devant la porte, aujourd'hui comme il y a
soixante-dix ans, des voitures à bras, des colis
de papiers ficelés dans des emballages de plan-
ches. La maison n'a pas changé de destination,
et sur l'imposte on lit : A. Herment, successeur de
Garnier. Cahiers d'école. Fabriqtw de registres. Sur
la porte bâtarde qui ouvre à droite, on lit encore :
A. Herment. Magasins et bureaux au 1er étage. La
porte est épaisse, à un seul vantail ; elle a
conservé le heurtoir d'anlan, mais, inutile main-
tenant, il est fixé par un clou.
Un couloir sombre; une loge de concierge
48 LA JEUNESSE DE BALZAC.
s'ouvrant comme une grotte obscure, à mi-hau-
teur de l'entresol; un escalier avec rampe de
fer, marches de bois et paliers carrelés; à gau-
che, une porte. On entre, et l'on se trouve au
milieu d'un vaste atelier rempli, du plancher au
plafond, de piles énormes de papiers, de car-
tons et de registres.
L'obligeance des locataires actuels nous per-
met de visiter la maison.
L'imprimerie était installée dans les ateliers
du rez-de-chaussée : « Le rez-de-chaussée for-
mait une immense pièce éclairée sur la rue par
un vieux vitrage et par un grand châssis sur une
cour intérieure... » La phrase est prise dans les
Illusions perdues; elle s'applique exactement à la
maison de la rue des Marais : « On pouvait,
d'ailleurs, arriver au bureau du maître par une
allée. » L'allée subsiste aussi et la porte du
couloir est découpée par une sorte de galerie
en style ogival qui indique le goût romantique.
Au premier étage, une pièce, non moins vaste
que celle d'en bas, occupe toute la largeur des
deux maisons. 11 n'est pas difficile de reconnaître
les restes d'un ancien appartement qui est au-
jourd'hui comme englobé dans le vaste atelier.
Du temps de Balzac, cet appartement faisait
logis à part, et la plus grande partie de l'étage
était habitée par un autre locataire.
BALZAC IMPRIME! R. '.'.»
Voici (loue les pièces du petit appartement
(jui lui le sien : voici la cuisine obscure; voici
l'antichambre assez \;<sie; voici la salle à man-
ger qui, seule, conserve encore sa cheminée en
marbre noir, assez belle et de style Empire.
Voici, enfin, la chambre que la tradition dési-
gne comme « la chambre de Balzac » : c'est le
bureau actuel du patron. Haute et carrée, elle
prend jour, sur la rue, par une seule fenêtre. En
face de la fenêtre, il y avait une alcôve, aujour-
d'hui démolie, et, de chaque côté de la cheminée,
deux grands placards. Il ne reste rien que les
quatre murs et une cheminée du style le plus
banal. Le lambris paraît avoir été refait lorsqu'on
a tendu le papier actuel, où alternent des lignes
verticales vertes et jaunes.
L'aspect de la chambre devait être tout autre
quand Balzac l'habitait. Car il avait cloué sur
les murs, « à la place d'un affreux papier, une
tenture de percale bleue1 »; il avait meublé la
1. Cette tenture fut déclouée par Balzac et reportée ensuite
dans l'appartement qu'il occupa rue Cassini, où son ami La-
louche, l'éditeur d'André Chénier et l'amant de Mme Desbordes-
Yalmore, l'aida à la reclouer.
« On me reproche, écrit Balzac à sa sœur, l'arrangement de
ma chambre; mais les meubles qui y sont m'appartenaient
avant ma catastrophe. Je n'en ai pas acheté un seul! Cette ten-
ture de percale bleue qui fait tant crier était dans ma chambre
à l'imprimerie. C'est Latouche et moi qui l'avons clouée sur
un affreux papier qu'il eût fallu changer... » Œuvres complètes,
t. XXIV. Correspondance, p. 52 (lettre XXIII, datée de Paris 1827).
— Ce texte diffère absolument de celui de la lettre autographe
4
50 LA JEUNESSE DE BALZAC.
pièce avec quelque recherche; ses livres, reliés
par Thouvenin, y étaient réunis1.
de Balzac (Collection Lovenjoul, ms. A 276, fol. 76). Elle est datée
du samedi 14 février [1829] et non de 1827, comme il est imprimé,
par erreur, dans la Correspondance. Le passage correspondant,
dans l'original, est le suivant : « ma pauvre mère accuse mon
luxe. Tous les meubles que j'ai m'appartenaient avant ma ca-
tastrophe, à l'exception du corps de bibliothèque et de la re-
liure des livres... Mais ne parlons pas des meubles, il reste les
tentures. Le papier à mettre aurait coûté en tout 80 francs.
J'ai cent et quelques aunes à 20 sous qui me resteront, que
Latouche m'a posées, et quelques bouts de franges... »
Plusieurs historiographes de Balzac, M. Gabriel Ferry no-
tamment, dans une étude intitulée Les Habitations de Balzac,
insérée dans le Monde moderne de juin 1897, pp. 857-850, ont
avancé que Balzac, en quittant l'imprimerie de la rue des
Marais-Saint-Germain, avait été habiter au n° 2 de la rue de
Tournon. Ce domicile était celui qu'il occupait avant d'être im-
primeur ; c'est l'adresse qu'il donne au bas de sa letlre au mi-
nistre de l'Intérieur, quand il sollicite l'obtention d'un brevet
(Voir Appendice VI, pièce n° 50).
En quittant la rue des Marais, après sa déconfiture, c'est rue
Cassini que va demeurer le futur auteur de la Comédie humaine.
Il le dit lui-même, dans une de ses Lettres à l'Étrangère (p. 414).
« En 1828, j'ai été jeté dans cette pauvre rue Cassini, sans que
ma famille voulût me donner du pain, par suite de la liqui-
dation à laquelle on m'avait contraint, devant 100 000 francs, et
n'ayant pas un sou. »
Henry Monnier, dans les Mémoires de Monsieur Joseph Prud-
homme, t. II, p. 101, confirme le fait : « Balzac, écrit-il, venait
de quitter le métier d'imprimeur dans lequel il n'avait pas fait
de brillantes affaires. L'abandon du matériel de l'imprimerie à
ses créanciers, quarante mille francs de billets qu'il fallut ac-
quitter avec le produit de ses livres, capital et intérêts : tels
furent les résultats de sa tentative industrielle. Ses affaires
terminées, Latouche se chargea d'installer Balzac dans son
appartement de la rue Cassini, près de l'Observatoire. In
matin, Latouche, monté sur une échelle, un tablier devant lui.
se livrait avec délice à sa passion pour le collage du pa-
pier... »
Pour les différents logements occupés par Balzac, voir Col
lection Lovenjoul, mss. A 522, 525. 527 et 328.
1. Voir Appendices V et VIII, pièces n09 44, 94 et 95.
BALZAC IMPRIMEUR. M
En un mol, le jeune homme, à peine éman-
cipé,avait fait, de l'appartemeni obscur M I riste,
un nid doux et chaud. Il avait cru s'installer
pour toujours, en maître, dans la laide et banale
maison qui lui devenait chère; son goût Pavai!
modifiée selon son rêve.
C'est là que, pendant deux années, il reçut
tous les jours1, comme il le dit lui-même, la
visite de l'amie dont la présence l'aidait à sup-
porter les difficultés et bientôt les déboires de
sa nouvelle existence.
I. Lettres à VÉtrangère, p. 418 (lettre CXXVI, 19 juillet 1837;.
RUE DES MARAIS
Les courtes années que Balzac passa rue des
Marais-Saint-Germain furent décisives pour la
formation de son génie. Il vivait là, au plein
cœur du vieux Paris, sur ce sol où la vie et la
mort accumulent leurs énergies depuis des
siècles.
Parmi les industries parisiennes, celle qu'il a
choisie a encore quelque partie intellectuelle.
Dans la crasse de l'encre, de la fumée et du
papier noirci, elle sent rôder autour d'elle le vol
de la pensée qui cherche à se poser. Mais, aléa-
toire plus qu'aucune autre — étant le thermo-
mètre de la culture et, ainsi, de la prospérité
publiques — au moindre trouble, au moindre
recul, elle est en péril.
L'expérience des affaires, avec tout ce qu'elle
a de brutal et de dur, va donc former ce jeune
homme qui s'offre à la vie. La nécessité maté-
rielle, maîtresse des âmes et des mœurs, va
RUE 1 > i: S MARAIS.
devenir l'institutrice de ce! investigateur des
mœurs et clos âmes. Kl le vient vers lui dans sa
forme ordinaire et banale, dont il sera le pre-
mier à saisir l'étrange poésie.
C'est l'atelier noir et bas, où la lumière du
dehors laisse à peine pénétrer, aux heures enso-
leillées, un terne rayon ; ce sont les têtes pales el
sincères des ouvriers qui surgissent de l'ombre,
apparaissant et disparaissant, selon le travail
mécanique qui les astreint; c'est la ligure de
Vours « avec ce mouvement de va-et-vient, qui
ressemble assez a celui d'un ours en cage, par
lequel les pressiers se portent de l'encrier à la
presse et de la presse à l'encrier » (Mimons per-
dues); et c'est la rangée « des singes », qui sont
ainsi nommés « à cause du continuel exercice
que font ces messieurs pour attraper les lettres
dans les cent cinquante-deux petites cases où
elles sont contenues » (Illusions perdues)1.
Ce sont les ballots de papier qui arrivent; ce
sont les gens affairés et indifférents qui entrent
et sortent; c'est le bureau du patron, noir et
sombre, au fond de l'atelier, avec ses papiers,
ses cartons, ses abat-jour verts, ses chiffres
obscurs, ses rubriques incompréhensibles au
public, et le branle-bas de combat, deux fois
1. Voir Appendice VIII, pièces n0,83 et 84, et Œuvres complètes,
édition Lévy, t. VI, p. 134.
54 LA JEUNESSE DE BALZAC.
par an, le jour de l'inventaire (La Maison du
Chat-qui-pelote)\
Puis, c'est la difficulté des affaires elles-
mêmes ; c'est le client attendu qui ne se presse
pas, et dont la tactique sournoise se devine
dans les détours d'une conversation indifférente ;
c'est le fournisseur impatient, dont la voix, douce
le jour de l'achat, devient rude, au moindre
retard, le jour du paiement.
Ce sont les fins de semaines et les fins de mois,
avec l'exigence de la main-d'œuvre qui attend
sa paie pour vivre et qui ne connaît pas d'autre
raison que l'argent; ce sont les tours de force
et les tours de passe-passe pour trouver cet
argent, pour gagner huit jours, pour obtenir un
délai; c'est l'émotion de l'attente et le soupir
momentané de la délivrance.
Voici, maintenant, grouillant dans la détresse
qui grandit, les figures redoutables des hommes
d'affaires, de tous les vautours que l'odeur de la
misère appelle : l'huissier avec son grimoire,
l'avoué rose et gras, le juge sceptique et indif-
férent qui laisse tomber, sur tous ces cous ten-
dus, le couperet de la loi.
Puis, l'armée des prêteurs, depuis l'horrible
usurier du coin — Cerizet ou Gigonnet — jus-
1. Œuvres complètes, édition Lévy, t. I, p. 37.
RUE DES M IRAIS.
qu'à la grande banque, maîtresse de la place,
remuant les capitaux internationaux, formulant
l'étonnante maxime du vieux baron : « 11 n'y a
qu'un argent », embrassant d'un coup d'œil les
affaires du monde, et, jouant pourtant aussi
sriré dans les petites affaires que le dernier des
Gobseck, parce qu'elle est convaincue que, si
elle se laissait prendre par la pitié, elle se lais-
serait saisir, en môme temps, par la ruine.
Voilà ce que cette vieille rue des Marais
raconte à l'ardent et attentif jeune homme,
tandis qu'il rentre, le soir, et que la lanterne du
coin grandit son ombre allongée sur le pavé. Au
dehors, ce fut, toute la journée, la course enfié-
vrée avec la quête ardente; au dedans, ce sont
les soucis grandissants et la faillite menaçante.
Avant Balzac, rien de tout cela n'avait été
aperçu par les faiseurs de romans, narrateurs
des passions humaines. Les héros des livres
qui charmaient ou divertissaient l'humanité
vivaient dans une atmosphère irréelle et se
nourrissaient, comme on dit, « de l'air du temps » .
L'école des mœurs et de la vie était en dehors de
la vie et des mœurs.
Ames éthérées, princesse de Clèves ou prin-
cesse de Montpensier, Paméla ou Julie, vous
vous teniez bien loin au-dessus du tracas mé-
diocre des nécessités humaines! Oui eût songé
56 LA JEUNESSE DE BALZAC.
à faire l'inventaire de vos moyens d'existence?
Et, si cette coquine de Manon posait, en riant,
le problème, c'est encore par l'amour qu'elle se
chargeait de le résoudre.
Balzac arrache le roman au rêve. 11 le décroche
du ciel et le ramène sur la terre. On sait, main-
tenant, de quoi vit la Nouvelle Héloïse; on tient
les comptes de Saint-Preux ; autour d'eux, les
misères de la vie s'agitent et ajoutent leurs
angoisses et leurs tares aux tares et aux angoisses
de l'amour.
La Comédie humaine, c'est l'économie poli-
tique des passions humaines. Voilà ce qu'elles
coûtent en livres, sols et deniers. Dans la fic-
tion, comme dans la réalité, le compte par
doit et avoir est ouvert, et viendra l'heure des
échéances.
Cette révolution dans l'art, qui eut pour con-
séquence une révolution non moindre dans
l'éducation littéraire de l'humanité, fut conçue
par Balzac durant son séjour dans la rue des
Marais. C'est là qu'il respira l'acre senteur de
la vie et son œuvre en resta, pour toujours,
imprégnée.
Et c'est là qu'un autre enseignement lui dévoila
l'autre énigme : la Femme. « Elle est venue, tous
les jours, comme un bienfaisant sommeil
RUE DES MARAIS. M
endormir les douleurs. » Tel esl !<■ mystère
de la chambre lendue de percale bleue!
Laissons-le parler encore; il va Loul dire :
« Depuis quej'ai eu des idées et des sentiments,
j'ai été tout entier à l'amour, et '«» première per-
sonne que j'ai rencontrée était une héroïne
accomplie, un cœur angélique, l'esprit le plus (in,
l'instruction la plus étendue, les grâces et les
manières parfaites. La nature diabolique y avait
mis son fatal mais! Mais elle avait vingt-deux ans
déplus que moi, en sorte que si l'idéal était dépassé
moralement, le matériel, qui est beaucoup, posait
des bornes infranchissables. Cette passion sans
limites que j'ai dans l'âme n'a donc pas rencontré
toute sa pâture. Il m'a manqué la moitié du
tout1. »
Voilà donc le secret de ces angoisses; voilà
donc cette énigme que personne ne devait devi-
ner; voilà la clef de cette vie si peu connue et si
méconnue! « Elle avait vingt-deux ans de plus
que moi!... des bornes infranchissables!... il
m'a manqué la moitié du tout! »
Balzac ne s'entendait pas, alors, avec sa mère2.
Il rencontra en Madame de Berny une seconde
1. Collection Lovenjoul, ms. A 301, fol. 494. — Lettres à l'Etran-
gère, p. 500 (lettre CXL, 15 novembre 1838).
2. M. Fessart a noté, sur son exemplaire de la Vie de Balzac
par Mmo Surville (p. 26), la fermeté de la mère à l'égard du fils :
« M"" de Balzac était très sévère avec ses enfants, et surtout
58 LA JEUNESSE DE BALZAC.
mère, une mère plus douce, plus tendre; une
femme attentive, caressante, grave, une maî-
tresse, une éducatrice, une femme supérieure,
prévenante et prévoyante qui conçut, nourrit et
développa son génie, la mère de l'intelligence et
la mère du cœur, dont l'affection inquiète et
ardente enveloppa et domina toute sa jeunesse,
et, en leprécipitant sur la vie, lui dévoila d'avance
la leçon de la vie.
« Vingt-deux ans de plus que moi!... » La
connaissance remontait, dit-on, à l'époque où
Balzac habitait avec ses parents à Villeparisis,
où ils avaient pour voisins le ménage de Berny.
Balzac paraît indiquer une époque plus ancienne,
si on applique à sa propre vie le court fragment
inséré dans les « Œuvres diverses » : Une Passion
cm collège1 : « Nuit capricieuse et pleine de sua-
vité! nuit dont nepeut jouir qu'une fois l'homme-
enfant assez heureux pour la rencontrer dans
la vie !... » etc.
Quoi qu'il en soit, c'est bien à Madame de
Berny qu'il faut rapporter certains propos amu-
sants des lettres de 1822, datées de Villeparisis.
a Madame de B... s'est fait marchande d'avoine,
avec Honoré. » A la page 38 du même livre, M. Fessart note
que Balzac, demandant de l'argent à sa mère, « elle ne lui
répondait pas; elle le laissait mourir de faim ». Voir Une Page
perdue de H. de Balzac, pp. 121 et 126.
1. Œuvres complètes, édition Lévy, t. XX, pp. 259-262.
RUE Di:s MARAIS.
de son et de blé et d<* fourrages, parce qu'elle
sVsi apperçue après quarante ans de réflexions, que
l'argent est toul » ; Balzac ajoute : « M. de Berny
n'y voit pas plus cette année-ci que l'autre '. »
Ce serait donc là l'origine.
Nous ne savons, de pins, que ce qu'il a dit
lui-même: « ... Au début de ma vie, elle a été
une mère véritable... Mon Dieu, je n'ai pas une
âme qui me connaisse; il n'y en a eu qu'une. La
pauvre et chère Mme de B...y me venait voir tous
les jours, et, dans ce temps-là, elle croyait que
je périrais sous le fardeau. Que dirait-elle en
le voyant décuplé! Oui, je travaille dix fois
plus en 1838 qu'en 28, en 30 et 31, 32 et 33.
Dans ce temps-là, je croyais à la fortune, et
aujourd'hui je crois à la misère1... Elle a fail
plus; quoique en puissance de mari, elle a
trouvé moyen de me prêter jusqu'à 45.000 francs
et j'ai rendu les derniers 6.000 francs en 1836,
avec les intérêts à 5 p. °/0 bien entendu. Mais
elle ne m'a jamais parlé de ma dette que peu à
peu; sans elle, certes, je serais mort. Elle a
souvent deviné que je n'avais pas mangé depuis
quelques jours; elle a pourvu à tout avec une
angélique bonté; elle a encouragé cette fierté
1. Œuvres complètes, édition Lévv, t. XXIV, Correspondance, p. 41.
2. Collection Lovenjoul, ms. A 301, fol. 491 v°. — Lettres à l'Étran-
gère, p. 496 (lettre CXXXIX, 17 septembre-16 octobre 1838).
60 LA JEUNESSE DE BALZAC.
qui préserve un homme de toute bassesse, et
qu'aujourd'hui mes ennemis me reprochent
comme un sot contentement de moi-même, cette
fierté que Boulanger a peut-être un peu trop
poussée à l'excès dans mon portrait. Aussi, ce
souvenir est-il pour beaucoup dans ma vie; il
est ineffaçable; car il se mêle à tout1... Elle
était crime bonté infinie et d'un dévouement
absolu. »
En 1834, quand commence la maladie qui doit
emporter son amie, Balzac écrit : « Hélas ! je suis
atteint d'une douleur qui s'étendra sur toute ma
vie. Je suis allé voir, pour deux jours (compre-
1. Lettres à V Étrangère, p. 418 (lettre CXXVI, 19 juillet 1837).
— Il est très difficile de savoir si Balzac a rendu effectivement,
avec intérêts à 5 p. 100, la somme que lui avait prêtée Mme de
Berny. On verra, dans le chapitre suivant et dans les appen-
dices qui s'y rapportent, que, lors de la liquidation de l'en-
treprise Balzac et Cia, Alexandre de Berny, fils de Mme de
Berny, reprit la part de Balzac dans la maison de fonderie. Il y
eut là, probablement, une première compensation. Cependant,
Balzac dut rester débiteur pour une somme importante à
l'égard de Mmu de Berny et de ses héritiers. Voici, en effet,
l'anecdote qui nous est contée par un vieil ami de la famille,
M. Arthur Rhoné :
« Étant tout enfant, j'allais souvent chez Alexandre de
Berny, le camarade de collège de mon père, qui, depuis la
mort de celui-ci, était resté l'ami intime de ma famille. Sur la
cheminée de son bureau, rue des Marais-Saint-Germain, je
voyais un joli buste de Flore, et mes yeux ne se détachaient
pas de ce bronze signé Marin. Marin, né en 1773, mort en 1834,
avait obtenu le premier grand prix de sculpture en 1812.
« Un jour, M. de Berny me dit tout à coup : « Sais-tu ce que
« me coûte ce buste ? » — Je ne savais que répondre ; il ajouta :
« Il me coûte quinze mille francs. » Comme je semblais un
KUE DE8 MARAIS. (il
nez-vous quelle est la furie de mes travaux?),
madame de B...7 qui est à dix-huit lieues de
moi1. .r«*ii élé témoin d'une crise affreuse. Je
n'en puis plus douter, elle est atteinte d'un ané-
vrisme au cœur. Cette vie si précieuse es! per-
due. A tout moment la mort peut m'enlever un
ange qui a veillé sur moi pendant 14 ans, une
fleur de solitude aussi, que jamais le monde n'a
touchée et qui était mon étoile... Elle pousse
l'amitié jusqu'à me cacher ses souffrances; elle
veut être bien portante pour moi. Vous com-
prenez que je n'ai pas tracé Claës pour faire
comme lui. Grand Dieu ! quels changements se
sont faits en deux mois chez elle! J'en ai été
al terré. Se trouver presque fou de chagrin et se
voir condamné au travail! Perdre cette noble et
peu abasourdi de ce gros prix pour un si petit objet (j'avais
alors une quinzaine d'années environ), M. de Berny reprit :
« En ce temps-là, Balzac me devait beaucoup d'argent. Un jour
que j'étais chez lui : « — Puisque je ne peux pas te payer, me
dit-il, prends ici ce que tu voudras pour te rembourser ».
« La scène se passait probablement dans la maison de
Passy. Or, on sait que Balzac avait le goût des belles œuvres
et que sa maison était remplie d'objets d'art. M. de Berny, très
fier et très délicat, prit, sans doute, une des moindres choses.
« Après sa mort, M. Charles Tuleu, sachant l'intérêt que je
portais à ce buste de Flore, me l'apporta lui-même comme
souvenir de notre ami commun.
« Peut-être est-ce pour une raison analogue que M. de Berny
était resté possesseur d'une superbe pendule de style
Louis XVI en bronze doré, accompagnée de ses deux candé-
labres, provenant de Balzac et aujourd'hui la propriété de
M. Tuleu. »
1. A la Bouleaunière, canton de Nemours (Seine-et-Marne).
68 LA JEUNESSE DE BALZAC.
grande partie de ma vie et vous savoir si loin,
c'esl à se jetter dans la Seine l ! »
Un mot encore, une précision: « Demain,
écrit-il, en août 1832, à Mme Hanska, demain je
briserais ma plume, si vous le vouliez; demain,
nulle femme n'entendrait ma voix. Je deman-
derais grâce pour la Dilecta, qui est ma mère2;
elle a bientôt 58 ans, vous ne sauriez en être
jalouse, vous si jeune ! »
Et c'est tout. Balzac n'en a pas dit davantage
sur cette autre Madame de Warens qui resta
pour lui, toute la vie, l'étoile, l'ange, la Dilecta.
La Dilecta! c'est à elle qu'il donnait le beau
portrait de Devéria, où nous l'avons vu resplen-
dissant de force et de jeunesse, avec la dédicace
écrite de sa main : « Etnunc et semper. »
C'est à elle qu'il dédiait, en 1832, Louis Lambert,
— qui n'est autre chose que le récit de sa jeu-
nesse— avec cette dédicace, toujours la même :
« Et mine et semper, Dilecix dicatum3. »
C'est elle qui est debout devant lui, quand il
écrit Le Lys dans la Vallée, et qu'il crée ce type de
Mrae de xMortsauf, le plus étrange, le plus fasci-
1. Collection Lovenjoul, ras. A 501, fol. '256 v°. — Lettres à V Étran-
gère, p. 220 (lettre LXXV, 22 décembre| 1854). M- de Berny
est morte le 27 juillet 1856; elle est inhumée à Gretz, près Ne-
mours. Voir Appendice III, pièce n° 15.
2. Collection Lovenjoul, ras. A 501, fol. 27 v°. — Lettres à l'Étran-
gère, p. 55 (lettre VII, 19 août 1855).
5. « Et maintenant et toujours, dédié à la très chère. »
RUE DES MARAIS. 65
nant et le plus énigmatique de tous ceux qui
aient hanté le rêve de son cerveau visionnaire1.
C'est à elle qu'il pensait quand il racontait,
dans Le Curé de Village, l'histoire tragique du
jeune ouvrier qui meurt d'amour sans desser-
rer les lèvres.
C'est à elle qu'il pensait encore quand il ré-
digeait les dernières lignes du sombre drame
où il toucha le Fond de la passion humaine,
La Duchesse de Langeais : « Il n'y a que le dernier
amour d'une femme qui satisfasse le premier
d'un homme. »
Nous en savons maintenant assez pour devi-
ner que cette femme lui apprit la Femme.
Toutes les autres, les Abrantès, les Castries,
les Zulma Carraud, même cette noire Polonaise
qui dévora les quinze dernières années de sa
1. « ... J'ai repris mes travaux ce matin; et ça a été pour
obéir au dernier mot que m'ait écrit Mmede B...y. Elle a trouvé
que, dans cet ouvrage, qui lui a fait m'écrire : « Je puis mourir,
je suis sûre que vous aurez sur le front la couronne que je voulais
y voir. Le Lys est un sublime ouvrage, sans tache ni faute. Seule-
ment, la mort de Mme de Mortsauf n'a pas besoin de ses horribles
regrets; ils nuisent à la belle lettre qu'elle écrit ». Alors, aujour-
d'hui, j'ai pieusement effacé les cent lignes environ qui, selon
beaucoup de gens, déparaient cette création. Je n'en ai pas
regretté une seule, et, chaque fois que ma plume a passé sur
l'une d'elles, jamais cœur d'homme n'a été plus fortement
ému. Je croyais voir cette grande et sublime femme, cet ange
d'amitié, devant moi, me souriant comme elle me souriait
quand j'usais de cette force si rare, qui consiste à se couper
un membre, à ne sentir ni douleur, ni regret, à se corriger, à
se vaincre ! » Collection Lovenjoul, ms. A 301, fol. 394. — Lettres
à l'Étrangère, p. 376 (lettre CXIX, 15 janvier 1837).
64 LA JEUNESSE DE BALZAC.
vie, n'ont pas eu sur lui une pareille influence.
Il était déjà formé, et on n'apprend plus rien,
en cette matière, passé trente-cinq ans. Toute
sa vie, il eut le regret de cette « moitié du tout »
el il eut toujours la soif de ce qui avait man-
qué à sa jeunesse.
Lidée qu'il se fit de la femme, en bien et en
mal, cette idée, il l'a prise dans les conversa-
tions de la chambre tendue de percale bleue,
tandis qu'il était, — si jeune encore, — aux
pieds de l'éducatrice clairvoyante et expéri-
mentée.
On retrouve partout Yempr*einte. On la relève
à chaque page de ces Lettres à l'Etrangère qui ne
sont souvent qu'une involontaire confession.
« Pour moi, dit-il, j'ai en détestation profonde
les jeunes personnes et je tiens plus compte de
la beauté développée que de celles qui se déve-
lopperont1. »
Balzac a rendu aux femmes un service
immense, dont elles ne lui seront jamais assez
reconnaissantes : il a doublé, pour elles, le
temps de l'amour. Avant lui, toutes les amou-
reuses de roman avaient vingt ans. Il a pro-
longé jusqu'à trente ans, jusqu'à quarante ans,
leur vie active; il a plaidé, pour elles, la cause
de la nature et de la vérité.
1. Lettres à l'Étrangère, p. 501 (lettre CXL. là novembre 1838).
RUE DES MARAIS. 65
Il a guéri l'amour du [préjugé de la jeunesse.
1! a montré le charme prolongé d'une beauté
déclinante, d'un port alangui, d'un automne
ardent et animé. « Vienne le temps, dit-il quel-
que part, et je n'épouserais qu'une veuve ! » Et
il devait l'aire, dix-sept ans plus tard, comme il
Tavaildit dès Tannée 1833.
Voilà le don immortel que, dans sa largesse,
le génie de Balzac a fait aux femmes et à l'hu-
manité. Il a multiplié, sinon la joie humaine, du
moins la conscience de cette joie. Il a osé
affranchir un sentiment qui doutait de lui-même.
Il a célébré, ennobli, excusé si l'on veut, bien
des heures chères, celles où les rayons du soleil
couchant prolongent la chute exquise du jour.
Cette leçon, c'est encore dans la rue des
Marais-Saint-Germain qu'il la recueillit.
Il la recueillit de la bouche et des lèvres de la
femme qui, dans le silence de la nuit, dans la
solitude des jardins environnants, quand l'ate-
lier s'était tu, confiait au jeune homme attentif
et inapaisé le secret de la vie, et lui versait,
goutte à goutte, le philtre dont elle voulait sa-
vourer encore les suprêmes délices.
D1LECTA
Cette femme qui eut une si grande influence
sur les premières années de Balzac, cette Ma-
dame de Berny dont la figure nous apparut,
pour la première fois, dans l'ombre de l'atelier
d'imprimerie, qui était-elle? d'où venait-elle?
quelles leçons, quels exemples, quels sentiments
sa maturité attentive devait-elle déposer dans
l'âme neuve de son jeune ami?
Nous sommes en mesure de répondre à ces
questions. Une ligne, inscrite dans le grimoire
du dossier de Balzac imprimeur, nous a mis sur
la voie. Peu à peu, toute une suite d'événements
et de circonstances inattendues et vraiment
extraordinaires s'est développée devant nous.
Dans un des actes où Mme de Berny intervient
pour essayer de sauver Balzac en train de se
ruiner, son nom de jeune fille est donné tout
entier. Elle s'appelait Laure-Louise-Antoinette
Ilinner1.
1. Voir Appendice VII pièce n° 73.
DILECTA. 07
Le rapprochement de ces deux prénoms,
Louise, Antoinette, ne peut passer inaperçu, sur-
tout si ou se souvient que Paul Lacroix a
raconté dans ses « Mémoires »! que Madame de
Berny avait, dans sa jeunesse, assisté à la repré-
sentation d'une pièce de Vivant Denon, jouée à
la cour.
Un souvenir venu, par hasard, sur les lèvres
1. Nous résumons l'anecdote si curieuse rapportée par Paul
Lacroix : Dans une soirée chez le baron Dubois, à laquelle
assistaient Paul Lacroix et M»e de Berny, on reprochait à
Balzac d'avoir réimprimé sans façon, dans sa Physiologie du
Mariage, le Point de lendemain du baron Vivant Denon. Mraa de
Berny, qui avait connu le baron Denon à la cour de Marie-
Antoinette, prit la défense de Balzac : « J'étais bien jeune,
presque enfant, à cette époque-là, dit Mme de B*"* en rougis-
sant. M. Denon, ancien gentilhomme ordinaire de Louis XV,
avait composé une fort jolie comédie, Julie ou le bon père, qui
fut représentée sur le théâtre de la Cour, dix ou douze ans
avant la naissance de la princesse Pauline...
— En 1769 ou 1770, ajouta Paul Lacroix, pour venir en aide à
l'embarras de Mrae de B***, forcée d'accuser son âge. C'est à peu
près vers la même époque que Dorât publiait, dans le Journal
des Dames, sa charmante historiette intitulée : Point de lende-
main... »
« On passa dans la salle à manger. Mme de B*"', qui était visi-
blement mal à l'aise, me prit le bras avant que je le lui offrisse
et me dit à voix basse, avec émotion :
* Je vous prie instamment, Monsieur, de ne pas répéter à
M. de Balzac la discussion qui vient d'avoir lieu; il en serait
très troublé. Ainsi vous êtes bien sûr que la nouvelle de Point
de lendemain est de Dorât et non du baron Denon?... N'importe,
j'avertirai M. de Balzac qui fera un changement dans la seconde
édition de la Physiologie. » — Voir dans Le Livre, Revue du monde
littéraire... Bibliographie rétrospective, Troisième année. Paris,
A. Quantin, 1882, gr. in-8, un extrait abrégé des Mémoires iné-
dits de Paul Lacroix, sous le titre de Simple histoire de mes re-
lations littéraires avec Honoré de Balzac, pp. 271-272.
68 LA JEUNESSE DE BALZAC.
d'un ancien familier de la maison, M. Mous-
sard, donnait encore quelque précision à ces
indices ; Mme de Berny, disait-on, avec une légère
erreur, était d'origine autrichienne. On pouvait
donc chercher dans l'entourage de Marie-Antoi-
nette.
M. de Nolhac, le délicat historien de la reine,
l'homme qui vit dans le Versailles d'aujour-
d'hui comme si c'était encore le Versailles du
grand roi, voulut bien se charger de cette recher-
che. Elle ne fut pas longue : « Il y avait, nous
écrivit-il, dans l'entourage de Marie-Antoinette,
un harpiste allemand du nom de Hinner. » Et,
pris lui-même par l'intérêt de l'énigme, secondé
par M. Coùard-Luys, l'érudit archiviste du
département de Seine-et-Oise, M. de Nolhac
nous transmit, bientôt, les renseignements sui-
ants sur les origines de l'amie du romancier.
Mme de Genlis écrit dans ses Mémoires : « La
reine [de Naples] me chargea de lui envoyer, de
Paris, un joueur de harpe et je lui envoyai le
jeune Hinner qui avait un joli petit talent »\
Cela se passait en 1777 ou 1778. Or, la vie de ce
Hinner n'est pas inconnue. Fétis lui a consacré
une notice dans son « Dictionnaire des musi-
1. Voir Mémoires de Madame de Genlis... avec avant-propos et
notes par M. F. Barrière. Paris. Firmin-Didot et O, 1885, in-l\
p. 175.
DILECTA. M
(•ions »f el la notice a été L'objet d'une rectifica
fcion émanant précisément de M. Coûard-Luys*.
Philippe-Joseph I limier était né en 1754,
à Wetzlar, d'un père musicien qui avait <in
l'idée singulière d'aller, avec son talent de har-
piste, chercher Fortune à la Guyane. Le père
y était mort dans la dernière des misères en
1765; mais le fils, âgé de onze ans, avait inté-
ressé le chevalier Turgot, qui le ramena en
France et qui, probablement à la faveur de ses
origines allemandes, le présenta à la reine et le
mit en état de devenir musicien ordinaire du roi
et harpiste de la reine.
Il est donc introduit dans ces petits cercles
de musique où la reine se plaisait tant. La mu-
sique « était le seul art qu'elle ait vraiment
aimé, dit l'historien de Marie-Antoinette; elle
chantait de sa voix mal assurée, mais agréable ;
elle jouait ses musiciens préférés... Les musi-
ciens d'Allemagne étaient tout particulièrement
1. Biographie universelle des musiciens et bibliographie générale
de la musique. Deuxième édition entièrement refondue et aug-
mentée de plus de moitié par F.-J. Fétis, maître de chapelle
du roi des Belges, directeur du Conservatoire royal de musique
de Bruxelles, etc. Paris, Firmin Didot frères, fils et Cie, tome IV,
pp. 356-357.
2. Voir dans Archives historiques, artistiques et littéraires, Recueil
mensuel de documents curieux et inédits..., tome II (1890-1891),
Paris, Etienne Charavay, in-8, pp. 376-378, un article de
M. E. Couard-Luys, intitulé : Le Maître de harpe de Marie-
Antoinette.
70 LA JEUNESSE DE BALZAC.
reçus par Marie-Antoinette; c'était le seul goût
qu'elle eût gardé de son pays... Le harpiste qui
raccompagnait était un Allemand, un certain
Hinner1... » Voilà notre homme.
Bientôt, la reine prend la peine de le marier à
une de ses femmes de chambre, une demoiselle
de bonne famille, Louise-xMarguerite-Emélie
Ouelpée de Laborde*. Le mariage a lieu en 1775,
à l'église Saint-Louis de Versailles3; il est béni
par l'évêque de Saintes.
Au bout de deux ans, il naît de ce mariage
une Fille, et voici maintenant l'extrait des regis-
tres de baptême de la paroisse Saint-Louis :
« L'an mil sept cent soixante-dix-sept, le vingt-
quatre may, Louise-Antoinette-Laure, née hier,
fille légitime de Philippe-Joseph Hinner, musi-
cien ordinaire du Roy et de la chambre de la
Reine, etdeMarguerite-Louise-Émélie Ouetpée
(sic) de Laborde, a été baptisée par nous, prêtre
curé de cette paroisse; Le Parein, très haut,
très puissant, très illustre Prince Louis Seize, roy
de France, et la Mareine, très haute, très puis-
i. Études sur la Cour de France. La Reine Marie-Antoinette, par
Pierre de Nolhac. Neuvième édition revue d'après de nou-
veaux documents. Paris, Calmann Lévy, 1889, in-18. pp. 188-189.
2. Voir Biographie universelle (Michaud) ancienne et moderne....
nouvelle édition, t. XX, Paris, Mme C. Desplaces, s. d., gr. in-S.
p. 572 (à la suite de l'article Jarjayes (François-Augustin Rei-
nier de).
3. Voir Appendice III, pièce n° 12.
DILECTA. 71
tante, très illustre Princesse, la Heine de France,
le Parein représenté par très haut, très puis-
sanl seigneur Louis-Sophie-Antoine Duplessis
de Richelieu, duc de Pronsac, pair de France,
premier gentilhomme de la chambre du Roy,
maréchal des camps cl armées de Sa Majesté,
noble génois; la Mareine représentée par très
haute, très puissante dame Laure-Augusle de
Fitz-James, princesse de Chimay et du Saint-
Empire romain, grande d'Espagne de la pre-
mière classe et dame d'honneur de la Heine,
lesquels et le père ont signé avec nous. Le duc
de Fronsac; Fitz-James, princesse de Chimay; Hin-
ner; Jacob, curé1. »
Le Roi, la Reine, les Fitz-James-Chimay, les
Richelieu, quel cortège! —-Or, l'enfant qui
entrait, ainsi entourée, dans la vie, c'était notre
Louise-Antoinette-Laure, la future Mmede Berny.
Hinner, le harpiste, meurt, le 13 avril 1784, à
l'âge de trente ans5. Mais Madame Hinner est
trop jeune pour rester veuve. Trois ans après,
en 1787, elle se remarie; et elle épouse, dans
l'église de Livry, François-Augustin Reinier de
Jarjayes, aide-major général de l'armée. Le
mariage à Livry s'explique par le fait que le
château était habité, conjointement avec le
1. Voir Appendice III, pièce n° 13.
2. Voir Appendice IV, pièce n° 16.
:- LA JEUNESSE DE BALZAC.
président de Bésigny, qui signa au mariage,
par .Mathieu Ouelpée de La Borde, père de
M™ Hinner, devenue, par son second ma-
riage, la femme du chevalier de Jarjayes1.
Faut-il insister maintenant sur le chevalier de
Jarjayes? C'est, assurément, un des person-
nages du parti royaliste les plus connus pen-
dant la Révolution. Lisez Eckart, Concourt,
Gaulot, Campardon, Lenôtre, Funck-Brentano
1. Voici ce que nous écrit à ce sujet M. l'abbé Genty, ancien
curé de Livry (Seine-et-Oise), auteur d'une histoire 'de cette
paroisse, actuellement vicaire général à Versailles : « Le 5 no-
vembre 1781, par devant Maret, notaire à Paris, Louis-Mathieu
Ouelpée de La Borde, écuyer, huissier ordinaire du cabinet de
la Reine, ancien officier du Roi, agissant en son nom et en
celui de dame Marie-Louise Pecquet, son épouse, acquit le
château de Livry, situé à côté de l'église, du sieur Alexandre-
François-Jérôme Dargouges, héritier de Madame la duchesse
de Beauvilliers. Il habita cette propriété jusqu'au 26 floréal de
l'an III de la République [15 avril 1795]. A cette date, il vendit
son domaine au citoyen René Chopin d'Arnouville. Avec
Mathieu Quelpée de La Borde vivait, au château de Livry,
dès l'année 1784, Jules-Adrien Gaultier de Bésigny, conseiller
du roi en ses conseils et président honoraire du Parlement de
Paris. Le premier se disait propriétaire de l'immeuble, le
second s'en disait usufruitier. Ils en habitaient probablement
chacun une partie et cette habitation fut constante, car chaque
année, les registres paroissiaux, soit à l'occasion d'un mariage,
soit à l'occasion d'un baptême ou d'une inhumation, portent
les signatures des La Borde et des Bésigny. Louis-Mathieu
Quelpée de La Borde eut deux filles, l'une, qui vécut dans le
célibat, s'appelait Claude-Pierre-Mélanie (son nom est cité dans
un acte du 9 septembre 1784); l'autre portait les prénoms de
Louise-Marguerite-Émélie. Mention de cette dernière est faite,
pour la première fois, dans les registres de la paroisse de
Livry, à la date du 26 septembre 1787. En ce jour, elle contrac-
tait mariage dans l'église de ce lieu avec Régnier de Jarjaye... -
Voir à I'Appendice IV, l'acte de mariage que nous publions
in extenso.
DILECTA. 77,
el notammenl l'abbé Allemand', et vous con-
naîtrez, par !<' menu, l'histoire du vaillant cham-
pion de la reine, <!<> l'homme <jui lit toul pour
essayer de la délivrer. Il est, beaucoup plus
que I<4 douteux Rougeville, digne de servir de
prototype au chevalier de Maison-Rouge.
Son mariage avec une des femmes de chambre
de la reine (la treizième, d'après YÉtal Général
de Warroquier8) l'introduit dans la petite inti-
1. Voir Biographie universelle {Michaud), nouvelle édition, t. XX,
pp. 569-572. — E. et J. de Goncourt. Histoire de Marie-Antoi-
nette. Édition ornée d'encadrements à chaque page par Giaco-
melli, et de douze planches hors texte, reproductions d'origi-
naux du xvin* siècle. Paris, G. Charpentier, 1878, in-4. — Paul
Gaulot. Un complot sous la Terreur. Marie-Antoinette — Toula n
— Jarjayes. Avec six portraits et fac-similé. Paris, Paul Ollen-
dorff, 1889, in-18. — Le Tribunal révolutionnaire de Paris. Ou-
vrage composé d'après les documents originaux conservés aux
Archives de l'Empire, suivi de la liste complète des personnes
qui ont comparu devant le Tribunal, et enrichi d'une gravure
et de fac-similés, par Emile Campardon, archiviste aux Archives
de l'Empire. Paris, Henri Pion, 1866, 2 vol. in-8. — La Captivité
et la mort de Marie-Antoinette. Les Feuillants, la Conciergerie
d'après des relations de témoins oculaires et des documents
inédits par G. Lenôtre. Paris, Perrin et Cio, 1897, in-8. — Frantz
Funck-Brentano. La Mort de la Reine (Les suites de l'affaire
du collier), d'après de nouveaux documents recueillis en partie
par A. Bégis... Paris, Hachette et C[", 1901, in-18. — Le Chevalier
de Jarjaves, par M. l'abbé F. Allemand. Gap, E. Jouglard, 1896,
in-8.
2. « Le service de la Chambre se composait de deux pre-
mières femmes et de douze autres, d'huissiers de la Chambre,
du Cabinet et de l'antichambre, de valets et garçons de la
Chambre, et autres gens du service intérieur. »
Sur l'administration de la maison de la Reine, voir Mémoires
sur la vie privée de Marie-Antoinette, par Mme Campan, première
femme de chambre de la Reine, 2e édition, Paris, 1823, 3 vol.
in-8, t. II, p. 339.
:; LA JEUNESSE DE BALZAC.
mité du palais, à la veille des graves événements.
Il se dévoue corps et âme. Ce n'est ni un vio-
lent, ni un exalté. C'est un homme froid, réflé-
chi. On lui reproche même quelque tiédeur appa-
rente. Il conseille la prudence. Mais quand il
faut agir, il est là.
Il est l'homme des grands services occultes,
peu connus et parfois méconnus. C'est lui, dit-
on, qui fut le premier intermédiaire des rela-
tions entre Marie-Antoinette et Barnave, Duport,
Alexandre de Lameth. Au 10 août, il était près
du roi; il accompagna Louis XVI jusque dans
la loge du logographe et reçut les derniers ordres
de la bouche royale. Il se cache dans Paris,
mais reste à la disposition de ses maîtres.
C'est alors que Toulan, avec Turgy et Cléry,
conçoivent le projet de faire évader Louis XVII
et les princesses. La reine ne veut se confier
qu'à Jarjayes. Elle engage avec lui une corres-
pondance secrète; tout est préparé. Jarjayes
avance les sommes nécessaires. Leprojet échoue
par la pusillanimité d'un des affiliés, Lepître.
On eût pu sauver peut-être la reine seule; mais
elle ne voulut pas se séparer de ses enfants.
Elle écrit au chevalier de Jarjayes : « Nous
avons fait un beau rêve, voilà tout; mais nousy
avons beaucoup gagné en trouvant encore dans
cette occasion une nouvelle preuve de votre
DILECTA. "o
entier dévouement pour moi. Ma confiance en
vous est sans homes; vous trouverez toujours,
dans toutes les occasions, on moi, du caractère
et dn courage; niais l'intérêt de mon (ils est le
s(Mil qui me guide, et, quelque bonheur que
j'eusse éprouvé à être hors d'ici, je ne peux pas
consentir à me séparer de lui... '. »
Le chevalier de Jarjayes fut chargé de trans-
mettre à « Monsieur » et au comte d'Artois le
cachet, l'anneau et le paquet renfermant les
cheveux de la famille royale que Louis XVI
avait remis à Cléry pour les porter à la reine.
Il rejoignit les princes et se fixa à Turin.
Nommé lieutenant-général par Louis XVIII,
il mourut, âgé de soixante-dix-sept ans, à
Fontenay-aux-Roses, en 1822*.
Madame de Jarjayes avait été mêlée à toute
l'histoire du complot. La reine l'aimait. Avant
de mourir, elle lui avait envoyé, par l'avocat
Tronson du Coudray, une mèche de ses cheveux
et les deux anneaux d'or qui lui servaient de
pendants d'oreilles (octobre 1793) 3.
1. Lettres de Marie-Antoinette. Recueil de Lettres authentiques
de la Reine, publié par la Société d'histoire contemporaine, par
Maxime de La Rocheterie et le marquis de Beaucourt, Paris.
Alphonse Picard et fils, 1895-1896, 2 vol. in-8, t. II, p. 433
(lettre CCCLXXX, [1793, février ou mars]).
2. Voir Biographie universelle {Michiud), nouvelle édition, t. XX.
p. 572.
3. Voir B iographie universelle {Mie) iaud), nouvelle édition, t. XX,
p. 372, et Frantz Funck-Brentano, La Mort de la Reine, p. 207.
70 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Ainsi désignée à l'attention du tribunal révo-
lutionnaire, Mme de Jarjayes fut arrêtée à Livry
et incarcérée1, une première fois, aux Madelon-
nettes. Délivrée au bout de six semaines, elle
fut, de nouveau, emprisonnée avec sa famille,
en février 1794. Sa fille, Laure Hinner, était
déjà mariée à cette époque. En effet, elle avait
épousé, le 8 avril 1793, à la mairie de Livry, en
présence de sa mère, un homme appartenant à
une excellente famille, Gabriel de Berny2. Le
marié avait vingt-quatre ans et quatre mois, la
mariée quinze ans et dix mois. Moins d'un
an après, le beau-père, la mère, le marié, la
mariée, les témoins, tout le monde était en
prison. La délivrance ne vint qu'au bout de
neuf mois, après la chute de Robespierre \
1. Voir Biographie universelle (Michaud), nouvelle édition, t. XX,
p. 572.
2. M. de Berny était de la plus ancienne noblesse. « Sa
famille primitive, les de Bernez, nous écrit M. Arthur Rhoné, est
originaire de Vigon, en Piémont, et remonte au xia siècle. Une
branche de cette famille émigra en Picardie où le nom se
transforma en de Berny. Au commencement du xvie siècle, les
deux branches se fondirent par un mariage et désormais la
famille prit le nom de Bernez de Berny, avec le titre de comte
et les armoiries réunies des deux branches.
« Je possède ces armoiries dorées et enluminées par les des-
sinateurs de la fonderie. Alexandre [de Berny] m'a prêté pen-
dant assez longtemps ses titres de noblesse. A sa mort, je les
ai fait réunir et porter au Cabinet des titres de la Bibliothèque
nationale où on peut les consulter. »
Les armes de Bernez de Berny sont : D'azur à tro's bandes de
gueules, celle du milieu chargée de trois roses d'or, et les deux
autres de deux roses du même.
3. Voir Appendice II, pièces not 8 et 9.
DILECTA. 77
De ce mariage, M""" de Berny n'eul pas moins
de neuf enfants1. Cependant, 1<* ménage ne fui
pas toujours heureux. M'n<' de Berny étail une
femme instruite, intelligente, sentimentale; le
mari était, dit-on, capricieux et atrabilaire.
M"18 de Berny paraît avoir réalisé assez bien ce
type, célèbre alors, de la « femme incomprise ».
Une communication obligeante nous permet
de publier son portrait; elle était iine, souple,
l'air langoureux et volontaire pourtant. Quelque
chose rappelle, en elle, l'origine allemande : elle
aussi, est une étrangère. Gomment ne pas remar-
quer la douceur pressante du regard, et le sou-
rire voluptueux des lèvres?
De son enfance passée à la cour, elle tenait
un esprit cultivé, ouvert, un sens psychologique
très fin, un art accompli dans la conduite de la
vie, de la gaieté, de la vivacité, du scepticisme.
1. Un <• Recueil de pièces relatives à la famille de Berny
(xine-xixe siècles) », conservé à la Bibliothèque nationale, Mss.
Nouv. acq. franc, 22362, nous fournit les dates de naissance de
ces enfants :
Ie Emilie-Gabriel (sic), née le 20 janvier 1794, décédée après
le mois de mai 1851. — 2° Augustine-Jeannc-Antonette, née
le 10 avril 1797, décédée le 9 novembre 1850. — 3° Louis-Adrien-
Jules, né le 9 septembre 1799, décédé le 3 novembre 1814. —
4* Jeanne- Augus Une- Aimée, née le 6 mai 1801, décédée le
8 mars 1816. — 5° Louise- Emmanuelle, née le 28 juin 1800, dé-
cédée le 11 juillet 1834. — 6° Lucien-Charles Alexandre, né le
13 février 1809, décédé le 15 juin 1882. — 7° Armand- Marie, né
le 2 octobre 1811, décédé le 23 novembre 1835. — 8° Laure-
Alexandrine, née en 1813, décédée après le 15 mai 1851. —
9° Antoine-Ange, né le 13 février 1815, décédé le 4 janvier 1841.
78 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Les temps où elle avait vécu lui avaient appris,
comme à tant d'autres, la morale du « Point de
lendemain ». Balzac, tout enfiévré d'un amour
d'enfant, nous révèle, cependant, par ses fureurs
jalouses, qu'elle avait eu avant lui, un amant.
La première jeunesse était passée. L'âge
venait. C'est alors qu'elle vit Balzac, camarade
d'un de ses enfants. Elle découvrit, elle admira
cette jeune et puissante nature. Elle était mariée
depuis trente ans; elle avait quarante-cinq ans,
lui vingt-trois. Malgré de tels obstacles, les
deux existences se rapprochèrent, et « la femme
de quarante ans » devint pour Balzac, l'amie et
la compagne qui devait lui apprendre la vie.
11 est facile de deviner maintenant quelle
influence dut exercer, sur l'imagination du
jeune romancier, la femme, belle encore, qui se
présentait à lui, accompagnée de l'admirable
cortège de souvenirs que nous venons de
rappeler.
Filleule du roi et filleule de la reine, belle-fille
du chevalier de Jarjayes, élevée dans les cercles
intimes, témoin des dernières fêtes et des pre-
mières douleurs, ayant ressenti le choc de toutes
les grandes crises, confidente des complots,
dépositaire des secrets, ayant eu dans les mains
les lettres, les anneaux, les mèches de cheveux.
DILECÏA. 7!>
que d'événements dans une telle vie! Que d'é-
motions dans ce cœur blessé, quels drames lus
el devinés dans ee regard déjà lointain! Quel
livre ouvert que celle mémoire vivante, el avec'
quelle passion le jeune interrogateur de la vie
ne devait-il pas le feuilleter!
Il trouvait la les anecdotes inconnues, les
laits typiques, les desseins ignorés, les détails
révélateurs. C'était « l'envers de l'histoire con-
temporaine » ; c'étaient les grands complots,
tes Chouans, Madame de la Chanterie, Un Épisode
sous la Terreur.
Madame de Berny savait tout par le menu. Et
sa mère, la femme de chambre de la reine, la
veuve du harpiste, Mmc de Jarjayes , vivait
encore, elle qui avait été de tout ! Elle ne mourut
qu'en 18371.
C'était donc un monde qu'on eût cru disparu
et qui était là, survivant. Et ce passé auquel on
osait à peine faire allusion, tant son souvenir
éveillait de cuisantes douleurs, il était là ! Ces
secrets qu'on disait à voix basse, dans les tête-
à-tête aux portes closes et en ces heures rares
où l'âme s'ouvre et se livre, on allait les enten-
dre, tout frémissantset vivants, sur cette bouche
délicieuse encore et encore prête aux baisers.
1. Voir Mémoires inédits de Paul Lacroix, dans Le Livre, 1882 ,
p. 271.
BO LA JEUNESSE DE BALZAC.
De tout ce qui avait été ces joies, ces fêtes, ce
deuil, ces larmes, quelque chose restait. Un
sentiment avait plané au-dessus des tempêtes,
franchi les révolutions, attendu et retrouvé son
heure : c'était la fidélité à la cause royale ou,
mieux, c'était la Fidélité au petit groupe qui
avait été admis, jadis, dans les intimités et qui
avait su.
Après l'orage, ceux qui avaient survécu
s'étaient recherchés et s'étaient rapprochés.
Entre ceux-là (combien rares maintenant!),
c'était à la vie à la mort.
Or, voilà l'initiation que la fille de la femme
de chambre de la reine, la belle-fille du cheva-
lier de Jarjayes, la prisonnière des Madelon-
nettes pouvait transmettre à son jeune disciple.
On a cherché les origines du royalisme de
Balzac. On s'est demandé où il avait connu ces
admirables figures de grandes dames qui appa-
raissent dans son œuvre. On s'est demandé où
il avait recueilli ces principes de la pure doc-
trine qu'il développe si souvent et qui étonnent
parfois sous la plume du roturier Baissa, petit-
fils des paysans de Nougarié, en Albigeois, et
dont les tendances eussent été, plutôt, révolu-
tionnaires et bonapartistes.
Le secret est là. Le royalisme de Balzac, ses
DILECTA. xi
prétentions nobiliaires ', ses relations avec un
monde où il ne paraissait pas appelé à vivre,
ne les doit-il pas, en grande partie, è l'affection,
aux directions de l'amie qui veilla sur sa
jeunesse et guida sa maturité?
Du moins, on peut relever ici encore de pré-
cieux indices et de curieux rapprochements.
Ouel est le grand patron politique du roman-
cier, le chef dont il se réclame, l'homme dont il
vante1, sans cesse, l'autorité et les lumières?
c'est le duc de Fitz-James. C'est avec le duc de
Fitz-James qu'il devait faire son voyage d'Italie,
en 1833: « Et moi aussi j'irai à Naples... Cette
1. Le père de Balzac avait, avant son fils, des prétentions à
la noblesse. Un document, que nous avons sous les yeux, en
fournit la preuve. En 1821, Bernard-François Balzac mariait sa
fille Laurence ; pour annoncer ce mariage à ses relations, il fit
imprimer deux types de billets de faire-part. L'un est ainsi
libellé :
. M
« Mr. de Balzac, ancien Secrétaire au Conseil du Roi, ex-
Directeur des vivres de la première Division Militaire, et Mme de
Balzac ont l'honneur de vous faire part du Mariage de M,,e Lau-
rence de Balzac, leur Fille, avec Monsieur Armand-Désiré
Michaut de Saint-Pierre de Montzaigle. »
L'autre est ainsi rédigé :
« M
« Monsieur Balzac, ancien Secrétaire au Conseil du Roi, ex-
Directeur des vivres de la première Division Militaire, et Ma-
dame Balzac, ont l'honneur de vous faire part du mariage de
Mademoiselle Laurence Balzac, leur Fille, avec Monsieur
Armand-Désiré Michaut de Saint-Pierre de Montzaigle. »
Dans l'acte de mariage, en date du 1er septembre 1821, la
mariée est dénommée : Laurence Balzac.
G
82 LA JEUNESSE DE BALZAC.
année, vers le mois de décembre, il y aura là
des âmes d'élite qui doivent s'y réunir et, si vous
parcourez ce pays à cette époque, grande sera
ma joie de vous y voir. J'ai dû y aller avec
M. le duc de Fitz-James et Mme la duchesse
de Castries, mais les ennuis de la vie littéraire
m'ont rappelé dans le grand bagne de Paris, où
je suis trop souvent cloué sur un banc de
forçat1. » Les « âmes d'élite », voilà le petit
groupe !
C'est le duc de Fitz-James qui, en 1832, avait
fait entrer Balzac au Rénovateur, qui le chargea
d'écrire une sorte de programme du parti
royaliste et qui, en 1834, voulut, avec Berryer,
faire de Balzac un député2. C'est pour complaire
1. C'est d'une lettre adressée par Balzac à M. le docteur Mé-
nière qu'est extrait ce passage sur le voyage projeté à Naples.
Elle a été publiée dans La Captivité de Madame la duchesse de
Berry à Blaye, 1833. Journal du docteur P. Minière, médecin en-
voyé par le gouvernement auprès de la princesse, publié par son
fils, le docteur E. Ménière, avec deux lettres inédites de. Balzac et
du maréchal Bugeaud. Paris, Calmann Lévy, 1882, 2 vol. in-8, t. I,
p. 531.
Voir aussi Œuvres complètes, t. XXIV. Correspondance, p. 1 \'l
(lettre LXXXVII, à Mme Laure Surville, datée d'Aix, 15 septembre
1832);p.l40(lettreLXXXIX,à M™ de Balzac, datée d'Aix, 23 sep-
tembre 1832) ; p. 158 (lettre XCIV, à M»e de Balzac, datée île
Genève, octobre 1832). — Le duc Edouard de Fitz-James, né A
Versailles, en 1770, et mort en novembre 1838. était le petit-fils
du maréchal. Ancien aide de camp du maréchal de Castries,
pair de France après la Bévolution de 1830. il fut élu député de
Toulouse en 1834. Cf. Biographie universelle [Michaud), XIV, p. 17 1 .
2. « MM. Berryer et Fitz-James veulent me faire nommer
député ; mais ils échoueront. Ce sera une question décidée
dans un mois; vous saurez cela sans doute à Trieste. Mais, si
DILEC1 \. 83
à « ces amis » que Balzac publie une admirable
page sur la duchesse d'Angouléme où l'on
dirait que l'on sent l'inspiration directe d<>
« l'amié » pins intime encore1. Enfin, c'est à
propos d'un discours où le duc de Fi tz- James,
dès 1836, céclame l'alliance russe, que Balzac
écrit c<4s lignes : « Depuis longtemps, la tri-
hune n'avait entendu de discours plus complet
que ne Ta été celui du duc de Fitz-James. Ce
sont de ces grands jalons posés parles hommes
supérieurs, auxquels il faut un jour revenir et
dont on se repent de n'avoir pas suivi les
indications2.
Ce chef du parti, ce patron, ce directeur de
la conscience politique du débutant, ce duc
de Fitz-James n'est autre que le neveu de la
marraine de Mme de Berny.
Si Balzac est entré en relation avec de
j'étais nommé, je me ferais ordonner les eaux, car le porte-
feuille de premier ministre ne me ferait pas renoncer au cher
usage du premier moment de liberté que j'aurai su conquérir
dans ma vie. Permettez-moi de laisser cela encore... » Collec-
tion Lovenjovl, ms. A 301, fol. 169 v°. — Lettres à V Étrangère,
p. 162 (lettre LXI, 3 juin 1834).
1. Voir Œuvres complètes, t. XXIII, pp. 353-358 : La vie d'une
femme. Parmi les écrits historiques et politiques d'Honoré de
Balzac recueillis dans le tome XXIII des Œuvres complètes
(œuvres diverses), nous citerons : Du droit d'aînesse, p. 1 ; Lne
famille politique, p. 217; De l'indifférence en matière politique,
p. 237 ; Enquête sur la politique des deux ministères, p. 241 ; Sur la
situation du parti royaliste, p. 359; La France et l'Étranger
p. 579; Profession de foi politique, p. 787, etc., etc.
2. Œuvres complètes, t. XXIII, p. 490.
s; LA JEUNESSE DE BALZAC.
tels personnages, avec le prince Christian de
Montmorency qui lui écrivait en 1832 et faisait
des démarches pour soutenir sa candidature1,
avec les Duras, les Biencourt, c'est probable-
ment à son amie qu'il dut, de si bonne heure,
de si hautes relations2.
C'est par elle qu'il eut une ouverture sur ces
hautes demeures si fermées du faubourg Saint-
Germain et, pour hasarder une dernière hypo-
thèse, c'est par elle que l'étudiant besogneux
du quartier de l'Arsenal et le pauvre imprimeur
1. Sur les opinions royalistes de Balzac, consulter notam-
ment l'intéressante étude de M. Edmond Biré : Honoré de
Balzac. Paris, H. Champion, 1897, in-8, et un article de M. Ga-
briel Ferry, intitulé : Balzac candidat à la députation, ses idées
politiques, 1831-1848, inséré dans la Bévue politique et parlemen-
taire du 10 décembre 1901. La lettre adressée à M. le docteur
Ménière, que nous avons citée note 1, p. 82, a aussi une grande
importance au point de vue des convictions monarchistes de
Balzac. Ajoutons que Mme de Berny eut à regretter d'avoir lancé
Balzac dans ce monde quand il y rencontra des femmes qui de-
vinrent ses rivales. Voir, p. '250, une leltre de M"* de Berny.
2. M. Edmond Biré, dans son Honoré de Balzac, p. 145, publie
la lettre du prince de Montmorency qui lui a été communiquée
par le vicomte de Spoelberch de Lovenjoul. Le prince de Mont-
morency dont il est ici question est, d'après les renseigne-
ments que nous donne obligeamment M. Frédéric Masson.
Anne-Louis Christian, prince de Montmorency, grand d'Es-
pagne, né le 27 mai 1761), troisième fds de Anne-Léon, due de
Montmorency, et de Anne-Charlotte de Montmorency-Luxem-
bourg, sa seconde femme. Marié le 6 septembre 1797 à Marie-
Henriette de Becdelièvre de Cany, maréchal de camp en 1815.
pair de France en 1827, il mourut le 25 décembre 1844. De lui
viennent mesdames de Cossé-Brissac, de la Châtre et de Bien-
court. Son fds, mort en 1853 sans alliance, s'est appelé le
prince de Robecq. Lui-même, bien que ne s'étant appelé que
le prince de Montmorency, était, en réalité, le prince de Tan-
carville et était, en 1789, titré comte de Tancarville.
DILECTA. 85
de la rue <l<\s Marais put, dès sa jeunesse, et
alors qu'il n'avait ni célébrité, ni relations,
entrevoir el dévoiler au public, avec une réalité
si palpitante, les drames du grand monde et
« les secrets de la princesse de Cadignan ».
Il nous esl possible aujourd'hui de lever tous
les voiles grâce à notre ami regretté et nous
pourrions presque dire notre collaborateur, le
vicomte de Spoelberch de Lovenjoul. Il n'a pas
eu le loisir de publier lui-môme les documents
si précieux qu'il avait réunis sur cette page,
maintenant ouverte, de la vie du grand roman-
cier. Nous les publions plus loin en son nom.
Ajoutons auparavant, car c'est là ce qui im-
porte, que l'influence littéraire de Mme de Berny
sur le génie de son jeune ami paraît avoir été
réelle et considérable. Elle avait une large ins-
truction, un lact sûr, une grande expérience de
la vie. Balzac reçut d'elle des leçons inoubliables.
Précisons encore : Balzac dédie à Mme de Berny
son roman Louis Lambert, qui n'était qu'une
sorte d'autobiographie. Voici la délicieuse et
émouvante lettre qu'elle lui écrivit à ce sujet :
[Lundi] 9 [juillet 1832.]
Quel lourd et pesant fardeau tu me donnes à por-
ter, ami chéri ! Quoi ! ne t'en rapporter qu'à moi pour
86 LA JEUNESSE DE BALZAC.
ton L[ouis] L[amberf]1, pour une œuvre à laquelle tu
mets tant de prix! Mais c'est une folie, mon bien cher,
et si tu crois une femme capable de t'aider par ses
jugemens, pourquoi ne consultes-tu pas Mde Caraud
(sic) ? Je te dis, en toute vérité, que, par les lettres que
tu m'as lues d'elle, et par ce que tu m'en as dit, je la
crois plus capable que moi, qui n'ai, comme tu sais, que
mon sentiment, guidé par l'instinct du cœur.
Faut-il donc, Mr Minet, pour pouvoir profitter des
conseils d'une femme que cette femme nous appar-
tienne? Ce génie- femme dont l 'absence, dites-vous,
vous jette dans une petite folie, s'évanouit-il donc tout à
fait, quand les sens ne sont plus près de lui? Ah! mon
René, quel arrêt pour ta nouvelle Eve1!
A propos de René, ne voilà-t-il pas ce nom qui se
trouve écrit par nous deux dans le même moment, et
tu veux que le génie ne soit plus là? Oh oui, tu as
mieux dit ailleurs, nous sommes la même substance, et
voilà pourquoi la plus légère parcelle séparée entre
nous produit un si vif déchirement. Oh ! comme j'ai
savouré ce bon et long et voluptueux bec que ttu m'en-
1. La Notice biographique sur Louis Lambert, qui porte la dédi-
cace : Et nunc et semper dilectx dicatum, datée du château de
Sache, juin-juillet 1832, parut, pour la première fois, datée et
dédiée en octobre 1832, dans les Nouveaux Contes philosophiques
(Paris, Gosselin, 1832, in-8). En 1833, le livre parut séparément,
chez le même éditeur, en un volume in-18, intitulé : Histoire
intellectuelle de Louis Lambert. Réimprimé dans Le Livre mys-
tique (Paris, Werdet, 1835, 2 vol. in-8), chez Charpentier, en 1842,
puis dans les Études philosophiques (lre édition de la Comédie
humaine, t. XVI), Louis Lambert a définitivement pris place dans
le tome XVII des Œuvres complètes de H. de Balzac (Paris. Mi-
chel Lévy frères, 1870, in-8). Voir Histoire des œuvirs de H. de
Balzac, par le Ve de Spoelberch de Lovenjoul, 5e édition.
pp. 190-191.
2. Peut-être MBe Hanska, dont Balzac avait reçu la première
lettre le 28 février 1832. Il devait, toutefois, ignorer son pré-
nom : Éveline.
DILECTA. *1
voies! Ami, à cette distance, l'enivrement qu'il cause
n'est pas dangereux, et l'on peut s'y livrer; aussi je te
le renvoie doublement chargé de tout co que tu y as
uns.
Je veux. M1, savoir ce que vous avez écrit après le
mol : dame, il m'a été impossible <le déchiffrer ce mot
qui m'intéresse; vous le transcrirez lisiblement, s. v. p.,
et me renverrez mon petit morceau de papier, j'y tiens,
attendu qu'il fail partie d'une collection de laquelle je
n'ai pas encore égaré une seule syllabe1.
Tu le vois bien que je ne suis que femme. Cette
lettre était destinée à ne te parler que de ton L[ouis L[am-
bert], je voulais obéir à tes ordres, et m'afïubler du
masque de critique, bah! j'ai enfilé une toute autre
route, et je m'y trouvais bien mieux que sur le sol
rocailleux où tu veux me faire marcher. Tune sais donc
pas que je m'y blesserai, non les pieds, mais le cœur,
car il s'agit de te dire des vérités dures, puisque tu
veux les entendre; mais songe que je puis ne pas avoir
le sens commun, qu'un avis donné par sentiment sur un
objet d'art peut ne pas avoir le sens commun et que là
où ma vue débile n'apperçoit rien, un œil exercé y verra
d'admirables beautés !
Je viens de relire ce que j'ai de L[ouis] L[ambert),
c'est-à-dire le tout, moins la 3e et 4e feuille; après avoir
disséqué cette œuvre, je viens de la revoir vivante, et
je crois que tu as entrepris une œuvre impossible. Ce
i. Il se trouve joint, à cette page, un minuscule fragment de
la lettre même de Balzac à laquelle répond celle-ci. Voici ce
qu'il contient : « Faut-il donc aller à la dame d'Aix? », c'est-
à-dire, ainsi qu'il le fît en effet, aller retrouver la marquise de
Castries qui l'attendait à Aix-les-Bains. — Malgré la demande
de sa correspondante, Balzac ne lui retourna donc jamais cette
petite relique à laquelle elle semblait attacher tant de prix.
Il i» msa. probablement, que la fine mouche, un peu jalouse,
n'avait pas voulu lire ou comprendre. [S. L.]
«8 LA JEUNESSE DE BALZAC.
qui me console, c'est que le public ne verra pas ce que
tu as espéré en faire, et ce qui est la seule chose que je
trouve impossible, tu veux faire le fait vrai, le saisir
dans son action même. Si le public devinait cela, tu
serais perdu, car ce serait vouloir poser une borne qu'il
n'est permis qu'à Dieu de toucher. Goethe et Byronont
admirablement peint les désirs d'un esprit supérieur;
en les lisant, on les grandit de tout cet espace qu'ils
ont apperçu ; on admire la portée de leur vue ; on vou-
drait leur donner son âme pour aider la leur à franchir
la distance qui les sépare de ce but où ils aspirent.
Mais, si un auteur vient me dire qu'il est parvenu à ce
but, tel grand qu'il soit, je ne vois plus en lui que le
présomptueux, sa vanité me choque et je le rapetisse
de toute la hauteur où il a voulu s'élever. La perfection
est pour l'homme quelque chose d'autant plus précieux
qu'elle est toujours accompagnée de Y espérance; si un
Dieu venait la lui offrir, peut-être n'en voudrait-il plus;
mais bien certainement il croira toujours de mauvais
aloi, ou mieux encore il ne croira pas à celle qu'un
homme viendra lui offrir, et il jettera sur cet homme
un juste ridicule. Voilà, chéri, mon avis, et d'après
lequel je te supplierais de retrancher de ton L[ambert\
tout ce qui pourrait faire deviner ces singulières pen-
sées, dont je voudrais bien être seule dépositaire (et que
j'ai transcrites de tes lettres). Ainsi ces phrases : « l'ad-
mirable combat de la pensée, arrivée à sa plus grand**
force, à sa plus vaste expression »... « le monde moral,
dont il avait reculé les limites pour lui...* ne peuvent
se tolérer, surtout les premières, car, enfin, reculer des
limites n'est pas atteindre un but, et celle-ci peut à la
rigueur passer.
Oui, bien certainement, je blâme la collusion, car
elle serait à ton préjudice; fais, mon chéri, que toute la
foule t'apperçoive de partout, par la hauteur où tu te
seras placé, mais ne lui crie pas de t'admirer, car, de
DILECTA. *'■'
toutes |>;iris, les verres les plus grossissants seraient à
l'instant dirigés sur toi, et <|n<^ devient le j>Ius délicieux
<>l>jH vu au microscope
i v
Si l'on se souvient <Ie la confuse philosophie
et du prétentieux grossissement qui gâtent cer-
taines pages de Louis Lambert, tel qu'il a été pu-
blié, même après les critiques de M™6 de Berny,
celles-ci paraissent singulièrement sages, har-
dies et justes.
Mais avec quel art, cette femme qui adorait ce
o Monsieur Minet » glisse, dans ses caresses,
cette forte leçon! Avec quelle prudence elle pro-
cède ! Comme elle soigne ses travaux d'approche !
Elle arrive au but, cependant, et elle dit ce
qu'elle pense. Elle avertit, en femme avisée et en
penseur éclairé, le jeune orgueilleux. Elle lui
signale les écueils où, plus d'une fois, il faillit
sombrer : la vanité littéraire, l'essoufflante pré-
tention philosophique, l'ambition maladive de
« faire le Dieu ».
Qu'une femme de sens et de tact ait pu voir
ainsi jusqu'au fond de l'âme qui s'ouvrait devant
elle, à cela rien détonnant; mais le miracle est
dans le fait qu'ayant vu, elle ait parlé.
Franchise, courage singuliers chez une
1. Cette lettre ne porte pas d'adresse, niais au moment où
elle a été écrite, Balzac se trouvait chez Mme Zulma Carraud, à
Angoulème. {Collection Spoelberch de Lovevjoul, ms. A 291 ,
fol. 2'.).)
90 LA JEUNESSE DE BALZAC.
femme que tout menace et qui ne craint pas,
pour corriger et grandir l'objet de l'amour, de
risquer l'amour lui-même.
Ici, le sentiment complexe et parfois inquié-
tant s'élargit et s'ennoblit jusqu'à devenir ma-
ternel.
Et comme il s'élève encore dans la phrase
triomphale de la fin : « Fais, mon chéri, que
toute la foule t'apperçoive de partout, par la
hauteur où tu te seras placé! »
Cette page est décisive, Madame de Berny fut
une éducatrice1.
1. Voir plus loin les lettres de Balzac et celles de Mme de
Berny, publiées, pour la première fois, dans le présent vo-
lume.
LES AFFAIRES
L'association entre Balzac et Barbier pour
l'exploitation du fonds d'imprimerie de la rue
des Marais- Saint- Germain dura depuis le
1er juin 1826 jusqu'au 3 février 1828\
M. d'Àssonvillez, à qui Balzac devait déjà une
somme assez ronde, avait pris ses précautions.
Par acte passé le 16 mars 1826, quelques
semaines avant la prise de possession de la
maison par les deux associés, il s'était fait céder
par eux, à titre de nantissement, la propriété
du fonds et de tout le matériel. Si bien que
Balzac et Barbier étaient, tout simplement, les
locataires de M. d'Assonvillez. Ils lui devaient,
de ce chef, un loyer annuel de cinq cent vingt-
huit francs quatre-vingt-huit centimes. Nou-
velle charge ! On peut se demander comment
des gens raisonnables, couverts de dettes par
ailleurs, avaient pu l'assumer.
1. Voir Appendice VI, pièces n0i 62 et 66.
92 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Dans l'association, Barbier s'occupait de la
partie technique; Balzac avait gardé la signa-
ture ; en outre, il s'était réservé toute la partie
commerciale, la tenue de la caisse et la compta-
bilité.
Quoique Balzac eût alors vingt-sept ans, qu'il
eût passé plusieurs années chez un notaire et
un avoué, l'examen des papiers de la maison
d'imprimerie suffit pour prouver qu'il fut, dans
cette circonstance, ce qu'il demeura toute sa
vie, le plus déplorable des hommes d'affaires.
Dans ses romans, il jouait admirablement avec
les chiffres: dans la réalité, il était incapable de
tenir un compte.
Les faits parlent trop haut : en moins de deux
ans, la maison se trouva débitrice d'une somme
d'environ 113 000 francs, en présence d'un actif
évalué à 67000 francs.
La légèreté qui avait présidé à l'installation
de la maison se manifesta dans l'exploitation.
Elle se résume endeuxmots : désordre, coulage.
Les associés s'étaient établis avec des dettes.
Balzac avait déjà des engagements pour plus de
70 000 francs ' quand il vint s'installer rue des
Marais. Son père, il est vrai, lui aurait avancé,
d'après ce que dit Mmc Surville, une somme de
i. Voir ci-dessus, p. 41.
LES AFF AIRES. W
30000 francs. Mais il ne semble p;is que cette
somme ail été réellement versée; car, nous
voyons que, le c2.'l août 1826, Balzac père
répond, pour son fils, auprès dune amie de la
famille, Mmo Delannoy: « Balzac (il s'agil du
père) répond à Mmc de Lanoy (sic) de tout ce
qu'elle pourra faire pour son (ils, à quelle
somme que cela puisse se monter, et de la rem-
bourser si l'emprunteur ne satisfait pas à ses
engagements. Elle comprendra mieux que je
pourais (sic) l'écrire que ceci doit rester dans
le plus absolu secret. — Versailles, 23 août
1826\ »
Donc, de ce côté, Balzac, le fils, devait
encore. Il n'avait pas reçu de l'argent comptant,
et son père ne lui avait donné rien autre chose
que sa garantie.
Cependant, l'affaire du Molière et du La Fon-
taine était une perte sèche. Les livraisons ne se
vendaient pas. On devait de l'argent à Canel.
1. Madame Joséphine Delannoy, née Doumerc. C'est à elle
que Balzac a dédié La Recherche de l'absolu (juin-septembre 1834).
M. Hanotaux possède un exemplaire des Romans et contes philo-
sophiques, seconde édition. Paris, Charles Gosselin, 1851, in-8°,
qui porte, sur le faux-titre du deuxième volume, la dédicace
suivante : Offert à Madame Delannoy comme témoignage de recon-
naissance de l'auteur: Balzac. — Balzac écrit à sa sœur, en sep-
tembre 1835 : « Dablin a été récemment gracieux, obligeant et
ami, comme l'est Mm* Delannoy, Borget, madame Carraud ou
Y Aima soror. » (Collection Lovenjoul, ms. A 276, fol. 221. —
Œuvres complètes, t. XXIV, Correspondance, p. 224.)
94 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Celui-ci, qui était sur le point de tomber en
faillite, devenaitexigeant. Peut-être Mmede Berny
avait-elle souscrit les billets sans l'aveu de son
mari. Il fallait de l'argent à tout prix.
Balzac croit se tirer d'affaire en cédant tout le
La Fontaine h un librairenommé Alexandre Bau-
douin. Il devient, alors, la victime d'une de ces
manœuvres que, par la suite, il s'entendra si
bien à raconter, et qui font tout le drame de
César Birotteau.
Balzac, on s'en souvient, avait acheté, en 1825,
à Canel le La Fontaine en feuilles, et, comme
nous l'avons vu, il avait payé Urbain Canel en
argent ou en billets souscrits par Mme de Berny.
Or, maintenant, que fait-il ? Il cède toute l'édition
du La Fontaine, en feuilles, non encore achevé,
à Alexandre Baudouin, en prenant l'engage-
ment de livrer l'ouvrage complet dans les deux
mois.
En échange, que va-t-il recevoir de Bau-
douin? D'abord, 2000 francs versés à Urbain
Canel. Et, pour le surplus, c'est-à-dire pour les
20000 fr. environ que représentent 2500 exem-
plaires à 8 francs le volume, Alexandre Bau-
douin lui écoule (sans garantie d'aucune sorte) :
1° une créance sur le sieur Frémeau, libraire à
Reims, actuellement en état de faillite, créance
montant à la somme de 28840 francs; 2° une
LES AFFAIRES. M
autre créance de 1 650 francs sur le sieur Dabo
jeune, également en état de faillite; 3° une autre
créance de 1 335 francs sur une maison Bou-
land el Tardieu qui ne paraît pas valoir beau-
coup plus '.
Nanti de ces rossignols, le pauvre Balzac se
met en chasse pour obtenir pied ou aile des
débiteurs du compère Alexandre Baudouin.
Finalement, après des frais sans nombre et un
échange de papiers — où le papier timbré
domine, — le libraire de Reims, Frémcau, s'ar-
range pour glisser à Balzac, en paiement de
ses 28 000 francs, tout un stock de livres
faisant le fonds de boutique de sa librairie de
province : c'est-à-dire les Œuvres complètes de
Gesmer en nombre, les Œuvres complètes de Flo-
rian, les Œuvres de Gilbert, et puis des Molière,
des Fénelon, des Condillac, des Pausanias, des
Colardeau, des Colin d'Harleville et des Parny !
Trop heureux que, dans cette étonnante nomen-
clature, il ne se trouve pas des squelettes
anatomiques ou des lézards empaillés !
Balzac accepte tout, et, après ce détour aussi
imprévu que compliqué, il se trouve à la tête
d'un lot de vieux papier noirci, alors qu'au
début de l'affaire, pour un premier lot de papier
1. Voir Appendice V, pièce n° 36.
96 LA JEUNESSE DE BALZAC.
noirci, il avait déjà donné sa signature et son
bel argent comptant1.
Ainsi menée, la maison était vouée à une
ruine prochaine. La clientèle ne venait pas. Une
maison d'imprimerie ne s'achalande pas du jour
au lendemain. L'affaire Laurens aîné était bien
peu de chose quand celui-ci cédait son fonds.
Balzac comptait sur ses propres relations. Il
dut en rabattre.
L'un de nous, M. Georges yicaire, a pris la
peine de dresser la liste des impressions de
Balzac mentionnées au Journal de la Librairie
et ailleurs. Nous avons réuni un assez grand
nombre de ces épaves. Tout compte fait, on
arrive à un total d'environ cent cinquante arti-
cles, ce qui n'est guère, en deux ans, si l'on fait
remarquer que, parmi ces travaux, il y en a la
moitié au moins qui sont de très peu d'impor-
tance : de simples placards, des brochures, des
factums, des livraisons2.
La première des productions qui sort des
presses de Balzac est un prospectus de phar-
macie : Pilules anti-glaireuses de longue vie. ou
Grains de vie, de Cure, pharmacien à Paris, rue
Saint-Antoine, n° 77, in-8 d'un quart de feuille,
daté du 29 juillet 1826. C'est sur ce frêle esquif
1. Voir Appendice V, pièces nM 39 à 42.
2. Voir Appendice IX.
LES AFFAIRES. W
que s*embarque la gloire future <ln rival imagi-
naire desEstienne et des Didot. Et, sauf erreur,
la dernière cartouche est tirée, le 1 octobre i 828
avec la Princesse Christine, de Henri Zschokke.
Cependant, dans l'intervalle, quelques livres
intéressants et curieux onl étélivréspar la mai-
son Balzac :
Pour Baudouin, Balzac entreprit une série de
petits classiques in-32, imprimés dans son
fameux caractère Mignone, si lin qu'il casse les
yeux ; il est vrai qu'en raison de leur pelilformat,
ces livrets minuscules peuvent se glisser dans
la poche : ce sont les œuvres de Volney, de
Ducis, de La Harpe, de Colardeau, les contes de
La Fontaine : on entreprend même les « Chan-
sons de Béranger1 ».
Ganel fait imprimer, par Balzac, nombre de
livres dont les titres évoquent toute l'époque
romantique : Leduc de Guise à Naples, La Prin-
cesse Christine, Le Grison ou la Côte-aux-Fées,
Myriologies ou chants funèbres et élégiaques d'un
1. Chansons de P.-J. de Béranger. Paris, Baudouin frères, rue
de Vaugirard, n° 17, 1829. In-32 de 2 ff et 484 pp.
Cette édition, bien que datée de 1829, est enregistrée dans la
Bibliographie de la France du 22 novembre 1828, n° 6773 ; elle
porte comme nom d'imprimeur celui de Barbier seul. La com-
position en caractères Mignone, de près de 300 pages, a
dû exiger beaucoup de temps et, par conséquent, commencer
avant que Balzac eût quitté son imprimerie. Or, un ouvrage
enregistré dans la Bibliographie de la France du 4 octobre 1828.
La Princesse Christine, porte encore le nom de Balzac.
7
98 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Épirote, Tableaux poétiques par le comte Jules de
Rességuier, les Annales romantiques pour 1828,
et surtout un charmant et précieux livre, fort
bien imprimé, en vérité, et orné de deux gra-
vures en couleur par Henry Monnier : Scènes con-
temporaines laissées par feue Madame la vicomtesse
de Chamilly ; seconde édition augmentée du Dix-huit
brumaire. Paris, Urbain Canel, 1828.
Voici encore les Proverbes romantiques par
Romieu, imprimés pour Ladvocat; voici un gros
livre imprimé pour Baudouin : Manuel géographi-
que, historique et statistique des départements de la
France et de ses colonies; voici des actualités :
La Petite Dragonnade du quai des Orfèvres, Le
Féroce à Montrouge, le Testament des Ministres,
le Discours de la Girafe au chef des six Osages [ou
Indiens), YOde sur la nouvelle loi contre la liberté
de la Presse.
Marco de Saint-Hilaire fait imprimer par
Balzac une série de ses fantaisies dans le goût
du temps : L'Art de mettre sa cravate, L'Art de
payer ses dettes et de satisfaire ses créanciers sans
débourser un sou; on réimprime, de Mme de Genlis,
le La Bruyère des domestiques.
Dans ce même genre, Balzac lui-même porto
de l'eau au moulin et on lui attribue le Petit
dictionnaire critique et anecdotique des enseignes de
Paris, par un Batteur de paré.
LES AFFAIRES. 99
Voici deux livres dignes de survivre : les
Mélanges historiques et littéraires de .1/. Villemain,
imprimés pour Ladvocat; et La Jaquerie, scènes
féodales, suivies de la Famille de Carvajal, drame,
par l'auteur du Théâtre de Clara Gazul (c'est-à-
dire Mérimée), imprimée très élégamment pour
Brissot-Thivars, en 1828.
Deux entreprises purement commerciales
mais plus importantes fournissent un fonds
de travail courant à l'imprimerie : c'est la col-
lection des Mémoires sur la Révolution, de Bar-
rière, pour laquelle Balzac et Barbier im-
priment : les Mémoires du baron de Besenval,
les Mémoires de Madame Roland, les Mémoires du
marquis de Bouille, les Mémoires de Charles Bar-
baroux ; et, d'autre part, le vaste recueil du
Corps du droit français, pour Mal lier et Gie, dont
Balzac livre dix-neuf livraisons, du 9 février au
SOaoût 18281.
Malgré ces efforts constants, les affaires vont
mal. L'argent ne rentre pas. On est en discus-
sion avec les clients. Balzac ne connaît pas, lui-
même, exactement, les conditions dans les-
quelles il travaille. Il consent des réductions
impossibles. Les clients se renseignent, les
uns les autres, et refusent de payer si on ne
1. Voir Appendice IX.
100 LA JEUNESSE DE BALZAC.
leur accorde pas sur les factures des diminu-
tions énormes. C'est le gâchis1.
Qu'est-ce que fait Balzac? Déjà empêtré
dans la direction d'une affaire restreinte qui
tourne mal, il ne trouve rien de mieux que de
s'enfoncer davantage; il ne lui suffit plus
d'être éditeur et imprimeur : il devient main-
tenant fondeur de caractères. Au moment où
la ruine menace, Balzac, comme César Birot-
teau, croit que c'est le moment de frapper
un grand coup, et il ne songe qu'à entrer,
toute voile dehors, « dans la grande industrie
parisienne »\
Le feuilleton de la Bibliographie de la France
du 8 septembre 1827 avait annoncé la mise en
vente, après faillite et décès du sieur Gillé fils,
du fonds d'imprimeur-fondeur de caractères
exploité par lui, rue Garancière, n° 4. C'est tout
un attirail de matrices, de lettres, de carac-
tères, de moules, de gravures, etc. Le liquida-
teur de la faillite est un certain Laurent qui se
déclare domicilié rue des Marais-Saint-Ger-
main, n° 17, c'est-à-dire dans la même maison
que Balzac. En effet, dès le mois de juillet, ce
Laurent (Jean-François) s'était associé à Balzac
1. Voir Appendice VIII, pièce n° 80.
2. Voir Appendice VIL
LES AFFAIRES. 1<M
cl Barbier, en vue de se porter acquéreur de
l'entreprise (lillé1.
C'est ce qu'ils font le 18 et 1!) septembre. Ils
annoncent, le '2\) septembre 1827, par des avis
insérés au Journal de la Librairie, qu'ils ont
acquis, conjointement avec M. Dumont, pro-
priétaire-directeur de la fonderie typographique
royale de Bruxelles, le Couds de feu Gillé fils.
On va donc pouvoir faire des affaires en
grand.
En effet, le 6 décembre 1827, par une circu-
laire envoyéeà tous leurs clients, Laurent, Balzac
et Barbier annoncent qu'ils ont constitué une
société de douze années pour l'exploitation de la
fonderie de caractères d'imprimerie, la gravure
sur acier, sur cuivre et sur bois, la polytypie, etc.
A cette circulaire, ils joignent le curieux post-
scriptum suivant : « MM. Balzac et Barbier sai-
sissent cette occasion pour vous prévenir qu'ils
ont acheté de M. Pierre Durouchail la commu-
nication de ses procédés de Fontéréotypie*. La
Fontéréotypie est l'art d'obtenir les résultats de
la stéréotypie sans avoir besoin de la chaudière
à plonger les matrices ni de tourner, bizoter (sic)
et corriger les pages. » Cette notice particulière
paraît être l'explication de l'opinion générale-
1. Voir Appendice VII, pièce n° 07.
-. Voir Appendice VII, pièce n° 71.
102 LA JEUNESSE DE BALZAC.
ment répandue que Balzac fut l'inventeur d'un
procédé de clicherie.
Ceci donc se passe en décembre 1827. On
prépare un magnifique album in-folio oblong,
devant contenir le spécimen de tous les carac-
tères, vignettes et ornements typographiques de
la maison, les caractères depuis la fameuse
« Mignone » jusqu'au « Gros-Canon », les
Vignettes, les Tarots, les « Culs-de-Lampe du
Berquin1 », les sujets de mort, les signes du
Zodiaque et sujets mythologiques gravés au
trait. C'est là que le goût étriqué de l'époque se
révèle dans sa mièvre et courte invention.
Cet album si précieux et annoncé si solennel-
lement, on n'a même pas le temps de le finir.
Trois mois ne sont pas écoulés (trois mois alors
que l'on prévoyait douze années!), qu'un des
associés, Barbier, sentant probablement que la
barque fait eau de toutes parts, se retire.
C'est le prodrome de la débâcle. Peut-on
encore sauver la maison? A qui s'adresser?
Balzac n'a-t-il pas là, près de lui, l'amie qui
1. Voir Appendice IX, n° 158. — Le « Gros-Canon »
comme le « Petit-Canon » et le « Double-Canon » sont des
caractères pour affiches. — Voir Spécimen des divers caractères,
vignettes... de la fonderie de Laurent et de Berny... Paris, 1828.
in-fol. oblong, lre partie, pp. 19 à 25. Ce spécimen sort des
presses de Balzac. Voir dans ce spécimen, lre partie, les « Vi-
gnettes » de toutes sortes, pp. 76 à 85, et les « Tarots », pp. 86
et 87. Pour les « Culs-de-lampe du Berquin », les sujets de
mort, etc., voir le même ouvrage, 2* partie, pp. 1 à 86.
Li:s AFFAIRES. !°7'
l'a engagé, encouragé, soutenu? Elle veille; elle
sedévoue; et, par un acted'une hardiesse inouïe
après s'être fait donner une procuration géné-
rale par son mari, elle entre en nom, le 3 février
1828, dans l'association de Laurent et Balzac
pour la fonderie de caractères.
Ce sont encore les actes notariés qui nous
révèlent cette péripétie du drame intime : « Il y
a société entre les sieurs Jean-François Lau-
rent, Honoré Balzac et Madame de Berny pour
l'exploitation de la fonderie des caractères d'im-
primerie et de tout ce qui dépend de cette branche
de commerce. La société sera en nom collectif
à l'égard de MM. Laurent et Balzac et en com-
mandite seulement à l'égard de Madame de Ber-
ny. La durée de la société sera de douze ans1. »
Si Pergame eût pu être sauvée, c'est par cette
intervention suprême qu'elle l'eût été! L'apport
de Laurent, tout en matériel, est estimé 18000
francs. Balzac et Mme de Berny ont le leur,
<( tous deux ensemble », montant à la même
somme. La maison nouvelle représente donc un
capital de 36000 francs, où Mme de Berny
se trouve engagée pour 9000 francs. Balzac,
seul, garde encore la signature sociale.
1. Voir Appendice VII, pièce n° 73. C'est cet acte, dans lequel
figure Mrao de Berny (qui signe Hinner de Berny), qui nous a
mis sur la trace des relations de Balzac avec elle.
104 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Nouvelle insertion au Journal de la Librairie.
Dépôt légal des pièces de la société au greffe
du tribunal de commerce le 15 février 1828.
Ya-t-on marcher, cette fois?
Hélas non! tous les sacrifices ont été vains.
Les clients ne sont pas venus. Les affaires ne
vont plus du tout. Les ouvriers ne sont pas payés
et envoient du papier timbré. Les créanciers
assiègent la maison; et, avant même qu'on ait
pu tendre la voile, la fortune de Balzac, fondeur
de caractères, chavire comme celle de Balzac
éditeur et de Balzac imprimeur.
Le 16 avril 1828, c'est-à-dire après un nou-
veau laps de trois mois, la société Laurent et
Balzac est déclarée dissoute, et Laurent est
chargé de la liquidation.
En présence du gouffre, l'homme d'affaires
improvisé qu'est Balzac se sent pris de ver-
tige. Il crie au secours; la faillite le menace;
l'honneur du nom peut être compromis.
Il se retourne alors vers les siens; sa mère
supplie un cousin, M. Sédillot, de se mettre à la
tête de la manœuvre, de sauver, du moins, l'hon-
neur : « Je vous autorise, mon cher cousin,
à prendre tous les engagements qui vous paraî-
tront nécessaires pour terminer l'affaire de mon
fils aîné, comme vous le feriez pour vous-même ;
m'engageant à reconnaître tout ce que vous
LES AFFAIRES. Ut>
ferez, m'en rapportant entièrement à vous... etc.;
faites toul voire possible pour que nous évitions
que l'affaire arrive à la connaissance de mon
pauvre mari, faites valoir ses quatre-vingt-trois
ans, qu'il ne peut se déplacer, etc., etc.; j'ai une
procuration générale un peu ancienne, mais je
puis encore m'en servir pour signer, dans le cas,
comme autorisée. Evitons à ce bon père le
chagrin qu'il ressentirait de tout cela... Je m'en
rapporte à vous sur tout ce que vous ferez, je
vous le répète'. »
Cet appel est entendu et M. Sédillot, — homme
expérimenté et parent dévoué — opère, au
milieu des plus grandes difficultés, un véritable
sauvetage, en procédant à une liquidation qui
pèsera, cependant, sur toute la vie du fécond
romancier.
1. Voir Appendice VIII, pièces nos 78 et 79.
LA CATASTROPHE
M. Sédillot, sur la prière de Mrae Balzac mère,
se décide à prendre en mains la liquidation des
affaires de l'imprudent jeune homme. Tout d'a-
bord il obtient, de Mme Balzac, l'engagement de
faire les sacrifices nécessaires pour désinté-
resser les créanciers. Ensuite, il dresse un état
aussi complet que possible de la situation.
La troisième partie de l'opération consistera
à détacher Balzac des deux affaires distinctes
où il est engagé, celle de l'imprimerie et celle
de la fonderie de caractères, sans toutefois ame-
ner la ruine totale des deux entreprises.
Sur le premier point, on peut dire que l'inter-
vention de Mme Balzac dégage le présent et
sauve l'avenir.
La mère de Balzac, née Sallambier, pari-
sienne, était une femme de tête. Sa ferme rai-
son, son bon sens un peu sec se heurtèrent,
souvent, à l'imagination débordante que le fils
tenait de ses ancêtres gascons. Entre les deux
LA CATASTROPHE. 107
originaux, le père et le fils, elle eut à souffrir.
Dans la Correspondance de Balzac, on voit
qu'elle reçut de celui-ci, parmi des marques de
tendresse toutes filiales, plus d'un coup de bou-
toir. Elle savait les rendre à sa façon. M'r,L Laure
Surville exprime les choses finement quoique à
mots couverts, dans un passage de la biogra-
phie de Balzac : « Ma mère riche, belle et beau-
coup plus jeune que son mari, avait une rare
vivacité d'esprit et d'imagination, une activité
infatigable, une grande fermeté de décision et
un dévouement sans bornes pour les siens. Son
amour pour ses enfants planait sans cesse sur
eux, mais elle l'exprimait plutôt par des actions
que par des paroles1. »
Donc, femme d'action, elleagit;mèredévouée,
elle se dévoua. Elle offrit tout son bien et donna,
sans hésiter, son nom et sa fortune pour sauver
son fils.
Parmi ses angoisses, elle n'avait qu'un désir,
c'était d'éviter à son mari, âgé maintenant de
quatre-vingt-trois ans, les tracas etles douleurs
d'une telle catastrophe. Mais le secret ne put
être gardé longtemps; en effet, dans une lettre
adressée à M. Sédillot, le 18 août 1828, Balzac
père s'exprime en ces termes : « Mon cher
1. Balzac, sa vie et ses œuvres, par Mme L. Surville, p. 13.
108 LA JEUNESSE DE BALZAC.
parent, Mnu> Balzac ne m'a rien laissé ignorer de
tout ce que vous avez bien voulu faire pour
nous; je vous en remercie bien sincèrement.
J'approuve tout ce que vous avez fait et ferez
pour le complément de votre œuvre. Vous avez
cicatrisé la plus grande de nos plaies, et je serai
bien heureux, lorsque je trouverai l'occasion de
vous en témoigner, ou aux vôtres, la profonde
reconnaissance dont je suis pénétré1. »
Le coup fut terrible pour le vieillard. Malgré
la théorie qu'il professait, à savoir qu'on vit
tant qu'on a la volonté de vivre, malgré la
conviction où il était qu'il atteindrait cent ans,
ses forces commencèrent à décliner. Sept mois
après, en avril 1829, Honoré Balzac écrit au
même M. Sédillot: « Mon père est décidément
entre la vie et la mort... Il faut nécessairement
et sous peine de mort, lui ouvrir le côté. La
crise commence2. » Le vieillard mourait le
19 juin suivant.
Pour ce qui concerne les comptes, M. Sédil-
lot dut s'en rapporter souvent à la mémoire de
Balzac. Celui-ci était, en effet, un pauvre comp-
table. Il se trouvait en désaccord avec la plupart
de ceux à qui il avait eu affaire.
1. L'autographe de cette lettre, dont la Collection Lovenjoul
ne possède qu'une copie (ms. A 259, 2e partie, fol. 15), appar-
tient à la famille Sédillot. — Voir Appendice VIII, pièce n° 85.
2. Voir Appendice VIII, pièce n° 100.
LA CATASTROPHE. 109
Il aida M. Sédillot par une correspondance
où respirent à la fois l'honnêteté el la lassitude1.
Déjà, il ne songeait plus qu'à ses travaux litlé-
raires. II comptai! sur sa plume pour réparer le
désastre el combler les vides. Les embarras
d'une affaire manquée lui devenaient odieux.
M. Sédillot dut donc se tirer d'affaire tout seul,
ou peu s'en faut.
11 commença par distinguer entre les deux
entreprises, l'imprimerie et la fonderie de carac-
tères; de Tune et de l'autre, il travailla à élimi-
ner Balzac, comme s'il avait le sentiment que la
présence de celui-ci était le seul obstacle à leur
prospérité.
Il traita, d'une part, la question de l'impri-
merie avec l'associé A. Barbier. Dans la col-
lection Lovenjoul se trouve le compte de liqui-
dation qui se rapporte à la maison d'imprimerie.
Ce document est intitulé : « Etat de la situa-
tion du sieur Honoré Balzac, imprimeur,
demeurant à Paris, rue du (sic) Marais n° 17,
faubourg S'-Germain*. »
Le passif, au 16 août 1828, monte à un total
de 113081 fr. 92 qui se décompose ainsi : dus
par billets et obligations, 71659 fr. 82; dus sur
1. Voir Appendice VIII, pièces n0f 86 à 92 et 100 à 108.
2. Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 2.
410 LA JEUNESSE DE BALZAC.
factures, 3822fr. 10; avancés par Mme Balzac
mère, 37 G00 francs. Ce dernier chiffre indique
le montant des sacrifices qu'avait dû faire la
famille pour répondre aux réclamations les plus
pressantes. Il résulte d'un compte à part que
Balzac devait en outre, à ses ouvriers, la somme
relativement considérable de 4895 fr. 30. On se
demande vraiment où avait passé l'argent1.
Les principaux créanciers étaient le proprié-
taire de la maison, M. Henri Prestat, Laurens
aîné, prédécesseur de Balzac, Barbier l'asso-
cié, et, en outre, des fournisseurs : papetiers,
marchands de métal et de plâtre, d'autres impri-
meurs comme Didot, des serruriers, des méca-
niciens. M. Sédillot entreprit de leur faire
comprendre qu'ils n'avaient pas intérêt à ruiner
complètement la maison. Il leur démontra que
Barbier avait toute compétence pour continuer
à la gérer. La plupart d'entre eux adhérèrent à
un arrangement dont il suffit d'indiquer les
grandes lignes2.
Barbier reprenait, pour lui seul, la maison
Balzac et Barbier, au prix auquel on estimait
l'actif (brevet, pas de porte, matériel, etc.), le
tout montant à la somme de 67000 francs.
Moyennant quoi, Barbier s'engageait à désin-
1. Voir Appendice VIII, pièces not 83 et 84.
2. Voir Appendice VIII, pièce n° 81.
LA CATASTROPHE. 111
téresser les créanciers de I imprimerie jusqu'à
concurrence de la môme somme. Il s'engageait,
en outre, h solder le retard des ouvriers contre
l'abandon qui lui était fait des sommes dues à
l'imprimerie.
D'autre pari, M. et Mme Balzac père et mère
désintéressaient les créanciers pour le surplus,
c'est-à-dire pour 37600 francs, et en outre, sur
la somme de 30000 francs due à Laurens pour
l'achat de l'imprimerie et du brevet, ils s'enga-
geaient encore jusqu'à concurrence de 7200 fr. !
En un mot, Balzac subissait, rien que dans
l'affaire de l'imprimerie, une perte sèche de
45 000 francs payée par sa mère, et l'associé
qu'il avait appelé devenait seul maître de la
maison qui, d'ailleurs, à partir de ce moment
prospéra.
En ce qui concerne l'affaire de la fonderie,
nous sommes moins bien renseignés. Dans sa
courte durée du 1er août 1827 au 16 avril 1828,
l'établissement avait subi deux ou trois trans-
formations. Il y avait d'abord eu la maison Lau-
rent seul, puis la maison Laurent, Balzac et
Barbier, puis la maison Laurent, Balzac et
Mme de Berny. A la fin, Laurent avait encore
repris, seul, l'affaire, du moins en qualité de
1. Voir Appendice VIII, pièce n° 81.
142 LA JEUNESSE DE BALZAC.
liquidateur. L'apport social était estimé 36 000 fr.,
la part de Laurent étant de 18000 et celle de
Balzac et de Mme de Berny, ensemble, étant éga-
lement de 18000 francs '.
Ici encore, M. Sédillot paraît s'être appliqué
uniquement à dégager et à éliminer Balzac. Ce
qui est certain, c'est que, au bout de quelques
mois, la maison apparaît sous la raison sociale :
Laurent et Alexandre de Berny. Or, cet Alexan-
dre de Berny est le fils de Mme de Berny. Agé
seulement, de dix-neuf ans, il entre en nom
dans l'affaire; un fondé de pouvoirs tient sa
place jusqu'à ce qu'il ait atteint la majorité. 11
est facile de reconstituer cette phase de l'opé-
ration2. Nous savons, par divers renseigne-
ments, que Mme de Berny avait avancé à Bal-
zac 45000 francs. Il était hors d'état de les
payer. La famille Balzac avait fait de grands
sacrifices pour liquider l'affaire de l'imprimerie.
Elle était aussi dans l'impossibilité de désinté-
resser Mme de Berny. Celle-ci eut donc l'idée
d'établir son fils dans la maison où Balzac avait
échoué et de le substituer, en quelque sorte, à
celui-ci. Alexandre de Berny devint en consé-
quence l'associé de Laurent, et l'affaire continua
à marcher comme auparavant.
1. Voir ci-dessus, p. 103.
2. Voir Appendice VII, pièce n° 76.
LA CATASTROPHE. 1ir.
Elle marcha beaucoup mieux; car le jeune
associé de Laurent devint un négociant des
plus distingués. C'était un homme actif, vigi-
lant, ingénieux, élève pratique du Saint-Sirno-
nisme. Il s'installa rue Visconti et donna à la
fonderie de caractères une vive impulsion.
En 1840 (le 12 avril), il racheta la part de
Laurent et étendit encore ses affaires.
L'ancienne fonderie de Balzac devint ainsi,
assez rapidement, un des établissements les
plus importants de Paris. Alexandre de Berny
fut un des organisateurs des caisses de re-
traite ouvrière et il institua, l'un des premiers,
après Leclaire, la participation du personnel
aux bénéfices. Il mérita le beau nom de philan-
thrope. Il mourut en 1882, entouré de l'estime
universelle1.
La maison existe toujours; elle est dirigée,
actuellement, par un homme de haute distinc-
tion, M. Charles Tuleu, « enfant d'élection »
d'Alexandre de Berny, d'après les principes
4. Voir la notice intitulée : De Berny. Appréciation de son œuvre.
Paris, rue Visconti, 17, près le Palais des Beaux-Arts, 1882,
in-4° (avec un portrait d'Alexandre de Berny, gravé sur bois par
Huyot d'après Petot). Cette notice, dédiée « A la mémoire
d'Alexandre de Berny » et signée « son enfant d'élection,
Ch. Tuleu », contient, après un avertissement signé : Les Colla-
borateurs de M. de Berny, une introduction signée de même, des
renseignements sur la caisse et les comptes de l'atelier, et des
« Jugements portés sur l'œuvre de M. de Berny », extraits de
divers journaux.
8
H4 LA JEUNESSE DE BALZAC.
de celui qui a déterminé son succès; elle est en
pleine prospérité.
Balzac la quittait l'oreille basse, accablé du
fardeau de ses dettes où figurent, en première
ligne, les 45000 francs avancés par les siens et
les autres 45000 francs dus à Mme de Berny.
Sa sœur, Mme Surville, dit que la famille de
Balzac eut tort de ne pas le soutenir plus long-
temps et que, si Ton eût persévéré, il se fût
enrichi comme le firent ses successeurs. Rien
n'est plus douteux. Il n'avait pas l'esprit des
affaires... Quoi qu'il en soit, pour avoir un
riche imprimeur de plus, nous aurions eu un
admirable romancier de moins. La destinée
était plus sage que tous les calculs.
Balzac, après cette courte expérience, se sen-
tait libéré. Aussitôt qu'il le put, — c'est-à-dire
bien avant l'arrangement définitif de février 1829,
— il s'enfuit.
Dès le 1er septembre, — quinze jours après la
crise, — il écrivait au général baron de Pom-
mereul, vieil ami de la famille: « Ce que beau-
coup de personnes pouvaient prévoir et ce que
j'ai craint moi-même en commençant et soute-
nant avec courage un établissement dont les
proportions avaient quelque chose de colossal (voilà
bien l'imaginatif !) est enfin arrivé. J'ai été
précipité, non sans les prévisions de ma cou-
LA CATASTROPHE. il'.
science, de niii petite fortune... Depuis un mois,
je travaille à <l<\s ouvrages historiques du plus
haut intérêt el j'espère, qu'à défaut d'un talent
tout à fail problématique chez moi, les mœurs
nationales me porteront peut-être honneur
(il avait conçu le plan des Chouans.) Ma pre-
mière pensée a été pour vous et j'avais résolu
d'aller vous demander asile pour une vingtaine
de jours... Un lit de sangle et un seul matelas,
une table, pourvu qu'elle soit comme les
quadrupèdes et non invalide, une chaise et un
toit sont tout ce que je réclame1. . . » Le général
1. Voir Balzac en Bretagne, pp. 10-12. —Voici une autre lettre de
Balzac au général de Pommereul que nous a communiquée
M. Th. Janvrais :
Fonderie de Laurent, Balzac et Barbier, rue des Marais-S.-G.,
n. 17.
Politypie. Paris, ce 23 octobre 1827.
Gravure.
sur acier, cuivre,
bois, etc.
Général, j'ai recours à vous pour l'affaire dont j'ai eu
l'honneur de vous parler pendant votre séjour à Paris.
J'avais cru un moment avoir placé les 2 750 fr. dont je vous
avais parlé ; mais la personne est tombée très dangereusement
malade et je n'irai pas lui parler de longtemps de ce placement
bien qu'elle me l'ait promis avant sa maladie.
L'affaire dont il s'agit est toute simple, c'est le placement de
la somme de 2750 fr. à 6 0/0 pour le terme moyen de deux
années — et cette somme est représentée entre les mains du
prêteur par des effets de portefeuille de pareille somme, garan-
tis par 5 signatures dont la mienne.
Et pour plus grande sûreté, lorsque les effets seront à trois
lit. LA JEUNESSE DE BALZAC.
lui répondit : « Voire chambre vous attend ;
venez vite. »
Et c'est alors que les Pommereul virent arri-
ver, dans le vieux château de Fougères, le gros
garçon joufflu et jovial, qui, à peine débarqué,
illumina la maison de son rire opulent et de ses
prodigieuses gasconnades.
Il avait laissé Paris et la débâcle derrière lui;
il n'y pensait plus. Il était tout à la rédaction de
mois de leur échéance, je les reprendrai moi-même comme argent
escompte balancé.
Si vous pouviez me trouver dans le pays de Fougères quel-
qu'un à qui ce placement pourrait convenir, vous me rendriez
un très grand service, car cet argent ne sera pas de trop pour
ma fin d'année. Je ne sais, mais je me figure que Madame
votre mère pourra peut-être me rendre ce service, il serait, je
vous assure, sans péril, et serait immense pour moi.
Au surplus, je me repose entièrement sur l'intérêt que vous
avez la bonté de me porter et dont je suis sincèrement recon-
naissant, pour essayer de me mener cette négociation à bien.
Vous excuserez, j'espère, Général, la franchise avec laquelle
je ne crains pas de vous demander ce service.
Quant aux livres que vous avez confiés à ma garde, et sur la
vente desquels vous vous en êtes remis à mes soins, je vous
dirai que j'ai déjà vu bien des libraires et que tous m'ont pro-
mis de venir chez moi ; mais aucun n'est encore venu.
Je ne doute pas que chacun d'entr'eux qui tiennent ce genre
de livres n'attende le placement certain avant de venir les
chercher chez moi — si ceci nous mène un peu loin, d'un autre
côté ils seront achetés plus cher.
Voulez-vous avoir la bonté de présenter mes respects à
Madame votre mère et mes hommages à Madame de Pomme-
reul, et garder pour vous, Général, les témoignages de ma
sincère et amicale reconnaissance.
Je suis, avec respect, votre dévoué serviteur.
H. Balzac.
Suscription de la lettre : Monsieur le Général, baron de Pom-
mereul, Fougères (Ille-et-Vilaine).
LA CATASTROPHE. "7
ce romandes Chouans, la première assise de 1<»
Comédie humaine, et où il peignait d'abord ces
soldats de la cause royaliste, dont I«is confi-
dences de l'amie lui avaient appris à connaître
la grandeur.
Mais, s'il essayaitde se détacher du passé, le
passé s'attachait à lui. Partout, à Fougères
d'abord et ensuite à Paris, au milieu de ses
travaux, tout le long d'une vie désormais serve,
le poids mort du passé l'entrava. Ces deux
années s'imposèrent à son existence. Jusqu'à la
tin, sa dette le tint à la gorge.
C'est un drame poignant, — qui contient une
terrible leçon : « Du travail, toujours du travail,
écrit-il dix ans après, quand il est déjà devenu,
comme il le disait, un « maréchal des lettres » ;
des nuits embrasées succèdent à des nuits
embrasées l ! ... De quelque côté quej e me tourne,
je ne vois que difiicultés, travaux, espoir inu-
tile. Je n'ai même pas la ressource des deux ans
à Diodati2 sur le lac de Genève, car je suis,
maintenant, trop vieilli dans le travail pour en
mourir et qui voudrait m'y aider? Je suis
comme un oiseau en cage, qui s'est heurté à
tous les barreaux; il reste immobile sur un
i. Lettres à l'Étrangère, p. 269 (lettre XCVII, H août 1855).
2. La villa Diodati, habitée jadis par lord Byron, est située à
Cologny, sur le lac de Genève, non loin du Pré-1'Evèque.
118 LA JEUNESSE DE BALZAC.
bâton et une main blanche a étendu au-dessus
le réseau vert qui lui défend de se casser la
tête...1. »
Et toujours, toujours cette plainte, ce cri de
détresse. Toujours la dette. Toujours l'argent,
toujours la lutte. Il fut, toute sa vie, le forçat
évadé de la rue des Marais; il traîna le boulet
jusqu'à la fin.
Il avait eu un faux départ; il avait mal pris
et mal appris la vie : « il n'avait jamais eu que
la moitié du tout. » Il chercha toujours l'autre
moitié qui lui échappa toujours.
Passionné de la femme, il manqua la femme.
La première gorgée qu'il avait savourée, avec
ses troublantes délices, lui laissa l'amertume à
la gorge. Il ne fut jamais jeune. Il garda tou-
jours la blessure secrète. L'expérience lui était
venue trop tôt. Il l'avait subie trop tôt... Trop
tôt pour son bonheur, sinon pour son génie.
Car, ici encore, la leçon de la vie, désastreuse
pour l'homme, fut féconde pour l'écrivain.
« Il faut blesser la vigne pour qu'elle pro-
duise, » disait, un jour, un vieux vigneron du
Médoc qui taillait le bois, le rognait de près et
maniait le sécateur avec rudesse. Balzac répan-
1. Collection Lovenjout, ms. A 30i, fol. 479 v°. — Lettres à
l'Étrangère, p. 478 (lettre CXXXVII, 20 mai 1838).
LA CATASTROPHE. 11»
(lit, loul le long de son œuvre, la sève de sa
jeunesse navrée.
Lui qui avait tant besoin de luxe, d'amour el
<le gloire, il courut en désespéré après la for-
lune, la femme et la renommée. Tout lui fui
disputé.
Après les quatorze années de la première
intimité, il ne rencontra plus, sur sa route, que
ces passions littéraires où la vanité insinue son
froid calcul. Il éparpilla sa vie entre les diverses
« inconnues » qui se prirent à l'hameçon de sa
gloire. Il partagea l'illusion de ces fils de leurs
œuvres qui cherchent, dans la femme, un enno-
blissement. Il se consuma dans cette autre
recherche.
Enfin, il crut avoir trouvé. Mme de Berny
déclinait. Elle allait bientôt mourir. Il fit alors,
par correspondance d'abord, la connaissance de
cette Polonaise, noble, jeune, belle, qui devint
la Béatrice lointaine de ce grand Imaginatif
d'amour. Il l'attendit dix-sept ans, traversant
l'Europe pour la rencontrer un jour. Au bout
de huit ans, le mari mourut.
Balzac avait eu, alors, un de ces avertisse-
ments qui bouleversaient son âme supersti-
tieuse : « Laissez-moi vous dire, écrit-il à
Mme Hanska, une petite superstition qui a fait sur
moi la plus grande impression. Le 1er novem-
120 LA JEUNESSE DE BALZAC
bre [1841], j'ai perdu l'un des deux boutons
de chemise que m'avait donnés madame de
Berny et que je mettais un jour, et les vôtres le
lendemain. Ayant perdu cela, je n'ai plus mis
que les vôtres, et cette petite chose de hazard
m'a troublé à un point que vous imaginerez
quand je vous dirai que ma mère et tous ceux
qui me connaissent s'en sont aperçus. J'ai dit :
« Il y a là quelque avis du ciel* ! »
Le 10 novembre, le mari de « l'Etrangère »
mourut.
Mme Hanska était libre. Pour Balzac, c'était
tout le passé enterré, le bonheur possible, le
repos entrevu. C'était l'amour avec la fortune et
la gloire. La vie lui devenait-elle indulgente"?
La destinée se joua, une fois de plus, de son
rêve. Par une intuition vraiment extraordinaire,
il avait eu la vision de ce que devait être sa lin. . . ,
si triste.
En 1845, cinq ans avant sa mort, il terminait
les Petites Misères de la Vie Conjiigale\yav ces paroles
prophétiques : « Qui n'a pas entendu, dans sa
i. Collection Lovenjoul, ms. A 301, fol. 553 v°. — Lettres à l'Étran-
gère, p. 573 (lettre CLVI, 5 janvier 1842).
2. Le mariage d'Honoré de Balzac avec Mme de Hanska fut
célébré, dans l'église Sainte-Barbe de Berditchef. le 14 mars
1850. Voir Œuvres complètes, t. XXIV, Correspondance, p. 050-651
(lettres CCCLXXVI et CCCLXXVII à M™ de Balzac mère et à
Mme Laure Surville). M de Hanski était mort le 10 novembre
1841.
LA CATASTROPHE. 121
vie, un opéra italien quelconque?... Vous avez
dû, dès lors, remarquer l'abus musical du mol
felichittà prodigué par le poète et par les
chœurs, à l'heure où tout le monde s'élance
hors de sa loge ou quitte sa stalle. Affreuse
image de la vie. On en sort au moment où Ton
entend la felichittà... \ »
Après tant de peines, il croyait trouver le
bonheur. Il ne trouva que le dégoût et la mort.
Il partit et quitta la salle, au moment où, autour
de lui, le chœur entonnait à tue-tête : felichittà.
1. Œuvre» complètes, t. XVII, p. 697.
CONCLUSION
On sait, maintenant, que Balzac, quoique
né à Tours, n'est pas Tourangeau. Son père
qui, d'après l'acte de naissance, relevé sur les
registres de la paroisse de Canezac (hameau de
la Nougarié), Tarn, s'appelait Bernard-François
Baissa, fils de Bernard Baissa, laboureur, était
originaire du Languedoc; sa mère, Anne-Char-
lotte-Laure Sallambier, était née à Paris et
appartenait à une famille parisienne1.
1. Nous avons reçu de M. Alfred Caraven-Cachin, de Salva-
gnac (Tarn), de très intéressants détails sur les origines du
père de Balzac :
« J'ai été à Castres, nous écrit notre obligeant correspon-
dant, où l'on croyait qu'un descendant de Balzac avait été ser-
gent de ville et, après quelques jours d'enquête à la police et
au greffe du tribunal civil, il m'a fallu abandonner cette piste.
De là, j'ai été à Montirat étudier les minutes du notaire Bal-
zac. M. Camors, aujourd'hui notaire de cette localité, a bien
voulu m'aider dans cette tâche ; nous n'avons rien trouvé
d'intéressant pour vos études.
« Alors, on m'a indiqué une famille Balzac qui habite Gra-
nette, par Auvillars (Tarn-et-Garonne). Je suis parti pour Gra-
nette où j'ai trouvé, en effet, Mm' Georges Balsac, veuve d'uo
ancien magistrat, mais qui ignore si elle est parente avec le
CONCLUSION. vi:
Le père <lc Balzac, homme de loi, commis-
saire aux vivres, royaliste déclaré, fonctionnaire
de Bonaparte, Méridional, Tourangeau, Pari-
sien, propriétaire, avocat, militaire, intendant,
génial romancier... Le père de Balzac, ayanl quitté son paya à
l'âge de li ans, ancien avoc.il aux Conseils du Roi, lié avec «les
notabilités que la Révolution fit surgir tout à coup, écrit Champ
fleury, avait été envoyé, en 1792, dans le nord de la France
pour organiser le service des vivres de l'armée. Il se tira de
ses fonctions avec assez d'habileté pour être envoyé, en 1799,
à Tours, en (pial il é de directeur de la régie, chargé en même
lemps de l'administration du grand hôpital de celte ville. Bal-
zac le père était un réformateur de la classe de ceux qui,
dans les époques suivantes, furent appelés économistes.
Entre 1807 et 1809, le fonctionnaire publia deux brochures qui
indiquent un administrateur préoccupé de philanthropie. L'une
a pour titre : Mémoire sur le scandaleux désordre causé par les
jeunes filles trompées et abandonnées dans un complet dénuement
et sur les moyens d'utiliser une portion de la population perdue
par l'Etat et très funeste à l'ordre social. L'autre est intitulée :
Mémoire sur les moyens de prévenir les vols et les assassinats et
de ramener les hommes qui les commettent aux travaux de la
Société et sur les moyens de simplifier l'ordre judiciaire. Le père
de Balzac lit encore imprimer, chez Marne, en 1809, un Mémoire
but deux grandes obligations à remplir par les Français, et, à en
croire une note de M. de Monmerqué, l'idée première de l'érec-
tion de l'Arc de Triomphe de l'Étoile serait due à M. de Bal-
zac père. Quand nous aurons mentionné une Histoire de la rage
et moyens d'en préserver comme autrefois les hommes, et de les
délivrer de plusieurs autres malheurs qui attaquent leur existence,
édition faite par le Gouvernement, nous aurons à peu près
catalogué la série de brochures de cet homme bizarre dont
on retrouve tant de traits dans l'esprit de son illustre fils. Si
Balzac est languedocien par son père, il demeure parisien
par sa mère, Laure Sallambier, née à Paris d'un vieux pari-
sien d'origine.
« La famille de Balzac n'est pas encore éteinte dans nos con-
trées. M. Jean Delmas, propriétaire à Carmaux (Tarn), possède
un acte daté du 28 août 1840, prouvant qu'il existait à cette
époque deux Balzac. Voici, en effet, les deux premières lignes
de ce grimoire : Pour Jean-Pierre Balzac, propriétaire de la
134 LA JEUNESSE DE BALZAC.
riche et ruiné, est surtout un original. C'est sa
propre fille qui dit de lui : « Il ne faisait et ne
disait rien comme un autre; Hoffmann en eût
fait un personnage de ses Créations fantastiques* . »
Il avait conçu un rêve — parmi tant d'autres,
— celui de survivre à toute sa génération; il
était convaincu qu'il serait le seul et unique
bénéficiaire de la fameuse tontine Lafarge. Il
affirmait qu'un homme pouvait, s'il le voulait,
vivrecentans.il mourut à quatre-vingt trois ans,
contrairement à son système et à ses principes8.
Rigaudié, contre maître Jean-François Balzac, notaire habitant de
Montirat, etc.
« Balzac était donc le fils d'un modeste paysan qui n'avait
aucune prétention aristocratique. Le véritable nom de la famille
semble avoir été Baissa, nom très commun dans notre région ;
mais je dois dire aussi qu'on trouve des Balsa, des Balsac et
enfin un Balzac. Balzac, le notaire de Montirat, qui a dû mou-
rir peu de temps après 1859, avait-il modifié l'orthographe de
son nom après que son glorieux cousin fut arrivé à la celé
brité? Je ne saurais le dire, mais ce que je puis affirmer, c'est
qu'aucun membre de la famille, y compris l'ancien notaire, n'a
jamais prétendu à la particule... »
1. Balzac, sa vie et ses œuvres, par Mme L. Surville, p. 9.
2. « Le père de Balzac avait calculé, d'après les années qu'il
faut à l'homme pour arriver à l'état parfait, que sa vie devait
aller à cent ans et plus ; pour atteindre le plus, il prenait des
soins extraordinaires et veillait sans cesse à établir ce qu'il
appelait l'équilibre des forces vitales... A quarante-cinq ans,
n'étant pas marié et ne comptant pas se marier, il avait placé
une bonne partie de sa fortune en viager, moitié sur le grand
livre, moitié sur la caisse Lafarge, qu'on fondait alors et dont
il était un des plus forts actionnaires (il touchait, en 1829,
quand il mourut par accident, à l'âge de quatre-vingt-trois ans,
douze mille francs d'intérêt). La réduction des rentes, les gas-
pillages, qui eurent lieu dans l'administration de la tontine,
diminuèrent ses revenus : mais sa belle et verte vieillesse lui
CONCLUSION. !25
La mère de Balzac était une femme beaucoup
plus jeune que son mari, une, un peu sèche,
serrée <in affaires, active plutôt que tendre,
dévouée plutôt qu'aimante, pratique, comme
on dit, ayant le sens des chiffres et passant sa
vie à remettre de Tordre dans le ménage que les
fantaisies du père et des enfants ne cessaient
de troubler : c'est la fourmi silencieuse parmi
les bruyantes cigales.
La mère et le fils se heurtaient souvent. Dans
les « notules » précieuses qu'a publiées M. de
Lovenjoul, Fessart, un ami de la famille, apporte
ce témoignage : « M. de Balzac disait qu'il n'avait
jamais pu entendre parler sa mère, sans éprouver
un certain tremblement, qui lui ôtait toutes ses
facultés lorsqu'il était en sa présence*. » Pour-
tant, la mère et le fils sont toujours restés étroi-
tement unis. Dans toutes les crises, Balzac s'est
retourné vers elle. Elle a été, pour lui, le sou-
tien, le refuge, le réconfort : femme de charge
ou homme d'affaires souvent, — mère dévouée
toujours.
Voilà donc la double origine : le Nord et le
Midi, la province et Paris; et la double nature :
donna l'espoir de partager un jour avec l'État, à l'extinction
des concurrents de sa classe, l'immense capital de la ton-
tine... « Bahac, sa vie et ses œuvres, par Mme L. Surville,
p. 8.
1. Une page perdue de H. de Balzac, p. 118.
126 LA JEUNESSE DE BALZAC.
la fougue et la mesure, l'imagination et la
réflexion. Le père et la mère prolongent les dis-
parates du ménage dans le cerveau contrasté de
leur prodigieux enfant.
Balzac lit ses études au collège de Vendôme :
il est d'abord un écolier très ordinaire, ne se
distinguant de ses camarades que par la splen-
deur des joues et la grosseur des mollets.
Tout à coup, il pâlit, il maigrit; le front se
bombe, les yeux se cernent. Sa mère, inquiète,
s'écrie : « Voilà comme le collège nous renvoie
les jolis enfants que nous lui envoyons1 ! » Il est
plongé dans une sorte de coma : c'est que, dans
le gros garçon insouciant, la maturité a surgi
tout à coup.
Sans que les autres le remarquassent, la per-
sonnalité s'est formée par un travail intime; elle
apparaît, spontanée et autodidacte; le choc des
deux natures s'est produit à la première étin-
celle de l'intellectualité éveillée'. L'enfant a
dévoré toute la bibliothèque du collège ; il a
pensé par lui-même; il a pris une plume; il a
écrit son premier ouvrage, et c'est — admirez
le titre — une « Théorie de la volonté ».
1. Voir Balzac, sa vie et ses œuvres, par Mme Laure Surville.
p. 22.
2. Il est inutile de rappeler que c'est là tout le sujet de l'auto-
biographie que Balzac a intitulée Luuis Lambert.
conclusion. vn
Son génie naissant brise déjà les lisières; il
est un grand homme avant d'être un homme.
Son imagination puissante l'accable. A ces
heures de formation, la lutte entre les deux
natures juxtaposées, non combinées, déchire
l'adolescence jusqu'à mettre l'existence elle-
même en péril.
La vie, maintenant. Nous sommes en 1822.
La vigueur native Ta emporté. Balzac est un
garçon à la figure ronde, au corps un peu bas,
mais souple et plein. L'œil est admirable, tout
rempli d'étoiles d'or; l'entrain, la gaieté, la
verve, la bonne humeur éclatent dans les mou-
vements et les gestes ; une vie exubérante et
conquérante émane de lui. Il aime déjà; il est
aimé.
Dans le jeune homme, l'homme apparaît.
Celui-ci veut être libre; il veut agir, il veut être
lui. L'imagination caresse et transforme un
projet que l'esprit réaliste a conçu. Balzac se
croit né pour les affaires. Il se propose, d'abord,
la plus prompte de toutes les conquêtes : celle
de la fortune. 11 devient éditeur, imprimeur,
fondeur de caractères. Précis et imaginaire, il
recherche des formats, des types, des procédés
nouveaux. Il prétend révolutionner la librairie
et l'imprimerie.
128 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Le tourbillon des affaires le saisit. 11 s'y jette
à corps perdu. Mais les tristes réalités se dres-
sent devant lui. La lutte est âpre, journalière,
laide, fastidieuse, pénible ou dégoûtante; le
travail est rare, la main-d'œuvre exigeante ;
l'argent manque. Bientôt ce sont les billets, les
renouvellements, les protêts : ce sont les courses
désespérées pour faire face aux échéances, la
rencontre des créanciers, les attentes chez l'usu-
rier, les contacts douteux, les compromissions,
les mensonges, enfin, la rentrée, le soir, dans
l'atelier muet et vide.
Mais, là, le rêve renaît. Dans la chambre
étroite, l'amie, Mme de Berny, attend, le sou-
rire sur les lèvres et les bras ouverts. D'un
mot, d'un geste, elle écarte le souci, ramène la
confiance et la sérénité. Elle a tant souffert,
elle a vu des choses si cruelles ! Elle a des
consolations pour toutes les peines, des paroles
douces pour toutes les tristesses, des caresses
pour toutes les douleurs. Comme Schahrazade,
elle parle; son récit met l'âme apaisée à la porte
du palais des songes.
Elle raconte sa jeunesse, les temps qui sont
passés, et dont elle a gardé le tendre et harmo-
nieux secret : la cour, la reine, les fêtes, les
joies, les musiques, Trianon, les bergerades,
les bals champêtres, les fantaisies, les caprices.
CONCLUSION. 129
le mouvement brillant et fastueux d'une foule
qui ne connaissait de la vie que la « douceur de
vivre ».
Elle raconte aussi les heures terribles, les
foules hideuses, les sans-culottes, le bonnet
rouge, les palais envahis, le sang coulant à flot,
la fusillade à bout portant, la guillotine, et elle
dit la longue liste des morts.
Elle dit les fuites la nuit, les rencontres sus-
pectes, l'apparition des falots, les réquisitions,
les arrestations, les prisons, l'appel des vic-
times, l'habitude du péril et la familiarité prise
avec le bourreau. Sa parole est une évocation où
tous les drames se succèdent, où les ressorts
de toutes les passions sont en jeu, où la réalité,
elle-même, apparaîtcommeun rêve; et le regard
du jeune homme avide plonge dans les prunelles
qui ont vu ces choses et qui, pour les revivre,
se posent sur le cher enfant.
L'œuvre naît de cette double et antinomique
préparation. Un monde disparu, un siècle qui
commence. D'une part, le passé auguste de la
vieille France, la stabilité des cadres anciens,
l'harmonie sociale; la religion, la monarchie,
l'aristocratie, la famille, s'étageant comme les
assises nécessaires de la société; l'onction des
prêtres, le courage des soldats, l'autorité des
magistrats, une majesté historique qui va de
9
*W LA JEUNESSE DE BALZAC.
Catherine de Médicis à Bonaparte et qui met
les Chouans en face de Robespierre.
A côté de cette légende et de cette épopée,
voici, par un contraste inouï, l'activité mesquine
de la vie journalière, le profil exact de chaque
métier, les nuances psychologiques de chaque
caractère, le détail précis de chaque affaire et de
chaque dossier, le pli professionnel, le geste
habituel, le tic familier.
Le temps où vit Balzac est l'aboutissant des
grandes époques et des divers régimes qui se
sont succédé si rapidement dans l'histoire de
France : monarchie, république, empire, res-
tauration. Ce temps se mire dans l'œuvre du
romancier, et ici encore, et surtout, le roman-
cier est un historien. Callot n'a été ni plus abon-
dant, ni plus pittoresque, ni plus exact. La foule
contemporaine — grands du monde ou misé-
reux — grouille dans son œuvre. C'est par là
qu'elle survivra.
Voici les grandes dames et les lorettes, le
faubourg Saint-Germain et le faubourg Saint-
Honoré, le Palais-Royal et la rue Saint-Denis,
le journalisme et la bourse, la pairie et la
Chambre, Véfour et Flicotaux. D'une page à
l'autre, la France ancienne, la France moderne.
Cet homme qui se perd dans l'Empyrée à la
suite du « Philosophe inconnu » et de Sweden-
CONCLUSION. 131
borg, l'hagiographe de Seraphitm-Scraphila,
écrit, aussi, la Physiologie du Mariage, les Contes
Drolatiques et s'attarde aux passions séniles du
baron Hulot : poète pour Eugénie Grandet,
avoué pour César Hirolteau, collectionneur et
« chineur »l avec le cousin Pons, naturaliste
pour le bouquet de M,nfi de Mortsauf, couturier
pour habiller Mu,e Marneffe et amoureux, au
besoin, pour la déshabiller.
Il vit en plein romantisme, et rien n'est moins
romantique que son œuvre; il rejette tout le
bric-à-brac sentimental et moyen-âgeux de
l'École.
Il échappe à l'hypocrisie ambiante. Les fem-
mes, autour de lui, baissent les yeux : chez lui,
elles les lèvent et regardent en face. Elles sont
franches et saines ; elles avouent leurs passions,
leurs vertus, même leur âge. « Nous voilà,
disent-elles ; prenez-nous telles que nous som-
mes. » Et quel gré elles lui sauront, toujours,
d'avoir dépeint, en elles, des êtres vivants, non
des poncifs inanimés : vierges inconscientes,
poupées fragiles, oies effarouchées. Il raye
Indiana, Amélie, même Julie; il remonte jus-
i. M. Fessart rapporte que « M. de Balzac était connu pour
un chineur et un bibloteur de première classe. Par trop d'en-
thousiasme pour les Antiquités, il se faisait parfaitement attra-
per, et il ne voulait pas en convenir «.Voir Une page perdue de
H. de Baliac, pp. 121-122.
152 LA JEUNESSE DE BALZAC.
qu'à Manon et jusqu'à la princesse de Glèves.
Comme Balzac sait, par une trop dure expé-
rience, que l'argent est le grand ressort de la
vie moderne — étant la mesure des efforts
humains — il fait, de la question d'argent, la
trame solide de son épopée.
Ses personnages vivent, et ils comptent. Il y
a des âmes pures, mais il y a des courtisanes.
Les pistolets qui arrêtent les diligences sur les
grand'routes ne sont pas plus dangereux que
les beaux yeux qui subtilisent les portefeuilles
et défoncent les coffres-forts.
On voit, pour la première fois, apparaître,
dans son œuvre, le chaos immense, grouillant,
agité, fécond, stérile, âpre, délicieux, et, somme
toute, incompréhensible, qu'est la vie.
Est-ce bien la vie? C'est plutôt le raccourci
puissant de la vie. Le génie de Balzac tient à sa
double nature. Son imagination est un verre
grossissant. Les objets ont, pour elle, des pro-
portions énormes. Elle ne saisit pas seulement
les circonstances, mais les lois, non seulement
les individus, mais les types.
Tout être vivant sur lequel l'attention de Bal-
zac s'est portée devient un objet exceptionnel,
un phénomène, et, comme disait la philosophie
ancienne, un « monstre ». Celui-ci est l'Usurier,
celui-ci le Soldat, celui-ci le Banquiste, celui-ci
CONCLUSION. 133
le Criminel, celui-ci le Satyre. Celle, déforma-
tion prodigieuse impose ces types à l'esprit et
les enfonce dans la mémoire.
Mais l'abus du procédé conduirait à l'invrai-
semblance et à l'outrance. Ce sonl les défauts
habituels du temps où vit Balzac. Il y échappe, et
comment? Par le contrôle qu'exerce, sur lui, la
qualité complémentaire de son génie, la finesse,
la justesse, le tact, ou, pour tout dire en un mot,
le sens des réalités.
Le Méridional est corrigé par le Parisien. Ce
Bonaparte des Lettres trouve, en lui-même,
son Sieyès. Le verre grossissant, monté en
lunette, devient un instrument de précision.
Dans la vie de Balzac, ce contraste singulier,
cette antinomie, qui fait sa gloire et son tour-
ment, se retrouve jusqu'à la fin. Homme simple,
droit, laborieux et chaste, il laisse s'exercer sur
lui la fascination de tous les prestiges. Il galope
à la recherche de tous les absolus. Il a convoité
la fortune, la renommée, le pouvoir, l'amour. Il
ne trouve que la désillusion ; mais sa vigou-
reuse nature se relève toujours par le goût du
travail, la franchise du caractère et la probité
des mœurs.
La sage vigilance de la mère veille sur le fils.
Un suprême essor de son imagination l'avait
emporté, à travers l'Europe, à la suite de VÉtran-
154 LA JEUNESSE DE BALZAC.
gère. Il revient, marié; heureux d'abord, mais
bientôt cruellement meurtri. Quand l'heure
dernière fut arrivée, la mère était seule, près de
son fils, dans la maison abandonnée. De ses
vieilles mains tremblantes, elle éteignit les
étoiles d'or en lui fermant les yeux.
CORRESPONDANCE
D'HONORÉ DE BALZAC ET DE I.AURE DE BERNY
4 822... 1832
Quand, dans une série d'articles parus au
Journal et qui sont comme une première rédac-
tion du présent ouvrage, nous eûmes apporté
un élément nouveau à la biographie du grand
romancier, à savoir la révélation du nom et des
amours de la Dilecta, notre ami M. de Spoel-
berch de Lovenjoul nous écrivait, dans la joie
de voir révélé le secret de l'énigme balza-
cienne :
Ah, cher ami, que votre quatrième article m'a donc
transporté ! Vous m'avez appris là ce que je cherchais
depuis trente msî Cette fois, nous la tenons, et l'amon-
cellement d'eneurs, de nuages, de légendes qui entou-
raient la dame, s'est évanoui pour toujours. A la lettre,
j'ai bu votre enre par les yeux, et je vous réponds que
pas un de vos acteurs n'aura savouré aussi profondé-
ment que moi, ni ne se sera aussi gloutonnement gavé
du régal unique que vous avez servi là aux Balzaciens.
Plus que jamais je vous dis : Venez, Venez! »
136 LA JEUNESSE DE BALZAC.
En nous communiquant en même temps la
belle lettre de Madame de Berny à Balzac rela-
tive à Louis Lambert, M. de Lovenjoul nous priait
instamment de venir à Bruxelles prendre con-
naissance de la correspondance de Balzac et de
Madame de Berny, qu'il avait en sa possession.
Nous voulions répondre immédiatement à
son appel; les circonstances nous en ont empê-
chés; le temps passa, les années s'écoulèrent.
Notre illustre ami mourut. Toutefois, en léguant
la collection de ses manuscrits à l'Institut de
France, il nous confiait le soin de publier cette
correspondance échangée entre les deux amants
à l'heure où le jeune homme, entrant tout à la
fois dans la vie et dans l'infortune, ne trouvait
autour de lui d'autre appui que l'affection pas-
sionnément maternelle de sa vaillante amie.
Voici donc ces deux séries de lettres : leur
apparition donnera son sens psychologique
profond à cet épisode initiateur de la vie de
Balzac.
Ce que cette correspondance nous révèle,
ce n'est plus l'homme d'affaires improvisé,
le jeune téméraire qui, par una résolution
funeste, s'accable lui-même d'une dette dont il
subira le fardeau jusqu'à son derrier jour, c'est
l'homme lui-même. Elle nous montre l'homme
et elle nous montre la femme. Voici Honoré et
LA CORRESPONDANCE. 151
voici La ure. Les deux amants sont devant nous,
m pleine lumière.
Et, malgré la cruelle différence des âges,
malgré les borne* infranchissables, malgré la con-
trainte des lois de la nature et de la société
(jui les excite et qui les torture à la fois, ils se
découvrent à nous, tels qu'il furent, dans la
candeur et la sincérité de leur passion.
Une courte note, rédigée par le vicomte de
Spoelberch de Lovenjoul et placée par lui en
tête des brouillons des lettres adressées par
Balzac à Madame de Bernv, établit l'authen-
ticité de ces documents que le pieux collec-
tionneur a sauvés du naufrage.
La lettre d'Alexandre de Berny \ écrite le soir
1. « Voici une lettre de deuil, cher Honoré ; après dix jours
de souffrances nerveuses très aiguës, d'étouffemens et d'hy-
dropisie, notre mère a succombé ce matin à neuf heures.
« Sa vie était bien remplie, à cette bonne mère, elle est sans
doute bien calme à présent. Demain, à dix heures, elle sera
déposée en terre à côté de son Armand, dans le cimetière de
Grès.
« Avant sa maladie, elle classa ses lettres et en fit trois
paquets ; un de ces paquets contient toute votre correspon-
dance avec elle depuis qu'elle vous connaissait. Ce paquet,
ficelé avec de la laine et entièrement clos, j'ai l'ordre forme!
de l'incendier aussitôt après sa mort. Dans une heure, j'y met-
trai le feu.
« Il se trouve ici beaucoup de papiers de votre écriture,
classés dans des feuilles qui portent le titre de manuscrits :
dans quelques jours, je vous en donnerai le détail.
« Adieu, cher Honoré, je ne puis rien vous dire, vous le
savez. — 27 juillet 1836. Alexandre. • (Collection Spoelberch de
lovenjoul. ms. A ."12, fol. 115.)
138 LA JEUNESSE DE BALZAC.
même de la mort de Madame de Berny, établit
que l'ensemble de la correspondance de Balzac
conservée par la Dilecta a été brûlée. Elle s'ex-
plique elle-même, dans une des lettres que nous
publions, sur ce qu'elle pensait de la conservation
des lettres d'amour : ou le tout ou le feu.
Quant aux dernières lettres de Madame de
Berny, Balzac les a conservées, sans doute
parce qu'elles étaient, à ses yeux, la relique
suprême du drame de cœur qui s'était joué
entre lui et l'amie, alors que la séparation
allait s'accomplir.
Voici donc tout ce qui reste : quelques brouil-
lons de lettres de Balzac adolescent, quelques
lettres de l'aimée vieillissante. Car, par un autre
caprice du sort, les lettres de Balzac ne sont
pas contemporaines de celles de Madame de
Berny; les unes ne répondent pas aux autres;
celles de Balzac sont de 1822, celles de Madame
de Berny sont, du moins les dernières, de
1832. Dix ans d'intervalle!... Le drame n'est
pas lié... Mais, il n'en paraîtra que plus pathé-
tique peut-être. Caries lettres de l'amant sont de
l'époque où l'amour naît, celles de l'aimée du
temps où l'amour se meurt. Ardeur et enthou-
siasme au début; et, à la lin, palpitations de
l'agonie, dernières étincelles, cendres brû-
lantes, étouffement, silence !
LA CORRESPONDANCE. 1™
Celte passion partagée, où l'homme de vingt-
trois ans étreint la femme de quarante-cinq
ans, n'est-elle pas un des drames les plus
singuliers qu'ait connus l'histoire? La filleule
de Marie-Antoinette berçant sur ses genoux le
peintre des mœurs bourgeoises, la belle-fille du
chevalier de Jarjayes, qui a vu Versailles,
Trianon, la Conciergerie, la cour des Tuileries,
couvant, dans l'étroite chambre tendue de per-
cale bleue, le génie du grand investigateur de
« l'âge industriel », une Béatrice déjà fanée
apprenant la vie et l'amour à cet enfant qui
croyait les connaître et qui ne savait encore
que les deviner. Balzac, qui n'a cessé de trans-
poser ce roman dans tous ses romans, n'a
rien combiné de plus imprévu et de plus dra-
matique.
Il faut donc prendre les lettres de Balzac à
part et les lettres de Madame de Berny à part.
Mais, en même temps, il faut, quand on lit
les unes et les autres, avoir toujours dans
l'esprit la réplique absente; il faut deviner; il
faut sentir comme sentait l'autre, invisible et
présent.
Ne pas manquer aussi de se représenter le
temps, les circonstances, les entourages, les
familles, les affaires; la grande maison de Ville-
parisis où la passion naît dans les sourires
140 LA JEUNESSE DE BALZAC.
pour s'épanouir bientôt dans les larmes, la
chambre « tendue de percale bleue », les châ-
teaux de la Touraine et de l'Angoumois, Sache
et la Grenadière; et puis, auprès des acteurs,
les comparses, les surveillants et les malveil-
lants, ces jeunes filles à l'œil perçant que
signale l'amoureux un peu gêné de son rôle, et,
(drame dans le drame) les rivaux et les rivales :
car cette femme a un mari et un amant délaissé
peut-être; et ce jeune homme est entouré de
dames et de grandes dames qui voudraient bien
s'emparer de son génie deviné, les d'Abrantès,
les de Castries, les Zulma Carraud, et même
déjà cette Polonaise lointaine qui le prend par
la vanité des admirations fabuleuses et de
l'Europe remplie de son nom. Toutes accablent
des traits de la jalousie la pauvre femme qui
n'a plus déjeune que le cœur.
Ce fond de tapisserie une fois tendu, voyons
les deux héros s'avancer sur la scène, et creu-
sons les caractères : car, c'est ce qui importe;
il s'agit de connaître les âmes.
Balzac, au moment où il écrit les lettres qui
allument l'incendie, n'a que vingt-trois ans ; il
achève ses études ; il se lance dans la vie ; il
touche aux affaires.
l.A CORRESPONDANCE. m
A celte heure critique, il se connaîl déjà lui-
même à fond et, en psychologue prédestiné, il
se peint admirablement. Il regarde aussi les
hommes en lui et se contemple, eux et lui, dans
un même reflet.
Mais ce qui frappe d'abord c'est que, dans
cet adolescent, si extraordinairement doué,
tout est « littérature ». L'homme de lettres aime
en homme de lettres. Sa première passion,
lui est un sujet. Se regardant, s'observant, s'ana-
lysant, il institue d'avance l'expérience de labo-
ratoire d'où s'élèvera la création grouillante de
la Comédie humaine. Cette goutte d'eau de Ville-
parisis et de la rue des Marais-Saint-Germain
lui est un microcosme. Son génie, qui grandit
en ce vase clos, grandit ce qui l'entoure jus-
qu'aux proportions de l'universel. Cet amour,
qui naît au seuil de la jeunesse, finira par abriter
son œuvre et son génie. Et, penché sur cette
plante fragile, il y découvre déjà ce qu'il cherche
et cherchera toujours : la science des hommes.
L'expérimentateur coupe, taille, tranche, dût-il
blesser. Ce n'est ni par la douceur ni par le
tact qu'il brille, l'acharné. Tel un carabin, il
enfonce son scalpel et scrute à fond toutes les
fibres. A peine née, la passion douloureuse est
sur la table de dissection.
Quelque chose atténue, adoucit cette âpre
142 LA JEUNESSE DE BALZAC.
brutalité, c'est l'entière bonne foi, et, selon une
expression qui revient souvent sous la plume
de l'écrivain, parmi les délices des sens, « la
chasteté ». Psychologue impassible, analyste
sans pitié, Balzac reste, malgré tout, un brave
garçon, un honnête homme. Son imagination
errante ne l'égaré pas, ses fautes ne l'aveuglent
pas, son orgueil ne l'enivre pas. Il sait ce qu'il
doit à cette femme, savante en la vie, qui,
sciemment, lui a tout appris. Et, à l'heure de la
supplication, quand il implore et qu'il est à ses
pieds, et plus tard, à l'heure des séparations,
quand il la laisse seule, loin de lui, désolée, il la
respecte et s'incline devant elle d'âme à âme.
Ayant toujours sur les lèvres l'illusion amère
et le sucre de ce faux essai de l'amour, touché
au cœur et écœuré en même temps, il parlera
jusqu'à la fin de cette femme, comme d'une
« maîtresse », comme d'un « maître », comme
d'une amie souveraine, éducatrice de son intel-
ligence et de son génie.
Les rivales elles-mêmes ont dû accepter
l'étrange confession qu'il leur fit sans cesse
de ce durable envoûtement : elles ont dû y
consentir. Balzac amoureux ne sera, pour l'his-
toire des mœurs, ni le courtisan de la duchesse
de Castries, ni le galant de la duchesse
d'Abrantès, ni même l'amant ni le mari de la
LA CORRESPONDANCE. 14T»
Hanska, il sera à jamais l'ami de Madame de
Bemy, le disciple passionné de la fHlecta. (Tesl
de celle-ci qu'il a reçu l'empreinte.
Le lecteur cherchera et trouvera, dans les
lettres écrites par le jeune homme de vingt-
Irois ans, les traits de cet étonnant amour et
les traits de ce singulier caractère. Gomment
ne pas lui signaler le portrait qu'Honoré trace
de lui-même en s'y reprenant par touches et
retouches successives, dans cette correspon-
dance qui n'est, au fond, qu'une « confession »
à la Jean-Jacques :
... Tel je suis el tel je serai toujours, timide à
l'excès, amoureux jusqu'au délire, et chaste au point
de n'oser dire : j'aime.... Je conviens que la dernière
chose à laquelle je ressemble c'est à un amoureux, je
n'en ai ni le ton, ni les manières, je n'ai ni grâces ni
hardiesse, rien d'agressif; en un mot, je suis comme
ces jeunes filles qui paraissent gauches, sottes, timides,
douces et qui cachent sous ce voile un feu qui, une fois
qu'il aura franchi les cendres qui le couvrent, dévorera
le foyer et la maison, et tout.
Jean-Jacques est derrière cette image et
Balzac lui-même le dit :
Au surplus, jamais je ne peindrai mieux mon carac-
tère qu'il n'a été dépeint par un grand homme. Relisez
les Confessions et vous l'y trouverez tout au long1.
1. Quelques années plus tard, Balzac refaisait le même por-
trait pour Madame d'Abrantès, niais d'un burin à la fois plus
144 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Rousseau était le grand homme de la géné-
ration révolutionnaire. Toutes les âmes sensi-
bles se tournaient vers lui comme vers leur
soleil. Laure Hinner était, comme tant d'autres,
une Héloïse. Comment eût-elle dédaigné cet
hymne à l'amour que son éclatante maturité
inspirait au disciple exalté du maître :
Aimer, c'est sentir autrement que tous les autres
hommes, c'est vivre dans un monde idéal, magnifique
et splendidede toutes les splendeurs; c'est ne connaître
ni le tems, ni ses divisions, ni le jour, ni la nuit, ni
hiver ni printems; le jour et le printems sont la pré-
sence de l'objet aimé; il n'y a dans la nature qu'un
seul endroit, c'est le lieu où l'on se voit, un seul indi-
vidu, celui que l'on aime, le reste n'est rien!
Aimer, c'est quitter son existence passée et future et
ferme et plus dégagé; il affirmait, dans l'homme, l'homme de
lettres : « Je m'étudie moi-même comme je pourrais le faire pour
un autre, je renferme dans mes deux pieds cinq pouces toutes
les incohérences, tous les contrastes possibles; et ceux qui me
croiront vain, prodigue, entêté, léger, sans suite dans les idées,
fat, négligent, paresseux, inappliqué, sans réflexion, sans aucune
constance, bavard, sans tact, mal-appris, impoli, quinteux, iné-
gal d'humeur, auront tout autant raison que ceux qui pour-
raient dire que je suis économe, modeste, courageux, tenace,
énergique, négligé, travailleur, constant, taciturne, plein de
finesse, poli, toujours gai ; celui qui dira que je suis poltron
n'aura pas plus tort que celui qui dira que je suis extrême-
ment brave, enfin savant ou ignorant, plein de talents ou
inepte, rien ne m'étonne plus de moi-même... Ce Kaléidoscope-
là vient-il de ce que, dans l'âme de ceux qui prétendent vou-
loir peindre toutes les affections et le cœur humain, le hazard
jette toutes ces affections mêmes, afin qu'ils puissent par la force
de l'imagination ressentir ce qu'ils peignent? Et l'observation ne
serait-elle qu'une note de mémoire propre à aider à cette mobile
imagination, je commence à le croire. • (Œuvres complètes, t. XXIV,
Correspondance, p. 56.)
LA CORRESPONDANCE, 145
présente pour en adopter une nouvelle : c'est la sienne.
Penser comme elle pense, avoir des milliers d'idées
quand nous sommes loin délie, et, quand on la voit,
n'en pouvoir exprimer une seule; mettre de l'éloquence
dans tout, dans un geste, un regard, un mot. C'est être
transporté de bonheur d'une niaiserie, accablé de cha-
grin d'un signe équivoque.
Aimer, c'est se confondre tellement qu'il n'y ait pas
trace d'individualité; c'est vivre de la vie d'un autre,
ne rien négliger pour embellir cette vie, trouver de la
douceur dans les larmes, dans l'abaissement, et abjurer
même sa croyance, mourir même. Il en est qui trouvent
ces sacrifices trop faibles et qui vont jusqu'à croire que
celui de l'honneur n'est pas assez....
Aimer, c'est faire croire en soi et se rendre digne l'un
de l'autre par les plus nobles efforts; c'est, quand on a
tout fait, croire n'avoir encore rien fait; rendre sa
bonté, sa foi, et les marques de son amour aussi innom-
brables que les graviers de la mer, faire que chaque
sentiment soit une goutte d'une mer inépuisable.
Aimer, c'est l'exaltation de tout notre être, l'inspira-
tion constante d'un poëte, en la portant dans le cœur
et dans la vie; c'est nager dans l'univers, voir la nature
autre qu'elle est, être en contradiction perpétuelle avec
toutes les idées reçues et trouver un ciel affreux lorsque
tout le monde le trouve sans nuages; se plaire dans une
tempête, quand chacun tremble ; alors les sentiments
de l'homme ont une espèce de majesté et jettent sur lui
quelque vestige de ce qu'on se figure de la création.
Une telle page, à elle seule, justifie tous les
abandons : Laure Hinner devait succomber.
Comment ne pas aimer celui qui parle ainsi de
l'amour? Succomber, c'est triompher encore,
dût la femme, la pécheresse, se sacrifier dans
10
i ici LA JEUNESSE DE BALZAC.
son triomphe et mourir sur le bûcher que de
telles flammes ont allumé.
Elle succomba; elle fut sacrifiée.
Dix ans s'écoulent1.... Durant ce long espace
de la vie humaine, quelques rares lettres, au
hasard des séparations. L'amoureuseétait mûre ;
elle vieillit. Le jeune homme mûrit, grandit,
remplit le cadre de sa destinée. La gloire l'a
touché. De lui rayonne une force, une confiance,
une puissance. Tenant son époque, il commence
à sentir qu'il tient l'avenir. S'il se mesure, c'est
à Napoléon : « J'achèverai par la plume ce qu'il
a fait par l'épée. »
Les femmes se pressent autour de lui. Elles
sont là, toutes celles qui l'accompagneront dans
sa course effrénée : la duchesse d'Abrantès,
Zulma Carraud,la duchesse de Castries. Adulé,
caressé, jeté dans la politique par ce même
parti royaliste qui tourne autour du duc de
Fitz-James et auquel Laure peut-être, l'impru-
1. Voici le portrait de Balzac, à cette date, de la main d'un
peintre, s'il en fut, Eugène Delacroix : « C'est chez Madame O'Reilly
et chez Nodier (vers 1832 ou 33) que j'ai vu pour la première
fois Balzac qui était alors un jeune homme svelte, en habit bleu
avec, je crois, gilet de soie noire, enfin quelque chose de dis-
cordant dans la toilette et déjà brèche-dent, Il préludait à son
succès.... » Journal, II, p. 80. — Dix ans après, Delacroix écrivait
de Nohant, chez George Sand : « Nous attendions Balzac qui
n'est pas venu et je n'en suis pas fâché : c'est un bavard qui
eût rompu cet accord de nonchalance dans lequel je me berce
avec un grand plaisir. » Correspondance, t, I, p. k2i>2.
LA CORRESPONDANCE. 147
dente, l'a présenté, il tire sur sa chaîne, sa
vieille chaîne. Il s'est éloigné, il s'attarde dans
les châteaux de la Tou raine, et dans cette Grena-
dière où il se vante lui-mOmc d'avoir emmené
« une esclave ».
L'amie sait tout cela. Elle accepte, elle subil
et si, parfois, la jalousie la point, si elle crie d<-
douleur, c'est pour s'incliner encore à la fin et
pour souffrir; elle consent à gravir le calvaire
pourvu que l'ami, l'enfant adoré devenu homme,
homme de lettres, grand homme, apparaisse
sur la cime illuminée :
Une crainte mortelle vient quelquefois faire bondir
mon cœur : je pense que si certaine dame t'écrivait de
la venir trouver, tu serais assez bon pour y aller. Une
autre dame ne t'a-t-elle pas fait revenir jadis de Tours à
Versailles pour la consoler de chagrins que son égoïsme
lui faisait te grossir? Ici, la circonstance est bien plus
grave et malheureusement ta vanité est toujours
éveillée, active, et a sur toi une prise d'autant plus
réelle que tu en ignores la force.... Jamais tu ne
sauras, ami, jusqu'à quel point j'ai placé mon orgueil
en toi.
Tu me dis que l'intérieur de mon fils sera ma justifi-
cation. Mon chéri, elle ne sera pas là; je l'ai placée tout
entière en toi.... La nature ni la société ne pardonnenl
jamais à celui qui transgresse ses loix; je me trouvais
nécessairement rebelle envers l'une ou l'autre; il nui
fallu offenser cette dernière; je sais ce qu'elle me
réserve. Mais si je peux te voir dans le lointain grand
et honoré (et tu dois savoir quel est pour moi le sens de
ces deux mots), eh bien je serai contente sinon heu-
148 LA JEUNESSE DE BALZAC.
reuse; car je suis fière de toi. Il me semble que ni ma
conscience ni le monde ne pourront me rien repro-
cher.
Le poignard est dans le sein. Ce que cette
femme, âgée de cinquante-quatre ans, frap-
pée de l'anévrisme qui devait la tuer quatre
ans plus tard, ce que cette femme fit pour
défendre son amour, pour garder son amant,
— son enfant, — il faut le voir dans les dernières
pages de cette correspondance, si fière et si
humble à la fois. Elle l'a sauvé au penchant de
la ruine, elle l'a réconforté, rasséréné, instruit,
façonné, achevé, et il lui échappe. Elle continue :
c'est elle qui fait ses courses, corrige les épreu-
ves, porte les lettres, parfois celles qu'elle vou-
drait ouvrir. Elle lit ligne à ligne tous ses
ouvrages, revise ses marchés, le tire d'embarras
aux heures de la copie inachevée ou des dettes
trop criardes. Elle accepte tout, la séparation,
les erreurs, l'abandon. Mais il y a un point sur
lequel elle ne transige pas : c'est quand ce qui
est en question, c'est son travail, sa gloire,
tranchons le mot, son génie. Quoi qu'il arrive,
elle reste en sentinelle, là. Elle est et restera la
gardienne et l'éducatrice; car, c'est son lot,
celui qu'elle a choisi et qu'on ne lui arrachera
pas.
S'il se trompe, s'il s'affole, s'il s'exalte, s'il
LA CORRESPONDANCE. 14'J
s'égare, elle esl là. Kilo rappelle4 la fougueuse
nature au bon sens, à la sagesse, à l'équilibre.
D'une main ferme, elle rabaisse le terrible
orgueil.
On a lu déjà la lettre si haute écrite au sujet
de ljOim Lambert et qui dévoilait la fière et noble
autorité de femme qui ne fléchit pas.
Et c'est pourquoi, précisément, elle fut, jus-
qu'à la fin, la Dilecta.
Ainsi, ces deux courtes correspondances
expliquent tout. Le génie restait fidèle à la nour-
rice du génie. Jusqu'à la fin, lui aussi, l'enfant
se retournera vers la maternité créatrice. Balzac
revint, toute sa vie, vers l'image de la femme
dont le vigoureux esprit avait emprunté tous les
délices des sens et de l'âme pour le former en
esprit. Finalement, le psychologue impeccable
achève, pour lui-même, la figure de la maîtresse
de ses jeunes ans par un portrait où les traits
de l'intelligence dominent et effacent tous les
autres. Il écrit à Madame ZulmaCarraud, en sep-
tembre 1833, à l'heure même où les liens se
dénouent : « Vous avez bien raison, chère belle
âme, d'aimer Mme de Bferny]; vous êtes la seule
dont elle ne soit pas jalouse, vous avez dans la
pensée des ressemblances frappantes : même
amour du bien, même libéralisme éclairé, même
amour du progrès, mêmes vœux pour la masse,
150 LA JEUNESSE DE BALZAC.
même élévation d'âme, de pensées, même déli-
ratesse de cœur1. »
N'ajoutons rien. Telle fut celle qui restera
pour l'histoire comme pour Balzac lui-même :
I'éducatrice.
i. Collection Lovenjoul, ms. A '293, fol. 58. Voir aussi Œuvres
complètes, t. XXIV, Correspondance, p. 178, où cette lettre
est incomplète d'un membre de phrase et inexactement datée
du 2 août, alors que, dans l'original, elle porte la date du
2 septembre.
LETTRES
D'HONORÉ DE BALZAC A MADAME DE BERNY
(brouillons)
1822
NOTE EXPLICATIVE
Les lettres que nous publions ici pour la pre-
mière fois — sauf une lettre de Madame de
Berny, déjà imprimée dans l'édition originale
de notre ouvrage — font aujourd'hui partie de
la Collection généreusement léguée à l'Institut
de France par M. le vicomte de Spoelberch de
Lovenjoul. Elles y sont conservées, les lettres
de Balzac sous la cote Ms. A 290, celles de
Madame de Berny sous la cote Ms. A 291 .
Sur la chemise renfermant les brouillons de
Balzac, M. de Lovenjoul avait inscrit la note
suivante :
HONORÉ DE BALZAC
Important dossier. — Contient les brouillons, gardés
précieusement par le grand écrivain, de sa première
correspondance d'amour. Il s'agit des lettres écrites en
1822 à Mme de Berny, et qui furent le point de départ
154 LA JEUNESSE DE BALZAC.
d'une liaison qui dura de 1822 à 1836. Balzac avait alors
23 ans et elle 45.
Ces lettres qui sont, sans doute, les premières mani-
festations amoureuses tombées de la plume de Balzac,
sont remarquables de netteté et de franchise. En
revanche, elles manquent un peu de grâce et de charme.
Ce sont bien là les côtés que Balzac reconnaissait
devoir à Mme de Berny qui, plus tard, l'avait absolument
policé, adouci et formé aux nuances du cœur.
Par malheur, ces brouillons sont presque illisibles et
certains mots tout à fait indéchiffrables. C'est d'autant
plus fâcheux que les autographes de toute la corres-
pondance de Balzac avec sa première amie, embrassant
une période de quatorze ans et contenant forcément des
détails précieux sur les débuts si peu connus de sa car-
rière (1822-1830) sont, paraît-il, brûlés. Voir à ce sujet
la lettre d'Alexandre de Berny à Balzac, datée du
27 juillet 1836 [Dans mes papiers. S. L. 15 septembre
1894*].
Ces brouillons de lettres sont, en effet, pour
la plupart, selon l'expression de Balzac lui-
même, de véritables hiéroglyphes8. Nous avons
1. Voir ci-dessus p. 137.
2. Le passage suivant de Louis Lambert, relatif aux brouillons
de ses lettres d'amour, trouve ici sa place :
« Lorsque le hasard me mit en relation avec son oncle, le
bonhomme m'introduisit dans la chambre habitée à cette époque
par Lambert. Je voulais y chercher quelques traces de ses
œuvres, s'il en avait laissé. Là, parmi des papiers dont le
désordre était respecté par ce vieillard, avec cet exquis senti-
ment des douleurs qui distingue les vieilles gens, je trouvai
plusieurs lettres trop illisibles pour avoir été remises à Made-
moiselle de Villenoix. La connaissance que je possédais de
l'écriture de Lambert me permit, à l'aide du temps, de déchiffrer
les hiéroglyphes de cette sténographie créée par l'impatience
et par la frénésie de la passion. Emporté par ses sentiments, il
NOTE EXPLICATIVE. ,r,:»
pu, néanmoins, en déchiffrer la plus grande
partie. Seuls, quelques mots ou bribes de phrases
ont résisté h notre lecture, si attentive qu'elle
ait été; nous les avons remplacés par des points,
mais en ayant soin d'indiquer en note que ces
points étaient substitués aux mots qu'il nous a
été impossible de lire.
D'autres points se rencontrent, çà et là, dans
écrivait sans s'apercevoir de l'imperfection des lignes trop lentes
à formuler sa pensée. Il avait dû être obligé de recopier ses
essais informes où souvent les lignes se confondaient; mais
peut-être aussi craignait-il de ne pas donner à ses idées des
formes assez décevantes, et, dans le commencement s'y pre-
nait-il à deux fois pour ses lettres d'amour. Quoi qu'il en soit, il
a fallu toute l'ardeur de mon culte pour sa mémoire, et l'espèce
de fanatisme que donne une entreprise de ce genre pour deviner
et rétablir le sens des cinq lettres qui suivent. Ces papiers,
que je conserve avec une sorte de piété, sont les seuls témoi-
gnages matériels de son ardente passion. Mademoiselle de
Villenoix a sans doute détruit les véritables lettres qui lui furent
adressées, fastes éloquents du délire qu'elle causa. La première
de ces lettres, qui était évidemment ce qu'on nomme un brouil-
lon, attestait par sa forme et par son ampleur, ces hésitations,
ces troubles du cœur, ces craintes sans nombre éveillées par
l'envie de plaire, ces changements d'expression et ces incerti-
tudes entre toutes les pensées qui assaillent un jeune homme
écrivant sa première lettre d'amour : lettre dont on se souvient
toujours, dont chaque phrase est le fruit d'une rêverie, dont
chaque mot excite de longues contemplations, où le sentiment
le plus effréné de tous comprend la nécessité des tournures les
plus modestes et, comme un géant qui se courbe pour entrer
dans une chaumière, se fait humble et petit pour ne pas
effrayer une âme de jeune fille. Jamais antiquaire n'a manié
des palimpsestes avec plus de respect que je n'en eus à étu-
dier, à reconstruire ces monuments mutilés d'une soufliance
et d'une joie si sacrées pour ceux qui ont connu la même
souffrance et la même joie. » (Œuvres complètes, t. XVII, 1870,
p. 71.)
156 LA JEUNESSE DE BALZAC.
le texte des lettres, ils sont du fait de Balzac et
nous les avons, naturellement, maintenus.
Quant au lieu d'origine et aux dates assignées
par le vicomte de Lovenjoul, nous les avons
placés entre crochets en tête de chacune des
lettres; car, bien que nul de ces brouillons
ne soit daté, il n'est pas douteux qu'ils ont été
écrits au cours de l'année 1822.
Certains faits en fournissent la preuve, telle
l'apparition de Jean-Louis dont il est question
dans la lettre XVI, tels aussi le voyage à Bayeux
et la correspondance échangée, à cette époque,
entre Balzac et sa sœur, Mme Surville, ou bien
encore la lettre écrite, le 5 août 1822, par Mme de
Balzac mère à sa fille Laure.
Le fac-similé que nous donnons ci-contre
mettra le lecteur à même de se rendre compte
que Balzac n'exagérait pas en qualifiant ses
brouillons d'hiéroglyphes.
Nous avons fidèlement respecté l'orthographe,
parfois un peu désuète, de Balzac ; mais la ponc-
tuation étant souvent absente dans ces pages
écrites hâtivement, nous avons cru devoir, pour
faciliter la lecture, la rétablir. Une raison ana-
logue nous a conduits à placer entre crochets
certains mots qui nous ont paru éclaircir le texte.
^HiVK * »»»■— w* . &*Ë^y +/ &. <*V^*. fî^ **S/S . ^fA
0 ê^y
\*\ *<* •46> /*—&- tf»\? 6 r*&y*y & *~*K>£*Ty &~*~
MU, 0*^£ùJj *+++[ U vtr '**•+* '<? 6S*^ ? C*ijJr%> + ft+y
*iÀ '
»
£& àCcr
1
JL 9^ j^tL este-
.A-^'A..
-<e^^»e»' W
FAC-SIMILE DE L'ÉCRITURE DE BALZ.'
\C
LETTRES DE BALZAC
( brouillons)
[Villeparisis,] 1822.
Vous êtes malheureuse, je le sais, mais vous avez
dans l'âme des richesses qui vous sont inconnues,
et qui peuvent encore vous rattacher à l'existence.
Quand vous m'êtes apparue, ce fut avec cette
grâce qui environne tous les êtres dont l'infortune
vient du cœur, j'aime d'avance ceux qui souffrent.
Ainsi, pour moi, votre mélancolie fut un charme,
vos malheurs un attrait, et, du moment que vous
avez déployé les agrémens de votre esprit, toutes
mes pensées se sont involontairement rattachées
aux doux souvenirs que j'ai conservés de vous.
Depuis le tems de ma séparation, vous écrirais-je,
n'écrirais-je pas, telle a été l'histoire fidèle de mes
idées, l'ohjet de toutes mes méditations, et, si je
vous dis qu'il y a longtems que je ne vous vois
plus des yeux, vous serez surprise qu'une jeune
âme, ordinairement remplie de sentimens pré-
somptueux, ait pu concevoir, garder et nourrir une
passion, sans chercher plutôt à l'embellir des trésors
de l'espérance. Mais tel je suis et tel je serai tou-
jours, timide à l'excès, amoureux jusqu'au délire,
et chaste au point de n'oser dire : j'aime. Il entre
bien dans cette chasteté, dans cette pudeur de sen-
160 LA JEUNESSE DE BALZAC.
timent, toute la crainte et la honte que me causent
les refus. Aussi, n'en ais-je jamais essuyé, puisque
je ne m'y suis jamais exposé et c'est aujourd'hui
pour la première fois que je me hazarde à dépeindre
ce que je ressens.
Oui, Madame, je l'ose, mais ce n'est pas sans
m'être retiré dans le dernier espace que ma raison
s'est conservé pour y calculer toutes les consé-
quences de cette lettre.
Ne croyez donc pas que j'ignore la moindre des
pensées que vous aurez en la lisant, si toutes fois
vous la lisez. D'abord, vous y verrez la matière d'une
des meilleures railleries qui soit au monde, ou un
amusement tel que le comporte votre genre d'esprit.
L'ironie, les plaisanteries ne manqueront pas, et
elles seront d'autant plus sardoniques et piquantes
que l'auteur de l'épître est inconnu, c'est-à-dire que
la considération qui devrait lui valoir votre silence
et votre protection sera la raison suprême, et l'abso-
lution de vos mocqueries. Restera à savoir si je n'ai
pas pris mes précautions.
Qu'ais-je dit! Ce mot peut-être va vous inquiéter,
et vous chercherez à l'expliquer en regardant en
arrière sur le chemin que vous avez déjà parcouru
dans la vie. Ah! rassurez-vous, Madame, je vous
jure que ce qui dicte cette lettre est un des sentimens
les plus purs que le cœur d'un [être de] 20 ans ait
jamais enfanté, un sentiment qui, j'ai l'orgueil de le
croire, vous serait agréable, si vous voulez en con-
naître l'étendue.
Ainsi sachez, Madame, que cette lettre n'est
point un jeu, c'est l'expression franche d'une jeune
I I TTRES DE BALZAC. 161
âme, qui se trouve dans la même position que vous.
Elle es! gaie, parfois elle s'abandonne à la mélan-
colie, et c'est dans un de ces momens où tout
semble peine qu'elle s'esl adressée à vous pour
vous faire la confidente de ses pensées dont vous
êtes le centre.
Vous êtes triste, et souvent dans la solitude, cette
lettre vous donnera, je pense, un instant de dis-
traction et, à votre place, je trouverais je ne sais quoi
d'original dans cette correspondance. Et n'est-ce
pas une chose hardie que de chercher à ne se faire
connaître que par les espèces de portraits de l'âme
qu'offrent les lettres? N'est-ce pas là quelque chose
de pur, et où est le danger?
Mais, j'ai tout calculé, vous ai-je dit, et si j'ob-
tiens la laveur d'une réponse, mon esprit ombra-
geux m'a déjà suggéré que ce serait peut-être un
piège pour chercher à me connaître et vous mocquer
de moi, enfin imiter les feux follets qui donnent
au voyageur un instant d'espoir, pour le plonger
ensuite dans un abîme.
Mais non, je n'ai point cela à craindre, car vous
ne me répondrez pas. Il y a mille raisons qui vous
retiendront et dont vous n'aurez pas le courage de
secouer le joug.
Quoi qu'il en soit, je ne me lasserai point de
continuer à penser à vous avec délices. Songez,
Madame, que, loin de vous, il existe un être dont
l'âme, par un admirable privilège, franchit les dis-
tances, suit dans les airs un chemin idéal, et court
avec ivresse vous entourer sans cesse, qui se plaît
à assister à votre vie, à vos sentimens, qui tantôt
n
16* LA JEUNESSE DE BALZAC.
vous plaint, et tantôt vous souhaite, mais qui vous
aime avec cette chaleur de sentiment et cette fran-
chise d'amour qui n'a fleuri que dans le jeune âge,
un être pour qui vous êtes plus qu'une amie, plus
qu'une sœur, presqu'une mère, et même plus que
tout cela, une espèce de divinité visible à laquelle
il rapporte toutes ses actions. En effet, si je rêve
grandeur et gloire, c'est pour en faire un marche-
pied qui me conduise à vous, et si je commence une
chose importante, c'est en votre nom. Vous m'êtes,
sans le savoir, une véritable protectrice. Enfin,
imaginez tout ce qu'il y a de tendre, d'affectueux,
de gracieux, d'expansif dans le cœur humain, et je
crois l'avoir dans le mien lorsque je pense à vous!
Vous riez peut-être et vous dédaignerez ce silen-
cieux hommage, cette adoration pure et désinté-
ressée, sans seulement essayer à répondre. Alors,
Madame, je me contenterai de vivre de mon sen-
timent lui-même, et j'aurai du moins pendant
quelque tems une chimère à caresser, en m'ima-
ginant qu'une lettre est en chemin, et, si elle ne
vient pas, mon chagrin aura une cause; jusqu'ici je
me créais moi-même mes biens et mes maux; main-
tenant, vous en êtes la source. Quoi qu'il arrive, je
vous aimerai toujours, et je vous le dis avec cette
simplicité, cette candeur qui n'appartient qu'aux
sentimens [jeunes] et aux sensations premières '.
1. Le passage qui suit a été supprimé par Balzac :
. « Il y a une chose que je ne puis me risquer de dire, c'est
qu'une de vos phrases m'a révélé tout votre caractère et que
je crois savoir ce qu'il faudrait écrire pour vous plaire avec
constance »
LETTRES !)!•: BALZAC. 163
Si vous avez espoir en un état inouï dans lequel
on ne peut rester longtems, être aimé serait pins
inouï encore, et1 ee n'est pas l'effet que doit pro-
duire ce premier cri d'un malheureux.
Je n'en attends de votre part ni l'amour, ni l'éton-
nement, ni la moquerie, ni le dédain, encore moins
le mépris. Mais j'ai toujours soupçonné qu'il y avait
dans le cœur de toutes les femmes un sentiment qui
se trouve sur les confins de la tendresse et de
l'amitié; c'est la compassion, la pitié généreuse qui
tend la main aux fous comme aux malheureux.
Adieu, Madame, adieu, et permettez qu'au lieu
des phrases banales par lesquelles l'on termine, je
dépose ici, à cette place, mon âme toute entière,
une âme sans souillure, irréprochable, que j'ose
vous offrir comme un des plus purs présens que
l'on puisse recevoir. — Adieu.
Répondre à Mr. ... Manfredi*.
II
[Villeparisis, 23 mars 1822.]
Madame,
Quand on a fait un thème pour sa vie, il est cruel
de le reconnaître impossible à suivre.
1. Phrase rayée : « je ne sais si le passage... ainsi l'un à l'autre
ne me ferait... mais être consolé dans mes peines, dont... ce n'est
pas encore aussi .»
2. Nous avons remplacé par quelques points trois mots ratu-
rés par Balzac et qui semblent être : Delan, Varvi, André.
164 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Quand, égaré par V imagination, on l'a construit
brillant et plein de charme, on peut se trouver dé-
sespéré.
Quand il est impossible d'en suivre un autre, la
vie n'est plus rien.
Que Ton suppose une jeune âme naïve, quoi-
qu'elle se soit imprudemment trempée dans le vase
des sciences; ignorante néanmoins, puisqu'elle ne
fait que d'entrer dans le commerce du monde; mais
pleine de sentimens généreux, gaye sans méchan-
ceté, aimante à l'excès, partant, un peu friande de
mélancolie et de voluptés; d'abord exagérée dans
tout, par suite de la pente de l'imagination; puis,
ayant déversé cette exagération dans les sentimens;
présomptueuse, folle, inconsidérée, ayant enfin tous
les vices comme toutes les vertus de son âge.
Cette jeune étourdie a regardé un instant dans le
puits, elle crut appercevoir la tête de la déesse qui
s'y cache; peut-être, n'a-t-elle vu que la sienne!
Mais enfin, jeune, elle a osé juger la vie comme
le vieillard qui regarde en arrière; elle a pensé que
le plaisir en était l'essence et elle a cherché le plus
grand des plaisirs pour en faire son texte. Elle n'a
fait qu'obéir à la nature des choses et à son pen-
chant, tout en s'iinaginant choisir. Dirigeant toutes
ses forces vers l'amour et ses joies, elle s'en est
créée son unique perspective, elle y a tout subor-
donné : elle s'est couronnée de roses, et, dans la
fleur du printems, pleine de sève et d'espérance,
elle s'est élancée, elle a cherché, elle a trouvé...
Mais son élan fut arrêté par cet axiome de morale
que : il est impossible que l'on aime ceux qui donnent
LETTRES DE BALZAC. 165
prise soit (m ridicule soit aux plaisanteries1. Alors,
déshéritée de ses espérances, en regardant l'issue
de celle première tentative comme celle de toutes
les autres, elle n'eut pus le courage d'en appeler,
et de surmonter eetle pensée...
Qu'il soit permis de citer notre* jeune poète5? Ce
sera une grande preuve d'humilité que de mettre
ses vers à côté de ceci:
Au milieu d'un parterre, un matin vit éclore
Sur un lys encor frais des larmes de l'aurore,
Un des fils du printems;
Par sos jeunes efforts, par ses doux mouvemens,
Sa prison est brisée
Il marche sur la fleur, se nourrit de rosée,
Regarde le jardin
Et par un vol naïf, chancelant, enfantin,
Interroge ses ailes
Où resplendit l'éclat des couleurs les plus belles.
Il voit l'honneur de Flore, et, de ses pas légers
Lui destine l'hommage, en rêvant de baisers
Une abondante fête :
La rose, en détournant sa gracieuse tête,
1. Le 5 août 1822, Mme Balzac mère écrivait à sa fille,
Mme L. Surville, à propos d'Honoré : « Made de Berny fort
portée pour lui, parce qu'elle aurait un fils du même âge, me
disait l'autre jour que chez elle Honoré allait jusqu'au ridicule,
qu'il n'était pas aimé, qu'il avait été jusqu'à trouver le moyen
de choquer et d'humilier l'amour-propre de Mr Mich[elin], son
gendre, qu'elle me citait cela pour me donner la mesure, parce
que c'était de tous ceux qui venaient chez elle le moins sus-
ceptible, jugez de tous les autres; je lui suis attaché, me
disait-elle, je donnerais beaucoup pour qu'il prît plus garde à
ses paroles, à son air, à son ton.... » (Collection Lovenjoal,
ms. A. 381, fol. 1l6v°).
2. Dans un brouillon de cette lettre, on lit ceci : « A[ndré]
Chénier. • Les vers qui suivent ne sont, bien entendu, pas de
lui, mais de Balzac en personne. [S. L.]
106 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Insulte au papillon!
Il insiste. Bientôt, percé par l'aiguillon
D'une perfide abeille
Il tombe, et meurt au sein de la rose vermeille,
En caressant toujours
Cette fleur, son tombeau, cette fleur, ses amours!
Voilà bien des 'dernières lettres, celle-ci sera la
seule. Mes yeux, je vous le jure, ne vous importu-
neront plus, mes paroles ne pourront plus impru-
demment vous offenser ou vous chagriner. Adieu.
J'ai pris mon parti. Quel qu'il soit, soyez en
joyeuse1!
Suscription: Madame,
Madame de Berny.
Cette suscription a été raturée par Balzac lui-même,
mais se lit sous ses ratures.
1. Voici deux autres brouillons de cette lettre. Les lignes
suivantes sont écrites au verso de ce brouillon et sur le feuillet
suivant :
Premier brouillon.
Quand on a fait un thème pour sa vie, il est cruel de le
reconnaître impossible à suivre.
Quand, égaré par l'imagination, on l'a construit brillant et
plein de charme, on peut se trouver désespéré, quand il est
impossible d'en suivre un autre, la vie n'est plus rien... on doit
la quitter, car l'on ne vit que pour vivre.
Que l'on suppose, par exemple, une jeune âme, naïve quoi-
qu'elle se soit imprudemment trempée dans le vase des sciences,
ignorante néanmoins, parce qu'elle ne fait que d'entrer dans le
commerce de la vie; mais pleine de sentimens généreux, gave
sans méchanceté, aimante à l'excès, partant un peu friande de
mélancolie, d'abord exagérée, par suite de la pente de l'imagi-
nation, puis ayant reporté cette exagération dans les sentimens
quelle enfante, cette jeune étourdie a regardé un instant dans
le puits; elle a cru appercevoir la tête de la déesse qui s'y
cache, peut-être n'a-t-il (sic) vu que la sienne.
Mais enfin il a, jeune encore, osé juger la vie; il a pensé que
LETTRES DE BALZAC. 107
le plaisir y étnit tout; il 8 choisi parmi les plaisirs le seul que
son organisation lui indiquait.
Elle a dirigé tout es ses forces vers l'amour; elle <ti a l'ait
tout son èlre, toute sa vie ; elle ;• subordonné tout à cette unique
passion.
Dans la fleur de l'âge, pleine de vigueur, elle essaye ses ailes
comme le fils du printems, sans frayeur. Alors il secoue ses
ailes, essaye de voler, se dirige sur la première rose qui lui
plait. La rose détourne la tète; elle contient une abeille qui le
pique, il tombe et meurt au pied de la rose, en la regardant
toujours.
Il voit l'honneur de Flore, et, de ses pas légers
Il apporte l'hommage, en rêvant de baisers
Une abondante fête.
La rose, en détournant sa gracieuse tète,
Insulte au papillon.
Il insiste, et bientôt, percé par l'aiguillon
D'une perfide abeille
Il tombe et meurt au pied de la rose vermeille
En regardant toujours
Ce rosier, son tombeau, ce rosier, ses amours1.
Il serait par trop extraordinaire que l'on aimât celui dont on
plaisante. Aussi, n'attend-il plus rien de celle qu'il chérira
toujours.
Je vous prie de faire l'honneur à celui qui vous écrit de le
lire jusqu'au bout, avec le plus d'intérêt que vous pourrez
accorder à ce dernier feuillet du livre, et cette sotte confiance
pourrait peut-être recevoir son salaire, s'il ne se joignait à la
mocquerie quelque chose de plus injuste.
Je crois qu'il serait par trop extraordinaire que l'on aimât
celui dont on plaisante.
Voilà bien des dernières lettres, je pense que celle-ci se
trouve la troisième, mais malheureusement son titre est réel.
Il serait par trop extraordinaire que l'on aimât celui dont on
plaisante; il est encore plus extraordinaire que le plaisanté
chérisse la plaisantante.
extrait de la correspondance]
S'il est un axiome de morale, c'est que l'on n'aime jamais
ceux qui donnent prise soit à la plaisanterie soit au ridicule
1. En tête de ce brouillon, on lit : « Ch. f — Le pot cassé — J'ai parlé
de Balarouth et je dois expliquer ce qu'est ce personnage. »
168 LA JEUNESSE DE BALZAC.
qui, chez nous est la conséquence de la1.... Ce qui parait
extraordinaire, c'est que pénétré de cette maxime, l'on continue
d'aimer lorsqu'on est l'objet plaisanté.
Néanmoins cette bizarrerie doit être la marque d'une véritable
passion. Lorsqu'une àme, entourée d'une foule de tissus qui
redoublent sa chaleur et la rendent impénétrable, se sent mal
jugée sur quelques unes de ces enveloppes et par cela même
mal jugée, elle se réfugie dans elle-même et plus sévère que
le reste elle se juge2.
Selon les divers arrêts que chacun porte sur soi, voici ce qui
peut arriver. Alors il est des hommes qui se vengeront avec
toute la force des sentimens que l'on nomme vengeance; ils
haïront, s'ils le peuvent, et, comme ce payen mécontent de son
idole, ils la briseront avec une sourde rage, et c'est ici le cas
d'observer que la nature n'a refusé à aucun être les moyens
de se venger cruellement.
D'autres useront d'une vengeance plus magnanime ; ils ras-
sembleront toute leur énergie, aiguiseront leurs volontés, cher-
cheront ce à quoi la nature les a destinés, ils s'élèveront, bril-
leront, et mettront leur joie à se dire alors ? on me regrette.
Mais les caractères sont variés à l'infini. Celui dont il est
question n'embrassera pas le sentiment de la première ven-
geance, parce qu'il annoncerait que ce n'est pas à tort que l'on
a été dédaigné, et que du reste ce serait puéril et peu digne.
Elles [ces âmes] n'embrasseront pas le second, parce que ce
serait donner à des grandes choses une trop petite cause, et
s'il en a la force, ce dont je doute, il tachera de les accomplir
dans un but moins frivole.
Mais que feront-elles, [ces âmes?] Ici s'ouvre un autre ordre.
Ces âmes ne prendront point le parti trop extrême de... elles
se regarderont d'un air inquisiteur [et songeant que si elles
n'ont pu]3.
En examinant sa singulière organisation, voilà ce qui doit
arriver.
Une âme qui n'a jamais connu que les extrêmes agit toujours
avec ce sens, par conséquent, se voyant dédaignée, elle croira
1. Ces huit mots : qui jusqu'à de la ont été rayés par Balzac.
2. La phrase suivante, entre le mot et et le mot plus, a été rayée sur le
brouillon : « -Juge mal à son tour l'humanité et attend en silence l'occa-
sion de réformer cette pensée de dépit et l'occasion de se venger de...
réformer son propre jugement et les moyens de se venger... Mais la
vengeance, quoique rangée parmi les sentimens énergiques, déplaît à
certaines âmes nourries de douces pensées quoique l'on en pense d'après
certaines phrases. »
3. La phrase : Mais que feront elles jusqu'à n'ont pu est raturée sur le
brouillon.
LETTRES DE BALZAC. I6fl
l'être jugement et n'accusera jamais personne, si elle •■• mis
i ont son espoir '.
Deuxième brouillon.
Quand <»n a fail un thème pour sm vie, il est cruel de le
reconnaître impossible à suivre.
Quand égaré par l'imagination, on l'a construit brillant et
plein de charme, on peut se trouver désespéré.
Quand il est impossible d'en suivre un autre, la vie n'est plus
rien. Alors quelques-uns la quittent en réfléchissant à ce qu'est
la vie.
Que l'on suppose, une jeune àme : naïve, quoiqu'elle se soit
imprudemment trempée dans le vase des sciences; ignorante
néanmmoins, car elle ne fait que d'entrer dans le commerce du
monde; mais pleine de sentimens généreux, gave sans méchan-
ceté, aimante à l'excès; partant un peu friande de mélancolie
et de voluptés; d'abord exagérée dans tout, par suite de la
pente de l'imagination; puis, ayant reporté cette exagération
dans les sentimens qu'elle enfante; présomptueuse, folle, incon-
sidérée, ayant enfin tous les vices et, comme tous, les vertus
de son âge!
Cette jeune étourdie a regardé un instant dans le puits; elle
crut appercevoir la tête de la déesse qui s'y cache; peut-être
n'a-t-elle vu que la sienne!
Mais enfin, jeune, elle a osé juger la vie comme un vieillard
qui regarde en arrière. Elle a pensé que le plaisir en était
l'essence, et elle a cherché, choisi le plus grand des plaisirs,
elle en a fait son texte.... Elle n'a fait qu'obéir à la nature et à
son penchant tout en s'imaginant choisir. Dirigeant toutes ses
forces vers Famour et ses joies, elle en a fait tout son être, a
tout subordonné à cette unique passion, elle s'est couronnée
de roses et, dans la fleur du printems, pleine de sève et d'espé-
rance, elle s'est élancée. Elle a cherché, elle a trouvé. Mais son
élan fut arrêté par cet axiome : qu'il est impossible que Von aime
celui dont on peut plaisanter.
Déshéritée de ses espérances en regardant l'issue de cette-
tentative comme celle de toutes les autres, elle n'eut pas le
courage d'en appeler, et de surmonter cette pensée.
Qu'il soit permis de rappeler A. Chénier. Ce sera une preuve
d'humilité que de l'accoler à de la vile prose. Voici ses vers* :
1. Ces sept derniers mots « Si elle a mis tout son espoir » ont été biffés.
2. Les vers qui suivent ne sont point d'André Chénier, mais bien de
Balzac lui-même. Impossible de se rendre compte aujourd'hui s'il voulut
d'abord réellement citer des vers de l'auteur de la Jeune Captive, ou
1T0 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Au milieu d'un parterre un matin vit éclore
Sur un lys eneor frais des larmes de l'aurore
Un des fils du printems;
Par ses jeunes efforts, par ses doux mouveraens,
Sa prison est brisée :
Il marche sur la fleur, se nourrit1 de rosée,
Regarde le jardin,
Et d'un vol chancelant, naïf, enfantin,
Interroge ses ailes
Où resplendit l'éclat des couleurs les plus belles;
Il voit l'honneur de Flore, el de ses pas légers
Lui destine l'hommage, en rêvant de baisers
Une abondante fête.
La rose, en détournant sa gracieuse tête,
Insulte au papillon;
Il insiste. Bientôt, percé par l'aiguillon
D'une perfide abeille,
Il tombe et meurt au pied de la rose vermeille,
En regardant toujours
Ce rosier son tombeau, ce rosier ses amours.
III
[Villeparisis, ... 1822i]
Voici un passage de Théophraste que La Bruyère
ne put pas traduire, parce qu'il n'a paru que dans
l'édition faite sur le dernier manuscrit trouvé dans le
, Vatican; la lacune que laisse ce fragment se voit à
la page 17 de l'édition de Didot1.
essayer d'attribuer à ses propres strophes une paternité supposée.'
comme il l'a faij à cette époque pour tous ses romans de jeunesse.
[S. L. 8 sept. 189A.1
1. Balzac avait d'abord écrit : il en boit la rosée.
2. Inutile, sans doute, de faire remarquer que tout ceci n'est
qu'un petit roman inventé par Balzac pour essayer de changer
LETTRES DE BALZAC. 171
« S'il es! en morale un précepte que l'on puisse
regarder comme un axiome, c'est que l'on n'aime
jamais ceux qui donnent prise soit à la plaisanterie,
soil au ridicule.
« Ce qui paraît extraordinaire, c'est que des gens
pénétrés de celie maxime continuent d'aimer, bien
qu'ils soient l'objet plaisanté!
« Néanmoins cette bizarrerie est dans le cœur
humain, et, de plus, elle est la marque d'une passion
véritable; et cette sotte constance peut quelquefois
recevoir un salaire, à moins qu'il ne se joigne à la
mocqucrie un sentiment plus injuste.
« Il est des âmes entourées d'une foule de tissus
qui redoublent leur chaleur et les rendent impé-
nétrables. Il arrive qu'on les juge sur quelques-unes
de ces enveloppes, et alors on les juge mal.
« On les rebute en amour. Elles se réfugient en
elles-mêmes, et1.... »
IV
J'entreprends une tâche difficile. Vous le voulez,
il le faut*.
à son égard les sentiments de sa moqueuse amie. Il est bien
dans la note de ses travaux de jeunesse toujours attribués à
des personnages morts ou inconnus. [S. L.]
1. Ce prétendu passage de Théophraste est écrit au verso de
la lettre qui commence par ces mots : « Si vous êtes fidèle au
seul entraînement.... »
2. Voici le premier brouillon de cette lettre :
« J'entreprends une tâche difficile? vous le voulez? il le faut,
mais n'est-ce pas une cruelle plaisanterie que vous me faites
172 LA JEUNESSE DE BALZAC.
N'est-ce pas une cruelle plaisanterie que vous
me faites? et votre lettre n'est-elle pas déjà le fruit
amer d'un grand défaut? Quel plaisir une âme
généreuse peut-elle prendre à badiner un malheu-
reux qui vous demanderait de la pitié, afin d'exciter
un sentiment quelconque, si celui-là avait quelque
chose de consolant. Cette malignité féminine n'est-
elle pas un grand vice chez vous que je ne croyais
pas femme comme une autre?...
Vrous êtes fîère, très fière. Ne prétendez-vous pas
que, recevant ce que vous ne pouvez pas donner,
ce rabaissement vous empêche de me céder?
Cette hauteur de sentiment m'a plus charmé que
tout le reste de vos défauts et c'est un nouveau
chaînon que vous avez méchamment forgé.
Mais quel droit ais-je de vous déplaire? Suis-je
quelque chose pour vous? Et du reste, que me
fait à moi que vous soyez attrayante dans le monde
par l'esprit brillant et tant soit peu caustique que
vous y déployez?
Si vous étiez parfaite, vous aimerais-je? La per-
et votre lettre n'est-elle pas déjà le fruit d'un grand défaut.
Quel plaisir une âme généreuse peut-elle prendre à badiner un
malheureux qui demanderait de la pitié, si ce sentiment avait
quelque chose de consolant pour le moy aigri. Cette malignité
féminine n'est-elle pas un grand vice chez vous que je ne
croyais pas femme comme une autre. Ainsi vos défauts sont
d'être trop femme, trop séduisante1. Vous avez trop de fierté,
beaucoup trop, ne prétendez-vous pas.... ■
Ce brouillon est écrit au recto d'un feuillet contenant, au
verso, un fragment de Clotildc de Lusignan (7 lignes) qui com-
mence par: « Mes amis, croyez-vous que le diable doive perdre •
et finit par : « S'il vous faut un chef je vous en servirai et je
promets que ».
1. Ces neuf derniers mots ont été raturés par Balzac
LETTRES DE BALZAC. 17:.
fection est une divinité que l'on adore. Kll<k n'a que
des autels, et l'on se contente de les encenser.
V
Plus je vais et pius je vois que vous ne m'aimez
pas, que vous ne m'aimerez jamais, malgré ma
constance et malgré les formes sous lesquelles je
me présente à vous et c'est vraiment folie que de
persévérer. Toutes fois, je persévère1.
0 comme je me reproche d'avoir été chez vous
hier, mais, dans le dessein que j'avais formé de ne
plus vous revoir il n'entrait pas de vous persuader
que je ne vous aimais plus, et vous l'eussiez pensé
si j'avais mis de la mauvaise grâce à vous obéir.
J'ai préféré payer les frais de la guerre que de
faire croire à l'ennemi que je n'avais pas le courage
d'entrer en campagne. Il faut avouer cependant que
je suis mille fois plus gauche que le marquis du
Legs, et que tout autre à ma place, en vous voyant
hier vous aurait sauté au col.
Mais toute autre que vous se serait peut-être
autrement conduite, et je ne puis m'excuser qu'en
vous disant, et d'après ce que j'ai pu appercevoir
de mon caractère : la seule appréhension d'un refus
suffît pour contrebalancer toute la fougue des plus
violentes passions.
Cependant, voulez-vous que je vous prouve d'une
1. En tète de ce brouillon, trois lignes raturées.
174 LA JEUNESSE DE BALZAC.
manière évidente que vous ne m'aimez pas? et je
ne peux pas m'en plaindre car votre tenue dérive
précisément de ce qui est en question, savoir que
vous ne m'aimez pas, et il est philosophiquement
impossible qu'une femme qui n'aime pas se con-
duise comme une femme qui aime. — Or, vous
dites que je ne vous trouverais jamais qu'entourée
de vos enfans.
Vous calculez si mon attachement pourra durer
un an ou plus.
Vous croyez qu'il est facile de savoir mon secret
et que vos lettres peuvent être lues par tout le
monde.
Vous parlez des choses les plus charmantes avec
une négligence et vous y attachez aussi peu d'im-
portance que s'il s'agissait du sultan Saladin. Et
vous ne voyez pas que ce peu d'importance serait
une raison pour ne pas faire le malheur d'un ami
pour si peu de chose. Si peu de chose vaut bien
une amitié constante.
Sont-ce là des griefs, car je ne veux vous rap-
peler que ceux-là, dont un seul suffirait pour m'é-
clairer, si je n'étais pas sous le charme.
Grand Dieu, si j'étais femme, que j'eusse qua-
rante-cinq ans, et que je fusse encore jolie, ah,
comme je me serais conduite autrement que vous.
J'aurais d'abord tâché de deviner quel caractère
avait l'homme qui m'adorait (songez qu'il ne s'agit
que de moi femme) et, selon ce caractère, j'aurais
ou pris en plaisantant tout ce qu'il m'aurait dit, et
s'il avait persévéré, j'aurais entouré ma défaite de
tout le charme dune bonhomie sans prétention, ou
LETTRES DE BALZAC. 175
plutôt, je l'aurais, je crois, sincèrement aimé, quand
ce n'aurait été que par reconnaissance, et ne cal-
culant rien, parce que jamais l'amour n'a connu
Barème; je me serais livrée à ce sentiment, en
lâchant d'y retrouver, quant a moi, les délices du
premier âge, ses innocentes illusions, ses naïvetés
et tous ses charmans privilèges.
Je vous ai dit que j'avais fait un thème pour ma
vie que ma jeune imagination a été étourdie. Voyant
dans le puits, elle a cru y voir la tête de la déesse
qui s'y cache; peut être n'a-t-elle vu que la sienne
propre.
Enfin, elle a cru que le plaisir était le seul texte
à suivre, le seul chanvre dont on doit faire sa toile.
Elle a dirigé toutes ses forces de ce côté, elle
y a mis son bonheur, et, à la première tentative,
elle échoue, et elle échoue devant une charmante
personne qui pense comme elle!
Quel triste gage pour l'avenir, que d'espérances
renversées, surtout quand j'ai la présomption de
croire qu'auprès de la plus jolie et de la plus fière
des femmes j'en aurais assez fait pour être mille
fois plus heureux.
Quel problème pour moi qu'une femme qui re-
trouve, dans le commencement de son automne, des
jours aussi beaux que ceux de l'été, qu'une femme'
desprit qui juge le monde tel qu'il est, se refuse à
cueillir la pomme qui perdit nos premiers parens.
Mais peut-être je m'abuse; il se peut que j'aye
plus de torts que vous ; ayez moins de torts que je
1. Membre de phrase biffé : « Convaincue que le plaisir et les
amours sont les seules.... »
170 LA JEUNESSE DE BALZAC.
ne vous en donne, et que j'en aie plus de mon côté.
Je conviens que la dernière chose à laquelle je
ressemble, c'est à un amoureux, je n'en ai ni le ton,
ni les manières, je n'ai ni grâces, ni hardiesse,
rien d'agressif, en un mot je suis comme ces jeunes
filles qui paraissentgauches, sottes, timides, douces,
et qui cachent sous ce voile un feu qui, une fois
qu'il aura franchi les cendres qui le couvrent, dé-
vorera le foyer et la maison, et tout!
Au surplus, jamais je ne peindrais mieux mon
caractère qu'il n'a été dépeint par un grand homme.
Relisez les Confessions et vous l'y trouvez tout au
long. Je ne vous dis pas cela par amour propre,
mais parce que cela est la vérité pure, et que je ne
suis pas le seul placé dans la catégorie de ce carac-
tère-là.
Vous ferez ce que vous voudrez, tout ce que vous
ferez sera bien. Mais de grâce, ne m'en voulez pas
de mes gaucheries, car si je voulais vous détailler
ce que j'aurais dû faire, vous verriez que je n'ignore
pas mes torts.
VI
[Villeparisis, ... 1822.]
Il faut avouer que le hasard, que l'on est convenu
d'appeler Dieu, fut bien bizarre quand, en me refu-
sant le don de la parole, il m'accorda, par surcroît,
une triple dose de timidité.
i.i;i 1 lus DE BALZAC. n:
Ne serait-ce pas plutôt un bienfait que d'avoir
posé tant de barrières autour d'une passion fou-
gueuse et qui règne en souveraine, car toutes les
autres semblent lui l'aire leur cour?
Sans tout cela je vous aurais dit de vive voix (pie,
jeune et partant présomptueux, et vous ayant
observé qu'un mot de vous serait pour moi la plus
grande faveur, j'avais déjà regardé votre lettre
comme un de mes fétiches et son contenu comme
un gage inespéré qui m'entraînait à vous aller
achever les réticences que vous m'avez reprochées,
car j'avoue à ma honte que l'amour propre m'inter-
prète ce passage de votre lettre.
Vous me ferez plaisir de venir me voir. J'ai
congé. Je pourrai caus[er] plus à l'aise. Vous me
comprendrez.
Ma timidité et quelque chose de plus que la
mélancolie m'ont ressaisi, lorsque je vous vis
entourée de vos enfans, alors je vous ai comprise,
j'abdiquai l'espérance, la parole expira sur mes
lèvres et mes sentimens se réfugièrent dans le plus
profond de mon cœur en voyant que cette invita-
tion ressemblait aux feux follets qui égarent le
voyageur1.
1. Celte phrase, rayée par Balzac dans ce brouillon de lettre,
a été utilisée en partie dans une autre. Voir p. 179 : « Il doit donc
s'arrêter, mais avant de faire un pas en arrière, qu'il lui soit
permis de se faire comprendre à son tour.
<• Entre deux personnes qui coïncident dans leurs idées philo-
sophiques et qui s'élèvent à une certaine hauteur, je pense que
le langage vulgaire doit être banni, et sans parler de martyre,
de chaînes, de feux, d'ardeurs, de flammes, etc. >•
Autre brouillon : « ... Entre deux personnes qui ont quelque
coïncidence dans les idées philosophiques et qui s'élèvent à
12
178 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Il doit donc s'arrêter mais avant de faire un pas
en arrière et de quitter cette main pleine de fleurs
qu'il crut pr lui, qu'il lui soit permis de dire à son
compagnon d'un instant :
Adieu! ... Je t'aimais!... Mais ne me retournai-
je pas souvent?
Adieu!... le peu de route que nous avons fait
ensemble a fait naître en moi plus que de l'amour.
Un moment j'ai cru... !
Si tu as donc compris mes regards, à ta ren-
contre pourquoi m'avoir laissé thésauriser d'im-
menses désirs inapaisés. Si tu ne les vis pas,
sache...
Adieu, je t'aimais et vais [continuer] dans
la vie mais combien de fois me retournerais-je
jusqu'à ce que je ne puisse que te perdre de vue.
Adieu donc! et alors encore chercherai-je à te
revoir. Il fît quelques pas, il se retourna et dit : tu
ne réponds rien?
Ainsi je ne vous verrai plus, cependant sachez
une chose que tel [le] soit la nature du service que
vous réclamiez de moi, hors de vous voir et de
vous parler, comptez que vous ne trouverez jamais
de génie de fée plus prompt et plus obéissant
pour vous, je tâcherai de reculer les limites de
mon pouvoir.
Il est encore une chose qu'il faut que vous appre-
niez, c'est que votre plus grand charme, c'est que
je ne vous crois pas heureuse, et que je fuis les
une certaine hauteur, qu'il me soit permis de rejetter ce lan-
gage vulgaire et banal de flammes, de chaînes, d'ardeurs, de
feux et pour vous dire tout simplement que je vous aime... ••
LETTRES DE BALZAC. 17fi
heureux; mon âme a toujours eu un secrei penchant
à s'épanouir avec les affligés.
Encore un mot. Je relis pour la cinquième fois
votre lettre, vous y avez l'air embarrassée et je ne
suppose pas (jue vous puissiez l'être. Soit que vous
teniez à moi, soit que vous n'y teniez plus, à mon
tour je pourrais dire: « Expliquez-moi quelles sont,
hors le mépris, les raisons que vous allégueriez
pour ne pas condescendre a mes désirs.
Advienne que pourra. Je dépose à cet endroit de
ma lettre toute mon Ame et toutes mes pensées,
que les vôtres s'y
dont le cœur est plein
de trésors ! mes sentiments.
Adieu, trois fois adieu. Votre souvenir sera pour
moi comme celui de la terre natale.
VII
[Villeparisis, ... 1822.]
Vous voir! J'y renonce à jamais, le voyageur
s'est retourné, c'est pour toujours, il ne cherchera
même pas maintenant à regardera la place où vous
fûtes. Pourquoi?
Je vais tout expliquer, mais je parle pour la der-
nière fois; et je serai diffus. Vous me pardonnerez
en songeant que c'est un adieu, et un adieu sem-
blable à celui d'un mourant à ses amis. Et que de
1. Mots illisibles.
180 LA JEUNESSE DE BALZAC.
choses à dire! Je pourrais presque mettre là : ceci
est mon testament1.
La première fois que je vous vis, il s'est....
Entre deux personnes qui coïncident dans leurs
idées philosophiques, et qui s'élèvent à une cer-
taine hauteur, je pense que l'on doit banir ce
langage vulgaire, destiné à combler le vuide des
idées. Ainsi créant pour la morale une espèce
d'algèbre, je vais tâcher de vous rendre mes senti-
mens sous une expression simple et pour ainsi dire
formulique.
Ainsi, dédaignant la poésie, le sentiment, ce
genre dont on revêt ses paroles, je vous crois assez
forte pour voir les idées à nu ; traitons de l'amour.
Et il n'existe que deux sentimens qui méritent
ce nom : celui des mères pour leurs enfans et celui
que la nature a posé chez nous comme principe
conservateur.
Ainsi, quand j'ai dit : je vous aime, voilà ce que
cela signifie.
La première fois que je vous vis, mes sens furent
émus, et mon imagination s'alluma jusqu'au point
de vous croire une perfection, je ne sais laquelle,
mais enfin, imbu de cette idée, je fis abstraction de
tout le reste, et ne vis en vous que cette seule chose.
1. Après cette phrase, les sept lignes suivantes raturées par
Balzac : « Je commencerai par vous apprendre à vous connaître
vous-même et je vous rehausserai à vos propres yeux, car
remarquez que je suis le seul juge de l'effet que vous avez
produit sur moi.
« Du premier moment que je vous vis, je logeai dans ma
tète l'idée d'une certaine perfection indépendante et des formes
et d.... »
LETTRES !>!•: BALZAC. 1H1
Cette idée première ;< reçu depuis un développe-
ment Immense, c'est-à-dire qu'autour de ce désir
premier se son! groupés une foule d'autres désirs,
qui forment maintenant chez moi une masse, et
celte passion ne voyant qu'un but y rattache tout et
justifie fou!. Ainsi vos 4r> ;ms n'existent pas pour
moi, ou si je les apperçois un moment, je les regarde
comme une preuve de la force de ma passion, puis-
(ju'à votre compfe ils devraient en rompre le
charme. Semblable à l'herbe avec laquelle les
nègres cassent le fer, ainsi votre esprit, vos ma-
nières, votre accent, votre œil, votre pied enfin,
que sais-je? la moindre chose de vous est pour moi
un phénomène !
Gomment en suis-je venu à ce point? C'est par
l'habitude, par le train qu'a pris ma pensée de tou-
jours vous environner, enfin parce que vous voyant
sans cesse, sans cesse ce désir se réveille et a
pris une intensité qui me subjugue, et c'est une
chose réelle puisque j'ai vu depuis trois mois des
jolies femmes, des jeunes femmes, des femmes
spirituelles, enfin des Laïs et que rien de tout cela
ne m'a fait émettre un désir et que ' depuis 6 mois
je ne pense qu'à vous; il ne dépend pas de moi de
ne pas le faire, parce que je ne suis pas libre.
Ainsi votre âge, qui vous rendrait ridicule à mes
yeux si vraiment je ne vous aimais pas, est au con-
traire un lien2, une chose piquante qui, par sa
1 . Ce membre de phrase a été rayé sur le brouillon : vous ne
serez pas pour moi un passe tems puisque c'est une passion réelle.
2. Phrase supprimée : « Ne craignez jamais que je vous le
reproche.... »
182 LA JEUNESSE DE BALZAC.
bizarrerie et son contraste avec les idées ordinaires,
m'attache.
Mais que vous soyez bien ou mal, laide ou jolie,
cela ne vous regarde pas, et ce sont les seuls rap-
ports que vous n'avez pas osé empêcher : la ten-
dresse que vous pfrisez], sur laquelle vous basez
bien faussement l'amour, car l'amour n'est qu'une
espèce de tendresse. C'est moi qui suis le seul juge
de votre beauté; telle chose que vous dira votre
miroir, mon imagination le démentira1 toujours
parce que tant que je vous aimerai, et lorsque,
devenue plus âgée, cet amour aura cessé, l'amitié
qui lui succédera n'a point de visage et est toute
incorporelle.
Mais pour, dans ce moment, n'avoir que de l'ami-
tié, je ne saurais, cela m'est impossible et voilà
pourquoi je ne puis plus vous voir, puisque vous
rejettez mon hommage.
Mais j'entends que vous allez vous récrier et
dire : « la morale, les mœurs, je deviendrais mépri-
sable! »
J'ai honte de vous établir le contraire, car c'est
croire que vous n'êtes pas capable de vous le prou-
ver à vous-même. Si vous m'aimiez, ce serait déjà
fait. Au total, raison de sage froid[eur]. Ou vous
avez des principes philosophiques, ou vous n'en
avez pas!
Si vous les avez tels que je les suppose, la con-
séquence est que nous mourons tout entiers, qu'il
n'y a ni vice ni vertus, ni enfer, ni paradis, et que
1. Phrase biffée : <• Et je vous assure que vous réapparaissez
toujours charmante. »
LETTRES DE BALZAC. 183
la seule chose qui doive nous intéresser, c'est cel
axiome : prends le plus de plaisirque bu pourras.
Si tels ue soûl, pas vos principes, je pourrais
alors [nie] contenter de vous citer l'exemple de
lous les tems passés, mais voici le seul raison-
nement] que je vous expose : nuire à un autre esl
un crime. Ce crime est le mien. Mais cel autre ne
m'étail pas ami primitivement, ou, en d'autres
termes, est-ce ma faute si la société est assise sui-
des bases contraires à la nature? Au reste, la
preuve que l'homme a réfléchi depuis long tems à
cela, et que je ne suis pas le premier, c'est qu'il y
a des moyens de ne nuire à personne.
Et qu'est-ce que je vous demande? Rien, si ce
n'est la permission de vous aimer sans que vous
vous en fâchiez.
Quant au mépris, je suis, je l'avoue, dans le plus
grand étonnement sur cet article. Avez-vous bien
pesé ce qu'il voulait dire? Il signifie que vous
m'estimez bien peu en pensant qu'en vous donnant
à moi vous seriez avilie, tandis que, dans mon
idée, je crois que nous en serions en quelque sorte
honorés l'un et l'autre. Quant au reste de l'uni-
vers, je le regarde comme un néant. Si je savais
pouvoir être jamais coupable du crime de méses-
timer ce que j'aime, cela seul suffirait pour abréger
ma vie, déjà si chancelante.
En vous disant ce que je pensais c'est me mettre
dans la nécessité de ne plus vous revoir, car je
vous avoue que je n'ai pas été une minute auprès
de vous, sans en être tourmenté, et en avoir le cer-
veau troublé. Ce délit que vous me reprochez est
184 LA JEUNESSE DE BALZAC.
une conséquence de mon ivresse. Vous trouvez ces
termes trop forts peut-être, ils ne le sont pas assez.
Ce que j'ai ressenti ce matin en vous voyant entrer
me l'a prouvé, mais ce qui m'a prouvé que je ne
dois plus vous voir, c'est la négligence avec la-
quelle vous m'avez jeté votre lettre!
VIII
[Villeparisis, ... 1822.
Quand je ne vous vois pas, faut-il que je vous
écrive? Telle est la tournure de mon esprit qu'il
m'est impossible de ne plus penser à vous. 11 n'y
a plus pour moi dans le monde qu'une idée, il me
semble, et mon imagination caresse cette idée avec
ardeur, avec complaisance même, il me semble
qu'il n'y a plus qu'une chose qui s'interpose entre
nous, c'est que vous avez aimé1.
En effet, je crois que, quant à vous paraître ri-
dicule à vous même, vous seriez assez grande, si
1. Le brouillon de cette lettre est écrit sur le revers d'une
page commencée, et effacée du roman : Clotilde de Lusignan.
En tète de ce brouillon, onze lignes raturées par Balzac, dont
les cinq premières ne peuvent se lire; les six dernières sont
les suivantes :
« Si je ne vous vois pas, il faut que je vous écrive, car telle
est la tournure de mon esprit que je ne puis pas m'empècher
de penser à vous.
« Je songe sans cesse à ces murs d'airain que vous élevez
entre nous, et mon imagination se plaît à les détruire. Vous
avez aimé, vous avez connu l'amour, et vous ne coinpatis[sez
pas], n'avez auc[une pitié?], no voulez pas jetter un gâteau.... •
LETTRES DE BALZAC. 185
vous m'aimiez, pour vous sacrifier. Quant à perdre
aux \ <nx du monde votre lustre et n'avoir plu-»
le droit de parler morale, pour que cette raison
existât, il faudrail supposer que le secret de nos
cœurs fut divulgué. Et par qui?... Ce mot seul
esl une réponse assez forte. .le ne vois plus que
voire fierté de prétendre que, recevant ce que vous
ne pouvez donner, vous vous trouveriez rabaissée.
J'avoue que cette hauteur de sentiment, que je
n'ai découverte que récemment, m'a plus encore
charmé que tout le reste, et je ne sais si ce n'est
pas un nouveau chaînon que vous avez forgé.
Mais qu'ai-je à prétendre sur ce qui n'existe plus
que dans le souvenir? Vous n'êtes comptable que
du reste de votre vie, et le passé n'appartient à
personne. Pour moi comme pour vous, vous
n'existez que de ce matin. La vie est un vaste po-
lype qui meurt et se renouvelle à chaque minute.
Ainsi, cet amour antérieur n'est rien et, pour
peu que vous réfléchissiez, vous verrez mille
exemples de grandes passions, de passions véri-
tables, nées dans l'automne de la vie après la fou-
gue de désirs qu'amène le printemps. Ainsi, je ne
vois point d'obstacles et il est une perspective
sur laquelle je jette toujours ma vue1.
1. Les lignes qui suivent ont été biffées :
« Car il est dans la nature qu'un homme qui chemine triste-
ment dans un champ regarde avec plaisir un bocage enchan-
teur [qui]
Négligemment étale
De beaux tapis de fleurs
Que l'amante du beau Céphale
A couvert de ses pleurs,
Je crois que toute éloignée que vous soyez de vous y
180 LA JEUNESSE DE BALZAC.
J'attribue, Madame, à ce que j'appelle vos défaus
la manière bizarre dont je vois les choses.
Quand on regarde à travers un prisme, il est
tout simple que les couleurs soient plus vives, les
rayons en sont séparés, et l'on voit mille choses là
où d'autres ne voient qu'une lumière tout unie l.
Votre premier défaut est une amabilité pleine
de tant de g [race].
IX
[Villeparisis, ... 1822.]
Les deux lignes que vous m'avez fait l'honneur
d'écrire sur l'enveloppe de mon livre sont suscep-
tibles de trop d'interprétations pour que je ne doive
pas choisir celle qui m'est défavorable : vous en
avez agi comme avec les traîtres, que l'on pend
après s'en être servis. On ne les remercie même
pas de s'être avilis1.
Dans toute autre circonstance, Madame, deux
mots de vous m'auraient paru la faveur la plus
précieuse. M'ayant presque entraîné à me donner
un tort, il eût été généreux de m'en consoler. Mais
j'ai le droit de vous écrire de même que l'accusé se
défend ; en effet, n'est-ce pas se mépriser soi-même
reposer, n'est-ce donc rien qu'un ami fidèle sur lequel on a tous
les droits que la nature peut donner sur un être... •>
1. Autre passage rayé : « Il vous est bien facile de plaisanter.
N'est-ce pas votre premier défaut. »
2. Ici quatre lignes fortement raturées.
LETTRES DE BALZAC. \*~>
(|ue de regarder des ouvrages pareils comme des
moyens de que l'on s'en remette [à eux] du
soin de cultiver cette masse de pensées divines
que l'on baptise du nom d'amitié, de sympathie,
d'amour, etc. et que lame seule peut échauffer.
Ma position n'est-elle pas celle d'un courtisan
qui déplut à Louis XIV. Ils s'exilaient, Madame, et
l'on sait que la beauté pardonne encore moins
que le pouvoir1.
X
[Villeparisis, ... 1822.]
Vous aurez, en un seul moment, empoisonné toute
ma vie. Rien, pas même vous, ne peut me sauver
du malheur qui commence pour moi, car rien
n'ôtera de mon souvenir les quatres lignes de ce
matin. Elles m'ont glacé. J'ignore ce qui m'enlève,
à la fois, une amie et un ami en espérance.
Tant de réflexions, tant de projets, tant d'idées,
se pressent dans ma tête que je ne sais si j'existe.
Ah! Madame, que de choses vous avez ensevelies
d'un trait de plume!
Au surplus, je m'interdis même de m'expliquer
ce qui m'arrive. A plus forte raison dois-je vous le
taire. Quoiqu'il en soit, je crois vous avoir compris.
1. Dans le haut de ce brouillon on lit : « Que si je n'avais pas
qu'à me justifier? — Que si j'osais continuer? — Que ne dirais-
je pas? — ou plutôt que dirais-je! »
188 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Je me suis prononcé mon arrêt; il est sévère et j'y
souscrirai.
Puisque1.
XI
[Villeparisis, ... 1822.]
Je crois comprendre votre lettre. C'est un ulti-
matum. Adieu, je désespère et j'aime mieux la souf-
france de l'exil que celle de Tantale. Pour vous
qui ne souffrirez rien, je pense que ce qui peut
m'advenir vous est indifférent. Puissiez-vous croire
que je ne vous ai jamais aimée! Adieu2.
1. Le feuillet est mutilé dans le bas, et la déchirure ne permet
plus de lire que : Je suis extrêmement... c'est là ce que... et
au-dessous : quelque. Au verso, de la main de Balzac : 1515 francs
et au-dessous : 1574.
2. Voici un premier brouillon de ce billet :
<-■ Adieu! qu'il est facile aux riches de refuser l'indigent, que
les gens sans désir....
« Adieu, ce n'est pas vous qui souffrirez et puissiez-vous
ignorer ce qu'il m'en coûte. J'entends votre lettre : c'est un
ultimatum.
« Adieu, je désespère et j'aime mieux la souffrance de l'exil
que celle de Tantale. Pour vous qui ne souffrirez rien, je pense
que ce qui peut m'advenir vous est indifférent. »
.Au verso, Balzac a calligraphié ces mots : « nuhu — habile-
ment — Bo — hulma — Bospliore — lui — ulémas. •>
LETTRES DE BALZAC. iw»
XII
[Villeparisis, .. 1822.]
Je retire ma parole daller vous voir sans vous
dire que je vous aime.
Je ne vous verrai plus, et je vous promets sur
l'honneur, de ne jamais dire un mot sur vous qui
ne soit à votre avantage, et même de vous défendre,
sans chaleur toutes fois, car on pourrait croire ce
qui n'est pas : je vous fais cette promesse, car
dans le nouveau plan de vie que j'embrasse, vous
auriez pu croire que, n'épargnant personne, vous
n'auriez pas été épargnée1.
XIII
Que de choses j'ai à vous dire... je m'expliquerai
sans ordre comme je parlerai sans flatterie, vous
me l'avez à jamais interdite.
J'ai du vous paraître bien incivil, quand, en vous
quittant, je ne vous ai ni remerciée de votre obli-
geance, ni reconduite jusque chez vous.
Quand on exigera du sang-froid d'un homme qui
perd tout, quand on décrétera qu'il est beau de
négliger la réputation de ce qu'on aime, et qu'on
1. Dans le bas du brouillon, quatre lignes très raturées.
190 LA JEUNESSE DE BALZAC.
sera convenu que les paroles sont tout en fait de
sentiment, je serai coupable!
Vous m'avez dit que vous m'aimeriez si vous
étiez jeune et sans amour1. Il y en a beaucoup
qu'une telle réponse satisferait. Quant à moi, elle
m'a condamné au silence et à une solitude pleine
de vous.
Vous trouverez dans Sterne la demande suivante :
« Si la nature, en tissant sa toile d'amitié, a entre-
lacé dans toute la pièce quelques fils d'amour et
de désir, faut-il déchirer toute la toile pour les
en arracher? »
Vous, Madame, vous voulez détruire notre tissu
avec votre ciseau! Voyez tout ce que je perds! Une
amie fidelle est le vœu éternel de mon âme; elle ne
peut exister sans cela. J'ai besoin d'un cœur dans
lequel je déverse ce luxe de sensibilité, sorte de
chaleur qui finira par me consumer ! Peut-on arriver
à l'intimité sans se lier d'une manière indissoluble?
Je laisse à votre imagination concevoir comment
cela ne peut pas être autrement. Je vous avoue que
ma pensée erre, en y songeant, dans un labyrinthe
délicieux, que vous parcouriez aussi souvent. Je
sais seul quel charme cette union aurait répandu
sur une partie de ma vie, comme sur la vôtre.
Enfin, vos enfans arriveront à un âge où un
fidèle ami est le trésor le plus précieux que l'on
puisse avoir pour les garantir d'une foule de pièges,
il faudra qu'on les guide dans la vie. Il est des
pères que leur âge ou leur caractère rendent inha-
1. Balzac avait d'abord écrit : Si vous aviez 36 ans, mai?; il a
biffé ces cinq mots.
LETTRES DE BALZAC. 191
biles à cette tâche délicate, qui commence lorsque
les mères ont fini la leur. Quel plaisir j'aurais eu h
remplir un devoir, qui serait devenu pour moi un
plaisir!
De quoi parlé- je? N'en aimeriez vous pas un
autre?...
Cependanl, si vous redeveniez libre, songez,
songez à moi! Mais comment puis-jc me flatter de
vous plaire? J'ignore l'art futile de ce qu'on nomme
la galanterie.
Ce que j'appelle mon cynisme, que vous m'avez
reproché, est plutôt un écart de mon imagination
qui se trompe et l'effet d'une force qui, n'étant pas
dirigée, se porte indifféremment sur tout. Je suis
la simplicité même, et je m'en glorifie. Je rougirais
d'être ce qu'on nomme : fin, et j'ai encore de la
candeur, plus qu'on m'en accorde1.
1. Après le mot candeur, Balzac avait écrit : bien qu'effronté.
Il a rayé ces trois mots.
Premiers brouillons.
1° Je me figure que je suis à vos yeux un être très ridicule
et qui ne pourra jamais vous plaire. Je me condamne au silence
et vous jugez si je n'ai pas d'empire sur moi et....
2° Je dois être à vos yeux un être très ridicule, et je doute
plus que jamais de pouvoir vous appartenir par un lien quel-
conque....
3° Si la nature en tissant sa toile d'amitié a entrelacé dans
toute la pièce quelques fils d'amour et de désir, faut-il déchirer
toute la toile pour les en arracher? Vous trouverez cette
demande dans Sterne, et je vous la soumets parce que....
Vous m'aimeriez si....
4° D'après ce que vous m'avez dit je ne dois plus vous faire
de complimens, ni vous louanger. Aussi, pour cela, vous vous
en appercevrez.
Je me figure être à vos yeux bien ridicule, et cependant je
Ift2 LA JEUNESSE DE BALZAC.
C'est cette candeur qui me fait rester, même per-
suadé que je suis que vous n'avez pour moi aucun
sentiment dans lequel il y ait quelque chose qui
admette la familiarité et la joyeuserie de l'âme, et
la folâtrerie.
Je dois vous remercier d'une chose. C'est de
m' avoir fait connaître Sylla*, et combien il y avait
de loges aux Français, aux premières, aux secondes,
et aux troisièmes. J'ai parcouru toute la salle sans
vous y trouver.
Je vous envoie la lettre de mon libraire pour
vous prouver que si Hérodote n'est pas venu, il n'y
a pas de ma faute.
XIV
Jeudi [... 1822. J
Vous avez trouvé une intention dans la figure
bizarre que j'ai tracée pour indiquer la lettre qui
vous était destinée, à mon tour je puis dire que
ne puis m'empêcher de vous aimer. Mais je puis du moins me
vouer au silence, et me réfugier dans une solitude pleine de vous.
Si je romps mon silence, c'est pour vous faire observer que
lorsque je vous ai quittée, j'ai semblé commettre une grossiè-
reté impardonnable, une faute dans tous les sens, en ne vous
présentant pas ma main pour vous conduire chez vous, et en
ne vous remerciant pas de votre obligeance.
Quand on exigera du sang-froid d'un homme qui perd toute
espérance, je serai coupable.
Quand il sera décrété que ceux qui aimeront n'auront aucun
soin....
1. Sylla, tragédie en cinq actes par M. de Jouv, représentée
pour la première fois, sur le Théâtre-Français, le 27 décembre
1821.
LETTRES DE BALZAC. 193
vous n'avez pas sous les yeux le Sterne et sou aven-
ture avec Marie.... Vous ne m'aimez plus, toul me
L'annonce. Je ne dois pas attendre de l'amour de
vous.
Aimer, c'est sentir autrement que tous les autres
hommes, et sentir violemment ; c'est vivre dans un
monde idéal, magnifique et splendide de toutes
les splendeurs; c'est ne connaître ni le tems ni ses
divisions, ni le jour ni la nuit, ni hiver ni printems;
le jour et le printems sont la présence de l'objet
aimé; il n'y a dans la nature qu'un seul endroit,
c'est le lieu où l'on se voit, un seul individu celui
que l'on aime, le reste n'est rien !
Aimer, c'est quitter son existence passée et
future et présente pour en adopter une nouvelle.
C'est la sienne, penser comme il pense; avoir des
milliers d'idées quand nous sommes loin d'elle, et,
quand on la voit, n'en pouvoir exprimer une seule;
mettre de l'éloquence dans tout, dans un geste, un re-
gard, un mot. C'est être transporté de bonheur d'une
niaiserie, accablé de chagrin d'un signe équivoque.
Aimer, c'est se confondre tellement qu'il n'y ait
pas trace d'individualité, c'est vivre de la vie d'un
autre, ne rien négliger pour embellir cette vie,
trouver de la douceur dans les larmes, dans l'abais-
sement et abjurer même sa croyance, mourir même 1
Il en est qui trouvent ces sacrifices trop faibles et
qui vont jusqu'à croire que celui de l'honneur n'est
pas assez '.
Aimer, c'est faire croire en soi, et se rendre digne
1. Membre de phrase illisible.
lOi LA JEUNESSE DE BALZAC.
l'un de l'autre par les plus nobles efforts; c'est
quand on a tout fait, croire n'avoir encore rien fait;
rendre sa bonté, sa foi, et les marques de son
ajmour] aussi innombrables que les graviers de la
mer, faire que chaque sentiment soit une goutte
d'une mer inépuisable !
Aimer, c'est l'exaltation de tout notre être, l'ins-
piration constante d'un poète, en la portant dans
le cœur et dans la vie, c'est nager dans l'univers,
voir la nature autre qu'elle est, être en contra-
diction perpétuelle avec toutes les idées reçues, et
trouver un ciel affreux lorsque tout le monde le
trouve sans nuages, se plaire dans une tempête
quand chacun tremble, alors les sentiments de
l'homme ont une espèce de majesté, et jettent sur lui
quelque vestige de ce qu'on se figure de la création.
Alors il se resserre, et se place en dehors de la
création; il n'est plus un vil animal; alors on lui
pardonne, alors on l'admire parce qu'il est perdu,
loin de la terre, dans les cieux, et qu'il est rare d'y
aller; un tel amour est une vie dans la vie. C'est le
chant, le premier désir de toute créature.
Cet accord de toutes les forces n'arrive qu'une
fois, ainsi qu'une seule fois l'on aime à vingt ans,
ainsi que l'on ne vit qu'une fois, que l'on ne meurt
qu'une fois, que... !
Je crois être arrivé à cet a[mour] violent, idé[al]
pour vous, mon imagination s'est élancée avec tout
ce que *, lui a don|né] de force '
que je suis malheureux; il le veut énergique[ment|
1. Mots illisibles
LETTRES DE BALZAC. 195
comme si le Destin des Anciens régnait encore.
Je me sen[tirai] heureux si je me suis trompé,
heureux si je puis rencontrer tout ce que j'ai
remplacé en vous, avec tout ce que vous disiez
vous manquer.
Je ne le crois pas. Je ne cherche pas ;i savoir.
Et puis, cela serait; je ne dois pas compter sur
une telle faveur. Mon écorce est désagréable, et ce
n'est pas sur le coup que l'on découvrit que l'arbre
de Java donnait du baume.
Laure, voilà les derniers mots que je me permets;
ce dernier pas dans la vie de bonheur qui s'offrait
à moi, se fait avec délire? Cette lettre est sortie
de mon âme brûlante, et la première plume qui a
rendu mes idées est brisée, le papier est percé.
Adieu, désormais je ne t'écrirai plus que comme
à une amie. Encore, je te cacherai le tiers, la moitié
de mes sentimens puisqu'il te faudrait ne plus être
un ami ! et alors j'en meurs!...
Dès aujourd'hui je dis vous, je dis : madame,
pour toujours, et jamais ma plume ni ma langue ne
diront une idée qui ne soit de la plus sincère
amitié. Seulement, je supplie que l'on respecte le
malheur, et qu'on ne se permette jamais de sou-
lever le masque qui me couvrira, puisque je le
garderai toujours.
Ainsi, la cendre est jettée sur le feu; il se cour-
rouce et lance ses dernières flammes; bientôt, il
sera couvert, mais alors il ne faudra pas le plaindre
de sa couleur terne et grise, et en voyant le lys
coupé sur la tige, il ne faudra pas s'écrier: quel
dommage !
190 LA JEUNESSE DE BALZAC.
XV
[Villeparisis, ... 1822.1
Pensez-vous à moi, autant que je pense à vous,
m'aimez-vous autant que vous le dites, je ne sais
pourquoi, depuis j'en doute1.
Que vous étiez jolie hier, bien des fois je vous ai
rêvée brillante et pleine de grâces, mais j'avoue
qu'hier vous avez surpassé votre rivale, la solitaire
création de ma pensée et, le doux sourire que je
m'imagine excepté, vous resplendissiez de toute la
beauté idéale que je vous prêtais si largement,
désespérant vous y voir atteindre! Ne me parlez
plus de votre âge, car j'en rirais, mais ce serait
une mauvaise plaisanterie, et mon compagnon
boiteux me disait lui-même que vous ne paraissez
pas 30 ans!
Convenez que c'était là cette toilette qui fut
reserrée dimanche et qu'hier vous ne l'avez mise
que parce qu'elle ne pouvait pas mètre imputée,
et que vous vouliez m'en faire jouir et compenser
par là l'injure des papillotes.
Mais, pour me rendre tout à fait heureux, il fallait
me dire lorsque j'arrivais un bonjour aussi tendre
que le bonsoir que j'entendis.
Jamais ce mot, ce simple mot, et votre accent
1. Dans le haut de ce brouillon, trois lignes biffées; Balzac y
a également calligraphié ces mots : 1 hélas — Marg.
LETTRES DE BALZAC. W7
ne sortiront d<> ma mémoire. .I<v crois l'entendre
encore, el vous me paraissez ignorer à quel point
je vous aime puisque vous me'.... i
0 soyez, à jamais.
Je ne pourrai jamais assez vous voir, jamais
assez vous parler Je suis triste sans savoir
pourquoi, et comme je suis triste même en pensant
à vous, il faut que ce soit une maladie.
Tout ce que je sais, c'est que depuis ces dix jours
où il ne s'est pas écoulé une minute pendant la-
quelle je n'aie pensé à vous, je me suis dit que je
ne pourrais jamais assez vous voir au gré de mes
désirs, que vous ne m'aimez pas, que vous ne
pensez pas à moi autant que je pense à vous, que
vous ne me rendrez jamais heureux, et de ces
idées s'est formé un nuage qui s'est étendu sur
mon imagination et l'a rembrunie.
1. Autre brouillon de cette lettre :
« Que vous étiez jolie hier!
« Ah! que vous étiez jolie dimanche. Souvent je vous ai rêvée
brillante, pleine de grâces et de ce charme qui résulte de
l'accord d'une âme divine (?) et des attraits, mais j'avoue que
vous avez surpassé votre rivale, cette solitaire création de ma
pensée amoureuse et en exceptant le doux sourire que j'ima-
gine errer sur vos lèvres, vous resplendissiez de toute la beauté
idéale que je vous accorde si libéralement quand je songe à
vous en votre absence.
« Être là, vous voir ainsi, et se trouver entouré de gens qui
surveillent les regards comme des commis des douanes, c'est
vraiment un supplice; j'aurais donné de bon cœur une portion
de ma vie pour n'être pas troublé dans mon ivresse; à peine
ais-je punie reposer un moment dans mes propres sensations.
« Convenez que cette toilette était la même qui fut naguère
resserrée avec une sainte horreur, et que vous ne l'avez mise
que parce qu'elle ne pouvait pas m'ètre imputée.
« Pour me rendre tout à fait heureux il fallait me dire lorsque
198 LA JEUNESSE DE BALZAC.
XVI
[Villeparisis, 1822.]
Laure est un nom chéri pour moi, c'est un nom
qui s'est offert à moi jusqu'à présent comme la
réunion, dans le plus petit espace possible, de tout
ce qu'il y a de gracieux, de charmant, d'amical,
de fraternel, de vertueux; il renferme et l'idée de
la beauté, non pas de la beauté parfaite, toujours
froide et inanimée, mais de cette beauté rendue
plus puissante par les qualités morales et les naïfs
sourires de l'âme ; il renferme l'idée d'une con-
fiance illimitée et l'idée du laisser-aller, de la
franchise et de l'amour1.
j'arrivais un «bonjour» de la manière que vous avez prononcé
bonsoir(?).
« Jamais ce mot, ce simple mot si court, si connu, si long et
tant répété, d'un usage si ordinaire dans la vie, jamais ces
deux syllabes et l'accent qui les accompagna ne sortiront de
ma mémoire.
« O ne consentirez-vous donc jamais à devenir la dispensatrice
souveraine de ma vie, à décider de mon tems, de mes occupa-
tions, de mes plaisirs, de mes espérances, de mon bonheur...?
« Je vous trouverais bien coupable de ne pas présider à ma
vie, car vous l'aurez troublée pour jamais.
« Ah je vous promets pour longtems un cœur brûlant d'amour
et pour toujours celui d'un fils ou d'un ami véritables. »
1. L'autographe de ces lignes est écrit sur une feuille de
papier à lettre, commençant par ce début de billet resté ina-
chevé, mais qui précise bien la date de 1822 :
Monsieur
•< N'oubliez pas, je vous en supplie, d'envoyer l'exemplaire
de Madame Surville à Bayeux. ■
Il s'agit de l'envoi parle libraire Hubert de Jean-Louis. [S. I ..
LETTRES DE BALZAC. 199
Je parais devant Laure tel que je suis, et, sans
contrainte, je nie vante et nie déprécie, je lui dis
mes chagrins et mes joies, mes espérances et mes
désappointemens, je me réjouis, et toujours j'ai
trouvé le langage le plus doux et le plus consolant ;
et je suis grondé parfois d'un ton qui me fait re-
gretter de ne l'être pas toujours.
Dès aujourd'hui, ce nom m'ofTrira tout cela, mais
avec quelque chose de plus suave et de plus enchan-
teur, quelque chose, un je ne sais quoi que je ne
peux pas nommer. Il m'est indifférent qu'une de
ces Laures paraisse ornée, il m'est indifférentqu'elle
brille à tous les yeux ; qu'au bal chacun la suive
des yeux, et dise : elle est charmante! Je ne désire
que son cœur, et quoiqu'un autre le possède tout
entier, je sais que j'y suis, que mon image y est
gravée, et que telle chose que l'on entasse par des-
sus cette impression elle y restera toujours la pre-
mière. Je me tiens à elle par le plus grand des sou-
venirs, celui de l'essai de la vie, celui des bégaye-
mens et des joies naïves de l'enfance. Enfin, c'est
ma sœur.
Tel charmant que ce portrait me paraisse, telle
grande que soit la réciprocité de mon cœur pour
elle, cette Laure serait jalouse, indignée, si elle
apprenait (et j'ai suie lui taire !) qu'une autre Laure
Jean-Louis est enregistré dans la Bibliographie de la France
du 30 mars 1822.
Sur la chemise qui contenait cette lettre, le vicomte de Spoel-
berch de Lovenjoul a écrit la note suivante : «- H. de Balzac.
— Brouillon d'une lettre où il est question du nom de Laure,
celui de Mme de Berny (porté par Mme Surville, sa sœur, et
plus tard, par la duchesse d'Abrantès). Elle est adressée, en
réalité, à Mme de Berny. »
200 LA JEUNESSE DE BALZAC.
se présente à mon imagination environnée du
même cortège, en y joignant une cour plus gra-
cieuse encore.
Autour d'elle se groupent toutes les espérances de
la vie, la troupe vagabonde des désirs, et celle, plus
friande encore, de toutes les voluptés et des amours.
Oh, Laure, ne croyez pas qu'il soit possible que
vous soyez autrement à mes yeux. Ne faut-il pas
que le souvenir, que le lien qui me lie à votre cœur
soit remplacé par un autre ; il est fâcheux que ce
lien vous semble forgé par l'égoïsme, et qu'il ne
soit pas construit par nos deux cœurs à la fois, et
cette idée qu'il n'y a que moi qui désire, qu'enfin à
vos yeux j'ai l'air de ne chercher que mon bonheur
propre, me fait saigner le cœur1.
XVII
[Villeparisis, ... 1822.]
Une fois pour toujours apprenez que jamais je
n[e vous] abordai le premier, Laure, sans trouble,
sans désirs, l'âme reposée comme l'eau du lac de
Genève, et que jamais je ne vous aborderai tran-
quille.
Voyez moi tel que je suis réellement, et tel que
je dois être. N'est-ce pas un miracle que je sois
1. Au verso du second feuillet de cette lettre, on lit : « rue
S1 Martin, hôtel du petit S1 Martin, voiture de Gave. pr
M. Balzac, à Villeparisis. »
LETTRES DE BALZAC. 201
ainsi que vous me voyez, n<v vous y trompez p;«s;
jugeant de votre cœur par le mien, je crois vous
donner une très grande preuve d'amour par mon
excessive réserve et par les sacrifices que je m'im-
pose; j'ai fait abnégation de moi pour suivre les
mouvemens que vous m'imprimez. Serait-ce parce
que vous (Mes sûre de cela que vous êtes tranquille?
En tout cas, je m'en remets à vous; j'attendrai tout
de la souffrance de contre coup que vous devrez
ressentir à la longue.
Sous ce rapport, le dernier mercredi a ajouté à
la masse de mes désirs inexaucés; mais, Laure, je
vous en supplie, ne vous targuez pas de mon aveu
pour être pour eux charmante, et surtout ne m'é-
crivez plus de ces lettres où vous me donnez des
vertus que je n'ai pas. Il faudrait être un ange, et
vrai, nul ne tient plus que moi à l'humanité.
Que vous dirais-je qui vaille votre bonjour? Je
me tais.
XVIII
[Villeparisis, ... 1822.]
Laure, il faut nous dire adieu. Je me sens la force
de pratiquer cette noble vertu qui agit, simple-
ment, sans bruit et sans éclat. La douleur de votre
frère m'a fait faire de profondes réflexions et s'il
202 LA JEUxNESSE DE BALZAC.
était un jeune homme ou qu'il m'eût choqué en la
moindre chose '.
Surtout, ma tendre amie, qu'il ignore mon sacri-
fice. Laissez-le dans ses sentimens à mon égard,
pour moi je ne serai pas 2 , je v....
11 se rencontre trop d'âmes viles pour que l'on
apprenne; il n'y aura jamais que moi qui saurai ce
que j'ai sacrifié et ma vie toute entière en sera peut-
être changée. On doit s'interdire ce qui cause tort
à d'autres et je....
Puisqu'il est le plus faihle qu'on le protège.
Hélas ! devrais-je écrire cela et n'est-ce pas gâter
mon.... La vertu est-elle sans indulgence.
Il ne pourra jamais croire à une liaison de la
simple amitié entre nous et, nous, devons-nous....5
Puisque nous fesons 4, fesons la
complètement.
Je n'oublierai jamais que vous avez voulu vous
sacrifier et choisir votre infortune à un des vôtres,
mais. nous serions 2 lâches de le rassurer et moi, je
ferais une indignité si j'attendais à faire mon devoir.
Gardez le souvenir de moi, gardez surtout cette
lettre et brûlez toutes les autres; mais celle-ci peut
représenter le tombeau de tout ce que la jeu-
nesse, le sentiment ont compté de plus beau,
de plus etc....
1. Phrase inachevée. Les mots suivants ont été biffés sur le
brouillon : le parti que je prends n'eût point eu lieu.
2. Mot illisible.
o. Mots illisibles.
4. Mots illisibles.
5. Mots illisibles.
LETTRES DE BALZAC. 203
X I X
Vas, ma lettre! parais avec toutes les grâces du
malin, compagnes de la rosée!
(Juc de choses j'ai à dire! Je commencerai par
demander pardon d\...
Malgré tout le charme du moment d'hier, il m'en
reste un souvenir mêlé de quelque peine, et la pre-
mière c'est que vous avez pu penser, chère Laure,
que n'ayant pas prononcé une seule fois ce nom
chéri, je méprisais cette douce attention, cette
faveur grande et légère tout à la fois; une de vos
paroles me l'a faitappercevoir. Mais comment vous
exprimer l'espèce de crainte qui me retenait? Vous
étiez encore imposante pour moi, je n'ose me livrer
à tout mon délire de tête de peur de vous déplaire,
et dire Laure sans dire : je t'aime, me semble une
hérésie en fait d'amour.
Cette crainte de déplaire, cette ligne de respect,
ce sont des barrières, et jamais cerf n'a couru entre
deux grilles!
0 Laure, quelle mauvaise grâce l'on a à répéter
sans cesse les mêmes vœux et les mêmes paroles,
surtout lorsqu'on se voit refusé !
Un homme qui nous aurait apperçus hier aurait
bien pu dire : « ou ce sont deux sots ou deux amou-
reux «.Puisque vous n'avez pas honte de me laisser
mendier, je devrais garder l'effronterie des pauvres;
mais je serai le plus généreux, et je jure de rester
204 LA JEUNESSE DE BALZAC.
à compter d'aujourd'hui, huit jours, huit grands
jours tout entiers, sans t'exprimer un seul de mes
désirs, puisqu'ils troublent ta tranquillité!
J'ai cru voir, hier, que tu regardais comme un
grand sacrifice que de m'écouter pendant un ins-
tant1!
XX
[Villeparisis, lundi matin 1822.]
Que d'amour!... J'en devrais être fier: je le suis,
si je veux être franc, mais j'ai honte de moi. Jamais
mon bonheur, si j'en ai goûté, n'a chagriné per-
sonne! Eh, ce serait aujourd'hui que, vil égoïste,
je détruirais celui d'un être dont la douleur vue
pendant une seconde me ferait lui sauter au cou,
et lui dire : Pardonnez moi, j'étais un méchant, et
c'est à moi seul à souffrir.
Si vous veillez, si vous souffrez, apprenez que je
souffre et que je veille, qu'hier au soir j'ai été au
martyre, que j'avais la fièvre comme toute la jour-
née, qu'enfin au comble du bonheur, ce bonheur
m'assassine, parce qu'il doit affliger un être qui
vaut mille fois plus que moi2. Et vous l'auriez
aimé à la longue.
1. Au verso de ce brouillon, une multiplication et une division
de la main de Balzac.
2. Balzac avait d'abord commencé cette lettre par ces divers
débuts :
« Par quels accens vous remercier! Hélas, ce ne sera ni de
joie, ni de chagrin!... Oli si, du chagrin... »
LETTRES DE BALZAC. mr
XX]
[Villeparisis, ... 1*22.1
Si vous êtes fidèle au seul entraînement qui vous
ait dominée, si vous n'avez été la conquête que
d'un seul homme, vous n'aurez rien à vous re-
procher. Sinon, je crois qu'il n'y aurait pas de
terme pour qualifier votre crime.
Rayons de notre dictionnaire le mot d'amitié.
Vous ne me serez jamais indifférente, mais, aussi,
vous ne pouvez pas être mon amie et je ne peux,
je ne dois pas être votre ami.
Je vous laisse en deviner les motifs.
Je ne veux pas vous dire le parti que je prends
parmi les trois, les seuls à prendre, car, vous l'ex-
pliquer serait une véritable vengeance, et un levain
de peine que je vous léguerais.
Leibnitz prétend que toute la masse idéale est
coordonnée dans la nature et que cette chaîne com-
mence au plus insensible jusqu'au plus sensible:
il dit que les marbres, par cela même qu'ils nais-
sent et croissent, ont des idées, mais extraordinai-
rement confuses. Je serai marbre, passif dans la
vie. Celui qui se blessera contre moi me maudira,
« J'ai plus que. »
Par quels accens vous peindrais-je. »
- Quels accens ferais-je entendre!... Vous êtes navrée et je
le suis plus que vous.... ■
« J'étais à.... »
« Il faudrait être né tigre.... »
206 LA JEUNESSE DE BALZAC.
celui qui, fatigué, viendra s'asseoir me bénira. Si
l'on me polit et que Ton me mette au haut d'une
colonne pour ornement, j'y resterai; si Ton m'em-
ploye à la construction d'une étable, j'y resterai,
également insensible aux injures et aux bienfaits.
Adieu, mon rôle commence.
XXII
[Villeparisis, ... 1822.]
Oui, Laure, reste brillante ! Je n'examine point
si l'on doit tenir sa promesse, si de tels retards ne
sont pas des folies, si.... Je n'ai pas le courage d'en
écrire davantage.
Adieu, reste brillante, te dis-je.
Mais rien ne m'empêchera d'être à la grille à
dix heures et d'y rester en mémoire de celle qui
devait l'ouvrir, en souvenir des délices que j'y
devais trouver.
Il sera beau d'y être sans espoir.
XXIII
[Villeparisis, ... 1822.]
0 Laure, c'est au milieu d'une nuit pleine de
toi, au sein de son silence et poursuivi par le sou-
venir de tes baisers délirans, que je t'écris, et
LETTRES DE BALZAC. '2<>7
quelles idées puis-je avoir? lu les as toutes em-
portées. Oui, mon âme boute entière s'est attachée
;« la tienne, et lu ne marcheras désormais qu'avec
moi.
Oh, je suis environné d'un prestige tendrement
enchanteur et magique; je ne vois que le banc, j<*
ne sens que ta douce pression, et les fleurs qui sont
devant moi, toutes desséchées qu'elles soient, con-
servent une odeur enivrante.
Tu témoignes des craintes et tu les exprimes d'un
ton déchirant pour mon cœur. Hélas ! je suis sûr
maintenant de ce que je jurais, car tes baisers
n'ont rien changé.... Oh, si, je suis changé, je
t'aime à la folie' !
XXIV
[Villeparisis, ... 1822.]
Ma pauvre maman,
La joie que j'avais en vous quittant était une joie
affectée. Aussitôt que je vous ai perdue de vue, la
tristesse m'a envahi, et j'ai regagné le banc chéri,
où je suis resté une grosse heure, veuf, passif, mo-
1. En tète de ce brouillon, Balzac avait d'abord écrit : ■ ()
Laure, c'est au sein de la nuit, du fonds de son silence et p.... »
Au verso du feuillet sur lequel il est écrit, on lit :
« Madame Vaillant, soyez à la maison rue Portefoin mercredi ».
puis, au-dessous, également de sa main : « Ce n'est pas l'affaire
d'un moment que de... » et : « Y a-t-il au monde quelque chose
de plus ridicule qu'un.... »
'208 LA JEUNESSE DE BALZAC.
rose. Heureusement que vous ne m'avez pas vu.
Il faut que ce chagrin soit quelque chose de réel,
puisque le souvenir de tes tendres caresses ne l'al-
lège pas. En rentrant, cette pauvre Commin1 riait
à gorge déployée, en lisant Jean-Louis, et me dit
avec son franc sourire :
— « Ah, Mr,ce livre est bien amusant.
En tout autre moment, ce mot m'aurait ému au-
tant à cause du plaisir que je procurais à un être
qui joue sur le bord de la tombe, que comme jouis-
sance d'amour propre. Mon cœur était comme moi.
Tout avait un aspect décoloré, terne. Le sourire
de bonne Ma[man) m'a déplu, la voix de mon père
n'avait plus d'attrait, et j'ai lu le journal les larmes
dans les yeux.
XXV
[Yilleparisis, 9(?) mai 1822]
Oui, Laure, je ne partirai d'ici que jeudi soir
[16 mai], ce serait par trop cruel de se refuser à
revoir le banc pour la dernière fois. Mais j'espère
que mercredi soir je te verrai à ton retour de Paris
et que je te reconduirai.
Hélas! il est une prière que j'ose faire, si toutes
fois, elle est facile à exaucer. Dimanche 12 [mai],
ma mère ne sera plus à Paris, j'y reste seul, c'est
1. La mère Commin, l'Iris messagère de Balzac à sa sœur (voir
la Correspondance), qui lui portait les leltres de sa famille, en
1810-1820, rue Lesdiguières. [S. L.]
LETTRES DE BALZAC. '200
la surveille de mon départ. Sous le prétexte de
faire sortir tes enfans, enfin que sais-je? ne pourrais-
lu l'y trouver? Songe, Laure, que ce n'est qu'une
prière, un vœu.
Quant à notre correspondance, l'asile dernier où
se réfugieront mes pensées, et où se déployera
mon cœur, je crois que nous ne saurions prendre
trop de précaution. Ainsi, j'écrirai de Bayeux de
manière à ce que tous les mercredis il se trouve à
Paris, au bureau restant, une lettre adressée à
Madame Laure ; elle sera sous envellope, pour
qu'on ne puisse reconnaître qu'elle vient de Bayeux.
Et toi, Laure, tu auras soin que tous les mêmes
mercredis, il parte de Paris une lettre pour ton
fidèle ami, qu'elle ne soit jamais mise à la poste
d'ici. Voici l'adresse : M1. H. chez Mr. S. rue
Teinture, à Bayeux1. Si je puis donner des ordres,
je vous prescris que vous fassiez écrire l'adresse
de l'ami, mais je veux que les lettres soient écrites
menu serré et sans blanc.
J'espère que mercredi soir j'aurai un flacon,
celui que j'achève, car assez ancien, reste, puisqu'il
ne peut me servir. Tous ces détails, ces apprêts
ressemblent aux dernières dispositions des mou-
rans. Ah! si j'avais un testament à faire, il serait
contenu dans ces simples paroles : « Aime moi
toujours, que je sois toujours présent à ta pensée,
que, du fond de mon exil, si cet espoir se fonde, je
puisse me dire: Il est dans l'univers, à tel endroit,
un être à qui je suis cher et qui pense fidèlement à
1. Monsieur Honoré, chez M. Surville, rue Teinture, à Bayeux.
14
210 LA JEUNESSE DE BALZAC.
moi, que ma pensée se rencontre avec la sienne, de
même que mon imagination l'entoure ». Ce lien
voltige sur mes pas et ces angéliques douceurs
n'ont rien qui puisse, hélas, faire rougir la vertu.
Oh Laure ! j'aurai fait plus que bien des hommes!
Sans être J. Ghr. j'ai fait mieux que lui. Que m'en
reviendra-t-il? Plus de regrets que de jouissances
morales. N'importe, le fatal voyage est tellement
décidé que ma mère n'en parle que comme si j'étais
déjà en route. Le moyen de reculer? Grandite1
mère m'aurait mal[me]né, je m'y suis résolu. N'im-
porte, il le faut, je le dois, plutôt pour toi que pour
moi, et sache, Laure, que ce n'est qu'à cause
de toi que je vais à Bayeux, que si je vais là préci-
pitamment, que j'abandonne tout ce qui me retenait
ici : Clotilde* à moitié imprimée, affaires, et, ce qui
est pis, ta présence, ta douce présence, et les dou-
ceurs et les plaisirs suaves qui en découlaient, il
faut dire adieu à tout! et, quand je reviendrai, peut-
être auras-tu changé! Ton frère ne saura jamais
l'étendue de mon sacrifice, non seulement par rap-
port à la violence de ma passion mais à l'avenir
des obligations sacrées en jeu que je trahis5.
1. M. de Lovenjoul a écrit en note de la copie de cette lettre :
Sa grand'mère.
2. Clotilde de Lusignan, ou le Beau juif. Paris, Hubert, 1822.
4 vol. in-12.
3. L'autographe de ce brouillon fut écrit au moment où Balzac
composait Wann-Chlore. Il porte la trace de différents essais
d'orthographe pour ce nom. [S. L.]
Wann-Chlore, écrit en 1822, n'a paru qu'en 1825.
LETTRES DE BALZAC. 211
XXVI
[Villeparisis, ... 1822.]
Ah, ma chère Laure, ne nous abusons plus; les
pleurs qui roulaient dans tes yeux, la souffrance
qui se déployait sur ton visage, et le combat inté-
rieur dont les vestiges apparaissaient dans ta noble
conduite, prouvent que je te serais odieux si je ne
tenais pas à ma promesse. De combien s'en est-il
peu fallu que je la violasse, et si la douleur infer-
nale que je ressentais et que je t'ai cachée avait
duré, je fusse devenu criminel.
Oh, maintenant, je vais mettre autant de soins à
te taire combien je t'aime, que j'ai mis de recherches
à le faire voir; je couvrirai mon âme, chagrine et
navrée, de la robe brillante de la joie, j'abaisserai
mes paupières, je voilerai ma pensée, j'amortirai
le feu de mes expressions; je tâcherai d'être égal,
simple, pur, tranquille comme un ami.
Voyons, prenons-en l'allure, et commençons par
te gronder, te gronder toi seule, car, sans l'indul-
gence, il n'est point de vertu, et, me dispensant
alors d'interroger ta vie passée, et de jeter le blâme
sur celui qui veut t'être toujours cher, et qui, s'il
me connaissait, ne m'en voudrait jamais, occupons-
nous du présent et de l'avenir.
Notre conscience ne nous reproche rien, et nous
pouvons regarder en arrière sans rougir; quanta
l'avenir il est entre les mains du hazard. Mais ce
219 LA JEUNESSE DE BALZAC.
à quoi nous devons prendre garde, Laure, c'est aux
apparences, qui, jusqu'ici, je dois le dire, nous
condamment entièrement et réfléchis que, vertueux,
c'est un grand malheur que d'être signalés comme
des criminels ; bien que notre propre cœur nous
console, on n'en reste pas moins accablé; et crimi-
nels, c'est un devoir, même une sorte de vertu, de
taire la faute aux yeux du monde. Il est peu de ces
âmes grandes et nobles, qui disent avec l'Evangile :
« Ce n'est pas à moi de jetter les premières pierres. »
On ne voit que gens occupés à en ramasser !
Je crois que nous ne pouvons pas nous dissi-
muler que l'œil perçant des jeunes filles nous devine.
Je ne sais, mais jamais je ne puis regarder ton E '
sans qu'elle rougisse et que sa figure ne dise quelque
chose que je ne saurais exprimer. Quant à A1, le
dédain et une foule d'autres sentimens percent
maintenant. J.3nous a depuis longtems compris,
et toutes no[us] entourent d'une masse de senti-
mens qu'elles ne cachent plus. Une indiscrétion
qui leur révélerait que je viens en leur absence jus-
tifierait leurs soupçons, et tout cela retomberait
sur nos têtes chastes et pures.
J'espère que dans ces observations tu ne verras
que l'attention d'un ami qui ne craint que pour toi,
car rien de fâcheux n'en résulte pour ma personne.
Il y a plus. Le bruit court que je ne suis si assidu
1. M. de Lovenjoul, dans la copie qu'il a faite de cette lettre,
a mis entre crochets : E[lisa]. Aucune fille de Mme de Berny ne
portant ce prénom, nous pensons plutôt qu'il s'agit d'Emma-
nuelle, née le 28 juin 1806.
2. Louise-Alexandrine de Berny.
3. Augustine-Jeanne-Antoinette de Berny, née le 10 avril 1707.
LETTRES DE BALZAC. v2i:>
([ue [jour l'aire nia COlir à Ion E., et déjà l'on dit
qu'un mariage se prépare, (ferles, si j'étais en ce
moment de fortune à me marier, je n'hésiterais |>as .
Mais si, par un bavardage commun entre les gens,
un mol en tombait dans l'oreille d'E., bien que je
ne sois pas de tournure ni de nature à rien faire
naître dans le cœur, on ne pourrait pas s'empêcher
d'y penser, et ce serait déjà de trop.
Il ne résulte pas de cela qu'il ne faille pas nous
revoir, mais je veux venir peu à peu moins souvent,
te regarder moins en leur présence, être plus affec-
tueux avec elles, ne pas s'enfuir quand elles viennent,
et, quant à nos charmans tête à tête, ah! Laure, je
crois que nous pouvons bien les trouver sans que
personne n'en sache rien. Ah, la jeune fille timide
et fîère de Vevei savait trouver des chalets à
Job, savoyard; Héro, la nuit, éclairait le détroit
que traversait Léandre et les nombreuses allégo-
ries des métamorphoses de la fable prouvent qu'il
n'existe point d'obstacles pour ceux qui aiment et
toujours ' à faire de l'impossible une
idée qui ne représente rien.
Forte de ma promesse, ma mère ne cesse de parler
de mon voyage de Bayeux comme d'une chose cer-
taine, oh pourquoi la ligne que tu écriras le samedi
soir ne vient-elle pas le matin, je n'irais pas à
Bayeux. Mais, puis je n'irai pas là.... ma vie est
ici, que dis-je même, non c'est l'idée contraire,
puisque j'ai promis mon suicide.
Ne pourrai-je encore vivre et vous écrire une
1. Mots illisibles.
_i; LA JEUNESSE DE BALZAC.
lettre froide et sans vous dire que je vous aime et
que vous êtes mon unique pensée çt la somme
totale de mon bonheur.
XXVII
B[ayeux], 30 jfuillet 1822.]
Je n'ose vous dire que vous m'attristez en ne
mettant plus de fleurs dans vos lettres. Mon eau de
Pfortugal] est finie, et sans mon Chénier, je serais
sans amulette, je n'ai pour toute ressource que de
trouver dans les anciennes fleurs une odeur dis-
parue.
Pourquoi tout cela? Je serais fort embarrassé
d'en donner une raison, car, à présent, je ne veux
plus rien m'expliquer, je ne le peux plus. Je vais
revenir, dans une huitaine je pars.
En vérité, et je vous écris dans la sincérité de
mon cœur, je ne vois pas de quel droit je trouble-
rais votre bonheur pour un reste d'existence que je
crois qu'il n'est au pouvoir de personne d'embellir.
Il y a des êtres qui naissent malheureusement, je
suis de ce nombre. C'est persuadé de cette évidence
que je vous écris.
J'ai vu avec plaisir que vous avez reconquis
votre libre arbitre, j'en suis joyeux plutôt pour vous
que pour moi. Oui, L[aure], je vous en supplie,
maintenant que vous êtes maîtresse, persuadez bien
à ceux qui me haïssent qye je ne mérite ce senti-
ment d'aucune créature, car, maintenant que vous
LETTRES DE BALZAC Mû
êtes libre de me voir, de me recevoir, que je le
suis, cl qu'aucune force ne peut m'empécher de
vous voir, j'y renonce de plein gré, si ce sacrifice
assure le bonheur de quelqu'un et le vôtre par con-
séquent,
Il n'entre dans cette détermination aucun motif
que l'on puisse incriminer, elle m'est dictée par le
sentiment de non-valeur que j'ai de moi-même. Je
suis trop peu, ma vie intellectuelle est trop peu de
chose, pour que je blesse seulement un insecte
pour la récréer. Oui, je crois m'etre abusé sur moi-
même, je me suis en outre abusé sur la vie. Je dois
désormais rester dans l'ombre et y végéter.
Je m'applaudis en quelque sorte d'être sorti de
mon néant, puisque cela vous a fait connaître à
quel point vous êtes aimée. Ceux qui vous aiment
doivent seuls connaître l'étendue de ce sacrifice
volontaire, et, pour peu qu'il y ait encore une étin-
celle de générosité dans le monde, on doit s'en
étonner et m'en savoir gré. Content désormais de
vivre dans votre cœur, si j'y tiens la place que je
vous donne dans le mien, je me nourrirai de sou-
venirs, d'illusions, de rêves, et ma vie sera toute
imaginative, ainsi qu'elle l'était déjà en partie.
S'il y a de grands inconvéniens à dévorer l'ave-
nir en l'enrichissant de tous les trésors de la per-
fection et du bonheur, on gagne d'oublier le pré-
sent et pour les momens de mélancolie qui
arrivent, lorsque les yeux se dessillent et que le
dormeur casse les porcelaines de sa boutique ou
que le pot de lait tombe, on a eu des heures char-
mantes où l'on vit double. C'est ainsi que, riche
216 LA JEUNESSE DE BALZAC.
dans la pauvreté, savant dans l'ignorance, entouré
de créations brillantes, couronné de roses imagi-
naires, imitant Lafontaine dans son insouciance et
ses rêves, j'espère compenser pendant le peu de
minutes qui me restent, tout ce qui me fuit, tout ce
que mes mains débiles ne peuvent pas saisir. Heu-
reux que je suis de pouvoir me dire que je n'ai
jamais fait le mal et que je n'ai nui à personne. Inap-
perçu sur la terre. et c'est un de mes plus grands
chagrins, j'aurai vécu comme les millions d'ignorés
qui sont passés comme s'ils n'avaient jamais été.
Au milieu de ces illusions, filles élégantes d'une
imagination trop mobile, il y aura une étoile fixe,
toujours brillante, qui me servira de boussole, ce
sera vous, mon aimable amie ; sans cesse présente,
jamais oubliée, vous êtes sûre de vivre autant que
moi. Par une bizarrerie du sort, c'est ainsi que prêt
à revenir, je vous fais des adieux. Si vous avez
souhaité de me voir guéri, j'en aurai toute l'appa-
rence. Nous remettrons donc à un autre tems
toutes les douceurs d'une tendre amitié, et ce sera
lorsque vous serez tout à fait comme Mlle de R.,
que notre intimité ne choquera plus personne.
J'espère qu'alors vous n'aurez plus à souffrir de
l'humeur de personne et j'aurai la satisfaction de
savoir que de ma peine est sorti le bonheur d' autrui.
Lorsqu'on est médiocre, qu'on n'a pour tout bien
qu'une âme sans fiel et sans levain, on doit se faire
justice; la médiocrité de moyens ne donne point
de grandes jouissances, et faute de ce pouvoir de
distribuer les grandes émotions et de répandre les
trésors de la renommée, du talent, des grandeurs,
LETTRES DE BALZAC. ^'7
c'est obligation de retirer son cœur de la scène, car
il ne faut leurrer personne. Il y a la même fripon-
nerie morale que lorsqu'on vante une maison qui
croule. Les avantages du génie et les privilèges des
grands hommes sont les seules choses qu'il soil
impossible d'usurper. Un nain ne peut pas lever la
massue d'Hercule.
J'ai dit que je mourrais de chagrin le jour que je
reconnaîtrais que mes espérances sont impossibles
à réaliser. Quoique je n'aye encore rien fait, je
pressens que ce jour approche. Je serai viclime de
ma propre imagination. Aussi, L[aureJ, je vous
conjure de ne point vous attacher à moi, je vous
supplie de rompre tout lien. Vous vous éviterez des
peines, c'est déjà beaucoup trop que vous m'ayez
vu et que vous ayez pris de moi une idée avanta-
geuse. Je puis la mériter sous le rapport des quali-
tés précordiales, certes, et c'est peut-être un reste
de présomption évanouie. Certes, je crois être bon,
mais voilà tout. Croire autre chose et continuer à
me voir, c'est semer le chagrin. Ne me devenez pas
mère ; ce sera bien assez que la mienne s'afflige.
Je vous ai dévoilé l'intérieur de ma pensée; c'est
une fois pour toujours. Ce que je viens de pro-
mettre je le tiendrai, lorsque, de votre part, vous
l'aurez accepté. Je ne vous reparlerai plus de mon
chagrin et je tâcherai, d'ici au 10 d'août, de conqué-
rir une écorce joyeuse et une figure supportable.
Ce ciel de la Normandie est froid, l'azur en est
terne, je commence à m'y trouver mal à l'aise et je
me blase sur tout ce que j'y fais. Grand Dieu, que
de mauvaises choses j'y ai faites ! C'est à reculer.
218 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Au surplus, que m'importe, puisque tout m'est
indifférent.
Vous ne me parlez pas de votre maison, de ce
que vous faites, dites, comment vous vivez. Pro-
menez-vous, allez-vous dans cette prairie, dans
ce potager que je vois si souvent? Comment ces
jnes v0nt_elles? quelles parties, quelles fêtes?
S'asseoit-on sur ces bancs, franchit-on cette haie
normande? Le piano, le chant est-il abandonné.
Vous ne m'avez pas seulement dit où l'on a placé
les deux sépias de Mlle J....
Je ne vous ai pas raconté mon voyage de Cher-
bourg, qui, certes, est bien digne d'une belle lettre,
je dis belle, par les travaux dont il serait parlé. Ces
travaux sont la plus belle conquête des hommes, le
nec plus ultra des constructions humaines, et
jamais les Romains n'ont rien fait d'aussi étonnant.
Les pyramides d'Egypte ne sont pas si colossales,
pour l'art et pour l'exécution. Enfin, l'esprit et
l'œil sont tellement étonnés des proportions gigan-
tesques de ces admirables projets que, lorsqu'on
revient de là, rien n'est plus saillant. On ne trouve
plus de difficultés, parce que l'on a construit une
autre échelle de comparaison pour l'impossible.
L'audacieux génie qui a osé promettre au génie
d'alors1 de réaliser de pareilles conceptions, mourra
sans récolter le laurier qui lui appartient : M. Ca-
chin, l'Homère, le Newton, le Dante de l'architec-
ture', n'est connu que des sa vans et ce nom, qui
1. Napoléon.
2. Joseph-Marie-François Cachin, ingénieur, né à Castres en
1757, mort à Paris en 1825. Ce fut lui qui dirigea les travaux de
la digue et des fortifications de Cherbourg.
LETTRES DE BALZAC. 219
devrai! être populaire, est le point de mire de la
plus basse envie. Quelque jour je vous ferai une
analyse de ces travaux qui donneront une haute
idée de noire peuple, et vous concevrez alors qu'il
ne peut pas y avoir de bornes à l'enthousiasme
qu'excitent de pareilles créations.
Je compte partir le 9 ou le 10 d'août, ainsi vous
pouvez m'écrire encore une fois. Adieu, je vous
serre toujours cette main dénuée de sentiment, et
je vous prie de présenter à madame V[aillant] les
tendres hommages qui lui sont dus. Vous me devez
aussi ces lettres brûlées. L'autre jour, Sur[ville]
chantait : « Que le jour me dure. » Grand Dieu, qu'il
chante mal et que votre chant, que je n'appréciais
pas jadis, m'a paru charmant! Readieu.
P. S. — Ne dites pas chez nous que je vous écris,
cela fait mauvais effet. Je vous envoyé des litanies,
et à eux des oraisons. La comparaison ne fait pas
plaisir à .... et c'est juste. Il ne me restait plus que
d'être un mauvais fils!
Suscriplion : Madame, Madame de Berny, à Villeparisis,
Seine-et-Oise.
XXVI11
4 8fcre [1822.]
Plus nous allons et plus je découvre une foule
de beautés de sentiment dans toi. C'est le propre
230 LA JEUNESSE DE BALZAC.
de tout ce qui est véritablement beau d'être fécond
à toujours de grandes choses, d'abord inaperçues.
Laure, je te l'avoue, la consécration du banc, cette
tête d'un amour que nous croyons expirant, le ral-
lume, et loin d'y voir une tombe, ce lieu charmant
ne m'est apparu que comme un autel. N'est-ce pas
trop soigné pour un sépulcre? Oh, non, qu'il soit
à jamais ce qu'il est ! Tombe ou autel, peu importe,
pourvu que, dans tout le reste de notre vie, lorsque
nos regards tomberont sur cet endroit, ils [nos
cœurs] battent un instant à l'unisson. Le souvenir
n'a rien de criminel; il embellit la vie présente de
tout ce qui charma dans la vie du passé, et le don
de la pensée fait quelquefois ainsi vivre au double.
Ne t'ais-je pas dit en voyant ce luxe champêtre :
« Quel discours! » A en juger par les émotions
que nous donnent de telles actions qui n'ont rien
que de tendre et de délicat, que devons-nous pen-
ser du sentiment principal qui les dicta? N'est-ce
pas folie que de chercher à l'éteindre?
0 Laure ! reçois à ce moment tout le témoignage
brûlant d'un véritable enthousiasme! Oui!... je
crois que, dans tout le reste de ma vie, personne
ne me donnera une fête plus simple et plus magni-
fique...
Ce muet et délicat hommage a flatté tous les sen-
timent de mon cœur. Et tu ne serais plus rien pour
moi ! Celle qui aime tant n'aurait plus en partage
que le sentiment d'un fils?... Non, non, Laure, tu
seras en tiers dans toutes mes pensées, et ce sera
aussi en ton nom que je ferai tout ce qui me portera
à m'élever au-dessus des autres hommes. Je ne
LETTRES DE BALZAC. 221
veux plus d'autre devise que ton nom chéri, ei je
me sens un accroissement de désir de parvenir el
de l'aire en sorte qu'un tel culte <lr ta pari soit jus-
lifié. J'en suis fier, et si les Croisés dans la mêlée
s'écriaient: « Dieu le veut! » mon cri sera : « Laure
l'espère! » à chaque fois que je me sentirai au fort
des travaux qui pourront me donner quelque gloire.
Si tu souffres, Laure, que crois-tu que je res-
sente, surtout lorsque de pareilles idées empreintes
de toute la grâce des amours réveillent cette masse
de sentimens, que je crois endormir? Songe donc
que l'aspect seul de ta douleur, une larme, empor-
tent mille helles résolutions?
Il y aurait quelque grandeur à nous cacher l'un
à l'autre combien nous nous aimons. Il y aurait
encore plus de grandeur à persister dans notre
amour, je te laisse, ô chérie, cette décision. Au-
jourd'hui, comme il y a quatre mois, je te soumets
tout mon sort, tout mon être, mon âme, en t'avouant
que je n'ai fait que gagner par le contact de la
tienne!
Hé quoi, ma Laure, l'âme éloquente et pure du
grand Rousseau ne nous a-t-il pas tracé l'immortel
tableau de deux femmes idéales, aimant le même
homme, et as-tu rien vu de plus généreux et de
plus attendrissant que Claire? Oui, mais l'amant
de Julie l'ignorait, et, s'il l'eut su!...
Je ne sais ce que Rousseau lui eut fait faire.
Ah laisse-moi t'avouer que mes douleurs me sont
douces et que je suis heureux, aussi heureux qu'un
homme puisse l'être, en me sentant aimer ainsi.
Enfin, en te dédiant tout mon être et t'en fesant
SB3 LA JEUNESSE DE BALZAC.
souveraine, je crois n'avoir rien fait en retour. Je
te l'envoyé ce baiser d'âme, de cœur, de tout, ce
baiser auquel je voudrais rendre le domaine de la
pensée! 0 Laure, je t'aime encore plus que le jour
de ce premier baiser du banc, et, pour être calme
en apparence, mon cœur n'en est pas moins agité.
Suscription : Madame Deligny.
« Le nom de Berny effacé par Balzac a été remplacé
par lui par celui inventé de Deligny ». [S. de L.]
LETTRES
DE MADAME DE BERNY A HONORÉ DE BALZAC
(originaux)
1828-1832
■f S$^r.
/
— O- — «ci 0'-^<d<^: o. U.y~ «•■*
f- ^ o^4r
«~r-*-
2*r
V
^ CZ7^A^
^^Â *»•»• ^r >•
FAC-SIMILE DE L ECRITURE DE MADAME DE BERNY
15
LETTRES DE MADAME DE BEIWY
(originaux)
Si vous aviez été gentil, vous m'auriez fait dire
hier en m'envoyant la revue, que vous ne seriez
pas chez vous à 3h, mais....
Ne voulant pas encore aujourd'hui me faire dire
par tous les gens de votre maison que vous n'y êtes
pas, je vous prie de me faire dire si je peux, mal-
gré le soleil ou la pluie, m'aventurer jusqu'à la rue
de Gassini à 3 h.
Adieu Didi, on t'aime quand même, on t'aime
avec tes colères, avec tes miriades(sic)de caprices,
avec tes manques d'usage, avec toutes tes imper-
fections qu'on aime elles-mêmes, heureuse d'avoir
à te les pardonner pour que tu en pardonnes
d'autres. On t'aime malgré la corde qui te manque,
mais on t'adore pour toutes celles qui font vibrer
ton gentil cœur et ta belle âme. Adieu, toi.
Suscription de la lettre: Mr Balzac1.
1. Sur une copie de cette lettre, le vicomte de Lovenjoul a
ajouté de sa main l'adresse : Rue de Cassini, à Paris. Balzac a
habité la rue Cassini du 1er janvier 1828 à 1855.
2-28 LA JEUNESSE DE BALZAC.
II
Vous me demandiez sur quelle herbe j'avais
marché ce matin, sur celle, chéri, qui infuse le
bonheur puisqu'elle me conduisait vers toi.
Je suis si accoutumée à vivre avec toi, non pas au
jour le jour, mais par minute, que chacune de celles
qui me donnent le pouvoir de jouir de ta douce pré-
sence est pour moi toute une vie, elle absorbe tout,
passé, avenir, tout est en elle. Ainsi, en courant ce
matin chez toi, je n'avais d'autre idée que celle-ci,
te voir! tes projets de long départ, notre séparation
de quatre lieu[es], tout était enveloppé par cette
idée : te voir! oui, oui, cette idée fera toujours
l'office de ces mouches prévoyantes qui enferment
leur ennemi, tel fort qu'il soit, dans une matière
qui leur ôte à la fois et la vie et le pouvoir de
nuire. 0 que mon âme était bien ce matin près de
toi, et si cette disposition eût pu durer un an, un
an assise sur cette barre, mon regard sur le tien,
me livrant à toute la joyeuseté de l'amoureuse folie,
un an m'eut paru à la fois un siècle et une seconde.
Chéri, je sens qu'hier j'ai été mise à la diète, j'ai ce
soir un impérieux besoin de paroles, aussi je suis
si hardie avec ma plume : je suis certaine de
mettre tout en œuvre, folie, raison, sagesse, délire
sans entendre un cruel et impérieux ta, ta, ta! pour-
tant ne va pas croire que je me plaigne de ma
soirée, car déjà, ce matin, sur une phrase, je ne sais
LETTRES DE MAI) AMI-: DE BERNY. 229
quelle guêpe l 'a bourdonné à L'oreille, pour que tu
ne m'aies pas toute comprise! Toi ne pas me com-
prendre! <> quand ce phénomène arrivera ou en
aura vu d'autres. A propos, j'ai ce malin été fourbe
et menteuse, cl comme tous les réprouvés de In
nature j'ai porté la peine. Je te disais de brûler
mes lettres! pour avoirde toi une douceur) (de plus)
et ne voilà-t-il [pas] mon félon qui me répond quil
me les rendra!... je n'en veux pas, méchant, et je ne
veux plus entendre cette phrase, car elle n'est pas
dictée par ton cœur. Le serait-elle parla prudence?
0 ami céleste, cher, je t'en dispense. Si je savais
qu'on put comprendre l'amour que j'ai pour toi, je
le crierais sur les toits, sur les montagnes, en tous
lieux, certaine qu'il me couvrirait de gloire, qu'il
m'entourerait d'une auréole dont chacun des
rayons irait vivifier les cœurs aimant et commu-
niquer aux âmes nobles et grandement tendres une
sublime exaltation.
Dispense-toi donc de cette prudence qui, dans ton
bec chéri, me semblerait froideur, si nous pouvions
comprendre ce sentiment, non tu ne me rendras
pas mes lettres et tu ne t'en sépareras pas; quand
leur volume te deviendra gênant tu feras ce que j'ai
fait pour une partie des tiennes, tu les brûleras, et
en garderas les cendres. Le plus mince morceau
de papier, qui a eu avec toi quelque contact, n'a
jamais été perdu pour ta bien-aimée, j'ai dit une
partie de tes lettres, car pour les dernières il ne
m'est plus possible de ne les pas conserver intactes.
La copie me semblerait faible et les cendres un
deuil. Je les lis et relis, elles sont devenues mon
*2:>0 LA JEUNESSE DE BALZAC
manuel, elles sont si bien l'expression de ta chère
et fidèle constance, elles me peignent si bien cette
tendresse toujours plus belle, plus active, plus
croissante, que,.... ô elles me sont plus chères que
je ne saurais dire. — Ce matin j'ai écrit pour toi à
Ernest, si tu pouvais réussir à quelque chose ici
dans ton pays! je te l'avoue, j'en ai la gracieuse
espérance qui vient soudain montrer sa radieuse
figure, quand la crainte de ton départ ose montrer
son hideux visage, et, suivant ma gentille coutume,
ce monstre féminin se trouve aussitôt repoussé par
ma déesse favorite. Que ne puis-je la placer près
de toi comme j'y suis moi-même ? Je ne doute pas
que si tu pouvais lui donner la préférence sur
cette fripone de mélancolie qui agit pour toi en
coquette, elle te suggérerait mille sentimens utiles
qui lui servent de cortège.
Mais ici le ta, ta, ta, aurait beau jeu et serait de
belle mise, car en vérité je bavarde inutilement, et
c'est comme si je te demandais de changer le noir
de tes chers yeux en bleu. Pardon, mon doux maître,
tenez, je me tais. Voilà un autre volume de Mac-
kensie, lisez et donnez-moi seulement cette main
adorée que je ne me lasserai jamais de caresser.
Puis, n'ai-je pas une autre douce occupation, celle
de contempler ton bien aimé visage? Quand Rous-
seau mourut, il demanda qu'on le mit à la fenêtre
pour jouir une dernière fois de la nature, du soleil;
à ma dernière heure je l'imiterai, seulement je suis
plus riche, mon soleil et ma nature sont à moi
seule! — Je quitte la place pour ne pas tomber dans
ma tendresse accoutumée, il faut finir la journée
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 231
comme elle a commencé. Ainsi je pense à la gen-
tille manière don! tu me disais « .!<' t'aime » tout
en mettant 1rs papiers dans la poche, et heureuse,
mille lois heureuse, je te quitte en Renvoyant le
sourire du bonheur qui erre en ce moment sur des
lèvres où In déposes souvent tout l'amour et toi.
Adieu, adieu, gentil, je te verrai lundi; ô demain
ils ne sauraient ni m'ennuyer,ni me déplaire, ni me
chagriner; je te verrai lundi!
Lundi 5 h.
J'avais envie de ne pas t'envoyer ce (sic) rapsodie
de redites, mais il doit être mis sous tes yeux
puisqu'il a été écrit à cette intention, n'aurais-je
pas un plaisir toujours nouveau, toujours plus vif
à t'entendre, à te lire sans cesse, et en tout; moi,
n'est-il pas toi? Voilà 5 h. ne dois-jeplus t'attendre?
ô doux et gentil espoir, venez sur mon cœur, que
je vous caresse, montrez-moi mon chéri, mon
maître adoré, annoncez-moi sa venue. Si vous
voulez que je brûle l'encens sur vos autels, je ne
vous fatiguerai pas d'une multitude de vœux indis-
crets, un seul et je me tais. Lui et lui, voilà tout.
Pour le reste donnez ailleurs à pleines mains, je ne
prétends rien de vous ni de votre grand exécuteur,
la fortune. — Gentil, le soleil semble d'accord avec
mon cœur, il rend aujourd'hui la fraîcheur à la
nature, comme notre amour à tout moi; quelque
chose me repousse de la terre, une région plus
noble semble m'attendre. N'entcnds-je pas mon
ange!
LA JEUNESSE DE BALZAC.
III
Mardi matin.
Je voudrais qu'il fut au pouvoir de la pensée de
t'entourer d'une atmosphère de bonheur, et qu'elle
s'infiltre dans toute ta vie avec cette force de désir
plein d'amour qui semble planer sur ta tête adorée.
0 toi ! toi céleste cher ! rester en extase, absorbée par
mes souvenirs, est tout ce que je puis, comment te
dire mon bonheur? il faudrait que tu te connusses,
et c'est impossible, impossible que tu saches sur-
tout ce que tu es pour moi. J'aurais souhaité, dans
un rêve plein de folie, être aimée à la manière du
ciel, ce souhait aurait eu un entier accomplis-
sement, que je n'aurais rien obtenu, en comparant
ces bienfaits aux tiens. 0 que puis-je faire? où
trouver la force, le pouvoir, tout ce que je voudrais,
tout ce qu'il me faudrait pour payer tant d'amour !
ma soirée d'hier fait à elle seule dix siècles, et tu
pouvais penser à ce que je puis devenir? et, mon
sort, quand un jour pourrait être un obstacle
à tes projets, à tes désirs, à tes volontés? Non, chéri,
marche, fort de ta conscience à mon égard, tu ne
me dois rien, tu ne me devras jamais rien, je serai
toujours en reste. Mes souvenirs seront plus beaux,
plus riches que toutes les réalités de la terre! à toi
salut, honneur, amour! Aujourd'hui comme tou-
jours, quelle que soit ta conduite à mon égard,
riche par mes trésors de jadis, je dirai toujours
inclinée devant toi : Salut, honneur, amour! ! Juge
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 233
alors ce que doit éprouver mon cœur aimant, quand
je pense qu'un être ;» pu s'interposer entre ta con-
fiance <4 ce cœur? Si ma vie n'était toute pris*; par
mon reconnaissant amour, je ne s;iis ce que je
pourrais te dire, mais elle ue suffît pas à te remer-
cier, comment saurait-elle trouver des mois pour
un autre emploi? Cependant, je dis à mon ami que
plus je m'étonne de la richesse de cœur de mon
chéri, el plus aussi j'ai peine à penser qu'il ait pu
promettre de cacher quelque chose à celle qu'il
adore avec une force inconnue à ce monde de
misère, car enfin, cette promesse n'en détruisait-
elle pas une plus sacrée quoiqu'émise seulement
par le cœur d'une confiance à l'épreuve de tout?
Eh bien, mon noble maître, je m'incline devant
cette peine de cœur que le sort nous a envoyée
comme pour nous faire raser la terre en passant
au-dessus d'elle, et je dis nous, car mon cœur ne
peut souffrir seul. Ne sommes-nous pas à deux en
tout et pour tout, ou, bien mieux, ne sommes-nous
pas à un? Tu reviendras jeudi, je ne sortirai pas,
dans l'espoir de te voir. Te voir! soif inextinguible,
et qui semble renaître à mesure qu'on croit l'ap-
paiser! Adieu, adieu! ange de bonheur et d'amour,
adieu.
IV
Si tu as encore mon avant dernière lettre, je te
prie de la relire. Si tu avais jamais éprouvé dans ta
vie une minute des souffrances que j'ai ressenties
234 LA JEUNESSE DE BALZAC.
depuis hier, tu n'aurais pas été si durement et inu-
tilement cruel. Quant à ton exclamation sur les
femmes, je la comprends à peine, mais si tu veux
un cœur qui puisse à la fois t'aimer comme un
Dieu, et se séparer du tien sans souffrir, c'est une
nouvelle pierre philosophale, digne d'un injuste
égoïste.
Il faut, malgré toutes tes rigueurs, ne pas te
laisser un espoir que tu aurais le déplaisir de voir
déçu, la pauvre minette est recluse.
Puisque tu vois Janvier ce matin, arrange notre
affaire comme tu le voulais d'abord, il me sera
indifférent d'y paraître en nom. Cependant, j'aurais
eu du plaisir à ce que nos intérêts ne fussent pas
séparés, cela eut été un brin ajouté à la gerbe qu'il
me faudra glaner bientôt1.
Suscription de la Lettre : Mr Balzac.
V
Dimanche [1828.]
Salut à mon chéri avec l'aube matinale, cette
aube qui aura pénétré dans son regard comme mon
souvenir dans son âme, salut à mon doux maître.
Source de ma vie, ô toi ange gracieux, si jamais tu
1. Peut-être s'agit-il ici de l'acte, daté du 3 février 1828, et où
Madame de Berny paraît en nom, pour la première fois, dans
les affaires de Balzac. Voir ci-dessus, p. 103 et Appendice VII,
pièce n° 73.
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 255
m'as donné douleurs, tu n'étais alors que l'effet
d'une cause étrangère, car tout ce qui me vient de
toi mVsl charme el bonheur, ô reçois avec amour
les remercîments que je l'envoie pour notre journée
d'hier. Celle-là aussi tiendra sa place dans nos
tendres annales ; me lever dans l'espoir de te voir!
t'attendre ! te voir!', ô le voir, sentir notre chère
chambre purifiée par ta douce présence des con-
tacts étrangers! T'y entendre dire que tu y es heu-
reux! ô chère et pure moitié de ma vie, en ce
moment je verse des larmes, mais elles sont de
bonheur. — Sortir pour aller te chercher, t'attendre,
te retrouver, dans ces doux inslants, mon cœur
équivalait à mille. Notre dîner, ces gracieuses
actions du cœur qui se transforment en plaisirs de
Ta me, tout est là, comme aussi tes souffrances.
0 parles m'en, ne me laisse rien ignorer, si tu veux
que je vive, et ton dernier adieu, ô chéri, j'oserai
dire qu'il faut être nous, pour sentir, pour bien sentir
ce que m'a fait éprouver ce doux retour vers moi
dans un moment où cette triste idée « Je vais être
longtems sans le voir » s'était déjà emparée de
toute ma pensée. Mes gants d'hier seront l'objet de
mon culte, l'un a touché ton cher bras, l'autre a reçu
ce délicieux baiser d'adieu. — Pauvre cher! faut-il
te dire que je t'aime??
Lundi.
Mon chéri, la nature ne permet donc pas un cer-
tain orgueil, car après des efforts au-dessus d'elle,
elle semble se retirer au loin, et vous abandonnera
k27»G LA JEUNESSE DE BALZAC.
toute votre misère. En ce moment, ô mon bien-
aimé, je suis toute foiblesse, ta lettre qui est deve-
nue mon pain quotidien, tous les sentimens qu'elle
renferme et dans lesquels je me balance avec amour
la main sur lesyeux, tes regards toujours les mêmes,
ton départ, et cet épuisement qu'a dû causer le cruel
sacrifice auquel je m'étais condamnée, tout, pauvre
cher, en ce moment semble excuser ma foiblesse, et
je te demande grâce, puisque je suis obligée de me
l'accorder moi-même. Si tu étais ici, ô situ étais là
sur ce canapé, à cette sainte place, j'irais près de
toi, je prendrais ta main chérie, par un regard je
verserais toute mon âme sur la tienne, et je te
dirais : « Chère et tendre créature, rends à notre
amour chaste sa pureté, rends la paix à mon cœur,
le calme à mon âme, à ma pensée toute sa noblesse,
tout s'est terni depuis trois mois, viens, ami, te
retremper au feu de tant de sentimens que nous
seuls entre tous, avons unis, fais-en jaillir une
lumière céleste ; bientôt elle aura consumé de légers
fantômes qui, nés du néant, retourneront sans peine
à leur faible origine, puis, me rappelant cette triste
phrase prononcée par ta bouche chérie : « Gom-
ment veux-tu, ma L[aure], que je me retire tout à
coup ? puis-jene pas payer ma dette à une personne
qui semble tout m'ofTrir, etc., etc.? » et décou-
vrant ainsi la crainte que tu as de déplaire à la
D[uchesse]* crainte que tu dois puiser dans la
bonté de ton cœur, je te demanderais comment
cette même bonté de cœur ne te parle pas bien
1. La duchesse d'Abrant!>s. [S. de L.]
'LETTRES DE MADAME DE BERNY. 237
plus fortement en faveur de ta pauvre amie? et si la
crainte de V affliger ne devrait pas faire taire toutes
les autres? Alors, je verrais ta tête d'amour se
pencher sur mon sein, cl ton doux regard me dire :
u o que tu as raison, nu» L[aure] ». — J'ajouterais
encore, de bonne foi, mon doux cher : « Je ne crois
pas que celle femme puisse, ou veuille t'être utile.
Si elle le pouvait, il nie semble que déjà elle
aurait donné quelques preuves, quand ce ne serait,
comme dit Lal]ontaine], que pour t'allécher, et elle
ne le voudra pas, car ce n'est pas à Verfsailles] que
In pourrais trouver fortune et t'éloigner d'elle ne
serait pas, je pense, de son goût. » Enfin, ta pauvre
chérie employerait toujours près de toi, sur ce cher
canapé, toute l'éloquence du cœur, pour t'empecher
de courrir (sic) après des choses incertaines, et te
persuader de conserver ce bonheur tant réel dont
tu peux disposer encore. O quelle joie du cœur,
quelle fête du ciel, si je gagnais ma cause, comme
je me complairais dans l'oubli de mes chagrins,
avec quel charme je les verrais se dissiper comme
un songe pénible, et que la douce réalité de ton
cher amour me serait précieuse, ô je ne t'aimerais
pas davantage, non, je ne le puis, mais je serais
d'autant plus heureuse que j'aurais craint le
malheur. O chéri, l'imagination est fille du ciel, je
te vois, je t'entends, tu es là, je me livre à la joie,
au bonheur, je t'accable de baisers, de caresses.
Î3S LA JEUNESSE DE BALZAC.
VI
[Paris] Mercredi soir1 [septembre 1828]
Bonsoir, Minet cher, il est bientôt dix heures et
j'aime à croire que tu traces en ce moment ce
petit mot caressant : Min-min, que j'aime tant à
entendre ou à lire. Me voilà, mon doux chéri,
entourée de tout mon monde. E . . . . est revenu
d'une tendresse presqu'ancienne ; ce méchant
cœur-là ne peut pas s'empêcher d'être à moi, quoi-
qu'il fasse. Alex[andre]2 s'est amusé à faire
150 lieues qui ne lui ont servi qu'à prendre du mou-
vement, ce qui pour lui est beaucoup.
J'avais eu envie, je crois te l'avoir dit, d'aller à
S1 Germain et à Merfonds, je ne ferai rien de tout
cela, ils m'ont mangé tant d'argent dans leurs
voyages que j'ai besoin d'économiser, et, en res-
1. Cette lettre, quoique non datée, est sûrement du mois de
septembre 1828. Balzac était alors, à Fougères, l'hôte du géné-
ral baron de Pommereul. M. R. du Pontavice de Heussey, dans
son Bahac en Bretagne, pp. 23-24, nous apprend que ce fut le
seul séjour que fit l'auteur de la Comédie humaine dans la petite
cité bretonne. « Vingt fois, écrit-il, dans le cours de son exis-
tence si occupée, il forme le projet de revisiter ces vallées
paisibles.... Peu de temps avant sa mort, il manifestait encore
ce désir.... Ce vœu irréalisé du grand écrivain n'a rien qui nous
étonne!... On a vu plus haut, p. 115, que Balzac avait écrit
le 1er septembre 1828 au général pour lui demander asile.
« — Votre chambre vous attend; venez vite », lui avait répondu
M. de Pommereul et Balzac accourut.
2. Lucien-Charles-Alexandre de Berny, fils de M. et Mme de
Berny, né à Paris, le 13 février 1809, décédé en sa propriété de
Montmorency, le 15 juin 1882.
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 239
tant chez moi, je n<i fais pas un grand sacrifice.
Aller là ou là m'esl fort indifférent. S'il s'agissait
d'aller trouver le bonheur, c'est-à-dire toi, c'est
différent, on n'aurait pas la raison, sans doute, de
faire un tel sacrifice. Ton cher gentil journal a été
commencé il y a aujourd'hui 8 jours, je l'ai reçu
lundi, et il me semble qu'il y a déjà un siècle. Je
suis comme les gourmands auxquels l'appétit vient
réellement en mangeant.
Chéri adoré, reçois ta minette sur tes genoux,
laisse-lui passer son bras derrière ton cou, penche
ta tête chérie sur son épaule, ne t'y endors pas
ah non ! et pour que cette fantaisie ne te prenne
pas, je te donne un de ces baisers que nous con-
naissons si bien. — Quel gentil tableau ! que la
réalité me serait en ce moment gracieuse ! — J'ai
peur que tu ne restes là-bas bien longtemps. —
Cependant, si tu y es bien et que tu y travailles, je
devrais être contente; — Chéri, ma raison fera ce
que tu voudras, mais mon cœur est un enfant trop
gâté pour se prêter de bonne grâce aux privations
qu'on lui impose, il souffre, j'ai beau lui dire que
l'ami est toujours à lui, là-bas comme ici, il n'en-
tend rien à cela et trouve que l'ami serait beaucoup
mieux ici que là-bas. Que faire à cela ? lui donner
la liberté d'errer à son gré, d'être plus à Fougères
qu'ici ? Oui sans doute, il y est souvent, eh bien
cette manière d'y être ne lui plaît pas encore. —
Hélas! chéri, je ne te dis pas que j'ai un petit
bonheur. La grande Dlle est restée à Fontainebleau.
240 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Jeudi.
Travailles-tu beaucoup, cher bien-aimé? je ne
reçois pas de lettre et j'ai peur du découragement;
s'il arrivait, peut-être craindrais-tu de m'en faire
part, et au lieu de me répondre: « Je n'ai rien, ma
minette », tu ne m'écrirais pas non plus, parce que,
justement, tu aurais beaucoup à m'écrire. — Oui,
monsieur Minet, quand on est mécontent on a
beaucoup à dire à l'être qu'on aime ; on fait comme
le jour du départ, on se plaint, on grogne, puis,
quand on a bien grogné, bien dit de ces riens qui
soulagent sans qu'on sache trop pourquoi, on
recommence; voilà comme on agit avec son amie,
qui, au moins, sait à quoi s'en tenir, et a, dès lors,
toute la satisfaction qu'on puisse lui donner en
pareil cas. — Aussi, écris donc, chéri. — Eh bien,
vas-tu dire, les voilà bien les femmes; L[aure]
m'écrit, il y a quelques jours, dans un beau mou-
vement d'humilité, qu'elle ne s'habituera pas au
doux plaisir que lui cause mon journal, et aujour-
d'hui elle me fait cette phrase impérative : « Ecris
donc»! — Pardon, mon petit maître, ma phrase au
premier abord peut donner matière à la critique,
mais en analisant (sic) la pensée qui Ta dictée, on
peut y trouvertoutes les formes possibles, ainsi le
bon petit maître est prié de s'arrêter à celle qui lui
plaira le plus. — Pour que tu saches tout ce que
fait ta chérie tu sauras qu'elle a été toute la ma-
tinée à pied, en cabriolet et en omnibus, pour trou-
ver un chimiste fort habile et fort bonne personne
dont nous avons besoin pour la stéréotypie, et que
LETTRES DE MADAME DE BERNY. £2H
toutes ces Fatigues ont été prises en pure perte,
je ne l'ai point trouvé. J'ai vu sa femme qui doit
m'engager à dtner, ce qui me sera Tort commode
pour parler à son mari tout à mon aise. — Un
petit mot sur vos hôtes, mon chéri. — Sont-ils
heureux? Je le voudrais; j'ai toujours du plaisir à
savoir qu'il y a dans le monde un bon ménage de
plus.
Bonsoir, petit minet d'amour, si tous les ménages
ressemblaient au nôtre, il n'y aurait pas un seul
célibataire — mais de ceux-là je ne pense pas qu'il
y en ait beaucoup de mauvais, quoique je sois
convaincue, doux, cher, adoré, que notre lien a
été tressé dans le ciel, tandis que tant d'autres le
sont sur terre. Un baiser.
VII
Je ne pourrai aller chez toi aujourd'hui, mon bon
chéri, ou au moins ce matin; mais comme j'ai peur
que tu n'exécutes le beau projet que tu avais conçu
pour te débarrasser d'Olimpe1 : je veux te dire à
temps qu'en cela encore tu passes à côté du vrai,
on ne doit tenir à une attention de cœur que de la
part des gens que l'on aime ; or Olimpe en sa qua-
lité de femme sentira bien vite qu'elle est plus
honorée par toi que flétrie de ta querelle.
— Mon Dieu, mon pauvre ami, que ma condi-
1. Olympe Pélissier, depuis Mme Rossini. [S. de L.]
10
LA JEUNESSE DE BALZAC.
tion de prêcheuse me pèse, et qu'il me serait doux,
que mon cœur serait à l'aise si je n'avais qu'à
admirer. — Oui, chéri, l'admiration est la seule
base du véritable amour; il faut que les amans s'en
créent une s'ils étaient assez malheureux pour en
manquer.
Chéri, voilà encore cette stupide lettre de la sotte
fleur d'automne qui est venue me tourmenter; lire
la même recommandation faite par ta chérie dans
l'écriture d'une autre femme ! Fi ! !
Tiens, cher, tu as beau dire, et j'ai beau faire,
toutes ces 'poursuites de femmes n'ont déjà que
trop entaché notre amour, et une tache sur l'amour,
c'est la goutte d'huile. Tu me deffends d'être jalouse,
c'est m'ordonner de te moins aimer, oui, chéri je
ne le sens que trop, une concession en amour ne se
fait pas impunément : pour qu'il reste en son entier
il ne faut rien céder de ce qui est lui, si on l'y force,
on l'amoindrit; pour qu'il reste pur il ne doit rien
partager, car tout partage est un mélange ; un
amour vrai, vrai, entends-tu, veut tout à lui, esprit,
cœur, âme, puis le reste, mais le reste après tout,
et si ce reste est la seule chose qui lui reste intacte,
il en blêmit, il en est honteux, comme d'une pos-
session mauvaise. Je sais que j'ai ton cœur, ami,
oui je le sais, mais le souffle des femmes me le
gâte. Je t'en vois entouré et quand je te dis que je
n'en souffre plus, je te ments (sic) parce que je
cherche à me mentir à moi-même; mais cette feinte
continuelle est une fatigue attroce. Oh oui! il faudra
bientôt en finir et voir si je pourrai t'aimer dune
tendre et belle amitié.
LMTTHKS l)K MADAMi: DE BERNY. 243
VII]
[Lundi] 18 [juin 1832] Bazarnes1.
À toi mon premier mot, ami cher, comme à toi
les premières pensées de mon réveil. Après avoir
passé 33 heures dans d'horribles voitures, car la
diligence même, par suite d'un accident, touchait
sur la caisse d'une manière infernale, je suis arrivée
sans trop de fatigue chez le Gal qui m'a reçue avec
tant de plaisir, une cordialité si vraie, une sensi-
bilité si profonde, que j'en ai été touchée aux
larmes. Je suis ici aussi bien que je puis être main-
tenant quelque part, l'habitation est charmante,
1. Le château de Bazarnes était situé dans la commune de
Courcelles, canton de Varzy, arrondissement de Clamecy. Il
appartenait au général Allix. Jacques-Alexandre-François Allix,
lieutenant général d'artillerie, membre de la Légion d'honneur,
grand-cordon de Saxe, membre de l'Académie des sciences de
Gôttingue et de plusieurs autres sociétés savantes, comte de
Frienthal, commandant de la Couronne de Westphalie et ancien
gouverneur de ce royaume, est décédé, en son château de
Bazarnes, à l'âge de 67 ans, le 26 janvier 1836; son acte de
décès a été dressé le lendemain 27, par M. Vion, maire de
Courcelles, sur la déclaration de MM. Philippe Brivos, banquier
à Clamecy, gendre du défunt, et Jean-Philippe Guérin, per-
cepteur à Corvol-l'Orgueilleux, son ami.
Sur la tombe du général Allix est gravée l'épitaphe suivante :
« Ici repose Jacques- Alexandre-François Allix, lieutenant géné-
ral d'artillerie, né à Percy (Manche), le 22 décembre 1768, décédé
à sa terre de Bazarnes, le 26 janvier 1856. Proscrit trois fois
pendant les guerres de la Révolution française par les diverses
tyrannies, a participé à quatre-vingt-trois combats ou batailles.
Blessé huit fois. — La vie est la condition de la mort. L'uni-
vers a toujours été et sera toujours ce qu'il est. »
244 LA JEUNESSE DE BALZAC.
un château féodal, pas assez ancien pour que les
distributions intérieures en soient incommodes, et
assez cependant pour avoir une sorte de majesté
qu'on a trop négligée dans nos jolies maisonnettes
d'aujourd'hui. De chaque côté du bâtiment, qui
n'est élevé que d'un beau rez-de-chaussé, très élevé
lui-même, se trouvent deux tourelles d'une belle
dimension, et tu sais si j'aime les tourelles; une
chambre spacieuse, pas trop cependant, décorée
tout à neuf, meublée très proprement, ornée même
d'un tapis, et se trouvant à l'un des bouts du bâti-
ment pour que le bruit n'y arrive pas, est la chambre
qu'occupe ta Didi ;
l'anti-chambre
de ma chambre descend sur une jolie terrasse
pleine de fleurs, mes fenêtres donnent sur des
vergers qui embaument. Enfin, chéri, je suis si bien,
en comparaison de l'idée que je m'étais faite de
mon séjour ici, que je crois rêver. De plus, il y a
pour la conversation un jeune médecin fort instruit
et s'exprimant très bien.
En voilà bien long sur moi, mais c'est que ces
détails t'interressent(sic), n'est-ce pas? J'ai apporté
les Contes Bruns1, et vais y faire mes féroces cor-
1. Contes bruns, par une [tête à l'envers]. Paris, Urbain Ca-
nel rue du Bac, n° 104, Adolphe Guyot, place du Louvre, n° 18,
MDCCCXXXII. In-8.
Ce volume contient des nouvelles de Balzac, Philarète Chasles
et Charles Rabou. Les deux nouvelles de Balzac sont : Une
conversation entre onze heures et minuit (pp. 5-96) et Le Grand
d'Espagne (pp. 375-398).
Elles devaient être réimprimées dans un recueil, qui n'a jamais
paru, intitulé : Causeries du soir.
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 245
rections queje t'enverrai aussitôt. Quant à la Tran-
saction1, chéri, je ne la corrigerai pas, car je crois
que lu as si^ué L'engagement de ne pas la prendre,
et je ne pense pas que tu sois tenté de mettre tes
ennemis dans leur droit, s'ils venaient à crier contre
ta mauvaise foi. Plus tu es en évidence, ami, moins
tu dois t' entacher, plus tu as d'envieux, moins tu
dois leur laisser de prise sur toi. J'ai su samedi,
avant mon départ, que ta mère n'avait pas encore
fait partir un paquet dans lequel se trouvait ma
p,e lettre; hélas! tu m'as indiqué cette voie pour
économiser les ports de lettres, et d'infernalles
ennemies de mon repos t'en auront fait payer bien
d'autres. Que de grand cœur j'aurais affranchi mes
lettres, pour qu'elles soient lues les premières.
Didi! il n'est donc plus de bonheur possible pour
moi ! ! ! Ecoute, ami, avant de recevoir la réponse à
la lettre que je t'ai écrite vendredi dernier, je veux
t'expliquer ce que j'entends par un certain sacrifice
que je t'ai demandé. Ce n'est pas la connoissance de
certaines dames dont je t'ai demandé le sacrifice,
non, car les unes t'amusent, les autres te sont ou
te seront peut-être utiles, au moins tu l'espères ;
1. La Transaction a paru, pour la première fois, dans L'Artiste
des 20,27 février, 6 et]13 mars 1832; elle reparut la même année,
dans le tome Ier du Salmigondis, contes de toutes les couleurs.
Paris, H. Fournier jeune, 1832, in-8, sous le titre de : Le Comte
Chabert; en 1835, elle devient, dans le tome IV de la première
édition des Scènes de la vie parisienne, Paris, Mme Charles
Béchet, 1855, in-8 : La Comtesse à deux maris; depuis elle a été
publiée, dans le tome II des Scènes de la vie parisienne (lr* édi-
tion de La Comédie humaine), sous son titre définitif : Le Colonel
Chabert. Voir Spoelbercii de Lovenjoul. Histoire des Œuvres de
H. de Balzac, 5a édition, Calmann Lévy, 1888, in-8, p. 29.
2*6 LA JEUNESSE DE BALZAC.
ainsi ce serait alors un sacrifice personnel à toi
que je t'aurais demandé et tu sais si je veux de ces
sortes de sacrifices. Ce que je veux, c'est le secret
de ces dames et de leurs correspondances, car il
m'appartient et m'appartiendra, tant que notre
position ne sera pas changée. Je dis, mon doux
cher, tu m'as donné une profonde humiliation, en
me refusant celle de la Dsse d'Ab1.... Mais, à cette
époque, j'ai dû en quelque sorte respecter la déli-
catesse du jeune homme, telle fausse qu'elle fut,
car il en manquait envers la femme qu'il aimait et
la faisait grandement souffrir dans l'intérêt d'une
personne qu'il aurait du lui sacrifier. Aujourd'hui,
chéri, les mêmes raisons n'existent plus, je ne peux
plus envelopper ton manque de délicatesse à mon
égard sous le manteau de ton inexpérience, au-
jourd'hui tu as de l'acquis plus qu'il n'en faut pour
savoir de quel côté doit aller la victoire dans un
combat où il y va de mon bonheur, et si mon
pauvre cœur doit toujours servir de plastron à tous
les coups qu'il plaira aux femmes qui assaillent le
tien de lui porter. Ami, si tu pouvais [hésiter] un
moment à me faire connoître un secret qui est
bien moins à elles qu'à moi, si tu pouvais leur gar-
der ce prétendu secret et manquer ainsi à tout ce
que tu me dois, oh! chéri!!!.
Ce talent d'observation, cette connoissance du
cœur de la femme dont chacun, et surtout chacune
te complimente, je suis loin de le reconnoître. Ami,
oui tous les cœurs de femmes du monde dans les-
1. Mme la duchesse d'Abrantès.
LETTRES DE MADAME DE BERNY, U1
(juels on peut lire avec la vue ordinaire, tu les sais
par cœur, mais il en est qui ne peuvent être bien
étudiés, bien'.
IX
Mardi [19 juin 1832.)
Je ne me mets pas à la besogne sans relire ta
cbère lettre, ami chéri, et toujours elle me donne
la même émotion, une douce et suave reconnois-
sance pour les vœux bienveillants de ton gentil
cœur; oh oui, chéri, pourquoi n'avons-nous pas été
assez favorisés du sort pour vivre toujours ensemble,
loin d'un monde si peu fait pour des âmes vraies,
sensibles et grandes! Oh pourquoi?
Déjà j'ai repris bien des fois le doux bec que tu
as déposé sur la place que tu m'indiques dans ta
lettre; je finirai par l'user; puis il n'y aura plus
rien, que je croirai y retrouver encore l'empreinte
de tes lèvres adorées ; illusion et toujours illu-
sions!
— Je suis ici très libre; la nourriture y est saine,
le pays riche en culture, enfin, si tu y étais je croi-
rais au paradis.
1. La fin de la lettre manque. — Balzac était alors, depuis
quelques jours, au château de Sache, l'hôte de M. de Margonne,
il y resta jusqu'au 16 juillet, date à laquelle il se rendit à
Angoulême chez M. et Mme Carraud où il passa le mois d'août.
Voir Œuvres complètes de H. de Balzac, t. XXIV, Correspon-
dance, p. 111.
248 LA JEUNESSE DE BALZAC.
— Chéri! j'ai apporté les Scènes1 selon tes ordres,
j'en ai prêté un v[olume] à la petite Cornélie2, son
père s'en est emparé et ne Ta pas quitté sans l'avoir
fini. Ce matin nous avons, lui et moi, beaucoup
causé sur toi; et il a fini par me dire cette phrase,
qui m'a fait trouver sa voix la plus douce possible.
« S'il veut venir ici passer quelque temps avec vous,
je lui donnerai sur la vie de Bonaparte tous les ren-
seignemens nécessaires pour faire un roman poli-
tique, qui, sous sa plume, serait du plus haut intérêt,
et pourrait initier les femmes même aux secrets
d'une haute politique! » Ami, je t'ai déjà vu là, tra-
vaillant près de moi, puis quelques réflexions sont
venues chasser ce doux espoir.
Peut-être ne te trouverais-tu pas bien ici, tu es
devenu dans la vie ordinaire bien difficile! et je
souffrirais beaucoup, soit que tu te trouvasses mal,
soit que les exigences de ta vie de poète méconten-
tassent ces braves gens.
Peut-être aussi dans la circonstance de famille
où je me trouve, ne dois-je pas me permettre le
bonheur de t'avoir ici, que dis-tu de tout cela? Toi
qui t'es montré si sage dans ta dernière lettre, pro-
nonce, maître à moi, et comme toujours fiât volon-
tas tua. Allons à la besogne des Contes Bruns p[our]
te les envoyer. Mille becs là.... Pour le tien, il y
est, reprends-le et envoie m'en toujours un dans tes
lettres, mais dépose-le tout de bon. Adieu, toi.
1. Scènes de la vie privée, par M. de Balzac. Seconde édition.
Paris, librairie de Mame-Delaunay, rue Guénégaud. n° 25, 1852.
4 vol. in-8.
2. Fille du général Allix.
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 249
Mercredi [20 juin 1832.]
Je t'envoie mes corrections, pourvu qu'elles n'ar-
rivent pas trop tard. J'ai vu hier dans le journal
certaines arrestations qui m'ont beaucoup occupée1 •
Mr de Ch2... ne sera pas fâché, je crois, de cette
circonstance qui lui donne une importance politique
à laquelle il court toujours sans pouvoir la saisir;
quant à l'arrestation de Mr de F. J. \ je suis forcée,
par ma Franchise envers toi, de te dire que je suis loin
d'en être peinée. Car si le parti de ces gens-là était
détruit, il faudrait bien que tu en prisses un autre.
Cependant, une crainte mortelle vient quelquefois
faire bondir mon cœur, je pense que, si certaine
dame t'écrivait de la venir trouver, tu serais assez
bon pour y aller4. Une autre dame ne t-a-t'elle pas
fait revenir jadis de Tours à Versailles, pour la
consoler de chagrins que son égoïsme lui faisait te
grossir5; ici la circonstance est bien plus grave et
malheureusement ta vanité est toujours éveillée,
active, et a sur toi une prise d'autant plus réelle
que tu en ignores la force. Cependant, mon bien
aimé cher, ami, fils d'amour, si tu veux, écoute un
peu la raison qui emprunte pour se faire entendre
la plus amicale de toutes les voix qui jamais frap-
peront ton oreille, songe bien que certains person-
1. Voir Le Rénovateur du 23 juin 1832, pp. 32-38, au sujet de
l'arrestation de MM. le duc de Fitz-James, de Chateaubriand et
Hyde de Neuville.
2. M. de Chateaubriand.
3. M. de Fitz-James.
4. Mmc la marquise de Castries, à Aix-les-Bains. [S. de L.]
5. Mme la duchesse d'Abrantès.
250 LA JEUNESSE DE BALZAC.
nages ne te donneraient pas un seul des trois ou
quatre mille écus dont tu as un indispensable
besoin ; songe bien que, dussent-ils être vainqueurs,
ils ont toujours été ingrats par principe, et ne chan-
geront pas pour toi seul, ami; ils ont tous les
défaus de l'égoïsme, toute l'astuce et la fourberie
de la foiblesse; un dédain qui va jusqu'au mépris
pour tous ceux issus d'un autre sang que le leur;
ami ! par tout ce qui t'est cher, pour ta gloire, pour
ton bonheur à venir, pour mon repos (car tu
m'aimes) ne les crois pas, ne t'y fie pas ; emploie ton
esprit à prendre avec eux le rôle qu'ils jouent dans
le monde ; sers-toi d'eux, s'ils peuvent te servir, pour
suivre la route dans laquelle tu es entré, puisque,
malheureusement, ton pied s'y est déjà posé; mais
hélas! que de défaus il te faut acquérir pour les
imiter; et comment deffendras-tu ton âme, comment
la conserveras-tu pure, au milieu de tant de per-
versités? Enfin, chère créature adorée, tire-moi de
peine, enlève-moi le poids qui m'oppresse l'âme,
en m'assurant que tu ne seras pas ïesclave de ces
gens-là et n'obéiras pas au premier ordre que tu
recevras d'eux. Oh, par grâce, réponds moi à ce
sujet aussitôt ma lettre reçue. Ce qui me rassure
un peu, c'est Y assurance que tu m'as donnée de ne
vouloir parvenir à rien que par la Chambre; au
moins le moyen est-il noble, et d'autant plus que
tes talens feront seuls alors tous les frais de ton
avancement. Jamais tu ne sauras, ami, jusqu'à quel
point j'ai placé mon orgueil en toi. Tu me dis que
l'intérieur de mon fils sera ma justification. Mon
chéri, elle ne sera pas là, je l'ai placée tout en-
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 251
tière en toi. De ton avenir deppend ou ma satisfac-
tion ouïe trouble de mon âme. Tu ne sauras jamais
ce que tu m'as donné, cl ce que lu me donnas
encore d'inquiétudes; ce sont toutes mes dernières
sollicitudes qui ont épuisé mon courage; mon ame,
si fatiguée par elles, n'a pu supporter le moindre
choc étranger; et, incapable de livrer le plus léger
combat, elle a préféré chercher un repos apparent,
mais qui, je le sais, instruite par ma raison, ne
sera jamais que factice. La nature ni la société ne
pardonnent jamais à celui qui transgresse leurs
loix; je me trouvais nécessairement rebelle envers
Tune ou l'autre ; il m'a fallu offenser cette dernière;
je sais ce qu'elle me réserve; mais si je peux te
voir dans le lointain, grand et honoré (et tu dois
savoir quel est pour moi le sens de ces deux mots)
eh, bien, je serai contente si non heureuse; car je
suis fière de toi, il me semble que, ni ma conscience
ni le monde ne pourront me rien reprocher. Ami,
songe que tu dois quelque chose à ma tendresse.
Jeudi 21 [juin 1832.]
Je corrige maintenant les Scènes, et comme cha-
cun ici s'est emparé des v[olumes] à mesure que je
les coupais, je tiens le 5e. Oh ! ami, je viens encore
de pleurer avec ta Juliette, le morceau surtout où
elle reçoit les cheveux m'a fait une bien doulou-
reuse impression1. Je me demandais quelle douleur
devait être la plus vive, entre celle de perdre son
1. Voir Scènes de la vie privée, par M. de Balzac. Tome troisième.
Seconde édition, p. 44, Le Conseil (devenu en 1854, Le Message).
852 LA JEUNESSE DE BALZAC.
amant, mort ou vivant, et je n'ose me répondre.
Juliette possède un trésor dans des cheveux qui lui
rappelleront toujours de purs souvenirs ; mais
qu'aurait-on pu lui offrir qui la consolât si son
amant l'eut quittée pour une autre femme? — rien.
— Pour chasser de cruelles pensées je relis quel-
ques chères phrases de tes lettres, et j'espère que
ton cœur me servira de tombe avant qu'il appar-
tienne à une autre. Chéri adoré, je ne connais rien
de plus inhumain que la vie quand elle reste accro-
chée à un être qui n'en veut plus. — Je ne suis pas
très gaie, comme tu vois, et cependant ici je ris,
parce qu'il est dans ma nature de rire comme
d'aimer ; néanmoins ce séjour est assez triste ;
beaucoup plus que je ne l'ai cru d'abord, je m'étais
attendue à le trouver si sale, si vilain, que le peu
d'avantages qu'il possède m'ont paru immenses,
mais cette infernale fumée de la pipe du gal me
fait mal au cœur, bien que le pauvre homme se gêne
quelquefois pour moi. Le peu de conversation que
l'on peut avoir avec lui est fatigant en raison de sa
surdité, et son despotique rôle de père, de mari et
de maître est assomant (sic). Sa femme est une
bonne et excellente femme de ménage, sa fille, une
gentille enfant, pleine de bienveillance, mais qui
n'a encore aucune idée; les voisins sont vieux,
laids, bêtes jusqu'à l'imbécilité ; le jeune médecin
est mon seul amusement ; car il a jeté tout le fond de
son sac dans une demi-heure de conversation et,
comme beaucoup de gens, il ne lui reste plus rien
du tout en sorte que je m'en serts (sic) pour amuser
ces dames et en rire moi-même, voilà le seul parti
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 253
que j'en puisse tirer, ou, quand ces dames ont bien
pi, je le fais parler médecine. — Je n'ai donc
d'autres plaisirs que celui de lire tes Scènes en les
corrigeant; elles me donnent de chers souvenirs, je
me rappelle où nous étions quand tu me lisais tel
ou tel morceau, ce que tu m'en disais, les mots
d'amour qu'il faisait naître, ami, je m'enfouis alors
dans ton cœur comme sur ton gentil corps quand...
lu sais ? — Ah mon Dieu ! pourquoi ne peux-tu
pas venir? mais non, ne viens pas, cette habitation
est dans un fond, la vue y est bornée de tous côtés ;
tu y serais mal, ah ! non, n'y viens pas. — Je ne
puis donc rien t'offrir, ni par moi, ni par mes amis de
tout ce qui peut te charmer ailleurs! ! Ah grand Dieu!
quelle attroce (sic) pensée ! Quel mauvais génie a
donc placé mon âme au milieu de tant d'entraves?
Chéri, mon cœur te donne d'autant plus que je n'ai
que lui à t'offrir. — Pour me soulager un peu, je te
presse dans mes bras, et je m'épuise dans cette
étreinte. — Une idée me revient, et il me faut te la
dire, vois-tu, me voilà encore nr effaçant et ne pen-
sant qu'à toi isolément, en t'engageant à ne pas
venir, car si je me mêlais à toi comme je devrais le
faire, est-ce que je ne serais pas persuadée que,
pour passer quelque temps près de moi, tu mettrais
volontiers de côté certains petits désagrémens de
la vie? Je crois qu'il entre beaucoup de vanité dans
certains de mes regrets, mais vanité qui n'est que
pour toi, entends-tu ; savoir que tu trouves ailleurs
que près de moi ou par moi des choses qui te plai-
sent est une idée qui me causera toujours un amer
dépit suivi de chagrins.
LA JEUNESSE DE BALZAC.
Samedi [23 juin 1832.]
Oh qu'une lettre de toi me sera douce! et comme
je l'attends ! Chéri, pour ménager un peu les ports
de lettres je ne t'enverrai mon bavardage de cœur
que tous les dimanches, puisque toi aussi a (sic)
choisi ce jour. J'ai reçu hier une lettre d'Antoine1
qui est vraiment extraordinaire, je voudrais bien
pouvoir te la lire et te parler de ce singulier garçon.
Peu d'hommes de 30 ans seraient capables d'avoir
ses idées et de les exprimer aussi bien. Et toi, chéri,
que fais-tu? où en est la Bataille'? Mon Dieu, si
près de ton cœur, et si loin de ta parole, ne pas
t'entendre, être forcée de te deviner, et parfois ne
l'oser pas, comme quand il s'agit de politique par
exemple ; une partie de mes journées se passe à
désirer ta réponse à mes deux dernières lettres, et
l'autre en commentaires sur ta décision à une chose
qui m'est personnelle, ou, sur les rapports que
peuvent avoir avec toi les événemens politiques
actuels. Oh chéri, où est le temps où je n'attendais
tes chères lettres que pour y lire, écrite en cent
manières, l'assurance de ton jeune amour ? ce temps
n'est plus, et ma raison plus foible que la nécessité
est accablée sous son énorme poids — et tant
1. Antoine- Ange de Berny, fils de M. et i\Ime de Berny, né le
14 février 1815, décédé le 4 janvier 1841.
2. Balzac, dans ses lettres à sa mère, parle constamment de
La Bataille [de Wagram], parfois comme d'une œuvre presque
terminée; elle était destinée à entrer dans les Scènes de la vie
militaire, mais n'a jamais paru. Voir, dans la Revue de France
du 15 juillet 1921, une étude de M. Bouteron sur ce mystérieux
roman.
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 1j.y,
d'autres choses encore m'accablent en ce moment
que j'aurais bien besoin d'un cœur bout à moi pour
m'aider à supporter de si lourds fardeaux. — Ne va
pas croire que d'après cette phrase je ne sais pas
tout ce (|ue je puis trouver en toi, mais dans ta
lettre si pleine de raison, nous serons, me dis-tu
toi-même, souvent séparés ; or, ami, quand tu n'es
pas là je suis seule, et maintenant, c'est bien sou-
vent. — Mille baisers — oh qu'un seul donné sui-
tes chères lèvres vaudrait mieux que ceux-ci ! !
Dimanche [24 juin 1832.]
Je suis persuadée que je recevrai une lettre de toi
aujourd'hui, car j'en ai eu certain avertissement
nocturne qui ne me trompe jamais. Chéri, tant que
mon âme tiendra ainsi à la tienne, par ces liens
invisibles et inexplicables, je ne me croirai pas tout
à fait malheureuse ; et cependant je ne ferai partir
cette lettre que lorsque j'aurai certaine réponse
qu'il me faut pour bien connaître la véritable situa-
tion dans laquelle tu me laisses près de toi, car il me
faudra peut-être bientôt changer de langage, et je
t'avoue que, si tu ordonnes à mon cœur de se taire,
le silence que tu lui auras imposé me semblera
moins pénible que celui auquel je veux inutilement
le condamner moi-même ; je me suis mille fois tor-
turée en vain, mais j'ai dans ce combat reconnu
comme toujours ta supériorité, tu es encore mon
maître, et j'attends l'arrêt de ta volonté toute sou-
veraine. Or, comme il ne m'est pas encore connu,
quel qu'il soit, je me crois toujours ta chérie, et te
256 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Fais toutes nos caresses accoutumées. Je te baise
partout. Je suis toute à toi, toute ton Eve.
Lundi [25 juin 1832.]
Oui, elle était en chemin, cette chère lettre, mon
bon génie ne m'a pas trompée, et je l'aurais reçue
hier si tu me l'eusses adressée ici directement,
comme tu aurais du le faire, puisque tu avais mon
adresse. — Tu m'aimes ! je suis toujours ta chérie
aimée ! ta chère étoile! ta Didi idolâtrée! — oh ami,
mon cœur ne te demande plus rien, mais les assu-
rances de ton cher amour sont venues le tourmenter
d'une autre manière. Je t'ai encore affligé de nou-
veau! Oh chéri, cette pensée est une souffrance, et
quoique ta chère âme devine en ceci toute la
mienne, et voye clairement que la force de mon
amour soit la seule cause de mes inquiétudes, et
par suite de mes injustices, que ta divine bonté
appelle justice, je ne me pardonne pas comme tu
me pardonnes, et, je suis forcée d'admirer de nou-
veau la tendresse indulgente de ton cher cœur, qui
pourrait si bien, et à juste titre, faire expier au mien
toutes ses extravagances ; mais enfin je t'adore, tu
le sais, et je comprends tout ce que la foi peut te
faire excuser ; tous mes torts, chéri, viennent du
manque de cette foi si précieuse et si douce ; mais
ta dernière lettre est venue confirmer toutes les
autres et toutes tes chères paroles que parfois tes
actions semblent démentir. Mais en ce. moment je
suis toute confiance, et par suite, tout amour, puis
tout bonheur, ma vie est tout entière sous la direc-
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 2M
lion de mon cœur, ou plutôt de mon espoir en ton
amour. — Adoré cher! que de temps ('coulé entre
ma lettre et la réponse! 10 longs jours ! et j'ignore
ce que lu fais maintenant? travailles-tu? Auras-tu
reçu à temps les corrections des Contes Bruns ? Cette
dame t'écrira sur la Vendée et la politique '!!... Oh !
tu devrais d'ici entendre les battemens de mon
cœurl Ami! c'est jouer avec ta tête! tu comptes
sur les femmes pour qu'elles te servent d'appui en
politique! impossible, chéri, ce n'est pas là ce que
tu veux; d'abord, Dieu merci! le temps où elles
étaient puissantes dans ces sortes de matières est
bien loin de nous, et aujourd'hui, elles sont nulles
en affaires aussi graves, ou, si elles sont influentes,
c'est pour tout gâter. La révolution a coupé les
lisières de l'homme, et il n'est pas organisé, de nos
jours, de manière à les reprendre ; et puis mon
doux bien-aimé, je te le répète et te le rappelle,
n'est-ce pas par la Chambre que tu veux arriver? Oh
par grâce ! au nom de tout ton avenir, prens-t'y
avec toute l'adresse possible pour faire cesser cette
correspondance (non pour moi, car je suis trop heu-
reuse aujourd'hui par ton cœur, pour avoir des
inquiétudes personnelles) mais pour toi, pour ta
sûreté, il ne faut qu'un mot indiscret, et il y en aura
mille, pour te compromettre. Et toi, innocent,
sera (sic) confondu avec de coupables agitateurs,
de monstrueux égoïstes, qui, dansle seul but d'obte-
nir plus de fortune ou plus de moyen pour dominer,
immolent de sang-froid et sans regret des myriades
1. La marquise de Castries.
17
258 LA JEUNESSE DE BALZAC.
d'êtres inoffensifs. — Voilà mon tourment d'aujour-
d'hui, mais il est bien vif, outre la douleur de
craindre ton danger; je frémis encore de te voir
accolé avec un Gh[ateau]B[riand]. Je méprise sou-
verainement cet homme et sa dernière lettre si spé-
cieuse1 où sont exprimées des pensées si fausses,
capables de le faire chasser du territoire ou incar-
cérer à tout jamais, si le gt2 était conséquent, a
encore ajouté à la profondeur de mon mépris. Ami,
pour que je vive j'ai peut-être plus besoin encore
du profond respect dont mon âme veut t'entourer
que de ton amour. — Tu dois juger, par cette
phrase, de quelle manière je t'aime, si tu pouvais
l'ignorer encore. Tu m'as promis un journal, tiens
ta parole, mon Didi, serre tes lignes et tes mots,
écris-moi chaque jour quelque chose et envoie-moi
le tout une fois ou deux par semaine. — Mille
caresses et puis mille encore, mille pardons, mille
becs d'amour et des vœux innombrables pour ton
cher bonheur!
Puisse cette lettre te porter autant de bien que
m'en a fait la tienne. Oh chéri, dans tous tes maux,
repose-toi sur mon cœur î
Mercredi 27 [juin 1832.]
Mon bien aimé, lire et relire tes lettres, baiser
les chères places où ta main a tracé les tendres
expressions de ton cœur, voilà, ici comme partout,
aujourd'hui comme toujours, la plus douce occu-
1. Voir Le Rénovateur du 23 juin 1832. [S. de L.]
2. Le gouvernement.
LETTRE9 DE MADAME DE BERNY. ÎM
patioo de ma vie ; puis viennent les corrections
pour mon plaisir; le reste du temps, celui que la
politesse m'impose de donner aux bavardages du
G*1, je me crois dans un triste exil, à mille lieues
d'un monde où je serais dans ma sphère : avoue que
je suis malheureuse en amis.
Mde de B et le G", quel couple! l'un et l'autre
ne peuvent m'offrir qu'ennui et déplaisir. Mais
pourquoi venir encore occuper d'eux ma pensée en
l'écrivant ? parlons de toi, chéri, toi dont je rêve le
bonheur, toi que j'aime assez pour oublier ma vie
en pensant à la tienne, toi dont l'avenir est une de
mes pensées si intense qu'elle enveloppe et fait
disparoître toutes celles qui pourraient avoir le
mien pour objet. Ainsi, quand je fais des châteaux
en Espagne, je te marie avec une femme pleine de
dévouement et de bonté, assez spirituelle pour te
comprendre, pas assez pour viser au bel esprit, et je
te fais riche, assez pour que tu aies de l'aisance, pas
assez pourque tu aies desflatteurs, mais pardon, mon
petit maître, si, en ce que tu vas lire, mes châteaux
en Espagne diffèrent des tiens, je me garde bien de
te faire arriver au pouvoir, bien certaine que là il
n'y a pas de vrai bonheur pour l'homme, mais,
pour te dédommager, je te donne les plus belles
palmes littéraires, et une considération toujours
croissante parmi tes concitoyens. Je t'entoure de
gens capables de t'apprécier et d'embellir ta vie,
et j'éloigne de toi tes faux amis ou tes amis faux.
Parmi ceux-ci se trouve la D8se d'Abr1. Oh! mon
1. Mme la duchesse d'Abrantès.
'200 LA JEUNESSE DE BALZAC.
chéri ! j'ai lu ici une lettre de 8 pages écrite par elle
au Gal à l'occasion de la proposition qu'il avait faite
à Mlle J de la recevoir chez lui, lorsqu'il la sût reli-
gieuse à Dijon1. Mon chéri, quel tissu de hardis
mensonges! de cafarderies! de vanité ! d'exagéra-
tions de toutes sortes! ah, mon minet adoré, c'est
ton bon ange qui t'a délivré du malheur d'apparte-
nir à une pareille femme ! le Gal a trouvé quelque
chose de si faux dans toute cette lettre qu'il n'y a
pas répondu ; J aussi lui en a écrit une, mais la
vérité la plus simple en a dicté les phrases ; elle
fait honneur à son caractère. — Tu ne saurais trop
te méfier des exagérations ; malheureusement tu y
es trop habitué pour les reconnoître tout d'abord,
et il te faut observer mieux qu'un autre. — x\dieu
pour aujourd'hui, mon gentil aimé, mille becs sur
tout toi. — Que fais-tu? le saurai-je donc bientôt?
Jeudi [28 juin 1832.]
Je suis tentée de battre le piéton quand il ne
m'apporte pas de lettres, chéri, je me fais des
inquiétudes de toutes les sortes, et je parcours le
champ des suppositions de la manière la plus triste.
Je ne puis t'écrire la plus grande partie de mes
craintes, par prudence, mais sache que l'idée la
moins effrayante pour moi est celle de te savoir
ne produisant rien, et cependant, je vois de tous
mes yeux l'énorme besoin que tu as de produire ;
1. M"c Joséphine Junot d'Abrantès. Mllc Junot avait été
sœur de charité pendant quelques années. Voir Coivespondance,
p. 90, lettre XLVIII. [S. de L.J
LETTRES DE MADAME DE BERNY. HH
oh mou gentil, <ju«* je serais contente de savoir
tous les jours ce qui se passe dans ta pensée! il
nie faut donc toujours souffrir maintenant! Quand
ee n'est pas par le cœur, c'est par la lète. — Ami,
est-ce donc un bonheur qu'un attachement si vrai?
Oh oui, mille fois oui, jamais les souffrances que
lu me causes n'égaleront le bonheur que j'éprouve
à t'aimer! et une seule parcelle de ton amour
balancerait les plus pesans malheurs!!
Vendredi [29 juin 1832.]
J'ai ta lettre ! grâces te soient rendues, je sais où
tu es, je sais que tu travailles ; ta situation, est-ce
que je ne la vois pas comme toi? il eut été sage de
vendre tes deux chevaux, ils mangent, inutilement
pour toi, pendant ton absence. Mais aujourd'hui,
ce n'est pas là ce qui m'occupe le plus, car de toi,
la première chose c'est toi, et je suis un peu ras-
surée, d'autant plus que la dame est partie1; que le
1. Il s'agit, d'après une note du vicomte de Spoelberch
de Lovenjoul, d'un projet de mariage avec Mme Deur-
broucq. Le 13(?) juin 1832, Balzac écrivait à sa mère, de Sache :
« Mme Deurbroucq doit venir — grande nouvelle et qui
peut me faire rester ici pendant quelque tems, si.... » Cette
lettre est inédite (Collection Lovenjoul, ms. A 276, fol. 93). Le
28 juin, nouvelle lettre de Balzac à sa mère : « On attend de
jour en jour Madame D.... Aussi je ne puis pas courir les
champs et travailler autant que je le voudrais.... Je voudrais
pourtant savoir à quoi m'en tenir sur une chose qui changerait
si grandement ma situation et modifierait tous mes plans. Le
travail souffre de cette attente, car, comme elle est attendue
de jour en jour, je vais trois fois par semaine à Mjeré]; or il
m'est impossible de concilier cela et le travail. Néanmoins,
Gosselin satisfait, — et il le sera cette semaine — je ferai vive-
ment La Bataille à moins que celle des amours ne commence
269 LA JEUNESSE DE BALZAC.
sort la fasse rester où elle est jusqu'à parfaite tran-
quillité, et que le diable enchaîne toutes les femmes
qui se mêlent de ce qui ne les regarde pas ! —
Que je te remercie de tous les gentils cadeaux
dont ta lettre est pleine ; j'y répondrai plus longue-
ment, j'envoie celle-ci de suite pour que tu aies
mon adresse; mais, Mr Minet, je vous l'ai écrite
dans ma dernière lettre de Paris ; tu ne me lis pas,
méchant. Mille becs. Bazarnes, par et à Varzi,
Nièvre.
Je ne veux pas voir la lettre; hâte-toi de la
mettre au feu.
Suscriplion de la lettre : A Monsieur Balzac, au château
de Sache par et à Azai-le-Rideau. Tours. Indre-et-Loire.
Le timbre de la poste porte la date du 30 juin 1832.
X
[Mercredi] 4 juillet [1832.]
Je reçois à l'instant deux lettres, l'une de mon
bien aimé, l'autre de Laure1; comme toujours je
mais alors, je ne perdrai pas pour attendre et je pourrai
bien faire la loi aux libraires. » (Correspondance, lettre LXXII.
p. 114.) Enfin, le 15 juillet, Balzac écrit encore à sa mère : « Ma
correspondance et mes visites à Méré ont tout à fait tout mon
tems. Quant à Mm« D..., elle m'a écrit un mot poli pour me
remercier des Scènes. Claire m'a dit en dernier lieu qu'elle ne
viendrait en Touraine qu'au mois d'8bro; alors, je vais aller à
Angoulème pour ne pas être 6 mois chez M. de Margonne. »
(Collection Lovenjoul, ms. A 276, fol. 98 et 107. — Cowespondance,
lettre LXXIX, p. 118.)
1. Laure- Alexandrine de Berny, née le 30 octobre 1813.
LETTRES DE MADAME DE BERNY, 263
garde la tienne pour la lin* la dernière, bien ;i mon
aise, mais hélas ! j'avais presqu'envie «le ne l'ouvrir
([lie ee soir ; après avoir lu celle de L[aure]. Cette
lettre lui est dictée d'un bout à l'autre, mais figure-
toi mon angoisse, lorsque j'y vois que son père ne
veut pas que son frère la reçoive des mains de
Mmo Fabre mais des siennes et qu'Alex [andre| se
refuse à aller chez son père. Je connoissais l'inten-
tion de M1 B[erny] et j'avais écrit à ce sujet à
Alex[andre], mais la lettre ne sera pas arrivée à
temps. La voiture du Gal est partie pour aller
prendre mes enfans à la diligence de Clamecy, je
ne sais si elle me ramènera au moins Alex[andre|.
Oh! mon Dieu, quelle terrible chaîne est la mienne!
D'un autre côté, Antoine me donne de vives inquié-
tudes, car le parti que j'ai pris pour lui semble ne
pas lui convenir. — Je ne t'en avais pas parlé,
parce que tu as bien assez de tes chagrins sans
prendre encore ta part des miens. Mais en ce mo-
ment la mesure est si comble qu'il m'a fallu en
déposer une petite partie sur ta chère et fidèle âme.
— J'ai lu ta lettre, ami, j'y répondrai plus tard. Tu
me reproches de ne pas t'écrire et cependant, à
peine s'il se passe un seul jour sans que je me
donne le doux plaisir de causer avec toi. — J'at-
tends le retour de la voiture avec une anxiété
fatigante. — Vraiment, ce n'est pas vivre, que de
se trouver toujours ainsi environnée de tourmens.
— Je reçois tes caresses pour adoucir l'amertume
de ma situation présente — Quelle déraison, faire
souffrir Laure de la raideur de son frère !!... Je suis
brisée!
264 LA JEUNESSE DE BALZAC.
J'ai voulu me mettre à corriger, impossible, il
est 2 h., je ne serai tirée de mon anxiété qu'à 6 h.,
c'est bien long. Je me mets à réfléchir, les bras
croisés, puis j'ai pensé qu'il me serait peut-être
moins pénible de causer avec toi que toute seule.
— On veut, je le vois, me faire renoncer à une
séparation qui, sans doute, doit affliger beaucoup
Mr B[erny]. Mais voyons quelles sont les raisons
qui peuvent me faire persister dans ma résolution,
ou celles qui pourraient m'y faire renoncer. De ces
dernières j'en vois bien peu. L'affliction de MrB[er-
nyj est la plus puissante, sans doute ; il m'est
affreux d'affliger qui que ce soit, mais la position
de mon cher Àlex[andre], si je l'abandonne, est un
poids bien autrement pesant dans la balance, une
chère victime qui de sa vie ne m'a donné de cha-
grin, qui a besoin d'avoir près de lui un être qui
l'aime et qui adoucisse l'amertume que donne tou-
jours à ses pensées le genre de son caractère. Lui
qui ne cherche et ne trouve de distraction nulle part,
et qui avait pris la douce habitude de se laisser
aller à causer avec moi. Moi qui suis le seul être
qu'il aime au monde je l'abandonnerais ? impos-
sible ! or ce serait l'abandonner que de vivre avec
Mr B[erny], car je le vois, c'est fini à tout jamais
entre son père et lui. Je neveux pas juger cela,
cette conduite de sa part est une conséquence de
son caractère ferme et rect. Il y a partout des
conséquences à subir, celles de la fermeté ne sont
pas à comparer, pour leur préjudice, avec celles de
la foiblesse. Je respecte la force et puis tout sup-
porter d'elle, je méprise la foiblesse, et n'en puis
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 265
rien supporter sans de grandes souffrances. —
Serait-ce pour mes autres enfans que je resterais
près de M' <l<; B[emy] ? il n'y en a pas un d'eux
maintenant à qui ma séparation puisse être nuisi-
ble. Laure elle-même y gagnera plus qu'elle n'y
perdra, je la marierai de cette manière moins diffi-
cilement, car je pourrai amener des jeunes gens
chez moi, et certes, ce n'est pas la vue de son père
qui les déterminerait à entrer dans une famille
dont il est le chef; ce n'est pas non plus son adresse
qui les y déterminerait, il n'a jamais su que mettre
les bâtons dans les roues que j'étais parvenue à
faire mouvoir. — Enfin, si les jugemens du monde
pouvaient entrer pour quelque chose dans ma dé-
termination, je sais ce que penseront toutes les
personnes qui connoissent Mr de Bjerny] ; mes
filles elles-même me conseillaient plutôt le pour que
le contre (peut-être auront-elles changé d'avis).
Quant à mes fils, je sais ce que pensera Ant[oine].
Ar[mand] l ne désire rien autre chose en ce moment
que cette séparation ; ainsi qui pourrait donc m'y
faire renoncer? Mr B|erny] tout seul, s'il lui prenait
fantaisie de me retirer sa procuration; mais j'espère
qu'il ne V osera pas. Néanmoins, cette pensée me
forcera peut-être à retourner à Paris plutôt (sic) que
je ne le croyais, car il faut être là pour éviter cela.
— Ami, ce doux épanchement m'a un peu calmée,
et m'a doucement fait patienter une demi-heure.
1. Armand-Marie de Berny, né à Paris, le 2 octobre 1811,
décédé le 23 novembre 1835.
266 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Mercredi.
Mes enfans sont arrivés tous deux hier, je t'en-
voie mon bavardage pour que tu sois au fait de
toutes mes pensées. — Quant à mon cœur, tu sais,
j'espère, tout ce qu'il renferme pour toi. — Reçois
mille baisers, ami, le piéton attend, à plutard (sic)
tout ce que mon cœur peut te dire. — Adieu1.
XI
Vendredi [6 juillet 1832.]
Ami chéri, gentil, adoré, le Gal et Alex[andreJ
ne me laissent pas à eux deux le temps de t'écrire ;
il me faut ôter ma clef, comme dans ce moment,
pour jouir d'un quart d'heure de liberté, encore
rôdent-ils dans mon corridor; mais grâce à la sur-
dité du Gal, je puis te parler tout haut fort à mon
aise pendant qu'il me débite ses histoires, et c'est
un plaisir dont je me régale souvent, mais hélas,
chéri, elles ne vont pas jusqu'à ton oreille ces
paroles d'amour ou ces confidences, et cette triste
distance qui nous sépare les engloutit, comme la
mer une goutte d'eau. Chéri, j'espère que tu ne
souffres pas de la chaleur comme nous ici. Bazarnes
est un entonnoir et nous y sommes comme dans un
1. Balzac, quand il reçut cette lettre, était à Sache, l'hôte de
M. de Margonne.
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 26*3
foui*, oli non! j'espère «pn- la chaleur ne t'empêche
pas de produire, car tu as tant besoin des fruits
de ton Imagination que je frémis en pensant à ce
que tu deviendrais s'ils n'arrivaient pas à une
pleine maturité.
Je ne puis encore rien te dire sur mon allure,
j'attends la réponse d'Antoine; je suis comme
l'oiseau sur la branche, et cet état précaire n'esl
pas beaucoup de mon goût : mais tu connais ma
devise Patience et Courage. Ce qui m'aidera tou-
jours à prendre ma part de ces deux trésors hu-
mains, ce sont tous ceux que tu me conserveras
dans ton cher et gentil cœur, c'est ta douce ten-
dresse, ce sont tes expressions d'amour. Oh! Minel
adoré, sois en prodigue ; songe que chacune d'elles
porte la joie et le contentement dans un cœur dont
tu es si souverainement le maître que ses batte-
mens n'ont d'autres moteurs que ta volonté. Mon
doux Seigneur veut-il prendre toutes les caresses
que dépose ici son Eve aimante?
Samedi [7 juillet 1832.]
Je n'aime pas ce découragement dont ta dernière
lettre est remplie, oh! mon chéri! toute ma rhéto-
rique de cœur serait employée à le détruire, si
j'étais près de toi, mais y parviendrais-je? oh! oui,
et je sais bien comment, Minet adoré! la puissance
de nos caresses est bien grande! Aussi je t'avoue
que cette pensée m'afflige, car, ami, rien ne rem-
placera leur douce influence sur nos existences, et
surtout sur la tienne. Je ne puis m'empecher de
268 LA JEUNESSE DE BALZAC.
frémir de toute mon âme, quand je songe au mo-
ment où il ne me sera plus permis par un baiser,
de te jeter en dehors de tout ce qui t'afflige. Quelle
est la coquetterie de cœur, d'âme , d'esprit qui
pourra remplacer une seule gentillesse d'amour?
Et quand je pense qu'une autre. . . . !
Oh mon Didi à moi ! mon chéri, mon adoré maître,
viens donc recevoir encore le tribut d'une volupté
créée par toi, les caresses d'une chérie façonnée à
ton usage! Oh, nous nous retrouverons bientôt
j'espère ; il me serait trop affreux de laisser cueillir
par d'autres ces belles fleurs dont le parfum vient
encore jusqu'à moi et m'enivre, dont les vives
couleurs me réjouissent le cœur, et que j'effeuille-
rais avec tant d'amour sur ton gentil corselet!
Minet aimé, à toi les baisers, à toi tous les plus
gracieux dons de ta Didi méchante !
Dimanche [8 juillet 1832.]
Cette lettre va partir, et je n'en espère pas une
de toi, car je n'ai pas eu mon avertissement noc-
turne qui ne me trompe jamais, ami ! Serais-tu
malade? Oh cette pensée m'est insupportable, et,
fâcheusement pour moi, elle entraîne une inquié-
tude pécuniaire, la plus sotie de toutes. Que de-
viendrais-tu si tu tombais malade? Tu avais bien
raison de te comparer naguère à un manouvrier,
ton existence, comme la sienne, repose donc sur ta
force et ta santé. Ami, courage, et si tu peux ne
laisser courrir ton imagination qu'au profit de tes
gentilles, de tes belles compositions, arrète-la.
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 269
lorsqu'elle voudrait s'en aller vagabonder dans
ccrlaines rouies épineuses où elle n'a nul besoin
d'aller déjà se fourrer, et d'où elle revient souf-
frante. Ami, il y a partout des antipathies et je suis
persuadée que la poésie et la politique ont entre
elles une aversion invincible. Pourquoi veux-tu
faire un miracle, en cherchant à les accoupler? es-
tu sot de ne pas jouir tranquillement de tes belles
années? es-tu fou de chercher à troubler la joie
qu'elles sont si bien disposées à te prodiguer? es-
tu imprudent d'abandonner les riches moissons
qu'elles t'offrent pour glaner quelques mauvaises
épines? Ah! le temps ne viendra que trop tôt, ami,
où tu en prendras ta grande part, tout comme un
autre — Sois poëte, mon doux chéri, quelques
années encore, et laisse couler l'eau; — la librairie
va être ruinée, dis-tu, quand cela serait? Toi qui
réfléchis, pense donc aux besoins actuels de la
pensée, et dis-moi si cette ruine peut être de longue
durée? Pauvre chéri, le temps que tu mettrais à
lui préparer un ouvrage lui suffîraitpour se relever,
s'il lui arrivait ce malheur que tu t'affliges à pré-
voir, et quant à ce qu'elle te doit, je crois que tu
t'arranges toujoursde manière à te laisser peu d'in-
quiétudes sur ce point. Allons, MrDidi, du courage
et pas de folles craintes. Sur ce je vous baise le
bec pour vous empêcher de me répondre, comme
aussi pour reprendre à l'instant même tout ce que
j'y dépose d'amour.
270 LA JEUNESSE DE BALZAC.
XII
[Lundi] 9 [juillet 1832.]
Quel lourd et pesant fardeau tu me donnes à
porter, ami chéri! quoi! ne t'en rapporter qu'à moi
pour ton L[ouis] L[ambert], pour une œuvre à la-
quelle tu mets tant de prix! Mais c'est une folie,
mon bien cher, et si tu crois une femme capable
de t'aider par ses jugemens, pourquoi ne consultes-
tu pas Mde Caraud (sic)l Je te dis, en toute vérité,
que, par les lettres que tu m'as lues d'elle, et par ce
que tu m'en as dit, je la crois plus capable que moi,
qui n'ai, comme tu sais, que mon sentiment, guidé
par l'instinct du cœur.
Faut-il donc, Mr Minet, pour pouvoir profîtter des
conseils d'une femme que cette femme nous appar-
tienne? Ce génie femme dont l'absence, dites-vous,
vous jette dans une petite folie, s'évanouit-il donc
tout à fait, quand les sens ne sont plus près de lui?
Ah! mon René! quel arrêt pour ta nouvelle Eve! A
propos de René, ne voilà-t-il pas ce nom qui se
trouve écrit par nous deux dans le même moment,
et tu veux que le génie ne soit plus là? Oh oui, tu
as mieux dit ailleurs, nous sommes la même sub-
stance, et voilà pourquoi la plus légère parcelle
séparée entre nous produit un si vif déchirement.
Oh! comme j'ai savouré ce bon et long et volup-
tueux bec que tu m'envoies! Ami, à cette distance,
l'enivrement qu'il cause n'est pas dangereux, et
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 271
l'on peut s'y livrer; aussi j«' te l<i renvoie double-
ment chargé de iout ce que tu y a mis. .Je veux,
Mr, savoir ce que vous avez <'crit après le mot:
dame, il m'a été impossible de déchiffrer ce mot
qui m'intéresse; vous le transcrirez lisiblement,
s. v. p., et me renverrez mon pelit morceau de
papier, j'y tiens, attendu qu'il fait partie d'une
collection de laquelle je n'ai pas encore égaré une
seule syllabe1.
Tu le vois bien que je ne suis que femme. Cette
lettre était destinée à ne le parler que de ton L[ouis]
L[ambert], je voulais obéir à tes ordres, et m'af-
fublcr du masque de critique, bah ! j'ai enfilé une
toute autre route, et je m'y trouvais bien mieux que
sur le sol rocailleux où tu veux me faire marcher.
Tu ne sais donc pas que je m'y blesserai, non les
pieds, mais le cœur, car il s'agit de te dire des
vérités dures, puisque tu veux les entendre; mais
songe que je puis ne pas avoir le sens commun,
qu'un avis donné par sentiment sur un objet d'art
peut ne pas avoir le sens commun et que là où ma
vue débile n'apperçoit rien, un œil exercé y verra
d'admirables beautés! Je viens de relire ce que j'ai
de L[ouis\ L[ambert] c'est-à-dire le tout, moins la
1. Il se trouve joint à cette page un minuscule fragment de
la lettre même de Balzac à laquelle celle-ci répond : voici ce
qu'il contient : « Faut-il donc aller à la dame d'Aix! » c'est-à-
dire, ainsi qu'il le fit en effet, aller retrouver la marquise de
Castries qui l'attendait à Aix-les-Bains.
Au revers de la phrase que nous venons de citer on peut lire
ces mots : « (oh toi! toi!) c'est tout pour... n'efface.... »
En tout cas, malgré la demande de Madame de Berny, Balzac
ne lui retourna jamais cette petite relique à laquelle elle sem-
blait tant tenir !
'272 LA JEUNESSE DE BALZAC.
5e et 4e feuille; après avoir disséqué cette œuvre, je
viens de la revoir vivante, et je crois que tu as
entrepris une œuvre impossible. Ce qui me console,
c'est que le public ne verra pas ce que tu as espéré
en faire, et ce qui est la seule chose que je trouve
impossible, tu veux faire le fait vrai, le saisir dans
son action même. Si le public devinait cela, tu
serais perdu, car ce serait vouloir poser une borne
qu'il n'est permis qu'à Dieu de toucher; Goethe et
Byron ont admirablement peint les désirs d'un
esprit supérieur; en les lisant, on les grandit de tout
cet espace qu'ils ont apperçu; on admire la portée
de leur vue, on voudrait leur donner son âme pour
aider la leur à franchir la distance qui les sépare
de ce but où ils aspirent. Mais si un auteur vient
me dire qu'il est parvenu à ce but, tel grand qu'il
soit, je ne vois plus en lui que le présomptueux, sa
vanité me choque et je le rapetisse de toute la
hauteur où il a voulu s'élever. La perfection est
pour l'homme quelque chose d'autant plus précieux
qu'elle est toujours accompagnée de V espérance; si
un Dieu venait la lui offrir, peut-être n'en voudrait-
il plus; mais bien certainement il croira toujours
de mauvais aloi, ou mieux encore il ne croira pas
à celle qu'un homme viendra lui offrir et il jettera
sur cet homme un juste ridicule. Voilà, chéri, mon
avis, et d'après lequel je te supplierais de retran-
cher de ton L\ouis] L[ambert] tout ce qui pourrait
faire deviner ces singulières pensées, dont je vou-
drais bien être seule dépositaire (et que j'ai trans-
crites de tes lettres). Ainsi, ces phrases : « l'admi-
rable combat de la pensée, arrivée à sa plus grande
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 273
force, à sa plus vaste eœpresêion? » « le monde
moral dont il avait reculé les limites pour lui. » ne
peuvent 9e tolérer, surtout les premières, car, enfin,
reculer des limites n'est pas atteindre un but, et
celle-ci peut à la rigueur passer.
Oui, bien certainement, je blâme la collusion,
car elle serait à ton préjudice; fais mon chéri, que
toute la foule t'apperçoive de partout, par la hau-
teur où tu te seras placé, mais ne lui crie pas de
f admirer, car de toutes parts les verres les plus
grossissants seraient à l'instant dirigés sur toi, et
que devient le plus délicieux objet vu au miscro-
scope?
XIII
Mercredi [11 juillet 1832.]
Gomment, chéri ! pas un être qui puisse t'en-
tendre? pas de conversation, me dis-tu, mais je
croyais Mr de M[argonne] au moins, bien en état
de comprendre l'exigeante loquacité d'un auteur,
et je lui croyais assez de savoir-vivre pour s'y
prêter. — Tu es donc là dans un désert? pauvre
ami ! je te plains d'autant plus que le plus triste de
tous est celui qui est habité, et je ne suis pas près
de toi, cette pensée ressemble à un remords. — Mon
gentil ami, et la veuve '? mets donc ton esprit à la
1. Voir la note de la lettre IX, p. 261.
18
274 • LA JEUNESSE DE BALZAC.
voile pour la remorquer. Oh oui, ami, je t'aime
trop vraiment pour ne pas désirer ce mariage qui
assurerait si bien ton avenir, et de toutes manières,
car il te donnerait la facilité de faire tes beaux
ouvrages à ton aise ; et, chéri, tant que je verrai ton
existence si précaire, je ne serai pas tranquille,
l'inquiétude que tu me donnes rend mon cœur
presque docile, et cependant si tu étais là en ce
moment, oh chéri ! par ce beau temps, par cette
chaleur qui ne doit pas laisser facilement travailler,
qu'un petit brin d'amour nous irait bien ? et comme
nous aurions l'art d'en tirer un beau parti? Minet,
il me semble que tu es là, dans cette grande chambre
propre et commode. Oh, comme je te rends au cen-
tuple tous les beaux et riches bouquets que tu te
plais à m'envoyer ! comme je les effeuille avec
amour, que de caresses je te prodigue, pour une
seule de leurs parcelles? Chéri adoré, à quand donc
la belle réalité d'un si doux rêve? Oui, mon cœur a
bien vite répondu au tien, quand nous reverrons-
nous? il te faut moi, ange céleste, et toi, combien tu
me manques. — Tiens, ce que je t'écrivais l'autre
jour sur la conversation est une niaiserie, nous con-
versons si bien sans rien dire! puis, tes contradic-
tions, telles grandes qu'elles soient parfois, vont
encore mieux à mon âme que l'approbation des
autres, comme aussi je pense que, pour toi, cette
àme compense pour toi de mille manières ce qui
peut manquer à mon esprit.
Enfin, c'est un fait, nous nous manquons cruelle-
ment quand une affligeante distance vient se mettre
entre nos voix, entre nos regards, entre nos doux
LETTRES DE MADAME DE BERM l27:>
serrements de mains ; tu travailles donc beaucoup?
Cependanl , par cette chaleur, prends garde. Je dirai
comme jadis un jeune el gracieux Chéri: « Allez,
porte/, ma lettre et portez à mon ami toutes les joies
de la terre, toutes les délices du cœur! »
XIV
[Mercredi] 18 [juillet 1832.]
Alex[andre] vient de partir pour Clamecy où il a
affaire, et je l'avais chargé d'une lettre pour toi,
afin qu'elle t'arrivât plutôt (sic) ; je t'y exprimais
toutes mes inquiétudes sur ton sort, elles ont été
vives et cruelles; oh chéri, dix longs jours sans te
lire ! c'est trop pour ma tendresse.
J'ai enfin reçu ta lettre du 13, et j'ai repris celle
que je t'envoyais et dont plus de la moitié ne signi-
fiait plus rien.
Te voilà donc encore bien plus loin de moi V Oh
mon Dieu, comme cette nouvelle m'attriste; elle
me fait l'effet d'une seconde séparation ; qu'avais-tu
donc besoin de ce nouvel éloignement, de ce sur-
croit de dépenses ? pauvre ami ! ton imagination se
croit toujours mieux là où tu n'es pas ; craignais-tu
qu'on ne courût jusqu'à Sache pour t'y arrêter?
quelle crainte chimérique et panique /Enfin, te voilà
1. Balzac venait d'arriver à Angoulèmc chez M. et Mme Car-
raud, lorsqu'il reçut cette lettre. M. Carraud avait été nommé,
en juillet, inspecteur de la poudrerie d'Angoulème.
276 I A JEUNESSE DE BALZAC.
près d'une de tes amies ; je l'en félicite, dans le
nombre des aspirantes, c'en est toujours une heu-
reuse. Elle fera bien dejouirpleinement du bonheur
que lui donnera ta présence, car dans ce monde il est
rare et court ; puisses-tu te trouver bien dans ce
nouveau séjour ami, et y être assez inspiré pour
faire une belle œuvre! — Je me hâtais de t'écrire,
pour t'informer de mon départ de Bazarnes, car ton
silence me donnait, entr'autres pensées, celle de
t'y voir arriver. Cependant je savais que ta gêne
était un obstacle au voyage, mais je savais aussi
que notre tendresse n'a pas toujours su calculer
avec nos bourses. Enfin après m'être bien fatigué
l'àme à craindre quelques malheurs, je la raffrai-
chissais par l'espoir de te voir arriver. Maintenant
je suis tranquille, tu te portes bien et tu voyages,
oui, tu voyages mais c'est au loin, et pourquoi
faire? cela, je l'ignore, il eût été bien difficile que tu
vinsses ici c'est vrai, tout ce qui touche à ma ten-
dresse pour toi est hérissé de difficultés. — Ecoute,
ami, puisque te voilà de nouveau près de Mde C[ar-
raud] je désire que tu me réhabilites dans son
esprit, ce désir va peut-être te paraître une peti-
tesse, et je ne chercherai pas à m'expliquer si tu
auras tort ou raison, mais ce que je sais, c'est que
je craindrais également et des parures étrangères et
des travestissemens difformes ; par les lettres que
j'ai lues de Mde C[arraudJ, j'ai jugé l'opinion qu'on
lui a donnée de moi ; dans toutes ses offres de ten-
dresse, il y a plus que du sentiment, il y a de la
pitié. On voit qu'elle souffre en te croyant uni à un
être indigne de toi. Chéri, sois certain que je ne me
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 277
trompe pas, jamais pour juger (,('s choses-là, un
homme n'aura la vue d'une femme. Cependant,
c'est si visible que je t'ai souvent su mauvais gré,
je te l'avoue, d'avoir Laissé peser sur moi, sur ta
chérie, un jugement indigne d'elle et de toi, loi par-
fois si bavard, toi si communicatif. Rougirais-tu
donc d'avouer ta tendresse? Si tu avais pu avoir
l'ombre de cetle pensée, sans reprendre à l'instant
ta liberté, je ne t'estimerais pas. Ne viens pas, pour
t'excuser, me dire que la délicatesse te deffend de
me compromettre, chéri. A cet égard toute ta
famille s'est si mal conduite envers moi, qu'elle ne
t'a laissé d'autre moyen pour mettre mon honneur
à couvert, que celui d'avouer noblement ton chaste
et pur sentiment, et d'inspirer alors pour la femme
qui t'adore un genre de respect dont elle aurait été
plus fîère que de celui perdu. — Mais tout perdre à
la fois, c'est trop !
Mon bien aimé, j'ai eu plus d'une fois à souffrir
par toi à ce sujet-là; va, mon gentil, ton amour est
bien grand, mais rappelle-toi ce que je t'écrivais
naguère sur les compensations ; puis, serre-moi
sur ton cœur aimant.
Je pars d'ici le 24, c'est-à-dire mardi prochain.
Antoine me force à partir plutôt (sic) que je ne l'au-
rais voulu. Peut-être laisserai-je Laure, et peut-
être la viendrai-je reprendre, mais ce ne sera pas
sans t'avoir vu, après être restée à P[aris] le temps
nécessaire pour mes affaires. J'irais passer à la
Boulonière1 le temps que tu resteras à Angoulême.
1. La véritable orthographe du nom de cette propriété est :
La Bouleaunière. Ce pavillon, qui appartenait à Armand-Marie
278 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Puis je reviendrai à P[aris] quand tu y reviendras,
car il faut que je te voie, puis, je reviendrai ici
prendre Laure ; je demeurerai à Pjaris] rue de Cré-
bilion 5, dans le petit appartement d'Alex[andrej.
Ainsi jusqu'à nouvel ordre, envoie-moi mes lettres
à cette adresse.
Sois tranquille sur le paquet que tu m'envoies. Si
j'étais partie d'ici lorsqu'il arrivera, on me le fera
passer de suite à Paris. — Je serai contente de lire
et relire cette dernière œuvre; m'occuper de tout ce
qui est toi me charmera toujours, mon ange aimé,
je suis si triste que mon cœur en est muet, ainsi,
pour cette fois, fais ce qui t'arrive souvent, com-
prends-le sans qu'il s'exprime. — Sais-tu que j'aime
mieux te savoir près d'une femme raisonnable et à
laquelle je suppose une belle âme, que près de cer-
taines folles, égoïstes, et au jugement faux, qui, par
un malheur de ta destinée, ont plus d'influence sur
toi que qui que ce soit. Mais la folie est plus
attrayante que la raison, et, poëte, il faut que tu en
subisses toutes les conséquences. Par exemple, tes
opinions en politique n'ont commencé à prendre un
autre port que depuis les longues et interminables
conversations de la Dssed'Abr|antès]. LeMet[ternich]
y assistait probablement toujours, lui ou son om-
bre. — Que ta vanité d'homme ne s'effarouche pas
chéri, aucun de vous, même le plus supérieur, ne
peut échapper à l'influence féminine, et la plus heu-
de Berny, est situé au hameau de Hulay, commune de Grez-
sur-Loing, canton de Nemours, à environ 4 kilomètres de cette
ville. Voir Y Intermédiaire des Chercheurs et Curieux, t. XXYII.
col. 486, 701, et t. XXVIII, col. 600.
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 279
reuse d'entre nous à ce mauvais jeu es! celle qui
attaque à dessein voire côté faible. — [ci permets-
moi un hélas! car j'aurais voulu voir mon idole
placée sur un des plus beaux piédeslals qui jamais
ait soutenu grandeur humaine, mais mon âme
réprouvera toujours celui sur lequel tu veux te
hisser, mon pauvre cher, cl cette aine ne se trompe
pas sur la valeur des choses, elle devine les lieux
où se trouve le beau. Comme Cassandre j'ennuie,
peut-être, pannes répétitions, quoique je m'attende
à ce qu'elles aient le même sort que les siennes,
mais ma tendresse vraie est aussi courageuse que
sincère.
En relisant ma lettre, je m'apperçois que tu pour-
rais peut-être mal interpréter la phrase à laquelle
j'ai mis une croix1, tu pourrais y voir un reproche,
et je ne veux pas que tu y sois trompé. Non, mon
chéri, elle ne renferme rien qu'un doux regard sur
le passé où tant de fois nous avons été plus amou-
reux que sages
Mais à toi, ami, ah! à toi qui seras toujours un
être bien-aimé, à toi dont la chère présence m'ap-
portera toujours joie, plaisir et bonheur, comme
l'absence me donnera ennui, tristesse et chagrin,
à toi mille tendresses d'âme, le serrement de main
le plus confidentiel, et au chéri, mille becs pleins
d'amour.
1. La croix dont parle Mme de Berny est placée au milieu de
la phrase de cette lettre commençant par : « Cependant, je
savais que ta gêne... » et finissant par ces mots: « calculer
avec nos bourses ».
880 LA JEUNESSE DE BALZAC.
XV
[Dimanche] 22 [juillet 1832.]
Je suis si triste, si triste, mon pauvre ami, que
j'ai à peine le courage de t'écrire, à toi, pauvre
cher, qui ressentiras bien un peu mes chagrins, à
toi à qui je ne voudrais donner que joie et bonheur.
Cependant, comme toi, j'ai besoin de verserdans
une âme amie les souffrances qui oppressent la
mienne, et cet impérieux besoin me rend égoïste
pour un moment, oh oui, pour un seul moment,
j'espère, car mon âme comprimée reprendra sans
doute plus tard son élasticité accoutumée, et alors,
ami, quoi qu'elle souffre, j'aurai la force de ne te
montrer, comme par le passé, qu'un visage riant.
Mais aujourd'hui je suis prise par tous mes soucis,
tous mes ennuis, comme une mouche dans une toile
d'araignée ; mes pieds manquent de force pour me
dégager, et de gentilles ailes qui m'ont si souvent
portée dans des régions éthérées sont inhabiles,
pliées qu'elles sont elles-mêmes sous le poids de
mon cœur !
Ami ! je ne puis tourner en ce moment la vue
d'aucun côté sans y voir une douleur, moi qui aurais
mis mon bonheur à faire celui de tous les êtres qui
m'entourent, et dont le sort est lié au mien, je ne
vois que malheureux autour de moi. Mes filles dépé-
rissent l'une après l'autre, faute d'une dot pour les
mariera temps, mes fils, excepté Ar[mand], qui a
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 281
le hou esprit de se trouver content, sinon heureux,
mes fils me reprochent leur existence, chacun ;> leur
manière, A lex[andre] sans amertume, et sans croire
m'affecter, Anl|oinc] en me disant, avec la vérité
que j'ai voulu leur inspirer à tous, les souffrances
<[ue son manque de fortune lui donne. Enfin M1 d<-
B|erny] malheureux aussi. — Puis, pour le bou-
quet, tôt, chéri, toi, qui n'es pas heureux, toi, qui
es inquiet, toi dont peu à peu la vie s'est détachée
de la mienne, toi enfin duquel tant de circonstances
réunies vont forcer ma vie future à se séparer de
la tienne à son tour. S'il n'y a pas là de quoi mettre
en poussière une âme telle que la mienne, un
cœur tel que le mien, je ne sais où le sort peut
chercher de nouvelles douleurs pour ajouter à
toutes celles dont il m'écrase.
Je parts (sic) d'ici demain dans la nuit; m'en
irai-je donc sans tes épreuves, sans quelques mots
consolateurs qui raffraîchissent un instant mon
cœur, pour lui rendre ensuite ses mauxplus cuisans.
Je ne suis plus maîtresse de ne revenir ici qu'à
ma volonté, il a fallu me charger d'y ramener la 2e
fille du gal à la fin d'aoust; dans les termes où j'en
suis avec lui, je ne pouvais, pas refuser, ainsi tu
n'auras certes pas fini la Bataille pour cette époque,
et garde toi bien de quitter sans la finir, les lieux où
tu l'auras commencée. Ainsi nous ne nous reverrons
sans doute que vers la fin de 7bre. —
Aussi bien le sort nous force à accomplir un acte
qui ne l'aurait été peut-être, de quelque temps
encore, à cause de la foiblesse de notre raison,
282 LA JEUNESSE DE BALZAC
faut-il le remercier ou lui en vouloir? Je l'ignore,
en ce moment ma réflexion est tout à fait nulle, je
ne sais que souffrir. Si tu étais là, je cacherais ma
tête sur ton cœur pour y déposer mes larmes. —
Que d'égoïsme à montrer ainsi ses souffrances à
celui qu'on aime. Oh ! pardonne, ami, pardonne
mon cœur, et ne t'en prends qu'à ma faiblesse. —
Ami, je t'aime!
XVI
[Lundi] 23 [juillet 1832.]
Le piéton ne m'a rien apporté de toi , mon
chéri, voilà sept jours que je suis sans lettre, ne
me laisse pas si longtemps inquiette. Je pars cette
nuit et demain je ne serai plus ici quand le piéton
emportera ces tristes lignes. Mon bon chéri, en
faisant mon paquet, de cruelles pensées sont encore
venues se mêler à toutes celles dont je te parlais
hier, car je viens de réempaqueter une petite robe
coquette, c'est te dire qu'elle était faite dans l'in-
tention de te plaire avec; je l'avais apportée, espé-
rant aller jusqu'à Orléans, où je comptais te donner
rendez-vous; car mon goût pour la parure n'est
mu que par le désir de te plaire. Donc j'ai serré ma
robe sans qu'elle ait été portée, et cette toilette
d'été, faite pour toi, aura donc le même sort que
celle de cet hiver, que j'avais fait faire aussi avec
un plaisir d'enfant, espérant m'en parer à tes chers
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 283
côtés, aux Bouffons1 ou ailleurs I Cependant si j<i
m'avisais de me plaindre, le sort ferait bien <!<' me
rire au nez, car il m'a donné de si beaux jouis par
toi jadis, que, quoiqu'il m'envoie maintenant de
pénible, je serai toujours en reste avec lui. Adieu,
ami, je t'écrirai de Paris, où je te lirai bientôt j'es-
père. Accepte toutes les tendresses que mon cœur
renferme pour le tien, accepte tous mes désirs de
me retrouver près de toi, accepte tous mes envois,
car, quoique couverts d'un crêpe, ils partent tous
d'un cœur à toi et d'une ame qu'à bon droit tu
nommes fraternelle. Mille baisers, mille caresses,
et entre chacune d'elles un doux et puissant serre-
ment de mains.
XVII
Mardi soir [24 juillet 1832.]
Pourquoi faut-il, chéri, que si heureux par nous,
nous soyons si gênés parce qui nous entoure? Quel
doux plaisir j'aurais eu à te faire lire à Vil[leparisis]
une nouvelle assurance de mon amour, dans ces
lieux si chers, si riches en souvenirs, loin du tu-
multe, au sein d'un repos qui plonge l'âme dans
le vague et la méditation, qui la rend si apte à se
1. On donnait autrefois, dans la société élégante, le nom de
Bouffes au Théâtre-Italien. Mme de Berny n'aurait-elle pas écrit
Bouffons pour Bouffes et ainsi désigné le Théâtre qui, plus tard,
s'est appelé Théâtre-Italien?
284 LA JEUNESSE DE BALZAC.
poser avec charme sur son plus cher objet; comme
je serais venue avec joie me montrer tout entière
aux regards de mon bien-aimé, dans une lettre
chérie en lui peignant avec la vive exaltation que,
par lui et pour lui, j'éprouve sans cesse, ce bon-
heur, cette vie pleine, entière, réelle, cette vie dont
parle Chénier, cette vie qui en vaut mille, puis
mille encore, et que je tiens de lui; j'aurais cherché
à faire naître un instant, à ses yeux, les fleurs
qu'en ce moment la nature refuse au vulgaire, en
lui chantant sous toutes les formes, dans toutes les
modulations, notre doux refrain d'amour, je t'aime!
0 oui, je t'aime! tu es pour moi plus que l'air pour
l'oiseau, plus que l'eau pour le poisson, plus que
le soleil pour la terre, plus que la nature pour l'âme.
En répétant simplement après lui, chéri, je t'aime,
je t'adore, j'aurais voulu charmer son oreille, à
défaut de l'oiseau printanier, en lui demandant de
prendre sa chérie sur son cœur et de faire avec
elle une gentille promenade, j'aurais voulu lui
faire croire aux plus beaux jours d'été, mais cette
douceur m'est refusée, car j'aurais craint que ma
lettre n'attirât à mon doux cher quelques pau-
vres débas, et, par cela, ne lui fut une gêne qui
eût troublé son plaisir. Mais sans lettre, je pense
bien que tu te seras occupé de celle qui te suit
partout, sans cesse, ô chéri. Tu ne peux faire un
mouvement sans le sentir, car ma vie est toute
en toi, et je respire encore. Un auteur a dit que
le bonheur s'engendre toujours et ne se trouve
jamais; moi je dirais, mon divin Chérubin, que tu
le produis sans cesse; il émane de toi, comme
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 285
l'odeur de la fleur; pour piller T[homas] M[oore] je
dirai : « Tu parais, il est là! » O oui, c'est ;i flots
que tu le verses sur cette tel*' que lu aimes, merci
mille fois merci. Tes dons sonl immenses, mais ta
gentille sait tous les sentir, les saisir, ô pourquoi
ne suis-jc pas mille pour le rendre tout ce que j<i
voudrais, et comme je le voudrais; mais, ami, si
tout mon être, dans ses parties, dans son entier,
orné de tout ce que l'amour le plus parfait peut y
ajouter, te suffit, je serai contente, car rien de moi
n'est à moi.
XVIII
[Août 1852, avant le 12.]
Mon Dieu chéri, je ne puis le croire, j'en perds
la respiration; comment tu pars aujourd'hui, et je
puis être enlacée dans tes bras après-demain. Mon
Didi, laisse-moi respirer, et bien m'assurer que je
veille. Mais ton argent? Comment feras-tu? Mon
Dieu! attendrais-tu ma réponse? ou si cela est, et
que je cause le retard de ta venue, quelle punition
j'endurerais, pour ma faute ; mais je t'ai dit qu'Alex
[andre] te prêterait ce que tu voudrais, ainsi, dans
le cas où tu ne serais pas parti pour ce mauvais
motif d'écus, écris vite, ils seront à la diligence
d'Angoulême le jour que tu préciseras, tu peux
même les demander là-bas et eux les reprendraient
aussitôt à la diligence. Comment, Monsieur, rien fait !
286 LA JEUNESSE DE BALZAC.
oh je prendrai moi aussi la clef du coffre où seront
vos pantalons, et point de sorties, jusqu'à ce que
besognes soient faites. En voilà bien assez comme
cela de repos et de distractions. Joli! voilà ce que
c'est que d'être entouré d'amoureuses; que d'exa-
mens j'aurai à faire, pour savoir si elles t'ont bien
laissé sain et entier
Viens donc! Didi — Oh! viens donc; je ne puis
que répéter ces mots, j'en tremble, je n'ai pas une
idée nette et précise, mon cœur envahit tout, oui,
tout mon être, il m'enlève les pensées, et ne me
laisse que mon amour, mais aussi quel amour! Oh
grâce à toi de m'avoir fait femme ! se sentir vivre
des cheveux aux pieds! se sentir enserrée de par-
tout par de chères espérances entées sur de déli-
cieux souvenirs, sentir fondre son âme entière dans
un amour assez pur, assez sublime pour qu'il fasse
disparoître toutes les mesquines conventions so-
ciales pour le voir lui, seul, planer grand et majes-
tueux, sur tous les riens du monde, brisés, pulvé-
risés, autour de lui, le voir, nous couvrir tous deux
de ses ailes embaumées et diaprées. Oh chéri !
chéri adoré! gloire à toi! dis-moi comment peut-on
éprouver ce que j'éprouve en ce moment et vivre
encore de la vie commune? Comment ne pas ren-
contrer dans les lieux où mon âme s'élève le terme
de ma course terrestre! Oh! mon sublime poète,
mon Seigneur, mon Ange, ton Eve en ce moment
est digne de ton chaste et adorable amour!...
Viens.... Viens!
Pauvre chéri, j'aurai peut être à dîner dimanche
LETTRES DE MADAME DE BERNY. 287
12, tous les Mieh|elin?| ' sans pouvoir faire autre-
ment. Je viens d'essayer à remettre le dîner au 11),
mais je pense que cela sera difficile; si lu arrives
le 12, ah mon Dieu, mon Dieu, quelle attroce
contrariété!
XIX
Fragment.
... avons joui ensemble, ce sera pour nous comme
des souvenirs de collège, aussi purs au moins.
Oui, deux ans en arrière, huit jours de la Grena-
dière, et la mort me vaudrait mieux que toutes les
idées d'un avenir froid. Avant de te connoître, j 'avais
déjà une certaine dose de chaleur répandue dans
toute ma personne, mais il me semble qu'elle n'y
était qu'en germe. Oui, chéri, ce sont tes rayons vivi-
fîans qui ont fait naître tant de choses qui, pour la
plupart, seront désormais en trop chez moi. Cepen-
dant il ne se passe pas de jour où je ne te rende
grâce, tu m'as donné mille jouissances inconnues
avant toi, tu m'as appris à sentir , à voir; aussi
chaque soir ce magnifique couché de soleil que je
vois de mes fenêtres et dont tu te rappelles n'est-ce
pas? est pour moi un spectacle dont je te remercie.
J'en jouis d'autant plus que bientôt j'en serai
privée... privée de cette belle vue que nous avons
1. Mme de Berny avait marié l'une de ses filles à M. Michelin.
288 LA JEUNESSE DE BALZAC.
tant de ibis admirée ensemble, privée de ma
chambre, privée de tout. Et pas de lien de famille,
pas de mère, pas de mari, pas d'enfants, après tout
ce que j'ai fait pour eux, après les soins, si petits
et si larges, si bas et si hauts, et si multipliés, que
j'ai pris de leur enfance! Alex[andre] seul me reste;
tous les autres ou ne me comprennent pas ou sont
d'un égoïsme effrayant. Un mot sublime d'Alex
[andre] : je lui parlais de son avenir, et je voulais le
lui faire envisager pour lui. « Oh! moi, ma mère,
je me moque de moi. » Tu reconnaîtras là son élo-
quent laconisme; que de vertus exprimées dans
cette phrase. A quand donc nous dire tout cela à
l'oreille?... A quand? et cependant! si! mais? oh!
grandes misères humaines, heureux les pauvres
d'esprit, de cœur, d'âme, heureux les pauvres ! Chéri
une lettre de toi me serait bien douce ! C'est pour
demain j'espère! voilà ma phrase de chaque jour
quand l'heure est passée. Adieu, Mr Minet, ma
pensée permanente. Adieu.
APPENDICES
APPENDICE I
LES BALZAC
[IJ ACTE DE NAISSANCE DU PÈRE DE BALZAC
n juillet 1746.
Bernard François Baissa, fils de Bernard Baissa, labou -
reur, et de Jeanne Granier, mariés de la Nougayrié, pa-
roisse de Canezac, est né le 22 juillet mil sept cent qua-
rante six, environ les six heures du soir, et batisé le même
jour dans l'église dudit Canezac : parrain, François Gra-
nier, ayeul, et marraine, Jeanne Nouvialle, ayeule du
batisé, de la Pradelle, illétrés (sic). Signé : Vialar, prêtre.
(Extrait des registres paroissiaux de baptêmes de la paroisse
de Canezac, déposés à la Préfecture du Tarn.)
[2] ACTE DE DÉCÈS DU PÈRE DE BALZAC
19 juin 1829.
Extrait du registre des actes de décès de l'an 1S°29, sep-
tième mairie.
Du samedi vingt juin, mil huit cent vingt-neuf, heure
1. Nous devons la communication de cette copie à M. Alfred
Caraven-Cachin, de Salvagnac (Tarn). Le hameau de la Nougarié
se compose de quatre maisons et compte vingt-quatre habi-
tants. Le père de Balzac est mort, à Paris, en 1829, dans sa
83e année.
292 LA JEUNESSE DE BALZAC.
de midi, acte de décès de Bernard-François Balzac, âgé
de quatre-vingt deux ans, né à Nougairié, département du
Tarn, décédé à Paris le dix-neuf de ce mois, à quatre
heures du soir, rue et quartier Ste-Avoie, n° 47, et demeu-
rant habituellement à Versailles, département de Seine-
et-Oise, rentier, marié à Anne-Charlotte-Laure Sallambier,
demeurant au dit Versailles.
Sur la déclaration à moi faite par Henri-François
Balzac, âgé de vingt un ans révolus, employé, demeurant
audit Versailles, de présent à Paris, fils du défunt, et par
Armand-Désiré Michaut de Saint-Pierre de Monzaigle,
âgé de quarante-deux ans, employé supérieur des octrois
de Paris, y demeurant, barrière de Ménilmontant, sixième
arrondissement, gendre du défunt.
Constaté par moi faisant les fonctions d'officier public
de l'état civil, et j'ai, ainsi que les témoins, signé le pré-
sent acte, le tout après lecture à eux faite. Signé : Balzac,
Michaut de Saint-Pierre de Monzaigle et Tournaire,
adjoint au maire.
Délivré par moi, adjoint au maire du septième arron-
dissement, Paris, ce vingt-quatre juin mil huit cent vingt-
neuf. Signé : Tournaire, adjoint.
[3] NAISSANCE DE LA MÈRE DE BALZAC
Anne-Charlotte-Laure Sallambier, qui épousa Bernard-
François Balzac, est née, à Paris, le 22 octobre 1778. Nous
n'avons pu retrouver son acte de naissance, détruit pro-
bablement dans les incendies de la Commune.
[4] ACTE DE DÉCÈS DE LA MÈRE DE BALZAC
Ier avril 1854.
L'an mil huit cent cinquante quatre, le premier avril, à
midi, devant nous maire de la ville des Andelys, faisant
les fonctions d'officier de l'état-civil, se sont présentes
LES BALZAC. H>3
messieurs Jean-Charles-Raoul de la Barre, propriétaire,
âgé de soixante-douze ans, el Pierre Désiré Petit, âgé de
soixante-trois ans, employé d'administration, demeurant
au Petit-Andely, lesquels nous on! déclaré que dame
Anne-Charlotte-Laure Sallambier, âgée «le soixante quinze
ans cinq mois, rentière, demeurant au Petit-Andely,
grande rue, veuve (le monsieur Bernard François de
Balzac, née à Paris, le vingt-deux octobre mil sept eent
soixante-dix-huit, fille de feu... Sallambier, administrateur
des hôpitaux de Paris et président de l'administration
des vivres militaires, et de feue Marie- Barbe-Sophie
Chauvet, son épouse, est décédée en son domicile ce jour
d'hui, à quatre heures du matin, et ont les déclarants,
amis de la décédée, signé avec nous, maire, après lecture.
Signé : Cle de la Barre, Petit, et B. [Mouton, maire.
(Extrait <lu Hegistre des actes de décès de la mairie des
Andelys.)
[5] ACTE D'INHUMATION DE LA MÈRE DE BALZAC
ù2 avril 1854.
L'an de Jésus-Christ mil huit cent cinquante-quatre, le
dimanche deuxième jour d'avril, vu le permis d'inhumer
après le délai prescrit par la loi, délivré hier par l'officier
civil des Andelys, le corps de Laure-Charlotte Sallambier,
rentière, épouse de feu Bernard-François de Balzac, âgée
de soixante-quinze ans cinq mois dix jours, née à Paris, le
vingt-deux octobre mil sept cent soixante-dix-huit, décédée
hier à quatre heures du matin, en son domicile au Petit-
Andely, munie des sacrements de l'Église, a été inhumé
dans le cimetière de ce lieu, par moi prêtre vicaire de
cette paroisse soussigné, en présence des témoins soussi-
gnés : Cte de la Barre, Surville, Dubois, vicaire du
Petit-Andely.
(Extrait des registres de l'église paroissiale Saint-Sauveur
des Andelys.)
'294 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[6] ACTE DE NAISSANCE D'HONORÉ DE BALZAC
2/ mai 1799.
Aujourd'huy, deux prairial an sept de la République
française, a été présenté devant moi, Pierre-Jacques Du-
vivier, officier public soussigné, un enfant mâle, par le
citoyen Bernard-François Balzac, propriétaire, demeurant
en cette commune, rue de l'Armée d'Italie, section du
Chardonnet, n° 25; lequel m'a déclaré que ledit enfant
s'appelle Honoré Balzac, né d'hier à onze heures du
matin, au domicilie du déclarant; qu'il est son fils et celui
de citoyenne Anne-Charlotte-Laure Sallambier, son
épouse, mariés en la commune de Paris, huitième arron-
dissement, département de la Seine, le onze pluviôse, an
cinq ; ce qui a été enregistré en présence des citoyennes
Magdelaine Robin, épouse de Marc Bodin (sic), employé
à l'administration départementale d'Indre-et-Loire, de-
meurant rue de la Caserne, n° 13, section de l'Arsenal, et
Jeanne Vaillant, sage-femme, veuve de Jean Rougen.
drapier, demeurant rue de Loches, n° 8, section de la
Belle-Fontaine, témoins majeurs, à ce requis.
Le déclarant et la femme Boivin (sic) ont signé avec
nous. La citoyenne Rougen a déclaré ne le savoir de ce
interpellée.
Balzac, femme Bodoin (sic), Duvivier, officier public.
(Extrait des Archives de la mairie de Tours, registre des
actes de naissance pour l'an sept.) — Communiqué par M. de
Grandmaison, archiviste du département d'Indre-et-Loire.
APPENDICE II
LES DE BERNY
[7] MARIAGE DE M. GABRIEL DE BERNY
AVEC M"e LAURE HINNER
8 avril 1793.
L'an deuxième de la République française, quatre-vingt-
treize, le huit du mois d'avril, en la commune de cette
paroisse, après la publication d'un ban faite à la porte de
la dite commune le trente et un du mois de mars, après
avoir pris le consentement d'Adrien-Jules Gaultier de
Bésigny, représentant le père de l'époux ainsi qu'il nous
a paru par la procuration à lui adressée par les père et
mère du dit époux passée à Gien, département du Loiret,
par devant le citoyen Bazin, notaire, le dix-huit mars
dernier, à l'effet du dit mariage, et celui de Marguerite-
Louise-Emélie Quelpée de La Borde, mère de l'épouse, en
présence des cy après nommés : Augustin-Jean-Charles
Clément, citoyen, Pierre-Samson de Lagarde, citoyen,
Nicolas-Antoine Alizon, Louis-Mathieu Quelpée de La
Borde, grand-père de l'épouse, tous les susdits témoins
domiciliés en cette commune de Livry, majeurs, et de
Pierre-Marcel Cottereau, homme de loi, résident à Noisi-
le-sec, district de SLDenis, département de Paris, ont été
déclarés unis en mariage par nous Antoine Clavières,
296 LA JEUNESSE DE BALZAC.
officier public de la dite commune de Livry, Étienne-
Charles-Gabriel Berny, citoyen, âgé de vingt-quatre ans
et quatre mois, fils de Gabriel Berny et de Jeanne
Lascases, domiciliés au dit Gien, et Louise-Antoinette-
Laure Hinner, âgée de quinze ans et dix mois, fille de
feu Philippe -Joseph Hinner, et de Margueritte Louise
Quelpée de La Borde, maintenant épouse d'Augustin
Renier Jargayes {sic), maréchal des camp et armées de
la République française, qui ont tous signé les jours, mois
et an ci-dessus1 : Etienne-Charles-Gabriel Berny, Louise-
Antoinette-Laure Hinner, Gaultier de Bésigny, Quelpée
de La Borde, Pecquet-Delarorde, Clément-Pierre Samson
de Lagarde, N.-A.Alizon, Thérèse Hinner, Louise Hinner,
Mélanie Quelpée de La Borde, Cottereau, Clavières.
(Extrait des Registres de l'état-civil de la mairie de Livry,
canton du Raincy, département de Seine-et-Oise.)
[8] EXTRAIT DE L'ÉCROU DES NOMMÉS LABORDE,
BEZIGNI ET BERNY
ù25 février 1794.
Le citoyens Bertrand, concierge de la maisons d'arrêt
des Anglaise de la rue de Loursine à Paris, recevra les
nommés La Borde, Berny, Bézigni, lequel avons mis sous
1. M. l'abbé Genty, qui nous a communiqué cette pièce, nous
écrit : « Augustin Clément était prêtre. Il avait acheté l'abbaye
de Livry vendue comme bien national. Il devint évèque consti-
tutionnel de Seine-et-Oise vers 1798. Il était intimement lié avec
Grégoire. Antoine Clavières était curé de Livry et officier pu-
blic. » Le contrat de mariage de M. de Berny avec Mu* Hinner
a été passé le 6 avril 1793 devant M* Cottereau, notaire à Noisy-
le-Sec, canton de Pantin, arrondissement de S'-Denis, dépar-
tement de la Seine. Ce contrat se trouve à la Bibliothèque
nationale, dép1 des manuscrits, dans le Recueil Nouv. acq. franc.
22362, fol. 193 et suiv. Dans ce même Recueil, fol. 107, se trouve
l'acte de baptême, en date du 26 novembre 1768, de M. de Berny,
iils de messire Gabriel de Berny, chevalier, gouverneur pour le
Roi de la ville de Marsigny en Bourgogne, et de dame Jeanne,
marquise de Lascases, son épouse ; il est extrait du Registre
LES DE BERNY. 207
la responsabilité des citoyens Goût, Henriol el Jamais
lequel se sont chargé, el <>ni signé, arrêté par ordre «in
Comité <lc sûreté général <lc la Convention national, <l<>ni
étoieiit porteurs les citoyens Deschamps, aide-de-camp
• lu général de Larmée parisiei Preslin, juré du tri-
bunal révolutionnaire, et Dumoutier, membre du Comité
révolutionnaire de la sections de l'Observatoire.
Fait à Livry, ce 7 ventôse, l'an 2nae de la République
française une et indivisible.
Signé : Deschamps, Preslin, Dumoutier.
Bibliothèque nationale, département des manuscrits. Papiers
de Bernv.
[9] CERTIFICAT DE MISE EN LIBERTÉ DU CITOYEN
GABRIEL BERNY
1794, août 20.
Je soussigné certifie que le Cn Etc-Charles-Gabriel
Bcrny, âgé de vingt-cinq ans, et détenu dans la maison
d'arrêt des Anglaises, rue de Loursine, depuis le 8 ven-
tôse par ordre du Comité de sûreté générale de la
Convention nationale, je certifie aussy qu'il a été mis en
liberté le trente thermidor par ordre du môme Comité.
Fait en la d,e maison des Anglaises, rue de Loursine,
faubourg Marceau, ce trois fructidor, l'an 2ème de la Répu-
blique une et indivisible.
Brossier Rivoirk
concierge greffier
Cachet à la cire portant autour : Maison d'arrêt des
Angloises, rue de Loursinne et, dans le bas : République
française.
Bibliothèque nationale, département des manuscrits. Papiers
de Berny.
de l'égiise paroissiale de Saint-Germain-les-Couilly-en-Brie,
diocèse de Meaux. L'acte de décès de M. de Berny. décédé à
Paris, rue Castex, n° 18, le 27 mars 1851, à 5 heures du matin,
âgé de 82 ans et 4 mois, se trouve également dans ce Recueil,
fol. 252.
298 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[10] ÉTATS DE SERVICE DE M. GABRIEL DE BERNY
31 décembre il 99.
LIBERTÉ, ÉGALITÉ
Paris, le 10 nivôse an 8 de la République française
une et indivisible.
Le Ministre de l'Intérieur,
Nomme le citoyen Berny, demeurant à Issy, employé
de première classe dans le Bureau particulier du Ministre,
et aux appointements de 2400 livres.
Le C. Berny aura un logement dans la Maison Conti.
Il entrera en fonctions demain et il se rendra à cet effet
chez le ministre à midi1.
Lucien Bonaparte.
Bibliothèque nationale, département des manuscrits. Papiers
de Berny.
1. Dans les Papiers de Berny, conservés à la Bibliothèque
nationale, département des manuscrits, une note, datée du
15 décembre 1826, fournit, à cette date, l'état des services de
M. Étienne-Chaiies-Gabriel de Berny. Le 10 mai 1799, il est
nommé chef de comptabilité des subsistances dans la 9e divi-
sion militaire ; le 1er janvier 1800, sous-chef du personnel au
Ministère de l'Intérieur; le 6 janvier 1811, conseiller à la Cour
de Paris ; le 3 décembre 1832, M. de Berny est nommé offi-
cier de la Légion d'honneur. — M. de Berny avait perdu la
vue après 1830. Il rappelait lui-même au conventionnel Lafiot
que celui-ci avait, pendant la Terreur, sauvé sa mère « qui
gémissait dans les cachots du Loiret ». Voir Albert Tournier.
Les Conventionnels en exil. Article Lafiot, p. 120.
APPENDICE III
LES IIINNKIi
[11] SENTENCE DU BAILLIAGE DE VERSAILLES
relative au mariage de Philippe-Joseph Hinner avec
Marguerite-Louise-Émélie Quelpée de La Borde.
24 décembre 1775.
Par sentence du Baillage de Versailles du vingt-trois dé-
cembre mil sept cent soixante-quinze, duement scellée
homologative de l'avis des parents et amis du sieur Phi-
lippe-Joseph Hinner, ordinaire de la musique du Roy, et
maître de harpe de la Reine, fils de défunts sieur
Jean Hinner, musicien, et de sa femme qui portoit le nom
de Catherine, morts l'un et l'autre à Cayenne :
Il paroit que sieur Louis-Charles Demignaux, ordinaire
de la musique du Roy, a été nommé tuteur du dit sieur
Philippe- Joseph Hinner, à l'effet de l'assister à la célébra-
tion de son mariage, avec demoiselle Marguerite-Louise-
Émélie Quelpée de la Borde, femme de chambre de la
Reine, fille de sieur Louis-Mathieu Quelpée-Delaborde,
écuyer huissier du cabinet de la Reine, et chef du gobelet
du Roy, et, à l'effet du dit mariage, prêter tous consente-
raens nécessaires, et par la même sentence le dit sieur
de Mignaux a accepté la dite charge.
Extrait par les notaires au Baillage royal de Versailles
soussignés, ce jourd'hui vingt-quatre décembre mil sept
300 LA JEUNESSE DE BALZAC.
cent soixante-quinze, sur la grosse de la dite sentence
représentée et rendue. Signé Ducro, Raux, Rauland,
notaires, contrôlée Versailles ce vingt-neuf décembre 1775.
Reçu sept sols. Signé : Liénard.
(La copie de cette sentence a été déposée aux Mariages
de la paroisse de Saint-Louis de Versailles.)
Bibliothèque nationale, département des manuscrits. Papiers
de Berny. Nouv. acq. franc. 22362, fol. 181.
[12] MARIAGE DE PHILIPPE-JOSEPH HINNER
AVEC MARGUERITE-LOUISE-ÉMÉLIE QUELPÉE
DE LA BORDE
30 décembre 1715.
L'an mil sept cent soixante-quinze, le trente décembre,
ont été unis en mariage par nous soussigné Germain de la
Chateigner De la Chatagneraye, évêque de Saintes, avons
du consentement de Monsieur Baret, curé de cette
paroisse, fiancé et uni en légitime mariage, de leur mutuel
consentement et de celui de leurs principaux parents,
Philippe-Joseph Hinner, musicien ordinaire du Roy et de
la Chambre de la Reine, âgé de vingt-un ans, fils de
défunts Jean Hinner et de Catherine, ci-devant de fait et
de droit de la paroisse de Notre-Dame de cette ville, rue
de la Pompe, de présent de fait et de droit de cette
paroisse, rue Satory, d'une part.
Et Marguerite Louise Émélie Quelpée de La Borde,
femme de chambre de la Reine, âgée de quinze ans, fille
de Louis Mathieu Quelpée de La Borde, écuyer, huissier
ordinaire du Cabinet de la Reine, et chef du Gobelet du
Roy, et de Marie Louise Pecquet, de fait et de droit de
paroisse, rue Satory, d'autre part.
En présence, du côté de l'époux : de Mr Demignaux,
ordinaire de la musique du Roy, son tuteur, de la paroisse
Notre-Dame de cette ville, rue de la Pompe, de Mr Defou-
gères, maréchal des camps et armées du Roy, comman-
dant de la province du Bourbonnais, et de Mr Marsollier,
maître des comptes à Paris — ; du côté de l'épouse, de
ses père et mère, de Pierre Louis Pecquet, chef du Gobelet
LES HINNER. 301
du Roy, son grand'père el grand oncle, de maître Adrien
Gautier de Bésigny, de Bellegarde, Président du Parle
menl de Paris, de M. de Saint-Aubin, huissier «lu cabinet
de Monsieur Darlois, et autres amis qui ont gigné avec
les époux el nous ont certifié la liberté, I»; domicile, <-t la
catholicité des contractants. Signé : Hinner, Quelpée de
La Borde, De Mignaux, Defougâres, de Marsollier,
Quelpée La Borde, Pecquët, de St-Auiun, Pecquet,
Delaborde, Gautier de Bésigny, Pecquet. -f- G. Ev. de
Saintes.
Délivré le présent extrait par moi, secrétaire de la mairie,
Versailles, ce six juin de l'an mil huit cent sept
Guillemot.
(Extrait du Registre des actes de mariage de la paroisse
de Saint-Louis, de Versailles.)
Bibliothèque nationale, département des manuscrits. Papiers
de Berny.
[13] ACTE DE BAPTÊME
DE LOUISE-ANTOINETTE-LAURE HINNER
24 mai 1777.
L'an mil sept cent soixante-dix-sept, le vingt quatre may,
Louise-Antoinette-Laure, née hier, fille légitime de Phi-
lippe-Joseph Hinner, musicien ordinaire du Roy et de la
Chambre de la Reine, et de Marguerite-Louise-Émélie
Ouetpée {sic pour Quelpée) de Laborde, a été baptisée par
nous, prêtre curé de cette paroisse; le parein très haut,
très puissant, très illustre Prince, Louis Seize, Roy de
France, et la mareine, très haute, très puissante, très
illustre Princesse la Reine de France, le Parein repré-
senté par très haut, très puissant seigneur Louis-
Sophie-Antoine Duplessis de Richelieu, duc de Fronsac1,
1. Le duc de Fronsac, né le 4 février 1736, avait épousé en
premières noces, le 25 février 1764, Adélaïde-Gabrielle de
Hautefort. Veuf le 3 février 1767, il se remaria, en avril 1776,
avec demoiselle N... de Galliffet. Il était le fils de Louis
François-Armand du Plessis, duc de Richelieu en Poitou et de
Fronsac en Guyenne, maréchal de France, petit neveu du car-
302 LA JEUNESSE DE BALZAC.
pair de France, premier gentilhomme de la Chambre du
Roy, maréchal des camps et armées de Sa Majesté, noble
génois, la mareine représentée par très haute, très puis-
sante dame Laure-Auguste de Fitz-James, princesse de
Chimay et du Saint-Empire Romain, grande d'Espagne
delà première classe et dame d'honneur de la Reine1,
lesquels et le père ont signé avec nous.
Le duc de Fronsac, Fitz-James Pesse de Chimay,
Hinner, Jacob, curé.
(État civil de Versailles, GG 375, Registre des naissances de
la Paroisse Saint-Louis. — 1777, fol. 35.)
[14] ACTE D'INHUMATION
DE PHILIPPE-JOSEPH HINNER
14 avril 1784.
L'an mil sept cent quatre-vingt-quatre, le quatorze avril.
s' Philippe-Joseph Hinner, ordinaire de la musique du
Roi et garçon de la Chambre de la Reine, décédé hier,
âgé de trente ans, a été inhumé par nous soussigné prêtre
de la Mission, faisant les fonctions curiales, en présence
de sr Charles de St-Aubin, huissier du cabinet de Monsei-
gneur, comte d'Artois, et de messire Joseph-Paul-Guiol,
prêtre chapelain de la Reine et de Madame Adélaïde de
France, et autres qui ont signé avec nous2 :
Guiol, De St-AuBiN, Henry, prêtre.
(Registre des décès de la Paroisse Saint-Louis de Versailles,
1784, fol. 18.)
dinal, né à Paris le 13 mars 1696, mort dans la même ville,
le 8 août 1788.
1. Laure-Auguste de Fitz-James, fille du duc Charles de Fitz-
James, qui avait épousé la fille aînée du marquis de Matignon,
était née le 7 décembre 1744. Le 25 septembre 1762, elle s'était
mariée avec Philippe-Gabriel-Maurice d'Alsace-Hennin-Liétard,
prince de Chimay et d'Empire, grand d'Espagne de la première
classe. Elle fut nommée dame d'honneur de la Reine en 1775.
2. Dans un extrait de cet acte d'inhumation, délivré le
2 juin 1807, et qui se trouve à la Bibliothèque nationale, dans
les Papiers de Berny, Philippe-Joseph Hinner est qualifié
ordinaire de la musique de la chapelle ».
LES HINNER. 303
[15J ACTE DE DÉCÈS
DE LOUISE-ANTOINETTE LAURK HINNER,
ÉPOUSE DE BERNY
97 juillet 1836.
Lan mil huit cent trente-six, le vingt-sepl juillet, une
heure du soir, devant nous adjoint de la commune de
Gretz, officier de l'Etat civil spécialement délégué, sonl
comparus les sieurs Lucien-Charles-Alcxandre de Berny,
négociant, âgé de vingt-sept ans, demeurant à Paris, rue
des Marais-Saint-Germain, n° 17, et Louis Périchon,
vigneron, âgé de quarante ans, demeurant à Gretz, tous
deux témoins majeurs, lesquels nous ont déclaré que
dame Louise-Antoinette-Laure Hinner, âgée de cinquante
neuf ans, née à Versailles, département de Seine-et-Oise,
demeurant momentanément au pavillon de la Boulon-
nière, hameau de cette commune, maison appartenant à
son fils aîné déclarant, fille de Philippe-Joseph Hinner,
décédé, et de dame Marguerite-Louise-Émélie Quelpet
(sic pour Quelpée) de Laborde, sa femme, demeurant à
Paris, rue de l'Arcade, n° 38, épouse d'Étienne-Charles-
Gabriel de Berny, âgé de soixante-huit ans, chevalier,
conseiller de Sa Majesté dans la Cour Royale de Paris,
officier de l'ordre royal de la Légion d'honneur, demeu-
rant à Paris, rue de la Chaussée des Minimes, n° 2, décé-
dée au pavillon de la dite Boutonnière cejourd'hui à neuf
heures du matin, et ont les déclarans signé avec nous le
présent acte, excepté le témoin Louis Périchon qui a
déclaré ne savoir signer, de ce requis après lecture faite.
Signé au registre : Al. de Berny et Briard.
(Extrait du Registre des actes de l'état civil de la commune
de Gretz, canton de Nemours, année 1836.)
Bibliothèque nationale, département des manuscrits. Papiers
de Berny. Nouv. acq. franc., 22362, fol. 226.
APPENDICE IV
REINIER DE JARJAYES
[16] ACTE DE MARIAGE DE MESSIRE FRANÇOIS-
AUGUSTIN REINIER DE JARJAYE AVEC LOUISE-
MARGUERITE-ÉMÉLIE QUELPÉE DE LA BORDE,
VEUVE DE PHILIPPE-JOSEPH HINNER.
36 septembre 1787.
L'an 1787, le 26 du mois de septembre, après la publi-
cation d'un ban faite en l'église St-Louis ainsi qu'en celle
de Notre-Dame de Versailles, le '23 de ce mois, ainsi qu'il
nous a paru par les certificats des sieurs Gruyer et Colli-
gnon, prêtres de la Mission, faisant les fonctions curiales
des susdites paroisses, délivrés le 24 du présent; vu la
publication d'un ban faite en la paroisse du Paix, diocèse
de Gap, et dûment légalisée, en date du 27 août dernier,
signé Brun, curé du Paix; pareillement vu l'extrait mor-
tuaire de Marie-Anne-Louise de Bourcet de Lacassagne,
épouse de François-Augustin de Jarjaïe, délivré par le
sieur Rambaud, vicaire de St-Huguesde Grenoble, en date
du 1er septembre de cette année, légalisé parle lieutenant
général de Grenoble, signé Sadin, en date duo septembre
de la présente année ; vu aussi l'extrait mortuaire de Phi-
lippe-Joseph Hinner, délivré par le sieur Titeux, prêtre de
la mission, de la paroisse St-Louis de Versailles ; vu la
REINIER DE JARJAYES. 305
dispense accordée | >;i r Monseigneur l'évoque de Gap, (,ii
date du 27 aoûl dernier; vu la dispense de deux l»;ins
accordée par Monseigneur l'Archevêque ; vu la permission
à nous adressée de célébrer i<" mariage par le sieur
Gruyer, prêtre de la mission, faisant les fonctions curiales
dans la paroisse St-Louis de Versailles, Les fiançailles
célébrées la veille, après avoir pris leur mutuel consente-
ment, ont été mariés et ont reçu la bénédiction nuptiale
messire François-Augustin Heinier de Jarjaye, aide-major
général de l'armée, major d'infanterie, veuf majeur de
dame Marie-Anne-Louise de Bourcet, de la paroisse
Notre-Dame de Versailles, rue Neuve, l'époux, et dame
Louise-Marguerite-Émélie Quelpée de La Borde, femme de
chambre de la Reine, veuve majeure de Philippe -Joseph
Hinner, ordinaire de la musique du Roi et garçon de
chambre de la Reine, de la paroisse St-Louis de Ver-
sailles, rue Royale, l'épouse. Ils ont eu pour témoins
Adrien-Jules-Gaultier de Bésigny, conseiller du Roi en ses
conseils, président honoraire au Parlement; Louis-
Mathieu Quelpée de La Borde, écuyer, huissier ordinaire
du Cabinet delà Reine, Charles St-Aubin, écuyer, huissier
de Mer le comte d'Artois, Pierre-Jean de Bourcet, premier
valet de chambre de Mer le Dauphin, ancien conseiller au
Parlement de Grenoble et autres qui ont signé :
Gaultier de Bésigny, Reinierde Jarjayes, Quel-
pée Delaborde (sic) y Quelpée De Laborde,
Pecquet-Delaborde, de St-AuBiN, de Bourcet.
Montauban, Monchoreil, Delon, Clavi ères, curé.
(Registres de la paroisse de Livry, année 1787.) Communiqué
par M. l'abbé A. Genty, vicaire général à Versailles.
20
APPENDICE V
BALZAC LIBRAIRE
LE LA FONTAINE ET LE MOLIÈRE
EDITION DU LA FONTAINE
BIBLIOGRAPHIE
Avant de publier les pièces relatives à l'opération des
Œuvres de La Fontaine, complètes en un volume, nous don-
nons la description bibliographique de ce tome :
OE livres complètes de La Fontaine, ornées de trente
vignettes dessinées par Devéria et gravées par Thomp-
son. Paris. A. Sautelet et Cie, place de la Bourse. Impri-
merie de Rignoux, rue d>s Francs-Bourgeois-S. -Michel.
MDCCCXXVI. In-8°.
1 f. (faux-titre au v° duquel on lit : //. Balzac, éditeur-proprié-
taire,rue des Marais-S. -Germain, n° 17); 1 f. (titre orné d'un por-
trait de La Fontaine); 2 ff. (Notice sur la vie de La Fontaine
par H. Balzac) ; VIII-493 pp. ; et 1 f. n. chiffré (table).
Nous n'avons pas vu d'exemplaire muni de sa couverture.
M. le Ytc de Spoelberch de Lovenjoul nous a communiqué la des-
cription de cette couverture, telle que la lui avait envoyée
M. Mathias, libraire. La couverture porte comme adresse : Paris,
If. Balzac, éditeur-propriétaire, rue des Marais, n° 17, A. Sauielet
et Cu, place de la Bourse. Imprimerie de Rignoux. rue des Francs-
Bourgeois-S^Michel, 1826.
LA LIBRAIRIE. r,«»7
Les vignettes Boni dans le texte, imprimé sur deux colonnes
- mi 1,1 Qotice de Balzac qui est à longues lignes).
Il existe des exemplaires portant sur le titre le nom el
l'adresse de Baudouin frères, rue de Vaugirard, su lieu de ceux
de Sautelet ei Cu.
Le prospectus el Bpecimen de cette édition 'in-8 d'un quart
de feuille), imprimé par Tilliard, est enregistré dans la Biblio-
graphie de la France, du \i mai 1825, n° 2799. Ce prospectus
annonce l'ouvrage comme devant paraître chez Urbain Cane!
et Baudouin frères, eu huit livraisons à 2 fr. 50 l'une.
Toutes les livraisons sont imprimées par Rignoux. Les six
premières, annoncées avec les noms d'Urbain Canel et Bau-
douin tïèivs. sont enregistrées dans la Bibliographie de la France
i\o* 4 juin 1825 (n° 3067), 27 août. 1825 (n° 4795), 1" octobre 1825
(n° 5487»). 29 octobre 1825 (n° 5996), 15 mars 1826 (n° 1485),
5 avril 1826 (n° 1998).
Les 7e et 8* livraisons, qui terminent l'ouvrage, sont enregis-
trées dans la Bibliographie de la France du 29 juillet 1826
in° 4901) de la façon suivante :
« — Œuvres complètes de La Fontaine. VIIe et VIIIe livrai-
sons. Un seul cahier in-8 de 54 demi-feuilles avec vignettes.
Imp. de Rignoux à Paris. — A Paris, chez H. Balzac, rue des
Marais, faubourg Saint-Germain, n. 17 ; chez Sautelet.
« Prix de chaque livraison, 2.50. L'ouvrage complet en un
seul volume in-8 : 20.00. »
Il a été tiré un exemplaire sur papier de Chine, qui figure au
Catalogue Pixérécourt, sous le n° 1658.
[17] LETTRE DE HONORÉ BALZAC A URBAIN CANEL
13 mai 1825.
A M. Urbain Canel, libraire, place St-André-des-Arts,
n° 50, à Paris.
Villepansis.
Mon cher Monsieur Urbain,
J'irai sans faute vous voir dimanche matin pour échan-
ger nos billets sur papier mort en billets faits sur papier
timbré. Ayez la complaisance, je vous prie, de ne pas sor-
tir ou de ne pas vous éloigner avant que je ne sois venu,
et je n'arriverai pas avant midi.
Si vous avez besoin d'argent pour le Lafonlaine avant
308 LA JEUNESSE DE BALZAC.
dimanche, écrivez-moi ; mais, dimanche, munissez-vous
de timbres pour terminer cette affaire-là aussi.
J'ai rétabli la fin du 3" volume de Wann-Chlore et je suis
en train de corriger le 4e volume. Lundi, Rignoux aura
toute la copie et vous n'aurez plus de reproches à me
faire.
Attendez-moi bien dimanche, car le jeune homme qui
réclame mes billets part pour l'Angleterre.
Mes complimens à vos dames, et recevez, je vous prie,
l'assurance de mon sincère attachement,
H. Balzac.
Villeparisis.
La lettre n'est pas datée, mais le timbre de la poste porte la
date du 13 mai 1825.
(Collection Lovenjoul, ras. A 258, fol. 7bis.)
[18] TRAITÉ ENTRE PIERRE-FRANÇOIS GODARD,
URBAIN CANEL ET HONORÉ BALZAC
Î7 avril 1825.
Entre M. Pierre-François Godard, graveur sur bois,
demeurant à Alençon, rue Aucieux (sic), n° 17, d'une
part,
Et M. Urbain Canel, libraire, demeurant à Paris, place
St-André-des-Arcs, n° 30, et M. Honoré Balzac, demeurant
à Paris, rue de Tournon, n° 2,
Ce dernier étant pour le présent à Alençon, fondé de
pouvoirs de M. Urbain Canel en ce qui le concerne et
permettant d'envoyer la ratification du présent traité —
d'autre part,
A été fait et convenu ce qui suit :
Article 1. — M. Godard s'engage à graver sur bois un
certain nombre de vignettes d'après les dessins de M. De-
véria ou tout a utre dessinateur, destinées à une édition
in-octavo en un seul volume des œuvres complètes de
Lafontaine que Mrs Urbain Canel et Balzac se proposent
de publier.
i.\ LIBRAIRIE. 309
Article 2. — M. Godard s'engage à travailler à ces
vignettes préférablement à toutes autres, à moins qu'il ne
soil dérogé par écrit, tel qu'une simple Lettre, à la pré-
sente convention".
Article .lJ. — M,s Urbain Cane! H Balzac s'engagenl à
payer comptante Monsieur Godard la somme de soixante-
dix francs par bois de vignette gravé, e1 ce, entre les
mains cl sur la quittance de M. Roret, libraire à Paris.
Néanmoins, M,s Urbain Canel et Balzac se regarderont
comme obligés à augmenter ce prix de dix francs en sus
si les soins donnés par M. Godard étaient tels que les
vignettes fussent appréciées par M. Devéria mériter cette
augmentation.
Article 4. — M. Godard s'engage, par ces présentes, à
faire les vignettes des éditions de Racine et de Corneille
exclusivement à tout autre ouvrage, si, après les vignettes
de Lafontaine exécutées, Mrs Urbain Canel et Balzac entre-
prenaient les susdites éditions de Racine et de Corneille
ou tout autre. «
Mais alors, si Mrs Urbain Canel et Balzac avaient accordé
quatre-vingt francs par vignette du Lafontaine, ce prix
de quatre-vingt francs serait alloué à M . Godard par
chaque vignette des éditions projetée s — sauf à Mes-
sieurs Urbain Canel et Balzac à augmenter encore de dix
francs ce nouveau prix, si M. Godard, par son travail, et
au dire de M. Devéria, le méritait encore.
Article 5. — Si par cas fortuit et qu'on ne saurait pré-
voir, l'édition de Lafontaine n'avait pas lieu, le présent
traité serait nul de plein droit, mais les parties contrac-
tantes seront engagées par la gravure d'une seule
vignette, et il demeurera bien entendu que MIS Urbain Canel
et Balzac peuvent seuls profiter du droit accordé par le
présent article.
Article 6. — Si les deux premiers bois gravés ne conve-
naient pas à M's Urbain Canel et Balzac, ils auraient la
faculté de résilier le présent traité, en désintéressant
M. Godard par une somme de cent francs payée entre les
mains de M. Roret, libraire, dont la quittance libérera
MO LA JEUNESSE DE BALZAC.
Mrs Urbain Canel et Balzac de toutes sommes dues à
M. Godard, et ce, dans tous les cas du présent traité.
Article 7. — Les vignettes une fois approuvées de
Mrs Urbain Canel et Balzac, le présent traité aura son exé-
cution pleine et entière, M. Godard s'engageant, dans
l'intérêt de son talent même, à graver les vignettes sui-
vantes comme il aura gravé les premières.
Article 8. — Les vignettes des éditions postérieures à
celle du Lafontaine devront avoir les mêmes dimensions
que les vignettes de la susdite édition de Lafontaine,
sinon, Mrs Urbain Canel et Godard feraient un nouveau
prix de gré à gré.
Fait double à Alençon le dix-sept avril mil huit cent
vingt-cinq.
Il est entendu par.les parties qu'une simple lettre de
M. Urbain Canel suffira pour ratifier le présent traité et,
au refus de M. Urbain Canel d'y donner sa ratification,
M. Godard ne serait plus engagé que par M. Balzac.
Les frais d'envoi et de retour des bois seront au compte
de Mrs Urbain Canel et Balzac.
Alençon, 17 avril 1825.
Honoré Balzac
Godard.
Si le libraire Delongchamps demande à M. Godard des
vignettes pour l'édition de Molière, imprimée en un
volume in-8° chez Rignoux, à Paris, M. Honoré Balzac
consent par ces présentes à ce que M. Godard donne à
M1S Urbain Canel et Delongchamps une vignette pour le
Molière sur trois vignettes exécutées, à savoir deux pour
le Lafontaine et une pour le Molière.
H. Balzac.
M. Balzac soussigné s'engage à payer comptant M. Go-
dard par deux vignettes livrées; ainsi M. Roret recevra
à chaque remise cent quarante francs pour le compte de
M. Godard.
H. Balzac.
Les parties contractantes, afin d'éviter toute conlesta-
tion dans le précédent traité, ajoutent, pour expliquer les
LA LIBRAIRIE. :>I1
mots <le l'article premier un certain nombre de vignettes ^
• lue M. Godard fera exclusivement à toutes autres les
vignettes <{ u i lui Beronl données par MM. Urbain Cane! el
Balzac pour la collection des classiques français qu'ils
entreprennent, eu commençant par les éditions de
Molière el <le I .al'onlaine.
A Alencoii, ce 17 avril 1825.
Approuve' l'écriture ci-dessus,
< iODARI).
Honoré Balzac'.
Ce tut au numéro 16 tle la rue aux Sieurs, alors habi-
tuellement orthographiée rue aux Cieux, que Balzac se
rendit, à son arrivée à Alençon. Là se trouvait, ajoute
le comte G. de Contades, la librairie Godard, à laquelle
était joint un cabinet de lecture, où l'on venait chercher
les Mystères a" Udolphe, d'Anne Radcliffe, et les Barons de
Fels/ieim, de Pigault-Lebrun. Ce magasin, à l'apparence
vulgaire, était la demeure de véritables artistes, le père
et le fils Godard, graveurs sur bois, qui s'étaient fait un
nom même en dehors de leur province. Voir Balzac alen-
connais, p. 6.
Le séjour de Balzac à Alençon ne fut que de courte
durée. Rentré à Paris, Balzac communique le traité du
17 avril à Urbain Canel qui le ratifie; le 19, il en informe
M. Godard par une lettre qui est publiée in-extenso dans
la Correspondance (t. XXIV des Œuvres complètes, p. 50).
A cette lettre qu'a également publiée M. le comte de
Contades, d'après la pièce autographe conservée dans la
collection de M. de La Sicotière, et qui offre quelques
variantes avec le texte imprimé, était jointe l'adhésion
suivante d'Urbain Canel, également adressée à Godard :
1. Ce traité, qui fait partie de la collection de feu M. de La
Sicotière, léguée par lui à la ville d'Alençon, a été publié, pour
la première fois, par M. le comte G. de Contades dans un
article inséré dans le Bulletin de la Société historique et archéo-
logique de l'Orne, intitulé : Balzac alençonnais, et tiré à part à
70 ex. dont 10 sur Japon, sous ce titre : Balzac alençonna*.
Alençon, E. Renaut-De Broise, 1888, in-8°, p. 19 à 23.
312 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Monsieur,
J'adhère aux sentiments que vient de vous exprimer
M. Balzac et je ratifie pleinement et entièrement le mar-
ché que vous avez conclu et arrêté avec lui sous la date
du dix-sept de ce mois et, conformément à l'article spé-
cial de ce traité concernant la ratification, cette simple
lettre doit équivaloir à ma signature sur le dit traité. Je
vous prie, en conséquence, de m'en accuser réception.
J'ai vu les vignettes que vous avez confiées à M. Balzac,
elles m'ont paru fort bien et je conçois de votre talent la
plus haute opinion.
Agréez, Monsieur, l'assurance de ma parfaite considé-
ration,
Votre très humble serviteur,
Urb. Canel.
Paris, 19 avril 1825.
[19] DISSOLUTION DE LA SOCIÉTÉ FORMÉE ENTRE
MM. CHARLES CARRON, HONORÉ BALZAC, BENET
DE MONTCARVILLE ET URBAIN CANEL, POUR
L'ENTREPRISE DU LA FONTAINE
1er mai 1826.
Entre les soussignés :
Charles Carron, médecin, demeurant à Paris, rue de
l'Odéon,,n° 17, d'une part,
Honoré Balzac, homme de lettres, demeurant à Paris,
rue de Berry, n° 7, d'une part,
Jacques-Edouard Benêt de Montcarville, officier en
réforme, demeurant à Paris, rue Meslay, n° 41, encore
d'une part,
Et Urbain Canel, libraire, demeurant à Paris, rue St-
Germain-des-Prés, n° 9, d'autre part,
A été dit et convenu ce qui suit :
Art, 1er.
La Société qui existait entre les soussignés pour l'entre-
prise des Œuvres complètes de Lafontaine en un volume
LA LIBRAIRIE. ~]:>
in-octavo est e1 demeure dès 6 présent, dissoute, d'un
consentement unanime.
A HT. 2.
En ce qui touche la liquidation de la < i i t « ^ entreprise,
les sieurs Carron et Monte arville seulement se recon-
naissent satisfaits ei quittent le sieur Urbain Cane! de
toute obligation envers eux quant à la dite entreprise,
pour prix de la renonciation que font les s,s Balzac et Ur-
bain Canel du droit qu'ils auraient de les forcer à conti-
nuer la publication des dites œuvres de Lafontaine.
Fait quadruple à Paris, le premier mai mil huit cent
vingt-six.
II. Balzac.
Approuvé l'écriture Approuvé l'écriture ci-dessus,
ci-dessus, U. Canel. J.-E.-B. de Montcarville.
Approuvé l'écriture
ci-dessus, Carron.
En marge : Enregé à Paris, le cinq mai 1826, fol. 8 v. Re<;u
cinq francs cinquante c. plus cinquante cent, pour le D. de Société.
{Collection Lovenjoul, ras. A 258, fol. 79i,er.)
[20] CESSION A H. BALZAC PAR MM. URBAIN CANEL,
CH. CARRON ET DE MONTCARVILLE DE LA PRO-
PRIÉTÉ DU LA FONTAINE
-Ier mai 18c26.
Entre les soussignés :
Charles Carron, demeurant à Pans, rue de l'Odéon,
n° 17, d'une part,
Jacques-Edouard Benêt de Montcarville, officier en
réforme, demeurant à Paris, rue Meslay, n° 41, d'une
part,
Urbain Canel, libraire, demeurant à Paris, rue St-Ger-
main-des-Prés, n° 9, d'une part.
Et Honoré Balzac, homme de lettres, demeurant à
Paris, rue de Berry, n° 7, d'une autre part,
A été dit et convenu ce qui suit :
514 LA JEUNESSE DE BALZA<
Art. 1.
Les s™ Urbain Canel. Charles Carron et de Montear-
ville cèdent, transportent et abandonnent au s1 Honoré
Balzac, ce acceptant, tous leurs droits de propriété sur:
Ie les six premières livraisons qui ont été faites d'une
édition des Œuvres complettes sic de Lafontaine. en un
seul volume in-octavo, imprimé à deux colonnes, en
caractère dit Mignone, tiré sur papier cavalier vélin de la
fabrique de M. Montgolfier. d'Annonay. orné de trente
vignettes environ, dessinées par Devéria. gravées par
Thompson, la dite édition tirée à trois mille exemplaires
et mains de passe. — '2° sur tous les bois des vignettes
dont il est parlé ci-dessus ainsi que sur toutes les listes de
souscripteurs, sommes à recevoir pour souscriptions et
pour les livraisons futures et précédentes en tant que ce
jourd'huy des souscripteurs n'auraient encore rien payé
au sr Urbain Canel. — 5; sur dix-sept rames de papier
dont il a été parlé ci-dessus et qui se trouvent chez le
sr Rignoux. imprimeur à Paris, enfin sur les trois mille
exemplaires qui ont été tirés de la seizième feuille du dit
volume et sur la composition des formes qui suivent la
dite seizième feuille jusqu'à la fin du Théâtre de Lafon-
taine. ainsi que le tout se poursuit et comporte sans en
rien réserver ni excepter.
A la charçre par le sieur Balzac de terminer les dites
Œuvres de Lafontaine, de tenir tous marchés faits avec
des tiers, souscripteurs et autres, quant à la continuation
de la dite édition. La présente cession est faite, en outre,
pour indemni>er le sr Honoré Balzac de toutes sommes
servies par lui au s* Urbain Canel pour l'entreprise des
dites œuvres de Lafontaine que le s1 Urbain Canel est
dans l'impossibilité de continuer, sous tels noms qu
soit et à la charge pour le sr Balzac de remettre au
s1 Urbain Canel tous titres et billets ou reconnaissanee>
des dites sommes.
Art. 2.
Le sr Urbain Canel ayant dirigé l'entreprise et les objets
sentement cédés étant en sa p ss --.on. il est seul
• hargé de leur livraison au sr Balzac et il est :?pecialement
convenu entre les soi.-- gnés que les objets présentement
I A LIBRAIRIE. 315
cédés seront livrés au s1 Balzac indemnes de toutes
son, mes à payer pour leur confection h sans autres
déductions que, quant aux exemplaires, de ceux donnés
aux journaux et livrés aux acheteurs el souscripteurs.
Fait quadruple à Paris, ce premier mai mil huit cent
vingt-six.
U. Canel.
Approuvé L'écriture Approuvé l'écriture cy-dessus,
ci-dessus, H.Balzac. J.-E.-B. de Montcarville.
Approuvé l'écriture
ci-dessus, Carbon.
Je déclare, pour satisfaire aux droits d'enregistrement,
que les sommes versées au sr Urbain Canel s'élèvent à la
somme de cinq mille francs, sauf erreur des comptas
courans.
H. Balzac.
En marge de ce traité, enregistré le 5 mai 182G, Rignoux ;i
écrit la déclaration suivante : Je déclare avoir pris connaissance
du dit traité. Paris, 5 mai 1826. Rignoux.
(Collection Lovenjonl. ms. A 258, fol. 8.)
[21] TRAITE ENTRE ALEXANDRE BAUDOUIN
ET HONORÉ BALZAC
3 mai 1826.
Entre les soussignés :
Alexandre Baudouin, libraire, demeurant rue de Vaugi-
rard, n° 17, à Paris, d'une part,
Et Honoré Balzac, demeurant à Paris, rue de Berry,
n° 7, d'autre part,
A été dit et convenu ce qui suit :
Art. 1.
M. Honoré Balzac vend à M. Alexandre Baudouin, ce
acceptant, cinq cents exemplaires des Œuvres com-
plètes de La Fontaine en un seul volume in-8°, précé-
546 LA JEUNESSE DE BALZAC.
déminent publié par le s1' Urbain Canel, au prix de
huit francs l'exemplaire.
Art. 2.
M' Alexandre Baudouin reconnaît que moitié seulement
des Œuvres complètes de La Fontaine lui a été fournie
par le s1 Urbain Canel et que moitié dudit ouvrage reste
à fournir.
M. Honoré Balzac reconnaît de son côté que deux
mille francs ont été payés par M. Alexandre Baudouin au
sr Urbain Canel pour la moitié déjà publiée du dit
ouvrage.
Art. 3.
Mr Honoré Balzac s'engage à continuer les dites
OEuvres de Lafontaine et à les achever au plus tard au
trente juillet prochain avec le même caractère, le même
papier et la même justification employés jusqu'à ce jour.
Art. h.
A défaut d'achèvement du dit ouvrage par le sr Balzac
au trente juillet prochain, le sr Balzac s'engage à reprendre
tous les exemplaires complets ou incomplets que le
sr Alexandre Baudouin aurait en magasin, sauf à lui tenir
compte de ce qu'il aurait reçu pour la partie vendue des
exemplaires incomplets.
Art. 5.
Mr Alexandre Baudouin continuera à tirer cinq cents
exemplaires in-8 sur la composition du dit ouvrage, en
payant à l'imprimeur le tirage et fournissant le papier,
sans que M. Honoré Balzac puisse prétendre à aucune
indemnité pour la composition.
Art. 6.
Les bois des vignettes qui auront servi à l'ornement de
la dite édition de Lafontaine seront remis au sr Alexandre
Baudouin, sans aucune indemnité, et, de son côté, le
sr Alexandre Baudouin renonce à toutes sommes qu'il
pourrait prétendre pour le retard apporté par le sr Urbain
Canel dans la publication des dites OEuvres de Lafontaine.
LA LIBRAIRIE. r.n
Art. 7.
Le prix de la moitié du volume in-8 (formant l<is OEu\ rea
de Lafontaine) à fournir à M. Alexandre Baudouin par
M. il. Balzac sera solde par M. Alexandre Baudouin en
lw2 billets à onze mois et M. II. Balzac fournira le trei-
zième.
A HT. 8.
Au moyen des présentes, toides conventions antérieures
relatives à la dite édition des Œuvres complètes de Lafon
laine seront regardées comme nulles el non avenues et
M. Alexandre Baudouin s'engage à ne rien payer au sr Ur-
bain Canel pour cet objet.
Fait à Paris, ce trois mai mil huit cent vingt-six, en
double expédition.
Approuvé l'écriture ci-dessus et cinq mots nuls.
A. Baudouin.
Approuvé cinq mots nuls,
H. Balzac.
{Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 9.)
[22] LETTRE DE RIGNOUX A BALZAC
Paris, le 6 mai 1826.
Monsieur Balsac (sic),
J'accepte les conditions spécifiées dans votre lettre de
ce jour pour le transfert de l'impression des OEuvres de
Lafontaine en un seul volume in-8°, tirées à trois mille
exemplaires et la passe, dont Monsieur Urbain Canel
m'avait chargé et ce aux mêmes conditions que j'étais
convenu envers le dit sieur Urbain Canel, savoir : deux
cent soixante-quinze francs par feuille comptant et sur
bonnes feuilles, et je vous reconnais en même temps, à
dater de ce jour, propriétaire de tout ce qui concerne le
dit ouvrage.
J'ai l'honneur de vous saluer,
Rignoux.
Suscription de la lettre : Monsieur Balsac (sic), homme de
lettres, rue de Berry, n° 7, au Murais. Paris.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 10.)
318 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[25] REÇUS DE NAUDOT, ASSEMBLEUR
7 mai 1826.
Je reconnais avoir reçu de Mons.1 la quantité de
six livraisons de La Fontaine.
Savoir :
Cent trente-cinq exemplaires de la lre livraison.
Cent soixante et douze exemplaires de la 2e livraison.
Cent soixante-dix exemplaires de la 5e livraison.
Cent soixante-neuf exemplaires de la 4e livraison.
Cent quatre-vingt exemplaires de la 5e livraison.
Deux cent quarante-deux exemplaires de la 6e livraison.
Paris, ce sept mai 1826.
Naudot.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 12.)
|24J 11 mai 1826.
Je reconnais avoir reçu de M1 - deux mille exem
plaires des feuilles 1, 2, 5, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10. 11, 12, 13, 14,
15 des OEuvres complètes de Lafontaine en un volume
in-8, imprimées par Rignoux sur papier cavalier vélin de
Montgolfier et dont je suis responsable envers lui.
Le présent reçu est en outre de celui donné précé-
demment pour les livraisons séparées.
Paris, ce onze mai 1826.
Deux mots rayés nuls, approuvé l'écriture ci-dessus.
Naudot.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 14.)
[25] REÇU D'URBAIN CANEL DÉLIVRÉ A BALZAC
9 mal 1826.
Je soussigné reconnais avoir reçu en exécution du traité
1. Le nom est resté en blanc dans l'original.
2. Le nom est resté en blanc dans l'original.
LA LIBRAIRIE. 519
passr le premier mai couranl la somme <l<" neuf mille
deux cenl cinquante francs <*u mes trois billets, savoir :
fr. 2250 du 15 mai 1825 0/mad« Berny. . ) au 51
fp. 5000 du 15 mai 1825 0/mad« Berny. . j août
fr. 1000 du 15 mai 1825 0/ - d° . . ) 1826.
\) t>;>o
de M. H. Balzac h ce pour prix de la vente, à lui faite par
le susdit traité.
Paris, ce 9 mai 1826.
U. Canel.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 13.)
[26] VENTE DE PAPIER FAITE PAR RIGNOUX
A BALZAC
17 mai 1826.
Paris, le 16 mai 1826.
Imprimerie de Rignoux
rue <i<>s Francs- Bourgeois-
St Michel, n0 8.
Vendu à Monsieur Honoré Balsac (sic) quarante rames
de cavalier vélin d'Annonay, à 38 francs la rame payable
comptant en espèces pour la somme de 1 520 fr.
Reçu le montant de la facture ci-dessus de quinze cent
vingt francs.
Paris, 17 mai 1826.
Au bas de cette facture, Rignoux a écrit :
Je reconnais avoir gardé les quarante rames de papier
ci-dessus pour l'impression des Œuvres de Lafontaine.
1 vol. in-8°, à dater de la 37e forme.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258. fol. 16.)
520 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[27] LETTRE DU Dr CARRON A H. BALZAC
me.
Monsieur,
Comme vous, je suis ennemi des injures et je n'aime ni
en dire ni en recevoir; mais aussi je suis las de supporter
des injustices. Si dans la vive discussion que nous avons
eue mercredi dernier, je me suis écarté des règles de la
politesse, j'y ai été poussé et par le bon droit de ma
réclamation et surtout par le ton hautain que vous avez
pris avec moi, et auquel je ne suis point habitué. L'expres-
sion de menteur, dont je me suis servi, est, je l'avoue, trop
énergique, et doit être réprouvée par la bienséance; mais
j'ai voulu dire par là que vous aviez avancé un fait
erroné en m'annonÇant que Mr Tiercelin, votre ancien
commis, avoit les suites du Lafontaine et étoit chargé de
me les remettre. Au surplus, bien qu'il me soit pennible
(sic) d'être en guerre ouverte avec un homme dont j'ai
toujours estimé le caractère, je ne puis, vu la justice de
ma cause, vous donner une plus ample rétractation.
Votre serviteur,
Dr Carron.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 27.)
Cette lettre n'est pas datée, mais comme elle est adressée à
« Monsieur Balzac, imprimeur, rue du (sic) Marais, à Paris », sa
date ne peut être antérieure au mois de mars 1826, époque à
laquelle un acte du 16 de ce mois indique Balzac comme domi-
cilié rue des Marais-St-Germain. Voir Appendice VI, pièce n° 45.
[28J LETTRE DE M. D'ASSONVILLEZ A H. BALZAC
21 juin 1826.
A Monsieur Honoré Balzac, rue des Marais. n° 17,
faubourg St-Germain, à Paris.
Montglas, ce 21 juin 1826.
Mon cher Honoré,
Je vous avais demandé deux jours pour réfléchir à la
proposition qui m'a été faite par le sieur Urbain Canel.
LA LIBRAIRIE. 321
Voici le résultat auquel je m'arrête définitivement. Je
signerai L'acte que j'ai lu, qui fait remise de soixante
quinze pour cent, sous la modification de quelques
expressions qui no peuvent me convenir, <ku ce sens que
n'ayant jamais examiné les registres de mon débiteur, il
me paraît un peu hasardé de certifier des faits et des
conséquences qui, véritablement, ne sont pas à ma
connaissance. Vous voyez que ceci est peu de chose, et
qu'un acte séparé pour moi répondrait à tout.
Ce qui m'embarrasse le plus, c'est que je ne puis arriver
à Paris, comme je vous l'avais promis, pour l'exécution
de cette clause, qui ne donne que huit jours à notre débi-
teur pour rapporter toutes les signatures. Les ouvriers
que vous avez vus chez moi et quelques personnes qui me
sont arrivées et avec lesquelles je serai obligé de voisiner,
me retiendront ici jusqu'au cinq juillet. Je ne puis donc
accepter un rendez-vous que pour le six, le retard, jusqu'à
un certain point, me sourit même, car ce serait une
consolation pour moi que vous réfléchissassiez mûrement
à l'acte que vous me faites signer, et aux conséquences
que je vous soumets.
Vous savez que je n'ai jamais connu Mr Urbain Canel,
que je n'ai jamais eu confiance en lui, que je n'ai jamais
fait d'affaires avec lui, et, dès lors, que jamais je n'ai été
à même de faire avec lui des gains, qui pourraient aujour-
d'hui me consoler de la perte énorme que l'on me propose.
Dans cette affaire, c'est vous seul que j'ai désiré obliger;
c'est une entrée dans les affaires que je voulais vous
procurer. C'est donc à vous que je demande sécurité
pour mon avenir. Cette sécurité ne peut plus résulter
pour moi de la connaissance que j'ai de votre extrême
délicatesse; vos nouveaux engagements, votre nouvelle
position sociale, vous font une loi de me rassurer
autrement.
Je verrais aussi avec plaisir que tous les créanciers
eussent signé avant moi. Ce serait pour moi une espèce
de conviction que les affaires de votre ancien associé ne
sont que malheureuses.
J'oubliais aussi de vous dire que je ne puis pas remettre
le titre de Urbain Canel, mais seulement donner quittance
du dividende, car ce titre porte votre endos, endos que
21
522 LA JEUNESSE DE BALZAC.
vous ne devez plus signer aujourd'hui sans la participation
de votre associé.
Je n'en suis pas moins votre ami.
d'Assonvillez.
{Collection Lovenjoul, ms. A 259, lre part., fol. 53.)
FACTURES ET REÇUS DE RIGNOUX
POUR L'IMPRESSION DU LA FONTAINE
[29] 12 mai — 30 juin 1826.
Reçu de Monsieur Ralsac (sic) la somme de cinq cents
francs à valoir sur mes impressions du Lafontaine in-8\
de la signature 35 et suivantes.
Paris, 12 mai 1826.
RlGNOUX.
[30]
Reçu de Monsieur Ralsac (sic) la somme de cinq cents
francs à valoir sur mes impressions du Lafontaine in-8\
Paris, 27 mai 1826.
RlGNOUX.
[31]
Reçu de Monsieur Ralsac (sic) la somme de quinze
cents francs à valoir sur mes impressions et fournitures
de vingt rames de cavalier vélin pour le Lafontaine.
Paris, 10 juin 1826.
RlGNOUX.
[32]
Imprimerie de Rignoux
rue des Francs- Bourgeois-
St-Michel, n» 8.
Paris, le 30 juin 1826
Doit Monsieur H. Ralzac fr[ancs] pour l'im-
pression seulement des 12 feuilles portant les
signatures 33, 34, 55, 36, 57, 58 et 59 des Œuvres
LA LIBRAIRIE. 523
de Lafontaine en un seul volume, tirées ;'•
3000 exempl. sur cavalier vélin <vt quatre feuilles
de papier de Chine, à 85 IV. la 1/2 feuille .... 595 »
Composition et tirage au môme nombre des
1/2 fouilles portanl les signatures 40 à 62 inclusi-
vement, formant Il f",s 1/2 à 275 fr. 3162.50
Composition et tirage do la JVe d'Ésope for-
mant une 1/2 feuille 157.50
Surcharge pour vers et préface en caractère
n° 6 1/2 75 »
fr. 3970 »
Pour fourniture de quarante-neuf rames de ca-
valier vélin, à raison de 38 fr. la rame . . 1862 )
Plus 128 fllcs papier de Chine à 1 fr. la £ 1900 »
feuille 128 )
Sur quoi j'ai reçu en trois fois 2500 »
Reste à me solder ce jour 3460 »
fr. 5900
Reçu la somme de trois mille quatre cent soixante
francs pour solde de la présente facture.
Paris, 50 juin 1826. Rignoux.
[33]
Imprimerie de Rignoux
rue des Francs -Bourgeois-
St-Michel, n° 8.
Paris, le 30 juin 1826.
Doit Monsieur H. Balzac fr[ancs] pour l'im-
pression des titres des OEuvres complètes du
Lafontaine en un seul volume in-8°, formant un
quart de feuille d'impression ... un 1/4 )
plus la notice dudit ouvrage for- > 1/2 fiIe 137.50
niant un 1/4)
Tirage de mille couvertures 12.00
Fourniture de quinze mains de papier de cou-
Aerture 33.50
183.00
324 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Reçu comptant la somme de cent quatre-vingt-trois
francs.
Paris, 30 juin 1826. Rignoux.
Rignoux a ajouté au bas de cette facture : Je garde les mains
de passe pour les remettre à Mr Balzac. R.
Le 30 juin 1826, Rignoux signe encore la déclaration sui-
vante :
Je déclare avoir entre les mains les vignettes des
Œuvres complètes de Lafontaine en un volume in-8° que
je lui représenterai soit en nature, soit en un reçu de
Monsieur Alexandre Raudouin au nom de Mr Balzac.
Paris, 30 juin 1826. Rignoux.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 15, 17, 19, 20, 21 et 22.)
[34] LETTRE DE BALZAC
A UN IMPRIMEUR-LIBRAIRE D'AGEN
2 juillet 1826.
Imprimerie Paris, ce 2 juillet 1826.
de H. Balzac et A. Barbier,
rue des Marais S.-G. n. 17.
Monsieur Vaubel, imprimeur-libraire, à Agen.
Monsieur,
Devenu propriétaire du Lafontaine in-8°, que publiait
Monsieur Urbain Canel et sachant que vous êtes sous-
cripteur à cet ouvrage pour 1 exemplaire, je vous engage
à compléter votre douzaine, ce qui serait d'autant mieux
dans vos intérêts que vous obtiendriez double Treizième.
Je désire que cette proposition puisse vous être agréable.
Veuillez, je vous prie, me faire connaître votre inten-
tion à cet égard. Comme je me propose de publier plu-
sieurs autres ouvrages, je vous les offrirai en temps.
Disposez entièrement de moi et soyez assuré de mon
entier dévoûment.
H. Balzac.
P. -S. — Si vous aviez besoin de caractères, comme
confrère je me chargerais de vous en faire la commission.
LA LIBRAIRIE
Si vous prenez la douzaine, je vous passerai L'exeni
plaire à 13 f., ce qui esl un prix fort doux, dans le cas
contraire, je ne pourrai vous donner l'exemplaire que
vous avez à moins de 15,
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. ÎÀ.)
155] AFFAIRE BAUDOUIN-FRÉMEAU-BALZAC
Compte envoyé par Baudouin en sa lettre du 10 juin 1826.
1825 Doit Frémeau.
Avoir Frémeau.
Oct. 26.37/34 Conseils
Walter Scott . . .
171 .
aux jeunes filles
Nov. 9. 13/12 Histoire de
Paris, 17 livon'.
68 »
5000 -
36 »
60/52 Rousseau . .
40 Voltaire
936 .
1680 .
— 17. Id. Gaule poé-
Buffon. . .
252 .
108 »
Effets renouvelés.
2924 .
Déc. 16. Facture
294.75
10963 •
— 24. Id
2402.90
168.70
75
Remises. . . .
900 «
1826
Fév. 4. 27/24 Buffon. . .
— 16. 1 Annuaire . . .
11863 »
— 28. 69/63 Esquisses.
13/12 Histoire na-
141.75
112 »
Mars 9.13/12 Molière. .
72 »
Avril 9. Balot contesté1.
33.60
100 Voltaire. . .
1800 »
100 Rousseau. .
900 »
6137. 752
28 285.38
28 285.38
11 863 .
16421.65*
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 30.)
1. Sur ce compte, la somme de 33 fr. 60 a été barrée de deux
traits de plume.
2. L'addition donne, en réalité, la somme de 6138.45 et la
soustraction 16422.38.
526 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[56] CESSION PAR ALEXANDRE BAUDOUIN A BALZAC
DE DIVERSES CBÉANCES
30 août 1826.
Entre les soussignés :
M. Alexandre Baudouin, lib,e, demeurant à Paris, d'une
part,
M. Honoré Balzac, imprimeur, demeurant à Paris, rue
des Marais, n° 17 (St-Germain), d'autre part,
A été dit et convenu ce qui suit :
1° M. Alexandre Baudouin vend, cède et transporte sans
aucune garantie que celle des faits et promesses à
M. Balzac acceptant :
1° Une créance sur le sr Frémeau, libre à Bheims, actuel-
lement en état de faillite, la dite créance montant environ
à la somme de vingt mille huit cent quarante-sept francs,
telle qu'elle se poursuit et comporte, sans en rien réserver
ni excepter, entendant purement et simplement la mettre
à son lieu et place, sans entrer dans les discussions ou
diminutions qui pourraient résulter de la dite créance,
mais promettant l'aider par tous les renseignements dési-
rables à l'effet de rentrer dans la dite créance ; 2° une
autre créance sur le sr Dabo jeune, en état de faillite,
montant à la somme de seize cent cinquante et un francs,
aux mêmes charges et conditions que celles stipulées ci-
dessus; 3° une autre créance sur le sr Bouland et Tardieu,
montant à treize cent cinq francs, aux mêmes charges et
conditions que celles ci-dessus stipulées.
2° Le présent transport est fait moyennant un transport
d'égale somme en marchandises de librairie, se compo-
sant des OEuvres complètes de Lafontaine en un volume
in-8 au nombre de deux mille et quelques exemplaires
sans en rien relever ou rabattre, dont Mr Baudouin se
reconnaît satisfait et dont le s. Balzac lui garantit la pos-
session de tout trouble et évictions et payement sur le
pied de ce qu'il auroit reçu sur le montant des créances
ci-dessus transportées.
Tous pouvoirs sont donnés au porteur des présentes
pour faire signifier partout où besoin sera.
LA LIBRAIRIE. 327
Reconnail M. Balzac avoir reçu de M' Baudoin ions les
titres de créances sus énoncées dont décharge.
Reconnail M. Baudouin avoir reçu de M. Balzac un bon
pour prendre chez le s' Naudot, son assembleur, tous les
exemplaires existant de Lafontaine et un bon par M. Ri
gnoux pour les mains de passe; son reçu de l'assembleur
servira de décharge.
Fait double, à Paris, le trente août mil huit eent
vingt-six.
Approuvé l'écriture
A. Baudouin. H. Balzac.
Je déclare garder en ma possession les pièces relatives
aux affaires Dabo et Tardieu et Boulland que je remettrai
à M. Balzac à sa première réquisition.
Paris, 30 août 1826. A. Baudouin.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 54.)
Le dossier Baudouin-Frémeau-Balzac, qui fait partie de
la Collection Lovenjoul (ms. A 258, fol. 30 à 55), contient
un certain nombre de lettres du dit Frémeau, des lettres
de Balzac et diverses conventions passées entre eux. La
plupart de ces lettres, sauf celles de Balzac que nous
publions in extenso, n'offrent qu'un intérêt très relatif;
nous avons donc estimé qu'il était suffisant d'en donner
une analyse succincte.
[37]
1° Lettre de Frémeau à Honoré Balzac, datée de Beims,
le 2 septembre 1826. — Il repousse la prétention de
MM. Baudouin frères qui lui réclament une somme de
16 421 fr. 65 cent. ; il ne doit, écrit-il, que 14553 fr. 30 cent.
« sans préjudice aux articles à livrer quoique réglés et à
ceux dont ces messieurs se sont reconnus dépositaires ».
[38]
2° Lettre de Frémeau à Honoré Balzac, datée de Reims,
le 7 novembre 1826. — Il annonce que le traité aux débats
duquel Balzac a pris « une part de bienveillance » a été
homologué le 30 octobre dernier et il en donne les clauses
substantielles :
588 LA JEUNESSE DE BALZAC.
1° Je payerai, écrit-il, quarante pour cent des créances en
deux années, date de mars prochain, par quarts, de 6 en
6 mois et sans intérêts. On a refusé l'abandon que j'avais offert,
faute de savoir qui mettre à ma place pour la liquidation, qui,
faite par des syndics étrangers à notre commerce et aux habi-
tudes de ma maison, n'eût probablement pas amené vingt-cinq
pour cent en un an ou deux.
2° J'ai repris la suite de mes affaires sous la surveillance de
trois commissaires qui, jusqu'après l'entier payement des
quarante pour cent fixés par le concordat, contrôleront mes
opérations et encaisseront mes recettes hebdomadaires dont
il ne sera par moi distrait que ce qui sera strictement néces-
saire au payement de la suite de mes souscriptions, que je ne
prendrai qu'au comptant et sans escompte, et à mes frais de
maison fixés à 200 francs par mois. Il me sera loisible d'avan-
cer les termes du payement mais non de les reculer...
3° Pour ce qui vous regarde personnellement, vous avez été
admis pour 15 037 fr. 30 c. comme cessiônnaire de la créance
de Mr8 Baudouin frères ; sous la réserve de la livraison à
effectuer à ces messieurs.
Frémeau énumère la nature de la livraison qui doit lui
être faite; il s'agit de treizièmes des Voltaire qui lui
étaient acquis avant sa faillitte et du restant de ses Leber.
« Bien certainement, ajoute-t-il, on ne pourra payer de divi-
dende à M" Baudouin ou à leur cessionnaire que quand ils
auront effectué livraison des articles dont l'achat m'a rendu
leur débiteur, ou plutôt qui ne se trouvent chez eux qu'à titre
de dépôt... et la cession qu'il vous ont faite ne les affranchit
envers moi d'aucune des obligations inhérentes au titre de
leur créance ».
Frémeau tient à terminer cette affaire à l'amiable; il
demande à Balzac de lui envoyer un catalogue ou une
notice de ses livres de fonds ou en nombre pour faire
« une affaire, change ou même argent », si les articles et
les prix lui conviennent;
[59]
3° Lettre de Balzac à Frémeau. Nous la reproduisons
in extenso :
F. A LIBRAIRIE. 529
Paris, ce quatorze décembre 1826
I mprl merle
-!-• il Balzac el A. Barbier
nie des Marali s G., a* it
Monsieur Frémeau, libraire à Rheims,
Je vous adresse, conformément à nos conventions
faites à Rheims, la nomenclature des livres dont vous
pourriez me faire la vente jusqu'à concurrence de mon
dividende :
2 Eyriès 84 fr.
1 Cervantes, complet, gr. papier fin, fig. avant la lettre. 140 —
2 Poètes français jusqu'à Malherbe 64 —
1 — — gr. papier. ... 50 —
Art. ajoutés.
2 Voltaire (Uenouard), pap. ordinaire à 170 fr 340 —
2 Voltaire — pap. vélin à 240 fr 480 —
3 ex. de chaque résumé à 1 fr. 50 le vol.
70 ex. Collection Debure, in-32 à 1 fr. 50.
Je présume que ces deux articles monteront à la
somme de 300 —
75/80 Gesner (édition Renouard, 4 vol.), 8° vélin,
49 gravures dont on donnera 20 ex. avant la lettre
à 36 fr., net 2570 —
6094 »
il y aurait encore une différence de fr. 693 que nous
pourrions balancer ainsi :
11 Gessner 396 )
1 Voltaire (Renouard), pap. vélin .... 240 > 676 fr.
2 Bertin, pap. vélin 40 )
La différence que j'ai mise sur les 75/80 ex. de Gesner
vient : 1° de ce qu'il Taut en déposer 7 à la Direction,
faire des couvertures, des titres, etc.
Enfin, vous songerez que j'ai à supporter le port, la
brochure, etc., que l'emmagasinage et le temps à réaliser
est trop long.
En m'expédiant, répondez-moi, je vous prie, sur ces
points et mettez, je vous prie, l'activité que je vous con-
1. L'addition donne seulement 4028 fr. Nous ne comprenons
pas comment compte Balzac.
530 LA JEUNESSE DE BALZAC.
nais à cette affaire toute à votre décharge, vous voyez
que j'ai tout concilié.
[H. Balzac]
[40]
Monsieur Frémeau, libraire à Reims.
Suivant votre concordat, ma créance a été admise à
votre passif pour la somme de quinze mille trente-
sept-francs cinquante centimes, vous m'avez fait observer,
que, pour que la créance reconnue s'élever par vous à
cette somme fût maintenue, il y avait entre vous et la
maison Baudouin frères deux discussions à terminer. Sur
la l,e, relative aux 13esde Voltaire, une lettre de vous à ces
messieurs, du 14 novembre dernier, a transigé à l'amiable
cet art[icle]. Sur la 2e, relative aux exemplaires] de Leber
que la maison Baudouin frères garde en ses magasins,
elle se trouve résolue par mon fait en sa faveur, puisque
je m'engage à vous envoyer sous huitaine le récépissé de
M. Ducollet, aussitôt que vous m'aurez mandé par votre
réponse à cette lettre que vous l'autorisez à les recevoir
et que son reçu me déchargera de cette obligation. Ainsi,
le dividende de ma créance sera, suivant votre concordat,
de la somme de 6767 fr. 50 c. Je vous ai proposé à Rheims
de prendre, à des prix débattus entre nous, des livres de
votre fonds pour ce dividende même, ce qui constitue-
rait une véritable vente très profitable à vos intérêts, vous
avez accepté et, de mon côté, j'ai mis la condition que
cette vente n'atteindrait que mon dividende et que au cas
où vous donneriez un plus fort dividende, chose à laquelle
vous n'êtes, je le sais, engagé que d'honneur, vous ne m'oppo-
seriez pas cette transaction.
2° Que je ne renoncerais pas à l'obligation que vous
vouliez aussi me souscrire pour les 1 300 d'argent que vous
ont prêté Messieurs Baudouin frères et que vous restrei-
gnez à mille francs (cette restriction étant en dehors de
mes créances, je l'accepte sans y rien trouver que de
louable pour vous). Voici donc, en dernier lieu, la nomen-
clature des livres que je consens à prendre avec leurs
prix, elle est exacte sauf un dernier article que j'ai ajouté
et deux observations dont vous jugerez le mérite.
LA LIBRAIRIE. 331
7/6 Cambiste (Bossange, 2 vol. in-8°) i«o fr.
1 choix de rapporta (-1 vol. avec portraits) ioo —
3 Boileau (Desoër) 1 vol. in-8 15
S Annuaire nécrologique complel 35 —
3 Thomas Belin complet
3 Barthélémy complet f
3 Dalembert complet 262 fr.
3 Marmontel complet \
3 Diderot complet j
1 Diderot (Brou?) complet, 25 vol 88 -
3 Hamilton complel (Renouard) 60 —
Art. forcé: 7/6 Florian complet (Renouar(l) '200 —
1 Gilbert (Dalibon) gr. pap. fin, avanHa lettre 20 —
3 La Rochefoucault complet, de Ponthieu 15 —
1 Rabelais (Dalibon) 70 —
1 Rotrou (Desoër) 20 —
1 Molière (Desoër) gr. pap. fin, avant la lettre .... 200 —
3 Bertin 15 —
1 Bernard, gr. pap. fin avant lettre 8 —
1 Condillac complet 45 —
1 Marmontel (Verdière) 75 —
1 Millevoye de choix 60 —
3 J.-B. Rousseau complet 00 —
1 Théâtre étranger )
1 Schiller [ vélin 400 —
1 Sakespeare (sic) )
2 Collin d'Harleville 34 —
3 Colardeau, vélin, fig. avant la lettre 24 —
Art. forcé : 2 Fénelon complet 50 —
[FI. Balzac]
4° Lettre de Frémeau fils à Balzac, datée de Reims, le
31 janvier 1827. — C'est une réponse à la lettre de Balzac,
datée du 14 décembre 1826.
[il] 5° Traité entre Frémeau fils et Honoré Balzac.
29 mars 1827.
Entre les soussignés :
Charles-François Frémeau fils, libraire, demeurant ordi-
nairement à Rheims, de présent à Paris, rue S'-Germain
l'Auxerrois, n° 84, d'une part,
553 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Et Honoré Balzac, imprimeur, demeurant à Paris, rue
des Marais S.-Germain, n° 17, d'autre part,
A été dit et convenu ce qui suit :
Au mois d'août 1826, M. Alexandre Baudouin, libraire
à Paris, créancier du sieur Frémeau soussigné, libraire à
Rheims, et alors en faillite, fît à M. Balzac le transport
des créances, comptes courans, etc., qu'il pouvait avoir à
répéter du sr Frémeau. La somme à laquelle M. Baudouin
prétendait fut réduite par l'examen des comptes et des
syndics de la faillite à la somme de quinze mille trente-
sept francs cinquante* centimes pour laquelle M. Balzac,
cessionnaire de M. Baudouin, fut admis au passif du bilan
de la dite faillite par les syndics et le juge commissaire de
la faillite.
Suivant lettre de M. Baudouin, adressée à M. Frémeau,
le onze novembre dernier, et postérieurement au trans-
port fait par M. Baudouin à M. Balzac, M. Baudouin recon-
nut que sa créance ne se montait effectivement qu'à la
somme de quatorze mille huit cents francs.
Un concordat ayant été passé entre M. Frémeau et ses
créanciers, il fut fait par ces derniers remise au sr Fré-
meau de soixante pour cent sur le montant de leurs
créances, à la charge par le s' Frémeau de payer les qua-
rante pour cent restant dans l'espace de deux années qui
commencent à courir du présent mois et en quatre paie-
mens égaux qui doivent s'effectuer de six mois en six
mois.
Dans ces circonstances, les soussignés, dans le but d'ap-
purer leurs comptes et pour faciliter au sieur Frémeau
l'acquittement de ses dettes, ont arrêté les conventions
suivantes :
Art. 1.
M. Balzac, bien que sa créance eût été admise pour une
somme de 15,057, 50 c, adhère par ces présentes à la
réduction consentie par la lettre de M. Baudouin; mais
toutes fois sans que cette adhésion qui n'a de valeur
qu'envers le sr Frémeau puisse lui être opposée contre le
recours qu'il doit exercer à l'égard de M. Baudouin et au
cas où il serait, obligé d'agir envers ce dernier, le sr Fré-
meau soussigné s'engage par ces présentes à lui corn mu-
LA LIBRAIRIE. 533
aiquer la Lettre écrite à lui par M. Baudouin le onze no«
vembre dernier, <■! ce, à sa première réquisition.
Reconnaît M. Balzac que la <iit<^ créance de 14 800 fr.
est grevée de L'obligation de remettre ans1 Prémeau les
exemplaires par Lui déposés à MM. Baudouin d'un oui rage
intitulé : Leber, Cérémonies du sacre, in-*, un volume avec
figures, Lequel ouvrage resté dans Les magasins de
MM. Baudouin devra être rendu dans Le nombre intégral
désigné au reçu que MM, Baudouin en ont donné à
MM. Frémeau, dont la quittance libérera M. Balzac de
cette obligation.
Art. 2.
M. Frémeau vend, cède, transporte et abandonne à
M. Balzac ce acceptant : 1° trente exemplaires en feuille
des Œuvres complexes de Gessner, édition Renouard,
avec les figures avant le numéro ; trois exemplaires des
œuvres complètes de /° Thomas, 2° Barthélémy, 3° d'Alem-
bert, 4° Marmontel, 5° Diderot; 2° trois exemplaires des
Œuvres complètes de Florian en 16 volumes, in- 18, édition
Renouard ; 3° trois exemplaires des Œuvres de Boileau en
un seul volume in-8°, édition Desoër; 4° un exemplaire
des Œuvres de Gilbert publiées par Dalibon en un volume
grand papier vélin, figures avant la lettre; 5° les Œuvres
complètes de Molière en neuf volumes in-8, grand papier
vélin, gravures avant la lettre, publiés par Desoër; 6° un
exemplaire de la collection des Théâtres étrangers publiés
par Ladvocat y compris un exemplaire des Œuvres de
Schiller et un exemplaire des Œuvres de Shakespeare,
grand papier vélin, figures avant la lettre, dont moitié
publiés par Belin: 7° un exemplaire des Œuvres complètes
de Fénélon, in-8° ; 8° deux exemplaires du Supplément à
l'Histoire des voyages publiés par Eyriès; 9° deux exem-
plaires des Œuvres complètes de Condillac en 16 volumes
in-8; 10° deux exemplaires des Œuvres complètes de Mar-
montel, in-8°, publiées par Verdière ; 11° trois exemplaires
des Œuvres complètes de J.-Bapt. Rousseau, en 3 volumes,
in-8, édition Renouard; 12° un exemplaire de l'édition de
Pausanias, en papier vélin, publiée par Bobée; 13° trois
exemplaires des Œuvres de Colardeau sur cavalier vélin,
in-8°; H° un exemplaire des Œuvres complètes de Collin
534 LA JEUNESSE DE BALZAC.
d'Harleville, in-8°; 15° un exemplaire des Œuvres complètes
de Millevoye sur grand papier vélin, figures avant la
lettre; 16° cinq-quatre exemplaires du Cambiste universel,
publié par Bossange; 17° deux exemplaires de la Collec-
tion des poètes français avant Malherbe, in-8, imprimés
par Crapelet; 18° deux exemplaires de quatre années de
Y Annuaire nécrologique publié par Malher (?);19° un
exemplaire du choix de rapports publié par Eymery ;
20° trois exemplaires des Œuvres de Bertin en 1 vol. in-8,
plus un exemplaire des Œuvres de Bernard, 1 vol. in-8,
grand papier, fîg. avant la lettre; 21° et enfin un exem-
plaire du susdit Molière Desoër en neuf volumes, papier
carré vélin.
La présente vente est faite moyennant la somme à reve-
nir à M. Balzac pour le payement des deux derniers divi-
dendes qu'il doit toucher par suite du concordat passé
entre Frémeau et ses créanciers et dont M. Balzac donne
quittance au sr Frémeau, par ces présentes, entendant le
mettre à son lieu et place purement et simplement.
Il est bien entendu entre les soussignés que l'on ne
pourra, en aucun cas, opposer la présente vente à
M. Balzac, lors du payement des deux premiers dividendes
à la délivrance desquels il n'est rien changé par ces pré-
sentes et le sr Frémeau s'engage à faire ratifier le présent
traité par les commissaires de la faillite, par un simple
approuvé sur la lettre d'envoi des objets présentement
vendus qu'il s'engage à livrer à M. Balzac dans le courant
du mois d'avril prochain, faute de quoi la présente vente
serait nulle à l'égard de M. Balzac si bon lui semblait.
Fait double, à Paris, le vingt-neuf mars mil huit cent
vingt-sept.
H. Balzac.
Approuvé l'écriture ci-dessus et d'autre part
Frémeau fils.
6° Lettre de Frémeau fils à Balzac, datée de Vitry-le-
François, le 30 mai 1827. — Il réclame livraison des
figures de 396 exemplaires du Leber qui « doit être un
objet de, papier et tirage, 1 000 francs au moins... ».
7° Lettre de Frémeau fils à Balzac, datée de Reims, le
i.\ LIBRAIRIE.
23 août 1897. C'esl la réponse à une lettre de Balzac,
datée du 91 août, mais que nous ne connaissons p;»^ Il
y csi question d'un traité passé entre lui ei M1 Baudouin
frères, le 94 juin 1 8~2.">, au sujel des exemplaires du Leber
Prémeau souhaite un arrangement amiable pour éviter
L'intervention des tribunaux.
S" Lettre de Frémeau fils à Balzac, datée de Reims, le
18 septembre 1 827. — Confirme sa précédente lettre du
du 25 aoùl.
[49]
9° Lettre de Frémeau fils à Balzac, datée de Reims le
4 octobre 1827. — Frémeau déclare n'être plus débiteur
de Balzac que pour une somme de 3 007 fr. 50 centimes,
pour les deux derniers dividendes dont Balzac a promis
de se « remplir en livres », si ces articles et prix lui con-
venaient. Il lui propose de solder ces deux dividendes par
l'envoi des ouvrages suivants :
33/30 Gessner. Paris, 1799, en feuilles, figures
avant les numéros à 72 fr./30 fr 900 fr.
11/10 Numismatique. J.-V. (à voir chez M. Ducol-
let). 2 vol. in-8, sat,, pi. à 15 fr./7 fr. 50 75 fr.
1 Théâtre étranger. 25 vol. in-8 gr. r. vélin, sat.
portr., à 250 fr 250 —
1 Shakespeare, 13 vol. in-8, d° à 130 fr ) X,.A c ,,AA
7 Schiller^ 6 vol., d° d° à 60 fr { 400 fr-/40° ~
11/10 Cambiste universel, 2 vol. in-4°, cartonnés,
à 42 fr./21 fr 210 —
4 Poètes français, 6 vol. in-8, à 48 fr./30 fr. . . . 120 —
1 Molière (Desoër), 9 vol. in-8, gr. raisin vélin,
cart., sat., fig. avant la lettre 200 —
1 Millevoye, 5 vol. in-8, gr. raisin vélin, sat.,
portr., 100 fr 50 —
10 Lycée de Laharpe (Dupont), 18 vol. in-8, sat.,
à 54 f r 540 —
20 Boileau, de Dupont, 4 vol. in-8, sat. à 12 fr. . 240 —
10 La Fontaine, d° 6 vol. d° à 18 fr. . 180 —
Frémeau estime que l'envoi de ces livres à Balzac est
le meilleur moyen de régler sûrement l'affaire. C'est sa
dernière proposition « qu'il faut accepter ou rejetter ».
336 LA JEUNESSE DE BALZAC.
ÉDITION DU MOLIÈRE
BIBLIOGRAPHIE
Comme pour le « La Fontaine », avant de publier les pièces
relatives à l'opération des OEuvres de Molière, complètes en
un volume, nous donnons la description bibliographique de ce
tome :
OEuvres complètes de Molière, ornées de trente vignettes
dessinées par Devéria et gravées par Thompson. Paris.
Delongchamps, boulevard Bonne-Nouvelle, Urbain Cartel,
rue Saint- Germain-des-Prés, Baudouin frères, rue de Vaugi-
rard, MDCCCXXVI. In-8.
1 f. (faux-titre ; au v° : Paris. — de l'imprimerie Rignoux, rue
des Francs-Bourgeois S.-Michel) ; 1 f. (titre, orné d'un portrait de
Molière); IV pp. (Vie de Molière, non signée1); 553 pp.; 1 p.
blanche et 1 f. n. chiffré (table).
Les vignettes sont dans le texte, imprimé sur deux colonnes ;
elles sont placées en tête de L'Étourdi, Le Dépit amoureux, Les
Précieuses ridicules, Sganarelle, Don Garcie de Navarre, L'École
des maris, Les Fâcheux, L'École des femmes, La Critique de
l'École des femmes, V Impromptu de Versailles, Le Mariage forcé.
La Princesse d'Élide, Don Juan, L'Amour médecin, Le Misan-
thrope, Le Médecin malgré lui, Mélicerte, Le Sicilien, Le Tartufe,
Amphytrion, L Avare, George Dandin, M. de Pourceaugnac, Les
Amants magnifiques, Le Bourgeois gentilhomme, Psyché, Les Four-
beries de Scapin, La Comtesse d'Escarbagnas, Les Femmes savantes
et Le Malade imaginaire.
Le prospectus et spécimen de cette édition (in-8° d'un quart
de feuille), imprimé par Rignoux, enregistré dans la Bibliogra-
phie de la France du 23 avril 1823, n° 2123 annonce que « ce
volume paraîtra en 4 livraisons de 8 à 9 feuilles ». La lre livrai-
son était promise pour le 1er mai, les autres de mois en mois.
Elles sont enregistrées dans la Bibliographie de la France des
28 mai 1825 (n° 2928), 10 septembre 1825 (n°5049), 5 novembre 1825
(n° 6208) et 31 décembre 1825 (n° 7524).
1. La notice sur la Vie de Molière, non signée, est de Balzac.
Elle a été imprimée dans le tome XXII des Œuvres complètes de
II. de Balzac, p. 1 à 8. Voir Histoire des Œuvres de H. de Bahac
par le V,e de Spoelberch de Lovenjoul, 2e édition, p. 245.
LA LIBRAIRIE. 331
[43] TRAITÉ ENTRE URBAIN CANEL
ET HONORÉ BALZAC
14 avril 1895.
Entre les soussignés, i pbain Canel, libraire, demeurant
à Paris, place S^André-des-Arts, n° -"o, (rime part, el
Honoré Balzac, demeurant à Taris, rue de Touiiion. n" 2,
d'aulrc part, a été l'ail cl convenu ce qui suit :
M. Urbain Canel s'engage à partager avec M1 Honoré
Balzac, ce acceptant, les profits, bénéfices, charges et
périls, d'une édition de Molière en un volume in OCtavo,
entreprise par Delongchamps et Urbain Canel, collecti-
vement chacun pour la moitié, par traité fait le trenle et
un mars mil huit cent vingt-cinq.
Le traité signé par M' Urbain Canel et Delongchamps
est accepté par M' Balzac pour base de la présente
convention et M. Balzac aura les mêmes droits que
M. Urbain Canel dans l'exécution de ce traitté (sic).
Si, par un cas fortuit, M. Urbain Canel ou M. Balzac
venaient à être représentés par des tiers ou ayant cause,
Mr Urbain Canel et M' Balzac se réservent mutuellement
le droit purement facultatif de rembourser à quarante
pour cent des bénéfices les ayant cause ou les tiers, de
manière cependant que ce droit ne soit exercé que par
celui des deux contractants qui restera seul dans l'entre-
prise, les tiers ou les ayant cause n'ayant aucune qualité
pour l'y contraindre.
Pour l'exécution entière de cette convention, M" Bal-
zac et Urbain Canel se ressaisissent, même dès ce moment,
en tant que de besoin de leurs droits de propriété au dit
cas, en faisant l'abandon pur et simple de celui des deux
qui serait appelé à exercer ce droit.
Mr Urbain Canel reconnaît par ces présentes avoir reçu
des mains de M' Balzac la somme de six mille francs en
espèces ayant cours, montant du quart des dépenses pré-
sumées de la dite édition de Molière, s'engageant à en
fournir le compte, dont quittance.
Ces six mille francs proviennent d'un prêt fait à
M1 Balzac par M. Jean-Louis-IIenri Dassonvillez sur deux
lettres de change tirées par M. Balzac sur Mr Urbain Canel
28
538 LA JEUNESSE DE BALZAC.
et acceptées par lui. En considération du présent traité,
M1* Balzac a prêté à M' Urbain Canel, ce acceptant, la
somme de trois mille francs formant la moitié delà quote
part des dépenses de Molière dont quittance, attendu que
les neuf mille francs dont il est question ont été prêtés
par M1' Dassonvillez à M1" Urbain Canel et Balzac, il
demeure bien attendu (sic) que le payement des lettres de
change qui se trouvent au nombre de trois plus un biliet
de cent vingt-deux francs formant ensemble dix mille cent
vingt-deux francs y compris les intérêts, sera fait parles
contractants au prorata de leur prise de fonds.
Fait double, à Paris, le quatorze avril mil huit cent
vingt-cinq.
Approuvé le mot deux en surcharge
U. Canel.
Approuvé l'écriture ci-dessus
H. Balzac.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 3.)
[44] REÇU DE THOUVENIN, RELIEUR
1er septembre 1827.
Reçu de Monsieur Balsac (sic) soixante-quinze francs pr
livraison d'un exemplaire Amours des Dieux, reliure com-
prise.
Paris, lftr septembre 1827.
A Deltut,
Commissaire gérant.
M. Thouvenin s'était trompé de f. 4. Nous ne pouvons
céder qu'au comptant.
A. D.
(Collection Lovenjoul, ms. A 258, fol. 61.)
APPENDICE VI
L'IMPRIMERIE
[45] TRAITÉ ENTRE MM. D'ASSONVILLEZ,
HONORÉ BALZAC ET ANDRÉ BARBIER
16 mars 1826.
Entre les soussignés M. Jean-Louis-Henri d'Assonvillez,
propriétaire, demeurant au château de Montglas, arrond1
de la Ferté-Gaucher, de présent à Paris, rue du Foin-St-
Jacques, n° 15, d'une part, et MM. Honoré Balzac et
André Barbier, imprimeurs, demeurant à Paris, rue des
Marais-St-Germain, n° 17, a été dit et convenu ce qui suit :
Au 15 juillet dernier, M. H. Balzac était débiteur de
M. d'Assonvillez pour une somme de dix mille francs due
par lettres de change à M. d'Assonvillez par le sr Urbain
Canel, libraire, et endossées par M. Balzac. Le sr
Urbain Canel étant tombé en faillite et M. Balzac n'ayant
pu acquitter les lettres de change, elles furent protestées
et la dette totale de M. Balzac envers M. d'Assonvillez a
été depuis reconnue par eux soussignés s'élever à la
somme de dix mille sept cent quinze francs sur laquelle
somme M. Honoré Balzac, ayant payé huit cent quatre-
vingt francs quarante-cinq centimes, la somme dont il
restedébiteurestde neuf mille huit cent trente-quatre francs
cinquante-cinq centimes.
M. Balzac ayant formé avec M. A. Barbier un établis-
540 LA JEUNESSE DE BALZAC.
sèment d'imprimerie à Paris dont M. d'Assonvillez aurait
pu entraver les opérations s'il avait dirigé des poursuites
contre M. Balzac, à raison de cette dette, il y renonça
afin de faciliter cet établissement mais à la condition ver-
balement acceptée de régler cette dette d'une manière
satisfaisante.
A cet effet, M. A. Barbier a consenti à cautionner cette
dette et à entrer dans le payement aux clauses et condi-
tions suivantes :
Art. 1.
Pour payer M. d'Assonvillez des neuf mille huit cent
trente-quatre francs cinquante cinq centimes à lui dus
comme dit est ci-dessus, MM. H. Balzac et André Barbier
lui cèdent, vendent et transportent, ce qui est accepté
par lui, sous les réserves ci-dessous :
1° Sept presses à la Stanhope en fer, l'une d'une
valeur de neuf cent francs et les six autres d'une
valeur de douze cents francs chacune, ci 8 100 fr.
2° Une presse à satiner d'une valeur de quatre
cent francs, ci 400 fr.
3° Et deux corps de fonte dont l'un pesant six
cents livres, caractère dit cicero, provenant de l'ac-
quisition faite par MM. Balzac et Barbier du fonds
de M. Laurens, leur prédécesseur, et l'autre pesant
quatre cents livres, caractère dit petit texte, venant
également de M. Laurens, le tout d'une valeur de
quinze cent cinquante francs, ci 1 550 fr.
4° Onze cents livres de petit romain achetées à
MM. Henri Didot, Legrand et O, estimées deux
mille quatre-vingt-dix francs, ci 2 090 fr.
formant en tout une valeur de douze mille cent
quarante francs, prix d'acquisition et présentement
vendue moyennant la dite somme de neuf mille huit
cent trente-quatre francs cinquante-cinq centimes. 12 140 fr.
Art. 2.
Cependant, la présente vente pourra, pendant quatre
années qui commenceront à courir de ce jour, être réso-
lue de plein droit si M. Balzac rachète les droits de
M. d'Assonvillez en lui remboursant intégralement les
neuf mille huit cent trente-quatre francs cinquante-cinq
centimes pour le paiement desquels la présente vente a
L'IMPRIMERIE. 341
lieu; et, à cet effet, il suffira de la quittance de la dite
somme pour accomplir le réméré.
A HT. .").
Attendu que les objets présentement vendus par
MM. Balzac et Barbier à M. d'Assonvillez sont indispen-
sables à MM. Balzac et Barbier pour l'exploitation de leur
imprimerie, M. d'Assonvillez les a donnés, par ces pré-
sentes, à bail à MM. Balzac et André Barbier moyennant
la somme de cinq cents qualre-vingt huit francs quatre-
vingt huit centimes de loyer annuel, payable aux quatre
ternies accoutumés de l'année et qui commenceront à
courir du premier avril de la présente année et dont le
premier terme écherra le premier juillet et sera de la
somme de cent quarante-sept francs vingt centimes.
Le présent bail est fait pour l'espace de quatre années
consécutives qui commenceront à courir du premier avril
de cette année et le bail des dits objets cessera de plein
droit du jour où M. Balzac aura satisfait aux conditions
du réméré stipulées en l'article précédent.
Art. 4.
Il demeure convenu entre MM. Balzac et Barbier que
M. Balzac sera personnellement chargé d'acquitter le
loyer des dits objets présentement donnés à bail et
M. d'Assonvillez consent par ces présentes à ne regarder
MM. Balzac et Barbier comme solidaires du paiement du
loyer que faute par M. Balzac de payer deux termes du
loyer.
Art. 5.
Il n'a pas été fait plus ample désignation des objets pré-
sentement vendus à M. d'Assonvillez et donnés à bail par
lui aux vendeurs, attendu l'entière connaissance qu'en
avaient les soussignés et les objets ayant été livrés ce
jour à M. d'Assonvillez et les a rendus aux preneurs à
condition qu'ils en jouiraient en bons pères de famille.
Fait double, à Paris, le 16 mars mil huit cent vingt-six.
H. Balzac.
Approuvé l'écriture ci-dessus comme caution et vente,
A. Barbier.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, lr» partie, fol. M.)
548 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[46] SUITE DE L'AFFAIRE D'ASSONVILLEZ,
BALZAC ET BARBIER
16 mars 1827.
N/S. Balzac, S/Cte particulier
à d'Assonvillez. F. 9834,55.
pour ce qu'il a reconnu devoir personnellement à ce der-
nier, par acte en date de ce jour et suivant compte arrêté
entre eux, pour raison de lettres de change acceptées par
Urbain Canel endossées par n/s. Balzac et impayées le
15 juillet 1826, laquelle dette, par le susdit acte, a été
cautionnée par n/s. Barbier et réglée par la Société Balzac
et Barbier, ainsi qu'il sera dit dans l'article ci-après,
ci F. 9834,55
Dans le haut de cette pièce on lit : Bon à passer écriture.
H. Balzac.
[«] foJ58 _
Les suivans à matériel d'imprimerie d'Assonvillez.
A lui vendu par réméré, en paiement de 9834,55 men-
tionnés dans l'article précédent, les objets suivans avec
la faculté réservée à n/s. Balzac de les racheter dans l'es-
pace de 4 années en remboursant à M. d'Assonvillez la
susdite somme, lesquels objets ce dernier nous donne à
bail pendant l'espace de 4 années à raison de 588,88 de
loyer annuel qui seront payés par trimestre par n/s. Bal-
zac personnellement.
Désignation des objets.
f. »» = vendus pour la somme de. fr. 9 834 55
12 140
N/S. Balzac, S/Cto particulier.
Pour différence de la susdite vente dont
il s'engage à rendre la Société indemne, fr. 2 305 45
fr. 12 140 -
[Collection Lovenjoul, ms. A 259, lre partie, fol. 57.)
19 mars 1827.
Au vingt juillet prochain, je paierai à M. d'Assonvillez
L'IMPRIMERIE. 343
OU ordre la somme de mille francs' valeur reçue
comptant.
Paris, ce 19 mars 1837.
H. Balzac.
H* Balzac, imprimeur, rue des Marais S. -G., n° 17, P>e Sl-Gain.
[49] 18 juin 1828.
Reçu de M. Honoré Balzac la somme de dix mille
soixante-dix-neuf francs pour solde en principal et loca-
tion échue des sommes et objets détaillés au réméré ci-
dessus dont quittance, au moyen de quoi je remets de ce
jour en la possession et propriété de M. Honoré Balzac
les objets ci-dessus détaillés et formant l'objet delà vente
à réméré ci-dessus.
A Monglas, ce treize juin mil huit cent vingt huit.
D'Assonvillez.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, lro partie, fol. 51 v°.)
DOSSIER D'HONORÉ BALZAC
RELATIF A L'OBTENTION D'UN BREVET D'iMPRIMEUR
12 avril i 826-4 juin 18%.
Ce dossier, déposé au Ministère de l'Intérieur où il
est resté jusqu'en 1877, a été versé, à cette époque,
aux Archives Nationales ; il y est conservé sous la cote
F18 71094; il renferme quatorze pièces numérotées au
crayon. La première de ces pièces est la chemise qui
recouvre le dossier et qui porte les indications sui-
vantes :
Se^e BALZAC Honoré
~ . Imprimeur.
Pans ■
Breveté le Ier juin 1826, n° 2554, en remplacement du sr
Jean-Joseph Laurens, démissionnaire.
544 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Démissionnaire, remplacé le 26 septembre 1828 par le
s' André Barbier.
!50] DEMANDE DE BALZAC A MONSIEUR LE MINISTRE
DE L'INTÉRIEUR
Monseigneur,
Honoré Balzac a l'honneur de faire connaître à Votre
Excellence qu'il vient de traiter' avec le s1 J.-J. Laurens
aîné de son fonds d'imprimeur à Paris. Il supplie Votre
Excellence de daigner accorder sa sanction à ce traité, en
lui faisant délivrer le brevet personnel dont il a besoin
pour exercer cette profession.
Il a l'honneur d'être, avec un profond respect, Monsei-
gneur, de Votre Excellence le très humble et très obéissant
serviteur
Honoré Balzac.
Paris, le 12 avril 1826.
M. Honoré Balzac, rue de Tournon, n° 2.
Pièce n° 10 du dossier des Archives Nationales.
1. C'est avant le 16 mars 1826 que Balzac a traité avec Lau-
rens ; cela résulte d'un arrangement passé à cette date entre
MM. d'Assonvillez, Balzac et son associé André Barbier ; Balzac
et Barbier y sont qualifiés « imprimeurs demeurant à Paris,
rue des Marais-St-Germain, n. 17 ». Malgré toutes nos recher-
ches, nous n'avons pu jusqu'ici rencontrer l'acte de vente.
M. Paul Delalain, dans sa Liste des imprimeurs typograplies de
Paris du 1er avril 1811 au 10 septembre 1870 sous le régime du Bre-
vet (extraits de la Bibliographie de la France, septembre-octobre
1899), donne la nomenclature suivante des typographes qui ont
précédé ou suivi Balzac: 1er avril 1811, Laurens aîné (Jean-
Joseph) ; 1er juin 1826, Balzac (Honoré de [sic]) ; 26 septembre
1828, Barbier (André) ; 7 octobre 1833, Joly (Jacques-Louis) ;
3 mai 1834, Beaulé (Pierre-François) ; 20 novembre 1846. Beaulé
(Jean-Baptiste-Prosper), fils du précédent. Jean-Joseph Laurens
aîné exerçait déjà en 1798 ; quand vint le régime du brevet, il
fut inscrit en 1811, mais les brevets ne furent pas alors déli-
vrés aux titulaires. L'Empire s'écroula et la Restauration crut
nécessaire de renouveler lesdits brevets, et c'est pour cette
raison que celui du prédécesseur de Balzac ne porte que la
date de 1816, comme on le verra plus loin.
L'IMPRIMERIE. 545
[51]
La demande de Balzac a été remise au Directeur
général de la police parM.de Berny, qui l'avail accom-
pagnée des deux lettres suivantes destinées l'une au
Minisire de l'Intérieur1, L'autre au Directeur générai de
la Police" :
Monseigneur,
Permettez-moi de faire connaître à Votre Excellence
l'intérêt vif que je porte à M' Honoré Balzac qui désire
obtenir l'autorisation nécessaire pour exercer la profes-
sion d'imprimeur. Je connais depuis longtemps ce jeune
homme : la droiture de son cœur, ses connaissances en
littérature me persuadent qu'il s'est convaincu préalable-
ment des devoirs qu'impose une pareille profession.
La sévérité de mes fonctions ne me permettrait pas
d'élever la voix en faveur de M1 H. Balzac si je n'avais
une intime conviction que Votre Excellence n'aura jamais
à se repentir d'avoir favorablement accueilli sa demande.
J'ai l'honneur d'être, avec un profond respect, Monsei-
gneur, de Votre Excellence le très humble et très obéis-
sant serviteur
De Berny,
Conseiller à la Cour Royale.
Paris, le 12 avril 1826. rue d'Enfer, n° 55.
Pièce n° 1 1 du dossier des Archives Nationales.
[52]
Monsieur le Directeur général,
Pour ne pas vous ennuyer, j'aurai l'honneur de vous
prier de jetter les yeux sur la lettre ci-jointe avant de la
remettre à Son Excellence et d'être persuadé que je vous
aurai une vive et personnelle reconnaissance si vous pou-
vez, et promptement, faire réussir la demande de mon
jeune protégé.
J'ai l'honneur d'être, avec la plus haute considération,
1. M. le comte Corbière.
2. M. Franchet-Desperey, conseiller d'État, directeur général
de la Police.
546 LA JEUNESSE DE BALZAC.
monsieur le Directeur général, votre très humble et
très obéissant serviteur
De Berny,
Conseiller à la Cour Royale.
Paris, le 12 avril 1826. rue d'Enfer, n° 55.
Le Directeur de la police a écrit de sa main, dans le
haut de la lettre, la note suivante : Presse. Remis par
MT Berny (sic), conseiller, qui y prend le plus vif
intérêt. 12 avril.
Pièce n° 9 du dossier des Archives Nationales.
[53] LETTRE DE DÉMISSION DE LAURENS
A Son Excellence le Ministre Secrétaire d'Etat
au Département de l'Intérieur.
Monseigneur,
J'ai l'honneur d'annoncer à Votre Excellence que je
donne ma démission dé mon brevet d'imprimeur à la rési-
dence de Paris en faveur de M1 Honoré Balzac que je
supplie humblement Votre Excellence d'agréer comme
mon successeur, lui ayant cédé mon établissement.
J'ai l'honneur d'être, avec respect, de Votre Excellence
le très humble et obéissant serviteur
Laurens aîné,
imprimeur.
Pièce n° 12 du dossier des Archives nationales.
[54] CERTIFICAT DE CAPACITÉ
Nous soussignés, imprimeurs à Paris, déclarons que
M. Honoré Balzac possède toutes les connaissances
requises pour exercer la profession d'imprimeur.
Paris, ce onze avril mil huit cent vingt-six.
Didot le jeune, Gratiot, Huzard-Courcier.
Pièce n° 15 du dossier des Archives Nationales.
L'IMPRIMERIE. 541
[.r).r> lettre du directeur général de la police
au préfkt de police
15 avril 1826.
A M. le Conseiller d'Etat, Préfet de police à Paris*.
M. le Préfet, je vous prie de vouloir bien recueillir et
me transmettre des renseignemens sur la moralité et les
dispositions politiques du sr Honoré Balzac, domicilié rue
de Tournon, n°2, qui demande à remplacer un imprimeur
de la Capitale,...
Pièce n° 8 du dossier des Archives Nationales.
[56] LETTRE DE M. DE CASTELBAJAC AU DIRECTEUR
DE LA POLICE
Administration Paris, le 22 avril 1826.
des
Douanes
Cabinet
du
Directeur général.
Un brevet d'imprimeur a été promis à M. Honoré Bal-
zac. Je viens réclamer, mon cher collègue, votre inter-
vention pour que ce brevet lui soit expédié le plus tôt
possible.
M. Balzac m'est recommandé par une personne que je
désire obliger et je serai très reconnaissant si vous voulez
bien m'en fournir les moyens en rendant à M. Balzac le
service que je vous demande pour lui.
Recevez, mon cher collègue, .la nouvelle assurance de
ma considération très distinguée et de mon sincère atta-
chement.
Le Conseiller d'État, directeur général,
Castelbajac.
A M. Franchet-Despercy , directeur de la police.
M. le vicomte de Castelbajac, qui était aussi membre
1. M. O. Delavau.
348 LA JEUNESSE DE BALZAC.
de la Chambre des députés, a ajouté de sa main sur
cette lettre ces quelques mots : Je vous recommande
instamment Mr Balzac, mon ami; je le connais person-
nellement ainsi que sa famille qui mérite toute confiance.
En marge de la lettre, M. Franchet-Desperey a écrit
Librairie. Qu est-ce que cest que cette demande?
Pièce n° 7 du dossier des Archives Nationales.
[57] RÉPONSE DU DIRECTEUR DE LA POLICE
A M. DE CASTELBAJAC
27 avril 1826.
A M. le Directeur gal des douanes.
M. le Vicomte, vous m'avez fait l'honneur de me recom-
mander le sr Balzac, qui sollicite un brevet d'imprimeur à
Paris, en remplacement du sr Laurens, démissionnaire.
Le témoignage honorable que vous rendez à ce jeune
homme et l'intérêt que vous paraissez lui porter ne me
laissent pas douter qu'il réunisse les garanties que le gouvnt
a le droit d'exiger d'un imprimeur. Mais la demande du
sr Balzac est très récente et quelques formalités indispen-
sables doivent précéder la délivrance des brevets. Je ne
puis que vous promettre de hâter l'instruction de cette
affaire, et j'espère vous en annoncer bientôt l'heureuse
expédition.
Cette réponse est, dans le dossier, à l'état de
brouillon; elle porte beaucoup de ratures et de correc-
tions.
Pièce n° 6 du dossier des Archives Nationales.
L'IMPRIMERIE. 549
[58] LETTRE Di' PRÉFET DE POLICE au MINISTRE
DE L'INTÉRIEUR
Préfecture de police Paris, 1<^ 8 m.'ii [826.
\" division
3— bureau.
Monseigneur,
Votre Excellence, par sa Lettre du 1"> avril dernier, m'a
invité à recueillir des renseignements sur la moralité et
les dispositions politiques du sieur Balzac qui demande à
remplacer un imprimeur de la Capitale
J'ai l'honneur de lui transmettre le résultat des infor-
mations que j'ai fait prendre
Le sr Balzac, âgé de vingt-sept ans, est né à Paris. Ce
jeune homme qui a fait ses études et son droit, qui même
est homme de lettres, appartient, suivant ce qu'on rap-
porte, à une famille estimable et très aisée de la Capitale.
On a reconnu qu'il n'a jamais fait aucun apprentissage,
ni travaillé matériellement dans l'imprimerie; mais on
convient en même tems qu'il connaît bien le mécanisme
de cet art. Du reste, on annonce que la conduite du sr
Balzac est régulière et qu'il professe de bons principes.
On ajoute qu'il est particulièrement recommandé par
M. De Berny, conseiller à la Cour Royale, qui lui sert de
guide et de conseil et qui garantit l'honnêteté du sr Balzac.
J'ai l'honneur d'être, avec respect, Monseigneur, votre
très humble et très obéissant serviteur
Le Conseiller d'État, préfet de police,
0. Delavau.
A S. Ex. le Ministre secrétaire d'État au Dép'" de l'Intérieur.
Pièce n° 5 du dossier des Archives Nationales.
[59J LETTRE DE M. DE BERNY AU DIRECTEUR DE LA POLICE
Monsieur le Directeur général,
Je connais trop combien les momens d'un homme
public sont précieux pour user légèrement de l'aimable
550 LA JEUNESSE DE BALZAC.
permission que vous m'avez donnée de me présenter chez
vous à tout (sic) heure, surtout lorsqu'il s'agit d'une
affaire qui me devient personnelle par l'intérêt que je
porte à celui qu'elle concerne. Malgré ma réserve, si je
n'étais retenu chez moi par une indisposition, heureuse-
ment peu grave, je ne me serais pas refusé au plaisir
de passer quelques minutes avec vous pour avoir l'hon-
neur de rappeler à vos souvenirs mon jeune protégé.
Honoré Balzac. Ce n'est pas à lui que son tems d'épreuve
paraît long; je l'apprends à se soumettre à tout et à s'y
soumettre avec reconnaissance. S'il y a un impatient dans
l'affaire et veuillez me le pardonner, Monsieur le Directeur
général, c'est un vieux conseiller qui désire vivement le
bonheur de ceux auxquels il s'intéresse et qui ne cesse
de le faire que lorsqu'il lui est démontré qu'ils n'en sont
pas dignes.
Hâtez donc, s'il vous est possible, Monsieur le Directeur
général, le moment où je pourrai joindre, pour vous, le
sentiment de reconnaissance à ceux de haute considéra-
avec lesquels j'ai l'honneur d'être, Monsieur le Directeur
général,
Votre très humble et très obéissant serviteur
De Berny.
Paris, 27 mai 1826.
Cette lettre est écrite de la main de Balzac, M. de
Berny n'a fait que la signer.
Pièce n° 4 du dossier des Archives Nationales.
[60] RAPPORT DU DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA POLICE
Ministère de l'Intérieur.
Direction de la police.
Librairie.
Paris, le 182
RAPPORT
Le s'* Laurens, imprimeur du Constitutionnel, s'est démis
en faveur du sr Balzac (Honoré) recommandé comme
digne de toute confiance par M. le vicomte de Castelba-
L'IMPRIMERIE. 351
ja<\ directeur général «les Douanes, <-t par M. de Berny,
conseiller à la Cour Royale,
Le s1 Balzac b produit uncertifical «le capacité, signé de
."> imprimeurs à Paris.
Il annonce que l'impression <lu Constitutionnel ne sera
point faite par lui. Elle a passé, en effet, «liez le s' Cliai-
gnieau jeune, qui en a fait la déclaration.
D'après les renseignemcns recueillis auprès de M. le
Préfet de police, il paraît que le s' Balzac, natif de Paris
et Agé de "21 ans, a fait sesétudes etsondroit, qu'il appar-
tient à une famille estimable et aisée, que sa conduite est
régulière et qu'il professe de bons principes.
Il n'a fait aucun apprentissage dans l'imprimerie, mais
on convient qu'il en connaît bien le méchanisme (sic).
D'après ces diverses considérations, je crois devoir pré-
senter à la signature le brevet du s1 Balzac, en remplace-
ment du s' Laurens.
Pièce n° 3 du dossier des Archives Nationales.
Ce rapport n'est ni signé ni daté; mais Balzac obtint
son brevet d'imprimeur le 1er juin, ainsi que le constatent
deux mentions, l'une ainsi libellée et écrite sur le rap-
port : Breveté le 1er juin 1826, n° 2854, l'autre insérée
comme suit dans la Bibliographie de la France du
samedi 12 août 1826 :
— M. Balzac (Honoré) a obtenu, le 1er juin 1826, un bre-
vet d'imprimeur à la résidence de Paris, en remplacement
de M. Laurens aîné, démissionnaire.
Quatre jours après l'obtention de son brevet, Balzac
déposait au Ministère de l'Intérieur la déclaration sui-
vante :
[61] DÉCLARATION DE CHANGEMENT DE DOMICILE
Imprimerie II. Balzac.
Je soussigné, imprimeur à Paris, déclare transporter
mon domicile et mon établissement rue des Marais, n° 17,
faubourg Saint-Germain.
Paris, 4 juin 1826. H. Balzac
Pièce n° 2 du dossier des Archives Nationales.
LA JEUNESSE DE BALZAC.
La quatorzième et dernière pièce du dossier est le
brevet d'imprimeur de Jean-Joseph Laurens, à lui
accordé le 15 octobre 1816, et enregistré au greffe du
tribunal de lrti instance de la Seine le 31 décembre 1816.
Il est signé par le comte de Gazes, ministre secrétaire
d'État au département de la police, par M. Bertin-de-
Vaux, secrétaire général du ministre, et par M. Ville-
main, directeur de la division de l'Imprimerie et de la
Librairie.
[02] FORMATION DE LA SOCIÉTÉ H. BALZAC
ET A. BARBIER
-Ier juillet 1826.
D'un acte de société passé sous signature privée, à
Paris, le premier juillet mil huit cent vingt-six, enregistré
le quatre du même mois par Labouret, qui a reçu huit
francs quatre-vingts centimes décimes compris,
Il appert :
Que M' Honoré Balzac, imprimeur, demeurant à Paris,
rue des Marais-Saint-Germain, numéro dix-sept, d'une
part,
Et M1' André Barbier, prote d'imprimerie, demeurant à
Paris, rue de Vaugirard, numéro trente-huit, d'autre part,
Ont formé, pour l'exploitation d'un brevet d'imprimerie,
une société dont la durée sera de quinze années à partir
du premier juillet mil huit cent vingt-six.
Les effets de commerce, traites, obligations de toute
espèce ne font obligation pour la Société qu'en tant qu'ils
seront souscrits de la signature individuelle de chacun
des associés.
Le fonds social est de soixante mille francs.
La raison de commerce est « Balzac et Barbier ».
Signé : H. Balzac
Signé : A. Barbier.
Le dit acte enregistré, à Paris, le sept juillet mil huit
cent vingt-six, folio cent quatre-vingt-dix-sept recto, case
L'IMPRIMERIE. 553
quatrième, par le receveur qui ;i perçu un franc dix cen-
times décimes compris, el déposé au greffe <l<- ce tribunal
suivant procès-verbal en date, du six juillet mil huit cent
vingt six enregistré.
[Archives du Greffe du tribunal de commerce de la Seine.)
Voir à l* Appendice VIII, pièce n° 81, l'acte de vente de l'im-
primerie à André Barbier.
[63] LETTRE DE BALZAC A M. GILLÉ
Paris, ce 8 août 1826.
Imprimerie
de II. Balzac et A. Barbier,
rue des Marais S. G. n. 17.
Monsieur,
Nous adhérons pleinement aux propositions contenues
dans votre lettre, quant à la transmission de votre brevet
de libraire, sous la modification suivante :
La rente viagère que nous vous servirons sera de cent
quatre-vingts francs par année: elle sera payée par tri-
mestre et constituée par un acte sous seing privé qui vous
offrira, outre la responsabilité du titulaire, la nôtre soli-
dairement.
Nous sommes dans l'impossibilité d'ajouter aux sacri-
fices que nous ferions par ce traité.
Telle est, Monsieur, la base de ce traité pour lequel
nous réclamons de votre part une célérité qui devient
indispensable par le tems nécessaire à son accomplisse-
ment; un plus long retard compromettrait nos opéra-
tions et une fois que nous aurions été forcés de nous
servir du nom d'un libraire, tout serait ajourné indéfi-
niment.
Nous avons l'honneur de vous saluer avec la plus haute
considération
H. Balzac.
M. Gillé, typographe.
Suscriplion de la lettre : Monsieur Gillé, rue Saint-
Jean-de-Beauvais, n° 16, ou aux Feuillantines, rue S.-
Jacques, entre le n° 261 et 265.
[Collection Lovenioul, ms. A 259, 1re partie, fol. 63.)
23
-;>; LA JEUNESSE DE BALZAC.
[64] LETTRE DU PÈRE DE RALZAC
A MADAME DELANNOY
23 août 1826.
Versailles, 23 août 4826.
Ralzac aprend {sic) avec satisfaction que Madame de
Lanoy (sic) vient au secours de son fils Honoré ; il lui en
fait mille remercîmens avec d'autant plus de plaisir que
des changemens coûteux et encore plus indispensables ne
lui permettent pas de faire ce qui convient et que d'ail-
leurs les secours auront plus d'effet venant de la simple
bonté d'un tiers, mais Ralzac répond à Madame de Lanoy
de tout ce qu'elle pourra faire pour son fils, à quelle
somme que cela puisse se monter, et de la rembourser si
l'emprunteur ne satisfait pas à ses engagemens. Elle
comprendra mieux que je pourrai l'écrire que ceci doit
rester dans le plus absolu secret.
Ralzac espère être assez heureux pour trouver des occa
sions de (manifester?] sa sensibilité à Madame de Lanoy.
elles ne sauraient trop se multiplier. Il la prie d'agréer
l'hommage de son profond respect. Ralzac.
Suscription de la lettre : Madame,
Madame de Lanoy, rue Rasse-du-Rempart, n* 42, à Paris
banlieue.
[65] LETTRE DE H. RALZAC A M. DE LA PILAYE
27 août 1827.
M. Ralzac a l'honneur de saluer Monsieur de la Pilaye
et il le prévient afin d'éviter toute surprise,
1° Que des deux effets qu'il a à payer du mois, ven-
dredi prochain, Vun est de 1437 fr. 20 cent, et qu'il est cause
payable chez M. Boulanger.
2° Celui de 1000 fr. est au domicile de M. de La Pilaye.
rue de Madame.
Il a l'honneur de lui présenter ses affectueuses civilités.
H. R.
Suscription de la lettre : Monsieur de la Pilaye. impasse
de Madame, n°4, f. s. G.
[Collection de M. Georges Coin.)
L'IMPRIMERIE. 555
66 DISSOLUTION DE LA SOCIÉTÉ H. BALZAC
ET A. BARBIER
:l février 1828.
D'un acte sous signatures privées en <l;ii<- du trois
février présent mois, enregistré !<• six «lu même mois.
folio cinquante recto, case première, par Laboure)
qui a reçu cinq francs cinquante centimes décimes
compris,
Il apperl :
Que la Société formée entre Messieurs H. Balzac et
A. Barbier, demeurant tous deux, rue des Marais-Saint-
Germain, numéro dix-sept, pour l'exploitation d'un brevet
d'imprimeur, par acte en date du premier juillet mil huit
cent vingt-six, est dissoute.
M. Balzac est nommé liquidateur et reste seul posses-
seur de l'établissement d'imprimerie.
Pans, ce quatre février mil huit cent vingt-huit.
Signé : H. Balzac.
Signé : Barbier.
Le dit acte enregistré, à Paris, le six février mil huit
cent vingt-huit, folio cinquante, case deuxième, par le
receveur qui a perçu un franc dix centimes décimes com-
pris, et déposé au Greffe du tribunal de Commerce de la
Seine, suivant procès-verbal en date du quatorze février
mil huit cent vingt-huit, enregistré.
(Archives du Greffe du tribunal de commerce de la Seine.
APPENDICE VII
LA FONDERIE BALZAC ET CIEl
[07] FORMATION DE LA SOCIÉTÉ LAURENT,
BALZAC ET BARBIER
15 juillet 1827.
D'un acte de société passé sous signature privée, à
Paris, le quinze juillet mil huit cent vingt-sept, enregistré
le dix-neuf du même mois, folio soixante-cinq recto, case
sixième, par De Pilez qui a reçu cinq francs cinquante
centimes, subvention comprise,
Il appert :
Que Messieurs Honoré Balzac et André Barbier, impri-
meurs, demeurant à Paris, rue des Marais-Saint-Germain,
numéro dix-sept, et Monsieur Jean-François Laurent,
fondeur, demeurant à Paris, rue des Fossés-Saint-Germain,
numéro onze, ont formé, pour l'exploitation de la fonderie
des caractères d'imprimerie, une Société dont la durée
1. Les pièces indiquées, dans notre première édition, comme
conservées dans les archives de la fonderie Deberny font
aujourd'hui — sauf la pièce 110 — partie de la Collection
Lovenjoul, à laquelle M. Charles Tuleu, successeur de
M. Alexandre de Berny et directeur actuel de la fonderie, les a
très gracieusement offertes.
LA FONDERIE BALZAC ET < ". ""'7
Bera <ic douze années à partir du premier août mil huit
cenl \ ingt-sept.
La raison sociale esl « Laurent, Balzac e( Barbier ».
M. Balzac aura seul la signature sociale.
Neuf mille francs ont été fournis par un associé com-
manditaire indépendamment de L'apport des gérants.
La Société sera gérée par Messieurs Laurent, Balzac ''I
Barbier.
Pour extrait. Paris, ce trente juillet mil huit cent vingt
sept.
Signé : Balzac.
Signé : Laurent.
Signé : Barbier.
Le dit acte enregistré, à Paris, le trente juillet mil huit
cent vingt-sept, folio cent six recto, case cinquième, par
le receveur qui a perçu un franc dix centimes décimes
compris et déposé au Greffe de ce tribunal suivant pro-
cès-verbal en date du trente juillet mil huit cent vingt-
sept enregistré.
(Archives du Greffe du tribunal de commerce de la Seine.)
[68] LETTRE DE J.-F. LAURENT A BALZAC
ET BARBIER
Fonderie Paris, le 16 juillet 1827.
en caractères, gravure
et politypage de J.-F. Laurent,
rue du Four,
faubourg Saint-Germain, n. 11.
Messieurs,
Je vous envoie la facture des objets qui n'ont pu être
compris dans les feuilles qui ont servi à évaluer mon
apport social, vous la comparerez à ces feuilles, en
faisant l'inventaire régulier; là, vous reconnaîtrez
encore un nouvel abandon de ma part, d'objets qui
seraient peut-être évalués deux mille francs, s'il 1 al-
laient (sic) les acquérir; par là vous pouvez juger de
358 LA JEUNESSE DE BALZAC.
ma confiance dans votre manière de traiter les affaires
futures, car les prérogatives que vous conservez dans
l'acte à signer, sont de nature à effrayer tout autre que
moi; j'espère que vous réaliserez par la suite la haute
opinion que j'ai conçu de vous.
J'ai l'honneur d'être, Messieurs, votre très affec-
tionné.
J.-F. Laurent.
Note des objets qui n'ont pas été compris dans les 18 mille
francs :
158 matrices justifiées, gaillarde rom. et ital. à. 2 fr. 316 fr.
89 — — cicero romain (en acier). 2,50 222,50
55 — — — italique — .2,50 137,50
32 — — — (cuivre). 2 » 64 »
35 — — lettres grasse 3 p. de Pa-
risienne, qui iront pas servi 2,50 90 »
42 matrices justifiées, lettres ornées 3 p. de
Philosophie, qui n'ont pas servi 3 » 126 »
11 matrices justifiées, vignettes différents corps. 5 » 55 »
1 — — — très grandes, s'em-
ployant de quatre manières 10 » 10 »
1 matrice justifiée, tremblé nouveau par ligne. 3 » 3 •>
Gravures sur cuivre :
Petite bordure gothique, avec son coin 18 »
Nœud, avec son coin 15 »
Bordure du bouclier de François Ier 40 »
Nid d'amour dans des roses 40 »
Grand ceps de vigne en forme d'arbre pour
passe-partout 20 »
Un bœuf 7 »
Un bouclier 5 »
Un Christ 15 .
Total 1184 -
Plus pour environ 400 fr. en divers objets, dont je fournirai
note détaillée en temps utile, mes occupations présentes ne
me permettant pas de la donner en ce moment.
Suscription de la lettre : Messieurs, Messieurs Balzac
et Barbier, Paris.
(Collection Lovenjoul, ras. A 260. fol. 11.)
LA FONDERIE BALZAC El O.
69 VENTE DE LA FONDERIE GILLÉ FILS
IS septembre f897.
Vente aux enchères, après faillite el décès de M. Gillé
(ils, imprimeur-fondeur, rue Garancière, n. '», près Saint
Sulpice, à Paris, le mardi IN septembre i<s-;7 el jours sui
vans, 1 1 heures du malin.
Cette vente consiste dans les objets ci après détaillés :
Matrices de caractères romains et italiques depuis la
nompareille jnsques et y compris les grosses de fonte; la
vente s'en fera par lots. — Matrices de vignettes depuis la
parisienne jusqu'aux deux points de gros canon. — Col
lection de lettres ombrées et ornées. — Caractères d'écri-
tures anglaise, ronde, coulée et bâtarde. — Divers signes
célestes, de géométrie, algèbre, médecine, maçonne-
rie, etc. — Divers plain-chants. -- Lettre de deux points
sur divers corps. — Caractères de l'ancienne fonderie de
Gillé père, depuis la nompareille jusqu'au double canon.
— Collection de poinçons gravés sur bois. — Collection
de gravures politypées. — Moules, divers corps. — Un
coupoir avec justifîeurs, rabats, etc. — Collection de
composteurs en bois. — Deux armoires typothèques gar-
nies de leurs tiroirs. — Une grande table d'assemblage. —
Livres d'épreuve. — Expressément au comptant.
S'adresser, pour voir les objets, à M. Laurent, syndic
de la faillite, rue des Marais Sl-Germain, n. 17.
Nota : On vendra à l'amiable, s'il est fait des offres
satisfaisantes avant le jour indiqué.
Feuilleton de la Bibliographie de la France, n° 29, samedi 8 sep-
tembre 1827.
[70] NOTE DE H. BALZAC A M. BEUCHOT
directeur de la Bibliographie de la France,
rue de l'Abbaye, à Paris.
Imprimerie Paris, ce 24 7^ 1827.
de H. Balzac et A. Barbier,
rue des Marais S. G. n. 17.
M. Balzac a l'honneur de saluer Monsieur Beuchot et
de le prier d'insérer, dans le prochain n° du Journal de
la Librairie, les deux avis qu'il lui transmet.
^
560 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Le n° 1 est d'autant plus utile que le journal a, de
bienveillance, annoncé le changement de domicile de
M. Laurent, sans annoncer que la fonderie appartenait
à MM. Balzac et Barbier.
Le second avis est d'une grande utilité pour le com-
merce.
Si, malgré l'abonnement de leur nouvelle fonderie,
il y avait à payer pour cette insertion, M. Balzac s'em-
presserait de satisfaire au payement.
M. Balzac prie Monsieur Beuchot d'agréer ses compli-
mens et l'assurance de sa considération très distinguée.
H. B.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, lre partie, fol. 152,er.)
Voici le texte des deux avis rédigés par Balzac et
insérés dans la Bibliographie de la France du samedi
29 septembre 1827, feuilleton n° 21 :
— MM. Balzac et Barbier ont contracté le 1er août der-
nier une société de douze années avec M. J. F. Laurent,
fondeur en caractères, pour la fonderie des caractères
d'imprimerie. Leur établissement est maintenant situé
rue des Marais-Saint-Germain, n. 17, à l'imprimerie de
M. H. Balzac.
— La maison de fonderie de MM. Laurent, Balzac et
Barbier a acquis, conjointement avec celle de M. Dumont,
propriétaire de la fonderie typographique royale de
Bruxelles, le fonds de feu Joseph Gillé, vendu par adjudi-
cation publique les 18 et 19 septembre courant. Ces deux
maisons se sont réunies pour offrir les produits de ce
fonds, à Bruxelles, rue des Sablons, section première,
n. 1042; à Paris, rue des Marais-Saint-Germain, n. 17.
Les autres produits de la maison Laurent, Balzac et
Barbier se trouvent également à la fonderie royale de
Bruxelles, et ceux de cette dernière maison à la fonderie
Laurent, Balzac et Barbier.
LA FONDERIE BALZAC ET O. 561
71 CIRCULAIRE I>i: LA FONDERIE LAURENT,
BALZAC ET BARBIER
Fonderie Paria, le 6 décembre \>^~.
«le
.a un nt, Baisse el Bsrbier,
Rue des Marais S. -G., n. 17.
Gravure sur acier, cuivre et bois, —
Polytypie.
M
Nous avons l'honneur de vous annoncer que nous
avons formé, le Ier août dernier, une association de
douze années pour l'exploitation de la Fonderie des
caractères d'imprimerie, la gravure sur acier, sur cuivre
et sur bois, la polytypie, &c.
Incessamment, nous aurons l'avantage de vous
adresser les cahiers d'épreuves de nos caractères et de
nos sujets polytypés, vignettes, fleurons, &c, qui son!
en ce moment sous presse.
Nous espérons, M[onsieur], que vous voudrez bien
continuer de nous honorer de votre confiance et nous
envoyer vos ordres; M. Laurent étant entièrement
chargé de la direction des ateliers, nous sommes
à même, par les connaissances qu'il possède en tout ce
qui concerne la fonderie, de satisfaire à toute espèce
de demande.
Nous avons récemment acquis dans une adjudication
publique tout le matériel de l'ancienne Fonderie de feu
Gillé fils, imprimeur et fondeur, et nous pouvons faci-
lement fournir les assortimens et les caractères de cette
fonderie dont les types, bien qu'ils soient différens des
nôtres, seront conservés dans notre maison.
Monsieur Balzac ayant seul la signature sociale,
veuillez prendre note de celle apposée ci-dessous, pour
y ajouter foi au besoin.
362 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Dans l'attente de vos ordres, nous avons l'honneur
d'être, M[onsieur], vos dévoués serviteurs
Laurent, fondeur. Balzac, A. Barbier, imprimeurs.
ci-devant rue du Four S. G., n. 11. rue des Marais S. G., n. 17.
Signature sociale
Laurent, Balzac et Barbier
MM. Balzac et Barbier saisissent cette occasion pour
vous prévenir qu'ils ont acheté de M. Pierre Durouchail
-^ la communication de ses procédés de Fontéréotypie1.
La Fontéréotypie est l'art d'obtenir les résultats de
la Stéréotypie, sans avoir besoin de la chaudière à
plonger les matrices ni de tourner, bizoter et corriger
les pages.
M. Laurent ayant consenti à diriger les Ateliers de
Fontéréotypie, a perfectionné les procédés de M. Du-
rouchail de manière à mettre MM. Balzac et Barbier à
même de fournir, dans le plus court délai possible, tel
nombre de feuilles stéréotypées que l'on pourrait dé-
sirer.
(Collection Lovenjoul, ras. A 260, fol. 26.)
La circulaire imprimée porte : «< tout le matériel de l'ancienne
Fonderie... » Sur l'exemplaire que nous avons eu entre les
mains ces mots tout le ont été rayés à la plume et remplacés
par les suivants : une partie choisie du...
1. Le billet suivant nous donne le prix d'achat par Balzac et
Barbier de l'indication de ce procédé :
Au quinze mai prochaine année, nous paierons à Mon-
sieur Durouchail ou ordre la somme de cinq cents francs,
valeur reçue en l'indication de son procédé de fontéréoty-
page (sic).
Paris, ce 16 novembre 1827.
H. Balzac, A. Bakbier,
imprimeurs, rue des Marais S. G., n° 17.
I \ FONDERIE BALZAC ET tX 303
73 DISSOLUTION DE LA SOCIÉTÉ LAI RENT,
BALZAC ET BARBIER
;{ frrrirr 1898,
D'un acte, sons signatures privées en date du trois fé-
vrier présent mois, enregistré le six <lu même mois, folio
cinquante ivrlo. rase troisième, pur Labonrey (sic) qui a
reçu cinq francs cinquante centimes, décimes compris,
Il appert :
Que la Société formée entre Messieurs Jean-François
Laurent, H. Balzac et André Barbier, demeurant tous trois
rue des Marais-Saint-Germain, numéro dix-sept, pour
l'exploitation de la fonderie des caractères d'imprimerie.
est dissoute.
Messieurs Laurent et Balzac sont nommés liquidateurs
et restent propriétaires de l'établissement de fonderie.
Paris, ce quatre février mil huit cent vingt-huit.
Signé : Laurent. « Signé : Balzac.
Signé : Barbier.
Le dit acte enregistré, à Paris, le six février mil huit
cent vingt-huit, folio cinquante recto, case quatrième,
reçu un franc dix centimes décimes compris, et déposé au
Greffe de ce tribunal, suivant procès-verbal en date du
quinze février mil huit cent vingt-huit enregistré.
(Archives du Greffe du tribunal de commerce de la Seine.)
1 73] ACTE DE SOCIÉTÉ ENTBE LAURENT
ET BALZAC
3 février 1828.
Entre les soussignés Jean-François Laurent, fondeur en
caractères, demeurant à Paris, rue des Marais S1 G", n.17,
d'une part, et Honoré Balzac, imprimeur en caractères,
môme demeure, d'autre part, et encore Madame Louise
Antoinette Laure Hinner, stipulant au nom et comme
fondée de procuration de M. Etienne, Charles, Gabriel de
364 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Berny, son mari, conseiller à la Cour Royale de Paris, y
demeurant, rue d'Enfer n. 55; la dite procuration passée
devant Me Dubois, notaire à Paris, le six février mil huit
cent vingt-sept; aussi d'autre part, il a été dit ce qui suit :
Les soussignés désirant continuer l'association formée
entre eux par acte sous signatures privées en date du
quinze juillet dernier, enregistré le 19 et qui n'a été dis-
soute que par suite de la retraite de M. A. Barbier,
associé de M. Balzac, pour l'exploitation de la fonderie
des caractères d'imprimerie et de tout ce qui dépend de
cette branche de commerce, comme la polytypie, la gra-
vure sur bois, sur cuivre, sur pierre, gravure de carac-
tères, &c. ils ont reconstitué leur société sur les mêmes
bases que celles consenties dans l'acte du quinze juillet
sus-mentionné et ainsi qu'il suit :
Article premier
Il y a société entre les sieurs Jean François Laurent et
Honoré Balzac et Madame de Berny pour l'exploitation
de la fonderie des caractères d'imprimerie et de tout ce
qui dépend de cette branche de commerce. La société
sera en nom collectif à l'égard de MM. Laurent et Balzac
et en commandite seulement à l'égard de Made de Berny.
Article 2
La durée de la société sera de douze années qui auront
commencé à partir du premier août dernier.
Article 5
La mise de fonds social de M. Laurent se compose de
tous les ustensiles, matrices, poinçons, moules, outils et
objets mobiliers généralement quelconques qui compo-
saient la fonderie exploitée par lui, rue du Four S1 G",
n. 11, lesquels objets mobiliers ont été énumérés dans un
inventaire qui a été fait quadruple par l'ancienne société;
cet inventaire continuera à être annexé au présent acte
de société pour servir et valoir ce que de raison; le tout
a été estimé contradictoirement entre les soussignés la
somme de dix-huit mille francs.
M. Balzac ayant, sur l'apport de sa mise de fonds social
et celle de Madame de Bernv, toutes deux ensemble.
LA hONDERIE BALZAC ET C«. 365
égales à celle de M. Laurent el stipulées dans l'acte de
constitution de la société dissoute, versé la somme de
quinze mille quatre cent quatre-vingt francs •><• centimes
el leur mise sociale restant la même, il ne se trouve plus
obligé que de verser celle de deux mille cinq cent dix*
oeuf francs 50 centimes, d'ici au premier août prochain
au fur et à mesure des besoins de la société, pour par
faire la somme de neuf mille francs qui constituaient son
apport.
Article 4
Chacun des associés demeure chargé de ses dettes per-
sonnelles. Si la société jugeait convenable de payer la
dette personnelle de l'un des associés, il perdrait pendant
tout le teins qui s'écoulerait entre l'acquittement de la
dette et le rétablissement de la somme payée, à la caisse,
une portion dans la part de ses bénéfices, au prorata de
la somme payée; cette réduction de sa part dans les béné-
fices n'aurait lieu qu'autant qu'il serait plus de quatre
vingt-dix jours à rétablir la somme payée pour lui.
Article 5
Le siège de la société continuera à être fixé rue des
Marais S1 Gn,n. 17, dans l'établissement de Monsieur Balzac.
Article 6
En leur qualité d'associés en nom collectif, MM. Lau-
rent et Balzac auront des droits égaux à la gestion et à
l'administration de l'établissement en tout ce qui concer-
nera les détails tels que marchés, achats, fabrication,
correspondance, comptabilité, etc. Mais cependant, M. Lau-
rent aura particulièrement la direction de la fabrique et
des ateliers, achats en matière, ventes, etc., et, afin de
faciliter la surveillance des ateliers, la société continuera
à loger M. Laurent dans l'établissement.
M. Balzac tiendra la caisse, les écritures, la comptabilité
et sera chargé de tous les mouvemens de fonds, négo-
ciations, etc.
Les livres continueront d'être tenus en parties doubles.
M. Laurent promet par ces présentes de s'occuper de la
direction des ateliers de la dite fonderie, exclusivement à
toute autre entreprise commerciale du même genre ou de
366 LA JEUNESSE DL BALZAC.
quelque nature que ce soit; et les effets de l'infraction à
la présente obligation seront réglés ci-après, article 18.
Néanmoins, M. Laurent pourra autoriser Made Laurent,
son épouse, ou ses enfans à entreprendre le commerce,
pourvu qu'ils soient séparés de biens avec lui, de manière
à ce qu'ils ne puissent engager la présente société et que
le commerce par eux entrepris ne soit pas du ressort de
la fonderie et de tout ce qui la concerne; ne seront pas
considérés comme une dérogation au présent article, les
services que M. Laurent pourra rendre soit à ses amis, à
l'étranger ou en province, lorsqu'ils seront purement
gratuits et non préjudiciables à la présente société.
Article 7
Les associés partageront, aux époques qui seront déter-
minées ci-après, les bénéfices par moitié, savoir : M. Lau-
rent, une moitié et M. Balzac et Madame de Berny, l'autre
moitié par portions égales ; ils subiront les charges et les
pertes dans les mêmes proportions.
Article 8
Les charges de la société se composeront : 1° du loyer
entier du local qui sera occupé par la fonderie; 2° des
impositions et de la patente de la fonderie ; 3° des paie-
mens à faire aux ouvriers; 4° de l'acquittement de som-
mes dues pour acquisitions faites par la Société et pour
les besoins de la fabrication.
Article 9
Indépendamment des charges ci-dessus stipulées, les
associés gérans auront le droit de prélever la somme de
quatre mille huit cents francs par année pour leurs
besoins personnels, à savoir : deux mille quatre cents
francs pour M. Laurent et deux mille quatre cents francs
pour M. Balzac ; lequel prélèvement sera considéré comme
une charge sociale.
M. Laurent ne supportera personnellement qu'une
charge nouvelle de quatre cents francs sur le prix du
logement qui lui est donné par la société.
Article 10
Tous les ans, au mois de septembre, il sera fait un
inventaire régulier de l'actif et du passif de la société, à
LA FONDERIE B tLZAC ET C». 567
l'effet de constater les bénéfices ou les pertes. <>t mven
taire contiendra I»' pri\ exact de chaque objet nouvelle
menl acquis et les objets anciens seront portés au prix
fixé dans l'apporl de Mons. Laurent. Les objets nouvelle
ment acquis subiront tous les quatre ;ms une dépréciation
« i ■ * quinze pour cent. Les objets qui périssenl par l'usage
disparaîtront <l»j l'inventaire. L«'s objets anciens subiront
aussi, tous les quatre ans, une dépréciation de cinq
pour •■«'ui .
Les bénéfices à partager se composeront de toutes i<>n
valeurs pécuniaires liquides qui se trouveront en caisse
el dont un quarl au moins devra rester pour le service de
l'année courante.
Article 1 1
La raison de commerce sera : Laurent et Balzac.
Article 12
M. Balzac, étant spécialement chargé de la caisse et du
maniement des fonds, pour que les effets de commerce,
obligations, traites, brefs engagemens, endossemens que
les besoins de la société nécessiteront soient obligatoires
pour elle, ils ne devront être souscrits que par M. Balzac
qui aura seul la signature sociale; et la société ne sera
engagée qu'autant que les signatures auront été données
pour cause de valeurs à elle fournies et résulteront des
opérations inscrites sur les registres.
Article 13
La société sera dissoute : 1° par l'expiration du terme
de douze années; 2° par l'infraction dont il a été parlé à
l'article 6 des présentes. La société pourra être dissoute :
1° par la mort de M. Laurent, mais sous les conditions qui
seront stipulées dans les articles 15 et 16; 2° par le décès
de M. Balzac, sous les conditions stipulées dans l'article 17.
Article ! i
Lors de la dissolution de la société par l'expiration des
douze années, les associés s'entendront, à cette époque,
sur le meilleur mode de liquidation à intervenir; mais,
dans tous les cas, le matériel composant le fonds social
ne pourra jamais être partagé en nature que d'un consen-
tement unanime.
368 LA JEUNESSE DE BALZAC.
X
Article K>
Arrivant le décès de M. Laurent, la dissolution de la
société n'aura lieu que sous l'empire des clauses et condi-
tions suivantes : ses héritiers auront la faculté de conti-
nuer l'association sur les bases du présent acte de société,
sous la condition du prélèvement dont il sera ci-après
parlé. Ils auront le délai d'un mois pour exercer cette
faculté. Le mois expiré, ils seront tenus d'opter entre la
continuation de la société et le remboursement qui va
être stipulé ci-dessous : ce délai d'un mois ne commencera à
courir qu'à partir de la présentation par les associés res-
tant d'un état de situation de l'actif et du passif de la
société, lequel sera basé sur le précédent inventaire.
M. Balzac aura un délai d'un mois pour présenter cet état
de situation. Si les héritiers de M. Laurent continuent
l'association, ils n'auront pas droit à la portion du prélè-
vement stipulé dans l'article 9 et revenant à M. Laurent
comme associé gérant; ce prélèvement sera affecté au
paiement de l'individu qui sera commis à son lieu et
place. Les héritiers de M. Laurent seront tenus de n'être
représentés que par une seule personne; et dans le cas où
il ne se trouverait pas d'héritiers du nom de Laurent, la
raison sociale serait Balzac et Cie. Les héritiers de M. Lau-
rent seront également tenus de rester associés par moitié
comme leur auteur et sous son nom, d'après les bases du
présent acte de société, pendant le laps de temps qui
s'écoulerait entre le décès de M. Laurent et leur option
pour le remboursement qui va être stipulé. La société ne
sera dissoute et la liquidation ne commencera qu'à dater
du jour où ils auront signifié à M. Balzac qu'ils n'enten-
dent pas continuer l'association. Si les héritiers renoncent
à la faculté qui leur est laissée de continuer la dite
société, ils ne pourront rien exiger autre chose que le
remboursement intégral du capital représentant leur por-
tion d'intérêt, lequel capital sera fixé d'après un inven-
taire qui sera fait dans la même forme et par les mêmes
moyens que ceux employés pour l'inventaire annuel,
prélèvement fait du fonds nécessaire à l'acquittement dos
dettes de la société et sauf rencaissement de tout ce qui
pourra lui être dû.
I A FONDERIE BALZAC Et <>. 309
La liquidation faite el le capital Axé, M. l^i*!^---!*- aura lu
faculté de jouir d'un délai de quatre années pour effectuer
le remboursement dudil capital m huit paiements égaux
qui se feront <lr six mois en six mois avec intérêts à six
pour cenl par an, <|ui commenceront à courir <ln jour on.
la liquidation terminée, le capital aura été fixé.
Article H>
Les clauses el conditions stipulées dans l'article précé-
dent, quant à la continuation de la société, ne concernent
que les enfans légitimes de M. Laurent. Sa veuve aura les
mêmes droits mais au cas seulement où elle ne convole-
rait pas en secondes noces. Les héritiers collatéraux,
créanciers ou ayant cause autres que la veuve et les
enfans légitimes de M. Laurent seront tenus d'accepter
le remboursement tel qu'il est stipulé dans l'article précé-
dent et d'après les mêmes bases. Dans ce cas, la société
seraitdissouteimmédiatementaprèsledécèsde M. Laurent.
Article 17
Arrivant le décès de M. Balzac, ses héritiers ou ayant
cause seront soumis aux conditions stipulées pour les
héritiers Laurent dans les articles 15 et 16, sous les modi-
fications suivantes : Pendant les deux mois qui peuvent
s'écouler entre le décès de M. Balzac et l'option laissée à
ses héritiers, la société sera gérée par M. Laurent, sous
sa seule responsabilité; il aura la signature sociale et ne
pourra en faire usage que pour les endossemens. Dans le
cas où les héritiers de M. Balzac jugeraient convenable
de vendre son imprimerie, M. Balzac réserve spécialement
à ses héritiers, ce qui est accepté par M. Laurent, le droit
de vendre également leur portion d'intérêt dans la pré-
sente société, et M. Laurent serait tenu d'accepter les suc-
cesseurs de M. Balzac comme associés gérans aux mêmes
conditions et sur les mêmes bases que celles stipulées
dans le présent acte de société, sauf les modifications
apportées à la signature sociale qui seront réglées à
l'amiable. De son côté, M. Laurent aura le droit d'arrêter
l'effet de cette dernière clause en payant aux héritiers de
M. Balzac une plus-value qui ne pourra, dans aucun cas.
excéder le quart du capital social qui leur reviendra.
24
370 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Article 18
La dissolution ayant lieu par l'infraction dont il a été
parlé dans l'article six, M. Laurent subirait la perte entière
de sa portion de capital.
Article 19
Dans le cas où, dans l'intérêt de la présente association,
les associés jugeraient convenable d'augmenter le fonds
social, chacun desdits associés, même le commanditaire,
serait tenu de contribuer, au prorata de sa mise sociale,
à ce versement qui sera simultané et fait en espèces.
Fait en triple expédition, à Paris, le trois février mil
huit cent vingt-huit.
Approuvé l'écriture ci-dessus et des autres parts :
L.-A.-L. HlNNER DE BERNY.
Approuvé l'écriture ci-dessus :
H. Balzac
Approuvé l'écriture ci-dessus :
Laurent.
Enregistré, à Paris, le neuf février 1828. f° 96 v°, c. .'».
6, 7 et 8. Reçu cinq francs 50 cent.
Cette expédition porte en outre que le dépôt légal des pièces
de la société a été fait le vendredi i5 février 1828 au greffe du
Tribunal de commerce.
L'insertion concernant la formation de la Société Laurent et
Balzac a été enregistrée le 6 février 1828, sous le n° 3840, au
livre de caisse du Journal général d affiches.
[Collection Lovenjoul, ms. A 260, fol. 57.)
|74] DÉPÔT LÉGAL DES PIÈCES DE LA SOCIÉTÉ
LAURENT ET BALZAC
15 février 1828.
Extrait des minutes du greffe du Tribunal de Commerce
de la Seine, séant à Paris.
Du vendredy quinze février mil huit cent vingt-huit.
Aujourd'hui est comparu au greffe de ce tribunal le
LA FONDERIE BALZAC ET C«. 371
sieur Jean-François Laurent, fondeur <vn caractères,
demeurant à Paris, rue des Marais, numéro dix sept
Lequel, en conformité des articles quarante deux, nus
raille trois et quarante-quatre, livre premier, titre troi
sième du Code <!<• commerce, requiert le dépôt, l'enregis
tremenl et l'affiche d'un acte de société fail à Paris, sous
seing privé, le trois février présent, enregistré l<- neuf du
<lil par le sieur Laboure! qui a reçu la soin m e de cinq lia nés
cinquante centimes.
Entre ledit compara ni. d'une part, et le sieur Honoré Bal
zac, demeuranl à Paris, rue des Marais, numéro dix-sept,
d'autre pari :
Desquels dépôt, enregistrement el affiche à In salle
d'audience à l'instant fait il a été, audit sieur Laurent,
comparant ce requérant, donné acte, pour servir el valoir
<e que de raison; sera ledit acte transcrit en fin de la pré
sente expédition et restera pour minute au greffe du dil
tribunal et a le dit sieur Laurent signé avec nous greffier
après lecture faite.
Signé : Laurent et Ruffin.
En marge de la minute est écrite la mention d'enregistre-
ment dont la teneur suit :
Enregistré, à Paris, le vingt-cinquième jour du mois de
lévrier mil huit cent vingt-huit, reçu la somme de
quatre francs cinquante-cinq centimes.
Signé : Gobkrt.
Au greffier, douze centimes.
Suit la teneur de l'acte déposé.
Extrait d'un acte, sous signatures privées, en date du
troisième jour du mois de février présent, enregistré le
neuvième jour du mois de février mil huit cent vingt-
huit, folio quatre-vingt-seize verso, cases cinquième^
sixième, septième et huitième, par le sieur Labouret qui
a reçu la somme de cinq francs cinquante centimes.
11 appert qu'il y a société entre Monsieur Jean-François
Laurent, fondeur en caractères, demeurant à Paris, rue
des Marais, numéro dix-sept, et Monsieur Honoré Balzac,
imprimeur, même demeure, pour l'exploitation de la fon-
derie des caractères d'imprimerie.
572 LA JEUNESSE DE BALZAC.
La durée de la société sera de douze années à partir du
premier août mil huit cent vingt-sept.
La raison sociale est Laurent et Balzac. Le fonds social
se compose de trente-six mille francs dont neuf mille francs
sont fournis par un associé commanditaire1.
Monsieur Honoré Balzac a seul la signature sociale et
la société ne sera engagée qu'autant que les effets de com-
merce, obligations, traites, engagemens, endossemens
souscrits par lui seul auront été contractés pour des
valeurs fournies ou à fournir à la société et résultant
d'opérations inscrites sur les livres de commerce.
Paris, ce six février mil huit cent vingt-huit.
Pour extrait, ainsi signé : Laurent et Balzac.
Au-dessous est écrite la mention d'enregistrement dont la
teneur suit :
Enregistré, à Paris, le neuvième jour du mois de
février mil huit cent vingt-huit, folio quatre-vingt-seize
verso, case neuf. Reçu un franc dix centimes, dixième
compris.
Signé : Labouret.
Délivré par moi, greffier soussigné :
Pour extrait conforme.
Ruffin.
Insertion a été faite clans le Constitutionnel du vendredi
15 février 1828, n° 46, à la dernière colonne de la quatrième
page.
(Collection Lovenjoul, ms. A '260, fol. 54.)
[75] DISSOLUTION DE LA SOCIÉTÉ LAURENT ET
BALZAC
16 avril 1828.
Entré les soussignés :
Jean-François Laurent, fondeur en caractères, demeu-
rant à Paris, rue des Marais S1 G", n° 17, d'une part, et
1. M™' de Bernv.
LA FONDERIE BALZAC ET C«. 573
Honoré Balzac, imprimeur, môme demeura, d'autre part,
il a été convenu ce qui suii :
Article l
La société formée entre eux i>;>r acte sous seing privé
du trois février dernier, enregistré le neuf du <lii mois
sous La raison Laurent et Balzac pour la fonderie des
caractères d'imprimerie, esl el demeure dissoute à
compter de ce j<m r.
Article 2
M. J.-F. Laurent est nommé Liquidateur de La dite
société.
Article .">
MM. Laurent et Balzac se quittent et déchargent réci-
proquement de toutes obligations l'un envers l'autre.
Fait double, à Paris, le seize avril mil huit cent vingt-
huit.
Approuvé récriture ci-dessus :
H. Balzac.
Approuvé l'écriture ci-dessus :
Laurent.
Cet acte a été enregistré à Paris, le 17 avril 1828, f° 175 v°,
c. 9, 5 fr. 50.
(Collection Lovenjoul, m s. A 260, fol. 71.)
Extrait des minutes du greffe du Tribunal de commerce
du département de la Seine, séant à Paris.
Du jeudy vingt-quatre avril mil huit cent vingt-huit.
Aujourd'hui est comparu au greffe de ce tribunal le
sieur Jean-François Laurent, fondeur en caractères,
demeurant à Paris, rue des Marais, faubourg Saint-Ger-
main, numéro dix-sept.
Lequel, conformément aux articles quarante-deux, qua-
rante-trois et quarante-quatre et quarante-six, livre pre-
mier, titre troisième du Code de commerce, requiert le
dépôt, l'enregistrement et l'affiche de l'extrait enregistré
d'un acte de dissolution de société fait, à Paris, sous seing
privé, le seize du courant, enregistré le dix-sept du dit
par le sieur Labouret qui a reçu la somme de cina francs
cinquante centimes.
374 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Entre le dit comparant, d'une part : et le sieur
L. Honoré Balzac, imprimeur, demeurant à Paris, rue
des Marais Saint-Germain, numéro dix-sept, d'autre part.
Desquels dépôt, enregistrement et affiche à la salle
d'audience à l'instant faite il a été audit sieur Laurent,
comparant ce requérant, donné acte pour servir et valoir
ce que de raison ; sera ledit acte transcrit en fin de la pré-
sente expédition et restera pour minute au greffe du dit
tribunal et a le dit sieur Laurent signé avec nous greffier
après lecture faite.
Signé : Laurent et Ruffin.
En marge de la minute est écrite la mention d'enregistrement
dont la teneur suit :
Enregistré, à Paris, le septième jour du mois de mai
mil huit cent vingt-huit, reçu la somme de quatre francs
cinquante-cinq centimes.
Signé : Jamin.
Au greffier, douze centimes.
Suit la teneur de l'acte déposé :
Extrait d'un acte, sous signatures privées, en date du
seize avril présent, enregistré le dix-sept présent mois,
folio cent soixante-quinze verso, case neuf, par le sieur
Labouret qui a reçu la somme de cinq francs cin-
quante centimes.
Il appert que la société formée entre les sieurs Jean-
François Laurent, fondeur en caractères, demeurant à
Paris, rue des Marais, faubourg Saint-Germain, numéro
dix-sept, et Honoré Balzac, aussi imprimeur, môme
demeure, pour l'exploitation de la fonderie des caractères
d'imprimerie, par acte sous signatures privées, en date
du trois février dernier, enregistré le dix-sept présent
mois, folio cent soixante-quinze, est dissoute à compter
dudit jour seize avril.
M. J. F. Laurent est nommé liquidateur.
Fait double, à Paris, le dix-septième jour du mois
d'avril mil huit cent vingt-huit.
Au-dessous est écrit ce qui suit :
Approuvé l'écriture ci-dessus : Signé : Laurent.
Approuvé l'écriture ci-dessus : Signé : Balzac.
LA FONDERIE BALZAC El Cf. 578
Au-dessous esl encore écrite la ntion d'enregislremenl
iioni la leneur suii :
Enregistré, à Paris, le vingl quatre avril mil huit cenl
vingt-huit, f<>li<> cent quatre-vingl six verso, case deux,
reçu mi franc <li\ centimes; dixième compris. Signé :
Labourbt.
Délivré par moi greffier soussigné
Pour exl rail conforme
Ruffin.
(Collection Loveujoul, ms. A 860, fol. 56.)
|76] FORMATION DE LA SOCIÉTÉ LAURENT
ET DE BERNY
16 avril 1828.
D'un acte en date du seize avril présent mois, enre-
gistré le dix-sept par Labourey {sic) qui a reçu seize francs
six centimes, fait sous signatures privées entre M. Jean-
Prançois Laurent, fondeur en caractères d'imprimerie,
rue des Marais-Saint-Germain, numéro dix-sept, et M. de
Berny (ils, Lucien-Charles-Alexandre, mineur, mais éman-
cipé d'Age suivant acte reçu par le juge de paix du don
zième arrondissement de Paris, le huit avril présent
mois, enregistré et dûment autorisé par son père à LelYet
de contracter la société dont il va être parlé;
La dite autorisation donnée suivant acte passé devant
le même juge de paix, le douze avril courant, enregistré.
Laquelle autorisation est déposée au Tribunal de com-
merce avec le présent extrait pour être affichés ensemble:
Le dit de Berny fils, demeurant chez son père, rue
d'Enfer-Saint-Michel, numéro cinquante-cinq.
Il appert :
Que les dits sieurs Laurent et de Berny ont formé une
société en nom collectif pour l'exploitation de la fonderie
de caractères d'imprimerie.
La durée de cette société est de douze années consécu-
tives è partir dudil jour seize avril.
576 LA JEUNESSE DE BALZAC
Le siège de l'établissement est rue des Marais-Saint-
Germain, numéro dix-sept.
La raison sociale est « Laurent et de Berny ».
Mr de Berny a, seul, la signature sociale, mais cepen-
dant, par convention expresse entre les dits associés.
M1 de Berny ne devra faire usage de la signature que dans
cinq années à partir du dit jour seize avril mil huit cent
vingt-huit, c'est-à-dire le seize avril mil huit cent trente-
trois.
Par acte passé le dix-huit courant, par-devant maître
Mignotte et son collègue, notaires royaux à Paris, Mr de
Berny a délégué à Mr A. -F. Huet, employé dans leur éta-
blissement et demeurant à Paris, au faubourg Saint-Denis,
numéro cent cinq, l'autorisation de signer le nom de la
raison sociale « Laurent et de Berny » pendant les cinq
susdites années, en le constituant son mandataire général
et spécial pour toutes les opérations de la société dont la
gestion lui était attribuée par l'acte social.
Fait double, à Paris, le vingt avril mil huit cent vingt-
huit.
Signé : Laurent.
Signé : de Berny.
Le dit acte enregistré, à Paris, le vingt-quatre avril mil
huit cent vingt-huit, folio cent quatre-vingt-cinq, case
troisième, par le receveur qui a perçu un franc dix cen-
times décimes compris et déposé au Tribunal de com-
merce de la Seine, suivant procès-verbal en date du vingt-
six avril mil huit cent vingt-huit, enregistré.
(Archives du Greffe du tribunal de commerce de la Seine.)
APPENDICE VIN
LA FAILLITE ET LES DETTES
[77] BILLET DE BALZAC A M. VOISIN
Imprimerie Paris, le 17 juillet 182S.
de
H. Balzac,
rue des Marais S. -G., n° 17.
M. Balzac salue bien Monsieur Voisin, il le prie d'avoir
la complaisance de prendre demain l'heure de midi pour
la saisie que Monsieur Prestat compte faire.
Command' 8,85
Saisie 12,40
21,25
Autre command' 10,40
51,65
Suscription du billet : Monsieur Voisin, huissier, rue des
Lavandières-S'' -Opportune, n° 24.
Le 28 octobre 1828, un sieur Martin, agissant au nom de
M. Voisin, huissier, donne reçu à M. Sédillot des trente et
un francs G5 cent, montant des frais détaillés ci-dessus.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, ln partie, fol. 218.)
378 LA JEUNESSE DE BALZAC.
I78J LETTRES DE M"'e BALZAC MÈRE
A M. SÉDILLOT
Mon cher cousin, faites tout votre possible pour que
nous évitions que l'affaire arrive à la connaissance de
mon pauvre mari, faites valoir ses 83 ans, qu'il ne peut se
déplacer, etc., etc.; j'ai une procuration générale un peu
ancienne, mais je puis encore m'en servir pour signer,
dans le cas, comme autorisée. Évitons à ce bon père le
chagrin qu'il ressentirait de tout cela.
Faites valoir que le bien est de mon côté, qu'il n'y a que
moi qui peux répondre ou renoncer; mon mari n'a que
des rentes viagères. On n'a pas besoin de sa signature ;
dans sa convalescence, épargnons-le, le plus que nous
pourrons.
Je m'en rapporte à vous sur tout ce que vous ferez, je
vous le répète. Dites-moi quand il faudra aller à Paris; je
veux ne pas même faire faire ici la procuration. S'il vous
en faut une, j'irai chez votre notaire à Paris; je ne veux
pas même aller chez le mien.
Adieu, cher cousin, la petite va un peu moins mal.
Vous feriez peut-être bien de demander à Honoré les
reçus de toutes les sommes que j'abandonne, et dont je
réponds; du reste, je m'en rapporte à vous sur tout.
[Balzac, née Sallambier.]
Lettre adressée à M. Charles Sédillot.
[Arch. de M. Sédillot.)
[79J A Monsieur Sédillot, rue des Déchargeurs, n° 10.
Versailles, le 20 juillet à 11 heures [1828].
Mon cher cousin, nous recevons à l'instant votre lettre
et m'empresse d'y répondre. Votre amitié et votre inter-
vention dans notre malheureuse affaire est la seule conso-
lation que je pouvais recevoir.
Je vous autorise, mon cher cousin, à prendre tous les
engagements qui vous paraîtront nécessaires pour ter-
miner l'affaire de mon fils aîné, comme vous le feriez pour
I.A I Al II 1 1 i: ET LES DETTES 579
vous-même; m'eng&geani à reconnaître tout ce que vous
tel»'/. Dotammenl pour la renonciation aux sommes qui
peuvent nous être dues, H pour la garantie de ma pari
• lu règlement d'ouvrages qui restenl à faire, <-i <jm * l r »i \ « • 1 1 1
être employés aux payements arriérés des ouvriers, M'en
rapportant entièrement à vous, j'attendrai \<>ir<' avis pour
me rendre à Paris signer toutes les conditions <|n<> vous
aurez souscrites pour moi.
Recevez, cher cousin, cl mes remerclments h i exprès
sion de ma reconnaissance pour vos lions offices dans cette
circonstance malheureuse.
Toute à vous.
Balzac, née Sallambier.
(Arch. de M. Sédillot.)
[80] ÉTAT DE LA SITUATION
DU SIEUR HONORÉ BALZA<:
Imprimeur
demeurant à Paris, rue des Marais, n° 17,
faubourg St-Germain1.
PASSIF
Créances par billets et obligations.
Barbier, rue de Vaugirard, n° 17. maison Baudouin 12000 •
Laurens, à Viilers-Cotteret 50 000 ..
Tc-plier, quoi de Gévree, n- ». . . . j « £■- j" %£ j «,,*
/ 1- 50 juin — 556,15 \
Constant Chantpie, Palais-Royal, Ga- \ : 5^ Juln 52 " f
557 » >
5;
\ 5° 50 septembre
lerie de bois, n- 264 ^ 3° 50 jllin ~ 357 ' > 2563'13
/ 4" 15 août - 550 » \
\ 5° 50 septembre 1000 » /
Auguste Près ta t, rue de la Poterie. . 50 juin 1828 525,90
V-CavaignacrueSt-Julien-le-Pauvre j f." ^î J""1. ,~ ',M' " j 1096
' 1 lo février 1829 <>îb » )
Lacroix, rue du Cherche-Miiiy .... 15 juillet — 150
De Berry, papetier rue St-Séverin. . 15 juillet — 249,06
A reporter 47066,35
1. M. Sédillot a annoté cet état à l'encre rouge; ses annota-
tions sont imprimées ici en caractères italiques.
580
LA JEUNESSE DE BALZAC.
Wadington
Dupré
ProsperChaput,papelier,rueSt-André-
des-Arls.
D revêt, papetier, rue d'Anjou-Dau- i
phine (
Firmin Didot, rue Jacob <
Barbier, serrurier \
Maheu, Jean *
Giroudot, mécanicien, rue du Val-de-
Grâce
Montgolfier, rue St-Germain, n° 14. . <
Durouchail, graveur, rue des Grands- (
Augustins, n* 25 \
Oudot, rue de Vaugirarcl, n° 122 .. .
Cuisin, rue de la Harpe, n° 13 . . . .
Lamothe, rue St-Germain-des-Prés, <
n°9 \
Beaurain, rue
Lecœur, rue
Malher et C", passage Dauphine. . .
Henry Didot, Legrand et Cio, rue de i
Vaugirard \
Henry Prestat, rue des Bourdonnais, i
n° 9. |
Fauqueux, rue de Richelieu, n° 18 . . ]
Hanu, rue
Hy, rue Poupée
Cabany, rue Ste-Avoie (en faillite) . .
Delmas, rue du Chemin- Verd, n° 2 .
Report.
15 juillet —
15 juillet —
17 juillet —
17 août
17 septembre
17 octobre
51 octobre
25 décembre
31 mai —
31 juillet —
15 août —
31 juillet —
30 septembre :
15 novembre
31 décembre
31 juillet —
30 septembre
31 juillet —
17 septembre
8 août —
31 janvier —
28 février —
30 avril —
15 août —
15 septembre
28 février —
15 mars —
15 août
15 octobre —
20 août
31 août
31 janvier —
31 août
1 octobre —
15 octobre —
15 octobre —
31 octobre —
31 octobre —
30 novembre
31 janvier —
50 novembre
31 janvier —
28 février —
25 décembre
31 janvier 1828
28 février —
244,80
629.70
1000
661
400
400
733
601
932
» I
47 066,35
196,97
170 »
2 915 »
1 140 >»
4 048 »
400»
400 •
2 700 »>
2 690,50
1000 »
306,70
874,50
156 »
150 ■
157,10
1661 »
695,45
800 »
2 266 i
848 »
123 •
435,25
500 •
;i 659,82
LA FAILLITE i:i LES DETTES. 381
Report 71660,82
Créancière par facture*.
Oudot, marchand <!<■ Imis. pue de Vauglrard, a* 2 68,60
Meyé 5oo khi
Giroudol 200
Montgolfler, quai de la Cité ii«.)
Gagné, quai de Gèvraa, n* 10 5Jo,o.5 500
llv. rue Poupée M
Orcaly*, marchand de plâtre 50»
Cornuault et Poret, rue du Four-St-Honoré, n* 9 170 •
Lacroix, rue du Cherche-Midy, nn 20 130
Preatat Henry (frala de bail). Payé par Ch. Séd 269.50
Joson et Chauvet, rue Courte-Affaire 1/3, ç5 i il »
Cuiain, rue de la Harpe, 11° 13 167 ■•
Montgolfler, rue de Seine 5o8 600 »
Fradelisy M8 ■
75481,92
M et Mad. Balzac, à Versailles 37 000 »
103081,92*
Certifié véritable, le seize août mil huit cent vingt-huit.
H. Balzac. Meyé. Barbier. 3822.10
Actif estimé approximativement ainsi qu'il suit :
1* Brevet • . 22.000
2« Matériel de l'inventaire de 1827, fonte 18 513' 11. . • 16.000
3° Acquisitions de fonte du 1" juillet 1827 au 1" juillet 1828. Environ
10000 1, au prix commun de 2 fr.30 11.000
i° Fonte montée au 1" juin 1827 500
5* Presses au 1" juin 1827 8.000
6' Mobilier industriel dans lequel se trouve (sic) 155 châssis en fer. . . . 4.000
7* Acquisitions présumées depuis le 1" juillet 1827 jusqu'au 1" juillet 1828
dont 80 châssis environ 3.000
8* Compositions conservées 2.500
67.000
Certifié véritable comme [compte?]
H. Balzac,
Meyé, Barbier.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2* partie, fol. 2.)
1. Ce nom est écrit ailleurs Orzali par Balzac.
2. L'erreur d'addition existe ainsi dans l'original. Le total
devrait être de 113.081,92.
382 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[81] VENTE DE L'IMPRIMERIE A BARBIER
H août 1828.
Entre les soussignés, créanciers sérieux et légitimes du
s1 Balzac, d'une part,
Et le dit sr Honoré Balzac, imprimeur, dem1 à Paris,
rue des Marais, n° 17, d'autre part,
2° Le s1 Barbier, employé, dem1 à Paris, rue du Plàtre-
S'-Jacques, n° 24, encore d'autre part,
5° Et le sr Balzac, propriétaire, dem1 à Versailles, et la
dame son épouse de lui autorisée à l'effet des présentes
et, en outre, sa mandataire spéciale, suivant acte devant
Me Guiiïrey, notaire à Paris, en présence de témoins, le
douze août mil huit cent vingt-huit, enregistrée, encore
d'autre part,
A été dit, convenu et arrêté ce qui suit1 :
Art. 1er. — Mr Balzac vend, cède, transporte et aban-
donne, du consentement de MM. les créanciers soussi-
gnés, à M' Barbier, ce acceptant, pour lui, ses héritiers et
ayant cause, son fonds de commerce d'imprimerie, maté-
riel, fonte, presses, mobilier industriel, marchandises,
papier blanc, ses droits au brevet d'Imprimeur, et enfin
tout ce qui dépend du commerce de l'imprimerie.exploité
par le dit sr Balzac.
Art. 2me. — La présente vente est faite moyennant la
somme de soixante-sept mille francs, laquelle sera payée
par M. Barbier,
Savoir : aux créanciers porteurs de bil-
lets relatifs au commerce d'imprimerie la
somme de 29,650 fr. 82
2° Aux créanciers par factures et comptes
courants environ celle de 2 500 »
82 150 fr. 82
3° A M. Laurence (sic) à valoir sur le mon-
tant de sa créance vingt-deux mille huit
cent quarante-neuf francs 12 c. mais avec
t. Les annotations faites à l'encre rouge par M. Sédillol sili-
ce traité sont imprimées ici en caractères italiques.
LA FAILLITE ET LES DETTES. 583
intérêts des dits 22 849 r. 12, le toul dans le
terme des conventions prises avec lui le
quatre avril 1826 22 <Si(.) IV. l£
i° El la somme «le douze mille francs qui
servira à éteindre 1rs obligations souscrites
par ledit sr Balzac, au profil <lu sr Barbier . 12 000 »
Somme égale ... 07 000 fr. M
Art. .>"'. La somme de vingt-neuf mille six cenl cin
quante francs 82 cent, et deux mille cinq cents, au total
trente-deux mille cent cinquante francs 82 cent., néces-
saire pour payer les créanciers porteurs de billets, fac-
tures et comptes courants, sera payée par M. Barbier à
MM. les créanciers, acceptant, en six paiements, savoir :
le premier qui sera d'un sixième dans six mois à compter
«lu jour où tous les créanciers auront signé les présentes,
le second qui sera d'un sixième, six mois après le premier
paiement et ainsi de suite de six mois en six mois, le tout
sans intérêts. Les fonds seront versés entre les mains des
commissaires ci-après nommés qui les répartiront aux
créanciers.
Comme la somme de trente-deux mille cent cinquante
francs 82 cent, ci-dessus sera insuffisante pour désinté-
resser les créanciers porteurs de titres, factures et
comptes courants, M1 Balzac s'engage à parfaire la somme
qui sera nécessaire pour payer le surplus qui est fixé à la
somme de deux mille deux cent vingt-neuf francs, c'est-à-
dire que le s' Balzac se charge du paiement des créances
ci-après, savoir :
Aux sieurs Buisson Payé à ce 500 800
Déro Vayé 350
Fleuriet 86
( payé 150 )
Chaumont — 150 [ 500 {sic)
[ - 100)
Sédillot débité 187
Chanu payé 500
Nacquart payé 206
Fr. 2 229
584 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Lesquels créanciers ont déclaré conserver M' Balzac
seul pour débiteur et renoncent à exercer toute espèce
de droits contre le s1' Barbier.
Art. 4mc. — Mr et Mde Balzac, père et mère du s1 Balzac,
renoncent à jamais à exercer aucune répétition contre le
s' Barbier, ni sur l'actif qui lui est vendu à raison de leur
créance contre leur fils s'élevant à trente-sept mille six
cents francs, réservant néanmoins tous leurs droits contre
ce dernier, lesquels ils exerceront comme bon leur sem-
blera.
Art. 5me. — A l'égard du remboursement des créances
diverses, Mr Balzac les abandonne à Mr Barbier, à la
charge par lui de payer ce qui est dû aux ouvriers, mais,
à cet égard, il sera pris des arrangements particuliers à
l'effet d'assurer au premier la rentrée de la dite créance
et au second qu'il ne sera pas inquiété ultérieurement
par les dits ouvriers. Mr Barbier prendra avec les dits
ouvriers tels arrangements que bon lui semblera pour le
paiement qu'il s'engage de leur faire.
Art. 6me. — M1 Balzac s'engage à payer à M1 Laurence
{sic) tout ce qui lui restera dû après paiement de vingt-
deux mille huit cent quarante-neuf francs 12 cent, que
Mr Barbier doit lui payer sur le dit principal, laquelle
somme, restant due, ne sera imputable que sur les der-
niers termes de la dite créance, mais portera intérêts
ainsi qu'il est stipulé en son titre de créance, ce qui est
accepté par Mr Laurence (sic) qui consent à n'avoir plus
que le dit s1 Balzac pr débiteur du dit surplus de prix,
consentant à décharger Mr Barbier de toutes choses à ce
relatives.
Art. 7me. — Mr Barbier s'engage en outre à rembourser
à Mr Balzac la somme de deux mille francs pour les six
mois payés d'avance pour les loyers, comme aussi il s'en-
gage à prendre les papiers blancs étant en magasin, éva-
lués par M. Balzac à la sme de mille francs, mais sauf
l'estimation qui sera faite à cet égard.
Les dites sommes seront payées à Mr Balzac par sixième
de six mois en six mois et sans intérêts, comme il est dit
en l'article troisième ci-dessus.
LA FAILLITE ET LES DETTES. 588
Sur les premiers sixièmes Mr Barbier retiendra : 1° ce
qu'il sera tenu de payer pour contributions arriérées dues
par M1 Balzac; 2" la s"" de mille francs pour le terme des
loyers échus le quinze juillet mil huit cent vingl huit et
dus par Mr Balzac; 3° tout ce qui sera payé aux créanciers
porteurs «le faelures et cl,s courants au-dessus de, la s"" de
deux m il Ki cinq cents francs ci-dessus.
A ht. 8 — Mr Balzac s'engage à faire à Mr Barbier le
transport du bail des Lieux où il exploite le dit établisse-
ment et à faire accepter le dit transport par le proprié-
taire, condition de rigueur et sans l'exécution de laquelle
les présentes seront nulles et non avenues.
Art. l)""'. — Faute par Mr Barbier de payer le premier
ou l'un des subséquents paiements dans les délais ci-
dessus lixés, il sera déchu du bénéfice du terme à lui ac-
cordé, et MM. les créanciers, désignés à l'art. 3mc, rentre-
ront dans la plénitude de leurs droits et action contre lui,
pour le paiement de leur créance ; ils pourront, en consé-
quence, exercer toutes les poursuites que bon leur sem-
blera, faire vendre son établissement, le matériel et mobi-
lier en dépendant et en partager le prix.
Art. 10mc. — Pour veiller à l'exécution des pré-
sentes, Mrs les créanciers nomment pour commissaires
MM. Alexandre Montgolfier et Malher, lesquels ont ac-
cepté et sont chargés de recevoir, h chaque échéance, les
6 versements que devra faire M1 Barbier, ainsi qu'il est
dit ci-dessus, et en feront la répartition aux créanciers.
Les dits commissaires devront également surveiller les
opérations du s1' Barbier qui sera tenu de leur communi-
quer ses livres à toutes réquisitions et au moins tous les
trois mois.
Et dans le cas où MM. les commissaires trouveraient
que l'établissement du sr Barbier n'est pas conduit de
manière à donner aux créanciers toute sûreté, ils devront
réunir les créanciers, leur faire leur rapport, et alors
M's les créanciers prendront telles mesures qu'ils jugeront
convenable.
Art. llme. — MM. les créanciers s'engagent dès à pré-
sent à suspendre toutes poursuites contre le sr Balzac et
25
586 LA JEUNESSE DE BALZAC.
le sr Barbier, et s'obligent à retirer de la circulation tous
les titres qu'ils auraient pu y mettre et, en tous cas, à
garantir les srs Balzac et Barbier de toutes poursuites qui
pourraient être exercées par des tiers ; ils réservent néan-
moins tous leurs droits contre les coobligés aux titres
dont ils sont porteurs autres que les srs Barbier et Balzac
et ce sans novation.
Art. 12me. — Au moyen des présentes, Mrs les créanciers
quittent et libèrent M1' Balzac et reconnaissent Mr Barbier
pour leur seul débiteur.
Art. 13me. — Les présentes seront nulles et non avenues
dans le cas où les créanciers n'y adhéreraient pas, et le
brevet dont est propriétaire M. Balzac restera déposé
entre les mains de Mr Sédillot, rue des Déchargeurs, n° 10,
jusqu'à ce que le consentement à l'unanimité des créan-
ciers ait été obtenu, et aussitôt il sera remis à M. Barbier.
Fait triple, à Paris, le seize août mil huit cent vingt-
huit, dont un pour M. Barbier, un pour M. Balsac {sic), un
pour M1 qui sera remis aux créanciers.
Suivent les signatures : Malher et Gie ; Drevet ; Fau-
queux; Ve Lacroix [signé Lacriox] ; Ch. Sédillot ; Balzac,
née Sallambier, tant en mon nom qu'en celui de mon
mari comme porteur de sa procuration »; J.-B. Guisin;
Beaurain ; Giroudot; Gagné; Prosp. Ghaput ; Meyé :
Dupré; Templier; veuve Cavaignac ; Beaulé fils, pour la
valeur de ma facture de six cent quarante-huit francs ; Fra-
delizy neveu; P.-L. Montgolfier; Alex. Montgolfier;
H. Balzac; Cornuault et Poret ; A. Prestat ; Jozon et
Chauvet ; H. Didot pour Firmin Didot père et (Us :
Le Grand et Gie; Constant Chantpie; Durouchail; Ambr.
Firmin Didot; Alfred Waddington, par procuration de
M. A. Montgolfier; R°"Isnard; Deberny; Maheu; Henri
Prestat; V de Boz; Hanus; Barbier, serrurier; de Chau-
mont; Laurens aîné; Lamothe; Floriet fils; Buisson;
Nacquart; Barbier.
1. Le nom est resté en blanc dans l'original.
LA FAILLITE ET LES DETTES. 387
Les signatures de MM.
i " Lecœur, créancier de la somme de 157.10
->" Cabany 135.25
5° Constant Chant pie 2563.15
4° Ou. loi 375.30
5° Delmare 500 »
6° Orzali 50 »
7° M""' Chanu, rue SL-Louis-au-Marais, n° 71. . . 300 »
Total : Quatre mille trois cent quatre-vingt francs
cinquante centimes. i.">,S0.50
Les signatures de deux tiers porteurs n'ayant pu être
obtenues jusqu'à ce jour, Madame Balzac, tant en son
nom personnel que comme fondée de la procuration
sus énoncée du sieur son mari, promet et s'engage ga-
rantir M' Barbier de tout recours de la part des dits
créanciers ou de leurs tiers porteurs, s'obligeant à prendre
avec eux telles conventions particulières qu'elle avisera ;
et se réservant seulement, ainsi que Mr Barbier y consent,
d'exercer, au lieu et place desdits créanciers, tous les
droits qui résulteraient en leur faveur de l'acte qui pré-
cède, s'il était signé par eux pour le remboursement par
sixième du capital de leurs créanciers.
Fait triple, à Paris, le seize août mil huit cent vingt-
huit
Approuvé l'écriture ci-dessus,
Balzac, née Sallambier.
Approuvé l'écriture ci-dessus,
H. Balzac
Approuvé l'écriture ci-dessus,
Barbier.
(Collection Lovenjoul, ms. A '259, 2e partie, fol. 4.)
[82] CONVENTION ENTRE HONORÉ BALZAC,
ANDRÉ BARBIER ET M. CHARLES SÉDILLOT
16 août 1828.
Entre les soussignés :
M. Honoré Balsac (sic), imprimeur, dem1 à Paris, rue
588 LA JEUNESSE DE BALZAC.
des Marais, n° 17, et M. André Barbier, employé, dem1 à
Paris, rue du Plâtre Sl-Jacques, d'autre part.
5° M. Charles-Antoine Sédillot, négociant, dem1 à Paris,
rue des Déchargeurs, n° 10, encore d'autre part.
Indépendamment des conventions arrêtées entre M. Bar-
bier, M. Balzac et les créanciers de ce dernier par acte
sous seing privé en date du 16 août 1828, il a été convenu
ce qui suit entre les soussignés :
M. H. Balzac, outre les créanciers portés dans l'acte sus
daté, doit aux ouvriers qui ont travaillé chez lui, une
somme de quatre mille cinq cent vingt-sept francs 30 cent,
suivant l'acte annexé à chacun des triples du présent.
Il destine à l'acquit de la dette les sommes à lui dues
pour diverses "impressions dont l'état, également ci-
annexé, s'élève à, sauf erreur ou omission, environ six
mille quatre cent vingt francs ; les factures des dites im-
pressions ont été présentement remises à M. Barbier qui
le reconnaît et se charge de faire régler, en présence de
M. Balzac, ce qui est dû par les libraires et autres débi-
teurs dans le mois qui suivra la prise de possession de
l'établissement dont il s'agit et s'engage à remettre les
dits règlemens à M. Sédillot.
M. Sédillot, de son côté, s'engage à remettre, dans le
délai de deux jours, à M. Barbier qui s'en charge la
somme de onze cent trente un franc 82 cent, formant le
quart de celle due aux ouvriers, et M. Barbier s'engage à
justifier, dans le délai de huit jours, de la répartition qu'il
aura faite de la dite somme aux ouvriers. Le reçu de
M. Barbier de la dite somme de onze cent trente un francs
82 cent, sera échangé contre celui des ouvriers.
M. Sédillot s'engage, en outre, à remettre à M. Barbier
la somme de trois mille trois cent quatre-vingt-
quinze francs 48 cent, formant les trois autres quarts de
celle due aux ouvriers et ce en trois payements de mois
en mois, à la condition qu'avant le versement du second
quart les règlemens des libraires et autres débiteurs lui
seront fournis en totalité.
Ces règlemens devront être faits à l'ordre de M. Balsac
(sic) ou de son mandataire spécial et à une année
d'échéance au plus.
LA FAILLITE ET LES DETTES.
389
Fait triple, à Paris, le seize août mil huit cent vingt-
huit.
Approuvé L'écriture
II. Balzac. Approuvé L'écriture
Approuvé l'écriture ci-dessus et des autres parts.
A. Barbier. Ch. Sédillot.
J'ai reçu de M. Sédillot la somme de onze cent trente
un francs quatre-vingt un centimes pour le premier quart
relaté dans l'acte ci-dessus.
Paris, ce seize août 1828.
A. Barbier.
(Collection Lovcnjoul, ms. A 259, 2* partie, fol. 10.)
La pièce qui suit est l'acte don il est question dans le se-
cond paragraphe de l'arrangement ci-dessus :
[85J Relevé général des sommes dues aux ouvriers de M. Balzac
depuis le 17 mai 1828 jusqu'au 12 juillet 1828.
Compositeurs.
Bertemy 899,20
Huette 49 .
Alexandre Pisseau. . . 61 »
Thomas 43 »
Marelle 320,75
Regnaud 217,95
Bouillot (pour d'autres) 4,90
Marchand 90,40
Lenord 62,35
Presses.
Lavaud et Fournier. . 519,40
Cruzel et Lousteau. . 188,55
Labruvère et Compa-
gnon 319,80
Mifflièz père et fils. . . 221,60
Lormant et Lebon. . . 133,50
Lebon et George ... 46,75
Lorrin (avec d'autres) . 67,80
Chevilièz 13 »
Nuée 16,50
Fouqueray 9 »
A reporter. . . 3084,45
(Collection Lovenjoul,
Report. . . 3084,45
Conscience.
Lecorney 120 «
Bouillot 237,75
Blanc 29 .
Bouillon 80 »
Bordier 56 »
Bève 8 •
Stéréotypie.
Haran 50 »
Derrieu 72 •
Gittlif 50 -
Magasin.
M<« Huette 53,40
Protc.
Noguès 235 »
Collection du droit
Français.
Girard . . . 451,70
4527,30
Sauf erreur ou omission,
ms. A 259, 2- partie, fol. 12.)
"90 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Etat des recouvrements.
MM. Ladvocat et Duffey 1940 »
Isambert 768 »
Froment et Lequin 359 »
Prosper Froment 300 »
Baudouin 1053 »
Cassel 1500 •
5920 »
Sommes saisies par M. Girard entre les mains
de M. Malhers {sic) 500 »
6420 .
Annexé à l'acte Annexé
H. Balzac. Barbier.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 28 partie, fol. 12.)
[84] Supplément du relevé général des sommes
dues aux ouvriers de l'imprimerie de M. Balzac.
MM. Girard, omission de la retenue pour les
ouvriers de la Collection, etc 95 »
Blanc, erreur sur la somme due 58 »
Bertemy 16 »
Marelle 56 »
Huette 5 »
Thomas 10 »
Labruyère 10 »
Blanc 9 .
Harang 25 »
Bouillot 76 .
Darbac 8 »
Hucrot 6 »
Vermont 12 »
Gittliff 24 ■
368f .
Paris, 21 août 1828.
Noguès, prote.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2* partie, fol. 13.)
LA FAILLITE ET LES DETTES. 301
|85] LETTRE DE BALZAC PÈRE
A. M. SÉDILLOT
18 août IMS.
A Monsieur Sédillot, négociant, rue des Déchargeurs,
n° 10, à Paris.
Versailles, le 18 août 1828.
Mon cher parent,
Mme Balzac ne m'a rien laissé ignorer de tout ce que
vous avez bien voulu faire pour nous; je vous en remercie
bien sincèrement. J'approuve tout ce que vous avez fait
et ferez pour le complément de votre œuvre. Vous avez
cicatrisé la plus grande de nos plaies, et je serai bien heu-
reux, lorsque je trouverai l'occasion de vous en témoigner
ou aux vôtres, la profonde reconnaissance dont je suis
pénétré.
Agréez, mon cher parent, les sentiments du plus invio-
lable attachement avec lequel je suis tout à vous.
Balzac.
(Arch. de M. Sédillot.)
[8ô] LETTRE DE H. BALZAC
A M. CHARLES SÉDILLOT
io septembre 18*28.
Imprimerie
de
H. Balzac,
rue des Marais S. -G., n. 17.
A Monsieur Sédillot, négociant, Paris.
Paris, le 15 7»" 1828.
Mon cher cousin,
Après des efforts soutenus et réitérés auprès des débi-
teurs par comptes courants de mon ancienne imprimerie,
nous sommes parvenus à solder les comptes ci-après :
592 LA JEUiNESSE DE BALZAC.
1° Celui de M. U. Canel, dont le solde s'élève
à 743 45, réglé en un billet pour lequel il y a des
conventions particulières nécessaires à la position
de ce débiteur qui remplira parfaitement ses obli-
gations ci 743,45
Sur ce dit compte, M. Gosselin,le débiteur dont n/
v/ avons parlé, a réglé, pour solde, 625 10 cent, en
deux effets, l'un au 5 9bre et l'autre au 5 Xble 1829. . ci 625,10
Total de ce compte 1568,55
2° M. Charles Froment a soldé son compte par
280 fr. au 51 août prochain 280 »
3° M. Prosper Froment a remis sur son compte fin
9bre, 500 f., et il a voulu laisser un reliquat de 44,
pour sûreté d'un cliché, et, s'il y a lieu, cette somme
sera payée ci 500 »
4° Sur le compte de MM. Ladvocat et Dufey, mon-
tant à 1 500 francs, toute vérification faite, ces mes-
sieurs ont remis un effet de 1 000 fr. au 20 7Lra pro-
chain, et, sur les 500 fr. restant, la discussion aux-
quels (sic) ils donnent lieu les réduira probablement
à 200, qui seront réglés cette semaine, selon leur pro-
messe. M. Barbier peut suffire complètement à cette
discussion, attendu qu'il a connaissance des difficultés,
et que n/ avons discuté jusqu'où devait aller l'abandon
des sommes de ma part ci 1 000 »
5° M. Isambert étant parti en Suisse depuis deux
mois et ne revenant qu'après les vacances, n/ v/ trans-
mettons sa facture à toucher 768 »
Total 5 916,55
Maintenant, mon cher cousin, il reste une somme de
240 fr. due par M. Hippolyte Baudouin, pour un ouvrage
à continuer, et en cas. chose douteuse, qu'il veuille régler
ce qui me regarde avant que l'ouvrage soit terminé, il y a
à v/ faire observer qu'il est à la campagne depuis deux
mois et qu'il a été impossible de savoir l'époque de son
retour.
Ainsi, il faut attendre ci 240 »
2° M. Alexandre Baudouin a, depuis huit jours, mon
compte à vérifier, dont le solde susceptible de discussion
et sauf les erreurs de calcul ou omissions, doit se porter
en ma faveur, à 800
»
LA FAILLITE ET LES DETTES. 593
N/ avons encore à recouvrer sur M. L'Huillier, libraire
peusolvable, une somme d<> 100 fï., pour gage desquels il
y a dans les magasins de l'imp1' ['édition à peu près
complète d'un roman en 2 vol. intitulé : Henriette Sontag.
V/ verrez les pièces.
Il existe encore à recouvrer 200 fr. sur le cne Muller,
qui pourra payer sous peu. Il demeure rue de la Sour-
dière, n° 31, et n/ joignons l'effet qui n'a pas été protesté.
A/., un effet de 105 sur un employé aux Archives dont on
pourrait saisir les appointemens, il y est habitué. Cette
dette douteuse, montant à plus de 700 fr., plus les inté-
rêts, n'a pas été portée par moi en ligne de compte.
Il existe encore des factures à recevoir de particuliers
absents, pour une valeur de 200 fr. environ. Ce sont
MM. de Beaurepaire, Protez Delâtre, Nanteuil et autres.
Tel est, en résumé, mon cher cousin, le résultat de la
liquidation.
Je vais retourner aujourd'hui chez M. Baudouin (Alex.),
pour tâcher d'obtenir de solder mon compte. Après ces
efforts qui (sauf M. A. Baudouin, et cela pour raison par-
ticulière) ont été partagés par M. Barbier, il serait diffi-
cile de mieux faire par suite des difficultés qu'élèvent les
libraires et les réductions qu'ils font subir ; elles ont monté,
sur les comptes présentés, à près de six cents fra"hcs, par
suite des corrections non reconnues, et de la réduction
des prix.
M. Barbier pourra, en cas de mon absence, faire rentrer
[les créances de] M. Isambert et Hip. Baudouin.
Recevez, mon cher cousin, je vous prie, l'hommage de
ma profonde reconnaissance.
V[otre] dévoué cousin,
H. Balzac.
Je joins à ceci une note, relativement à M. Malher. Il
v/ sera remis également une liasse de mes billets acquit-
tés, réclamée par ma mère.
H. B.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 17.)
394 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[87] LETTRE DE BALZAC A M. DUVERGER
17 septembre 1828.
Fonderie de Laurent et Balzac,
rue des Marais St-G., n. 17'.
Politypie
Gravure
sur acier, cuivre,
bois, etc.
Paris, ce 17 septembre 1828.
Je vous prie, mon cher Monsieur Duverger, d'avoir la
complaisance d'approuver le petit engagement que
M. Noguès vous présentera à signer, vous m'obligerez
beaucoup et l'aiderez lui-même.
V[otre] d[évoué] sferviteur],
H. Balzac.
Cette quinzaine dont il est question se composera :
1° de la retenue qui se fait chez vous et sur laquelle
j'aurai privilège après vous et d'une nouvelle retenue
d'une semaine seulement.
H. B.
Le 13 octobre, Barbier écrit, en l'absence de Balzac, à
M. Poirot, propriétaire demeurant Vieille-rue-du Temple, n° 8,
une lettre par laquelle il l'informe que « M. Bouillot lui re-
mettra la note supplémentaire de ce qui reste dû aux ouvriers »,
se montant à 574 fr. ; il l'engage à voir M. Sédillot. M. Noguès
devra être payé comme les autres, il donnera un bon supplé-
mentaire de 280 fr. 50 pour les trois quarts de la somme due.
Le 15 octobre 1828, Barbier donne reçu à M. Sédillot de la
somme de 280 fr. 50, pour les trois quarts de celle due en
supplément par M. Balzac à ses ouvriers.
D'autre part, voici un reçu de M. Noguès, signé par lui, mais
qui a été écrit par Balzac ainsi que la déclaration de E. Du-
verger :
1. Les mots : Fonderie de Laurent et Balzac ont été barrés
d'un trait de plume sur l'original.
LA FAILLITE ET LES DETTES. 505
,88]
Je soussigné m'engage envers M. Balzac, ex imprimeur,
à affecter et affecte par ces présentes la valeur «les salaires
de quinze joins de travail chez M. Duverger à la garantie
de ma reddition de comptes à M. Halzac, renonçant à
toucher à cette retenue jusqu'à l'appuration (.sic) de mon
compte.
Paris, ce 17 7bic 1828.
Noguès.
[89]
Je soussigné, imprimeur à Paris, approuve la présente
garantie et m'engage à la maintenir envers M. Balzac.
Paris, ce 17 7bre 1828.
Approuvé l'écriture,
E. Duverger.
{Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 20 et 21.)
[90] LETTRE DE BALZAC A M. ORZALI, MOULEUR
26 novembre 1828.
Monsieur,
Je suis v/ débiteur de la somme de cinquante francs
pour du plâtre fourni à ma stéréotypie, je vous prie de
vous présenter chez M. Sédillot, rue des Déchargeurs,
n° 10, pour les toucher.
J'ai l'honneur de v/ saluer.
26 9bre 1828.
H. Balzac,
ancien impr, rue des Marais.
Cette lettre est adressée à M. Orzali, mouleur, rue de
l'Odéon, 22. La note, présentée le 21 juin, a été réglée le
28 novembre 1828 par M. Sédillot.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2« partie, fol. 39.)
39G LA JEUNESSE DE BALZAC.
[91] LETTRE DE BALZAC A M. FESSIN, FONDEUR
Monsieur,
J'ai remis votre facture à votre confrère, Monsieur Lau-
rent, qui a la complaisance de vous servir d'arbitre rela-
tivement au prix, et, sur son approuvé en marge de la
facture, vous pourrez vous présenter avant neuf heures
chez M. Sédillot pour en être payé.
J'ai l'honneur de vous saluer.
H. Balzac.
Cette lettre, non datée, est adressée à M. P. J. Fessin, fon-
deur, rue des Boucheries-Saint-Germain, n° 19, qui avait pré-
senté à Balzac, le 7 juillet 1828, une facture se montant à
97 fr. 80 cent, pour fournitures de 108 livres 11 onces d'inter-
lignes. Cette note, réduite à 92 francs, a été payée, le 3 dé-
cembre 1828, par M. Sédillot à M. Chauveau, représentant
M. Fessin.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 214.)
[92] LETTRE DE BALZAC A M. SÉDILLOT
1er février 1829.
Mon bon cousin, j'ai vu le sieur de Chaumont; et je suis
convenu avec lui que M. Prin donnerait pour caution du
payement fait, sans le billet, le sieur Biaise, libraire,
rue Férou, et la somme du billet est exacte.
Je vous donne avis de ceci par un petit mot en cas que
je ne vous trouve pas aujourd'hui chez vous, comme je
compte le faire, à moins que mes épreuves ne soient pas
corrigées de bonne heure.
Agréez, mon cher cousin, l'expression sincère de ma
reconnaissance.
Honoré.
Paris, ce dimanche matin, 1er février 1829.
Au v° de cette lettre adressée à M. Charles Sédillot, négo-
ciant, rue des Déchargeurs, n° 10, à Paris, est écrite la pièce
suivante :
Nous soussignés Simon Prin, demeurant au Petit Mont-
rouge, et J.-J. Biaise, demeurant rue Férou, n° 24, décla-
rons que dans le cas où le billet Balzac de cent francs
dont est question à la lettre d'autre part viendrait à être
LA FAILLIT!-: ET LES DETTES.
597
représenté ;'i M. Balzac, nous nous engageons solidaire-
ment l'un pour l'autre, un de nous deux seul pour le tout,
à Le rembourser ef à payer tous frais qui viendraient à
survenir, déclarant avoir reçu les cenl francs 'les mains
de M. Ch. Sédillol H l'acquit de Mous. IL Balzac.
Paris, ce 7 février 1829.
Approuvé l'écriture ci-dessus. Bon pour aval :
J.-J. B LAI SB.
Approuvant l'écriture ci-dessus. Bon pour aval :
Prin.
[Collection Lovcnjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 40.)
[93] ÉTAT DES SOMMES A RÉPARTIR
AUX CRÉANCIERS DE BALZAC
Paris, ce 9 février 1829.
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous faire parvenir l'état (d'après les
rectifications faites jusqu'à ce jour) des sommes à répartir
aux créanciers Balzac et dont le total forme, sauf ce qui
concerne Laurens aîné, le prix d'achat de l'imprimerie
qui m'a été cédée1.
Templier
Aug. Prestat
V* Cavaignac
V» Lacroix
Deberry
Wadington
Dupré
au 15 juillet
15 août
50 juin
50 juin
15 février
15 juillet
par facture
15 juillet
par facture
15 juillet
15 juillet
1828
1829
1828
1828
1828
130
411 .
206,25
683,25
325,90
400 -
695 »
1095 »
130 .
131,30
261,30
249,05
90 .
539,05
196,97
170 .
5 071,47
1. Cet état a été vérifié par M. Sédillot, les vérifications sont
écrites, dans l'original, à l'encre rouge ; nous les avons impri-
mées ici en italiques.
398
LA JEUNESSE DE BALZAC.
Firmin Didot
Prosper Chaput
Drevet
i 3
Barbier, serrurier. J ^
M ah eu
Giroudot
Montgolfier, rue de
Seine.
Durouchail
Cuisin
Lamothe
Baurain
Malher et O
Henri Didot, Le-
grand et Cie
H. P restât1
Report . .
31 juillet —
50 septembre —
15 novembre —
31 décembre —
17 juillet —
17 août —
17 septembre —
17 octobre —
31 octobre —
25 décembre —
51 mai 1829
31 juillet 1828
15 août —
51 juillet —
50 septembre —
51 juillet —
17 septembre —
8 août —
51 janvier 1829
28 février —
50 avril —
15 août 1828
15 septembre —
28 février 1829
15 mars —
par facture
15 août 1828
15 octobre —
51 août —
51 janvier 1829
par facture
31 août 1828
1er octobre —
par facture
15 octobre 1828
51 octobre —
51 octobre —
50 novembre —
51 janvier 1829
467
864 -
1000 ■
1000 »
1184 »
400 »
400 -
400 -
450 »
500 »
650 »
115 »
700 »
440 »
200 »
200 »
200 »
200 »
1000 »
750 .
500 »
450 »
524 »
1000 »
566,50
1000 .
508 »
500 -
500 -
244 »
629 »
171 .
150 -
114,23
1 000 .
661 -
400
400
5 071,47
4 048
2 915 ■
1140 »
400 »
400 -
2 700 .
5198,50
1000 .
1045,50
156 »
264 ,25
1661 .
695,45
800 .
A reporter 25 475,17
1. M. Sédillot a écrit en marge : Vérifier douhle compte.
LA FAILLITE ET LES DETTES.
m
l;>i>
>rt. . .
23475,11
Fauqueux
50 novembre
1828 .
733 ■
—
."i janvier
1820 .
<;oi •■
—
28 février
— .
932 ••
2 200 •
Hanua
1S décembre
1828 .
848 .
Hj
"i janvier
1820 .
127» .
—
par facture
59 ..
182 .
IVfeyé
par facture1
500 •
Montgolfler
quai
de
la Cité.
par facture
110 .
Mm' Gagné
par facture
539,75
Cornuault o
t Poret
par facture
170 .
Joson et Chauve
t
par facture
112,95
Fradelizy
par facture
G48 .
M™6 Balzac (substituée aux droits des autres
créanciers, sauf la différence résultant de
la rectification des comptes ci-dessus)
pour solde de 32150,82 3 289,95
La même, sur 2 000 fr. de six mois de loyer
d'avance.
Après diminution 1037,50 payés à Prestat.
Différence
Papier en magasin d'après l'état ci-joint. .
28 800,87
3 289,95
32150.82
902,50
4 252,45
520,50
Yl 78^95
Je vous fais également remettre la somme de 796 fr. 50,
sixième de celle de 4 778,95 indiquée ci-contre et je vous
prie de remettre au porteur un reçu ainsi conçu :
Je reconnais avoir reçu de M. Barbier la somme de sept
cent quatre-vingt-seize francs cinquante centimes pour
acquit du premier sixième de 4 778,95 qu'il doit à
Mme Balzac mère, ainsi qu'à M. Honoré Balzac son fils,
tant pour les différens créanciers aux droits desquels
Mme Balzac s'est substituée que pour ce qui reste dû à
M. Honoré Balzac pour les six mois de loyer d'avance du
bail des lieux où est située l'imprimerie qu'il a cédée à
M. Barbier, par acte sous signatures privées en date du
1. M. Sédillot a écrit en note : Vérifier livre.
100 LA JEUNESSE DE BALZAC.
1C août 1828, et pour les papiers étant en magasin à cette
époque.
J'ai l'honneur d'être, Monsieur, votre très humble ser-
viteur. Barbier.
Suscription de la lettre : A Monsieur, Monsieur Sédillot, négo-
ciant, rue des Déchargeurs, n° 10.
A cette lettre de Barbier est annexé un « état estimatif des
papiers blancs, étant dans les magasins de Mr Balzac, impri-
meur, rue des Marais, n° 17, à Paris, et cédés par lui à Mr Bar-
bier aux termes de l'acte passé entre eux, sous signatures
privées, le 16 août 1828 ». Cet état, sur papier timbré, dressé
par M. J.-B. Cuisin, marchand de papiers, rue de la Harpe
n° 13, à Paris, le 15 septembre 1828, accuse soixante-dix-neuf
rames de papier de divers formats, d'une valeur totale de cinq
cent vingt-six francs 50 centimes.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 41.)
[94] LETTRE DE BALZAC A THOUVEN1N, RELIEUR
5 mars [1829].
Monsieur,
Monsieur Sédillot, rue des Déchargeurs, n° 10, m'a
promis d'acquitter intégralement le mémoire des reliures
que je vous dois, y compris celles du Voltaire et des Mille
et une nuits, lorsque vous lui remettrez les Mille et une
nuits terminées.
Il approuvera même au besoin cette lettre si vous le
désirez, mais cette précaution est, je crois, inutile.
Je désire bien vivement que vous lui envoyiez au
plutôt (sic) les Mille et une nuits qui sont destinées à ma
mère.
Vous m'obligerez beaucoup de presser cette demi-
reliure et j'espère que vous ne me ferez pas trop attendre
mon Voltaire.
Agréez, Monsieur, mes complimens.
H. Balzac.
M. Ray.
La suscription de la lettre porte : Monsieur Ray, chez M. Thou-
venin, rue Mazarinc, n0' , Paris.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 47.)
1. Le n° est resté en blanc dans l'original.
r.A FAILLITE ET LES DETTES.
■401
[95] FACTURE DE TKOUVENIN
30 mars 1899.
Rub Mazarink, n° 54.
J, Thouvenin aîné et Cta relieurs brevetés
de S. A. H. Monseigneur le duc d'Orléans, Paris.
1829. Doit Monsieur Balzac.
Fr. Fr
50. La Fontaine 1/2 rel. veau, 2 ex. 2 in-8 gr. à 3 6
18-27 mars
— septembre 30. Bolleau maroquin
— . La Fontaine 1/2 rel. veau
— — . Ducis —
. Molière —
27. Bulletin des lois. —
31, Droit français. —
5. Mille et une nuits —
15. Deux alluims gravures .
. Mille et une nuits 1/2 rel.
30. Mille et une nuits —
. Voltaire 1/2 rel. veau. . .
— octobre
1828 mai
— juillet
— août
1829 mars
1 —
8
1 —
1 —
1 ex. 3
3
9
1 —
3
<■>
3
6
0 gr. in-8
3
18
2 in-f*
35
6 gr. in-8
3
18
(j —
3
18
fi très gr. in-8
•i
24
Fr. 145
11 nous reste à rendre à M. Balsac (sic) le Voltaire ci-
dessus.
Paris, le 50 mars 1829.
Pour acquit
ppon de J. Thouvenin et Cie.
O. Ray.
(Collection Lovenjoul, ms. A 250, 2e partie, fol. ï9.)
[96] LETTRE DE M. BENAZÉ A H. BALZAC
Paris, 25 avril 1829.
Monsieur,
M. Barbier à qui j'ai communiqué la dernière lettre que
vous m'avez fait l'honneur de m'écrire, toujours con-
vaincu qu'il n'y a aucune question véritable à faire dé-
cider entre vous et lui, persiste dans les intentions que je
vous ai déjà fait connaître.
26
402 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Recevez, je vous prie, l'assurance de ma parfaite consi-
dération. »
Benazé.
Suscription de la lettre : Monsieur, Monsieur H. Balzac, rue
de Cassini, n° 1er, chez M. Surville.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 50.)
[07] LETTRE DE LAURENS AINE A BALZAC
• ■ • Paris, 27 avril 1829.
Monsieur,
Ayez la bonté de passer chez M. Sédillot pour vous
entendre concernant le paiement à effectuer à mon frère;
il va venir au premier jour à Paris, du moins qu'il ait la
satisfaction de savoir que je me suis occupé de lui et que
vous aussi vous ne l'avez pas oublié.
J'ai l'honneur de vous présenter toutes mes civilités.
Laurens.
Suscription de la lettre : A Monsieur, Monsieur de Balzac,
homme de lettres, rue Cassini, n° 1er, faub. St-Jacques.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, lre partie, fol. 8.)
[98] ÉTAT DES SOMMES DUES A LAURENS
PAR M. BALZAC
SANS PRÉJUDICE AUX TRIMESTRES ARRIÉRÉS
Du 1er juin au 1" septembre 1828, un trimestre à. . . . 575 »
Du 1er septembre au 1er décembre 1828, un trimestre. . 89,55
Du 1er décembre 1828 au 1er mars 1829, un trimestre. . 89,55
Total des sommes dues à M Laurens. 555,70
Reçu pour le trimestre échu le l,r décembre 1828, ci. 89 »
Partant reste dû. . 464,70
Il est dû à Made Cuisinier, cessionnr* de M. Laurens,
pour le trimestre échu le 1er juin 1829 89,55
Total dû au 1er juin 1829 ci 554,05
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, lre partie, fol. 12.)
LA FAILLITE HT LES DETTES. 403
[99] REÇUS DE J.-J. LAURENS
26 juin-26 juillet I8<29.
Je soussigné Jean-Joseph Laurens, ancien imprimeur,
demeurant à Villers-Coterets, reconnais avoir reçu de
M. Balzac, des mains de iM. Sédillot, la somme de trois
cent soixante-quinze francs que me doit le dit Balzac
pour le trimestre, échu le premier septembre mil huit
cent vingt-huit, des intérêts de la somme de 30 000 francs
qu'il me devait aux termes du traité du quatre avril mil
huit cent vingt-six.
Dont quittance sans préjudice es autres dus et courant.
A Villers-Coterets, ce vingt-six juin mil huit cent vingt-
neuf.
Approuvé l'écriture ci-dessus
J. Laurens.
Je soussigné Jean-Joseph Laurens, ancien imprimeur,
demeurant à Villers-Coterets, reconnais avoir reçu de
Mr Balzac, des mains de M. Sédillot, la somme de quatre-
vingt-neuf francs trente-cinq centimes pour le trimestre,
échu le premier mars des intérêts de la somme de
7.150 fr. 88 centimes que me doit M. Balzac aux termes du
traité du seize août mil huit cent vingt-huit et trente-cinq
centimes dus.
Dont quittance sans préjudice au trimestre, celui de
premier du courant, lequel appartient à Madame ve Cui-
sinier comme cessionnaire de M. Laurens sur le trimestre
précédent.
A Villers-Coterets, ce vingt-six juin mil huit cent vingt-
neuf.
Approuvé l'écriture ci-dessus
. Laurens.
Le 28 juillet 1829, Laurens jeune, par procuration de
Mme ve Cuisinier, donne reçu à M. Sédillot, de la somme de
quatre-vingt-neuf francs 35 cent., pour le trimestre d'intérêts
échu le 1" juillet.
{Collection Lovenjoul, ms. A 259, 1" partie, fol. 16.)
401 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[100] LETTRE DE BALZAC A M. SÈDILLOT
30 avril 1829.
A M. Sédillot, rue des Déchargeurs, à Paris.
[Paris], mercredi 30 avril [1829],
Mon bon cousin,
M. Laurens arrive à Paris et je vous transmets ici la
dernière lettre écrite par M. Benazé, après une longue
correspondance qui n'a abouti à rien. M. Barbier ne veut
pas même choisir d'arbitre, et il sent qu'il ne peut pas
être attaqué pour une si faible somme lorsque l'acte n'est
pas enregistré. C'est un élève de Baudouin.
Le hazard a fait que je sois venu à Paris pour venir
chercher mon ouvrage. Mon père est décidément entre la
vie et la mort. Les chirurgiens et médecins ont reconnu
qu'il y avait au-dessus du foie un abcès si considérable
que la quantité d'humeur est incalculable. 11 faut néces-
sairement et sous peine de mort, lui ouvrir le côté. La
crise commence. C'est depuis jeudi jusqu'à dimanche que
l'opération aura lieu. Je quitte tout pour ne pas laisser
ma mère et ma sœur seules en cette fatale circonstance,
et je vous conjure de clorre (sic) cette affaire Laurens
selon que vous le jugerez convenable. Lundi, je serai, je
crois, à Paris, et Dieu veuille que je vous apporte de
bonnes nouvelles.
Agréez les témoignages les plus sincères de la recon-
naissance que vous a vouée
Votre cousin,
Honoré.
(Collection Lovcnjoul, ms. A '259, lre partie, fol. 10.)
[101] LETTRE DE BALZAC A M. SÉDILLOT
Si mai 1829.
A M. Charles Sédillot, rue des Déchargeurs, n° 10, Paris.
Paris, 31 mai 1829.
Mon bon cousin,
J'ai écrit à 3 de mes créanciers de se présenter chez
vous :
LA FAILLIT!-: ET LES DETTES. 405
Mm* vTf Naudot pour une somme de 79.00
Son mari était malade OU mort à l'époque de
l'arrangement, elle n'a pas pu ou pas voulu
figurer.
M. M ah eu, serrurier. Il devra donner un acquit
pour solde de tout compte, et vous remettre un
reçu de protêt que je lui ai donné, et il lui est dû . '20 . 00
M. Fauqueux, papetier, pour 50.00
C'est un mémoire de cartes, et c'est aussi un
solde de tout compte.
En tout 140.00»
Voilà, je crois, les dernières vétilles de. l'affaire, mais
Dieu veuille que nous atteignions la fin des payements, la
librairie devient bien malade.
Adieu, mon bon cousin, je vous réitère l'expression de
ma reconnaissance.
H. Balzac.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2- partie, fol. 53.)
[102] LETTRE DE BALZAC A Mme NAUDOT
1er juin 1829.
Madame,
Vous pouvez v/ présenter chez M. Sédillot, rue des
Déchargeurs, pour toucher le montant de v/ facture en
ayant soin de l'acquitter pour solde de tout compte.
Je vous prie de ne pas v/ y présenter plus tard que
neuf heures du matin et pas avant le 4 juin, attendu qu'il
est en voyage.
Agréez mes complimens.
1er juin 1829.
H. Balzac
Cette lettre est adressée à Mme Naudot, brocheuse, rue du
Pot-de-Fer, n° 1 i, qui avait présenté sa facture des travaux
d'assemblage et de brochure faits pour le compte de Balzac en
avril 1828. La dite note se montait à 71 fr. 85 cent. ; elle a été
réglée « pour solde de tout compte » le 5 juin 1829. par M. Sé-
dillot.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 55.)
1. Balzac se trompe de neuf francs.
406 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[105] LETTRE DE BALZAC A M. MAHEU
Monsieur,
V/ pouvez vous présenter le 4 juin avant neuf heures
chez M. Ch. Sédillot, rue des Déchargeurs, n° 10, et en
lui remettant le reçu que je vous ai donné de vos pièces
et un acquit pour solde de tout compte, il vous soldera
les 20 f. que vous réclamez.
J'ai l'honneur de vous saluer.
H. Balzac.
Cette lettre est adressée à M. Maheu, serrurier et mécani-
cien, rue du Milieu-des-Ursins, n° 1, en la Cité, à Paris. Le reçu
auquel Balzac fait allusion est le suivant :
Reçu de M. Maheu, serrurier, un protêt d'effet fait le
18 septembre 1828, lequel établit une dépense de 20 fr. au
remboursement de laquelle il aurait droit.
Paris, 11 mai 1829.
H. Balzac.
M. Maheu a remis, le 4 juin 1829, le reçu ci-dessus à M. Sé-
dillot, qui, de son côté, lui a payé les 20 francs dont il est
question dans la lettre de Balzac.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 57.)
[104] LETTRE DE BALZAC A M. FAUQUEUX
Monsieur,
Vous pouvez vous présenter chez M. Sédillot, rue des
Déchargeurs, n° 10, avant neuf heures du matin et il sol-
dera le mémoire de 50 fr. qui vous est dû. Je vous prie
de ne pas vous présenter avant le 4 juin, attendu qu'il est
en voyage.
Agréez mes complimens.
H. Balzac
Lettre adressée à M. Fauqueux, papetier, rue Richelieu, n° 28.
Ce mémoire de 50 fr. a trait à « 30 cartes couvertures dorées »
fournies à Balzac le 20 mars 1828; M. Sédillot a payé cette note
le 5 juin 1829.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2* partie, fol. 59.)
LA FAILLITE ET LES DETTES. 407
[105] LETTRE DE BALZAC A M. BONNEVILLE
Monsieur,
M. Sédillot vous prie d'appliquer au remboursement de
L'effet dont M. Boulet poursuit le recouvrement contre
moi ainsi qu'au payement des irais, l'argent du billet,
Constant Chantpie dont vous poursuivez le rembour-
sement et, en cas que cet argent ne soit pas rentré ou
soit insuffisant, d'acquitter l'effet et le mémoire de
M. Boulet pour le joindre à la poursuite générale des
effets Ponthieu pour laquelle j'aurai l'honneur d'aller
vous voir, en étant empoché en ce moment par indispo-
sition, et M. Sédillot vous remboursera immédiatement à
moins que vous n'envoyez chez lui pour avoir les fonds,
alors ayez la complaisance d'y envoyer le matin avant
neuf heures.
Aussitôt que les pièces de ce billet seront rentrées, vous
auriez la complaisance d'obtenir un jugement qui réunisse
les trois affaires des trois billets signés Ponthieu et Cie et
de diriger une poursuite très vive contre tous les signa-
taires et l'endosseur Canel, mais principalement contre
M. Ponthieu, rue de l'Abbaye, n° 14, qui paiera. Il faudra
môme signifier la contrainte par corps à tous.
Agréez mes complimens et mes regrets de ne pas pou-
voir me rendre chez vous et vous éviter qqe peine.
H. Balzac.
Suscription de la lettre : Monsieur Bonneville, rue des Vieux -
Augustins, n° 40, Paris.
Le 10 juin 1829, M. Guitry donne, au nom de M. Duquesnel,
reçu à M. Sédillot d'une somme de deux cent soixante-cinq
francs pour le principal du billet Balzac en faveur de M. Girou-
dot.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2« partie, fol. 63.)
408 LA JEUNESSE DE BALZAC.
[106] LETTRE DE M. ALEXANDRE DE BERNY
A M. SÉDILLOT
1er juillet 1829.
Fonderie de caractères de Laurent et de Berny,
rue des Marais St-G., n. 17.
Polytypie Paris, ce 1er juillet 1829.
Gravure
sur acier, cuivre,
bois, etc.
Monsieur,
Mr Balzac m'ayant prié de remonter à la source de cet
effet pour le payer avant qu'on n'en fasse le protêt, je
viens de le solder.
Je vous prie, en son nom (selon qu'à son dire vous en
êtes convenu avec lui) d'en remettre le montant au
porteur.
J'ai l'honneur d'être avec respect
Al. de Berny.
Suscription de la lettre : Monsieur, Monsieur Sédillot, rue des
Déchargeurs, n° 10.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 65.)
[107] LETTRE DE BALZAC A M. SÉDILLOT
W juillet 4S29.
Mon bon cousin, M. Laurens m'a fait signifier en tems
utile et dans une forme légale un acte de transport de sa
créance sur moi au profit de la dame veuve Cuisinier, sa
sœur, et c'est à elle que doit être payé le terme réclamé.
Cet acte a eu pour but de sauver cet avoir des mains des
créanciers qui le poursuivent relativement à une garantie.
Ainsi, si vous voulez avoir la bonté de payer sur la quit-
tance de cette dame, il n'y aura aucune irrégularité.
Ne vous étonnez pas, mon bon cousin, de ne pas me
voir. Je suis occupé à achever deux ouvrages qui vont
être vendus d'ici à un mois; il faut les mettre en état
LA FAILLITE ET MIS DETTES. 409
d'être imprimés. Je suis accablé d'obligations. Mou tailleur
a un effel de 500 fr. renouvelle {sic) échéant en août. J;u
750 fr. d'arriéré à M. Laurens pour Virc; à compter de
cette époque, je dois lui payer les 89 fr. par trimestre. Je
dois à mon beau -frère un peu d'argent. Je dois à un ami
qui m'aide à vivre eu attendant le produit de nies deux
ouvrages, vous savez que je n'ai guère eu que 100 fr. de
suitte {sic) pour vivre, sur mon Chouan; j'ai cependant
acquitté des petites dettes comme 500 fr. à mon bottier
dont l'effet n'a pas paru sur mon bilan, et vous comprenez
que l'intérêt de mon travail passe avant tout autre ; le
désespoir me prendrait si je n'étais pas absorbé par mon
travail, car je sens que je ne dois plus causer de charges
à ma pauvre mère. Je voudrais pouvoir payer cet effet de
300 fr. à la (in de juillet et je désespère d'avoir fini à cette
époque. — La librairie devient de jour en jour plus mau-
vaise — Ponthieu a passé à Bruxelles en se voyant con-
damné — mais on dit que Schubbart offre 50 °/0. En ce
moment, mon bon cousin, j'ai oublié toute affaire pour
mon travail, car avant tout je dois vivre et ma ressource
n'est que là. — Aussitôt que je serai dans toutes les hor-
reurs de l'impression, comme mes travaux ne réclameront
pas toute mon âme et mes momens, qu'il y aura quelque
chose d'irrégulier dans mes instans de travail, je pourrai
être tout à vous et régler les deux ou trois petites affaires
qui sont en suspens par ma faute.
Adieu, mon bon cousin, agréez le sincère témoignage
de ma reconnaissance.
20 juillet 1829. H. Balzac.
Suscription de la lettre : Monsieur Charles Sédillot, rue des
Déchargeurs, 10, Paris.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, lro partie, fol. 17.)
[108J LETTRE DE BALZAC A M. SÉDILLOT
Paris, 24 9br« 1850.
Mon cher cousin, si je n'ai pas été vous voir relati-
vement au billet Marne, n'en attribuez la raison qu'à la
nécessité où je suis, en ce moment, de passer les jours et
UO LA JEUNESSE DE BALZAC.
les nuits à travailler pour subvenir aux besoins journaliers
de l'existence. La Librairie est morte. Il n'y a pour moi
de ressources que dans les journaux et j'ai à peine le
temps de suffire à leurs exigeances (sic). Il est d'autant
plus malheureux qu'il y ait eu des frais de faits pour le
billet de Marne qu'il vous avait été remis par moi en
compte sur la dette et qu'étant en compte avec M. Marne
et devant à M. Marne de l'argent, je pouvais presque le
balancer et ne rien perdre ; les frais étaient en train quand
je suis revenu de Touraine et il m'a fallu aussitôt faire de
pressantes démarches.
Aussitôt que j'aurai quelques jours à moi, je m'occu-
perai de faire lever les oppositions dont vous me parlez;
mais il faut introduire des instances et, en ce moment, le
plus nécessaire et le plus pressé est de vivre et de gagner
de l'argent pour ma mère et pour moi — car pour payer,
il faut travailler. — Ayez donc, mon cher cousin, la cha-
rité de croire que tous mes efforts tendent à me libérer le
plus promptement possible; j'y emploie tout ce que j'ai
de force et de courage. Avant d'accorder mes affaires liti-
gieuses, il faut avoir le tems devant moi et si je suis un
jour sans travailler, je suis le lendemain sans pain — per-
sonne ne songe à cela.
Agréez, mon cher cousin, les témoignages d'une recon-
naissance sincère et durable.
V/ dévoué cousin H. Balzac
Suscription de la lettre: Monsieur Ch. SédilIot,rue des Déchar
geurs, n° 10, Paris.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 73.)
[109] REÇU DE BALZAC
29 novembre 1830.
Reçu de M. Sédillot les pièces d'un effet Marne et De-
launay-Vallée, ensemble francs : 824,55 cent., je dis huit
cent vingt-quatre francs trente-trois centimes dont je lui
tiendrai compte à sa première réquisition.
H. Balzac.
29 9k" 1830.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2* partie, fol. 76.)
LA FAILLITE ET LES DETTES.
411
[HO] COMPTE DES FOURNITURES DE CARACTÈRES
FAITS PAR LA MAISON LAURENT A BALZAC
ET BARBIER
25 août 1897-29 janvier 18:11'.
BALZAC ET BARBIER, IMPRIMEURS A PARIS
1827 Poids.
Août 25. Filets n" 3, 5 et 13 32\9° à
— ». Interlignes in-18, 8 au cicéro , . . 56,10 à
— 31. — — 2,04 à
Sff.teir.lre 3 — — 15, Il à
— ». — — 22,4 à
— 5. — — 7,4 à
— 12. Cadratins petit texte 3,9 à
— 14. Cadratins et 1/2 cadratins.
petit texte 22,2 à
— ». 1/2 cadratins petit texte 7,2 à
— 17. Cadrats — 26,13 à
— ». Interlignes 4 au cicéro 16,2 à
— 18. — - 20 » à
— 19. — 48,6 à
— ». Cadrats de petit texte 5,14 à
— 20. Interlignes 4 au cicéro 22,16 à
— 21. — — 34,4 à
— 22. Cadratins et 1/2 cadratins
de petit texte 11,13 à
— 24. La volière des enfans, n° 258 . . .
— ». Interlignes des 4 au cicéro .... 60 à
— 1". — des 8 — .... 6,4 à
— 25. Rosace gothique 4 à
— 25. Interlignes 4 au cicéro ...... 61,8 ù
— ». Un vieux quinquet réparé
— 28. Un cul de lampe
— ». Cadrats corps 8 21,10 à
— 29. Cadrats et cadratins corps 8 . . . 11 » à
Octobre 1. — — — ... 34 » à
— ». Filets azurés 2,2 à
A reporter. . .
DOIVENT
AVOIR
Prix
Fr. Cent.
Fr. Cent.
1,10
35,80
1,75
$9,10
1,75
3,95
»
27,75
»
58,90
»
12,70
»
6,25
»
38,70
»
12,45
»
46,90
1 »
16,10
1 »
20 »
1 »
48,55
1,75
10,30
1 »
22,60
1 »
54,25
1,75
20,65
4 »
o »
1 »
60 »
1,75
10,95
2,25
9 »
1 »
61,50
4 »
2 »>
1,50
52,. i5
1,50
16,50
1,50
51 »
1,50
3 20
739 , 35
9 »
1. Malgré le caractère technique de ce compte, que nous a
très obligeamment communiqué M. Tuleu, nous avons cru
indispensable de publier en son entier ce document intéres-
sant à plus d'un titre. Le poids des caractères est en livres
et onces.
412
LA JEUNESSE DE BALZAC.
Report .
1827
Octobre. 2.
— ».
— 6.
— 7.
— 9.
Sphinx, fonds blanc, de Gillé. . .
Chiffres égyptiens, petit texte . .
2 p. de philosophie ornées et om-
brées
Cicéro romain
3,4 a 3
10.
11.
12.
».
13.
».
».
15.
» .
17.
».
18.
19.
12 lames de filets maigres 6 points.
Cadrats et 1/2 cadratins, corps 8. .
2 p. de philosophie, ornées . . . .
Filets anglais
Interlignes 4 au cic". Annales ro-
mantiques f
Interlignes 4 au cic°. L'Ecolier . .
— — Annales. . .
— — L'Écolier . .
Cicéro romain
Filets de cuivre
Gothique du 36 de F1" Didot . . . .
Cicéro romain
8
149,10
205,4
10 »
14,14
13,8
6,8
— 20.
— ».
— 22.
— ».
— ».
— 23.
25.
29.
30.
31.
Interlignes. 4 au cic*. L'Écolier. .
Cicéro romain
— — Espacés
4 couvertures pour Const' Chantpie
Cicéro romain S à bouton
Cadrats petit texte
Espaces de nompareille
Filets de cuivre
Cadrats du 8
Cadrats et espaces de nompareille.
Vignette de Thompson, n* 7. ...
Filets de cuivre
Cicéro romain
Filets, double maigre, 5 p
Vignettes, petit parangon
Filets maigres, 3 p
Filets de cuivre
Coins, feuilles d'acanthe
Cicéro romain
» à
36 » à
41,8 à
24,10 à
24 »
5,15
» 5
29,6
22,8
68 »
58,12
9,12
18,8
a
à
8.8 à
6,3 à
52,8 à
17,15 à
6.3 à
41 » à
12 » à
14 à
14,14 à
12.7 à
1.4 à
67,12 à
423,12 à
26.8 à
53 » à
SoTemir«.l. Interlignes, 4 au cic° 58 » a
— ». Cicéro romain 53 » à
— ». 2 p. de Mignonne (Aubry) 4 » à
A importer. . .
2,50
1,60
1,60
1,10
1,50
2,50
4
,60
,50
*
,60
,60
»
,60
,60
,60
,50
»
,50
,50
,50
.60
,10
»
,10
,50
»
,60
,60
,60
,60
»
,60
DOIVENT
Fr. Cent.
759,35
2 »
9,75
1,25
239,40
328,40
11 »
22,30
33,75
2 »
6 »
56 »
41,50
24,60
38,40
26,15
47 »
36 »
68 »
94 >»
15,60
40 »
12,80
27,75
42,50
27,84
78,75
89,70
5 »
27,84
65,60
13,20
1 75
16,35
55,95
2,50
108,40
678 »
42,40
52,80
38 »
52,80
75
3 301,13
LA FAILLITE ET LES DETTES.
ir,
Report .
1827
N«umlire ». Interlignes, 4 au cicéro 27,0 à 1 »
— ». Cicéro 38,4 ù 1,60
1. Solde des prélèvements d'août et
septembre
». Moitié du prélèvement d'octobre. .
1. Interlignes) l au cicéro 37 » à 1 »
1. 00 chiffres 1, égyptiennes et petit
texte. 2 à 3 »
— ». Polytypage p' dos de couvert, de
l'Anthologie
— ». -i passe-partouts, n* 54, Duplot. . 4 »
— ». Cicéro romain 86,12 à 1,60
— 2. Vieille fonte 319,» à 55 »
— 3. Chiffres égyptiens, petit texte. . . 15 à 3 »
— ». Cicéro romain 96 » à 1,60
— 5. — — 12,12 à 1,60
— 7. — — 101 » à 1,60
— ». Espaces nompareille ....... 7,7 à 5 »
— 8. Vieille fonte 42 » à 55 »
— ». Cicéro romain 104,6 à 1,60
— 14. Polytypage n* 521
— ». — n»52i
— 16. — n* 10 de Thompson . .
— ». Polytypage n° 130
— 17. — n* 11
— 18. Filets de 3 points, n* 3 21,4 à 1,10
— 20. Tremblés de petit texte 14 à 3
— ». Solde du compte de M. Laurent
pour les fournitures antérieures
à l'association
— 23. Cicéro romain 386,10 à 1,60
— ». Espaces de nompareille 12,6 à 5
— ». Différence sur77l,5 cadrats de petit
texte comptés à 1,75 au lieu de 1,50
— 26. Filets simples sur 3 points .... 30,6 à 1,10
— ». Cadratins et 1/2 cadratins nom-
pareille 3 » à 5 »
— 28. Cadratins et 1/2 cadratins nom-
pareille 1,12 à 5 »
— 30. Prélèvement de novembre . . .
Décembre 1. Accolades nompareille et cadratins 4,6 à 4 »
— 4. 2 clichés n" 159 et 160 de F" Didot. 4 »
— ». Un poêle en faïence pour le cabinet
— 7. Matière en lingots pour garniture. 524,4 à 60 »
A reporter
DOIVENT
Fr. Cent.
3 301,13
z7,ao
6 1,20
37 »
o »
16 »
138,80
2,83
153,60
20,40
161,60
37,20
167 »
4 »
2 »
4 »
1,50
5 »
23,35
2,65
» »
618,60
61,87
33,40
15 »
8,75
17,50
16 »
178,72
5 119,80
AVOIH
Fr. Cent.
10,26
200 »
100 »
175,15
23,10
19,25
200
16
744, 05
414
LA JEUNESSE DE BALZAC.
18-27
JoTembre ».
Report.
— 11.
».
— ». 2
— 12.
— ».
— 15.
5 polytypages, armes d'Espagne,
d'Angleterre, d'Autriche et de
Russie
Lettres ornées 2 p. de mignonne. . 10,8 à 3 »
Moitié d'une voie de bois pour la
portière
Leur remise à valoir sur les 324', 4
matière
polytypages, petites armes de
Russie montées dans 160 de
t Firmin Didot
Egyptiennes 2 p. de gaillarde. . . 25,6 à 3 »
Accolades nompareille 3 » à 4 »
Lettres ombrées et p de nom-
pareille
— ». Coulée de St-Augustin
— ». Filets 1/2 gras de 3 p
0~ ». Gothique allemande du 36
— 17. Interlignes 1 p. 1/2
— 20. Cadrats nompareille stéréotype. .
— ». Vignettes, palmettes, coins ....
— ». Interlignes 1 p. 1/2
— 12. Vignettes, feuille d'acanthe. . . .
Décembre ». Cadrats, espaces nompareille. . .
— 24. Lettres grasses petit romain . . .
— 7. Acanthe nouvelle, petites feuilles.
— ». Impression de factures, reçus, etc.
— 26. Polytypage n° 201 . . .
— ». Espaces nompareille hautes. . . .
— 27. Cadrats et espaces hauts de cicéro
— 23. Espaces nompareille
— ». Couronne n* 524
— 31. Prélèvement de décembre
1828
Jantitr 2. Attribut de justice
— 3. Espaces nompareille hautes. . . . 10,2
— 5. Cadrats nompareille hauts .... 6,2
— .. Polytypage n* 597 .
— 9. 2 p. de mignonne ornée 14 »
— 10. 4 clichés : Courrier du Midi ....
— ». Cadrats et 'espaces hauts de nom-
pareille 15,14
— 12. Ass' de cicéro 19,9
— 15. — — 44,6
— ». Espaces hautes de nompareille. . 6,14
— ». Croix d'honneur corps 8 8
DOIVENT AVOIR
Fr. Cent
5119,80
15 »
31,50
17 »
12,12 à
3 »
38,25
4,8 à
3 »
13,50
1 »
» »
1,10
23,6 à
2,50
58,43
2 à
1,75
3,50
19,13 à
5 »
99,06
4,8 à
2 »
9 »
4,1 à
1,75
7,11
6 » à
2 »
12 »
13,12 à
5 »
68,75
9,4 à
2 »
18,50
7,8 à
2 »
15 »
3 »
2,8 à
5 »
12,50
3 » à
1,60
4,80
6,12 à
5 »
33,75
5 »
5 »
75
5 »
1,60
1,60
5 »
4 «
A reporter 5 988,47
76,12
12 »
5 »
50,62
30,62
3 »
2,63
79,58
31,30
71 »
54,38
LA FAILLITE ET LES DETTES.
415
1 828
Jantirr »
— 16
— 17
— »
— 10
— »,
— 25.
— 23.
— ».
— 25.
— 31.
Pétriir 7.
— 11.
— 12.
— 13.
— 14.
— 16.
— 12.
—
23
Jamier
19.
Pérrier
27
—
»
—
»
—
29.
—
29.
lars
1".
Report, .
. 10 clichés : Moka en poudre. . . .
. Ass1 de clcéro 9,3
. 50 bandes imprimées : Abonnement
à le lecture
. Ass' de clcéro 47 »
. Ass' de mignonne 4,7
— — 2,3
Ass' de cicéro 48,8
Série de chiffres, comp" et 6 tirages
à 12 exempl
Circulaire, composition annulée. .
Cadrats et espaces hauts, corps 9. 4,2
Cadrais et espaces de cicéro . . . 47,12
Ass' cicéro 19,4
Prélèvement de janvier H. Balzac.
Vignettes petit romain 2 »
— petit canon 6 »
Vignettes grecque nompareille . . 1,8
Acanthe anglaise sur gros canon . 15 »
Pelmette. fond blanc 18,8
Chiffres gras, corps 9 6,8
Montage de 8 clichés, sur bois,
couvert., et prosp. de la collec-
tion
Montage de 4 clichés, sur bois,
institution Bourdon
6 lettres montées sur bois : Romans
8 lettres montées sur bois :
Zschokke
Fournitures faites à l'imprimerie
par Fessin et réglées par la fon-
derie dans sa facture générale . .
N*244
Ajustage par Drevault de 2 plaques
du stéréotype
Interlignes 8 au cicéro 6,6
Filets n°10, 6P 10,3
Interlignes 8 au cicéro 32,2
— — 13,12
Prélèvement de février
Du 23 août 1827; 100 adresses vélin.
Argent
1 cliché, tête de page (Allain) en-
semble 3 sujets
1 cliché, tête de page (Allain) sépa-
rément 3 sujets
A reporter. .
à 1,60
à 1,60
à 3,25
à 1,60
à 2 >»
là 1,60
2,50
2 »
à 4 »
à 1 »
à 2 »
à 2,50
à 1,75
à 1,10
à 1,75
à 1,75
2,50
2,50
DOIVENT
Fi. Cru!
5988,47
14,70
75,20
21,52
77,60
8,50
107,20
5 »
12 »
6 »
30 »
37 »
16,25
6 »»
2 »
6 »
802,32
5 »
12 »
11 14
11 20
56,22
24,05
AVOIR
Fi cm
1 10f,05
5 »
10 ■
200
200
5
600
7 348,57 I 2136,05
416
A JEUNESSE DE BALZAC.
Report
18-28
Bars 6. Espaces et cadrats 8 au cicéro, sté-
réotypie 18 » à 2 »
— ». Interlignes hautes 8 au cicéro. . . 22 » à 1,7a
— ». Lingots, p' la stér 20 » à 90 »
— ». Bizeaux — ... 6 » à 90 »
— S. N* 492 nouveau
— ». Interlignes 4 au cicéro 95,5 à 1 »
— 8. Vieux vêtements pour Marie. . . .
— 12. Cadrats et cadratins du 8 hauts . . 22, 14 à 2 »
— 14. Espaces du 8 7,12 à 2 »
— 15. Argent
— 17. Sa remise E' V" Thiercelin au
20 nov. 1828
— ». Sa remise E» V0' Thiercelin au
51 janvier 1829
— ». Sa remise E1 V" Thiercelin au
51 mars 1829
— 17. Montage sur bois de 2 couvert,
grand in-8
— 19. Interlignes hautes 8 au cicéro ... 21,12 à 1,75
— 20. Espaces hautes du 8 11,14 à 2 »
— 21. Interlignes 4 au cicéro 24,8 à 1,75
— ». Lingots pour le stéréotype 53 » à 90 »
— ». Bizeaux — .... 21,4 à 90 »
— 26. Lettres grasses de petit romain. . 11,14 à 2,50
— 28. Etat des lieux de la fonderie. . . .
— 28. Vieux filets baissés pour la stéréo-
typie 25 » à 25 »
— 31. Prélèvement de mars
Avril 2. Lettres de 2 p. petit texte ordi-
naire 34 » à
— ». Lettres de 2 p. mignonne ordinaire 20,12 à
— ». Lettres de 2 p. mignonne gras. . . 26,6 à
— ». gyptiennes petit romain 21,14 à
— ». — 2 p. de nompareille. . 20 à
— ». Espaces et cadrats du 8 42,4 à
— ». Filets double maigre 3 p 17,6 à
— ». Lettresgrasses2p.de cicéro. . . 15,2 à
— ». — 2 p. de philosophie . . 21,12 à
— ». Lettresgrasses2p.de petit romain. 22 à
— ». 2 p. de petit romain ord 17,10 à
— ». 2 p. de gaillarde ord" 27,12 à
— ». 2 p. de petit rom. ombré 24,2 à
— 4. 2 p. de petit texte, grasses 15,8 à
— ». Interlignes 4 au cicéro 39,12 à
A reporter. . .
DOIVENT
Fr. Cent.
7 518,57
36 »
58,50
18 »
5 40
2 »
96,51
45 , 75
15,50
38.05
25,75
42,87
47,70
19,12
29,62
6,25
2,50
85 »
5 »
62,25
3 »
79.12
3 »
65,62
2 »
60 »
2 »
84,50
1,10
19,10
2 »
30,25
2 »
43,50
2 »
44 »
2 »
55 , 25
2 »
55,25
2,50
60,31
2,50
58,75
1 »
59,75
8615,84
LA FAILLITE ET LES DETTES.
il 7
1828 Report. . .
uni 5. Partie du prix des bois du La Fon
taine vendus à Durouchall . . .
— ». •> imi> de sujets graves au trait à
paj er a^ ec !<■ produll des deua
["• polvl ypages vendus
». Egyptiennes petil romain s
Points, corps 8 1,14
— 8. l'oinis, corps s .
— il, 4 pages in i pour Disse} et Piver .
montées sut bois
— 12, Interlignes 1 au c* 67,12
— ». Filets de 3P 7,12
— ». 2 p. de philosophie ord" 29 »
— ». 2 p. de petit texte, ornés 25 »
— 15. Filets 6,4
— 16. — 6 points -20,li
— 17. Interlignes hautes, 8 au cicéro. . . 6,8
— 21. égyptiennes petit romain 2 »
— 24. — — 1,2
— ». Filets maigres 5 p 13,6
— "24. Lettres en bois stéréotypées. ... 107 »
— ». Vieille matière 424 »
— 25. Egyptiennes petit romain 5,10
— 25. Sa remise 1»" U. Canel au 5 sep-
tembre
— ». Sa remise b"1 U. Canel au 30 sep-
tembre
«ai 1". Interlignes 6 au c* 19,12
— 2. — — 29,12
— 3. Un pain de régule 22,12
— ». N- 514
— 10. 2 cadres in-12, vignettes stéréoty-
pées et montées sur bois
— 13. Egyptiennes petit romain 55,10
— 19. Italiques 7 au c" 22,8
». Régule 22,6
— 23. Filets azurés 5,12
27. Interlignes 4 auc 72 »
— ». Bizeaux de nompareille 20,4
— 29. N- 294
— 30. Régule 10
Juin 4. Divers objets réglés au mécanicien
Mabeu
— 16. 100 kg. d'huile à brûler fournie cet
hiver à la stéréotj'pie
Juillet 9. Bois pour la stéréotypie
A reporter. .
1 . Il y a ici une erreur d'addition ; le total est 9
a
1 »
;'i
1,10
à
2 »
à
3 »
à
1,10
a
1,10
à
1,75
à
3 »
à
3 »
à
1,10
à
1 »
à
55 >»
à
3 »
1,25
0 »
1,60
1,25
1,50
1 »
1,25
1,25
80 »
DOIVENT
i i Cent
8615,84
1,50
5,62
12 »
67,75
58 »
7."> »
6,87
22,95
11,37
6 »
5,37
1 i , 70
16.87
24,68
57,18
28,43
5 »
50 »
106,87
36 »»
27,96
8,62
72 ».
•2:.,.-.!
8 »
12,50
80 »
10 ..
9 441, 05 !
AVOII!
1 1 Cent
I 265,05
100 »
107 »
233,20
300
1000 »
85
6 288,25
110,91.
27
us
LA JEUNESSE DE BALZAC.
1829
JaiTier
Mars
tnll
1831
JiiTier
Report.
28. Fleurons fournis en déc. 1827 à
Cavillon et Moreau p. Al. Bau-
douin
28. 200 affiches du Traité du dol pour
Comynet d'Avallon
17. Montage sur bois de 2 couvertures
gr. in-8, géographie Baudouin.
20. 2 matrices de gravures et 1 ma-
trice de cinq filets de l'Opinion.
16. Acompte sur les impressions de
notre spécimen et autres objets.
29. Complément de sa facture d'impressions
». Solde du compte de Delâtre, de Cambray, pour
i rames de papier imprimé égarées, sans frais.
». Solde reporté au compte de M"" de Berny. . . .
DOIVENT
AVOIR
Fr. Cent
Fr. Cent.
9-141,05
6288,25
51 »
21,50
1,50
40 »
4 400 *
83 »
128,25
1210,96
10 852,76
10 832,73
(Archives de la fonderie Deberny.)
DOIT
AVOIR
18 10
îTrii 16. Prêté à Balzac depuis longtemps qui devait le
rendre de jour en jour et qui paraît ne pas
devoir le rendre 500 »
Perle probable de cette somme1. 300 »
Livre des comptes courants n° 6, du 28 février 1858 au
15 avril 1840, folio 385.
(Archives de la fonderie Deberny.)
1. Ces cinq mots, imprimés en italiques, sont écrits à l'encre
rouge sur le registre.
Nous tenons de M. Arthur Rhoné qu'un jour M. Alexandre de
Berny vit arriver Balzac qui lui dit : « Prète-moi 500 francs,
j'en ai besoin pour payer un acte. »
Ce prêt de 500 francs semble bien être celui porté sur les
livres de la maison de Berny, à la date de 1840, comme fait
depuis longtemps ; l'acte en question serait relatif à l'acquisi-
tion des Jardies par Balzac, en 1857. « J'ai acheté ici, écrit-il à
M™0 Hanska le 10 octobre 1857, un petit terrain d'une quarantaine
de perches sur lequel mon beau-frère va me faire bâtir une
maisonnette où je vais dès lors demeurer jusqu'à ce que ma
fortune se fasse et où je resterai toujours si je reste gueux.
LA FAILLITE ET LES DETTES. 419
[III! BALZAC ASSIGNÉ DEVANT LE TRIBUNAL
DE COMMERCE DE LA SEINE
S juillet 1834.
Le 3 juillet 1834, M Michel Henrion, huissier, à la
requête «le M. Pichon, ancien libraire, représentant
M. Delatouche, demeurant à Paris, pue Christine a0 •">, et
M. Decaix, propriétaire, demeuranl 6 Paris, nie Mr le
Prince n° 24, agissant lous deux comme commissaire el
représentant la masse des créanciers du sr Emmanuel
Drevet, ancien marchand de papiers, à Paris, rue d'Anjou-
Dauphine, n° 6, donne assignation à Balzac et à Barbier,
au nom et comme ayant droit de la Société Balzac et
Barbier, imprimeurs à Paris, à comparaître le 10 juillet
1834, à l'audience du Tribunal de commerce de la Seine;
pour s'entendre condamner solidairement à payer aux
demandeurs la somme de trois cent quatre-vingt francs,
restant dus sur une somme de onze cent quarante francs,
montant de deux billets souscrits, l'un de 700 francs, le
20 juillet 1827, l'autre de 440 fr., le 20 octobre de la
môme année.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e part., fol. 77.)
Quand elle sera bâtie et que j'y serai, ce qui pourra être pour
le mois de janvier prochain, je vous en aviserai, et vous pourrez
alors m'écrire sous mon nom, en mettant le nom de mon pauvre
ermitage qui est Les Jardies, celui de la pièce de terre sur
laquelleje me pose comme un ver sur sa feuille de laitue »
Collection Lovenjoul, ms. A 301, fol. 434. — Lettres à l'Étrangère,
p. 427 (lettre CXXIX, 12 octobre 1837). Voir, sur la rédaction
de l'acte, Champfleury, Balzac propriétaire, pp. 13-16.
APPENDICE IX
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC
LISTE DES LIVRES
SORTIS DES PRESSES DE LA MAISON HONORÉ DE BALZAC
La liste des impressions faites par Honoré Balzac,
que nous publions ci-dessous, est aussi complète que
possible. Toutes les impressions qui ont été régulière-
ment déposées, par conséquent enregistrées dans la
Bibliographie de la France, sont consignées dans cette
liste, mais nous ne nous sommes pas contentés des
mentions insérées par Beuchot; nous avons vu les
exemplaires des livres, brochures ou prospectus impri-
més par Balzac et nous avons fidèlement transcrit leurs
titres. Pour ceux qu'il nous a été impossible de rencon-
trer, nous les avons cités d'après la Bibliographie de la
France.
Nous avons suivi, par année, l'ordre chronologique
d'enregistrement dans ce journal. Certaines impres-
sions ne figurent qu'à la table alphabétique des ou-
vrages, et sans aucune indication de date de dépôt,
quelques-unes n'y figurent pas du tout; nous avons
mentionné les unes et les autres à la fin de chacune des
LES IMPRESSIONS FAITES l'Ai'. BALZAC. 421
années 1826, 1827 el 1828. Nous n'avons donné la colla-
tion que pour les brochures comportant moins de cent
La mention : Imprimerie de //. Balzac, rue des Marais-
S.-G, n. 17 est le plus ordinairement inscrite soit au
verso du faux-titre, soit au verso du titre; pour les bro-
chures ou prospectus qui n'ont qu'un simple titre de
départ, la mention se trouve généralement au bas de la
dernière page. Nous n'avons pas cru devoir répéter
cette indication à la suite de chacun des articles. Nous
avons mentionné la date d'enregistrement dans la
Bibliographie de la France désignée parles lettres B.F.
Pour faciliter les recherches aux amateurs d'impres-
sions balzaciennes, nous avons pris soin de relever la
cote que porte chaque numéro, à la Bibliothèque
Nationale, désignée par les lettres B. N1.
ANNÉE 1826
1° Deuxième tirage à mille exemplaires. — Pilules anti-
glaireuses de longue vie, ou grains de vie, de Cure, phar-
macien, à Paris, rue St. -Antoine, n° 77 (ancienne maison
Cadet) [Paris, imprimerie de H. Balzac, rue des Marais
S.-G. n. 17] s. d. [1826J. In-8.
4 pp. (la dernière blanche) — Le nom et l'adresse de Balzac
se trouvent au bas de la 3e page. (Bibliothèque Nationale :
Te151 1023 bis (recueil).
Les exemplaires du cinquième tirage comportent 4 pp. d'im-
pression et le nom de Balzac est à la 4e page. Nous n'avons
pas vu le premier tirage que nous citons d'après la Bibliogra-
phie de la France, du 29 juillet 1826, n° 4957. Ce prospectus est
la première impression de Balzac que nous connaissions de
façon certaine.
1. M. Marcel Bouteron a relevé, à notre intention, dans la
collection balzacienne d'un de ses amis, M. J. Gabalda, l'indica-
tion de quelques livres ou brochures imprimés par Balzac, que
nous n'avions pas connus lorsque parut la première édition de
notre ouvrage. Grâce à son obligeante communication, notre
précédente liste se trouve donc, aujourd'hui, enrichie de
quelques numéros.
422 LA JEUNESSE DE BALZAC.
2° — Plaidoyer pour Henriette Cornier, feBerton, accusée
d'assassinat, prononcé à l'audience de la Cour d'assises
de Paris, le 24 juin 1826. Par N. Fournier, avocat stagiaire
près de la Cour Royale de Paris. Paris. A. Sautelet et Cic,
libraires, place de la Bourse, 1826. In-8.
47 pp. et 1 p. blanche. — B. F., 2 août 1826, n° 5063. — B. N. :
8° F3 145. (pièce 719.)
5° — Trente-cinquième tirage à mille exemplaires. —
Mixture brésilienne de Lepère, pharmacien, à Paris, place
Maubert, n. 27. Instruction traduite en italien, anglais,
espagnol et allemand. (A la page 2 : Paris. Imprimerie de
H. Balzac, rue des Marais S.-G., n. 17), s. d. (1826). In-8.
8 pp. chiffrées plus 8 n. chiffrées pour les traductions. — B. F.,
12 août 1826, n° 5215. — B. N. : Te23 588 (45) et (46).
4° — Boussole du commerce des bois de chauffage,
bois carrés, charbons de bois et charbons de terre des-
tinés à l'approvisionnement de Paris; par H.-E. de La
Tynna et C.-P. Rousseau. Prospectus (A la fin : Impri-
merie de H. Balzac, rue des Marais S.-G., n. 17), s. d.
(1826). In-8.
4 pp. — B. F., 16 septembre 1826, n° 5959. — B. N. : 8° Q. 2897.
Voir ci-dessous les n0' 77 et 78.
5° — Rapprochement de la Théorie d'Alexandre Muller
et de la Théorie intitulée : Maniement du sabre, litho-
graphie par ordre de M. le comte de Durfort. A Paris,
imprimerie de Balzac, s. d. (1826). In-4°.
Une feuille 1/2. — N'est pas à la Bibliothèque Nationale. Cité
d'après la Bibliographie de la France du 20 septembre 1826,
n° 5985.
6° — OEuvres de J. F. Ducis. Paris. Librairie française-
étrangère, Palais-Royal, galerie de bois, n° 233 (1826-1827).
8 vol. in-32.
B. F. : Tome I : 30 septembre 1826, n° 6190: tome II : 14 oc-
tobre 1826, n° 6426; tome III : 25 octobre 1826, n° 6576; tome IV :
6 décembre 1826, n° 7536; tome V : 16 décembre 1826. n° 7685;
tome VI : 20 janvier 1827, n° 582; tome VII : 10 février 1827,
n° 1073; tome VIII : 28 février 1827, n° 1624.
Le tome IV est enregistré, par erreur, comme tome V, et le
tome V comme tome VI. Les couvertures des tomes V à VIII
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC.
sont enregistrées le 6 décembre 1820. — B. N. : Inv. Yf. 4605-
ir.io.
7° — Leçons d'histoire prononcées à L'École normale par
C. F. Volney, pair <lc France, membre de l'Institut, etc.,
augmentées d'une leçon inédite <-i suivies du Discours de
Lucien sur la manière d'écrire l'histoire. Paris, Baudouin
frères, libraires, rue de Vaugirard, n° 17, 1826. ln-32.
C'est la lrt livraison d'un « Cours complet des Hautes
Études ».
Voir ci-dessous le n° 1K. — B. F., 14 octobre 1826, n° 6381. —
B. N. : Inv. G 30064.
8° — Petit dictionnnaire critique et anecdotique des
enseignes de Paris, par un batteur de pavé. Paris. Chez
les marchands de nouveautés, au Palais-Royal, 4826. In-32.
Un batteur de pavé est un pseudonyme de Balzac. — B. F.,
18 octobre 1826, n» 6444. — B. N. : Lk7 7415.
9° — Le Troubadour français contenant romances,
chansons de table et rondes, tirées des meilleurs chan-
sonniers. Rédigé par quelques convives du Caveau
moderne et des Soupers de Momus. Paris, chez Caillot,
libraire, rue St-André-des-Arts, n° 57 ', s. d. (1826). In-12.
B. F., 25 octobre 1826, n° 6574. — B. N. : Inv. Ye 34169.
10° — Napoléon et Talma aux Champs elysées. Dia-
logue à la manière des anciens, précédé d'une notice his-
torique sur la vie, la maladie, les derniers momens, les
funérailles et discours prononcés sur la tombe de ce
grand Tragédien. Par C. F. Bertu. Paris. Chez les mar-
chands de nouveautés, au Palais-Royal, 1826. In-32.
65 pp. et 1 p. blanche. — B. F.. 28 octobre 1826, n° 6748. —
B. N. : Lb49 465. — Une seconde édition est enregistrée dans
la B. F., 23 décembre 1826, n° 8012. — B. N. : Lb49 465 A.
11° — L'Echo Européen, journal. Prospectus (A la fin :
Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais S. -G n° 17), s. d.
(1826). In-12.
4 pp. — B. F., 8 novembre 1826, n° 6922. — B. N. : Inv. Z 8168.
— Le journal, qui avait pour éditeurs Lecointe et Durey, n'est
pas imprimé par Balzac.
124 LA JEUNESSE DE BALZAC.
12° — Œuvres de Colardeau, de l'Académie française.
Paris, librairie ancienne et moderne, Palais-Royal, galerie
de bois, n° 263-264, 1820. 2 vol. in-52.
B. F., Tome I : 18 novembre 1826, n° 7140; tome II : 29 no-
vembre 1826, n° 7537. — B. N. : Inv. Ye 48762-18763.
13° — Contes de La Fontaine. Paris. Librairie française-
étrangère, Palais-Royal, galerie de bois, n. 233, 1826.
2 vol. in-52.
Ces deux volumes figurent seulement à la « table alphabé-
tique des ouvrages » de la Bibliographie de la France, avec
l'indication qu'ils ont paru en novembre. Ils ne sont pas enre-
gistrés dans ce journal.
14° — Discours de M. Canning, prononcés au Parle-
ment d'Angleterre, précédés du message de S. M. Britan-
nique au Parlement. Ces discours sont accompagnés de
ceux prononcés par MM. Peel, secret. d'Etat, Rob.
Wilson, Brougham, Baring, Hume, Wood, etc. ; et tous
ont été traduits sur les originaux anglais. Paris. Librairie
ancienne et moderne, Palais-Royal, galerie de bois, n. 263-264,
1826. In-32.
64 pp. — B. F., 23 décembre 1826, n° 7998. — B. N. : Ng. 243.
15° — Napoléon et Talma aux Champs Elysées... Se-
conde édition. Paris. Chez les marchands de nouveautés.
1826. In-32.
Voir ci-dessus le n° 10.
16° — La Liberté individuelle, ou plaidoyer et réplique
prononcés par Me Dupin aîné, avocat, aux audiences des
5 et 9 décembre 1826 dans la cause de Me Isambert. Paris.
Baudouin frères, libraires, rue de Vaugirard, n° 17, 1826. In-8.
iv-66 pp. — B. F., 23 décembre 1826, n° 8021. — B. N. : Lb49 48 ï.
Voir ci-dessous le n° 168.
17° — Opinion de M. le général Sébastiani, député du
département de l'Aisne, sur le projet d'adresse de la
Chambre des députés. Paris. Baudouin frères, libraires,
rue de Vaugirard, n. 17, 1826. In-8.
16 pp. — B. F., 5 janvier 1827, n° 24. — B. N. : Le5S 14, i« pièce.
LES IMPRESSIONS FAITES PAU BALZAC. 425
IN" — Leçons de Littérature prononcées 6 l'Ecole nor-
male, par J, F.La Harpe. Puris, Baudouin frères, librain
rue de Vaugirard, n. /?. 1826. ln-32.
B. F., 10 janvier 1827, n° 123. — B. Ni : Inv. Z 52621. V. ci-
dessus le u" 7.
19° — Affaire Têtard. Accusation d'assassinat portée
contre Joseph Têtard, ouvrier maçon, défendu par
M1' Bautier. Paris, Ladvocat, libraire au Palais-Royal, 1826.
In-8.
5G pp. — B. F., 13 janvier 1827, n* 189. — B. N. : 8" F5 525
(pièce 2840).
ANNÉE 1827
20° — L'Académie, satire. A Paris, chez Urbain Cartel,
rue Saint-Germain-des-Prés, n. 0, 1827. In-8.
Par H. de Latouche, d'après Qùérard ; par Germond, d'après
Barbier. Une feuille 1/2. N'est pas à la Bibliothèque Nationale.
Cité d'après la Bibliographie de la France du 6 janvier 1827,
n° 57.
21° — Des arrestations arbitraires, ou Débats du procès
intenté à M. Isambert, avocat, et à la Gazette des tribu-
naux, au Journal du commerce et à l'Echo du Soir. Paris.
Baudouin frères, libraires, rue de Vaugirard, n. il, 1827.
In-8.
B. F., 10 janvier 1827, n° 112. — B. N. : Lbi9 1570.
22° — Almanach-Barême pour l'an 1827. A Paris, chez
Prevot, rue Hautefeuille, n. 23, 1827. In-plano.
Demi-feuille. — Cité d'après la Bibliographie de la France, du
15 janvier 1827, n° 190.
25° — Almanach du commerce de la charcuterie de la
Ville et faubourgs de Paris; contenant les noms, pré-
noms et demeures de MM. les marchands charcutiers de
la ville et faubourgs, avec les principales lois, ordon-
nances de police et les instructions nécessaires relatives
au dit commerce. A Paris, au Bureau du commerce de la
charcuterie, rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, n. 24, près
celle Sainte- Avoye, quartier du M ont- de- Piété, 1827. In-18.
B. F., 15 janvier 1827, n° 192. — B. N. : Inv. V. 27451,10.
126 LA JEUNESSE DE BALZAC.
24°— Règlement de la R . *. L .-. Saint-Jean, sous le
titre distinctif de la Bonne foi à l'O . • . de Saint-Germain-
en-Laye. Imp. de Balzac, à Paris. 1827. In-12.
Cité d'après la Bibliographie de la France du 15 janvier 1827,
n° 240. — Ne se vendait pas.
25° — De la tolérance arbitraire et coupable du minis-
tère à l'égard des Jésuites, de leur rétablissement légal,
ou de leur expulsion selon les lois du Royaume. Considé-
rations politiques par A. -S. Saint-Valry. Paris. Sautelet et
compie, place de la Bourse. Janvier 1827. In-8.
B. F., 17 janvier 1827, n" 301. — B. N. : Ld39687.
26° — Mémoires de Dorothée, née Rhennet, surnommée
l'Amazone de la Grande Armée, chevalière de la Légion
d'honneur, écrits par elle-même, et revus par M. J. M. G.
Prospectus. (A la page 3 : Imprimerie de II. Balzac, rue des
Marais S. -G., n. 17). In-8.
4 pp. — B. F., 17 janvier 1827, n° 315. — B. N. : Ln27 17354.
27° — OEuvres de J. F. Ducis. Paris, librairie française-
étrangère, 1826-1827. 8 vol. in-32.
Voir ci-dessus le n° 6.
28° — Annuaire et liste de messieurs les perruquiers et
coiffeurs de la ville de Paris pour l'an 1827. Paris. Impri-
merie d'il. Balzac, rue des Marais S. -G., n. 17, s. d (1827).
In-8.
72 pp. et 5 ff. n. chiffrés. — La date n'est que sur la couver-
ture, ornée d'un encadrement. B. F.. 20 janvier 1827, n° 408. —
B. N. : Inv. V 28051,6.
29° — Mémoire adressé à M. le conseiller d'État, préfet
de police, par le commerce de bois de chauffage en chan-
tiers de la Ville de Paris. (A la fin : Imprimerie de H. Balzac,
rue des Marais S. -G., n. 17), s. d. (1827). In-4°.
8 pp. — B. F., 27 janvier 1827, n° 706. — B. N. : Vp. 25722.
30° — Stances sur la liberté de la Presse, par Auguste
Crebassol. Prix : 50 centimes. Paris, chez tous les mar-
chands de nouveautés, 1827. In-8.
7 pp. et 1 p. n. chiffrée. La couverture tient lieu de titre.
B. F., 51 janvier 1827, n° 787. — B. N. : Ye 41089.
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 427
31°— Nouvelles observations adressées à M. le con
seiller d'État, préfet <ie police, par le commerce <l<- bois
de chauffage en chantiers pour l'approvisionnement <l<- la
ville de Paris (A la lin : Imprimerie de If. Balzac ) rue des
Marais 8. G., n. il), s. d. (1827). In4°.
15 pp. et I p. blanche. — B. F., fO février 1827, n° 1009. —
B. N. : Vp. 25722.
52° — L'Album historique et anecdotique. Toux pre
mier. Paris. Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais S.-Cr.,
n. 77, 1827. In-8.
La couverture est ornementée. B. F., 10 février 1827, n° 1129.
— B. N. : Le* 2812.
35° — Politique religieuse et philosophique, ou consti-
tution morale du gouvernement. Par M. le baron Bigot de
Morogues (Prospectus). A Paris, chez Renard, 1827. In-8°.
Un quart de feuille. — N'est pas à la Bibliothèque Nationale.
Cité d'après la Bibliographie de la France du 14 février 1827,
n° 1092.
Voir ci-dessous le n° 40.
54° — Le Trésor des poumons du docteur Portai, pré-
paré par Cure, pharmacien, rue Saint-Antoine, n° 77, à
Paris. (A la fin : Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais
S. -G., n. 17), s. d. (1827). In-8.
Prospectus de 4 pp. — B. F., 14 février 1827, n° 1205. — B. N. :
Te71 14 (57).
35° — Un mot sur le projet de loi relatif à l'organi-
sation du jury, sur le projet de code militaire, première
partie, et sur l'article XI de la loi du 21 octobre 1814; par
un magistrat. Paris, au dépôt des lois, chez Madame veuve
Dècle, place du Palais-de-justice, 1827. In-8.
70 pp. — B. F., 21 février 1827, n° 1419. — B. N. : Lf1»3 3G.
Cette brochure, dédiée « à M. le Conseiller d'État, pair de
France, premier président de la Cour Royale de Paris », est
signée : De Berny.
On sait que M. de Berny, protecteur de Balzac, était con-
seiller de cette même Cour.
36° — OEuvres complètes de Le Sage. Le Bachelier de
Salamanque. A Paris, au Palais-Royal, n. 263-264, et chez
Berquet, 1827. In-32.
fâ8 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Balzac n'a imprimé que les faux-titres, les titres et les cou-
vertures de ces deux volumes, parus en 4 livraisons, qui ne
sont pas à la Bibliothèque Nationale, et que nous citons d'après
la Bibliographie de la France du 28 février 1827, n° 1622.
Par contre, la Bibliographie de la France n'enregistre pas les
impressions suivantes relatives à Le Sage que possède la Bi-
bliothèque Nationale.
Voir l'article suivant :
57° — OEuvres complètes de Le Sage. Gusman d'Alfa-
rache. Paris, librairie ancienne et moderne, Palais-Royal,
galerie de bois, n. 263-264. Théophile Berquet, libraire, quai
des Augustins, n° 39, 1827. 2 vol. in-32.
Comme pour les deux volumes précédents, Balzac n'a im-
primé que les faux-titres et les titres, plus les couvertures des
huit livraisons de l'ouvrage. Ces couvertures roses, encadrées
de deux filets, portent, dans le bas, entre les filets : Imprimerie
de H. Balzac.
B. N.. 8° Q 2897.
Voir l'article suivant :
38° — OEuvres complètes de Le Sage. Le Diable boi-
teux. Paris, librairie ancienne et moderne, Palais-Royal, ga-
lerie de bois, n. 263-264. Théophile Berquet, libraire, quai des
Augustins, n. 39, 1827. In-32.
Même observation que pour l'article précédent.
Balzac a imprimé, pour le Diable boiteux, six couvertures de
livraisons, dans les mêmes conditions que celles de Gusman
d'Alfarache.
B. N. : 8° Q 2897.
Voir l'article suivant :
59° — OEuvres complètes de Le Sage. Estevanille Gon-
zalès. Paris, librairie ancienne et moderne, Palais-Royal,
galerie de bois, n. 263-264. Théophile Berquet, libraire, quai
des Augustins, n. 39, 1827. In-32.
Même observation que pour l'article précédent.
Balzac a imprimé, pour Estevanille Gonzalès, six couvertures
de livraisons et trois titres de volumes.
B. N : 8° Q 2897.
40° — Politique religieuse et philosophique ou consti-
tution morale du gouvernement. Par M. le baron Bigot de
Morogues. A Paris, chez Renard, rue Sainte- Anne, n. 71,
1827. 4 vol. in-8.
IJiS IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 429
\'rst pas à la Bibliothèque Nationale. Cité d'après la Biblio
graphie <lr lu France qui enregistre le tome I, le 7 mars 1x27,
a- 1810; le tome II, le \ avril 1x^7, ir 2464; le i« III, le
16 mai 1X27, a- 3401 ; le tome IV. le 7 juillet 1X27, q« 4473.
Voir ci dessus, p<»ur le Prospectus, l«' n° 33.
il" — Observations de M" Isambert, avocat, dans sa
cause. Paris, imprimerie de II. Balzac, rue des Marais S.-G.,
n. 17, mars 1X27. In-8.
52 pp. — B. F., 14 mars 1X27, n" 1851. — B. N. : LbM 539.
12° — Mémoire présenté à son Excellence le ministre
de la marine et des colonies, sur quelques améliorations
à introduire dans le système administratif adopté pour
l'île de Marie-Galante, par Joseph Pélissié, négociant de
cette colonie. (A la fin : Imprimerie de II. Balzac, rue des
Marais S.G., n. 17), s. d. (1827). In-4°.
1 f., 25 pp. et 1 p. blanche. — B. F., 17 mars 1827, n" 1025. —
B. N. : Lk12 07.
43° — Réfutation succinte de la dénonciation aux Cours
Royales des clubs menaçans de la franc-maçonnerie, par
le F.\ Jules R***, dignitaire d'un des plus nombreux
attel.-. de l'Or.*, de Paris. Prix : 75 c. franc de port 1 fr.
Paris, chez Silvestre, libraire, rue Tkiroux, n° 8, et chez les
marchands de nouveautés, 1827. In-8.
16 pp. dont une blanche. — B. F., 20 mars 1827, n» 2048. —
B. N. : Lb491571.
44° — Deuxième mémoire pour le sieur Louis Aulanier,
contre ses frères, sœurs et beaux-frères. (A la fin : Impri-
merie de H. Balzac, rue des Marais S.-G., n° 17), s. d. (1827).
In-4°.
38 pp. et 1 p. blanche. — B. F., 24 mars 1827, n° 2153. — B. N. :
4n F3, 44. (pièce 1155).
45° — Plaidoyer de Me Isambert pour le capitaine
Muller, contre le général Durfort et contre le procureur
général de la Cour royale de Paris. (A la fin : Imprimerie
de H. Balzac, rue des Marais S.-G., n° 17), s. d. (1827). In-4°.
H pp. et 1 p. blanche. — B. F., 24 mars 1827, n" 2104. — B. N. :
4° F3 000 (pièce 22810).
Nous savons, par une facture de l'imprimerie H. Balzac et
A. Barbier, en date du 3 avril 1827, que ce Plaidoyer a été tiré
150 LA JEUNESSE DE BALZAC.
à 300 exemplaires et que le prix de ce travail (corrections et
50 épreuves en sus) était de 65 francs.
46° — Choix d'anecdotes, de contes, d'historiettes, d'épi-
grammes et de bons mots tant en prose qu'en vers. Paris,
à la librairie ancienne et moderne, Palais-Royal, galerie de
bois, n. 263-264, 1827, 2 vol. in-32.
Cet ouvrage comprend un volume de prose et un volume de
poésie. Voici, d'après la Bibliographie de la France, l'indication
des livraisons qui ont été imprimées par Balzac :
Tome second (poésie), lre livraison, 28 mars 4827, n° 2234.
Tome second (poésie), 28 livraison (4e de l'ouvrage), 11 avril 1827,
n° 2641.
Tome premier (prose), 3e livraison (5e de l'ouvrage), 25 avril 1827,
n° 2849.
Tome second (poésie), 3e livraison (6e de l'ouvrage), 25 avril 1827,
n° 2849.
Tome second (poésie), 4* livraison (7e de l'ouvrage), 12 mai 1827,
n° 5229.
Tome premier (prose), 6e livraison (1 Ie de l'ouvrage) , 16 juin 1827,
n° 3970.
Tome second (poésie), 6e livraison (12e de l'ouvrage), 16 juin 1827,
n° 3970.
Tome premier (prose), 7e livraison (13e de l'ouvrage), 27 juin 1827,
n° 4228.
Tome second (poésie), 7e livraison (14e de l'ouvrage), 27 juin 1827,
n° 4228.
470 — ode sur la nouvelle loi contre la liberté de la
Presse, par A. J. C. S. = Elme (de la Corrèze). Paris, chez
les marchands de nouveautés, 1827. ln-8.
8 pp. _ B. F., 31 mars 1827, n° 2323. — B. N. : lnv. Ye 32748.
48<> — vie de Jean-Baptiste-Elisabeth Asselineau, écrite
par lui-même. Précis de l'acte d'accusation, résumé des
débats et plaidoirie de Me Geehter, suivis de l'arrêt de la
Cour Royale de Paris du 26 mars 1827, qui condamne
Asselineau à la peine de mort. Paris, librairie ancienne et
moderne, Palais-Royal, galerie de bois, nos 263-264, 1827.
In-8.
52 pp. — B. F., 31 mars 1827, n" 2342. — B. N. : Ln27 691.
490 _ pétition à messieurs les membres de la Chambre
des députés. (A la fin : Imprimerie de H. Balzac, rue des
Marais S.-G., n° 47) s. d. (1827). In-4°.
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. r.i
3 pp. et I p. blanche. — Signé : A. U. Minus, veuve Tanchon,
nièce de fou M. Minus, ancien directeur au Trésor, rue d'Ar-
genteuil, q. 18. B. F., 31 mars 1X27, n<»2383. — B. N. : ¥ F* 1387
(pièce 30741).
Voir ci-dessoua le n° 58.
50° — Observations du capitaine Muller, auteur de
l'Escrime à cheval, etc., etc., adressées aux magistrats <le
la Cour Royale de Rouen. Paris. Imprimerie de II. Balzac,
vue des Marais S.-G., n. 17, 1827. In-4°.
20 pp. plus la couverture encadrée. — B. F., 4 avril 1827,
n» 2457. — B. N. : 4« F3 999 (pièce 22818).
Sur la facture relative au Plaidoyer de M" Isamkert que nous
citons plus haut (voir le n° 45) est portée aussi l'impression
des Observations du capitaine Muller. Le montant de la facture
pour ce travail est de 272 francs; mais nous croyons devoir
donner ici le détail de ce compte qui permettra de connaître les
prix d'imprimerie d'alors :
3 feuilles comprenant couvertures encadrées grand in-4°,
1000 ex. papier fin, surcharges de petit texte comprises et une
main de couleur, 75 francs la feuille, soit 225 francs.
Corrections et plusieurs épreuves, 12 francs.
Séchage après piqûre et rognage, 30 francs.
50 épreuves de deux feuilles, 5 francs.
54° — A M. le Président et MM. les Juges composant la
première Chambre du tribunal civil de la Seine, séant à
Paris, pour l'une des branches de ïa maison Salignac de
la Mothe-Fénelon ; contre les héritiers de M. le comte de
Baschi. (A la fin : Imprimerie de II. Balzac, rue des Marais
S.-G., ?i° 17), s. d. (1827). In-4».
8 pp. — Signé : C,e de Verdonnet. — B. F., 7 avril 1827, n° 2533.
— B. N. : 4° F3 1323 (pièce 29424).
52° — Débats du procès intenté à Me Isambert, avocat,
à la Gazette des Tribunaux, à l'Echo du soir et au Journal
du Commerce au sujet des arrestations arbitraires :
Deuxième partie. Cour Royale de Paris. Paris, imprimerie
de H. Balzac, rue des Marais S.-G., n° 17), mars 1827. In-8,
B. F., 11 avril 1827, n° 2648. — B. N. : Lb49 552 (Réserve).
53° — Mémoires de Madame Roland, avec une notice
sur sa vie, des notes et des éclaircissemens historiques.
Par MM. Berville et Barrière. Troisième édition. A Paris,
432 LA JEUNESSE DE BALZAC.
chez Baudouin frères, rue de Vaugirard, n. 17, 1827. 2 vol.
in-8.
N'est pas à la Bibliothèque Nationale. Cité d'après la Biblio-
graphie de la France du 11 avril 1827, n° 2659.
5i° — Œuvres complètes de Condillac. (Faux-titres et
titres des 16 volumes, plus 16 couvertures sur papier de
couleur.) A Paris, chez Baudouin frères, rue de Vaugirard,
n. 17, 1827. In-8.
Seize quarts de feuille. — N'est pas à la Bibliothèque Natio-
nale. Cité d'après la Bibliographie de la France du 11 avril 1827,
n° 2665. Beuchot, le rédacteur de ce journal, ajoute : « Ces
faux-titres et titres, portant la date de 1827, sont destinés à des
exemplaires de l'édition publiée en 1821, 22 et 23, par MM. Le-
cointe et Durey. »
55° — Plaidoyer de Me Dupin, avocat, pour Me Isam-
bert, prononcé devant la Cour Royale de Paris, Ie et
Ve chambres réunies, sous la présidence de M. le baron
Séguier, audience du 15 mars 1827, recueilli par les sté-
nographes. Paris, imprimerie de H. Balzac, rue des Marais
S.-G., n° 17, 18 mars 1827. In-8.
63 pp. et 1 p. blanche. — B. F., 14 avril 1827, n° 2725. — B. N. :
Lb49 544 A.
56° — OEuvres choisies de C.-F. Volney, pair de France,
membre de l'Institut. Paris, Baudouin frères, éditeurs, rue
de Vaugirard, n. 17. Achille Désauges, libraire, rue Jacob,
n. 5, 1827. 6 vol. in-32.
B. F. : Tome I : 25 avril 1827, n» 2882 ; tome II : 9 mai 1827,
n° 5202 ; tome III : ne figure qu'à la « table alphabétique des
ouvrages » ; tome IV : 16 mai 1827. n° 5397 ; tome V : 6 juin 1827,
n° 5841 ; tome VI : ne figure qu'à la « table alphabétique des
ouvrages ». B. N. : Inv. Z 30200-50205.
Voir ci-dessus le n° 7.
57° — Prophétie du général Foy. (Extrait du discours
prononcé, le 20 mars 1821, à la Chambre des députés.)
(Dans le bas : Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais S.-G.,
n. 17), s. d. (1827). In-8.
1 feuillet. — B. F. 2 mai 1827, n° 3090. — B. N. : Lb49 570.
LES EMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 433
b8° Pétition ;» messieurs les membres «le la Chambre
<I<vs Députés. (A la lin : Imprimerie de H. Balzac ^ rue des
Marais S. (',., v. 17). s. <l. (1827). lui".
3 pp. m I p. blanche. — Signé : A. lT. Minus.
Impression différente de celle même pétition déjà décrite
sous le n° 19. _ B. F., I'-' mai IS27, n° 3334. — I'». N. : ' \* F8 138,1
(pièce ."0711).
.Mi" — Révélation au Roi d'un affreux complot, tramé
dans les repaires de In franc-maçonnerie, contre In Reli-
gion el le Troue. Suivie d'un avertissement à S. A. II. le
due d'Orléans, odieusement trompé par In profonde hypo-
crisie de plusieurs Loges mnçonniques. Prix : I IV. par la
poste. A Paris, chez Hiver t, libraire, rue des Mathurins
S. Jacques, n. 18, et chez les marchands de nouveautés, 1827.
In-8.
10 pp. _ b. F., 16 mai 1827, n° 54! 2. — B. N. : Lb*9 595.
60° — Annuaire de la Société des Arts graphiques.
XIXe année. Paris, impr. de Balzac, 1827. In- 12.
Une feuille 2/3. — N'est pas à la Bibliothèque Nationale. Cité
d'après la Bibliographie de la France du 2 juin 1827, n° 3750.
61° — Gazette des tribunaux de commerce. (Prospectus
et acte social.) A Paris, imprimerie de H. Balzac, 1827. In-4°.
Une feuille. — La Bibliothèque Nationale possède d'autres
prospectus de ce journal, mais ils ne sont pas imprimés par
Balzac. Cité d'après la Bibliographie de la France du 2 juin 1827,
n> 3787.
Voir ci-dessous le n° 80.
02° — Réplique de Me Dupin, pour Me Isambert
(audience du 27 mars 1827), imprimée chez Boucher, avec
cette épigraphe : lncivitate nostrâ docuit, in conservayidâ
civium libertate esse privatum neminem. Cic. (A la fin :
Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais S. -G., n. 77), s. d.
(1827). In-8.
72 pp. — B. F., 1G juin 1827, n» 4009. — B. N. : Lb*9 551.
G5° — Proverbes romantiques, par A. Romieu. A Paris,
chez Ladvocat, libraire de S. A. R. le duc de Chartres, quai
Voltaire et Palais-Royal, MDCCCXXVII (1827). In-8.
B. F., 27 juin 1827, n° 4277. — B. N. : Inv. Yf 11475.
28
134 LA JEUiNESSE DE BALZAC.
64° — Nouveau vocabulaire français, où l'on a suivi
l'orthographe adoptée pour la prochaine édition du Dic-
tionnaire de l'Académie, et dans lequel on trouve de
plus : 1° un grand nombre de mots et d'acceptions de
mots généralement reçus et qu'on a distingués par une
étoile; 2° environ huit mille termes de sciences et arts, et
spécialement la nouvelle nomenclature chimique ; 3° un
vocabulaire géographique ; 4° la prononciation de tous
les mots ; 5° l'étymologie des mots dérivés du grec et du
latin; 6° la conjugaison des verbes irréguliers, par
MM. de Wailly, membre de l'Institut, et de Wailly, pro-
fesseur au collège royal de Henri IV. Quatorzième édition,
revue et corrigée par Alfred de Wailly, professeur au
collège royal de Henri IV. Ouvrage adopté par l'Uni-
versité de France pour les Collèges et Ecoles publiques,
et revu, quant aux termes de médecine, d'anatomie et
d'histoire naturelle, par M. Bosquillon, médecin de Paris
et professeur de langue grecque au Collège Royal.
A Paris, chez Rémc-Jit, libraire, rue Pavée, n° il, près du quai
des Augustins. Juillet 1827. In-8.
B. F., 4 juillet 1827, n° 4404. — B. N. : Inv. X 13750.
65° — L'Art de mettre sa cravate de toutes les manières
connues et usitées, enseigné et démontré en seize leçons,
précédé de l'histoire complète de la cravate, depuis son
origine jusqu'à ce jour, de considérations sur l'usage des
cols, de la cravate noire et l'emploi des foulards. Par le
Bon Emile de l'Empesé. Ouvrage indispensable à tous nos
fashionables, orné de trente-deux figures explicatives du
texte et du portrait de l'auteur. Paris, à la librairie univer-
selle, rue Vivienne, 2 bis, au coin du passage Colbert, et chez
tous les marchands de cravates, de cols et de foulards les plus
en vogue de la Capitale, 1827. In-18.
D'après Asselineau, le Bon Emile de l'Empesé est M. Lefebvre-
Duruflé; d'après Quérard, M. Emile Marco de Saint-Hilaire. On
a aussi attribué cet ouvrage à Balzac.
B. F., 7 juillet 1827, n° 4431. — B. N. : Li11 1."».
Balzac a imprimé une deuxième, une troisième et une qua-
trième édition de cet ouvrage. La deuxième et la quatrième sont
enregistrées dans la Bibliographie de la France des 25 juillet 1827,
n° 4814, et 11 août 1827, n° 5188. Le rédacteur de ce journal,
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 435
Beuchotj déclare n»> pas connaître la troisième. Voir ci-dessous
les n- 71, 72 et 74.
66° - Cinq Mars, ou une Conjuration sous Louis XIII.
Par le comte Alfred de Vigny. Troisième édition, revue
et corrigée. Paris. Urbain Canel, libraire, rue Saint-Ger-
main-des-prés, n° 9, 1X27, 2 vol. in-8.
B. F., 7 juillet 1827, n» 4434. — B. N. : Inv. Y* 73272-73273.
67° — Les Contagionistes réfutés par eux-mêmes, par
Eug. Sulpicy, docteur-médecin de la Faculté de Paris.
Paris, chez les marchands de nouveautés, 1827. In-8.
52 pp. dont une blanche. — B. F., 7 juillet 1827, n° 4437. —
B. N. : Td*814.
68° — Manuel de l'Étranger à Paris et aux environs,
orné d'un plan de la Capitale, de quarante-quatre gra-
vures représentant tous les monumens de Paris et d'une
carte indiquant les divers palais du gouvernement, les
hôtels des ministères, les établissemens civils et religieux,
les mairies, promenades, théâtres et jardins publics. Cet
ouvrage est terminé par un Dictionnaire des rues, des
barrières, des quais, des boulevards, etc. Par N. Richard.
Paris. Baudouin frères, éditeurs. Delaunai, Palais-Royal
1827. In-32.
Balzac semble n'avoir imprimé que des faux-titres et des
titres pour cet ouvrage, déjà publié en 1826, sous le titre de :
Dictionnaire de poche de Paris... De nouveaux titres ont encore
été réimprimés en 1828 et 1829 par Pinard.
B. F., 11 juillet 1827, n° 4550. — B. N. : Lk7 6166.
69° — Le Bibliographe français, ou le Littérateur pari-
sien et provincial. Feuille générale d'annonces, tant mar-
chandes qu'analytiques concernant les sciences, les arts,
les lettres, l'industrie et le commerce; par une société de
savans et de gens de lettres (A la fin de chaque numéro :
Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais S. -G., n° 17) 1827
Pet. in-fol.
Les prospectus et les 6 premiers numéros de ce journal ont
été imprimés par Victor Cabuchet; Balzac n'en a fait l'impres-
sion qu'à partir du n» 7 (28 avril 1827) jusqu'au n° 30 (15 no-
vembre 1827). La Bibliothèque Nationale ne possède que ces
30 numéros. Nous ignorons s'il en a paru d'autres.
436 LA JEUNESSE DE BALZAC.
A partir du n° 17, le titre du journal a été modifié de la ma-
nière suivante :
7^° — Journal de Paris et des départemens, ou le
Bibliographe français, feuille d'annonces concernant la
librairie, les arts, les sciences, l'agriculture, l'industrie et
le commerce, par une société de savans et de gens de
lettres (A la fin de chaque numéro : Imprimerie de H.
Balzac, rue des Marais S.-G., n° 17), s. d. (1827). Pet.
in-fol.
B. F., 14 juillet 1827, n" 4692 et 4693. — B. N. : Inv. Z 821.
Imprimerie Paris, ce 28 avril 1827.
de H. Balzac et A. Barbier,
rue des Marais S. -G., n. 17.
A Messieurs Lestrade et Chambelland,
au bureau du Bibliographe.
Par les comptes de nos compositeurs et au moyen
de la colonne augmentée, le prix du journal tel que vous
le voyez est de quarante-cinq francs et n/ n'avons pas
tenu compte de la composition une fois faite du titre,
parce que c'était une misère, quand il s'agit d'un jour-
nal.
La surcharge de petit texte a été de 5 fr. et il y a
7 francs de composition sur le prochain n°. Je crois que
l'on peut toujours évaluer à 3 ou 4 francs la surcharge
de petit texte.
Si v/ n'avez pas eu le tirage hier soir, c'a été faute
des corrections et de l'ajouté de copie à faire, mais en
n/ remettant la copie comme de règle, v/ aurez tou-
jours le jal la veille au soir, de 6 à 8 heures.
Votre dévoué serviteur,
H. Balzac.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, lre partie, fol. 108.)
71o — L'Art de mettre sa cravate... Seconde édition.
Paris, à la librairie universelle, 1827. In-18.
Voir ci-dessus le n° 65 et ci-dessous les n°» 72 et 7i.
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 457
72° — L'AN de mettre sa cravate.... Troisième édition.
Paris, à la librairie universelle, 1827. In 18.
Édition que Beuchol dôclarail ne p.'i* connaître et qui n'est
pas A la Bibliothèque nationale. Voir ci-dessus les n" 65 et 71.
7,"»° — Le Cultivateur ou journal des campagnes. Pros
pectus (A la lin : [mprimerie de II. lialzac, rue des Marais
S.-G., n. 17), s. d. (18'27). In-8.
12 pp. dont une blanche. — Balzac a fait trois impressions
différentes de ce prospectus. Celui-ci commence par : « Il y a
des journaux pour les juges et les avocats, pour les médecins,
pour le clergé... » ; le second, même titre, a 14 pp. et débute
ainsi : « Il n'y a presque plus qu'une seule classe de Français
qui ne possède pas de journal... » ; le troisième n'a que 4 pp.
(les pp. 1 et 4 encadrées de filets) et commence par : « A MM. les
Curés et Desservans. Notre intention est de donner aux Agri-
culteurs... »
Le 1er et le 2° prospectus sont enregistrés dans la Bibliogra-
phie de la France des 4 août 1827, n° 5121, et 3 novembre 1827,
n° 6872. Le troisième ne l'est pas. Le journal n'est pas imprimé
par Balzac.
B. N. : Inv. S 25579.
Voir ci-dessous le n° 75.
74° — L'Art de mettre sa cravate... Quatrième édition.
Paris, à la librairie universelle, 1827. In-18.
Voir ci-dessus les nri 65, 71 et 72.
75° — Le Cultivateur ou Journal des campagnes. Prospec-
tus (A la fin : Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais
S. G., n. 17), s. d. (1827). In-8.
Voir ci-dessus le n° 75.
76° — L'Art de payer ses dettes et de satisfaire ses
créanciers, sans débourser un sou ; enseigné en dix leçons.
Ou Manuel du droit commercial à l'usage des gens ruinés,
des solliciteurs, des surnuméraires, des employés réformés
et de tous les consommateurs sans argent. Par feu mon
oncle, professeur émérite, précédé d'une notice biographi-
que sur l'auteur et orné de son portrait. Le tout publié
par son neveu, auteur de l'Art de mettre sa cravate. A
Paris, à la librairie universelle, rue Vivienne, n° S bis, au
coin du passage Colbert, 1827. In-12.
458 LA JEUNESSE DE BALZAC.
B. F., 11 août 1827, n° 5190. — B. N. : Li5 107.
Une deuxième édition, revue et augmentée, est enregistrée
dans la Bibliographie de la France du 14 novembre 1827, n° 7080.
Voir ci-dessous le n° 91.
77° — Boussole du commerce des bois de chauffage,
bois carrés, charbons de bois et de terre, destinés à
l'approvisionnement de Paris. Par H.-E. de La Tynna et
C.-P. Rousseau. Ouvrage utile aux commerçans, aux pro-
priétaires de bois, aux employés de la navigation et au
commerce. Prix : 8 francs. Paris. Au bureau du commerce
de bois flotté en trains, quai Béthune, n. 8 (île Saint-Louis),
MDCCCXXVII (1827). In-8.
B. F., 11 août 1827, n° 5192. — B. N. : Inv. V 45939.
Voir ci-dessous le n° 4 et l'article suivant :
78° — Boussole du commerce des bois de chauffage,
bois carrés, charbons de bois et de terre, destinés à l'ap-
provisionnement de Paris; par H.-E. de La Tynna et
C. P. Rousseau. Ouvrage utile aux commerçants, aux
propriétaires de bois, aux employés de la navigation et
du commerce. Prospectus (A la fin : Imprimerie de
H. Balzac, rue des Marais S.-G., n. 17), s. d. (1827). In-8.
Ce prospectus, qui n'est pas enregistré dans la Bibliographie
de la France, est différent de celui décrit sous le n° 4. Il a paru
après la mise en vente de l'ouvrage. B. N. : 8° Q 2897.
Voir ci-dessus les n0,4 et 77.
79° — Observations sur l'expédition de 1827, pour le
pôle nord, par M. Cadet, de Metz, membre des sociétés
philotechnique, de géographie, et de l'Athénée des Arts à
Paris; honoraire de celle de Metz, correspondant de
celles de Lyon, Nancy, Strasbourg et Avignon, etc. Paris,
chez l'auteur, rue de Berry, n° 10. Victor Thiercelin, librai-
rie, rue duCoq-S.-H., n° 6, 1827. In-8.
24 pp. dont une blanche. — B. F., 11 août 1827, n° 5224. —
B. N. : iMp 4737.
80° — Gazette des tribunaux de commerce. (Prospectus
et acte social.) A Paris, imprimerie de Balzac, 1827. In-i°.
Une feuille. — N'est pas à la Bibliothèque Nationale. Cité
d'après la Bibliographie de la France du 11 août 1827, n° 5238.
Voir ci-dessus le n° 61.
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 139
SI" La ChaS86 au liP, poème <'ii <in«j chants, dédié
;hix chasseurs. Parti, chez Victor Thiercelin, rue du Coq-
>'-//o/m/r, /c C>: Urbain CanelyrueS^Gerrnain-des-préêfn0 9,
U27. In-8.
B. F., [•> septembre 1827, n° 5520. — B. N. : Inv. Y<* 18213.
82° — Mémoire du marquis (le Bouille (comte Louis),
liîutenant-général, sur le départ de Louis XVI, au mois
de juin 1791, avec des notes et observations en réponse à
la relation de M. le duc de Choiseul, pair de France,
extraits de ses Mémoires inédits. Seconde édition. A
Paris, chez Baudouin frères, rue de Vaugirard, n. 17,
1827. In-8.
N'est pas à la Bibliothèque Nationale. Cité d'après la Biblio-
graphie de la France du 1" septembre 1827, n° 5562.
85° — Mémoires de Charles Barbaroux, député à la
Convention nationale; avec des éclaircissemens histo-
riques, par MM. Berville et Barrière. Troisième édition.
Paris. Baudouin frères, libraires-éditeurs, rue de Vaugirard,
n° /7, 1827. In-8.
B. F., 1er septembre 1827, n° 5565. — B. N. : La53 9 B.
84° — L'Art de ne jamais déjeuner chez soi, et de dîner
toujours chez les autres; enseigné en huit leçons, indi-
quant les diverses recettes pour se faire inviter tous les
jours, toute l'année, toute la vie. Par feu M. le Cher de
Mangenville. Précédé d'une simple notice sur l'auteur et
orné de son portrait. A Paris, à la librairie universelle,
rue Vivienne, n. 2 bis, au coin du passage Colbert, 1827,
In-18.
B. F., 12 septembre 1827, n» 5823. — B. N. : Li5 106.
Une troisième édition, également imprimée par Balzac, a paru
la même année. Par Emile Marco de Saint-Hilaire.
85° — Discours de la girafe au chef des six Osages (ou
Indiens), prononcé le jour de leur visite au jardin du
Roi; traduit de l'arabe par Alibassan, interprète de la
giraffe (sic). Paris, Martinet, libraire, rue du Coq-Saint-
Honoré, n° 15, 1827. In- 18.
12 pp. — B. F., 15 septembre 1827, n° 5876. — B. N. : Lk7 7474.
LA JEUNESSE DE BALZAC.
80° — Les Remèdes de bonnes femmes ou moyens de
prévenir, soigner et guérir toutes les maladies, rédigés et
mis en ordre alphabétique d'après le manuscrit original
de Mme Michel, ex-garde malade. A Paris, rue Vivienne,
n. 2 bis, 1827. In-32.
Une feuille 5/8. — N'est pas à la Bibliothèque Nationale. Cite
d'après la Bibliographie de ta France du 26 septembre 182",
n° 6060.
87° — Mélanges historiques et littéraires, par M. Ville-
main, membre de l'Académie française. Tome II. A
Paris, chez Ladvocat, libraire de Son Altesse Royale le di.c
de Chartres, quai Voltaire et au Palais-Royal, M. D. CCC.
XXVII (1827). In-8.
B. F., 20 octobre 1827, n° 6544. — B. N. : Inv. Z 27994.
Le tome III (1828) est également imprimé par Balzac, mais la
Bibliographie de la France n'en fait pas mention.
88° — Mémoires du comte de M..., précédés de cinq
lettres, ou considérations sur les Mémoires particuliers.
Paris. Victor Thiercelin, libraire, rue du Coq Saint-Honoré,
n° 6, 1828. In-8.
Par le comte More de Pontgibaud.
B. F., 20 octobre 1827, n° 6546. — B. N. : Ln-7 13098.
La nouvelle édition des Mémoires du comte de More1 nous
apprend que les « cinq lettres ou considérations sur les Mé-
moires particuliers » sont de M. le comte de Salaberry qui
était, alors, membre du Conseil général de Loir-et-Cher et
député de Blois. Ce fait explique donc les relations qui existè-
rent entre Balzac et lui, relations attestées par les deux lettres
suivantes :
A M. Berthevin, à l'Imprimerie Royale, Vieille rue du
Temple, à Paris.
Paris, ce 14 août 1827.
M. Balzac souhaite le bonjour à Monsieur Berthevin2,
1. Mémoires du comte de More (17581837), publiés pour la
Société d'histoire contemporaine par M. Geoffroy de Grand-
maison et le Cle de Pontgibaud. Avec cinq héliogravures. Paris,
Alphonse Picard et fils, 1898, in-8°, pp. 15 et 16.
2. M. Berthevin élait alors conservateur du matériel de
l'Imprimerie Royale.
LES IMPRESSIONS FAITES l'Ai! BALZAC. 441
et le prie «I»' remettre au porteur les épreuves des
quatre premières feuilles, car M. de S... ne les a jamais
vues, et il désirerait reporteries corrections de Monsieur
Berthevin avant de tirer.
Il le prie d'agréer ses respectueuses civilités.
{Collection Lovenjoul, ms. A 281, fol. 15.)
A M. Honoré Balzac;, imprimeur.
Ce samedi 18 août [1«^27. |
J'ai reçu, Monsieur, votre lettre ce matin et vos deux-
envois d'épreuves. Je me suis conformé aux observa-
tions qui sont fort justes. Mais je n'ai pas reçu la pre-
mière épreuve, le commencement, jusqu'à la page1 ;
si, entre temps, Berthevin et vous, vous avez corrigé,
francisé, éclairci ces pages, il n'est pas nécessaire de
me les envoyer; je vous avertis seulement que je ne
les ai pas reçues. Je vous renverrai exactement tout ce
que vous m'enverrez, et vos épreuves, je les ferai passer,
comme celles d'aujourd'hui, par la Préfecture] de
police.
Je vous renouvelle mes remercimens, de vos obser-
vations et de vos soins.
Salaberry, député.
(Collection Lovenjoul, ms. A 516, fol. 92.)
89° — L'Écolier ou Raoul et Victor, par MUjC Guizot.
Ouvrage couronné par l'Académie, comme le plus utile
aux mœurs. Deuxième édition. A Paris, chez Ladvocal,
libraire de S. A. R. le duc de Chartres, quai Voltaire et Pa-
lais-Royal, MDGCCXXVIII (1828). 4 vol. in-12.
B. F., 3 novembre 1827, n« 6836. — B. N. : Inv. Y2 40976-40979.
90° — Le Gastronome français, ou l'art de bien vivre,
par les anciens auteurs du Journal des gourmands,
MM. G. D. L. R"*, D. D***, Gastermann, G***, Clytophon,
1. Dans l'original, le chiffre est resté en blanc.
142 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Charles Sartrouville, C. L. C***, C***} Marie de Saint-
Ursin, B***, etc.; ouvrage mis en ordre, accompagné de
notes, de dissertations et d'observations par M. C***.
Paris. Charles Béchet, libraire-commissionnaire, quai des
Augustins, n° 57, près le Ponl-Neuf, 1828. In-8.
B. F., 7 novembre 1827, n° 6903. — B. N. : Inv. V 59928.
91° — L'Art de payer ses dettes et de satisfaire ses
créanciers sans débourser un sou.... Deuxième édition,
revue et augmentée. Paris, à la librairie universelle, 1827.
In-12.
B., F., 14 novembre 1827. — B. N. : Li5 107.— Une quatrième
édition a été également imprimée par Balzac.
Voir ci-dessus le n° 76.
92° — Nouvelle Anthologie, ou choix de chansons an-
ciennes et modernes, publiées par L. Castel. Deuxième
édition, revue, corrigée, augmentée et ornée de gravures.
Paris, librairie ancienne et moderne, Palais- Roy al, galerie
de bois, n. 263-264, 1828. 3 vol. in-12.
B. F., Tome I : 10 novembre 1827, n° 7003 ; tome II : 21 novem-
bre 1827, n° 7307 ; tome III: 12 décembre 1827, n° 7780. — B. N. :
Inv. Ye 17269-17271.
De cette même deuxième édition, M. Gabalda possède un
exemplaire dont le titre imprimé par Balzac est : Anthologie
française ou choix....
93° — Théâtre de l'Enfance, par Madame de Lafaye-
Bréhier, auteur des Petits Béarnais, du Robinson fran-
çais, etc. Orné de gravures. Paris, Eymery, Fruger et C" ,
libraires-éditeurs, rue Mazarine, n° 30., 1828. 3 vol. in-12.
B. F., 14 novembre 1827, n° 7152. Annoncé en 2 vol. in-8°. Le
tome III est imprimé par Decourchant. — B. N. : Inv. Yf 9695-
6995.
94° — Calculs faits, à l'usage des industriels en général,
et spécialement des mécaniciens, charpentiers, pompiers,
serruriers, chaudronniers, toiseurs, etc., etc., contenant :
un grand nombre de tables et notamment les suivantes
qui sont autant de barèmes industriels. — Poids et
volume de l'eau contenue dans des cylindres de 1 pied de
haut, sur tous les diamètres, depuis 1 ligne jusqu'à
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 443
12 pieds. — Circonférences et surfaces des cercles.
Poids du pied carré, des métaux Laminés suivant leur
épaisseur, platine, plomb, argent, cuivre, laiton, fer,
étain, zinc. — Poids des pouces cubes ei des pouces
cylindriques, des métaux les plus usuels. — Conversion
des mesures et des poids anciens, en mesures et poids
métriques. — Cubage de la charpente. — Calcul des inté-
rêts. — Analyse des expériences de Iùiffon et Duhamel
sur la résistance des bois, etc., etc. Par B.-A. Lenoir.
Paris. A la librairie scientifique-industrielle de Malhcr et, CiQ,
passage Dauphine, 1828. In-12.
B. F., 21 novembre 1827, n° 7267. — B. N. : Inv. V 44681.
95° — Elémens de géométrie descriptive, à l'usage des
élèves qui se destinent à l'École polytechnique, à l'École
militaire, à l'École de Marine. Par E. Duchesne, profes-
seur de mathématiques spéciales au collège de Vendôme.
Paris. A la librairie scientifique-industrie lie de M allier et Cie,
passage Daup/tine, 1828. In-12 et un cahier de planches
in-4°.
B. F., 21 novembre 1827, n° 7284. — B. N. : Inv. V 37071 et
37072.
96° — L'Homme de soixante ans, ou la Petite entêtée,
comédie-vaudeville en un acte, par MM. Dartois, Simonnin
et Ferdinand, représentée pour la première fois à Paris,
sur le théâtre des Variétés, le 2 juin 1824. Nouvelle
édition. Paris, chezJ.-N. Barba, éditeur, cour des Fontaines,
n. 7, et au Magasin de pièces de théâtre, vis-à-vis le café de
la Régence, à la Civette, rue S. -Honoré, n. 310, 1828. In-8.
32 pp. — B. F., 24 novembre 1827, n° 7372. — B. N. : Yth
8618 A.
97° — M. Sans-Gêne, ou l'Ami de collège, vaudeville en
un acte, par MM. Désaugiers et Gentil. Représenté pour
la première fois à Paris, sur le théâtre du Vaudeville, le
13 mai 1816. Nouvelle édition. Paris, chez J.-N. Barba, édi-
teur, cour des Fontaines, n. 7, et au Magasin de pièces de
théâtre, derrière le théâtre français, 1828. In-8.
46 pp. — B. F., 24 novembre 1827, n° 7378. — B. N. : Yth
12204.
W4 LA JEUNESSE DE BALZAC.
98° — Ma tante Aurore, ou le Roman impromptu, opéra
bouffon . sifflé en trois actes le 23 nivôse, applaudi en
deux le 25 du môme mois, au théâtre Feydeau. Nouvelle
édition. Paris, chez J.-N. Barba, cour des Fontaines, n. 7,
et au Magasin de pièces de théâtre, vis-à-vis le café de la
Régence, à la Civette, rue S. -Honoré, n. 210, 1828. In-8.
48 pp. — B. F., 24 novembre 1827, n° 7579. — B. N. : Yth
52277.
99° — Le Sommeil. A Caroline H***. MDCCCXXVII. (A
la fin : Paris. Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais
S.-G., n. 17.) In-8.
16 pp. dont une blanche. — B. F., 28 novembre 1827, n° 7484.
— B. N. : Ye 52277.
100° — Voyage de Paris à S..-Cloud, par mer, et retour
par terre. Augmenté des Annales et Antiquités de Saint-
Cloud. Nouvelle édition seule complète. Paris, à la librai-
rie ancienne et moderne, Palais-Royal, galerie de bois,
n. 268-264, 1828. In-32.
B. F., 5 décembre 1827, n° 7581. — B. N. ; Lkk 8597 H.
101° — Le La Bruyère des domestiques, précédé de
considérations sur l'état de domesticité en général, et
suivi d'une nouvelle par Mme la comtesse de Genlis. Paris.
Victor Thiercelin, libraire-éditeur, rue du Coq-S t. -Honoré,
n. 6. Ponthieu, Palais-Royal, 1828. 2 vol. 12.
B. F., 8 décembre 1827, n° 7623. — B. N. : Inv. R 37056-37057.
Sous ce même n° 7623, la Bibliographie de la France enregistre
une édition in-8, également imprimée par Balzac.
102° — Les Deux filles spectres, mélodrame en trois
actes et en prose, par M. Népomucène L. Lemercier, de
l'Académie française, représenté sur le théâtre de la Porte
S.-Martin, le 8 novembre 1827. Musique arrangée par
M. Chantagne. Paris, J.-N. Barba, éditeur, cour des Fon-
taines, n° 7, et au Magasin de pièces de théâtre, rue Saint-
Honoré, n. 210, 1827. In-8.
86 pp. et 1 f. — B. F., 12 décembre 1827, n° 7755. — B. N.
Yth 4857 .
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 145
10.")" — Souscription. Corps du droit français, ou recueil
complet des lois, décrets, ordonnances, arrêtés, sénatus
consultes, règlemens, avis du Conseil d'État, publiés
depuis 1789 jusqu'à 1825 inclusivement. Deux vol. in-8, en
70 livraisons de quatre feuilles (64 pages) chaque. (Prix
de la livraison : ij IV. 25 cent.) Mis en ordre h annoté par
CM. Galisset, avocal à la Cour Royale de Paris (A La lin :
Imprimerie de If. Balzac, rue des Marais S. -G., n" 17), s. d.
(1827). In-8.
4 pp. — Ce prospectus, relatif à l'article suivant, n'est pas
enregistré dans la Bibliographie de la France. — B. N. : Inv.
S 35285.
104° — Corps du droit français, ou recueil complet des
lois, décrets, ordonnances, arrêtés, sénatus-consultes.
règlemens, avis du Conseil d'État, publiés depuis 1780
jusqu'à 1825 inclusivement, mis en ordre et rédigé par
CM. Galisset, avocat à la Cour Royale de Paris. Tome
premier. Paris. Malher et Cl°-, éditeurs co-propviêtaires, pas-
sage Dauphine, 1828. In-8.
Le tome II est imprimé par Duverger. Balzac n'a commencé
à imprimer cet ouvrage qu'à partir de la 32rae et non de la
28e livraison, comme l'indique une note de Beuchot, sous le
n° 1G0 de la Bibliographie de la France de 1828. La 28e livraison
est imprimée par Farcy.
Voici les dates d'enregistrement des livraisons imprimées
par Balzac. — B. F.: 52e livr., 15 décembre 1827, n° 7814;
55e livr., 22 décembre, n° 7967 ; 54e livr., 29 décembre, n° 8107 ;
55e livr., 12 janvier 1828, n° 160; 56e livr., 2 février, n° 605;
57e livr., 9 février, n° 915; 58e livr., 16 février, n° 1229; 39e et
40e livr., 15 mars, n° 1597 ; 41e livr., 22 mars, n° 1722; 42e livr.,
29 mars, n° 1901; 43e livr., 12 avril, n° 2130; 44e livr., 19 avril,
n° 2247 ; 45e et 46e livr., 17 mai, n° 2911 ; 47e livr., 24 mai, n° 2045 ;
48fi et 49e livr., 14 juin, n° 3592; 50e livr., 5 juillet, n° 4047;
51e livr., 19 juillet, n° 4369; 52e et 53e livr., 2 août, n° 4730;
54e livr., 23 août, n° 5088 ; 55e livr., 30 août, n° 5258.
Cette livraison est la dernière imprimée par Balzac ; la 56e
sort des presses de Duverger.
L'impression du Corps du Droit français a donné lieu à de
nombreuses contestations ; en 1852, le règlement de cette
affaire n'était pas encore terminé. Nous avons eu communica-
tion d'un assez volumineux dossier la concernant, mais il nous
a semblé d'un intérêt médiocre de le publier en entier.
146 LA JEUNESSE DE BALZAC.
Un ouvrier imprimeur, le sieur Girard, chargé par Balzac de
diriger l'impression du Corps du Droit français, demande le
20 juin 1828, au Président du tribunal civil de la Seine, de for-
mer opposition entre les mains de MM. Malher et O, pour la
somme de 546 fr. 70 à lui due ainsi qu'à ses ouvriers. Permis-
sion lui est donnée le 21 juin 1828. Le 27 juin signification est
faite à Balzac de cette opposition ; le 50, à MM. Malher et O.
Le 19 septembre 1828, Girard donne main levée de son opposi-
tion. Ce dossier contient, en outre, différentes lettres de
MM. Malher et Cie, Sédillot et A. Barbier, successeur de Bal-
zac. Nous reproduisons ici les documents émanant de Balzac
ainsi qu'une importante lettre de M. Ch. Sédillot :
Mon cher Monsieur Malher, je suis en mesure par
des délégations sur M. Barbier de satisfaire Mon-
sieur Duverger, tout en réservant mes droits sur les
questions litigieuses entre moi, M. Galisset et vous
— la personne qui m'oblige a consulté sur ces diffi-
cultés et les maintiendra. — Ainsi M. Duverger que
je vais voir immédiatement étant satisfait, les rigueurs
de la Société n'ont pas de but à mon égard.
H. Balzac.
Lettre non datée.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2° partie, fol. 177.)
Je soussigné Honoré Balzac, ancien imprimeur,
ayant été chargé en cette qualité de sléréotyper l'ou-
vrage de droit intitulé : Corps du droit français dont
MM. Malher et O sont les éditeurs, consens à ce que
les clichés du dit ouvrage fait tant par moi que par le
sieur Hanus depuis la 2e livraison jusques y compris la
50e soient vus et vérifiés par Mr Duverger, imprimeur à
Paris, sous les réserves suivantes: 1° Le sieur Duverger
indiquera par une marque particulière, sur l'épreuve
qu'il fournira aux sieurs Malher et O, les corrections à
faire qui doivent être à la charge de la Société dont les
libraires sont gérants, telles que celles provenant du
tirage qui a été fait sur quelques-uns des clichés et celles
qui consistent en fautes de textes ou typographiques
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. '•'.:
existants sur les bons à tirer de M1 Galisset; 2° Le sieur
Duvergerfera toutes les autres corrections à ma charge
pourvu qu'au préalable j'aie consenti aux prix qu il
demandera pour les autres corrections; 5° Dans l<" cas
où le sieur Du verger croirai! devoir rejeter une ou plu-
sieurs pages de clichés, il serait nommé un tiers,
arbitre entre les libraires et moi, qui déciderait en der-
nier ressort; 4° MM. Malhcr et Gie s'engagent à libérer
M. Balzac de sa responsabilité pour raison de la fabri-
cation des dits clichés après le tirage qui se fera à
compter du 1er mai 1829, se chargeant de les faire
accepter par la Société.
Approuvé l'écriture ci-dessus
H. Balzac.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 179.)
Paris, 2 août 1829.
Mon cher cousin, j'ai vu M. Galisset qui désirerait
conférer avec vous et M. Malher sur vos intérêts pour
vos clichés du Droit français. Écrivez à l'un ou à
l'autre pour leur fixer un jour où vous vous rendriez
chez M. Malher. Je crois même que ce dernier a dû
vous voir hier, et peut-être avez-vous déjà arrêté jour.
Terminez, je vous engage, avec ces messieurs afin
que nous puissions disposer de votre action.
J'ai soldé M. Laurens et Made Cuisinier pour tout
l'arriéré.
M. Bertrand est venu me présenter un billet Constant
Chantpie, ordre Rivey, échu le 27 juillet 1828, protesté
à temps, et sur lequel il a obtenu jugement par défaut
tant contre vous que contre tous ses endosseurs;
le capital de ce billet est de fr 200
les frais à ce jour 51 15
251 15
LA JEUNESSE DE BALZAC.
M. Bertrand a en dépôt un billet Th. Berquet, quai
des Augustins, n° 57, ordre Rivey, qu'il rendrait si l'on
consentait à le rembourser.
Que prétendez-vous faire? Il me semblait que vous
ne deviez plus être engagé avec ces Messieurs. Enfin, il
en est autrement.
Sur le tout réponse.
Mes respects à Made voire mère. Que faites-vous?
Quand vendez-vous?
Je pars mardi par la malle poste pour 5 semaines en-
viron.
Votre dévoué
Ch. Sédillot.
Lettre adressée, d'abord rue Maurepas, n° 2, à Versailles,
puis à « Monsieur Honoré Balzac chez Madame sa mère, rue
Danjou, n° 4, au Marais, à Paris ».
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 180.)
Tours, 25 juin 1850.
Monsieur,
J'ai reçu à la fois ici la lère lettre que vous m'avez
fait l'honneur de m'écrire le 4 juin cl et la 2e en date du
15. J'étais parti le 4, même mois, pour un voyage et je
ne suis de retour qu'aujourd'hui à Tours où je suis forcé
de rester.
Je vais répondre succinctement à vos deux lettres et
si vous aviez à me faire observer quelque chose, vous
auriez la complaisance de m'écrire à Tours poste res-
tante.
1° Relativement à la convocation du 22 juin, comme
il m'a été impossible d'y assister et que la majorité des
actionnaires aura dû y prendre un parti, j'en écrirai sur
le champ à ma mère qui, dûment autorisée par moi,
adhérera ou n'adhérera pas à la résolution. Je lui com-
muniquerai mon opinion ; elle est de tout point favo-
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. MO
rable à \/ travail et l;i difficulté ne réside < | «i «- sur
l'exécution. Mmc Balzac décidera.
2° Relativement à la demande d'argent faite par
M. Duverger pour les corrections des clichés, il esl
difficile de discuter en apparence sur ce point; cepen-
dant La question de ce payemenl est soumise à des
règles incontestables que je vais avoir L'honneur de
vous expliquer el dont il m'est impossible de dévier.
Toute La retenue a été jusqu'ici appliquée à ce paye-
ment; elle n'a pas suffi et nous ne sommes pas arrivés
aux livraisons fabriquées par moi.
Il paraît que les retenues faites sur Constant Chantpie
et Hanus sont insuffisantes.
Constant Chantpie prétend (et comme MM. Malher el
Cie et moi le représentons, nous devons épouser ce qu'il
y a de juste dans ses prétentions) : 1° qu'une portion de
livraisons ayant été tirées sur le cliché doivent être
exemptes de corrections ; 2° que partie de ces livraisons
ont été acceptées et livrées à la Société et que, par
conséquent, elles doivent être non sujettes à correc-
tions. Ce premier point de difficulté réglé à V amiable ,
il résulterait qu'on doit faire une distraction des
sommes indûment prises sur les retenues de Constant
Chantpie et sur les miennes et compter. Alors, si les
corrections faites sur les livraisons fabriquées par
C. Chantpie et Hanus montent à une somme de \
nous la paierons par la somme des retenues Constant
Chantpie, plus la somme prise sur ces retenues pour les
corrections à la charge de la Société; puis, si cela est
insuffisant, MM. Malher et moi, devons chacun par
moitié parfaire la somme.
Ce calcul est conforme à toutes nos conventions.
Puis, si nous payons pour C. Chantpie une somme,
MM. Malher et moi devons la lui réclamer.
1. Le montant de la somme est resté en blanc dans l'origi-
nal.
29
fôO LA JEUNESSE DE BALZAC.
Attendu que toute ma retenue a déjà été donnée,
MM. Malher et Gie doivent verser déjà une somme égale
à relie de mes retenues.
Puis après, si ce versement ne suffit pas, nous achè-
verons par moitié le payement des corrections dites
Constant Chantpie ; quant à celles qui se feront sur mes
clichés, M. Sédillot, ma mère et moi, nous avons tou-
jours dit qu'elle serait acquittée (sic).
Il résulte de tout ceci que M. Duverger n'entrant pas
dans ces discussions là doit être payé ; mais vous devez
voir que nous avons un accord à obtenir et des vérifi-
cations à faire, la Société, MM. Malher et O et moi.
Or, comme il faut en droit et en équité payer quand on
le doit et comme on doit et que, si je payais sans rai-
son, il serait difficile de nous entendre, vous me per-
mettrez de demander instamment à ce que cet arrange-
ment d'intérêts soit parfaitement convenu.
Nous ne refusons pas de donner de l'argent, mais
quant à ce qui me concerne, je désire qu'il soit bien
expliqué que la somme qui serait donnée est imputée
sur le prix des corrections des clichés fabriqués par moi,
en cas que mes retenues soient insuffisantes.
Je transmettrai, Monsieur, une copie de cette lettre
à M. Sédillot et à ma mère et vous pourrez, vous et
MM. Malher, en conférer.
Agréez, Monsieur, mes obéissances,
H. Balzac
Lettre adressée à M. Galisset.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 182.)
[2.1 mars 1851.]
Monsieur,
L'affaire dont je vous ai parlé est soumise à la loi
des distances et nous attendons une procuration; il
m'est impossible d'y mettre plus d'ardeur, car elle
m'intéresse au dernier point et je voudrais la voir
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 451
conclue. Au surplus, Monsieur, dans l'étal actuel de la
librairie, la Société n'a pas <!<• pertes à subir, mais je
sais que mes obligations sont indépendantes même de
la gêne actuelle qui a saisi l<<uf le monde.
Agréez mes complimens empressés,
de Balzac
Lettre adressée à M. Galisset, rue Saint-Germain-l'Auxerroig,
65. Ou a écrit sur l'original : /{crue le 24 mars 1831, puis : H avril
1831 , écrit de nouveau et le S mai encore.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, 2e partie, fol. 184.)
M. de Balzac contre M. Beauvais, gérant de la Société
du Corps du droit français.
Note pour Monsieur Dubois de Nantes, nommé arbitre
rapporteur.
M. de Balzac s'en réfère, en ce qui le concerne, à
Y observation présentée par son co-intéressé, M. Joubert,
au nom de la Société Malher et G,e, à Monsieur Dubois,
relativement à la confection des treize premières
livraisons qui, ayant été fabriquées par MM. Constant
Chantpie et Galisset et acquises par la Société, ne
peuvent donner lieu à aucune action contre lui.
M. Dubois appréciera cette défense, et M. de Balzac
n'examinera que, sous le rapport de l'art, les questions
qui se rattachent à la cause.
Il commence par ôter de la discussion les livraisons
qu'il a confectionnées, et transige sur ce point en en
acceptant la responsabilité, sous les réserves suivantes :
1° : De discuter si les corrections proviennent de son
fait.
2« : Si les corrections exigées ne sont pas voulues
par la nature môme du cliché.
Mais, en tout état de cause, les sommes qui lui ont été
induement retenues, suffisent à acquitter toute correc-
tion, et qui se composent de retenues qui lui étaient
45Î LA JEUNESSE DE BALZAC.
faites, comme à Hanus, et de sa part dans les divi-
dendes.
Ainsi, la discussion qui nous est suscitée par
M. Beauvais ne peut concerner que les livraisons fabri-
quées par Constant Chantpie, gérant, depuis la 13e
jusqu'à celle où il a commencé à confectionner
(forme 117).
Or, relativement à ces livraisons....
Cette note inachevée a été écrite par Balzac, au verso de
la page 24 du manuscrit de Louis Lambert, 1832.
(Collection Lovenjoul, ms. A 160, fol. 24 v°.)
105° — Mémoire justificatif pour le sieur Théodore
Desmanet, ci-devant marchand de fer à Beauvais; contre
un arrêt rendu par la Cour d'Amiens, chambre des appels
de police correctionnelle, le 29 décembre 1825 (A la fin :
Paris, imprimerie de H. Balzac, rue des Marais S.-G., n. 17),
s. d. (1827). In-4°.
30 pp. dont une blanche. — B. F., 15 décembre 1827, n° 7872.
— B. N. : 4° F3, 439 (pièce 9652).
106° — Le Duc de Guise à Naples, ou Mémoires sur les
révolutions de ce royaume en 1647 et 1648. Deuxième
édition. A Paris, chez Urbain Canet, rue Saint-Germain-des-
prés, n. 9, 1827. In-8.
Anonyme. Par le comte Amédée de Pastoret. La collection
Lovenjoul possède le manuscrit de cet ouvrage qui a, parfois,
mais à tort, été attribué à Balzac.
N'est pas à la Bibliothèque Nationale. D'après la Bibliographie
de la France du 22 décembre 1827, n° 7970, Balzac n'aurait im-
primé que des faux-titres, titres et couvertures « probablement
destinés à des exemplaires de la première et unique édition ».
107° — Mémoires du baron de Besenval, avec une
notice sur sa vie, des notes et des éclaircissemens histo-
riques. Par MM. Berville et Barrière. Paris. Baudouin
frères, libraires-éditeurs, rue de Vaugirard n. 17, 1827.
2 vol. in-8.
B. F., 22 décembre 1827, n° 8000. — B. N. : La30 6 B.
En cette même année 1827, Balzac a fait diverses autres im-
pressions dont quelques-unes ne figurent qu'à la table de la
u;s IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 153
Bibliographie de la France, sans indioaiion de date de dépôt, et
dont d'autres D'y figurent pas du tout. Nous les classons i(,i
par ordre alphabétique des litres :
lo,s° — Adieux «les tambours <lr la Garde nationale à
leurs colonels, pot-pourri en manière <le grande com
plainte, par Em. Debraux et Ch. Lepage, suivi (Je la
superbe chanson de M. Pigeonneau, fils aîné de M. Pigeon.
Paris, chez les marchands de nouveautés, 1827. In-32.
32 pp. dont une blanche. — B. F., Table. — B. N. : Lb* 579,
1 09° — Chansons nouvelles de P. Emile Debraux. Tome
deuxième. A Paris, Palais-Royal, n. CJS3, 1827. In-8.
N'est pas à la Bibliothèque Nationale. B. F., Table.
110° — Chefs-d'œuvre des théâtres étrangers, allemand,
anglais, chinois, danois, espagnol, hollandais, indien,
italien, polonais, portugais, russe, suédois, traduits en
français. A Paris, chez Rapilly, libraire, passage des Pano-
ramas, MDCCCXXVII (1827), In-8.
Ne figure pas à la Bibliographie de la France. Balzac n'a im-
primé que les faux-titres, titres et couvertures. Ces dernières
portent, sur le premier plat, au-dessous de l'encadrement, le
nom de l'imprimeur qui se trouve également au verso des
faux-titres. 11 y a 8 titres et autant de couvertures.
Les titres sont semblables à celui décrit ci-dessus mais por-
tent en plus : Lope de Vega. Tome I [et Tome 11] ; Théâtre italien
moderne. Tome I ; Goethe. Tome 11 ; Calderon. Tome I; Théâtre
anglais. Tome I. Tobin, Sheridan, Cumberland ; Lessing ; Théâtre
hollandais. Tome I. Hooft, Vondel, Longendnk.
B. N. : 8° 0 2897.
111° — Pichon-Béchet, libraire-éditeur. — Collection
des Mémoires relatifs à la Révolution d'Angleterre. In-8.
8 pp. — Ce prospectus est rédigé par P. F. Tissot. Ne figure
pas à la Bibliographie de la France. B. N. : Nb141 A.
112° — Cri d'un vieux soldat à l'ex-garde nationale. Par
A, Béraud, Paris. Chez Ladvocat, libraire, quai Voltaire,
1827. In-8.
15 pp. dont une non chiffrée et une pour le second plat de
la couverture. — B. F., Table. — B. N. : 8° pièce Ye 5931.
tôl LA JEUNESSE DE BALZAC.
115° — Epitre à Monsieur le comte de Villèle; par
Méry. 0e édition, revue et augmentée, précédée d'une
notice, et suivie de l'hymne à M. de Villèle. Paris, chez les
marchands de nouveautés, 1827. In-8.
32 pp. — B. F., Table. — B. N. : Inv. Ye 27674.
114° — Œuvres complètes de Shakspeare, traduites de
l'anglais par Letourneur. Nouvelle édition, revue et cor-
rigée par F. Guizot et A. P., traducteur de lord Byron;
précédées d'une notice biographique et littéraire sur
Shakspeare par F. Guizot. Tome I [II, III, IV, V, VI, VII,
VIII, et XII]. A Paris, chez Rapilly, libraire, passage des
Panoramas, 1827. In-8.
Balzac n'a imprimé que les faux-titres, titres et couvertures.
Les titres et couvertures des tomes IX à XI, et du tome XIII
que nous avons vus portent le nom de l'imprimeur Fain. Les
initiales A. P. désignent Amédée Pichot. Ne figurent pas à la
Bibliographie de la France. — B. N. : 8° Q 2897.
115° — OEuvres dramatiques de F. Schiller, traduites de
l'allemand; précédées d'une notice biographique et litté-
raire sur Schiller, par M. de Barante, pair de France.
Tome Ier [II, III, IV, V, VI]. A Paris, chez Rapilly, libraire,
passage des Panoramas, 1827. In-8.
Faux titres et titres seulement imprimés par Balzac, plus
6 couvertures qui portent : Deuxième souscription. Ne figurent
pas à la Bibliographie de la France. — B. N. : 8° Q 2897.
116° — Le Féroce à Mont-Rouge. Dialogue satyrique,
par M. Charles Chabot. A Paris, chez Ambroise Dupont cl
compagnie, rue Vj,vienne, n° 16, 1827. In-8.
52 pp. dont une blanche. — B. F., Table. — B. N. : Ye 400oi.
117° — La Meilleure complainte sur le licenciement de
la garde nationale, par deux tambours. A Pans, chez les
marchands de nouveautés, 1827. In-52.
Une demi-feuille. — N'est pas à la Bibliothèque Nationale. —
B. F., Table.
118° — Mémoire pour le sieur Jean-Baptiste Mathieu
Delacoste, géomètre de lre classe du cadastre, employé
anciennement en cette qualité dans le département des
Deux-Sèvres, et aujourd'hui dans les Côtes-du-Nord, contre
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC.
le sieur François Tallonneau, propriétaire dans la coin
mune de Pi oussay, canton de Chef-Boutonne, arrondisse
iikmiI de M elle, débiteur, et prévenu d<- diffamation
envers le dit sieur .Mathieu DelacOSte (A la fin : Paris.
imprimerie <(c II. Balzac, rue des Marais 8. G.f n° /7), s. d.
(18kJ7). lu i".
t f., et 26 pp. dont une blanche. — Signé : A. Delaubier,
avocat plaidant. Ne figure pas à la Bibliographie de la France,
B. N. : ¥ F3 922 (pièce 21089).
119" - La Petite Dragonnade du quai des Orfèvres.
Pot-pourri dédié aux élèves en médecine, par Km. De-
braux et Ch. Le Page. Paris, chez les marchands de non
veaulés, 1827. In-8.
24 pp. — B. F., Table. — B. N. : Ye 41416.
120" — Plainte de M. Lucy, contre M. le Préfet de la
Seine, et contre M. Defresne, préfet délégué. (A la fin :
Imprimerie de II. Balzac, rue des Marais S. -G., n. il.) In-8.
8 pp. — B. F., Table. — B. N. : 8° F3 334. (pièce 1910).
121° — Plainte en prévarication et en vol, portée le
1 juillet 1827, à M. le premier président Séguier, et à
M. Jacquinot-Pampelune, procureur général près la Cour
Royale de Paris (A la fin : Imprimerie de H. Balzac, rue
des Marais, n° 17, f. s. g.), s. d. (1827). In-4°.
12 pp. — Signée : Mme A. V. Minus. — B. F., Table. — B. N. :
4° F5 706 (pièce 15968 bis).
122° — Réponse de M. le Cte de Villèle à l'avocat des
causes désespérées. Paris, 1827. In-8.
16 pp. — Ouvrage apocryphe.
B. F., Table. — B. N. : Lb49 594.
123° — Revue et licenciement de la garde nationale,
pot-pourri par Em. Debraux et Ch. Lepage. A Paris, chez
les marchands de nouveautés, 1827. ln-32.
Une demi-feuille. — B. F., Table. — N'est pas à la Biblio-
thèque Nationale.
1. Le quantième du mois est resté en blanc.
450 LA JEUNESSE DE BALZAC.
124° — Testament des Ministres, rêve de deux bons
Français, mis en pot-pourri, par Emile Debraux et Charles
Le Page. Prix : 1 fr. Paris, chez les marchands de nou-
veautés, mai 1827. In-8.
24 pp. — B. F., Table. — B. N. : Ye 41417.
125° — Nous reproduisons ici une facture relative à
un Bréviaire ainsi conçue :
Imprimerie de H. Balzac et A. Barbier, rue des Marais
S. -G., n. 17.
Paris, ce 30 juin 1827.
Doit M. Poussielgue
Breviarium, etc. T. 2.
Fles 1, 2, 3, 4, tirage à 2000 + 500 cal [endriers]. . 168.00
Fonctions (compos011 établie) à 3 fr 12.00
180.00
Bordereau du compositeur 26.00
Pour acquit 206.00
Barbier.
(Collection Lovenjoul, ms. A 259, lre partie, fol. 113bU.)
M. Poussielgue fils, à qui nous avons demandé des rensei-
gnements, a fait très obligeamment des recherches, mais qui
n'ont donné aucun résultat. M. Poussielgue nous a dit que la
maison n'avait été fondée que vers 1834, mais que ce Breviarium
avait sans doute été imprimé pour le compte des Jésuites et
que son père, à cette époque, se chargeait de faire exécuter
pour eux des travaux.
M. Dumaine, ministre plénipotentiaire, a bien voulu nous
signaler l'existence d'un Voyage du jeune Anacharsis, de
J.-J. Barthélémy, 16 vol. in-32, publié en 1827 et sortant des
presses de H. Balzac. Nous n'avons pu rencontrer cet ouvrage
qui ne figure pas au Journal de la librairie.
126° — Mémoires de Madame la marquise de Bon-
champs, rédigés par Mme la comtesse de Genlis, suivis
des pièces justificatives. Seconde édition. Payais, Baudouin
frères, libraires-éditeurs, rue de Vaugirard, n° 17, 1827. In-8.
Ne figure pas au Journal de la librairie.
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 151
ANNÉE 1828
127° — Annales romantiques; recueil de morceaux
choisis <!<• littérature contemporaine. 1827-1828. Paris.
Urbain Cane', libraire, rue Saint-Gcrrnain-des-prés, n. 9.
MDGCCXXVII1 (1828). In-18.
Les premiers vers de Balzac ont paru dans ce recueil. Voir
.4 une jeune fille, ode, p. 170, et Vers écrits sur un album, p. 404.
B. F., 5 janvier 1828. n° 9. — B. N. . Inv. Ye 12195.
128° — Chants du siècle, par Adolphe Nicolas. Paris,
Ponthieu et Cie, libraires, au Palais- Roy al. Leipzig, Ponthieu,
Michelsen el Cie, 1828. In-8.
B. F., 5 janvier 1828, n» 21. — B. N. : Inv. Ye 28520.
129° — Don Alonso, ou l'Espagne, histoire contempo-
raine, par N.-A. de Salvandy. Quatrième édition. Paris,
Baudouin frères, libraires, rue de Vaugirard, n. i7. 1828.
4 vol. in-16.
B. F., 5 janvier 1828, n* 32. — B. N. : Inv. Y2 64026-64929.
130° — Tableaux poétiques, par le Cte Jules de Ressé-
guier. Paris, Urbain Canel, rue Saint-Germain-des-prés, n°9,
1828. In-8.
B. F., 5 janvier 1828, n° 105. — B. N. : Inv. Ye 32041.
Voir ci-dessous le n° 143.
151° — Les Deux années, ou 1827 et 1828. Revue. Paris,
Urbain Canel, rue Saint-Germain-des-prés, n° 9. 1828. In-52.
62 pp. et 1 f. blanc., — B. F., 12 janvier 1828, n» 168. — B. N. :
Inv. Ye 20235.
132° — Odes et poésies diverses par Léon Dusillet.
Paris, chez Ladvocat, libraire de S. A. R. le duc de Chartres,
quai Voltaire et Palais-Royal, 1828. In-18.
B. F., 12 janvier 1828, n° 234. — B. N. : Inv. Ye 20940.
133° — Sur le conflit dans l'affaire de Mme Fodor; note.
Paris, imprimerie de Balzac, 1828. In-8.
1/2 feuille. — N'est pas à la Bibliothèque Nationale. — B. F.,
12 janvier 1828, n° 276.
158 LA JEUNESSE DE BALZAC.
154° — Annuaire de la Société de médecine de Paris,
séante à l'Hôtel de la préfecture du département. 1828.
(A la fin : Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais S. -G.,
n. 17.) In-16.
16 pp. — B. F., 2 février 1828, n° 579. — B. N. : T46, 69.
155° — L'Art de donner à dîner, de découper les viandes,
de servir les mets, de déguster les vins, de choisir les
liqueurs, etc., etc.; enseigné en douze leçons, avec des
planches explicatives du texte ; par un ancien maître
d'hôtel du président de la Diète de Hongrie, ex-chef
d'office de la princesse Charlotte, etc., etc. Paris, Urbain
Cartel, rue Saint-Germain-des-prés, n. 9, 1828. In-18.
Par Emile Marco de Saint-Hilaire.
B. F., 2 février 1828, n° 583. — B. N. : Inv. V 30798.
136° — Le Ménétrier, ou Une insurrection en Suisse,
histoire de 1655. Par Henri Zschokke, traduite de l'alle-
mand par A. Loëve-Veimars. A Paris, chez Urbain Canel,
rue Saint-Germain-des-prés, n. 9, 1828. 5 vol. in-12.
N'est pas à la Bibliothèque Nationale. — B. F., 2 février 1828,
n° 652.
Sous ce même numéro est également annoncé un prospectus
d'un sixième de feuille.
137° — Petit Paroissien, contenant l'office des dimanches
et fêtes, en latin et en français, selon l'usage de Paris et
de Rome. Paris, D. Belin, libraire- éditeur, quai des Augus-
tins, n. 11. 1828. In-18.
B. F., 2 février 1828, n° 770. — B. N. : Inv. B 15182.
138° — Henriette Sontag, histoire contemporaine, tra-
duite de l'allemand, ornée d'un portrait. Tome premier
[et second]. Paris, chez LHuillier, éditeur, rue Haute feuille,
n° W, 1828. 2 vol. in-8.
B. F., 16 février 1828, n° 947. — B. N. : Inv. Y2 41707.
La Bibliographie de la France n'enregistre que le tome I.
159° — Mémoire au Conseil d'État, sur la demande
d'interrogatoire et de mise en jugement de M. Delavau,
ex-Préfet de Police de Paris, conseiller d'Etat, et de
M. Franchet, ex-Directeur général de la Police du
Royaume, aussi conseiller d'Etat. A raison de leur partiei-
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC.
paiion aux excès commis dans les Journées «les 1 * * el
20 novembre. El des réparations ducs par les <lni\ fonc
tionnaires aux victimes (Imprimerie de II Balzac t rue des
Marais S. <].. n. Il), s. <1. (1828). In-V\
20 pp. dont une blanche. — Signé : [gambert, avocat aux
Conseils du roi. — 15. F., L« mars 1828, u- 1271. — B. N. : Lb*
869.
140° — Œuvres do, Boileau-Despréaux, avec commen
taires revus, corrigés et augmentés, par M. Viollet-le-Duc.
Édition elzévirienne. Paris, Brissot-Thivars el C'*;, libraires,
rue de i Abbaye -S. -Germain, n. i4, 1828. 4 vol. in- IH.
Les faux-titres et titres seuls ont été imprimés par Balzac
pour Brissot-Thivars et Cie qui avaient aequis, à la mort de
Desoër, la propriété de la collection publiée par cet éditeur.
Ces faux-titres et titres ont remplacé simplement ceux de 1821
qui portaient le nom de Desoër.
B. F., 1" mars 1828, n° 1291. — B. N. : 8° Q 2897.
141° — OEuvres de Mathurin Régnier, avec commen-
taires, revus, corrigés et augmentés, précédés de l'histoire
de la satire en France, pour servir de discours prélimi-
naire, par M. Viollet-le-Duc. Edition elzévirienne. Paris,
Brissot-Thivars et Cie, libraires, rue de V Abbaye-S .-Germain-
des-prés, n. 14, 1828. In-18.
Même observation que pour l'article précédent. — B. F.,
1er mars 1828, n° 1293. — B. N. : 8° Q 2897.
142° — Mémoire pour le Sr Joseph-Marie Bonnet, négo-
ciant à Paris, fait par lui-même, contre la dame son
épouse, à MM. les Président et juges composant la
2me Chambre de la Cour Royale, section civile, séant à
Paris (A la fin : Imprimerie de H. Balzac, rue des Marais
S.-G., n. 17), s. d. (1828). In-4°.
80 pp. dont trois blanches. — Signé : Joseph-Marie Bonnet.
— B. F., 8 mars 1828, n6 1418. — B. i\. : 4° F3 137 (pièce 3518).
143° — Tableaux poétiques. Par le comte Jules de Res-
seguier. Seconde édition. A Paris, chez Urbain Canel, rue
Saint-Germain-des-prés, n. 9, 1828. In-8.
B. F., 8 mars 1828, n° 1477. Le rédacteur de la Bibliographie
de la France annonce que Balzac n'a réimprimé que des faux-
460 LA JEUNESSE DE BALZAC.
titres et titres « pour des exemplaires de la première et unique
édition ».
Voir ci-dessus le n° 130.
144° — Encore quelques mots sur l'entrepôt de Paris.
Paris, Saulelet et compagnie, libraires, place de la Bourse.
1828. In-8.
48 pp. — B. F., 29 mars 1828, n° 1927. — B. N. : Vp 11033.
145° — La Protestante, ou les Cévennes au commence-
ment du 18e siècle. Précédée d'une introduction histo-
rique sur la guerre des Camisards. Paris, Ponthieu et Cie,
libraires, Palais-Royal et quai Ma laquais, n° i. Leipzig,
même maison de commerce, 1828. 3 vol. in-16.
Par Mm8 Charles Reybaud, d'après Barbier. Cet ouvrage a été
réimprimé, en 1844, avec le nom de l'auteur, sous le titre de
Géraldine, 2 vol. in-8.
B. F., 29 mars 1828, n° 1968. — B. N. : Inv. Y2 60888-60889.
146° — Myriologies ou Chants funèbres et élégiaques
d'un épirote, publiées par E.-M. Dourneau. Paris, Urbain
Canel, libraire, rue Saint-Germain-des-prés, n.9, 1828. In-12.
B. F., 5 avril 1828, n° 2045. — B. N. : Inv. Ye 20508.
147° — Scènes contemporaines laissées par Madame la
vicomtesse de Chamilly. Paris, Urbain Canel, libraire, rue
Saint-Germain-des-prés, n° 9, 1828. In-8.
Vicomtesse de Chamilly est le pseudonyme collectif de
MM. Loève-Veimars, Emile Vanderburgh et Auguste Romieu.
Cette première édition ne figure qu'à la table de la Bibliogra-
phie de la France où le nom de Thuau est donné comme celui
de l'imprimeur ; est-ce une erreur d'impression ? Thuau a-t-il
imprimé des titres ? Toujours est-il que nous avons vu un
exemplaire portant le nom de Balzac. N'est pas à la Biblio-
thèque Nationale.
Voir l'article suivant :
148° — Scènes contemporaines laissées par feue Ma-
dame la vicomtesse de Chamilly; seconde édition aug-,
mentée du Dix-huit brumaire, scènes nouvelles. Pari.<.
Urbain Canel, libraire, rue Saint-Germain-des-prés, n° 9,
1828. In-8.
B. F., 12 avril 1288, n° 2197. — B. N. : Yf 8557.
U<:s IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC W1
149° — Véronique, <>u la Béguine d'Aarau, histoire de
I44i. Par Henri Zschokke, traduite de l'allemand par
Loeve Veimars. A Paris, chez Canel, rue Saint-Germain'
'1rs prés, n. 9, 1828. 4 vol. in-12.
N'eal paB à la Bibliothèque Nationale. — I5. F., ii2 avril 182K,
ir 2202.
150° — Libération de la caisse, hypothécaire, sans perte
pour ses actionnaires. Paris, de l'imprimerie de II. Balzac,
rue des Marais S.-G., n. Il, 1828. In-8.
'20 pp. — Par M. J. M. de Mora qui a signé l'avant-propos. —
\\. F., -19 avril 1828, n° 2293. - R. N. : Vp 5419.
151° — Le Cri des employés du gouvernement: par u
chef de division. Paris, I.advocat, libraire de S. A. H. M.
le duc de Chartres, quai Voltaire, 1828. In-8.
13 pp. et 1 p. blanche. — Au verso de la couverture, ornée
d'un encadrement, on lit : Imprimé par H. Balzac. — B. F.,
23 avril 1828, n» 2440. — B. N. : Lf97 6.
152° — Le Jeune Irlandais, par Maturin, auteur de Mel-
moth le voyageur, d'Eva, des Albigeois, de la Famille
Montorio, etc., traduit de l'anglais par Madame la com-
tesse***. Paris, Marne et Delaunay- Vallée, libraires, rue Gué-
négaud, n° 25, 1828. 4 vol. in-12.
B. F., 23 avril 1828, n» 2474. — B. N. : Inv. Y1 51964-51967.
153° — Manuel géographique, historique et statistique
des départemens de la France et de ses colonies, conte-
nant une description générale de la France, une descrip-
tion historique et statistique de Paris; un texte énumé-
ratif des bourgs et villages principaux du royaume et de
ses colonies; un historique des hommes célèbres, des
origines, des antiquités et des curiosités de chaque lieu;
l'indication des productions les plus intéressantes dans
les trois règnes; les renseignemens les plus exacts et les
plus récens sur la population, l'industrie, le commerce,
les revenus, l'administration politique et judiciaire, etc.,
et un index alphabétique, servant de dictionnaire géogra-
phique, par M. Félix Lallement. Avec une carte générale
des bureaux de douanes, une carte des environs de Paris,
un plan, de la même ville, et une carte particulière de
chaque département, formant un atlas de cent cartes,
462 LA JEUNESSE DE BALZAC.
revues par M. Achin, ingénieur attaché au génie militaire.
Paris. Baudouin frères, éditeurs, rue de Vaugirard, n. 17,
18-28. In-8.
A paru en livraisons. Les deux premières sont enregistrées
dans la Bibliographie de la France du 25 avril, n° 2485. — B. N. :
L827.
15i° — Traité des maladies des enfans nouveaux-nés et
à la mamelle, fondé sur de nouvelles observations clini-
ques et d'anatomie pathologique, faites à l'hôpital des
enfans-trouvés de Paris, dans le service de M. Baron;
par C. Billard, ancien interne de cet hôpital, docteur en
médecine de la Faculté de Paris. Paris, J.-B. BaiUière,
libraire de V Académie royale de médecine, rue de VEcole-de-
Médecine, n. 13 (bis) : Londres, même maison, 3, Bedford
Street, Bedford Square: Bruxelles, au dépôt de la librairie
médicale française, 1828. In-8.
B. F., 10 mai 1828, n° 2856. — B. N. : Td36 47.
155° — Le Gymnase, recueil de morale et de littérature.
1er volume. — 1er cahier. Paris, imprimerie de H. Balzac,
rue des Marais S. -G., n. 17, 8 mai, 1828. In-12.
Par Hip. Carnot et H. N. J. Auger, d'après Barbier.
B. F., 17 mai 1828, n° 5009. — B. N. : Inv. Z 20576.
156° — Connal ouïes Milésiens, par Maturin, auteur de
Melmoth le voyageur, d'Eva, des Albigeois, de la Famille
Montorio, du Jeune Irlandais, etc. Traduit de l'anglais
par Madame la comtesse***. Paris, Marne et Delaunay-
Vallée, libraires, rue Guénégaud, n° 25, 1828. A vol. in- 12.
B. F., 51 mai 1828, n° 5186. — B. N. : Inv. Y2 51951-51954.
157° — La Jaquerie, scènes féodales, suivies de la
Famille de Carvajal, drame. Par l'auteur du Théâtre de
Clara Gazul. Paris. Brissot-Thivars, libraire, rue de ÏAbbaye-
Saint-Germain-des~prés,n. 14, 1828. In-8.
Par Prosper Mérimée.
B. F., 7 juin 1828, n° 3446. — B. i\. : Vf. 10154.
158° — Spécimen des divers caractères, vignettes et
ornemens typographiques de la fonderie de Laurent ei île
Berny, rue des Marais Saint-Germain. n° 17. Paris. 1828.
Pet. in-fol. oblong.
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC
Sur le titre, dans le l>.is. au-dessous de l'encadrement :
Imprimé pur II. Ilulzur.
( ',c gpecimen, particulièrement intéressant, mérite une des
cription détaillée. Sur le premier plal de la couverture jaune,
dont l«' titre est orné d'un encadrement, se trouve une vignette
dessinée par H. Monnier. Sur le second, une autre vignette,
non signée. Après le titre, un feuillet contient, au r. la table
des matières, et un autre feuillet contenant, égalemenl au i
le prix des caractères. Puis l'ouvrage se divise en deui par-
ties, la première de 87 feuillets imprimés au recto seulement
<Je 1er contient un avertissement). Les fi*. 3 à 17 contiennent les
caractères romains et italiques; les fi*. 18 à 39 (il y a des ff. 34 W»,
35 bis et 58 6*8), les caractères pour affiches; les ff. 40 à 50, les
caractères pour titres et frontispices; les fi*. 51 à 00, les caractères
grecs et allemands (les caractères grecs, quoique annoncés,
manquent, ils devaient occuper les ff. 52 et 53) ; les ff. 61 à 68,
les caractères d'écriture; les ff. 69 à 74, les filets simples, en lam<s
et ornés, accolades et signes divers; les ff. 75 à 87, les vignettes.
La seconde partie se compose de 88 ff. dont 2 de titres, com-
prenant les fleurons, vignettes, têtes de page, armes, passc-
ptrtouts, portraits, etc., poly typés.
B. F., 14 juin 1828, n° 5684.' N'est pas à la Bibliothèque Natio-
nale.
La description de la Bibliographie de la France n'est pas
absolument exacte ; elle n'indique que 84 pp. pour les gravures
polytypées.
159. — Principes de l'étude comparative des langues,
par le baron de Merian. Suivis d'observations sur les
racines des langues sémitiques, par M. Klaproth. Paris.
Scliubart et Heideloff, éditeurs, quai Malaquais, n° i . Leipzig,
Ponthieu, Michelsen et Cie, 1828. In-8.
B. F., 28 juin 1828, n° 4006. — B. N. : Inv. X 289i3.
1(50° — Epître à Monsieur le Ministre pour lui demander
de rendre à l'admiration publique les chefs-d'œuvre de
l'Ecole française; notamment, le tableau de la bataille
d'Austerlitz, et celui des pestiférés de Jaffa. Par Gachot
d'Arpenans. Paris, de l'imprimerie de II. Balzac, rue des
Marais Saint Germain, n. il , 1828. In-8.
16 pp. — B. F., 12 juillet 1828, n° 4190. — B. N. : Inv. Ye 22052.
161° — Adresse à Messieurs les membres de la Chambre
des députés, par Vyard, artiste peintre, rue Notre-Dame-
464 LA JEUNESSE DE BALZAC.
des-Champs, n. 1. Paris, imprimerie de H. Balzac, rue
des Marais S.-G., n. 17, 1828. In-8.
8 pp. — B. F., 19 juillet 1828, n° 4345. — B. N. : Ln27 20872.
102° — Le Cabinet noir et M. de Vaulchier. Paris, chez
Constant-Chantpie, éditeur, Palais-Royal, galerie de bois,
n° 264\ et Le Caudey, libraire, galerie de bois, n° %61,
1828. In-8.
Par F. T. Claudon, d'après Barbier.
52 pp. — B. F., 9 août 1828, nu 4824. — B. N. : Lb49948.
163° — Mémoires sur la Cour de Louis-Napoléon et sur
la Hollande. Paris, Ladvocat, libraire de S. A. R. M. le duc
de Chartres, quai Voltaire et Palais-Royal, 1828. In-8.
Par Paul Garnier, d'après Barbier.
B. F., 50 août 1828, n° 5511. — B. N. : Inv. M 29666.
164° — Le Grison, ou la Cote-aux-fées. Simple épisode
des troubles de la Suisse, en 1799. Par Henri Zschokke,
traduit de l'allemand par A. Loève-Veimars, traducteur
de la collection complète des romans historiques de van
der Velde. Paris, chez Charles Gosselin, libraire de S. A. R.
Mgr le duc de Bordeaux, rue Saint-Germain-des-prés, n. 9,
1828. 2 vol. in-18.
B. F., 4 octobre 1828, n° 5887. — B. N. : Inv. Y2 74904-74905.
165° — La Princesse Christine, épisode historique du
commencement du xvme siècle, par Henri Zschokke, tra-
duite de l'allemand par A. Loève-Veimars, traducteur de
la collection complète des romans historiques de van der
Velde. A Paris, chez Urbain Canel, rue Saint-Gcrmain-des-
prés, n. 9, 1828. 2 vol. in-12.
B. F., 4 octobre 1828, n° 5924. — B. N. : Inv. Y2 74027 et 74028.
166° — OEuvres choisies de Lebrun. Deuxième édition.
Paris, Baudouin frères, éditeurs, rue de Vaugirard, n° 17,
1828. 2 vol. in-12.
La Bibliographie de la France n'enregistre pas cette édition :
en 1828, elle ne mentionne qu'une édition imprimée par Decour-
chant pour Randuel [sic), et qui eut également une seconde
édition.
167° — Maison Ladvocat. Catalogue général (Paris.
LES IMPRESSIONS FAITES PAR BALZAC. 465
imprimerie de II. Baltac^ rue des Marais -s'. Cf., n, 17),
RiDCCCXXVIIl (1828). h. -8.
♦ii» pp. j compris Le titre (au verso, nom h adresse de l'impri
meur). N'est pas enregistré dans la Bibliographie de la i ronce.
10K". — Deux lettres de M- Isambert, adressées S Barbier,
l'ancien associé et successeur de Balzac, le 23 octobre et le
12 novembre. 1828, nous apprennent que Balzac avail commencé
pour lui l'impression d'un ouvrage dont nous n'avons pu
trouver trace et qui. peut-être d'ailleurs, n'a jamais été achevé.
Dans la première de ces lettres, M" Isambert déclare à Bar-
bicr qu'il réglera avec lui « le compte des impressions com-
mencées sur la Liberté individuelle », qu'il veut « porter cet
ouvrage de 1(3 à 20 feuilles », mais qu'il n'y « en a encore que
9 tirées ». Il a « besoin du mémoire détaillé pour les correc-
tions ou d'une vérification », car il soupçonne Balzac « d'enfler
ses mémoires ». Dans la seconde, Me Isambert informe Barbier
qu'il va lui adresser la feuille 10 à mettre en pages et que le
règlement aurait lieu une fois l'impression terminée. La récla-
mation de M. Balzac est exagérée; « je veux bien lui payer,
ajoute-t-il, 60 p. 100 d'étotïes et bénéfices outre le salaire des
ouvriers, et il me paraît qu'on a compté 75. Si M. Balzac accepte
la réduction de 15 p. 100, je suis prêt à régler avec lui pour les
9 feuilles sans autre retard ». Enfin, le 15 novembre 1828, Bar-
bier fait remettre à M. Sédillot le règlement définitif de ce
compte.
Il s'agissait peut-être d'une réimpression de La Liberté indi-
viduelle ou plaidoyer et réplique prononcés par Me Dupin aine,
brochure publiée en 1826 et décrite sous le n° 16.
30
APPENDICE X
LA MAISON DE LA RUE DES MARAIS
Sur la rue des Marais-Saint-Germain, consulter Topo-
graphie historique du vieux Paris, par Adolphe Berty,
historiographe de la ville [et L.-M. Tisserand, inspecteur
principal du service historique de la ville...] Paris,
imprimerie nationale, 1882, t. IV (Région du faubourg
Saint-Germain), p. 250.
On trouvera, sur Vauquelin des Yveteaux et sur la vie
« voluptueuse » qu'il menait en son hôtel de la rue
des Marais, une notice intéressante dans le livre de
M. le baron Jérôme Pichon, intitulé : Notices biogra-
phiques et littéraires sur la vie et les ouvrages de
Jean Vauquelin de la Fresnaye et Nicolas Vauquelin des
Yveteaux, gentilshommes et poètes normands, 1536-
1649. Paris, Techener, 1846, in-8, pp. 4042.
Au temps où Balzac l'habitait, la maison portant le
n° 17 appartenait à M. Dufour; elle est aujourd'hui
la propriété de la Ville de Paris. En 1905, elle portait
le n° 17 bis et dépendait de la « Librairie agricole »,
26, rue Jacob ; la gracieuse complaisance de Mme De-
prez, qui en était propriétaire à cette époque, nous per-
mit de réunir les renseignements relatifs à la construc-
tion de la maison. M. Bourguignon, au nom de
M"ie Deprez, avait bien voulu nous écrire :
I.A maison DE LA RUE DES MARAIS.
«... 1° D'un acte de vcnic, en date du 7 mai 1825, il
résulte qu'à celle époque la maison de la rue Visconti
n'existait pas. Il n'y avait sur la rue Visconti (alors rue
des Marais) que « deux pavillons élevés d'un re/ .dé-
chaussée ei couverts en ardoises ». J'ai d'ailleurs un plan
général et j'y constate que la maison actuelle n° '26, rue
Jacob (alors n° 24, rue du Colombier) est bien désignée
Hôtel du prince de Galles.
« 2° La maison de la rue des Marais était construite à la
date du 8 décembre 1828, comme il résulte d'un compte
de mitoyenneté entre M. Prestat, propriétaire rue des
Marais, n° 17 et M. Lacy, propriétaire rue des Marais,
n° 15, établi, à cette date du 15 décembre 1828 et portant
cette mention : « M. Prestat ayant adossé un bâtiment
dut acheter la mitoyenneté... », etc.
« Mais cette date du 28 décembre 1828 est une date
limite et rien ne fait supposer que les comptes de mitoyen-
neté aient été établis aussitôt après la construction, puis-
qu'il y a deux autres voisins avec lesquels les comptes de
mitoyenneté n'ont été établis que : le premier en 1851
et le deuxième en 1846. Le premier est le voisin de gau-
che de la rue du Colombier, parce qu'on avait exhaussé
une aile de l'Hôtel du prince de Galles, le deuxième
(celui réglé en 1846) est précisément le voisin rue des
Marais, 19.
« Il est, au contraire, probable que M. Prestat, devenu
propriétaire suivant l'acte d'adjudication du 7 mai 1825,
n'aura pas trop tardé à construire et la maison, 17, rue
des Marais, a dû être construite en 1826 ou au plus tard
1827. Cependant, je n'ai pu trouver, dans aucune pièce,
l'indication précise de la construction. Tous les actes rela-
tifs à la mitoyenneté portent simplement la mention :
« M. Prestat ayant adossé, etc. »
La maison portant le n° 17 de la rue des Marais-Saint-
Germain était certainement construite en 1826, puisque
dans un traité passé entre M. d'Assonvillez, Honoré
Balzac et André Barbier, en date du 16 mars 1826
(Voir Appendice VI, pièce n° i6), Balzac et Barbier sont
168 LA JEUNESSE DE BALZAC.
déjà dits domiciliés : rue des Marais-Saint-Germain,
n° 17.
Quant au M. Prestat, cité dans la lettre de M. Bour-
guignon, il s'agit de M. Henri Prestat, demeurant 9, rue
des Bourdonnais, propriétaire des locaux occupés par
l'imprimerie Balzac et Barbier. Nous le voyons figurer
comme créancier à la faillite, dans un « état de la situa-
tion du sieur Honoré Balzac » et dans l'acte de vente de
son imprimerie à Barbier (Voir Appendice VIII, pièces
nos 80 et 81). Un autre Prestat, du prénom d'Auguste,
demeurant rue de la Poterie, y figure également.
Paul Lacombe, le bibliographe parisien, aujourd'hui
défunt, voulut bien relever et nous communiquer la
liste des voisins de Balzac, en 1827, d'après YAlmanach
parisien ou Liste générale des habitants de Paris, clas-
sés par rues et par numéros... pour l'année 1827 . Paris,
chez les éditeurs, rue des Marais du Temple, n° 14,
1827, in-12, p. 187. Voici cette liste :
N° 15 : Delpont, négociant.
Dufraval, receveur de l'enregistrement.
Lacy.
N° 17 : Balzac, imprimeur.
N° 19 : Besson (Madame).
Desmichels, baron de Champorçain, avocat.
Ducamp de Bussy.
Il n'est pas fait mention du 17 bis. Il est à remarquer
que, lors de notre première édition de cet ouvrage en
1905, le 17 bis était le numéro de l'immeuble placé
entre le 15 et le 17 et que le 17 était contigu au 19.
Actuellement (1921), la Ville de Paris a fait disparaître
le n° 17 bis en le réunissant au n° 17.
Au moment où Georges Vicaire achevait la correction
des dernières feuilles de cet ouvrage, il succombait
soudainement. Jusqu'au bout il a travaillé et celte nou
velle édition de notre livre — retardée par la guerre -
avait été Vobjet de ses soins scrupuleux. Il se faisait
une joie d'exécuter les volontés de M. de Spoelberch de
Lovenjoul et de donner au public les lettres de Balzac et
celles de Madame de Berny. Il na pas eu la satisfaction
de voir paraître le livre et, après vingt-cinq années d'une
collaboration cordiale, fai ta douleur de perdre, à
l'heure de la réalisation, cet incomparable ami.
Ce livre vient de lui; il est à lui; je le rends à sa
mémoire. On y retrouvera, à chaque page, les marques
de sa conscience, de son érudition sans défaut et du
culte qu'il professait pour les Belles-Lettres.
G. II.
Paris, 8 novembre 1921.
TABLE DES MATIÈRES
Pages.
Avis sur la présente édition 1
Avertissement de la première édition 5
La Jeunesse de Balzac :
Premières armes 11
Balzac imprimeur 55
Rue des Marais 52
Dilecta 66
Les Affaires 91
La Catastrophe 106
Conclusion 122
Correspondance d'Honoré de Balzac et de Laure de
Berny (1822-1852) 155
Note explicative 155
Lettres d'Honoré de Balzac . 159
Lettres de Madame de Berny 225
Appendices :
I. — Les Balzac 291
II. — Les de Berny 295
III. — Les Hinner 299
IV. — Reinier de Jarjayes 504
V. — La Librairie 506
VI. — L'Imprimerie 559
VII. — La Fonderie Balzac et Cie 556
VIII. — La Faillite et les dettes 577
IX. — Les Impressions faites par Balzac. . . . 420
X. — La Maison de la rue des Marais 466
FABLE DES ILLUSTRA PIONS
Portrait d'Honoré de Balzac , . . . . 24
Portrait de Madame de Berny 70
Fac-similé de l'écriture de Balzac 157
Fac-similé de l'écriture de Madame de Berny 22'»
85 598. — Imprimerie générale Lahure, rue de Fleuras, 9, Paris.
2178
<riel
PLEASE DO NOT REMOVE
CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET
UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY
O o>
JV^m--
I
ma ;. '
•■••'■ .•"-. •
'■'''■' '•
■• :•:■:•:■
au
".'V.