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Full text of "La langue théâtrale : vocabulaire historique, descriptif et anecdotique des termes et des choses du théâtre, suivi d'un appendice contenant la législation théâtrale en vigueur"

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VOGABl^AIRE 

HISTORIQUE.  DESCRirTIl-  KT  ANECDOTIQUE 


SUIVI  D'UN  APPEiNDIGE 

CONTENANT  LA  LÉGISLATION  THÉATUALE  EN  VIGUEUR 


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^i.FUEn  noîr.irARD 


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ARNAUD  ET  LABAT,  L^^RAIRES-ÉDITEURS 

215,   PALAIS-ROYAL 
1878 


•658 


LA 


LANGUE  THÉÂTRALE 


liVJlEUX,   IMPRIMERIE  DE  CH.   HÉRI33ET. 


[.A 


LANGUE  THEATRALE 

VOCABULAIRE 

HISTORIQUE,  DESCRIPTIF  ET  ANECDOTIQUE 

TERMES  ET  DES  CHOSES  DU  THÉÂTRE 

SUIVI  D'UN  APPENDICE 
CONTENAM  L\  LÉGISLATION  THÉÂTRALE  EN  VIGUEUR 

-PAR 

ALFRED    BOUCHARD 


PARIS 

ARNAUD  ET  LABAT,  LIBRAIRES-ÉDITEURS 

215,    PALAIS-ROYAL 

.    .    i878 


\ 


AVANT-SCENE 


L'ouvrage  que  nous  offrons  au  public 
témoigne^  par  son  sous-titre^  de  la  modestie  de 
nos  prétentions  pour  cette  œuvre  où  notre 
collaborateur  «  ciseaux  »  a  joué  un  rôle  aussi 
important  que  notre  plume;  nous  croyons 
cependant  qu'il  pourra  être  utile  aux  per- 
sonnes qui  aiment  le  théâtre  :  c'est  là  notre 
seul  but. 

Notre  idée  n'est  pas  neuve  dans  la  forme, 
car  il  existe  plusieurs  ouvrages  sous  les  titres 

de  DICTIONNAIRE  DES  THÉÂTRES,  DICTIONNAIRE  THÉÂ- 
TRAL, etc.,  etc.  ;  mais  elle  est  nouvelle  dans  le 

a 


fond,  en  ce  sens  que  les  ouvrages  précédem- 
ment ptibliés,  en  outre  qu'ils  remontent  au 
milieu  du  siècle  dernier  pour  quelques-uns^  et 
à  l'année  iS9,4  pour  les  plus  récents ^  ne  s'oc- 
cupent en  aucune  façon  à  satisfaire  la  curio- 
sité du  spectateur 'j  les  uns,  beaucoup  trop 
longs,  offrent,  dans  leurs  huit  ou  neuf  volumes, 
un  catalogue  ou  répertoire  des  pièces  jouées 
depuis  l'origine  de  notre  théâtre  jusqu'à  la 
date  de  leur  publication;  les  autres,  surtout 
les  derniers^  se  sont  attachés  à  faire  une  courte 
biographie  critique  ou  apologétique  des  comé- 
diens qui  étaient  au  théâtre  à  ce  moment,  plu- 
tôt qu'à  traiter  des  choses  du  théâtre.  Cette 
méthode,  qui  pouvait  piquer  la  curiosité  au 
moment  de  la  mise  en  vente,  n  offrait  plus 
aucun  intérêt  quelques  mois  après,  par  suite 
des  nombreux  changements  survenus  dans  le 
personnel  des  théâtres. 

Laissant  de  côté  la  bibliographie  comme 
trop  aride,  et  la  biographie,  comme  trop 
sujette  à  partialité,  nous  n'avons  fait  entrer 
dans  notre  vocabulaire  que  les  mots  qui  peuvent 


—  III 


intéresser  le  spectateur;  donner  matière  à  son 
jugement,  à  son  appréciation,  à  sa  critique, 
tout  en  V initiant  aux  choses  du  théâtre.  ISlous 
avons  rejeté  presque  entièrement  /'argot  de 
coulisses  et  n'en  avons  conservé  que  quelques 
mots  qui  sont  du  domaine  général,  et  en  quel- 
que sorte  passés  dans  la  langue  du  monde.  Cet 
argot,  du  reste,  est  trop  fantaisiste,  et  surtout 
trop  élastique,  pour  être  classé  dans  un  voca- 
bulaire, à  moins  d'en  faire  un  spécial,  comme 
fit  le  regretté  joachim  duflot. 

Nous  avons  omis,  à  dessein,  la  technologie 
du  machiniste  et  ne  lui  avons  emprunté  que 
quelques  mots  indispensables  au  spectateur 
pour  qu'il  puisse  se  rendre  compte  des  ma- 
nœuvres qu'il  voit  opérer;  le  reste  serait  fati- 
gant et  sans  intérêt  pour  lui. 

Enfin,  pour  faire  passer  quelques  réflexions 
de  notre  cru,  nous  avons  agrémenté  notre 
vocabulaire  d'une  certaine  quantité  d'anec- 
dotes dramatiques  ;  mais,  craignant  qu'on  y 
voulût  voir  des  personnalités,  nous  les  avons 


IV    — 


prises  assez  anciennes  pour  ne  blesser  per- 
sonne^ ce  qui  ne  veut  pas  dire  que  l'application 
n'en  puisse  être  faite  de  nos  jours  ;  de  cela, 
nous  nous  lavons  les  mains. 

La  partie  historique,  on  le  comprendra  faci- 
lement, doit  être  fort  écourtée  dans  un  ouvrage 
aussi  restreint  que  le  nôtre;  cependant  on  y 
trouvera,  sommairement  il  est  vrai,  les  ori- 
gines du  théâtre,  en  G?'êce,  à  Rome,  et  chez 
nous;  celles  de  nos  grandes  scènes  :  Opéra, 
Opéra-Comique,  Théâtre-Français,  ainsi  que 
l'histoire  et  la  fondation  des  principaux 
théâtres  de  Paris. 

Nous  avons  terminé  et  complété  notre 
volume  par  U7i  Appendice  contenant  les  docu- 
ments historiques  de  fondation,  ainsi  que  les 
lois,  décrets,  ordonnances,  règlements  de  police 
qui  forment  la  législation  théâtrale.  Le  lecteur 
y  trouvera  de  précieux  et  intéressants  rensei- 
gnements qui  lui  expliqueront  bien  des  choses; 
il  y  verra  que  tandis  qu'il  se  livre  insouciant 
au  plaisir  des  yeux  et  des  oreilles,  ses  plaisirs, 


^ 


sa  santé,  sa  sûreté^  sa  vie  même  sont  protégés 
par  les  lois  existantes  et  par  des  agents  qui  les 
font  observer. 

Du  reste,  à  la  grâce  de  Dieu  ! 


OBSERVATION  IMPORTANTE 


Pour  éviter  de  nombreuses  redites  et  des  renvois 
multipliés,  nous  avons  imprimé,  dans  chaque  ar- 
ticle, en  caractère  semblable  à  celui-ci — THÉÂTRE 
—  les  mots  contenus  dans  notre  vocabulaire  dont 
la  lecture  pourrait  servir  de  corollaire  ou  de  com- 
plément au  mot  consulté. 


Pendant  l'impression,  lo  mot  SOCIÉTAIRES  a  subi  les 
modifications  suivantes  :  M.  Dressant  a  pris  sa  retraite , 
et  M'"*^  Emilie  Guyon  est  décédée. 


LA 


LANGUE  THEATRALE 


ABANDON.  —  Fils  du  naturel,  et  aussi 
difficile  à  atteindre  que  son  père  ;  il  demande, 
plus  que  lui,  de  la  grâce,  une  grande  déli- 
catesse de  nuances  dans  le  geste  et  dans  la 
voix.  On  ne  le  trouve  guère  que  chez  les 
grands  GOMÉDlEiNS;  les  autres  s'abandonnent 
volontiers,  mais  n'ont  pas  d'abandon. 

ABONNÉ.  —  Spectateur  payant  ses  ENTRÉES  à 
l'avance,  pour  un  mois  ou  une  année.  Dans 
beaucoup  de  villes  de  province,  les  abonnés 
font  la  loi  aux  directeurs  et  sont  l'effroi  des 
DÉBUTANTS. 

h'abonné  à  une  place  numérotée  ou  à  une 
loge,  a  seul  le  droit  d'en  disposer.  L'adminis- 
tration ne  peut  la  louer  ni  y  introduire  per- 

1 


sonne.  Il  y  a  exception  pour  les  théâtres  dont 
les  représentations  ne  sont  pas  quotidiennes  ; 
l'administration  peut  en  disposer,  dans  le  cas 
d'une  représentation  extraordinaire,  les  jours 
non  compris  dans  le  contrat  de  location. 

Uabonné  pour  un  nombre  déterminé  de 
représentations  a  droit  à  ce  nombre  sans 
avoir  à  se  préoccuper  des  empêchements  ou 
des  retards. 

Uabonné  au  mois  doit  supporter  tous  les 
cas  de  RELACHE  qui  se  présenteront  dans  son 
mois  de  location  et  ne  pourra  se  plaindre  ni 
d'un  changement  de  pièce,  ni  de  changements 
d'acteurs.  Ces  cas  sont  jugés. 

ACADÉMIE...?  DE  MUSIQUE.  — F.  0/;eVa. 

ACCESSOIRE.  —  Tous  les  objets  portatifs 
qui  sont  nécessaires  à  la  représentation  et 
concourent  à  l'iLLUSiON  dramatique  en  dehors 
de  la  décoration  peinte. 

Il  faut  convenir  que  MM.  les  DIRECTEURS 
actuels  apportent  un  grand  soin  aux  acces- 
soires. Si  la  scène  se  passe  de  nos  jours,  les 
meubles,  les  tentures,  les  garnitures  sortent 
de  chez  l'ébéniste,  le  tapissier,  le  marchand 
de  bronze,  et  sont  à  la  dernière  mode  ;  s'il 
s'agit  d'histoire  ancienne,  ou  de  pays  étran- 


—  3  — 

gers,  les  caractères  archéologique,  historique 
et  géographique  sont  observés  avec  assez  de 
soin. 

En  province  les  accessoires  sont  encore  très- 
négligés  :  nous  avons  vu  jouer  le  Piano  de 
Berthe,  sans  le  portrait  de  M.  de  Merville 
auquel  Frantz  adressait  néanmoins,  malgré 
son  absence,  de  vigoureuses  apostrophes.  La 
bouteille  avec  laquelle  l'acteur  est  supposé  se 
griser  est  presque  toujours  en  verre  clair,  et 
vide,  de  sorte  que  le  spectateur  voit  la  toile 
de  fond  à  travers  la  bouteille  ;  le  riche  album 
que  M""®  la  marquise  doit  feuilleter,  est  un 
livre  de  blanchisseuse  ;  le  chibouck  de  Loré- 
dan,  une  affreuse  pipe  culottée.  Si  l'on  prend 
le  thé,  les  tasses  sont  empruntées  au  café  voi- 
sin et  en  portent  la  marque  ;  le  vin  de  Cham- 
pagne est  une  mauvaise  limonade  gazeuse  qui 
réclame  le  secours  du  tire-bouchon.  Quand  le 
traître  ou  la  femme  coupable  veulent  brûler 
les  traces  de  leur  crime ,  il  n'y  a  ni  bougie  ni 
allumettes  :  bien  heureux  quand  ils  ont  la 
présence  d'esprit  de  se  servir  de  la  RAMPE, 
etc.,  etc.. 

Une  lettre  oubliée,  un  accessoire  ridicule, 

peuvent  compromettre  le  succès  d'une  pièce, 

et  quelquefois  causer  sa  chute.  V.  Ustensilicr, 

-  Se  dit  encore  d'un  rôle   sans   importance. 


Beaucoup  de  comédiens  du  plus  grand  mérite 
n'ont  dû  la  révélation  de  leur  talent  qu'à  l'em- 
ploi qu'on  a  fait  d'eux  comme  accessoires. 
Potier,  Arnal,  Odry,  Bouffé  sont  de  ce 
nombre.  V.  Utilité. 

Les  COMPARSES  qui  ne  font  pas  régulière- 
ment partie  d'une  TROUPE  rentrent  aussi  dans 
les  accessoires. 

ACCESSOIRES  (GARÇON  D').  —  Artiste 
invisible,  aux  appointements  de  50  à  60  francs 
par  mois.  Ses  rôles  sont  cependant  nombreux, 
comme  vous  l'allez  voir.  L'acteur  dit  :  «  Voici 
une  voiture  qui  entre  dans  la  cour  du  châ- 
teau !  »  Le  garçon  donne  quelques  coups  de 
fouet  et  traine  deux  roues  de  bois  derrière  la 
toile  de  fond.  «  Vous  ne  pouvez  sortir,  il  pleut 
à  torrent...  »  ou  «  la  grêle  rebondit  sur  les 
toits,  »  ou  «  la  foudre  gronde,  l'éclair  déchire 
la  nue.  »  Le  garçon  tourne  un  cylindre  dans 
lequel  il  y  a  des  petits  cailloux  (pluie  ou  grêle, 
suivant  la  rapidité  du  mouvement)  ;  il  remue 
la  feuille  de  tôle  (tonnerre)  et  souffle  dans  un 
tube  des  matières  résineuses  sur  une  pamme 
(éclairs).  «  Ma  mère,  vous  n'avez  plus  de  fils  !  » 
dit  le  jeune  premier  en  se  précipitant  dans  la 
coulisse  ;  aussitôt  le  garçon  tire  un  coup  de 
pistolet. 


C'est  encore  lui  qui  remue  la  vaisselle  que 
Ton  brise  ;  qui  sonne  ou  frappe  à  la  porte  ; 
qui  fait  le  chien  dans  Brutus  !  loche  César.  Il 
fait  aussi  des  riforzando  dans  les  chœurs  à  la 
CANTONADE,  et  les  murmures  du  peuple  dans 
les  drames  de  Bouchardy. 

ACCORD.  —  Rare  à  l'orchestre;  très-rare 
sur  la  scène  ;  plus  rare  encore  dans  les  cou- 
lisses. 

Rien  à  ajouter  à  cette  formule  déjà  an- 
cienne ,  mais  éternellement  vraie  au  théâtre 
comme  en...  politique. 

ACCROCHÉ.  —  Se  dit  d'une  pièce  qui,  au 
moment  d'être  jouée,  se  trouve  «  accrochée  » 
par  un  accident ,  un  caprice  ,  la  censure , 
etc.,  etc. 

ACROBATE.  — Nom  sous  lequel  on  désigne 
les  danseurs  de  cordes.  Ce  genre,  qui  eut  ses 
beaux  jours  aux  THÉÂTRES  DE  LA  FOIRE  et  chez 
NicoLET,  est  à  peine  représenté  aujourd'hui 
par  quelques  saltimbanques  forains.  La  der- 
nière étoile  du  genre  fut  M"""  Saqui  ;  elle  dan- 
sait encore  à  quatre-vingts  ans. 

Les  gymnasiarques  ont  remplacé  les  acro- 
bates. 

1. 


ACTE.  —  Division  d'un  poëme  dramatique, 
ayant  pour  but  de  laisser  reposer  l'acteur  et 
le  spectateur.  L'ACTION  marche  néanmoins,  et 
l'intervalle  qui  sépare  un  acte  d'un  autre  sert 
à  la  déplacer,  à  la  modifier  sans  trop  choquer 
la  .vraisemblance.  L'esprit  du  spectateur  se 
prête  merveilleusement  à  cette  action  invi- 
sible ;  il  cherche  à  la  deviner,  et,  lorsque  Vacte 
suivant  commence,  sa  curiosité,  son  attention 
sont  réveillées  par  cette  suspension,  et  son 
plaisir  accru.  V.  Entr  actes. 

Les  règles  de  Tart  poétique  assignent  cinq 
actes  aux  timgédies  et  diux  comédies  ;  cette  règle 
fut  mise  de  côté  par  Voltaire  dans  la  Mort 
de  César,  qui  n'en  a  que  trois ,  et  cet  exemple 
fut  suivi  par  beaucoup  d'autres  auteurs.  Sans 
vouloir  accepter  la  règle  rigoureuse  des  an- 
ciens ,  nous  croyons  qu'il  n'y  a  que  trois 
coupes  permises  pour  le  genre  sérieux  :  un, 
trois  et  cinq  actes.  V.  Tableaux. 

L'acte  se  subdivise  lui-même  en  SCÈNES. 

ACTEUR,  ACTRICE.  —  Celui,  ou  celle, 
qui  représente  sur  un  théâtre  un  personnage 
d'une  œuvre  dramatique.  V.  Comédien,  Comé- 
die fine. 

La  TKAC.KDlE  d'origine  n'était  qu'un  simple 
chœur  chantant  des  hvmnes  en  Thonneur  de 


—  7  — 

Bacchus.  Thespis  fut  le  premier  qui  pensa  à 
y  introduire  un  personnage,  ou  actem%  dont 
les  récits  avaient  pour  but  de  laisser  reposer 
le  chœur;  Eschyle  y  en  introduisit  un  second, 
et  voici  le  dialogue  établi;  Sophocle,  pensant 
avec  raison  qu'il  fallait  un  nombre  impair 
pour  établir  une  majorité,  en  introduisit  un 
troisième.  La  tragédie  grecque  n'a  pas  ou  peu 
dépassé  ce  nombre  d'acteurs. 

En  Grèce,  les  acteurs  étaient  admis  aux 
plus  hautes  fonctions  et  très-considérés  ;  à 
Rome,  au  contraire,  celui  qui  montait  sur  un 
théâtre  perdait  ses  droits  de  citoyen  et  était 
en  quelque  sorte  entaché  d'infamie. 

Cette  contradiction  s'est  continuée  chez  les 
peuples  modernes  :  en  Angleterre  les  acteurs 
ont  toujours  joui  d'une  grande  considération, 
tandis  qu'en  France  ils  étaient  repoussés  de 
la  société.  Ainsi,  quand  en  Angleterre  la  no- 
blesse suivait  le  convoi  de  Garrick,  on  refu- 
sait en  France  d'enterrer  Molière  et  W^^  Le- 
couvREUR.  Cette  déconsidération  s'est  beau- 
coup amoindrie,  mais  elle  existe  encore,  ne 
fût-ce  qu'à  l'état  de  préjugé.  C'est  à  ce  point 
que  le  ruban  de  la  Légion  d'honneur,  qui 
s'épanouit  à  la  boutonnière  de  tant  de  nul- 
lités, ne  décore  aucun  acteur,  en  tant  que 
comédien. 


—  8   — 

Dans  le  monde  on  se  sert  indistinctement 
des  mots  «  acteur  »  et  «  comédien  ».  C'est  à 
tort,  car  il  y  a  une  énorme  différence  entre 
les  deux,  et  tout  autant  qu'entre  apprenti  et 
ouvrier.  Tout  comédien  est  acteur;  mais  tout 
acteur  n'est  pas  COMÉDIEN.  "V acteur  n'est  sou- 
vent propre  qu'à  un  rôle  ;  le  COMÉDIEN  peut 
les  jouer  tous  avec  la  même  perfection,  à 
quelques  nuances  près.  C'est  ainsi  que  Gar- 
RicK  jouait  Orosmane  et  Crispin  avec  le  même 
succès  ;  c'est  aussi  pour  cela  que  notre  Théâtre- 
Français  nous  montre  autant  de  COMÉDIENS 
qu'il  compte  à'acteurs. 

ACTION.  —  En  style  dramatique  Y  action  est 
le  SUJET  ou  le  principal  élément  d'une  pièce. 
D'après  l'ancienne  poétique  elle  devrait  être 
unique  et  ne  pas  excéder  le  cours  d'une  jour- 
née. Le  théâtre  moderne,  surtout  dans  le 
DRAME,  s'est  affranchi  de  ce  joug  ;  Y  action  a 
pris  des  proportions  et  un  développement 
immenses  :  de  simple  qu'elle  était,  elle  est 
devenue  tellement  compliquée,  que  parfois  le 
public,  les  acteurs  et  l'auteur  n'y  compren- 
nent rien. 

—  Se  dit  encore  comme  synonyme  de  mouve- 
ment :  Il  y  a  beaucoup  à'action  dans  cette 
pièce. 


~  9  — 

AFFECTATION.  —  Ce  que  beaucoup  (l'ac- 
teurs,  des  deux  sexes,  veulent  faire  passer 
pour  du  NATUREL  —  erreur  n'est  pas  compte. 
—  DuBAY  a  dit  :  «  U affectation  est  la  carica- 
ture du  NATUREL.  »  On  ne  peut  mieux  dire. 

AFFÉTERIE.  — Préoccupation  de  ses  avan- 
tages physiques  et  de  ses  moyens  personnels. 
Ceci  ne  devrait  regarder  que  le  côté  des  dames  ; 
malheureusement  il  n'en  est  rien  :  des  deux 
côtés  l'on  «  pose  ». 

AFFICHE.  —  Gluau  que  le  directeur  d'un 
tjiéâtre  fait  apposer  sur  les  murs  de  la  ville 
où  il  exploite  son  privilège  (vieux  style). 

Ce  fut,  dit-on,  Cosme  d'Oviedo,  auteur  espa- 
gnol contemporain  de  Cervantes,  qui  inventa 
V affiche  (dramatique.  Elle  ne  fut  en  usage  en 
France  que  vers  la  fin  du  xvii°  siècle. 

Les  affiches  différaient  de  couleurs  pour 
chaque  théâtre.  Celles  de  TOPÉRA  étaient  jau- 
nes ;  celles  de  l'HOTEL  de  bourgogne  étaient 
rouges,  et  le  théâtre  de  la  rue  Mazarine  les 
avait  vertes.  On  voit  que  depuis  longtemps 
MM.  les  directeurs  nous  en  font  voir  de  toutes 
les  couleurs. 

Primitivement,  les  affiches  n'indiquaient  ni 
le  nom  de  l'auteur,  ni  les  noms  des  acteurs. 


—  10  — 

Pour  Fauteur  il  n'y  avait  pas  grand  mal  :  on 
ne  pouvait  substituer  une  pièce  à  une  autre  ; 
mais  l'absence  des  noms  des  acteurs  permet- 
tant au  CHEF  DEMPLOl  de  se  faire  remplacer, 
sans  que  les  spectateurs  en  fussent  instruits, 
cela  occasionnait  souvent  des  scènes  tumul- 
tueuses de  la  part  du  public  déçu. 

Si  V affiche  n'indiquait  pas  les  noms,  elle 
remplissait  l'office  des  journaux  de  théâtres 
actuels  et  contenait  un  compte  rendu  de  la 
pièce  du  jour  ;  elle  engageait  le  public  à  se 
pourvoir  à  l'avance  de  bonnes  loges,  et  s'ex- 
primait en  prose  et  en  vers.  Villiers  composa 
pour  V  Amarilhjs  de  Du  Ryer,  jouée  à  Y  hôtel 
de  Bourgogne^  en  1658,  une  affiche  en  vers 
qui  est  restée  le  modèle  du  genre. 

Bien  faire  \ affiche  est  une  science,  et  chose 
qui  n'est  pas  donnée  au  premier  venu.  \^ affiche 
est  le  levier  d'ARCUiMÈDE,  surtout  en  province. 
Il  faut  savoir  disposer  les  titres,  fabriquer  les 
sous-titres,  baptiser  les  ACTES  et  les  TABLEAUX. 
Exemple  : 

LA  TOUR  DE  NESLE 

ou   REINE  CRIMINELLE  !  EPOUSE  COUPABLE  !  ! 
MÈRE  DÉNATURÉE  !  !  ! 

Les  directeurs  de  province  excellent  tout  par- 


—  ti  — 

ticulièceniont  à  taire  Vafficfte.  Leur  ignorance, 
assez  générale  en  littérature  dramatique...  et 
autre,  leur  donne  un  aplomb  qu'on  ne  saurait 
trop  admirer.  Nous  lisions  tout  récemment, 
à  la  suite  du  titre  :  Le  Supplice  d'une  Feinme, 
cette  appréciation  pyramidale  :  «  Dans  cette 
pièce,  les  mots  fulminent  comme  des  coupoles 
intelligentes.  »  (Textuel.) 

Voici  encore  deux  jolies  choses  auxquelles 
nous  ne  changeons  rien  : 

L'INTRIGUE  ESPAGNOLE 

ou 

LA  BARBE  INTERROMPUE 

CHEF- d'oeuvre    HISTORIQUE    DE    l'IMMORTEL 
BEAUMARCHAIS. 

On  comprend  qu'il  s'agit  du  Barbier  de 
SÉviLLE  ;  et  puis 

ALI-BABA 

ou   LES   QUARANTE   VOLEURS 

MÉLODRAME   HISTORIQUE   A    GRAND    SPECTACLE 

«  Nota.  —  Le  directeur  n'ayant  pu  trouver  que  1:2  vo- 
leurs dans  le  pays,  demande  l'indulgence  du  public 
pour  n'en  pas  offrir  40.  » 

\j' affiche  doit  encore  compter  avec  MM.  les 


—  12  — 

imprimeurs,  compositeurs  et  protes  qui  com- 
mettent des  gentillesses  de  ce  genre  : 

LE  ROMAN  D'UN  JEUNE  HOMME 

PAUVRE  PIÈCE,  PAR  M.  OCT.  FEUILLET 

OU  bien  : 

LA  CHANTEUSE  VIOLÉE  (pour  voilée) 

OPÉRA-COMIQUE  EN  UN  ACTE. 

Les  affiches  sont  obligatoires.  A  Paris,  elles 
ne  peuvent  mesurer  plus  de  0™,63  sur  0™,43, 
ni  être  apposées  au-dessous  de  0™,50,  ni 
au-dessus  de  2°", 50,  à  partir  du  sol.  Tout 
cbangement  dans  le  spectacle  du  jour  doit 
être  indiqué  par  des  bandes  de  papier  blanc 
collées  sur  les  affiches  avant  l'ouverture  des 
bureaux. 

\Saffche  est  le  contrat  qui  lie  la  direction 
envers  le  public. 

A  Paris  l'affichage  des  théâtres  se  fait  dans 
des  endroits  déterminés,  et  les  théâtres  y  sont 
placés  d'après  leur  ordre  hiérarchique ,  le 
grand  Opéra  qh  tête.  V.  Appendice  (ord.  1864). 

AGE.  —  S'il  est  vrai  de  dire  qu'on  n'a  que  l'âge 
que  l'on  paraît  avoir,  c'est  surtout  au  théâtre. 


—   13  — 

M""  Debrie  jouait  encore  les  INGÉNUITÉS  à 
l'âge  de  65  ans,  et  le  public  ne  voulait  qu'elle 
dans  le  rôle  d'Agnès. 

Qui  s'est  jamais  inquiété  de  l'âge  de 
M"^  Mars?  Elle  avait  15  ans,  30  ans,  60  ans  ; 
Elle  avait  l'âge  qu'elle  voulait  avoir.  Qui  a  pu 
dire  au  juste  l'âge  de  Virginie  Déjazet  ? 
Elle  eut  autant  d'extraits  de  naissance  qu'elle 
a  créé  de  rôles.  Etait-ce  un  Richelieu  enfant? 
Etait-ce  une  Golombine?  Etait-ce  la  douairière 
de  Brionne?  Le  talent  n'a  pas  d'âge. 

AGENT  DRAMATIQUE.  —  Négociant  qui 
fait  la  traite  des  comédiens,  tient  magasin  de 
rois  et  de  bergères,  de  Lucrèces  et  de  Marcos, 
de  Scipions  et  d'Antonys,  de  roulades  et  d'en- 
trechats, de  corps  de  ballets  et  de  dames  de 
chœurs...  et  de  cœurs.  Il  expédie  en  province, 
s.  G.  D.  G.,  en  prélevant  d'avance  une  prime 
de  dix,  quinze  ou  vingt  pour  cent  —  mais 
toujours  en  sens  inverse  de  la  valeur  du  sujet 
—  sur  chaque  engagement  qu'il  fait  faire.  Le 
port  et  la  casse  sont  au  compte  du  demandeur. 
—  Synonyme  :  CORRESPONDANT. 

AGRÉMENT  (Avoir  de  1').  —  Signifie,  en 
termes  de  coulisses,  obtenir  des  applaudisse- 
ments, biSy  rappels,  quelle  qu'en  soit  la  source. 


—   li  — 

Nous  connaissons  des  acteurs  qui  se  procurent 
de  V agrément  à  leurs  frais...  Ça  fait  toujours 
plaisir.  V.  Egayer^  Reconduire. 

AIR.  —  Complément  indispensable  de  la  pensée 
et  des  expressions  :  Y  air  noble,  majestueux, 
fin,  rusé,  bonhomme,  naïf,  niais,  bête,  etc. 

Celui  qui  voudrait  raconter  les  naïvetés  de 
Jocrisse,  de  Janot  ou  de  Calino  avec  un  air 
fin,  rusé,  ou  avoir  Vair  de  comprendre  la 
chose,  manquerait  son  EFFET.  L'a?>est  souvent 
un  don  naturel  qui  détermine  le  choix  de 
l'EMPLOl,  comme  firent  Tiercelin,  Potier, 
Arnal,  Odry,  Bouffé,  Sainte-Foy,  etc.,  etCc 

AISANCE.  —  Liberté  de  corps  et  de  mouve- 
ments qu'il  ne  faut  pas  laisser  aller  jusqu'au 
sans-gêne,  comme  le  font  certains  acteurs 
qui  semblent  plutôt  jouer  avec  les  spectateurs 
qu'avec  leur  interlocuteur. 

Quelques  auteurs  prétendent  que  le  manque 
à*aisance  de  beaucoup  d'acteurs  provient  de 
leur  état  de  gêne.  Ce  sont  de  mauvais  plai- 
sants. 

ALLUSION.  —  Malheureuse  ou  désobligeante 
application  que  le  public  fait  de  quelques 
passages  d'une  pièce. 


—  15  — 

Les  allusions  politiques  ou  contre  certain 
personnage  marquant  sont  fréquentes  au 
théâtre,  et  ont,  à  plusieurs  reprises,  motivé  la 
suspension  d'œuvres  dramatiques  complète- 
ment innocentes  de  l'intention. 

Quelquefois  la  malice  du  public  se  tourne 
contre  les  interprètes.  C'est  ainsi  qu'il  en 
arriva  pour  un  ténor  à  Rouen.  Il  chantait, 
dans  l'opéra  d'HÉROLD  ,  Marie  ;  arrivé  à  la 
romance  :  «  Je  pars  demain...  y>  Non  !  non  ! 
partez  de  suite  !  lui  cria  le  parterre. 

Une  autre  fois,  nous  avons  entendu  un 
amoureux  dire  :  «  Puisque  vous  ne  rn  aimez 
pas,  je  ne  reviendrai jAus  !  » 

Tant  mieux  !  tant  mieux  !  dit  la  salle  en- 
tière. 

AMATEUR.  —  On  distingue  deux  classes 
à' amateurs  .*  1°  ceux  qui  aiment  le  théâtre  et 
tout  ce  qui  en  dépend  ;  2°  ceux  qui  jouent  la 
comédie  sans  faire  partie  d'une  troupe,  ce  qui 
constitue  le  théâtre  d'amateurs,  plus  générale- 
ment dénommé  théâtre  de  société. 

AMBIGU-COMIQUE  (Théâtre  de  1').  —  Ce 
théâtre^  fondé  par  Audinot,  en  1770,  au  bou- 
levard du  Temple,  en  face  la  rue  Chariot, 
était  le  reste  des  marionnettes  de  la  foire, 


-   16  — 

auxquelles  on  adjoignit  des  enfants,  comme 
plus  tard  fit  M.  Comte.  En  1772  les  marion- 
•  nettes  disparurent  tout-à-fait.  C'était  le  mo- 
ment de  la  grande  lutte  entre  Audinot  et 
NicoLET,  V.  Gaîté  (Théâtre  de  la),  lutte  qui  se 
continua  jusqu'en  1784,  époque  où  l'on  reprit 
le  privilège  d'AuDiNOT.  La  liberté  des  théâtres, 
proclamée  en  1791,  rendit  la  vie  à  V Ambigu- 
Comique^  mais  ne  lui  rendit  ni  la  vogue,  ni  la 
fortune,  malgré  le  succès  de  if^"^  Angot  au 
SéraiL 

En  1827,  ce  théâtre  fut  incendié.  Il  ne  fut 
pas  reconstruit  à  la  même  place,  mais  où  nous 
le  voyons  aujourd'hui ,  par  les  architectes 
HiTTORF  et  Lecointe,  et  il  devint  alors  une 
des  curiosités  monumentales  de  Paris.  Il  fut 
inauguré  le  8  juin  1828,  et  continua  depuis 
cette  époque  à  faire  fleurir  le  drame  et  le 
mélodrame. 

AME.  —  L'acteur  qui  n'a  pas  d'rt7?2e,  qui  ne 
sent  pas  ce  qu'il  dit  et  ne  le  fait  pas  sentir  au 
public,  qui  n'obéit  qu'à  la  mémoire  et  à  la 
routine,  n'entraînera  pas  la  foule  et  ne  la 
subjuguera  jamais.  IJâme  est  d'essence  supé- 
rieure ;  le  talent  ne  vient  qu'après. 

AMENDE.  —  Punition  pécuniaire  infligée  à 


—   17  — 

l'acteur  qui  manque  la  RÉPÉTITION,  ou  son 
ENTRÉE,  ou  arrive  en  retard,  etc.  Le  plus 
malheureux ,  c'est  que  V amende  n'amendti 
personne. 

Il  y  a  à  Paris,  dans  ce  qu'on  est  convenu 
d'appeler  les  théâtres  de  genre  (?),  des  pen- 
sionnaires —  au  féminin  —  qui  payent  en 
amendes^  chaque  mois,  deux  ou  trois  fois  le 
montant  de  leurs  appointements  annuels,  et 
qui  n'en  sont  pas  plus  pauvres...  au  contraire. 
Ce  que  c'est  pourtant  que  l'économie  ! 

AMOUREUX,  AMOUREUSE.  -  Emploi 
généralement  tenu  par  trop  de  personnes 
dans  une  troupe. 

AMOUR-PROPRE.  —  Sentiment  qui  tient 
le  milieu  entre  l'orgueil  et  la  VANITÉ,  et 
que  Voltaire  a  défini  ainsi  :  «  L'amour- 
propre  est  un  ballon  gonflé  de  vent  dont 
il  sort  des  tempêtes  quand  on  y  fait  une 
piqûre.   » 

Si  cette  définition  peut  s'appliquer  à  quel- 
qu'un, c'est  à  coup  sûr  aux  comédiens,  qui 
n'admettent  ni  les  conseils,  ni  la  critique. 
C'est  encore  avec  raison  que  Imbert  a  dit  : 

L'amoiir-propre  fait  peut-ôlre 
Autant  de  tyrans  que  l'aniour. .. 

2. 


—   18  — 

AMUSER  L'ENTR'AGTES^  — Petite  comé- 
die qui  se  joue  dans  la  salle,  quelquefois  par 
la  volonté  et  avec  la  participation  du  directeur, 
qui  trouve  ainsi  moyen  de  dissimuler  la  lon- 
gueur des  entr  actes.  Exemples  :  Si  un  mon- 
sieur s'approche  trop  près  d'une  dame  pour 
causer  avec  elle,  aussitôt  un  loustic  de  crier  : 
//  l'embrassera  !  et  un  autre  de  répondre  :  Il 
ne  V embrassera  pas! —  Cela  amuse  V entr  actes. 
—  Un  spectateur  des  loges  ou  des  galeries  se 
tourne-t-il  pour  parler  derrière  lui  :  Face  au 
parterre  !  face  au  parterre  !  crie  une  voix  d'en 
bas ,  bientôt  accompagnée  d'un  formidable 
chorus. —  On  amuse  V entr  actes.  —  Un  enfant, 
qu'une  mère  a  eu  la  malheureuse  idée  d'amener 
avec  elle ,  vient-il  à  crier,  aussitôt  on  entend 
de  tous  les  coins  de  la  salle  :  Donnez-lui  à  téter  ! 
Asseyez-vous  dessus!  Au  vestiaire  ! — On  amuse 
l'entr  actes,  et  le  public  ne  s'est  pas  aperçu 
de  sa  longueur  quand  le  rideau  se  relève. 
Cette  pratique  théâtrale  s'est  introduite  dans 
la  politique  :  à  la  Chambre,  on  amuse  la 
séance. 


'  C'est  à  tort,  suivant  nous,  que  l'Acadt^mie  et  tous  les  grammai- 
riens écrivent  le  mot  entr'acte  au  sinijulier.  —  Qu'est-ce  qu'un 
entractes?  —  Je  temps  qui  s't'TouIe  entre  deux  actes. —  Peut-il  y 
avoir  entr'actes  sans  cette  condition  iil)soluo  de  deux  actes? —  Non. 
—  Que  sifînifie  loj;i(|nemcnt  ,  nitionncllomcnt  ce  mot,  sans  tenir 
compte  de  l'cli.-ion  ?  —  cntie  les  actes.  Donc,  grammaticalement. 
entr'actes,  comme  on  écrit  etitrejiwts. 


—   19  — 

ANNÉE  THÉÂTRALE.  —  Voici  une  circu- 
laire ministérielle  en  date  du  20  février  1815, 
qui  décide  la  question  : 

((  D'après  les  règles  précédemment  établies, 
«  Vannée  théâtrale  finissait  le  20  avril  de  chaque 
a  année,  et  recommençait  le  21. 

«  Mais,  à  partir  de  1816  et  par  la  suite, 
«  Vannée  théâtrale  finira  le  dimanche  avant 
«  Pâques,  et  ne  recommencera  que  le  dimanche 
«  après  cette  fête.  » 

ANNIVERSAIRE.  —  Au  Théâtre- Français, 
il  est  de  tradition  de  célébrer  les  anniversaires 
de  la  naissance  de  Corneille,  Molière  et 
Racine.  La  cérémonie  pour  Corneille  a  lieu 
le  6  juin,  celle  pour  Molière  le  15  janvier,  et 
celle  pour  Racine  le  21  décembre. 

Ce  jour-là,  la  représentation  est  entièrement 
composée  des  œuvres  du  maître  fêté.  Celle 
en  l'honneur  de  Molière  est  la  plus  attrayante, 
parce  qu'elle  comporte  ordinairement  une 
pièce  qui  permet  à  tout  le  personnel  de  la 
Comédie- Française ,  sociétaires  et  pension- 
naires, de  paraître  sur  la  scène. 

ISOdéon  ,  subventionné  par  l'État  et  consi- 
déré comme  second  Théâtre- Français  ^  suit  les 
errements  de  son  chef  de  file. 

11  serait  à  désirer  que   les  grandes  villes 


-|20  — 

assez  heureuses  pour  être  honorées  par  la 
naissance  d'une  célébrité  dramatique,  célé- 
brassent dignement  l'anniversaire  de  leurs 
glorieux  enfants.  Ces  hommages,  tout  en  satis- 
faisant l'orgueil  local ,  ne  pourraient  qu'être 
profitables  à  l'art. 

ANNONCE.  —  U annonce  incombe  ordinaire- 
ment au  RÉGISSEUR,  qui  est  tenu  d'endosser 
l'habit  noir  et  de  mettre  des  gants  pour  venir 
annoncer  aux  spectateurs,  après  avoir  fait  les 
trois  saluts  traditionnels,  que  M.  ***,  ténor, 
ayant  attrapé  un  rhume  en  allant  à  la  chasse 
au  marais,  réclame  l'indulgence   du  public, 

'  ou  bien  que  M"®  Virginie  Lucrèce ,  venant 
d'être  enlevée  «  subitement  » ,  M'^°  Blanche 
Hermine  veut  bien  se  charger,  par  complai- 
sance, et  pour  ne  pas  faire  manquer  la  repré- 
sentation, du  rôle  de  M"^  Lucrèce.  On  annonce 
encore  les  représentations  au  bénéfice  d'un 
camarade. 

Aux  xvii°  et  xviii"  siècles,  Vannonce  du 
spectacle  du  lendemain  était  faite  chaque  jour, 
au  Théâtre-Français^  entre  les  deux  pièces, 
par  un  acteur  de  la  troupe.  Il  profitait  de  cela 
pour  faire  l'apologie  de  la  pièce  en  vogue  et 
pour  indiquer  celles  qui  étaient  en  répétition. 
Ces  harangues  demandaient  un  certain  talent 


—  -21     - 

d'élocution;  il  fallait  vanter  sa  marchandise, 
sans  passer  les  bornes,  et  surtout  savoir  tour- 
ner un  compliment  au  public.  Aussi  voyons- 
nous  figurer  parmi  les  comédiens-orateurs  : 
Bellerose,  Floridor,  Mondory,  Laroque, 
Molière,  de  La  Grange,  et  enfin  Lecomte  qui 
fut  le  dernier  annoncier  en  titre  du  Théâtre- 
Français. 

Dans  la  dernière  moitié  du  xviii®  siècle  , 
Vannonce  continua  d'être  faite,  non  par  le  pre- 
mier venu,  mais  par  le  dernier  venu  de  la, 
troupe.  Cet  usage  fut  entièrement  aboli  en  1793 
et  se  réfugia  dans  les  spectacles  forains ,  où  il 
subsiste  encore  :  Vannonce  s'y  fait  après  la 
parade  sous  le  nom  de  «  boniment  ». 

APARTÉ.  —  Petit  écueil  semé  sur  la  route 
théâtrale.  L'aparté  est  en  quelque  sorte  un 
monologue  que  l'acteur  doit  se  dire  à  lui  seul, 
et  non  au  public,  comme  beaucoup  ont  la 
mauvaise  habitude  de  le  faire.  —  Le  public 
ne  doit  pas  exister  pour  l'acteur  en  scène.  — 
Dans  Vaparté,  l'acteur  doit  encore  économiser 
les  gestes,  autrement  il  attirerait  l'attention 
de  ses  interlocuteurs. 

Dans  une  réunion  de  beaux  esprits  où  se 
trouvaient Lafontaine,  Boileau,  Molière,  on 
discutait  sur  les  apartés ,  que  plusieurs  trou- 


—  22  — 

valent  inutiles  et  peu  naturels.  Lafontaine 
surtout  se  déchaînait  contre  leur  invraisem- 
blance, et  ne  pouvait  comprendre  qu'on  fit 
dire  tout  haut  des  paroles  que  Tinterlocuteur 
n'entendait  pas. 

BoiLEAU ,  pendant  ce  temps ,  disait  tout 
haut  :  Le  butor  de  Lafontaine  !  l'entêté^  l'extra- 
vagant^ que  ce  Lafontaine!  sans  que  le  fabu- 
liste y  prît  garde  tant  il  mettait  de  vivacité 
dans  son  dire.  Tout  le  monde  partit  d'un 
grand  éclat  de  rire  dont  Lafontaine  demanda 
la  cause.  «  Vous  déclamez  contre  les  apartés, 
lui  dit  BoiLEAu  ;  il  y  a  une  heure  que  je  vous 
débite  aux  oreilles  une  kyrielle  'd'injures  sans 
que  vous  y  ayez  fait  attention.  >'  Le  procès 
était  jugé. 

APLOMB.  — Contre-partie  du  mot  aisance. 
Pour  beaucoup  d'acteurs  il  remplace  le  talent 
et  y  supplée  souvent;  le  public  auquel  il  jette 
de  la  poudre  aux  yeux  l'accepte  comme  tel  : 
c'est  déjà  quelque  chose. 

APPLAUDISSEMENTS.— Monnaie  de  satis- 
faction avec  laquelle  le  public  paye  l'acteur. 
A  voir  la  manière  dont  elle  se  dépense,  on  la 
croirait  de  peu  de  valeur.  Elle  devrait  être 
d'or  fin  et  distribuée  à  qui  de  droit.  Heurcu- 


—   23   — 

sèment  que  les  comédiens  acceptent  facilement 
la  fausse  monnaie. . .  Ils  sont  si  habitués  aux 
mauvaises  pièces.  V.  Claque. 

APPOINTEMENTS.  —  Nous  n'avons  pas 
besoin  d'expliquer  ce  mot  ;  nous  nous  conten- 
terons de  mettre  en  parallèle  les  appointements 
anciens  et  nouveaux. 

D'après  des  documents  trouvés  par  M.  Nuit- 
TER,  les  premiers  sujets  du  chant,  à  V Opéra- 
Comique^  touchaient  350  fr.  par  mois;  les 
danseurs,  100  fr.  ;  le  maître  de  ballet  et  le 
maître  de  musique,  200  fr.  chacun. 

Avant  1740,  les  premiers  sujets  de  V Opéra 
touchaient  par  an  2,000  à  2,500  fr.  ;  les  autres 
variaient  de  800  à  1,000  fr.  Au  commence- 
ment de  ce  siècle ,  le  maximum  était  de 
9,000  fr.  Aujourd'hui  ces  mêmes  sujets  tou- 
chent de  60,000  à  100,000  fr.  et  plus  ;  voici 
pour  le  chant. 

Dans  la  comédie,  nous  voyons  Lekain, 
pour  ne  pas  remonter  plus  loin,  toucher, 
en  1757,  2,000  et  2,500  fr.  par  an. 

Maintenant  voyons  ce  que  touchait  Rachel. 
En  1838,  elle  fut  engagée  à  4,000  fr.  ;  mais 
elle  força  bientôt  la  caisse,  car  en  18i0  elle 
touchait  37,000  fr.  de  fixe,  plus  soixante- 
quatre  feux  à  281  fr.  25  c.  ;  plus  un  BÉNÉFICE 


—  24   - 

garanti  15,000  fr.  ;  plus  trois  mois  de  congé, 
et  elle  ne  s'arrêta  pas  là.  Chacun  la  suivit 
bientôt  dans  cette  voie,  et  nous  savons  des 
GRUES  des  Folies  et  des  Délassements  mieux 
appointées  que  ne  l'étaient  la  Malibran  et 
M^^^  Mars. 

Pour  donner  une  idée  du  prix  de  revient  de 
ce  que  chante  un  ténor  à  100,000  fr.,  c'est  le 
bas  prix  aujourd'hui,  prenons  un  exemple 
dans  Guillaume  Tell.  Arnold  chante  : 

a  Ma  (1  fr.)  présence  (3  fr.)  pour  vous  est 
peut-être  un  outrage  (9  fr.). 

«  Mathilde  (3  fr.),  mes  pas  indiscrets  (5  fr.) 

«  Ont  osé  jusqu'à  vous  (6  fr.)  me  frayer  un 
passage  (7  fr.).  » 

Total  pour  Arnold  :  34  fr.  Mathilde  répond  : 

«  On  pardonne  aisément  (3  fr.  50  c.)  des  torts 
que  l'on  partage  (3  fr.  50  c). 

«  Afmold{i  ÎT.),je  vous  attendais  (2fr.  50).» 

Total  pour  Mathilde  :  10  fr.  50  c.  Remar- 
quez que  nous  ne  comptons  la  prima  dona 
qu'à  50,000  fr.  Ainsi,  cinq  petits  vers  coûtent 
à  la  direction  44  fr.  50.  C'est  roide!  Qu'on 
vienne  donc  après  cela  parler  de  l'économie 
des  chants. 

11  faut  encore  remarquer  que  dans  le  tarif 
ci-dessus  nous  supposons  au  moins  sept  repré- 


—  25  — 

sentations  par  mois,  et  un  rôle  de  1,100  notes 
chaque  fois. 

APPUYEZ.  —  Terme  de  machiniste  qui  veut 
dire  «  enlevez  » .  Tout  ce  qui  monte ,  soit  du 
DESSOUS,  soit  dans  le  cintre  se  commande  à  la 
manœuvre  par  le  mot  appuyez  I 

A-PROPOS.  —  L'esprit  à'à-p7'opos  n'est  pas 
donné  à  tout  le  monde  ,  pas  plus  aux  gens 
d'esprit  qu'aux  autres;  on  ne  peut  donc  rien 
reprocher  aux  acteurs  qui  ne  l'ont  pas ,  tout 
en  félicitant  ceux  qui,  l'ont  eu  et  qui  l'ont. 
C'est  une  qualité  professionnelle. 

M'^°Fanier,  jouant  le  rôle  de  Lisette,  de 
la  Métromanie ,  fut  arrêtée  par  un  défaut  de 
mémoire,  après  avoir  dit  ce  vers  : 

«  Et  je  prétends  si  bien  représenter  l'idole..,  » 

alors  songeant  qu'elle  jouait  une  soubrette 
étudiant  un  rôle,  elle  fit  ce  vers  : 

«  Mais  j'aurai  plutôt  fait  de  regarder  mon  rôle.  » 

qu'elle  tira  en  effet  de  sa  poche.  Elle  eut  l'air 
de  le  parcourir  et  continua ,  sans  que  le 
public  y  vît  rien.  C'était  de  Yà-propos. 

W^°  Deligny,  dans  V Avare,  rôle  de  Ma- 
rianne, perdit  complètement  la  mémoire  à  la 

3 


-ob- 
scène XI  du  troisième  acte ,  où  elle  devait 
répondre  aux  compliments  de  Gléante.  L'ac- 
teur BoNNEVAL ,  voyant  son  embarras ,  s'écria 
soudain  :  «  Elle  ne  répond  pas,  elle  a  raison  : 
à  sot  compliment  pas  de  réponse.  »  C'était  de 
Và-propos. 

Chassé  conduisait  une  marche  de  soldats 
courant.  En  traversant  la  scène ,  il  tombe  ; 
mais  prévoyant  que  cet  accident  allait  arrêter 
la  marche  des  soldats  et  troubler  la  représen- 
tation ,  il  crie  aux  exécutants  :  «  Marchez-moi 
sur  le  corps  et  passez.  »  C'était  de  Yà-propos 
et  du  feu  sacré. 

ARLEQUIN.  —  Principal  personnage  de  l'an- 
cienne comédie  italienne^  dont  l'esprit,  la 
souplesse  et  la  gaité  amusèrent  nos  pères 
jusqu'en  1789.  D'après  Ménage  le  premier 
comédien  italien  qui  vint  à  Paris  jouer  ce  per- 
sonnage ,  sous  Henri  III ,  allait  souvent  chez 
le  président  du  Harlay  ,  ce  qui  fut  cause  que 
ses  camarades  le  surnommèrent  Harlequino, 
ou  petit  Harlay.  Ce  surnom  resta  au  person- 
nage. 

Les  plus  remarquables  parmi  les  arlequins 
furent  Dominique  ,  Gherardy  ,  Thomassin  , 
Francisque  et  le  fameux  Carlin.  Le  dernier 
arlequin  fut  Laporte,  du  Vaudeville;  il  quitta 


le  théâtre  vers  1828,  et  avec  lui  finit  le  per- 
sonnage &' Arlequin. 

ARMES  A  FEU.  —  Au  théâtre  l'usage  des 
armes  à  feu  est  quotidien,  le  pistolet  surtout. 
Il  faut  bien  décharger  fusils  et  pistolets  sur 
le  traître  ou  sur  la  victime  ;  de  là  deux  graves 
inconvénients  à  éviter  :  les  blessures  et  l'in- 
cendie. Pour  éviter  l'un  et  les  autres,  on  rem- 
place la  bourre  en  papier  par  une  bourre  en 
poil  de  vache ,  qui  ne  brûle  pas  et  s'éparpille 
au  sortir  du  canon. 

Les  armes  sont  chargées  d'avance  par  l'arti- 
ficier ou  l'armurier,  et,  par  mesure  de  pré- 
cautions, la  baguette  qui  sert  à  bourrer  est 
attachée  au  mur  par  une  chaîne.  Les  armes 
chargées  en  scène  —  ce  qui  n'a  guère  lieu  que 
pour  les  fusils,  et  dans  les  pièces  militaires  — 
ne  sont  chargées  qu'à  poudre  ;  la  cartouche, 
toujours  plus  grosse  que  le  canon,  ne  peut  y 
être  introduite  et  y  est  forcément  versée.  Deux 
ou  trois  coups  de  crosse  sur  le  plancher  tas- 
sent suffisamment  la  poudre  pour  déterminer 
l'explosion.  F.  Fusillade^  Tringle. 

ARRANGEUR.  — Tout  le  monde  connaît  l'an- 
nonce de  ce  chapelier,  qui  dit  :  «  Donnez- 
moi  un  vieux  chapeau,  je  vous   en  rendrai 


—  28  — 

un  neuf.  »  —  Eh  bien  !  il  y  a  des  arrangeurs 
dramatiques  qui  font  le  même  métier  :  ils 
prennent  les  vieilles  pièces  et  coupent  un 
acte  à  l'une,  quelques  scènes  à  l'autre;  une 
situation  par-ci ,  un  dénouement  par-là ,  et 
retapent  ainsi  une  pièce,  qu'ils  font  jouer  sous 
leur  nom. 

ARTISTE.  —  Cette  dénomination  à' artiste^ 
prise  généralement  par  MM.  les  COMÉDIENS , 
quel  que  soit  d'ailleurs  leur  talent  affirmatif 
ou  négatif,  nous  la  trouvons  un  peu  ambi- 
tieuse et  non  justifiée. 

Artiste^  pour  nous,  veut  dire  créateur,  ou 
celui  qui  avec  une  matière  rudimentaire ,  et 
même  avec  rien  ,  crée  quelque  chose.  Dieu 
est  le  premier  artiste  !  Le  peintre  qui ,  avec 
quelques  vessies  de  couleurs  et  un  morceau 
de  toile,  produit  un  tableau  ;  le  sculpteur  qui, 
d'un  bloc  de  marbre  ou  de  pierre,  dégage  une 
statue,  un  groupe;  le  graveur  qui  a  fouillé 
avec  son  burin  une  planche  de  cuivre  ou 
d'acier;  l'architecte  qui  a  conçu  et  fait  élever 
un  édifice;  le  musicien  qui  enfante  des  mélo- 
dies, sont  des  artistes  :  ils  ont  créé,  ils  meu- 
rent dans  leur  chair  et  vivent  dans  leurs 
œuvres  ;  ils  se  nomment  :  Raphaël,  Véro- 
NÈSE ,  Michel- Ange,  Rembrandt,   Yignole, 


—  29  — 

Palladio,  Soufflot,  Goustou,  Jean  Goujon, 
Ganova,  Germain  Pilon,  Pradier,  Mozart, 
RossiNi ,  AuBER.  Que  créent  les  comédiens? 
que  reste4-il  après  eux?  rien.  Ils  sont  des 
interprètes  intelligents ,  soit  ;  d'excellents 
COMÉDIENS,  oui;  mais  des  artistes^  non! 

Notre  remarque  n'a  rien  d'offensant  pour 
le  talent  des  vrais  comédiens  ;  c'est  même 
ce  mot  qui  les  distingue,  car  nous  défions 
qu'on  nous  montre  une  carte  du  dernier 
CABOTIN  qui  ne  porte  pas ,  après  le  nom ,  la 
mention  :  «  artiste  dramatique  ». 

ATTITUDE.  —  i: attitude  au  théâtre  est  le 
complément  du  geste  et ,  souvent ,  de  l'idée 
dramatique.  La  manière  de  se  poser,  d'écou- 
ter, de  regarder,  d'épier,  de  saluer,  de  donner, 
de  recevoir,  de  parler,  etc.,  indique  au  specta- 
teur le  sens  qu'il  doit  attacher  à  ces  différents 
actes.  Un  comédien  consciencieux  doit  faire 
une  grande  étude  de  la  science  des  attitudes. 

ATTRAPER  LE  LUSTRE.  -  Se  dit  d'un 
ténor  qui  ouvre  une  large  bouche  pour  lais- 
ser passer  une  note  qui  s'obstine  à  rester 
dans  le  gosier. 

AUTEUR.  —  Machine  humaine  chauffée  avec 

3. 


—  30  — 

du  génie ,  de  l'esprit  ou  du  savoir-faire  pour 
fabriquer  tragédies,  comédies,  drames,  vau- 
devilles, revues,  voire  même  des  ours  et  des 
fows. 

AUTORISATION.  —  Aucune  œuvre  drama- 
tique ne  peut  être  représentée  sans  avoir  été 
préalablement  autorisée  par  le  ministre  de 
rintérieur,  pour  Paris ,  et  par  les  préfets , 
pour  les  départements.  V.  Appendice  (décrets 
des  30  juillet  1850,  30  décembre  1852  et  loi 
du  6  janvier  1864,  art.  3). 

AUTORITÉ.  —  V.  Police,  et  les  lois  à  l'ap- 
pendice. 

AVANCES.  —  Somme  que  le  directeur  verse 
à  son  pensionnaire  avant  l'ouverture  de  la  sai- 
son, ou  au  moment  de  l'ENGAGEMENT.  Assez 
ordinairement,  pour  les  engagements  de 
province,  cette  somme  représente  un  mois 
d'appointements,  et  se  déduit  proportionnel- 
lement chaque  mois. 

AYANT-SCÈNE.  -  Trébuchet,  sous  forme 
de  loge,  placé  aux  deux  côtés  de  la  scène, 
pour  prendre  les  étourneaux. 

Ces  places   ne   sont   probablement  pas   à 


—  31   — 

l'usage  de  ceux  qui  veulent  voir  le  spectacle, 
puisque  nous  avons  un  jugement  du  22  octo- 
bre 1869  ,  qui  déclare  que  «  celui  qui  a  loué 
une  loge  d'avant-scène  ne  peut  se  plaindre 
de  ne  pas  voir  le  spectacle  ».  Gii^ardin,  C. 
Montigny. 

—  Se  dit  aussi  de  la  partie  de  la  SCÈNE  com- 
prise entre  la  RAMPE  et  le  RIDEAU.  Dans  les 
théâtres  de  chants,  cette  partie  est  plus  avan- 
cée dans  la  salle,  ce  qui  empêche  la  voix 
de  se  perdre  dans  le  cintre. 

AVERTISSEUR.  —  Employé  dont  le  titre 
indique  la  mission.  Il  n'existe  à  l'état  de 
titulaire  que  dans  quelques  grands  théâtres. 
A  V Opéra  il  y  a  V avertisseur  du  chant  et  celui 
de  la  danse  ;  dans  les  autres ,  cette  fonction 
est  dévolue  au  second  RÉGISSEUR,  quelquefois 
au  premier. 

AVOIR  DE  QUOI.  --  Cette  phrase,  qui 
sent  son  Calvados  de  quatre  kilomètres, 
s'applique,  en  termes  de  coulisses,  aux  ac- 
trices dont  la  position  financière  est  satisfai- 
sante. Que  ce  soit  les  appointements  régu- 
liers... ou  irréguliers  qui  en  soient  cause, 
cela  ne  change  rien  à  la  phrase. 


—  32  — 

AVOIR  DES  PLANCHES.  —  Se  dit  d'un 
acteur  qui  est  aussi  à  l'aise  sur  la  scène  que 
s'il  était  chez  lui.  C'est  ce  qu'un  matelot 
appellerait  avoir  le  pied  marin. 

AVOIR  DU  CHIEN.  —  C'est  avoir  de  l'en- 
train ,  le  diable  au  corps ,  une  parcelle  du 
feu  sacré.  Se  dit  principalement  d'une  actrice 
qui  joue  les  SOUBRETTES,  les  DUGAZONS,  les 
TRAVESTIS. 

AZOR  (Appeler).  —  C'est  une  périphrase  pour 
dire  siffler.  En  voici  l'origine  : 

Un  mauvais  acteur  du  nom  de  Fleury  — 
ne  pas  confondre  avec  le  grand  Fleury  — 
jouait  le  rôle  d'Achille  dans  Iphigénie  en  Au- 
lide  ;  il  avait  coutume  d'amener  son  chien 
avec  lui  au  théâtre  et  le  donnait  en  garde  à 
son  père  (pas  celui  du  chien)  qui  le  tenait  en 
laisse  dans  la  coulisse.  Achille  entre  en  scène. 
Le  public,  qui  reconnaît  Fleury,  le  reçoit  à 
coups  de  sifflets.  Le  père,  furieux  de  l'accueil 
qu'on  fait  à  son  fils,  laisse  échapper  le  chien 
qui  vient  en  scène  caresser  son  maître.  Sur 
ce,  les  sifflets  redoublent,  et  le  père,  furieux, 
tirait  son  épée  pour  aller  embrocher  les  sif- 
fleurs,  quand  un  acteur  (c'était  Gaussin)  lui 
dit  :    «  Ne  voyez-vous   pas   qu'on   siffle   le 


—  33  — 

chien  !...  »  Effeativcment,  il  entend  son  fils 
qui  lui  criait  de  la  scène  :  «  Mon  père ,  sifflez 
donc  !  Mon  père ,  appelez  Azor  !  » 

Nous  devons,  pour  être  véridique,  dire  que 
le  chien  se  nommait  Tarquin ,  et  qu'on  a  sub- 
stitué Azor  à  Tarquin. 


B 


BAIGNOIRES.  — Logesplacces.au  niveau  et 
au  fond  du  PARTERRE,  et  tirant  probablement 
leur  nom  des  bains  de  vapeur  que  leur  empla- 
cement fait  prendre  aux  spectateurs  qui  les 
occupent.  Il  y  a  aussi  les  baignoires  d'avant- 
scène. 

BAILLER  AU  TABLEAU.  —  Terme  de 
coulisses  qui  s'applique  à  un  acteur  qui  voit 
au  tableau  la  mise  en  répétition  d'une  pièce 
dans  laquelle  il  n'a  qu'un  bout  de  ROLE. 

BAISSER.  —  La  caisse  est  le  thermomètre  de 
la  valeur  d'une  pièce  ou  du  talent  d'un  acteur. 


—  34  ~ 

On  arrête  le  cours  de  Tune  quand  la  recette 
vient  à  baisser  au-dessous  d'un  degré  convenu, 
et  on  ne  renouvelle  pas  l'engagement  de  l'autre 
par  le  même  motif. 

BALLET.  —  Pièce  où  l'on  ne  parle  qu'avec  les 
bras  et  les  jambes,  et  qui  n'en  est  pas  plus 
morale  pour  ça.  Il  y  a  dans  presque  tous  les 
OPÉRAS  et  les  grandes  FÉERIES  une  partie  dan- 
sante qu'on  nomme  ballet. 

Le  premier  ballet  représenté  en  France  est 
Circé  et  ses  Nymphes,  du  sieur  de  Beau- 
joyeuse,  dont  le  véritable  nom  était  Baltaza- 
RiNi;  les  airs  étaient  de  Beaulieu  et  Salmon. 
Il  fut  exécuté  au  Louvre  devant  Catherine  de 
MÉDicis,  en  1581. 

Jusqu'en  1681,  aucune  femme  ne  figura 
dans  les  ballets;  les  rôles  de  Bergères,  de 
Nymphes,  de  Déesses  étaient  remplis  par  de 
jeunes  garçons.  Ce  ne  fut  que  le  21  janvier  de 
cette  même  année  que  quelques  dames  de  la 
cour,  la  Daupbine  en  tête,  y  dansèrent  des 
rôles  dans  le  Triomphe  de  l'Amour.  Cette  inno- 
vation porta  bientôt  des  fruits,  car,  le  16  mai 
suivant,  quatre  véritables  danseuses  débu- 
tèrent dans  la  même  pièce  avec  un  véritable 
succès  d'enthousiasme  ;  elles  étaient  élèves  de 
LuLLi,  et  se  nommaient  :  M""  La  Fontaine, 


-  ;i5  — 

Roland,  Lepeintre  et  Fernon.  Bientôt  des 
écoles  de  danse  s'établirent  et  formèrent  des 
danseuses  de  théâtre,  dont  les  plus  célèbres 
furent  M."^^^  Prévôt,  Salle,  la  Gamargo, 
Allard,  Gardel,  la  Guimard,  Taglioni, 
Fanny  Esler  ,  Garlotta  Grisi  et  la  malheu- 
reuse Emma  Livry,  dévorée  par  les  flammes. 

Le  ballet  d'action,  tel  que  nous  le  voyons 
aujourd'hui,  est  dû  aux  frères  Gardel  et  à 
Noverre,  qui  l'importèrent  sur  la  scène  aux 
lieu  et  place  de  V opéra-ballet.  Ils  eurent  la 
gloire  plus  grande  de  faire  disparaître  les 
paniers,  les  tonnelets _,  ainsi  que  les  costumes 
bizarres  et  ridicules  dont  on  affublait  les  dan- 
seurs et  les  danseuses  ;  ils  furent  grandement 
secondés  dans  cette  œuvre  intelligente  par 
W  Salle. 

Cette  célèbre  danseuse  était  la  rivale  en 
grâces  et  en  talent  de  la  Gamargo  ,  ce  qui 
veut  dire  qu'elles  se  voyaient  d'un  mauvais 
œil.  Voltaire,  appelé  à  juger  leur  talent,  fut 
plus  prudent,  et  surtout  plus  diplomate,  que 
le  berger  Paris,  lequel  ne  réussit  qu'à  se  faire 
deux  ennemies  des  déesses  évincées  par  lui  ; 
il  leur  adressa  les  vers  suivants  : 

«  Ahl  Gamargo,  que  vous  êtes  brillante  ! 
u  Mais  que  Salle,  grands  dieux,  est  ravissante  ! 
u  Que  vos  pas  sont  légers!  et  que  les  siens  sont  doux. 


—  36  — 

«  Elle  est  inimitable ,  et  vous  êtes  nouvelle  ; 
«  Les  Nymphes  sautent  comme  vous  ; 
«  Mais  les  Grâces  dansent  comme  elle.  » 

C'était  une  véritable  réponse  de  Normand. 

Les  danseurs  eurent  jadis  une  grande  impor- 
tance, aujourd'hui  réduite  à  presque  rien.  En 
effet ,  ils  ne  servent  guère  que  d'accompagna- 
teurs à  la  danseuse  et  leur  talent,  si  grand 
qu'il  soit,  touche  peu  le  public.  Les  danseurs 
restés  célèbres  sont  Dupré,  Gaétan  Vestris, 
Auguste  Vestris,  son  fils,  surnommé  par  lui 
le  Diou  de  la  danse,  et  Petipa.  Les  hommes 
ont  commencé  par  danser  les  rôles  de  femmes  ; 
espérons  qu'avant  peu  les  femmes  danseront 
tous  les  rôles  d'hommes. 

BANCS.  —  F.  Parterre. 

BANDE  D'AIR,  DE  MER.  —  La  première 
est  une  DÉCORATION  flottante  suspendue  en 
l'air  à  chaque  plan  et  arrêtant  l'œil  du  spec- 
tateur qui,  sans  cela,  se  perdrait  dans  le 
CINTRE  ;  il  y  a  aussi  la  bande  de  plafond,  des- 
tinée au  même  usage,  et  la  bande  de  mer,  qui 
se  pose  sur  la  scène,  comme  son  nom  l'in- 
dique, et  se  fait  mouvoir  des  coulisses. 

BANQUE.  —  Peu  de  nos  lecteurs  se  doutent 


—  37  — 

qu'il  existe  une  banque — nous  devrions  dire 
mont-de-piété  —  dramatique.  L'opération  est 
simple.  Un  auteur  jeune  et  inconnu  enfante 
une  pièce  et  va,  le  naïf  qu'il  est,  frapper  à  la 
porte  d'un  directeur.  On  refuse  de  la  lui  ou- 
vrir, où,  quand  on  la  lui  ouvre,  on  refuse  sa 
pièce.  Gomment  donc,  un  inconnu  ! 

Le  banquier,  lui,  est  plus  humain  ;  il  avance 
de  l'argent  et  se  charge  de  faire  jouer  la  pièce, 
à  condition  qu'il  touchera  les  DROITS  D'AUTEUR, 
moins  la  somme  donnée  ;  qu'il  pourra  ad- 
joindre des  collaborateurs  à  l'auteur,  et  même 
faire  disparaître  son  nom  de  l'œuvre.  Il  y  a 
quelques  risques,  c'est  vrai,  mais  en  entre- 
tenant des  relations  avec  des  fournisseurs 
attitrés,  on  peut  s'en  tirer. 

BARYTON.  —  Emploi  du  chant.  Voix  mixte 
entre  la  voix  de  TÉNOR  et  la  voix  de  BASSE  et 
la  plus  naturelle  comme  voix  d'homme. 

Le  baryton  Martin,  qui  fit  la  fortune  de 
VOpéra-Co7nique,  a  laissé  son  nom  à  V emploi ^ 
dans  le  répertoire  de  ce  théâtre.  On  se  rap- 
pelle les  succès  de  Baroilhet,  à  l'Opéra,  dans 
la  Favorite^  \d,  Reine  de  Chypre,  Charles  VI. 
Le  présent  n'a  rien  à  envier  au  passé  sous 
ce  rapport,  puisque  nous  pouvons  entendre 
M.  Faure,  un  des  meilleurs  barytons  connus, 

4 


—  38  — 

et  M.  Lassale,  dont  le  talent  grandit  chaque 
jour. 

BASSE.  —  Emploi  du  chant.  Se  subdivise  en 
basse  chantante  et  basse  pi^ofonde.  On  compte 
dans  une  troupe  par  première,  deuxième  et 
troisième  basse.  Lablache,  des  Italiens,  a  été 
la  plus  belle  basse  chantante  connue  et  n'a 
pas  été  remplacé. 

BATI.  —  On  appelle  bâti  une  construction  qui 
doit  être  chargée  de  personnages  et  de  déco- 
ration, et  qui  doit  descendre  du  GLNTRE  ou 
monter  des  DESSOUS.  Les  gloires ,  les  apo- 
théoses ,  les  songes ,  les  fées  avec  cortège 
nécessitent  l'emploi  des  bâtis.  Les  féeries  en 
consomment  beaucoup. 

BATTRE  DES  AILES.  —  Cette  onomatopée 
s'applique  à  l'acteur  qui  gesticule  avec  ses 
bras  et  se  frappe  souvent  les  flancs  du  coude. 

BEAUTÉ.  — La  beauté  n'est  pas  indispensable 
au  théâtre,  mais  à  la  condition  d'y  suppléer 
par  le  talent  qui,  seul,  peut  faire  oublier  la 
laideur  —  nous  parlons  principalement  des 
femmes,  bien  entendu. 
Quelques  actrices,  dont  les  noms  sont  restés 


—  39  — 

parmi  les  plus  célèbres  :  la  Ghampmeslé  , 
M"°  DuMESNiL,  les  sœurs  Sainval,  la  Desœuil- 
LET,  étaient  laides,  même  très-laides  ;  mais 
elles  avaient  plus  de  talent  que  de  laideur. 
Adrienne  Lecouvreur  et  Duchesnois  étaient 
également  laides;   on  n'y  songeait  pas. 

Pour  beaucoup  d'actrices  du  jour  la  beauté 
tient  lieu  de  talent,  ou  du  moins  en  fait  par- 
donner l'absence.  Nous  ne  citons  pas  de  noms 
propres,  le  lecteur  y  suppléera  sans  peine,  et 
nous  éviterons  ainsi  de  nous  faire  quelques 
belles  ennemies. 

BÉNÉFICE.  —  Représentation  dont  la  recette 
appartient  à  l'acteur  au  bénéfice  duquel  elle  a 
lieu  :  l*^  quand  le  directeur  ne  s'est  pas  ré- 
servé le  droit  d'user  à  son  profit  du  nom  de 
son  pensionnaire  ;  2°  quand  la  recette  brute 
n'est  pas  inférieure  au  chiffre  de  frais  récla- 
més par  le  directeur,  comme  cela  se  voit  sou- 
vent en  province  ;  3°  quand...  quand...  quand. 
Voir,  pour  plus  de  détails,  la  spirituelle  comé- 
die de  Théaulon,  ayant  pour  titre  :  le  Béné- 
ficiaire. 

Au  Théâtre- Français  la  représentation  à 
bénéfice  n'a  lieu  qu'à  la  retraite  du  comédien 
et  est  réglée  par  la  loi.  Dans  les  autres  théâtres 
de  Paris  ,  elles  ont  lieu  en   récompense   de 


—  40  — 

longs  services  ou  dans  des  cas  urgents  d'acci- 
dents ,  d'infortunes ,  subis  par  le  bénéficiaire 
ou  sa  famille.  En  province,  elle  fait  partie  de 
l'engagement  annuel  de  chaque  acteur. 

BILLET.  —  Petit  morceau  de  carton  ou  de 
papier  imprimé  indiquant  la  place  que  vous 
devez  occuper.  C'est  contrairement  à  l'ordon- 
nance de  police  que  certains  billets  portent 
l'indication  de  plusieurs  places  du  même  prix. 
Le  billet  ne  doit  indiquer  qu'une  seule  espèce 
de  places  ,  et  y  donne  droit.  V,  appendice 
(ordonnance  du  1*'''  juillet  1864). 

—  On  appelle  aussi  billets  les  lettres  ou  écrits 
jetés  par  le  public  sur  la  scène.  L'autorisation 
de  lire  ces  billets  dépend  du  commissaire  de 
service. 

—  Se  dit  encore  d'une  affiche  manuscrite 
collée  chaque  jour  au  foyer  des  acteurs,  et 
indiquant  l'heure  des  RÉPÉTITIONS,  ainsi  que 
les  pièces  en  DISTRIBUTION. 

BILLETS  D'AUTEUR.    DE   FAVEUR.— 

Les  correspondants  de  la  Société  des  auteurs 
ont,  indépendamment  de  leur  entrée  person- 
sonnelle,  le  droit  de  signer  quatre  billets 
d'une  personne  à  chaque  représentation.  Ces 


—  41  — 

billets,  vendus  aux  abords  des  théâtres  avec 
quelque  diminution ,  jouissent  des  mêmes 
avantages  que  ceux  pris  au  bureau;  ils  doi- 
vent être  échangés  au  contrôle  contre  la 
contremarque  du  jour  et  ne  peuvent  être 
assimilés  aux  billets  de  faveur  qui,  eux-mêmes, 
donnent  des  droits  identiques  à  ceux  qui  les 
ont  reçus  et  en  sont  possesseurs  à  titre  non 
onéreux. 

BIS .  —  Cri,  synonyme  de  «  répétez  » ,  poussé  par 
le  public  à  la.  suite  d'un  morceau  de  chant  ou 
d'un  couplet.  Ce  cri  varie  beaucoup,  suivant 
le  lieu  et  l'époque.  Tout  ce  qui  attaque  les 
classes  supérieures  est  «  bissé  »  dans  les  théâ- 
tres populaires  ;  ce  qui  attaque  le  pouvoir  est 
(c  bissé  »  partout.  Jadis  tout  couplet  farci  de 
chauvinisme  était  «  bissé  »  avec  frénésie  : 
c'était  le  bon  temps  des  colonels  du  Gymnase 
et  celui  du  grand  succès  de  la  Cocarde  trico- 
lore ;  la  fibre  patriotique  était  encore  tendue. 
Aujourd'hui  on  demande  bis  pour  Le  Pied 
qui  r  mue ^  ou  A  Chaillot!  C'est  un  signe  des 
temps. 

BONHOMIE.  —  Une  des  phases  du  NATUREL 
et  la  plus  précieuse  qualité  du  jeu  de  Geof- 

FROI. 

4. 


—  42  — 

BOUCHE-TROU.  —  COMPARSE  intelligent 
auquel  on  confie  quelquefois  un  rôle  de  Douze. 
Les  notaires,  les  postillons,  les  témoins,  un 
joueur,  un  agent  de  la  force  publique  rentrent 
dans  les  bouche-trous. 

BOUFFES.  —  Les  éowyf es  italiens,  ou  bouffons, 
débutèrent  à  Paris  en  1752,  et  obtinrent  un 
grand  succès.  Ils  avaient  été  précédés,  dès 
1724,  par  une  troupe  italienne;  ce  fut  cette 
troupe  qui  joua  en  t7'46  la  Se7'va  padrona  (la 
S  élevante  maîtresse)^  de  Pergolèse. 

En  1786 ,  Léonard  ,  coiffeur  de  la  reine 
Marie-Antoinette,  obtint  un  privilège  à' opéra- 
italien  et  le  vendit  à  Giotti  qui,  avec  l'aide  de 
Gherubini,  forma  une  troupe  excellente  qui 
débuta  en  1789.  Effrayée  par  le  mouvement 
politique  auquel  donna  lieu  la  Révolution, 
elle  repartit  en  1792. 

Pendant  les  campagnes  d'Italie,  les  Français 
prirent  goût  .à  Vopera-buffa^  et  M"°  Montan- 
sier  fit  venir  des  bouffes  en  1802.  Après  quel- 
ques alternatives  de  succès  et  de  mauvaise 
fortune,  ils  furent  organisés  en  troupe  privi- 
légiée sous  la  direction  de  Picard  et  la  sur- 
veillance du  grand  chambellan,  M.  de  Rému- 
sat.  C'est  la  source  de  V Opéra-Italien  actuel. 
V.  Italiens. 


—  43  — 

BOUFFES-PARISIENS  (Théâtre  des).  —  Ce 
fut  le  5  juillet  1855  qu'eut  lieu,  à  la  salle  des 
Folies-Marigny ^  aux  Champs-Elysées ,  l'ou- 
verture des  Bouffes-Parisiens,  dont  le  privilège 
venait  d'être  accordé  à  M.  Offenbach,  alors 
chef  d'orchestre  au  Théâtre -Français.  Le  ré- 
pertoire de  ce  nouveau  théâtre  devait  se  com- 
poser d'OPÉRETTES  à  trois  personnages  au  plus, 
de  SAYNETTES,  de  PANTOMIMES  et  d'arlequi- 
nades.  Le  prologue  fut  écrit  par  Méry  sous  ce 
titre  :  Entrez,  messieurs,  mesdames!  musique 
d'OFFENBACH.  Yidi  Nuit  blauche,  musique  d'ÛF- 
FENBACH,  les  Deux  Aveugles,  musique  d'OF- 
FENBACH ,  et  Arlequin  barbier,  pantomime , 
complétaient  le  spectacle  de  cette  première 
représentation. 

Le  succès  croissant,  les  Bouffes- Parisiens  se 
trouvèrent  bientôt  à  l'étroit  dans  leur  petite 
salle  des  Champs-Elysées  et  vinrent,  vers  la 
fm  de  1857,  s'installer  au  passage  Ghoiseul, 
dans  la  salle  du  physicien  Comte,  avec  un 
nouveau  privilège  qui  permettait  à  l'heureux 
maestro  Offenbach  d'élargir  son  cadre  et  de 
donner  de  véritables  petits  opéras-comiques. 

Ce  théâtre  qui  aurait  pu  rendre  de  grands 
services  à  l'art  musical,  en  permettant  aux 
jeunes  compositeurs  de  se  produire,  en  fut-* 
empêché  en  ce  sens  qu'il  fut  d'abord  presque 


—  44  — 

entièrement  accaparé  par  les  productions  de 
son  directeur  privilégié,  dont  la  musique  fit 
florès  et  créa  une  pernicieuse  école  de  littéra- 
ture dramatique  qui  a  fini  par  envahir  toutes 
les  scènes  de  genre. 

Plusieurs  directions  se  sont  succédé  à  ce 
théâtre  depuis  celle  de  M.  Offenbach  ;  le 
genre  seul  n'a  pas  changé,  et  M.  Comte  fils, 
le  directeur  actuel,  ne  pourrait  plus  mettre 
en  tête  de  ses  affiches  le  distique  qu'y  mettait 
son  père  : 

«  Par  les  mœurs,  le  bon  goût,  modestement  il  brille, 
«  Et  sans  danger  la  mère  y  conduira  sa  fille.  r> 

BOUIS-BOUIS.  — Terme  populaire  désignant 
les  petits  théâtres  d'ordre  inférieur. 

BOUQUET.  —  Bien  qu'on  étudie  peu  le  lan- 
gage des  fleurs  au  théâtre,  le  bouquet  y  ioue 
cependant  un  grand  rôle.  C'est  une  arme  de 
guerre  entre  deux  bonnes  petites  camarades 
qui  ne  peuvent  se  souffrir.  Celle  qui  peut  se 
faire  jeter  un  bouquet  par  son...  admirateur, 
ou  à  ses  frais,  ne  manque  jamais  de  le  faire 
à  l'occasion  ;  malheureusement,  l'ouvreuse  ou 
le  vendeur  de  programmes  chargés  du  jet  se 
trompe  souvent  de  moment  et  le  jette  trop 
tôt  ou  tard  ;  quelquefois  aux  pieds  de  la  rivale 


—  45  — 

seule  en  scène  ;  quelquefois  dans  l'orchestre 
ou  sur  le  pompier  de  service.  //  ny  a  pas  de 
roses  sans  épines. 

Nous  admettons  cependant  qu'il  y  a  parfois, 
surtout  lors  des  représentations  à  bénéfice  ou 
d'adieux,  des  bouquets  jetés  en  signe  d'encou- 
ragement ou  de  regrets  ;  mais ,  comme  dit 
Bassecour,  c'est  la  minorité. 

BRULER  (Se).  —  S'approcher  trop  près  de  la 
RAMPE,  soit  dans  la  chaleur  de  l'action,  soit 
pour  tous  autres  motifs,  tels  que  se  faire  mieux 
remarquer,  PRENDRE  DU  SOUFFLEUR,  indiquer 
le  moment  au  CHEF  DE  CLAQUE,  plonger  un 
œil  inquisiteur  dans  les  baignoires  d'avant- 
scène. 

BRULER  LES  PLANCHES.  —  Se  dit  prin- 
cipalement des  comiques  auxquels  la  véritable 
verve  fait  défaut  et  qui  la  remplacent  par  une 
chaleur  factice,  beaucoup  de  mouvement,  de 
bons  poumons  et  une  grande  volubilité.  Quel- 
ques bons  acteurs  brûlent  les  planches;  alors 
c'est  pour  sauver  la  pièce,  ou  bien  parce  qu'elle 
les  ennuie,  ou  qu'ils  ont  un  souper  fin  qui 
les  attend. 


-    46  — 


CABALE.  —  Se  dit  indistinctement  d'une  réu- 
nion qui  se  concerte  pour  faire  réussir  ou 
tomber  une  pièce  ou  un  acteur.  Dans  la  pre- 
mière catégorie  se  placent  les  applaudisseurs^ 
bissew^s,  ?neu)'s,  chatouilleurs,  pleureurs,  pleu?^- 
nicheurs,  mousseurs,  bonnisseurs,  emblêmeurs, 
enleveui's,  enthousiasmeurs,  exclama teur s. 

Dans  la  seconde  les  siffleurs,  chuteurs,  éter- 
nueurs,  tousseurs,  remueurs  et  crieurs. 

CABOTIN.  —  Terme  de  mépris  qui  s'adresse 
à  un  acteur  nomade  et  sans  talent.  Le  cabotin 
est  généralement  envieux,  potinier,  et  pousse 
le  réalisme  jusqu'à  ses  dernières  limites.  Il 
vit  sans  habits,  sans  chapeau,  sans  chaussures  ; 
fléau  de  ses  camarades,  il  pratique  l'emprunt 
sur  une  large  échelle  et  ne  rend  jamais. 

CACOPHONIE.—  La  plupart  des  OPÉRETTES 
jouées  sur  les  scènes  de  province  avec  un 
piano  ou  la  musique  municipale. 

CACHET.  —  Le  cachet  est  à  un  rôle  ce  que  le 
bouquet  est  à  un  vin.  Donner  un  bon  cachet 


-   Ï7  — 

n'est  pas  chose  commune  :  Talma,  Rachel 
imprimaient  celui  du  génie  à  leurs  rôles  ; 
M"^  Mars,  celui  de  la  grâce  et  de  l'intelli- 
gence ;  Dressant  celui  de  la  distinction. 

—  Se  dit  aussi  de  certaines  primes  accordées 
par  la  direction  pour  services  exceptionnels. 
Quelques  acteurs,  même  parmi  les  plus  fa- 
meux, ne  jouent  qu'au  cachet,  c'est-à-dire  sans 
engagement. 

CADRE.  —  Le  personnel  du  ballet  et  des  com- 
parses se  classe  par  rang  de  taille.  C'est  ce 
qu'on  appelle  le  cadre. 

CAMARADE.  —  On  est  prié  de  ne  pas  con- 
fondre avec  ami  ;  ce  mot  est  ici  comme  syno- 
nyme de  collègue. 

Yoici  un  exemple  bon  à  suivre  que  nous 
ont  laissé  trois  comédiens  :  Beil,  Buck  et 
Opfland  : 

•  «  Nous  étions  les  uns  pour  les  autres  un  juge 
«  sévère  ;  souvent  nous  nous  moquions  de 
«  nous-mêmes  ;  nous  nous  fâchions  sans  mé- 
«  nagements  de  nos  gaucheries,  de  nos  mala- 
«  dresses,  soit  dans  les  gestes,  soit  dans  le 
«  débit,  et,  lorsque  l'un  de  nous  avait  aperçu 
«  dans  l'autre  quelque  mouvement  d'une  ve- 


—  48  — 

«  rite  frappante,  il  le  serrait  tendrement  dans 
«  ses  bras.  » 

C'étaient  de  bons  camarades.  L'espèce  en 
est  rare  au  théâtre. 

CANARD.  —  Ne  cherchez  ni  petits  pois  ni 
navets  ;  le  canard  en  question  sort,  de  temps 
à  autre,  des  instruments  à  vent  de  messieurs 
de  l'orchestre.  Il  a  pour  prénom  :  Couac. 

CANTONADE  (Parler  à  la).  —  L'acteur  qui 
parle  à  un  personnage  qu'on  suppose  placé 
dans  la  coulisse,  parle  à  la  cantonade.  Égale- 
ment ce  qu'un  acteur  dit  dans  la  coulisse 
avant  d'entrer  en  scène,  et  généralement  tout 
dialogue  de  coulisse  appartenant  à  la  pièce  est 
à  la  cantonade, 

CAPOT.— Nom  donné  à  la  boite  du  SOUFFLEUR. 

CARACTÈRE.  —  Physionomie  particulière 
donnée  par  l'auteur  à  ses  personnages  et  que 
l'acteur  doit  chercher  à  rendre.  L'Avare,  le 
Tartuffe^  le  Menteur^  le  Misanthrope.,  le  Glo- 
rieux^ le  Joueur^  sont  des  caractères. 

—  Désignation  d'emploi  :  Rôles  de  caractère. 

CASAQUE.  —  (Grande,  petite). 

Costume  des  anciens  valets  de  comédie  ;  ce 


—  49  — 

terme  indique  l'emploi  de  la  grande  et  de  la 
petite  LIVRÉE. 

CASCADE.  —  Jadis  on  appelait  «  lazzi  »  ce 
que  nous  nommons  aujourd'hui  Cascade,  c'est- 
à-dire  depuis  que  l'abus  qu'on  a  fait  de  ce 
genre  dans  quelques  vaudevilles,  et  surtout 
dans  les  opérettes  Belle-Hélène,  Duchesse  de 
Gérolstein,  Petit  Faust,  Œil  crevé,  Chilpéric, 
a  créé  en  quelque  sorte  l'emploi  de  «  casca- 
dier  ».  Le  mot  cascade  est,  du  reste,  parfait 
d'application  :  la  cascade  tombe  de  haut  en 
bas  ;  nous  croyons  que,  de  ce  côté,  l'art  drama- 
tique et  l'art  musical  font  de  même. 

CASSER  DÛ  SUCRE.  ~  Quand  deux  ac- 
trices —  ou  deux  acteurs  —  disent  du  mal 
d'une  camarade  absente,  elles  cassent  du  sucre. 

CÉLIRAT.  — Le  mariage  n'est  pas  obligatoire 
au  théâtre,  au  contraire  ;  cependant  les  enga- 
gements prévoient  le  cas  où  les  dames  appar- 
tenant à  l'ordre  de  notre  mot  ne  pourraient 
paraître  en  scène,  par  suite  d'un  empêche- 
ment... momentané.  Il  y  est  dit  que  leurs 
appointements  seront  suspendus  jusqu'au  jour 
où  elles  pourront  reprendre  leur  service  de 
Jeanne  d'Arc,  de  Virginie,  d'Agnès  et  de  Lu- 


--  50  — 

crèce.  A  défaut  de  mœurs,  sauvons  la  caisse. 
V.  G7'ossesse. 

CENSURE. — Administration  d'opérations  chi- 
rurgicales pratiquées  sur  les  œuvres  de  l'esprit 
au  nom  de  la  politique,  de  la  religion  et  de  la 
morale. 

Le  principe  de  la  censure  est  apparent  avec 
les  origines  de  notre  théâtre.  Dès  1448  et  1488, 
le  Parlement  dut  rendre  des  arrêts  pour  répri- 
mer la  licence  des  FARCES,  SOTIES,  et  MORALI- 
TEZ  que  jouaient  les  clercs  de  la  basoche,  et 
même  faire  fermer  leur  théâtre,  qu'ils  rou- 
vrirent sur  un  ordre  du  roi  daté  du  8  mars 
1496. 

Gomme  ils  avaient  joué  Louis  XII  sous  la 
figure  de  l'avarice  et  qu'on  voulait  qu'il  sévit 
contre  eux,  il  répondit  :  «  Je  veux  qu'on  joue 
«  en  liberté,  et  que 'les  jeunes  gens  déclarent 
a  les  abus  qu'on  fait  à  ma  cour,  puisque  les 
tt  confesseurs  et  autres  qui  font  les  sages  n'en 
a  veulent  rien  dire,  pourvu  qu'on  ne  parle  pas 
a  de  ma  femme,  car  je  veux  que  l'honneur 
«  des  femmes  soit  sacré.  » 

Aussitôt  après  la  mort  de  Louis  XII,  le 
Parlement  rétablit  les  défenses,  et  quelques 
années  après,  en  1538  et  1540,  la  censure; 
enfin,  en  1609,  Henri  IV,  dans  une  ordon- 


—  51    — 

nance  du  12  novembre  sur  les  théâtres  et  les 
comédiens,  dit  : 

«  Leur  défendons  de  représenter  aucune 
«  comédie  ou  farce  qu'ils  ne  les  ayent  com- 
«  muniquées  au  procureur  du  Roi  et  que  leur 
«  rôle  au  registre  ne  soit  de  nous  signé  ».  V. 
cette  ordonnance  à  V appendice. 

Voilà  donc  un  acte  bien  caractérisé  de  cen- 
sure qui  sera  cimenté  cent  ans  plus  tard,  en 
1702,  par  la  nomination  de  censeurs. 

La  censure  peut  avoir  du  bon,  car  d'après 
les  immoralités  —  nous  pourrions  dire  les  ob- 
cénités  —  qu'on  débite  sur  certaines  scènes, 
on  peut  supputer  la  qualité  de  ce  qu'elle  coupe 
par  ce  qui'  reste.  Malheureusement  les  cen- 
seurs sont  des  hommes,  et  c'est  l'esprit  d'ap- 
préciation qui  seul  est  juge.  De  là  des  énor- 
mités  et  des  naïvetés  dont  voici  quelques 
exemples. 

Un  auteur  avait  donné  le  nom  de  Dubois 
à  un  valet  fripon.  La  censure  fit  changer  le 
nom  de  ce  valet,  parce  que  le  préfet  de  police 
d'alors  se  nommait  Dubois  et  qu'il  n'était  pas 
convenable  de  donner  à  un  fripon  le  nom  de 
celui  qui  les  faisait  arrêter.  Une  autre  fois,  on 
dut  changer  le  nom  de  «  barbe  de  capucin  », 
et  choisir  une  autre  salade,  sous  le  prétexte 
de  respect  pour  la  religion  ! 


—  52  — 

h' Esope  à  la  cour\  de  Boursault,  fut  fort 
maltraité  par  la  censure  qui  lui  coupa  beau- 
coup de  beaux  vers,  entre  autres  les  quatre' 
suivants,  qui  semblent  cependant  sortir  du 
miroir  de  la  vérité  et  qui  se  trouvaient  dans 
la  bouche  de  Grésus  : 

Par  là  je  m'aperçois,  ou  du  moins  je  soupçonne, 
Qu'on  encense  la  place  autant  que  la  personne; 
Que  c'est  au  diadèjne  un  tribut  que  l'on  rend 
Et  que  le  roi  qui  règne  est  toujours  le  plus  grand. 

Les  censeurs  sont  aussi  chargés  de  régler 
la  longueur  des  jupes  des  danseuses  et  des  figu- 
rantes dans  les  ballets  ^i  féeries^  seulement, 
quand  ils  les  rallongent  par  en  bas,  ces  dames 
les  raccourcissent  par  en  haut.  Le  diable  n'y 
perd  rien. 

CHAMBRÉE.  —  Synonyme  du  mot  salle,  en 
tant  seulement  qu'on  veut  parler  du  nombre 
des  spectateurs  qui  sont  dans  la  salle  :  une 
moyenne  chambrée  ;  une  bonne,  une  pleine 
chambrée. 

CHANGEMENT  A  VUE.  —  C'est  toujours 
un  attrayant  spectacle  pour  l'œil,  qu'un  chan- 
gement à  vue,  soit  de  décors,  soit  de  costumes. 
La  rapidité  en  faisant  généralement  la  beauté, 
il  faut  que  les  machinistes  soient  à  leur  poste 


—  53  — 

et  que  tout  soit  bien  équipé  avant.  Au  signal 
convenu,  les  TREUILS  et  les  CONTRE-POIDS  font 
leur  office  :  un  TRAPILLON  engloutit  une  feuille 
de  décor  tandis  que  son  voisin  en  fait  surgir 
une  autre  ;  les  plafonds  ,  les  rideaux  ,  les 
BANDES  D'AIR  s'envoient  et  disparaissent  dans 
le  CINTRE,  tandis  que  ce  qui  doit  les  remplacer 
descend.  Tout  cela  se  fait  en  un  tour  de  roue. 

Il  y  a  aussi  les  changements  sans  déplace- 
ment qui  se  font  à  l'aide  de  volets  doublant 
le  châssis  et  qui  se  manœuvrent  à  l'aide  de 
FILS  tirés  par  derrière,  et  d'un  seul  coup.  Il  y 
a  quelquefois  plus  de  cent  volets  sur  un 
châssis. 

Les  chan'gements  de  costumes  se  font  tou- 
jours par  les  trapillons  et  à  la  main.  Le  cos- 
tume qui  doit  disparaître  ne  forme  jamais  que 
deux  morceaux,  rattachés  par  un  lacet,  avec 
rosette  en  haut  que  défait  l'acteur  au  moment 
voulu,  et  un  anneau  en  bas  qui  est  saisi  par 
la  main  du  costumier  placé  au  trapillon. 

CHARGE.  —  Exagération  voulue  par  certains 
rôles,  mais  dans  les  limites  de  la  raison.  Ainsi 
le  rôle'de  Werther^  qui  fut  créé  par  Potier,  est 
une  charge  du  sentiment.  Tiercelin,  Odry, 
Mazurier,  Monrose,  Arnal,  Lesueur,  sont 
connus  par  leurs  charges^  mais  toutes  plaisantes 

5. 


-  54  — 

et  de  bon  goût.  Grassot  n'était  que  la  charge 
d'une  charge. 

Nous  voudrions  que  MM.  les  comiques  com- 
prissent bien  que  la  charge  est  au  NATUREL  ce 
que  la  caricature  est  au  dessin  :  elle  ne  passe 
qu'à  force  d'esprit. 

CHARGEZ!  —  Terme  employé  dans  la  ma- 
nœuvre des  décors,  pour  indiquer  le  mouve- 
ment de  descendre.  Toutes  les  parties  qui 
descendent  du  CINTRE  ou  qui  s'enfoncent  dans 
les  DESSOUS,  se  meuvent  au  commandement 
de  «  Chargez  I  » 

CHASSIS.  —  Tous  les  décors  qui  ne  sont  pas 
rideaux  sont  sur  châssis,  construits  en  sapin  du 
Nord,  très-légers,  très-solides  néanmoins,  et 
chantournés  suivant  le  besoin.  Les  châssis 
manœuvrent  généralement  sur  le  côté  et  s'ac- 
crochent —  se  guindent  —  sur  les  FAUX  CHASSIS 
ou  MATS.  Les  FERMES  se  font  aussi  ^\xt  châssis. 

CHAT.  —  Animal  sournois  qui  se  loge  subrep- 
ticement dans  la  gorge  des  chanteurs  —  voire 
même  des  chanteuses  —  puisqu'on  dit  com- 
munément :  il  a  un  chat  dans  le  gosier. 

GHATELET  (théâtre  du).  —  Inauguré  en  1862, 


—  55  — 

ce  théâtre,  le  plus  grand  de  Paris ,  puisqu'il 
contient  3,600  places,  peut  se  prêter  à  tous 
les  genres  ;  par  sa  dimension,  il  semble  sur- 
tout destiné  aux  drames  de  cap  et  d'épée  et 
aux  féeries  qui  peuvent  y  déployer  largement 
leur  pompe  et  leurs  nombreux  cortèges. 

CHAUFFER  LA  SCÈNE.  —  Se  remuer, 
s'agiter,  s'évertuer  pour  faire  rendre  à  un 
rôle  plus  qu'il  ne  contient.  De  chauffer  à  BRU- 
LER LES  PLANCHES,  il  n'y  a  qu'un  pas. 

CHEF  DE  CLAQUE.  — V.  Claque,  Claqueurs. 

CHEF  D'EMPLOL-- Chaque  acteur  portant 
dans  son  engagement  Y  emploi  qu'il  doit  occu- 
per dans  une  troupe,  stipule  ordinairement 
qu'on  ne  pourra  distribuer  ses  rôles  à  d'autres 
que  lui  sans  sa  volonté  ;  il  devient  par  ce  fait 
chef  d'emploi.  Cet  usage,  qui  peut  être  excel- 
lent comme  mesure  d'ordre,  a  cependant 
l'inconvénient  de  fermer  la  carrière  aux  jeunes 
acteurs  qui  montrent  du  talent.  On  ne  leur 
laisse  jouer  que  les  PANNES  ;  ou  il  faut  un  acci- 
dent arrivé  au  chef  d'emploi  pour  les  mettre 
en  évidence.  V.  Double. 

CHIEN.  —  Y .  Avoir  du   chien . 


—  56  — 

CHOEUR.  —  Troupe  réunie  pour  chanter  ou 
danser  ensemble.  Dans  la  tragédie  antique, 
le  chœur  faisait  l'office  d'un  personnage  et 
donnait  en  quelque  sorte  la  RÉPLIQUE. 

Dans  le  théâtre  moderne,  le  chœur  n'existe 
plus  que  comme  une  masse  chantante  ou 
dansante,  et  encore  cette  dernière  est-elle  plus 
communément  appelée  CORPS  DE  BALLET. 

CHORÉGRAPHIE.  —Science  de  la  composi- 
tion des  BALLETS. 

CHORISTE  ou  COMPARSE  chantant.  —  Dans 
les  grands  théâtres,  les  choristes  ne  sont  admis 
qu'au  concours.  Ils  sont  conduits  par  les  co- 
ryphées ou  chefs  d'aljtaque,  qui  donnent  le 
premier  coup  de  g... osier;  aussitôt  chacun  de 
suivre  de  la  voix  et  du  geste,  avec  un  ensemble 
—  pour  le  geste  —  à  faire  mourir  de  honte 
une  mécanique. 

Ce  sont  ces  mêmes  choristes  qui  chantent  : 

Allons,  marchons! 
Allons,  courons! 
Et  saisissons 
Ce  coupable!.. 

pendant  vingt  minutes  sans  bouger  de  place. 
CHUTI  —  Ilya  deux  sortes  de  chut!  l'un  est 


—  57  — 

approbateur  :  c'est  quand  le  public  impose 
silence  à  quelques  brouillons  jaloux  ou  caba- 
leurs  par  un  chut!  bien  accentué  ;  il  équivaut 
presque  à  des  applaudissements;  l'autre  qui 
tue  net  une  pièce  ou  un  acteur  :  c'est  quand 
il  s'adresse  aux  applaudissements  que  la 
claque  ou  quelques  amis  maladroits  tentent 
pour  sauver  une  mauvaise  pièce  ou  pour  faire 
plaisir  à  un  mauvais  comédien.  Alors  il 
change  de  sexe  :  ce  n'est  plus  un  chut!  c'est 
une  CHUTE. 

CHUTE.  —  Insuccès  d'une  pièce  ;  mais  au  théâ- 
tre, comme  ailleurs,  toutes  les  chutes  ne  sont 
pas  mortelles,  et  l'exemple,  n'est  pas  rare  de 
pièces  tombées  à  la  première  représentation, 
qui  ont  fourni  une  brillante  carrière  et  sont 
même  devenues  la  gloire  du  théâtre  français. 
Ainsi  Britannicus  et  les  Plaideurs  de  Racine 
furent  siffles  ;  le  Cid^  ce  chef-d'œuvre  !  éprouva 
le  même  sort  ;  les  Fables  d'Esope^  de  Bour- 
SAULT  ;  le  Grondeur^  de  Bruys  et  Palaprat, 
également.  Les  citations  dans  le  répertoire 
moderne  nous  entraîneraient  trop  loin.  Nous 
en  traiterons  les  causes  au  mot  PUBLIC. 

Quelquefois,  la  chute  d'une  pièce  tient  à 
des  circonstances  imprévues,  impossibles  à 
prévoir.  Le  Coriolan  d' Abeille  marchait  au 


—  58  — 

succès   quand  un  personnage  eut  à  dire  ce 
vers  : 
Ma  sœur,  vous  souvient-il  du  feu  roi  notre  père? 

Un  farceur  du  parterre  répondit  aussitôt  : 
Ma  foi,  s'il  m'en  souvient,  il  ne  m'en  souvient  guère  î 

Un  fou  rire  s'empara  de  la  salle,  et  la  pièce 
ne  put  se  relever. 

Pareille  chose  arriva  pour  le  Siège  de  Paris 
de  d'Arlincourt.  Un  soldat  vient  dire  : 

Pour  chasser  loin  des  murs  les  farouches  Normands, 
Le  roi  Charles  s'avance  avec  vingt  mille  Francs. 

Il  est  plus  riche  que  moi,  cria  un  habitant  du 
PARADIS,  jouant  sur  les  mots  :  Vingt  mille 
francs.  Le  rire  général  qu'excita  cette  saillie 
faillit  compromettre  la  pièce;  l'auteur  dut 
supprimer  les  vingt  mille  francs. 

Les  drôleries  de  ce  genre  ne  sont  pas  extrê- 
mement rares  ;  on  connaît  dans  ce  genre  : 

Mon  pauvre  père,  hélas  !  seul  à  manger  m'apporte. 

malheureuse  inversion.  Et  puis  : 

J'habite  la  montagne  et  j'aime  à  la  vallée!.. 

c'est  pis  que  Gargantua.  Et  encore  : 

Voici  ces  chevaliers  que  l'on  nomme  les  preux  !.. 

Le  plus  extraordinaire,  c'est  que  ces  choses, 


—  59  — 

qui  sautent  à  l'oreille,  aient  échappé  aux 
auteurs  et  aux  acteurs  pendant  les  répéti- 
tions. 

CINTRE.  —  Toute  la  partie  supérieure  de  la 
scène,  jusqu'au  GRIL,  se  nomme  cintre.  Il  est 
divisé  en  deux  ou  trois  étages  et  desservi  par 
des  corridors  qui  en  font  le  tour  et  qu'on 
nomme  premier,  deuxième  et  troisième  corri- 
dors du  cintre^  en  commençant  par  celui  du 
bas. 

Pour  éviter  de  faire  le  tour  et  activer  le 
service,  les  corridors  de  droite  et  de  gauche 
sont  mis  en  communication  par  des  PONTS- 
VOLANTS  suspendus  au  comble  par  des  FILS  ou 
des  tiges  de  fer.  C'est  dans  les  corridors  du 
cintre  que  se  trouvent  les  TREUILS  et  TAMBOURS 
qui  servent  à  la  manœuvre. 


> 


CLAQUE,  CLAQUEURS.  —  La  c/a<?«e  est 
fille  de  l'intérêt  et  de  la  VANITÉ.  Directeurs , 
auteurs  et  acteurs  s'entendent  pour  la  soute- 
nir; le  public  la  subit. 

Elle  remonte  loin.  Néron,  chantant  dans 
l'amphithéâtre,  avait  des  claqueurs,  d'où  le 
nom  de  romains  donné  à  ceux  d'aujourd'hui. 

Ses  origines,  chez  nous,  sont  assez  difficiles 
à  saisir.  Ce  sont  les  auteurs  qui,  les  premiers, 


—  60  — 

ont  distribué  un  grand  nombre  de  billets  pour 
faire  soutenir  leurs  pièces.  Ce  n'étaient  pas 
proprement  des  claqueurs;  c'étaient  des  spec- 
tateurs bienveillants. 

A  la  représentation  de  V Accommodement 
imprévu,  de  Lagrange,  un  individu  du  parterre 
applaudissait  à  tout  rompre  en  même  temps 
qu'il  s'écriait  :  Que  cela  est  mauvais  !  que  cela 
est  exécrable/  —  Pourquoi  applaudissez-vous 
alors?  lui  dit  un  de  ses  voisins. —  C'est,  répon- 
dit notre  homme,  que  j'ai  reçu  un  billet  pour 
applaudir,  et,  comme  je  suis  honnête,  j'applau- 
dis; mais  je  n'ai  pas  promis  de  me  taire  et  je 
crie  ce  que  je  pense. 

DoRAT,  voulant  satisfaire  sa  vanité  d'au- 
teur, n'eut  pas  une  claque  comme  nous  l'en- 
tendons; mais  il  distribua  tant  de  billets,  à  la 
condition  qu'on  applaudirait,  qu'après  la  re- 
présentation d'une  de  ses  pièces  il  s'écria  : 
«  Encore  un  ou  deux  succès  comme  celui-là 
et  je  suis  ruiné!  »  Il  avait  semé  en  France  la 
graine  des  applaudissements  payés,  elle  pros- 
péra et  devint  bientôt  une  institution. 

Nous  maintenons  le  mot  institution  :  la 
claque  possède  un  chef,  des  lieutenants  et  des 
soldats. 

Le  chef  de  claque  traite  directement  avec 
les  directeurs,  les  auteurs  et  les  acteurs  :  il 


_  6i   — 

reçoit  des  trois  mains.  Il  a  tant  de  places  de  la 
direction,  tant  de  billets  d'auteurs  et  d'acteurs, 
ou  une  somme  fixe  de  ces  derniers.  Ses  troupes 
sont  divisées  en  trois  classes.  La  première  est 
composée  des  purs,  des  intimes  :  ceux-là  entrent 
à  lœil  et  ont  les  figures  patibulaires  que  l'on 
connaît  ;  la  deuxième  comprend  ceux  qui  paient 
un  léger  droit,  et  est,  par  conséquent,  mieux 
composée  :  on  les  appelle  les  lavables^  (en 
argot,  laver  veut  dire  vendre)  parce  que  quel- 
ques-uns revendent  leurs  contre  -  marques 
avec  bénéfice  :  aussi,  on  les  surveille  ;  la 
dernière  est  composée  des  solitaires  qui  paient 
leur  billet  d'entrée  presque  aussi  clier  qu'au 
bureau,  quelquefois  plus  cher,  mais  ne  sont 
pas  forcés  d'applaudir.  Ils  évitent  ainsi  de 
faire  la  QUEUE  :  c'est  tout  l'avantage  qu'ils 
ont. 

Les  claqueurs  étaient  toujours  groupés  dans 
le  parterre,  sous  le  lustre,  ce  qui  leur  avait  valu 
\q  s,\ivnom.  ÔlQ  chevaliers  du  lustre.  Aujourd'hui 
que  la  nouvelle  distribution  des  salles  a  pris 
le  PARTERRE  pour  en  faire  des  stalles,  on  met 
la  claque  un  peu  partout. 

La  position  de  chef  de  claque  est  un  joli 
avoir  et  équivaut  à  un  bon  notariat.  Auguste 
avait  acheté  sa  charge  à  l'Opéra  80,000  francs  ; 
nous  ne  savons  ce  qu'il  l'a  revendue  à  David, 

6 


—  62  — 

le  titulaire  actuel,  mais  il  y  a  eu  certainement 
une  belle  plus-value. 

CLAQUE.  — Un  jugement  du  tribunal  de  com- 
merce de  la  Seine  dit  «  que  le  traité  passé 
«  pour  assurer  par  des  applaudissements  sala- 
«  ries  le  succès  d'une  pièce,  est  déclaré  illicite, 
«  et  ne  peut  donner  lieu  à  une  action  en  jus- 
ce  tice,  quand  bien  même  ce  traité  serait  dé- 
«  guisé  par  une  vente  de  billets  ». 

COLIN.  —  Emploi  d'amoureux  comique  dans 
les  anciens  opéras-comiques.  On  en  a  fait  dans 
le  monde  un  qualificatif  :  c'est  un  colin. 

COMÉDIE.  —  Terme  générique  de  toutes  nos 
productions  dramatiques  jusqu'à  Racine,  car 
M^®  de  SÉviGNÉ  dit  encore  «  la  comédie  du 
Cid^  »  «  la  comédie  de  Cinna,  »  <(  la  comédie 
de  Phèdre,  »  et,  bien  que  les  genres  soient 
aujourd'hui  parfaitement  définis,  on  dit  encore 
«  aller  à  la  comédie  » ,  comme  disaient  nos 
pères,  pour  aller  au  spectacle,  quand  bien 
même  on  n'irait  voir  que  la  tragédie. 

Proprement,  le  mot  comédie  s'applique  au 
genre  de  pièces  dans  lesquelles  les  caractères, 
les  mœurs,  les  ridicules,  particuliers  ou  géné- 
raux, sont  exposés  sans  apporter  à  leur  suite 
aucune  action  sanglante. 


—  63  — 

Aristote  définit  la  comédie  :  «  Unp.  imitation 
des  plus  méchants  hommes  dans  le  ridicule.  » 
Cette  définition  prise  à  la  lettre  serait  un  peu 
sévère  pour  le  genre  et  nous  rapprocherait  du 
drame.  Nous  aimons  mieux  la  définition  de 
BouRSAULT.  (c  La  comédie,  dit-il,  est  un  poëme 
ingénieux  pour  reprendre  les  vices  et  les  rendre 
ridicules  ».  Dacier  ajoute  :  «  ha.  comédie  ne 
soufi're  rien  de  grave  et  de  sérieux,  parce  que 
le  comique  et  le  ridicule  sont  l'unique  carac- 
tère de  la  comédie.  » 

Enfin  nous  finissons  par  cette  définition  qui 
semble  les  résumer  et  les  confirmer  toutes  : 
«  La  comédie  est  l'usagé  ou  la  représentation 
delà  vie  ordinaire  des  hommes  ;  on  y  représente 
leurs  actions  les  plus  communes,  et  on  y  ré- 
pand du  ridicule  sur  leurs  défauts,  afin  d'en 
préserver  les  spectateurs  ou  les  en  corriger.  » 
C'est  à  peu  près  ce  que  dit  Racine  auquel  il 
serait  inconvenant  de  ne  pas  laisser  la  parole 
en  cette  matière  :  «  La  comédie  doit  représenter 
au  naturel  les  mœurs  du  peuple  pour  lequel 
elle  est  faite,  afin  qu'il  s'y  corrige  de  ses  vices 
et  de  ses  défauts,  comme  on  ôte  devant  un 
miroir  les  taches  de  son  visage.  » 

N'en  déplaise  à  Racine,  il  n'en  est  pas  des 
vices  comme  des  taches  du  visage,  qu'on  ôte 
avec  une  éponge.  Il  y  a  des  taches  qui  tiennent 


—  64  — 

à  la  peau  comme  les  vices  tiennent  à  nos  pas- 
sions, et  nos  passions  à  la  race  humaine;  de 
plus,  l'œil  de  l'homme  est  ainsi  fait  que  lors- 
qu'on lui  présente  un  miroir,  ce  sont  toujours 
les  taches,  ou  pour  parler  vrai,  les  vices  et 
les  ridicules  du  voisin  qu'il  croit  y  voir.  C'est 
Lafontaine  qui  a  raison  : 
Lynx  envers  nos  pareils  et  taupes  envers  nous. 

COMÉDIE  FRANÇAISE.  —  V.  Théâtre- 
Français. 

COMÉDIEN.  —  Nous  avons  déj  à  traité  ce  suj  et 
au  mot  ACTEUR,  mais  pas  avec  le  développe- 
ment qu'il  comporte  et  qui  trouve  mieux  sa 
place  ici. 

Etre  un  bon  comédien^  c'est  posséder  le  plus 
beau,  le  plus  rare  et  le  plus  difficile  des  talents  ; 
c'est  percevoir,  comprendre,  analyser,  rendre 
et  exprimer  toutes  les  passions  de  l'humanité. 
«  Le  bon  comédien^  a  dit  Rousseau,  est  celui 
qui  oublie  sa  propre  place  à  force  de  prendre 
celle  d'autrui;  il  feint  les  passions  qu'il  n'a 
pas.  »  C'est  probablement  pour  cela  que  les 
hommes  politiques  sont  de  grands  comédiens, 
Lekain  divisait  l'art  du  comédien  en  quatre 
parties  :  1°  l'âme;  2°  l'intelligence;   V  la 

VÉRITÉ  ET  LA  CHALEUR  DU  DÉBIT  ;  4**  LA  GRACE 

ET  LE  DESSIN  DU  CORPS.  Ajoutous  quc  l'esprit 


—  65  — 

d'observation,  la  connaissance  parfaite  de  la 
langue ,  la  sûreté  de  mémoire ,  l'étude  de 
l'histoire,  surtout  celle  des  mœurs,  et  vingt 
années  d'un  travail  assidu  suffisent  à  peine 
pour  former  un  bon  comédien. 

Fleury  donne,  dans  ses  mémoires,  la  me- 
sure des  soins  qu'un  vrai  comédien  comme  lui 
prenait  pour  représenter  un  personnage  his- 
torique. Il  devait  faire  le  grand  Frédéric  dans 
les  deux  Pages.  Il  étudia  les  portraits  de  Fré- 
déric II,  prit  des  renseignements  de  ceux  qui 
l'avaient  connu,  donna  à  son  appartement  le 
nom  de  Postdam,  se  fit  faire  un  vêtemenj; 
militaire  complet,  pareil  à  celui  du  roi,  et  le 
mit  chaque  matin  pendant  plusieurs  mois 
pour  y  habituer  son  corps  et  s'y  trouver  à 
l'aise.  Il  apprit  à  jouer  de  la  flûte  pour  obte- 
nir le  mouvement  de  tête  que  Frédéric  devait 
à  cet  instrument  favori,  etc. 

Les  grands  comédiens  comme  Baptiste  aîné 
et  cadet,  Saint-Prix,  Préville,  Dazincourt, 
MoLÉ,  Talma,  faisaient  des  études  sérieuses  et 
ne  recevaient  personne  quelques  jours  avant 
les  grandes  représentations. 

Les  exemples  que  nous  pourrions  citer  dé- 
passant les  limites  de  notre  vocabulaire,  nous 
nous  arrêtons.  D'ailleurs,  serviraient-ils?  on 
se  le  demande  ! 

6. 


—  66  — 

COMIQUE.  — Emploi.  Acteur  payé  pour  faire 
rire  le  public  avec  Fesprit  des  autres  qu'il 
finit  par  croire  le  sien. 

On  compte  au  théâtre  plusieurs  genres  de 
comique  :  le  comique  noble.,  le  comique  bour- 
geois., le  comique  niais  et  le  bas  comique.  En 
forçant  un  peu  celui-ci,  on  arrive  au  pitre  et 
au  queue-rouge.  L'échelle  des  comiques  com- 
mence au  Théâtre-Français  et  finit  aux  Funam- 
bules. On  trouve  au  sommet  Got,  Coquelin, 
Geoffroi  ;  au  milieu  Brasseur,  Gil  Pérez  ; 
au  bas  Paul  Legrand  et  Debureau. 

Une  chose  remarquable,  c'est  que  la  plu- 
part des  comiques  passés  et  présents  sont,  en 
dehors  du  théâtre,  tristes,  moroses  et  ennuyés. 
Le  célèbre  Thomassin  qui,  sous  l'habit  d'arle- 
quin, a  fait  rire  le  monde  entier,  attaqué 
d'une  maladie  noire  alla  consulter  le  docteur 
Dumoulin.  Celui-ci,  ne  le  connaissant  pas,  lui 
conseilla  d'aller  voir  arlequin.  —  Hélas  !  lui 
répondit  Thomassin,  il  faut  donc  que  je  meure, 
car  je  suis  cet  arlequin  auquel  vous  me  ren- 
voyez. Got  est  très-sérieux  et  réfléchi;  Geof- 
froi presque  taciturne  ;  Brasseur  à  peine  gai  ; 
Debureau  était  mélancolique  et  bon  père  de 
famille. 

COMITÉ.  — Il  est  établi,  dans  toute  entreprise 


-  67  — 

théâtrale  sérieuse,  un  comité  de  lecture,  —  il 
devrait  du  moins  en  être  ainsi  —  pour  la 
réception,  le  renvoi  à  correction  ou  le  rejet 
des  pièces  présentées.  Gela  avait  lieu  dans 
l'antiquité,  cela  a  toujours  eu  lieu  pour  la 
Comédie- française.  A  ce  théâtre,  on  votait  par 
bulletin  motivé  ;  les  comédiens  et  comédiennes 
faisaient  partie  du  comité ,  sous  la  présidence 
du  commissaire  du  roi.  Un  jour  on  trouva  dans 
l'urne  le  bulletin  suivant,  émanant  d'une  de 
ces  dames  :  «  Cette  petite  acte  m' a  paru  char- 
mante, mais  invraisemblable^  je  la  refuse.  » 
Depuis  on  a  remplacé  le  bulletin  par  des 
boules  blanches,  rouges  et  noires  :  c'est  plus 
grammatical. 

COMMANDE.  —  Quelques  lecteurs  bénévoles 
peuvent  croire  que  les  dramaturges  et  les  vau- 
devillistes travaillent  d'après  leur  propre  ins- 
piration ,  et  qu'une  pièce  sort  tout  armée  de 
leur  cerveau  :  c'est  une  erreur  ;  ces  messieurs 
ne  font  pas  seulement  la  confection ,  ils 
fabriquent  sur  commande.  Les  REVUES  ne  se 
l'ont  jamais  autrement. 

COMMERÇANT.  —  Les  directeurs  de  théâtre 
sont  considérés  comme  commerçants.  Les 
auteurs  ne  le  sont  pas,  les  acteurs  non  plus. 


—  68  — 

COMMISSAIRE.— V.Pofe,  eikV Appendice 
l'article  24  de  l'ordonnance  du  1"  juillet  1864. 

COMMISSIONNAIRE.  —  Y.  à  VAppendice 
l'article  44  de  l'ordonnance  du  1"  juillet  1864. 

COMPARSE.  —  Sorte  d'automate  vivant,  qui 
obéit  à  un  fil  et  exécute  mécaniquement  les  : 
Ciel  l  Grands  Dieux  l  Se  peut-il  ?  Oui,  oui  ! 
Non,  non  !  à  mort  !  à  mort  1  II  fait  les  «  mur- 
mures du  peuple  »  «  la  foule  qui  remplit  les 
salons,  »  les  paysans  et  les  soldats  de  tous  les 
pays,  recevant  et  donnant  des  coups  de  sabre 
ou  de  bâton.  Il  représente  les  rois  muets,  les 
diables,  les  ours,  une  jambe  d'éléphant  ou  le 
train  de  derrière  d'un  chameau,  c'est  encore 
lui  qui,  couché  sous  une  toile  peinte  qu'il 
soulève  de  temps  en  temps,  fait  le  flot  de  la 
mer ,  etc. ,  etc.  Tout  cela  pour  la  modique 
somme  de  75  cent,  à  1  fr.  50  par  soirée. 

Les  chefs  de  comparses  reçoivent  une  haute 
paie  supplémentaire  de  50  cent,  et  ont  le  droit 
d'infliger  des  amendes  à  leurs  subordonnés. 
—  Synonyme  :  figurant.  V.  Choriste. 

CONCOURS.  —  Il  y  a  concours  pour  les 
emplois  de  musicien  instrumentiste  et  pour 
les  choristes  des  deux  sexes  dans  les  théâtres 


—  69  — 

de  chant.  Il  n'y  a  pas  de  mal  à  ça,  si  ce  n'est 
que  le  concours  qui  a  lieu  pour  les  choses 
secondaires  devrait  exister  pour  les  princi- 
pales. 

CONGÉ.  —  Temps  accordé  aux  comédiens  pour 
se  reposer  des  fatigues  de  leur  profession.  Les 
congés  sont  d'un  ou  deux  mois  suivant  les  con- 
ditions de  l'engagement. 

Il  était  sage  d'accorder  un  repos  aux  comé- 
diens. Gomment  en  usent -ils  ?  La  plupart 
revendent  leur  congé  à  la  direction;  les  autres 
font  des  tournées  en  province  et  ajoutent  aux 
fatigues  du  métier  les  fatigues  du  voyage.  En 
résumé,  les  congés  ne  sont  que  des  supplé- 
ments de  fatigues  et  d'appointements  :  c'est  à 
ce  commerce-là  que  Rachel  s'est  tuée. 

GONSERYATOIRE.  —  V.  Ecole  de  chant. 

GONTRE-MARQUE.  —  Morceau  de  carton 
qu'on  distribue  aux  spectateurs  qui  sortent 
dans  le  cours  d'une  représentation  et  qui 
donne  droit  de  rentrer.  La  contre-marque  est 
au  porteur  et  se  négocie  à  la  porte  comme  une 
action  à  la  bourse  :  qui  la  vend  ?  qui  la  donne  ? 
crient  les  spéculateurs  de  la  chose  à  chaque 
sortie.  La  hausse  ou  la  baisse  dépendent  de  la 
pièce  et  des  acteurs. 


—  70  — 

CONTRE-POIDS.  —  Pour  diminuer  la  force 
musculaire  nécessaire  pour  la  manœuvre  des 
grandes  FERMES,  BATIS,  CHASSIS,  apparitions, 
CHANGEMENTS  A  VUE,  on  fait  usage  de  contre- 
poids équilibrés  de  façon  à  ce  qu'un  homme 
ou  deux  puissent  faire  mouvoir  une  masse  qui 
en  exigerait  dix.  Ce  système  des  contre-poids 
a  surtout  l'avantage  de  pouvoir  diriger  le 
mouvement  et  de  l'adoucir,  ce  qui  est  impor- 
tant pour  le  service  des  TRAPPES  et  des  appa- 
ritions :  un  mouvement  trop  brusque,  en  ce 
dernier  cas,  lancerait  l'acteur  en  l'air. 

CONTRE-SENS.  —  Quelques  acteurs  y  sont 
sujets  et  feraient  mieux  de  faire  des  souliers 
ou  de  la  maçonnerie  que  de  jouer  la  comédie. 
L'un  s'écrie  :  Le  ciel  est  contre  moi!  et  montre 
du  doigt  la  terre,  ou  :  Terre,  engloutis-le  !  et 
montre  le  ciel;  un  autre  raconte  un  épisode 
tragique  d'un  air  riant. 

C'est  dans  le  costume  surtout  que  le  contre- 
sens abonde.  Regardez  un  groupe  de  paysannes, 
par  exemple,  vous  n'en  verrez  pas  deux  chaus- 
sées pareillement,  ni  à  la  mode  du  pays. 

CONTROLEUR.—  Employé  à  l'échairge  des 
billets,  coupons  de  loges,  billets  d'auteur  ou 
de  faveur.  Cet  emploi  est  très-recherché  dans 
les  grands  théâtres. 


—  71    — 

COQUETTE  (grande).  —  L'ancien  rôle  des 
Gélimènes  est  connu  dans  le  répertoire  mo- 
derne sous  le  nom  de  grande  coquette;  en 
province,  il  est  presque  toujours  tenu  par  le 
premier  rôle  femme. 

CORPS  DE  BALLET.  —  On  dit  corps  de 
ballet^  comme  on  dit  corps  d'armée.  En  effet, 
le  corps  de  ballet  se  compose  de  pelotons,  divi- 
sés d'abord  par  les  sexes  ;  ensuite,  pour  les 
besoins  du  service,  par  quadrilles.  Le  Conser- 
vatoire, classe  de  la  danse,  entretient  un 
corps  de  renfort  que  l'on  prête  aux  théâtres 
subventionnés. 

CORRESPOND  ANT.— y.  Agent  dramatique, 

CORRIDOR.  —  Les  plus  étroits  sont  les  meil- 
leurs... pour  ceux  qui  ont  besoin  de  s'y  ren- 
contrer. Dans  certain  théâtre,  on  pourrait 
établir  des  billets  de  corridor  avec  succès. 

CORYPHÉE.  —  Premier  choriste,  ou  chef 
d'attaque. 

COSTIÈRE.  —  Rainure  qui  se  trouve  dans  le 
plancher,  et  à  chaque  PLAN,  au  nombre  de 
deux  ou  trois,  suivant  qu'il  y  a  ihi  ou  deux 
TRAPILLONS.  C'est  par  la  costière  qu'on  emboîte 


—  12  — 

les   FAUX-CHASSIS  et  MATS  sur   le    chariot   de 
manœuvre. 

COSTUME. 

Par  un  mensonge  heureux  voulez-vous  nous  ravir? 
Au  sévère  costume  il  faut  vous  asservir  ; 
Sans  lui  d'illusion  la  scène  dépourvue, 
Nous  laisse  des  regrets  et  blesse  notre  vue. 

Ce  quatrain  est  vrai.  La  vérité  historique 
du  costume  est  aussi  nécessaire  à  la  bonne 
représentation  d'une  pièce  que  la  décoration 
et  les  accessoires  dont  il  fait  partie. 

Le  costume  historique  est  cependant  de  date 
récente,  relativement  au  théâtre.  Ce  ne  fut 
que  vers  1760  que  Lekain,  et,  après  lui, 
M^^"*  Clairon,  essayèrent  cette  révolution,  qui 
fut  plus  tard  continuée  par  Talma  et  M^^'^Mars. 
Figurez-vous  les  héros  de  Corneille  et  de 
Racine  en  habits  de  cour,  cannes  à  pomme 
d'or,  grandes  perruques  et  chapeaux  à  plumes  ; 
et  Agrippine,  Camille,  Phèdre  en  paniers  et 
vertugadins,  avec  poudre,  mouches,  etc.,  etc. 
C'est  cependant  ce  qui  avait  lieu. 

COULISSES.  —  Séjour  de  la  désillusion. 
Celui  qui  s'y  aventure  sur  le  prestige  brillant, 
vu  de  la  salle,  y  rencontre  un  amoureux  pous- 
sif, une  ingénue  qui  consulte  le  docteur  et 


—  73  — 

cherche  un  parrain;  la  princesse  fait  des  mots, 
ou  des  maux,  avec  le  coiffeur;  le  père  noble 
eng...treprend  le  lampiste  pour  une  tache 
d'huile.  —  Pas  un  visage  :  du  blanc,  du  bleu, 
du  noir  et  du  carmin  en  tiennent  lieu.  Faux- 
chignons,  fausses  dents,  faux-mollets,  faux... 
et  l'on  s'étonne  de  la  hausse  du  coton  ! 

Hier,  chez  Melpomène,  aux  déchirants  adieux 

De  Titus  et  de  Bérénice, 
De  longs  ruisseaux  de  pleurs  coulaient  de  tous  les  yeux. 
Quand  un  rustre,  attendri  de  ce  cruel  supplice, 

Qui  des  deux  amants  malheureux 
Causait  à  tous  les  cœurs  ce  cruel  sacrifice 
S'écrie  :  Ah  !  bonnes  gens,  ne  pleurez  pas  sur  eux, 
Ils  ne  sont  point  partis  :  je  les  vois  tous  les  deux 

Qui  s'embrassent  dans  la  coulisse. 

Par  ordonnance  de  police,  .l'entrée  des  cou- 
lisses est  interdite  au  public.  C'est  bien  vu  : 
il  ne  faut  pas  que  le  consommateur  entre  dans 
la  cuisine. 

COUPLET.  —  Tout  ce  qu'un  acteur  a  à  dire, 
prose  ou  vers,  se  nomme  littérairement  cou- 
plet. 

COUPON.  —  Nom  que  l'on  donne  au  billet  de 
loge  louée  à  l'avance  et  qui  doit  correspondre  à 
la  feuille  de  location.  Le  coupon  est  plus  pro- 
prement appelé  lorsqu'il  ne  comporte  qu'une 
partie  des  places  que  contient  la  loge. 


—  74  — 

COUPURE.  —  Retranchements  faits  à  une 
pièce,  soit  par  la  CENSURE,  soit  par  l'auteur 
pour  activer  la  marche  de  l'ouvrage  ou  en 
diminuer  la  longueur.  —  V.  Rognures. 

COUR  (côté).  —  Côté  droit  de  la  SCÈNE,  vue 
prise  de  la  salle.  —  V.  Jardin, 

CRACHER  SUR  LES  QUINQUETS.—  Un 

acteur  crache  sur  les  quinquets,  quand  il  fait  de 
vains  efforts  pour  produire  de  l'EFFET  et  ne 
réussit  qu'à  montrer  sa  faiblesse  ou  sa  nullité. 

CRITIQUE.— Bête  noire  de  MM.  les  directeurs, 
auteurs  et  comédiens  des  deux  sexes. 

Il  faut  avoir  un  tempérament  solide,  et  être 
doué  d'une  dose  prodigieuse  de  patience  pour 
consacrer  sa  plume  à  la  critique  théâtrale. 
Quoi  que  vous  fassiez,  quoi  que  vous  disiez  et 
écriviez,  vous  soulevez  toujours  des  haines 
et  ne  recevez  que  de  mauvais  compliments. 
Si  vous  louez  un  acteur  ou  une  actrice,  vous 
avez  contre  vous  tous  les  bons  camarades  d'i- 
ceux,  qui  en  trouveront  de  suite  le  motif  dans 
vos  rapports,  fussent-ils  complètement  nuls, 
avec  ceux  que  vous  aurez  loués  ;  si  vous  avez 
le  malheur  de  dire  qu'une  mauvaise  pièce  est 
mauvaise,  ou  mal  montée,  ou  pas  sue,  M.  le 


—  75  — 

directeur  vous  montrera  les  dents  ;  il  dira  que 
vous  voulez  le  ruiner,  que  vous  ne  connaissez 
rien  en  matière  de  théâtre,  et,  finalement,  — 
POUR  vous  PUNIR  —  vous  tefuscra  vos  ENTRÉES. 
Le  public,  pour  lequel  vous  écrivez,  et  au  res- 
pect duquel  vous  voulez  avoir  droit  par  votre 
indépendance  et  le  bien-fondé  de  votre  juge- 
ment, ne  compte  pas  pour  ces  messieurs.  Ce 
n'est  pas  une  plume  que  vous  devez  tenir  à  la 
main,  c'est  un  encensoir,  et  encore  faut-il  que 
vous  le  leur  cassiez  sur  le  nez. 


DANSE.  —  Mouvement  cadencé  des  jambes. 
La  danse  est  universelle  et  aussi  vieille  que  le 
monde;  on  danse  partout,  même  devant  le 
buffet. 

DANSEUSE.— Bipède  de  l'ordre  des  rongeurs. 
S'apprivoise  facilement  et  vient  manger  dans 
la  main  des  fils  de  famille ,  banquiers ,  agents 
de  change,  diplomates  et  rentiers  de  tout  âge; 
vit  très-bien  en  cage,  pourvu  que  la  cage  soit 
dorée  et  capitonnée ,  —  ne  pas  trop  laisser  la 


—   76  — 

porte  ouverte.  —  Le  gouvernement  entretient 
une  école  d'acclimatation  pour  la  propagation 
de  l'espèce.  —  V.  Ballet. 

DÉBIT.  —  Manière  de  dire,  de  réciter  un  rôle. 
C'est  surtout  par  le  débit  qu'un  bon  comédien 
se  révèle.  Les  nuances  en  sont  nombreuses; 
le  talent  consiste  à  les  savoir  appliquer.  On 
distingue  le  débit  naturel^  agréable^  aisé ^  so- 
lennel, éloquent,  savant,  affecté,  chaleureux, 
spirituel,  facile,  entraînant,  net,  léger,  chan- 
tant, lourd,  élégant,  lent,  gracieux,  pénible, 
comique,  fatigant,  drôle,  froid,  bouffon,  lacry- 
mal, confus,  monotone,  etc.,  etc.  Il  y  a  de 
quoi  choisir. 

DÉBUTANT.  —  Celui  qui  s'essaie  à  la  car- 
rière du  théâtre  et  s'offre  pour  la  première 
fois  au  contrôle  du  vrai  public. 

Il  est  rare  qu'un  débutant  ne  choisisse  pas 
d'abord  le  genre  qui  lui  convient  le  moins; 
ce  n'est  qu'après  quelques  essais  malheureux, 
assaisonnés  de  pommes  et  de  sifflets,  qu'il 
trouve  sa  véritable  voie.  Le  grand  Talma 
lui-même  commit  cette  erreur;  il  débuta  dans 
les  JEUNES  PREMIERS ,  et  voici  ce  que  disait  de 
lui  le  Journal  de  Paris  du  27  novembre  1787  : 
«  Le  jeune  homme  qui  a  débuté  hier  par 


—  77  — 

«  le  rôle  de  Seïde  annonce  les  plus  heureuses 
«  dispositions,  et  il  a,  d'ailleurs,  tous  les  avan- 
«  tages  naturels  qu'il  est  possible  de  désirer 
«  pour  l'emploi  des  jeunes  premiers.  » 

Ce  jeune  premier  est  devenu  le  plus  grand 
tragédien  de  son  siècle  ! 

Les  débutants  qui  ont  le  malheur  de  réussir 
du  premier  coup  font  rarement  d'excellents 
comédiens.  Ils  s'endorment  sur  le  premier 
succès  et  sortent  peu  de  la  médiocrité;  ils 
ne  sentent  pas  la  nécessité  du  travail  et  le 
repoussent;  ceux,  au  contraire,  qui,  comme 
Lekain  et  M"®  Mars,  ont  eu  des  débuts  très- 
difficiles,  très-contestés  ;  qui  ont  la  volonté, 
l'opiniâtreté,  sont  obligés  de  travailler,  de 
lutter,  et  se  font  une  brillante  place  aux  pre- 
miers rangs. 

DÉBUTS.  ■ —  Usage  qui  soumet  les  acteurs, 
quelle  que  soit  leur  ancienneté ,  à  faire  trois 
débuts  chaque  fois  qu'ils  abordent  une  nou- 
velle scène.  C'est  une  épreuve  qui  souvent  ne 
prouve  rien  ;  une  pierre  de  touche  parfois 
trompeuse  et  qui  réussit  à  celui  qui  a  le  plus 
D'APLOMB. 

Du  temps  que  les  débuts  étaient  obligatoires, 
l'acteur  avait  droit  à  ses  trois  débuts,  et  quel- 
ques-uns y  tenaient  malgré  le  mauvais  accueil 

7. 


-  78  — 

du  public  à  leur  premier.  On  cite  entre  autres 
une  demoiselle  Guérin  qui,  comptant  plus 
sur  le  talent  de  sa...  nature  que  sur  la  nature 
de  son  talent,  après  une  bordée  de  sifflets, 
rentra  dans  la  coulisse,  changea  de  costume 
et,  dit  le  Journal  de  Metz,  de  mai  1826,  «  osa 
«  rentrer  en  scène  avec  la  gorge  découverte 
«jusqu'au  milieu  des  seins,  qui  n'étaient 
«  garantis  d'une  évidence  complète ,  et  même 
«  d'une  chute,  que  par  une  gaze  légère  qui  ne 
«  cachait  que  bien  peu  de  chose;  les  bras,  les 
«  épaules  et  le  dos  étaient  aussi  exposés.  Les 
«  sifflets  les  plus  aigus  se  firent  entendre  de 
«  partout.  »  Et  M^^°  Guérin  en  fut  pour  ses 
frais...  d'exhibition. 

Je  me  permettrai  de  comparer  cette  demoi- 
selle à  M™"  Putiphar  et  les  spectateurs  à  de 
petits  Joseph.  La  vertu  triompha.  Merci,  mon 
Dieu  ! 

Gomme  il  y  a  de  vieux  matelots  qui  ne 
peuvent  reprendre  la  mer  sans  être  malades , 
il  y  a  de  vieux  comédiens  que  les  débuts  para- 
lysent, et  qui  ne  retrouvent  leurs  MOYENS 
qu'après  les  trois  épreuves  subies.  Ces  der- 
niers, bien  que  reçus  froidement,  gagnent 
chaque  jaur  dans  l'estime  du  public,  tandis 
que  ceux  qui  ont  été  reçus  avec  enthousiasme 
ont  souvent  de  la  peine  à  se  soutenir. 


—  79  — 

Les  débuts  n'existent  plus  en  droit.  A  Paris, 
ils  ont  peu  d'importance  et  n'impressionnent 
pas  la  foule  des  spectateurs.  En  province, 
c'est  différent  :  les  spectateurs  aiment  à  se 
constituer  en  jury  dramatique,  et  les  direc- 
teurs ont  dû  céder  devant  cette  habitude. 

Une  circulaire  du  ministre  d'État,  en  date 
du  6  septembre  1862,  contient  des  apprécia- 
tions très-sensées  sur  les  débuts^  et  essaie  de 
les  réglementer.  Nous  en  détachons  ce  qui 
suit  : 

«  La  troupe  nouvelle  débuterait  pendant  un 
mois  ;  à  la  fin  du  mois  seulement ,  le  public 
qui  aurait  pu ,  à  diverses  reprises ,  apprécier 
les  artistes  dans  plusieurs  rôles,  en  dehors 
des  émotions  d'une  soirée  spéciale,  serait 
appelé  à  statuer  au  scrutin  sur  l'admission  ou 
le  rejet  de  chacun  d'eux. 

a  Un  mois  serait  accordé  au  directeur  pour 
remplacer  les  artistes  qui  n'auraient  pas  été 
admis. 

«  Tout  artiste  admis  une  première  fois  ne 
débuterait  plus  les  années  suivantes,  tant 
qu'il  resterait  dans  le  même  théâtre  et  le 
même  emploi. 

«  Seraient  seuls  assujettis  aux  débuts  les 
artistes  remplissant  les  emplois' ci-après  : 

«  Dans  l'opéra  :  fort  ténor,    ténor  léger, 


—  80  — 

première  basse,  baryton,  trial,  forte  chan- 
teuse, chanteuse  légère,  dugazon; 

«  Dans  la  comédie,  le  drame  et  le  vaudeville  : 
premier  rôle,  jeune  premier  rôle,  premier 
rôle  marqué,  troisième  rôle,  premier  comique, 
financier,  premier  rôle  femme,  jeune  premier 
rôle,  jeune  première  ingénuité,  soubrette. 

DÉCLAMATION.  —  Manière  emphatique, 
ampoulée  de  dire  le  vers  tragique.  L'empha- 
tique était  poussé  à  un  tel  point  dans  notre 
ancien  théâtre  que  Mondory  y  gagna  une 
attaque  d'apoplexie  en  jouant  Hérode  de 
Mainanne.  Montfleury,  Brécourt,  la  Ghamp- 
MESLÉ  furent  également  victimes  de  cette 
manière  de  déclamer.  Molière  a  critiqué  et 
peint  ce  genre  faux  dans  V Impromptu  de  Ver- 
sailles. 

La  déclamation  était  chantée.  Ce  n'est  que 
depuis  la  création  du  Conservatoire,  en  1784, 
et  grâce  aux  efforts  de  Mole,  Dugazon  et 
Fleury  qu'elle  rentra  dans  les  limites  de  la 
raison. 

DÉCLARATION.  —  Chacun  peut  faire  cons- 
truire et  exploiter  un  théâtre,  à  la  charge  d'en 
faire  déclaration  aux  autorités.  (Loi  du  6  jan- 
vier 1864.  V.  à  Y  Appendice.) 


—  81  — 

DÉCOR.  —  Le  mot  décor  est  employé  comme 
terme  général  par  les  machinistes.  C'est  un 
mot  technique.  Pour  eux  le  décor  est  l'en- 
semble du  magasin  ou  d'une  pièce;  pour  le 
public,  la  décoration  (v.  ci-dessous)  est  la  partie 
visible  et  coopérative  de  l'action  du  moment. 

DÉCORATION.  —Notre  mot  n'a  aucun  rapport 
avec  cette  profusion  de  petits  rubans  rouges 
ou  multicolores  qui  ornent  les  boutonnières  et 
font  ressembler  la  France  à  un  champ  de  co- 
quelicots et  d'oeillets  panachés.  C'est  de  la 
décoration  théâtrale  qu'il  s'agit. 

On  nomme  décoration  toutes  les  parties 
peintes  qui  servent  à  l'ILLUSlON  de  la  scène. 
Les  Latins  avaient  deux  sortes  de  décoration  : 
l'une,  tournante  {versatilis),  avait  trois  faces 
en  forme  de  triangle  et  tournait  sur  un  pivot  ; 
l'autre,  coulante  {ductilis),  équivalant  à  la  cou- 
lisse actuelle. 

La  décoration  moderne  nous  vient  d'Italie. 
C'est  à  Baltazar  Peruzzi  qu'il  faut  faire  re- 
monter, vers  1516,  l'invention  de  la  grande 
architecture  peinte.  Son  œuvre  fut  continuée 
par  Del  Pozzo  et  ne  fut  guère  importée  en 
France  que  vers  1582,  en  même  temps  que  le 
ballet-opéra.  Jusqu'à  cette  époque  on  se  con- 
tenta d'un  écriteau  sur  lequel  on  écrivait  : 


—  82  — 

«  Ceci  est  un  bois  »,  «  Ceci  est  un  palais.  »  *Le 
spectateur  se  figurait  qu'il  voyait  un  bois  ou 
un  palais. 

La  décoration  fut  longtemps  stationnaire  et 
fit  peu  de  progrès.  La  tragédie  et  la  comé- 
die durent  se  contenter  d'une  place  publique, 
d'un  salon  et  de  la  galerie  d'un  palais  :  Cor- 
neille, Molière  et  Racine  n'en  eurent  pas 
d'autres. 

C'est  à  Servandoni,  celui-là  même  qui  cons- 
truisit le  portail  de  Saint-Sulpice,  qu'on  doit 
le  développement  de  l'art  décoratif  au  théâtre. 
Jusqu'à  lui  les  arbres,  les  monuments,  quelles 
que  fussent  leur  hauteur,  leur  importance, 
n'excédaient  jamais  la  grandeur  du  CHASSIS 
sur  lequel  on  les  peignait.  Ce  célèbre  artiste 
osa  franchir  cette  limite  et  s'élancer  dans  les 
frises  ;  il  donna  à  la  décoration  des  perspec- 
tives inusitées  et  un  luxe  inconnu  avant  lui. 
L'essor  était  donné  et  ne  se  ralentit  plus.  La 
décoration  joue  maintenant  un  rôle  immense 
et  produit  des  merveilles. 

Parmi  les  anciens  décorateurs  célèbres  on 
cite  :  Pietro  Algieri,  Bibiena  Galli,  Bo- 
quet,  Sparni,  Bondon,  Machy,  Tardif  et, 
en  venant  jusqu'à  nos  jours,  Desgoty,  Gué, 
Daguerre,  Bouton,  Gicéri,  Philastre,  Cam- 
BON,   Séchan,  Despléchin,  Feuchères,  Die- 


—  83    - 

TERLE,   Chaperon,  Rubé,    Ghéret,    Nolau, 
Lavastre,  Garpezat. 

Les  décorations  sont  composées  :  1°  de  CHAS- 
SIS ou  feuilles  de  décoration  qui  manœuvrent 
généralement  sur  les  côtés;  2°  de  TOILES  DE 
FONDS  qui  descendent  du  CINTRE  ;  3°  de  ciels, 
PLAFONDS,  BANDES  D'AIR  et  de  mer  ;  4°  de 
FERMES,  grands  décors  à  châssis  montant  du 
dessous  ;  5°  de  PRATICABLES  ou  décors  acces- 
sibles, tels  que  rochers,  montagnes,  degrés,  etc. 
— V.  Scène. 

DÉCRET  DE  MOSCOU. —  C'est  ainsi  qu'on 
nomme  vulgairement  le  décret  du  15  octobre 
1812,  envoyé  de  Moscou  par  Napoléon  I".  Ce 
décret,  que  nous  reproduisons  dans  son  entier 
à  V Appendice,  est  un  chef-d'œuvre  d'organisa- 
tion théâtrale  et  applicable  au  seul  Théâtre- 
Français.  Bien  que  modifié  par  la  force  des 
choses  en  1847  et  1850  (V.  à  V Appendice), 
il  reste  encore  la  règle  fondamentale  de  la 
Comédie-Française. 

DÉDIT.  —  Petite  clause  féline  mise  dans  un 
ENGAGEMENT  et  à  la  charge  de  celui  qui  veut 
le  rompre.  Le  bon  côté  du  dédit,  qui  maintient 
les  bons  acteurs  dans  leurs  engagements,  est 
malheureusement  contre-balancé  par  la  né- 


—  8i  — 

cessité  d'en  garder  d'autres  que  le  public 
voudrait  voir  loin.  Il  y  a  des  directeurs  qui 
engagent  des  demoiselles  sans  vocation  ni 
talent  —  mais  jolies  —  avec  l'espérance  qu'un 
amateur  viendra  les  en  débarrasser  en  payant 
le  dédit. 

DÉFAUTS.  —  L'exiguité  de  ce  vocabulaire  ne 
nous  permet  pas  de  traiter  à  fond  ce  mot  qui 
demanderait  un  volume.  Nous  signalerons  les 
principaux. 

Le  grand  et  général  défaut  des  acteurs  est 
de  ne  point  jouer  d'après  leur  organisation 
naturelle  et  de  prendre  des  EMPLOIS  en  désac- 
cord avec  leur  nature  physique;  défaut  capital 
qui  détruit  TlLLUSION. 

Ensuite ,  de  n'être  point  à  la  scène  ;  de 
causer  entre  eux  quand  ils  ne  sont  pas  du 
dialogue;  de  parler  au  public,  au  lieu  de  le 
faire  à  leur  interlocuteur  ;  de  négliger  les 
principes  de  la  respiration  et  de  la  ponctuation  ; 
de  parler  trop  vite;  de  faire  des  liaisons... 
dangereuses  ;  de  sacrifier  le  collègue  pour  faire 
de  l'EFFET  et  provoquer  des  applaudissements  ; 
de  s'habiller  sans  goût  ou  avec  négligence  ;  de 
porter  des  moustaches  et  des  favoris,  quand 
la  figure  du  comédien  doit  être  nue  pour  se 
prêter  plus  facilement  à  représenter  tous  les 


—  85  — 

personnages;  de...   mais  à  quoi  bon  pour- 
sui\Te  ?  laissons  la  fin  à  Florlajn  : 

Chacun  de  nous  connaît  bien  ses  défauts  ; 
En  convenir,  c'est  autre  chose  : 
On  aime  mieux  souffrir  de  véritables  maux 
Que  d'avouer  qu'ils  en  sont  cause... 

D  É J A  Z E  T .  —  y.  Emploi,  Travesti. 

DÉNOUEMENT.  —  C'est  le  démêloir  de  l'im- 
broglio dramatique,  et  la  partie  d'une  pièce 
la  plus  difficile  à  bien  traiter.  C'est  le  dénoue- 
ment qui  fait  le  plus  d'impression  sur  le  public  ; 
il  doit,  tout  en  étant  la  conséquence  logique 
de  l'intrigue,  satisfaire  le  spectateur  et  le  lais- 
ser sous  une  bonne  impression.  Il  doit  être  na- 
turel et  naître  du  SUJET.  La  comédie  et  le 
vaudeville  usent  et  abusent  du  mariaçre  comme 
dénouement  :  C'est  dénouer  une  chose  en  y 
formant  un  nœud  I  Le  drame  et  la  tragédie  ont 
le  meurtre,  le  suicide,  le  poison  et  les  grandes 
reconnaissances  :  C'est  ma  fille  !  C'est  mon 
père  a 

DÉSAGRÉMENT  (Avoir  du).  —  Provoquer 
des  murmures,  être  un  peu  sifflé,  c'est  avoir 
du  désagrément. 

DESSOUS.  —  Le  dessous  de  la  scène  se  com- 

8 


—  86  — 

pose  assez  communément  de  trois  étages  dont 
le  plus  près  du  plancher  de  la  scène  se  nomme 
le  premier  dessous ,  et  ensuite  second  et  troi- 
sième, e.n  descendant.  Toute  la  charpente  est 
disposée  de  façon  à  laisser  des  vides  du  haut 
en  bas  sous  les  TRAPPES  et  TRAPPILLONS.  Sur 
les  planches  du  premier  dessous  se  trouvent 
les  rails  des  chariots  gui  portent  les  MATS 
et  FAUX-CHASSIS  ;  dans  le  second  et  le  troisième 
sont  les  TAMBOURS  et  treuils  pour  la  ma- 
nœuvre des  FERMES,  RIDEAUX  DE  FOND  et 
autres  décorations.  —  V.  Scène. 

DÉTAILLER  LE  COUPLET.  —  Science 
presque  perdue  aujourd'hui  où  l'on  ne  chante 
plus  dans  les  pièces  du  nouveau  répertoire, 
mais  très  en  pratique  du  temps  de  Scribe, 
BrazieRj  Bayard,  Dumersan,  qui  bourraient 
leurs  comédies  et  vaudevilles  de  couplets 
charmants  et  spirituels  dont  le  trait  final  de- 
mandait à  être  lancé.  Il  n'en  est  plus  de  même 

•  à  présent.  Est-ce  le  goût  du  public  qui  a 
changé?  Est-ce  l'esprit  qui  fait  défaut  aux 
vaudevillistes  actuels?  That.îs  the  question. 

DICTION.  —  Art  de  fléchir  la  voix  selon  les 
exigences  du  sentiment  pour  en  faire  l'inter- 
prète exact  de  la  pensée. 


—  87  — 

Une  bonne  diction  est  une  qualité  précieuse 
qu'on  rencontre  rarement  ;  elle  comprend 
l'art  de  prononcer,  de  ponctuer,  de  phraser 
et  de  nuancer  le  discours.  Le  travail  et  la 
volonté  ne  suffisent  pas  toujours  pour  vaincre 
un  organe  rebelle  qu'on  parvient  à  assouplir 
dans  un  discours  calme  mais  qui  reparaît  dans 
la  chaleur  du  débit;  c'est  alors  que  le  gras- 
saiement,  le  bégayement ,  le  susseyement ,  le 
zézayement,  le  bredouillement  reprennent  leur 
empire  naturel,  momentanément,  il  est  vrai, 
mais  assez  pour  jeter  une  note  discordante. 

DIRECTEUR.  —  Autocrate,  pacha,  sultan, 
placé,  jadis,  en  vertu  d'un  privilège  et  à  ses 
risques  et  périls,  à  la  tête  d'une  exploitation 
théâtrale.  Depuis  la  liberté  des  théâtres  il  n'y 
a  plus  de  privilège  de  droite  mais  il  existe  en 
partie  de  fait^  surtout  en  province,  où  les 
salles  appartiennent  à  la  ville  et  à  des  parti- 
culiers. Le  privilège  ne  vient  plus  du  minisire, 
il  émane  de  la  mairie  ou  des  propriétaires  de 
l'immeuble. 

Nous  n'avons  pas  à  nous  occuper  ici  de 
Paris.  Chaque  théâtre  ayant  son  genre,  et  le 
public  pouvant  choisir,  vu  le  grand  nombre, 
celui  qui  lui  convient,  le  directeur  n'est  d'au- 
cune importance  pour  lui. 


—  88  — 

La  plupart  des  villes  de  province  n'ayant 
qu'une  salle,  deux  au  plus,  le  choix  disparaît 
et  le  public,  forcé  d'aller  à  ce  seul  théâtre  ou 
de  se  priver  d'un  plaisir,  se  préoccupe  du 
directeur  dont  il  doit  subir  le  goût,  bon  ou 
mauvais ,  le  savoir  ou  l'ignorance ,  la  capacité 
ou  l'incapacité. 

En  effet,  celui-ci  est  maître.  Il  a  bien  quel- 
ques obligations  pour  la  composition  de  sa 
troupe,  pour  son  RÉPERTOIRE  ;  mais  il  peut  faire 
une  troupe  de  carton^  quoique  complète  ;  quant 
à  son  répertoire,  il  n'est  tenu  qu'à  le  sou- 
mettre au  préfet  ou  au  maire,  et  ceux-ci  n'ont 
pas  qualité  pour  en  faire  le  choix.  Ils  ne  peu- 
vent qu'élaguer  le  fruit  défendu. 

Si  un  directeur  est  peu  lettré  et  a  peu  de 
goût  —  cela  n'est  pas  rare  —  vous  aurez  un 
mauvais  répertoire;  si  le  directeur  est  un  an- 
cien acteur,  — cela  est  commun  —  vous  aurez 
toutes  les  vieilles  rangaines  dans  lesquelles  il 
a  joué;  s'il  joue  encore  et  qu'il  fasse  partie 
de  sa  troupe,  c'est  bien  pis!  Il  montera  les 
pièces  pour  lui  et  s'entourera  de  médiocrités 
pour  mieux  ressortir;  si  c'est  sa  femme  qui 
joue ,  même  résultat.  Ne  croyez  pas  qu'il 
consultera  le  goût  local,  qu'il  y  conformera 
son  répertoire ,  non  ;  il  jouera  à  Rouen  ou  à 
Bordeaux  une  absurdité  qui  a  réussi  à  Ville- 


—  89  — 

dieu-les-Poëles,  sans  s'inquiéter  de  la  diffé- 
rence de  ces  villes. 

Les  mauvais  résultats  obtenus  par  les  mau- 
vais directeurs  ne  datent  pas  d'hier  et  ont 
donné  lieu  à  des  plaintes  assez  fortes  pour 
qu'on  s'en  préoccupât  en  haut  lieu.  —  Yoici 
à  ce  sujet  une  circulaire  que  le  comte  de  Yau- 
BLANC,  alors  ministre  de  l'intérieur,  adressait 
en  1820  aux  préfets,  et  qui  semble  ne  rien 
perdre  de  son  à-propos,  malgré  le  demi-siècle 
écoulé  depuis  sa  publication  : 

«  Les  théâtres,  considérés  sous  le  rapport 
«  de  l'art,  ne  peuvent. être  indifférents  à  l'au- 
«  torité.  Bien  dirigés,  ils  offrent  les  plus  nobles 
«  délassements  à  la  classe  instruite  de  la 
«  société;  surveillés  avec  soin,  ils.  peuvent 
«  répandre  de  saines  maximes  et  servir  des 
«  vues  utiles. 

«  Malheureusement  les  agents  de  ces  entre- 
ce  prises,  ne  répondent  que  bien  imparfaite- 
ce  ment  à  ce  qu'on  a  droit  d'attendre  d'eux, 
ce  et  ne  s'efforcent  guère  de  justifier  la  con- 
cc  fiance  qui  leur  est  accordée.  On  les  invite  à 
«  former  un  bon  répertoire  et  à  le  renouveler 
ce  de  manière  à  tenir  les  villes  des  départe- 
(e  ments  au  courant  des  nouveautés  ;  mais  ils 
ce  n'ont  guère  pour  pièces  nouvelles  que  les 
ce  informes  canevas  ou  les  esquisses  des  petits 

s. 


—  90  — 

«  théâtres  de  Paris.  Ils  prétendent  qu'ils  ne 
«  trouvent  pas  de  spectateurs  quand  ils  don- 
«  nent  des  représentations  d'ouvrages  de  la 
«  haute  comédie;  mais  ils  n'ajoutent  pas  que  ces 
«  ouvrages  sont  par  eux  si  mal  montés,  si  mal 
«  joués,  qu'il  est  impossible,  en  effet,  que  des 
«  hommes  de  goût  se  plaisent  à  les  voir  ainsi 
«  défigurés. 

«  On  aime  partout  en  France  les  comédies 
«  de  mœurs,  les  jolis  opéras,  la  bonne  mu- 
«  sique,  les  bons  vers  ;  mais  il  n'y  a  rien  de 
a  tout  cela  quand  il  n'y  a  pas  de  bons  acteurs. 

«...  Les  directeurs  capables  sont  en  bien 
«  petit  nombre.  )> 

Un  critique  qui  écrirait  aujourd'hui  les 
VÉRITÉS  que  M.  le  comte  de  Vaublanc  met- 
tait en  évidence  d'une  façon  si  nette  dans  sa 
circulaire  de  1820  serait  voué  aux  dieux  infer- 
naux. Cette  mercuriale  s'adressait  cependant 
à  des  directeurs  privilégiés,  choisis,  épluchés 
et  révocables  au  gré  du  ministre.  Croyez-vous 
que  la  liberté  des  théâtres  et  l'abolition  du 
privilège  les  aient  corrigés  ?  Il  n'en  est  rien. 

DISTRIBUTION.  —  La  distribution  est  la 
répartition  que  l'on  fait  de  chacun  des  rôles 
contenus  dans  une  œuvre  dramatique  aux 
acteurs  qui  doivent  y  jouer  un  personnage. 


—  91   — 

A  Paris,  la  distribution  est  presque  toujours 
faite  par  l'auteur,  en  tenant  compte,  bien 
entendu,  de  l' EMPLOI  de  chacun.  De  plus,  la 
pièce  étant  souvent  écrite  pour  un  théâtre 
déterminé,  l'auteur,  qui  en  connait  le  per- 
sonnel, y  subordonne  ses  personnages. 

En  province,  la  question  change  de  face: 
chaque  acteur  restant  strictement  dans  son 
emploi,  la  distribution  devient  plus  difficile  et 
donne  lieu  à  de  nombreux  conflits,  dont 
quelques-uns  sont  jugés  par  les  tribunaux. 

On  appelle  encore  distribution  la  nomen- 
clature des  rôles  et  le  nom  des  acteurs  d'une 
pièce  imprimés  sur  les  affiches  ou  dans  un 
PROGRAMME. 

DOUBLE,  DOUBLURE.  —  Dans  les  grands 
théâtres  chaque  chef  d'emploi  a  son  double 
qui  doit  connaître  le  répertoire  et  se  tenir  prêt 
à  jouer  au  pied  levé  en  cas  d'empêchement  de 
son  chef,  ceci  pour  sauver  la  recette  ou  ne  pas 
interrompre  le  succès  d'une  pièce.  Dans  les 
théâtres  inférieurs,  doublure  est  synonyme  de 
mauvais  acteur.  Parfois  cependant  la  dou- 
blure vaut  mieux  que  le  drap. 

DRAME.  —  Genre  de  pièces  qui  tient  le  milieu 
entre  la  tragédie  et  la  comédie.  Le  véritable 


—  92  — 

drame  moderne  commence  à  Diderot,  dans  le 
Père  de  famille^  et  vient  aboutir  à  Dumas  fils 
et  Sardou,  de  nos  jours. 

Le  drame  devrait  toujours  être  le  dévelop- 
pement d'une  action  intime  et  poignante,  sans 
les  emphases  de  la  tragédie  ni  la  gaîté  de  la 
comédie  ;  mais  nos  auteurs  modernes  ont  tel- 
lement enjambé  sur  les  limites  de  chaque 
genre,  qu'ils  ne  savent  plus  dans  lequel  clas- 
ser leurs  productions,  et  que  nous  voyons 
l'affiche  porter  :  Pièce  en  4  actes.  Cette  pièce 
est-elle  une  tragédie?  un  drame?  un  mélo- 
drame? une  comédie?  un  vaudeville?  L'auteur 
n'en  sait  rien  lui-même,  car  il  y  a  un  peu  de 
tout.  C'est  une  o//a-^^oc?rz6/a  dramatique  ;  enfin 
c'est  une  pièce  ! 

DROIT  DES  PAUVRES.  —  Ce  droit  remonte 
aux  origines  de  notre  théâtre.  Un  arrêt  du 
10  décembre  1541  ordonne  aux  entrepreneurs 
du  «  jeu  du  Vieux  Testament  de  donner  mille 
«  livres  aux  pauvres^  après  avoir  vu  Vétat  de 
«  leurs  frais  et  gain  ».  —  Un  autre  arrêt  de 
François  P""  porte  que  «  les  théâtres  bailleront 
«  aux  pauvres  mille  livres  tournois,  sauf  à 
((  ordonner  plus  grande  somme  ». 

Cet  impôt  prélevé  sur  le  plaisir  est,  malgré 
la  guerre  à  outrance  que  lui  font  MM.   les 


—  93  — 

directeurs,  le  plus  juste  et  le  plus  humain 
qu'on  puisse  établir.  Né,  en  principe,  des  deux 
arrêts  ci-dessus  indiqués,  il  fut  régularisé  par 
Louis  XIV  dans  l'ordonnance  que  voici  : 

Ordonnance  du  roi,  en  date  du  25  février  1699,  pour  la 
levée,  en  faveur  de  l'Hôpifal-Général,  du  sixième  en  sus 
de  ce  qui  se  reçoit  aux  entrées  des  opéras  et  comédies. 

«  Sa  Majesté  voulant,  autant  qu'il  est  possible,  contri- 
«  buer  au  soulagement  des  pauvres  dont  l'Hôpital-Géné- 
«  rai  est  chargé,  et  ayant  pour  cet  effet  employé  tous  les 
«  moyens  que  la  charité  lui  a  suggérés.  Elle  a  cru  devoir 
«  encore  leur  donner  quelque  part  aux  profits  considé- 
«  râbles  qui  reviennent  des  opéras  de  musique  et  des 
'<  comédies  qui  se  jouent  à  Paris  par  sa  permission  ;  c'est 
«  pourquoi  Sa  Majesté  a  ordonné  et  ordonne  qu'à  l'ave- 
«  nir,  à  commencer  du  l^r  mars  prochain,  il  sera  levé  et 
«  reçu  au  profit  dudit  Hôpital-Général  un  sixième  en 
«  sus  des  sommes  qu'on  reçoit  à  présent,  et  que  l'on 
«  recevra  à  l'avenir  pour  l'entrée  aux -dits  Opéras  et 
«  Comédies  ;  lequel  sixième  sera  remis  au  receveur 
«  dudit  Hôpital  pour  servir  à  la  bienveillance  des  pau- 

«  vres, 

«  Louis  XIV.  » 

Ce  document  ne  laisse  aucun  doute  sur  l'o- 
rigine et  le  but  de  ce  droit  tant  attaqué  par 
les  directeurs,  et  constate  d'une  manière  for- 
melle que  c'est  le  public  qui  le  paie  et  non 
eux,  puisqu'il  est  prélevé  en  sus  du  prix  d'en- 
trée. 

Ce  droit  fut  aboli  le  6  août  1789,  et  devait 
être  remplacé  par  des  représentations  au  profit 
des  hospices,  représentations  qui  n'eurent  ja- 


—  94  — 

mais  lieu,  ce  qui  motiva  l'arrêté  suivant  en 
date  du  11  nivôse  an  iv. 

«  Art.  ler.  Tous  les  entrepreneurs  ou  sociétaires  de 
(n  tous  les  théâtres  de  Paris  et  des  départements  sont 
«  invités  à  donner  tous  les  mois,  à  dater  de  cette 
«  époque,  une  représentation  au  profit  des  pauvres, 
«  dont  le  produit,  déduction  faite  des  frais  journaliers 
«  et  de  la  part  de  l'auteur,  sera  versé  dans  les  caisses 
«  désignées. 

«  Art.  2.  Ces  jours-là  les  comédiens  concourront  par 
«  tous  les  moyens  qui  sont  en  leur  pouvoir  à  rendre  la 
«  représentation  plus  lucrative. 

«  Art.  3.  Les  entrepreneurs  ou  sociétaires  seront  auto- 
ce  risés  à  tiercer  le  prix  des  places  et  à  recevoir  les 
«  rétributions  volontaires  de  tous  ceux  qui  désireraient 
«  concourir  à  cette  bonne  œuvre. 

«  Art.  4 

«  Art.  5.  Deux  théâtres  ne  pourront  donner  le  même 
«jour,  dans  la  même  commune,  de  représentations 
«  pour  les  pauvres.  » 

Cet  arrêté  n'eut  aucun  effet  fructueux  ;  les 
représentations  données  couvrirent  rarement 
les  frais,  —  du  moins  les  directeurs  le  dirent 
—  et  une  loi  du  7  frimaire  an  v  rétablit  le 
droit  de  un  décime  par  franc,  en  sus  du  prix 
de  chaque  billet. 

La  loi  que  nous  rapportons  ci-dessous  con- 
firme et  étend  celle  du  7  frimaire. 

Loi  du  8  thermidor,  an  V  ^26  juillet  1797)  : 

<  Le  Conseil  de  Cinq-Cents,  considérant  combien  les 

«  besoins  des  hospices  sont  pressants  et  l'utilité  qu'on 
«  peut  retirer   d'une  augmentation  de  la  rétribution 


—  95  — 

«  imposée  sur  les  produits  des  bals,  concerts,  feux 
«  d'artifices,  courses  et  exercices  de  chevaux,  et  autres 
«  fêtes  où  l'on  est  admis  en  payant, 

«  Déclare  qu'il  y  a  urgence  et  prend  la  résolution 
«  suivante  : 

«  Art  1er.  Le  droit  d'un  décime  par  franc ,  établi  par 
«  la  loi  du  7  frimaire  an  v  prorogée  par  celle  du  7 
«  floréal  dernier,  continuera  à  être  perçu  jusqu'au  7 
«  frimaire  de  l'an  vr,  en  sus  du  prix  de  chaque  billet 
«  d'entrée  et  d'abonnement  dans  tous  les  spectacles  où 
<;  se  donneront  des  pièces  de  théâtre.  » 

L'art.  2  concernait  les  bals,  concerts,  etc. 

Cette  loi  fut  prorogée  chaque  année  jus- 
qu'au 9  décembre  1809,  époque  à  laquelle 
un  décret  déclare  que  ces  droits  seront  indé- 
fiminent  perçus.  Enfin  le  budget  de  1817  con- 
tient un  article  ainsi  conçu  : 

<•  Continuera  d'être  faite,  conformément  aux  lois 
existantes,  la  perception  du  dixième  des  billets  d'en- 
trée dans  les  spectacles ,  d'un  quart  de  la  recette  brute 
dans  les  lieux  de  réunion  et  de  fêtes  où  l'on  est  admis 
en  payant,  et  d'un  décime  par  franc  sur  ceux  de  ces 
droits  qui  n'en  sont  pas  alfranchis.  » 

Depuis  cette  époque,  ces  droits  font  partie 
du  budget,  et  sont  entièrement  perçus  par  les 
hospices,  tant  à  Paris  qu'en  province. 

Devant  ces  pressantes  sollicitations  en  fa- 
veur de  misères  à  soulager,  nous  ne  savons 
quelles  bonnes  raisons  les  directeurs  donnent 
pour  demander  la  suppression  de  cet  impôt; 
toujours  est-il  que  la  guerre  contre  lui  re- 


—  96  — 

commence.  Un  directeur  de  théâtre  vient  de 
publier  un  long  mémoire,  chargé  à  mitraille, 
contre  ce  droit.  Il  croit  avoir  trouvé  un  argu- 
ment victorieux  en  établissant  le  bilan  d'un 
directeur  failli  et  en  faisant  ressortir  que  le 
total  de  la  faillite  est  inférieur  aux  sommes 
payées  par  lui  pour  le  droit  des  pauvres.  Mais 
à  ce  compte-là  le  directeur  était  en  faillite  dès 
le  premier  mois  de  son  exploitation  !  Et  tous 
les  commerçants  devraient  demander  la  sup- 
pression des  impôts,  car  il  serait  facile  d'éta- 
blir dans  la  plupart  des  faillites  que  si  l'on 
n'avait  payé  ni  patente,  ni  foncier,  ni  portes 
et  fenêtres,  ni  loyer,  on  serait  au-dessus  de 
ses  affaires. 

Ce  n'est  pas  le  droit  des  pauvres  qui  ruine 
les  directeurs  ;  ce  sont  les  folles  dépenses  faites 
pour  monter  des  pièces  ridicules  qui,  en  admet- 
tant le  succès,  ne  couvrent  jamais  les  frais 
qu'elles  occasionnent.  —  On  a  établi  par  des 
chiffres  que  le  Roi  Carotte  avait  coûté  345,000 
francs  à  monter,  plus  les -frais  généraux.  — 
Ensuite  le  haut  prix  auquel  on  s'arrache 
quelques  acteurs  ou  actrices  en  vogue.  Nous 
laissons  de  côté  la  vie  à  grandes  guides  de 
MM.  les  directeurs. 

Voici,  selon  nous,  qui  simplifie  la  question  : 
Quand  un  directeur  entreprend  Texploitatiou 


—  97  — 

d'un  théâtre,  il  connaît  la  loi,  il  connaît  l'im- 
pôt ,  il  connaît  les  autres  charges  et  obli- 
gations de  son  entreprise  ;  assurément.  De 
quel  droit  alors  veut-il  s'y  soustraire  après 
coup  ?  Quelle  est  sa  qualité  pour  demander  la 
suppression  de  Vimpôt  des  pauvres  payé  par 
LE  PUBLIC,  quand  celui-ci  ne  réclame  pas,  et 
qu'il  n'est  lui,  directeur,  que  le  premier  per- 
cepteur de  ce  droit  ? 

Voici  les  tarifs  anciens  de  plusieurs  théâtres. 
Parterre  de  l'Opéra  et  des  Italiens,  3  fr.  60  ; 
de  l'Opéra 'Comique,  du  Théâtre -Français, 
2  fr.  20;  orchestre  de  la  Gaîté,  1  fr.  80  ;  par- 
terre du  Vaudeville,  des  Variétés,  de  la  Porte- 
Saint-Martin,  1  fr.  65.  Ne  trouve-t-on  pas  le 
décime  par  franc  ajouté  à  3  fr.,  à  2  fr.,  à 
1  fr.  50  ?  Depuis ,  les  théâtres  ont  arrondi 
les  chiffres,  mais  en  les  augmentant  considé- 
rablement. Gela  ne  détruit  pas  le  principe. 

DROITS  D'AUTEUR.  —  Avant  Beaumar- 
chais les  di'oits  d'auteur  étaient  en  partie  un 
mythe,  ainsi  que  la  propriété  de  leurs  œuvres. 
Les  deux  choses  étaient  absorbées  par  les 
comédiens,  qui  achetaient  à  forfait  une  pièce 
—  toujours  à  bas  prix  —  ou  stipulaient  une 
part  d'auteur  que  celui-ci  ne  touchait  jamais, 
heureux  encore  quand  il  échappait  au  sort  de 

9 


—  98  — 

La  Saussaye  auquel  MM.  de  la  comédie  rede- 
mandèrent 101  livres  8  sous  et  8  deniers, 
après  avoir  encaissé  10  à  12,000  francs  avec 
sa  pièce.  Quand  un  génie  comme  Corneille 
n'a  récolté  que  la  misère  pour  droits  d'auteur, 
jugez  des  autres. 

Beaumarchais  leva  l'étendard  de  la  révolte, 
et,  après  plusieurs  années  de  lutte,  finit  par 
obtenir  un  arrêt  du  conseil,  daté  du  9  décembre 
1780,  qui  fixait  les  droits  des  auteurs  sur  le 
produit  des  pièces.  Cet  arrêt  fut  à  peu  près 
illusoire  par  le  mauvais  vouloir  ou  la  mau- 
vaise foi  des  comédiens.  Beaumarchais  n'aban- 
donna pas  le  terrain  et  la  loi  du  19  janvier 
1 79 1 ,  en  proclamant  la  liberté  des  théâtres,  fixa 
pour  la  première  fois  les  bases  de  la  propriété 
des  œuvres 'dramatiques  et  les  droits  d'auteur. 

Aujourd'hui,  excepté  pour  les  opéras  et  les 
ballets  qui  sont  réglés  par  la  loi  du  24  décembre 
1860,  rapportée  à  V Appendice,  les  droits  d'au- 
teur résultent  des  engagements  faits  librement 
avec  le  directeur  qui  reçoit  la  pièce.  Ils  sont 
perçus  par  une  société  connue  sous  le  nom 
de  société  des  auteurs  dramatiques,  dont  les 
agents,  répandus  dans  toutes  les  villes  où  se 
trouve  un  théâtre,  facilitent  cette  perception 
pour  la  province.  —  V.  à  V Appendice  les  lois 
sur  la  propriété  littéraire. 


—  99   — 

DUÈGNE.  —  EMPLOI.  Vieille  matrone,  sur- 
veillante, mère  comique.  Dernière  étape  des 
actrices. 

DUGAZON.—  EMPLOI.  —  La  célèbre  Dugazon, 
jeune  chanteuse  de  V Opéra-Comique^  morte 
en  1821 ,  a  donné  son  nom  à  l'emploi  des  chan- 
teuses légères  et  soubrettes  d'opéra-comique. 
Les  duègnes  lyriques  sont  appelées  mères 
Dugazon. 


EAU.  —  Les  effets  à'eau  sont  assez  difficiles  à 
rendre  d'une  manière  satisfaisante.  L'eau  dor- 
mante est  rendue  par  la  DÉCORATION  :  c'est 
une  question  de  peinture  plus  ou  moins  réus- 
sie; la  mer  par  les  bandes  de  mer  (V.  Bandes 
d'air)  placées  à  ras  de  scène  sur  châssis  chan- 
tournés, tirées  et  poussées  en  sens  inverse 
par  des  hommes  placés  dans  les  coulisses,  ou 
encore  par  une  seule  toile  peinte  étendue  sur 
la  scène  et  sous  laquelle  on  place  des  enfants 
qui,  en  se  baissant  et  se  levant,  ou  avec  des 
baleines,  imitent  le  flot. 


—  100  — 

Veau  courante,  —  ruisseau,  torrent  et  cas- 
cade —  est  figurée  par  des  toiles  sans  fin  con- 
duites sur  des  rouleaux.  On  fait  encore,  pour 
ce  cas,  usage  d'un  cylindre  double  et  découpé 
dans  lequel  on  fait  passer  une  lumière  élec- 
trique. Les  découpures,  en  tournant,  laissent 
de  temps  en  temps  passer  la  lumière,  et  pro- 
duisent les  effets  de  soleil  sur  Veau  courant 
sur  des  cailloux. 

Dans  les  cascades  et  fontaines  décoratives 
on  emploie  Veau  naturelle,  qu'on  fait  couler 
sur  une  glace  inclinée,  ou  entre  deux  glaces. 
Cet  effet  est  surtout  joli  en  ce  qu'il  laisse  voir 
le  fond  du  décor  derrière  la  nappe  à' eau. 

ÉCLAIRS.  —  Plusieurs  moyens  sont  employés 
pour  figurer  les  éclairs.  Le  plus  ancien  et  le 
plus  commun  est  un  long  chalumeau  par  lequel 
on  souffle  du  lycopode  en  poudre  sur  une 
lampe  à  esprit  de  vin  attachée  au  bout  du 
chalumeau.  Le  lycopode  s'enflamme  violem- 
ment en  passant  sur  la  flamme  et  s'éteint 
subitement.  On  produit  encore  Véclair  avec 
des  becs  de  gaz  ouverts  et  fermés  rapide- 
ment. 

Les  plus  beaux  effets  sont  ceux  produits  par 
la  lumière  électrique.  Pour  cela,  on  a  laissé 
dans  le  décor  des  transparents  qui  s'éclairent 


—  101   — 

tout  à  coup  par  lô  rayon  lumineux  et  s'étei- 
gnent de  même. 

ÉCLAIRAGE.  —  C'est  tout  une  affaire  que 
V éclairage  d'un  théâtre.  Jusqu'en  1720,  les 
chandelles  eurent  l'honneur  de  servir  de  lumi- 
naires et  furent  mouchées  par  des  hommes 
habiles  dont  les  plus  experts  entraient  àl'Opéra. 
De  là  le  proverbe  :  //  entrera  moucheur  à 
l'Opéra.  Ce  devait  être,  en  effet,  un  curieux 
spectacle  que  de  voir  moucher  la  RAMPE  pen- 
dant le  cours  de  la  représentation,  car  les 
chandelles  n'attendaient  pas  l'entr'actes  pour 
faire  leur  nez...  ou  leur  mèche;  aussi  les  plus 
habiles  moUcheurs  obtenaient-ils  des  applau- 
dissements et  se  croyaient  de  grands  artistes, 
tandis  qu'on  sifflait  celui  qui  éteignait  des 
chandelles. 

Mais  —  sic  transit  gloria  mundi  —  Arcant 
inventa  la  lampe  qui  prit  le  nom  de  son  fer- 
blantier QuiNQUET,  et  la  chandelle  fut  chassée 
des  temples  de  Melpomène  ,  de  Thalie  et  de 
Terpsichore. 

Tout  passe.  1822  faisait  une  bien  autre  révo- 
lution :  il  amenait  le  gaz  qui  chassait  l'huile, 
comme  celle-ci  avait  chassé  la  chandelle  :  avec 
cette  différence,  pourtant,  que  l'huile  conserva 

9. 


—  102  — 

le  service  de  jour  et  celui  des  dessous  :  le  tout 
réduit  à  la  simple  et  errante  lanterne. 

A  part  quelques  plafonds  lumineux,  —  en 
existe-t-il  encore?  —  éclairage  qui  manque  de 
gaîté,  les  salles  sont  éclairées  par  un  lustre 
central,  quelques  girandoles  aux  galeries,  et 
des  becs  englobés  dans  les  couloirs.  La  scène 
l'est  de  face  par  la  RAMPE ,  du  haut  par  les 
HERSES,  de  côté  par  les  PORTANTS,  et  enfin,  à 
raz  de  terre ,  par  les  TRAÎNÉES.  Le  gazier  chef 
a  son  poste  dans  le  couloir  de  la  rampe, 
où  une  logette  lui  est  ménagée.  Tous  les  robi- 
nets de  service  sont  là  sous  sa  main  pour 
faire  à  volonté  le  jour,  le  demi-jour  et  la 
nuit. 

La  lumière  électrique  est  aussi  employée, 
ainsi  que  celle  du  gaz  oxhydrique^  pour  des 
effets  de  lumière  partielle  dans  les  grands 
tableaux  et  les  apothéoses.  On  en  obtient  aussi 
de  fort  beaux  effets  de  soleil  avec  un  appareil 
disposé  pour  laisser  échapper  les  rayons. 

ÉCOLE  DE  CHANT  ET  DE  DÉCLAMA- 
TION. —  C'est  le  titre  sous  lequel  fut  insti- 
tué le  Conservatoire,  le  1"  avril  1784,  sous  la 
direction  de  Gossec.  Le  programme  d'alors 
dit  que  :  «  l'ordre  le  plus  sévère  règne  à  cette 
«  école,   tant  du  côté  du   devoir  que  de  celui 


—  103   — 

((  de  la  décence,  et  il  n'est  aucune  grâce  que 
«  puisse  espérer  un  sujet,  pour  peu  qu'il  s'é- 
((  carte  de  l'un  de  ces  points.  » 

Nous  serions  heureux  d'apprendre  que  cette 
tradition  morale  s'est  continuée  jusqu'à  nos 
jours. 

La  rareté  des  sujets  pour  l'Opéra,  et  le  désir 
d'en  avoir,  firent  qu'on  proposa  une  rente 
viagère  de  500  livres  à  celui  qui  indiquerait 
un  sujet  remplissant  les  conditions  suivantes 
indépendantes  de  la  voix  :  «  qu'il  n'aurait  pas 
«  plus  de  vingt-deux  à  vingt-trois  ans,  ni  moins 
«  de  dix-huit  à  dix-neuf;  qu'il  aurait  au  ftioins 
((  cinq  pieds  de  haut,  et  pas  plus  de  cinq  pieds 
«  quatre  à  cinq  pouces  ;  qu'il  aurait  une  figure 
((  agréahlo  ou  nohle;  sans  défaut  dans  les 
«  yeux,  dans  les  jambes,  et  généralement  qu'il 
«  n'aurait  aucune  difformité  naturelle.  »  Gela 
se  comprend  :  la  beauté  devrait  être  obligatoire 
au  théâtre. 

EFFET. —  Chaque  pièce,  un  peu  bien  condi- 
tionnée, doit  contenir  certaines  positions,  cer- 
tains mots  qui  doivent  frapper  le  public ,  l'im- 
pressionner et  provoquer  spontanément  le 
rire,  les  larmes  ou  les  applaudissements.  C'est 
ce  qu'on  nomme  un  effet. 

Un  bon  comédien  doit  savoir  préparer,  ame- 


—  104  — 

ner  ses  effets  ;  il  doit  y  disposer  le  public  et  le 
conduire  au  point  voulu  sans  jamais  dépasser 
le  but. 

Beaucoup  d'acteurs  neutralisent  les  effets 
de  leurs  camarades  en  ne  donnant  pas  la 
RÉPLIQUE  en  temps,  ou  celle  voulue;  en  s'abste- 
nant  d'un  geste  important,  en  se  hâtant  de 
prendre  la  parole,  etc. 

Ueffet  doit  être  amené  naturellement  et  ne 
doit  pas  être  trop  prolongé.  C'est  un  éclair  dra- 
matique. 
Plus  on  vise  à  Vefl'et,  moins  on  atteint  son  but. 

ÉGAYER.  —  Terme  de  coulisses  qui  signifie 
être  sifflé.  Ainsi,  on  égayé  une  pièce  ou  un 
acteur  en  les  sifflant...  légèrement. 

EMPLOIS.  —  Classification  des  différents  rôles 
en  usage  dans  les  œuvres  lyriques  et  drama- 
tiques et  aidant  à  leur  DISTRIBUTION. 

Dans  le  genre  lyrique  on  compte,  pour  les 
rôles  d'hommes  :  fort  ténor ^  ténor  léger ^  bm^y- 
ton;  première,  deuxième  et  troisième  basse, 
laruette  et  t7naL  En  rôles  de  femmes  :  forte 
chanteuse^  soprano  et  contralto,  chanteuse  lé- 
gère^ Dugazon  et  mère  Dugazon. 

Dans  le  genre  tragique  ou  de  comédie,  côté 
des   hommes   :   premiers  rôles,  pères  nobles. 


—  105  — 

jeunes  premiers,  premiers,  deuxième  et  troi- 
sième amoureux,  troisièmes  rôles,  grimes, 
manteaux,  financiers,  comiques  nobles,  deu- 
xième et  troisième  comiques,  utilités. 

Du  côté  des  dames  :  premiers  et  grands 
premiers  rôles,  reines,  jeunes  premières , 
grandes  coquettes,  premières,  deuxième  et  troi- 
sièmes amoureuses ,  ingénuités ,  soubrettes , 
duègnes,  utilités,  plus,  les  travestis  ou  Déjazet. 
Il  y  a  encore  quelques  dénominations  usitées, 
mais  qui  ne  sont  que  des  nuances,  et  qui 
indiquent  plutôt  une  spécialité  qu'une  géné- 
ralité, comme  des  Bouffé,  des  Arnal. 

Cette  classification,  qui  a  le  mérite  d'éviter 
la  confusion  et  de  maintenir  l'ordre,  en  assi- 
gnant à  chacun  son  emploi,  a  l'inconvénient 
de  créer  des  chefs  qui,  ne  voulant  pas  tenir 
compte  des  années,  se  croient  toujours  suffi- 
sants pour  le  remplir.  En  province,  où  les 
troupes  se  forment  et  se  renouvellent  chaque 
année,  cet  inconvénient  disparaît  en  partie. 

EMPOIGNER.— Mot  à  double  portée.  Quand 
un  acteur  a  préparé  un  EFFET  et  qu'il  réussit 
à  le  produire,  il  dit  qu'il  a  empoigné  le  public  ; 
quand,  au  contraire,  il  le  rate  et  provoque  des 
murmures  et  des  marques  manifestes  de  mé- 


—  106  — 

contentement,  c'est  lui  qui  est  empoigné  par 
le  public. 

ENGAGEMENT.—  Contrat  synallagmatique 
passé  entre  l'acteur  et  le  directeur.  Ordinaire- 
ment les  contrats  les  plus  courts  sont  les 
meilleurs.  Ce  n'est  pas  le  cas  pour  les  enga- 
gements de  théâtre,  qui  sont,  comme  ceux 
d'assurances,  bourrés  d'une  foule  d'articles 
souvent  contradictoires,  ce  qui  ne  les  rend 
pas  plus  clairs  et  prête,  en  cas  de  procès,  des 
armes  aux  deux  parties. 

Les  mineurs  ne  peuvent  s'engager  qu'avec 
le  consentement  de  leurs  parents  ou  tuteurs  ; 
la  femme  mariée  avec  celui  de  son  mari,  ou 
un  jugement  qui  l'y  autorise.  Un  procès  tout 
récent  établit  que  la  femme,  même  séparée  de 
corps  et  de  biens,  ne  peut  s'engager  sans  la 
volonté  de  son  mari. 

Il  y  a,  dans  les  petits  théâtres,  des  engage- 
ments... postiches,  à  l'usage  des  petites  dames 
qui  ont  besoin  d'un  semblant  de  profession  et 
qui,  ne  voulant  pas  prendre  celle  de  blanchis- 
seuses, corsetières  ou  piqueuses  à  la  méca- 
nique, se  font  artistes  dramatiques^  sans 
appointements.  Elles  trouvent  toujours  quel- 
qu'un pour  payer  les  AMENDES,  et  parfois  les 


—  107  — 

DÉDITS  énormes,  que  les  directeurs  qui  vivent 
de  ce  métier  leur  font  stipuler.  Pouah  ! 

ENLEVER.  —  Terme  de  claque  qui  signifie 
faire  un  succès  d'enthousiasme  à  un  acteur 
ou  à  une  pièce.  C'est  surtout  dans  un  début 
ou  dans  une  première  qu'on  enlève.  Ce  succès 
est  souvent  éphémère  et  ne  dure  qu'un  soir. 

ENSEMBLE.  —  Ce  qui  manque  souvent  pour 
la  bonne  exécution  des  ouvrages.  Gela  tient 
à  ce  que  chaque  acteur  voulant  se  faire  re- 
marquer particulièrement  reste  dans  toute 
la  rigueur  de  son  rôle,  le  détache,  en  quelque 
sorte,  au  lieu  de  le  souder,  de  le  fondre  avec 
les  autres  rôles.  Le  manque  d'ensemble  se  fait 
surtout  remarquer  dans  les  premières  repré- 
sentations; puis  tout  se  fond,  s'harmonise,  et 
Y  ensemble  vient  donner  à  la  pièce  un  attrait 
qu'on  ne  lui  soupçonnait  pas. 

Le  défaut  à' ensemble  provient  aussi  de  la  di- 
versité des  qualités  physiques  et  artistiques  des 
acteurs.  C'est  alors  au  directeur  à  composer 
sa  troupe  de  façon  à  éviter  les  disparates  trop 
choquantes. 

ENTR'ACTES.  —  Nous  avons  dit  au  mot 
«  AMUSER  l/ENTR'ACTES  »,    notre   opinion    sur 


—  108  — 

la  manière  d'orthographier  ce  mot,  nous  n'y 
reviendrons  pas. 

Ce  temps  de  repos  entre  deux  actes  est  l'é- 
quivalent des  «  dix  minutes  d'arrêt  »  des 
chemins  de  fer.  C'est  le  moment  de  reprendre 
haleine,  de  sécher  ses  yeux,  de  se  remettre 
la  rate.  C'est  le  relai  du  public  et  des  acteurs  ; 
c'est  le  moment  où  les  contrôleurs  se  réveillent 
pour  distribuer  les  contremarques;  où  les 
négociants  du  dehors  crient  :  «  Qui  vend  son 
billet?  »  où  les  cafés  voisins  du  théâtre  se 
remplissent,  et  où  les  chopes  se  vident;  où... 
n'allons  pas  plus  loin. 

Ne  croyez  pas  qu'on  se  repose  de  l'autre 
côté  du  rideau.  Ceux  ou  celles  qui  n'ont  rien 
à  faire  à  leur  loge  restent  sur  la  scène.  C'est 
alors  que  r OEIL  DU  RlDEAUdevient  un  véritable 
observatoire.  Le  docteur  fait  sa  ronde  et 
demande  à  l'ingénue  des  nouvelles  de  son 
petit  dernier  ;  le  machiniste  et  ses  aides 
changent  les  décors;  les  pompiers  sortent  des 
coulisses  et  se  promènent,  prêts  à  éteindre  les 
feux. . .  illicites  qui  pourraient  se  produire.  Mais 
la  cloche  teinte  et  le  régisseur  crie  :  «  Place 
au  théâtre  l  »  alors  tout  s'évanouit. 

ENTRAILLES.  —  L'acteur  sans  ent?mlles  est 
un  tison  sans  chaleur.  Il  ne  sent  pas  ce  qu'il 


—  109  — 

dit,  récite  sans  goût,  sans  intelligence,  discute 
sans  vivacité,  lance  l'invective  et  la  malédic- 
tion comme  s'il  disait  :  bonjour  !  sa  colère  n'ef- 
fraierait pas  un  enfant;  mais  celui  qui  a  des 
entrailles  sent  et  fait  sentir;  il  communique 
son  fluide,  remue  et  passionne  la  salle  si  bien 
que  le  spectateur  oublie  la  fiction  pour  croire 
à  la  réalité. 

ENTRÉE.  —  Une  des  grandes  difficultés  de 
Fart  du  comédien.  Dans  toutes  les  pièces,  les 
entrées  sont  ménagées,  indiquées,  attendues, 
et  doivent  produire  un  EFFET  que  l'acteur  ne 
doit  pas  laisser  échapper.  Chaque  personnage 
qui  entre  en  scène,  doit  augmenter  l'intérêt  de 
l'action  et  piquer  à  nouveau  la  curiosité  du 
spectateur. 

MM.  de  la  claque  soignent  les  entrées  des 
principaux  acteurs. 

—  Entrée  se  dit  encore  d'un  droit,  acquis  ou 
concédé,  qu'ont  plusieurs  personnes  d'entrer 
dans  un  théâtre.  Les  journalistes,  les  auteurs, 
les  représentants  de  l'autorité,  les  proprié- 
taires ou  actionnaires  des  salles,  et  quelques 
privilégiés,  ont  leurs  entrées;  elles  sont  per- 
sonnelles et  ne  peuvent  être  transmises  qu'avec 
l'autorisation  de  la  direction. —  (V.,  à  YAppen- 

10 


—  110  — 

dice,  l'article  2  de  la   loi  de  finance  du  21 
mars  1872.) 

ENVOYER.  —  Ce  terme  appartient  au  souf- 
fleur dont  l'emploi  est  à" envoyer  le  mot. 

EQUIPE.  —Se  dit,  dans  le  domaine  du  machi- 
niste, d'une  DÉCORATION  ou  d'un  TRUC  mis  en 
état  de  manœuvrer  au  signal  et  au  moment 
voulu.  Ainsi,  quand  tous  les  FILS  qui  doivent 
enlever  un  décor  sont  attachés  à  lui  et  au 
tambour  ou  TREUIL,  il  a  son  équipe. 

ESCAMOTER  LE  MOT.  —  Ceci  est  une 
question  de  tact  de  la  part  de  l'acteur,  et  sur- 
tout de  l'acteur  de  province.  Ainsi,  tel  mot  un 
peu  grivois  ou  trivial  qui  peut  être  accentué 
au  Palais-Royal  ou  aux  Vajnétés,  où  d'ailleurs 
le  public  va  pour  l'entendre,  doit  être  escamoté, 
dit  du  bout  des  lèvres  au  Gymnase  ou  dans 
une  salle  de  province,  où  le  public  n*a  pas  le 
choix  d'un  autre  théâtre. 

ÉTOILE.  —  Cette  dénomination  s'applique, 
dans  le  cas  qui  nous  occupe,  aux  grandes  célé- 
brités féminines  de  la  danse  et  du  chant.  La 
Cérito,  Taglioni,  Emma  Livry,  la  Patti, 
TAlboni,  la  Malibran,  sont  des  étoiles;  elles 


—  111  — 

brillent  ou  brillèrent  au  premier  rang.  La 
VANITÉ  et  la  spéculation  ont  créé  des  étoiles 
factices,  des  nébuleuses,  des  étoiles  errantes, 
qui  ne  brillent  que  sur  l'affiche,  en  VEDETTE, 
ou  dans  les  réclames  de  journaux.  Quelques- 
unes  appartiennent  exclusivement  à  la  planète 
de  Vénus. 

* 
ÊTRE  EN  SCÈNE.  — Précieuse  qualité  dont 
bon  nombre  de  comédiens  font  peu  de  cas. 
Être  en  scène  signifie  que  l'acteur,  tout  à  son 
personnage  et  à  l'action,  oublie  qu'il  y  a  un 
public  et  qu'il  n'est,  lui,  qu'un  personnage  de 
convention,  pour  se  prêter  du  geste,  du  regard, 
de  la  voix,  à  la  bonne  exécution  de  l'œuvre 
qu'il  interprète.  Il  n'est  pas  rare  de  voir  des 
acteurs  causer  entre  eux  et  demeurer  aussi 
indifférents  à  ce  qui  se  passe  à  leur  côté,  que 
s'ils  ne  jouaient  pas  dans  la  pièce  :  c'est  ne 
pas  être  en  scène. 

EXPRESSION.  —  Nous  ne  cesserons  de  dire 
que  tout  doit  concourir  à  l'illusion  théâtrale. 
h' expression  est  une  des  parties  les  plus  impor- 
tantes d'un  bon  ensemble  ;  non-seulement  la 
figure  doit  rendre  la  douleur,  la  joie,  la  crainte, 
le  commandement,  l'étonnement,  l'obéissance, 
suivant  la  leçon  qu'on  répète  ;  mais  encore  les 


—  112  — 

bras,  leà  mains,  les  jambes,  la  tête,  le  corps 
doivent  se  joindre  à  cette  expression  et  la  com- 
pléter. Ce  n'est  pas  tout;  il  faut  exprimer  ce 
que  disent  les  autres,  et  réciproquement,  afin 
que  la  position  générale  de  l'ACTION  soit  expri- 
mée par  tous. 


FAIRE  DE  LA  TOILE.  —  Perdre  le  fil  de  son 
discours  et  dire  ce  qui  passe  par  la  tête  de  l'ac- 
teur en  attendant  que  le  souffleur  le  tire  d'em- 
barras, c'est  fawe  de  la  toile.  Dans  ce  cas, 
l'esprit  d'à-propos  est  d'un  grand  secours. 

FAIRE  FEU .  —  C'est  un  tic  assez  commun  au 
théâtre.  Beaucoup  trop  d'acteurs,  surtout  dans 
la  tragédie  et  le  drame ,  accentuent  leurs 
phrases  et  les  fins  de  tirades  en  frappant  du 
pied  la  scène  :  c'est  ce  qu'on  appelle  faire  feu. 
Allusion  au  cheval  qui  frappe  le  pavé  du  pied 
et  fait  feu. 

FAIRE  LA  SALLE.—  Une  première  est  une 
grande  bataille  qui  doit  être  décisive  ;  aussi, 


—  113  — 

acteurs  et  directeurs  veulent  la  gagner,  et  sa- 
chant, par  expérience,  que  le  public  est  de  la 
race  des  moutons  de  Panurge,  trouvent  plus 
prudjent  de  faire  la  salle^  c'est-à-dire  de  choisir 
leur  public  ce*jour-là.  C'est  une  pluie  de  billets 
de  faveur  :  amis  du  directeur  ;  amis  du  ou  des 
auteurs;  amis  des  acteurs,  actrices,  du  con- 
cierge, des  ouvreuses,  des  contrôleurs,  du  coif- 
feur, du  costumier,  etc.,  etc.,  en  sont  inon- 
dés. Les  bureaux  n'ouvrent  que  pour  la  forme. 
Il  va  sans  dire  que  la  claque  occupe  les  deyx 
tiers  de  la  salle. 

FARCES.  —  Les  confrères  de  la  Passion  ayant 
le  privilège  exclusif  de  représenter  les  MYS- 
TÈRES et  autres  sujets  religieux,  les  Enfants 
sans  SOUCI,  et  les  Clercs  de  la  basoche  durent 
chercher  un  genre  différent  et  donnèrent  nais- 
sance aux  pièces  nommées  MORALITÉS,  SOTIES 
et  farces,  qui  fleurirent  durant  les  xv%  xvi°  et 
même  xvii^  siècles,  car  les  comédiens  de 
l'HOTEL  DE  BOURGOGNE  jouèrent  des  farces  et 
eurent  des  FARCEURS  jusqu'à  leur  réunion  à 
la  troupe  de  Molière,  en  1680. 

La  fa7'ce  était  une  sorte  de  petite  comédie 
généralement  très-courte,  roulant  sur  des  tours 
de  friponnerie  ou  sur  des  sujets  graveleux. 
On  peut  en  juger  par  ces  titres  :  Farce  joyeuse 

10. 


—  114  — 

dtune  femme  qui  demande  des  arrérages  à  son 
mari.  —  Farce  fort  joyeuse  ^  des  femmes  qui 
font  escurer  leurs  chaulderons  et  défendent  quon 
ne  mette  la  pièce  auprès  du  trou\  et  il  y  avait 
plus  fort.  Bref,  l'immoralité  en  devint  telle 
qu'en  1588  l'autorité  en  défendit  les  représen- 
tations. 

Un  véritable  petit  chef-d'œuvre  en  est  cepen- 
dant sorti  ;  c'est  la  Farce  de  maistre  Pathelin, 
avec  laquelle  Bruys  et  Palaprat  ont  fait  leur 
charmante  comédie.  Nous  croyons  qu'on  nous 
saura  gré  de  reproduire  la  fable  suivante  tirée 
de  la  Farce  de  Pathelin  : 

GUILLEMETTE 

Il  m'est  souvenu  de  la  fable 
Du  corbeau  qui  étoit  assis 
.  Sur  une  croix  de  cinq  à  six 
Toyses  de  haut;  lequel  tenoit 
Un  fromage  au  bec  :  Là  venoit 
Un  renard  qui  vit  ce  fourmaige, 
Pensa  à  luy  :  «  Gomment  Tauray-je?  » 
Lors  se  mit  dessoubz  le  corbeau  : 
«  Ha!  fist-il,  tant  as  le  corps  beau, 
«  Et  ton  chant  plein  de  mélodie  I  » 
Le  corbeau,  par  sa  conardie, 
Oyant  son  chant  ainsi  vanté. 
Si  ouvrit  le  bec  pour  chanter, 
Et  son  fourmaige  chet  à  terre 
Et  maistre  renard  vous  le  serre 
A  bonnes  dents  et  si  l'emporte. 

La  Farce  de  Pathelin  est  de  1470,  ou  quel- 


I 


—  tl5  — 

ques  années  avant  ;  on  en  ignore  la  date  pré- 
cise et  le  nom  de  l'auteur. 

FARCEURS. —  hd. farce  devait  naturellement 
faire  naître  les  farceurn.  Les  noms  des  plus 
célèbres  sont  parvenus  jusqu'à  nous  :  ce  sont 
ceux  de  Tabarin,  Gros-Guillaume,  Gautier- 
Garguille,  Turlupin,  Guillot-Gorgu  et 
Bruscambille.  Tabarin  débitait  ses  farces,  ou 
plutôt  ses  obscénités,  sur  la  place  Dauphine, 
en  compagnie  de  son  associé  Mondor,  quand 
tous  deux  ne  couraient  pas  la  province. 

Gautier- Garguille ,  dont  la  femme  était  fille 
de  Tabarin,  et  dont  le  nom  était  Hugues 
GuERET  DE  Fleschelles  ,  appartenait  à  la 
troupe  de  l'HOTEL  DE  BOURGOGNE.  Il  mourut  à 
soixante  ans.  Sa  veuve  se  remaria  avec  un 
gentilhomme  normand. 

Gros -Guillaume  se  nommait  Guérin  ;  il  était 
garçon  boulanger  avant  de  faire  partie  de  V hô- 
tel de  Bourgogne.  Ivrogne,  gros,  gras  et  ventru, 
il  se  cerclait  le  corps  au  haut  des  jambes  et 
sous  les  bras  de  façon  à  représenter  un  ton- 
neau. Il  vécut  quatre-vingts  ans. 

Turlupin,  de  son  vrai  nom  Henry-le- Grand, 
(pas  Henri  IV)  était,  comme  les  précédents, 
attaché  à  la  troupe  de  V hôtel  de  Bourgogne,  où 
il  joua  la  farce  pendant  cinquante-cinq  ans. 


—  116  — 

C'était  un  très-bel  homme,  et  de  plus  un  excel- 
lent comédien. 

Guillot-Gorgu  avait  nom  Bertrand  Har- 
DUYN  ;  il  avait  étudié  la  médecine  et  exercé  la 
profession  d'apothicaire.  Après  avoir  joué  la 
farce  pendant  huit  ans,  il  s'établit  médecin  à 
Melun,  —  pays  des  anguilles  sensibles,  —  et 
y  gagna  une  maladie  noire  ou  spleen^  dont  il 
vint  mourir  à  Paris. 

Bruscambille^  nommé  Deslauriers,  auteur 
et  acteurdel'/id^e/^/e^owr^ro^we,  vint  longtemps 
après  débiter  des  facéties  dans  les  entr'actes  ; 
il  a  laissé  un  recueil  sous  ce  titre  :  Fantaisies 
et  Paradoxes. 

FAUX-CHASSIS.  —  Ils  se  composent  de 
deux  montants  de  sapin,  reliés  en  haut  et  en 
bas,  en  forme  de  cadre  et  s'emmanchant  par 
la  GOSTIÈRE  dans  le  chariot  logé  sous  le  plan- 
cher de  la  scène  ;  ils  sont  garnis  d'une  échelle 
et  servent  à  guinder  (attacher)  les  décors  ou 
châssis  sur  les  côtés. 

FÉERIE.  —  Pièce  à  grand  spectacle,  où  le 
sujet  est  remplacé  par  les  décors,  le  dialogue 
par  les  trucs,  l'esprit  par  des  actrices  demi- 
nues,  quand  elles  ne  le  sont  pas  tout  à  fait, 
au  maillot  près.  Ce  genre  a  pris  depuis  quelques 


—  117  — 

années  un  développement  beaucoup  trop 
grand.  On  croirait  que  MM.  h&s  auteurs  s'en 
tiennent  aux  fées  à  défaut  de  génie. 

FEMMES.  — Dans  le  théâtre  antique,  tous  les 
rôles  de  femmes  étaient  joués  par  des  hommes. 
Il  en  fut  de  même  chez  nous  jusqu'au  com- 
mencement du  xvii^  siècle  ;  mais  il  n'en  était 
pas  ainsi  chez  les  étrangers,  puisque  la  troupe 
des  Gelosi,  qui  vint  en  France  vers  1577, 
(V.  Italiens)  et  la  troupe  espagnole,  qui  vint 
quelques  années  plus  tard,  avaient  des  ac- 
trices. Deux  acteurs  de  la  troupe  espagnole 
furent  même  roués  pour  avoir  assassiné  une  de 
leur  camarade,  bien  qu'elle  leur  fût  commune. 
On  ne  sait  ni  dans  quelle  pièce  ni  dans  quel 
rôle  parurent  les  premières  femmes  dans  des 
pièces  et  sur  des  scènes  françaises.  Il  y  avait 
encore  en  1616  un  acteur  qui  jouait  les  rôles 
de  femmes  sous  le  nom  de  Perrine;  en  1637 
Alison  jouait  les  rôles  de  soubrettes  et  de 
nourrices.  Plus  de  trente  ans  après,  Molière 
fit  spécialement  pour  le  comédien  Hubert  les 
rôles  de  la  comtesse  d'Escarbagnas,  de  M'^^Per- 
nelle,  de  M""^  Jourdain  et  de  M"'^  de  Sotten- 
ville.  Hubert  ne  quitta  le  théâtre  qu'en  1685. 

FERME.  —  On  nomme  ferme  tous  les  grands 


-  118  — 

décors  de  fonds  portant  bois  et  ferrures,  portes, 
fenêtres,  balcons.  A  de  rares  exceptions 
près,  les  fermes  montent  du  dessous  et  se 
plantent  par  les  TRAPPILLONS. 

FEUX. — On  appelle  ainsi  les  sommes  données 
aux  comédiens  en  dehors  de  leurs  appointe- 
ments fixes.  Assez  généralement  les  feux  sont 
consignés  dans  les  engagements,  mais  ils 
résultent  toujours  d'une  circonstance  variable 
et  intermittejite  :  feux  par  répétition;  feux 
par  représentation;  feux  pour  déplacement; 
feux  pour  costumes  ou  toilette. 

Ce  mot,  assez  obscur  appliqué  à  l'usage 
actuel,  vient  de  ce  que  jadis  les  acteurs  rece- 
vaient le  bois  et  la  chandelle  pour  se  chaufi'er 
et  s'éclairer  dans  leurs  loges,  et  ce,  en  dehors 
des  appointements.  Cette  distribution  en  na- 
ture fut  plus  tard  faite  en  argent  et  prit  le 
nom  de  feux,  ce  qui  s'explique  ;  la  chose  dis- 
parut, mais  le  nom  resta,  bien  qu'appliqué  à 
de  nouveaux  usages.  En  somme,  c'est  une 
rémunération. 

On  supposera  naturellement  que  les  feux 
sont  un  accessoire  ?  ce  serait  une  erreur.  MM. 
les  comédiens  eu  vogue  en  ont  fait  le  prin- 
cipal. Le  chiffre  des  appointements  est  là  pour 
la   forme;   les   feux  sont  là  pour  le  fond  ; 


—  119  — 

3,000  fr.  d'appointements  et  25,000  fr.  de 
feux.  La  sauce  vaut  mieux  que  le  poisson.  — 
V.  Cachet. 

FICELLES.  —  Ce  mot  tiré  des  fantoccini  ou 
marionnettes,  qui  ne  remuent  qu'autant  qu'on 
tire  les  ficelles  —  c'est-à-dire  n'empruntent 
rien  à  la  nature  —  s'applique  à  quelques 
comédiens  qui  arrivent,  à  force  de  travail, 
d'études  patientes  ,  à  produire  de  grands 
effets  où  le  NATUREL  n'a  aucune  part.  Quel- 
ques-uns approchent  si  près  de  la  nature 
qu'on  ne  voit  pas  les  ficelles]  mais  le  plus 
grand  nombre,  dédaignant  ce  travail,  frappent 
un  grand  coup  et  laissent  voir  les  ficelles. 
Heureusement  pour  eux  qu'il  y  a  des  myopes. 

FIGURANT.  —  V.  Comparse. 

FIL.  —  Pour  le  machiniste,  tous  les  cordages 
employés  pour  la  manœuvre  se  nomment  fils, 
et  la  réunion  de  plusieurs  fils,  poignée. 

FINANCIER.  —  EMPLOI  dont  le  titre  indique 
suffisamment  le  genre. 

FOLIES-DRAMATIQUES  (Théâtre  des).  — 
Ce  théâtre   fut  construit  après  la  révolution 


—  120  — 

de  juillet  1830  sur  l'emplacement  de  l'ancien 
Ambigu-Comique^  incendié  en  1827;  il  fut 
inauguré  en  1831  et  eut  coup  sur  coup  deux 
immenses  succès  avec  la  Cocarde  tricolore^ 
des  frères  Cogniard,  et  la  Fille  de  Vair,  féerie  ; 
ensuite  vint  le  Robert  Macaire^  avec  Frédéric 
Lemaitre.  Il  fut,  en  outre,  une  pépinière  d'où 
sortirent  d'excellents  sujets,  parmi  lesquelles 
^,j^|mes  Judith  et  Nathalie. 

Démoli  avec  les  autres  théâtres  du  boulevard, 
il  transporta  son  titre  heureux  à  la  salle  qu'il 
occupe  actuellement,  et  qui  fut  érigée  en 
1862.  UopérettQ  à  cascades  semble  être  le 
genre  qu'il  affectionne  le  plus  et  qui  lui  réus- 
sit le  mieux  :  VŒU  crevé ^  le  Petit  Faust ^ 
Chilpéric^  Héloise  et  Abeilard,  en  ont  fait  les 
beaux  jours.  La  Fille  de  i)/"*«  Angot,  d'un  genre 
plus  relevé,  y  a  fait  courir  la  France  entière  et 
les  étrangers;  elle  y  est  encore  reprise  chaque 
fois  qu'il  faut  remplir  la  caisse. 

FOUDRE.  —  Une  fusée  allumée  descendant 
rapidement  sur  un  fil  conducteur  produit 
l'effet  voulu.  Un  transparent  eu  zig-zag,  éclairé 
subitement  par  la  lumière  électrique,  est 
encore  un  moyen  employé  pour  imiter  la 
foud)'e  et  produit  un  bel  effet. 

FOUR.  —  On  écrivait  jadis  fourre,  probable- 


—  121    — 

ment  du  verbe  «  fourrer  »  :  ^q  fourrer  dedans, 
ce  qui  est  à  peu  près  la  signification  actuelle 
du  mot  ;  ainsi,  compter  sur  une  pièce,  compter 
sur  un  succès,  compter  sur  une  recette,  et 
échouer,  c'est  faire  four. 

FOYER.  —  Salle  des  pas  perdus  où  le  public 
vient  se  promener  dans  les  entr' actes.  C'est 
un  salon  commun  où  l'on  discute  du  mérité 
d'une  pièce  ou  des  acteurs,  surtout  au  moment 
des  débuts  ou  d'une  première  représentation. 
Il  existe  derrière  le  rideau  un  foyer  pour 
les  acteurs.  Quand  nous  disons  un  foyer, 
comptons;  car,  dans  cette  république  théâtrale, 
la  fraternité  et  l'égalité  existent  comme...  par- 
tout ailleurs.  Nous  avons  donc  le  foyer  des  ac- 
teurs, foyer  du  chant,  foyer  de  la  danse,  foyer 
des  musiciens,  foyer  des  comparses.  C'est  donc 
au  théâtre  qu'on  devrait  trouver  la  paix,  la 
douceur  et  la  vertu  du  foyer...  Allez-y  voir  ! 

FRISE.  —  Toutes  les  bandes  de  toile  peinte 
qui  descendent  du  CINTRE  pour  venir  porter 
par  les  extrémités  sur  le  sommet  de  la  coulisse 
se  nomment  frises.  Jadis  les  plafonds  étaient 
figurés  par  des  frises,  ce  qui  offrait  une  grande 
difficulté  pour  l'effet  d'optique  qu'on  n'obte- 
nait jamais   d'une   façon   satisfaisante   pour 


—  122  — 

tous,  par  suite  des  diverses  positions  qu'oc- 
cupent les  spectateurs.  Aujourd'hui  les  pla- 
fonds sont  d'une  seule  pièce. 

FUGUE.  —  Déménagement  spontané  d'un  ou 
d'une  pensionnaire.  La  fugue  n'est  pas  rare, 
et  cause  parfois  un  grand  préjudice  au  direc- 
teur. La  fugue  des  dames  est  bien  plus  fré- 
quente que  celle  des  hommes,  et  cela  se 
conçoit  :  l'enlèvement  d'Hélène  est  un  terrible 
précédent...  0  amour! 

FUSILLADE.  — Les  effets  de  fusillades  sont 
assez  communs  au  théâtre,  même  dans  les 
pièces  qui  ne  sont  pas  militaires  ;  dans  ce  cas 
la  fusillade  se  passe  à  la  CANTONADE  et  s'imite 
avec  une  forte  crécelle  sur  pieds  qu'on  fait 
tourner  avec  une  manivelle.  Dans  les  pièces 
militaires,  où  la  fusillade  a  lieu  en  scène,  ce 
sont  les  ARMES  A  FEU  et  la  TRINGLE  qui  fonc- 
tionnent. 


GAITÉ  (théâtre  de  la).  —  C'est   le  doyen   des 
théâtres  du  second  ordre;  il  remonte  à  1760 


—  123  — 

et  fut  fondé  par  le  fameux  Nicolet,  dont  la 
devise  était  :  «  De  plus  fort  en  plus  fort  !  »  Il 
eut  pour  premier  titre  :  Théâtre  des  grands 
danseurs  du  Roi.  La  danse  de  corde,  les  panto- 
mimes et  les  funambules,  de  petites  pièces 
grivoises  ou  bouffonnes,  formaient  son  réper- 
toire ;  l'acteur  Taconnet,  un  des  plus  grands 
buveurs  dramatiques  connus,  en  faisait  les 
délices. 

En  1792,  un  nouveau  baptême  lui  donna  le 
nom  de  Théâtre  d'émulation)  enfin,  sous  la 
Terreur,  il  prit  celui  de  la  Gaîté  —  le  moment 
était  bien  choisi  —  qu'il  a  toujours  conservé 
depuis. 

Le  théâtre  de  la  Gaîté  ayant  trouvé  son 
nouveau  nom  à  l'époque  ci-dessus  indiquée 
devait  —  naturellement  —  être  le  berceau  du 
mélodrame  :  il  n'y  manqua  pas.  Victor, 
DucANGE  et  GuiLBERT  de  PixÉRÊcouRT  y  don- 
nèrent leurs  premières  œuvres.  Thérèse  ou 
l'Orpheline  de  Genève  y  fit  verser  de  tels  tor- 
rents de  larmes  qu'on  aurait  pu  se  dispenser 
de  remplir  les  réservoirs.  Cependant,  on  n'y 
pleurait  pas  toujours,  puisque  c'est  là  que 
l'éternel  Pied  de  Mouton  a  vu  le  jour.  Ce  n'était 
qu'un  pied  d'agneau  en  comparaison  du  Pied 
de  Mouton  actuel  qui  a  grandi,  bien  qu'il  ne 
soit  pas  espagnol. 


—  12i  — 

La  salle  de  la  Gaîté  construite  sur  le  boule- 
vard du  Temple,  dit  du  Crime^  en  1808,  fut 
incendiée  en  1835  et  reconstruite  la  même 
année  sur  le  même  emplacement.  Le  succès 
semblait  s'être  attaché  à  ce  théâtre  :  la  Belle 
écaillère^  le  Sonneur  de  Saint-Paul^  le  Courrier 
de  Lyon^  les  Cosaques^  la  Grâce  de  Z)?ew  y  atti- 
rèrent le  public  pendant  de  longues  années. 

L'expropriation  des  théâtres  du  boulevard 
du  Temple  en  chassa  celui  de  la  Gaîté^  qui 
vint  s'installer  au  square  des  Arts-et-Métiers, 
où  nous  le  voyons  aujourd'hui.  Il  fut  construit 
en  1861-62  par  l'architecte  Hittorf.  Une  nou- 
velle combinaison  vient  d'en  changer  le  titre 
en  en  faisant  le  THÉÂTRE  LYRIQUE. 

GANACHES    et     PÈRES    DINDONS.   — 

Personnages  remplis  par  les  comiques  GRIMES. 

GARDE-ROBE.  —  On  nomme  ainsi  la  collec- 
tion de  costumes  appartenant  aux  comédiens 
et  dont  la  valeur  représente,  pour  d'aucuns, 
une  somme  de  plus  de  cinquante  mille  francs. 
Un  comédien  ou  comédienne,  chanteur  ou 
chanteuse,  qui  n'aurait  pas  de  garde-robe^ 
trouverait  difficilement  un  engagement  en 
province,  où  les  directeurs  n'ont  pas  de  MA- 
GASIN de  costumes,  si  ce  n'est  pour  les  figu- 


—  125  — 

rants  et  les  utilités.  Il  n'est  pas  nécessaire 
d'avoir  absolument  tous  les  costumes  de  son 
RÉPERTOIRE,  mais  il  faut  en  avoir  assez  pour 
y  faire  face,  en  les  rafistolant  un  peu. 

GARGARISER  (Se).  —  Ce  mot,  inventé  par 
le  chanteur  martin,  s'applique  au  roulement 
des  notes  dans  la  gorge,  ce  qui,  en  effet, 
imite  assez  bien  le  bruit  d'un  gargarisme.  Il 
se  dit  aussi  d'un  acteur  de  drame  ou  de  co- 
médie qui  fait  RONFLER  les  R. 

GAUTIER-GARGUILLE.  —  V.  Farceurs. 

GENRE.  —  Les  différentes  productions  drama- 
tiques sont  classées  par  genre  :  genre  lyrique, 
^enre  tragique,  genre  comique.  Gomme  la  lo- 
gique est  bonne,  fille,  et  qu'on  la  respecte 
juste  autant  qu'on  feyit  des  Constitutions,  on 
appelle  «  théâtres  de  genre  »  ceux  qui  n'en 
ont  pas  de  défini;  ainsi  les  Variétés,  le  Vau- 
deville ,  le  Gymnase  sont  des  théâtres  de 
genre.  Le  décret  du  27  avril  1807,  que  nous 
donnons  à  Y  Appendice ,  donnera  une  idée 
exacte  des  genres  tels  qu'ils  étaient  compris 
et  exploités  à  cette  époque. 

GLOIRE.  —  Quelques  philosophes   ont  pré- 


—  1:26  — 

tendu  que  la  gloire  est  une  fumée.  La  nôtre 
est  de  toile  et  de  bois,  et  descend  du  CINTRE 
sous  forme  de  nuage  lumineux  contenant  une 
déesse,  un  dieu,  un  génie  ou  une. fée  quel- 
conque, le  tout  attaché  avec  des  cordes.  Il  y  a 
quelques  périls  pour  celui  qui  descend  ainsi  ; 
il  peut  s'écrier,  comme  le  Cid  : 

«  A  vaincre  sans  périls,  on  triomphe  sans  gloire.  » 

GOURER  (Se). —  Ce  mot,  conservé  dans  la 
langue  des  coulisses,  est  presque  synonyme  de 
((  CONTRE-SENS  ».  Ainsi,  jouer  un  rôle  de 
mendiante,  ou  celui  de  Mignon,  au  premier 
acte,  avec  des  boucles  d'oreilles  en  diamant 
et  des  bagues  aux  doigts,  ou  celui  d'un  aveugle 
avec  un  lorgnon,  écrire  sur  un  carnet  mo- 
derne quand  l'action  se  passe  avant  Jésus- 
Christ,  mettre  des  souliers  de  satin  pour  tra- 
verser un  glacier,  c'est  se  gourer. 

GRANDE  CASAQUE.  —  V.  Casaque. 

GRANDE  COQUETTE.  —  V.  Coquette. 

GRATIS.  —  Le  répertoire  des  représentations 
gratuites  est  toujours,  surtout  à  Paris,  choisi 
avec  goût  ;  les  comédiens ,  sachant  qu'ils 
ont  affaire  à  un  public  d'autant  plus  difficile 


—  127  — 

qu'il  ne  paye  pas,  apportent  le  plus  grand 
soin  à  leur  JEU.  Il  n'y  a  pas  de  claque  ce 
jour-là  ;  cependant,  il  n'y  a  pas,  un  mot  mar- 
quant, une  situation  intéressante,  une  tirade 
remarquable  qui  ne  soient  saisis ,  appréciés 
et  applaudis  par  ce  public.  Auteurs  et  acteurs 
peuvent  être  fiers  de  ces  applaudissements  de 
bon  aloi. 

GRATTER  au  FOYER.  —  Cette  locution, 
très-ancienne ,  provient  d'un  acteur  de  la 
Comédie  italienne  qui,  n'ayant  jamais  rien  à 
faire,  «  sa  valeur  attendant  le  nombre  des 
années  »,  s'amusait  à  gratter  les  murs  du 
foyer.  Aujourd'hui,  on  dit  d'un  acteur  qui 
attend  un  rôle  et  d'un  auteur  qui  attend  le 
tour  de  sa  pièce,  qu'ils  «  grattent  au  foyer  ». 

GRÊLE.  —V.  I^iïe. 

\ 
GRIL.  —  Premier  plancher  général  au-dessus 
de  la  SCÈNE,  après  les  corridors  du  CINTRE. 
Son  nom  vient  de  ce  qu'il  est  effectivement 
fait  comme  un  gril,  aucune  des  pièces  de 
bois  ou  de  fer  qui  le  compose  n'étant  proche 
l'une  de  l'autre  et  laissant  un  intervalle  entre 
chacune  d'elles.  C'est  sur  ce  plancher  que 
sont  attachées  les  poulies  où  passent  les  nom- 


—  128  — 

breux  FILS  qui  supportent  et  font  manœuvrer 
les  rideaux  de  fond^  bandes  d'air ^  frises^  pla- 
fonds ^  etc.,  à  l'aide  des  treuils  et  tambours 
auxquels  ils  communiquent.  Il  y  a  souvent 
au-dessus  du  gril  un  petit  gril. 

GRIMAGES.  —  J.-J.  Rousseau  a  dit  : 
«  L'expression  des  sensations  est  dans  les  gtn- 
«  maces ,  et  l'expression  des  sentiments  est 
«  dans  les  regards...  »  Il  faut  croire  que  le 
philosophe  de  Genève  a  forcé  le  mot  pour 
mieux  exprimer  la  chose,  car  le  bon  comé- 
dien ne  doit  jamais  aller  jusqu'à  la  grimace, 
ce  qui  serait  fausser  et  forcer  l'expression  : 
Dépasser  le  but  n'est  pas  l'atteindre. 

GRIME.  —  EMPLOI.  Il  consiste  principalement 
dans  les  rôles  de  vieillards  qui  représentent 
un  caractère  comique ,  ridicule  ou  sérieux  par 
la  tête.  L'art  de  se  grimer,  ou,  pour  mieux 
dire,  l'art  de  se  faire  une  tête  est  difficile  à 
grtteindre;  il  demande  une  longue  étude  et  des 
notions  de  peinture  et  de  dessin.  Les  rôles  de 
l'Avare,  de  Bartholo,  de  Sganarelle  sont  des 
grimes. 

GROS -GUILLAUME.  —  V.  Farceurs. 

GROSSESSE,    —   On   ne   s'attendait  certes 


—  129  — 

pas  à  Couver  ce  mot  dans  un  vocabulaire 
théâtral,  et  il  ne  s'y  trouverait  pas  s'il  n'était 
urgent  d'apprendre  au  spectateur  qui  pourrait 
s'étonner  de  voir  paraître  en  scène  une  ingé- 
nue qui  aurait  besoin  de  la  sage-femme  que, 
par  jugement  du  tribunal  de  commerce  de  la 
Seine,  en  date  du  2  janvier  1857,  il  a  été  dé- 
cidé «  qu'une  actrice  non  mariée  ne  peut  in- 
voquer son  état  de  grossesse  pour  se  dispenser 
de  remplir  les  devoirs  de  son  engagement  ». 
Il  nous  semble  que,  dans  l'espèce,  ce  n'est 
plus  un  engagement,  mais  un  contrat  à  la 
grosse. 

GRUES.  —  Les  savants  prétendent  que  c'est 
un  oiseau  de  l'ordre  des  échassiers  ;  d'autres, 
que  c'est  une  construction  mécanique  destinée 
à  soulever  les  fardeaux. 

Nous  sommes  fort  embarrassés,  car  les  ca- 
ractères de  la  grue,  oiseau,  sont  d'avoir  les 
jambes  demi-nues,  d'aimer  à  voyager,  d'avoir 
le  sommet  de  la  tête  nu  et  rouge  ;  et  la  ^rwe 

*  mécanique  se^compose  d'engrenages,  de  pi- 
gnons, de  treuils,  est  mobile  ou  fixe,  simple 
ou  double. 

Notre  grue  participe  un  peu  des  deux  :  elle 
est  simple,  a  souvent  les  cheveux  rouges, 
beaucoup  d'engrenages  et  les  jambes   assez 


—  130  - 

nues,  —  sans  compter  le  reste  ;  —  a  quelque- 
fois pignon  sur  rue;  est  mobile  et  voyageuse. 
Elle  vit  un  peu  partout  et  s'acclimate  surtout 
dans  les  petits  théâtres  de  Paris.  Appartient- 
elle  à  l'ornithologie  ou  à  la  mécanique  ?  Nous 
sommes  perplexes. 

GUILLOT-GORGU.  —  V.  Farceurs. 

GYMNASE-DRAMATIQUE  (Théâtre  du).~ 
La  création  de  ce  théâtre  fut  autorisée 
en  1820  comme  succursale  du  Théâtre- Fran- 
çais et  de  V Opéra-Comique,  Son  privilège  lui 
donnait  le  droit  de  jouer  les  pièces  d'auteurs 
lyriques  morts  depuis  dix  ans  au  moins. 

Son  existence  assez  précaire  se  vit  assurée 
solidement  par  le  titre  de  Théâtre  de  Madame, 
que  son  directeur,  M.  Poirson,  obtint  le  droit 
de  prendre  par  la  faveur  de  la  duchesse  de 
Berry^  après  une  saison  dramatique  passée  à 
Dieppe,  où  madame  prenait  les  bains,  et  par 
l'engagement  que  prit  Scribe  de  travailler 
exclusivement  pour  ce  théâtre.  Après  la  révo- 
lution de  1830,  il  reprit  son  premier  titre. 

Ce  théâtre  est  le  seul  où  les  traditions  du 
bon  goût  se  soient  conservées  au  milieu  du 
dévergondage  de  la  littérature  dramatique 
moderne.  Toujours  peuplé  de  comédiens  de 


—  131  — 


valeur  et  alimenté  par  des  auteurs  comme 
Emile  Augier,  Sardou,  Dumas  fils,  il  voit  ses 
acteurs  et  ses  pièces  passer  au  Théâtre-Fran- 
çais. 


H 


HABILLEMENT.—  Le  mot  habillement  n'a 
pas  rapport  au  mot  COSTUME,  comme  nous 
l'avons  traité,  mais  bien  à  la  manière  de  le 
mettre,  de  l'endosser,  de  s'en  vêtir  ;  il  s'ap- 
plique également  à  l'habit  de  ville. 

L'acteur  doit  veiller  à  ce  que  son  habille- 
ment n'ait  pas  l'air  d'un  musée  dont  chaque 
pièce  appartient  à  une  époque  ou  à  une  nation 
différente,  ce  que  nous  voyons  trop  souvent. 
Si  vous  voulez  vous  rendre  compte  de  la 
manière  dont  on  procède  à  cet  article,  regar- 
dez le  chœur  des  Écossaises  de.  la  Dame 
blanche;  vous  n'en  trouverez  pas  deux  chaus- 
sées de  même  :  vous  y  verrez  des  pantoufles, 
des  souliers  à  rubans,  des  souliers  lacés,  des 
bottines  à  boutons,  à  lacet,  à  caoutchouc,  et 
des  bottes  à  glands.  Gomme  tout  cela  est  cou- 
leur locale  ! 


—  1.32  — 

HABILLEUSE.  —  Préposée  de  l'adminis- 
tration pour  remplir  les  devoirs  de  sa  charge, 
et  ayant  la  discrétion  du  dieu  Terne. 

S'il  n'y  a  pas  de  héros  ni  de  grand  homme 
pour  son  valet  de  chambre,  y  a-t-il  de  belles 
actrices  pour  V habilleuse?  0  spectateurs 
éblouis,  ravis,  transportés,  enchantés  par  la 
richesse  des  formes  que  votre  lunette,  lor- 
gnon, binocle  ou  jumelle  vous  révèlent,  allez 
demander  à  Y  habilleuse  ce  qu'il  en  est. 

«  Gardez-vous  de  vouloir,  faibles  et  curieux, 

«  Pénétrer  des  secrets  qu'on  voile  à  tous  les  yeux.  » 

On  prétend  que  V habilleuse ,  bien  que 
n'étant  nullement  reçue  par  l'administration 
des  postes,  en  fait  le  service  :  toujours  des 
méchancetés  !  Il  est  possible  qu'elle  s'exerce  à 
débuter  en  disant  : 

« Et  voici-z-une  lettre, 

«  Qu'entre  vos  mains,  Madame,  on  m'a  dit  de  re- 

[mettre,  » 

mais  en  tout  bien,  tout  honneur. 

HERSE.  —  Pour  obtenir  un  jour  égal  sur  la 
scène  et  éviter  les  ombres,  il  fallait  l'éclairer 
par  en  haut  comme  elle  l'est  par  en  bas  : 
c'est  l'office  de  la  hei^se,  galerie  lumineuse, 
suspendue  librement,  se  déplaçant  suivant  le 
besoin  et  rattachée  au  grand  tuyau  du  gaz  par 


—  133  — 

des  tuyaux  en  cuir  ou  en  caoutchouc.  L'illu- 
mination des  édifices  publics  par  le  gaz  donne 
l'idée  de  la  herse;  seulement  dans  celle-ci  le 
rayon  lumineux  est  renvoyé  sur  la  scène  par 
un  réflecteur. 

HEURES.  —  Les  ordonnances  de  police,  tant 
générales  que  locales,  portent  que  les  repré- 
sentations ne  doivent  pas  passer  minuit,  sous 
peine  d'amende.  Ces  ordonnances  sont  assez 
peu  observées  et  les  amendes  encore  plus  ra- 
rement appliquées.  C'est  plutôt  une  mesure 
d'ordre  qu'une  mesure  de  rigueur. 

Les  heures  des  représentations  ont  beau- 
coup varié  depuis  l'origine  de  notre  théâtre. 
Les  MYSTÈRES  se  jouant  dans  les  rues  avaient 
lieu  le  jour.  Quand  les  comédiens  abandon- 
nèrent les  tréteaux  pour  se  loger  dans  des 
salles,  la  police  réglementa  les  heures.  Ainsi, 
sur  la  plainte  du  curé  de  Saint-Eustache,  le 
Parlement,  à  la  date  du  6  novembre  1574, 
condamna  «  les  maîtres  et  gouverneurs  de 
Vhôtel  de  Bourgogne  à  faire  ouvrir  les  portes 
de  la  salle  dudit  hôte.,  pour  les  représentations 
de  comédie,  à  t7'où  heures  sonnant,  et  non  plus 
tôt».  En  1609,  les  théâtres  devaient  ouvrir 
leurs  portes  à  une  heure,  commencer  à  deux 
et  avoir  fini  à  quatre  et  demie.  Au  xviii^  siècle, 

i2 


—  134  -- 

les  représentations  avaient  lieu  de  cinq  à  neuf 
heures;  de  1800  à  1815,  de  sept  heures  à  dix  et 
demie,  onze  au  plus  tard.  Du  temps  que  flo- 
rissait  le  mélodrame,  on  commençait  à  cinq 
heures;  aujourd'hui  c'est  de  sept  à  huit  et  Ton 
finit  quand  on  peut.  «  //  ny  a  pas  d'heure 
pour  les  braves.  »  —  (V.  à  V Appendice  Tord,  du 
12  nov.  1609  et  l'art.  61  de  l'ord.  du  1"  juil- 
let 1864.) 

HOQUET.  —  Respiration  bruyante  qui  ap- 
proche du  râle  et  qu'on  nomme  le  hoquet  dra- 
matique. Quelques  comédiens  le  doivent  à  une 
mauvaise  manière  de  respirer,  d'autres  à  la 
faiblesse  de  leur  organisme  ;  un  petit  nombre 
croient  faire  plus  d'EFFET  en  l'affectant.  Quel 
que  soit  le  motif  qui  le  fait  naitre,  il  est  très- 
désagréable  et  fatigant  pour  le  spectateur. 

HOTEL  DE  BOURGOGNE.  —  Cet  hôtel 
joue  un  trop  grand  rôle  dans  l'histoire  du 
Théâtre-Français,  dont  il  fut  en  quelque  sorte 
le  berceau,  pour  que  nous  le  passions  sous  si- 
lence ;  il  existait  sur  des  terrains  situés  rue 
Mauconseil  et  rue  Française. 

Lorsque  les  Confrères  de  la  Passion  durent 
abandonner  l'hôpital  Saint-Laurent,  ils  ache- 
tèrent ce  qui  restait  des  bâtiments  ruinés  de 


—  135  — 

Tancien  hôtel  des  ducs  de  Bourgogne  et  les 
terrains  en  dépendant ,  ainsi  que  les  hôtels 
d'Artois  et  de  Flandres,  dont  la  vente  eut  lieu 
le  20  décembre  1543,  et  y  firent  construire 
leur  théâtre,  qui  fut  terminé  en  1548,  ce  que 
confirme  un  arrêt  du  Parlement  du  17  no- 
vembre de  cette  même  année,  où  il  est  dit  : 
«  Qu'il  est  permis  aux  maîtres  de  la  confrérie 
«  de  pouvoir  représenter  jeux  profanes,  hon- 
«  nêtes  et  licites,  et  défend  à  toutes  personnes 
«  de  jouer  et  représenter,  sinon  au  profit  de 
«  ladite  confrérie  et  sous  le  nom  d'icelle.  » 

Les  Confrères  jouèrent  jusqu'en  1588*, 
époque  à  laquelle  ils  louèrent  leur  salle  à  une 
troupe  de  comédiens  français  permissionnés 
par  le  roi. 

En  1600,  cette  troupe  se  divisa  en  deux 
parties  dont  l'une  fut  s'établir  à  l'hôtel  d'Ar- 
gens,  rue  de  la  Poterie,  et  bientôt  après  rue 
Vieille-du-Temple,  et  enfin  rue  Michel-le- 
Gomte.  C'est  ce  qu'on  nommait  la  troupe  du 
Marais ,  à  laquelle  vint  se   réunir  celle   de 

'  Cette  date  de  4588,  indiquée  par  tous  les  auteurs,  semblerait 
fautive  devant  le  document  suivant,  d'où  il  résulterait  que  cette 
concession  a  été  faite  en  1578. 

-<  2i  juillet  1578.  —  Marché  fait  entre  les  maîtres  de  l'Hôtel  de 
«  Bourgogne  et  Agnan  Sarat,  Pierre  Dubuc  et  autres  compagnons 
«  comédiens,  par-devant  Marchand  et  Brugait,  notaires,  par  lequel 
«  iceux  compagnons  comédiens  promettent  de  représenter  comédies, 
«  moyennant  le  prix  porté  au  marché.  » 


—  136  — 

Molière  après  la  mort  de  cet  illustre  maître. 

La  troupe  de  V hôtel  de  Bourgogne  continua 
d'y  jouer  jusqu'en  1680,  où  elle  prit  le  titre 
de  Comédiens  du  roi,  en  même  temps  que  la 
troupe  du  Marais  se  fondait  avec  elle  par 
ordonnance  royale.  Les  comédiens  français 
quittèrent  alors  la  salle  de  Vhôtel  de  Bour- 
gogne ^omv  venir  s'installer  rue  Guénégaud. — 
V.  Théâtre- Français. 

Une  troupe  italienne  jouait  alternativement 
avec  la  troupe  depuis  1662;  en  1680,  elle  y 
demeura  seule  et  y  joua  jusqu'en  1697,  où  le 
théâtre  fut  fermé,  pour  réouvrir  de  1716  à 
1783,  où  il  ferma  définitivement.  Ce  fut  dans 
cet  ancien  théâtre  qu'on  établit  la  halle  aux 
cuirs.  On  avait  déjà  dû  y  en  entendre  plus 
d'un. 


I 


ILLUSION.  —  Au  théâtre,  tout  est  fiction  et 
illusion.  Le  comble  de  l'art  est  donc  de  faire 
approcher  ces  deux  filles  du  mensonge  le  plus 
près  possible  de  la  vérité,  de  la  réalité.  Tout 
doit  y  concourir  :  la  décoration,  la  mise  en 


—  137  — 

scène,  le  costume,  le  jeu  des  acteurs.  C'est  ce 
qu'on  voit  rarement. 

«  Flatteuse  illusion  1  doux  oubli  de  nos  peines  ! 

«  Oh  I  qui  pourrait  compter  les  heureux  que  tu  fais  !  » 

IMITATION.  —  Par  suite  du  mot  précédent, 
on  imite  le  TONNERRE  en  remuant  une  feuille 
de  tôle  ;  la  FOUDRE  qui  tombe ,  en  laissant 
tomber  sur  le  plancher  des  rondelles  de  fer 
enfilées  dans  une  corde  ;  les  ÉCLAIRS,  avec  des 
torches  de  lycopode  qu'on  secoue,  ou  de  l'ar- 
canson  qu'on  brûle  ;  la  PLUIE  et  la  GRÊLE,  par 
des  cailloux  qu'on  roule  ou  qu'on  secoue  dans 
une  vanne  ;  la  NEIGE,  par  des  petits  morceaux 
de  papier  ou  de  ouate  qu'on  jette  du  cintre  ; 
le  VENT,  avec  une  roue  à  palettes,  comme  un 
ventilateur  agricole,  etc. 

Imitation  se  dit  encore  de  la  contrefaçon 
que  quelques  acteurs  essaient  de  faire  d'autres 
acteurs  en  reproduisant  leur  voix,  leurs  gestes 
et  surtout  leurs  tics.  Ces  imitations  mettent 
plus  en  relief  les  défauts  que  les  qualités. 
Molière  s'est  lui-même  essayé  à  ces  imitations 
dans  Y  Impromptu  de  Versailles.,  mais  alors 
comme  critique.  Ce  fut  pour  faire  ressortir  le 
ridicule ,  la  fausse  déclamation ,  la  manière 
outrée  des  comédiens  de  Vhôtel  de  Bourgogne, 
qu'il  imita  Montfleury,  Hauteroche,  Vil- 

12. 


—  138  — 

LiERS,  Beauchateau  et  M"°  Beauchateau. 
C'est  une  leçon  qu'il  donna;  c'est  encore  le 
grand  maître  qui  parle  ! 

D'autres  comédiens,  ne  trouvant  pas  dans 
leur  propre  nature  une  manière  à  eux,  cher- 
chent à  imiter  le  jeu  de  quelques  acteurs  en 
réputation,  et  sont  assez  généralement  de  pâles 
copies. 

INCENDIE.  —  Les  effets  à' incendie  se  font  à 
l'aide  de  pots  à  feu  et  de  lumière  électrique 
colorée  en  rouge.  Pour  les  grands  effets,  on 
jette  dans  des  fourneaux  alimentés  par  des 
soufflets  du  spark  qui  brûle  en  jetant  une 
fumée  noire  et  de  nombreuses  étincelles  ; 
les  poutres  enflammées  sont  figurées  à  l'aide 
de  traînées  percées  de  petits  trous  par  où 
s'échappe  du  gaz  en  feu. 

INDISPOSITION.  —  Fin  de  non-recevoir  à 
l'usage  des  acteurs  et  surtout  des  actrices  ; 
arme  offensive  et  défensive  pour  ou  contre 
la  direction.  Tous  les  mauvais  vouloirs,  les 
mécontentements,  les  AMOURS-PROPRES  bles- 
sés, les  VANITÉS  froissées ,  les  RIVALITÉS  exci- 
tées, le  rôle  pas  assez  MUR,  la  couturière  en 
retard,  et  mille  autres  choses,  ont  une  indis- 
position en  réserve,  sans  compter  les  vraies. 


-  139    - 

qui  sont  rares.  Le  directeur  envoie  le  MÉDE- 
CIN du  théâtre  pour  constater,  et...  ma  foi... 
le  médecin  constate  Y  indisposition  !  C'est  pour- 
quoi vous  voyez  de  temps  en  temps  sur  Taffiche 
une  bande  portant  :  Relâche  pour  cause  d'in- 
disposition. Je  vous  garantis  que  ces  indispo- 
sitions-\k  ne  font  pas  la  fortune  des  pharma- 
ciens. Les  FEUX  ont  de  beaucoup  diminué  le 
nombre  des  indispositions. 

INDULGENCE.  —  Moyen  préparatoire  dont 
on  abuse  souvent.  Ainsi  un  ténor  qui  a  laissé 
sa  voix  dans  sa  malle  fait  demander  Vindul- 
gence  du  public  en  prétextant  un  enrouement 
subit,  ce  qui  ne  l'empêchera  pas  de  toucher 
ses  appointements,  sans  indulgence  pour  la 
caisse  du  directeur. 

INGÉNUE,  INGÉNUITÉ.  —  Cet  emploi,  qui 
avait  une  grande  importance  du  temps  de 
Sedaine,  où  l'on  distinguait  les  ingénues  et  les 
rosières,  ce  qui  ferait  supposer  que  l'on  pou- 
vait être  l'une  sans  être  l'autre,  cet  EMPLOI, 
disions-nous,  tend  à  disparaître  du  répertoire 
moderne  comme  il  disparaît  de  la  société.  Sous 
le  règne  des  Fanfan-Benoîton,  et  nous  y 
sommes,  l'emploi  d'ingénue  devrait  commen- 
cer en  nourrice  et  finir  au  sevrage.  Gomme 


—  140  — 

nous  venons  de  le  dire  plus  haut,  l'illusion 
étant  la  règle  du  théâtre,  on  conserve  l'emploi 
à' ingénuité  ;  on  fait  mieux,  on  distingue  la 
première  et  la  seconde  ingénuité.  On  ne  peut 
plus  dire  : 
«  Le  vice  a  des  degrés  ;  la  vertu  n'en  a  pas  I  » 

INGRAT.  —  Ce  mot  fut  longtemps,  à  Lyon, 
synonyme  de  billet  de  parterre  ;  voici  à  quelle 
occasion  :  Dans  une  représentation  de  VAmi 
de  tout  le  monde  ^  un  acteur  que  les  Lyonnais 
sifflaient  souvent,  ce  qui  ne  le  rendait  pas 
meilleur,  fut  tellement  sifflé  ce  jour-là  qu'il 
s'avança  jusqu'à  la  rampe  en  s'écriant  :  «  In- 
grat parterre  ^  que  fai-je  fait  ?  »  Le  lendemain 
on  ne  demandait  plus  un  parterre  au  bureau, 
on  demandait  un  ingrat. 

INTERDICTION.—  Un  certain  nombre  de 
,  pièces  dont  la  représentation  avait  été  autori- 
sée ont  dû  être  interdites  au  cours  de  leurs  re- 
présentations, soit  parce  qu'elles  surexcitaient 
les  passions  religieuses  ou  politiques,  soit  par 
d'autres  motifs.  Vautri?!,  V Incendiaire^  le  Fac- 
teur, les  Deux  Serruriers,  Louise  de  Lignerolles, 
Robert  Macaire,  sont  de  ce  nombre.  Toute 
pièce  interdite  à  Paris  est  par  cela  môme  inter- 
dite dans  toute  la  France  ;  mais  les  autorités 


—  141  — 

de  province  peuvent  interdire  les  pièces  auto- 
risées à  Paris,  si  elles  étaient  de  nature  à 
troubler  Tordre  en  froissant  les  mœurs,  les 
habitudes  ou  la  susceptibilité  locales. 

INTRIGUE.  —  Complication,  lien,  marche 
d'une  pièce.  C'est  ce  qu'on  appelle,  en  style 
de  métier,  la  charpente.  Il  y  a  des  charpen- 
tiers dramatiques  qui  ne  savent  ni  maçonner, 
ni  peindre,  ni  décorer.  C'est  en  grande  partie 
le  motif  de  la  collaboration,  qui  n'est  par  le 
fait,  et  souvent,  que  la  réunion  et  l'association 
du  charpentier,  du  maçon  et  du  peintre. 

ITALIENS.— Vers  1577,  une  troupe  de  comé- 
diens italiens,  appelés  i  gelosi,  fit  son  appari- 
tion à  Paris  et  obtint  des  lettres-patentes  de 
Henri  III  ;  leurs  représentations  effrayèrent 
tellement  la  morale  du  Parlement,  qu'il  refusa 
d'enregistrer  leurs  lettres-patentes.  Yoici  ce 
qu'en  dit  notre  vieux  chroniqueur,  Pierre  de 
l'Estoile  :  «  Les  actrices  italiennes  faisaient 
«  monstre  de  leurs  seins  et  poitrine  ouverte, 
«  et  autres  parties  pectorales ,  qui  ont  un  per- 
«  pétuel  mouvement,  que  ces  bonnes  dames 
«  faisaient  aller  par  compas  ou  mesure  comme 
«  une  horloge,  ou,  pour  mieux  dire,  comme 
«  les  soufflets  des  maréchaux.  »  Les  Italiens 


—  142  — 

ne  tinrent  compte  de  la  résistance  du  Parle- 
ment, ni  de  l'amende  de  10,000  livres  pro- 
noncée contre  eux  ;  ils  continuèrent  leurs 
représentations ,  protégés  par  Henri  III ,  dont 
la  morale  ne  s'effrayait  pas  facilement,  et  res- 
tèrent jusque  sous  Henri  IV. 

En  1645,  Mazarin  fit  venir  une  nouvelle 
troupe  italienne.  C'est  ce  que  nous  nommons 
I'ancien  Théâtre-Italien.  Elle  ne  devait  par- 
ler que  la  langue  italienne  et  jouer  l'arlequi- 
nade.  Elle  partageait  avec  les  comédiens  fran- 
çais Y  hôtel  de  Bourgogne.  Ces  Italie?is,  appre- 
nant peu  à  peu  notre  langue,  l'introduisirent 
dans  quelques  scènes  de  leur  répertoire,  et 
finirent  par  la  parler  au  lieu  de  l'italien. 
Gomme  le  public  s'amusait  beaucoup  chez 
eux  et  délaissait  les  comédiens  français,  ceux-ci 
leur  firent  un  procès ,  motivé  sur  ce  qu'ils  ne 
devaient  pas  parler  français.  La  cause  fut 
portée  devant  Louis  XIV  et  plaidée,  pour  les 
comédiens  français,  par  le  célèbre  acteur  et 
auteur  Baron. 

L'arlequin  Dominique,  chargé  de  la  défense 
de  la  Comédie-Italienne ,  commença  par  quel- 
ques lazzis  et  demanda  au  roi  :  «  En  quelle 
langue  Votre  Majesté  veut-elle  que  je  parle  ? 
—  Parle  comme  tu  voudras ,  répondit  Louis 
XIV.  —  Je  vous  remercie.  Sire  !  Puisque  vous 


-   143  — 

m'autorisez  à  parler  comme  je  voudrai,  italien 
ou  français,  ma  cause  est  gagnée.  —  C'est  une 
surprise ,  dit  le  roi  ;  mais  n'importe  ,  ma 
parole  est  donnée,  je  ne  la  reprendrai  pas.  » 
Cette  troupe  fut  supprimée  en  1697  pour  avoir 
joué  la  Fausse  Prude,  qui  désignait  M""^  de 
Maintenon. 

Les  Italiens  revinrent  en  1 71 6  sous  le  titre 
de  Comédiens  du  Régent,  et  s'établirent  à  la 
foire  en  1721;  c'est  là  que  Y  Opéra-Comique 
vint  se  fondre  avec  eux  en  1762.  Les  deux 
troupes  jouèrent  ensemble  jusqu'en  1780,  où 
VOpé7m-Comîquexe;^v\i  son  titre  et  son  indivi- 
dualité. 

Le  répertoire  de  Vancien  Théâtre-Italien  est 
très-curieux  à  étudier,  surtout  comme  parodie, 
genre  dans  lequel  il  a  excellé  ;  ARLEQUIN  en 
était  le  principal  personnage.  —  V.  Théâtre  de 
la  Foire. 


JARDIN  (côté).  —  On  nomme  ainsi  le  côté 
gauche  de  la  scène ,  vue  prise  du  spectateur. 
Nous  donnons  l'étymologie  des  mots  COUR  et 
jardin  au  mot  SCÈNE. 


—  \^\  — 

JE  NE  SAIS  QUOI.— Il  y  a  dans  les  œuvres 
d'art  en  général,  que  ce  soit  un  tableau,  une 
statue,  une  mélodie,  quelque  chose  qui  plait 
ou  qui  déplaît,  sans  qu'on  puisse  au  juste  se 
rendre  compte  du  pourquoi  ;  car,  dans  ce  qui 
plaît,  les  règles  souvent  ne  sont  pas  observées, 
la  critique  a  tout  à  y  reprendre  ;  mais  il  y  a 
un  je  ne  sais  quoi  qui  vous  empoigne,  et, 
dans  le  cas  contraire ,  malgré  l'observation  de 
toutes  les  règles,  unye  7ie  sais  quoi  qui  vous 
repousse. 

Il  en  est  de  même  pour  le  comédien.  Quel- 
ques-uns ,  malgré  de  grands  défauts  ,  ont  un 
je  ne  sais  quoi  qui  plaît,  et  vice  versa. 

JETON.  —  Ce  mot  est  remplacé  par  celui  de 
CACHET  dans  le  langage  théâtral  moderne. 

Bien  que  la  formule  des  engagements  soit 
très-verbeuse,  elle  ne  peut  tout  prévoir  et 
laisse  encore  une  grande  place  aux  actes  de 
complaisance  ou  de  bonne  volonté  de  la  part 
des  pensionnaires  envers  leur  directeur  ;  mais 
complaisances  ou  bonnes  volontés  sont  héris- 
sées de  difficultés  que  le  jeton  ou  cachet  a 
mission  d'aplanir. 

L'argent,  a  dit  Regnard, 

Est  le  nerf  de  la  guerre  ainsi  que  des  amours. 


ri\ 


—  ti: 

JEU.  —  Le  jeu  est  le  complément  du  DÉBIT  et 
se  trouve  intimement  lié  à  l'action.  Il  doit 
commencer  à  l'entrée  en  scène  de  l'acteur  et 
ne  finir  qu  après  sa  sortie ,  qu'il  ait  à  parler 
ou  non.  C'est  ce  qu'on  appelle  ÊTRE  EN  SCÈNE. 
Il  y  a  une  juste  mesure  à  observer  entre  un 
jeu  outré  et  un  jeu  négligé  qui  frise  l'indif- 
férence. 

JEU  DE  PHYSIONOMIE.— V.^^jomsîon, 
Physionomie. 

JEUNE  PREMIER.— EMPLOI.  Le mot«jeune)) 
est  là  par  tradition,  car  la  plupart  des  jeunes 
premiers  ont  atteint  un  âge  qui  repousse  le 
qualificatif.  Nous  avons  dit  au  mot  AGE  qu'il 
n'y  en  avait  pas  au  théâtre,  et  nous  mainte- 
nons notre  dire  par  des  exemples  :  Baron, 
après  une  retraite  de  trente  ans,  reparut  sur  la 
scène  et  joua  un  rôle  d'enfant  dans  les  Ma- 
chabées,  de  Delamotte  :  il  avait  soixante-dix 
ans  ;  M^^°  Thérèse  Lenoir,  femme  de  l'auteur 
Dancourt,  jouait  encore  à  soixante  ans  des 
rôles  d'ingénuité;  M"°  Mars  a  créé  Marie ^ 
ou  les  Trois  Époques^  —  comédie  dans  le  pre- 
mier acte  de  laquelle  elle  a  quinze  ans,  —  à 
plus  de  soixante  ans.  N'avons-nous  pas  eu  l'é- 
ternelle jeunesse  de  M.  Laferrière,  qui  jouait 

13 


—  146  — 

encore  des  jeunes  'premiers  au  moment  de  sa 
mort. 

JOCRISSE.— Un  des  types  comiques  inventés 
par  DoRviGNY  et  dont  le  succès  au  théâtre  fut 
l'œuvre  du  talent  de  Brunet.  Ce  personnage, 
naïf  jusqu'à  la  bêtise,  descend  des  Jodelets^ 
des  Pointus^  des  Jeannots,  personnages  entiè- 
rement passés  de  mode  aujourd'hui,  malgré 
leur  étourdissant  succès  près  de  nos  grands- 
pères.  La  Sœur  de  Jocrisse^  vaudeville  qui 
fait  encore  partie  du  répertoire  des  comiques 
de  province ,  a  donné  un  regain  de  vie  aux 
Jocrisses^  qui  vont  disparaître ,  submergés  par 
les  Calinos.  Au  fond,  c'est  toujours  le  même 
personnage,  moins  le  nom. 

JOURNAUX  DRAMATIQUES.  — Sangsues 

littéraires  qui ,  sous  prétexte  d'enregistrer  le 
talent  des  acteurs ,  leur  sucent  40  francs  par 
an,  et  plus.  Il  est  vrai  que  l'abonné  a  toujours 
du  talent  et  qu'on  érein. . .  qu'on  évite  de  parler 
de  ceux  qui  ne  le  sont  pas.  Bon  nombre  d'ac- 
teurs voulant  avoir  beaucoup ,  mais  beaucoup 
de  talent,  s'abonnent  aux  trois  ou  quatre  or- 
ganes spéciaux ,  ce  qui  fait  120  francs  à 
150  francs  prélevés  sur...  le  talent.  Et  dire 
que  c'est  encore  là  que  messieurs  les  direc- 


h.1 


147 


teurs  prennent   leurs    renseignements   pour 
former  leurs  troupes  1 


LA. —  Ce  pronom,  employé  dans  le  langage 
ordinaire  pour  désigner  une  personne,  est  un 
terme  de  mépris,  et  implique  généralement 
une  femme  de  mauvaises  mœurs.  Dans  la  lan- 
gue théâtrale,  il  change  complètement  d'ac- 
ception et  ne  s'accorde  qu'au  talent,  dont  il 
constate  la  popularité  et  la  supériorité.  On 
dit  :  la  Malibran,  la  Taglioni,  la  Gérito,  la 
Patti,  TAlboni. 

LANGER  LE  MOT.  —Souligner  un  mot, 
un  trait,  enfin  le  détacher  en  quelque  sorte 
du  dialogue,  afin  de  le  mieux  faire  comprendre 
au  public  et  qu'il  porte  plus  sûrement,  c'est 
lancer  le  mot. 

Un  acteur  intelligent  lance  le  mot  sans  avoir 
l'air  d'y  toucher;  d'autres  ont  tant  soin  d'y 
préparer  le  public  et  de  lui  dire  :  Attention, 
vous  allez  rire!  que  le  public  se  dit,  m 
petto  :  Nous  prend-il  pour  des  imbéciles? 


—  148  — 

LAPSUS  LINGUE.  —  Tout  le  monde  y  est 
sujet;  aussi  ne  parlons-nous  du  lapsus  que 
parce  qu'il  a  produit  au  théâtre  des  phrases 
assez  originales.  Ainsi,  un  amoureux  se  jette 
aux  genoux  d'une  femme,  qui  le  repousse,  en 
lui  disant  avec  désespoir  :  Un  mou  de  veau , 
madame I  Un  seul  mou  de  veau!  pour  un  mot 
de  vous.  —  Un  traître  sort  de  la  coulisse  et 
dit  d'une  voix  sourde  :  C'en  est  mort,  il  est 
fait  1  au  lieu  de  :  Cen  est  fait^  il  est  mort/ 

Nous  ne  savons  quelle  est  la  tragédienne 
qui  a  commis  celui-ci  : 

«  Mit  Rome  dans  mon  lit  et  Claude  à  mes  genoux.  » 

au  lieu  de  mit  Claude;  ni  le  comique  qui, 
ayant  à  citer  ce  proverbe  :  Mieux  vaut  tard 
que  jamais!  s'avisa  de  dire  :  Vieux  moutard 
que  f  aimais. 

Un  comparse  intelligent  avait  obtenu  un 
rôle  de  deux  mots.  Il  devait  dire  :  Sonnez, 
trompettes!  Il  répéta  son  rôle  tout  le  jour  et, 
le  moment  venu,  il  s'écria  :  Trompez,  son- 
nettes! La  peur  de  se  tromper  lui  avait  fait 
commettre  ce  lapsus. 

En  voici  un  plus  corsé  : 
Dans  un  opéra-comique  de  Fleury,  Olivette, 
joué  en  1726,  se  trouve  le  refrain  suivant  : 


—   149  — 

«  Un  petit  moment  plus  tard 
«  Si  ma  mère  n'était  venue, 
«  J'étais,  j'étais...  perdue.  » 

l'actrice  chargée  du  rôle  avait  pris  l'habitude 
de  chanter  ce  refrain  dans  la  coulisse,  en 
changeant  le  dernier  mot,  tout  en  conservant 
la  rime.  A  une  représentation,  ce  mot  grossier 
lui  échappa.  Ce  fut  un  coup  de  foudre.  Quel- 
ques femmes  s'enfuirent;  d'autres  se  réfugiè- 
rent derrière  leur  éventail  ;  le  parterre  deman- 
dait bis;  mais  la  police,  qui  est  gardienne  des 
mœurs,  apparut  sous  la  forme  d'un  exempt 
qui  pria  l'actrice  de  le  suivre,  et  elle  fut  en- 
fermée à  la  salle  Saint-Martin. 

LARUETTE.  —  EMPLOI  du  chant.  Laruette 
était  un  chanteur  comique  grime  de  V  Opéra- 
Comique  et  assez  bon  comédien.  Il  débuta  à 
la  foire  Saint-Laurent,  en  1752,  et  mourut  en 
1792,  en  laissant  son  nom  à  Y  emploi. 

LÉGISLATION  THÉÂTRALE.— La  légis- 
lation en  matière  de  théâtre  a,  comme  en  toute 
autre  matière,  subi  les  influences  des  milieux 
que  le  pays  a  traversés.  L'intérêt  privé  ou 
général ,  les  régimes  de  privilège  ou  de  liberté, 
les  mouvements  politiques,  les  questions  de 
morale  publique ,  la  censure,  le  progrès,  les 

13. 


—  150  — 

besoins  administratifs,  ont  donné  le  jour  à  de 
nombreuses  lois,  dont  nous  reproduisons  les 
plus  curieuses,  et  celles  restées  en  vigueur, 
dans  V Appendice  de  ce  volume. 

LEVER  DE  RIDEAU.  — Dans  les  théâtres 
où  le  gros  poisson  a  seul  de  l'attrait,  on  tient 
en  réserve  quelques  goujons  en  un  acte  qu'on 
sert  en  levei^  de  rideau.  C'est  un  hors-d'œuvre 
qui  passe  toujours  inentendu  et  laisse  au  pu- 
blic gourmand  de  la  grosse  pièce  le  temps 
d'arriver,  d'ouvrir  bruyamment  les  loges ,  de 
s'asseoir,  de  placer  les  petits  bancs,  de  se 
moucher,  de  regarder  dans  la  salle  si  on 
y  voit  des  connaissances,  d'acheter  le  pro- 
gramme, etc.,  etc.  Le  lever  de  indeau  est  une 
pièce  usée  ou  un  jeune  OURS. 

LIBERTÉ  DES  THÉÂTRES.  — La  loi  des 
6-18  janvier  1864  a  proclamé  de  nouveau 
«  la  liberté  des  théâtres  »  ;'(V.  cette  loi  à  l'Ap- 
pendice) nous  pensons  que  cette  liberté  a  tra- 
versé des  phases  assez  curieuses  pour  être 
consignées  ici  : 

1791  décrète  la  libei'té  des  théâtres;  mais 
1793  trouvant  que  cette  liberté  ne  suffisait 
pas  rend,  le  3  août,  le  décret  suivant  : 

«  Art.  1".  —  A  compter  du  4  de  ce  mois , 
«  et  jusqu'au  1"  septembre  prochain,  seront 


—   1.51    — 

«  représentées,  trois  fois  par  semaine,  sur  les 
a  théâtres  de  Paris  qui  seront  désignés  par  la 
«  municipalité,  les  tragédies  de  Brutus,  Guil- 
«  laume  Tell,  Caïus  Gracchus,  et  autres  pièces 
«  dramatiques  qui  retracent  les  glorieux  évé- 
ft  nements  de  la  Révolution  et  les  vertus  des 
«  défenseurs  de  la  liberté. 

«  Art.  2.  —  Tout  théâtre  sur  lequel  seront 
«  représentées  des  pièces  tendant  à  dépraver 
«  l'esprit  public  et  à  réveiller  la  honteuse 
«  superstition  de  la  royauté  sera  fermé,  et  les 
«  directeurs  punis  selon  la  rigueur  des  lois.  » 

Singulière  liberté! 

Le  18  juin,  même  année,  la  Commune 
«  considérant  que  ces  messieurs  (de  TOpéra) 
«  corrompent  l'esprit  public  par  les  pièces 
«  qu'ils  représentent  ...  arrête  :  que  le  Siège 
«  de  Thwnville,  pièce  vraiment  patriotique, 
«  sera  représentée  gratis  et  uniquement  pour 
«  l'amusement  des  sans-culottes,  etc.  » 

Autre  décret  du  3  septembre  1793,  toujours 
au  nom  de  la  liberté ,  approuvant  un  arrêté 
du  Comité  de  salut  public,  qui  déclare  «...  que 
«  les  acteurs  et  actrices  du  Théâtre-Français 
«  ont  donné  des  preuves  d'incivisme  caracté- 
«  risé  depuis  la  Révolution  et  représenté  des 
«  pièces  anti-patriotiques ,  arrête  : 

«  1°  Que  le  Théâtre-Français  sera  fermé; 


—  152  — 

«  2"  Que  les  comédiens  du  Théâtre-Français 
«  et  l'auteur  de  Paméla  (François  de  Neuf- 
cc  château)  seront  mis  en  état  d'arrestation 
«  dans  une  maison  de  sûreté  et  les  scellés 
«  apposés  sur  leurs  papiers.  » 

A  la  suite  de  ce  décret  la  plupart  des  comé- 
diens furent  jetés  en  prison,  où  ils  restèrent 
plus  d'une  année.  Dans  le  même  temps 
Sarrette  ,  directeur  du  Conservatoire,  fut 
arrêté  et  mis  en  prison  parce  qu'un  élève 
avait  joué  sur  son  cor  l'air  0  Richard!  ô 
mon  roi! 

Citons  un  autre  arrêté  du  18  nivôse  an.  YÇ 
(4  janvier  1796)  : 

«  Le  directoire  exécutif  arrête  :  «  Tous  les 
«  directeurs,  entrepreneurs  et  propriétaires 
«  de  spectacles  de  Paris  sont  tenus ,  sous  leur 
ce  responsabilité  individuelle,  de  faire  jouer 
«  chaque  jour  par  leur  orchestre,  avant  le 
«  lever  de  la  toile,  les  airs  chéris  des  républir 
«  cains ,  tels  que  la  Marseillaise^  Ça  ira^  Veil- 
«  Ions  au  salut  de  V empire^  le  Chant  du 
((  départ. 

«  Il  est  expressément  défendu  de  chanter... 
«  l'air  homicide  dit  le  Réveil  du  peuple.  » 

Cette  liberté  (?)  fut  supprimée,  en  1807,  par 
un  règlement  confirmatif  du  décret  du  8  juin 
1806,  et  les  théâtres,  dont  le  nombre  fut  ré- 


—  153  — 

duit  à  huit,  rentrèrent  sous  le  régime  du  pri- 
vilège, où  ils  restèrent  jusqu'au  18  janvier 
1864. 

Si  ce  nouveau  régime  de  liberté  donna  lieu 
à  l'édification  de  quelques  nouveaux  théâtres, 
il  ne  saurait  être  comparé  à  la  fièvre  qui  enva- 
hit la  France,  et  surtout  Paris,  après  la  loi 
de  1791. 

A  l'abri  de  cette  loi,  les  théâtres  poussèrent 
comme  des  champignons,  et,  comme  eux,  ne 
furent  pas  tous  bons.  Paris  seul  en  compta 
plus  de  quarante  ;  voici  une  liste  assez  curieuse 
de  leurs  noms,  en  laissant  de  côté  les  théâtres 
connus  : 

Le  théâtre  du  Marais,  rue  Culture -Sainte - 
Catherine  ; 

Le  théâtre  Comique^  rue  de  Bondy  ; 

Les  Variétés-Lyriques,  à  la  foire  Saint-Lau- 
rent ; 

Les  Variétés-Comiques ,  à  la  foire  Saint- 
Germain  ; 

Le  théâtre  des  Sans  -  Culottes ,  rue  Saint- 
Martin  ; 

Le  théâtre  des  Jeunes-Élèves,  rue  de  Thion- 
ville  (rue  Dauphine  actuelle)  ; 

Le  théâtre  du  Café-Guillaume,  rue  des  Mar- 
tyrs ; 


—  154  — 

Le  théâtre  du  Mont- Parnasse^  boulevard 
Neuf; 

Le  théâtre  des  Amis-de-la-Paùne,  rue  de 
Lancry  ; 

Le  théâtre  des  Jeunes-Artistes ,  rue  de  Lan- 
cry ; 

Le  théâtre  Marcus  ou  de  Thalie^  rue  Saint- 
Antoine  ; 

Le  théâtre  des  Champs-Elysées; 

Le  théâtre  des  Muses,  rue  de  TEstrapade  ; 

Le  théâtre  Patinotique  ^  boulevard  du  Tem- 
ple ; 

Le  théâtre  du  Wauxhall,  boulevard  Saint- 
Martin  ; 

Le  théâtre  Sans-Prétention,  rue  du  Bac  ; 

Les  deux  théâtres  de  la  place  Louis-Quinze  ; 

Le  théâtre  des  Ti^oubadours,  rue  Chante- 
reine  ; 

Le  théâtre  de  la  Cité  ; 

Le  théâtre  Doyen,  rue  Transnonain  ; 

Le  théâtre  Moreau,  au  Palais-Royal  ; 

\jQi\iQkivQ  du  Cirque,  au  Palais -Royal  (il 
occupait  l'emplacement  du  bassin  actuel  et 
était  presque  enterré)  ; 

Le  cirque  Astley,  faubourg  du  Temple  ; 

Le  théâtre  d'Émulation,  rue  Notre-Dame- 
de-Nazareth  ; 


—  155  — 

Les  Élèves-de-Thalie^  boulevard  du  Temple  ; 

Le    théâtre    du    Café-Yon,    boulevard    du 
Temple  ; 

Le  théâtre  de  la  Concorde,  rue  du  Renard- 
Saint-Méry  ; 

Le  Petit-Comédien-Français,  boulevard  du 
Temple  ; 

Le  Lycée-Dramatique,  boulevard  du  Temple  ; 

Le  théâtre  du  Café -Godet,  boulevard  du 
Temple. 

La  plupart  de  ces  théâtres  n'eurent  qu'une 
existence  éphémère  et  leurs  galles  furent  dé- 
molies ou  devinrent  des  ateliers  ;  quelques- 
uns,  comme  le  Vauxhall,  le  théâtre  de  la  Cité, 
se  transformèrent  en  salle  de  bal  et  vécurent 
jusqu'aux  grands  changements  de  voirie  muni- 
cipale ;  d'autres,  enfin,  servirent  à  former  des 
élèves  :  tels  furent  le  théâtre  Doyen,  qui  vit 
les  premiers  essais  de  Samson,  Provost,  Li- 
GiER,  Bocage,  Mbnjaud,  Beauvallet,  Bouffé, 
Arnal,  M""^  Brohan  ;  celui  des  Jeunes-Élèves, 
rue  Dauphine ,  d'où  sortit  Déjazet,  et  la  salle 
Chantereine,  ancien  théâtre  des  Troubadours. 

LIBRETTO.  —  Nom  dont  on  se  sert  commu- 
nément pour  désigner  le  poëme  d'un  opéra. 
On  dit  encore  livi^et,  qui  est  la  traduction  fran- 
çaise du  mot  libretto. 


—  156  — 

LIGEN  GE.  —  Synonyme  de  liberté,  au  théâtre 
comme  partout. 

LIVRÉE.  —  Emploi.  On  disait  autrefois  : 
grande  et  petite  casaque.  La  grande  livrée  com- 
prend les  Labranche,  les  Frontin ,  les  Masca- 
carille  :  ces  valets  hardis,  fripons,  libertins  et 
spirituels  du  vieux  répertoire.  Molière,  Sam- 
son,  GoT  et  GoQUELiN  ont  illustré  la  grande 
casaque.  La  petite  livrée  comprend  tous  les 
valets  de  service. 

LOCATION.  ~  Les  loges  et  toutes  les  places 
numérotées  d'un  théâtre  peuvent  se  louer  à 
l'avance,  en  s'adressant  au  bureau  de  location 
ouvert  à  cet  effet.  Geci  est  bien  ;  mais  ce  qui 
est  mal,  c'est  la  surtaxe  énorme  imposée  à 
cette  location^  surtaxe  qui  varie  de  30  à  50 
p.  100,  quand,  logiquement,  on  devrait  faire 
une  diminution  à  celui  qui  apporte  son  argent 
à  l'avance,  ou  tout  au  moins  lui  livrer  la  place 
au  prix  du  bureau  ;  c'est  ce  que  fait  le  Théâtre- 
Lyrique  dramatique,  et  il  faut  lui  savoir  gré 
de  cette  innovation. 

LOGES  .  — Petites  boites,  grillées,  couvertes  ou 
découvertes,  placées  un  peu  partout  dans  l'in- 
térieur d'une  salle  ;  quelques-unes  sont  faites 
en  forme  de  box. 


—   157  — 

Il  y  a  des  loges  où  les  femmes  se  mettent 
pour  voir  sans  être  vues ,  et  d'autres  où  elles 
se  mettent  pour  être  vues  sans  voir.  Il  y  a 
même  des  loges  où  on  ne  vous  voit  pas  et  d'où 
vous  ne  voyez  rien  :  que  peut-on  bien  y  aller 
faire?  Si  c'est  un  mystère,  respectons-le.  Les 
ouvreuses  prétendent  que  ces  mauvaises  loges 
sont  les  plus  fructueuses  pour  elles. 

—  Se  dit  encore  des  cellules  où  les  acteurs  et 
actrices  s'habillent  et...  vice  versa.  L'entrée 
en  est  formellement  interdite  au  public . . . 

Mais  la  garde  qui  veille  aux  barrières  du  Louvre 
N'en  défend  pas  les  rois 

de  cœur.  L'ameublement  de  quelques-unes  de 
ces  cellules  se  chiffre  par  3  ou  4  zéros  devancés 
d'un  gros  chiffre. 

LOINTAIN.  —  C'est  ainsi  qu'on  nomme  le 
fond  du  théâtre,  par  opposition  au  mot  face^ 
qui  désigne  le  devant  ou  l'avant-scène. 

LORGNETTE.—  Instrument  perfide  et  indis- 
cret qui  ne  sert  qu'à  détruire  l'iLLUSION  qu'on 
vient  chercher  à  prix  d'argent.  Vous  voyez  à 
l'œil  nu  un  visage  charmant,  un  teint  frais, 
des  lèvres  vermeilles ,  des  yeux  bien  fendus , 

U 


—  158  — 

un  col,  des  bras  et  des  mains  blanches,  un 
signe  gracieux  et  provocateur;  mais  si  vous 
prenez  votre  lorgnette^  quels  changements, 
grands  dieux  I  Vous  voyez  une  couche  de 
plâtre  et  du  vermillon  dessus,  des  sillons  bleus, 
comme  le  tracé  d'un  chemin  de  fer  sur  une 
carte,  une  large  bordure  d'ocre  autour  des 
yeux,  et  un  pain  à  cacheter  au  lieu  d'un  signe  î 
Il  vaut  mieux  regarder  par  le  petit  bout.  — 
V.  Maquillage. 

LUSTRE.  —  Soleil  théâtral  dont  la  première 
application  fut  faite  à  VOdéon^  en  1784,  par 
MM.  Langlé  et  Quinquet,  d'après  le  système 
de  ce  dernier. 


M 


MACHINISTE.  —  Employé  chargé  de  la  ma- 
nœuvre générale  des  décors,  machines,  trucs 
d'un  théâtre.  Il  est  secondé  dans  ses  fonctions 
par  une  équipe  qui  obéit  à  son  sifflet  ou  à  ses 
ordres,  comme  on  le  fait  sur  un  navire. 

MAGASIN.  —  Se  dit  du  local  où  sont  déposés 
les  décors,  armes,  costumes  et  autres  parties 


—  159  — 

du  matériel  d'un  théâtre.  L'arrêté  du  1"  ger- 
minal an  VII  ordonne,  art.  1**^,  «  que  le  maga- 
sin sera  séparé  de  la  salle  de  spectacle  ». 
Excepté  à  Paris,  cet.  article  est  peu  observé. 

Magasin  se  dit  encore  des  costumes ,  décors 
et  matériel  possédés  par  d'anciens  directeurs 
de  province,  et  qui  en  font  location  à  ceux 
qui  n'en  ont  pas,  quand  eux-mêmes  n'ont  pas 
de  direction.  Quelques-uns  possèdent  deux  et 
trois  magasins,  et  en  font  profession. 

MAGASINIER.  —  Celui  qui  est  chargé  de  la 
garde  du  magasin.  Presque  partout  en  province 
c'est  le  chef  machiniste  qui  est  magasinier  en 
même  temps  qu'il  est  concierge  du  théâtre 
et  chargé  des  réparations  du  matériel. 

MAILLOT.  —  Prohpudor  I  Schoking  I  rassu- 
rez-vous, lectrices,  nous  ne  regarderons  pas 
sous  les  mailles.  Le  maillot,  du  nom  de  son 
inventeur,  est  un  habillement  complet,  couleur 
chair,  collant  à  la  peau,  en  coton  ou  en  soie, 
—  le  maillot,  pas  la  peau  —  en  usage  pour 
la  danse  ou  les  travestis  :  les  diables  et  les 
nègres  ont  des  maillots  noirs. 

Le  maillot  est  un  grand  sorcier  ;  il  redresse 
les  tors,  efface  les  bosses  du  dos  et  en  donne 
à  la  poitrine,  développe  les  muscles  de  la  jambe 


—  160  — 

de  façon  à  pouvoir  y  piquer  —  sans  douleur 
—  des  épingles  dans  les  mollets,  et...  mais  ne 
soyons  pas  indiscrets. 

On  appelle  porte-maillot  les  figurantes  de 
féeries,  de  ballets,  de  pièces  à  femmes  secon- 
daires et...  au-dessous. 

MANIÈRES.  —  C'est  Vaffectation  poussée  à 
l'extrême.  Il  faut  être  bien  gracieux  pour  faire 
accepter  le  genre  maniéré,  qui  finit  à  la  longue 
par  fatiguer. 

Quelques  actrices  font  des  manières  en  de- 
hors de  la  scène  ;  ceci  dit  pour  placer  la  petite 
anecdote  suivante  : 

Une  actrice,  connue  pour  ses  nombreuses 
aventures  galantes,  refusait  de  se  charger  d'un 
rôle  de  courtisane  dans  une  grande  pièce  en 
DISTRIBUTION  au  Théâtre-Françak.  —  Et  pour 
quel  motif  ?  lui  demanda  son  camarade  Gran- 
VAL.  —  Mais,  mon  cher,  une  femme  qui  se 
respecte  ne  peut  se  charger  d'une  pareille 
horreur  I  —  Bon,  bon,  reprit  Granval,  prenez 
toujours  le  rôle;  c'est  notre  métier,  il  ne  faut 
rien  refuser.  C'est  à  force  de  jouer  les  fats 
que  j'apprends  tous  les  jours  à  me  corriger. 

MANTEAU  (ROLES  A).  —  Emploi.de  l'an- 
cien répertoire;  il  est  remplacé  do  nos  jours 
par  les  pères  nobles  et  les  financiers. 


—  161    — 

MANTEAU  D'ARLEQUIN.—  Partie  de  la 
SCÈNE  qui  commence  au  RIDEAU  et  se  termine 
au  premier  plan  des  coulisses  ;  elle  est  géné- 
ralement décorée  en  forme  de  draperie  de 
couleur  rouge.  Les  loges  de  la  direction,  des 
acteurs  et  des  pompiers  de  service  sont  prises 
dans  le  manteau  d'Arlequin.  Deux  ou  trois 
théâtres  de  Paris  y  ont  des  loges  pour  le 
public.  Arlequin,  de  l'ancienne  Comédie-Ita- 
lienne, faisait  toujours  son  entrée  par  cette 
fausse  coulisse,  et  lui  a  donné  son  nom. 

MAQUILLAGE.  —  Ce  mot,  qui  n'existe  pas 
dans  le  dictionnaire  de  l'Académie ,  provient 
sans  doute  d'un  terme  de  marine  dont  nous 
ne  pouvons  décemment  indiquer  la  portée.  Il 
est  passé  de  Vargot  dans  les  coulisses  et  aussi, 
avec  la  chose,  dans  le  monde.  Chacun  sait 
qu'il  veut  dire  se  farder  complètement,  se 
faire  une  tête.  Dans  le  monde,  c'est  un  abus 
de  coquetterie;  au  théâtre,  c'est  une  nécessité 
du  métier,  ce  qui  n'empêche  pas  l'abus. 

Yoici  l'arsenal  des  substances  et  outils  em- 
ployés pour  le  maquillage  :  crème  bistre,  blan- 
che et  rose;  rouge  végétal^  rouge  liquide, 
rouge  de  Chine,  carmin,  blanc  de  lis,  blanc  de 
baleine,  cire  vierge,  poudi^e  d'iris,  poudre  de 
riz,  eau  de  lis,  pommade  de  concombre ,  noir 

14. 


—  162  — 

indien^  encre  de  Chine ^  réseau  d'azur  pour  les 
veines;  ocre^  bistre^  koheuil  pour  donner  de 
Téclat  aux  yeux;  incarnat^  crayons  pour  om- 
brer et  noircir  les  cils  et  sourcils  ;  liège  brillé^ 
noir  de  fumée ,  etc.  :  le  tout  s'appliquant  avec 
des  pattes  de  lièvre,  des  houpes,  des  palettes, 
des  pinceaux,  de  grosses  aiguilles,  etc.  Les 
cosmétiques  et  ingrédients  de  bonne  qualité 
coûtent  fort  cher,  ce  qui  fait  qu'on  se  sert 
assez  communément  de  substances  ordinaires, 
nuisibles  à  la  santé,  qui  détruisent  en  peu  de 
temps  la  fraîcheur  du  teint  et  le  poussent  au 
jaune. 

Le  talent  du  maquillage  est  poussé  si  loin 
par  certaines  femmes  que  leurs  familiers 
même  qui  ont  le  malheur  de  les  surprendre 
avant  l'opération  —  ce  qu'elles  ne  pardonnent 
jamais  —  ne  les  peuvent  reconnaître.  La  Gui- 
MARD,  qui  était  fort  jolie,  avait  fait  faire  son 
portrait  à  vingt  ans  et  l'avait  placé  dans  son 
cabinet  de  toilette,  duquel  elle  ne  sortait  que 
lorsque  sa  figure  et  son  portrait  étaient  res- 
semblants. Elle  ne  se  départit  pas  un  seul  jour 
de  sa  longue  carrière  de  cette  opération. 

MARCHER  SUR  SA  LONGE.— Si  le  temps 
est  un  grand  maître ,  c'est  aussi  une  grande 
meule  qui  use  terriblement  les  hommes.  Le 


-    163  — 

comédien  vieilli  qui  ne  veut  pas  se  rendre  à 
l'évidence ,  marche  sur  sa  longe.  On  le  sup- 
porte par  prestige  ou  par  respect  pour  son 
passé,  mais  il  ne  produit  plus  A' effet;  le  fa- 
meux Baron,  le  Roscius  français,  éprouva  ce 
déboire.  Il  lui  prit  fantaisie  de  remonter  sur 
la  scène  à  l'âge  de  quatre-vingts  ans,  et  de 
jouer  Rodrigue  du  Cid.  Tout  alla  bien  jusqu'à 
ces  deux  vers  : 

«  Je  suis  jeune,  il  est  vrai;  mais  aux  âmes  bien  nées, 
«  La  valeur  n'attend  pas  le  nombre  des  années.  » 

Le  parterre  se  mit  à  rire.  Baron  recom- 
mença; le  parterre  rit  de  nouveau.  Alors  Ba- 
ron, s'adressant  au  public,  lui  dit  :  «  Mes- 
sieurs, je  vais  recommencer  pour  la  troisième 
fois  ;  mais  je  vous  avertis  que,  si  l'on  rit  encore, 
je  quitte  le  théâtre  et  n'y  remonterai  de  ma 
vie.  »  On  fit  silence  et  il  continua  son  rôle  , 
mais  il  ne  put  se  relever  seul  lorsqu'il  se  mit 
aux  pieds  de  Gliimène.  N'y  a4-il  pas  encore 
aujourd'hui  quelques  comédiens  qui  marchent 
sur  leur  longe  ? 

MARIAGE. —  Bien  que  le  théâtre  n'ait  rien 
de  commun  avec  la  maison  Foy,  il  sert  ce- 
pendant de  tremplin  à  quelques  beaux  ma- 
riages. Nous  en  citerons  quelques-uns,  sans 


—  164  — 

remonter  plus  haut  que  notre  siècle,  afin 
d'abréger  la  liste. 

Le  chant  a  fourni  :  M°^°  Sontag,  devenue 
comtesse  Rossi;  TAlboni,  aussi  forte  femme 
que  forte  chanteuse,  —  un  rossignol  enfermé 
dans  une  tour  —  est  comtesse  Pepoli  ;  Ade- 
LiNA  Patti,  dit  le  Nid  de  Fauvette,  marquise 
DE  Gaux  ;  Sophie  Gruvelli,  vicomtesse  Vigier  ; 
Pauline  Lucca,  baronne  de  Rhodes  ;  M^^"  Nal- 
DY,  comtesse  de  Sparre;  W^^  Stolz,  baronne 
de  Kischendorff  ,  puis  duchesse  de  Lésignano 
San-Marino;  M™^  de  Lagrange,  comtesse 
DE***  ;  W^^  Daram  a  épousé  le  frère  de  sir 
Richard  Wall  ace. 

Passons  à  la  danse  :  M^^°  Taglioni  est  com- 
tesse Gilbert  des  Voisins;  Maria,  baronne 
d'Henneville  ;  Adèle  Dumilatre  ,  comtesse 
Glarke  DEL  Gastillo;  Virginie  Morel,  ba- 
ronne DU  Verger  ;  Thérèse  Essler  a  épousé 
le  frère  du  roi  de  Prusse;  sa  sœur,  Fanny 
EssLER,  faite  comtesse  Edda  par  le  roi  de 
Prusse,  a  épousé  don  Fernando,  père  du  roi 
de  Portugal. 

Le  drame  et  la  comédie  sont  moins  bien 
partagés  :  M™^  Ristori  est  devenue  marquise 
DEL  Grillo  ;  M'^°  Colas,  baronne  de  Hendel. 

Voici  pour  les  mariages  réguliers.  Si  nous 
publiions  ceux  de  la  main  gauche^  nous  pro- 


—  165  — 

duirions  une  forte  hausse  sur  le  papier  :  nous  le 
trouvons  assez  cher  et  nous  nous  abstenons. 

MARIVAUDAGE.  —  Ce  mot  est  dû  au  genre 
gracieux  et  maniéré  tout  à  la  fois  qui  forme 
le  fond  du  style  de  Marivaux.  La  petite  comé- 
die de  genre  et  le  proverbe  ont  continué  le 
marivaudage.  C'est  ce  qu'on  pourrait  appeler 
la  coquetterie  en  miniature. 

MASQUE.  — Dans  le  théâtre  antique,  les  ac- 
teurs se  mettaient  un  masque  qui  servait  en 
même  temps  de  porte-voix  :  il  y  avait  le  mas- 
que tragique  et  le  masque  comique.  De  nos 
jours  le  masque  n'est  plus  usité  que  dans  les 
féeries. 

MATS. —  Ce  sont  les  hautes  pièces  de  bois, 
emboîtées  dans  les  GOSTIÈRES  et  qu'on  emploie 
en  remplacement  des  FAUX  CHASSIS.  Ils  sont 
traversés  par  des  tiges  de  fer  en  bâtons  de  per- 
roquet ou  garnis  de  chantignoUes  qui  rem- 
placent l'échelle  du  faux  châssis. 

MÉDECIN. — Il  y  a,  comme  mesure  de  sûreté, 
un  médecin  nommé  près  de  chaque  théâtre  et 
qui  DOIT  ASSISTER  à  chaque  représentation , 
tant  dans   l'intérêt    des  spectateurs,  en  cas 


—  166  — 

d'accident,  que  dans  celui  des  acteurs.  Cette 
place  est  peu  lucrative,  mais  elle  offre  quel- 
ques avantages  particuliers  à  ceux  qui  ont  du 
savoir,  et  une  position  à  ceux  qui  n'en  ont 
pas  plus  que  de  clientèle.  Nous  avons  connu 
un  médecin  de  théâtre  dont  on  disait  :  «  Celui 
qui  se  servira  de  l'Épée,  périra  par  Lépée!  » 
—  c'était  son  nom. — La  directrice,  ayant 
une  forte  fluxion  à  la  joue,  consulta  le  doc- 
teur, qui  lui  ordonna  des  cataplasmes  sur  le 
ventre  et  des  synapismes  aux  mollets  ;  mais 
la  tête  enflait  toujours  !  Elle  consulta  un  autre 
médecin  qui ,  après  l'avoir  examinée,  lui  dit  : 
«  Vous  avez  une  dent  gâtée;  je  vais  vous  l'ar- 
racher et  il  n'y  paraîtra  plus,  »  ce  qu'il  fit. 
La  fluxion  disparut  et  le  médecin  Lépée  fut 
convaincu  que  son  remède  avait  opéré. 
C'est  toujours  la  même  chose  depuis  Molière. 
(V.  à  V Appendice  le  décret  du  2  mai  1852.) 

MÉDECINE.  — Le  théâtre  renferme  un  peu 
de  tout,  même  des  formules  pharmaceutiques 
qui  ne  figurent  pas  dans  le  Codex.  En  voici 
une  : 

Procope-Couteau  ,  le  fils  du  fameux  Pro- 
coPE  qui  établit  le  premier  café  en  France  , 
était  attaqué  par  le  spleen.  Il  allait  chaque  soir 
à  la  comédie  pour  dissiper  sa  mélancolie,  sans 


—   167  — 

grand  succès.  Cependant  un  jour  qu'il  avait 
vu  une  certaine  arlequinade,  il  lui  prit  fan- 
taisie de  faire  une  pièce  du  même  genre, 
sous  le  titre  à' Arlequin  balourd.  Plein  de  son 
sujet  il  dormit  mieux,  le  lendemain  il  se  mit 
à  la  besogne  ;  au  bout  de  dix  jours,  sa  pièce 
était  terminée  et  son  spleen  tout  à  fait  disparu. 
La  pièce  fut  jouée  avec  un  grand  succès,  et 
son  auteur  fut  à  jamais  guéri.  Ce  remède 
date  de  1769. 

MÉLODRAME.  —La  loi  de  1807,  en  limitant 
les  genres  et  en  les  distribuant  à  chacun  des 
huit  théâtres  autorisés,  avait  en  quelque  sorte 
tué  l'avenir.  Quelques  chimistes  dramatiques 
se  mirent  à  la  recherche  de  l'inconnu  et  eu- 
rent l'idée  de  mettre  dans  une  cornue  un 
traître,  un  amoureux,  une  femme  innocente 
et  persécutée,  un  niais  et  un  personnage  ver- 
tueux ;  on  y  joignit  un  peu  de  musique  pour 
marquer  les  ENTRÉES,  trémolo,  —  les  SORTIES, 
trémolo,  la  catastrophe,  trémolo.  De  cet  amal- 
game bien  trituré,  bien  fondu,  bien  cuit, 
naquit  le  mélodrame.  Guilbert  de  Pixéri- 
couRT,  Gaigniez  ,  VicTOR  DucANGE  en  furent 
les  plus  illustres  fabricants  ;  puis  vinrent  Bou- 
CHARDY  etc'ENNERY,  mais  avec  des  compli- 
cations qui  les  éloignent  du  genre  primitif. 


~   168  — 

«  Le  mélodrame,  a  dit  Geoffroi  le  critique, 
est  un  opéra  en  prose  qui  n'a  que  la  parole , 
et  où  la  musique  fait  l'office  de  valet  de 
chambre,  puisqu'elle  est  simplement  chargée 
d'annoncer  les  acteurs.  Le  mélodrame,  n'étant 
gêné  par  aucune  des  règles  de  l'art  drama- 
tique, peut  offrir  les  situations  les  plus  étran- 
ges ;  on  y  peut  rendre  l'intérêt  assez  vif  pour 
qu'on  n'ait  pas  même  besoin  de  style,  ce  qui 
est  d'une  extrême  commodité  pour  les  auteurs 
sans  talent  et  pour  les  spectateurs  sans  juge- 
ment. » 

Cette  définition  du  critique  est  encore  exacte 
aujourd'hui. 

MÈRE  D'ACTRICE.  —  Dans  une  carrière 
aussi  scabreuse  que  celle  du  théâtre,  une 
jeune  femme  doit  avoir  un  porte-respect.  Cette 
nécessité  a  fait  naître  la  profession  de  mère 
d'actrice  pour  celles  qui  n'en  ont  pas,  ou  qui 
en  ont  qui  ne  veulent  pas  se  prêter  aux  exi- 
gences de  la  position.  On  loue  une  mère  comme 
les  mendiants  louent  des  enfants.  Sa  mission 
est  assez  compliquée  :  elle  accompagne  «  sa 
fille  »  au  théâtre,  reçoit  les  billets  doux,  les 
propositions  honnêtes,  c'est-à-dire  lucratives, 
et  celles  nées  du  sentiment.  Elle  repousse 
celles-ci  et  débat  les  premières  au  nom  de  la 


—   109  - 

vertu,  qui  n'est  en  ce  cas  qu'une  question  de 
chiffres,  et  fait  tout  ce  qui  concerne  son  état. 

Le  bonheur  naît  des  obstacles  qu'il  ren- 
contre :  la  mère  d'actrice  en  est  un  créé  par 
l'art  ou  la  nature.  Jugez  de  ce  que  peut  valoir 
pour  un  cœur  bien  épris  cette  simple  phrase  : 
«  Que  dira  ma  mère  ?  » 

Le  docteur  Véron  ,  dans  ses  Mémoires  d'un 
Bourgeois  de  Paris,  nous  édifie  sur  certaines 
mè7'es  d'actrices  en  écrivant  ceci  : 

«  J'ai  entendu  un  singulier  sermon  fait  par 
((  la  mère  d'une  artiste  à  sa  fille.  Elle  lui 
«  reprochait  de  montrer  trop  de  froideur  à 
-  «  ceux  qui  l'aimaient.  —  Sois  donc  pour  eux 
«  plus  aimable,  plus  tendre,  plus  empressée  ! 
«  si  ce  n'est  pour  ton  enfant,  pour  ta  mère, 
«  que  ce  soit  au  moins  pour  tes  chevaux.  » 

Voici  une  nuance  moins  crue  :  M^^°  X... 
tenait  fort  au  cœur  du  jeune  comte  de  V... 
qui  la  suivait  à  la  sortie  du  théâtre  en  lui 
faisant  compliment  sur  son  talent.  Quelqu'un 
en  félicitait  la  mère  de  M^^°  X...  qui  répondit  : 
«  Vous  faites  beaucoup  trop  d'honneur  à  ma 
fille  ;  M.  le  comte  n'en  est  encore  qu'aux  poli- 
tesses de  foyer.  » 

METTRE   DU   BOIS.  —  Chauffer  le  public 
de  l'intérieur  d'une  salle  par  des  amis  officieux 


—   170  — 

qui  vont  du  parquet  aux  galeries  s'extasier 
sur  le  mérite  de  l'œuvre,  le  talent  des  auteurs, 
la  richesse  de  la  mise  en  scène,  etc. 

MIME.  —  Le  mime  n'est  plus  représenté  dans 
le  théâtre  moderne,  plutôt  actuel,  que  par 
Pierrot  y  ce  type  dont  les  deux  derniers  grands 
représentants ,  Debureau  et  Paul  Legrand, 
sont  morts  récemment.  Il  faut  croire  que  les 
mmes  antiques,  très  en  vogue  chez  les  Romains, 
avaient  une  façon  irrésistible  dans  le  geste, 
puisque  l'un  d'eux,  nommé  Paris,  devint  le... 
suppléant  conjugal  de  Domitien,  lequel  répu- 
dia sa  femme  pour  ce  fait  et  fit  étouffer  Paris, 
ainsi  qu'un  autre  mime  qui  lui  ressemblait. 
Excusez  ! 

MIMIQUE. —  Art  d'exprimer  par  des  gestes  ce 
qu'on  devrait  dire  par  des  paroles,  hdi  mimique 
est  surtout  obligatoire  pour  les  chefs  de  la 
danse,  qui  sont  chargés  de  représenter  les  per- 
sonnages d'un  BALLET.  Les  rôles  de  muets, 
dans  le  répertoire  général ,  comme  le  Muet 
d'Ingouville,  Y  Idiot  ^  Fenella  de  la  Muette^ 
appartiennent  à  la  mimique. 

MIMODRAME.— C'est  un  genre  bâtard  qui 
fut  enfanté  par   le  privilège.  On  accorda  à 


—  171   — 

quelques  théâtres  le  droit  de  faire  parler  un 
sew/ acteur  en  scène  ;  les  autres  lui  répondaient 
par  signes ,  c'est-à-dire  eti  mimant  ;  de  là  le 
mot  mïmodrame.  On  était  parvenu,  par  un 
tour  d'adresse,  à  escamoter  l'ordonnance  : 
quand  il  y  avait  trois  personnages  en  scène, 
l'un  parlait  de  droit;  les  deux  autres  lui  répon- 
daient par  signes,  tandis  qu'un  personnage 
placé  dans  la  coulisse  disait  les  paroles  en  rap- 
port avec  les  signes.  Aujourd'hui  le  mimodrame 
est  du  domaine  des  cirques  et  théâtres  forains. 

MISE  EN  SCÈNE.  —  Si  le  théâtre,  au  point 
de  vue  littéraire,  n'a  pas  fait  de  grands  pro- 
grès depuis  Molière,  il  a  fait  des  pas  de  géant 
du  côté  de  la  mise  en  scène.  La  place  publique 
et  le  salon,  où  l'on  peut  jouer  tous  les  chefs- 
d'œuvre  du  grand  homme,  feraient  triste  figure 
dans  les  ouvrages  dramatiques  d'aujourd'hui. 
Une  pièce  écrite,  distribuée  et  sue  est  encore 
quelque  chose  d'informe.  C'est  une  statue  :  il  y 
manque  l'animation.  C'est  au  mettew  en  scène 
qu'appartient  le  souffle  de  vie  ;  c'est  à  lui  de 
le  répandre  en  réglant  les  mouvements,  les 
passades,  les  groupes,  les  entrées  et  sorties  ; 
en  disposant  les  accessoires  en  rapport  avec  les 
l)esoins  de  l'action.  C'est  une  science  qui  doit 
l)caucoup  aux  elforts  de  Beaumarchais  qui  hi 


—  172  — 

fit  sortir  de  la  routine,  et,  depuis  lui,  aux 
RÉGISSEURS  intelligents,  ainsi  qu'à  quelques 
auteurs.  Dumas  fils  et  Sardou  sont  de  remar- 
quables mettews  en  scène. 

MONOLOGUE.  —  Pièce  à  un  seul  personnage. 
Se  dit  aussi  d'une  grande  scène  où  un  seul 
personnage  a  un  grand  couplet  à  dire,  tel  que 
le  monologue  de  V Avare ^  de  Figaro^  à'Bamlet, 
à'Hernani^  de  Ruy-Blas. 

MONOPOLE.  —  Mot  qu'il  ne  faut  pas  con- 
fondre avec  PRIVILÈGE,  dont  nous  parlerons  à 
son  tour. 

Le  monopole  dont  nous  parlons  est  un  genre 
de  traité  occulte  fait  entre  un  directeur  et 
quelques  auteurs,  par  lequel  ces  |derniers  ont 
presque  la  fourniture  exclusive  d'un  théâtre. 
On  ne  peut  y  avoir  accès  qu'en  passant  par 
leur  canal  ;  de  là,  le  nombre  des  collaborateurs 
que  vous  voyez  souvent  pour  un  malheureux 
vaudeville  en  un  acte  ;  c'est  ce  qui  donne  éga- 
lement toujours  les  mêmes  noms  pour  les 
REVUES.  Ce  monopole  constitue  de  bonnespetites 
rentes  sur  le  travail  d'autrui.  Voici,  à  ce  sujet, 
ce  qu'écrivait  en  1820  un  de  nos  devanciers  : 

«  Dans  les  petits  théâtres,  une  ligue  d'acca- 
«  pareurs  s'est  établie  de  telle  sorte,   qu'un 


—  173  — 

«  auteur  débutant  ne  peut  être  admis  à  faire 
«  jouer  une  pièce  s'il  n'a  d'abord  associé  à  son 
«  travail,  du  moins  à  ses  profits  présumés,  un 
«  des  privilégiés  dont  les  noms  occupent  sur 
«  l'affiche  une  place  inamovible.  » 

MONOTONIE.  —  MM.  Tel,  Tel,  Tel;  et 
j^mes  et  ]^nes  Ghoses,  Machin  et  autres,  ex- 
pliquent mieux  par  leur  JEU  et  leur  DÉBIT  le 
mot  monotonie  que  nous  ne  le  pourrions  faire 
avec  notre  plume.  Le  lecteur  pourra  mettre 
les  noms  propres. 

MORALE.  —  Qu'est-ce  que  ce  mot  vient  faire 
dans  cette  galère  ?  va-t-on  s'écrier.  Il  vient 
combattre  une  erreur  trop  propagée  :  à  savoir 
que  le  théâtre  corrige  les  mœurs. 

Le  théâtre  n'est  pas  une  chaire,  mais  un 
miroir  qui  réfléchit  les  vices  et  les  ridicules  de 
l'espèce  humaine.  Il  ne  peut  avoir  la  préten- 
tion de  corriger  les  masses  par  l'exposition  de 
ses  tableaux.  Il  exprime  les  mœurs  d'une 
époque  et  d'une  nation,  mais  il  est  impuissant 
pour  les  changer  et  les  modifier. 

Il  n'est  pas  nécessaire  qu'une  pièce  soit  im- 
morale pour  qu'elle  ne  soit  pas  morale.  Voici 
à  ce  propos  l'opinion  de  de  Boissy,  à  laquelle 
nous  nous  rallions  :   «  Le  théâtre  est  l'école 

15. 


—  174  — 

«  et  l'exercice  des  passions,  puisque  son  objet 
«  est  de  les  exciter,  et  que  c'est  de  cet  effet 
a  que  dépend  le  succès  dramatique  de  toute 
«  pièce  »... 

«  Si  le  dénoûment  d'une  pièce  «est  moral, 
«  la  morale  vient  trop  tard.  L'esprit  et  le  cœur 
«  qui  ont  été  excités  pendant  quatre  ou  cinq 
«  actes  ne  peuvent  s'apaiser  subitement  devant 
«  un  châtiment  que  le  spectateur  sait  fictif.  On 
a  sait  que  l'or  a  son  prix  partout  où  il  se 
«  rencontre,  mais  qu'il  n'en  donne  jamais  à 
«  l'impureté  qui  fait  son  alliage.  » 

Si  le  théâtre  est  impuissant  à  moraliser  les 
masses  par  l'exposition  de  doctrines  morales 
et  de  personnages  moraux,  il  est  au  contraire 
puissant  pour  propager  le  vice  et  les  mauvaises 
doctrines.  Il  semble  qu'il  y  ait  toujours  dans 
l'espèce  humaine  une  terre  toute  préparée 
pourrecevoir  la  semence  du  mal  et  la  faire  fruc- 
tifier, tandis  que  le  terrain  du  bien  est  telle- 
ment aride  que  le  vent  emporte  la  bonne 
semence  aussitôt  qu'on  l'y  répand.  Gela  est  si 
vrai  que,  s'il  en  était  autrement,  le  monde 
serait  une  société  parfaite,  et  chacun  de  nous 
un  petit  saint,  car  depuis  deux  mille  ans  le 
théâtre  ne  fait  autre  chose  que  de  critiquer 
nos  ridicules,  nos  vices  et  nos  crimes.  Les 
premiers  convertis  seraient  à  coup  sur  ceux 


-    175   — 

qui  apprennent  par  cœur  et  débitent  ces  prin- 
cipes moraux,  ainsi  que  ceux  qui  les  écrivent. 
En  est-il  ainsi  ?  Est-ce  au  théâtre  qu'on  va 
chercher  des  rosières?  Est-ce  parmi  les  acteurs 
et  les  auteurs  dramatiques  qu'on  décerne  le 
prix  de  Montyon  ?  Gomment  voulez-voas  que 
ce  remède,  inefficace  sur  ceux  qu'il  touche  de 
près,  agisse  sur  ceux  qui  en  sont  éloignés  ? 
La  fameuse  devise  :  Gastigat  ridendo  mores, 
est  un  piège.  Le  théâtre  nous  amuse,  oui; 
mais  pour  nous  corriger,  non.  Dumas  fils  dit 
donc  avec  raison,  dans  la  préface  de  la  Prin- 
cesse Georges  :  «  N'y  menez  pas  vos  filles.  » 

MORALITÉS.  — Petits  poëmes  dramatiques 
dont  l'origine  est  contemporaine  de  la  SOTIE 
et  remonte  au  premier  quart  du  xv^  siècle. 
A  son  début,  la  moralité  eut  une  tendance  re- 
ligieuse dont  elle  s'éloigna  bien  vite  pour  faire 
cause  commune  avec  la  sotie  et  devint,  comme 
elle,  satirique,  agressive,  triviale  et  obscène. 
Elles  disparurent  l'une  et  l'autre  à  la  Renais- 
sance. 

MOYENS.  —  Ghaque  acteur  possède  une  cer- 
taine quantité  de  force  de  poumons,  de  chaleur, 
d'entrain,  de  gaité  :  ce  sont  les  moyens.  Sui- 
vant les  besoins,  on  lâche  la  soupape  à  une 


—  176  — 

plus  ou  moins  grande  partie  de  cette  provision 
pour  produire  de  l'EFFET.  Il  y  en  a  qui  n'ont 
pas  le  moyen  d'avoir  des  moyens. 

MUR.  —  Terme  de  coulisse  qui  veut  dire  su.  — 
Pourquoi  tel  drame  qu'on  devait  jouer  hier 
n'a-t-il  pas  PASSÉ?  —  Il  n'était  pas  assez  mûr. 

MUSIQUE.  —  De  partie  accessoire  qu'elle  est 
dans  la  comédie  et  le  vaudeville,  la  rnusique 
devient  une  partie  principale  dans  l'opéra  et 
l'opéra-comique  ;  quelquefois  tout. 

Elle  est  devenue  tellement  bruyante  que 
nous  allons  le  constater  par  un  fait  : 

Un  médecin  avait  entrepris  la  guérison  d'un 
sourd;  les  remèdes  échouant,  il  lui  prit  l'idée 
de  le  conduire  à  un  opéra  de...  Spontini,  si 
vous  voulez.  Au  premier  acte,  —  andante,  — 
le  sourd  n'éprouva  ni  n'entendit  rien;  au  se- 
cond acte,  —  largo  —  le  sourd  entendit  comme 
un  murmure  et  le  fit  comprendre  au  docteur 
tout  joyeux;  au  troisième,  grosse  caisse,  tim- 
bales, basses,  cors,  trompettes,  tout  y  est,  et 
notre  sourd  s'écrie  :  J'entends!  j'entends!.. 
Mais  le  docteur  était  devenu  sourd. 

MYSTÈRES.  —  Ces  embryons  de  notre  litté- 
rature dramatique  étaient  des  espèces  de  poëmes 


—  177  — 

informes,  sans  harmonie  ni  liaisons,  suivant 
mot  pour  mot  le  texte  biblique  ou  la  légende 
des  saints  d'où  il  étaient  tirés.  A  l'origine,  ces 
mystères  faisaient  partie  des  cérémonies  reli- 
gieuses et  se  représentaient  dans  les  églises. 
On  nommait  ceux  qui  les  installaient  meneurs 
ou  maîtres  du  jeu.  Ces  maîtres,  artisans,  ma- 
çons, menuisiers,  charpentiers,  eurent  l'idée 
de  tirer  profit  de  ces  représentations  en  les 
donnant  en  public  sur  des  échafauds  nommés 
établies  dressés  dans  les  rues  ou  sur  les  places, 
moyennant  salaire.  Ils  furent  autorisés,  le 
4  décembre  1402,  à  prendre  le  titre  de  Con- 
frères de  la  Passion  et  s'établirent  alors  dans 
leur  maison  de  la  Sainte-Trinité,  près  la  porte 
Saint-Denis  actuelle.  Jusque-là  ils  avaient 
donné  leurs  représentations  au  bourg  de 
Saint-Maur.  (V.  à  V Appendice  ce  privilège.) 

Voici  un  fragment  d'un  des  premiers  et 
principaux  mystères;  celui  de  la  Conception, 
Passion  et  Résurrection  de  N. -  S. -J. -Christ.  Il 
durait  plusieurs  jours  et  ne  contenait  pas 
moins  de  cent  personnages,  sans  compter  les 
anges,  les  bergers  et  les  diables. 

Aussitôt  après  la  nativité,  la  Yierge  Marie 
s'adresse  ainsi  à  son  nouveau-né  : 

«  Mon  chor  enfant,  ma  très  doiilce  portée, 
«  Mon  bien,  mon  cœur,  mon  seul  avancement, 


—  178  — 

«  Ma  tendre  fleur  que  j'ai  longtems  portée, 

«  Et  engendré  de  mon  sang  proprement  : 

«  Virginalement  en  mes  flancs  te  conceuz 

«  Virginalement  ton  corps  humain  receuz, 

«  Virginalement  t'ai  enfanté  sans  peine, 

«  Tu  m'as  donné  connaissance  certaine 

«  Que  à  ton  pouvoir  âme  ne  se  compère; 

«  Pourquoi  te  adore  et  te  clame  à  voix  pleine. 

«  Mon  doulx  enfant,  mon  vrai  Dieu  et  mon  père.  » 

On   donna  des  mystères  jusqu'en  1548.  — 
V.  Hôtel  de  Bourgogne^  Théâtre-Français. 


N 


NAÏVETÉS.  —  Ce  mot  est  plutôt  un  cadre  à 
quelques  anecdotes,  qu'un  mot  de  notre  voca- 
bulaire. 

Le  fameux  Lays  se  faisait  nettoyer  les  bottes 
par  un  petit  Savoyard  ;  quand  il  voulut  payer, 
l'enfant  lui  dit  qu'il  ne  voulait  rien  recevoir 
d'un  confrère.  —  Gomment,  confrère?  reprit 
Lays.  —  Je  suis  comme  vous  de  l'Opéra,  ré- 
partit le  fils  des  glaciers,  je  fais  les  amours  et 
les  diablotins. 

A  la  représentation  du  Fabricant  de  Londres^ 
drame  de  Fenouillot  de  Falbaire,  il  y  a  un 


f 


—  179  — 

moment  où  Ton  vient  annoncer  la  faillite  du 
négociant  au  personnage  qui  est  en  scène  : 
«  Nom  d'un  bleu!  s'écria  un  spectateur,  j'y 
suis  pour  mon  écu  !  » 

Le  jour  de  la  première  représentation  des 
Chimères^  opéra-comique  de  Piron,  celui-ci 
était  au  milieu  du  parterre,  près  d'un  specta- 
teur qui  criait  :  «  Que  cela  est  mauvais!  pi- 
toyable !  qui  est-ce  qui  peut  faire  des  sottises 
pareilles? —  C'est  moi,  lui  répondit  Piron; 
ne  criez  pas  si  haut,  parce  qu'il  y  a  ici  beau- 
coup de  gens  qui  trouvent  cela  bon  pour  eux.  » 

La  meilleure,  pour  finir  :  Une  actrice  des 
Délassements-Comiques^  —  théâtre  où  ces  dames 
se  délacent  facilement,  —  prenait  sans  grand 
succès  des  leçons  de  déclamation  d'une  bonne 
comédienne  ;  celle-ci  ayant  à  lui  faire  rendre 
l'EXPRESSION  passionnée  et  douloureuse  d'une 
amante  abandonnée  par  un  infidèle ,  crut  que 
son  élève  comprendrait  mieux  en  la  faisant 
entrer,  comme  on  dit,  dans  la  peau  du  bon- 
homme :  «  Mettez-vous  à  la  place  de  l'amante, 
lui  dit-elle  ;  si  vous  étiez  trahie,  abandonnée 
par  un  homme  que  vous  aimeriez  passionné- 
ment, que  feriez-vous?  -^  Ma  foi,  répondit 
l'élève,  je  chercherais  au  plus  vite  un  autre 
amant  pour  le  remplacer.  »  Est-ce  assez... 
naïf  ? 


—  180  — 

NATUREL.  —  Le  naturel  est  le  comble  du 
talent  chez  le  comédien.  Au  théâtre,  où  tout 
est  de  convention,  la  nature  suit  la  même  loi. 
L'acteur  doit  donc  être  naturel,  non  par  lui- 
même,  mais  par  convention.  C'est  le  rôle  qu'il 
remplit,  le  lieu  et  l'époque  où  la  scène  se  passe, 
l'AGTION  du  drame  et  son  but  qui  commandent 
le  naturel  auquel  il  doit  atteindre.  Ainsi  le 
natwel  d'un  roi, d'un  financier,  d'un  bourgeois, 
-  d'un  mendiant,  n'ont  rien  de  commun  entre 
eux.  C'est  le  travail,  l'étude,  l'observation 
seuls  qui  peuvent  donner  au  comédien  le 
talent  voulu  pour  rendre  naturellement  chacun 
de  ces  différents  types. 

NEIGE.  —  De  petits  morceaux  de  papier  jetés 
de  dessus  les  PONTS-VOLANTS  sont  encore  ce 
qui  a  prévalu  pour  les  effets  de  neige  tombant 
sur  la  scène.  Quand  c'est  au  LOINTAIN  que  l'ef- 
fet se  produit,  une  gaze  lamée  de  flocons  de 
laine  blanche  et  se  déroulant  de  haut  en  bas 
produit  un  joli  trompe-l'œil. 

NOEUD.  —  La  poétique  théâtrale  exige  que 
chaque  pièce  qui  mérite  ce  nom  ait  un  nœud 
dont  la  rupture  ou  l'explication  amène  le  dé- 
noûment.  C'est  la  clef  de  l'intrigue.  Le  nœud 
des   Pattes  de  Mouche,   le    chef-d'œuvre   de 


—  181    - 

Sardou,  est  la  fameuse  lettre  après  laquelle 
tout  le  monde  court  pendant  trois  actes.  Les 
lettres  et  le  QUIPROQUO  sont  des  nœuds  com- 
munément employés. 


ODÉON  (théâtre  de  Y).  —  Ce  théâtre  construit 
sur  les  plans  et  devis  de  Wailly  et  de  Peyre, 
sur  l'emplacement  de  l'ancien  hôtel  de  Gondé, 
fut  inauguré  en  1782  sous  le  titre  de  Théâtre- 
Français^  par  les  comédiens  français,  qui  quit- 
tèrent pour  s'y  installer  le  théâtre  des  Machines 
aux  Tuileries.  Le  4  septembre  1793,  le  théâtre 
fut  fermé,  par  ordre,  et  les  comédiens  jetés 
en  prison.  —  V.  Liberté. 

En  1794,  M^^°MoNTANSiER  réouvrit  cette  salle 
sous  le  titre  de  Théâti^e  de  l'Égalité^  section  de 
Marat^  avec  sa  troupe  et  les  comédiens  sortis 
de  prison.  Les  dépenses  dépassant  les  recettes, 
on  dut  fermer  au  bout  de  trois  ou  quatre  mois. 

Nouvelle  tentative  le  V  prairial  an  V  (  20 
mai  1797).  La  mode  étant  au  grec,  on  ouvrit 
sous  le  nom  à'Odéon,  mais  pour  un  mois  seu- 
lement. Le  30  thermidor  (17  août),  nouvelle 

i6 


—   \S'2  — 

réouverture  qui  se  termine  par  une  fermeture, 
le  \?» prairial  an  VI  (P""  juin  1798);  enfin  le 
10  brumaire  an  VII  (31  octobre  1798),  les  comé- 
diens font  une  dernière  tentative  qui  les  con- 
duit jusqu'à  l'incendie  du  8  ventôse  (18  mars 
1799),  qui  détruisit  la  salle. 

Reconstruit  en  1808,  il  ouvrit  sous  le  titre 
de  Théâtre  de  V Impératrice ^  qu'il  conserva  jus- 
qu'à la  chute  de  l'Empire.  En  1816,  il  prit  le 
titre  de  Second  Théâtre-Français  —  qu'il  con- 
serva jusqu'en  18^4  —  et  fut  de  nouveau 
incendié  en  1818. 

Remis  en  état  dès  1819,  il  servit  aux  débuts 
de  Casimir  Delavigne,  qui  y  fit  représenter 
les  Vêpres  Siciliennes,  En  1824,  il  reprit  son 
titre  à'Odéon  et  essaya  de  l'opéra.  Il  produisit 
Robin  des  Bois  (le  Freyzchutz)  et  ferma  en  1828. 

Après  l'incendie  de  la  salle  Favard,  en  1839, 
les  Italiens  se  réfugièrent  à  VOdéon,  et  y  res- 
tèrent jusqu'à  leur  installation  à  la  salle  Ven- 
tadour,  en  1842. 

Ce  fut  à  cette  époque  que  commença  une 
nouvelle  ère  pour^  le  théâtre  de  VOdéon;  il 
reprit  sa  position  de  Second  Théâtre-Fi^ançais^ 
fut  subventionné  par  l'Etat  et  soumis  à  des 
règlements  particuliers.  Sa  subvention  actuelle 
est  de  60,000  francs. 


—  183  — 

OEIL-DU-RIDEAU.—  Ces  deux  trous  ronds, 
placés  de  chaque  côté  du  rideau,  et  auxquels 
vous  voyez  souvent  deux  doigts  et  un  œil 
apparaître,  sont  des  observatoires  qui  servent 
au  directeur  pour  constater  le  mouvement  de  la 
recette,  et,  à  ces  dames,  pour  faire  des  signaux 
aux  amis  qui  se  trouvent  dans  la  salle,  ou 
pour  les  épier.  Cœurs  volages,  méfiez-vous  de 
Vœil-du-7ndeau. 

OPÉRA.  —  Poëme  entièrement  chanté  sur 
une  musique  ou  PARTITION  faite  spécialement 
pour  lui. 

a  L'Opéra,  ditSAmT-EvREMONT,estune  sot- 
«  tise  chargée  de  musique,  de  danse,  de  machi- 
ne nés,  de  décorations  ;  une  sottise  magnifique, 
«  un  travail  bizarre  de  poésie  et  de  musique, 
«  où  le  poëte  et  le  musicien,  également  gêné 
«  l'un  parTautre,  se  donnent  bien  de  la  peine 
«  pour  faire  un  méchant  ouvrage...  » 

Il  y  a  bien  du  vrai  dans  cette  définition,  en 
réservant  toutefois  que  le  résultat  n'est  pas 
toujours  un  méchant  ouvrage. 

L'opéra  est  d'origine  italienne  et  remonte  à 
1516,  où  la  première  œuvre  de  ce  genre  —  la 
Calendra  —  fut  représentée  devant  Léon  X. 
Ce  ne  fut  qu'en  1645  que  des  chanteurs  italiens 
vinrent  en  France,   appelés  par  Mazarin,  et 


-  184  — 

jouèrent  Orphée  devant  la  cour.  Ce  genre  eut 
bientôt  des  imitateurs.  Dès  1659,  parut  une 
pièce  française  —  ce  fut  la  première  —  avec 
de  la  musique;  c'est  la  Pastoimle  en  musique. 
Elle  fut  jouée  à  Issy,  chez  M.  de  la  Haie,  ce 
qui  la  fit  aussi  nommer  la  Pastorale  (TIssy. 
Cambert  en  avait  fait  la  musique  sur  des  pa- 
roles de  l'abbé  Perrin,  qui,  par  parenthèse,  ne 
fut  jamais  abbé. 

En  1660,  Pierre  Corneille  donna  sa  Toison 
d^or,  dont  les  décorations  et  les  machines 
sont  dues  au  marquis  de  Sourdéac,  et  la  mu- 
sique à  Cambert.  Cette  pièce  eut  un  immense 
succès,  tant  par  l'attrait  que  par  la  nouveauté 
du  spectacle.  \J opéra  français  était  né! 

En  1669,  Louis  XIV  accorda  le  privilège  de 
ce  genre  à  l'abbé  Perrin,  sous  le  titre  à' Aca- 
démie royale  de  Musique^  —  le  titre  à' Opéra 
ne  date  que  du  24  juin  1791.  (V.  ce  privilège 
à  Y  Appendice.)  En  1672,  Lulli  supplanta 
Perrin,  et  fut  directeur  jusqu'en  1687. 

Les  \Tais  fondateurs  de  Y  Opéra  en  France 
sont  donc  Mazarin,  Cambert,  le  marquis  de 
Sourdéac  et  Y  abbé  Perrin. 

De  1687  jusqu'à  nos  jours,  YOpéra,  tantôt 
géré  par  des  directeurs  intéressés,  tantôt  pour 
le  compte  de  l'État,  a  subi  des  phases  diverses 
dans  lesquelles  nous  ne  pouvons  entrer.  Les 


—  185  — 

compositeurs  les  plus  illustres,  depuis  sa  fon- 
dation, sont  Rameau,  Lulli,  Gluck,  Sacchini, 
PicciNi,  Berton,  Kreutzer,  Méhul,  Spon- 
TiNi,  Garafa,  Weber,  Haydn,  Mozart,  Ros- 
siNi,  Meyerbeer,  Halévy,  Auber,  Donizetti, 
Félicien  David,  Bellini,  Yerdi,  Gounod  et 
Mermet. 

Son  odyssée  est  assez  curieuse  : 
Les  premiers  essais  furent  tentés  au  théâtre 
du  Petit-Bourbon  ;  mais  lorsque  Perrin  eut 
obtenu  le  privilège,  il  fit  construire  une  salle 
rue  Mazarine,  en  face  la  rue  Guénégaud, 
sur  remplacement  où  se  trouve  aujourd'hui 
le  passage  du  Pont-Neuf,  et  l'inaugura  le 
19  mars  1671,  par  Pomone,  opéra  en  5  actes. 
Lulli,  ayant  remplacé  Perrin  en  1672,  trans- 
porta V Opéra  rue  de  Vaugirard,  près  le 
Luxembourg,  dans  une  salle  de  jeu  de  paume, 
le  15  novembre  de  la  même  année. 

Après  la  mort  de  Molière,  V Opéra  prit  pos- 
session de  la  salle  du  Palais-Royal,  que  sa 
troupe  occupait  depuis  1680.  Cette  salle, 
construite  par  Richelieu  pour  les  représenta- 
tions de  Mirame ,  occupait  l'emplacement 
actuel  de  la  rue  de  Valois  et  de  la  Gour-des- 
Fontaines.  Le  feu  la  détruisit  le  6  avril  1763. 
Ij' Opéra  dut  chercher  asile  ailleurs  et  s'établit 
provisoirement  dans  la  salle  des  Tuileries,  où 

16. 


—  186  — 

il  resta  jusqu'en  1770,  puis  vint  s'installer 
dans  la  nouvelle  salle  reconstruite  sur  les 
débris  de  l'ancienne.  Cette  salle  fut  de  nou- 
veau incendiée  en  1781 ,  et  ne  fut  pas  rétablie. 

\j  Opéra  étant  sans  asile,  on  construisit  en 
quatre-vingt-six  jours,  la  salle  de  la  Porte- 
Saint-Martin^  qui  a  été  incendiée  par  la  com- 
mune en  1871  ;  ce  n'était  encore  qu'une 
étape.  En  1794,  nouveau  déménagement  pour 
venir  à  la  salle  Louvois,  rue  Richelieu.  Après 
l'assassinat  du  duc  de  Berry,  le  13  février  1820, 
cette  salle  fut  démolie  pour  construire  une 
chapelle  expiatoire,  démolie  elle-même  avant 
d'être  terminée,  après  la  Révolution  de  1830. 
Cet  emplacement  est  occupé  aujourd'hui  par 
le  square  et  la  fontaine  Louvois. 

On  construisit  alors,  toujours  provisoire- 
ment, la  salle  de  la  rue  Le  Peletier,  inaugurée 
en  1821.  Cette  salle  semblait  devoir  être  son 
dernier  gîte  en  attendant  qu'il  vint  s'installer 
dans  le  magnifique  monument  élevé  pour  lui, 
quand,  le  18  octobre  1873,  un  incendie  ter- 
rible n'en  laissa  rien  subsister.  Tout  fut  dévoré 
en  une  nuit.  Le  Théâtre-Italien  lui  offrit  alors 
l'hospitalité  ;  enfin,  le  5  janvier  1875,  il  prit 
possession  du  Nouvel  Opéra  inachevé.  Espé- 
rons que  l'y  voilà  pour  longtemps. 

Ses   changements   de  titres    sont  presque 


-   187  — 

aussi  nombreux  que  ses  changements  locatifs. 
Gréé  sous  la  dénomination  d'Académie  i^oyale 
de  Musique,  il  prit  le  titre  d'Opéra,  en  1791; 
de  Théâtre  des  Arts,  en  1793;  d'Académie  im- 
périale, de  1804  à  1814;  d'Académie  royale, 
après  la  première  Restauration  ;  Impériale, 
pendant  les  Cent  jours;  Royale,  de  1816  à 
1848  ;  de  Théâtre  de  la  Nation,  en  1848  ;  d'Aca- 
démie impériale,  sous  le  second  Empire.  Il 
vient  de  prendre  le  nom  d'Académie  nationale, 
sous  le  régime  actuel.  (V.  à  V Appendice  les  lois 
et  règlements  concernant  l'Opéra.) 

OPÉRA  (salle  du  nouvel).  — Nous  avons  con- 
fondu à  dessein,  dans  l'article  qui  précède,  les 
définitions  du  mot  opéra,  sa  formation  en 
France,  son  développement  et  les  divers  lieux 
où  il  séjourna,  pour  réserver  au  superbe  édi- 
fice qui  l'abrite  aujourd'hui  un  article  spécial. 
Un  décret  du  29  septembre  1860  déclara 
cette  construction  d'utilité  publique;  un  second 
décret  du  29  décembre  suivant  ouvrit  un  con- 
cours qui  eut  lieu  au  palais  dé  l'Industrie, 
puis  un  second  concours  définitif  entre  les 
cinq  concurrents  primés,  à  la  suite  duquel 
M.  Charles  Garnier  fut  proclamé  architecte 
général. 
Les  travaux  commencèrent  au  mois  d'août 


—  188  — 

1861  ;  la  première  pierre  à  niveau  du  sol  fut 
posée  le  21  juillet  1862  parle  ministre  d'État, 
et  la  façade  entière  put  être  découverte  le 
15  août  1867.  L'incendie  de  l'ancienne  salle 
força  d'approprier  au  plus  vite  l'intérieur  de 
la  nouvelle,  qui  fut  livrée  à  la  ville  le  1"  jan- 
vier 1875  et  inaugurée  le  5  par  une  représen- 
tation de  gala  à  laquelle  fut  convié  le  lord- 
maire  de  Londres. 

Les  matériaux  les  plus  rares  et  les  plus  pré- 
cieux ont  été  employés  dans  cette  construc- 
tion qui  occupe  une  surface  de  11,237  mètres 
et  contient  2,156  places;  13  peintres  et  92 
sculpteurs  renommés  y  ont  prodigué  leur 
talent;  46  entrepreneurs  ont  coopéré  à  son 
édification.  Au  milieu  des  richesses  artistiques 
qui  frappent  les  yeux  et  vous  attirent,  il  est 
une  merveille  vers  laquelle  on  revient  tou- 
jours :  c'est  le  grand  escalier. 

OPÉRA-COMIQUE.  — Genre  bâtard,  quoique 
charmant,  entre  la  musique  d'un  côté,  la  tra- 
gédie, le  drame,  la  comédie  et  le  vaudeville 
de  l'autre  :  ce  qui  fait  que  son  titre  est  presque 
toujours  en  contradiction  avec  l'œuvre  repré- 
sentée; en  France,  où  l'étiquette  du  sac  suffit, 
cette  anomalie  n'est  pas  rare.  C'est  pour  cela 
que  ceux  qui  veulent  pleurer  vont  à  la  Gaité. 


—  189  — 

Les  Italiens,  du  moins,  ont  V opéra  séria  et 
Vopera  bu/fa  :  on  sait  à  quoi  s'en  tenir. 

Les  origines  de  V opéra-comique  ^  s'il  faut  en 
croire  quelques  auteurs  qui  ont  fait  des 
fouilles  sur  ce  sujet,  remonteraient  au  mi- 
lieu du  XIII''  siècle.  Nous  n'y  contredirons  en 
rien,  si  ça  peut  leur  faire  plaisir;  mais  nous 
croyons  qu'il  ne  faut  pas  remonter  si  loin  et 
que  c'est  aux  foires  Saint-Germain  et  Saint- 
Laurent,  vers  la  fin  du  xvii^  siècle,  qu'il  faut 
s'arrêter. 

Ce  titre  à' opéra-comique  ne  semblait  d'abord 
indiquer  qu'une  sorte  de  PARODIE,  puisque 
tous  les  couplets  se  chantaient  sur  des  airs 
connus,  de  vieux  pont-neufs.  Le  mot  opéra 
s'applique  donc  à  ces  airs ,  et  le  complément 
«  comique  »  indiquait  le  genre  des'pièces.  C'est, 
du  reste,  ce  qui  nous  semble  résulter  du  ré- 
pertoire qui  fut  joué  à  cette  époque  sous  ce 
titre. 

En  tout  cas ,  ce  genre  eut  assez  de  succès 
pour  porter  ombrage  aux  privilégiés  de  l'Oyoem 
et  de  la  C  omédie- Française  ;  des  poursuites, 
des  restrictions,  des  défenses,  et  enfin  la  sup- 
pression du  malheureux  Opéra-Comique^  en 
1718,  furent  la  conséquence  des  plaintes  de 
MM.  les  privilégiés.  Fatigué  de  lutter,  et  se 
voyant    menacé   de    mort,    V Opéra- Comique 


—  190  — 

s'obligea  à  payer  une  redevance  de  35,000 
francs  par  an  au  seigneur  Opéra,  son  suze- 
rain. 

Sur  ces  entrefaites ,  la  Comédie- Italienne 
s'était  établie  en  concurrence  à  V Opéra-Comi- 
que. C'était  une  nouvelle  lutte  à  soutenir  ; 
mais  de  cette  lutte  sortit  le  premier  et  véri- 
table opéra-comique,  avec  musique  nouvelle, 
sur  des  paroles  françaises.  Ce  premier  né , 
c'est  «  les  Troqueurs  »,  paroles  de  Vadé,  mu- 
sique de  D AUVERGNE,  douué  en  1753,  à  la  foire 
Saint  -  Laurent.  Le  papillon  déployait  ses 
ailes  I 

En  1762,  V Opéra-Comique  fut  réuni  à  la 
Comédie-Italienne  et  perdit  son  titre  dans  cette 
fusion  qui  dura  jusqu'en  1780,  où  le  titre 
di  Opéra- Comique  fut  rétabli  par  ordonnance 
royale,  pour  se  conserver  jusqu'à  nos  jours. 
Les  représentations  avaient  lieu  à  la  salle 
Favart,  construite  sur  les  jardins  de  l'hôtel  de 
Ghoiseul  et  le  boulevard  Richelieu,  qui  prit 
son  nom  actuel  de  boulevard  des  Italiens  après 
l'installation  delà  troupe  italienne.  Cette  salle 
fut  incendiée  en  1839  et  rétablie  en  1840.  Elle 
est  depuis  cette  époque  occupée  par  Y  Opéra- 
Comique. 

En  1791,  la  liberté  des  théâtres  donna  nais- 
sance au  Théâtre-Feydeau,  genre  opéra-comi- 


—  191   — 

que.  La  lutte  entre  les  deux  théâtres  fut  vive 
et  fructueuse  pour  l'art  musical;  elle  dura 
jusqu'en  1801,  où,  le  16  septembre,  les  deux 
troupes  réunies  exploitèrent  le  Théâtre-Fey- 
deau,  qui  fut  démoli  en  1829.  En  1830,  V Opéra- 
Comique  inaugura  la  salle  Ventadour,  cons- 
truite pour  lui  ;  mais  il  y  fit  mal  ses  affaires 
et  vint  à  la  place  de  la  Bourse,  où  il  resta 
jusqu'en  1840  qu'il  fut  à  la  salle  Favart, 
comme  nous  l'avons  dit  ci-dessus. 

Les  compositeurs  qui  ont  le  plus  contribué 
à  la   prospérité   de   V  Opéra- Comique  ^    sont  :' 

Ga  VEAUX,    MONSIGNY,    DaLAYRAC  ,    PhILIDOR  , 

NicoLO,  Grétry,  Boïeldieu,  Hérold,  Mon- 
pou ,  Grisar  ,  AuBER,  Adam  ,  Halévy  ,  Am- 
BRoisE  Thomas. 

OPÉRETTE.  —  Genre  nouveau,  ou  plutôt 
renouvelé,  dont  le  titre  annonce  une  œuvre 
sans  prétention.  Offenbach  est  le  grand-prê- 
tre du  genre  et  y  a  répandu  des  perles  musi- 
cales qui  ont  fait  le  tour  du  monde.  Malheu- 
reusement les  auteurs  des  paroles  ont  poussé 
ce  genre  du  comique  au  bouffon,  du  bouffon 
au  trivial,  du  trivial  à  l'obscène  ;  où  vont-ils 
aller?  que  vient  faire  la  musique,  cette  chose 
quasi-divine,  sur  ce  fumier  littéraire?  Triste  ! 
triste  !  ! 


—  192  — 

ORCHESTRE.  —Partie  de  la  salle,  devant 
la  scène ,  où  se  trouvent  placés  les  musiciens  ; 
par  extension ,  partie  occupée  par  les  specta- 
teurs, entre  les  musiciens  et  le  parterre.  Cette 
partie,  qu'on  nomme  aussi  parquet^  est  divisée 
en  stalles  et  fauteuils  dans  presque  tous  les 
théâtres. 

On  dit  encore  Y  orchestre^  en  parlant  du 
groupe  des  musiciens  exécutants. 

Chez  les  Grecs,  Yorchestt^e  était  vide,  riche- 
ment décoré  et  pavé  en  marbre  ;  il  servait  au 
jeu  des  MIMES  et  des  danseurs.  Chez  les  Ro- 
mains ,  c'était  la  partie  où  l'on  plaçait  les 
sommités  de  l'État,  les  sénateurs,  les  vestales. 
Aujourd'hui  qu'il  y  a  peu  de  sénateurs  et 
pas  beaucoup  de  vestales,  Yorchestre  est  re- 
cherché par  de  jeunes  lions  —  ce  mot  est  rem- 
placé par  gommeux  —  qui  ont  des  intelligences 
dans  les  coulisses.  A  VOpé?'a^  pendant  le  bal- 
let, les  fauteuils  d'orchestre  sont  occupés  par 
les  vieux  admirateurs  du  MAILLOT.  C'est  le 
pays  où  fleurit  la  lorgnette. 

OURS.  —  Terme  par  lequel  on  désigne  une 
mauvaise  pièce  endormie  dans  les  cartons,  et 
qu'un  directeur  ne  joue  que  contraint  et  forcé 
par  jugement,  ou  par  obligations  envers  l'au- 
teur. 


—  193   — 

OUVERTURE.  —  Prologue  musical  d'un 
opéra,  opéra-comique,  opérette,  qu'on  exécute 
avant  le  lever  du  rideau.  Une  ouverture  bien 
faite  doit  rappeler  les  principaux  motifs  de 
l'œuvre  et  en  donner  le  caractère.  L'ouverture 
de  la  Muette  est  un  modèle  du  genre. 

0  UVREUSE.  —Ajoutons  :  de  loges.  Préposée 
que  toute  administration  théâtrale  entretient 
pour  garder  et  ouvrir  les  portes  des  loges  et 
galeries,  recevoir  les  billets  et  donner  les  sor- 
ties d'icelles.  lu  ouvreuse  qui  a  du  métier  flaire 
le  client  à  la  mise  et  à  la  démarche  :  elle  peut 
tarifer  d'avance  son  degré  de  générosité.  Elle 
voit  d'un  mauvais  œil  les  billets  d'auteur  et 
ceux  d'administration,  surtout  quand  il  n'y  a 
que  des  dames.  A  l'entendre,  tout  est  loué  ! 
quand  il  n'y  a  quelquefois  personne.  Ne  la 
croyez  pas  sur  paroles,  mais  ne  discutez  pas  : 
elle  est  plus  forte  que  vous.  En  avant  la  petite 
clef  d'or  :  les  petits  bancs.,  les  vêtements  en 
garde  et  la  pièce  ronde  !  Quelques  minutes 
après  vous  aurez  une  bonne  loge,  ou  de  bonnes 
places  qu'elle  disait  louées.  Méfiez-vous  encore 
des  places  gardées  par  une  paire  de  gants.  Ces 
gants  appartiennent  à  Vouv7^euse  et  la  place  au 
plus  offrant. 


M 


—   194  — 


PALAIS-ROYAL  (Théâtre  du).  —Pourquoi 
Palais-Royal?  Si  jamais  un  théâtre  a  mérité 
d'être  appelé  de  la  Gaîté,  c'est  bien  celui-ci. 
Ce  titre  appartenant  à  un  autre,  il  devrait 
s'appeler  Palais-du-Rire.  Cette  petite  salle, 
qu'on  a  agrandie  en  supprimant  presque  les 
corridors,  qui  sont  interdits  aux  personnes 
d'une  corpulence  prononcée,  et  en  prenant 
sur  la  rue  en  encorbellement,  fut  occupée 
avant  1789  par  une  troupe  d'enfants,  sous  le 
nom  de  Théâtre  des  Beaujolais;  et  jusqu'en 
1793,  par  la  Montansier,  actrice  célèbre  par 
ses  aventures  galantes  et  autres.  C'était  à 
cette  époque  le  Théâtre  -de  -  la-  Montagne  ! 
comme  cela  sonne  bien  pour  un  théâtre  !  à 
peu  près  comme  la  formule  Liberté  sur  les 
murs  d'une  prison.  Et  nous  nous  prétendons 
le  peuple  le  plus  spirituel  de  la  terre.  Enfm! 
A  la  Montansier,  on  vit  succéder  des  acro- 
bates, des  marionnettes,  des  animaux  savants. 
Le  nom  de  montagne  ne  protégeait  plus  les 
exhibitions  d'animaux  de  plaines  :  c'était  le 
théâtre  des  jeux  forains.  Les  botes  déguerpirent 


—  195  — 

pour  faire  place  au  café  de  la  Paix;  ce  n'était 
pas  le  café  concert,  c'était  un  café  spectacle, 
ou  plutôt  l'un  et  l'autre,  car  on  y  jouait  de 
petites  pièces  et  l'on  y  chantait  des  chansons 
et  des  vaudevilles. 

En  1831,  nouvelle  métamorphose,  hethéâtre 
du  Palais-Royal  prenait  possession  de  l'im- 
meuble et  y  est  encore.^  Il  est  bon  de  noter 
que  son  titre  effrayant  la  république  de  1848, 
il  dut  prendre,  jusqu'en  1852,  le  nom  de  théâtre 
de  Montansier,  pour  revenir  après  cette  époque 
à  son  nom  primitif. 

Le  succès  n'a  cessé  un  seul  jour  de  favori- 
ser ce  joyeux  théâtre.  La- nature  avare  de  bons 
comédiens  semble  en  avoir  toujours  en  ré- 
serve pour  lui,  non  pas  un  à  la  fois,  comme 
partout  ailleurs,  mais  une  pléiade  entière. 
Ainsi,  on  comptait  à  la  fois  Achard  et  Déja- 
ZET,  Leménil,  Alcide  Tousez  et  Levassor, 
Ravel  et  Grassot,  Régnier,  Samson  et 
M^^^  Fargeuil,  Philippe  et  Hyacinthe,  Sain- 
ville  et  Lepeintre  aîné,  et  encore  aujourd'hui 
nous  y  voyons  Geoffroy,  Brasseur  S  Gil- 

PÉRÈS  et  l'HÉRITIER. 

PANNE. — C'est  ainsi  que  les  acteurs  appellent 

^  M.  Brasseur  a  quitté  le  théâtre  le  i'-'"  janvier  1878  pour  prendre 
une  direction  à  Paris. 


—  196  — 

un  mauvais  rôle,  ou  trop  court,  ou  dans  lequel 
on  ne  suppose  pas  faire  d'effet.  Ce  terme,  bien 
entendu,  appartient  à  V argot  des  coulisses. 

PANTOMIME.—  Ce  genre,  qui  eut  ses  beaux 
jours  avec  les  arlequins  de  la  Comédie-Ita- 
lienne et  les  pierrots,  dont  Débureau  père  fut 
le  plus  grand,  a  disparu  des  théâtres  populaires. 
On  le  trouve  encore  en  haut,  dans  le  ballet, 
et  en  bas,  chez  les  forains. 

PARADIS.  —  La  plus  haute  et  la  plus  recu- 
lée des  galeries  d'un  théâtre.  C'est  en  vain 
qu'on  affiche  troisième  ou  quatrième  amphi- 
théâtre ;  pour  la  masse,  et  surtout  pour  le 
public  qui  fréquente  ces  places,  c'est  le  para- 
dis^ voire  même  le  poulailler.  C'est  de  là  que 
trognons  de  fruits,  écorces  d'oranges,  noyaux 
de  prunes,  coquilles  de  noix  et  bouts  de  cer- 
velas tombent  sur  le  parterre,  le  parquet  et 
l'orchestre,  comme  une  manne  qui  n'a  rien 
de  céleste. 

Dans  les  anciens  MYSTÈRES,  le  théâtre 
était  toujours  divisé  en  trois  étages  :  l'enfer, 
la  terre  et  le  paradis  :  c'est  là  que  se  tenaient 
les  anges,  prêts  à  descendre  en  scène.  Le  nom 
de  paradis  est  resté  à  la  galerie  supérieure; 
mais  les  anges  ?. . 


—  197  — 

PARODIE. — La  pai'odie  nous  vient  des  Grecs; 
elle  se  bornait  chez  eux  au  changement  d'un 
mot  ou  d'une  'lettre  dans  un  vers  pour  lui 
donner  un  sens  différent,  de  façon  à  travestir 
le  sérieux  en  burlesque.  C'est  bien  la  base  de 
noire  parodie,  avec  l'intention  plus  marquée 
chez  nous  de  tourner  la  chose  en  ridicule  ; 
c'est,  du  moins,  le  but  que  se  propose  Idi  paro- 
die dramatique. 

Gomme  la  parodie  ne  s'attaque  qu'aux 
œuvres  importantes,  que  le  succès  en  soit 
contesté  ou  certain,  elle  est  un  certificat  de 
valeur  autant  qu'une  critique  ;  elle  met  en  re- 
lief les  parties  faibles,  excentriques,  de  non- 
sens  de  l'œuvre  parodiée,  et  les  grossit,  outre 
mesure,  pour  provoquer  le  rire.  La  Comédie- 
Italienne  a  excellé  dans  la  parodie;  tout  le  ré- 
pertoire lyrique  de  la  fin  du  xvii^  siècle  et  celui 
du  xvni®  y  a  passé. 

La  première  pièce  qui  peut  être  considérée 
comme  une  parodie,  ou  qui  fut  du  moins  le 
germe  de  ce  genre  en  France,  est  la  Folle  Que- 
relle, de  SuBLiGNY,  donnée  en  1668.  G'est  une 
parodie  de  V Andromaque  de  Racine,  lequel 
l'attribua  à  Molière  et  se  fâcha  avec  lui  à  ce 
sujet.  Les  Petites  Danaides,  cette  amusante 
parodie,  ont  fait  courir  tout  Paris  pendant  plus 
d'une  année.  Arnali  est  une  des  plus  spiri- 

17. 


—   198  — 

tuelles,  une  des  mieux  réussies  du  répertoire 
moderne,  ha  paj^odie  demande  la  finesse  d'ob- 
servation, l'esprit  de  saillie  et  de  gaité.  Est-ce 
pour  cela  que  nous  en  voyons  si  peu?  ou  est- 
ce  faute  d'œuvres  qui  vaillent  la  peine  d'être 
parodiées  ? 

La  parodie  n'est  pas  du  goût  de  tout  le 
monde.  Voici  un  couplet,  tiré  du  Temple  du 
goût,  comédie  jouée  en  1733,  qui  déclare  la 
guerre  aux  parodistes. 

«  Des  parodistes  éternels, 
«  Dont  je  voudrais  exterminer  la  clique, 

«  Portent  les  coups  les  plus  cruels 
«  Aux  endroits  les  plus  beaux  d'un  sujet  dramatique  ; 
«  Et  ce  même  public,  facile  à  s'égarer, 

«  Après  avoir  donné  des  larmes 
«  A  ces  endroits  qu'il  devrait  révérer, 
«  A  rire  à  leurs  dépens  trouve  les  mêmes  charmes 

«  Qu'il  trouvait  à  les  admirer.  » 

Nous  croyons  que  ce  couplet  fait  autant  la 
critique  du  PUBLIC,  changeant  et  mobile,  que 
le  procès  de  la  parodie. 

Nous  reproduisons  une  parodie  du  grand 
couplet  de  Ruy-Blas,  tirée  d'une  pièce  inédite 
ayant  pour  titre  :  Les  Comédiens  de  province. 

—  La  scène  est  au  foyer  des  artistes.  — 
MM.  LES  COMÉDIENS,  en  chœur. 

Tant  pis  pour  le  public  !  nous  prend-il  pour  des  nègres  ? 


—  199  — 


RAFALE,  artiste  mauvais,  mais  consciencieux,  entrant  à  pas  de  loup. 

Bon  courage,  messieurs.  —  Comédiens  intègres  ! 

Artistes  paresseux  !  Voilà  votre  façon 

D'apprendre  votre  rôle  !..  Oh  !  la  bonne  leçon  !.. 

Et  vous  n'avez  pas  honte  !..  Et  vous  choisissez  l'heure 

Où  Thahe  est  mourante,  où  Melpomène  pleure  ! 

Donc  vous  n'avez  ici  pas  d'autres  intérêts 

Que  de  dire  des  mots  et  vous  coucher  après  ? 

Soyez  flétris  devant  l'art  scénique  qui  tombe, 

Acteurs  qui  le  tuez  et  riez  sur  sa  tombe  !  ! 

Arrêtez-vous,  du  moins...  Ayez  quelque  pudeur  : 

Le  théâtre  est  perdu  !  Sa  gloire  et  sa  grandeur. 

Tout  s'en  va.  —  L'indifférence  naît.  —  Sans  combattre 

Devons-nous  succomber  et  nous  laisser  abattre  ? 

Le  public  ne  vient  plus.  —  Nous  perdons  chaque  jour 

Le  spectateur  de  ville  et  celui  du  faubourg. 

Jadis  le  paysan  faisait  plus  d'une  lieue 

Pour  venir  au  théâtre...,  où  l'on  faisait  la  queue. 

Il  ne  vient  plus...  Pourquoi  ?..  Voyez  !..  L'étudiant 

Déserte  le  parterre  et  nous  quitte  en  riant... 

Cette  salle,  autrefois  votre  joyeux  royaume, 

Est,  —  regardez-la  donc  !  —  vide  comme  un  fantôme. 

Le  public,  croyez-moi,  ne  veut  rien  à  demi  : 

De  tout  comédien  il  se  montre  l'ami  ; 

Il  donne  des  bravos  à  l'acteur,  à  l'actrice  ; 

Il  ne  manque  jamais,  quand  vient  le  bénéfice^ 

De  porter  son  offrande,  et  des  fleurs  quelquefois, 

A  ceux  qui  de  lui  plaire  ont  pris  soin.  —  Que  de  fois 

N'avez-vous  pas,  messieurs,  provoqué  des  esclandres 

■En  tenant  vos  emplois  comme  de  vrais  Cassandres  ? 

Et  quand  un  directeur  adroit,  intelligent. 

Comptait  sur  vous,  sur  nous,  pour  faire  de  l'argent, 

Combien  avez-vous  fait,  riant  de  sa  colère, 

De  la  direction  une  triste  galère  !.. 

J'on  ai  honte  pour  vous  !  Ah  1  tenez,  songez-y  ; 

Ce  public  méconnu,  j'en  fais  le  compte  ici..., 


—  200  — 

Pour  vous,  par  bon  plaisir...,  et  que  chacun  me  croie... 

Afin  de  vous  ou\Tir  une  plus  large  voie, 

Ce  public  mécontent,  et  qu'on  accuse  encor, 

A  sué,  sachez-le,  deux  cents  mille  écus  d'or 

Pour  bâtir  cette  salle  où  vous  jouez,  mes  maîtres  ! 

Et  vous  osez  !  !..  Tenez  ;  les  amoureux,  les  traîtres, 

Chacun  porte  la  barbe.  —  Un  ténor  sans  raison 

Fait  la  chasse  au  marais  ou  fouille  le  buisson, 

Et  chaque  chef  d'emploi  pose  et  commande  en  prince. 

Mauvais  vouloir  partout.  —  L'artiste  de  province 

S'applique  à  dénigrer  son  collègue  éperdu  ! 

Chacun  veut  gouverner  sur  ce  vaisseau  perdu. 

Le  public,  fatigué  d'avaler  des  couleuvres. 

Ne  croit  plus  à  l'affiche  ainsi  qu'aux  belles  œuvres. 

Quand  on  lui  sert  un  ours,  mauvais  drame  avorté, 

Qui  pèche  par  la  forme  et  la  moralité. 

—  Pour  passer  la  saison  tout  directeur  engage 
Vingt  acteurs  différents,  différant  de  langage  : 
Gascons,  Flamands,  Picards;  Caen,  Marseihe  et  Paris 
En  fournissent  aussi.  —  Les  rôles  ?  pas  appris. 

On  entend  trop  souvent  le  souffleur  à  notre  aide. 

—  Hier,  on  m'a  sifflé,  moi,  dans  le  Fou  de  Tolède  l 
La  moitié  d'entre  nous  rit  de  l'autre  moitié, 

Et  nous  ne  brillons  pas  au  moins  par  l'amitié. 

—  Faut-il  avouer  ici  le  point  où  nous  en  sommes? 
Quelle  est  notre  défroque  ?  —  A  peine  si  les  hommes 
Ont  pour  jouer  les  rois,  amoureux,  montagnards. 
Des  faux-cols  en  papier,  un  lambeau  de  brocart  ; 

Un  habit  dévasté,  dont  le  pan  se  dédouble 
Et  fait  un  paletot  ;  des  galons  en  or  trouble 
Pour  le  garde-français  ou  le  valet  larron  ; 
Un  chapeau  retapé  pour  monsieur  le  baron  ; 
Un  manteau  de  voleur  couvre  le  roi  d'Espagne  ; 
Avec  n'importe  quoi  l'homme  de  la  campagne. 
Le  valet  est  souvent  mieux  nippé  que  le  roi. 
Tout  est  à  contre-sens;  tout  est  en  désarroi. 

—  En  agissant  ainsi,  croyez-vous  que  la  foule 
Viendra  prêter  sa  force  à  cette  œuvre  qui  croule  ? 


—  201   — 

Mais  ouvrez  donc  l'oreille.  Elle  dit  :  nous  voulons 
De  la  pourpre  au  théâtre  et  non  pas  des  haillons  ! 
Si  vous  marchez  longtemps  dans  ce  chemin  funeste, 
Chacun  de  nous,  messieurs,  remportera  sa  veste, 
Et  le  vieux  répertoire,  aux  memhres  énervés, 
Qui  s'est  caché  dans  l'ombre  et  sur  qui  vous  vivez, 
Renfermé  dans  l'armoire  où  son  sort  se  termine, 
Sera  moisi  par  l'eau,  rongé  par  la  vermine  ! 

0  Lekain  !  dans  ce  temps  d'évidente  froideur, 
Que  fais-tu  chez  les  morts,  noble  et  sublime  acteur  ? 
Oh  ! . .  Lève-toi  !  Viens  voir  1 ..  Les  bons  font  place  aux  pires  ! 
...  Le  trial  fait  pleurer  !..  Le.  tragique  a  des  rires  !.. 
Vite,  viens  au  secours  de  ton  grand  art,  Lekain  1 
Le  théâtre  se  meurt  I  Le  théâtre  s'éteint  ! 
Dis-nous  d'où  te  venaient  ta  science  profonde, 
Tes  accents  convaincus  qui  remuaient  un  monde. 
Ton  geste  merveilleux  d'orgueil  ou  de  mépris, 
L'éclair  de  ton  œil  d'aigle  et  j  usqu'à  ton  souris  ? 
As-tu  semé  le  grain  d'un  talent  qu'on  ignore?.. 
Nous  sera-t-il  donné  d'en  saluer  l'aurore  ?.. 
Hélas  !  ton  héritage  est  en  proie  aux  vendeurs. 
Ton  génie  ?..  on  l'escompte  !  Et  de  piètres  auteurs 
Méprisant  le  talent,  le  fond,  l'esprit,  la  forme, 
Font  des  rôles  idiots  pour  un  acteur  difforme  ! 
Le  stupide  est  partout  !..  Un  pitre  plus  que  toi 
Ferait  venir  l'argent.  La  grimace  fait  loi. 
Et  ton  génie,  hélas  1  ne  serait  qu'une  flamme 
Dont  ils  se  serviraient  pour  leur  marmite  infâme  ! 

PARTERRE.  — Le  parterre,  dans  les  théâtres 
modernes,  occupe  une  partie  de  l'ORCHESTRE 
des  Grecs,  qui  comprenait,  chez  eux,  toute  la 
partie  basse  comprise  entre  la  scène  et  Tam- 
phithéâtre. 
Du  moyen  âge  jusqu'à  nos  jours,  lopartei^re, 


-    202  — 

personnifié  par  son  public,  fut  le  véritable 
maître,  disons  mieux,  le  tyran  des  comédiens 
et  l'effroi  des  directeurs.  Les  spectateurs  y 
étaient  debout,  pressés,  mouvants,  agités 
comme  une  mer,  et  toujours  prêts,  comme 
elle,  à  se  charger  d'orages  et  à  les  faire  éclater. 

Gomme  les  vols  étaient  faciles  dans  cette 
cohue,  les  filous  s'y  trouvaient  toujours  en 
nombre;  un  jour,  un  d'eux  cria  «  au  feu  !  » 
on  se  presse,  on  se  bouscule  pour  sortir.  Le 
lendemain,  il  y  eut  trente-sept  plaintes  pour 
vols.  En  1797,  à  une  reprise  dn  Mariage  de Ft- 
garo^  on  fit  mieux.  Une  bande  de  voleurs  avait 
pris  position  dans  la  salle  Feydeau.  Ces  har- 
dis coquins  fermèrent  les  portes  et  détrous- 
sèrent les  voyageurs,  comme  ils  auraient  fait 
d'une  diligence  sur  la  grande  route. 

Par  suite  des  querelles  fréquentes  du  par- 
terre et  des  coups  de  cannes  et  d'épées  qui 
s'y  donnaient,  on  interdit  l'entrée  des  can- 
nes et  épées  en  1685,  1729,  1791.  Ce  ne  fut 
cependant  qu'en  1817,  à  la  suite  de  conflits 
occasionnés  pour  la  représentation  de  Gei^na- 
nicus,  qu'on  établit  un  dépôt  de  cannes  à  la 
porte  des  théâtres. 

On  comprend  facilement  qu'un  joar^erre  de- 
bout, où  le  déplacement  est  facile,  donnait 
libre  carrière  aux   filous,  aux  tapageurs,  aux 


—  203  — 

cabaleurs  de  toutes  classes.  On  pensa  remé- 
dier à  cet  état  de  choses  en  y  mettant  des  ban- 
quettes. Ce  fut  à  VOdéon,  alors  Théâtre-Fran- 
çais, que  cette  innovation  eut  lieu  en  1782,  et 
bientôt  après  dans  tous  .les  théâtres  de  Paris 
et  de  France.  Il  n'y  a  guère  que  les  théâtres 
de  Rouen  qui  persistent  à  conserver  un  par- 
terre debout. 

PARTITION.  —  La  musique  écrite  pour  un 
livret  àîopéra  ou  à' opéra- comique  se  nomme 
partition  dans  son  ensemble,  qui  se  subdivise 
en  parties  ou  morceaux  détachés. 

PASSE.  PASSADE.  —  Le  mouvement, c'est 
la  vie;  ceci  est  vrai  partout, principalement  au 
théâtre.  Deux  personnes  peuvent  se  ren- 
contrer dans  la  rue,  y  causer  une  demi-heure 
sans  changer  de  place  ;  ce  fait  tout  naturel  ne 
peut  avoir  lieu  en  scène.  Le  dialogue  qui  ne 
peut  être  coupé  par  l'action,  est  animé,  rompu, 
repris  par  des  changements  de  position,  qu'on 
nomme  passes  ou  passadeSyàe  droite  à  gauche, 
de  gauche  à  droite.  Ces  passes  doivent  avoir 
lieu  le  plus  naturellement  possible;  c'est 
l'affaire  du  metteur  en  scène. 

PASSER.  —  On  emploie  le  mot  passer  pour 


—  204   — 

synonyme  de  représenter  :  telle  pièce  doit 
passe?'  la  semaine  prochaine,  —  passera  de- 
main. 

PÉLAGIE  (Sainte).  7-  Patronne  des  comédiens. 
Cette  sainte,  qui  fut  comédienne  à  Antioche, 
se  retira  sur  la  montagne  des  Oliviers,  où  elle 
mourut  vers  le  milieu  du  v®  siècle,  après 
une  longue  et  sévère  pénitence.  Sa  fête 
se  célèbre  le  9  juin.  Nous  ne  savons  si  les 
comédiens  fêtent  leur  patronne,  dont  le  nom 
fut  un  épouvantail  pour  tout  le  monde  avant 
l'abolition  de  la  contrainte  par  corps. 

PENSION  DE  RETRAITE.  —  Dans  tous  les 
théâtres  qui  étaient  sous  le  patronage  et  la 
surveillance  de  FÉtat,  le  personnel  général 
avait  droit  aune  pension  de  retraite.  Le  Théâtre- 
Français  se  trouve  seul  aujourd'hui  dans  ce 
cas.  La  troupe  est  divisée  en  deux  parties  : 
les  sociétaires  partageant  aux  bénéfices;  les 
pensionnaires  ou  artistes  aux  appointements 
fixes,  faisant  en  quelque  sorte  leur  stage 
pour  entrer  dans  la  première  division,  qui 
seule  a  droit  à  la  retraite. 

L'article  12  du  décret  de  Moscou  (V.  à  V Ap- 
pendice) réglait  la  retraite  et  ses  obligations 
antérieures  ;  il  fut  modifié  par  un  décret  du 


—  205  — 

30  avril  1850  (V.  à  Y  Appendice),  ainsi  conçu  : 

«  La  pension  de  retraite  ne  sera  acquise  à 
«  l'avenir  qu'après  vingt  années  de  services, 
«  à  partir  du  jour  de  l'admission  à  titre  de 
«  sociétaire.  Elle  est  fixée  et  liquidée  confor- 
«  méinent  au  décret  du  15  octobre  1812.  » 

Dont  l'article  14  dit  : 

«  La  retraite  consiste  :  1°  en  une  pension 
viagère  de  2,000  fr.  sur  les  fonds  de  l'État  ; 
2°  à  pareille  somme  sur  le  fonds  de  réserve 
du  théâtre.  » 

C'est  donc  une  pension  de  4,000  fr.  à  la- 
quelle on  ajoute  200  fr.  par  chaque  année  de 
service  faite  en  plus  des  vingt  années  obliga- 
toires. (V.  à  Y  Appendice  le  décret  modificatif 
du  19  novembre  1859.) 

\^d.  pension  de  retraite  de  V  Opéra  avait  été 
réglée  par  une  ordonnance  des  14-30  mai  1856, 
qui  instituait  une  caisse  spéciale  à  cet  effet  ; 
la  loi  de  1866,  en  rendant  V Opéra  à  l'indus- 
trie privée,  abroge  cette  ordonnance,  mais 
sans  effet  rétroactif  pour  le  personnel  qui  s'y 
trouvait  compris  et  les  ayants  droit. 

PÈRE  NOBLE.  —  EMPLOI  suffisamment  indi- 
qué par  son  titre. 

PHYSIONOMIE.  —Jeu  des  muscles  du  vi- 

i8 


--  206  — 

sage,  qui  en  change  l'expression  et  le  met  en 
rapport  avec  les  émotions  que  l'acteur  doit  ou 
devrait  éprouver  dans  la  réalité  de  son  rôle. 
Un  comédien  sans  />%s/onom2e  ne  sortira  ja- 
mais de  la  médiocrité. 

PHYSIQUE.  —  Nous  nous  montrerions  vo- 
lontiers sévère  sur  le  physique  d'un  comédien, 
si  notre  goût  pour  le  beau,  le  grand,  le  noble, 
au  théâtre,  devait  être  pris  en  considération, 
et  nous  dirions  que ,  s'il  faut  accepter  le 
physique  que  la  nature  nous  donne,  elle  ne 
nous  oblige  pas  à  nous  faire  comédien  ;  mais 
comme  notre  démonstration  ne  servirait  à 
rien,  et  qu'on  nous  opposerait  que  Roscius, 
Beaubourg,  Kean,  La  Noue,  Lekain,  étaient 
affreux,  —  comme  si  leur  immense  talent  ne 
faisait  pas  oublier  leur  laideur  !  —  nous  ai- 
mons mieux  recommander  aux  acteurs  qui 
n'ont  pas  Y  emploi  de  leur  physique,  d'avoir  le 
physique  de  leur  emploi. 

PLAGES.  —  Le  prix  des  places  a  beaucoup 
varié  depuis  l'origine  de  notre  théâtre.  Cela 
se  conçoit  :  il  a  dû  suivre  la  différence  du 
cours  de  l'argent,  l'augmentation  des  frais 
de  représentations,  des  charges  des  exploita- 
tions, etc.  En  1517,  on  payait  mi  liard  ou  six 


—  207  — 

deniers  ;  en  1577,  les  Galosi  prenaient  quatre 
sols;  vers  la  fin  du  même  siècle,  le  parterre 
coûtait  cinq  sols  et  les  galeries  dix;  sous  Mo- 
lière, jusqu'en  1659,  le  parterre  fut  à  dix 
sols;  il  fut  à  quinze,  en  1667.  Une  ordonnance 
de  1768  défend  de  mettre  les  premières  à  un 
prix  dépassant  trois  livres  ;  les  secondes , 
vingt-quatre  sols;  les  troisièmes,  douze  sols; 
les  quatrièmes,  six  sols.  Nous  ne  suivrons  pas 
plus  loin  ces  variations.  (V.  à  V Appendice.) 

PLAFOND.  —  La  décoration  moderne  a  rem- 
placé les  BANDES  par  le  plafond  entier  pour  les 
scènes  fermées.  C'est  une  grande  amélioration 
d'un  bel  effet  décoratif. 

PLANS.  —  On  nomme  plans  ou  RUES  cer- 
taines divisions  de  la  SCÈNE  qui  sont  traitées  à 
ce  dernier  mot. 

PLANTER.  —  Ce  mot,  assez  expressif,  in- 
dique une  idée  arrêtée  pour  la  MISE  EN  SCÈNE 
d'une  pièce  à  l'étude  :  ainsi.  Planter  un  acte, 
veut  dire  que  le  mouvement  général  et  les 
positions  en  sont  fixées.  On  dit  Planter  la  dé- 
coration dans  le  même  sens. 

PLUIE,  GRÊLE.  — hd. pluie  et  la  grêle  s'imi- 
tent au  moyen  d'une  longue  boite  en  bois 


—  208  — 

obstruée  de  petites  planchettes,  et  dans  la- 
quelle on  verse  des  cailloux  qui,  en  tombant 
d'obstacle  en  obstacle,  rendent  le  bruit  de  la 
pluie  ou  de  la  grêle ^  suivant  la  rapidité  du 
mouvement  de  bascule  imprimé.  Souvent  c'est 
un  cylindre  placé  obliquement ,  ayant  la 
forme  de  la  vis  d'Archimède,  et  se  tournant 
comme  elle. 

PLUIE  DE  FEU.  —  Elle  se  fait  au  moyen 
d'une  forte  fusée  glissant  lentement  sur  un  fil 
de  fer  qui  traverse  la  scène. 

POLICE  DES  THÉÂTRES.  —  La  police 
des  théâtres  appartient,  à  Paris,  au  préfet  de 
police;  en  province,  à  l'autorité  municipale. 
Un  commissaire  de  police  est  de  service  à 
chaque  représentation.  I]  fait  le  service  de  la 
salle  et  de  la  scène.  (V.  à  V Appendice  les  Lois 
de  Police.) 

Cette  ingestion  de  la  police  municipale  dans 
les  théâtres  a  donné  lieu  à  quelques  anecdotes 
assez  piquantes.  Exemples  : 

Dans  une  petite  ville  de  province,  un  maire 
qui  faisait  le  service,  s'apercevant  qu'un  vio- 
lon de  l'orchestre  se  reposait,  le  manda  près 
de  lui,  aussitôt  le  rideau  baissé. 

—  Je  m'aperçois,  monsieur,  que  vous  en 


—  209  — 

prenez  à  votre  aise  :  vous  vous  reposez  tandis 
que  les  autres  violons  jouent.  —  Je  ne  joue 
pas  du  violon,  je  joue  de  la  quinte,  —  De  la 
quinte!  Me  prenez-vous  pour  un  sot?  Allez, 
et  que  je  ne  vous  voie  plus,  comme  au  pre- 
mier acte,  les  bras  croisés. — Mais  je  comptais 
mes  pauses.  —  Vous  contiez  des  pauses? 
Qu'est  -  ce  que  cela  ?  des  gaudrioles ,  sans 
doute?  —  Mais  non,  monsieur  le  maire,  il  y 
avait  tacet  allegro.  —  Gomment  I  comment  ! 
vous  m'injuriez  maintenant;  que  l'on  con- 
duise cet  insolent  en  prison. 

A  la  fm  d'octobre  1829,  à  la  suite  d'une 
représentation  des  Deux  Nuits,  d«  BOÏELDIEU, 
le  chef  d'orchestre  du  théâtre  de  Rouen, 
M.  ScHAFFNER,  douna  une  sérénade  à  l'illustre 
compositeur  rouennais.  Cité  pour  ce  fait  en 
petite  police,  il  fut  condamné  à  onze  francs 
d'amende  pour  tapage  nocturne. 

La  musique  de  Boïeldieu  condamnée  comme 
TAPAGE  NOCTURNE  !  et  daus  SOU  pays  natal  ! 
dans  cette  ville  qui  vient  de  célébrer  avec 
pompe  son  centenaire  !  Que  voulez-vous  ?  ré- 
pondra la  police,  il  y  avait  contravention.  Dura 
lex,  sed  lex. 

POMPIERS.  —  Le  service  des  pompiers  se  fait 
de  jour  et  de  nuit  dans  chaque  théâtre  de  Pa- 
is. 


—  210  — 

ris  et  des  grandes  villes.  Le  nombre  d'hommes 
est  établi  d'après  l'importance  des  théâtres  et 
les  risques  de  la  représentation.  Le  gaz  est  un 
cas  de  grands  risques,  c'est  pour  cela  que  les 
répétitions  se  font  généralement  à  l'huile. 

Pendant  la  représentation,  chaque  homme 
est  à  son  poste  et  a  à  sa  portée  la  lance, 
l'éponge  mouillée  dans  un  seau,  la  hache,  etc. 
C'est  surtout  dans  les  féeries,  les  apothéoses, 
les  feux  de  Bengale,  les  batailles,  que  la  sur- 
veillance est  double.  Les  commencements 
d'incendie  sont  fréquents  ;  mais  le  pompier 
veille  et  les  réprime  aussitôt  sans  que  le  pu- 
blic se  doute  qu'il  vient  de  courir  un  danger. 
(V.  à  V Appendice  l'arrêté  du  l^'  germinal 
an  VII  et  celui  du  20  juillet  1862.) 

PONT-VOLANT.  —  Pont  étroit,  suspendu 
au  comble  par  des  FILS  ou  des  tiges  de  fer, 
au-dessus  de  chaque  RUE  ou  PLAN,  et  allant 
d'un  côté  à  l'autre  delà  scène.  La  pratique  de 
ces  ponts  inobiles  est  très-dangereuse  pour  ceux 
qui  n'en  ont  pas  Thabitude.  Il  n'est  malheu- 
reusement pas  rare  de  voir  des  machinistes 
qui  en  tombent  et  dont  la  chute  est  souvent 
mortelle. 

PORTANT.  —  Appareil  d'ÉCLAlRAGE  se  com- 


—  211   — 

posant  d'une  longue  pièce  de  bois  garnie  d'un 
tuyau  et  de  becs  à  gaz  en  quantité  nécessaire. 
Cet  appareil,  destiné  à  donner  la  lumière  de 
droite  et  de  gauche  à  la  scène,  s'accroche  aux 
FAUX-CHASSIS  et  se  branche  sur  le  tuyau  con- 
ducteur à  l'aide  de  tuyaux  souples  qui  permet- 
tent d'avancer  ou  reculer  le  faux-châssis  à 
volonté. 

PRATICABLE.  — C'est  un  DÉCOR  dans  lequel 
on  peut  entrer,  sur  lequel  on  peut  monter, 
d'où  l'on  peut  descendre  :  un  pont,  un  rocher, 
une  montagne,  un  escalier,  une  galerie,  sont 
des  praticables.  Le  mot  s'explique  de  lui- 
même. 

PREMIERE.  —  Une  première  implique  en 
sous-entendu  «  représentation  ».  C'est  un 
grand  jour  de  combat.  La  victoire  donnera  la 
gloire  et  l'argent;  la  chute  fera  imprimer 
dans  tous  les  comptes  rendus  ce  vieux  cliché  : 
«  C'est  l'erreur  d'un  homme  d'esprit  qui  pren- 
dra sa  revanche.  » 

Vers  1829,  quelques  auteurs  innovèrent  de 
faire  mettre  leurs  noms  sur  l'affiche  le  jour 
de  la  première  représentation.  C'était  hardi  et 
loyal ,  car  celui  qui  commet  une  mauvaise 
pièce  doit  en  porter  la  peine,  comme  celui  qui 


—  212  — 

commet  une  mauvaise  action;  seulement  les 
auteurs  de  mauvaises  pièces  étant  en  majorité, 
cet  usage  ne  fut  pas  suivi. 

PRENDRE  DU  SOUFFLEUR.  —  L'acteur 
qui  n'est  pas  sûr  de  son  rôle,  ou  qui  n'a  pas 
eu  le  temps  nécessaire  pour  l'apprendre , 
comme  cela  arrive  fréquemment  en  province, 
prend  du  souffleur. 

PRIVILÈGE.  —  La  loi  de  janvier  1864,  qui 
donne  la  liberté  des  théâtres  et  abolit  les  privi- 
lèges, nous  coupe  la  parole;  nous  tenons  seu- 
lement à  constater  qu'aujourd'hui,  comme  en 
1791,  cette  liberté  n'a  produit  que  de  mau- 
vais résultats  pécuniaires,  et  rien  pour  l'art.  Le 
privilège  étouffait  les  artistes!  disait-on.  Où 
sont  les  grands  auteurs,  les  grands  composi- 
teurs, les  grands  chanteurs,  les  grands  comé- 
diens que  nous  devons  à  l'abolition  du  privi- 
lège théâtral?  Est-ce  à  dire  qu'il  faut  le  j 
rétablir?  Non.  Mais  il  faut  cesser  de  l'accuser 
du  mal  qu'il  n'a  pas  pas  fait. 

PROGRAMME.  —C'est  l'indication  des  pièces 
jouées  dans  un  théâtre,  avec  la  distribution 
des  personnages  et  le  nom  des  acteurs  qui  les 
jouent. 


—  213  — 

Jadis,  à  Paris,  il  n'y  avait  que  quelques 
journaux  spéciaux  :  le  Vert-Vert,  VEntracte, 
le  Programme,  Y  Orchestre,  la  Lorgnette,  qui 
continssent  \q  programme  ;  aujourd'hui  tous  les 
grands  journaux  politiques  le  donnent. 

La  province  a  aussi  ses  journaux  pro- 
grammes, et  le  métier  de  rédacteur  d'iceux 
n'est  pas  semé  de  roses.  Quels  que  soient  les 
titres  dont  ils  se  parent  on  peut  les  résumer 
en  un  seul  :  l'Encensoir...  Sans  quoi  la  vente 
en  serait  interdite  à  l'intérieur.  A  défaut  de 
journal,  le  programme  se  vend  sur  une  petite 
feuille  volante  aux  frais  et  profits  du  direc- 
teur. 

PROLOGUE. —Dans  le  théâtre  des  Grecs, 
le  prologue  servait  à  initier  les  spectateurs  à 
la  marche  du  drame  et  à  ses  développements  : 
il  était  dit  par  un  acteur  ;  plus  tard  cette  expo- 
sition —  car  le  prologue  n'est  qu'une  exposi- 
tion —  se  fit  en  grande  partie  par  le  chœur, 
et,  dans  les  commencements  de  notre  théâtre, 
par  les  confidents  ;  de  là,  ces  longs  récits,  ces 
monologues  interminables  que  nous  trouvons 
depuis  JoDELLE  jusqu'à  ce  magnifique  mono- 
logue de  Figaro. 

L'école  dramatique,  issue  de  Técole  roman- 
tique de  1829-1830,   changea  la  manière;  au 


—  214  — 

lieu  de  noyer  l'exposition  dans  le  cours  d'une 
pièce,  ce  qui  contribue  toujours  à  endormir 
l'action,  elle  en  fit  un  drame  à  part,  un  drame 
préliminaire,  où  tous  les  faits  qui  suivent 
dans  le  drame  proprement  dit  prennent  nais- 
sance. C'est  le  prologue.  —  Bouchardy  a  mé- 
rité la  place  d'honneur  par  ses  prologues  de 
Gaspardo,  de  Lazare  le  Patine ^  du  Sonneur  de 
Saint-Paul.  Celui  de  Richard  d' Arlington  , 
bien  que  copié  mot  à  mot  dans  la  Fille  du 
Médecin^  de  Walter  Scott,  est  très-remar- 
quable. 

Le  théâtre  du  jour  se  sert  peu  àw  prologue  ; 
les  auteurs  ont  reconnu  qu'il  usait  leur  force, 
et  que,  si  \q  prologue  était  réussi,  la  pièce  se 
tenait  rarement  à  la  hauteur  voulue.  D'En- 
NERY  en  a  cependant  joué  quelquefois  avec 
succès.  Il  est  vrai  qu'il  répand  sur  les  deux 
parties  un  niveau  demi-teinte  qui  lui  assure 
la  réussite. 

PRONONCIATION.— Un  comédien  soigneux 
ne  saurait  trop  s'appliquer  à  acquérir  une 
bonne  prononciation^  et  surtout  à  corriger  les 
accents  de  terroir.  C'est  ainsi  qu'un  acteur  à 
l'accent  pointu  et  à  la /?ronow«a/wn  mauvaise, 
ayant  à  dire  :  «  Arrête^  lâche!  arrête^  »  les 
spectateurs    entendirent  :   «  Arrête   la  cha- 


—   215  — 

rette.  »  Un  autre,  dont  l'accent  germanique 
se  trahissait  trop  ouvertement  à  l'oreille , 
disait,  dans  Hamlet  : 

«  ...  Fuis,  s6cctre  é^ouvantaple  ; 
«  5orte  au  fond  des  toiïijjeaux  ton  asôect  redoutaple.  » 

PROPRIÉTÉ  LITTÉRAIRE.  —  La  pro- 
priété des  ouvrages  dramatiques  a  été  assez 
problématique  jusqu'à  Reaumarchais.  Si  les 
tragédies  de  Corneille  lui  ont  assuré  la  gloire 
dans  l'avenir,  elles  ne  lui  ont  guère  donné  que 
la  misère  pendant  sa  vie.  MM.  les  comédiens 
se  faisaient  la  part  du  lion,  et  les  pauvres 
auteurs,  dépossédés  par  eux ,  mouraient  de 
faim. 

Nous  avons  traité,  au  mot  DROITS  D'AUTEUR, 
les  premiers  pas  de  la  propriété  littéraire  et 
nous  avons  réuni,  à  V Appendice^  toutes  les 
lois  sur  cette  matière. 

Les  traités  internationaux  faits  par  le  gou- 
vernement impérial,  de  1852  à  1867,  assurent 
à  nos  auteurs,  compositeurs,  graveurs,  dessi- 
nateurs, la  propriété  de  leurs  œuvres  à  Fétran^ 
ger  et  la  rétribution  qui  peut  en  résulter.  La 
dénonciation  de  ces  traités  ramènerait  la  con- 
trefaçon et  la  piraterie  littéraires,  plus  préju- 
diciables à  la  France  qu'à  nos  voisins. 


—  216  — 

PUBLIC.  —  François  P'  a  écrit  sur  les  vitres 
de  Ghambord  :  «  Souvent  femme  varie  !  »  ; 
Shakspeare  a  dit  d'elles  :  «  Mobiles  comme 
l'onde  !  »  Ces  deux  pensées  peuvent  également 
s'adresser  au  public^  qui  est  plus  changeant , 
plus  variable,  plus  mobile,  plus  capricieux 
que  la  femme. 

Pris  individuellement,  les  spectateurs  ont 
peu  d'idées  préconçues;  mais,  réunis  en  masse, 
il  s'en  dégage  un  fluide  qui  les  entraine  tous, 
tantôt  en  bien ,  tantôt  en  mal ,  et  leur  fait 
commettre  les  plus  grandes  inconséquences. 
Il  faudrait  un  volume  pour  enregistrer  les 
pièces  du  plus  grand  mérite  sifflées  aux  pre- 
mières représentations,  puis  applaudies  aux 
suivantes  par  ce  même  public,  de  même  que 
celles  applaudies  d'abord  et  sifflées  ensuite. 

Nous  avons  parlé,  au  mot  CHUTE,  des  Fables 
d'Esope,  de  Boursault  ;  il  répondit  à  l'oppo- 
sition que  lui  fit  le  public  par  une  fable  inti- 
tulée le  Dogue  et  le  Bœuf,  que  voici  : 

«  Un  dogue  envieux,  superbe, 

«  Etant  couché  dans  un  champ 

«  Fut  assez  lâche  et  méchant 
«  Pour  empêcher  le  bœuf  d'y  brouter  un  peu  d'herbe 
«  Le  bœuf,  en  mugissant,  portant  aillejin's  ses  pas  : 
«  Maudit  sois-tu,  dit-il,  et  que  malheur  t'arrive! 

«  Ta  méchanceté  me  prive 

«  De  ce  que  tu  ne  veux  pas.  > 


—   2t7  — 

<■■  A  tant  d'honnêtes  g'ens  qui  sont  devant  vos  yeux, 

«  Laiss(!z  la  liherté  d'ai)|)laiulic  ce  mélange, 

«  Et  ne  ressemblez  pas  à,  ce  dogue  envieux 

«  Qui  ne  veut  pas  manger,  ni  souffrir  que  l'on  mange.  » 

Certains  auteurs,  certains  acteurs,  inspirent 
au  public  des  sympathies  ou  des  antipathies 
que  rien  ne  justifie;  en  voici  des  preuves  : 

BoYER,  le  tragique,  ayant  vu  la  plupart  de 
ses  ouvrages  tomber,  voulut  s'assurer  s'il  n'y 
avait  pas  parti  pris  de  la  part  du  public  et  fit 
représenter  son  Agamemnon  sous  le  nom  de 
Pader  d'Affezan,  en  répandant  le  bruit  que 
c'était  un  jeune  étranger  nouvellement  arrivé 
à  Paris.  La  pièce  fut  applaudie  bruyamment. 
BoYER  ayant  eu  le  malheur  de  dire  après 
qu'elle  était  de  lui ,  elle  fut  sifflée  tous  les 
jours  suivants  et  tomba. 

Un  comédien  très-laid  était  toujours  accueilli 
par  des  sifflets  ;  un  jour,  après  la  bordée  Te- 
çue,  il  vint  sur  le  bord  de  la  scène  et  dit  au 
public  :  «  Messieurs,  vous  sifflez  mon  visage, 
«  mais  il  vous  sera  plus  facile  de  vous  y  faire 
«  qu'à  moi  d'en  changer.  »  On  rit  de  cette 
répartie  et  l'acteur  fut  toujours  bien  reçu 
depuis. 

Le  public  se  divise  souvent  en  plusieurs 
camps,  témoins  les  fameuses  cabales  pour  la 
Phèdre^  de  Pradon,  et  la  Phèdre,  de  Racine  ; 

!9 


—  218  — 

la  guerre  des  Lullistes  et  des  Ramistes ,  des 
Gluckistes  et  des  Ptccimstes,  des  classiques  et 
des  romantiques.  Tant  mieux!  tant  mieux! 
qui  a  tort?  qui  a  raison?  qu'importe!  on 
vit  !  il  n'y  a  que  l'indifférence  qui  tue. 


QUEUE.  —  Usage  barbare  qui  consiste  à  faire 
attendre  à  la  porte  les  personnes,  rangées, 
deux  par  deux,  jusqu'à  l'ouverture  des  bu- 

^  reaux,  ouverture  qui  se  fait  juste  assez  à  temps 
pour  que  les  derniers  entrés  arrivent  au  mi- 
lieu de  la  première  pièce.  Il  va  sans  dire  que, 
la  queue  se  faisant  dans  la  rue,  sans  abri,  les 
personnes  qui  la  composent,  reçoivent  la  pluie, 
la  neige,  la  grêle,  le  vent,  attrapent  le  froid 
aux  pieds  et  gagnent  des  rhumes ,  tout  cela  pour 
satisfaire  l'amour-propre  du  directeur,  qui 
aime  à  voir  une  longue  queue,  et  laisser  au 
buraliste  le  temps  de  prendre  son  café,  et  se 
chauffer  tranquillement.  0  moutons  de  Pa- 
nurge  que  nous  sommes  ! 

Cette  invention  ne  date  pas  d'hier,  car  nous 
voyons,  en  date  du  6  octobre  1599,  une  «  per- 


—  219  — 

«  mission  de  faire  dresser  des  barrières  au- 
((  devant  de  la  porte  et  entrée  de  V Hôtel  de 
«  Bourgogne^  pour  empêcher  la  pression  du 
«  peuple  lorsqu'on  y  veut  jouer.  » 

La  queue  protège  deux  industries  :  les  gar- 
deurs  de  place  et  la  vente  des  billets,  que  des 
employés  de  l'administration  vendent  pour 
son  compte  cinquante  centimes  ou  un  franc 
plus  cher  qu'au  bureau.  Il  y  a  bien  aussi  les 
pharmaciens  et  les  médecins  qui  ne  demande- 
ront pas  la  suppression  de  la  queue. 

QUIPROQUO.  —  Base  des  trois  quarts  au 
moins  des  vaudevilles  fabriqués  de  nos  jours. 
On  use  d'autant  plus  volontiers  du  quiproquo^ 
comme  nœud  d'intrigue,  qu'il  amuse  toujours. 
Voici  un  cas  de  l'espèce  qui,  pour  n'être  pas 
tout  à  fait  neuf,  n'en  est  pas  moins  drôle  : 

Un  grave  magistrat,  n'ayant  jamais  été  à 
la  comédie,  s'y  laissa  entraîner  par  l'assurance 
qu'on  lui  donna,  qu'il  serait  très-content  de 
la  tragédie  diAndromaque.  En  effet,  il  fut 
très-attentif  au  spectacle,  qui  finit  par  la  co- 
médie des  Plaideurs^  dont  on  ne  lui  avait  pas 
parlé.  En  sortant,  il  trouva  l'auteur,  et  croyant 
lui  faire  un  compliment  il  lui  dit  :  «  Je  suis 
«  très- satisfait,  monsieur,  de  votre  Andro- 
«  maque;  c'est  une  jolie  pièce.  Je  suis  seule- 


—  220  — 

«  ment  étonné  qu'elle  finisse  si  gaiement. 
«  J'avais  d'abord  quelque  envie  de  pleurer  ; 
«  mais  la  vue  des  petits  chiens  m'a  fait  rire.  » 
On  ne  dit  pas  ce  qu'a  répondu  Racine. 


R 


RACCORD.  —  Il  est  rare  qu'après  une  pre- 
mière représentation,  l'auteur  ne  soit  pas 
obligé  défaire  des  coupures,  des  changements. 
Les  répétitions  que  cela  nécessite  se  nomment 
raccords;  également  quand  un  acteur  prend 
le  rôle  d'un  autre,  il  faut  faire  des  raccords. 
On  comprend  bien  que  dans  ces  deux  cas  on 
ne  répète  que  les  parties  qui  ont  éprouvé 
des  coupures  ou  celles  qui  dépendent  du  rôle 
repris. 

Les  raccords  sont  très-fréquents  dans  le 
répertoire  lyrique,  où  les  chanteurs  de  pro- 
vince transposent  beaucoup  et  suppriment  sou- 
vent. Dans  ce  cas,  c'est  affaire  entre  eux  et 
l'orchestre. 

RAMPE.  —  Galerie  lumineuse  qui  borde  la 
scène,  du  coLé  de  la  salle.  Jusqu'à  l'invention 


—  221  — 

des  quinquets,  le  luminaire  se  composait  de 
chandelles,  dont  le  moucheur  était  une  auto- 
rité. Après  1822,  le  gaz  se  répandit  partout  ; 
et  la  lumière  de  la  rampe  pouvant  obéir,  grâce 
au  robinet,  on  put  faire  des  effets  plus  variés 
de  jour  et  de  nuit. 

La  vivacité  de  la  lumière  de  la  rampe^  pro- 
duisant des  ombres,  de  bas  en  haut,  on  y 
remédia  à  l'aide  de  la  HERSE.  La  rampe  est 
mobile  et  s'abaisse  à  volonté. 

RAPPEL.  —  Cet  usage  de  rappeler  les  acteurs 
existe  depuis  longtemps;  en  Italie,  il  y  est 
poussé  jusqu'à  l'abus,  et  à  un  tel  point  qu'on 
a  dû  pratiquer  une  petite  porte  dans  le  rideau 
pour  donner  passage  à  l'aoteur  rappelé  sou- 
vent dix  à  douze  fois,  sans  relever  pour  cela 
la  toile  à  chaque  fois. 

Cette  ovation  très-flatteuse  pour  celui  qui 
la  mérite,  a  le  défaut  de  faire  partie  du  service 
de  MM.  les  claqueurs,  ce  qui  gâte  un  peu  le 
rappel^  sans  compter  que  le  public  qui  se  fait 
un  jeu  de  tout,  croit  prouver  ses  sympathies 
en  criant  :  Tous  !  tous  !  ce  qui  satisfait  mé- 
diocrement les  acteurs  méritants. 

RAT.  —  Nous  laissons  la  parole  à  Balzac  : 
«  Le  rat  est  un  des  éléments  de  Y  Opéra... 

19. 


—  222  — 

«  Il  est  produit  par  les  portiers,  les  pauvres, 
a  les  acteurs,  les  danseurs.  Il  n'y  a  que  la 
((  plus  grande  misère  qui  puisse  conseiller  à  un 
«  enfant  de  livrer  ses  pieds  et  ses  articulations 
«  aux  plus  durs  supplices.  » 

Voici  ce  qu'en  dit  Roqueplan,  plus  compé- 
tent : 

«  Le  vrai  rat^  en  bon  langage,  est  une  petite 
<(  fille  de  sept  à  quatorze  ans,  élève  de  la 
«  danse  ;  qui  porte  des  souliers  usés  par 
«  d'autres,  des  châles  déteints,  des  chapeaux 
«  couleur  de  suie  ;  qui  sent  la  fumée  de  quin- 
«  quetj  a  du  pain  dans  ses  poches  et  demande 
((  dix  sous  pour  acheter  des  bonbons  ;  le  rat 
«  fait  des  trous  aux  décorations  pour  voir  le 
«  spectacle,  court  au  grand  galop  derrière  les 
«  toiles  de  fond,  et  joue  aux  quatre  coins  dans 
«  les  corridors...  le  chant  ne  produit  pas  de 
«  rat.  )) 

.  Si  nous  ajoutons  cet  extrait  d'un  article  sur 
VOpéra^  on  devinera  sans  peine  quel  sera  le 
sort  du  rat  : 

«  \i' Opéra  est  un  vaste  bazar,  une  exhibition 
«  continuelle  de  tous  les  sentiments  du  cœur 
«  et  des  avantages  physiques  des  deux  sexes, 
«  mais  plus  particulièrement  du  sexe  féminin.» 

Le  rat  qui  ne  passe  pas  SUJET,  devient  mar- 
cheuse. 


—  223  — 

RÉGIT. — Le  répertoire  tragique,  surtout  l'an- 
cien, contient  peu  de  pièces  où  ne  se  trouve 
un  récit  d'une  longueur  parfois  démesurée. 
La  nécessité  d'expliquer  au  spectateur  des 
faits  qui  se  passent  hors  de  sa  vue,  ou  qui  se 
sont  passés  avant  le  commencement  de  l'AC- 
TION  et  qui  l'explique,  a  donné  naissance  au 
récit  qui,  quelque  beau  qu'il  soit,  arrête  court 
le  mouvement  du  drame.  Un  des  plus  beaux 
récits  connus  est  le  récit  de  Théramène,  dans 
Phèdre.  Il  y  a,  au  commencement  du  troi- 
sième acte  des  Diamants  de  la  couronne,  un 
long  récit  pour  expliquer  l'imbroglio  de  la 
pièce. 

RECONDUIRE.  —Lorsqu'un  acteur  est  sifflé 
ou  EMPOIGNÉ  par  le  public,  .les  camarades 
disent  qu'il  s'est  fait  reconduire, 

RÉGIE. —  Lorsqu'un  directeur  fait  comme  M*** 
et  va  à  Gonstantinople  ou  en  Gochinchine 
chercher  de  quoi  payer  ses  acteurs,  ceux-ci 
attendent  son  retour,  quand  ils  peuvent  dis- 
poser de  l'immeuble,  en  se  constituant  en 
régie,  et  jouent  en  partageant  entre  eux  les 
recettes.  Gela  ne  dure  jamais  longtemps  :  la 
question  àvi prorata  amène  bientôt  la  division 
entre  les  gros  et  les  petits. 


—  224  — 

—  Régie  se  dit  encore  des  fonctions  et  du 
bureau  du  régisseur. 

RÉGISSEUR.  —  Alter  ego,  bras  droit,  chef 
d'état-major,  du  DIRECTEUR;  toujours  vu  d'un 
mauvais  œil  par  les  camarades  sur  lesquels  il  a 
une  certaine  autorité  et  un  devoir  de  contrôle. 
C'est  lui  qui  fait  le  TABLEAU,  surveille  les  ré- 
pétitions, constate  les  retards  et  les  absences  ; 
vérifie  la  MISE  EN  SCÈNE,  les  ACCESSOIRES, 
appelle  au  théâtre,  frappe  les  trois  coups.  La 
brochure  à  la  main,  il  regarde  si  chacun  est 
à  son  poste  pour  son  ENTRÉE.  C'est  le  mouve- 
ment perpétuel.  Un  bon  7'égisseur  est  la  che- 
ville ouvrière  d'une  troupe. 

Dans  les  grandes  occasions,  quand  il  faut 
parler  au  public,  c'est  lui  qui  endosse  l'habit 
noir  et  les  gants  blancs,  fait  les  trois  saluts 
d'usage  et  dit  :  Messieurs... 

Tout  n'est  pas  roses  dans  les  fonctions  de 
régisseur.  Même  du  temps  de  Dancourt,  il  en 
était  ainsi,  s'il  faut  en  croire  l'anecdote  sui- 
vante :  Le  parterre  avait  demandé  Ariane, 
qui  était  le  triomphe  de  la  Duclos  ;  celle-ci 
était  atteinte  d'une  fluxion  générique  assez 
avancée,  bien  qu'elle  fùtdemoiselle;  Dancourt 
ne  savait  comment  annoncer  cette...  maladie 
au  public,  surtout  devant  M"®  Duclos,  qui  le 


—  225  — 

guettait  de  la  coulisse;  enfin,  il  annonce  que 
sa  camarade  était  malade  et,  par  une  mimique 
rapide,  fît  comprendre  de  quoi  il  s'agissait. 
Aussitôt  M"°  DucLos  s'élance  sur  la  scène, 
flanque  un  soufflet  à  Dancourt  et  dit  au  par- 
terre :  A  demain  Ariane  l 

RELACHE  ou  le  repos  des  banquettes.  —  Ces 
sept  lettres  qu'elles  proviennent  d'une  néces- 
sité matérielle,  comme  une  répétition  géné- 
rale, d'une  indisposition  réelle,  d'une  fantai- 
sie, d'un  caprice  de  monsieur,  madame  ou 
mademoiselle  sept  étoiles,  ont  toujours  pour 
résultat  un  vide  dans  la  caisse. 

RENAISSANGE(Théâtre  de  la).  — Ce  théâtre 
construit  sur  l'emplacement  du  restaurant 
Deffîeux,  incendié  par  la  Commune,  a  été 
inauguré  le  6  mars  1873.  Après  avoir  débuté 
par  le  drame  qui  ne  lui  a  pas  réussi,  il  s'est 
donné  à  Y  opérette  qui  s'acclimate  très-bien 
chez  lui. 

RENTRÉE.  —  Lorsqu'un  comédien  —  le  sexe 
ne  fait  rien  à  la  chose  —  revient  d'un  congé 
ou  remonte  sur  une  scène  qu'il  avait  quittée, 
il  fait  sa  rentrée.  Cette  chose  aussi  simple  que 
naturelle  est  une  occasion  de  grosse  caisse  ; 


—  226  — 

l'affiche  annonce  en  gros  caractères  et  en 
VEDETTE  cette  rentrée;  le  bataillon  de  cla- 
queurs  reçoit  du  renfort  et  travaille  solide- 
ment ;  le  public  est  satisfait...  ou  ne  l'est 
pas  ;  ce  n'est  pas  là  la  question,  si  le  caissier 
est  content. 

RÉPERTOIRE.  —  Ce  mot  a  plusieurs  signi- 
fications ;  d'abord,  il  indique  la  série  des 
pièces  jouées  à  un  théâtre  et  lui  appartenant  : 
Répertoire  du  Théâtre- Français  ^  du  Gymnase^ 
du  Palais-Royal.  Ensuite,  il  fait  partie  du 
bagage  des  comédiens  de  province  qui  sont 
engagés  plus  ou  moins  facilement,  suivant 
que  leur  répertoire  —  c'est-à-dire  les  rôles 
qu'ils  savent  —  est  plus  ou  moins  nombreux, 
plus  ou  moins  nouveau,  sans  compter  le 
choix.  Un  directeur  intelligent  coordonne  ces 
répertoires  avant  de  signer  les  engagements, 
afin  d'avoir  une  série  de  pièces  sues  et  prêtes 
à  jouer,  sauf  quelques  RACCORDS  pour  les 
petits  rôles,  ce  qui  permet  d'apprendre  les 
nouveautés.  —  Il  désigne  encore  la  liste  que 
les  directeurs  de  province  sont  tenus  de  sou- 
mettre à  l'autorité  administrative.  Ce  i^éper- 
toire  doit  indiquer,  d'une  quinzaine  ou  d'un 
mois  à  l'avance,  ce  qu'on  a  l'intention  do 
jouer.  Cette  clause  administrative  est  assez 


—  227  — 

mal  observée.  Les  trois  quarts  du  succès  d'un 
directeur  de  province  sont  dans  la  com- 
position de  son  répertoire ,  qui  doit  avoir 
pour  règles  :  la  valeur  et  les  aptitudes  de  ses 
pensionnaires,  les  ressources  matérielles  de 
son  MAGASIN  et  le  goût  de  son  public. 

RÉPÉTITION.  —  Une  pièce  terminée  par 
l'auteur  n'est  qu'à  l'état  de  chrysalide.  Il 
s'agit  d'en  faire  un  papillon  ;  c'est  le  but  des 
répétitions. 

Les  ROLES  copiés  et  DISTRIBUÉS,  les  pre- 
mières répétitions  se  font,  le  manuscrit  à  la 
main,  devant  l'auteur  et  le  metteur  en  scène. 
Tandis  que  l'un  et  l'autre  s'évertuent  à  faire 
comprendre  l'esprit  de  la  pièce,  à  en  régler 
les  positions  et  le  mouvement,  les  acteurs 
causent  de  leurs  petites  affaires,  maudissent 
la  critique,  CASSENT  DU  SUCRE,  devinent  des 
mots  carrés  ;  les  dames  brodent,  tricotent, 
ourlent  des  mouchoirs,  sans  autrement  s'occu- 
per de  la  question  théâtrale.  Enfin,  les  rôles 
sont  sus,  ça  se  fond^  et  l'auteur,  après  ce  pur- 
gatoire, voit  arriver  le  jour  de  la  PREMIÈRE. 

Pour  les  œuvres  d'auteurs  en  renom,  la 
répétition  générale^  c'est-à-dire  celle  qui  pré- 
cède la  première^  est  une  cérémonie.  Le  décor 
est  planté  ;  tout  le  monde  est  en  costume  ; 


—  228  — 

l'éclairage  est  au  complet,  et  Von  joue  pour 
bon  ;  enfin,  on  voit  la  pièce  au  gaz. 

Autrefois,  la  presse  n'était  conviée  que  pour 
la  pi'einiè)'e.  Aujourd'hui,  elle  l'est  pour  la 
répétition  générale^  ce  qui  permet  de  faire 
l'article  d'avance,  et  laisse  au  directeur  le 
bénéfice  des  places. 

RÉPLIQUE.  —  Derniers  mots  d'une  tirade 
qu'il  est  urgent  qu'un  acteur  ne  change  pas 
et  sache  bien,  puisque  ce  sont  ceux  que  son 
partenaire  attend  —  et  souvent  les  seuls  qu'il 
connaisse  de  la  pièce  —  pour .  répondre. 
Quand  un  personnage  doit  entrer  en  scène ^ 
l'acteur  qui  parle  donne  la  réplique  un  peu 
plus  fortement  et  la  jette  autant  qu'il  peut 
sur  la  CANTONADE  du  côté  où  l'ExNTRÉE  doit  se 
faire.  Les  acteurs  rivaux  ou  ennemis,  se  ser- 
vent de  la  réplique  pour  faire  une  niche  au 
camarade  en  la  donnant  mal  ou  mal  à 
propos. 

REPRÉSENTATION  EXTRAORDINAIRE.— Mé- 
fiez-vous de  ce  piège  tendu  par  certains  direc- 
teurs, et  ne  confondez  pas  extraordinaire  avec 
meilleure.  Il  n'y  a  souvent  d'extraordinaire  que 
la  grandeur  de  l'affiche,  la  longueur  du  spec- 
tacle et  l'augmentation  du  prix  des  places.  Le 


—  229  — 

reste  est  fort  ordinaire  et  se  compose  assez 
généralement  d'un  acte  d'une  tragédie,  du 
quart  d'une  comédie,  de  la  moitié  d'un  vau- 
deville, d'un  morceau  d'opéra,  d'une  chanson- 
nette usée,  d'une  pièce  de  vers  faite  pour  la 
circonstance  et  mal  dite,  d'une  variation  bril- 
lante pour  piano,  composée  et  exécutée  par 
M.  Tappeforiski,  et  autres  ingrédients  sem- 
blables. 

RETRAITE.  —  V.  Pension, 

REVUE.  —  Pièce  dont  l'intention  est  de  faire 
défiler,  —  en  les  critiquant,  -^  devant  les 
spectateurs,  les  faits  saillants  de  l'année, 
choses  et  gens. 

Ce  genre  de  pièce  n'est  pas  nouveau,  car 
nous  voyons,  en  1737,  V Amour  censeur  des 
Théâù^es,  de  Romagnesi  et  Laffichard,  revue 
en  un  acte  des  principales  pièces  jouées  dans 
l'année  1736.  En  1740,  Favard  fit  jouer  la 
Barrière  du  Parnasse^  revue  dont  la  pensée 
est  ingénieuse.  La  muse  garde  la  barrière,  et 
la  pièce  qui  veut  qu'on  la  lui  ouvre  vient 
décliner  ses  qualités  ;  la  muse  relève  les 
défauts  et  ne  laisse  entrer  au  Parnasse  que 
celles  qui  le  méritent.  Jusqu'en  1815,  les  Re- 
vues furent  rares  et  ne  comportaient  jamais 

20 


—  230  — 

plus  d'un  acte.  Les  frères  Gogniard  redon- 
nèrent la  vogue  à  ce  genre  avec  leur  revue 
1841-1941,  jouée  à  la  Porte-Saint-Martin  avec 
un  succès  fou. 

Aujourd'hui,  les  7'evues  sont  faites  sur  COM- 
MANDE par  des  fournisseurs  attitrés  ;  elles 
portent  des  titres  pris  dans  le  vocabulaire  des 
halles  ou  des  voyous,  durent  quatre  à  cinq 
heures,  contiennent  des  gravelures  en  place 
d'esprit  et  beaucoup  de  MAILLOTS,  mais  peu 
d'idées. 

RIDEAU.  —  Cette  grande  toile,  peinte  en 
forme  de  draperie,  et  ornée  d'un  œil  de  cha- 
que côté,  c'est  le  rideau.  Il  cache  aux  specta- 
teurs les  détails  de  la  cuisine  dramatique 
qu'on  confectionne  pour  eux.  Il  n'y  a  pas 
grand  mal.  Mais  chut  !  Ecoutez  le  régisseur 
crier:  «  Place  au  théâtre  !  »  et  ensuite  :  «  Tlw 
rideau  !  »  Il  se  lève  majestueusement  et  l'acte 
commence. 

Chez  les  Grecs  et  chez  les  Romains,  le  ri- 
deau descendait  sous  la  scène  ;  longtemps 
chez  nous  il  s'est  tiré  sur  les  côtés,  en  deux 
parties,  comme  les  rideaux  de  fenêtres. 

L'idée  mercantile  se  glissant  partout,  quel- 
ques théâtres  de  Paris  avaient  un  rideau-an- 
nonces, comme  la  quatrième  page  des  jour- 


—  231  — 

naux,  nous  croyions  qu'on  y  avait  renoncé, 
mais  le  nouveau  théâtre  de  la  Porte-Saint- 
Martin  vient  de  le  ressusciter.  Ce  n'est  pas 
tant  mieux. 

Il  y  a  de  petits  rideaux  pour  distinguer  les 
TABLEAUX  des  ACTES  ;  ils  sont  souvent  pla- 
cés après  le  MANTEAU  D'ARLEQUIN. 

RIDEAU  DE  POND.— Le  nc?eawc/e/bnc?est 
un  décor  sans  châssis  ;  il  est  attaché  par  sa 
partie  supérieure  à  une  perche  à  laquelle 
tiennent  les  FILS  de  manœuvres;  dans  le  bas, 
une  autre  perche  est  dissimulée  dans  un 
fourreau,  et  maintient,  par  son  poids,  la  rigi- 
dité du  décor  ;  une  bande  de  toile,  ou  bavette^ 
peinte  dans  le  ton  du  rideau^  tombe  sur  le 
sol,  au-dessous  du  fourreau,  pour  cacher  la 
solution  de  continuité. 

RIEN  DANS  LE  VENTRE.  —  Se  dit  d'un 
auteur  qui,  ayant  eu  quelques  succès  à  ses 
débuts,  ne  produit  plus  que  des  OURS,  ou  des 
pièces  mal  venues  :  //  na  plus  rien  dans  le 
ventre. 

RIVALITÉ.  —  En  général,  les  rivaux  sont  ceux 
qui,  concourant  à  un  même  but,  rivalisent  de 
talent,  d'ardeur,  de  travail,  de  soins,  pour  y 


—  -232  — 

atteindre  le  premier;  au  théâtre,  ce  n'est  pas 
cela  :  la  rivalité  n'est  pas  l'émulation.  Depuis 
Pylade  et  Bathilde,  à  Rome,  jusqu'à  nos 
jours,  autant  de  rivaux,  autant  d'ennemis. 
Nous  ne  parlons,  bien  entendu,  que  des  riva- 
lités de  métier. 

ROGNURES.  —  L'économie  étant  une  vertu, 
MM.  les  auteurs  qui  sont  obligés  de  couper 
tantôt  une  scène,  tantôt  un  acte  d'une  pièce, 
conservent  les  rognures  avec  lesquelles  ils  re- 
confectionnent un  vaudeville  ou  une  comédie. 
C'est  l'art  d'accommoder  les  restes  appliqué  au 
théâtre  ;  c'est  un  hachis  dramatique. 

DuFRESNY  fut  un  dcs  auteurs  auxquels  on 
imposa  le  plus  de  rognures.  Les  comédiens 
français  venaient  de  rogner  deux  actes  à  son 
Amant  masqué,  ce  qui  le  réduisait  à  un  seul, 
quand  il  rencontra  Pellegrin,  auquel  il  se 
plaignit  amèrement  du  procédé  de  ces  mes- 
sieurs, et  surtout  du  chagrin  qu'il  éprouvait 
de  ne  pouvoir  jamais  avoir  une  pièce  en  cinq 
actes  reçue  par  eux.  —  Il  y  a  un  moyen  bien 
simple,  lui  répondit  Pellegrin,  faites-en  une 
en  onze  actes  ;  on  vous  en  rognera  six,  et  il 
vous  en  restera  cinq. 

ROLES.  —  Lorsqu'une  pièce  est  reçue  et  doit 


—   233  — 

PASSER,  elle  est  DISTRIBUÉE,  c'est-à-dire  que 
chaque  acteur  qui  doit  y  jouer  reçoit  un  ma- 
nuscrit contenant  son  rôle,  avec  une  RÉPLIQUE 
seulement  du  rd/e  auquel  il  doit  répondre.  Un 
comédien  désireux  de  bien  faire  doit_,  avant 
d'étudier  son  rôle,  lire  attentivement  la  pièce 
afin  de  juger  de  l'ensemble,  du  caractère  gé- 
néral, et  de  celui  qu'il  doit  donner  au  rôle 
qu'il  est  chargé  d'interpréter.  Ce  sont  des 
notions  élémentaires  trop  négligées ,  mais 
bonnes   à   redire. 

Ce  que  nous  venons  de  dire  ne  s'applique 
pas  aux  théâtres  de  Paris  où  la  pièce  est  lue 
aux  acteurs  par  l'auteur,  et  souvent  mise  en 
scène  par  lui  ;  mais  pour  la  province  où  les 
j'ôles  sont  copiés  et  distribués  par  la  direc- 
tion, de  façon  que  les  acteurs  sérieux  sont 
obligés  d'acheter  la  pièce  pour  la   connaître. 

Les  rôles  se  comptent  *à  la  ligne  ;  on  dit  : 
j'ai  un  rôle  de  500,  de  300,  de  200.  Ceux  de 
50,  et  au-dessous,  rentrent  dans   les  PANNES. 

ROMAINS.  —V.  Claque. 

RONDE.  —  C'est  une  innovation  des  drama- 
turges modernes,  d'avoir  introduit  dans  cha- 
cun de  leur  drame  une  ronde.  Quelques-unes 
sont  devenues  populaires  :  la  ronde  du  Canal 

20. 


—  234  — 

Saint-Mm'tin  ;  celles  de  Paris  la  nuit,  du  Juif- 
Errant,  de  Bocambole,  etc. 

RONFLER.  —  Faire  sortir  les  R  dans  les  mots 
comme  ceux-ci  :  Horrreur,  affrrreux,  trrrem- 
blez ,  rrrace  maudite  !  et  autres  du  même 
genre. 

ROUGE.  —  Printemps  artificiel  que  les  acteurs 
et  actrices,  du  monde  ou  du  théâtre,  s'appli- 
quent sur  les  joues  et  sur  les  lèvres.  Il  fau- 
drait pouvoir  retirer  celui  des  mains,  des  bras 
et  des  oreilles  ;  c'est  là  le  hic.  —  V.  Maquillage. 

RUE.  —  L'espace  vide  entre  deux  coulisses,  et 
dans  toute  la  largeur  de  la  scène,  se  nomme  rue. 
C'est  ce  qui  constitue  les  PLANS.  —  V.  Scène. 

RUSTIQUE.  —  Terme  pour  désigner  un  décor 
qui  appartient  à  ce  genre.  Une  chaumière, 
une  cabane,  sont  des  rustiques. 


SALUT.  —  Marque  de  déférence  que  tout  ac- 
teur doit  au  public,  auquel  il  ne  doit  parler 


—  235  — 

qu'après  lui  avoir  fait  trois  saints:  un  en 
face,  un  à  droite,  un  à  gauche.  Tout  cela 
n'est  encore  que  de  la  comédie.  Il  faudrait 
avoir  l'oreille  dans  la  coulisse  pour  voir  ce 
que  vaut  cette  déférence...  obligatoire  et  tra- 
ditionnelle. 

SAYNÈTE.  —Nom par  lequel  on  désigne  des 
embryons  d'opérettes  qui  tiennent  le  milieu 
entre  ce  genre  et  la  chanson  comique,  dont 
ils  dérivent  plus  directement,  leur  domaine 
étant  plutôt  le  café  concert  que  le  théâtre. 

SCÈNE.  —  Un  théâtre  se  divise  en  deux  par- 
ties distinctes  :  la  salle  et  la  scène.  Aux  termes 
de  la  loi  qui  régit  les  constructions  théâtrales, 
une  forte  construction  en  maçonnerie  doit 
les  isoler,  et  un  rideau  de  fer  s'opposer  à  la 
propagation  de  l'incendie  d'une  des  deux  par- 
ties dans  l'autre. 

Nous  nommons  scène  toute  la  partie  pla- 
cée au-delà  du  rideau.  Les  anciens  avaient 
donné  ce  nom  à  une  construction  de  pierre, 
percée  de  trois  portes,  décorée  de  marbre,  de 
sculptures,  peintures,  et  placée  où  nous 
voyons  chez  nous  le  RIDEAU  DE  FOND.  Cette 
scène  servait  de  décoration  fixe  pour  la  tragé- 
die,  dont  la   représentation   avait   lieu   sur 


—  236  — 

Vhyposcenium  et  le  proscenium',  nous  avons 
fait.de  ces  deux  parties  notre  scène  et  notre 
avant-scène. 

La  scène  est  légèrement  inclinée  et  se  di- 
vise en  deux  parties  longitudinales  dont  le 
côté  droit  du  spectateur  se  nomme  côté  cour, 
et  le  ^'àwohQ  côté  jardin. 

Antérieurement  à  1789,  les  machinistes, 
pour  se  reconnaître  dans  le  placement  des  dé- 
cors, les  désignaient  par  ceux  du  côté  du  roi, 
et  ceux  du  côté  de  la  reine,  dont  les  loges  se  trou- 
vaient, l'une  à  droite,  l'autre  à  gauche,  dans 
chaque  théâtre  dépendant  des  Menus.  Après  la 
Révolution,  le  machiniste  des  Tuileries  rem- 
plaça les  mots  ro?"et  reine  par  cour  qI  jardin,  Ao, 
Idicour  du  carrousel  et  àM  jardin  des  Tuileries 
qui  se  trouvaient  à  gauche  et  à  droite  de  la 
salle.  Cette  dénomination  s'est  appliquée  par 
la  suite  à  tous  les  théâtres. 

Dans  le  sens  transversal,  sa  division  est 
plus  nombreuse.  Le  devant,  au  niveau  de  la 
RAMPE,  se  nomme  face,  et  le  fond  lointain. 
Entre  la  rampe  et  le  MANTEAU  D'ARLEQUIN,  est 
Vavant'Scène.  Entre  l'avant-scène  et  le  fond  se 
trouvent  les  plans,  au  nombre  de  cinq  à  douze, 
suivant  l'importance  des  théâtres.  Les  plans 
sont  distants  entre  eux  de  1  mètre  à  1  mètre  15 
environ.  L'espace  compris   entre   deux  plans 


—  237  — 

se  nomme  rue  :  c'est  la  coulisse  proprement 
dite. 

C'est  aux  plans  que  sont  fichés  les  MATS,  les 
PORTANTS,  les  FAUX-CHASSIS  auxquels  on  at- 
tache la  décoration  et  l'éclairage.  Les  mâts, 
portants  et  faux-châssis  sont  fixés  par  les  COS- 
TIÈRES  à  des  charriots  placés  sous  le  plancher 
et  roulant  sur  des  galets,  ce  qui  permet  d'a- 
vancer et  de  reculer  à  volonté  les  objets  qui  y 
sont  attachés. 

Le  plancher  est  entièrement  mobile  ;  il  se 
compose  de  TRAPPES  ef  TRAPILLONS  dont  les 
cadres  portent  sur  des  montants  fermes  qui 
forment  la  charpente  du  premier,  du  deuxième 
et  du  troisième  dessous.  Les  trappes  compren- 
nent toute  la  partie  d'une  rue,  la  scène  com- 
prise, et  sont  divisées  en  compartiments  d'un 
mètre  carré  environ  ;  les  trappillons  sont  en 
ligne  avec  les  plans,  et  assez  généralement  au 
nombre  de  trois,  côte  à  côte. 

Les  trappef  servent  à  la  machination,  aux 
TRUCS  ;  les  ^ra/)/327/o^zs, de  beaucoup  plus  étroits, 
servent  à  la  décoration  qui  monte  du  dessous, 
ou  qui  y  descend. 

Le  dessus  de  la  scène  se  nomme  cintre;  il 
est  occupé,  tout  au  haut,  par  un  pont  général 
qu'on  nomme  GRIL,  et  entouré  d'un  pont  de 
service,  quelquefois  de  deux  ou  trois.  Lasm^e 


—  238  — 

est  de  plus  traversée  par  des  PONTS-VOLANTS 
qui  permettent  de  faire  la  manœuvre  des  pla- 
fonds^ bandes  d'air  et  d'aller  d'un  côté  à  l'autre 
sans  faire  le  tour. 

—  Le  mot  scène  marque  aussi  une  division 
d'un  poëme  dramatique.  Chaque  fois  qu'un 
personnage  entre  ou  sort,  c'est  une  scène  nou- 
velle ;  quand  il  y  a  un  changement  de  décor, 
on  dit  que  la  scène  change,  et  on  indique  le 
lieu  de  l'action  en  disant  :  la  scène  se  passe  à 
tel  endroit.  * 

SEMAINIER.  —  Fonction  de  régisseur  que 
chaque  sociétaire  du  Théâtre-Français  remplit 
à  tour  de  rôle.  Ce  titre  de  semainier  en  indique 
la  durée. 

SERVIR.  —  Acte  de  bon  camarade  qui  consiste 
à  préparer  le  terrain  de  son  partenaire  pour 
placer  un  bon  mot,  une  allusion,  un  EFFET 
comique.  Entre  acteurs  intelligents,  c'est  un 
prêté  pour  un  rendu,  car  chacun  peut  faire  le 
compère  pour  sei'vir  un  camarade  qui  le  lui 
rendra.  Mais  il  n'y  a  pas  de  médaille  sans 
revers  :  du  moment  qu'on  peut  se  servir^  on 
peut  se  nuire  aussi  facilement. 

SERVICE.  —  Distribution  do  billets  de  places 


—  239  — 

faite,  par  l'administration  d'un  théâtre,  aux 
auteurs,  aux  acteurs,  au  chef  de  claque,  aux 
journalistes,  aux  fonctionnaires,  etc.  Le  jour 
d'une  première,  on  fait  le  service  de  la  presse 
sur  une  grande  échelle  ;  l'auteur  garnit  la 
moitié  de  la  salle;  la  claque,  le  reste.  Vous 
pouvez  vous  fier  aux  comptes  rendus  du  lende- 
main. 

SIFFLET.  —  Siffler  au  théâtre  est  témoigner 
son  mécontentement,  comme  applaudir  est  un 
signe  de  satisfaction.  Ces  deux  manifestations 
sont  spontanées  et  ont  le  même  droit  d'exister. 
La  question  des  applaudissements,  même  ceux 
les  plus  ridiculement  prodigués  par  la  CLAQUE, 
est  mise  de  côté  :  elle  ne  blesse  que  le  public  ! 
Pour  le  sifflet^  il  y  a  deux  camps  bien  tran- 
chés ;  je  ne  parle  pas  des  comédiens  qui  sont 
contre,  cela  se  conçoit.  Dans  un  camp  on 
allègue  que  le  droit  d'applaudir  et  le  droit  de 
siffler  sont  identiques  ;  dans  l'autre,  on  prétend 
que  le  sifflet  est  brutal,  grossier,  ofî'ensant  I  — 
Mais,  répondent  les  premiers,  ce  qui  est  bru- 
tal, c'est  de  nous  prendre  notre  argent  ;  ce 
qui  est  grossier ,  c'est  votre  pièce  absurde 
et  votre  acteur  sans  talent  ;  ce  qui  est  offen- 
sant ,  c'est  de  voir  cinquante  déguenillés 
payés  par  vous   pour  applaudir  des   choses 


—  2i0  — 

impossibles!  — Songez  donc,  réplique-t-on, 
que  les  acteurs  sont  des  hommes,  que  les 
actrices  sont  des  femmes,  et  que  votre  sifflet 
est  une  insulte.  —  Gomment  une  insulte?  En 
choisissant  cette  profession,  ce  à  quoi  aucune 
loi  ni  personne  ne  les  forcent,  ne  savent-ils 
pas  qu'ils  s'exposent  au  jugement  du  public, 
et  qu'il  se  manifeste  ainsi  ?  Qu'ils  doivent  le 
satisfaire  pour  l'argent  qu'il  donne  et  qui  les 
fait  vivre  ;  que  le  public  ne  peut  établir  de 
colloque  avec  eux  et  n'a  d'autres  moyens 
d'exprimer  ses  impressions  que  d'applaudir  ou 
de  siffler  ?  Est-ce  le  sifflet  en  lui-même  ?  Mais 
s'il  était  convenu  de  frapper  le  parquet  de  sa 
canne,  ou  le  fond  de  son  chapeau,  ou  de 
grogner,  comme  en  Angleterre,  il  en  serait 
de  même,  car  ce  n'est  pas  la  chose  en  elle- 
même  qui  blesse  ;  c'est  le  sens  qu'on  y 
attache.  Il  vaudrait  donc  mieux  déclarer  qu'on 
n'a  que  le  droit  d'être  toujours  content. 

Les  Athéniens  se  servaient  du  sifpet,  ce 
qui  lui  fait  une  respectable  ancienneté,  pour 
signaler  les  mauvais  passages  d'une  pièce  ou  le 
mauvais  jeu  d'un  acteur  ;  ils  avaient  même 
pour  cet  usage  une  espèce  de  flûte  de  Pan 
dont  chaque  son,  ou  chaque  tuyau,  indiquait 
le  degré  de  critique  qu'ils  entendaient  faire. 

L'origine  du  sifflet  dans  le  théâtre  de  France 


—  2M   — 

est,  comme  beaucoup  d'autres  choses ,  assez 
problématique;  les  uns  disent  qu'on  l'entendit 
pour  la  première  fois  à  propos  de  YAspar  de 
FoNTENELLE,  OU  1680  ;  d'autres  au  Baron  de 
Fondrières  de  Thomas  Corneille,  en  1686. 
Dans  l'un  comme  dans  l'autre  cas,  ce  serait  un 
Rouennais  qui  en  aurait  eu  l'étrenne. 

Voici,  du  reste,  une  épigramme  de  Racine 
qui  semble  décider  la  question  : 

Ces  jours  passés,  chez  un  vieil  histrion, 
Un  chroniqueur  émit  la  question  : 
Quand  à  Paris  commença  la  méthode 
De  ces  sifflets  qui  sont  tant  à  la  mode. 

—  Ce  fut,  dit  l'un,  aux  pièces  de  Boyer. 
Gens,  pour  Pradon,  voulurent  parier. 

—  Non,  dit  l'acteur,  je  sais  toute  l'histoire. 
Qu'en  peu  de  mots  je  vais  vous  débrouiller  : 
Boyer  apprit  au  parterre  à  bâiller  ; 

Quant  à  Pradon,  si  j'ai  bonne  mémoire, 
Pommes  sur  lui  volèrent  largement  ; 
Mais  quand  sifflets  prirent  commencement, 
C'est  (j'y  jouais,  j'en  suis  témom  fidèle), 
C'est  à  VAspar  du  sieur  de  Fontenelle. 

Le  sifflet  eut  les  honneurs  de  la  persécution  : 
il  fut  défendu  et  rétabli  plusieurs  fois  ;  ces 
défenses  donnèrent  naissance  au  rondeau  sui- 
vant, qui  n'est  qu'une  spirituelle  épigramme, 
mais  qui  nous  semble  assez  bien  résumer  la 
matière  qui  nous  occupe  : 

«  Le  sifflet  défendu,  quelle  horrible  injustice  ! 
«  Quoi  donc  1  impunément  un  poète  novice, 

21 


—  242  — 

«  Un  musicien  fade,  un  danseur  éclopé, 

«  Attraperont  l'argent  de  tout  Paris  dupé, 

«  Et  je  ne  pourrai  pas  contenter  mon  caprice? 

«  Ah  !  si  je  siffle  à  tort,  je  veux  qu'on  me  punisse  1 

«  Mais  siffler  à  propos  ne  fut  jamais  un  vice. 

«  Non,  non,  je  sifflerai,  l'on  ne  m'a  pas  coupé 

«  Le  sifflet. 
«  Un  garde  à  mes  côtés,  planté  comme  un  Jocrisse, 
«  M'empêche-t-il  de  voir  les  danses  d'écrevisse, 
«  D'ouïr  ces  sots  couplets  et  ces  airs  de  Jubé  ? 
«  Dussé-je  être,  ma  foi  !  sur  le  fait  attrapé, 
«  Je  le  ferai  jouer  à  la  barbe  du  suisse... 

«  Le  sifflet.  » 

Les  meilleurs  comédiens  et  comédiennes  : 
Lekain,  Fleury,  Mole,  Talma  ;  MM"'^^  Clai- 
ron, Contât,  Champmeslé,  Mars,  Rachel, 
furent  siffles  ;  leur  talent  n'en  fut  pas  amoin- 
dri. Beaucoup  d'acteurs  sont  chaque  jour 
applaudis,  —  par  la  claque,  il  est  vrai,  — sans 
que  leur  médiocrité  en  diminue.  —  Qui  est 
dans  le  vrai  ? 

SOCIÉTAIRE.— Le  personnel  delà  Gom.édie- 
Française  est  divisé  en  sociétaires  Qi  comédiens 
à  appointements  fixes,  ou  pensionnaires.  Les 
sociétaires  seuls  ont  voix  délibérative  dans  le 
comité  de  lecture  et  la  commission  administra- 
tive ;  ils  ont  seuls  aussi  droit  à  la  PENSION  DE 

RETRAITE. 

La  subvention  et  les  recettes  forment  une 
masse  dont  une  partie  déterminée  est  acquise 


—  -243  — 

aux  sociétaires,  qui  la  partagent  suivant  le  lang 
que  le  talent  leur  assigne.  Cette  masse,  défal- 
cation faite  des  frais  généraux,  est  divisée  en 
vingt-quatre  parts,  dont  une  est  mise  en  réserve 
pour  frais  imprévus  ;  une  demie,  pour  augmen- 
ter le  fonds  de  pension;  une  demie,  pour 
décors,  ameublement,  costumes.  11  reste  donc 
à  distribuer  vingt-deux  parts  entre  les  socié- 
taires, depuis  un  buitième  de  part  jusqu'à  une 
part  entièi'c,  qui  est  le  maximum.  (Y.  à  V Ap- 
pendice les  lois  sur  le  Théâtre- Français.) 
État  des  sociétaires  au  1"'  févi'iei-  1879. 
MM.  Maubant.  M""*^^  Broban. 

Gol.  Favard. 

Delaunay.  Jouassiu. 

Talbot.  Édile  Riquier. 

Coquelin  aîné.  Provost-Ponsin. 

Febvre.  Dinab  Félix. 

Tbiron.  Heicbemberg. 

Mounet-Suliy.  Croizette. 

Laroche.  Sarab  Bernbart. 

Worms.  Em.  Broisat. 

Coquelin  cadet.  Baretta. 

M"»^    Nathalie.  Jeanne  Samary. 

SOIGNER.  —  Allons,  mes  enfants  !  11  faudra 
soigner  cet  acte-là  !  dit  le  chef  de  claque  à 

srs  chevaliers.   Chacun    apprête  ses  mains. 


—  244  — 

—  Dites  donc,  cher  ami,  il  faudra  soigner 
l'enfant,  dit  le  directeur  à  un  journaliste,  le 
jour  d'une  première.  Que  do  soins  ! 

SORTIE.  —  Si  les  entrées  en  scène  sont  dif- 
ficiles, les  sorties  le  sont  encore  davantage. 
La  difficulté  fait  que  certains  acteurs  forcent 
la  situation  et  font  une  mauvaise  sortie  :  d'au- 
tres la  négligent  tellement  qu'ils  sortent 
parce  qu'ils  n'ont  plus  rien  a  dire  ni  à  faire 
en  scène  ;  ce  qui  est  pire. 

S  0  T I E.  —  La  Sotie  était  une  satire  draniatique 
extrêmement  violente  qui  n'épargnait  per- 
sonne. Elle  prit  naissance  au  xv'^  siècle,  sous 
Charles  VI,  et  eut  pour  acteurs  les  Enfants- 
sans-Souci,  dont  le  chef  prit  le  nom  de  Prince- 
des-Sots. 

Chaque  personnage  d'une  Sotie  se  nommait 
Sot.  L'analyse  que  nous  faisons  de  la  Sotie, 
le  Vieux-Monde,  l'une  des  plus  reniarquables, 
donnera  une  idée  de  ce  genre.  Vieux-Monde 
se  plaint  de  ses  fatigues:  Sot-A bus  l'engage 
à  dormir,  lui  promettant  de  veiller  à  sa  place. 
A  peine  Vieux-Monde  est-il  endormi  que  Sot- 
Abus  appelle  à  lui  tous  les  Sots,  ses  amis. 
Alors  arrivent  Sot-Trompeur,  c'est  un  mar- 
chand ;    SoT-DissoLU,    un    prélat  :    Sot-Glo- 


—  245  — 

RiEux,  un  soldat  ;  Sot-Ignorant,  qui  person- 
nifie le  peuple,  et  Sotte-Folle,  la  déraison  ou 
folie  humaine. 

Sotte-Folle  dit  qu'il  faut  tondre  Yieux- 
MoNDE  et  en  reconstruire  un  autre  sur  Con- 
fusion. Chacun  des  Sots  présents  devant 
construire  un  pilier  choisit  et  élague  les  ma- 
tériaux que  son  goût  lui  fait  trouver  bons  ou 
mauvais  ,  sous  la  surveillance  de  Sot-Abus 
qui  est  nommé  architecte.  Le  travail  com- 
mence. Sot-Dissolu  prend  pour  matériaux 
apostasie,  lubricité,  hypocrisie,  simonie,  et  vq- 
ieiie  chasteté,  dévotion,  prière,  humilité;  Sot- 
Glorieux  écarte  noblesse,  libéralité,  et  choisit 
lâcheté,  avarice;  Sot-Trompeur  bâtit  avec 
fausse  mesure,  larcin,  usure;  Sot-Corrompu 
préfère  corruption  à  justice;  Sot-Ignorant 
dédaigne  pour  son  pilier  simplicité,  innocence, 
obéissance,  et  emploie  murmure,  fureur,  rébel- 
lion. Le  nouveau  monde  achevé,  les  construc- 
teurs se  disputent  à  qui  épousera  Sotte- 
Folle.  Dans  l'ardeur  de  leur  querelle  ,  ils 
renversent  le  monde  qu'ils  viennent  de  cons- 
truire et  réveillent  Vieux  -  Monde  qui  les 
chasse  en  déplorant  leur  folie.  Ne  croirait-on 
pas  cette  Sotie  écrite  pour  l'an  de  grâce  dans 
lequel  nous  sommes  ?  —  V.  Farces,  Moralités, 
Mystères. 

21. 


—  246  — 

SOUBRETTE.  —  EMPLOI;  un  des  plus  vifs, 
des  plus  spirituels,  des  plus  importants  de  la 
comédie  au  xvii^  et  au  xviii^  siècles,  où  bril- 
laient les  Dorine,  les  Marton,  les  Marinette. 
Aujourd'hui ,  cet  emploi  est  complètement 
effacé  du  répertoire  moderne.  La  soubrette  ac- 
tuelle est  une  femme  de  chambre,  une  bonne, 
une  domestique  enfin  :  elle  n'a  pas  le  verbe 
haut,  la  répartie  vive,  le  droit  de  dire  son 
mot  dans  les  affaires  de  famille  comme  sa  de- 
vancière :  elle  obéit,  rien  de  plus,  et  s'en 
venge  en  faisant  danser  l'anse  du  panier,  et 
des  cancans  sur  madame  et  monsieur. 

La  raison  en  est  que  jadis  les  domestiques 
naissaient  et  mouraient  dans  une  maison  ;  ils 
faisaient  partie  de  la  famille.  Aujourd'hui,  ils 
ne  font  qu'y  passer. 

SOUFFLEUR.  —  C'est  à  tort  que  nous  n'a- 
vons pas  classé  le  souffleur  au  mot  emploi: 
c'en  est  un,  et  un  des  plus  utiles.  Ce  modeste 
employé  fait  comme  la  violette  :  il  se  cache, 
pas  sous  l'herbe,  mais  dans  une  boite  nommée 
capot.  Gomme  sa  sœur  la  violette,  il  se  décèle, 
non  à  son  parfum,  mais  à  son  souffle^  la  voix 
majeure  lui  étant  interdite. 

Le  public  croit  généralement  que  le  souf- 
fleur ne  souffle  que  lorsque  la  mémoire  fait 


—  247  — 

défaut  au  comédien  ;  c'est  une  erreur  :  le  souf- 
fleur souffle  toujours  et  doit  être  en  avance 
d'un  mot  ou  deux  sur  l'acteur.  Il  envoie  le  mot 
et  un  signe  à  celui  qui  attend  la  RÉPLIQUE. 
Celui  qui  ne  sait  pas  ou  auquel  la  mémoire 
fait  faillite  prend  du  souffleur^  auquel  il  fait 
souvent  appel  du  pied,  ou  en  jouant  près  de 
la  rampe  quand  il  devrait  être  au  fond. 

L'acteur  le  plus  sûr  de  lui  ne  peut  jouer 
sans  le  souffleur.  Il  ne  s'en  sert  pas,  mais  il  le 
sait  là,  ça  lui  suffit  ;  il  en  est  qui  lisent  simple- 
ment leur  rôle  une  fois  ou  deux  et  comptent 
sur  le  souffleur  pour  le  reste.  Dans  une  repré- 
sentation de  Mélanide^  de  La  Chaussée,  un 
acteur   s'arrête   court ,   et ,    comme  il   avait 
l'oreille  paresseuse,  laisse  le  souffleur  faire  la 
déclaration  d'amour  à  sa  place  ;  quand  celui-ci 
eut  fini,  il  montra  le  souffleur  à  Mélanide^  et 
lui  dit   :    Mademoiselle ,   comme  vous   a    dit 
monsieur;  jugez  de  l'efi'et.  —  Une  autre  fois, 
un  acteur  faisant  un  récit  arrive  à  ces  mots  : 
«  J'étais  alors  à  Rome  ...  »  et  perd  la  mé- 
moire. Il  voit  que  le  souffleur  dormait,  alors 
il  s'approche  du  capot  et  crie  d'une  voix  forte  : 
F  h  bien!  monsieur^  que  faisais-je  à  Rome  ?  Le 
souffleur  se  réveille,  envoie  le  mot,  et  le  public 
applaudit  la  présence  d'esprit  du  défaillant. 


—  248  — 

SOUTENIR.  —  Terme  de  c/a^we,  synonyme 
de  SOIGNER,  mais  plus  général  en  ce  sens  qu'il 
faut  soutenir  le  médiocre  et  le  mauvais,  tant 
comme  pièces  que  comme  acteurs,  les  bonnes 
choses  se  soutenant  toutes  seules.  Au  Mans, 
un  comédien  assez  m...  médiocre  avait  à  jouer 
le  Lusignan,  de  Zaïre,  et  s'était  entendu  avec 
le  chef  de  claque  pour  être  soutenu.  —  Il  entre 
en  scène  en  disant  :  Soutiens-moi^  Chatillon... 
Le  chef  de  claque  qui  ne  connaissait  pas  à 
fond  la  pièce  et  se  nommait  Chatillon,  crut 
qu'il  s'adressait  à  lui  et  lui  répondit  aussitôt  : 
Ne  crains  rien,  mon  vieux,  nous  sommes  là  ! 
Le  public  a  tellement  ri  qu'il  s'en  souvient 
encore. 

SPECTATEUR.  —  Partie  unitaire  du  public, 
s'agglomérant  facilement,  et  subissant  alors 
toutes  les  impressions  de  la  foule.  Le  specta- 
teur a  droit  à  la  place  désignée  par  son  billet 
et  au  spectacle  porté  sur  l'affiche  ;  de  plus, 
fût-il  seul  dans  la  salle,  on  doit  jouer  pour 
lui,  s'il  l'exige.  Le  fait  est  arrivé  à  la  Comédie- 
Italienne,  où  il  n'y  avait  que  Aqmx  spectateurs. 
Après  la  représentation  ,  C/Vrlin  pria  l'un 
d'eux  d'approcher  de  la  scène  et  lui  dit  : 
«  Monsieur,  si  vous  rencontrez  quelqu'un  en 
sortant  d'ici,  faites-moi  le  plaisir  de  lui  dire 


—  249  — 

que  nous  donnerons  demain  une  représenta- 
tion de  Arlequin  toujours  Arlequin. 

STYLE.  —  Le  style  d'une  pièce  suffirait  pour 
indiquer  son  genre  et  son  époque.  Nous  avons 
donné  au  mot  MYSTÈRE  un  échantillon  du 
style  de  l'un  d'eux.  Nous  allons  essayer,  par 
quelques  extraits ,  de  suivre  la  marche  du 
stijle  depuis  Jodelle  jusqu'à  ce  jour,  en  com- 
mençant par  la  Cléopâtre  de  cet  auteur,  donnée 
en  1557. 

CLEOPATRE  (acte  iy). 

«  Penserait  donc  César  être  de  tout  vainqueur? 
«  Penserait  donc  César  abâtardir  ce  cœur? 
«  Veu  que  des  tiges  vieux  ceste  vigueur  j'hérite 
«  De  ne  pouvoir  céder  qu'à  la  Parque  dépite? 
«  La  Parque,  et  non  César,  aura  sur  moy  le  pris  ; 
«  La  Parque,  et  non  César,  soulage  mes  esprits; 
«  La  Parque,  et  non  César,  triomphera  de  moi  ; 
«  La  Parque,  et  non  César,  finira  mon  osmoi  ; 
«  Et  si  j'ai,  aujourd'hui,  usé  de  quelque  feinte, 
«  Afin  que  ma  portée  en  son  sang  ne  fust  teinte.  > 

Sautons  jusqu'en  1616,  où  nous  trouvons 
le  grand  fournisseur  Hardy,  qu'on  pourrait 
surnommer  le  bien-nommé,  par  l'extrait  sui- 
vant de  sa  Lucrèce  ou  l'Adultère  puni.  C'est  un 
mari  qui  parle,  en  considérant  sa  femme  à 
l'œuvre  : 

«  0  cieux!  ô  cieux  I  La  louve  à  son  col  se  penchant, 
«  Et  de  lascifs  appas  provoque  l'impudent, 


—  250  — 

«  Lui  chatouille  le  sein,  lui  baisotte  la  bouche, 
«  D'un  clin  de  tête  au  lit  l'appelle  à  l'escarmouche. 
«  Ma  patience  échappe,  exécrable  p..., 
«  Tu  mourras,  à  ce  coup,  tu  mourras  de  ma  main  !  » 

Heureusement  que  quelques  années  plus 
tard,  en  1631 ,  nous  trouvons  ce  gracieux 
échantillon  du  style  galant  : 

PHILIDAN. 

«  Si  de  ce  que  j'ai  dit,  la  rigueur,  trop  connue, 
«  Cherche  la  vérité,  la  voilà  toute  nue, 

{Il  lui  ôte  son  fichu.) 
ELIANTE. 

«  Que  fais-tu,  Philidan  ? 

PHILIDAN. 

C'est  que  je  veux  au  moins 
«  Te  convaincre  d'erreur  avec  deux  beaux  témoins. 

ELIANTE. 

«  Causeur.  Rends  ce  mouchoir,  ou  de  tant  de  malices 
«  Je  sçaurai  châtier  l'auteur  et  les  complices. 

PHILIDAN. 

«  Pourquoi  les  caches-tu? 

ELIANTE. 

Parce  que  j'ai  raison, 
«  Puisqu'ils  sont   faux  témoins,  de  les   mettre  en 

[prison.  » 

On  croirait  lire  du  Marivaux.  Du  gracieux 


—  251  — 

nous  passons  au  sublime.  Voici  le  grand  Cor- 
neille : 

«  Je  suis  maître  de  moi  comme  de  l'univers; 
«  Je  le  suis,  je  veux  l'être.  0  siècles  !  ô  mémoire  ! 
«  Conservez  à  jamais  ma  nouvelle  victoire. 
«  Je  triomphe  aujourd'hui  du  plus  juste  courroux, 
«  De  qui  le  souvenir  puisse  aller  jusqu'à  vous'. 
«  Soyons  ami,  Ginna,  c'est  moi  qui  t'en  convie.  » 

Et  Racine  : 

«  Ce  Dieu,  maître  absolu  de  la  terre  et  des  cieux, 
«  N'est  point  tel  que  l'erreur  le  figure  à  nos  yeux. 
«  L'Éternel  est  son  nom,  le  monde  est  son  ouvrage  ; 
«  Il  entend  les  soupirs  de  l'humble  qu'on  outrage, 
«  Juge  tous  les  mortels  avec  d'égales  lois, 
«  Et  du  haut  de  son  trône  interroge  les  rois.  » 

Et  Molière  : 

«  On  gagne  les  esprits  par  beaucoup  de  douceur  ; 

«  Et  les  soins  défiants,  les  verrous  et  les  grilles 

«  Ne  font  pas  la  vertu  des  femmes  et  des  filles. 

«  Nous  les  portons  au  mal  par  tant  d'austérité, 

«  Et  leur  sexe  demande  un  peu  de  liberté.  » 

Arrêtons-nous  un  peu.  Nous  sommes  au 
sommet,  nous  allons  redescendre,  et,  je  le 
crains  bien,  plus  bas  que  notre  point  de  dé- 
part. Regnard  nous  arrête  à  la  rampe;  écou- 
tons-le dans  le  Joueur,  1696  : 

«  La  fortune  offre  aux  yeux  de  brillants  mensongers. 
«  Tous  les  biens  d'ici-bas  sont  faux  et  passagers  : 
«  Leur  possession  trouble,  et  leur  perte  est  légère. 
«  Le  sage  gagne  assez  quand  il  peut  s'en  défaire,  » 


—  252  — 

A  quelques  années  de  là,  en  1754,  nous 
trouvons,  dans  David  et  Bethsabée,  tragédie  de 
Petit,  ces  vers  : 

«  Vous  sûtes  arracher  Saûl  à  ses  furies. 

«  Oui,  ce  prince,  vainqueur  de  mtlle  incirconcis, 

«  Frémissait  que  David  en  eût  dix  mille  occis.  » 

Ce  qui  fit  crier  dans  la  salle  :  Ok  qusif 
Oh  qunonf  Quelle  chute  I 

Passons  à  Voltaire,  le  dernier  astre  du 
siècle  : 

«  Des  dieux  que  nous  servons  connais  la  différence  ; 
«  Les  tiens  t'ont  ordonné  le  meurtre  et  la  vengeance, 
«  Et  le  mien,  quand  ton  bras  vient  de  m'assassiner, 
«  M'ordonne  de  te  plaindre  et  de  te  pardonner.  » 

Mais  voici  la  Révolution  et  son  chantre  dra- 
matique, Marie- Joseph  Ohénier  : 

«  Puisque  les  lois,  les  mœurs,  les  nobles  sentiments 
«  Ne  peuvent  respirer  l'air  souillé  par  un  maître, 
«  Puisse,  puisse  à  jamais  la  liberté  renaître 
«  Sur  les  sanglants  débris  des  tyrans  abattus, 
«  Pour  que  le  genre  humain  conserve  des  vertus  !  » 

Nous  sautons  à  pieds  joints  par-dessus  TEm- 
pire  et  la  Restauration.  1830  vit  fleurir  le  ro- 
mantique. Voici  du  Victor  Escousse  : 

«  Adieu,  dt'^s  aujourd'hui  je  jouis  de  vos  pleurs. 
«  Unissez-vous!  je  signe  un  contrat  de  malheur! 
«  Et  tôt  ou  tard,  beau  noble,  h  Tàme  vile,  atroce, 
«  Je  vous  apporterai  votre  cadeau  de  noce.  » 


—  253  — 

Et  la  Tour  de  Nesle  : 

«  0\\(i  !  maître  Orsini,  tavernier  du  diablo,  double 
empoisonneur!  Il  paraît  qu'il  faut  te  donner  tous 
tes  noms  pour  que  tu  répondes.  » 

Nous  faisons  grâce  du  reste  à  nos  lecteurs, 
qui  doivent  être,  comme  nous,  au  courant  du 
style  noble  de  la  Grande-Duchesse ^  du  Trône 
d'Ecosse^  du  Roi  Carotte  et  tutti. 

SUBVENTION.  — Nous  donnons  ci-dessous 
les  noms  des  théâtres  subventionnés  par  l'État 
et  le  chiffre  de  la  subvention  portée  au  budget 
de  1878  : 

Opéra 800,000  fr. 

Théâtre-Français 2^0,000 

Opéra-Comique 360,000 

Odéon 60,000 

Théâtre-Lyrique *. 

Une  grande  partie  des  théâtres  de  province 
sont  subventionnés  par  les  villes,  ce  qui  n'em- 
pêche pas  les  directeurs  de  faire  faillite,  au 
contraire. 

Expliquons  ce  :  au  contraire. 

Aujourd'hui,   surtout,  que    la  liberté   des 


*  Le  Théâtre- Lrjrique  établi  dans  la  salle  de  la  Gaîté  \icnt 
de  succomber.  La  subvention  attribuée  à  cette  entreprise ,  soit 
200,000  francs,  reste  entre  les  mains  du  ministre  pour  encourage- 
ments aux  beaux-arts. 

22 


—  254  — 

théâtres  existe ,  le  directeur  qui  accepte 
une  subvention  accepte  en  même  temps 
un    cahier    des    charges    qui    lui   impose  : 

—  une  troupe  composée  de  tant  d'acteurs;  — 
un  orchestre   composé  de  tant  d'exécutants; 

—  un  répertoire  d'opéra  et  d'opéra-comique  ; 
— le  drame,  la  comédie  et  le  vaudeville,  comme 
hors-d'œuvre  ;  —  un  corps  de  choristes  et  un 
corps  de  ballet  ;  —  de  monter  tant  de  pièces 
nouvelles  par  an,  etc.,  etc.  Or,  comme  les 
municipalités  savent  compter,  quand  elles 
donnent  30,000  francs  de  subvention,  elles 
demandent  que  le  directeur  fasse  40,000  francs 
de  dépenses,  et  ainsi  de  suite,  proportionnel- 
lement. 

Les  chanteurs  et  les  comédiens,  sachant  que 
le  directeur  reçoit  une  subvention,  ne  s'enga- 
gent qu'à  des  conditions  onéreuses  pour  lui. 
Le  public  lui-même,  ne  prenant  en  aucune 
considération  le  cahier  des  charges  et  les  obli- 
gations qu'il  impose  au  directeur,  en  veut 
pour  son  argent,  et  un  peu  plus,  en  se  mon- 
trant plas  exigeant  qu'il  ne  devrait.  De  tous 
ces  faits  réunis,  il  arrive  souvent  que  le  di- 
recteur succombe  à  cause  de  la  subvention. 

SUCCÈS.  —  Le  succès  est  le  grand  dispensa- 
teur de  la  gloire  et  de  la  fortune.  S'il  suivait 


—  255    — 

le  talent  véritable,  la  valeur  réelle,  tout  serait 
pour  le  mieux;  mais  il  n'en  est  malheureuse- 
ment pas  toujours  ainsi  ;  au  théâtre,  plus  que 
partout  ailleurs,  c'est  le  caprice  du  public  qui 
fait  le  succès,  et  souvent  pour  des  causes  fu- 
tiles et  accessoires.  C'est,  du  reste,  une  vieille 
histoire. 

Lorsque  P.  Corneille,  en  1650,  donna  son 
Andromède,  une  des  premières  pièces  où  l'on 
employa  les  machines,  la  grande  attraction  ne 
fut  pas  la  pièce,  mais  l'apparition  d'un  cheval 
vivant  sur  la  scène,  ce  qui  ne  s'était  pas  encore 
vu.  Ce  cheval,  qui  faisait  Pégase,  piaffait, 
hennissait,  à  la  grande  joie  des  spectateurs. 
On  obtenait  ce  jeu  en  laissant  jeûner  le  che- 
val; aussitôt  qu'on  le  tenait  en  scène,  on  van- 
nait de  l'avoine  dans  la  coulisse,  et  le  cheval 
piaffait  et  hennissait.  Chacun  voulut  voir  le 
cheval ,  qui  fit  le  succès  de  la  pièce. 

h' Auberge  des  Adrets,  écrite  pour  faire  un 
drame  sérieux,  était  en  train  de  tomber  et  ne 
serait  pas  allé  jusqu'au  bout,  si  Frédéric 
Lemaitre,  par  un  trait  de  génie  ,  n'avait  pris 
sur  lui  de  terminer  la  pièce  en  drame  co- 
mique. Envisagée  à  ce  point  de  vue,  V Au- 
berge des  Adrets  eut  un  succès  étourdissant  et 
dota  la  France  du  type  de  Robert  Macaire. 

Le  Fils  de  la  Nuit  n'a  du  son  succès  qu'à  la 


—  256  — 

machination  du  vaisseau.  Il  suffit  de  connaî- 
tre le  répertoire  du  jour  pour  savoir  que  le 
succès  de  certaines  pièces  en  vogue  n'est  nul- 
lement justifié  par  le  mérite  littéraire.  Tant 
pis  ! 

Entre  le  succès  et  la  chute,  pour  les  auteurs 
qui  ont  l'habitude  de  travailler  laborieusement 
et  consciencieusement,  on  a  établi  une  nuance 
qu'on  nomme  succès  d'estime. 

SUJET.  —  La  matière,  le  fond,  idéal  ou  histo- 
rique, sur  lequel  on  écrit  une  pièce.  Si  la 
donnée  est  prise  d'une  anecdote,  de  l'histoire, 
d'un  roman,  on  dit  :  le  sujet  est  pris  là,  ou  là. 

—  Sujet  se  dit  encore  d'une  danseuse  qui 
quitte  le  corps  de  ballet  pour  entrer  dans 
les  jo«s.  Elle  devient  sujet  de  la  danse.  Il  y  a 
des  degrés  :  premier  sujet,  deuxième  sujet. 

SUPPLÉMENT.  —  Le  bureau  des  supplé- 
ments est  une  concurrence  faite  aux  OUVREUSES 
par  l'administration.  Si  vous  ête^  mal  placé, 
vous  n'avez  que  deux  ressources  :  1°  graisser 
la...  main  à  l'ouvreuse,  et  convenablement  : 
elle  vous  trouvera  une  bonne  place,  n'eu  fùt- 
il  plus  au  monde  ;  2°  d'aller  au  bureau  des 
suppléments  payer  la  différence  pour  une  meil- 


—  257  — 

leure.  Les  billets  donnés  forment  le  fond  de 
caisse  des  suppléments. 

SUPPRESSION.  —  La  censure  fait  de  la 
grande  chirurgie  et  s'inquiète  peu,  son  opéra- 
tion faite,  si  le  sujet  est  valide  ou  pas;  c'est  à 
la  représentation  que  les  vides,  les  longueurs 
apparaissent  et  que  l'auteur  est  obligé  de  faire 
des  suppressions.  Les  directeurs  de  province 
font,  de  leur  chef,  des  suppressions  pour  rac- 
courcir les  pièces,  et  poussent  cela  si  loin 
qu'on  en  a  vu  supprimer  la  musique  de  la 
Dame  blanche  comme  nuisant  à  l'intérêt  de 
l'ouvrage. 


TABLEAU.  —  Partie  d'acte  coupé  par  un 
changement  à  vue ,  ou  en  baissant  un  rideau 
quand  le  théâtre  n'est  pas  machiné  suffisam- 
ment, mais  toujours  sans  entr'actes.  C'est 
surtout  dans  le  genre  féerie  que  le  tableau  e^ 
en  usage. 

—  On  appelle  aussi  tableau  un  effet  de  scène 
où  les  personnages  sont  groupés  de  manière 


—  258  — 

à  produire  une  impression  sur  le  public.  Les 
reconnaissances,  les  surprises  de  coupables, 
les  incendies,  les  inondations,  les  grandes 
scènes  finales  forment  tableau. 
—  Tableau  se  dit  encore  d'un  cadre  existant 
au  foyer  des  acteurs,  dans  lequel  on  affiche  le 
répertoire  du  lendemain,  sa  distribution,  Tor- 
dre et  riieure  des  répétitions. 

TAMBOUR.  — V.  treuil. 

TARTINE.  —  Terme  de  coulisses  pour  indi- 
quer les  longs  récits  d'une  pièce. 

TEINTURIER.  —  Celui  qui  confectionne  des 
pièces  avec  les  idées  des  autres  et  n'y  a  mis 
que  son  style,  est  un  teùitune?\  La  collabo- 
ration est  en  partie  fondée  sur  cette  base  : 
l'un  apporte  l'idée,  le  sujet;  l'autre  —  le  tein- 
turier  —  le  style. 

TÉNOR.  —  Emploi  du  chant,  connu  dans  l'an- 
cien répertoire  sous  le  nom  de  haute-contre  et 
dont  l'importance  était  alors  secondaire,  tan- 

,  dis  qu'il  occupe  le  premier  rang  aujourd'hui. 

La  ténor  a  deux  registres  :  voix  de  poitrine 

et  voix  de  tète,  suivant  lesquels  on  le  classe 

en  fort  ténor^  premier  ténor^  ténor  léger  ou 


—  259   — 

premier  d'opéra-comique,  et  deuxième  téno7\ 
L'Italie  avait  une  grande  prédilection  pour  les 
voix  de  tête  et  possédait  un  procédé  pour 
fabriquer  des  ténors  à  l'usage  de  la  chapelle- 
sixtine.  S'il  leur  manquait  quelqife  chose  d'un 
côté,  ils  se  rattrapaient  bien  de  l'autre,  car 
Balthazar-Ferri,  Bernardi,  Farinelli  et 
Gafarelli  firent  des  fortunes  immenses,  à  tel 
point *que  ce  dernier  put  acheter  le  duché  de 
San-Donato  sur  ses  économies. 

Les  grands  ténors  de  notre  Opéra-français 
qui  ont  laissé  un  nom,  sont  :  Lainez,  Lays, 
iLAFON,  NouRiT,  DupREZ  et  Roger. 

THÉÂTRE  CHEZ  les  ANCIENS.  —  Ce  mot 
demanderait  un  développement  auquel  notre 
cadre  s'oppose  ;  nous  allons  le  traiter  som- 
mairement. 

Le  théâtre  est  d'origine  grecque  ;  son  nom 
l'indique.  Il  débuta  par  le  char  de  Thespis, 
pour  la  tragédie,  et  les  tréteaux  de  Susarion, 
pour  la  comédie  ;  char  et  tréteaux  parcou- 
raient les  bourgs  pour  y  donner  leurs  repré- 
sentations. 

Un  théâtre  en  bois,  construit  à  Athènes, 
s'étant  écroulé  pendant  la  représentation  ,  — 
500  ans  avant  Jésus-Christ  —  Thémistocle  , 
vingt  ans  plus  tard ,  fit  construire  le  premier 


—  260  — 

théâtre  de  pierre ,  bien  que  les  colonies  grec- 
ques eussent  devancé  la  mère  patrie  dans 
ce  genre  de  constructions.  Le  théâtre  de  Thé- 
MisTocLE  servit  de  type  à  tous  ceux  qu'élevè- 
rent les  Grecs  et  les  Romains. 

Le  théâtre  antique  avait  deux  parties  princi- 
pales :  1°  le  creux  chez  les  Grecs,  la  cavea 
chez  les  Latins,  ou  partie  semi-circulaire, 
réservée  aux  spectateurs  ;  2°  la  scène^  o\i  partie 
rectangulaire  destinée  à  la  représentation.  Le 
théâtre  grec  seul  comprenait  une  troisième 
partie  —  Y  orchestre  —  qui  servait  aux  jeux 
scéniques. 

La  première  partie,  le  creux,  fut  longtemps 
adossée  à  une  colline,  un  monticule,  dans  les- 
quels on  taillait  des  gradins.  Chaque  classe 
avait  ses  places  distinctes  :  chez  les  Grecs,  les 
premiers  rangs  étaient  occupés  par  les  agono- 
thètes,  les  magistrats,  les  généraux  et  les  prê- 
tres; après  eux,  venaient  les  citoyens  riches 
et  aisés  ;  le  peuple  occupait  les  gradins  élevés. 

On  voit,  à  Athènes,  les  ruines  du  premier 
théâtre  qui  fut  au  monde  :  c'est  un  temple  de 
Bacchus.  En  Grèce,  tous  les  théâtres  étaient 
dédiés  à  Bacchus  ou  à  Vénus.  Je  crois  que  ce 
dernier  culte  est  encore  bien  en  faveur  dans 
les  théâtres  modernes. 

Passons  à  Rome. 


—  201   — 

Le  théâtre  ne  pénétra  chez  les  Romains  que 
deux  cents  ou  deux  cent  cinquante  ans  plus 
tard.  La  première  pièce  représentée,  le  fut  l'an 
de  Rome  391  —  363  avant  J.-G.  —  par  suite 
d'un  vœu  fait  pendant  la  peste  qui  ravagea 
Rome  en  389.  Voici  ce  que  dit  à  ce  propos  saint 
Augustin  :  «  Ce  fut  pendant  cette  peste  qu'on 
«  inti'oduisit  à  Rome  les  jeux  scéniques,  autre 
«  peste  plus  funeste  encore,  non  pour  les  corps^ 
«  mais  pour  les  âmes.  » 

D'abord  les  théâtres  romains  ne  furent  que 
temporaires  ;  par  conséquent  construits  en  bois, 
et  pour  des  circonstances  particulières,  prin- 
cipalement pour  les  élections  consulaires  ;  les 
candidats  avaient  le  soin  d'y  convier  le  peu- 
ple pour  gagner  ses  suffrages.  —  Gomme  on 
le  voit,  ce  que  nous  nommons  corruption  élec- 
torale date  de  loin.  —  Les  plus  grandes  folies 
en  ce  genre  sont  celles  de  Scaurus,  gendre  de 
Sylla,  et  de  Curion.  Ce  dernier  fit  construire 
deux  théâtres  adossés  qui,  à  un  moment  donné, 
tournèrent  sur  des  pivots,  avec  leurs  specta- 
teurs, et  formèrent  une  arène  pour  les  gla- 
diateurs. 

L'austérité  des  mœurs  romaines  s'opposa 
très-longtemps  à  la  construction  fixe.  Ce  fut 
Pompée  qui  dota  Rome  de  son  premier  théâtre 
de  pierre,    en   Tan  699  de  sa  fondation,  — 


—   262   — 

55  ans  avant  J.-G.  —  Il  fit  bien  les  cho- 
ses, car  ce  théâtre  contenait  40,000  specta- 
teurs. Le  goût  du  théâtre  devint  une  passion 
pour  les  Romains  ;  les  édifices  destinés  aux 
représentations  couvrirent  bientôt  toutes  les 
provinces,  et  la  plus  petite  ville  avait  son 
théâtre.  Les  ruines  en  sont  nombreuses;  les 
fouilles  de  Pompéï,  à'Berculamun,  en  ont  donné 
de  précieux  restes,  et  la  France  en  possède  de 
nombreux  vestiges. 

Les  Grecs  n'avaient  que  deux  genres  d'é- 
difices consacrés  aux  représentations  :  le  Théâtre 
et  VOdéon;  ce  dernier,  comnje  son  nom  l'in- 
dique, était  consacré  au  chant,  à  la  musique 
instrumentale  et  de  déclamation.  Les  Romains 
y  ajoutèrent  V Amphithéâtre ^  ou  arènes,  pour 
le  combat  des  gladiateurs;  le  Cirque^  pour  les 
courses;  les  Bassins^  ou  Naumachies,  pour  les 
représentations  nautiques. 

'L'Odéon  seul  était  entièrement  couvert;  il 
a  servi  de  type  à  nos  théâtres  modernes. 

Nous  ne  suivrons  pas  plus  loin  cet  aperçu 
du  théâtre  antique. 

THÉÂTRE  DE  LA  FOIRE.  —  Nous  ne  pou- 
vons oublier  de  parler  des  théâtres  dressés 
aux  foires  Saint-Germain   et  Saint-Laurent, 


—  263  — 

sur  remplacement  desquelles  existent  au- 
jourd'hui deux  marchés. 

Ces  théâtres,  d'où  sortirent  notre  Opéra- 
Comique  et  notre  Vaudeville,  conservèrent  par- 
mi nous  la  verve  et  l'esprit  gaulois,  en  y  joi- 
gnant la  pétulance  et  le  comique  des  Italiens. 
Les  premières  représentations  de  pièces  sur  les 
Théâtres  de  la  Foire  eurent  lieu  en  1678.  La 
plus  ancienne  a  pour  titre  :  les  Forces  de  l'A- 
mour et  de  la  Magie.  Il  y  avait  un  peu  de  tout 
dedans,  y  compris  la  danse  de  corde,  fort  goû- 
tée à  la  foire.  La  suppression  de  l'ancienne 
troupe  italienne,  qui  eut  lieu  en  1697  (V.  Ita- 
liens), fut  un  coup  de  fortune  pour  la  foire. 
On  y  construisit  des  salles  et  on  y  représenta 
le  répertoire  des  Italiens.  Le  public  qui  les 
regrettait,  courut  à  la  foire,  s'y  amusa,  et  dé- 
laissa la  comédie  française.  Alors,  grands  cris 
des  comédiens  français  qui,  leur  privilège  à 
la  main,  firent  condamner  les  théâtres  forains 
à  ne  jouer  que  des  monologues,  et  bientôt 
après  des  pièces  muettes,  c'est-à-dire  des  pan- 
tomimes. 

Ce  fut  alors  au  plus  fin.  Les  forains,  muets 
par  ordre,  imaginèrent  d'écrire  leurs  rôles  sur 
des  cartons  qu'ils  tiraient  de  leurs  poches,  et 
qu'un  individu  placé  près  de  Torchestre  lisait 
tout  haut  pendant  qu'ils  faisaient  leurs  ges- 


—  264  — 

tes.  Peu  après,  ils  imaginèrent  d'écrire  ces 
rôles  en  couplets,  sur  des  airs  connus.  Ces 
couplets,  écrits  en  très-gros  caractères,  des- 
cendaient du  cintre  au  moment  voulu;  l'or- 
chestre alors  donnait  Taccord,  et  le  public, 
soutenu  par  lui,  chantait  en  chœur  le  cou- 
plet. On  prit  tellement  goût  à  ce  genre  de 
plaisir  et  de  malice,  que  les  théâtres  étaient 
toujours  pleins.  Ceci  dura  jusqu'à  171 6,  époque 
où  la  nouvelle  troupe  des  Italiens  vint  s'instal- 
ler à  l'HOTEL  DE  BOURGOGNE. 

En  171  i,  V Académie  royale  de  musique  au- 
torisa, moyennant  une  redevance  annuelle  de 
35,000  fr.,  un  Théâtre  de  la  Foire  à  jouer  de 
petites  pièces,  mêlées  de  prose,  d'ariettes  et  de 
danse,  sous  le  nom  à' opéras-comiques  ;  ce 
genre,  qui  réussit  grandement,  eut  pour  au- 
teurs Lesage,  Panard,  Le  Grand,  Piron, 
BoissY,  Favard,  Sedaine,  Vadé,  Anseaume. 
Il  fut  réuni  à  la  troupe  italienne  en  1762 
(V.  Opéra-Comique).  Nous  croyons  faire  plai- 
sir à  nos  lecteurs  en  leur  donnant  un  frag- 
ment de  la  comédie  de  Favard,  intitulée  :  Le 
Retour  de  /'Opéra-Comique.  C'est  une  imita- 
tion très-réussie  des  imprécations  de  Camille; 
elle  était  dans  la  bouche  du  personnage  de  la 
Comédie-Française,  qui  exhalait  ainsi  sa  bile 
contre  le  Théâtre  de  la  Foire  : 


-  265  — 

Ah  I  c'est  trop  en  souffrir  de  ce  vil  adversaire  : 
Qu'il  sente  les  effets  de  ma  juste  colère. 
Foire,  l'unique  objet  de  mon  ressentiment, 
Foire,  à  qui  l'Opéra  fait  un  sort  si  charmant, 
Foire,  qui  malt,''ré  moi  te  trouves  ma  voisine, 
Foire,  enfin,  que  je  hais,  et  qui  fait  ma  ruine  : 
Puissent  tous  les  rivaux  contre  toi  conjurés 
Saper  tes  fondements  encor  mal  assurés  ; 
Et,  si  ce  n'est  assez  de  leurs  trames  secrètes, 
Que  mille  plats  auteurs  t'apportent  leurs  sornettes. 
Que  chez  toi  la  discorde  allume  son  flambeau, 
Que  ce  trône  éclatant  te  serve  de  tombeau, 
Que  cent  coups  de  sifflet  effrayent  ton  audace. 
Que  ton  cher  Opéra  te  mette  à  la  besace, 
Que  tes  auteurs  jaloux  se  disputent  entr'enx  ; 
Que  jamais  le  bon  j^oùt  ne  préside  à  tes  jeux; 
Puissé-je  de  mes  yeux  voir  tomber  ce  tliéàtre, 
Dont  Paris  follement  se  déclare  idolâtre; 
Voir  le  dernier  forain  à  son  dernier  soupir, 
Moi-même  en  être  cause  et  mourir  de  plaisir. 


THÉÂTRE-FRANÇAIS.— Ses  origines  sont 
plus  qu'obscures.  En  remontant  jusqu'aux 
premiers  siècles  de  la  monarchie  nous  ne  trou- 
vons que  les  Mimes,  Histrions,  Farceurs,  Jon- 
gleurs, Troubadours,  Ménestriers,  qui  semblent 
se  rattacher  par  un  fil  à  la  tradition  drama- 
tique des  anciens.  Ceux  qui  faisaient  des  tours 
de  force  ou  d'adresse;  ceux  qui  montraient 
des  singes  ou  d'autres  animaux  savants,  furent 
appelés  :  «  Bateleurs  ».  —  Le  nom  et  la  chose 
existent  encore.  Ils  étaient  autorisés  par  les 
anciens  édits  royaux  à  faire  des  tours,  par  eux 

^23 


—  266  — 

ou  leurs  singes,  pour  satisfaire  les  «  Péagers  » 
ou  agents  du  fisc  ;  de  là  le  proverbe  :  Payer 
en  monnaie  de  singe. 

En  admettant  beaucoup  de  bonne  volonté, 
on  pourrait  faire  remonter  les  représenta- 
tions dramatiques  en  France  à  l'année  1179, 
où  un  religieux  du  nom  de  Geoffroi  faisait 
représenter  par  ses  élèves  des  tragédies  pieu- 
ses, entre  autres  le  Mystère  de  sainte  Catherine; 
ou  bien  encore  dans  les  représentations  qui 
eurent  lieu  dans  les  réjouissances  et  fêtes  pu- 
bliques sous  Philippe  le  Bel,  Louis  le  Hutin, 
Philippe  le  Long,  Charles  le  Bel.  Nous 
croyons  qu'il  convient  de  s'arrêter  à  l'année 
1398,  où  nous  trouvons  les  premières  traces 
des  représentations  —  payantes  —  des  MYS- 
TÈRES, dans  Paris,  ou  plutôt  au  village  de 
Saint-Maur. 

Les  bourgeois  et  maîtres  maçons,  serruriers, 
menuisiers,  inventeurs  de  ces  jeux,  furent 
autorisés,  par  lettres  -  patentes  octroyées  par 
Charles  YI,  en  décembre  1402, —  lettres-pa- 
tentes qui  furent  confirmées  par  François  I", 
le  1"  mars  1518;  par  Henri  II,  en  janvier 
1554;  par  Charles  IX,  le  25  novembre  1563; 
par  Henri  III,  en  janvier  1575;  par  Hen- 
ri IV,  en  1597,  —  à  s'ériger  en  confrérie  sous 
le  titre  de  :  Confrères  de  la  Passion,  en  même 


—  267  — 

temps  qu'ils  établissaient  leur  théâtre  dans 
la  grande  salle  de  l'hôpital  de  la  Trinité,  situé 
hors  la  porte  de  la  ville  conduisant  à  Saint- 
Denis.  (V.  ce  privilège  à  Y  Appendice.) 

Leur  privilège  étant  de  jouer  exclusivement 
Dieu  et  les  saints,  d'autres  sociétés  drama- 
tiques se  formèrent  en  concurrence  en  jouant 
un  genre  autre.  Les  Enfanfs-sans-souci  inven- 
tèrent la  SOTIE  ou  sottie,  petite  pièce  dont  le 
but  était  de  critiquer  la  sottise  humaine.  Ils 
donnèrent  leurs  représentations  à  l'hôtel 
Gluny;  mais  l'obscénité  de  leurs  FARCES  les 
fit  supprimer  par  le  parlement,  le  6  octo- 
bre 1584. 

Les  clercs  de  procureurs,  sous  le  nom  de  Ba- 
sochiens,  ou  cleixs  de  la  basoche,  obtinrent  éga- 
lement de  Charles  VI  un  privilège,  et  ajou- 
tèrent, à  la  sotie,  la  MORALITÉ  et  la  farce. 

Tandis  que  ceci  se  passait  à  Paris,  la  pro- 
vince était  sillonnée  par  des  troupes  nomades, 
dont  nous  verrons  sortir  plus  tard  notre  im- 
mortel Molière. 

Ces  pièces  informes  dégénérèrent  bientôt  en 
une  grossièreté,  une  licence,  une  obscénité 
telles  que  le  parlement  de  Paris,  en  1588, 
supprima  les  jeux  de  théâtre ,  comme  il  avait 
déjà  supprimé  les  mystères  dès  151-8,  en  défen- 


—  268  — 

dant   d'exposer  sur  la  scène  des   choses  de 
religion. 

De  ces  farces  grossières,  de  ces  soties  sati- 
riques et  ordurières,  la  Comédie-Française  de- 
vait surgir,  de  même  qu'on  voit  une  fleur 
s'épanouir  sur  un  fumier. 

JoDELLE,  mort  en  1593,  eut  l'honneur  de 
tirer  de  cette  fange  la  première  comédie  digne 
de  ce  nom.  Elle  est  en  cinq  actes  et  se 
nomme  :  Eugène  ou  la  Rencontre;  après  lui, 
vinrent  Grevin,  Robert  Garnier,  Pierre 
Larivey;  puis  Rotrou,  Corneille  et  Mo- 
lière ,  lequel  a  laissé  si  loin  derrière  lui  ses 
prédécesseurs,  qu'il  doit  être  considéré  comme 
le  véritable  père,  comme  le  créateur  de  la  co- 
médie en  France,  à  laquelle  cependant  Cor- 
neille avait  fait  faire  un  pas  immense  avec 
le  Menteur. 

La  tragédie,  entraînée  dans  le  même  mou- 
vement, s'était  élevée  à  des  hauteurs  incon- 
nues avant  Corneille  et  Racine.  Hélas!  ce 
soleil  des  génies  sublimes  allait  descendre  sur 
l'horizon,  en  montrant  encore  de  temps  à 
autres  quelques  rayons  lumineux,  comme  RÉ- 
GNARD,  Marivaux,  Voltaire,  Beaumarchais, 
puis  se  coucher  dans  la  nuit  en  laissant  nos 
pygmées  s'agiter  dans  son  crépuscule  !  Repre- 


—  269  — 

nons  notre  chemin  et  retournons  à  nos  mou- 
tons. 

Après  l'arrêt  de  1588,  les  Confrères  de  la 
Passion  cédèrent  leur  privilège  à  une  troupe 
de  province,  ainsi  que  leur  théâtre  de  Y  hôtel 
de  Bourgogne;  puis,  enfm,  à  une  autre  compa- 
gnie, en  1598. 

Cette  troupe,  avec  des  alternatives  litté- 
raires assez  variées,  puisqu'elle  jouait  la  tra- 
gédie, la  comédie  et  la  farce  ;  qu'elle  entremê- 
lait RoTROu,  Corneille,  Racine  avec  Turlu- 
pin,  Gauthier- Garguille  et  Bruscambille,  fut 
le  berceau  de  la  Comédie-Française,  et  vint  se 
réunir,  en  1680,  sur  l'ordre  de  Louis  XIV,  à 
celle  de  Molière,  mort  en  1673.  Elle  fut 
constituée  en  société  par  acte  authentique  du 
5  juin  1681.  Depuis  cette  époque  jusqu'à  nos 
jours  elle  n'a  cessé  de  briller  au  premier  rang, 
et  l'on  peut  dire  avec  orgueil,  sans  craindre 
d'être  démenti,  que  le  Théâtre-Français  est 
le  premier  théâtre  du  monde  par  son  organi- 
sation et  par  ses  comédiens.  (V.  à  V Appendice 
les  lois  concernant  le  Théâtre-Français.) 

Nous  avons  donné,  au  mot  HOTEL  DE  BOUR- 
GOGNE, les  différents  logis  occupés  par  les 
troupes  d'où  sortit  la  Comédie-Française  et 
l'avons  laissée  à  la  salle  Gucnégaud.  Elle  resta 
dans  cette  salle  jusqu'en  1689  et  la  quitta  pour 

23. 


-    O70  ^ 

venir  rue  des  Fossés-Saint-Germain-des-Prés, 
qui  prit  plus  tard ,  en  mémoire  de  cette 
troupe,  le  nom  de  rue  de  Y  Ancienne-Comédie. 

Après  une  période  de  quatre-vingts  ans,  la 
Comédie-Française  Vini^  en  1770,  s'établir  aux 
Tuileries,  et  y  demeura  jusqu'en  1782,  qu'elle 
prit  possession  de  la  nouvelle  salle  qu'on  ve- 
nait de  construire  sur  l'emplacement  de  l'hô- 
tel de  Gondé.  G'est  VOdéon  actuel.  Ce  fut  là, 
qu'en  mai  1784  elle  joua  la  Folle  Journée  y 
ou  le  Mariage  de  Figaro,  prélude  d'une  révo- 
lution qui  devait  éclater  cinq  ans  après. 

Les  idées  nouvelles,  écloses  après  1789, 
divisèrent  la  troupe  des  comédiens  français. 
MoNVEL,  Talma,  Dugazon  embrassant  chau- 
dement les  idées  révolutionnaires,  surtout 
MoNVEL  et  Dugazon,  quittèrent  la  société  et 
vinrent  au  Théâtre-Français  du  Palais-Royal. 
En  1793,  Gollot-d'Herbois ,  ancien  acteur, 
jaloux  du  talent  des  comédiens,  les  fit  jeter  en 
prison,  le  4  septembre  1793.  Ils  ne  durent 
d'échapper  à  la  mort  qui  les  attendait  qu'au 
dévouement  d'un  employé ,  nommé  Labus- 
siÈRE,  qui  détruisit  les  pièces  d'accusation.  La 
chute  de  Robespierre  leur  rendit  la  liberté , 
après  un  an  d'emprisonnement. 

Le  faisceau  était  brisé  ;  la  Comédie-Fran- 
çaise n'existait  plus  I  Les  comédiens  dispersés 


—  271    — 

jouaient  dans  trois  ou  quatre  théâtres  diffé- 
rents ,  suivant  leur  tempérament  politique  ou 
leurs  besoins.  Ce  fut  alors  que  François  de 
Neufchateau,  l'auteur  de  Paméla,  devenu 
ministre  de  Tintérieur,  conçut  l'idée  de  re- 
constituer la  Comédie-Française  et  de  rassem- 
bler ses  membres  épars.  Cette  réorganisation 
se  fit  en  1799.  Le  lliéâtre-Français  actuel  fut 
le  local  affermé  à  la  nouvelle  troupe,  et  l'inau- 
guration en  eut  lieu,  le  31  mai  1799,  par  le 
Cid  et  V Ecole  des  Maris. 

Cette  salle  fut  commencée  à  construire 
en  1786,  pour  le  duc  d'ÛRLÉANS,  sous  la  con- 
duite de  l'architecte  Louis.  La  troupe  des 
Variétés-Amusantes  en  fit  l'ouverture,  le  15 
mai  1790,  et  lui  donna  le  nom  de  Théâtre  du 
Palais-Royal.  Elle  prit  celui  de  Théâtre-Fran- 
çais de  la  rue  Richelieu,  en  1791  ;  après  le 
10  août,  on  l'appela  Théâtre  de  la  Liberté  et 
de  l'Egalité,  et  enfin  Théâtre  de  la  République, 
bien  justifié  alors  par  son  répertoire  ;  il  con- 
serva ce  titre  jusqu'à  sa  fermeture,  en  1799. 
A  la  réorganisation,  dont  nous  avons  parlé 
ci-dessus,  il  reprit  son  titre  de  Théâtre-Fran- 
çais. 

THÉÂTRE-LYRIQUE.   —  Le  privilège  de 
ce  théâtre  fut  accordé,  en  1847,  au  composi- 


—  272  — 

teur  Adolphe  Adam,  lequel  ouvrit  son  théâtre 
le  15  novembre  de  la  même  année,  sous  le 
titre  de  Théâtre- National.  La  révolution  de 
1848  vint  ruiner  Tentreprise  qui  avait  com- 
mencé avec  des  charges  très- lourdes,  et  la 
réduire  à  ses  propres  forces ,  ce  qui  ne  lui 
permit  pas  de  surmonter  la  position  difficile 
créée  par  les  événements.  Adolphe  Adam  fut 
ruiné  de  fond  en  comble  et  dut  vendre  ses 
meubles,  ses  bijoux,  son  argenterie,  son  piano, 
sans  pouvoir  liquider  sa  position. 

Le  privilège  resta  enseveli  sous,  les  ruines 
pendant  trois  ans,  et  fut  enfin  accordé,  en 
1851,  à  Edmond  Seveste,  qui  fit  la  réouver- 
ture du  feu  Théâtre-National^  le  27  septembre, 
sous  le  nouveau  titre  de  Théâtre- Lyrique, 
qu'il  a  gardé  depuis ,  et  qui  est  bien  plutôt 
son  titre  que  n'était  le  premier  qui  peut  s'ap- 
pliquer à  tous  les  genres. 

Edmond  Seveste  fut  emporté  par  la  mort 
après  quelques  mois  d'exploitation  et  rem- 
placé par  son  frère  Jules,  auquel  succéda,  en 
185i,  M.  Perrin,  déjà  directeur  de  V Opéra- 
Comique,  ce  qui  réunit  en  quelque  sorte  le 
monopole  des  scènes  de  chant  entre  ses 
mains. 

Cet  état  anormal ,  qui  pouvait  mettre  en 
légitime  émoi  les  compositeurs,  cessa  bientôt 


—  -273  — 

par  la  nomination  de  M.  Pellegrin,  lequel 
fut,  peu  de  temps  après,  remplacé  par  M.  Car- 
VALHO.  Ce  fut  la  belle,  la  grande  période  du 
Théâtre-Lyrique ,  auquel  une  enchanteresse 
qu'on  appelait  M"^  Miolan  ,  et  ensuite 
M™°  Miolan-Garvalho,  attira  la  foule  par  lô 
charme  de  sa  voix. 

Pour  des  motifs  que  nous  n'avons  pas  à 
examiner,  M.  Garvalho,  céda,  en  1860,  son 
privilège  à  M.  Rety,  qui,  malheureusement 
pour  lui,  ne  put  conserver  M°'^  Miolan-Gar- 
valho, ce  qui  rendit  l'entreprise  désastreuse, 
car  ce  théâtre  n'était  pas  subventionné  ; 
M.  Rety  fut  obligé  de  donner  sa  démission 
en  1862. 

Tous  les  faits  subséquents  se  passèrent  à 
l'ancienne  salle  du  boulevard  du  Temple, 
démolie  depuis  pour  faire  la  place  du  Ghâ- 
teau-d'Eau  et  les  nouvelles  constructions  qui 
dépendaient  du  plan  général. 

La  nouvelle  salle,  bâtie  au  compte  de  la 
Ville,  place  du  Ghâtelet,  était  prête,  et  la  dé- 
mission de  M.  Rety,  laissait  le  privilège 
vacant.  M.  Garvalho  fut  de  nouveau  nommé 
directeur  de  la  nouvelle  salle.  Si  le  ministre 
donnait  le  privilège,  la  Ville  louait  bel  et  bien 
la  salle  130,000  francs  par  an,  y  compris  les 
boutiques  et  magasins,  dont  on  pouvait  tirer 


—   '21\  — 

50,000  francs,  ce  qui  faisait  toujours  80,000 
francs  de  loyer,  et  constituait  le  directeur  à 
l'état  de  principal  locataire,  avec  les  risques 
et  périls  y  attachés.  Ces  charges  et  Tabsence 
de  subvention  rendirent  l'opération  si  difficul- 
tueuse  que  l'Etat  fut  amené  à  donner  une 
subvention,  qui  était  alors  de  60,000  francs, 
pour  empêcher  les  désastres  financiers  et 
soutenir  une  scène  qui  a  fourni  de  bons 
artistes,  et  à  laquelle  nous  devons  d'avoir  pu 
entendre  les  œuvres  de  MM.  Maillard,  Bois- 
SELOT,  Bousquet,  Girard,  F.David,  Gounod, 
V.  Massé,  Grisar,  Poise,  Gevaert,  Glapis- 
son,  Adrien  Boieldieu,  sans  compter  les 
chefs-d'œuvre  lyriques  de  l'ancien  répertoire 
dus  à  Grétry,  Nicolo,  Mozart,  Weber, 
Carafa,  Daleyrac,  etc. 

Ce  théâtre,  en  partie  incendié  sous  la  Com- 
mune, a  été  réparé  et,  sans  changer  son  titre 
principal,  auquel  il  a  ajouté  le  mot  «  drama- 
tique »,  a  changé  tout  à  fait  de  genre  :  il  sup- 
plée aujourd'hui  Y  Ambigu-Comique,  et  joue  le 
drame  et  le  mélodrame. 

TOILE.  —  Synonyme  populaire  de  RIDEAU,  et 
plus  généralement  adopté  par  le  public  qui, 
fatigué  d'un  long  entr' actes,  crie  :  la  toile  !  la 
toile  !  la  toile  ou  mon  argent  !  en  battant  un 


-  275  — 

fort  rappel  du  pied.  On  crie  encore  :  la  toile  l 
quand  on  joue  une  mauvaise  pièce  dont  on 
ne  veut  pas  voir  la  fin. 

TONNERRE.  —  Une  longue  et  large  feuille 
de  tôle,  suspendue  par  en  haut  et  agitée  par 
en  bas,  est  encore  le  plus  général  et  le  plus 
commode  moyen  —  quoique  antique  —  d'imi- 
ter le  tonnerre  ;  suivant  qu'on  agite  plus  ou 
mois  fort,  on  a  des  roulements  à  volonté. 
Une  série  de  plancliettes  enfilées  en  forme  de 
jalousie  et  qu'on  laisse  tomber  l'une  sur 
l'autre,  imite  assez  bien  le  tonnerre  qui  tombe. 

TOUR  DE  FAVEUR.  —  Chaque  pièce  reçue, 

étant  classée  à  sa  date,  devrait  être  jouée  à 

son  tour  ;  mais  il  en  est  du  théâtre  comme 

de  tout  :  il  faut  compter  avec  le  tour  de  faveur, 

«  La  faveur  est  comme  une  belle, 
«  Aux  modestes  amants  toujours  fière  et  cruelle.  » 

Aussi  ceux  qui  ont  le  monopole  de  la  mai- 
son, les  plus  importuns,  les  pièces  de  circons- 
tances, les  revues  et  les  parodies^  ont  le  tour 
de  faveur.  Au  Théâtre- Français^  l'ordonnance 
du  29  août  1847  règle  le  tour  de  favetir  k  une 
pièce  sur  deux  reçues. 

TOURNÉE. — Les  comédiens  en  renom  uti- 
lisent leur  CONGÉ  pour  faire  des  tournées  en 


-    276  — 

province  et  à  l'étranger,  tournées  dont  ils 
tirent  un  grand  profit  pécuniaire.  Le  mal  est 
qu'ils  se  fatiguent  sans  profit  pour  fart,  et  que 
chacun  arrivant  seul  dans  une  troupe  mé- 
diocre, —  mais  suffisante  comme  ensemble 
pour  la  localité,  —  fait  l'effet  d'une  rose  dans 
un  champ  de  navets.  De  plus,  il  faut  monter, 
pour  l'acteur  en  tournée  ,  des  pièces  au-des- 
sus de  la  force  de  ceux  qui  doivent  le  secon-. 
der,  ce  qui  les  tue  près  du  public  lorsque 
l'acteur  étranger  à  la  troupe  est  parti. 

Ce  qu'il  conviendrait  de  faire,  ce  serait  des 
tournées  complètes,  composées  des  plus  forts 
élèves  du  Conservatoire,  voyageant  sous  la 
surveillance  et  la  direction  d'un  professeur 
ou  d'un  chef  d'emploi.  Ces  troupes  joueraient 
le  grand  répertoire  tragique,  comique  et  lyri- 
que ;  les  acteurs  se  perfectionneraient  et  le 
public  de  province  verrait  nos  chefs-d'œuvre 
que  les  directeurs  ne  peuvent  monter  d'une 
façon  satisfaisante. 

TRADITION.  —  Entrave,  lange  antique, 
barrière  mise  au  développement  du  talent 
primesautier  d'un  acteur  qui  sent,  qui  voit, 
qui  observe  et  qui  raisonne.  La  tradition  est 
une  carrière  dans  laquelle  on  doit  conduire 
son  char,  parce  que  les  devanciers  y  ont  con- 


—  277  — 

duit  le  leurl  c'est  absurde!  D'ailleurs,  sur 
quoi  repose  la  tradition  ?  En  voici  un  exemple  : 

Le  rôle  des  Crispins  fut  créé  par  Poisson, 
acteur  et  auteur  de  V Hôtel  de  Bourgogne.  Ce 
comédien,  qui  ne  manquait  pas  de  talent, 
avait  le  bas  des  jambes  très-maigre,  et,  de 
plus,  le  défaut  de  bredouiller.  Pour  cacher  le 
bas  de  ses  jambes,  que  son  costume  ne  cachait 
pas  assez,  il  se  fit  faire  des  bottines  pour 
jouer  Grispin.  Depuis  cette  époque,  la  tradi- 
tion veut  que  tous  les  crispins  se  jouent  en 
bottines  et,  ce  qui  est  plus  fort,  en  bredouil- 
lant par  imitation,  comme  Poisson  bredouil- 
lait par  nature  ! 

A  côté  de  la  tradition.,  dont  on  peut  faire  bon 
marché,  il  y  a  les  règles  du  beau,  du  bien, 
du  grand,  du  sublime,  qu'il  faut  toujours 
suivre  et  respecter. 

TRAGÉDIE .  —  Pour  satisfaire  Tamour-propre 
des  sociétés  savantes  dont  nous  avons  failli 
faire  partie,  nous  dirons  que  le  mot  tragédie 
vient  de  deux  mots  grecs  qui,  littéralement, 
signifient  «-chant  du  boucn.  Est-ce  le  bouc 
émissaire  chargé,  comme  celui  des  Hébreux, 
de  tous  les  péchés  et  méfaits  de  la  tribu  dra- 
mati(fue?  11  faut  le  croire. 
La  tragédie  est  donc  d'origine  grecque.  Les 

24 


—  278  — 

plus  grands  tragiques  grecs  sont  Sophocle, 
Euripide  et  Eschyle,  qui  n'ont  jamais  été 
surpassés. 

Les  Romains,  dont  le  théâtre  comique  est 
si  brillant  avec  Plaute  et  Térence,  sont  assez 
pauvres  du  côté  tragique.  Leurs  tragédies  ne 
sont  que  des  imitations,  très-éloignées,  des 
œuvres  des  tragiques  grecs. 

Les  premiers  vagissements  de  la  tragédie 
en  France  se  firent  entendre  avec  Jodelle,  et 
Garnier;  puis  vinrent  Hardy,  qui  fit  plus  de 
cinq  cents  pièces,  Théophile,  Mairet,  Rotrou 
et  Corneille.  Pierre  Corneille  avait  atteint 
le  beau  antique,  la  force,  la  grandeur;  Racine 
y  joignit  la  grâce;  Voltaire  maintint  la  tra- 
gédie à  une  certaine  hauteur  ;  puis  elle  déclina 
rapidement  jusqu'à  Casimir  Delà  vigne,  qui 
lui  redora  un  peu  les  ailes  en  prenant  ses 
héros  plus  près  de  nous.  Malgré  les  tentatives 
de  MM.  Latour-Saint-Ybards,  Augier,  Pon- 
SARD,  pour  la  ressusciter,  ils  n'ont  fait  que 
galvaniser  un  cadavre,  elle  est  morte.  Du 
reste,  il  n'y  a  qu'un  théâtre  qui  puisse  la  re- 
présenter, c'est  le  Théâtre-Français^  mais  il 
n'a  remplacé  ni  Talma,  ni  Rachel. 

Si  l'on  veut  se  rendre  compte  de  latnarche 
de  la  tragédie,  comme  style,  il  suffira  de  hre 


—  279  — 

l'échantillon    suivant,    tiré    des    œuvres    de 
Chrétien,  et  de  sa  tragédie  Albouin. 

ALBOUIN,  buvant. 

«  Ce  vin-là  n'est  pas  bon. 

ROSA  MONDE 

C'est  donc  que  votre  goût 
«  Volontiers  est  changé. 

ALBOUIN 

Oh  !  comme  cela  bout 
«  Dans  mon  pauvre  estomac. 

ROSA MON DE 

Cela  n'est  pas  étrange  ; 
«  C'est  le  mal  qui  sitôt  pour  votre  bien  se  change. 

ALBOUIN 

«  Hélas  !  c'est  du  poison  ! 

« 

ROSAMONDE 

Que  dites-vous,  grands  dieux  I 

ALBOUIN 

«  Je  suis  empoisonné  ! 

ROSAMONDE 

Vous  êtes  furieux, 
«  Vous  croyez  bien  cela  ? 

ALBOULN 

vSi  tu  ne  bois  le  reste, 
«  Je  le  crois. 


—  280  — 

ROSAMONDE 

Je  n'ai  soif. 


ALBOUIN 

0  dangereuse  peste  I 


«.  Tu  le  boiras  soudain. 

ROSAMONDE 

J'ai  bu  vous  l'apportant, 
«  Et  ma  soif  est  éteinte. 

ALBOUIN 

Il  faut  boire  pourtant, 
«  Çà,  çà,  méchante,  louve,  ouvre  ta  bouche  infâme. 
«  Malheureux  est  celui  qui  se  fie  à  sa  femme  !  » 

Ne  croirait-on  pas  lire  une  tragédie  comique? 

La  timgédie  enfanta  des  bâtards  sous  le 
nom  de  tragi-comédie  et  d'autres  sous  celui 
à' opéra-tragédie^  après  la  fondation  de  Yopéj^a^ 
Ces  bâtards  sont  morts  sans  laisser  d'héri- 
tiers. Heureusement  ! 

traînée. —  C'est  un  appareil  d'ÉCLAlRAGE 
portatif  destiné  à  être  posé —  traîné —  à  terre 
pour  faire  le  jour  derrière  des  décorations 
basses,  ou  avancées  devant  d'autres  sur  les- 
quelles elles  feraient  ombre  sans  cette  précau- 
tion luminaire. 

TRAITRE.  —  Pierre   angulaire   de   l'ancien 


—  281   — 

mélodrame,  ce  personnage  s'est  métamorphosé 
en  chevalier  d'industrie  dans  le  répertoire  du 
jour,  où  il  pratique  l'adultère  sur  une  grande 
échelle. 

TRAPPE.  — Le  plancher  mobile  de  la  scène 
est  composé  de  trappes  et  trappillons  pour  les 
apparitions,  disparitions,  changements  à  vue 
et  manœuvre  de  décors.  —  V.  Scène. 

TRAPPE  ANGLAISE.  —  Cette  trappe,  dont 
le  nom  indique  l'origine,  se  place  horizontale- 
ment, verticalement  ou  obliquement  àvolonté, 
soit  sur  le  plancher,  soit  à  la  décoration,  ce 
qui  est  d'un  grand  secours.  Elle  se  compose 
de  petits  volets  attachés  en  dessous  par  des 
lames  d'acier  ou  de  baleine  fixées  solidement 
au  châssis.  Lorsqu'un  acteur  s'élance  vivement 
vers  cette  trappe,  les  lames  cèdent  et  livrent 
passage  en  se  refermant  aussitôt  par  l'effet  du 
ressort  et  de  l'élasticité  des  lames;  le  décor 
n'en  porte  aucune  trace  et  l'effet  est  produit. 

TRAVAILLER  (se  faire).  —  C'est-à-dire  se 
faire  siffler  pour  un  motif  ou  pour  un  autre. 
Le  fameux  Rosembeau,  dont  les  excentricités, 
nous  pourrions  dire  les  mauvais  tours,  rem- 
pliraient un  volume,  s'avisa  de  jouer  à  Caen 

24. 


—  282  — 

le  rôle  d'Oreste,  dans  Andromaqae^  en  costume 
de  général  français.  On  le  travailla,  bien 
entendu,  à  son  entrée  en  scène.  Lui,  sans  se 
déconcerter,  s'approcha  vers  la  rampe  et  dit 
au  public  :  «  Messieurs,  si  mon  costume  ne 
vous  convient  pas,  c'est  la  faute  du  directeur. 
Permettez-moi  devons  lire  mon  engagement.  » 
Il  lit  :  «  M.  RosEMBEAU  jouera  en  chef  et  sans 
partage  y  dans  la  tragédie,  la  comédie  et  l'opéra, 
,  les  roisj  les  grands  amoureux,  et  tous  les  pre- 
miers rôles  en  général.  »  A  cette  chute  impré- 
vue, la  salle  partit  d'un  immense  éclat  de  rire 
et  laissa  Rosembeau  jouer  en  «  général  ». 

TRAVESTI.  —  EMPLOI.  Ce  genre  appartient 
généralement  aux  soubrettes  et  aux  jeunes 
dugazon.  Quelques-unes  ont  toutes  les  qualités 
requises  pour  jouer  les  rôles  d'hommes, 
parce  qu'il  leur  manque  un  peu  de  tout  comme 
femme;  d'autres,  trop  richement  dotées  par 
dame  nature,  sont  obligées  d'y  renoncer.  On 
pourrait  compter  parmi  les  travestis  quelques 
acteurs,  comme  Lhérie,  qui  jouaient  les  rôles 
de  femmes  à  s'y  méprendre. 

Voici  un  épisode  de  travestis  qui  ne  font 
pas  partie  des  engagements.  On  jouait  à  Mon- 
tauban  la  Vestale;  le  directeur,  malgré  ses 
recherches,  ne  put  trouver  qu'un  petit  nombre 


*L 


—  283  — 

de  Vestales...  comme  figurantes  :  il  ne  pouvait 
faire  son  cortège  et  était  aux  abois,  quand  il 
avisa  les  pompiers  de  service  et  leurs  pantalons 
blancs.  Il  fait  vite  chercher  des  jupons  de 
même  couleur,  les  leur  met  sur  la  tête  en 
guise  de  tunique  retombant  sur  le  pantalon, 
et  se  confectionne  ainsi  un  corps  de  vestales... 
sans  pompe. 

TREUIL,  TAMBOUR.  —Instrument  méca- 
nique faisant,  dans  un  sens  horizontal,  fonc- 
tion de  cabestan  et  servant  à  la  manœuvre 
des  décors  appelés  FERMES,  des  rideaux  de 
fond,  des  plafonds,  etc.  Ils  sont,  —  ainsi  que 
les  tambours  destinés  aux  mêmes  usages,  — 
placés  dans  le  cintre,  les  dessous  et  les  corri- 
dors. 

TRIAL.  —  EMPLOI.  Ténor  comique,  à  voix 
châtrée,  qui  a  pris  son  nom  du  chanteur 
Trial,  né  à  Avignon  en  173G.  Il  fut  d'abord 
enfant  de  chœur,  puis  entra  dans  une  troupe 
de  comédiens  ambulants  et,  peu  après,  au 
Théâtre-Italien,  où  il  créa  l'emploi  qui  a  con- 
servé son  nom.  Il  mourut  à  Paris,  le  5  février 
1795. 

TRINGLE.  —  C'est  une  forte  planche  sur 
laquelle  sont  attachés  une  certaine  quantité 


—  284  — 

de  canons  de  pistolets,  dont  les  lumières  sont 
en  communication  par  une  mèche.  On  nourrit 
les* feux  de  file,  feux  de  peloton  et  FUSILLADES 
à  l'aide  de  cet  appareil.  —  V.  Armes  à  feu. 

TROTTOIR  (grand).— Argot  de  coulisses  qui 
signifie  le  grand  répertoire  :  Il  joue  le  grand 
trottoir. 

TROUPE.  —  L'ensemble  du  personnel  engagé 
pour  donner  des  représentations  sur  un 
théâtre,  se  nomme  troupe.  Il  y  a,  si  Ton  peut 
s'exprimer  ainsi,  une  gamme  dramatique  qui 
doit  être  observée  dans  la  formation  d'une 
troupe.  Elle  peut  être  plus  ou  moins  nom- 
breuse, mais  il  n'y  doit  pas  avoir  de  trous,  de 
dissonnances.  Les  acteurs  doivent  jouer  de 
pair,  comme  les  amoureux  et  les  amoureuses, 
les  pères  et  les  mères  nobles,  les  grands  pre- 
miers rôles  hommes  et  femmes.  Il  doit  y  avoir 
des  rapports  de  tailles,  de  voix,  de  manières, 
afin  que  les  personnages  ne  forment  pas  un 
contraste  comme  cela  se  voit  continuellement. 
On  appelle  aussi  troupe  de  carton^  une  mau- 
vaise troupe  faite  à  la  hâte,  et  destinée  seule- 
ment à  donner  la  réplique  à  un  acteur  en 
TOURNÉE  ou  en  représentation. 

TRUC.  —  Toute  machine  qui  sert  à  faire  appa- 


—  285  —■ 

raître,  disparaître,  métamorphoser  sponta- 
nément des  objets  sur  la  scène,  se  nomme 
unie.  Il  y  en  a  de  très-compliqués  et  qu'on 
peut  considérer  comme  des  merveilles  de  mé- 
canique. Ils  concourent,  dans  les  féeries,  au- 
tant et  plus  que  le  reste,  à  la  réussite  de  la 
pièce;  les  Mille  et  une  Nuits,  les  Pilules  du. 
Diable,  le  Pied  de  Mouton,  la  Chatte  Blanche, 
le  Roi  Carotte  ne  doivent  leurs  grands  succès 
qu'aux  trucs. 


U 


UNITÉ. — D'après  les  poétiques  d'AmsTOTE, 
d'HoRACE  et  de  Boileau,  on  doit  observer  dans 
les  œuvres  dramatiques  :  Vunité  de  temps, 
V  uni  té  de  lieu,  Vunité  d'action.  Que  diraient 
ces  maîtres,  bon  Dieu  !  s'ils  pouvaient  venir 
fourrer  le  nez  dans  nos  drames? 

Unité  de  temps?  Le  prologue  nous  montre 
la  naissance  du  héros,  qui  a  trente  ans  au 
second  acte,  et  meurt  au  cinquième  à  l'âge  de 
quarante  ou  cinquante.  C'est,  du  moins,  ce 
qui  a  lieu  pour  Richard  d'Arlington. 

Unité  de  lieu  ?  Le  Docteur  Noir  commence 
à  Saint-Domingue  et  finit  à  Paris. 


—  286  — 

Unité  d'action?  quelquefois,  mais  pas  sou- 
vent. 

USTENSILIER.  -  Employé  chargé  de  la  dis- 
position et  de  l'enlèvement  des  ACCESSOIRES 
de  petite  dimension. 

UTILITÉ.  —  EMPLOI  des  deux  genres  ,  rempli 
souvent  par  des  inutilités.  Quelques  bons  ac- 
teurs ont  débuté  par  des  utilités.  Arnal, 
Bouffé,  Odry  sont  de  ce  nombre. 

Une  utilité,  genre  masculin ,  chargé  de  pe- 
tits rôlps  de  dix  à  quinze  mots,  ayant  eu  à  se 
plaindre  d'un  comédien,  et  voulant  s'en  ven- 
ger, avait  remarqué  que  son  supérieur,  auquel 
son  rôle  voulait  qu'il  remît  une  longue  lettre, 
ne  l'avait  pas  apprise  et  se  contentait  de  lire 
en  scène  celle  qu'il  lui  remettait;  il  imagina 
donc  de  lui  remettre,  en  place,  une  feuille  de 
papier  blanc,  ce  qu'il  fit.  Grand  embarras  de 
l'acteur,  qui  tournait  et  retournait  la  diable 
de  lettre.  L'utilité,  voulant  pousser  plus  loin 
sa  vengeance,  lui  dit  d'un  air  narquois  ;  «  Et 
que  vous  dit-on  dans  cette  lettre?  »  Tiens,  fit 
l'autre  en  lui  rendant  le  papier,  lis  toi-même. 


—  287  — 


VANITÉ.  —  Un  philosophe  a  écrit  quelque 
part  :  «  Si  la  vanité  disparaissait  du  monde, 
on  la  retrouverait  chez  les  comédiens.  »  A 
quoi  tient  le  développement  de  ce  sentiment 
chez  le  personnel  dramatique?  Cherchons 
chez  les  moralistes  et  les  penseurs  ce  qu  ils 
disent  de  la  vanité ,  nous  trouverons  peut; 
être. 

J.-J.  Rousseau  :  la  vanité  de  l'homme  est 
la  source  de  ses  plus  grandes  peines;  I'Aca- 
DÉMiE  :  la  vanité  est  une  marque  de  petitesse 
d'esprit  ;  Fontenelle  :  la  vanité  est  l'amour- 
propre  qui  se  montre,  la  modestie  est  l'amour- 
propre  qui  se  cache  ;  Mirabeau  :  la  vanité  des 
petits  autorise  l'orgueil  des  grands  ;  La 
Bruyère  :  la  vanité  est  l'aliment  des  sots  ; 
Florian  :  la  vanité  nous  rend  aussi  dupes 
que  sots  ;  Saint-Evremont  :  il  faut  avoir  bien 
de  la  vanité  ^o\iv  ne  pas  connaître  sa  faiblesse; 
Formage  :  la  vanité  nait  de  l'aveuglement. 

Passons  aux  exemples  : 

Baron  disait  :  «  La  nature  a  toujours  été 
avare  de   grands  comédiens  :  Il  n'y  a  jamais 


-  288   — 

eu  que  Roscius  et  MOI.  »  Il  fut  tout  près  de 
refuser  la  pension  que  le  roi  lui  accordait, 
parce  que  l'ordonnance  portait  :  «  Payez  au 
nofnmé  Michel  Boyron  la  somme...  »  Il  trou- 
vait un  manque  d'égard  dans  le  style. 

Ce  fut  encore  lui  qui  disait  qu'on  voyait 
un  CÉSAR  tous  les  cent  ans ,  mais  qu'il  fallait 
deux  mille  ans  pour  produire  un  Baron.  Son 
vrai  nom  était  Boyron. 

La  vanité  de  Vestris  est  bien  connue  :  son 
fils  ayant  refusé  de  danser  devant  Marie- 
Antoinette,  fut  conduit  au  fort-l'Evêque.  Son 
père  lui  adressa  ces  mots  :  «  Résigne-toi^  mon 
fils.,  cest  la  première  fois  que  notre  famille  a 
quelque  chose  à  démêler  avec  celle  des  Bour- 
bons. » 

Gomme  on  ne  doit  dire  la  vérité  aux  vi- 
vants... qu'après  leur  mort,  nous  attendrons 
pour  faire  d'autres  citations. 

La  vanité  gagne  facilement  les  familles  de 
ceux  qui  abordent  le  théâtre  :  les  pères ,  les 
mères,  les  parents  sont  dans  la  salle,  lors  des 
débuts,  et  crieraient  volontiers  :  C'est  mon  fils! 
c'est  ma  fille  !  Nous  avons  connu  un  brave 
homme,  dont  la  fille  débuta  à  l'Opéra,  sous 
le  patronage  d'un  illustre  compositeur;  il  se 
levait  au  milieu  du  parterre  pour  lui  dire  : 
Bonjour  P...,  quand  elle   était   en  scène.  Il 


—  289  — 

devint  tellement  gênant,  qu'on  lui  donna  un 
intérêt  dans  le  théâtre  d'Alger,  où  nous  le 
vîmes.  Un  jour  il  avait  prêté  un  âne  pour  en 
faire  un  personnage.  Nous  étions  au  parquet 
quand  Tâne  parut  *en  scène  ;  alors  mon  homme 
se  leva  et  nous  hélant  d'un  bout  à  l'autre  du 
parquet,  il  s'écria  :  Alfred!  Alfred!  C'est 
Cadet!  C'est  mon  âne!  (Historique.) 

Terminons  par  ce  mot  de  M.  Fay  ,  en  voyant 
les  succès  de  la  petite  Léontine  :  «  Et  dire  que 
madame  Fay  ne  voulait  pas  faire  cette  enfant- 
là!  » 

VARIÉTÉS  (Théâtre  des).  Cette  salle,  cons- 
truite par  l'architecte  Gélerier,  ouvrit  ses 
portes  le  24  juin  1807,  sous  la  direction  de 
M"°  MoNTANSiER,  qui  trouva  enfin  moyen  de 
fixer  d'une  manière  définitive  son  titre  de 
Variétés- Amusantes^  qu'elle  avait  promené  à 
la  salle  Richelieu,  aux  Beaujolais,  au  théâtre 
de  la  Cité,  avant  de  le  loger  au  boulevard 
Montmartre. 

Le  Théâtre  des  Variétés  a  produit  des  comé- 
diens remarquables,  avec  un  répertoire  char- 
mant. Nous  citerons  :  Brunet,  Tiercelin, 
Yernet  ,  Odry  ,  Arnal,  Lafont,  Lepeintre 
aîné,  PoTHiER.  Depuis  quelques  années,  il  a 
modifié  -son  ancien  genre  et  s'est  jeté  dans  les 

25 


—  290  - 

bras  d'OFFENBACH,  qui  lui  a  donné  la  Belle 
Hélène,  la  Grande  Duchesse,  les  B?igands, 
Barbe-Bleue.  Nous  ne  cachons  pas  notre  peu 
de  sympathie  pour  ce  genre,  qui  a  étendu  la 
démoralisation  et  créé  la  cascade;  ce  n'est  à 
coup  sûr  pas  à  lui  qu'on  pourra  appliquer  le 
castigat  ridendo  mores. 

VAUDEVILLE. 

D'un  trait  de  la  satire,  en  bons  mots  si  fertile , 
Le  Français,  né  malin,  créa  le  vaudeville, 

a  dit  BoiLEAu.  En  effet,  le  genre  vaudeville 
est  dû  aux  couplets  qu'on  introduisit  dans  le 
dialogue  des  pièces,  et  fut  le  germe  de  V opéra- 
comique,  jusqu'à  ce  que  ce  dernier  déterminât 
son  genre  propre  au  moyen  d'une  musique 
nouvelle ,  faite  spécialement  pour  lui. 

Le  vaudeville  tire  son  nom  des  chansons 
d'ÛLiviER  Basselin,  foulounier  à  Vire,  lequel 
vivait  —  s'il  n'est  pas  apocryphe,  comme  le 
prétend  M.  Gasté  —  vers  le  milieu  du 
xv^  siècle.  Il  habitait  le  fond  de  la  vallée  où 
coule  la  Vire  ;  cette  vallée  forme  deux  bran- 
ches qu'on  nomme  les  vaux.  Ces  chansons 
patriotiques  et  bachiques,  jetées  au  hasard 
et  sans  titres,  durent  être  d'abord  connues 
sous  la  rubrique  générale  de  «  Chants  des 
vaux  de   Vire  ».  Ce  ne  fut  qu'en   1576  que 


-    291    — 

Jean  Le  Houx,  chansonnier,  comme  Basse- 
lin,  publia  pour  la  première  fois  ses  chan- 
sons et  celles  de  son  devancier,  sous  le  titre 
de  Vaux-de-  Vire,  dont  on  a  fait,  par  ignorance 
géographique  ou  corruption  de  langage  «  vau- 
deville ». 

La  Comédie  des  Chansons,  jouée  en  1640, 
qui  n'est  autre  qu'une  suite  de  couplets,  cou- 
sus les  uns  au  bout  des  autres,  peut  servir  de 
point  de  départ  au  genre  vaudeville.  C'était, 
du  moins,  l'idée  émise  ;  elle  devait  prospérer. 
En  tout  cas,  les  comédies  mêlées  d'ariettes  du 
THÉÂTRE  DE  LA  FOIRE  sont  de  véritables  vau- 
devilles ;  mais  la  création  de  l'OPÉRA-COMlQUE, 
avec  sa  musique  ad  hoc,  tua  le  Vaudeville  qui 
n'offrait  plus  assez  d'attraits  pour  lutter  contre 
ce  nouveau  genre.  Il  ne  reparut  qu'en  1792, 
et  prit  une  brillante  place,  qu'il  devait  garder 
longtemps.  Ce  genre  charmant,  gai,  vif,  fron- 
deur, spirituel  et  malin,  est  essentiellement 
français  par  le  fond  et  par  la  forme. 

VAUDEVILLE  (Théâtre  du).  -~  Quatre 
hommes  d'esprit  joyeux  s'associèrent  en  1790 
ou  1791  —  ce  sont  Monnier,  Pus,  Barré  et 
RoziÈRES  —  pour  fonder  un  nouveau  théâtre, 
qu'ils  firent  construire  rue  de  Chartres,  au- 
jourd'hui disparue    avec   beaucoup    d'autres 


—  292  — 

pour  faire  place  au  pavillon  du  Louvre  et  à  la 
place  du  Palais-Royal.  Ce  théâtre,  dont  l'inau- 
guration eut  lieu  le  19  janvier  1792,  fut  in- 
cendié en  1838.  Le  Vaudeville  chercha  un 
refuge  dans  une  salle  du  boulevard  Bonne- 
Nouvelle,  où  est  la  Ménagère,  puis  vint  au 
théâtre  de  la  Bourse,  —  ancienne  salle  des 
Nouveautés^  —  que  venait  de  quitter  V  Opéra- 
Comique.  Le  percement  de  la  grande  voie  qui 
relie  la  Bourse  au  Nouvel-Opéra,  délogea  le 
Vaudeville^  qui  vint  alors,  en  avril  1869, 
prendre  pied  dans  la  bonbonnière  qui  fait  le 
coin  de  la  Ghaussée-d'Antin  et  du  boulevard 
des  Capucines.  Il  convient  d'ajouter  que  le 
titre  seul  est  resté.  Le  genre  a  complètement 
disparu. 

VAUDEVILLISTE.  —  Auteur  dramatique 
dont  l'esprit  est  assez  fm  pour  confectionner 
le  genre  vaudeville.  Barré,  Radet,  Desfon- 
TAiNES  et  DÉSAUGIERS ,  Ics  pèrcs  du  genre, 
n'ont  jamais  été  détrônés.  Brazier,  Em.  Wan- 
DERBRUCK,  DuvERT,  Lauzanne,  ont  été  d'heu- 
reux successeurs. 

Il  y  a  une  classe  de  vaudevillistes  que  nous 
ne  devons  pas  oublier  ici,  c'est  celle  des  AR- 
RANGEURS. Nous  avons  donné  —  à  ce  mot  — 
leur  manière  de  procéder. 


—  293  — 

VEDETTE.  —  0  vanité!  dont  nous  parlons 
ci-dessus,  la  vedette  est  un  de  tes  enfants. 
Ainsi,  un  comédien  en  représentation  ou  en 
tournée,  exigera  que  son  nom  soit  placé  seul 
et  en  gros  caractères  en  tête  de  l'affiche  ;  de 
plus,  qu'il  ne  soit  pas  confondu  dans  la  distri- 
bution avec  les  autres  noms,  mais  indiqué  à 
la  ligne.  Dans  l'un  comme  dans  l'autre  cas, 
c'est  ce  qu'on  nomme  «  en  vedette  ». 

Ceux  qui  ne  peuvent  obtenir  la  vedette^  sur- 
tout quand  ils  font  partie  de  la  troupe,  se  con- 
tentent de  voir  leurs  noms  imprimés  en  plus 
gros  caractères  que  ceux  de  leurs  collègues 
dans  la  distribution  de  l'affiche. 

VENT.  —  Plusieurs  moyens  imitatifs  sont  em- 
ployés pour  faire  le  bruit  du  vent.  Les  cordes 
tendues  rendent  bien,  au  frottement,  le  siffle- 
ment du  vent;  des  lames  de  bois,  disposées 
sur  un  tambour  tourné  rapidement  et  frottant 
sur  une  étoffe  de  soie  tendue,  produisent  le 
même  effet. 

VERTU.  —  Rassurez-vous,  princesses  de  la 
rampe,  ce  n'est  pas  à  vous  que  nous  en  vou- 
lons ;  vos  modestes  appointements  ne  vous 
permettent  pas  ce  luxe.  Nous  voulons  simple- 
ment constater  que  le  public  veut  et  aime  que 

25. 


—  294  — 

la  vertu  reçoive  sa  récompense  à  la  fin  d'une 
pièce.  Ce  sentiment  lui  fait  honneur,  lui  rend 
l'esprit  libre,  le  cœur  content,  et  lui  donne  la 
satisfaction  de  voir  au  théâtre,  et  pour  une 
modique  somme  ,  ce  qu'il  ne  pourrait  voir 
pour  beaucoup  d'argent  dans  le  monde  ordi- 
naire. 

VESTE.  —  Remporter  sa  veste  est  synonyme  de 
chute,  d'insuccès.  L'origine  de  cette  phrase 
qui  est  en  grand  usage  dans  les  coulisses,  et 
s'applique  à  tout  ce  qui  ne  réussit  pas,  re- 
monte à  une  pièce  intitulée  «  Les  Etoiles  » 

jouée  au  théâtre  du  Vaudeville,  en L'étoile 

de  Vénus  et  celle  du  Berger  causent  amoureu- 
sement ensemble  sous  forme  de  berger  et  de 
bergère. 

((  —  Le  berger:  La  nuit  est  sombre,  l'heure 
est  propice  :  viens  t'asseoir  sur  ce  tertre  de 
gazon. 

«  —  Lm  bergèi^e  :  L*herbe  est  humide  des 
larmes  de  la  rosée. 

«  —  Le  berger  :  Assieds-toi  sur  ma  veste.  » 

A  cette  sortie  inattendue,  les  rires,  les 
huées,  les  sifflets  contenus  jusqu'à  ce  moment 
firent  explosion,  et  le  berger  dut  «  remporter 
sa  veste  »  dans  la  coulisse. 


—  295  — 

Cette  scène  se  reiiouvella  les  jours  suivants 
et  l'on  dut  suspendre  les  représentations  des 
Étoiles,  auxquelles  on  allait  pour  voir  La- 
grange  —  c'était  le  berger  —  Remporte)^  sa 
veste.  Des  coulisses ,  cette  locution  a  fait 
irruption  dans  le  monde,  et  l'on  dit  assez 
généralement  d'une  chose  qui  ne  vaut  rien, 
ou  qui  ne  réussit  pas  :  c'est  une  veste,  comme 
on  dit  :  c'est  un  fiasco. 

VESTIAIRE.  —  Lieu  où  l'on  dépose  les 
cannes,  les  parapluies,  les  manteaux,  chapeaux 
et  autres  objets  gênants. 

Le  dépôt  des  armes,  cannes  et  parapluies  est 
obligatoire  ;  on  est  plus  tolérant  pour  les 
spectateurs  des  loges,  galeries  et  balcons, 
qui  sont  censés  les  remettre  aux  ouvreuses.  Il 
y  a  même  avantage  à  en  agir  ainsi,  car  l'ou- 
vreuse à  laquelle  vous  confiez  ces  objets,  de- 
vant compter  sur  une  gratification,  vous  pla- 
cera mieux.  Le  mal  est  qu'ayant  peu  de  place 
pour  les  effets  elle  vous  rend  vos  chapeaux 
bossues,  vos  châles  plissés  et  vos  pardessus 
frippés. 

hesvestiaires  ne  datent  que  de  1817,  époque 
à  laquelle  ils  furent  installés  à  la  porte  des 
théâtres  de  Paris.  Ils  sont  obligatoires  pour 
les  directions;  et  les  cannes,  armes  et  para- 


—  296  — 

pluies   doivent    y   être    reçus    gratuitement. 
Va-t-en  voir  s'ils  viennent,  Jean  ! 

VOIR  AU  GAZ,  A  LA  RAMPE,  A  LA  LU- 
MIERE. —  Ces  trois  modes  synonymes  se 
disent  à  propos  d'une  pièce  dont  les  répétitions 
touchent  à  la  fm,  et  qui  se  comporte  assez 
bien.  Gomme  on  ne  peut  juger  que  par  appré- 
ciation, on  dit  :  il  faudra  voir  ça  au  gaz,  c'est- 
à-dire  devant  le  public,  et  salle  éclairée.  Gela 
est  d'autant  plus  vrai  que  beaucoup  de  comé- 
diens sérieux  sont  eux-mêmes  surpris  de 
CHUTES  que  rien  ne  faisait  pressentir  aux  ré- 
pétitions, tandis  que  certaines  pièces  qu'on 
s'attendait  à  voir  siffler,  ont  réussi.  Gela  ne 
surprendra  pas,  si  l'on  veut  se  rappeler  qu'au 
théâtre  la  question  d'optique  joue  un  grand 
rôle,  tant  pour  les  paroles  que  pour  les  décors, 
sans  compter  l'influence  du  public  sur  lui- 
même  :  le  fluide. 

VOITURES.  —  (Voir  sur  ce  sujet,  à  V Appen- 
dice, les  articles  62,  63,  64,  65,  66  de  l'ordon- 
nance du  !•'■  juillet  1864.) 

VOL,  VOL  OBLIQUE.  —  Il  s'agit  ici  d'une 
apparition,  d'une  déesse,  d'une  fée,  d'un  génie 
qui  s'envolent.    On  comprend   parfaitement 


—  297  — 

qu'un  de  ces  personnages  soit  enlevé  perpen- 
diculairement par  le  fil  qui  le  tient  à  la  cein- 
ture ;  on  comprend  moins  le  vol  oblique^  qui  est 
très-gracieux,  produit  beaucoup  d'effet,  et  est 
cependant  très-simple. 

Supposons  le  sujet  à  enlever,  placé  du  côté 
gauche  de  la  scène.  Le  FIL  qui  le  tient  à  la 
ceinture,  monte  directement  et  perpendicu- 
lairement à  un  point  fixe  où  il  est  attaché, 
en  passant  sur  une  roulette  qui  glisse  de 
gauche  à  droite  dans  une  rainure  cachée  dans 
les  frises.  En  tirant  cette  roulette  sur  le  côté 
droit,  on  enlève  le  sujet. en  même  temps  que 
le  fil  de  suspension  se  raccourcit,  et  le  vol  se 
produit  du  bas  de  la  scène,  côté  gauche,  à  la 
frise  du  côté  droit,  où  il  se  perd.  Nous  n'em- 
ployons pas  les  mots  techniques  pour  mieux 
nous  faire  comprendre. 


ZÈLE.  —  Ce  petit  mot,  formé  de  quatre  lettres 
seulement  et  qui  terminera  notre  vocabulaire, 
ne  saurait  être  trop  recommandé  à  MM.  et  à 


—  298  — 

MM"'"  du  théâtre.  Il  ne  donnera  pas  le  talent 
à  ceux  quf  ne  peuvent  l'acquérir,  mais  il  le 
remplacerasouvent;  il  empêcherales  médiocres 
de  devenir  mauvais;  il  fera  apprécier  du  di- 
recteur et  du  public  l'acteur  qui  lui  obéira, 
et  sera  une  sauvegarde  dans  les  cas  difficiles  : 
car  il  sera  beaucoup  pardonné  à  celui  qui 
aura  toujours  été  zélé. 


APPENDICE 


PREMIERE  PARTIE 

DOCUMENTS    HISTORIQUES 

DEUXIÈME  PARTIE 

RÈGLEMENTS  ET  LOIS  CONCERNANT  LE  THEATRE- 
FRANÇAIS 

TROISIÈME  PARTIE 

LÉGISLATION    GÉNÉRALE  ! 

LOIS ,   DÉCRETS ,    ORDONNANCES  ,    ARRÊTÉS    EN    VIGUEUR 
DE   1790   A   1878 


PREMIÈRE    PARTIE 

DOCUMENTS  HISTORIQUES 


4  DÉCEMBRE  1402.  —  Lettres-patentes  fondant 
le  privilège  des  Confrères  de  la  Passion, 
octroyées  par  Charles  YI. 

«  Charles,  etc.,  savoir  faisons  à  tous  présens  et  avenir, 
nous  avoir  receu  l'umble  supplication  de  nos  bien  amez 
et  confrères,  les  maistres  et  gouverneurs  de  la  Confrarie 
de  la  Passion  et  Résureccion  nostre  Seigneur,  fondée  en 
l'église  de  la  Trinité,  à  Paris,  contenant,  comme  pour  le 
fait  d'aucuns  misterres,  tant  de  saincts  comme  de  sainctes 
et  mesmement  du  misterre  de  la  Passion,  qu'ils  derre- 
nièrement  ont  commandée  est  prest  pour  faire  devant 
nous,  comme  autrefoiz  avoient  fait,  et  lesquelz  ilz  n'ont 
peu  bonnement  continuer  pour  ce  que  nous  n'y  avons 
peu  estre  lors  présent  ;  auquel  fait  et  misterre  ladicte 
Confrarie  a  moulte  frayé  et  despendu  du  sien,  et  aussi 
ont  les  confrères ,  un  chascun  proportionnablement  ; 
disons  en  oultre  que  se  ilz  jouoient  publiquement  et  en 
commun,  que  ce  seroit  le  proufit  d'icelle  Confrarie,  que 
faire  ne  povoient  bonnement  sans  nostre  congié  et  licence 
requerans  sur  notre  gracieuse  provision. 

«  Nous  qui  voulons  et  désirons  le  bien,  proufit  et  uti- 

26 


—  302  — 

lité  de  ladicte  Gonfrarie,  et  les  droitz  et  revenus  d'icelle 
estre  par  nous  accreuz  et  aug'mentez  de  grâces  et  privi- 
lèges, afin  que  un  cliascun  par  dévocion  se  puisse  et 
doye  adjoindre  et  mettre  en  leur  Compaignie,  à  yceulx, 
maistres,  gouverneurs  et  confrères  d'icelle  Gonfrarie  de  la 
Passion  nostredict  Seigneur,  avons  donné  et  octroyé, 
Donnons  et  Octroyons  de  grâce  espécial,  plaine  puissance 
et  auctorité  royal,  ceste  fois  pour  toutes,  et  ce  toujours 
perpétuellement,  par  la  teneur  de  ces  présentes  lettres, 
auctorité.  congié  et  licence, 

«  De  faire  et  jouer  quelque  misterre  que  ce  soit,  soit  de 
ladicte  Passion  et  Résurreccion,  ou  autre  quelconque  tant 
de  saincts  comme  de  sainctes  que  ilz  vouldront  eslire  et 
mettre  sus,  toutes  et  quantefoiz  qu'il  leur  plaira,  soit 
devans  nous,  devans  nostre  commun  ou  ailleurs,  tant  en 
recors  comme  autrement,  et  de  eulx  convoquer  et  com- 
muniquer et  assembler  en  quelxconque  lieu  et  place 
licite  à  ce  faire,  qu'ilz  pourront  trouver,  tant  en  nostre 
ville  de  Paris,  comme  en  la  prévosté  et  viconté  ou  ban- 
lieu  d'icelle,  présens  à  ce  troiz,  deux  ou  l'un  d'eulx 
qu'ilz  vouldront  eslire  de  nos  officiers,  sans  pour  ce  com- 
mettre offense  aucune  envers  nous  et  justice. 

«  Et  lesquels  maistres,  gouverneurs  et  confrères  dessus- 
diz,  et  un  chascun  d'eulx,  durant  les  jours  esquelx  ledit 
misterre  qu'ilz  joueront  se  fera,  soit  devant  nous  ou  ail- 
leurs, tant  en  recors  comme  autrement,  ainsi  et  par  la 
manière  que  dit  est,  puissent  aler,  venir,  passer  et  repas- 
ser paisiblement  vestuz,  abilliez  et  ordonner  un  chascun 
d'eulx,  en  tel  estât  que  le  cas  le  désire  et  comme  il  appar- 
tendra  selon  Tordonnance  dudit  misterre,  sans  destour- 
bier  ou  empeschement  ; 

«  Et  à  gregneur  confirmacion  et  seurté ,  nous  iceulx 
confrères,  gouverneurs  et  maistres,  de  nostie  plus  habun- 
dant  grâce,  avons  mis  en  nostre  protection  et  sauvegarde 
durant  le  recours  d'iceulx  jeux  et  tant  comme  ilz  joueront 
seulement,  sans  pour  oe  leur  meffaire  ne  à  aucun  d'iceulz 
à  ceste  occasion  ne  autrement  comment  que  ce  soit  au 
contraire. 


—   303  — 

«  Si  donnons  en  mandement  au  prévost  de  Paris  et  à 
tous  noz  aultres  justiciers  et  officiers,  présens  et  avenir, 
ou  à  leurs  lieuxtenans  et  a  chascun  d'eulx,  si  comme  a 
lui  appartendra,  que  les  diz  maistres,  gouverneurs  et  con- 
frères et  un  chascun  d'eulx,  facent,  seuffrent  et  laissent 
joïr  et  user  plainement  et  paisiblement  de  nostre  présente 
grâce,  congié,  licence,  dons  et  octroy  dessusdiz,  sans  les 
molester,  faire  ne  souffrir  empeschier  ores  ne  pour  le 
temps  avenir,  comment  que  ce  soit  au  contraire. 
«  Et  pour  ce  que  ce  soit  ferme  chose  et  estable  à  toujours.» 
(V.  les  mots  :  Hôtel  de  Bourgogne,  page  134;  Mystères, 
page  176;  Théâtre-Français,  ^di%Q  265.) 

12  NOVEMBRE  1609.  —  Edit  du  roi  Henri  IV.  — 
Censure.  —  Eclairage.  —  Heures.  —  Pjnx  des 
places. 

«  Sur  la  plainte  à  nous  faite  par  le  procureur  du  roy, 
que  les  comédiens  de  l'hostel  de  Bourgogne  et  de  Thostel 
d'Argent  finissent  leur  comédie  à  heures  indues  et  incom- 
modes pour  la  saison  de  l'hyver,  et  que,  sans  permissions 
ils  exigent  du  peuple  sommes  excessives  ;  estant  néces- 
saire d'y  pourvoir  et  de  leur  faire  taxe  modérée,  nous 
avons  fait  et  faisons  très  expresses  inhibitions  et  défenses 
ausdits  comédiens,  depuis  le  jour  de  S'  Martin  jusqu'au 
15  février,  de  jouer  passé  quatre  heures  et  demie  au  plus 
tart  ;  ausquels  pour  cet  effet  enjoignons  de  commencer 
précisément  avec  telles  personnes  qu'il  y  aura  ù  deux 
heures  après  midy  et  finir  à  la  dite  heure  ;  que  la  porte 
soit  ouverte  à  une  heure  précise,  pour  éviter  la  confusion 
qui  se  fait  dedans  ce  temps,  au  domage  de  tous  les  habi- 
tants voisins. 

«  Faisons  défenses  aux  comédiens  de  prendre  plus 
grande  somme  des  habitants  et  autres  personnes  que  de 
cinq  sols  au  parterre,  et  dix  sols  aux  loges  et  galeries  ; 
et  en  ce  cas  qu'ils  y  ayent  quelques  actes  à  représenter  où 
il  conviendra  plus  de  frais,  il  y  sera  par  nous  pourvu  sur 


—  304  — 

leur  requeste  préalablement  communiquée  au  procureur 
du  roy. 

«  Leur  défendons  de  représenter  aucunes  comédies  ou 
farces  qu'ils  ne  les  ayent  communiquées  au  procureur  du 
roy  et  que  leur  rôle  au  registre  ne  soit  de  nous  signé. 

«  Seront  tenus  lesdits  comédiens  avoir  de  la  lumière 
en  lanterne  ou  autrement  tant  au  parterre,  montée  et 
gallerie,  que  dessous  les  portes  et  à  la  sortie,  le  tout 
sous  peine  de  cent  livres  d'amende  et  de  punition  exem- 
plaire. 

«  Mandons  au  commissaire  du  quartier  d'y  tenir  la 
main. 

«  Henri  IV.  » 


28  JUIN  1669.  —  Lettres-patentes  octroyées 
par  Louis  XIV  à  l'abbé  Perrin,  pour  le  privi- 
lège et  la  fondation  de  /'Opéra  français. 

«  Louis,  par  la  grâce  de  Dieu,  roy  de  France  et  de 
Navarre,  à  tous  ceux  qui  ces  présentes  verront,  salut. 

«  Notre  bien  aimé  et  féal  Pierre  Perrin,  conseiller  en 
notre  conseil  et  introducteur  des  ambassadeurs  près  la 
personne  de  feu  notre  très  cher  et  bien  aimé  oncle  le  duc 
d'Orléans  nous  a  très  humblement  fait  remontrer  que, 
depuis  quelques  années,  les  Italiens  ont  établi  diverses 
académies,  dans  lesquelles  il  se  fait  des  représejitations  en 
musique  qu'on  nomme  opéra  ;  que  ces  académies  étant 
composées  des  plus  excellents  musiciens  du  pape  et  autres 
princes,  même  de  personne  d'honnêtes  familles,  nobles 
et  gentilshommes  de  naissance,  très  savants  et  expéri- 
mentés en  l'art  de  musique,  qui  y  vont  chanter,  font  à 
présent  les  plus  beaux  spectacles  et  les  plus  agréables 
divertissements,  non  seulement  des  villes  de  Rome,  Ve- 
nise et  cours  d'Allemagne  et  d'Angleterre,  oil  lesdites 
académies  ont  été  pareillement  établies  à  l'imitation  des 
Italiens  ;  que  ceux  qui  font  les  frais  nécessaires  pour  les- 
dites représentations  se  remboursent  de  leurs  avances 


—  305  — 

sur  ce  qui  se  reprend  du  public  à  la  porte  des  lieux  où 
elles  se  font  ;  et  enfin  que  s'il  nous  plaisoit  de  lui  accor- 
der la  permission  d'établir  dans  notre  royaume  de  pa- 
reilles académies,  pour  y  faire  chanter  en  public  de 
pareils  opéra  ou  représentatiojis  en  musique  et  en  langue 
/nmçoise,  il  espère  que  non  seulement  ces  choses  contri- 
buroient  à  notre  divertissement  et  à  celui  dw  public,  mais 
encore  que  nos  sujets ,  s'accouttumant  au  goût  de  la 
musique,  se  porteroient  insensiblement  à  se  perfection- 
ner en  cet  art,  l'un  des  plus  nobles  libéraux. 

«  A  ces  causes,  désirant  contribuer  à  l'avancement  des 
arts  dans  notre  royaume  et  traiter  favorablement  ledit 
exposant,  tant  en  considération  des  services  qu'il  a  rendus 
à  notre  très  cher  et  bien  aimé  oncle  le  duc  d'Orléans, 
que  de  ceux  qu'il  nous  rend  depuis  plusieurs  années  en 
la  composition  des  paroles  de  musique  qui  se  chantent 
tant  en  notre  chapelle  qu'en  notre  chambre,  nous  avons 
audit  Perrin  accordé  et  octroyé,  accordons  et  octroyons 
par  ces  présentes,  signées  de  notre  main,  la  permission 
d'établir  en  notre  bonne  ville  de  Paris  et  autres  de  notre 
royaume  une  académie,  composée  de  telle  nombre  et 
qualité  de  personnes  qu'il  avisera,  pour  y  représenter  et 
chanter  en  public  des  opéras  et  représentations  en  musique 
et  en  vers  français,  pareilles  et  semblables  à  celles  d'Italie. 

«  Et  pour  dédommager  l'exposant  des  grands  frais  qu'il 
conviendra  faire  pour  lesdites  représentations,  tant  pour 
les  théâtres ,  machines ,  décorations ,  habits ,  qu'autres 
clioses  nécessaires,  nous  lui  permettons  de  prendre  du 
public  telles  sommes  qu'il  avisera,  et,  à  cette  fin,  d'éta- 
blir des  gardes  et  autres  gens  nécessaires  à  la  porte  des 
lieux  où  se  feront  lesdites  représentations. 

«  Faisant  très  expresses  inhibitions  et  défenses  à  toutes 
personnes,  de  quelque  qualité  et  condition  qu'elles  soient, 
même  aux  ofticiers  de  notre  maison,  d'y  entrer  sans  payer, 
et  de  faire  chanter  de  pareils  opéras  ou  représentations  en 
musique  et  en  vers  français  dans  toute  l'étendue  de  notre 
royaume,  pondant  douze  années,  sous  les  consonteuient 
et  permission  dudit  exposant,  à  peine  de  10,000  livres 

26. 


—  306  — 

d'amende,  confiscation  du  théâtre,  machines  et  habits, 
applicables  un  tiers  à  nous,  un  tiers  à  l'hôpital  général  et 
l'autre  tiers  audit  exposant. 

«  Et  attendu  que  lesdits  opéras  et  représentations  sont  des 
ouvrages  de  musique  tout  différent  des  comédies  récitées, 
et  que  nous  les  érigeons  par  cesdites  présentes  sur  le 
pied  de  celles  des  académies  d'Italie,  où  les  gentilshommes 
chantent  sans  déroger,  voulons  et  nous  plaît  que  tous 
gentilshommes,  damoiselles  et  autres  personnes  puissent 
chanter  sans  déroger  audit  Opéra,  sans  que  pour  ce  ils 
dérogent  aux  titres  de  noblesse  ni  à  leurs  privilèges, 
charges,  droits  et  immunités. 

«  Révoquant  par  ces  présentes  toutes  permissions  et 
privilèges  que  nous  pourrions  avoir  cy  devant  donnés  et 
accordés,  tant  pour  raison  dudit  Opéra  que  pour  réciter 
des  comédies  en  musique,  sous  quelque  nom,  qualité, 
condition  et  prétexte  que  ce  puisse  être. 

«  Si  donnons  en  mandement  à  nos  amis  et  féaux  conseil- 
lers, les  gens  tenant  notre  cour  de  Parlement  à  Paris  et 
autres,  nos  justiciers  et  officiers,  qu'il  appartiendra,  que 
ces  présentes  ils  oyent  à  faire  lire,  publier  et  enregistrer  : 
et  du  contenu  en  icelles  faire  jouir  et  user  ledit  exposant 
pleinement  et  paisiblement,  cessant  et  faisant  cesser  tous 
troubles  et  empêchements  au  contraire  ;  car  tel  est  notre 
bo7i  plaisir. 

«  Donné  à  Saint-Germain-en-Laye ,  le  vingt-huitième 
jour  de  juin  l'an  de  grâce  mil  six  cent  soixante  neuf,  et 
de  notre  règne  le  vingt-septième. 

«  Signé  Louis.  » 

Trois  ans  après,  le  30  mars  1672,  Louis  XIV  révo- 
quait le  privilège  accordé  à  Pierre  Perrin  et  roctroyait 
à  Ldlli.  INous  croyons  inutile  de  reproduire  ce  nou- 
veau document,  dont  la  forme  varie  peu  du  précédent, 
et  qui  n'est  lui-racmc  qu'un  document  historique.  — 
V.  Opéra,  page  183. 


DEUXIÈME    PARTIE 

RÈGLEMENTS  ET   LOIS   CONCERNANT  LE   THÉÂTRE 
FRANÇAIS 


25  AOUT  1680.  —  Ordonnance  par  laquelle 
Louis  xiv  réunit  les  t7\oupes  de  l'hôtel  de 
Bourgogne  et  de  la  rue  Guénégaud  en  une 
seule^  et  fonde  la  Comédie -Française. 

«  Sa  Majesté  ayant  estimé  à  propos  de  réunir  les  deux 
troupes  de  comédiens  établies  à  l'hôtel  de  Bourgogne  et 
dans  la  rue  Guénégaud,  h  Paris,  pour  n'en  faire  à  l'ave- 
nir qu'une  seule  afin  de  rendre  les  représentations  des 
comédiens  plus  parfaites  par  les  moyens  des  acteurs  et 
actrices  auxquels  elle  a  donné  place  dans  ladite  troupe, 
Sa  Majesté  a  ordonné  et  ordonne  qu'à  l'avenir  lesdites 
deux  troupes  de  comédiens  français  seront  réunies  pour 
ne  faire  qu'une  seule  et  même  troupe,  et  sera  composée 
des  acteurs  et  actrices  dont  la  liste  sera  arrêtée  par  Sa 
dite  Majesté,  et,  pour  leur  donner  moyen  de  se  perfec- 
tionner de  plus  en  plus,  Sa  dite  Majesté  veut  que  ladite 
troupe  puisse  représenter  les  comédies  dans  Paris,  faisant 
défense  à  tous  autres  comédiens  français  de  s'établir  dans 
ladite  ville  et  faubourgs  ,  sans  ordre  exprès  de  Sa 
Majesté.  »  —  (V.  Hôtel  de  Bourgogne,  p.  134,  et  Tliéâtre- 
Fratïçais,  p.  265.) 


—  308  — 

i5  OCTOBRE  1812.  —  DÉCRET  DE  Moscou,  sur  la 
surveillance,  V organisation^  V administration , 
la  comptabilité^  la  police  et  la  discipline  du 
Théâtre-Français . 

TITRE  PREMIER 

DE  LA  DIRECTION  ET  SURVEILLANCE  DU  THÉÂTRE-FRANÇAIS. 

Article  1er.  _  Le  Théâtre-Français  continuera  d'être, 
placé  sous  la  surveillance  et  la  direction  du  surintendant 
de  nos  spectacles. 

2.  —  Un  commissaire  impérial,  nommé  par  Nous,  sera 
chargé  de  transmettre  aux  comédiens  les  ordres  du  surin- 
tendant. Il  surveillera  toutes  les  parties  de  ladministra- 
tion  et  de  la  comptabilité. 

3.  —  Il  sera  chargé,  sous  sa  responsabilité,  de  faire 
exécuter,  dans  toutes  leurs  dispositions,  les  règlements 
et  les  ordres  de  service  du  surintendant.  —  A  cet  effet, 
il  donnera  personnellement  les  ordres  nécessaires. 

4.  —  En  cas  d'inexécution  ou  de  violation  des  règle- 
ments, il  en  dressera  procès-verbal,  et  le  remettra  au  surin- 
tendant. 

TITRE  II 

de  l'association  du  théâtre-français. 

SECTION  I'^  —  DE  LA  DIVISION  EN  PARTS. 

5.  —  Les  comédiens  de  notre  Théâtre-Français  conti- 
nueront d'être  réunis  en  société,  laquelle  sera  adminis- 
trée suivant  les  règles  ci-après. 

6.  —  Le  produit  des  recettes,  tous  les  frais  et  dépenses 
prélevés,  sera  divisé  en  vingt-quatre  parts. 


—  309  — 

7.  —  Une  de  ces  parts  sera  mise  en  r<'!serve,  pour  être 
afTectéo,  par  le  surintendant,  aux  besoins  imprévus  :  si 
elle  n'est  pas  employée  en  entier,  le  surplus  sera  distribué 
ù  la  fin  de  l'année  entre  les  sociétaires. 

8.  —  Une  demi-part  sera  mise  en  réserve  pour  augmen- 
ter le  fonds  des  pensions  de  la  société. 

9.  —  Une  demi-part  sera  employée  annuellement  en 
décorations,  ameublements,  costumes  du  maiçasin,  répa- 
ration des  loges  et  entretien  de  la  salle,  d'après  les  ordres 
du  surintendant.  Les  réserves  ordonnées  par  les  articles 
7,  8  et  9  n'auront  lieu  que  successivement  et  à  mesure 
des  vacances. 

10.  —  Les  vingt-deux  parts  restantes  continueront 
d'être  réparties  entre  les  comédiens  sociétaires,  depuis  un 
huitième  de  part  jusqu'à  une  part  entière,  qui  sera  le 
maximum. 

11.  —  Les  parts  ou  portions  de  parts  vacantes  seront 
accordées  ou  distribuées  par  le  surintendant  de  nos  spec- 
tacles. 


SECTION  II.  —  DES  PENSIONS  DE  RETRAITE. 

§  /«»■.  —  Du  temps  Jîécessaire  pour  obteiiir  sa  peiision, 
et  de  sa  quotité. 

12.  —  Tout  sociétaire  qui  sera  reçu,  contractera  l'enga- 
gement de  jouer  pendant  vingt  ans  ;  et,  après  vingt  ans 
de  service  non  interrompus,  il  pourra  prendre  sa  retraite, 
à  moins  que  le  surintendant  ne  juge  à  propos  de  le  rete- 
nir. 

Les  vingt  ans  dateront  du  jour  des  débuts,  lorsqu'ils 
auront  été  immédiatement  suivis  de  l'admission  à  l'essai, 
et  ensuite  dans  la  société. 

13.  —  Le  sociétaire  qui  se  retirera  après  vingt  ans 
aura  droit  :  1"  à  une  pension  viagère  de  deux  mille  francs, 
sur  les  fonds  affectés  au  Théâtre-Français,  par  le  décret 


—  310  — 

du  13  messidor  an  X;  2"  à  une  pension  de  pareille 
somme  sur  les  fonds  de  la  société  dont  il  est  parlé  à  l'ar- 
ticle 8. 

14.  —  Si  le  surintendant  juge  convenable  de  prolonger 
le  service  d'un  sociétaire  au-delà  de  vingt  ans,  il  sera 
ajouté,  quand  il  se  retirera,  cent  francs  de  plus  par  an  à 
chacune  des  pensions  dont  il  est  parlé  à  l'article  précé- 
dent. 

15.  —  Un  sociétaire  qu'un  accident  ayant  pour  cause 
immédiate  le  service  de  notre  Théâtre-Français  ou  des 
théâtres  de  nos  palais,  obligerait  de  se  retirer  avant  d'a- 
voir accompli  ses  vingt  ans,  recevra  en  entier  les  pensions 
fixées  par  l'article  13. 

16.  —  En  cas  d'incapacité  de  servir  provenant  d'une  autre 
cause  que  celle  énoncée  en  l'article  15,  le  sociétaire 
pourra,  même  avant  ses  vingt  ans  de  service,  être  mis  en 
retraite  par  ordre  du  surintendant. 

En  ce  cas,  et  s'il  a  plus  de  dix  ans  de  service,  il  aura 
droit  à  une  pension  sur  les  fonds  du  gouvernement,  et 
une  sur  les  fonds  des  sociétaires  :  chacune  de  ces  pen- 
sions sera  de  cent  francs  par  année  de  service,  s'il  était 
à  part  entière;  de  soixante-quinze  francs,  s'il  était  à  trois 
quarts  de  part,  et  ainsi  dans  les  proportions  de  sa  part 
dans  les  bénéfices  de  la  société. 

17.  —  Si  le  sociétaire  a  moins  de  dix  ans  do  service, 
le  surintendant  pourra  nous  proposer  la  pension  qu'il 
croira  convenable  de  lui  accorder,  selon  les  services 
rendus  à  la  société  et  les  circonstances  où  il  se  trouvera. 

18.  —  Toutes  ces  pensions  seront  accordées  par  déci- 
sions rendues  en  notre  conseil  d'Etat,  sur  l'avis  du  comité, 
comme  il  a  été  statué  pour  notre  académie  impériale  de 
musique  par  notre  décret  du  20  janvier  1811. 

§  2.  —  Des  moyens  de  payement  des  pensions. 

19.  —  Les  pensions  accordées  sur  le  fonds  de  cent 
mille  francs  de  rentes  accordé  par  nous  à  notre  Théâtre- 


—  311    — 

Français  seront  acquittées,  tous  les  trois  mois,  sur  les 
fonds  qui  seront  touchés  à  la  caisse  d'amortissement. 

20.  —  En  cas  d'insuffisance,  il  sera  pourvu  avec  la  part 
mise  en  réserve  pour  les  besoins  imprévus. 

21.  —  Pour  assurer  le  payement  des  pensions  accordées 
sur  les  fonds  particuliers  de  la  société,  il  sera  prélevé, 
chaque  année,  et  chaque  mois,  sur  la  recette  générale, 
une  somme  de  cinquante  mille  francs. 

22.  —  Cette  somme  sera  versée  entre  les  mains  du  notaire 
du  Théâtre-Français,  et  placée  par  lui  à  mesure  pour  le 
compte  de  la  société,  selon  les  règles  prescrites  par  l'ar- 
ticle 32. 

23.  —  Aucun  sociétaire  ne  peut  engager  ni  aliéner  la 
portion  pour  laquelle  il  contribue  à  cette  rente. 

24.  —  A  la  retraite  de  chaque  sociétaire  ou  à  son  décès, 
le  remboursement  du  capital  de  cette  retenue  sera  fait  à 
chaque  sociétaire  ou  à  ses  héritiers,  au  prorata  de  ce 
qu'il  y  aura  contribué. 

25.  —  Tout  sociétaire  qui  quittera  le  théâtre  sans  en 
avoir  obtenu  la  permission  du  surintendant,  perdra  la 
somme  pour  laquelle  il  aura  contribué,  et  n'aura  droit  à 
aucune  pension. 

26.  —  Jusqu'à  ce  qu'au  moyen  des  dispositions  ci-des- 
sus une  rente  de  cinquante  mille  francs  soit  entièrement 
constituée,  les  pensions  de  la  société  seront  payées,  tant 
sur  les  intérêts  des  fonds  mis  en  réserve,  que  sur  les 
recettes  générales  de  chaque  mois. 

27.  —  Quand  la  rente  sera  constituée ,  s'il  y  a  de 
l'excédant  après  le  payement  annuel  des  pensions,  il  en 
sera  disposé  pour  l'avantage  de  la  société,  avec  l'autori- 
sation du  surintendant. 


—  312  — 

SECTION  III.    —  DE  LA  RETRAITE  DES  ACTEURS  AUX 
APPOINTEMENTS  ET  EMPLOYÉS. 

28.  —  Après  vingt  ans  ou  plus  de  service  non  inter- 
rompus par  un  acteur  ou  une  actrice  aux  appointements  ; 
après  dix  ans  de  service  seulement  en  cas  d'infirmités  ; 
enfin  en  cas  d'accidents,  comme  il  est  dit  pour  les  socié- 
taires, article  15,  le  surintendant  pourra  nous  proposer 
d'accorder,  moitié  sur  le  fonds  de  cent  mille  francs,  moi- 
tié sur  celui  de  la  société,  une  pension  laquelle,  tout 
compris,  ne  pourra  excéder  la  moitié  du  traitement  dont 
l'acteur  ou  l'actrice  aura  joui  les  trois  dernières  années 
de  son  service. 

29.  —  Le  commissaire  impérial  pourra  aussi  obtenir 
une  retraite  ou  pension  d'après  les  règles  établies  en 
l'article  28  ;  mais  elle  sera  payée  en  entier  sur  le  fonds 
de  cent  mille  francs. 


TITRE  III 

SECTION  I".  —  DE  l'administration  DES  INTERETS 
DE  LA  SOCIÉTÉ. 

30.  —  Un  comité,  composé  de  six  hommes,  membres 
de  la  société,  présidé  par  le  commissaire  impérial,  et 
ayant  un  secrétaire  pour  tenir  registre  des  délibérations, 
sera  chargé  de  la  régie  et  administration  des  intérêts  de 
la  société. 

Le  surintendant  nommera,  chaque  année,  les  mem- 
bres de  ce  comité. 

Ils  seront  indéfiniment  rééligibles. 

Trois  de  ces  membres  seront  chargés  de  l'expédition 
de  ses  résolutions. 

31.  —  Le  surintendant  pourra  les  révoquer  et  rem- 
placer à  volonté. 


—  313  — 

32.  —  Les  fonctions  de  ce  comité  seront  particulière- 
ment : 

1"  De  dresser,  chaque  année,  le  budget  ou  état  pré- 
sumé des  dépenses  de  tout  genre,  de  le  soumettre  à 
l'examen  de  l'assemblée  générale  des  sociétaires  et  à 
l'approbation  du  surintendant  ; 

2"  D'ordonner  et  faire  acquitter,  dans  les  limites  por- 
tées au  budget  de  chaque  nature  de  dépenses,  celles  qui 
seront  nécessaires  pour  toutes  les  parties  du  service  ;  à 
l'effet  de  quoi,  un  de  ses  membres  sera  proposé  à  la 
signature  des  ordres  de  fourniture  ou  de  travail,  et  des 
mandats  de  payement  ; 

3"  De  la  passation  de  tous  marchés,  obligations  pour 
le  service ,  ou  actes  pour  la  société  ; 

4"  D'inspecter,  régler  et  ordonner  dans  toutes  les  par- 
ties de  la  salle,  du  théâtre,  des  magasins,  etc.  ; 

5»  De  vérifier  les  recettes,  d'inspecter  la  caisse,  et  de 
faire  effectuer  le  payement  des  parts,  traitements,  pen- 
sions ou  sommes  mises  en  réserve,  selon  le  présent 
règlement  ; 

6»  D'exercer  pour  tous  recouvrements,  ou  tout  autre 
cas,  tant  en  demandant  qu'en  défendant,  toutes  les 
actions  et  droits  de  la  société ,  après  avoir ,  toutefois, 
pris  l'avis  de  l'assemblée  générale,  et  l'autorisation  du 
surintendant. 


SECTION  II. — DES  DÉPENSES,   PAYEMENTS,  ET  DE  LA 
COMPTABILITÉ. 

33.  —Le  caissier  sera  nommé  par  le  comité,  et  sou- 
mis à  l'approbation  du  surintendant. 

Il  fournira,  en  immeuble,  un  cautionnement  de  soixante 
mille  francs,  dont  les  titres  seront  vérifiés  par  le  notaire 
du  théâtre,  qui  fera  faire  tous  les  actes  conservatoires  au 
nom  de  la  société. 

34.  —  A  la  fin  de  chaque  mois,  les  états  de  recette  et 

27 


—  314  — 

dépense  seront  arrêtés  par  le  comité,  et  approuvés  par  le 
commissaire  impérial. 

35.  —  D'après  cet  arrêté  et  cette  approbation  seront 
prélevés  sur  la  recette ,  d'abord  les  droits  d'auteurs , 
ensuite  toutes  les  dépenses  :  l"  pour  appointements 
d'acteurs ,  traitements  d'employés  ou  gagistes  ;  2»  la 
somme,  prescrite  pour  les  fonds  des  pensions  de  la 
société  ;  3"  le  montant  des  mémoires  ,  tant  pour  dé- 
penses courantes  que  fournitures  extraordinaires. 

36.  —  Le  reste  sera  partagé ,  conformément  aux  arti- 
cles 6,  7,  8,  9  et  10. 

37.  —  Le  caissier  touchera,  tous  les  trois  mois,  à  la 
caisse  d'amortissement ,  le  quart  des  cent  mille  francs 
de  rente  affectés  au  Théâtre-Français,  et  soldera,  avec 
ces  vingt-cinq  mille  francs,  et,  au  besoin,  avec  le  pro- 
duit de  la  part  dont  il  est  parlé  à  l'article  7 ,  sur  les 
états  dressés  par  le  commissaire  impérial,  et  arrêtés  par 
le  surintendant  :  [1»  les  pensions  des  acteurs  retirés  ou 
autres  pensionnaires;  2" les  indemnités  pour  supplément 
d'appointements  accordés  aux  acteurs;  3»  le  traitement 
du  commissaire  impérial;  4"  le  loyer  de  la  salle*. 

38.  —  A  la  fln  de  chaque  année,  le  caissier  dressera  le 
compte  des  recettes  et  dépenses,  pour  les  fonds  de  la 
société. 

39.  —  Ce  compte  sera  remis  au  comité ,  qui  l'examinera 
et  donnera  son  avis. 

Il  sera  présenté  ensuite  à  l'assemblée  générale  des 
sociétaires,  qui  pourra  nommer  une  commission  de  trois 
de  ses  membres  pour  le  revoir  et  y  faire  des  observa- 
tions ,  s'il  y  a  lieu  ,  dans  une  autre  assemblée  générale. 

Enfin,  le  compte  sera  soumis  au  surintendant,  qui 
l'approuvera  ,  s'il  y  a  lieu. 

40.  —  Le  caissier  dressera  également  le  compte  des 
cent  mille  francs  accordés  par  le  gouvernement,  et  des 
parts  mises  à  la  disposition  du  surintendant.  Ce  compte 

*  La  salle  appartient  maintenant  à  l'État. 


—  315  — 

sera  vis6  par  le  commissaire  impérial,  et   arrêté  parle 
surintendant. 

41.  —Sur  la  part  réservée  aux  besoins  imprévus,  il 
pourra  être  accordé  par  le  surintendant ,  aux  acteurs  ou 
actrices  qui  se  trouveraient  chargés  de  dépenses  trop 
considérables  de  costumes  ou  de  toilettes ,  une  autorisa- 
tion pour  se  faire  faire,  par  le  magasin,  des  habits  pour 
jouer  un  ou  plusieurs  rôles. 

SECTION  m.  —  DES  ASSEMBLÉES   GÉNÉRALES. 

42.  —  L'assemblée  générale  de  tous  les  sociétaires  est 
convoquée  nécessairement  par  le  comité,  et  a  lieu  pour 
les  objets  suivants  : 

1"  Au  plus  tard  dans  la  dernière  semaine  du  dernier 
mois  de  l'année ,  pour  examiner  et  donner  son  avis  sur 
le  budget  de  Tannée  suivante,-  conformément  au  para- 
graphe 1er  t]e  l'article  32; 

2"  Au  plus  tard  la  dernière  semaine  du  premier  mois 
de  chaque  année,  pour  examiner  le  compte  de  l'année 
précédente ,  et  ensuite  pour  entendre  le  rapport  de  la 
commission,  s'il  y  en  a  eu  une  de  nommée. 

43.  —  L'assemblée  générale  doit  être,  en  outre,  convo- 
quée par  le  comité  toutes  les  fois  qu'il  y  a  lieu  de  pla- 
cement de  fonds  ,  actions  à  soutenir ,  en  défendant  ou 
demandant,  dépenses  à  faire,  excédant  celles  autorisées 
par  le  budget  :  cas  auxquels  l'assemblée  générale  doit 
donner  son  avis,  après  quoi  le  surintendant  décide,  après 
avoir  vu  l'avis  du  conseil  dont  il  est  parlé  au  titre  VIL 

44.  —  L'assemblée  générale  peut,  au  surplus,  être 
convoquée  par  ordre  du  surintendant,  quand  il  juge  né- 
cessaire de  la  consulter,  ou  avec  son  autorisation  ,  si  le 
comité  la  demande,  pour  tous  les  cas  extraordinaires  et 
imprévus. 


—  316  — 
TITRE  IV 

DE   l'administration   THÉÂTRALE. 

SECTION  l""^.  — DISPOSITIONS    GÉNÉRALES. 

45.  —  Le  comité,  établi  par  l'article  30,  sera  également 
chargé  de  tout  ce  qui  concerne  l'administration  théâtrale, 
la  formation  des  répertoires ,  l'exécution  des  ordres  de 
débuts,  la  réception  des  pièces  nouvelles,  sous  la  sur- 
veillance du  commissaire  impérial  et  l'autorité  du  surin- 
tendant. 

SECTION    II.    —  DES    RÉPERTOIRES. 

g  yer  _  De  la  distribution  des  emplois. 

46.— Le  surintendant  déterminera,  aussitôt  la  publica- 
tion du  présent  règlement,  la  distribution  exacte  des 
différents  emplois. 

Il  fera  dresser,  en  conséquence,  un  état  général  de 
toutes  les  pièces  soit  sues,  soit  à  remettre,  avec  les  noms 
des  acteurs  et  actrices  sociétaires  qui  doivent  jouer  en 
premier,  en  double  et  en  troisième,  les  rôles  de  chacune 
de  ces  pièces,  selon  leur  emploi  et  leur  ancienneté,  afin 
qu'il  n'y  ait  plus  aucune  contestation  à  cet  égard. 

47.  — Nul  acteur  ou  actrice  ne  pourra  tenir  en  premier 
deux  emplois  différents,  sans  une  autorisation  spéciale 
du  surintendant,  qui  ne  l'accordera  que  rarement,  et 
pour  de  puissants  motifs. 

48.  —  Si  un  acteur  ou  actrice,  tenant  un  emploi  en 
chef,  veut  jouer  dans  un  autre;  par  exemple,  si,  tenant 
un  emploi  tragique,  il  veut  jouer  dans  la  comédie,  ou, 
si,  jouant  les  rôles  de  jeune  premier,  il  veut  jouer  un 
autre  emploi,  il  ne  pourra  primer  celui  qui  tenait  l'em- 
ploi en  chef  auparavant  ;  mais  il  tiendra  ledit  emploi  en 


—  317  — 

second-,  quand  môme  il  serait  plus  ancien  que  son  cama- 
rade. 

Notre  surintendant  pourra  seulement  l'autoriser  à  jouer 
les  rôles  du  nouvel  emploi  qu'il  voudra  prendre,  alter- 
nativement avec  celui  qui  les  jouait  en  chef  ou  en  pre- 
mier. 

§  2.  —  De  la  formation  du  répertoire. 

49.  —  Le  répertoire  sera  formé  dans  le  comité  établi 
par  l'article  30,  auquel  seront  adjointes,  pour  cet  objet  seu- 
lement, deux  femmes  sociétaires,  conformément  à  l'arrêt 
du  conseil,  du  9  décembre  1780. 

50.  —  Les  répertoires  seront  faits  de  manière  que 
chaque  rôle  ait  un  second  ou  double  désigné,  qui  puisse 
jouer  à  défaut  de  l'acteur  en  premier,  s'il  a  des  excuses 
valables,  et  sans  que,  pour  cause  de  l'absence  d'un  ou 
plusieurs  acteurs  en  premier,  la  pièce  puisse  être  changée 
ou  sa  représentation  retardée. 

51.  —  Pour  veiller  à  l'exécution  du  répertoire,  deux 
sociétaires  seront  adjoints  au  comité  sous  le  titre  de  semai- 
niers \  chaque  sociétaire  sera  semainier  à  son  tour. 

52.  —  Si  un  double  étant  chargé  d'un  rôle  par  le  réper- 
toire tombe  malade,  le  chef,  se  portant  bien,  sera  tenu 
de  le  jouer,   sur  l'avis  que  lui  en  donnera  le  semainier. 

53.  —  Un  acteur  en  chef  ne  pourra  refuser  de  jouer  ni 
abandonner  tout  à  fait  à  son  double  aucun  des  premiers 
rôles  de  son  emploi;  il  les  jouera,  bons  ou  mauvais, 
quand  il  sera  appelé  par  le  répertoire. 

54.  —  Aucun  acteur  en  chef  ne  pourra  se  réserver  un 
ou  plusieurs  rôles  de  son  emploi.  Le  comité  prendra  les 
mesures  nécessaires  pour  que  les  doubles  soient  entendus 
par  le  public  dans  les  principaux  rôles  de  leurs  emplois 
respectifs  trois  ou  quatre  fois  par  mois. 

11  veillera  également  à  ce  que  les  acteurs  à  l'essai  soient 
mis  à  portée  d'exercer  leurs  talents  et  de  faire  juger 
leurs  progrès. 

27. 


—  318  — 

Les  acteurs  jouant  les  rôles  en  second  pourront  récla- 
mer en  cas  d'inexécution  du  présent  article  ;  et  le  surin- 
tendant donnera  des  ordres  sans  délai  pour  que  le  comité 
s'y  conforme,  sous  peine,  envers  l'auteur  en  chef  apparent 
et  chacun  des  membres  du  comité  qui  n'y  ont  pas 
pourvu,  d'une  amende  de  trois  cents  francs. 

Notre  commission  près  le  théâtre  sera  responsable  de 
l'exécution  du  présent  article,  s'il  n'a  été  dressé  procès-ver- 
bal des  contraventions,  à  l'effet  d'y  faire  pourvoir  par 
le  surintendant,  et  de  faire  payer  les  amendes. 

55.  —  Nos  comédiens  seront  tenus  de  mettre  tous  les 
mois  un  grand  ouvrage,  ou,  du  moins,  deux  petits 
ouvrages  nouveaux  ou  remis. 

Dans  le  nombre  de  ces  pièces  seront  des  pièces  d'au- 
teurs vivants. 

Il  est  enjoint  au  comité  et  au  surintendant  de  tenir  la 
main  à  l'exécution  de  cet  article. 

56.  —  Les  assemblées  des  samedis  de  chaque  semaine 
continueront  d'avoir  lieu;  et  tous  les  acteurs  seront  tenus 
de  s'y  trouver  pour  prendre  communication  du  répertoire. 

11  continuera  d'être  délivré  des  jetons  aux  acteurs 
présents. 

57.  —  Tous  acteurs  ou  actrices  pourront  faire  des 
observations,  et  demander  des  changements  au  réper- 
toire pour  des  motifs  valables  sur  lesquels  il  sera  statué 
provisoirement  par  le  commissaire  impérial,  et  définiti- 
vement par  le  surintendant. 

58.  —  Le  répertoire  servira,  la  première  fois,  pour 
quinze  jours.  Il  en  sera  envoyé  copie  au  préfet  de  police. 

Le  samedi  d'après,  se  fera  celui  de  la  semaine  ensui- 
vant, et  ainsi  successivement. 

59.  —  Quand  le  répertoire  aura  été  réglé,  chacun  sera 
tenu  de  jouer  le  rôle  pour  lequel  il  aura  été  inscrit,  à 
moins  de  causes  légitimes  approuvées  par  le  comité  présidé 
par  le  commissaire  impérial,  et  dont  il  sera  rendu  compte 
au  surintendant,  sous  peine  de  cent  cinquante  francs 
d'amende. 


-    319  — 

60.  —  Si  un  acteur,  ayanl  fait  changer  la  représentation 
pour  cause  de  maladie,  est  aperçu  dans  une  promenade, 
un  spectacle,  ou  s'il  sort  de  chez  lui,  il  sera  mis  à  une 
amende  de  trois  cents  francs. 


SECTION  III.  —  DES  DEBUTS. 

61.  —  Le  surintendant  donnera  seul  les  ordres  de  début 
sur  notre  Théâtre-Français.  Les  débuts  n'auront  pas  lieu 
du  1er  novembre  jusqu'au  15  avril. 

62.  —  Ces  ordres  seront  présentés  au  comité,  qui  sera 
tenu  de  les  enregistrer  et  de  mettre  au  premier  répertoire 
les  trois  pièces  que  les  débutants  demanderont. 

63.  —  Le  surintendant  pourra  appeler,  pour  débuter, 

les  élèves  do  notre  Conservatoire,  ceux  de  maîtres  parti- 
culiers, ou  les  acteurs  des  autres  théâtres  de  notre  empire  ; 
auquel  cas,  leurs  engagements  seront  suspendus  et  rom- 
pus, s'ils  sont  admis  à  l'essai. 

64.  —  Les  acteurs  et  actrices  qui  auront  des  rôles  dans 
ces  pièces,  ne  pourront  refuser  de  les  jouer,  sous  peine 
de  cent  cinquante  francs  d'amende. 

65.  —  On  sera  obligé  indépendamment  à  une  répétition 
entière  pour  chaque  pièce  où  les  débutants  devront  jouer, 
sous  peine  de  vingt-cinq  francs  d'amende  pour  chaque 
absent. 

66.  —  Le  comité  proposera  ensuite  d'autres  rôles  à 
jouer  par  le  débutant  ;  et  le  surintendant  en  déterminera 
trois  que  le  débutant  sera  tenu  de  jouer  après  des  répé- 
titions particulières  et  une  répétition  générale,  comme  il 
est  dit  à  l'article  65. 

67.  —  Les  débutants  qui  auront  eu  des  succès  et  an- 
noncé des  talents,  seront  reçus  à  l'essai  au  moins  pour 
un  an,  et  ensuite  comme  sociétaires  par  le  surintendant, 
selon  qu'il  le  jugera  convenable. 


—  ^20  — 

TITRE  V 

DES  PIÈCES  NOUVELLES   ET  DES  AUTEURS. 

68.  —  La  lecture  des  pièces  nouvelles  se  fera  devant  un 
conseil  composé  de  neuf  personnes  choisies  parmi  les 
plus  anciens  sociétaires ,  par  le  surintendant,  qui  nom- 
mera en  outre  trois  suppléants  pour  que  le  nombre  des 
membres  du  comité  soit  toujours  complet. 

69.  —  L'admission  aura  lieu  à  la  pluralité  des  voix. 

70.  —  Si  une  partie  des  voix  est  pour  le  renvoi  à  cor- 
rection, on  refait  un  tour  de  scrutin  sur  la  question  du 
renvoi,  et  on  vote  par  Oui  et  Noti. 

71.  —  S'il  n'y  a  que  quatre  voix  pour  le  renvoi  à  cor- 
rection, la  pièce  est  reçue. 

72.  —  La  part  d'auteur  dans  le  produit  des  recettes,  le 
tiers  prélevé  pour  les  frais,  est  du  huitième  pour  une 
pièce  en  cinq  ou  quatre  actes;  du  douzième  pour  une 
pièce  en  trois  actes,  et  du  seizième  pour  une  pièce  en  un 
et  deux  actes  :  cependant  les  auteurs  et  les  comédiens 
peuvent  faire  toute  autre  convention  de  gré  à  gré. 

73.  —  L'auteur  jouit  de  ses  entrées  du  moment  où  sa 
pièce  est  mise  en  répétition,  et  les  conserve  trois  ans 
après  la  première  représentation,  pour  un  ouvrage  en 
cinq  ou  quatre  actes,  deux  ans  pour  un  ouvrage  en  trois 
actes,  un  an  pour  une  pièce  en  un  et  deux  actes.  L'au- 
teur de  deux  pièces  en  cinq  et  en  quatre  actes,  ou  de 
trois  pièces  en  trois  actes,  ou  de  quatre  pièces  en  un  acte, 
restées  au  théâtre,  a  ses  entrées  sa  vie  durant. 

TITRE  VI 

DE     LA     POLICE. 

74.  —  La  présidence  et  la  police  des  assemblées,  soit 
générales,  soit  des  divers  comités,  sont  exercées  par  le 
commissaire  impérial. 


—  321  — 

75.  —  Tout  sujet  qui  manque  à  la  subordination  envers 
ses  supérieurs;  qui,  sans  excuses  jugées  valables,  fait 
changer  le  spectacle  indiqué  sur  le  répertoire,  ou  refuse 
de  jouer  soit  un  rôle  de  son  emploi,  soit  tout  autre  rôle 
qui  peut  lui  être  distribué  pour  le  service  des  théâtres  de 
nos  palais,  ou  qui  fait  manquer  le  service  en  no  se  trou- 
vant pas  à  son  poste  à  l'heure  fixée,  est  condamné,  sui- 
vant la  gravité  des  cas,  à  l'une  des  peines  suivantes  : 

76.  —  Ces  peines  sont  les  amendes,  l'exclusion  des 
assemblées  générales  des  sociétaires,  et  du  comité  d'ad- 
ministration; l'expulsion  momentanée  ou  définitive  du 
théâtre,  la  perte  de  la  pension  et  les  arrêts. 

77.  —  Les  amendes  au-dessous  de  vingt-cinq  francs 
seront  prononcées  par  le  comité,  présidé  par  le  commis- 
saire impérial. 

L'exclusion  des  assemblées  générales  et  du  comité 
d'administration  peut  l'être  de  la  même  manière;  mais 
le  commissaire  impérial  est  tenu  de  rendre  compte  des 
motifs  au  surintendant. 

Le  commissaire  impérial  qui  aura  requis  le  comité' 
d'infliger  une   peine,  en   instruira,  en  cas  de  refus,  le 
surintendant  qui  prononcera. 

78.  —  Les  amendes  au-dessus  de  vingt-cinq  francs  et 
les  autres  punitions  sont  infligées  par  le  surintendant, 
sur  le  rapport  motivé  du  commissaire  impérial. 

L'expulsion  définitive  n'aura  lieu  que  dans  les  cas 
graves,  et  après  avoir  pris  l'avis  du  comité. 

79.  —  Aucun  sujet  ne  peut  s'absenter  sans  la  permis- 
sion du  surintendant. 

80.  —  Les  congés  sont  délivrés  par  le  surintendant,  qui 
n'en  peut  pas  accorder  plus  de  deux  à  la  fois,  ni  pour 
plus  do  deux  mois  :  ils  ne  peuvent  avoir  lieu  que  depuis 
le  1er  mai  jusqu'au  1er  novembre. 

81.  —  Tout  sujet  qui,  ayant  obtenu  un  congé,  on  outre- 
liasse  le  terme,  paye  une  amende  égale  au  produit  de 
sa  part,  pendant  tout  le  temps  qu'il  aura  été  absent  du 

L         re. 


—  322  — 

82.  —  Lorsqu'un  sujet,  après  dix  années  de  service, 
aura  réitéré  pendant  une  année  la  demande  de  sa  retraite, 
et  qu'il  déclarera  qu'il  est  dans  l'intention  de  ne  plus 
jouer  sur  aucun  théâtre ,  ni  français ,  ni  étranger ,  sa 
retraite  ne  pourra  lui  être  refusée  ;  mais  il  n'aura  droit 
à  aucune  pension,  ni  à  retirer  sa  part  du  fonds  annuel 
de  cinquante  mille  francs. 


TITRE  VU 

DISP03ITI0ÎJ8  GÉNÉRALES. 

83.  —  Les  comédiens  français  ne  pourront  se  dispenser 
de  donner  tous  les  jours  spectacle,  sans  une  autorisation 
spéciale  du  surintendant,  sous  peine  de  payer,  pour 
chaque  clôture,  une  somme  de  cinq  cents  francs,  qui  sera 
versée  dans  la  caisse  des  pauvres,  à  la  diligence  du  préfet 
de  pohce.  "  * 

84.  —  Tout  sociétaire  ayant  trente  années  de  service 
effectif  pourra  obtenir  une  représentation  à  son  bénéfice, 
lors  de  sa  retraite  :  cette  représentation  ne  pourra  avoir 
lieu  que  sur  le  Théâtre-Français ,  conformément  à  notre 
décret  du  29  juillet  1807. 

85.  —  Tout  sujet  retiré  du  Théâtre-Français  ne  pourra 
reparaître  sur  aucun  théâtre,  soit  à  Paris,  soit  des  dépar- 
tements, sans  la  permission  du  surintendant. 

86.  —  Toutes  les  affaires  contentiouses  seront  soumises 
à  l'examen  d'un  conseil  de  jurisconsultes,  et  on  ne  pourra 
faire  aucune  poursuite  judiciaire  au  nom  de  la  société, 
sans  avoir  pris  l'avis  du  conseil- 
Ce  conseil  restera  composé  ainsi  qu'il  l'est  aujourd'hui, 

et  sera  réduit  à  l'avenir,  par  mort  ou  démission,  au 
nombre  de  trois  jurisconsultes,  deux  avoués,  et  un  notaire 
du  théâtre. 

En  cas  de  vacances,  la  nomination  se  fera  par  le  comité, 
avec  l'agrément  du  surintendant. 


—  323   — 

87.  —  Le  surintendant  fera  les  règlements  qu'il  jugera 
nécessaires  pour  toutes  les  parties  de  l'administration 
intérieure. 

88.  —  Les  décrets  des  29  juillet  çt  1er  novembre  1807 
sont  maintenus,  en  tout  ce  qui  n'est  pas  contraire  aux 
dispositions  ci-dessus.  (V.  ces  décrets  à  leurs  dates, 
page  345.) 

TlTRE  VIII 

DES  ÉLÈVES  DU  THÉÂTRE-FRANÇAIS. 

§  1er.  —  Nombre,  nomination,  instruction  et  entretien 
des  élèves. 

80.  —  Il  y  aura,  à  notre  Conservatoire  impérial,  dix-huit 
élèves  pour  notre  Théâtre-Français,  neuf  de  chaque  sexe. 

90.  —  Ils  seront  désignés  par  notre  ministre  de  l'inté- 
rieur :  ils  seront  âgés  au  moins  de  quinze  ans. 

91.  —  Ils  seront  traités  au  Conservatoire  comme  les 
autres  pensionnaires  qui  y  sont  admis  pour  le  chant  et  la 
tragédie  lyrique. 

92.  —  Ils  pourront  suivre  les  classes  de  musique  ;  mais 
ils  seront  plus  spécialement  appliqués  à  l'art  de  la  décla- 
mation, et  suivront  exactement  les  cours  des  professeurs, 
selon  le  genre  auquel  ils  seront  destinés. 

93.  —  A  cet  effet,  indépendamment  des  professeurs,  il 
y  aura  pour  l'art  dramatique  deux  répétiteurs  d'un  genre 
différent,  lesquels  feront  répéter  et  travailler  les  élèves, 
chaque  jour,  dans  les  intervalles  des  classes,  à  des  heures 
qui  seront  fixées. 

94.  —  Il  y  aura,  en  outre,  un  professeur  de  grammaire, 
d'histoire  et  de  mythologie  appliquées  à  l'art  dramatique, 
lequel  enseignera  spécialement  les  élèves  destinés  au 
Théâtre-P''rançais. 

93.  —  Les  élèves  seront  examinés  tous  les  ans  par  les 
professeurs  et  le  directeur  du  Conservatoire  ;  et  il  sera 


—  324  — 

rendu  compte  du  résultat  à  notre  ministre  de  l'intérieur 
et  au  surintendant  des  théâtres. 

96.  —  Les  élèves  qui  ne  donneraient  pas  d'espérances 
ne  continueront  pasjeurs  cours,  et  ils  seront  remplacés. 

97.  —  Ceux  qui  ne  seraient  pas  encore  capables  de 
débuter  sur  notre  Théâtre-Français  pourront,  avec  la 
permission  du  surintendant,  s'engager  pour  un  temps  au 
théâtre  de  l'Odéon,  ou  dans  les  troupes  des  départements. 

98.  —  Ceux  qui  seront  jugés  capables  de  débuter  pour- 
ront recevoir  du  surintendant  un  ordre  de  début,  et  être, 
selon  les  moyens,  mis  à  l'essai  pendant  au  moins  un  an, 
et  ensuite  admis  comme  sociétaires,  comme  il  est  dit 
article  67. 

§  2.  —  Des  dépenses  pour  les  élèves  de  l'art  dramatique. 

99.  —  La  dépense  pour  chacun  des  élèves  est  fixée  à 
1,100  francs  ; 

Le  traitement,  pour  chacun   des  répétiteurs,  à  2,200 
francs  ; 
Le  traitement  de  professeur,  à  3,000  francs. 

100.  —  En  conséquence,  notre  ministre  de  l'intérieur 
disposera,  sur  le  fond  des  dépenses  imprévues  de  son 
ministère,  de  26,800  francs  en  sus  de  celle  allouée  pour 
notre  Conservatoire  impérial  de  musique. 

101.  —  Nos  ministres  de  la  police,  de  l'intérieur,  des 
finances,  du  Trésor,  etc.,  etc.,  sont  chargés  de  l'exécution 
du  présent  décret. 

Une  ordonnance  du  29  août  i847  modifia  le  décret 
de  Moscou  dans  quelques-unes  de  ses  parties  et  devint 
la  charte  du  Théâtre -Français.  Celte  ordonnance  fut 
elle-même  annulée  par  la  loi  du  27  avril  4  850  que 
nous  donnons  ci-après.  C'est  la  loi  organique  actuelle 
du  Théâtre-Français.  Elle  reproduit  en  grande  partie 


—  325  — 

te  décret  de  1812  et  s'y  réfère  pour  les  articles  qui  ne 
se  trouvent  pas  modifiées. 


27  AVRiL-11  MAI  1850.  —  Loi  qui  règle  l'organi- 
sation du  Théâtre-Français. 

TITRE  PREMIER. 

DE  l'administration  DU   THEATRE-FRANÇAIS. 

§  /«'■  —  De  l'administration. 

Article  I^r.  —  Le  Théâtre-Français  est  placé  sous  la 
direction  d'un  administrateur  nommé  par  le  ministre  de 
l'intérieur. 

Art.  2.  —  L'administrateur  du  Théâtre-Français  est 
chargé  :  l»  de  présenter,  chaque  année,  à  l'approbation 
du  ministre  de  l'intérieur  le  budget  du  théâtre,  dressé  par 
le  comité  d'administration  et  soumis  à  l'examen  de  l'as- 
semblée générale  des  sociétaires  ;  2°  d'ordonner,  dans  les 
limites  portées  au  budget  pour  chaque  nature  de 
dépenses,  celles  qui  seront  nécessaires  pour  toutes  les 
parties  du  service,]  et  de  signer,  à  cet  effet,  tous  ordres 
de  fournitures  et  mandats  de  payements;  3°  dépasser  des 
marchés,  souscrire  les  obligations  pour  le  service,  et 
signer  tous  les  actes  dans  l'mtérét  de  la  société,  confor- 
mément aux  délibérations  du  comité  ;  ceux  de  ces  actes 
dont  la  durée  excédera  une  année  devront  être  approuvés 
par  le  ministre  de  l'intérieur  ;  4°  d'exercer,  tant  en  deman- 
dant qu'en  défendant,  conformément  aux  délibérations 
du  comité,  toutes  les  actions  et  tous  les  droits  des  comé- 
diens, après  avoir  pris  l'avis  du  conseil  de  la  comédie, 
de  l'assemblée  générale,  et  l'autorisation  du  ministre  ;  de 
faire  tous  actes  conservatoires  et  tous  recouvrements  ; 
50  de  faire  des  engagements  d'acteurs  pensionnaires  dont 

28 


—  326  — 

la  durée  n'excède  pas  une  année  ;  60  d'inspecter,  régler 
et  ordonner  dans  toutes  les  parties  de  la  salle  et  des 
magasins,  et  de  déléguer  à  cet  effet,  s'il  le  juge  néces- 
saire, un  ou  plusieurs  membres  du  comité  d'administra- 
tion ;  7"  de  prendre  toutes  les  mesures  relatives  au 
service  intérieur,  aux  entrées,  loges  et  billets  de  faveur, 
à  la  convocation  et  à  la  tenue  des  commîtes  et  des  assemblées 
générales,  aux  affiches  et  annonces  dans  les  journaux  ; 
8"  de  distribuer  les  rôles,  sauf  les  droits  d'auteurs,  et 
sans  pouvoir  imposer  aux  sociétaires  des  rôles  en  dehors 
de  leurs  emplois  ;  9°  de  statuer  définitivement  sur  la 
formation  du  répertoire  et  sur  les  débuts  ;  10"  de  donner 
les  tours  de  faveur,  lesquels  ne  pourront  être  accordés 
à  plus  d'un  ouvrage  sur  deux  reçus  ;  11"  de  donner  les 
congés,  en  se  conformant,  pour  leur  répartition,  aux  dis- 
positions du  règlement,  et  sans  pouvoir  en  accorder  plus 
de  six  mois  à  l'avance,  ni  pour  des  époques  périodiques; 
12"  de  prononcer  les  amendes,  dans  les  limites  du  maxi- 
mum fixé  par  le  règlement.  Il  exerce,  en  outre,  les  fonc- 
tions attribuées  par  le  décret  du  15  octobre  1812  au 
commissaire  du  Théâtre-Français. 

Art.  3.  —  L'administrateur,  après  avoir  pris  l'avis  du 
comité  d'administration,  propose  au  ministre  de  l'inté- 
rieur :  1"  les  admissions  de  sociétaires  ;  2"  les  accroisse- 
ments successifs  de  la  part  d'intérêt  social,  en  ayant 
égard  tant  à  la  durée  et  à  l'importance  des  services 
qu'à  la  nature  de  l'emploi  ;  ces  augmentations  pourront 
être,  à  l'avenir,  d'un  douzième  de  la  part  sociale;  3"  les 
engagements  d'acteur  pensionnaire  dont  la  durée  excède 
une  année  ;  4°  les  décisions  relatives  au  partage  des 
bénéfices  et  à  la  fixation  des  allocations  annuelles 
attribuées  aux  sociétaires  ;  5"  les  règlements  relatifs  aux 
congés,  aux  amendes  et  autres  peines  disciplinaires,  aux 
feux  ;  à  la  composition  du  comité  de  lecture  ;  à  la  nomi- 
nation de  ses  membres  et  à  la  tenue  de  ses  séances. 

AiiT.  4.  —  L'administration  donne  son  avis  au  ministre 
sur  tous  les  objets  non  compris  dans  les  articles  précé- 
dents, concernant  le  Théâtre-Français. 


—  327  — 

Art.  5.  —  Toutes  les  personnes  attachées  au  service  dt| 
théâtre,  le  caissier  et  le  contrôleur  général  exceptés,  sont 
à  la  nomination  de  l'administrateur. 

Art.  6.  —  L'administrateur  présente  au  ministre  de 
l'intérieur,  le  l^r  avril  et  le  l'^''  octobre  de  chaque  année, 
un  rapport  détaillé  sur  sa  gestion,  dans  lequel  il  fait 
connaître  les  pièces  reçues,  à  l'étude  ou  jouées,  les  tra- 
vaux des  acteurs  et  les  résultats  généraux  de  l'exploita- 
tion. 

Art.  7,  —  Les  rapports  semestriels  de  l'admi- 
nistrateur sont  communiqués,  avec  toutes  les  pièces 
justificatives,  au  comité  d'administration,  qui,  sous  la 
présidence  du  membre  le  plus  anciennement  reçu  socié- 
taire, est  admis  h  les  discuter  et  adresse  directement  ses 
observations  au  ministre  de  l'intérieur. 
•  Art.  8.  —  L'administrateur  ne  peut  faire  représenter 
aucune  pièce  n'ayant  pas  encore  fait  partie  du  répertoire 
du  Théâtre-Français,  si  elle  n'a  été  admise  par  le  comité 
de  lecture. 

Art.  9.  —  L'administrateur  a  droit  :  !«  à  un  traitement 
égal  au  maximum  de  l'allocation  annuelle  d'un  sociétaire  ; 
2»  à  une  part  dans  les  bénéfices  nets  égale  à  deux  fois  le 
maximum  d'une  part  de  sociétaire.  Il  lui  est  alloué,  en 
outre,  pour  frais  de  services,  une  indemnité  dont  la  quo- 
tité est  fixée  par  le  ministre  de  l'intérieur. 

§  2.  —  Du  comité  d'administration. 

Art.  10.  — Le  comité  d'administration,  composé  confor- 
mément à  l'article  30  du  décret  du  15  octobre  1812,  dresse 
le  budget  du  théâtre.  11  délibère  :  1»  sur  les  comptes  du 
théâtre,  sur  les  marchés  à  passer,  sur  les  obligations  à 
souscrire,  sur  les  crédits  extraordinaires  et  placements 
de  fonds  ;  2''  sur  les  actions  à  intenter  ou  à  soutenir  au  nom 
de  la  société  ;  3"  sur  les  objets  compris  dans  l'article  3  ; 
4"  sur  les  rapports  semestriels  de  l'administrateur  ;  5»  sur 
la  mise  à  la  retraite  des  sociétaires  après  dix  ans  de  ser- 
vice. 


—  328  — 

§  3.  —  De  l'assemblée  générale. 

Art.  11.  —  L'assemblée  générale  délibère  :  1"  sur  le 
budget  et  les  comptes  du  théâtre,  sur  les  crédits  extra- 
ordinaires et  placements  de  fonds;  2"  sur  les  actions  à 
intenter  ou  à  soutenir  au  nom  de  la  société. 


TITRE  II 

DES    SOCIÉTAIRES. 

Art.  12.  —  Chaque  sociétaire  a  droit  à  une  allocation 
annuelle,  à  des  feux,  à  une  quotité  dans  les  bénéfices 
nets,  à  une  représentation  à  son  bénéfice,  à  une  pension. 
L'allocation  annuelle,  calculée  proportionnellement  à  la 
quotité  de  la  part  sociale,  ne  peut  dépasser  le  maximum 
des  allocations  fixes  précédemment  accordées  aux  socié-' 
taires  ;  elle  sera  payable  par  douzième.  La  quotité  des 
feux,  suivant  les  services  et  les  emplois,  sera  déterminée 
par  les  règlements.  La  quotité  dans  les  bénéfices  nets  est 
proportionnée  à  la  part  ou  portion  de  chaque  sociétaire. 
Une  moitié  est  mise  à  réserve  et  soumise  aux  dispositions 
des  articles  22,  23,  24,  25,  26  et  27  du  décret  du  15  octobre 
1812,  Elle  ne  peut,  dans  aucun  cas,  sauf  les  droits  acquis, 
dépasser  la  quotité  déterminée  par  Tarticle  13  dudit  décret. 

Art.  13.  —  Après  une  période  de  dix  années  de  ser- 
vice à  partir  du  jour  de  la  réception,  il  sera  statué  de 
nouveau  sur  la  position  de  chaque  sociétaire  reçu  posté- 
rieurement à  la  promulgation  du  présent  décret.  Le  mi- 
nistre, après  avoir  pris  l'avis  de  Tadininistrateur  et  du 
comité  d'administration,  pourra  prononcer  la  mise  à  la 
retraite,  conformément  à  l'article  16  du  décret  du  15  octobre 
1812.  Dans  ce  cas,  le  sociétaire  aura  droit  au  tiers  de  la 
pension  qui  lui  aurait  été  due  après  vingt  ans  de  service, 
et  sera  libre  d'exercer  son  art  soit  à  Paris ,  soit  dans  les 
départements. 

Art.  14.  —  Tout  sociétaire  qui,  après  vingt  années  de 
service,  n'aura  pas  été,  en  vertu  de  l'article  14  du  décret 


1 


—  329  — 

du  15  octobre  1812,  mis  en  demeure  de  continuer  à  jouer 
sur  le  Théâtre-Français,  sera  libre  de  jouer  sur  les  théâ- 
tres des  départements.  11  ne  pourra  jouer  sur  les  théâtres 
dé  Paris  qu'avec  Tautorisation  du  ministre  de  l'intérieur, 
et  sauf  interruption  du  payement  de  sa  pension  de  retraite, 
pendant  la  durée  des  engagements  qu'il  aura  contractés 
sur  ces  théâtres  <. 

Art.  15.  —  Les  acteurs  sont  tenus,  sous  les  peines  qui 
sont  déterminées  par  le  règlement,  de  se  soumettre  aux 
ordres  de  service  donnés  par  l'administrateur.  Ils  ne 
peuvent,  sous  les  mêmes  peines  :  1"  refuser  aucun  rôle 
de  leur  emploi ,  ni  s'opposer  à  ce  qu'un  autre  acteur  le 
partage  avec  eux;  2°  s'absenter  sans  congé,  ni  dépasser 
le  terme  du  congé  obtenu.  Les  peines  disciplinaires, 
autres  que  les  amendes,  ne  peuvent  être  prononcées  que 
par  décision  du  ministre  de  l'intérieur  sur  la  proposition 
de  l'administrateur. 

TITRE  III 

DE   LA  COMPTABILITÉ. 

Art.  16.  -  Le  budget  des  recettes  et  des  dépenses  du 
Théâtre-Français  est  dressé  chaque  année  et  approuvé 
dans  les  formes  prescrites  par  l'article  2.  Il  comprend  les 
prévisions  de  recettes  et  de  dépenses  afférentes  à  toute 
la  durée  de  l'exercice.  Sont  seuls  considérés,  comme 
appartenant  à  un  exercice,  les  services  faits  et  les  droits 
acquis  à  la  société  ou  à  ses  créanciers,  du  1er  janvier  au 
31  décembre  de  l'année  qui  donne  son  nom  à  l'exercice. 

Art.  17.  —  La  subvention  accordée  par  l'Etat  est  versée, 
chaque  mois  et  par  douzième,  dans  la  caisse  du  théâtre. 

Art.  18.  —  Il  est  ouvert,  au  budget  de  chaque  exercice, 
an  chapitre  spécial  destiné  à  pourvoir  aux  dépenses  que 
le  ministre  de  l'intérieur  croirait  utile  d'autoriser,  dans 

'  V.,  pour  ces  articles  13  et  M,  le  décret  modificatif  des  19  no- 
\embre,  5  décembre  1859,  aux  articles  2,  3  et  A,  page  333. 


—  330  — 

l'intérêt  du  théâtre,  en  dehors  ou  en  supplément  des 
prévisions  portées  aux  autres  chapitres  du  budget.  La 
quotité  du  crédit  ouvert  par  ce  chapitre  est  déterminée, 
chaque  année ,  par  le  ministre  ;  elle  ne  peut  excéder  le 
cinquième  du  montant  de  la  subvention.  Il  ne  peut  être 
imputé  de  dépenses  sur  ledit  chapitre  qu'avec  l'autorisa- 
tion du  ministre. 

Art.  19.  —  Les  placements  de  fonds  et  les  dépenses 
extraordinaires,  non  prévues  au  budget  ou  dépassant  les 
crédits  alloués,  ne  peuvent  être  proposés  et  autorisés  que 
dans  les  mêmes  formes  que  le  budget. 

Art.  20.  —  Le  caissier  ne  peut  faire  aucun  payement 
que  sur  un  mandat  signé  de  l'administrateur.  Pour  les 
dépenses  extraordinaires  prévues  par  les  articles  18  et  19, 
l'ordonnancement  ne  peut  avoir  lieu  qu'en  vertu  d'une 
autorisation  spéciale  du  ministre  de  l'intérieur.  La  répar- 
tition des  bénéfices  entre  les  sociétaires  ne  peut  avoir 
lieu  que  suivant  un  état  dressé  par  l'administrateur  et 
approuvé  par  le  ministre  de  l'intérieur. 

Art.  21.  —  La  comptabilité  du  caissier  est  tenue  en 
partie  double.  Il  y  a  un  journal,  un  grand-livre  et,  autant 
de  livres  auxiliaires  qu'il  y  a,  sur  le  grand-livre,  de 
comptes  donnant  lieu  à  des  développements.  Chaque 
opération  inscrite  sur  la  comptabilité  du  théâtre  doit  être 
appuyée  de  justifications  régulières. 

Art.  22.  —  L'administrateur  tient  enregistrement  des 
mandats  de  recette  et  dépense  qu'il  délivre,  des  marchés 
et  engagements  qu'il  souscrit;  des  entrées,  loges  et  bil- 
lets de  faveur  qu'il  accorde;  des  ordres  généraux  de 
service,  et  de  tous  les  actes  qu'il  fait  ou  ordonne  dans 
l'intérêt  de  la  société. 

Art.  23.  —  Le  15  de  chaque  mois,  pour  le  mois  pré- 
cédent, l'administrateur  adresse  au  ministre  de  l'intérieur 
le  compte  des  recettes  et  des  dépenses  de  la  société,  avec 
toutes  les  justifications  réclamées  par  le  ministre. 

Art.  24.  —  La  comptabilité  du  théâtre  est  soumise,  sur 
la  demande  du  ministre  de  l'intérieur,  à  la  vériûcation 


—  331  - 

des  inspecteurs  généraux  et  particuliers  des  finances.  La 
gestion  de  l'administrateur  est  soumise  aux  inspections 
administratives  que  le  ministre  juge  utile  d'ordonner. 

Art.  25.  —  Il  sera  procédé  dans  le  délai  de  trois  mois, 
par  un  agent  du  ministre  de  l'intérieur,  concurremment 
avec  l'administrateur  et  le  plus  ancien  des  sociétaires,  à 
un  récolement  général  de  tous  les  objets  composant  le 
matériel,  le  mobilier,  la  collection  de  tableaux  et  de 
sculptures,  les  archives  et  la  bibliothèque  du  théâtre.  Les 
mouvements  de  ce  matériel  sont  soumis  à  une  compta- 
bilité d'entrée  et  de  sortie.  Chaque  année,  les  résultats 
de  cette  comptabilité  sont  constatés  dans  un  inventaire, 
et  il  est  procédé  à  un  récolement  général  dans  les  formes 
indiquées  ci-dessus.  Un  double  du  procès-verbal  du  réco- 
lement est  remis  au  ministre  de  l'intérieur,  après  avoir 
été  communiqué  au  comité  d'administration. 

Art.  26.  —  Le  compte  de  l'exercice  de  chaque  année 
reste  ouvert  jusqu'au  1er  avril  pour  le  cornplément  des 
opérations  engagées  avant  le  31  décembre  de  l'année 
précédente  ,  conformément  à  l'article  16  .  Il  est  définiti- 
vement arrêté  le  1er  mai  de  l'année  suivante.  Il  comprend 
toutes  les  recettes  réalisées  et  les  droits  acquis  dans  la 
période  de  l'exercice  ;  toutes  les  dépenses  faites  ou  enga- 
gements contractés,  pour  des  services  faits,  pendant  la 
même  période,  et  constate  l'excédant  des  recettes  formant 
les  bénéfices  à  répartir ,  conformément  aux  articles 
9  et  12  ci-dessus. 

Art.  27.  —  Ce  compte  est  certifié  par  l'administrateur, 
soumis  par  lui  à  l'examen  de  l'assemblée  générale  et  à 
l'approbation  du  ministre.  A  l'appui  dudit  compte ,  sont 
joints  :  1"  un  état  présentant  la  situation  des  valeurs  en 
caisse  et  du  portefeuille,  à  la  date  de  la  clôture  de  l'exer- 
cice ;  2»  un  état  des  engagements  contractés  ;  3"  l'inven- 
taire du  matériel. 

Art.  28.  —  Les  dispositions  encore  en  vigueur  du  décret 
du  15  octobre  1812,  auxquelles  il  n'est  pas  dérogé  par  le 
présent  décret,  continuent  à  recevoir  leur  exécution.  Le 


—  332  — 

ministre  de  l'intérieur  continue  à  exercer  ceux  des  pou- 
voirs conférés  au  surintendant  à  l'égard  desquels  il  n'est 
point  statué  par  le  présent  décret. 

Art.  29.  —  Le  ministre,  etc. 


19   NOVEMBRE  -  5   DÉCEMBRE   1859.    —   Décret 
concernant  le  Théâtre- Français. 

Article  1er.  _  L'article  72  du  décret  de  1812  est  modi- 
fié ainsi  qu'il  suit  :  Article  72.  —  La  part  d'auteur  dans  le 
produit  brut  des  recettes  est  de  15  p.  100  par  soirée  à 
répartir  entre  les  ouvrages,  tant  anciens  que  modernes, 
faisant  partie  de  la  composition  du  spectacle,  conformé- 
ment au  tableau  suivant  : 

Une  pièce  seule 15 pour  100. 

2  pièces  égales.  .  .    7  1/2  chacune.  .  .      15 

4  ou  5  actes  ....  11 

1  ou  2  actes  ....    4 

4  ou  5  actes  ....    9 

3  actes 6 

3  actes 10 

1  ou  2  actes  ....    5 

3  pièces  égales  ...    5  chacune 15 

4  ou  5  actes  ....    8 \ 

1  ou  2  actes   ....     31/2 [15 

1  ou  2  actes  ....     31/2 ) 

4  ou  5  actes 7 \ 

3  actes 5 /   15 

1  ou  2  actes  ....    3 ) 

3  actes 7 \ 

1  ou  2  actes  ....    4 f   15 

1  ou  2  actes  .  .  .  ,    4 ) 


15 
15 


—   333  — 

3  actes 5  1/2 

3  actes 5  1/2 ^15  pour  100. 

1  ou  2  actes  ....    4 

Cependant,  les  auteurs  et  les  comédiens  pourront  faire 
toute  autre. convention  de  gré  à  gré,  à  la  condition  de  ne 
pas  réduire  les  droits  d'auteur  fixés  dans  le  tableau  pré- 
cédent. 

Art.  2.  — A  l'avenir,  la  pension  do  retraite  sera  acquise, 
fixée  et  liquidée  conformément  au  décret  du  15  octobre 
1812.  Elle  ne  peut,  dans  aucun  cas,  sauf  les  droits  acquis, 
dépasser  la  quotité  déterminée  par  l'article  13  dudit  décret. 

Art.  3.  —  Après  une  période  de  dix  années  de  service 
à  partir  du  jour  des  débuts,  lorsqu'ils  auront  été  immé- 
diatement suivis  de  l'admission  comme  artiste  aux  ap- 
pointements et  ensuite  comme  sociétaire ,  il  sera  statué 
de  nouveau  sur  la  position  de  chaque  sociétaire  reçu 
postérieurement  à  la  promulgation  du  présent  décret.  Le 
ministre,  après  avoir  pris  l'avis  de  l'administration , 
pourra  prononcer  la  mise  à  la  retraite,  conformément 
à  l'article  16  du   décret  du  15  octobre  1812. 

Dans  ce  cas,  le  sociétaire  aura  droit  au  tiers  de  la  pen- 
sion qui  lui  aurait  été  due  après  vingt  ans  de  service  et 
sera  libre  d'exercer  son  art,  soit  à  Paris,  soit  dans  les 
départements. 

Art.  4.  —  Les  avantages  résultant  de  l'article  précédent 
pourront  être  appliqués  à  ceux  des  sociétaires  actuels 
qui  ont  été  nommés  postérieurement  au  décret  du  27  avril 
1850,  et  qui  demanderont  après  dix  années  de  services, 
comme  pensionnaires  et  comme  sociétaires,  que  leur 
position  soit  révisée  conformément  à  l'article  précédent. 

Ceux  des  sociétaires  qui,  n'étant  pas  maintenus  dans 
leur  position,  se  trouveraient  alors  avoir  h  l'aide  de  leurs 
services  antérieurs  plus  de  dix  années  d'exercice,  pour- 
ront recevoir  pour  chacune  des  années  qui  en  formeront 
l'excédant,  200  francs  de  pension  imputable,  moitié  sur 
le  fond  de  100,000  francs  (réduit  aujourd'hui  à  90,000 
francs),  moitié  sur  celui  de  la  société. 


--  334  — 

Art.  5.  —  Les  dispositions  du  décret  du  27  avril  1850, 
qui  sont  contraires  au  présent  arrêté,  sont  abrogées. 

Le  tableau  des  combinaisons  portées  à  l'article  l" 
n'étant  pas  complet,  l'administration  du  Théâtre- 
Français  y  a  pourvu  dans  le  complément  suivant  : 

4  ou  5  actes  .  7 'i 

3  actes 4 j  15  pour  100. 

3  actes   ....  4 J 

3  actes 6 \ 

1  ou  2  actes.  .  3 (   ... 

1  ou  2  actes.  .  3 ( 

1  ou  2  actes.  .  3 .....) 

4  ou  5  actes.  .  5  1/2 \ 

4  ou  5  actes.  .    5  1/2 [  15 


3  actes 4 

4  ou  5  actes  .  .  6 

1  ou  2  actes.  .  3 

1  ou  2  actes.  .  3 

1  ou  2  actes.  .  3 

3  actes 4  1/2 

3  actes 4  1/2 

1  ou  2  actes.  .  3 

1  ou  2  actes.  .  3  .  .  , 

4  ou  5  actes.  .  5 

3  actes 3  1/2 

3  actes 3  1/2 i 

1  ou  2  actes.  .  3 ) 

4  ou  5  actes.  .  5 

3  actes 4 

1  ou  2  actes,  .  3 

1  ou  2  actes.  .  3 

4  ou  5  actes.  .  4  1/2 

4  ou  5  actes.  .  4  1, 2 

1  ou  2  actes.  .  3 

1  ou  2  actes.  .  3 


J5 


15 


15 


—  335  — 

4  ou  5  actGvS.  .  6 

4  ou  5  actes.  .  6 [15  pour  100. 

1  ou  2  actes .  .  3 

1  ou  2  actes.  .  3  3/4 

1  ou  2  actes.  .  3  3/4...-. ,   ,. 

1  ou  2  actes.  .  3  3/4 

1  ou  2  actes.  .  3  3/4 


22  AVRIL  1869.  —  Affrété  relatif  au   comité  de 
lecture  de  la  Comédie-Française. 

Article  I^^.  —  A  l'avenir,  le  comité  de  lecture  du 
Théâtre-Français  sera  composé  :  1"  de  l'administrateur 
général  du  Théâtre-Français,  président;  2"  de  six  mem- 
bres titulaires  du  comité  d'administration. 

La  présence  de  cinq  membres,  y  compris  le  président, 
suffira  pour  qu'une  décision  soit-  régulièrement  prise. 

2.  Dans  le  cas  où  l'auteur  le  demanderait  formellement, 
tous  les  autres  sociétaires-hommes  pourraient  être  adjoints 
au  Comité  de  lecture,  formé  comme  il  est  dit  à  l'article  1^'-, 
pour  participer  au  jugement  de  sa  pièce,  avec  voix  déli- 
bérât! ve. 

3.  Toute  pièce  qui,  n'ayant  pas  été  reçue  à  une  pre- 
mière lecture,  aura  été  remise  à  une  seconde,  devra  être 
lue,  cette  fois,  en  présence  des  membres  du  Comité  de 
lecture  et  de  tous  les  autres  sociétaires-hommes,  réunis 
sous  la  présidence  de  l'administrateur  général.  Dans  ce 
cas,  la  présence  de  sept  membres  au  moins  sera  néces- 
saire pour  que  la  seconde  lecture  puisse  avoir  lieu  régu- 
lièrement. 

4.  Après  la  lecture,  il  sera  procédé  à  un  tour  d'opinions 
dans  lequel  chacun  des  membres  présents  sera  invité  à 
exprimer  son  avis.  Le  vote  aura  lieu  ensuite  nominale- 
ment par  bulletins  signés  et  portant  l'une  des  mentions 


—  336  — 

suivantes  :  pièce  reçue,  refusée,  ou  admise  à  une  seconde 
lecture.  Le  résultat  du  vote  sera  relaté  au  procès-verbal 
de  chaque  séance,  en  regard  du  nom  des  votants. 

5.  Toutes  les  pièces  présentées  au  secrétariat  du 
Théâtre-Français  devront  être  immédiatement  inscrites 
sur  un  registre  spécial  avec  un  numéro  d'ordre  consta- 
tant le  jour  de  leur  dépôt.  —  ElleS'  seront  remises  sans 
retard  à  des  examinateurs  chargés  d'en  prendre  connais- 
sance et  de  faire,  sur  chacune  d'elles,  un  rapport  motivé 
concluant,  suivant  leur  appréciation,  à  ce  que  la  pièce 
soit  réservée  pour  être  ultérieurement  lue  devant  le  Co- 
mité de  lecture,  formé  comme  il  est  dit  en  l'article  I^r, 
et  à  qui  seul  il  appartiendra  d'en  accepter  ou  d'en  refu- 
ser les  conclusions. 

Le  résultat  de  cet  examen  préalable  devra  toujours  être 
notifié  à  l'auteur  un  mois  au  plus  après  le  dépôt  de  sa 
pièce. 


TROISIEME    PARTIE 


LEGISLATION  GENERALE  : 

LOIS,    DÉCRETS,     ORDONNANCES,    ARRÊTÉS,    CIRCULAIRES 
MINISTÉRIELLES. 


16-24  AOUT  1790.  —  Extrait  de  la  loi  d'organi- 
sation judiciaire.  —  Police  des  théâti^es. 


TITRE  XI. 

Art.  3.  —  Les  objets  de  police  confiés  à  la  vigilance 
et  à  l'autorité  des  corps  municipaux  sont  : 

2°. . .  3»  Le  maintien  du  bon  ordre  dans  les  endroits  oh 
il  se  fait  de  grands  rassemblements  d'hommes,  tels  que 
foires,  marchés,  réjouissances  et  cérémonies  publiques, 
spectacles,  jeux,  cafés,  églises  et  autres  lieux  publics. 


13-19  JANVIER  1791.  —  Déci^et  relatif  aux  droits 
des  auteurs  et  à  la  police  de  la  salle. 

Art.  1er..,  (Abrogé.) 

2.  —  Les  ouvrages  des  auteurs  morts  depuis  cinq  ans 
et  plus  sont  une  propriété  publique,  et  peuvent ,  nonob- 

29 


—  338  — 

stant  tous  anciens  privilèges,  qui  sont  abolis,  être  repré- 
sentés sur  tous  les  théâtres  indistinctement. 

3.  —  Les  ouvrages  des  auteurs  vivants  ne  pourront 
être  représentés  sur  aucun  théâtre  public,  dans  toute 
l'étendue  de  la  France,  sans  le  consentement  Formel  et 
par  écrit  des  auteurs,  sous  peine  de  confiscation  du  pro- 
duit total  des  représentations  au  profit  des  auteurs. 

4.  —  La  disposition  de  l'article  3  s'applique  aux  ouvrages 
déjà  représentés  ,  quels  que  soient  les  anciens  règlements  ; 
néanmoins  les  actes  qui  auraient  été  passés  entre  les 
comédiens  et  des  auteurs  vivants,  ou  des  auteurs  morts 
depuis  moins  de  cinq  ans,  seront  exécutés. 

5.  —  Les  héritiers  ou  les  cessionnaires  des  auteurs 
seront  propriétaires  de  leurs  ouvrages  durant  l'espace  de 
cinq  années  après  la  mort  de  l'auteur. 

6.  —  Les  entrepreneurs  ou  les  membres  des  différents 
théâtres  seront,  à  raison  de  leur  état,  sous  l'inspection 
des  municipalités;  ils  ne  recevront  des  ordres  que  des 
officiers  municipaux,  qui  ne  pourront  arrêter  ni  détendre 
la  représentation  d'une  pièce,  sauf  la  responsabilité  des 
auteurs  et  des  comédiens,  et  qui  ne  pourront  rien  enjoindre 
aux  comédiens  que  conformément  aux  lois  et  aux  règle- 
ments de  police  :  règlements  sur  lesquels  le  comité  de 
constitution  dressera  incessamment  un  projet  d'instruc- 
tion. Provisoirement,  les  anciens  règlements  seront  exé- 
cutés. 

7.  —  Il  n'y  aura  au  spectacle  qu'une  garde  extérieure, 
dont  les  troupes  de  ligne  ne  seront  point  ciiargées,  si  ce 
n'est  dans  le  cas  où  les  officiers  municipaux  leur  en 
feraient  la  réquisition  formelle.  Il  y  aura  toujours  un  ou 
plusieurs  officiers  civils  dans  l'intérieur  des  salles,  et  la 
garde  n'y  pénétrera  que  dans  le  cas  où  la  sûreté  publique 
serait  compromise,  et  sur  la  réquisition  expresse  de  l'offi- 
cier civil,  lequel  se  conformera  aux  lois  et  règlements  de 
police.  Tout  citoyen  sera  tenu  d'obéir  provisoirement  à 
l'officier  civil. 


i 


—  339  — 

19  JUiLLET-6  AOUT  1791.  —  Décret  confirmatif  et 
complémentaire  du  précédent. 

Art.  1",  —  Conformément  aux  dispositions  des  arti- 
cles 3  et  4  du  décret  du  13  janvier  dernier,  concernant 
les  spectacles ,  les  ouvrages  des  auteurs  vivants ,  même 
ceux  qui  étaient  représentés  avant  cette  époque,  soit 
qu'ils  fussent  ou  non  gravés  ou  imprimés,  ne  pourront 
être  représentés  sur  aucun  théâtre  public,  dans  toute 
l'étendue  du  royaume,  sans  le  consentement  formel  et 
par  écrit  des  auteurs,  ou  sans  celui  de  leurs  héritiers  ou 
cessionnaires,  pour  les  ouvrages  des  auteurs  morts  depuis 
moins  de  cinq  ans,  sous  peine  de  confiscation  du  produit 
total  des  représentations  au  profit  de  l'auteur,  ou  de  ses 
héritiers  et  cessionnaires. 

Art.  2.  —  La  convention  entre  les  auteurs  et  les  entre- 
preneurs de  spectacles  sera  parfaitement  libre,  et  les  offi- 
ciers municipaux,  ni  aucuns  fonctionnaires  pubhcs,  ne 
pourront  taxer  lesdits  ouvrages,  ni  modifier  et  augmenter 
le  prix  convenu;  et  la  rétributibn  des  auteurs,  convenue 
entre  eux  ou  leurs  ayants  cause  et  les  entrepreneurs  de 
spectacles,  ne  pourra  être  saisie  ni  arrêtée  par  les  créan- 
ciers des  entrepreneurs  de  spectacles. 


19  JUILLET  1793.  —  Décret  relatif  à  la  propriété 
des  œuvres  dramatiques. 

Art.  1er.  _  Les  auteurs  d'écrits  en  tous  genres,  les 
compositeurs  de  musique,  les  peintres  et  dessinateurs  qui 
feront  graver  des  tableaux  et  dessins,  jouiront,  durant 
leur  vie  entière,  du  droit  exclusif  de  vendre,  faire  vendre, 
distribuer  leurs  ouvrages  dans  le  territoire  de  la  répu- 
blique, et  d'en  céder  la  propriété  en  tout  ou  en  partie. 


—  340  — 

Art.  2...  (Modifié  par  des  lois  subséquentes,  et  en 
dernier  lieu  par  la  loi  du  14  juillet  1866,  rapportée  ci- 
après.) 


14  FÉVRIER  1796  (25  pluviôse  an  IV).  —  Arrêté 
sur  la  police  des  théâtres. 

Article  le»-.  —  En  exécution  des  lois  qui  attribuent  aux 
officiers  municipaux  des  communes  la  police  et  la  direc- 
tion des  spectacles,  le  bureau  central  de  police,  dans  les 
cantons  où  il  est  établi,  et  les'  administrations  munici- 
pales dans  les  autres  cantons,  tiendront  sévèrement  la 
main  à  l'exécution  des  lois  et  règlements  de  police  sur  le 
fait  des  spectacles,  notamment  sur  les  lois  rendues  les 
16-24  août  1790,  et  14  août  1793  ;  en  conséquence,  ils 
veilleront  à  ce  qu'il  ne  soit  représenté  sur  les  théâtres 
établis  dans  les  communes  de  leur  arrondissement , 
aucune  pièce  dont  le  contenu  puisse  servir  de  prétexte  à 
la  malveillance,  et  occasionner  du  désordre,  et  ils  arrête- 
ront la  représentation  de  toutes  celles  par  lesquelles 
l'ordre  public  aurait  été  troublé  d'une  manière  quelconque. 


21  MARS  1799.  —  A7'rêté  relatif  aux  incendies. 

Article  1er.  —  Le  dépôt  des  machines  et  décorations 
pour  les  théâtres,  dans  toutes  les  communes  où  il  en 
existe,  sera  fait  dans  un  magasin  séparé  de  la  salle  du 
spectacle. 

Art.  2.  —  Les  directeurs  et  entrepreneurs  de  spectacles 
seront  tenus  de  déposer  dans  la  salle  un  réservoir  tou- 
jours plein  d'eau,  et  au  moins  une  pompe  continuelle- 
ment en  état  d'être  employée. 

Art.  3.  —  Ils  seront  obligés  de  solder,  en  tout  temps, 


f 


—  3i1  — 

des  pompiers  exercés,  de  manière  qu'il  s'en  trouve  tou- 
jours en  nombre  suffisant  pour  le  service  au  besoin. 

Art.  4.  —  Un  pompier  sera  continuellement  en  senti- 
nelle dans  l'intérieur  de  la  salle. 

Art.  5.  —  Un  poste  de  garde  sera  placé  à  chaque 
théâtre,  de  manière  qu'un  factionnaire,  relevé  toutes  les 
heures,  puisse  continuellement  veiller  avec  un  pompier 
dans  l'intérieur,  hors  le  temps  des  représentations. 

Art.  6.  —  a  la  fm  des  spectacles,  le  concierge,  accom- 
pagné d'un  chien  de  ronde,  visitera  toutes  les  parties  de 
la  salle  pour  s'assurer  que  personne  n'est  resté  caché 
dans  l'intérieur,  et  qu'il  ne  subsiste  aucun  indice  qui 
fasse  craindre  un  incendie. 

Art.  7.  —  Cette. visite  après  le  spectacle  se  fera  en 
présence  d'un  administrateur  municipal,  ou  d'un  commis- 
saire de  police,  qui  la  constatera  sur  un  registre  tenu  à 
cet  effet  par  le  concierge. 

Art.  8.  —  Les  dépôts  de  machines  et  décorations,  la 
surveillance  et  le  service  pour  les  salles  de  spectacles, 
déterminés  par  le  présent  arrêté,  seront  établis,  sans 
délai,  par  le  bureau  central  dans  les  communes  au-dessus 
de  100,000  âmes  ;  dans  les  autres  communes  par  les 
administrations  municipales. 

Art.  9.  —  Tout  théâtre  dans  lequel  les  précautions  et 
formalités  ci-dessus  prescrites  auront  été  négligées  ou 
omises  un  seul  jour,  sera  fermé  à  l'instant.  (V.  l'arrêté  du 
20  juillet  1862,  ci-après.) 


1"  JUILLET  1800  (12  messidor  an  XII).  —  Arrêté 
relatif  aux  attributions  du  préfet  de  police. 
(Extrait.) 

Article  12.  —  Il  (le  préfet  de  police)  aura  la  police  des 
théâtres  en  ce  qui  touche  la  sûreté  des  personnes,  les 

29. 


—  342  — 

précautions  à  prendre  pour  prévenir  les  accidents  et 
assurer  le  maintien  de  la  tranquillité  et  du  bon  ordre, 
tant  au  dedans  qu'au  dehors. 


8   DÉCEMBRE   1805   (17    frimaire   an  XIY).   — 
Décret  relatif  aux  attributions  de  police. 

Article  I"-.  —  Les  commissaires  généraux  de  police 
sont  chargés  de  la  police  des  théâtres  seulement  en  ce 
qui  concerne  les  ouvrages  qui  y  sont  représentés. 

Art.  2.  —  Les  maires  sont  chargés,  sous  tous  les 
autres  rapports,  de  la  police  des  théâtres  et  du  maintien 
de  l'ordre  et  de  la  sûreté. 


S  JUIN  1806.  —  Extrait  relatif  à  la  propriété 
littéraire. 

Article  10.  —  Les  auteurs  (dramatiques)  et  les  entre- 
preneurs seront  libres  de  déterminer  entre  eux,  par  des 
conventions  mutuelles,  les  rétributions  dues  aux  premiers 
par  somme  fixe  ou  autrement. 

11.  —  Les  autorités  locales  veilleront  strictement  à 
l'exécution  des  conventions. 

12.  —  Les  propriétaires  d'ouvrages  dramatiques  pos- 
thumes ont  les  mêmes  droits  que  l'auteur;  et  les  disposi- 
tions sur  la  propriété  des  auteurs  et  sa  durée  leur  sont 
applicables,  ainsi  qu'il  est  dit  au  décret  du  l^''  germinal, 
an  Xin. 


343 


25  AVRIL  1807.  — Extrait  du  décret  qui  déter- 
mine la  hiérarchie  des  théâtres  de  Paris  ^  et 
fixe  le  genre  de  chacun  d'eux. 

Article  l^r.  —  Les  théâtres  dont  les  noms  suivent  sont 
considérés  comme  grands  théâtres  ,  et  jouiront  des  pré- 
rogatives attachées  à  ce  titre  par  le  décret  du  8  juin  1806  : 

1"  Le  Théâtre-Français. 

Ce  théâtre  est  spécialement  consacré  à  la  tragédie  et 
à  la  comédie. 

Son  répertoire  est  composé  :  1"  de  toutes  les  pièces 
(tragédies,  comédies  et  drames)  jouées  sur  Tancicn 
théâtre  de  l'hôtel  de  Bourgogne ,  sur  celui  que  dirigeait 
Molière^  et  sur  le  théâtre  qui  s'est  formé  de  la  réunion 
de  ces  deux  établissements,  et  qui  a  existé  sous  diverses 
dénominations  jusqu'à  ce  jour;  2"  des  comédies  jouées 
sur  les  théâtres  dits  italiens,  jusqu'à  l'établissement  de 
rOpéra-Gomique. 

VOdéon  sera  considéré  comme  une  annexe  du  Théâtre- 
Français  ,  pour  la  comédie  seulement. 

Son  répertoire  contient  :  1"  les  comédies  et  drames 
spécialement  composés  pour  ce  théâtre  ;  2"  les  comédies 
jouées  sur  les  théâtres  dits  italiens ,  iu?,qu' h  l'établisse- 
ment de  rOpéra-Gomique  :  ces  dernières  pourront  être 
représentées  par  l'Odéon,  concurremment  avec  le  Théâtre- 
Français. 

2"  Le  théâtre  de  l'Opéra. 

Ce  théâtre  est  spécialement  consacré  au  chant  et  à  la 
danse  ;  son  répertoire  est  composé  de  tous  les  ouvrages, 
tant  opéras  que  ballets,  qui  ont  paru  depuis  son  éta- 
blissement, en  1646. 

1°  11  peut  seul  représenter  les  pièces  qui  soflt  entière- 
ment en  musique  et  les  ballets  du  genre  noble  et  gra- 


—  344  — 

deux  :  tels  sont  tous  ceux  dont  les  sujets  ont  été  puisés 
dans  la  mythologie  ou  dans  l'histoire ,  et  dont  les  prin- 
cipaux personnages  sont  des  dieux,  des  rois  et  des 
héros  ; 

2»  Il  pourra  aussi  donner  (mais  non  exclusivement  à 
tout  autre  théâtre)  des  ballets  représentant  des  scènes 
champêtres  ou  des  actions  ordinaires  de  la  vie. 

30  Le  théâtre  de  rOpéra-Comique. 

Ce  théâtre  est  spécialement  destiné  à  la  représentation 
de  toute  espèce  de  comédies  ou  drames  mêlés  de  cou- 
plets, d'ariettes  et  de  morceaux  d'ensemble. 

Son  répertoire  est  composé  de  toutes  les  pièces  jouées 
sur  le  théâtre  de  l'Opéra-Gomique  avant  et  après  sa  réu- 
nion à  la  Comédie-Italienne ,  pourvu  que  le  dialogue  de 
ces  pièces  soit  coupé  par  du  chant. 

L'Opéra-Buffa  doit  être  considéré  comme  une  annexe 
de  rOpéra-Comique.  Il  ne  peut  représenter  que  des  pièces 
écrites  en  italien. 

Art.  2.  —  Aucun  des  airs ,  romances  et  morceaux  de 
musique  qui  auront  été  exécutés  sur  les  théâtres  de 
l'Opéra  et  de  l'Opéra-Comique,  ne  pourra,  sans  l'autori- 
sation des  auteurs  ou  propriétaires,  être  transporté  sur 
un  autre  théâtre  de  la  capitale,  même  avec  des  modifi- 
cations dans  les  accompagnements,  que  cinq  ans  après 
la  première  représentatiofi  de  l'ouvrage  dont  ces  mor- 
ceaux font  partie. 

Art.  3.  —  Sont  considérés  comine  théâtres  secondaires  : 
l"  Le  théâtre  du  Vaudeville. 

Son  répertoire  ne  doit  contenir  que  de  petites  pièces , 
mêlées  de  couplets  sur  des  airs  connus,  et  des  parodies. 

2»  Le  théâtre  des  Variétés^  boulevard  Mofitmartre. 

Son  répertoire  est  composé  de  petites  pièces  dans  le 
genre  grivois,  poissard  ou  villageois,  quelquefois  mêlées 
de  couplets  également  sur  des  airs  connus. 


I 


—  345  — 

3«  Le  théâtre  de  la  Porte-Saint-Martin. 

11  est  spécialement  destiné  au  genre  appelé  mélo- 
drame ,  aux  pièces  à  grand  spectacle.  Mais ,  dans  les 
pièces  du  répertoire  de  ce  théâtre,  corpme  dans  toutes  les 
pièces  des  théâtres  secondaires,  on  ne  pourra  employer, 
pom'  les  morceaux  de  chant,  que  des  airs  connus. 

On  ne  pourra  donner  sur  ce  théâtre  des  ballets  dans 
le  genre  historique  et  noble  :  ce  genre,  tel  qu'il  est  in- 
diqué plus  haut,  étant  exclusivement  réservé  au  grand 
Opéra. 

4"  Le  théâtre  de  la  Gaité. 

Il  est  spécialement  destiné  aux  pantomimes  de  tous 
genres,  mais  sans  ballets  ;  aux  arlequinades  et  autres 
farces,  dans  le  goût  de  celles  données  autrefois  par 
Nicolet  sur  ce  théâtre. 


29  JUILLET   1807.  —  Décret    complémentaire   de 
celui  du  25  avril  ci-dessus. 

Article  1er.  _  Aucune  représentation  à  bénéfice  ne 
pourra  avoir  lieu  que  sur  le  théâtre  même  dont  l'admi- 
nistration ou  les  entrepreneurs  auront  accordé  le  béné- 
fice de  ladite  représentation.  Les  acteurs  des  grands 
théâtres  de  Paris  ne  pourront  jamais  paraître  dans  ces 
représentations,  que  sur  le  théâtre  auquel  ils  appar- 
tiennent. 

Art.  2.  —  Les  préfets ,  sous-préfets  et  maires  sont 
tenus  de  ne  pas  souffrir  que,  sous  aucun  prétexte,  les 
acteurs  des  quatre  grands  théâtres  de  la  capitale ,  qui 
auront  obtenu  un  congé  pour  aller  dans  les  départe- 
ments, y  prolongent  leur  séjour  au-delà  du  temps  fixé 
par  le  congé;  en  cas  de  contravention,  les  directeurs  des 
spectacles  seront  condamnés  à  verser  à  la  caisse  des 


—  346  -- 

pauvres  le  montant  de   la   recette  des  représentations 
qui  auront  lieu  après  l'expiration  du  congé. 

Art.  3.  — 

Art.  4.  —  Le  maximum  du  nombre  des  théâtres  de 
notre  bonne  ville  de  Paris  est  fixé  à  huit;  en  consé- 
quence, sont  seuls  autorisés  à  ouvrir,  afficher  et  repré- 
senter, indépendamment  des  quatre  grands  théâtres 
mentionnés  en  l'article  l^<^  du  règlement  de  notre  mi- 
nistre de  l'intérieur,  en  date  du  25  avril  dernier,  les 
entrepreneurs  ou  administrateurs  des  quatre  théâtres 
suivants  : 

10  Le  théâtre  de  la  Gaîté,  établi  en  1760  ;  celui  de 
Y  Ambigu-Comique ,  établi  en  1772,  boulevard  du  Temple; 
lesquels  joueront  concurremment  des  pièces  du  même 
genre,  désignées  aux  paragraphes  3  et  4  de  l'article  3 
du  règlement  de  notre  ministre  de  l'intérieur. 

2"  Le  théâtre  des  Variétés,  boulevard  Montmartre, 
établi  en  1777,  et  le  théâtre  du  Vaudeville,  étabU  en  1792; 
lesquels  joueront  concurremment  des  pièces  du  même 
genre ,  désignées  aux  paragraphes  1  et  2  de  l'article  3 
de  notre  ministre  de  l'intérieur. 

Art.  5.  —  Tous  les  théâtres  non  autorisés  par  l'article 
précédent  seront  fermés  avant  le  15  août. 
Etc.,  etc. 


9  DÉCEMBRE  1809.  —  Décret  concernant  les  droits 
à  percevoir  sur  les  théâtres,  bals,  concerts, 
etc. 

Article  l^'.  —  Les  droits  qui  ont  été  perçus  jusqu'à 
ce  jour  en  faveur  des  pauvres  ou  des  hospices,  en  sus 
de  chaque  billet  d'entrée  et  d'abonnement  dans  les  spec- 
tacles, et  sur  la  recette  brute  des  bals,  concerts,  danses 
et  fêtes  publiques,  continueront  à  être  indéfiniment  per- 
çus, ainsi  qu'ils  l'ont  été  pendant  le  cours  de  cette  année 


—  3V7  — 

et  'des  années   antérieures,   sous   la  responsabilité  des 
receveurs  et  contrôleurs  de  ces  établissements. 

Art.  2.  —  La  perception  de  ces  droits  continuera,  pour 
Paris,  d'être  mise  en  ferme  ou  régie  intéressée,  d'après 
les  formes,  clauses,  charges  et  conditions  qui  en  seront 
approuvées  par  notre  ministre  de  l'intérieur.  En  cas  de 
régie  intéressée ,  le  receveur-comptable  de  ces  établisse- 
ments, et  le  contrôleur  des  recettes  et  dépenses,  seront 
spécialement  chargés  du  contrôle  de  la  régie ,  sous  l'au- 
torité de  la  commission  executive  des  hospices,  et  sous 
la  surveillance  du  préfet  de  la  Seine. 

Art.  3.  —  Dans  le  cas  ou  la  régie  intéressée  jugerait 
utile  de  souscrire  des  abonnements,  ils  ne  pourront  avoir 
lieu  qu'avec  notre  approbation  en  conseil  d'Etat,  comme 
pour  les  biens  des  hospices  à  mettre  en  régie;  et  cette 
approbation  ne  sera  donnée  que  sur  l'avis  du  préfet  de 
la  Seine ,  qui  consultera  la  commission  executive  et  le 
conseil  des  hospices. 

Art.  4.  —  Les  représentations  gratuites  et  à  bénéfice 
seront,  au  surplus,  exemptes  des  droits  mentionnés  aux 
articles  qui  précèdent,  sur  l'augmentation  mise  au  prix 
ordinaire  des  billets. 


1811 .  —  Extrait  du  Code  pénal. 

Article  428.  —  Tout  directeur,  tout  entrepreneur  de 
spectacle,  toute  association  d'artistes  qui  aura  fait  repré- 
senter sur  son  théâtre  des  ouvrages  dramatiques  au 
mépris  des  lois  et  règlements  relatifs  à  la  propriété  des 
auteurs,  sera  puni  d'une  amende  de  50  francs  au  moins, 
de  500  francs  au  plus,  et  de  la  confiscation  des  recettes. 


—  348  — 

10  OCTOBRE  1822.  —  Circulaire  ministérielle.  — 
Censure. 

«  Sur  le  compte  qui  m'a  été  rendu  que  les  auteurs 
dramatiques  rétablissaient  presque  toujours,  en  impri- 
mant leurs  ouvrages,  les  passages  supprimés  par  la  cen- 
sure, j'ai  décidé  qu'à  l'avenir  les  exemplaires  de  pièces 
de  théâtre  représentées  à  Paris  ne  seraient  envoyées 
aux  directeurs  des  départements  qu'après  avoir  été  tim- 
brées au  ministère  de  l'intérieur,  et  que  ce  timbre  ne 
serait  apposé  que  sur  les  exemplaires  conformes  au 
manuscrit  censuré. 

«  Je  vous  recommande,  en  conséquence,  de  n'accorder 
d'autorisation  pour  la  représentation  d'ouvrages  nou- 
veaux dans  votre  département  que  sur  la  production  de 
ces  exemplaires  timbrés.» 


17  MAI  1838.  —  Ordonnance  du  préfet  de  police 
concernant  les  décorations  en  toile  ininflam- 
mable. 

Article  Ter.  —  A  l'avenir,  tout  directeur  de  théâtre  de 
la  capitale  et  de  la  banlieue  ne  pourra  plus  mettre  en 
scène  aucun  décor  neuf,  à  moins  que  les  fermes,  châs- 
sis, terrains,  bandes  d'eau,  rideaux,  bandes  d'air,  pla- 
fonds, frises,  gazes,  toiles  de  lointain,  n'aient  été  rendus 
ininflammables,  soit  par  une  préparation  des  toiles,  soit 
par  un  marouflage  qui  rendrait  également  les  décors 
ininflammables. 

2.  —  Il  est  pareillement  enjoint  aux  directeurs  de  faire 
procéder  immédiatement  au  marouflage  avec  papier 
ininflammable  des  doublures  de  châssis  vieux  à  l'usage 
actuel  de  la  scène. 

3.  —  Ils  ne  pourront  aussi  employer,  pour  l'enveloppe 


—  349  — 

des  artifices  et  pour  bourrer  les  armes  à  feu,  que  des 
matières  non  susceptibles  de  continuer  à  brûler,  même 
sans  flammes. 

4.  —  Les  toiles  et  papiers  destinés  aux  décorations 
indiquées  par  l'article  1er  seront  toujours,  avant  leur 
emploi ,  soumis  à  l'examen  de  la  commission  des 
théâtres,  ou  d'un  de  ses  membres  désigné  par  nous, 
lequel  vérifiera  et  constatera  si  les  toiles  et  papiers  qui 
lui  seront  présentés  par  les  directions  théâtrales  sont 
réellement  ininflammables. 

5.  —  La  vérification  et  la  réception  desdites  toiles 
seront  constatées  par  l'application  immédiate,  sur  leurs 
tissus,  de  deux  mètres  en  deux  mètres,  d'une  estampille 
de  notre  préfecture. 

6.  —  Le  papier  reconnu  pareillement  ininflammable 
sera  aussi  estampillé,  avant  son  usage,  à  notre  préfecture. 

7.  —  L'établissement  de  tout  décor  neuf,  avec  des 
toiles  et  papiers  non  estampillés  à  notre  préfecture,  don- 
nera lieu,  non-seulement  à  la  suspension  de  la  représen- 
tation, mais  encore  à  l'enlèvement  immédiat  des  décors 
de  l'intérieur  du  théâtre. 

8  et  9.  —  Dispositions  pénales. 


10  DÉCEMBRE  1841.  —  Arrêté  conccimant  la  rétri- 
bution du  dépôt  des  cannes ,  parapluies  et 
vêtements. 

Article  1er.  _  ^  partir  du  présent  arrêté  et  à  l'avenir, 
les  préposés  des  directeurs  de  théâtres,  des  salles  de 
bals  et  de  concerts,  chargés  de  recevoir  en  dépôt  les 
cannes,  armes,  parapluies,  manteaux  et  tous  autres  vête- 
ments des  personnes  qui  se  rendent  dans  ces  établisse- 
ments publics,  ne  pourront  percevoir,  à  titre  de  salaire 
pour  la  garde  du  dépôt  desdits  objets,  que  les  rétributions 

30 


—  350  — 

ci-après,  savoir  :  —  pour  une  canne,  10  cent.;  —  un 
parapluie,  10  cent.;  —  une  épée,  10  cent.;  —  un  sabre, 
10  cent.;   —   un  manteau  ou  autre   vêtement,  23  cent. 

2.  —  Les  rétributions  ci-dessus  fixées  de\Tont  être 
payées  au  moment  où  s'effectuera  le  dépôt  des  objets 
décrits  ci-dessus. 

3.  —  Il  sera  délivré  par  les  dépositaires,  en  échange 
des  objets  qui  leur  seront  déposés,  des  numéros.  —  Ces 
numéros  énonceront  le  titre  du  théâtre  ou  do  l'établisse- 
ment public,  ainsi  que  la  nature  de  l'objet  déposé. 

4.  —  La  restitution  des  objets  qui  auront  été  déposés 
s'opérera  sur  la  remise  du  numéro  du  dépôt  par  la  per- 
sonne qui  en  sera  porteur. 

5.  —  Les  dépositaires  devront  conserver  et  restituer  les 
objets  qui  leur  seront  confiés,  conformément  aux  dispo- 
sitions du  Gode  civil. 

6.  —  Lorsque  ces  objets  auront  été  déposés  dans  des 
bals  de  nuit  qui  ont  lieu  dans  les  théâtres  ou  autres  éta- 
blissements publics  ,  les  rétributions  déterminées  par 
l'article  1er  seront  payées  double. 

7.  —  Les  contraventions  au  présent  arrêté  seront  cons- 
tatées par  les  commissaires  de  police  et  déférées  au  tribu- 
nal de  simple  police. 


30  JUILLET  i850.  — Loi  su?'  la  police  des  théâtres.- 

Art.  ler.  —  Jusqu'à  ce  qu'une  loi  générale,  qui  devra 
être  présentée  dans  le  délai  d'une  année,  ait  définitive- 
ment statué  sur  la  police  des  théâtres,  aucun  ouvrage 
dramatique  ne  pourra  être  représenté  sans  l'autorisation 
préalable  du  ministre  de  l'intérieur  à  Paris,  et  du  préfet 
dans  les  départements.  —  Cette  autorisation  pourra  tou- 
jours être  retirée  pour  des  motifs  d'ordre  public. 

2.  —  Toute  contravention  aux  dispositions  qui  précè- 


} 


—  351  — 

dent  est  punie,  par  les  tribunaux  correctionnels,  d'une 
amende  de  cent  francs  à  mille  francs,  sans  préjudice  des 
poursuites  auxquelles  pourraient  donner  lieu  les  pièces 
représentées. 

Cette  loi  fut  prorogée  le  30  juillet  1851 . 


2  MAI  1852.  —  Service  médical.  —  Arrêté  du 
préfet  de  police. 

Art.  icf.  —  Dans  chaque  théâtre  ou  salle  de  spectacle 
de  P^ris,  il  y  aura  un  service  médical  qui  sera  composé 
d'un  nombre  de  médecins  en  rapport  avec  l'importance 
de  l'établissement. 

2.  —  Le  service  sera  divisé  par  semaine  et  réglé  par 
les  médecins,  à  la  fin  de  chaque  mois,  pour  le  mois 
suivant.  Il  sera  communiqué  au  directeur  qui,  après 
l'avoir  approuvé,  nous  en  donnera  connaissance. 

3.  —  Ce  service  devra  être  distribué  de  manière  qu'il 
y  ait  constamment  un  médecin  dans  la  salle,  depuis  le 
commencement  jusqu'à  la  fin  de  la  représentation.  — 
Lorsque  le  service  de  la  soirée  sera  partagé  entre  plu- 
sieurs médecins,  aucun  d'eux  ne  pourra  se  retirer  avant 
d'avoir  été  relevé  par  un  de  ses  collègues.  —  Il  y  aura 
aussi  à  chaque  repétition  générale  des  pièces  à  spectacle 
un  médecin  de  service  qui  sera  prévenu  par  la  direction. 

4.  —  Lorsqu'un  des  médecins  voudra  échanger  son 
tour  de  service  de  semaine,  il  devra  en  prévenir  le  com- 
missaire de  police  de  la  section,  en  lui  justifiant  du 
consentement  par  écrit  de  son  remplaçant  avant  l'ouver- 
ture des  bureaux. 

5.  —  Une  stalle  d'orchestre  ou  de  balcon  sera  réservée 
chaque  jour  de  représentation  pour  le  médecin  de  service 
de  la  salle.  Elle  devra  être  placée  le  plus  près  possible 
de  l'une  des  portes  d'entrée.  A  la  place  du  numéro,  elle 
portera  ces  mots  :  Médecin  de  service. 


—  352  — 

6.  —  Le  médecin  de  service  se  rendra,  chaque  matin,  à 
la  direction  du  théâtre  auquel  il  sera  attaché,  pour  savoir 
s'il  y  a  lieu  de  constater  à  domicile  les  maladies  d'ar- 
tistes ou  employés  qui  motiveraient  des  refus  de  service. 
En  cas  d'urgence,  le  directeur  devra  le  faire  prévenir  à 
domicile. 

7.  —  Un  local  sera  mis,  dans  l'intérieur  des  bâtiments, 
à  la  disposition  des  médecins  de  service.  Il  devra  être 
convenablement  meublé,  chauffé  et  éclairé,  et  contenir 
une  petite  pharmacie  dont  la  composition  sera  réglée 
par  nous,  et  placée  sous  la  surveillance  du  conseil  de 
salubrité. 

8.  —  Des  rapports  trimestriels  sur  le  service  médical 
seront  adressés  par  nous  à  M.  le  ministre  de  l'intérieur. 

9.  —  La  nomination  des  médecins  dans  les  théâtres  et 
spectacles,  à  l'exception  du  théâtre  de  l'Opéra,  qui  est 
en  dehors  de  ce  règlement,  et  le  remplacement  des  méde- 
cins qui  manqueraient  à  leur  service  ou  se  feraient 
remarquer  par  leur  inexactitude,  sera  faite  par  M.  le 
ministre  de  l'intérieur  d'après  nos  propositions  et  sur  la 
présentation  des  directeurs. 

Leurs  fonctions  seront  gratuites.  —  Leur  révocation 
pour  manquement  et  inexactitude  dans  leur  service  sera 
proposée  par  nous  à  M.  le  ministre  de  l'intérieur. 

lOv  —  Le  commissaire,  chef  de  la  police  municipale, 
et  les  commissaires  de  police  de  la  ville  de  Paris,  sont 
chargés,  chacun  en  ce  qui  le  concerne,  du  présent  arrêté. 


30  DÉCEMBRE  1852.  —  Décvet  relatif  à  la  censure. 


Art.  1er.  —  Les  ouvrages  dramatiques  continueront  à 
être  soumis,  avant  leur  représentation ,  à  l'autorisation 
de  notre  ministre  de  l'intérieur  à  Paris,  et  des  préfets 
dans  les  départements. 


—  353  — 

2.  —  Cette  autorisation  pourra  toujours  être  retirée 
pour  des  mesures  d'ordre  public. 


10  JUILLET  1853.  —  Circulaire  ministérielle  sur 
les  titres  des  pièces. 

«  Des  abus  nombreux  se  sont  introduits  dans  l'annonce 
des  spectacles  par  des  affiches  placardées  dans  les  villes 
ayant  un  théâtre.  Les  directeurs,  pour  piquer  la  curio- 
sité publique,  changent  ou  dénaturent  les  titres  des 
ouvrages,  ou  bien  y  ajoutent  des  annonces  souvent  incon- 
venantes sur  la  nature  et  l'esprit  de  l'ouvrage,  sur  la 
mise  en  scène,  sur  les  droits  des  acteurs  à  la  bienveil- 
lance des  spectateurs.  Toutes  ces  infractions  aux  instruc- 
tions ministérielles  offrent  des- inconvénients  que  l'admi- 
nistration doit  faire  cesser.  Les  préfets  ont  en  conséquence 
été  invités  à  donner  des  ordres  très-précis  aux  sous-pré- 
fets, aux  maires  et  commissaires  de  police  de  leur  dépar- 
tement, pour  que,  à  dater  du  1er  août,  les  affiches  de 
théâtre  n'annoncent  au  public  que  les  titres  des  ouvrages 
dramatiques  portés  sur  les  brochures  visées  au  ministère 
de  l'intérieur  ou  sur  les  répertoires,  et  pour  que,  sous 
aucun  prétexte,  ces  titres  ne  puissent  être  dénaturés  ou 
doublés.  » 


6-23  JUILLET  1853.  —  Décret  relatif  à  la  censw^e. 

Art.  1".  —  L'autorisation  préalable,  sans  laquelle 
aucun  ouvrage  dramatique  ne  peut  être  représenté,  aux 
termes  des  lois  du  30  juillet  1850  et  31  juillet  1851,  ainsi 
que  du  décret  du  30  décembre  1852,  sera  désormais  déli- 
vrée par  notre  ministre  d'État  pour  les  ouvrages  destinés 
aux  théâtres  nationaux  subventionnés. 

2.  — 


30. 


—  354  — 

,  8  AVRIL  1854.  —  Loi  sur  la  propriété  littéraire, 
—  Droits  dés  veuves. 

Article  unique.  —  Les  veuves  des  auteurs ,  des  com- 
positeurs et  des  artistes  jouiront,  pendant  toute  leur  vie, 
des  droits  garantis  par  les  lois  des  13  janvier  1791  et 
19  juillet  1793,  le  décret  du  5  février  1810,  la  loi  du 
3  août  1844,  et  les  autres  lois  et  décrets  sur  la  matière. 

(Le  second  alinéa  qui  réglait  la  position  des  autres 
héritiers  et  ayants  droit,  est  modifié  par  la  loi  du  14 
juillet  1866,  qui  se  trouve  ci-après  à  sa  date.) 


20  JUILLET  1862.  —  Consigne  générale  pour  les 
sapeurs-pompiers  de  service  dans  les  théâtres. 

1.  —  Les  postes  de  grand'garde  ne  portent  pas  de 
secours  à  l'extérieur;  en  cas  d'incendie  à  proximité  d'un 
théâtre,  les  sapeurs  doivent  utiliser  tous  les  moyens  de 
secours  pour  protéger  l'établissement  confié  à  leur  garde. 

Les  chefs  de  poste  ne  doivent  recevoir  aucun  étranger, 
pas  même  de  parents  dans  leur  corps  de  garde,  et  ils  ne 
peuvent  s'éloigner  de  leur  poste,  sous  aucun  prétexte, 
sans  encourir  les  peines  portées  par  le  Code  de  justice 
militaire. 

2.  —  A  l'arrivée  de  la  garde  montante ,  les  caporaux 
relèvent  les  factionnaires;  ensuite  ils  vérifient  ensemble 
si  tous  les  objets  du  matériel,  portés  sur  l'inventaire 
déposé  dans  le  poste,  sont  placés  où  ils  doivent  être  ; 
s'ils  sont  en  bon  état.  Ils  prennent  note  des  objets  man- 
quants ou  détériorés,  pour  en  rendre  compte  à  qui  de 
droit. 

3.  — -  Immédiatement  après  le  départ  de  la  garde  des- 
cendante, le   chef  de   poste    doit  faire   connaître   aux 


—  355  — 

hommos  de  service  les  pompes,  les  (établissements,  les 
réservoirs,  les  robinets  de  barrage  du  gaz  et  des  eaux , 
en  un  mot  tous  les  secours  qui  sont  à  leur  disposition  et 
le  parti  qu'on  jpeut  en  tirer.  Il  leur  montre  l'emplacement 
des  compteurs  et  l'itinéraire  des  rondes.  Il  leur  apprend 
comment  les  pompes  et  les  colonnes  en  charge  sont  ali- 
mentées et  le  moyen  de  rendre  foulantes  les  pompes 
aspirantes  ;  il  leur  fait  aussi  connaître  l'emplacement  des 
bornes-fontaines  qui  environnent  le  théâtre,  et  s'assure 
en  même  temps  qu'elles  sont  en  charge.  L'hiver,  lorsque 
les  bouches  d'eau  sont  barrées,  il  est  défendu  de  toucher 
aux  carrés  qui  doivent  rester  ouverts  ;  il  montre  les 
diverses  issues ,  les  portes  de  retraite  et  les  portes  de 
fer  destinées  à  isoler,  en  cas  de  feu ,  les  diverses  parties 
du  théâtre  et  de  la  salle.  Enfin,  il  ne  doit  rien  omettre 
pour  que  les  sapeurs  placés  sous  ses  ordres  soient  en 
état  de  le  seconder,  en  cas  d'incendie. 

4.— Lorsque  le  caporal  s'absente  de  son  poste  pour 
faire  cette  visite,  il  doit  en  prévenir  le  factionnaire. 

5.  —  Le  caporal  de  grand'garde  fait  prévenir  le  com- 
missaire de  police  des  répétitions  qui  doivent  avoir  lieu 
avec  lumière  à  la  rampe  et  aux  portants.  En  attendant 
sa  décision  sur  la  nécessité  d'un  détachement  de  service, 
il  fait  occuper  les  postes  des  pompes  parisiennes  et  des 
colonnes  en  charge.  Dans  le  cas  où  le  luminaire  serait 
complet,  c'est-à-dire  avec  portants,  herses,  rampes,  lus- 
tres ou  pièces  d'artifice,  il  s'opposera  à  ce  que  la  répé- 
tition commence  avant  la  décision  de  ce  magistrat. 

6.  —  Tous  les  matins,  à  huit  heures,  l'eau  des  seaux 
sera  renouvelée,  les  demi-garnitures  des  colonnes  en 
charge  repliées,  les  matelas  battus ,  le  poste  balayé  et 
nettoyé.  Les  mercredis  et  samedis,  les  couvertures  seront 
secouées  et  battues,  les  vitres  nettoyées  toutes  les  fois 
qu'elles  seront  malpropres. 

7.  —  Les  détachements  de  service  dans  les  théâtres, 
pour  la  représentation ,  doivent  toujours  être  arrivés  un 
quart  d'heure  avant  l'ouverture  des  bureaux  de  recette. 


—  356  — 

8.  —  Avant  l'ouverture  des  bureaux ,  le  caporal  de 
grand'garde,  sur  l'ordre  du  sous-officier  commandant, 
conduit  les  factionnaires  à  tous  les  établissements ,  leur 
donne  la  consigne ,  fait  humecter  les  éponges ,  examine 
lui-même  si ,  à  chaque  poste ,  le  boisseau  est  en  état ,  la 
clef  bien  tournée,  les  boyaux  bien  placés  ;  il  fait  sonner 
aux  établissements  d'ascension,  et  rend  ensuite  compte 
au  chef  du  détachement  du  résultat  de  sa  visite.  Le  sous- 
officier  envoie  en  même  temps  le  caporal  de  représenta- 
tion s'assurer  si  les  bornes-fontaines  sont  en  charge  ou 
si  le  carré  est  bien  tourné  lorsqu'elles  sont  barrées  ;  il 
se  rend  ensuite  à  la  cave  pour  entendre  fonctionner  la 
correspondance  des  sonnettes,  et  attend  le  retour  de 
ce  caporal  pour  lui  donner  la  consigne. 

9.  —  Quand  les  postes  sont  pris,  le  sous-officier  monte 
au  réservoir  supérieur,  fait  sonner  du  poste  le  plus  rap- 
proché pour  faire  manœuvrer,  afin  de  s'assurer  que  les 
pompes  fonctionnent  bien  et  fait  remplir  les  réservoirs, 
s'il  y  a  lieu  :  puis  il  fait  sonner  de  nouveau  pour  faire 
cesser  la  manœuvre.  Il  visite  tous  les  établissements,  fait 
essayer  les  pompes  parisiennes  ou  suisses,  répéter  les 
consignes  aux  factionnaires ,  et  redescend  ensuite  à  la 
cave  pour  s'assurer  si  tout  est  en  bon  état. 

10.— Pendant  la  représentation,  le  chef  de  détache- 
ment visite  plusieurs  fois  tous  les  postes,  et,  lorsqu'il 
envoie  toucher  le  montant  de  la  quittance  du  service,  il 
ne  quitte  pas  la  scène ,  d'où  il  exerce  une  surveillance 
générale. 

11.  —  Le  spectacle  terminé,  le  sous-officier,  accom- 
pagné du  caporal  de  grand'garde,  fait  une  ronde  dans  les 
dessous  du  théâtre  afin  de  s'assurer  qu'aucune  lampe  ne 
reste  allumée  et  qu'il  n'y  a  aucun  danger  d'incendie. 
11  exige  que  tous  les  châssis  ou  feuilles  de  décoration 
soient  enlevés  de  dessus  les  faux-châssis. 

Le  caporal  de  représentation  va  relever  les  faction- 
naires et  ne  les  ramène  au  théâtre  qu'après  l'extinction 
des  lumières,  après  avoir  fait  développer  les  boyaux  des 


—  357  — 

colonnes  en  cliarge  et  s'être  assuré  qu'il  n'y  a  aucun 
danger  d'incendie.  Les  boyaux  des  colonnes  d'ascension 
et  les  appareils  à  compression  d'air  ne  seront  établis 
qu'en  cas  de  feu.  Dans  les  théâtres  où  il  n'y  a  pas  de 
sapeur  en  faction  sur  la  scène,  le  sous-officier  en  fait 
monter  un  de  la  cave  pour  surveiller ,  tandis  qu'il  fait  sa 
ronde.  Ce  n'est  qu'après  l'entière  extinction  des  lumières 
du  théâtre  et  de  la  salle,  et  le  rideau  de  fer  baissé,  que 
le  détachement  de  représentation  se  retire. 

12.  —  Après  le  départ  du  détachement,  le  chef  du 
poste  de  grand'g-arde,  assisté  du  concierge  du  théâtre, 
fait  la  ronde  générale. 

13.  —  Pendant  la  nuit,  toutes  les  armoires  seront  ou- 
vertes; pendant  le  jour,  les  boyaux  sont  repliés  et  les 
armoires  fermées ,  à  l'exception  d'une  des  armoires  des 
colonnes  en  charge  sur  le  théâtre  et  de  celle  où  se  trouve 
la  bascule  de  la  sonnette  d'alarme. 

14.  —  Pendant  le  jour  et  la  nuit,  le  temps  de  la  repré- 
sentation excepté,  une  sentinelle  en  tenue  de  feu  est 
placée  sur  le  théâtre.  Elle  a  dans  sa  poche  une  clef  de 
toutes  les  armoires;  une  hache,  un  seau  et  une  éponge  à 
main  sont  déposés  près  de  la  lampe  de  nuit.  Après  le 
spectacle,  le  compteur  des  rondes  doit  être  placé  près 
du  factionnaire. 

15.  —  Dans  les  théâtres  où  il  y  a  un  caporal  et  quatre 
sapeurs  de  grand'garde,  il  y  a  deux  factionnaires  pen- 
dant la  nuit  :  l'un  sur  la  scène,  l'autre  toujours  en  ronde 
dans  toutes  les  parties  du  théâtre;  le  caporal  ne  fait  que 
des  rondes  ;  en  outre,  il  pose  et  relève  les  factionnaires. 

La  première  ronde,  avec  le  compteur,  sera  faite  par  le 
caporal  ;  les  autres  seront  faites  par  le  deuxième  sapeur 
de  ronde,  aux  heures  indiq-uées  par  la  consigne. 

16.  —  Dans  les  théâtres  où  la  grand'garde  est  composée 
d'un  caporal  et  de  trois  sapeurs,  le  caporal ,  avant  de 
commencer  sa  ronde,  place  le  factionnaire  sur  le  théâtre 
pendant  deux  heures;  il  fait  lui-même  des  rondes  avec 


—  358  — 

le  compteur,  aux  heures  prescrites  et  en  suivant  l'itiné- 
raire tracé. 

17.  —  Dans  les  théâtres  où  la  grand'garde  n'est  com- 
posée que  d'un  caporal  et  deux  sapeurs,  le  caporal,  après 
la  ronde  terminée  avec  le  concierge,  prend  la  faction 
pour  deux  heures;  il  fait  la  première  ronde  au  comp- 
teur à  l'heure  prescrite  d'après  la  consigne,  les  autres 
sont  faites  par  les  sapeurs. 

18.  —  Dans  les  théâtres  où  la  grand'garde  n'est  com- 
posée que  d'un  caporal  et  un  sapeur,  il  n'y  a  pas  de 
factionnaire  pendant  le  jour;  des  rondes  sont  faites 
d'heure  en  heure,  et,  lorsqu'il  n'y  a  pas  de  jeu  le  soir, 
le  factionnaire  est  placé  à  la  nuit  tombante  ;  lorsqu'il  y 
a  jeu,  le  caporal  prend  la  première  faction,  après  avoir 
fait  sa  ronde,  et  il  alterne  de  deux  heures  en  deux  heures 
avec  le  sapeur  jusqu'au  jour.  Les  rondes  au  compteur 
sont  faites  par  le  caporal  et  le  sapeur,  aux  heures  pres- 
crites. 

19.  —  Les  sous-ofTiciers  et  caporaux  de  service  dans 
les  théâtres  devront,  pour  s'assurer  si  la  colonne  en 
charge  fonctionne  bien,  démonter  la  demi-garniture  avant 
de  tourner  la  branche  du  boisseau,  afin  qu'il  ne  coule  pas 
d'eau  dedans.  A  cet  effet,  ils  prendront  un  seau  vide  et 
ils  le  placeront  devant  la  sortie. 

20.— Pendant  le  spectacle  et  particulièrement  pendant 
les  changements  de  décorations ,  les  factionnaires  s'oc- 
cupent de  surveiller  les  portants  de  lumières,  les  herses, 
les  robinets  de  gaz  et  les  pièces  d'artifice. 

Si  une  fuite  de  gaz  venait  à  se  déclarer  et  si  le  faction- 
naire n'avait  pas  à  sa  portée  un  robinet  de  barrage  ou 
du  blanc  de  céruse  pour  la  boucher,  il  aplatirait  le  tuyau, 
s'il  est  en  plomb,  avec  l'extrémité  du  manche  de  la  hache. 

Les  factionnaires  ne  doivent  laisser  déposer  devant  les 
armoires  ni  décorations,  ni  autres  accessoires.  Ils  em- 
pêcheront de  fumer ,  de  circuler  avec  du  feu  sans  qu'il 
soit  couvert  et  avec  des  lumières  autres  que  des  lampes, 
qui  ne  seraient  pas  renfermées  dans  une  lanterne.  S'ils 


—  359  — 

éprouvaient  quelques  difficultés  pour  l'exécution  de  ces 
dispositions,  ils  en  préviendraient  immédiatement  le 
chef  de  détachement ,  qui  en  référerait  au  commissaire 
de  police  de  service. 

Si  le  feu  se  manifeste  sans  gravité  à  la  portée  du 
factionnaire,  il  se  sert,  pour  l'éteindre,,  de  son  seau  et  de 
son  éponge  à  main.  Si  ces  moyens  sont  insuffisants,  il 
opère  de  la  manière  suivante,  selon  le  poste  qu'il  oc- 
cupe ,  mais  en  se  servant  toujours  de  préférence  de  la 
colonne  d'ascension. 

21.  —  Pour  se  servir  de  la  colonne  d'ascension,  le  fac- 
tionnaire sonne ,  en  appuyant  fortement  trois  fois  sur  la 
bascule  ;  il  tourne  la  branche  du  boisseau  en  l'amenant 
vers  lui ,  développe  les  boyaux  en  évitant  les  plis  et  les 
coudes  et  dirige  Teau  sur  le  feu.  Le  feu  éteint,  ou  n'étant 
plus  à  sa  portée,  il  ferme  le  boisseau  et  ne  démonte  sa 
demi-garniture  que  sur  l'ordre  verbal  du  chef  de  déta- 
chement. 

22.  —  Si  le  coup  de  sonnette  partait  de  l'établissement 
supérieur  à  celui  qu'il  occupe,  il  se  porterait  prompte- 
ment  à  la  pompe  suisse ,  ou ,  à  défaut,  à  la  colonne  en 
charge. 

23.  —  Pour  se  servir  de  la  pompe  suisse,  on  ouvre  et 
on  fixe  les  branches  du  balancier,  on  appelle  des  travail- 
leurs, on  tourne  le  robinet  et  on  développe  les  boyaux 
en  se  dirigeant  sur  le  feu. 

24.  —  Pour  se  servir  d'une  pompe  parisienne,  on  place 
un  travailleur  à  la  manivelle  du  volant  et  on  lui  indique 
de  quel  côté  il  doit  tourner;  on  ouvre  le  robinet  et  on 
développe  les  boyaux  en  se  dirigeant  sur  le  feu. 

25.  — Pour  se  servir  d'un  appareil  à  compression  d'air, 
ou  d'une  colonne  en  charge  simple,  le  factionnaire  déve- 
loppe les  boyaux  ,  tourne  doucement  la  branche  du 
boisseau  et  se  porte  promptement  à  la  lance. 

26.  —  Pendant  les  grands  froids,  si  la  surface  de  l'eau 
dans  les  réservoirs  était  gelée,  on  ferait  casser  la  glace. 


—  360   - 

27.  —  Si  le  feu  se  déclare  dans  une  partie  quelconque 
du  théâtre  ou  des  cintres,  les  boyaux  de  tous  les  établis- 
sements en  général  devront  être  développés  et  disposés 
à  fonctionner  au  besoin  ;  mais  on  ne  se  servira  que  de 
l'établissement  à  portée  du  feu. 

28.  —  Le  caporal  de  représentation,  chef  de  poste  à  la 
cave,  après  s'être  assuré  que  les  bornes-fontaines  sont  en 
charge,  fait  placer  ses  hommes  à  chaque  extrémité  du 
balancier  et  leur  donne  un  numéro  d'ordre.  Pour  l'essai 
des  pompes,  il  faut  manœuvrer  au  premier  coup  de  son- 
nette et  cesser  au  second.  Il  rend  compte  au  chef  du 
détachement  de  l'état  du  matériel  et  des  détériorations 
ou  accidents  qui  seraient  survenus  aux  pompes  pendant 
la  manœuvre.  Il  vide  ensuite  les  colonnes  d'ascension  à 
la  hauteur  de  la  scène  à  peu  près.  Après  le  jeu ,  les  co- 
lonnes d'ascension  sont  vidées  entièrement. 

29.  —  Si ,  pendant  le  jeu ,  on  sonne  à  la  cave ,  le 
caporal  fait  manœuvrer,  sans  interruption,  la  pompe 
dont  la  sonnette  aurait  été  entendue,  et  ne  ferait  cesser 
cette  fois  la  manœuvre  que  sur  l'ordre  verbal  du  chef  de 
détachement. 

30.  —  Si  le  feu  se  manifeste  dans  quelque  partie  du 
théâtre  ou  de  la  salle,  le  factionnaire  sonne  de  suite  la 
sonnette  d'alarme  pour  avertir  les  sapeurs  de  grand'garde. 
En  attendant  leur  arrivée,  il  emploie  tous  les  secours  qui 
sont  à  sa  disposition ,  c'est-à-dire  les  colonnes  en  charge, 
à  compression  d'air  ou  de  ville. 

31.  —  Pendant  le  jour  et  la  nuit  (le  temps  de  la  re- 
présentation excepté),  dès  que  la  sonnette  d'alarme  se 
fait  entendre,  le  caporal,  suivi  de  toute  sa  garde,  se 
transporte  vivement  auprès  de  la  sentinelle,  reconnaît  le 
feu,  et,  si  cela  est  nécessaire,  le  fait  attaquer  avec  le  jet 
provenant  des  colonnes  en  charge  ou  à  compression  d'ail' 
ou  de  ville.  11  avertit  les  employés  logés  dans  l'intérieur 
du  théâtre,  fait  prévenir  immédiatement  la  caserne  du 
corps  la  plus  rapprochée,  les  postes  environnants,  le 
conuïiissaire  de  police  du  quartier,  et  réunit  le  plus  de 


•      —  361   — 

monde  possible  pour  faire  manœuvrer  les  pompes,  en 
attendant  l'arrivée  des  secours  extérieurs. 

32.  —  Le  caporal  de  grand'garde  ne  devra  jamais  dé- 
tacher aucun  de  ses  hommes  pour  alier  en  ordonnance, 
soit  à  l'état-major,  soit  à  la  caserne. 

33.  —  Les  caporaux  et  sapeurs  de  grand'garde  dans 
un  théâtre  sont  prévenus  qu'ils  ne  doivent,  sous  aucun 
prétexte,  faire  isolément  des  rondes  dans  les  loges  de  la 
salle,  le  parterre  et  l'orchestre ,  ni  des  visites  dans  les 
loges  des  artistes.  Dans  le  cas  où,  par  une  circonstance 
quelconque,  ils  pourraient  penser  que  leur  présence  est 
nécessaire,  soit  dans  l'intérieur  de  la  salle,  soit  dans  les 
loges  d'artistes,  les  factionnaires  avertiront  le  chef  du 
poste,  lequel  se  rendra  près  du  concierge  pour  le  requé- 
rir de  l'accompagner  dans  sa  tournée. 

34.  —  Dès  qu'une  dégradation  quelconque  se  manifes- 
tera dans  un  théâtre,  le  chef  du  poste  en  préviendra  de 
suite  l'inspecteur  du  matériel,  afin  que  la  réparation 
soit  exécutée  immédiatement,  si  cela  est  possible ,  et  il 
en  rendra  compte  à  l'ofïicier  de  ronde  à  son  passage  dans 
la  soirée. 

35.  —  Tant  que  les  postes  de  caves  ne  sont  pas  occupés 
par  les  sapeurs  de  service,  les  ouvertures  doivent,  autant 
que  possible,  rester  ouvertes,  afin  d'en  renouveler  l'air. 

36.  —  Toutes  les  fois  que  des  travaux  s'exécuteront 
dans  un  théâtre,  les  chefs  de  poste  devront  en  rendre 
compte  ;  en  outre,  ils  feront  surveiller  les  ouvriers  et  le 
plus  particulièrement  ceux  qui  seront  obligés  de  faire 
usage  de  feu. 


31 


—  362  —      . 

6-18  Janvier  1864.  — Loi  concernant  la  liberté 
des  théâtres. 

Vu  les  décrets  des  8  juin  1806  et  29  juillet  1807;  vu 
l'ordonnance  du  8  décembre  1824;  vu  l'article  3,  titre  XI, 
de  la  loi  des  16  et  24  août  1790  ;  vu  les  arrêtés  du  gou- 
vernement, du  25  pluviôse  et  11  germinal  an  IV,  ler  ger- 
minal an  VII  et  12  messidor  an  VIII;  vu  les  ordonnances 
de  police  des  12  février  1828  et  9  juin  1829;  vu  la  loi 
du  7  frimaire  an  V  et  le  décret  du  9  décembre  1809,  sur 
la  redevance  établie  au  profit  des  pauvres  et  hospices  ; 
vu  le  décret  du  30  décembre  1862;  notre  conseil  d'Etat 
entendu,  avons  décrété. 

Article  1er.  —  xout  individu  peut  faire  construire  et 
exploiter  un  théâtre,  à  la  charge  de  faire  une  déclaration 
au  ministère  de  notre  maison  des  beaux-arts,  et  à  la 
préfecture  de  police,  pour  Paris,  à  la  préfecture  dans  les 
départements.  Les  théâtres  qui  paraîtront  plus  particu- 
lièrement dignes  d'encouragements  pourront  être  subven- 
tionnés soit  par  l'Etat,  soit  par  les  communes. 

Art.  2.  —  Les  entrepreneurs  de  théâtres  devront  se 
conformer  aux  ordonnances,  décrets  et  règlements  pour 
tout  ce  qui  concerne  l'ordre,  la  sécurité  et  la  salubrité 
publics.  Continueront  d'être  exécutées  les  lois  existantes 
sur  la  police  et  la  fermeture  des  théâtres,  ainsi  que  la 
redevance  établie  au  profit  des  pauvres  et  des  hospices. 

Art.  3.  —  Toute  œuvre  dramatique,  avant  d'être  repré- 
sentée, devra,  aux  termes  du  décret  du  30  décembre  1852, 
être  examinée  et  autorisée  par  le  ministère  de  notre 
maison  et  des  beaux-arts,  pour  les  théâtres  de  Paris, 
par  les  préfets  pour  les  théâtres  des  départements.  Cette 
autorisation  pourra  toujours  être  retirée  pour  des  motifs 
d'ordre  public. 

Art.  4.  —  Les  ouvrages  dramatiques  de  tous  les  genres, 
y  compris  les  pièces  entrées  dans  le  domaine  public, 
pourront  être  représentés  sur  tous  les  théâtres. 


—  363  — 

AuT.  5.  —  Les  théâtres  d'acteurs  enfants  continuent 
d'être  interdits. 

Art.  6.  —  Les  spectacles  de  curiosités,  de  marion- 
nettes, les  cafés  dits  cafés-chantants ^  cafés-concerts  et 
autres  établissements  du  même  genre  restent  soumis 
aux  règlements  présentement  en  vigueur.  Toutefois,  ces 
établissements  seront  désormais  affranchis  de  la  rede- 
vance établie  par  l'article  11  de  l'ordonnance  du  8  dé- 
cembre 1824,  en  faveur  des  directeurs  des  départements, 
et  ils  n'auront  à  supporter  aucun  prélèvement  autre  que 
la  redevance  au  profit  des  pauvres  ou  des  hospices. 

Art.  7.  —  Les  directeurs  actuels  des  théâtres,  autres 
que  les  théâtres  subventionnés,  sont  et  demeurent  affran- 
chis, envers  l'administration,  de  toutes  les  clauses  et 
conditions  de  leur  cahier  des  charges,  en  tant  qu'elles 
sont  contraires  au  présent  décret. 

Art.  8.  —  Sont  abrogées  toutes  les  dispositions  des 
décrets,  ordonnances  et  règlement  dans  ce  qu'elles  ont 
de  contraire  au  présent  décret. 

Art.  9.  —  Le  ministre  de  notre  maison  et  des  beaux- 
arts  est  chargé  de  l'exécution  du  présent  décret,  qui  sera 
inséré  au  Bulletin  des  lois  et  recevra  son  exécution  à 
partir  du  le«-  juillet  1864. 


1"  Juillet  1864.  —  Ordonnance  de  police  en 
vigueur  à  Paris. 

Article  Je»-.  —  Tout  individu  voulant  faire  construire 
et  exploiter  un  théâtre  est  tenu  d'en  faire  la  déclaration 
préalable  au  ministère  ainsi  qu'à  la  préfecture  de  police. 

Il  sera  joint  à  l'appui  les  plans  détaillés,  avec  coupes, 
et  l'indication  du  nombre  des  places  calculées  par  per- 
sonnes à  raison  de  0°»  80  de  profondeur  sur  0">  45  de 
largeur  pour  les  places  en  location,  et  0™  70  sur  0™  45 
pour  les  autres  places. 


-    364  — 

Les  travaux  ne  pourront  être  commencés  que  sur 
notre  avis  formel,  après  examen  du  projet. 

Sauf  les  cas  de  dérogation  que  nous  nous  réservons 
d'admettre,  les  salles  seront  établies,  construites  et  dis- 
tribuées conformément  aux  prescriptions  suivantes  : 

2.  —  L'édifice  peut  être  isolé  ou  adossé,  au  choix  du 
constructeur.  En  cas  d'isolement,  il  sera  laissé  sur  tous 
les  côtés  qui  ne  seront  pas  bordés  par  la  voie  publique  un 
espace  libre  ou  chemin  de  ronde,  qui  pourra  n'être  que 
de  3  mètres  de  largeur  si  les  maisons  voisines  n'ont  pas 
de  jour  sur  ledit  chemin.  Dans  le  cas  contraire,  la  largeur 
serait  rationnellement  augmentée  eu  égard,  notamment, 
à  l'importance  et  aux  dispositions  de  l'édifice. 

En  cas  d'adossement,  il  sera  construit  un  contre-mur 
en  briques  de  O""  25  au  moins  d'épaisseur  pour  préserver 
les  murs  mitoyens.  —  L'épaisseur  de  ce  contre-mur 
pourrait  être  augmentée  comme  la  largeur  du  chemin 
de  ronde  ci-dessus,  et  par  les  mêmes  considérations. 

3.  —  Les  murs  intérieurs,  les  murs  qui  séparent  les 
loges  d'acteurs  et  le  théâtre,  le  mur  d'avant-scène,  le 
mur  qui  séparera  la  salle,  le  vestibule  et  les  escaliers 
seront  en  maçonnerie. 

4.  —  Les  portes  de  communication  entre  les  murs, 
loges  d'acteurs  et  le  théâtre  seront  en  fer  et  battantes,  de 
manière  à  être  toujours  fermées.  -^  Le  mur  d'avant- 
scène,  qui  s'élève  au-dessus  de  la  toiture,  ne  pourra  être 
percé  que  de  l'ouverture  de  la  scène  et  de  baies  de  com- 
munication fermées  par  des  portes  de  fer.  —  L'ouverture 
de  la  scène  doit  être  fermée  par  un  rideau  en  fil  de  fer 
maillé  de  0^  05  au  plus  de  maille,  qui  intercepte  entière- 
ment toute  communication  entre  les  parties  combustibles 
du  théâtre  et  de  la  salle.  Ce  rideau  doit  être  soutenu  par 
des  cordages  incombustibles.  —  Les  décorations  fixes 
dans  les  parties  supérieures  de  l'ouverture  d'avant-scène 
doivent  toujours  être  incombustibles. 

5.  —  Tous  les  escaliers,  les  planchers  de  la  salle,  et  les 


—  365  — 

cloisons   des    corridors  doivent  être  également  en  maté- 
riaux incombustibles. 

6.  —  La  calotte  de  la  salle  doit  être  en  fer  et  plâtre, 
sans  boiseries. 

7.  —  Dans  l'une  des  parties  les  plus  élevées  du  mur 
d'avant-scène,  et  sous  le  comble,  sera  placé  un  appareil 
de  secours  contre  l'incendie,  avec  colonne  en  charge,  au 
poids  de  laquelle  il  sera  ,au  besoin  ajouté  une  pression 
hydraulique  assez  puissante  pour  fournir  un  jet  d'eau 
dans  les  parties  les  plus  élevées  du  bcàtiment.  La  capacité 
de  cet  appareil  sera  déterminée  selon  l'importance  du 
théâtre. 

8.  —  Les  pompes  doivent  être  installées  au  rez-de- 
chaussée,  dans  un  local  séparé  du  théâtre  par  des  murs 
en  maçonnerie. 

9.  —  Les  pompes  seront  toujours  alimentées  par  les 
eaux  de  la  ville  recueillies  dans  des  réservoirs,  et  par  un 
puits,  de  manière  que  chacune  des  deux  conduites 
puisse  suffire  au  jeu  des  pompes  établies. 

10.  —  En  dehors  des  salles  de  spectacle,  il  doit  être 
établi  des  bornes-fontaines  alimentées  par  les  eaux  de  la 
ville,  et  pouvant  servir  chacune  au  débit  d'une  pompe  à 
incendie  ;  le  nombre  en  est  déterminé  par  l'autorité. 

11.  —  La  salle  ne  peut  être  chauffée  que  par  des 
bouches  de  chaleur  dont  le  foyer  doit  être  placé  dans  les 
caves.  —  Les  bouches  s'ouvriront  à  O^  30  au-dessus  du 
plancher. 

12.  —  Les  salles  de  spectacles  doivent  être  ventilées 
convenablement;  l'air  y  sera  renouvelé  au  moyen  de 
dispositions  que  l'autorité  appréciera.  —  Des  thermo- 
mètres seront  placés  en  vue  dans  les  corridors. 

13.  —  Aucun  atelier  ne  peut  être  placé  au-dessus 
du  théâtre. 

14.  —Des  ateliers  ne  peuvent  être  établis  au-dessus  de 
la  salle  que  pour  les  peintres  et  les  tailleurs,  et  sous  la 
condition  que  les  planchers  soient  carrelés  et  lambrissés. 


—  366  — 

Dans  le  cas  où  l'on  établirait  des  ateliers  pour  les 
peintres,  la  sorbonne,  à  moins  que  les  combles  ne  soient 
en  fer  et  plâtre,  doit  être  enfermée  dans  des  cloisons 
hourdées  et  enduites  en  plâtre,  plafonnée,  carrelée  et 
fermée  par  une  porte  en  tôle. 

15.  —  Aucune  division  ne  peut  être  faite  dans  les 
combles  que  pour  les  ateliers  désignés  ci-dessus. 

16.  —  La  largeur  des  corridors  de  dégagement,  le 
nombre  et  la  largeur  des  escaliers  ainsi  que  des  portes 
de  sortie  seront  proportionnés  à  l'importance  du  théâtre. 
—  Toutefois,  il  doit  y  avoir  au  moins  deux  escaliers 
spécialement  destinés  au  service  de  la  salle  et  donnant 
issue  à  l'extérieur. 

17.  —  Tout  théâtre  doit  avoir  un  magasin  de  décora- 
tions et  machines  hors  de  son  enceinte ,  établi  dans  des 
conditions  convenables  et  avec  notre  autorisation. 

18.  —  Aucun  magasin  ou  approvisionnement  inutile  de 
décorations  et  machines  accessoires,  ne  doit  être  fait 
sur  le  théâtre  ou  sous  la  scène  :  le  lieu  de  dépôt  doit 
toujours  être  séparé  du  théâtre  par  un  mur  en  maçon- 
nerie. 

19.  —  11  est  interdit  de  louer  une  boutique  ou  un  maga- 
sin dépendant  du  théâtre  à  tout  commerce  ou  industrie 
qui  offrirait  des  dangers  exceptionnels  d'incendie,  notam- 
ment par  la  nature  de  ses  marchandises  ou  de  ses  pro- 
duits. 

Les  tuyaux  de  cheminées  des  boutiques  louées,  s'ils 
traversent  le  théâtre  ou  ses  dépendances ,'  seront  en 
maçonnerie  et  montés  verticalement  jusqu'au-dessus  du 
comble.  Ces  tuyaux  seront,  en  outre,  dans  la  hauteur  de 
la  salle,  garnis  d'une  enveloppe  en  briques. 

20.  —  Personne  autre  que  le  concierge  et  le  garçon  de 
caisse  ne  peut  occuper  de  logement  dans  les  salles  des 
théâtres,  ni  dans  aucune  partie  des  bâtiments  qui  com- 
muniquent avec  les  salles. 

21.  —  L'ouverture   d'un  théâtre   ne   peut  avoir   lieu 


—  367  — 

qu'après  qu'il  a  été  constaté  par  nous  que  la  salle  est 
solidement  construite  et  dans  les  conditions  suffisantes 
de  sûreté,  de  salubrité  et  de  commodité.  —  Des  modi- 
fications apportées  ultérieurement  dans  la  construction, 
dans  la  division  et  dans  les  distributions  intérieures 
nécessiteraient  un  nouvel  examen  avant  la  réouverture. 

22.  —  Les  agents  de  l'autorité  supérieure  doivent  être 
mis  à  même  d'exercer  dans  chaque  théâtre  une  surveil- 
lance quotidienne,  tant  au  point  de  vue  de  la  censure 
dramatique  que  dans  l'intérêt  de  l'ordre  et  de  la  sécurité 
publique. 

23.  —  11  y  aura  un  bureau  pour  les  officiers  de  police 
et  un  corps  de  garde. 

24.  —  Un  commissaire  de  police  est  chargé  de  la  sur- 
veillance générale  de  chaque  théâtre.  —  Une  place 
convenable  lui  sera  assignée  dans  l'intérieur  de  la  salle. 

25.  —  Tout  individu  arrêté,  sôit  à  la  porte  du  théâtre, 
soit  à  l'intérieur,  de  la  salle,  doit  être  conduit  devant  le 
commissaire  de  police,  qui  statuera. 

26.  —  La  garde  de  police  est  spécialement  chargée  du 
maintien  de  l'ordre  et  de  la  libre  circulation  au  dehors 
du  théâtre,  ainsi  que  de  l'exécution  des  consignes  rela- 
tives aux  voitures.  —  Elle  ne  pénétrera  dans  l'intérieur 
de  la  salle  que  dans  le  cas  où  la  sûreté  publique  serait 
compromise  ou  sur  la  réquisition  du  commissaire  de 
police. 

27.  —  Il  y  aura  dans  chaque  salle  de  spectacle  un 
service  médical  organisé  conformément  à  l'arrêté  de 
pohce  du  2  mai  1852.  (V.  cet  arrêté  à  sa  date,  page  351.) 

28.  —  Le  service  des  sapeurs-pompiers  s'effectuera 
conformément  à  la  consigne  générale  du  20  juillet  1862, 
approuvée  par  nous.  (V.  cet  arrêté,  page  354.)  —  Des 
cadrans-compteurs,  servant  à  constater  les  rondes  faites 
pendant  la  nuit,  seront  placés  dans  l'intérieur  des 
théâtres,  sur  les  points  que  désignera  le  commandant 
du  bataillon  de  sapeurs-pompiers. 


—  368  — 

29.  —  Les  directeurs  feront  établir  des  urinoirs  fixes  ou 
mobiles,  appropriés  aux  localités  et  dans  des  conditions 
de  convenance  et  de  salubrité  que  l'autorité  appréciera. 

30.  —  Les  affiches  de  spectacle  ne  pourront  être  apposées 
que  sur  les  emplacements  où  cet  affichage  ne  peut  nuire 
à  la  circulation  et  en  se  conformant,  d'ailleurs,  aux  pres- 
criptions générales  de  l'ordonnance  de  police  du  8  sep- 
tembre 1851. 

31.  —  Est  et  demeure  prohibée,  à  moins  d'une  autori- 
sation et  à  l'exception  de  l'affiche  de  spectacle,  toute 
apposition  d'affiche  ou  inscription  d'annonces  industrielles 
et  autres  à  l'intérieur  des  théâtres,  soit  sur  les  rideaux 
soit  dans  les  péristyles,  escaliers  et  corridors,  soit  dans 
les  foyers. 

32.  —  Il  est  expressément  défendu  aux  directeurs  de 
faire  annoncer  sur  leurs  affiches  la  première  représenta- 
tion d'un  ouvrage  sans  avoir  préalablement  justifié  au 
commissariat  de  police  du  quartier  de  l'approbation  du 
manuscrit  par  l'autorité. 

33.  —  Les  affiches  obligatoires  du  spectacle  du  jour 
seront  imprimées  sur  papier  de  format  de  0  fr.  05  c.  ou 
de  0  fr.  10  c.  au  gré  des  directeurs,  pourvu  que  la 
dimension  ne  dépasse  pas  0  m  63  c.  de  hauteur  sur 
G  m  43  c.  de  largeur. 

34.  —  Les  affiches  ne  pourront  être  apposées  au  des- 
sous de  0  m  50  c,  ni  à  une  élévation  dépassant  2  m  50  c. 
à  partir  du  sol. 

35.  —  Les  changements  survenus  dans  le  spectacle  du 
jour  ne  pourront  être  annoncés  que  par  des  bandes  de 
papier  blanc  appliquées  sur  les  affiches  du  jour,  avant 
l'ouverture  de  la  salle  au  public.  —  Il  est  interdit  aux 
directeurs  d'annoncer  ces  changements  par  de  nouvelles 
affiches  imprimées,  quelle  que  soit  la  couleur  du  papier. 

36.  —  Le  tarif  du  prix  des  places,  pour  chaque 
représentation,  devra  toujours  être  indiqué  très-ostensi- 
blement sur  les  affiches,  en  même  temps  que  la  compo- 


—  369  — 

sition  des  spectacles  annoncés.  —  Un  exemplaire  sera 
apposé  au  bureau  du  théâtre  et  à  tous  autres  qui 
pourraient  être  établis  comme  succursales.  —  Ledit  tarif 
devra  être  inscrit  en  tète  de  chaque  feuille  de  location, 
pour  que  le  public  soit  toujours  utilement  averti  de  ses 
variations.  —  Une  fois  annoncé,  le  tarif  de  chaque  repré- 
sentation ne  pourra  être  modifié, 

37.  —  Les  directeurs  ne  doivent  émettre  aucun  billet 
indiquant  plusieurs  catégories  de  places,  au  choix  des 
spectateurs  ;  réciproquement,  ceux-ci  ne  peuvent  s'ins- 
taller qu'aux  places  portées  sur  leurs  billets. 

38.  —  Ils  ne  peuvent  louer  à  l'avance  que  les  loges  et 
les  places  converties  en  fauteuils  ou  en  stalles,  ou,  dans 
tous  les  cas,  numérotées.  —  La  location  doit  cesser  avant 
l'heure  de  l'introduction  du  public  dans  la  salle. 

39.  —  Les  places  louées  doivent  être  inscrites  sur  la 
feuille  de  location  ;  l'étiquette  indicative  ne  peut  être 
placée  que  sur  celles  qui  figureront  sur  ladite  feuille. 

40.  —  Il  est  enjoint  aux  directeurs  de  faire  remettre 
au  commissaire  de  police  de  service,  avant  l'introduction 
du  public,  un  double  de  la  feuille  de  location. 

41.  —  La  salle  devra  être  livrée  au  public  et  la  repré- 
sentation commencera  aux  heures  indiquées  par  l'affiche. 
—  Des  bureaux  de  distribution  de  billets  devront  être 
ouverts  au  moins  une  demi-heure  avant  le  lever  du 
rideau. 

42.  —  Il  est  défendu  d'introduire  des  spectateurs  dans 
la  salle  avant  l'ouverture  des  bureaux.  —  Aucun  specta- 
teur n'entrera  que  par  les  portes  ouvertes  au  public.  — 
Les  files  d'attente  seront  établis  hors  de  la  voie  publique. 

43.  —  Il  est  défendu  de  s'arrêter  dans  les  péristyles  et 
vestibules  servant  d'entrées  aux  théâtres  et  de  stationner 
aux  abords  de  ces  établissements. 

44.  —  Il  ne  peut  y  avoir  pour  le  service  public,  à  l'en- 
trée des  théâtres,  que  des  commissionnaires  permissionnés 
par  nous  et  porteurs  de  leurs  insignes  réglementaires. 


—  370  — 

45.  —  La  vente  et  Tofifre  de  billets  ou  contre-marques 
sur  la  voie  publique  et  le  racolage,  ayant  ce  trafic  pour 
objet,  sont  formellement  interdits  sur  la  voie  publique. 

46.  —  Tout  individu  trouvé  vendant  ou  offrant  des 
billets  ou  contre-marques  sur  la  voie  publique,  ou  raco- 
lant pour  en  procurer  aux  passants,  sur  lieu  ou  dans 
une  localité  quelconque,  sera  conduit  devant  le  commis- 
saire de  police  qui  avisera. 

47.  —  Il  est  défendu  d'entrer  au  parterre  et  aux 
amphithéâtres  avec  des  armes,  cannes  et  parapluies.  Un 
vestiaire  destiné  à  recevoir  ces  objets  en  dépôt  sera 
établi  dans  chaque  théâtre,  de  telle  sorte  que  la  circula- 
tion ne  soit  pas  gênée.  —  Un  exemplaire  du  tarif  fixé 
par  l'arrêté  de  police  du  10  décembre  1841  sera  affiché 
au  vestiaire.  (V.  cet  arrêté,  page  349.) 

48.  —  Il  est  enjoint  aux  directeurs  de  faire  fermer, 
pendant  le  spectacle,  les  portes  de  communication  de  la 
salle  aux  coulisses ,  aux  foyers  particuliers  et  aux  loges 
des  artistes,  où  il  ne  doit  être  admis  aucune  personne 
étrangère  au  service  du  théâtre.  —  Une  clef  de  la  porte 
communiquant  de  l'intérieur  de  la  salle  à  la  scène  sera 
mise,  avant  la  représentation,  à  la  disposition  du  com- 
missaire de  police  de  service. 

49.  —  Il  est  défendu  de  placer  des  sièges,  chaises  ou 
tabourets  dans  les  passages  ménagés  pour  la  circulation, 
notamment  des  personnes  se  rendant  à  l'orchestre,  au 
parterre,  aux  galeries  et  aux  amphithéâtres. 

50.  —  Il  est  défendu  de  parler  ou  de  circuler  dans  les 
corridors,  pendant  la  représentation,  de  manière  à  trou- 
bler le  spectacle. 

51.  —  Il  est  également  défendu,  soit  avant,  soit  après 
le  lever  du  rideau,  de  troubler  l'ordre  en  causant  du 
tapage,  en  faisant  entendre  des  interpellations  ou  des 
clameurs. 

52.  —  Les  spectateurs  ne  peuvent  demander  l'exécution 
d'un  chant,  morceau  de  musique  ou  récit  quelconque  qui 
n'est  pas  annoncé  dans  les  affiches  du  jour. 


^ 


—  371   — 

53.  —  Nul  ne  peut  avoir  le  chapeau  sur  la  tête  lorsque 
le  rideau  est  levé, 

54.  —  Il  est  défendu  de  fumer  dans  les  salles  de  spec- 
tacle et  sur  la  scène. 

55.  —  Toutes  les  fois  que  dans  une  représentation  on 
devra  faire'usage  d'armes  à  feu,  le  commissaire  de  police 
s'assurera  qu'elles  ne  sont  chargées  qu'à  poudre. 

56.  —  Il  ne  peut  être  annoncé ,  vendu  ou  distribué, 
dans  l'intérieur  comme  à  l'extérieur  des  salles  de  spec- 
tacle, d'autres  écrits  que  les  pièces  de  théâtre  portant 
l'estampille  du  ministère,  et  les  programmes  de  spec- 
tacle, journaux  et  imprimés  dont  la  vente  et  la  distri- 
bution ont  été  dûment  autorisées. 

57.  —  Les  objets  perdus  par  le  public  et  trouvés  dans 
l'intérieur  des  salles  de  spectacle  par  les  ouvreuses  ou 
employés  du  théâtre,  qui  n'auront  pu,  pendant  la  repré- 
sentation, être  remis  au  commissaire  de  police  de  service, 
devront  être  déposés  le  lendemain  au  bureau  du  com- 
missariat du  quartier  où  est  situé  le  théâtre. 

58.  —  A  la  fin  du  spectacle,  toutes  les  portes  latérales 
et  autres  issues  seront  ouvertes  pour  faciliter  la  sortie  du 
public.  —  Les  battants  de  ces  portes  devront  s'ouvrir  en 
dehors,  et  leurs  abords,  tant  à  l'intérieur  qu'à  l'extérieur, 
seront  constamment  libres  de  tout  obstacle  ou  embarras. 
—  Toutes  les  portes  des  loges  s'ouvriront  de  l'intérieur 
et  à  la  volonté  des  spectateurs. 

59.  —  Il  est  expressément  défendu  aux  directeurs  de 
faire  cesser  l'éclairage  dans  l'intérieur  de  la  salle,  dans 
les  escaliers,  corridors  et  vestibules  avant  l'entière  éva- 
cuation du  théâtre. 

60.  —  Des  lampes  brûlant  à  l'huile,  contenues  dans 
des  manchons  de  verre,  allumées  depuis  l'entrée  du 
public  jusqu'à  la  sortie,  seront  placées  en  nombre  suffi- 
sant, tant  dans  la  salle  que  dans  les  corridors  et  escaliers, 
pour  prévenir  une  complète  obscurité,  en  cas  d'extinction 
du  gaz. 


—  372  — 

61.  —  L'heure  des  clôtures  des  représentations  de 
théâtre  est  fixée  à  minuit  précis  en  tout  temps.  Dans  le 
cas  de  représentations  extraordinaires  ou  à  bénéfice,  il 
pourra  être  dérogé  à  la  règle,  mais  sur  la  demande 
expresse  que  devront  nous  adresser  les  directeurs. 

62.  —  Les  voitures  ne  peuvent  arriver  aux-  différents 
théâtres  que  par  les  voies  désignées  dans  les  consignes. 
—  Il  est  défendu  aux  cochers  de  quitter,  sous  quelque 
prétexte  que  ce  soit,  les  rênes  de  leurs  chevaux  pendant 
que  descendent  et  montent  les  personnes  qui  occupent 
la  voiture. 

63.  —  Les  voitures  particulières  ou  retenues,  destinées 
à  attendre  jusqu'à  la  fin  du  spectacle,  doivent  aller  sta- 
tionner sur  les  points  désignés. 

64.  —  A  la  sortie  du  spectacle,  les  voitures  qui  auront 
attendu  ne  pourront  se  mettre  en  mouvement  que  lorsque 
la  première  foule  se  sera  écoulée. 

65.  —  Les  voitures  de  place  ne  chargeront  qu'après  le 
défilé  des  autres  voitures. 

66.  —  Aucune  voiture  ne  pourra  aller  qu'au  pas,  et 
sur  une  seule  file  jusqu'à  ce  qu'elle  soit  sortie  des  rues 
avoisinant  le  théâtre. 

67.  —  Les  directeurs  des  théâtres  subventionnés  restent 
soumis  envers  l'administration  aux  clauses  et  conditions 
de  leurs  cahiers  des  charges.  En  conséquence,  la  pré- 
sente ordonnance  ne  leur  est  applicable  que  sous  les 
réserves  résultant  de  leur  situation  exceptionnelle. 

68.  —  Sont  astreints,  comme  par  le  passé,  à  notre  auto- 
risation préalable,  et  par  conséquent  laissés  en  dehors 
de  la  présente  ordonnance,  les  cafés-concerts  et  cafés 
dits  chantants^  où  les  exécutions  instrumentales  ou  vo- 
cales doivent  avoir  lieu  en  habit  de  ville,  sans  costume 
ni  travestissement,  sans  décors  et  sans  mélange  de  prose, 
de  danse  et  de  pantomime  ;  les  spectacles  de  curiosités, 
de  physique,  de  magie  ;  les  panoramas,  les  dioramas, 
tirs ,   feux  d'artifice ,   expositions  d'animaux ,    exercices 


—  373  — 

équestres,  spectacles  forains  et  autres  exhibitions  du 
même  genre  qui  n'ont  ni  un  emplacement  durable  ni  une 
construction  solide. 

G9.  —  Sont  et  demeurent  rapportés  les  ordonnances  et 
arrêtés  précédents,  en  contradiction  ou  en  double  emploi 
avec  la  présente,  notamment  les  ordonnances  des  9  juin 
1829,  26  décembre  1832,  3  octobre  1837,  22  novembre 
1838,7  mars  1839,  15  juin  1841,  23  novembre  1843, 
30  mars  1844  ;  l'arrêté  du  11  mars  1845,  et  les  ordon- 
nances du  8  mars  1852  et  du  15  mars  1857. 


22  MARS- 11  AVRIL   1866.  —  Décret  qui  rend 
l'exploitation  de  V Opéra  à  V industrie  privée. 

Napoléon,  etc.;  vu  le  décret  du  29  juin  1854,  qui  a 
placé  la  régie  de  l'Opéra  dans  les  attributions  de  notre 
maison  ;  considérant  qu'envisagée  au  point  de  vue  des 
intérêts  de  l'art,  la  gestion  de  l'Opéra  est  digne  de  notre 
haute  protection,  mais  que  cette  protection  peut  s'exercer 
autrement  que  par  la  régie  de  la  liste  civile  impériale; 
considérant  que  la  gestion  d'un  théâtre,  même  de  l'ordre 
le  plus  élevé,  se  rattachant  à  un  très-grand  nombre  de 
questions  présentant  un  caractère  industriel  et  commer- 
cial, et  dont  le  règlement  est  en  conséquence  peu  com- 
patible avec  les  habitudes  et  la  dignité  d'une  adminis- 
tration publique;  sur  la  proposition,  etc.,  etc.,  décrétons 
ce  qui  suit  : 

Article  1er.  — A  partir  du  15  avril  prochain,  la  gestion 
du  théâtre  impérial  de  l'Opéra  sera  confiée  au  directeur- 
entrepreneur  administrant  à  ses  risques  et  périls. 

Art.  2.  —  Le  directeur-entrepreneur  fournira,  pour 
la  garantie  de  son  exploitation,  un  cautionnement  de 
500,000  fr.,  qui  sera  déposé  à  la  caisse  des  dépôts  et 
consignations. 

Il  devra  se  soumettre  aux  clauses  et  conditions   {\n 

32 


—  374  - 

cahier  des   charges  qui  sera  dressé  par  le  ministre  de 
notre  maison  et  des  beaux-arts. 

Art.  3.  —  Indépendamment  de  la  subvention  allouée 
par  l'État,  le  directeur  entrepreneur  recevra,  sur  le  budget 
de  notre  liste  civile,  une  somme  annuelle  de  100,000  fr. 

Cette  subvention  de  la  liste  civile  sera  déposée  pendant 
les  cinq  premières  années  à  la  caisse  des  dépôts  et  con- 
signations,  au  nom  du  directeur  -  entrepreneur ,  pour 
accroître  d'autant  son  cautionnement,  et  les  sommes 
ainsi  versées  ne  lui  seront  définitivement  acquises  qu'à 
la  fin  de  son  exploitation. 

A  partir  de  la  sixième  année,  cette  subvention  lui  sera 
payée  directement. 

Art.  4.  —  Le  directeur- entrepreneur  sera  tenu  d'exé- 
cuter tous  les  engagements  contractés  par  l'administration 
de  notre  liste  civile  pour  l'exploitation  de  l'Opéra,  de 
quelque  nature  qu'ils  soient. 

Art.  5.  —  Les  dispositions  du  décret  du  14  mai  1856, 
qui  a  créé  une  caisse  de  retraite  pour  le  personnel  de 
l'Opéra,  sont  maintenues  à  l'égard  des  artistes,  employés 
et  agents  présentement  tributaires  de  cette  caisse  et  de 
leurs  ayants  droit. 

Toute  mesure  ayant  pour  objet  même  de  modifier  la 
condition  des  artistes,  employés  et  agents  tributaires  de 
cette  caisse,  ne  pourra  être  prise  par  le  directeur-entre- 
preneur qu'après  avoir  obtenu  l'autorisation  ministérielle. 

Ladite  caisse  continuera  à  être  administrée  par  la 
caisse  des  dépôts  et  consignations,  sous  l'autorité  et  la 
surveillance  du  ministre,  etc.,  etc. 


—  375  — 

14-19  JUILLET  1866.  —  Loi  sur  la  durée  des  droits 
de  propriété  accordés  aux  veuves  et  autres  héri- 
tiers. 

Art.  1er.  _  La  durée  des  droits  accordés  par  les  lois 
antérieures  aux  héritiers ,  successeurs  irréguliers,  dona- 
taires ou  légataires  des  auteurs,  compositeurs  ou  artistes, 
est  portée  à  cinquante  ans,  à  partir  du  décès  de  l'auteur. 

Pendant  cette  période  de  cinquante  ans,  le  conjoint 
survivant,  quel  que  soit  le  régime  matrimonial,  et  indé- 
pendamment des  droits  qui  peuvent  résulter  en  faveur 
de  ce  conjoint  du  régime  de  la  communauté,  à  la  simple 
jouissance  des  droits  dont  l'auteur  prédécédé  n'a  pas  dis- 
posé par  acte  entre-vifs  ou  par  testament. 

Toutefois,  si  l'auteur  laisse  ses  héritiers  à  réserve,  cette 
jouissance  est  réduite,  au  profit  de  ces  héritiers,  suivant 
les  proportions  et  distinctions  établies  par  les  articles  913 
et  915  du  Gode  Napoléon. 

Cette  jouissance  n'a  pas  lieu  lorsqu'il  existe,  au  moment 
du  décès,  une  séparation  de  corps  prononcée  contre  ce 
conjoint;  elle  cesse  au  cas  où  le  conjoint  contracte  un 
nouveau  mariage. 

Les  droits  des  héritiers  ou  successeurs,  pendant  cette 
période  de  cinquante  ans,  restent  d'ailleurs  réglés  con- 
formément aux  prescriptions  du  Code  Napoléon. 

Lorsque  la  succession  est  dévolue  à  l'État,  le  droit 
exclusif  s'éteint  sans  préjudice  des  droits  des  créanciers 
et  de  l'exécution  des  traités  de  cession  qui  ont  pu  être 
consentis  par  l'auteur  ou  par  ses  représentants. 

Art.  2.  —  Toutes  les  dispositions  des  lois  antérieures 
contraires  à  celles  de  la  loi  nouvelle  sont  et  demeurent 
abrogées. 


376 


22  DÉCEMBRE  1871.  —  Circulaire  du  ministre  sur 
le  contrôle  des  répertoires.  (Extrait.) 

«  L'administration  n'entend  pas  proscrire  d'une  ma- 
nière absolue  les  pièces  contenant  des  allusions  poli- 
tiques ;  mais  elle  a  le  devoir  d'interdire  toutes  les  œuvres 
qui  portent  atteinte  à  l'ordre  public  et  aux  bonnes  mœurs, 
aussi  bien  que  celles  qui,  en  raison  de  la  situation  des 
esprits  ou  de  certaines  circonstances  locales,  seraient  de 
nature  à  donner  lieu  à  des  désordres. 

«  En  conséquence,  les  préfets  doivent  veiller  à  la 
rigoureuse  observation  de  l'article  3  du  décret  du  6  jan- 
vier 1864,  d'après  lequel  toute  œuvre  dramatique  doit, 
avant  d'être  représentée,  être  approuvée  par  les  préfets.  » 


21  MARS  1872.  —  Extrait  de  la  loi  de  finances 
concernant  les  entrées  de  faveur. 

Art.  2.  —  Toutes  les  loges  de  faveur  concédées  aux 
ministres,  ministères,  secrétaires  généraux,  beaux-arts, 
architectes,  domaines,  préfecture  de  la  Seine,  préfecture 
de  police.  Académie  française,  sont  supprimées.  ». 


TABLE  CHRONOLOGIQUE 

DES    LETTRES-PATENTES,    LOIS,    DÉCRETS,    ORDOMANCES 
ARRÊTÉS,    ETC.,    ETC. 


Pages. 

•1402.  Lettres  patentes  fondant  le   privilège  des  confrères  delà 

Passion 304 

4609.  Edit  concernant  les  heures  de  représentation,  le  prix  des 

places,  l'éclairage  et  la  censure 303 

4669.  Lettres  patentes  pour  le  privilège  de  fondation  de  l'O- 
péra   304 

4680.  Ordonnance  réunissant  les  troupes  de  l'hôtel  de  Bour- 
gogne et  de  la  rue  Guénégaud,  et  fondant  la  Comédie- 
Française  307 

4699.  Ordonnance  de  Louis  XIV  concernant  le  droit  des  pauvres.  93 

4790.  Police  des  théâtres 337 

4794.  Décret  relatif  aux  droits  d'auteurs  et  à  la  police  de  la 

salle 337 

—  Décret  confirmatif  du  précédent 339 

4793.  Décret  sur  la  propriété  littéraire 339 

4796.  Arrêté  sur  la  police  des  théâtres 340 

4799.  Arrêté  relatif  aux  incendies 340 

4  800.  Police  du  théâtre.  Attributions  du  préfet 344 

4  805.  Attributions  de  police 342 

4806.  Propriété  littéraire 342 

4807.  Décret  sur  la  hiérarchie  des  théâtres 343 

—  Décret  complémentaire  du  précédent 345 

32. 


—  378  — 

Pages. 

<809.  Décret  concernant  le  droit  des  pauvres 346 

iSH.  Extrait  du  Code  pénal 347 

1812.  Décret  de  Moscou  sur  le  Théâtre-Français 308 

1822.  Circulaire  ministérielle.  Ceiisure 348 

1838.  Ordonnances  concernant  les  décorations  ininflammables.  348 

1841.  Arrêté  concernant  le  dépôt  des  cannes,  etc 349 

1850.  Loi  sur  l'organisation  du  Théâtre-Français 325 

—  Loi  sur  la  police  des  théâtres 350 

1852.  Arrêté  sur  le  service  médical 331 

—  Décret  sur  l'autorisation 332 

1853.  Circulaire  ministérielle  sur  les  titres  de  pièces   ......  353 

—  Décret  relatif  à  la  censure 353 

1854.  Loi  sur  la  propriété  littéraire 354 

1859.  Décret  concernant  le  Théâtre-Français 332 

1862.  Consigne  générale  pour  le  service  des  sapeurs-pompiers.  354 

1864.  Loi  concernant  la  liberté  des  théâtres 362 

—  Ordonnance  de  police  pour  Paris 363 

1866.  Décret  qui  rend  l'Opéra  à  l'industrie  privée 373 

—  Loi  sur  la  propriété  littéraire 375 

1869.  Arrêté  relatif  au  comité  de  lecture  du  Théâtre-Français.  335 

1871.  Circulaire  ministérielle  sur  le  contrôle  des  répertoires  .  .  376 

1872.  Extrait  concernant  les  entrées  de  faveur 376 


TABLE 


l'ages. 

Abandon I 

A.I  onné i 

Acdémie    de    musique.   (V. 

Opt-^u.)  138 

Accessoire 2 

Accessoires  (Garçon  d')  .   .    .  i 

Accord   .   .       5 

Accroché 5 

Acrobate 5 

Acte 6 

Acteur,  Actrice 6 

Action 8 

Affectation 9 

Afféterie 9 

Affiche 9 

Affiches.  —  Articles  30  à  36 

de     l'ordonnance     du    1«"" 

juillet  1864.  —  Appendice.  368 

Age 12 

Agent  dramatique 13 

Agrément  (Avoir  de  1')  .   .   .  13 

Air 14 

Aisance 14 

Allusion 14 

Amateur 15 

Ambigu  -  Comique     (  Théâtre 

del') 15 

Ame 16 


Pages. 

Amende 16 

Amoureux,  Amoureuse  ...  17 

Amour-propre 17 

Amuser  l'entr'actes 18 

Année  théâtrale 19 

Anniversaire 19 

Annonce 20 

Aparté 21 

Aplomb 22 

Applaudissements 22 

Appointements 23 

Appuyez  ! 25 

A-propos 25 

Arlequin, 26 

Armes  à  feu 27 

—  Art.  55  de  l'ordonnance 
du  1"  juillet  1864.—  Ap- 
pendice    371 

Arrangeur 27 

Artiste 28 

Attitude 29 

Attraper  le  lustre 29 

Auteur 29 

Autorisation 30 

—  Décret  du  30  décembre 

1852.  —  Appendice.  352 

—  Décret  des  6-23  juillet 

1853.  —  Appendice.  353 


—  380 


Pages. 
Autorité.  (V.  Police.) 

Avances 30 

Avant-scène 30 

Avertisseur .     3\ 


Pages. 

Avoir  de  quoi Si 

Avoir  des  planches 32 

Avoir  du  chien 32 

Azor  (Appeler) 32 


B 


Baignoires.   . 33 

Bailler  au  tableau 33 

Baisser 33 

Ballet 34 

Bancs.  (V.  Parterre.).  ...  36 
Bande  d'air,  de  mer,  de  pla- 
fond   36 

Banque 36 

Baryton 37 

Basse 38 

Bâti 38 

Battre  des  ailes 38 

Beauté 38 

Bénéfice 39 

Billet 40 


Billets  d'auteur,  de  faveur.  .  40 
Billets,  contremarques  (Vente 
de).  —  Articles  45,  46  de 
l'ordonnance  du  le""  juillet 

1864.  —  Appendice.   ...  370 

Bis 41 

Bonhomie 4i 

Bouche-trou 42 

Bouffes 42 

Bouffes  -  Parisiens     (  Théâtre 

des) 43 

Bouis-bouis 44 

Bouquet 44 

Brûler  (Se).       , 45 

Brûler  les  planches 45 


Cabale 46 

Cabotin U6 

Cacophonie 46 

Cachet 46 

Cadre 47 

Camarade 47 

Canard 48 

Cantonade 48 

Capot 48 

Caractère 48 

Casaque 48 

Cascade 49 

Casser  du  sucre 49 

Célibat 49 

Censure 50 

—  EditdeHenri  IV.— AjD- 

pendice 303 

—  Circulaire  du  10  octobre 

1822.  —  Appendice.  348 

—  Décret  du  30  décembre 

1852.  —  Appendice  .  352 


—  Décret  des  6-25  juillet 

1853.  —  Appendice.  353 

Chambrée 52 

Changement  à  vue 52 

Charge 53 

Chargez 54 

Châssis 54 

Chat 54 

Châtelet  (Théâtre  du)  ...  .  54 

Chauffer  la  scène 55 

Chef  de  claque.  (V.  Claque.)  62 

Chef  d'emploi 55 

Chien.  (V.  Avoir  du  chien)  .  32 

Chœur 56 

Chorégraphie 56 

Choriste 56 

Chut! 56 

Chute 57 

Cintre 59 

Claque,  Claqueurs 59 

Claque 62 


381 


Pages. 

Colin 62 

Comédie 62 

Comédie-Française.  (V.  Théâ- 
tre-Français)   265 

Comédien.  ". 64 

Comique 66 

Comité ■  ■  •     66 

Comité  de  lecture.  Arrêté  du 
22  avril  1859  pour  la  Co- 
médie-Française.— Appen- 
dice  332 

Commande 67 

Commerçant 67 

Commissaire.  —  Appendice. 
Commissionnaire.   Article  kh 
de    l'ordonnance     du    l^"" 
juillet  1864.  —Appendice.  369 

Comparse 68 

Concours 68 

Confrères  de   la  Passion.  — 

Appendice 301 

Congé 69 

Conservatoire.  (V.  Ecole  de 
chant) 102 


l'agos. 
Construction  de  salles.  Arti- 
■    des   l*:'-  à  20  de  l'ordon- 

Tiancc  du  le-- juillet  1864. 

—  Appendice 363 

Contre-marque 69 

Contre-poids 70 

Contre-sens 70 

Contrôleur 70 

Coquette  (Grande) 71 

Corps  de  ballet 71 

Correspondant.     (V.     Agent 

dramatique.). 13 

Corridor 71 

Coryphée 71 

Costière 71 

Costume 72 

Coulisses 72 

Couplet 73 

Coupon 73 

Coupure 74 

Cour  (Côté) 74 

Cracher  sur  les  quinquets  .  .  74 

Critique 74 


Danse 75 

Danseuse 75 

Débit .  , 76 

Débutant 76 

Débuts 77 

Déclamation 80 

Déclaration 80 

Décor 81 

Décoration 81 

Décret  de  Moscou 83 

—    Appendice 308 

Dédit 83 

Défauts 84 

Déjazet  (V.  Emploi,  travesti)  104 

Dénoùment 85 

Désagrément  (Avoir  du) .  .   .  85 

Dessous 87 


Détailler  le  couplet 86 

Diction 86 

Directeur 87 

Distribution 90 

Double,  Doublure 91 

Drame 91 

Droit  des  pauvres 92 

—  Décret   du  9  décembre 

1809.  —Appendice.  346 

Droits  d'auteur '  97 

—  Décret  du  19  novembre 

1859  pour  la  Comé- 
die-Française. —  Ap- 
pendice    332 

Duègne 99 

Dugazon 99 


—  38-2  — 


Pages  _ 

Eau 99 

Eclairs 100 

Eclairage iOi 

—  Edit  de   Henri   lY. 

—  Appendice..  .  303 

—  Articles  59  et  60  de 

l'ordonnance    du 
1"  juillet    i864. 

—  Appendice .  .  371 
Ecole  de  chant  et  de  déclama- 
tion  <02 

Effet 103 

Egaver 104 

Emplois 104 

Empoigner 105 


Pages. 

Engagement 106 

Enlever 107 

Ensemble 107 

Entr'actes 107 

Entrailles 108 

Entrée 109 

Entrées  de  faveur.  —  Loi  du 
21  mars  1872.  —   Appen- 

dice 376 

Envoyer 110 

Equipe 110 

Escamoter  le  mot 110 

Etoile 110 

Etre  en  scène 111 

Expression     111 


Faire  de  la  toile 112 

Faire  feu 112 

Faire  la  salle 112 

Farces 113 

Farceurs 115 

Faux-châssis 116 

Féerie 119 

Femmes 117 

Ferme 117 

Feux 118 

FiceUes 119 


Figurant.  (V,  Comparse.) .  .    68 

Fil 119 

Financier 119 

Folies -Dramatiques  (Théâtre 

des) 119 

Foudre 120 

Four 120 

Fover 121 

Frise 121 

Fugue 122 

Fusillade 122 


Gaîté  (Théâtre  de  la).   ...  122 

Ganaches 124 

Gairde-robe 124 

Gargariser  (Se) 125 

Gautier-Garguille.   (V.   Far- 
ceurs.)   115 

Genre 125 

—  Décrets  des  25  avril  et 
29  juillet  1807.  — 
Appendice 343 


Gloire 125 

Gourer  (Se) 426 

Grande    Casaque.  (Y.  Casa- 
que.)    48 

Grande    Coquette.    (V.    Co- 
quette.)   71 

Gratis 126 

Gratter  au  fover 127 

Grêle.  (V.  Pluie.) 207 

Gril 127 


\ 


—  383  — 


Pages. 

Grimaces <28 

Grime 128 

Gros -Guillaume.     (V.    Far- 
ceurs.)    115 

Grossesse 128 


Pajres. 

Grues 129 

Guiilot-Gorgu.  (V. /farceurs.)  115 
Gymnase-Dramatique  (Théâ- 
tre du)  130 


H 


Habillement 131 

Habilleuse 132 

Herse 132 

Heures 133 


—    Edit  de  Henri    IV.  — 

Appendice 303 

Hoquet \'ik 

Hôtel  de  Bourgogne  .   .   .   .134 


I 


Illusion 136 

Imitation 137 

Incendie 138 

—  Arrêté     du    21     mars 

1799.—  Appendice.  340 

—  Ordonnance  du  17  mai 

1838  sur  les  déco- 
rations ininflamma- 
bles. —  Appendice .  348 

—  Consigne  du  20  juillet 

\%<o2.  —  Appendice .  354 


—  Articles  7  à  11  de  l'or- 
donnance du  l^i'juil- 
let  1864.  —  Appen- 
dice  365 

Indisposition 138 

Indulgence 139 

Ingénue,   Ingénuité 139 

Ingrat 140 

Interdiction 140 

Intrigue 141 

Italiens 141 


Jardin  (Côté-) 143 

Je  ne  sais  quoi 144 

Jeton 144 

Jeu 145 


Jeu  de  physionomie  .    .    .   .145 

Jeune  premier 145 

Jocrisse 146 

Journaux  dramatiques  .   .   .146 


La Ma 

Lancer  le  mot 147 

Lapsus  linguœ 148 

Laruetlc 149 

Législation  théâtrale.   .    .    .  149 

Le\er  de  rideau 150 


Liberté  des  théâtres  .   .   .   .150 
—    Loi    des    6-18  janvier 

1864.  —  Appendice  362 

Libretto 155 

Licence 156 

Livrée 156 


384 


Pages. 

Location iSe 

—  Articles  38,  39,  40  de 
l'ordonnance  du  i«^ 
juillet  4864.  —  Ap- 
pendice   369 


liOges 1  : 

Lointain 13 

Lorgnette 4  5 

Lustre 15 


M 


Machiniste, 158 

Magasin.   . 158 

Magasinier 159 

Maillot 159 

Manières 160 

Manteau  (Rôles  à) 160 

Manteau  d'Arlequin  .    .   .    .161 

Maquillage 161 

Marcher  sur  sa  longe.   .   .    .162 

Mariage 163 

Marivaudage 165 

Masque 165 

Mâts 165 

Médecin, 165 

Médecine 166 

Mélodrame 167 


Mère  d'actrice 168 

Mettre  du  bois 169 

Mime 170 

Mimique 170 

Mimodrame 170 

Mise  en  scène 171 

Monologue 172 

Monopole 172 

Monotonie 173 

Morale 173 

Moralistes 175 

Moyens 175 

Mur 176 

Musique 176 

Mystères 176 


N 


Naïvetés 178  1  Neige 180 

Naturel 180  |  Nœud 180 


Odéon  (Théâtre  de  1').   ...  181 
OEil  du  rideau 183 


Opéra. 


Privilège  de  fondation. 
—  Appendice  .   .   . 

Décret  des  22  mars-11 
1866  qui  rend  l'ex- 
ploitation à  l'indus- 
trie privée. — Appen- 


138 
304 


dice 373 

Opéra  (Salle  du  Nouvel-)  .   ,  187 

Opéra-Comique 188 

Opérette 191 

Orchestre 192 

Ours 192 

Ouverture 193 

Ouvreuse 193 


385 


Pages. 

Palais-Royal  (Théâtre  du).  .  194 

Panne 195 

Pantomine 196 

Paradis 196 

Parodie 197 

Parterre 201 

Partition 203 

Passe,  Passade 203 

Passer 203 

Pélaçie  (Sainte-) 204 

Pension  de  retraite 204 

—  Articles  2,  3  et  4  du 

décret  du  19  novem- 
bre et  5  décembre 
1859.  —  Appendice  332 

Père  noble 205 

Physionomie 205 

Physique 206 

Places 206 

—  Article  37  de  l'ordon- 

nance du  l*"-  juillet 

1864.  —  Appendice  369 

Plafond 207 

Plans 207 

Planter 207 

Pluie,  Grêle 207 

Pluie  de  feu 208 

Police  des  théâtres 208 

—  Loi    des    16-24     août 

1790.  —  Appendice  337 

—  Décret  des  13-19  jan- 

vier 1791.—  Appen- 
dice   337 

—  Arrêté  du    14  février 

1796.  —  Appendice.  340 

—  Arrêté   du   le"-  juillet 

1800.  —  Appendice.  341 

—  Décret  du  8  décembre 

1805.  —  Appendice  342 

—  Loi  du  30  juillet  1850. 


Pages. 

—  Appendice.  .  .  .  350 

—  Ordonnance      du     lo- 

juillet  1864.  —  Ap- 
pendice   363 

Pompiers 209 

—  Consigne  du  20  juillet 

1862.  —  Appendice  354 

Pont-volant 210 

Portant 210 

Praticable 211 

Première 211 

Prendre  du  souffleur 212 

Privilège 212 

Prix  des  places.  —  Edit  de 
Henri  IV.  —  Appen- 
dice  303 

—  Article  36  de  l'ordon- 

nance du  i"  juillet 
1864.  —  Appendice  368 

Programme 212 

Prologue  .  .  , 213 

Prononciation 214 

Propriété  littéraire.  .  .  .   ,  .  215 

—  Décret  des  13-19  jan- 

vier 1791 .  —  Appen- 
dice   337 

—  Décret  des  19  juillet  et 

6  août  1791.  —Ap- 
pendice   339 

—  Décret    du   19   juillet 

1793.—  Appendice  339 

—  Décret  du  8  juin  1806. 

Appendice 342 

—  Article    428    du  Code 

pénal.  —  Appendice  347 

—  Loi  du  8   avril  1854. 

—  Appendice ....  354 

—  Loi    des    14-19  juillet 

1866.  —  Appendice  375 
Public 216 


Queue 


Q 

218  I  Quiproquo 


219 


33 


—  386  — 


Raccord 220 

Rampe '.  .  .  220 

Rappel 221. 

Rat 221 

Récit 223 

Reconduire 223 

Régie 223 

Régisseur 224 

Relâche.  . 225 

Renaissance  (Théâtre  de  la).  225 

Rentrée 225 

Répertoire 226 

—  Circulaire  du  22  dé- 
cembre \  871 . —  Ap- 
pendice   376 

Répétition 227 


F»ge8. 

Réplique" 228 

Représentation  extraordinaire  228 
Retraite.  (V.  Pension.).  ...  204 

Revue 229 

Rideau 230 

Rideau  de  fond 231 

Rien  dans  le  \entre 231 

Rivalité 231 

Rognures 232 

Rôles  . 232 

Romains 233 

Ronde 233 

Ronfler 234 

Rouge.  . 234 

Rue 234 

Rustique 234 


Salut 234 

Saynète 235 

Scène 235 

Semainier 238 

Servir 238 

Service 238 

Service  médical. —  Arrêté  du 
2  mai  1852.  —  Appendice  351 

Sifflet 239 

Sociétaire 242 

—  Articles  3  et  4  du  dé- 
cret des  19  novembre 
et  5  décembre  1859. 
—  Appendice  ...  331 


Soigner 243 

Sortie ■  .    .   .   .  244 

Sotie 244 

Soubrette 246 

Souffleur 246 

Soutenir 248 

Spectateurs 248 

Style 249 

Subvention 253 

Succès 2S4 

Sujet 256 

Supplément 256 

Suppression 257 


Tableau 257 

Tambour.  (V.  Treuil.) 

Tartine 258 

Théâtre  chez  les  anciens  .    .  259 

Théâtre  de  la  foire 262 

Théâtre-Français 265 


Ordonnance  de  Louis 
XIV  pour  la  fonda- 
tion. —  Appendice.  307 

Décret  de  Moscou.  — 
Appendice 308 

Décret     réglementaire 


—  387 


Pages. 

des  27  avriMI  mai 
i850.—  Appendice.  325 

Théâtre-Lyrique 271 

Titres  de  pièces. —  Circulaire 
du  iO  juillet  1833.  —  Ap- 
pendice  353 

Toile 274 

Tonnerre 275 

Tour  de  faveur 275 

Tournée 275 

Tour  de  faveur 275 

Tradition 276 

Tragédie 277 


ragos. 

Traînée 280 

Traître 280 

Trappe 28i 

Trappe  anglaise.    ....  28i 

Travailler  (Se  faire)  ....  281 

Travesti 282 

Treuil 283 

Trial      283 

Tringle 283 

Trottoir  (Grand) 284 

Troupe 284 

Truc 284 


u 


Unité.  .   . 
Ustensilier. 


285  I  Utilité. 
286 


286 


Vanité 287 

Variétés  (Théâtre  des)  ...  289 

Vaudeville 290 

Vaudeville  (Théâtre  du).   .   .  291 

Vaudevilliste 292 

Vedette 293 

Vent 293 

Vertu 293 

Veste 294 

Vestiaire 295 


Vestiaires. —  Arrêté  du  10  dé- 
cembre 1841  sur  le  dépôt 
des  cannes,  etc.  —  Appen- 
dice  

Voir  au  gaz,  à  la  rampe  .    . 

Voitures.  —  Articles  62  à  66 
de  l'ordonnance  du  l"""  juil- 
let 1864.  —  Appendice.   . 


349 
296 


372 


Vol,  Vol  oblique 296 


Zèle 


297 


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Composé  en  fiwrae  de  déclamation 
PAR  ÉRASME 

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et  son  époquei  des  1%'oies  et  une  Bibliographie 

PAR«EMMANUEL  DES  ESSARTS 

Vrofesseur  à  la  faculté  des  lettres  fle  Clemionl 

•S/  eaux- fortes  d'après  les  dessins  d'Holbei7i,  un  frontispice  di 
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d'après  ^édition  de  1663 

Avec  une  Préface  et  des  Notes  par  Charles  Baumi 
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