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Full text of "La methode directe dans l'enseignement des langues vivantes. --"

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l'enseignement   des    langues 
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THE  LIBRARY 


The  Ontario  Institute 


for  Studies  in  Education 


Toronto,  Canada 


THE  ONTARIO  INSTITUTE  FOR  STubiE?.  IN  EDUCATION  -  LIBÏÏARY 


LA 


MÉTHODE  DIRECTE 


DANS 


'ENSEIGNEMENT  DES  LANGUES  VIVANTES 


PAR 


Professeur    à    l'Université    de    Louvain 


TROISIÈME  ÉDITION 


BRUXELLES 
MAISON  D'ÉDITION  ALFRED  CASTAIGNE 

28,  Rue  de  Berlaimont,   28 
1004 


L  J  B  R  A  R  Y         I 

NOV  1  2  1969 

THE  ONTASIO  IN5TITUTE 
FOR  STUDIES  in  EDUCATION 


MÉTHODE  DIRECTE 


DANS 


L'ENSEIGNEMENT  DES  LANGUES  VIVANTES 


LA 


MÉTHODE  DIRECTE 


DANS 


L'ENSEIGNEMENT  DES  LANGUES  VIVANTES 


PAR 


Professeur    à    l'Université    de    Louvain 


TROISIEME  EDITION 


BRUXELLES 
MAISON  D'ÉDITION  ALFRED  CASTAIGNE 

28,  Rue  de  Bcibimont,  28 


190  1 


TOUS  DROITS  RESERVES. 


Tous  les  exemplaires  sont  revêtus  de  la  signature 
de  VauteuP. 


UN    MOT    AL    LECTEUR 


Notre  troisième  édition  n'est  pas  une  simple  reproduction  des  deux 
précédentes  :  nous  nous  sommes  attaché  à  donner  à  notre  étude  un 
caractère  essentiellement  pratique,  et  nous  avons  tenu  compte  avec 
soin  de  toutes  les  publications  parues  depuis  1901. 

Louvain,  décembre  1903. 

F.  COLLARD. 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  witii  funding  from 

University  of  Ottawa 


littp://www.arcliive.org/details/lametliodedirecteOOcoll 


La  Méthode  directe 
dans  l'Enseignement  des  langues  uiuantes  ^'^ 


§  1.  —But. 

But  pratique  et  littéraire.  —  Le  but  do  l'étude  des  langues 
vivantes  est  double  :  pratique  et  littéraire,  ou  utilitaire  et  désintéressé. 
En  d'autres  termes,  on  apprend  l'allemand  et  l'anglais  pour  les  parler, 
les  écrire  et  les  lire,  tandis  qu'on  apprend  les  langues  anciennes 
seulement  pour  les  lire.  Cette  formule  précise  nettement  la  diversité 
des  buts,  tels  qu'ils  sont  réclamés  par  les  besoins  de  la  société  actuelle  : 


fl)  H.  Breymaun,  Die  neusprachllche  Reform-Literatur  :  a)  von  1876-1893,  Leipzig-,  1893  ; 
n;  von  1891-1899,  id.,  1900,  Eine  bibliographisch-hrUische  Uebersicht,  fait  un  relevé  de  tous  les 
ouvrages  qui  exposent  lu  métliode.  On  trouve  aussi  un  bon  choix  de  travaux  dans 
AV.  Muencli,  Franzoesisch  (1902  ,  et  dans  F.  GUuining-,  Englisch  1903),  deux  monot'rapliies  qui 
forment  la  seconde  parUe  du  3*'  tome  du  Hxndbuch  dfr  Erzichungs-und  Unlenichislehre  fuer 
hoeiieve  Sckulen  de  Baumeister.  Je  recommande  particulièrement  la  lecture  de  :  Hartmann, 
Die  Anscliauiing  im  neuspracltlulicn  î/zi/enic/it,  Wien,  1895;  Le  même,  Reiseelndriudie  und 
BeohachtwKjen  elnes  deuts  lien  Neupfidoligen  in  der  Schweiz  und  in  Frankreich,  Leipzig, 
1897  ;  J.  HubSCher,  De  l'enseignement  des  langue!;  virantes,  Lausanne,  1897  ;  R.  Horner,  L'ensei- 
gnement des  langues  vivantes  dans  les  collèges,  2c  édition,  Friboary,  1901  ;  J.  ]\Ie'.on,  Li  mi'thode 
intuitive  dins  l'enseignement  des  langues  vivantes,  l.  Historique.  II.  Avantages  de  la  méthode). 
Tournai,  1900;  Les  langues  vivai.tcs  en  Hollande,  dans  la  Revue  des  Humanités,  ô^  année,  p.  305; 
Le  principe  de  la  suppression  des  traductions  dans  l'enseignement  scolaire  des  langues  vivantes, 
Bruges,  1903  ;  Sigwalt,  La  n'forme  de  l'enseignement  des  langues  vivantes,  dans  la  Revue 
internationale  de  l'enseignement,  1931,  t.  2,  p.  OCO  ;  W.  Vietor,  Die  Methodili  des  neu^prachlichen 
Vnterrichts,  Leipzig,  1902  ;  F.  Baumann,  Reform  und  Anlirefonn  im  neusprachlichen 
Unterriclit,  Berlin,  1002  ;  O.  Tliiergen,  Methodik  des  neuphilologischen  Unterrichts,  Leipzig, 
1902;  J.  Firmcry,  La  première  période  de  l'enseignement  des  Langues  vivantes,  d'après  les  nou- 
veaux programmes,  dans  la  Revue  universitaire,  1902,  2,  p.  329  et  suiv.,  et  Quelques  mots  sur  la 
deuxième  période  dans  l'enseignement  des  langues  vivantes,  ibidem,  p.  41()  ;  La  méthode  directe  et 
son  application,  dans  la  Revue  de  l'enseignement  des  langues  vivantes,  1902,  p.  385v reproduction 
du  premier  art:clc  de  la  Revue  universitaire  :  Schweitzer,  La  méthodologie  des  langues  virantes 
dans  la  Revue  universitaire,  1903, 1,  p.  462  ;  2,  p.  1  et  s.,  et  p.  105  et  suiv.  ;  I-ichtenberger,  Du  but 
et  de  la  milhodc  de  l'enseignement  des  langues  vivantes,  Godart,  La  lecture  directe,  et  Cnmer- 
I.vnck,  Des  devoirs,  dans  la  Revue  de  l'enseignement  des  langues  vivantes,  1903,  )).  4(35  et  suiv.  ; 
H.  Alnien,  Lx  mjlhode  directe  dans  l'enseignement  des  langues  vivantes,  programme  d'Ecliter- 
nach,  Luxembourg,  l'.lOj.  —  La  Revue  pratique  de  l'enseignement  à  l'usage  des  établissements 
à'édu:ation  du  diocèse  de  Bruges,  t.  2,  p.  177,  donne  la  traduction  dun  article  de  Sclimidt,  Les 
premières  leçons  de  françxis  en  Allemagne,  publié  dans  les  Lehrproben  und  Lehrgaenge,  25. 
On  lit,  dans  la  même  revue,  f .  4,  p.  3,  l'exposé  de  la  méthode  Carré,  fait  par  M.  Rommel  :  La 
manière  d'enseigner  une  première  langue  étrangère  à  de  jeunes  en  funts.  — J"ai  moi-même  exposé 
l'enseignement  des  langues  vivantes  dans  le  Bulletin  bibliographique  et  pédagogique  du  Musée 
belge,  1900,  p.  93  et  suiv  ;  1901,  p.  23  et  suiv.  Mon  exposé  de  la  méthode  directe  est  ijrécédé  d'une 
esquisse  des  principales  méthodes  suivies  dans  renseignement  des  langues  vivantes  ;  une 
seconde  édition  de  ce  travail,  publiée  chez  Castaigne  (190i;,  ne  contient  pas  cet  ai)erçu. 


»  Nous  ne  sommes  pas  exposés,  dit  M.  Bréal  ('),  à  rencontrer  des 
contemporains  de  l'empereur  Auguste,  au  lieu  que  nous  coudoyons 
tous  les  jours  des  Allemands  et  des  Anglais.  N'avons-nous  pas  des 
expositions,  des  congrès,  des  conférences  internationales  ?  Vous  dites 
que  l'occasion  de  parler  se  présentera  rarement  ;  mais  si  nous  voulons 
que  le  Français  sorte  de  son  pays,  il  faut  le  munir  pour  le  voyage. 
Quelle  envie  voulez-vous  qu'il  ait  d'aller  au  loin  si,  après  dix  ans 
d'étude,  il  ne  sait  seulement  pas  prendre  son  billot  de  chemin  de  fer  ?  " 
Loin  de  moi,  en  poursuivant  ce  but  pratique,  la  pensée  de  viser 
trop  haut  et  de  songer  à  obtenir  de  nos  élèves  qu'ils  parlent  et  lisent 
une  des  deux  langues  étrangères  connne  leur  langue  maternelle  :  le 
régime  de  l'enseignement  collectif  et  l'insuffisance  des  heures  de  classe 
s'y  opposent.  Ainsi,  en  ce  qui  concerne  l'art  de  parler,  on  devra  se 
déclarer  satisfait,  si  l'élève  peut  s'entretenir  couramment  avec  des 
étrangers  sur  les  principales  nécessités  de  la  vie. 

§  2.  —  Exposé  général  de  la  méthode  directe  ou  intuitive. 

Acquisition  de  la  langue  par  l'oreille.  —  De  la  différence  des 
buts  résultent  les  difïerences  de  méthodes.  Pour  le  latin  et  le  grec, 
lacquisition  de  la  langue  se  fait  surtout  par  les  yeux;  pour  les  langues 
vivantes,  par  ïoreille.  p]n  conséquence,  d'un  côté,  la  lecture  des  œuvres 
littéraires  vient  en  première  ligne  ;  de  l'autre,  elle  est  rejotée  à  la  fin, 
pour  faire  place  d'abord  à  l'étude  de  la  langue  usuelle. 

Ainsi  pense  aussi  M.  Bréal  (-).  Il  divise  l'enseignement  d'une  langue 
vivante  en  trois  périodes,  selon  l'objet  qui  doit  dominer  dans  chacune 
d'elles.  «  Durant  la  première,  le  professeur  donnera  sa  principale 
attention  à  la  prononciation.  Pendant  la  seconde,  il  s'attachera  surtout 
à  la  grammaire  et  au  vocabulaire.  La  littérature  formera  l'occupation 
principale  de  la  troisième.  Il  est  clair  que  celte  division  a  quelque 
chose  d'artificiel,  puisqu'on  ne  saurait  montrer  la  prononciation  sans 
faire  connaître  en  même  temps  des  mots,  et  puisque  la  littérature  ne 
met  évidemment  pas  fin  à  l'étude  de  la  langue.  Mais,  selon  le  degré 
d'avancement  de  l'élève,  l'un  ou  l'autre  point  de  vue  l'emportera.  Les 
trois  choses  nous  paraissent  également  nécessaires  :  si  toutefois  il 
fallait  en  sacrifier  une,  ce  serait  la  troisième  qui  pourrait,  avec  le 
moins  de  dommage,  être  retranchée  ;  car  il  serait  toujours  loisible  à 
l'étudiant  devenu  honmie  de  compléter  son  savoir,  au  lieu  que  pour 
les  premières  —  une  expérience  fréquente  le  prouve  —  les  omissions 
et  les  erreurs  ne  se  laissent  guère  réparer.  » 


(n  M.  Bréal,  De  l'ensfignemeiU  des  langues  vicanles,  Paris;,  1803,  p.  ID. 
(2)  Ouvrage  cité,  p.  ?5  et  suiv. 


—  9  — 

Autrefois,  on  abordait  le  plus  vile  possible  la  litlératiire  ;  on 
s'empressait  de  lire  Schiller  et  Goethe,  qu'on  traduisait  à  coups  de 
dictionnaire,  et  l'on  pensait  qu'il  serait  aisé  de  passer  de  la  langue 
écrite  à  celle  de  la  conversation.  "  Le  passage  est  cependant  difficile, 
dit  M.  Bréal  ('),  et  d'autant  plus  difficile  que  vous  aurez  tardé  plus 
longtemps.  On  peut  vous  citer  des  hommes  qui  ont  écrit  des  livres  de 
critique  sur  Chaucer  et  Miltoi],  qui  n'auraient  pas  su  demander  leur 
chem.in  à  un  policeman  de  Londres  ;  encore  moins  auraient-ils 
soutenu  en  anglais  une  discussion  dans  une  société  littéraire  ou 
politique.  //  leur  fallait  voir  les  mois  écrits  pour  les  comprendre. 
Quant  à  leurs  propres  idées,  l'habitude  leur  manquait  pour  trouver  à 
l'instant  l'expression  convenable.  Celui  qui  lit  les  auteurs,  est  dans 
la  situation  d'un  homme  que  les  mots  et  les  tours  de  la  langue 
viennent  trouver,  sans  qu'il  ait  d'autre  peine  que  de  les  reconnaitre  : 
celui  qui  parle  doit  tirer  de  lui-même  ces  tours  et  ces  mots.  II  y  a 
contradiction  à  attendre  passivement  l'éclosion  d'une  faculté  active.  » 

'•  Au  lieu  de  passer  de  la  langue  écrite  à  la  langue  parlée  (chose, 
comme  nous  venons  de  le  voii-,  diflicile  et  problématique),  la  marche 
indiquée  par  la  nature  est  de  passer  de  la  langue  parlée  à  la  langue 
écrite.  »  -  N'est-ce  pas,  dit  ailleurs  encore  M.  Bréal  (-),  la  marche 
que  nous  avons  tous  suivie  ?  N'ous  avons  conversé  avec  nos  parents, 
i;os  frères  et  sœurs,  nos  amis  et  nos  camarades,  avant  de  lire  Bossuet 
et  Racine.  » 

Di^:FINITION    DE    LA    METHODE    DIRECTE    OU     MATERNELLE.    —    On    le 

voit.  A  l'heure  actuelle,  on  veut  que  les  élèves  apprennent  une 
langue  par  Yoreille,  qu'ils  la  parlent  et  l'entendent  parler  dès  la 
première  heure  {^),  au  lieu  d'en  lire  ou  plutôt  d'en  ànonner  des  textes. 
Cette  méthode  qu'on  préconise,  c'est  la  méibodc  directe,  ou  maternelle, 
ou  intuitive,  qui,  pour  enseigner  une  langue,  se  sert  de  cette  langue 


(1)  Ouvrage  cité,  p  19. 

i2)  M.  Uréal,  Comment  on  ap2^mid  Ux  htngves  étrangères,  dans  la  lîevve  internationale  de 
l'enseignement ,  1880,  t.  1,  p.  2j7. 

(3)  «  Pour  parler  —  je  veux  dire  i)ar  là,  pour  exprimer  ses  besoins  et  ses  impressions  les 
plus  immédiates,  pour  exprimer  ce  qui  est  proprement  du  domaine  de  la  conversation 
usuelle  — pour  parler,  il  n'est  besoin  que  d'un  vocabulaire  extrêmement  restreint.  L'ouvrier, 
sans  culture,  au  bout  de  quelques  semaines  passées  dans  un  pays  étranger,  en  parle  la 
langue.  Oh  !  ce  parler  a  des  limites  étroites,  mais  c'est  parler,  on  s'est  beaucoup  raillé  de 
nous  en  disant  que  c'est  ce  parler-I;'i,  ce  qu'on  a  appelé  le  parler  de  bonnes,  l'allemaitd  ou 
l'anglais  de  garçons-  d'iiôtel,  que  nous  voulions  désormais  donner  comme  but  à  notre 
enseignement.  Non  1  loin  d'en  être  le  couronnement,  i!  en  sera  la  base  et  le  début;  but  de 
l'enseignement  pendant  les  premiers  temps,  il  en  deviendra  le  moyen,  et,  tout  en  s'enri- 
cliissant  et  en  se  perfectionnant  lui-même,  il  contribuera  à  donner  is.  tout  ce  que  nous 
enseignerons,  ce  caractère  de  vie  dont  l'absence  s'est  troj)  fait  sentir  jusqu'ici. 

A  vrai  dire,  dès  ce  début  même,  parler  n'est  pas  le  vrai  but  que  nous  cherchons  à 
atteindre;  le  but,  c'est  de  transporter  tout  de  suite  l'enfant  dans  une  sorte  d'atmosphère 
artificielle  et  comme  en  jiays  étranger  ;  le  but,  c'est,  en  l'exerçant  k  parler,  de  lui  donner  des 
facultés  et  des  habitudes,  la  faculté  de  saisir  exactement  les  sons  prononcés  et  la  faculté  de 
prononcer  lui-même  ces  sous  correctement  et  sans  elTorî,  rhabilude  de  saisir  directement 


—   10  — 

mémo,  habitue  l'enfant  dès  le  début  à  se  passer  du  français  et 
à  comprendre  directement.  On  renonce  donc  à  la  méthode  indirecte, 
qui  exerce  l'clèvc  à  la  version  et  au  thème,  et  l'on  emploie  la  méthode 
orale,  basée  sur  l'intuition  (^1. 

La  méthode  dii'ectc  ou  intuitive,  imitant  en  cela  la  mère  ou  la 
nourrice,  montre  les  objets  dans  la  nature  ou  par  reproduction,  en  dit 
les  noms  et  les  fait  répéter  par  les  élèves  jusrpi'à  complète  assimilation. 

Bien  qu'on  donne  à  cette  méthode  l'épithète  de  maternelle  (2),  on  ne 
peut  oublier  que  rélève  n'est  plus  le  petit  enfant  assis  sur  les  genoux 
de  sa  mère.  La  situation  est  bien  changée.  D'abord,  l'élève  possède 
déjà  un  langage,  c'est-à-dire  un  vocabulaire,  une  grammaire,  dos 
manières  de  s'exprimer  ;  c'est  donc  une  seconde  langue  qu'il  veut 
apprendre,  et  qui  fréquemment  viendra  se  glisser  entre  l'objet  montré 
et  sa  désignation  en  un  nouvel  idiome  ;  ensuite,  il  n'a  plus  au  même 
degré  que  l'enfant,  la  faculté  d'imitation  irrélléchie  ;  enfin,  il  ne 
consacre  dans  ses  classes  qu'un  petit  nombre  d'heures  à  l'étude  d'une 
langue  étrangère,  et  il  n'est  pas  seul  en  tète  à  tête  avec  son  maitre, 
qui,  partant,  doit  partager  ses  questions  entre  toute  la  classe.  Ce  sont 
là  des  conditions  défavorables  pour  notre  collégien  (').  Mais  il  en  est 
d'autres,  propices  :  son  intelligence  s'est  développée;  sa  mémoire  s'est 
fortifiée  ;  il  a  acquis  un  certain  nombre  de  notions,  et  il  sait  faire  un 
elTort  de  volonté. 

Avantages  de  la  méthode  directe.  —  Quoi  qu'on  puisse  objecter 
contre  la   méthode  directe  (''),   il  est   certain  qu'elle    présente    des 

et  sur-Ie  champ  le  sens  tics  mots  et  des  phrases  ainsi  prononcés,  et  l'habitude  d'exprimer  sa 
pensée  dans  la  langue  élranj,^ère  directement,  sans  laide  ou  plutôt  sans  l'obstacle  d'une 
traduction.  Kn  un  mot,  au  début,  il  s'ayit  plus  encore  de  donner  à  l'enfant  une  éducation 
qu'un  enseignement  iiropremeiit  dit.  -  .J.  Firmery,  La  prcmin-e i^crlode  de  l'eitsi-iijnnnevt  des 
langues  vivantes,  d'apivs  les  nouveaux  iirof/ranunes,  dans  la  Revue  universitaire,  1902,  2,  p.  332.) 

'D  lion  coup  d'œil  général  dans  M.  Walter,  Die  Reform  des  neusprachlichen  rnterrichti  auf 
Schule  nnd  Universitaet ,  Marburg.  1901. 

(2)  Veyssier,  De  la  méthode  pour  l'enseignement  scolaire  des  langues  viva)ilcs.  Paris,  18.8,  p.  51 
etsuiv.  ;  Passy,  mémoire  du  concours  de  1898,  De  la  méthode  directe  dans  rcmeigunncnl  des 
langues  virantes,  Paris,  18^9,  p.  30  ;  Delobel,  mémoire  du  même  concours. 

(3,  Laudenbach,  mémoire  du  même  concours,  p.  7,  et  Passy,  mémoire  cité,  p.  37. 

(4)  Notons,  par  exemple,  la  boutade  suivante  :  ««  Les  maîtres  de  langues  vivantes  ne  sont 
pas  des  professeurs  de  conversation  ou  des  "  nourrices  sèches  »  ;  nous  n'avons  pas  pour 
mission  de  former  des  garçons  d'hôtel  pol.xglottes.  "  ;Mieille,  Enquête  sur  les  nœthodes  dans 
l'enseignement  des  langues  vivantes,  àims  la  Revue  universitaire,  \9(J0,  l,p.  57!.  — "Il  peut  sembler 
au  premier  abord,  dit  M.  Sclnveitzer,  Méthode  directe  de  renseignement  de  l'alloinund,  Paris, 
19Û0,  p.  V,  que,  faisant  surtout  appel  aux  sens,  la  méthode  directe  soit  incapable  d'exjiliquer 
les  mots  abstraits.  Mais  l'enfant  qui  apprend  sa  langue  maternelle  acquiert-il  donc  les  idées 
abstraites  autrement  que  par  des  impressions  sensibles  ?  Les  divisions  du  temps,  notions 
essentiellement  abstraites,  ne  sont-elles  j)as  marquées  par  les  alternatives  de  la  lumière  et 
de  l'obscurité,  par  le  retour  périodique  des  transformations  de  la  nature  ?  La  joie  et  la 
tristesse  ne  se  manifestent-elles  pas  par  des  signes  extérieurs  ?  Entln  les  mots  exprimant  les 
qualités  morales  du  bon  élève,  tels  que  la  politesse,  l'obéissance,  l'ai)plication,  l'exactitude, 
ne  contiennent-ils  pas  la  synthèse  d'une  série  d'actes  purement  matériels  ?  Toute  locution 
abstraite  est  donc  au  bout  d'une  série  de  phénomènes  sensibles  :  c  esi  à  la  méthode  de  nouer 
les  anneaux  de  la  chaîne  qui  y  conduit.  "  —  M.  Firmery  fait  la  même  observation,  p.  335. 


—  11  — 

avantages  tels  qu'on  ne  peut  hésiter  à  l'adopter  :  elle  assouplit  les 
organes  de  la  voix  ;  elle  forme  l'ouïe  ;  elle  empêche  l'élève  de  penser 
en  sa  langue  maternelle  ;  elle  vainc  la  timidité,  naturelle  chez 
l'enfant,  de  s'exprimer  en  une  langue  étrangère;  elle  grave  mieux  les 
vocables  dans  la  niémoire,  parce  qu'on  les  apprend  en  voyant  les  objets 
qu'ils  représentent,  ou  en  écoutant  les  explications  qui  font  découvrir 
le  sens  des  mots  employés  ;  elle  fait  gagner  beaucoup  de  temps, 
puisqu'on  se  sert  toujoui's  de  la  langue  vivante,  et  que  sur  les 
60  minutes  d'une  leçon,  on  n'en  gaspille  pas  40  en  parlant  français; 
enfin  elle  intéresse  beaucoup  les  élèves  (M,  elle  éveille  chez  eux 
un  vif  désir  d'apprendre,  concentre  toute  leur  attention  et  les 
fait  participer  activement  tous  à  la  leçon. 

Que  cette  méthode  soit  insuffisante  pour  toutes  les  classes,  qu'elle 
ne  puisse  pas  être  appliquée  sans  certains  ménagements,  qu'elle  soit 
d'autant  plus  efficace  que  les  élèves  sont  moins  nombreux  et  de  force 
sensiblement  égale,  qu'elle  cause  aux  maîtres  un  surcroit  de  travail, 
c'est  chose  certaine.  "  Elle  exige  d'eux,  dit  Zbinden,  dans  sa  préface 
du  manuel  de  Lcscaze  (^),  une  activité  plus  personnelle  que  par  le 
passé  ;  ils  doivent  se  dépenser  davantage  et  ne  plus  s'en  tenir  à  la 
lettre  du  livre.  Ils  doivent  obtenir  qu'on  leur  fournisse  une  collection 
d'objets  et  de  tableaux,  faire  un  choix  parmi  les  morceaux  de  lecture, 
les  chants  et  les  poésies,  mais  ils  ont  aussi  plus  d'initiative  et  de 
liberté.  » 

Principes.  —  Les  principes  de  la  méthode  sont  très  simples  ;  l'en- 
seignement sera  surtout  oral  ;  on  se  servira  le  moins  possible  de  la 
langue  maternelle  (^),  et  l'on  recourra,  du  moins  au  début,  à  l'intuition, 
non  pas  qu'il  s'agisse  de  faire  connaître  les  choses  aux  élèves,  mais 
parce  qu'il  importe  de  leur  faire  appliquer  immédiatement  aux  choses 
les    noms    allemands   ou   anglais,    et  parce  que   c'est  le   mode   le 


{V,  "  L'enfant  jjrend,  dit  un  pédagogue  suédois,  un  intérêt  bien  plus  vif  à  la  langue  parlée 
QU'ù  la  langue  écrite,  de  même  que  les  animaux  vivants  des  ménag-eries  lui  plaisent  tout 
autrement  que  les  animaux  emiKiillés  de  nos  musées.  "  Th.  Cart,  Be  remeignement  des 
langttes  vivantes  dans  les  écoles  secondaires  de  la  Suéde,  dans  la  Revue  universitaire,  1892,  2.  p.  442  . 

;2'  Zbinden,  jjréface  de  l'ouvrage  de  I.escaze,  Lehrbvch  ftter  den  Unlerricht  in  der  dcutschen 
Sx-vache  auf  G rnndlage  der  Anschaianuj,  Genève,  1698,  p.  X. 

(3;  "  On  se  sert,  d'abord,  de  la  langue  maternelle  toutes  les  fois  quelle  aide  à  gagner  du 
temps,  en  particulier  pour  expliquer  les  règles  de  grammaire  un  peu  délicates.  On  a  aussi 
recours  à  elle  pour  les  élèves  moins  intelligents,  quand  il  est  bien  avéré  qu'ils  ne  saisissent 
pas  une  explication  importante,  c'est  par  elle  également  qu'on  fait  comprendre  le  sens  des 
termes  abstraits,  que  la  mélliode  lîerlitz  a  voulu  primitivement  essayer  de  rendre  clairs  au 
moyen  de  mots  concrets  déj  'i  connus,  jjrocédé  qui  exige  beaucouj)  de  temps  et  qui,  neuf  fois 
sur  dix,  est  ineflicace.  D'atitre  part,  la  langue  maternelle  est  un  moyen  de  contrôle  ;  elle 
permet  de  s'assurer  que  les  élèves  ont  bien  saisi  une  ex])llcation  ou  comi)ris  le  sens  d'un 
mot  ou  d'un  passage  :  voilà  pourquoi  j'ai  vu  souvent  le  maitre,  quand  un  élevé  se  tromi)ait 
sur  l'acception  d'un  mot,  en  faire  domier  la  traduction  allemande  et  jiourquoi  j'ai  entendu 
plus  d'une  fois  un  morceau  français  récité  en  allemand.  "  ;iioniecque,  L'enseignement  des 
langues  ancienties  et  modernes  dans  l'enseignement  secondaire  des  garçons  en  Allemagne,  Paris, 
1902,  p.  42.)  ; 


—  12  — 

plus  cûinmode  de  conduire  dans  les  commencements  une  conver- 
sation qui  ne  soit  pas  languissante.  Au  fond  donc,  comment  procède- 
t-on  ?  On  suit  la  recommandation  des  Instructions  françaises  (*). 
«  Pour  apprendre  une  langue,  il  faut  commencer  par  l'isoler,  il  faut 
n'avoir  affaire  qu'à  elle.  Si,  sachant  le  français,  vous  voulez  apprendre 
l'allemand,  oubliez  pour  un  moment  le  français.  »  Et  j'ajouterai  : 
ne  perdez  pas  de  vue  que  celle  langue  n'est  pas  une  langue  seulement 
écrite,  couchée  uniquement  sur  le  papier,  morte,  en  un  mot,  mais 
bien  une  langue  qu'on  parle,  qu'on  entend  parler,  qui  vit. 

Intuition.  —  L'intuition  est  directe,  indirecte  ou  mentale. 

a)  L'intuition  directe  prend  comme  objet  d'exercices  de  conversation 
ce  qui  se  trouve  dans  le  milieu  immédiat  de  l'élève  :  personnes, 
animaux  et  choses.  On  passe  donc  successivement  en  revue  :  1°  la 
classe  avec  tout  ce  qu'elle  renferme  ;  2°  l'enfant  lui-même,  son  corps 
et  ses  vêtements  ;  3°  les  alentours  de  l'école  ;  4°  tout  ce  qui  tombe 
directement  sous  les  yeux,  par  exemple  une  habitation,  quelques 
détails  des  divers  règnes,  animal,  végétal,  minéral. 

Notons  avec  Hubscher  (*)  que  «  ce  ne  sont  pas  seulement  les  choses 
qui  peuvent  servir  d'objets  à  l'intuition  directe  :  l'élève  peut 
apprendre,  par  exemple,  les  adjectifs  de  couleur  en  voyant  les 
couleurs  des  différents  objets  ;  par  exemple  «  noir  "  par  rapport  à 
l'encre,  «  vert  "  par  rapport  à  la  couverture  d'un  livre  ou  d'un  cahier 
et  des  feuilles  de  l'arbre  qu'il  voit  à  travers  les  fenêtres  de  sa  classe, 
etc.  Il  nous  parait  incontestable  que  l'élève  retient  bien  plus  facilement 
ces  vocables  que  lorsqu'il  doit  apprendre  :  noir  =  schwarz,  vei't  == 
gruen,  etc.  La  gradation  des  adjectifs  s'apprend  aussi  plus  facilement 
quand  on  montre  à  l'élève  deux  ou  plusieurs  objets  de  grandeur 
différente  et  qu'on  fait  la  comparaison  en  langue  étrangère.  Les  noms 
de  nombre  ont  probablement  toujours  servi  de  matériaux  à  une  leçon 
d'intuition.  On  peut  faire  apprendre  de  même  les  pronoms  pei'sonnels, 
démonstratifs  et  possessifs  sans  qu'on  rencontre  les  difficultés  que 
nous  connaissons  tous,  lorsqu'il  s'agit  de  les  rendre  familiers  à  l'élève 
au  moyen  de  la  traduction  et  des  règles  de  grammaire.  Les  prépositions 
offrent  également  un  champ  favorable  à  ce  genre  d'exercices.  Il  suffit, 
par  exemple,  de  placer  un  élève  devant,  derrière,  à  côté  de,  sur  le  banc; 
de  faire  prendre  une  plume  hors  de  l'étui,  de  la  faire  remettre  dans 
la  boîte  ;  de  rapprocher  deux  élèves  et  d'appeler  l'attention  de  la  classe 
sur  les  rapports  exprimés  par  les  prépositions  relatives.  Le  verbe,  enfin, 
donnera  lieu  à  la  formation  de  propositions,  sans  qu'on  ait  besoin 
d'avoir  recours  à  la  langue  maternelle.  On  n'a  qu'à  traduire  par 


(i;  Enseùjnemenl  des  langues  vivantes,  p.  lôG. 
(2)  Brochure  citée,  p.  12. 


—  ];i  — 

le  verbe  de  la  langue  élraiigère  le  geste  on  le  mouvement  qu'on 
exécute  ou  qu'on  fait  exécuter  pour  avoir  une  base  solide  pour 
apprendre  les  verbes,  du  moins  ceux  qui  expriment  des  actes  concrets.-' 

b)  L'intuition  directe  doit  être  complétée  par  l'intuition  indirecte  : 
elle  ne  peut,  en  eflet,  à  elle  seule,  suflîre,  et  l'on  se  voit  forcé  de 
recourir  aux  images.  Il  va  sans  dire  qu'on  peut  souvent  alterner 
l'intuition  indirecte  avec  l'intuition  directe,  et  que  plusieurs  exercices 
que  je  viens  d'indiquer  avec  Hubsclier,  trouvent  aussi  leur  place 
dans  l'intuition  indirecte. 

11  est  d'usage  de  se  servir  de  tableaux  pour  étudier  les  saisons. 
A  cet  effet,  on  a  à  sa  disposition  des  collections  telles  que  celles  de 
Wilke,  de  Struebing,  de  Ka^'ser,  de  lloelze],  de  Colin  et  de  Hachette. 

Les  tableaux  de  "Wilke  (')  sont  d'un  petit  format  (38  cent,  x  48)  et 
manquent  d'exécution  artistique. 

Les  tableaux  de  Struebing  (^),  qui  ont  paru  chez  Winkelmann,  à 
Berlin,  sont  plus  grands  (71  x84},  mais  laissent  à  désirer.  Les  voici  : 
L  Friielili)ig,  Mensck  lunl  Ilaustiere.  2.  Wald.  3,  Sommer- Eru le. 
4.  Herbst-Ernte.  5.  Winler.  6.  MeuscJteuverkehr.  7.  Garten.  8.  Ge- 
hirgsgegend. 

Ceux  de  la  librairie  Kaj'ser  ont  servi  de  base  à  Lescazo,  et  ceux  de 
la  librairie  Colin,  qui  ne  se  bornent  pas  aux  saisons,  sont  utilisés  par 
Schweitzer.  Quant  aux  tableaux  muraux  encyclopédiques  de  la  maison 
Hachette,  qui  sont  au  nombre  de  sept  (les  quatre  saisons,  la  ferme, 
la  ville  et  la  montagne),  ils  sont  accompagnés  de  deux  commentaires, 
l'un  en  allemand,  l'autre  en  anglais. 

les  tableaux  de  Hoelzel  (L-10  x  92)  sont  surtout  en  faveur  depuis 
que  Alge  les  a  pris  comme  base  de  son  manuel  (^).  Pour  les  répétitions 


;1  Willic's  Bildi'VtafeJn  fucr  ilen  Ansrhaunnt/.^uoilerrtrlil.  lutch  jxiedoff.  Voysclildri/en  von 
I..  Heiiiemanu  ncu  gezcichnct  r.  A.  Toller,  lU  Tafclii.  -  Texte  :  Heinemanii,  Handbuch  fucr 
den  Ansrhmii'nf/stinierricht  iind  die  Hcimatsliiinde. 

(2;  Winkelmann,  yeue  BiJdcv  fuer  dru  Anschainmgs-uKd  Sprachunlerriclil.  —  Ouvrages 
SU'ueljiny,  S2}r(ichstoir,  4  cuhiers  ;  imdix,  Denli-xind  Spvctchtiebungen,  2  cahiers  ;  lîormann, 
Leben  in  Stadl  vnd  Land,  FcJd  vnd  Wald  ;  Treiige,  Der  AnxchatciingsiiHterriclit  im  Ausclih'gs 
an  die  WinJielmannschen  Bildeytafeln.  Les  tableaux  de  Strasbourg  donnent  les  quatre 
saisons  :  .Ç/iYf.s.'i&îf !•(/«•  Biidcr  fucr  dm  Anschanunysimterricht,  Vicv  JaJircszcitm,  —  Manuel  : 
Text  und  Anlcitinig  zirr  Bchandlinu/  der  Bildei;  4  calliers. 

(3)  HodzeU  Waudbildcr  fitcr  den  Ansr.haitumjs-und  Spvachvntervicht.  Ces  tableaux  sont 
reproduits  en  réduction  et  réunis  dans  HnclzeU  Bilderbvch  fuer  Schidc  vnd  Hai's 
(les  quatre  saisons)  et  dans  Huudaxsgahe  von  Hoelzels  Wandbildcrn  8  images;.  Manuels  : 
Jordan,  Materialicn  fi'er  den  Anachaunnf/sunterricht  in  der  Elementarklasse,  4  caliiers 
vienne,  Hoelzel  ;  Wallenstein,  Die  vier  Jahrcszeilen  fiier  die  deittsche  Sj^rechstunde,  Giessea 
Rotli,  et  du  même  auteur.  Die  Stadt,  dev  Wald,  dax  Hncht/ebirge,  der  Banernhof,  id.  ; 
"Winter,  Hoelzels  Wandbilder  fuer  den  Anschainingsnnterricht  in  ilirer  prahlisehen  Vericendiing 
beim  Spraclniiilerric/ite,  A'ieane,  Hoelzel.  —  En  français  :  Eochtel,  L'enseignement  par  les  yeva\ 
Vienne,  Hoelzel;  L.  Génin  et  J.  Schanianek,  Conversations  fran'.riites  sur  les  tahleatcrd' Hoelzel. 
9  cahiers,  y  compris  le  supplément,  ibid.  —  Ponr  l'anglais  :  Towers-CIark,  The  foiirseasons 
fur  lessons  in  english  eonrersal ion .  Oiessen,  Kotli  ;  le  même,  Cilg.  Foresl,  Memnlain-liange, 


—    M    - 

à  domicile,  les  ("lèves  ont  ;ï  leur  disposition  des  images  en  réduction, 
soit  détachées,  soit  réunies  en  un  caliiei-  ('). 

Quand  on  a  épuisé  les  tableaux  de  Hoelzel,  qui,  outre  les  saisons, 
représentent  encore  une  ferme,  une  montagne,  une  forêt,  une  ville, 
Paris,  Londres,  Vienne,  une  habitation,  on  peut  se  servir  de  cartes 
géographiques,  surtout  de  celles  de  l'Allemagne  ou  de  l'Angleterre,  de 
plans  de  villes,  de  vues  photographiques  de  certains  sites  ou  de 
certains  monuments,  de  tableaux  représentant  des  scènes  de  l'histoire 
de  l'Allemagne  ou  de  l'Angleterre,  de  portraits  historiques,  d'images 
tirées  de  journaux  illustrés  allemands  ou  anglais  qui  s'occupent 
d'événements  contemporains,  etc. 

Les  livres  avec  gravures  sont  à  condamner,  parce  qu'ils  constituent 
une  source  de  distractions  ;  ce  qu'il  faut,  ce  sont  de  grands  tableaux 
muraux,  de  préférence  coloriés,  avec  des  personnages  agissants  (-). 

c)  «  Si  précieuses  que  soient  ses  ressources  pour  l'étude  de  la  langue 


Fann-Varil  ;  le  lllôaie  :  EnijUah  Cfanirnav  (iitrl  Vorahula,-;/  ;  Boweil  .'lud  Schliell,  A  Vk'lO 
ùf  Lonâon  ;  les  mrmcs,  The  Bivclliii;/  ;  Kroil,  TJialiii/ixche  Bi'xpverlunig  Hoclichrher  Wdudblldcr 
in  oujlisflu-r Sprachr,  yincnchen-GlinUrdch,  ]S'X}\Wil\\.e.Anscliauim!j!<i(nicrricht  im  Eiuilhchen, 
LeiiD/Jy,  IbOS  ;  Fick,  Zur  3h'tliode  rfcs  cnr/lisrhen  Anfcmgsinitcrrirlits  aiif  Grinid  dcr  vLr 
JcOnvsz-eiten,  llaiiibiiry,  1S'J4  ;  \V.  Kiisten,  Erlcieittcmn;/  do-  HcelzcUclicn  Blldcr  ..  Die 
Wohnvng  ^  imd  <•  Vteic  of  Lcndon  »  in  enr/lisrher  Sj.ruche,  Iliniiiover,  1S09  ;  Fabritius, 
Quelques  obxerratioi^s  basces  .tur  des  e.rpérienee.t  personnelles  à  j:ro2)os  des  tableaux  de  Hoelzel, 
dans  la  Revue  des  Hitnianiles,  n,  p.  184  et  suiv.  —  Kcssicr  a  iniblié  cii  namaïul  des  cause- 
ries ayant  trait  aux  saisons  :  De  rier  Jaar;/elijden  rcnr  nederlandsclte  spreehfiefvninge'n  naar 
Hoelzel's  2}l'iien  'Giessen,  riotli'.  Melon  vient  de;  faire  paraître  à  Tournai,  cliez  Decallonne- 
Ijagre  :  Mé/lmde  ditreie  ptiin-  l'ens:i<ine)neul  du  nécrlandiiix.  partie  de  l'élève  iKirlie  du 
mailrc. 

(1)  A  citer  encore  :  Kafeniann,  Xexe  Bildev  fuev  den  Ansehauunffsunterviehl  :  Fntehling, 
Sommer,  Herbsl  nnd  Winter  (98  X  141),  et  l'ouvrage  de  Schneider  qui  s'y  rapiiorte  :  Malerialien 
zv.r  Erteihmg  des  Anscliaininr/smUirriehls.l.ix  maison  J.lî.  Wolters.  à  Groningue,  vient  de 
publier  une  collection  de  tableaux  fort  appréciée.  Elle  comin-end  deux  séries,  l"une  de 
20  tableaux,  l'autre  de  ir>.  Deux  manuels  donnent  en  lianiand  l'explication  des  diirérents 
sujets. 

(2;  I.elong'.  Enr/uéte.  dans  la  K'enie  imirersiidire.  UKJO,  1,  ]i.  L").  II  ajoute  "  Tout  est  bon,  qui  est 
clair:  les  Hugo  d'Alesi  qui  illustrent  les  gares,  les  tableaux  d'iilstolre,  jusqu'aux  cartes 
postales  et  aux  images  d'Épinal.  "  Cependant,  l'exécution  artistique  ne  devrait  pas  trop 
laisser  à  désirer  ;  de  plus,  M.  I.ecoq,  L'enseif/nement  virant  des  lang-Kes  vivantes,  Paris.  1903, 
a  raison  de  faire  observer,  p.  75,  qu'il  est  très  désirable  de  se  servir  de  préférence  de 
tableaux  faits  à  l'étranger,  ou  du  moins  imités  de  ceux  faits  à  l'étranger,  représentant 
des  scènes  de  la  vie  étrangère,  des  paysages  étrangers.  "  J'entends  bien  qu'il  y  a  beaucoup  de 
choses  qui  nous  sont  communes  avec  les  pays  nous  environnant,  que  les  grands  spectacles 
de  la  nature  se  ressemblent  partout.  Mais  à  côté  de  ce  qu'il  y  a  de  commun  et  de  semblable, 
que  de  choses  difTèrent  qui  frappent  l'œil  de  l'enfant  !  Chaque  pays  a  sa  physionomie 
propre  :  une  rue  de  Londres  ou  de  lierlin  n'est  pas  une  rue  de  Paris  ou  de  Rome  ;  la 
nature  elle-même  a  dans  chaque  contrée  un  aspect  particulier.  Tout  cela  l'enfant 
le  découvrira  :  et  la  nouveauté,  l'étrangeté  même  l'attireront,  l'intéresseront,  si  vous 
couvrez  les  murs  où  ses  yeux  vont  errer  aux  minutes  de  distraction,  de  choses  étrangères, 
d'atUches  allemandes,  de  réclames  anglaises,  de  photographies,  de  rejiroductions  de  la  vie 
réelle,  tout  ce  qu'il  voit,  de  même  que  tout  ce  qu'il  entend,  lui  apportera  cette  sensation  que 
les  heures  qu'il  vit  dans  cette  salle  sont  des  heures  passées  en  pays  étranger  :  il  y  aura  une 
conspiration  de  tous  les  sens  pour  l'abuser  ;  il  cessera  peu  à  peu  de  penser  en  français, 
parce  que  rien  ne  lui  rappellera  plus  la  langue  maternelle,  et  que  sa  vue  s'arrêtera  sur  des 
objets  qui  n'évoqueront  dans  sa  mémoire  que  des  mots  étrangers.  '■ 


—    ITj   — 

descriptive,  l'ininge  n'a  qu'une  portée  assez  limitée.  Ne  pouvant 
représenter  qu'un  acte  à  la  fois,  qui  reste  pour  ainsi  dire  figé  (^),  la 
langue  de  l'action  lui  échappe  en  partie.  C"est  alors  qu'intervient  la 
troisième  forme  de  l'intuition,  f)U  intuition  mentale,  par  laquelle 
l'imagination,  partant  d'une  action  figurée,  se  représente  la  série  des 
actes  successifs  qui  la  précèdent  ou  la  suivent  immédiatement.  Tous 
ces  actes  forment  comme  les  anneaux  d'une  même  chaîne.  Dès  que 
nous  tenons  le  premici",  les  autres  suivent  naturellement.  On  sait 
qu'un  professeur  français,  M.  Gouin  (-),  a  attaché  son  nom  à  cette 
forme  spéciale  de  l'intuition.  Il  en  a  fait  la  base  de  sa  méthode  des 
séries.  " 

Marche.  —  La  marche  à  suivre  ne  présente  aucune  difj^culté.  Le 
maître  montre  un  objet  ou  une  personne,  prononce  en  allemand  le 
mot  ou  la  phrase,  le  fait  répéter  suflîsamment  par  plusieurs  élèves, 
et  finalement  l'écrit  au  tableau.  Ici,  une  double  précaution  est  cà 
prendre  :  d'une  part,  n'écrivez  pas  trop  vite;  ce  n'est  qu'une  fois  le 
vocable  acquis  par  l'oreille,  que  vous  le  noterez  par  l'écriture  au 
tableau  ;  d'autre  part,  n'attendez  pas  des  semaines  :  les  yeux  viennent 
aussi,  a-t-on  dit,  en  aide  à  l'oreille;  les  personnes  qui  ne  veulent  rien 
perdre  au  concert  ou  au  théâtre,  suivent  avec  la  partition  ou  avec 
le  libretto  ('•). 

Quelques  recommandations  pratiques  me  paraissent  nécessaires  (^). 

On  procédera  avec  une  sage  lenteur.  La  qualité  qu'on  doit 
s'elï'orcer  de  donner  avant  tout  au  savoir  de  l'enfant,  c'est  la  sûreté, 
et  la  sûreté  ne  peut  s'acquérir  que  grâce  à  cette  lenteur.  On  fera  donc 


(i;  -  On  rend  lu  mobilité  à  ces  niouvemenls  ttgûs,  eu  se  servuiit  tlu  geste.  S'iiyit-il,  i)ar 
exem])le,  de  rendre  sensible  Ui  cliute  des  feuilles  d'automne,  nous  laisserons  tomber 
quelques  bouts  de  papier.  Faut-il  donner  la  sensation  de  l'éloiynement  d"abord,  puis  du 
retour  des  liirondelles,  nous  enverrons  un  élève  à  la  porte  pour  le  rappeler  ensuite  :  ainsi 
s'ex]jlIqueront  parle  mouvement  les  mots  fort  et  zvrnecli,  que  l'Immobilité  du  dessin  est 
impuissante  à  rendre,  ^■eux-.je  dire  que  l'été  est  passé  :  clcr  Soumicr  ht  vorhci,  mon  cadran 
(outil  indispensable  dans  toute  classe  de  langues;  m'y  aidera  :je  mettrai  lesaiguilles  d'abord 
sur  midi,  et  je  dirai  ;  ex  ht  iKodf;  je  ferai  avancer  la  grande  aiguille,  et  je  dirai  :  m  i.it  zivoelf 
vorhei.  Cela  suppose  bien  entendu  que  nos  élèves  seront  d'avance  familiarisés  avec  la  manière 
de  dire  l'heure.  »  (Schweitzer,  Méthode  directe,  p.  \\l\).  Dernièrement,  dans  ses  conférences 
sur  la  méthodologie  des  langues  vi^  antes,  le  savant  professeur  a  fort  bien  montré,  par  un 
exemple,  comment  l'action,  l'action  vivante  et  continue  jieut  se  dégager  de  l'image,  en 
d'autres  termes,  comment  tel  geste,  telle  attitude,  forcément  Immobilisée  par  le  dessin,  peut 
se  prolonger  dans  le  passé  et  dtins  l'avenir.  (Revue  Kniver.^ilair,',  1903,  2,  p.  109). 

(2)  Gouin,  L'art  d'emeigner  et  d'étudier  les  tcniçjue^,  Paris,  2''  édition,  ISOl  ;  Kron,  Die  Méthode 
Gouin  Oder  dus  Serieti-Si/stem  in  Théorie  nnd  Praxis,  Marburg,  Elwert,  1900.  Sans  adopter  le 
système  Gouin,  nous  pouvons,  dans  certains  cas,  y  recourir  avantageusement,  comme  le 
fait  remarquer  M.  Simonnot,  Comment  les  lanr/ues  vivantes  sont  enseiynées  à  l'étraui/er,  dans 
la  Hevue  pédagogique,  l.j  juillet  1901,  p.  21.  •'  I,e  grand  tort  de  Gouin  a  été  de  se  montrer 
trop  exclusif,  en  proscrivant  d'une  façon  absolue  les  autres  modes  de  l'enseignement 
intuitif.  Mais  on  peut  tirer  un  excellent  parti  de  son  système.  » 

(3)  F.  Glauning,  Englisch,  j).  13,  dans  le  Handbuch  de  Baumeister. 

(4)  V0nR0den,I>iV  Vern-endung  von  Bildern  :ii  franz-oesischen  vndcnglisclien  Sprcrhuebungen. 
Marburg,  1890. 


—  ic.  — 

force  exercices  sur  les  mêmes  choses,  force  répélilioiis  ;  mais  on 
prendra  garde  que  cette  lenteur  ne  devienne  un  piétinement  sur  place. 
Tout  en  marchant  lentement,  on  avancera  :  on  fera  chaque  fois  un 
pas  en  avant  ('). 

Les  commandements  se  font  toujours  dans  la  langue  étrangère  : 
Buecher  auf,  Biiecher  zu,  etc. 

C'est  tout  un  plaisir  pour  les  élèves  de  trouver  par  eux-mêmes  le 
sens  d'un  mot  et  ils  y  arrivent,  plus  vite  qu'on  ne  pense, 
grâce  à  l'intuition  et  au  contexte.  Par  exception,  le  maître,  après 
avoir  donné  des  explications  suttîsantes,  peut,  comme  contrcMe  et 
rien  qu'en  passant,  demander  la  traduction  (-).  Il  n'est  pas  difficile 
d'empêcher  que  les  élèves  ne  répondent  machinalement  ou  ne  répètent 
des  mots  qu'ils  ne  comprennent  pas.  Ainsi,  on  ne  se  conlenle  pas  de  leur 
apprendre  les  mots  :  weiss,  scJiwar:-,  blciii,  griicii,  en  leur  montrant  sur 
le  tableau  des  objets  de  ces  difïerentcs  couleurs  ;  on  leur  demande 
encore  quelle  est  la  couleur  de  tel  ou  tel  objet  déterminé,  si  tel  objet 
qu'on  montre  est  blanc  ou  noir  ;  on  fait  opposer  dans  des  phrases  les 
couleurs,  etc.  Bref,  il  est  aisé,  pour  un  maître  quelque  peu  habile, 
de  bien  faire  saisir  le  sens  de  la  plupart  des  mots  qu'il  emploie,  et 
de  contrôler  immédiatement  si  les  élèves  en  ont  une  notion  nette  et 
précise. 

La  méthode  directe  rejette  les  détails  peu  connus,  les  termes 
techniques,  tous  les  mots  qui  ne  rentrent  pas  dans  la  langue  usuelle. 
Il  est  fort  important  de  bien  choisir  les  mots,  de  ne  prendre  que  ceux 
qui  sont  usités  dans  la  conversation  ou  qu'on  trouve  dans  les  œuvres 
littéraires.  Certains  maîtres  n'observeiit  aucune  mesure  et  ne  font 
grâce  d'aucun  terme.  Ne  les  imitez  pas  quand,  au  lieu  de  se  contenter 
de  faire  dénommer  le  mât,  la  voile,  le  pont,  la  boussole,  ils  veulent 
encore  la  cale,  les  vergues,  la  hune  et  le  banc  de  quart  (^). 

L'ordre  est  triplement  nécessaire. 

■  1°  Les  tableaux  dont  on  se  sert,  ne  peuvent  pas  être  quelconques  ; 


1  v.  Firmery,  p.  319. 

(2;  "  Les  élèves  ont  peut-être  compris  autre  chose.  C'est  un  accident  qui  se  produit 
quelquefois,  si  l'on  a  des  doutes,  il  ne  faut  jias  hésiter  à  prononcer  le  mot  français  ou  à 
demander  en  français  aux  élèves  ce  qu"ils  ont  compris  eux-mêmes.  Do  temjjs  à  autre,  quand 
on  se  sent  impuissant  à  se  faire  comprendre  en  langue  étrangère  ou  simplement  quand  on 
veut  aller  i)lus  vite,  on  peut  parler  français,  mais  à  nue  condition  essentielle,  c'est  que 
l'on  ne  mêlera  jamais  les  deux  lang-uês,  l'étrangère  et  la  maternelle.  C'est  là  une  observation 
dont  l'importance  apparaîtra  vite  aux  professeurs  après  quelques  semaines  d'expérience. 
Dans  la  classe  où  Ton  parle  continuellement  la  langue  étrangère,  on  fait  vivre  l'enfant  dans 
une  sorte  datmosplière  artificielle.  Il  faut  l'y  maintenir  tant  qu'on  pourra.  Mais  quand  on 
l'en  sort,  il  faut  l'en  sortir  franchement.  Quelque  court  que  soit  l'instant  où  l'on  parle 
français,  il  est  en  deliors  de  la  classe  et  l'élève  doit  en  avoir  la  sensation.  On  rentre  ensuite 
dans  cette  très  ])etitc  Allemagne  ou  Angleterre,  où  l'enfant  doit  s'imaginer  vivre,  et  le 
vocable  français,  qui  a  servi  à  faire  comprendre  un  mot  étrang'er,  ne  doit  plus  reparaître.  •' 
(Firrnery,  p.  33.").; 

;.">;  Veyssier,  ouv.  cité.  \^.  G]. 


ils  doivent    embrasser  dans  une  suite    logique    et  graduée    toute 
l'encj-clopédie  des  connaissances  usuelles  (/). 

2°  Dans  l'étude  d'un  tableau,  on  procédera  d'ordinaire  comme  suit. 
On  commencera  par  les  personnes  (-)  ;  on  les  nommera  d'après  leur 
qualité  ou  leur  profession  ;  on  leur  donnera  des  noms  déterminés, 
comme  le  fait  Algo.  On  prendra  ensuite  les  animaux,  puis  les  lieux, 
c'est-à-dire  les  différentes  parties  qu'on  peut  distinguer  dans  le 
tableau,  par  exemple,  pour  le  printemps,  le  jardin,  la  prairie,  la 
campagne,  etc.  On  terminera  par  les  actions. 

En  s'occupant  de  chacun  de  ces  points,  on  établira  aussi  des 
groupes,  des  unités  méthodiques,  qui  permettent  au  professeur 
d'enseigner  aisément  de  tête,  sans  suivre  des  j'eux  son  livre  ou  ses 
notes,  et  aux  élèves  de  mieux  retenir  les  mots,  parce  qu'ils  ne  sont 
pas  isolés.  De  plus,  dés  qu'on  aura  appris  une  douzaine  de  mots  et 
qu'on  les  aura  exercés  dans  des  questions  et  des  réponses,  on  les 
répétera  en  les  groupant  de  différentes  façons  ou  en  les  faisant  grouper 
par  les  élèves. 

3'^  On  ne  passera  à  la  description  des  détails,  par  exemple  d'une 
maison,  d'un  arbre,  des  vêtements,  que  quand  l'élève  aura  une  idée 
générale  de  l'ensemble  du  tableau. 

Au  début,  l'élève  ne  peut  évidemment  que  répéter  les  phrases  du 
professeur.  Il  est  néanmoins  préférable  de  se  servir  de  la  forme 
interrogative.  Au  lieu  de  dire,  en  le  montrant  :  c'est  un  moulin,  ou 
se  demande  :  qu'est-ce  que  ceci  ?  et  l'on  répond  soi-même  :  c'est  un 
moulin.  On  interroge  ensuite  un  élève  de  la  même  façon.  Il  convient 
de  faire  répéter,  du  moins  au  commencement,  la  question  avant 
d'exiger  la  réponse.  On  aura  soin,  surtout  au  début,  de  faire  répéter 
la  réponse  par  un  ou  plusieurs  élèves. 

Quand  l'élève  est  un  peu  plus  avancé  et  qu'il  n'a  plus  à  reproduire 
purement  et  simplement  ce  qu'il  vient  d'entendre,  la  question  doit 
être  faite  de  façon  qu'il  trouve  la  réponse  sans  trop  de  difficultés;  s'il 
hésite  ou  s'il  va  se  fourvoyer,  on  lui  vient  en  aide,  on  lui  donne  la 
réponse  exacte,  et  on  la  lui  fait  répéter  immédiatement.  En  effet, 
pour  assurer  le  succès  des  exercices  de  conversation,  on  doit  chercher, 
autant  que  possible,  à  éviter  les  réponses  mauvaises,  à  n'obtenir 
que  des  réponses  exactes. 

Que  toute  réponse  doive  être  donnée  en  une  phrase  complète, 
c'est  évident.  Le  maître  qui  n'y  tient  pas  rigoureusement,  compromet 
tout  le  succès  de  son  enseignement. 


l)  Sclnveitzer,  EnqiKHe.  etc.,  dans  la  Rwue  vniversituive,  1900,  p.  261. 

;-2)  von  Roden  veut  aiion  commence  par  un  examen  d'ensemble  :  Que  représeate  le 
tableau  i  Qu'y  a-til  au  fond  du  tableau  ?  etc. 

« 


—  18  — 

Évitez  aussi  que  la  réponse  soit  hachée  :  elle  doit  être  donnée 
sans  hésitation. 

«  Autant  que  possible,  habituez  l'élève  à  joindre  le  geste  à  la  parole. 
Lui  demandez-vous  le  nom  d'un  objet  qui  se  trouve  dans  la  classe, 
d'une  figure  représentée  sur  une  image?  Qu'il  ne  reste  pas  les  bras 
croisés  à  chercher  ce  nom  dans  sa  mémoire.  Qu'il  montre  l'objet  d'un 
geste  franc,  naturel.  De  même  lorsqu'il  racontera  une  histoire,  qu'il 
récitera  une  leçon,  qu'iTfasse  des  gestes,  qu'au  besoin  vous  lui  aurez 
appris.  C'est  là  encore  un  de  ces  détails  en  apparence  insignifiants, 
mais  qui,  avec  une  foule  d'autres,  contribuent  à  donner  la  vie  à  ce 
que  l'on  enseigne  à  l'enfant  (').  '' 

Il  n'est  pas  k  craindre,  je  pense,  que  l'élève  chorclie  à  formuler 
la  réponse  mentalement  dans  sa  langue  maternelle,  pour  la  traduire 
ensuite  de  vive  voix.  En  elTet,  nos  questions,  mises  à  sa  portée  et 
menées  vivement,  ne  lui  permettent  guère  de  contracter  cette 
mauvaise  habitude.  Eût-on  des  soupçons,  voulût-on  l'entrainer, 
comme  on  dit,  on  pourrait  faire  en  allemand  ou  en  anglais,  de  temps 
à  autre,  de  petites  opérations  de  calcul  (^). 

11  ne  sufïît  pas  d'exercer  nos  élèves  à  répondre  ;  il  faut  aussi  qu'ils 
sachent  interroger  ;  car  une  vraie  conversation  se  compose  et  de 
questions  et  de  réponses.  Aussi  ferons-nous  venir  deux  élèves  devant 
l'image  :  ils  s'interrogeront  et  répondront  à  tour  de  rôle.  Plus  tard, 
nous  exercerons  la  classe  à  l'interrogation  indirecte.  Nous  dirons, 
par  exemple,  à  un  élève  :  Demandez  à  votre  voisin  ce  qu'il  voit  sous 
l'arbre.  L'élève  désigné  fera  la  question  :  Que  voyez-vous  sous 
l'arbre?  Le  maître  poursuivra  en  demandant  à  un  autre  :  Dites-moi 
ce  que  X.  a  demandé  à  votre  voisin.  L'élève  devra,  pour  répondre, 
faire  usage  de  l'interrogation  indirecte. 

Ce  n'est  pas  tout.  De  temps  à  autre,  nous  appellerons  un  élève  au 
tableau,  et  nous  lui  ferons  donner,  la  baguette  en  main,  la  description 
de  l'une  ou  de  l'autre  partie.  Il  suffira  d'un  peu  d'exercice  pour 
obtenir  des  élèves  un  exposé  suivi,  simple  et  naturel. 

Peu  à  peu,  nous  rattacherons  à  l'étude  des  tableaux  la  lecture 
de  morceaux  en  texte  suivi,  comme  le  fait  Lescaze.  Peu  à  peu  aussi, 
nous  pourrons  nous  tenir  moins  rigoureusement  aux  tableaux  :  ainsi, 
dans  une  leçon  de  répétition  sur  l'été  avec  le  tableau  de  Hoelzel, 


(1)  Firmery,  p.  33G. 

(2)  "  Quand  renfant  sera  parvenu  à  faire  ces  opéraUons  avec  une  certaine  raiiidité  et 
comme  mécaniquement,  non  seulement  il  parlera  réellement  en  se  servant  de  ce  petit 
vocabulaire  aritlimétique,  mais  il  aura  de  plus  celte  précieuse  sensation  qu'il  peut  quelque 
chose  dans  la  langue  étranjfère.  Je  ne  parle  pas  de  l'avantage  qu'il  y  a  de  le  familiariser 
avec  certains  mots  abstraits  (ajouter,  retrancher,  diviser,  partager,  etc  ).  "  Firmery,  p.  340. 


—  19  — 

nous  verrons  dans  la  jeune  fille  le  petit  Chaperon  rouge,  et  nous 
narrerons  en  allemand  ce  conte,  qui  ne  manquera  pas  d'intéresser 
nos  élèves  ;  ou  bien,  nous  verrons  dans  le  promeneur  un  collégien  qui 
revient  de  la  ville  passer  les  vacances  dans  la  maison  paternelle  ;  ou 
bien  encore  nous  replacerons  lu  description  dans  le  passé  :  quelqu'un 
décrira,  d'après  ses  souvenirs,  la  campagne  où  il  est  né,  ou 
bien,  s'il  s'agit  do  l'automne,  un  voyageur  racontera  ce  qu'il  a  vu 
étant  sur  le  bateau  à  vapeur.  Ainsi,  soit  en  recourant  k  un  livre  de 
lecture,  soit  en  imaginant  l'un  ou  l'autre  thème,  nous  introduirons 
de  la  variété  dans  l'étude  des  tableaux,  et  nous  montrerons  à  l'élève 
les  progrès  qu"il  aura  faits.  Dés  lors,  on  ne  pourra  reprocher  à  la 
méthode  intuitive  l'uniformité  que  présentent  le  genre  et  la  forme  de 
ses  questions. 

Il  me  reste  une  question  difficile  à  résoudre.  Les  partisans  do  la 
méthode  directe  recommandent  vivement  les  exercices  d'ensemble.  La 
reprise  par  toute  la  classe  des  réponses  corrigées  par  le  professeur  leur 
paraît  une  nécessité.  C'est,  disent-ils,  un  moyen  précieux  et  pratique 
d'obtenir  des  élèves  plus  fréquemment  une  participation  active  à  la 
leçon,  d'occuper  souvent  toute  la  classe,  d'entrainer,  bon  gré,  mal  gré, 
les  faibles,  les  timides  et  les  paresseux,  qui,  s'ils  étaient  livrés  à 
eux-mêmes,  resteraient  sur  la  réserve,  inactifs  et  silencieux  (*). 

Cette  manière  de  voir  a  cependant  ses  adversaires.  Ceux-ci  recon- 
naissent que  la  participation  active  à  la  leçon  sera  plus  fréquente  et 
plus  générale  ;  mais,  ripostent-ils,  n'exagérez-vous  pas  les  avantages 
des  réponses  collectives,  et  n'oubliez-vous  pas  les  inconvénients 
qu'elles  présentent  ?  Certes,  un  professeur  dont  l'ouïe  est  très  fine, 
peut  entendre  les  fautes  de  prononciation  et  de  grammaire  ;  mais  ne 
devez-vous  pas  avouer  que  c'est  très  difficile,  plus  difficile  que  pour 
le  maître  de  musique  ?  En  tout  cas,  n'avez-vous  pas  remarqué  que 
les  élèves  prononcent  avec  moins  de  vigueur,  avec  plus  de  noncha- 
lance, et  qu'ils  prennent  vite  le  ton  chanteur,  cette  plaie  de  nos 
écoles  ?  Enfin,  ne  craignez-vous  pas  que  la  discipline  ne  reçoive 
souvent  un  accroc  ? 

Sur  ce  point,  je  ne  crois  pas  devoir  imposer  une  règle.  Tel 
professeur  peut  réussir  là  où  tel  autre  échouera  ;  telle  classe  peut  se 
prêter  avec  entrain  à  ces  réponses  collectives,  tandis  que  telle  autre, 
blessée  d'être  ravalée  au  rôle  d'élèves  d'écoles  primaires,  les  verra  de 
mauvais  œil  et  sera  toujours  prête  à  faire  l'une  ou  l'autre  gaminerie. 
N'essayons  les  réponses  collectives  qu'à  coup  sur  ;  car  l'autorité  du 


(1,  Voir  Lescaze,  Manuel,  p.  xiv  et  xv 


—  20  — 

maître  une  fois  compromise,  la  discipline  une  fois  en  péril,  il  devient 
bien  difficile  d'avoir  l'ordre  ('). 

Pendant  combien  de  temps  éUidiera-t-on  les  tableaux  des  quatre 
saisons  ?  Je  ne  puis  indiquer  un  nombre  d'heures  fixe  et  invariable  : 
cela  dépend  du  temps  que  le  programme  accorde  aux  langues 
vivantes,  et  des  progrès  des  élèves.  Hartmann  (-),  qui  ne  prend  les 
tableaux  que  si  les  élèves  possèdent  déjà  400  mots  vus  dans  Bocrner  (^), 
consacre  11  heures  au  printemps,  14  à  l'été,  15  à  l'automne  et  15  aussi 
à  l'hiver.  L'étude  des  saisons  exige  ainsi  55  heures  sur  les  200  que 
comporte  chez  lui  le  cours  d'une  année,  et  apprend  à  l'élève  environ 
7()0  mots. 

Ce  premier  enseignement  durera,  selon  les  circonstances,  une 
année  ou  deux.  11  exerce  les  élèves  à  une  bonne  prononciation,  il  les 
familiarise  avec  le  vocabulaire,  leur  apprend  l'orthographe  d'un 
certain  nombi-e  de  mots  et  les  habitue  au  maniement  des  formes 
élémentaires.  Quelques  remarques  sur  chacun  de  ces  points  spéciaux 
ne  seront  pas  déplacées,  ce  me  semble  ;  elles  mettront  en  lumière 
certains  détails  qui  peuvent  encore  paraître  obscurs. 

Prononciation.  —  La  prononciation  laisse  souvent  à  désirer 
dans  les  classes  (^)  ;  l'accent  est  mal  placé  ;  des  syllabes  longues 
deviennent  brèves  et  vice-versa  ;  l'/t  initiale  est  supprimée  là  où  elle 
existe  (die  And,  das  Aus)  et  ajoutée  là  où  elle  n'a  que  faire  (der 
Hanfang,  das  Heis)  (•'). 


(1)  Voyez  un  très  bon  article  de  J.  I.oos,  Chorxprcchen,  dans  VEnci/hlopaeclisches  HantVntch 
ilcr  Pacâurjo'iik  de  Kein,  1. 1,  2,  p.  5l0  et  siiiv. —  lîoriiecque  (L'enseignement  des  langvex 
anciennes  et  modernes  dans  l'eiiseig.  sec.  j).  (îG;  recommande  »  de  ne  pas  répugner  à  l'emploi 
du  chœur,  qui  jiermet  une  revision  rapide  et  complète  des  matières  dont  on  veut  s'assurer 
que  toute  la  classe  les  possède,  et  qui,  employé  modérément  et  à  propos,  ne  causera  aucun 
désordre,  jusqu'à  la  cinquième  inclusivement,  surtout  si  le  professeur  a  soin  de  placer  sous 
ses  yeux  les  mauvais  élèves  qui  ne  i)articij)eraient  pas  au  chœur  ou  y  verraient  une  occasion 
de  désordre  :  d'ailleurs,  en  Allemagne,  les  meilleurs  élèves  sont  généralement  au  fond  de 
la  classe  ".  —  Firmery  (p.  312)  préconise  aussi  le  chœur  "  ou  parlé  simultané  "  1"  afin  de 
faire  répéter  à  tout  le  monde  un  vocable  nouveau,  une  phrase  nouvelle  ;  2»  lorsqu'il  s'agit 
de  rectifier  une  prononciation  défectueuse  ou  une  faute  de  grammaire  ;  3»  pour  pré- 
parer la  leçon  et  la  faire  réciter.—  Godart,  Zn  lecture  directe,  dans  la  Revue  de  l'enseigne- 
ment des  langues  vieatites,  11103,  p.  l'ô,  fait  Observer  que  la  lecture  en  chœur  a  l'incontestable 
avantage  d'exercer  H  la  fois  tous  les  élèves,  mais  elle  n'est  pas  sans  dang'ers.  "  Elle  rend, 
dit-il,  très  difficile,  sinon  impossible,  la  constatation  des  erreurs  individuelles  de  ])ronon- 
ciation.  Elle  permet  bien  de  distinguer  les  fautes  énormes,  mais  non  de  saisir  les  nuances. 
De  plus,  elle  a  le  grave  inconvénient  de  proposer  un  débit  incolore  et  sans  vie,  une  mélopée 
d'un  rythme  monotone,  où  l'accent  des  mots  nuit  à  l'accent  de  la  phrase.  Un  élève, 
individuellement,  donne  bien  à  une  phrase  lue  sa  mélodie  propre;  mais  il  est  bien  difficile 
d'obtenir  ce  nuancement  d'un  débit  simultané.  Nécessaire  dans  les  classes  nombreuses,  la 
lecture  en  chœur  s'impo.se  donc  moins  régulièrement  dans  les  classes  réduites,  où  le  petit 
nombre  des  élèves  iiermet  d'obtenir  de  la  lecture  individuelle  une  correction  plus 
délicate.  » 

(2;  Die  Anschauung,  etc.,  p.  21. 

(3)  lioerner  est  l'auteur  de  manuels  pour  l'enseignement  du  français  (])Ubliés  chez 
(Teubner). 

(»;  Hartmann  l'a  constaté  dans  ses  visites  des  lycées  français. 

(5j  M.  Bréal,  ouv.  cité,  p.  28. 


—  21  — 

Yûilà  la  situation.  Et  quelle  en  est  la  cause  ?  Nous  ne  faisons  pas 
assez  de  cas  do  la  prononciation  :  nous  la  croyons  chose  facile  ou 
secondaire.  Nous  avons  tort.  La  prononciation  est,  îiu  contraire, 
importante  et  diflîcile.  '•  En  tête  de  toute  méthode  pour  apprendre  une 
langue  vivante,  il  faut  écrire,  disent  les  Instructions  françaises  (*),  le 
mot  «  prononciation  ".  Ce  qui  veut  dire  que,  quand  l'enfant  saura 
prononcer  les  sons  de  la  langue  étrangère,  la  tâche  du  professeur 
sera  loin  d"êtie  terminée.  "  L'élève  peut,  dit  M.  Firmeiy  (-),  pro- 
noncer. Mais  tant  que  ses  organes  vocaux  n'auront  pas  été  assouplis 
par  de  longs  et  fréquents  exercices,  il  lui  faudra,  pour  le  faire, 
un  effort.  Or,  si  vous  l'abandonnez  désormais  à  lui-même,  il  évitera 
ou  diminuera  cet  effort,  et  finira  par  adopter  cette  prononciation 
bâtarde,  sorte  de  compromis  entre  le  français  et  la  langue  étrangère, 
qu'on  entend  trop  souvent  dans  les  classes  ». 

Comme  conditions  générales  de  succès,  on  doit  exiger  du  mailre 
qu'il  ait  l'ouïe  fine  et  qu'il  soit  inexorable,  et  de  l'élève  qu'il  développe 
son  ouïe  et  exerce,  lui  aussi,  un  contrôle  sur  la  prononciation  de  ses 
condisciples. 

Précisons.  Que  fera  le  maitre  ?  Dès  la  première  heure  et  jusqu'à  la 
fin  des  études,  il  portera  son  attention  sur  ce  point  ;  il  prêchera 
d'exemple,  il  aura  une  prononciation  irréprochable,  il  parlera  ou  il 
lira  avec  tout  le  soin  désirable,  il  se  gardera  de  répéter  une  pronon- 
ciation fautive,  et  il  corrigera  impitoyablement  toutes  les  fautes. 
«  Jamais,  dit  M.  Firmery  (^),  on  n'entendra  une  prononciation 
défectueuse,  sans  la  faire  rectifier  et  non  seulement  par  l'élève  qui  l'a 
fait  entendre,  mais  par  d'autres  encore,  par  toute  la  classe  au  besoin. 
En  procédant'ainsi  le  maitre  se  sauvera  lui-mèm.)  d'un  sérieux  danger. 
On  sait  combien  la  pureté  de  la  prononciation  est  chose  délicate 
et  combien  elle  se  perd  facilement.  Le  professeur  négligent  finit  par 
prendre,  sans  s'en  douter,  la  prononciation  de  ses  élèves.  » 

Si  la  classe  compte  des  élèves  plus  avancés  que  d'autres,  ces  élèves, 
déjà  habitués  à  saisir  les  sons  prononcés,  serviront  d'intermédiaires. 
Ils  prononceront  après  le  maitre,  les  faibles  prononceront  après  eux. 
C'est  une  observation  (-^j  que  l'on  peut  faire  chaque  jour,  que  les 
enfants  apprennent  plus  rapidement  les  mots  d'une  langue  de  la 
bouche  de  leurs  camarades  que  de  celle  de  leur  professeur  ^^. 

Le  maitre  renoncera  à  certains  exercices  :  telles  sont  les  déclinai- 
sons ou  les  conjugaisons  dans  lesquelles  on  fait  alterner  l'allemand  et 
le  françiiis,  par  exemple  :  ich  sclilafe,  je  dors,  du  schlaefst,  tu  dors. 


;ij  Page  m. 
(2)  Puye  2M. 
(3:  Paye  331. 
(4)  Firmery,  p.  3J8. 


ou  das  schoene  Ilaiis,  la  belle  maison,  des  schoenen  Emises,  de  la 
belle  maison  ;  telle  est  encore  la  traduction  dite  littérale  ou  le  mot  à 
211  ot. 

Comme  moyens  spéciaux,  on  recommande  de  faire  réciter  les  vers 
ou  mieux  encore  de  les  chanter  (')  ;  cai-,  dit  M.  Bréal  (^j,  la  prosodie 
germanique,  qui  repose  en  grande  partie  sur  l'alternance  des  syllabes 
accentuées  et  des  syllabes  atones,  peut  servir  à  mettre  dans  la 
mémoire  les  mots  comme  ils  doivent  être  prononcés. 

«On  s'est  demandé,  dit  encore  M.  Bréal  (^\s'il  n'y  aurait  pas  avantao'e 
a  faire  d'abord  abstraction  de  l'orthographe  traditionnelle  et  à  repré- 
senter les  mots  exactement  comme  ils  s'articulent.  De  cette  manière 
l'ouie  et  la  vue,  étant  d'accord,  se  fortifieraient  mutuellement  Des 
hommes  justement  considérés,  MM.  Sweet  en  Angleterre,  Jespersen  en 
Danemark,  Storm  en  Norwège,  Vietor  en  Allemagne,  ont  arrêté  les 
bases  d'un  système  de  notation  phonétique  dont  M.  Paul  Passy  en 
France  s'est  fait  le  zélé  propagateur  (^).  On  ne  doit  pas  confondre  ce 
mouvement  avec  celui  de  la  réforme  orthogrnpliique,  avec  lequel  il 
n  a  qu  un  rapport  hidirect  et  nullement  nécessaire.  Il  s'agit  ici  d'une 
notation  toute  provisoire,  à  laquelle  l'élève  renoncera  au  bout  de 
quelques  semaines  ou  de  quelques  mois,  quand,  une  fois  en  possession 
des  mots,  Il  sera  sur  de  ne  pas  se  laisser  dérouter  par  les  signes  écrits 
Une  société  s  est  fondée  pour  la  propngmion  de  ce  sj-stème  :  c'est  la 
société  Quousque  tandem,  ainsi  nommée  d'après  le  litre  d'une  brochure 
(le  Vielor  ("). 

..  Nos  professeurs  auraient  (ort  de  iic  pas  prendre  connaissinpe 
d  une  ,„e.hode  qui  intéresse  de  si  prés  leur  lâche  ,uo  idi^^   M 

"éZCi;™:'!  ■'""'■  ^"■™  ^"-  --  ^  ^--OM'^ 

Voilà  ce  que  pense  M.  Bréal.  Les  T„sm,clio,„  ,„;mie,mes  de  189- 

.  a  m  Ua,ent  pas  non  plus  la  transcription  phonitique.  parce  qu'cli; 

n  fes°  er,„       ^'^l^J-  """''  '''  """"'"'"^  rn.,(aise.  s'expri,nent 
termes  .     L  eleve  a  qu,  vous  presejitoz  un  mot  écrit,  et,  à  côté, 

(1)  Taveniier  et  Adam  'C/ioi  r  rn-mhir  ,if    i 
Paris,  coliii)  font  remarquer  rimportaiice  àn'X^'!^  f''»"['dcs  avec  ,>n,strjuc  et  rocahnlaire. 
Chant  est.  disent-ils.  rauxiliaire  ind  s  ,«,^.  ,  ^  v  '  ^'T  '  ^'^"'^''^'^  '«"«"«.s  vivantes  :  .  i.é 
'(?S'bS??'^"'''''""""'^''^''-^'^^^^^  ''"'"'"'"•  ^'""""^  '^'"'^•^ 

'3)  M.  Bréal,  p.  37. 

'\-^]  Le  Maître  phonétique  G'it  rnrn-..„d„  r. 

Vietor  et  Franke.  Die  pra,  s^^sZ^T  ^""'"''"  '"'"""'  ««^'^'-omi,  Ire  édi.ion,  mi 

I.eipzi,^1800,sont]esvérUablesto    oteu      ;u:;;:;t  '" ''"'°"    '-"'^  "«'•  ■'espèrsen; 

ioteui  s  du  g  1  and  mouvement  réformiste  en  Allemagne. 


le  même  mot  en  prononciation  figurée,  ne  voit  bientôt  plus  que  ce 
dernier,  et  il  a  désormais  trois  choses  à  apprendre  :  l'orlhographe,  la 
figuration  et  la  prononciation. C'est  sur  la  bouche  du  maitre  que  l'élève 
doit  lire  le  mot  ;  c'est  de  la  bouche  du  maitre  qu'il  doit  recevoir  les 
sons  de  la  langue  étrangère,  laquelle,  peu  à  peu  et  parce  seul  moyen, 
cessera  d'être  étrangère  pour  lui.  »  Que  conclure  ?  On  ne  se  servira 
pas  d'une  façon  systématique  de  la  notation  phonétique  (*)  ;  tout  au 
plus  pourra-t-on  y  recourir  occasionnellement  pour  les  explications 
au  tableau  noir  ;  «  rien  ne  s'oppose  même  à  ce  qu'on  pratique  modé- 
rément des  exercices  d'épellation  sur  des  tableaux  muraux  présentant 
une  synthèse  s^'stématique  de  tous  les  sons  de  la  langue  étrangère  [-). 
Ces  exercices  d'assouplissement  sont  à  la  langue  ce  que  sont  les 
gammes  à  la  musique  (^).  » 

«  Quelques  notions  de  phonétique  plu'siologique  ne  seront  pas  non 
plus  inutiles  au  professeur,  fait  observer  encore  M.  Bréal  (*).  Ainsi 
qu'on  l'a  dit  avec  raison,  elles  seront  pour  lui  ce  que  des  notions 
d'anatomie  sont  pour  le  professeur  de  gymnastique.  Corriger  une 
fausse  prononciation  n'est  pas  chose  facile  :   il  faut  avoir  quelque 


(i;  "SV.  Mueucli,  Frfntzocstsril,  dans  le  Haiulhuch  de  lîaumeisler,  j).  32.  —  «  Faut-il  aller, 
se  demande  Hubsdier,  )).  (m,  jusqu'à  se  servir  de  l'alphabet  iihoaéiique  ou  plutôt  d'un 
des  nombreux  aii)liabets  plionétiques  qui  existent  î  Xon,  répond-il.  »  Si  nous  croyons, 
ajoute-t-il,  pouvoir  nous  dispenser  de  lempîoi  systématique  de  l'écriture  phonétique 
pour  l'allemand,  il  est  vivement  à  désirer  que  le  maitre  d'allemand  se  familiarise  avec 
les  résultats  de  la  i)lu)nétique  et  qu'il  sache  tirer  profit  de  ce  qui  ))eut  être  utile  à  son  ensei- 
gnement. L'étude  des  phénomènes  phonétiques  rend  attentif  à  des  nuances  qui  échappent 
souvent  à  l'oreille  la  mieux  exercée,  voire  même  à  celui  qui  croit  posséder  à  fond  sa  langue 
maternelle.  -^  —  -  i,a  question  de  l'usage  de  lu  phonétique  dans  l'enseignement  des  langues 
vivantes  est  l'une  des  plus  discutées  actuellement  en  Allemagne.  Miss  lîrebner  f  Tll^  Mciliod 
ofTeaching  Modem  Lanr/iiar/es  in  Gi'niunv/,  London,  1899)  ne  doute  pas  que  la  prononciation 
des  élèves  ne  bénéficie  grandement  de  l'emploi  des  traiisc-iptions  phonétiques  ;  mais  elle 
reconnaît  que  l'enseignement  basé  sur  la  ])honétique  est  (lilficilc  et  arcb',  spécialement  dans 
des  classes  nombreuses  et  peuplées  de  jeunes  élèves.  Pour  ces  classes,  elle  rejette  les 
transcriptions  dans  les  cahiers  de  notes  des  élèves,  mais  elle  en  recommande  l'emploi  par 
le  professeur  au  tableau.  Parmi  les  causes  qui  tendent  à  empêcher  l'enseignement  â  base 
phonétique  de  se  populariser.  Miss  Hrebner  cite,  et  avec  raison,  la  diversité  des  alphabets 
utilisés.  Celui  du  Maitre  phonétique  gagne  cependant  de  plus  en  jV.us  d'adhérents.  "J.  Melon, 
Choses  d'Angh'tenv  et  d'Allemagne,  dans  la  Reime  des  Humanités  en  Belgique,  t.  .5,  )).  223.  Voyez  : 
Vietor,  Elemcnte  der  Phonetik  iind  Oi-thoepie  des  Deutschen,  L')iglischen  imd  Franzoeshche^i 
mit  Ruecltsicht  auf  die  Bedueff7iisse  der  Lehrpraxis,  Leipzig,  Reisland  ;  le  même  en  abrégé  ; 
Trautmann,  Die  Sprachlaute  im  Allgemeinen  und  dis  Ladite  des  Englischen,  Franzoesischen  und 
Deutschen  îjh  i?t'sr)«rfecrti.  Leipzig,  1S81-80  ;  Guex,  J*('.s"  recherches  phonétiques  et  de  leur  appli- 
calion  à  l'enseignement  des  langues  vivantes,  Zurich  ;  H.  Sweet,  Elementarljuch  des  gesprochenen 
Englisch  (Grammatik,  Texte  v.nd  Glossar),  Oxford,  1887;  Cl.  H.  lîreymann,  Die phonetische 
Literatur  von  187C-189.J,  Leipzig,  1897. 

(2)  Vietor  a  imaginé  des  tableaux  qui  portent,  imprimés  en  couleurs  différentes,  des  lettres 
ou  des  signes  qui  représentent  les  sons.  L'emploi  des  couleurs  est  très  judicieux  :  elles 
servent  à  distinguer  nettement,  par  exemple,  les  sons  que  ne  i)Ossède  pas  l'allemand,  et, 
par  suite,  à  mettre  tout  de  suite  les  élèves  en  garde  contre  certaines  prononciations 
vicieuses.  Dès  lors  ou  fait  d'abord  prononcer  les  sons  isolés  par  un  élève  ou  par  toute  une 
classe,  ou  bien  on  demande  à  un  enfant  de  montrer  sur  le  tableau  un  son  prononcé  par  le 
maitre  ou  un  camarade.  ;i!ornecque,  p.  -14). 

;3)  E.  Simonnot,  Comment  les  langues  vivantes  sont  enseignées  à  l'étranger,  dans  la  Revue 
pédagogique,  1901,2,  p.  20. 

{•1)M.  Bréal,  p.  30. 


—  24  — 

idée  des  organes  mis  en  jeu.  Il  ne  suJïit  pas  de  répéter,  ni  même  de 
crier  les  mots  :  en  vain  vous  élevez  la  voix,  votre  écolier,  habitué 
comme  il  est,  les  entend  non  comme  vous  les  prononcez,  mais  comme 
il  les  prononce  lui-même  (').  " 

Comment  donc  apprendra-t-on  aux  élèves  à  prononcer?  Se  servira- 
1-on  immédiatement  d'un  livre  de  lecture  ?  Kxpliquera-t-on  d'abord 
les  dilTérents  sons,  em])loicra-t-on  ensuite  des  mots  modèles,  et 
passera-t-on  enfin  à  la  lecture  de  textes  suivis  ?  Nullement  ;  l'enseigne- 
ment de  la  prononciation  se  fera  dans  les  leçons  d'intuition  au  fur  et 
à  mesure  que  les  mots  se  présenteront.  Dès  que  le  professeur 
emploiera  un  mot  nouveau,  il  le  répétera  plusieurs  fois,  s'il  est 
ditîicile,  puis  le  fera  prononcer  par  un  ou  plusieurs  élèves  (^). 

Vocabulaire.  —  Cette  étude  se  confond  avec  la  leçon  d'intuition. 
En  répétant,  on  groupera  les  mots  de  différentes  façons  par  matière, 
ou  bien  on  les  opposera  les  uns  aux  autres.  Le  plus  possible,  on  les 
enchâssera  dans  des  propositions.  "  Ces  propositions,  qui  encadrent 
le  mot,  sont,  dit  M.  Bréal  {^),  le  meilleur  secours  pour  la  mémoire  : 
elles  servent  à  l'enserrer  et  à  le  maintenir,  connne  le  composteur 
maintient  les  lettres  d'imprimerie.  "  On  se  gardera  bien  do  faire 
réciter  les  mots  accompagnés  de  leur  traduction  française  :  ce  serait 
pécher  contre  les  principes  de  la  méthode. 

Orthographe.  —  Les  intransigeants  ont  peur  du  mot  écrit  :  ils  se 
contentent  pendant  longtemps  d'un  enseignement  oral.  Je  ne  partage 
pas  leurs  craintes,  et  je  n'hésite  pas  à  écrire  au  tableau  des  mots  dont 
la  prononciation  est  bien  acquise  par  les  élèves.  Je  vais  même  plus 
loin.  A  la  fin  d'une  leçon,  je  dicte  quelques  phrases,  que  je  corrige 
immédiatement  à  l'aide  du  tableau  mobile. 

Gr.oimaire.  —  L'étude  grammaticale  de  la  langue  doit  marcher 
de  pair  avec  les  exercices  d'intuition.  Gardons-nous  de  faire  fi  de  la 
grammaire  pendant  tout  un  temps  ;  car,  remarquons-le  bien,  nos  collé- 
giens ne  sont  plus  des  enfants  qui  passent  toute  la  journée  avec  leur 
mère  :  ils  ont  déjà  appris  deux  ou  trois  grammaires;  ils  n'ont  que  peu 
d'heures  d'allemand  ou  d'anglais  et  sont  exposés  à  oublier  d'une  leçon 
à  l'autre;  enfin,  ils  n'ont  l'occasion  de  parler  que  relativement  peu  en 
une  heiue  de  classe  ;  en  tout  cas,  ils  ne  répéteront  pas  et  ils  n'enten- 
dront pas  répéter  des  centaines  de  fois  les  mêmes  mots  ou  les  mêmes 
tournures.  Dès  lors,  pourquoi  leur  refuser  le  "  régulateur  nécessaire  », 


(11  Voyez  ]!.  Eggort.  Phonclhclic  inul  mcthoiUsche  StitAien  iii  Paris  zirr  Pra.vis  des  ncuapraclill 
chen  Unlerrichls,  Leijizig,  l'JÛO. 

(2)  Mueiich  est  partisan  clun  cours  préparatoire  qui  durerait  un  mois.  Uubsclier,  p.  CO, 
recommaiulc  aussi  un  enseignement  ea:  jn-ofcsso  de  la  prononciation. 

3)  M.  liréal,  p.  CO. 


—  25  — 

qui  les  guidera,  viendra  en  aide  à  leur  mémoire  et  les  empêchera  de 
contracter  de  mauvaises  habitudes  ?  J'ai  vu  des  enfants  qui  avaient 
appris  l'allemand  à  raison  d'une  demi-heure  par  jour  pendant  une 
année  et  qui  se  trompaient  constamment  dans  la  déclinaison,  parce 
que  jamais  ils  n'avaient  appris  la  déclinaison  complète  d'un  substantif 
seul  ou  accompagné  d'un  adjectif.  Par  contre,  j'ai  constaté  qu'en 
systématisant  soigneusement  les  faits  grammaticaux,  les  enfants 
s'expriment  correctement.  Il  en  est  de  la  correction  grammaticale  en 
allemand,  comme  de  la  prononciation  :  il  est  plus  malaisé  de  corriger 
sans  cesse  des  fautes  que  de  faire  prendre  dés  le  début  l'habitude 
d'emplo3'er  des  formes  correctes. 

Je  reviendrai  sur  ce  point,  quand  je  m'occuperai  plus  spécialement 
de  la  grammaire.  Pour  le  moment,  je  me  borne  à  une  remarque 
que  M.  Firmer}'  (^)  a  soin  de  faire  :  il  faut  prendre  garde  d'exercer 
exclusivement  l'élève  sur  le  présent  de  l'indicatif.  C'est  un  inconvénient 
de  renseignement  par  questions  et  par  réponses  (quV^f  ceci?...  Que 
voyez-\ous  là?...  Que  fait  ce  personnage  sur  notre  tableau?...  etc.).  Le 
professeur  averti  se  préoccupera  d'introduire  journellement  dans  la 
conversation  les  autres  temps  du  verbe  et  les  fera  emplo.yer  de 
préférence  dans  les  devoirs.  M.  Firmery  recommando  en  outre  aux 
professeurs  d'allemand  de  tutoyer  leurs  élèves.  C'est,  en  effet,  le  moyen 
le  plus  efficace  pour  les  familiariser  avec  une  des  formes  les  plus 
difficiles  de  la  conjugaison,  et  qui,  chez  nos  voisins,  est  continuelle- 
ment employée.  Je  ne  sais  pas  cependant  s'il  n'y  a  pas  d'inconvénient 
à  tutoyer  dans  la  classe  d'allemand  lorsqu'on  ne  le  fait  pas  dans  les 
autres  (-).  Le  professeur  en  jugera. 

Un  manuel,  garantissant  un  plan  uniforme  et  méthodique,  me 
parait  nécessaire  :  il  sera  avant  tout  un  aide-mémoire  pour  l'élève 
qui,  rentré  chez  lui,  reverra  sa  leçon.  En  classe,  on  ne  l'ouvrira  que 
pour  lire  ce  qui  a  été  exposé  de  vive  voix  \^}.  Il  va  sans  dire  que  le 
manuel  formule  les  règles  daiis  la  langue  étrangère  :  c'est,  d'ailleurs, 
celle  dont  le  mailre  s'est  servi  pour  les  exposer  de  vive  voix. 
En  cela,  pas  de  difficulté.  L'élève  comprend  directement  des  questions 
comme  :  do  quel  genre  est  ce  substantif  ?  à  quelle  personne  ou  à  quel 
temps  est  ceverbe?ctc.,  et  directement  y  répond.  Il  est,  en  otFct,  familier 
avec  le  langage  grammatical,  dont  les  termes  techniques  sont  à  peu 
près  les  mêmes  dans  toutes  les  langues  (■*). 

(1)  Firmery,  p.  339. 

(2)  '■  Si  les  élèves,  dit  M.  Firmery,  p.  339,  se  montrent  iieut-étre  peu  sensibles  ;'il;i  raison  de 
pédafe'Ogie  grammuticale,  ils  se  rendront  à  une  autre  ;  c'est  qu'en  Allemagne  le  i)rofcsseur 
tutoie  ses  élèves.  Et  c'est  là  encore  un  petit  fait  qui  contribuera  à  maintenir  dans  nos  classes 
cette  atmosphère  artiflcielle  que  je  ne  saurais  trop  recommander.  " 

(3)  Firmery,  p.  340. 

(i;  Les  bons  manuels  ne  manquent  pas  :  I..  Poiry,  Méthode  directe  et  intiiitire  de  la  Imigne 
allemande,  Bruxelles,  1902.  —  Alye,  Leitfaden  fiievden  evsten  Unterricht  im  Deutscheit,  SI.  Gall(  n. 


—  26  — 

Conversation.  —  Au  bout  d'un  ou  de  deux  ans,  selon  le  cas,  le  rôle 
exclusif  de  la  méthode  intuitive  est  fini.  Cependant  cette  méthode  se 
retrouve  encore  directement  ou  indirectement  dans  les  conversations. 

a)  Ainsi,  on  fait  des  exercices  comprenant  les  locutions  ou  les 
formules  qui  ont  trait  aux  sujets  de  conversation  les  plus  courants, 
tels  que  l'état  de  santé  ou  de  maladie,  les  propos  de  civilité,  les 
phénomènes  atmosphériques,  le  chaufïage  et  l'éclairage,  l'heure,  les 
positions  ou  mouvements,  si  du  moins  l'étude  de  certains  tableaux  n'a 
pas  déjà  amené  ce  genre  de  sujets. 

b)  On  entame  un  vrai  dialogue  en  questions  et  en  réponses  faites, 
d'une  part,  sur  Tàge,  le  lieu  de  naissance,  le  diner,  le  coucher  de  l'élève 
interpellé  ;  de  l'autre,  sur  quelque  événement  saillant  du  jour;  car  tous 
les  incidents  de  la  classe,  ordinaires  ou  extraordinaires,  doivent  faire 
l'objet  d'une  conversation.  On  y  consacre  une  dizaine  de  minutes. 
Hartmann  (*)  rapporte  plusieurs  conversations  de  ce  genre  qu'il  a 
entendues  dans  ses  visites  scolaires.  Ainsi,  au  Lycée  Racine,  à  Paris, 
la  maîtresse  de  quatrième  demandait  à  une  de  ses  élèves  :  War  Ihre 
Aufgabe  schwer  ?  —  0  ja.  —  Warum  Avar  sie  denn  schwer?  —  Wohl 
weil  gewisse  Regeln  anzuwenden  waren.  —  Wie  lange  Zeit  haben  Sie 
auf  Ihre  Aufgabe  verwandt?  —  Dreiviertel  Stunden,  etc. — A  une 
autre  élève  :  Haben  Sie  den  Festzug  gesehen  ?  —  Ja.  —  Hatten  Sie  ein 
gutes  Fenster?  —  Ja.  —  An  welchem  Tage  haben  Sie  den  Oclisen  (= 
den  P'aschingsochsen)  gesehen? —  Am  Sonntag.  —  Yormittags?  — 
Nein,  Nachmittags.  —  Wie  lange  dauerte  denn  der  Zug  ?  —  Eine 
Yiertelstunde.  —  Wie  haben  Sie  die  Wagen  gefunden  ?  —  Nicht 
sehr  intéressant,  aber  die  Menge  war  intéressant.  —  Ja,  das  Volk 
freute  sich.  Aber  die  Maedchen  in  den  Blumen,  das  war  docli  ein 
guter  Einfall.  ^^ 

cj  On  fait  rouler  la  conversation  sur  une  question  d'histoire,  de 
géographie,  de  littérature,  en  un  mot,  sur  tout  ce  qui,  entre  gens 
instruits,  précise  et  nourrit  un  entretien.  Ici,  on  pourra  parfois  faire 
usage  de  tableaux,  de  gravures,  de  photographies. 

cl)  On  fait  une  conversation  sur  un  morceau  expliqué.  Eggert  (-) 


2  parties  ;1899  et  1003;.  —  Sclnveilzcr  et  Simoiniot,  Mvihodc  directe  imvr  Vensciuuement  âe 
l'allemand,  Paris,  19C0,  Ire  série  et  2«  série  ;  deux  parties,  ruiie  pour  l'élève,  l'autre  pour 
Je  maître  ;  Deutschcs  Lesehuch  mil  Spirchuebi'nr/en  fiter  Seo-ta  (partie  de  l'élève  et  partie  du 
maître;,  fi'er  Qvinta,  fuer  Qvarla  vnd  Terlia,  Paris,  1903.  —  Hamburger,  L'iif/lish  Lessons  after 
S.  Alye's  Metiiod  for  the  fîrsl  inxtniclion  in  forcign  lanfjiiages  icilh  E.  Iloelzel's  piclurcs.  St.  Gall, 
19C0.  —  Schmidt,  Lehrbuch  der  cnglischen  Sprache  ai'f'Grnndlaf/eder  Anschauung,  Leipzig,  1899. 
—  Les  professeurs  trouveront  d'excellents  conseils  dans  M.  Walter,  Enf/lisek  nnch  de»i. 
FmnJifin-ter  Refonnplan,  Marburg,  HX)3.  —  Pour  le  flamand,  abstraction  faite  de  l'ouvrage 
de  Melon,  cité  plus  haut,  nous  avons  :  P>aratto  en  Rijmers,  Vlaamsch  taalboeJi,  Bruxelles, 
K02-1903,  et  Duqué,  Hct  Vlaamsch  door  de  aanschoun-inysmethode,  Bruxelles,  19Û3. 

(1)  Hartmann,  Beisecindn'eche,  p.  58. 

[2)  Eggert,  p.  95  et  suiv. 


donne  un  exemple  d'une  bonne  répétition  sur  la  fable  du  Loup  et  du 
Renard  qu'il  a  entendue  à  Paris.  LeJirer  :  Wir  wollon  heute  ueber 
die  schoeno  Gescliichte  spreclien  voni  Wolf  und  dein  Fuchs.  Was 
fuer  Tiere  sind  der  Wolf  und  der  Fuchs?  —  Schuelej-  :  Der  Wolf  und 
der  Fuchs  sind  wilde  Tiere.  —  L.  :  Hast  du  schon  wilde  Tiere 
gesehen?  —  S.  :  Ja,  ich  habe  schon  wilde  Tiere  gesehen.  —  L.  : 
Wo  hast  du  wMq  Tiere  gesehen  ?  —  S.  :  In  einem  zoologischen 
Garten.  —  L.  :  Was  verlangte  der  Wolf  von  dem  Fuchs?  —  S.  :  Der 
Fuchs  sollte  ailes  thun,  was  der  Wolf  wollte.  —  L.  :  Warum  sollte 
der  Fuchs  ailes  thun  ?  —  .S.  :  Weil  er  der  schwaechste  war.  —  L.  : 
War  der  Fuchs  gern  bel  dem  Wolfe  ?  —  S.  :  Nein,  er  war  nicht 
gern  bei  dem  Wolfe  ?  —  L.  :  Der  Wolf  und  der  Fuchs  kamen  an 
einen  Wald.  Wasistein  AVald?  —  S.  :  ...  —  L.  :  So  sage  mir  wenig- 
stens,  was  sieht  man  in  einem  Walde?  —  S.  :  In  einem  Walde  sieht 
man  viele  Baeume.  —  L.  :  Was  sagte  der  Wolf  zu  dem  Fuchs  ?  — 
S.  :  Der  Wolf  sagte  :  Schaffe  mir  etwas  zu  essen,  oder  ich  frcsse 
dicli  auf.  —  L.  :  Warum  sagte  er  nicht  «  ich  esse  "  ?  —S.  :  Die 
Tiere  essen  nicht,  sondern  sie  fressen.  —  L.  :  Was  heisst  «  son- 
DERN  ?  "  etc.,  etc.  Voilà  une  leçon  pleine  de  vie  et  d'entrain,  que 
je  regrette  de  devoir  écourter  ici;  mais  le  peu  que  j'en  ai  cité,  suffit 
pour  juger  de  l'intérêt  qu'elle  présente. 

ej  On  imagine  aussi  un  vo3'ageou  une  excursion.  Ainsi,  M.  Schweitzer 
prend  comme  livre  de  lecture  «  Paris  et  ses  environs  ^  de  Baedeker, 
en  allemand,  bien  entendu  ;  je  dis  "  livre  de  lecture  "  ;  il  serait 
plus  juste  de  dire  :  "  sujets  d'entretiens  "  ;  car  on  ne  se  sert  pas  de  ce 
livre  comme  texte  de  traduction  ;  les  élèves  préparent  leur  texte  chez 
eux  et,  au  cours,  la  page  devient  un  sujet  de  conversation,  le  livre 
restant  fermé.  Sous  la  direction  de  leur  guide,  M.  Schweitzer  et  ses 
élèves,  semblables  à  une  caravane  de  l'agence  Cooke,  font  leur 
tour  à  travers  Paris.  En  débarquant  du  train,  ils  écoutent  les  conseils 
de  leur  cicérone  sur  les  formalités  de  douane  et  d'octroi,  sur  le 
choix  d'un  hôtel  ou  d'un  restaurant,  sur  le  système  monétaire  français 
comparé  à  l'argent  étranger,  sur  les  moyens  de  communication  de  la 
capitale,  sur  le  service  des  postes  et  télégraphes.  Puis,  ils  se  mettent 
en  marche...  «  En  parcourant  les  rues  de  Paris  en  tous  sens, 
à  pied,  en  tramway,  en  fiacre,  en  automobile,  en  bateau-mouche, 
en  allant  de  la  gare  à  l'hôtel,  au  restaurant,  au  café,  en  nous 
entretenant  avec  les  gens  de  service,  en  faisant  nos  emplettes  aux 
grands  magasins  du  Eouvre  et  du  Bon  Marché,  en  recevant  et  en 
expédiant  notre  courrier,  en  assistant  le  soir  à  une  représentation 
de  l'Opéra  ou  du  Théâtre  français,  après  avoir  employé  notre  journée 
à  admirer  les  monuments  et  la  splendeur  de  la  grand'ville,  à  toute 
heure  nous  vivons,  dit  M.  Scln\'eitzor,  de  la  vie  moderne,  de  la  vie 


—  28  — 

présente,  au  milieu  de  Féclosioii  continuelle  des  industries  et  des 
inventions.  Et  dans  l'entraînement  de  cette  vie  multiple  et  diverse, 
nous  nous  approprions  une  langue  qui,  elle  aussi,  est  diverse, 
étendue  et  nmltiplo  ;  mais  c'est  surtout  une  langue  vivante,  n'aj^ant 
rien  d'abstrait  ni  de  livresque,  une  langue  tout  imprégnée  de  sensa- 
tions et  de  visions  immédiates,  une  langue  apprise  sur  le  vif,  une 
la)]gue  vécue  (').  '•  Que  les  professeurs  belges  imitent  M.  Scliweitzer  en 
prenant  pour  guide  Baedeker  "  La  Belgique  ?î  en  allemand. 

f)  Il  est  encore  une  série  d'exercices  qui  tiennent  de  la  conversation 
•et  préparent  plus  particulièrement  à  l'élocution.  Les  voici. 

On  lit  un  morceau  dont  on  a  expliqué  au  préalable  les  mots  qui 
pourraient  n'être  pas  compris.  On  invite  ensuite  les  élèves  à  répéter 
■ce  qu'ils  ont  retenu.  On  demande  aussi  de  reproduire  librement  soit 
un  passage  préparé  à  domicile,  soit  un  passage  qui  n'a  pas  été 
étudié,  mais  qui  vient  d'être  lu  par  le  maitre.  Ou  mieux  encore  : 
on  raconte  sui-même,  on  questionne  ensuite  les  élèves  pour  obtenir 
les  grandes  divisions  du  récit  ;  enfin,  on  invite  les  élèves  à  développer 
à  tour  de  rôle  chaque  point. 

On  joue  une  charade,  un  proverbe.  Hartmann  (-)  rend  compte 
d'un  exercice  de  ce  genre  qu'il  a  vu  au  Lycée  Janson-de-Sailly  à 
Passy,  en  4°.  Tandis  qu'un  des  meilleurs  élèves  quitte  la  classe,  le 
maître  s'entend  avec  ses  condisciples  sur  le  choix  d'un  proverbe.  On 
prend  :  Wlien  llie  cat's  away,  the  mice  k'HI  plny,  et  les  neuf  mots 
sont  partagés  entre  neuf  élèves  ;  chacun  d'eux  doit  faire  entrer  le  mot 
qui  lui  est  échu,  dans  sa  réponse  à  la  question  de  celui  qui  doit  deviner 
le  proverbe  en  conîbinant  les  diverses  réponses.  Les  élèves  ont  fait 
preuve,  dit  Hartmann,  de  beaucoup  d'habileté  et  de  tact.  C'était  avec 
un  vif  intéi'èt  qu'on  suivait  les  questions  et  les  réponses. 

Autre  exercice.  On  met  en  action  un  récit  qu'on  a  lu.  En  cinquième 
du  Petit  Lycée  Condorcet,  Hartmann  (^)  a  assisté  à  un  exercice  de 
ce  genre.  Le  professeur,  —  c'était  M.  Meneau,  l'auteur  d'un  bon 
■cours  de  langue  allemande,  —  a  fait  lire  le  morceau,  Der  Ratten- 
faenger  ;  il  a  posé  ensuite  à  ses  élèves  une  série  de  questioiis  sur  les 
points  principaux  du  récit  ;  enfin,  il  a  exprimé  le  désir  de  voir  deux 
«lèves  représenter  devant  leurs  condisciples  l'un  le  bourgmestre, 
l'autre  le  preneur  de  rats.  Des  mains  en  grand  nombre  se  sont  levées 
aussitôt,  et  le  professeur  ayant  fait  un  choix,  les  deux  élèves  ont 
•engagé  sur  l'estrade  la  conversation  suivante  :  Guten  Tag,  Herr 
Buergermeister.  —  Guten  Tag  !  giebt  es  etwas  Neues  ?  —  Ach,  es 


(11  Claudine  Boucluicourt,  if's  levons  de  choses  dans  rcnseijjnemenl  des  la>if/ircs  rivantes,  dîms 
lu  Jievue  vniversitaire,  189;',  t.  2,  p.  42ir4Tï. 
(2   Hartmmiu,  p.  ô7. 
(3.  Hartmaiiii,  p.  03. 


—  29  — 

sind  viele  Ratten  iiiid  Maeuse  in  der  Siadt,  und  sie  machen  vici 
Scliaden.  Icli  moeclite  gerii  dieStadt  befreieii.  —  Ich  kann  die  Stadt 
von  allen  Ratlen  und  Maeusen  befreien.  —  Ist  es  wahr  ?  Wenn  es 
wahr  waere,  so  wuerden  Sio  mir  einon  grossen^Dienst  leisten.  —  Ich 
werde  Ihnen  den  Dienst  leisten.  —  Wann  woUen  sie  es  lliun  ?  —  Uni 
Mitternacht.  —  Welclie  Siimme  verlangen  Sie  ?  Ich  wuerde  Ihnen 
hundert  Tlialer  geben.  — Ich  will  gern  dièse  Bedingung  annehmen. 
Ce  dialogue,  que  la  classe  écoutait  avec  le  plus  vif  intérêt,  n'avait  pas- 
été  appris  par  cœur  ('). 

Pour  les  élèves  plus  avancés,  un  exercice  très  utile  et  très  inté- 
i^essant,  ce  sont  les  discussiojis  préparées  d'avance  sur  des  sujets  qui 
s'y  prêtent  tout  particulièrement.  Ainsi,  le  professeur  peut  ouvrir  des- 
débats sur  les  qualités  et  les  défauts  des  principaux  peuples  de- 
l'Europe.  Les  élèves  viennent  exposer,  à  tour  de  rôle,  ce  qu'ils  pensent 
des  Anglais,  des  Allemands,  des  Italiens,  des  Français  et  des  Russes. 
Hartmann  a  vu  à  Genève  un  exercice  de  ce  genre  (-). 

Les  exercices  de  conversation  et  d'élocution  peuvent  donc  être- 
très  variés  ;  il  est  aisé  de  les  multiplier  et  de  les  approprier  aux 
différentes  classes  ;  mais,  chose  importante,  «  il  faut,  comme  le  dit 
M.  Bréal  (''),  que  dès  les  premiers  moments  les  élèves  parlent.  Le- 
mot  bien  connu  de  Démosthène  sur  V action,  première  et  dernière- 
qualité  de  l'orateur,  se  vérifie  dans  l'étude  du  langage.  Plus  vous 
attendrez,  plus  votre  élève  aura  de  peine  à  partir.  L'augmentation 
même  de  ses  connaissances  deviendra  un  obstacle.  Quand,  pour 
exprimer  une  idée,  il  aura  l'option  entre  deux  ou  trois  tournures, 
il  passera  à  choisir  entre  elles  le  temps  qu'il  fallait  parler.  Joignez-y 
une  cause  d'ordre  psychologique.  Tous  les  professeurs  savent  que  la 
timidité  grandit  avec  les  années  :  nous  nous  rendons  mieux  compte- 
des  difficultés,  nous  avons  plus  d'égards  pour  l'oreille  de  nos  inter- 
locuteurs, notre  amour-propre  aussi  est  devenu  plus  sensible,  et  nous- 
demeurons  muets  pour  ne  pas  être  au-dessous  de  la  bonne  opinioii 
que  nous  voudrions  donner  de  nous-mêmes.  " 

§  3.  —  L'enseignement  grammaticaL 

NÉCESSITÉ  DE  CET  ENSEIGNEMENT.  —  Je  l'ai  déjà  fait  entendre  :  bon 
nombre  de  réformateurs  vont  trop  loin   dans  leur  réaction   contre- 


:i)  M.  I.ocombe  recommande,  lui  aussi,  de  faire  de  petits  récits,  d'expliquer  de  petites 
fables,  qu'on  mettra  eusuite  en  action  ;  ces  petits  drames,  joués  par  les  élèves,  les  amuseront 
beaucoup,  i  Enquête,  dans  la  Kecve  xrniversitairc,  l^JO,  t.  1,  p.  254.) 

[2)  Hartmann,  p.  15  et  10. 

.:])  Hréal,  p.  .53.  si  vous  n'organisez  pas,  dit  Hartmann,  DU'  Auscliauung,  p.  23,  des  exercices- 
de  conversation  dès  le  premier  degré,  n'essayez  pas  de  les  faire  plus  tard  ;  c'est  peine 
inutile  ;  le  meilleur  professeur  de  rhétorique  n'y  réussira  pas. 


—  30  — 

la  grammaire.  S'il  est  exact  de  dire  que  pendant  longtemps  on  a  fait 
à  la  grammaire  la  part  trop  grande,  qu'on  l'a  enseignée  d'une  façon 
abstraite  et  a  priori,  qu'on  s'est  perdu  dans  des  détails  inutiles, 
il  n'est  pas  moins  vrai  qu'on  s'expose  maintenant  à  faii-e  fausse  route, 
en  prétendant  retarder  le  plus  possible  cet  enseignement,  en  ne  l'ad- 
mettant qu'occasionnellement  et  en  le  réduisant  à  la  portion  congrue. 
J'ai  montré  plus  haut  la  source  de  cette  erreur  :  l'assimilation  complète 
du  collégien  avec  le  petit  enfant  vivant  auprès  de  sa  mère. 

L'enseignement  de  la  grammaire  est  absolument  nécessaire.  Vouloir 
s'en  passer,  c'est  une  illusion  étrange,  que  dis-je  ?  c'est  une  erreur 
grossière,  c'est  une  faute  qu'on  paiera  cher  !  "  La  grammaire,  a  dit 
M.  Mieille  ('),  est  la  lanterne  qui  éclairera  notre  route  ;  sans  elle, 
nous  nous  casserions  le  cou  ". 

Caractère.  —  Cet  enseignement  sera  au  début  occasionnel,  plus 
tard  sj^sténiatique  ;  mais  alors  même  qu'il  sera  occasionnel  ou,  plus 
clairement  encore,  qu'il  se  grelFera  sur  nos  premiers  exercices 
d'intuition,  il  conviendra  de  procéder  dans  un  ordre  déterminé  et  de 
synthétiser  régulièrement.  Gardez-vous  de  suivre  certains  l'éformateurs 
qui  vont  à  l'aventure  et  émiettent  les  faits  grammaticaux.  Vous  seriez 
tout  étonné  de  constater  que  vos  élèves  retiennent  à  la  vérité  un  bon 
nombre  de  mots,  mais  n'ont  aucune  correction  grammaticale.  Vous 
compromettriez  ainsi  toute  la  valeur  de  votre  méthode. 

Marche  a  suivre.  —  Partir  d'exemples  bien  choisis,  conclure  à  la 
règle,  la  faire  appliquer,  telle  est  la  marche. 

Importance.  —  Quelle  sera  l'importance  de  l'enseignement  gramma- 
tical? Réduit  d'abord,  il  s'étendra  et  se  développera  plus  tard,  à  mesure 
qu'on  avancera  ;  mais  il  restera  toujours  pondéré  :  un  enseignement 
approfondi,  remontant  dans  le  passé,  n'a  que  faire  ici.  Les  élèves  n'ont 
besoin  que  des  règles  essentielles  ou  ordinaires.  Arrière  donc  les 
recherches  de  pure  érudition  !  Ne  perdez  pas  votre  temps  à  insister 
sur  des  exceptions  qui  se  rencontrent  rarement,  sur  des  formes  qu'on 
ne  devra  jamais  employer,  sur  des  explications  scientifiques  qui 
surchargent  la  mémoire  sans  profit.  Ne  vous  arrêtez  pas,  par  exemple, 
à  des  impératifs  comme  "  nais  ",  werde  geboren  !  «  naissons  »,  lasset 
uns  geboren  iverden  !  !  "  naissez  »  werdet  geboren  !  !  !  Un  élève 
intelligent  pourrait  vous  déconcerter  par  une  réflexion  piquante, 
comme  le  fit  un  paysan  répondant  à  un  dialectologue  suédois  (-).  Ce 
savant  qui  étudiait  l'extension  de  la  forme  forte  dog  (passé  de  doe, 
mourir),  lui  avait  demandé  :  «  Est-ce  que  vous  dites  maintenant,  par 


<\)  Enquête,  dans  la  Revue  iinirersilaire,  1903,  t.  I,  p.  ÎÔS. 
(2;  rassy,  mémoire  cité,  p.  51. 


—  31  — 

ici,  jag  dog  ou.  jag  cloede  (je  mourus;  comme  qui  dirait  icli  s  ta  rb  ou. 
ich  sterbte)  ?  n  —  Le  paj'san  n'était  pas  grammairien  ;  il  répondit 
raisonnablement  :  «  Mais,  nous  autres,  une  fois  morts,  nous  ne  disons 
généralement  plus  rien  du  tout.  " 

Intérêt.  —  Il  n'est  pas  difficile  de  rendre  souvent  les  leçons  de 
grammaire  intéressantes.  L'ouvrage  de  Hartmann  fournit  à  ce  sujet  de 
nombreux  exemples.  Il  me  suffira  d'en  rappeler  un(').  C'est  une  leçon  sur 
les  particules  herein  et  hinein.  Le  professeur,  M.  Girard,  écrit  tout 
d'abord  au  tableau  noir  :  lier  =  par  ici  ;  hin  =  par  là.  Il  fait  suivre 
le  premier  mot  de  l'exemple  :  komni  lier  ;  le  second  de  geh  hin.  Après 
des  explications  suffisantes,  il  écrit  d'une  part,  herein,  et,  de  l'autre, 
hinein.  Il  prend  alors  des  exemples  bien  choisis  :",  il  rappelle  les 
saltimbanques  qui,  sur  le  champ  de  foire,  crient  au  public  :  Immer 
herein  !  le  gendarme  qui  coffre  un  vagabond  en  lui  disant  :  hinein  ; 
le  maître  d'études,  qui,  conduisant  les  élèves  jusqu'à  la  porte  de  la 
classe,  leur  dit  :  geht  hinein,  tandis  que  le  professeur  qui  se  trouve 
dans  la  classe,  leur  dit  :  kommt  herein.  M.  Girard  n'oublie  pas 
d'indiquer  les  gestes  que  l'on  fait  de  la  main  soit  avec  hinein,  soit 
avec  herein.  Il  cite  aussi  le  cri  des  sentinelles  :  'raiis  !  et  les 
expressions  :  heraus  mit  der  Sprache  !  heraus  mit  dem  Degen  !  et  le 
contraire  Jiinaus  !  Il  recourt  ensuite  à  l'intuition.  Deux  élèves  sont 
désignés  :  l'un  doit  ouvrir  la  porte  et  sortir  ;  l'autre,  resté  en  classe, 
appelle  son  condisciple  :  herein  !  et  quand  celui-ci  est  entré,  on  lui  dit  : 
hinaus.  Ensuite  deux  élèves  vont  se  placer  devant  la  porte  et  entrent 
l'un  derrière  l'autre  ;  le  second  dit  au  premier  :  hinein  !  Enfin  le 
maître  fait  lui-même  sortir  et  entrer  des  élèves  en  disant  :  hinaus  ! 
herein  !  —  Une  leçon  du  même  genre  peut  se  donner  à  l'aide  d'un 
tableau  et  amener,  comme  le  montrent  Meneau  et  Wolfromm  (-), 
des  développements  semblables  à  celui-ci  (Herbstbild)  :  Karl  sitzt  auf 
dem  Apfelbaume,  und  pflueckt  Aepfel  ab.  Seine  Schwester  steht  unter 
dem  Baume  und  haelt  die  Schuerze  auf.  Karl  spricht  :  «  Gib  acht  ! 
Ich  werfe  dir  einen  Apfel  hinab.  Blicke  zu  mir  heraiif,  dass  du  den 
Apfel,  wenn  er  hinabiaeWi,  auffaengst  !  «  Anna  erwidert  :  »  Wirf  nur 
einen  Apfel  nach  dem  andern  herab,  ich  werde  aufmerksam  liinauf- 
sehen,  wenn  du  einen  herabwirfst.  »  L'étude  des  principales  prépo- 
sitions, assez  fastidieuse  et  aride  dans  une  grammaire,  devient  ainsi, 
au  contraire,  des  plus  intéressantes  et  des  plus  faciles,  dès  que  des 
exemples  peuvent  être  mis  sous  les  yeux  des  élèves. 

De  même  les  exercices  de  conjugaison  sont  pleins  de  vie,  si  le 
maître  se  sert  de   l'intuition  et  s'il  distribue  les  personnes  entre 


(1)  Hartmann,  licisecindruecTie,  p.  G4.  • 

(V)  Meneau  et  AVolfromm,  deuxième  livre  de  Jcctuirs  allemandes,  Paris,  1898,  p.  li. 


—  32  — 

différents  élèves  (').  Ainsi,  tout  en  exécutant  les  mouvements,  il  dit  : 
Icli  stehe  auf,  ich  verlasse  meincn  Platz,  ich  gehe  an  die  Thuere,  ich 
mâche  die  Thuere  auf,  ich  mâche  die  Thuere  wieder  zu,  ich  drehe 
mich  um,  ich  gehe  an  die  Tafel,  ich  nehme  die  Kreide,  ich  schreibe 
meinen  Namen  an  die  Wandtafel,  ich  gehe  an  meinen  Platz  zurueck, 
ich  setze  mich,  ich  sitze.  Un  élève  répète  les  différents  mouvements 
ainsi  que  les  paroles.  Un  second  reprend  les  mouvements,  et  un 
troisième  lui  dit  :  Du  stehst  auf,  du  verlaesst  deinen  Platz,  etc.  Un 
quatrième  exécute  à  son  tour  ces  diverses  actions  et  un  cinquième  se 
sert,  en  parlant,  de  la  troisième  personne.  Deux  élèves  sont  ensuite 
désignés  pour  faire  également  toute  la  série  des  mouvements,  et  l'un 
d'eux  dit  :  Wir  stehen  auf,  wir  verlassen  unsern  Platz,  etc. 

§  4.  —  Les  exercices  écrits  ("-). 

Le  thème.  —  La  méthode  dite  naturelle  fait  la  guerre  au  thème  et 
à  la  version.  Requiescant  in  pace  !  disent  les  réformateurs. 

Pourquoi  repoussent-ils  le  thème  ?  Parce  qu'il  faut,  dès  le  début,  se 
proposer  comme  un  but  à  atteindre  aussi  vite  ((uc  possible,  d'amener 
les  élèves  à  penser  dans  la  langue  étrangère,  c'est-à-dire  à  rattacher 
directement  les  expressions  de  la  langue  aux  idées  qu'elles  représen- 
tent. «  Nous  croyons,  disent  MM.  Passy  et  Rambeau  (^),  que  la 
traduction  et  surtout  le  thème  est  le  meilleur  moyen  d'empêcher  de 
pénétrer  dans  la  pensée  étrangère.  Pour  y  arriver,  il  faut  s'émanciper 
de  la  langue  maternelle,  véhicule  et  forme  de  la  pensée  nationale,  à 
laquelle  le  thème  nous  enchaîne.  Félix  Franke  a  très  bien  miontré 
comment  la  traduction  introduit  dans  l'opération  de  la  parole  des 
coi;)})lications  inutiles  qui  la  ralentissent  et  l'empêchent.  Si,  en  effet, 
dans  notre  langue  maternelle,  nous  parlons  d'une  chaise,  nous  passons 
directement  de  l'idée  au  mot.  C'est  là  qu'il  faut  en  arriver  aussi  dans 
la  langue  étrangère  ;  c'est  au  concept  de  l'objet  et  non  au  mot  de  notre 
langue  qu'il  faut  rattacher  le  mot  étranger.  Mais  que  fait  la  méthode 
des  traductions  ?  C'est  le  mot  chaise  qu'elle  associe  au  mot  étranger, 
chair  ou  Stuhl  ;  de  sorte  que  l'opération  peut  se  figurer  comme  suit  : 
1°  idée  de  chaise  ;  2°  mot  chaise  ;  3°  mot  chair  ;  au  lieu  de  l'opération 
beaucoup  plus  simple  et  tout  à  fait  parallèle  à  l'opération  qui  a  lieu 
pour  la  langue  maternelle  :  P  une  idée  de  chaise  ;  2°  mot  cliair. 

Ceci  n'est  rien,  parce  que  le  mot  chaise  représente  une  idée  simple 
et  matérielle,  identique  en  toutes  langues  ou  à  peu  près.  Mais  si  nous 


(1)  Hartmann,  Reisecindrucclu;  y.  75. 

(2   Hubscher,  p.  IS,  et  Cumerlynclc,  Les  devoirs  dans  la  méthode  directe,  dans  la  pcrue  de 
Venseiijnement  des  Unigues  rivantes,  1903,  p.  486  et  suiv. 
(3  J.  Passy  et  A.  Rambeau,  Chreslomathic  française,  Paris..  1897,  p.  VIII. 


—  33  — 

envisageons  des  mots  représentant  des  concepts  compliqués,  plus  ou 
moins  différents  dans  chaque  pays,  la  difficulté  augmente. 

La  traduction  —  précieuse  ici  pour  des  linguistes  déjà  forts,  parce 
qu'elle  leur  apprend  à  rendre  conscientes  ces  différences,  à  les 
analyser  et  à  s'exercer  dans  l'art  si  difficile  des  équivalences  de 
phrases,  qui  est  tout  l'art  du  traducteur  —  est  une. véritable  trahison 
au  début  de  l'enseignement,  parce  qu'elle  fausse  le  sens  du  mot 
étranger  en  paraissant  établir  une  identité  qui  n'existe  pas.  w 

«  Aussi,  quand  on  prend  l'habitude  de  traduire  sa  propre  langue  en 
parlant  la  langue  étrangère,  on  ne  parvient  presque  jamais,  comme  le 
dit  M.  Passy  ('),  à  s'exprimer  d'une  manière  idiomatique.  Les  fautes 
que  font  les  étrangers  en  parlant  français,  proviennent  le  plus  souvent 
de  traductions.  Souvent  ils  arrivent  ainsi  à  dire  tout  autre  chose  que 
ce  qu'ils  veulent.  —  Une  Norwégienne  à  qui  on  avait  rendu  quelque 
service,  écrit  pour  remercier,  et  ajoute  :  «  Je  regrette  de  vous  avoir 
fait  tant  de  peine  "  (gjort  Dem  saa  megetbnjderi),  pour  "  de  vous  avoir 
donné  tant  de  peine  »  —  Un  jeune  Anglais  en  séjour  chez  un  Français, 
quand  il  voyait  un  enfant  pleurer,  s'écriait  régulièrement  :  «  Oh  ! 
quelle  est  la  matière  avec  vous  ?  »  {whaCs  tite  matter  witli  you  ?)  — 
Un  autre,  s'installant  dans  une  pension,  demande  à  la  maîtresse  de 
maison  de  faire  mettre  dans  sa  chambre  •'  une  poitrine  de  caleçons  » 
(a  cliest  of  drawers).  —  Un  prédicateur  anglais,  parlant  à  un  auditoire 
français  sur  un  texte  de  l'Apocalypse,  répétait  avec  conviction  : 
«  Buvez  de  l'eau  de  vie,  mes  frères  ;  buvez  l'eau  de  vie  librement  !  » 
(drink  the  water  of  Life  freelij). 

«  Pour  éviter  des  bévues  de  cette  sorte,  pour  habituer  les  élèves  à 
sentir  instinctivement  ce  qui  est  juste  et  ce  qui  ne  l'est  pas  ?•,  pour 
les  amener,  en  un  mot,  à  penser  dans  la  langue  étrangère,  on  condamne 
le  thème.  Sans  aller  jusqu'à  l'exclure  complètement,  je  crois  qu'il 
faut  y  renoncer  au  début  et  ne  l'admettre  plus  tard  qu'exception- 
nellement. Dans  l'enseignement  des  langues  vivantes  tel  que  je 
le  comprends,  non  seulement  il  nuit  au  succès  de  la  méthode, 
mais  encore  il  est  inutile,  parce  que,  en  tant  qu'application  dos 
règles  et  des  mots,  il  est  avantageusement  remplacé  par  des 
exercices  oraux  et  écrits  (-).  En  résumé,  à  mon  avis,  dirai-jo  avec 


(1)  Passy,  mémoire  cité,  p.  42. 

(2)  "  Quand  nos  élèves  seront  en  état  de  causer  facilement  c:i  langue  étrangère,  et  de  lire 
sans  peine,  non  seulement  la  littérature  courante,  mais  quelques-uns  des  chefs-d'œuvre 
des  prosateurs  et  des  jioètes,  alors  ils  pourront  chercher  à  faire  passer  dans  leur  langue 
maternelle,  la  pensée  et  même  quelque  chose  de  la  tjeauté  de  forme  de  ces  chefs-dœuvre. 
Quand  ils  seront  plus  forts  encore  et  pourront  écrire  couramment  la  langue  étrangère,  ils 
pourront  s'essayer  à  cet  exercice  difficile  entre  tous,  le  thème  —  non  pas  l'inepte  thème 
d'application,  mais  le  thème  littéraire.  Ils  ne  réussiront  peut-être  pas  toujours  très  bien  ; 
mais  en  tout  cas,  ils  s'habitueront  à  comparer  les  deux  langues,  à  pénétrer  le  génie  de  l'une 

3 


—  34  — 

M.  Passy  (*),   le  thème  doit  venir  moijis  tôt,  moins  souvent  et  être 
conçu  .autrement. 

La  version.  —  On  a  fait  à  la  version  les  mêmes  objections  qu'au 
thème  (-).  Aussi,  dans  la  mélhodologie  moderne,  change-t-elle  de  rôle 
et  devient-elle  moins  fréquente.  Qu'est-elle  donc  dans  la  méthode 
directe  ? 

P  Elle  n'est  plus  un  moyen  d'apprendre  une  langue  dont  on  ne 
sait  encore  que  peu  de  chose  ;  c'est  avant  tout  une  sorte  de  pis-aller 
auquel  on  a  recours  pour  gagner  du  temps,  se  faire  comprendre  d'un 
inattentif,  ou  indiquer  une  nuance  délicate,  et  c'est  un  moyen  de 
contrôle  ou  de  veriflcation  dont  on  se  sert,  après  d'autres,  pour 
constater  si  les  élèves  ont  tout  saisi.  Ainsi,  au  début,  après  certaines 
explications,  on  donne  ou  Ion  demande  la  signification  d'un  mot, 
rien  qu'en  passant  :  plus  tard,  quand  on  aborde  des  morceaux  dont 
l'ensemble  ou  seulement  un  passage  présente  des  difficultés,  on  peut, 
après  une  bonne  interprétation,  faire  traduire  lestement,  de  vive  voix, 
l'une  ou  l'autre  phrase  ou  le  tout.  On  voit  alors  jusqu'à  quel  point 
l'élève  a  compris  des  tournures  et  des  termes  diflîciles. 

2°  La  version  est  ensuite  un  exercice  de  style,  qui  se  fait  de  temps  à 
autre  et  surtout  à  la  fin  des  études.  On  a,  par  exemple,  expliqué  dans 
la  langue  même  un  passage  d'un  auteur  allemand  :  il  s'agit  maintenant 
de  mettre  en  présence  les  deux  langues. 

Exercices  écrits.  —  La  méthode  directe,  qui  repousse  donc  autant 


et  de  l'autre  ;  ce  sera  tout  profit,  et  pour  lu  langue  élniiigùre.  et  surtout  pour  lu  langue 
maternelle.  Ce  sera  le  couronnement  de  leurs  études.  Muis  commencer  par  là,  ce  seruit  uu 
non-sens.  "  Pussy,  mémoire  cité,  p.  5(5. 

il;  Mémoire  cité,  p.  50.  Cf.  von  Roden,  p.  39-40.  —  •'  Le  thème  me  puraît,  dit  M.  Lecoq,  ]).  8:J, 
devoir  être  condamné  sans  api)cl,  i)urce  qu'il  est  en  complète  contradiciiou  avec  l'esiirit 
de  la  méthode  nouvelle.  Ce  ne  serait  vraiment  ])as  lu  peine,  a  mon  avis,  d'essayer  pendunt 
plusieurs  années  de  ))roduire  une  connaissance  immédiate  et  directe  de  la  langue  pour 
neutraliser  les  efTorts  laborieusement  accom]ilis  jiur  un  exercice  qui  en  est  lu  contre-i)artie, 
exercice  suranné  d'ailleurs  et  sans  intérêt,  dont  on  peut  se  disjienser  entièrement.  " 

'2)  Voici  les  raisons  que  Berlitz,  —  dont  les  manuels  pour  l'enseignement  de  l'anglids  et  de 
l'allemand  sont  publiés  à  Berlin,  chez  Siegfried  Crombach.—  donne  pour  condamner  l'emploi 
de  toute  traduction.  «  1"  Dans  les  méthodes  qui  font  usage  de  la  traduction,  lu  iilus  grande 
partie  du  temps  les  neuf  dixièmes;  est  employée  à  donner  des  explications  dans  la  langue 
maternelle  de,  lé  ève  :  i)ar  conséquent,  peu  de  mots  sont  prononcés  dans  la  langue  qu'il 
apiM'end.  2"  ceux  qui  étudient  ])ar  la  traduction  ne  peuvent  saisir  comi)lèlement  l'espi'it  de 
la  langue  éli'angère,  ni  ai)prendre  à  penser  dans  cette  langue  ;  au  contraire,  ils  s'habituent 
à  baser  tout  ce  qu'ils  disent  sur  ce  qu'ils  diraient  dans  leur  langue  maternelle  ;  ])ar 
conséquent,  ils  corrompent  Texpression  étrangère  tant  par  le  choix  des  mots  que  par 
les  formes  des  phrases.  3"  I.a  connaissance  d'une  langue  étrangère  acquise  jiai  la  traduction, 
est  défectueuse  et  incom])lète;  car  bien  des  mots  d'une  phrase  n'ont  jias  d'équivalent  précis 
dans  une  autre.  Chaque  langue  a  ses  exjiressions  propres,  ses  figures,  ses  idiotismes  et 
même  ses  constructions  de  jilirases  qu'il  n'est  ])us  possible  de  rendre  entièrement  dans 
nue  autre  langue.  Ces  raisons  déznontrent  clairement,  pense  Berlitz,  la  défectuosité  des 
méthodes  employant  la  traduction.  Elle  est  aussi  confirmée,  ajoute-t-il,  par  le  fait  bien 
connu  qu'un  voyageur,  en  pays  étranger,  api'ès  un  séjour  relativement  court,  et  sans 
yrands  efforts,  possède  suffisamment  la  langue  pour  tenir  une  conversation,  tandis  que 
l'élève  passera  de  longues  et  laborieuses  années  à  faire  de  la  traduction  sans  pouvoii' 
arriver  uu  même  résultat.  ^ 


que  possible  le  thème  et  la  version,  veut  des  exercices  dans  la  langue 
même.  Enuméroiis-Ies  rapidement. 

1.  On  dicte  un  texte  qui  reproduit  un  exercice  fait  au  tableau,  ou 
bien  un  morceau  qu'on  a  lu  et  interprété  dans  la  clirestomathie,  ou 
bien  encore  un  texte  légèrement  modifié,  ou  bien  enfin  un  morceau 
qu'on  n'a  pas  lu,  mais  qui  est  composé  de  mots  connus, 

2.  L'élève  copie  ou  écrit  de  mémoire  un  texte  étudié. 

3.  Il  fait  des  transformations  do.  nombre,  de  personnes,  de  temps, 
de  modes  et  de  voix  ;  il  met  un  discours  direct  en  discours  indirect, 
et  vice-versa. 

4.  Il  forme  des  propositions  avec  des  termes  qui  lui  sont  connus  et 
d'après  des  analogies  données. 

5.  11  répond  dans  la  langue  étrangère  à  des  questions  faites  dans 
cette  langue.  Il  pose  aussi  lui-même  des  questions  et  y  répond. 

0.  Il  décrit  soit  tout  un  tableau  étudié,  soit  seulement  une  partie. 

7.  Il  résume  de  petits  morceaux  qu'il  a  lus  où  qu'on  lui  a  racontés. 

8.  11  présente  sous  une  autre  forme  un  morceau  qu'il  a  lu, 
substituant,  par  cxemi)lc,  la  narration  à  la  description. 

0.  Il  écrit  des  lettres  et  de  petites  compositions  pour  lesquelles  on 
lui  donne  les  mots  nécessaires  et  qui  ont  été  préalablement,  du  moins 
dans  le  début,  préparées  en  classe.  On  commence  par  faire  imiter  un 
morceau  qui  a  été  lu,  mais  dont  on  soustrait  le  texte  aux  regards  des 
élèves  ;  on  prend  ensuite  un  sujet  qu'on  lit  une  ou  deux  fois,  et 
qu'on  fait  reproduire  de  vive  voix  par  un  élève.  L'important,  c'est  de 
ménager  les  forces  des  élèves,  de  les  amener  peu  à  peu,  de  difficulté 
en  difficulté,  à  écrire  dans  la  langue  étrangère. 

Ce  qui  est  surtout  à  cultiver  pendant  toute  la  durée  de  l'enseigne- 
ment, c'est  la  composition  de  lettres.  Par  lettres,  il  faut  entendre  des 
lettres  véritables,  du  genre  de  celles  que  les  élèves  pourront  être 
appelés  à  faire  dans  la  vie  pratique. 

On  fait  également  décrire  des  événements  de  la  vie  de  tous  les  jours, 
par  exemple,  l'horaire  d'un  jour  donné,  les  différents  repas,  les  actions 
quotidiennes,  telles  que  le  lever,  etc.,  des  faits  particuliers,  tels  que 
promenades,  excursions,  etc  (^). 

On  peut  aussi  donner  des  travaux  se  rattachant  à  la  lecture  d'une 
poésie  ou  d'un  drame  ;  par  exemple  l'analj'se  des  dillerentes  parties 
d'une  tragédie,  la  marche  de  l'action,  le  nœud,  un  résumé,  l'un  ou 
l'autre  caractère. 

On  peut  encore  tirer  des  sujets  de  l'histoire,  de  la  géographie  ou 


(Ij  voix-  J.  Me'.on,  Cliows  d'Anylctcri-e  cl  cVAlh;mar/ne,  art.  cité,  p. 


—  so- 
cles sciences  naturelles,  ou  donner  à  développer  une  sentence,  un 
proverbe,  une  pensée  d'expérience,  etc.  ('). 

La  correction  portera  non  seulement  sur  la  grammaire,  mais  aussi 
sur  le  style. 

§  5.  —  La  lecture  d'une  chrestomathie  et  des  auteurs. 

RÔLE  ET  BUT.  —  Quand  l'intuition  exclusive  prend  fin,  la  lecture 
devient  le  centre  do  l'enseignement  (-).  «  C'est,  dit  M.  Godart  ('),  de  la 
réalité  ambiante,  matérielle  ou  figurée,  que  l'élève  tirait  jusqu'ici  les 
matériaux  de  son  langage  ;  c'est  du  livre  qu'il  va  désormais  les  extraire. 
L'observation  des  objets  ou  de  leur  représentation,  la  vue  des  gestes 
accomplis  devant  lui  ou  des  actes  des  personnages  figurés,  suffisait 
jusqu'à  présent  à  créer  tout  son  vocabulaire.  C'est  dans  les  textes 
imprimés  qu'il  va  maintenant  le  puiser.  A  Y Anschamuujsmethode  se 
substitue  ainsi  une  Lesebiuhmelliode,  mieux  appropriée  à  son  degré 
d'intelligence.  » 

"  Quel  est  donc  le  but  que  la  méthode  directe  assigne  à  la  lecture  ? 
C'est  d'être  elle-même  une  lecture  directe.  L'idéal  est  d'amener  l'élève 
à  comprendre  un  texte  en  langue  étrangère,  directement,  c'est-à-dire 
sans  le  secours  de  la  langue  maternelle,  n 

Chrestomathie.  —  Que  lira-t-on  ?  Une  chrestomathie  et  des  œuvres 
littéraires. 

La  chrestomathie  comprendra  au  moins  deux  volumes,  destinés  l'un 
aux  classes  inférieures,  l'autre  aux  classes  supérieures. 

Le  premier  volume  se  composera  principalement  de  morceaux  écrits 
en  prose  moderne,  qui  initieront  l'élève  aux  mœurs  et  coutumes  du 
peuple  étranger,  à  sa  vie  politique,  économique  et  industrielle,  à  son 
génie  national  (*). 


(1)  Muench,  p.  7i'.. 

(2)  "  Excellente  pour  la  transmission  du  vocabulaire  concret,  la  méthode  intuitive  devient 
insuffisante  pour  la  langue  abstraite.  Mais  là  où  s'arrête  l'intuition  commence  la  lecture. 
Certains  réformateurs  ont  même  fait  de  celle-ci  le  centre  de  la  méthode  directe.  Il  est  plus 
juste,  sans  l'exclure  au  début,  d'en  faire  le  terme  d'arrivée  de  l'enseignement  des  langues 
vivantes.  C'est  par  la  lecture  qu  on  achèvera  de  prendre  possession  du  vocabulaire  qui 
échappe  à  l'intuition.  Les  mots  concrets  déjà  connus  des  élèves  formeront  l'assise  solide  sur 
laquelle  repose  la  langue  abstraite.  Par  un  emploi  habile  des  exemples,  de  la  définition,  de 
la  comparaison,  de  l'antithèse,  de  létymologie,  des  familles  de  mots,  de  la  paraphrase  et 
des  synonymes,  on  ])0urra  expliquer  le  sens  de  presque  tous  les  mots  nouveaux,  sans 
recourir  à  la  traduction.  Tout  le  temps  dispensé  à  l'étude  des  langues  vivantes  sera  ainsi 
consacré  à  des  exercices  faits  directement  dans  l'idiome  enseigné.  I.e  mot  étranger  restera 
associé  étroitement  à  l'idée  qu'il  exprime,  et  ])ar  là  même  l'élève  arrivera  plus  vite  à  penser 
dans  la  largue  étudiée.  "  (Simonnot,  art.  cité,  p.  21).  Le  savant  professeur  du  Collège  Chaptal 
observe  en  outre  :  "  En  Allemagne,  en  particulier,  les  ])artisans  de  V Anschawngsmethcde  et 
de  la  icsc&î^c/DHefAorfe  ont  formé  longtemjis  deux  camps  bien  tranchés.  Mais  c'est  en  vain 
qu'on  chercherait  à  établir  un  antagonisme  entre  les  deux  méthodes.  '' 

(3;  Godart,  La  lectiirc  directe,  dans  la  Revue  de  V enseignement  des  langues  vivantes,  1903,  p.  -171. 
(1   M.  Lecoq,  p.  91,  donne  d'excellents  conseils  sur  l'étude  méthodique  des  pays  étrangers 
par  l'enseignement  des  langues  modernes. 


Le  second  volume  permettra  d'étudier  les  grandes  époques  de 
l'histoire  du  peuple  étranger,  son  histoire  contemporaine,  la  géogra- 
pliie  du  pays,  la  topographie  de  la  capitale  et  des  villes  principales  (*). 

Une  certaine  part  sera  faite  à  la  poésie  :  on  choisira  des  morceaux 
classiques,  caractérisant  heureusement  les  différents  genres  et 
permettant  de  saisir,  d'une  façon  élémentaire,  le  développement  de 
la  littérature  étrangère. 

Tous  ces  morceaux  choisis  devront  convenir  à  l'âge  des  élèves,  les 
instruire  et  les  divertir  tout  à  la  fois.  Ne  leur  donnez  donc  pas  des 
textes  qui  ne  peuvent  intéresser  que  des  élèves  de  cinq  ou  de  six  ans. 

Je  ne  me  contenterais  pas  d'une  chreslomathie,  quelque  bonne 
qu'elle  fût.  Je  tâcherais  de  faire  lire  par  les  élèves,  de  temps  en 
temps,  un  journal  allemand  ou  anglais  composé  à  leur  usage  ;  ils  y 
apprendraient  les  nouvelles  du  jour  dans  la  langue  vivante  qu'ils 
étudient,  et  le  maître  y  trouverait  une  nouvelle  source  d'entretiens 
actuels  et  intéressants. 

Œuvres  littéraires.  —  Toutefois  le  caractère  éminemment 
pratique  de  cet  enseignement  n'exclura  pas  la  lecture  d'une  ou  de 
deux  œuvres  littéraires  par  an. 

Choix.  —  Le  choix  de  ces  œuvres  n'est  pas  aisé.  On  ne  peut,  ce  me 
semble,  rompre  complètement,  sans  raisons  sufïisantes,  avec  la 
tradition  qui  a  accordé  sa  faveur  à  certains  écrivains  ;  on  doit  aussi, 
je  pense,  tenir  compte  des  avantages  que  présentent  les  œuvres  soit 
au  point  de  vue  moral  ou  simplement  récréatif,  soit  au  point  de  vue 
de  la  concentration  de  l'enseignement,  de  la  science  proprement  dite, 
de  l'histoire  littéraire  ou  de  la  langue  actuelle,  soit  au  point  de  vue 
ethnographique,  c'est-à-dire  au  point  de  vue  du  profit  que  l'on  peut 
retirer  de  la  lecture  d'une  œuvre  pour  connaître  un  peuple  étranger. 
<^e  sont  là  les  différentes  considérations  qui  doivent  peser  dans  la 
balance  et  déterminer  le  choix.  Le  problème  est  donc  complexe  et 
ardu  (^). 

Interprétation.  —  V interprétation  est  chose  aussi  importante 
que  le  canon  des  auteurs  (^). 


(1)  Ce  sont  là  les  thèses  de  Wendt  votées  au  Congrès  néopliilologique  de  l.eiinig  de  1900. 
(Revue  vitirersitaire,  lOoO,  2,  p.  153-l.jl).  Deux  cents  professeurs  allemands  travaillent  à  la 
composition  d'un  tel  livre  de  lecture  pour  l'anglais.  On  voit  que  les  Allemands  attachent 
une  grande  Importance  aux  ReaUeu.  I.e  Katalog  der  englischen  Realien  de  Wendt,  Hambourg, 
1870,  est  très  jjrécieux. 

(2)  Muench,  p.  81  et  suiv. 

':])  H.  I.audenbach.  Élude  û'ini  tccle  de  Unu/i'e  vh-antc  dans,  les  claxsex  de  grammaire,  dans  la 
Rer.ie  universitaire,  190?,  2,  p.  1-17  et  suiv.,  et  A.  Godart,  article  cité.  ]).  -171  et  suiv. 


—  38  — 

On  adopte  généralement  la  marche  suivante  (').  1.  Le  maître  lit  un 
passage  formant  un  tout.  Cette  lecture,  aussi  nettement  articulée  que 
possible,  indique  à  l'élève  la  façon  dont  il  doit  lire  et  lui  permet  de  se 
faire  une  idée  de  l'ensemble. 

2.  Le  professeur  interprète  le  texte,  a)  Il  explique  les  mots  inconnus, 
en  recourant,  tour  à  tour,  à  la  définition,  à  la  synonymie,  à  l'intuition 
directe,  à  l'intuition  mentale,  à  la  transposition  de  l'abstrait  dans  le 
domaine  du  concret.  Pour  que  ces  explications  soient  comprises  de 
l'élève,  il  importe  naturellement  qu'il  y  soit  activement  associé.  — 
b)  Le  maître  donne  les  explications  grammaticales  et  réelles  néces- 
saires. —  c)  11  fait  faire  la  synthèse  du  contenu  :  ici  encore,  il 
procède  par  questions;  il  obtient,  au  moyen  des  réponses  reçues,  un 
petit  résumé  qu'il  force  l'élève  de  resserrer  de  plus  en  plus  jusqu'à  le 
réduire,  par  approches  successives,  à  une  phrase  unique.  —  d)  S'il  le 
juge  nécessaire,  il  fait  traduire  lestement  le  passage.  —  e)  Il  le  fait 
relire  par  les  élèves. 

3.  A  la  leçon  suivante,  il  revoit  le  morceau  interprété  :  a)  A  l'aide 
de  questions  bien  choisies,  il  fait  reconstituer  le  texte.  —  b)  Il  fait 
écrire  par  un  élève  au  tableau  les  mots  essentiels,  qui  seront  pour  lui 
autant  de  points  de  repère,  et  le  travail  de  la  classe  consistera  à  relier 
ces  jalons.  —  c)  Au  lieu  de  ces  mots  générateurs,  Slich-Woerter,  il 
ne  propose  plus  que  des  titres  très  généraux,  des  formules  synthé- 
tiques, au  moyen  desquels  il  fait  reproduire  librement  tout  le  texte. 
—  d)  Il  fait,  si  le  passage  s'y  prête,  d'utiles  exercices  de  style  ou  de 
grammaire. 

On  conservera  dans  les  différentes  classes  celte  méthode.  Le  texte 
sera  toujours  préparé  en  classe;  mais  pour  la  revision,  on  supprimera 
progressivement  le  système  des  questions  et  des  réponses  pour  faire 
parler  l'élève  le  plus  possible  sans  l'intervention  du  professeur,  et 
dans  l'interprétation,  on  s'attachera,  de  plus  en  plus  au  contenu. 

On  remettra  aux  élèves  des  éditions  annotées  en  allemand  ou  en 
anglais.  Au  lieu  des  dictionnaires  bilingues,  ils  se  serviront  de  lexiques 
en  langue  étrangère. 

Reprenons  quelques  points  pour  les  éclaircir.  kjoz  soin  de 
commencer  voire  leçon  d'une  façon  intéressante  et  de  la  rattacher 
convenablement  à  la  leçon  précédente. 

Lisez  vous-même  le  texte.   Ferez-vous  fermer  les  livres  pendant 


;ii  J'ai  suivi  M.  Godart  dans  le  plan  des  leçons  d'interprétation  ;  mais  je  renonce  à  la 
lecture  mécanique  qu'il  fait  faire  par  les  élèves  immédiatement  ai)rès  l:i  lecture  du 
professeur,  parce  que  je  jiense  qu'on  détourne  ainçi  l'attention  des  élèves  du  contenu 
général  du  passaj^^e  :  je  n'admets  i)as  non  plus  qu'on  questionne  sur  le  fond,  avant  qu'on  se 
soit  assuré  que  les  élèves  connaissent  tous  les  mots. 


—  39  — 

votre  lecture  ?  Oui,  si  le  texte  a  été  déjà  interprété  en  classe  ou  s'il 
est  très  facile.  Vous  formez  ainsi  l'oreille  des  élèves. 

Quant  aux  élèves,  ils  ne  peuvent  lire  que  les  textes  qu'ils  compren- 
nent. Si  vous  leur  demandez  de  le  faire,  qu'ils  se  lèvent.  Ne  leur 
permettez  jamais  do  lire  quand  ils  sont  assis,  la  tète  baissée,  souvent 
même  appuyée  sur  le  coude,  et  la  poitrine  écrasée.  ^  Pendant  qu'un 
élève  lit  isolément,  il  importe  que  le  reste  de  la  classe  surveille  atten- 
tivement sa  lecture  et  s'attache  à  découvrir  ses  moindres  erreurs  de 
prononciation.  La  faute,  aussitôt  commise,  doit  être  signalée  et 
corrigée  par  un  camarade,  qui  se  contente  d'indiquer  la  prononciation 
exacte.  En  général,  les  jeunes  élèves  apportent  à  ce  contrôle,  qui  met 
en  jeu  leur  amour-propre,  une  sévérité  impitoyable.  C'est  tout  profit 
pour  l'éducation  de  leur  oreille  et  tout  repos  pour  nous  (*).  »  Ne  faites 
pas  lire  le  iiième  texte  consécutivement  par  trois  ou  quatre  élèves  ; 
reprenez-en  plutôt  la  lecture  vous-même  après  chaque  élève. 

En  expliquant,  observez  une  sage  mesure  :  pns  trop  de  grammaire, 
surtout  de  la  grnnnnaire  historique,  pas  trop  d'étymologies  savantes; 
pas  trop  non  i)lus  de  realia,  ni  de  notices  biogrîiphiques.  Déflez-vous 
d'un  commentaire  étendu  qui  étoutïe  la  pensée  de  l'écrivain  ;  allez  au 
fond,  au  cœur  même  du  sujet. 

Les  explications  seront  données  en  allcmainl  ou  en  anglais,  comme 
cela  ressort  sullisamment  de  tous  mes  conseils  ;  mais  sous  prétexte  de 
maintenir  haut  et  ferme  le  principe,  on  ne  faussera  pas  le  caractère 
do  cet  enseignement  en  le  rendant  superficiel.  Ainsi,  pour  déterminer 
la  valeur  exacte  do  synonymes,  pour  expliciuer  des  faits  gramma- 
ticaux difficiles,  pour  faire  saisir  aisément  certaines  nuances  délicates, 
il  peut  êti'o  avantageux  de  se  servir  de  la  langue  maternelle.  Ce  sont 
là  des  exceptions  qui  confirment  la  règle  (-}. 

Tout  en  conseillant  de  lire  de  la  sorte  un  auteur,  c'est-à-dire 
d'expliquer  dans  la  langue  ménie  un  morceau  allemand  ou  anglais,  et 
de  s'assurer  si  les  élèves  l'ont  compris  dans  son  ensemble,  je  ne  puis 
me  résoudre  à  renoncer  à  toute  traduction.  Certes,  le  professeur 
rencontre  des  passages  pour  lesquels  il  peut  se  dire,  sans  la  moindre 
hésitation,  que  la  traduction  est  inutile  ;  mais  pour  d'autres,  pour 
beaucoup  d'autres,  il  est  nécessaire  de  traduire  ;  car  il  est  de  ces 
nuances,  de  ces  détails  que  l'élève,  même  de  bonne  foi,  croit  com- 
prendre, alors  qu'il  se  trompe  grossièrement.  La  traduction  permettra 
au  professeur  d'avancer  sans  laisser  rien  d'obscur. 

Cette  traduction,  je  la  demande  orale  :  elle  ne  vient  qu'en  dernier 
lieu,  après  les   explications,   tout  à  fait  accessoirement  ;  elle  n'a 


(Ij  Goclart,  p.  475. 
(2,  Muencli,  p.  43. 


—  40  — 

qu'une  valeur  de  contrôle.  Il  suffît  qu'elle  soit  exacte  ;  peu  importe 
qu'elle  soit  médiocrement  élégante.  L'essentiel  est  que  l'élève 
s'habitue,  quand  il  traduit,  à  le  faire  d'un  trait  (*). 

Inutile  de  dire,  ce  me  semble,  que  je  condamne  sans  pitié  le  mot  à 
mot.  Je  le  repousse,  parce  qu'il  nuit  à  Vélociilion  et  à  la  prononciation, 
en  habituant  les  élèves  à  s'exprimer  en  phrases  coupées,  hachées,  et 
en  les  forçant  à  prononcer  alternativement  le  français  et  l'allemand 
ou  l'anglais  (^). 

C'est  aussi  pour  éviter  le  passage  continuel  d'une  langue  à  l'autre 
et  le  perpétuel  arrangement  des  organes  de  la  voix  qu'on  ne  lira 
pas  le  texte  en  traduisant  (^). 

Quant  aux  exercices  oraux  et  écrits  qui  peuvent  se  rattacher  à  la 
lecture  des  auteurs,  je  les  ai  déjà  indiqués  :  ce  sont  tour  à  tour  des 
exercices  de  grammaire,  de  vocabulaire,  de  sjaionymie,  de  stylistique, 
de  conversation  et  de  rédaction. 

MÉMOIRE,  —  Il  convient  de  faire  apprendre  par  cœur  quelques 
pages  bien  choisies,  que  le  professeur  a  expliquées  et  qu'il  a  fait 
lire  par  les  élèves  en  tâchant  d'obtenir  non  seulement  une  bonne 
prononciation,  mais  une  intonation  juste.  Pour  la  récitation,  il  faut 
exiger  un  débit  intelligent,  presque  déclamé  ;  il  convient  d'associer 
le  geste  à  la  parole.  «  Quand  le  texte  s'y  prêtera,  on  en  distribuera 
les  différentes  parties  à  différents  élèves,  et  la  récitation  deviendra 
un  dialogue.  S'il  y  a  une  partie  narrative,  elle  peut  être  confiée  à  un 
chœur,  qui  est  le  reste  de  la  classe.  Mais  que  les  élèves  qui  dialo- 
guent, se  regardent  et  n'aient  pas  les  yeux  fixés  sui-  le  maitre,  qu'ils 
parlent  réellement  (*).  »  Ce  qui  a  été  ainsi  appris  de  mémoire,  doit 
être  répété  en  classe  de  temps  à  autre  :  c'est  un  excellent  exercice 
de  prononciation.  Au  commencement  d'une  nouvelle  année,  on  fera 
revoir  tous  les  morceaux  appris  dans  la  précédente. 


(1)  Godart,  p.  4S0. 

(2)  "  I.e  mot  à  mot  formaliste  est  un  massacre  en  régie  des  deux  langues,  celle  de  l'original 
et  celle  de  la  traduction  ;  il  nécessite  une  nouvelle  explication  en  bon  français  gui  fait  perdre 
le  texte  de  vue  et  oblige  ainsi  à  parler  français  pendant  les  deux  tiers  de  l'explication, 
comme  s'il  ne  s'agissait  pas  avant  tout  d'apprendre  une  langue  étrangère.  Il  est  excessi- 
vement nuisible  à  la  bonne  prononciation  de  l'allemand.  Les  finales  allemandes  ont  une 
tonalité  jilus  basse  que  les  syllabes  radicales  et  accentuées  ;  au  contraire,  les  Anales  du 
français  ont  une  tonalité  à  la  fois  plus  forte  et  plus  élevée,  comme  dans  le  mot  à  mot  on 
entremêle  constamment  les  deux  langues,  c'est  forcément  la  modulation  de  la  langue 
maternelle  qui,  dans  la  prononciation,  rejîrendra  le  dessus  ;  d'où  le  clumtonnement 
désagréable  que  les  meilleurs  conservent  même  après  un  long  séjour  a  l'étrantîer.  Ils 
mettent  bien  l'accent  tonique  à  sa  jilace.  mais  ils  ajoutent  à  la  fin  des  mots  l'accent  musical 
du  français'-.  F.  Galiide,  I)e  Véttuic  des  lanr/ues  virantes,  dans  L'cnscirjuemcnt  chrciien.  KOO, 
p.  .'308. 

(3;  Duhamel,  Enquête,  dans  la  Jin-ue  universitaire,  1900,  1,  p.  257. 
(4)  Firmery,  p.  344. 


—  41  — 

§  6.  —  L  orthographe  et  l'écriture. 

Il  convient  de  suivre  une  orthographe,  l'orthographe  prussienne. 

Les  élèves  écriront,  du  moins  pendant  les  dernières  années,  en 
caractères  allemands  et  ils  seront  exercés  à  lire  des  textes  manuscrits 
allemands  {*). 

§  7.  —  La  correspondance  interscolaire  internationale  (^). 

Objet.  —  Cette  correspondance  est  une  méthode  d'enseignement 
qui  consiste  à  établir  un  échange  régulier  de  lettres  entre  les  élèves 
des  écoles  des  différents  pays.  Le  mérite  de  l'idée,  qui  date  de 
1897,  revient  à  M.  Mieille,  professeur  au  lycée  de  Tarbes  (^). 

Organisation.  —  L'organisation  de  la  correspondance  interscolaire 
est  très  simple.  Supposons  qu'un  jeune  Français  veuille  correspondre 
avec  un  élève  d'une  école  étrangère.  Il  doit  s'adresser  à  son  professeur 
et  lui  remettre  une  sortc.de  notice  individuelle  contenant  son  nom,  son 
prénom,  son  âge,  la  mention  de  son  école,  la  profession  de  son  père. 
A  cette  notice  est  ajouté  un  renseignement  sur  la  valeur  de  l'élève. 
Le  professeur  transmet  la  notice  et  la  demande  aux  bureaux  où  sont 
centralisées  les  adhésions,  c'est-à-dire  en  France,  à  la  Revue  univer- 
sitaire. Celle-ci  transmet  la  notice  et  la  demande  à  l'office  étranger  de 
centralisation,  la  Review  of  Reviews,  pour  l'Angleterre,  M.  Hartmann 
à  Gohlis  (Leipzig),  pour  l'Allemagne,  M.  Moneta,  de  Milan,  président 
de  rUnione  Lombarda,  etc.  Là,  on  cherche  un  correspondant  qui 
conviemie,  et  dès  qu'il  est  trouvé,  on  envoie  un  avis  au  chef 
d'institution  de  chacun  des  nouveaux  correspondants. 

On  essaie  de  disperser  les  correspondances  :  ainsi,  une  même  école 
anglaise,  par  exemple,  ayant  plusieurs  élèves  désireux  de  correspondre 
avec  des  Français,  signalera  ce  fait  à  la  Review  of  Reviews,  et  la 
Revue  universitaire  s'efforcera  de  trouver  à  ces  élèves  des  correspon- 
dants dans  les  écoles  françaises  situées  sur  divers  points  du  territoire 
français. 

Chaque  correspondant  écrit  deux  lettres  par  mois,  au  minimum. 
Chacun  d'eux  écrit  la  première  fois  dans  sa  langue,  puis  la  seconde 
fois  dans  la  langue  étrangère,  et  il  a  ainsi  chaque  mois  une  lettre 
modèle,  —  celle  de  son  correspondant  dans  la  langue  de  celui-ci,  —  et 


(1}  Par  exemple,  Koch,  Xotcs  liandschriftUchcs  Lcaeburh,  Bruxelles,  1001. 

;2)  Je  n'ai  fait,  dans  ces  quelques  lignes,  qu'abréger  le  beau  rapport  de  Mi>e  Scott, 
professeur  au  Lycée  Molière,  De  la  correspondance  interscolaire  internationale,  dans  la  Sevuc 
v.niversitaire,  1900,  2,  p.  131  et  suiv. 

(3)  Mieille,  Esmi  d'ortjanisation  d'une  correspondance  scolaire,  dans  la  Revue  universitaire, 
1807,  1,  p   1  ;  La  correspondance  interscolaire  et  les  correspondances  internationales,  Tarbes,  19(J0. 


—  42  — 

une  lettre  exercice  —  la  sienne,  dans  la  langue  de  son  correspondant. 
—  Les  deux  lettres  exercices  sont  corrigées  par  le  correspondant 
auquel  elles  s'adressent,  et  renvoj^ées  à  leur  auteur.  Chaque  corres- 
pondant corrige  dans  sa  propre  langue. 

Les  meilleures  lettres  sont  lues  en  classe.  «  De  temps  à  autre,  nous 
employons,  dit  M.MieilIe('),  un  petit  quart  d'heure  à  lire  ces  lettres  en 
commun.  Quels  bons  moments,  élèves  et  maîtres,  nous  passons  alors  ! 
C'est  la  classe  gaie  et  vivante  que  réclament  tous  les  éducateurs, 
depuis  Montaigne.  Et  que  de  choses  familières  et  pratiques  apprises 
dans  ces  trop  courtes  séances  !  » 

Les  élèves  sont  libres  d'écrire  sur  les  sujets  qu'ils  choisissent.  "  En 
général,  la  première  lettre  est  une  lettre  de  présentation  :  on  parle  de 
de  sa  famille,  do  ses  amis,  de  ses  condisciples  ;  on  décrit  son  collège. 
Pins  tard,  on  s'entretient  des  jeux,  des  sports,  de  l'emploi  des 
vacances,  etc.  Puis  viennent  des  sujets  sérieux  :  on  cause  de  ses 
lectures,  de  ses  études,  du  but  qu'on  veut  leur  assigner  ;  on  se  fait 
de  mutuelles  confidences  sur  sa  vocation,  etc.  -9 

Succès.  —  La  période  de  tâtonnements  n'a  guère  duré  ;  car,  dès  le 
mois  d'octobre  1899,  M.  Mioiile  déclarait  que  10,000  correspondants 
environ  de  divers  paj^s  échangeaient  20,000  lettres  par  mois,  soit 
200,000  par  an,  et  au  dernier  Congrès  international  de  l'enseignement 
secondaire,  il  annonçait  que  le  nombre  des  correspondants  s'élevait 
pour  la  France  à  18,000,  ainsi  répartis  :  Français-A.nglais,  11,000  : 
Français-Américains,  1,000  ;  Français-Allemands,  4,000  ;  Français- 
Italiens,  1,000;  soit  17,000,  auxquels  il  faut  ajouter  un  millier  do 
"  francs-tireurs  »  {^). 

Rien  d'étonnant  donc  que  le  Congrès  international  de  l'enseignement 
secondaire  à  l'E.xposition  universelle  ait  émis  à  l'unanimité  le  vœu  : 

«  Que  la  correspondance  interscolaire  internationale,  —  entreprise 
par  l'initiative  privée  dans  des  conditions  qui  ont  été  reconnues 
nécessaires  par  une  expérience  de  plus  de  trois  ans,  —  constituant 
un  auxiliaire  précieux  non  seulement  au  point  de  vue  de  l'appre)!- 
tissage  des  langues  vivantes,  mais  aussi  au  point  de  vue  de  la  culture 
générale  de  l'esprit  et  à  celui  des  relations  internationales,  toutes  les 
autorités  scolaires  encouragent,  par  tous  les  moyens,  le  développement 
ultérieur  de  la  correspondance  interscolaire  internationale.  » 

Abstraction  faite  do  tous  les  avantages  que  la  correspondance 
interscolaire  présente  au  point  de  vue  pédagogique  do  l'enseignement 


(1)  Mieille,  Essai,  p.  2.  Cf.  Gendre,  Les  cnseir/nements  de  la  correspondance  ixterscolaire,  dans 
la  Hernie  ttniversitaive,  1901,  1,  ]).  34. 

12)  Voyez  Le  Congrès  international  de  l'enseirinemenl  secondaire  ù  l'Exposition  universelle 
de  19(j0,  dans  la  Revue  universitaire,  1900,  ?,  p.  2ô3. 


—  43  — 

et  au  point  de  vue  intellectuel  et  moral,  on  s'était  dit  que  cet  échange- 
de  lettres  ferait  naître  chez  rélève  le  désir  de  connaître  un  autre  pays 
que  le  sien  et  déciderait  ses  parents  à  l'envoyer  pendant  quelque 
temps  cà  l'étranger.  La  correspondance  l'ayant  déjà  mis  en  rapport 
avec  une  famille  étrangère,  faciliterait,  avait-on  pensé,  les  choses  au 
point  de  vue  matériel.  Ces  espérances  n'ont  point  été  déçues  :  il  y  a 
déjà  eu  en  France  quelques  échanges  d"enfanls  pour  plusieurs 
semaines  ('}. 

En  voyant  le  succès  obtenu  par  M.  Mieille,  pourquoi  ne  nous 
engagerions-nous  pas  dans  la  même  voie  ?  Nous  pourrions  créer 
une  correspondance  nationale  entre  nos  provinces  ^vallonnes  et  nos 
provinces  flamandes  (-),  et  une  correspondance  internationale  avec 
l'Angleterre  et  l'Allemagne  {'). 

§  8.  —  Les  récréations,  les  séances  de  conversation,  les 
représentations  théâtrales  et  les  voyages  de 
lectures. 

RÉCRÉATIONS.  —  Dans  des  lycées  français,  on  a  organisé  le  jeudi 
des  récréations  spéciales  où  les  élèves  parlent  anglais  et  allemand  et, 
sous  la  direction  de  leurs  professeurs  de  langues  vivantes,  jouent  au 
cricket,  au  football,  etc.  Pendant  tout  ce  temps,  il  leur  est  interdit 
de  parler  français. 

SÉANCES  DE  CONVERSATION.  —  Daus  Certains  établissements,  on 
complète  l'enseignement  par  dos  séances  de  conversation  allemande  et 
anglaise  (')  où  sont  appelés  les  meilleurs  élèves.  On  forme  alors  des 
groupes  de  six  îi  sept  élèves  au  niaximiun.  Le  programme  des  séances 
comprend  des  comptes  rendus  de  lectures,  de  courtes  conférences,  de 
libres  entretiens,  des  jeux  de  société. 

Représentations  théatr.\les.  —  Les  résultats  de  ces  séances  de 
conversation  ont  permis  à  des  établisseineiits  de  faire  jouer,  devant 


(F.  De  tels  échanges  se  font  depuis  assez  longtemps  et  avec  succès  entre  les  provinces 
limitrophes  de  l'Autriche  et  de  l'Italie,  entre  différents  cantons  de  la  Suisse  allemande  et  de 
la  Suisse  française.  Voyez  Mieille,  L'ctudc  praliquc  des  laugues  vivantes  et  les  échanges  d'enfants, 
dans  la  Seviie  universitaire,  1&9S,  ?,  p.  123  et  p.  SGO  :  Mieille,  Les  bu reavx  d'échanges  intcrscolaires, 
Tarbes,  i:,00. 

[2]  G.  Vandenrydt,  Correspondance  scolaire  française- flamande ,  dans  la  Revue  de  l'Instruction 
publique  cil  Belgique,  1S97,  p.  177. 

;:jj  On  songe  aussi  dans  certains  pays  à  organiser  des  caravanes  scolaires.  Ainsi,  M.  Picq, 
chargé  du  cours  d'allemand  au  collège  de  Langres,  a  conduit  en  1899  un  certain  nombre  de 
ses  élèves  en  Suisse  et  en  Allemagne. 

(4)  Séances  do  convci-sotion  allemande  et  anglaise  au  lycée  de  Caen,  dans  la  Revue  v.niveisitaire^ 
1?99,  2,  p.  -131,  et  Enquête,  même  revue,  190u,  2,  p.  -10  et  suiv. 


—  44  — 

un  public  assez  nombreux,  par  leurs  élèves  une  scène  de  Schiller  en 
allemand  et  une  scène  de  Shakespeare  en  anglais  (*). 

Voyages  de  lectures.  —  Hartmann,  qui  avait  remarqué  comment 
l'art  de  la  lecture  est  pratique  en  France,  a  voulu  faire  bénéficier  les 
élèves  de  son  pays  des  avantages  de  ces  lectures  comportant  toutes 
les  nuances  et  les  subtilités  de  la  diction,  tout  en  restant  éloignées  de 
la  déclamation  théâtrale  (-).  La  première  année,  il  s'est  adressé  à 
M.  Joutfret,  professeur  au  lycée  de  Marseille  ;  la  seconde  année, 
à  M.  Bornecque,  maître  de  conférences  à  l'Université  de  Lille.  Au 
cours  de  son  voyage  pédagogique  à  travers  l'Allemagne,  M.  JoufTret 
a  fait  plus  de  25  lectures  et  cinq  ou  six  conférences  littéraires  ;  il  a 
parlé  devant  plus  de  4000  écoliers  ou  écolières  et  300  ou  400  profes- 
seurs. M.  Bornecque  a  visité  42  villes  ;  il  a  fait  G2  récitations  aux- 
quelles ont  assisté  800  professeurs  de  langues  vivantes,  12000  élèves 
et  à  peu  près  700  adultes. 

Comment  expliquer  ce  succès  ?  Deux  circonstances  ont  favorisé  ces 
tournées.  La  première,  c'est  l'époque  des  vacances  en  Allemagne.  Les 
vacances  scolaires  de  la  France  ne  coïncident  pas,  en  effet,  avec  les 
vacances  des  gymnases  allemands,  qui  vont  du  15  juillet  au  20  août.  Il 
est  donc  possible  à  un  professeur  français  de  parcourir  pendant  ses 
vacances  tant  de  gymnases  allemands. 

La  seconde  circonstance  favorable,  c'est  l'instilulion  des  Neuphilo- 
logisdie  Vereine.  Ces  associations  ont  été  la  cheville  ouvrière  des 
tournées  de  récitations  ;  elles  ont  tout  préparé,  tout  organisé  sur  le 
passage  des  deux  professeurs  français. 

Une  part  de  succès  revient  incontestablement  à  Hartmann.  C'est 
lui  qui  avait  lancé  une  circulaire  à  travers  toutes  les  associations, 
pour  demander  quelles  étaient  les  villes  désireuses  d'entendre  une 
lecture,  et  c'est  lui  qui  avait  fait  imprimer  un  opuscule  de  32  pages 
contenant  les  textes  à  lire.  Ce  recueil  s'imposait  doublement.  Le 
professeur  français  devait  pouvoir  étudier  soigneusement  les  morceaux 
à  l'avance  et  composer  pour  ainsi  dire  ses  intonations,  et  les  élèves 
devaient  avoir  étudié  en  classe  les  textes,  avant  qu'on  en  fit  la  lecture 
en  séance  publique. 


(1)  "  La  3e  moderne  a  joué  dernièrement  le  drame  â'Hamh-t  sur  le  petit  théâtre  du  collège 
de  Coulommiers,  et  elle  s'en  est  tirée  d'une  manière  satisfaisante;  d'elle-même,  toute  la 
classe  a  demandé  à  préparer  Macbeth,  pour  une  seconde  représentation.  »  Lacombe,  Enquête, 
dans  la  RevKe  nnh-ersitaii-e,  l'JOO,  ?,  p.  43. 

;2;  Jouirret,  Vue  expérience  pédagogique  en  Allemagne,  dans  la  Revue  -universitalye,  1893,  ?, 
p.  337  et  suiv.  ;  lîornecque,  Un  vogage  de  récitations  en  Allemagne,  même  revue,  ISOO,  2,  p.  408  ; 
Mieille,  La'S  récitations  fraiieaises  en  Allemagne,  dans  l'Annuaire  de  la  correspondance  intersco- 
laire, Comrades  ail.  Internat ionaler  Schuclerbrieficechsel,  London,  at  tlie  office  of  tlie  "  Review 
Of  Reviews  »,  1901  ;  Gueadel,  Die  Recilationen  Jouffrels,  dansX»"'  neuercn  Sprachen,  mai  1900  ; 
Hartmann,  3Iitteilungen  der  deutschen  Centralstelle  fver  fremdsprachlirhe  Recilationen, 
Leipzig,  1901. 


—  45  — 

M.  Boriiecque  croit  pouvoir  affirmer  que  l'influence  de  ces  récita- 
tions sur  les  élèves  a  été  très  grande.  «  Quand  le  morceau  a  été 
étudié  de  près,  sous  la  direction  des  excellents  néo-philologues  que 
possède  l'Allemagne,  d'abord  les  élèves  entendent  la  véritable  pro- 
nonciation et  la  véritable  déclamation...  En  outre,  le  récitateur  est 
aussi  collaborateur  du  professeur.  Souvent  les  élèves,  lorsque  leur 
maître  veut  leur  imposer  telle  prononciation  difficile  pour  eux,  ont 
une  tendance  à  croire  qu'il  accumule  par  plaisir  les  difficultés  ;  après 
la  récitation,  il  n'en  est  plus  de  même  :  le  professeur  peut  évoquer  le 
souvenir  du  récitateur,  et  les  élèves,  qui  ont  noté  sur  leur  texte  la 
prononciation  figurée  de  tel  ou  tel  son,  le  reconnaissent  les  premiers. 
Enfin,  il  y  a  plus.  Si  les  élèves  arrivent  à  comprendre  les  explications 
données  —  et  pour  cela,  il  suffit  de  parler  lentement  et  distinctement 
—  ils  sont  -  enflammés  d'un  nouveau  zèle  pour  l'étude  de  la  langue 
française  ». 

§  9.  —  Résumé. 

En  résumé,  je  recommande,  sans  hésiter,  aux  professeurs  de 
langues  vivantes  la  méthode  directe,  qui  est  basée  sur  des  principes 
psychologiques  et  physiologiques,  et  dont  les  avantages  sont  démontrés 
par  l'expérience.  Comme  toute  autre  méthode,  elle  doit  être  appliquée 
avec  mesure  et  entourée  de  certaines  précautions;  comme  toute  autre 
méthode,  elle  réclame  des  maitres  entendus,  maniant  aisément  la 
langue  vivante  qu'ils  enseignent,  et  rompus  à  l'art  d'enseigner.  Ici, 
moins  que  partout  ailleurs,  on  ne  peut  aller  cà  l'aventure  :  il  faut,  avant 
de  se  mettre  en  marche,  bien  déterminer  la  route  à  prendre  et  ne 
jamais  s'en  détourner  (*). 


d';  On  a  objecté  contre  la  méthode  directe  qu'elle  fati^iiie  les  élèves  et  le  maître,  ^r. 
Firmery,  p.  345,  répond  à  cette  objection  en  ces  termes  :  "  Quand  la  classe  a  été  bien  faite 
et  remplie  d'utiles  exercices,  que  l'attention  des  élèves  a  été  continuellement  tendue,  cette 
fatigue  se  produit  réyrulièrement  au  bout  de  trois  quarts  d'heure.  Quand  le  maître  \x)it  tous 
ces  petits  yeux  qui  le  suivaient  avec  tant  dintérèt,  se  voiler  d'indilTérence,  que  les  gestes 
deviennent  mous,  les  réponses  hésitantes,  qu'il  soit  satisfait  de  lui-même  :  son  ensei^niement 
a  été  fécond  et  portera  des  fruits.  Mais  qu'il  ninsiste  pas.  La  classe  est  finie,  le  temps  qui 
reste  doit  être  consacré  à  des  exercices  purement  mécaniques,  et  la  récitation  de  leçons 
imperturbablement  sues,  en  est  devenu  un.  (A  mon  avis,  on  peut  éyalement  faire  "une 
dictée;.  La  fatigue  peut  se  produire  aussi  chez  le  professeur,  moins  souvent  cependant  que 
ne  semblent  le  croire  certains  de  nos  collègues.  Je  ne  leur  ferai  pas  l'injure  de  penser  que 
c'est  l'attention  toujours  eu  éveil  et  portée  sur  tous  les  élèves,  sans  exception,  qui  les  pourra 
lasser  :  elle  est  le  premier  de  leurs  devoirs,  quelle  que  soit  la  méthode  qu'ils  pratiquent.  On 
pourrait  craindre  une  fatigue  de  la  gorge  et  de  la  voix.  Cependant  il  faut  observer  que  le 
professeur  de  langues  ne  parlera  pas  en  somme  beaucoup  plus  que  le  professeur  d'histoire 
ou  de  mathématiques.  Néanmoins  le  maître  pourra  quelquefois  ressentir  une  certaine 
lassitude,  surtout  s'il  parle  avec  une  grande  vivacité.  Qu'il  passe  la  parole  aux  élèves  et 
leur  fasse  réciter  un  des  morceaux  qu'ils  savent.  Ai-je  besoin  de  répéter  que,  làen  qu'on 
n'apprenne  plus  rien  de  nouveau,  ce  temps  ne  sera  pas  perdu,  etque  ces  exercices  reposants 
ont  leur  grande  utilité  !  « 


TABLE  DES  MATIÈRES 


PAGES 

Un  mot  au  lecteur 5 

§1.  — But 7 

§  2,  —  Exposé  général  de  la  méthode  directe  ou  intuitive 8 

i^  3.  —  L'enseignement  grammatical 29 

§  4.  —  Les  exercices  écrits 32 

§  5.  —  La  lecture  d'une  clirestomathie  et  des  auteurs 36 

§6.  —  L'orthographe  et  l'écriture 41 

§  7.  —  La  correspondance  interscolaire  internationale 41 

§  8.  —  Les  récréations,  les  séances  de  conversation,  les  représentations 

théâtrales  et  les  voyages  de  lectures 43 

§  9.  —  Résumé 45 


MAISON    D'ÉDITION    ALFRED    CASTAIGNE 

BRUXELLES 


OUVRAGES  DE  F.  COLLARD 

professeur  à  TEcole  normale  de  Nivelles 

revus    par    F.     COLLARD 

professeur  à  l'Université  de  Louvain 


1.  Notions  sur  la  Constitution  et  les  Lois  organiques,  IP  édition, 
complètement  mise  à  jour,  à  l'usage  des  écoles  normales 
primaires , broch.  2,00 

Ouvrage  porté  au  Catalogue  officiel. 

2.  Cours  supérieur  de  grammaire  française,  à  l'usage  des  écoles 
normales,  Syntaxe,  5*^  édilioi) brocli.  1,75 

3.  Cours  moyen  de  grammaire  française,  à  l'usage  de  l'enseignement 
moyen,  ll«  édition carton.   1,80 

L'emploi  de  ces  deux  ouvrages  est  autorisé  par  le  Gouvernement. 

4.  Cours  inférieur,  12^  édition carton.  0,60 

5.  Cours  préparatoire,  4^  édition carton.  0,60 

Ces  deux  ouvrages  sont  portés  au  Catalogue  officiel. 
•     0.  I  Cours  moyen.  —  r®  partie  (lexi- 

j     graphie)  ^^  édition    .     .     cart.  0,85 

7.  Exercices  grammaticaux,' IFpartie(syntaxe)8*'édition.  cart.  1,10 

8.  \Cours inférieur, 12'' éà\{\o\\.(i?iVi.  0,85 

9.  Cours  prépara(Qire,b^éd\t. hr.     0,60 

Tous  ces  exercices  sont  portés  au  Catalogue  officiel; 


OUVRAGES  DE   F.   COLLARD 

professeur  à  l'Université  de  Louvain 

1.  Quelques  mots  sur  l'enseignement  de  la  grammaire  française,  ou 

exposé  théorique  et  pratique  de  la  méthodologie  de  la  grammaire 
française broch.  0,50 

2.  Là  méthode  directe  dans  l'enseignement  des  langues  vivantes, 
3«  édition broch.  1,00 

3.  L'art  d'interroger,  3^  édition broch.  0,50 

4.  Méthodologie  de  l'enseignement  moyen.  —  Méthodologie  générale  ; 
méthodologie  spéciale  :  langue  maternelle,  latin,  grec,  langues 
vivantes,  histoire  et  géographie broch.  5,00 

5.  Introduction  à  l'étude  de  la  tragédie  grecque    ....       0,75 

6.  Histoire  de  la  tragédie  romaine 1,50 

7 .  La  préparation  pédagogique  des  docteurs  en  philosophie  et  lettres 
à  l'Université  de  Louvain 0,25 


407  C697M  c.1 

Collard  #  La  méthode 
directe  dans  l'enseigneme 


3  0005  02015148  9 


4Ô7 

Collard 

Le  méthode  directe  dans 
J-  enseignement  des 
vivantes 


La  méthode  directe  dans  l'enseigne- 
ment des  langues  vivantes